i
i
P: '
L Tome III- 1826. ( 3 1 "^ ile la collection, j
91* HVRA.(.SO^.
m
REVUE .
ENCYCLOPEDIQUE
00
ANALYSE RAISONNEE
DES PRODUCTIONS LES PLUS REMARQUABLES
DANS tA LITTEKAT'JUE, I>ES SCIENCES KT LFS ABTS.
i" I'oiir li'S Sciences jilijsif/iies et mnlhemaliques et Ips Arts inJuslriels:
MM. AmCF.RE.Ch. UuI'IK, FotRlFR.GlRARD, NAVIER,cie l'Ilist.itl]t;COyil';RFI.
cisASECA, de .Vadritl; Kek.iy, Frakcokur . Ad. Gondinet, Lk Normaku
iirutV-sseur de technoloi;ie; A. MicHti.oT, de Momtgery, Morrau uk Jokhes
l>OUir,I.ET,WxRDEM, CtC.
2" Pom U'i Sciences naturelles: MM. OeopfroySaint-Hilkire, de I lostitut;
BoRY BE Saint-Vincent, oorresjiond.iiit dc i'liistitut , V. AnDOUTW, MATsrEU
BoNAFOtJs, de Tuiiu; Brongniakt Ills, Desmarest, Flocren.s, D.-M. ;
OA.tT.i.ON , de Dii'piie; V. Jacquemomt, etc.
'i'^ Vour yiis Sciences meilica/es : MM. Adrlok, BAi.i.v,D\MtROlT , G.-T.Doiw,
AsiEDEE Doi>AO, EsQUiROL, FossATX, Gasc, A. Grimaub, d'Augers ; Georget;
KiR< KHOFF, d'Anvers; Orfii.a; KiGoi.t.oT fils, d'Amions.
/.■> Pour !es Sciences iihitos(ii>hiqu£s et nwra/rs , poUtiques , geographiques et
hisioriques : MM. M. A. JuLttEH, de Paris, FoiidalcurDireeteur do la Revue
lincyclnftedique; Degerando, Ai.ex. de la Boroe, Jomard , Lanjoinais, de
I'lusiitut ; .Agoob , Artakd, M. AvFKEi., Barbie du Bocage fits, Bewjamiw-
CONSTANT, CllARtES CoMTE , DfiPI-IHG , AdoLPUE GaRKIER, CctCNIAUT,
GuizoT, A. Jaubert, Lafon DE Ladebat, Ar.EX, Lamei b , Lahjcihais Ills,
p. Laiui , I.ESUEDR-iVlERi.in, Massias, A. Wetrai.; Meyer, d'Ainsterd.iiti ;
dePiobvins, Parent-Real, Kl'sebe Salverte, J.-B. .Say. Sismondk dk
SiSMONDi, de Geneve, etc. UurtN aiiie, Bervilj.e , A. Beugnot, Bouchpne-
LeFER, CRlVELt.I.DoDBLET-ME-BoiSTHlBAULT, UhFAU , DUPRAYEK , UUVER-
gier , GoAUET. Ch. Kekouard, Taillandier, avocats, etr.
5" Pour la Litteratare J'rancaise et etiangere, la ftihliogiapliie , V Ai'chenlogie
e.i\cs£ea<M-Arts:'M.M. Andrieux, Am aory-Ddvat,, Berton,J. Droz, Kmeric
David, Lemercier , WAtJDET, de SEGi3R,de I'lustitut; MmcL.-Sw. Belloc;
MM. Bariseau, BtANCHr ,M. Uerr , J.-V. Eres, Felix BoDiWi Bornouf (Us,
CiiAtrvET, Cbenedolle , de Liege; P.-A. Coupin', Fr. Degiorge, Dumersan,
Ed. Gauttier, Ph. Colbery, Heibero, IIenrichs, E. Hereai;, Au<jdste
JuLLiEN.ftls; Kalvos, de Zaute; Adrien-Lafa.sge , J.-V. I^eclerc, Loeve-
Veimars, a. Mahdl, Mauviel, Mav.ois, AlbErt-Montemont, Mownard,
de Lausaiiue; KtcoLO-PocLO, C. Pagasel,!!. Patin, Pongerville;Qc£te-
LET, DE Eeiffekderg, de Briixelles ; Kolle , bibliotheraire de la ville de
Paris; de Stassart, Fr. Salpi, M. Scbinas; St;HvvElGii«uSER , de Stras-
bourg; Leok Thiesse.P. F. Tissot, Verweuil, YiLLENAVB, S.ViscoNTi, etc.
A PARTS,
AU BUREAU CENTRAL DE LA REVUE ENCYCLOPI^.DIQUE,
Rue d'Enfer-Saint-Micliel, n° i8;
AUTHUS BERTKAND , rue Hautefeuille, n" 23;
Au MusEEfiNCYCioPEDiQUE. CHEZ Bossange pfere,rue Richclicu ,
n" fio; ' •
Rewou.vrd, rue de Tournpn, n° 6;
LOiSDRES. — Fredebic Degkorge, n" 38, Noffolk-stre^f, Strand;
Theottel et WiiBTz; Bossaitge; Dulau etcomp.;?. Rolandi,
11° 20, Berners-street , 0.%fordrstreet.
JUILLET 1826.
I'^^'W^y-S-^L
AVIS ESSEWTIEL AUX SOUSGIUPTEURS.
MM. LBS SODSCRIPTEDRS doiU rABONNEMENT EST BXlMUli
LB 3o JuiN DEKNiER , sont invites a le taire nEWtoc-
VELKK iNCESSAMMENT , pour que le service des envois
nVprouve auciiii retard.
CONDITIONS UE LA SOUSCRIPTION.
Depuis le mois de Janvier 1819 , il parait, par annee , douze cahier*
.ie ce Recueil; chaque cahicr , public le 3o du mois, se compose d'en-
viron i4 feuilles d'impressioii , et plus souvent de t6 on 18.
On souscrit k Paris, au Bureau central d'abonnemeat tt d'expSdition
iiidique sur le litre.
Prix de la Souscriptioit.
/^ Paris ^f> (r. pour un an; afi fr. pour nix luoik.
Dans les departemens. 53 3o
A I'etranger <'o ^4
La difference entre le prix d'ahonncment,o Purij, dans les de/iarte-
ttieni et dans Cetmnger, devant 6tre proportionnelle aux frais d'expe-
dilioH par la poste, a servi de base a lafixation portee ci-dessus.
A ce suiet, la Direction de la Revne Encyclooedique croit devoir faire
observer que , cette base ayant et6 calculce d'apr^s le nombre de qua-
torze feuilles promises mensuellement aux aboDnes, les frais de port
occasiones par I'augmentatioii successive des cahiers sont restes entife-
remeut a sa charge.
Le montant de la souscription, envoye par la poste, doit ^tre adresse
d'avance, FRiNC deport, ainsi que la conespondance, au Directeiir
de la Revue Encrdopidiqiie , rue d'Eiifer-Saint.Michel, n° 18. C'est i la
lu^me adresse qii'on devra envoyer les ouvrages de tons genres et les
gravures (ju'cn voudra faire annoncer, ainsi que les articles dont on
desirera I'insertion.
On peut aussl souscrire chez les Directeurs des postes et chez le»
principaux Libraires, A Paris, dans les departemens et dans les pays
•trangers.
Trois cahiers ou livraisons forment un volume, Chaque volume est
terrain^ par une Table des mali^res alphabetique et analytique, qui
eclaircit et facilite les recherches. Cette Table est toujours jointe au
T"cahier du volume suivant, A I'exoeption de la derni^re Table do
lannde, qui est exp^dide isol^ment a tous ceux qui peuvent y avoir droit.
0)1 souscrit, seulement i partir de deux ^poques , Am i" Janvier on
du \"ju;iletde chaque ann^e, pour six mois, ou pourun an.
On tronve, »n bobkati cektr*.l, les collections des annees 1819, i8»a,
jS:.t, 182a, 1823, i8a4ef 1825, au prix de 5o francs chacune.
REVUE
ENCYCLOPEDIQUE
^. firiyo ,
PARIS. DK IIMPRIMEHIE DE KIGWOUX,
rae dcs Francs-Bourgcois-S.-Michel , no 8.
REVUE
ENCYCLOPEDIQUE,
OtI
ANALYSE RAISONNEE
DES PRODUCTIONS LES PLUS REMARQUABLES
BANS I.ES SCIENCES, LES ARTS INDDSTRIELS, LA UTTERATDRE
ET LES BEAUX-ARTS ;
PAR UNE REUNION
DE MEMBRES DE L'INSTITUT,
ET D'AUTRES HOMMES DE LETTRES.
TOME XXXI.
PARIS
AU BUREAU CENTRAL DE LA REVUE ENCYCLOPI^DIQUE;
RUE d'enfer-saint-michel, n° i8.
JUILLET 1 826.
« Toutcs les sciences sont les rameaiix d'une memo tigc. »
Bacon.
" L'art n'pst autre cliose que le contrAle et Ic registre dcs meillcures produc-
tions... A contr61er les productions (ct les actions) d'un cliacun, il s'engcndre
euvie dcs bonnes, ct mepris des mauvaises. '>
MOHTAIGHE.
•< Les belles-lettres et les sciences, bieu etudiccs et bicn comprises, sont des
instniraens universcls de raison , de vcrtu , de bonhcur. »
REVUE
ENCYCLOPEDIQUE,
ou
ANALYSES ET ANNONCES RAISONNEES
DES PRODUCTIONS LKS PLUS REMARQUABLES
DANS LA LITTIiRATURE, LES SCIENCES ET LES ARTS.
I. MEMOIRES, NOTICES,
LETTRES ET MELANGES.
SUR L'ETABLISSEMENT DU JURY
A L'lLE DE GEYLAN.
j\jous avons sous les yeux line letlrc adrcssee, \e 26 inai
1826, a M. Wtcnn, president du bureau de controle dcs af-
faires del'Inde aLondres, par M. Alexandre Johnston , pre-
mier juge de la cour de justice i I'lle de Ccylan (1). Ce niagis-
(i) La piece interessante que nons publions ici, comane propre ii
fortifier par une preuve solennelle ropinion favorable que tous les
homines eclaires se sont deja formee de rinstitulion du jury et de
son influence sur les progres des lumieres et de la moralite , dans
tous les pays ou elle est introduite, nous a cte commuuiquee par
M. le due de D , ami de I'lionorable M. Johnston , et qui est lui-
in^ine I'un des plus fermes defenseurs de nos liberies constitution
nelles el; I'un des fondateurs et des membres les plus zeles de ce
CoMiTEGKEC, qui, suivant les expressions de M. le ducdeCuoisnui,
dans un discours pronoac6 depuis peu a la Chanibre des Pairs (voy. le
6 tXABLISSEMENT DU JURY
Irat, dont les lumieres paraissent egaler le zele philantropiquc,
rend comptc de I'introduction de la procedure par jury dans
cette colonic anglaise, et des heureiix effets qu'a deja produits
cette admirable institution. Rien n'etant plus propre ii en faire
ressortir tous les avantages que I'expose meme des fails ra-
contes avec simpiicite , nous avons cru , en communiquant cet
expose a nos lecteurs, remplir I'un des devoirs que nous nous
sommcs imposes, celui de faire connaJtre peu a peu lespro-
gres de la civilisation sur tous les points du globe, et d'indi-
(juer en meme terns la possibilite de faire participer a des
progres semblablcs des contrees eloignees oil le besoin s'ln
fait sentir.
Londres, 26 inai 1826.
Monsieur ,
« Vous m'avez temoigne le desir de connailre le plan
que j'ai adopte , lorsque je remplissais les fonctions de
chef de justice et de premier membre du conseil de
S. M. B. a Ceylan , pour I'introduction du jugement par
jury dans cette ile. Je m'enipresse de vous satisfaire; je
vous indiquerai en meme tems comment je m'y suis
pris pour faire participer a la faculte de sieger parmi
lesjures, les naturels de demi- caste, aussi bien que
tous les habitans nes dans le pays, de toute caste et
de toute religion. Je vous exposerai les motifs qui me
determinerent a proposer ce plan, la maniere dont il a
ete execute, et les resultats qu'on a obtenus.
« On reprochait a I'ancien systeme judiciaire en vi-
gueurdansl'ile, ses lenteurs, les frais considerables quil
Journal des Debats , 11° du 5 juillet 1826) « est une des gloires de
notre patrie, en devenant le centre de tous les sentimens , de loiis
les dons earopeens pour soutenir cclte cause heroique et pour en
soulager les lionorables viclimes. » IVI. A. J.
A L'lLE DE CEYLAN. 7
entrainait, et son impopularite. Les def'auts essentiels
de ce systeme pouvaient etre attribues au peu d'impor-
taiice que les naturels attachaient a la reputation de
veracite, a ce qu'ils ne prenaient aucun intei-et a un
mode d'administration de la justice auquel ils restaient
lolaleraent etrangers, a la difficulte pour des juges eu-
ropeens, charges a la f'ois de prononcer sur les faits et
d'appliquer la loi, de se fixer sur le degre de confiance
que pouvait meriter le tenioignage des indigenes 5 enfin ,
aux lenteurs de la procedure, dont le double inconve-
nient etait de retenir long -terns les temoins pendant
les sessions , et de causer de grandes depenses au gou-
vernement qui les defrayait. Plusieurs moyens s'offraient
pour remedier a ces vices dans ladministration de la
justice. II fallait d'abord y interesser directement les
indigenes, en ieur y donnant une part considerable;
a° Ieur rendre la veracite respectable , en les accou-
tumant a regarder le respect pour la verite comme un
titre essentiel pour meriter I'estime de leurs compa-
tnotes, et obtenir quelque avancement dans les emplois
publics; 3°appelerles indigenes eux-memes aux fonctions
dejuges dujait , puisque la connaissance qu'ils avaient
du caractere de leurs compatriotes les rendait plus que
des etrangers capables d'apprecier le merite de leurs
temoignages. Ainsi , Ton abregeait la duree des proces ;
on affranchissait les temoins d'un trop long sejour au-
pres des cours de justice, et Ton diminuait les frais a
la charge du gouvernement. L'introduction du jurv a
Ceylan , et I'extension de la capacile de faire partie des
jurys a lous les indigenes, sauf quelques restrictions,
me parurent la meilleure methode a suivre pour arriver
au but. Je consultai les principaux ministres du culte
de Boudha, pour ce qui concernait les interets des
8 ' :^TABLISSEME1NT DU JURl
Chingulais dans la partie meridionale de I'lle , et les
Braniines dc Keniissuram, de Madure et de Jatna, dans
rinte'ret des Hindous cjiii habitent le Nord. Je soiimis
ensultc nion plan, pour 1 introduction du jury a Gey-
Ian , au gouverneur et an conseil de I'lle. Sir T. Mait-
land , alors gouverneur, et les autres meinbres du
conseil regardaient I'adoption de ce plan conime un
objet dune grando importance pour la prosperite de
I'lle ; mais ils craignaient que la nouveaute de la me-
sure proposee ne titnailre des objections en Angleteire,
puisque Ton n'avait encore accorde a aucun des natu-
rels de I'lnde les droits doiit je demandais la concession
aux indigenes d« Ceylan. Je recus en consequence une
mission olficielle pour I'Angleterre, en ma qualite de
premier membre du conseil de I'lle, avec plein pouvoir
de presser I'adoption de cette niesure , sauf les modi-
fications que jugeraient a propos d'y apporler les mi-
nistres de S. M. , apres m'avoir entendu. La question
ayant ete murement examinee a Londres , une cliarte
scellee du grand sceau accorda aux naturels de Ceylan
le droit d'etre appeles a prononcer comme jures dans
les causes criminelles, conformement au mode que
j'avais propos*^, et a men retour a Ceylan, en 1811,
les mesures furent prises pour mettre cette cbarte a
execution.
« Pour vous donner une idee de la maniere dont le
jugemtnt par jury a ete introduit parmi les naturels et
les individus de demi-caste a Ceylan , je dois vous faire
connaitre : 1° les conditions auxquelles un natif pent
faire partie d'un jury ; 2** comment les jures sont con-
voques a cliaque session ; 3° comment lis sont choisis
pour chaque jugement a rendre; 4"t;omment ilsforment
leur conviction et prononoeiit leur verdict. Tout natif de
A L'lLE DE CEYLA.N. 9
Ceylan , homme libre, ayant atteint 1 age do vingt et un
ans, et domiciiie dans lile , est apte a remplir les fonc-
tions de jure. Des que I'epoque des assises est fixee
tians une province , le Gscal ou le scherif convoque un
grand nombre de jures de chaque caste ; il a le plus
grand soin de ne pas convoquer un jure hors de son
tour, de ne point choisir un moment qui I'enleverait
a des travaux urgens d'agriculture ou de fabrique, ou
a quelque ceremonic religieuse qui reclamerait la pre-
sence des hommes de sa caste. A Touverture de la ses-
sion, on proclame les nonis de tons les jures convoques.
Tous ces jures , avec tons les magistrals et les officiers
de police , entrent en seance , et ecoutent la lecture
de I'acte d'accusation dresse par le juge. C'est alors que
Ton fait comparaitre les prevenus. Chacun d'eux a le
droit d'etre juge par trelze jures de sa caste , a moins
que Tavocat du fisc , qui remplit a Ceylan a pen pres
les memes tonctions que celles du lord-avocat en Ecosse,
ne fasse valoir des motifs pour empecher que raccuse
ne soil juge par un jury de sa caste, et que la cour
n'adopte ses conclusions, ou que I'accuse lui-meme ,
craignant des preventions de la part de sa caste , ne
demande un jury pris dans une autre caste, ou compose
soil d'individus de demi-caste , soit d'Europeens. Des
que la caste qui doit fournir le jury est definitivement
designee , le greffier de la cour depose dans une urne
placee de maniere a etre vue de tout le monde , un tres-
graud nombre de noms de jures de cette caste , parmi
lesquels le jury doit eire pris. L'accuse a le droit d'en
recusercinq, sans deduireaucun motif, et d tn recuser
un nombre indelerniine, en deduisant ses motifs, jusqu a
ce qu'il soit sorti de I'urne treize noms de jures qu'il
n'ait point recuses. Coux-ci pvetcnt alors serment, clia-
lo ETABLISSEMF.NT DU JURY
ciiii dans les tonnes prescrites par sa religion, de juger
le fait d'apres sa conviction , et sans partialite. Ensuite
Tavocat fiscal expliqueles faits an juge(par interprete,
s'il y a lieu), et precede a I'appel de tons les temoins ,
pour rinstruetion de I'atfaire. Le juge recoit leurs depo-
sitions ( toujours au besoin , a I'aide d'un inlerprete),
en presence du jury. Les jures ont le droit d'examiner,
et I'accuse de contre-exaniiner les depositions, en ques-
tionnant les temoins. Quand I'affaire est instruite , I'ac-
cuse parle pour sa defense et fait comparaitre ses
temoins , dont les depositions sont egalement recues
par le juge , le jury exercant a leur egard le droit
d'examen, et I'avocat fiscal celui de contre-examen. Ra-
renient et presque jamais , a moins de circonstances
extraordinaires , il est permis a I'avocat fiscal de repli-
quer on de faire entendre de nouveau des temoins. La
procedure terminee pour I'instruction et pour la de-
fense, le juge (toujours au besoin, a I'aide d'un inter-
prete ) , recapitule , d'apres ses notes, pour le jury , les
resultats des depositions , ajoutant a ce resume les ob-
servations qui hii paraissent utiles. Lejury, apres avoir
delibere , soit rlans son banc, soit s il veut deliberer a
part, dans une chanibreou les juges n'ont point acces ,
delivi-e son verdict, que le chef du jury prononce
en plein tribunal. Ce verdict est forme par I'opinion de
la majorite. On prend les precautions les plus scrupu-
leuses pour que les jures ne se separent point, et ne
comniuniquent avec qui que ce soit, depuis I'instant
oil ils ont prete serment jusqu'a ce que leur verdict
ait ete prononce et enregistre publiquement par le
greffier.
o
« Le nombie des naturels de toiite caste aptes a etre
jures est si grand , et il y a tant d'incertitude sur les
A L'lLE DE CEYLAN. ii
noms de ceux qui coniposeront un jury, qu'il est pres-
que impossible que qui que ce soit , et quel que soit
son credit, parvienne a I'influencer ou a le corrompre.
Le nombre des jures convoques par le fiscal ou le sche-
rit", a chaque session , I'impartialite du lirage au sort ,
le droit de recusation exerce par I'accuse et le fiscal ,
le scrupule que met le tribunal a prevenir , apres Je
serment prete, toute communication des jures entre
eux, ou avec d'autres personnes, donnent un grand
poids a leur decision.
" Comme les naturels sont maintenant juges du fait,
les juges europeens n'ayant plus d'autre fonction que
celle d'appliquer la loi, il suffit d'un seul magistrat
parmi ces derniers , tandis qu'il en fallait deux ou trois,
lorsque le tribunal cumulait les deux attributions. Les
jures indigenes , sachant a quoi s'en tenir sur le degre
de confiance du aux temoins, decident les questions
de fait bien plus promptement que ne pourraient le
faire les Europeens. Aussi , depuis I'introduction du jury,
un jour suffit pour le jugement dime affaire , et la ses-
sion ne se prolonge guere au dela de huit ou dix joxu's
au plus, tandis qu'auparavant un proces durait quel-
quefois six seraaines ou deux mois, et une session ,
souvent trois mois. Tons les naturels appeles aux tri-
bunaux comme jures se familiarisent si bien , pendant
la duree de leurs fonctions, avec les formes dela pro-
cedure et les regies de I'instruction , que, depuis I'eta-
blissement du jury, le gouvernement a pu cboisir, parmi
les indigenes et les individus de demi- caste, appeles
comme jures, quelques-uns des magislrats naturels du
pays, les plus capables et les plus estimes. Places sous
I'inspection de la cour supreme, ils rendent la justice
a leurs compatrioles , en matiere de deiits peu graves,
la ETABLISSEMENT DU JURY
sans frais on a tres-peu de frais pour le gonvernement.
On doit a I'introduction des jiirys indigenes le triple
avantage d'avoir aiigmente I'utiiite et la consideration
des cours de justice , d'avoir affranchi les accuses et
les temoins des inconveniens graves qu'entrainait pour
eux la longue duree des sessions , et d'avoir mis le gou-
vernemenl a portee d'effeciuer sur I'administration de
la justice, une econoinie de 10,000 I. st. par an, comme
le prouve inon rapport , cite page 8 du recueil imprime
de docuniens cnvoyes a Londres. Aucun honime d'une
probite ou d'une veracite suspectes n'etanl inscrit sur la
liste des jures , celte inscription est le temoignage d'un
caractere a I'abri du reproche. On I'invoque pour se
defendre en cas d'attaque devant un tribunal , ou pour
appuyer une demande d'eniploi a la nomination du
gouvernement. Les roles des jures, revises a cliaque
session par la cour supreme , exercent sur le peuple
de ce pays I'influence la plus puissante, ct deviennent
pour tons les habitans un motif qui leur fait attacber a
la veracite beaucoup plus d'importance qu'ils n'etaient
accoulumes a le faire. Le droit de sieger parmi les jures
a releve )e caractere des naturels de Ceylan , et leur a
fait faire desprogres tres-remarquables, sous le rapport
des idees morales. Tons les indigenes inscrits sur les
roles des jures se regardent comme ayantautant de part
que lesjuges europeens eux-memes , au gouvernement
de leur patrie; aussi, depuis I'etablissement des jurys
indigenes, prcnnent-ils au maintien du gouvernement
britannique un iiiteret qui leur elait autrefois etranger.
On peut juger du cbangement qui s'est opere dans leurs
dispositions par la difference de lem- conduite pendant
la guerre de Kandy en i8o3 , et pendant celle de iSi6.
Celle de i8()3 etaitanterieure aletabiisscmentdu jury :
A L'lLE DE CEYLAN. i3
a cetle epoque, les habitans indigenes des etablissemens
britanniques etaient la plupart en etat de revolte. En
i8i6, cinq ans apres Tetablissenient du jury, loin de
montrer le plus leger symptome de mecontentement,
ils saisirent, au fort de la guerre, roccasion de mon
retour en Angleterre, pour me rendre I'organe de leur
reconnaissance envers le gouvernement britannique, et
remercler Sa Majeste de leur avoir accorde I'importante
prerogative dujury. C'est ce qu'atteste I'adresse inseree
pages 1 6 — 5o du Recueil que j'ai cite. Le rapport de
mon successeur, comma chef de justice de lile, en
1820, offre de nouvelles et de tres-fortes preuves des
effets bienfaisans de I'introduction du jury a Ceylan.
On peut le consulter, pages 289 et 290 du 10'' volume
de r Asiatic- Journal. Cbaque jure indigene, quelles que
soient sa caste et sa religion , quelque partie de I'lle
qu'il habite , parait devant la cour de justice , au moins
une fois en deux ans; a I'ouverture de chaque session,
le juge qui la preside adresse une allocution aux jures
en exercice. L'introduction du jury est done non-seu-
lement un moyen de leur donner part a I'administration
de la justice, mais une occasion d'entendre les obser-
vations que les juges leur coramuniquent sur cet objet
et sur I'etat de la societe et des nioeurs particulieres et
publiques. La difference de la conduite des proprietaires
d'esclaves a Ceylan, en 1806, avant Tintroduction du
jury, et en 1816, cinq ans apres cette introduction,
est une forte preuve du changement que peuvent operer
dans I'opinion publique des juges qui mettent a profit
Touverture lies sessions pour inculquer dans I'esprit
des indigenes des idees utiles aux progres des diverses
classes de la societe. Le droit de conserver leurs es-
claves ayaiit ete garanti aux proprietaires par la capitu-
1/, ETABLISSEMENT DU JURY
lalion qui avait transfere aux Anglais, en 1793, cette
colonic hollandaise, le gouvernement britannique ne se
croyait pas autorise a abolir I'esclavage , quelque desi-
rable que fut cette mesure. Cependant en i8o6,avant
I'introduction du jury, je fis aux proprietaires d'esclaves
la proposition d'adopter d'eux-memes quelque plan
pourune abolition graduelle. Cette proposition fut alors
rejetee dune voix unanime. Le jury pour les indigenes
ayant ete institue en 1811, je saisis depuis lors toutes
les occasions que m'offraient mes allocutions annuelles
aux jures , la plupart grands proprietaires d'esclaves ,
pour leur faire connaitre ce qui se faisait en Angleterre
relativenient a I'abolition de I'eselavage. J'ajoutais a
ces renseigneineiis des observations sur les diffiicultes
qu'ils ne pouvaient nianquer d'eprouver souvent, lors-
qu'ils avaient a remplir leurs devoirs de jures, dans
des affaires ou des esclaves etaient parties interessees.
Peu a pen il me fut facile de remarquer en eux un
changement sensible dans leur opinion sur i'esclavage ;
enfin , en 1816', les proprietaires d'esclaves de toules
castes et de toute religion m'adresserent , pour etre pu-
bliee et enregistree a la cour supreme , une resolution
unanime , qui declarait libres tous les enfans d'esclaves
nes apres le 12 aout 1816 , mesure qui, dans peu d'an-
nees , doit mettre un terme a I'esclavage qui a pese
sur rile de Ceylan , pendant plus de trois siecles. >>
Ces resultats de la sage philantropie et du zele d'un
magistrat dont les lumieres et I'experience avaient su
prevoir les heureux eflets dune belle innovation , sont
une excellcnte reponse a tous ces argumens que ne
cessent d'opposer aux ameliorations la prevention et la
cupidite. 11 est remarquable que les indigenes de Cey-
lan aient ete amenes par les bienfaits du jury a delivrer
A L'lLE DE CEYLAN. i5
eux-memes leur pays du (leau de lesclavage , tandis
que les Anglais etles Creoles des colonies britanniques
aiix Indes occidentales opposent a tout projet favorable
aux malheureux esclaves une resistance opiniatre , et
trouvent des apologistes parmi des ecrivains qui se pre-
tendenteclaires.Lesresultats obtenus aCeylan honorent
le gouvernement anglais; ils font regretter que les
malheureux habitans de I'lnde, au lieu d'etre places
sous sa tutele directe , soient encore condanines a geniir
sous le joug d'une compagnie de marchands, qui, tant
quelle exploitera cette belle et vaste contree , ne lui
donnera surement pas le jury, et y laissera I'esclave
dans les fers (i).
ECONOMIE POLITIQUE.
Qui!t.Ql3ES GENERALITES SUR LES E 4UX MINERALES.
Dans son ouvrage intitule : Precis historique sur les eaux
mincrales les plus usitees en medecine , suivi de quelques ren-
setgnemens sur les eaux minerales exotiques (2) , M. le docteur
Alibert a reuni toutes les notions que I'experience, la pra-
tique journaliere et les essais chiniiques les plus recens nous ont
mis a meme de recueillir sur cet important sujet. Son livre est
(i) Voy. Rev. Erie, t. XXIV, p. 635 , et t. XXX, p. 344 , les
deux articles de M. de Sismondi sur I'elat acluel de radminis-
tration et de la civilisation dans I'lnde anglaise. n. d. k.
(2) Paris, 1826; Becliet jeune, libraire de I'Academie royale de
medecine , place de I'Ecole de medecine, n" 4- ' ^'o'- i"-8° de
636 pages ; prix , 5 fr. — Cet ouvrage forme, en outre, la plus
grande partie du tome troisieme des Elemens de theropeiitiqiie et de
matiere medicale, dn ni^me auteur, dont la cinquierae edition vient
de paraitre aussi chezBechet. 3 vol. iu-8° ; prix, 24 fr.
,6 QUELQUES GENERALITES
iin resume bicn pcnfO ct bicn ecrit de cc que Ton saitsurles
eaux mineiales , et un apercn de ce qui restc a fairc pour en
completer Thistoire, pour en determiner la nature , pour en
cclaircr I'omploi. Fixer ainsi I'etat d'une science, c'est lui ren-
drc un important service, puisque c'est indiquer a ceux qui
sont appcles a s'en occuper, ce que leurs devanciers ont fait,
et ce qu'ils peuvent ajouter a leurs travaux , puisque c'est leur
montrer de quel point ils doivent partir pour augmenter la
masse des fails qui lui appartiennent. Riche d'une longue expe-
rience acquisc dans la pratique et dans I'enseignement, en-
toure d'liommes instruits qui sont venus a I'envi lui porter le
tribut de leurs connaissances particulieres, M. Alibert etait
plus que tout autre capable de remplir cette tache difficile, et
Ton doit dire qu'il s'en est acquitte avec la superiorite qui ca-
racterisc ses autres ecrits. Presenter, sous la forme A'apho-
risrnes ,\.ous, les grands preceptes sur I'emploi et I'utilite des
eaux minerales ; diviser eu cinq classes et d'apres leur compo-
sition toules les sources le plus en usage; indiquer , pour cha-
cune d'elles, les proprieteschimiques, physiques, mediciuales
qui la distinguent, et le mode d'administration qui lui est pro-
pre ; joindre a ces descriptions des details sur I'histoire de ces
eaux et sur le pays qui les entoure , des notes precieuses pour
en rendre I'uogc plus commode et plus efficacc; grouper on-
fin, dans un petit nombrc de pages, ce que Ton sail sur les
sources minerales eti'angeres, meme les plus eloignees,commc
celles de la Chine, du Japon , de I'lnde , des deux Ameri-
ques, etc. : telle est la marche suivie par I'auteur, et qui lui a
permis d'eviter les repetitions, ct de dire bcaucoupen pen de
mots.
Avec des connaissances aussi etendues que celles qui distin-
guent M. le professeur Alibert, il lui etait impossible de ne pas
apercevoir, dans les sources minerales, beaucoup plus que cc
qu'ony a vu generalcmentjusqu'a ce jour; de ne pas y recon-
naitre, outre un puissant moycn pour combattre les maladies,
un element de lichesses et de prosperite pour le pays ou elles
soni situecs. Quelqnes-inies de ses reflexions etplusieurs de ses
SVK LES EAUX MINERALES. 17
conseils prouvcnt assez combieu cette verite lui parait feconde.
Son vingt-sixieme aphorisme la consacre tout entiere; le void :
n Les eaux mineiales sent des propinetes qui restent souvent
steriles entre les mains de possesseurs inhabiles et inexperi-
mentes; ellespourraient verser dans 110s deparlemens des pro-
duits considerables, si elies etaient convenablemeiit exploitees.
Ainsi,Ies sources de la santc pourraient devenir celles de la
richesse. « On doit regretter que la nature de sestravauxhabi-
tuels, que les borncs du cadre dans lequel 11 etait force de se
renfermer ne lui aient pas permis de se livrer a des develop-
pemens qui auraient offert un grand interet. Avec une inferio-
rite trop reelle , mais avec la conviction in time de I'importance
de cette question encore nouvelle, je vais essayer, non de la
resoudre completement , mais d'indiquer avec rapidite les
objets qui s'y rattachent, et de montrer quel role les sources
minerales jouent dans I'economie politique , quel rang elles
occupent parmi lesrichesses nationales.
L'utilite des eaux minerales, comme moyen therapcutique ,
est aujourd'hui hors de toute espece de doute ; et, si quelques
gens riches et ennuyes vont y chercber seulement du mouve-
ment et de la distraction , on ne saurait nier qu'un grand
nombre de malades y trouvent chaque annee nn soulagement
marque, ou une complete guerison. Ainsi consideres , les eta-
blissemens thermaux meriteraient deja les encouragemens et la
protection speciale de Tadministration; maisils en sontdignes
encore a bien d'autres titres. Si, comme on I'a dit souvent, et
comme on le reconnait chaque jour, la centralisation est ,une
faute grave, en economic aussi bien qu'en politique; si les
avantages qui en resultent pour le point central , ou la ca-
pitale ,* sonl, et bien aii-dela , contrcbalances par la dcpen-
dance, I'asservissement et Totat de gene ou Ton tient les de-
parlemens, on reconnaitt a sans peine que les sources minerales
sont au moins une richesse que Ton ne peut leur enlever, et au
moyen de laquelle une assez forte partie du numeraire, absorbe
par les graudes villes , retourne chaque annee, pendant la
belle saison , dans des campagnes eloignccs, en echange des
T. XXXI. — Juillel 1S26. 2
,8 QUELQUES G1?:n6RA.LITES
produits du sol et de rindustrie locale. Et qu'on n'aiilc pas
croire que cette somme ainsi repartie est peu considerable ,
que c'est iin de ces avantagos miiiimes qii'une administration
pent neyliger sans encoiirir de rcproches ; on serait dans I'er-
reur. L'ari^ent qui chaque annre est depense dans le voisi-
nage des sources minerales, ou le long des chemins qui y
couduisent, s'eleve au nioins, en ce moment, a un total de
quinze millions. En cffct, si Ton fait un rcleve exact des
sources minerales qui couvrent le territoire francais , on verra
que sur deux cent quaranle et plus qui pourraient etre exploi-
tees, cent cinquante-une seulement sont en etal de reccvoir
des malades, et que , dans ce nombre encore , il n'en est
guere que soixanle-dix-neuf qui soient visitecs par des bu-
veurs eloignes , tandis que les autres sont presque exclusive-
mentfrequentees par des malades des environs. Or, si Ton s'en
rapporte aux sommes indiquees par les medecins-inspecteurs
des eaux, sommes qui, pour le dire en passant, sont toutes
au-dessous de la verite , on trouvera que I'argent depense ,
pendant une saison, a sept sources qui jonissent de la vogue a
des degres tres-differens , forme un total de 467,959 fr. ; ce
qui donne une moyenne proportionuelle de 66,85i fr. pour
cliacune, et pour les soixante - dix -neuf sources assez bien
exploitees pour y attirer les malades eloignes , un total
de 5,281,229 '^''*
Mais, il reste soixante-douze aufres sources,
frequcnttesaussi,quoique parun moins grand
nombre d'individus, et donton peut ccpcn-
dantevaluer le revenu annuel a la moyenne
de trenle mille fr., ce qui fait encore 2,160,000 fr.
En tout . . . 7,4415229 fr.
Maintenant, si Ton faitentrer en ligne dc compte I'argent de-
pense par les gens riches en superfluites, eu achats de fantai-
sies, ce qui est nccessaire pour approcher de la verite; si Ton
comprend aussi I'argent depense le long des routes, pendant
les voyages , argent qui profile aux proprielaires d'hotelle-
SUR LES EAUX MINER ALES. 19
rics, aux maitres de poste , aux entrepreneurs de diligences ,
et par suite , h une foule d'ouvriors et de journaliers ,
ce ne sera pas trop faire que de doubler ce premier total
et de porter a quinze millions la somme qui, tous les ans,
reste dans nos departemens, a la suite de la saison des eaux.
II suffit d'avoir visile quelques - uns de nos etablissemens
therraaux pour etre convaincu de I'hcureuse influence que cet
argent exerce dans les departem£ns. II y favorise I'agriculture
en general , et surtout le jardinage, parce qua lepoque de la
saison des eaux, le cultivateur sait qu'il pourra facilement
vendre les fruits et les legumes de son jnrdin; il alimente et
soutient seul plusieurs fabriques, plusieurs manufactures dont
les produits soat destines aux baigneurs et achetes par eux ;
seul il fait vivre un grand nombre d'aubergistes, de marchands
de detail, d'artisaus utiles, d'ouvri.ers , de journaliers, de
garcons de bains, et il contribue puissamment a repandre le
gout dii travail avec tous les avantages qui en sont la suite et
la consequence n^cessaire. Plus d'une fois , les sources mine-
rales ont donne naissance a des constructions d'un inleret ge-
neral; des routes commodes et bien entretenues, des prome-
nades saines et agreables, quelques salles de spectacle , des
hopitaux militaires ou civils , des lavoirs n'ont du leur creation
qu'a ['exploitation bien entendue d'une source minerale.
L'utilite des routes est bien reconnue; assez de voix se sont ele-
vees, en France, pour en demander denouvelles, pour en signa-
ler I'indispensablenecessite; assez souvent, on a demontre que
les moyens de communication peuvent seuls faciliter et ame-
ner les echanges, sans lesquels il n'y a ni agriculture, ni com-
merce, ni industrie; il serait superflu de revenir sur ces ve-
rites. Les sources aiinerales ont done rendu un grand service
puisqu'elles sont la cause premiere de I'etablissement de plu-
sieurs routes, creees depuis un demi-siecle, et puisque ces
routes, parmi lesquelles on doit citer celles d'Ax, de Bonnes ,
de Bagnoles , de Bagneres-de-Luchon, etc., offrent aujour-
d'hui des debouches d'un avantage reel.
Dans une ville populeuse , partout ou des hommes occupes
20 QIIELQUES GEN1?:RALIT6S
sont r^iinis en grand nombre, une promenade agreable, oin-
bragee, dcvient necessairf, et contribue anlant a la sante qu'ati
delassement des individus; dans plus d'nne source, I'admini-
stration prtvoyante a fait tracer et planter des promenades; et,
(jnoiquc destinees d'abord aux baigneurs, ces promenades n'en
sont pas moins utiles a toute la population.
On sait combien de gens vivcnt du produit des representa-
tions thealraics , combien ce genre d'amusement , si digne d'un
peiiple civilise, pent, en exercant une influence heureuse sur
I'esprit et sur les moeurs, repandre d'aisance jusque dans les
classes les moins favorisees de la societe. Si, comme plusieurs
cxemples I'alicstenl, les reunions demalades autour d'une eau
niinerale fournissenl les moyeiis de soutenir plus d'une entre-
prise iheatrale, les sources ont encore rendu un service im-
portant.
II est inutile d'insisler sur les avantages des hopitaux situes
pres des eaux minerales, de ces asiles oii les guerriers vont
cliercher la giierison des niaux causes par les fatigues ou par
les accidens de la guerre, oil les pauvres trouvent les secours
que riiouime riche parait seul pouvoir se procurer. II serait
seulemont a desirer cjue ces fondations utiles fussent en plus
.grand nombre, et que, par une niesure aussi sage que juste,
I'administration put les entretcnir au moins en partie, en prt-
levant un droit modique sur I'exploitation generale des eaux.
Dans plusieurs pays , les sources chaudes sont employees
avecsuccesa des usages domestiques; ou a mcme tvouve depuis
pen le nioyen de les faire servir au blanchimentet au degrais-
sage des laines ; et, parlout oil de telles eaux existent et ou elles
ne sont pas exclusivement reservees au traitement des mala-
dies, il serait avantageux que des lavoirs convenables et solide-
ment construits en rendissent, comme ^ Chaudes-Aigues, I'usage
commode pour tons, et pussent ainsi contribuer a etendre et a
populariser cette uouvelle branclie d'economie domcslique.
A ces considerations rapidement exposees, mais dont il est
facile de sentir toute I'importance, on pent encore en joindre
d'auties d'une application moins directe sans doute, mais qui
n'en sont pas moins dignes d'un intcrct parliculicr. Les per-
SUR LES EAUX MINlSlRALES. ai
sounes qui freqiicutent les eaiix minerales apparliennent pres-
que toutes a la classe aisee, et possedent poiir la pliipart I'in-
struction et les Immeres que la fortune permet d'acquerir.
Leur sejour prolonge au milieu d'une population souvent peu
cclairee doit naturellement y faire naitrele desir d'apprendre,
le besoin de s'insfruire. Plus d'un artiste distingue , plus d'un
homme remarquable a du la revelation de ce dont il etait ca-
pable a la rencontre fortuite d'un etranger, et les exemples
ne manqueraient pas pour prouver que plus d'une fois ce sont
des baigneurs qui ontarrache a la solitude des campagnes, et
aux plus humbles emplois, des hommes faits pourbriller par
les plus hautes conceptions de I'intelligence. De tels faits sont
rares sans doute; il suffit pourtanl qu'ils se soient presentes
quelquefois, pour les mentionner ici. Mais, ce qui est general,
ce qui se rencontre partout aux sources et dans les lieux qui
les entourent, c'est iiu ton d'urbanite plus liabituel , une poli-
tesse plus affectueuse, un langage plus epure, des manieres
moins agrestes que dans les lieux qui ne sont point, chaque
annee, frequentes par unepopulationetrangerect qui, isoles en
quelque sorte du reste du monde, se trouvent prives des avan-
tages de I'exemple et de I'emulation.
Voila certainement bien des motifs pour que le gouverne-
ment, les administrations locales et tous ceux qui, par leurs
lumieres, leur rang ou leur fortune, peuvent exercer une in-
fluence utile, entretiennent, embellissent, augmentent encore
les etablissemeus thermaux. De toutes les sources minerales
qui existent en France et dont beaucoup sont encore incon-
nues, im releve, fait avec exactitude d'apres les raeilleurs ou-
vrages publics sur ce sujet, prouve que vi/i^t-deux scu\ement
sont exploitees avec un succescomplet ; que quarante cinq sont
frequentees encore par un grand nombre de rnalades ; mnis que
plusieurs manquent de batimens thermaux, etque dans lai)lu-
part les etrangers ont de la peine a se procurer des vivres et
nn logement; que douze , qui jadis etaient en grande vogue ,
sont aujonrd'hui presque entierementabandonnees, sans qu'on
puisse attribuer ce changement a autre chose qu'a Icnr niau-
aa QUELQUES G^NERALITES
vaise atlmiiiistration et a rincurie des pioprietaires (i); que
soixante - douze sont presqiie exclusivemcnt visitees par les
nialades du voisinage, parce que rien n'y est dispose pour
recevoir des etrangers; enfin, (\uc quatre-vingt-neuf iiont ^n-
tierement negligees et menlionnees seulement par les auteurs
comme pouvant etre utiles. D'apres cet apercu, on voit com-
bien il reste a faire pour porter ce genre d'industrie au point
de perfection auquel il doit arriver un jour, et quels avan-
tages resulteront pour la France de I'exploitation bicn enten-
due de deux cents sources minerales : c'est surtout dans les
provinces sans debouches, ou les habitans n'ont presque au-
cun moyeu de vendre les produils de leur sol, ou rindustrie
n'a point penetre , qu'il faut chercher si quelque source mine-
rale ne pourrait pas devenir a la fois un moyen de !^;uerison
pour les malades et une source de richesses pour le pays.
Cette veriteaetebien sentie par M. Alibert, et il I'a misedans
tout son jour, ( page 44o de son ouvrage deja cite ): « Dans ce
moment, dit-il , on afflue dans le departement de I'Aveyron
pour proceder a la recherche des mines; il faudrait aller dans
celui de la Lozere, pour y faire prosperer les eaax de Ba-
gnoles, qui sont une richesse inactive , dans un pays sauvage
qu'on croirait livreaux vautours et aux betes fauves, et qui ,
sous le point de vue industriel, peuvent certainement rivaliser
avec celles des Pyrenees. » Oui , sans doute, une source nii-
nerale convenablement exploitee est, pour le pays qui la pos-
sede, une richesse plus grande, plus generale, mieux repartie,
que la mine la plus productive; et, ce que ne saurait faire
une mine, la source I'opere constamment; elle contribue a re-
(i) Quand le proprietnire d'une eau minerale est dans une situa-
tion a pouvoir operer le bien, il doit vivre en quelque sorte de celui
qu'il fait a ses semblables ; il n'est pas permis de negliger ses inte-
rdts materiels, quand ils touchent de si pres au bonheur des autres.
C'est corame si un homme refusait d'ensemencer son champ, sous
le vaia pretexte qu'il est assez riche pour subsisler par d'autres
moyens. ( Alibert , Precis stir les eaux minerales , p. loi. )
SUR LES EAUX MINERALES. ^3
pandre les lumieres , a faire marcher la civilisation. Les
Romains semblent avoir mieux senti ces verites que les aiitres
peuples. Leurs nombreux etablissemens thermaux , dont les
ruines se retrouvent encore aujourd'hui sur tant de points de
la France, sont la pour I'attester. L'economie politique, comnie
science, n'existait certainement pas pour eux ; niais quelques-
uns des grands principes qu'elle proclame ne leur etaient pas
entierement inconnus, et il me sera peut-etre facile de prou-
ver ailleurs que, pour ce peuple-roi, chez lequel toutes les
lumieres du globe semblaient s'etre refngiees, et qui domina
long-tems le monde par I'ascendant de la civilisation , bien plus
que par la force des armes, une source minerale etait plus
qu'un simple etablissement sanitaire; c'etait une ressource po-
litique; c'f'tait un moyen assure de porter dans un pays les
lois, les moeurs, les usages des peuples polices, de les colo-
niser an milieu des barbares et dans les lieux meme qui les
avaient repousses jusqu'alors. En effet,quand I'ltalie renfer-
mait tant d'eauxmineralessalutaires, les Romains ne seraient
probablement pas venus en chercher, en embellir, en creer,
pour ainsi dire, dans les forets des Gaules et de la Germanic,
s'ils n'avaient pas su d'avance qu'autour d'un de ces thermes
construits a de si grands frais , il devait bientot s'elever un
bourg; puis, une ville dont les habitans s'eclaireraieut, se ci-
viliseraient en peu d'annees, par la frequentation continuelle
des riches citoyens de Rome que Tespoir de recouvrer lasante,
ou I'amour du changement conduirait au milieu d'eux. la ville
de Luxeuil, dans la Haute-Saonc, celle de Boiirbonne- les-Bains,
dans la Haute-Marne, celle de Bagneres - Bigone , dans les
Hautes-Pyrenees, celle de Neri.s dans I'Allier, n'ont peut-etre
pas une autre origine , et I'histoire pent dire combien ces pre-
mieres fondations ont influe sur la prosperity de plusieurs
autres parties de la France.
Ce que les Romains ont fait avec tant de bonheur , ce qui a
produit de si precieux resultats dans les provinces soumises a
leur empire, nous serious bien coupables dene j)as I'imiler,
dans I'interet de nos departemens les moins favorises; aujour-
24 QUELQUES GENERALlTfiS
d'hui que , vicillis par une longue experience , nous connais-
sons le prix des lumieres et Ics avantages de I'industrie, une
pareille tAche presente sans doute bicn dcs difficuUcs, mais
elle est loin d'etre impossible. Dcja mcme, depuis quelques
annees, de nombreuses ameliorations ont ete apportee^ dans
le regime et rexploitationdes eaux mineralcs. Quelques hom-
ines, aussi cminens par leurs lumieres que par leur zcle pour
le bien public , se livrent avec ardeur a des recherches, i des
cssais qui ne peuvent manquer d'amencrles plus heureux rc-
sultats. Que rien ne ralentisse leurs genercuses investigations;
que le gouvernemcnt, eclaire sur ses vrais interets qui sont
inseparables de Finteret de tous, seconde leurs efforts; et
bientot on verra les sources minerales de la France atteindre
le double but qui leur est assigne par la nature et par les lois
sociales. II reste beaucoup a faire , puisque Ton comptc a
peine en France vingt sources qui soient exploitees avec
succes, et qu'il n'en est pas une encore ou I'on ne puisse
operer d'uliles cLangemens; mais qu'on se persuade bien que
les sources minerales sonl de veritables richessesnationales ;
qu'on perde I'habitude de les considerer exclusivement comme
une des ressources del'art de guerir; et bientot, on verra une
noble emulation s'etablir de ville ;\ ville, de departemcnt a
departement , et cette emulation, en fournanta I'avantagc des
malades, tournera immanquablement a I'avantage des habi-
taus. II faut que les chimistcs continuent a rechercher, a de-
terminer la nature des eaux, la proportion de leurs principes
niineralisateurs ; que les medecins les appliquent avec pru-
dence, avec discernement au traitement des maladies ; qu'ils
vecueillent avec un soin scrupuleux tous les fails qui peuvcul
contribuer a en faire connaitre les proprietes medicinales; il
faiit enfin que, partout ou une source aura etc trouvee digne
d'etre exploitee, les administrations, soitaprcs avoir acquis le
terrain, soil en secondant et en eclairant le proprietaire , se
hatent de la faire entourer de constructions utiles et commo-
des, d'en rendre I'abord facile, d'y lassembler tons les objets
d'utilite et d'agrement que les malades peuvent desircr. De sem-
SUR LES EAUX MINl&RALES. aS
blables tentatives pourront quelquefois etre infructueuses;
mais , le plus souvent, dies seront couronnees du plus heu-
reux succes, et la certitude d'avoir rendu a leiir pays un ser-
vice important, sera la plus douce recompense de ceux quiles
aurontaccomplies avec perseverance. G. T. Doin, D. M. P.
N. B. Le point de vue 6conotnique et d'utilite generale, sous
lequel on envisage ici les eaux minerales et leur importance
pour les localiles qui les possedent, nous parait devoir disposer
ceux de nos iecteurs que celte question pourra specialement
interesser, a consuller tous les articles de la Revue Encyclo-
pedique dans lesquels on a fait mention de bains et d'etahlisse-
me.ns ihermaux. Pour leur eviter des recherches longues et pe-
nibles, nous indiquerons ici sommairement ces articles et les
numeros des volumes et des pages oil ils se trouvent. — i. Bai-
gnoires ambulantes de M. Valette et bains a domicile, t. in ,
p. 378 , 692. — 2. Bains a vapeur etablis a Madrid , par M. Ei-
mery , medecin francais, t. v, p. 201. — 3. Bains a vapeur eta-
blis sup le terrain de la Solfatara, pres Naples, par ledocteur
Assalini, t. v. p. 386. — 4- Essais sur les eaux minerales de
Pozzuoli; pac Fr. Lancellotti, professeur de chimie a Na-
ples. Naples 5 1819. t. VI, p. i65. — 5. Etablissement pour
prendre des bains de mer, forme aupres de Marseille par
M. Vailhen, t. vii, p. 623. — 6. Recherches medicales sur les
bains a vapeur, par le docteur Paul Assalini. Naples, 1820,
t. VIII , p. 125. — 7. Notice sur I'eau minerale de Linthal, can-
ton de Glaris , en Suisse; par le docteur Hegetschwf.iler.
t. viii , p. 629. — 8. Etablissement de bains de iner chands
et froidsetde douches, forme a Boulogne-sur-Mer par M. Quet-
tier, t. IX , p. 200 et t. xxiv , p, 628. — 9. Bains de mer a
Dieppe, f. x. p. 652 ; t. xix , p. 490. — 10. Bains d'eau snlfn-
reuse d'Enghien, valiee de Montmorency, pres Paris, t. x,
p. 653. — II. Eaux minerales deCambo, pres Bayonne ( Bas-
ses-Pyrenees ). f. XIII, p. 236. — 12. Notice de M. Edouard
Laffon de Ladebat, sur les etahlissemens thennaux du de-
partement des Hautes-Pyrences , shues z Cauterets , Bareges,
Saint-Sauveur , Bagneres-sur-Adour ; t. xxiii, p. 268-289. —
1 3. Memoire sur les eaux minerales de Fuen-Sanla , dans la
province de la Manche , en Espagne , par don Jos. Torres.
Madrid, 1822, t. xv, p. 564. — 14. Des bains propres a la
sante , par P. Pacanini. Turin, 1822, t. xvi . p. 34o. — i5.
Les bains de Kiel , decrits et compares avec d'autres bains
de mer de la Baltique et de la mer du Nord, par Praff. Kiel,
1822. t. XVII , p. 116. — 16. Eaux minerales de Montlignon ,
26 GENERALIT^S SDR LES EAUX MIIVERALES.
( vallec de Montmorency ); Ibid. p. 421. — 17. Hydrologie mt-
nerale , ou histoire de toutes les sources d.'eaux minerales con-
iiues jusqu'ici dans les ctctts du roi de Sardaigne , par don Bern.
Bertini. Turin, 1821. Jhid, p.GgS. — 18. Edux thertnalesd' Aix,
( Bouches-du-Rhone, ) observees par M. Gimbernat, natu-
ralisle, et par M. le docteur Despine, dirccteur des bains,
t. XVIII, p. 456. — 19. Eaux minerales de Sainte Madelaine de
flourens (Haute-Garonne) , t. six, p. 489. — 20. Fontaine
minerale d'eau salee a S;in'enai ( Cotc-d'Or ) , t. xx, p. 23i. —
21. Bains de tner de I'ilc de Nordernej { Hnnovre ) , par le
docteur DE Halem. Hanovre, 1H22. t. xs, ]>. gS. — 22. Carle
des eaux minerales de la France , par M. Breon, D. M. , con-
foime a la division adoptee par la commission des eaux mine-
rrdes. Paris, 1823 , t. xxi, p. 399-401. — 23. Nouvelle source
d'eau minerale froide, recemment decouverte, a Chamouni
(Savoie), analysee par M. Gimbernat, t. xxiii, p. 241-242.
— 2/|. Eaux minerales de Dlnan ( Cotes du Nord ), par M. Bi-
CEON, D. M. Dinan, 1824. Ibid. p. 423. — 25. Eaux minerales
aux environs de Moscou , ibid. p. 746. — 26. Etablissement de
bains a Bex , canton de Vaud ( Suisse ) ; sources sulfureuses
analyseespar M. Mercanton. Ibid. p. 754. — 27. Bains gazeux
«le Baden, canton d'Argovie ( Suisse ), ameliores par M. G«V«-
Oernat, \. yi%iv, Y). 5i6. — 28. Etablissement balneo-medical
du docteur Paganini, a 0/(»g^^/o ( Piemont ). Ibid. p. 5 18. —
29. Reclierches sur les eaux publiques de Paris , j)ar M. GiraUd,
t. XXVI , p. 47-55. — 3o. Bains de mer de Boulogne , etablisse-
ment forme par M. Versial, ibid. p. i83. — 3i. Bains d'Aix en
SnyQie, ibid. p. 290. — 32. Notice sur les memes bains, avec un
plan lithographie , par M. Francoeur. Ibid. p. 3i3-332. — 33.
Eaux minerales de Bagnoles ( Orne ) , Ibid. p. 599. — 34- Bains
de mer a la Teste ( Gironde ) , I. xxvii , p. 594. — 35. Fonda •
tion d'un hospice thermal au Mont-d'Or ( Puy-de-D6me ) ,
Ibid. p. 922. — 36. Manuel d'analyse chimique des eaux mine-
rales medicinales , etc., par MM. Henry, pere et fils. Paris,
1825 , t. xxviii , ]i. 201. — 37. Sur les eaux minerales acidules
de Fals, par M. Tailhaud, D. M. Valence, iSaS. t. xxviii,
]). 521. — 38. Etablissemens thermaux de Bade et d'Yverdun,
en Suisse, visites el ameliores par M. Gimbernat. Ibid , p. 622.
— 39. Meme sujet , I. xxix, p. 3i8. — 40. Eaux minerales du
Caucase, observees par le docteur Conrad; t. xxx, p. 127. —
4i. Ifydrologie minerale, par Bertini. Ibid. 140. — 4*- Hygie
des bains , par Franceschi. Ibid. 141. — 43. Recherches sur les
bains a vapcur ct les fumigations. Ibid. ibid. [Fay. ci-dessus,
n" 6. ) — 44. Nouvelles eaux minerales decouvertes en Russie.
Ibid. p. 238. M. a. J.
TABLEAU STATISTIQUE
DU COMMERCE DE LA FRANCE, EN 1824;
Lu a rAcademie royale des sciences de I'lnstitDt , daus sa Seance
du 3 avril i 826.
Les termes numeriques qui exprinracnt le commerce des peu-
ples modernes sont comme les hieroglyphes del'antique Egypte ,
ou les lecons de I'histoire, les prcceptes de la sagesse et les
secrets de I'avenir efaient caches sous des caracteres mysle-
rieux. Onjpeut y decoiivrir raccroissement de la puissance des
empires, les progres des arts et de la civilisation et la marcho
ascendante ou retrograde des societes europeennes.
En restreignant a la France les donnees que nous allons pie-
senter sur ce vaste sujet, nous y joindrons cependant celles qui
permetlrontde comparer lepresentaii passe, et notre commerce
a celui des grandes puissances maritimes et continentales des
deux hemispheres. Nous montrerons d'abord , d'apres les do-
cumens officiels, quelles ont ete, pendant 1824, les quantiteset
la valeur des importations et des exportations ; nous etablirons
ensuite, sur une periode de plusieurs annees, des termes moyens
propres a fixer les idees sur I'etat de cette branche principale
de la richesse publique.
Expoitation. En i823. En 1824. Difference.
Produits natarels. . . . 163,493,000 — i63,o56,ooo — 446,000 f.
uianufactnres.. 227,262,000 — 277,486,000 — 60,224,000
Totanx. . . 390,754,000 — 440,542,000 — ■ 49,778,000 f.
Ainsi , la valeur de I'exportation des produits du sol de la
France ne s'estelevee en 1824, qu'au meme degre que I'annee
precedenle, et meme elle a ete moindre d'uu 826^; conse-
quemment, I'agriculture n'a pas trouve de debouches plus Jar-
ges ou plus nombreux pour ses productions; mais il en a efe
tout autrement de I'industrie. Les produits de nos manufac-
tures ont obtenu une vente plus considerable de 5o millions,
ct plus grande d'uu cinquieine que I'annee precedente. C'est
28 TABLE A.U STATISTIQUE
cet accioissement qui constitue Ics progres de notre commerce
d'exportation , dotit la prospcrite est due au perfectionnement
rapide de notre industrie et a I'extcnsion de nos etablissemens
manufacturiers.
L'exportation a ete effecluee :
En i8a3. liniSj/). DiffCTeiice.
Par 3,488 nav. franc. — Par 3,()55 nav. franc. . . 467 navires.
6,1 ry nav. ctraug.— 6,333 nav. etraug. . 221
Tot. . . (),Go5 10,393 688
Le tonnage de l'exportation a ete :
Ell 182?. En 1824. Diff.'renco.
Nav. francais 2/\0,o/i& tonn. ^ — Nav. francais 320,698 tonn. — 85,65o
etrang. 396,810 — ctrang. 4i5,24i — i8,93i
Totaux. . . 636,358 — 740,939 — io4,53i
La valeur de l'exportation a ete distribute ainsi qu'il .suit :
En 1823. En 1824.
Exportat. uiarit. 229,902,200 fr. — Exportat. marit. 271,019,000 fi-.
par terre i6o,852,ooo fr. — par terre i69,5a3,ooo fr.
Totaux. . . 390,754,200 fr. — 440,542,000 fr.
L'exportation maritime a ete :
En 1823. En 1824.
Par nav. franc, de 87,704,000 fr. — Par nav. franc, de i36, 932,000 fi'.
etrang. 142,(98,000 fr. — etrang. 134,087,000 fr.
Totaiix. . . . 239,902,000 fr. ■ — 27 1,019,000 fr.
Accroissementde la valeur de Texportation franc, par mer. 49,228,000 fr.
Diininatlon de la valeur de l'exportation eirang. par mer. 8,11 1,000
Accrolssemeut ab.solu de la valeur de I'export. maritime. 4'i''7)OOo
de I'expovtatioii par terre 8,671,000
total de l'exj)ortation. . . • 49,788,000
DU COMMERCE DE LA FRANCE, EN 1824. 29
Void les resultats de ces termes numeriqnes :
1" La navigation a gagnc d'une annee a I'autre, par I'ac-
ci'oisscment de ['exportation de nos produits agricoles et in-
dustrials, une augmentation de presde 700 batimens , jaugeant
ensemble 104,000 tonneaux. La navigation nationale forme les
cinq sixiemes de I'accroissement du nombre des navires et de
I'augmentation du tonnage;
2° L'urgence de cette amelioration etait tres-grande, puis-
f|u'en 1823 !e nombre des navires francais qui concoururent a
I'exportation ne s'elevait gueres qu'a moitie de celui des na-
vires etraugers ; en 1824, il en a presque egale les deux tiers;
3° La flotte de 10,000 navires , sortis de nos ports, charges
des productions indigenes de la France, etait formce en 1824,
de pres de 4)Ooo navires francais, cliacun du port moyen de
82 tonneaux, et de plus do 6,000 navires etrangers, jaugeant
ensemble chacun 68 tonneaux par un terme moyen ; ce qui ,
comparativement a ces derniers, elevc d'un sixieme le tonnage
de nos batimens du commerce au-deSsus du terme moyen que
presenle le leur ;
4° La masse des produits agricoles et indnstriels exportcs
par mer et vcndus a I'etranger dans le cours de cette seide
annee, etait du poids de pres de i5oo millions de livres, et
du volume de 3o millions et derai de pieds cubes;
5° Si le poids et le volume des produits exportcs par terre
correspondent, dans la meme proportion de la valeur, a ceux
exportcs par mer, on jieut porter approximativement la masse
totale des marchandlses sortant du royaume chaque annee a
2 milliards et demi de livres pesant, et a plus de 5i millions
de pieds cubes ;
6° Les tonneaux d'encombrement ayant a peu pres un vo-
lume d'un metre cube et demi, si tons ceux formant I'expor-
tation annuelle de la France, etaient ranges sur une seule ligne,
ils occuperaient une etendue de i83o kilometres, et il fau-
drait 67 journees de marche de 7 lieues chaque pour en par-
courir toute la longueur, cc qui ferait un voy.ige de 469 lieues,
comme celui de Paris a Petcrsbourg ;
3o TABLEAU STATISTIQIJE
7" La valour de I'e.xpoitation maritime faite i)ar les navires
francais a excede de 3 millions celle dc I'exportation faite par
Ics navires etrarigers , quoiqiie ccux-ci fussent plus nombreux
dans la proportion de 11 a i3; les cargaisotis de nos tt,ooo
navires valant plus de i36 millions, c'est pour chaque 3Zi,ooo f.
par unterme nioyen; tandis que celles des 6,3oo navires etran-
gers valant seulement i3/l millions, la valeur de chacune n'est
guere que de 21,000 fr. , d'ou il suit que les cargaisons de nos
balimens du commerce sont plus riches d'un tiers, et qu'il est
fait une exportation plus considerable par nos navires que par
ceux des etiangcrs, qui cependantenemploicnt ?.,383 au-deli\
du nombre de nos armcmens;
8° L'accroissemcnt de I'exportation effectuee par nos na-
viress'est elevee, en i824> a 49 millions; mais celle des naviies
etrangers ayant eprouve une diminution de 8 millions, I'ac-
croissement absolu de I'exportation maritime est de 41 mil-
lions; plus, I'avantage d'avoir substitue, pour un huitienie de
celte somme, le commerce national au commerce etranger;
9*^ L'exportation par terre netant que de 169 millions et
demi, est encore loin de s'elever aux deux tiers de I'exporta-
tion maritime, nonobstant le developpement de nos frontieres,
les besoins iirgens et multiplies des etats liniitrophes, et les
lignes dc transit, singulieremcnt favorables, que permet d'ou-
vrir noire situation geographique, et dont les avantages reei-
proques sont etouffes par I'esprit de defiance et d'liostilite
commerciale des puissances du Continent;
10" Cescauses n'ont laisse en 1824, a I'exportation par terre,
qu'un accroissement de 8 millions et demi, tandis que I'ex-
portation maritime en a obtcnu un cinq fois aussi grand ; d'ou
il suit que les debouches offerts a notre commerce par les ex-
peditions d'outre-mer se sont elargis, dans le cours d'une seule
annce, cinq fois autant que ceux qui ont etc donnes par le
transit de nos frontieres;
11" L'exportation de nos produits, en 1824. ^ ^te de 5o mil-
lions de francs plus considerable que I'annee precedente; ou,
DU COMMERCE DE LA FRANCE, EN i8a/,. 3i
en d'autres termes, elle s'est augmentee cl'iin liuiliemo dc sa
valeur en 182 3;
12° Ce grand accroissement commercial est du tout enticr
aux progres de notre indnstrie, dont les produitsperfectionues
troiivent dans les marches etrangers une concurrence moins
puissante que celle qui limile I'exportation de nos prodiiits
agricoles , et I'empeche d'obtenir la meme prosperite.
11 est ourieux et important de connaitre snr quels objets
s'est portee la faveur du choix dans les marches etrangers, et
quelle part est due a telle fabrication ou manufacture dans
cette exportation , qui n'est surpassee par celle d'aucun autre
pays du monde, excepte I'Angleterre.
Grandes manufactures. Exporte en i823. En 1824. Difference.
Tissns de chanvre et de lin. 3o,36o,ooo — 37,379,000 — 7,019,000 f.
Id. de laine , . ig,oi3,ooo — 20,040,000 — 1,027,000
Id. de soie 84,92.1,000 — 99,486,000 — r4,56i,ooo
Id. de colon 24,464,000 — 35,024,ooo — io,56o,ooo
Totaax 158,7(12,000 — 191,929,000 — 33,167,000 f.
Arts et Metiers. Exporte en 1823. En 1824. Difference.
Papier 3, 495,000 — 6,379,000 — 2,884,000 f.
Merceries 7,345,ooo — 9,653,ooo — 2,3o8,ooo
Porcelaine 3, 816,000 — 4,5o3,ooo — 687,000
"Verreries 3,137,000 — 3,643,ooo — 5i6,ooo
Bijouterie 2,699,000 — 3,o4i,ooo— 342,000
Litres 2,863,ooo — 3,171,000 — 3o8,ooo
Gravures et lithographies. . 1,126,000 — 1,727,000 — 601,000
Mode.s 2,779,000 — 3,004,000 — 225,000
Chapeans 2,854,ooo — 3,077,000 — 273,000-
Menbles 927,000 — r, 224,000 — 227,000
Effets d'habillement 2,41 5, 000 — 3,809,000 — 1,394,000
Peaux OQvrees et preparees. ii,588,ooo- — 16,091,000 — 4,5o3,ooo
Totaux , . 45,034,000 — 59,322,000 — 14,288,000 f.
II sort de ces chiffres dcs considerations <;ommercialcs dime
haute importance pour la prosperite |)ubliqiie :
32 TABLEAU STATISTIQUE
1° Nos quatrc cspeces de grandes manufactures fournissent
k ['exportation annuelle pour pres dc 200 millions de francs
dc fissus; cUos ont trouve en 1824 une vente plus considerable
de 33 millions, ou d'un sixieme, que I'annee precedente ;
1" Los soierics forment soulcs la moitie de ce riclie commerce;
les trois autres especes dc manufactures se partagent la valeur
de 100 millions constituant I'autre moitie. Les draps sent la
fabrication qui possede les moindres debouches; ils ont cepcn-
dant ga^ne une augmentation de vente d'un million. Les toiles
en ont obtenu une plus grande, de 7 millions, et les soieries
une de i4- Les colons sont , apres les tissus de soie, les objets
les plus favorises par les progres de leur vente; on en a ex-
porte en 182/1 pour 10 millions et demide plus qu'en x823 ;
3° Ces quatre branches principales de I'industrie francaise
ont procure a notre exportation beaucoup au-dela des trois
cinquiemes de son accroissement. Si les succes de nos lainages
avaient egale dans les marches etrangers ceux de nos toiles, de
nos cotons et siutout de nos soieries, ces manufactures au-
raient fourni a I'exporlation la moitie de sa valeur totale ;
4° Parmi les arts et metiers les plus productifs et dont la
reussite est la plus grande a I'exterieur, sont ceux qui fournis-
sent au commerce les peaux ouvrces et preparees. La valeur
des objets qu'ils oat dounes a I'exportation en 1824 s'est elevee
a 16 millions; elle a surpasse de beaucoup plus d'un quart
celle de I'annee precedente, ce qui est un accroissement im-
mense. Les tabriques dc papier ont trouve aux objets de leurs
travaux un debouche plus large, qui leur a perrais d'en placer
pour un excedant de pres de 3 millions; la vente de nos mer-
ceries s'est augmentee de deux millions, et celle des effets
d'habillement neufs ou portes, d'environ 1,400,000 fr.
5" II y a eu pareillement des progres satisfaisans , faits par
la bijouterie, la gravurc et la lithographic, la typographic,
la verrerie commune et surtout les cristaux, la chapellerie et
les modes , ainsi que I'envoi des meubles d'appartemens dans
les pays etrangers. Cette derniere branche s'est etendue d'un
quart, dans son developpemcnt d'uneannec a I'autre.
DU COMMERCE DE LA FRANCE, EN 1824. 33
6° En masse, 12 especes d'industrie, qui en 1823 n'avaient
donne a I'exportation qu'une valeur de 45 millions de pro-
duits, en ont foiirni pour 60 en 1824, et consequemment ont
accru leur vente cxterieure d'un quart dans I'espace d'une
seule annee; ce qu'elles ont obtenu par les progres des con-
naissances commerciales, le perfectionnement des operations
industrielles et I'amelioration de nos habitudes nationales,
trop long-terns etrangeres a tout ce qu'exigent de tels succes.
7'^ Ces douze especes d'industrie et nos quatre especes de
grandes manufactures ont augmente d'une cinquantaine de
millions, dans le cours d'un an, I'exportation de leurs produits,
et suffisent pour alimenter les marches etrangers d'objets
d'une valeur de plus de 25o millions, ce qui cree , par les re-
tours, un commerce montant beaucoup au dela d'un demi
milliard.
8° Enfin, Ton pent prevoir, en decouvrant quels prodi-
gieux succes notre industrie obtient d'une annee a I'autre, la
prosperite qu'elle doit atteindre, par la continuation de la
paix et I'ouverture d'une multitude de debouches favorables ,
demeures fernies jusqu'a ce jour. Dans la seule fabrication des
colons, la vente des toiles teintes et imprimees s'est elevee de
II millions et demi a i5, outre 2 millions de toiles blan-
ches. Les calicots imprimes sont monies a 5 millions; I'ex-
portation des tulles a double, ainsi que celle des schals el des
mouchoirs; el les etoffes dites printanieres ou nankinets , s'etant
(■levees de 800,000 fr. a 3,900,000, leur vente a presque quin-
tuple dans I'espace d'un an.
Importation. En 1823. En 1824. Difference.
Matieies necess. a I'industr. 22i,554,ooo — 272,873,000 — 5i, 819,000 f.
Objets de consooi. naturels. 88,579,000 — 121,957,000 — 33,378,000
— fabriques 51,694,000 — 6o,o3o,ooo — 8,336,ooo
Totanx 361,827,000 — 454,860,000 — 93,o33,ooo f.
Ainsi la valeur des objets imporles en France pendant 1824
T. XXXI. — Juillet 1826. 3
3/, TABLEAU STATISTIQITE
a cxcc'dii cclle de I'iniportation de 1823 de beaucoup plus du
quart de son montant k cette derniere epoque. La moitie dc
cet accroissement est formce de racquisition des niatiercs pre-
mieres qui alimentent nos manufactures. Un tiers on davan-
tage resulte de la consomniation plus grande niaintenant des
objcts naturels exotiqnes, principalement des denrees colo-
niales. Un douziemc seulement provienl de raccroissement de
notre consomniation en objets etrangers fabriques. En divisant
en douze parties egales I'augmenfation eprouvee en 1824 par no-
tre importation , on reconnait qu'unc seule a eu pour destination
les jouissances du luxe; quatre sont entrees dans la consom-
niation domestique, et ont ajoute aux progres de I'aisance de
toutes les classes sociales; six et deniie ont contribue essen-
ticUement a I'extension de notre Industrie et de notre com-
merce interieur et exterieur.
L'importation a I'te effectuee :
En i8s3. Eu 1824. Difference.
Par 2,73s nav. franc. — Par 3,387 nav. franc. . . 649 navires,
3,984 nav. etran. — 4,183 nav. elrau. . . 199
Tolaux. . 6,723 7.570 848 navires.
Le tonnage de l'importation a ete :
En 1823. En 7824. Difference.
Nav. francais. 247,540 ton. • — Nav. franc. 3 16, 4 80 ion. — 68,940 ton.
etrang. . 4>ii233 — etran. 438, oo5 — ■ 16,772
Totanx... . 668,778 754,485 85,712 ton.
La valeur de l'importation a ete distribuee ainsi qu'il suit r
En 1823. En 1824.
Importat. inarit. 232,194,000 fr. — Iraporlat. marit. 297,932,000 fr.
parterre. 129,634,000 — ■ parterre. 156,929,000
Totanx 36i,8s3,ooo fr. 454,861, ono fr.
DU COMMERCE DE LA FRANCE, EN iSa/j. 35
L'importation maritime a etc :
En 1823. En i8i4-
Par nav. franc, de. i33,543,ooo fr. — Par nav. franc, de. i89,535,ooof.
nav.etran.de. 98,631,000 — nav.etran.de. 108,397,000
Totaux 232,194,000 fr. 597,932,000 f.
Accroisseinent de la valeur de I'lmportat. franc, par mer. 55,992,000 fr.
Accrolssement de la valenr derimportat. etrang. par mer. 9,746,000
Accroissement absolu de la valeur de rimpot maritime. . 65, 738,000
Accroissement absolu de l'importation par terre 27,295,000
Accroissernent total de rimportation 93,o33,ooo
Accroissement total de I'exportation 49,788,000
Difference de leur accroissement en 1824 43, 245, 000
Difference absolue entre le montant de I'une et de I'autre. 1 4,3 19,000
Voici les resultats de ces termes numeriques :
1" II est entre dans les ports de France, en 1824, 7>570 na-
vires, chaciin, par un terme moyen, du portd'environ 100 ton-
neaiix. C'est 848 on un dixieme de pins que I'annee precedente;
2° La navigation nationale forme les deux tiers de cet ac-
croissement; et cette amelioration etait d'autant plus urgente
qu'en iSaS les trois cinquiemes de l'importation furent operes
paries naviresetrangers. Si ces progres ne se sont pas ralentis,
le nombre de ces navires est egale maintenant par celui des
notres ;
3° L'augmentation du tonnage a ete de pres de 86,000 ton-
neaux , dont les quatre cinquiemes appartiennent au commerce
francais ;
4° La masse des produits exotiques importes par mer pour
la consommation du royaume est de 764,000 tonneaux; jointe
a celle de l'importation par terre, elle est de i,i3o,ooo; leur
volume total est d'environ 4? millions et demi de pieds cubes;
5° On peut porter, par approximation, le poids des mar-
chandises importees et exportees annuellement a 4 milliards
700 millions de livres, et leur volume a 3 millions et demi de me-
tres cubes; leur transport par mer exigerait uneflottede 23,5oo
navires, ayant cliacun une cargaison de 100 tonneaux. Si Ions
36 TABLEAU STATISTIQUE
ces tonneaiix, qui forment iin enconibremeiit chacun cl'iin
metre cube et demi, etaient ranges sur line seiilc ligne, ils oc-
cuperaient unc etendue do 3,526 kilometres ou 904 lieues de
2,000 toises, ce qui eqnivaut a pen pres ;\ la circonference en-
tiere du tcrritoire dc la France;
6° La valeur dc I'importation maritime faite par les navires
francais a excede de plus de 81 millions celle qui a etc faite par
les etrangers, et de 56 millions celle que notre navigation
avait effecluee lannee precedente; cependant, I'affluence des
etrangers dans nos ports a ete plus grande en iSa/j qu'en 1823,
et ils y ont apporte un excedant de marchandises d'environ
10 millions de francs. Si nos progres ne se sont pas arretes ,
notre commerce maritime fournit aujourd'hui a I'importation
une valeur double de celle qui constitue I'importation faite par
les navires etrangers;
7** Notre importation par mer s'est augmentee de 65 mil-
lions, ce qui exclude I'accroissement de notre transit, par les
frontieres autres que le littoral, de plus de 38 millions. On ne
pent guere porter qu'ii la moitie de la valeur de I'importation
maritime celle des produits importes par terre, tandis que I'ex-
portation est proportionnellement plus considerable;
8° Nous avons recu, en 1824, pour 93 millions de produits
etrangers de plus que I'annee precedente , ou, en d'autres ler-
mes, cette branche de notre commerce s'est accrue du quart
de sa valeur a cette dernicre epoque;
9" II y a un excedant de i4 millions entre la valeur desobjets
exotiques acheles pour la consommation individuelle jointe a
celle de nos fabriques et la valeur des produits agricoles et
industriels exportesen 1824; mais aucune balance ne pent etre
etablie que sur une serie de termes donnes par une periode de
plusieurs annees;
10° L'ensemble des exportations et des importations effec-
tuees, en 1824, constitue un commerce d'environ 2,400,000 ton-
ueaux de marchandises, evaluees approximativemeut a SgS
millions et demi.
Recherchons le plus brievemcnt possible sur quels objets
DU COMMERCE DE LA FRANCE, EN 1824. 37
s'est porle I'accroissenient de la consommation, et quelle part
ont obtenu dans cet accroissenient les materiaux qu'emploie
notre Industrie, les objets naturels consommes par la popu-
lation et ceux qui sont fabriques a I'etranger, qu'on admet
avec des restrictions plus ou moins severes.
Matieres necesxaires h t Industrie.
1823. 1824. DifKrencc.
Colon 48,019,000 — 64,12/1,000 — i6,io5,ooo fr.
Soies. 26,250,000-— 37,149,000 — 10,899,000
Laines 12,820,000 — 9,542,000 — 3,278,000
Fils de chanv.ou de lin. 5, 357, 000 — 6,901,000 — i, 544,000
Peaax brutes 8,5o6,ooo — 8,l5i,ooo — 845,000
Halles de fabrique. . . 37,625,000 — 35,ooo,ooo — 7,375,000
Noix de galle 1,247,000 — 2,092,000 — 845,000
Cochenille 1,098,000 — 2,066,000 — 968,000
Indigo 8,660,000 — 9,086,000 — 426,000
Potasse 2,495,000 — 4,355,000 — 1,860,000
Soufre ii5,ooo — i,53o,ooo — i,4i5,ooo
Plerres gemmes brutes. 35o,ooo — 1,000,000 — 65o,ooo
Fer forge 965,000 — i, 182,000 — 167,000
Cuivre coule 7,482,000 — 12,081,000 — 4>599,ooo
Plomb 3,698,000 — 5,000,000 — i,3o2,ooo
Etaln brut 1,592,000 — i,865,ooo — 278,000
Objets de consommation naturels.
i8i3. 1824. Difference.
Sucres 27,860,000 — 89,709,000 — 11,849,000 fr.
Cafe 17,613,000 — 22,010,000 — 4,387,000
Poivre 2,479,000 — 2,620,000 — 141,000
Tabac 5,8o4,ooo — 6,042,000 — 228,000
Huile comestible. . . . 6,58 1,000 — 15,272,000 — 8,691,000
Fromages 8,964,000 — 3,636,ooo — 328, 000
Citrons et oranges. .■ . 2,001,000 — 2, 5 11,000 — 5io,ooo
Chanvre 5,5oo,ooo — 4,487,000 — i,o63,ooo
Houille 5,222,000 — 7,369,000 — 3,147,000
Chevres, betail, moutons. 18,092,000 — 20,309,000 — 2,217,000
Bois de construction. . 10,000,000 — 12,000,000 — 2,000,000
Merrains 6,120,000 — 8,339,000 — 2,219,000.
38 TABLEAU STATISTIQUE
Obj'ets fabriques ou de luxe.
1823. 1824. Difference,
Toiles de tontes espcces. i9,35o,ooo — 4i(573,ooo — 22, i^ 3, 000 h.
Picrres gemmes taillees. 1,000,000 — 2,000,000 — 1,000,000
Perles lines 1,000,000 — 1,100,000 — 100,000
Chapeaux de pallle. . . 1,196,000 — 1,714,000 — 5i8,ooo
Merceries i,53o,ooo — 1,795,000 — 265,000
L'examen de ces nombres presente une serie de resultats qui
doivent occuper uue place eminente dans I'histoire de la ri-
chcsse piiblique :
1° De tous les objets qu'embrasse le commerce d'importa-
tion, celui qui a la valeur la plus graude et qui alimente I'in-
dustrie la plus vaste et la plus productive, est le colon en laine
des deux Ameriques et du Levant; nous en avons achete en
1824 pour 64 millions de francs, ce qui, comparativement
i I'annee precedente, offre un accroissement de 16 millions
ou d'un tiers.
2° La plus riche de nos quatre especes de grandes manufac-
tures , celle qui fournit annuellement au commerce exterieur
une vente de cent millions, la fabrication des soieries, s'est ap-
provisionnee au dehors d'une quantito de malieres premieres
plus considerable par sa valeur d'au-dela des deux cinquiemes;
les achats ont ete portes de 26 millions a 37.
3° Nos fabriques de toiles ont acquis des fils de chanvre et
de lin pour un quart en sus de leur approvisionuement prece-
dent a I'etranger; ce qui manifeste un accroissement de be-
soins dont pourraient profiler nos dtpartemens de I'ouest, en
donnant plus d'extension a la culture des plantes textiles et a
leur preparation.
4" Les soins plus grands et mieux entendus donnes aux
troupeaux ayant augmenle la production des laines indigenes,
et aussi sans doute I'augmentation du droit de douanes, ainsi
que les limites elroites de I'exportation des draps, attcnuant
la progression des succes de leurs manufactures, les achats de
DU COMMERCE DE LA FRANCE, EN 1824. :^9
laines exoliques ont dimiiiue d'un quart, et ont ete rediiits do
12 millions a 9.
5° Quoique noire exportation de peaiix ouvrees el preparees
ait acquis, dans I'annee, une valeur do 16 millions, et se soit
augmcntee du quart au tiers, nos achats de peaux brutes ont
ete moindres qu'cn 1823, et n'ontpas depasse la moitie du prix
de la vente a I'etranger.
6° L'une des plus fortes depenses qu'exigeut les travaux de
nos fiibriques est I'achat des huiles exotiques; nous en avons
importe, en 182/1, pour 35 millions; c'est une augmentation
d'un cinquieme d'uue annee a I'autre; I'extension des fabrica-
tions, dans lesquelles entre ce produit, a sans doute ete propor-
tioDnelle.
7° II y a eu pareillement un accroissement notable dans
I'emploi des matieres tinctoriales; I'imporlation de la coche-
nille et de la noix de galle a presque double; celle de I'indigo
monte a 9 millions de francs.
8° Notre consommation en soude et en potasse a ete, en
182/1, deux fois celle de I'annee precedente; nous avons tga-
lement achete des quantites beaucoup plus considerables de
metaux bruts ou prepares, notamment pour 17 millions au
lieu de 11, de cuivre coule et de plomb.
9° En masse, les douze principaux articlfs de notre impor-
tation en objets necessiires a notre industrie , ont eprouve ,
en 1824, une augmentation forniant au moins 41 millions de
francs de plus que I'annee precedente.
10° Un accroissement conciderable a eu lieu pareillement
dans I'exportation des objets naturels qui entrent immediale-
mcnt dans la consommation individuelle ; les j'.enrees coloniales
en forraent les articles les plus riches. Nous avons re^u pour
pres de 40 millions de sucre ; c'est une augmentation de 12 mil-
lions, qui en suppose une de 18, dans le revenu annuel de
nos raffineries; leur fabrication excede inaintenant 100 mil-
lions de francs.
1 1° L'importation du cafe s'est accrue d'un quart, ct la con-
sommation de chaque iudividu en poivre, orauges, citrons et
4o TABLEAU STATISTIQUE
tcibac, a pris aussi plus d'extension. Nous avons achetti , en
1824, pour i5 millions d'huile comestible au lieu de six el
demi; nous avons importe de plus qu'en 182!^ un quart de la
valeiir dcs liouilles et des mcrrains, que nous recevions alors,
un neuviemc du montant des chevaux et du betail, et un
sixieme du bois de construction. Les chanvres sont Ic seul ar-
ticle important qui ait baisse; nous n'en avons acquis que
4 millions et demi au lieu de 5 et demi.
12° En masse, une douzaine d'objets natiirels, introduits
pour la consommatiou , out forme une valour de 3o millions,
en sus de leur montant en 1823. En consultant les besoins qui
ont provoque leur importation, on trouve que la destruction
de nos forels nous oblige a acheter annuellement des bois pour
20 millions de francs; que les limites trop ctroites de I'exploi-
tation de nos houilleres nous font importer de I'etranger pour
7 a 8 millions de charbon de terre ; qu'il manque a nos pro-
vinces meridionales ime culture de rolivier assez ctendue el
suffisamment productive pour nous fournir des huiles jusqu'a
la valeur dc i5 millions; et qu'enfin les bornes de notre In-
dustrie agricole nous forcenta demander a nos voisins, chaque
annee, pour plus de 20 millions de chevaux, de betail et de
moutons.
i3° Au demeurant, les objets de consommatiou que nous
achelons de I'etranger jusqu'au montant de 80 millions de francs,
et quoique notre Industrie agricole put nous les fournir , sont
soldes en produits de nos manufactures, et donnent lieu a uu
commerce d'echange plus ou moins avantageux.
14° Parmi les effets fabriques ou de luxe , il y en a cinq ou
six qui ont eprouve un accroissement d'importation montant a
24 millions; mais cette somme a ete reduite des deux tiers par
la diminution d'autres articles.
1 5° Au nombre de ces objets on en compte plusieurs que
notre Industrie met h profit, quoiqu'ils aient dej;"! acquis un
premier prix par Taction de I'industrie etrangere. Telles sont
les pierres gemmes taillees , qui sont montees avec avantage
par nos bijouticrs; telles encore les merceries grossiercs , les
DU COMMERCE DE LA FRATVCE, EN 1824 • 4i
toiles ecrues. Ce deinier objct a monle, en 1824, a 22 millions
de plus qu'en i823; mais nous en avons exporte une valeur
excedaut de 7 millions celle de I'annee precedente. Nous en
avons achete en tout de I'otranger pour 41 millions; nous en
avons vendu au dehors pour 87; la difference, qui est encore
de4 millions au moins, suppose que la fabrication des toileries
pent s'etendre avec avantage.
Si de CCS details nous nous elevons a des considerations ge-
nerales sur la richesse actuelle du commerce de la France,
nous parvicndrons peut-etre mieux par des termes rclatifs
que par des nombres absolus , a fixer les idees sur son eteiidue.
Quand, pour comparer I'etat de nos transactions commer-
ciales avec I'epoque anterieure de notre histoire la plus pros-
pere , on recherche quelle ctait la valeur de nos exportations
et de nos importations pendant la periode de paix qui suivit,
i! y a quarante ans, la guerre d'Amerique, on arrive aux re-
sultats ci-apres :
De 1785 a 1787, la valeur des exportations fut de 526 m°"S
En 1824, elle s'estelevee a 44o
La difference est de 86
Consequemment, il s'en faut de beaucoup moins d'un cin-
quieme que la valeur de nos exportations ne soit la meme que
lorsque nous possedions d'immenses colonies, et que nous dis-
putions encore a I'Angleterre la preponderance maritime. II
ne faut plus a la France que dix-huit mois de progres aussi
rapides que ceux qu'elle a faits pendant 1824, pour effacer
completement les traces qu'ont laissees jusqu'a ce jour, dans la
principale branche de notre fortune commerciale, trenle an-
uees de revolutions , de guerres , de triomphes et de malheurs.
De 1785 a 1787, par un terme moyen, I'importation on
France, monta a la valeur de Go3 m""".
En 1824, elle a ete de 454
La difference est de 149
II s'en faut done presque du tiers de la valeur des objels
4« TABLEAU STATISTIQUE
tires dc retrangcr niaintenant , que noire importation n'egaie
celle d'autrefois ; et cette difference s'explique aisemcnt, quand
on se rappelle qu'alors nous ctions obliges d'acheter les bles
necessaires au complement de notre consommation, tons les
tissns de colon, et unc multitude d'objets que notre industrie
nous fournit aiijourd'luii abondamment.
En masse, le commerce de la France n'excedait pas i loo mil-
lions, a son epoque la plus brillante , si Ton deduit de scs
transactions les piastres espagnoles , comprises dans les etats
de marchandises. Sa valeur s'eleve niaintenant a environ 900
millions ; il est dii quart au dessous de sa prosperite, telle que
I'exprimcnt ces nombres ; mnis la difference est infiniment
moins grande quand on examine les avantages qui resultent
de la nature de scs elemens et d'operations mieux balancees.
L'etendue des ressources nationales et la superiorite de la
ricHesse publique etant, dans I'ordre actuel des societes, les
plus surs garans de I'independance des etats et de leur pre-
ponderance politique, il importe surtout de connaitre compa-
rativement quelle prosperite chaque peuple obtient de sou
commerce extcricur pour resoudre cette grande question.
Voici un tableau qui presente les termes de la comparaison
de notre commerce avec celui des grandes puissances mari-
times ; ses donnees sont pour la Grande-Bretagne et les Etats-
Unis des valeurs moyennes fournies par les documens officiels
des annees les plus recentes.
Expoitatlons. GranJeBretagne. France. Elats-Unis.
Produils natur. iiidi'gen. 7.5,725,000 — i63,o56,ooo — 248,955,000 fr.
— industr. indig. 8ro,85o,ooo — 277,486,000 — i3,o36,ooo
— etrangers. . . 253,875,000 — g5,o55,ooo — 142,000,000
Totaux. . . . i,i4o,45o,ooo — 535,597,000 — 408,991,000
Iinportalions. Grande-Bretagne. France. Etats-Unis,
Produits etrangers. . . 411,825,000 — 404,738,000 — 246,000,000 Ir.
— colonianx. . . 342,175,000 — 5o,323,ooo — 137,000,000
— enli'epo.scs. . « —173,771,000 — »
Totaux. . . . 754,000,000 — 628,832,000 — 383,000,000 fr.
DU COMMERCE DE LA. FRANCE, EN 182/,. /,3
Ce tableau presente des donnees importantes sur la situa-
tion actuelle du monde commercial.
1° Les produits naturels exportes par la France sontd'ime
valeur double de ceux qu'exporte I'Angleterre; ils sont moin-
dres de moitie que ceux des Etats-Unis; notre superiorile a cet
egard sur le premier de ces pays tient a la vente de nos vins et
eaux-de-vie, qui s'est eievee en iSaA^i 64 millions de francs.
La superiorite des Etats-Uuis resulte de I'exportation des pro-
duits provenant de leurs forcts et de leurs pecheries, et prin-
cipalement du haul prix des denrees tropicales indigenes des
elats les plus meridionaux de TUnion.
a* Les produits industriels exportes par la France ne sont
gueres que du tiers de la valeur de ceux exportes par I'Angle-
terre; ils sont 21 a 7.1 fois aussi riches que ceux des Etats-Unis.
La superiorite de I'Angleterre resulte principalement de la
vente des tissus de coton de ses fabriques.
3° Quoique notre reexportation des produits etrangers en-
treposes se soit augmentee, dans ces derniers terns, de pres de
moitie, celle de I'vyigleterre vaut plus de deux fois et demie
le montantactuel de la notre. Celle des Etats-Unis ne I'excede
que de la moitie de sa valeur. Ainsi I'exportation de la France
I'emporte sur celle de I'Angleterre , par la valeur superieure
des produits naturels, et sur celle des Etats-Unis, pavla valeur
bien autrement grande de ses produits industriels; mais elle
estinferjeure a ce dernier egard aux Iles-Britanniques; et elle
i'est aussi a I'Union americaine, quant a la valeur des produits
naturels exportes. Son commerce d'cntrepot est parcillement
d'une moindre richesse que celui de ces deux puissances ma-
ritimes, et son accroissement doit exciter vivemeut la sollici-
tude du gouvernement.
4° En masse, il s'en faut de 69 millions que notre exporta-
tion totale n'atteigne la moitie de celle de la Grande-Bretagne ;
mais cette derniere ne la vaut exactement que deux fois, lors-
qu'on compare seulement les produits indigenes exportes four-
nis par le sol et par I'industrie. II s'en faut de plus de i3o mil-
lions que Texportation americaine puisse egaler la notre; c'est
4/, TABLEAU STATISTIQUE
line difference d'un quart, qui s'eleve a nioilie , quand on dt-
duit le commerce de reexportation.
5° L'importation des produits Strangers est a pen pres la
meme en France et en Angletcrre ; clle est presque double de
celle des Etals-Unis. La grandc difference qui exisle entre les
deux premieres de ces puissances se forme de celle des pro-
duits coloniaux importes. L'Angleterre en recoit pres de sept
fois autant que nous, et les Elats-Unis deux fois et demie; mais
dans cette evaluation, il ne se Irouve compris, quant a la
France, que les produits introdnits pour la consommalion; et
si Ton y joint les produits entrcposes, la balance retablit son
equilibre.
6° En masse, il s'en faut de 126 millions, ou du 5"'<' au 6'»'',
que notre importation totale n'egale celle de la Grande-Brcta-
gne; et elle tend vers le double de celle des Eta ts-Unis; mais,
il y a exageration dans le terme numerique qu'elle presente,
ct qui s'cnfle par la valeur des niarchandises demeurees dans
les entrepots, sans qu'il y ait aucune garanlie de vente pour
I'annee suivante. Si 1825 n'a offert que les mcmcs debonches
ouverts en 1824, l'importation des produits entreposes aura
excede I'exportation d'environ 78 millions, et la valeur des
marchandises importees utilement soit pour la consommalion ,
le transit, ou la reexportation par mer, aura rnonte a 55o
millions.
7° Dans cette hypothese, la balance entre I'exportation ct
l'importation totale serait contrc la France d'environ i4 mil-
lions; clle est en faveur de I'Angleterre de 386 millions, dont
le? marchandises exportees excedent celles qui sont introduites
dans les lies Britanniques; aux Etat-Unis , il y a une singuliere
variation dans la valeur des objets achetes ou vendus. Dans
ces derniers terns I'lJnion americaine a obtenu une balance fa-
vorable d'environ 20 millions.
8" Les produits naturcls exporles par les trois grandes puis-
sances maritimes montenl a 488 millions, et Icurs produits
induslriels a 1 100 millions ; consequemment, leur agriculture
et leurs mines fournissent moilie raoins que leur Industrie au
commerce cxtericur.
DU COMMERCE DE LA FRANCE, EN 1824. 45
9" Les produits coloniaux qu'elles resolvent valent S'5o
millions, non comptis ceiix qui demeiireiit dans les entrepots
de la France; conseqiieniment, leur commerce agit sur unc
valeur plus grande de denrces coloniales que de produits agri-
coles indigenes.
10° Elles lecoivent tant pour leur consonimation que pour
leurs entrepots une masse do produits etrangers valant i23r)
millions; elles en reexportent pour environ un denii milliard
eu y comprenant les denrees coloniales. Leur importation
totale etant de 1765 millions, leur consonimation en produits
coloniaux et etrangers s'eleve a 12 ou i3oo millions.
ix° Eu 1822, la valeur des exportations de la Russie a etc
de 201,400,00 fr. , et celle de ses importations de i88,i5o,ooo;
ce qui porte la masse totale de son commerce a 389,55o,ooo fr.
Celle des Etats-Unis s'eleve i 787 millions.
Celle de la France . . . . a 1164
Celle de I'Angleterre ... a 1894
Ainsi le commerce exterieur des quatre grandes puissances
du monde civilise monte amuiellement a 4 milliards 284 mil-
lions de francs.
12° Leur participation dans cette sommeest proportionnel-
lement comme ii suit : la Russie i ; les Etats-Unis 2 ; la France 3 ;
I'Angleterre 5. Mais, si Ton compare a leur population la masse
de leur commerce, cette proportion est modifiee de la maniere
suivante,
Un commerce d'exportation et d'importation de 1900 mil-
lions, reparti enlre les 22 millions d'liabitans des Iles-Britan-
niques, donne 87 fr. pour la participation de chacun d'eux.
Un commerce de 790 millions donne 79 fr. pour chacun
des 10 millions d'habitans des fitats-Unis.
Un commerce de i i(j4 millions donne moins de 40 ft"- pour
chacun des 3o millions d'habitans de la France.
Enfin un commerce de 890 millions fait par les 5o millions
(le sujets de la Russie, n'elove pas a 8 fr. le contingent de cha-
cun d'eux.
D'ou il suit que proportionnellement a la populalion, le
46 TABLEAU DU COMM. DE LA FRANCE, EN 182/,.
commerce exterieur dc la France est quintuple de celui de la
Russic, mais nioitie moindre que celui des j^tats-Unis et de
I'Anj^letcrre.
L'examen du commerce intorieur, forme par la consomma-
tion , uoiis fournirait des donnecs moiiis defavorablcs, et qui
montreraient les progres etonnans de la production agricole
etindustrielle, et I'aisance quale travail repand, depuis vingt-
cinq ans surtout , dans toutes Ics classes de la population ; mais,
la multiplicite des clemcns dont so compose neccssairement
un it'l tableau, nc pcrmet j^as de les exposer sommairement,
et exige le cadre etendu d'un ouvragc special, tel que celui
que nous avons offerl a I'Acadcmie des sciences (;). II suffil a
I'objet que nous nous proposions ici, d'avoir fait connaitre
I'etat actuel du commerce de la France a I'cxterieur, sesprin-
cipaux objets d'e.xportation et d'importation , leur valeur , les
progres de nos transactions d'une annee a I'autre et le degre
d'extension dont chacune d'elles est susceptible , pendant une
aussi courte periode.
Outre ces elcmens dc la richesse publique, que nous avons
exprimes, par des termes numeriques , nous avons montre en
nous servant du meme moyen de conviction , qu'excepte la
Grande-Bretagne, aucune des premieres puissances de I'Eu-
ropc n'c'gale la France par Tetcndue et la richesse de son
commerce; et que notre agriculture et notrc induslrie posse-
dent de telles ressources qu'cn dix annees, avec des debouches
suflisans et sans progres plus rapides que ceux d'aujourd'hui,
la masse de nos produits indigenes exportes pent doubler de
•valeur, surpassant alors en richesse ceux de I'Anglelerre dont
la prosperite commerciale est cependant sans exemple dans
I'histoire et sans ri vale dans le monde. A. Moreau de J onnes.
(i) Le Commerce an A'/A'e siecle , etat de ses transactions clans les
principales contrees des deux hemispheres , causes et effets de son
agrandissement et de sa decadence , et moyens d'accroitre et de
consolider la prosperite agricole , industrielle , coloniale et commer-
ciale de la France; ouvrage couronne par TAcademie de Marseille.
a vol. in-8°.
II. ANALYSES D'OUVRAGES.
SCIENCES PHYSIQUES.
ESSAI SUR LIS CRYPTOGAMES DES ECORCES EXOTIQUES OFFI-
CINALES, precede d'une Methode lichenographique^ etc.;
par A.-L.-J. Fee (i).
Beaucoup de personnes qui jugent de I'iniportance d'un
livre siir son litre, et sur les eloges qu'en font Ics joiunaux
qnotidiens, concevront difficilement que celui-ci, dent aucune
feuille u'a fait mention , et que I'auteur intitule modestement
Essai, puisse etre excellent et fort utile. Le vaoi cryptogames ,
surtout, ne lui sera pas un puissant motif de recommandation
aupres des hommes superiiciels. Les cryptogames sont de fort
petites choses sans doute : elles n'en meritent pas moins qu'on
les eludie. En composant son systeme sexuel d'un usage si
commode, et que I'emploi des families naturelles n'a pas
encore rendu inutile, Linnce ne dedaigna pas ces etres sin-
guliers, et forma, pour les y comprendre, une vingt-quatrieme
classe, dont les caracteres consistaient dans le mystere de leiirs
amours, c'est-a-dire dans I'absence de toule fleur distincte. De-
puis ce grand homme, les botanlstes a reputation negligent ces
vegetaux clandeslins, qui n'offrent pas une nudtitude d'organes
generateurs auxquels on puisse donner des noms nouveaux ;
noms dont la multitude surpassera bientot le nombre des vege-
tans existans. On se borne ordinairement, dans les grands ou-
vrages a planches, ou le dessinateur et le graveur ont les huit
(i) Paris, 1826; Didot, rne Jacob, n° 24- Grand rn-4") a'vec
34 planclies representant en couieurs plus de aSo cspeces dans pres
de 600 figures; prix, /\i fr.
/,8 SCIENCES PHYSIQUES,
dixiemcs du iiicritc, i donncr des descriptions faites sur le sec ,
souvent d'apres d'execrables echantillons, tout-a-fait mecon-
naissablcs, mais rapportcs de loin, et dent on pent faire mi
titro dimmoitalitc pour quelquc amateur vivant de botani(iue ,
loquel ne manque point par reconnaissance d'envoyer a I'au-
teur du genre nouveau , bon ou mauvais, qui porte son nom ,
les raretus de son lierbier. On commence neanmoins a sentir le
ridicule de cetlc maniere de demander une sorte d'aumone;
les bons esprits reconnaissent que les plus magnifiqucs vege-
tans ue jouent p^s dans la nature un role plus important que
les plus petits; il est meme des pliilosoplies qui croient que la
connaissance dc ces derniers peut produire d'immenscs resul-
tats pour Tavancement de I'histoire naturelle, et nous sorames
du nombre des humbles qui ii'affectent pas un surperbe de-
da in pour les cryptogames. Aussi, trouvons-noils que M. Fee
a dit fort a propos : « L'efude des moindres objets en botani-
que a detruit plus d'erreurs que les decoHvertes faites dans
les autres branches de nos connaissances n'ont amene de re-
sultats 11. En effet, cette etude a fait disparaltre les divisions
des regnes et prouve que, tout tranches qu'on supposait ceux-
ci, leur separation n'etait pas moins arbitraire que tant d'aii-
trcs dont on a surcharge la science sans necessite. M. Fee, par
ses recherches paticntes et rainufieuses, a surtout prouve, con-
tre I'autorite des noms les plus iniposans, la vanite de I'arith-
metique introduite dans les sciences naturciles, puisque I'une
des unites botaniqucs des Adansons modernes, le lichen scrip-
tus, L. est devenue pour iui une famille entiere des gjaphidees
composee de sept genres des mieux circonscrits, contenant
plus de cent especes certaines. JN'est-ce rien que d'avoir ainsi
signale une route d'erreur aux savans qui eussent pu depenser
beaucoup de terns pour supputer, d'apres des flores plus ou
moins incompletes, dans qucUes proportions rigoureuses sont,
a la surface du globe, les plantes de telle ou telle famille aux
plantes de telle ou telle autre?
a Non , sans doute, les cryptogames ue sont pas sans impor-
tance, ajoute judicieusemont M. Fee; elles paraissent destinees
SCIENCES PHYSIQUES. 49
a couvrir de terieau les surfaces qui en sont privies, el pre -
parent ainsi une couche d'humus qui recoit plus tard les
gernies des grands vegetaux. Le roc se charge d'abord de
lichens criislaces, puis de lichens foliaces... Cependant, quel-
ques autcurs, et apres eux plusieurs personnes etrangeresa la
botanique, ont qualifie ct'S plantes d'imparfaites. Mais ici le
mot d'imperfection ne sert-il pas de voile h Tignorance ? Nul
elre imparfait n'a pu sortir des mains du Createur; et, si cela
eutete possible, aucun principe de reproduction n'eiit accom-
pagne cette oeuvre ebauchee. » Les recherches de I'auteur
confirment pleinement tout ce qu'il dit au sujet de I'utilite des
cryptogames, de la singularite de leur reproduction, de la
variete avec laquelle nous les trouvons repandues dans
la nature, ou, malgre les lois qu'ont pretendu etablir dans
la distribution des etres quelques ecrivains, qui n'avaient
pas suffisamment observe les objets sur lesquels ils ecri-
vaient , beaucoup d'especes sont communes a toutes les
contrees de I'univers. II en est, neanmoins, qui, cosmopolites
relativement aux climats ou la temperature leur permettait
de vivre, ont pour patrie telle ou telle ecorce; et de la,
M. Fee a imagine un nouveau moyen de signaler les ecorces
officinales, de sorte que, par les cryptogames qui la couvrent,
on pourrail distinguer une espece de quinquina de toute autre ;
cette observation correspond, en botanique, a celle des ento-
mologistes qui ont constate que le pou de I'Ethiopien n'etait
pas celui de I'Europeen, d'espece japetique, et qu'ainsi le
blanc et le negre, comme on les appelle vulgairement, n'ap-
partieunent pas k la meme espece du genre homme. Cette
maniere d'etudier les choses les plus meprisables en appa-
rence, pour atteindre aux verites de I'ordre le plus eleve,
vaut bien celle de ces botanistes dont les longues recherches
sur I'insertion d'un filet ou sur la disposition d'une bractee ,
finissent par decider, par exemple, que tel arbuste est plutot
une ternstrsemiacee qu'une onagrairePQuoi qu'il en soit, M. Fee
qui n'annon^ait qu'un essai sur les cryptogames des ecorces
officinales, a donne beaucoup plus qu'il ne promit, et la
T. xxxT. — Juillet 1826. /,
5o SCIENCES PUTSIQUES.
melhode liclicnographiqnc dont il fait precc-der son beau tr«-
vail, est certainement preferable a cclle d'Acharius, si r.ouveut
iiiodifiee par son auteur, et qui rompait encore bien des rap-
ports naturels, meme apres avoir subi ses derniers cliangemens.
Nous ponrrions cependant adresscr quelques observations
critiques a I'auteur , au sujct de plusieurs de ses groupes et de
ses genres, qui nous paraissent efre un pen trop nombreux,
et quelquefois bases sur des differences offertes par des echan-
tillons d'herbier, plutut que par des planles etudiees en profu-
sion dans I'etat de fraicheur. Un savant allemand qui s'occupe de
la meme famille dc plantes que M. Fee, simplifie aujourd'hui
singnlierement la melhode lichenographique, et il a raison. Il
y a plus de vingt ans que nous soupconnions Texistence d'une
senle cspece, depuis le L. pixidatus le plus simple, jusqu'au
L. rangiferimis le plus complique. Or, nous ne saurions adopter
tout au plus quecomme sous-genre les cladonia , scyphiphorus ,
e\. pycnotelia. Peut-etre aussi , I'auteur n'a-t-il pas assez re-
monte aux sources ou puisa quelquefois Acharius, c'est-a-dire
aux ouvrages dans lesqiiels on s'est occupe de lichens avaut
le classificateur suedois. II eut vu , par exemple, dans I'nn des
notres, publie il y a plus de vingt ans, un lichen unguigerus ,
reproduit par Acharius sous le nom de nephroma unguigera ,
et ne I'eiit pas donne comme nouveau et decouvert par un
autre voyagj?ur , sous le nom de geni-e erioderma , nom qui doit
etre rejete, parce que la plante en question que nous n'avons
pas eludiee seulement d'apres quelques irauvais echantillons
mal prepares, mais sur place a Mascareigne, est un veritable
nephroma, et qu'il etait absolument inutile de I'extraire d'une
coupe oil est suffisamment bien place notre lichen.
Apresavoir parfaitement caracterise les lichens, etdemaniere
ace qu'il soil desormais impossible de les confondre avec quel-
que autre classe de vegetaux que ce soit, M. Fee en forme dix-
huit groupes on families, et les dispose, dans la planche iv,
comme il serait curieux de disposer les families et les genres des
autres classes, c'est-a-dire , en cercle d'ou partent des raccords
vers les points d'affinit^ des classes et families voisines. Main-
SCIENCES PHYSIQUES. 5i
tenant qii'il est bien demontre que toute disposition rectiligne,
en liistoiie naturelle, ne pent tout an plus equivaloir, par rap-
port aux convenances naturellcs, qu'au systcme sexuel qui ne
rompait gucre plus d'alfuiites, les naturalistes devraient s'ap-
pli(iucr, ainsi que Tavaient deja tente M. Gallesio pour le genre
citrus, M. Cassini pour Ics synanlherees, et le premier pour Ics
lichens, noire modeste et savant ami le chef de bataillon Delise,
les naturalistes devraient, disons-nous, s'appllqiier a composer
des cartes, on, suivant le vosu de Linrie, les productions de la
nature se trouveraient disposees comme les empires le sontsur
les cartes de geographic.
Soixante genres qu'il serait trop long de mentionner ici , deux
cent quatre-vingt-huit especes, dont plus de la moilio sont
parfaitemcnt figurees, remplisserit I'excelient ouvrage que nous
recommandons aux naturalistes, et auquel sa magnifique exe-
cution assure une place distinguee jusque dans les biblio-
theques, mcme de luxe.
Nous saisirons cette occasion; et, puisqu'il est question de
parasites desecorces, pour deplorerl'interruption d'un ouvrage
qui pouvait former le complement de celui que M. Fee a
termine avee une si prodigieuse celerite; nous voulons parler
des fascicules du docteur Chevalier, anxquels M. Firmin
Didot pretait aussi le sccours de ses beaux caracteres. Les dix
planches qui en ont deja paru sont de veritables chefs-d'oeuvre,
oil les figures equivalent prcsque aux objets representcs pour les
personnes qui veulent reconnaitrc uue espeee du premier coup
d'oeil, sans perdre un tenis precieux a comparer de longues et
minutieuses descriptions, souvcnt insuftisantes pour faire re-
connaitre les cryptogames. Le docteur Chevalier faisalt a peu
pres, pour les especes indigenes, ce que le savant dont I'ou-
vrage vient de nous occuper, a fait pour les especes exoliques;
et il serait plus important qu'on ne pense en histoire naturelle
de fixer I'existence de tous ces avortons de la creation par
lesquels cette puissance semble avoir commence et termine
I'cxecution de ses plans merveilleux.
Bor.Y UK Saint-Vincent,
52 SCIKNCES PHYSIQUES.
Geometric et mecanique des arts et metiers et des
BEA.OX-ARTS; GouRS NORMAL CI Vusiige des ouvriets et
des artistes ) des sous-chefs et des chefs d^ ateliers et de
manufactures ; proFesse au Conservatoire des arts et
metiers, par le baron Charles Udpii^, de TAcademie
des sciences, elc. (i).
IVoiis n'avons pu aunoncer encore que le premier vo-
lume de cet ouvrage vrainient national ( voy. Rrv. Enc. ,
torn. XXIX, pag. 2o3 ), dont I'heureusc influence, secondee
par les professeurs qui le prennent pour maliere de leur
enseignenient , va placer la classe industrieuse de la France
au premier rang, ou pour mieux dire, hors de rang,qnant
ik I'instruclion. Si Ton compare, nieme en Angleterre, les
ecoles d'ouvriers a celles qui se forment dans presque toutes
nos villes, on sera eonvaincii que la melropole de lindustrie
no pourra conserver la superiorite qu'elle avail acquise, et
qu'on ne lui conteslait plus; que le genie fran^ais, aide par !e
savoir , va la snivre a grands pas dans la carriere, I'atteindre ,
el enfin la depasser. Lorsque nous conipterons par niilliers ,
dans presque toutes nos piovinces , les ouvrlers ponrvus des
connaissances renfermoes dans les trois volumes de ce cours
normal, il seia bien difficile qu'un fait instnictif echappe h.
I'observation , qne les perfecliounemens n'arrivent point en
foule, et qu'apprecies avecjustesse ils ne se repandent par-
lout, sans retard et sans obstacle. De fansses vues, de steriles
essais ne fcront pas perdre un tems precieux : I'homme habile
tronvera parlout d'auljres hommes capables de le seconder ,
le charlatan fera pen de dupes, et celles qu'il pourra se-
dui<'e encore inspireront moins d'interet et de regrets : ces
resultats de I'instruclion ne sont-ils pas nn perfeclionnement
moral, et de la pins haute importance? Ferait-on plus, ou
mieux, par quelque autre moyen ?
(i) Paris, 1826; Baclielier, quai des Augustins,n° 55. 3 vol.
in-S", avec beaucoup de planclies gravees ; prix , 6 fr. cliaque vol.
SCIENCES PHYSIQUES. 53
La nature et le but de cet ouvrage et de renseigueinent qii'ii
est destine h propager meritent la plus serieuse attention, non-
seulement des professeurs , nriais de toys les homines qui pen-
sent; et les hommes du mondene refuseront pas d'etre compris
dans ce nombre. Peut-etie meme conviendrait-il de leur re-
commander plus particulierement les observations suivantcs
auxquelles on est conduit par la lecture de I'ouvrage de
M. Dupin.
L'instruction litteraire pent etre morcelee, partielle, reduite
k un petit nombre d'objets, sans rien perdre de ses charmes,
de son utilite, de son merite. Cctte propriete remarquable a
du lui concilier beaucoup de suffrages, et decider en sa fa-
veurdes preferences de gout, que Ton altribue volontiers a
I'estime, soil qu'on les accorde, soit qu'on en profite. Fortes
de cette predilection generale, les lettres ont impose, sans le
vouloir, aux autres divisions des connaissances humaines quel-
ques-unes de leurs opinions, quclques maximes ou regies qui
ne convenaient qu'a elles seules. C'cst ainsi qu'on a cru dire
une chose sensee, en conseillant de ne prendre que la Jlcur de
CCS connaissances, de se tenir a \Asuperficie et de ne rien ap-
profondir. Montesquieu, que les lettres ne desavouent point,
etait loin de partager, a cet egard, I'opinion commune : dans
une science , disait-il , on ne dent rien , sil'on ne dent toute la
chaine. Cette pensee, reproduite frequemment, et sous des
formes diverses, est demeuree dans les ecrits, sans devenir
une verite pratique; destinee qui lui est commune avec beau-
coup d'autres resultats de I'experience et de I'observation.
Presque toujours, les ouvrages dont le but est l'instruction de la
classe laborieuse sont regardcs comme elementaires, parce
qu'ils commencent effcctivement au point de depart, et qu'ils
ne vont pas loin : c'est a peu pres comrae si Ton affirmait qu'un
voyageur est arrive , parce qu'il s'est mis en route, et qu'il a
fait quelques pas. Rien de plus inutile que ces pretendus ou-
vrages elementaires : malhenreusement, plusieurs sont cou-
ronnes et repandus par des Societes philantropiques. Avec
cette direction, la bienfaisancc nc pent atteindrc son but, et
5/, SCIENCES PHYSIQUES.
la profusion des livres n'est point uno source de lumieres.
Pour que I'enseignement soit profitable, il faut qu'il embrasse
dans toute son etendue un objet special ; si cct objet n'etait
monlre qu'en partie, autant aurait valu le laisser entierement
cache. Mais I'intelli^ence qui aper9oit les limites reelles d'un
objet compris dans le domainc des arts ou des sciences , et I'es-
prit d'analyse qui trace ces limites avec clarte et precision, sont
des facultes assez rares; elles constituent le talent capable de
composer de bonsouvrages ^lementaires : on les cherche sou-
vent, la ofi elles nepeuvent etre, dans la mediocrite.
Nous ignorons si les champs de I'imagination sont plus vastes
que ceux dont se compose le domaine des sciences et des arts:
mais nous voyons clairement que I'imagination forme des
groupes et les detruit, combine et bouleverse au gre de ses
fanlaisies plus ou moins raisonnables ; au lieu que les sciences
meltent tout en ordre , et que les arts dont les produits doivent
etre durables, suivent egalement des procedes indiques par la
nature des choses. On sait aussi que I'effet ordinaire de la re-
gularite et de la symetrie est de diminucr la grandeur appa-
rente d'un ensemble d'objets : c'est peul-etre «me illusion de
cette espece qui livre limmensite a I'imagination, et renferme
les sciences et les arts entre des bornes que I'on ne peut voir ,
mais dont on admet I'existence, sur la foi du raisonnement.
Quel que soit le nombre des objets qui remplissent cet espace ,
ils y forment des groupes naturcls, dont les parlies ne peuvent
etre connues independamment de la place qu'elles occupent ,
dont chacun peut etre le snjet d'un traite, d'un ouvrage t'/f-
7>ientaire, pourvu que rien n'y soit omis , qucl'ordre des ana-
logies soit ngoureuscment observe et que I'ori n'y remarque
point de lacunes. Un ouvrage ne peut etre instructif , s'il no
satisfait a toutes ces conditions.
On ne sera done point surpris que M. Dnpin ait consacrc
trois gros volumes a un Cours normal de geometric et de me-
canique pour les ouvriers. Le savant professeur n'a certaine-
ment rien mis dans son ouvrage qui puisse etre considers
comme un luxe de savoir ; il connait trop bien le prix du terns
SCIENCES PHYSIQUES. 55
pour nc pas eparguer celui de ses eleves, de »es nonibreux
collaborateurs dans toute la France, et le sien proprc. Si
done il a f'allu trois volumes de 5oo pages au moins pour
enseigner aux ocvriers la geometric ft la mecaniqiie usiielles,
quels fruits aurait-ou pu recucJllir d'(m pareil nombre d'opus-
cules reduits, suivant I'usage, a trois ou quatre feuilles d'im-
pression, et decores du litre d'ouvrages elementaires ? Loin
que M. Dupin ait mis dans son ouvrage rien dont il eut pii se
passer, il est aise de prevoir que chaque reimpression s'ac-
croitra de quelques fails, de preceptes ou de donnees genc'rales
dont I'experieneo de I'enseignement ou des ateliers auront fait
sentir le besoin. Le premier volume, consacre a la geometrie ,
n'est guere susceptible de varier dans son etendue ; le second ,
oiiles theories mecaniques sont exposees, pent aussi atteindrc
tres-promptement la forme et les developpemens qile compor-
tent le nombre limite et la nature des elemens dont il est com-
pose. Mais le troisieme volume, destine a la description de
V art des machines, de ses ressources et de ses procedes, cette
partie de I'ouvrage ne peut avoir de limites que celies de la
duree de I'enseignement: elie doit renfermer tout ce qu'il est
possible d'ymettre;son ulilile sera proportionnelle a son eten-
due : le tems approche peut-etre ou Ton sentira la necessity
d'y ajouter un autre volume.
Ce cours devait etre special; il s'agissait d'enseigner la geo-
metric des arts, et la mccanique des machinistes. Mais,esl-il
possible de considerer ces deux sciences sousun aspect diffe-
rent, et de les trailer diversement, suivant les applications
qu'cn veut en faire ? Ne sont-elles pas I'une et I'autre un en-
semble de verites disposees dans un ordre invariable, et dont
I'expression peut etre rrimeuee au dernier degre de justesse el
de concision ? Les sciences n'ont - elles pas, en general, un
caractere de simplicicite qui semble imposer la necessite de les
presenter conslamment sous la meme forme , quel que soil I'u-
sage qu'on veut en faire? Pour repondre a ces questions, exa-
minons.si la geometrie des arts n'est pas effectivement un peu
different© de la geometrie consider^e dans toute sa generalite,
56 SCIENCES PHYSIQUES.
ct si la rnecanique du machiniste est exactement la meme que
celle de I'astronome.
Le but des arts dits mecaniqites et de ceiix des beaux - arts
qui eniploient le dessin est d'executer des formes deterniinees,
ou de trouver ces formes d'apres cortaines conditions. Les me-
thodes de calcul y sont Ires-souvent necessaires; mais on y
fait un tisage continuel des methodes auxquelles on applique la
denomination tres-exacte A*i geomelrie descriptive , parce
quelle donne effectivement les moyens de determiner les for-
mes et les situations, et par consequent de les decrire. Or, c'est
un fait tres-remarquable, etbien dignedc trouver place dans
I'histoire des sciences, que cettc partie essentiellede la geo-
metrie , aussi ancienne que les arts el que ton te autre applica-
tion des sciences, n'a commence a prendre la forme scientifique
que dans ie xviii'"' siecle. Ce serait en vain que Ton en re-
chercherait quelques vestiges dans les ecrits des aneien*
gcometres, ni dans les ouvrages de mathematiques , rediges
suivant I'ancienne methode classique. On n'aurait pu I'intro-
duire dans I'enseignement, si Ton avait conserve lechafau-
dage des theoremes, coroUaires, scolies, etc., ainsi que les
fatigantes etpresque toujours inutiles demonstrations des pro-
positions inverses. Les Anglais qui ont persiste avec une sorte
d'obstination dans les vieilles habitudes d'instruciion mathe-
inalique , n'ont point redige la f^eomctrie des arts, quoiqu'elle
fut repandue dansleurs ateliers et leurs chantiers. Les ouvriers
I'y apprenaient , et continuent encore a I'apprendre, noii
comme une science, mais comme un art, avec plus de terns et
de peines, et moins bien.
Cependant, la geometric descriptive n'est pas toute lajijw-
melrie des arts, quoiqu'elle en forme la partie essentielle et
caracteristique. Comme son but n'est que de determiner et de
decrire des formes, elle ne s'occupe point des mesures, ni des
methodes de calcul dont les arts nc peuvent se passer. II a
ddnc fallu prendre ces connaissances dans les depots tpii les
renferment, dans les meilleurs elemcns de geometrie. On ne
reprochera point a M. Dupin un faslueux elalago d'un savoir
SCIENCES PHYSIQUES. 5?
iuutile aux arts; il s'est reduit scrupuleuseinciit a ce que les
artistes ne peuvent ignorer sans inconveniens.
Une machine a pour objet d'appliquer une force niotrice a
ia matiere sur laquelle cette force doit agir, d'impriraer et de
diriger le mouvemcnt. La route que le mobile doit parconrir
est determinee, il n'est jamais //6re. Les mouvemens des corps
celestes s'accomplissent d'une autre maniere, et ne sont point
soumis aux memes conditions; ils sont litres ; les forces dont
ils eprouvent Taction ne sont soumises qu'a une seule loi : la
mecanique celeste a done a resoudre des problemes fort diffe-
rens de ceux qui occupent le machiniste. L'etude du systenie
du monde suppose la connaissance de la theorie du mouve-
ment des corps libres; pour les applications aux arts, il ne
s'agit que des mouvemens qui s'accomplissent suivant des
lignes ou sur des surfaces determinees. Ainsi, la mecanique
generale , telle qu'elle est devenue par les travaux de D'Alem-
bert, d'EuU'r, de Lagrange, etc., va plus loin que ne I'exi-
gent les besoins du machiniste. II fallait rediger une mecanique
des arts. Voyons comment M. Dupin a concu I'ensemble et la
distribution de son Cours de geometric et de mecanique.
Le Traite de geometrie est divise en seize lecons oii les ap-
plications, toujoiirs a la suite de la theorie, servent en meme
tems a la faire mieux comprendre eta la fixer dans la memoire.
Huit lecons de geometrie descriptive font parcourir auxelevcs
tous les principes et toutes les methodes de cette science ,
et quelques-uns de ses usages. L'auteury a traite des cylindres ,
des surfaces coniques , developpables , gauches, de revolution ,
spirales ; tous ces genres de surfaces d'uu emploi si multiplio
n'etaient connus que tres-imparfaitement, et quelques - unes
de leurs proprietes les plus remarquables n'avaientete revc-
lees qu'aux georaetres , sans que les arts en eussent profite. Les
methodes generales pour tracer Tj/z^cz-iecf/ow des surfaces dont
la situation , la forme et les dimensions sont donnees geome-
triquement, fournissent la solution d'une multitude de pro-
blemes. L'auteur passe aux considerations importantes des
tangentes aux courbes et des plans tangens aux surfaces , no-
58 SCIENCES PHYSIQUES.
tions boaiicoup Uop restreinfes dansles Clemens ordinaires dc
geomelrie. La mesiire de la courbure dcs lignes et des surfaces
est un autre ordre de connaissances qui manijuait totalemeiit
ii la classe industrieuse, et qui donnera plus de precision a
queiques precedes, phis dejustcsse au coup d'oeil, el surtout
I'habitude de la correction, sans laquelle les arts ne se perfec-
tionneraient point. La seizieme Iccon est V exposition faite a la
Societe (V encouragement pour Vindustrie nationale sur les pro-
gres du nouvcl enseii^nernent de geometrie et de mecanique,
L'ordre dcs tems assi^uait a cet expose la place qu'il occupe :
aujourd'hui, il ne scrait pas moins bien place au commence-
ment, en forme d'introduction.
L'enseignement des theories mecaniques comprend quinzc
lecons , ou les applications trouventaussi leur place, immedia-
tement a la suite des verites qu'ellcs eclaircissent et develop-
pent. Dans la premiere lecon , I'auteur expose notre systeme
metrique, et il en fait sentir les avantages. L'abondance dela
matiere I'oblige a continuer le meme sujet dans la lecon sui-
vante , oil il expose aussi les premieres lois du mouvement.
Danscette premiere partie de sou traite de mecanique, il a dir
suivre la route frayee par ses predecesseurs : sa metliode d'ex-
position ne pouvait diffeier de celle des anciens auteurs que
par unlangage plus simple, un peu different des formes ordinaires
de la science, par des exemples plus multiplies, plus familiers et
DOn moins utiles et instructifs. Il ne lui etait done pas possible
d'etre aussi court sur chaque sujet : il fallait renoncer au laco-
nisme habituel de la langue des sciences, et prendre de tems
en tems le ton de la conversation, toujours un peu verbeuse.
II faut avoir lu ce traite de mecanique , pour bien juger des
difficultes que I'auteur avail a surmonter. Un livrc, tel que
celui-ci, suppose plus que du savoir : si Ton n'y Irouvait que
ce qui convient a I'etude de la science, de bons elemens; si
Taiiteur n'y montrait point, a chaque page, le fruit des obser-
vations qu'il a faites en enseignant, il serait encore loin du but;
nos ouvriers n'auraient qu'une instruction plus apparente que
recUs , jiuperficiel/e d<\n% le sens le plus raisonnablcde ce mot,
SCIENCES PHYSIQUES. Sg
qu'ils ne conserveraient pas long-tems , et qui, dans la pra-
tique, ne serait pas un guide assez digne de confiance. Ne
craignons point de le repeter : I'auteur se serait expose a n'a-
voir fait qu'un travail d'une utilile restreinte et peu certaine ,
si son iivre elait plus court.
M. Dupin n'a point conserve la division ordinaire destraites
de mecanique; il n'expose pas separement les conditions de
I'equilibreet les resultals du mouvement. Comme a toutes les
epoques de notre vie , et principalement dans notre jeunesse ,
les faits de mouvement nous sont beaucoup mieux connus que
ceux d'equilibre , rien de plus conforme aux habitudes de notre
intelligence et aux regies de la logique, que de partir dece
que nous savons le mieux , pour proceder a de nouvelles re-
cherches. La troisieme lecon sur les forces paralleles , la pe-
santeur et les centres de gravite eut ete moins instructive, et
cependant plus longue, si elle avait commence par les notions
de statique sur lesquelles le professeur a leplus insiste. On doit
bien s'attendre a quelque partage d'avis, au snjet des applica-
tions qu'il fait des theories mecauiques aux beaux-arts : des que
Ton entre dans le domaine du gout, on a quitte celui des de-
monstrations , et le raisonnement n'est plus un moyen de
conviction.
La quatrieme lecon est consacree a I'exposition des proprie-
tes des centres de gravile aux methodes pour les determiner ,
h. la theorie et aux usages des momens. Apres avoir niontre
comment les centres de gravite peuvent servir a trouver le vo-
lume de certains corps, M. Dupin fait I'observation suivante :
« Il est essentiel d'appeler lattention des eleves sur ces rela-
tions intimes desproprietesde la geometiie et de la mecanique.
La mecanique sans geometric estune routine sans theorie, unc
elude sans lumiere, ou plutot, une elude impossible. A son
tour, la mecanique rend a la geometric d'importans services;
elle lui fournit des instrumens varies pour executer avec une
extreme precision , et pourtant avec facilite, des operations
tres-delicates. Effor9ons-nous done de montrer de plus en plus
les rapports indispcnsables de ces deux belles sciences , pour
Go SCIENCES PHYSIQUES.
les appliquer de concert 5 rindiistrie. » La mecanique rend-elle
en effct quelques services h la geometric ? La science dc I'e-
tendue pent subsister isolee, absolument independantedecelle
du mouvenient, lirant d'elle seulc toutesses ressources ettoutes
ses raelhodes, y coinpris celle des centres de gravite , denomi-
nation contra laquelle on a souvent reclame. La science du
niouvemcnt ne pent se passer des notions de lieu, de distance,
de figure , de tout ce qui est du ressort de la geometrie , et la
plupart du terns, on n'a fait que de la geometric , en s'occti-
pant de mecanique. Mais, lorsque les notions de mouvement
ontete introduitesdans des recherchespurementgeometriques,
il est tres-douteux qu'ellesles aientsecondees. La maniere me-
canique dont Roberval avait concu les tangentes aux courbes
ne pouvait mener aussi loin que la raelhode de Fermat, qui
est toute geometrique. On peutobjecler que la forme des sur-
faces est tres bien decrite et concue par la forme et le mouve-
ment des lignes generatrices; niais, dans ce cas, I'idee de
munvement n'est point necessaire, etdisparait tout-a-fait, apres
.ivoir prete a I'imagination un secours momentane, et qui n'e-
tait pas indispensable. Nous insistons sur cette remarque, dans
I'interet d'une verite generale, trop souvent meconnue, et
qu'on ne pent cependant negliger impunement; c'est que I'a-
nalyse qui distingue et differeucie est toujours d'une utiiite
non contestee, au lieu que I'analogie qui rapproche est quel-
quefois sur le point decor.fondre, que son langage manque de
correction, et qu'il ne pent eire sans influence sur la justesse
desidees:il a necessairement quelques uns des inconveniens
du langage figure. On le remarque jusque dans le trace des
courbes qui servent a represcnter des resultats d'observations;
ce mode d'expression a deja propage des notions fausses , ct
fait faire de njiiuvaisraisonuemens. M. Dupin a choisi I'exemple
de deux sciences dont I'une est necessaire a I'autre, et qui
semblent en effet, se preter un secours mutuel :mais, lorsque
la mecanique pretend aider la geometric, elle ne fait que res-
tituer ce qui ne lui appartient pointj la geometric ne lui doit
point de reconnaissance.
SCIENCES PHYSIQUES. 6i
Danslacinquieme lecon, I'auteur a traite de la composition
^l de la decomposition des forces, et il termine ainsi I'Lnstruction
siir les lois geneiales du mouvement. Passant ensuite aux ma-
chines simples, il commence, dans la sixieme lecon par les
cordes, les ponts suspendus, les traits et les harnais d'attelage ,
Ic greement des vaisseaux, etc. Le meme sujet est continue
dans la lecon suivanle, ou I'application des cordes a la produc-
tion du mouvement circulaire amene les considerations rela-
tives h ce mouvement, et ensuite, la theorie du pendule.
Les leviers et les poulies sont le sujet des deux le9ons
suivantes. La somme des connaissances renfermees dans les
56 pages consacrees h ces deux sortes de machines aurait pu
fournir !a matiere d'un volume. II a falluparler des differentes
sortes de balances, du gouvernail des vaisseaux, des expe-
riences de Coulomb sur la raideur des cordes, des precedes de
MM. Brunel et Hubert pour fabriquer les rouets, etc. Le
treuil et les roues dentees qui viennent ensuite exigeaientaussi
d(!s developpemens fort etendus, comme elemens necessaires
d'une multitude de machines composees.
Dans la lecon sur le/j/«« incline {\a. onzieme), M. Dupin a
fait I'application de la theorie dc cette machine ^ la recherche
des conditions d'equilibre de plusieurs formes diverges posces
sur des plans, a celle des metacentres , ^ la stabilite des voi-
liires en repos ou en mouvement, aux routes ou ornieres en
fer, et il decrit I'une de ces routes destinee au transport du
charbon, et quis'eteud sur un e^pace de lo kilometres, depuis
la mine jusqu'au lieu d'embarquement , pres de Sunderland.
A mesure que Ton avance , les objets dont on s'occupe de-
viennent plus complexes, et les applications plus varices. La
vis et le coin, les torsions et leur effet sur les cordages, les
instrumens des arts derives de la vis el du coin sont une partie
ossentielle des connaissances dont I'ouvrier doit etre pourvii.
Ici, il a deja fallu tenir compte, non-seulement de la forme et
des dimensions, mais aussi des proprietes particulieres des.
corps employes dans la construction des machines. L'impor-
tante theorie des frottemens, si rcmarqnable par la simplicite
6.1 SCIENCES PHYSIQUES,
de ses lois et par le genie qui I'a creee ; celle des pressions, dcs
tensions, de relasticito ; enfin, Ics lois du choc des corps, et
quelqiics-unes de leurs applications les plus inslructives sont
les sujets des qualre dernieres Iccons. Nous n'avotis puinserer
ici qu'unc table des malicios ties abregee; niais cetle nolice
impaifaite servira tout au moius A justiRer ce que nous avons
dit sur la nccessite de trailer oes matieres pluslonguement et
plus afondi\\xnn ne I'a fait jusqu'ici. On en tirera aussi celte
consequence, qui n'est pas sans inleret : lorsquc les ouvriers
posscderont les connaissanccs (]ue renferment les trois volumes
de M. Dupin et celles qui les accompagnent ou qui en derivent,
leur savoir vaudia bien celui que la jeiinesse acquiert dans les
colleges , par un travail de quelques annees.
Les deux volumes dont nous venons de parler sont deji\ re-
pandus dans toute la France, et enseignes dans les principales
\illes dcs departemcns. Le Iroisieme est sous presse , et parai-
tra peut-etre en meme terns que cctte notice, ou fort peu dc
terns apres; et, comme il est public par Iccons, ainsi que I'ont
etc les deux autres, nous pouvons dcja donncr une idee som-
maire des lecons que le professeur vient de livrer a I'ardeur
studieuse de ses Aleves.
Le troisieme volume traitera des forces motrices , et de la
maniere de les employer. Le nombre des forces dont I'liomme
pent disposer pour aider son industrie est certainement limite;
niais on ne pent pas dire qu'il soit connu. Long-terns dans I'elat
de barbaric, I'homme ne put employer que sa propre force
qui, secondee par son intelligence et par quelques machines,
lui soumit toute la nature vivante. La conquete et la soumission
du cheval et du boeuf amenerent un developpement extraordi-
naire de ses arts et de son commerce. Ses premiers cssais de
navigation lui donnerent quelque notion du parti qu'il pourrait
tirer du mouvement des eaux ; I'invention des voiles vint sans
doute peu de tenis apres celle des canots et des barques, et
prepara celle des machines mues par le vent. L'industrie sc
borna long-tems i I'emploi de ces quatre forces motrices; elles
snffisaient pour assurer son empire sur toute la nature. Un
SCIENCES PHYSIQUES. 63
autre moyen d'action fat dc-couvert : mais terrible, intlomptable,
ne pouvant se soumeltre k la direction continue derintelligence
crcalrice, il fut regarde comme un agent de destruction; la
guerre s'en empara. Les arts de la paix n'cn firent usage que
pour pcrfectionner les amies de I'liomme contre les aniniaux ,
et pour renverser des obstacles, en imitant les proctdes de
I'art de la guerre. Enfin, un autre agent vint s'offrir, et c'efait
le plus puissant, celni dont les services etaient le raieux assures,
qui permettait a I'industrie de s'etablir dans tous les lieux (jui
lui offriraient les avanlages qu'elle recherche. Comme I'indus-
trie elle-meme est creatrice de cet agent, la quantite de travail
qu'elle pourra produire ne connail plus de limites, et Thomme,
en s'environnant ainsi de ces iminenses richesses produites par
le travail , aura cependant accru le lems de ses loisirs en meme
tems que les moyens d'en jouir. Est-il probable que nous
soyons an terme des decouvertes possibles , et que nous n'ayons
plus a parcourir que la carriere des perfectionnemens? Qiioi
qu'il en soit, nous pourrons attendre assez tranquillement les
decouvertes ulterieures, si nous savons protiter habilement de
celles qui sont faites.
M. Dupin fait voir que I'homme fournit une phis grande
somme de force physique par ses jambes que par ses bras ,
et que, lorsqu'on lui fait executer des travaux ou son intelli-
gence n'a point de part, ce ne sont pas ses bras qu'il faut
exercer. On voit par cela seul qu'une multitude d'operations
usuelles consomment encore plus de forces qu'ellesn'en exigent
leellement. Le professeur compare ensuite la force des che-
vaux a celle de I'homme, et reclifie quelques <irreurs que Ton
a commises jusqu'a present dans revaluation de ces deux sortes
de moteurs.
L'emploi de I'eau , comme force motrice , est traite avec le
soin qu'il merite. M. Dupin met ses lecteurs au courant des
connaissances acquises sur cette partie essentielle des machines
hydrauliques , encore si imparfaite dans presque toute la
France. En traitant des pompes, il a du faire un choix parmi
celles qui sont le plus generalement enployees et qui merilent
64 SCIENCES PHYSIQUES.
d'etre prcfcrecs; la nomenclature et la description de toutes
les formes connues de ces machines eussent rempli seules un
tres-gros volume. II a fallu reduire aussi le nombre des exeni-
ples d'emplois de la force du vent pour faire mouvoir des
machines ; mais , notre auteur choisit toujours les plus instruc-
tifs, et ceux qui offrent les meilleurs modeles que Ton puisse
i miter.
Nous avons dit que I'ouvrage de M. Dnpin est national : il
ue pent cesser de I'etre par son origine; mais sa destinee est
d'appartenir nn jour a toutes les nations instruites. Chacune
des traductions que Ton en fera pent etre recommandable par
quelques perfectionnemens , si ce travail est confie a des savans
qui le comprennent dans toute son etendue. Pour un bon
ouvrage de science , ou de raisonnement , une traduction doit
etre une revision, et dans I'interet des lecteurs, il est tres
perrais d'y substituer ce que I'auteur devait dire k ce qu'H a
dit reellement. Si le livre de M. Dupin, traduit par des hommes
de merite, n'eprouve aucun changemenl en passant dans une
autre langue , ce sera le plus bel eloge qu'on puisse en faire :
s'il a recu quelques additions ou corrections, elles seront au
profit de tons, et principalement de I'auteur.
Ferry.
SCIENCES MORALES ET POLITIQUES.
Theorie du Beau et du Sublime , ou Lei de la repro-
duction ^ par les arts, de Vhomme organique, intel-
LECTDEii, SOCIAL ct MOUAL, ct de scs rupports , pour
faire suite au llvre intitule : Rapports de la nature a
Vhomme , et de Vhomme a la nature ^ par le bajon
Massias (i).
M. Massias ne divise pas le monde en deux grandcs portions :
la raison ct la matirre , I'lmc belle et I'autre laule (2). La ma-
tiei e , pour lui , n'cxiste prcsque pas. « Elle ne pent elre, dit-il
(p. 19), pcrciie que par rintelligence... La statue que vous
croyez voir dans ses parties materielles, vons ne !a vove;: que
dans scs formes; » ct il regarde la forme et les modifications
comme dcs accidens immaiericls. Ainsi , tont ce que I'inteliigence
connait de I'univers est inTmatcriel. Mais le beou , suivant notre
autcur, n'cst pas tout ce qui est rationncl; c'cst seulement
tout ce qui est soumis a I'ordre universel : Vuniversalile lui
parait elre le fondcmcnt unique du beau. L'ordre imiverscl
a fait riiomme orf;anique, intelligent, social el moral; Thomme,
sous ces quatre faces, est cmpreint de beaute; pour prodiiire
une belle oeuvre, il suffit que les arts reproduisent I'homnie
sous une de ces quatre proprietes universelles. « Le poele,
dit-il ( p. 273 ) , n'a pu reussir a nous cmouvoir qu'en devinant
(i) Paris, i8a4; Firniin Didot pere et Cls. i vol. in-8° de 872 p.;
prix , 6 fr.
(2) Voy. Hev. Enc, t. xxx, p. 601 , les Observations siir le beau ,
qui renferment les idees jireliminoires propres a faire mieux com-
prenilre le systeme expose dans cette analyse, et deve!opp6 dans
Fouvrage de M. Massias.
T. XXXI. — Juillel 1826. 5
66 SCIENCES MORA.LES
les lois ctfinellcs qui ont fondc noire cspece, et qn'il trouve
eii)|)rcintes clans son propfc coEur. Tout cc qui, tl.ins son ou-
vrage, nous touche profondoniL-nt, porlc le lype auquel est
vuirquec Vhumimitc, ct a une anal(^ie ntcossairc avcc nos
facultes constilutU'Cs. »
S'occnpant de la pocsic plus spccialemcnt que des aulres
arts , M. Massias nous la niontrc produisant le beau, sculepieot
lorsqu'ellc relrace unc dos quatrc proprietes generates de
nolte especc ; ot d'abord , ])our nous la faire voir representant
riiomme ori^anique on sensible , il cherclie « quels sont les
principaux scnliniens, communs aux hommos de tons les
terns ct de tousles pays ( p. 3o'3 ) « ; ct il cite de nombrcux
passaijes poetiques qui lui paraissent tirer leur beaute do ce
qu'ils out exprimc cos scntimcns nnU-ersels (sect, vi, ch. ii ,
p, 273-3o3).
Passant cnsuite a riioinmc intellccttiel, il donnc d'aulres
excinples ( sect, vi , cli. in, p. 3o3-3o9) qu'il appcUe heaux ^
parce qu'ils contiennent des pensees communes a tous les
hommes. II arrive a rhommc social , et cherche a prouver par
de nouvclles citations (.sect, vi, ch. iv, p. 3io-3i3), que la
poesie, en retracant I'liomuie sous cet aspect, ne fait encore
que rcproduire les senliniens naturels et unn>erseis de Xespece
humaine. Il Icrniine par I'homme moral (sect, vi, ch. v,
p. 3i4-32i ); et ce point de vuc Uii scmble beau, parce que
c'est le cole qui « affeclc le plus \ivenient ct le plus univer-
sellement le coeur des hommes. «
Ainsi, la tcnsibilite , on I'organisnie, X intelligence, \& socia-
bilite et la moralile, tcells sont les quatre proprietes com-
munes a tous les hommes. EUes sont belles, parce qu'elles
tienncnt a I'ordre univcrsel ; relracees par les arts, clles forment
les chefs-d'oeuvre. D'apres ce systenic,. tout cc qui est commun
a I'espece est beau; il n'y aura de laideur que ce qui formera
exception. Dans tousles objels, ainsi que dans I'homme, la
beaute scral a possession de ces qualiles con)munes qui consti-
tuent unc cspece. "On noninie beau, dit I'autcur (sect i",
ch. 11, p. I?), le moindre des objets, lorsqiie, possedant toutes
ET POLITIQUES. 67
&es qualites constitutives , il rcpresente, pour aiiisi dire, I'es-
pece, dont il montre le type. Sa petitesse n'excliit point la
beaute, parce que toute grandeur niaterielle n'est que relativcj
et que la plus veritable est cello qui provient du nombre et dil
complement des proprietes. Ainsi, Ton dit que telle fleur, telle
feuille, tel fruit, telle mouche, tel insecte, sont beaux, u
Telle est la doctrine du livre que nous avons sous les yeux.
Certes, on ne pent nicrque I'ordre universel ne soil beau, et
qu'un objet soumis a celte loi n'ait de la beaute, si on le consi-
dere dans ses relations avec elle. Uordre est une portion de
I'immateriel, une parcelle de cette raison qui doit dominer la
matiere. Mais, ce n'est la qu'uue face du rationnel, et on n'a pas
vu tout ce qui est beau , quand on a contcmple I'ordre qui
constitue chaque espece et lui donne des proprietes communes .
\J ApoUon du Belvedere vous parait-il u'avoir reellement que
les qualites communes a tous les Jiommes , les qualites consti-
tutives de V espece ? N'est-il pas, au contraire, une magnifique
exception? — Non, direz-vous, son attitude, son regard, ses
formes expriinent des idces de proportion, d'harmonie, de
generosite, de grandeur, idees qui sont communes a tous les
hommes, ou du moius a la generalite. — Je vous accorde que
ces idees et ces vertus existent dans le coeur de tous les hommes;
au moins, serez-vous oblige de convenir que ce n'est pas une
propriete commune, de les exprimer a la maniere de I'Apolion;
de sorte que, si c'est une loi constitutive de noire espece de
concevoir ces idees, ce n'en est pas une de les exprimer.
J'ajoute d'autres exemplcs pour me faire mieux comprendre :
Regulus pense qu'il faut tenir son sermcnt, malgre les tortures
de Carthage. • — Cette pensee est commune i tous les hommes.
— Je le veux bien. Mais il la met a execution, et marche au
supplice. Or, les actions de ce genre sont peu communes; son
action ne sera done pas belle, puisqu'elle sorlira de I'ordre
commun. Socrate, qn'on aime a citer, enseignc qu'il faut pre-
ferer I'austerite aux jouissances. — Tout le monde est de son
avis. — Voila done une belle le^on. Mais il s'avise de pratiquer
cette morale. Ce n'est pas en vertu d'une loi universelle qu'ii
68 SCIENCES MORALES
agit ainsi; car nous voyons qii'une jiropriete commune de
tespt-ce est de courir i ses plaisirs. — Voila done unc conduite
qui ne serait pas rcputec belle.
M. Massias cite ( p. 72 ) comme de beaux ouvrages de pein-
ture, « Jupiter foudroyant I'audace des Titans, que Junon lui
designe avec calme; le dernier jour du moude et le genre
luimain appelc dcvant son juge; le Ills de Marie succombant
sous le poids de sa croix ; son corps divin eclairant un tableau
oil sont manifestes les passions de la tcrre et les ravisscmens
ducicl; la pr/ix religieuse des fds do Bruno; I'ame de sainte
Cecile dans son regard cxtatique; la vertu souriant au milieu
des tourmens et triomphant de la tyrannic. » — II est dou-
teux que radmiratcur songe a voir dans tout cela les proprielcj
constitutivcs de I'espece humaine, et qu'il soit conduit par lill
a mediter sur I'ordre universcl qui a constitue cette race. Tous
ces tableaux rcpresentcnt une pcnsee morale dominant la
matierc; mais, encore une fbis, ce qui est beau, ce n'est pas
seulement la pcnsee, pcut-etre commune a tous; c'est encore
le devoucment rare qui raccomplit (i).
On pourrait dire que la maliere soumise a la raison produit
I'ordre, et que, par consequent, soit dans I'espece, soit dans
I'individu, le beau n'est autre chose que fordre meme; mais
telle n'est pas la tlicse de BI. Masbias. 11 n'a vu le beau que
dans cette conformitc de certains etres les uns avec les autres,
de laquelle resultc une espece. Ce rapport est bien une sorte
d'ordre, et il a son genre de beanie ; mais il est loin d'etre le
beau tout entier, en d'-.iutrcs tcrmes, tout I'inimateriel, tout
Vordre , si nous voulons entendre par ce mot tout ce qui plie
(i) II nous semble que M. Massias ne considere ^.oiut les actions
suhlinies des homines vertueux et les chefs-d'oeuvre des grands
maitres comme des exceptions . mais comme offrant le type de ce
qu'il y a de plus beau dans la nature humaine; et ce beau n'existe
pour nous qu'antant qu'i! est exprime par des actions ou par des
ouvrages de I'art. M. A. J.
ET POLITIQUES. 69
la matiere ^ la raison dans un intliviclu, comme dans I'es-
pece (i).
Le beau n'est done pas seulement la possession, ou la repre-
sentation des qualitcs qui constituent chaquc espece. Mais, en
admettant comuie vraiecette opinion, ilrestaitbeaucoupc^ faire
a I'autcur, pour completer son systime. II ne devait pas se
contenter de dire qu'un objet etait beau « lorsqu'il possedait
toutes scs qualites constitulives (p. 17) «, et que c'efait pour
cela qu'on disait « telle fleur, telle feuille, tcl fruit, telle
mouche, tel insecte , sont beaux [ibul.) ». II fallait demontrer
qu'une belle feuille, un beau fruit, uue belle mouche, un bel
insecte , reunissaicnt toutes les qualites de leur espece, ot pour
nous le prouver, dresser la liste de toutes\cuv5 proprietes (2).
D'jipres le systeme de I'auteur, un livre d'histoire naturelle
etait leseul monument de bcaute qu'il put offrir a nos ycux.
La, nous aurious admire des proprietes communes. Mais il a
neglige cet appui, et jjas un des exemples qu'il a cites ne con-
tient le genre d« beaute qu'il a cru le scul dans I'univers, sa-
voir, la possession des qualites communes.
Nous avons deja dit qu'en peiuture I'auteur avail cru voir
rcpresenter des qualites constitutivcs de I'espece, lorsqu'au
contraire on ne represcutait que des exceptions. Son erreur
me parait etrc la meme ])our le beau dans la danse. II le definit
« le mouvement mesure et rhyihmique de I'organisation. » Or,
a coup sur, ce mouvement ihythitiique n'est pas une loi cons-
titutive de notre espece. Car la grande majorite danse mal ou
ne danse pas. Si nous passons a la musique, I'auteur uous dit
(i) Nous croyons necessaiie de lappeler ici que M. Massias, con-
siderant le beau dans ses rappoits avec I'liumanile , I'a presente sous
le point de vue le plus g6neral possible, puisque le beau qui n'au-
rait aucuii rapport avec rhomme serait pour lui comme s'il n'exis-
tait point. N. d. R.
(2) Uii semblable travail ne pourrait appartenir qu'a riulelligence
supreme qui embrasse dans sa pensee I'ensemble et les details de
tous les 6tres cre^s. N. d. R.
70 SCIENCES MORALES
qui Vile est la langiic du genre humain , et cependant ceux qui
la parlcnt bien font justement exception.
Quel que soit, au rcste, le jugement qii'on doive porter sur
Ic systemc qui nous occupe, il est impossible de ne pas louer
la raaniere dout I'auteur a developpe son sujet. Il a compris
toutc rotendnc de la question et I'a traitee sous toutes Ics faces.
II commence par recliercher ( sect, i", ch. i"""") Torigiae du
beau etdu sublime. Toutefois, il eut etc plus logique d'en exa-
miner d'abord la nature : car on ne peut clairement chercher
I'origine d'un objet , qu'apres I'avoir bien defini ; par conse-
quent, le second chapitrc, qui expose la nature du beau, au-
rait du preceder ceUii qui traite de son origine. Ce n'est done
qu'apres nous avoir dit que le beau descendait dun Dieu crea-
teur, que I'autenr nous dtlinit le beau (sect, i", cha. ii.). II
cherche a le distinguer du sublime : leur point dc resseim-
blance, comme il le dit ailleurs ( p. 26), est d'etre « I'un et
I'autre ordre , ensemble et hierarcliie de tons les rapports. »
Ce qui les distingue, c'est que le sublime est I'ordre absolu,
« cfclui dont la divinite seule peut avoir la comprehension, et
qui t'chappe a I'analj'se » (p. i5, 16). Lebeau, c'est la portion
de Tordre apcrcu par I'homme, etqui peut ctre analysoe. Cette
distinction se rapporte a peu pres a celle que Ton fait enlre la
raison objective et la raisori subjective ; mais , je ne crois pas
qu'elle puisse s'appliquer au beau et au sublime, comme on a
pu le voir d'apres le premier article.
L'auteur reconnait dans le beau trois caracferes, savoir : la
veritc, Vutilite et la grandeur. II est certain que la verite et la
grandeur sont deux faces du beau, quoiqu'elles ne soient pas
les seulcs; mais, quant a Vutilite, si ell e ne tient qu'a I'interet
prive, elle ne peut par elle-meme etre empreinte de bcaute.
Le tableau que Buffon trace de I'utilite des elemens est beau,
parce qu'il nous les presente comme servant I'interet general ,
comme exprimant la bienveillance et la providence de Dieu.
Ainsi, ce qu'il y a de beau dans I'utilite, ce n'est pas le profit,
mais le bienfait. Or, la bienfaisance, comme notion et comme
acta, rentre dan? le domaine de la raison.
ET POLITIQIJKS. :i
M. Massias s'occupe ensuite de I'titre susceptible de peice-
vQJr le beau; il demontre que c'est rinteUigcnce, et la siib-
divise en sensibilite, reflexion, conscience et imagination. Nous
n'entreions point dans des discussions qui nous entraineraient
trop loin, et qui, d'aillcnrs, s'appiiquant a la marche ordinaire
de rintelligence , sortiraient de I'objct special de notre exa-
rnen. Nous ferons seulemcnt reniarquer que I'auteur, n'ayant
vu dans le beau que rordte nniversel qui constitue cliaque es-
pece, n'a pu voir dans I'imagination que la faculle de grouper
les objets fournis par la vue. I.es procedes qu'il lui attribiie
sont I'analyse et la synthese, c'est-a-dire , les procedes de I'ob-
servation. Ei!e puise dans la nature, dans i'homme et dans
leurs rapports, et le beau ideal est, pour notre autcur « I'cn-
senible des perfections disseminees sur les individus. » Ainsi ,
dans ce systenie, I'art n'aura qu'a recueillir les differentes pro-
prietes constitutives de chaque espece. II ne faudra que des
yeux, etil est elonnant , d'apres cela , que les artistes soitntsi
rares.
• M. Massias, apres avoir trace ( sect, iii , cli. vii ), une es-
quisse rapide de chacun des beaux-arts, montre leur rapport,
etablit que , piiisqu'ils sontl'expression de potre etre, coir.me
tels ils sout iVeres, et passe a la litteraiure qu'il traite dans
toutes ses parties, et qui occupe la derniere moitie de son
livre ( sect, iv , v et vi ). II m'est impossible de le suivre daus
le developpement de ses opinions iitteraires, qu'on pent ne
point partager, mais dans lesquellcs il a montre quelquefois
le plus grand talent, comme ecrivain et conime penseur.
L'ouvrage est tcrmine par un chapitre vraiment admirable
sur le developpement du inoi humain, depuis la plus obscure
des affections, jusqu'a la perception et la production du su-
blime. Cc chapitre, plein de precision et de logique, cot evi-
demment le plus beau de tout le volume, et scmble dicte par
le genie methodique de Blair.
Il me restc a parler du style : I'expression est soiivcnt bar-
die et pittoresque. Une singulier* aversion pour les adjectifi
xtn et le ^ et I'usago frequent de substantifs jouant le role d'at-
72 SCIENCES MORALES
tribiits, donnent iin air ctrango a plusieurs phrases. Mais ou
trouve un grand iiombre de pages plciiies d'imagcs et de cha-
leur. Quelques personnes qu'oa nc pent accuser nid'ignorance ,
ni de legercte, qiioi (jii'en disc I'aiUeur dans sa preface , ont
trouve de I'obscurile dans la premiere partie du volume : mais
il ne faut pas oublier que la theorie du beau ct du sublime est
la suite du livre sur le rapporl de la nature a riionime ct de
riiomniea la nature. (!e livre doit sans doute rendre plus facile
rinlelligence dunouvel ouvrage que M. Massias nous a donne
et qui le place dans un rang honorabie parmi les pliilo-
sophes(i). Adolphe GkV^vi^Vi.
(i) M. Massias dit que le beau, danschaque objet, est /a possession
de tons ses rapports. D'apres sa doctrine, depuis le brin d'herbe et I'iii-
secte jusqu'a rhomme, tout etre qui a dcveloppe ses facult^s dans
toute leur plenitude , et qui , par consequent, atteint la perfection
de tous ses rapports , ou celle qui est propre a sa nature , est juste-
meiit appele beau. On regrettera peut-elre, que I'auteur de cette
analyse , d'ailleurs fort reniarquable, ne se soil pas attache a discuter
cette doctrine pour I'approuver ou la refuier (a). Selon M. Massias,
les rapports de rhomme sent organi^iies ou physiques, iutellectiiels ,
sociaux et moraitx , et la beaute pour I'liomme consisfe a les rcunir
dans une parfaite barmonie. Cette division parait d'autant micux
former la base d'un sjsf^me complet de philosophic generale, que
toutes les sciences, qui sont a la fois le produit de riutelligence hu-
maine , et qui viennent ensuite se rapporter a I'homme et aux moyens
d'ameliorer sa nature ou sa condition, renlrent directement ou indi-
rectement dans cesquatre branches titles embrasseut nccessairement.
M. A. J.
(a) Je crois avoir expose que le fieau , pour un etre quclconque, ne consisto
pas a developper ses Jacultes dans toute leur plenitude , mais a porter I'empreinte
de quelque idee rationnelle. C'est ee que j'ai tente de prouver dans mes deux,
articles. Adolphe Garnikr.
ET POLITIQUES. 7 5
Traite de Legislation , ou Exposition des lois gene-
rales suivant Icsquelles les peiiples prosperent , depe-
rissent, ou restent stationnnires , par Charles Comte ,
avocat a la Cour royale de Paris, professeiir hono-
raire de droit a I'Academie de Lausanne, auleur du
Censeur Europeen (i).
II a ete iin tems, qui n'est pas encore bien eloigne, oil non-
seulcment les sciences n'avaicnl prcsque rien dc commun entre
ellcs , mais ou, dans la nieme science , la theorie et la pratique
restaient souvcnt etrangeres Tune a Tautre. Un homme qui
imaginait un systcme de lois aurait cru qu'il ne pouvait, sans
renoy.cer a sa dignite, s'abaisser jusqu'a connaitrc les details de
la jurisprudence; mais aussi un pralicien se serait perdu dans
I'esprit de scs confreres, si, dans une discussion judiciaire , il
s'elait livre a la moindre consideration philosophique.
II s'est deja operc, a cet egard , une revolution remarqnable
chez plusieurs nations. Un ecrivain qui voudrait ainourd'hui
exposer un systeme dc lois sans consulter ce qui se passe dans
la sociele, ne pourrait esperer de trouver des lecteurs. S'il
veut ctre lu , il faut qu'il desccnde dans la vie reelle , qu'il ob-
serve comment les clioses s'y passent, et qu'en exposant ce qui
est, il montre comment on y est arrive et comment on pourrait
etre mieux; il faut, en un mot, que les idees qu'il presente
dans la theorie soicnt susccplibles d'etre appliquees dans la
pratique. De leur cot^, les lionimes qui se vouent a la pratique
de la jurisprudence sont devenus un pen moins etrangcrs a la
theorie: il est beaucoup de jcunes gens destines a la magistra-
ture ou an barreau qui nc se bornent plus a etudier le texte
des lois on les commentaires destines a en faciliter I'intelligence;
ils desirent connaitre, en general, quelles ont ete les causes des
(i) Paris, i8a6; Sautelet et comp., libraires, place de la Bourse.
Jn-8° de 54i pages; prix, 8 fr. — Voy. Rev. Enc, t. xxx, p. 338.
74 SCIENCES MORALES
dispositions des lois, et quels sont les cffets qu'elles produisent.
On pcut meme observer que ceux d'entre cux qi\i sont les plus
remarqiiables par letirs talcus , sont ceux qui sont restcs
le nioins etrangcrs aux autrcs branches dcs sciences mo-
rales, ct qu'il n'est plus possible dc negliger ce genre de
connaissances, a moins de se condamner a ne jamais sorlir de
la mediocrite.
Non-seulcmcnt on observe que deux branches de la meme
science, qui jadis etaient separecs, cherchent a s'unir ct a se
confondre; mais on remarque, de plus, que des sciences qui
semblaicnt autrefois n,'avoir rien de commuu, tendent a se
rapprocher et a se preter mutucllemcnt des sccours. La morale,
reconomie politique, I'histoire et meme la geographic, devien-
nent une parlie essentielle de la science des lois ; H n'est pas
possible de bien la connailre, si Ton ignore quelle est I'influence
que les choses exerccnt sur les hommes, cclle que les hommes
exercent a leur tour sur les choses, et cellc qu'ils exercent les
uns sur les autres, soil individucllement, soit collectivement.
Si Ton veut se donncr la peine dc rechercher la cause du
rapprochement qui tend a s'operer entre les sciences, on la
trouvera dans le but qu'elles se proposent toutes, le perfec-
tionnement et le bien-etre du genre humain. II est evident, en
effct, que, du moment qu'elles ont un but commun, plus elles
avancent ct plus elles se trouvent rapprochecs.
Mais, quoique, dans la legislation, la theorie ne puisse plus
etre separee de la pratique , quoiqu'on fende generalemcnt dans
cctfe science a mettre a profit les decouvertes et les progres
faits dans les autres branches de nos connaissances, lesjeunes
gens qui aspirent a la posseder sont loin de trouver dans les
ouvragcs qui existent les secours dont ils auraient besoin.
Si nous calculous, par le nombre des annees, I'iritervalle
qui nous separe du terns ou vivait le plus celebre de nos publi-
cistes, Montesquieu, nous ne le trouverons pas tres-grand;
mais, si nous le calculous par les revolutions que le monde a
epronvees, par les progres que toutes les sciences ont faits,
el par les changemens qui se sont opercs dans les idees et
ET POUTIQUES. 7 5
dans les habitudes, nous nous convaincrons qu'il y a plus
de distance de lui a nous , que de Platon a lui. Nous admi-
rons encore ses ecrits, et sans doute il en est quelques parties
qui sont admirables ; mais, si Ton nous menace de nous donner
quelqu'une des institutions qu'il a Ic plus vantees, nous nous
sentons aussitot saisis d'cffroi. V Esprit des Lois est toujours a
nosyeux un des chefs-d'oeuvre de I'esprit humain; cependant,
s'ii efait question de le reduire en pratique , il n'y a peut-etre
pas dix pages que nous voulussions nous appliquer.
II existe done dans la theorie de la legislation et de la morale
une immense lacune, depuis Montesquieu jusqu'a nous; car on
ne peut pas considcrer I'ouvrage de Filangiericomme ayant fait
faire des progres a I'esprit humain. Ceux qui douteraient en-
core de cette verite apres I'avoir lu, peuvent s'en convaincre
par I'excellent commcntaire qu'en a fait M. Benjamin-Constant.
Comment cette lacune sera-t-elle remplie ? par les progres qu'ont
faits toutes les branches des sciences morales , par Texperience
que les revolutions nous ont donnce , par la multitude des faits
nouveaux que les savans ont constates. Tels sont les materiaux
qu'il s'agit aujourd'hui de recueiilir et de mettre en oeuvre; tel
est I'ouvrage que I'auteur du Traitc de Legislation aosc tenter.
Ramenant la science de la legislation a la simple observation
des faits , et ccartanl tout esprit de systeme, I'auteur porte al-
tcrnativement son attention sur les hommcs, et surleschosesau
milieu desquelles ils sont places. Tl considere les hommes dans
leurs facultes physiques, dans leurs facultes intellectuelles et
dans leurs facultes morales; il expose Taction qu'ils exercent
les uns sur les autres , soit comme individus, soit comme agre-
gation d'individus; il fait connaitre les causes et les effets de
cette action. Il considere, dans les choses, I'influence qu'elles
exercent sur les hommcs, sur leurs idees, sur leurs passions ,
sur leurs besoins; il determine I'influence qu'exercent sur la
civilisation, la nature et I'exposition du sol, Ic cours des eaux,
la temperature de I'atmosphcre, el d'autres circonstances qu'on
a designees sous la vague denomination de climat. Ces der-
nieres considerations ne sont qu'indiquees dan? le volume que
75 SCIENCES MORALES
I'auteur vient de publier; mais le developpement en est an-
nonce pour la suite de I'oiivrage.
Dans la premiere partie du volume qui vient de paraitrc ,
ranteur expose quelle est rinfluence de la methode d'obser-
vation appliquee a I'etude des sciences morales; il fait voir
quelles sent les consequences qui resultent d'une bonne el
d'une mauvaisc methode^ et il examine les divers systemes sur
Icsquels on a cherche a faire rcposer la morale et les lois. Il
expose, dans la seconde panic, quelle est la nature des lois,
quels sent les divers elemens de force dont elles se composent,
et comment quelqucs-uns de ses elemens se forment et se de-
irnisent. On rcmarque dans cette dernicre panic uue maniere
tout-a-fait nouvelle de considerer la legislation et la morale;
et cela ne pouvait etre autrement, puisque Tauteur , ecartant
les livrcs et les systemes , ne considere que les hommes et les
cboses, et qu'il ne voit dans les codes que de simples descrip-
tions, j)lus ou nioins incompletes et souvent mcnsongeres. Au-
tant ranteur met de scrupule a subordonner ses opinions a I'ob-
servatioti des plienomenes de la nature, aulant il se moutre
indcpendant des systemes des eeiivains. Il trai.'e les maximes
de quelques philosophes, et parliculierement ceiies de Rous-
seau, avec beancoup de severite, el les admirateurs du Conttat
social seront probublement pen satisfails de la maniere dont il
le jnge.
Dans presque tons les pays ou les lois sont enseignecs , on a
pense qu'il etait impossible de bien les entendre et d'en faire
une juste application , si Ton ne commcncait par en rechercher
les fondemens , et par chidier ce qu'on a ajipele le droit na-
tural; mais les livres qui servent a cet cgard de base a I'ensei-
gutnient sont de beaucoup en arriere des connnissances ac-
tuelles. Un immense intcrvalle nous sepnre du tcms on vivait
Grotius; et cependant, cet ecrivain est encore un des oracles de
I'ecole. Comment est-il arrive que I'enseignement de la morale
et de la legislation n'a point fait les memcs progres que I'ensci-
gnement de toutes les autres sciences?
Un grand nombre de causes peuvent rendre raison de ce
ET VOLITIQUES. 77
phenomenc; mais il en est une que nous devons exposer, parce
qu'elle exerce une grandc influence. Dans presque tons les etats
de I'Europe, I'enseignement public est dans les mains, ou du
moins sous I'influencc des gouvernemens. Pour parvenir a la
place de professeur, o^i pour y restcr quand on y est arrive,
il est done uecessaire d'enscigner , non pas precisement ce qui
est juste et vrai , mais ce qui convieut a I'auloritc qui donne ou
reiirc les emplois. Or, en fait de legislation, de morale et de
politique, les gouvcrncmens sontpcu progressifs : ils preferent,
et probablemcnt ils profercront encore long-tems un ecrivain
pcnsionnaire de Louis XIV, Icl que Grotius, a des ccrivains
quiaspireronta meltre les sciences des lois et de la morale au
niveau de toutcs les aiitres.
L'auteur du Traiie de Legislation est Ini-meme une preuve
de I'observf.tion que nous faisons ici. Lorsqu'il a ete appele ii
professer le droit naturel dans rAcademie de Lausanne, com-
ment a-t-il considcre son sujet? II nous le dit lui-mcme : il a
degage les sciences de la legislation et de 1 t morale des croyances
particulieres a chaque religion. Il n'a vu dans ces sciences que
la description des actions et des institutions humaines, des
causes physiques et morales qui les produisent, et des effets
qui en resultent rclativemcnt au bien-etre des hommes. «C'est
uniquement sous ce point de ■Cue, dit-il , que je me suis pro-
pose de les considerer; je ne venix ni etablir un systeme, ni
presenter sous de nouvelles formes un systeme imagine par
d'autres; mon unique but est, en ramenaut , s'il est possible,
les sciences de la legislation et de la morale a la simple obser-
vation , de fnire considerer cos deux branches de nos connais-
sances comme une partie de I'histoire naturelle de Vhomme. »
II est clair, d'apres cela, que l'auteur s'est completement
ecarte de la melhode suivie par les ecrivains qui I'ont precede
dans I'etude des memes sciences. Et ce n'est pas seulement en
theorie qu'il sen est ecarte, c'est surtout dans I'appUcalion; il
suflit, pour s'en convaincre , de voir la maniere dont il exa-
mine les systemes des ecrivains qui I'ont precede , et surtout
la maniere dont il decompose les lois. Mais , en s'ouvrant une
7$ SCltxNCKS MORALES
carriere nouvelle , on en s'ecartant de la route battue , il a etc
oblige de rcnoncer a Vcnseigncment. Les minislrcs dc la sainte-
alllance ont paru peu satisfaits dc voir lui professeur trailer
dcs gouvernemens el dcs lois en naluralis'e; soil qu'iis aienl eu
peur de voir figurer dcs barons , dcs dues ct des princes dans
une nomenclature d'histoire ualurelle, soil pour lout autre
motif (jui nous est inconnu , ils n'ont point approuvu les lecons
du professeur, ct Icurs notes diplomatique? I'ont oblige d'y
mettre fin.
Si , an lieu de fonder les sciences de la legislation et de la
morale sur robscrvation,et de les considerer comme une parlie
de rhistoire naturelle de rhomme, I'auteur s'etait sagemenc
attache a commenter Grotius par Barbeyrae, el a expliquer
Barbeyrac par Burlamaqui, jamais Ics ministrcs de la sainte-
alliance ne I'eussent trouble dans ses dissertations; il est done
vrai que les gouvernemens font de I'etat stationnaire des scien-
ces morales une des conditions de I'enseignemcnt public. TJn
professeur d'anatomie pent exposer ses idees sur I'organisation
du corps liumain, sans prendre d 'informations sur I'elat actuel
des membrcs de leurs excellences : tons les ministres fussent-
ils louchcs ou bossus, le laisseronl disserter sur les yeux et sur
les bosses , aussi long-lcms que cela pourra lui faire plaisir.
Maisil n'en est pas de meine dn professeur charge de I'cnsei-
gnement d'une des branches des sciences morales: avanl de
faire connaitre ses idees sur ce qui est juste ou moral, il faut
qu'il s'informe soigneusement de I'etat des raoeurs ct du cer-
veau de lels et tels ministres; et, s'il trouve que leurs excel-
lences ont Tesprit de travers ou les mosurs relachees, il fera
sagement de ne pas dire lout haul que le droit est droit, et que
Ic vice est funeste aux nations. A cette condition, on lui per-
meltra d'instruire les jeunes gens , et de les preparer a etre un
jour des magistrals.
Tandis que les hommes charges de renseignement public
sont obliges d'arrangcr, nous ne disonspas leurs peusees, mais
leurs paroles, de maniere qu'elles se Irouvent en harmonic
avec les pensecs ou du moins avec les paroles de tels ou lels
ET POLITIQUES. 79
niinistres, les ctudians sont obliges d'appreudre et de repeter
les paroles olTicielles qu'on Icur dcbite. Phisieurs circonstaiices
leur en font uno nccessite : la premiere, c'est que , pour cxer-
cer une profession, il ne suffit pas d'avoir des connaissanccs,
de la capacite, de I'liitegrite, des moeurs; il faut, de plus, et
ceci est le plus essenlicl, posseder un petit morceau de peau de
mouton au bas duquel est ecrit le uoni d'une excellence. Or,
pourobtenir ce precieux morceau de peau , signe incontestable
d'un grand merite, il faut avoir prouve qu'on a bicn retenu
les paroles officiellement prononcees par un homme portaut
une robe rouge et un bonnet carre.
Il y a deux nioyens d'apprendre ces paroles : Tun est d'aller
les saisir au moment on elles tombent du haut de la tribune
dans les oreilles des auditeurs; I'aulre, de les acheter chez le
libraire du professeur. Ce dernier moycn est le plus court et
le plus sur : tout etudiant qui, dans ses exaniens, pent prou-
ver a ses maitres qu'il a acliele lui exemplaire de leurs livres,
est a pen pres assure d'etre recu avec acclamation.
Les jeunes gens qui etudient ne sont pas, commc les hom-
mes qui enseignent, a la nomination des gouvernemens ; mais,
si les miiiistres n'instituent pas les etudians, ils les destituent
quelquefois; nous en avons eu des preuves nombreuses. C'est
pour les eleves une raison nouvelle de s'atlacher aux paroles
officielles que I'autorite leur fait distribuer pour leur argent,
et de ne pas trop examiner si ces paroles s'accordcnt ou non
avec la nature des chcscs. Un tcl cxamen pourrait fairenaltre
dans leur esprit des opinions qui s'accorderaient pen avec cclles
dont on leur a donnelesformules; et cette discordance, si elle
venait a se mauifester, pourrait bicn les faire destituer de
leurs fonctions d'ecolier.-
Enfiu , et c'est ici la consideration la plus grave, lors-
qu'on a obtenu le morceau de parchemin qui atteste la
haute capacite de celui qui en est porteur, et qu'en langage
uuiversitaire on nomme un diploine , il faut obtenir autre
cliose ; il faut, si Ton veut avoir part au budget, devenir
procureur du roi, sous-prefet, ou auditeur; etpour cela, rion
8o SCIENCES MORALES
n'est molns necessairc que la science, rien n'est plus utile ijue
I'art de reciter les formules des opinions officiclles. Les maxi-
mes (les uioines n'ont point peri avec les couvcns : sous les
monarchies constilulionnelles ou inconstitulionnelles, commc
dans les mouasteres, le meilleur moycn d'arriver a la fortune
a ete et svra long- terns encore de iaisscr aller Ic monde tclle-
menl quellement , et de dire toujours du Lien de monsieur le
prieur.
En faisant ces observations, je n'ai, en aucune manicre,
I'intentiou de fairc la critique de ce qui est. Toutes les fois que
I'ou considere les choses sous un point de vue scientiiique, on
est peu dispose a se plaindre. Les evenemens qui ne sont pas
bons en eux-mcmcs, sont bons du moins, comme Iccons ou
comnie experiences. Et , puisqu'en definitive il n'y a que les
experiences qui instruisent les Lonuiies, il n'y a pas de raison
pour qu'elles se fasscnt sur d'autrcs plulot que sur nous. Ta-
clionsseulementqu'elies ne soient pas perducs pouruosenfans.
Ce que je voulais expliqucr, c'est I'etat stationnaire dans le-
quel renseignement tient, dans presque toute I'Europe, les
sciences morales et politiques. La premiere cause de cet etat,
c'est le monopole de I'instruction , ou des influences qui
sont I'cquivalent d'un monopole. La seconde cause, c'est la
difficulte dans laquelle se trouve toute personne qui ne pro-
fesse pas les doctrines officiclles, de se creer une carricrc in-
dependante.
Mais, si les ecoles n'avancent point , le monde avance nial-
grc clles et les lalssc en arriere. Sous I'ancienne monarchic,
un hommc reccvait ordinaircmcnt trois sortes d'cdtications,
qui n'avaient entre elles presque rien de commun : I'education
du college, ccUe desa famiile et celle du jnonde. Aujourd'hui,
c'est exactement la meme chose; mais, la difference qui existe
entre I'education des ecoles et Tediication du monde, est bien
plus grande qu'elle ne I'etait jadis. Car, tandis que la plnpart
des professeurs officiels sont obliges, pour ne pas etre desti-
tues, de reporter les esprits de leurs eleves en arriere de plu-
sieurs siecles , les idees des nations font des progres rapides. II
ET POLITIQUES. 8i
JX'Sulte cle la que les jciiiies gens qui lie veulent pa> tester
etrangers aux progres de I'lspiil huinai;i , sont obliges cle faire
<knix gi-nrcs d'eliiiles dianielralcment opposces : il faut qii'ils
sacli.Tit au ])cs()iii icciler les c»piiiioiis dii terns passe coniiiie
si elies Iciir apparlenaient reellemciit; il faut, de plus, qu'ils
coniiaissent les idees de leur age, s'ils no veuleut pas que, dans
le inondo, on les pienne pour des niais.
Cette iRCcssite d'avoir une double doctrine, ctlle qui fait
reussir auj)res des goiivernonicns, et cclle qui fiiit reiissii- au-
pres ties nations, n'cst pas ce <ju'il y a de plus favorable aux
progresde la morale ct dela verite; mais elleest ceitainenient
ia circonstance la plus favorable aux ambitieux. Qu'unjcune
Iiommc, sortant du college, aille prendre pour argent conip-
tant les doctrines de tel ou tel professetir; qu'il reduise ces
doctrines en forniules , et en fasse le symbole d'une cioyance
sincere; qu'il eprouve nienie une picuse aversion pour toute
idee nouvelie, et qu'il repousse loin de lui les ecrits dans les-
qucls elles auront etc consignees, il pourra faire son chemin,
aussi loiig-tems que tels niinistres restcront en place. Mais, s'il
arrive una revolution rninisterielle, le voila un honinae perdu :
les formules d'opinions qu'il aura apprises ne lui seront plus
bonnes a rien ; quelle (pie soil sa sonplesse, il sera remplace
comuie un sot, avant d'avoir eii le teins d'apjirendre les for-
mules nouvelles.
L'observation que nous faisons ici n'ost pas une vaine sup-
position : elle est fondee sur des experiences qui durent de-
puis un demi-siecle, et qi;i se renouvellent sans cesse. Depuis
le commencement de notre revolution jusqu'a ce jour en elfet
ks liommes qui n'ont eu qu'une doctrine et qu'un !ariga;je,
ont loujours ele froisses par les evenemens quel que soil le
parti auquel ils se sont attaches. Ceux, au contraire , qui ont
eu dans I'esprit deux on frois especes de formides d'opinions
differentes, non-sculement sont toujours restes debout, mais
ont fait rapidement leur chcmin. Cela etait dans la nature des
choses : un homme qui possede une I'pec ou une langue a plu-
sicurs trancliaus, et (pii pent, selon les cireonstaiices , frapper
T. wxi. — Jinllct 182'i. 6
82 SCIENCKS MORALES
u droitc, ;"! gauche, an centre, eit toujoiirs piefi'ie a coliii
qui ne peut frapppr que d'un cote. Un tel homme nVst jamais
pris au dopoiitvu par les evenemens : il est fait pour ctreTatni,
Ic compaguon, le collcguc de tons Ics tninistres presens eta
venii'.
Lesainbilieux sontiloiic aussi intcresses a s.: tcnir au courant
des progres des sciences morales et politiqiief), que Ics hommes
conscienciinix, de qtulque parti qu'ils soient : c'est memc le seul
moven (|u'ils aient d'ecarler toujours ces derniers de leur che-
miu ; car ce serait une imprudence excessive de s'imaginer
que les mcmes formules d'opinion pourront scrvir pendant la
dnrec ordinaire de la vie d'nn homme. Ayant doiine cet avis
charitable aux honmies qui croiraient trouver, dans leurs pre-
juges et dans leur ignorance, des auxiliaires de leur amliition,
revenons au traite de legislation.
Le mot legislation a plusieurs significations. Quelquefois on
I'emploie pour designer les lois de tel ou tel peuple, ou seulc-
tiient une des prii:cipales parties de ces lois; d'auties fois, on
I'emploie pour designer I'art de donner des lois a une nation;
c'est dans ce sens que SI. Bcntharn en a fait usage. Enfin, il
sert a designer la science des lois, c'est-a-dire la connaissance
de leur nature, de leurs causes et de leurs effets ; c'est dans ce
sens qu'il est pris dans rouvrago qui sert de litre a cet article.
Lorsque Ton considere la legislation comme la connaissance
des lois de tel ou tel pays, ou comnic I'art d'appliquer Taction
du gouvernement a des faits delermines , elle sc trouve separec
d'une grande pai'lie de la morale : la jjuissance ties mosurs
s'etend beauconp plus loin (]ue I'autorite des lois. Ce sont, a
dit le savaTit auteur qui a mis en ordre ct public les ecrits de
M. Bentliam ( M. DuMONT,.'/t» Genei'e), deux sciences qui
ont le meme centre , mais qui n'ont pas la memc circonference.
Lorsque Ton considere les lois dans leui- nature, dans leurs
causes ct dans leurs effets, il u'est plus possible de separer la
morale de la legislation; les mceurs des peuples se montrent
alors, tantot comme elcmens de la puissance des lois, tantot
comme etanf au nombre des causes «|ui les produisent, et tan-
ET POLITIOUES. 8',
tot comiiu" ctant au nombre des offets qui en resultent. Aiissi ,
I'aiUeur clu traite de legislation n'a-t-il point separe ces deux
branches des sciences morales.
Ayant degage la science cle la legislation et de la morale des
croyances parlicniieres a chaque religion , il a etc neccssaire-
ment conduit a considercr les moeurssonsnn rapport pnrrment
scientifique.il les a etudiees dansleur nature , dans ics causes qui
lesproduisont, et danslcseffets qui en resu'.ient; il a particnlie-
rcnientclierche a determiner quels son ties services que pen! ren-
dre a I'liumanite la science de la morale, consideree sonsce point
de vue. Ces services lui out paf u tres-grands; et peut-eire les per-
sonnesqui lirontson ouvrageseront-ellesdu meme avis que lui.
De toutes les connaissanccs, il n'cn est aucune qui soit pins
iniportante et qui ait besoin d'etre plus universelle que cePe
de la morale. Un magistral , un jurisconsulte, peuvcnt sans
qu'il en resulle de graves inconveniens, rester etrangers aux
matiiematiques, a I'astronomie, a la physique; un mcdeciD
pent, sans danger pour ses malades, ne pas connaitrc les lois
du pays dans lequel il vit; un negociant pent, sans peril pour
ses pi-atiques, ignorer les regies dc la jurisprudence ; un miii-
taire pent, sans danger pour sa nation , ne pas connai tie Ihistoire
nalurellc. Mais, quelle est la profession, quel est I'art, le me-
tier, qui puissent, sans danger pour la societe, eire exerces
par des hommes etrangers a la morale? Quelle confiance pour-
rait-on avoir dans des magistrals et des jurisconsultes qui
seraient Ires-verses duns laconnaissance des lois de leur pay;,
mais qui n'auraient point de moeurs ? Quelle confiance inspi-
reraient aux malades el a ieurs families les medecins qui se-
raient les plus habiles dans I'art de guerir , mais qui n'auraient
que des moeurs corrompues? Les connaissanccs de tons Ics
genres accroisscnt la puissance de I'homme : mais cette puis-
sance pent etre employee a faire le nial comme a faire le bien;
il n'y a que la morale (jui en garantisse le bon emploi.
Chaque profession , chaque art exige des connaissanccs
speciales; mais la morale est neccssaire dans tous : elle ne doit
pas etre separee de la qualite d'homme. Ne serait-ce point
.S4 SCIENCES 'JORALES
paicr (ju'ello est indispensable ii toutcs les conditions, cjii'ellc
n'est enseijjnce dans ancitne? On seiait tenle de le penser :
mil ne so croit obligo d'etre plus lionnole honiine qu'iin autre;
«it qiiand on voit qu'il est possible de parvtnir aux fonclions
Ics plus importantes sans etre un ^^raiid nioraliste, on croi-
rait faire un metier de dupe, si on allait nicitre des scrupules
dans rexercico des plus humbles professions.
Mais, la morale n'cst-elle pas suffisamment enseignee par la
religion ? Ayant un tel appui, est-il necessaire de lui en cher-
cher d'autres ? Certes, si Ton jugeait de I'appui que les nioeurs
reooivent de la religion, par le nombre et par la vivacite ties
discussions religieuses dont nous sommes lemoins, il faudrait
etre bien difficile pour ne pas etre satisfalt. Mais, quels sont
les objets de ces vives et nombreuses disputes ? La probite , la
sincerite, la modestie , la simplicite, I'economie, la chastete,
la temperance, sont- dies miscs en question? Non , ce n'est
pas de cela qu'il s'agit. Les pretres auront-ils ime dotation
permanente, on leurs a[)pbintemens seront-ils porfes, clia(|iie
annee, sur le budget? Monseigneur sera-til condamnc ;i la
simplicite evangeliquc, ou bien aura-t-il uiic table so'iiptucuse
pour I'edification des fideles et la consolation dcsindigens?
Aura-t-il unc simple maison, ou lui batira-t-on un palais ? La
part du budget que s'attribue I'universite royak- , sera-t-el!e
prise par des jesuites, ou par des gallicaiis ? Les emplois
publics seront-ils a la disjjosilion des premiers ou des se-
conds? La puissance royale est-elle une emanation immediate
du droit divin, comme le croyait Bossuet; ou n'emane-telle
de la divinite que par lintermediaire du pa[)p, ainsi (|ue le
pense M. de La Mennais ? Voila les grandes questions qui agi-
lent I'eglise et unc partie du public; et, a vrai dire, nous ne
voyons pas ce qu'ellcs peu vent avoir de commun avec la morale.
Si nouspassonsdes<]uestionsquioccupent lesesprits, accqnise
])ratique dans le monde, nous ne trouverons pas que la religion
exerce sur la morale une influence tres-etcndue.Cette influence ne
pourrait avoir lieu (jue de deux manieres: par la predication ou
parlalecture.Or,on n'observo pas que cos multitudes de jeune*
ET POLITIQIJES. 85
gens qui liahitent les grancles villes et qui eliidient les sciences,
les ar;s, on le commerce, soient tres assidiisan sermon tic leur
paroisse ou se niineni en livres tic clt-votion. Qn'on nous tlise
si les eiuiliaris en mcdecine passent en ijeneral pour tres-ilt^-
vots, ct si les titiuiians en droit freqiienlent beaucoup les
ej^lises, a nioins (|u'ils n'aspirent a eire procureurs du roi?
Enfin, est-il bien prouve que les jeunes gens qui se deslinent
an commerce preferent le prone a une partie de plaisir ?
C'est un ma! sans doute; mais il sera difficile d'y porter re-
niede, aussi long-tems que les cnltes seront lihres, et qu'on
ne fera pas usage des conimissaires de police pour amentr les
gens a I't-glise; ct, si jamais nous en venons la, il y aura autre
chose a discuter que de la morale.
Puisque les grandes questions qui s'agitent, et qu'on dit re-
ligieuses, sont etrangeres a la morale, et que d'ailleurs les
lieux ou Ton dit qu'on I'enseigne sont ceux que les jeunes gens
Hx-quentent le moins, n'y aurait-il pas un moyen d'en rcndre
I'cnseignement profitable, en le rattacliant aux eludes speciales
nccessaires a I'exercice de chaque profession? Dans toutes les
ccoles, on apprend a lire, a ecrire, a compter, parce que dans
toutes les positions de la vie on a besoiu de lire, d'ecrire, de
calculer ; pourquoi done la morale ne seraitelle pas enseignee
dans toutes, puisqu'il n'est aucune position dans laquelle il ne
soit necessaire d'avoir de bonnes moeurs ?
II est vrai que, dans la plnpart des ccoles elementaires, on
donne quelques elemens de morale aux enfans; mais tons les
enseignemens ne sont pas propres a tons les ages. Exposer la
nature, les causes ct les effcts des passions et des habitudes a
des enfans chez lesquels aucune passion ne s'est encore tleve-
loppee, ct leur expliquer les rapports qui existent entre ks
individus de meme espece, avant qu'ils aient acquis aucune
notion sur rien, c'est tout au moins pcrdre son tems; ce tju'on
pent espt'rer de mieux en pareil cas, c'est souvent de ne pas
etre compris. L'enseigneuient raisonne de la morale ne com-
mence a etre veritablement profitable qu'au moment ou toijics
les facultt-s humaines se developpent, el ou chacun pen? com-
S6 SCIENCES MORALES
|)reii(lre Ic role qu'il est appele a jouer dans I'ordre social ;
c'est au moment ou chacun se livre aiix etudes specialcs qui
detciniinent la profession qu'il doit embrasser.
L'idce d'cnseigner la morale comme une science propre ii
toutes les conditions et a toutes les croyances iclit^ieuses, est
sujette a unc objection grave. Si la morale ne doit pas etre
basee sur telle ou telle croyance religieuse, qu'importe, dira-
t-on, que des incredules aient de bonnes ou de mauvaises
inceurs? Leur perle etant decidee, ne vaut-il pas mieux que
leur malheur commence dans ce monde, que s'il ne commen-
cait que dans I'autrc? Leurexempleneservira-t-il pas a rendre
religieux leshommes qui se sentiraient quelques penchans vers
I'incredulite? Si des hommes sans foi se disliiit^uaient jamais
par leur franchise, par leur probite, par leur humanite, par
leur temperance etpar d'autres vertus, ne serait-il pas a erain-
dre que la religion ne fut compromise?
Ces objections sont graves assurement; aussi serions-nous
d'avis de laisser les incredules s'engnger dans la carrier e du
vice, si Ic mal que le vice produit se concentrait tout entier
sur I'individu qui en est infecte. Mais, prenons-y garde; les
vices ne sont pas seulement funestes aux incredules qui les out
contracles, ils le sont aussi aux croyans que la foi en a ga-
rantis : un magistrat.corrompu ne se fera pas plus de scrupule
de commettre une injustice conlre un devot que contre un
infidele; un medecin sans moeurs abusera de la confiance dune
sainte, coninie il abuserait de la confiance d'une danseuse de
I'Opera ; Targent d'un saint homme n'aura pas moins d'attraits
pour lui marchand fripon , que n'en aura I'argent d'un vau-
rieu; an general sans honneurse vendra aussi facilenient i.\ un
usurpateur qu'a un roi legitime.
Convertissons les incredules si nous en avons le moyen;
mais, si nous ne le pouvons pas, lachons au moins d'en faire
des honnetes gens; si ce n'est pas dans leur interct , que ce
soit du moins dans celui des croyans. S'il etait possible de les
enchainer ou de les meltre en cage, ce serait assurement le
meilleur parti a prendre; mais, puisqnecela no se pent, il est
ET POLITIQUES. 87
hon qii'on les apprivoise ; et il n'y a que la morale qui piiisse
produire un tel effet.
La morale se lie a tout dans la societe, et il est des sciences
(lontelleest meme une parlie essentielle. Il est un grand nom-
bre de passions on de vices qui affectent les hommes dans
leur constitution physique. Or, comment est-il possible de
connailre et de traiter certaines maladies, si Ton n'etudie pas
les causes qui les ont produites? La morale ne serait-elle pas
la partie la plus imporfante del'liygiene? Cette question n'est
point de notre competence; mais nous pouvons la soumetlrc
du moins a 1' Academic de medccine. II ne serait pas diflicile
de prouver que la science de la morale est aussi essentielle au
magistrat, au jurisconsulte, a J'administrateur, au negociant,
que la connaissance des lois, ou du calcul.
Mais, la morale a-t-elle besoin d'etre enseignee? Peut-on
meme dire que c'est une science susceptible de demonstration ?
Chacnn ne trouve-t-il pas dans sa propre conscience lout ce
(ju'il a besoin desasoir?
Et quels sont les faits qui pourraient nous faire penscr qiie
la morale n'a pas besoin d'etre enseignee? Serait-ce le spectacle
de ce qui se passe journellement sous nos yeux? la probite,
le desinteressement, la bonne foi, la candcur des diplumaics,
des ministres, des administrateurs, des deputes, des elecleurs,
et enfin de tous les hommes qui participent d'unemaniere plus
ou moins directe au gouvernement? Serait-ce la moderation,
I'humilite, la bonne foi, le desinteressement des membres du
clerge? Serait-ce lacandeur,la probite, Kisimplicite des gens
d'affaires de toutes les especes? L'impulsitm donnee par les
hautes classes aux autres parties de la population serait elle
tellement salutaire, que I'enseignement de la morale dovien-
drait superflu?. Enfin, en snpposant que les moeurs de toiites
les classes de la societe, depuis les plus hauts fonctionnaires
jiisqu'aux simples artisans, sont tellement pures, qu'elles n'ont
plus rien a gagncr, il faudrait encore enscigner la morale, ne
fut-ce que pour conserver cette puretc.
Mais, ici , tine autre objection se presente : la morale pent-
«8 SCIENCES MORALES
file fi)rinc'r unc science ? En general les mornlisles nc I'onl
{lueie envisagee que comnie un art , et c'est peut-elre une dc*
causes dii pen de progtes qn'elle a fait. Mais, pourquoi iie
serait-eile pas susceptible de former une science anssi bien que
la connaissance de telle ou telle autre parlie de riuimnie ? Se-
lait-il plus difficile de soiuueltre a I'observation les aclifins et
les li.ibitudes huniaines, les causes diverses qui les produiseiit
et les effets qu'elles engendrcnt, que d'y sonniettre la nature,
les causes et les effets des maladies du corps humain?
II est vrai que les causes et les effets dune passion sont sou-
vent plus nombreux et plus etendus que les causes et les effets
il'une maladie. La goulte qui cnchaine un prince sur son fau-
tciiil , a des consequences nioins etendues que I'ainbition qui
Ic Iraine sur des champs de bataille. II faut convenir aussi
jptil est moins dangereux d'exposer les caracteres d'unc mala-
die physique, que d'exposer les caracteres d'une maladie mo-
rale. Le medecin qui guerirait un prince d'une indigestion , en
serail recompense par des honneurs et des richcsses. Le mora-
lisle qui tenterait de le guerir de sa gloutonnerie ou de sa
duplicite, pourrait en etre recompense par des amendes et par
la piison. Mais, ces differences ne changent rieu a la nature
des clioses; si elles ne donneut pas a la science du medecin
plusde certitude, elles ne sauraicut rcndre incertaine la science
du moraliste.
II est des personnes qui s'imaginent que la science de la
morale a ete revelee al'homme, et que chacun apporte en ve-
naut au monde toutesles notions dont il a besoin pour bien se
conduire. L'auleur du traite de legislation observe que cette
opinion se tronve dementie par les fiiits; il recounait qu'il
existe dans I'homme un sentiment qui lul faitapprouver ce qui
est bien, et condamner ce qui est mal ; il reconnait que ce
sentiment est inherenta notre nature, qu'il est pour les hom-
mes un principe d'action, et (jue, s'il n'existait pas, il n'y au-
rait pas de progies possible pour le genre humain. Mais il ob-
serve en meme teins que rintelligence est aussi necessaire a la
direction de ce sentiment, que ce sentiment est necessaire a
ET POIJTlnUE.S. «0
rinU'lligtncc, ijoiirqu'elle soit profitable. iSi cc sentiment, dit-
il, est ua fait incontestable, il est un autre fait qui ne me parait
pas moijis evident; c'est que I'intelligence, qui est propie ;i
i'homme, lui est aussi neccssaire pour se bien conduire, que li-
jjrincipe niemcquile met en niouvement. Privcz-lc de son jiriii-
cipe d'action, sesconnaissanceslui seront inuliles: vousu'ainrz
qti'un ctre passif. Privez-lc de ses connaissances, son principu
d'action ne lui sera pas moius iiuitile, si meme il nc lui est pas
funeste. Pour marcher avec surete, il ne suffit pas d'en avoir
le desir et de posseder des jambes; il faut de plus avoir des
yenx pour se conduire. »
' " Des liommes qui considerent comme une science, ajoufe
I'auteur, des senlimens comnnins a tous ies individus dont se
compose le genre humain, et qui cependant reconnaissent la
necessite d'ecrire et d'enseigner celte science , aflirment une
veritable contradiction. Si I'ecrivain, le professeur ou le pre-
dicatenr, n'importe le uom, ne pent dire a ses lecteurs ou ii
ses auditeurs que ce qu'ils sentent comme lui, il n'a rien a leur
apprendre; ils sont tout aussi savans que lui -racmc. S'il a des
sentimens qui lui sont parliciiliers et qu'il se propose de leur
communiquer, il doit reconnaiire que le sens moral ou la
conscience ne parle pas egalement a tout le monde. 11 faut alors
rechercher quelles sont los causes de la difference, et trouvcr,
sans le secours de rintelligence, des raisons qui soient capa-
bles de faire parler des consciences qui se talsent. Ou bien , il
faut determiner des hommes a se laisser dirigcr par un sens
moral qui n'est pas le leur, apres leur avoir ])ersuade qu'ils
ne peuvent pas trouver de guide plus sur que leur propie
conscience. II faut leur prouver que le sentiment moral , inhe-
rent a la nature humaine, ne recevant aucune direction de
I'intelligence, a tonjours bien dirige Ies hommes, et que ce-
pendant le christianisme a change Ies nioeurs d'une partie des
nations qui I'ont adopte, tandis que des nations qui ne sout
pa-; chretiennes , se livrcnt, par i)rincipes de conscience , a des
actions que notre sens moral reprouve. »
II semble a I'auteur que la plupart des pcrsonnes qui cxclucrit
90 .SCIENCB;.S MOllALES
rupplication dc I'intelligcnce do I'etude de la morale, n'oi.t
pas d'aiitre but <|ue de mettre Iciir raison i la place de celle
des aiitres. « Qu'on y regarde de pres, dit-il; qii'on suive la
conduite de la pliipart de ces liomiues, et Ton vcira que leuis
effets continuels ne tendent (|u'a former les consciences scion
ienr propre entendenient. lis veulcnt que cliacun obeissc a sa
conscience; niais, c'est sous la condition que ce seront eux
qui lui apprendront a pailer, et qui seuls , fornieront sou
langage. »
Mais, comment empecher que quelques individus re subs-
fituent leur entenlcmeut a renteudement du public? Par la
simple exposition de la nature des hoinmos et des choses, par
la science (|ni ne donne aucun emploi , qui ne vit d'aucun abus,
-qui ne profile d'aucune erreur, (jui n'a aucun orgueil a dcfen-
dre, iiucim pouvoir a conservcr. La question est de savoir
comment la morale et la legislation peuvent devenir des scien-
ces? C'est una des questions dont la solution doit determiner
la base de I'ordre social; elle est d'uue importance si clevee,
qu'il ne serait pas possible de la traiter dans un article de
quelques pages; a plus forte raison , ne peut-on pas la trailer
sur la fin d'un article. Nous nous borncrons a renvoyer ccnx
de nos lecteurs qui voudraicnt s'eclairer sur la maniere de
traiter cette question, a la lecture de I'ouvrage que nous au-
noncons ; car on y tr.tite au nioins autant de la morale que
<le la legislation.
L'auteur , ayant considere les lois dans leur nature , dans
leurs causes et dans leurs effets, a dii etre necessaiiemeut cou-
duilaparier des moeurs, puisqu'il est impossible que Ics moeurs
n'entrent point dans les lois, comme causes, comme parties
conslitutives , on comme resultats. II doit done se trouver une
certaine ana!ogie entre le Traite de legislation , etVowyxa^G
qu'a public recemment un de nos meilleurs moralistes; nous
voulons parler des Applications dc la morale h la politique par
M. Droz. ( Voy. ^t't'- Enc. , t.xxx, p. 655 ) La principale diffe-
rence qui existe entre ces deux ouvrages consiste dans la me-
ihode. Dans le premier, la morale est fraitec comme une
ET POLITIQUES. 9'
science; dans le second, elle est traitee comnie un art. Dans
l"nn,rauteur a siiivi la melhode d'ex])osition; dans I'antie,
I'auteur a donne des preceptes ou dcs conseils. Celiii-ci per-
suade par la douceur de ses lecons; celui-la cherche surtout
a convaincre par ses raisonnemcns; mais dans tons les deux le
resultat est a pen pres le nieme. On observe, dans I'lm et
dans I'autre, la mome absence d'esprit de paiti, et la meme
aversion pour I'oppiession et rhypocrisie. L. C. F.
HiSTOIRE DES EXPEDITIONS MAUITIMES DES NoRMANDS, Ct
fie leur etablissement en France au dixieine siecle ;
par G.-B. Depping. Ouvrage couroniie en 1822 par
X Academie royale des inscriptions et belles-lettres (i).
Le choix des questions raises au concours par I'Academie
des inscriptions et belles-lettres, depuis un certain nombre
d'annees, nous revele I'eiTibarras de ce corps savant. On lui
a fait renoncer au titrequ'il portait dans I'lnstitut, declasse
des sciences politiques et morales ; c'etait un avertissement de
ne plus s'occuper de I'encouragement de ces sciences. Sous
I'ancien regime, I'Academie des inscriptions et belles-lettres
avait en I'ambilion de s'elever au-dcssiis de son litre, ellc s'e-
tait propose pour objet de ses recherches, non point le champ
etroit des inscriptions, mais I'histoire ; elle avait entrevu que le
but de rhistoire c'est de recueillir les experiences de la vie
sociale,qui peuvent eclairer les hommes sur les nioyens de
devenir meilleurs et phis heureux; elle avait eclaire I'histoire
universelle, et meme I'histoire nationale de quelqucs rayons
phiiosophiques , et elle elevait les savans francais vers la de-
couveite des sciences politiques ct morales.
Maiseiisupprimant le nom honorable de la classe de I'lnsfi-
tiit, il parait, qu'on lui a donne avec une designation insignifiante
un devoir negalif; qu'en lui permettant I'histoire, on ya mis
(i) Paris, iSafi; Ponthieu. 2 vol. in-8°; prix , 12 ir.
(}i SCIEJJCES MORALES
pour condition qu'ellc en iejJiiusstTail soi^niuseinent le poisoii
de la philosophic, »le la morale et tie lii poliliquc. On ne pou-
vait empecher line Acatli'nile cle decerner des prix , de recueil-
lir, de fnirc imprinier des inemoires, de laisser parler ses
iiH'ml)rcs dans une seance publiqne. Facheuse iiecessile, car il
valid rait mienx que tout le inonde se tiit. Un organe du pou-
voir, en presidant la Sociefe royale d'Atjricidture , I'a bien
fait scntir a ces academiciens, il lenr a bien ensei^ne cpie comme
le plus beau perfectionnement qu'on demandat aux agricul-
tcurs etait le rctour anx usages de leurs peres, le plus bel
exemple que Icssavans pussent donnci' ;'i leurs t'leves etait ce-
lui du silence. Mais ce sont la des choscs qu'on dit larement
aux Academies, et (prelies-memes ne disent jamais an public.
La tache de cellequi avail du renoncer anx sciences politiques
et morales comprend done en meme terns I'obligation de pro-
voquer des memoires savans , et de fermer la porte h celte fa -
tale philosophic; de faire etudier, et tontefois d'enipecher
qu'on ne pense.
Lesujet propose pour le concours de 1820 a para sansdoute
reunir assez bien ces deux conditions. Lcs concurrcns ont du
« developper d'apres les monnmens historiqucs , surtout du
nord , les causes des nombreuses emij^rations des peoples con -
nus sous le nom de Normands, et faire I'histoire abregee de
leurs etablissemens en France. » II y a a peine dans I'histoire
du moyen age uuevenemcnt plus etrange, plus importantdans
ses consequences, et cppendantplus nial connu, que I'invasion
de tont I'occident de TEurope par des brigands qui arrivent
dans de petits bateaux, au travers des mcrs les plus orageu-
ses, qui detruisent toute civilisation et toute Industrie, dans la
plus grande partie de la France, dans les lies Britanniques, la
Belgique, la basse Allemagnc, les cotes d'Espagnc, el qui
apresy avoir presqnc aneanti la population ancienne , y fon-
dent de nouveau de grandos nations.
La comparaisou des chroniques des pays devastes par les
pirates, avcc lcs monnmens historiques et surtout les chants
gurrriers des vaiuqucurs, demandait une vastc. erudition et la
ET r()LlTI(^)L'ES. y'^
connaissance de lanj;ties nt'gligtes par la plupai t des sav.ms ;
et en meme tems le snjet etait si cloigne de nos terns, dc nos
moeiirs, des questions que nous dcbattoiis, des dangers (juo
nous courons, qu'il scn)blait impossible d'y fairc intervenir
les questions de politique et de morale dont on redonte I'appli-
cation : que peut-ii y avoir de commiin entre les rois de mer
qui conimandalent ces expeditions devastatrices , et la repre-
sentation nationale, entre la vente des esclaves enleves en
France et le jury, entre I'incendie de toutes les villes situces
jnsqu'a cent lieues des cotes et les usurpations du clerge ? La
question seniblait faite pour provoquer un bon ouvrage sans
alarmer ceux qui nous reprochent sans cesse notre indiscre-
tion de vouloir nous meler de nos affaires.
L'ouvragc couronne doit en effct avoir repondn double -
inent aux vues de T Academic, et par I'etendue de I'erudition ,
la recherche conscieueieuse de tons les aneiens monumens du
nord , de tons les travaux posterieurs des erudits scandinaves,
4le toutes les ehroniques latines et fiancaises , en vers et en
prose de la France, et par la circonspection avec laquelle I'au-
teur s'est abstenu de tout resultat politique. En effet, malgre
I'heureux choix de la question proposee, dans un age oil Ton
vent toujours considerer I'liistoire comrae nn recueil d'expe-
riences politiques et morales , on pouvait encore craindre que
i'auteur ne se demandat comment il ariivaitque la France ne
futplus au x^ siecle que le patrimoine de prelats et dc moines
incapables de la defendre , car les institutions du pays vaincu
eurentplus de part encore que celles du pays vainqueur a ces
grands evtnemens. Si M. Depping s'etait egare sur cetle voie,
il n'aurait probablement pas ete couronne , et nous y aurions
perdu un bon ouvrage. Un ouvrage qui excite et soutient la
curiosite, par des details piquans et neufs, sur un sujct dont
on s'etait toujours detourne avec degout; nn ouvrage qui con-
tient un tableau complet de cette giande revolution, de ses
causes dans I'organisation sociale des peiqjies scandinaves, et
de ses effets dans la desolation de la France, depuis la premiere
apparition dis vaisseaux normands sur ses cotes, jusqn'a Tela-
9/i SCIENCES MORALES
blisseineiit apres mi siecle it clriiii tie dcsastres d'une colonie
do brigands qui se changeroiit en citoyens utiles, dans le pays
memo qu'ils avaiont dosolo.
L'ouvragode M. Dcpping so divise en donzc cliapitrrs, outre
un aj)pendicc qui CDntient des eclaircissemcns ci des pieces
justificatives. Lcs trois premiers chapitres formant ensemble
80 pages sont destines a peind re I'efat social delaSeandinavie, a
rej)oqt;eou ce pays pauvre, barbare et presque desert entre-
prit la conquete de I'Europc. La Norvogo, le Danemark et la
Suede contenaient alms des cenfaines de pctits etats indepen-
dans les uns des autres :leur seule indnstrie elait uno chttive
agriculture, la pcche et la guerre; les denx premieres leiir
fournissaicnta peine une miserable subsistance, la guerre elan t
le seul moyen d'acquerir des ricliesscs, tout elranger etait en-
nemijtoutc propriete etrangere etait de bonne prise, la pira-
teric et le brigandage etaient lcs seules carriercs ouvertos aux
hommes avides de gloire, ct toutcs les institutions nntionalos
encouragcaient, non pas la valour seulement mais la fureur
guerriere.
Les rois, et ce nom etait donno non -soulement aux chefs
des etals , mais aux chefs des bandes erranles on aux chefs de
pirates, nc devaicnt les dislinclions qu'on leur accordait , 011
I'autoiite limilee dont its etaient revetus qu'a lour valeur per-
sonnelle, et a celle des champions ou des braves qui s'etaient
devoues a eux. Ces champions qui devaient donner an reste
des combattans I'exemple du devoument et de la valeur, etaient
des hommes en qui les passions gnerrieres avaient ete poussees
au dernier degre d'exallation. « L'histoire et les Sagas nous en-
seignent, dit M. Depping , qu'il prenaita ces heros de terns a
autre, des acces de frenesie, provenant probablement de
I'exallaliou de leur courage, et j)eut- etre aussi de I'usagede
quelque boisson qui portait a la fureur. Dans ces acces ils
ccumaient, ils ne distinguaient plus rien autour d'eux,lcur
tete , comme saisie d'un vertige, ne dirigeait plus leurs actions,
leur glaive frappait indistinctement amis et ennemis , les etres
vivans, les arbres et les pierres ; ils detrnisaient leurs propres
ET POUTIQIES. 95
effets , et sV'iUouraient quelqiiefois cic victimc; de leiif fero-
cile. La laiigue du Nord avail un teiiin- paitictilier pour diri-
ger les champions sujets a ces transports au cerveau, c'est
celiii do Derscrher [\). Ce mot revient si frt-cinomment dans les
Sagas que Ton doit rogarder I'etat de frenesie qii'il designe
comme etant devcnii presqtie habitiiel aiix pirates qui passaient
leur vie a croiscr en mer et a sc battre en duel. II est dit de
Sivald, nomme par acclamation roi de Suede, que ses cinq
*fils etaient Berserker. Dans leurs acces dc rage ilsavalaient des
charbons ardens, et se precipitaient dans le feu. Ce Sivald fut
detrone et tue avec ses cinq (lis par I'ancien roi Halfdan qui
reprit ria j)lace , et qui eut ensnite a lutler contre im autre Ber-
serle nouiiue Harlbe/i , qu'accompagnaient douze champions.
C'etait un pirate redoulable : durant ses acces de fureur ses
oompagnons avaient de In peine a I'empechcr de tout devaster
autour de lui. Le roi Halfdan s'offrit a combattre contre toute
la troupe. A cette offre la lierle du pirate fut tellement offen-
see qu'il tomba dans un acces pendant lequcl il tua six de ses
compagnons fideles. II marclia avec les six autres contre Half-
dan, qui les repoussa I'un aj)res I'autre a coups demarteau. —
Les Sagas assurent egalement des fi!s d'Arngrim , roi d'Hel-
geland, que dans leurs courses sur mer iis etaient emporles
quelquefois par la rage; qu'alors ils tuaient leurs gens el de-
truisaient leurs bateaux, ou bien ils debarquaient dans quel-
ques lieux deserts et exercaient leur fureiu'aveugle contre les
vochers et les bois. Apres leur rage ils eprouvaient un long
epuisement de leurs forces^a). »
Les brigands du Nord apres s'etre pillesreciproquenient at-
taquerenl bientot les peuples plus meridionanx chez lesquels
ils esperaient trouver plus de I'ichesses et moins de resistance.
Dans le quatrieme chapitre et les deux suivans M. Depping
(i) Pekingskioeld, dans sa traduction du Heimskrinijla de
Snorro, explique le terme de Berserke pw piigil rabiosi/s. Voyez
aussi I/tre Glossor. Sveo- Goth. Ramelius de bcrserkis , et Lysholm
de Furore gigant. Seplentr. Berserher-gangii dicto. ( Note de I'auteur. )
(a) T. I , p. 46.
ijG SCIENCES MORA.LES
rac'oiiti! it'ur premiere apparition siii- les Cotes de lamonarchie
ties IWerovingicns , puis de celie de Charlemagne. II Ics montrc
ensuilc s'cnhardissant pendant les regncs de Louis-le-Debon-
naire et de Cliarles-le-Chanve, lorsque la France lie coiitenait
presque jiliis dc poindation militaire.II les montre remontant
pUisieurs fois par anni'c le Rliin, la IMeusc, la Sommc , la Seine,
la Loire, la Garonne, aiissi loin que ces rivieres portent des
bateaux , ot pillant a plusieurs reprises Paris et loutes les villes
sur leurs bords, Dans Ic 7™^chapitre il raconle le siege que les
Parisiens soutinrcnt en8H5 contrc les Normands. Dans le S""* ,
il fait voir I'influence de ces emigrations snr la Scandinavie ,
la rennion des pelits etats en monarchies absolues, et la fon-
dalion de la republique d'Islande par les emigres. Les deux
chapitres suivans sont surtont consacres aux expeditions de
lloUon en Erance, et a la cession qui lui fut faile en 912 de la
NoYmandie : les deux derniers chapitres de I'ouvrage font cori-
iiaitre I'histoire abregee des dues normands et la fusion des
j)euples dans la nation francaisc.
I,cs expeditions des Normands sout presque inexplicables ,
par les obstacles seuls que devaitleur opposer la nature, meme
en comptant pour rien ceisx (]u'ils auraient pu atlendre des
hommes. On nous (lit bien qu'ils avaicnt un cam]) retranche
dans quelque ile k I'embouchure de la Seine et h celle de la
Loire; mais il n'y parait point qu'ils y laissassent leurs gros
vaisseaux pour remonter les rivieres avecde nioindres bateaux;
les memos navires qui etaient partis des cotes de Norvege re-
montaicnt la Seine jusqu'a Paris; bicn plus les Normands les
trainaient sur terre pendant plusieurs milles, pour les remettre
a flot dans la Seine, la Marne ou I'Oise, au-dessus des obs-
tacles par lesquelsles Parisiens avaient cru les arreter.
Ces bateaux devaient done ctre bien legers, bien petits, con-
tenir bien pcu d'liomnies et point de chevaux. M. Depping
estime avec raison que chacun ne devait pas porter plus de
vingt homiTK^s (1). Les chroniques n'attribuent je crois a ai»-
(0 Tome 1, p. 98.
ET POLITIQUES. 97
cune flotte norniande plus de deux cent cioquante bateaux.
C'est done environ cinq mille hommes pnurleurs plus fortes
armees, et cinq mille hommes sans superiorite d'armes, sans
autre cavalerie que les chevaux qu'ils volaient aux paysans. II
ne faut pas en effet s'arreter aux exagerations des vaincus sur
le nombre de leurs vainqueurs , ou au nombre des morts in-
diques dans quelques legendes; qui ne salt combien aujoui-
d'hui meme avec nos controles reguliers, notre experience mi-
litaire et nos gazettes, nous soramessans cesse tronipes sur la
force des armees par les exagerations populaires. Ainsi done
la France entiere etait liors d'etat d'opposer une resistance
efficace a des bandes de quelques milliers de brigands, qui
s'enfermaient elles-memes dans ses rivieres.
J'ai dit dans I'histoire des Francais que cette audace des
Normands ne pouvait s'expliquer que par I'extinction presque
absolue de la population rurale, et que celle-ci avail du etre
la consequence de I'esclavage auquel la conquete des Francs
Carloviugiens avait reduit les paysans. M. Depping remarque
queje n'ai point cite de temoignageshistoriques de cette extinc-
tion de la population (1). Je pourrais m'en tenira ceux qu'il
cite lui-meme, I'abbe Jigo de Vavres , et la chronique de Be-
noit de Saint-Maur. «La plus grande desolation, dit-il d'apres
eux, regnait dans tonte la contree; les villes etaient niinees,
les eglises et monasteres pilles et devastes; des arbres tonffus
croissaient au-dessus des murs qui restaient encore debout. Les
paiens avaient disperse les habitans , et, s'ils avaient epargne
lenr vie, ce n'avait cte que dans I'espoir d'lme forte rancon.
De ceux qui avaient habite les campagnes, les uns s'etaient
expatries pour s'etablir dans Test, d'autres avaient mieux aime
aftendretous les dangers que de quitter le sol paternel; d'au-
tres encore, rompant les noeuds les plus sacres, s'etaient pre-
cipilesau devant de ces cnnemis etrangers, et pour gagner ieur
confiance, ils les surpassaient en cruaute, en trempant leuis
(l) Ch;ip. VI, p. a44-
XXXI. — Jui//ft i'i<26. 7
98 SCIENCES MORALES
inaiusdansle sargdelcurs amiset ilolciirspnrcns. Ducote Jj la
mer la terrc rcstait incuhc ; Ics hoinmcs s'ctant tons jcles clans
dcs lieux bien fortifies : le reste dii pays offrait a peine aiix
regards un etre humain. II en etait de mcmc dans le nord et
le cenire de la France » (i).
Maisniucstejc necroispointqueksflnclnationsdelapopida-
tionaiont jamais clc as^cz bienobscrvccspar Ic.sliistoriciis, pour
qu'on piiisse Ics otaiilir paili'iir tc-moignagc diroct. II faiit com-
biner lour ruci t aveclt-s notions que nous donne ri'conoaiio poli-
tique, sur les causes de I'augmentation ou de la diminution dc
la population : il faut d'autre part jugcr du nonibre dcs hom-
nies par leschoscs qu'on Iciir voil fairc. S'il y avail eu dans les
campagnes dc France un homme sculemcnt pour vingt qu'on
en voit aujourd'hui , les paysans se seraient dcfcndus coiitre
les Normands. Ceux-ci ne sc conlentercnt pas dcbruler leurs
granges, d'enlevcr leurs bcstiaux , Icurs fcmmcs ct Icurs en-
fans, le plus souveut ils sc faisaicnl un diverlisscmcnt de les
tuer. Les Normands ;"i pied , combatlant avec la hachc ou Te-
pee , sans armures defensives, niassacraicnt dcs paysans ro-
■bustes qui avaient sous la main ilcs faux, dcs haclies ou des
inassups. Le soUlat d'un dcspote pent fairc trembler des cen-
taines de paysans, parce qu'iis savent que lout le poids d'un
gouvernemcnt sans pi tie I'appuiera ou le vengera : mais la
Normand etait un brigand isole, et le gouvernemcnt quel-
que faible qu'il ful , etait du cote du paysan. Nous voyons
deux cents Normands separes de leurs compagnous d'armes,
s'avancer jusqu'aupres de Paris, pour ravagcr scs alentours(2}.
C'esl a mes ycux une preuvc sufdsante qu'iis ne riscpiaienl pas
d'y rencontrer un attroupemcnt de deux mille paysans.
L'immense etcndue de pays que les Normands dcvaient par-
courir avant d'avoir rcmpli de butin cinquante ou soixantc
mauvais bateaux, est encore une preuvc dc la depopulation
universellc du pays. Quand on songe qu'iis cnlrainaient le plus
(i) Chap. V, p. i6o. — (j) Chap, vi, p. 197.
ET POLITIQTIES. 99
souventhommes, chevaiixet hetail (i),et qii'ils se charge.'iient
en meme terns do vivres , il semhlc que Ics dc'poiiilles d'lin seul
■village auraicnt suffi pour remplir leiirs bateaux, et Ton voit
au contraire qu'ils parcouiaient souvent quatre cents lieues
carrees, avant que leur chargement fAt accompli, ct que dans
ces expeditions au sein de la France , ils souffraient souvent
tie la faini. Quant anx prisonniors et au betail, il est vrai qu'on
doit siipposer que ce qu'ils avaient achete dans un lieu ils
cherchaient a le revendre dans un autre. Les prclats auxqucls
apparienait lesol presqueentier de la France, quand ils avaient
perdu Icurs laboureurs en rachetaient d'autres pour ne pas
pcrdrc tout revenu.
M. Depping accuse a plusieurs reprises la noblesse fcodale
dc I'clat de faiblesse ouse trouvait la France. Cette accusation
n'cst peut-etie pas tres-meritee : la noblesse n'est nullement ea
evidence pendant les regnes des Carlovingiens; la partie mili-
tairc de la nation avail ete entrainec par Charlemagne vers la
fronliereseptentrionale ct orientale deson imnienscempiredcs
terresdu centre avaient presquetoutesete donnees anx eglises.
Diirant les regnes de ses successeurs, nous voyons beaucoup de
guerres cntre les princes du sang, aucune entre les nobles :nous
voyons que les Normands dans Icurs in^»asions ne rcncontrcnt
jamais d'autres lieux forts que les egliseset lescouvens; nous
voyons que les plus grands seigneurs de France etaient le
grand abbe Hugues, puis d'autres eveques et d'autres abbes :
nous voyons enlin qu'au x"« siecle seulement les tcrres im-
menses, on plutot les provinces que possedaient les e^lises,
passerent sous des titres divers ci la noblesse, qu'alors celle -ci
commenga a batir des chateaux, et que des que la terre fut
herissee de forleresses feodales, les invasions des Normands
devinrent impossibles.
Les chroniques des ix*et x'siecles ont ete ectifes par des
(i) Chap, vr, p. 93i.
lOo SCIENCES MORALES
nioines, qui la plupart, a I'approche des Normands, s'eii-
fiiyaient avcc leurs reliqiies versquelqiies provinces reculees :
la plupart sont interrompues a cette epoque,les archives fu-
rent inccndiees, I'histoirc devint silencieuse, et les vastes
deserts rendent seuls temoignage de ce que la race humaine
eut a souffrir a cette epoque. Les moines en petit nombre qui
continuercnt leurs chroiiiques, n'observaient jamais , ne com-
paraient jamais, et ne pouvaient rien peindre. II ne faut pas
suppleer a leur silence par les romans et les chroniques en
vers frau9ais, qui ont ete ecrits au moins trois siecles plus
tard, quand I'etat de la societe avait absolument change. Ces
chroniques nous font sentir que la France etaic morte au com-
mencement du xe siccle. On n'y voit ni noblesse fiere et turbu-
lenle, ni soldats pour repousser des poignees de brigands, ni
paysans pour fermer par quelques pilotis I'embouchure des
fleuvcs; ui butiu de quoi enrichir, meme de quoi nourrir quel-
ques milliers de barbares. C'est a I'ecouomie politique a nous
apprendre avec quelle rapidite I'esclavage et la misere font
disparaitre la population, avec quelle rapidite la demande de
travail et la securile la font renaitre. L'histoire vient ensuite
confirmer la theorie. Elle nous appreud quapres la peste de
1348, qui enleva a TEurope la moitie de sa population , il ne
fallut pas vlngt ans pOur que le vide fut comble. II est pro-
bable que cette peste fit perir en France trois ou quatre fois
plus d'liabitans que le pays n'en contenait au temsdes Nor-
mands : il est egalement probable que le repos qui suivit la
cessation de leurs invasions, et I'amelioration de la condition
du peuple aux x^ et xi® siecles , multiplierent rapidcment Ic
nombre des habitans; car bientot apres la France se raontra
vivante, active, et energique dans toutes ses parties.
Nous ne pousserons pas plus loin nos observations et nous
renverrons nos lecteursa I'ouvrage meme de M. Depping,pour
ychercherles traits piquans,les details neufs et caracteristiques
qu'il a su emprunter lour a tour aux Sagas du nord , aux lais,
romans et poemes de I'ancicnne France. Une erudition con-
ET POLITIQUES. loi
sciencieuse, ct une elude intelligente de tous les monumens dcs
tems passes, justifient Ic choix que I'Academie a fait de son me-
nioire pour lui decerner le prix. En meme tems celte lecture
fera reflpchir sur les tems de barbaric , et le public qui s'attachc
aujourd'hui a I'etude des sciences politiques et morales, non a
celle des inscriptions et belles-lettres, trouvera que la question
qu'a traitee M. Depping meritait en effet d'etre traitee , quel-
qu'eloignee qu'elle parut a la premiere vue de toute application
k I'utilite sociale.
J.-C.-L. DE SiSMONDI.
LITTlilRATURE.
OEuvEEs cojjPLi-TEs DE J.-J. RoTTssEAu, en un seul
volume (i).
Cefte nouYclle edition doit plaire aux nombrcux amis du
pliilosophe de Geneve, en Icnr offrant sons nne forme porta-
tive et tres-commode, dans im senl volume imprime par un
de nos liabiles typograplies (BI. Foitrnier), avec dcs carac-
tcres d'nne neltete rcmarquable, la lotalite des ouvraijcs de
Ce c;rand t'crivain.
On troiivc d'abord ses Discours phtlosophiqucs qui com-
mencerent sa reputation pt qui Ini revelercnt a lui-nicmc le
secret de son talent dVcrire et de son genie; puis, son Emile
qui deviut le manncl des meies de famille, et qui, les rappe-
lant an premier comme au plus saint des devoirs, produisit
une sorfe de revolution douce et bicnfaisante dans les mosurs
domcstiques, inlroduisit parmi les femmes des classes riches I'li-
sage presque fombe en desuetude d'allailer l8urscnfans,et par
cola seul les rendit dotdilcment meres, a la fois nourrices et
inslilulrires des innocentes creatures, dont elles se debarras-
saient auparavant comme d'un fardeau , en les envoyant loin
(i) Paris, 1826. Sautelet, place rjc la Bourse; Verdi^re, qua! des
Augustins; A. Dupont ef Roret, rue Vivienne. Gr. in-8° de 1708 p..
avec tieiix tables, I'une dcs matiercs, I'autre des corrcspondans de
J.-J. Rousseau. Prix, .Tr, fr.
N. B. On souscrit, aux m^mes adresses, pour les OEwres com-
pUies de VoLTAjRF, m^mes format, pnpier et caracteres que les
OEiivres de J.-J. Roiissf.au. 2 vol. in-8°, paraifsanten 60 livraisons,
de 2 fr. 5o c, chacune. La publication dp eel ouvrage sera ache-
T^e dans I'ann^e i8a6.
LITT^RATLRE. io3
d'clles, apres leur avoir donne la vie, pour Ics confier a tics
mains ctrangeres et mercenaires, dans lesqucllcs ces viclimcs
d'une coulume barbate trouvaient souvcnt la mo:t.
Aprcs VE'/iUc, vicnt le Discours sur reconomie politique ,
oil (!cs erreurs graves, qui tiennent a I'ignorance gonerale ct
aux prt-jiigt's de I'^'poque sur Ics questions compliquees que
ccHe science embrassu , n'empechent point que Rousseau n'ait
eu le merile d'lippeler rattcntion des hommes du moncie sur
line branche importante du savoir humaiu, alors dedaignee,
on reservce a quciquos adcptcs, et ri'.iit ainsi ete, en France,
I'un des precurscurs de notre grand economistc (!M. J. B. Sat),
qui, par scs ouvrages, dcvcnus classiques, a rendu la con-
naissance dc reconomie politique populaire en FAU'ope, et
dont nous reclamons les Iravaux ct la gloire , coniine etant
du domaiue dc la gloire nationale, quoiqu'il soit aussi ne ci-
toyen de Geneve.
Les ecrits sur \a politique pioprement dite succedent a ceux
qui traitcut de Ycconoinie politique : tel est I'ordre naturel et lo-
gique des i decs : il faut assurer a la societe des uioyens d'exis-
tenceet d'aisancc, des riehessfs etdu bien-etrc, avant de son-
gera perfcclionner son organisation. Etueanmoins, unepreniiere
organisation, bien qu'ebauchee ct tres-inqiarfaite, est une
condition necessaire pour que la societe puisse frouver dans
le travail dc ses mcmbrcs la source des ricliesses parliculieres
ct pubrKjues. Ainsi, les sciences econouiicjucs et politiques
sont etroitement unies les unes aux autres, et se pretent un
mntuel secours. Nous ne pouvons nous dispenser de signaler
ici I'affligeante lacune que prescnleut, sous ce rapport, notie
~ legislaticu sur I'eiiucativn et notre systeine universilaire , qui
n'admettent pas encore I'economie politique an nombrc des
sciences cnseignees dans les cours publics de iios colitises el
dc nos ecoies speciales, on Ton forme des philologues, des ma
lliemaliciens, des niedeeins, des jurisconsultes, des theologiens,
sans prendre aucun soin pour former des administrateurs.
Le discours sur VEconomie politique , -^ consideree comma
le sage et legitime gouvcrncment de la granule famillc, qui est
io4 LITTEllATURK.
r^tar, pour le bien commun <le toiite la famille, » est immedia-
tement suivi du Contrat social , ouvrage d'une dialeclique in-
vincible, si la legitimite dii litre n'est point contestee. Get ex-
pose hardi des principes du droit politique , qui a rendu aux
Fiancais la conscience de leurs droits, comnie VErnile avait
rendu aux meres le sentiment de leurs devoirs, renferme, au
milieu de plusieurs vues incompletes ou fausses, quelques
hautes ct profondcs vcrites, long-terns etouffees, et mises peut-
etre alors pour la premiere fois a la portee d'un grand nombre
d'esprits, par la plume eloquente et independante d'un homme
libre.
Les Considerations sur le gouv :rnement de Pologne , et les
Lettres sur la legislation de la Corse, quoique inferieures aux
autres productions du meme auteur, dont I'esprit, habitue
h generaliser ses pensees, n'elait peut-etre guere propre aux
a|)plications speciales, sont neanmoins deux germes feconds,
qui, sous I'influence d'une raison superieure associee a une
sage politique, produirunt un jour leurs fruits en faveur d'une
grande et genereuse nation , destinee k reparaitre sur la scene
politique, et d'une autre contree remarquable par le carac-
tere national de ses habitans, et digne , comme la Pologne,
des rechcrches du voyageur, des meditations du philosophe ,
des soins eciaires du legislateur, des vceux bienveillans de I'ami
de I'humanite.
L'extrait du Projet de paix perpetuelle , rove philantropi-
que de I'abbe de Saint-Pierre, nous rappelle involontairement
cette alliance de rois, qui , suivant les expressions recemment
employees par un jeune academicieo, dans une ceremonie so-
lennelle ( M. Guiraud , Discours de reception a I'Academie
francaise, i8 juillet 1826), f<aurail pu etre nommee sainte, si
elle n'avait pas oiiblie qu'il existe aussi des chretiens dans I'O-
rient; » et (nous devons ajouter pour completer cette pensee et
pour devancer le jugement de I'histoire ), si elle avait su com-
prendre son siecle et accomplir sa destination; si, egaree par
des craintes piisillanimes, par des conseillers aveugles ou per-
r<Ts , entraincc dans de fausses consequences par un prin-
LITT£RATI)RK. ioS
cipe chimerique , par des pretentions surannees, an lieu d'obeir
anx premieres et nobles inspirations de ses principaux chefs,
el surtout du nionarque bien intentionne, vertneux, mais d'un
caractere faible et mobile, qui en fut le fondateur, elle u'avait
pas mis en opposition, avec una maladresse deplorable, les
interets des g'ouvernemens et ceiix des nations.
On relit encore avec iin vif itileret, dans la collection qui
nous occupe, les Lettres polemiques , et surtout celle qui est
adressee a rarclieveqne de Paris, clief-d'oeuvre de dialectique
et de style, aux yenx meme de ceux qui ne partat'ent point les
opinions de I'auteur (i), et les Lettres ecrites de la Montague;
puis, \^.% Lettres elementaircs sur la botanique et diverses /ei-
tres sur cette aimable science, tQujoirrs chere aux amis de la na-
ture, et qui, comme la mythologie ancienne, rend, pour ainsi
dire, la solitude des champs vivante et aniraee; enfin, ce roman
ecrit sous I'inspiration brulante de I'amour, la Nouvelle He-
(i) Je trouve ce prodigieux mcrite de dialectique et de style et
I'eloquence entrainaute de J. -J. Rousseau caracterises avec autaiit
de precision que de nouveaute dans le passage suivant du Tableau
litteraire du XVIW Steele, par M. Victorin Fabre , ouvrage qui a
remporte le prix d'eloquence decerne par la Classe de la langue et de
la litleratuie fiancnises de Vlnstkul, dans sa seance du 4 avril 18 (o.
« Qui jamais posseda comme lui cette loglque des passions hu-
maines, cette eloquence penetrante oil le raisonnement , revetu
d'images^ devient, en quelqne sorte , palpable a nos sens, oii la
morale animee et fondue en sentiment porte !a persuasion par tor-
rens dans I'esprit et dans le coeur ? Ses tours , ses mouvemens libres ,
hardis , presses, eclatans , se precipitent I'ua sur I'autie, et devan-
cent rimagination qu'il'i laisseiit long-tenis ebranlee. Dans ce tour-
hillou d'eloquence, il circonvieut le coeur de toutes j)arts, il le saisit,
il I'enleve, el I'entraine a volonte dans toutes les einotions qui
I'agilent. II passionne I'idee , I'image, la parole. Son style est I'elo-
quence elie-nieme deliiiie par Ciceron; c'est le moiu'emenC continu de
I'dme. » — Les amis des letlres reclament avec instance une nouvelle
edition de ce Tableau liiceraire du xvili® siecle , et de quelques autrcs
ecrits de M. Victorin Fabre, egalement couronnes par la Classe dc
I'Instinit qiu ri'presentait alors \' .Icadeinie francaise.
to6 LITTER ATURE.
loi'se, qui a fait coiilcr tant de larmes ct dont la suduisante
Iccliirc n'est pas sans danger, quoicjue tonttis les emotions
qu'eilc excite soicnt favorablcs a la veitu, niais qui conlicnt
tant de pages admirables ou rcspirent la morale la plus pure
el les sentimens les plus elcves.
La suite dc ce volume, si riche et si varie,nons offre les
Melanges en prose , ou Ton remarquc la Refutation du livrc
tie V Esprit, ct Ics Essais de traduction , par Icsqticls Rous-
seau, luttant corps a corps avcc le plus grand historien de
ranliquile, s'excrrait a devcnir lui-mcme I'nn des plus t^rands
ecrivains modernes; les Poesies diverses ; lo Theatre oil sont
reproduites des ebaiichcs informes d'un genie qui essayait scs
forces et ne les connaissait pas encore, et parmi Icsquelles la
scene lyrique de Pygmalion ct le Dcvin du village sont Ics
seules pieces qui soicnt encore quelqucfois represeulecs; les
Leltres ct fragnicns sur la musique , et le Diclionnaire ds
jnusique , toujours consultc avcc fruit par les artistes el Ics
amateurs; enfin, les Confessions, oii Rousseau cut le tort
grave, en avouant scs propres fautes, de compromettre des
personnes long-lems adniises diins son inlimite , et dont les
lois sovercs de la sainte aniilie Ini ordonnaiont de respecter la
meiTioirc, mais qui n'en reslent pas moins I'ouvragc le jjIus
parfait, commc narration pittoresque, toujours naturellc, at-
tachante el varice, comme etude curieuse et instructive du
coenr liumain, commc monument de cetle grandeur et dc cette
faiblesse inhercntes a noire nature, qui nous etaient deja re-
velees avcc tant d'abandon et de naivete, quelqucfois avec
plus dc cynismc d'exprcssion , dans les Essais de Montaigne.
Les Leltres a M. de Maleshcrhes , ce modele des magistrats
ct des ministres, qui aurait pti sauvcr la monarcliie ct la
rcndre populaire, en la fondant sur sa veritable base, le
bonheur public , si ics pretentious d'une vieillc aristocratic,
orgneilleuse, iusolente et avide, n'avaicnl pas entraiue le
trone dans !e meine gouffre qui devait aussi I'engioutir; les
Reveries du pronieneur solitaire , les trois Dialogues , ou Rous-
teau juge de J can- Jacques , production dnns laquclle on
LITTER ATURE. 107
CHtrcvoit encore les vestiges d'un grand talent au milieu meme
des desordres d'une imagination ogarce; la Correspondance ,
ou Ton aime a cludier le caractere, les pcnchans, la suscepti-
bilite oaibragcuse, les defiances, les faiblesses de rhomme donl
on vient d'adinircr le genie dans scs precedens ecrits; ces Let-
trss, trop nombrenses pent etre, odsouvent Tame s'epanchecn
liberie, sans prevoir que ces epanchcmens secrets seront pro-
duils au grand jour, achevent de mcltre a nu cct homrue
extraordinaire, tour a tour sage et insense; compose bizarre,
digne d'affection, d'admiration ct de pitie; qui sonda les profon-
deurs du coeur humain ct nc sut point sc connaiire ni se domplcr
hii-meme; qui peignit les passions ct fut en proie a lenrs plus
violensoragcs; qui dicta d^s Iccons aux princes ctaux ptu])Ics,
et ne fut point capable de rcgler sa propre conduite; qui fit Ic
mellleurouvragc surl'edncation que Ton eutpiiblie jusqu'alors,
ct qui, par ies suites funestes d'une education incomplete et
vicieuse, fut liii-meme un hommc incomplet, presque vicicux,
toujours different dans ses actions et dans ses relations avec
les lionimcs do cc qu'il etait dans scs ouvrages; anssi infidele
a scs devoirs de pero, aussi mauvais institutcur qu'il fut
moralislc sublime; (|ui ecrivit des pages que I'Amour semble
avoir empreintes d'une celeste flnmme, ct qui livra son coeur
ct sa destinee a deux fenmes indignes de lui, et dont aucune
ne pouvait inspirer ce veritable et pur amour qu'exprimait
dans un style enfiamme ranianl de Julie; qui sc fait aimer,
malgre ses torts, et quoiqu'il ait eloigne de lui pendant sa vie
tons ceux qui furent ses amis; dans Icquel, cnfiri, on rcspccte
le grand homme, le pcnseur profond , recrivain qui cntraino
p.-ir son eloquence vive, pittoresque, animee, el Ton deplore
rhommeca]jricicnx,inju,ste,passionne,sauvage,victime deson
iniaginaliow , de son caracterc, de ses faiblesses : contraste eton-
nant, oia Ton retrouve Tun des types a la fois honorables ct af-
fligeans de la nature humaine , melee de grandeur et de peli-
tcsse, de vertus et de vices, de bien et de mal, de force ct de
fragilite, de parties nobles et presque divines qui nous font
prcssentir notre existence future, et de parties basses, tcrres-
io8 LITT^RATURE.
tres et fangeuses qui humilient iiotre orgueil et nous font pres-
que descendre au- dessous de I'liumanite.
Les OEnvres que nous venous de passer rapidementen revue
deviendront, dans ce recueil , le sujet d'un examen appro-
fondi. Un de nos collaborateurs, dont le tact fin el delicat a
souvent merite les plus honorables suffrages, se propose de
rechercher d'abord le genre d'influence que le phiiosophe de
Geneve a exerce sur ses contemporains et continue d'exercer
encore; puis, comparant Rousseau avec Voltaire, il tachera
d'apprecier le merite respectif et les doctrines philosophiques
et litteraires de chacun de ces deux illustres rivaux, dc re-
duire a leur juste valeur les reproches et les accusations qui
leur ont ete adresses, et de faire sortir de leurs ouvrages et de
leurs caracteres, ainsi rapproches , compares et observes, des
le9ons utiles pour leurs nombreux leeteurs et pour les ecrivains
appeles a marcher sur leurs traces dans les routes varices
qu'ils leur "onl ouvertes , et dans lesquelles leurs successeurs
pourront se diriger d'un pas plus sur vers un but mieux deter-
mine (t).
M.-A. JuLLiEN, de Paris.
(i) Nous saisissons cettc occasion pour rappeler k nos leeteurs
I'interessant ouvrage de M. V.-D. Musset-Pathay, qui a pour titre :
Hisloire de la I'ie et des ouvrages de J.-J. Rousseau (Paris, l8ai. a vol,
in-S". J.-J. Paschoud), et qui forme le complement indispensable
des oeuvres de ce grand ecrivain : nous en avons rendu compte avec
soin et etendue dans deux articles , i'un de M. Deppimg , I'autre, de
M. £/on Thikssk. {fiev. Eric, t. xi , juillet iSii , p. loa-taS.)
III. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQLE.
LIVRES ETRANGERS(i).
AMERIQUE SEPTENTRIONALE.
ETATS-UNIS.
I. — * Report of the committee on laws etc. — Rapporl du
comity des lois au corps municipal de New-York au sujer des
inhumalions dans leslieuxtres-peuples ; lu etadopte dansl'as-
semblee tenue pour cet objet, le 9 juin iSaS : public par ordre
de la irunicipalitc. New -York, 1826; imprimerie de Mahon-
day. In-8" de 76 pages.
Ce Rapport conlient la mafiere d'un traits sur les sepul-
tures ; il en presente une analyse, pleine d'erudition et de
discussions judicieuses. Mais, pour que ce traite fut un ou-
\rage complet , aussi philosophique et aussi instructif qu'il
pourrait I'ctre, ce n'est pas dans le Noaveau-Monde qTi'ilfau-
drait I'ecrire ; les besoins y sont molns nonibreux, moins di-
vers et moins pressans que dans noire Europe : en composant
cet outrage, un citoyen des Etats-Unis ne penserait qu'a son
pays, et perdrait de vue la question generale , pour ne s'occu -
per que d'un cas tres-particulier. En traitant la question ge-
nerale , les sepultures seraient considerces dans les interels de
la sante publique , de la morale , de la saine politique, de la
religion : sous ce dernier aspect, on exarainerait si la religion
ne doit pas demeurer etrangerea un acle qui apparlient, sons
tous les rapports, aux choses d'ici-bas, (jui n'a lieu qu'a une
.epoque ou I'elre intellectuel, religieux et moral n'est plus sur
la terre, et ii'y a laisse que son enveloppe mateiielle. On se
diiciderait , sans doute , jiour I'affirmative. En traitant la (|ues-
fion morale, on aurait a passer en revue des sujets d'un tres-
liaut interet, etla politique n'y serait autre chose qup la morale
(i) Nous iudiqnnns par un asterisquc (*) , place a c6te du litre de cbaque
ouvrage, ceux deslivTes otrangers ou francais qui paraitroutdignesd'une atten-
tion particulicrr , et nous en reudrons qr.rlquefois comptc dans la section des
Analyses,
no LIVllES ETRATVGERS.
dcs societes. On ferait voir que, si un honimc nierita I'eslime
et les regrets <le scs concltoyens, I'l-xpression pul)liqiie de ces
scntimens est un devoir, au moment oil cot iioinmc est enleve
a la palrie : (|ue, h'il rendlt dts services oiniueiis, soit par un
genie extraordinaire, soit par la conduitc qu'inspire nne amo
grandc et forte, dans les ciiconsiances ou I'l'tat a bcsoin dc
cettc energie , ii faul que ses funerallles ressemblcnta la pom])c
touc!ianteipiiaccompagna le general l''oy jusqu'a son lonibcau:
que la doulenr pnhlique, exprimee sans fasie, avec I'eloqnenee
du sentiment, laisse une impression profonde c;t de Ionics sou-
venirs; que la si'-pultnre du grand citoyen ne soit pas sans
monument; qu'elle soit sons If s yens de ses conciloyrns , dans
un lien ou la pensee se recucilie cl rassemble ses forces ; que la
reconnaissance pnbliquc ne soit point exposee a s'egarer; qu'en
jouissant dn bienfait , elle ne puisse pas oublier que le bienfai-
leur n'est plus, et qu'eile ne ridcnlifie j)as avec sa ligncc, su-
perstition qui a cause tant de niaux, et dont I'influence , quoi-
que moins funeste anjonrd'liui , jirepare encore au genre
humain une longue suite de calainites.
Les causes qui ont donrie lieu a ce rapport nierilcnt aussi
lieaucoup d'atteniion, et peuvent eclairer , dans tons les])ays,
les mapistrals qui ont la louable ambition d'administrer dans
rinteret des pcnples. A New-York , des hns prndentes avaient
restreint le droit de sepidiure , ct prcscrit des jirccaulions ne-
cessaires pour la salubrile dcs f|uai tiers populeiix et dcs lieux
de reunions nombreuses. Queiques bocietes religieuses ont
refuse de se conformer a ces niesnres; elles ont atlaque devant
les Iribunaux les magisliats qui les avaient suivies, et C{ui
avaient ainsi rempU leurs devoirs; enfin, elles ont deniande
pinsieurs modifications a ces lois qui leur paraissent contraires
a leurs droits et a leurs croyances religieuses. Aux Etats-Unis,
oil le gonvernement representalif est bien compris, on ne re-
pousse pas les vreux des citoyens par nn ordre du jour pro-
nonce avec une insidtante legerete; on examine serieusement,
avec maturite ; la deiibeiation est attentive, et Ton ne prononce
point, sans etre bien inforrae. Tcus les moyens dc conviction
sont reudis dans ce rapport, pour lemaintien des lois : le but
du coniite etait d'eclairer I'opinion publi(]ue ; ce qui exige
une variete dc prcuvcs appropric'es a la porlce et a la forme
particuliere de char|ue intelligence; ct en effot , toutes j>onr-
ront y trouver ce qui Icur convient. Nous ferons cepcndant
une observation , au sujet des sepultures dans les teni])les. En
convenant que cet ancien usage doit etre gencralement aboli ,
il senible que Ton ne pent refuser d'adniettre queiques rares
ETATS-UNIS. Ill
exceptions, et cc rapport mcme nous on offre uii excmjilc. On
y lit cju'en 1707 , le colebre et rpspectnbie Chrisiophe Wren ,
arcliliecte de Salnt-Paiii tie Lonilrcs , alors octogenaire , con-
suite sur ces inliuinations , les desapproiiva foiincllement , et
cxj)rima par ecrit le vreu qu'elles fussei't intcrdiles a i'avenir.
Ccpendnnt, on sail gre a la vilie de Londres de ce c|u'f!Ie no
stiivit point, relativcmcnt a la sepulture de cet lioinmc d'lin
ordre sn])crieur, ics niaxinics qui! avait professees dura'.t sa
vie : on se plait a lire son e]Mia[)lie dans ce leiiit)lc qiji atles(e la
grandeur de ses conceiJlion?. Dans tout autre lien, cette inscrip-
tion d'line admirable sim]!licile n'aurait pii ette terniinee p:ir
ccltc phrase rtmarc[uable : Lcc/or , a/ moninncntura rcquiris ,
circuinspice. Quelciuef'ois, el ])eut-etre plus souvont, les con-
venances bien senlies fcraicnt placer les sepiillurcs des prands
lioniines liors des lieux consacres aux croyances religieusci.
Ccs convenances prescrivaient, sans dome, (pie le toinbeau
de Maurice de Saxe ne liit yas separe de cenx de Turenne,
de Villars, de Calinal, cic. 1! ne fallait ])as !e reli'guer dans nn
temple protestar)t, a rexliemiie de la France, ]>arce que le
vainqneur de Fonlenoy /iit prolcslaut.
En eliininant de ce rapjiort ce qui est tout-a-fait local , et ne
concerne que la \iile de New-York, on en f'ejait unouvrago utile
jiour I'Enropp. L'economie publitiue et la morale y trouve-
raient des documens ])rojiares aver soin, et de nombieuses
indicalions pour en cliercher d'autres. La lah'c des matiercs
merite que nous en disions un mot,parce C{u'el!e donne una
notion tres-juste, non-seulement du nombre et de Tetendue
relative des sujets traites dans I'ouvragc, mais aussi dela redac-
tion , de I'ordre et de la liaison des idees. JVIais il est peiit-cire
jdus aise d'obtenir celte sorte de perfection dans la table d'un
petit ouvrage; a mesure que les objets s'ngrandisseni , la ue-
cessile de former des groupes plus voiuniineux contraint qiiel-
quefuis k adopter des divisions moins dairement iudiquces
par les analogies. F.
Ouvrages periodlques.
3. — * The north-ninerican medical and surgical Journal, etc.
— Journal de inedecine et de cliinargie de I'Aincrique du
nord. N° 2 ( avril 1826 ). Philadelphie. ( Voyez P,.ev. Enc, ,
t. XXIX , p. 459).
Ce journal donne lieu a une observation que nous ne de-
vons pas omellre, quoiqu'elle convienne moins a un journal
francais qu'a un recueil etranger, ou elle paraitruit plus iiu-
Ill LIVRES fiTR ANGERS.
partiale ; car clle est en faveur des medecinsde notre nation.
Les AUemands font profession d'estimer peu les doctrines
raedicales des Francais : cette disposition, donl la cause est tres-
diftlcile a dcineler, finira par jeter les niedecins allemands
Lors de la bonne voie, si les Francais y sont entres et ne s'cn
ccartent pas : car il ne siiffirait point aux Allernands de laisser
les Francais deriierc eux ; ils cliangeraient de direction, s'ils
les voyaient a leur suite; il leur faut des sciences et une iilte-
rature a part. L'orj^ueil anglais est d'un autre caractere; il se
plait a contempler la foule qui le suit dans la carriere ; il veut
etre chef, ou se persuader qu'il Test. En fait de sciences , le
Francais s'occupe plus des clioses (|ue de lui-meme, et recoit
volontiers ce qui lui parait bon, de quelque part qu'il vienne;
il traite les verites, comme un cosmopolite acciieillerait les
bommes de tnutes les nations. Cette sorte d'cquite inteliec-
tuelle n'est pent -etre pas aussi favorable a I'esprit de decou-
verte, que cerlaines passions qui excitent la hardiesse de la
pensee ; mais elle n'arrete point I'essor du vrai genie des scien-
ces , et sm tout , elle multipiie les professeurs habiles , et fait
composer de bons ouvrages. Hors de I'EurojJC , ou Ton juge
sans rivalites nationales , la part que Ton nous fait est assez
honorable pour que nous ensoyons satisfaits, et nos medecins
peuvent se faire honneur de celle qu'on leur assigne. Ce sont
leurs ouvrages ([ue Ton cite , leurs doctrines que Ton suit et
que Toil propage. Les pertes que I'enseigneinent de la inuede-
cine eprouve ici sont resserities presque aussi vivement en
Amerique qu'en France; la memoire de Beclardy fut recoin-
inandee a !a veneration de tous ceux qui ciiltivent les sciences
inedlcales dans le nouveaii continent , comme elle sera con-
servee par les lileves que ce professeur a formes.
Parmi les memoires inscres dans le cahier que nous annoo-
cons, on remarquera celui de M. TaENOR , medecin , de New-
York sur le tic douloureux , maladie qui produil qiielquefois
des effets extraordinaires, dont il rapporte quelques exemples.
M. le docteur Wood, de Philadelphie, professeur de chimie an
college de pharmacie, public des observations sur I'usage de
I'essence de terebenthine dans cerlaines fievres. — M. le doc-
teur Reynell expose les maladies que pent causer I'abus de
la saignee , et les remedes qu'il faut y appliquer. — M. Huntt,
de Washington, a fait des recherches sur les effets qiiepioduit
le chaugement de climat , et sur ce tjue les nialades attaques de
consomption pulmonaire peuvent en esjierer. Ses observations
ne sont point rassiirantes; on en conchierait qu'un grand nom-
bre d'habitans des Efats-Unis devraient on s'expatrier annuel-
ET A.TS-UNIS.— ASIE. 1 1 5
tement, ou lenoncera I'espoir dc guerir. On a calcule, dit-il,
que , parmi les causes de itiorl.ilite dans les princlpales villes de
cctle contree, la consomption pulmonaire est pour un sixieine
a Boston ; a New- York , pour un cinqiiieme ; a Pliiladelphie
et a Baltimore, pour un septieme ; a Washington, un liui-
tieme; a Charleston (Caroline du sud) , un sixieine. Aux Etals-
Unis, comme ailleurs, quelqnes lieux de garnison sont tres-
insalubres, et causent annuellement des perles notables. —
M. le docteur Wiltb\nk a fait des observations et des expe-
riences sur Taction da coeur, en operant sur des chats ;ses
resultals sont d'accord avec les observations de MM. Legal-
Loi s, Bell et Magendie. — M. Bache , I'un des redacteurs de
ce recueil, a fait un niemoire sur V acupuncture : il parait que,
si ce nouveau nioyen de guerison perdait son proces en Eu-
rope, il pourrait en ajjpeler, en Amerique, du jugeroent
prononce par nos mcdecins.
Le reste du caliier est consacre a des analyses d'ouvrages et
au resume des observations les plus recer.tes, et des connais-
sances dont la medecine s'est enrichie. L'essai de M. IWongel-
LAz sur les irritations intermittentes , etc. ; X Anatomic pntholo-
gique^ dernier cours de Bichat ; le Traitede chiinie de Thomp-
son ; le lome xui de I'onvrage anglais intitule : Medico-
chirurgical transactions ; VHistoire naturelle et medicate des
snngsues , etc., parM. Derheims; une exposition des doctrines
physioiogiques et palliologiques de Borheu ; VEloge de Be-
clard, etc.; toules ces inatieres renfermees dans un meme
cahier prouvent qu'il ne manque ni d'abondance, ni d'intcret :
nos inedecins le recherclieront pour s'instruire , etles erudits
qui recucillent des materiaux pour I'histoire des sciences , au-
ront soin de le consuller. Y.
ASIE.
— 3.* Bydragen , etc.- — Fragmens pour la composition
de la PMore de I'lnde neerlandaise ; par M. Blume, D. M. 6"^" ,
■^nie, 8'"'', 9"«, 10'"^, 11""= et 11^" cahiers. Batavia, 182 5; im-
prlmerie du gouvernement. In-8°.
M. Blume continue avec ardeur a publier ce recueil, qui
inerite de recevoir un accueil favorable. Les cinq premiers ca-
hiers, que nous avons annonces ( voy. /Jec. £'rtc., t.xxix p. 459")
ont deja ete suivis de plusieurs autres, dans lesquels I'auteur
decrit et fait connaitre au dela de sept cents plantes de Tile de
Java appartenant aux families des orchidees, urticees, poly-
gonees, chonopodees, amaranthacees, hernandiees, laurinees,
T. XXXI. — Juillrt 187.6. 8
ii4 LiVRES Strangers.
myristicees et etiphorbiacees. Parmi ces planles, il s'en troiive
plusieurs qui elaient inconnucs avant M. Blume.
Le 6™* cahier , consycre aux orchidees , est suitoiit curieux ,
attendu (|u'il renfenne sur cette iinportante famille des obser-
vations entierement iieiives, qui apparliennenl a I'auleur. Ce
cahier est accompagnc de cinq planches gravees, destinees a
donnei' une idee des orchidees de Java et a faire reconnaitre
promptement leurs genres. Selon W. Blurae, la jilupart de ces
orchidees different beaucoup de celles d'autres pays , et prin-
cipalement de celles qui ont ete decouvertes jiar M. de Hum-
boldt , dans I'Amerique nieridionale. de Kirck.hoff.
EUROPE.
GRANDE-BRETAGNE.
/j. — * Cateclsmas de ciencias y artes, etc. — Catdchismes
des sciences et des arts. Les livraisons qui sont dcja publiees,
comprennent : les catechisraes de chirnie, de geographic , d'a~
griculture, A' astronomic , A'arithmetique , de geometrie , A'eco-
nomic rurale , d! economie politique , Ae. morale , etc. Londres,
1825-1826; R. Ackcrmann. Chaque catechisme forme uu vol.
in-18 , d'environ 120 pages; prix, 2 sh.
Cette collection de livres elomentaires, publics en espagnol,
et destines a ['education publique des nouvelles rcpubliques
americaines, a merite I'approbation de I'illustre Lancaster et
celle du gouvernement de Colombie, qui I'a fait distribuer
dans toutes les ecoles. Les redacteurs de ces petlts ouvrages,
qui sont imprimes avec beaucoup de soin et de gout, ont eu
le bon esprit d'adopter les productions d'un merite non con-
teste, pour les abreger et les mettre ainsi a la portee de la
jeunesse americaine. lis ont suivi pour la chimie le grand
ouvrage de Parkes; pour I'economie politique, les traites de
Mill et de Ricardo, et ainsi du reste. On remarque surtout le
catechisme de morale, ccrit parl'emigre espagnol T'illanueva;
ce petit livre est deja populaire dans toutes les rcpubliques de
I'Amerique du sud. J- J. M.
5. — * The narrative of a tour through Hawaii, etc. —
Rdcit d'un voyage i Hawaii ou Owhyhee, avec des remar-
<|ues sur la religion, les moeurs, I'histoire, les coutumes,le
langage , etc. , des habitans des lies Sandwich , et des observa-
tions geologiques, agronomiques, etc., sur cet archipcl ; par
W. Ellis, missionnaire de la Society desiles Sandwich. Lon-
dres, i8a6; H. Fisher, i vol. in-8° avec carte et sept gravu-
GRANDE-BRETAGNE. iiS
res; prix , la sh. ( Voy. Rev. Enc. , t. xxx, p. 396,ranoonce
d'un autre voyage aux meraes iles. )
Le caraclere , commun a toutes les sectes, est de vouloir faire
des proselytes; ce qui les distingue, est le mode qu'clles em-
ploient pour propager leur croyance. Que, suivant les jirecep-
tes du fondalcur du christianisine, elles porteut les paroles de
i'ovangile et les bienfaits des lumieres chez des peupladessu-
perstitienses et ignorantes, elles auroiit servi I'liumanite et la
luorale. Mais, qu'en opposition a ses snintes maxinies, elles
preclient le fanatisnie et Tintolerance a des populallons eclairees
et paisibles; qu'au lieu de faire entendre le langage de la rai-
son et de la verite, elles appellent la force et le mensonge au
secours de leurs argumens, elles deviendront un fleau de la
sociele.
Les differentes sectes chretiennes ont leurs missionnaires,
et le nombre en est immense. Mais, tandis que ceux d'une
eglise vorit a travers mille dangers repandre leurs doctrines
et porter les lumieres sur des plages lointaines et au milien de
hordes i demi sauvages, ceux d'une communion rivale parcou-
rent nos villes et nos campagnes, enflammant les passions et
semant parlout les haines el les discordes. Des rixes, des insur-
rections , des condaranalions et du sang marquent bien souvcnt
le passage de ceux-ci; I'abolition de I'idolatrie, la culture des
arts utiles, et une augmentation de bien-elre signalent presque
toujours la presence de ceiix-la. Les premiers inondent le midi
de I'Europe de cantiques immoraux et de leg^ndes ridicules ;
les seconds portent la bible a des nations sauvages , et se delas-
sent des perilleux travaux de leur minister* par la composition
d'ouvrages utiles.
Le livre du reverend W. Ellis offre ce dernier caraclere.
Pontife etabli pour le sen-ice des hommes , ce missionnaire
sail , suivant le precepte de Saint-Paul, compatir a t ignorance,
se piier a la faiblesse et eclairer I'erreur. Apolre de I'evangile,
il en fait entendre le langage, mais sans jamais forcer le sanc-
tuaire des consciences; il en proclame les veriles , mais sans
jamais porter I'epouvanle et la douleur dans ces ames incultes
donl il faut plaindre et non condamner les erreurs et le pen-
chant a I'incredulite. Philantrope eclaire, il parle avec indul-
gence du peuple idolalre auquel il apporte le culle d'un seul
Dieu ; observateur judicieux, il peint avec verite les qualites
et les vices de cetle nation a demi barbare, sur laqnelle ses
compagnons et lui viennent repandre les bienfaits de la ci-
vilisation.
C'est seulement chez des peuplades semblabies i celies qui
ii6 LITRES Strangers.
habitent les i\c& Sandwich , qii'il convient d'aller leriler des
conversions. Les missions t|ui, clicz les j)etij)Ies civilises, ne
fonl souvent qu'ecliauffer les passions , Iroubler la j)aix , attris-
ter les fideles, soulever et non convaincre les dissidens , adou-
cissent , au conlraire , les mceurs des sauvages , les disposent an
travail, a la sociabilite , et anieliorent ainsi leur nialheureuse
condition.
Au tems de la docouverte des iles Sandwich, ])ar le capi-
tainc Cook, en I77y, la loi du tahou , si injuiieuse a la plus
belle moitic de noire espece, et la coutume barbare d'immoler
des viclimes huniaines a des dieux fantasiitjues existaient dans
toute leur force. Eclaire jiar les missionnaires anglais et ame-
ricains, le ])euple de cet archipel a delruit ces pratiques. Plus
eclaire, il proscrira sans doute aussi I'usage nionslrueiix qu'ont
les meres de delruire leurs propres enfans; cnfin , aide des Eu-
ropeens, on pent esj)erer que le tems n'est pas iloigm; oil il
presentera lui-raeme le tableau d'une nation induslrieuse et
policee.
Situees dans I'Ocean Pacifique, immedialement au-dessous
du tropique du cancer, entre les i5o® et 160^ degrcs de lon-
gitude, meridien de Paris , et a plus de cent lieues des cotes du
Mexique, les dix iles Sandwich gagneraient beaucoup par
I'ouverture de Tisthme de Panama. Eiles deviendraient un point
favorable de station, dans la iraversee d'Europea la Chine;
leur sol, inhabite sur plusieurs points, se couvrirait de nom-
breux ctablissemens agricoles et industriels 011 I'on pourrait
cultiver les cannes a sucre, le cafe, les bananes, et exploiter
les mines; et leur population, aujourd'liui reduite a Hi, 000
ameSjSerait doublee en quelques annees par les emigrations
europeennes et par la repression du crime affreux d'infanticide,
si commun dans ce pays. Toujours soigneux des interets de
son commerce, le gouvernement anglais s'est declare le pro-
tecteur des iles Sandwich; etdeja plusieurs compagniesonl ete
formees a Londres, dans le but d'e."<j)loiter ces noiivelles con-
Irees. Frederic Degeorge.
6. — * Delia fcrzn nelle cose politiche. — De la force en
politi(|ue , par M. Louis Angeloni. Londres, 1826. 2 vol.
in-8°.
L'auleur de ce nouvel ouvrage est deja bien connu, surtout
en Italie et en France, par diverses publications anterieures,
entre autres par un ouvrage sur V Italic , qu'il a fait paraitre
a Paris, oil il a reside plus de vingt ans.
L'idee mere de son nouvcau livre est que, tout est force
dans I'univers , et que rich ne peul exister que p,ir la force.
GRANDE-BRET AGNE. 1 1 7
Ce principe pose, I'auteur se renferme dans la sphere ties
forces politlques, sujet de son travail. On se troniperait beau-
coup toutefois, si Ton croyait, sur cet apercu, trouver dans
I'auteiir, un disciple de Hobbes. I! nc s'agit nullernent, dans
son livre, de poser, romnie dans le Leviallian, les bases d'un
despotisme pcrpctuel et absolu. L'o.nvrage de M. Angeloni a
un but toul-a-fait oppos*', et c'est la liberty dans toute sa
franchise, avec toute son ctendue.
D'apres cet auteur, la force en politique, est celle des
horames qui constiSuent, dans son langage, la matiere de la
societe.W hui AoT\c bien connaitre les horames, les ressorts
qui les font aglr, sous I'impulsion de qualites organiques et
de forces intellectuelics tres-diverses. Aj)puye sur la physio-
logic, M. Angeloni signale ces differences et celle des ten-
dances differenies qu'elles determinent. 11 en resulte que le bien
cherchc par un individu, lui est special, et peut elre le mal
pour un autre. Comme tout prouve que les hommes sont
faits pour vivre en socieie, et que chaque liomme cherche son
6«e«propre, la societe ne j)eut avoir un autre fondement.
Mais, pour qu'elle existe, il faut nne mesure commune a tous.
et qui convienne au plus grand norabre. M. Angeloni appelle
gouvernement de force naturelle , celui qui est fonde sur ce
principe, et gouvernement de force artificielle , celui qui n'a
pour objet que le bien d'un nombre plus ou moins circonscrit
d'individus. II ne lui est ])as difllcile de monlrer les avantages
du premier, les vices et les funcstes effets du second. L'auteur
regarde conime des illusions les idees du juste et de I'injuste,
du droit, etc., considerees d'une manieie abslraite.
Nous ne nous permettrons pour le moment aucune reflexion
sur les idees de M. Angeloni, dont nous pourrons peut-eire
examiner plus amplement I'ouvrage. 11 contient beaucoup de
faits importans, surtont, a I'egard des dernieres revolutions qui
ont eu lieu en Italic. C'est a ses conipatriotes que l'auteur a dc-
dic son livre, comme celiii qu'il a public en 1818. A. de V.
7. — Misapprehension of the — Meprises du tres-rev. P.
Curtius et du tres-rev. G.Doyle, docteurs, concernant le
serment que les cveqiies d'lrlande prelent au poniife roroain;
par le rev. /. - Z. Villanueva, D'', chanoiiie de Cuenca et
membre de I'Academie royale d'Espagne. Londies , 1825 ;
in-8° de 72 pages.
8. — Observations on the answers , etc. — Observations sur
les reponses du tres-rev. D^" G. Doyle, eveque de Kildare et
LeigUlin au comite de la Chanibre des communes, par le D^
f.-L. ViLi.ANDEVA. Londres. In-8° de 43 pages.
ii8 LIVRES ETRANGERS.
g. — * Fida literaria , etc. — Vie lilteraire de Jon Joachim-
Laurent ViLLANUEVA, ou Memoircs concernant ses (Merits, ses
opinions ecclesiastiques ct politiqties et divers evencmens
notables de son terns, avec un appendix contenant plusieurs
documens relatifs a i'histoire du conclle de Trente; le tout
^crit par lul-meine. Londies, iBaS. 2 vol. in-8"; r. !*"■ de4^2 p.,
t. II, 470 p.
M. le D"^ J.-L. Villanueva , ne en 1757, a Jativa, I'ancienne
Setabis , ville fondce par les Pheniciens , a ^te I'un dcs ecrivains
espagnols les plus distingues et les plus savans de notre epoque.
Membre des Corles de i8i3, puis de 1820, il y brilla par
I'etendue de son erudition et la sagesse de ses opinions.
Nomm^ ensuile plcnipotentiaire d'Espagne pres la cour de
Rome, cetle cour ne vonlut point le recevoir, parce (ju'elle
redoutait ses lumleres et son intrcpidite a combatire le curia-
lisme. II a public sur cctte exclusion un poeme inoins remar-
quable par la beaute des vers que par la singularite et la
variet«5 des notes tres-erudites qu'il y a jointes (1). Citons-en
quelques fragmens.
« Saint Anlonin, de Florence, attribue au pape une telle
puissance sur le purgatoire et sur I'enfer, que, par ses indul-
gences, on peut en deiivrer autant d'ames qu'il lui plait et les
envoyer au sejour des bienheureux. Cette opinion ouvre la
porte a des discussions scholastiques 011 Ton examinait si le
pape pourrait supprimer en entier le purgatoire ; si le pape est
plus clement que Jesus-Christ, doiit il n'est pas dit qu'il eut
delivre aucune arae du purgatoire. — Le decretaiiste Fclino
declare que, s'il plaisait au pape de jeter beaucoup d'ames en
enfer [catervas animaruin), personne n'aurait droit de lui
dire : Pourquoi faites-vous cela? — Une controverse qui a ete
agitee dans les ecoles eut pour objet d'examiner si le pape
peut commander aux anges. D'autres adulateurs ont discute
si le pape est simplement homme, ou s'il est dieu. La glose dit
qu'il n'esl ni I'un ni I'autre, mais un efre interraediaire. —
Louis Gomes assure que le pape peut changer en juste ce qui
est injuste. — Balde dit rpie le pape peut tout, supra jus ,
extra jus ; il peut meme arrondir ce qui est carre. D'apres
cela , doit-on s'etonner si , au concile de Trente , les curialisles
traitaient de schismatiques et d'ennemis de la religion les
cv^ques qui soutenaient la divine origlne de I'episcopat ? «
(i) Mi dispedida do la curia romana. — Mon expnlsion do la cour
lie Boiue. Barcelonue, i8-a3. In-4° de 54 pages.
grande-bretagnt:. 119
Dans I'^crit qui concerne les Meprises de M. Curtius, arche-
Teque d' Armagh, et de M. Doyle, ovdque de Kildare, notre
auleur reconiiait et revere dans le pape la principatile d'hon-
neur ct de juridiclion; raais, autant il est fermc a soiilenir ce
dogme , autant il Test a conibalfre les invasions de la puissance
papale qui a franchi loules les liniiles.
En i8i4) don Pedro Gravina, nonce en Espagne, soutenait
que le serraent des cveques an pape fait parlie du rit de la con-
secration approuve par I'eglise. Cette assertion offre une preuve
iiouvelle de la fourberie qui affecte d'idenlifier a I'essence du
rit sacramentel une cliose eirangere et inconnue a I'antiquite.
Dans les premiers siecles, les Cveques, elus par le clerge el le
peuple . consacrcs , instilucs par le metropolitain , se bornaient
a envoyer au chef de Teglise leur profession de foi. Saint
Boniface, de Mayence, fut rintrodncteur d'un serment dont,
sans doute, il n'avait pas prevu toutes les consequences. Des
Cveques il fait des vassaus, des feudataires du pape. M. Villa-
nueva accumule les preuves de la resistance que deployerent
en divers pays les eveques centre la prestation de ce serment,
qu'il faudrait supprimer totalement, en se bornant, comme
dans I'anlique egiise, et comme I'exigeait la constitution civile
du clerge, a I'envoi au pa])e, par chaque cveque, de sa pro-
fession de foi. Cet ecrit, et plus encore, le second intitule:
Observations , etc , peuvent etre considercs comme des apolo-
gies irrcfragabies des reformes operees par TAssemblee cons-
tituante de France.
L'auteur y devoile les intrigues emyjldyees dans les has
siecles pour identifier les abus avec les droits reels. Ceux-ci
sont la tige sur laquelle sont greffes les autres. II nousmontre
la simonie a Rome qui , malgre les decisions du concile de Bale ,
pcrcoil des annates; qui, malgre le concile de Trcnte, en
percoit pour les dispenses que jadls on ne demandait pas a
Rome.
A Tabus des indulgences, des dispenses, joignez celui desi
inlerdits arbitroires et des excommunications; par exemple,
cello par laquelle le pape excommuniait autrefois quiconque
acheterait de I'alun chtz les Florenlins dont il etait niecontent ,
et cent autres vexations du meme geni'e. Pour detruire ces
abus, n'attendez aucun succes des demi-mesures et des con-
cordats, stipulations anti chrellennes, fleaux deguises sous
d'autres noms. Les desordres sont des plantes Ires-vivaces qui
ont leurs racines dans la cupidite, I'ambilion, la vanite. Le
seul moyen de les extirper est un abatis general dans la foret
des abus pour revenir aux formes sacrees de la bieraichiej
120 LIVRES ltTRA.NGERS.
telle qu'elle etait clans la primitive ^glise, d'apres la tradition
apostolique et les canons des conclies.
Nous regrettons d'etre obliges, par les bornes qui nous sonl
prescrites, demutiler la recension des ouvrages qtic Ton vient
de citer, ouvrages dans lesquels I'.inteur deploie une erudition
immense, bien digeree , ct qui vient toujonrs a I'appui de ses
raisonnemcns. On doll jiorlcr le m^tne jugenient de son grand
ouvrage en -x vol. in-S", ou les dc-tails de sa vie amenent une
foule d'anecdotes pi(|uariles sur I'elat lltteraire, ecclesiastique
ct politique de I'Espagne.
M. Villanueva fiit lie avec tons les conlemporains les plus
distingues de celle conXrce : J ovellanos , Climent , Olavides
Campoinanes , Irlasti, Llorenle , JJrquijo , Yeregui, Amat,
Sola , Sceo, Palofox , Cuesta, Ce/Uero, Lorenzana^ Tavira , la
pieuse etcelebre comtessede Montijo, persecutce entre autres
motifs a cause de sa correspondance avec M. Gregoire, eveque
de Blois.
L'ouvrage de cet eveque (M. Gregoire) centre I'inquisition
avait force ce tribunal a faire ce qui nelui arrivait jamais, a ten-
ter da le lefuter. Quatre ccrits furent publics centre le sien ; et de
ces quatre, celui qui, pour le soulien d'une mativaise cause,
etait le plus specieux, le plus modcre, le mieux redige, etait
celui de M. Villanueva, sous le pseudonyme Lorenzo Astingo.
M. Villanueva, dans sa Vie luteraire, extirlme ses regrets
d'avoir combattti l'ouvrage de I'eveque de Blois. II les exprime
avec une francliise, une loyau!,e qui honore son esprit et son
cceur. Lui-meme devint ensuile un des aniagonistes les plus
redoutables de I'inquisition. II la jieint sous les traits liideux
qui doivent la caracleriser. II en montre a nu les iniquiles et
lui imprime encore le sccau du ridicule, lorsque alternalive-
ment elle approuve, puis elle condamne les ecrits de Nicole.
L'ouvrage dont nous parlous offre nn tableau vigoureuse-
ment trace de fails extremement curieux , et peut-etre introu-
vables parlout ailleurs , non-seulement siir les effels du synode
de Pistoie, qui furent en Espagne : lerejet, puis, I'acceptation
de la fameuse bulle auctorsmfidel , laquelle censure nos quatre
articles de 1682; mais encore sur les liberies des egiiscs de la
peninsule; sur la cour de Rome, ses intrigues, ses exactions;
sur Pie VI qui dccerna au prince de la Paix le titre de co-
lonne de la foi... au prince de la Paix!
Mais, dans cet ouvrage, on trouve surtout des renseigne-
mens precieux concernant I'Espagne sous le regime des jcsuites;
puis sur son ^tat politique sous Charles IV, el depuis lors
jusqu'a Dotre epoque.
GRANDE-BRETAGINK. lai
li'autcur, deux fois membre des Cortes par le choix libre
de ses concitoyens, revetu des plus honorablcs fonctions pu-
bliques, a eu la fgcijitede connaitre la marche des evenemens,
leurs causes et leurs rcsultals, ainsi que les limnmes qui out
figure sur la scene, etc. Comnie tant d'Espagn.ls esiimables,
victimes des reactions de la Peninsule, il a trouve un asile en
Anglelerre ou, pendant son sejour, il a compose et public les
trois ouvrnges dont on vient de voir nne courte mention, et
qui ajouteronl de nouveaux litres a sa reputation litteraire.
Un de ses amis, ancien niembrc des Cortes, le digne eccle-
siaslique, auteur d'ecrits annonces dans nos cahiers prccedens,
M. Bcrnabeu, est mort en Angleterre, ainsi qu'un frere de
M. Villanueva , auteur d'un Voyage lUtt'rnire en Espagne. Un
autre de ses freres s'occupe aussi de iravaux litteraires. Jouets
infortunes de Tiiijustice et balloies par les vicissitudes liu-
maines , il est un bien que jamais on ne pourra leur ravir,
c'est I'estime due aux vertus et aux talens. G.
lo. — yi practical grammar, etc. — Grammaire pratique
de la langue francaise eclaircie par de nombreux exeinples et
par des exercices choisis dans les meilleurs ecrivains francais,
a I'usage des ccoles et des etudians; par J. Rowbotham. Lon-
dres, 1826; I'auteur ; Baldwin, Cradock et Joy ; in-12 de xii
et 332 pages.
Cetle grammaire se divise en deux parlies : la premiere
traite des mots isoles, la seconde de la syntaxe. Le plan de
I'auteur, ni ses definitions n'ont rien cjui lui solt proj)re ; il a
suivi en general tons ceux qui ont traite des meines matiercs;
aussi, a-t-il reproduit qneiques erreurs qu'il eut ete facile de
fairedisparaitre.J'endonneraiunoudeuxexemplesniousavons
renoiice depuislong-temsa toute idee decas dans nos subs tan lifs :
pourquoi M. Rowbotham conserve-t il un nomlnatif, un genitif
et un datif? Sans doule, on dit I'enfant, de I'eiifant, a I'enf'ant;
mais on dit aussi pour I'enfant, contre I'enfant , avec ou sans
I'enfant, par I'enfant, etc.; faudra-t-il faire autant de cas de
toutes ces prejiositions ? II en est de meme de ces expressions
composees qu'il nomme adverbes , prepositions ou conjonc-
tions , et donl il remplit vingt-sept pages. Le fait est que nous
avons en francais vingt prepositions et onze conjonctions a peu
pres:mais, si Ton donne ce nom a toutes les combinaisons
qu'elles peuvent former, il faut alors un dictionnaire. Sous le
rapport de I'analyse, la grammaire de M. Rowbotham laisse
done , selon nous, quelque chose a desirer. Quant a la ])rali-
que, il est diftlcile de rien voir de plus clair et de plus com-
plet. Chaque regie est suivie d'lin grand nombre d'exemples.
laa LivREs Strangers.
oil I'ecolier pent appliquer les principes qu'il vient d'apjiren-
dre, ct saisir facilement les difftrences des deux idiomes.
L'auteur fait un ogal usage de la traduclion de I'anglais en
francais et du francais en anglais; et en cela, il prouve son
bon esprit, puisqne scs eleves sont destines a parler comme a
traduire les deux langues.
Nous reconiinandons celle grammaire aux Anglais qui ai-
ment notre liltcrature, en desiranl loutefois que l'auteur, si
cela se peut, donne plus au raisonnement et moins a la me-
moire, qu'il vaut niieux enrichir de beaux exemples que cliar-
ger d'une multitude de mots et de regies. B. J.
11. — * Tales of the O'Hara family, etc. — Contes de la
famille O'Hara. Londres , iSaS; Simpkin et Marshall. 3 vol.
in-8°; prix , i L. 1 1 sh. 6 p.
12. — * The Boyne Water, etc. — La Boyne-Water; par la
famille O'Hara. Londres, 1826; Simpkin et Marshall. 3 vol.
in 8"; prix, i L. 11 sh. 6 p.
Le premier de ces deux ouvrages a ete publie, il y a pres
d'une annee ; le second vient de paraitre. L'un et I'aulre sont
d'un grand interet; ils contiennent des peinlures de moeurs et
de caracteres que peu d'auteurs contemporains, exceple Wal-
ter Scott, etaient capables de tracer.
On compte maintenant en Europe , ou au raoins en Angle-
terre, deux ecoles de roreans. L'une et I'autre ont une origine
moderne, et l'une et I'aulre ont atteint une etonnante perfec-
tion. La premiere, la plus richeet la plus brillante, a produit
des ouvrages comparables aux plus beaux chefs - d'oeuvre du
regne d'Elisabeth , c'est I'ecole de WaverUy. La seconde,
d'nne origine encore plus recente, est I'ccole de Mathilde et
de Vivian Grey. Celle - ci a plus danalogie avecles ecrits du
siecle passe , et tout ce qui la distingue des ouvrages de
M™e d'Arblay ( Miss Burnett), par exemple, est moins la su-
perioriie du talent, qu'une graiide diffi-rence dans les moeurs
qui s'y Irouvent representees. II n'y a presque aucune ressem-
blance entre la society d'aujourd'hui et celle de la fin du
xviii* siecle. II doit done n'y avoir que peu de rapports entre
les romansde cette epoque et ceux de nos jours.
Les ouvrages de l'auteur ou des auteurs de la famille O'Hara,
apparliennent a la premiere de ces deux ecoles, a cette classe
de romans qui a produit les Puritains d'Ecosse et la Fiancee de
Lximmermoor. Quoique meles de dissertations polltiques, les
deux contes de la famille O'Hara sont tres-inlercssans. On y
trouve de I'impartialite sans indifference, et du liberalisme
sans exageration. La Boyne -fVnter est encore plus remar-
GRANDE-BRETAGNE. i.»^
quable. L'esprit en est excellent, le style plus flenri, et I'on y
trouye des tableaux plus poetiqiies et plus animes. Maisl'au-
teur est-il torijours exact dans ses details historiques ? Son por-
trait de Guillaume est ressembiant ; inais celui dc Jacques
n'est-il pas trop flatte? Quoiqiie favorables en tous points a
roinancipalion des calholiques d'Irlande , nous ne sommes
nullereent disposes a accrcdiler des assertious mensongeres ,
telles que celle-ci : Ic dernier prince de la dynastie des Stuarts
n'avait en vue , dans sa conduile religieuse , que d'assurer a
tous la liberie de conscience, et dans sa conduite politique,
que la conservation des seules prerogatives que lui accordait
la constitution. L'auteur ne se rappelle done pas, lorsqu'il
nous parle des droits du trone , droits qui ne furent point
contestes , si ce n'est par les revolutionnaires du tems de Char-
les I", que le renversement des Stuarts ne fut point le resullat
d'une telle contestation? N'a-t-il pas ete prouve, specialeraent
par M. Brodie, que la grande lutte d'Elliot et de Hampden
contre Strafford et Laud, des partisans dela constitution contre
la tyrannic des gens de loi, de la nation anglaise contre Char-
les P"", n'etait que la consequence deplnsieurs sicclesde tyran-
nic. Et d'ailleurs, quelles qu'aient ete les prerogasives confe-
rees a Jacques par les staluls, devait-il s'en prevaloir pour
elablir le pouvoir absoiu ? Quelle puissance humaine avail pu
accorder a un roi la faculte de regir, selon son bon plaisir, la
nation confiee a sa garde , et lui donner le pouvoir d'aneantir
les droits les plus sacres , ceux sur lesquels reposent les bases
de la societe civile ?
Quoique nous differions d'opinion, sur plusieurs points,
avec l'auteur de Boyne-fFater , il n'est personne que nous
soyons nioins disposes a critiqner. On irouverait difficilement
dans un ecrivain plus de tolerance et de candeur ; et Ton quitte
avec plaisir les ecrits fanatiques de bigots intolerans ou les
pamphlets de radicaux incendiaires, pour des ouvrages sembla-
bles a ceux de la Famille O'Hara.
Nous avons longiiement parle des principes poliliques mani-
festesdans5ojne-//^arfr;onse tromperaitbeaucoupneanmoins,
si Ton croyait que la politique , maliere peu interessante pour
les lecleurs de romans , a envahi toutes les pages de celui-ci.
Quelques-unes des descriptions sont un peu longues •, quelques
portraits de personnages secondaires manquent de verite, et
plusieurs incidens places dans le premier volume pourraient
etre relranches sans inconvenient. Mais , a part ces legeres
taches, combien de tableaux et de recits dignes d'admiration.
Les principaux caracteres sont peints avec talent , le genie du
ia4 LIVRES STRANGERS,
narrrateur crott avec Timporfance de son siijet, et il serait
difficile de trouver des descriptions plus animecs et plus inte-
ressanies que celles de la bataille de la Boyne , etde la sortie
de Limerick : elles rcssemblent a celles qu'on doit a la plume
de I'auteur do Waverley. R. R., de VXJniversitc de Cambridge.
Revue sommaire des recueils periodiques sur les sciences , les
lettres et les arts, piiblies dans la Grande-Brelagne. —
Neuvieme article. ( Voy. Re\'. Enc, t. x.wi , p. 767-770,
t. xxviii, p. i49-i5G, 799-80/1; t. XXIX, p. 141-148,
463-468 et 747-756, et xxx, p. 121-126, et p. 419-424-)
JOURMAUX HEBDOMADAIRES.
Nous avons deja fait connaitre a nos lecteurs les cent et
quelques recueils, mensuels et trimestriels , qui se publient
dans la capitale des Irois royanmes. Arrives aux journaux lieb-
domadaires, nous avons fourni la nioitie de notre carriere, non
la plus difficile, mais la plus longue et la plus brillante. On
Me trouvera, dans \es Jeuillcs quotidiennes et dans les recueils
hebdoinadaires , ni celle instruction solide que Ton jiuisedans
les deux ouvrages periodiques : le Journal des sciences , public
par V Institution royale de la Grande-Bretagne , et le Maga-
sin philosophique de Richard Taylor ; ni cetle profondeur de
vues, cette justesse de critique que Ton admire dans la Revue
d'Edimbourg et dans la Revue mensuelle ; ni ineme celte va-
riete de sujets jointe a cette eK'^jance de style, que Ton aime
dans le Magasin triincstrielmet-ropolitain , et dans le Nouveau
Magasin mensuel. Les feuilles quotidiennes n'ont rien de com-
raun avec ces differens ouvrages : c'est nn autre genre et un
autre plan. Les recueils hebdomadaires, differens par le fonds,
leur rossembler.t par la forme et par les resullats qu'ils produi-
sent ; mais toutes ces sorles de journaux, quel que soit le ta-
lent de leurs redactenrs , ont chacune leiir ntilite particuliere.
« Maintenant, ( pour nous servir des expressions de M. Brou-
gham ) que, d'uu bout de I'Angleterre a I'autrc , artisans,
charretiers et meme garcnns de chairue, tout le monde sait
lire el ccrire , ({ue des niiliiers d'entre eux suivent des cours ,
et que des centaines de milliers lisent les gazettes, » il serait ab-
surde de proscrire, avec la Revue d'Edimbourg , !a masse tout
enliere des journaux hebdomadaires, et injuste de repeter ,
avec la dedaigneuse Ecossaise , que« ces roluriers de In presse
pcriodique ne constituent quune classe insignifiante , un cata-
logue incowplet d'ouvrages , un tas d'insectes litteraires qui
i
GRANDE -BRETAGNE. 12 5
meurent inapercus , etouffes par dcs ecrits plus iinportans « (i).
Car les jouinaux a trois pence (six sous rfe France) , sontaiissi
utiles et aussi necessaires aux artisans et aiix pauvres laboii-
leurs, que les recueils a six shellings [ sejU francs et plus ) le
sont aux savans et aux riches citadins.
On irouve, en Angleterre, comme en France, plusieurs de
ces liommes que peint fidelenient la Revue d'Ediinbourg ,
« semblables aux chouettes et aux aiitres aniruaux de nuit et
de rapine, nes seulement pour les lenebres et (jui, sachant
qu'avec la clarle du jpur finiront leur dominalinn et leur bri-
gandage » (2] voudraiient refuser rinstruction anx artisans et
les reduire a Tetat de la machine avengle qui serl a becher ou
a ramer, ou de la bete de somme, stupidement courbee sous le
poids de son fardeau. Ce sonl eux qui se reci icnt contrc I'cta-
blissement de la nouvelle universite de Lor.dres (':5); ce sont
eux qui poursuivent de leurs outrages les philantroi>es qui
veulent relever par rinstruction I'intelligence humaine , si
long-tems abatardie par Tignorance, les prejuges et le fana-
tisine (4); ce sont eux enfin que Ton voit au premier rang
parmi les adversaires de I'affranchissement dcs noirs et de I'e-
mancipation des catholiques d'Irlande (5).
Cris impuissans, fareurs bizaries!
Tandis que ces nionslres barbares
Poussaient d'lnsolenles clanienrs,
Le Dieu , poursuivant sa carriere ,
Versait des toncns de lumiere
Sar ses obscuis blasphemateurs.
Lefranc de Pompignan.
Les ouvrages, lels que ceux auxquels nous consacrons eel
article, (lesjournaux hebdomadaires qui tiaitent des sciences
et des arts ) ne sont pas un objet de sp;Jculation. Les ouvriers
forment cnlre eux des reunions studieuses, oii le tems du re-
pos est employe a les lire : on les medite, on les comraente, on
les etudie. Loin que ces reunions excitent aucune defiance de
la part de raulorite, elles sont encouragees i)artout; ce n'est
(1) Revue d" tdimhourg , N° 76, p. 369.
(a) Revue d'Ediinbourg, W 86, p. 3i6.
(3) The Quarterly Review, N" 65.
(4) Lettre a SI. Brougham, montrant combien ii est inutile, absarde
et iinpolitiqne d'enseigner aux artisans et anx laboureurs les sciences
chimiqaes et mathematiques, par le reverend G. Wright. Londres, 1856.
Brochure in-8°.
(5) Blackwood MagiTsine , N° d'octobre i8a5. — John Bull.
laf) LIVHES ETR ANGERS.
|)as de lenr sein que sortcnt les briseurs de machines et Ie»
liommcs turbulens qo'il faut conldnir ])ar la force. Malheurcu-
senient, la nation anglaise rst ])cut-etre la seule qui puisse
nietlrc en praliqiic cet excellent moyen d'enscignement. La
classe laborieuse y est preparee pai' une inslruclion ])lus elen-
due et plus generale, qii'on ne lui a pas refusie. Sur le conti-
nent europeen , quelques parties de rAliemagne formeraient
aiissi avec succcs des associations poui' les progrcs iiileliectueh
des ouvriers, et les savans de ces pays sont exerces depuis
long-tems a rediger des ouvrages 61ementaires de technologie.
En Fiance, le secours des ecoles publlqucs d'arts et metiers ,
aux frais du gouvernement, nous est indispensable, si nous ne
voulons pas rester en arriere de I'industrie europeenne. Depuis
quelque lems, les sciences industrieiies y recoivent de puissans
encouragemcns. Les savans se sont enfin occnpi'-s de la classe
ouvriere. M. Charles Dupin el ses emules oat fait naturaliser
dans les principales villes ces institutions d'artisans qui , sous le
nora de Mechanics' Institutions , produisent en Angleterre de
siheureuxresultats.Mais troppetidetemss'est ecoule depuis que
la France est entree dans la voie des perfectionncmens indiis-
triels, y)our qu'on puisse juger des progres que ce systeme a
fait faire a la classe laborieuse de la nation.
Sciences et Arts.
i3. — * The scientific Gazette, etc. — Gazette des sciences ,
n° 2. Londres, 9 juillet 1826. Thomas Boys. In-4'', 1 feuilles
d'impression, avec pi. et grav.; prix, 8 pence (4 decimes).
Redigee par ptusieurs membres de la Societe des ingenieurs
civils de Londres et sous la direction de M. C. F. Partington,
aiiteur d'un grand nombre d'ouvragcs cstimes sur les sciences
mecaniques, la Gazette des sciences etait le journal hebdo-
inadaire le plus important et le mieux ecrit qui se publiat en
Angleterre. «]Votrc intention, disaient lesredacteurs, estd'oflVir
le tableau de I'etat present et progressif do la science, chez
nous et dans les pays etrangei's. Nons avons pris, a cet effet,
des arrangemens avec differens professeurs distingues, alle-
mands, francais etnalionaux; et nous esperons qu'on trouvera
reunis dans notre gazette tows les fails, toutes les inventions,
toutes les decouvertes qui peuvent intcresser les sciences et les
arts. » Ces promesses onl ete remplies; compose sur le plan
du Journal des sciences de Tinstitulion royale de la Grande-
Bretagne, mais paraissant a des epoques beaucoup plus rap-
prochees , le recueil de M. Partington etait, comrae rannon-
cait son second titre , une bihliotheqiie complete de chimie , de
GRANDE-BRETAGNE. 127
matMinatiques , de geographic el de mecanique , dans laquelle
les d^couverles les plus nouvelles elaicnt lonjouis decrites avec
soin , et qui ne prcsentait pas, comme le journal ledige par
M. Brande, ces preventions nationales, aussi contraircs aux
progres de la science qu'elles le sunt a la juslice et a la liberie.
Aussi, tandis que le numcro de juillet de ce dernier journal
(Y.Her. EriQ., t. xxvii, p. 768) contenait une crjlique aussi
amere que mal fondee des principaux ecrits dc M. de Humboldt,
le numero de juillet de la Gazelle des sciences donnait des
cloges merites aux travaux de cet illusire voyageur. — Pourquoi
depuis quelques mois la publication de celte cxcellenle feuille
a-t-elle ete discontinuce? Le prix en etait trop eleve et le
format trop pcu portalif pour devenir le vade mecum de I'ar-
tisan. — Nous la mentionnons cependcnt, parce que nous avons
lieu de croire qu'elle reparaitra bienlot sous tine forme plus
convenable et a un prix plus modcre.
1 4- — * The London mechanics' register, etc, — Le Registre des
artisans de Londres, n° 83. Londres, 22 avril 1826 ; Gifford.
In-8° d'une feuille imprimee sur deux colonnes, avec gravurcs
et planches; prix, 3 pence (3 decimes).
i5. — * The Mechanics' magazine , etc. — Le Magasin des
artisans, n° i35. Londres, aS mars 1826; Knight et Lacey.
In-8° d'une feuille, imprimee sur deux colonnes, avec gra-
vures et planches; prix, 3 pence.
16. — * Register of the arts and sciences, etc. — RegisUe des
arts et des sciences, n° 69. Londres, 22 aviil 1826; Cowre.
In-80 d'une feuille avec gravures et planches; prix, 4 pence.
Ces trois recueils sc ressemblent et par la forme de leurs
cahiers et par les matieres dont ils traitent. lis sont principa-
lement destines a la classe ouvriere: le mode de leur publica-
tion, la modicite de leur prix, la clarte des definitions et des
explications que Ton y donne, et jusqu'a cetle espece de
correspondance entretenue enlre leurs editeuts et le public,
au moyen de laquelle sont demandees et resolues mille ques-
tions relatives aux arts et aux sciences, tout a contribue a
rendre ces feuilles excessiveraent pojiulaiies. « Le tems est
arrive, dit le London mechanics' register, dans la preface
]>lacee en ttte de son troisieme volume, oil 11 est aussi sjjperflu
de vouloir prouver les avantages resultant de la diffusion des
connaissances scientlfiqnes parmi les classes productives de la
societe , que de s'efforcer de montrer la superiorite d'nn pays
cullive el feriile sur des contrces inculles el barbares. L'expe-
rience des deux ou trois dernicres annees, ajoute-t-il, a etabli
d'une maniere convaincante les bienfaits de I'instruction , et
128 LivRES Strangers.
celtc foule qui remplit chaque joui' I'amphithealre de I'insti-
tution des artisans de Londres {^ihe London mechanics' insti-
tution) et qii'on y voit leclieiclier ies nombreux ccrits jxjrio-
diques ptiblics sur Ies arts et Ies sciences, prouve i'heureuse
impulsion donnee aux esprils et Ies progres iiitellectuels des
classes ouvrieres de cette capitale. »
Le London mechanics' register doit elre ])lacc a la tete de ces
journaux, <i bon marche , qui ont si puissamnient contribtie
a faire aimer et cultiver !es sciences par Ies arlisaiis. Depuis
son etablissemeiit, il a offerl a ses lecleurs des analyses inslruc-
tives de jilusieurs cours de mecanique, de cliiniic,de physique,
de geogiaphie, etc., fails a rinstitulion des artisans de
Londres. Le sccoi-.d volume de ce recueil contientune liistoire
complete des machines a vapeur, dans laquelle M. Partington
decrit et applique, a I'aide de planches , ce merveilleiix agent
du au genie de Watl. Le 83^ numero, que nous avons sous Ies
yeux, et qui termine le troisieme volume de la collection, con-
tient I'analyse de la seconde seance du cours d'aslronomie fait
par M. Wallis a I'inslitution de Londres; le raj)port de la de-
couverte faite par le capilaine Henry Kater, d'apparences de
volcans sur la surface de la lune; une lettre sur I'utilile de la
botanique, et divers autres articles et renseignemens.
Le Mechanics' magazine est plus ancien (|ue le ])recc-
dent; il a pres de Irois ans d'existence, et c'est a lui qu'ap-
parlient la gloire d'avoir le premier appele I'altention des
artisans de Londres sur rimportance de I'etude des sciences
et des arts. C'est par lui et par le Mechanics' magazine ,
pnblie a Glasgovs' , que Ies notions scientifiques ont cle dis-
seujinees et propagces parmi Ies individus de la population
laborieuse des trois royaumes. Comnie le London mechanics'
register, le Mechanics' magazine est rcmnji de details interes-
sans sur Ies nouvelles inventions, de discussions sur I'avantage
des methodes nouvelles et des ])erfectionneinens en tout genre.
C'est une espece de bureau de consultation ou Ton repond a
toutes Ies demandes qui peuvent interesser differentes branches
de I'induslrie. 11 consnere moins d'espace que le London
mechanics' register, aux Iravaux des societes savantes; et , s'il
a le nierite d'etre venu le premier, son rival a I'avantage de
montrer plus de talent et d'avoir pour patron cl pour colla-
boratcnr rillnstre D'' Birkbeck. Les deux piincipaux articles
du i35® numero du Mechanics' magazine sont la description,
avec gravure, d'uii nouvel echafaudage pour servir a reparer
I'interieur des domes et quelqucs nouvelles idees sur les
constructions des batimcns de mer.
GRANDE-BRETAGNE.
129
Le Register of arts and sciences esf redige sur le meme ])lan
que la Gazette scierttifique , mais siir unp plus j)etile c'chelle.
A la difference des tleux feuiiles prec(-den!es, il s'occupe pintot
de decjiie les nouvelles decouvertes , que de disculerel d'ap-
profondir les ])rincij)cs theoriques des i.rts. Trois planciies,
f;ravees sur Lois avec assez de nellete, sont joinlcs a son
69^^ nuniero. L'une reprcsente un riouvtl apparei! pour la
distillation et re\nj>oralion des liquides ; cf la seconde, une
nouvelle luachiiie a vapeur, new gaz power engine. On y donne
aussi I'analyse de la troisieiiie lecon du cours d'astrononue de
M. AVallis et (jiielrji'es nouvelles scientifiques, pnisees dans les
journaux anglais et etrangers.
17. — * Essays and Gleanings on naval arrhitec.ture , etc. —
Essais sur rarchilectnre navale et I'cconoinie nautique. N° g ;
Londies, avril i8a6 ; Slierwood. In-8° d'uue feuille avec plan-
ches el gravnres; prix, 6 pence.
Lesredacteurs out piis pouri'pigraplie cetaxionie desir Wal-
ter Raleigh : '■ Quiconque est niailre de la mer , est le rnaitre du
commerce : quiconque est u^aitre du commerce du monde, est
le maitre des richesses du monde, ef, par consequent, du monde
lui-merae. » Ce recueil est S[iecialement consacrc , comme son
titre rindique , a tout ce qui concerne la science de la naviga-
tion. Ses precpdens caiiiers coutenaicnl des instructions sur la
construction, rarraeiuent, le grc'ement des vai-seaux et des
donnces sur la force navale des grandes puissances de I'Eu-
rope. On y traduissitun morceau de M. De Pradt, sur les pos-
sessions inaritinies de I'Angleterre, avec un chapitre (continue
dans ce ^f cahier ) de I'ouvrage de M. Charles Dupin, et dans
lequel notre savant collaborateur decrlt les differens arsenaux
de I'Angleterre. Nous avons extrait le tableau suivant du
9* numero, page i32.
NOMS DES ARS.ENAUX.
Deptford. .
Woolwich. .
Chatham. .
Sheerncss. .
Portsmonth.
Plymouth. .
Pembroke. .
TOTAUX.
14 ■
36
3S
24
192
OUVRIERS.
i,5oo
2,060
2,o5o
800
4,000
3,000
5oo
13,910
CHANTIERS.
EASSINS.
_„
__
.'>
3
5
3
5
4
»
3
(\
8
5
4
12
2
38
27
T. xxsi. — Juillet iSoifi.
(^o UVRES feTRA.NGER.S.
On pent se former ime idee de I'inimensite (iu commerce an
glais , Inrsqtie Ton considere (|ue celiii de Londres seul emploic
plus do 3,5oo nnvires ct (pie le nombre de batimens, qni en-
frent anntiellement dans le port, s'eleve a plus de ii,5oo. On
peut calculer qu'il y a commiineinent dans la Tamise i ,ioo na-
vircs et 8,419 barques employees pour ciiarger oil decharger
ces navires ; 2,288 batimens employes an commerce de Tinte-
rieur, et 3, 000 pelits bateaux pour le transport des passagers.
A ractlvil^ de cetie scene que presente le port de Londres , il
faut ajouter environ 8,000 bateliers pour la navigation des
petils esqiiifs ; lf,oao ouvricrs occupos au chargeinent et au
dcchargement des vaisseaux; i ,200 employes appartenant aux
douanes, etc.; enfin , I'equipage des nombreux vaisseaux en
station dans la riviere. Cetle scene reinplit un cspace de six
milles, a coinmeocer de deux milles au-dessus justpi'a quatre
inilles au-dessous du pent de Londres, c'est- a-dire, depuis le
pont de Wetsminslerjusqn'a Lime-House. Ce recucil parait tous
les quinze jours,
18. The Lancet, etc. — La Lancelte, N° i38. Londres,
avrll 1 826. Strand, N° 210. In- 8" de deux feuilles, impriraees
siir deux colonncs ; j^rix , 8 pence.
ig. — The rnedrcnl .-Jdviser,etc. — Le Conseiller medical, N" 43.
Londres, 22 avril 1826. John Williams. In 8" de deux feuilles,
imprimees sur deux colonnes, avcc gravure ; prix , 6 pence.
Des I'apparition du premier de ces recueils, un cri d'indigna-
tion s'(51eva contre !ui. Redige avpc talent, dcmasqnant avec
courage le charlatanisme des praliciens anglais de la vieille ecnie,
il souleva contre liii presque toute la gent inedicaic , mcdecins,
chiriirgiens , apotliicaires ; ce fut un decliainement general.
II rcsista, et soutenu par des coUaboratcurs liabile.s, il Iriom-
pha des attaques que lui livraient les defenseurs des prejuges
et de la routine. On doit applaudir aux ameliorations que la
Lancetteyeut apporter dans la medeclne; mais on doit blarner
lespersonnalites (ju'elle se permet dans sa polemique medicale.
Pourquoi ses violentes at!ac]ues con I re le CtHebre Abernelhy ,
savant cliinirgien anglais? Pourquoi surtout ses injures contre
la plupart des ])rofesseurs dont elle stcnngrapbie les coiirs?
La Lancette s'cst forme une nombrense clieniellc. Nous loue-
rions sansrestriction ce recueil,s'il resseinblait un peu inoins, par
Id grossierete desonlangage, au fameux Blnchivood Magazine.
C'est anx gens qui s'occnpent , par profession, de mede-
cine, qu'eldit destine le recuell precedent ; c'est aux per-
sonnes qui ne s'orcupent de medecine que pour leur propre
usage que le Medical advertiser est adress^. C'est un abrege de
GRANDE-BRETAGNE — RIISSIE. i ^i
la modecine domeslique de Buchiin; c'csl un vade mecum
hebdomadaiie , cjui traite dcs differens raaux qui peuvent af-
fliger I'espece Jiumaine et qui doniie pour lous des indicalions
dc Iraiteinens et des recetles. Ce Journal coule six decimes par
ciaJiier, et la possession d'un cahier confere a I'acheteur le droit
d'obtenir, sur toutcs les especes de maladies, des consultations
gratuites du coraito de redaction de ce journal.
" Nos souscripleuis, est-il dit sur la couverlure , pourront
recevoir des avis gratis, soil jiar reponse inseree dans le jour-
nal njeme, soit par correspondance particnliere, et cela , en
s'adressant a I't'diteur par lettre caclietee, et par I'interme-
diairc du Jibraire qui a fait I'abonncment. « l^e Journal phi-
lomatique [\\\c pbilomatic Journal, cahier de Janvier 1826,
j)age 219) reprcsente ce recueil coraiue propre a troniper le
peuple, et coinme une oeuvre de charlatanisme. Cette opinion
nous parait beauconp trop severe. Frederic Degeorge.
( Cetle Revue desjournaux anglais sera continuee ).
RUSSIE.
20. — Description des jjonts en chaines executes a Saint-
Petersbourg ^ en 1824, sous la direction de S. A. R. le due
Alexandre de Wurtemberg, par G. de Traittedr , colonel
dri cor[)s des ingenicurs des voies de communication , chevalier
de plusieurs ordres. Saint Petersbouig, j825; iinprimerie
des voies de communication. Iii-/)° de vii el 74 p. avec atlas.
Cette description offre un grand nombre de details inle-
ressans sur la construction de deux ponts suspendus en
chaines, acheves I'annee derniere et situes, I'un sur la Fon-
tanha, I'aulre sur la Moiha, caaaux qui font passer par la
nouvelle vllle une partie des eaux de la Neva. Cos pouts sont
aussi solides qu'elegans, et les frais de construction n'ont pas
<5te tres-considerables, puisqne le grand pont etabli sur la
Fonlanka, qui a 124 pieds d'ouverlure et 35 d^ largeur, n'a
coute que 160,000 fr. , et celui des pietons sur la Moika ,
environ i5,ooo fr. Le colonel de Traitteur donne, a cette oc-
casion, des renseignemens curieux sur le moJe pratique en
Russie pour ces sortes de constructions, sur les malerianx
a employer et les mesnres prealables necessitees par le lerraiii
oil d'autres circonstances locales. L'atlas qui accompagne cette
brochure se compose de neuf planclies lithogiaphiees. Parmi
les plans qu'elles representent, nous avons remarque le sidero-
metre, machine desfinee a faire connaitre la force des fers.
21. — Recueil de voyages ciiez les Tatars et autres peuples
i32 LIVRES ETRANGERS.
del'Orient, dans lex xiu* mv*^ et xv" siecles. i° Plan-Carpiw.
2" AssELiN. Saint-Peleisbouiii, iSaS; imprimerie du Depar-
teraeiit de rinstructioii piibliqiie. In-8°.
L'editeur de cttte collection de voyages dans I'Asie centralc
est M. Iasirof, qui en public en meuie tenis nne traduction
russe, faile avec beaucouj) de soiii. I>es relations (ju'il donne
sent toutes connues; inais ce niodesle et. laborieux savant a
jugo mile de les repandre davanlage en Russie, oil elles peu-
vent contribuer a tlt'bioiiiller riiisloiie nalionale pendant Ja
domination des Mongols , ijui ont si long-leins occupe I'cm-
pirc nioscovite, ct dont I'histoire se trouve par consi^quent
eiroitenieiit lice a celle du JVord. II commence par les relations
des moines Plan-Cakpin et Asselik. Tons deux ineuibres d'une
meme mission envoyee, en 124G, par Innocent IV, aupres du
khan des Mongols, et f(ui ont laisse par ecrit les rcsultats de
leurs observations. 11 leur fera sncceder celles de Rubriquis,
de Marc-Paul, de Kaiton, de Mandeville, dOnERiQUE,
de ScHiLiiERGRR , dc Clarigu, de Baruaro el de Cuntarijni.
22. — * Voiennoie krasnoretchie , osnovnnnoie na obchihh
natchalakh sloyesnosli. — r»lietori((iie niilitaire, basee sur les
elemens generaux de la litterature, avec un Recueil d'exemples
de ditferens genres. Par M. Jacques Tolmatchef, professeur
ordinaire a TUniversite iuiperiale de Saint-Pelersbourg ; ou-
vrage public aux frais <lu gouveruenient et dedie a i>. M.
I'empereur Nicolas Pavlovitch. Saint- Petersbourg, 1826;
Smirdine. Tiois parlies in-8", dont la i''* de 170 p., la i*' de
120 p. et la 3"" de 162 p. ; prix, 10 roubles.
L'inslructiou publique dans les ecoles ]>ossede depuis quel-
ques annees un assez grand nombre debons livreselemeiitaires
en langue russe, et ce nombre augmente journeliemenl.
Celul que nous annoncons merite d'occiiper parrai eux une
place tres-dislinguee, et son utilite est deja reconnue. II est
destine sijecialement aux jeunes militaires (|ui recoivent leur
education a I'Ecole des enseignes de la garde, et I'auteur a
rendu a cet ctablissement et a tons les auues du meme genre
un veritable service, en publiant sa Rheiorif|ue niilitaire. On
sail que la litterature russe, en general, possodait depuis
plusietirs annees uu ouvrage ties-estimable du aux soins de
M. Gretcli et qui oft're, en cpiatre volumes, un apercu complet
de la litterature russe, depuis son origine jusqu'a nosjoiirs.
Mais cet ouvrage etait compose sur un plan peu elementaire;
.celui de M. Tolmalchef est beaucoup plus resserrc, e.t con-
vient mieux par consequent a la destination qu'il a voulu lui
donncr.
RUSSIE. i33
23. — Apologui. — Reoueil d'ApoIogues en quatrains, par
M. J. D. Moscou, 1826. In- 16 dc iv rt 121 p. Se ironve a
Saint-Petersbourg, chez Smiidine.
II n'est pas difficile de reconnaitre soiis ces iritiales le iiom
de M. Dmitrief, du celebic chantre de lermak, qui , au grand
regret des amis de la litternlure ralionnle, a laisse si long-terns
reposer sa lyre. Tout le mondc sail que ce jioete ingenieux
occupe une des premipies j)lares sur le Parnasse russe, et que
ses ainiables ct eleganics productions en ont f;iil en quelque
sorle I'idole de la nalinn. L)n honanage eclalant vient , tout
recemment encore, de liii eire rendu ; la noblesse du gouver-
ncnient de Simbirsk, oil il est ne , rasseuiblee pour elire de
nouTeaux marechaux qui la rcpresentent, a rcsolu de placer
dans la salle des seances de sa depniatiori le portrait de
M. Dmitbief, couseiller privo actuel , el celui de I'historio-
graphe Karamzine, conseiller d'eiat acluel, qui appartienl
egalemen! i ce gouvernement, mais dont la sante, mallieureu-
sement tres-deiabrre, le force d'interrompre les travanx bis-
toriques auxquels il se livrait exclusivcnieiif dep'iis plusieurs
annees [i).
Les quatrains de M. Dmitt ief ne sunt pas indignes de sa
haute rujmtation : la taclie de renfermer dans quaire vers une
fable et sa morale n'etait point facile. II ne s'est point borne
toutefois a soumettre ses ilees a cette forme restreinte : ses
apologues soni aussi elegans que varies; il y rcgne une poesie
brillante, une precision parfaite, el surtout une clarte eton-
nante a\'ec autant de brievele (2). Son rccueil est divise en
deux parties, dont cliacune offre 28 apologues, qui pour la
plupart ccpcndant ne sont pas de son invention; I'auteur
avoue liii-nieme en avoir empiiinte le tujel a M. Mollevaul
(1) M. Ka-RAmzine vlent d'etre enleve a la Russie par une iiiort prema-
taiee : nous consaci-ons a ce grand ecrivain , si jnstement celeb le , une
notice uecrologiqne qni fait partie de notre quatrieme secllon, celle des
Noiivelles scientifiqiics et Utter, lires.
(2) Nous voulons bien nous en rapporter ici a notre correspondant.
Cependant , nons serions portes a douter que les letlres iniiiales J. D.
cachent ici le uona d'un des premiers poetes niodernes de la Russie , jns-
qn'a ce que la chose soil bien coustatee. Nous avons peine a croire qu'un
homme d'autant d'esprit et de gout que I'heurenx fraductenr de La Fon-
taine, ait pu compromettre sou talent dans une entreprise ingrate, qui
ne doit ctre consideree que comine un jeu de I'espiit. On pent bien
faire une on deux fables de quairo vers chaoune; niuis, comment con-
cevoir qu'il soit possible d'eti faire un grand nonibre qui snpportent
lexamen? Ce ne serait tout au plus que des quatrains moranx comnie
ceax de Pibrac, et non des fables. N. d. K.
J 34 LivRES Strangers.
dont les quatrains Iiii ont pcut-ttre suggt'ic jnsqii'a I'idee ties
siens.
M. Dmitrief a un neveu qui fait d'heureux efforts pour se
rendre digne du beau nom qu'll porle, et jiour y ajoulcr, s'il
est possible , upc nouvelle illustration. Son ode sitr la mort de
Vempereur Alexandre s'fsl fait distinguer parmi les nom-
brcuses productions que cette grande calaslroplie a fait colore.
M;. Michfl DsiiTuiEF y rapproclie d'une maniere nalurelle et
ingenieuse la mort de Irois hommes f|ui ont cxerce une grande
influence sur les evenemens des 25 dernieres annees : Napoleon,
Alexandre et Louis XVIII. Ce morceau lyrique merile de
fixer rattention. J. H. S— r.
Outrages periodiques.
alf. — * Journal imperatorshavo tcheloveholioubivavo Obcht-
chestva. — Journal de la Societe iinperiale philantropiqiie de
Salnt-Petersbourg. 1825.
Ce journal est doublement important, par son but et ])ar
son contenu ; il serait a desirer qu'il put se repandre dans
loutes les parties du vaste empire de Piiissic, oii les lecleurs
sent encore en si petit nombrc : il y serait cerlainement d'une
grande utilitc. Les trois cahiers, publics receniinent, offient
une fouie de donnees statisliques, de notices et de lenseigDC-
mens relatifs a la vie ])ratifpie , et classes sous les quatre divi-
sions suivantes : 1° Errits sur la bienfaisance el stir les nioeiirs;
2° Etablissemens de bienfaisance et dccouvertes d'une ulililc
generale; 3° Medecine generale et populaire ; 4" Nouvdles
officiellcs el autres sur I'excrcice de la bienfaisance. Les travaus
d'une societe pliilantropique doivenl otre imnienses en Russie :
car, a I'exception de quelques villes oil se trouve concenlree
toute la civilisation , le reste de la nation est encore dans un
etatassez voisin de la barbaric. Avaiit de publicr des jouinaux,
il faudrait mettre a la portee du peuple les moyens d'ap])rendre
a lire eta ccrire, il faudrait detruire le nialiieureux penchant
qu'il montre pour les boissons fortes , aviser aux mesures qui
peuvent preparer dans la servitude meme un avenir de li-
berte(!), J H. S— r.
(i) Tel a ete le but visible de plusieurs institutions liberales, creees
par rempereur Alexandre, au commencement de son regne. Ces institu-
tions seraient-elles lombees en defaveur depnis (juelques annees ! La
Russie craindrait-elle les progres de la civilisation, et pourrait-elle con-
seatir a revenir sur ses pas dans une aussi belie carriere , oil elie sem-
bl.iit promettre d'atteiudre bientot les autres nations? Cc serait une
i35
DANEMAKK.
a5. — * Phrcenologien. — La Phrenologie, d'apr^s le sys-
teme de MM. Gall et Spurzheiin ; par M. C. Otto , docteur en
inedecine et uieiubre de plusieurs soci^tes savanlcs. Copeidia-
gue, 1825. In-8° de xvi et /,o8 pages, avec deux planches.
C'est a tort , ce me serable , que Ton a substitue au mot era-
nioscopie celui A& phrenologie. Si le premier est peu noble,
conime on le pretend, le second est ceriainemenl trop expres-
sif:car, le mot grec <pp;;V ( entendemeut on espril. ) signifie
quelque cbose d'immateriel , oil la science ne pretend arriver
qu'a I'aide de quelques organes materiels. Ainsi, le terme de
cranioscopie , compose de Kpocviov ( crane ) et a-Kovrfiv ( examiner )
nous parait expliquer bien mieux I'objet de cette science qui
juge des penchans de I'homme d'apres Torgaiiisation du cer-
veau et du crane, el d'apres les traces d'irapression que le pie-
mier laisse sur I'auire. Quoiqu'il en soit, M. Otto a tralte son
sujel avec la lucidite d'un ecrivain qui vent repandre I'instruc-
tion, et avec la profondeur d'un savant medecln et ])hysiolo-
giste. Apres avoir suivi , a Paris, les cours de MM, GaJi et
Spurzheim , el recueilli , pendant son sejour en Angleterre,
loutes les experiences, par lesquelles les savaiis de ce pays ont
confirrae leur syslenie, M. Otto, de retour daii£ sa patrie, y
a^rouve de frequentes occasions de se convaincre encore da-
vantage de I'existence de celte nouvelle branche de la physio-
logic par des observations publiees dans I'ouvrage que nOus
annoncons, etqui, si dies ne font pas encore de \nphre/io logic
une science demonlree, lui assurenl du moins un haut degre
de probabillte. Nousne nous etendrons pas sur cette premiere
pariie, qui offreles ri-sullats des recherches faites par les etian-
gers el par I'auteur liii-meme; mais nous parlerons de la se-
conde, qui lui appariient tout cnliere. 11 y examine les cranes
de sept malfaiteurs executes a Copcnhague, le 3 octobre 1817,
pour avoir incendie la maison de force oil ils etaienl detenus,
comme coupables avec recidive. Les deux planches represen-
tent les cranes de ces sept criminels, conserves dans le cabinet
d'analomie de I'Universiic de Copenliague. D'apres I'exaraen
grande faute politique que de cheicher a la faire retrograder , et meme
que d'essayer d'arreter son essor. L'exces de civilisation est un para-
doxe; il n'y a poiut d'exces a redoiiter dans le bien ; les derai-lumieres ,
une demi-civilisation sont seules dangereuses ; elles produisent des er-
rears et des mal-entendus en morale, comroe le demi-savoir en produit
dans la luarohe des uonnaissaQces humaines. N. d. R.
i36 LIVRE.S ETI\A.NGERS.
a[)profondi ile M. Otro , I'liistoire de la vie criminello des in-
dividiis a (]nl ont aj)partenu ccs cratirs, et les aulres details qui
s'y rattaclicnt, ii notis semble que, du inoins duns cctte cir-
constancp, la doclrine de MM. Gall et Spnrzheim se trouve
pleincment confirmee. M. Otto eombat avec sagesse les con-
clusions erroiiees que certains es[irits, animes cependant des
meilleures intentions, on! voulu lirer de la p/irenoiogie en fa-
venr du falalisme.
26. — * De Orienlis commerciu cum Russia et Scandinavia,
medio cevo. — Du commerce de ['Orient avec la Russie et ia
Scandinavie au mnyen age; par M. le docleur Jean Lassen
Rasmussen. Copenhagup, 1825. In '["do 60 pages.
Le savant orientaiiste , auteur de cet opuscule, est di'ja
connu des lecfeurs de notre rente par deux autres ouvrages
que nous avons annonces ( voy. t. xxvii, p. 444 et t. xxviii,
p. 8i5 J. Cette dissertation porle un double lilre, pnisqu'elle
sert de programme d'invitation a la fete que I'Universite de
Copenhague colebre , chatjue annee, en meraoire de la refor-
mation de Liither. Quant a sa manierc de trailer le snjet qu'il
avait choisi, I'anteur a fait preuve d'une vaste erudition et de
profondes connaissances dans les langues orientales; mais, ce
sujet est tellement eloigne de I'etroite sphere de nos etudes,
que nous sorames obliges de nous borner a une simjile an-
nonce , (jui suffira peut-t^lrepoureveiller la curiosite des savans
qui s'interessent particulierement a colte branche des connais-
sances humaines. Nous ne pouvons c?pendant nous abstenlr
de faire une remarque sur la diction latinede I'auteur; it nous
a paru choisir tres-souvent entre deux expressions eipiivalen-
tes, la plus surannee et par consequent la moins claire, ce qui
rend la lecture de cerfaines j)lirases un peu faliganfe. Nous
devons ajouter avec douleur a ce couit article que M. Rasmus-
sen, qui professait les langues orientales depuis i8i5,et qui,
en 181 1, a suivi a Paris les savantes lecons de M. de Sacy,
vient de mourir, age seulement de quarante ans.
Heibekg.
ALLEMAGNE.
27. — * Karte von JJriha. — Carte d'Afrique, d'apres les
relations et les dccouvertes les plus recentes , et surtout d'a[)res
les travaux geographiques de M. C/i«;/e.f Ritxer, projelee et
dessinre , en 1824, par M. Henri Berghaus, gravee par
M. Henri Brose. Stuttgart, 1826; Gotta. Sc trouve a Paris,
chezPicqnet.
Gette carte fera (5poque en geographic. EHe presente , pour
ALLEMAGNE. i37
la premitM-e fois , iVnserr.ble des decoiivei tes f'aites en Afriquf,
jusqu'en 1824 ; en mcine tems,elle est liabilenicnt disposee pour
rccevoir touU'S les additions qu'ont deja procurees ou que procu-
reront a la science les nouveanx voyages entrepris dans cette
coiitrec, si iiileressante etsi pen connue sous lai:t de rapports.
Nous ne connaissons point de carle oil I'aspect du terrain soit
rendu avec plus de soin et d'exactilude , ou Ton ait su niienx
di.slinguer les notioiisbien averees de cellesqui ne paraissaient
que pins oumoins viaisemblables , ou Ton se soil moins aban-
donne aux conjeclureshasardees, enfm ou les sources aient ete
phis judicienseinent consullces et pins scrupuleusenieiU indi-
quees. Nous v trouvons la hauleur des moiitagncs , parlout oil
il a lie possible de la determiner; nous y reconnaissons les lies
d'origine volcanique; nous pou\ons y suivre les routes de com-
merce, et les traces des differens voyageurs , en dernier lien
celles A'Oudney, de Clapperton et de Denham ; et , nialgre la
multiplicite de ces indications, la carte conserve la pins grande
neltete.
Tout en s'altachant a retracer par le dessin les resullats des
liabiles et savantes reclierches consignees par M. Charles Ritler
dans son excellent ouvrage sur I'Afrique, M. Berglians n'a
point neglige de s'eniparer des donnees que lui offraientdes
decunveites plus recentes. Paisse le succesde ce premier tra-
vail I'engager a prendre les inemes soins, et a consulter les
memes sources pour dresser , dans le meme esprit de critique ,
une carte d'Asie , telle que I'Allemagne I'atleiid encore.
M. Charles Ritter, professeur a i'Universite de Berlin, a ou-
vert une nouvelle route aux eludes geographiques |)ar ia pu-
blication de I'ouvrage , anquel nous devons dt5ja la carle d'A-
frique, et qui est intitule : Connaissance de la terre par rapport
a la nature et a I'histoire de Vhortirne , ou Geographie generate
comparee , consideree comme In base la pins sure des etudes
dans les sciences physiques et hisloriiiues ; ( Erdhundc im Ver-
haeltniss zur Natur iind zur Geschiclue des Menschen , oder
allgemeine verglcichende Geographie , ats sicherc Grundlage
des Studiums und Unterrichts in physihalisclien und historis-
chen fFisscnschaftf-n ). Les deux volumes consacres a I'Afrique
et a I'Asie, ont paru. L'autcur se prononce avec force contre
les compilations routinieres et denuees de critique , qui , dans
un siecle oii des parties accessoires de la geographie se sont
elevces au rang des sciences, semhlent devoir I'empecher d'y
l)arvenir elle-meme. Cet ouvrage deviendra classique, et il faut
esperer qu'un habile traducleur permeltra bienlof au public
i38 LIYRES ETRANGERS.
francais ile le lire el de I'appiccier. M. Rittrr ne peul pasmaii-
quer iioii plus de publier bientot -es rcclieichcs sur I'Europe ,
oil il se prescnlera liii-iiienie comine voyageur.
La carte que nous avons annoncee a environ trois pieds de
largeiir; elle est paifaileiiient execulee, el contie;)t deja que',
ques details sur I'Arabie et sur la Perse. D. — r.
28. — * Beytriige iur Kenntniss , etc. — Instructions nou-
velles snr rintorieur de la Russie, par M. /. F. Erdmann ,
D. M. Deuxlenie Parlie. Leipzig, iSaS el 1826; Kummer.
:i vol. in-8° formant 718 pages, avec douze planches lilho-
graphioes de niineralogie, des cartes geographiques , topogra-
J)hiques, des tableaux de stalibtique, el phisicurs aiis de chant,
avec Ics jjaroles dans I'idlonie du payj.
■Dans cetle seconde i>anie, M. Erdmann dccril les gouver-
iiemens et les ccrcles, de Kasan, de Saralow, d'Asfracan, de
VVjaika , dc Perniie et de Siberie. 11 nous offre, sur loules les
pailics de la geographic et de la slalistique de ces regions pen
connues les details les plus curieux el les j)lus noiivcaux. I./aii-
teur se distingue par I'elendue et la variele de ses connais-
sances, et par son caraclere philantropiqne. II a plusieuis fois
visile la capilale de la France; il s'y est fail des amis qui s'jii-
teressent a ses travaux et a ses succes. L.
29. — IJeber allein scU^machcnde , etc. — De reglisc qui
seule pretend que liors d'elle il n'y a point de salut ; par M. Ca-
KOVE. Francfort-sur-Mein , 1826; Hermann. In- 8° de 612
pages.
L'eglise clirclienne enseigne la ^oie du salul ; elle croil qu'il
n'y a point d'aulre voie de salut qui nous soit connue. C'csl la
un dogme aiissi ancien que le christianisnie , dognic commun
non-sei'.lement aux callioliques , mais encore aux reformes.
Car, il ne serait pas juste de confondre avec ceux ci les purs
philoso|)hes, qui, sous un noni quelconque, et avec plus ou
iDoins d'estinie pour I'evangile, s'efforcerit niaintenant de re-
duire la religion chreticnnea cetle science ou sagesse naturelle
que Tapoire appelleyb//e devant Dieu , science prelendue com-
mune a tons les hommes de tous les terns el de tousles lieux,
et deierminee arbltrairement par chaque individu. M. Carove
.appartient sans doute a ccfte derniere classe de i>liilosophes ,
puisque, d'une part, il s'eff'orce de delruire Ics foniieuicns de
la foi chrctienne , comme les dogmes de la trinite, de I'ancarna-
lion , de la rcdimplion , les saci emens , I'autorite de l'eglise, la
chute des anges , I'enfer, etc. , etc., et que, d'autre part, sous
pretexte de nous conduirc au parfiiil onioitr de Vahsolu, it
ALLEMAGTSE. il.)
I'union avec Dicu , union, dit-il , objectn>e et subjective , subs-
tantielle , complete, senile, verifiee, etc., il soutient que Dieu
el le salut sont reveles a tous les hommes dans la nature, s'en-
tcnd , et dans leur cceur. II ajoute que Dieu leur a parte par
dcs genies ; qu'il s' est fait voir a eux , quand il les a trouvds
assez murs , qu'il leur a fait entendre sa voix , sur le mont
Merou, sur le Caucase , a Sais , a Me roe , a Dodone eth Del-
phes, comine sur le mont Sinai et a Jerusalem. Quant a Jesus,
c'etait, dit I'auteur ,. un homme qui se sentit appele a publier
le precepte de la charite et de la conformite ii la volonte de
Dieu , et a corroborer cette doctrine par le sacrifice de sa vie.
Telles soni, litleralement, les bases tres-larges du systeme
de M. Carove. II a doncaussi le sentiment religieux , ou la re-
ligiosile; mais, doming par ses idces particulieres sur I' union
a Dieu , et souleve par le spectacle du moderne pharisaisme,
il depeint vivement les scandales dont noire siecle est teraoin; il
s'indigne contre I'orgueil el I'avarice, contre la dominalion po-
litique, les reactions, les congregations, les folles pretentions,
les influences odieuses et anarchiques de cerlains membres du
clerge de nos jours ; il s'en fait des motifs d'une vive guerre
contre tout le calholicisme, affeclant de le confondre avec de
graves desordres que I'evangile et le calholicisme condamncnt
egalement. II ne faul pas se le dissimuier: cette exasperation
fait des progres en Europe; elle y prend un caractere d'cm-
porlemcnt; elle menace d'une contrc-rcaction violente, difficile
a eviter, a moins que Irs prelres et leslaitjues coiipablcs ne ren-
trent d'eux memes dans les justes bornes, ou n'y soient repous-
ses et contenus par de sages lois qui dorment aujourd'hui, et
par des jnges naturels et inamovibles. Quelles que soient ses
aberrations , I'auteur montre une grande connaissarice des faits
et des textes; il estun raisnnneur subtil, un controversiste ar-
dent, un ccrivain fecond , enfin un ennemi tres-digne d'etre
combattu par ceux qui enseignent, on font enseigner ce qu'ils
nomment les hautes sciences, c'est-a-dire, en style plus apos-
tolique, la bonne nouvelle , la science des pauvres el des hum-
bles, la science de la foi et du salut. Les conferences de
M. I'eveque d'Hermopolis sont frequemmcnt et vivement cri-
tiquees dans ce volume, et il scriible qiie ce n'est pas toujonrs
mal a propos. Au resle, cet ouvrage a passe a la censure , dans
la ville libre de Francfort , sous les yeux de la diete gerniatiique.
II doit avoir ete suivideja d'un second volume, conienant de
nouveaux developpemrns; et des 1824, rauteur avail mis au
jour un traite preliminaire contre rauiorite du cle.'ge sur les
fpiestions relatives a»i salut, Ces Irois tomes sont un vaste arse-
i4o LIVRES JiTRA.NGERS.
nal d'objections anti-cathnlitpies ot anti-^vangeliijues. Cest sur-
toiit aux professeurs et aux jilus forts eleves <le la nouvclle
Soiboniie i]n'il convienl de lefuter ces doctrines, Mais lout
cela t'sl ccril en bns alleniand, charge d'ailleurs de p^riodes
enormes, hciissc ilc citalions grecques, latines on allemandes ,
et de longs molsabslraits invenles nouvelieinent, on meine fa-
))riques par I'autour ; on sent bien, d'aillenrs, qnela refutation
la scnic rfficace et la plus ])rompte serail de se con igcr , de re-
iioncer de bonne foi aux vices, anx passions, aux jtrelenlions ,
aux j)ertiirbalions , aux hypocrisies qui affligrnr li's fideles , ct
(jui er.coiiragent, f]iii sonlevent les non-conforinisles. Ce qu'il
faliait, disait si bien Bossuet, relativcmenl aux entreprises de
Luther et de Calvin, c'elait de se reformer; qui pcut en douter?
De meme ce nn'ii faul aujourd'hui, pour desarmcr les incre-
dules et les anti-catholiqnes , c'est encore de se reformer; (ini
pent en douler? Qni aura le bonheur d'cn donrur le salulaire
exemple ? )^AJi!3viyAis>, de I'lnftitut.
3o. — * Da.9 Erhrecht in welts;'jschichtlicher EnUvickelung.
— Le droit de succession , ccnsidere dans son developpemenl
chez tousles pcuples; Iraile faisant parlie de rhisloire du droit
en general; par M. Edouard Gans. Berlin, i*'' vol. 182/1,
2" vol. 1826.
Lorsqu'on etudie, dans les annales humaines, ies fails nom-
brcnx qu'elles renferment; lorsqu'on so conlente de les classer
par epoques;quandon vainrniejusqu'a les cnchaincr et lescoor-
donner, on ne connait encore, pour ainsi dire, que I'exterienr
de I'histoire. Si Ton veut pi'nelrer ])lus avanl , si Ton parvicnt
ase rendre compte de la niarche despenples, depuis leur nais-
sance et leur adolescence, jnsqu'a I'age viril et la caducite,
on possede alors, non un vain elalage d'crudition, mais un
ensemble de vues et de reflexions qui forment la science de
rhisloire. C'es' de cetle maniere que Timinortel Montesquieu
observait la vie des nalions : place an-dessus de toutes ces re-
volntions qui changereni si souvent la face du monde, il con-
siderait d'un ceil scrulateur la mobilile des sieclcs : il voyait
un peuple nonrrissanl, a son origine, le germe qui devait
produire sa gloire, et dans sa gloire les fautcs fjui devaient
amener sa chute.
Cetle voie Iracee a I'historien philosophe est, d'apres
M. Gans, la seule qui puisse condnire a la vraie science du
droil. Cen'esi point uniquement dans les compilalionsdn droit
remain qu'on doit chercher la legislation romaine. Un jur:s-
consulle, qui chargerait sa memoire des diverses decisions don-
nees sur les differens points de droit, pourrait posseder la
ALLEMAGNE. i4i
connalssance du droit; inais il n'en aurait pas encore aUeint
la science. Pour y ariiver, 11 faurirait (ju'il iie s'arrelat point
aux debris nombreux (|ui nous rt-jtent de la jurisprjidcncn
roniaine ; il devrait s'elever a un degre d'oii son espiit piit,
non-seulenienr embrasser les jihases differentes dii droit ro-
juain , Miais encore reconnaitre, dans sa naissance, IVffet d'une
exigence anlerieure , dans ses progres, le developpenient de
ses eieniens, ef , dans sa decadence, le terme oil devaient ar-
river ces elemens developpes.
Ptinetre de toules ces considerations, M. Gans preiend qu'il
ne snffit point encore , pour saisir I'esprit de la jurispi ndence.
roniaine, de porter ses regards sur la scene ou elle a brille; il
veut qu'on la coiujjare d'abord avec la jurisprudence anlerieure,
et ensuite avec celle (jui s'est etablic parmi les peui>les mo-
dernes.
L' elevation sur laquelle s'est place ce savant auteur , c'est le
Capitole. D'un cote , ses ycux contemplent le berceau de Rome,
la Grece et I'Orient; ce n'est qu'apres avoir examine d'un ceil
impartial la famille et I'ordre de succession dans I'Orient,
qn'il considere, d'lin autre cote, chez les Roniains , le droit
de succession (jui est I'objet de son ouvrage, et qu'il I'observe
enfin chez les autres peoples de I'Europe.
Les deux premiers volumes nous olTrent I'liistoire du droit
des successions cliez ies Indiens, les Cliinois, les Perses, les
Juifs, les Musnlnians , les Atheniens et les Romains. D'apres !e
systetne adopte par M. Gans, on ne doit point s'attendre a ne
trouver ici que I'expose niuet des dispositions legales relatives
a la succession; ces dispositions recoivent un grand jour des
lumieres philosophiqiies dont il salt les eclairer. 11 va cherclicr
la raison de ce qui a d'abord une apparence bizarre , dans
I'espril des differens peuples. Dans I'lnde , on voit I'liommeen
proie aux folies de riniagination ; dans la Chine, il est reslreint
dans les limitcs d'une froide nature; dans la Perse, il s'cleve a
uii nionde sjiirituel ; dans la Judce, la legislation sort des mains
de Dieu, mais n'est pas Dieu lui-meme comme dans I'lnde.
Cepcndant , cLez les .Juifs , les dons ile Dieu soiit, pour ainsi
dire, circonscriis dans un coin de la terre: c'e^t pour briser
ces bornes, que le Clirislianisme el le Mahometisine ont paru :
le picmier vtiit coniinuniquer a Ions les mortels les bienfaits
divins; le second, au coiilraire , est indifferent au sort du resie
de I'uiiivers; loin de chertlier a le gagner a sa doctrine, il I'ex-
terniinerait, s'il elait en sa ])uissance de le faire; I'un est le
pros«'lylisme, TaulrCjle fanatisme constitue.
Le principe qui domine dans I'Asie est un principe de per-
i42 UVRES ETRANGERS.
manpiice. L'bistoire y est stationnaire; elle s'elend dans I'cs-
pace , mais clle n'a point de sieclcs.. En nous traiisportant a
.\llieiies, nous Irouvons un sol tont-a-fait nouvcau ; la mobilite
en est le principal caraclere; ce (jui distingue I'Earope de
I'Asie, c'est Yindiviilualite. A Allienes, surtout , Vindividu ,\a
personne se presente u nosyeux, excrcant un empire prcsque
sans bornes.
Mais, a Rome, la jurisprudence philosopliique trouve une
ample niatiere ii la reflexion. Ici , le princi|)easiaiique se trouve
aux prises avec le priiicipe grec : la stabilite est sans cesse at-
laquee par la mobilite, qui, d'abord lultant avec peine, finit
])ar triompher. Le principe de stabilite etait dc'fendu par les
patriciens ; les plebeiens, au conlraire, etaicnl diriges par le
]>rincii)e de la mobilite. Celle idee feconde rentre dans le sys-
teme de M. Niebulir sur la naissance de Rome : il dit, en effel ,
que Rome dut son origine a une colonic d'Etruriens, donl les
raoeurs et les coutumes sacerdolales fureut le fondement des
institutions de Rome (i).
De I'examen approfondi de cette luite conlinuelle, M. Gans
tire un grand nombre d'observatioiis qui expliquent cerlaines
disposilions du droit de succession chez les Remains, que Ton
n'avait encore ir.terpretees que par le rapprochement des
textes.
Si je ne craignais d'etre long , j'entrerais a ce sujet dans
des details qui feraienl connailre et I'iiilention de Fauleur et
les lieureux restdtats qu'il a obtenus. J'engage, au reste, ceux
qui connaissent la langue allemande a consulter I'ouvrage lui-
meme ; iiuant aux personnes qui I'ignorent , j'ai laclic dc leur
faire reconnaitre par ce court expose sous quel immense jioint
de vue la jurisprudence peut elre envisagee- L. Etienne.
3 1. — Gesc/iichtc der Siadt Harneln. — Histoire de la ville
(leHameln, par Fr. Sprenger. Ha no v re, 1826. In8"de 5oopag.
Favorisc jiar les autorites et par les deposilaires des docu-
mens publics, M. Sprenger a j)u faire avec beaucoiip de soin
des recherches qui jiisqu'ici c!aient reslees fort incompletes.
On ne sail pas bien a quelle epoque Harneln est devenue une
viilerson nom vient probablement de la petite riviere de
(l) M. de GoLBERY prepare la tradaction de la seconde edition de
\' Histoire romaine de M. Niebnhr. L'auteur dc cet article avail eu dessein
d'entreprendre le meme travail : mais d'autres occupations, el surtont la
certitude que deux traductions en concurrence se nniraient mutuelle-
ment, I'enbpec'-ienl de niettre son projet a execution.
ALLEMAGNE. i /, '.
Harael , et, selon toule apparencc, c'est a rexistenced'un eta-
lj!issement religieux que so raltarhe la forraalion, dans ce lieu,
d'nne ville, dont il est, pour la premieie fois, fail mention
dans le cours du xi® sieclc. Haineln s'accrut tres-rapidemont ,
larit par son accession a la ligne ansealiqne qu'a la faveiir des
querellesqui divisaient les princes voisins. Mais, depuis le mi-
lieu du xvii^ siecle, ectfe ville vil dijclin.fr la prosperite dont
elle avait joui jus(|u'aIors; toutefois , en 1688, des cliaiigeniens
d'administrasion intcrieure, et I'arrivee d'une colonic fruncaise
semblercnt lui communiquer une nonvelle vie: la guerre de
sept ans fit renaitre les malheurs qu'elle avail ('-prouves deja
])endanl la guerre de trente ans; et les derniers eveneniens ont
encore contrlbue a sa decadence. L'histoire de Hanieln est ici
(livisee en cinq |)eriodes: i", de I'an 1000 a 1279, ^pofp'e de
la mort du due Albert; 2°, de 1279 a la reformation en i54o;
3" de la reformation a la guerre de trente ans , en i6i8; 4", de
cefle guerre a celle de sept ans, en i755; 5° en(in, de 1755
jusqu'au i*'' septembre 1824 , jour ou la ville recut une autre
organisation. Plusieurs appendices sont consa<res a des derails
de statistique et de topographie ; on y trouve aussi des listes de
magistrals qui remontent, avec autnnt d'exactilude que le
permetlaient le temps, jusqii'a I'an i2'55.
32. — * Eustathii archiepisc.opi Thessalonicensis comrnen-
tiiriiad Homeri Odjsseam. — Commenlaires d'Eustathe, ar-
cheveque de Thessaloni(]ue sur I'Odyssee d'Hoinere. T. II.
premiere livraison. Leipzig, 1826. In-4"'
Eustallie est,poTir tout homme cjiii vent etudier Homere,
nn auteur indispensable. II a vecusous les empereurs Maniiel,
Alexis et Andronic Comnene. D'abord moine, il enseigna la
rhetoriqne dans un couvent , puis il fut archcveque de Cons-
tantinople. II y a , dans son commentairc de I'lliade et de
rOdyssc'e, une immense erudition : remarques grammaticales,
traditions historiques , rajqirochemens ingenieux , tout y
abonde, el Ton pent dire que le principal defaut du livre ,
c'est qu'il est trop plein de choses. Ccpendant, commc il est
plus fait pour I't'lude que pour une simple lecture, il est a de-
sirer qu'il soil plus connu, et plus scmvent lire des biblio-
iheques ou la cherte de ses editions le tient renferme. II n'en
existait jusqu'ici que deux, publires dans un espace de moins
de 20 ans [ de ir)42 a i56o), I'une a Rome, I'auire a Bale.
Ces editions ne fiircnt stiivies d'aucune autre; car, je ne tiens
pas compte de I'enfreprise abandonnee au commencement du
siecle dernier par M. Salvini. M. Heinricli, professeur a Bonn,
avail atinonce , il y a quelques ahnees , qu'il donnerait Eusta-
1 44 LIVRES ETRA-NGERS.
the au public , ci nous nous dlions hates d'anrioncer celte bonne
iioiiveile^ raais cette esperanco fiit encore (lecne, lorsqu'enfin
en i.SaS parurent plusiems caliiers separes, ct qui deja fornient
deux voliiiiies, ei reiiferinent I'Oilyssee commenlee par Eus-
lathe. Celte ruimjiression est faite sur I'cdiiion la j)lus ostiinee ,
celle de Rome. On n'en a pas mime change la ponctualion:
on I'a repiod'iite avec unc hdelife qui tient de la ii{;ueur d'un
fac simile. On n'a point reim|)rime le tcxte d'Honiere ; ii est
plui comrnode, en effet, de se servir pour- la lectuie d'Eus-
tathe d'uii exemplaire separe, que de retonrner tro|» sonveiit
les pages pour cliorcher lin texte dont ia {)rolixite des notes
vous a di'ja eloigne. On a eu soin pour la commodite ties ci-
tations, de marquer en marge, a droite, la pagination de
Teditioii roniaine , a gauclie celle de {'edition de Bale. Noiis
regariions la publication de celivre comme I'nndes plus grands
services rendus aux bonnes etudes, et nous regrettons de ne
voir sur le titrc aucun nom anquel puisse s'adresser noire re-
connaissance. Toulcfois , M. Weigel, qui a fait les frais de
I'cntreprise , raerite nos eloges; graces a lui , nous possederons,
pour rooins de quatre-vingis francs, un livre precieux : car il
etait devenu tres-difficile de se procurer I'ediiion de Rome;
quant a I'edition de Bale, eile etait pleine de fautes, et toutes
deus se \endaient a nn prix fort eleve.
33. — * M. Tullii Ciceronis de Republica libri , etc. — La
Rej)ublique de Ciceron. Noiwelle edition de G. H. 3Ioser, avec
des notes par M. (>reutzer. Francfort, i8a6. In-8°.
L'infatigable et ingenieux professeur Creutzer continue ses
travaux stir differens traites de Ciceron. Deja on lui doit une
edition de celui de Natiira Deoruin , une autre du traiie de Le-
gibus : voici celle qu'il a promise de la Republique , et bientot ,
nous pouvons I'assnrer , I'oiivrage intitule de Divinatione se
trouvera entre les mains du public. Le volume dont il s'agit
aujourd'hni esi dela jdtishauteimpnrtance, non que Ton inantpie
d'editions de ce Iraite idepuis que les recherches de I'abbe Mai
nous en ont rendu des fragniens si nombrenx et si iraportans,
TAllemagne les a vu leimprimer successiven)ent par les soins
de M I\l . Heiiirich , Stei/iac/.er , Lebner et Schiitz : et meme en ce ,
moment, le premier s'occupe encore d'nnc edition in-quarto,
contenaut des remarques fort etendues. M. Moser, dont le livre
est maintenant sous nos veiix , eleve du celebre Creutzer, se
montre toujours digne de son maitre , et il Iravaille si bien sous
sa direction qu'il est pcrmis de croire que I'ouvrage de I'un est
souvetit celui de I'autre. La base de cetle edition est toujours
le Palimpseste de I'abbe Mai. Tout en rendant hommage au
. ALLEMAGNE. i/,5
merite du docle Italien, M. Moser qui, dcpuis plusieiirs an-
nees, se consacre plus specialement a I'elude des traites philo-
sopliii([iics de CictTon , a pense que ses travatix pourraient
prodiiire de bons resultats, quant a la restitution eta I'inter-
pretation de certains passages. II a done soumis ses essais en
ce genre a M. Creulzer qui a lout revu, ou, pour niieux nous
exprimer, qui a coopere a tout. Comirie le but de ces nouveaux
cditeurs etait de donner des choses neuves, ils se sent atta-
ches a ne point reproduire ce que d'autres ont public jiendant
la duree de leur travail ; d'ailleurs, ce travail porte un cachet
tout particulier, et se distingue par ces grandes vues, qui ont
altire sur le savant protesseur les regaids de noire Academic
des inscriptions dont il est devenu associe etranger : digne ct
noble recompense des nombreux et iin[)ortans services qu'il
rend a la science de I'antiquite. Rien n'est plus satisfaisant sans
doute que le chapitre intitule Index libronun ; on y voit avec
plaisir renumeration de tous les Iravaiix dont ce Iraite de Ci-
ceron a deja ete I'objet. C'est ici suriout que Ton s'apercoit que
les limites des efats ne sont plus celles de la science, et qu'il
s'esl etabii entre les ])euplesun tel commerce de lumieres qu'un
sujet Iraite chez une nation profile a toutes les autres. II ne
mancjueici ni la preface de M. Mai, nile lac- simile du paliiu-
pseste. A la fin du volume, on trouve aussil'index (]ue M. Nie-
buhr avail faitpour la premiere edition. Pendant I'impression ,
M. Moser a fait encore des additions qu'on lit a la fin, et qu'il
faut com])arer avec les notes, ce qui n'est pas toujours fort
commode , raais ce qui n'a pu etie fait aatrenient. Quant aux
excursus , on en a etc fort sobre, et d'aiilenrs, ils sont d'uno
haute importance. Nous citerons plus specialement celui qui a
pour objet la repariitiou du peuple en centuries par Servius
Tullius. Get endroit du livre ii est a peu pres le seul de tout
I'ouvrage dont un historieu puisse llrcr jiai ti; encore le texte
est-il tellement altcre qu'on ne pent s'en rendre compte qu'en
reslituant les mots, ce qui ouvre nn cliauip bien vastea la con-
troverse. M. Moser s'est fait ici simple rapjiorlcur : il a analyse
les opinions de M. Niebuhr, celles de Steinacher , de Franc/; ,
6.e Burckhard , de Jlcisif^ , de Hermann. I! ne s'agit de rien
moins que de concilier Tite-Live avec Denis d'Halycarnasse sur
le nombre des centuries , sur leur division, et de trouver place
pour les centuries de chevaliers. Dernierement ce point a ete
examine, dans un article tres-profond de V-Hcrmos ( rahier de
mai ). Nous ne craignons pas d'annoncer ici que la question
recevra bientot la solution la ])lus satisfaisante, de celui qui
I'a sonlevoe le jiremier , c'est-a-dire , de M. Niebnhr lui-menie.
T. XXXI. — Juillet 1826. 10
146 LIVRES I^LTRANGJiRS
Car la seconde edition dii ]ireniier volume de son HUtoire ilc
Rome est sons presse, et j'ai snjet do pcnser que sa reponse
laissera pen de prise ;\une rrplifpie. Pour en revenir a M. Mo
ser et a M. Crcntzer, nous no jiouvons plus que conseiller a
nos leclcurs dc lire les notes, tt ils nous sauronf ^ri- de re
conseil, apres I'avoir snivi. P. de GornvRY.
SUISSE.
34. — * La Scandinavie et les Alpes , par Ch. - Victor de
BoNSTETTEN , uuteur de V Homme du midi et T Homme dunord,
des Recherches stir la nature ct les lots de V imagination , des
Etudes de r/iomme, du Voyage dans le Latiinn , etc. Geneve,
1826; Paschoud. Paris, ineiiie maison , rue de Seine, n° 48.
Brochure in-8° dc xxx el 18;^ pages ; Jirix, 6 (V.
Ce n'est ici in nn voyage, ni un traile, ni niie disserlalion ;
c'est un recueil de souvenirs, qui presence, d'mienianicre unpen
vague, un peu confuse, nia is eii memetenisaniiueeetpittoresque,
les observations quel'autenra faites pendant son scjour dans les
contrees situees au-dcla de la iner I3alti(|i)e. Le cliniar, les re-
volutions du so! , les scenes de la nature, les evenemens hislo-
riques, les nioeiirs, la litterature, sont tour a tour robjetde ses
remarques et de ses tableaux. Uans une premiere f)artieinti-
tulee : Fragmcns stir C Islande , I'auleur exprime ainsi I'im-
pression qu'ileprouva en arrivant dans les regions sepicntrio-
nales. «. Quand j'eus passe la Baltiqne , je me sentis dans un pays
nouvean. Le ciel , la terre , les liommes, leur langage, n'eiaient
plus les meraes j)our nioi. Les decorations de mes idees etaienl
cliangees; nn nionde nouvean se deroulait a mes regards."
Toutefois, M. de Bonsletlen n'est pas du nombre de ces phi-
losophes qui , exagerant I'influence du climat, le regardent, a
I'exemjile de Montesquieu, comrae la cause principale et pres-
([ue unique des institutions etdesqualites morales des penplcs.
« On parle, dit-il, du climat, coinine d'une quantile constante,
et 11 n'y en a pas de j)lus mobile. Chaque invention dans ies
artsseinble lapjiroclier le nord du midi, el cliac^ue manvaise
loi nons rend nn peu Lapons. ■> Ailleurs , il fait ces remarques
jddicieuses sur I'effet que produisit en Islande I'introduclion
de la langue latine ({ui fut bienloi la seule langue ecrite :
1 Commc on n'ecrit jamais dans une langue morte que pour
un petit nombre de lecteurs, il arriva en Islande cjue I'usage
du latin , en separanl le gros de la nation de sa parlie pen-
sante, la rcndil ctrnngcre aux progres des lumieres. On vit
alors chez les peoples du nord ce qu'on a vn chcz foutcs les
SUISSE.— IT ALIE. 147
jiaiions culfivees de TEurope : des savai;s neyliger la langue
de leur pays, el des nations scjiarees <ies linaiores de Iturs pen-
seurs. De la I'ignorance et la baibarie des pciiples du moyei!
age, avatit la veritable renaissance des let! res [)ar I'lisage de la
langue vulgaire. II y a une correspondance si inlimc entre la
])ensee ct le langage, que les progros de la pensee sont tou-
jours proportionnes aux jirogres du langage, coninic les pro-
gresdu langage lesofitaux ])rogrcs de la pensee. C'est toujours
le reflet des himieres de quelcpies lioninies sur la lotaiifc de la
iialiori, qni donne de la "vie a la{)ensee. » Dans la seconde par-
lie de son livre , M. de Bonstetun s'attache a faire ressortir les
differences geologiques qui existent entre les monlagnes de la
Scandinavic et les Alpes; les jjieinieres, arrondies au soniniet
en forme de plateaux , sont crevassees scidement a lears bases,
tandis que c'est a la cime des aulres que se Irouvent les cre-
vasses et les rocs escarpcs. Cette remarque fournil a I'auieur
plus d'line conjecture ingenieuse siir les revolutions qu'a dvi
eprouver le globe lerreslre. Les grands tableaux, les traits de
sentimeiis, les observations ingenieuses ou profondes, se pre-
sentent frequemment dans I'ouvrage de M. de Bonstelten. Son
style, a la fois nature! et briliant, offre de tems en Icms quel-
ques formes etrangeres , qui ne sont toutefois dcpourvues ni
d'oi iginalite, ni de grace. Mais I'ordre et la methode sont ab-
solnment exclus de cet ecrit, et il me paraitrait impossible d'en
faire une analyse quelconque. Tel est en general le caractcre
distinctif de I'ecolegermanique. En France, I'auieur songe sans
cesse au public qui exige uti livre bien fait. En Allemagne , il
semble le plus souvent u'avoir pris la plume que pour satis-
faire le besoin d'exprinier ce qu'il a senii. Cette rnaniere de
composer n'est pas sans cliarme pour le lecleur qui ne cherche
quun amusement ; niais veut-il recueillir quelque fruit de sa
lecture , il s'apercoit aussitol ([ue I'auteiir lui a laisse le soin de
coordonner ses pensees et d'en faire , s'il s.e peut , un ouvrage.
Ch.
ITAHE.
35. — * Meniojif sulla atoria e nototnia degli animali senzn
vcrtebre. — Mcmoires sur I'histoire et I'anatomie des animaux
sans vertebres du royaume tie Naples ; par jE". Delle Chiaje.
Naples , 1823-1825. In-4° avec planches. 5 livraisons ont deja
jiaru.
M. Delle Chiaje,eleve du savanlPoli, marche sur les traces
de son digue mailre. Les mcmoires qu'il public offrent aux
naluralistcs les descriptions de j)hisicurs especes entiereinent
148 I-IVRES ETRANGERS.
nouvcllcs dans la classe dos animaux saus vcrlebros. Nous cf
lei'ons entre nutros une incdusc a laquelle il a donnc le noin de
cassiopea borbonica , decrite dans la premiere livraison.
E. G.
36. — II Bolanico ilaliano, ofsia discussioni siiUa Flora ita-
liana , etc. — Le Boianisle italien, on Discussions sur la Flore
italicnne , du professeur/o^c/^/i Mouktti. N" \" . Pavie, 182G;
Insila. In-4°.
M. MoRETTi, qui nous a doja promis I'cdiiion de sa Flore
italienne a laquelle il Iravnillc depuis if) ans, a sent! la ne-
cessite de la f'aire preceder par son Botaniste italien. II a vu
combien il seralt difficile il'assigner a chatiue espcce les deno-
minalions diverses f;ue leur ont appliquees lous ceux (|ui en
ont Iralle auparnvant. Pour eviler toule erreur, il s'cst pro-
pose de publier d'avance les planlcs ([u'il croit elre nouvcllcs,
et d'indiquer cclles qui , Lien que decrites par des eirangers,
n'ont pas encore ete indiqiiiJcs comme indigenes de I'ltalie. II
soumet ainsi au jugeinent des plus liabiles botanisles diverses
plantes etqueiques autres dont I'originecst encore incertaine;
il s'engage a publier, avec des annotations, les mi'moires qui lui
scront adresses, rnlativenient a cliacune de ces pianies. Nous
esperons que les amis de la science s'empresseront de s'assoclcr
a I'utile entreprise de M. Moretti. F. Salfi.
37. — Rijlessiorti so/ira I' origine delle Malattic , etc. — Re-
flexions sur I'origine des maladies et leiirs remedes specifiqnes,
modifies d'apres la ilieorie du docleur Lk Roy. Naples, 1826;
P. Tizzano. In 8°; prix , 3 Carlins ( i t'. 32 c. }.
Get ouvrage est une des nombreuses brochures que fait nailre
la vogue du specifique coni])Ose par Le Roy qui, raalgre les
defenses du gouvernement des JDeux-Siciles et les attatjucs
dont il est I'objet dans les chaires de I'Universile et sur les thea-
tres de celte capitale, trouve clinf)ue jour, en Italic, un grand
nombre de partisans. L'auteur de la brochure que nous an-
nonoons , s'clevanl conlre le sysleme du docteur Broussais,
souticnt que les drasliqnes violens sont preferables a la saignee,
dans les pays chauds. Cet ouvrage, qui conlient quelques ob-
servations assez justes , est d'ailleurs faiblcment concu et fai-
blement ecrit. E. G.
38. — * Delia storia Bresciana , etc. — Discours sar I'his-
toire de Brescia, par Joseph Nicolini. Brescia, iSaS; N. Bet-
toni. In 4°.
M. Bettoni, celebretypographe Italien , ayant forme le projet
de pidjlier a la fois les vies et les portraits deshommes de Ict-
tres les plus illustres de Brescia, apres avoir confie rexcculion
ITALIE. 1/.9
tl'un si iniercssanl travail a des t'crivaiiis et a des artistes que
celte ville s'honorc de posseder aujourd'hui, a compris qu'il
imporl.Tit de joindre a ce reciicil biographique et iconogra-
phique iiii discours preliminaire qui offrit un tableau abrege
de I'hisloire civile de Brescia. M. Nicolini, dcja connu par
d'autres productions liltcraires, a rempli cetle laclie avec suc-
ces. On ne Irouve ricri a reprendre dans le plan , ni dans les
details de son precis bistorique , divise en Irois periodes, dont
la j)renilere s'elend depnis la fondalion de Brescia jusqu'au
regne d'Othon V de Saxe; la seconde s'arrete a la moitic
du siv*^ siecle; et la troisienie ne depasse pas le xviS. L'auteur
distingue les terns ou Brescia etait constituee en republic|ue,
de ceux oii elle toniba sous les lois d'lin maitre, et il peint le
caractere du peuple sous I'une et I'autre forme de gouverne-
ment. Le siyle de cet essai est elegant, et ne manque pas
de dignite. Nous conseillons a M. Nicolini de se livrer encore
a des travaux de ce genre et tels que I'ltalie doit en attendre
de son patriotisme et de son talent.
39. — La Georgica de'Jiori, poerna, etc. — -La Georgique des
fleurs , poeme d'yJ/ige Ricci, eic. Pise, i825 ; Nistri. In-18.
M. Ricci s'est deja faitconnaitre par plusieurs autres poemes
de divers genres, surtout par ceux de Vltaliade et de St. Benoit.
Celui que nous annoncons est du genre didaclique; il contient
vingt-quatre chants, composes en terzn rima. Apres avoir ex-
pose les regies generalcsa suivre ])our la forniallon d'un jardin,
et trace un calendricr de Flore, propre a determiner les tra-
vaux convenablesachaque saison et achaquemois, l'auteur en-
trem^le ses ler.ons sur le jardinage de tableaux poetiques , ou il
peint avec variete les metamorphoses mythologiques de la j)lu-
])artdes fleurs. Ilenibellit ces descriplionsemprunlees a la fable
par des traits que liii fournit sa brillante imagination, et par
des episodes dont I'objet est de plaire aux lecteurs , en les ins-
truisant. On Irouve, a la fin de chaque chant, des notes d'une
brievete qui ne iiuit pas a la science.
Zio. — * Canzoni, etc. — Odes de Jacques Leopardi. Bo-
logne, 1824 ; Nobili. In-8'^.
La plupart de ces odes sont de veritables chants patriotiques.
Admirateiir des i)remiers poe'es de sa nation, du Dante ct de
Petrarque, M. Leopardi, tout en iinilant leur beau style, n'ex-
prirae que des pensees qui lui appartienncnt a lui-meme. Dans
la premiere ode, il oppose a Tabaissement de I'ltalie moderne
le souvenir de sa grandeur passee, et s'indigne contre les vices
quiont produit et qui pcrpetuent sa triste decadence. A la vuc
de cette cliero patrie, abandonnec parses propres enfans , il
oo LIVRES ETRANGERS.
demanile des ariues, et vent combaltre el inourir seul pour
eile . en s'ecrhint : « O ciel, accorde-inoi que mon sang rc-
pauiln devieiine un feu (|ui einbrase le coeur de trrns mes con-
ritoycns ! (i) » Les deux Canzoni snivans cclebient I'ereclioii
d'un monument a la mcmoire du Danle par la ville de Flo-
rence , el la decouvcrle des livres de Id rr/mbl/rjiwile Ciceioii ,
faile par I'abbe Mai. Ennemi de tonte servitude politique, I'au-
teur s'eleveaussi contre la servitude lilteraire; il nieprise jusle-
ment cette foule desprits mediocres qui, loin d'imiter la liberti!
de penser des etrangers , nc font que repeter des maximes
vu'gaires , la plupart decreditees. La quatrieme ode est un
chant nuptial en I'honnenrde Paoline, sceurdupoete ; cette piece
renferme de sages et nobles conseils qu'il adresse aux meres
ifaliennes sur Teducation de leuis enfans, el cpi'il torini!»e en
leur rappelanl le sacrifice de la fille de Virginius. Dans la cin-
((uieme, il exhorte un jeune athlete, qui vietit de remporter le
[irix an jeu du ballon, a cueillir des palmes encore plus honn-
rables. La sixieme offre nn commentaire energique des der-
nieres paroles du second Brutus , avant de se donucr la niort ;
I'auleur s'efforce de demontrer la juslesse de cette terrible
apostrophe a lavertu, par le tableau des uialheurs de son pays.
La septieme, adressee au printems, vante les charmes del'an-
cienne mythologie, dont la perte a change la nature en une
muetle solitude. Cette ode est suivie du dernier chant de Sa-
p/io , et d'un hjinne aux patriarches. Le poete a dcdie la der-
niere a sa dame. II s'est montre fidele , dans ces differentes
pieces , aux memes sentimens et aux memes pensees. Son styh;
devient parfois un peu obscur par I'emploi de quehpies lati-
nismes, qui n'otent rien , d'ailleurs, a la dignite de son elo-
cution.
41. — Vn Sogno delta vita ed il Larncnto di Dnnle. — Un
Songe de la vie et la Lamentation du Dante ; par Ange Brof-
FERio. Milan, iSaS; A.-F. Stella. In-8".
L'auteur de ces vers merite d'etre distingue dans la foule de
ses rivaux par sa jeunesse et par la sensibilite dont ses poesies
sont empreintes. L'editeur en lone la clarte , dans son avis au
public. Mais il me semble que le jeune poele ne doil pas fon-
der uniquement son merite snr cctle qualitc indispensable a
(i) L'iirml, qua r.'iinii; io solo
Conibaltpri>, procooibero sol io
Damini , o Ciel , che sinfoco
Agl' italiri pptii il sangue min.
ITALIE. i5i
lout ocrivaiii. Nous liouvoiis, d'ailleurs, dans ses jjreinieres
pioductioiis, un caractere louclianl, une leinte de melancolie,
qui sonl d"un heureux augure pour son talent a venir. Ses
odes sur le Toinbeau de Julittle et de Romeo, sur le Cimetiere,
et suitoui la Lamentation du Dante juslifieiit ces presages.
Dans la derniere, Taiiteui' fait repcter au Dante des plirases
exlrnitcs presque litteralement de ses ceuvres. Quoique cet
artifice puisse paraitre pen original , et meme pueril , on
avoueia du moins c|ue le jeune poete I'a employe avec beau-
coup d'adres^e et de naturel. Cela prouve, au reste , combien
il s'est applique a s'cnrichir des couleurs de ce grand poete,
pour en reveiir ses propres pensces,
42. — Tragedie , etc. — Tragedies A' Edouard de Fabbri , de
Cesene. Rimini, 1821, 1822, etc. In 8°.
M. Fabbri est i'lin iles auteurs dramatiques de I'ltalie qui,
depuisle comniencement de notre siecle, ontsouventmerifeles
suffrages du public. Jeune encore, il s'etait fait remarqutr par
rexpression energiijue dessentimens et des pensees qu'il ci oyait
conveiiir le niieux aux circonstances Son premier essai fut ia
tragedie de Thjtisjbule , jouce, en 1802, aux applaudissemens
de tous !es speciateurs, mais proscrite aussilot par le gouver-
nenienl. Loin d'etre decourage par cette rigueur, il composa
plusieurs autres pieces, loujours dans le meme esprit. II a pu-
blic depuis une Iphigenie en AuUde , une Sophonisbe et une
Mariarnne.'Nlz\% , s'otant apercu cpie de pareiis sujets com-
niencaienl a vieillir, il en puisa d'autres dans I'liistoire mo-
derne , et s'adacha surtoiit a celui de Francoise de Rirnini, deja
traite \)ar tant d'autenrs. I! entreprit a la fois, comme poete,
de faire couler denouvelles larmes sur cette funeste aventure,
ct, corame historien, de jusllfier la Romagne de I'horrible bar-
baric dont plusieurs etrangeis ont accuse cette province, en
cbeicliant surloul a refuter les asseitions de M. de Sismondi,
dansrHistoire des republiques italieiinesdu moycn age. Mais il
n'est parvenu qu'a pioiiver I'ardtNir de son patriotisme, par
cette refutation et par sa tragedie; I'hcroine, amenee par lui
sur la scene, nous emeut beaucouj) luoins que dans le recit du
Dante. On trouve ce defaiit dans toulcs les pieces qu'on a essayii
de faire sur le meme sujet, parmi lesquelles nous avons signale
les plus remarquables. ( Voy. Ret'. Em:., t. xxii, pag. 4o/i.)
Est-ce la faute des auteurs, ou n'est-ce pasplutot celle du sujet,
(|ui, apres avoir fburui au Dante un louchant episode, ne se
prele pas au plan d'une bonne tragedie?
.'i'^. — Novel /e de, etc. — Contes de .facte/ Scivor,\Ni. Palerme,
1824; Solli. In-S".
i5a LIVRES £TRANGERS.
L'edileur aniionce que ce recueil conlicndra douze notx-
velles , dont la premiere avait deja etc imprimee sous Ic titrc
de Fete de Venus. II rappclle les eloges que M. Scrofani obtint
de CesaroUi, au siijet de cet essai. L'auteur est, en effet, avan-
tagcusement connu Ciaiis la republique des letlres par diverses
productions dignes d'etre remarquces. Mais nous parlageons
ici I'opinion de YAntkologic de Florence, qui n'a pas trouve
dans celte nouvelle lout I'interet qu'aurait pu y repandrc le
talent de M. Scrofani. Nous esperons qu'il se relevera dans
celles dont il promet la publication, et qu'il aura su donner
plus d'importance a ses sujefs, en les ratlachant aux interets
de son siecleet de sa nalion.
44- — * lllustrazione dell' Arco d'Augusto in Rimini , etc.
— Eclaircissemens sur I'Arc d'Auguste a Rimini , avec huit
planches; par Maurice Brighenti , ancien professcur de I'L'-
niversite de Bologne. Rimini, i825.In-8°.
L'Arc d'Auguste, situe pres dela porte orientale de Rimini,
a sonvent occupe I'attention des artistes et des antiquaires, et
lous I'ont regarde corame I'un des raonumens qui prouvent le
mieux la magnificence des anciens Remains. Ceux-ci I'avaient
eleve en riionneur d'Auguste, au sujet de la restauration des
grandesroutesdel'Italie.M. Brighenti s'esi a jiplique a determiner
I'annee ou fut drige ce monument, a icconnaifre les medailles
qui le representent, el a completer I'inscription quise trouve
fortalteree. C'est le sujet de la premiere partie de cettedisser-
tation. La seconde contient une description exacte de tout ce
qui reste de ce grand monument, d'autant j)Ius prccieuse
qu'elle I'offre en meme terns tel qu'il elait avant sa destruc-
tion, c'est-a-dire, qu'elle en indique le site, lesfonderaens, le
soubassement, les colonnes, lesornemens et les debris des sta-
tues dont il etail decore. Sept planches forment un atlas se-
pare du livre, et peuvent ligurer aussi dans le cabinet d'un
amateur. L'execution en estparfaite.L'auleurpi'omet de publier
nn travail semblable sur le Pont de Rimini et le Temple de
Malatesta. — L'allas etle texle se trouvent a Paiis, chez Treul-
tel el Wiirtz. ¥. S.
PAYS-BAS.
45. — * Verhandeling over de damphringsluclit , etc. — Dis-
sertation sur I'air atmosplierique et. son influence sur I'ecoiio-
mie animale; parle chevalier /.-/?. -Z. de Kirck.hoff ; iraduite
du francais sur la tiuisicine edition, par MM. Swaan el Jou-
niTSHA , D*" M. Hoorn , 1826; imprimerie de Vermandcn.
I vol. in 8<>.
PAYS-BAS. 1 tVi
/,6. — * Ahnnnah ten diensle der zeelieden. — Almaiiacli a
I'lisagc des mariiis, pour 1826 et 1827. La Haie, iSaS; im-
primerie de I'etat. 1 vol. in 8°.
Get ouvrage qui est, pour le royaume des Pays-Bas , ce que
la Connaissance des teins est pour la France , exisle depuis
1788; et il en parait annuellement un volume. 11 est rediirc
par une Commission chargee de I'examen des officiers de ma-
rine, de la revision de cartes hydrographiqucs , et generale-
ment de tout ce qui concerne la determination des longitudes
en mer. On y trouve, comme dans les autres recueils de menie
nature, I'ascension droile et la declinaison du solell et de la
lune pour les differens jours du mois; les diametres apparens
de ces astres; ia distance de la lune aux principales eloiles ;
les lieux de Venus , de Mars , de Saturne, de Jupiter ; les confi
gurations des satellites de Jupiter; les rpoques des eclipses de
ces satellites. Des avis et des memoires fort interessans servent
encore a completer les documens utiles que renferroe cet ou-
vrage. On doit au zele infaligable de M. Schroder, professeur
^ a rUniversitcd'Utrecht et president de la Commission, tonte
la partie supplementaire qui a paru dans les volumes de 182G
et 1827. Ce sont des tables ires-etcndues des dcclinaisons de
I'aiguilie aimantce hors des tro])iques, dont les donnees ont etc
puisees dans un grand nombre d'ouvrages ; des avis sur les
fanaux places autour de la rade de Batavia , ainsi que le long
des cotesde laHoliande, de la Zelande etdela Flandre occiden-
tale; des tables des courans et des decliiiaisons de raiguiile
observes pendant un voyage a Batavia ; des analyses des re-
cherclies de Davy et dc Barlow sur les actions chimiques (les
nietaux et sur I'isolement de I'aiguilie aimantee. On trouve
encore dans eel ouvrage des recherches tres-interessanles sur
les releves hydrographiciues du golfe de Mexique , de la Terre
ferme et des iles des Indes occidentales dus aux ofiicicrs es-
pagnols, et des rapprocheinens avec les observations de M. A.
de Humboldt pour Li dclermiiialion des longitudes et latitudes
de differens points si lues dans ces regions; ainsi que de$ rensei-
* gneraens sur la nielhode d'apres larjucile la carte hydrogra-
phique des passes des bouches de I'Escaut, etc. a ele Icvce ,
en 1823 et 1824 , par le capitaine-lieutenant J.-C. Ryk. Le
volume pour 1S27 se termine ])ar une l;ible des elemens de l;i
grande triangulation faite en Belgique par le general Kr.tveii-
hof. Nous n'avons pu donner qu'une indication des princi-
paux articles qui reconimandeni re recueil, digne sous tons
les rai)ports d'etre connu a I'exterieur bien plus qu'i! ne Test
generalemrnl. Nous nc craignonspas mcme de dire que lessa-
ir.4 I.IVKES ETRANGERS.
vans de ioiiU'i It's classes pomroiit le coosiilter avcc fruil ct
liiont avoc iiitert't la panic stip[)leine;)taiic \. Quktklet.
4" — * Handboe/' voor staatsinanntn , rlr:. — Manuel «ie
radiiiinislrateur, ilu nianiifacturicr el dn ncf^ociant; par M. de
(Iloet; tiaduit snr la seconde edition, et dedie a M. le cheva-
lier de Kirckhojf, par M. P. Vaw Grithuizen. Utrecht , i8'iG ;
A.lter. I vol. in-8° de xxviii-270 pages;
Nous avons rendu , dans le terns, un coinpte favorable dii
Manuel de M. de Cloet ( Voy. Ra: Enc. , t. xxi , p. 388 ). Ctt
ecrivain n'aurail pu avoir, enllollniide, un meillenr inierpiele
que M. Van Giilhuizcn, auquel la langue hoUandaise est ties-
familiere; el Ton dolt le feliciler d'avoir eu jjour liaducteiir
nn honinie aiissi verse ilans la corinaissance de I'econoinie po-
litique et des affaires cominerciales. La traduction de M. Van
Grithuizen est tres-hicn ecrite el faite avec cxacliludc, el il I'a
enrichie de 191 pages de notes el de rernarques, qui ajoutctu
au meritede Touvrage oiiginal. *.
48. — Les malheurs de la Grece, scene lyrique; par Ph. I..
Rruxelles, 1826.
49. — Cantate snr la destiuction de Missolonghi ; j)ar Ph. L.
Bruxelles, 1826.
5o. — Missolonfi^hi, etc. — Missolonghi, par E. - ff^. Vain-
dam-Van-Isselt. Tiel , 1826; Carnpnglie. In-8".
Ces differentes compositions ont pour but de raiuener I'at-
tenlion de I'anu de I'humaniie stir les malheurs de la Grece;
les deux premieres ont ete vivenient applaudies a Bruxelles ,
ilanstleuxconcerlsqui ont eledonnes siiccessivenient an benefice
des malheureux Hellenes ; la troisicnie, ecrite en hoiiandais,
est egalement concue et executee sons I'inspiraiion de la dou-
leur et d'une genereuse indignation. Nous regrcttons de ne
pouvoir en faire connaitre, par nne traduction, des fragmens a
nos lecteurs ; mais , nous croyons les dedonimager , rn cilaiil
les vers suivans, tires de la scene lyrique sur les malheurs lie
ia Grece.
O mes concitoyens ! si de la gloire antique
Vous gardez en vos coeurs le noble souvenir.
Que vos pieuses mains ariiicbont la Belgique
Aox reprocbes de I'avenii'.
Un peu d'or sauvciail ces peuples oiagnaninies
Que le besoia pouisuit au milieu des combats ;
Vi\ j)eu dot doiiuerait du fer a leurs soldats,
Du paiu aux culaus dis vicliiues.
Pri'lres, pour eux aussi mouiul le lledein|>teui ;
Fils d'EgiiKinl, aide/.-ics a briser lours cnMavc-i.
Vous , femmes, donncz au malhear;
Snltlats lieljTPS, doimrz aux braves.
PA.YS-BAS. '53
Ces gcncreiix acceiis out ciuentendus de tous les Beiges fiui
s'cinpressent de payer, coinme les aulies nations, leiir Inbnl
;"> la vertu malheurcuso.
5i. — Cntalogus dcr bibliotheeli van Teylers stickling. — C;i-
taloguedela bibliothequeTeylciienne a Harlem. Harlem, 182G;
Loosjes. In-8° de 128 pages.
Ce catalogue est public par M. V^an Marum directeur du
niusee de la fondation Teylerleiine et premier bibliothecaire.
Ce savant dont la reputation est generalement repandue en
Europe, a puissamment conlribuc par scs travanx a repr.ndre
de I'eclat sur retablissemenl dont I'organisation lui ful conficc
des I'annee 1784. En nous fesant connaitre aujourd'hni les on-
vrages precieux cpie renferuie la bibliotheque, il rend un nou-
veau service aux sciences. Les amateurs des belles editions, y
trouveront une riche collection^ des auteurs grecs et lali.is,
et des documens noinbreux sur I'liistoire nalurelle, la geogra-
phic et les voyages. La bibliotheque renferme encore une des
collections des memoires academiques les plus completes que
presente notre pays. C'est surtout dans les ctablissemens publics
que Ton doit Irouver les ou\ rages souvent trcs-dispendieux
qui ne sont point a la portee des fortunes parliculieres; on
doit done savoir gre au discernement de M. Van Marum (|ui
en les reunissant , a consulte les interels du plus grand nomine
de lecteurs. A. Q.
Oiwrnges pdriodiques.
52. — * Annates universelles de V Industrie, des sciences , dc
la litterature et des beaux-arts , ou choix d'articles extraits et
tradnits des meilleurs oiivrages publics dans les deux hemis-
pheres. Bruxelles, 1826 ; Imprimeric des Annales universelles ,
grande place, n° 1189. In - 8". Prix de I'abonnement par
an , 36 f'r; par mois, 4 fV. — Ce journal paraitra tous lesmois,
par cahier de i5o a 200 pages environ ; il doit se composer de
trois parties distinctes, subdivisees elles-memes en differenles
sections. La premiere comprendra les ar-ts induslriels ; le
deuxieme les sciences ; la troisieme la Utterature et les heau.r-
arts.
Ce nouveau journal , dont le premier cahier vient de parai
tre, ne sera, d'apres I'annonce de I'editeur, qn'un choix ile
ce que les autres journaux renferment de meillcur. Son elcn-
due permettra memc d'v coniprcndrc tout ce que cenx-ci out
de &o«. C'est prometlre beaucoup. Du reste , si, des le pre-
mier numero , I'editeur a rcmpli ses engagemens , la Revue En ■
rjrlnpedique n'a pas a sc plaindrc nuisqu'ellc a fourni inron-
1 56 LIVRES liTR ANGERS.
testablemcnt plus que tous les recucils dans lesijuels on a piiisc
des matcriaux. Le caliicr que nous a\ons sous Ics yeux ron-
tient, parnii les articles princlpaux , un coup-d'cc'd sur (vlat
actuel des sciences ct dcs arts rt sur les progrcs des pcuples ,
depuis le commencement du XIX' siecle , extrait en ])artie des
articles que RIM. Sisbiondi, ^f/?yrt/«/« Constant el Juli.ien
out inseres dans la Revue Encyclopedique; des fragmens du
beau rapport fait a tlnstitut sur les paratonnerres , des notices
sur les bateaux a vcpeur, sur I'art d'incriister le verrc , sur les
machines a vapeur , sur V education des classes inferieures et
superieures , etc. Nous nous reservons de revenir plus lard sur
ce journal , quand il comptera plusieurs mois d'exislence.
A. Q.
53. — * Revue bibhograpJtique des Pays-Bas et de I'etran-
gcr , ou Indicaleur general de I'imprimerie et de la librairie ,
des cartes geographiques , gravures, lithographies et ceuvres de
musiquc. Bruxelles , P. - J. Denaat, libraire , Grande Place ,
n° n88. II parait chaque mois un cahier de 32 pages i>i - 8°.
Prix de rabonnement annuel avec les tables , 12 fr. et i5 fr.
pour la France et I'Anglelerre.
L'origine de cet utile recueil , que nous avons deja annonce,
remonte a i8i4Lapaix, conclue celte annee , fit nnitrele de-
sir d'augmenter les debouches des produits de la librairie et
d'clablir une correspondance mensuelie entre les cditeurs de
tous les pays. Peut-elre un des motifs qui conlribuerent a la
creation de la Revue bibliographique fut aussi rnniniosite que
montrait, a cette epoque, le gouvcrnement francais contre la
presse : on espera que les Pays - Bas allaient redevenir la res-
source des ecrivains persecutes. Quoi f|u'il en soit, la guerre
qui ne tarda pas a se declarer , en 181 5, nc laissa pas a la ty-
pographie les moyens de devenir florissantc, le journal fut
ilonc suspendu. En 1822 , des fonderies et des papeteries niet-
laient la Eclgique en etai deluttcr avec la France; des ouvriers
b'elaient formes , le gouvcrnement avait encouratje ccs di-
verses industries : la Revue reparut. Elle est mainlenant a sa
cinquieiue annee et a subi differens cbangemens. Nous nc jjou-
vons approuver celui que I'editeiir a cru devoir intro:!uire, et
qui consisle a ne point donner I'adresse des editenrs qui ne
deposerojit pas les ouvrages c]u'ils publient : Tesccllent journal
de M. Beuchol ne cominet pas unc semblable faute : il donee
sur un ouvrage tous les renseigneraens desirables, sans exiger
«le depot. Une veritable amelioration consisle dans les notices
qui sont quelquefois placees a la suite du litre des ouvrages
antionces; on oblient ces nnnonccs dclaillces, en adressanl a
LITRES FRA.NCAIS.— SCIENCES PHYSIQUES. i57
I'l'diteur deux exeniplaires de I'ouvrage dont on desire qu'il
soil rendu comple. I.es nolicos qui ont paru jusqu'a ce joui*
so:it en genernl fort louangeiisos ct ne font pas assez la part de
la critique. Ainsi, Ton y voit les Memoires d'Henriette fVilson
pories aux nues, sans que I'Dri disc un mot des caloinnies dont
est reniplie cette scandaleuse publication. Quoi qu'il en soit ,
ce recueil, (pii tend a se j)erfectionner, est precieux et meme
indispensable pour tons les amateurs de livres et pour ceux qui
aiment a comparer les prodiiits de la presse dans les principales
conlrees de I'Europe. J. A. L.
LIVRES FRANCAIS.
Sciences physiques et naturelles.
S/j. — * Dictionnaire classique cthistoire naturellc , par une
Socicle de iialuralistes , dirige par M. Bory de Saint-Vincent.
Tome X. BIAC-MN. Paris, 1626; Rey et Gravier; Baudouin.
I vol. in-S" de 6/^7. pages avec une livraison de planches; prix,
I'if. en noir,et i5 f. en coulcur (v. TJec. £«c.,t. xxts, p. 782 ).
Ce X® volume, qui n'a pas attendu pour paraiire plus de
quatre mois apres le IX** , est cejiendant le plus fort de la col-
lection, qui n'en aura que quinze; et loin que la plupart des
collaborateurs se lassent a mesure qu'ils avancent dans la car-
riere, ce volume est , s'il est possible , encore plus conciencieu-
sement fait que les precedens. II n'est guere d'articles qui ne
conticnnent quelques vues neuves; une on deas parties de la
science y sont pent-etre un peu negligees, 011 trop servilement
et meme maladroitement calquees sur d'autres ouvrages an-
terieurs; mais , comme les sources oil puiserent les redacteurs
qui signent ces articles son excoUerites , la partie la moins neuve
du Dictionnaire n'en est pas moins encore tres-recomman-
dable. L'importance des mots que le hasord de I'ordre alpha-
betique appelait dans la serie M , rend au resle ce volume si
remarquable, qu'on pourrait bien lui passer quelques imper-
fections. Les articles marninalogie , inammijeres , mersopiaux ,
marteeX migrations de M. Geoffroy-Saint-Hilairk fils, ina-
rais,t)ier, metamorphoses, inatit'/e ei microscopiques de M. Boav
DE Saint-Vincent, ( V. ci-apres, p. i58), methode deM. A. Ri-
chard, marces c\iinarned(iM.. Constan t P KivosT , inagnetisme,
meteores , meteorites et mines de M. Guillemin , enfin , mine^
ralogie de M. Delafosse, sont tous egalement curicux par le
fonds et par la forme. La maniere dont les faits v sont, pour
alnsi dire, cntr.-.ses ot presses, ne nuit jamais a la clarte, pi
meme, quelquefois, a une cerlaine beaute de style. La plus
i5« • LIVRES FRANflAlS.
parr tic CCS articles iinportans soiit comnie les chaipenles ile
j>^rands ouvrages qui pourraiem, avec iin pen plus de deve-
loppeincns, mcriler qu'on Ics lirat a part pour les repandre le
plus possible dans le inonde savant. L'importance de ces ar-
ticles Iciir incritera siiccessivemcnt un examcn parliciiiier dans
notre Reme. II nous sul'fit pour le moment dc les signaler. On
reniatqno, dans la liste des coll.iboralcurs qui sc Irouve en
iite du Bit tionnaire dont il est question, queiqnes noms dont
on clierclie vainement une seuie foisriniiiale , dans le cours du
nieillenr de ses volumes. MM. V. Audouin, Dumas et d'Au-
debard de FOrussac, par exemp'.e, auraienl-ils cesse d'y tra-
vailler? leurs nombreuses occupations appelleraient-elles ail-
leurs la solliciliide de ces auteurs ? L'liistoire naturelle v
perdrait sans doute queiqnes bons articles: mnis le zele du
restc des redactenrs repond au public de la bonne redaction
(le la fin de I'ouvrage , tnnt que les Brongniarl , les Bory, les
Jussien, les Richard, les Constant Prevost , les Desliayes, les
Delongchamps , les Delafosse , les GeolTroy-Saint-Hilaire et
les Guillemin cohtinueront a y donner leurs soins. Y.
55 * De la matierr, par le colonel Bory-de-Saint-Vin-
CEKT, de TAcadeinie des sciences, etc. Paris; 1826. Rey et
Gravier, qnai des Auguslins , n" 55. In-8''. ( Voy. Rei'. Enc. ,
t. xxn , p. 5 un memoire du merae auleur siir le meme sujet. )
« On ne doit pas s'attendre, dit I'auteur , a nous voir traiter
c/e I'l matiere sous le point (!e vtie metapliyslque , ni, commc
on I'envisagea long-tems, dans un esprit de syslenie qui n'est
pas celui de la veritable philosophie; nous I'examinerons en
naturaliste. « En effet, M. Bory-de-Saint-Vincent ne s'aban-
donne a aucune idee speculative. Soigneus de s'alfranchir du
funeste esprit de sysleme, independant dans sa marclie ou il
suit pas a pas la nature, il decompose les corps de la maniere
la plus simple , il interroge I'eau (ju'il Irouve la source de toute
vie et de toute organisation, parce qu'elle en contienl les
causes el les principes en dissolution ; le microscope a la main,
il suit d'un coup d'oeil exerce I'effet des decompositions et
des recompositions , deraontre la necessite de generations
spontanees, et comment ensuite la toufe-puissance creafrice dui
arrivtr do complications en complications, jiar I'addilion d'or-
gancs divers, aux elres qui nous paraissent jouer le role le plus
important dans !a nature. Ce ne sont j)oint des hypotheses qui
servent de base aux rcsultats obtenus par M. Bory de Sainl-
Vincciit qui met ses lecteurs en etat de repetcr ses experiences
par la manietc claire et parfaite dont il lesexiiosc. Dans nnsujet
aussi abstraif, il est bien certains passages qu'on doit relire
SCIENCES PHYSIQUES. i5y
pour le comprendre parfaiuineiit ; niais, en gt'iu'-ial , r;uil<?iir ;i
le secret dc lendre attaclinntes des choses qui sont ennuyeuses
cliez ses devanciers. 11 eif vrai fjiie sa inaiiiere d'ocriie sur les
poinlslesplusardus dcia science est ilegageedeju'danlisiuc elde
pretentions; 11 n'accumule p.is les mots inintelligibles, il se met a
iaporlcede I outcs les classes delecieurs;i! suffitd'un pen debon
sens pour s'enlendre avec lui. Sur les traces dii grand Bacon,
il n'admet que ce qu'il a \n, et nous engage a taire comine lui,
n'exigeant i>as que nous le croyons sur parole. Selon ]i)i,de
I'eau <le puiis , defoiitaine, de jjluie, de i-iviere, n^eme dislillec
et siirloDi de I'eau dc mer, et cclle qui est dans leshnitres,
niise dans des vases de verre, exposee an coiitacl de I'air ei
de la iumiere, oil Ton j)rend toutes les precautions possibles
pour qu'il ne s'introduise ni corps etrangers, ni poussiere af-
mo!>pIie,ricjue , ne tarde pas a degager nne maliere miiqiteitse ,
que penelrcnt bienlot des gaz sous la forme vesiculaire, nne
troisieme combinaison azotique qu'il appelle maliere agissante^
une quatrieme colorante qui est la vegetative, enlin deux auires
scries de molecules iiiertes iju'il qualifie de rrislalisahle ei de
terreuse. « La cliimie, dit-ii, avail deja entrevu par ses pro-
])rietes la premiere de ces forme^ que noiis regardons comme
primitives; t]uel(jues pliysiciens avaient distingue ia seconde ,
sans s'occuper des consequences qu'on pouvait tirer de son
develoi)pemenr ; Buffon avait devine la troisieme ; Priestlev,
decouvert la qnalrieme; Linne, Rome de Lille et Haiiy avaient
inditjue ou saisi les Jois en vertu desqnelic se juxtaposenl les
molecules de ia cinquieme; I'anliquite, enfin , avait suppose
Texislence de la derniere. On en conclura probablement qjie
rien ii'est nouveau dans notre ccrit. » M. Borv se trorajie; sun
onviage est nouveau d'un bout a I'autre , soit par I'importance
des faits qui s'y trouvcnt accumules, soit par les consequences
qui en jaillissent. Si de tels travaux eussent precedt? les ecrits
de cesphilosophes qui deraisonnerentdepuis troi* inille ans snr
la maliere, nous aurions bien des volumes de moins; mais ia
Nerite ne serait ])as ecrasee sous une multitude de jirejuges
I'unestes. Le chapitre de la maticre agissante est des plus cu-
rieux, et renverse bien des idees. Aussi M. Bory de Saint-
Vincent qui avait, il y a quel(]iies annees, lance dans le monde
un premier essai sur ie meme sujet (Voyez le memoire deja
cite), a recu beaucoup d'objections qui I'ont determine a
revoir n7i li-avail de vingl ans avec une nouvelle ardeur. II si-
gnale lui-meme quelques erreurs ou il s'etait d'abord laisse
entrainer, ct sa bonne foi a cct egard cnmmiinde la plus en-
ticre cor.fiance sur lout Ic reste. Nul ne pent plus lui conlester
i6o LIVRES FRANCAIS.
le liti-e de premier niic?o^raphf de I'opoque : il est en inline
tcnis un de nos prof'onds jiliilosoplies. Passant de I'riude de
rhomirie -d celle des infiniment pelits, exaniitiant avec sagacite
les deux extremes de la cliaine des eircs, il applique aux pro-
gres de la raison liumaine des observations qui, pour la plu-
part des naturalistes, sont de sinipics objels de cuiiositc. II
lermine ainsi son im])Ortant travail : « Quelques])ersonnes au-
raient desire que , pour ajouter a nos experiences un degre de
certitude irrefragable, uous en eussious fait (]uel(]ues-unes
dans le vide, et que nous eussions cbaque fois acquis preala-
blement la conviction que I'eau dans laquelle se produisaient
nos sixiformes primitives, ne contenait rigoureusement que
de I'eau. Nous repondrons que nousn'avons pas entenduprou-
ver, par ce (|ui vieut d'eire expose , qu'on put faire quoique
ce soit de rien. Convaincus, comme nous le sommcs, c]ue la
sagfsse admirable, ])ar qui furent etablles Ics lois organisa-
trices de la creation, n'emplova pas le neant covame base de
ses innombrables ojuvies, nous n'avons pas pretendu , plus
que cette sagesse ineme, trouver le nennt fecond; nous avons
souniis a nos rechcrcliesseulement des corps tres-simples, parce
que nous avions la conscience (lu'au fond de leur simplicite
inenie cxistaient d'inepuisables sources de merveilles , mais
rien qui fut impossible. » G. S. H.
5G. — * Mistoire naturelle des races humaines dii nord-est
de I' Europe , de I'Jsie boreale et orientale, etde I' Afrique nus-
trale , d'api'es des recbercbes spcciales d'antiquites, de pliy-
siologie , d'analomie et de zoologie; ajipllquee a la recherche
des origines des anciens peuples, a la science etymologique ,
ala critique de I'histoire, etc., smvied'un mcTnoire lu,en iSaS,
a \ Ac.ademie des inscriptions et belles-lettres de I'lnstitul; par
A. Desmoulins, D. M., auteur de VAnatoniie du sysleine ner-
irK.r. Paris, iS'iS. ]\Iequignon-M3rvis,rue du Jardinet, n° i3.
In-8° de 892 pages , avec uu tableau generaldes races humai-
nes ^ et 6 figures lithograpliiees ; prix , 7 fr. 5o c., el 9 fr. par
la poste.
Nous nous abstiendrons de parier d'une lettre inseree dans
cet ouvrage, en forme de preface, parce qu'elle renferme des
personnaliles qui auraient dii cire bannies d'un ouvrage con-
sacre a des recherches scieutifiqucs.
L'auteur debute par uur exj)osition et une division dusujet
qu'il a traile; c'esl une analyse de son livre. En cojisiderant
quelques coufoiniites assez remarquables entre les peuplades a
j>cau jaune du nord de .'Asie, et les hordes de la meiiie cou-
leur au sud de I'Afrifpie, plusieiirs ecrivains ont pense que ces
SCIENCES PHYSIQUES. 16 1
jieuples devaieiit avoir unc origine coinmuiie; e! , siilvant Ics
ressourcos oiilinaires de Tespiil de ^ystcnie, ils ont Iroiivc,
dans I'iiistoire, les langues rt Ics usages de ces pen])les, les
traces des emigrations successive.s d'uiie nieine race juscm'anx
extremites les plus cloignees de I'ancien continent. II s'agissait
done a la fois d'exaniiuer des questions purcment liistoriques,
de discater la ])ossibilite de ces emigrations des penples, d'ap-
jn-ecier leiir degre de probabilite, et de caracleriser avec plus
de precision ces races que Ton vent coiifondre, deles etudier
en nat'ualiste, avec toutes les luir.ieres de Tanatomie compa-
rce. Telle est la tache qne M. Desmoullns s'est imposee. Son
ouvrage est divise en deux livres: dans le premier, il deter-
mine quels sont les peui)les cotinus des anciens sons Ics noms de
Scythes , de Huns, de Tares , A' Jlains , etc. , d'apies les carac-
teres physiques que leshistoriens lenr assignent : c'esl I'ensem-
ble des notions que I'antitjuite et lemoyen age nous ont trans-
mises snr ces j)euples. Le second livre , beaucoui) plus eicndu
que le premier, est intitule: Histoire des especes lium:)ines du
nord et de I'orient de i'Asie et de I'Afrique auslrale. Au lieu
i\n Tcioi especes , on eut prefcre celui de races, qui est pins
exact. Mais I'auteur Temjiloie commc une subdivision des es-
peces disllnctes dont il reconnait I'existence ; ce qui pent eire
contcste. Dans ce livre, loin d'interroger I'anliquite, ce sont
les documens les plus recens qui sont les plus ir.striiclifs, et
tout prouve que M. Desnioulins les a recueillis soigneusenicnt.
Mais les observations d'liistoire naturelle ne sont pas les serdes
dont il fasse usage: il rect)ei!le tout ce qui peut faire connaitre
I'etat physique et moral des peui)les dont il parte, et s'attache
a montrer Taction mutuelle que les diverses facultes de rhonime
exercent les unes sur les autres, a mesuie qu'elles sont plus
developpees. On lira avec interet le dernier chapitre intitule:
Applications de quelqiies resultats de cet outrage a la science
etymologique , h quelqnes regies de critique historique , etc. Ci-
tons I'une de ces applications.
« D'apres des principes qui passent pour certains en etymo-
logie, on a reuni en une meme famille les langues des Indiens ,
"lesPersans, des A.fgans, desKourdes, des Medes, des Ossetes,
des Armeniens, des Slaves, des Allemands, et de tons les jieu-
ples de I'Europe latine: or, 1° les Afgans, les Medes, les Os-
setes, les Slaves, les Allemands, les Uanois, les Normands et
les Anglais, par leurs yeux hleus, leurs cheveux blonds on
roux , leur teint seme de taclies de rousseur, etc., constituent
cctte race indo-germanique , dont le type est ugalement inal-
terable, par le cliniat de I'lslande et par les plaines oii coule
T. XXXI. — Juillet 1826. 1 1
iSa LIVRES FRANC AIS.
Ic Gauge. 2" les At'm(5nicnsel Ics Kourdes sont des peuples dn
race caucasiciine, aiix yrnx ct aiix cheveux noirs, au visai;e
([u'on peut dire acadei)U(jue , pour la forme. 3° Les Pcrsans
sont de celte race arabc ou seinitique a la lele plus potiie, anx
yeiit plus grands que ceux de la race caucasienne, It" XJne par-
lie des Espa^'iiols et des jjeiiples (|iii parlcnt anglais soul de
celte race cellique, aiissi diffiiroiite de la race indo-gcrmani-
quc, que Ics Kouiilier.s le sont des Tongour.es , etc. 5° Eiifln,
Its Iiidoiis proprciuent diis, dont le Sanskrit est un des plus
anciens dialcctcs , sont eyaleiuent dilfcicns des Caucasiens ct
des .scniitiques; inais , coinine nous ii'a voiis pas parlc des races
de rinde , nous n'insislvrons ])assm cc dernier point, u
A la fin de oes recherclies i<ur una parlie des races hnmaines,
M. Desnioulins a place un inemoire sur la pairie du chameau a
urie bos.\e, lu a rAc;\demie des ir.scriptions et beiles-leltres, et
auquei M. SAI^T-MAIlTlN, membre de I'Inslilut, a joint plu-
sieurs notes. J.
57 — * Considerations sur les mamrniferes , par M. Isidore
Geoffroy Saint-Hilaire. Paris, 1826. Imprimcrie de Tastu.
In- 18
Ce petit volume contient plus de faits parfaitement exposes
t\\i.c ii'en renfernieiil bcaucoup de longs traites in-4°, ou le
pompeux appareil de jjlirases \aines deguise la steriliie du
fond. L'auieiir, digne fils de I'un de nos savans les plus illus-
tres, nousapprond, dans un avei tissement empreint de mo-
desiie, que son ouvrage est forme de deux articles qu'il a
composes pour le Dictionnaire classiqtie d'histoire naturelle
{voy. ci-dessus, p. iri7 , I'annonce du x« volume). Ces articles
sont mammalogie et maminifere. Ce dernier, tresbien ecrit,
veritable clief - d'ouuvre d'analyse, sera consulie souvent par
les naturalistcs de profession ; les gens du monde le llront avec
interel : ils y puiseront des idces justrs sur des tlioses qui lou-
chent de prcs noire orgucilleuse espece. Ce coup d'essai fail le
plus grand hoiineur a la [)lume du jeune auteui'; M. de Blain-
\ille, I'un des zoologistes les plus savans de notre epo([ue, en
a rendu comnte avec eloge a rAcademic des sciences, et nous
devons signaler , au sujet d'nii travail qu'on serait lente de
croire celui d'un liomme des long-lems niarquant dans les
sciences, un caractire d'impartialite genereuse, altribul pre-
cieux de la candeur du jeune age ; des ccrivaizis acerbes qui se
signalercnt en essayant de blesser au coeur M. Geoffroy Sainl-
Hilalre fils, dans la personne de son respectable pere, n'en
sont pas moins cites par lui avec une sorle de complaisance,
quaud il liouve Toccasion de le faire d'une nianlcre flatteuse.
B. D. S. V.
SCIENCES -PHYSIQUES. iC5
58. — * Plantes cryptoganits du iiord de la France ; par
J.-B.- //. - /. Dfsmazieres, membre de pliisieurs Socic'tes sa-
\antes. li* fascicule. Lille, 1826; iiTii)iinierie de Leleux. Paris,
Treutlel et Wiirtz. In -/i** avec 5o eelianlillons; |)iix , 8 f'r,
Ce recueii scientilique dont nous avons d.-ja anno.'ice les
deux premiers Tascicules ( Voyez Rei'. Enc, t. xxv, p. i58 ct
t. XXVI, p. 800), so continue avec soin et perseverance. Le
3* fascicule renferme des apercus fdrt curieux siir ces f)eilicul< s
qui se forrnent a ia surface lie la blere,duvin et d'aulres li-
qui(ies feinK'ntes, exposes a lair ou dans des vases en viilangc.
Ces productions appelees \n\^i\iie\'[\en\JIrurs ou nititousAe la
bicre et dn via, cunsidertes jus(|u'alors coninie des pioiluc-
tions vegetales et rapportees a la faniille des cliaiupignons par
Pcrsoon, sous le no:n de mycodcrmes , viennent d'e!re recon-
nues par M. Desmazieres pour des agr/gaiions peiliculaires
d\i//i/na/cuies riiicroscopitjiies qu'il n'liesite pas a ranger dans
la classe des etres dt';sign«» ])ar M. Gaillon sous le noni de ne-
inazoaires. Voici comment il rend conipie de sa decouverte.
o Observce au microscope, ceite pellicule est d'abord couipo-
see de corpuscules monadaires tres-simj)Ies , hyalins, gflali-
neux, jjrodii^ieuseinenl petils, libres et doucs d'une loco-mobi-
lite Ires-sensible dans la ])lupart des espcces. Mais, Lienlot
comme si ces pelits eires ( qu'II cvalue a i/iao"*' millimetre en
longueur sur i;20o""' de raillimeire en largeur ) eprouvaient
unesorte debesoin d'associatioa, ils se reunissent bout a bout
en series lineaires, soil en conservant leuis dimensions pre-
mieres, soil apres avoir subi une elongalion plus ou nioins
considerable. Par celte agregation, ils constituent des fila-
iiiens hyalins , quelquefois granules inferieureinenl , tres-
nombreiiX, r.mieux, nioniliformes ou paraissant cloisonnes a
des intervalk's plus ou moins grands , et pres'jue toujours cou-
ches sur le liquide oil ils s'entrecroisent, se ieutrent ])Ourainsi
dire, et donnent plus de consistance a la jiellicule qui, pur le
developpement de iiouveaux corpnscnies souinis atix memes
destinees, augmente continuellement d'epaisseur. >>
M. Gaillon en donne trois esjieces, cclie de la biere, myco-
derma ceivisiw^ celle <le la dseche tie genievre, mjccderma
maltc-jujiiperini , et celle du vin, wycoderina vini. Dans toutes,
la faculte locomotive des animalcules ne s'apcrc^oit facllement
qu'avaai letir agregation filnmenieubc. L'autpur de celte decou-
verte n'hesite pas a considerer, comrae de la meme nature, « ces
peaux molles , visqueuses qui se developpent souvent en masse
arrondie, corivexe, homogene, charnue et compacte, que I'on
remarque, dans nos celliers ou caves, a I'exterieur des piecea
i6/» LIVRES FRANCAIS.
de vin, oitlour des bondes el le long des fissures qui laisscni
suintor le vin. « II fait deceltc production niie vaiit^te du wj-
coticrina vini , e! ])reicnd en liemonlrer au:si i'animalitc.
Les aperciis de M. Desniazieres jiarai'isent d'autant plus
exacts ([lie nous avons deja nn bon noiiibte d'observations
ipicroscojiifiues en faveiir de I'aniinalite, non-seulement c?c.v
mouissurcs , niais nieinc de ])lusicurs es|)eces de bys.sus. A
nicsure <iuc Ton observe plus scrupulensement i'organisalion
et la nature inliuie des etres microscopiques cjui sent sur les
liniilos dii regne vegetal et du regne animal , on s'assure de
I'atiiinaiite d'un grand nombrc de ces productions; plus aussi
la Iribu des nemazoaires s'en aiigmente, et plus on sent la
justesse de cctte assertion de De CandoUe, que » les etres qui
nons semblenl iniermediaires entre les animaux et les plantes,
doivent piulot etre consideres comme des tenioignages de
nv)lre ignorance, que coimne des j)reuves de I'existence d'une
classe parlicuiiere. » B. G.
Sg. — * Memoire sur les depressions tie la surface du globe,
dans le sens longitudinal des chaines de montagnes et entre
deux reliefs maritimes adjaccns, lu a rAcadeiuie des sciences
par M. le lieutenant-general Anurkossy, membre del'Insiilut.
Paris, 1826. In-8° avec deux carles (ne se vend pas1.
Ce memoire a pour objet de fiiire connaiire , sous ses ra])-
ports lopographi(iues et geologiques, I'uiie des formes princi-
pales de la surface du globe, de la defmir, d'en indiquer des
exemples tres-remarquabies et de monlrer de quelle impor-
tance est son etude, pour I'hydrographie et les sciences niili-
taires. C'est un fait incontcsiable que les montagnes, dont
I'aspect presente au ])ren)ier coup d'oeil celui du cliaos, fonnent
nn systeme dont toules les parties reproduisent des configura-
tions semblabies , ci'.ordonnees pareilienient et doniiant lieu
aux nienies applications usuelles. Quoique cette idenlitc'; soil
meconnue dans une foule d'operations (pie faciliterait sa con-
naissance, elle est, depuis long-terns, le guide fideie des ex-
ploraiions geologiques. II y a vingt ans que I'inspection des
reliefs de I'Auvergne m'a conduit a determiner, en Amerique,
le systeme des douze cents montagnes de ]'archi|)el des Antdles;
et c'est anjourd'hui le fil de I'analogie , remis par le celebre
cxploraleur des Andes aux voyageurs des nionts Himalaya ,
qui les conduit avec tant de certitude et de rapidite. Mais, en
s'occupant de la struciure des moniagues, on avail omis de
faire une etude speciale des dej)ressions , d'en ciiercber les
lois, d'en decrire les circonstances, et de ramener a un prin-
cipe fixe les applications , auxquelfes on fait servir empirique-
SCIENCES PHYSIQUES. i65
menl ces localitesponr les besoins de la societe. C'est celte lacLc
que I'auteur s'est proposee, ct qu'il a remplie avec celte liaute
sagacite et ce rare talent d'observatioii ciu'il a deployes dans ses
Iravaux geographiques, en Franre , en Egypte et en Tnrquie.
11 parait que ce memoirea ete delache d'un grand onwat^e sur
les inefralites de la surface de la /er/vetudiees sous di\ers rap-
ports, et accompagne de carles et de coupes geologiques. La
publication de cet inipoi't.int travail seralt un nouveau service
que I'auleur rendrait aux sciences; et riuteiet tju'il excilerait
est garanii par I'accueil que viennent do faire a I'un des cha-
pitres de cet ouvrage les premiers gcologues de TEurope et les
Academies les plus celebres. A. Moreau de Jonnes.
60. — * Essai ^eologique sur la montagnc de Boulade, pres
d'Issoire, departement du Puy-de-D6me; avec la description
et les figures lithographiees des ossemens f'ossiies qui y ont ete
recueillis; par MM. Deveze-de-Chabriol et J.-B. Bouii-let.
Clermont-Ferrand, 1826; Tliiband-Landriot, ijuprimeur ly-
pograplie et iithograpbe, charge de I'impression des planches
et du texte. Quatrieme livrnison. Petit in-folio, snr papier
raisin-velin fin d'Annonay. Le texte paraitra avec la derniere
livraison, dont il f'era parlie. Piix de I'ouvrage entier, pour les
souscripteurs , i5fr. ; pour les non-souscripteurs, i8fr. — On
souscrit a Paris, cliez Treultel et VViiriz ( Voy. Re^-. E/ic,
T. xsviii, p. 194).
6r. — * Planches anatomiques du corps humain , execiitees
d'apres les dimensions naturelles ; par le D*" F. Antommahchi ,
publiees ])ar C. de IjASTeyrie , editeur, avec cetle dedicace :
« Au tombeau de Sainte-Heleiie. Puisse cet ouvrage durer
aussi long-iems que le souvenir du grand horame que lu
renfermes ! F. Antommarchi. >. xv^ livraison. Paris, 1826;
imprimeiie lithograjihique de R. Brcgeaut, rue Saint-Marc,
n" 8. Prix de chaque livraison en noir, 25 fr. , colorice sur
papier velin, 70 fr.
L'anteur a cru devoir joindre a cette livraison sous le (ilfe
A' Appendice un clioix d'articles extraits de differens journaux
periodiques oil ce grand ouvrage a ete annonce, parmi lesqnels
trois appartiennent a la Revue Encyclopedique (t. xviij , p. 383
et 5oi ; T. XXIV, p. Ai5.) et deux letlres relatives au meme
sujet, dont nous nous bornons a citer la premiere sans ajouter
aucune reflexion, -i Mif)islere de I'inlerieur. Le mitjistre de
i.'iNTERihUR, «M f/oc?f«rANTOiMMARCHi. Paris , le 21 juin 1828.
Monsieur, vous m'avez, invite a souscrire pour quelques exem-
plaires de I'ouvrage que vous jniblifxsur 1' Anatomic liumaine.
J'aurais vouln jiouvoir f af0'.:ragcr uno onlreprise , su\ laquelle
1^6
LIVRES FRANCAIS.
la Faciilti; de inc-drcine de Paris m'a fait un rapport favo-
ral)le ; mais la incdicit^ des fonds dozit je ptiis disposer, et le
prix tics-cieve des excrnplairrs colorit's, c'est-a-dire de ceux
qui peuvenl rendre le plus de service a I'art , iie me i)ermeltent
pas de souscrire a cet ouvrngc. Je vnns ]irie. Monsieur, d'eii
recevoir tons mes regrets. Le ininistie, secrolaiie d'etat dc
rinlerieor, Corbikre. » B.
G2. — * Tniiti- e[rinentnire dc tlingiio^tic , fir pronnstir, , d'ln-
dlcnlions tlti'in/teitlirjues , on Cotirs de mvdcciite cUiiiqiie ; ])ar
M. RosTAis , medecin, de rii«<,pice de la .Sid,)tlri»;re, ])rof'es-
seur de inc. I( cine dinifjue, elf. Tome F"". Paris, 187(1 ; Bechet
jeunc. In-8°; prix , 7 fr. Le second volume j)ai;iiUa \crs la fin
d'aeut.
Ce volume est divise en deux parties: dans la premiere,
Taiiteur ex])Ose <lfs coniiderafions p;enei;des sur la mcdecine :
la spconde est un Iraile de srrueiologie. Suivant M. Rostau :
1° II n'y a dans, i'homme vivant ni jirincipe, r.i ])ropri( tes vi-
tales; ie.-i organes en exeiiice conslilnent la vie. 0° Lor>.qne
ces organes sont sains, les fonclions sont sair.c£. Si les organes
Eont alleres, leurs mouvcir.ens soi:t iriegulicrs; les fonctions
son! dans un elal ])a!iioiigiqne. 3" ,Ne cioyanl ])as qu'il j)uisse
exister de maladies satis sioge, I'auleur rejclte I'existence des
fievies cssenlieiles. Z," Tons les organes penveul eue j)i iinili-
vement malades, indi''peiid.miinei!t les nns des mitres. 5° Les
fluides peiiveni eire ])iinii;ivenienl alteres, pi'-clier par exces,
par dt-'i :ut et etre pervcrtis dans lenr composition. (>" II est
impossible qu'il n'y ait qn'nne senle et meme maladie : Ics affec-
tions anxf[uelles IVspece liumaine est exposee varient autant
par lenr natnre que ]iar leur siege. 7°. Un certain degre de
force est necessaire pour opcrcr la resolution des maladies.
8° Un nieme liaiteinent lie pent jias convenir dans toules les^
circonslances : il devranon-senlcment varier du jdiis an moins,
mais el re quelquefois ojpose. Tels soni les princljies que de-
>c'oppe I'autcur, et qui sont comme la base du syslenic (ju'il a
adopte.
M. Rostan expose ensuite qnelques iilees gencrales siir I'ob-
servatioH en niedecine, snr I'ntilite de la metletine ciinicpic et
des reclierclies cadaveiicjues, et lermiiie ceile jiremieie parlie
par des considerations snr les indications iherapcnliqwes, tiiees
des causes des malarjies, de lenr ratine, de lenr mai die , de
Jcur duree, de I'etat des forces, des Ages, des constitutions,
des sexes, des liabiludcs.'
Dans la seconde partie, on la semciotique, I'auleur passe en
revue les changemens morbides qui peuvent surveuir dans
SCIENCES PHYSIQUES. 167
I'exercice des fonctions et les ap))arcncos dcs organes , et cJier-
cbe a on jjrcciser !a \alcur. Celte parlie de I'ouvrage n'estpas
susceptible d'analyse.
Les quatre premieres propositions de pailiologie gcnerale
parailront inconlestables a tons les medecins de recole irro-
derne. II n'existe pas de facuiti' de faire de la bile sans le foie,
ni de faculte de digerer sans Testomac ; les proprieles vilales
ne sont done que I'effet de raciion dcs tissus \ivans. Lc5 alte-
rations des fluides no soni point contestee*; seiileniciit , beau-
coup de iiK^'decins prelendent que ces alieralions sont des c.iuscs
de maladie ])ar leur action delelere sur les organes , plulot que
des affections ayant leurs syinplomes propres. Au reste les
allcrafioris de fluides sont encore peu connues et devront etre
le siijet de reclierclics nombreuses, avant de fournir des re-
sultats satisfaisans. Je ne sais sur quels faits M. Rostan s'appuic
pour ranger 1 hysteric, I'epilcpsie, la catalepsie, qu'il appclle
maladies generates , parmi les maladies des fluides.
Les partisans de la nouvelie doctrine admettent au nioins
doux causes procliaines de maladies, I'irritation et la f;iib!esse,
el ils sont loin de vouloir nier, du moins la pliiparl, qu'il existc
des affections a causes specifiques, virulente ou contagieuse;
seulement, ils sonlionneni que ces mcmes affections , iiiie fois
dcvelojipt^es, presentent les caracleres des pli'egmasies aigues
ou chroniqiies et exigent le meme Irniietr.ent. Onl-ils Sort rcla-
livcment a la variole , a la rougeoie ? Cos deux maladies ne
sont-ell'.'S p;is dcpuis long-teros rangees dans la classe des in-
flammriliop.s aigi;es de la ]>eau? On ne peut nier la contagion
ct la virulence de la plupart des maux veneriens; inais, cst-il
bien vrai qp.e ces maux a cause specifique exigent, plus que la
variolectla rougeoie, un traitcmenlspi'cifi'iue? SiHI.le docteur
Brelonnenii a ])u donnrr tons les symjitonies cr.nscci.tifs de la
syphilis a dcs eiifans rpi'd Iraitait du crouji, jjar u:i Irailcinent
mercuriel , ct meme a des cbiens q I'i) souniellait a des expe-
riences , croit-on qu'une foule d'accidens, prctcndr.s sypliilili-
ques, ne puissent pas etre attribucs souvcv.t a rintrocbiclion
du merrure dans Tecononiie (i)?
On pourra, en lisant cef ouvrage, se faire iin? idee des jiro-
gres que la pathologic a faits dcpiiis dix ans. On jiotn la voir
a quel degre de precision a etc jiorte , dans ces derniers tenis,
(i) Ce fait tres-iinportant nons a ete cile par nn eleve da nicdfcin
Je Tonrs, et doit se Ironver consigne dans un Traitc du Croup, da
lueine .luleiir, qui paraiira iDcessamment.
i6.S LIVRES FRANCA IS.
le diagnoslic des maladies des organes de la lete , de la poi ■
trine et de rabdoinen ; combit-n d'assertions vagues , obscures ,
fausses et souvent ridicules sur la valeur des sym|)t6mes , ont
etc rcmplacees par des coiinaissnnces positives, claires et d'une
application facile an lit du inalade.
L'ouvrage que nous annoncons manquait a la science , et
persoiine n'etait plus a nieme (jue M. Rostan de donner un ex-
cellent travail en ce genre. Cest nn manuel indispensable aux
deves qui s'adonnent a I'etude de la medecine clinique. Nous,
n'avons pas besoin de le reconimantler aux nonibreux eleves
qui suivent les cours de I'auteur, et qui ont deja su en appre-
cier le nierite , puisque c'est ici le resume des lecons de me-
decine clinique failedepuis dix ans avec tant de succcs a I'hos-
pice de la Salpetriere (i). Nous devons ncanmoins indiquer a
I'alteiition du savant professeur un defant reel dans la redaction
de son livre. Souvent il combat des assertions eniises par diffe-
rens auteurs, et il ne cite iii leurs norns, ni lenrs ouvrages, et
ne rapporte pas toujours testuellement leurs opinions. Ce-
pendant, on serait curieux de connaitre qes memes opinions ,
de voir comment elles sont i)resentces , soutenues, developpees
par leurs auteurs; ce qu'il est Ires-difficile et quebjuefois im-
possible de faire par le defaut d'indications.
Georget , u. M.
63. — * Histoire anatomique des inflanimaiions , par yl.-N.
Gendrin, D. M. Tome \" . Paris, 1826 ; Gabon et compagnie;
Bi^chet jeune. i vol. in-8° ; prix, 8 fr.
Decrire les tissus enflammes dans tous les etals d'altcration
qu'ils peuvent eprouver par la presence des phlegmasies; tel
est I'objet principal de l'ouvrage de M. Gendrin. Pour par-
venir a ce but, I'auteur, consideraiit successivenient les diffe-
rens syslemes, a donne d'abord les caracteres anatomiques
qui aj)partiennent a leur elat sain. En prcnaiit la connaissance
de ces caracteres pour point de depart, il a indique les modi-
fications que rinflaramation produit dans les tissus. Ces
iiiodificatioris sont sujetles a des variations nombreuses tjue
I'auteur a rapjiortees aux differentes especes de plilegmasies.
(i) N'est-ce pas une chose tligne d'observation, qu'un conn de cli-
nique, fait pendaut I'hiver, a une lieue du centre de la ville , sans au-
noQce, par UQ luedecin qui n'est excite que par son zele, soil ccpendant
saivi regulierement par plus de 3oo eleves, tandis que plusicnrs cours
du ineme genre, richement payes , anaonces officielleinent deux fois
I'annee, et fails dans le quartier meine haliite par les elev»-s , ne sont
snivis que par i5 on 20 aiiditeursi"
SCIENCES PHYSIQUES. ifi()
Sans s'attadier a determiner les canses de ces differentfs cs-
peces, il distingue les inflammations en aigues, chroniqties,
pliage;ieniqties el gangreneuses, ct tient seulement conipte dcs
desordres que prodnisent ,specialeniPr:t dans les lissus ces
diffi-rentes phlegmasies.
F3ansce premier volume, I'autenr a rcuni I'liistoire complete
(les caracieres anatoniiques des inflammations dans les tissus,
dans les membranes, dans les os.
Le second volume, <|ui doit compliter I'liisloire anaiomiqne
des lissns enflammes, contiendra nne liisloire des' phlegma-
sies adliesives, I'anatomie pathologiipie dcs differens desordres
que rinflammalion produit dans les tissus, et eiifin , nne com-
paraison des caracteres analomi(|nes des desordre!> morbides
produits dans les organes par d'aulres maladies que les phleg-
masies, avec ceux qui appartiennent exchisivement a ces der-
nieres affections.
L'ouvrage de M. Gendrin est nn ouvrage de fails. C'est nne
hisloire grajjhique des tii.sus enflammes. II n'a done pn enlrer
dans le plan de rauteur (!e se livrer a aucnne discussion de
doctrine on de theorie; il s'en est tenu a I'exposition rigon-
reuse des faits eta leurs consequences immediales. G.
64. — * Manuel d'obstetrique , ou Precis de la science el
de I'art des accouchemens; suivi de V exposition des principaies
maladies des feinines et des enfans nouveau-nes et conlenant
nn precis de la saignee et de la vaccination ; par yJrit. Duges,
professeur a la Faculte de medecine de Monipellicr. Paris,
1826. Gabon. In-i8 de45op.,avec 44 fig'Teslithographiees;
prix, 6 fr. , et 7 fr. par la poste.
Ce mauuel est superieur a tons ceux qui ont deja ]>aru sur
le meme sujet; il est divise en cinq parties : dans la 1^^, Tau-
teur decrit de la maniere la plus succincle et la plus exacte tout
ce qui concerne I'anatomie des parties qui servent a la genera-
tion. Dans la 2^, on apprend les fonctions de ces parties et
lontce qui a rapjiortala conception eta la grossessc. La 3^ par-
tie est consacree a faire connniire les soins relatifs a la nubilite,
a la conception, a la grossesse , au travail pendant et apres
I'accouchement. Dans la 4'" partic, on trace rapidement This-
toire de toutes les maladies, dites chirurgicales, (]ui peuvent
se developper dans les organes geniiaux ou leurs annexes,
])endant la nubilite, la conception, la grossesse, I'accouchc-
inent et ses suites, et on indique les moyeus les plus propres
pour les coiubattre ; c'est dans cetle partie qu'on a place Ic
precis sur la saignee et la vacrinatiou. La 5' et derniere parlie
est consacree aux maladies de la fpinme ct de I'enfant nouvcan-
^To LIVRES FRANCzVIS.
TtL Cet ouvrage, nuqncl on a ajoule 24 planches litliographiecs
representant 44 figure* diffi'rentes, est reniarquable par sa
precision ot sa clarte, ct ne peut nianqucr d'avoir iin siuccs
durable. j)_
65. — Cllnique mrdicnln dc. I'Hoi.ol-Dicu de Rouen; par
M. Hellis. Paris , 1826; Gabon. In-8° ; prix ,4 fr. 5o c.
M. Hellis, persuade que I'obscrvalion peule peut conduire a
des resultafs posilifs en medecine pratique, a rcniarque,
comme il le dil ( introd. p. 33 ), que nous sommes arrives a une
^pocjue oil tonl en nu'decine scmble devoir elre reinis en (|ues-
tion; oiilc lems et les noms ne nous paraissenl plus des auto-
rites sulfisanles; il iinporle done, plus que jamais, de recourir
A I'observation pour consacrer ce qu'il y a d'exact dans les
travaux de nos devanciers , et pour savoir ks concessions que
i'on doit fjire anx doctrines inodernes.
D'apies ces principes, I'auleiir a pense qu'il devait se mon-
trer aussi avare de reflexions que liberal de fails. Dans un
avant-propos frcs-court, il a donne un apercn topograj)liique
de la ville oil il a pralique.
La periode de terns parcourue par M. Hellis s'etend depuis
J'automnc de i8a3 ju'^qn'a ia fin de I'automne de 1824; voici
la marclie qu'il a suivie avcc regnlarlte , dans tout le cours de
son ouvrage, H a d'abord trace un apcrcu rapide de la coijsti-
lulion de I'automne de 1823, el i! a cile une observalion a
I'appui des generaliles qu'il avait enoncees sur les maladies qui
regnercnf a Rouen danscclte saison. II passe ensuite a I'liiver
de 1824, il parrourt successivcmen! les niois dc Janvier, ft'^vrier
et mars, el cite les observations qui ont fixyla constitution de
cetle periode de I'annee. Bes reflexions gcnciales sur celte sai-
son suivent les faits parficuliers qu'il a enonces ; de nonvelles
observations vicnncnt confirmer la justesse de ces reflexions:
il suit la ineme marclie pour le prinlems, pour I'etc et I'au-
tomne de 1824 , jusqu'a la fin dc deccnibre. II joint a celte
derniere jieriode des reflexions j)ratiques judicicuses sur la
variole. L'ouvrage est lermine ])ar dc,> tableaux fort exacts cl
fort clairs qui presentent le resume general de la pratique de
rHotel-JJieu de Rouen : les entrees de malades , les diverses
especcs de maladies, et leurs diflVrcnles issues.
M. Hellis a elierche a mettre dans ses observations une
grande precision; et , comtne il ecrit spccialemcnt pour des
mcdccins, il a concentre, pour ainsi dire, dans ses rccitsl'cs-
scnce des maladies qu'il decrivait.
En nous resumant, nous regardous ccl ouvrage comme celui
d'un jeune praticien exact el consciencieux. Nous pensons
SCIENCES PHYSIQUES. J 71
qu'il {leiit etre infinimenl utile a tous ceux qui preferent la
verile a des llicories brillantcs ct. souvent lioiripeiises. Ce tra-
vail jirouve que M. Hellis ivossetle tin grand fonds de inedccinc
praiii|ue, et nous avo:is cm rcmai'(|ucr qu'il est assez dou^
de jugPinent et de ]iliiloso[>hie pour aimer iriieiix etre un pra-
tieieii utile qu'uu meileciii celebre. Jijlia-Fontenelle.
(i6. — * Llemens d'arilhmctifjiic coinplenteiiUiire , ou me-
tliode nouvelie par l.u|uclle, a I'aide des complcmens arilh-
mr-lijiies, on execute toutes les operations de calodls; par
M. Berthevin. Noin'elleedilinn. Paris, 1826. Imprinierie royaie;
Baelielier. Ifi-8° de il\0 pages; piix , 5 fr.
Le plus utile cl ie jilus ingenieus des precedes d'arillimdtique
consiste dans I'eniplui des logarilljines, r.oiiibres qo'on subs-
tiliic a ceiix (|ui sont ])roposes, et a I'aide dcsqiiels le-> calculs
devienneiit d'line extreme sinijilicile. Mais I'art de reinpiacer
ainsi des nouibies ])ar d'autres ])our donner lieu a des 0[)('Ta-
lions faciles, est su^ceplib'e d'une inidiilude d'atiplicaiions.
Qoeltpies cssais ])lus ou inoins iriooin|)lels avaieiit dej.'i ete
tenies en ee genre, lorscpie M. Berthevin s'cst livie a ces re-
eliereb.es; I'oiiviage (]u'il piiblie aujoiird'liui est lefiuit de ses
mediinlions. On verra , diais cct interessant ecrit, comnient
sans le seconrs de tables, des calculs penibles, se transforinent
en d'autres qui n'exigent plus que qiielqnes nihliiiniis et sous-
'raclicins. II lant av;)ijer cepenilaiit fpie I'auleur, ])nur niieux
monlrer combien ses procedes sont expediiifs, a soin de choisir
SOS exem[)les, de nianiere a tornber tlans les eas qni lenr sont
favorables : car , pour un autre dioix dc nombres, il se pouriait
que la noiivellc nielluHle n'fut pns les avaiitagcs qu'on hii
trouve. Cc n'est pas qu'elle ne soil tres-gei'.cr?.le , et ])ar con-
sequent applicable a tous les cas : mais les simplifications
perdent souvent lour njcrite, et Ton n'obtient plus une anssi
rapide execution. L'autcur fail alors prendre au j)roccde di-
verses formes qui se preient niieux an but qu'il a en vue
dans ces cas rebclles ct fort nondjreux. Sa metliode est d'une
grandc fecondile ; mais cette focondile mcinc pourra bien etre
un obstacle a son adoption, i)arce qu'il est souvent einbar-
rassar.t de choisir celle des formes qui convient au calcul (|u'on
veut faire. Quoi rpj'il en soil, I'ouviage de M. Berllievin est
digue d'etre etudie, non-seulcment par les eleves , mais aussi
par les maitres; les uns et les autres y trotiveront des conibi-
naisons adroites ([ui donnerorit a I'esprit calculateur plus d'in-
vention et de ressources. La partic des fractions deoimales
pcriodiques est surlout fort bifn trailce, et prosente diverses
idees neuves, particulierement aux pages 127, i44 et aaS.
172 LIVRES FRANCAIS.
L'auteur peut se glorifier d'avoir perfectionne ce genre de
reclierches , iiieine ajires les travaux des BernouilU , d'Alcm-
bert et Gauss sui' le m6iuc sujel. Francokcr.
67. — * Manuel de physique , on ek'tnens ahrcges de cetle.
science, mis a la portee des gens du tiionde et des etudians ,
conienant I'cxpose coinplet et inelhodique des ])ropi'ietes ge-
nerales des corps solides, liquides el aeriformes , ainsi ([iie des
phenoinenes du son , siiivi de la iiouvelle theorie de la iuinicic
dans le syste'itje des ondulations et de celle de Teleclricite et
dti niagnelisiiie reunis; par M. Baii.ly. Troisieme edi.'ion.
Paris, 1826; Roret. t vol. in-18 de 270 pages et 3 plantlies;
prix , 2 fr. 5o c.
68. — * Manuel de perspective , du dessinateur el du peinlre,
contenant ies elemens de geoinetrie indispensablcs au traci' dc-
la perspeclivc lineaire et aerieiine, et a I'otude du dessiii et do
la peinttire, specialement appiiqueeau paysage;par A. D. Ver-
GNAUD, capitaine d'artillerie, etc. Deuxicme edition , corrigee
el augmentee. Paris, 1826 ; le uieme. In-18 de 260 pages
et 8 planches; Jirix, 3 fr.
69. — * Manuel du pecheur francais , ou traite general de
toutes sortc*; de peches, contenant I'histoire naturelle des jiois-
sonSj la maiiiercdc pecher cliaqiie espece en particiilier , I'art
de fabriquer les filets, un traite sur les etangs, uii precis des
lois , ordoniiances et regieniens sur la peche, un modele des
proces-verbaux qui doivent etre dresses par les gardes- pe-
che, etc., ])ar M. Pesson-Maison-Neuve. Paris, 1826; le
meme. In-18 de 248 pages, avec une planche; prix, 3 fr.
70. — * Manuel du sornmelier , ou instruction pratique sur
la maniere de soigner les vins , contenant la theorie de la de-
gustation, de la clarification, tlu collage et de la fermenialion
secondaire des viiis, les moyens cleprevenirleur alteration ,elc.;
suivi du Tarif des droits de inouvement d' entree, d'octroi , de
vente en detail, etc.; par M. Jullien , marchand de vins en
gros,auteur de la Topographie de tous les vignobles connus; in-
venteur Aes poudres pour clarifier le vin, des cannelles aerijeres,
et de jilusieurs autres instruniens. Quatrieme edition , cor-
rigee et augmeulee d'un chapitre sur la litharge. Paris , 1826 ;
l'auteur, rue Neuve-des-Pelits-Champs, n° 91 ; Mme Huzard,
rue de I'Eperon. In-12 de 34o pages, avec trois planches;
prix , 4 fi . , ct 5 fr. ])ar la ))oste.
Les deux premiers et le dernier de ces quatre ouvrages
doivent etre consideres coranie ayant subi I'epreiive du terns
pl de I'u^nge ; ils se niaintiendront a la place c[u'i!s occupent ,
jusqu'a ci; que des coucnrreiis munis de plus de litres aiont
SCIENCES PHYSIQUES. 173
pu monlrcr uiie snporioriie reelle : la liceesi toujouis ouverte,
et les juf^es allenlifs, edairrs, incoriDptibles , ne nian(]uei'ont
point. On ne persuarlera pas a un inanufactuiior (ju'nn om-
vrage sur son art est bon, si la lecture n'eii est point instruc-
tive, si la description des precedes est inexacte, si Ton y
remarque des omissions essentielles. Coinme un manuel est
fait pour ceux qui travaillenl , a mesure qu'un art s'cnrichit ,
il faut que le manuel stiive I'ordre de ses acquisilions; le mon-
vement irnprime a I'industrie sera ressenii par tons les ecrils
publics jiour provoquer et entretenir ce mouvement , ou qui
en out suivi le cours , et I'art de faire des manuels se perfec-
tioniiera coinrae tons les autres. II faudra done de nouvelles
editions ; et , plus il en paraitra , plus le public aura lieu d'etre
satisfait; rnais, a cote, et en concurrence de ces anciens 011-
vrages rajounis et anieliores, il faut aussi que Ton voie paraiire
des compositions nouvelles, ou la vigueur de la jeunesse se
manifesle par la plenitude du savoir, le pressentiment des de-
couvevtes, une sage hardiesse de pensees qui caracterise I'es-
prit de recherches. Quand nous en serons venus la , les ouvrages
sui- les sciences el les arts, y compris les manuels , seront juges
avecpliis deseverile; on aura le droit d'etre exigeant, et Ton
ne manqucra pas d'en user.
Nous sommes done encore dans le terns d'indulgence : le
Manuel du perkeur francais ne sera pas traitc avec rigueur ,
d'autaiit plus que I'aiiteurapris soin d'eviter les reproches que
pourraii faire une critique snperficielle , et qu'ii faut de I'at-
tentloii pour apercevoir (juelques legeres inexactitudes dans
son ouvragp. II y en a sans doule : on voudtait, par exemi)le,
qu'i! cut dit vin mol des fanieuses carjjcs du Rhin, natives, pour
la plupart , de I'eiang de Lindres , et qui obtiennent assez fa-
cilement leur naturalisation dans ce fleuve. On desirerait aussi
qu'II cut, fail mention de I'espece de carpe imporlee en France
vers le uiilieu du siecle dernier, et dont I'accroissemcnt est,
dit-on, encore plus rapide cjue celui de I'espece commune. On
regret te aussi qu'il n'aii pas distingue les deux especes de truites
qui different I'une de I'autre par la taille , la couleur et la qua-
lite de la chair, et ])ar les eaux ou elles vivent. II n"a pas in-
dique non plus tonles les sortes de pcches , meme celles d'eaux
douces auxqnelles il sest borne. Or. clicrcliera vainement,
dans ce manuel, la meilleure construction des deversoirs des
etangs, etc. Ainsi, on se plaindra plutot de ne pas trouver
dans eel ouvrage tout ce que Ton y chcrcliera que de la inaniere
dont I'auleur a Iraite les sujels qu'il y a fait enlrer. Une nou-
velle edition pourra remplir les lacunas que Ton y remarque ,
174 LIVRES FRANCAIS.
et en taire un ouvraj,e lioii-seulement agr<iable, mais d'uiie
utililo reelle.
Quoiqiie le Manuel du somrne/ier soit a sa (|uati'ii'ine edition,
disons (juelquc chose des additions que raiilcur y a faites. C'est
a rarlicle A^s v'ns snphisttqiies que M. Jullien ajoutc nn sup-
plement. II y discute principalcnient ie nioyen A'adoucir les
vins avec la litharge, et donne les moyens de reeonn.iiire celte
conibinaisoa dan!,'ereuse. Mais, qne!(|i!CS-unes de ceiles qu'il
regarde coninie innocentes le sont-elles rc'ellemeni ? de ce (iiie
lesniedetinspresci ivent quelquefois Tenqjloi dii tartrate ncidu'e
de polasse , le marchand de vin esl-il en droit (i'en faire piendre
a ceux auxqueis ii debite son vin? II seinble que I'auteur est
un peu Irop intiulgent, et que les consommi.teurs et inenie les
inagistrats doivent eire plus alten;ifs et jilus se%erfs. Lc terns
viendra sans doule oil la ehiniie saura composer des vins,et
de bons vins : mais, pour urie decouver!o de cetle importance,
il ne faut rien iiioins que le contours d'habiles <himisies et de
gourmets d'un certain merite, la cooperation de la i>cie!ice et
tl'iin talent dont il parait que la nature n'est pas prodigue. Les
Chinois qui ont fait taut de progres dans presqiie tous les arls,
ne meritent aucune mention honorable i)our leurs liqtienrs
fermenlt'es ; les Anglais, ccs fabricans univers(.-is, ont etabli
de grandes manufactures dc vins. C'est la Cjue Ton trnuverait
un commencement d'instruction ; mais on ne s'en licndrait
point a cette ebauche : I'art ne pourrait eire iierfectionnc ,
acheve qu'en France. Mais, qu'on u'esjiere jjoint qu'il s'eleve
jamais bien haut, s'il n'est Tiratiquii f[ue par les marchands de
vins. Slalgre ces observations critiques, les additions que
M. Jullien a failes a son ouvrage le rendent de plus en plus
utile; et, si Ton s'occupe si'rieusement de la composition des
vins artificiels, on n'aura lien de mieux a faire (iue de recourir
a ses lumieres.
71. — * Moyen de rendre les croixees absoltirnent impene-
trable s a I'eau pluviale ; par Saint-Amand, archilei'te , mem-
bre de la Socicte d'encouragenient , demsuraflt au Thuit-Si-
gnol , pres d'Elboeuf ( I'^ure ). Paris, 1826; Carilian-Coeury,
quai des Augustins, n° 4 i , etrauleur, au Thuit Signol. In-8"
de 8 pages , avec une planche gravee ; ])rix , 2 fr.
M. Saint-Amand a pris un brevet d'invontion pour son pro-
cede qui pent eire applique a toutes les croisees , pourvu <[ue
le bois n'en soil jias entiereraent pourri. Nous devons done
nous abstenir d'cn donner une desci iption ; d'ailleurs , il serait
fort difficile de le faire comprendre, sans le secours du dessin.
Les proprietaires sentiront assea combien I'invention de
SCIENCES PHYSIQUES. 17^
M. Saint- A.nian<l pent leur etie utile, et s'einpresseront de se
procurer sa brochure, ou ils trouveront, tion-seulement une
noiice claire ct suffis.inle sur celic disposilion des cioisees,
mais les proposilions de I'auteur pour les appliquer dans le
deparlemcnt de la Seine. On ne peut douter que ce qu'il pro-
])Ose ne soit reellenient utile. F.
72. — * Di'oUomdpjye , 011 Livre - caries ; lecons niulhodi-
quesde sfeo^Jftaidjie et de chronologie, redif;eos d'apres les plans
deM. B. ( J.-Ch. ); par MM. Daunou, Eyries , Asnee, Al-
bert - MoNTEMONT , ViviEN , Pi'RROT , ingf-nieur - i^eogra-
plie, etc. Troisieme clegrc , !N° 9. Paris, i826;Rrnard, rue
Sainte-Anne, n° 71. Un cahier in-4° olilong; prix du caliier,
3 fr. ( Voy. Re\'. Enc, t. xxs , p. 172 et 49*3 ).
Noire Revue, dans son cahier d'avril dernier , a rendu
coui])te des livraiions du Bibltornappe, jusques et compris le
7""' cahier. Les 8"' et 9™=, que nous avons sous les yeux, ren-
fernient six cartes comprenant la Baviere , les Pays- Das, la.
Suisse, la France, V Italic supchienre q\. Vltalie injcrieiire. he
soin de Fediteur, M. Hailleul, erLite surtout dans ia distinc-
tion et le trace des lignes de faite et de partage des eaiix,
dans renonce des accidens naturejs fbrmant limitcs ei:tre los
elats ou leur etai;t comuiuns.
Nous avons deja fait reinarquer que ce grand ouvrage , qui
contiendra plus decent caries reparties dans 17 ou 18 livrai-
sons de texte analytique et raiscnne , est divke en trois degrcs
d'enseignernenl. II nous parait utile de les indiquer d'une n;a-
niere nette et ])ositive a nos lecteurs. he premier degre prescnte
les grandes divisions des terres et des mers, sansaucune indi-
cation de partages politiques; dans le detijricme , on voit les
cinq parties du rnonde, avec Icurs grandes divisions dislinguecs
par les accidens nalurels, fleuves, montagnes, mers, etc.,
conimuns a plusieurs de ces grandes divisions, ou servant de
linules entre clles ; et dans le troisieme ct dernier degre, figu-
rent les divisions par etats ( royaunies ou rcpubllques ), les
subdivisions poiitifjues et les accidens naturels qui les soparent
ou qui leur sont conimuns. D.ins le premier cas, on ne voit
que les plus grandes generalites comrae les continens; on re-
Irouve , dans le second , les continens divises en grands etats
politiques; et dans le troisieme, les pelits etats, sans arriver
encore a la topographic. Ce vaste plan , suivi avec perseve-
rance , et a I'execution duquel sont venus concourir jilu-
sienrs hommes dislingues, doit fixer I'attention de tous ceux
qui s'occupent d'education et d'instrnction, snrtout ;\ une
epoque oil I'importance des etudes geographiques, rattachees
I7t»
LIVRES FRANCAIS.
a renscigneincnl de I'liisioire, est plus vivcinenl sentie qii'olle
ne I'a jamais tie. J.
■J 3. — * Gi'Ograp/iie universelle , ou Description gcneialede
la terre, consideree sous les lapporls astrononiique, pliysiijue,
politique el hislorique ; par E. Cortambert , prof'csseur de
geogr:i[>liie. Paris, 182C; Rilian el Picquet. In-8" (ie 5o2 pages ;
prix , 7 U\
PeiU-eire ce litre n'iiuiique-t-il pas suflisammeiit que c'est
un livie elcnientairc que M. Cortambert preseiile au public.
Ainsi (jiie dans d'auires abref;es , on commence, danscelui-ci,
par des notions de ^coj^raphie malliematique el physiiiue ; en-
suile on passe a la gcoj^raphie des diverses parties du momle.
L'auteur n'admel que trois races princij)ales de rcspccelm-
haine,la bltinclw on caucasique , Ihtjaune ou r/wrigolique , ct la
negre ; il pcnse que le teint cuivre des indigenes de rAaieritjue
n'est pas un caractere suffisant pour en faire une race [.arlicu-
liere ; tnutefois, ii convient (ju'ils ne peuvent non jdus ctre
rattachcs clairement a\x% races mongolique et caurasique.
Dans la description des diverses conlrees du globe, l'auteur
fait con nail re , dans des cliapitres ou paragraphes separes, les
limites, Taspecl general, les divisions, ies montagnes, lesflcuves,
les lacs, les golles, les caps, etc. decljaqiie [)ays; puis,il fail I'eiiu-
meration des principals villes, indique la nature du gouver-
nement et du culte , et tennine par uue notice hislorique. —
La multitude de ces utiles indications ne laisse pas a l'auteur
beaucoup de place pour faire connaitre ce que les villes len-
fermenl de reniarquable ; aussi les articles qui les concernent
sont tres-courls. Au sujet de la ville de Londres, Tauteur dit
simplenient qii'elle esl la capitalede la Grande -Bretagne et la
plus grande ville de l'Euro])e, qu'clle est situce sur la Tamise,
et qu'elle renferrae i,o5o,ooo ames. C'esl une question de
savoir si, dans une geographic elenicnlnire , il convienl de s'e-
lendre davantage sur les particularites du sol , ou de decrire
plus en detail les villes. Comme l'auteur de cet article a cm
devoir suivre la derniere de ces methodes, dans un ouviage
• li'raentaire sur la geographic, il ne lui appariient pas de de-
rider la queslion. II serait sans doute a desirer (jue Ton pAt
egalement bien faire connaiire tout ce qui rend un pays re-
niarquable ; mais, daFis des bornes aussi etroiles, l'auteur est
loujours gene j)ar le pen d'espace (|ui lui reste.
L'ouvjage de M. Cortambert, redige d'une nianiere claire
et meiliodique, seia tres-ulile pour I'enseignement de la geo-
graphic. On pourrait faire des observations sur quelques de-
tails : mais il faut avoir travaille a de parcils ouvrages pour
SCIENCES PHYSIQUES.— SCIENCES MORALES. 177
savoir combien il est difficile de verifier tous les renseigne-
iiicns fournis paries voyagcurs et les topogrnplies. D — o.
74. — * Alias geographique ct stnlistique da dcpartemens de
la France ; (Carles des depai leinens de la Sartlie et de la Hattte-
Marne. Varis, 1826 ; Baudouln. Prix de cliaque carte eiilu-
niiiiee , i fr. 80 c. prise scparemcnt, et 1 fr. 25 c. pour les
souscripteurs a I'Atlas enlier (Voy. Jlev. Enc, t. sxv, p. 1^57 ").
Cede grande et importante entreprise, dont I'utiliie ne
sanrait elre conleslte , malgie les iin])erfcclions de details
qu'uiie criticjue severe peut y signaler, e.-^t coiitiniiee avcc iin
zele et une perseverance dignes d'cloges : elle imrite les en-
couragemens des amis de la gcograpliie , el de tons ceux qui
voient avec plaisir se multiplier ics moyens de rendre pltispo-
pulaires les notions geographiqiies et siatistiques, et surtout
de mieux fairc connaitre la France a la classe nombreuse des
bommes les plus capables d'augmcnter, par leurs travaux en
tout genre, ses mojens de prosperite. J.
Sciences religieuses , morales , politiques et kistoriques.
75. — * Memoirs en faveur de la Uberte des cultes , par
Auguste PoRTALis, a^'ocai a la Cour royale de Paris; avec cetle
dpigraphe, Posteri, posteri, vestra res agitur. Paris, 1826 ; iiu-
primcrie de Guyot. ln-8° <ie 48 pages. ( Ne se vend jias. )
L'auteur de ce memoire est jirodie parent du celebre rap-
porteur de la loi sur le concoidat de 1801 , et du noble pair
qui fit rejeter , il y a deux aus, la loi jiour la repression des
delits commis dans les eglises, loi qui depuis a cte reproduite
avec I'expression sacramen telle de sacrilege. II n'est done pas
dtonnant qu'un membre de celte honorable famille ait eleve la
voix en faveur de la liberte des cultes, c'est-a dire de Tunc
des principales garanties que nous offre la Charle conslitu-
tionnelle. On sait a (|uelle occasion ce discours a ete compose.
Feu M. La nibi edits ayant charge M.dOulrcpont, son legatatre
universel, de prier I'lnstitut de donncr pour stijel de prix la
liberte des cultes , Tautorisation net^saire a ce sujei fut refuscc
par M. le minisfre de I'interieur. M. dOulrepont crut devoir
inviter la Societe de lamnrale chretienne ik proposereta decerner
ce prix. Le memoire que nous annoncons , inscrit sous le w" i5,
a obtenu une mention honorable. L'auteur suppose que,
la 355^ annee avant I'ere clirctienne, epoque de la guerre des
Phoceens, connue sous le nom de guerre sacree , le philosophe
grec Callisihene est consultc parses concitoyens sur la question
de savoir si les Phoceens avaient le droit de ne pas croira
T. XXXI. — Juillei 1S26. 12
178 LIVRES FRANCMS.
aiix dieiix de la Gri-ce, ou dc croire a d'aiitres dieux. Dans nn
discoitrs eloquent, le philosophe s'eleve centre la pretention
d'imposer des croyaiices religieuses aux aolrcs hommes. Ce
simple apercu siiffit pour niontrer le vice radical du disconrs;
ici nous laisseruns parlcr IM. Giiizot, rajiporteiir de la com-
missicn d'examen des ouviagrs cnvoycs au concours : « par
cette fiction, I'auteur s'csl prive des plus precicuscs richesses
de son sujet ; car c'est a I'Europe nioderne qu'apparticnt vrai-
ment la question de la liberie descuites; c'est la que s'en sont
developpt'S les principes, et qu'olle apuissammentagite I'esprit
et la deslince des honimes : el!e n'avait apparu que confuse-
ment a la pcnsce des pouples anciens, et iiortee siir la place
])ublique d'Atiicnes , eWe. y sembic embarrassce et froide ,
comme une ctrangere. L'au;eur lui-meme n'a pu s'empecher
de le sentir; aussi, a-t-il ajoute au discours de Callisthene nn
supplement 011, parlaiit en son propre nom, il s'effoice de
rattacher a I'liistoire er aux idecs de I'Europe chr-Jtienne les
raisoniiemens du pliiiosophe grec. Mais ce supplement indique
la lacune, au lieu de la rempiir. » Nous croyons que lout lec-
teur impartial adoptera ce jugemcnt; mais , sons un autre rap-
port, le raemoire de M. Awguste Porlalis merite beauconp
d'elogcs, et nous allons encore empruntcr les propres paroles
de I'excellcnt jiige que nous avons cite pins haut. « En re-
vanche , ce inemoire se d.istlngiie par une ctendue etune fer-
mete d'idees peu coraniuncs , jiar un style noble , elegant, qui
s'eleve meme quelqiicfoi^ a reloquence; et, dans plus d'un
passage, enlre autres dans le debut du discours de Callis-
thene. regne un sentiment vif et vrai du tour d'esprit et de
langage des oraleurs pliilosopbes de ranliquite. » Y.
176. — * Principes d'nnlhropolof;ie , ou des lois de la nature
considerecs dans rhoramc, par de Joannis. Paris, 1826. Delau-
nay, Bechet jeune. In - 8° dc viii el 69 p. ; prix, 1 fr. , et 2 fr.
5o c. par la poste.
L'auicur a voulu , dans cet ouvrage , aliler !a metaphysi(jue
a la pliysiologie; maia, malgre ses efforts, quels que soient les
emprunts plus ou moins heureux qu'il ait fails aux sciences
naturelles, il est reste purement mctaphysicicn; et, s'il nous
est permis de donner nos conjectures sur la manierc dont il
I'a compose, nous somnies portcs a croire que ses conclusions
^laient prises, avant qu'il chcrchat a les appnyer par des
preuvcs tirecs du monde physique. II renouvelie une opinion
qui date de bicn des siecles, cl suivant laquclle I'homme serait
forme d'un corps, d'unc amc et d'un esprit; le corps, Tame,
ne le distingucraient pas du reste des animaux; mais par
I'esprit qu'il posscde a lui scul, il forme dans la creation une
SCIENCES MORALES. 179
classe a part ^ laqnelle rien dans la nalure ne pent etre
compare.
C'est sous forme d'apliorisraes que cette brochure est ecrite;
cent dix-neuf paragraphes donnent la serie des propositions
de I'autejir qui, presentees de cette maniere, ne pourraient
^tre discutees sans des develoi)pemens bien plus etcndiis que
I'ouvrage Ini - meme. M. de Joannis cependant .Tpi)elle Ics
objections; essayons de le satisfaire. II nous seinble qu'apres
avoir ex])Ose quelle est I'opinion des pliysioiogistes modernes
sur le point fondamental de la question, savoir, en quoi
I'homme differe des animaux, qunnf a ses faculte* intellec-
tuelles, il suffira d'une simple comparaison pour mettre a
meme de juger Touvrage dont nous rendons comptc. La jilii-
part des naturalistes, suivanl a peu pres les principes d'iden-
logie de I'ecole de Condillac, admettent :
1° Qii'il existe une faculte , nommee instinct, rjiii dirige
exclusivement , souvent avoc une perfection remarquable, et
avant loute experience, les actions des animaux des classes in-
fcrieures , des insectes, par esemple. Chez les aulres animaux
et chez rhorame lui-ineroe, I'instinct est aussi ia sourCe dr-
beaucoup de determinations.
2" Que les animaux qui se rapprochent de nous joignent ;i
rinstinct une intelligence dirigee par d'autres causes : on
admet chez eux perception , attention, association et comhi-
naison d'idees, jugement, memoire non-seulement des per-
ceptions, mais des jugemens portes , habitudes, etc., toufes
facultes que I'homnie possede aussi, et auxquelles il scmhle
borne pendant la duree de son enfance.
3" Que I'homme a sur les animaux une preeminence incon-
testable qu'i! s'agit ne preciser. Dira-t-on qu'i! est done de
raison ? Mais qu'est-ce que la raison? Ce n'est pas la definir,
que de la regarder comme un degre superieur d'intelligcnce.
Suivant M. Frederic Cuvier, I'homme n'aurait de plus que
I'orang que la volonte avec connaissance, ou plutot la faculte
de connaitre. Ce natiiraliste dit ailleurs que I'homme doit sa
superiorite a la reflexion, qu'il jouit seul d'une veritable
bberte; et cependant, il avait reconnu que les quadruman^s
et les carnassiers sont en quelque sorte des animaux libres en
comparaison des insectes. Peut-on , du reste, refuser aux betes
la reflexion, <]uand « elles sentent meme leur subordination,
qu'elles semblent connaitre qiie I'etre qui les punit est libre de
ne pas le faire, puisqu'elles prennent devanl lui I'air de sup-
pliantes lorsqu'elles se sentent coupables ou qu'elles le voient
fache. » ( George Cuvier.)
i8o LIVRES FRANCAIS.
La distinction ne reposerait-elle done t|ue siir le degro des
iaculies inlellecliielles, et iiou sur leur cspece? Enfin, on pcut
se demander encore si la difference enlre lame de rliomine
ct celle des aniniaux tient seulement a la difference des or-
ganes, instruinens regardes couune necessaires a la manifesta-
tion de la pensec.
Ces questions long-tems debaltues tronvent lour solution
dans un autre svslcme ])liiiosopIiir|ne, colui fju'a fonde le
D*" Gall. Get liabile obset valeur, abandonnant la loulesuivie
par les ideologues, envisageant sous un point de -vne nouveau
nos facultes intellectnelles, regardant celles ([ui avaieiit etc
adniises jusqu'a lui coinme des abstractions, des altiibuts.
coniinnns de Ions nos jienchans, de toulcs nos aptitudes, a
determine, avec pins de precision qu'on n'avait pulefaire, ce
que nous avons de comniun avec les aniinaux ks plus parfaits
et ce qui nous en distingue, comnie eires moraux ot pensans.
Voila oil nous en etions sur ce snjet, lorsijue M. de Joannis
s'en est occupe de nouveau. II existe, suivant lui, nn principe
animiqne , couimun a I'liomme cl aiix aniinaux cpii ne se ma-
nifeste que par I'insliiict, et auqnel il rcconnait quinze moda-
lif^s ou ])encbans , qui ne sont autres (lu'une partie des facultes
ou forces fondanientales etablies par le D'' Gall. M. de .foannis
admet ensuile que riionime ou lu nature homiiialc se compose,
en outre, d'un principe rasionnel ou volitif done de la facullc
de connaitre et du libre arbitre. 11 se trouve ainsi employer
les meines expressions que M. I'Vederic Cuvicr; mais il dilfere
dece. savant, en ce C|u'il refuse aux animaux ce que celui-ci
leur accorde de jilus que Tinslinct. On pent remarquer, du
reste, (lue Condillac, dans son Traiie des animaux ^ avait de
meme nomnic /rtJii//c^ rintelligence des betes, ct raison celle
de rhomme. M. de Joannis a done eni])runte lour a lour des
malcriaux a deux doctrines absolument opposces, et qui ne
peuvent etre vraies a la fois Tune et I'autre. li resulte de ce
melange nn tout incolicrent, peu pro;)re a satisfaire les natu-
ralistes el les metaphysiclens , mais (jui a le merite de donner
a penser aux personncs doni ronlnion n'cstpas arretee sur ces
questions iuteressantes.
L'auleur a ajoule a ses aphorismes deux appendices : I'un
sur I'amour dans rhomme, rautre sur les principes et les
causes de la sociabilite. II y fait ])i euve d'une grande indepen-
dance dans les idi^es ; mais cetle liardiesse de pcnsee se porte
sur des sujets si eleves , si dilficiles , si au-dessus de la portee de
notre investigation; le positif, le probable. I'inconnu sont telle-
inent confondus , que nous ne savons quel jugemeni en porter,
RldOLLOT (lis, I). M.
SCILNCES MORALES. I'ii
77. — * Atlas constilutionnel, on Tnhleauxchronologique.i,
genealogiques et bibliograp/iiques , pouc servir a I'histoire de
la monarchic representative en France depuis le retour des
Bourbons, sur le plan de V' Atlas de A. Lesage ( M. de Las
Cases); par A. -J. de Mancy , auteur \\e\' Atlas historique des
Utteratures , des sciences et des beaux-arts ( Voy. Tier. Enc. ,
t. XXIX , p. 548. ) 1'* livraison. Paris, 1826; M"^ de Breviile,
rue de I'Odeon , n° 82. TJne planche in-folio ; prix , 4 fr.
Letitre que nous venons de transcrireenonceavec precision le
but que I'auteur s'est propose. II a eu I'heureuse idee tl'ouvrir
son ouvrage par une carle, ou notre Charte conslilutionnelle
est comparee aux constitutions des autrespeujiles d'Europe et
d'Amerique. Celle de la Grande-Bretagne occupe la premiere
place , comme type primitif de touiesles chartes roonarchiques
ou republicaines qui existent aujourd'hui : on n'a pu en don-
ner le texle beaucoup trop long, mais I'analyse en est bien
faile. On peut en dire autant ties autres constitutions, soiteu-
ropeennes, soit americaines. A la suite de ce vaste tableau ,
M. de Mancy en a place unfort etroit qui presente les monar-
chies absolues de I'Europe : I'analyse de leur organisation in-
terieure est si simple qu'il suffit de pen de phrases pour I'indi-
quer. Voulez-vous, par exemple, connailre /ei' votes et mojens
adrninistrat//'s du grand seigneur? II vous suffira de lire ces molsr
/e cordon, le pal ct le sabre. Voulez-vous savoir les resultats
ordinaires de ce regime ? Vous vous contenterez de ces ligncs:
• Revoltes des pachas, insurrections militaires, sanglantes re-
volutions dti serail , frequens incendies de Constantinople. Tel
estle joug affreux que la population lieroique de la Greces'ef-
force de briser. » Cetle reflexion, glissce dans un ouvrage ana-
lyliqiie, atleste rinleret si vif queue cesse d'inspircr aux Fran-
cais les braves et malheureux Hellenes. Puisse M. Mancy, dans
la seconde edition <le son tableau, avoir a comprendre un
nouvel etat et une nouvelle constitution!
N. B. Nous signalerons a M. de Mancy une errenr qui depare
son tableau. II tcrmineainsi I'article de la Suisse : Un a'i'^^can-
ton,celuide Neufchdtel appartient an roi de Prusse. L'ancienne
principaute de Neufchalel forme aujourd'hui I'un des 22 can-
tons de la Suisse, et n'appartient point a la Prusse. II a son
gouvernement particulier, ses deputes a la dicte helvetique ,
mais il est place sous la protection du gouvernement jirussien
auqu^l il fournit quelques compagnies de chasseurs.
Crussolle-Lami.
78. — * Des assernblees nationales en France , depuis Veta-
blissementde la monarchic jusqu' en i6i4;par M. le president
i8a LI V RES FRANCilS.
Henrion dePamsey. Paris, i826:TheophileBarrois, p^re.In-S**
de 382 pages; prix, 7 fr.
Lcs clats-gencraux et, avant eux, les anciennes assemblees
ualionales forinent sans contredit la partie la plus interessante
de iiotre liistoire. C'est lii seulement que Ton voit le peiipie
f'aisant entendre sa voix et prenant part aux affaires du pays.
De vastes compilations renferaient toutes les pieces qui sont
rel;ilives a ces dietes generales; les historiens nous ont aussi
entretenu quel(|uefoisdesiroportanles discussions qui y avaienl
lieu; niais, jusqu'ici, aucun ouvrage n'elait consacre a trailer
ex professo de celte partie de nos annalcs. Cette lacune cepen-
dant ctait d'autant plus extraordinaire qn'une kistoire des etats
gcneraux devenait I'introduction indispensable a notre nou-
velle forme de gouvernement. Ce qu'aucun historien n'avait
encore tente de faire, \\u venerable magistral vient de I'exccu-
ter. L'ouvrage c]ue nous aniion^ons aujourd'hui est un iiou-
veau service rendu a la science par M. le president Henrion de
Pansey. Get illiistre jurisconsulte a presenle dans un seul vo-
lumt' i'aualysc complete des discussions qui se sont elevees dans
les di\-liuit assemblees d'etats-generaux qui out etc reunies
(iepiiis 1285 jusqu'en 161 4- Les profondes connaissances de
1 uateur dans I'ancienne legislation de la France I'ont mis a
uieme d'eclairer quelques points difficiles de notre liistoire par
les lumieres de la jurisprudence. Son style est toujours pur,
elegant et souvent cleve. Ce nouvel ouvrage est en tout digne
de la haute reputation de M. Henrion de Pansey qui, parvenu
a I'age ou le repos parait etre le premier besoin de I'liomme ,
n'en continue pas raoins ses laborieuses recherches et puise des
forces nouvelies dans i'heureuse habitude du Ira vail et dans
I'immensite de ses connaissances, en conservant celte fraicheur
d'idees quisemble cependant I'apanage exclusifde la jeunesse
et de I'age mur. L'importance de cet ouvrage nous fera un
devoir d'en entretenir plus longuement nos lecteurs.
A. T.
79. — Considerations sur I'aulorite royale el sur Vadini-
nistraUon locaie, par M. D'Aubuisson de Voisins, conseiller
municipal. Toulouse, 1826; Douladoure : Paris , Ponthieu-
In-8°; prix , 4 f'".
Cet ouvrage a ete distribue aux Chambres : I'auteur y pro-
fesse de singulieres doctrines; laissons-le parler lui-meme.
« Par la nature de ce livre , dit il, comrae d'apres mes prin-
cipes, il ne pouvait K\re publie ; j'en extrais les falls et leiiis
causes et je developpe ce ([iii est relatif aux administrations lo-
cales.— I. Faits et causes. Eu 1814, il fallaitaux Francais repos.
SCIENCES MORALES. i83
stabilite , justice , et liberie ( civile ) , qui est toute la vraie li-
berie... La liberie de la piesse, consideree par rapport aux
livres, seukment , vient au secours des proletaires conire les
proprielaires ; elle sert aiix gouvernes conlre les gouveruans;
elle est au desavantage de ceux-ci ; mats c'est uiie neccssite
qu'il leur faut subir; ils ont, en compensation , lapoudre a ca-
non, avec la legislation reprimanle eX. preventive a tin certain
point. Quant aux journaux , on cherche vainement le bien
qu'ils peiivent produire. Mais notre legislation actuelle donnc
apeu pres \e^ garanlies necessaires contre les journaux. S'ils
vont encore trop loin, le legislateur rapprochera les homes.
II serait , dil I'auteur , vraiment dcrisoire de chercher des ga-
ranties contre le despotlsme des Bourbons; mais il ne suppose
pas celiii de leurs minislres. Les 98 centiemes de la population ,
a Ten croire, sont entierement indiffercns a la forme et au
cLefdu gouvernement ; seulement, la democratie, lors meme
qu'elle n'est pas dans fow^lescceurs et dans tous les interets, est
dans toutes les teles. La religion est maintenant de nul ejfet,
en France, si ce n'est dans quelqiies petites communes ru-
raies, et dans qnelques-unes de celles oil sont deux religions
dissidentes. Les constitutions de 1789-1814 ne furent que des
rapsodies , des actes diineptie et d'in.becillite. Les aulres n'ont
guere niieux valu; depuis 1814, nosasseniblees n'ont eu guerc
plus de sagesse, ni d'liabilele... II n'y a que les opinions reli-
gieuses qu'il faille satisfaire, et qui donnent un moyen de gou-
verner les peuples. Avec un roi ([ui excite les sentimens d'/ion-
neur et de gloire, les doctrines des conslitutlonnels neseraient,
linaiement, i\uun objet de risee et de mepris. La Charte do't
etre observee ; il ne faut la changer qu'apr^s I'experience.
Elle estvicieuse, selon notre auteur, soi-disanlorgane desbons
royalistes : 1° en ce qu'elle elablit le vote annuel de I'impot ;
2° en ce qu'elle n'a pas reserve aii Roi seul la disposition de
I'impot ; 3° en ce que, dans le cas de dissolution dela Cham-
bre elective , les deputes sortant sont reeligibles ; 4° en ce
qu'elle elablit la pubiicite des discussions dans I'une des Cham-
bres. Les cliangemens ([u'on a fails a la Charle sont tous au
prejudice du pouvoir royal. En i8i5, le ministcre , en esprit
de mefiance et presque d'hoslilite , exigea des deputes le ser-
ment d'obeissance a la Charle... La loi qui laisse a I'ancien-
nete une partie des grades niilitaires inferieurs, est une loi
tres-mauvaise ; elle n'a fait qiie du mal ; elle sera rapportee.
— II. Adminislrations communales et departementales. S'l on
les retablissait, on verrait ..i France couverte dejacobinieres. Ce
qui existe a cet egard est a peu pres fort bien , et pent etre
i8/, LIVRES FRANg^IS.
sanclionnc, anicliore par une lot, quant au rtfgime des com-
munes , et par des ordonnances , pour les autres adininislrations
locales, u
II V a, dans ce livre, beaucoup d'aulrcs assertions bizarres
ou remarquables, conoernant les choses et les personnes; mais
il serait Ires -inutile d'en f.iire la critique, ni de chercher ct
concilier I'autcur avcc lui-mLme. L.
80. — * Traite eleinentaire dcs successions ah intestat ; par
M. MiLi'F.L , avocat a la cour royale et professeur a I'Ecole de
droit de Toulouse. Toulouse, 1826; J.-M. Corne, imprimeur.
Paris , Ch. Becliet. In - 8"; prix , 8 francs , et 10 francs par la
postc.
Cet ouvrage est dii petit nombre de ccux qu'on peut signa-
ler comme bons a toutes les classes de Iccteurs, et nous pou-
vons affirmcr que nous lavons \n avec interet et avec fruit.
L'auteur a divise son livre en douze lecons. II a suivi dans la
distribution de ses nialieres I'ordre adopte par les redacteurs
du Code civil, qui a le raerite de ne pas contrarier des idees
antcrieurement concucs. Cel-a convenait surtoul dans un Iraile
elementaire , essenlieilement destine a I'inslruction des jeunes
gens. lis y trouveront analysees avec autaiit de clarte que de
precision les dispositions clu litre 1^', liv. ?, , du Code civil,
dont riiabile professeur s'est applique a leur rerulre I'intelli-
gence facile par des explications qu'il puise le plus souvcnt
dans les motifs du logislaleur. Apres avoir eiabli les princii)es
et deduit les consequences, il met en comparaison les opi-
nions des meilleurs auteurs qui ont traite avant lui des succes-
sions; il se livre a un examen tres-judicieux de leur doctiine ;
il releve avcc beaucoup de juslesse el combat avcc mesure les
erreursqiiipcuvent leur etre echappees; il appuie le jugement
qu'il porle sur les questions conlroversecs entre ces derniers,
de rautoritc des arrets qni les ont resolues. Les rcsultats de
celte partie de son travail offreiit parliculierement un haut
degre d'ulilile.
On lira avec fruit ce qu'il dit au sujet de la viabilite des en-
fans de naissance : il donne les indications propres a rclairer
cette question de medecine It'gale , dont la solution interesse
non-seulement la fortune des individus, inais encore et trop
souvent I'lionnenr et la vie meme de la mere. On ne sera pas
moins satisfait de ce qu'il dit pour elablir la Icgitiinite d'un
enfant ne prematureraent ou apres la mort de son pere , et son
ppiitude a succeder soil a celui-ci, soit a ses parens coliateraux.
II presente les causes dUndignite de manicre a fixer les in-
SCIENCES MORALES. i85
certitudes que les circonstances, ou meme la combinaison des
differens testes des lois, peuvent faiie naitre a cet cgard.
La cinquleme lecon contient une esquisse lapide des sys-
teraes de succession qui ctaient suivies en France dans les pro-
vinces regies par le droit ecrit , dans celles qui etaient sou-
miscs a Tcmpire des contumcs; des changemens qui y furent
apportes par I'asseniblce constituante, puis par la convention
naiionale; cnGn , le tableau raisonne et compare de la legisla-
tion qui nous regit aujourd'hui. L'auteur donne des nolions
fori justes sur la parente , les lignes, les degres, la famiile et
Ja represenlalion , et sur les divers ordres de succession elablis
par la loi. Les details particuliers dans lesquels il entre sur les
droits des enfans nalurels,des enfans adulterins et incestueux,
dans les biens de leur pere et mere, sont ])ropres a jeter nn
grand jour sur cclle nratierc et a dissiper bien des doutes
qu'elle avait fait naitre.
Nous avons lu avec le plus grand inleret la dissertation a
laquelle il se livre relativement aux effets que doivenl pro-
duire h I'cgard des tiers les ventes des biens d'une succession
conscnties par un parent du defunt qui I'avait recueilhe, et qui
en est ensnite depoulile jiar un parent phis procbe en degre qui
se serait presente plus tard. Tout ce qui concerne le jiartage
de ces biens , I'envoi en possession des heriticrs, la renoncia-
tion aux successions , la vacance de rheredite et la desherence
fait I'objet des dernieres lecons.
On pourra ne point ])artager quelquefois les doctrines de
l'auteur; mais on y puiscra toujours d'abondantes lumieres :
c'est du moins ce que nous avons eprouve dans la lecture de
son livre. Nous nous somuies api)liqucs a donner du plan (ju'il
a suivi et de la inaniere dont il I'a execute , une idee suffisante
pour en faire res'ortir I'ulilile : elle sera plus particulierement
appreciee par cette classe de jeunes adcjiles de la science du
droit ausquels son travail est destine. Les jurisconsulles eux-
memes nc le liront pas sans fruit. Crivelli, avocat.
8 1 . — Eisai siir lex principes de legislation penale , en ma-
tiere de tentative dc crime et de delit , par M. Daljgny, presi-
dent de chambre a la cour royale de Corse, presidanl la cour
de justice criminelle de I'ile. Paris, 1826; B. Waree. In-8°
de 3o pages; prix, 1 fr.
Cette courte brochure a pour but de prouver que la ten-
tative de crime ne devralt pas etre assiuiilce au crime meme,
et devrait etre punie de peines moins rigoureuses. On voit, en
la lisant , que l'auteur a une longue experience des affaires
crimiuelles, et qu'il sail bien saisir les nuances qui separent
i86 LIVRES FRANCAIS.
les actions coupables reprimees par la loi. II serait a d^sirer
qu'il conlinu4t aiasi I'exaraen de toutes les parties de notre
code penal. Ce n'est pas que nous adoptions toules ses opinions;
roais du moins , on ne saurait lul refuser la justice qu'elles sont
presentees avec une grandc bonne foi et une intime convic-
tion. Si M. Daligny est dans I'intention d'acLevcr le tableau
qu'il n'a fait qu'esquisser, nous I'inviterons a chalier un peu
plus son style, ou Ton pourrait signaler plusieurs locutions vi-
cieuses, tellcs que la casuaUle des evenemens , la somrne des
demarches, Yimrnobilite a laisser suivre Taction, etc. Mais,
sans nous arreler a ces legeres critiques, nous aimons a re-
connaitre le merite de la dissertation en elje-meme, qui ne fait
pas moins d'houneur aux sentimens qu'aux lumieres de son
auteur. A. T.
82. — * Des modes actuels de remplacetnent etde rengage-
ment, de leurs inconveniens et des moyens d'y remrdier ; par
£. Taree Des Sablons, officier aux chasseurs de la garde.
Paris, 1826; Anselin et Pochard, rue Dauphine, n° 9. In -8°
de 64 pages ; prix , i fr. 25 c.
Cet ecrit est tres-remarquable, en ce qu'il fait voir combien
de choses essenlielles ont ete omises ou mal conciies et mal
faites dans I'organisation actuelle de I'arince. Et cepcndant,
ces defautssont tellement sensibles, que Ton s'etonneraitqu'on
ne les ait pas evites, s'ils n'etaient une consequence necessaire
de notre etat social, melange inconciliable de I'ancien regime
et de la revolution. Les niaximes nouvelles exigeaient que nul
ne fut exempt du service militaire, que touie la jeunesse fran-
caise put etre appelee sous les drapeaux de I'etat; celles d'au-
trefois voulaientdcs privileges, desdis!inclions,ou des exemp-
tions : la faculte de se faire remplacer est une sorte de
composition enlre ces pretentionsconiradictoires. Mais, comme
il y a chez les Francais quelque senliment des convenances ,
quelques notions du veritable honneur, les renq)lacans ont ete
mal recus , et le seroiit toujours, a moins que I'esprit militaire
francais ne fasse place a celui des Maineluks, et qu'on ne disc
un jour dans nos armees : un tel est un homme comme ilfaut ;
ila ete achele. M. Des Sablons ne cherchepoint de remedes di-
rects au mal quelesremplacemens font al'armee; c'est dans les
rengageuiens qu'il espere les trouver. Mais, dans I'etat actuel
des lois et de Tadministration militaires, les rengagemenssont
presque nuls pour les trowpes de ligne ; et dans la garde royale
merae on ne pifrvient guere a conserver , parrai les soldals ,
que ceux qui nepeuveiit faire autre chose que de continuer a
^rvir. C'est done a de nouvelles dispositions qu'il faut recou-
SCIENCES MORALES. 187
rir; que Ics soldals puissent trouver dans Je service militaire
I'equivalenl dii sort qu'ils se seraient assure par leur travail;
qu'ils n'aient pas, comrae aujourd'liui, pour unique perspec-
tive, d'achever leur carriere aux Invalides ou dans la miscre
dont ies retraites qu'on leur promet ne peuvent les tirer. L'au-
teur de cet ecrit a resolu en militaire la question qu'ii s'etait
proposee : un legislateur aurait a la considerer sous un autre
point de vue. II senlirait que I'organisation de i'armee ne pent
pecher dans quelques parties essenlielles, sans etre defec-
tueuse dans son ensemble, et que, pour une Societe raal con-
siituee, il ne peut y avoir une bonne organisation, si ce n'est
de quelques divisions peu importantes des services publics.
L'effetdesmoyens proposes par M. Des Sablons serait de deta-
cher tout-a-fait I'armee de la nation; elle u'y tiendrailplus que
par un tres-faible recrutement annuel : I'auteur prevoit meme
le cas oii Ton voudrait augmenler le nombredes soldatsetran-
gers employes en France. Ce qu'il proi)ose est peut - etre le
mieux , dans I'etat oil nous sommes , si loutefois il est possible
d'ameliorer notre situation , sans la changer eatierement. II
fait cesser ies abus des speculations sur les remplacemens ; mais
c'est en augmentant I'inegalite deja extreme du plus pesant et
du plus mal reparti de tous Ies impols, celui de la milice. Ce
que Ton perdrait par I'adoplion de son projet est certain ; ce
que Ton gagnerait ne Test pas : dans une pareille incertitude ,
on se decide volontiers a rester dans I'etat ou Ton est. N.
83. — * Notn'cUes idees sw la population avec tXes re mar-
ques sur les theories de Mallhus el de Godwin ; par Al. H. Eve-
rett, ancien charge d'affaires des Etats-Unis dans les Pays-
Bas et ambassadeur de la meme puissance en Espagne ; ouvrage
traduit sur I'edition anglaise publiee a Boston, en iSaS, avec
une nouvelle preface de I'auteur; par C. J. Ferry , i'un des
redacteurs de la Revue Encycloprdique. Paris, 1826; J. Re-
nouard et Sautelet. In-8° de 127 pages; prix, 3 fr.
M. Godwin attribue, comme Rousseau, aux institutions po-
liliqucs tous les maux de I'huniaiiite. M. Malthus voit la cause
principale de ces maux dans un execs de population. M. Eve-
rett, combattant a la fois ces deux economistes dans un livre
beaucoup plus court que les leurs, n'a pu eviter quelque em-
barras et quelque obscurite dans la niarche et dans le develop-
pement de ses idees. Du reste, il s'est peu appesanti snr le
syslenie de M. Godwin , qui en effetne supporte pas Texamen,
Mais il s'atlache a prouver, contre M. Malthus, que I'accrois-
semeul de population est une cause d'abondance , et non
de disette; que cet accroissement augmente les produits di4
i88 LIVRES FR/VNCAIS.
travail, en meine terns que le besoin de ces produits; qu'il de-
termine le perfectionnenienr de I'industrie et rend le travail
plus pioduciif , et il appuie ces divcrses propositions d'exem-
ples analop,ues que lui funruit I'liistoire de la civilisalion. II
combat suriout cetle assertion dc M- Mallhus, que la population
tend conlinuellement a croitreplus rapidement que les inoyens
de subsislance; il affirme, an conlraire, et pretend demontrer
par des calcnls que, dans un pays ou la popubiion croitrait
comme lesnombies 1,2,4,8, etc., raccroissement des moyens
de subsislance serait represente par les nonibres i, 10, 100,
1000, e'.c. II rei'iUe victorieusement celte autre assertion de
M. Mallhus, quo tonte population est bornee pour sa subsis-
tancc aux produits dn sol qu'elle occupe. Apres s'eire livre a
des considerations generalcs S'lr les causes qui favorisent ou
arretenjt les prof];res de la population , M. Everett consacre
plusieurs cliaj^itrcs a i'cxamen des opinions de M. Malthus sur
les institutions en faveur des pauvres et sur les enconragemens
donnesau mariage. M. Mallhus condamne ces institutions et ces
encourageraens; M. Everett approuve les premieres et regarde
les dernieis coniine absolument sans eftet. Enfin , il consacre
un chapilre a trailer des saiaires dans leurs rapports avec les
produits.
Tel est le plan et Tcnsenible de I'ouvrage de M. Everett. Les
propositions fjnMl tend a d(';monlrer sont consolanles ])our
rimnianitc. Cependant, I'opinion de M. Mallhus, sur les incon-
veniens que produit un execs de population a cle admise par
nos plus savans econoniistes , MM. Say et de Sismondi. Ou se
trouve la veriie? Pout-elre au milieu de toutes ces opinions
divergenles. II senible, d'abord, que, tant que I'espece hu-
mainc ne sera pas devenue assez nombreuse pour absorber
tons les produits nulritifs dii globe , il n'y aura pas, a propre-
ment jjarler, execs de population, les pays surcharges ayant
toujours la ressource des (''changes et des colonies. Mais, long-
terns avant que cette limite soit atteinle, beaucoup de j)ays
pourront souffrir de la mauvaise repartition de la population.
Ainsi, toutes les fois que, par reffel des guerrcs, des institu-
tions, des decouvertes, des mouvemens du commerce, elc. ,
une classe nombreuse se irouvc exercer une indusirie doiit le
produit est iusuffisant pour ses besoins, il y a malaise social,
jus(]u'a ce qu'unc meilleure rrpartilion ait fait disparailre cet
excedant pariiel. On ne pent pas dire, comme M.Everett, que
cet excedaiu soit lonjours un bien. Get excedant est un mal ,
qui provient, non de I'accroissement, mais de la mauvaise
repartition df la ]iopu]ation. Que I'cquilibre se rc'tablisseenlre
SCIENCES MORALES. 189
les differciites classes de consoinniateurs et de productcurs ,
soit flans le inAme ]»ays , soit d'un pays a I'autic , et aussitot le
mal ccssera.
M. Mallius rep[arde la taxe des jiauvres romine un iinpot
desasireux. M. Eveiclt soutient, au coiitsairc, (iii'miue taxe
pour le soulageiiient des vieillards, dcs infirnies et dos paii-
vres, ne pent nuirc aux intercis de la societc, et que I'liinna-
nite la reclame, Iorsi|ue la soclele est nombreuse et civilisc'e. »
Les vieillards ot Ics infirmcs sont ici liors de la qucstinnjinais,
quant aux paiivres valides, tcute taxe, lout sacrifice en ieiir
faveur n'est qii'iin paliialif de la mauvaise rcj)artition de la po-
pulalionet des proprietcs. C'est ce qu'i)n voil en Aiiglelerre,
ou uii petit nombre de projirietaires I'onciers, maitres de tout
le sol , aprcs avoir demesureuient renclieri les cereales j)ar des
lois proiiibitives, est oblige de faire I'aumone au j)eiiple, pour
qu'il ne renverse jias \iolemiuent un ordre de choses oil il ne
peut vivre de soil travail.
L'ouvrage de M. Everett discute en peu de pages de grande.*
questions et les envisage sous dcs aspects nouveatix. II incrile
1 altenlion des cconoinistes et des jiliiiantropes. Le style du iv-a-
ducteur a toutes les qualiles convenables a un ecrit de cette
nature. Ch.
8/|. — Dcs pastes en general et particulicrement en France ,
par Charles BERNiuE. Paris, 1826; Raynal. In-8" de 177
pages; prix , 3 I'r. 5o c.
L'usage des posies, Tun des premiers besoins des socictes
modernes, serelrouve, sous dos formes j)Ins ou nioinsinipar-
faites, chez tons les peuples qui ont marque dans I'antifiuite,
ou qui figurent encore parini les nations eivilisees. Avaiit de
nous faire connailre les facililisde correspoiidre ou de voyager
ipfellesprocurent avec desinoyens divers, en Chine, au Jajion,
a Slam, en Tartaric, ainsi qn'en Europe et dans le Nonveau-
Monde, I'auteiir picnci en Egypte ceite precieuse inslitution
a sa naissanco; il suit ses perfcctionncnicns chez les Grers et
les Romains ; i! la voil , apres des siecles de barbaric, leparai-
tre sous CliarJeniagne , et nous la montre enlin definitivenient
ri'gularisee , dans I'interet d'nnc poliiique inquiete et jalouse,
par I'ombrageux Louis XI. Al'aide de cette belle invenlion et
de ceile de rcciilure plus mcrveilleuse encore, pnisfiue avec
qiielques signes de convention Ton est parvenu a representer
tonies les modifications de la parole, les nations entieres pen-
vent assister simullanement aux meditations des savans et des
philosopbes, aux harangues des orateurs, aux discussions des
hommes d'eu.t et a toutes les sciences de la vie sociale qui
I go LIVRES FRANCAIS.
interessent I'homine eclaire. A peine une region sauvage est
couverte de qiielques habltans ,qn*il s'elablit aiissit6t, pardes
communications periodiqncs, niille relations nouvelles pour
rattacher ces liotnmes isolcs aux populations agglomerees des
inctropoles, ct la jiensec cirrule incessamment sur tous les
points dii globe.
Pour que les moyens de corresi)oiidre avec rapidite a de
grandes distances puissent recevoir tout leur deveiop[)enient ,
il est necess.'iirc qne les poslesetendont leurs utiles ramifications
an travers de tonles les mers, par un sysleriie en grand de ba-
teaux a vapenr (]ue n'arcelent dans leur marclic conslanle, ni
les courans, ni les ven;s conlraires ; il faut encore que leslignes
telegraphiqucs, iriullipliees al'infini, ouvrent a I'industrie,
conime I'Angleterre nous en offrira bienlot I'excmple , leurs
modes cxpediiifs tie Iransniettre les courts avis, on les depe-
clies de peu d'elendue. Alors, a une jirnduction et a une con-
sommation jih'.s abondnnle viendront se joindre les bienfait.s
non moins importans d'une cor.imunicalion inslantant'-e en Ire
les villes quivoient s'effeclucr le plusde transactions comuier-
ciales;-et les rayons emant's de ces fovers principaux del'acli-
vite humaine resserreroiit de jour en jour davantage ios liens
qui doivent finir par reunir tous les hommes dans une grande
et nieme association.
M. Eernede s'est propose danscet ouvrage, qu'il a divise en
f;uatre parlies, i" de decouvrir I'origine des postes dans I'an-
tiqtnle; 2° d'indirpier re[)oque de leur introduction chez les
raodernesetparticulieremrnt en P'rance; 3°d'exposeriesdiverses
modifications qu'elles ont subies cliez tons les peiipies ; 1° enfin,
de rherchrr a en rendre la pratic|ue pliis uiile, par la connais-
sance des regies generales auxcjuelles ellcs sont assujeties.
On dcsirerait peuf-etre qu'aulieu d'ctaler en certains endroits
le luxe d'uue erudition souvent inutile et minntieuse, il eut
indiquc des vues neuves ct quelqucs anu'lioraiions qui ont
echappe a son attention. A ces legeres imperfections jires, il
nous parail avoir a'iteinl son but. y4d. Gondinf.t.
85. — * Manuel clu publiciste ct de I'homme dctat, con te-
nant lescbarles et lois fondamenla'es ; les traites, conventions ,
el notes diplomaliques; les proclamations , actes publics et au-
tres documens officieis relatifs a la consfiluiion politique et aux
interets generaux des etats de I'ancien ct dsi nouveau niondc,
avec tables chronologiques et nlphaheliques des maticres ; par
M. IsAMBERT, avocat an conseil-d'etat et a la cour de cassation.
Paris, [826; Brissol-Thivars. 4 vol. in-8°; prix, 6 fr. levol.
Les deux premieres livraisons de cette collection ont etc
SCIENCES MORALES, 191
annoncecs dans notre Revue (t. xv. p. iSy ); et Ton en a fait
connaitre I'importance. On la sent mieux encore, a mesure
que I'ouvrage avance; il manquait a la bibliotlieque deshoin-
mes qui, par goiit on par devoir, s'occupent des affaires pn-
bliqnes. C'est iin vaste depot oil Ton tronve sans peine des
pieces et des dociimens dissemin<''s ca et la , et qu'on ne se
prociircrait quelqnefois qu'apres de longues rec}ierches.«Nons
avons eu I'idee, dit I'anteur , d'ouvrir des annales ou seront,
chaque annee, recueillis et classes tons les documens officicis
de qnelqu'imporlance, publics soit en France, soit a I'etran-
ger. » Apres la publication des volumes promis par I'editeur
et qui completeront son recueil jus(]ii'a ropocjue on nous
soniines , un demi volume environ suffira , chaque annee , pour
conlinuer la collecfion entiere des actcs et des pieces ncces-
saircs a la connaissance de la situation politique des divers
etats.
Depuis surtout que I'ouvrage de M. Martens es! iiiterrompu,
un recueil, tel quecelni quenousannoncons, estdevenu indispen-
sable; et , comme on le dit dans ravcrfissemenl , il appartenait
peut-ctre phis parliculierenient a des Francais de se charger
d'nne telle publication , puisque leur langue est celle de la di-
plomatic, est qu'elle est devenue ainsi le lien commun de
toutes les nations liviliseci. Pcrsonne d'ailienrs n'etait plus
capable que M. Isambert d'apporter dans ce grand travail le
soin et la science nucessaires pour en garantir la perfi'ction et
le succes. M, A.
86. — Opinion de M. Stanislas Girarisin , depute de la
Seine-Inferieure, contre le projct de loi destine a retahlir les
substitutions. Paris, 1826; f/Huillier. In-8" de 5/» p.; prix, aS c.
M. Girardin a remportc bien des couronnes civiqucs; il a
donne des preuvcs honorablcs dii plus vif et du plus gcnereux
attachcmeiit pour sa jiatrie et pour la monarcliie constitution-
nelle. Aucun depute n'a defendu avec plus de force, avec jilus
d'esprit et de talent nos libertes publiques. Mais il est permis
de penser que son discours contre les substitutions est son
plus beau tiire de ginire. On ne sait pas ce qu'il faut y admirer
davantage, ou les raisonnemens profonds de la logique la plus
exacte, laplus rigoureuse, ou les traits brillans de la j)!us fine
et de la plus victorieuse ironic. Ce discours a obtenu un succes
de vogue; il sera long- terns cite comme un grand service
rendu, a une cause excellente qui doit finir par triompher.
L.
87. — * Bibliotlieque populaire. Paris, 1826; Touquet et
compagnie , galerie Vivienne. F* livraison : Histoirede Pierre-
i9» LIVRES FRANCAIS.
le-Grand. In-32, iBf) pages. — a'"^ llvraison : Liberies deVeglisc
frnllicanc. In-32 , 128 pages. — 3'"'=Iivraison : Dlctionnnirefen-
dal. Ia-32, 128 pages. — 4™« livraison : Hisloire de Henri If^.
In-32, 120 [)ages; prix dc cliaque volume, 60 c.
Cette bibliollicque, ijublicc. bous un formal si modesfe , sera
peut-elrebcaucoup plus utile que ccrlaincs collections in folio,
oil la science se trouve etouffoe sous un amas He commcntaires ,
et les esprils eclaires doivcnt n[)pla!iillr a I'licureuse idee de
repandre rinsUuclion panni le pcuple a si peu de frais Cliacun
de ces qnatre premiers volumes confirme nofre opinion ,
surloul V Hisloire de Pierre-lc-Grand et cclle de Henri I P^ y en
offrant un style toujours simple ct de sages reflexions sur les
liommes et sur les choses, qui scront aisement compj-ises par
les lecteurs de toutes les classes. X.
88. — Histoire des conspirations des jesuites contre lu inai-
son de Bourbon en France, jiar MM. Eugene de Monglave et
Prosper Chalas. Paris, 1826; Ponthieu. In-8° de ^35 pages;
prix , 6 fr.
Pltisieurs ecrivains ont donne depuis qnclquc terns des liis-
toires de la secle Irop fameusc qui semble n'avoir ])i is le nom
de Jesus que par derision, les maximes de I'auteur de I'Evan-
gile n'ayant p)as de plus grands enneniis que cette societe. Ces
divers ouvrages ont paru en general cntaclics de partialile, et
cela ne pouvait guere arriver auiremenf. Comment, ajires
avoir lu les conslitulions de cet ordre pretendu religieux , et
apres avoir eludie ses livrcs (pii, publics par difft'-rens auteurs
etadiverses epoques, semblent avoir ete inspires et dictes j)ar
line meme volonte , nejias s'indipner des jjrincipes immoraux
dont ils sont remplis ? Les auteurs ont eu pour but de presen-
ter les nombreuses charges qui pcsent sur la societe de Jesus ;
leur ouvrage est uno sorte de niemoire h consulter , de reqni-
sitoire oil se trouvent relates les mefails des jesuites el leurs
attentats contre divers membres de la famllle dont un des
rejetoiis occupeaujourd'liui le trone de France.
L'ouvrage est divise en Jiuit Hi' res ; rintrodnction offre un
precis de Thistoire des jesuites, depuis la naissance du vision-
naire Ignace de Loyola jusqu'a I'epoque de leurs ))remlers
attentats contre la personne de Henri IV , c'est-a-dire de-
puis 14*)' just]u"en 1589. Le livre premier retrace leurs divcrses
mences , au terns du siege de Paris, et apres TcTitree du roi
dans la capitale jusqu'en 1594, ejioque du crime de Jean
Chatel. Le livres 11 , in et iv conduisent I'liistoire de
leurs conspirations jusqu'en 1610, annee oil Henri IV suc-
coniba au vingl-troisieme complot Iramc contre lui par les
SCIENCES RIORALES. ig?
jesuilcs. Le livrc v presente leuis intrigues sous le regne du
cardinal de Richelieu et la condamnation de leuis doctrines
par les parlemens. Le sixieme livre est consacre au regne de
Louis XIV. L'affiliation de ce roi superstitieux a I'ordre des
jesuitcs mit ceux-ci en conspiration perinaneiite, non plus
centre les rois, mais conire les peuples. Le livre septieme
traite deleurs coujuralionscontre Louis XV, de leur expulsion
de France et de leur suppression, en 1773. Le huitieme est
un extrait de leurs faits et gestes jusqu'a nos jours.
UHistoire des conspirations des jesuites est un recueil d'ex-
cellens niateriaux pour une histoire de cet ordre ; c'est ce qui
nous empechera de reprocher aux auteurs d'avoir ete quelque-
fois diffus et d'avoir surcharge leurs recits des pieces don I'e-
tendue' coupe desagreablement la narration. Le succes de
Touvrage sera dii surtout aux circonstances deplorables qui
onl mis a I'ordre du jour I'execrable societe dont les crimes
sont encore flagrans. J. A-L.
89. — Histoire de la reforme protestante en Angle terre et
en Irlande ; dans une serie de lettres adressees au peuple an-
glais ; par JVilUain Cobbett ; ouvrage traduit de I'anglais.
Paris, 1826; Mequignon-Havard. Quatre livraisons formant
un volume in-8°; pris , 8 fr.
Ce livre vient d'etre jugc a Preston par le public meme au-
quel il etait adresse. M. Cobbett voulait se faire eltre a la
Chambre des communes. L'election de Preston est au noirbre
des plus deraocratiques de TAngleterre; quiconque a reside six
mois dans la ville est electeur. M. Cobbett a ecrit une histoire
de la reforme anglaise a I'usage des artisans et des ouvriers
radicaus , se flattant que , pour leur plaire , il snffirait de mau-
dire indistinctement la religion elablie , I'Eglise anglicane,
Henri VIII, Elisabeth, les torys, les whigs, lord Russel ,
Sidney, les anciennes lois, les anciennes moeurs, en un mot
toute I'hisloire, tout I'ordre social du pays. A ce prix , il comp-
tait sur les suffrages du peuple. Le bon sens du peuple a fait
justice de ce charlatanisme cynique. M. Cobbett n'a pas ete elu.
II est probable que son livre est parfaitement oublie en An-
gleterre. Peut-etre lui-meme ne s'en soucie-t-il deja plus.
Qui done s'est aviso de I'importer en France? Qui a pu
croire que, sur un si grand sujet, un pamphlet ephemere et
local merilat les honneiirs de la traduction ? Un parti bien
different de celui auquel M. Cobbett s'est adresse dans son
pays , un parti grave , rell'.'ieux, monarchique , aristocratique,
le parti qui se pretend seul defenseur des anciens souvenirs,
des anciennes moeurs, de I'ancienne foi. M. Cobbett a ecrit
T. xx^i. — Juillet 1826. ij
194 LIVRES FRANC AIS.
pour les radicatix ; chez nous, ce sont probablement les je-
sultes qui le IraduiserU ; les ladicaux meme rent trouve
anaicliiqiie; les jesuites le trouvent catholi()ue, bon du mcins
commeallie du calholicisine : pour charmer les esprits lorts
des tavernes de Preston , I'anteur a dit des injures a la refonne
te n'a pas reussi; son sutccs est coui|ilet parnii nous aujjres
pes ennemis de toute liberie d'esprit, de toute philosophic;
le rebut de la populace britannique fait en France les delices
des ultramoutains.
A coup si'ir, M. Cobbett ne s'altendait pas a ce trioniphe.
Rien de plus uatuiel pourtanl; la verve meme de son style n'y
est pour rien , et tout autre I'eut obtenu comme lul. Son livre
est cynique, anarchique , impie ; qu'imporle ? II se repand en
invectives centre Luther, C;ilvln, les puritains ; II defend contre
eux les moines et la relne Marie. Le parti n'en veut pas da-
vantage; qu'oii flalte ses passions, ccla lui suffit; il ne recherche
point quel desseln se cache sous de telles paroles, ni quel en
sera I'effet. Si les doctrines el les ouvrages dc M. Cobbett
pouvaient avoir un resultat, ce serait d'abolir egalement , et
I'un par I'autre , selon les lieux et les tems, le protestantisme,
le calholicisme, le deisuie , toule regie , toute foi. Mais qu'on
ne demandc pas a nos fanatiques tanl de prevoyance ; M. Cob-
belt parlage leur haine et repete leurs injures; ils sont con-
tens de lui et le traduisent , et le pronent de lout leur pou-
voir. S'il en sail quelque chose, il doit se bien moquer d'cux-
Couiidere en lui-meme, ce livre ne merile pas un examen
serieux ; il founniile d'erreurs, de bevu«s historiques comme
de raisonncmeus d'une absurdite cvidenle. Pour prouver sa
these conirela reforme, M. Cobbett soutient que rAuglclerrc
etait plus libie, plus riche et plus lieurense il y a trois cents
ans (pie de r.os jours. Cet argument seul dispense dc loule
refutation. F. G.
()0. — * V Annee francaise , on Memorial politique , scienti-
fique et litteraire , comprcnant les evenemens politlques dans
les cinq parties dumonde, les debats legislatils, les inventions
el les decouvertes reccnles, les nouvelles lilteraires, Texamen
des produils industriels, des expositions publiques, la revue
des pieces representi'-es sur les theatres de la capitale, un jirecis
des Iravaux des soclctes savantes , des tableltes biographiques
el bibliograpl^iques , les anecdotes nalionales et (itrangeres le^
plus inleressantes, et generalemenl tout ce qui a paru de plus
reiuarquable dans le ccurant de 18^5; par MM. Albert-Mon-
ternont, Alexandre Lenoir , Badly de Merlieux, Baudot, Ber-
trand, Ch. Coquerel , CAviale , Colard de Murligny , Coudret,
SCIENCES MORALES. igS
Ed. (V Anglemoril , CIt. Diipin , d'Henin de (^uvilliers , P. Grand,
■fuha- Fontenelle , Justin Gensoul , Lefour du Loiret, Lenor-
tnand , Lesguillon , Meyranx, Moreau de Jonnes , Pelletan ,
Pero , Perrot , Perrier, Pine/ , de P** , Rirhi , Aim. Saintes ,
Toussaint , architecte, Vatel. Deuxieme annce. Paris, 1826;
au bureau de I'Annpe francaise, rue des Saints-Peres, n° 18.
'2 vol. in-8° de 3/i4 et 54o pages; prix , 12 fr. ( Voy. Bev. Enc.
f. xxviii , p. 421. )
II ue suffit pas a uu observatenr habile d'avoir examine toutes
les parlies d'lme mecanique, il en voudra juger I'ensemble:
xxn. voyageur itistiiiit qui aura parcouru lous les quartiers
d'une capitale, voudra encore , de quelque point eieve, Pem-
brasser d'un regard, dans sa tolalite. II en est de nieme dcs
<H-enemens politiques, scientifiques et littcraires : des journaux
qtiotidiens, des revues periodiques les auront signales; mais
les details ecliappeiit a la mcmoire on a I'inieliigence, et jettent
souvent de la confusion dans les idees; les lecteurs cclaires
deinanderont un ouvrage qui prcsente une vue plus generale,
une recapitulation niethodique, en ec.ulant les faits steriles,
en recueillant les documens utiles, et en coordonuant tous les
inateriaux, de maniere a ne plus offrir qu'un edifice reguiier ,
quoique forme de divers assemblages et a differens inlervalles.
Tel est le but de X Annee francaise. Dcja le ])lan de I'editeur
avait eu un commencement d'execution pour 1824- C'etait,
com me il le reconnait lui-meme , un essai public jionr sonder
I'opinion. Le succes obleiiu dans celle premiere tentative a
perniis, pour iSaS , de donner ane etendue convenablc a I'en-
treprise, et d'en develouper les diver jCS parties avec cette
unite de direction et cette rapidile d'exposition que reclamait
un resume de ce genre.
U Annee francaise dt; iSaS n'est [>as un simple et froid me-
morial , une compilation indigesie; c'ect une analyse raisonnee
des evenemens les plus remarqiiables de la periode qu'elle em-
brasse, soil dans la politique , soil dans les sciences et la lille-
ratnre. On y retrouve les debats legislatifs et judiciaires, les
decouvertes les plus importantes , la revue des produils de
I'industrie, des ouv rages scientifiques et litteraires, les travaux
des corps savaiis , etc. Les principaux chapitres sont ouveris
par des introductions qui annoncent la justesse du coup-d'oeil
et le discernement dans le choix des generalites ou des idees
sommaires Nous avons surtout distingue, dans le premier vo-
lume , le preliminaire historique relalif a la situation politique
de la France, par M. L. F. ; u.ne dissertation sur la marque ou
la fletrissure, par M. Pierre Grand ; et , dans le second volume ,
uj6 LIVRES FRANCAIS.
I'introdurtion .'i I'ctat actucl dcs sciences, par M. JibertMov-
TEMONT ; un monioire siir le commerce et son t'lat actucl en
France, par M. Mokeau ue Jonnes ( Voy. ei-dcssiis p. 27 ).
Ij'yJ/i/ice francaise est Icrminee par un clioix de poesies
inedites et p.ir un chapitrc de melanges anccdotiques..
A, M. Z.
91. — * Metnoires stir la guerre de 1809, en Allemagne ,
avec les operations particulieres des corps d'ltalie, de Polognc,
de Saxe, de Naples et de Walcheren ;par le general PEi,ET,etc.
Tomes III et IV. Paris, 1 8^5 el 189,6; Rorel , rue llaulcfeuille.
In-S" de 496-502 pages ; ])rix, 7 fr.
Comme nous aiirons a revenir sur ce precieux monument
liislorique eleve par M. le general Pelet, nous nous hornerons,
quant a present, a une seule citation , prise dans le 'tome IV.
L'auteur lermine ainsi !e recit du giorieux combat du general
Broussier contre le ban de Croalie, Ignace Giulay, comman-
dant-general des troupes deTAutriclie dans les parties mt'-
ridionales de cet empire : « Nos biaves prirent a rennemi
/|5o hommes; 1200 de ses morls furent comptes sur le champ
de bataille. Le S/i""" perdit 260 hommes. Quel coeur francais
peut rester froid au recit de ces hauts fails! Napoleon donna
au 84"'^ la plus belle des recompenses ; il fit inscrire sur les
drapeaux et sur I'aigle : Un contre dix. Qu'eles-vous devenus ,
regiment, inscription, nun)ero ? Le 84""^, comme le 32""^, le
57™', le 43™"... avaient ainsi recu la tache de vaincre toujours,
et ils la remi)lireiit dans toutes les campagHes : la France devait-
olle etrc desheritee de tant de gloires , pour leur voir succcder
d'insignifians noms de legions! » F.
92". — * Tableau de la Grecc en 1825 . on Recit des voyages
de M. J. Emerson et du comtePECcHio ; traduit de I'anglais par
Jean Cohen. Paris, 1826 ; Alexis Eymery. Ir-8° de 464 pages ;
prix , 6 fr.
M. Emerson arriva en Grece, le 23 mars 1825, et en re-
partit, le 2 aoiit de la meme annee ; son sejour fiU done seu-
leinent de quatre mois : terns bien court jjour juger un pays et
ses habitans. Envoye par le Couiite anglais, dans le but , jc
crois , de surveiller la remise et I'emjjloi des fonds resultans
de I'emprunt, le voyageur anglais seuible avoir concu d'a-
vance des preventions pen favorables aux Grecs. La froideur
glaciale de ses jugemens et de ses impressions lient evldem-
nient a une preoccupation de vanite nationale. M. F^merson
n'est occupe en Grece que de la snprematie de TAngleterre :
les intrigues qui tendent a livrer les deslinees des Hellenes a la
fucrcidesministres de la Grandc-Brctagne liai paraissentdigncs
SCIENCES MORALES. 197
d'eloges. II ne volt iVcspoir pour la Grece que dans une depen-
dance presque absolue de cette puissance. II cberche la civili-
sation dans un pays, ou les vertus et les vices sortent de nos
etroiles limites, et semontrent gigantesques ; oii le plus rare,
comme le ])lus admirable heroisnie est mis chaqne jour en pra-
tique par des liommes qui n'en connaissent pas la iheorie , ni
merac le nom. La, on ne parle pas de la patrie; mais on meurt
pour elle : on n'afiichc pas le fanntisme ; mais on consent a de-
venlr martyr, philot que de traliir sa foi : la, tout ce qui est
noble el grand, est resle simple; et accoulumes an charlata-
nisme de nos vertus de parade, nous ne comprcnons pas ce
nouvel ordre de clioses, et nous le jugeons avec nos prejiigcs.
Ainsi, avant de dire avec details que partout il a ete accueilii
de la maniere !a plus cordlaleet la plus affectueuse, M. Emer-
son assure que c'esl a lort que Ton vante I'liospitalite des Grecs.
La menie contradiction , cntre ses reflexions et les fails qu'il
cite, se retrouve dans viugt cndroits. On se lieurtea cliaque
instant contre I'opinlon qu'il s'etait formee d'avance, el qui
est raide et immuable ; car il raconte lout ce qui peut demenlir
ses idces , sans se doparlir d'une seule. II faut au moins lui sa-
volr gre de son jjcu dc logique, qui permet aux lecteurs de
s'eclairer, et de rectifier d'eux-memes les erreurs (|u'il vou-
drait leur faire partager. En parcourant tous les ouvrages
ecrils sur la Grece, depuis sa regeneration, par ceux qui font
visitce, on esl douloureuscjuent frappe du pcu de jusfice et
d'impartialile qu'on y rencontre. Le sentiment dc sa propre
supcriorite , un superbe dedain pour tons ceux qui ne lui res-
semblent pas, ou qui ne suivent pas ?es conseils, dominent
Irop souvent dans rauteur.ct rendent son esprit peu acces-
sible a la verile. Lorsqu'il n"y avail en Grece que des anliquites
mortes a ex])lorer , c'etait relile des nations qui s'y rendait , et
des ouvrages pleins de raison , de science et de sagesse ctaieut
les fruits de ces voyages. Maintenant que ce sont des liommes
qu'il s'agit de voir et de secourir , on ne nous dorine que des
relations de querelles parliculiercs, de^ commentaires dicles
parde pelits interels, et dcdegouianles intrigues. Esperonsquc
ccla clinngcra, el (jue ceux qui agissent aujourd'hui plus ulile-
meni]»our la Grece , nous la peiiulronl un jour sous ses veri-
tables couieurs.
Outre les erreurs de jugcnicnt, I'ouvrage de M. Emerson
CM coiitient pliisieuis aulres assez graves sur les fails, el qui
ont ete relevees ])ar le comte Alerino Palma , dans sa justifica-
tion dc la Greco, ])ijbliee dernieremenl a Londres sous le litre
dc <; Greece vindicated. >' { Vnyez i?cc. Eric. , t. x^x , p. 1 ly].
198 LIVRES FRAiXCA-lS.
Entre aulics choses, M. Emerson accuse ])Ositiveineiil le gou-
vernemeiit grec d'avoir fait perir .secretement Odyssee <luns
sa prison, et il n'en npporie pour prcuve que des on dit ft
des sonpcons. Le comte yVlerino Falnia rile un trait qui , sil
no dement pas directenient cette Iraliisori , permet du moins
tie ia revo(|uer en doiite. « Je jjuis affirincr , dil-il, qii'iiii
homme resolu a tout offrit aux inembres du gouvernemcnt do
se charger, moyennant une recompense, d'empoisonner Co-
locotroni et ses cainarades dans leur prison d'Hydra ; mais i!s
repousseretit avec horreur ce miserable et son projet ; et, quoi-
que ce crime les eut debnrrasses de cenx dont la vengeance
etait le plus a redoutorpotir eux, ils repondirent que c'ctait au
glaive de la justice, et non au poignard d'nn assa'.sin , (]u'il>
remeitaient lenr cause. »
On .1 joint, a la suite du journal de M. Emerson, une lr;i-
duction du voyage en Grece du coinle Pecchio. C'est un ta-
bleau pittoresqup, anime et fidele decette belle contree et dc
ses habitans. On y veil figurer tour a tour presrpie lous les
hcros grecs, et d'une manierc digriede leurs exploits et de leurs
noms. Tout le rocit a un grand caractere de veritc ; et c'est
sans contredil ce que j'ai lu de jilus interessant panni les ou-
vrages qui ont peintia Grece en iSaS. L. Sw — B.
^3. — * Lettres sur la Grece, notes et chants populaires ,
extraits du porlejeuille du colonel Voutier. Paris, 1826;
Firmin Dldot. In-S" de xxx et 224 pages ; prix , 5 fr., au profit
des Grecs.
Tous ceux (jui s'intriessent a la dcstinee d'une nation aussi
malheurcuse nu'elle est etonnante p;ir son courage, ont re -
marque, parmi les nonibreux ecrits dont elle a ele I'Dbjet, les
memoires publics en i823 yat le colonel Voutier. L'un de nos
plus celebies collaborateuis , M. de Sisniondi, a conipris ccs
memoires dans la Revue des principaux ouvragessur la Grece,
dont il a enrichi notre recueil ( Voy. Rev. Ear.., f. xxvi , p. 38i
ot 7o3 , et t. xx^ii, p. 6x). En faisant i'eloge du zele de I'au-
teur pour tine noble cause , en cilant son ouvragc comme plein
d'interet et d'agrcment, M. de Sisrnondi n'a point dissiinule
les doutes qui s'cleverent sur rexacfitiide des notions que ren-
t'erroe ce livre, doutes que semblaient confirmer les critiqi:es
de M. Maxime R^ybaud , eniule du colonel Voutier, comme
guerrier philhellene, et comine hislorieii des Grecs. Notre col-
laboratciir n'a pi)int cru les fails assez ^claircis pour prononcer
sur les reproches adresses a M. Voutier. Le recueil dont nous
annoncons la publication a pour ibut dc jirouver la vcracite de
I'auleur dans son premier recit , et de doniier de nouveaiix
SCIENCES MORALES. 199
details sur les evenemens de 1824, pendant son second sejour
en Grece.
Les services signales que I'auteur a rendus aux Grecs sont
attestes par les pieces imprimces a la suite de ses leitres : la
j)liipart de celles-ci sont adressees a nne aimable pliilhellene,
jjme R »»*, En laisant courir sa plume sans pretention,
M. Vouiier raconte les faits importans dont il a ete le temoin.
Les traits qui caracteriscnt le mieux rheroisme des Grecs et
la barbarie de leurs adversaires , I'orgueil et la durele de quel-
ques puissances chreliennes, presque aussi redoutables aux
Grecs que leurs feroces enneinis , sont d'autant plus frappans
qu'iis sont narros avec sim])licile. L'auteur ne dissiraule point
les defaiits des Grecs, I'insouciance, une confiance quelquefois
aveiigle, leurs divisions, I'aviditf- de quelques chefs. Mais le
dcvouement, le courage, les malhenrs des Hellenes etlasaintele
de leur cause font tout oublier. On Irouve dans ces letlres des
details curieux sur lord Byron et le colonel Stanhope. On ap-
prend avec peine que , inalgre leur zcie pour la cause des Gi ecs,
la prodigalite du premier et les preventions du second ont beau-
coup nui a cette cause. C'est lics-probablement aux lenteurs
qu'eprouverent les versemen.s de I'emprunt grec, lenteurs oc-
casionnees par les obstacles qu'opposait le colonel Slanhope,
qu'il faut attribuer les desastres de 1824, la perte d'ljjsara et
de Cassos, et les suites faclieuses de ces premiers malheurs.
La lecture de ce recueil offre nn interet trcs-vif. L'epigMphe
choisie par I'aulenr est liree des conversations de lord B>Ton :
« Je ferais monnayer mon cceur pour secourir la malheureuse
Grece. » A. de V.
94. — Missolonghi n'est plus ! Appel aux amis des Grecs ;
par Camille Paganel. Paris, 1826; A. Desaugcs, rue Jacob,
n" 5. In-32 de 4o pages; prix , 26 c. au profit des Grecs.
CV'tait bien a l'auteur du Tombeau de Marcos Botzaris (Voy.
Rev. Enc, t. sxix , p. 24O T^'i' "PP^''^^''^''^*' '■^^•"^'' *^^''*^'^"
veau I'indignation el la pilie de I'Enrope , a la vue de I'affreuse
destinee de Missolonghi. Dans cet appel aux Philhellenes, M. C.
Paganelleur offrea la foisun plaidoyer, fort de raison, enfaveur
de la cause (lu'iU ont cnibrassee, et des tableaux ou il ])eint tour
a tour I'admirable h^roisme des Grecs , I'horrible barbarie des
Musiilmans, et la cruelle indifference des gouvernemens de la
chreliente. Ils'atfache ensuilea ranimer leurs esperances par des
considerations qui reposent sur des calculs politiques dont la
certitude est rigoureuse. « L'cmpire tnrc, dil-il, porte en lui
un germe de inort. II est frappe au coeur. Sa place elait naar-
quee en Asie ; il s'est jete sur I'Euiope : I'Europe lui a ete fatale.
200 LIVRES FRANCA.I,S.
11 se Jcballra quelque terns encore , pour aller s'eteindre dans
son repaire primitif : ses derniers inomens sont I'agonie d'linc
bete feroce. » Enfin, il les exliorle partout avecchaleur a per-
severer dans leur genereux devoueraeiit. O.
g5. — * Biogruphie universclle et portative dcs contempo-
rains , on Dictionnaire historiqtie des liomraes celebres do tou-
tes les nations , morts et vivans, par uiie Societe de publicistes,
de Ic'gislateurs , d'hommcs de lettres, d'artistes, de mililaires
et d'anciens inagislrats; en un seul volume in-8° , orne de 35o
portraits, i"^^, a" et 3^ livraisons. Paris, 1826; au bureau de
la Biograpliie, rue St-Andre-des-Arfs , n° 65 , pres le passage
du Commerce; prix du cahier, 1 iv. 5o c. L'ouvrage entier sur
papier velin satme se composera de 24 livraisons qui paraitront
de 1 5 en 1 5 jours.
Si nous etions appeles a dire notre avis en general sur ces
biographies des contemporains dont la librairie est comme
inondee, nous essayerions de fletrir cc genre de composition.
Nous signalames des i8i5 la premiere biographic des horames
vivans comme un dictionnaire 60/2 iiconsuLter par des proscrip-
teurs. II n'est pcut-ttre jamais entre didce plus immorale dans
une t^le humaine , que celle de tracer, par ordre ulphabetique,
I'histoire des hommes vivans. Le Moni'eur n'existait- il pas
pour mettre en coiitradiclion avec elles-mcines la plupart des
personnes qui ont eu le nialheur d'accjuerir une celebrite quel-
conque , et parmi lesquelles un si petit nombre neredoutepas
les investigations? L'abus de lels livres a ete porte au dernier
exces; on a vu des ecrivains s'eriger en tribunal pour juger
leursiecle, et faisant une operation de commerce del'espece de
raagistrature qu'ils s'claient arrogee , abandonner a d'obscurs
plumitifs le soin de pronoiicer les sentences que semblaient
valider des noms environnes d'une certaine celebrite; les au-
teurs se prodiguaienl les uns aux autres d'autant plus d'encens
qu'ils se le reservaientexclusivement. L'histoirc qui consacrera
quelques-unes de ses pages a divers auteurs de Biographies
qu'on ne doit cependant pas confondre avec le vulgairc des
ecrivains, ne prendra probablement pas ce qn'elle en devra
dire dans les articles ou nous les \oyons se congratuler mutuel-
lement sans la moindre pudeur ; elleremarquera, au coalraire,
combien ils furent coupables en pretant I'autorile de leurs noms
a des compilations de faits hasardes , d'imputalions souvent
odieuses, de louangcs ridicules el de calomnies atroces, calom-
nies contre lesquelles les viclimes de quelque redacleur subal-
terne n'avaient memepas la I'aculte de rcclamer. Les premiers
speculateurs en Biographic, ont ouvert la harricre a cctte mul-
SCIENCES MORALES. 201
tilude de zoiles que Ton voit maintennnt atlaquer toute per-
sontie que sa position met en evidence atiu de se faire payer Te-
logc, le silence, ou rneme I'injure. Ce sera I'une des singularites
de noire cpoque, qu'un folliculaire ait pu dire au savant, a
I'homme d'etat, au militaire, a I'arliste, au poete, a I'acteur :
Yous vous abonnercz a ma biogranhie , ou a mon journal ; si-
non vous y serez dechire touslesjoursetpour toujours. II n'est
pas moins etrange que Ics antagonistes de la liberie de !a presse
n'aient jamais argue des Biographies et des articles de certains
petits journaux pour faire ressortir le plus grand abus de cette
precieuse liberie. Quoi qu'il en soit, pnisqu'il est desormais recu
que chacun pent de son vivants'etablirle Minos, I'Eaque ou le
llhadamantbe de I'epoque ; on doit convenir qu'entre tous les
juges biographiques qui nous citent a leur tribunal, ceux dont
nousannonconsl'ouvrageparaissent circles plus consciencieiix.
lis le sont d'abord, quant au formal de leur livre, parfaite-
ment bien imprime , compacle dans le sens le plus honorable du
mot, contenant une c|uantite de matieres presque effrayanle,
et dont chaque cahler equivaut a la valeur d'un volume ordi-
naire. On concoit que, d'apres leur plan, les articles qui al-
longent les vingt-cinq ou trente volumes de leurs predecesseurs
pourront rentrer dans un seul volume d'un format beau,
commode et facile a lire. On doit encore cette justice aux
biographes anonymes dont nous annoncons le livre, que cc
n'est point pour dechirer impunement qu'ils n'ontpasproclamc
leurs noms; ils montrent juscju'ici beauconp d'impartialito et
de raison; ils sont concis sans eire sees, obligeans sans flagor-
nerle, ou severes sans cruaute. Ils citent une multitude de fails
exposes avec lucidite , et laissent au lecteur le soin des re-
ilexior.s. Un grand nombre d'articles sur des etrangers rec-
lifient autant d'erreurs commises par les biographes precedens ;
quelles que soient les opinions des personnes dont riiistoirc
est tracee, ces personnes sont jugees avec indulgence, lorscju'll
est manifeste qu'elles agirent par conviction. La page 208 arrive
au nom de la ctlebre comtesse de Balbi dont la notice est fort
curieuse; ainsi, Ton peut esperer que les editeurs tiendront
leurs engagemens et ne depasseront que peu ou point le nom-
bre de livraisons qti'ils ont promis. B. de St. V.
96. — * Repertoire universel, historique , biographique des
feinmes celebres , mortes ou vivantes , qui se sont fait remar-
ciuer dans toutes les nations par des vertus, du genie , du nic-
rite, du talent pour les sciences et pour les arts , par des aclcs
de sensibilite , de courage , d'heroisme , dcs'nialheiirs , des er-
reurs, des galanteries, des vices, etc., dcpuii les terns les jilus
rccult'5 jusqu'a nos jours ; par uiu; Socivtc dc gens de kttres ,
aoa LIVRES FRANCAIS.
auteurs du Dtctionnairc universel ; public par L.-P. Premiere
Uvraison ABAART. Paris, 1826; AchiileDesauges, libraire ,
rue Jacob, n" 5. In-8" de viii et a/Jopages. — Cel ouvrage for-
mera 7 vol. in - 8° publics en 14 livraisons. Les personnes qui
souscriront nvant la publication de la 4""') paieront chaque li-
vraison /i fr. et 4 fr. 76 c. par la poste. De plus , elles recevront
gratis les 7'"' et 1 j""^ livraisons. Quant aux non souscripteurs,
lis ne jouiroiit pas de ce dernier avanlage , et chaque livraison
leur coiitera 4 fr. 5o c. el 5 fr. aS c. par la poste.
« Depnis i7')9, cinq oiivrages (i) seulement ont rendu uri
hommage special a un sexe (|ui fait la gloire de la societe, au-
taut (ju'il en fait le bonheur. Encore chacun des auteurs, avare
dans son choix , ne fait-il mention que d'un petit nombre de
fcmmes dont les noins se sont fait remarqner dans la lillera-
ture. Cependant , combicn de noms depuis plus d'un demi-
siecle merilent d'occuper nne place dans I'histoire !... Notre
Repertoire universel comprend les feniraes des nations et des
tems les plus recules, celles des epoques et des nations con-
temporaines qui ont obtenu ou qui merilent un genre qnel-
conque de celebrile. » ( Avertissemcnt, p. i. ) Parrai les noms
les plus connns , qui se trouvent compris dans la premiere li-
vraison, on remarque ceux A' Anne, soeurde Pygmalion et de
Didon , A'Andromaque , des deux 4grippine , I'une epouse de
Germanicus, I'autre mere et victime de Neron ; ceux d! Anne
de Bretagne et iV Anne d' Atitriche , reincs de France, d'Anne
Iwanoiva , imperafrice de Russie, A' Anne { lille de Jacques II )
reine d'Anglcterre , A' Agnes Sorel, de Marie Alacoque , de
Sophie A mould , etc. , etc.
Un style simple, olair et rapide; ['exactitude dans le choix
des fails, I'imparlialite dans les jugemens, telles soni les condi-
tions necessairos au succes d'un dictionnaire biographique. En
les remplissant, le Repertoire universel prendra place parmi ces
recueils utiles ou I'historien va puiser ses materiaux, et le pu-
blic d'interessantes lectures. C. P.
97. — * Fie de Louis de Berton de Crillori des Balhes , sur-
nomnie le brave Crili.on , suivies de notes historiques et criti-
(i) « Dictionii. histor. portatif des femtnes ceUbres, par deLa.(;roix, de
Compiegne. Paris, 1769. a vol. — Vies des femmes Ulustres el celebres
de France. Paris, 1768. 5 vol. in-12. — Hisloire I'uteraire des femmes
francaises , par I'abbe de La. Porte. Paris, 1769. — W^^ Briquet a
public, en 1804, iin volume, sons le litre de Dictionnaire biographique
des Francaises el des etrnngeres naturalisees en France, conniies pnr
leiirs errits. > (Note ties auleurs du Repertoire. )
A
SCIENCES MORALES. 3o3
qucs. T. IIF. Paris, 1826; A. Duponl et Roret. ]n-8° de vii-
424 pages; prix, 6 fr.(voy. Re\>. Enc, t. xxviii, p. 886 ).
Plus (I'un lecteiir faxera peiit-^tre de prolixite )e savant edi-
teur de la Fie de Crillon , en le voyant ajouter un iroisieme
volume de notes a celte biograpliic C|ui n'a pas plus de 80 pages
d'inij)ression. Mais ce dcfaut , que J'on repioche souvent avec
justice aux comnientaleurs , est ici amplement rachete ])ar I'im-
portance des malieres , suivant I'opinion de M. Fortia d'Urban .
quepartageront beaucoup d'hommes instruits. Nousavons fait
■ remarqiier en annoncant les deux premiers volumes, qu'il ne
•se livre point a ccs futiles discussions trop communes dans les
travaux de ce genre, inais (|u'il eclairdit , avec un rare savoir
et une critique habile, beaucoup de points encore obscurs de
I'histoirc ancienne et moderne. Dans ce tome troisieme, il passe
de I'erudition a la science ; apres avoir acheve I'histoire des
duels jusqu'a la morl de Charles IX, il arrive a la note log,
concernant Alexandre; et la , il declare en ces termes c|u'il vu
cntrer dans une nouvelle carriere: « Alexandre, surnomme le
Grand , nierite sous tous les rapports de fixer notre attention ;
mais, comme le tems auquel il a vecu est deja bien loin de
nous , il a donne lieu a des disputes qui ne sont pas encore ter-
min^es, et qui exigent des connaissances dans la science des
tems, connue sousle nom Ae chronologic. C'est d'elleque nous
allons nous occuper. On nous pardonnera la longueur de cette
note en faveur de son importance. » Cette note, qui remplit
seule les deux tiers aii moins du volume, se compose de trnites,
divises en uombreux chapilres, snr la chronologie , la cosrno-
logie , la geographic , I' astronomic , etc., enfin , d'une Iiistoire
raisonnee des cometes qui ont paru jusqu'a nos jours, mor-
ceaux precieiix sans dotite par la curiosite de beaucoup de de-
tails, niais apres lesqiiels I'auteur s'arrete coraine apres une
exposition puremeut preparatoire, sans rien conclure touchant
les disputes relatives a la fixation cerfaine de I'epoque oil vecut
Alexandre. Nous attendons le tome quatrieme pour avoir, a
cet egard , une solution [)Ositive. P.
98. — Eloge historique de M. Voiity de la TouR,ancien
conseiller au parlement de Diipn, ancien premier president
de la Cour royale de Lyon, etc., prononce a Y Academic de
Lyonle 29 mai 1826, par ff onore Tokomb'ert. Lyon, 1826;
Perrin. In-8" de 38 pages.
M. Vouty fut un vertueux magistrat, dans des tems difficiies.
Son panegyriste est conuu par des ouvrages estlraes sur la mo-
rale et la politique. L'eloge est ecrit avec talent, et cnntient
des recits anecdotiques d'un veritable interet. On aime a re-
204 LIVRES FRANCOIS.
trouver ici cc moL d'un illustie ccrivnin, juafcuicnt apjjliqutii
M. Vouty : II lui a toiijottrs mei/iquc, pour reussir, une passion
ct un vice : Canibition ct I'hypociisie. L.
99. — * Lettres inedites de M"" dc Maintenon ctde M"" la
princesse dks Ursins. Paris, 1826. Bossange frores , quai Vol-
taire, 11" II. 4 vol. in-8"i prlx , 28 f'r.
II serait injuste de coiifondre ce recueil avec lant de vicille-
ries, malencontreusement exhumees, donl on nous inoiide dc
toutes parts. La correspondance etablie , pendant dix ans,
entre la confidcnte de tous les secrets de Louis XIV , et la prin--
cesse placee par ellc a la cour de Madrid pour y joucr , noii
sous le inanteau, mais sous la cornette, Ic role de premier nii-
nistre de Philippe V, pent servir a faire mieux connnitre I'e-
poque la plus inlcressante de I'liisloire du grand roi,repoque
de ses revers et deson veritable courage. Ce n'est point le ta-
bleau des evenenaens qu'II faul chercher dans les leltres de nos
deux dames diploraates ; mais la peinture de la sensation que
produisaient les evcnemens sur la cour de Versailles et sur la
cour d'Aranjuez, les intrigues qui en preparerent quclques-
uns, les ressourccs et les esperances, la p^nurie et lescrainles
des deux cabinets, I'esprit des courtisans et celui du jteuple
dontla voix penetrc eiifindans les palais des grands, (juandla
peurs'yestdeja inlroduite.Onpuisera dansles lettres doM""" de
Maintenon une foule de renseignemens instructifs sur I'elat on
se trouvaitla France lorsque, apres trenteannecs de victoircs,
elle n'apprenait plus que des dcfaites, elle voyait la famine do-
peupler ses hameaux, et tant de morls preraaturees couvrirdc
deuil eette familje royale si long-lems environnee de fetes. L'a-
mie de Louis XIV raconle en detail , avec une finesse d'csprit
pen commune, cette crise memorable que tant d'ecrivains ont
relracee, et tjui est jieinte surtout avec tant d'eloquencc et
de profondeur dans le Tableau litteraire de la France an
xviii* sLcclc par M. Victoria F'abre. La princesse des Ursins
nous doune le rc'cit, moins important , mais peut-ctre plus
dramatique, des troubles dc la cour de Philippe. Le lectcur
suit avec die la rcine d'Espagne forcce de quitter Madrid me-
nace [)ar les Porlugais, manuuaiit de lit dans sa route, ct nc
subvcnant aux frais du voyage qu'avec de I'argcnt cmprunte.
II souril de la mauvaise humeur de la princes'^c coiilrc cetle
infdine Catalogue , oil , dit-elle, on r/e pcutfairc unjias sans
trouver des bnissons plei/is d'une canaille enragce , ex]ires«ions
qu'on croirait exlraites de quelquc bulieiin de 1809. Bientot ,
i! voif , au lieu de cottc canaille, io bon pciij)le de Madriil en
toi.'rcr Irurs sonvcrains de rctour, S'il i'aiit en cror.c M""" des
SCIENCES MORALES. ao5
Ursins, « I,es uns pleuraient de joie, et demandaient au ciel
que LL. MM. eussent cinquante enfans qui durasscnt plus que
le monde; les autres riaient et faisaient des grimaces tres-ridi-
cules ; il y en cut de si transportcs envoyantJa reine, qu'ils
poussorent la folic jusqu'a lui dire qu'ils Tairaaient plus que
DIeu.« '
Les deux auteurs de ces lettresavaient dans I'esprit de la jus-
tcsse et de la portee; leur caractere ne inanquait ni de force
ni d'energie. Seulement, on remarque en general , dans leur
maniere d'envisager I'avenir, une difference qui rend plus pi-
quante la lecture deleur correspondance. La princesseselaisse
facilementalleraresperance. M""^^ de Maintenonse defend avec
])eine du desespoir. Cette sorte d'opposilion est expriniee avec
bonheur dans ces lignes de ia foudatrice de Saint-Cyr : « Vous
nous voyez bien des troupes, beaucoup d'argent, et un nombre
suflisant d'excelleus generaux; vous voyez les ennemls embar-
rasses et las de la guerre : malheur a ceux qui voient tout le
contraire! — Vous voyez rarcliiduc se promenant aubord de
ia mer, au mois de Janvier, dims le dessein d'accoulunier les
Catalans a une promenade qui lemette en ctat de se sauver par
quelque miserable barque, qui pourrait bien perir; je le vois
ailer vers la mer, pour apercevoir des premiers une puissante
flolte qui lui amene quarante mille hommes commandes par
M. le prince Eugene. — Vous voyez le comte d'Oropesa mort ;
nous avons bien oui dire qu'on a jete quelques pierres dans
son carrosse. — Vous voyez une paix glorieuse qui nous meltra
tous en repos et en joie, et j'en crains une plus triste que la
guerre. Voyez aprcs tout cela, Madame, si je profite de toules
les railleries dont la reine ct vous m'aceablez. »
II y a, cependant, coninie on le pense bien , un pen d'esa-
geralion dans ce double portrait. Les chateaux en Espagne de
la princesse ne sont pas toujours si brillans, et la inelancolie
de sa protectrice n'est pas souvent si ombrngeuse. Mais il n'en
est pas moins tres-curieux de comparer leurs previsions et
leui's calculs opposes. Cette comparaison eut ete plus facile et
plus agreable, je crois, si, au lieu de reunird'un cote toutes
leslettres de M""= deMaintenon, et de I'autre, toutes celles de
la princesse, les editeurs eussent donne alternalivemeiit une
epUre de chacune de ces dames. II me semble que c'etait la ma-
niere la plus convenable de disposer le recueit. Mais, telqu'il
est , il devrait avoir du succes , d'autant plus qu'on y trouve ,
particulierement dans les lettres de M""= de Maintenon, des
modelcs du style epistolaire. T. R.
100. — Question d'etat civil et historique : Napoleon Buona-
^o6 UVRES FRANCAIS.
pane est-il nc Francais? par M. Ec.k.aru Paris , 1826; Everat.
In-8" de 3i pages; prix, i fi. fi.
Ly veritable daii^ de la naissanue de Napoleon Bonaparte
n'a d'aulre importance que celle qui s'altaclie aux inoindres
particularites de la vie d'un homme dont la renoiiunee a oc-
cupe le monde pendant un quart de siecle ; tar 11 importe fort
pen a la France et a Bonaparte, <ju'il soit ne avant ou apres
la reunion de la Corse au royauine. li est bien evident que,
I)ar le fait de la reunion, tout citoyen corse est devenu sujet
du roi de France, et Francais, a moins qu'il n'ait fait acte de
soumissioii a queiqu'autie prince, et ne se soit naturalise dans
une autre contree. II n'en esi pas ainsi de Bonaparte; la date
de sa naissance nc peul rien clian^jer a son etat civique. Quoi
fju'il en soit, I'autcur prouve, d'une maniere ([ui nous semble
a pen pres auihenlique, que la veritable dale est bien celle
qui a ete long-tenis reconnue ofriciellement, le i5 aout 1769,
et non le 5 fevrier 1768, date que plusiei-rs persoiines et I'au-
teur luinieme, aliirs mal informes, avaient voulu faire preva-
loir. Cette brochure donne ausii sur la genealogie de N. Bona-
parte, sur I'age de Joseiiliine et sur I'acte de leur mariage ,
des renseignemens (jui ne nianqucnt pas d'interet. Une note
poric que cot ecrit n'a cle tire qu'a cent esemplaires.
A. M.
101. — * Mcmoire pour M. le marcchal ( Victor j nuc de
Bellunk, sur les marches Ouvrard. Paris, juiilet 1826. Iii-8"
de 180 pages, avec tableau. Trouve, in>pi imeiir-libraii e, rue
Notre-! )ar!ie-(le>-Victoires, n" 16; prix, 4 fr.
Quand toiites lespersonnes qui ont pris part aux luarclics de
Bayonne s'accusent mutuellement ou publient des inemoires
jiistificalifs ; I'Europe attentive s'etoiuiait que M. le duo de
Bellune, minisire de la guerre a cette epoque, demeurat muet.
II rompt le silence et publie une brochure tres-remarquable
par la force des raisonneinens qui s'y enchainent, et par le
style propre a faire ptnetrer la couviction dans I'espiit des
Jecteurs de bonne foi. Tout cet ecrit est dans ce passage ;
«. Cerles, je I'avouerai , dit son illustre auteur, lorscju'avec
un zele dont j'ai peut-etre droit de parier; lorsqu'avec des
soins assidus et passionnes je preparais I'expedition militaire
qui devait sauver I'Espagne , je ne soupconnais guere que d'a-
vides spcculateurs me contesteraient bientot i'honneur d'avoir
scrvi I'etal ; (|aeje verrais s'accrediter d'injustes preventions;
que des preparatifs, dont toute la France ful temoin , seraient
revoqii^s en dome, el que ['opinion publique finirait peul-
ttre par flotter incerlaine entre mot et un traitant dont toute
SCIENCES MORALES — LITTERATURE. 207
I'habilete fut de se faire livrer s;ins iiiesiire coinme sans garaniie
)es Irosors el les magjisins de Petal... Toutefois , je voulais me
taire sur les inarches de Bayonne, commo snr lis transactiuri!*
de Victoria. » Fort de sa conscience, le marechal ajoute qu'il
se fut estime lieurfux de n'avoir pas h rendre plus difficile la
position dex prei'enus , parini lesquels il pourrail relrouycr d'an-
ciens cornpaf^noris d'annes. La natuie de la Revue Encyclopv-
dique ne nous perinet pas d'entrer dans de jjIus aniples details
sur 1112 menioire qui nous commande la confiance la plus com-
plete, parce qtie I'auleur entre en matiere, en emeltant celle
incontestable verite : « Je puis au moins faire remarqner que
les homines (pii se sont fails mes eniiemis ne me coutestent pas
Thonneur d'avoir seconde les jiensees bienveilLmtes du feu Roi
pour rarmee. » Celui qui signe eel article peut attcsler ee fait :
quand tous les ministres, avant el apres le due de Bellune ,
ont repousse les justes reclamations qu'il adressait au gouver-
neinent, conjoinlement avec son camarade le colonel Blarbot ,
le due de Beliune, seul, se ressouvint que nous avions niarche
sous les niemes di'apeaux , el il nous fit lendre, mal<;re la des-
potique obstinalion deses bureiiux, iine partie de la justice qtii
nous etaitdue. B. df, Sai.nt Vincent.
Litleralurc.
\oi. — * Encyclopcdie monerne , ou Dictionnaire abrege
des sciences, des Ictlres et des arts, avec V indication des ou-
vrages oil les divers siijets sont developpes et approj'ondis ; par
M. CouRTiN, ancien magistral , rt par une Socicte de gens de
lettres. T. VJIL com-con. Paris, 1826. Au bureau de YEncyclo-
pedie moderne , rue Neuve-Saint-Roch, n° il\. In-8° de 583 p.;
prix du vol., 9 fr. (Voy., ci-dessus, Rev. Enc, t. xxx , p. 683.)
Une Encyclopedic est une bibliollieque universelle : un
dictionnaire encyclopediquc serail celte meiiie bibliotheque,
disposee par ordre alphabetique. Si Ton reduisail aux moin-
dres dimensions ])ossibles ce \asle depot des cpnnaissances
bumaines, on aurait I'ouvrage dont nous annoncons le hui-
tieme volume. Le lecieur n'y apercevrail point de lacune, si
ce n'esl celles des sciences menies : on n'y trouverait point
d'erreurs, point de notions incerlaines, ni d'idees vagues,
hasardees; eorome les abreviateurs auraient en snin d'ecarter
le luxe du savoir, ils auraient fait encore plus d'efforts ])our le
montrer pur et libre, debarrasse de tout melange et degage
des entraves qui peuvenl gener sa marche. Les articles ne
paraitraient ni Irop longs, ni irop courts, ct ne le seraient
ao8 IJVRES FRAlVrAIS.
point en cffet. Mais, de coinbien de volumes serait compose
ce dicdonnaire abrege ? on ne i)ounait le savoii- qu'en Ic
terminant. II serait a dcsiier que ronvrage fut Ircs-etendu;
peut-elrc serions-nous etonnes de sa brievele.
Les lecteurs n'exigeront ceitainemcnt point que I'ouvrage
de M. Courtin alteigne la perfection dont nous venons de
parler; on se passerait d'encycloj)edie, si Ton ne pouvait en
avoir qu'a si liaut ptix. Mais , comme I'ouvrage sera juge ,
suivant ropinion que le litre endonne, et les conditions que
ce litre impose aux redacteurs , il est indispensable de ne pas
les perdre de vue un seul instant, dans le cours d'un tiavail
aussi long et d'ane aussi grande importance. Si Ton coniparait
I'ancienne encyclopedic a la moderne , or) en conclurait que
M. Courtin ne serait pas encore fori avance dans son entre-
prise , qu'il lui resterait encore a faire plus que les quatrc
cinqHiemes de ce dictionnaire. II ne s'agit pas d'examiner si
chaque volume contient d'escellens articles, et en grand
nombre; on s'y attend, et cet espoir ne sera jamais dccu : mais
on demandera si rctendue de chaque article est en raison de
son importance relative. Si un seul art s'frnj)are de deux vo-
lumes; si une seule science ne se con ten le pas d'en occuper
trois ou quatre, les autres divisions de nos connaissances,
traitees avec moins de faveur, ou menie chassees de I'espace.
qui leur apparlenait de droit, reclameront, par I'organe des
lecteurs qui les chercheront telles qu'ils les concoivent, et qui
auront peine a les reconnaitrc dans Tetat de mutilation ou elies
seronl reduites. Comme la majeure p;irlie de I'ouvrage est
encore a faire, il ne sera pas inutile d'exprimer avec francliise
Fopinion d'un assez grand nombre de lecteurs sur I'ensendjle
de ce c[ui a deja paru. On y remarque des lacunes qui sont des
omissions; on regrette que pluslcnrs articles soient irop courts
el peu instructifs, et que d'autres annoncent, dans un diction-
naire abrege, I'intention d'etre plus que complet. Cos obser-
vations critiques sont-elles encoie applicables au volume que
nous annoncons? 0«/. Sans iiidiquer specialement d<s omis-
sions, des articles trop courts, cl d'aiitres qu'il eiit laliu res-
treindre , nous avons la certitude cjue les direcleurs de cette
belle entreprise les connaissent, qu'ils oist tie conUaints de
laisser dans leur travail cette sorte d'iniperfection, pour ne pas
rendre leur marcbe trop lente el trop pcnible. Mais le public
qui prend interet a leur ouvrage, puisque c'estpour lui qu'il
est fail, ies aidera volouliers a surmonter les obstacles qui les
arretent; il exprimera ses voeux qui devraietU etre des ordies,
lorsqu^ils sont conformcsa la raison: forts de cet appui, Ies
LITTERATURE. aog
dii'tcteurs obliendronl des reiranchemens, et pourront donner
place a un plus grand norabie d'articles : le livie pourra etre
ouvert plus frequemment, et avec plus de fruit. Nous propo-
sons done avec confiance ceite ligue defensive entre le public
et les direct eurs de V Encyclopcdie inoderne , ligue dont ce que
Ton appelle la republique des letlres n'a peut-eire point encore
vu d'exemple, et qui devrait se renouveler, toules les fois
qu'il s'agirait d'une entreprise d'une grande utilile, et'dont le
succes pourrait etre conipromis par des pretentions, des
exigences ou des inlerets prives. Ferry.
io3. — * Resume de Vhlstoire de la Ulterature italienne ; par
F. Salfi , ancien professeur dans plusieurs universites d'ltalie.
Paris, 1826; Louis .Tanet, libraire, rue Saint-Jacques, n" Sg.
a vol. in-8°; prix, 6 fr.
M. Salfi, qwenousaimonsa compter parminos collaborateurs,
et qui continue VHlstoire Ulteraire de CItalie, comminenceepar
GiNGUENE, a voulu nous donner aussiun precis de I'histoirede
la litterature italienne. Ce travail se fait remarquer par sa
rapldite et par sa precision , el surtout par la maniere impar-
tiale dontTauteur envisagelesdeux ecoles des classiques et des
romantiques(|ui souvent, en outrantleurs pretentions, perdent
de vue les vrais principes du gout et de la raison. Nous consa-
crerons a cet onvrage un exanien plus detaille.
io4- — * OEuvres de Jean Racine , en un seul volunje in-18.
Paris, 1825 ; Jules Andriveau, boulevard des Capuciues, n° 3.
In-i8 de 658 pages avec un portrait; prix, 8 fr.
Nous avons annoncc, lors de leur publication, les premieres
livraisons des OEuvres de Racine enun seul volume (Voy. Rei:
Enc. t.xxvi , ]). 549 )• Maintenant que ce volume est complete ,
nous le signalons a I'attention des voyageurs, des militaires
et de tons ceux qui, par gout ou par necessity, reclierclient
les editions conipactes, et veulent se former une bibliotheque
choisie, portative et economique. A — e.
io5. — *0£'«('/'e.r6?f Gessner. Paris, 1826; Payen, rue Serpen le,
n° i3. 4 ■vol. in-32 , d'envlron 3oo p. chacun, avec un portrait,
et douze gravures au burin ; prix, 1 2 fr et 1 3 fr. par la poste.
II faut n'avoir pas entiercment desespere du gout de notre
siecle pour placer en regard de tant de productions informes
qui semblent attester que noire litterature est tiavaillee par un
pcnible cauchemar, unenouvelle edition des oeuvres de ce bon
Suisse , qui fut a la fois poele , impriraeur , dessinateur et gra-
veur. Amant favoris^ de la nature, il lui deroba ses couleurs
pour la peindre, et resia simple et vrai comme elle. On re-
trouve, dans ses Idylles, ses pastorales et ses poemes, ce ca-
T. XXXI. — Juillet 1826. 14
aio LIVRES FRANCAIS.
racterenaifdesproductions de I'ancienne Grcce, que Tart seulne
saurait iiniter et qui nous Iransporte en idee, avec rautenr,daii5
ces jours fabuleux de I'age d'or, dont il avait les vertiis et la
candeur. Heurcux ceux qui, aj)res avoir traverse des jours
oragcus, oil le inonde reel s'est prcsente a leur yeux attristes
sous ua aspect bien different, aiinent a s'oublier avec Gessner,
en revant un naonde cjui n'est pas entierement chimerique et
qui exista du raoins dans son occur! Sa rouse savait tout em-
bellir, et nous en avons tin exemple charmant dans son pocme
Am Premier nai'tgateur , oil sa riante imagination rapporte a
I'amour seul une invention a laqiielie d'auires aulcurs avaicnt
donnc pour mobile la soif de Tor. Si Gessner eut vecu avnnt
Horace, nul doute que le poete laiin ne se fiit empresse d'a-
doptcr cette lieureuse fiction : « II n'cut ])as alors, dit M. Hen-
nequin , dans son Cours de lUteralure ( Voy. Kev. Enc. . t xxv,
p. 73i), revelu d'un triple airain le coeur de celui qui, le
premier, osa, sur une frele barque, s'exposer a la fureur des
flots. >.
M. Aiine Payen a suivi pour son edition la seule qui existe
dans le format in-32 , cclle qu'a publiee le savant bibliographe
M. Renouard; c'est assez dire qu'elle est aussi lidele que com-
plete, et qu'elle merite sous lous les rapports une place dans la
bibliotheque des gens de gout. E. Hereau.
1 06. — Morceaiix c/ioisis de Burns , poete ecossais, traduits
par MM. James Aytoun et J.-B. Mesnird, Paris , 1826 ; Ferra
jeune, rue des Grands-Augustins, n° 23. In-18; prix,i fr. 5oc.
Si les poesies de Burns n'ont pas encore cle iraduites en
francais, malgre I'estime dont elles jouissent en Angleterre,
c'est peut-ctre parce que, rempiies d'expressions qui ne sont
guere en usage que parmi les paysans ecossais, clles ont em-
barrasse les traducteurs. Le meilleur moyen de vaincre la dif-
Cculte qu'on eprouvait a les transporter dans notre langue, etait
sans doute qii'un Ecossais et un Francais se reunissent pour
les traduire. C'est ce qu'ont fait MM. Aytoun et Mesnaid. L'c-
diteur nous apprend qu'ils oht traduit tous les ecrits de ce
poete, et que le recucil complet paraitra bientol , si le public
accueille favorablement les morceaux choisis que nous annon-
cons. Nous commencerons par reraarquei' que les Francais
feraient peut-elre mieux de lire leurs vtritables poetes, de se
procurer, par exemple , les oeuvres de Lebrun , dont I'edition,
donnee il y a quinze ans, n'est pas encore epuisee, que de se
nourrir de livres etrangers, dont le raerile, souvent bien Infe-
rieur a celui de plusieurs ouvragcs ecrits en France, ne peut
inline passer tout entier clans notre langue. Mais, apres cette
i
LITTERATURE. 7.1%
profession de foi, nous «Urons volonlicrs que, si le gout pour
les auteurs .inglaii continue, Burns parait etre I'un de ceux
dont la connaissance peut faire le plus de plaisir, et que les
raoiccaux publies jiar MM. Aytoun et Mesnard sc fontremar-
quer par le bonlieur avec lequel la tourniire et I'expression
poetiques sont rendues. Nut doule que , si ces ecrivalns veulent
revoir avec soin leur travail pour en faire disparaitre quelques
mots impropres, quelques con'itructip'iis vicieuses, il ne soit
bien superieuraplusicurs traductions qui ontoblenu beaucoup
dc succes. Parmi les pieces ciu'ih donnent mainlenant au pu-
blic, il y en deux charraantes, Tarn O'S/ianter et Le Retour
dusoldat. A.
107. — Onf^uentpnur la hrulure , ])oenie par Barrier d'Au-
couRT , de I'Acadeiuie francaise. Deuxieme edition. Paris,
1826; Touquet. In-32 de 128 pages; prix , 5o c.
La resurrection des jcsuiles fait revivre uue multitude d'ou-
vrages qui , depositaires des iniquites de cet ordre celebre,
dormaient ensevelis dans la poudre des bibliotheques. Tel est
ce poeme en onze chants, ou Barbier d'Aucourt raccuse dla-
voir allume le feu de vanite, le feu de sedition , le feu d'ava-
rice , le feu dc vengeance, le feu d'impurete. C'est pour por-
ter remcde a tous ces foux tpi'il offre awpnhWc son on quent,
c'est-a-dire son poeme. II est facheux que le style en soit plal
et prosaique d'un bout a I'autre. — Heureusement , I'ouvrage
n'est pas ecrit en vers alexandrins. La legerete du rhyllime de-
guise la pesanleur dc la diction. Plusieurs passages ne sont
m^me pas sans allrait ])our la curiosite. La preface, en forme
de letlre, contient des details inttiressans sur les querelles rc-
ligieuses du xvu™^ siecle. Les notes designcnt beaucoup d'ou-
vrages des jesuites, ou Ton pourra prendre une idee de I'ijnmo-
ralitede leurs doctrines et de I'esprit de violence et d'orgueil
qui les aniiaait. Ch.
108. — Childc Harold aux ruines de Rome, imitation du
poeme de lord Byron; par Jristide Tarry. Paris, 1826; se
vend au profit des Grecs , a la librairie nioderne, passage Vero-
Dodat. Tn-8°; prix, 1 fr. 5o c.
Le poeme de Childe Harold n'a pas encore cte Iraduit en
vers francais ; la difficulle de conserver dans une autre langue
les bcautes de I'original serable avoir arrele nos poetes dans
une si grande entreprise. M. de Lamartine seul a prouve qu"il
savait dignement infer preter lord Byron; par malheur, il n'a
point tente davanlage. Le titre du petit opuscule public par
M. Tarry annoncc que ce jeune auleur n'a i>oint non plus pr^-
tendu traduire I'ceuvre immortelle du poete anglais; mais on
Ill LIVRES FRANCAIS.
m- pout (]ue doniier des ^loges an dessein qu'il a concu de Ic
prendre poar son modcle, ct de reproduire quclques-unes de
ses nobles pensdes. Avec Ini, il revolt la Grece; il s'arrele a
Waterloo, medite sur les ruines de Rome , et porte partoul sa
douleur et son genie.
Trop grand pour se venger et trop fier poor se plaindre;
Ce vers peint toutentier Y Harold de lord Byron; etcetessai
offre plnsieurs passages (]ui ne sont pas uioins heureux ; on y
decouvre de la facillie, du gout, et la promesse d'un veritable
talent. C'esi aux Grecs (jiie M. Tarry a consacre le fruit de son
travail, el c'est iin litre de plus a I'inlerel el aux encourage-
in ens qu'il nierite. N.
109. — Promenades poctiques dans les hospices et hdpitaux
de Paris; dediees a M. le C"^Chaptal; par M. Alhoy. Paris,
1826 ; Trouve. In-8° de xlviij-3a7 p. ; prix, 6 fr.
Ce livre doil avoir un sort conlraire a celui des meilleurs
poemes modernes, oil le fond se fait encore remarquer,
inalgre le luxe des accessoircs : ici I'on pourra consulter
avec fruit les notes et I'iniroduction; on ne lira guere les vers.
Voici quelques-uns des argumens de la deuxieinc promenade
( p. 40 ) - " Placement des enfans a la campagne. — Moyen de
leur procurer des nourrices. — Meneurs sermenles et caution-
nes, charges de ce soin.- — -Visile des nourrices a leur arrivee
dans I'Hospice, etc., etc. » Tout cela peut aniener sans doule
des considerations d'hygiene, et meme de morale, fort utiles;
mais quel poete n'eiit pas echouedevant un pared sujet? E. H.
110. — * Tristan le vojagi'ur, ou la France au XI y^ siecle ;
par M. DE Marchancy. T. V et VI. Paris, 1826; Maurice ct
Urbain-Canel. a vol. iu-8°; prix, 14 fr. ( Voy. Res'. Enc, t. xxvii,
p. 239 et t. xxviu, p. 571).
La mort, qui se joue egalement de nos projets el de nos
esperances, est venue surprendre I'auleur de Tristan, avanl la
publication des deux derniers volumes de cet ouvrage. Ou
potivait craindre qu'il n'eut pas eu le teins de le terminer, et
qu'il ne restat incomplet; car qui eut ose enti'eprendre de iious
en donner la suite? M. de MarcLangy etait du petit nombre
des auteuis modernes qui, comme MM. de Cliateaubriant ,
Beranger et ce Paul-Louis Courier, mort si malheureusemerit ,
onl imprime a leurs productions un cachet original que I'art
ne saurait imiter. En essayant de marcher sur leurs tracts, on
risquera de reproduire et d'exagerer leurs defauts, sans jamais
atteindre leurs qualitcs. C'est done avec un vrai sentiment de
LITTERATURE. ai3
satisfaction que les amis deslettres nationales onl accueilli, au
commencement de I'annee, I'annonce de la prochaine publi-
cation de ces derniers volumes. Leur lecture ne laisse pas douier
que I'auteur n'y ait mis la derniere main. Toulefois, quelques
lignes de points tiennent la place de la fin du cliapltre cvui^
probablement le dernier de I'ouvrage. « L'inutilile des rccher-
clies qui ont ete failes pour trouver la fin de ce chapii.re, qui
devait elre ccUe de I'ouvrage (disent les editeurs), semble
prouver que la subite maladie dont I'auteur a ete atteint est
la seule cause de cette interruption; ef, quoique son intention
sur la nature du denoument ne puisse etre douteusC; notis ne
regrettons pas moins de ii'eu avoir pu recueillir les graces
naives et originates... Au surplus, en comparant ensemble les
derniers chapitres et le sixieme volume avec les preceriens, il
est aise de se convaincre que cette lacune suppose deux ou
trois pages au plus de texte dont nous sommes prives. »
Aujourd'hui que I'auteur de 7>Y,y/«« et de la Gaule poetique
est enire dans cet asile ou toutes les passions viennent
s'eteindre, et devant lequel les inimities doivent cesser, I'opi-
riion peut encore s'asseoir s«r sa tombe et demander conijjte
a riiomrae public de I'eraploi qu'il a fait de son pouvoir; mais
peul-eire sera-t-il permis a la critique litteraire de ne plus
voir en iui q.ue Tecrlvain dont les travaux ont lionore sa pa-
trie , et de Iui departir I'eloge ou le blame , en raison seulement
des beautes ou des defauts qui se rencontrent dans ses pro-
ductions. C'est ce que nous essaierons de faire avec Impar-
lialite, dans une analyse consacree a I'examen des deux
ouvragcs dont nous venons de rapjieler les litres, et qui sont
lies eiroilement par leur sujet et par leur but. E. Heueau.
1 1 r. — * La Bonne faille , ou le Maire et le Jesuitc; par Isi-
dore Lebrun. Paris , 1 826 ; Ponlliieu. 2 vol. in-12 formant en-
semble VIII et 616 pages ; prix , 6 fr.
Le gout du public pour tout ce qui presente des idees posi-
tives, a mis a la mode parmi nousun genre d'ouvrages pour
lequel il faudra bienlot un nouveau nom : je veux parler de ce
roman politique, lei que I'ont concu et execute MM. Picard ,
Lamothe- Langon et les auleurs du Figaro de la Revolution et
du Ministre des finances , qui consiste a representer , sans sor-
tir de la sphere de la vie commune, des evenemens presque
toujours lies a nos institutions, quclquefois meme auient'-s par
ellcs , mais en general peu influens liors d\i cercle qui les voit
naiire. J'ai signale, en rendant compte du Gilblas de la Revolu-
tion (V. Rev.Enc, t. xxiv, p. /,9i.), Ied<5faut capital decegenre,
le manque d'interet. En effet , le but meme que se proposent les.
21 4 LIVRES FRANCAIS.
auteurs , les reduit prcsqiic a faire de Icur narration une cs-
pece d'optique ou viennent se peindre iios lois ct iios cq,utuiTies
avec leurs resultats bons ou manvais, et leur ouvrage devient,
pour ainsi dire , une piece a tiroir oii cliaque chose, bonne en
soi , tient a peine aux autres parties.
Nor.s en avons une nouvelle prcuve dans la Bonne Ville ,
a laquelleje n'ai, d'ailleurs , auoun autre reproclie a faire.
M. Isidore Lebrnn s'etait dcja exerce contre Ics deux ordres
envaliisseurs que Ton comlile aujonrd'luii d'honncurs et dc
biens , dans ses brochures siir le Sacrilep;e , et sur C Emigration
indcmnisee par I'ancicn regime. Aujourd'hui, il rentre en lice
pour combattre les memes cnneniis ; mais il a ];ris un cliamp
plus large : tous les troubles que peuvent introduirc au sein
d'une villc populcuse la coterie jcsuitique et la faction arislo-
cratique naissent comme d'eux-meines dans la Bonne Yille : on
deslitue les pins honnetes gens , les nieilleurs cltoyens; on
poursuit des phiisanterics inriocentes , comme des actes punis-
sables; on cherche a fausser I'esprit public; on prodigue les
revenus publics pour des dcjicnses onoreuses ct inutiles au
peuple: toutes choses que nous voyons arriver journellement,
mais qui, rcunies dans unmeme cadre, appuyees de I'erudi-
tion de I'auteur, qui lui fournit Tine grande quantito d'anec-
dotespeu connues , et soulenurs par uii style toujour* correct,
rapide et spirituel , ont une force <]ue leur fcrait perdre leur
isoleraent. Je n'hesite pas a le direrde tous les ronians poli-
tiques (je me sers de ce mot jusqn'a ce que I'usage en ait in-
dique un autre), que j'ai lu jusqn'a ce jour , la Bonne Ville m'a
paru le plus approcher dubiit.je ne retracte point ce que j'ai
dit plus haut sur le manque d'inieret; mais, ce dtfaut excepte,
et je le crois inherent au genre, et non a I'ouvi'age , il me j)a-
rait difficile de faire mieux queM. Lebrun, malgre un certain
nombre d'invraiscmblanccs, repandiies surtout dansjles delibe-
rations, ou il nous prescnte tous ses orateurs comme etautaussi
instruits que lui sur nos lois et sur la chronique scandaleuse des
derniers regnes. B. J,
1 12. — * Alais ou la vierge de Tenedos , par M°" Adele Da-
MiNois. Paris, 1826; Pigoreau, place St-Germain I'Auxerrois,
n° 21. In-8". Sc vend au profit des Grecs; prix, 3 fr.
Non loin de I'Hellespont est une petite ile qui lire son nom
du rol Tenes, mais dont I'anciennete se perd dans la nuit des
terns; la siirete de son port I'avait rendue fameusc , et Virgile,
dans son Eneide , en a immortalise I'existence. C'est la que I'au-
teur a place les scenes de la nouvelle qu'il met aujourd'hui sous
les yeux du public. Alais , jeune grecque de Tenedos, en csl
LITTER ATURE. ' ai5
rheroine; elle apparlient a la Grece moderne, et par scs mal-
heurs, son courage et scs vertus, ellc peut eire revendiquee ,
coninie faisant partie de ses tnfaiis. Le caracterenaif de la jeune
vierge forme uuc heureuse op])Osition avec I'austeilie du ca-
loyer ( religieux grec) Atbanase, et la fougeuse lemerite d'Aris-
tide, avec la douleur morne et silencleuse de Zagoria , pere
d'AIais : uii iniisiilman, le volii])iueux et cruel Selim offre ea
raccourci !es trails distinclifs des hommes de sa nation, et ces
principaux personnages jiailentet agisseiit de maniere a cap-
tlver I'interet des lecteurs. M"*^ Daminois, deja connue par de
nombreux ouvrages, a mis dans ce!ui-ci toute la grace qui
pouvait faire ressortir le sujet qu'elle a choisi; clle a d'ailleurs
consacre le produit de celle nouvelle aux malhcureux Grecs,
etceltepensce, qui semblelui avoir servid'inspiration, a dome
encore ])lns d'eclat a son talent, et assure une grande vogue a
son ouvrage. J.
II 3. — Lcs Epoiix malhcureux, ou le Voyage h Moscou ,
par M"' DucLOz. Paris, 1S26; I'auteur, rue de Clery, n** 72.
2 vol. in-i2, ensemble Zj^G p.; prix, 5 fr.
Une note nous annonce , des la premiere page, que la
plupart des personnes dont il est question dans ce livre exis-
tent encore, et que I'auteur a seulement change leurs noms;
ce qui ferait supposer que ce n'est point ici un roman, mais
un recit d'aventures et de calamites rcelies , et non fictivts.
Cependant , les situations et les incidens , qui se succedent avec
rapidite, sont plutot bizarres, cxtraordinaires, invraisem-
blables, que simples, naturels et touchans. On lit avec inlerct
la narration, moins par un sentiment d'affeclion et de sympa--
tbie pour les deux epoux, victimes d'une longue suite d'iufor-
tunes, que par un mouvement de curiosite.
La maniere dont Charles fait la connaissance ou plutot la ren-
contre de Julie , et, prcs de mourir d'amour pour elle, flnit par
obtenir son cceur et sa main; !a conduile peu delicate d'un jeune
homme, appele Emilc, camarnde d'ctudes et ami de Charles,
qui dcvienl son rival et fait a Julie la declaration tresincon-
venante de la teudresse qu'elle lui a inspirce; le voyage des
deux epoux qui s'arretcnt dans quelques villes d'AIlemagne,
en allant rejoindrc I'arniec francaise en Russie; la deplorable
catastrophe qui livre Julie a la brutalite u'un cosaque, que
Charles tue entre ses bras; la singuliere delivrance d'Eraile,
fait prisonnier par les Russes, puis, recu dans un chateau ou
sont des amazones raasquees, condamnc a ctre fusille, atteint
d'une balle, sauve par la jeune et belle chatelaine qui lui ra-
ronte sa propre histoire, aussi denuee de vraisemblance quQ
ai6 LIVRES FRANC AIS.
toutes celles des aurres personnages du roman , et qui lui offie
inulilementsa fortune et sa main; beaucoup d'aulres s'mgulieres
vicissitudes qui se rattachenl an terrible drame dc I'incendie
de Moscou et de la relraife des Francais, dont plusieurs
milliers meurent a la fois par Ic frnid et par la faim; la con-
servation rairaculeusement prolongee de Julie, de sa vie et de
sa beaute, au milieu des plus ciucUcs epreuves et de tous les
genres de soulfrances; enfin, la mort de cetle heroine, et
renvoi en France du cerciieil qui renferme ses restes , la cir-
constance falale qui fait que Charles se trouvc voyager dans
la mfime voitnre dans laquelle est transporte le corps de son
Spouse; la mort volontaire de cet infortune jeune homme, a
peine age de 21 ans,... tels sont quelques-uns des evenemens
et tel est le denouement tragique de cette lamentable his-
toire, ecrile d'un style rapide, mais tres-negligo, meme in-
correct, sans aucune reflexion ni pensee morale, qui ne
m^rite ni des eloges (car c'estla production d'une imagination
malade et d'une plume fort pen exercee), ni une critique
severe: car c'est I'ouvrage d'une dame. Peut-eire, en melant
des fictions a des verites, elle a vouhi consacrer le souvenir
de personnes qui lui furent cheres : peui-^tre a-t-eile en effet
connu deux jeunes epoux eprouves par de grands malheurs et
moissonnes par une mort cruelle, a la fleur de leur age, dans
cetle campagne desastreuse qui ouvrit le gouffre ensangianl^
dans lequel fut precipitc^e cette nation si courageuse et si
fiere, naguere triomphante, qui s'elait avanceeavcc confiance,
sur la foi d'un chef aventnreux, sous une longue avenue de
lauriers. M. A. J.
11^. — La Religieuse d'Jrrouca. Paris, 1826; Baudouin
freres. In-12 de i56 pages; prix, 3 fr.
Edouard Pembroke, attache a retat-niajor de I'armee an-
glaise, voyageait dans la partie du Portugal qui est situee entre
leMondego et le Donro. Dans le cours de son voyage, il alia
visiter le couvent d'Arrouca. II y rencontra une jeune novice,
Catherine, qui, peu de temps aprcs, lui consacra les plus ten-
dres soins , lorsque , defendant les approches du couvent con(re
un parti Francais, il cut ete dangereusement blesse. Chez lui,
la reconnaissance; chez la jeune portugalse, I'interet et lapilie,
devinrent I'origine d'un amour passionne. Bienlot , Catherine,
entrainee , consent a renoncer a sa pieuse vocation ; mais pour
obtenir I'annulation de ses vceux , I'appiH de son oncle, grand
inquisiteur a Coimbre, lui est necessaire. Edouard la suit dans
cetle ville, ou il attend avec anxiety le resultat dc sa visite. De-
puis eel instant, la destinec des denx amans est enveloppee
LITTfiRATURE.— BEAUX-ARTS. 217
d'une sorte de mystere : Catherine ne fait point connaitre la
decision de son oncle a Pembroke, que le desespoir conduit a
I'ariTic^e, ou il s'expose aux plus grands dangers, indifferent a
la conservation d'une viedesormais sans charmespour lui. Plus
tard, il ne retrouve ceile qu'il aime que pour la voir monrir
enire ses bras. Telle est I'analyse dii ronian que nous venons de
lire; conime on le volt, les incidens y sonl pen nombreux ; le
style, ordinairement simple, devient quelquefois prttentieux
et meme obscur, lorsque Tauteur, qui d'aiileurs rencontre sou-
vent dcs pensees fines et vraies, cede au desir de paraitre pro-
fond. L'hisloire de la religieuse d'Arrouca paralt avoir etc in-
spiree par la nouvelle de M^e de Duras : on trouve entre ces
deux ouvrages plus d'un rapport; et les editenrs du dernier,
en adoptant le meme format et la meme impression , ont semble
manifester le desir de ie voir place a cote d'Ourda. A — U.
Beaux-arts, archeologie, numismatique.
II 5. — * OEuvres completes de Palladio , nouvelle edition
contenant les quatre livres, avec les planches du grand ouvrage
d'Octavc ScAMOZzi et le traite des termes ; le tout reelifie et
complete d'apres des notes et des documens fournis par les
premiers architectesde I'ecole francaise; par Chapuy, ex-of6-
cier du genie maritime, ancien elevc de I'Ecole polylechnique,
et Amedee Beugnot, architccle de Paris. Paris, 1826; Cor-
reard , rue Traversicre Saint-Honore, n° 33. L'ouvrage se
composera de trente livraisons in-folio , composees chacnne de
dix planches et d'environ deux feuilles et demie de teste. II
en a deju paru dIx. Prix de cliaque livraison, 6 fr.
L'architecture , fille de la necessite et du genie, porte dans
tous ses ouvrages I'empreinte de cette origine : humble
avec les humbles, a la voix des puissans de la terre, elle batit
des palais somptueux et eleve des temples a la divinite.
Toules les nations ancienncs ont eu un caractere d'archi-
tecture cjui leur etait propre ; les Egypliens, les Indians, les
Grecs, les Arabes , et meme les nations de I'Europe occi-
dcntale, dans le moyen age, ont laisse des monumens qui
offrent, entre eux, la difference qui existait entre les usages
religieux et civils de ces nations, le dimat qu'elles habitaienl
et les materiaux que fournissait le sol. L'Europe raoderne
seule, si ficre de sa civilisation el de ses lumieres, a tout
emprunte aux tems anciens : I'eclat dont elle brille n'est que
le reflet de celui de I'antiquite; mais, aiosi qu'il arrive souvent
ai8 LIVRES FRANCMS.
aux iinitaleurs, on a fnit, en Europe, un usage nialadroit
d'une architecture cruee ])our d'autres besoins et pour un
autre clinial. N'est-il pas oUange, par exemple, de voir sur
les bords de la Spr<5e et de la Neva, sons un climat rigoureux
oil I'liiver amoncele les neiges, des monumens empruntcs au
ciel loujours pur de la Grice?
Apres la barbaric du nioyen age, lorsque le commerce
devint una source de puissance et de richesse, on vit, en
Italic, un grand noinbre de jietites rei)ubliques rivaliser d'ef-
forts et de gloirc ; Venise, la premiere, pent- etre, appela
les arts dans son sein. Fondee par de malheureux fugitifs ,
echappes an fer des barbares qui finirent par renverser I'em-
pire remain, Venise, soutenue par le courage que fait naitre
le besoin de I'independance, etait devenne une puissance re-
doutable , et il est digne de remarque que cetle republiquc
fut delruite, au noni d'un grand peuple qui appelait les autres
nations a la liberie. Batie au milieu des lagunes, ses palats
baignes par la mer et par les canaux qui lui servent de rues,
offraient des difficuUes d'execution qui tournerent au profit
de I'art : partout le genie de I'horame sort vainqueur des
obstacles; aussi, il n'cxiste peut-ctre pas de pays qui ait pro-
duit un aussi grand nombre d'architecles habiles que Venise j
celte ville, maintenant decliuc de touie puissance politique,
et dont les flots de la mer finiront peut-etre par reconquerir
le sol qu'elle leur avait ravi , vivra elernellement dans les pro-
ductions des arts qu'elle a si libcralement proteges, Tilien,
I'cmule de Raphael, Le Tintoret, Paul Veronese, Schiarone
et beaucoup d'autres, ont illustre I'ecole venitienne; Sansorino,
Bartolomeo Cregno, Scarpagnino, Bergamasco, Palladio, da
Ponte, deux fois vainqueur de Palladio (i), Scamozzi , etc.
servent encore de modcles; et, ]>armi les sculi)teurs que la
republique de Venise s'honorait d'avoir produits, il en est un,
Canova , dont la perte recente a fail naitre des regrets qui ne
sont pas encore calmes.
Dans le nombre des architectes que je viens de nommer, il
en est un dont les travaux et les ccrits sont devenus I'objet
d'une etude cotistanle et d'une admiration bien meritee. Palla-
dio est celui qui a su le mienx appliquer I'archltecfure grecque
(i) En i577 el en iSSg, lorsqu'il fut qaestion de restaarer le palais
ducal et de balir le pont de Rialto en plerre. ( Cicognara; le Fabbriche
pi'u cospicue di yenezia,)
BEAUX- ARTS. 219
a DOS Edifices et a nos besoins modernes. Son genie plane
encore sur Veiiise; Vicence liii doit ses plus beaux edifices, et
les liabitans se felicitent encore de posseder des delices palla-
dlennes ; car c'est ainsi qu'ils ap[)cllent les palais coDStruits
])ar Palladio. Fori de son genie , Fort de ses eludes, ce celebre
arehifecte a laisse des trailer doni MM. Chapuy et Beugnot
publient une edition nouvelle, avec les augmentations que le
litre indiqae. Les planches jointes a ces traites en sont une
j):irlie tres importante ; IM. Chapuy s'est servi, pour les repro-
duire , de la lithographie, cet art encore iiouvcau et qui, dcja,
satisfait a lant de besoins; ce travail est fait avec une r.ettete
et une precision, tclles qn'on peut I'csiger, lorsqu'il s'agit
d'une elude que le conipas dirige.
Je ne doule pas que cette nouvelle edition, pour laquelle
MM. Chapuy et Beugnot ont invoque le secours des architecles
de Paris les plus cclebres, ainsi qu'ils Ton fait connailre par
Taverlissenient place en tete de I'ouvrage, n'obllenne le succes
qu'elle mcrite; elle me seinble propre a lever beaucoup d'in-
cerlitudes que les premieres editions avaient laisse subsislerl,
et a remplacer, dans les mains de ceux (|ui etudient I'archilec-
ture, pliisieurs traites dont la rarete et le defaul de concor-
dance rendaient I'usage difficile, etla possession tres-dispen-
dieuse.
1 16. — * Cathedralcs frnncaises , dessinees et lithographiees
par Chapuy , ex-oflicicr du genie , ancien elcvc de r£cole Po-
lylechni(]ue; avec un texle historique et descrlptif, par /. de
JoLiMOJVT, inembre de plusieurs academies, auteur de plusieurs
ouvrages sur les niociirs et les anliquites da moycn age; pu-
bliees par Engelmann, iuiprluieur-lithographe, a Paris. L'ou-
vrage enlier conliendra, en trente-six livraisons , la descrip-
tion d'environ vingt-cinq calhedrales. Ciiaquc livraison , com-
posee de cinq planches et d'une feuille de teste, format grand
Jesus in-4*', coute 6 fr. avec les epreuves stir papier blanc velin,
et 10 fr. avec les epreuves sur papier de Chine.
J'ai deja rendu nn compte particulier de cette entreprise
[Rev. Enc. , t. xx, p. 4o'3 ) , a roccasion des deux premieres li-
vraisons relatives a la cathedrale de Paris; depuis, il en a paru
quatre autres qui comprcnnent les calhedrales d'Amiens et d'Or-
leans. Ces dcrnieres livrai.sons meritent, a tons egards, les eloges
que j'ai donnes aux deux premieres , et le soin que M. Chapuy
met dans son travail est un sur garant que, jusqu'a la fin, il
sera digne de Tattention des artistes. Cet ouvrage a eprouve un
peu de lenteur dans sa marche; pour mon compte , je ne m'en
plains pas ; j'ai toujours present a la pensee cet adage du poete :
220 LIVRES FRANCAIS.
Sat citb qui sat bene ; ce qiienotrebon La Fonlainea exprimc
a sn maniere, en disant :
Le terns ne fait rien h I'affaire.
Mais , en general , le public aime a jouir vile , et M. Cliapny ,
qtii avait voulu tout a la fois faire les dessins , surveiller I'ex^-
cution, et se livrcr aux soins maieriels de la publication de
I'ouvrage, avait pris une tache au-dessus de ses forces; de la,
le retard des Iroisieme et qiiatricine livraisons. M. Engelniann
s'etant charge de foule la partie commerciale de I'enlreprise,
M. Cliapuy a pu se livrer cnlierement a ses travaux d'artiste , et
les cinqnieme et sixieme livraisons ne se sont pas fait attendre.
La catliedrale de Reims, I'un des monuiiiens les plus imporlans
de rarchilectiire a ogive, fera I'objet des sepiienie , Imitieme el
neuvieme livraisons qui doivent blent 6t paraitre ; les different es
ceremonies du sacre el les decors qni ont etc composes a cette
occasion fourniront des dessins extreniement curicnx , et qui
auront un double inleret historiquc. Ces livraisons, devant
conlenlr un plus grand nombre de j)lanclies, roiiteront il\ fr.
Au reste, cbaque cathedrale pent ctreacquise scparement; ma is
alors le prix en est porte a 8 fr. et a 12 fr. pour chaque li-
vraison.
En consacranl son terns et son talent a rcproduire toutes
les principaies eglises de France, dans un meme format, de ma-
niere a en former un corps d'ouvrage, M. Chapuy a rendu nn
veritable service aux arts comme a tons ceux qui s'occnpent de
I'histolre des monumens , et je suis persuade que celle cntre-
prise aura tout le succes qu'elle nierite. J'ai deja parle du teste
a roccasion des deux premieres livraisons : cclui des quatre sui-
vantes offre le meme interet; il contient, outre la description
exacte de cbaque monument, les details historiques qui s'y ral-
tacbent el qui meritaient d'etre rappcles. II y a done de I'accord
dans cet ouvrage, ce qui finit toiijours par etre remarque.
P. A.
117. — Essni sur les medailles antiques de Cunobelinus ,
roi de la Grande-Bretagne, et Description d'une roedaille ine-
dite de ce prince, par M. le M" Roger de La Goy. Aix, 1826;
imprimerie d'Aug. Ponlier. In-4° de 20 p., avec une plancbe
gravee au trait.
Les anus de la numismalique lironl avec inleret ce petit
traile dans lequci M. de La Goy cberche a prouver ([ue Ton
a en tort de penser jusqu'ici, d'apres i'autorit« d'Eckhel, que
les Bretons n'avaient point cu de inonnaie particnliere jiisqu'au
terns ou lis furent soinnis j-ar les Romalns. Plusleiirs passages
BEAUX- ARTS. 221
de Cesar, de PolydoreVirgile , et de divers hisloriens da la
Grande-Bretague, prouvent, au contraire, que les Bretons se
servaient, sous Icurs anciens rois, de pieces de bronze et de
cylindres de fer. M. de La Goy decrit plusieius medailles de
bronze qui portent des types divers et qui ont pour legende ,
le mot cvNo et cvnobilin. II les aliribue, avec une grande
apparence de raison, au roi Cunobelinus, dont les fils Cata-
ractacus et Togodurnnus , scion Dion Cassius, furent conlem-
)>orains de reiupereur Claude. Ce Cuuobeiinus, fameux dans
les annales brctoiincs, est celui dont Sliakespeare a fait le heros
de sa tragedie de Cjmheline. Toules les medailles connues
avec ce nom sont cilees dans les ouvrages de numismatistes
anglais, et aucune d'elles n'a ete decouverte en France : cette
parliciilarilc a]>puie encore I'opinion de M. de La Goy, et sa
decouverlc I'emplit une lacune dans nos medaillers, en y placant
des monnaies de la Grande-Bretagne dont lis avaientete prives
jusqu'a present. Ce jjiemier ouvrage de I'auteur doit I'encou-
rager a continuer ses Iravaux numismaliques. Dumersan.
1 18. — La Grace ^ scene lyrique , chantee par M"<' Fremont
au concert du 9 mai donneau Vauxhall par messieurs les ama-
teurs; paroles de M. A., musiquc de /.-^. Delaire, rcduite
avec accorapagnement de piano par I'auteur : M"" Dorval , rue
de la paix, n" 9. 18 planches iii-folio; pris , 7 f'r. 5o c.
Cette scene, paifaiteinent disposee pour la musique, ne
pouvait maiiquer d'inspirer des chants heureux. Ceux qui I'ont
entendue out pu s'apercevoir que M. Delairs a une grande
connaissance des effels d'orchestre, et fait des divers instru-
raens un emploi estremement judicicux. Bien que ce morceau
perde a elre rcduit au piano, on y trouvera toiijours des for-
mes de chant larges et reguliercs. Les clioeurs a trois parties
qui reprenncnt les motifs executes d'abord a voix seule , sont
d'un effef agrcable , mais un pea monotone. La partie de la
caniate oii M. Delaire ale mieux reussi est,a mon avis, la cava-
tine a trois terns : RempUssez un sort glorieux. Uagitato qui
suit retonibe un peu dans les tournures ordinaires a ce genre
de mouvenient : ou y rencontre une imitation a I'oclave qui
n'est jias neuve, mais qui produit toujours une forte impres-
sion. Au demenrant, celle scene lyrique sera sans doute
recherchee, non-seulement de tons les amis des Grees, mais
encore de tous les amateurs de la bonne musique.
Puisque nous avons eu I'occasion de parler de M. Delaire,
nous dirons un mot d'un stahat de sa composition, execute a
Paris il y a quelque terns, et qui a etc entendu avec le plus
grand plaisir par les connaisseurs. Get ouvrage se compose de
aaa LITRES FRANCAIS.
quatorze morceaux dont la reunion forme iin ensemble fort
satisfaisant. L'lnlroduction consiste dansuu contrepoint a qua-
tre parlies, tciit avec une grande correclion ct qui annonce
bien la gravile du sujet. Le duo avcc cha-ur quce mcKrebat et
dolebnt est plein dc grace. La fiiguc a deux snjets quis posset
non co/itristari m'3i sciiible msl adaptt'e aux p;iroIcs; pcut-clre
cela ne tient-il qu'a I'liabitude vicicuse que Ton a prise d'exc-
cuter les morceaux dc cc genre par saccades et d'une manicre
toul-a-fait dcpourvue de grace et d'cxprcssion. Je suis force de
l)asscr sur beaiicoup dc morceaux de cct ouvrage qui me four-
niraient dcs reinarqiies de qiielque inleret; mais je ne puis
m'cmpechcr dc fairc au raoins menlion de Irois verscis qui
offrent des melodies clinrmantes , le solo de Icnore vidct suiim ,
le ch'Kur dcs dessus tui nnti ct le cliceur a due, virgo virginum;
raccomnagnement de violonceile employe fort a propos dans
ce dernier jnorccau rappclle I'air cliarmanl Ac Joseph : hclas
quand la marl trap cruelle. Je dirai aussi un mot d'un autre
numero, mais ce ne sera pas pour lui donncr des cloges : I'au-
tcur y a reproduit le cbant ecclcsiastiqiic du stabat , en lui ira-
posaiit un rliyllirae qui kw otc tout son cliarme ; il n'cst pas
plus licureux lorsqu'il reprcscnle cc meme diant avec un ac-
compagncmcnt plaque : dans ce genre d'liarmonie qui n'est
autre chose que du contrepoint de premiere espcce, oil doit
surtout eviter les accords blancs, c'cst-a-dii'c qui ne ])ortent
que Toclave ou la quinle, etc'est ce que M. Delaire n'a point
fait. Son contrepoint fleuri sur un plain-chant ideal estduret
peu tbantant. La fugue finale offre une entree vicieuse, celle
de la basse succedant au sojirano; on dolt eviler celle forme
qui cearte trop I'liarmonic. En general, bien que I\L Delaire
soil un fort bon liarmoniste, c'est toujours dans les morceaux
simples et gracieux que sou talent se nionlre avec plus d'avan-
tage, et nous croyons p-3uvoir annoncer que c'est sous ce rap-
port que ses compositions obliendront du succes.
J. A. L.
Memoires et Rapports dc Societcs savantes ct d'utdile
publique.
119. — * Compte rendu des Iravaux de I'Jcadcmie rnyale des
sciences , belles-lettres ct arts de Lyon , pendant le second se-
mestre de iSiS ; par M. C. Breghot nu Lut , president. Lyon,
1826; imprimerie de G.-M. Barret. In-8° de /i4 pages.
On remartjuc, dans cette courte notice, des details intcres-
sans sur la formation de Vccole d'arts et metiers dont le major
general Mabtin a dote la viile de Lyon, lieu de sa naissance.
MEMOIRES ET RA.PPORTS. ai3
L'Academie , consultce sur I'organisation de cette ecole , a pris
les meilleurs moyens de recueil]ir tout ce que Ton sait sur ces
etablissemens , et de connaiire ce que Ton fait avec le plus de
succes. Eile ne s'est pas bornec a consulter les livres ; I'un de ses
membres a ele charge de visiter les ccoles acluelles et d'inter-
rogcrles plus habiles profcssenrs, et surtout M. Ch. Dupin. On
veut que cetle ecole dc La Martiniere conlribue efficacement
aux progres de I'induslrie lyonnaise, qu'eile soit dans tous les
tems un rempart contre les dixpcsilions ho.ttiles des Anglais. II
scmble que de long-teins nos induslrieux compatriotes n'auront
I'ien a craindre de ces disjiosition.i , et qu'iis sont beaucoup trop
avances dans la carricre jiour que leurs rivaux de la Grande-
Brefagne les atleigiient proniptement, nitine avec les immenses
ressources de letirs capilaux ,de leurs machines et de leur In-
dustrie; mais r«.'mul;ition des Lyonnaisn'en sera ni moins utile
a la prosperite de leurs fabriques, ni nioin? honorable pour
I'induslrie francaise , ni luoins avanlagense pour tout lemonde
commercial. Lorsque la nouvelle ecole sera completement or-
ganisee ct en plelne activiie, I'inslruction qu'eile repandra ne
sera pas conCnee dans les ateliers de Lyon, qnoiqu'elle soit
dirigee spccialement vers les besoins de la capitale des manu-
factures francaises : tous les arts mtcaniques et chiiniqucs en
proliteront. C'est en secondant ainsi les vues d'une administra-
tion bicnfaisante et eclairce que les societes savantcs rendent
le plus de services , et meritent le mieux la reconnaissance pu-
biique.
A la fin de ce compte rendu, M. le president protesfe conlre
la centralisation qui pretend rassembler a Paris tons les talens
aux depens des provinces, auxquelles on ne laisserait d'autre
emploi que celui de fournir au departement de la Seine des
vivres et des matieres premieres , y comprls les hommes et leurs
facultes. Tous les vrais amis de la France ])artagent son opinion
et ses regrets : ils ne peuvcnl voir sans inquietude I'accroisse-
ment prodigieux d'une ville unique, ou Ton etablit cliaque jour
encore plus de fabriques nouvelles que de couvens dans les
provinces ; oil I'activite, toujours stimuiee, s'empare peu a peu
du commerce de toute la France, et ne porte ses regards si;r le
territoire francais que pour y chercher de nouveaux alimens
pour ses fabriques. L'interet general, d'accord avec I'equile ,
sollicite un partage plus egal des biens de la f ociefe et des maux
que Ton ne pent en separer. Rien ne fait presumer que ce grand
changement soit prepare; il semble, au conlraire , qtie la cen-
tralisation fasse de jour en jour de nouveaux progres, et que
le^ provinces soient encore menacees de nouvelles pertcs. F.
214 LIVRES FRANCAIS.
Outrages periodiques.
lao. — * Le Speclateur militaire , ouvrage perioHiqtic.
Paris; avril, raai et juln, 1826. Anselin et Pochard ; bureau
du Speclateur militaire, rue Neuve-Saint-Rocli , n** 2/,; prix
de rabonnemtnl , 3o fr. par an; 18 fr. pour six inois; 10 fr.
pour trois luois.
II est anjourd'hui peu de sciences qui n'aient plusieurs joiir-
nauxspccialement consacresa leurs progres. Celle de la guerre
n'en comptait gucre que deux en France, et I'un de ces recueils
etait public avec rapprobation dii ministre. On avail inscrit
sur la couverture les nonis de beaucoup d'officiers et d'admi-
nistrateurs tres-distingues, donl I'influence ministerlelle a sans
doute alarnie i'independance, puisque j)as un d'eux n'y a fait
iruprimer une ligne. Yoicl quelqnes officiers-generaux ou
superieurs, qui, sans prospectus, sans annoiices emphaliques,
sans lisle de redacteurs prealables, lancent dans le monde un
nouveau journal militaire. Jiisqu'ici, Ton n'y trouve aucun
article de remplissagc, et, si I'entreprise se soutient dans la
meme ligne, il est impossible qu'elle n'obtienne pas un grand
succes. — Les memoires que nous Irouvons dans les trois
premiers cabiers, sont : 1" de I'emplacemenl et de la popu-
lation des capitales, considerees sous le rapport militaire, par
le lieutenant-general Lamarque; 2*^ observations sur I'educa-
tion militaire, par le general Fririon ; 3° observations sur les
sieges de Saragosse et de Burgos, appliquees a la defense des
places en general , par le general Valaze ; 4° des principales
operations de la campagne de i8i3, par le general Pelet;
5° de la necessite d'oiganiser un corps d'hospitaliers militaires,
par M. D.; 6" sur I'histoire de Napoleon et de la grande
armee en Russie , par le colonel Marbot; 7" de I'impoitance
des places fortes, notes de Napoleon sur un ecrit du lieute-
nant-general Sainte-Suzanne; 8° historique des travaux dela
32" demi -brigade; 9° notice necrologique sur le marechal
SucHET , due ^i'ALBUFERA , ])ar le general Lamarque ; 10° ra^-
nioire sur les guerres de 1809, par le general Pelet; i i" Exa-
men d'un ouvrage du general ANDRE0SSY,par le colonel Bory de
Saint-Vincent; 12° des princii)ales operations de la campagne
de i8i3, par le general Pelet; i3" sur un ecrit du capilaine
de genie Villenei;ve , au siijel de I'armement des places, par
le general Valaze; 14° siir les modes acluels de remplacement
et de rengagement, ouvrage de M. Tarbe des Sablons, par
M. A.- A. C,; i5° Annonces de divers ouvrages. Tons ces mor-
ceaux sont saillans par les faits et par le style. Nous signalerons
OUVRAGES PERIODIQIIES. 226
part leu] icrement I'examen des ouvrages de MM. de Segur et
Gourgaud qui ont fait tant de bruit. M. Marbot, dans cef. im-
portant article , n'a eu d'autre but que la recherche de la verite
historiqiie, et Ton est force, apres I'avoir lu, de la trouver
chez le general Gourgaud, plutot que chez M. de Segur, dent
les tableaux sent fort draniatiques et annoncent un grand la-
lejit d'ecrire, mats paraissent trop souvent manquer dexacti-
tude. On est d'autant plus surpris que M. de Segur nit fait
quelqucs eniprunts a M. Labaume , « auleur d'une relation
justement critiquee , qui lui - meine eraprunta do telles
horreurs a un ecrivain allemand qui les avait probablement
inventees pour donner le cauchemar aux bonnes fcmmes de
la Germanic. » Le colonel Marbot, militaire consomme, ecri-
vain pur et correct, critique spirituel, avait autrefois ecrasc
de sa logique pressante une production du general Rogniat ,
dont les plans no tendaient qu'a bouieverser les principes de
I'art , ainsi que rorganisaiion de raiTjii-e ; i! combat aujourd'hui
ce genre de style romantique qui voudrail envahir le doniaine
de I'histoire, en s'introduisant dans la maniere d'ecrire siir les
combats et sur les grandes operations stralegiques. C. N.
121. — * Rcf'ue americaine , journal mensuel. N" i.(Juii-
let 1826.) Ce journal est p.ublie a Paris, par cahier de 8 a
10 feuilles et plus, in-8°. On s'abonne chez Sautelet, rue de
la Bourse ; prix de I'abonnement, 40 fr. pour I'annee , a Paris-
46 fr. pour les depariemens; 54 fr. pour I'etranger.
Ce noHvel ouvrage periodique vient, c(>mnie la Revue hritnn-
nique, \a Bibliotheque allemafide (voy. ci-aprrs, p.aSi) , ettpiel-
quesautres recueils dunieme genre, servir de supplement et de
complement a noire Revue Eucyclopedique , qui, par ceia menie
qu'elleembrasse dans son plan loutes les nations rapprochees el
comparees,ne peutpointfaireconnailreavecles developpemen*
coavenables.touslestravaux et lesprogresimportans quirarac-
terisent I'activile inlellectuelle de cliacune d'elles. Nousdevons
necessairemcnt nous borner a un apercu lre=-sommaire sur
chaque pays; et ce coup-d'oeil general peut suffire a I'horame
du monde et au philosopbe. Mais les hommes qui s'occupent
d'etudes speciales sur une branchc de nos connaissances, ou
sur une nation en particulier, ont besoin de documens plus
circonstancies et plus complets. La situation acluelle du \aste
continent de I'Amerique, I'accroissement de la population et
de I'industrie dans les Etats-Unis da nord, i'organisation defi-
nitive des republiqucs du sud, I'entier affranchissement de ces
colonies espagnoles, si long-tems assujeties a la plus dure de-
pendance, retablissement du regime represcntalif et constitu-
T. XXXI. — Juillct 1826. i5
2a6 LIVRES KllANCAIS.
tionnel au Br^sildontrEmpereur a donned sa nation etadopte,
pour le Portugal , une charfe calquee sur notre charte fran-
caise, et perfectionnee dans plusieurs de ses dispositions,
rendaient plus necessaire que jamais un journal uniquement
consacre a cette jeune Amerique, qui donne deja d'utiles et
importantes lecons a la vieille Europe. II nous resle a parler
du premier cahier de la Revue auicricaine , etablie sous le plus
noble patronage , et qui lait bien augurer de ce recueil.
La table des matieres prcsente celle division : histoire ; do-
cuinens officiels ; sciences physiques , potiliques et morales ;
applications des arts a V Industrie , et commerce; melanges.
La litterature est unc division naturelie des connaissances hu-
nnaines, qui n'est pas negligee en Amerique, et qui ne sera
point omise dans la Revue americaine , quoiqu'clle ue paraisse
point dans ce cahier; car elle ne peut se contenter de la place
qu'on lui assignerait dans la section des melanges , oil les re-
dacteurs annoncent qu'ils publieront des extraits « qui auront
pourobjet de faire connaitre les moeurs, la litterature et les
beaux-arts en Amerique. Nous desirons que bientot les repu-
bliquesdu Sud puissent nous interesser sous ce dernier rap-
port. Necessairement, elles fournissent peu jusqu'a present;
mais nous nous empressorons de recueillir leurs premiers es~
sais. " Dans les circonstances actuelles, ce qu'il importe le plus
de connaitre , c'est le point de depart de ces republiques, et le
chemin qu'elles ont deja fait. Elles ne pouvaient etre sans litt<i-
rature indigene; et cette litterature, peu estimable sans doute
en elle-meme, doit cependant etre etudiee , non pour I'utilite des
lettres , mais pour I'histoire de I'esprit humain. La Revue ameri-
ca/«e nous feraitencoremieuxconnaitrel'Ameriquedu sud, si elle
offrait des extraits des livres qu'on y lit, si elle citait des chants
nationaux, descontes populaires; si elle entrait dans quelques
details sur I'eloquence de la chaire et du barreau, etc. A ces
recherches sur I'histoire de la litterature se joindront naturel-
lement cellesqui concernent les beaux-arts.
II ne suffitpas non plus de suivre les progres de I'industrie,
dans les nouvelles republiques; un journal consacre speciale-
ment a I'Amerique, une rfcwe contracte I'engagement de nous
apprendre ce (\yjLetait I'industrie avant I'etablissement des re-
publiques; car elle n'etait pas absolument nuUe. II importe de
savoir quels travaux , quelles exploitations reussissaient alors
dans ces regions immenses , quels arts y ctaient exerces avec
t]iiel(}uesucces; car partout oil des villes considerables se sont
elevees, avec le luxe des edifices publics, civils et religieux , il
y a necessairement des arts.
OUVRAGES PlfeRlODIQUES. 227
Ce cahier presente uii bon resume de ce que les ouvrages
pt'iiodiques ont public sur rAmeriqiie. L'esquisse historique,
qu'on lit au commencement, n'est pas suffisante, sansdoute;
mais elle ne pouvait etre plus etendue. Le Journal d'un jeune
americain retenu au Chili pendant le cours des evenemens revo-
lutionnaires est instructif et plein d'interet; mais I'instruc-
tion qu'il donne est incomplete, et quelquefois inexacte. UEs-
quisse historique sur Buenos- Ayres parait trop courte : cette
republique a offert au monde un spectacle si nouveau , si re-
marquable a tous egards , que Ton ne peut entamer son histoire,
sans etre entraine ])ar la nature des evenemens, sans les deve-
loppcr autant qu'il est necessaire pour en donner uue idee
assez complete. La section des documens ofjiciels est ici la plus
importante; mais, a cause de son importance, les journaux
quotidiens ont dcja public tous ceux que Ton trouve dans ce
cahier, et cet ordre de publication sera niaintenu dans lous les
tems. On lit, dans une note sur les effets de la liberie du com-
merce, quelqaes observations dont la justesse peut etre con-
testee. On ne peut douter que la liberte illimitee des importa-
tions ne retarde lelablissement des manufactures daas un pays ,
et qu'il n'y ait des arts dont une nation ne peut se passer, si
elle veut etre et demeurer independante. Si elle etait dans la
necessite de se procurer par la voie du commerce exterieur ce
qui est necessaire a sa defense, elle aurait manque de prudence
etde sagesse. Les besoins de la guerre la plus juste sont nom-
breux , varies , immenses; que chacune des nouvelles republi-
ques prenne les raoyens les plus prompts et les plus surs
pour naturaliser sur son territoire tous les arts qui concou-
rent a repousser les agressions exterieures. Lorsqu'un etat
n'a plus rien a redouter au dehors, lorsque son indepen-
dance ne peut plus €tre menacee, il est lems d'y ouvrir les
ports a un commerce iibre, a tous les produits des fabriques
etrangeres.
Notre litteratureperiodique va s'enrichir d'un bon journal
de plus. Le lems viendra peut -etre ou les redacteurs s'aper-
cevront que les publications mensuelles reviennent trop sou-
vent, qu'un coup d'oeil jete sur un plus grand nombre d'ob-
jets, a de plus longs intervalles, satisferait encore mieux la
curiosite et I'esprit de recherche, et qu'une revue trimestrielle
presenterait aux lecteurs un tableau tout aussi completet en-
core plus instructif des progrcs du Nouveau- Monde dans la
civilisation, les arts el les ameliorations morales..
122. — * La /^ra/ece C/i/-e7«ert«e, journal religieux, politique
•et lilteraire. Paris, i8a6. — Ce journal parail, depuis le mois
,a8 LIVRES FR.ANCA1S.
d'aviil i8'z6, le samedi de chaque semaine, par livraisons de
Irois a ([uatre feuilles ; prix de la souscriplion , 60 fr. jiour
I'annec; 3!i fr. pour six laois; 17 fr. pmir trois moisjon s'a-
bonne au bureau du Journal, rue d'Artois, n". 24.
Ce Rccueil continue de raeriter I'estime qu'il inspira , des la
ptiblication de sou premier cahier, aux amis d'une sage libcrtc,
en icur faisant connaitre, dans un article preliminaire, ecril
avecune encrgique franchise, les intentions de ses redacteurs.
II nous suffira de reproduire ici quelques traits de ce tableau,
remarqiiable sons plus d'un rapport, pour mcltre nos lecteurs
a porlee d'apprecier cetto nouvelle publication pcriodique.
« Notre premiere et severe attention se fixera sur I'etat reli-
gieux et moral de I'Europe. Cette Europe est chretienne :
quatre-vingt-dix millions de catholiques , quarante-six millions
de Grecs, quarnnte millions de protestans jieuplent ses divers
etats ; el cependant, sa plus belle province, cet Orient que le
ciel a favorise d'un cliraat si doux , d'une terre si fertile; cetle
Grece , mere des Icttres , des sciences , des arts , de la civilisa-
tion de I'univers qu'elle remplit d'un imperissable souvenir,
est livree depuis six ans a toutes les vengeances d'une stupide
et cruelle tyrannic... Dans cetle lutte des martyrs contre les
bourreaux , de la liberie contre la barbaric, la politique sta-
tionnaire de I'Europe laisse , impassible et mtiette, egorger la
population, pour ne pas se disputer le territoire : I'Aiigleterre
craint que la Russie , maitresse du Bospliore, ne s'ouvre vers
I'lndostan une route plus facile et plus prompte ; la Russie
prevoit que I'Angleterre , apres avoir porte son trident sur la
Mediterranee , abandonnera le chemin si long du cap de Bonne-
Esperance pour envahir sur la mer Noire le commerce de la
Perse , de I'lnde et de I'Arabie ; I'Autriche voit sa perte dans
ragrandissement des nations rivales , et tons tremblent que la
Grece victorieuse et independaute ne prenne place parmi les
peuples civilises, et n'organise, au profit du patriotisme et de
la liberie, ce beau pays que I'ambition europeenne convoite,
ces lies qu'elle se partage en idee , ce commerce et cette route
que chacun desire et que personne n'ose conquerir. Les Turcs
laissent le champ libre a toutes les esperances ; les Hellenes
ferment la porte a toutes les ambitions de I'Occident : voila la
source de cette homicide neutralite qui doit lasser a la longue
le patriotisme des fils de Miltiade et de Leonidas, livrer le
courage au nonibre, I'independance a la servitude, le christia-
nisme a rinfidcllte... Est-on neutre ou complice, en restant
impassible enlre les victin-.es ct les bourreaux ? n'est-ce pas
plulot I'interet ephemere et personnel de quelques ministres
OUVRAGES FERIODIQIIES. aa.j
qui remporte sur riiiteret iinrnuable de I'honneur , du chiis^
fianisme et de I'liumanite ? » Aprcs avoir demasque la conduite
d'une secle ainbitieuse et formidable « qui ne cessa jamais de
denaturer la religion, » et de I'exploiter a son profit , et aprcs
avoir trace un tableau frappant de verile, de I'etat politique
actuel de I'Europe et des deux Amerlques, I'auteur s'arrete a
la France, et prcsente xme rapide esquisse de la position oCi
elle se trouve aujourd'hiii. Les cahiers suivans renferruent des
arlicles d'une dialectique vigoureuse, priricipalement dans les
deux sections generales , litterature c\. politique ; mais dont la
premiere ne se borne pas a rendre compte d'ouvrages pnre-
iiient litteraires, puisqu'elle offre, par exemple, une analyse
raisonnee du celebre Memoire de M. de Montlosicr , du Me-
morial catholiqite , du Memoire pour M. Ouvrard , d'une
brochure intitulee : iVrt/'o/e'o« devanl ses coiitempo/ains , etc.,
et contient, en outre des epitres d'un chretien a un catholique
roinain. On y reraarque aussi des articles pleins d'erudition et
(legout, notamment deux analyses des ceiivres completes de
MM. Jouy et Chateaubriand. Dans la section politique, on
trouve d'abord les sessions des Chambres ; le compte rendu de
chaque seance est impartial , mais severe , et sonvent accompa-
gne d'importanles reflexions. II en est de meme pour les Tribu-
naux. Un redacfeiir , homme d'esprit , sous le nom de Semai-
nier , donne , dans nne piquante chronique liebdomadaire, des
details sur tout ce qui a le plus excite I'altention du public
pendant les liuit derniers jours ecoules.
1 23. — * Documens relatifs ci I'etat present de la Grece ,
publics d'apres les communications du Comite philhellenique
de Paris. Premier numero. Paris, juin 1826; F. Didot pere et
Ills. In-8° de 64 pages; prix, 1 fr. 5o c.
Ce recueil peut etre considere comme une continuation des
Chroniquesdu Levant, que publiaient les memes edi teurs ( v. lle^'.
Enc, t. XXV, p. 229), et doit inspirer autant d'interet et de con-
fiance aux partisans de la cause des Hellenes. Les auteurs se pro-
posentd'y consigner, sous la forme la plus simple, les derniers
evenemens mililaires de la Grece, le detail de ses forces et de ses
besoins, lesactes publics de son gouvernement, et d'une autre
part, les divers temoignages de I'opinion francaise et euro-
peenne, les formations de Socieles philantropiques, les sous-
criptions , les secours ; enfin , tous ces acles qui sont comme la
protestation permanente des nations civilisees en faveur de la
nation grecque. « De simj)les details , disent-ils , des faits re-
cueillis sur les lieux, sans intenlion et sans systeme, devien-
dront sonvent la plus jtuissante refutation de ces calomnies
a3o LIVRES FRANgA.rS.
odicuses, dc ccs so[ihisnies meurtriers centre un petiple, donf
il suffit bieii de proldgw le massacre , sans insulter a son roar-
tyre. » — Ce i)remier numero contienl, suivant la division
que nous venons d'indiquer , trois sections : — i" Fails et ei>e-
nernens militairex ; — i° Actes du gouvernement ; — 3" Te-
moignages de V opinion piibliquc enfaveur des Grecs. — Parnai
les nombreux documens inserts dans la i" section sur les der-
niers momens de Missolonghi, nous croyons devoir citer des
extraits d'une lettre particuliure ^crite de Zante, a la date du
i5 mai : « Missolonghi vient de succomber en vue du pavilion
britannique, qui pouvait sauver cette ville et sa population
heroique. Quoique nous ne connaissions encore qu'imparfai-
tement les details de la prise et du sacdecelte ville, dont les
approches sont severement dcfendues aux caboleurs ioniens ,
nous Savons que le sanguinaire Ibrahim - Pacha y a fait nne
nioisson de quatre a cinq mille tetes , qui sont journellement
envoy^es a Constantinople. On assure que le corps de I'eveque
de Rogous, Joseph, a etesale pour elre envoy(5 en enlier au Sultan.
Quant aux femmes et aux jeunes Giles, apres avoir ete livrees
h. la brutalite des Turcs, Ibrahim en a fait des lots qu'il a dis-
tribucs a ses capitaines et a ses soldats, pour en disposer comme
lis I'entendront. Les eglises ontet^ detruites, a I'exceptiond'une
seule que les infideles font reparcr pour la transformer en
mosquee... Ibrahim ne s'est relire a Palras qu'apres avoir fait
la part de la vengeance , en laissant massacrer sous ses yeux
tous les individus qui etaient capables de porter les armes , et
en ordonnant de circoncire quelques centaines d'enfans. Jamais
on ne pourra s'imaginer les exces de ferocite auxquels se sont
portes lesEgyptiensetlesrenegats enrolessous leurs drapeanx...
11 n'est pas de tourmens qu'on n'ait fait endurer a plusieurs
malhenreux, pour les forcer a reveler les lieux ou Ton suppo-
sait que les Chretiens avaient enfoui des tresors. On passail les
uns aux aiguilles, en leur enfoncant des roseaux aigus sous les
on{;les ; ceux-ci etaienttenailles a rouge ; on arrachait les dents
aux antres ; et, quoiqu'on ait propose a chacun d'eux le moyen
de I'apostasic pour se racheter de tant de douleurs, pas un de
res nobles martyrs n'a renie la divinite du Christ... Nous som-
mes informes que les legations chretiennes de Constantinople
ont eu la satisfaction de recevoir la nouvelle officielle de la
prise de Missolonghi , et que leurs drogmans ont exprime a ce
sujet a la Sublime-Porte le plaisir que cet evenement causail a
leurs cours respectives. MM. les drogmans, en remplissant
cette commission, out passe au milieu des trophees composes
de tetes, et sous les guirlandes do nez et d'oreilles qui deco-
OUVRAGES P1!:RI0DIQUES. 23 1
faient I'entree dii palais des Sullans. » — La 2"'= section offre ,
«ntre autres articles remarquables , un compte - rendu des
seances de I'assemblee nationale; el la 3""= est consacree a I'in-
teressante relation des efforts que font sur divers points de
I'Europe ies Societes philhelleniqnes, dans I'espoir d'accom-
plir enfin la glorieuse et penible luclie que leur a impost^e un
sublime devoiiment a la cause de la justice et de I'humanite.
124. — * Bibliolheque aUeniande , journal de litterature,
redige par une Societe de gens de lettres et public parMM. Bar-
THELEMY ct G. SiLBERMANN, avocats. Strasbourg, 1826; au
bureau de la BibliotJicque allemande , place Saint-Thoraas ,
n° 3. Ce journal parait, le i5 de chaquemois, depuisle i5 no-
Tembre iSaS, par cahiers de quatre feuilles d'impression au
moins. Prix de I'abonnement : pour Strasbourg, 12 fr par an;
7 fr. pour 6 mois; pour Paris et Ies departemens (franc de
port) i5 fr. par an, 8 fr. pour six mois; pour I'etranger (franc
de port) 18 fr. par an ; 10 fr. pour six mois. On s'abonne a Pa-
ris chez Treutlel et Wiirtz.
Les redacteurs de la Bibliotheque nllemande , encourages
par le succes qu'a obtenu, en AUemagne et surtout en France,
le premier volume de ce recueii , viennent de publier un nou-
veau prospectus, contenant I'exposition dctaillee du plan qu'ils
se proposent dc suivre. « Nous classerons, disent-ils, ies pu-
blications de rofre Bibliotheque en deux series, qui peu-
vent offrir un egal interet. La premiere sera consacree a une
suite de tableaux rapides, mais fideles, des anciens ages de la
litterature allemande ; la seconde devra presenter le miroir des
terns actuels. 11 est certain que Ton ne saurait donner une idee
juste des travaux lilteraires d'une nation, lorsqu'on se borne
a une seule epoque, cette epoque fut-elle la plus belle et la
plus originale de loutes. II est egalement vrai que ce n'est plus
le moment actuel seulement que I'homme instruit veut con-
naitre. Notre vue porte plus loin; on ne veut plus de voiles,
plus de tenebresdans la vie intellectuelle des peuples ; on veut
la voir se developper dans des terns divers, afin de pouvoir
comparer ce que produisent les diverses positions sociales ou
se trouvent tour a tour les nations. C'est pour repondre a ces
besoins que nous presenterons , dans cliacun de nos cahiers,
I'histoire d'une epoque delerminee des lettres germaniques;
c'est ainsi que nous ferons passer successiveinent sous les yeux
de nos lecleurs, tout ce que le genie allemand a produit de
bon et de beau , depuis I'epoque la plus reculce jusqu'au der-
nier jour qu'atteindra notre recueii. Dans la seconde serie de
nos tableaux, dans ceux qui sont consacres aux ouvrages con-
■i^i LITRES FRANCAIS.
temporains, nous avoiis pris pour point tie viie principal d'tlic
coinplets; inais, pour n'l'lrc pas rtiduits a la scchcresse , nous
rejetterons tout ce c|ui ne porte pas en soi la garanlie d'une
txistence de que.'ques iusfres au inoins. Nous faisons connailrc
ces travaux par des traductions , des analyses on des rapports
resserres. Comme la vie intellectiieile des peuples est aujour-
d'hui lout-a-fait dans Ics journaiix , et que I'esprit de ces
feuilles presente renserable de nos idces , de nos sentimens , de
nos preventions, enfiu de tout ce qui nous caracterise, inieux
qu'aucun ouvrage isole, quel (]u'il soit, nous donnerons sou-
vent des articles speciaux sur I'esprit des feuilles litteraires.
Notre experience nous ayanl convaincus que noire cadre n'est
ni Uop etendu , n; trop borne , nous continuorons i nous atta-
cker a ce que I'Allemagnc appelle \a lifteratun- , c'est-a-dire,
a la poesie , a ['eloquence et aux etudes philologiques, pliiloso-
])luques et historiqufs. Ce n'est j)as pour avoir quelques chances
de succes de plus (]ue nous nous sommcs prescrit ces limiles;
c'est I'interet des sciences elles-memes qui nous a delerraines
a los poser. Par la meme raison, nous ouvrirons nos pages a
des analyses sur los productions des beaux-arts, les inventions
de I'industrie, les dccouvertes des sciences exactes, toutes les
fois que ces progres se ratiacheront au sujet liabituel de nos
t/avaux. « Apri'S cct expose de la marche qu'ils doivent suivre,
les redacteurs se felicitent de I'accueil favorable que plusieurs
journaux francais ont fait a leur Bibliotheque, ainsi que des
teinoignagcs d'interet et d'approbalion, desconseilset des pro-
messes qu'ils ont recus de plusieurs savans de France, d'Alle-
magne et d'llalie. Cette concordance de suffrages leur donne
I'espoir « qu'aprcs plusieurs tentatives aussi genereuses que
passageres, la France allemande ou I'Alsace pourra faire enfin
ce qui etait attendu d'elle depuis trop long-terns. » La lecture
attentive de cc que renferment les cinq numcros du premier
volume, nous porte a joindre aussi notre suffrage a cette opi-
nion jjresque unanime sur le merite du nouveau journal. Nous
n'avons point cru devoir I'annoncer avant qu'un certain nom-
bre de livraisons nous eiu mis a meme de I'apprecier comple-
tenicnt; nous v puiserons quelquefois des renseignemens sur
I'elat et les progres de la litterature et des scienceseti Alle-
magne, et nous saisirons ainsi I'occasionde rappeler cette utile
entreprise a I'attention de nos lecteurs. B — u.
Livres en langnes rtrangeres, imprimcs en France.
125. -^-* Elemens de langue anglaise , ou Melliode j)ratique
LIVRE8 Strangers imprimis en france. -233
pour appiendre facilement cette laiigue, par Siret. iVo«pf/(i'e
edition, considerablement auginentee par M. Poppleton ; re-
vue, corrigc-e et annotee par Alex. Boniface. Paris, 1826.
Baudry. In-S" de vni et 210 pages; prix
126. — * English grammar. — Grammaire anglaise adaplee
auxdifferentesclassesd'etudians, par Z,/W/ey Murray. Trente-
neuvieme edition. Paris, 1825. Baudry, rue du Coq . n" 9.
In -12 de 3/48 pages; prix
La grammaire de Siret est connue depujs long-tems de tons
ceux qui apprennent la langue anglaise. 11 est inutile de dire
combien les auginentations de M. Poppleton et les annotations
de M. Boniface ont ameliore cette gran)maire : les soins qu'on
a pris de plus pour en assurer la parf'aite correction, semblent
I'avoir portee au point de perfection qu'elle peut atteindre.
Nous nous contenterons done d'indiquer les principales divi-
sions : la prononclalion des voyelles , des diphthongues et des
consonnes est traitee avec tout le soln qu'elle merite dans une
introduction tres-detaillee. Le reste sc divise en trois livres :
il est question, dans le premier, des especes de mots et de
leurs formes gramniaticales; dans le second, de la synlaxe;
dans le iroisieme, des idiotismes francais et anglais. Le tout
est suivid'exercices, de dialogues faniiliers dans les deux lan-
gues , de modeles de lettres , et d'une table aipliabetique
tre:i-etendue des verbes anglais avec les prepositions qui les
siiivent.
Nous avons regrelte que les nouveaiix editeurs n'aient jjas
loujourscberche a corriger, par des definitions plus rigoureu-
ses, celles que Siret avail donnees, et que les progres de I'ana-
lyse grammaticale ne permettent pas de conserver ; il nous a
semble aussi que Ton aurait pu presenter les verbes sous une
forme plus favorable a lamemoire, en distinguant avec soin ,
comme I'a fait Joseph Priestley, les terns simples qui consti-
tuent praprement le verbe des tems composes d'un ou de
deux auxiliaires , dont la combinaison appartient moins a la
lexicologie [etymology) qu'a la syntaxe. N'aurait-on pas
du ensuile supprimer les declinaisons dans les nonis anglais,
comme on les a depuis long-lems bannies des grammaires fran-
caises; et de meme, fallait-il laisser subsister ces pretendus
adjectifs possessifs : //jj, thy, his, etc. dont M. Siret fait des
mots particuliers ?
C'est une erreur dans laquelle n'est ])oint lombe M. Lindiey
Murray, auteur du second onvrage annonce en tete de cet ar-
ticle. II a fort bien vu que ces mots etaient seulement la forme
possessive des pronoms personnels, el, en les remettant a leur
a34 LIVRES ETRANGERS IMPRIMES EN FRANCE,
place, il a fait disparaitre une des difficultc-s de la languc an-
glnise.
Nous n'avons qu'uii mot a dire de la grammaire de M. Mur-
ray. Parvenue a sa 89' Edition , elle n'a aucun besoin de nos
sieges. Mais plusieurs de nos lecteurs peuvent nc point la con-
naitrc encore; iis nous saurbnt gre d'en indiqiier le plan. Elle
est divisee en quatre parties: la premiere, sous le nom d'or-
thographe , traite des loltres, des syllables et des mols : la se-
conde, Y etymologic . indique les diverscs sortes de mots, et
les formes qu'ils peuvent prendre. La syntaxc et la prosodie
forment les deux dcrniercs parties de cet ouvrage : celle-cl
comprend la prononciation et la versification ; I'auleur a
ajoute un appendice sur les qualites du s!yle et les figures de
grammaire. B. J.
ii'j. — * Popular Ballads and Songs from tradition manus-
cripts, and scarce editions. — Ballades et chants populaires,
tires de manuscrits et d'editions rares. Paris 1 8x5 ; J. Renouard.
In-8° de iv et 92 p.; prix, l\ fr. , et 4 fr. 5o c. par la poste.
En annoncant I'elegante traduction des Ballades populaires,
due a la plume de M. Loeve Weimars ( Voy. Rev. Enc. ,
t. xxvii, p. SSg), nous avons essaye de donner une idee de
de la composition de son recueil. Les personnes qui connais-
sent I'anglais pourront lire maintenant le texle original,
imprime dans le meme format. C'esl un volume que Ton peut
encore ajouter aux jolies editions anglaises des Amours des
Anges et des Voyages de Gulliver, publics par le meme
libraire. A — k.
IV. NOUVELLES SGIENTIFIQUES
ET LITTERAIRES.
AMERIQUE SEPTENTRIONALE.
^tats-Unis. — Massachossetts. — Education. — On evalne
k environ i5oo, le noinbre des inslituteurs employes dans cet
etat, et a plusieurs milliers, celui des inslitutrices. Un message
du gouverneur a recommande a la legislature retablissement
d'une Ecole normale pour rediication des n.aitres d'ecole.
Connecticut. — Legislation. — Fondation d'un hospice.
La legislature de cet etat , dans sa derniere session, a pro-
hibe remprisonnemcnt des femmes pour dettes. Elle a en
meme terns autorise une Societe pour la fondation d'un ho-
pital general, et rerection de cet hospice. Elle a enGn adher^
au projct decrete par la legisl.iture de Vermont, pour perfec-
lionner la navigation de la riviere Connecticut.
Raxveigh — .Affranchissement et colonisation des escla^'cs
de cotdeur. — Nous trouvons dans le journal de New-York,
Daily- Advertiser, du lo juiu 1826, une nouvelle preuve des
progres de rcmancipation des esclaves dans cet etat. La So-
ciete des amis , dans sa derniere seance annuelle, a adopte
la resolution genereuse d'affranchir Ics esclaves possedes par
ees membres , et d'envoyer ceux d'entre eux qui voudraient
quitter le pays, soit a Haiti, soit a Liberia, soit enfin dans
I'un des etats d'Ohio ou d'lndiana , ou I'esclavage est aboii.
120 de ces affranchis ont clioisi le sejour d'Ha'iti ; 3i6, celui
de la colonic africaine de Liberia; el 100, les etats d'Ohio
ou d'lndiana. La Societe a pourvu a leur transport, a leurs
besoins el aux frais de leur etablissement. Elle avail deja au-
paravant envoye a ses frais 64 colons dans i'etat d'Ohio, et
60 en Afrique, oulre une contribution de 800 dollars donnes
par elle a la societe pour la colonisation dans cette partie du
raonde. ^- * •
— New-York. — Le Lyc.ee d'histoire naturelle , connu par
sesimporlans travaux (Voy. Rev. Enc, \. xxx, p. 397), vient.
de s'associer comme membres correspondans MM. le baron
de Goethe, president de la Societe de mineralogie d'lena ,
et le chevalier Kirckhoff, vice-president honoraire de la
ni^me Societe, I'un de nos collaborateurs dans les Pays-Bas.
a36 AMER. CENTRALE. — AINTIIXKS.— AMER. MERID.
AMERIQUE CENTRALE.
Guatemala. — Publication orilonncc par Ic gouverric-
ineiit, de touvrage sur les libertos ele VEglise gallicane. — Le
congres de la ropubliqiic du cenire de l'AintTi(]ue, seant a
Guatemala, a ordonne »U; Iraduire en langue nationale Tou-
vrage de M. Grkgoire, ancieii oveque de Blois, sur les libertex
de i'Eglise gallicane et des aiitres cglises de la catholicitc. Le
di'cret redige d.ins les termes les j)liis honorables a etc expiidie,
le -ifi fuvrier 1826, i)ar M. ie president Mariano Galvlz a
M. Marcial Zep-adua, cnvoyc de celte republiquc auprcs du
gouverncment britannique pour «^tre transmis a I'aateur de
I'ouvragc. Z.
ANTILLES.
Martinique. — Treinblemettt de terre. — Froids exlraordi-
nairex. — Un tremblement dc terre s'est fait seiiiir dans cette
ile, dans la unit du i*"" au 1 niai dernier , a miniilt 35 mi-
nutes. II n'y a eu qu'une seule secousse, dont la diiree a ele
d'une longueur remarqiiable, etdont la force a etc assez grande
pour reveiller toule la po|)iilalion desviiles.
Des vents de nord, Ires-violens , qui onl commence a souffler
en Janvier, er dont la domination a dure, sans interruplion,
])lus de deux mois et deiiii, ont tellement abaisss la tempera-
ture ordinaire des Antilles , que I'hiver y a ete beaucoup plus
rigourcux que depuis un grand nombre d'annees. II en est
resulte une affection epidemique, Inflainmatoire, et d'un type
etranger aux maladies de la Zone - Torride. Qnoiqu'on Ini ait
altribue la mort d'une assez grande quantite d'indlvidus, il pa-
rail que la saignee etles sangsues Tont combattue efficaceraent ,
et en ont fait disparaitre les symptomes, notamnient la fievre ,
la cepiialalgie et le point-de-c6te. Mais il reste constamment,
apres lamaladle, une singuliere faiblesse, et une funeste dis-
position a une rechule plus grave encore. M. ue J.
AMERIQUE MERIDIONALE.
Bresil. — Instruction elerncnlaire. — Le baron de 1'eura-
Brancv vient de fonder , sur ses terres au Bresil, une ccole
d'enscignemenl mutuel enlierement a ses frais. Ainsi cette
methodesimplifiee, que vondraient proscrire en Europe les en-
iieiuis de rinstructlon populaire , trouve un refuge en Anie-
ritjue. Piiissent tous les ciloyens ricbes et influens du Bresil
AMERIQUE MERIDIONALE.— AFRIQUE.— ASIE. 2^7
iiniter le nobie exeraple doime par leiir conipatriole ! L'ins-
triiction jMimaire bien organisee, et mise a la portee tie toiites
les classes de cifoyeus, est a la fois le jjiemier devoir de tout
gouvernemeiit, et surlout d'un goiiverneinenl constitutionnel,
le phis grand bicnfail pour le peii])le , et la source la plus fe-
conde de Ions les moyens de richesse et de prosperite pour
I'etat. J.
AFRIQUE.
Egypte. — Indication dea principaux elahlisseinens indus-
triels , fondcs en Egypte par- ordre du pacha Mohamed - All
— Fdatures de colon: 3 a Boulaq; i au Grand -Caire; i a
Gaillouph, a trois heures du Caire; i a Rosette; i a Mehnllet-
el-Kebir; i a Fouah; 1 a Mansourah; i a Souah ; total, 10.
— Des ateliers de tissage se trouvent joints a toules ces fila-
tures.— Fonderies de cuii'te : i a Boulaq; i au Caire. — On
recoit le cuivre d'Europe eu pain, et on le fond pour le trans-
former en objets necessaires aux fabriques , principalement a
cclies de colon. — Fabrique d'armes : i au Caire. — On y
travailie peu. — Imprimerie : i a Boulaq. — Fabrique d'in-
diennes imprimces au rouleau .• i a Boulaq. — Verrerie ; i a
Aiexandrie. — Fabriques de salpelre : 1 au Vienx-Caire; i a
Medinet-el-Sayoum. — Ateliers de menulserie et de serrurerle
potir les hesolns des fabriques , a Boulaq , fondes par M. Jumel.
Beauconp d'ouvriers europeens y sont employes. — Fabriques
de soierles : i an Caire; i a Einbabeb, vis-a-vis le Caire, sur
la rive opposee du Nil. — i fabrique de t.erpouches , ou bon-
nets de Tunis, a Souah, au confluent du canal d' Aiexandrie
avec le Nil. — Des details circonstancies sur les actes du gou-
vernement du vice-roi d'Egypte, qui nous sont transmis
d'Alexandrie, et dont nous differons la publication, jusqu'a
ce que nous ayor.s pu en verifier I'exactitude , font craindre
que ce gouvernemeat ne manque le but qu'il parait se pro-
poser, d'encourager I'industrie, fante de bien comprendre
que le respect de la propriete et de la liberie individuclle est
Je premier des encouragemens dont elie a besoin. D.
Cap de Boknk - Esperance. — Fondatlon a'un musee. — Le
gouvernement a etabli , depuis peu, dans la ville du Cap un
nuisee d'objets d'art el d'histoiro naturelle, sous la direction
de M. le D'' Smith. Une lettre, dalee du 9 mars dernier, an-
norice que ce musee prend jin accroissement considerable.
DE K.
ASIE.
liATAviA. — SoiUHe des sciences el arts. — Le 1 3 Janvier der-
<i38 ASIE.
nicr, celte socidt(j a teiui une assembl(5e generale, consacr^e
a prendre conge de M. le gouverneur general Van ukr Ciip-
I'ELLEN , si universellemeiit regrette dans I'lnde ncerlaudaise,
et a la protection et aux encouragcmens duquel cette savante
compagnie est redevable de I'etat florissant ou elle se trouve
aiijonrd'hui. Dans cetle meme seance, elle a recti an nombre
de ses membres etrangers, MM. le general Van df.n Bosch;
Van Alphen , de La Hayc ; de Stassart , de Namiir; le recleur
SwAAN, de Hoorn; Van Grithuizen, d'Utiecht ; et le docteur
Bollinger, de 1' Academic des sciences de Munich, de K.
Ceylan. — Resultat de f introduction du jugement par jury
( ^oy. ci -dessiis, p. 5 ). — L'introdiiction du jugement par
jury dans I'ile de Cleylan et le droit de sieger parmi lesjures,
assure aux naturels de demi-caste comnie a tous les autres
natifs de I'ile, quell. s que soient leur caste ou leur croyance
religieuse, out fourni aux indigenes la pi'eniieie occasion de
manlfester leur capacite, comnie dispensateurs de la justice et
corame protecleurs de la vie, de la liberie et des proprietes de
leurs concitoyens. C'etait consequemment i)our eux un puissant
motif de perfectionner leur education, et un encouragement
aux etudes necessaires pour fortifier leur intelligence. Les faits
suivans nous montrent comment un nalif de I'lnde a signale,
dans I'exercice des fonctions de jure, une supdTiorite de talent
evidente, et propre a faire sentir a ses compatriotes tous les
avantages resultant d'une bonne education.
Un liramine d'une des j)rovinces septentrionales de Ceylan
comparut , il y a quelques annees, devant un jury de bramines
de la meme province. Cet homnie etait accuse d'avoir assassinc
un de ses parens, dans I'espoir de devenir , par sa mort, maitre
de sa propriete. Les depositions des temoins etaient si con-
vaincantes que le jury allait prononcer la cuipabilite du pre-
venu , lorsqu'un jeune Bramine , siegeant parml les jures , an-
iionca qu'il ne se croyait point assez instruit, et demanda que
les temoins fussent de nouveau appeles et qu'il lui fiit permis
de les inlerroger. La cour ayant accede a sa demande, il pro-
ciida avec tant d'adresse aux divers interrogatoires qn'il de-
moDtra en fort peu de tems que les temoins, si bien d'accord
dans leurs depositions , avaient conspire contre la vie du pre-
venu; et celui-ci , d'apros la conviction definitive du jury, fut
acquiltert I'unaniinitc.
Sir Alexander Johnston, alors president de la cour, frappe
de la haute capacite ijue le jeune bramine avnit montree dans
celte affaire, le fit appeler et le queslionna sur son education
et sur ses etudes. Lc joune homme lui repondit qu'il attribuait
ASIE. — EUROPE. 239
la sagacity dont il avail fait preuve, dans celtc circonsrance,
non a son education, qui ne dlfferait point de celle des auires
inembres de sa caste, mais a I'etude d'un ouvrage qu'il s'etait
procure dans son voyage a la peninsule de I'lnde, ouvrage qu'il
consultait souvent , comme ayant plus que tout autre developpe
son intelligence. C'etait un abrege de la dialectique d'Aristote
traduit de I'Arabe en Sanscrit , et copie sur queltjues feuilles de
palmier en caractere de v^anagari. Cette circonstance, et plu-
sieurs autres, dont sir A. Johnston eut connaissance jiendant
son sejour a Ceylan, lui persuaderent qu'un traite de logique ,
adapte a I'intelligence et a I'education des habitans, trouverait
des lecteurs et developperait leurs facultes. Afin de determiner
quelle melhode, de celle de Condillac ou de Dugald Stewart,
devait etre preferee, il preser.ta aux indigenes les plus instruits
des extraits de Tun et del'autre ouvrage; la methodede Stewart
I'emporta ; et I'intention de sir A. Johnston, s'il fut reste a Cey-
lan, aurait ete d'engager les braniines et les pretres de Bouddha
a traduire, dans leurs langues , les parties de \a philosophie de
I'esprit humain le plus en harmonic avec I'intelligence des in-
digenes , et a en faire circuler des copies parmi les habitans qui
inontreraient quelque gout pour les etudes de ce genre. — Sans
doute , ce projet d'un philantrope cclaire recevra plus tard son
execution, et nous faisons , en le deposant dans notre recueil,
un appel aux homraes qui veulent contribuer aux progres de
la civilisation et des luinieres dans I'lnde. D.
EUROPE.
ILES BRITANIVIQUES.
Nouvelle expedition maritime. — Le capitaine Parry est a
la veille de faire un nouveau voyage au pole arctique. II
s'agira cette fois, non de trouver un passage vers Tocean Pa-
cifique , mais de reconnaitre les cotes situees a Test du Spitz-
berg, et de tacher de s'approcher eiiSTzite du pole nord. Des
barques d'une construction particuliere doivent etre trans-
portees a bord de VHecla; elles serviront au capitaine Parry
et a sa suite, pour cette seconde entreprise, et VHecla sera
laisse dans les environs du Spitzberg. Cette expedition a ete
ordonnee par le bureau de I'amiraute sur la demande de la
Societe royale; elle couiirmera peut-etre les conjectures du
capitaine Weddell, que les poles ne sent point converts de
glaces. F. D.
Hai;te-Ecossf.. — Elat de I'education. — Nous emprunloui
a4o EUROPE.
aii New-Mont/ily-Magazine (cahier ilejuillet, p. 309), les details
statisliques snivans, resultant de rechercliesfaitesavecsolu dans
les coinfos d'Aigyle, d'Inverness, de Nairn , de Ross, de Cra-
marty, de Sutherland, dc Caithness, dans les iles Orkney et
Shetland, et dans les districts galliqucs des conites de Moray et
de Pertli. Cette })artie inontueuse de I'Ecosse oontient, d'apres
le recenseinent de 1.S21, 4iG,ooo liabitans, repartis dans 171
paroisses. Snr le nonibre de ccux qui ont dcpasse I'age de huit
ans , la moitio environ ne sait pas lire. On pent du reste ctablir
les proportions snivantes : dans les Hebrides, et dans la partie
occiiicntaie d'Inveiness ct de Ross, ily a, sur 100 liabitans,
70 qui n'ont point appris a lire; dans les autres districts d'ln-
verness et de Ross, dans Nairn, dans les monlagnes de Moray,
dans Cromarty et Sutl)erland, dans la partie interieure dc
(Caithness, /lO sur 100; dans Argyle el les monlagnes de Perth,
3o sur 100; dans Orkney et Shetland, 12 seulemenlsur 100. —
Plus d'un tieis de la population totale est a la distance de deux
milles, et ])lusieurs milliers, a cinq niilles des ecoles les plus
rapprochees. — Dans les jiarlies occidentales-d'Inverness ct de
Ross, il y a, en repartissant egalement louies les Bibles qu'on
a pu y trouver, un exemi)!aire des Saintes-Ecrllures pour 8
pcrsonnes, agees de plus de huit ans; dans les autres jiarties des
monlagnes et des iles , on ])eut com|)!er un exemplaire j)our 3
personnes. II reste encore un quartde la population, ou 100,000
habiians prives dc bibles. — L'idionie gallique est la iangue
de 3oo,ooo, ou des trois quarts des liabitans de ccs comtes.
Cest la seule Iangue ])arlee dans les Hebrides; elie domine dans
les autres parlies, cxcepto dans Orkney, Shetland et sur la cote
de Caithness, ou I'on ne parle que la Iangue anglaise. A — e,
Manchester. — Institut pour les sourds - muets des classes
indigcntes. — Cette ecole a ele fondee, en 1824, et ouverte
pour la reception des eleves , au mois de fevrier iSaS. —
M. f/^. Vaughan , direcleur de cet etablissement , coramenca
ses lecons avec i4 eleves, dont 6 gareons et 8 lilies. L'age des
candidals est iixe pour I'admission a 9 ans, et ne peut de-
passer 14 ans ; la duree de leurs etudes est de 5 ans. — L'ins-
tructlon que Ton donne aux eleves comprend un langage ecrir
et articule, des notions sur les saintes Ecritures et des lecons
d'arithmetique, en proportion des facultes particulieres de
chaque eleve. Pendani leur sejour a I'ecole, ils sont loges,
nourris, blancliis ct soignes, aux frais de I'etablissement. On
adniet dans la nieme ecole des pensionnaires, moyennant une
cerlaine somnie a payer chaque annce, et dont le montant est
fixe par le conscil d'adaiinistration de I'etablissement. Cette
ILES BRITANNIQUES.— RUSSIE. 241
seconde classe d'tileves n'est distinguee de la premiere par
aucun privilege particulier , soil dans le mode d'enseignement,
soil dans les soins et les details de I'entretien. Les revenus de
I'etablissement proviennent de dons philantropiques, soil de
souscriptions d'une guinee par an, soit de donations de dix
guinees; ce dernier paieraent donne entree au conseil d'admi-
nisti-ation, avec le privilege de voter pour l"admission de
chaque enfant ^ I'ecole. Le conseil d'administration special
pour la direction de I'institut est compose de 24 membres,
pris parmi les donateurs- administrateurs. Le nombre des
eleves des deux sexes est aujourd'liui de 23 ; les revenus de
I'institut ne permeltent pas en ce moment de I'augmenter ; ces
enfans sont vetus par leurs families, ou par les moyens que
fournissent des ])articuliers bienfaisans.
Si les fonds de I'etablissement permettaient d'augmenler le
nombre des eleves, il serait aussitot double, puisque les seuls
postulans deja inscrits depassent 3o. On peut s'etonner que le
nombre des sourds - muels pauvres soit aussi considerable
dans une seule ville. Si Manchester avait besoin d' encoura-
gement pour repandre des bienfaits ou pour reveiller sa solli-
citude, il en trouverait dans les fruits des travaux infatigables
du directeur de I'ecole des sourds - muets. Dix - huit mois ne
sont pas ecoules depuis qu'il a reuni ses premiers eleves, et
deja, des succes extraordinaires ont couronne ses soins. Les
abbes de I'Epee et Sicard sont les grands maitres que M. Vau-
yhan a consultes pour reraplir sa noble tache. Son activite
personnelle, son zele pour le bien, sa douceur et I'affection
qu'il porte a ses eleves, ont fait le reste. Les resultats qu'il a
obtenus passent toute croyance. Nous avons vu ces interessans
eleves rcpondre, avec une justesse et une promptitude admi-
rables, aux questions de tous genres que nous leur avons
adressees par Tintermediaire de leur digne professeur; leur
ecriture est soignee ; ils ecrivent des phrases entieres sans
faire une seule faute d'orthographe ; et tout cela est le rcsultat
d'une instruction de moins de dix-huit mois ! Plusieurs d'entre
eux prononcent meme des mots d'une maniere tres-iritelligible,
et tous raisonnent sur leurs devoirs domestiques et religieux
avec une justesse d'esprit que Ton serait etonne de trouver
dans des enfans nes sans aucune imperfection. D. Albert.
PtUSSIE.
Lectures a V Academic des sciences. — Le 25 mal iSaS : In-
vestigatio radii circuli polygono cuicunque inscripli, cujus
T. XXXI. — Juillet 1826. 16
^^t^^ EUROPE.
data sunt latera una cum quolibet punclo cunctaius, par In
profosseur Fuss; le i*^"" juin : De raccroisseinont des diameties
apparciis du soleil et de la Itine, cause par la refraction (en
francais), par le professeur Schubeut ; le 8 juin: Des fleurs
ininerales (en rnsse), par le professeur Severguine; le 22 juin :
Des effets d'un papier monnaie depreci^ , dont la valeur so
releve (en francais), par le professeur Storcu ; le 2 juillet :
Novae observationes anatoinic;e de arteriarum varietate.
M. Kaiaidovitch , litterateur distiiis^ue, a cte admis au
nombre des membres correspondans de TAcadeinie.
(Extr. des Feuilles bibliographiques , 25 oct. iSaS.)
E. H.
Necrologie. — Karamzine (Nicolas.) — La mort vient de
frapper , au milieu de ses honorables travaux, M. Karamzine,
hisloriographe de I'empire deRnssie, conseiller d'etal actuel,
grand-cordon de i'ordre deSaintc- Anne, chevalier deSainl-Vla-
dimlr, membre de I'Academie russe, etc. — Cethoiniiie celebre,
egaleraent estimable par ses vertus et par ses talens, a ete en-
leve a sa famille, a ses amis et a sa patrie , le 22 mai ( 3 juin )
1826. Sa perte est d'autant plus deplorable, qu'il n'avaitpas
encore termine son Histoirede Russie , dont les onze premiers
volumes out ete traduits en francais et dans presque toutes les
langues de I'Europe. Ne, le i" decembre 1765, d'une familJe
noble, dans le gouvernement de Simbii'sk, il fit d'excellenles
Etudes et debuta , jeune encore, avec succes dans la carriere
des lettres, par des poesies qui annoncaient une imagination
vive etbrillante. A I'age de 24 ans, il entreprit un voyage en
Allemagne, en Suisse, en France el en Angleterre. Use trou-
vait a Paris , au commencement de la Revolution , et y fre-
quenla les litterateurs les plus distingues de cette epoqr.e.
L' Allemagne, qui jouissait alors d'une situation douce et tran-
qullle, lui offrit aussi des homines dont la socielelni fut pro-
fitable pour augmenter son instruction et ddvelopperses talens.
En Suisse, il vit souvent le celebre Bonnet, auteur de la Palin-
genesie, de la Contemplation de la nature et de plusieurs autres
ouvrages pliilosophiques et d'histoire naturelle que Karamzine
seproposait detraduire. A son retour en Russie, il publia les
Lettres d'un voyageur russe , en 4 volumes , oiivrnge que le
public accueillit avec enthousiasrae ; ces Lettres eiuent plu-
sieurs editions el furent aussitot traduites en aliemand. Ses'
Souvenirs historiques surle rheinin de Moscou a Troitza (1), sa
(t) Anc!en mona.stere aux environs de Moscou.
f
RUSSIE. 243
Martke, la possadnitza [o.) , ou la Soumission de Novgorod,
riouvelle historique , Nathalie ,Jille d'uii Boyardei uneioviXe
d'autres productions du premier ordre, prouverent qu'il avail
su perfeclionner la prose russe et lui donncr un charme que
Ton lie trouve dans aucun des ecrivains qui le precederent.
Redacteur de plusieurs journaux ( le Courrier de t Europe,
^ont il fut le fondaleur, et que redige anjourd'hui M.Katche-
NovsRY , les Aon'ules , Jglae, etc. ), i) semblait s'etre voue tout
entier a la literature. Cependant, il fut blentot oblige de re-
iioncer aux ouvrages d'imaginalion , pour s'occuper d'nn tra-
vail plus serieux. L'empereur Alexandre le nomnia liistorio-
graplie de I'empire el le chargea d'ecrire I'liistoire de la Ruisie.
Apres plus de quatorze annees de recherches et de travaux
assidus, Karamzine fit paraitre les Imit premiers volumes de
son excellente histoire qui produislrent la plus vive sensation,
non-seulement en Russie, mais dans toute I'Europe. Trois
mille exemplaires de la premiere edition furent vendus dans
I'espace de 28 jours : l'empereur avait fait imprimer cet ou-
vrage a ses frais et accorda, de plus, a I'auteur les litres men-
tionnes dans les premieres lignes de cet article, avec une dota-
tion de 5o mille roubles. Son histoire ne laisse rien a desirer
sous le rapport du style et des details; elle doit prendre place
a cote des chefs-d'oeuvre des meilleurs historiens modernes. II
n'appartenait qu'a un talent aussi eleve d'appeler par I'habile
disposition des evenemens, autant que par le charme du style,
I'a ttention des lecteurs sur une histoire que jusqu'alors ils avaient
dedaignee comme arlde et sans interet. Cet illuslre ecrivain
jouissait de toute la confiance d' Alexandre , et avait acces a
toute heure aupres de ce prince, qui le visitait lui-memequel-
quefois , pour recourir a ses lumiores. Sage et modere dans une
si belle position , Karamzine refusa consta mment toutes les places
que lui offrait l'empereur; celle de minislre de I'instruction
publique ne le tenta pas non plus : son intention etant de con-
sacrer toute sa vie a terminer son important ouvrage. L'em-
pereur Nicolas le combla egalement de ses faveurs; mais il n'a
pti en profiler long-tems. Un abces s'etait forme dans sa poi-
irine; esperant Irouver quelque soulagement sous un ciel plus
doux, ileiait sur le point de :-'embarquer; mais il devait niou-
rir dans sa patrie. Ce fut le 11 mai qu'il expira , et le i3 de
ce meme mois , il avait recu de la part de Nicolas un rescrit
(2) Possadnitza vent dire femme du possadnik , premier magistrat de
la repnblique de Novgorod.
244 EUROPE.
tres-flatteur, accompagiie d'un ukase, dans lequel S. M. accordc
a Ivaramzine une pension annuelle de cinq mille roubles
(5ooo fr.), reversible a safcinme, et, apres elle, a sesenfans. —
Karamsine avail ccrit , ily a qiielques annees , au fondateur-
directeur de la Revue Encyclopedique une lettie conlenant les
lemoignages dii vif interet (ju'il portait a une entreprise aussi
utile, destinec a rapprocher par des communications muluelles
et periodiques les hommes eclair^s de tous les pays. \ T.
POLOGNE.
Monnaie polonaise. — L'empereur Nicolas a decide que la
monnaie de Pologne conserverait toujours I'effigie de Tempe-
reur Alexandre, a qui ceroyaunie est redevabledesareedifica-
tion : grand et important ouvrage qu'il avait I'intention de
completer quand les circonstances generales de I'Europe se-
raient plus favorables : I'execution de celte noble pensee reste
confiee a son successeur, qui s'esl montre jaloux d'observer
avec un sentiment religieux ses volontes les plus intimes. — Les
pieces d'or et d'argent presenteront d'un cole I'effigie de leu
l'empereur et roi , avec une couronne de laurier sur la lete,
et cette exergue en langue polonaise : Alexandre 1"'' , empe-
reur de Russie , restaurateur du royaumc dc Pologne ( i8i5);
de I'autre cote, au milieu d'une couronne de chene, inscrip-
tion de la valeur de la piece ; au-dessous de la couronne , ces
mots : Nicolas I^'' , empereur de ioutes les Russies , roi regnant
de Pologne. La monnaie de cuivre n'eprouvera aucun chan-
gement. J-
ALLEMAGNE.
GoETTiNGtJE. — Societe des sciences. — Lecture d'un Memoire
sur thistoire de Perse. — La Gazette litteraire de Goetlingue
( Gelehrte Anzeigen ) rend compte d'un Memoire fort important
lu a la Societe royale des sciences par M. Tychsen, ou ce savant
recherche quelles sont les sources de I'histoire de Perse, et
quel degre de confiance on peut leur accorder. Les Arabes
maltraiterent beaucoup plus les Perses que les autres peuples
subjugues par eux; car ils les regardaient comme des idolatres,
et d'un autre cote, ils comprenaient combien il serait difficile
de contenir une nation aussi etendue, aussi unie par la langue
et par la religion , tant que I'ordre des mages subsisterait. Les
temples furent done detruits, et les livres , brules. L'islam fut
enseigne par la force ; toutes les places furent le domaine exclu-
slf des Arabes, et dans les affaires publiques, il fallut se servir
ALLEMAGNE. 245
de leur langue. Cependant, les mages chercherent a maintenir
leur religion, et plusieurs livres zend paraissent avoir el6
ecrits a cette epoque. L'excessive severite de cetle domination
elrangerc s'adoucit sous les Abbassides , et les Perses, surtout
ceux du Khorasan , adopterent la civilisation arabe, tandis
que les Arabes prirent pour eux I'histoire, les recits et les
preceptes des Perses. En 731, Hescham II fit fraduire eu arabe
une histoire des Sassanides, et au x*' siecle, Massudi en vit un
magnifique exeniplaire. Sons le second Abbasside Almansur,
un Persan, nomme Mokaffa , fit de nombreuses traductions.
Bientot les Persans se mirent a rcrire en arabe, et enrichirent
de beaucoup de productions la litterature de cette nation.
Parmi les Listoriens, on cite Behram qui ecrivit sur Moise et
Jesus; puis, Chosru, Hescham ,Cassim d'Ispahan, auleur d'une
histoire de la guerre des Parthes et de quelques biographies.
Lorsqu'a la fin du x* siecle les Samanides regnerent sur la
Perse orientale, Mansur, fils de Nuh, chargea son visir Abu-
Mansur de reunir tous les materiaux d'une histoire de la Perse.
Aide de quelques savans, celui ci mit au jour le Schah-Nameh,
ou Livre des rois : toutefois , on est fonde a penser, d'apres la
preface de I'auleur meme, que ce travail a ete fait sans discer-
nement. L'auleur parait avoir tout accueilli , sans distinguer les
contesromanesquesetles fictions des recits vraimenthisloriques.
Les premiers cependant avaient subi de grandes alterations par
lecoursdes siecles; ils etaient originaires du Khorasan etde la
Perse orientale, et c'est pourquoi le Shali-Nameh contientles
nouveaux noms de villes , de pays. II y est beaucoup parle de la
guerre centre Turan; a peine y fait-on mention de ce qui con-
cemel'occident. II n'yest pas nonplus question de chronologic;
car il n'y en a jamais dans les recits heroiques. On n'y songea
que lorsqu'il fallut coordonner les traditions; et comme on
trouva 3ooo ans a distribuer entre 20 rois, on les fit regner
pendant des siecles, ct le seul Bustem obtint 600 ans pour sa
part. Au surplus , c'est une manie commune a plusieurs peuples
que de prolonger les anciens regnes. Quelque defectueux
qu'ait pu clre ce livre , nous serions encore heuresix de I'avoir ;
au lieu de cela, il ne nous reste que le Schah-Nameh de Fer-
dusi : c'est un poemc dans lequel I'imaginationa trop souvent
obscurci la veritc. Des le regne des Samanides, on avait concu
la singuliere pensee de transformer en poeme I'histoire d'un
grand peuple , et Dekiki I'avait entrepris; mais ce fut sous
Mahmud le Ghasnevid que Ferdusi I'acheva. Assedi, le maitre
deFerdusi, y .ijouta la conquete de la Perse par les Arabes.
Mahmud lui-m^me avait reuni des materiaux pour une his-
a46 EUROPE.
toire de Perse, et Ton dit que Ferdusi apporia a Ghasna nne
hisloire des rois et la cornpara avcc le Basitan-Naineh et avec
d'autrcs ouvrages historiques. Lcs chroniqiies out suivi le
poeme de Ferdusi; et il est difficile, peut-etre in^rae impos-
sible d'y faire la distinction du vrai et dii faux. 11 faudrait
avoir rccours aux auteurs arabes, tels qu'Abu Gufar-al-Tlia-
bar, qui vivait 5o ans avant la redaction du Scliah-Nameh
historiqiie; Massudi qui vivait vers le milieu du x^ siecle et
qui aura fait usage du Basitan-Nameh; enfin, Hamzeh, d'ls-
pahan, qui ecrivit long-tems avant Ferdusi, et mit un grand
soin a etudler I'histoire ancienne de Perse. II y a un beau
manuscrit de son ouvrage a la bibliotlieque de Leyde , et Ton
espere qu'en le decrivant dans son catalogue , M. Harnaker eu
donnera des extraits.
Halle. — Litterature orientnle. — On dit que M. Fraehn
travaille a la redaction d'un catalogue de inanuscrits orien-
taux, qui existent en effet, mais que Ton n'a pas encore pu
decouvrir. Ce catalogue doit etre distribuc aiix ambassadeurs,
aux consuls, et aux voyageurs qui se proposent de visiter
I'Afrique ou I'Asie , et il sera d'un grand secours ponr les gui-
der dans leurs recherches. Pu. G.
SUISSE.
Canton deVaud, — E cole pour les sonrds - muets a Yver-
DON. — Details statisliques sur les sourds-muets. — L'Institut
qu'avait fonde et qu'a dirige long-tems le respectable Pesialozzi,
a donne quelque celebrite a la petite ville d'Yverdon, situee a
I'une des extremit^s du lac de Neuchatel. Le clioix de Pesia-
lozzi semblait avoir decide Tetablissement, dans le meme lien,
de plusieurs niaisons d'education, qui exislerent concurrem-
ment avec la sienne,mais, qui, depuis la chute de cette der-
niere, ont en partie disparu. On y trouve encore deux
institutions; I'une, pour les jeunes j)ersonnes, est dirigee par
M. NiEDERER, autrefois I'aini et le collaboratcur de Pestalozzi,
et par sa femme ; I'autre, pour les sourds - muets, a ete fondee
par M. Naeff , qui lui consacre avec un zele constant, des
soins eclaircs , et des connaissances muries par une longue expe-
rience. Son ecole, qui compte plus de dix annees d'existence,
a etd visitee dernicrement par une commission du Conseil
academique de Lausanne. Nous ne poiivons la faire mieux
connaitre qu'en citant le rapport de cette commission. —
n L'Institut des sourds - muets n'est pas jilace sous I'inspection
immediate du Conseil academique; mais il offieune trop liaute
SUISSE. a^7
inopbrlance poiirne pas meritervotre attention. Nous avous fait
deux visites a M. Naeff; nous avons vu ses eleves au milieu
de leurs jeux, qui etaiexit des exercices {^yninastiques; nous
les avons vus a leurs repas, ouils trouvaientdans cet inslitu-
teur et dans son epouse I'affeclion et les soins de parens pour
leurs enfans; nous les avons vus enfin dans leurs lecons. Quel-
ques lieures ne suflisaient pas, sansdoute, jiour suivre, dans
son ensemble et dans ses details, la niarche d'une instruction
qui doit durer plusieurs annees; mais les points partlculiers ,
sur iesquels le hasard a porte notre attention, nous ont parn
remplir toutes les esperances que Ton peut concevoir d'une
education semblable... Nous avons ^te, entre autres, tres sa-
tisfaits de I'ecriture et de Torthographe des eleves ; nous arons
parlicuiierement observe, avec beaucoup d'interet, un exercice
propre a donner la mesure du developpement intellectuel et
moralque peulrecevoirunjeunesourd - muef. C'etaitlaleclure
par signes d'un recif, ecrit sur la gtande table noire et tiro de
i'Histoire sainte ( la inort de Sisera , lU'. des Juges ) , dans lequel
on trouvait une reunion de notions sensibles , d'ideesabstraites
et de sentimens. Le jeune eleve a exprime les uns et les autres,
au moyen du jeu de sa physionomie, de son attitude el de ses
gestes , avec une verite , une force et memc une de'icatesse qui
avaient quelque chose de touchant. Cette lecture nous a prouve
quelesourd-muet est susceptible de recevoir toule I'education
de I'enfant le raieux organise. On nous a fait lire aussi un des
journaux que les eleves de M. Naeff sont accoutumes a com-
poser, et une leltre qu'un de ces jeunes gens ecrivait a son
pere; il aurait ete difficile de rien trouver dans ces productions
enfantines, qui annoncat que I'auteur n'etait pas semblable
aux autres ecoliers de son age. M. Naeff, toujours aninie du
desir de reraedier aux defauts de I'crganisation physique de
ses eleves, parvient quelquefois , a force de peines et de pa-
tience , a leur apprendre a prononcer a liaule voix , c'est a-dire
a expriraer , par des emissions de sons anicules, les syllabes
et les mots ecrits; nous avons entendu une lecture de ce genre;
elle etait intelligible, mais penible. M. Naeff a, dans ce mo-
ment, dix eleves , tous fort jeunes ; il ]:iourrait en avoir un
beaucoup plus grand nombre. Sa maison est vaste ; la saile
. d'etude et cclle du refectoire sont grandes et commodes; der-
riere la maison est un jardin agrdablc. II est impossible,
lorsqu'on visile celle institution, de ne pas desirer vivement
qu'elle recoive des garanties publiques d'exislence et de de-
veloppement. »
Nous ajoutons ici queltjues details extraits d'une iVt»/e ftrt-
tistique iur les sourds - muets qui se trouvent dans le canton
a48 EUROPE.
de Fauci, lue a la Societe cantonale duUlite puhlique ( Voyez
Re\<. Enc , t. xxix , p. 879), par M. le professeur Gindroz.
Ces fails sont puises dans les renseignemens officiels , fouriiis
par laapasteurs. Dans 67 paroisses,il n'y a point de sourds-
muets; les 55 autres en compteiit i52. En portant la population
du canton a i55, 000 dines, on trouvequ'il y a environ ww^oz/ro'-
muet sur 1000 habitans. Lc district de Moudon , sur une
population de 6,602 habitans, a 43 sourds - muets ; celui de
Payerne , 25 sur 6,095 habitans; celnid'Aubonne, 20 sur6, 638;
enfin, celui de la Vallee, 12 sur 3,938. II serait curieux de
rechercher a quelles causes physiques on doit attribuer ces
disproportions bien marquees. En considcrant ces i52 sourds-
muetssous le rapport de leur aptitude a recevoir les secours
de I'education , on pent les classer de la raaniere suivante :
66 sont tres-susceptibles d'education, 70 ne paraissent propres
a recevoir aucune espece de culture intellectuellc , a cause de
leur age, ou de leur etat maladif, ou d'une imbecillite voisine
du cretinisrne ; x6, enfin, forment une classe intermediaire
avec laquelle on pourrait essayer quelque instruction : mais
le succes serait douteux. La plupart de ces infortunes appar-
tiennent a des families peu aisees, ou m^nie qui se trouvent
dans I'indigence. Sur les 82 qui feraient esperer quelques resul-
tats des soins que Ton donnerait a leur education, 26 seulement
pourraient contribuer aux fraisnecessaires. M. Gindroz expriroe
le Yoeu, etlaisse concevoir I'esperance que legouvernement de
son pays s'occupera enfin d'amellorer le sort de ces infortunes,
et profitera des ressources et des lumieres que lui offrent d^ja
I'etablissement et I'expcrience de M. Naeff.
Fribourg. — Societe cV antiquaires . — Le canton de Fri-
bourg comme plusieurs autres parties de la Suisse , oii les Ro-
mains avaient des etabJissemens considerables, est riche en
antiquites precieuses, que I'insouciance a laissees jusqu'a pre-
sent enfouies et ignorees. La decouverte, due au hasard de
plusieurs monumens tumulaires, de mosaiques precieuses, et
de divers debris des tems antiques, vient de reveiller le zele
de quelques amis des sciences et des arts. lis se sont reunis et
ont fait un appel a ceux de leurs compatriotes qui voudraienl
encourager une enti'eprise utile, et honorable pour leur pays.
Les citoyens les plus disfingues du canton forment le noyau de
cette societe ; ils ont publie un prospectus ou ils indiquent ainsi
le but qu'ils se proposent : « 1° faire fairedes fouilles dans les
endroits oil des decouvertes anterieures, ou bien les indica-
tions de personnes instruites pourraient faire concevoir quel-
que espoir de succes ; 2" recueillir les divers objets curieux
SUISSE. — ITALIE. a/Jr,
deji decouverts, qu'on tacherait d'obtenir graluitement, ou
en les payant, des personnes qui les possedent ; 3° reunir dans
un meme local et posseder en cornmun tons les objets qui se-
raient decouverts , achetes ou donnes. A cet effet, tout socie-
taire s'engage a contribuer pour sa part aux frais fails pen-
dant I'annee, dans Ic but indique. Des que le nombre dcs
societaires aura atteint celui de 20 , ils seront invites a se reu-
nir pour nommer la commission directrice qiii aura son yire-
sident et son secretaire , et sera chargee de rediger un projet
de reglement, afin de donner plus de stabilite a I'associaiion
et d'encourager les dons volonlaires. » Depuis la publication
de ce prospectus, le nombre des societaires s'est augmente ra-
pidement et a deja depasse le terme fixe pour retablisscment
definitif de la societe. A — e.
ITALIE.
Propagation de la vaccine en Savoie eta Piaguse. — Tandis
que I'experience vient chaque jour confirmer de plus en plus
I'efficacite de I'inoculation du vaccin , il est affligeant de voir
despeuples, aveugles par I'ignorance et par la superstition,
s'obstinera nepas accepter cebienfait de la science, et Ton doit
rendre graces aux gouvernemenseclaires et aux bommes genc-
reux qui s'efforcent, en lultant contre de funestes preventions,
depropager la vaccine. Nous apprenons que, dans la Savoie, le
nombre des vaccinations , pendant I'annee 1824, s'est eleve
jusqu'a 4,252, tandis qu'en 1823 il n'avait ete que de i,3ii.
Cet avantage est du au zele de la Commission etablie pour la
propagation de la vaccine, et aux soins des liommes de I'art
qu'elle a charges de vaccinergratuitement dans toutes les com-
munes. Nous nous empressons de rendre ici justice a M. Lur
Stulli, membre de la Commission de sante et raedecin en
chef de I'hopital civil de Raguse. Ce medecin philosophe a
preserve cette contree des ravages periodiques de la variole
auxquels elle etait exposee. Apres avoir etudie a Bologne et a
Padoue la philosophic et la medecine , surtoul sous le cclebre
Galvani , il connut a Florence I'anatomiste Felix Fontana ; a
Naples, I'infortune Cirillo, et le respectable Cotugno ; puis, il
rapporta dans sa patrie I'instruction qu'il avail jjuisee dans la
societe de ces illustres savans. Nomme I'un desquatre niede-
cins de Raguse, a I'epoque oix le pays etait organise en repu-
blique, M. Stulli voulut rivaliser de zele avec son gouverne-
men t;ilseproposad'introduire la vaccine parmisesconcitoyens,
et triompha de tous les obstacles que lui opposaieni I'inexpe-
a^o EUROPE.
I ience et rerrenr. II publia uii catecliisme dans les deux iangues
italienne ct illyrique, pour enseigner cette mdthode, et le fit
distribuer gratis dans toute la republique. II celebra en inenie
teins la dccouverte de Jenner , dansuri poeiiie qu'il Ct impri-
raer , en 1804 , a Pesto. Depuis, il n'a jamais cesse d'envoyer
a ses dejjens dans les campagiics des lionimes liabiies qui ,
coinnie autaul d'apolres de la sanle , dt'truisaient les germes
de cette fa tale nialadie. C'estpendantdouzeanneesque M. Stulli
s'est acquitle de cette noble mission, sans avoir ni recu, ni
soUicite aucune recompense de son gouvernement ; il n'a etc
inspired que par I'interet de sa patrie , a laquelle il a donne en-
core d'aulres preuves de devoument ; en s'occupant , par exem-
ple, d'arreler la peste qui s'clait introduite a Raguse, vers la
fin de 181G. Nous avons juge conyenable de signaler un
lionime qui ne se lasse point de repandre les luDiieres unique-
raent au profit de I'humanite.
Litterature classique. — Publication piochaine. — M. Joseph
PoMBA s'est fait un nom celebre dans la republique deslettres,
par la belle collection des Classiques latins , qu'il continue de
publier avec une louable exactitude. L'accueil favorable qu'a
obienu cette entreprise, I'engage a en commencer une autre ,
non moins precieuse, a laquelle il donnera les niemes soins,
celle des Classiques grecs. II annonce qu'elle doit contenir les
historiens, les ora'.eurs et les poetes. Le format et le papier
seront les memes que ceux de la collection des classiques la-
tins. Un choix de la meilleure version latine de chaque aufeur ,
et des meilleures notes que renferment les commentaires les
plus estimcs, rendra surlout cette edition fort recommandable.
On y irouvera, par exemple, les orateurs de Reiske , I'Hero-
dote de Schweighoeuser , le Thucydide de Gottleber et de
Bai'ero , I'Homere de Heyne, etc., ])uis, tons les morceaux
inedits, recemment decouverts, et cjue n'offre aucune edition
precedente. Le premier volume qui paraiira est I'lsocrate du
respectable Coraj , avec les notes de ce savant, traduites en
latin, et la version latine du texte, par Auger. Cette edition
d'Isocralesern, en outre, tnrichiede diverses notes de M. Mus-
toxidi, de variantes que cet erudit a puisees dans un raanus-
crit de la bibliotheque ambrosienne a Milan, enfin, d'un viede
I'oraieur aihenien, dont il a du la decouverte a ses doctes re-
cherclies. -
Des que I'editear aura donne les deux premiers volumes de
celte L;rande coliectioii , i! en piibliera un , tbaque mois,donl
leprix sera de 32 centimes la feuille. II y aurauu certain nom-
bre d'exemplairei imprimes sur un papier magnifique. F. S.
GRECE. — ESPAGNE.
GRECE.
Duel de deux Souliotes. — Le fait suivant, dont nous lisons
la relation dans un journal impriine en Grece, nous a para
fournir un exemple digne d'etre imite par Jes militaires de
tous les pays. — «Denxjeiines Souliotes de la garnison de Mis-
solonghi, se trouvant un jour a table, prirent qnerelle, ct
ctaient prets a s'allcr battre. — Fiere, dit le ])lusieune, si tu es
un brave, nous n'avons pas besoin de nous battre I'un contre
I'autre, etdenous exposerainsi amourir avec ignominie. Mais,
marchons a I'ennemi ; et la, nous verrons quel est le plus brave
de nous deux. — A la bonne heure, repondit I'autre. — Aus-
silot, ils lirerent leurs sabres et coururent vers le camp des
Turcs : le plus age, apres avoir tue cinq des soldats ennemis ,
tomba lui-meme atteint d'une balle : niais le plus jeune, qui
en avait deja tue dix , voyant son compagnon etendu par terre,
se diiige vers lui, I'emporte sur ses epaules, et gagne les re-
tranchemens, n'ayant ete que blesse d'un coup de pistolet dans
sa retraite. «
(Exlraitdujournal intitule :Z'^wiV/e/rt/oi,janvieri 826. N° 1 76.)
ESPAGNE.
Introduction de la cochen'dlc. — Vers a sole dits de la Chine.
• — On travaille avec beaucoup d'activite , dans plusieurs villes
des provinces meridionales de I'Espagne a V acclimatation de
la cochenille. T.a Societe economique de Cadix a reussi dans
celte utile entreprise, au dela de ses esperances. A Murcie et
a Carthagene , on a fait des essais qui ont presente les plus beu-
reux resullats. On sait que ce precieux insecte se nourrit des
feuilles d'une espece particuliere de cactus, qui, depuis des
siecles, prospere en Andalousie , et sert a former des haies
iiopenetrables autourdes vignes et des bois d'oliviers.
On a inlroduit aussi a Murcie les vers a soie de la Chine, on
vers a soie blanche, dont les produits sont superieurs en qua-
lite et en quantite a ceux des vers ordinaires Cette importanic
amelioration est due au zele de D. Thomas Serrano qui, apre>
une vie consacree au bonheur de sa palrie, a ete force de clier-
cher a Gibraltar un asile contre les persecutions de la faction
servile. M. Serrano, qui a letabli en Espagne I'ancien usage
des silos, se propose d'adresser a M. Ternaux un memoire sur
cette branche de I'induslrie ruiale.
Ce patriote cclaire est aussi I'auteur d'une prcjjaration inge-
nieuse, au moyen de laquelle la poinme d'amour, [tomate)
25i EUROPE.
conserve pour un teins indcfini son parfum et ses qualitcs, et
peut, sousitn petit volume, etre transportee a de grandes dis-
tances. Ce procede consiste a pulveriser le fruii , apres I'avoir
fait secher au soleil et au four. Pour consoz'ver la poudre qui
en rosulte, il suffit de ne point la laisscr exposee au contact
de I'air.
Proccdes de.la censure. — La censure deBarcelonne a refuse la
])erniission d'iniprinier une traduction es])agnole A'Ourika. Les
censeurs de Valence n'ont pas etemoins rigoureux envers cette
intcressante victime de I'aniour. Le deci'et de ce dernier tribunal
est concu en ces lerines : « II n'est pas con\ enable que Ton iin-
])rinie ce roinan , ecritpariineduchesse. La lecture pourrait faire
croire qu'il y a des personnes qui embrassent I'etat religieux
par suite d'unc conlrainte morale. Signe Fr. Antonio Diago. >>
/.-/. DE Mora.
PAYS-BAS.
Utrecht. — Culture dcx Jleurs. — Expositions publiques. —
Chaque annee il y a dans la partie sej)tentrionale du royaume
des Pays-Bas, deux expositions de plantes : I'une a Harlem,
dans les premiers jours de juin; I'aulre a Utrecht, vers la fin
du meme mois. Touies les deux ont ele fort brillantes cette
annee. Des prix ont etc distiibuds pour les planles les plus
belles et les plus rares. C'est une institution digne d'un pays
oil les plantes rares etles fleurs ont toujours etc cultivees avec
tant de solns et de succes.
Bateaux a vnpeur. — L'usage de ces bateaux se multiplie
de plus en plus dans la parlie septentrionale du royaume. La
ville de Rotterdan) oil se Irouve etablie la Societc nationale des
bateaux h vapeur, est le centre de cette navigation. Outre le
bateau (jui part pour Londres, il y en a un qui renionte le
Rliinjusqu'a Cologne , un qui fait journellement la route d'An-
vcrs, et un trnisieme qiii va jusqu'a Middelbourg. II existe
pareilleiuenl a Amsterdam, une societe qui fait parlir rcgulie-
reinenl des bateaux pour llambourg. La navigation par la va-
peur a ete etablie anssi pour des Irajets d'une moindre impor-
tance: entre Rotterdam et Dordrecht, Amsterdam et Harlingeii,
Amsterdam el Sardam, etc. Un enorme bailment a vapeui' a
ete construit, aux fraisdu gouvernement, prcs de Rotterdam;
il est destine pourle vovage des Grandes-Indes.
Utrecht. — La Socie.'r des arts et des sciences de cette ville
a tenu sa seance generale annuelle, le 23 juin dernier. M. le
pr ofesseur de Fremens , president, apies avoir pave un juste
PA. YS-BAS. — FRANCE. iSi
Iribut de reconnaissance a la memoiie des inembies morts
dans le courant de I'annee , a distribuc les mcdailles adjugees
I'anneeprecedenteaMM. Bennet, Van Wys Rz et J. Lenting,
dont les memoires avaient ete juges dignes des prix proposes.
Les questions mises au concours sent en trop grand noin-
bre et tiop ddtaillees pour que nous puissions les tianscrire ici
texluellement. La plupart des questions de physique ont rapport
aux provinces septentrionales des Pays - Bas ; parmi celles qui
sont d'un interet europeen, nous signaleronsune question sur
la convenance et les avantages de I'enseignement en langue la-
tine, tombc en desuetude ailleurs, mais conserve dans les Pays-
Bas; d'autres, sur Ossian, considere comma le j)ere et le fon-
dateur de la litterature germanique ; snr I'influeuce de la con-
federation anseatique ; sur le commerce des Pays-Bas; sur la
distinction des puissances legislative, executrice et judiciaire,
dans un etat; sur le vrai but de la societe civile; sur les prin-
cipes du droit crlminel, etc.
Les reponses devront etre envoyees , /ranches de port,
avant le i*"' octobre 1827 , a M. le professeur ScHROEDER,a
Utrecht.
Amsterdam. — Concert au profit des Grecs. — Le i5 juin,
on a execute dans cette ville au profit des Grecs I'Oratorio
das IVeltgericht (le jugement dernier) de BI. Frederic Schnei-
der, compositeur allemand. Plus de 1^0 personnes ont con-
couru a I'execution de cette magnifique composition musicale
qui a obtenu tons les suffrages. X.
^ FRANCE.
lie de la Camargue ( Bouches-du- Rhone ). — Assainisse-
ment et fertilisation ( par un nouveau mode de culture) de
cette lie. — L'ile de la Camargue , situee aux bouches du
Rhone qui parait I'avoir formee par atterrissemens, est ua
bassis. triangulaire de 74,200 hectares de superficie. 3i,3oo
hectares sont en palurages naturels, ou en terrains vagues ;
19,900 en etangs et en bas-fonds sales; 12,600 seulement se
trouvent en etat de culture , et il y en a 10,400 en marais.
Ces niarais, foyer d'infection , produisenl parmi les animaux
de nombreuses epizootics; chez les hommes, des fievres inter-
mittentes qui se renouvellent chaque annee, des fievres bi-
lieuses et putrides dont la frequence egale le danger, enfiu
des epidernies qui nchevenl la mine des malheureux habitans.
Tel est, presque mot pour mot, le temoigtiage de M. Poule
ingenieur de I'arrondissement d'Arles, dans lequella Camargue
est siluee , et celui de M. Garella, ingenieur en chef du de-
a 5/, FRATVCE.
parteiuent des Bouches-du-Rli6ne (i). Lcuis pr^d<5cesseurs les
iiliis liabilei avaient tenulc memelangnge, fruit des mcmes ob-
servations. On pourrail citer, enlre auties. MM. Gorsse, Carrier
ot Crognard. Mais il existe nn temoignage plus decisif encore
<t ])ltis effrayant , celui des registres de I'etat civil d.ins les villas
((ui out Ic malheur d'avoisiner la Camargue. Ternie moyen , la
loorlaiite n'est, en Fiance, que dti qunranlieme Ac la popula-
tion. Eile est d'un vhigtieme a Saint Gilles, et, a quelqiie dif-
feience pres, dans Aries ct a Bellegarde. Enfin, M. Poule assure
([u'a Sainte-Maric, situee en Camargue raeme, elle s'eieve, ccr-
faines annecs, jtisqu'a un huitieme. Croirail-on, en lisant de
pareils faits, qu'il s'agit d'une vaste contrce placce sous le plus
beau ciel de la France?
Certainemenf, assainir un lei pays, sans songcr meine a le
feconder, serait deja un immense service. Mais trouver et
determiner les moyens de I'assainir, en decuplant par degres
toutes ses recoUes , est le problemc que M. de Riviir>F., maire
de Sainl-Gillcs, n'a pas craint de se proposer, qui fait depuis
quelques annces I'objet dc ses meditations , le siijef de ses
ocrits, de ses demarches , et qu'il sembie enfm elre parvenu a
resoudre dans un ouvrage dont la publication rccente a pro-
duit, parmi les liommes accoulumcs a considerer en grand
i'^'conomie et I'lnduslrie agricolc, une vive sensation (2).
Frappes du vaste plan d'ameliorations qu'il developpe avec
autant de sagesse que d'intcr^t , nous aurions voulu pouvoir en
donner a nos lecteurs au moins une idee sommaire. Mais nous
(i) Leurs Mcmoires manuscrits sont deposes a la direction des ponts
et chaussees, on I'aulenr d'un livre dont nous parlerons tont-a-rheure,
et qui nous fournit ces renseigcemens, a ete a portee de les consnlter.
(a) yiemoiresnrla Camargue, far M. he Riviere, niaire de Saint- Gilles,
correspondant de plusieurs Societes savantes. Paris , 1826 ; Mm" Hnzard ,
rue de I'Eperou , n° 7. In-S" de 2 1 5 p. — Sous ce titre modeste de Memoirc,
I'aulenr donne , non-seulement la statistique la plus complete de Tile, les
notions les plus utiles, et souvent aussi les plus curieuses, sur les moeurs,
les habitudes, les circonstances locales, etc.; mais , ce qui raeiltc parti-
(ulierement I'attention de tons les lecteurs eclaires, il trace le tableau le
plus neufct le phis fiappant de Vemploi des eaiix dans I'agricullure des
divers pays civilises. II passe ensuite a Texameu des systemes d'amelio-
lation proposes jusqa'a ce jour; et c'est apres les avoir lous caractcrises ,
qu'il expose son propre systeme , et ses moyens d' execution. Tout cela ,
uresente sans la moindre apparence d'exageration ou d'emphase, et avec
une marche Ires-pbilosophique, nous a paru reniarquable et convaincant.
M. de Riviere y fait preuve d'une grande varicic de connaissances , ton-
joars raoieiieet a des vaes de bien public.
DEPARTEMENS. a55
nous sommes apercus qu'il leur faudrait, pour en saisir I'em-
semble, ou connaitre les localitos, ou , corame iieus, avoir sous
les yeux \e plan du Delta du Rhone qui precede nne autre bro-
chure sur le raerae siijet , pubiiee I'ann^e dernicre par I'a'uteur.
Nous nous borncrons done a observer que son sjsteme est, a
plusieurs egards, celui de I'ancienne Egyplc. II ne doule nulle-
ment qu'on ne puisse faire , a I'aide du Rhone, ce que les
Egypliens fesaient, h I'aide du Nil, ct renouveler ainsi; dans
noire Delia la merveilieuse fecondilo qu'ils avaient su donner
ail leur. En lisant cette assertion, on eprouve etonneinent et
defiance: quand on a bien lu le Memoirc, on ne peut se refuser
a la croire demontree.
C'est la premiere fois qu'une tentalive de ce genre a el e pro-
j)os^e en Europe ; et cependant elle est developpee dans lous ses
details avec tant de justesse et de clarte, elle prcsente evidem-
ment de telles chances de succes et de profit , que tout s'em-
presse d'y conconrir. Dcja la compagnie qui doit I'execuler est
forniee : elle renferme dans son sein les hommes les plus ilislin-
giies par leur consideration personnelle, leur fortune, ou leur
position sociale. Cette promptitude a reunir les moyens d'e ;xecu-
tion exiges potir une telle entreprise est un des traits caracteris-
tiques de notre t'poque. L'agriculture a long-lems manque en
France d'un element de prosperite , qui a fait des prodiijes en
Hollande ct en Anglelerre; nous voulons dire, I'esprit d 'asso-
ciation, la facllite pour I'agriculteur de faire concourirle capi-
taliste a des speculations qui, embrassant de vasles surfaces,
doivent necessairement enlrainer des debourses considerables.
Si nous sommes, a cet egard, trop loin encore de nos voisins ,
nous fesons du moins , chaque jour, quelcpies pas nouveaux
pour les atteindre : et e'en est un grand, a notre avis, que
I'entreprise concue il y a quelques annees par M. de Riviere,
et des a present adoptee par une societe capable de la mettre a
execution. Chose etrange, mais ordinaire! cpiand tout s'em-
presse de favoriser ses vues genereuses, il semble prevoir des
obstacles dans les prrjuges locaii.x, c'est-a-dire, dans ceux ineme
de ses concitoyens qui doivent le plus gagner a ses pi'ojets
d'amelioration ! Qu'imporle ? il n'ignore point qu'on n'a ja-
mais fait du bien aux hommes sans que des hommes aient
tente de s'y opposer. D'ailleurs, il ne s'agit pas seulement de
quelquesproprielaires de la Camargue, la pernicieuse influence
de ]eursjbyers d'injection se fait plus ou moins scntir dai)S ime
grande partie des departeraens du Gard et des Bouches-du-
Rhone. Enfin , ces departemcns meme ne sont pas seul in teres-
ses dans celte vaste ct necessaire en'.reprise. C'est evidemment,
a56 FRANCE.
au contiaiie, un objel, et un gninJ objet d'ulilitii publirjue
pour la France enliere, puisque des medecins habiles et digues
de toute confiance, ont vu , deja deux fois , disent - ils , Ja
fievre jaune SQ montrer aux bords des marais dii Pian-du-
Bourg. Que M. de Riviere acheve done ce qu'il a si dignement
et si heureusemeiit commence. 11 ne trouvera plus alors que
des bi-nodictions chez ceux nicme qui aujourd'hul lui font
craindre des resistances; et il aura nierlte d'obtenir une place
dans le trop petit nombre des magistrals en qui le zele et
I'amour du bien ont eu la science pour auxiliaire, et dont les
nonis, de bon exemple , restent graves par la reconnaissance
danslu meraoire de leurs concitoyens. N. X.
Societes savantes ; Etablisseniens d" utilite publique.
Bordeaux (^Gironde). — Academie des sciences , belles-let-
tres et arts. — Cetle Academie a tenu, le 26 mai , sa seance
publique annuelle. M. Guilhe , president, a prononce un dis-
cours sur les bienfaits que I'humanite doit a la culture des
sciences et des aits. M. Blanc - Dutroujlh , secretaire, a fait
un rapport sur les Iravaux de I'AcaJemie , depuis sa derniere
seance publique. Ce rapport a etc suivi d'un compte rendu a
I'Acaderaie, au nom de sa commission d'agriculture, par M. La-
TiiRRADE.Apres la lecture du programme, faite par3I. Bourges,
M. Lacour a lu , au nom de M. Jouannet, une notice sur les
sablieres de Terre-Negre. L'auteur a su lier aux discussions
geologiques et aux decouvertes qu'il doit aux foiiilles qui ont
ele faites depuis peu, des recherches hisloriques sur la popu-
lation de Bordeaux au 11*' slecle de I'ere chrelienne, et sur
I'etat politique et moral de celte ville, a la meme epoque.
L'assemblee a ensuile entendu avec jjlaisir une clwrmanle
piece de poesie de M. Guilhe, inlitulee le clciir de lune , et I'e-
loge de Bordeaux , du poete Ausone, Iraduit en vers elegans
par M. Jouannet. — Voici les sujels des prix proposes dans le
programme : Agriculture ; « i". Quel sont les perfectionnemens
que reclament la construction des charrues et celle des ins-
trumens d'agriculture, usiles dans le depaitement de la Gi-
ronde? Quels sont les moyens raecaniques qui pourraient elre
introduits avec avantage dans les diverses cultures de ce de-
parlement ? « La valeur du prix sera une niedaille d'or de 400 f.
2°. L'Academie rappelle qu'elle a propose, en 1825, pour sujet
d'un prix d'agriculture a decerner dans la seance jjubliquo
de 1827 ," la culture d'un deml-hectare de liorin [agrostis
stoloni/era) , dans le departemenl de la Gironde. « Les con-
DEPARTEMENS. aS?
currens devront faire connaitre, avant le i*'' mars 1827, les
succes qu'ils aurout oblenus , et en fournir Ics preuTCS : le prix
sera une medaille d'or de la valeur de 3oo fr. 3° Un prix de
3oo fr. pour I'auteur du meilleur manuel (V agriculture , appro-
J)rie au departement de la Gironde. 4" Une couronne et une
medaille de la valeur de 5o fr. pour celui des proprletaires ou
des fonctionnaires publics de chacun des six arrondissemens de
sous-prefecture du departement qui auia le plus contribue, par
ses soins , a la reparation des cbemlns vicinaux de la commune.
5° n Quel serait le meilleur systeme d'assolement que Ton
pourrait adopter pour les divers points du departement de la
Gironde? » Le prix , de la valeur de 3oo fr. , sera decerne dans
la seance publique de 1828. — Navigation et arts industriels,
« Comparer les avanlages et les inconveniens respeclifs des
enduiis, feutres et raetaux, parliciillerement du cuivre et du
zinc, employes a la conservation de la careiie des navires ;
preciser le degre d'utilite des armatures, d'apres le mode pro-
pose par le cliimiste Davy, et faire connaitre dans quel cas il
convient dy avoir recours. « — « Determiner, par des expe-
riences comparatives, la qualile des liouilles d'Angleterre, de
France, et notammcnt de celles des bassins de la Dordogne et de
la Garonne. Determiner dans quel cas la buche du pin maritime,
soit par ses qualites, soit par sa valeur venale actuelle, doit
elie preferee a la liouille, pour le chauffage des cbaudieres,
des machines a vapeur, pour la fusion des metaux, pour ['eva-
poration des liquides, elc. » — « Deduire d'une serie d'obser-
vations et d'experiences , la resistance du bois de pin (pin/is
rnaritirna) , employe, soit a I'etat de pin gerame, soit a I'etat
de pin non gemmii. Examiner dans lequel de ees deux etats
cetle essence a le plus de duree, soit dans les ouvrages sous
I'eau, soit dans les constructions a I'air. Indiqucr les divers
genres d'alleration provenant, soit de pourriture, soit de
piqurcs d'insectes auxquelles il est cxpo.se. EnGn , comparer la
resistance et la duree de ce bois a celles du bois de chene. »
Chacun de ces trois prix , de la valeur de 3oo fr. , sera decerne
dans la seance publique de 1828. — L'Academie propose en-
core des prix pour la solution des questions suivantes : 1° « Pour
la recherche et la decouveite, dans le dejiariement de la Gi-
ronde , d'un gisement d'argile tres-refractaii c , propre a la fa-
brication des creusets, des enveloppes de fourneaux , des bri-
ques composant les fours areverberes, ete.»Piix de 3oo fr.
— 2" Pour la recherche ct la decouverte, dans chacun des
arrondissemens de la Gironde, d'une carriere de pierre cal-
caire , propre a la fabrication de la chaux hydraulique. « Prix
T. XXXI. — Juillet 1826. 17
u'.8 IKANCK.
de 3oo fr. — 3". "Pourdes essaisprcseiiiaut des r^siiltalsdccisiCs
sur le melange des fontes francaises, et notaminent de celles dii
P^rigord et des Landes, afin de parvenir a oblenir une fonie
de scconde fusion propre a ^tre liinee , force et alesee. « Prix
de aoo fr. Ces trois prix seront decernesdans la seance piibliqne
de 1827. — Belles- Lettres. — L'Academie decernem, dans la
meme seance, tine raedaille d'or , de la valeur de 200 fr. , a la
meilleure piece de vers qui liii aura etc adrcssee. Le genre ot
le snjct en sont laisses au choix dos auleiirs. Los morceaux
priiscntes ne devront pas contenir plus de 200 vers, ni moins
de i5o. EUe pro))Ose enfin , pour sujet d'un prix , consistant en
une medaille d'or de la valeur de 3oo fr. , la question suivanle :
« Determiner I'influence qu'eut Charlemagne sur le progres dos
lumieres ; determiner de meme quelle fut cello de Francois V^. ^
Lton (Rhone). — Academic des sciences, belles-lettres et
artt. — Seance publique du 3o inai. — Cette seance etait spc-
cialement consacree a la reception de M. Bredin. Le nouvel
academicien avail choisi pour sujet de son discours la dignitr
de I'hornme, question d'un haul inleret, mais qu'avait deja
traitce avec beaucoup de talent M. Torombert, lors de sa
reception a I'Academie. Le souvenir du pren/ier discours n'a
pas contribue a faire nccueiilir favorablenient le second par
ceux des assistans qui les avaient entendus I'un etl'autre; ils
ont blame , dans le dernier, des longueurs et le manque d'u-
nite et de liaison. Le secretaire perpetuel de I'Academie,
M. Dumas, a lu un eloge historique de M. de Verninac, pre-
mier prefetdu Rhone, dont I'adminislration paternellea laisso
dans ie cceur des Lyonnais de profonds et durables souvenirs.
— M. Torombert a prononce I'eloge de iM. Vouiy-de-la-Tour,
ancien premier president dc la Cour royale de Lyon, mort il
y a peu de terns. ( f^oy. ci-dessus, p. 2o3.) On salt que M. To-
rombert est I'un des hommes dont le talent fait le plus d'honneur
a la ville de Lyon. M. de Trelis a termine la seance par la lec-
ture de deux apologues ])leins de finesse et de sel, auxquels
tout I'auditoire a vivement applaudi. B.
PARIS.
Institut. — Academic des sciences. — Mois de juin 1826.
— Seance publique annuelle du 5 juin. — Presidence de
M. PoissoN. — Pri.c et recomj/enses dccerne.i. — 1° Prix de
Physiologic experimentale^iondi: par M. de Montyon. L'Aca-
demie a decide qu'il n'y a pas lieu, celle annee , a decerner ce
prix. Mais, parmi les ouvrages soumis a son examen, elle a
distingu^ celui de M. le docteur Brachet, de Lyon, qui a pour
I
PARIS. 259
litre: Recherches experirnentales sur les J'onctions du systeme
nerveux ganglinnnaire. Ce memoire contient un grand nombre
d'experiences sur piusieors des questions les plus importantes
de la physiologie. Suns ie ptu d'ordie de la redaction et scs
lacunes frequcnics, TAcademie n'aurait point balance a cou-
ronner tet ouvrage. Elle se borne a accorder a M. Brachet, a
litre d'encoiirageinent, le montant de la somme de 8()5 fr., en
I'engageanta terminer et a perfecliciner son travail, avant
de le livrer au public. — Un autre ouvrage a fixe Tattention
de I'AcademJe; e'est celui fju'a envoye d'ltalie M. !e docleur
Rcgulus Lippi. Cet ouvrage, intitule : Illustrations anntomico-
cumparees du sjsteme lymphatique-chylifere , est reruarquable
sous le rapport des fails qu'il annonce et de I'execution des
planclies qui Taccoinpagnent. Mais les commissaires de I'Aca-
demie, ii'ayant pu verifier d'une maniere satisfaisante les fails
princij)aux qui y sont annonccs, ont juge convenable de
renvoyer le jugement definilif a I'ann^e prochaine, en reser-
vant a M. Lippi le droit de concourir. — 0° Prix de M. de
Montyon pour le perfectionnement de I'art de guerir. L'exa-
men de I'Acadeniie n'a compris que les fails publics depuis le
mois de juillet 1821 jusqu'a la fin de I'annee iSaS. D'apres
I'avis unanime de sa commission , I'Acadeinie a decide qu'il ne
serait pas decerne de grands prix pour I'annee 1825, et que,
sur la somme deslinee a ce double eniploi, 11 en serait pre-
leve une de 16,000 fr. pour etre distribuee a titre d'encou-
ragement de la maniere suivante : Pour la medecine, a M. Louis,
auteur d'un ouvrage intitule : Recherches anatomico-patholo-
giques sur la phtisie , 2,000 fr. — L'Academie cite avec cloge
le zcie et le devouement de M. le docteiir Bailly, qui a fait
des recherches sur les ficvres pernicieuses des environs de
Rome, et MM. Audouard et Lassis, pour les travaux qu'ils
ont entreprls sur I'examen des causes de la fievre janne el des
maladies contagieuses. — Pour la chirurgie : a M. Civiale qui
a public plusieurs memoires imporlans sur la lithotritie , ou sur
les moyens de broyer les calculs dans la vessie, et qui a fait
avec succes un grand nombre d'opcraiions , une somme de
6,000 fr.; — une somme de 2,000 fr. a chacun des trois mede-
cins donl les noms suivent : a M. Amussat, auteur d'un me-
moire tres-remarquable sur la structure du canal de Vuretre;
a M. Heurteloup, auteur d'un memoire sur I'extraction des
calculs par I'urelre, et qui a tres-ingenieusenient perfectionne
les instruraens adaptes a cette operation ; a M. James Leroy
(d'Eliolles) qui a public, en 1826, un ouvrage sur le meme
sujet, el quia, le premier, en 1822, fait connaitre les instru-
a6o ' FRANCF,.
mens qu'il nvait invcntcs ct qu'il a deptiis essayc de perfcc-
tionner; — cnfin, I'Acadt'mie deccine une pareille somme lic
2,000 tV. a M. ]c doclcur Deikau, a'ltcur de difforens me-
moircs, pour avoir principalemcnt perfecfionne le cathelerisme
,!c la troinpc d'Eustaci'ie , et pour avoir gucri, par ce nioycn ,
quekiues indlvidus affeclcs de cette cause rare de surdity. —
3" Prix de M. de Moniyon, en favcur de celiti qui aura de-
couvert le inoyen de rcndre un art oil iin metier rnoins i/isa-
lubre. Aucun travail n'a pani a rAcadeinie digne do ce prix.
— "i^ Le prix d'astronomie , fonde par M. Dclalaiide, a ete
decerne a I'ouvrage qii'a publie recemment le capitainc Sabine,
sous cc titre : Account of experiments to determine the figure 0/
the earth by mean oj the pendulum vibrating seconds in diffe-
rent latitudes. Londres, iSaS; et (|ui renfcrine les resullats
des nonibreuses observations du pendule qu'il a f.iites dans
I'heiuisphei'e boreal, depuis Je Spilzberg jusqu'a Tile poilu-
gaise de Saint-Thomas.
Prix proposes. 1° Prix de physique pour 1827 : presenter
'histoire generale et comparee de la circulation du sang dans
les quatre classes d'animaux vcrtebrcs, avant et apres la nais-
sance et a differens ages ; une medaille d'or de 3, 000 fr. —
2" Prix de mothemaliques pour 1827 : Methode pour le calcul
des perturbations du mouvement elUptique des comeles , appli-
quee a la determination du prochain relour de la comele de
1759 et au mom'cment de celle qui a cte observee en 1 8o5, 1819
et 1822. Une medaille d'or de 3, 000 fr. — 3° Prix de mathe-
maliqucs , propose en 1822, et remis pour 1827. 1° Determiner
par des experiences multipliees la dcnsitc qu acquierent les liqui-
des , et specialement le merrure , feau, Vnlcool et I'ether sulfu-
rique, par des compressions eqaivalenies au poids de plusieurs
atmospheres ; 2° mesurer les effets de la chaleur produits par
ces compressions. Une medaille d'or de 3, 000 fr. — 4° Prix
fonde par M. Alhumbert. L' Academic, n'ayant point recu de
memoiies satisfaisans, a arrete que les sommes deslinees au
prix seront reunies avec celles qui doivent cclioir, pour former
un pilx de 1,200 fr. qui sera dt'cernc, en 1829, au mcilleur
memoiie sur la question stiivante : Exposer d'unc maniere
complete et avec des' figures les changemens qu'eproui'ent le
squclette et les muscles des grenouilles et des salamandres,
dans les differcntcs epoques de leur vie. — 5° Prix de physio-
logic experimentale fonde par M. de Montyon. L'Academie
adjugera, en 1827, une medaille d'or de la valeur de 895 fr. , a
I'ouvrage imprimc ou manuscrit qui lui aura ete adresse , d'ici
au i*"" Janvier 1827, el qui lui paraitra avoir le plus conlribue
PARIS. a6i
aux progrts de la jiliysiologie cxperiiiientale. — 6" Prix rlc
mecanique , fonde par M. de Monlyon. L' Academic deceniera,
en 1827, 1111 prix de 1,000 fr. a cclui qui aura invente ou per-
icctionne des iiisUumens utiles aux progres de ragricuifure ,
desarts mecaniques et des sciences. — 7° Grands prix du legs
Montyon pour las perjecUonnemens de la tnedecine eX de la
chirurgie, ainsi que pour les tnnjens de rendre un art on un
metier tnoins insulubre. Les sonimes qui seront luises a ia dis-
position des auteurs de dt'couverles ou des ouvrages couronn^s
lie penvent etre indiquoes d'avance; mais ces somines pour-
ront'surpasser de beaucoup la valeur des plus grands prix dc-
cernes jusqu'a ce jour, en sorte que les auteurs soient dedom-
inages des experiences ou des recherches dispendieuses qu'ils
a^Mnicnt entreprlses, et rccoivent des recompenses propor-
lionnees au service qu'ils auraienl rendu, soit en prev«nant,
soit en diminuant beaucoup I'insalubrite decertaines profes-
sions, soit en perfectionnant les sciences medicales. Les me-
nioires et les machines devronteire remis au secretariat, avant
le I*"' fcvrier 1827; les prix seront dccernts, dans la seauce
publlque de la ineme annee. — 8" Le prix d'astronotnie fonde
par M. Delalande et cousistani en uns medailied'or de 625 fr. ,
sera decerne en 1827. — 9" Prix de siatistique : I'Academie
ayant juge qu'il n'y a jxiint lieu a ducerner de prix cette
annee, il sera reimi avcc celui dei826, pour etre decerne
en 1827, et coiisistera dans une medaille d'or de 1,060 fr.
Apres la proclamation des prix decernes et proposes, M. Cu-
viER a lu VEloge historique de M. de Lacepede ; M. BEUDA^■T,
un meinoire sur I' importance du j-egiie mineral, soux Ic rap-
port de ses applications ; ^A. Fournier, VElogc historique de
M. Breguet; M.Dupin, un memoire sur le sens de I'oui'e,
considers comme instrument de mesure dans les applications
aux arts et aux lettres. Ces quatre ouvrages, dont la lecture
a ete ecoutee avec interet , ont depuis ete imprimes.
— Seance du iijuin. — • M. BiLLERKy, de Grenoble, adresse
un travail intitule : Memoire historique , scientifique et pole-
mique surun nouvel hydro-calefacteur , <i la vapeur d'eau , j/ar
V intermediaire d'nn recipient condensateur , place au milieu
il'un reservoir rempli de ce liquide, avec grnvure. ( M. Dulone
j)rendra connaissance de la leltre de I'auleur, et fcra un rap-
jiort verbal sur I'ouvrage.) — M, Brejviner, pas'eur de TEglise
d'Ecosse, adresse a I'Acadeinie an memoire sur le magnetisnie.
(MM. Ampere et Fresnel , comraissaires. ) — Les sections de
mecanique, de geographic et de geometric sont invitees a s'as-
seinblur pour presenter des candidats aux [)laces de correspou-
26j FRA.NCE.
dans vacaijtes par le doces de MM. Reichenhach , Lcevenhorn
et Kramp. — M. le docleur llEuuTELnup adrcssc une ktfre
qui a pour objet de reprc'senler que, dans les memoiios qui
ont obtenu Ics cncourngemeiis de rAcadeniie, 11 n'a pas cn-
couru le rcproche de dissimTiler les cas d'insucct's des melhodes
curatives. — M. Solifr jiresente uii projet d'ex])eriences cju'il
a coniniencet's , el qui ont pour but dc delcrniiiu'r Taction du
soleil sur les fleursincolores. (MM. Tcssier, de Mirbel cl Fres-
ncl, comniissaires. ) — M. Leymf.ries ex])rinic le desir de
communiquer les resultals de son experience dans ie traitement
de la (ievre jaune a Barcelone. L'auteur est prevenu que I'Aca-
demie est disposee a recevoir ses oominunicalions. — M. I'ou-
REAU DE Beauregard ])ropose a I'Academie un medicametit
preservalif et curatif de la fievre jaune. M. Dumeril rend un
comptc verbal d'un ouvrage du nieme auteur : Fues prophjlac-
tiques et curatives sur la fievre jaune. — M. Latreille presente
des ecliantillons de cardium edule, coquilies marines Irouvees
a Abbeville, dans un sol d'alterisseinent , a sept metres environ
de profondeur , et a quatre lieues de la mer ou \ ivent ces ani-
maux. Ces objets sent envoyes par M. Baillon. — M. Huzard
fait un rapport verbal sur I'Duvrage intitule : Etudes de che-
vaux dessines d'apres nature au Haras royalde Neustadt sur la
Dosse, dans la marcJie de Brandebourg; lithographiees a Paris,
en 1825, par Frederic Burde. L'auteur sera reniercie au nora
de I'Acadeniie qui I'inviie a poursuivre ses utiles iravaux. —
M. Freycinet cominuni(jue a I'Academie I'exlrait d'une lellre,
dateede Gibraltar , 21 mai 1826, et adressee par M. Gaymard,
niedecin naturaliste dans i'expedition conimandee par M. d'Ur-
ville. — MM. THE^ARD et de Rossel font un rapj)orl sur un
Memoire de M. Belin de Laveal, ayant pour litre : Des Moyens
de conserver I'eau sans alteration sur les bdtimens en mer. II
en resulle que TAcadeinie ne pent donner son approbation
anx precedes de M. Belin. ( Adopte.) — M. Michelot, clief d'in-
stitution , annonce, par une letlre qu'il a recue deM. Billau-
DEL, ingenieur des ponis et cliaussces a Bordeaux , que ce
dernier a dccouvert, dans une carriere exploiiee sur les bords
de la Garonne, une caverne oil il a recueilli une inasse consi-
derable d'osscniens de divers aniinaux , parnii lesquels il a dis-
tingue des niachoires d'liyene, de lion ou de tigre, de blaireau;
des OS de bceuf,elc. etc. On repondra a cetie leltre,en tomoi-
gnant le desir que rAcadcraie a de conuaitre les fails annonces
par M. Billaudel. — M. Navier, presente un Memoire dc
M. Sartoris, sur un systeme de barrage et de vannes projire
a faciliier la navigation des ilvieres. (MM. de Prony, Fresnel
PARIS. a63
ft Navier.) — M, Chevreul acheve la lecture de son Memoire
inlitule : Recherches chirniques sur la teinture; application du
bleu d'indigo et du bleu de Prusse sur la sole. (MM. Vauquelin
et Thenard, commissaires. ) — M. Ic D"^ Mdbphy presenie un
ouviane manuscrit, intitule : Dissertation sur V ojfinile qui existe
cntrc le phcnomcnc des marees ct le principe de la temperature
de ratrnosp/iere. {MM. Damoiseau , Ampere et Dulong , com-
missaires.) — M. Turpln lit un memoire intitule : Organogra-
p/iie vegetale : Observations sur qrieique \egetaux mioroscopi-
qucs et surle role que leurs analogues jouent dans la formation
et dans i'asservissement du tissu cellulaire. (MM. Desfontaine,
Mirbel, Geoftroy Saint-Hilaire, de Blainville et Coquebertde
Montbret. )
— Du 19. — M. Despretz fait part de diverses experiencf s
qu'il a commencees sur la clialeur, et demande que I'Academic
Ini fasse connaitre si elle pense qu'il soil avantageux de les
continuer. (MM.Gay-Lnssncel Arago, commissaires.) — M. Ser-
voz adresse une fiole d'nne encre de sa composition (ja'il desire
soumcttre a la commission cliargee de rechcrcher Ics moycns de
prevenir les faux. (Renvoyee a la commission.) On renvoie h
la meme commission dos ecliantillons d'ecriture adresses par
MM. DuROSiEz pere et fils, et qui, disent-ils , snnt ecrils avec
une encre indelebile. — M. Maygrier adresse un paquet ca-
chete contenant la description d'instrumcns lithotripleurs de
son invention , pour etre di'pose au secretariat. (Acrorde. )
— M. Arago, fait sur-le-champ un rapport verbal sur un Me-
moire de M. Brewster, presente dans la seance, et intitule : Sur
le pouvoir refractif de deux nouveaax Jluides inineraux.
— M. Arago depose, de la pari de M. Savart, un jiacjuet
cachete , contenant uii travail dont ce physicien veut se con-
server la propriete. (Accorde.! — MM. Mathieu et Damoiseau,
rapporteurs, font un rapport sur le graphometre de perspective
de M. Boscary. En voici les conclusions : « Nous pensons que
cet instrument execute avec soin offrira , sous le rapport gco-
melrique, toute la precision desirable pour les details dans les
dessins de perspective, raais par un precede un peu long; que
i'expsrience seule, quant a I'operalion pratique, pent en faire
connaitre les avantages ou les dcfatils; que cepcndant rAcadt-
mie ne verra jias sans interet la perseverance de I'auteur dans
ses reclierches sur la perspective, qui ne jieuvent manquer de
produiredesrcsultatsuliles.fApprouvc.) — M. Magendie lit une
note sur I'application diiecle du galvanisme aux nerfs de I'or-
bite et sur I'cmploi de cc moyen pour le traiiement de I'smau-
rose (goutte screine). II resuUe de ccs experiences qiie la piqure
264 FRANCE.
des brandies orbilaires de la cinquieine paiie n'est point dan-
gereuse, qu'elle fait eproiiver un senlinient analogue a celui
fju'on eprouve quand le iierf cubital est froisse; rpie I'applica-
• ion du galvanisme aux brandies frontale et iacrymale du neif
ophlhaiiuiquepeutetre utile dans letraiteinent des amauroses in-
completes.— !MM. TuENARoet de Blainville I'ontun rapport
sur la mclhode dc dessiner au trait sur la picrre imaginee par
M. Laukent. lis pensent « que ce nouveau proccdii est reclle-
ment fort avantageux, surlout pour les dessins d'anatomie,
d'histoire naturelle, d'archlleclurc, d'orucmens, en general
pour tous les dessins compliques et de petitcs dimensions;
d'abord , en ce. qu'il est plus expedilif; ensuite, ea ce qu'il
rend le dessin original d'une maniere bien plus exacte, sans
agrandissement ni reduction sensibles, et dans le meme sens.
Ea consequence, ils croient que M. Laurent ne saurait trop
tot rendre public son precede, aCn qu'il atteigne par les re-
cherchesdeslithographes toutela perfection dont ilpeut encore
etre susceptible. » M. Dupetit-Thouars fait quelques obser-
vations a ce sujet. L' Academic adopte les conclusions. — M. Du-
PETiT Thouars lit un memoiresur la couleur verte des vege-
taux. — M. Daubree lit des observations sur la degradation
de la couleur du bleu de Prusse, dite en teinture bleu Rairnond.
(Renvoye aux cominissaires norames pour le Memoire de
M. Chevreul.)
— Du a6. — II est donnc lecture d'une leitre qui a pour
objet de rappeler que M. Mascagni, professeur d'anatomie a
Florence , a consigne depuis long-tems , dans des ouvrages
rendus publics, plusieurs decouvertes qui sont aujourd'hui
annoncees corame recentes; savoir : i° I'emploi des bi-carbo-
nates alcalins pour saturer les acides qui se degagent dans
I'estomac; i° I'alcalescence donnee aux urines par ces sels pris
en boisson ; 3° de la dissolution de la pierre dans la vessie par
I'usage de ces sels. — M. Gaudin communique, dans une lettre
ecrite de Rochefort, I'opinion qu'il se forme de la nature du
calorique. II propose a ce sujet diverses experiences. (Sa lettre
est renvoyee a une commission composee de MINI. Ampere et
Fresnel.) — M. Dutrochet, correspondant, lit un memoire
au sujet de la fontaine periodique du Jura , appelee \ajbntaine
Ronde. II propose une explication de la periodiciic de I'ecoule-
ment. — M. Corout, manufacturier en sole, adrcsse la des-
cription d'un nouveau metier mecanique a rotation continue,
susceptible de tisser des etoffes d'especes el de dimensions va-
rices. II rapporte plusieurs apjilications (ju'il a faites de ce
procede dont il est Tinventeur. (MM. Molard, Dupin et Navier,
PARIS. 2G5
commissaiies.) — M. Gikaru donne iecline d'un meiuoire de
v/r fVillam Rawson , snr le jirocede de M. Perkins , pour for-
mer la vapeiir a haute prcssion , et sur I'application de celte
vapeur an mouvement des machines. Ce Memoire auquei est
joint un dessin a\ec une descrii)lion ecrile, sera examin*^ par
MM. Arago , Girard et Dulong. — M. Dupetit-Thouars
jircsente diverses observations au snjet des precedes lithogra-
phicpies , et donne communication d'un prospectus relatif a la
publication de son ouvrage, conlenant Thistoire des planles
orchidees, recueillies dans Ics trois iles de France ou Maurice,
<le Bourbon et de Madagascar. — RI. Collard (de Marligny)
lit un Memoire intitule : De I'nction dii gaz acide c.irboniqnc
sur I'tconomieanimale. (MM. Thenard, Dumeril et Magendie.)
A. MiCHELOT.
— Atademie francaisc. — Seance puhlique pour la reception
fie MM. Briffaut et Guiraud. (i8 juillet.) — M. de Pastorf.t
occupait le f'auteuii, et a repondu aux deux recipiendaircs,
mais d'une voix si basse que la plus grande parlie de I'audi-
loire n'a pu saisir ancune de ses paroles. II a loui^, snivant
rusage,les deuxnouveaux eius, en celebrant aussi la memoire
el les travaux des deux academiciens qu'lis remplacent. —
M. Briffaut, apices avoir reconnu avec modestie (|ue « I'Aca-
dcmie est pour lui la terre de I'hospitalite « ou il ne doit son
admission qu'a I'extreme indulgence de ses juges, devenus ses
collegues, a fait leloge de son predecesseur, feu M. d'Agues-
seau, qu'il a loue particiilierement dans la personne de TiUiis-
tre chancelier, son aieul. « Gloire, a-l-il dit , a ce!!e liaule
magistralure francaise qui a su constamment se placer eutre le
trone et le peuple, en fletrissant jadis les ])rojets criminels
d'une faction ultramontalnc , en s'op]:>osant naguere au retoiu'
de cetle compagnie qui menace les peuples en meme tems que
les rois. » Get eloge merite des anciens el des nouveaux magis-
Irats a excite de vifs applaudissemens.
M. Guiraud n'a pas eu, comme M. Briffaut, le nierile de la
precision ; son discours etait diffus, et nous a paru manquer
d'ordre et de plan, et pecher souvent contre les coavenances
academiques. On secroyait tour-a-tour , en I'ecoutant, al'eglise
ou a la chanibre des deputes, et non dans le snnctuaire des
lettres. II a paye un juste hommage aux vertus eta la piete sin-
cere de M. Malhieude Montmorency; maisil a eu le tortdetrop
insister sur sa vie politique et de vouloir juslifier sa conduile
au congres de Verone, oil les envoyes de l.i Grece ne purent se
faire eniendre, ou leur resistance a I'oppression la plus cruelle
fut Iraitee de rebellion, et oil furent decides rinvasion et les
i66 FRAINCE.
malheui's ulterieurs de I'Espagne. II a dit, en parlant de la
ligue iiiotlerne de plusieurs rois : " Cptte alliance aiiralt pu ^tre
appelee sainle , s'ils n'avaient pas oublici (jii'll cxiste aussi des
chr<5tiens dans rOrient;»et des acclamation* nnanimes ont
recompense ce trait inattendu. — Comment faire des discours
academiques et litteraires, lorsqii'on doit parler d'liommes fort
recoinmandables d'nillenrs, niais dont Ic mcrite academiqiie
et litteraire fut le moindre litre? Avis a I'Acndemie franchise
qui doit sentir qii'clie ne sera honoree dans I'opiniondes amis
des letires, qu'autant qu'elle fera des choix vrainient litte-
raires.
— 20 juillel. — Choix d'un nouveau secretaire pcrpetuel. —
L'Academie a procede a la nomination d'nii secretaire perpc-
tuel , a la place de M. Raynouard ^ qui avait donne depiiis
quelque tems sa demission. Les Academiciens presens etaietit
ail nombre de 27. M. Auger a obtenu 22 voix ; M. Andrieux ,
4, M. Villemain , 1. 11 y a eu un billet blanc. Le choix de M. Au-
ger sera propose a la sanction du roi. Le nouveau secretaire
perpetue! n'entrera en fonctions que le j)remier Janvier pro-
chain.
— Prix propose. — L'Academie s'est occiipee, dans la menie
seance, du prix de poesie , pour I'annee prochaine. Plnsieurs
sujets de prix ont ete proposes : Vinvention de la boussole , la
decouverte de riinprirnerie , Yindependance de V Amerique ,
rAFFRANCHissEMBNT DFs Grecs , cic. Cc (lemicr sujel a reuni
la majoritc des suffrai^es.
La nomination du successeur de M. Lemon ley est renvoyee
an mois de novenibre. J.
Ecole speciale de commerce et d' Industrie ( ancien hotel de
Sully, rue St-Antoine, n° 1 43 ). — Seance du conseil de perjer-
lionnement{^\^ juillet.) — Nous avons signale ])lusieurs fois les
avantages de cet etablissement, si precieiix,comme I'a dit I'un des
chefs de notre commerce, pour !a prosperite nationnle (Vov.
Rey. Enc. , t. XXIV, p. 539). Nous avons fait sentir combien elait
heureuse I'idee de reunir les jeunes proselytes de I'indust rie dans
un inslituf . oi\ une instruction speciale batemit pour eux les
bienfaits d'une experience que ceux qui les ont precedes dims
la carriere ont du acheter par de longs et penibles efforts.
La seance du conseil de perfectionnemeni , doril nous :egn I -
tons de ne pouvoir faire qu'une courte mention, avait pour
objet I'examen des eleves et la distribution des diplomas. Ceile
seance reunissait toutes les nolabilites commerciales de la ca-
pitale. On remarquait an bureau M. T^FFiTTEqui presidail,
MM. Tebnaux , GtiERix-nE-FoNriN, L. Marciianu, .T.-B. Say,
PARIS. , ar)7
LocRKjPaoNYetCH. Dupin. Le piesideni , apres avoir rappelp
les avantages de retablisseirent et encourage Ics eleves, a in-
dique netleinent les causes de la crise qu'eprouve notrc com-
merce ; il a fait voir que Ton ne produisait pas Irop, comme
on I'a si singulierement pretendu, mais que I'on craignalt de
produire. Notre malaise pourrait, a-t-il dit, s'expliquer ])ar
un seul mot, le raan(|ue de confiance^n Si la consommalion
languit, si les apjji'ovisionnemens ne se font pas, si la specula-
tion ne se reveille point, c'est que des inquietudes exagcrces
troublent notre avenir , c'est que le travail est imprudemment
menace, et que I'ignorance nous ])rive encore des moyens suf-
fisans pour faciliter les eclianges. »
Apres queMM. Df.staillades, directeur dercco]e,et Poux-
Franklin, censeur des etudes et professeur de droit commer-
cial, ont pu fait connaitre les progres de I'tcoie, le plan et la
direction des etudes, M. L. MAKCUANn, membre du conseil de
perfecllonnement, a proclame le resultat de I'examen des ele-
ves, et onze diploines de capacite ont etc disSribuos par M. Laf-
fitte. M. Ch. DtrpiN a ensuile expose les avantages de I'applica-
tion des malhematiques a I'industrie et an commerce. M. Adolphe
Blanqdi , professeur d'economie politique et d'liisloire com-
merciale, succedar.t a M. Dujjin, s'cst attache a signaler, dans
un discours rempli de trails lieureux ct brillans que nous ai-
merions a pouvoir reproduire, les bienfails et les n.erveilles
rticentes de i'industrie.
Une quete pour les Grecs faite , au no:n du jeune ills de I'in-
trepidc Canaris, present a I'asseniblce, par MM™<'*Deslaillades
et Blanqui, et (jui a produit plus de i loo francs, a termine cette
seance. A. V.
Projet de Societe d' amelioration des animaux domestiques.
— M. Senac, rcdacteur du Bulletin des sciences agricoles , qui
fait partie du Bulletin universel des sciences, aconcu el redige
le plan de celte association palriotique : on le trouve dans le
numero du mois de mai de cette annee. II est peul-etre superflu
de recommander a I'atlenlion publique une institulion aussi
evidemment utile; on pent dire qu'clle est deja comincncee,
et quelques personnes trouveront peut-etre dans cetle re-
marque une objection contra la nouvelle Societe. Au sujel des
clievaux, on vanlera les baras que nous possedons : mais ces
otablissemens dispendieux procurent-ils a la culture, aux char-
rois, meme au.x arniees, les races les plus robustes et les plus
propres a cliaque service? La Societe pour V amelioration des
laines comprend - elle dans ses attributions loules les recher-
chcs dont le moulon pent etr*- I'objet ? Les cbevres h duvet sonf
2G8 FRANCE.
rii('(iui»iliou la jiliis iniportante que iioas ;iyons faite , apres
celle des moulons a laiiie fine ; mais la vigoniie ei I'alpaca
nous maiu|ucnt enco»e , etc. I.es ferines cxpcrimentales rie peii-
vcnt coiisidercr Ic pcrleclionnemenf des animaux dornesliques
que sous un aspect relalif aux intcreis du fermier et a la na-
tiirc du sol: Ics viies gt'uici'ales ne peuvent s'y offrir. Le& So-
cietes d'agrlculturc scraicnl plus jires du but; mais , distrailes
par rininiensite des objcis dont elles out a s'occuper, elles ne
douienl certaineinent point des bons efCels de la division da
travail, nienie dans le grand art qu'elles clierrhezit a perfec -
tionner : elles recevront avec reconnaissance le secours des
Societes qui se livrent spocialemenl a quel(|ues-nnes des re-
clierclies qu'elles entreprcndraient elles-nieines, s'il lenr efnit
possible de tout faire. C'est aux cultivateurs de la grande et
de la jictite proprii'te; c'est aux proprietaires de terrains sans
valenr ; c'est aux ujanufacturiers eclaircs qui s'affligent chacpie
jour <lc lirerdc I'elranger leursmatieres j)reinieres ■, c'est enfin
aux bomnies amis de la rlchesse et de la prosperilc de leur
pays que nous soumeltons ce jirojel , bien certains d'etre en-
te/idus, en faisant un appel au plus noble des sentimens qui
les aninient , I'amour de leur pays.
Jc ne suis ni ])roprletaire , ni matiufacturier; peu s'en faut
que je ne ni'enorgueillisse d'etre pauvre, et j'avoue que les il-
lusions de celte sorte d'aniour-propre sont les scnles dont j'aie
peine a me defendre. Toutefois , (juo M. Scnac veuille bien me
compter au nombre de ses souscripteurs, comme ami de la
prosperite de ma palrie, jaloiix de Ini consacrer le peu de
teuis qui me reste , mes faibles efforts, la sincerite de mes
opinions et la purete de mes doctrines !
Le minimum de la souscription est fixe jirovisoireracnt a
36 francs par an. On recevra les adhesions jusqu'au i5 aoiit ,
au Bureau dii Bulletin universel des sciences et de finduslrie,
rue de I'Abbaye , n° 3. Ferry.
LiBRAiRiE. — Productions de la presse pendant le premier
semestre de 1826. — Voici le releve des annonces faites dans
la Bibliographic de la France ; (V. Rev. Enc, t. xxviii, p. 932)
pendant les six premiers niois de 1826, et qui comprennent
la totalitc des outrages publics en France.
Livres et brochures 4^47
Gravures et lithographies 485
Cartes geographiques et plans 21
Musiqiic 220
Total . . . 5073
PARIS. 269
Pour les trois derniers objels , plusieurs articles sont tres-
frequemment coinprissous un seul numero; quant aux publica-
tions de librairie, proprenient dites, plusieurs annoncescon-
sacrees a des livraisons successives, se rapporlent souvcnt a un
seul et tneine ouvrage; mais beaucoup d'annonccs coropren-
nent aussi , duns un seul article, un grand nombre de volumes
d'un rat!me ouvrage.
Voici, pour les livres seulement, ^\ pendant les six premiers
mois , le tableau comparatifdes dernieres anuees :
En 181^ 979
En i8i5 -• . . 171a
En 1816 i85i
En 1817 2128
En 1818 243o
En 1819. . : 2441
En 1820 2465
En 1821 2617
En 1822. . 3ii4
En 1823 2687
En 1824 343G
En 1825 3569
En 1826 4347
L'annee 1823 a donne, comme on voif, pour les premiers
six mois , moins que l'annee 1822 ; mais la fin de l'annee 1823
I'a ernportesur la fin de l'annee 1822.
Theatres. — Theatre Francais. — P® repres.de /'^^/ofa^e
ou le Metier a la mode, comedie en cinq actes et en prose par
MM. PicARD et Empis. ( Mardi 25 jaillct. ) — Comme toutes les
autres modes, la manie de I'agiutage n'est pas une nouveaute ;
les passions et les goiits de I'homme, bormis comme ses facultes,
scrablent destines a rouler dans un cercle dont il leur est in-
terdit de soriir, et dont la revolution raraene tour a tour ce
qui a deja exisle; on les voit se reproduire a divcrses opoques,
sous diverses formes ; et , le plus souvent , ce que nous appelons
noiiveau , n'est que du vieux rajeuiii. L'agiolagc fiil anssi , il
y a plus d'un siecle, un mclier a la mode ; nos ancelres out
paye cher un eseniplc dont. leurs pelits-fils ne profitejit pas.
Pendant, quelcjue terns, tout Paris s'est preci])ite dans la rue
Quincampoix pour y changer de I'or centre du papier; cette
manie fit la fortune de quelques-uns, et la mine de beaucoup
d'autres; elle inspira quelques comedies; aucune n'est reslee
1-0 FRANCE.
au llii'^lrc; y aurait-il dans celte nuance de inceurs , dans
cette luanie de speculations, quelque chose de peu comicjue,
ct ce vice est-il plus liisle encore que ridicule? Quoi qu'il en
soil, Tagiotage semble etre aujourd'hui le theme comiuun de
lous nos poctes comiques ; dans le Roman {yoy. Rev. Enc. ,
f. xxvii, p. 6i3 ) M. de l^i Ville nous a beancoup parlc de la
bourse; nous avons vu tout receinment le Speculateur , (Voy.
ibid. , t. XXX, p. 88 1 ) el nous verrons bienlot V Argent , A'\in
auteur connu par des ouvragcs applaudis. Quelle que soil la
destinee de ces dlverses comedies, nous devons toujours tenir
coinpte a nos poctes de cette intention de peindre !es moeurs
actuelles, et de nous faire rire de nous-mcnies. IMM. Picard et
Empis y sont parvenus; voici, en peu de mots, ce qu'il onl
imagine.
Sainl-Clair, avocat dcja celebre, s'est lie avec un agent
d'affaires , nomme Durosai , qui lui a inspire le gout des specu-
lations de bourse; il airae encore son etat dont il attend de la
gloire, mais il le neglige pour I'agiotage qui lui proniet une
fortune plus rapide. II cache de son mieux des habitudes qui
lui feraient perdre toute consideration au barreau; cependant,
il n'a pu tromper sa jeune opouse : Aruelie soupconne la folle
jjassion de son mari , sans oser lui reveler ses Inquietudes; mais
ciles les confie a un oncle, son ancien luteur, riche negociant
de I.yon , qui s'empresse de se i endre aupres d'clle. Cet oncle,
qu'on nomme Marcel, s'est bientot convaincu qu'on s'occupe au-
tnnt de la bourse que du barreau dans le cabinet de Saint-Clair,
et il obtienl du jenne avocat I'aveu dc ses speculations, dans
une scene oii celui-ci livre son secret avec une legerete tout-
a-fait invraisemblable. La position de Saint-Clair est drama-
lique : au moment oil il compromet, en jouant a la bourse, sa
fortune, son etat, son honneur, il plaide conlre un agloteur,
pour Freviile, ancien ami de sa famille, et il fait les plus belles
phrases centre les speculateurs. II veut aussi chasser un domes-
lique qui s'est avise de faire en petit ce que son maitre fait en
irr.jnd; car tout le monde joue dans la maison, et le maitre, et
ie valet, et le clerc qui tire de la roulette un petit benefice quoli-
dien, et la femme de chambre qui met ses gages a la loteric, et
enPn leperede St. -Clair. Cepere, que rauteurappeileDormeuil,
est un ancien avoue, un homme a grands sentimens, qui affiche
la sensibilitela plusvive, I'esprit d'ordre le plus rigoureux; il
est mcmbre d'un comite de bienfaisance , el les bonnes oeuvres
sont sa seule occupation, a ce qu'il dit. II prend soin du petit
Gautier, son fillenl, qu'd a tiro d'line elude, sous jjrctexteque
ses moeurs y pouvaient ^tre compromises, pour le placer chcz
PARIS. 271
1111 honneteageni de change, noir.nn^ Forlis. On comprend que
I'innocence du petit Gautier n'cst pas le seul molif de son par-
lain : eel honinie si range, si severe dans ses discours , n'a point
resiste a I'appat qui seduit tons les aiilres, et il a vouln avoir
chez I'agent de cliange un inlermcdiaire sur la discretion du-
quel il pur compter. Saisi de rcpidemie generale, le petit fdleal
lni-meme, en faisaiit myslerieusement les affaires de son par-
rain , est bien tente d'en commencer pour son propre compte.
II nous reste encore deux pcrsonnages a faire connaiire : I'un
e«t le marquis Fugaccio, mari d'une prima donna, dont il
risque les appointernens a la bourse, en se fiant aux calculs de
noire avocal; I'autre, qui se nonime Germon , est un jennc
fermier de Saint-Brice, ami de Saint-Clair, qui commence i se
lier avec Dnrosai, et qui vient de vendre sa ferme pour se lan-
cer dans les speculations sur les cffels publics. Mainlenant (jue
les divers personnages sont indiques, nous re[)renons noire
analyse. Les avis de Marcel et les reprimandcs de Dormenil
sont sans effet sur I'csprit de Saint-Clair; et, ce jour meme, il
fait une operation qui doit lui procurer une fortune Conside-
rable. Cependant Amelie, toujours plus inquiete, tente un
dernier effort sur I'esprit de son epoux : sa do'iceur, sa ten-
dresse si complaisanle et si devouce, le touchent enfin ; il lui
j)romet de renoncer pour jamais a des speculations hasardeuses
qui peuvent le perdre avec toute sa famille; et Amelie, comp-
lant sur sa parole, continue a s'occuper des prcpnratifs d'une
fete que son mari donne le soir meme. Mais une hausse epou-
vanlable vient tout a coup dcranger les calculs de Saint-Clair,
et le precipiter dans un abime. Tandis qu'on cliante dans son
salon, il s'abandonne au plus violent desespoir dans son cabi-
net, ou lout le monde semble se reunir pour le desolcr; et sa
ferame , qui le remercie du bonheur ([u'elie goiite de son chan-
gement de couduite; et le plaideur Freviile, qui lui retire une
clientelle qii'il a ni'gligee; et Fugaccio, qui lui reproche ses
pertes; et enfin Durosai, au genie duijuel il demande des res-
sources, el qui n'a que des raoyens infames a lui proposer. En
re moment, Germon vient confier a Saint-Clair le portefeuille
qui contient loule sa fortune : en vain Durosai le jiresse de pro-
filer de cetle occasion pour rcparer tons ses desasli'es ; il resiste
a cette infernalc tentation, et sort dans I'agitation la plus vio-
lente. Nous voici au cinquieme acie et au lendeniain matin.
Amelie dort encore; Saint-Clair, qui medite un projet sinistre,
a laissc pres d'elle une lettre, et va jjrendre son cabriolet qui
I'atlend au detour d'une rue. Marcel le devine el le retient, lors-
qu'Am(!'lie accourt, pousse un cri d'effroi et se jelte dans les
272 FRANCE.
bras tie son inari, qu'elle ne croyait plus revoir. Saint-Clair a
perdu un million; c'cst im desastrc irreparable. La fortune
cntiere de Marcel pourrait a peine y faire lace; il va tenter sur
le pere de Saint-Clair un effort dont il n'attend presque aucun
succes. Ce vieillard arrive, plein d'une joie qu'il ne i)eut raai-
Iriser; i! jounit a la }iausse,etiecoup qui aruine son fils a triple
sa fortune. II fait deux ou trois nicnsonges a Marcel pour lui ex-
pliquer cebonbeurinespere, sans en laisser soupconner la veri-
table source. Marcel alors lui revele la position de Saint-Clair:
cetle nouvelle enipoisonne toute la joie du vieillard, qui re-
fuse de vcnir au secours de son fils. Mais il n'esi pas au bout
de ses tribulations; le petit Gautier acheve de le desoier en lui
annonc.int que son agent de cliange a disparu sans rien laisser
a ses cliens. Cependant Marcel cherche a rcndrc un pcu de
courage a toutle monde; il fera pour son neveu des sacrifices
q»ii le gcneront loutc sa vie, mais (]ui sauveront I'lionneur a
Saint-Clair. II force Dormcuil, ])ar la crainte deperdre la con-
sideration publique, a venir aussiau secours de son fils. St .-Clair,
rendu tout entier a sa famille et a son ctat, profitera de cette
terrible lecon, aussi bien que Gernion, qui va racheter line
ferme. Quant a Durosai, il a ele roconnu pour un certain Du-
hautcours, qui a fait banqueroute a Lyon, et contre lequel
Marcel a une prise de corps; il est deja loge a Sainte-Pclagie.
Les trois premiers actes sont un peu vides d'action ; mais les
deux derniers sont tres- diamatiques. Le dialogue est nalurel
et plein de traits d'observation, mais quelqutfois un peu ver-
bcux; il gagnerait a etre resserre. On a remartjiic', avec rai-
snn, que le pcrsonnage Fugaccio etait trop charge; et pli;-
sieurs figures de ce tableau ofTrent des reminiscences ou sont
ian peu communes ; mais , comnie dans Fctat acluel de la civili-
sation , on ne voit phis g'lere dans la societe de ces physiono-
mies tranchees que la separation des classes y introduisait jadis,
il n'est pas etonnant d'en rencontrer si rarement au tlitalre.
Dans Vngiotagc , le personnage de Germon est fort bien ima-
gine; el celui deDormenil nous a .semble excellent, sous Ic rap-
port dramali([iie ainsi que sous le point de vue moral de la
comedic. C'est une Idee fort henrcuse d'avoir montre le joueur
qui gagne a la bourse dcpouille anssi bien que celui qui perd ;
el ce personnage jelte d'ailleurs beaucoup de gaite sur le de-
nouement; habile diversion dans un sujet (jUi doit necessaire-
ment tonrner au iragique. Enfin , malgrc quelc|ues defauts,
celtc comedie, qui fail rire et qui peint les travers du jonr,
nous semble meriter le succes qu'cllo a ohtenu. M. A.
— Rr.vcE (le-f TfiEAXRris LVRionES j)cndon( Cornice iSaS.
PARIS. 173
— Noire but, dans cet article, n'est ])as seulement de dire uii
mot de plusieurs ouvrages dont la Revue Encyclopedique n'a
point encore parle; nous voulons aussi metlre nos lecleurs a
meiue de jnger qtiel a ete en France I'olat de la musique dra-
matique , durant I'annee derniere. Trois pieces , dont deux en
trois actes et unc en un acte, ont elc representees a TAcade-
MiE ROYALE DE MUSIQUE. Aucunc n'a obtcnn de succes, et le
jui^ement da public n'a eprouve aucune contradiction. On ne
retrouvait plus, dans la Be Lle-au-hois -dormant ( 2 mars), la
verve dont M. Planard a fait preuve ilans plusieurs operas-
coiuiques. L'intcrct de sa piece etait nul, la gaile n'etait pasde
bon ton, et I'auteur arme de la baguette magique n'avait pas
su en tirer parti. Son poeme n'etait pas de nature a echauffer
le genie du compositeur; aussi, M. Caraifa, connu par plu-
sieurs sacces sur ies theatres de I'llalie et par la reussile popu-
laire d'un opera-coinique francais ( le Solitaire ) , a-t-il echoue
devant la Belle-au-bois-dormant. Ce n'est pas que sa partition
ne renferme quelques inorceaux remarquables; mais il parait,
en I'ecrivant, avoir presque loujours manque d'inspiration.
Une observation que Ton a pu faire en entendant le premier
acte, c'est que M. Caraffa a tache de n'etre que lui-meme et a
renonce a jeter ses phrases melodiques dans Ies moules de
M. Rossini; on doit le teliciter d'avoir piis ce parti; il est ca-
pable de voler de ses propres ailes.
Pharamond ( 7 juin) n'a pas ete'plus heureux que la Belle-
au-bois-dormant. La confection de ce poeme avail ete comman-
dee a MM. Ancelot, Guiraud et Soumet, poetes tragiques
d'un vrai merite , mais qui ont paru ne pas comprendre la
contexture d'un opera. Leur sujet etait bien choisi, et,traite
par des auteurs exerces, il aurait pu produire un grand eft'et.
Tel qu'il a ete execute, il n'a guere cause que de I'ennui; la
musique confiee aussi a trois compositeurs , MM. Boieldieu ,
Berton et Rreutzer, n'a point sauve le poeme, parce qu'un
Guvrage faitde commande est presque toujours mediocre. I^es
decorations ont seules altire quelques curieux.
Don Sanche (^1"] octobre) est une f'eerie mauvaise de tout
point , toujours a I'exception des decorations. On ne concevrait
pas qu'une aussi plate rapsodie ait c(e representee sur un
theatre qui se donnele tllre de premier t/iedtre de C Europe , si
I'on ne savait pas que, dans ce theatre lyrique, Ies compositeurs
n'ont pas voix deliberative. On doit aussi de(>lorer cette manie
de faire passer pour un petit prodigeun enfant qui sansdoute
s'annonce sous d'heureux auspices, mais qui a besoin encore
debeaucoup d'eludes , avant d'obtenir le rang qu'on veut lui
T. xxM. — Juillet i82(>. 18
274 FRANCE.
donnerpar anfrcipalloir. Mozart aussi avait compose un opera,
lorsqu'il n'avait pas meme atteint I'age qu'a maintenaiu le
jeunc Litz ; raais le celebre Hasse, apres ravoir entendu en
particulier et en avoirapplaudi I'auteur, cut le bon esprit cle re
pas Ic faire representer. Si Ion en eut fait de meme a I'ej^ard de
Lifz, on lui eut epargn<5 ccs paroles severes qui lui furent adres-
sees , apres la premiere representation de Don Sanche , par I'un
de nos premiers compositeurs : Mon petit arni, voiis avez encore
la harbe bien blonde ; et pourtarit , si vous continuez , elle dc-
viendra blanche nvanl (f avoir Jamais etc noire.
Le THEATnE Itaiif.n est demeur6 dans une stagnation com-
])lete ; et, sans la presence de quelqaes bons clianteurs, la
mode dc le frequenter aurait entierenient passe. // Fiaggio a
Reims ( i<) jiiin ) est le seul ouvrage compose a I'occasion dn
sacre (jai racrite d'etre mentionne, par rapport au poeme qui
est de M. Balochi. La musique de M. Rossini offre un mor-
ceau a (juatorze voix qui prouve que le compositeur connait la
maniere de disposer convenablement les traits propres a cha-
que timbre et a chaque diapason.
Le Crociato in Egitto { 22 se])tembre ) de Meyer-Berr a
obtcnu dn sticces. 11 I'a du a tin grand nombre de morceaux
rcmarquables qu'il renferme, et qui sont connus dans tons les
pays de I'Europe ou Ton s'occupe de musique. Du reste, cet
opera est loin d'avoir joui de la vogue qu'ont obtenue ceux de
Rossini au meme theatre. On a tellement contracte I'habitude
des formes consacrees par ce compositeur, que ceux qui i'rc-
quentent le theatre italien n'y veulent plus entendre d'autre
musique que la sienne.
Le Theatre de l'Opera-comique a offert neuf pieces a ses
habitues : cinq en nn acte, une en deux et trois en trots. Lc
Capitaine Belronde { a'j mars), jolie comedie de M. Picaud,
n'a point gagne a etre reduite des deux tiers et arrnngee en
operft. Qaoique le sujet offrit I'occasion de placer beureuse-
ment plusieurs morceaux de musique, M. Cremont n'a pas
reussi dans son entreprise. On sait que M. Crcniont est un
excellent chef d'orchestre; ce qui exige beauconpplus de ta-
lent qu'on ne le pense communement, mais ce qui ne conslitue
pas le bon compositeur.
Le Macon ( 3 mai ) , dont le poeme est du a M M. Scribe et
Germain Delavigne, est un ouvrage rempli d'action et d'inte-
ret. Ce drame lyrique, ainsi que les auteurs font appele , of-
frait plusieurs sitnations fortes, et par consequent propres a
faire briller le niusicien. M. Auber, dont la reputation est
etablie par plusieurs operas comiques suit, depuis quelque
PARIS. 275
tenis une faiisse route. On ne doit passe dissiioulcr quo cci tains
traits (ie melodic, certaines combinaisous dharinonie et cer-
tains effets d'orciicstre, mis a la mode parM. Rossini, ne cap-
livent en ce moment les suffrages de ceux qui ne voient que
la supcrficie des choses, sans jamais en consiilerer le fond, et
qui ne songent pas que rien n'est plus facile que d'introduirc
dans nn morceau dc musicpie telle ou telle forme. Leverilabie
public a trouve M. Auber fort inferieur a luimeme; cc compo-
siteur nous avait prouve, en ecrivant Emma et la Bcrgere
chatelaine , qu'il ctait capable de se souslraire a nno mode
qui ote a ses nouvcaux ouvrages le cacliet de I'originalitc.
Quoique la musique du Lapin blanc (21 niai )fut anssi rem-
plie de tournures rossinicnncs , elle n'a point obtenu de suc-
ces. A la veritc, la chute de cet onvrage doit elre blen plutot
atlribuee au poeme dont la marche etait erabarrassee et qui
n'offrait ni mots pic|iians, ni situations interessantes.
Le Bourgeois dc Reims ( 7 juin ) a obtenu du succes, bien
qu'il ne fut qu'nne piece de circonstance, parce que la mu-
sique de M. FtTis a offertune assez heureuse alliance du savoir
et de I'imaginalion. Le morceau le plus rcmarquable de cet ou-
vragc est nn rondeau ou parait un nonvel accompagnement,
chaque fois que se reprcsente le motif; c'est une forme que
devraient en general adopter nos compositeurs lyriques.
La Fausse Croisade (12 juillet ) a cpronve une cliule com-
plete. On ne peut bldmer la severite du public; car, s'il y
avait dans les deux actes dont cetle piece se composait quel-
ques scenes lolerables, on ne rencontrait rieu de neuf, ni
dans les situations, ni dans le dialogue, ni dans la musique.
Les Enfans de Maitre Pierre ( (J aoiit ) onl ete accueillis phis
favorablement. Tout le monde s'est accorde a y reconnaitrc une
grande entente de la scene; on y a trouve de Tintcret , de la
gaite et un di'noument amene avec une grande habilete. M.de
KocKjSi connu par ses roraans pleins d'esprit et de verve,
parait devoir obtenir de nouveaux succes , comme anteurd'o-
peras comiques. 11 s'etait adjoint pour la composition de son
dernier onvrage RI. Krkube. Cemusicien , a qui Ton doit deja
plusieurs pieces agreables , s'est encore dislingue cctle fois. A
la verite, sa musique n'est pas savante; mais toules ses parti-
tions contiennent des chants heureux et naturels ; et, si quel-
f[uefois ses compositions manquent d'criginalite, elles ne man-
•juent jamais dc grace.
Le Voyoge de cour ( 20 aout ) n'a pas obtenu le suct.es dc".
Enfans de Maitre Pierre. Cetle piece qui avait pour outeur Ic
peinlrespirituel de In Famille Glinct, M. Mervii.i.e, reposnil
176 FRANCE.
dejiuis dix ans dans les cartons de Feydeaii. On sent que, de-
puis cetle epofiue, les teins ont cliant^e, rt que des idees qui
alors aiiraient pii elre goiilees du public out )>erdn a ii'eire
eniises ([u'au moment ou le cliangeinenl desyslenie de compo-
sition des operas comitiiies est prps(]iie enjit-remont effectu<5.
Cctte variation a etc efjalemeiit dt-favorable a M. Catruffo,
comi)ositeur de la musique; la maniere dont il a traile I'or-
chestre indique assez que sa parlilion n'a pas eie ccrlte de nos
jours.
Ce n'est que pour memoire qne no^is faisons fignrer dans ce
coup-d'oeil le Projetde Piece (4 novernbre), ouvrage de cir-
constance, ma-iivais de tout point, meme en ce (]iii concerne
la musique due a M. Blangini ; le poeme etail de M. Mely-
Janin. Au lieu de prendre la peine de monier un ouvrage
d'une telle faiblesse , il eiit bicn mieux valu reprendre h Bour-
geois de Reims, qui etait aussi un opera comique de circons-
tancc.
En terminant la revue des operas representes sur le tlicafre
Feydeau , nons sommmesheurenxd'annonrer le .suoces eclalant
et merite de la Dame Blanche (11 deceiulire ). Le imeme, du a
M. Scribe, est tire en parlied'un desromans de sirWiiller Scott,
dont les nombreux ecrits ont di'ja fourni el fouiniront encore
quantile de sujets de pieces a nos grands et petits theaires. Ce
pocnie n'est assurement ])as irreprocliable; i! offre nienie des
defauls qui certainement auraient ete reievcs avec severite,
s'ils n'avaient passe inapercus a la fnvenr de la chaimanle mu-
sique de M. BoiELDiEU. Ce compositeur, qui depwis quelc|ues
annees vivait eloigne de la scene et avail resolu de ne plus
etrire pourlc theatre, a cede anx conseils de son ami M. Ber-
ton ; et , meprisant les ecrits qtie I'ignoranre repand et propage,
il s'est de nouveau monire dans un lie>i oil il avait deja obienu
de si btillantes couronnes. Cliose rcmarqu;ible ! son talent n'a
point vieilli ; il senible, au contraire, qu'il ait acquis une noU-
velle vigueur, et ([ue M. Boi'eldieu ait trouve une force d'in-
ventiou dont il avait quelquefois manque, surtout dans ses
dernitTS ouvrages. Ce qui caracterise celui- ci , c'es.t I'emploi
de certaines formes melodiques pen usilees, et qui jetient sur
plusieurs morceaux un cafactere d'originalite qui salisfait j)ar-
ticulierement les connaisseurs. En enlendant la Dame Blanche,
on a peine a rroire que I'auteur en ait ecrit la parlilion avec
plus de rapidite que toutes cilles auxquelles il a travaille, bien
qn'il n'ait pu s'occuper de ccUe-ci que dans les instans que lui
laissalt une maladie longue et douloureuse.
Six operas ont paru sur la scene de I'Odeon ct ont obtcnu de
PARIS. 277
plnsou mollis de succes; un seul a eprou\e une chute complete.
Les Noces dc Gamache (9 mai) ne present.iient point la
gnite a laquclle on a droit de s'attendre d'apres le litre. Le chef-
d'oeuvre immorlel de Cervantes etail present a la mcmoire de
tout le monde, et la coni])araison n'eiait pas favorable au
poeine; neaninoins, la musique, liree des mellleurs ouvragcs de
MERCADANTE,com])osileurqiiiparaitavoircompletementadopte
le sysleme lyri(|ue de M, Rossini, a ete applaudie avec raison.
Louis XII (7 juin), de MM. Saint-George et Laureal ,
ouvrage jiarodie sur la musique de Mozart, a ele recu avec
assez de froideur par les habitues de I'Odeon. On ne doit pour-
tant pas en ^tre surpris. D'abord , cette musique de Rlozart , si
grande, si dramatique, si expressive, et qui avec toutes ces
qualites est toujoiirs parfaiiement en situation, ne poiivait se
plier facilement au travail des parodistes : si I'on vcut adapter
des piiroles francaises aux chefs- d'oeuvre de Mozart, il faut
traduire de lui un opera entier, et non coudre I'un a I'autre
des morceaux pris ca et la dans ses ouvrages. Une autre cause
du peu daccueil obtenu par Louis XII se reconnait dans la
composition habituelle du parterre de I'Odeon , oil le nombre
des vrais connaissenrs est presque imperceptible. La plupart
de ceux qui freqiientent ce theatre n'entendent guere d'autre
musique que celle qu'on y execute ; et pour niettre les ouvrages
dc Mozart a la jiortee de cette classe d'amateurs , il faudrait
ajf)uler a la savante instrumentation de ce grand maitre les
coHfichets jetes dans I'orchesfre par certains comjiositeurs mo-
dernes , et qui constituent a leurs yeux la beaute de la musique
en vogue aujourd'hui : nous ne serions pas surpris qu'il vint a
I'idee de quelque arrangeurAe faire subir a Mozart I'operation
doiit nous venons de parler; si Ton veut absolumenl des pa-
rodies , celle-la en vaudrail bien une autre.
Othello ( 9,5 juillet) n'a pas obtenu le succes que I'adminis-
trallon avait espere : M. Rossini s'y est coHStammenl monire
dramatique et fidele aux regies et aux exemples de ses habiles
devanciers, et par consequent n'est pas tombe dans ses defauts
habituels qui rendent ses ouvrages recommandablesa certaines
personnes. D'ailleurs, il faut I'avouer, les chanteurs a qui I'exe^
cution de ce chef-d'oeuvre etait confiee ont bien mal servi le
compositeur.
La Comedie a la Campagne (16 aout), musique de Cima-
ROSA , n'a point attire la fonle. Quoiqu'il n'y ait que fort peu
de rapports entre le genre de m^rite de Cimarosa et dc Mozart,
les raemes raisons qui se sont opposees au succes de Louis XII
ont empeche celui de la Comedie a la Campagne.
378 FRANCE.
La Dnino dn Lac (3i oc'tobl-e ) a <^le recue avec iine exlrtme
faveiir. Lc pot'me, qui est dii a M. d'£paony, est raisonaable,
et c'cst bcaucoup pour unc j):irodic. M. Rossini s'y prcsonle
av6c ses dcfauts , niais aussi avec de grandes beautes. Deux
cavatines charmantcs onl surtoiit ete remaiquecs , et uii duo,
cmpruntc a la Semiraimde du memc inaiire, a ct<5 parliculic-
inenl applaudi.
Prccioxa (17 novembre). Cctte piece, d'un genre particu-
lier , n'etait qn'un drnnie coupe par des choeiirs ; elle a eprouve
una chute complete. La inusique ctait cependant due au ce-
lebre auteur de Robin des Bois , M. Weber, dont la mort pr^-
maturee \ient d'affliger tous les amis des arts. Elle offrait des
morceaux du jnemier ordre ; mais tout le raonde sait que ce
n'est pas la ce c[ue demandent des amateurs qui , dans Robin ,
n'onladresse ieurs applaudissemens qu'a unchoeur, fort gra-
cieux sans doute et d'un bon cff'et, mais que le compositeur elait
bien loin de regarder commc la pierre angulaire de son opera.
Resumons nous. Sur vingt-une pieces lyriques representees
dans ie courant de I'annee passce , plusieurs sont deja tombces
dans I'oubli ; quclques-autres occiiperont encore le repertoire
pendant un certain temps; mais ont peut predire, sans crainle
de se tromi)er, que le Crociato , Othello et la Dame Blanche se
mainliendrout sur la scene et attireront long-tems encore les
amateurs de bonne musique. /. Adrien-Lafasge.
Beaux- Arts. — Peinture. — Uexposition au profit des Grecs,
(Voy. Rei>. £nc., t. xxx, p. 578), presque entlerement renou-
velee , au commencement de ce mols , continue d'altirer I'at-
tention publique. On distingue , dans le nombre des nouveaux
ouvrages , u/ie Jeunc Fille au bain , et deux tetes delude , de
GiRonET ; Bacchus et Ariane , de M. Gros , ainsi que les es-
quisses du Combat d' Abouhir , du Champ de bataille d' Ejlau ,
et de ce tableau qui produisit une impression si vive a Tepoque
ou il parut : Francois J" el Charles-Quinl visitant Veglisc dc
Saint-Denis. M"'^ Monges a envoye deux tableaux d'histoire ,
gfands comiiie nature, representant Saint- Martin partake ant
son manteau avec un pauvre , et les Sept Chefs devant Thrbes.
On sait que Girodet a egalement Iraite ce dernier sujet qu'il
n'a pas eu le terns d'exccuter, mais dont le dessin a etc tres-
bien Jithograiihic par M. Aubry-le-Comte, son elevc ( Voyez
Rev. Enc. , t. xxviii , p. 6'54). Deu.v portraits de Paesicllo et de
Robert , par M""" LEimtrN , font les honneurs d'une galerie qui
porte son nom , el ra])pcllent son talent d'une manicic fort
honorable. Je signale al'attention des amateurs un tableau dans
lequel M. Ingres a represcnie la Chnpcllc sixiine au moment
PARIS. a75
oil le pape y officie poiitificalemeut. M. Isabey a essaye (Je sup-
plcer au talent par la inigiiardise et une certaine rechcrcb.e tie
faire, dans une aquarelle represenlant VEscalier du Musee ;
produclion qui, a nion avis, ne merite j)as la repiilaiion qu'elle
a oblenue. Ceux de nosariislesqui sont a Rome, MM. Fleury,
Robert et Schmitz , ainsi que M. Alaux , raainlenant de re-
toiu', ontpuise , dans lesmoeursdu pays , des sujets de tableaux
qui joignent au meiite de la verite locale une grande force de
ton el un talent d'excciition justement remarque. On eprouve
du plaisir a revoir V Amour et Psyche de M. Picot , tableau
gracicux , sans doute , mais auquel on a prodigue des eloges
exageres. L'esquisse du Gustm>e ff^asa de M. Hersent fait re-
gi'etter que cet artiste, dont les productions sont empreinles
d'un sentiment aussi juste que bien exprime, se soit presque
enlicrement adonne au portrait. II y a trois tableaux de M. Gu-
DiN, a cette nouvelle exposition : ii«e Marine et deux Fues ;
tous trois ne meritent que des eloges. M. Gudin est .sans rival
dans le genre qu'il a enibrasse. Les peintres qui appartiennent
a ce que Ton appelle la nouvelle ecole, lemoignent une grande
horreur pour la beautedela forme et lestyle;i's recherclient,
avarit tout, la bizarrerle des costumes; une certaine naivete
d'expression qui n'esl souvent que de la lajdeur ou de la niai-
serie ; un eclat qu'ils obtiennent en versanl ^ pour ainsi dire ,
leur boiteacouleursur leur toile; enlin, pour eviter, disent-ils,
la maniere, ils soul aussi manithes que possible , mai? dans un
genre lout nouveauet fortetrance. Tels sont MM. Colijv, De-
lacroix, les deux Deveria, Saint-Evre , Scheffer et West,
avec des nuances qui les individualiscnt , quoiqu'ils suivent le
meme sysleme. Cependant , il faut etre juste : ils donnent quel-
quefois des preuves de talent et surtont de sentiment , ce (|ui
fait d'aulanl plus i egretter qu'ils sesoient volontairement em-
barques dans une fausse route que tot ou lard il faudra (ju'ils
abandonncnt ; on veut bien se singulariser, mais, en France ,
on ne lient j)as coiitre le ridicule.
M. H. Vernet, qui vient le dernier soiis ma plume , occupe
cependant un des ])remiers rangs a cetle exposition ; les noii-
veaux tableaux i\u\\ ya envoyes sont nombrenx ct ijnporlans..
P.lusieiirs etaient deja coiinus; tels sont la Bataille de Jetn-
mapes et VJpotheose de Bonaparte , ou le jteinlre a e\i I'idi'e
de placer un bataillon de I'ancienne garde presentant les armes
devant un rayon lumineux qui lie une lombeau ciel; ceux qui
n'avaicnt pas encore ete exposes sont : la Bataille de Vabny ,
et les Adieux de Napoleon a sa garde , a Fontainebleau . Le
premier de ccs deux tableaux mc paraii au-dessous du talcot
28o FRANCE.
que ce peinire a iiiontre dans la plupart de scs ouvrages ; mars
I'antre commande raltention. La scene a un grand intertt. Le
moment clioisi est celni ou Tempereur, s'adressant aux soldafs
de la garde, lour dit : i< Je voudrais vous presser lous sur mon
ccEur; j'erabrasserai votrc g^ndral et voire aigle. Approchez ,
general Petit. » Le general s'est approcliii et tient I'empereur
tlans ses bras ; le })orte-:iigle le suit ; sa main, dont il a con-
vert son visage, derobe a I'emperenr la vue de I'eraolion qu'il
eprouve et des pleurs qu'il rcpand. Bravo , M. H. Vernet !
Cette figure seulc suffirait pour assurer le succes de votre
ouvrage.
En general , I'e.xposition au jirofit des Grecs offre un tres-
grand interet; on y voil des tableaux dont la reputation est
depuis long - terns failc , mais qui ne sont presque pas con-
nus de la generation actuelle; d'aulres qui n'ont pu etre admis
au Salon, a cause des sujets qu'ils representent ; enfin toules
les reputations sont venues se placer a coleles unes des aulres
el provoquer, pour ainsi dire, un nouvel esamen : la curiosite
a done de quoi se satisfaire.
Diorama. — Cloitre de St- fVandrille. — Les auteurs du Dio-
rama nous inontrent conlitiuellement des eglises ruinees, des
fragmens de cloitre ou d'inlerieurs, toutes choses fort bonnes
a voir, sans doute, quand elles sont reproduiles avec talent;
mais rnoinSjCepcndant , quel'aspect principal d'un edifice veri-
fablement important. Je demande a voir rAlharobra, le Coli-
see, Teglise do St-£tienne a Vienne, Saltzbourg, dans le Tyrol,
le Mont-Blanc, etc.; mais il est plus facile d'allcr a Rouen
que dans les divers pays oil sont silues les roonumens on les
lieux que je viens de designer; ct voila pourquoinous voyons
maintenant le cloitre de St-VVandrille.
Ce cloitre, eleve, dans le cours du seplieme siecle, par un
moine auquel les chroniqucs donnent Pepin pour allie, a cte
jenverse trois fois; deux fois il s'est releve de ses ruines, se
relevera-t-il encore? II est plus sage de laisscr a I'avenir lesoin
de repondre. C'est dans I'etat de destruction oil il se tronve
maintenant que M. Bouton a represente ce cloitre, qui n'offre
veritableraent qu'un interel pittoresque tres-inediocre ; mais
il n'a ete , pour le peintre, que I'occasion d'employer de nou-
vcaux moyens d'effets tres-extraordinaires. Pour animer ce
tableau, I'auteur a appele a son secours la niecanique ; ainsi,
nne portc qui fernie I'une des extren)ilt:s du cloitre, estsucces-
sivement ouverte et fermee violemment par le vent; et, lors-
qu'elle est ouverte, Tce-il parcourt au dela, une immense etendue
de canipagne. Le ciel que Ton apercoit a travers les ruines
PARIS. ' aSi
da cloitre, se couvre de nuages qui, marchant avec rapiditi*,
^clipsent ou laissent paraiire, tour a tour, les rayons dusoleil.
Ce qui cause le plus d'etonnement , c'est que, lorsqiie le
solcil repand sa clarle , !es arbustes, veuus sans cullure au
milieu du preau, projettenl sur les debris du cloitre une ombre ,
mobile comme dans la nature, plus ou moins intense, selon
ijue I'eclat du soleii est ]ilus ou moins vif, et qui s'evanouit
avec lui. Tout cela est parfaitoment ingenieux; mais, ce que
les artistes et' les gens eclaircs demandent a MM. Bouton et
Daguerre, c'est une imitation de la nature, non par desmoyens
niecaniques , mais telle que les ressources de la peinture peu-
vent la produire.
Gravure. — Leonidas aux Thermopyles. — Ce tableau de
I'un des plus grands peintres qui aient jamais existe, a obtenu.
un succes qui ne s'est pas dementi un seul instant. Selon I'opi-
nion commune, ce serait le phis bel ouvrage de David; mais
les artistes ne pensent pas ainsi. Ce n'est pas ici le lien de de-
velopper les motifs de cette difference; je le ferai, dans la no-
tice que je me propose de j)ublier sur cet artiste celcbre; seule-
ment, je dlrai que le public a ete principalement frappe du
caractere dramaiique de la scene; les nouis des personnages
quiyfigurent, les souvenirs qu'elle reveille, etaient bien de
nature a fixer I'attention generale, dans un moment ou tout
I'inlerel se tourne vers la Grece; c'est une des causes du succes
qu'a obtenu la gravure , que vient de publier M. Laugier
et qu'il a dediee aux Hellenes. Cette gravure d'une dimen-
sion considerable , est leproduitde plusieurs anncesde travail;
el , cependant, elle ne me satisfait pas enlierement : 11 y a de la
durete dans I'effet ; plusieurs letes n'ont pas assez de finesse ; on
volt que I'auteur s'est trop presse de livrer sa j)lanche au public;
mais, d'un autre cole, on reconnaif , partout, un homme ha-
bile qui manie bien le burin, et qui sait disposer ses travaux
avec adresse ; la figure de Leonidas est irreprochable. Aussi
cette estampe a-t-elle cle trei-reclierchee du jiublic; d'abord ,
parce qu'elle reproduit un tableau de David; ensuile, parce
que le graveur n'est reste au-dessous de lui-meme que dans ce
qui n'est pas apercu de tout le monde. Cette planclie a eu deux
lirages avant et avec la lettre : les epreuves avant la lettre cou-
lent 280 fr. sur papier de Chine, et sur papier blanc, 240 fr-j
le prix de celles avec la lettre est de 140 fr., sar papier de
Cbine, et de 120 fr. sur jiapier blanc.
Lithographic. — Le voluplueux Anacreon , dans I'une deses
odes, adressee asa maitresse, lui dit : « Que nesuis-je ton miroir
fldele, douce et jeune beaute! je reflechirais tcslraits ravissans;
282 FRANCE.
ta (unique, je le loucliciais sans cesse. Que ne suis-je l'<>n<lc
pure qui baif^ne el caiesse leA ajipas, etc. On connalt I'imila-
lion charniatile (pii cii a etc faile en fraii^ais :
Qae ne suis-je la fougire
Oil sur sur le soir d'un beau jour, elc.
GiRODET a puise dans cell.e ode une composition pleine de
grace ; elle fait parlie de V /Inacreon public par MM. Becqueiel
et F. A. Coupin (i). Sa niaitresse vientde quitter ses vetemensj
elle est sur le point de s'abandonner a I'onde trancjuille et
pure; elle se regardc dans un miroir. Anacr<'on , a demi cacli^
dans le feulllage, !;i coiitemple; i'amoiir qui le favorise , fait
toniber les derniers voiles qu'elle voudrait retenir. Ce sujet
avait plu a Girodel, el il en avait fait un second dessin , dans
une plus grande dimension. Ce dessin vicnl d'etre lithographic
par M. Dassy, I'lin de ses eleves. Je crois que cette estarape
aura un grand succcs; sans doute , elle ne rejuoduit ])as coiu-
plelement I'original; il y a toujours dans le travail du maitre
un sentiment qu'une copie iie peut pas lendre; mais celte
l)lanche est bien lithographice ; le sujet a ce charme parlicu-
lier qui arrote et fixe les regards ; c'est assez potir que le
public ne reste pas indifferent a cette jiroduction. M. Dassy a
essaye d'introdiiirc une innovation dans cette planche; il a
iniite, dans quehjues parlies, les travaux de la gravure. Je ue
blame jioint ce sysleine; je trouve, au conlraire, qu'il y a de
I'avanlage a ne pas faire les etoffesetlesacccssoires, comnie les
chairs; seulement il me parait qu'il ne I'a i)as toujours bien
appli(pie. Cette belle lithographic, destinee a servir de pen-
dant a la Danae dn meme auteur , coute le meme prix.
P. A.
Necrologie. — Pierre Edouord Lemontey, ne a Lyon Ic
i4 Janvier 1768, est mort a Paris le 26 juin 1826. (Comnie
ciloyen et hoinrae de lettres , il servit son pays jiar In droiturc
de ses opinions et I'illustra par ses talens : un rapide exanien
de sa vie politique et de sa vie lilleraire servira de pieuve a
cette double assertion.
Lenioiiley , ne dune famiUe de negocians, au lieu de suivre
(i) Un volume grand in-4° papier velln, conlenant 54 gravures, les
Odes completes (f Mnacreon , et i)n Discoiirs preliminaire. Prix, loS fr.
les epreuves sur papier blanc , et 180 fr. avec les eprcuves sur papier
dc CLiine. Chez Jules Keuouard, rue de Touruon. ( Voy. Rev. Enc. ,
t. XXX, p. 386. )
PARIS. 283
I'etat de ses peres, cntra, jeune encore, dans la carriere du
barreau oil il oblint des succcs, quoiqu'il ne possedat point
Tin des avantages les plus necessaires a roraleur, la facilile de
I't'loculion. La principale canSe de ces succcs fut sans doute la
noblesse de son caractere : car il publia , en 1789, plusieurs
ecrits g^nereux et utiles, par lesqnels tantot il reclamait pour
les protestans le droit d'eleclion aux etats-generaux , et tanlot
il appelait la sollicilude des legislateurs sur la misere des cano-
pagnes et les besoins de I'agriculture. C'est a sa plume que fut
confite la redaction du cahier de I'assemblee electorale de Lyon
extra muros. 'Nomme substitut du procureur de la commune de
Lyon, il trouva bientot I'occasion de deployer ses talens sur
un theatre plus vaste et plus brillant, lorsque les suffrages de
ses concitoyens le porterent a rassemblee legislative. Tour a
tour membre du comite diplomatique, secretaire et president
de celte asseuiblce , il honora ces diverses fonctions par la sa-
gesse de ses \ueset la moderation de son caractere, soil lors-
qu'il combaltit les lois i)orlees centre les pretres insermentcs,
soit lorsqu'enlisanta la tribune le rapport sur les massacres de
la glaciere a Avignon, il ne put achever cette fatale lecture,
interromptie par son trouble et par ses larmes. Place dans les
rangs de la minorite qui defendait la conslitulion de T791
qu'elle avail adoptee de bonne foi, Lemontey se vit menace,
a cause meme de son courage : il revint a Lyon, oil d'aulres
perils I'attendaiont; apres avoir vu la plus grande parlie de sa
familleperir dans ies horreurs du siege, ilse refugia en Suisse
j)our ue pas etre temoin et peut-elre victirae d'une paix plus
sanglanteque la guerre elle-meme : ce ne fiit qu'en 1796 qu'il
reparut au milieu des mines de Lyon : toujours domine par le
besoin d'etre utile a son pays, grace a de r.ouvelies fonctions
adminislratives auxquelles il fut appele, il oblint le rappel ties
exiles et la restitution des biens des condamnes : de semblables
bienfaits suffisent a I'eloge de toute une vie. Enfin , qiiaud il
vit briller I'aurore d'un avenir plus calme et pins heureux ,
apres avoir visile une parliedii nord de I'ltalie, il vints'elablir
a Paris, pour s'y livrer en paix a ses gouts litteraires : il se fit
inscrire sur le tableau des avocats et devint conseil de radmi-
nistration des droits reunis. Sous le consulat, il se vit appele a
la censure des pieces de theatre; en 1814, il f'-il nomme cen-
seur royal, el j'isqu'a sa mort il conserva cette place dont le
trnitement ne lui etait pas necessaire a cause de sa fortune con-
.sidcrable et desa vie parcimonieuse (1), etdont la nature etait
(i) CctJe iiabitude (rcconoiuie fjui, peniKint sa vie, lui a v.iln quel-
a84 FRANCE.
en contradiction avec I'independance de son esprit. Toulefois,
on lui doit la justice de convenir qu'il a toujours mis dans
I'exercice de son etat beaucoup de politesse et de moderation.
Tels sont les principanx traits de sa conduite politique , oil
Ton trouve quelqucfois des exemples de courage, souvent
des preuves de sa£;esse el d'bumanite, et toujours I'envie de
concourir au bien public.
Quant a ses Iravaux litieraires , ils ne lui ont altirc ni moins
d'esiime, ni moins de gloire : en 1785 et 1788, il remporia
deux prix d'eloquence a I'Academie de Marseille pour ses elo-
ges de Fabry de Peyresc et du capitaine Cook. Son opera de
Palma , ou le voyage en Grece , joue a P'eyJeau en 1 798 , avait
pour but d'eclairer rip;norance et de corriger la cupidite de
ces vandales qui voulaient specular sur la destruction des nio-
numens de notre arcliilecture, en leur montrant les enfans de
Pericles niutllant avec la scie les debris du Parthenon : ce petit'
ouvrage elincelle d'csprif. Un autre opera comique de Lemon-
tey, intitule Rornagnesi , n'obtint qu'un mediocre succes : le
dialogue y manque de naturel. Leiuontcy sentit qu'il n'avait
pas i)!usieurs des <|naliles necessaires pour se fonder une reputa-
tion d'auleur dramalique : il reconnut que sa veritable vocation
elait le genre du conte, et des lors il se llvra tout enlier a cette
branche de notre litieralure qui n'a pas eie dcdaignee par les
genies d'tin ordre superieur , puisque Voltaire lui doit une j);irtie
de sa gloire. Raison , folic , chacun son mot, petit cours de
morale mis a la portee des nieux enfans : tel est le titre d'un
recueil de contes qui presente partout Talliance d'une satire
piquante et ingenieuse avec une philosophic clevee et pro-
f'onde. C'est avec autantd'adressequedebonheurqu'en j)uisant
le sujet de ses contes dans I'antiquite, il cherche a fronder les ridi-
cules, a corriger les vices de notre siecle. II est souvent
spirituel comme Sterne, enjoue corame Swift, franc comme
Hamilton. Si Ton peul lui reprocher un defaut, c'est I'abus de
I'esprit. Quelquefois son expression, trop pretentieuse, rap-
peile la maniere de Voiture ou de Marivaux : mais ces legeres
imperfections sont amplement rachetees par la douceur de sa
morale, la gaite de ses ])ensees et I'originalite de son style;
j)lusieurs de ses conies n'auraient pas ete desavoues par I'im-
qaes epigrammes, avait un but honorable qu'on n'a decouvert qu'apres
sa inort. On a tionve dans son portefenille la preuve qu'il avait prete ou
platot donne a diffcrenles personnes plus de cinquante mille francs. Ses
.imis n'ont jamais reclame en vain le seconrs desa bourse. Qnandonest
prodigue pour les autres, il est permis de ne pas I'elre pour soi-meme.
PARIS. a85
rrtortel auteur de Zadig etde Candide. Le nouvel ouviage qu'il
publia, sons le litre des Observateurs de lafemme, abonde ou
reflexions malignes et renferme une critique fort plaisanle des
usages acadeiiiiques (i). Parini les nornbreux opuscules c'cliaji-
pos a sa plume spirituelle, le public dislingua : Les trois visiles
de M. Bruno ail faubourg Saint- Antoine. Dans eel ecrit , doiit le
but est d'engager la classe peu riclie a verser dans la caisse
d'epargne le fruit de ses economies, on s'elonne que le talent
de son auteur ait pu descendre des hauteurs de la pliiloso[)hie
et des jeux brilians de I'iniagination , jusqu'a la familiarite d'un
raisonnement et d'un langage propres a convaincre les intel-
ligences les plus communes: depuis Franklin, on n'avait pas
aussi bien ecrit pour le penple. Ses deux peliis romans Irons-
nous a Paris? et ThibauU ou la Naissance tPun comte de Cham-
pagne ^ composes, I'un dans le genre de Sterne, pour le cou-
ronnement de Napoleon; I'auire dans le genre de I'Arioste,
pour la naissance du Roi de Rome, ont merite I'honnenr de
survivreaux deux circonstances qui les a vaient inspires. BienI 6 1,
le talent de Lemontey, grandi avee I'age, nmbitionna des suc-
ces plus difficiles et prit une direction plus grave : il remplaca
le-i riantes fictions du conte par les austeres meditations de
I'hisloire. Son Essai sur Velabitsscment monarchique de
Louis XIV., introduction d'une histoire critique de la France
depuis la mort de Louis XIV , produisit une vive sensation et
lui ouvrit les portes de I'Acadeiiiie fiancaise ou il fut recu, le
i7Juin 1819,3 la place de I'abbe Morellet, son compatriole.
Nouveaute de vues, independance d'opinions, hardiesse de
pensees , impartialile de jngemens, tout contribue a meltre ce
morceau historiqne au rang des ouvrages les plus remarqna-
bles de notre epoque : ami scrupuleux de la verite, Leraonley
relablit, dans des extraits desmcmcires de Dangeau, imprimes
dans le m^rne •volume que son Essai , une foule de passages
qui, dans une nouvelle edition de ces memoires, avaient ete
suppiim(''s ou alleles. Son Essai est done, suivant sa propre
expression , I'inventaire de la monarchie de Louis XIV. Espe-
rons que le grand ouvrage dont il est la preface, n'aura pas
(l) Cette critiqae est d'aatant pins singuliere que Lemonley, nierabre
de rAcademie de Lyon, attacha beaucoup de prix au fauteuil de I'losli-
lut : il remplit foujours ses devoirs academiqaes avec zele et exaelifude,
el contribua, autaat qu'il etait au pouvoir d'un seul homine, a favoiiser
I'elari des connaissances nouvelles. C'est lui qui , sons le voile de I'ano-
nyme, tournit les fends d'un prix de poesie pour celebrer les avaniages
de I'enseignement mutuel.
P
286 FRANCE.— PARIS.
ele laisse incomi)lel. Depuis long-teras , Lrmonley avail re-
cueilli de iiombroiix maltriaux pour son iiistoire, et avail pulse
a des sources nouvelles. Tous les amis de la fidelity liisloi ique
dolvent s'interessei' a rc.xistcncc d'un si important ouvragc: cet
interit est encore motive par Ic ineiile d'un fragment sur
la Peste de Marseille fpi'il publia en i8ai ; ce fragment est
empreint du co'.oris de I'hislorien grec qui Iraca un tableau si
vivant de la pcsle d'Allienes.
Lemontey a compose un grand norabre de notices hlstori-
ques qui out jiarn dans la Galerie francaisc , et dont qnel-
ques-unes ont etc inserees dans la Ret'ue Encyclopcdiquc. Les
notices sur de Thou, JRetz, Colbert, la duchesse dc Loiigue-
villc, ChauUeu , Helvelius , M"' Clairon, Adrienne Lecousreur,
se distinguent par des vues judicieuses et par un style toujours
pi(|uant. Un discours sur la precision considdree dans le style,
les langues et la pantomime, prononce par lui dans la seance
annuelle des quatre academies du 24 avril i824» ( voy, 7?ci'.
Enc.,X. XXII, p. 540), decele une erudition profonde, et
renferme des apercus entierement neufs sur le genie des lan-
gues et sur la marche de la litterature. Son dernier ouvrage
est I'eloge de Vicq d' A zyr <\\]^'A lut a I'Academie fiancaise, le
aS aout 1826. Ami de ce raedecin celebre, son cosur a heurcu-
sement inspire son esprit. Une annee ne s'est pas encore ecou-
lee depuis cette epoque , et la raort a condamne sa voix a un
silence eternel; elle a frappe un talent qui brillait de tout
I'cclat de la jennesse et marchait dans toute la force de I'age
mur. Une maladie courfe et aigue a presquc subitement en-
leve Lemontey aux lettres et a I'amitie. Sa depouille mortelle
a ete transportee au cimetiere du pere Lacbaise, et M. Auger
a prononce sur sa tombe un discours conqiosc par M. Ville-
main , et qui a vivement emu tous les assistans. Depuis (juelques
annees, la mort continue a eciaircirles rangs des membres do
I'Academie francaise. Henreux Icshommes qui peuvent, commo
Lemontey, se survivre dans leurs ouvrages! U est a desircr
que scs heritiers s'occupent d'une edition complete dc ses <x\\~
vres: cette edition serait rechercbee par tontcs les personnes
qui apprcclent le merite d'un penseur judicieux et profond,
iini au talent d'un ecrivain elegant et spirituel.
A. BiGNAN.
TABLE DES ARTICLES
CONTENUS
DANS LE QUATRE-VINGT-ONZIEME CAHIER.
JUILLET 1826.
I. MEMOIRES, NOTICES ET MELANGES.
I . Lettre sur retiiblisscment du jury a File de Ceylan.
Alexandre Johnston. 5
91. Quelqiies g^neralites sur les eaux minerales. G.-T. Doiii. i5
3. Tableau statistique du commerce de la France , en 1S24.
/}. Moreait de Jonnes. 27
II. ANALYSES D'OUVRAGES.
4. Essai sur les cryptogames des ecorces exotiques officinales,
par M. A. L. A. Fee. Borj de Saint-Vincent. 47
5. Geometric et niecanique des arts et metiers et des beaux-
arts, par M. Chailes Dupin. Terry. 5a
(). Theorie du beau et du sublime, par M. Massias.
Adolphe Gamier. fi'J
7. Traite de legislation, par Charles Comte. L. C. F. 78
8. Histoire des expeditions maritimes des Normands, par
G. B. Dapping. J- C. L. de Sismondi. 91
9. OEuvres completes de J. -J. Rousseau, en un seul volume.
M. A. Jn/lien dePnTis. roa
III. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
Annonces de it."] outrages , francais et etrangers .
Amekique SEPTENTRiONALE. — Etats-Uuis , 2, dont I ouvrage
periodique lOg
Asie, Datavia , i Il3
Europe. — Grande-Bretagne , 16 , dont 7 ouvrages periodiques. it/,
— Russie,S, dont i ouvrage periodique i3j
— Danemark , 2 l35
— AUemagne, 7 l3ti
— Suisse I, i4tt
— Italle , 10 147
— Pays-Bas, 9, dont 2 ouvrages periodiques i52
France, 74, savoir : Sciences physiques et naturelles , 21 157
— Sciences religienses , morales , po/itiques et historiques , 27. . . 177
— Littcrattire, 1 3 207
— Beaux- Arts , 4 217
— lUemoires et Rapports de societes savantes, 1 222
— Ouvrages periodiques ^ 5 224
— LiiTcs en langues etrnngeres , iinprirnes en France,3 232
al^S TABLK DES ARTICLES.
IV. NOUVELLES SCIENTIFIQUES ET LITTKRAIRES.
Aheriqub septehtrionale. — Etats-Unis ; Massachussets : Edu-
cation. — Connecticut : Legislation ; Fonrlation d'un liospice.
— Tfa/ei'g'/i .• Affianchissement et colonisation des esclaves. —
^ew-York : V.ycee d'liistoiie naturcUe ; nominations de non-
•veaux correspondans. . ■ 235
Amekique centhale. — Guatemala : Publication de I'ouvrage
sur les liberies de I'eglise gallicane a36
Aktilles. — Martinique : Tiemblement de terre ; Froids extraor-
diuaires «*"/.
Amerique meriuionale. — fir«(7.' Instruction elementaire. ibid.
ApiiiQUE. — £^/p/e ; Etabiissemens industriels fondes par le
pacha. — Cap cJe Bonne-Esperance : Fondation d^un musce. . aSj
AsiE. — Batavia : Societe des sciences et des arts. — Cejlan : Rii-
sultatsde I'introduction dujugement par jury ibid_
EUROPE.
IlesBritakniques. — Nouvelle expedition maritime. — Haute-
JBcoiie.-Etat de I'educatiou. — Manchester :\\\&\\\.\x\. pour les
sourds-muets des classes indigeutes iSg
RussiE. — Lecture a I'Academie des sciences. — Necrologie : Ka-
ramzine 241
Poi-oGHE. — Nouvelle monnaie polonaise 244
Ai-LEMAGNE. ■ — Goettingiie : Soc'ieti des sciences, Histoire de
Perse. ^a//e .- Litterature orientale ibid.
SoissE. — Canton de Vaud : Ecole pour les sourds-muets a Yver-
(foH ; Details statistiques sur les sourds-muets. — Fribourg :
Societe d'antiquaires • • • *4''
Italie. — Propagation de la vaccine en Savoie et a Raguse. —
Litterature classique; Publication prochaine 249
Gkece. — Duel de deux Souliotes 25 1
EsPAGNE. — Introduction de la cochenille ; vers a soie , dits de
la Chine. — Procedes de la censure ibid.
Pavs-Bas. — Ucrecht : Cu\\.\ive des fleurs ; Expositions publiques.
— Navigation par la vapeur. — Utrecht : Societe des sciences
et des arts. — Amsterdam : Concert au profit des Grecs. . . . aSi
Framce. — I/e de la Camargue : Assainissement et fertilisation
de cette ile. — Societcs &-AV Antes : Bordeaux , Academic des a53
sciences; l-yon , Academic des sciences, belles-lettres et arts.
Paris. — Jnstitut : Aca.demie des sciences: seance publique du
5 juin , et seances ordinaires du mois de juin. Academie fran-
^aise : Seance publique du 18 juillet ; Choix d'un nouveau se-
cretaire perpetuel ; Prix de poesie pour 1827. — Ecole speciale
de commerce. — Societe pour I'amelioration des animaux do-
mestiques. — Librairie : Productions de la presse, pendant
le premier semestre de 1826. — Theatres : Theatre- Fntncais ,
i'^ representation de Y Agiotage, coraedie. Revue des Theatres
lyriques pendant I'aanee 1825. — Bcaux-Aits .-Exposition au
profit des Grecs; Diorama; Gravure; Lilhographie. — A'c-
. crologie; Lemontey ^''*
A%'1S AUX AMATK^RS DB LA LITT^RATORS l^TEAKCiRE.
On peut s'adresser k Paris, par reiitremise du Bureau cbktbai. uk
LA Hbvub Emcyci-opediqub, a MM. Trkuttei. et WiiRTz, rue de
lionrbou, n" 17, qui ont aussi deux maisous de librairie, I'une a Strasr
bourg , pour rAllemagiie, et I'autre a Londres ; — a MM. Arthu*
BERTKiNn, rueHautel'cuille, n" a3; — Rewouard, rue deTouruon,n''6;
— Lkvraui.t, rue des Fosses-M.-le-Princejn" 3i,et^Strasbourg; — Bo»-
sMitin pere, rue Richelieu, n°6o; et a Londres, pour se procurer le»
divers ouvrages ^trimgers, anglais, allemands, italiens, russes, polo-
nais, hollandais, etc., ainsi que lesautres productions de la litt^rature
etrang^re. Le prix de ces ouvrages rendus a Paris sera celui des pays
Strangers oii ils se publient, augment^ de 10 pour 100, pour frais de
port, droit d'importation et de commission, etc. — La Direction dela
Revue Encyclopediqnerxat d'autre but, en publiant cet avis, que de faciliter,
par tous les moyens qui resultent de ses publications mensuelles, les
communications scientifiques et litt^raires entre la France et les pays
Strangers.
AUX ACADEMIES ET AUX SOCIETES SATANTES dc tOttS ICS poyS.
Les Academies et les Societes sayamtes et d'utilite publiqub,
fran^aises et etrang^res, sont invitees a faireparvenirexactement,/r<inc
de port , au Directeur de la Revue Encyclopedique , les comptes rendus
de leurs travaux et les programmes des prix qu'elles proposent, afin
que la Revue puisse les faire connaitre le plus promptement possible k
les lectt'urs.
AUX EDITEURS d'oUVRAGES et AUX libraires.
MM. les edlteurs d'ouvrages p^riodiques, francaiset Strangers, qui
desireraient echanger leurs recueils avec le n6tre, peuvent compter sur
le bon accueil que nous ferons a leurs propositions d'^changes , et sur
une prompte annonce dans la Revue , des publications de ce genre et
des autres ouvrages, nouvellemeut publics, qu'ils nous auront adresses.
AuX EDITEURS DBS RECUEILS PERIODIQUES EW AWGIETEHH».
MM. les Editeurs des Recueils periodiques publics en Angleterre sont
pri^s de faire remettre leurs numiros a M. Degeobge, correspondantde
la Revue Encychpedique a Londres, ir" 38, Norfolk-street, Strand , chez
MM. De Crusy, Cabet et Marbut, maison de correspondance et de com-
mission ; M. Degeorge leur transmettra, chaque mois, en ^change,
les cahiers de la Revue Encjclopedique , pour laquelle on peut aussi sous-
crire cbez lui , soit pour I'annee courante, soit pour se procurer les
collections des anneesant^rieures, de 1819 a i8a5 inclusivemeut.
AuX LIBRAIRES ET AUX EDITEURS o'oUVBaGES EN ALLBHAGITB.
M. ZiRGES, libraire a Leipzig, est charge de recevoir et de nous faire
parvenir tous les ouvrages pubUes en AUemagne , que MM. les libraires,
les editeurs et les auteurs desireront faire annoncer dans la Rfu* Snyr-
rlopidique.
LiBR/kinES chvz lesquels on souscrit clans lex pays ktrangers.
Londres, Diilau et Compagnie;-
Aix-la-Ch<tpeli», Laruelle £i!s.
j4miierdant, G. Dut'our; — Dela-
chaud.
yinveri , Ancellc.
Arau (Suisse) , Sauerlander.
Berlin, Schlesinger.
Heme, Clias , au cabinet litte-
raire j — Bourgdoit«jr.
Breslaii , Th. Korn.
Bnixelles, Lccharlier; — Demat.
Ilruges , Bogaeit; — Dumoitier.
Florence, Pialti.
Piiboiirg (Suisse) , Aloise Eggen-
doifer.
Prtincfort-sur'Mein , Schaeffer; —
Bionner.
Gand , Vandenkerckoven fils.
Geneve, J.-J. Paschoud ; — Bar-
ber.atetDeJarue.
La Haye, tes freros Langeohuysen.
LaiisAiiiie , Fischer.
Leipzig.GrieshAiMin^r; — CZlrges.
Treutlel et Wiirtz; — ^Bossange.
Madrid, Denude; — Perfes.
Milan, Gicgler; — VistTinra; Bocca.
Moscoii, G.iutier;— Piss ^6ieet tils.
Naples , Borel ; — Marotia et
Waiispaiidock.
Aeiic/ifttd (^Suisse), Grciter.
New-Yor/i ( Euts-Uiiis), Berard
c't Mouduii.
Nouvelle -Orleans , Jotirdan ; —
Roche , fW-rcs.
Pale/me (Sicile), Pedonne et Mq-
ratoi i ; — Boeuf (Ch.),
PelersOoiirg , Saiul - I'loient ; —
Graeff; — Weyher; — Hluchart.
Stuttgart et Tubingen , Coltd.
Utrecht, Van Schoonhovcii.
Tudi , B. Scalabtini.
Turin , Bocca.
l^iirsovie , GUicksberg ; — Za-
vadsky.
yienne ( Autriche ) , Gerold ; —
•Sehaumboiirg ; — Schalbacber.
Liege, Jalheau p^re.
Lisbonne , Paul Martin.
COLONIES.
Guadeloupe (?oiiite-a-Pitre) , Piolet ain6.
Ile-de-Prance (Port-Louis), E. Burdet.
Martinique , Thounens, Gaujoux.
ON SOUSCRIT A PARIS,
Au BVKKAU D« KEDA^CTIOJJ, itUB I)'EnPER-Sa INT-MlCHEL , U" iS,
Oil doivent fitl-e envoy«s, francs de port , les livrt-s, dessins et gra-
vures , dont on desire I'annonce, el les Lettres , Memoires , Notices
ou Extrails destines a ^tre insures dans ce Recueil.
Cu£z 'I'nEOTTEL EX WiiBTz , fue do Bourbon , n", 17;
Buy bt Ghaviek , ^^<.l ^os Augustins, n" 55;
Charles Rechet, libraire-comm""" , quai
Domdey-Dupre, rue Saint-Louis, n» 4'
Richelieu, n" 67;
MoNGiEain^, houlcvaiid Poi.<i,<ionui^re, n" i
Eymeky , rue Ma7.arine, n° 3o ;
BoaET, rue Hautefeuiile, n" la;
Bacublteh, quai des Augustlns, n" 54 ;
Levrault, ruedesFosses-M.-le-Prince, 11° 3i , et a Stiasbourg;
A. Baudouin, rue de Vaugirard, n° 17 ;
Dbi,aokaT, Pelicier, Ponthieu, au Palais-Royal;
Urbatw Canex., rue Saint-Germain-des-Priis , u" 9.
A LA Tente, CABrwET LiTTERAiRE, tCHU por M. Gaiitieb, ancica
niiiitairc, Galerie de Bois , n" 197, au Palais-lloyal.
Nota. Leg ouvrages Roaooces daus la Revue se trouvent aiissi cIiczUoret , rue
H«ntefeulUe , n" 11.
ustins. u" Sy;
arais; et rue
rAT'.lS. I>F. I. fH!J'RljMi
Tome III- 1826. ( 3i* de la collection. )
C)?. LIVHAISON.
^
i>
'&
mi
REVUE
ENCYCLOPEDIQUE
ANALYSE RAISO.NNfiE
DES PRODUCTIONS LES PLUS REMARQUABLES
DANS LA UTTEKATUKE, LES SCIENCES, ET LES ARTS.
1° Pour lea Sciences physiques ct mathematiiiues' el^les / ' v '
MM. Ampere, Ch. Dm'iN,.Koi;KiER, Girard, W^vniR.de This
Casaseca, Je Madrid; Ffkry, Fr,\>-coei;iv , Ad.' Go:^ i/iNi. i , i i - >..,
professeur de technologie; A. MtrHti.OT, be Montgrrt ; Morj-.vu ue Jos:<ls,
P01111.1.ET, T. RiCHAUD, Warden, etc. : •"■;• » '<.t~'--
■x" Pour Ips Sciences nataieUes: MM. GEOFVROY-SAiKT-Hir.AiRErde J'l^stitut;
I^oTiT DF. Saist-Vjncknt, corrcipoiulaiit dcVInstiiut , V. AnuQUiN, Mathied
LoNAKOUS, d'.' Tuiiu; TiRONGNlAnr fi!s, DBSM.\.RESTr Ft-buR'ENS, D.-M. ;
I'. GAtT.i.ON , de Difjipe; V. .Ia( niii-rjoKT, c'c.\ " , . ' ■
3* VmiT le<> Sciences medirales : MM. ADELOs.TJALr.YjDAMtRON , G.-T.Dois,
-\medee Dcpau, KsQiitROt, FossATr.GAsc, A. GKiMAUD.d'Ang'r^rs 'O'rohoi-T;
■viRCKHOFF, u'Auvcrs; Okfii.a; UiGoi.r.nT ii!.s, d'Amitwis;
.',° I'our les Sciences ^luHosoji/uijiifs et im/rafes , j^o/t'ifitc': ,
' isiori^/ues :llA'd. M. .V. Jui.i-iE?f, de J'niis, Fo;n^aioiir-Dir(( ! .' ' ,1 "
'.r2cj-ct/}peJiqiie; Df-Gei'..\stjo, Afr.x. HE i,a IuVrhf., JoiwARU .'LAivMmNAi.s, t\c
1 [iistitut ; Agoub, Ahtat:i), INI. Avi-.KEr,, KAr.r.iii du Ijocage Cls , IJF.'J.rAniiN-
' ON'iT\NT, (-'UABI.ES CcMTI,, l)KPrr:<(i, ADllI.Plli.. GARtt'lF.n , '"CrCNIAUT-,
>.i i:'.;, '. . IaijEErt, Lafow r>E i/AnF.RAr, Ai..':-.\. Lameth , L.'.-nji.IiNa ;s (ils .
: . i.i:..i , L,ZSL-EUIv-;.lERt-lK, jy\S-SIAS, A. MliT.'^'At/i'Ml-YKh.', (rA.'^l.^tJ i-,i;u!i ;
'U-; iS'op.vixs, PAnEHT-l'i) AL, KusEnE Salverte , ' J^-1 . '.-. "■ , ' -, , ,
.'.;sMONDi, dtvGcnevp, tic. Di;7nN iiiin', Bfrvjm.e , A
LeFER, CRIVEr.U.UoiiULEr-DE-CoiSTHlBArl.T, UUFAI , : I ! ,, ! ;
GIER , GUADET, Cll. ReKOCARD, TaILI.AMUER,, avoC.lt.',, itr.'. ;^, .. :,
5* I'our la IJtteriifureJhcncrJse et ciuingere, la Bi^'Hrt^iaiJiic ,\'y1i<:heologic
i\ \ci Beaux- Arts :M'S\ . AnnraECX, AMAt;RY-DtivAT.,I>EH ii.:;, J. Droz, FSieiuc
David, Leherc.'er , Natjdkt, de Seuur, de l'lii>titut; M'n<' L.-Sw". V.f.iA.or.;
;ni. Bariseau, DiANCui.M. Herr, J. -p. Bre.s, Feux Bodi;.-, Bu:•.^•o^■^^ (iS,
( iiAUVET, CBFSEDOt,i.E, de LicgP: P.-A. GouriN , Fr. Dlc; okge.Dhmer.an,
'u. Gauttier , Ph. Goi.BKRy, liEtRERO, IIekrichs, v.. F'erkau, Algvs;:;
;, r.tftK.fiis; KAr.ms, >\ ?.,-.nte, Adrie.v-Lafasge , J-V.' I.Ecr.taf;, r.oi:v.>?-
■ :;iM,vRS, .v.. 'i .: 1 ..s, Al.rERr-M(i?;Ti'MOST, Mo-.-vard,
'Lausanne; "> ir.-H. Patin, !'<>s-frEiivir.r.E;OnET!>
: ;.T, DE lUiFr ; < . , III r , bib'i.itjitcaire dp la vilie de
.l.'S; IIH yTASSAKT, Fit. ,S ; ,S(.H "EiGH/EUSER , dc.StraS';
■ iirt'; Lion [arnssr, V. V. . Viti.f.n-aae, S. Visoo.vti, etc,
AL' ...UKE.VU CEiaU.ALLE J.A.r.E-\(X'E F.NCYCLOPEDIQIT.,
ilue <rj''u;<M-,S.iint-'iyiclit;l ,-11" 18;
ARTHUS BRRTRA^'D , 1 ue Haiilefeuiile,.n° aS;
AiJ AlusEKKNCYCLoi'tDiQUE, cuEZ BossAKGE pfere,rue B ichclicn ,
u° 60;
Rekouahd, rue de Tournoti, n" 6;
LOrs'DRhS. — Gekekal Fobeigw Agency Office, n" 38, Norfolk-
streefjStinnd; Theuitei. etWurtz; Boss.ikge; .Dux.au r.Tco.\!P. ;
P. R01.AND1, n° 20, Eerneis-sireet , Oxford-Street.
AOUT 1 S26.
HKpx 'J^-:J>^'^H:'^^ -;.^<^ i^>
riS n<>y- ■l.rt.;^'>■!>r>?^I' ■■■^V.
m
AVIS ESSENTIEL AIJX SOUSCRIPTEURS
MM. LES SODSCRIPTEDUS (ioTll 1'aBONNEMENT EST EXPlfiE
LB 3o JOIN DERNIER , SOHt inVltCS a Ic faive RENOD-
VBLER iNCESSAMMENT , pouF quc Ic scrvicc dcs cnvois
ii'eprouve aucun retard.
CONDITIONS DE LA SOUSCRIPTION.
Uepuis le moisde Janvier 1819, il pariiit, par ann^e, douze cahiers
de ce Recueil; cfaaque cahier , public le 3o du mois, se compose d'en-
yiron i4 feuilles d'impression , et plus souTent de 16 ou 18.
On souscrit k Paris, au Bureau central cTabonnement el ^expedition
indique sur le litre.
Prix de la Souscription.
A Paris 46 fr. pour un an; a6fr. pour six mois.
Dans les departemens. 53 3o
A I'etranger .60 34
La difference entre le prix d'abonnenient,a Paris, dans les diparu-
rnens et dans tetranger, devant dtre proporlionnelle aux frais d'expe-
dilion par la poste, a servi de base a lafixation porl^e ci-dessus.
A ce suiet, la Direction de la Revue Encyclopedique croit devoir faire
observer que , cette base ayant ete calculee d'apres le nombre de qua-
torze feuilles promises mensuellement aux abounds , les frais depot t
occasion's par l' augmentation successive des cahiers sont restes entife-
rement a sa charge.
Le montant de la souscription, envoyd par la poste, doit ^tre adresse
d'avance, franc de pobt, ainsi que la correspondauce, au Directeur
de la Revue Kncxdopediqae , rue d' Enfer-Saint.Michel , n° 18. C'est a la
ra^me adresse qu'on devra envoyer les ouvrages de tous genres et les
eravures qu'on voudra faire annoncer, ainsi que les articles dont on
desirera I'insertion.
On peut aussi souscrire chez les Directeurs des postes et chez les
principaux Libraires, k Paris, dans les departemens et dans les pays
etrangers.
Trois cahiers ou livraisons forment un volume. Chaque volume est
terming par une Table des matiferes alphabdtique et analytique , qui
eclaircit et facilite les rccherches. Cette Table est toujours jointe au
I*' cahier du volume suivant, i I'exception de la dernifere Table de
lana'e, qui est exp6dide isol'ment a tous ceux qui peuvent y avoir droit.
On souscrit, seulement k partir de deux dpoques , du i" Janvier ou
du j'trfuiUetde chaque ann6e, pour six mois, ou pour un an.
On trouve, ad bobeau ckstral, les collections des armies 1819, iSao,
1821, i8ai, i8i3, i8a4 et tSi.T, au prix de 5o francs cliacune.
REVUE
ENCYCLOPEDIQUE,
ou
ANALYSES ET ANNONCES RAISONNEES
DKS PRODUCTIONS Ll'.S PLUS KKMAHQUABLES
DANS LA LITTliRATURE, LES SCIENCES ET LES ARTS.
I. MEMOIRES, NOTICES,
LETTRES ET MELANGES.
NOTICE
SUR LES SOCIETES SAVANTES
DES ETATS-UNIS DE L'AMERIQUE DU NORD (i).
N. B. CeUe Wotice est extraite de rexcellem journal intitule :
American journal of science and arts , publie a New- Haven
par M. le professeur Silliman [Rev. Enc, t. xxix, p. 736).
Le redacleuf nous avertit qu'il ne pretend point j)resenter une
liste complete des Societes consacrces aux sciences dans tous les
Elats de I'Union , et que des supplcMnens seront necessalres. A
iiiesiire que ces supplemens nous arriveront, nous auronr. soin
de les offrir a nos lecieurs; car les Societes savantes sont une
parlic essenlielle de la statistique, qui est elle-meme aussi
importante que la politique, propreraent dile, quoiqu'elle
ri'allire pas aussi fortement rattention publlque.
Dans renumeration des Societes dont nous allons parler,
nous ne consulterous que I'ordre geographique.
(i) Voy. Rev. Enc. , t. v, jjiivier et ferrier i8ao , p. 14 - 33 et
232 -aSo, les deux Notices sw les Societes savan'.cs eirarii/ires.^
T. XXXI. AOllt 1826. jy
•290 SOClfiTES SAV ANTES
1'' Societe marilime cles Indes orientales , i» Salem, etat dc
Massachusctls. Elle fut instituee primitivemont pour rccueillir
les observations relatives a I'histoire naturelle de I'Ocean.
Pour en etre meinbre, il faut ctrc patron ou subrecarguc d'un
navire , et avoir navigue jusque vers I'extremite sud de
TAfrique ou de rAmerique. Lorsqu'nn mcmbre fait un voyage,
il recoit tin livre blanc qu'il doit remplir de ses notes sur tout
ce qui interessc I'histoire naturelle, la geographie, la navi-
gation. A son retour, il remct son journal qui estsouniis a une
inspection. Par ce nioyen, la socielc possede actuellement plus
de 67 journaux , et dans son niusec , plusieurs miiliers d'objets
d'histoire naturelle dont on a public, en i8ax, tin catalogue
tres-bien fait. Le president de la Societe est M. Bowditch :
le nom de ce savant atteste assez I'ufilite dcs travaiix confies
;\ sa direction.
2° Acaclemie americcnne cles sciences et cles arts, fondee
en 1780, a Philadelphie. Elle a deja publie plusieurs volumes
de ses memoires; I'astronomie et les sciences malhematiques
V dominent. Les naturalistes mettrout aussi a contribution los
ecrits de MM. Cutler, Cleaveland et Peck. M. Cutler a
donne le classement ct la description des plantes indigenes
dc ce pays.
3" Societe linneenne cle la Noiwelle-Angleterre , etablie f>
Boston. Nous ignorons la date dc sa fondatiou ; nous ne savons
pas non plus si elle a publie d'autres ecrits qu'un rapport fait
au nom d'une commission sur le grand animal marin que Von
a vu pres du cap Ann, et que Von croit etre un serpent dc iner.
L° Societe de Franklin. )_ . , r^, , , , ■
Z ^ ...,., J [Providence, Rhode-Island.
5° Societe phdopnusienne. \
Ces Societes dcvraient se reunir, puisqu'clles tendent au
memc but, par les niemes moyens : a moins que les operations
de I'une ne servent a verifier celles de I'autre, et a donner
ainsi plus de certitude aux resultats. La premiere est en acti-
vite; elle a fait construire un trjs-beau laboratoire ou le„s
membres font une analyse tres-soignee des mineraux du pays,
recherches(]ui convienncnt tres-bien a IVtat de Rhode-Island.
DE L'AMERIQUE DU NORD. 291
6" Jcodemie des sciences et des arts du Connecticut , foiidee
en 1799, tenant ses seances a New-Haven. Le premier volume
des memoires fie ccttc Societe parut en 1810, et un autre,
en i8i3 : depuis cette epoqu'e, ses travaux ont ete pen actifs.
Les reclierches du professeur Silliman sur la fusion de quelques
substances refractaires sont rapportees dans ces memoires,
ainsi que les resultats des experiences qu'il a faites depuis iouc;-
tems sur cet objet important. On ne sail pourquoi ces travaux
n'attirerent point I'attention du monde savant, si bien que le
doctcur Clakke crut pouvoir s'attribuer I'honneur de les avoir
faits le premier. Son ouvrage parut en Angleterre, en 1820,
une vingtaine d'annees apres que MM. Hare et Silliman
avaient termine leurs experiences a Philadclphie, et que leurs
memoires elaient publics. 11 est bien etrange que le chimiste
anglais n'en ait eu aucune connaissance.
7° Socitle americaine de geologie, organisee a Ncw-IIaven,
en 1819. Eile n'a point encore public de memoires; mais le
redacteur du journal qui nous fournit les materiaux de cette
notice, lui doit une parlie de ses articles. Ses assemblees an-
nuelles sont flxees provisoirement au mois de septembre, a
New-Haven.
8° Lycee de Pittsfield, fonde en iSaS, a Pittsfield, etat de
Massachusetts.
9° Societe des arts d' Albany, etat de New-York. Elle a deja
public, sous differens titres, quatre volf.mes de memoires dont
plusieurs sont tres-interessans, principalement ceux de bota-
nique et de geologic. W s'etait forme dans la meme ville un
Lycee; les deux Societes viennent de se reunir sous le titre
d' In stitu t d' Albany ( i ) .
(i) 11 ne p.Traitra pas deplace de parler ici de Yecole de Rensslaer,
etablie dans ces derniers teras a Albany par M. Stephen Von Renss-
L4ER , habitant de cetie ville. Cette instiiution, qui a deja obfenu
les plus heureux resultats, peut devenir qnelque jour une pepi-
nifere de naturalistes. Le but du fondateur est de former, pour
I'instruction de la jeunesse des deux sexes, dans la classe des cul-
aga SOCIETjfcS SAVANTES
10" Lycee cThistnire naturelle ,a Vlique , etat de New- York,
fon(Jc' en 1820.
11" SocicUf de chimic el de geologic , a Delhi , etat de New-
York.
12" Lycee d'histoire naturelle , a Troy, 1819.
1 3° Lycee id., — a Hudson, 1821.
1/,° Id. id., — a Cats kill, 1820.
i5° Id. id., — <>i Nea'hurgh, 1819.
160 Id. id., — a f rest point, 182/1.
La pliipart de CfS Socieles n'ont point encore piiblie de
memoires; mais toutes out Iravaille avec zcle a dcs rccher-
ches, i former dcs collections, a preparer les depots qui rcn-
ferineront ces raoyens d'instrisction : ct plusieins d'entre elles
ont fait inserer de precicuses notices dans les joiirnaux oon-
sacres aux sciences.
17° Societe lilteraire et philosophique de New-Yorf; , fondec
tivalcurs et dans celle des ouvrlers, des professeurs capables d'en-
seigner I'applicaiion des sciences nattireiles a r.ngriculture , a I'eco-
noinie domestiqiie, aux arts et aux manufiictures. On emploie
poor cette in.struction les modes d'enseignement les plus cnpable.s
d'en assurer le succ^s. M. Eaton enseigne la chimie et la philosophic
naturelle ; il fait aussi un coiirs de gvolugie, un autre iVarpentage, etc.
M. Ic D'' L.-C. Beck, botaniste deja celebre , est professeur de
botaniqtie , de mineralogie et de zoologie. Des feniies bien cultivccs
et des atelieis de differens arts ont ete etablis dans le voisinage de
recole, afiii que les etudians puissent y faire rap])lication imrae-
diate de ce qu'oti leur enseigne. Les jeunes gens sent aussi exerces
tour a tour a professer les diverses parties de I'instruction qu'ils
ont reciie. L'etablissement poss^de une bibliotheque nouibreuse et
bien composee, unc' collection tres-complete des ecbantiilons geo-
logiques des Etats-Unis , de beaux lierbiers, et les Ecbantiilons ne •
cessaiies pour I'etude de la gcologie. Les cxercices i)ublics des
eleves ont donnc une opinion tres-avantageuse de I'excelience des
methodes d'enseignement que Ton suit dans cetie ecole, la meiileure
qu'il y ait dans ce pays, pour I'applicaiion des sciences aux be-
ioins ordinaires de la vie. On a public a Troy un irapjime sous ce
titre ; Constitution et reglemeiis de f ecole de Rcnsslaer.
DE L'AMERIQUE DU NORD. 293
en i8i5. Elle s'assemble tous les niois. Elle a deja public un
volume in-4° i3e ses transactions ; un autre volume ne tardera
point a paraitre.
18° Lycee d'histoire naturelle de New- York , fonde en 1818.
Ses reunions sont hebdomadaires. On public, sous ses aus-
pices, un catalogue des plantes qui croissant spontanement a
3o milies autour de la ville. La corrcspondance active de
New-York avec toutes les parties du monde invite a y former
nn cabinet d'histoire naturelle. Les premieres tentatives pour
rexectition de ce projet sont assez encourageantes; on a deja
rassemble, en mineraux et en debris organiques fossiles, une
collection de morceaux choisis. Dans le cours de I'annee dcr-
iiierc, 47 memoircs ont ete presentes par les membres de la
Socicte, et lus dans les seances. Pendant les mois d'hiver, les
membres font, a tour de role, des cours sur les differentes divi-
sions de I'histoire naturelle. En 1824 j la Societe a commence a
publier ses annates, dont le prix est tres-modique, afin qu'elles
soient a la portee d'un plus grand nombre d'acheteurs et de
lecteurs. L'ordre de la publication est celui de la presentation
des memoircs; ils paraissent en feitilles separecs, sans epoques
fixes et sans attendre qu'ils soient assez nombrenx pour com-
poser un gros volume. On pense avec raison que celte maniere
de communiquer avec le public est plus agreable et plus utile
pour tous, que les connaissances sont plus |)romptement re-
pandues, et I'emulation plus fortemcnt excitee.
19° Branche de la Societe linrteenne de Paris, etahlie h
New-York. Le mois de mai est I'epoque de ses assemblees
annuelles.
20° Nouvel Jthenee de New-York. Cet elablissement est du
a la munificence de quelques riches negocians qui se plaisent a
encourager les sciences et les Ictfres. Pendant Thiver dernier,
onya fait des cours de cbimie, de geologic, de botanique, etc..
r«mpressement des auditeurs a fait voir que cette instruction
venait fort a propos.
A ces etablisscmens formes en faveur des sciences, dans
celte ville et dans plusieurs autres de 1 etat, il faut ajouter les
294 SOCIETJiS SAV ANTES
Societeji ^'agriculture tloiit le gouvernement a ordonrn- la crea-
tion dans chaqiie comte. Quoique leiir but no soit pas preci-
scment dc peifectionncr les sciences naturelles, »;lies contri-
bueront cependant a Icurs progres : on doit deja a ccs Societes
plusieui's essais de geologic consideree dans ses rapports avec
ragriculture, et dont I'litilite ne sera pas moins appreciee par
Ics amis de la science cpie par les cultivateiirs. En i8iy, on
accorda, par nn acte de la legislatnre, une somme annuelle
de 10,000 dollars (environ 5o,ooo fr. ) a repartir entre les
comtes, en raison de la population, a condition que chaque
contingent serait double par des souscriptions volontaires. Un
an apres la promulgation de I'acte, 26 Societes iV agriculture
etaient en activitc. On organisa aussi un conseil central cV agri-
culture, compose de deputes des Societes; le gouvernement
fournit 1,000 dollars pour cette augmentation de frais , pour
achats de graines et pour impression de memoires. Le conseil
a deja public deux volumes de memoires envoyes par les
Societes.
21° Societe litteraire et philosophique de New- Jersey, cta-
blie en iSaS, a Princeton. Son objet est de repandre les con-
naissances usuelles, de multiplier les relations et de resserrer
les liens qui doivent unir tons les amis des sciences et des
lettres.
22° Societe philosophique americaine , fondee a Philadel-
phie en 1769. C'est la plus ancienne de toutes les Societes
savantes des elats de I'Union. Ses memoires forment deux
series, dont la premiere est de cinq volumes, et la seconde
r'en compte encore que deux ; le second a paru depuis peu
(Voy. Rev. Enc. , t. xxix, mai 1826, p. 327.). II est honorable
pour cette ville d'avoir forme deux etablissemcns de cette
sorte pour les sciences, a une epoque 011 les autres ctats n'en
avaient point encore (i). Ses travaux seront toujours recher-
(i) Le Journal dCun voyageur allemand nous fournit queiques |)ar-
ticiilarites intcressantes sur I'histoire de cette Societe. » C'est a
I'infatigable Constance de Fiaiiklin que Philadelphie est redevahle
I
DE L'AMtRIQUE DU NORD. 295
cheSj piiisque I'on y trouve les memoires tie MM. Barton ,
Maclure, Say, Lesueur, etc.
23° Societe iinneenne de Philadelphie, fondee, en 1807, par
feu M. le professeur Barton qui , dans la seance d'installation,
prononga son discotirs sur quelques-uns des principaux desi-
derata ( ou sur les priucipales lacunes ) de I'histoire naturelle
de rAmerique. II semble que les membres de cette Societe ne
se reunissent plus.
7.1^° Acadernie des sciences naturelles de Philadelphie , fondee
en 1818. Ses membres se reunissent une fois par semaine : elle
a deja fait paraitrc 4 volumes de son journal des sciences na-
turelles, in-8°, ct les materiaux du 5* sont prets pour la
publication. Sa bibliotheque est, de toutes eel les des Etats-
Unis, la mieux pourvue d'ouvrages sur I'histoire naturelle,
avanlage dont elle est principalement redevable a M. Maclure,
savant aussi recominandable par son zele pour les sciences que
par sa generosite envers ccux qui les cultivent (1). Le Journal
r ^
de cet etablissement. II avait commence par reiinir une iociete
toute composee de ses amis particuliers ; il s'y etait introdiiit, a ce
titre des hommes etrangers aux sciences, mais qui se fliisaient
gloire de frequenter les savans : peu a pen , les reunions devinrent
plus rares , et elles cesserent enfiu. En 1769, la Societe fut re-
composee ; mais tous les anciens membres n'y furent point admis •
Ceux qui eprouv^rent ce desagrement form^rent a leur tour une
autre Societe dont plusleurs membres n'etaient pas sans merite.
Quelque terns apr^s, les deux Societes jugerent qu'elles devaient
se reunir, dans I'iuter^t des sciences .• ainsi, les membres , exclus
en 1769, trouvferent cet expedient pour dtre admis, au grand de-
plaisir des savans ; mais ces contrarietes n'auraient pas interrompu
les recberches scieiitifiques, si la guerre n'y avait point mis
obstacle. Lorsque I'independance fut consolidee, les savans retour-
nerent a leurs occupations. Depuis ce tems , I'histoire de la Societe
est tout entiere dans ses memoires. »
(i) Nous avons possede long-terns M. Maclure a Paris, ou il
venait se reposer, pendant quelques mois , chaque annee , de ses
excursions philosophiques dans les differentes parties de I'Europe.
296 SOClliTES SAVANTES
(ie V Acadcmie t-st iin ouvrage dc premiere necessile pour les
iinturalistcs amcricains.
Tons CCS cncouragcmens et ccs sccours offerls a Tctiidc de
I'histoire natiircUo sont encore secondes par \Univcrsite de
Pensyhanie. M. Say y est professoiir de cetle science; M. le
D' Hare cnseigne la chimie, et M. IV. H. Keating, la inine-
ralogie appliquee aux arts : la botanique est confiee au D' Bar-
ton, et I'anatomie comparee au D"" Hewson. Tons ces cn-
seigncmons sont gratuits, et cliaque professeur est tenu dc
faire au nioins dix lecons par an.
Lc Musec de Vhdadelpiiie , etabli depuis qnelques annees,
est independant de I'Universite , et nomme ses professeurs.
M. Troost y enscigne la mineralogie et la geologic; la chaire
de zoologic est occupee par M. Say; celle de physiologie, par
le D' GoDMAN, et celle d'anatomie comparee , par le D"^ Har-
lAN. Tons ces cours sont en pleine activitc. On ainio a passer
eu revue cc qu'une seule ville a fait pour baler les progres des
sciences , et pour inspirer le gout des jouissances dent dies sont
la source. Puisse ce noble exemplc Uouver beaucoup d'imi-
tateurs!
i5° Acadihnic des sciences et des leltres , a Baltimore , etat
de Maryland, fondee en 1821. EUe se dispose a publier le
i'"^ volume de ses transactions.
26° Instilut colombicn, a fFashington. Le president des
Etats-Unis en est le president de droit. On a public, sous ses
II a laisse en France, conime dans lous les pays qu'il a visiles, les
souvenirs les plus honorables : il prenait un inter^t tout parliculier
a la Revue Encyclopedique , dont le fondateur avail fait sa connais-
sance personnelle et s'etait lie d'amitie avec lui , a Yverdun, en
Suisse, sous Ics auspices du cel6bre Pestalo/.zi, leur ami commun.
M. Maclure cache un rare talent d'observation et un grand fonds
de philantropie et de veritable et profonde philosopbie , sous les
formes simples d'une francbise qui va souvent jusqu'a la brusquerie ,
et qui rappelle .t la fois notre Lafoniaine , nomme le Honlwinme ,
quoiqu'il fut suitouthomme de genie, son Paysan du Danube, et
I'Americain par excellence, Franklin. M. A. J.
i
DE L'AMERIQUE DU NORD. 297
auspices, uae Jlorula columbiensis , et il s'occupe avec activite
do I'etablissement d'lin jardin botaniqiie.
27° Societe du 31usee cle I'Ouest, foiidee en 1818. Son but
est de reunir dans un vaste niusee une collection complete de
tons les objets d'histoiie naturelle du pays; d'y joindre tout
ce qui peut repandre quelques lumieres sur I'histoire du globe
terreslie, du nouveau continent en particulier, et sur celle
dcs anciens babitans de cette contree dont on retrouve aujour-
d'hui quelques monumens et quelques travaux. Quoique cetle
collection soit a peine coinmencee, elle est deja considerable,
et s'accroit rapidement.
a8° Societe litterairc et philosophique de Charlestown. Le
savant M. Elliot en est le president; elle possede un fort
beau cabinet d'histoire naturelle. Nous ne croyons pas qu'elle
ait encore public des memoires.
29° Lycee d'histoire naturelle de la Nouvelle - Orleans ,
Lonisiane. Cet etablissement ne date que de iSaS; on dit que
son debut a etc satisfaisant, et que tout annonce qu'il pros-
perera.
Cette liste ne peut etre ccnTiplete; niais i! est extreniement
difQcile d'apcrcevoir et de remplir los nombrcuses lacnnes qui
peuvent s'y trouver. On a plus lot et plus facilement des nou-
velles des grandes capitalcs do I'Europc que de Pittsbour^,
de Cincinnati ou des Natchez.
Cette notice fut redigee au mois de dccembre iSaS. Depuis
cette epoque, le noinbre des Socieles savantes peut s'etre aug-
mente. Plusieurs etats, meme parmi les anciens, ne sont point
compris dans cette liste, quoique les sciences n'y soient cer-
tainement pas negligees : il est done en effet tres-vraisemblable
que celte enumeration des Societes savantes des Etats-Unis
est incomplete. Cependant, on peut en conclure que I'etude
de I'histoire naturelle est plus en faveur quaucune autre, dans
TAmericpu' du nord. Cetle predilection est tiop bien foudee
et trop uiile pour que nous soyons tenles de la desapprouver;
mais elle ne peut etre expliquee que par des circonstauccs
qui nous sont inconnues. Il seaibie que, dans tous les lems,
2(j8 SOCIliTES SAVANTES DE L'AMERIQUE, etc.
I'interet dc rindustrie, des arts de l.i yuerre et de la navij;a-
lion, cxige le perfectionnoment des sciences mathemaliques ct
de leiirs applications. Ces besoins des nations nc sont point
negliges aux Etats-Unis, ni mis au-dessous de leur impor-
tance; cependant, il semble que Ton n'a pas, a beaiicoup
pres, recherche avec autaut d'empressenient ce qui pcut con-
tribuer a ies satisfaire, que ce que demandait la luuable et
utile curiosite des uaturalistes. Cette sorte de contradiction
disparailrait, si nous connaissions mieux rcnseuible de I'ins-
truction publique,des ecoles speciales, des etablissemens en
faveur des arts et de rindustrie, et Ies succes obtenus par
toutes ces institutions; en un mot, s'il nous etait possible de
rassembler et de coordonner Ies elemens d'une stadstique in-
tellectuelle des Etats-Unis. En attendant que nous ayons des
i;iformations plus completes, qui nous seront donnees pen a
peu par nos correspondans, et par notre nouvelle auxiliaire,
la Revue americaine , etablie depuis peu a Paris ( Voy. ci-
dessus, p. 33. ), nous nous bornerons a observer et a signaler
Ies resultats Ies plus imporlans. <I>.
NOTICE
SUR LES OUYRAGES DE JEREMIE BENTHAM.
Les amateurs des sciences morales nous sauront gre de leur
presenter un catalogue des divers ecrits publics en anglais par
M. Bentham, dans un espace de 5o annees. On sera surpris
de n'y point voir les grands ouvrages qui lui ont fait une re-
()Uta!ion europeenne, les Traites de legislation civile et pe-
tiale (i), la Thcorie des peines et des recompenses , la Tacti-
que des assemblees politiqites (2), le Traite des preuves Jtidiciai-
res (3); niais, ce n'est pas M. Bentham qui les a mis aii jour,
(i) Voy. Rev. Enc, t. vii , p. 164 ; t. xv, p. 499-
(2) Voy. ibid., t. xvii , p. 5o3.
(3) Voy. ibid., t. xix, p. 170.
NOTICE SUR LES OUVRAGES DE J. BENTHAM. ayy
lis n'ont point paru en anglais , ils ont ete rediges en francais,
d'apres ses manuscrits : manuscrits immenses et incomplels
que I'auteur, effraye de leur masse, n'avait ni le loisir, ni la
volonte de revoir et de terminer, et qui seraient restes cnfouis
dans son cabinet, sans la courageuse patience de son editeur
( M. Et. DuMONT, de Geneve).
M. Bentham avait debute dans la carriere du barreau : des
circonstances favorables, secondees de ses rares talens, Ini
promettaient de grands et rapides succes. Mais , entrainc
bientot par une plus noble ambition que celle de la fortune,
il abandonna la pratique de la loi pour se livrer tout entier
a I'etude de la legislation. Son premier ouvrage fnt publie
en 1776.
I. Fragments on government. — Fragmens sur legouverne-
ment, 177P.
C'est une critique de plusieurs passages des Commenlaires
de Blackstone, et notamment de son discours preliminaire.
L'auteur etait jeune : en attaquant un ecrivain d'une grande
reputation, Jl cnit devoir garder I'anonyme; mais il eut la
satisfaction de voir attribuer eel ecrit aux premiers juriscon-
sultes. II y etablissait la Suprematie du principe de I'lUilke ;
il y exposait toutes les fausses manieres de raisonner en ma-
liere de legislation; on y voyait poindre toutes les grandes
idees qu'il a depuis developpees dans ses autres productions.
Ce debut annoncail un penseur original et profond. Le style
a toutes les qualites que Ton pent desirer dans le genre
didactique.
II. View of the hard labour bUl. — Vues sur le bill relatif aux
travaux forces, 1778.
Un bill avait ete propose pour I'etablissement de prisons
penitentiaires et de travaux forces. M. Bentham, en approu-
vant le but, fit sentir toutes les imperfections des moyens par
lesquels on voulait I'atteindre. On s'apercoit partout, dans
cette discussion sur une loi particuliere, que Tauteur planait
au-dessus de son sujet par ses vastes conceptions sur la juris-
prudence penale. Ce bill fut rejete.
3oo NOTICE i)UR LES OUVRAGES
III. Defence of usury. — Defense de I'usure, 1787.
Ce title n'est peut-etre pas celui que I'ouvrage aurait do
porter. L'objet est de prouvcr, coutre une assertion d'Adam
Smith, que le commerce de I'argent doit etre libre comme
tout autre , et que les lois faites pour fixer le taux de I'interet
nc font qu'agi;raver le sort deseniprunleurs. Ce n'est done pas
une apologie de I'usure, mais une preuve que ce qu'on appelle
usure doit etre raye du nombre des delils. Cette dissertation
est un chef-d'oeuvre, par la force du raisonnement comme par
la maniere de I'exposer.
IV. Introduction to the principles of morals and jurispru-
dence.— Introduction aux principes de morale et de juris-
prudence, 1789. In-4''.
C'est un ouvrage fondamental oii se deploio toutle genie de
I'auteur; mais, tous les siijets les plus melaphysiques y sont
traifes sous une forme analytique et austere, dans une serie
de theses, qui exigent I'atlention la plus soutenue et la plus
peniblc, meme pour les lecteurs les plus exeices; I'ouvrage
n'eut aucun succes. Le due de la Rochefoucaull lui cheroha
vainement un traducteur.
Ce meme ouvrage, mieux apprecie dcs connaisscurs, a et6
reimprime en Anglelerre, en 1823 (2 vol. in-8"). II a fallu
33 ans pour arriver a cette scconde edition. On voit qu'il ne
suffit pas de faire un livre profondement pense ; il faut encore
qu'il soit proportionne a la capacite des lecteurs auxquels on
le destine.
Ces principes de morale et de jurisprudence sont entres dans
les traites de legislation que M. Dnmont a ])ublies; mais il en
a donne I'extrait sous des formes familieres, inlerpretant ce
qui etait obscur et dispersant les classifications dans les diffe-
rentes parties auxquelles elles appartiennent naturellement.
\. Panopticon. 2 vol. in-12. — Panopticon, on plan d'une
niaison d'inspcction centrale , particulierement adaptee aux
prisons penitenllaires, et en general a tous les etablissemeus
dans lesquels un grand nombre de personnes rcunies doivent
etre soimiises a une inspection constante.
DE JEREMIE BENTHAM. 3oi
Get ecrit renferme tons les details d'architecture , toute la
discussion des avantages du projet et des objections auxquellos
il pcut donner lieu, avec un plan d'administration morale et
ecoiiomi(jue. Ce plan avail ete adople par la commune dc
Paris, et il allait etre mis a execution, lorsque la violente
catastro]ilie de 1792 renversa la commune et la constitution
monaroliique. Les trailes de legislation contiennent un memoire
ou I'on a fait entrer tout ce qui est essentiel dans les deux
volumes deM. Bentham, a I'exception des details de construc-
tion qui ne peuvent interesser que les architectes.
VI. Draught of a code for the organizations of the judicial
establishment of France. — Esquisse d'un code pour I'organi-
sation judiciaire de la France, 1791.
Lc comitc de rAssemblce constituante presenta un plan
d'organisation judiciaire que M. Bentham attaqua reguliere-
ment, article par article ; niais il ne se borna pas a une simple
critique; il ajouta son propre plan sur lequel il avait long tems
reflechi. Get ecrit parut trop tard pour avoir de I'iniluence sur
I'assemblee, et il est plus que douteux qu'il eut produit quelque
effet, tant ses vucs etaient differentcs de celles qui dominaient
alors. II a depuis niodifie quelques-unes de ses opinions, mais
sur des points pen essentiels.
VII. Essays on political tactics. — Essai sur la tactique des
debats politiques, 1791.
M. Bentham ne publia que dix chapitres de cet ouvragc
sur les regies fondamentales des debats. G'est une critique
detaillee des modes de deliberation suivis dans les anciens
Etats-Generaux et dans TAssemblee des notables.
On ne pent qu'etre surpris de tout ce i.\\\e M. Bentham a
fait, dans un si court espace de tems. La revolution francaise
avait excite au plus haut degre toutes ses facultes et tout son
interet. II se regardait comme un cooperateur naturel de cette
grande entreprise de legislation , et il travaillait a lui seul plus
qu'aucun des comites de RAssemblee constituante. 11 etait tout
pret a achever son code penal et a entrept endre un code civil ;
mais il fut bienfot decourage par I'etat de desordre dans lequel
3o2 NOTICE SDR UlS OUVRAGES
la violence des partis avait fait tomber la France ; et il coiupi it
que ce n'etait pas dans un moment de fermentation qu'on pou-
vail faire entendre la voix paisible de la raison et de la philo-
sophic.
VIII. Supply without burthen. — Finance sans fardeau, 1795,
II s'agit de donner a I'etat par droit A't'chute les fortunes de
ceux qui meurent, sans laisser d'heritiers naturels. L'autcur
avait adouci ce qu'il y avait de dur dans cette disposition par
uu droit limite de tester; cette conception fiscale n'a point
Irouve d'approbateurs.
IX. Protest against law taxes. — Protestations contre ies
taxes, 1796.
C'est une reclamation contre les taxes siir les actcs judi-
ciaires : chef d'oeuvre de methode, d'argumentation et de style.
Cette dissertation, traduite par M. Dumont, a ete inscree
d'abord dans la Blbliotheque universelle qui se public a Geneve,
et depuis, dans le Traite des preuves judiciaires.
^.Emancipate yourcolonies. — Emancipez vos colonies, 1793.
Adresseal'Asseniblee legislative, dont Tobjetest de moiitrer
I'inutilite et le danger des possessions coloniales.
XI, Pauper management, 1797. — Ce plan sur I'adminis-
tration des pauvres est plus specialement rclatif a rAngieterre
qu'a tout autre pays. II s'agit de substituer a I'administration
de chaque paroisse celle d'une compagnie unique qui se cliar-
gerait a un prix fait de tons les indigcns du royaunie. L'expli-
cation de ce regime singulicr, les precautions a prendre en
faveur des pauvres , ies devoirs a imposer a la compagnie, les
details de I'administration, les avantages qui doivent resulter
de ce plan, tel est I'objet d'un volume de lettres adiessees h
Vediteur des Annates d' agriculture.
Cet ouvrage a ete traduit en francais par M. Duquesnoi.
XII. Letters to lordPclham. — Lettres a lord Pelhani, 1802.
Ces lettres, qui forment un gros volume, sont relatives ;\
Xetahlissement penal de Botany-Bay ; M. Bentham le Irouve
defectucux sous tons les rapports. II n'inspire point une crainte
salutaire; souvent il a servi de motif an crime. II ne conlribue
DE JEREMIE BENTHAM. 3o3
points la reformation morale des deportes; an conlraire, le
nombre des delits dans cette colonie est dans une proportion
effrayantc, compare a toiite autre population.
L'auteur donna ime suite a ces lettrcs [Plea for constitution).
— Plaidoyer en faveur de la constitution (i8o3 ), dont I'objV't
t'tail de prouver que la deportation a Botany - Bay entrainait
une multitude d'actes arbitraircs et illegaux , par lesquels la
constitution etait continuelI(;ment violee (i).
XIII. Scotch reform, 1806. — Reforme ecossaise, consi-
deree d'apres le plan propose au parlement pour la regulari-
sation de I'administration dc la justice en Ecosse. — Get ecrit
se compose de lettres adressees a lord Grenville, a I'occasion
de quelques changemens proposes dans I'etablissenient judi-
ciaire d'Ecosse. Get ouvrage ne peut paraitre intelligible qu'a
des personnes tres-versees dans la procedure technique de
I'Ecosse et de I'Anglcterre. G'est une critique vehemeiite de
tons les abus qui occasionnent tant de frais, tant de lenteurs et
de perplexites , dont les citoyens de toutes les classes sont
victimes.
XIV. Swear not at all , ]8i3. — Ne jurez point. — Expose
de I'iuutilite et des mauvais effets de I'institution et de I'usage
du serment.
L'auteur attaque I'emploi du serment dans toutes ses appli-
cations, comme une mesure non-seulcment inefficace, mais
dangereuse , et en contradiction avec le preccple le plus positif
du fondateur de la religion chretienne. II tire la principale
preuve de I'abiis du serment, en Angleterre, de I'usage que Ton
en fait dans les universites, soit pour fairc jurer des statuts que
personne n'observe, soit pour faire signer des declarations de
foi auxquelles on n'attachc aucune autorite et aucune im-
f>orfance.
(i) Voy. la Theorie des peincs. M. Dumojnt a f<Tit passer dans le
chapitre sur la deportation , tout ce qui, d,)ns ces lettres, olfrait un
in)er6t general.
3o4 NOTICE SUR LES OUVRAGES
XV. Elements of the art of paching. — Eleraens de I'ait
d'assortir un jury, 1817.
Voici un des ouvrages de M. Benthani ou I'on observe le
plus sa disposition a dc'precier les institutions britanniques.
Dans cct ecrit, dont ses amis rctardcrent long-terns la publica-
tion , par la crainle qu'il ne suscitAt quehjue poursuite judi-
ciaire contre I'auteur, il cxposait d'une raaniere caustique
I'art de former des jurys speciaux , pour exercer sur eux une
influence illegale , et principalement dans les cas dc libelles.
XYI. Table of springs of action. — Tableau des motifs ou des
sources des actions.
C'est un tableau synoptique de tous les motifs qui determi-
nent les actions humaines, avcc des notes explicativcs et une
sorte de commentaire, ou Ton presente les diverses especes de
plaisirs et de peines dont la nature de I'homme est suscepti-
ble , ainsi que les differens ordres A'interets , de devoirs et de
motifs qui y correspondent. On retrouve ici cet art profond
d'analyse dans lequel M. Bentham a moatre une superiorite
si distinguee.
XVII. Defence of economy. — Defense de I'economie.
Ce sont deux pamphlets, I'lm contre des pretendus projets
d'economie de M. Burke; I'autre, contre un des secretaires
d'etat, M. Rose, qui avait pris la defense des sinecures ct des
superfus necessaires.
XVIII. Chrestomatia. — Chrestomatie.
Cet ouvrage eomprend deux parlies : la premiere se com-
pose d'un recueil de pieces relatives au projet d'etablissement
d'une ecole chrestomatique , destinec a ctendre la melhode
d'enseigneraent de Bell et de Lancaster a des branches plus
elevees de la science. La seconde partie contient un essai sur
une nouvelle nomenclature et une distribution melhodique des
connaissances humaines, avec un examen critique chi tableau
encyclopedique Ae Bacon , adopteet augmente par ^/'^/cw/^e/r.
A la suite de cet examen, M. Bentham donne Ic cadre d'un
nouvcau tableau, fonde sur I'applicalion du principe logique
de I'analvse an principe moral de Vutilite generale. On pent
DE Ji5:REMIE BEISTHAM. 3o5
douter si I'avantage qui I'esulterait de cctte classification c'(|ui-
vaut a la difficiilte de faire adopter une liingiie toiite conipo-
see de denominations grecques. Ce livre est ecril dans uti style
qui ne le rend a;cce5sible qu'a un tres-petit nombre de iecteuis.
II I'enferme toutefois dcs idees tres-iniportantes, et que les
amis des sciences mediteront avec fruit. Une parlie <le cet
ouvrage a ete traduite en francais par M. George Bentham,
neveu de I'auteur. ( voy. TJec. Enc. , t. x , p. 569).
XIX. P/rtrt of parliamentary reform, 1817. — Plan d'uue
reforme parlementaire, sous la forme d'un catcchisme ; i^vv-
cede d'une introduction sur la necessite d'une reforme radicale
et t insuffisance d'une reforme inoderee.
Voici I'ouvrage par lequel M. Bentham est devenu I'oracle
du parti radical en Aagleterre, c'est-a-dire du parti qui veut
une refonte totale de la cliambre des communes, par une elec-
tion annuelle et des suffrages universels ou presque universels.
Nous ne pretendons point enoncer une opinion sur cesysteme;
mais nous sommes persuades que I'ouvrage con tieiit une criti-
que fort exageree du parlement britannique, et nous sftmmes
surpris d'y trouver un ton de vehemence etd'aprete, qiiel'au-
teur a souventcondamne avec raison dans k's discussions phi-
losophiques,
XX. Bentham's r«<f/c«(? reform Bill. — Bill de reforme radi-
cale , par Bentham.
XXI. Papers relative to codification, 1817-1823,^/6-. —
Pieces relatives k la codification. (V. Rev. Enc, t. xiv, p. 34o.)
C'est un recueil de lettres ou de memoires, adresses par
i'auteur au president des Etats-Unis d'Amerique, au president
<lu siinat de Philadelphie, a Tenipereiir Alexandre, pour leur
offrir de rediger un code civil et uncotle penal, a la seule con-
dition que ces codes seraieutsoumis a rexamen d'une commis-
sion officielle qui en ferait uri rapport public. Ces diverses
propositions n'ayant pas produit I'effet desire, I'auteur publia
d'autres memoires dans lesquels il etablit les avantages de la
codification, c'est a-dire, I'utilite de reduire en un code les
T. XXXI. — ^oiit 1826. ao
:io6 NOTICE SUR LRS OUVRAGES
lois uoii ecritcs, les coulumes et jurisprudences d'arret. (L'ana-
lyse de cet ouvragc sera inseree dans notie prochain cahier. )
XXII. Church of En^laiuUsm and its catechism considered.
1817. — Considerations sur I'cglise de I'Angleterre et son cate-
chisme,
Cet ouvragc de 800 pages, avec une multitude de notes
tres-serrees , renferme une grande variete de sujels, tous rela-
tiFs a rctablissemeut ecclcsiastique d'Angleterre. II est attaque
sous tousles rapports; mais la forme de ces ecrits et la nature
du style s'opposent a ce qu'ils produisent un cffet immediat.
C'est un depot dans lequel les antagonistes de I'eglise anglicane
trouveront des provisions et des armes. L'etablisseiTient reli-
gieux de I'Ecosse y est presente sous un point de vue favora-
ble. Dans la critique du Catechisme national, ce n'est point la
religion que Taiiteiir attaque, mais Ic mode d'cnseignement,
les inconsequences et les contradictions qu'il croit y trouver.
Les amis de I'auteur craignirent que cetonvrage ne provoquat
une poursuite legale , et il se debita long-tems avec precaution :
iBaisle mhiistere public a ete assez prudent |)our seiitir qu'une
pareille cause plaidee devant un jury , quel que fiit le resultat
juridique, aurait produit un effet tout contraire a celui qu'on
se serait propose.
M. Benthara a encore public plusieurs pamphlets sur la li-
berie delaprosse: Onthe liberty of the press. ln-^°. 1821. — Sur
le systeme restrictif en maliere de commerce : Observations on
the restrictive and prohibitory commercial system. In -8°. 1 8ai .
Sur le code penal des Cortes : Letters to count Tc-reno on the
proposed penal code. Lettres aucomteToreno sur lecode penal
propose. In-S", 1822 (voy. Rev. Enc, t. xv, p. 5/^4); et der-
nierement, Sur la cour de la chancelleric et In conduite judi-
ciaire du chancelier actuel. A. 1 age de soixante-et-dix-huit
ans, il poursuit ses travaux a.vec la menie ardeur, et raeme
avec plus de perseverance que dans sa jeunesse. Il rassenible
toutcs ses vues dans un grand ouvrage qui presentera I'en-
semble de son systeme constitutionnel.
DE j£r6jvhe bentham. :^()-
Mais, pour avoir une idee complete des travaux de ce grand
publiciste, il faut joindre a cette notice des buvrages qu'il a
publics lui-meme, celle des traites qui ont ete rediges en fran-
cais , par M. Dumont, de Geneve, d'apres les manuscrits ori-
ginaux de Bentham. Ce sont les suivans :
I. Traites de legislation civile et penale. Seconde edition.
Paris, 1820. ?i vbl.Jn-8". (Voy. Rev. Enc. , t. vii, p. 164, ct
t. XV, p. 499.)
Independamment de ces deux parties principales, ces traitt's
contiennenl : 1° des principes generaux de legislation, et ce
que I'editeur appelle la logique du legislateur ; 2" une vue com-
plete d'un corps de droit; 3° une dissertation sur la maniere
de promulguer les lois ct de les accompagner d'nn commen-
taire rationnel; 4° une exposition des principes du panoptiqne;
5° un essai sur I'influence des terns et des lieux en matiere de
legislation, c'est-a-dire le meilleur systemedeloisetaist donne,
quelles modifications faudrait-il y apporler, eu egard aux dif-
ferences de religion, de climat, de mceurs, de race, de lumie-
res , de situations locales , en un mot de toutes les circonstances
qui influent sur la sensibilite active et passive de I'homme.
(Voy. Rev. Enc, i. xix, p. 170, et t. xxv, p. 45i et 837. 1
II. Theorie des peines et des recompenses. La troisieme edi-
tion vient de paraitre en deux volumes, et sera I'objet d'line
analyse dans ce recueil.
III. Tactique des assemhlees politlques. Le second volume
traite des sophisrnes politiques. Seconde edition. Paris, 1820.
( Vojez le compte rendu de cet important ouvrage. Rev. Enc,
t. XIX, p. 568 ).
lY. Traite des preuves judiciaires. Paris, i823. 2 vol. in-S".
Nous savons que M. Dumokt possede encore d'autres ma-
nuscrits qu'il a extraits de ceux de M. Ecntham, et qu'il se pro-
pose de publier; il s'occupe actufllement de rediger un tra'tc
sur r organisation judiciaire. T.
3o8
NOTICE
SUR LA. LANGUE DES SAUVAGES
DE L'AMERIQUE DU NCRD;
Par M.-J. MORENAS.
Lcsdecouvertesqui repaiident iin nouveau jour stir la science
philologique fourniss*'nt les meilleurs jiiatcriaux pour I'liis-
toice de rhoinme , si pen connue aii dela d'une qnarantaine de
siecles. Plusieurs ecrivains nous ont fait connaitre I'etat social
des priiicipales nations de rAuierique; mais I'histoire philolo-
gique de cette portion dc I'espece humaine est restec dans une
profonde obscuritc. Cependant, si elle etait eclaircie, elle de-
viendrait piopre a jeter une vive lumiere sur I'antiquite du
nouveau monde et raeme sur les anciennes revolutions de notre
globe, dont le resultat a ete de disperser, ou de melanger les
peuples.
L'ignorance et I'absence de I'ecri ture chez des peuplades sauva-
ges vivant au milieu des forets, comparees avec I'abondanoe ,
la regularite et la douceur des langues dont ces peuplades font
usatje, pri'sentent un contraste dignede fixer I'attentiondu phi-
losophe.Les differens idiomes des deux Ameriques ne sont plus
en harmonic avec ce qui existe dans ces deux contrees. Cette ri-
chesse de languo, qui n'a pu etre I'ouvrage d'aucun des penples
connus de cepays, decele une grande civilisation, dont I'an-
cienne prosperite connue des empires du Mexique et du Peroa
est loin de nous donner une idee.
n Comment se fait-il , demandait Malouet, que Tare dessau-
vages de la Guyane soit precisenient celni des Parlhes et des
]\umides; que leur bouclier soit celui des Remains ? De qui les
Indiens de I'Amerique tiennent-ils icurs arts et la langue riche
qu'ils parlent, sans pouvoir analyser ni le terns, ni le verbe? »
Quelle eut ete la surprise de cet ecrivain , s'il avail su que
ces rapports s'etendent au dela du pays dont il parle, et qu'il
NOTICE SUR LA. LANGUE DES SAUVAGES, etc. 309
en exisle une foule d'autres dans les differentes contrces de
rAmeriqiie?
On reste miiet d'etonnement quand on voit la rt-gularite ,
I'abondance inepuisabledes langues donees et flexiblesdes sau-
vages du Nouveaii-Monde, les usages et les moniimens hiu-
dous des Mexicains, les raols sanscrits des langues de I'Ame-
rique. Mais, pourquoi s'etonner de ces rapports ? savons-nous
mieux de qui nous tenons les usages et les mots indiens arrives
jusqu'a nous ? Quel que soitle pays dans lequel on les observe,
ils prouvent I'existence d'anciennes relations avec la con tree
d'ou ces mots et ces usages sont venus.
Une longue suite de siecles a efface de la niemoire deshom-
mes les principales epoques de notre histoire. Mais, pour I'ob-
servateur, de bonne foi et sans prejuges, la terre qu'il foule
aux pieds, les antiquites sur lesquelles il medite, les mots
communs a plusieurs langues , et les usages qui nous modifient
lui disent assez que I'homme vit de souvenirs et niarche sur
des ruines.
Une foule de decouvertes constate chaque jour la civilisa-
tion d'un ancien peuple qui a precede tons les sauvages du nord
de I'Amerique. Parnii les monumens qui rappellent cette epo-
que, le plus etonnant, sans doiite, est celui d'une langue dont
le mecanisme et la richesse la rendent plus savante et plus phi-
losophique, qu'aucuno de celles de I'ancien monde, si Ton en
excepte le Sanskrit.
On peut partager tous les pays de I'Amerique septentrio-
nale, situes au nord et h Test du Mexi(]ue , en trois langues
principales; coinme Ton peut classer tous les peuples qui les
parlent en trois races distinctes.
1" Le Karalit, que parlent les Esquimaux, est la langue du
Labrador, du Groenlaiid , des parties superieures du Canaihi
et des autres contrees (]ui se rapprochent du pole.
EUe est aussi celle des Tckouhtschi sedentaires quihabilent
depuis I'embouchurc de I'Anadyr, en remontant la cote verslc
nord, jusqu'a la peninsulc de Tchouktsclikoi-noss, ou pro
montoire des Tchouktsclii; c'est-a-dire, cette partie nord-est
:5io NOTICE sun 1,A LAINGlJE DKS SAUVAGES
lie I'Asii; (jiii u'est scjjarc'c dc rAuiciiqiie que par le detroit df
Bheritig (i]. On les considure coniiue les desccndans d'un peu-
plo americain, tandis que les Tchouktschi errans, qui vivent
nu sud de I'Anadyr , passent pour elrc issus des Koriaks Tar-
tares.
On parle encore le Karalit a North-Sound , et Ton soupconnc
d'autres rapports entre les indii:;enes du nord-ouest de I'Ame-
rique et quelques peuples du nord-est de I'Asie, tels que les
Kanilschatdales, les Koriaks-Lamoutz, les Samoiedes, etc.
2° 'L'iroquois , qui est la langue des Iroquois, des Hurons,
desNoduouassi, des Siaoux (les sixnations),des Algonkins, etc.
3° he Lenapi , ou Lenni Lcnapi , qui est le noni du peuple
et de la laiii;ue Delaware. Cest le syuonyme de I'expiession
plus moderne de Ouapanatchhi , ou Abenaki, j^eneralement
adoptee par les indii^enes, et dont les Fran^'ais out fait a la
Louisiaue, Apalache, ternie donne aux niontagnes appelees
plus generalenient de leur ancien nom allegani. Le lenapi est
la langue du Mississipi, de rimmense territoire nord-ouest des
Etats-Unis, d'une partie du Canada, et meme de la contree
qui se proloiigc jusqu'a la bale d'Hudson. Dans cette etendne
de pays, il existe neanmoins quelques peuplades qui ne font
aucun usage du lenapi, de I'iroquois , ni du karaiit: tels sont
les sauvages Pieds noirs, les Saussi et les Snake indieus. De
lous les dialectes du Lenapi, le natif, , parle dans le Massa-
chussetts, est le mieux connii, depiiis la grammaire que M. Eliot
a publiee, et sur le compte de laquelle je reviendrai bientot.
II fautajouter a ccs trois principales laugues le floridien qui
eu differe assez pour etre considere comnie un idiome parti-
culier. Il appartient aux Criks, aux Maskodji, aux Chicksa,
aux Tchakta , aux Pascagoula, aux Tcheroki , etc.
On a parle de peuplades, provenant de la nation Mobilian ,
qui font usage d'un idiome, considere comnie une cinqiiieiTie
langue de I'Amerique du nord ; niais le pen de renseignemens
qu'on a sur ce fait en exige la confirmation. On peut compter
(i) Voy. Ic Mil/iiitialf d'AiiEX-UKG , t. lii , p. 4^4-
/
DE L'AM]£RIQUE DU NORD. 3ii
sur le zele et Jes liimleres des membres de \di societe philosopiii-
que de Philadelphie, pour eclaircir cettepai'tiedela philologie.
n Jene pouriai jamais vous faire connaitre, ecrivait M. Hec-
kewelder a M. Duponceaii, secretaire de cette societc-, et I'lm
des savans les plus distingues de I'Amerique , les nombreuses
manieres par lesqueHes les Indiens ( les indigenes d'Amerique )
expriment leursidees, les nuances de ces idees et toutes lenis
combinaisons. »
£d attendant que la societe philosophique de Philadelphie
rende publiques les graminaires precieuses qu'elle possede sur
les langues du pays, un apercu de celle que M. John Eliot a
publiee sur lidiome du Massachussetts suffira pour donner une
idee du mecanisme simple et profond des langues conservees
par les sauvages.
Cette grammaire est la plus etendue que je connaisse sur les
langues du Nouveau-Monde (i).
Les sauvages du Massachussetts se servent, conime je I'ai
die, du natik, dialecte du lenapi.
Le nom , dans cet idiomc, a deux declinaisons : Tune pour
le substantif qui exprime des choses animees, et I'autre pour
celui qui appartient aux choses inanimees (2). Chaquc nom se
combine aveclesdilferens pronomset forme avecchacun d'eux,
d'apres des regies simples et regulieres, un nouveau mot (3),
par exemple :
Oiiit, signifie une maison et produit au singulier
^ik, ma maison. Ouik , sa maison.
Kik, ta maison.
II fait au pkiriel
Nikou, noire maison. Ouikou , ses ou lems maisons.
Kikou voire maison.
(l) 4 Grammar of the Massachussetts i/idian language, by John
Eliot. — Grammaire de la lanj^ue indiejine de Massachussetts , par
John Eliot. Nouvelle edition, enrichie des notes savantes de M. P.-S.
DupoNCEAU , et d'une introduction par M. John Pickehijvg. Boston.
iSaa.
(a) Ibid., p. 9. — (3) Ibid., p. II.
'ii'2 NOTICE SLUl LA. LANGUE DES SAUVAGES
Ce null) et ses dciives se conibinent encore avec diffeientes
particiiles et fornient avec dies de uouveaux mots , tels que :
JVifiit, dans ma maison. Nikounoiiot , dans nos maisons.
Kihit, dans tit maison. Kikouot, dans vos maisons.
Ouikit , dans sa mnison. Oiiikouot ou ouikouomoi , dans ses, ou
dans leurs maisOns.
It existe danscette langue des diniinutifs de plusieurs rangs
et diffeientes manieres de changer le noni en verbe et le verbe
en nom. C'cst generalement an moyen de la racine linale du
mot qui se place au commencement ; ce mot eprouve ensuile
toutes les modifications grammaticales qui appartiennent a sa
nouvelle qualite (i). Le meme mecanisme existe dansplusieur.v
langues de I'lnde, ou chaque verbe devient un substantif, en
changeant la teiiiiinaison a en e; bolna , ]iarler; holne , sub-
stantif, qui exprimc Taction de parler ; bara , grand, ajoute a
la racine linale du verbe hona, etrc, {A\\.haranu qui veut dire
agrandir.
Le verbe americain se conjugue, au moyen de diverses ter-
minaisons qui eliangent pour n'en point alterer I'euphonie (2).
Il existe differentesconjugaisous, selon queles verbessont em-
ployes dans un sens affirmatif, negatif, ou interrogatif. Toutes
sont susceptibles d'exprimer differcns modes et differens terns
de Taction.
Les modes de Taction sont au nombre de cinq (3).
Le 1^'' se compose de Vindicatif, du demonstratif etde Tin-
terrogatif; c'est-a-dire qn'il y a des teins differens pour ex-
primer qu'une action se fait, qu'elle ne se fait point et pour
demander si elle se fait; par exemple :
J'aime. Je n'aime pas. Aimai-je?
Le 2^ est XimperatiJ, qui se divisc en imperatif qui ordonnc^^
en imperatif qui exhorte, en imperatif qui soUicite.
(i) Ibid., p. i3. — (2) Ibid., p. 16.
(S) Ibid. , p. 19 et siiiv., p. aS et siiiv.
DE L'AMERIQUE DU NORD. 3i3
Dans ce mode, un superieur commande , un ami engage, et
un conpable supplie.
Le 3*^ est VoptatiJ'.
Le 4^ est le suhjonctif, ou plutot le suppositif; c'est-a-dire,
lorsque Taction est siipposee etre, ce qui pent avoir lieu de
trois nianieres differentes, ayant chacune leur conjugaison par-
ticuliere, savoir :
Une chose eta nt. SI elle etait. Quand elle est.
Le 5^ est Yin/inilif (\u\ exprime I'accomplissement d'une ac-
tion, sans designation de peisonne, ni de terns.
Dans d'autres langues que le natik , il y a des inflnitifs de plu-
sieurs especes.
Ces diverses modifications du verbe se multiplient par Ics
formes des differens terns et par celles des personnes.
L'indicatif a trois singuliers et trois pluriels qui sont, pour
le tems du present :
Premier singulter.
Je te prends. Je le prends. Je vous prends. Je les prends.
Deuxierrie singitlier.
Tu me prends. Tu le prends. Tu te preiids. Tu les prends.
Troisieme singulier.
II me prend. II nous prend.
II te prend. II vous prend.
II le prend. II les prend.
Il en est de meme pour les trois pluriels.
II existe encore d'autres conjugaisons pour le meme tems,
comme le present negatif :
Je ne te prends pas. Je ne le prends pas, etc.
Le present intcrrogatif:
Est-ce que je te prends? Est-ce que je le prends? etc.
Ces nombreuses formes du verbe sont encore augmentees par
un mode du verbe qu'on pent appeler/>or«?/?//e/, et qui consist*^
3i4 NOTICE SUR LA LANGUE DES SAUVAGES
a considererractionconimcetant dans lapossibilite d'etre accom-
plie. Ainsi, il fiiut compter trois autres tems presens , qui sont :
Je te puis prendre. Je ne puis pas te prendre. Puis-je te prendre ?
Ayant chacun trois singuliers et trois pUiriels.
Il existe encore d'autres formes simples du tems present,
telles que :
Laisse-moi te prendre.
Je suis cause que tu me prends.
Je ne suis pas cause que tu me prends, etc.
L'infinilif, qui a, comme tous les autres tems du vcrbe, les
deux modes alfirmatif ct negatif , se conjugue de la mantere
suivaute :
Singulier.
Me prendre. Te prendre. Le prendre.
Pluriel.
Nous prendre. Vous prendre. Les prendre.
Mode negatif.
Sing. Ne pas me prendre, etc. Plnr. Nepas nous prendre, etc.
On voit par cet apercu , que la multiplicite des formes du
verbe dans les langues des sauvages de I'Amerique est presque
infinie.
Les autres mots sont egalement susceptibles de se modifier
en un grand nombre de formes varices pour exprimer les dif-
ferentes modifications d'une idee et toutes ses combinaisons
avec des idecs accessoires.
On a vu que le nom devenait verbe a volonte ; il est egale-
ment facile de rendre le verbe substanlif dans tous les tems,
soil au singulier , soil au pluriel ; ainsi ,
Oiianpis , signifie blanc. Kotioumpis , vous dies blanc.
A'ououmpis , je suis blanc. Koiioiiinpiss«riA , votre blancheur.
Nouoiimpissoiih, nia blancheur.
Dans le humn , dialecle de I'iroquois : <i voir uiic pierre et
DE L'AMERIQUE DU NORD. 3i5
voir un homme sont deux verbes, i> dit Charlevoix. II se
trompe; ce sont deux modes du meme veibe. Les ternies rela-
tifs a un voyage sont differens, s'il a ete fait par terre ou par
iner. Les verbes actifsse modifient, a inesure que de nouvelles
choses toaibenC sous leui' action. Le vcrbe manger, par exem-
plc , varic aiilant de fois qu'il y a de comestibles, auxquels
on Tajiplique (i).
M. Duponceau parle d'line grammaire manuscritcc/«? la lan-
gue Delaware , par Zeisberger, dans laquelle on trouve un
plus grand nombte de modifications dn verbe (a). II emit
que, dans les idiomes du sud , la conjugaison est encore plus
etendiie (3).
Jarvis nous apprend que les verbes floridiens ont un duel (4);
il est probable que des recherclies ulterieures feront decouvrjr
['existence du duel dans les autres langues de I'Amerique qui
n'auront pas perdu, par le laps des tems, ou par I'ignorance
dessauvages, cette richesse grammaticale, commune an grec et
au Sanskrit.
L'esprit se perd devant la multitude d'idees exprimees par
les nombreuses modifications d'un meme mot, qui se raultiplie
presque a I'infini au moyen d'une classification simple et regu-
liere, composce de modes, de tems, de personnes, d'affirma-
tion , de negation, de transition, etc.
Dans les langues du nord, conime dans celles du sud, on
remarque une egale richesse d'expression , non-seulcment pour
les objets physiques, mais aussi pour toutes les idees ayant
rapport a la morale et a la metaphysique. Le pere Zanteno
donne, dans sa grammaire, p. 5i, sept noms de la langue de
(i) CaxViLT.yoix , Joiinuil /listoritjue , p. 197.
(a) Grammaire de M. /. Eliot. Notes , p. xxii.
(3) Ibid., Notes, p. xxiv.
(4) yf Discourse on the leligion of the indian tribes of north Ame-
rican, delivered before the New-York historical Society, decembtr 20.
1819; by Samuel Fa;Tnar J kri,\js. New- York , 1820. Page 83.
3i6 NOTICE SUR LA LANGUE DES SAUVAGES
Houastecan ( Nouvelle Espagne } qui expriment I'amour, coii-
sidere, sansdoute, sous aiitant de rapports differcns.
La pkipart dcs ecrivains nous discnt, en parlant de I'lndc,
que les peuples de ce pays ont uii ijrand nonibre dc mors pour
une meme chose; ce qui n'est point. Quoique les Hindous aient
plusieiirs noms pour exprimer, par cxemple, la terre, I'atmos-
pherc, la lunc, ou le soleil , qui a millc noms en Sanskrit, il
n'exisle ncanmoins parmi eux aucun synonyme. Tons ces noms
represcntent bien , a la vcrite, une memo chose, mais conside-
ree sousautantde points de vue diffJrens; comme on leverra,
au mot Shanimaddra , dans mon dictionnaire hindou.ttani.
Toutes les langues de I'Amerique sont remarquables par une
metliode simple ct rci^^uliere qui serf a composer los mots au
moyen de racines, qui se modifient en se combinant. C'est un
procede admirable pour abreger le discours et pour exprimer
beaucoup d'idees en peu de mots. Ces idiomes se recomman-
dent encore par la douceur et I'harmonie qui resultent de syl-
labes, ou racines sans valeur, n'ayant d'autre fonction que
celle d'adoucir le laugage en s'interposantentre deux sons des-
agreables. Ce qui a lieu egalement pour le Sanskrit et autrcs
langues de Tlnde.
Ainsi, ces mots cites, comme etant d'une longueur demesu-
ree par des vnyageurs qui ignoraient le mecanisme savant dc
ces langues, sont des membres de phrases et parfois des phra-
ses entieres , et non point « des mots simples composes au
hasard, par le caprice de gens sans idees; ni de longues peri-
phrases employees naturellement par des sauvagcs; encore
moins les ebauches grossieres d'un peuple qui n'est pas encore
arrive aux premieres notions. »
lis sont, au contraire, les eleraeris du discours reduits a leur
plus simple expression et pouvant se combiner eutre eux dans
tons les sens, et avec la ])his grande facilite. lis offrent cnfin
I'analyse la plus parfaite et la synthese la plus philosophique
du discours, et sont un produit phiiologique, bien supericur
a notre essai de langue chimiquc, composec de mots dont la
signification arbitraire n'a pas toujours un rapport direct avec
DE L'AM£RIQUE DU IVORD. 3 17
les clemens empruntt-sdu grec; cc qui forme parfois un anial-
ijamecle racines simples avec des mots disparates (i).
Uue langue aussi perfectioiinee ne peut etre I'ouvrage que
d'un peiiple parvenu a une tres-haute civilisation. C'est un mo-
nument precieux do la plus haute antiquite , que Ton n'a point
su d'abord apprecier , parce qu'il a etc juge trop precjpitam-
ment, sur de premiers apercus superficiels et inexacts.
Parmi Ics ecrlvains qui se sont occupes des langues de I'A-
merique, plusieurs ont trouve qu'elles avaient du rapport avec
I'hebreu ; de ce nombre sout M. Eliot, le D*" Mitchill, de
New-York et divers missionnaires. Nasci, juif de Surinam,
disait a Malouet, « que le Galibi, langue de toutes les peupla-
des de la Guyane, est douce, agreable, abondanteen voyelles,
ainsi qu'en synonymes , et que la syntaxe on est tres-reguliere.
Cejuifa trouve, ajoute Malouet , que tous les siibstantifs de
cette langue sont hebraiques. »
Cependaut, le savant professeur Vater, successeur d'Ade-
lung et continuateur du Mithridates, le plus grand ouvrage que
Ion ait jamais entrepris en faveur de I'etude des langues, pense
que les idiemes americaius n'ont d'analogie en Europe qu'avec
le basque, en Asie avec le tchushtschi , et en Afrique avec le
Congo.
D'apres I'expose rapide que je viens de soumettre aux re-
flexions du lecteur, il s'est deja apercu que les langues de
TAmerique n'ont plus rien de commun avec I'etat actuel des
peuples de ce pays; elles appartiennent a une tres-grande ci-
vilisation ; c'est un debris precieux du naufrage des generations
anterieures. Malheureusement, ks nations sauvages dont le
(i) Je suis bien eloigne de ne pas reconnaitre tout le merite des
saviins qui ont enrichi notre langue des terines philosophiques de la
chiinie tnoderne. Je ne parle que comparativement a ce qui existe
ailleurs dans un autre genre. La preuve que cet essai des njodernes est
bien imparf^iit, c'est qu'il est modifie chaque jour par les nou-
vellec decouvertes de la cbiniie.
3i8 NOTICE SUR LA LA.NGUE DES SAUVAGES
nombre decroit cliaque jour, a mestue que la population eu-
ropeenne s'etend, laissent pcrdre de plus en plus ces testes des
anciennes connaissances philoloi^iques. C'est pouiquoi on iic
saurait trop desirer que les societes savantes, repandues dans
les Etats-Unis, principalenncnt celle de Philadelphie , publient
les manuscrifs precieux qu'clles possedent sur ce sujet qui in-
teresse tant riiistoite philosophique de riiomme. On pent at-
tendre de leur philantropie bien connue , qu'elles s'empresse-
ront de communiquer au public tout cc qu'elles ont recueilli
d'inleressant a cet egard.
Get immense resultat de la grammaire savante des anciens
peuples qui ont precede en Amerique I'existence des peuplades
sauvages de ce pays, se retrouve dans le sansJirit , dont les
mots, composes de racines, ou d'elemens simples, se combinent
et se modifient a I'infini, exprimant d'une maniere claire et
precise , el avec une harmonie douce et sonore , toutes les idees
et les nuances d'idees qui peuvent se presenter a I'esprit.
Une difference remarquable entre les langues des deux pays,
estTabsence dans celles d'Amerique, du verbe substantif eV/e,
exister ; esse, sum, qui est, dans I'ancien nionde, le canevas
sur lequel tons nos verbessont tissus. Les langues d'Amerique
possedent le verbe sto , etre quelque part, .stare (i), ternie qui
appartient au Sanskrit, comme on pent le voir au mot stem du
recueil des etymologies indiennes. Molina, dans sa grammaire
de la langue othomi , parle d'un verbe qu'il rend par sum , es ,
fui; mais le savant M. Duponceau pense, et je crois avec rai-
son, que c'est une erreur, et qu'il s'agit du verbe qui corres-
pond ii celui de stare et nonpasdu verbe e^r^^.ZANXENOassuie
que ce dernier manque aux Mexicains. M. Heckew alder et plu-
sieurs autres voyageurs ont egalement remarque qu'il n'existe
point dans les langues dont ils se sont occupes. Pluslcurs niis-
sionnaires se sont trouves embarrasses pour rendre le passage
del'evangilc : ego sum qui sum , en anglais, I am that I am.
(l) Transactions of the li^toricaL and literary- comtnillee of the yline-
rican philosophical Society he/flat Philadelphia. iSrg. T. I, p. XL.
DE L'AMERIQUE Dll NORD. iig
Dans le basque, la seule langiie d'Europe qui aitoffertdes
rapports avec celles de I'Amerique , les verbes elre et avoir ,
sont frequemment employes pour conjuguer les autres verbes.
II en est de meme du Sanscrit et autres langues de Tlnde dans
lesquelles le verbe ecre forme la terminaison de tous les ver-
bes, a Texception de quelques-uns qui se conjuguent au moyen
des verbes auxiliaires /aire , donner, etc.
Ce qui etonne , dans I'etude de Thomme en Amerique, c'est
que la richesse des langues de ce pays, bien superieure a la
ferlilite de son sol, se soit conservee durant line 'ongue suite
de siecles , sans le secoars d'aucun livre, meme sans celui
de I'ecriture. II est impossible que la transmission orale seule
n'ait pas considerablement altere la delicatesse, I'abondance et
la regularite deces langues depuisle laps de terns que ces peu-
plades sont tombees dans I'etat sauvage. Quelles ont du etre
leur immense etendue,leur etonnante superiorite dausleslivres
du peuple instruit qui les a perfectionnees?
N. B. Get article est extrait d'un Recueil d' etymologies indien-
nes, faisant partie d'une Grainmaire et d'un Dictionnaire hin~
douslani , par M. /. Morekas (i).
(i) Le Recueil inedit d'oii cet article est tir6 doit ^tre public in-
cessarament.
II. ANALYSES D'OUVRAGES.
SCIENCES PHYSIQUES.
Theorie du navire, par M. le marquis de Poterat,
capitaine de vaisseau , etc. (i).
L'ouvrage que nous annoncons est soumis au jugement de
I'Acadeniie des sciences; mais la decision de ce corps savant
pent litre attendue encore assez long-terns. Ces delais inevi-
tables , et que I'organisalion des Academies ne pent abreger ,
font neannaoins un tort reel aux bons ouvrages, et au public
qui en eut fait plus tot usage, s'il eut connu leur merite en meme
terns que leur apparition. En fait de lilterature, on ne s'informe
point de I'opinion des Academies; chacun juge soi-meme, ou
adopte de confiance, la decision de quelques hommes de lettres
dont il connait I'impartiaiite , les lumieres et le bon gout : mais
I'autorite de I'Academie des sciences n'est point contestee , et
ses arrets sont defiuitifs. Ce n'est qu'avec circonspection que
You se hasarde a les devancer : les inconveniens d'une critique
uon meritee ne sont pas moindres que ceux d'un eloge exagere.
Afin de concilier, autant que cela nous est possible, les divers
interets que nous devons consulter, nous examinerons surtout,
dans cet ouvrage, ce qui n'attirera passpecialement I'attention
de I'Academie : il y a meme, pour cette sorte de composition,
des regies, plus senties qu'exprimees , dont I'observation est
rigoureusemenl exigee , quoiqu'elle ne dispense jioint d'un
autre devoir encore plus imperienx , celui d'offVir aiix lecteurs
une instruction solide, ct qu'ils puissent acquerir sans de trop
grands efforts.
(i) Paris, 1826; Firmin Didot p6re et (lis, riip Taci'b , n° 24.
1 vol. in-/)'', avec ties planches; prix , 3o fr.
SCIENCES PHYSIQUES. 32 1
Dans line introduction assez ctendue, I'auteur expose son
but et son plan, les difficultes qu'il a rcnconlrees, et ce qu'il
a fait pour les surnioiiter. En pailant de la theorie do la resis-
tance des fluides, et dela lenteur de ses jjrogres , ii assigne a
ces retards une cause qui ne sera pas generalement rcconnue;
c'est, dit-il , parce que les geometres qui se sont occupes de ces
recherches n'etaicnt pas marins , et que leurs experiences n'ont
cfe faites que sur de trop petites surfaces. Mais le marin Borda
fut au nombre de ces geometres , et il fit , dans son cabinet , des
experiences sur les fluides. Lorsqu'il s'agit de decouvrir la loi
d'uue classe de phenomenes, on estpresque toujours beaucoup
plus a portee de la saisir au moycu d'experiences en petit.
La theorie de I'electricite serait beaucoup moins avancee , si
Ton n'avait observe que les nnages eiectriques; le marin lui-
meme compte sans doute beaucoup plus sur les niesures qu'il
a prises dans un terns ordinaire et par un vent modere , que
sur celles qu'il aurait pu saisir en operant, avec une extreme
contention d'esprit, au milieu d'une tempete.
« L'objet principal que je me suis propose , en faisant cet
ouvrage, ditM. de Poterat, a ete de traduire, d'eclaircir et de
corrigcr VExamen politico y marititno de don Jorge Juan, afin
de donner acette belle production toute la perfection dont elle
est susceptible. » M. de Poterat ajoute qu'il a conserve le texte,
autant qu'il I'a pu; qu'il n'a rien change aux planches ni aux
lettres explicatives, non plus qa'aux notations algebriques.
« J'etais bien aise de rendre cette espece d'hommage a la pro-
fonde erudition de don Jorge Juan, a ce savant respectable que
je dois regarder comma mon maitre, et auquel j'ai reellement
I'obligation do toutes les connaissances que j'ai acquises dans
cette partie. « Cette conformite cntre I'ouvrage original espa-
gnol et sa traduction francaise corrigce, donne lemoyen de
comparer plus facilement I'un a I'autre ces deux ouvrages :
mais M. de Poterat a cru devoir conserver aussi les mesures
dp I'original, c'est-a-dire le pied anglais et la livre castillane.
On peut, sans doute, prendre la peine de convertir soi-meme
les dimensions et les poids en mesures de notre systeme me-
T. XXXI. — Aout 1826. 21
i22 SCIENCES PHYSIQUES.
Irique, on rccourir h ties livres on ces calculs sont tout fails;
ccpendant, tout Iccteur reijrcttc qii'oii nc Uii ait pas cpargnc
ce travail, qui a riiiconvenicnt (I'iritt'rrompre ou Ac ralentir
le coiirs dc pensees ct iles raisonnemcns ; ce qui le rend plus
penible, ou moins efficace.
« Don Jorge Juan nous fait voir avec la nicmc clarte I'ab-
surdite de I'ancien systeme, suivant Icquel on mesurait la re-
sistance qu'un corps eprouve dc la part du tluidc dans lequel il
se meut. En effet, ce marin nous fait observer, avec raison, que,
si Ton supposait la vitesse du corps nid'e , en vcrtu d'un pareil
systeme, le fluide n'exercerait plus aucune resistance sur ce
corps, et par consequent aucune pression , principe dont I'ab-
surdite saute aux yeux, quand bien meme cettc absurdite ne
serait pas conslatee par les experiences physiques. » Ici I'incor-
rection du langage a produit tous ses mauvais effets. L'auteur
espagnol a mal expose la doctrine qu'il combat, et son raison-
nement ne portc que sur une meprise qu'il devait eviter. II nc
pent etre absurde de dire que la resistance an niouvement doit
cesser avec le mouvcment; et contre un corps en repos, une
pression n'est pas une resistance, mais une action qui doit eire
contrebalancee par une action egale et directcment opposee ,
si le corps demeure effectivement en repos. II est facheux que
les discussions sur les mots viennent occuper une place destinee
a I'exposition des choses. Lorsqii'un corps est en mouvement
dans un fluide, les pressions qu'il en eprouve sont inegales;
il s'agit par consequent de mesurer leur rcsultante et de deter-
miner sa direction. C'est cette resultante qui est la resistance ,
et qui en prend le nom ; elle devient nulle dans le cas d'equi-
libre; ces notions n'ontrien d'absurde , a moins que la meca-
nique tout entiere ne soit un abus du raisonnement.
M. de Poterat a rectifie des errcnrs de calcul echappees ii
I'attention de l'auteur espagnol, tt que son traductcur (M. L'E-
veque) n'^vait pas fait disparaitre. II ecrivait pour les navi-
gateurs , au lieu que don Jorge Juan s'est occnpe principalement
des constructions navales. Get aspect different sous lequel I'un et
I'autre ont considere leur objet commun , iniposait au marin
SCIENCES PHYSIQUES. 3a3
Ftancais I'obligation dc changer totalement I'application de la
theorie, ct par const-qucnt la fin de I'ouvrage. « J'ai cru devoir
faire, en faveur des marlns, ce que don Jorge Juan avail fait
pour les constructenrs, ct je m'y suis detennine d'autant plus
volontiers, que jc me trouvais aide dans cettecntreprise par
<juatorze annees consecutivcs de navigation dans piesquc toutes
les mers connues, et surtoiit par nies nonibreuses experiences
executees a bord du vaisscaii le MontaTies. En consequence,
je iTie suis decide a substiUier au cinquieme livre de I'ouvrage
dc don Jorge Juan un qualrienie livre. Je me suis propose d'ap-
pliqiier la theorie des livres precedens a rexplication des prin-
cipes qnipeuvent servir de guide dans les differenles manoeuvres
et dans les operations qui s'execnteiit joiunellement a bord des
vaisseaux. « Ce livre est imprime a part (i). L'auteur consacre
un premier chajiitre a I'arrimage des vaisseaux, ou a la distri-
bution des differens poids dont la charge est composee. U pense
que, pour les vaisseaux du commerce, cette operation ne merite
pas que Von s'en occupe serieusement , et les raisons qu'il en
•lonue attestant qn'il est beaucoup plus occupe des vaisseaux
de guerre : il ne parle, au sujet de la marine marchande, que
de la disposition de la charge relativemcnt a I'ordre des pesan-
teurs specifiqnes , ce qui effectivement ne peut echapper a
pwrsonne; mais il ne dit rien de la distribution des poids dans
Ic sens de la longueur du navire , ce qui eut aussi merite quel-
ques observations et quelques preceptes. Au reste, il est evi-
dent que la plus grande parlie de ce qui concerne les vaisseaux
de guerre, quant a leur arrimage, peut etrc appliquee , avec
<le legeres modifications , aux batimens du commerce.
Les deux chapitres suivans sotit consacri's a deux operations
opposecs , ramarrnge et rapparcilinge. Le quatrieme, beaucoup
fi) Traite pratique a i'tisagrt des marins, contenant la description
des operations, rnoiivemens et mancBuvres qui out lieu journellement
a bord des vaisseaux, etc. Paris, 1S26; Firaiin DI:lot. In-8°(Voy.
itcv. Euc.^ X. XXX, p. 755. )
3a4 SCIENCES PHYSIQUES.
plus aboudant en preceptes et en applications dc la theorie,
enseigne la maniere d'orie/iter les voiles, les diflcrenles posi-
tions dans lesquelles elles poiivent se tionvcr a I'egard du vent;
on apprend h les hisser et a les amcner ; a les border , a les car-
guer , etc. L'auteur passe ensnite aux viremens tie bord , aiix in-
clinaisons que prennent les vaisseaux parractiondu vent sur les
voiles, a I'art de les goiivernei" , aux experiences qne Ton pent
faire a bord pour ameliorer leur marche , anx precautions a
prendre centre les coups de vent ou de mer, ou contre ces deux
dangers reunis : il termine par la maniere de metlre a la cape
et en panne. Ces Ucons de rexpeileiicc sont loiijours profi-
tables, et toujcurs recues avcc reconnaissance.
Nousavonsparle de I'introduction etdu dernierlivre; voyons
maintenant ce qui occupe I'intervalle entre ccsdeiix extremites;
et forme a pen pres les quatre cinquienies de I'ouvrage , c|ans le
premier volume M. de Poterat donne un traite de inecanique a
I' usage de la marine , ce dont il cut pu se dispenser; car nous
ne manquons point de bons traites do cette science , et son litre
( Theorie du navire) avertit sufGsammcnt que son livre n'est
pas fait pour ceux qui ne sont pas munis de toutes les connais-'
sances qu'il suppose. Puisqu'il a juge a propos, soit comme tra-
ducteur , soit comme auteur , de nous donner un traile de plus?
nous ne pouvons nous dispenser de le comparer k ses devanciers,
et d'examiner s'il a fait faire quelqnes pas de plus a la science ou
a I'enseignement.
Dans les premieres definitions, les mots force in nee rempla-
cenl celui d'inertie qui, en effet , devrait etre baani de la lan^ue
des sciences. Mais la nouvelle expression manque aussi de jus-
tesse. La maniere d'etre des corps qui conslitue cette propriele ,
si toutefois on peut meme lui donner ce nom, n'est point une
force, toute force, ou cause de mouvement, a une direction et
une quantite ou energie determinee : cel!e-ci n'a ni I'une ni
I'autre; c'est une creation, non de I'analyse des choses et des
faits qui conduit toujours a des connaissances , mais de la me-
taphysique qui jette trop souvent hors de la voic des sciences.
SCIENCES PHYSIQUES. SaS
L'ancieniic denomination leparait plus loin , lorsqu'il est ques-
tion des inotneiis d'incrlie ; on n'a, par consequent , rien gagne
en la changeant.
La Theorie rnecanique des Jluides devait etre trailee plus lon-
guenient que la rnecanique generale. \J hjdrostatique , renfermee
dans uii cliapitre fort court, exigeait peut-efre un peu plus de
developpemens , quoique le marin ail surtoutbesoin de bien
posseder la science des Jluides en tnouvernent : les questions trai-
tees dans cet ouvrage sont celles dont la theorie du navire ne
pout so passer : mais, dans ce cas, un peu de superflu n'aurait
pas etc blame; pout-etre mcme devait-il etre considere comme
necessaire ;'a(in ti'avoir la ceititude que Ton n'a rien neglige
de ce qu'il faut savoir, la prudence conseille d'apprendre
quelque chose de plus. Un navire est une machine tellement
compliquee, que toutes les applications de la rnecanique s'y
trouvent a peu pres reunies, avec toutes leurs difficultes. L'of-
ficier de marine qui sera jaloux de bien connailre son vaisseau
choisira le traite de mecanique le )3lus complet; il etudiera la
science des machines en general , afin d'en faire une application
plus sure aux nombreuscs machines qu'il emploie : il ne deman-
dera point que le tems de ses etudes soil abrege, pourvu que
rien ne manque a son instruction.
Dans le second volume, les Theories mathematiques sont ap-
piiquees a Tart de la construction des vaisseaux et des ma-
chines destinees a les faire mouvoir et a les gouverner , aux
actions el aux mouvemens qu'on leur imprime. On regreltera
que beaucoup de calculs soient relatifs aux formes et aux di-
mensions des navires, tels qu'ils etaient il y a plus de 70 ansj
inconvenient que I'on ne pent 6viter, lorsqu'on reproduit
d'anciens ouvrages. Il est vrai que les changemens introduits
paries applications de sa science n'affectent point les Theories,
et que le but de cet ouvrage est d'exposer la Theorie du navire;
mais, des qu'il s'agit de calculs numeriques, les donnees de
ces calculs devraient etre u^uellcs : aucun motif ne senible
justifier le choix de celles qui sont tombces en desuetude.
3a6 SCIENCES PHYSIQUES.
L'ouviage de M. de Potcrat est certaiiiement tres-digne d'es-
time; mais il pouvait ctie mieux adapte a I'clat dcs sciuncuset
des arts ot aux bcsoins <lu moment. II iie sera pouttant pas
inutile; les marins y trouvcront leiinies des coiiiiaissances qn'il
faut cherchcr dans plusieurs livrcs : des recherches leur scront
epargnees, et leurs etudes, devenuesplus raetliodiques, seroiit
necessairement on plus fructueuses, ou tcrniinees plus tot; le
desir de rcndre un tel service etait biensuffisant popr engager
uu marin aussi iIl^.t^uil que M. de Potejat a les dii iger dans la
carriere; il a des droits reels a leur veconnaissiiuce, il I'obtiendra-
Fkrrt.
SCIENCES MORALES ET POLITIQUES.
Fkagmens philosophiqoes, par P ictor Cousin (c).
II n'y a guere de nouveau dans ce volume que \a. pre/ace
de 5o pages dans laquelle Taiiteur expose rapidement I'en-
semble des vues et des idees qui lui semblcnt pouvoir, jusqu'i
uii certain point, scivir de lien aux divers hiorceaux dont se
compose le recueil; ce sont , au reste, pour la plupart, des ar-
ticles iuseres, depuis une dixaine d'annees , soit dans le Journal
des sai'ans, soit dans les j4rchwes philosophiques. Nous nous
bornerons done a Texamen du dernicf ecrit de M. Cousin,
comme contenaut, non pas la doctrine philosophique dont il
est actuellement en possession, mais la jjariie qu'il vcut bien
nous en communiquer, pour nous aider a comprendre Xes/rag-
mens qu'il public. A la verite, il n'y expose, ainsi qu'il en aver-
lit lui-meme, que le systeine qui fit le fond de son enseigne-
ment, eu 1818, et du progres de ses rccherches , depuis i8j5,
ou il fut nomme maitic de conferences a I'ecole normale, et
professeur suppleant a la faculle des lettres de Paris, jusqu'en
1819 et 1820; car ce systeme , nous dit-il , a pris depuis lors,
d'ans son esprit et dans ses travaux, une importance dont il lui
est impossible de donner, quant a present, la moindre id^e,
et dont ses amis seuls peuvent comprendre entierement la
portee.
Comme on voit, M. Cousin se croit, non-seulement auto-
rise, mais appele a parler de lui-nicme dans cette preface, et
il declare qu'il le fera, sam aiicune dc ces precautions de mo-
destie qui ne valent pas la simplicilc et la droiture de V inten-
tion. Nous ne bhimons point cette noble confiance qu'un au-
(i) Paris, 1826; Sautclet. et C*^, iibraiies, place de la Bourse,
I vol. in-8°; prix , 7 fr. 5o c.
3a8 SCIENCES MORALES
teiJr puise dans le sentiment on dans I'opinion qu'd a de sa
force; mais on nous permettra sans doute aussi de croire qu'on
pent etre modeste, et avoir cependant des intentions droites et
purcs. Peut-etre meme qu'cn reflechissant sur la tendance
constante et, pour ainsi dire, inevitable qvii porte chacun de
nous a s'cxagcrer le merite el Timportance de ses travaux, on
pourrait devenir modeste par systeme et par amour pour la
verite, ou du moins regarder, ;'\ certains egards, une extreme
deiiance de soi-meme comme un moyen de succes, dans Ics
recherches de ce genre. Au reste , nousne nierons point qu'une
maniere d'etre tout opposee ne puisse eontribuer beancoiip a
I'eclat et a la celebrite d'un cours public; et chacun sail quelle
reputation M. Cousin s'est acquise, comme professeur. Une
elocution brillante et facile, un debit imposant et anime, une
imagination forte, des pensees elevees, des sentimens gone-
reux , I'accentd'une conviction sincere et profonde : tellcs sent
les qualites que ses auditeurs se sont plu a recounaitre en lui ;
or, on con9oit facilement que I'homme qui, jeune encore , se
presentait avec taut d'avantages reels, devait obtenir un im-
mense succes aupres d'une jeunesse avide de connaissances,
et naturellement cnthousiaste pour tout ce qui porte un carac-
tere de grandeur et de nouveaute. Nous ne sommes done point
surpris de la reputation dont il jouit; nous venons d'en indi-
quer les causes, et toutes sont honorables pour lui.
Mais sa doctrine philosophique obtiendra-t-elle par ses
ecrits, pres du public eclaire et des vrais apprcciateiirs du
merite en ce genre, la meme vogue qu'ont eue sesleconsparmi
les jeunes gens qui les frequenfaient? C'est une question que
nous ne pretendons nuilement decider; nous exposcrons seu-
lenient avec franchise I'impression que nous avons rccue de la
lecture de son recueil, et particulierement de la preface qui
est en tete du volume.
Premierement done, nous savons gre a M. Cousin de I'idee
qu'il a eue de nous donner , en quelque sorte, I'histoire de ses
pensees et de sCvS progrcs, depuis le moment ou, sortant a peine
ET POLITIQUES. 329
lui-meme des ecoles, il fut appele a professer la philosophic.
Ce fail nous explique assez bien comment, avec les talens na-
tucels, el assurement fort distingues dont il est done, ilajoue
precisement le role que nous lui avons vu jouer, et fourni la
carriere que nous lui avons vn parcourir avec eclat. Il s'y pre-
senta, nous dit-il , avec la ferrae resolution do reformer les doc-
trines qu'il croyait universellement admises en France; il no
savait pas bien encore quel autre systeme il devait y subsli-
luer; mais, enGn, il etait decide a combatlre , et il arrivait a
sa chaire, comme im jeune officier sur iin champ de bataille ,
bien persuade que ses adversaircs ont tort, ct brulant de se
signaler contre enx.
Il faul se rappcler que I'universite imperiale, des son etnblis-
sement, avail ete confiee ;^ la direction d'un certain nombre
d'horames d'un merite et d'un talent incontesfables, msis qui
avaient pour mission particuliere de donner aux esprits une
impulsion conforme aux vucs do gouvernement d'alors, c'est-
a-dire d'un gouvernement qui aspirait , par tous les moyens
possibles, au pouvoir absolu. Aussi, favorisait-il avec une
affectation remarquable tout ce qui tendait a decrier les opi-
nions philosophiques etpolitiques du siecle precedent. Les hom-
mes qui les avaient adoptees, ou qu'on soupconnait de les
adopter, avec ou sans modification, etaient en butte aux alta-
ques continuelles des journaux de ce tems-la et des ecrivains
qui aspiraient aux places et a la faveur.
Or, c'est precisement sous cette influence, a laquelie la di„-
rection de I'ecole normale n'etait point etrangere, que M. Cou-
sin y tcrmina ses etudes. II eut occasion d'v connaitre des hom-
mes de beaucoup de merite aussi, qui assurement n'enlraient
pas dans les vues du gouvernement, mais qui les secoudaient,
sans le vouloir, ou saas le savoir, parce que des motifs, d'ail-
leurs fort honorables, ieur faisaient partager la tendance im-
primee a cette epoque aux esprits. II etait done fort naturel
qu'un jeune homme, plein de zele et d'ardeur pour I'etude,
plein d'enthousiasmc ponr ce qui lui semblait estimable et
33o SCIENCES I\IORA.LES
hoDDCte, fut accueilli avec distinction par de tcls hommes, et
se troiiviit heureux d'obtenir un pareil accueil.
Voila comment il est arrive, siiivant nous, que M. Cousin a
commence sa carriere de professeur par dcs atlaciues formelles
et continuelles contre \es doctrines philosophiques dc Locke
ct de Condillac, et comuient on retrouve encore dans I't'crit
que nous cxaniiiions dcs traces dune sorte de colere contre
cette philosophic et contre I'esprit general du dix-huitieme
siecle, nieme dans la manieredontl'auteur cherche aujourd'hui
a en faire I'apologii^ , on a se soustraire aux restes des sen-
timens dont il etait anime, il y a plus de dix ans.
« C'estun fait incontestable, dit-il , ( p. iij ) qu'en Angleterre
et en France , Locke et Condillac... ont regne sans contradic-
tion jusqu'a ce jour. « Et il ajoute : «■ au lieu de sirriter de ce
fait, il faut tacher de le comprendre. » II est assurement tres-
douteux qu'excepte M. Cousin, en i8i5, et quelques jeunes
gens qui etaient sous la meme influence que lui, personne ait
jamais etc tente de s'irriter du fait dont il parle; il est, d'ail-
leurs , peu exact de dire que la philosophic des deux ecrivains
qu'il cite ait regne sans contradiction jusqu'a ce jour, c'est-a-
dire jusqu'au jour oil il ecrivait cette phrase :il oubliait appa-
I'emment qu'elle fut contredite d'une maniere formelle par le
docteur Reidy dans son premier ouvrage, public il y a pres de
soixante ans , et qu'elle rava:itete avant ce tems-la sur pliisieurs
points essentiels par le celebre Berkeley , par Leibnitz , etc.
M. Cousin dit aussi ( p. iv ) , « I'esprit du dix-huitieme siecle
n'a pas besoin d'apologie. L'apologic d'un siecle est dans son
existence; car son existence est un arret et «n jugement de
Dieumeme, ou Ihistoire n'est qu'une fantasmagorie insigni-
iiante. » Nous ne pouvons voir encore, dans la solennite un
peu singuliere de ces expressions, qu'uu souvenir de la colere
de I'auteur, en i8i5, contre ce malheurcux dix-huitieme sie-
cle, avec lequcl il ne s'cst pas reconcilie sans quelqiie effori.
Enfin, la doctrine de Locke et de Condillac qu'il appellc une
triste philosophic , qu'il designe par le nom de philosophie de
ET POLITIQUES. 33 1
la sensation , et ineme, dans un autre ecrit, par celui de sen-
sualisme, n'est mentionnee par lui qu'avec un ton de dedain et
meme de denigrenient tout-a-fait injuste; car il doit savoir,
mieux que personne, que ces deux ecrivains n'out conqjose ui
3es traitcs de gastrononiie, ni des remans licencieux.
En general, M. Cousin nous a paru, dans cette preface un
peu trop orateur, et peut-eire pas assez philosophe. II a I'art
de presenter les choses anciennes comme nouvelles, et des
opinions assez eommuncs comme des decouvertes fort impor-
tantes. Nous sommes loin de vouloir, par cette observation,
inculper sa bonne foi ; snais nous croyons qu'il s'est fail illusion
a lui-meme par la nouveante , et, s'il faut le dire aussi , par la
Lizarrerie de la langue philosophique qu'il s'est faite. Ainsi, il
se presenle, dans le debut de son enseigneinent, comme cher-
chant la methode la plus convenable a la reforme qu'il se pro-
pose d'etablir , et a I'instruction de ses auditeurs, et il ajoute
d'un ton solenncl que celle a laquelle il s'arreta, fut celle « qui
etait dans I'csprit du tenis, eludiee serieusement et volontaire-
ment acceplee, dans les habitudes nationales et dans ses pro-
pres habitudes... » c'est-a-dire la methode de I'cxperience et de
I'observatiou. Or, Bacon , Locke, Condillac n'ont ni employe,
ni recommande d'autre methode que celle-la. Platon, Aristote
et tous les phiiosophes anciens et raodernes, dans toutes les
questions qu'ils out traitees avec succes , n'ont pas meme pu en
employer d'autre; car c'est la seule qui puisse conduire a quel-
que I'esultat satisfaisant, dans les sciences naturelles, ou dans
la connaissance des faits de la nature, soit physique, soit in-
tellectuelle.
Mais cette methode, qu'il appelle methode psychologique ,
puis methode philosophique, et qu'il nous dit etre aussi la
methode qui preside encore a tous ses travaux , ne regrettera-
t-on pas que M. Cousin ne nous donne qu'un seul exemple de
I'emploi qu'il en a fait , et surtout que cet exemple soit, il faut
I'avouer , tres - peu satisfaisant ou tres - peu concluant ? C'est
dans ce qu'il appelle Vanalyse complete de la raison : il re-
proche a Kant d'en avoir abaisse les lois a n'etre plus que des
33a SCIENCES MORALES
lois relatives a la condition luimaine; il se felicito d'avoir dc-
montre que les lois de la raison humaine ne sont lieii nioins
que celles dc la roison en elle-m^mc , et voici comment il
decrit le piocede qui I'a conduit a cclle demonstration : « Plus
que jamais (idele a la mclhode psychologicpie, dil il, au lieu
de soitir de I'observation, je m'y cnfoncai davantage, et c'est
par I'observation qne, dans I'intimite de la conscience et a
un degre ou Kant n'avait paspenetre, sous la rolalivile et la
subjcclivite apparenle des principes necessaircs, j'atteignis et
demelai le fait instantane , mais reel, dc Tapcrception spon-
tanee de la verite, aperception qui, ne se reflechissant point
immediatcnient elle-meme,/7rtwe inapercue dans les profomlcurs
de la conscience , mais y est la base veritable de ee qui, plus
lard, sous une forme logique et entre les mains de la reflexion,
devient une conception necessaire, etc. •>
Nous avoucrons en toute humilite notre entiere impuissance
h. compreudre ce que c'est qu'une aperception qui passe in-
apercue; et, si c'est par un pareil procede d'observation que
M. Cousin est parvenu a contcmpler sans nuages cetle sphere
des idces que Platon, dit-il , avait entrevue, il ne nous est pas
plus possible de le suivre dans les hautes regions oii il s'eleve
que dans les profondeurs ou il s'enfonce.
Nous n'entreprendrons done point de donncr une idee de
la suite de raisonnemens, et de deductions purcment ver-
bales, ou logiques, suivant nous, sur laqnclle il fonde une
solution nouvclle en apparence du fameux probleme de I'union
des deux substances, et nous croyons d'autant plus inutile de
nous y arreter, que M. Cousin declare lui-meme, comme nous
I'avons deja fait observer, que la doctrine qu'il expose dans
celte preface n'est qu'un essai de sa jeunesse, el qn'aujourd'liui
apparemment il est entre dans un systenie d'idees ou depensees
tout diiTercnt sur le meme sujet. Nous esperons meme que ,
quand il croira devoir ou pouvoir nous communiquir les
nouvelles decouvertes dont scs travaux et ses meditations,
depuis 1819, 1'ont mis en possession, nous y trouverons des
notions plus satisfaisantes et un langage plus clair que celni
ET POLITIQUES. 333
dont il sf sert ilans cette preface, ioisqu'il dit, par exemple,
en parlant de Dieu : « Dans tout et partout, il rcvieut en
quelque sorte a lui-meme dans la conscience de I'homme, dont
il constitue indirectement le mecanisnie et la triplicitc pheno-
menale," par le reflet de son propre mouvement, et de la tri-
j)Ucite suhstantielle dont il est I'identite absolue. « Ou lorsqu'il
ajoiite, en parlant de la raison, qu'elle est « le mediateur
necessaire entre Dieu et I'homme, le hoyoi de Pylhagore et de
Platon, ce verbe fait chair qui scrt u'interprete a Dieu et de
precepteur a I'homme, honime et dieu tout ensemble, etc. «
Ces expressions, si etrangement mystiques et figurees, nous
semblent toiit-a-fait propres a obscurcir les questions les plus
importantes de la philosophic , et a produire chez ceux qui les
adopteraient uue sorte d'illuminisme entieremcnt oppose aux
pures lumieres de la raison et de la verite.
En un mot, quoique nous ne pretendions rien relracter des
justes cloges que nous avons donnes aux talens et aux qualites
estiinablcs de M. Cousin, quoique nous reconnaissions, dans
plusieurs parties des ecrits qu'il vient de publier, unc force
de tete pen commune, et uue aptitude remarquable aux medi-
tations abstraites, nous dirons avec la meme franchise qu'il
nous semble, au moins dans tout ce que nous connaissons de
lui jusqu'a f)resent, s'etre engage dans une route qui ne peut
gnere le conduire ;\ d'utilcs decouvertes.
Il remarque avec raison que Vobservation et I'experience
sont les seuls guides que Ton puissc suivre avec quelque secu-
rite dans I'etude de I'esprit humaiu; mais on ne trouve dans
ses ecrits presque aucune observation importanle qui lui soil
propre, et il parait merae avoir trop dedaigne celles qui ont
ete faites avant lui. Il ne voit, dans les ecrits de Locke, que la
sensation et la reflexion, c'est-a-dire les deux conceptions
generales auxquelles ce philosophe a voulu ramener I'ensemble
de ses travaux ct de ses meditations; et il prononce trop lege-
rement, a notre avis, que Kant a renverse entierement toute la
philosophie de Locke, parce que Kant a insiste pins particnlie-
rement siir qtielques considerations quf n'avaient pourtant pas
334 SCIENCES MOR/VLES
entierenient ocliappe a la sagacite de ce grand homme. II ne
voil dans Condillac que la sensation transformee , c'est-a-dire
I'abtis des mots par Icqud cot ccrivain a pretendn ramener a
I'linitc la somnie dcs faits qui constituent Ics facultes de I'enten-
dement : el il ne s'apercoit pas que cost par un abus du nieme
genre qu'il arrive lui-menie a la pretcnduc unite de substance
qui fait le fonds de son systeme.
Cet abus des terines generaux fut toujours recneil ou vinrcnt
cchouer les auteurs des systemes de nietaphysique, et M. Cou-
sin ne nous parait pas avoir mieux reiissi que ses devanciers a
I'eviter. Vainement il afiirme, en parlant de la solution qu'il
donne du faineux probleme qu'il entreprend do resoudre , que
le terns ni In discussion ne I'ont point encore cbrnnlee ; nous
lui ferons remarquer qu'un intervalle de, sept ou hnit ans,
pendant lesquels son systeme n'a pu etre connu que de luiet de
quelques-uns de ses amis ou de ses disciples, et discute par eux ,
n'autorise assurement pas la confiance implicife qu'il semble
prendre dans Ic jui^cnient qu'il en |)orte.
Nous ne pouvons done niieux terminer ccs observations
qn'en rappolant a I'auleur des Fmgmens philosophiques , et a
tous ceux qui s'occupent des memessujets, ces paroles rcmar-
quables du sage I.ocke, dont les ecrits seront encore long-tems
utiles, non seulemcnt a consulter, niais a mediter avec soin :
« Je tache de mc delivrer, autant que je puis (disait-il) de ces
illusions que nous sommes sujets a nous faire a nous-memes, en
prenant des mots pour des choscs. II ne nous sert de rien de
faire seniblant de savoir ce que nous ne savons pas, en pro-
noncant de certains sons qui ne significnt rien de distinct et de
posilif. C'est battre I'air inntilement; car des mots faits a plaisir
ne changent point la nature des choses, et ne peuvent devenir
intelligibles tpi'aiitant cjne ce sont des signes de qnelquc chose
de posilif, et qu'ils expriment dcs idees distinctes et deter-
ininees. » { Dc I'Enlcndem. hum. 1. ii, c. i3, § 18.)
ET POLITIQUES. 335
EuucATiON DOMESTiQUE , ou Lettres de famille sur
V education ; par M^e Guizot (i).
Si quelque chose depend immediatement de la marche de
la societe et du progres des esprits, si quelque chose doit res-
scntir les prompts effets de leurs variations siiccessives, c'est
sans (ionte Xeducation. Quand la societe n'est plus ordonnee
de la nieme sorte , quand elle est regie par des lois differentes,
quand elle est animee d'autrcs opinions , la destination des in-
dividus n'est plus la menie , et il devient a propos de donner a
leurs facultes una culture appropriee a I'etat de choses ou ils
auront a vivre. Mais, de tons les changemens , celui qui doit
exercer I'intlueuce la plus directe sur I'education, c'est evi-
dcmment le changement des doctrines philosopliiques- Lorsque
les idees sur la nature morale de rhomme ont varie , lorsqu'on
pense d'autre sorte sur les procedes de notre intelligence et
consequemment sur I'origine de nos counaissances, il est ma-
nifesle que les principes del'enseignement ne peuvent demeurer
tels qu'auparavant. Nous avons vu iin grand exemple d'une
pareille revolution dans I'empire de I'intelligencc. Des que la
philosophic de la sensation se fut emparee des esprits en France,
tous les livres qui n'etaient point oeuvre d'imagination se trou-
verenta rcfaire. En effet, sans parler de cette hardiesse avec
laquellc un besoin insatiable d'examen chercliait a se satisfaire,
Tame hnmaine, theatre de tous les phenomenes moraux, ayant
paru aux philosophcs sensualistes sous un aspect nouveau,
ayant etc decritu par eux autrement que par leurs devanciers,
il fallait indispensablement lui parler, conformement a la na-
ture qu'on lui supposait. La marche des idees, les moyens de
convaiucre, les inotifs de croire, tout devait se mettre en har-
monic avec I'homme , tel que le faisait cette philosophic. Long-
(i) Paris, i8»6; Leroux et Chantpie, libraires, au Palais-Pioyal,
galcries de bois , n°- afiS, a64- 2 vol. in-8° ; prix, 12 fr.
336 SCIENCES MORALES
tems I'aiitoiite avail etc un nioyen de persuasion; citcr des
textcs , rapporter des faits avail suffi aux uns pour euseigner,
aiix autres pour croirc. Quand arriva le tems des grandes re-
bellions de I'espril humain, n'ayant pas bien dcmele encore
le motif de son mccontentement, il nc commenca point par
protester contre la pretention de lui imposcr ses croyances;
il voulut seulcment changer dc maitres. Philosophicinemenl
parlanl, la revolution dii xvi' siecle n'alla pas bcaucoiip plus
loin. Descartes, le premier, proclama nettcmenl ce que I'liomme
avail droit d'exiger avant d'accorder sa conviction ; mais, apres
avoir declare que le seul prineipe dc certitude et.iit dans la
conscience, ni lui ni ses disciples ne prirent les pheuomeues
de la conscience pour sujet dc leurs observations; de sotte
qu'ils n'eleverent aucun edilice sur la base noble el ferme qu'ils
avaient etablie. Vint I'ecole de Locke el de Condillac : pour
elle, I'ame elait une puissance neutre el passive; sou activite
du moins n'avait rien de vivant el de volontaire; c'etail une
mecanique mise en jeu d'une fa^on necessaire par Taction des
objets exterieurs. Cela uae fois donne, c'etait dans les rapports
sensuels del'hommc avcc le monde que tout devait etre cherche ;
la residaient les principes universels. L'hommc dut y trouver
sa regie, et I'enfant, quon voulut des lors persuader el non
pins seulement commander, dut etre nourri a ecouter la seule
voix des sensations. Ainsi naquit la morale de I'interet, et cetle
philosophic n'en ponvait donncr une autre.
Cependant, quelle que soil la methode dc philosopher qu'a-
dopte une generation, elle ne peut s'y livrer en aveugle; ellci
ne peut promettre d'aller au hasard partout oii la conduiraient
les deductions de tel ou tel sysleme. Tout grand que ptiisse
etre I'empire d'une ecole en credit, il existe une reserve tacite
el involontaire ; la raison humaine a des points fixes qu'elle
ne pent renier, sans s'abdicjuer elle-meme. Permis a la philo-
sophic de nousy condiiire par la route qu'elle trouvera la plus
prompte et la plus certaine ; mais si, en definitive, elle nous
ecarte de ce but necessaire , la confiance sera bientot retiree a
ce guide infidele. D'ordinaire, les philosophes n'ignorent pas
ET POLITIQUES. 337
que cette condition leur est imposee ; plutot que de iie pas v
salisfaiie, ils faussent leurs deductions, et sont inconsequens
pour ne pas etie absurdes. De la sortirent les doctrines de
I'inleret bien entendu et de la syrapathie, ajustemens puerils
de la morale de I'interet. C'est un spectacle curieux que Rous-
seau , dont le sentiment interieur protestait de toutes ses forces
contre les consequences de celte philosophic, luttant avec elle
sans y pouvoir echapper, taut elle avait une domination imi-
versclle. Toute I'education d'Eir.ile est fondee sur la metaphy-
sique des sensations; c'est dans I'etude et la combinaison de
Taction exterieure que sont cherches tousles moyens d'instruire
et d'ameliorer I'enfant ; tandis que, par une contradiction nia-
Jiifeste, Taniour du beau moral est toujours depeint coninie un
fait interieur.
Depuis beaucoup d'annees , en Allemagne et en Ecosse , plus
recemment en France, I'insuffisance de la philosophic sensua-
liste a ete plcinement reconnue ; et, apres avoir regne d'une
facon pour ainsi dire absolue , elle a aujourd'hui perdu son
autorite. Maintenant, les fails internes sont admis comme fon-
demens de la counaissance; il est reconnu que, parmi les phe-
nomenes dont la conscience est le theatre, il en est dont les
objetsexterieurs ne sont ni la cause, ni I'occasion; I'existence
de la loi morale, comme inherente a Tame humaiue, soit par
son essence meme, soit par une perception necessaire , est
recue, non comme hypothese, raais comme fait observe contre
lequel il serait frivole de protester.
Qui ne voit combien il importe qu'une telle philosophic
receive son plus bel et plus utile emploi, en procedant a I'e-
ducation ? Ne faut-il pas se hater de la placer sous cette influence
salutaire? le caractere divin de I'ame, enseigne de tout tems
par I'instinct et revele par la religion, ayant trouve son rang
parmi les convictions raisonnees et scientifiques , ce doit-on
pas aussitot le prendre en contemplation, quand il s'agit de
proceder au developpement graduel de cette ame, dont les
droits et les facultc3 ne sont plus contestes?
f "est la noble tache que s'est proposee M"""^ Gnizot et qu'elle
T. XXXI. — Aoilt 1826. 22
^"58 SC.IKNCES MORALES
a su digticmeiit lemplir; son livrc est uc au sein dc cctte ecole
spirilualiste : tout pratique, lout matertiel qu'il est, si ron
peut aiusi parlor, il est pleiu des doctrines elevecs qui com-
mencent ik dominer parnii nous. Mais , comnie il convenait k
una fenuiie ct a ur*e mere, elles y sont h litre de senlimens.
lis apparaissent controles par la raison, soumis a I'exanien dont
i!s n'onrnen a craindre , et cependant faciles, calnies et fermes,
en meme tems que doux et animes.
Le principe d'une telle education ne peut pas etre I'obeis-
sance purement passive, puisqu'elle est destinee h former des
liommesqui demandenti leur raison compte deleurs croyauces:
« Car nos vertus, dit I'auteur, doivent etre a nous, le fruit de
noire volonte, non de noire soumissiun a celle d'aulrui. » On
ne peut pas nou pliisimposer a Tinstiluteur I'obligation de de-
montrer sans cesse a I'enfant I'utilite des clioses prescritesj car
cette demonstration serait souvenl impossible; il faudrait pres-
que toujours I'obtenir au moyen de circonstances factices , et
en definitive , elle aboutirait a la morale de I'inleret. Ce n'est
point la marche k suivre. Mais cette loi morale, ces immuables
regies de la raison, ces eternellcs decisions de la justice, ces
affections desinteressees pour le bien, cet inevitable sentiment
du devoir qui se trouye dans I'ame de I'homme, sont en
germe dans I'ame de I'enfant. Ce sont ces germes precieiix qui
doivent etre cherches , nourris , cultives ; c'est a eux qu'il en
faut appeler, ecartant tout ce qui pourrait les fletrir ou les
corrompre; leur donnant peu a peu autorite sur la viej les
instituant conseillers de la libre volonte, lorsque I'un se tail,
en invoquant un autre; appelant tantot I'affection au secours
de la raison, tantot la confiance a I'appui de la soumission;
enfin, c'est au dedans que doivent etre trouves tous les ressorts
de I'educalion , puisque ce ne sont point des apparences qu'on
veut etaler,mais des realites qu'on veutcreer; puisque cene
sont point des pratiques, mais des vertus que Ton desire en-
seigner.
Icise presentait une objection grave qu'allegucnt a la fois et
des hommes religieux et des pliilosophes. Si la nature morale
ET POLITIQUES. Zlg
tie riiomme rcnferme essentiellement de mauvaises dispositions,
si elle a subi une corruption originelle, I'education ne doit-
elle pas avant tout etre repressive ; et , avant de songer h faire
germer le bien, ne faut-il pas s'occuper d'exlirper les semences
dii mal ?
M.""' Guizot soumet cette question a un examen profond et
sincere; en effet, Ton voit quelle etait, dans un livre conCU
comme le sien, la question fondamentale. Elle se demande
d'abord si le mal a une existence positive, et ce qui le constitue.
Moralement, ce ne sont point ses effets qui le caracterisent ,
non plus que ses apparences exterieures; on peut faire le mal
avec ignorance, avec innocence; il est le mal pour celui qui le
souffre, pour celui qui le voit, il ne Test point pour celui qui
le commet. Quelle est la disposition d'ame qui fait commettre le
mal ? voila done ce qui est a trouver. Existerait-il en nous une
loi morale du mal, comme il y existe une loi morale du bien?
avons-nous I'une a accomplir, I'autre a evifer ? remarquons
d'abord que la religion nous fournit tout aussitot une reponse.
Dieu ne peut etre auteur du mal ; il le permet, mais il no vient
pas de lui. Ainsi , point de loi du mal inherente a notre ame.
Philosopliiquement , I'absurdite est palpable. S'il y avait deux
lois contradictoires, elles ne meriteraient pas ce nom; il fau-
drait de toute necessite ou detruire la responsabilite morale de
t'hommc, on placer au-dessus de ces deux prutendues lois, I'o-
bligation de choisir la loi dubien; alors, c'est cette obligation
qui serait la loi absolue; les autres seraient contingentes et
accidentelles.
S'il n'y a point de loi du mal, d'ou vient done I'inipulsion
qui nous y porte ? d'une part, I'homme n'est point une pure
intelligence ; il reside dans des organes materiels: or , cette na-
ture animee a des besoins, des penchans, elle a meme un ins-
tinct animal, susceptible de raisonnement et de calcul, bien
qu'entierement etranger a la loi morale. De la, une lutte con-
tinuelle entre les appetits de la chair, et cet autre instinct du
bien, du juste, de I'eternel , qui est le propre de Tame, mais
qui peut y sommeiller obscur, confus, etouffe. La volonte
3/io SCIENCES MORALES
parfois ne sail point I'ecouter, le chercher el lui obeir; d'ou
resulte rcmploi responsable «e la liberie. Les perchans, les
besoins do la natiiru physique n"ont ricii dc coupabie en enx-
memes; ils ne sont pas le nial, et ne le devicniiont que lors-
qn'ils s'excrcent en tiansgressiot) avec la loi morale. Que faire
done pour ne la point violer? Mettre en lumiere ces prtceptes
deposes an fond de nousmemes; d'instinctifs qu'ils sont, les
rendre explicites et positifs, les converlir en habitudes; faire
savonrer les jouissances qu'ils donnent, les appeler h. occuper
et satisfi'.irc I'activite humaine.
Mais ce n'est pas de la niatiere seule que nous vient ie mal.
Celte loi morale que nous portons en nous-memes, se compose
de prescriptions diverses, et parfois contradictoires en appa-
rence. C'est une loi de toute liberie; on ne pent lui obeir en
aveu^le. EUe nous fut donnee pour nous laisser tout le merite
du bien, tout le peche du mal. Elle n'a pas, comme les lois hu-
maines, sa lettre qui puisse excuser de manquer a son esprit.
Si je me venge de mon enncmi, je ne serai point adniis a dire
que Dieu avail place en moi un sentiment de justice et que j'ai
sculement puni le mal. II me sera demande si, dans ma ven-
geance, je suis assure de n'avoir point songe a cette colere du
sang que ni'a donnc la crainte, a ce soin de conservation qui
m'a inspire un acte de violence. Et alors , pourquoi ai-je trans-
gresse la loi de charile et de pardon? alors, ou est mon excuse?
Ainsi, la fausse interpretation de la loi morale, contournee
pour servir de justification mensongere a des actes de I'inslinct
materiel, est aussi une occasion de mal. Toulefois, cela ne
donne pas le droit de dire que le mal existe dans I'homnie, et
qu'il faut Iravailler ii Ten extirper. Ici encore, il nous faut
convenir a\ec I'auteur : « que le mal n'est que I'abscnce du
bien. Dieu, tout-puissant et tout parfait, nous commande la
perfection. Imparfaits ou inhabiles , nous obeissons mal, ou
nous repoussons ses commandemens. Sa loi nous parait trop
difficile et Irop dure ; noire paresse demeure en arrierc , ou
notre indociliie y echappe, L'accomplir, serait le bien; y
manquer , voila le mal ; il n'existe nulle part que dans la des-
ET POLITIQUES. 34 1
obeistancc; il n'est le ma!, que parce qu'il n'est pas le bien
dont I'obligation nous est imposue.
De cette possibilite d'crrersur la loi el de Tinterpreter faus-
sement, quelle est I'indication qui resulte pour rinstituteiir ?
s'agit-il, « de caracferes a rompre, de nature a dompter? comme
s'il fallait otcr a I'enfant celle que Dieu lui a faite pour lui en
donner une dc la facon de son maltre. » Nulleraent. Aussi,
]\jme Guizot n'hesite-t-elle point sur la direction gencrale de
I'education; elle prefere « rcncouragcoient (pii porte au bien a
la st'verite qui combat le mal. » Comme , selon ce qu'elle a dit,
le mal est I'absence du bien, elle s'cfforcede si bien remplirla vie
avec I'un , qu'il y reste le moins d'espace possible pour I'autre.
n Je ferais naitre dans ces jeunes coeurs le sentiment qui re-
prime de honteux mouvemens. A quoi s'adresscnt les puni-
tionsPades defauts de vertus. C'est done une place vide a
remplir, et la crainle n'y suffit pas. Mes encourageniens au
bien penetreront en mille lieux ou ne pourrait atteindre la ri-
gueur de mon autorite. Je ferai connaitre I'amour du sacrifice,
quand je ne pounai reprimer la personnalite; j'instruirai a
a trouver dans le plaisir dcs autres une joie qui ne laissera
plus de chances a la jalousie conlre laquelle tout mou pouvoir
serait sans action. Par la, et seulement par la, je pourrai ap-
pliquer a toutes les actions de mes enfans cette scrupuleuse
exactitude de morale, preservatif dc la vertu contre les fai-
blesses de la volonteet les complaisances de I'esprit. Toujours
agissant de la main , du coeur et de la pensee , toujours en pre-
sence de Dieu qui sans cesse nous commuuique et nous impose
sa loi , il n'est pas une de nos actions ou nous n'ayons quelque
bien a faire pour eviter quelque mal. »
Cette analyse et ces citations pourraient donner a penser que
I'auteur propose un systeme d'indulgence imperturbable, un
appel continuel a une raison non encore developpee. Ce serait
se faire une fausse idee d'un livre d'autant plus pratique qu'il
est moins absolu. C'est I'indicalion de I'esprit general que I'ins-
tiluteur doit apporter dans I'education, bien plutot qu'une
regie Iracee a sa conduite. La tacheest presentee comme doqce,
34 a SCIENCES MORALES
mais non comme facile; il y faut, en toute occasion, cxamen,
justice , precaution. Les circonstances varient; Ics inclividusne
sont pas les niemes. Aucun code ccrit d'avance ne pcut dis-
penser I'instituteur de rcflechir sans cesse , de n'agir qu'avcc
un scrupule eclaire. Ce pouvoir qui lui est confie, il peuten
abuser; car le pouvoir est une grande source d'erreurs, de Sorte
que ce mode d'education est une etude morale pour le maitre ,
comme pour I'elcve. « L'experience de I't'ducation a presquc
toujours pour resnltat de nous enseigner a n'appliquer qu'avec
reserve et Icnteur les idees qu'elle aura fait naitre , ct ;\ mesurer
I'importance de chaque chose , moins par le but auquel nous
voulons la faire servir, que par I'effet du moyenen lui-meme.
Ainsi, telle punition appropriee k la faute sera trop forte ou
mauvaise pour I'enfant. Notre juste severite, en reprimant ua
defaut, pourra risquer d'en faire naitre un autre. Il faudra
penser » tout, et nous garder de la pedanterie dans la pratique,
avec plusdesoin encore que de I'erreur dans le principe. L'e-
ducation est une ceuvre de toutes pieces, oh pourrait dire de
toutes mains. Taut de choses y concourent, sans nous, malgre
nous, que ce serait une grande imprudence de ne pas leur as-
signer une place. Quelle que soit I'idee qui la domine , cette
idee deviendra inutile ou dangereuse, si elle n'admet pas les
hasards, les negligences, les meprises ou les mecomptes, le
tems perdu ou nial employe, les notions fausses, recues on ne
sait d'oii, les mauvaises habitudes prises on ne sait comment.
Ce sont la des chances de la vie, du caractere, del'esprit des
enfans , et meme des pareias. II faut avoir prepare le terrain de
maniere a ce que tout s'y puisse rameuer a une bonne fin, mais
sans pretendre tout assujetir a un systeme uniforme et rcgulier. »
II etait h propos de citer ce passage pour donner une idee
du ton de bonne foi, de reserve et de juste mesiire qui regne
dans le livre de M""= Guizot. Aux yeux de beaucoup de gens,
un ouvrage philosophique est d'avance juge inapplicable, et ,
pour se servir de I'anatheme recu, bon pour la theorie, inu-
tile pour la pratique. Mais la theorie n'est impraticable que
quand elle n'est pas complete; chercher la raison des choses.
ET POLITIQUES. 3^3
n'est un moyen de s'eloigner du reel que lorsqu'on n'a pas
iissez bien cherche, lorsqu'on a misses suppositions a la place
des faits, et la fantaisie a la place de I'observation.
Nul des moyens employes dans I'education n'est done sys-
tematiquement proscrit; toussont bons, salon la cireonstance,
selon I'exigence du moment. Seulement , en se servant de cha-
cun d'eux, il faut savoir ce qu'on fait et en calculer toiijours
I'effet n.oral.
C'est de la sorte que M™^ Guizot examine successivement
les divers ressorts que Ton fait ai^ir surl'cnfant : \es punilions,
Vautorite, {'emulation , V habitude , V imitation.
Ainsi, quant aux punitions, il faut bien se garder de cher-
cher en elles une influence pareille ii I'infliience des lois penales
dans la societe. "Le but dela justice socialeestde rej^jerla con-
duite exterieure; I'education a surtout pour but de regler la
raison. II suffit a la societe que I'homme menace de sa rigueiir
sache quelle action il doit eviter; i! faut que I'enfant sache
pourquoi il doit I'eviter. » L'essentiel , dans la punition, c'est
done qu'elle s'accorde loujours dans I'Ame de I'enfant avec I'i-
dee dejvistice; autrement, vous I'instruisez a la crainte et ne
lui euseignez que le droit du plus fort. Voillez aussi h sa dispo-
sition interieure, et n'allez pas substituer aii chagrin qu'il
eprouve d'avoir mal fait, le chagrin bien nioins moral d'avoir
ete puni.
Mais I'enfant ne peut comprendre le motif de tout ce qui
lui estordonne ou defendu ; faudra-t-il done renoncer a exi-
ger I'obeissance sur tant de points ou sa raison n'est pas suffi-
samment eclaireePIl est facile de montrcr que I'autorite n'est
pas reduite a prendre son litre, soil dans la crainte, soit dans
la conviction raisonnee. EUe s'etablit bien plus sur cette con-
viction generale de I'enfant qui ne doutejamaisque ses parens
ou son instituteur n'aient plus de lumieres que lui et ne soient
moins sujets a se tromper. Il a a la fois conscience de sa fai-
blesse et confiance dans leur affection. Lorsque I'autorife ne
peut proceder par voie de raisonnement, elle a done d'autres
ressources. M""^ Guizot retrace, avec toute la tcndresse d'ame
3U S( 1K\C.F.S MORALES
.Vune iiiocv. Ic plus sikr couiine lo plus iloux aux.iliair*' dc cftt«r
supivinc MUtorilv.
■V Loi-sqiu-, pour lo faiix^ oboir, A Kexprossiou do la voloutc
il a fallu joiudiv cello du luocoutoutomont . il oedo avoc uno
polite uiinoomuo. qui n'ost point do la oolero, qui nost point
do la II Avour, niais lo troublo d"uuo fauto. Sos traits onf;uitins
so oontrnclont sans violoaco; il vous it^gardo , il ue ploure
point eucoro; touto son oxistonooost suspouduo ontre los lar-
nu's pres dVclatcr ot I'attonto dn sourirtMnatoruol qui s'oni-
prossoi-a do roparaitiv ot do ramouor la joio sur oo p;mviY po-
tit vis;»^o a poiuo formo . ot dojii snflisaut pour rovolor uuo
amo. L"out"ant sail done oboir ; il lo sait, dos quil so sent oxis-
tor autromontquo par desbosoinsot dos sensations physiquos.
h'/iommf «f vi't pas siniiemt'nt tie pain , I'enfant vit aussi de
synipathio. Son ;Une, dos qu'ollo a pu so fairc passage, a
(XMiuiuiniqiK- avec des otros somblablos ik bii ; il pleure, s'il est
soul, nou quil so sacho abandouno . mais parce quil est seul ;
SOS ploursappollont un visa.To ami. — 11 sora soiuiiis paroo qu il
est sociable. Pauvre petit ! Quand il se trouble d'un roijard so-
vore, ost-ct> done quil ait oprouve ce que pout ooulro lui le
ressentiuient dun eU^e plus fort .* Oil est le ui;U quil res,sent ?
II est, dans ee reijard , dausci^tle interruption momentanoe des
communications alTcctuousos, iii-jh nt^cessaires a sa jouneexis-
tonct\ Cost aiusi quun jour, dovoiui homuio, onlro on rela-
tion avec la Dlvinito, comnio leufaut avoc sa luoro, il on
rocovra la punition do sos fautos. Doii vient ootto an^oisse qui
Ta nous s;iisir, au sortir dun moment dogarenient ou de f*i-
ble.sse ? Pourqiioi cette inquietude douloiunsuse , ce profond
doconraiioineut qui se sont enipai"es de nous? Voyons-nous lit
des chatimoQS tout prets ? I.arret de la colere celeste est - il
suspondu sur notre tote ? Diou a-t-il tonno? rVon, niais il s'est
retire. "Nous sommes souls, ot nous pleurons oomiuo lonfaiit.
dolaissos vpio nous sonnuos , privos de la pioseuce paternello .
qu'avait bosoin do chorcher a chaque instant cette portion de
nous -memes qui n'a pas sa sooieto ou oo niondo. '
ET POLITIQUES. 3^5
« Ainsi, Dieu nous instiuit de sa loi; ainsi , la mere I'ap-
prend h I'enfant. Ainsi , dans I'homme, la conscience vit de la
societe immediate de Dieu : dans i'enfant , de la societe imme-
diate de ses parens , represcntans de la loi. D'abord, la sym-
pathie, I'instinct social agira seul sur ce coeur qui s'ignore; le
sourire maternel brillera pour lui, comme un rayon du soleil ;
un coup-d'ceil mecontent I'attnstera, comme robscurite. Blen-
tot, rexptrience y joindra le souvenir de I'acte reprehensible
qui le lui a attire. »
Nous DOus sommes laisses charmer a cette longue citation ,
et nous pourrions en faire beaucoup d'autres. Le cadre que
M™« Guizot a donne a son ouvrage prete a ce genre de pein-
tures oil la morale et I'observation prennent une teinte de ten-
dresse et de douceur. Tout y est ecrit avec amour; on voit
que I'auteur s'est complii dans son oeuvre , qu'il lui a confie
ses croyances, ses affections, ce qui occupe son esprit, ce qui
remplitson cceur, sa jouissance du present, son espoir del'a-
venir. II eut ete difficile peiit-etre de donner iiu caractere aussi
personnel a un livre doat la forme n'eut ete que dogmatique.
Ainsi, bien qu'on ne doive en aucuue facon, chercher un in-
teret progressif et romanesque dans cette correspondance cntre
un mari et une femme que les ciiconstances tiennent separes ,
I'observation et les preceptes s'y presentent sons une forme
vivante et animee. L'ouvrage y perd peut-etre de la niethode;
il y gagne de la clarte. En effet, la marche des idecs et des sen-
timens chez Icsenfausn'a pas ete assez generalementetudiee ;
on n'est pas assez d'accord sur les fails, pour les prendre
comme point de depart convenu. Uiie sorte de representation
draraatique, une creation de personnages est done commode
pour mieux faire comprendre les nuances delicates de la vie
enfantine.
De meme done que les principales questions de I'education
sont traitees et envisagees sous un aspect que nous avons es-
saye de montrer; de meme , les circonstances qui d'ordinaire
entourent I'enfance , les scenes qui remplissent it varient les-
journees passees au sein de la famille , les incidens qui vien-
3/. 6 SCIENCES MORALES
nont uuire on aider a I'education, sont retraces avec verite, et
c'esth leur occasion qn'artivent les preceptes et les conseils.
Autour dii Ljroiipe principal sont places d'aurresenfansct d'aii-
tres parens , de caractcres et de situations, d'opinions diverses,
aGn que rexaracn puisse cinbrasscr non-seulement les direc-
tions differentes qii'on pent donner a I'education , mais aussi
les modifications que doivcnt recevoir les principes en telle ou
telle hypothese.
La complete analyse d'un livre si plein eut et6 longue; nous
avons vonlu indiquer seulement la marche de I'auteur el sur-
tout le caractere moral de son ouvrage. C'est par-la qu'il est
frappanl et qu'il merite, nous ne dirons pas le suffrage, mais
la reconnaissance du lecteur. On se sent porte daus une at-
mosphere pure, elevee, salulaire, ou les sentimens desinte-
resses sembleut naturels et necessaires comme I'air qu'on res-
pire. Tout yest anime par le sentiment du devoir; il n'y a pas
une pensee qu'il n'ait inspiree, pas uuc ligne qu'il n'ait dictee ;
etpourtant, rien ne sent I'effort, rien ne parait commande;
tout est libre , volontaire; si bien que, tout en repoussant au
loin les frivoles doctrines de I'interet et de I'utilile, M""' Guizot
semble, sans y songer , avoir ecrit un livre sur le bonheur.
P. B.
HiSTOiRE DE Sardaigne , OU lu Sarclaigue ancienne cl
moderne^ par M. Mimaut, ancien consul de France
en Sardaigne (i).
Voyage en Sardaigne, de 1819^ iSaS, par M. le che-
valier Albert de i,a Marmora (2).
Comment se fait-il qu'une He feconde , presqu'aussi granile
que la Sicile, situee au milieu d'une mer dont les rivages
(i) Paris, 1825; Blaise et Pelicier, libraires. 3 gros vol. iii-8" ;
avec cartes et figures. Prix, 16 fr.
(2) Paris, 1825 ; Delaforest, libraire. r vol. in-8", avec atlas;
prix , f\o fr.
ET POLITIQUES. 347
sontoccupes, a quelqiies exceptions pies, par des peuples
civilises, industrieux , adonnes an commerce; qu'une lie qm
n'est separee des possessions francaises que par iin etroit canal,
soil moins bien connue peiit-etre que des lies lointaines, re-
cemment decouvertes dans la mer du Sud? Si un roi du con-
tinent neportait pas le litre de roi de Sardaigne, on trouverait
rarement le nora de cette ile dans les actes de la diplomatic;
et si des voyageurs curieux n'allaient qnelquefois -visiter les
ruines des monumens qu'y avaient eleves d'anciens peuples,
nousne saurions que parleshistoriens dela Grece etdeRome,
que ce ne fut pas toujours un pays pauvre , presque desert,
abandonne. Aussi, repeterai-je volontiers avec M. Mimaut,
quivient de publier unc Hisloire de la Sardaigne : « Toutetait
de nouveau a dire , tout est a apprendre sur un pays qui
n'est pas plus connu dans ses ciiconstances physiques et natu-
relles que dans ses relations politiques et historiques. «
Consul de France en Sardaigne, M. Mimaut devait sans
doule etudier le pays dans ses relations politiques et commer-
ciales; mais il a fait plus : il a voulu connaitre son etat phy-
sique, ses montagnes, ses fleuvcs, les diverses productions
dusol; surtout, il a cherche a decouvrir les traces des cites
antiques dont elle etait couverte,et, a I'aide des historiens et
des poetcs anciens , il a retrouve , retabli ses vieilles annales.
De la, passant a des temps moins ignores , il conduitpas a pas
son histoire jusqu'a nos jours. La place qu'il occupait lui don-
nait plus de facilites qu'a tout autre etranger, pour recueillir
les materiaux necessaires au grand travail qu'il avait entre-
pris , et qu'il a execute avec talent ct succes.
Presque en meme terns que I'ouvrage de M. Mimaut, on a
vu paraitre le premier volume d'un Voyage en Sardaigne , par
un savant Piemontais, M. de la Marmora, qui a passe plu-
sieurs annees dans cette lie , et qui y est encoie en ce moment,
dessinant ses restes d'antiquites, etudiantses productions phy-
siques, les niceurs de ses habitaus , leur industrie , etc. L'objet
des deux ouvragesest, comme on voit, parfaitenient identique.
Cependant, j'ai lieu de croire que M. de la Marmora s'occnperrt
3'i8 SCIENCES MORALES
moiiis de rhistoire politique que no I'a fait son devancier : el,
en effet, il no pourrait que presenter sous une autre forme ,
dcs tableaux qui deja ne laisscnt rien h desircr (i). Mais,
pour comparer les deux ouvrages , il faudra attendre que celui
qui paralt sous le litre dc Voyage, soit complet. Jusqu'a pre-
sent, M. de la Marmora ne donnc, dans son premier volume,
qii'un apercu assez etcndu , il est vrai, de toutcs les matieres
que contiendra son ouN'rage. C'est done sur le travail de M. Mi-
maut que je veux specialement attirer I'attention ; et jo n'aurai
recours a recrivaiu piemontais, que pourappuyer ou contre-
dire les observations de I'auteur francais.
Considerons d'abord la Sardaigne dans sa forme , dans son
^tat physique.
Cette lie, comme la plupart des pays auxquels les anciens
ont impose primitivement des noms, tire le sien ( t.int en grec
qu'en latin), de sa forme qui avait paru etre celle d'une san-
dale, dont le talon est dirige, au sud, vers la cote d'Afrique,
el la pointe, au nord, vers la Corse. En observant que la
chaine des montagnes qui commence dans cette derniere ile
continue , mais toujours en diminuant de hauteur dans toute
la longueur de la Sardaigne , on ne peut guere douter que les
deux lies n'en aient forme qu'une seule en des tems inconnus.
Le detroit dehuit milles de largeur qui les divise a sans doute
ete pi oduit pr.r quelque eruption volcanique. Cette conjecture
a d'autant plus de vraisemblance , que, dans les environs du
detroit, on reconnait, en Sardaigne, des crateres d'anciens
(i) Un secretaire particulier de S. M. le roi de Sardaigne, D. Giu-
seppe Mamno , public (^.ans ce moment , a Turin , line Uistoire de
la Sardaigne (voy. Rev. Enc, t. xxviil, cahier de novembre iSaS ,
p. 547). J'en ai eu le i^"" volume sous les yeux; et c'est, je crois ,
le seul qui ait paru. Taut que I'auteur n'aura a retracer que I'histoire
ancienue el peut-^tre encore celle du nioyen age, il ecrira, je n'en
doute point, s.dis g^iie, sans eiubarras ; mais quand il arrivcra aux
tems moderuesl... Je me defierai foajours de la veracite d'un histo-
rien qui compose dans le cabinet d'un roi.
ET POLITIQUES. 349
volcans. An reste, cette ile offre , en divers lieux , des traces
iiicontestables de volcans etcints : M. Mimaut, dans une note
de son tome 11 , dit ( page Itg'i ) : « Le sol d'aucun pays n'a etc
plus toiirmeule par les volcans , que celui de la Sardaijjne.
On en a comptc jusqu'a soixante-dia: , seulenient dans la partie
de I'oucst et du midi de cette ile. « II y a erreur dans cette
note, suivant M. de la Marmora, savaut geologue ; il a ob-
serve avec soin ces contrees, et n'y a pas trouve les traces
de plus de sept volcans. C'esl un chiffre a retrancher.
La catastrophe qui a separe la Sardaigne de la Corse, a
du etre necessairement tres-posterieure a cette autre Lien plus
etonnante sans doute, qui fit entrer sur le continent les eau.\
de I'Ocean, et forma cette nier que nous appelons Mediter-
ranee, et toutes les mers qui semblent en dependre. Les par-
ties les plus elevees du continent englouti resterent seules a
decouvert, et devinrent les nombreuses lies dont ces mers
sont parsenues.
La Sardaigne a ete , presque de tout terns, divisee, on
pourrait dire naturellement, en deux grandes parties que Ton
nomme des caps; I'un au midi, qui prend son nom de la ville
capitale , I'antique Calaris (Cagliari); I'autre , au nord, le
cap Sassari. A une distance a peu pres egale dc I'extremite de
ces deux caps et des villes dont ils portent le nom, est le golfe
d'Oristano qui lui-meme voit s'elever sur ses bords une ville
de meme nom.
Lacirconference de toute I'lle , y compris les lies adjacentes
et qui en dependent, est de 400 milles geographiques , qui
repondent a 5oo lieues marines. II est possible que cette me-
sure donnee par M. Mimaut soit, dans la suite, modifiee par
M. de la Marmora, qui leve, en ce moment, une carte de la
Sardaigne. Ce travail etait d'autant plusnecessaire que toutes
les cartes de cette ile qu'on a publiees jusqu'a ce jour, offrent
entre elles des differences notables, et sont consequemment
pour la plupart , tres-inexactes.
Passons maintenant a I'histoire du pays, en rommcncant
avec M. Mimaut, par les plus anciens terns.
35o SCIENCES MORA.LES
On ne sail pas plus d'oii venaient les premiers habitans dc
la Sardaigne, que Ton ne connait rorigine de tons les peuples
qui couvrent aiijonrd'hui les divcrses contrees dc I'Europe.
Chaque nation a dans ses fastes des tenis obscurs, des siecles
fabuleux. De vagues et incertaines traditions tiennent lieu,
pour les plus ancienncs periodes , d'annales ecrites ; mais des
nionumens de pierre, incontestabicmcnt eleves par des mains
d'homnies , prouvent du moins que dans ces lieux existaient
des populations qui n'ctaient pas entierement etrangeres aux
arts : par exemple , ces dolmen , ces pierres levees ou obe-
lisques inforraes que Ton trouve presque partout, et dont on
n'attribue I'execution aux Ccltes, que parce qu'il est penible
d'avouer qu'on ne peul decouvrir quels en sont vraiment les
auteurs.
La Sardaigne possede, plus qu'aucun autre pays, de ces
monumens dont ou ne peut deviner la destination, pas plus
que I'epoque ou ils furent eleves. M. Mimaut a consacre a leur
description imchapitre entier de son ouvrage (le chapitre vnr
du tome ii ) ; mais , je le dis a regret, je crains qu'il ne les ait
observes trop superficiellenieut , si meme il les a visiles. Voici
sur quoi je fonde mon opinion.
La description que fait M. Mimaut des JSuraghes (c'estle
nom de ces singuliers monumens que Ton rencontre en grand
nombre dans toute la Sardaigne , sur les collines comme dans
les plaines), est contraire en tout point a celle qu'en a donnee
M. de la Marmora, dans lui memoire que j'ai sous les yeux,
et ne se rapporte nullement aux dessins qu'il en a fails lui-
mcme , dit-il , a la chambre noire.
Je vais opposer I'auteur francais au voyageur piemon-
tais.
M. Mimaut, apres avoir dit que les Nuraghes sont jeles sur
toute la surface de I'ile, a des distances plus ou moins eloi-
gnees, nous les presente comme des tourelles dont la base est
fort enfoncte sous terre, et dont les plus hautes n'ont guore
plus de six a sept pieds au-dessus du niveau du sol. D'apres
cela , ce ne serait done que des cspcces de fouis qui meri-
ET POLITIQUES. 35 1
teraient a peine I'attention du voyageur , encore moius de
I'antiqiiaire.
Mais M. de la Marmora en fait, an contraire, de tres-
grands monumens de forme conique , poses siir une base de
plus de quarante pieds de circonference, et qui s'elevent souvent
au-dessus du sol de plus de dix-sept metres [cinquante-trois
pieds), sans compter I'etage qui terminait le comble, et dont
on ne trouve jamais que des vestiges.
M. Mimaut dit que Us pierres des Nuraghes sont des poly-
gones irreguliers ; M. de la Marmora, que ce sont de gros
blocs regulieis et poses par assises horizontales. M. Mimaut
place I'ouverture de ces monumens dans leur parde supe-
rieure ; M. de la Marmora assure qu'ille est h la base menie
sur le sol ; que dans les Nuraghes des contrees meridionales
de I'lle, on peut enlrer debout, et que dans les Nuraghes
des contrees septentrionales , on ne peut cntrer qu'en rampant.
M. Mimaut n'a vu dans I'interieur que de petites chambres ou
cellules ; M. de la Marmora y a trouve a chaque etage une
grande salle de forme conique, sans aucune division, niais
dans les murs de laquelle sont pratiques des renfoncemens ,
des especes de niches. II ajoute que , pi'es de I'entree de la
salle du rez-de-chaussee , s'ouvre , dans I'inlerieur des murs ,
une rampe en spirale qui conduit aux etages superieurs.
On voit combien ces descriptions different entre elles. Je
ctois qu'il faut s'en rappcrter de preference a celJe de M. de
la Marmora , qui a parcouru tout le pays , et y a passe plu-
sieurs annees; qui a explore avec soin, dessine et mesure
plusieurs fois des Nuraghes , tant an midi qu'au nord de la
Sardaigne.
II serait trop long de rapporter toutes les opinions diverses
qu'on a emises sur I'usage de ces singuliers moiuimens. Les
uns les out regardes comme des monumens ante-diluviens;
d'autres comme des vedetes ou lieux d'observation ; d'autres,
comme des a^les que se preparaient les anciens habitans contre
les excursions des pirates. L'opinion la plus admissible, selon
moi , est qu'il ne faut voir dans les Nuraghes que des lienx
■^'i'i SCIENCES MORALES
de sepulture. En effet, leur forme rappelle celle des pyra-
mides d'lilgypte , qui n'etaient qr.e des tombeaux. Au reste,
on trouve des monuinens h peu pies scmblables dans les iles
Baleares. Je serais lente d'en attribuer la construction aux
antiques Pclasges , penple qu'on ne connait guere , il est
vrai, que de nom, mais qui, d'apres les traditions recueillies
par les plus ancieus historiens, furent les premiers habitans
de la Grece, et envoyerent des colonies non-seulement en
Italie, mais dans presque toutes les Jlcs de la Mediterranee.
Mais, ce que n'ont point remarque les deux auteurs dont
nous examinons en ce moment les ouvrages , c'est qu'on voit ,
meme en Amerique , d'anciens monumens, qui ressemblent,
on ne peut plus , aux Nuraghes de la Sardaigne. Ecoutons ce
que dit I'exact et savant observateur, 31. de Humboldt, d'une
espece de monumens que Ton trouve dans les Cordilieres, et
qu'il nomnie des tumulus.
" La base des tumulus est ronde ou de forme ovale : ils
sont gcneralenient coniques, quelquefois aplatis au sommet,
comme pour servir aux sacrifices ou a d'autres ceremonies
qui doivent etre vues par une grande masse de peuple a ia
fois. » {^Vues des Cordilieres , par M. de Humboldt.)
Et voici , en abrege , ce qu'il ajoute 5 la description des
tumulus : « Il y en a de deux et trois etages, et qui rappellent
par leur forme, les teocallis mexicains, et les pyramides ^
gradins de I'Egypte et de I'Asie occidentale. Les tumulus sont
construits, partie en terre et partie en pierres jetees les unes
sur les autres. On y a trouve des baches, de la faience peinte,
des vases et des ornemens de cuivre, un peu de fer, de I'ar-
gent en plaques, et peut-etre de I'or. » Dans ies tumulus ou
Nuraghes de Sardaigne, on a trouve aussi des amies , et quei-
ques figurines en bronze, de style etrusquc; mais il est
k croire que ces objels y avaient et6 deposes dans des terns
bien posterieurs a leur construction.
Ces rapports, ces ressemblances enfre des monumens eleves
a de si grandes distances , en divers conlinens, separes entre
eux par d'immensesmers, font naitrede graves ot iniportantes
ET POLITIQUES. 35i
reflexions; mais ce n'est point ici le lieu de s'y livrcr : d'ail-
leurs, en pareille matiere , on doit loujours craindre de laisser
prendre trop d'cssor a I'imagination.
Apres avoir parcouru rapidement les terns qu'on pent ap-
peler tenebreux de I'histoire de la Sardaigne, M. Mimaiit
ofli-e un tableau succinct, mais interessant, des vicissitudes
di verses qu'eile a subies, a dater des premiers terns histo-
riques jusqu'a nos jours.
II n'est point de pays au monde qui ait ete soumis a autant
de maitres. Apres les invasions ou plutot I'etablissement des
Pelasges dans I'lle (si toulefois on adopte I'opinion que j'ai
emise, il n'y a qu'un moment , et qui m'est particuliere), on
la trouve occupee par des Grecs , ensuite par des Troyens ,
enfin par des Carthaginois. Placee a peu de distance des cotes
d'Afrique, elle ctait pour ce dernier jjcuple tres-adonne au
commerce, d'un immense avantage.,Aussi, des le terns oil les
Tarquins regriaient a Rome , les Carthaginois possedaient les
plus belles parties de la Sardaigne. lis etaient mailres du golfe
do Cagliari, et rebatirent, s'ils ne fonderent la ville de ce
nom. Mais en vain tenterent- ils a plusieurs reprises de sou-
mettre I'lle entiere : les anciens habitans, refugies dans des
montagnes inaccessibles , non-seulement leur resistercnt, mais
ne cesserent de ravager par de freqiientes inclusions les terres
qu'ils cultivaient, les villes , les villages qu'ils entreprenaicnt
d'elever.
I.es Romains voulurent a leur tour posseder la Sardaigne.
Pour s'y maintenir il leur fallut livrer de grands combats;
mais on ne pouvait long-temps resister a ces favoris du dieu
de la guerre. Cefte ile fut pour euxuneimportante possession :
comme la fertile i:gypte, la Sardaigne, devint un des greniers
de Rome. La periodo assez jongue de la domination de ces
niaitres du monde fut , pour le peuple sarde, la moins malheu-
reuse de toutes celles qui I'avaient precedee. Sans doute ,
d'avides preteurs le foulaient, le pressuraient , lui enlevaient
une grande partie des fruits de ses travaux ; mais il jouissait
do quelques droits, de quelque liberie : il pouvait elever des
T. XXXI. — .'lout iSaH. 23
354 SCIENCES MORALES
plaintes ; ct, lorsque Ics rapines, Ics concussions etaient Irop
revoltanles , il obtenait justice. D'ailleurs, ccs Romains, ces
maitres si fiers ct si rapaccs , n'etaient pas moins avides de
plaisirs que de richesses : lis portereut dans ces contrees
jusqiics-la demi-sauvagcs, leiirs arts et leurs goi'ifs. On voit
encore, sur tonte la surface de I'lle, les riiiiies des aqiiedncs,
des somptueuses w7/«, des temples, des amphitheatres qn'its
y ont cleves. L'lle fut bientot coiiverte de villes, de i;ros
villages qui leur durent Icur fondation. M. Miiuaiit a recherche
et fixe avcc beaucoup de sagacite, d'aprcs les anciens histo-
riens et geographes , remplacemont de la ])liipnrt de ces cites
Tomaines, dont on porte le nombre jusqu'a qiiaranle cinq ,
mais dont on ne connait que les nonis , car elles u'ont guere
laisse dc traces. Ce travail Ini fait hoiincur : je n'ai qu'nn
regret: c'est qu'apres avoir pr'S tant de peine a retrouvcr,
pour ainsi dire, la Sardaignc des Romains , il ait neglige do
consigner et de presenter aux ycux , dans une carte speciale,
ses conjectures ou jjUitot ses decouveites ; les eriulits lui en
auraient su gre.
Le repos, je no dis pas le bonheur, dont jouit la Sardaignc
sous les enipereurs romains , fut trouble, comme dans le reste
du monde , par I'apparition dii christianisme. La lutte entre
cette nouvelle religion et lancienne que les premiers empe-
reurs croyaient sage et politique de proteger, fut terrible,
mais, a ce qii'il sembie, asscz coiute. Le chrislianisnie triompha,
comme ailleurs, au milieu du sang ct des larmes.
Le spectacle du monde, dans ic moyen age ou nous en-
trons avec I'historien de la Sardaignc , a quelque chose de si
triste, de si rebulant , (|u'on ne pent y arreter long-tems les
regards. Qu'il suffise d'observer que, jusqiu-s en Sardaignc,
divcrses sectes , qui etaient nees presqiie toutes avec le chris-
tianisme meme, continnen^nl les massacres que son etablisse-
mcnt avait commences. On se battit, on se lua pour des chi-
meres , pour d'ininteliigibles propositifuis; et , comme dit
M. Mimaut, « des heresies multipliees, attaquees et defendues
les armes a la main, produisaient d'affreux dechiremens, et ne
ET POLITIQUES. 355
fireiit pas repandic moins de sang quu la lutte du chrislianisme
et de I'idoldtrie. »
La Sardaigne partagea tons les desastrcs dc TeHipire ro-
raain , qui s'ecroulait de toutes parts. Les Vandalcs la prirent,
!a perdirent, la reprirent, et enfin en fiirent chasses. Les
Golhs s'en rendirent maitres ; les Lombards y firont des
irruptions ; et ensuite, reiiniique Narses, ayant chasse de I'lle
les barbares qui s'y succedaient, s'y renouvelaient sans cesse;
elle rentra sous la domination des emperours d'Orient.
Mais les Maures ou Sarrasins, qui avaient ravage les rives
de la Mediterranee , ne pouvaient oublier la Sardaigne. Ces
brillans et iutrepides aventuriers s'y presenterent avec de
grandes forces; les Sardes se defendirent avec opiniafrete :
voyant qu'ils n'etaient point secourus par leurs souverains
legitimes , les empereurs d'Orient , ils s'offrircnt a Louis-le-
Debonnaire, empereur ot roi de France. I! uccepta avec joie
ce nouveau domaine, et fit, pour cxpuher les Sarrasins,
quelques tentatives qui n'eurent aucun siicces.
Les Genois et les Pisans s'linirent alors pour dt'livrer la Sar-
daigne , toujours soumise aux Maures , et ils y reussirenf.
Apres la victoire , ils songerent a en partager le fruit. Les
Genois se conlenterent d'une indemnite pecuniaire; les Pisans
garderent I'lle. Ce furent eux, a ce qu'il parait, qui la divi-
serent en quatre principautes ovijudicals. L'existence de ces
judicats a cteassez longue : institues vers le milieu du xi^ siecle,
on les retrouve encore dans le xv^ : on a les noms et Ton con-
nalt les principales actions de presque tous les princes qui ont
regne (car ils prcnaienl le titre de rois) dans les quatre ju-
dicats ou provinces de la Sardaigne. Mais, souventdivises entre
eux, ils ravagerent leurs petits elats, et quoiqu'ils fiissent sous
la dependance de la republique de Pise, on les vit plusd'uue
fois tourner leurs armes contre les Pisans, et se joindre contre
eux aux Genois. Ce sont lu les rcsullats ordinaires du regime
feodal , partout ou il est etabli. Or, ceijugcs , ou princes, en
Sardaigne, n'etaient ail tics que de grands vassaux , qui avaient
au dessoas d'etix des arrijre-vassaux ; et le reste de la nation
356 SCIENCES MORALES
n'etait qu'im anias de serfs obliges de travaillcr sans cesse on
de se battre pour leurs inaitres.
Oq ne peut s'attcndre a trouver dans un article (\m ne
doit pas s'etendre an dela de certaines bornes, des details sur
cette partie do I'liistoire de la Sardaigne. Les Icctenis qui
voudraient counaitre plus particulicrement tous cos tyrans,
jiisqu'ici presque ignores , d'un pays oublie lui - memo ou
dodaigne des historiens, reeourront il'ouvrage de M. Mimaut
qui a fait, pour les tirer de I'obscurite, de grandes et penibles
recherches. Dans cette galeric de personnages assez insigni-
liaiis , deux Ggures ressortent et excitent lui veritable interet :
ce sent un certain Hugues IV, jpge A'Arboree ( un des plus
importans judicats de la Sardaigne ) , et sa sceur Eleonore, qui
lui succeda.
Ce juge fut un des plus acharnes ennemis de la maison
d'Aragon , a laquelle un pape avait bien donne I'iuvestiture
de I'lle, mais non la possession; car il fallait I'enlever aux
Pisans , et, ce qui etait plus difficile encore, auxjuges qui
se I'etaient a pcu pres appropriec (i). M. Mimaut a Irouve,
dans les manuscrits de la bibliotheque du Roi , la relation
d'une ambassade envoyce a Hugues IV par le due d'Anjou,
qui rechcrchait son alliance, afin de faire la guerre avec plus
de succes au roi d'Aragon. Ce fait historique, a peu pres in-
connu , offre de I'interet : la politique astucieuse du due d'An-
(i) Presque de tout tems, les papes avaient eleve des pretentions
sur la Sardaigne; et cela, par une consequence de la doctrine etablie
par Hildebrand ( Gregoire VII) que , Dieu ayant sounds la puissance
temporelle a la puissance spirituelle, les papes devaient necessaire-
ment avoir la suzerainete de tous les trones et de tous les e!ats du
moade entier. Boniface VIII trouva , en 1297 , une occasion de faire
de ce principe nne application speciale a la Sardaigne. Les Pisans
n'etant plus ni assez puissans ni assez forts pour d^fendre leurs droits
sur I'lIe , le pape en donna I'investiture a Jacques d'Aragon, qui
sengagea, en revanche, a aider le saint-siege a depouiller Frederic,
roi de Siclle. Et ce Frederic etait le frcre de Jacques d'Aragon !
ET POLITIQUES. 357
jou echou.i devant I'apre franchise du juge d'Arboree. Mais
cethomnie, d'un si grand caractere, etait aussi un tyran qui
devint insupportable aux Sardes , ses sujcts. lis Ic massa-
crerent , ainsi que sa fille unique, et voulurent fonder un elat
rupublicain.
Mais Hugues avail une soeur, femme d'un Doria , due de
Monteleone , qui resolut de venger la niort de son frere. C'etait
une femme de beaucoup de tete et d'un grand courage. Eleo-
nore (c'est ainsi qu'ellc s'appelait ) passa en Sardaigne a la
tete d'use petite armee qu'elle commandait lUe-nieme, et
conquit, prosque sans opposition, les etats de son frere. Apres
avoir fait proclamer son fils aine Frederic heritier de la prin-
cipaute, elle gouverna en son nom avec tant de sagesse el de
douceur qu'elle n'eut plus dans tons ses etats que des sujets fi-
deles etdevoues. Onlui doit im code deloisconnu sous le nomde
Carta di Logii , qtie la Sardaigne entiere adopta, i-t qui y est
encore en vigueur. Ce Code est date des dernieres annees du
xiv^ siecle ; et, conime dit M. Miniaut, « quoiqu'il offrc dans
plusieurs de ses dispositions I'empreinte trop marquee de
I'ignorance et de la barbarie du terns , on ne peul contester a
son auteur le merite d'y avoir montre presque partout une
haute sagesse, Tamour de la justice, le respect de la propriete,
et surlout d'avoir concu la noble pensce d'ameliorcr le sort de
I'espece humaine, et de faire regner la clcmence et la pais ,
a une epoque de folies , de crimes et de ferocite. « L'historien
s'etend beaucoup sur ce Code. En trois differcns chapitres,
il en cite textuellement ?c preambule , extrait et commenle
ses principaux articles. On voit la une nouvelle preuve du
soin qu'il a mis a rassembler et a mettre en oeuvre tout ce
qu'il a pu trouver de materiaux utiles.
Celte principaute d'Arboree ne fut pas possedee long-tems
par le successeur d'Eleonore; il mourut sans enfans : un des-
cendant d'une soeur d'Eleonore, le vicomte de Narbonne, et
ensuite son frere uterin , Pierre de Tinieres , seigneur d'Ap-
chon , pretendirent a cette riche succession. Mais les rois
d Aragon la revendiquaient aussi ; et dc simples seigneurs ne
yj$ SCIENCES MOUALK.S
ponvaient lutter qii'avec dcsavantaj;e contre d'aussi puissan.4
pi inces. Lc sire do Tiniercs se crut trop heureux de vendre an
roi d'Aragon ses droits h la principaute d'Arboree. « Ccttc
espece de marche etait alors fort usitee, observe M. Miinaut ;
on vendait Ics pciiplcs conime dns troupcaux, ct les etats
comme des mcLaicics. Ccs bizarres contrats ne deshonoiaicnt
ni le vcndcur ni le clialand. » II me semble que rien n'est
change a cet egard ; commc alors, on vend, on echange au-
jourd'hui les pcuples comme des troupeaux , les etats comme
des metairies. N'avons-nous pas vu tout recemment un celebre
congres adjuger des repiibliques i\ des monarques ; retran-
cher telle ou telle partie d'un antique royaume pour en agran-
dir d'autres ? et cerles , avant de disposer ainsi des peuples ,
on ne leur avail pas demande leur avis ; on n'avail pas obtcnu
leur consentement.
La domination aragonaise ne fut pas funeste a la Sardaigne.
Presque toujours , il est vrai , cette ile ne fut gouvernee que
par des vice-rois, qui, souverains d'un moment, ne songeaient
guere a lui procurer une prosperite durable, fliais , graces ;\
quelques rois plus sages, plus bicnveillans, parnii lesqiiels il
faut compter don Pedre IV et Alphonse V, son administration
interieure s'ameliora. Les institutions qu'elle re<^ut d'eux furent
confoimes ii celles de I'Aragon. Elle cut des Cortes , jouit
d'un regime constitutionnel, ce qui releva les Sardes a leurs
propres veux. Le systeme representatif que Ton fondait en
Sardaigne existait depuis long-tems dans les Espagnes. « Ce
systeme, comme I'observe M. Mimaut, etait une doctrine
re9ue et comme une religion politique chez les diverses nations
de la peninsule espagnole , qui, avant ravenement de la mo-
narchic autrichienne , ne concevaient pas meme qu'il put exis-
ter un autre mode de gouvernement, et pour qui le pouvoir
absolu , objet d'horreur et de mepcis , etait mis au rang des
absurdites humaines. Les Goths , si calomnies par I'ignorance
et les prejuges , furent les veritables fondateurs du gouverne-
ment representatif en Espagne , et par suite dans tout le resfe
de VEurope. » En lisant ceci , on ne manquera point de fair*
ET POLITIQUES. 351)
une asscz douloureuse observation : cV-.sl que, dans ce pays
ou , nicnie au xv^ siccle , on legardait le gouvernement
representatif conime le nicilleur des gouvernemens , le seul
convenable pour un peuple qui sent sa dignite et connait ses
droits ; en Espagne , (lis je , et au xix^ siecle , la population
presque entiere , aveuglee par des prctres, ne vent que des
rois absolus , reclame pourcux, ou plulot ])our I'eglise qui
domine les rois, un despotisme sans bornes.
Depuis i355,epoquederetablisscmentd'un gouvernement a
peu presrepresentatifenSardaigne.jiisqu'a la guerre dc la succes-
sion d'Espagnc, les Cortes dc laSardaigncne cessercntdese reu-
nir. Siellesnepurent faire, pour la prosperite du pays, tout ce
qu'on doit attendre d'une asseinblee vraiment nalionale, elles
empecherent du moins bien des maux, et s'opposerent souvent
aux abusives pretentions, aux exactions des \ice-ruis. M. Mi-
maut donnc, a la fin de son premier volume, un precis tres-
bien fail de leurs sessions successivcs en Sardaigne, jusqu'en
1700 oil un Bourbon fut appele au trone d'Espagne.
Cet evenement, comme on sait , mit en feu I'Europe en-
tiere : M. Mimaut a cru dcvoii- offrir a ses Iccteurs le recit des
guerres longues et desaitreuses et des intrigues diploniatiques
decptte deplorable periode, pendant laqnelle tous les peuples
de I'Europe eurent lant a soiiffrir. Peut-etre etait-ce un hors-
d'oeuvre dans son ouvrage , puisque la Sardaigne , en lout cela ,
ne joua qu'un role tres-secondaire , et purement passif. Mais
on le suit volontiers dans cette digression ; car il est parvenu
a eclaircir des fails qui paraissaient obscurs , meme a en citer
de nouveaux qui avaient echappe aux nombreux historiens
des troubles de I'Europe au commencement du dix-huitieme
siecle.
Les traites qui terminerent ces longs troubles, tirent passer
la Sardaigne dans les mains de rempereur qui , en echange de
la Sicile , la remit immediatement au due de Savoie, et cettc
nouvelle possession valut au due le litre de roi. C'etail la I'in-
demnite qu'on lui accordait pour la perte qu'il eprouvail dans
I'echange.
33o SCIENCES MORALES
La maison de Savoie est restee depiiis ce terns en posses-
sion de la Sardaigne. Cette maison parut d'abord aniinee
dii desir de donner tons ses soins a iin pays qui la faisait
entrer dans la classe des maisons royales. Charles-Emmanuel,
qui eut le bonheur de trouver un habile et excellent ministre,
gratifia les Sardes, ses nouveaux sujels, d'assez bonnes insti-
tutions, et fonda d'utiles etablissemens. Mais, sous son suc-
cesseur, la Sardaigne vit reparaitre tons les anciens abus dont
elle avail eu si long-tems a souffrir. Ce ne fut guure qu'une
colonic du Piemont. Tous les principaux emplois de I'admi-
nistration y furent exclusivement exerces par d'avides Pie-
montais.
Lorsque, dans ces derniers tems, cette famille de Savoie,
chassee de ses etats du continent par les Fiancais, vint cher-
cher un asile en Sardaigne, on dut croire qu'elle n'allait s'oc-
cuper que des moyens d'enrichir, d'embellir, de rendre heii-
reux enfin le petit royaume que la Providence lui avait reserve.
II n'en fut rien. Les Piemontais qui avaicnt suivi la cour dans
son.exil, s'appliquerent aentretenir les monarques dans une
grande defiance de la fidelite des Sardes. C'etait un moyen
de continuer a les exclure de toutes les hautes places a la
cour, et de tous les emplois lucratifs. Les preventions qu'ils
jnspiraient contre les Sardes n'etaient pas, il faut !e dire,
sans quelque fondement. En effet , peu s'en etait fallu ,
en 1794 J que la Sardaigne n'echappat a la domination pie-
niontaise. Les idees de liberte avaient penetre dans cette
lie , une insurrection avait eclate ; on avait redemande , les
armes a la main, d'antiques privileges. Le souvenir de cette
recente revolution qu'on etait parvenu a eteindre , en faisant
des promesses , en prenant des engagemens qu'on avait rompus
apres I'orage; ce souvenir, dis-je , alarmait les souverains, et
les disposait a eloigner les Sardes de leur coeur conime de
leur cour.
M. Mimaut glisse assez rapidement sur les dernieres annees
de I'histoire de la Sardaigne. Est-ce prudence ? ou n'avait-il
rien d'important a dire? Comme il montre dans tout son ou-
ET POLITIQUES. 3Gi
viage assez d'iudependance , je suis porte k croire que, s'il a
peu parle, ce n'ost point par exces de circonspection.
Maintenant, on deniandeia peiit-etre si dcs terns plus heu-
reux se preparent pom- la Saidaignc , si plus de prosperile
I'attend? Non. la Satdaigne continuoia d'etre pauvre, oubliee;
les arts, le commerce n'y fleuriront point; la feodalitc la re-
tiendra sous son joug honteux, plus long- terns que tout autre
pays de I'Europe, et ses grands feudalaires iront toujours
consommer sur le continent, a Turin, les produits de leuis
inimenses possessions.
Si une grande nation, une nation libre , active, qui aurait
de grandes relations conmierciales dans toutes les parties du
nionde , possedait cette Sardaigne si heureusement situee pres
de I'Afriqtie et de I'Asie, dont les montagncs recelent dc riches
mines de toute espece, dont les plaines sout si fertilcs, comme
ce pays, aujourd'hui si miserable, jouerait bientot un role im-
portant! comme ils'elevcraitrapidementa cette prosperite dont
il a joui sous les anciens Romains ! Les Francais , en 1793,
voulurent s'en emparcr; mais une affreuse tempete tit echouer
leur entreprisc ; ce fut un malheur pour eux, moins encore
que pour I'Jle.
Lorsque , tout recemment , on a si liberalement donne toute
une repubiiquc au roi du Piemont, n'ainait-on j)u lui oter la
Sardaigne , et la cedcr a cette France a qui roii arrachait la
Belgique , et meme quel(|ues parties dc .son ancien territoire?
Les Anglais avaient deja Malte; iis se f'aisaicnt adjuger le
protectonit Aes ties loniennes; mais ils ii'auraient pas souffert
que les Francais possedassent une ile de plus dans la Medi-
terranee.
En terminanl cet article, je reviens a M. Mimaut. Il ne s'est
point contente de tracer I'histoire de la Sardaigne; ii a donne
sur les moeurs, I'industiie , le commerce de ses liabitans des
details tres-interessans. Mais, comme M. de la ]Marmora,qui
a fait dans I'lie un bien plus long sejour, comple s'occuper
specialement des mceurs , des usages, de la langue, et mcmc
36 i SCIENCES MORALES ET POLITIQUES.
des costiimes des Sardes, les lecteurs qui pounaieiit desircr,
sur tous ces objets, des notions completes, feront I)ien d'at-
lendrc la jmblication des autres volumes que pioniet le voya-
geur piemontais.
L'ouvrage de M. Mimaut est ecrit avec une clarte , une cor-
rection vraiment remarquables. On ne saurait trop applaudir
a sa metliode , i I'ordre qu'il a suivl dans la nai ration des
faits , qui sous sa plume s'enchainent sans confusion. II no
craint point d'emettre son opinion sur certains cvenemens et
certains personnages; et il I'appuie , de raisonnemens sages
et judicieux. Enfiu , il me parait qu'en ecrivant I'histoire, il a
pris M. dc Sismondi pour modele ; il n'en pouvait choisir un
meilleur.
Jmaury Duval, de I'lnstitut.
LITTERATURE.
Memoires inedits de M"^ la Comtesse de Genlis, sur
le dix-huitieme siecle et la revolution francaiae, de'
puis I'j^Sjusqua no s jours (i).
C'est line chose bien ocHeusc que ces libellcs pseudonymes,
dans lesquels la calomnie contrefait la voix des niorts pour
micnx diffamer les vivans. II semblerait que de tels ecrits ne
peuvent ctie inspires que par les passions les plus furieuses.
Ccpendant, qu'on y regarde de pres, la plupart n'ont ete
dictes que par le mobile commun de presque toutes les bas-
sesses humaines, la soif du gain. lis ont toujours abonde, a la
suite des grandes crises politiques; ils fourmillent, ils devaient
fourmiller dans un siecle a la fois hypocrite et venal. Les Me-
moires supposes se sont enfin multiplies avec une profusion
tellement scandaleuse qn'ils ont fini par discrediter tout te-
moignage posthume : I'homme d'honneur qui avait des revela-
tions a faire , a pu craindre d'etre confondu avec ces archivistes
du mensonge , s'il ne parlait qu'apres sa mort; et les appre-
hensions en sont venues au point de forcer la modestie meme
des dames a imprimer leur vie de leur vivant.
C'est I'exemple que vient de donner M™« la comtesse de
Genlis : et , s'il y a dans sa resolution de la franchise, il y a
du courage aussi. Une existence qui a offert des singularites
brillantes , a du faire des envieux , et rencontrer des persiffleurs.
De plus, il est demontre que Ton n'est pas sans ennemis, lors-
qu'on a eu des admirateurs sans uombre. C'etaitla nn double
danger. Aussi, quand M™^ de Genlis fit connaitre I'intention de
Paris; i8a5; Ladvocat et Baudouin frferes. 8 vol. in-8° ; prix,
64 fr.
364 LITTERATURE.
publier ses fllemoires sur Ic xviii^ siccle et siir la revolution
Jrancaise , s'eleva-t-il beauconp de clameurs. Un prospectus
avait annonlc son livrc comine ronvrai;c qui devait tenir la
place la plus esseiiticlle (je tianscris) entre les Mcmoires sur
I'Histoire de France publics par M. Petitot , et les Memoires
sur la rei'otutionfrancaise publics par MM. Berville et Barriere.
Parmi les lectcurs du prospectus, les uns, qui prenaient au
serieux la premiere raoitie du litre, s'atteiidaierit a trouver
dans le livrc une guerre acharnee conlre la philosophic et bon
nombre d'injures cdilianles ; ils se faisaient d'avance un malin
plaisir d'opposcr a tant de morale ^e ne sais quclles peintiires
un pen vives dans les Chevaliers du Cygne , qu'on ne vend plus
iParis, lels qu'ils parurent i Hambourg. D'autres, quivoyaient
venir de furieuses altaques contre la Revolution , tenaient deja
sous le manteau, comma pieces de confrontation , i°, un ecrit
de 1796, ayant pour \\tve: Precis de ma conduite, et renfer-
mant, en ternies cxpres, cette profession de foi : Les Fran-
cais seraient le dernier pcuple de la terre s'ils renoncaient Ic-
gerement a la Republique ; 1" , une lettre de quinze pages ,
adressee, vers la meme epoque, a un auguste oleve, pour le
dissuader d'accepter la couronne , si jamais elle lui etait offertc;
attendu que la Republique paraissait se fonder sur les bases
solidcs de la morale et de Injustice,
Qu'est-il ariive ccpendant ? Les Memoires de mndamc de
Genlis sur le xviii* siecle et la revolution francaise onL paru :
on y a cherche la Revolution, ouy a elierche le xviii" siecle;
on n'y a trouve que madanie de Genlis. Les epilogueurs en
ont ete pour leurs peines : on avait eu la malice de tromper
toutes leurs craintes.
Un autre desappointement atiendait ceux qui croyaient que
ces Memoires ailaient etre des confessions. M™*^ de Genlis ne
s'est point engagec a conter toute son histoire ; elle le declare
formellement dans son second volume, et des lecteurs altentifs
I'avaient pu voir des le premier. Aussi, a-t-on annoncequelque
part la prochaine apparition d'autres Memoires, composes des
reticences de M""'' de Genlis, C'est une plaisanterie, j'ainie a le
LITT^RATURE." ■'>G5
croire. En tout cas, fut-il ccilaiu( ce que je suis loin cle pcnser),
qu'en publiant une partle de sa vie , une femme donne au
public le droitdefouillerdaris tout le reste, j'avoue qu'exeiccr
un tel droit ne me conviendrait pas du tout; et que celle
espece de visite domiciliaire avec effet retroactif, serait une
chose odieuse. Heureusement, n'est-ce pas le moins du monde
ce que j'ai a faire ici. Je vais done, sans demander compte a
M""" de Genlis de ce qu'elle a pu vouloir taire, rendre compte
de ce qu'elle a dit.
Si presque toutes les fenilles quotidiennes n'avaient pas deja
pris plaisir a repeter , comme de concert, tant de jolis petils
details sur I'enfance de I'auteur qui remplissent les soixante
premieres pages du livre, il auraitpu m'arriver de m'y arreter
avec complaisance; car, c'est bien certainement la partie la
plus amusante de ces Memoires. On aurait vu M""^ de Genlis,
d'abord M"'' Ducrest , puis Ducrest de Saint-Aubin , nee
le 23 Janvier 1746, a Champceri , petite terre pies d'Autun,
devenir, des sa sixieme annee, chanoinesse du noble chapitre
d'Alix, en mcme terns qu'un de ses freres, n'ayant pas encore
un an, etait iait c/ievalier de Malte ; car c'etait alnsiqualors
on disposa'u de la destinee de ses enfans , un pen legerement ,
ilfaut en convenir. On aurait vu comment M. de Saint-Aubin,
fort occupe de chasses a la pipee, et M'^'^ de Saint-Aubin, dont
tout le terns etait pris par des visiles a recevoir ou a rendre,
abandonnerent, pendant sept ans, le soin d'elever leur fille
a des femmes-de-chambre, tres-bonnes personnes d'ailleurs,
mais qui remplirent sa jeune tete d'histoires de revenans :
comment, parvenue a sa septieme annee, elle fut raise sous la
conduite de M"" de Mars (fille d'un organiste de Vannes),
qui, seule chargce de ses etudes, lui fit etudier, en effet, le
le catechisme, nn abrcge historique du jesuite Buffier, le
Theatre de M"' Barbier, la Clelie ; et comment ces etudes
ayant developpe la double vocation que M"'^ de Genlis devait
suivre plus tard avec tant de succes et de perseverance , elle
fesait , des I'age de huit ans , des romans , des comedies , et, de
plus, donnait des lecons aux pctits enfans du village, rassem-
366 LiTTtRATURE.
bles pour I'ecoutei' sous la lerrasse du chateau, d'ou clle Irur
jetait dos galettcs. Enfin, Ton aurait vu la jcunc chanoinesse ,
qui suivait Ics processions de la Fete-Dieu, habilloe en ange,
joucr dans dcs prologues de comedie un role A' Amour , avcc
un hiihlt r.ouleur de. rose... de pctites boUines couleur de paille
et argent... ct des ailes bleues ; conserver hors de la scene
ce costume, qui lui allait si bien qu'on le Xm^i porter d'ha^
bitude ; avoir son habit d' Amour pour les jour.i om>riers et son
habit d'Ar-nour des dimanchcs ; puis, s'en aller journellcnient
promener dans la campagne avec tout son attirail d' Amour, un
carquois sur Tepaule, et son arc a la main : do tout quoi Ton
aurait pu conclure , avec M""= de Genlis, que cetle education
singulicrc (qu'au reste, clle avait dejii pcinte dans I'histoire
de la comtesse de Rosmond des Meres rivales), dut produire
dans son imagination et dans son caracterc un melange a la
fois religieux et lomanesque , dont on ne trouve que trop de
traces dans la plus grande partie de ses ouvrages.
Tout cela, quoique original et meme divertissant , est, il
faut le dire , un pen long et passablement futile. C'est done
sans trop de regret qu'abandonnant les details sur celte partie
des Memoires aux critiques qui m'ont d,evancc, je me hate
d'arriver a I'epoqne oii la comtesse de Lancy (nom de M"^ de
Saint- Aubin, depuis sa reception au chapitre d'Alix), vient
se fixer a Paris , et ou nous allons cnfin rencontrer quelques
personnages plus connus que ses cloves de Bourgogne.
Le premier qui sc prescnte est ce La Popliniere, le plusce-
lebre des fermiers generaux par son faste, son gout pour les
arts et ses disgraces maritales. M"® de Genlis le peint comrae
un homme de bcaucoup d'esprit, d'un caractere doux et facile;
bon maitre, bon parent, ami fidele et tendrc, possedant, en
, \mmot, toutes les vertus domestiqnes: et, sur ce point, tout le
monde est d'accord avec M'"^ de Genlis. Elle ne fait aussi qu'a-
jouter une voix distinguee a la foule des temoignages contcm-
poraius,. quand clle nous montre cet homme sur lequel la
moqueric pendant plus de trentc ansfut, dit elle , incpuisable ,
faisant un bien infini dans sa tcrre de Passy, mariantet dolaut
I
LITTERATURE. 36?
chaque annee six pauvres lilies, repandant d'abondantes au-
inones dans les families indigentes, et donnant du travail aux
ouvriers; tenant un f;rand etal de maison sans avoir fait jamais
aucune dette; recevant beaucoup de monde, et tres-bonne
conipagnie ; aimant passionneiiient In litterature , Ics arts el les
talens. Jiisqu'ici, pas \\n trait qui ne soit fidele, a tel point
qii'on poLirrait les retrouvcr tons dans les Memoires deja pu-
blics sur cette epoque, comme je m'en suis assure. Marmontel,
entre autres, nous fait voir, non-seiilement la meillenre com-
pagnif , mais la plus haute noblesse et les arnbassadeurs de
TEurope, reunis aux soupers et aux spectacles de M. de La
Popliniere. Puis , il ajoute : « Le niaitre de la maison en faisait
les honneurs en liomme qui avail pris dans le monde le senti-
ment des convenances... dont I'orgueil memesavait s'envelop-
per de politesse et de modestie , et qui , dans les respects qu'il
rendait aux grands , ne laissait/?«j de garder encore un certain
air de civilite libre et simple qui lui allait bien... personne ,
quand il voulait plaire , n'etait plus aimable que lui. II avail de
I'esprit, de la galanlcrie, ctsans aucime elude, ni beaucoup de
culture, assez de talent pour les vers. » Voila qui acheve le
portrait a merveille, et je crois avoir donne une singuliere
preuve de sa ressemblance, en le faisant ainsi terminer par un
autre peinire, sans qu'il ful possible dc s'apercevoir que la
main qui tenail le crayon avail change.
Mais, pourquoi M"' de Genlis, a qui Ton eut passe sans
mot dire , de vanter serieusement la sobrietc d'un fermier ge-
neral, veut-elle aussi lui faire honneur de cerlaine temperance
qui parait n'avoir pas etc toujours une vertu? Quand e!le vient
affirmer quil avail les mceurs les plus pares , la conduite laplus
decente et la plus reguliere , ne craint-elle pas de rappeler le
prclexte le plus fecond , ou le sujet Ic mieux fonde dc celte mo-
querie trentc ans incpuisahle dont elle parlail toutarheure?
Ici, je I'avoue, 3Iarmoulel me parait mieux el plus amplement
informe. Sincerement attache a La Popliniere, il convient ce-
pendaut de ses defauts. \.e plus deplorable, suivanllui, etait
une soifde Tantale pour un genre de volupte dont le vieux
368 uttj^:rature.
financier nc pouvait plus on presque plus jouir. La fortune (jni
iui amenait les plaisirs en foulc, et la nature qui lui en prescri-
vait une abstinence humiliante , le tcnaicnt dans une alterna-
tive de tentations continuelles et de continuelles privations , qui
ctait un supplice pour lui. « Le ii)alheureux./poyrsuiK Mar-
montel, ne pouvait se persuader que la cause ^gf^'^^^iW™^-
II ne manquait jamais tTen accuser robjet pt^s<!ttEvet ftlutes
los fois qu'un objet nouvean lui scmblait avpir ijjjifi'!^t*ijaits ,
on le voyait galant, enjoue, comme epanoui pkr^.ra5aJi/d'es-
perance; c'etait alors qu'il ctant aimable. II fabrniL-de^ contes
joyeux, il chantait des chansons qu'il avail composees, d'un
style tantot plus librc, tantot plus delicat, selon I'objet qui
I'animait : mais, autant il avail ete vif et charmant le soir ,
autant le lendemain il etait triste et mecontent. » Marmontel
qu'environnaient , dans la dcmeure de son patron, presque
autant A occasions de faillir , n'etait pas a beaucoup pros si
infaillible. II logeaic dans un co\t\Aov peuplc de filles de spec-
tacle, et particuliercment des chanteuses et des danseuses de
I'Opera qui , comme il le dit ailleurs, venaient aPassy embellir
les soupers. Or il convient qu'avec un tel voisinage, il lui etait
nial aise d'etre econome des hemes de son soinmeil et de cellcs
de son travail. Ce qu'il y a de personnel dans son rccit doit, ce
semble, ajouter beaucoup a la confiance qu'il nitrite. Je crois
done pouvoir conclure que, dans cette grave question, c'est
M"« de Genlis qui se trompe. Rien de plus naturel que sa me-
prise. Il est possible qu'i I'exception du corridor oil logeait
Marmontel, la decencc dont elle parle cachat trop bien cer-
laines choses pour que X esprit d'une tres-jeune personne/>err«7
ti travers ces voiles.
On aura plus de peine a s'expliquer comment, a peu pres
vers ce tems-la (1759), M""^ de Genlis, qui n'avait que
treize ans , a pu rencontrer frequemment, dans des reunions
de gens de lettres, le poete Berlin, qui avail six ans de moins
qu'elle (i). On s'etonnera qu'a I'epoque oil M""' de Genlis publia
(i) Berlin, le compatriote, Tami^ intiine, le lival et non pas
LlTTfiRATURE. 36g
le premier volume de sou Theatre <C education , c'est -a-dire
en 1777, elle eut deja /«, non-seiilement la premiere moitic
des Confessions de J.-J. , qui n'a paru qu'en 1781, mais encore la
seconde partie qui n'a vn le jour que sept ansapres (1788J. Voilii
pourtant ce qui resulte de ce passage, que j'abrege sans I'al-
turer :... « Parnii l^kttres de conipliniens sans nonibre que je
recus au- Palais^nfjiil , sur le premier volume du Theatre
(V education', j'en recus une de M""= d'Epinay, que je ne con-
naissais pas du tout...Sa lettre etaitaimable; je medecidai alui
faire une visite : eUe-«ie recut si bien que je me promis d'y
retourner... Je /ericttjftL^x^hez elle M»"= d'Houdetot , sa belle-
sceur, beaucoUp plHl^'^piEituelie qu'elle :y'e la regardai avec
curiosite , parce q'U^j'^ku!t\lu dans les Conjessions de J.-J.
Rousseau , quil'a^'^^^lfte p().ssionnenienl amoureux d'elle ; ce-
pendant, elle e^ait esTr'^r^ment louche, et ses trails d'ailleurs
n'etaienl pas beauxr5>-(-Tome iii, pages io5, 106 , 107 ct 108.}
Les mots ye recus au Palais-Royal fixent parfaitement la date;
c'etait, comme je viens de I'indiquer , avant I'entree de I'auteur
au convent do Bellechasse, qui eut lieu en 1777. La distraction
est d'autant plus forte qu'il est tres-difiicile , a coup sur, que
nous nous meprenions nous-memes sur le motif qui nous a
determines a faire une chose. Or, le motif determinant de
M"' de Geulis pour regarder avec curiosite M""" d'Houdetot ,
aurait ete la lecture d'un livre qui ue fut imprime que dix ou
douze ans plus tard, atlendu qu'il n'est question de M""= d'Hou-
detot , et de la passion de J.-J. pour elle , que dans la seconde
partie des Confessions.
II serait inutile de multiplier ces remarques, mais j'ai du les
faire, et voici pourquoi. M";^ de Genlis a bien certainement la
I'egal de Parny, quoiqu'on en dise, etait ne le 10 octobre lySa.
Quand M""^ de Genlis, nee en 174^). avail treize ans, ii en avail done
sept; et s'il etail deja poete , c'etail du inoins a I'ile de Bourbon.
II ne fut envoy e en France qu'en 1761. II publia , seuleuient en 1773 ,
quelques poesies sans goiil el presque sans talent. Ses elegies ( les
Amours), son premier litre a udc renoinniee durable, n'onl paru
qu'apres celles de Parny, en 178a.
T. XXXI. — Jout i^^G. alt
370 LlTTl^RATURE.
meilleure memoire possible : tout le itiondc le dit ; el, de plus,
M"" de Genlis le ropete, comiiie si personue iie le savait. EUe
convient , avec la meme franchise, qu'il doit nccessairement y
avoir un grand nombre de critiques ( etsouvent tres-piquantes)
dans un ouvrage qui contient une infinite d'anecdotes parlicu-
lieres. II suit de lacpi'en oonlribuunt poiit-tlrc, par Taiialyse dc
son livre, a repandrc ce grand nomhrc de critiques souvent tres-
piquantes, je ni'imposais robli^ation d'avcrtir que son excel-
lente memoire ne^ I'a pas toujours servie aussi iideloment que
ses bonnes intentions. M'en voila quittc maiutenant; etjepuis,
sans scrupiile, annoncer qu'on trouvera , dans les trois premiers
volumes de ses Me moire s , une suite presque continuelle de
portraits qui font, en quelque sorte, passer devant les yeux
du lecteur toute la haute socicte , depuis les dcrnieres annoes
du regne de Louis XV jusiiu'a la revolution. La premiere
chose qui frappe, en parcourant avec attention cette curieuse
ct tres-Iongue galerie , c'est d'y voir presque toutes les femmes
qui ont suscite dcs tracasseries au peintre, ou qui lui ont fait
des noirceurs , aussi pauvres de figure que laides de coeur et
d'esprit ; le visage de V une est crible parla petite-verole , I'autre a
\enezd\\n rouge eclatant. En revanche, celles qui ont aime, ad-
mire surtout I'auteur des Memoires, nous apparaissent presque
toujours commc des angcs de lumiere et de beaute. Qu'en con-
clure? la prevention; Dieu m'en garde! j'y trouve une expli-
cation plus polie , et non moins naturelie. Que les sotles , les
laides, les maussades, aient toutes montre de I'eloignement
pour M'"' de Genlis, rien de plus croyable; ii y avait incom-
patibilite. Qu'au contraire des femmes charmantes, en qui tout
etait prodige, I'esprit , les graces, la beaute, se soient unani-
mement declarees pour M""' de Genlis, rien de plus inevitable;
il y avait sympathie.
Dans la foule de ces portraits, il en est de charman:; sans
daute; ])liisieurs sont meme traces avec ime habilete incontes-
table , et qui plairait bien davantage si elle se trouvait unie h
un pen plus de varieto. Cependant, comme I'auteur possede
I'art de conler bien plus que le talent de peindre, on preferera,
LITTER ATUHE. 871
je presume , ses anecdotes h ses portraits ; on lira surtout ses
historiettes. Elles sent tres-nombreuses aiissi , et quelquefois
passablement longues. J'indiqiierai, comme la plus siuguliere,
cellc dii vicomte de Ciistine , dontle frere a etc I'un des pre-
miers generaux de nos armecs republieaines. II n'y a rien dans
les romans de M™' de Genlis de si eminemnient romanesque :
tant la verite pent, meme en ce genre, I'emporter sur la fiction !
Je recommande ce recit aux amateurs comme une bonne for-
tune, lis le trouveront tout cntier dans le cours du second vo-
lume ou il I'evient ,a diverses leprises , couvrir un asscz grand
nombre de feuillets. Quant a nioi , je crois devoir aux lecteurs
de la. Revue, de chercher, avant tout, dans des Memoires sur
le xviii' siecle, ce qu'il peut y avoir de curieux a glaner
sur les hommes dont le genie a forme I'esprit de ce grand
siecle, et I'a immortalise.
Ah Jove principium ; je coifiimence par un voyage a Ferney.
M"* de Genlis nous y conduit en 1776. Elle n'a point apporte
de lettres de recommandation, et se decide a ecrire de Ge-
neve un billet, qu'elle datefierement du mois dHaoiil. Malgre
cet acte de fierte , Voltaire , qui datait du mois A'Jiiguste ,
repondit le plus gracieusement du monde , par une invitation
a diner et h souper; ajoutant que ce jour - la il quitlerait ses
pantoujles et sa robe de chambre. Qui le croirait , cependant ?
Cette reponse tres-gracieuse, fitfaire a IM"^ de Genlis A'inquic-
tantes reflexions. « Je me rappclai , dit-el!e, tout ce qu'on ra-
contait des personnes qui allaient pour la premiere fois a
Ferney. II etait d'usage, surtont pour les jeunes femmes, de
s'emouvoir, de palir, de s'atlcndiir, et meme de se trouver
mat en uprrcevant M. de Voltaire : on se precipitait dans ses
bras, on balbutiait, on plcurait, on etait dans un trouble qui
ressemblait a I'amour le plus passionne. C'etait letiquelte de la
presentation a Ferney... « Ah, que n'ai-je eu le bonheur d'ac-
compagner dans sa visite I'aimable et timide conviee ! Comme,
pour calmer ses craintes, je me serais empresse de lui dire a
combien Ae jeunes femmes , tres-bien recues a Ferney, on
:i7i L1TTERA.TU.RE.
avail fait yiAce «I(; Yeliquettc qui Iciii piesciivait dc *'j trou-
\'crinal!
Le coinpaynoii do M"" de Genlis ii'aurait pii lui rendre tc
pelit service; il etait trop ignorant du ceremonial de Ferney
et dcs usages de France. C'etait iinjeuue M. Ott, peintre al-
lomand , revenant d'ltalic, ctqui iy\\. scandalise Ac trouver, en
entrant au chateau , un beau tableau du Coriege, cache dans
unc obscure antichauibre, taudis qu'elalee dans le salon, et en-
virounee d'un cadre superbe, res|)lendissait a tous les yeux une
veritable enseignc a bierre ; une peinlure ridicule rvprcsentanl
M. de Voltaire dans une gloire, tout entoure dc rajons comme
un saint, ay ant it ses genoux les Calas , et foulant a ses picds
ses ennemis , Freron, Poinpignan, etc., qui exprimaicnt leur
humiliation en ouvvant des bouches enormes , et en Jaisant des
grimaces ejfroyables. A coup sur, lout cela elait bien detes-
table; etsans etre indigne du dessin, conime M. Ott, nidcla
composition , comme M""^ de Genlis , je trouve , aulant qu'eux
pour le moins, inconcevable que Voltaire ail pu manquer de
sens et de gout au point d'exposer dans son salon une telle pla-
titude. Mais enfin, quand M. Ott se levoltait contre ce chef-
d'oeuvic Ac(\\xe\(\w Apelle genevois , ildevait etreprevenu par
I'humeur que lui causait ce beau Correge relegue dans cette
v'ilaiue antichambre ; et M'"^ dc Genlis avail de I'humeur aussi,
car elle venait defaire une gaucherie , sans qu'il y cutprecise-
menl de sa faute. Sa montrel'avait trompee; elle etait arrivee
irois grands quarts d'heure avant le diner. En regaidant a la
pendule, elle reconnut avec douleur sa meprise , ce qui redou-
bla son embarras. En ce moment, se presente, (decoiec d'une
medaille dor, prix d'arquebuse donne par M. de Voltaire"),
M"" de Saiut-Julien, qui propose a M"'' de Genlis un tour de
promenade sur la terrasse; ce qui devient, comme on va voir
la cause d'une nouvelle douleur.
Cherchanl quelque moyen de plaire a I'lionime illustre qui
voulait bien la recevoir , M'"' de Genlis s'etail paree avec tout
le soin possible. Je n'ai jamais eu , dit-elle, tanl deplumes el
tant dejleurs. Or, la terrasse sur laquellc la conduisilM"' de
LITTERATURE. 3,:i
Saint-Julien etnit recouverte d'un tieillage si has qu'elle eut
beau se baisser et marcher sur sa robe en ployant beaucoup les
genoux , ellc ne put garantir ses plumes. Quand on vint an-
noncei- que Voltaire entrait dans Ic salon , elle etait decoiffee
et toute chourijfee , et avait line mine verilnhlement piteuse el
tout-a-fait dccornposee. Neanmoins , elle fnt touckee quand
Voltaire hii baisa la main, et elle Yembrassa de bon coeur.
Mais il parait que cette emotion passagere ne put cliasser sans
retour le mt-contentement que lui avail cause \e pheux etat d<-
sa coiffure, vu dans une-des glaces du chateau. Quand on est
mecontent de soi, on meme de sa toilette, on est difficile .-.
eontenter. Aussi, allons-nous voirque , pendant tout le diner ,
M.de Voltaire ne fut rien mains quaimable. « II eut toujours
I'air d'etre en colere centre ses gens, criant avec une telle force
que la sal le a manger, qui etait tres-sonore, retentissait d'nue
maniereeffrayante... « H avait beaucoup perdu de I'usage ,!..
monde qu'il avait dA avoir, ajoute, quelques pages plus loin ,
1 auteur des Meinoires... Depuis qu'il etait dans cette terre , on
nallait le voir que pour I'enivrcr de Ir.uanges; ses decisions
etaient des oracles ; tout ce qui I'entourait etait a ses pieds; il
n'entendait parler que de I'admiration qu'il inspirait , et Ics
exageralions les plus ridicules en ce genre ne lui paraissaient
plus que des hommages ordinaires. Les roismeme n'ont jamais
ele les objets d'une adulation si outree : du moins , I'etiqnett.-
defend de leur prodiguer toutes ces flatteries; on n'cntre poini
on conversation avec eux; leur presence impose silence ; et
•Srace au respect, la flaltene, a la cour,est obligee d'avoir d-
lapudeur, et de ne se montrer que sous des formes delicates.
Je ne I'ai jamais vuc sans menagement qua Ferney ; elle y etait
vraiment grotesque : et, lorsque, par I'habitude, elle peutplaire
sous de semblables traits, elle doit necessairement gater le
gout, le ton et les manieres de celuiqu'clie seduit. Voila ponr-
quoi I'amour-proprc de M. de Voltaire etait sin^ulieremeut
'rritablc, et pourquoi les ciiliques lui causaient^cc chagrin
pueni qu'd ne pouvait dissimuler. « II y a dans ces observa-
tions unc finesse piquanic; ily a menic quciquc chose dc vrai
374 LITTl^RATURE.
qiioiqiie je n'aie point oui dire que les manieies , !e ton et \e
goAt de Voltaire aient jamais etc si gates; quoique les preuves
de la susceptibilite de ce grand honime pour la critique datent,
non poiut de son sejour a Ferney , mais de la representation
de son OEdipe, ou, anlerieurcment encore, d'un concours a
TAcademie dans lequel le jeune Aronet avait ete mallieurcux;
qnoiqiie, enfin, je sois trcs-eloignu de prctendre garantir les
formes toujonrs aimahles ni surtout la puclcur des flatteries de
cour.
Au surplus, je no dois pas omettre que, dans vingt autres
endroits, M""= de Genlis rend elle-meme hominage i la poli-
tesse de Voltaire, a sa conversation parfaitement aimable ,
qtiand il n'elait question, dit-elle, ni de ses ennemis ni de la
religion. Je dois moins encore oublier I'impression que fit sur
elle le spectacle des bienfaits sans nonrVre que I'illustre vieil-
lard repandait, depuis vingt ans, autour de lui. Elle s'en
explique en temoin oculaire, avec simplicite, mais avec effu-
sion , et elle rend a leur autcur cet eclatant temoignage , ex-
cellent i recueillir d'une bouclie si peu suspecte : « II nous mena
dans le village pour y voir les maisons qu'il a balies et les eta-
blissemens bitnfaisans qu'il a formes. 11 est plus grand h'l que
dans ses livres, et Ton y voit partout une ingenieuse bonte...
II montrait ce village a tons les etrangers, mais de bonne
grace ; il en parlait simplement, avec bonhomie; il instruisait
de tout ce qu'il avait fait; et cepcndant il n'avait nullement
I'air de s'en vautcr, etj'e ne connais personne qui pilt enfaire
aittant. » Ce dernier trait estdigne de remarque par sa simpli-
cite meme; c'esl le ton d'un noble aveu. Jamais on n'a mieux
loue le grand homme contre lequel M"= de Genlis a si long-
tems et si amerement ecrit.
Comme sa constante habitude est de peindre en detail la
figure de tous ceux qu'elle a connus, ou meme seulement ren-
contres, on sera sans doMte bien aise, avant de quitter Ferney,
de lui voir au moins esquisser celle du maitre du chateau.
« Tous ses portraits et tous ses busies sont tres-resscmblans ,
assure-t-elle; mais aucun artiste n'a bien rendu ses yeux. Je
LITTfiRATURE. 375
m'attendais a les trouver brillans et pleins tie feu ; ils etaient
en effct, les plus spirituels que j'aie vus ; mais ils avaient
en meme terns quelque chose do veloute el une douceur inex-
primable : I'anie do Zaire etait tout entiere danscesyeux- la.
Sou sourire el son rire extremement malicieux changeaient
tout-a-fait cctte cliarmante expression. II etait fort casse , et sa
maniere gothique de se me'ttre le vieillissait encore : il avail
une voix sepulcrale qui lui donnait un ton singulier, d'autant
pliisqu'il avail I'liabitude de parler excessivemenl haul, quoi-
qu'il ne fnt pas sourd. « Je crois ponvoir garanlir la verite de
cette peinture , dont le coinmencereent a de la grace. Mais , en
disant que les artistes n'avaieut pas sii rcndre les yeux dc Vol-
taire, il aurail fallu fairc une exception. J'ai vu chcz un homnie
celebre un portrait dans leqnel I'auteur de la Henriade parais-
sail avoir trente ans : c'eiail un ouvrage de Largilliere et
un cadeau du comte d'Argental. On trouvait dans le re-
gard cette douceur inexprimable et dans les yeux ce veloute
dont parle si bien M™" de Genlis. Le possesseur du portrait
avail coulume de dire a ceux dont cette aimable et douce fi-
gure avail attire I'attention : « Regardez ; il a Zaire dans I'oeil ! »
Etce mot pourrait fort bien avoir ete I'origine du trait, Xdine
de Zaire etait tout entiere dans ces yeux-ih ; car M™'de Genlis
a eu autrefois des relations avec le possesseur du portrait, et
elle a long-tems entretcnuun commerce de lettres avec lui. An
surplus, la double expression qu'cUe donne a la physionomie
dudialelain de Ferney se trouvait la confirmee et visible. II y
avail aupres du Voltaire peint par Largilliere, a trente ans ,
un vieux Voltaire sculple par Houdon : c'etaienl deux hommes
lout diffcrens. Merope et le Senateur Pococurante n'auraient
pas contraste davantage : il y avail la meme distance entre le
buste et le portrait.
Passant de Voltaire a J.-J. Rousseau , il m'eut ete fort agrea-
ble de raconter sa premiere entrevue avec M"* de Genlis,
scene comique, et double mystification, attendu que M™« de
Genlis recoit Rousseau, en croyant n'accueillir que Preville
charge , pour la mystifier , de jouer le role du philosophe ,
3:6 LIITERATURE.
tandis quo le philosophc, pris pour le conicdien, sans s'eudou-
ter, se fait honneur de la gaite qu'inspire Vexcellent jeu dc
Prtjville : j'auraisrapportc sa brouillerie avcc le comte de Gen-
lis qui, au lieu de deux Louteilles d'un bon vin de Sillery que
Rousseau avail prouiis d'acccpter, eut la mauvaise peusee de
lui en faire porter cinquante ; j'aurais dit aussi la rupture qui
siirvint, au bout de deux mois, entre I'auteur d'Ernile et celui
A'Jdele et Theodore, a la suite d'une representation da Pe.r-
siffleur, ou Rousseau , qui etait venu dans «ne logc f;riHcc
avee M'"* do Genlis, la voyant beaucoup troppareepour croire
qu'elle eut I'intention de s'y cacher, pretendit qu'on ne I'avait
mene a la comudie que pour le donner en spectacle, /po«r /<?
faire voir au public, comme on montre les betes feroces a la
foire. Tout cela est fort joli sans doute, et parfaitement bien
narre : j'aurais eu , je le repete, grand plaisir a le faire con-
naitre, si ce n'eul pas ete deja connu, a peu pres de tout le
moude, et depuis environ vingt ans. Quoique je ne sache pas
qu'aucun des jouruaux qui ont reprodiiit, en partic, ce rccit
aniusant, mais un peu long, en ait deja fait la remarque , je
crois me rappeler que tout le morceau, fel qu'il est dans ces
Me moire s , a etc mis dans Le Mercure , auquel travailiait alors
Tyjmc jg Genlis, et roproduit dans la Di'cade , a peu pres vers
le meme tems. Au moins est-il bien certain qu'on le trouve
mot pour mot dans les Souvenirs de Felicie (i).
La scene qui va suivre est plus ncuve , sans etre moins ex-
traordinaire :je la franscrirai textuellement : elle est courte;
etje ne dois pas oublier que M'"' de Genlis s'eleveavec toutc
raison contrc I'iujustice des journalistes qui pretendent faire
conuaiLre ses ouvrages, sans en offrir au public aucun frag-
ment de quelque ctendue. C'est done elle- meme qui va parlor:
« Je donnai successivcmcnt , dans les dix premiers mois de
mon sejour a Belie - Chasse , les dcrniers volumes de mon
Theatre d'educalion. A jiropos de celui das pieces tirees de I'E-
criture-Sainte, (i'Alembert, en presence de M. Schomberg,
(i), Tome I'T, pnges 2()o et suivantfs.
I
LITTER ATURE. 377
me dit amicalement ( c'est M"'' de Genlis qui souligne ), qu'il
me conseillait dc no jamais parlor i I'avenir de religion , parco
que celte mode elait passee ; qu'il fallait employer ma belle
imagination sur des sujets settlement moraux ( on savait q>ie je
travaillais a Jdele et Theodore) ; et qu'alors je serais sure d'ob-
tenir les suffrages les plus eclatans , et que lui ^par exemple ,
proposerait a I'Academie de creer qnatre places de femme, afin
de me mcttre a leur tete ; et qu'il etait certain d'obtenir cette
grace qui mecouvrirait de gloire, parce que le public pense-
rait bien qu'on n'aurait nomnie les trois autres que pour me
faire cette faveur , en diminuant un peu I'envie qu'elle excite-
rait. Je lui demandai qnelles seraient mes trois compagnes. II
me nomma M""" de Montesson, d'Angevilliers et d'Houdetot.
Je repondis qu'il m'etait impossible de separer la religion de la
morale , et que je n'aurais aucune espece de talent , si je vou-
lais la separer d'line telle base ; que non-seulemcnt je parlerais
sanscessede la religion, mais que je combattrais dc tons mes
faibles moyens la fausse philosophic qui I'attaqueetla calom-
nie. II me repondit avec colere et avec dedain que je m'en re-
pentirais. II ajouta, du ton le plus ironique et le plus amer,
que la grace pourrait etre de mon cote, mais que \!i force n'y
serait pas. Je repondis qu'avec la raison, la droilure et la per-
severance, on est toujours fort. La dispute devint tres-piquante
depart et d'autre, malgre tous les efforts de M. Schomberg
pour nous adoucir et nous concilier. D'Alembert sen alia fu-
rieux : depuis ce jour-la , jc ne I'ai pas revu.Tel a ete le com-
mencement de ma brouillerie avec les philosophes.»(^Tomein,
page 102. ) Dieu me garde d'tleveraucun doute sur une aven-
ture si plaisante et si naiivement racontee ! Elle n'eut qu'un seul
temoin, M. de Schomberg , qui est mort. Cette anecdote litte-
raire me paraJt etre dans sou genre ce que I'histoire galante du
vicomte de Custine est dans le sien. Permis, du reste, a chaque
lecteur de chercher, a sa maniere, ce qui avait pujeter dans
Tesprit d'un grand algebristc I'idee de ses quatre fauteuils fe-
minins. Pour moi, je crois le savoir ; et, si M""" de Genlis n'a
voulu que I'iudiquer, c'est sans doute par modestie. Elle ve-
378 LITT^RATURE.
nait d'atteindrei^ vine diffnite jusquA\ors inaccessible aux per-
sonoes de son sexe : elle etait gouverneur des Pis d'lin premier
prince dii sang. Un gcomctre diit trouver tout simple de fairo
un academicien de M""^ le gouverneur.
Si Ton njoiite a ce qn'on viciit du voir sur Voltaire, Rous-
seau , d'Alembert , quelques recits, de la memc importance, sur
Buffonet sur LaHarpe; quelques traits epars, dontla justesse
n'est pas toujours le premier merite, sur Thomas, Saint-Lam-
bert, Raynal, Marmontcl, I'abbe Dclille, Bcrnardin de Saint-
Pierre et Palissot, on aira toute la partic littoraire dcs Mc-
rnoires sur Ic xviii""^ sicclc. Quant a la partic politique dcs
Memoires sur la revolution, je ne dirai point, meme par poli-
tesse, qu'elle est plus incomplete encore; ce scrait prom.ettre
beaucoup trop. C'cst la surtout que les esperances sont tout-i-
fait desappointces. Y parle-t-on de \ J ssemblee des notables ;
c'est pour rappeler un pari de cinquante louis d'or entrc le due
d'Orleans et M. de Lauzun. Nomme - t - on la Feuille villa-
geoise a laquelle I'auteur dcs Memoires a, comme on sait ,
fourni des articles; on se borne a nous donner cette profes-
sion de foi : « Je n'etais d'aucun parti, que decelui de la reli-
gion. Je desirais la reforme de certains abus; et j'ai vu avec
joie la demolition dela Bastille, I'abolition des lettres de ca-
chet et des droits dc chasse : ma politique n'allait pas au dela
decela.^i Tome iir, ])age 260. Mais, du moins, quaud viendront
les epoqnes ou Ton attribue au Palais-Royal une influence qui
a etc le sujet de tant de controvcrses , noire curiosite obtien-
drat-elle enfin quelques renseignemens ? Non, cerles , moins
que jamais. N'interrogez point M'"° de Genlis; elle s'erapresse
de vous dire : Je n'ai rien vu, rien entendu: c'est Chanderlos
de Laclos qui, depuis la revolution, a eu seul I'oreille du
prince; c'est lui seul qui a tout su; quant h moi , j'ai tout ignore.
Nous voila done renvoyes aa general Laclos, qui est mort,
comme M. de Schomberg, et n'a point laisse de Memoires.
Un second article renfermera I'analyse des quatre derniers
volumes, dontjene puis rien dire aujourd'hui, ne les ayant
pas encore lus. T. L.
LITTfiRA-TURE. 379
Chefs-d'OEuvre des Theatres etrangers, allemand,
anglais, chinois, danois ^ espagnol, hollandais ^ in-
dien, italien, polonais , portugais ^ russe , suedois, etc.;
traduits en francais^ par une Sociele de gens de
lettres (i).
PREMIER ARTICLE.
Cette vaste collection , assemblage incoherent et diffus de
productions dramatiques, choisies comme au hasard dans les
litteratiircs etrangeres, et presentees sans distinction d'epo-
ques, sans commentaircs , presqiie sans notes, n'est pas sus-
ceptible d'un examen general. Son ensemble est au-dessous
de la critique; il faudrait, pour apprecier cliacune de ses par-
ties, se livrer a iin travail immense , peuinstructif, parce qu'il
serait dupourvu de plan , et incompatible avec le cadre de
la -ReiT/e. Un tel travail ne pour rait etre, eneffet, qu'une suite
de feuilletons dramatiques , sans rapport et sans liaison entre
eux. Nous avons prefere offrir, dans une serie d'articles, ?<«
Essai comparatif des theatres etrangers el du thedtre/rancais.
Get Essai, qui renfermera un examen a peu pres complet des
oeuvres dramatiques des nations rivales , de leur systerae, de
leurs opinions sur ce sujet , metlra les lecteurs en etat d'ap-
precier I'utilite et le mcrite de la collection dont le titre pre-
cede : il suppleera a une analyse ; son but sera plus cleve
et plus etendu. L'auteur , s'ecartant des voies trop frayees
d'une polemique vulgaire , remontant aux principes de I'art
dramatique , et consultant beaucoup moins I'autorite des
critiques, que la raison et I'histoire, essaiera de ramenera ses
veritables termes une discussion qui divise aujourd'hui la re-
publique des lettres; vieille querelle en vain rajeunie par la
forme, qu'un peu de bonne foi terminerait bieutot, et qui
ncanmoins menace de durer lonfr-tems encore.
(r) Paris, i8so-i8a5; Ladvocat, libraire, et Thoisnier Desplaces,
a5 volumes in-S"; prix, i5o fr.
38o L1TTI5RA.TURE.
U Essai comparalif %Q composeraile cinq arlicles. Le premier,
qne nous publions aiijoiud'hui, est consacre aux considerations
generates ; dans Ic second, I'aulcnr traitera specialement dn
theeitrc franca is ;\q troisicmc conliendra Texamcn du theatre
cspagnolct du theatre anglais ; le qiiatrieme, celiii du theeitrc
allemand ; enfin, le cinqnieme, offrant la recapitulation des
quatre precedens, presentera unecnmparaisonentre le theatre
francais et les theatres rivaux.
CoNsmKRATiONS ciJN3iRAi,Es. — Tous Ics arts d'imltation ont
vxi cercle prescrit a parcourir : lis ont leiir etendue et leurs
limitcs. Fanto dc niesurer cettc etendue, on est maigre et sans
genie; en ignorant ces liniites , on s'egare, on seperd, on pro-
duit des nionstres. Le secret du succes est de vouloir tout ce
que Ton peut, et rien au-del5. Ainsi, le statuaire se borne i
representer une attitude; le plus puissant genie ne fei'a pas
mouvoir le marbre immobile. Ainsi , le peintre ne dessine
qu'une scene ; et encore les convenances de son art, leslimites
de ses moyens d'execution ne lui permettent-ellcs pas de choisir
toutes sortes de scenes. A son tour, I'art dramalique est ren-
ferme dans certaines borncs qne lui tracenta la fois la nature
propre de cet art, et les moyens d'execution dont il dispose ,
I'illusion qu'il doit produire.
La raison dit au peintre : Voici le cadre dans lequel ton ta-
bleau sera circoiiscrit ; c'est ;\ toi de le remplir sans I'exceder ;
c'est a toi de renfcrmcr dans cot espace une scene complete
qui m'instruise et qui m'attendrisse. Emprisonne dans ces li-
mites, parais libre a force de genie; sache te mouvoir avec ai-
sance, enportantun joug necessaire. Cette meme raison ditau
poete dramatiqne : Vois cette scene de soixante pieds de pro-
fondeur sur quarante de largenr; voila ton domaine. C'est la
que ton I genie doit se dtbattre. C'est dans cette arene etroitc
que tu dois conlcnir I'homme, la societc; , I'univcrs. La, tu
dois faire parler les douleurs humaines, exposer les catastro-
phes des etats, transporter les grandes luttes de la politique ,
les debats sanglans du fanatisme. Le secret de ton art est le
Illume que celui du peintre : proportionner lo tableau a son
LITTER ATURE. 38 1
cadt e ; u'y faire entrer que ce qu'il pent ualurelleraent coni-
preiiJie , calculcr exacteineut les effets do I'optique; et
cepcndant iesler fidele aiix lois de I'interct, a la verite,
ail iiaturel ; il faut einouvoir, atteudrir, Uauspoiter le spec-
late ur.
Suivons cette idee trop meconnue: nous la trouverons fe-
conde. Un grand acieur ine disait un jour : « Savez-vous pour-
quoi je I'emporte souvent sur mes rivaux ? Ce n'est pas que
j'aie une organisation plus forte, des facultes plus puissantes :
c'est parce que je me counais moi-menie ; je sais ce que jepuis,
et ne fais que ce que je puis. On perd ses forces en voulant
les depasser. En connaissant les mienues, je jouis de toute leur
plenitude. « Cette exposilion si simple et cependant si lumi-
neuse est le secret du succes en tout genre. Et puisqu'il n'est
question ici que de I'artdramalique, combien de poetes distin-
gues de nos jours auraient fait des chefs-d'oeuvre , s'ils avaient
employe a rester dans le cercle de leur art la moitie du ta-
lent qu'ils ont depense pour le franchir ?
On reconnait generalement que tout, dans les arts d'imita-
tioHjSe reduit a une question d'interet. Onavoue encore que I'une
des principales conditions de I'interct, c'est la vraisemblance.
Mais, a-t-on des idees Ires-fixes sur cette vraisemblance, sur
sa nature propre , sur les moyens de la produire ? La vrai-
semblance est-elle la meme dans les differens genres depoesie?
Ceile qui convient parliculierement a I'art dramatique, ne
doit-elle pas avoir un caractere special iudique par la nature
des choses ? Ces diverses questions ont besoin d'etre eclair-
cies.
On divisc les ouvrages de haute poesie en deux genres prin-
cipaux ; celui qui , destine a offrir une vivante image de
I'homme, a le montrer agissant , parlant, deliberant, doit
avoir pour complement necessaire la representation thealrale:
c'est le genre dramatique; celui dans lequel I'auteur ex-
pose une grande action heroique, raconte les exploits, les
combats, les quel^es des guerriers, parcourt d'un regard
I'univcrs entier, rasscmblant dans un seul tableau, la terre,
38a LITTJ£rATURE.
I'enfer et les cieux : cestVepopce. Outre La difference du cadre,
ces deux genres presentent unc distinction fondamentale. Le
premier est destine a des spcctateurs ; le second, h des lec-
tciirs. L'un, presque tout materiel, et participant de la pein-
tiire, s'adresse a la vue ; I'autrc attaquc Timagination. Qnoi
de plus severe que ce sens de la vue qui jngo rapidement dela
verite des objets, compare aussitot I'imitation ;i la nature, et
ne saurait souffrir le faux, quelque brillant qu'il put ctre ?
Mais aussi quoi de plus complaisant que I'imagination qui , ne
voyant les objets qu'au nioyen des perceptions de Tame , en-
chanteresse docile a toutes les impressions, toujours disposee a
s'exalter, ii se creer d'agreablcs incnsonges, accepte tout ce
qui la seduit, consent ;\ tout cc qui Ini plait, et se prele sans
regret an jeu de toutes les fictions ? La vraisemblance ne peut
etre la meme pour I'art dramatique et pour I'epopee.
Spectateur d'un drame renferme dans les limites d'une
scene, je vous demande une verite rlgoureuse; si vos figures
sont liors nature, si, trop multipliees, clles se heurtent dans
I'enceinte etroite de votrc theatre , si vous m'offrez des eircs
surhumains , des fictions mythologiqucs , si vous vous ecartez
endn de I'ordre naturel des choses , quel que soit le talent de
votre macliinistc,je detourncrai la vue, je repousserai un spec-
tacle sans verite. L'erreur vue de pres, devicnt trop manifeste;
la raison s'en revoke. Mais, si vous me donnez h lire unpoeme
epique, alors, en I'absence des objets que le poete decrit, mon
imagination pourra se preter au mensonge. El!e s'exaltera au
sombre tableau de I'enfer; elle se laissera seduire par la cein-
ture de Venus, epouvantcr par I'antre de Polypheme; le se-
jour d'Armide charmera sa reverie ; le geant Adamastor lui
arvachera des cris d'adiniration. Pour elle , tout sera vraisem-
blable, tout paraitra possible ; et le poete pourra s'egarer en
liberte d^ins la vaste carriere du merveilleux.
Les consequences de ce rapprochement sont naturelles. Le
genre dramatique est le domaine de la verite; I'epopee , le
champ de la fiction. II y a deux vraisembfences, I'une severe,
I'autre complaisante ; I'une qui a les yeux pour arbitre; I'autre
LlTTfiRATURE. 3«S
qui se prete aiix caprices de I'imagination. Et revenant au prin-
cipe fondamental de cette discussion , placons cette premiere
vraiseniblance au nombre des limites assignees a I'art drama-
tique. Le poete qui les aura etudiees ne se precipilera j)oint
dans le nierveilleux epique; il sera sobre d'effcts de decoration;
il nc cherchera point, sous pretexte d'agrandir I'art, a trans-
porter sur la scene ce qu'elle se refuse a contenir; les batailles,
le siege et le sac des villcs, les lultes des populations cntieres.ll
repoussera surtout les objets surnaturels; les fantomes, les
ombres, les scenes de sorcellerie; enfm, toutes ces machines
qui necessitent I'intervention de la Divinite. Ce n'est point la le
but propre de I'art dramalique : ce but est la peinture des
passions del'homme; la tragedie est le supplement del'histoire.
Que! sera done le merveilleux tragique puisque sans merveil-
leux, il n'est point de poesie? Il consistera dans I'ideal des fi-
gures et des passions. De meme qu'un statuaire et qu'un
peintre, sans etre infideles a la verite, font leurs personnages
un pcu plus grands que nature , parcequ'ils connaissent I'effet
de I'optique; de meme, le poete dramatique agrandira la fi-
gure de ses heros. II reunira sur un seul personnage tous les
traits de caractere empruates a divers personnages; il en for-
mera un caractere general, que Ion pourra regarder comrae
un type, dont chaque trait en particulier sera vrai, dont I'en-
semble aura cette verite que nous appclons ideale. La grandeur
des inlerets, la \ive peinture des passions, surtout I'art qui
amene nalurellementdes incidens extraordinaires sans etre in-
vraisemblables , inattendus sans etre impossibles; enGn,le
grandiose des sentimens, ct la noble eloquence du style, voili
en quoi oonsiste le merveilleux tragique.
Mais on demande aux poetes dramatiques denos jours une
condition de plus, et la severile avec laquelle on la reclame,
est, aux yeux de quelques critiques, une preuve du perfec-
tionnement sensible des esprits. Je veux parler de la verite lo-
cale. On veut que la tragedie, source d'instructiou et d'etudes,
offre non - seulement la peinture generale des passions , mais
384 LlTTfiRATURE.
devienne I'image fidele des nioeurs des peuples auxquels elle
onipruate ses sujets ; on vent qu'elle poite rempreinte des ins-
titutions, des croyauces, des prejuges des nations. Onpermet
au poete de creer des evencmcns ; inais , une fois qu'il a choisi
le lieu de la scene, on exige de liii une exacte description du
pays, une verile toute historiquc dansles acccssoires; on de-
mande enfiu que le tableau ressemble exactement au niodele.
Une semblable exigence ne doit point etre blamee , et cette
passion de la verite fait honneur au siecle. On s'etonne cepen-
dant que les memes critiques approuvent I'cmploi des etres
fantastiques, aiment I'exageration du spectacle, les machines,
transformant le drame en un tableau epique. Dc pareilles
contradictious n'ont-elles pas droit de blesser les esprits
senses ?
Revenons a la verite locale. Cette verile , nous ne le nierons
point, contribue a riuterot du drame ; mais il faut la ranger
parmi les necessiles secondaires de I'art, parce qu'elle n'est
pas une partio tellcment indispensable de la tragedie que
celled ne puisse exister sans elle. En admeltant qu'elle ajoute
beaucoup au nierite du tableau, encore faut-il observer que
son emploi demande un tact delicat et une grande connaissance
du theatre. Les moeurs , les habitudes , le langage de certains
peuples anciens, et ceux de plus d'un peuplc moderne portent
une empreinte rustique qui Llesse la delicatesse des nations
civilisees. Transporterez-vous sur la scene les grossieres injures
ques'adressentles herosd'Homere; reproduirez-vous , comme
le font quelques auteurs allemands, les abjectes habitudes, Ses
ignobles quolibets desheros de la feodalite? Ce qu'aujourd'hui
nos oreilles souffrent a peine dans les halles, sera-t-il traduit
sur la scene , sous le nom de couleur locale ? Aucun bon esprit
ne le pensera. L'obscrvation dc la couleur locale presente un
autre obstacle non moins difficile it surmonter. Le poete , en
s'y conformant, s'expose a devenir inintelligible. Et c'est ici
I'occasion de signaler la difference qui existe eutre le poeme
dramatique et I'histoire. Al'une on demande des enseignemcns;
LITTERATURE. 385
h. I'autre, des emotions. Le lecteur ouvre un livre historique
avec line disposition a I'etude, avec des connaissances acquises;
il se prepare a mediter , a s'instruire par la reflexion. Le spec-
tateur qui se place au parterre du theatre ne cherche qu'un
delassement; il se presente sans etudes primitives; c'est un
enfant qui veut se divertir : il ne lui faut ni contention d'esprit,
ni meditation. Si, en consequence , vous voiilez I'interesser ,
soyez d'abord clair, accessible aux intelligences les plus bor-
nees ; la tragedie n'est point destinee spocialement a des hom-
mes instruils; elle s'adresse au vulgalre des honimes; elle est
I'amusement de tous ; il suffit d'avoir un cceur susceptible d'e-
motion pour etre en etat de I'entendre.
Connaissant la portee de ses auditeurs, le poete se livrera-
t-il a des details speciaux sur lesmoeurs ; donnera-t-il a I'orien-
tal son style figure; fera-t-il parler au Scandinave le langage
obscur de son cuke ; son respect pour la verite locale le jettera-
t il dans des peintures inusitees, dont I'etrangete revolterait le
spectateur? Non; parce qu'une tragedie n'est point un traite,
parce qu'elle peintdes passions et non desmoeurs. Mais, d'un
autre cote, dira-t-on, faiU-il i-evetir I'antiquite d'un costume
jnoderne , I'etranger d'un habit a la francaise? faut-il sacrifier
la verite historique a I'iguorance du spectateur? Personne ne
demanderait une pareille absurdite. Le secret est de marcher
entre les deux ecueils. Clioisissez, dans les mceurs, dans le
costume, dans les habitudes du peuple que vous representez ,
tous les traits qui ne sont pas en contradiction formelle avec
DOS idees, avec notre education : dites tout ce qui peut etre
compris a I'instant; niesurez I'intelligence de vos auditeurs, et
faites usage de la couleur locale, assez pour etre vrai, pas assez
pour etre obscur. L'art peut se reduire ace principe: ne dites
jamais rien qui soit contraire a la verite locale; mais ne dites
pas tout ce que la verite locale exigerait dans une histoire.
Aucune question n'a plus divise les critiques que celle des
dimensions , de I'etendue et de la forme convenable au drame.
•Sans nous livrer a un exainen approfondi des nombreux dis-
sentimensqui s'elevent a cet egard, cssayons d'offrir quelques
T. XXXI. — Aout 1826. 25
386 LITTERATURE.
idees sur le sujet principal tie la division dcs esprits, siir les
unites...
La raison el rexperience dii coeiir humain nous ap-
prennent que , pour captivcr I'altonlion des homnies et con-
sequeniment pour les interesser, il faut eviter de promcner
leur esprit d'une chose a une autre ; mais I'attacher a unc
scule , I'y 6xer, enchainer par cette unite d'objet son incon-
stance naturelle. Le principe de I'unite d'interet est la conse-
quence directe de cette observation. Mais , les critiques de
tons les partis rcconnaissent le besoin indispensable de cette
premiere unite: ct Ic plus grand nombre avoucnt merne qu'elle
eraporte avec elle la necessite de I'unite d'action. Comment,
en effet, obtcnir un interet unique, si vous ne concentrcz pas
I'attention du spectateur sur un sevd tableau? Si Taction par
laquelle vous commence/ votre drame n'est pas la meme qui
le finit, non-seulement vous egarez I'auditeur de scene en
scene sans le fixer sur aucune, mais vous vous exposez a
porter le trouble dans sa memoire.
Une difficulte plus grave se presente, relativement a ce
qu'on nomme I'unile de terns. La duree materielle de la re-
presentation est de deux a trois heures; une veritc complete
exigerait que Taction ne dural pas plus lons^-tcms, et nous
possedons en effet des tragedies exactement reufermees dans
cette limite. Mais la difficulte et meme I'impossibilite ou se
trouve le poete de s'y renfernier toujours ont rendu des con-
cessions neccssaires. On a reclame des spcctateurs un effort
d'lesprit; on a pense que leur imagination pourrait multiplier
les heures; toutefois, ces concessions ont ete faites avec pru-
dence; etcraignant d'abuser de la complaisance du spectateur,
les Grecs ont renferme la duree de Taction dans un four de
soleil.
C'cstainsi quest nee cette regie de I'unite de tems, fondee
sur le besoin de la vraisemblance, calculee d'apres la duree
positive de la representation, et que nos premiers poetes tra-
giques ont admise dans toute sa rigueur. Leurs successeurs ont
etc moins severes. A leur four, les Anglais, les Espagnols et
LITTERATURE. 387
les AUemands ont absolument repousse la regie qu'ils envi-
sagent comme una entrave; et aujourd'hui, les dissidens de la
litterature francaise pretendent que les etrangers ont raison.
Loin de nous de contredire un arrel si decisif; adressons
toiUefois une question aux reformateurs. Un draine ou tout
doit se suivre , ou tout doit etre lie, et qui est necessairement
borne dans son etendue, peut-il embrasser des annees, sans
entrainer des details infinis, ou sans presenter des laeunes ?
developpee sur une echelle immense, votre action ne sera-
t-elle pas disloquee; ne manquera-t-elle pas de precision ; enfin ,
ne vous exposez-vous pas a Sous perdre dans un vaste espace
vide ? N'cst-il pas plus conforme a I'art de rassembler tous les
evenemens dans' un seul faisceau ; de resserrer le tableau pour
le rendre plusvif, pins anime? Et d'aiUeurs, sous un autre
rapport, quelque confiance que vous ayez dans I'aptitude des
spectateurs a se faire illusion, leur persuaderez-vous qu'en
deux heures ils ont parcouru un demi-siecle? Vous vous adres-
sez a des etres raisonnables; dedaignerez-vous de satisfaire
leur raison ?
Mais, si Ton est divise sur I'unite de terns, on s'accord*
bien nioins encore sur V unite {le lieu. La nccessitc d'aniener
Taction dans un seul lieu parait tyrannique , contraire au bon
sens, a la verite, incompatible avec les cffets tragiques. C'est
fort bien. Ce principe de I'lmite de lieu cependant est I'expres-
sion d'un fait. Votre scene n'est-elle pas constamraent la meme,
pendant tout le cours de la representation, et vos spectateurs
n'occupent-ils pas la meme place, depuis le commencement
jusqu'a la fin ? Un drame ou le lieu de la scene ne change
point, est done celui dont la representation offre la plus com-
plete image de la verite; celui qui a etc le mieux calcule d'apres
les moyens d'execulion. On rtpondra, je le sais, que, si le
speclateur reste a la meme place , la scene peut varicr , non
de fait, mais en apparence , au moyen des decorations. Mais
chacun de ces changemens, qui blessent la verite mnterielle,
et qui sollicitent un effort d'imagination de la part du specta-
teiir, est deja une derogalion aux regies de la vraiseniblance.
388 LITTERATURE.
En vain pretendez-vous que I'auditeur se prctera k I'illusion;
quoique vous fassicz, cliaque fois que le machiniste substi-
tuera une decoration a une autre, Ic spcctateur se dira : je ne
suis pas i Rome, a Corinthe ; jc suis dans un theatre.
Convenez-cn, I'unito de lieu, si vous ne I'acceptfz pascomme
une regie , est du moins une pcrfeclioa de plus donnee au
poeme dramalique, ct, tout le rcste etant egal, la tragedie
qui I'observe est supurieure a cclle qui ne I'observe pas, parce
qu'elle est plus fidcle au but de Tart, a I'interet, plus ou moins
vif, suivant le degre de vraiseniblance. II vous arrange nean-
nioins de vous en passer, de transporter Taction d'un lieu a
un autre. On vous I'accorde; roais songez-y bien; c'cst une
licence qui ue se jiistifie que par les beautes quelle produit.
Le changement de scene detruisant un moment I'illusion,
I'auteur qui en use contracle I'obligation de dedommager
le spectateur. Pour exciter autant d'inleret que celui qui
n'aurait pas pris la meme liberie, il faut qu'il fasse plus
que lui.
Sans offrir un traite de I'art dramatique, notre but a etc de
parcourir les divers points qui divisent aujourd'hui les criti-
ques, et de ramener tout a des questions de sens commun.
Ainsi , nous avons tour a tour expose les principes sur les
limites de I'art etsur la vraisemblance, etablissant laligne de
separation que la nature des clioses a placee entrela tragedie
et Vcpopee. Nous avons ensuite essaye de fixer les idees sur la
verite locale, et sur I'emploi qu'il faut en faire. Enfin, nous
avons developpe succinctement la doctrine rationnelle des trois
unites. L'art dramatique presente une foule d'autres questions
que nous ne pouvons trailer aujourd'hui. Mais nous ne sau-
rions nous dispenser d'aborder deux ou trois difficultes qui
touchent immediatement a la question du romanlisme.
La premiere consiste dans lechoix des sujets, des tableaux,
des caracteres. La seconde est dans le melange du comique
et du tragiquc; la dernierc, dans le but moral des composi-
tions.
II est une idee chere aux modernes critiques; ils voudraicut
LITTERATURE. 389
quele poete dramatique nechoisit ses siijets que dans I'liistoire
de son propre pays, iie peignit que des nioeurs nationales,
n'entrelint les speotateurs que de leurs annales, des crimes et
des vertus de leurs peres. Ainsi, le theatre deviendrait un
nioyen d'education nationale, une institution politique. Et ces
critiques appuientcettc doctrinepar I'exemple meme desGrecs.
Nous ne voulons point dissimulcr tout ce qu'un semblable
systenie a de brillant et de specieux. Mais I'application d'une
theorie en est souvent I'ecueil; et d'abord ce que Ton propose
est sans excmple parmi les modernes. En effet, les priucipaux
apotres de la nouvelle ecole ont eux-memes choisi des sujets
antiques; Shakespeare a foil un Coriolan , une Cleopatre , un
Troile en Cresside , un Jules-Cesar; Alfieri a pris la plupart
de ses sujets dans I'histoire et dans la mythologie anciennos;
Goethe a fait une Tphigenie, et sSchiller lui-meme, le poete du
moyen age par excellence, a traduit la Phedre de Racine.
Mais, renoncant 3 conclure du fait an droit, calculous
d'abord quelle perte ce serait pour I'art de renoncer aux su-
jets antiques. Tons les arts, tons les chefs-d'oeuvre sont venus
de la Grece et de Rome, et I'histoire de ces deux contrees , leur
mythologie, les ouvrages de leurs poetes ont toujours servi de
bases a noire education; en naissant, nous avons begaye les
fables mylhologiques ; notre adolescence a ete nourrie des Vers
d'Homere et de Virgile. Les Grecs et les Romains sonl deve-
nus, pour ainsi dire, nos compatriotes , et leurs croyances, le
culte favori de notre imagination. Est-il si surprenaut que les
poetes modernes aient choisi pour sujets, des recits qui sont
dans toutesles memoires, qui y \ivent bien plus que ces con-
tes de nourrices, que ces sorcelleries , ces niagies, ces fables
diaboliques, que Ton nous presente comme notre veritable
croyance nationale. Voila le caractere de la litterature fran-
9aise suffisamment explique.
Mais, ne pourrait - on pas justifier ce caractere par des
motifs tires de la nature meme de I'art dramatique ? Comme
tons les peuples ne sont pas egalement dignes d'obtenir une
histoire, toutes les histoires ne sont pas propres a la tra-
3i)o ^ LITTERATURE.
gedie. On vondrait en vain le nicr, les annalcs du inoyen
age sont le plus soiivent dans ce cas. L'art draniatique vent
des passions elevees, des caractercs prononces, de grands
interets; le poete qui connait I'essence de cet art, sail qu'il
est impossible de reussir, en peignant des homnies sans pliy-
sionomie, des caracteres sans traits, des crimes has, des
desseins sans profondeur et sans noblesse. N'est-ce pas la
cependant ce que presente continuellemeut le nioyen age ?
des luttes continuelles pour des interets sans majeste, d'igno-
bles forfaits, des scelerats sans originalite, tous jetes dans
le nieme moule; une scene confuse oii se debat la cruaute
feroce des tyrans , et I'ignorance grossiere des esclaves , point
de caracteres, d'institutions, partout unc monotone unifor-
niite de barbaric. Peut-on tirer des tragedies intercssantes
d'annales qu'on nc pent lire; que I'ennui et le degout laissent
dans la poudre des bibliotheques? Y a-t-il dans ce chaos
quelque instruclion a recueillir, quelqiies nobles emotions a
eprouver ?
II faut le dire, les grandes institutions sociales forment
seules les grands caracteres, les grandes nations. Une societe
oiX le peuple est compte pour rien ne merite point d'histoire.
11 n'y a de profit pour I'esprit et le cceur que dans celle des
nations qui ont joui de la liberie. Quelles ressources de telles
nations n'offrent - elles pas aux poeles dramatiques ? Ainsi
s'explique le constant succes des sujets empruntes aux repu-
bliques de Rome et de la Grece. Nations privilegiees, en
effet! Le peintre et le statuaire vont vous derober les secrets de
leur art; le genie se trempe dans le feu de vos chefs-d'oeuvre;
le plus humble citoyen s'enflamme en lisant votre histoire!
Ce ne sont point des castes , c'est le peuple qui remplit les
theatres. Presentez-lui des ti'agedies oh Ton s'occupe du peuple,
oil Ton parle du peuple, il eprouvera une profonde sympathie
et ne saura qu'applaudir.
L'histoire moderne n'offre de veritables sujets tragiques que
certains evenemens qui ont influe sur la destinee des nations;
certains actes de devouement qui ont eii le saint national pour
LlTTltRATURE. Sgi
vehicule. Le reste ne protluira jamais que ties compositions
vulgaires ou baibares; et voila ce qui s'oppose a I'e.\ecution
(lece systeme brillant qui teiuhail afaire du theatre de chaque
peuple une ecole historiqiie, un supplement d'cducation na-
tionale. Loin de nous toutefois de detourner le genie drama-
tique des conquetes qu'il pcut tenter dans le moyen age. Une
institution brillante, la seule qu'aient enfantee ces terns bar-
bares , la chevakrie a deja fourni d'heureux tableaux et peut
en fournir encore. Mais, dans notre histoire , le cercle des
sujets vraiment dignes de la scene sera toujours tres-borne;
ils reclameront un immense g<fliie, et le succes en sera toujours
douteux. Quelques ouvrages slnguliers resteront , comme ces
gigantesques edifices gothiques, qui ont survecu a la barbaric,
couverts d'une empreinte venerable; mais la foule de ces vul-
gaires productions d'une fausse ecole tombera dans un pro-
fond mepris.
Les memes critiques qui repoussent les sujets antiques
proposent pour completer I'application de leur doctrine, de
traiter les evenemens niodernes, tels que I'histoire les fournif.
Les tableaux qu'offrent nos annales sont souvent ignobles et
repoussans; qu'importe? disent - ils au poete dramatique.
Reprcsentez-les, tels qu'ils sont; offrez-les dans toute leur
verile; ne craignez pas de mettre sur la scene des personnages
bassement vicieux, des caracteres meprisables, des crimes
atroces; faites plus: pour presenter une image exacte des tems
que vous avez choisis, entremelez les scenes tragiques de scenes
comiques; a cote du seigneur, mettez le vassal; a cote du
prince , mettez son bouffon : votre tableau n'en sera que plus
ressemblaftt. Oui, sans doute, une pareille confusion rap-
pellera celle du moyen age. Mais il ne suffit pas d'etre vrai ,
il faut etre interessant. Interesseront-ils sur la scene, ces
personnages qui dans I'histoire ne causent que du degout; et
ce naturel, depourvu de tout ideal, ne deviendra-t-il pas aussi
repoussant que la realite meme?
Ce melange de comique et de tragique, veritable corafusiop
de genres, on le demande, n'est-il pas destructif de I'uBite
392 LITTERATURE.
d'interet ? Cctle unite ne resulte pas seuleinent de I'unite d'ac-
tion, elle resulte encore de I'unite d'impression. Si vous me
faites alternativtMiient rire et plcurer, je ne serai ni complete-
nieut amuse, ni completement emu; une sensation dttruira
I'autre. Et si cette verite d'observation ne suffit pas pour faire
proserirc un monstrueux melange, combien d'aulres argumens
ne pourrait-on pas accumuler? Quelle est la destination des
arts, sinon d'embellir les figures, de perfectionner les formes,
de produire le beau en tout genre? Que diriez-vous d'un ar-
cliitecte qui proposerait de rapetisser les proportions de la
colonnc grecquc, d'un peintre qui transporterait le genre dans
I'histoire, d'un sculpteur qui, ayant a faire un homme, pren-
drait un modele disgracie de la nature , et le presenterait dans
la verite la plus vulgaire? Get architecte, ce peintre, ce
sculpteur, ressembleraient aux poetes qui essayeraient de
donner a Melpomene les formes d'une bourgeoise sans dignite.
Notre derniere question est celle du but moral, dedaigne
par des poetes etrangers, neglige meme quelquefois en France.
On pourrait reduire tout ce qui concerne ce point de notre
discussion a la question snivante : « Le poete doit-il etre en
meme terns honnete homme? » Toutefois, exposons quelques
idees. L'art dramatique a pris sa source dans ce besoin
d'emotions, naturel a tousles etres. Mais le but de cet art,
seul entre tous les autres, serait-il uniquenient d'emouvoir , de
toucher la fibre la plus sensible du coeur, et un poete citoyen
ne doit-il pas s'elever jusqu'a I'instruction des spectateurs? Les
arts, produit le plus precieux de la civilisation , ne doivent-ils
rien a la civilisation ? Que faudrait-il penser d'un peuple chea
lequel on reunirait un concours immense de citoyens pour
arreter leurs yeux sur des scenes dont le but serait immoral
et corrupteur? Les anciens qui avaient eleve le role du poete
tragique a la dignite du sacerdoce, qui regardaient le theatre
comme une ecole de patriotisme et de morale, etaient loin
d'imaginer que la scene put deveuir tin jour un atelier de
corruption , ou seulement offrir un spectacle inutile aux moeurs,
sans fruit pour la vertu.
LITTERATURE. 3g6
C'est cependant ce qu'on voit trop souvent dans les pieces
modernes, surtout, chez les Allemands. La scene fran^aise en
offre quelques examples, heureusement rares, la conscience
publique en ayant presqiie toujours fait justice. Le but moral
est le complement necessaire du poeuie dramatique.
Nous voici parvenus au terme de ce premier article. Dans
les suivans, nous examlnerons plus particulierement le systeme
dramatique des differcntes nations modernes. Mais il etail
necessaire de poser d'abord quelques bases, fondees siir I'ob-
servation et sur le bon sens, qui pussent nous servir de guic^le
dans cet examen comparatif.
(La suite au prochain ctihier.)
Leon Tbiesse.
III. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
LIVRES ETRANGERS(i).
AMERIQUE SEPTENTRIONALE.
ETATS-UNIS.
128 — * An adress pronounced at the opening of the New-
York Athenceum. — Discours prononce a I'ouvertiire de \' A-
thenee de New-Yorl- , le 24 deceinbie 1824, par Henry
Wheaton. Seconde edition. New- York, i8a5; imprimerie de
Palmer. In-8° de Si pages.
Ce discours est telleinent plein de pensees judicleuses, et il
offre tant de sujets a la njeditation , qii'il exigerait plus qu'iine
courte annonce. Quelques-unes des opinions de I'orateur de-
vraient etre disciitees, non pas en quelques raots, niais avec
I'etendue que reclameralent rimporiance du sujet, el la force
des raisons que Ton aurait a corabatire, si Ton efait d'un
autre avis. M. Whealon presente la situation des Etals-Unis
comine ires-favorable a la culture des lettres ; il ne parle point
d'un obstacle qui pent y limiter I'cssor de la pensee; c'est le
bonheur de la nation. L'effet necessairedu bien-etre universel,
et de la diffusion des lumieres dans toutes Ics classes de la so-
ciete est de calmer les passions, de forlifier I'empire de la raisou
non-seuleraent sur la conduite de I'homme , mais sur toutes ses
facultes. Chez une nation raisonnable, I'eloquence n'est plus
qu'une logique rigoureuse, cnoncee avec precision, soit qu'il
s'agisse des grands interets publics, soit qu'on ne plaide que
des causes privces. Les moeurs prennent une teinte uniforme;
chacun fait a peu pres la meme chose dans les memes circon-
stances; et, comme les habitudes communes sont conforrues a
la raison , tout ce qui s'en eloigne est folie, et deplail. Get etat
de choses est si difft^renf du notre qu'il est impossible de dire
(i) Nous iudiqiions par nn asterisque (*) , place a cote du litre dc cliaqiie
ouvrage, ceux des livres ctrangers ou francais qui paraitrout digues d'uue atten-
tiou particulicre , et nous en reudrons qiiclqucfois compte daus la sectiou des
AualvtCk.
LIVRES ETRANGERS. — ETATS-TJNIS. ii^j
en quoi consisterail la lilteiature il'un pouple parvenu a ce
degre de perfectioniiement general : raais on ne doute point
que ce peujile ne fut eminemment propre a la culture des
sciences et des arts. Ne pouiTait-on ])as dire, a I'eloge du
nouvcau nionde, qu'il laissera a son aine le sceptre des lettre's,
en dedommageraenl d'un empire que celui-ci n'aura point su
conserver? Cette matlere saffirait seule pour une dissertation
fort etendue.
M. Wlieaton trouve peu convenable que les principales epo-
ques de I'histoire des lettres et des arts soient designees ])arle
nom d'un monarque, ou d'un bomme qui etait alors a la tete
d'une nation. Get usage n'a pas tousles inconv^niens qu'il hii
attribue; pour le ]ilus grand nombre de ceux qui le suivent,
ce n'est point un honimage rendu a un grand pouvoir, mais
une maniere commode de designer un intervalle de tems,
dans les annales ordinaires des peuples. On devrait direet Ton
dira peul-etre un jour, le siecle de Louis XT; car, sous le
regne de ce prince qui certes n'eut rien de grand et ne protegea
ni les sciences ni les letlres, res])rit philosophique fit des pro-
gres si rapides, si etonnans, si decisifs, que peut-etre nucune
autre epoque ne lui sera comparable. Quant au litre Ae grand,
decerne par la flatterie a quelques rois dont les regnes eiircnl
un certain eclat, I'liisloire conserve cetle denomination comme
toule autre inscrij)tion monumentale; mais elie ne la con-
sacre pas.
L'orateur signale quelques-uns des funesles effets de la cen-
tralisotion sur les progres des lettres, et meme des sciences.
Heureusement pour I'Amerique, elle n'a pas acquis a ses depens
la connaissance des maux que cette desastrense maniere d'ad-
ministrer pent causer a I'instruction pnblique. Elle est aiissi a
I'abri du monacbisme, autre flcau qui menace denvahir les
ecoles de I'Europe , a I'exception de quelques contrees ou les
peres devront envoyer leursenfans, afin qu'ils conservent une
raison saine, encore plus precieuse que Tinstriiction.
G'est avec regret que nous renoncons a cxposer quelques
pensees de M.Wheaton sur I'influence que le commerce actuel,
et particulierement celui de I'Amerique exerceront siir les pro-
gres des connaissances et la direction des esprits , et par conse-
quent, sur les productions lilteraires. Dans ce discours, l'ora-
teur a jete un coup d'oeil general sur les ressonrces et les
esperances de I'esprit humain, sur les richesses qu'il possede
actuellement, et sur la meilleure maniere de les faire fructificr.
Les meditations qu'il provoque ne sont pas moins attrayantes
qu'atiles; ce discours reparaitra saii>5 doute dans le recneil des
396 LIVRES £TRA.NGERS.
memoires de VJthene'e ^/e lYew-Tor^: Tout annonce que cetle
collection sera pour nous un objet d'etude, et un moyen d'ac-
croitre nos coiinaissances.
129. — * Report from the commissioners appointed to revise
the statute -laws of the state of New- York. — Rapport des
conimissaires charges de la revision des lois de I'etat do New-
York , conformement au decret de TAssemblee des rcprcsentans,
fait le i5 mars 1826. Albany, 1826. Imprimeriede Croswell, etc.
In-8° de 112 pages.
La revision des lois d'un ctal est un travail Ires-dilficile et
tres-long, meme aux Etafs-Unis d'Americjue. Les commis-
saires que la legislature de New-York a charges de cette impor-
tante fonction , doivcnt, conformement au decret qui les
inslitue, recueillir et classer les lois existanles, indiquer les
lacunes et les imperfections, et proposer les reformcs qui leur
parailront necessaires et pralicables. Le classement etaitl'Dpe-
ration par laquelle il fallait commencer; les commissaires ont
admis les cinq grandes divisions suivantes : 1° lois relatives au
terriloire, a sa division politique, a I'ordre interieur, a I'ad-
ministration; 2° lois concernant la propriete, et tout ce qui
en depend; 3° procedure civile; 4° procedure criminelle et
code i)enal; 5" lois mixtes, locales, etc. La premiere division
esigeait de nombreuses subdivisions ; les commissaires I'ont
traitee en ig chapitres, dont chacnn est compose d'un certain
nombre de titres : un tltre comprend des articles , lesquels sont
un assemblage deparagraphes. Dans le systeme de nomencla-
ture auquel nous sommes habitues, le titre est plus haut dans
r<5chelle des divisions methodiques d'une loi, et Y article est au
dernier degre.
Ce rapport ne contient encore que deux chaplires : le 5^ sur
les elections des fonctionnaires publics, autres que les magis-
trats d'une ville, et le 7" sur les privileges des villcs, I'auto-
rite et les fonctions confiees a leurs magistrats. Celui-ci n'est
pas entiereraent fini; il y manque plusieurs dispositions dont
la legislation actuelle n'a pu fournir les bases, et dont il faut
que la legislature s'occupe, prealablement au travail de la
commission. Le chapitre sur les elections donnera beaucoup a
penser en Europe, et fera peut-ctre douter que nous ayons
une idee juste du gouvernement representatif dont nous par-
Ions si souvent. Ce gouvernement pent, il est vrai, se pre-
senter sous deux formes differentes , I'une republicaine, et
I'autre monarchique : le meilleur, sinon le seul type de celle-
ci , serait la constitution anglaise : hors de la , tout est privilege,
ou soumis a une puissance a laquelle la nation n'a point de
ETATS-UNIS. 397
part. Un peuple ne peul etre represente, s'il n'a point de droits
politiques; et le premier, le plus important, le plus inalie-
nable de tous ces droits est celui d'election. Les esprils qui
s'attachenl aux choses plutot qu'aux formes ct aux mots, ne
trouveront pas meme en Portugal un veritable gouvernement
represenlatif. Les alarmes des partisans de I'aneien etat de
I'Europe au sujet de la nouvelle organisation d'un petit royaume
jete a I'extremite du terriloire europeen, et dont les relations
en Europe se bornent presque uniquement a I'Angleterre,
annonceraient de grandes dispositions a s'effrayer : s'ils n'e-
taient aussi prompts a se rassnrer qu'ils ont paru I'^tre a exa-
gerer le peril, on serait fonde a penser que la peur est une
maladie dont ils ne gueriront point.
Dans les elecllons americalnes, lout est regie par la lol. Point
de dispositions regleraentaires, rien d'arbitraire, meme dans
les details les plus indiffi-rens en apparence. Le legislateur ne
craint point d'etre minutieux; c'est a etre exact qu'il s'attache
uniquement. 11 serablc cependant que Ton puisse faire une
objection aux commissaires de New - York : les comtes, ou
divisions terriloriales de I'etat, ne devraient-ils pas etre inde-
pendans, en ce qui ne concerne qu'eux seuls, de meme que
chaque etat so gouverne suivant ses proj)res lois, en salisfai-
sant la confederation? Chaque ville d'un conite , chaque sec-
tion de I'etat n'a-t-elle pas droit a une certaine mesure d'inde-
pendance, et ne devrait-elle pas en user dans les elections qui
lui appartiennent, choisir ellc-meme le mode deproceder qui
Ini conviendrait le mieux, fixer le nonibre de ses fonction-
naires, la duree des fonctions et I'epoque des renouvellemens?
En donnant cette extension a I'esprit du gouvernemeut fede-
ralif, on exerceralt en meme terns sur I'esprit public une
influence salutalreounuislble, mais qui ne pourrait etre nulle;
car la patrie serait consideree sous un aspect un peu different ,
un peu nouveau. Dans ce cas, la prudence conseille de rester
comme on est, puisque Ton joult non-seulement d'un mieux
relatif , mais d'un bien reel , dont les hommes raisonnables
peuvent se conlenter.
Une resolution du stinat charge la commission de revision
des lois de proposer ses vues sur les pelnes que les lois doivent
prononcer contre les crimes plus graves que les vols d'objets
de peu de valeur. On peut done s'atlendre a des discussions
apppofondies sur le code penal: et, tandis (jue I'esprit phi-
losophique presidera aux recherches des legislateurs de New-
York, il repandra aussi sa lumiere sur les travaux des com-
missions etablies pour le nierae objet dans plusieurs autres
398 LivREs Strangers.
etats. La verite ne peut echapper a ces investigations mulii-
plii'cs, attentives, coniluite» avec une sage lenteur. L'Europe
y gagnera de I'instruction; mais, entre I'acquisition des con-
naissances et la volontc d'en proGter, les passions peuvent
jetor un immense intervalle. On a vu , dans nos terns niodernes,
]>orter des lois dignes des peuplcs barbares; les iiiterels qui
Ics ont dictees observenl avec inquietude ce nouveau monde
dont I'acces Icur est inlerdit, et dont la force toujouis crois-
sanleles menace, nieme dans leurs plus anciennes possessions.
A I'avenir, la civilisation americaine et la politicjue de I'Eu-
rope seront perpctuellemenl en presence et sur la dt5fensive.
Les Veritas qui auront traverse I'Atlantique feront bien de
chercher une vole detournee pour arriver jusqu'a nous.
Ce rapport, dont la continuation ne sera pas moins desiroe
en Europe qu'en Amerique, est I'ouvrage de MM. /. iV. O.
DuEu, B. F. Butler et H. Wheaton. II est ecril avec beau-
coup de methode. 11 fera sentir de j)lus en plus la grande
Tjlilite des dissertations publiques sur les niatieres de la legis-
lation, quelle que soit la fprnie du gouvernemeiit. On observe
mieux les lois, lorsqu'on les a bien comprises. Deja, presque
tous les actes dc Faiitorili' sont precedes d'un exjjose des mo-
tifs, trop court sans donte pour etre instructif, et quelquefois,
peu sincere; mais ces premiers egards qu'on ne dedaigne point
de temoigner pour la raison des peuples, ne peuvent rassurer
les amis de I'liumanite. On parle moins de certaine science , de
pleine puissance , et le bon plaisir n'est plus une raison suffi-
sante. On s'efforce d'etre poli ; mais ce n'est pas assez, ce n'est
pas le plus important. Nous regreitons de ne pouvoir donner
a nos lecteurs une analyse du mode des elections, tel qu'il est
prc'sente dans ce rapjjort ; 11 faudrait transcrire presque tous
les arlicles, pour en donner nne idee claire et complete. On
n'y reconnaitrail certainement point la maniere dont proce-
dent nos colleges elecioraux.
La reforme du code penal et de la procedure cviminelle est
entreprise en Amerique, et meditee en Angleterre; pourquoi
la France est-elle en retard? L'etat de la Louisiane a donne le
premier excmple (voy. Re^'. Enc, t. xxx, p. 662), et offrira
les premiers resultats d'une exj>erience locale, il est vrai, mais
qui fournira cependant des faits instructifs. On pourra juger,
d'apres ces faits , si I'atrocile des peines est un moyen de pcr-
fcctionner la morale des peuples. Un calciil rigoureux a prouve
que Irs disjiositions relatives au jury dans la procedure cri-
minelle de la France ne donnent pas a Tinnocent une garantie
suffisante; on ne I'ignore point, et rien ne change! F.
MEXIQUE. — EUROPE. 399
MEXIQUE.
1 3o. — * Novorum vegetabilium descriptiones. — Descrip-
tions des vcgetanx nouveaux; premier fascicule ; par MM, Paul
de LA Llave et Jean Lexarza. Mexico, 1824; A. Rivera.
Grand in-8° de 32 pages.
Celte premiere livraison renferme la description de quarante
especes de plantes mexicaines nouvelles, parmi lesquelles se
trouvcnt treize genres nouveatix. Des figures seraient neces-
saires pour faire mienx connaiire les caracteres de ces nou-
veaux genres que les descriptions laissent un peu confus. Les
auteurs promettent qu'ils en enrichiront les livraisons sui-
vaiitcs. V. J.
EUROPE.
GRANDE-BRETAGNE.
i3i. — * Memoirs of the court of Henry the Eighth , etc. —
Memoires de la cour de Henri VIII ; par M'^^ A.-T. Thomp-
son. Londres , 1826. 2 vol. in-8°; prix, 28 sh.
Get ouvrage, du a la plume d'une femme, ne peut que re-
hausser la gloire de ce sexe, q!ie certains hommes voudraient
condamner a I'ignorance et a I'obscurite. II annonce dans son
auteur un digne eraule de Miss Aihin et de Miss Benger ; et ce
qu'avaient fait celles-ci pour les rogues d Elisabeth, de Jac-
ques I, de Marie Sluart , etc., a etc accompli par M''* Thomp-
son , pour celui de Henri VIII. Ectits avec simplicite, d'apres
des documens dlgnes de foi , ces memoires ne sont pas moins
inleressans qu'instructifs. F. D.
\Zi. — * Musoeuin criticum , etc. — Musee critique , ou Re-
cherches classlques a I'usage de I'Universite de Cambritlge.
N° 8. — Londres, 1826; Murray.
Voici le dernier cahier du seul journal classique un peu in-
teressant public dans la Grande Bretagne ; bieu que dirigepar
les humanistes les plus dislingues de I'Angleterie, ce recueil ,
conime tous ceus qui so;it extlusivement consacrcs a la litle-
rature ancienne, n'a jamais obtenu un grand -succes. Ce fait
serait-il la preuve et le rcsultat d'un grand changement dans
resi)rit national? N'en doutons point; on est enlin convaincu
qu'il est possible de se distinguer au barreau ei a la tribune,
sans avoir lu la Rhetorique d'Aristofe, et ra^me d'etre p.oete ,
sans imiter Virgile et sans traduire Euripide.
R. K. , de I' Unii'ersite de Cambridge.
400 LiYRES Strangers.
i33. * Canto a Bolivar, etc. — Chant h Bolivar stir la ba-
taille de Junin ,par J. J. Olmedo , Londres , 1826. Ackermann.
In-8", avec trois gravuies.
Les grands fails d'armcs qui ont ancantila puissance espa-
gnole dans la patrie des Incas devaient enflanimer i'imagi-
nation d'un peuple passionne pour !a liberte, el entoure d'une
nature rianle ct raagnifique. Ce sent ces grands senlimens na-
tionaux que M. Olmedo , ne au pied des Andes , retrace avec
tout renlhousiasme qu'une si belie cause inspire. Dcpuis long-
tems , la poesie lyrique tspagnole s'est trainee sur les pas
des grands modeles du xvi"'" siecle. M. Olmedo, sans blesser
les regies du bon goiil, revet ses images el son style de celte
pompe , de cetle grandeur que la nature montre partout dans
les regions fortunees ou il a vu le jour. On admire surtout ,
dans ce poeme auquel il a donne le litre raodeste de chant,
la prediction du dernier des Incas, qui , temoin du courage
et du patriotisme de Bolivar et de Sucre , revele I'avenir glo-
rieux que la liberie promel a son pays. L'execulion typogra-
phique de eel ouvragc fait honneur aux presses de M. Calcro,
I'un des nombreux proscrils qui sent venus deniander an
asyle a I'Angleterre. L'une des trois gravures que renferme
ce volume , est due au burin d'un artiste de Paris , et repre-
sente la medaille frap.pee en rhonneiir de Bolivar , par !e
congres national de Colombie. — M. Olmedo , qui se trouve
dans ce moment a Londres, en quallte de chargp d'affaires
de sa republique pres le gouvernemenl anglais, est autcur
d'une traduction de Pope tres-estimte. J. J. ue Mora.
i3/i. — * Gaston de Blondeville. — Gaston de Blondeville,
ou la cour de Henri III a Ardenne, roman; siiivi de YAbhaye
de Saint- Alban , conte en vers, et de quelques autres poesies
fugitives, par Anne Radcliffe, precede d'une Notice sur la
vie et les ecrits de cet auteur. Londres, 1826; Colburn. 4 vol.
in- 8°; prix, i 1. 18 sli.
C'etait aux approclies des fetes de Noel qu'accompagne de
son favori, lejeune et vaillant Gaston de Blondeville, Henri III
traversait la foret d' Ardenne , pour se rendre a son chateau de
Kenilworth. Dcja les antiques tourelles de cetle habitation
royale se faisaient voir dans le loiniain, lorsqu'un evencment
extraordinaire vint arreter les illustres voyageurs et apporter
une terrible diversion aux plaislrs non interrompus d'un long
voyage qui ressemblait jusqu'alors a un Iriomphe. Entoure de
sa cour, le roi d'Anglelerre se preparait a f.iireson entn'e dans
Kenilworth, lorsqu'un inconnu se presente, lui demandant
justice. Cet inconnu elait un marchand de Bristol, nomme
GRAKDE-BRETAGNE. 4oi
Woodreave, se disaiit parent d'un chevnlier aulrefois nssas-
sine par Gaslon, et qui venait demander la reparation de re
crime. Mais, que pent raccusation dun simple sujet contre lo
favori d'un prince ? La verite passe alors pour calomnie , et les
preuves produites par roflense lombent devant la denegation
(lu coupable. 11 en lut ainsi dans cetle circonstance. Woodreave
futjele dans un cachot, et la main d'une princesse recom])ensa
la fjdelite , la vertu et le courage de Gaston de Biondeviile.
Heureuseraent , le bonheur de? medians n'a qu'un terns,
n Dieu sait , quand 11 lui plait, reveilier la poussiere de la tombe
pour effrayer , convaincre et piinir le coupable. « Une \oix
vint consoler le prisonnier et lui predire la punltion de I'as-
sassin. En ef'fet, des cet instant, un spectre est sans cesse sur
les pas de Gaston : il interrompt la curemonie nupliale; il le
poursuit de I'eglise a la salle du festin et de la salle du festin
au milieu des concerts et des fetes. Tantot couvert du linceul
funeraire, il veut elelndre les flambeaux d'hyinenee qui brulent
sur k's autels; puis, sous les traits d'un barde, il -vient devant
la cour chanter ses inalheurs et le crime de Gaston ; enfin , pi e-
nant la forme d'un magicien, il lepresenie dans une suite de
tableaux toute riilsloire de sa vie. C'est d'abord un preux che-
valier, parlant pour la Terre-Sainte, recevant les adieux de sa
feinme et de ses jeunes enfans. Viennent eusuite des scenes de
combats livres entre les chreliens et les infideles; en fin , le
tableau du retonr du croisc et son assassinat dans la I'oret
d'Ardenne , par un chevalier, ressemblant a Gaston, de port
et de figure...
A ce spectacle, les salles du banquet sont en confusion. On
accuse, on defend le favori du roi : les uns attribuent a la
magie, les autres a la justice divine ces effrayans tableaux. On
attend , on s'agile , on murinure ; on vcut se saisir du magicien ;
iiiais ce!ui-ci, apparaissaul arme de ]>ied en cap, se fait place ■
a travers la foule , denonce Gaston comme son meurtrier; et
le provoque a un combat singulier. Gaslon succombe sous le
poids des preuves qui I'accablent; son crime est avere et puni,
et Woodreave est rendu a la libertc.
Tel est le canevas du ronian jiosthume de Teffrayante
AnneRadcliffe. Quoique infcrieur aux Mjsteres d'Udolphe, il
sera certaineinent admire ])nr ces vieilles douairieres qui ad-
racttent, comme articles de foi, les superstitieuses legendesdcs
siecles d'ignnrance et de galanterie feodale dont elles revent le
relour. Ceux qui, comme nous, trompes par le titre : la Cour
de Henri III, couimenceront la lecture de I'ouvrage, en
croyant y trouver des peintures analogues a celles do AValttr
T. XX.XI. — Jout 1^76. aCi
40.1 LIVRES liTRANGERS.
Scolt, acheveront cette lecture, captives par des descriptions
charmantes et par des scenes vraies et patlieliqucs, tout en
regrettant qu'unc aussi brilhmte et fcconde iniaginatioii u'ait
cree trop souvent que de vaines et absurdes cliiineres.
La notice bibliograpliique, qui precede ce roman , est ecriic
avec soin , et presente des details interessans sur la vie de
M"" Radcliffe. F. D.
Revue sommaire des rccueils periodiques sur les sciences , Ics
leltres et les arts, pubiies dans la Grcinde-Bretagne. —
Dixicme article. ( Voy. Rev. Enc, t. xxv]i,p. 7(>7-770,
t. xxvin, J). i49-i56, 799-80/1; t. XXIX, p. 1/11-148,
463-468 et 747-7^6, et xxx, p. 121-126,. 419-424, et ci-
dessus p. i24-i3i.)
Suite des journaux hebdomauaires.
Sciences morales et religieuses.
i35. — * The Spirit and manners of the age , etc. — L'esprit
et les iTioeurs du siecle. N° 26. Londres, samcdi 24 juin 1826;
Westley. In-8° d'uiie feullle; prix , 3 pence ( troi* decimes.)
1 36. — The christian Monitor , etc. — Le Moniteur chretien.
Londres, sainedi i juillet 1826. Westley. In-S° d'une fcuille;
prix , 4 pence.
137. — The Pulpit, etc. — La Ch-iire , n° 167. Londres,
jeudi 29 juin 1826, Knight et Lacey. In-S" d'une feuille, ini-
primce sur deux colonnes; prix , 3 pence.
Ces trois recucils complclent la liste des nombreux jour-
ueaux religieux , publics a Londres. Corame tous ceux du
meme geiue que nous avons passes en revue, ils offrent un
melange de sacre et de profane, en prose et en vers. Le.s cdi-
teurs clierchent bien inoins, en general, a faire des proselytes
<]u'a inaintenir les fideles dans !enr ancienne croyance. Les
trinitaires el les unitaires; ceux qui adniellcnt la transsubstan-
tiation , et ecus qui rtjetlenl cette doctrine; ceux (|ui croienl
au sommeil dans la lonibe jusqu'a la resurrection du corps, et
ceux qui annoncent un sejour inlermediaire dans le jiurga-
toire, comnie ceux qui croieiit a la transmission immediate de
I'ame au ciel; le catlioliquc qui soutient la suprematie du pape;
I'anglican qui sonlient celle du roi d'Anglelcrre; ceux qui as-
surent que Jesus, fils de Sirach , fut le .lesus des evangellsles ,
comme ceux fiui dlsent que deux contemporains du meme nom
enseigneient les mem es doctrines; le Jiiifcjuipreferelesabbat dc
GRAINDE-BRETAGNE. /jo 3
I'ancienne loi, et le chretien qui adopte cclui de la nouvelle;
lous enfin sentent la necessite d'eviier dans leurs ecrits ces
controverses scholastiques et cetle mysticite theologique qui
pitraisisent ne plus convenir a notre epoque. L'auslere metlio-
diste preche encore des regies severes, et le scrupuleux catho-
liqiie, I'omnipolence du pape; mais tous ont appris qu'il faut
arauser ou instruire ])our etre lu.
Plus que tout autre journal , I' Esprit du siecle seinble
avoir senli cette verite. L'homnie du monde pent aussi bien
que rhomme religieux le lire avec interet : abandonnant a
celui - ci Texamen des nodtieres traitees dans lesdeux sections:
chronique de la chaire et commenlaire de I'ecriture , il trou-
■verait sous ces litres : Meinoires et Notices , Esquisses histo-
riques , r Avocat chretien, Analyses et Melanges , des articles
instructifs et interessans. Ainsi, nous avons remarque dans
le premier numero de ce recueil , un article contre I'esclavage
ecrit dans un esprit de philantropie toufe chretienne; una
Notice biograpliique d'un grand interet sur Sheridan, et una
ode aux etoiles, riche d'idees et de poesie. Les numeros sui-
vans conlenaient egalement de tres-bons articles. Ceux qui
concernent lord Ryron parailront sans doute un peu seve-
res; mais on applaudira ceux qui sont signes, Theta et
Theodore. — Le Moniteur chretien est redige sur le meme
plan que le recueil precedent; mais il est inferieur dans le
cLoix des maticres ; nous y avons vu pourtant un tres-bon
article sur I'education des classes pauvres. La Chaire consacre
trop d'espace aux sermons preches dans les differentes eglises
de Londrcs; il est vrai que ces sermons respirent presque tou-
jours une morale pure, et contieunent d'excellentes lecons
morales; mais les ecrits destines au peuple doivent reunir
I'agreable a I'ulile , et les sermons ont rarement ce double
raerite.
II. Jurisprudence.
i38. Law Chronicle , etc. — Chronique judiciaire. Loudres,
jeudi 6juillet 1826. Peters Hill. Grand in-folio de deux feuilles ;
prix , I sh. 6 p.
I'ig. Law Advertiser , etc. — Affiches judiciaires. Londres ,
jeudi 6 juiliet 1826. Chancery Lane. Petit in-folio , de deux
feuilles; prix, 7 pence.
140. Hue and cry, etc. — Clameur de haro. Londres,
juin 1826. Strand, ]N° 240. Demi-feuilie grand in-folio. (IVe
se vend pas.)
Dans notre revue des journaux mensuels et irimestriels ,
/)o4 LIVRES ETRANGERS.
nous avons neglisjd , faiite de renseignemens suffisans, de fairo
connatire les recueils consacies a la science du droit. CeUi-
omission sera r6paree dans nn appendice. Quant mix trois
feuilles dont nous venons de donner le litre, elfes sont d'unc
mediocre importance; les deux prfmieres conliennent la lisle
des causes appclces devant les diffcrcntes cours de justice de
Londres ; !e nombre des banqueroutes dcclarees dans la se-
maine , enfin, des annonces et des avis judiciaires. La troi-
sieme rend ronipte des affaires qui ont ete jugt'es devant les
fribiinaux de police de Londres, et contient la liste des mili-
Jaires descries de leuis corps. C'est une sorte de Gazette de
police, qui ne se vend pas, et n'est publiee que toufes les
trois semaines.
in. Politique.
iZ|i. CohbelCs Register^ etc. — Registre de Cobbetl , t. lviii,
n° i5. Londres, samedi 8 juillet, 1826. Clement, Fleet-street.
In-8° d'line feuille d'impression ; prix , 6 p.
14*. The Re pub Lie an, etc. — Le Republicain, par P». Carlile,
tome XIII, 11° 27. Londres, vendredi, 7 juillet 1826. R. Carlile,
1 35 Fleet street. In-8° d'une fenille et deuiic; prix , 6 ]).
Aucun j)ami>hletaire vivant, anglaisou clrant,'er, ne saurait
eire compare a Cobbett, le ])lus fougueux athlete du radica-
lisme. Cet liomme, done d'ime imagination ardente, d'une
grande eloqiieiice revolutionnaire , d'une hardiesse a loiile
cpreuve et d'une confiance en lul-meme, qui vajusqu'a I'aveu-
gleroent, a joui long- teins parmi ses coneitoyens d'une repu-
tation gigantesque. Peut-etre citerait-on difficilement un ccri-
vain qui ait cliange aussi souvent de banniere que Cobbett;
peut-etre aussi n'exista-t-il jamais de ])rophete moins heu-
reux que lui dans ses predictions. Long -temps antipapiste,
il est papiste aujourd'hui.
L'eloquenee de Cobbett ne consistepas a demonlrer par des
argumens la justice de la cause <iu'il defend , et a combaltie
par des raisonnemens les doctrines de ses adver^aires. Le sar-
casme, les personnalilcs sont ses armes favorites. 11 excite les
passions du peuple , et ])reche Tinsurreclion.
Si Cobbett avait eu la precaution de reculer d'une cinquan-
taine d'annees I'i'poque fixee pour I'acconiplissement de ses
predictions, et surtout s'il s'etatt moins occujie de lui, dans
ses brochures, il jouirait encore d'une grande popiilariie.
Mais aucune de ses projihelies ne s'est trouvee rcalisoe ; et
Cobbett , negligeant la multitude pour n,e songer qii'a lui-
meme, exallant sans cesje ses talens et sesvertus,a vu tornl)er
I
GRANDE-BRETAGNE.— RUSSIE. 4o5
sa renoinmee, et dimlnuer de raoitie le nombre de ses lec-
teuis.
Ainsl que le Registre de Cobbett , le Republicain de Carlile
appelle a grands cris une reforme dans les institutions an-
glaises; mals il veut probablement I'obtenir par des moyens
differens de ceux que propose Cobbett. Car ses patjes sont la
critique la plus amere de la conduite et des principes de ce
fameux pamphletaire. II est deplorable que des hommes tels
que lui se disent les amis de la liberie. Leurs ccrits , degoii-
tans par de grossieres injures, nepourraient que compronicltre
la cause qu'ils voudraient defendre. — Nous ne connaissons
du Rrpublicain quece 27* numero ; nous ne savons pas preci-
sement jusqu'a quel point ses principes different des opinions
du Registre. Nous y avons iu avec plaisir un article sur la po-
litique suivie ]iar les differens elals de I'Europe et de I'Anie-
rique. Sa tendance nous parait digne d'cloges ; mais nous
craignons que I'exageralion ne se glissc trop souvent dans les
pages de ce journal. F. D.
( Celte Revue des Journaux anglais sera continuee. )
RUSSIE.
i/|3. — * Pis ma morsharo qfitzera , sloujachtchija dopolne-
nieme h'7,apisham morshavo ofitzera. — Lettres d'un officier
de la marine, desSinecs a servir de supplement aux Papiers
d'un officier dela marine. Moscou, i825. In-8'^ de xiv et 270 p.
Se trouve aussi a Saint-Petersbourg , chez Smirdine el Sleu-
iiine;prix, i5 roubles.
Les Papiers d'un officier de marine sont, de I'avis des con-
naisseurs, une des productions les plus Interessantcs, les jjIus
plquantes meme qui aient paru en Russie depuis le commen-
cement de ce siecle. L'auteur (M. Bronevski ) y a consigne un
grand nombre d'observations et de reflexions sar toutes sorles
de contrees, et surtout des eclaircissemens sur les mouvemens
de la flotte russe dans la Mediterranee , sous le commande-
ment du \ice-amiral Siniavine. Ce savant a recueilli, depuis,
un grand nombre de nouveaux renscignemens, et il lui en a
ete fourni, en outre, par plusieurs de ses freres-d'armes,
parmi lesquels nous devons nommer surtout M. Nicolas Vassi-
lieviich Karobka. Les lettres que nous annoncons ne sont que
le supplement de ces Papiers : elles renferment egalemenl
beaucoun de donnees statistiques , topographiques, historiques
et eihnographiques sur diverses contrees et sur plusieurs
villcs, ainsi que des anecdotes d'un grand inleret, des notices
lioG LIVKES liTRATVGERS.
sur quelques contemporains illustres, ou deja bien conniis,
dcs notes sur quelques productions distinguees de la littera-
ture, des pensees philosopliiqiies et iin choix de traits singu-
liers , relatifs a differentes nations. C'est un livre qui se recoin-
n)ande a plusienrs litres, ct qui rie inancjuera pas de lecteurs.
1 44' — * Su/ihotrorcnia Alexandra Pouclieldna. — Poesies
de M. Alexandre Pouchesine. Saint - Petersbourg, 1826.
In-8" de XI, 192 p. 5 prix, id roubles.
Ce recueil d'un poete qui joiiit dans son pays d'une tres-
grande reputation (i), et qui est aussi distingue par ses lumieres
et son esprit que par la chaleur et rcclal de son imagination,
contient des productions charmantes dans plusieurs genres de
poesies. On y compte 17 elegies, 21 epigrammes et epitaphes ,
12 imitations de poetes anciens, 16 epitres a divers litterateurs
russes et a quelques dames, g imitations du Coran et 24 autres
pieces dont on ne saurait rigoureusement assigner le genre.
II a recu Taccueil le plus flatteur de tons ceux qui s'occupent
des lettres en Russie; et sans doute les journaux litteraires ne
man(|ueront pas de nous faire apprecier les productions qu'il
renferme (2}.
i/,5. * Dassougui sellshavo gitela. — Les Loisirs d'un habi-
tant de la campagne ; poesies du paysan Fedor Slaipouche-
KiNE. Saint-Petersbourg, 182G. In-S** de vii-ioo pages, avec
\e. portrait de I'auteur; prix , 5 roubles.
Les amis des lettres en general, et special^roent ceux de la
litterature nationale en Russie, ont accueilli avec intertt cette
publication tres-remarquable. Un bon et modeste habitant de
la campagne, qui consacre les momens de loisirs que lui lais-
sent ses occupations journalieres a des delassemens aussi nobles
que doux, a droit sans doute a toute notre attention. Fedor
Slaipouchekine est ne , en 1788, dans I'arrondissement de Ro-
manof, gouvernement d'laroslaf, sur les terres de M'"" Novos-
siltsof , nee comtesse Orlof. C'est de son pere qu'il a appris a
lire et a ecrire; mais les travaux auxquels il a du se livrer des
sajeunesse ne lui ont jamais perinis de faire d'autres etudes, «
ni de lire aucun Iraile sur I'art poetique. Depuis 12 ans, il V
liabite I2 grande Slobode despecheurs, a i5 vcrstes de Peters- '^
(l)Voy. Rev. Enc. , t. xxx, p. 428 I'annnonce d'une prodnclion decel
iioteur, traduite en vers francais.
(j) Get article de noire correspondaut ne fait qu'annoncer la pnblica-
IroQ d'un recueil que tous les amis des lettres attendai^nt avec beaacoup
d'irapatieoce, et dont nous serions heureux de pouvoir offrir I'analy.se j»
nns lecteurs. Nous invitons I'editeur a nous le faire parvenir. N. d. R.
RUSSIE. 407
boiirg, sur te chemin de Schliisselbourg, et tient ce qu'on
nomme ici une melousinc, c'est-a-dire, qu'il fait un traficde
fruits et d'cj)lces. Ses poesies doiventetre regardees comraedes
productions de la simple nature; on y trouve des details frap-
pans de verite et plelns d'inlcret. Du reste, on se tromperait
fort, si Ton s'attendait a y trouver les brillantes couleurs de
I'iiuagination et les orncraens recherches de I'art. Pour bien
juger ce poete nouveau, il ne faut pas lui appliquer les regies
ordinaires; ses productions plaisent sans etre re^ulieres; elles
n'ont rien d'extraordinaire, de saillant, de bien ingenieux
meme; mais elles n'en conviennent que plus aux hommes de
toutes les conditions. Voici le jugemenf que M. Boulgarine ,
juge competent, en porte dans V Jheitle du Nord , ( Set'ernaia
Ptchela ). « L'instrument que les Muses ont accords a ce poele
rustique , n'est pas la lyre sonore d'Apollon, qui cnchante
les deesses elles-raemes; c'est la flute modeste dont Jes sons
charmerent la solitude du dieu devenu esclave du roi Ad-
mete. »
Ce phenomene n'est pas aussi rare dans le Nord qu'on serait
lente de le croire. A Moscou , un jeune paysan vient de chan-
ter la memoire d'Alexandre, et ses vers ont ele juges dignes
d'etre lus a la Societe imperiale pour I'histoire et les antiquitcs.
]\ous avons entendu parler, en Courlande, d'un paysan aveu-
gle , dont les vers sont repandus dans tout le pays et souvent
reproduits par la Gazelle lellonne que publie I'infatigable
pasteur Watson.
Pour revenir au livre qui nous occupe, nous dirons que
I'editeur, qui a garde I'anonyme, a rendu un veritable service
aux amis de la litterature nationale , en publiant ce premier
recuei! de poesies. Nous devons cependant avouer que quel-
ques-unes de ces productions nous paraissent d'un genre un
pen trop difficile el le metre en general trop varie pour qu'il
nous soil possible de croire, malgre les defauts nombreux qui
peuvent s'y trouver, que I'auteur n'ait pas etc- seconde, ou
plutot qu'il n'ait jamais rien appris sur le mecanisme des vers.
— Le portrait de I'auteur, avec sa barberusse, orne le fron-
tispice du livre, qui se compose d'une cinquantaine de nior-
ce,anx de poesie tres varies, dont le premier et le dernier
s'adressent a Dieu et respirent une douce piete. Nous citerons
la devise en vers russes qui se trouve sur le litre : « Je n'en-
lends rien a la science , mon gout ne soutient point la critique.
On me loue? Je m'en rejouis au fond de mon ame; on me
blame? .le n'en suis point abattu ! »
Les Loisirs de Slaipouchekine ont ele presentes a la famille
.'io8 LI V RES ETR ANGERS.
impih'iule par M. I'amiral Cliicliekof, iriinistre <le rinslriicu'ot/
imblique, ct lui-iniime litterateur distingue; I'empeieur Nico-
las , et les iinprratrices Alexandra Feodorovna et Marie Feodo-
rovna lui ont fait exprinier leur satisfaction; le premier, en lui
fnisant. reniettro un supeibe rafetan ( liabit rnsse ) en velours,
el Ics imperatrices, en lui donnant cliacune nne montre en or.
I/Academie imperiale rnsse, ay:int aussi pris connaissance de
ses travaux, a voulnlcs encourageret les rt'compenser , en lui
d^cernanl la medaille en orde la scconde classe, par les mains
de son jiresident, M. I'amiral Cliicliekof. Nons croyons faire
jilaisir a noslecteurs, en rapporlant la Icttre dece dernier, avec
1 1 reponse du pocte canipagnard.
« Unnorable campagnard, Fedor Nikiforovitch ! I'Acade-
mie iinperiale rnsse a pris connaissance, dans sa seance du aS
Janvier dernier , de tes poesies , ])ubliees sous le titre de Loisirs
d'un habitant de village. I.'Acadi'jmie , rempiie d'admirntion
pour tes talens natiirels, se plait a reconnaiire la beauie deles
productions, tant sous le rapport du bon gout ct des bonnes-
moeurs, que sous celui de la simplicile, dela noblesse du style,
et de la jmrete du langage, qualitcs conformes aux t;ibleanx
champelres. Inforniee en meme lems que, charge d'une fa-
mille qui demande tessoins, tii n'as jamais neglige les occupa-
tions qui conviennent a la condition dans laquelletues nc, que
neanmoins, et sans le secours de personne, tu as appris la
peinture , et que tu as merite par ta bonne conduite I'approba-
tion de ceux qui te connaisseut, rAcadciuie, desirant t'offrirun
encouragement, t'a destine une recompense de ta vie hono-
rable et de tes efforts , qui consiste dans la med;ii!le d'or de la
seconde classe avec la legende : « ^ celui qui a liicn merite de la
langiie rnsse. » En te la transmettant de la part de I'Academie ,
je desire que In vives long-tems, et que, par de nouveaux ef-
forls, tu te rendes plus digne encore de fixer I'attention. »
3 fevrier 1826. — Le ministre de I'inslruction publique ,
president de I'Academie imperiale russe.
Signe Alexandre Chichekof.
Reponse : — « Le ])ay5an Fedor Slaipouchekine adresse
de.i remercimens bien sinceres a I'Academie imperiale russe.
— Ta celebrite, briHante reunion d"hommes tres-eclair^s , a
fait honrieur a ma simplicile, ta bicnveillance a bien voulii ve-
nir trouver mon indigence, et tes iumieres n'onl point dcdai-
gne mon savoir insignifiant. Tu reconi])enses mes efforts avec
une generosite sans exemple. — Coininent t'exprimer, comment
le prouver ma reconnaissance? Par r|uels nouveaux efforts
])ourrai-je meriter ce qui deja m'est tombe en pnrfage? Ma
RUSSIE.— IVORViGE. 409
vie pouiTa-t-elle me rendre digne d'une telle attention ? Ah !
chacun est oblif^e ytar sa foi et sa conscience de vivre irrepro-
chablement, etje n'ai rien a t'offrir, si non mes piieres pour le
bonht'ur de chacun de tes membres; je ne puis qu'adresser
nies voeux an snpreme dispensateur du bien pour qu'il les
comble de toutessortesdeprosj^erites. — Ayant troiive un asyle
dans tes hautes liiiniercs et dans ton coeur bienfaisant , je suis
jii.'-qu'au lombeau , avec les sentimens d'une profonde venera-
tion et dune entieie reconnaissance, de rillnstre et ti es-eciai-
rt'e Sociele le tres-hninble servileur. 6 fevrior 1826.
Fedor Slaipoocbkkine, paysan de M""* de Novossiltsof ,
nee comtesse Oriof. S — r..
NORVEGE.
1.46. — Fjeldeventyret. — L'aventure dans les raontagnes :
oj)era-comique , par M. H.-A. Bierregaard ; mis en musique
par M. fV. Thrane. Christiania, iSaS.
Deux motifs nous determinent a faire I'annonce de cette
bagatelle dans la Beiue Encjclopedique. D'abord c'est le pre-
mier opera comi()ue qui ait ete ecrit et mis en musique pour
etre represenle dans le royaume de Norvege. Ce pays ne po.s-
sede pas encore des theatres publics; mais il Y a dans toutes
les villes un pen consideiables des societes d'amateurs qiii
jouent des comedies et des opera-comiques, pendant la saison
rigoureuse de I'annee ; et bientot, sans douie, ia ville de Cliris-
tianiadontla population a presque doiible depuis douzeannees,
sentira le besoin de I'etablissement d'un theatre regulier. Notre
second motif est bien ])lus puissant, et nous saisissons avec
empressement I'occasion de faire connaitre sous un autre rap-
port i'auteur des ])aroles de cette piece. M. Bierregaard est I'un
des avocats les plus distingues du tribunal supreme du royaume,
siegeant a Christiania. C'est en cette qualile qu'il a eu I'hon-
neur d'ouvrir la session de cette annee par un discours, qui
respire un ardent amour de la palrje et un attachement sin-
cere aux institutions eta la libertii constitulionnelle , garanties
par la loi fondamentale du royaume. A en juger ])ar lous les
renseignemens particuliers que nous avons recus, les cours de
justice et les tribunaux norvegiens conservent et manifestent
presque iiarlout une noble independance; ce sentiment est si
])rofondement grave dans tous les coeurs, que les vues interes-
^ees et la pusillauimite d'un bien petit nombre d'individiis ne
parviendront probablement jamais a faire changer une seule
cK's dispositions de la constitution. Sans doute, ellcs ne sont
4ia LIVRES ETRANGERS.
pas Ionics egalement bonnes; mais on craint de voir redifire
enticr s'ecronler, si I'on rc-ussissait a faire relirer nne seule des
pierrcs sur Icsqiiclles il repose. Pour revcnir a ropcra-comi-
que , nous y avons Iroiivo du talent et de I'esprit. Le suiet est
do i>ure invention; mnis, etant tout-a-fait national, ainsi que
les caractcres , il doit plaire aux Norvegiens, et c'est ici tout
CO qu'on a Ic droit d'exiger. Heiberg.
DANEMARK.
147. — Delerminismen , etc. — Le Determinisme , ou Hume
oppose a Kant; par Francois- Gotthard Hovitz, docteur en
medecine. Copenbague, 1824. In-8°de xn et 180 pages.
148. — Fortsatte Betragtninger , etc. — Considerations sur
le libre arbifre de I'boranie, a I'occasion de I'ouvrage prece-
dent de M. Hovitz; par M. le docteur 4.-S. Oersted , depute a
la cbancellerie royale danoise , etc. Copenhague, 1824. In -8°
de 126 pages.
1 49. — Ultimatum , etc. — Men dernier mot sur le Deter-
minisme et les considerations de M. Oersted ; par le docteur
F.-G. Hovitz. Copenliague, 1825. In-S** de 68 pages.
Le Determinisme est \in mot nouveau, que Ton a cru devoir
creer pour une discussion, ou il s'agit d'etablir si, dans ses
actions, riiomrae se determine par une soumission passive a
certains motifs , ou librement , apres les avoir examines.
M. Hovitz , medecin distingue , auteur d'un ouvrage sur la de-
nience, que nous regretlons de n'avoir pu lire, defend le pre-
mier de ces systemes, combaitu par M. Oersted, I'un des plus
celebres jiirisconsultes du Danemark, et par plnsieurs autres
savans, dont nous ne connarssons les ouvrages que par leurs
titres. On croit que c'est ici une question de medecine legale ,
discutee j)ar deux hommes dont la competence est egalement
legitime , quoicju'elle se fondc sur deux sciences tout - a - fait
differenles. Plnsieurs motifs nous empecbent d'analyser ces
brocbures avec !e soin qu'exige I'importance du sujet. D'a-
bord, nous ne pouvons pas remontcr a la source, c'est-a-dire,
au premier ouvrage de M. Hovitz, (|ue nous n'avons pas en-
core vu ; pui<i , notre analyse exigerait des details d'tme elen-
due incompatible avec le plan de ce recueil ; ensnite, nous
craindrions de pencher vers une doctrine , qui jouit de pen de
faveur, qiiolqu'elle fut exempfe de toute consequence dangc-
reuse,sielle etaitbicn expiiquee et bien comprise; enfin, dans
une telle matiere, nous devons franchement avouer notre in-
suffisance. Non nostrum est... tantas componere lites. II nous
DANEMARK. An
suffira done d'avoir iiidique I'existence de ces brochures , d'a-
voir rendu justice a I'cnidition el a la sagacile de leurs anteurs,
et de provoquer ainsi i'altention des liommes instruils qui se
livrent specialement a des recherches de cette nature. Cepen-
dant, nous cilerons un passage de la premiere brochure de
M. Hovitz, partisan decide de Hume ct de la philosophic an-
};;laise, ou plutot ccossaise. « II parait , dit-il, ( p. 119 ) que ,
dans ce pays ( en Dancniark ) , toute philosophie , qui n'est pas
celle de Kant, ou qui ne vient pas de I'Alleniagne, est une es-
]>ece de denree de contrebande, qu'on ne devrait jamais se
permettre d'exposer anx yeux du publics II avail deja dit,
<lans sa preface :« Je crois qu'un peu plus de la perspicacity
anglaise, de la clarle francaise, et du bon sens pratique Ae
I'nne et de I'aulre de ces deux nations, ne ferait aucun tort a
la litterature danoise, et qu'elle n'aurait point a rougir d'a-
voir acquis ces qualites » Je ne crains pas d'avouer que je
j)arlage Topinion de I'aTiteur, du moins en ce qui concerne ce
dernier jugement, mais loulefois en rcndanl justice a I'erudi-
lion et a la profondeurdesecrivainsallemands.
M. Hovitz avail intitule saderniere brochure, son Ultimatum,
ou son Dernier mot. Malheureusement , en ecrivant ce litre,
it ne prevoyait pas qu'une terrible nocessite le foi'ceralt de te-
nir sa parole. I) est mort pen de mois apres , a I'age de trenle-
six ans , et le Daneniark a perdu en lui , non - seulementun
citoyen estimable, mais »in savant medecin qui promeltait de
fonrntr une longue carriere, non moins honorable pour sa
patrie que pour lui-meme. Heiberg.
i5o. — Svend Grathe. — Suenon, surnomme Graihe , roi
de Danemark : Tragedie en cinq actes el en vers libres. Co-
penhague, i8a5. In-8" de 160 pages.
Nous avcns annonce, il n'y a pas long-lcms, une autre tra-
gedie danoise, Jula, reine de Dancmarh , ( Voy. Rev. Enc. ,
t. XXIX , p. 760 ) el nous lui avcns donne des eloges , que nous
croyons bien roerites. IVotJs voudrions pouvoir juger anssi fa-
vorablement celle que nous annoncons aujourd'hui; mais son
nierile nous parait bien inferienr a cehii de Juta ; et quoi-
qu'elle ait ete representee , peut-etre avcc un certain succes, au
theatre de Copenhague, nous croyons qu'elle aura bien de la
peine a s'y soutenir long-ferns. L'auteiir anonyme de cette tra-
gedie a egalement choisi son sujel dans lesannales duroyaume.
II remonte au milieu du xii'' siecle. Alors , il y avail trois com-
])Ptiteurs au trone de Danemark: Srend, Canut et Valdemar.
Apres de longues lultes et des combats sanglans, « des paroles
de paix , prononcces par Svend ( Resume de I'histoire de Da-
4iJ LIVRES ^TRANGKRS.
netnark , )iar M. Latni, p. 70) fiirciit ocorilt-es de ses rivaux ;
il se tint une confoience a Roschild ; on divisa le Danetiiark
en trois parts, et les trois princes se declarerent amis. Un
banquet m.ignifique ayant ete prepare pour lerminer ccl lieu -
reux accominodement, tont-a -coup des satellites se procipitent
dans la salle , el par ordrc de Svend atlaquenl et ininiolent
Canut ; le nieine sort atlendait Vaidemar, si, se di'fendant avec
courage, ii n'eut ])rofite du desordrc et des lenebres pour s'e-
chapper rapidenient. » Vaidemar se rcfugia dans le Jutland,
donl les liabilans lui etaient tres-d(''voucs. 11 y fut ])oursiiivi
par I'armee de Svend, qui, lui ayant livrd bataille , fut vaincu,
et enfin assassine par un paysan. La tragedie est remplie de
scenes et de jiersonnages inutiles; et I'autcur a eu , scion nous,
le grand tort de placer en premiere ligne , et comuie le heros
de son poome, ce Svend, si perfide, si mcprisable, et qui
succoinba dans une lutte lionleuse. Au coutraire, en choisis-
sant pour principal personnage ce jeune Vaidemar, qui regna
ensuite avec tant de gloire, et qui obtint le surnom def^rand,
I'anteur aurait sans doute fait une tragedie bien stiperieure a
celle qu'il vient d'offrir au public; car, nous aimons a lui
rendre justice , il annonce un vrai talent. Mais ce n'est que
lorsque le tems et I'expcrience auront muri ce talent, qu'il
pourra prendre rang parmi les poetes qui honoreiit la scene
tragique danoise. Heiberg.
ALLEMAGNE.
•:»
i5i. — Strafgezetzhuch. — Code des peines : Esquisse ac-
compagnee de I'exposition des ])rincipes qui lui servent de
base; par Charles - Salomon Zachari*, conseiller inlime du
grand due de Bade, professcur a TUniversite de Heidelberg
et commandeurde I'ordredu Lion de Zaehringue. Heidelberg,
1826.
Quand on considere rimportance dusujet, I'experience du
savant qui le ;raite , les liautes fonclions qu'il exerce a la cham-
bre reprosentalive d'uu pays conslilutionnellement gouvern^,
on doit accorder \n\ vif interet a une production qui n'est
pas seulenient locale, mais qui pent s'appliquer utilement a
toutes les socieles. II serait inutile de recommander a I'atten-
tion du public un livre qui porte le nom de M. Zachariae. II
vaut done mieux se borner a examiner ce qu'il a fait de plus
pour le bien general. II pose d'abord des principes, dont le
premier est quil ii'y a nulle action /junissable , si elle nc porte
prejudice h autriti. Cctte assertion est ))oussee si loin (pie jc
ALLEMAGNE. /, i i
cloute qifoti l':i donne jamais cclte extension ; M. Zachariw
nc \oit , meme dans une association dont ie but est de com-
nietlre des crimes, qu'tin fait qui donne lieu a la surveillance
de Tauioiite ; dans Ie faux ou dans la faiisse nionnaie, abstrac-
tion faite de toute emission, qii'un fait rjue les lois jieiiales ne
doivent pas alleindrc. Aussi la punition des complols ne parait
a I'niiteur qu'nn effet de la force; ccs coinplots sont, dit - il ,
delicta uxcepta. La consecjuence de ce principe est qii'un delit
n'est punissable qn'aulant qu'il a cte accompli. La tentative,
meme suivie d'exccution , pourvu qu'elle n'ait pas eu I'effet
qu'en attendait son auteur, ne donne lieu, dans ce systeme ,
qn'a I'obligation de fotirnir une caution. Voici Ie second prin-
cipe : La criminalite d'une action ne depend pas du plus ou
rnoins de mal fait a autrui , mais de son plus ou moins dirn-
moralitc. — Le troisieme principe consisted n'etablir d'au-
tre peine que la j)rison , et Tauteur n'admet d'autre ex-
ception que pour deux ou trois cas. Sans discuter ici cette
|)roposition , nous citerons une remarque assez piquante de
M. Zachariae : « II y a, dit-il , des gens fort recommandables
d'ailleurs, mais qui ont pour la variety despeines une predi-
lection aussi grande que si c'etaient des beautes de la nature
ou de I'art. Ya-l-il done, s'ccrie-t-il, des remedes specifiques
contre certains delits, comrae il y en a contre certaines mala-
dies ? »Neanmoins, la peine de raort subsisterait, selon I'au-
leur, pour le crime de haute trahison , pour le parricide, ou
pour celiii qui aurait rompu le cordon sanitaire etabii contre
une maladie contagiense. En trailant ce sujet sous ses rapports
philosopliiques, M. Zachariae nous semble avoir fourni une
raison de plus contre la peine de mort. Les droits de la societe
sur les individus ne se composent que <le ceux de chaque mem-
bre de cette societe mis en commun. Or, la societe n'a pu re-
cevoir d'aucun d'cux un droit qu'il n'avait passnr lui-meme,
celui de disposer de sa vie. Aussi , c'est plutot comme droit de
la guerre et de la force (pie M. Zachariae adrnet la ])eine de
mort pour les cas qu'il designe. Lesamendes ne sontapplicables,
dans ce systeme , qu'aux faits dont I'immoralite n'est pas bien
conslatee, ou qu'accoiiipagnent des circonstances attenuantes.
On fait voir ensuite combien il imjiorte de bien organiser la
police preventive ; puis, on etablit en quoi un code penal doit
(iifferer d'un autre, selon qu'il s'agit de I'adapter a un eiat
despotique ou constiiutionnel, a un gouvernement nobiliaire
ou ralionel. Noi/s recommandons a I'attention les paragraphes
rclaiifs a I'independance du pouvoir judiciaire, a I'arbitiaire
d;i juge. IVoiis consacrerons un article particulicr a cette Es-
', t/, LI V RES ETIl ANGERS.
(] u isse dc code p^iial ; et , a cede occasion, nous eiitrc])reii-
drons de trailer plusieuis questions iinportantes.P. Golbkuy.
i52. — * Aari Leo/t/i. Heinholds Lebcn luid Uteraiischfs
fVirken. — Vie el travaux lilteraires de Charles Leonard ]^v.ni-
iiold; avoc iin r.hoix dc leltres de Kant, Fichte, Jacobi , pu-
blics i)ar Ernest Reinholu. Jena, i(Sa5j Fiommann. In-8" de
418 pages.
Roinhold n'est guere coiinu eii France : c'est pourtant un
des ecrivains allcniuiids qui out le plus coopere aux progres de
la philosopliie et de ia metaphysique. On le cite , en Alientagne,
toujours a cote de Kant et de Fichte; et , grace a son style
clair et ch'gaiit , il a eu plus de lecteurs qu'eux ; jiar son expo-
sition desprincipes de la pUilosophie de Kant , il les a lueine
fait connaitre a beaucoup de personnes qui ne les auraient
guere compris dans le langage de Kant lui-meme. Ccqu'il y a de
singulier, c'est que Reinliold , qui raourul en 1823, clant pro-
fesseur de plillosopliie a I'universile dc Kiel, el avec la reputa-
tion d'un des jjIus grands ])enseurs de TAllemagne protestante ,
avail debute par etre novice des jesuiles de Vienne qui s'etaient
empares de lui des I'age de i4 aiis. II n'etait pas encore sorti
de son noviciat, quand Ics jesuiles furent suppriuies. Son fds,
autetir de sa biographie, a inscre une leltre que Reinhold
ecrivit sur cet evenement; dans ies circonstances actuelles ,
cetle leltre est pour nous la partie la plus curieuse de toute la
biographie du phiiosophe; un adepte qui nous revele le re-
gime des bons peres , est un tcmoin qu'il est bon d'enlendre.
Lejesuile novice ecrit :» son pere, sous la date du i3 septembre
1773, que le jugement de Dieu a enfln eclalc , et que la nie-
chancete des homines a lasse la justice divine. Deja quelque
(ems auparavant , le pere general avail envoye dans toutes les
parties du monde une encyclique pour exhorter les jesuites a
la penitence ; dans le college de Vienne, peres et novicesavaieni
pris leurs repas a terre, la tele couverte de couronnes de paille,
et outre les disciplines dorsales publiques, chaque novice avail
obtenu la permission de se donner en ]>articuiier \d, discipline
espagnole ( I'auteur de la biographie nous apprend, dans une
note, que, pour la discipline espagnole, on t'rappail un en-
droitdu cori)S qui tsl a quelques peaces plus has que ledos). Ces
penitences etaient finies, et les novices venaient de passer le
jeudi a la maison de cainpagne de I'ordre, oii, coninie Rein-
hold le mande a son pere, il avail gagne quelques ave maria
a ses caraarades. II parait que les jesuiles avaient sanctifie tout
jusqu'au jeu de billard, ct que celui qui perdait la partie reci-
ALLEMAGNE. 4i5
tait, a I'intention dn gagnant, un nombie convenu d'ave ma-
ria : on appelait cela joiier a I'twe maria. Revenus dans la
ville, les novices remurquerent un mouvement extraordinaire
dansle college; mais, comine ils no pouvaient inerae se parler
entre eux sans I'aulorisalion dii snperieur, ils ne jjurent savoir
de quoi il s'agissail : le soir, on se donna encore la discipline
al'espagnolc. l.elendeniain , peres et novices furentrasseniblos.
Un chanoine de I'eglise mctropolilaine viiit lire la bulle du
pape qui declarait I'ordre des iesuites dissout, et on ajouta
que les novices seraienl renvoyes sur-le-cliamp. II faut niainte-
nant entendre le recil naif du novice Reinliold, qui elail alors
dans sa quinzierne annee. « Je comjjris bien (ju'il me fallail
relourner a la maison paternclle. Cependant, comnie je n'elais
pas encore dispense d'observer nos saints staluts, je n'osai
paspcnser a vons et a la maison paternelle; car c'est une chose
qui viole nos regies , a moins que ce ne soit afln de ])rier pour
les notres. Un chretien aussi zclc que nous, mon cher papa,
salt Ires-bien qu'il y a des liens plus sacres que ceux d'une
nature vicieuse, et qu'un homrae mort a la chair, et vivant
seulenient dans I'esprit, ne peut plus avoir, a proprcnient par-
ler , d'autre pcre que le pere celeste, ni d'aulre mere que son
ordresacre, ni d'autres parens que ses freres en Jesus-Christ,
ni d'aulre patrie que le ciel. L'atlachemenl a la diair et au sang
est, comine tousles theologiens le soutiennent unanimement ,
une des plus fortes chaiues par lesquelles Satan peut nous river
a la lene. J'eus en effet loute la nuit une lutte tres-penible a
soutenir contrc I'adversaire heredilaire de notre perfection; a
tout moment, il faisait passer devant raon imagination, papa
et maman , freres et soeurs, oncles et tantes, et meme notre
chambriere. Vous pouvez vous Cgurer I'angoisse que ma con-
science eprouva , jusqu'a ce que , ce matin , a 9 lieures , le ma~
nuductor ( chef des novices ) nous annoncat que le pere Recteur
nous permetlait d'ccrire a nos fauiilles, et de les preparer a
notre retour. Pour la plus grande satisfaction de ran conscience,
je demandai en mon parliculier une permission spcciale du
manuductor de pcnser a nies jilus proches parens, non-seule-
meut pour le tenis ou j'ccrirais ia lettre , mais aussi pour le resle
de la journee. Je I'oblins effectivement, excepte pour le tems
des meditations, de la lecture spirituelle et de I'angelus. Pour
contrarier encore davantage le maiin esprit, et me donner le
merite de I'obeissance , j'allai trouver le pere Recteur, avant
d'ecrire la lettre, el je le priai de m'ordonner d'ecrire a mes
parens. 0
Dans cette lettre naive, se devolle le systeme odieux des
;iG LIA'RES ETR/\.i\(iER.S.
jesuiics ; jiour avoir des jeunes gens tout devout-s a leur ftrdre ,
ils av.iienl cnlrepiis de lenr persuader que I'affecliou pour leur
famille etait un peclie, et telle associalion delniisait dans le
<(ieur des novices tous les sentimens naturcis, jiour en faire des
instriimeris passifs de la volonto des superieurs ! Quelle per-
vei'.silc et ([uel fanalismc!
En renvoyant ics novices, Ics siiprricuis neanmolns les
a\aient engages a attendie paisiblcnietit ieur renlree qu'ils se
fliillaient d'obtenir sous peu. Reinliold altendil; niais, ne voyant
y)as les jesuiles rappcles, il sc fit barnabile. Cet ordre, niolns
f'anatitpje et moins immoral, contribua a (iclairor I'esprif du
jeune honime. Les reformes ojjciees par Joseph II, et les liai-
sons que fonnii Reinliold avec les ccrivaiiis les plus tclaircs de
Vienne, achcverent de lui dcssiller les yeux. 11 coopera avec
le baron de Bonn, auleur de la plaisante Monographic des
moines , a un journal destine a repandre les Inmleres en Autri-
ehe; jmis, il quilta Vienne, et se rendit a Leipzig, ou il em-
brassa !e protestaniisnie. A Weimar, il futaccueilli par Wieland
et devint son gendre, et son cooperateur dans la redaction du
Mercure allemand , cu il exposa surlout les ])rincipes de la
philosophie nouvelle. II obtint une cliaire de jdiilosophie a
i'universiie de Jena, et y enseigna pendant plusieiirs annees
avec beaucoup de succes ; tous les amis de la j^lsilosophie en
Alleniogne le rcgarderent comme le vrai soulien de cette
science, depuis qu'elle avail piis une forme nouvelle. Le roi de
Danemark a])pela Reinliold a Fuiuversite de Kiel; et c'est la
qu'il a termine son honorable carriere. Son Ills a joint a sa bio-
graphie des letlres des philosophes les plus estimcs de I'AUe-
magne (jui tous ctaient en correspondance avec lui, et cher-
chaient a meiiter son suffrage, ou a le gagner pourleurs opi-
nions particulieres. Cette collection comprend aussi quelques
lettres francaises de Charles Villers. D — "g
i53. — * Don AlonzQ ,oder Spanicn. — Don Alnnzo, His-
toire contemjjoraine. Traduction alleinande de I'ouvrage de
M. de Salvandy, d'apresla IP edition. Breslau, i825;Max et
compagnie. 5 vol. in-12; prix , 4llial-TO^ 9 f'"*
Don Alonxo n'est pas une des jjroductions les moins atta-
chanlesdela litteralnrefrancaise : comme on devaits'yaitendre,
elle vient d'etre traduite en allemand. Jusqu'ici , les essais des
Alieniands, dansle roman historique , manquent, en general,
d'action et de vie. Maintenant memc que tant d'auteurs sont
embarrasses pour Iroiiver des sujets, aucun n'a encore reussi
a fournir (jue des imitations assez malheureuses de Walter
ALLEMAGNE. 417
Scott ou de Cooper. Cependant, aucune espece de roinan ne
parait rnieux convenir au terns actuel. Prcsque tous les ])ay9
sont deveims !e theatre de grands cvcnenaens politiques et ini-
litaires : ct qucUes ressources, sans sortir de I'Europe, n'of-
frent pas anx litterateurs alleniands et francais, la Pmssie, la
Turquie, la Grece , la France, Naples, I'Espagne!
Nous engageons M. de Salvandy a faire, dans de nouveaux
ouvrages seniblables a cclui-ci, une nouvelle apjilication des
pi incipes selon lesquels il a concu ce genre de roman historique,
principes qu'il a si bien developpes dans sa preface, et mis ea
pratique dans son livre. Le iraducteur de cet ouvrage a eu le
double tort de garder I'anonyme et de supprimer la preface
de M. de Salvandy dans sa traduction. Jk. de Lucenay.
i54. — Joannis TzetzvE historiarum variaruin chiliades ;
grcEce textum adfidem duoruin codicuin nionaccnsium reco-
gnovit , hrevi annotationc et indicihus instruxit Theojihitus
KiESLiNGius. — Diverses histoires de Jean Tzetzes, distribuees
en chiliades ; le texte grec a etc revu d'apres deux manuscrits
et cnrlchi de conrtes notes et d'index par Thcophile Kies-
LiNO. Leipzig, 1826'. In-8°.
Cet ouvrage, precieux pour la connaissance de rantiquile,
est devenu fort rare; il avail ete imprirae et dislribue en
chiliades, a la suite de la Cassandre de Lycophron a Bale,
en 1 546, et reproduit avec d'horribles fautes dans le 3^ volume
des poetes grecs de Lectins. Par ce motif, M. Kiesling, auquel
on doit dcja une edition de Theodore Metochita , est fonde a
croire que cette reimpression de Tzetzes ne peut manquer
d'etre bien accueillie. Son premier soin a ete de refablir le
texte : il a fallu collationner deux manuscrits de Munich, dont
>in, qui date du x-v^ siecle, parait avoir ete surtout consulte
pour I'edition de Bale. Le second est du xiv" siecle, mais il ne
renferrae que trois chiliades et une partie de la quatrieme. Ce
n'etait point assez de ces faibles secours pour faire toiites les
rectifications desirables ; on y reconnait d'uliles ameliorations,
quand on compare ce texte a celui que nous avions jusqu'a ce
jour. Les notes sont courtes; elles renferment des variantes, et
renvoientaux auteurs que Tzetzes avait sous les yeux. II y a
trois index , I'uu des choses, Taulre des locutions, le troisicme
des auteurs cites. Les treize chiliades contiennent 496 histoires.
II y a aussi des vers iiambiques ( imxtt ta-f^^uat ) , et divers autrcs
morceaux ; enfin , quatre lettres de Tzetzes.
1 5&. — * Grabmal des Herzogs Heinrich des Vierthen. —
Tombeau du due Henri IV a Breslau ; par Buschisg Breslau,
1826. In- folio.
T. XXXI. — Aoiit 1826. 27
4i8 LIVRES tXRA-NGERS.
Quatrc belles gravures colorices avec tout I'eclat des teinte;.
du moyen age reprcsentent, d'une maniere aussi f'ldele que
briliante, I'un des plus beaux monumens qui soient a Rreslau.
Unc autre planche offre une inscription , et le tcxte exj)liqne
les divers sujets des bas-reliefs. Henri IV est le fondaieur de
I'egiise et du chapitre de la Croix ; il mourut a la fleur de I'age.
Ce prince etait I'un des poetes les plus distlngues de son tenis;
mais il ne nous est reste de Itii que deux chansons qui sont
rsimprini^es dans I'ouvrage que nous annoncons. On regrette
d'ignorer le nom de I'arliste auqucl on doit ce monument,
qu'ou a lieu d'altribuer au due Henri V, et aux membres du
chapitre. M. Rusching reconnait cependant les caracleres alle-
mands de I'ouvrage a tel point , dit-il , (|u'il serait difficile de
supposer qu'un etraiiger I'eut pu construire. Dans le cours de
sa description , I'auteur deplore plusieurs degradations qui ont
force a restaurer ce tombeau , et qui probablement ont eu lieu
durant la guerre de trente ans. Nous ne le suivrons pas dans
le detail des personnages figures sur les differentes faces du
tombeau; ce detail est suivi d'un appendice sur Je sceau du due
Henri IV , sceau qui a cte grave et joint aux planches. On oc-
cupe ensuite le lecteur d'une inscription importanle sous le
rapport de I'antiquite , puisqu'elle remonte a 1290; enfin, on
cite une vieille image de ce prince, et un distique, sous la date
de i5o5, a I'appui de I'opinion que Henri IV, surnomme
Prohus dans I'histoire, est mort par le poison. Apres ces details
techniques, on lit une vie de Henri IV redigee par M. Kunisch.
II parait que ce fut en 1270 que ce due fit cause commune avec
Ottocaire. Le commerce de I'lndc n'appartenant pas encore
exclusivement aux Genois et aux Venitiens ; il existait deux
grandes routes de caravanes de I'Allemagne en Orient. On fait
connaitre ce que le due entreprit pour favoriser ce commerce,
et Ton entredans le detail des reglemens d'administration qu'il
fit a ce sujet. On rapporle aussi quelques faits importans pour
I'histoire generale. P. de Golbeht.
SUISSE.
i56. — * Reflexions sur l' instruction religieuse, sur les
temples, sur la wort et sur les sepultures ; par A. Levade,
ministre du saint Evangile, professeur a I'Academie de Lau-
sanne, et president de la Societe de la Rible. Lausanne, 1826 ;
Blanchard freres. i vol. in-12.
Les trois productions que renferme ce volume se distinguent
surtout par I'expression dessentimens d'une pietetres-auslere.
L'auteur blAme et loue tour a tour certains points du systeme
SUISSE. /,i9
adopte pour I'instruclion religieuse de la jeunesse. II mele a
ses reflexions sur les temples, sur la moit et sur les sepultures,
de nombreuses citations d'ecrivains anciens et modernes, qu'il
•1 su meltre d'accord entre eux avec une grande superiorite de
logique. Nous placerons ici un tableau touchant par lequel
sent lerminees les reflexions sur les sepultures. « L'idee que je
ine forme d'un clmetiere est celJe d'un lieu spacieux, dont
I'abord est facile, ou les generations qui se succedent peuvent
eire deposees avec ordre, avec respect, avec quelques signes
religieux; d'un lieu ou, par un caJcul aise a faire, et sous une
ins})ection attentive, chaque cadavre pent, d'apres les lois de
la decomposition, n'etre pas trouble dans son repos; car le mot
ciinetiere signifie place de sommeil; d'un lieu clos d'une ma-
niere decente, non de rebuts de planches que le pauvre est
tente d'enlever, non de niurs dont I'aspect est toujours triste et
la degradation trop prompte, mais ferme par un fosse, dont
les deux bords sont revetus d'une haie d'epines, et interieure-
nicnt d'un double ou triple rang de peupliers rapproches. Une
porle de fer est a I'entree; au-dessus, je lis ce passage : lis se
reposent de leurs trai'aux, et leurs ceuvres les suivent. Apoc,
XIV, i3. A cote de ia porte, on trouve la loge commode d'un
honnete gardien, qui, a toule heure, pent ouvrir cet asile de
paix a I'afflige qui aurait quelques fleurs a deposer, quelques
larmes a repandre sur la tombe d'un pere, d'une mere, d'une
epouse , d'un enfant, d'un ami. Je m'attends a rencontrer dans
cette enceinte sacree des traces nombreuses de reminiscence
religieusement respectees; ici, une modeste pierre, avec une
inscriplion chretienne; la uu arbrisseau, une fleur, un potcau ,
une croix , une motte de gazon,un souvenir quelconque qui
permette de reconnaitre la place de nos douleurs; je veux
qu'une Marie alfligee puisse aller au tombeau pour y pleurer,
et qu'a chaque demande : ou Vavez-voiis mis? le gardien de ce
precieux depot puisse repondre ce que I'Ange repondit aux
salntes femmes : venez et voyez. Matth., xxviii, 6. — En
entrant dans ce temple de la mort, je le vois divise en compar-
timens, que separent des sentiers enlretenus cornice ceux de
nos jardins : j'en parcours I'elendue , sans etre oblige de fouler
aux pieds la cendre de mes concitoyens. Une double allee d'ar-
bres, coupant en croix le cimetiere , invite I'homme a y enirer
pour nourrir c|uelquefois son ame des grandes pensees de la
mort, et pour payer un tribut de respect, de reconnaissance ou
il'amour a ceux qui I'ont precede dans le chemin de toute la
terre. Josue, xxiii, ik- "
420 LIVRES ETRANGERS.
157. — * Notice sur la Socicte helvetique de musique. Geneve,
1826; J.-J. Paschoud. Paris, !e m^me, rue de Seine, n" 48.
In-8" de Sa pnges.
Dos les premiers terns ilc la confederation, les Suisses, pe-
netres de la nccessite de consolidcr, jiar lous lesmoyens, leur
independance, si clierement ac(|ui.se , jirirent I'habilmie de se
reiinir, a des epo(]ui's a ]>ou pres j)erioiii(|iies , I:int6t dans
un canton , tanlot dans un autre. lis rcsserraient ainsi des liens
formes d'abord par la scule politique , et tout ce qui lendait a
faire d'eux nne scuie et mcnie faniille, assiirait ienr slabilit(5 ,
en ajoutant a Icur force. Conime , a celle epoqne , leur premier
bcsoin ('tait de se dcfendre, I'objet de ces reunions ilut etre
tout niililiiire. Aussi , voyons-nous aiors les Suisses s'assembier
fro(]ueminent pour s'cxercer au tir, et leurs gonvernemens
accorder des prix considerables aux nuilleurs archers et aux
plus habiles arquebu^iers. Ce n'est guere que vers le milieu
du xvm* siccle qu'une noiivelle direction fut imprimee aux
esprits; de vrais patriotes, des philantropes eclaires eiirent
I'idee d'etendie le but de ces reunions, rcstreintes jnsque-la
audevcloppeuient des tnoyensde defense. lis jeiercfit, en 1 761,
les premiers fondemens de la Socicte helvetique , qui, en s'oc-
cujjant de I'histoire nationale, s'atlache nioins aux evenemens
menies qu'aux lecons de sagesseet aux regies deconduitequ'eile
fournit presqu'tt cbaque page. Depuis la fond:ition decetle So-
cicte, il s'cn est successivementformeun grand nombred'aiitrcs,
parml lesquelles on remarque surtont celle dont cctte Notice
nous fait connailrerorigine etles statuls.D'apres unecirculaire
adressoeauxdiverses Societes niusicalesde la Suisse ])arM.Xa-
■vier GuGGENBUHLER, aloi-s juge au tribunal de prefecture de
Lucerne, en sa qualile de president de la Sociele de musique
de ce c.'inlon , cinquanle-trois amateurs de differentes parties
de la Suisse se reunirent a Lucerne, le 27 jnin 180S, et se
constituerent en Sociele helvetique de musique. Le lendeniain,
sur le rapport d'une commission composee de cin(| membres,
I'assemblee arrela les statuts destines a regir la Sociele, staluls
qui avaientpour principal redacleur M. le doyen Hocfliger,
cure a Ho'cbdorf, canton de Lueerne. Ce venerable pairiote
s'etait deji fait nne reputation par des chants lyriques popu-
laires, destincsarappeler a la nation les vertus de ses anretres,
et a fortifier son amour pour Ics antiques institutions qui fitent
long-tems son bonheur. 11 se montra zele promoteiir de la
creation projetee de la Societe de musique : il entrevil d'abord
les heureux resultats qu'elle elait susceptible de produire : il
vit dans cette institution un puissant moyen de retablir la
SUISSE. Aai
Concorde, en 6touffant les germes de divisions qui pouvaient
encore troubler la patric. La Sociele nne fois conslituee, son
zele ne se ralentit point ; il est juste de reconnaitre que M. Hce-
fliger conlrlbua beaucoup a la faiie prospeier. Appeledeja six
fois a la presidence ])ar le suffrage de ses co'lcgues, il a j)u se
convaincre que ses services ctaient spprccies.
M, N.EGUELi , de ZiJiicli, habile compositeur et savant
tlicoricien, qui a occupt- cinq fois le lauteuil , a uussi forlcmcnt
conlribue au succes de la Societe. On lui doit une beineuse
application de la metliode gencrale de Pestalozzi a I'enscigne-
iiient du chant : il a reussi a rendre cet art populaire par i'ex-
treme facilile de son systeme; Ics premiers eleniens s'y olfrcnt
conime d'eux-niemes a I'eleve, et beaucoup d'hommes eclaires
I'envisagent conime un veritable pcifectionnemeiit de I'art
d'apprendre la mnsique.
L'experience nyant bientot fait sentir la necessite de modifier
les staluls primilifs , un uouveau regleinent, qui lonlefois
differait peu de cehii de 1808, fut arrele le 11 juillet 1810.
De nouvelies disposiiions ayant ete adoptees dans les reu-
nions stibsequentes, et les staluls de 1810 [iresentant encore
de grandes lacunes, la commission centrale de i8a3 pruposa
de charger celle qui devait lui succeder, de dresser un projet
de reglement plus complet. Celle proposition fut adopice; ct,
le 21 Juillet 1824, la Societe etant asseinblce a Lucerne, on
sanctiouna ce nouveau reglement , qui fournit les donnees
suivanles sur son organisation.
La Societe se reiinit pour executer deux concerts :le premier,
appele Grand Concert, ct auquel tousles mcnibres ordinaires
presens doiveut prendre une part active, sous peine de perdre
leurs droits a elre logos gratuilemect , a toujours lieu dans une
eglise.
La reunion dure trois jours, qui sont employes de la ma-
niere sulvante : — Premier jour. — Matin. Seance gen^rale.
Discours du president sur un sujet analogue au but de la So-
ciete. Lcclure de la lisle des niembres de la Societe, a I'effet
de reconnaitre quels sont ceux qui sont presens. Nomination,
par le j)resident, des scrntateurs; lecture de la lisle des mem-
bres morts ou demissionnaires depuis la dernicre reunion. —
Reception de nouveaux membres. — Fixation, par voic de
scrulln, du lieu de reunion de I'annee sulvante. — Election
des membres de la commission de revision des comptes. —
Notification de la lisle des aspirans, recus candldals par la
Commission centrale. — Discussion des autres affaires qui In-
teressent la Society. — Apres-midi. Repetition generale. — Se-
/,22 LivRES Strangers.
cond jour. — Matin. Seance. Rapport de la Commission des
comptes. Decision a prendre sur ce rapport. Election des
raembresdela grande Commission pour I'annee suivante. Dis-
cussion des autres affaires qui interessent la Society. — Apres-
midi. Grand concert. — Troisujme Jour. — Soiree. Concert. Les
amateurs les plus distingues de la Societe et les dames qui
cultivent avec succes la musique, sont invites a s'y faire en-
tendre.
La Commission centrale dirige toutes les affaires de la So-
ciete, quand celle-ti n'est pas reunie; elle determine les raor-
ceaax de musique a executer , et I'epoque de la reunion, qui
doit, autant que possible, avoir lieu au mois d'aout. La So-
ciete se compose actuellement de memhres ordinaires , de can-
didats, de niembres honoraires ordinaires et de memhres hono-
raires extraordinaires. Pour devenir membre ordinaire , il faut
etre citoyen Suisse; pouvoir executer desmorceaux de musique
vocale ou instrumentale, et s'engager a le faire; avoir assiste,
comme candidal, a deux reunions, consecutives ou non, et
enfin avoir paye quatre livres de Suisse pour droit d'enlree.
— Un scjour de dix ans et des services rendus dans I'enseigne-
ment de la musique en Suisse, rendent les etrangers habiles ii
devenir memhres honoraires ordinaires. Enfin, la Societe re-
volt, en qualilede memhres honoraires extraordinaires ; i° les
personnes qui, quoique non versees dans la connaissance de la
musique, ne peuvent que faire honneur a la Societe , en raison
du rang qu'elles occupent ou des fonctions qu'elles remplissent;
2° les musiciens etrangers qui se sont fait I'emarquer , nom-
mement les grands compositeurs, surtout lorsque leurs ou-
vrages ont et(^ executes par la Sociele; 3° les artistes qui ac-
quierent de la celebrite dans un art quelconque , pourvu
toutefois qu'il tienne de quelque maniere a la musique. B.
ITALIE.
1 58. — * Analisi di fondamenti , etc. — Analyses desfonde-
mens de la maliere medicale, et projet de leur reforme, par
Hippolyte Bouelli, Dr en medecine et chirurgie , etc. Rome ,
1823. I vol. in-8°.
Les medecins savent qu'il regne enfre eux et partout la plus
grande diversite d'opinion sur Taction des medicamens. M. Bo-
KELLi , dans I'ouvrage que nous annoncons, propose des regies
pour bien juger les fails relatifs a ce point si important de la
science medicale. II fait observer que les medecins en general
ont suivi deux regies differentes pour determiner Taction des
ITALIE. 4^3
medicamens : les uns se sont borncs a la consideration de leurs
qualites physiques, chiraiques et botaniques; les aulres ont
examine les effets qu'ils produissnt sur le corps humain, lors-
qu'ilssont appliques, solt interieurement, soil ex.lerieurement.
II releve ensuite les erreurs que durent rencontrer dans leurs
jugemens ceux qui se sont fond^s sur les influences qui deri-
veraient du rapprochement de la forme, da volume, de la
couleur, de I'odeur et du gout des medicamens. II passe de
meme en revue les opinions adoptees d'apres les principes de
la chimie. Les huiles, les terres, les sels different lellcment
cntre eux , qu'il n'est pas possible de fixer une regie pour
determiner Taction inedicinale d'apres de telles divisions. Si
Ton en vient aux idees que les medecins se sont formecs
d'apres les affinites botaniques ou d'analogie naturelle, on y
Irouve les memes erreurs. Les systemes des botanistes ont
varie conlinueilement ; et il est reconnu que les plantes de la
meme famille ont des actions bien dilferenles, tandis qu'on
ciblient des cffcts analogues par des planles de diffeicntes
classes, etc. Les fails nombreux sur lesquels I'anteur appuie ses
propositions laissent le lecleur dans une plcine coriviction.
Quant a la classe des medecins qui ont suivi la secondc regie
d'observation , il decouvre encore la source de differentes er-
reurs dans lesquelies ils sont tonibes. Avant tout, il leur re-
proclie de confondre les effets des medicamens employes dans
I'elat de sante ou physiologiques , avec leurs et'fcts dans I'elat
de maladie ou therapeutiques. II regarde comnie un obstacle a
la justesse des inductions le melange de plusieiirs mrdicamens
d'une action differente, ou op[)osee, pratique suivie par la
plapart des medecins. II signale a la fin une autre erreur plus
commune encore , qui est de confondre Taction chiinique ou
immediate sur I'organisalion avec Taction dynamique ou gene-
rale sur les proprietes vitales. Apres un exameii assez etendu
des differens objets qu'il annonce, Tauteur conclut que ce n'est
qu'en considerant les effets produits par les medicamens sur
la machine animale, que Ton pent tirer des inductions vraies
et solides. Mais, pour y parvenir, il propose des experiences
de comparaison , dans le but d'apprecier les phenomenes que
I'emploi des medicamens nous piesenfe dans Tetat de sante,
dans I'etat de maladie, et meme apres la mort. L'auteur , par-
tisan prononce des nouvelles doctrines mcdicales ilalienneS,
rend hommage aux talens des hommes celebres qui en ont jele
les bases. Fossati, D. M.
1 59. — Degli uffici del medico , etc. — Des devoirs du me-
decin, discours acadcmiqiic; par M. le doclcur Basevi, de
4a4 LIVRES fiTRANGERS.
plusieurs Academies. Milan, 1826; imprimerie de la Societe
typo^raphique des classiques italiens. In-S" de 1 feuilles.
160. — Del rnagnetismo animale , etc. — Du inagn^lisme
animal; expose des fails et dcs recherches siir cet objetjme-
raoire lu a la seance publiqiie de la Societe medicale de Ll-
vourne, le 20 inai 1826; par M. Basevi. Florence, 1826;
imprimerie de Lulgi Pezzali. In-8° de 21 pages.
Le premier de ces ecrits a ete imprime dans le Giornale cri-
ticodimcdccina analitica , et le second dans V Antologia , n" 66.
Ainsi la disserlalion sur les devoirs du mcdecin est deja re-
pandue, au moins en Italic, parmi ceux qui cxercent cetle
noble profession, el les ojnnions de M. Basevi sur le magne-
tisme animal soiit doja coiinues , non-seuleiuent des mederins
d'llalie, mais des gens de lellres et dcs hommes du monde.
Les devoirs du iiiedccin sont le fondemcnt des droits des ma-
lades et de tous ceux qui prennent intcret au relabllsseraent de
leur sanle ; nous somnics done intcresses a ce que ces devoirs
soient exijoses avec clarte, bien connus des hommes (jui se
consacrent a leur accomplissement, et de tous ceux qui en pro-
fitent, c'est-a-dire, de tout le monde. M. Basevi exige que les
medecins fassent plus que de s'acquitter ainsi envers les par-
ticuliers, il s'occupe aussi des interets generaux de la societe.
« Medecins , dit-il , payez largement a la patrie le tribut do vos
lumieres; prenez I'initiative en tout ce qui intercsse la sante de
vos conciloyens; que les rnagislrats soient informes par vous
de tout ce qui pourrait liil nuire ; indiquez les moyens de
prevenir le mal, de procurer le bien. Avertissez long-tcms avant
le danger, lorsque la raison et la sagesse conservent leur pou-
voir, et non pas au moment ou I'imminence du })cril inspire
aux uns une audacq qui repousse les conseils, et laisse le jjIus
grand nombre dans une jiusillanime irresolution, tandis que
des oris de douleur ou d'effroi portent le trouble partout, etne
laissent plus entendre la voix de la prudence. Les magislrats,
informes en tems convenable , prennent de sages precautions,
evitent de repandre d'inutiles alarmes, et lout est pret, autant
que la prudence liumaine a pu le permeltre , lors qu'une inti-
\itable action des causes natnrelles vicnt attaquer un grand
nombre d'individus , une pojiulation. »
Une note fort elendue sur les inconveniens de la divergence
des theories medicales aurait pu fournir ie sujet d'une disser-
tation inleressante. II n'y a (pi'une theorie ; car il n'y a qu'une
nature, soumise a des lois invariables. Hors de cetie unique
theorie, il n'y a que des systemes; mais, en fait de mcdecine,
est-ii pernais d'etre systematique? On condaranerait un mo-
ITALIE. ',25
raliste presomptueux qui oserait tirer de son imagination ce
qu'il appellerait une theorie sociale , dont il n'aurait a])ercu ni
les incoherences, ni !es funestes resultats : est-il possible qu'une
fausse llieorie medicale n'egare jamais le medecin? M. Basevi
s'attache a raraener les mcdecins italiensa I'uniformite de doc-
trines : ce ne serait pas encore assez pour la science et pour
I'humanite; de reeme qu'il n'y a qu'une geometric, une [ihy-
sique , une chimie , il n'y a c|u'une seule medecine.
Depuis que notre Academic royalc de medecine est envahie
par le magnelisme animal et le somnambulisme , la confiance
publique parait s'en eloigner. M. Basevi tiaile avec beaucoup
d'egards ceux de ses confreres qui admeltent ou ne rejettent
point cette pretendue branche de la medecine, et a plus forte
raison, les Societes savantes qui consentent a s'en occuper. II
obeitaii sentiment delicat des convenances; cemotifest toujonrs
digne d'eloges. Les homraes desiiiteresses jngeront aulrement :
ils considereront que, si les doctrines du magnctisme animal
n'ont point de roaiite, elles sent une superstition, ou unechar-
latanerie, ou Tune et I'autre a la fois; que, meme dans le cas
ou elles seraient fondees sur qnelques fails certains, lesmoyens
de propagation et d'action qu'elles ont adoptessont indignes
d'une science et de la raison liumaine ; que ces honteux rnoy ens
doivent 6tre livres au ridicule, et fletris par le bons sens. On
est comptable envers la societe, non-seulement de ce que Ton
y introduit, mais de la raaniere dont on I'introduit. Lorsque
les Societes savantes s'egarent, ou se laissent entrainer hors
de leurs devoirs, c'est a la raison publique qu'il appartient de
les remeltre dans la bonne voie, ou de faire ce qu'elles ne-
gligent. F.
i6i. — * Del trattamento degli annegati. — Du traitement
des noyes, instruction aux jeunes medecins, etc.; par Pierre
Manni, D. M. , professeur de I'Arcbigymnase roraam , etc.
Pesaro, 182G. Un vol. in 8°.
En adressant son ouvrage au prince cardinal Albani, M. le
professenr Manni fait observer que les voeux et lesesperances
des hommes eclaires qui aiment leurs semblables, reslent sou-
vent sleriles pour le bien de I'humanite , s'ils ne trouvent pas
I'appui des gouvernemens. II f;iit senlir a celui du souverain
pontife la necessile d'encourager les talens utiles, et de tirer
profit des luinieres fournies par les sciences physiques et natu-
relles. Dans un traite peu volumineux, I'auteura su reunir des
choses importantes a connaitre , et que Ton ne pourrait trouver
ailleurs qu'en parcourant un grand nombre d'ouvrages fran
cais, anglais et allemands. II examine d'abord les signes que
426 LIVRES ETR ANGERS,
proseiitenl les resultats de la submersion sur les foiictioiis dc
la vie; ensuite , passant en revue les differens expediens pro-
poses jusqu'ici pour rappeler a ieur exercice ces nieines fonc-
tions, il prouve par its fails, par I'autorite des savans, ou de
divers corps srienlifiques, que les moyens les plus efficaces ,
ouceux auxqucls on doit loujours recourir, sont la chaieur, les
frictions, I'introduclion del'air danslepoumon par des moyens
artificiels, et enfin I'introduclion de la fumee du tabac dans
I'anus.
line profcnde erudition; un style coulant et facile, nn zele
ardent pour le bien de rbumanile, rendent cet ouvrage je-
commandable sous tousles rapports. Fossati , D. M.
162. — * Dizionario universale , critico , enciclopedico delta
lingua italiana , etc. — Dictionnaire universe!, critique, en-
cyclopedique de la langue italienne, de I'abbe Alberti de
ViLLANOVA, revu et corrige. Deuxieme edition, et 1"= de Milan.
T. I. A-CA. r« livraison. Milan, iSaS; L. Cairo. In- 4".
L'importance de ce Dictionnaire est depuis long-tems re-
connue. L'abbe Alberti, qui osa entreprendie et executer seul
ce grand ouvrage, en corrigeant beaucoup de fautes et en re-
parant plusieurs omissions que Ton remarquait dans ceiui de
la Crusca, ne put eviler lui-meme quelques imperfections.
L'editeur de Milan s'est occupe , depuis plusieurs annees , de
fairedisparaitre ces laches, pour rendre plus utile et aussipar-
faite quepossiblecette nouvelleedition. lil'adedieeaM. Monti,
comme a I'ecrivain qui a le plus conlribue, de nos jours, a
propager I'etude de la langue italienne. 11 fait ressoriir en
nieme tems les defauts et le merile du Dictionnaire dans une
preface sagement raisonnee, ou il indlque les motifs des cor-
rections et la methode qu'il a suivie dans son travail. Disciple
du celebrc poete, il signale les meprises des academiciens de
la Crusca tant anciens que raodernes. II corrige specialement le
style d'Alberti, la confusion des exemples qu'il cite, etl'ap-
plication i)eu exacte qu'il en fait; enfin, il rectifie I'ordre al-
phabelique, souvent mal observe. Un grand nombre de ces
additions ou de ces cbangemens sont tires des observations ci'i-
tiques de M. Monti sur le vocabulaire de la Crusca, inscrces
dans sa celcbre Proposta , objet de critiques pour les uns , et
d'eloges pour les autres. L'editeur, aprcs ces rombreuses ame-
liorations, n'hesite pas a presenter le nouveau Dictionnaire
d'Alberti, non-seulement comme revu el corrige, mais comme
presque entiereraent refait. Ses observations et les connais-
sances qu'il deploie dans la preface, nous assurent qu'il est
capable de fenir sa promesse. Cette premiere livraison que nous
ITALIE. 427
venons de parcourir prouve un travail immense; s'il donneles
m^mes soins au reste de I'ouvrage, il peut compter sur I'estime
de tous les amateurs de la langue italienne.
1 63. — Dante rivendicato. — Le Dante venge; lettre adres-
see au chevalier Monti par I'auteur du Prospectus du Parnasse
italien. Foligno, i825 ; Tomassini. In-8°.
L'auleur se plaint vivement de M. Monti ; il lui rappelle I'in-
timite qui regnait entre eux des leur premiere jcunesse, et
leurs frequentes discussions sur le roerite du Dante. II lui
reproche de n'avoir fait aucune mention de sa personne ,
ni des ouvrages qu'il a publics depuis quelques annees, tels
que le Purisrne ennemi du gout , et le Prospectus du Parnasse
italien. II se propose de reparer lui raeme la negligence de
M. Monti a son egard, en nous entretenant un peu longue-
menl de ses propres opinions et de ses ouvrages, sous prelexte
de defendre le Dante. Nous pardonnons volontiers quelque
amour-propre a tout ecrivain; niais ici, le nouvel avocat du
grand poete se loue lui-meme et cite avec cmphase ses produc-
tions litteraires; il rappelle les eloges qu'il a recus de ses cri-
tiques ct de ses amis, de M. Biagioli surtout; il se montre
inconsolable du silence de M. Monti, qu'il accuse, en outre,
d'avoir cliange d'opinion sur le Dante , en designant comme
un poeme purement didaclique la Divine Co medie , apres I'a-
voir declaree une veritable epopee. Le critique s'arreie long-
tems a discuter cette question, qu'il eut ele facile de resoudre
en peude lignes. II entre dans I'analyse du poeme tout entier ,
dont il releve les beautes les plus reraarqiiables, et il s'aitache
a expliquer des difficultes de plus d'un genre , qui font le tour-
raent des commentateurs , tandis qu'il eitt pu se borncr a citer
I'opinion generale, que cette vaste composition offre a la fois
les qualiles de la poesie didaclique et le caractere de I'epopee.
II adresse encore un reproche a M. Monti ; c'est d'avoir repete
ce que le Dante a dit lui-meme de son style , qu'il I'av.Tit forme
sur celui de Virgile. Tout en avouant qu'il est difficile de
trouver des points precis de ressemblance entre les styles de
ces deux grands ecrivains, et que le Dante a cree le sien sans
le secours d'aucun modele, on peut croire aussi qu'il a du a
la lecture de Virgile quelque chose de ce coloris pittorescjue ,
anime, louchant, dont il a enrichi le premier la poesie rao-
derne.
Le critique fait souvent des remarques ingenieuses et justcs;
inais on regrette qu'elles soient accompagnees d'expressions
peu convenables sur un ecrivain digne par son talent et par
son age du respect de tous ses concitoyens. Quoique M. Monti
428 LiVRES Strangers.
se soil quelquefois exprinie, dans ses vers, avec la ni^ine li-
berty, nous ne consentirons jamais a qualifier son dernier ou-
vrage de farce grammaticate , comme n'a pas craint de le faire
son anlagoniste. II improuve en dernier lieu ie debat litlcraire
dans Jequel M. Monti s'est engage depuis dix ans contre i'A-
cadeniie de la Crusca ; il lui semble que ce veteran de la litle-
rature et ses discii)les , en prc<endanl soutcnir une sage liberie
de style que la laison reclame df^tiis long-teins, ont introduil
et accreditc de certaines locutions des trecentistes , (ccrivains
du XIV" siecle ) et que ces expressions peu poeliqucs ou plus
ou moins obscures, metlent leur thcorie en contradiction avec
leurspropresexeniples. L'auleurn'epargiienieroe pasun homine
que la mort a enJcve dernieremejit , et que les Italiens ont
beaucoup regrette, M. Jules Perticari, I'apotre le plus zele
des doctrines de M. Monti , dont il ctait le gendre. Enlin, il ne
fait pas grace au Dante lui -nieme; il le traiie sans strupule
coinme un ennemi de Florence et de I'llalie enliere. En gene-
ral, il s'est laisse emporter par la ])assion et souvent il a emis
des assertions exagerces, qu'il serait meme diflicile de con-
cilier.
164 — Cento epigranftni , etc. — Cent eprigrammes d'^/j-
towePERLi. Milan, iSaS; Pogliani. In-8°.
Depuis quelque terns, divers Italiens ont voulu briller dans
ce genre qui est jilus difficile qu'il ne le parait. Ceux qui s'y
sont distingues jusqu'ici, sont D' EIci el Zeflrino, etc. Souvent
les poeles de ce genre s'efforcent d'etre ])iquans, et ils font
senlir plutot leurs efforts que ieur causlicite. Quelquefois il ar-
rive aussi fjue, croyant dire une cliose neuve et ingenieuse , il
nous donnent une ])cnsee puerile ou vulgaire. Nous trouvons
des exemples de ces deux defauts dans les epigraninies de
M. Perli.
165. — * Opuscoli, etc. — Opuscules de J.-B. Vermiglioli,
avec un recueil de lettres inedites de piusieurs savan.» Italiens,
morts dans le xix"' siecle. Perouse, iSaS ; Bartelli et Constan-
tini. 2 vol. in-8°
M. Vermiglioli, I'un des plus celebres antiquaires de I'ltalie,
espere, en publiant ces opuscules, prouver que des produc-
tions si icgeres en apparence renferment quelquefois d'iinpor-
tans niateriaux. Cetle esperance nous parait bien fondee ,
d'apres la lecture de ces deux volumes, oil I'auteur traiie des
sujets plus ou moins curieux , dont aucun ecrivain ne s'etait
encore occupe. Le tome i'''^conlient : 1° une ancienne ins-
cription italienne , que Ton conserve dans le musee Oddi de
Perouse; a" une coupe {patera ) etrusque, appelee autrefois
ITALIE. — PAYS-BAS. 429
tniroir mystique; 3° des observations sur les orij^ines de Pe-
roase; 4° I'eloge histoiique de Ballhazar Ansidei, bibliolhe-
caire de la Valicane au xvie siecle; 5" uii extrait de I'histoire
de I'cglise de Saint-Paul, ecrite, avant la destruction de ce
monument, par Nicolas Nicolai ; 6" I'explicatlon d'un an-
cien cachet de Rartheiemy Erinanno degli Ermanni. On
trouve dans le second volume : 1° ia description de la descentc
de la croix , de Frederic Barocci, en prose par M. Vermiglioli
et en otlave rime par le professeur Mezzanotle , conuu deja
par sa traduction en vers de Pindare; 2° une inscriplion ine-
dite sur marbre qui fait connaitre un nouveau Municipium
dans I'Ombrie; 3° un singulier bas-relief en platre, avec une
tete de Meduse, que Ton veit dans le cabinet d'antiquites de
Perouse ; [^° une medaille inedite de Sparte , du m^me cabinet;
5" I'cIoge d'Ignace Danti, cosmographe de Cosme F"^, etma-
thematicien de Gregoire XIII. Quelques planches sont jointes
al'ouvrage; la plus reinarquable est celle de la Descente de
croix. Quant aux lettres, elles conliennent peu de choses inte-
ressantes; mais elles ont ete ecrites par des hommes recom-
mandables, tels que Cajetan Marini, Louis Lanzi, Mariolti et
le cardinal Borgia, qui souvent y rendent justice au merile de
M. Vermiglioli. F. Salfi.
PATS-BAS.
166. — * Geographice antiquce compendium , etc. — Abreg^
dela geographic ancienne; par i^.-^. Bosse. Deuxieme edition.
Leyde, 1826; A. et J. Honkoopo In-8°de i53 pages, avec une
carte.
II y a quinzc ans que M. Bosse, a I'lnsfigatlon du ceiebre
Wyltcnbach, enlreprlt,a Leyde, Tenseignement de I'histoire
et la geographic. II lul manqiiait un livrc elcmentaire qui put
servir de guide a ses eleves. On se servait generalement d'un
manucl geograj>hique imprime a Gouda. M. Bosse fut prie d'en
donner une nouvelle edition; mais il y Irouva tanl de fautes,
qu'il composa i;n autre ouvrage. II a suivi de preference Cclla-
vius, sans negligercepcndant Danville, Mannert etDornseiffen,
Get abrege, par demandes et par rcponses , parait avoir tout
ce qu'il faut pour devenir classique. De Reiffenbero.
167. Prima elementa logices , etc. — Premiers eleniens de
la Logique, d'apres les institutions logiques de M. /. Denzin-
ger; par le meme auteur. Liege, 1826, C. A. Bassompierre.
In- 8° de 72 pages.
Les Institutions logiques de M. Deflzinger sont en trois vo-
Oo LivRES Strangers.
liimes. U a scnli le besoin de resserrci- cet oiivrage; et d'en
composer uiie espece de catechisme, comnie I'a fait M. Sat
pour son Traite d'econoinie politique. A I'exemple de cet crri-
vain , il a adople la forme par deinandes et par reponses. Cet
abrege est substantiel , clair , mclhodiqne. M. Denzinger re-
connait aussi dans I'aine une faculty primitive ou fondamen-
lalc, dont les autres ne sent que des modifications : ce n'estni
le sentiment , iii I'entendement, ni i'atter.lion placee par M. La-
romiguiere a la tete de son sysleme ; mais la conscience pure
ou a priori qu'il faut bien se garder de confondre avec la
conscience empirique. Partantdela, il dccouvre, dans I'homme,
puissance intelligente, servie par un corps organise, trois
facultes : la representation , la sensibilite el le cles'ir. Les deve-
loppemeiis de cetle doctrnie se trouvent dans les Imtitutions
logiques. Nous remarquerons seulcment que ces facultes ne
semblent pas disposees dans leur ordrc analytique, et qu'on se
figure mal in faculte d'obtenir des representations, avant la
sensibilite qui , dans tous les cas , est mise en jeu la pre-
miere.
168. Oratio H. G, Tydeman , etc. — Discours prononce le
9 fevrier 1825, a I'universite de Leyde, par M. ie professeur
en droit H. G. Tyueman, sur la iiecessite d'enseigner dans les
nniversites des Pays-Bas , la science politique. Leyde, 1825,
in- 4°.
Ce discours academique a ete prononce , a I'occasion du
jubile de l'uni\ersite de Leyde. Dans un moment aussi .<o-
lennel , il etait beau d'entendre un professeur dire a une jeu-
nesse studieuse : « Et qui sommesnous , nous autres Beiges?
Unpeuple libre, qui, pour prix delaliberte que nous adonnee
ce Guillaume , fondateur de noire universite , pour prix des
innombrables ^ertus des Nassau, qui en font nos defenseurs
naturels, avons defere la couroiine au prince d'Orange , en
vertu d'une Cliarte approuvee et juree par le roi, etc. « Voila
ce qu'il serait defendu a MM. Guizot et Daunou de rappeler
en chaire, et ce (|ue les ministres du roi des Pays-Bas ne
craignent pas de proclamer hautement. De Reiffenberg.
169. — Opinions cnoncees par M. Donker Curtius van
TiENHovEN , depute de la Hollande aux Etats-Gei:craux, lors
de la discussion sur le projet de Code de commerce. Dor-
drecht, 1826. In-8° de 124 p.
L'auteur, un des jurisconsultes praliciens les plus distingucs
de la Hollande, a dcveloppe ici ses opinions sur ies difft'rens
litres du projel de Code de commerce maintenant adopte par
la legislature de notre royaume. II est a esjierer que les opi-
PAYS-B4S. li^i
uions des differens dejiutes qui ont pris part a la discussion
seront reunies, pour foriiier une collection de motifs, de dis-
cours, de rapports, et d'opinions, seinblable a ceile qui a etc
publiee en France pour le Code civil. X.
170. IVote de M. Ic comte de Mier, envoye extraordinaire
el niinistre plenipotentiaire de S. M. I. et R. cour des Pays-
Bas, et Reponse de S. Exc. M. le baron Verstolk. de Soe-
LEN , ministre des affaires etrangeres de S. M. le roi des
Pays Has. Bruxelles , 1 82G ; in-8° de 60 p.
L'objet principal de cette discussion est la navigation du
Rhin,mais ils'y rattacliait une imposante question, celle de I'o-
rigine dela monarchieactuelle desPays-Bas. La dignite des ex-
pressions, la liberalite desprincipes, toutfait dela derniere de
ces pieces un des monumens diplomatiques les plusremarquables
de I'epoque. M. le comte de Blier s'etait laisse aller a dire que
les allies avaient transmis a la maison d'Orange la souverainete
sur lesPays-Bas; le ministre beige repond en ces termes : «Le
Roi a pris connaissance des iignes qui viennent d'etre citees,
avecautantd'etonnement que de regret. Profondement affectee
de les voir emanees d'un cabinet dont la politique s'est trou-
vee si habituellement en harmonic avec ceile de I'ancienne
republique et du royaume actuel , S. M. vient d'enjoindre
tres-expressement au soussigne de protester contre une asser-
tion a la fois derogatoire a la dignite de sa couronne , et a
I'independanee des anciennes Provinces-Unics des Pays-Bas,
et opposee au droit des gens et public de I'Europe, au cours
des evenemens, ainsi qu'au principe de la legitimite , dans son
application aux dynasties el aux etats , base fondamentale de
la reconstruction en i8i3 , 1814 et i8i5 du systeme politique
europeen Cette souverainete, le Roi la doit, a;)res la Pro-
vidence , au sang verse par ses ancetres pour la patrie,ala
gloire qu'elle a acquise, et au bien-etre dont elle a joui sous
leurs auspices , aux rapports intimes elablis dans le cours des
siecles entre eux et la nation ; aux anciens droits de sa maison ,
et a laconfiance ainsi qu'au choix spontane d'un peuple libre!
De Reiffenberg.
171. — Lofred op Godfried vmi Bouillon. — Eloge de Godc-
froy de Bouillon. Gand , 1826. In -8° de x et iSg p.
La Societe de litlerature nationale , etablie h Gand , avail mis
au concours I'cloge de Godefroy de Bouillon pour le prix
de i824' Aucun memoire ne fut envoye. M. Schrant, profes-
seur de litteratnre nationale a I'Universite de Gand, entreprit
alors de trailer ce sujet dans un discours qu'il a fait iinprimer
el que nous annoncons. Get ouvrage a droit a tous nos eloges ,
i,^1 LIVRES ETRANGERS.— LIVRES FRATVCAIS.
tant pour le merite du style que pour rerudilion historique
dont I'auteur fait preuve.
172. — Jnnales Acaclemice Rheno-Trajcctince , ann. iSaiJ-
1825. — Arinales derAcadeinie d'Utreclit. Utrecht, 1826. In-8°.
Dans loutes les Uiiiversltcs des Pays-Bas, il existe tine
grande salle ou se font les promotions soiennelfes , les discours
d'entree des professeiirs, etc. L.t salle d'Utrecht venait d'etre
restauree : M. le rccteur Heringa , le premier qui ait ete appele
a y jiarjer en public depuis ecs reparations, choisit jiour snjel
de son discours , les evenemens qui ont cu lieu auparavant
dans le local me me. C'est la salle ou autrefois les etats de la
province d'Ulrcclil ont tenu leurs seances, ou I'union d'Utrecht,
base de notre ancienne constitution politique fut conclue, etc.
Les notes dont I'auteur a cnrichi son discours contiennent
beaucoup de renseignemens iraportans sur I'histolre de la
province et sur celle de la ville d'Utrecht. Le meme volume
contient, outre unc reponse a une question de Iheologie, un
menioire sur les droits dc succession ab inteslat et testamen-
taire dont jouissaient les femmes romaines. X.
173. • — * Monsieur V aim ore , ou le Maire de village; par
Fred. RouvEROY, avec cetle epigraphe : 7/// /«/? aimer les
champs , fait aimer la vertu. Liege, 1826; Latour. In- 18 de iv
et 220 pages, avec figures.
Dans un cadre ingenieux et soiis les formes les plus atta-
chantes, M. Rouveroy nous retrace les principaux devoirs de
la vie sociale. Je connais peu de livres plus agreables et plus
subslanliels. L'auteur y donne , sans que peut-elre il s'en dojite
lui-menie , des trailcs d'induslrie agricole , d'economie domes-
tique et d'education : ses precej)les, toujours clairs et precis,
se gravent dans la memoire avec d'autant plus de facilile qu'ils
se trouvent pour ainsi dire, mis en action. On s'iraagine avoir
les objets sous les yeus; c'est une galerie de tableaux varies
avec un ordre admirable. La librairie francalse ne tardera pas
sans doute a s'enrichir de cet estimable ouvj-age d'un des litte-
rateurs les plus distingucs de la Belgique. Puisse-t-il devenir
bientot le ma««e/ des peres de famille el des inslituteurs!
Stassart.
LIVRES FRANCAIS.'
Sciences physiques et naturelles.
174- — L'entomologie ou I'Histoire naturelle des insectes
enseignee en iSlecons, ouvrage contenant les principes ele-
mentaires de cetle science d'apres la melhode de classification
LIVRES FRANCAIS.— SCIENCES PHYSIQUES. 433
de Geoffrey, etc.; par R.-A. E. Paris, 1826; Aucher-Iiloy.
In-i2 de ij et 4^7 pages, et ix planches; prix, 7 fr.
II est sans doiite penible de ne pouvoir toujours annoncer
avee des eloges les oiivrages qui nous sont adresses; mais nous
devons avant tout la verite a nos lecteurs. L'enlomologie etant
aujourd'liui une science immense, comme on peut en juger par
notre article insere dans ce recueil (voy. Rev.Enc.^ t.xx.x, p. 742)
sur I'excellent Species public par M. le comte Dejean ; la vie
d'un bomme suffirait a peine pour y devenir Labile; comment
peut-on pretendre I'enseigner en quinze lecons? Quinze lecons
nesuffiraientpas a I'espritle plus penetrant pour se faire mcme
une idee juste des principes et des lois qui regissent i'entonio-
logie. D'ailleurs en lisant sur Ic litre de I'ouvrage que I'auteur
anonyme s'en tient a la methode de Geoffroy, on j)eut juger
combien son petit livre est en arriere de la science. Geoffroy
fit, dans son lems, un ouvrage estime sur ies insectesdes envi-
rons de Paris. Aujourd'hui, ce qn'II appelait des insectes forme
un embrancheraent, et presque le tiers du rcgne animal divis6
en plusieiirs classes dont chacune a sa terminologie et son bis-
loire a part : un pretendu traile d'entomologie ou les araignecs
sont encore comprises, n'est ])oint au niveau des connaissan-
ces actuellcs sur cette partie. Les tableaux analytiques et les
figures jiaraissent etre copies dans le recueil des travaux de
M. Dumeiil, inseres dans le grand dictionnairedeM. Levrault,
traite tres-recommandable sans doute, mais qui commence
lui-meme a devenir insufSsant. Un bon abrege d'enlomolowie
pour les gens du monde est done encore un ouvriige a faire •
nous engageo.ns la personne qui voudra I'entreprendre, a ne
pas puiser uniquement dans I'ancien Geoffroy et dans I'ency-
clopediemethodique, et surtouta ne pas proraettre qu'il ensei-
gnera une aussi vaste partie de I'histoire naturelie en i5 lecons.
Ce serait penser qu'il ne s'en est point forme une idee juste.
G.
175. — * Resume complet de botanique ; par M. J. -P. La-
MOUROUx. T. P'', formant la 16""= livraison de V Encyclopedic
portative. Paris, 1826; aux bureaux de TEncyclopedie porta-
tive, rue du Jardinet St-Andre-des-Arcs, n° 8. In-32 de vm
et 375 pages, avec des planches ; prix , 3 fr. 5o c. el 3 fr. 80 c.
par la poste.
U Introduction historique , placeo en tete de I'ouvrage, donne
une idee exacte et tres-claire de la marrhe de la hotanique j>ro-
prement dite , de cette branche de la science qiu a pour but
de distinguer les especes par leurs caracteres exterieurs , et de les
coordonner ensuite en genres, en Jamilles , et en classes,
T. XXXI. — Joiit i8a6. a8
434 LIVRES FRA.NCAIS.
d'apres les rapports de ces caractercs. Mais quant a I'^tat ac-
tuel de la physiologic vcgetale , elle laisse quelque chose a
desirer. Serait-ce a cause du pcu de progres qu'a fait celte
parlie de la science?
Tout I'article relalif aux notions preliminaires merite d'etre
reinarque. La description de la giroflce , et \>\us loin celje de
la tulipe , joignent a I'exactitude du langage technique, I'ele-
gance des formes litteraires. De la, passant aux I'apports de la
botanique avec les aulres sciences naturelles, I'auteur donne
un tableau comparatif des de-ux rcgnes organique et inorgani-
que. Ce tableau ne laisse rien a desirer. Examinant ensuite les
differences apparentes des deux rcgnes, et s'arrclant sur les
caracteres des vegetaux , il enunicre les rapports sous lesquels
on pcut les considerer; ce (jui le conduit a otablir la division
de la botanique en plnsieurs branches exposees dans un ta-
bleau.
Nous ne suivrons pas M. Lamouroux dans la description des
organes et de leurs modifications; nous ferons seulemcnt ob-
server qu'il a su enrlchir de haules considerations philosophi-
tjues cette partie de la science que la multiplicile des termes
techniques avail tonjours rendue aride.
On saura gre a I'auteur d'avoir decrit, dans un chapitre a
part , les organes des vegelaux appeles imparfails , tels que les
lichens , les fougeres, les mousses, les algues, etc.; ce comple-
ment manqua-it jusqu'ici dans presque tous les ouvrages ele-
mentaires,
La taxonomonie ou tlieorie des classijications n'esl pas la
partie la moins iiiteressante de I'ouvrage. Quelques idees
sur la necessite des raelhodes de classificalion ; une definition
claire et concise des melhodes naturelles et des raethodes arti-
ficielles; un expose de la marchede I'esprit huniain pour arriver
a la classification la plus naturelle , marche rendue plus sensi-
ble par des exemples, donnent aux derniers chapilres un ca-
ractere vraiment original. Nous aurions pourtant desire y
trouver plus de develai*peniens dans I'expose de la methode de
Tournefort, du systeme de Linne , et de la methode de Jussieu.
Un chapitre supplemcntaire sur les herbiers et sur la ma-
niere de dessecher et de conserver les plantes tcimine ce pre-
mier volume.
Le second volume Iraitera de la physique vegetate, qui
embrassc la physiologic ainsi que la pathologie des plantes , et
la geographic botanique. Toute la partie physiologique el pa-
thologique , et une jiortion de la geographic botanique , seront
traitees par M. Baillt de Merlikux.. Enfin, deux au'res vo-
SCIENCES PHYSIQUES. 435
himes, contenant la phito graphic , o« histoire naturclle ties
plantcs , et la synonymie des meilleurs auteurs, compl^teront
I'ouvrage.
M. le docteur Lamouroux, frere du celebre naturaliste a la
memoire duquel la Revue a paye un juste tribut de regrets,
(voy. Rev. Erie, t. xsv, p. 866) porte un nom cher aux sciences :
le livre que nous venons d'annoncer, et de nombreux succes
obtenus dans la carriere medicale, allestent qu'il est digne de
le porter. C. P.
176. — * Guide de Vamateur de champignons , ou Precis de
I'histoire des champignons alimentaires ,veneneuxet employes
dans les arts, qui croissent sur le sol de la France; par jP.-5.
CoRDiER, D. M. Paris, 1826; Bossange pere. In- 18 de 35o pa-
ges avec II planches lithographiees et coloriees; prix, 5 fr.
Ce petit traite est un resume assez bien fait de tout ce qui a
ete ecrlt sur les champignons mangeables de nos climals. Le
botaniste n'y trouvera cependant rien de neuf; dej)iiis vingt
ans, M. Persoonnous a dit tout cela sous diverses formes, scien-
liGques ou lilteraires; car les libraires ont trouve le moyen
d'engager M. Persoon lui-meme, auteur circonspect et laconi-
que, a faire un livre fleuri sur les champignons. Sous le rapport
de la science, le Guide'de T amateur de champignons en est
encore a I'epoquc ou Linne pubila son Species , et ou Buliard
nous donnait les descriptions de ces productions singulieres
qu'on renfermait alors dans une dizaine de genres. Mais I'ou-
■vrage dont il est question pent etre utile a d'aiitres egards. II
apprendra a distinguer les champignons veneneux des cham-
pignons innocens ou formant un bon aliment, et il indique
meme d'ou viennent ies meilleures truffes. Pour le mettre au
niveau des connaissances actuelles , ce qui n'eut pas eu d'incon-
veniens, attendu que les gastronomes menie sentent aujour-
d'hui la nccessite de ne pas demeurer slationnaires dans les
parties de la science qui alimentent I'art culinaire, I'auteur
aurait pu consul fer les excellens articles dc wiycologie dont
lejeune et savant AdoJphe Brongniart enrichit noire diction-
naire classique d'histoire nalurelle. S'il dome jamais une se-
conde edition, nousl'invitons a puiser a cette source.
B. DE Saint-Vincent.
177. — * Manuel de physique amusante , ouNouvelles Re-
creations physiques ; contenant une suite d'experlences cu-
rieuses,instructives et d'une execution facile, ainsi quediverses
applications aux arts eta I'induslrie : suivi d'un Vocabulaire
de physique ; par M. Julia-Fontenelle. Paris, i826;Roret.
In- 1 8 de 387 pages, avec des figures ; prix , 3 fr.
436 LI V RES FRANCAIS.
Depiiis que I'espi it d'observafioii a servi de guide aux sa-
vans, ils sc sont empresses de recueillir tout ce qui ponvaitles
eclairer; ils ont senti qii'un fait qui, au premier coup d'ceil ,
semble n'oft'rir aucun inleret , ou c|u'iin simple amusement
peut elre la source des plus iniporlantes decouverles. Aussi,
pourles vrais observaleurs , i'expcrience est la ricnionsliation
des d(imonstralioiis, jjarce que c'est elle qui a ouvert la porle
a lant de veritcs : c'est aussi ce qu'ont demontre les progres de
la physique et de la cliimie.
Les aniusonens pliysiques, chimiques et matliematiques ne
sont plus un siuiple objet de curiosice ; I'explication des phe-
iiomcnes qu'ils preseiiteiit se rattaclie aux tlieories les ])lus ele-
vees : c'est ce qu'a fort bien senti M. Julia- Fontenelle. Avant
lui , Ozannin et G'wjo^ avaient public chacun un ouvrage dont
les amusemens niathcmaliques et la raagie blanche faisaient la
base principale. Dejjuis I'epoque de leur ])ublication, le calo-
rique et la lumiere ont ele mieux etucUes; I'identite du fluide
eleclrique et da fluide magnelique a ele reconnue ; la decom-
position de r.'iir et de I'eau a eu lieu ; un grand nombre de gaz
et de sels ont cle decouverts, et la connaissance des reactifs a
piis des accioissemens imraenses ; ces deux ouvrages ne sont
done plus au niveau dela science. C'est pour remj)lircettelacune
que M. Julia Fontenelle a public I'ouvrage que nous annoncons.
II I'a divise en deux grandes sections : la premiere comprend
les corps imjionderables ; et la seconde,les corps ponderables.
En relracant les proprietes de chacun de ces corps , I'auteur
indique les divers amusemens physiques auxquels ils donnent
lieu , et il les fait suivre des explications lirees des decouverles "
les plus modernes. C'est aiiisi qu'il divise en autant de classes
\t calori(|ue , la lumiere, Teleclricite , I'aimant, les metaux ,
i'air, I'eau, les sels, le phosphore, les reactifs, les encres dc
sympathie, etc. — A la fin de son ouvrage, I'auteur a place un
petit vocabuhiire de physique propre a en faciliter la lecture.
Ce petit trailc peut etre tres-utile aux artistes et aux ou-
vriers : en effet, par le desir seul d'y trouvcr matiere a leur
amusement et a leur dclassement, ils y rencontreront les cl^-
mens de la science qui leur donreront I'envie de I'etudier, et
les connaissances f(u'ils y puiseront tourneront , sans aucun
doute, au profit de I'industrie.
L.-SiB. Le IVormand, professeur de tecJtnologie.
178. — * Projet d'une correspondaiice a ctablir pour I'avan-
cement de la metcorologie. Nevers, 1826; imprimerie dc Le-
fevre-Lejeune. In-8° d'une feuille.
L'auteur du projet et de la brochure qui Texpose est M. Mo-
SCIENCES PHYSIQUES. 437
RiN, ingcnieiir des ponts el chaussees, membi'e de la Societe
de geographic, zele pour la propagation des connaissances
utiles, comme le sont en general les anciens cleves de recole
polytechnique. En racditant sur les fails mcteorologicjues bien
constates, non-seuleinent dans nos cllraats, mais sur loule la
terre, M. Morin a concu la possibilite de les coordonner, d'eri
former un systeme, une tlieorie qui put servir a expliquer, et
peut-etre a prevoir les modifications de I'alinosphere. II n'a pu
donner que Tanalyse de celte tlieorie , telle que ses medilations
la Iiii ont presentee; il fallait un volume pour la d('velopper
completement. Nous n'enlreprendrons pas de la rednire a une
expression encore plus abregee, au risque de lamutiler, oii
de la rendre inintelligible; c'est dans cette brochure qu'il faut
en prendre une idee exacte et suffisante. L'auteur y a compris
tous les meleores, sans en excepter les aurores boreales. Pour
la verifier ou la modifier d'apres les faits, M. Morin fait un
appel aux observateurs de tous les i)ays, et demande uiie cor-
respondance qui deviendraitcertainement tres-utile. II indique
les lieux ou il est a desirer que les observations soient faites ,
et il les classe en ralson des communications qu'il a recues ,
de celles qu'il espere obtenir, de celles meme qu'il n'a pas en-
core le moyen d'etablir. Au moment ou son ecrit fut publie,
il pouvait compter sur des correspondans francais a Vernon ,
Paris, Strasbourg, Saumur , Nevers, St-Etienne, le Puv, Va-
lence, Sisteron, Toulon. L'AlIemagne n'avalt encore offert que
Munich et Freyberg; Drontheim et Stockholm representaient
la Norvege et la Suede; Genes represenlait (onte I'ltalie, et
le Senegal toute rAfriejue. Un grand nombre de villes de
France, d'Angleterre, d'Allemagne et de toute I'Europe lui
donnaient des esperances. Celles avec lesquelles il n'avait en-
core entame aucunc relation sont en assez grand nombre, et
tres-im])orfanles par leur position et par les faits que Ton peut
y observer : au midi de la France, il s'agirait de multiplier les
observations sur les coles de la Mediterrance. En Italic, Flo-
rence et Naples n'ont rien promis; en Rtissio, Archangel,
Saratof et Odessa sont des lieux tres-favorables pour des obser-
vations sans lesquelles on ne peut eclaircir plusieurs plienome-
nes atmospheriques en Europe. L'Espagne presque tout en-
tierene contribuerait point jusqu'a nouvelordrea ce contingent
scientifique. L'Asie, I'Amcrique et la Polynesie devraient aussi
fournir a ce depot commun des malieres qu'il s'agit d'elaborer
pour I'utilite commune. Nous esperons que les correspondans
de la Revue Encyclopedique voudront bien seconder les loua-
bles efforts de M. Morin. Les documens qui lui seraient adres-
438 LIVRES FRANCAIS.
ses peuvenl elre envoycs a notre bureau central, rue d'Enfer
Saint-Michel , n" 18; a M. Carilian - Goeury, libraire, quai
des Auguslins, n° ^i , ou a M. Morin lui-meme, a Nevers.
F.
179. — * Clinique medicale, 011 Choix d'observations re-
cueillies a la cliiilque de M. Lerminier, niedecin de I'hopital
de la Cliarilo , et publiees sons ses yeux par G. Andrai, fils,
agrege a la Facultc de medecine de Paris , etc. Troisicme par-
tie : maladies de poilrine. Paris, 182G j Gabon. In-8° de 588
pages; prix, 7 fr.
Les deux premiers volumes de cef ouvrage ont deja recu
I'approbation de tous les medecins instruits ; celui-ci merite un
accueil aussi favorable : on y retrouve la merae sagesse dans la
discussion ct cetespritd'analyse qui assignea chaquesymptome
le degre d'itnportance convenable, et qui discerne, au milieu
d'une confusion apparente, la lesion principaled'ou derive un
long encliainement d'alterations secondaires. Les deux tiers de
ce volume sent consacres a I'etude des tubercules et de la
phtlusie j)ulnionaire ; le reste traile des affections du coeur.
Des observations recueillies avec soin, choisies avec habilete,
rapprochees avec ait, eclairent le diagnostic etmellent ameme
de faire , sur Tissue probable des maladies, ces predictions si
importanles aux yeux des anciens, mais qui chez eux etaient
plutot le resultat d'une sorte d'instinct miir! par I'experience
que d'une science veritable, lelles qu'elles peuvent I'etre au-
jourd'hui. Pourquoi faut-il que, malgre les connaissances po-
sitives que nous devons aux travaux des modernes anatomistes,
malgre les moyens d'investigation que nous possedons et qui
nous font lire, pour ainsi dire , au travers des organes, ce
pronostic soit si souvent defavorable et notre art tant de
fois rcdait a I'impuissance? Cette reflexion s'applique surtout
'aux maladies traitees dans ce volume. Aussi, a peine y est - ii
question du traitement qu'elles reclament : I'auteur, les regar-
dant commc au -dessus de toute ressource, semble se borner
a des moyens palliatifs diriges seulement contre les symplomcs
les plus incommodes. Est-ce decouragement fondc sur I'inutilite
des tentatives? Est-ce que , ne rccevant le plus souvent dans
les hopitaux que des sujets parvenus a un degre avance de ma-
ladie, il n'y aurait plus aucune chance en leur faveur ? Rials,
si,lorsc[ue les tubercules existent dans le poumon , ils resistent
a nos moyens de guerison , ne peut-on detruire les causes qui
les engendrent et s'opposer a leur formation ? La se rattache
la question obscure , mais pleine d'interet de leur origine, qui
occupe et divise les pafhologistes. M. Andral les regarde comme
SCIENCES PHYSIQUES. 439
le j)roduit d'une secretion morbide qui s'oi)ere le plus souvent
dans les vesicules bronchiques eiles-inemes. II estassez connu,
du reste , que toute inflammation ne les developpe pas ; et de
deux choscs I'une, ou bien ils doivent naissance a nne irrita-
tion dune nature pariiculiere, on bien il cxiste une predispo-
sition qui, sous I'influence de causes diverses jjliis 011 moins
Icgeres, d'lin simple rliume, d'une congestion pulmonaire peu
intense, donne lieu a lenr ap])aritinn. Sans avoir nettenient
etabli celte distinction, M. Andral admet celie falale predispo-
sition conime cause premiere de la plitliisie; et, a notre avis ,
la discussion et la precision de ce fait serait d'une haute im-
portance. Si cette ])redisposition , d'ailleurs depuislong - tems
reconnue , ctait enfin eludlee comme elle meritede I'etre, avec
le soin qu'on apporte maintenant aux reclierches delicates de
I'analomie patho'ogique , si elle avait des signes certains, ap-
preciables, si on avait determine en quoi elle consiste, quelle
modification de I'organe pulmonaire la constitue, alors elle
pourrait ^ire attaquee par toules les ressources de I'hygiene et
de la tlierapeutique, et peut-etre on parviendrait a tarir une
source effrayante de depopulation (i), tandis qu'actuellement
on est reduit a combattre des causes occasionnelles, sans cesse
renaissantes, souvent impossibles a ecarter, ou a gemir sur le
sort des individus en qui on a reconnu I'existence des tuber-
cules. RiGOLLOT , fils , n. si.
180. — * Cliniqne de la maladie syphilitique , par M. N. De-
VEROIE, docleur en medecine et en cliirurgie, des facultes de
Paris et de Goeltingue , cldrurgien-major demonstrateur a I'ho -
pital du Val-de-Grace; avec atlas calorie , representant tousled
symplomes dessines et graves d'apres nature et la belle col-
lection de pieces modelees en cire, de M. Ddpont aine , natu-
raliste. Paris, 1826; F. M. Maurice, librairc. IP livraison
in- 4° avec planches. Chaque livraison , composee de 3 feuilles
de texfeetde cinq gravures, coulc 8fr. ( Voy. Rev. Enc. ,t.xiiii;
mai 1826; p. 374 ).
Cette IP livraison contient, avec cinq nouvellcs gravures,
la fin du chapiire concernant I'origine de la syphilis. II serait
difficile de ne pas se rendre aux nombreuses preuves que
M. Devergie accumiile et qu'il a puisees aux sources les plus
respectables i)our resoudre enfin cette question. Non-seulement
il prouve que le nouveau continent n'est point la mere-patrie
(i). Les phthisiqnes foniient le tiers des malades recns dans les hopi-
laux de Paris.
4/iO LIVRES KRANC/VIS.
de la maladic vcnerienne , opinion deja adoptee par los iiie-
decins instruits de ce siecle; mais il demontre qu'elle etait
counue des anciens, el il refute les erreurs propagces par les m^-
decins du luoyen age. II ajoulc de nouveaux faits a ecus qu'il
a judicieuseinciit ein|)riintt5s a ["erudit Sprengel, a son savant
ci>nteini)orain !e docXcvir Jourdan , et aux medccins etrangers
niodernes qui ont tcrit sur la meme raaladie. Les gravures,
ires-soignees , non-seuiement sous le rapport du coioris , mais
sous celui des syinptomes , donnent un nouveflu merite a cet
ouvrage. J.
i8i. — * Rapport presente au Mlnislre de finterieur par
H Academic rojale de medecine sur les vaccinations pratiquees
en France pendant I'annec i824. Paris, mars 1826. Inipri-
merie royale. In-8° de 91 p.
Ce rapport, lu a 1' Academic de medecine dans sa seance du
20 septerabre 1825, a occupe a cette epoque les differens
jonrnaux ; ils ont fait remarquer le juste tribut d'eloges donnc
a M. le due dela Rocliefoucauld-Liancourt, qui le premier a
importe en France la precieuse decouverte de Jenner et
fonde avec Thouret I'ancien comite de vaccine dont les Ira-
vaux et le zele ont cte si utiles. Tous les faits et les observations
qtie renferrae ce rapport soiit de nature a accroitre la con-
fiance que doit inspirer la vaccine a toutes les personnes
qu'une injuste prevention ou d'absiirdes prejuges n'nvenglent
pas. On a reproche aux rapporteurs de n'y avoir pas discute
la nature des eruptions plus ou moins analogues a la variole
qui se sont montrees, en iSaS, a Paris et dans une partie de
la France, sur des indi vidus vaccinos. lis ont repondu que c'etail
poureux I'objetd'un travail particulier, etrangerau but du rap-
port actuel relatifseulement a 1 824, et qui sera bientol soumis a
la discussion de TAcaderaie de medecine. 11 resulte du tableau
pret-snte au ministre (|ue 438,537 vaccinations ont ete prati-
quees en France, en 1824. Ce nombre depasse de 49)943 celles
qui furent faites en 1828. Nous observerons qu'il est a notre
connaissance que bien des vaccinal ions n'ont pas ete mentionnees
parl'Acadeniie de medecine, par suite de la negligence desvac-
cinateurs ou des antorites locales; et cependant nicmeen tenant
compte de ce qui a ete oniis, le total des vaccinations n'egale
pas la nioiti(i du nombre des naissances, nombre dont il fau-
drait se rajiprocher ])onr preserver efficaccment la France des
atteintes dela pelite verole. Ne doit-on pas regretler que, pour
atteindre un but aussi utile, radministration ail cru suflisante
I'allocalion d'une raodique somme de 34, 000 fr. ?]Ne peut-on
pas altribuer a cette parcimonie I'etai de languour ou se trouve
SCIENCES PHYSIQUES. /i4i
presque partout le service de la vaccine? Outre quatre-vingt-
dix-huitmedaillesd'argent decerneesaux personnes quiontmis
le plus de zele a propager ia vaccine, un premier prix de la valeur
de iSoofi'. a elepartageentre MM. BLANCHARD,officier desante
a Baud ( Morbihan ), et Nollet, officier de sante a Nancy
( Meurthe) et quatre medailles d'or ont ete accordees a MM. La-
BOSQCE » medecin a Agen(Lotet Garonne), Benoit, officier
de sante a Grenoble ( Isere } , Girard , officier de sante a Saint-
£tienne (Loire ), etCAVENNE, chirurgien a Laon ( Aisne).
R. fils, D. M.
182. — Expose par ordre alphabetique des cures operees en
France par le magnetisme animal , depuis Mesmer jusqu a nos
jours [ 1774-1826); ouvrage ou Ton a reuni les attestations de
plus de 200 medccins, tantmagnetiseurs que temoins , ou gue-
ris par le magnetisme; suivi d'un Catalogue complet des ou-
trages francais qui ont ete publies pour , sur ou contre le
magnetisme; par M. S., I'un des membres fondateurs de la
Societe du magnetistne de Paris. Paris- 1826; J. - G. Dentu.
2 vol. in - 8° de xli-6i2 et 543 pages; prix, i5 fr. et 19 fr.
par la poste.
Mesmer , a son arrivee k Paris, annonca sa decouverte
comme un moyen de guerison universel. Cette assertion ne
tarda pas a etre vivement contestce : on cita un grand nonibre
d'exemples dans lesqnols le magnetisme avail ^chouc, ou n'a-
vait fait que pallier le mal momentanement, et, combattant
une exageration par une autre exageration , on prononca que
le nouvel agent prctendu ne produisait aucun effet, n'avait
aucune existence.
Le terns est vonu de reduire ces exagerations contradictoires;
cin(|uante annees d'observations et d'experiences , pendant les-
quelles on a public des centaines de volumes, remplis par des
relations detaillees de traitemens magnetiques, peuvcnt eniln
permettre de se former une opinion. Quand une science n'est
pas assez avancce pour que, de la nature connue de I'agent on
puisse deriver avec certitude les effets qu'il produira , le seul
moyen de faire des progres est de conslaler eropiriquement les
faits , en laissant au tems a faire sortir des fails la theorie la
plus naturelle. C'est ce qu'a senii I'auteur de I'ouvrage que
nous annoncons; il a rassemble daus un seul ouvrage , etd'a-
pres Tordre aiphabetiqne, les effets curatifs du magnetisme qui
lui ont paru bien constates. En parcourant ce vaste repertoire,
ou. la plupart des traitemens sont determines ou du moins cer-
tifies par des medecins recomniandables, on est portc a croire
que le magnetisme, dans les maladies qui ne sonl pas incura-
1,1,1 LIVRES FRANCAIS.
bles, peut quclquefois elre utile, et que, s'iJ ne gu^rit pa»
toujours radicalement, du moins il soulage dans un j,'rand
nombre de cas. La multiplicite des excmples cites, dans i'ou-
vrage que nous annoncons, de traiteinens de rhumatisuies, de
paralysies, d'epilepsies, etc. , tendent a prnuvcr que ce nou-
\eau genre de reinede exerce surtoul son empire sur Ics mala-
dies nerveuses; ce qui serait d'autant plus a desirer qne ces
maladies font le desespoir de la mcdecine ordinaire.
Malheureusemcut , lorsque les rcssources de la veritable
science sont insuttisantcs, le cliarlalanisme vient se presenter
avec audace , et reusslt quelquefois, surtout quand il s'agit
d'exercer son pouvoir sur I'imagination. Les adversaires du
magnelisme prelendent que les cures dont il se vante sont de
cenonibre. Quant a nous, nousdoutons encore, nous ne serons
disposes a croire que lorsqu'un plus grand nombre de juges
couipelens auront jirononce. Bouillet.
i83. — * Recueil de probleines amusans et instructlfs , avec
les demonstrations laisonnees et I'application des regies de
I'arillimelique a leurs solutions, ou cours complet d'analyse
arithmetique , efc.;par/.-/. Grkmiihet. Troisietne edition.
1^ panic contenant les solutions. Paris, 1826; Crette, rue
St-Martin, n" 98; in-S'^ de /(Oo pages; prix, 6 IV.
L'auteur a divise son travail en deux volumes; le pre-
mier contient I'enonce des problemes,lc deuxieme en donne
les solutions. Nous avons deja annonce la publication de la
premiere partie : la seconde renferme les raisonneniens pro-
pres a conduire aux resultals demandes, Comme ces deux
parties se vendent separement et que Tune est plus specia-
lement destinee a etre mise cnlre les mains des I'leves ,
la deuxieme edition s'en est plus promptement ecoulee que
celle de I'autre; et comme M. Grcmillict a considerablement
accru , dans la troisieme edition , le nombre des proble-
raes, il s'est trouve oblige d'augmenter les exemplaires qui
rcstent de la deuxieme partie des solutions de ces nouvelles
questions, portees maintenant au nombre de i320, au lieu de
717 seulemenl. Cest I'ensemble de ces deux volumes qui com-
pose la troisieme edition qTie nous annoncons. Nous ne rcpro-
duirons pas ici les justes eloges que nous avons falts de cet
interessant travail, qui sera tres-utile aux personncs qui vcu-
lent se perfectionner dans la sciences des calcuis : les mailres,
aussi bien que les disciples, y trouveront des sujcts d'etudes
fort inlercRsans. Francoetir.
i8/(. — Lecons nouvelles d'astronomie, recueillies aux cours
publics par un ancien elcve de I'Ecole poly technique. Paris ,
SCIENCES PHYSIQUES. /,43
1826 ; Baudouin. In-8" de 208 p. avec cinq planches ; prix, 5 fr.
L'amoiir des sciences , devcnu, chaque jour plus vif dans
toutes les classes de la socicte, a fait multiplier leslivresqui
en exposeniles eleraens. L'Angletene etla France ont vu viaitre
chez elles una infinite d'onvrages de ce genre , et ces deux na-
tions se les sont reciproquement empruntes. Pour ne parler
que de rastronomie , Y Exposition du sysleme du monde de
M. de La Place et VUranographie de M. Fraiicoeur ont ete inises
plus d'une fois a contribution par des corapilateurs anglais; el
dememe, plusieurs parties de traites anglais ont ete repro-
duites dans notre langue, telles que les theories d'Herscliel ,
etjusqu'aii medium gazeux du reveur Philips. Paimi leso|)us-
cules originaux publics en France pour les gens du monde ,
nous avons vu , en peu d'annees , paraitre des resumes, des
manuels, et des lettres sur I'astronomie. Quelques - unes de
ces compositions, rccues avec faveur par le public, ont ob-
tenu les honneurs de la reimpression.
Voici maintenant des Lecoris nouvelles d'astionomie, annon-
cees comme recueillies aux cours publics des professeurs de la
capitale. On pourrait se demandersi, apresle grand nonibre
de publications analogues, celle-ci ctait "encore utile. Nous de-
vons lepondre qu'effectivement ces Lecons presenterit quel-
ques apercus nouveaux ; et sous ce rapport, il faut les recom-
mander aux amateurs : une courte analyse en fera juger.
Les Lecons nouvelles sont en prose, il y en a treize. La
premiere offre une histoire tres-abregee de I'astronomie. On
trouve , dans la seconde, les mouvemensapparens des corps ce-
lestes; dans la 3^ , les mouvemens reels, la forme et la gran-
deur de la terre; dans les 4<=, 5*=, 6'=et 7*', le systeme solaire, ses
planetes, leurs satellites et les cometes ; dans la 8% les etoiles
fixes; dans la ge, lesmarees; dans les loe et 11^, quelques
nouveaux details sur la lune ; enfin, dans la i2«, les eclipses, et
dans la i3'', le calendrier.
Ce sont des resuliats astronomiques, plutot que la maniere
de les obtenir, par la raison fort juste que I'anteur n'ccrit
point pour les savans. II n'est question ni de formules, ni de
demonstrations; mais on donne simplement des indications
sommaires, qui peuvent inspirer aux gens du monde Ten vie de
penetrcrplus avant dans la science avec le secours d'aulres ou-
vrages. Par exemple, on connaiirait bien mal I'histoire de I'as-
tronomie , si on ne la lisait que dans la premiere de ces Lecons;
on y decouvre des erreurs qui ne sauraient elre sans doute at-
tribuees qu'a I'auditeur des cours auqnel on doit ces lecons.
II avance , pages 3 et 6 , que Copernic ne crea point, qu'il ne
fit que renouveler le sysleme qui porte son nom. Mais les con-
4/,/, LIVRES FRANCAIS.
jectures des anclens n'etaient pas un systeme ; an contiaire,
I'Aichiincde allemand fiit inventeur et, en merae tems legisla-
teur; il apparut sur I'horizon scientlfique pour eclairer son
siocle et pour commander une reforme necessaire. Ptolcriiee
n'est ])oint regarde comma le premier des astronomes , ainsi
qu'on I'avance page 5; il n'a point assez fait pourmeriler ce
nom; il rassembla en corps d'ouvrage, sous le titre d'Jlina-
geste, title donne par les Arabes, les doctrines, les opinions
et les travaux de ses devanciers ; mais il ne decouvrit person-
nellement prcsque rien. Hipparque serait plus digne de la pree-
minence a cet egard, s'il s'agissait d'en accorder une; nous lui
sommes redevables du i*'' catalogue d'etoiles, auquel Ptolemee
n'ajouta (jue deux astres nouveaux. II n'est point vrai, non
plus, que Copernic ait ele persecute par ses contemporains,
puisque la crainte de I'etre le deiermina a ne publier son sys-
teme ciu'ii la (in de sa carriere, et puisqu'il raourut en rece-
vant le i*'' exemplaire de son livre. Enfin , le syslemc de Ty-
cho-Brahe n'eut de soutiens que les pretres et le peuple; mais
ses disci]iles, et notamment Kepler, le combaltirent franche-
cliement. Alors qu'on vent resumer I'hisloire d'une science, il
importe de ne laisser a ses lecteurs que des notions exactes.
Par une raison d'equite, I'auteur n'aurait pas du egalement
omeltre les travaux des astronomes et des geometres francais
qui ont les premiers mesurcia grandeur du globe terrestre. Les
tentatives de Picard meritaient d'etre citees avant celles de
Norwood. Un lort plus grand de I'auteur des Lecons est de re-
peler , page 76, que la lune a une atmosphere , ce (jue les
astronomes les plus eclaires nient formellcraent ; sans doiile il
n'etait pas responsable des opinions des professenrs qu'li a
cntendus, mais nous doutons que celle-la ait cte soutenue an
cours de M. Arago. La lecon des marees est incomplete ; car
elle ne parle pas des marees moyennes et a longues periodes ,
et on y effleure a peine le sujet si curieux des marees aeriennes.
Enfin, I'expiication de I'aberration de la lumiere n'a point paru
assez claire, et la description relative a une eclipse totale de
soleil est par trop vague et trop insignifiante.
Mais, en terminant, nous ne donnerons que des eloges a la
lecon sur Ic systeme solaire , aux tables sur les planetes, aux
details sur les nebuieuses, et au chapitre sur la lune d'au-
tomne. Albeut-Montemont.
i85. — * Le Mecamcicn anglais, ou Description raisonnee
de toutes les machines raecaniques, decouvertes nouvelies, in-
ventions et perfectionnemens appliques jusqu'a ce jour aux
manufactures etaux artsindustriels ; mis en ordre pour servir
de manual pratique aux mecaniciens , artisans, entrepreneurs ,
SCIENCES PHYSIQLES. 445
etc.; par Nicholson, ingenieur civil. Traduit de I'anglais sur
la derniere edition ; revu et corrige par M. * * * ^ ingenieur,
avec cent, planclies gravees par Lallemand. Paris, 1827 ; Fan-
tin ; Bocca. 4 vol. in-8° ; prix , 40 fr. , et 46 fr. par la poste.
li'industrie a fait d'imnienses progres depuis undemi-siecle,
et les nations qui s'occupent le plus des perfeclionnemens dont
elle a ete et dont elle est tons les jours susceptible , ont senti
qu'il elait impossible, sans se nuire reciproquement , de sou-
lenir plus long - tenis cet esprit de jalousie qui leur faisait
tenir cachees les ameliorations que les uns et les autres de-
couvraient assezsonvent dans les precedes, dans les machines,
dans les manipulations que le genie des artistes eraploie pour
perfectionner leurs produits.
La France a ouvert ce concours })hilantropique; et deja, en
1818, le savant ingenieur M. Borgms concut et executa , en
trois ans , son Iraite complet de mecanique appliquee aux arts ,
en 8 gros vol. in-4°, accompagnes d'une quantite prodigieuse
de figures. (Voy. Ref. enc. , t. x, p. 299, et t. xr, p. 42)
II serait a desirer que cet auleur ajoutat a cet ouvrage impor-
tant, un su^iplernent dans lequel il consignerait toutes lesd^-
couvertes faites depnis cette epoque.
Les Anglais , nos voisins et nos emules, ont senti I'avantage
d'une publication serablable. L'ingenieur Nicholson, I'un des
savans anglais , le plus propre peut-etre a decrire avec neltete
et simplicite les arts industriels , a rempli cette tache. Cet ou-
vrage n'aurait besoin que de quelques details thcoriques et
historiques gur chaque objet dont il traite , pour former un
cours conaplet de technologic, s'il cut traite de toutes les
branches de cette science; mais il s'est borne a la mecanique,
comme I'indlque son titre.
Nous ne pouvons donner unc analyse plus instructive de
I'ouvrage dont nous nous occupons , qu'en en transcrivant
une partie des tables.
Tome I. — De Taction des forces. — Du frotteinent. — Puis-
sances mecaniques. — Le levier. — La roue et I'axe. — Poulie.
— Plan incline. — Cordes. — Vis. ■ — Centre de gravite. — Com-
binaison des puissances mecaniques. — Construction des mou-
lins, — Dents des roues. — Des assemblages. — Des differens
engrenages. — De la maniere de regulariser le mouvement
des machines. — Observations generales. — De la force ani-
male. — Table comj)arative des forces mecaniques.
Des moulins a eau. — Roues mues en dessous. — Pioues
du puits de Lambert. — Roues mues en dessus. — Roues
mues en dessus sans arbres , dites de Burns... — Moulin
446 LITRES FRANC^AIS.
du doclenr Bacher. — Moulin a mar^e... — Sur retablissement
des canaux et des digues. — Canal avec flolterin pour regler
la sortie de I'eau. — Canal employe par M. Smeaton , pour
conduire I'eau sur les roues. — Rogulateur d'ecluse. — Regies
pour la construction des roues de moulins a eau niues en des-
sous , donnces par M. Fergusson. — Idem, par le docteur
£reivster. — Liste d'ouvrages sur le mccanisme des moulins.
Moulins a vent. . . — Methode pour placer et retirer les
Toilcs pendant que les ailes sont en mouvement. — Voiles
pour les moulins a vent verticaux. — Methode de Cubitt, pour
rendreuniforme le mouvemer-t des voiles des moulins a vent...
— Des moulins a ailes horizonlales. — Moulins a farine. — Des
meules de moulin. — Tables de Fenwick. — Moulin a blutoir
a bras , dit de menage. — Moulin a bras. — Moulin a pied. —
Moulin a petrir.
Des machines a vapeiir. — Appareils inventes par Savery ;
— par TSewcomen; par fVatt', par Hornblower \ par fVoolf...
— Machine a haute pression. — Observation sur le travail
des machines a vapeur de Cornouailles. — Vide de Brown, ou
machine pneumatique.
Tome II. — De la resistance desmateriaux. Machines hydrnu-
liques. — Ponipes. — Pompes a incendie — Du eric. — Des grues.
— Des presses. — Presse a cidre. — A. papier. — A empiler. —
A eau. — A im])rimer. — Pour les billets de banque. — Son-
nettes ou machines a enforcer les pilots. — Machine a allescr.
— Machine a couper les fih de metaux. — Machine a diviser
de Ram.sden. — • Tours et appareils a tourner. — Des usines a
fer. — Fabrique d'acier. — Des fileries et trefileries. — Fon-
derie de plomb. — Fabrique de papier. — Manufacture de
coton. — Filature de laine. — Longues laines. — Courtes
laines.
Tome III. — Manufacture de soie. — Manufacture de fil
de lin. — Tissage. — Corderies. — Moulins a scies. — Moulin
a tan. — Moulin a huile. — Moulin a couleur et a indigo. —
Polerie. — Horlogerie. — Horloges. — Montres. — Chrono-
metrcs. — Echappenient. — Pendules. — Balimens. — Des
mortiers. — Briques. — De la maconnerie. — Emploi des
briqiies dans la construction. — Charjjenterie. — • Metmiserie.
Tome IV. — Badigeonnage. — Toilure el ardoises. — Plom-
berie. — Des vitriers, — Peintures en batiniens. — Des che-
mins de fer et des machines locomotrices. — Appendix.
Geometrie. — Mesurcs de supcrficic. — Methode pour trouver
I'aire et le volume des solidcs. — Recetles utiles. Ce dernier
article, qui comprend 160 pages, contient une quantttc con-
SCIENCES PHYSIQUES. /,47
siderable de recettes, dont la plupart n'etaient pas connues
en France.
Les cent planches renferment six cent cinquante - deux fi-
gures tres-intelllgibles.
Si le traducteur de cet ouvrage avnit ete plus verse qu'il ne
le parait dans la mecanique , il ne se serait pas astreint , conime
il I'a fait, a traduire lilteralement I'original. Chaque langue a
son cractere particulier. Telle tournure de phrase bonne et
intelligible dans la langue anglaise, est impropre ct obscure
dans notre langue. Lorsqu'on traduit un ouvrage d'arl d'une
langue dans une autre, on dolt d'abord se penetrer de son
sujet , I'ctudier pour le bien comprendre, et ensuite le decrire,
sans presque se servir du langage de I'auteur. II faut surtout
etre bien fainilier avec les mots techniques , pour ne pas s'ex-
poser a prendre le change ; car alors on devient ininlelligible
pour des lecteurs qui ne sont pas bien verses dans la meca-
nique. A qi'.elques imperfections pres , qu'on pent reprocher
a I'auteur de cette traduction, ce traite renferme une grande
quantite de choses pcu connues en France , et sous ce rap-
port il pent elre tres-ulile aux mccaniciens eta ceiix qui s'oc-
cupent des arts industriels.
L. Seb. Lenormand , prof, de technologie.
186. — * Les Amusemens de la campagne, contenant 1° la
descri])tion de tons les jeux (jui peuvcntajouter a I'agrement
des jardins, servir dans les fetes de famille et de village , et re-
pandre la joie dans les fetes publiqucs ; 1° I'histoire naturelle,
les soins qu'exige la voliere, I'art d'empaiiler les animaux , le
jardinage, la peche, les diverses chasses , la navigation d'a-
grement ; des recreations de physique, des notions de geome-
tric pratique , d'astronomie, degnomonique; des principes de
gymnastique amusante , d'equitation,de natation , de patinage;
des lecons sur les arts de la menuiserie , du tour , du dessin ,
de la perspective ; des recetles agreables a connaitre, etc., etc.;
et generalement tout ce qui peut contribuer a charmer les loi-
sirs de ceiix qui habitent la campagne : recueillis par pUisieurs
amaieurs, et publics par M.-A.-PauUn Desormeaux. Paris ,
1826; A.udot, rue des Macons-Sorbonne , n*^ 11. 4 vol. in-12
de plus de Boo pages chacun ^ avec 40 planches gravees;
prix, 12 fr.
187. — La Peche a la ligne , cxtraite des Amusemens de la
campagne. Paris, 1826; le meme. In-12 de 216 pages, avec
figures gravees ; prix , 3 fr.
Nousfaisons des a present a nos lecteurs une invitation f[He
I'auteur leur a faite quelque part dans I'ouvrage, c'est de vou-
448 LIVRES FRANQAIS.
loirluifaire I'cmarquer les omissions qu'il a pu coramettrein-
volontairement. II accueillera tons les avisavec reconnaissance,
en rendant a chacun I'lionneur qui lui appartiendra , lorsqnc
la defense de faire connaitrc le nom ne suivra pas I'obligeante
communication quilni aura ete faite. Si la correspondance que
I'auteuf sollicite est aussiabondante et aussi produclivequ'elle
pourrait I'etrc, ce nc sera pas des supplemens k cet ouvrage ,
qui lui seront fournis, niais des materiaux pour une bibliotlic-
que. Que ne comprend point ce titrc : les Amusemens de la
campagn^ ? Le sejour des cbamps a le secret, pour ceux qui
savenl en goiiter les charmes, de converlir en occupations
agreables, en delassemens, ce qui dans les villes porte a bon
droit le nom de travaux. Et sans cliercher ailleurs que dans
les \ieux. livres , que de richesses a exploiter, dont les lieureux
campagnards d'aujourd'hui ont perdu la trace ! Dufouilloux
fournirait une cliasse au blaireau, dont Tusage est tout- a -fait
perdu, meme dans nos provinces de I'ouest; et pourtant , c'e-
tait un passe-tems fort agreable que ces grandes reunions de
chasseurs, ce concours de charrettes , Acjillettes, ces enormes
provisions de bons harnais de gueule, comme jambons, pou-
lardes, etc. ; ces faisceaux de pelles, de pics et de ploches , le
tout pour prendre par iriines et contremines un blaireau dont
la peau fournirait des baudriers oux aj-balestriers de Gascogne.
MraeOysille enseignerait aussi, par I'organe de !a reine de Na-
varre, d'autres manieres agreables de passer Ic tems , dans les
cas les plus desesperes. On remonterait jusqu'a Horace, qui
goulait si bien les delices de la campagne ; et pour peu que
Ion voulut compulser les auteurs grecs, Xenophon apporte-
rait aussi son Iribut. II ne faut done pas s'attendre que ces
quatre petits volumes, publics par M. Desormeaux , contien-
dront tout ce que le titre comporte : les redacteurs ont du se
borner a ce qui leur a paru convenir le mieux aux gouts ac-
tuels, et au plus grand nombre de ceux pour lesquels cet ou-
vrage est compose. En effet , dans le premier volume, la basse-
cour n'obtient que 38 pages , et le jardinage rccreatif, 70 p.
Le premier jiaragraphe aurait pu offrir a la curiosilc qui est
sans contredit un amusement, une multitude d'objetsnouveaux
et dignes de nous occuper plus serieusernent que le titre de cet
ouvrage ne semble I'annoncer. Plusieurs espcces d'oiseaux
manquent encore a I'ornement de nos basses-cours : la belle
espece de sarcelles que les dames cliinoiscs se plaiseiit a elever
n'est peut-etre pas encore en Europe; Yagonti ct Vagfimi de
Cayenne n'y sont point encore naturalises ( Voy. le Diction-
naire classique d'Histoire naturelle , par MM. Bory de Saint-
SCIENCES PHYSIQUES. /,/,(,
Vincent, elc. etc. T. P'' , p. i'')5 ). Si r.ous passons a i'autrc pa-
ragraphe, la grande variete , la licbe nomenclature des objets
qu'il prc^senle pent d(5guiser quelque terns nne discltc Hop
reelle : on peut se croire dans Tabondance, quand on possede
plus que le necessaire, et que Ton n'a pas eu sous les yeux
les tresors de la veiilable ricliesse. Mais , qnand on pent
jonir de plusieurs miliiers de planies d'agreinent , est-il pos-
sible de se borner a cinquanle on soixante, a un cent ? Mais
pressons-noiis, car rous avons a paiier de quatre volumes ;
apies If.jarclin rechcatif, un conte holanique amene beaucoup
de details siir celte aimablc science. Le langage desjleurs est
I'objet d'un cliapitre parliculicr. Ce sujet , qui appartient a la
■vill<^ coinme a la campagne, est place convenablcmenl dans un
ouvrage lei que celui-ci. Ce n'est pas chez. les Orientaux qu'il
faut aller clierclier des modeles et de veiitables ressources pour
la poesie, quoiqne leur imagination vagabonde nous plaise
souvent par la singularite deses inouvemeiis et Toclat des cou-'
leurs dont elie se pare. Au resle, le laugagc desjleurs a tout
au moins le mcrite des rebus, charades, logogryphes et au-
tres jeux Ires - innocens , et nous ne devons pas oublier qu'il
est question ^'ainusemens.
Uequitation , sur loquelle on tron\e ici nne notice fort
courle, et ])ourtant satisfaisanle, ne donne lieu a aucune oIj-
servation. Mais la chasse aux pieges ! II n'est pas une de iios
provinces qui n'ait a faire conaaitre de nouveaux stratagemes
de guerre contre les nialheureux habitans desbois , deshaies,
des champs, de I'air, de la terre et des eaux. Ici, I'editeuraura
certainemeut d'amples additions a faire a la seconde edition de
son livre. II en sera peut-^tre de menie de la chasse au fusil,
qui commence le second volume. Quant a ]z p^che a la Ugne
et autres peches qui n'ejtigent pas un grand ap])areil, la nia-
ticre est Iraitce ex professo ; c'est a bou droit qu'elle a recu le
privilege de former un ouvrage 3 part.
La voliere est un amusement contre lequel il faudrait faire
entendre les reclamations du bon gout. Un pays orne de
bosquets, de vergers, de beaux jardins d'ornement et de fo-
rets , n'est-il pas une immense voliere.^ Apres avoir In la des-
cription de la voliere do Jidie d'Efange , peut-on se plaire a
lenir en cajitivitc cespetits chantres cpii ne valent jamais, dans
les prisons de I'homme, ce qTi'ils deviennent par laseule direc-
tion de la nature? Quant aux aheilles et aux vers-a-soie , qu'on
s"en amuse, rien de plus convenable. Les plaisirs simples que
jirocurent ccs occupations champetics ne sont pas perdus pour
rinstrnction ; ils cxerrent utilemeni I'esprit d'observation , <;t
T. XXXI. — Aoiit i8a6. ay
/j5o LIVRF:S FRANflAIS.
ilseiitrciiennent riiahitucie de rordre , lorsqu'on s'y adonne
avec uii jieu tie zele.
Le troisieme volume a pour objet d'ebauclier a l.i campagne
des naturalisles; soil : des georaetres, des aslronomes , des
])1iysiciens; ceci est plus difficile et moins amiisant. Si I'edi-
leur manijuc de jilace pour de nouveaiix jeux clianipctres, il
pourra congedier sans regret les notions de gcoinctrie , d'a*-
tronomie , de gnomonique et meme Ae perspective , etc. , inais il
laissera , dans ce troisieme volume , la conrie nolice (|ue Ton y
trouve sur la natation, les details sur I'art du tour et sur quel-
ques autres arts auxquels une habitation chanip^tre senible
inviler ceux qui ne manquent ni de saute, ni de loisir.
Dans le qiiatrieme volume, I'auteur commence en savant et
finit de meme : mais , entre ces deux extrernites devolues a la
science , les jeux trouvent a se placer, et ils arriventen foule.
Toutefois, qu'on n'imagine point que des reflexions profondes
lie viennent de tems en tems se meler aux descriptions d'amu-
semens; le preceple de BoiJeau est observe , ce qui est d'un
lieureux augure pour le succes de I'ouvrage.
Nous avons parle de science au commencement et a la fin de
ce volume. Que les amis des plaisirs champelres ne s'en ef-
fraient point ; le mot est beaucoiip plus grave que la chose. Ils
reconnaitront bien.t6t que cette pretendue science n'est qu'un
jeu. En somme , cet ouvrage alteindra son but et il y a lout lieu
de croire que sa destinee sera de grossir avec le tems. Le
gout de la campagne nous viendra de plus en plus ; celui des
amusemens ne passera point: tot ou tard, ce livre deviendra
d'une utilite generale,et cette epoquedenotre existence comme
nation, si elle n'est pas la plus brillante, ne sera certainement
pas la moins heureuse. F.
1 88. — * Relation du voyage du capitaine Guedon a la baie
de Baffin sur le batiment baleinier le Groenlandais , pendant
I'annee i8a5; par M. Nell de Breaute. (Extrait des ^w/z^/cj
maritiines. ) Paris, 1826 ; imprimerie royale. In-8°de 22 pages,
avec une carte.
Ce voyage revele aux pecheurs francais de nouvelles ri-
chesses dans les mers polaires, et leur fait voir que, pour les
aller exploiter , il ne faut ni des vaisseaux tres-fins voiliers, ni
des marins etrangers. Parti du port de Dieppe , le 6 mars 1825,
il se trouva, vers la fin d'avril, sur les cotes du Groenland.
Deux Eskimaux les visiterent a bord; « M. Guedon eut de I'un
d'eux, pour une bouteille d'eau-de-vie, un raodele de leur
canot equlpe et arme. Les proportions y sont aussi exacte—
ment observees que dans les raodeles de vaisseaux executes par
SCIENCES PHYSIQUES. /,5v
nos ingenieurs. I-e plus jeunc dc ces Eskimaux efait presque un
hoinine civilise ; il avail demeure dans I'etjiblissement danois de
I'lle de Disco, et savait lire et eorire. Le capitaine lui presenla
son journal et une plume; il ccrivit aussitot son age, son nom,
celui de sa fenime, et la date de sa visite. Nous avons vu cette
ecriture: elle est giande, blen formee, et personne ne la croi-
rait d'un habitant du Greenland. »
Le baliment etait, dans les premiers jours du mois demai,
en vue de I'ile de Disco. Un certain nombre d'Eskiraaux etaient
venus a bord avec leurs femmes, pour faire des eolianges. A la
fin du jour , I'equipagc dansa avec les femmes, aux accords d'un
raauvais violon dont jouait assez adroitement un des naturels.
C'etait , sans aucun doute , le premier bal donne dans ces pa-
rages , sur le pont d'un vaisseau francais, aux sons de la mu -
sique d'un menetrier eskimaux. Ue capitaine Guedon alia, avec
lechef de peche anglais, faire une visile aii resident du comptoir
danois de I'ile de Disco : ils lui porterenl un present de pommes
de terre et de prunes; on les recul tres-bien. La niaison est
batie en bois, et habitee par Irois hommes et deux femmes.
Le clief du comptoir, qu'on appelle aussi Monsieur le gouver-
neur , revint a bord du GroenUtnclais Si^ec les officiers , a chaciin
desquels il fit donner un Iraineau allele de huit chiens, j)our
gagner la poinle ou Ton avail laisse la chaloupo ; le sien en avait
douze. Cette course d'un genre nouveau pour nos voyageurs
les amiisa singulierement. Le gouverneur resta une partie de la
nnit a bord, il parla un peu francais, causa de Paris, de nos
modes, et finit jjar chanter /e/«we.f, voulez-vous eprouver ,
croyant faire une chose agreable pour ses holes. Effectivement,
retat-major cprouva un grand plaisir a entendre nne chanson
francaise aumilieu de I'affreuse solitude de ces inimenses champs
de glace.
La peche ne devint fructucuse qu'au nord de I'ile de Disco ,
enlre le cap Searlc, par 67'' 40' et le detroit de Lancastrc,
par 74". Neuf baleines furent prises en fori peu de lems. M. de
Breaule indique, d'apres les observations du capitain-e Parry
et celles de M. Guedon . ce qui peul assurer le sucecs des balei-
niers francais dans ces parages. II s'altaclie a combattre ce pre-
juge decourageant pour noire marine , que les seals Anglais
saventnavigueretpecher. II rappelle , a ce sujet, la conversation
d'un capitaine francais, M. de Roquefeuil, avec un capitaine
anglais, M. Nye, a la cote du nord-ouest de I'Amcrique. " Le
capitaine Nye ne pouvait pas croire qu'uu navire francais,
sans pratique, put se irouver dans le canal de Lynn, la partie
la plus dangereuse de cette cote... Vous efes venu sans doute
452 LIVRES FRANCA^IS.
aniorieurenicnt dans ces parnges sur nos batimcns? — Non ,
capitainc. — Mais vous avez quelque officier qui les connait.
— AiiCun. — Comment faites-vous done? — Et vous-m^me?
— Moi! j'ai fait tiois voyages a la cole, avant de commander
comme officiei'. — Un de •vcs conipatriotes a ( onimence le pre-
mier cette navigation sans guide; je fais comme lui. » F.
189. — Voyage a IMcroe , au flcuvc Blanc ^ an dclh de
Fdzogl, dans le midl du rojauine de Senna r, a Sioitah et
dans rinq autres oasis, fait pendant les annecs 18 19, 1820,
1821 et 1822, p.ir M. Frederic Cailliauh, de Nantes; accoin-
pagiie de caries gcographiques, (ie planches represcntanl les
monumens de res contrees , avec les details relalit's a i'etat
nioderne et a i'liistoire nalnrelle , dedie au Roi. Paris , J82G.
De I'imprlmerie royale; Debure freres; Tilliard. 2 vol. in-8°,
avec un atlas et la description des planches; jirix , 20 fr.
Ce voyage, dans lequel M. Catlliaud fut pourvu de bons
instrumens, et accompagne par M. Letorzes, habilue a ob-
server, et a caiculer les observations, nous a fait connaitre dans
I'inlerieur de I'Afrique un ])ays tout nonveaii, sur une lon-
gueur deplus de 200 lienes, et jusqu'au 10" degre de latitude
nord. U est maintenant hors de doute (pie le Nil , doiit Bruce
crnt avoir decouvert les sources en Abyssinie, et que les Por-
iiigais avaient reconnu et dccrit dans le xvi' siecle, n'est
qii'un affluent du Nil veritable dont la source doit etre beau-
coup plus rapproohee de I'equateur.
On doit aussi a M. Cailliaud la d6couverte de la ville de
Meroe, dont il a retrouve les ruines dans le Delia forme par
le Bahr-el- Abriel , et le Bahr-el-Azraq (le tleuve Blanc et le
fleuve Bleu), precisement au lien ou D'Anville les avail pla-
cees, d'apres les temoignages des autcurs anciens.
Des allees de sphinx et de lions, des pylones et des temples
dans le style egyptien, des forels de pyi amides, une vaste en-
ceinte en briqnes crues, y deposcnt en faveur de I'exislence
d'une grande capitale, el petivent servir fi eclaircir cetle grande
quesiiou encore indccise : « La civilisation est-elle arrivee
d'Elhiopie en Egyplo en descendant le Nil, on bien a-t-elle
rcmonte d'Egypte en Nubie, en suivant le cours du fleuve ?
Un grand nombre de positions delerininces par des obser-
vations astronomiques ou par le chronoraelre, quelques hau-
teurs baroinetriqiies (car les instrumens se sont casscs dans ie
vovnge au\ oasis), quelques animaux et vcgelaux curieux ,
mais en Irop pent nombre, des niineraux et des descriptions
exacies de la composition geologiquc du sol sont les fruits de
SCIENCES PHYSIQUES. — SCIENCES MORALES. 455
ce voyage, dont la relation estd'un style simple, sans emphase,
et porte le caractere de la veracite.
Ce voyage a etc entiepris pendant I'expedilion que les deux
flls du pacha d'Egypte, Isiaael el Ibrahim, dirigerent conlie
la Nubie.
C'cst ure singularlte quiappartient au siecle ou nous vivons,
qu'une expedition armee, entreprise et dirigee par des Turcs
barbares, dans le seul but de' faire la chasse aux ncgres , et de
se procurer par la guerre des milliers d'esclaves, destines a
former une armee reguliere et a cimenter le despotisme du
paclia Mohammed, ait produit des resultats si importanspour
la geographic et pour les sciences en general.
Un Francais courageux et eclaire a surmontc tous les obs-
tacles pour s'y joindre. L'espoir de trouver dans la Nubie des
mines d'or a rendu necessaires les talens du mineralogiste que
I'on eut ineprisc, sans cela , comme un Cojfre cl un infuiele.
Plus d'une fois on eut recours a ses connaissances pour deter-
miner la position de I'armee, tracer la carte dn pays, et choisir
rempiacement d'un camp. Ces motifs expliquent la protection
constante dont notre voyageur a joui aupres des chefs dc
I'arniee lurque.
En resume, ce voyage contient beaucoup de faits nouveaux
et d'observalions interessanles sur les mceurs, les usages, les
habitudes des peuplades arabes ou ncgres de ces pays pen
connus. II sera recherche de tous les hommes qui aiment a
s'instruire et qui veulent trouver dans la leclure d'un livre
autre chose qu'un delassement frivole.
Bureau de la Malle , memhre de Vlnstitut.
Sciences religieiises , morales , poUtiques et historiques.
igo. — * Troisieinc lettre a M. le baron d'EcK.STEiN sur les
dangers de son cathoUcisme indo-chretien , sur le culte et les
mysteres naturels , adoptes , sanctifies par la religion veritable
et sur (|uelques moyens de rapprocher la philosophic de la
religion et les culles chretiens du catholicisme romain ; par
M. N. M. Paris, 1826., les marchands de nouveautes. In-8"
de 120 pages. [Voy. les articles sur les deux lettres qui ont
precede celles-cl, Rev. Enc. T. xxx, p. 494-) Prix, i fr. 5o c.
Cette troisierne lettre est remartjuable , par la science, )a
dialccti(]ue el le talent de I'auteur; mais, plus etendue que les
deux premieres, eile eslaussi plus riche en developpemens, en
trails vifs, en citations piquantes , en applications ^ plus ou
moins exactes , mais toujours d'un grand iutcret. Nous regret-
454 LIVRES FRANCAIS.
tons de ne pouvoir nous expliquer ici que tres-brievenient sur lea
Irois objets qui sent annonces dansle titre. — Dessa premiere
page , Tauteurse declare catholique; il s'appuie eii raeme teins
d'une metaphysique -vague, peu necessaire, meme nebuleuse,
et generalement ctrangere aux docteurs du catliolicisme. 11
insiste sur radmission d'un christianisrne naturel, produit de
nos seules facultes naturelles; il vent qu'on rapporte a des reve-
lations les sciences et les arts, conime cet illnstre ecrivain de
nos jours , qui , declarant acquiescer ii la revelation de Moise
eta celle de J.-C.,appelleen naeme tems revele tout ce qui est
bon et beau , tout ce qui est juste et \irai ; il fait consistcr son
chrislianisme surnaturel en un choir cle sentimens marque d'un
sceau celeste, ce qui est bien indefini. Enfin , il prend pour
egide celte assertion de M. de Chateaubriand, assertion pour
le moins tres -equivoque, theologiquement fautive, et plus
conlrariec que favorisee par I'Histoire : « plus on approf'ondit
le chrislianisme , plus on reraarque qu'il n'est que le develop-
pement et le resultat necessaire de la vieillesse de la societe. «
Notre auteur jiroteste de \a purcte cle ses intentions. J'y croi*
viveraent, conipletement; je lui ai voue,je lui conserve toule
I'estinie, toutel'amitie dont je suis capable; et, lorsque, dans
cette annonce, j'ose ddsirer de sa part une doctrine, ou des
paroles quiparaissent niieux en accord avec la verite, je crois
etre impartial , exact , et me conformer du moins a cette sincc-
rite, a cette franchise, que, d'apres son noble caractere, il a
bien voulu me demander, me prescrire lui-meme.
Avec son christianisme naturel , on pourrait s'etonner qu'il
combatte le prelendu catliolicisme, tanlot traditionnel , et
tanlot d'inspiration speciale , en un mot , le calholicisme indo-
chretien de M. le baron d'Eckstein. M. N. M. le rejette comme
darfgereux ou Vrai christianisme , et comme allegue ])our
asservir les peuples aux rois, et les rois avec les peuples au
Pontife de Rome. Mais, puisqu'il le rejette, pourquoi mettre
tant de soin , tanl d'appareil a le corroborer dans celte troi-
sieroe lettre ; et pourquoi appelle-t-il a son aide, en cette singu-
liere entreprise, on ne sait quel fantome de christianisme
egyptien , chinois , japonais , etc.? pourquoi le fait-il sans
opposer a ces testes ('^u'il semblerait accumuler pour aider son
adversaire), les critiques dont ils sont fort susceptiblcs, ou en
eux-memes, oudans leur application ? It se borne a dire qu'on
peut les expUquer de cinq manieres , dont trois se concilieraient
avec le pretendu christianisme naturel et anierieur a I'ere
chrctienne. — On trouve , il est vrai, dans toute Tanliquitt
payenne, on apercoit encore aujourd'hui choz les idolatres ..
SCIENCES MORALES. 455
ties croyances, des usages que les docteurs chretlens consi-
derent conime des resles plus oil moins defigures de la science
religieuse et de la vie palrinrchale. II est vrai qu'on y trouve
eriges en revelations , en religions , des pratiques impures ,
des iniquites , des cruautes incroyables , et pourlant bien
prouvees. Mais, dans tons ces exemples si tristes, dans ces
aberrations , en partie si horribles , il n'est rien que le scul vrai
chrislianisme, le christianisme surnaturel ne condamne , et ne
])roliibe severement, rien qui ne serve a relever son excellence ,
rien qui puisse le convaincre de mensonge ni de souillures
inlrinseques. — En coinbattant le servilisme systeinalique de
M. d'Eckstein , I'autcur a rencontre dans son chemin M. Lau-
rentie, conseiller de I'Universite, et auteur d'une Introduction
a la Philosophie, livre qui semble ecrit en faveur de tousles
despotismes. M. N. M. en fait une censure vigoureuse et bien
fondee. La seconde partie de sa troisleme lettre concerne des
etemens des mysteres , des symboles naturels adoptes , nous
dit-on, sanctifies par la religion veritable on chrclienne. Ces
eiemens, ces mysteres , ces symboles, sont indiques , divises ,
subdivises et commentes dans trois tableaux synoptiques. Vient
ensuite la reduction de touies les heresies et du catholicisme , a
deux chrislianisnr.es, I'un symboliquc y et le second reuliste
I'un qui prend rembleme a la leltre, I'antre qui le prend au
sens figure ; les deux sont pretendus egalement naturels jiar des
protestans modernes; et c'est du catholicisme reuni a toiites
les heresies passees, presentes et futures que noire auteur ecrit.
Voilh un assez beau catholicisme. Chacun est libre, sans doute
de penser et d'ecrire ainsi; libre naturellenient , et conslilu-
tionnellement, et suivant toute legislation qui admet la tole-
rance evangelique; maisil n'est pas de doctrine moins catho-
lique. jNous croyons voir, dans cctte partie de I'ouvrage ,
comme dans la premiere , des faits nia! ajjprecies, un lan^age
par fois obscur et pea coherent, une hypothese dont I'imagina-
tion fait les frais et dont le style fait le merite. II faudrait
plusieurs volumes, pour bien refuter ces idees. Mais nous
dirons : montrez-nous en un loin de la terre avant J.-C et hors
la bible , un seul sysleme de religion et de morale naturelle qui
soil raisonnable. Si Ton ne peut pas rindi(|uer, les catholiques
sont dis])enscs apparemment d'apprccier en detail les trois
tableaux, et de debrouiller ce uouveau labyrinlhe de meta-
pliysique et de citations, oil le christianisme surnaturel, soit
reforme , soit calholique , se trouve envcloppe dans cclte troi-
sieme lettre. — II est vrai qu'on peut y lire, p. 73 : « Osons etre.
bommcs tl chreliens; osons etre des liommcs, pour etre miens
.',56 LIVRES FRANCAIS.
cliii'tiens. Assuiant uiie source natnrellc aux clenicns iJe iiotre
culte, infiiino-je ainsi les nioypns ile crt-ilibilile que doniiem, a
la n-i-elaliori , awx iniraclc.f , aux prophetir.s , d'irrefragables
moriuiiicns hisloriques P » S'aulorisani ensuile de I'exemple de
Leibiiilz ineme, notre auteur ])l,ice dans regliso romaine le
centre des croyances nccessaires au boiiheur, et il en prend
occasion de donner a la cour de Rome dos avis malheureu-
sement juslifies par les faits historiques , et par ce ([ui arrive
sons nos yeux. II averlit , qu'altacher roninijioteiice teinpo-
rolle , et njcme roiniiipolence spiriluelle an chef visible de
I'eglise, taxer les peches , autoriser des procedures crirninelles
Ct des supplices pour des opinions, approuver les massacres,
nutremenl les riffueurs .uiltiiaires , comme disent les ultrainon-
tains de France, c'est une impiete monstrueuse.W insiste pOur
(jue le Pontife condamne enfiii ces horribles crimes publics ;
il deniande de revenir a ranti(|ulte par nne modilicalion de la
discipline moderne et arbilraire. II vent meme qu'on renonce
aux legendes ridicules ou odleuses;il anrnit pu ajouter, aux
levees d'argent, pour dis[)enses , ];our bulles et indults aux
excoiuiuunications anti-canoniques ou injustes ou perlurba-
Irices, et aux dangereux privileges des exemptions de I'ordi-
naire,eti. Lanjuinais, memhre de I'lnstitut.
1 <) I . — * Apliorisir.ata oppoaita apliorismalibtis , etc. —
Apiiorisiiies op[)Oses aux aphorismes conire les quatre articles
de la declaration de 1682. Monlpellier, 1826; Paris, Moutar-
dier. In-8".
M. I'abbede La Mennais, vonlant propager dans les&eminai-
resles faussesetpernicieusesdoct)inesultraniontaines,les a re-
digees en roauvais latin , en theses des nouvelles hautds etudes,
sousletitred y^/><i^omv«rt;rt. Denxecclesiastiquesfrancaisont aus-
sitot pare le coup : M. I'abbe de La Bouderie , par des contre-
aphorismes, rediges aussi en latin scoJaslique , imprimes a Pa-
ris; et M. I'abbe Flottes, professeur a Montpellier, par des
aphorismes ecrits dans un lalin pur , et tel qu'on peut I'attendre
aujourd'hiii d'lin ami de la plus belle litterature latine. II serait
bon que ces contre-aphorismes dc Paris et ceux de Montpellier
fussent communiques a tous nos eveques , et repandns dans lous
le» scminaires de France. li faudrait sans doute aussi qu'en
France h: theoKigie, comuieles autres sciences, fut enseigneeen
fran9ais, comnieclle le fiita Rome, en latin; a Constantinople en
grec; en armenien , dans I'Armonie, etc. Mais ce n'est pas la faute
de nos <leux iheologiens gallicans, si Ton a, depuis quelques
annees,retabli dans nos ecoles ce latin corrompu , si commode,
si agreable aux )gnorans, aux .sophistes, aux gens de mauvais
SCIENCES MORALES. /,57
gout, et surtout aux partisans de I'obscurantisine, et de I'en-
seiyneiiieiit retrograde. L.
IQ2. — Les Droits des femmes et I' Injustice des hotnmes ;
par Mistiiss Godwin; ouvrage traduit librement deTanglais,
sur la huitieine edition ; augmente d'lm apologue : V Instruction
sert aux Jemmes a trouver des maris; ])ar M. Cesar Garde-
ton, auleur du Dictionnaire dela beaute. Paris, 1826 ; Hivert,
rue des Matburius-Saint- Jacques, n" 18. In - 18; prix , 1 fr.
aS c. , ct 1 fr. 5o c. par la poste.
Voila bien le plus revolutionnaire de tous les livres! II ne
s'agit rien nioiris que des griefs de la nioilie de I'espece hu-
inaine, qui, inalgre tous les progres de la civilisation , toutes
les constitutions et toutes les chartes, est encore exclue des fonc-
tions publiques, des droits poUiiques et civils, souvent meme
de celui d'admiiiistrer ses propres affaires. Cette classe oppri-
mee a trouve dans Mistriss Godwin un defenseur eloquent ,
passionne , voire meme un peu seditieux. II me suffira , pour
faire connaiire la tendance de son ouvrage, de citer le som-
maire de quelques-uns de ses cbapilres : Si les hornmes sont
plus propres que les femmes pour gouverner. Si les Jemmes sont
propres , ou /ton, a remplir les charges publiques. Si les femmes
sont uaturellement propres aux emploi^ mililaires , ou «o«. Si
j'ajoute (]ue toutes ces questions sont resolues par I'aureiir a
I'avantage de son sexe, les hommes vont crier: A I'esprit de
parti !Queserait-ce, s'ils voyaient avec quelle fureur, avec quelle
irreverence elle les altaque? Je connais plus d'uii niari , nieme
liberal, qui , pour ce cas parliculier, implorerait la censure.
Voila done les femmes ])lacees parmi nous dans les tribunaux ,
dans les chambres, a I'armee. Que de distractions pour ces
pauvres juges ! Quel enfer pour cbteiiir la cloture ! A i'armee,
c'est bien uue autre affaire, et je tremble pour la discipline.
Vous verrez qu'une fois ces dames admises au partage de I'au-
torite , il faudra la leur ceder tout enliere. Et, quant au pou-
•voirreel, nous pourrions bien ne pas y perdre. Toutefois , je
ne vois guere qu'une insurrection qui puisse les amener \k.
Mais Mistriss Godwin n'est point pour ces moyens violens.
Contente d'avoir revendique en faveur de son sexe une sorte
<le droit honorifique , elle lui conseille de ne point se revolter;
elle consent a ce que les choses restent dans Tctal ou elles sont;
elle se borne a demandei , pour le moment , et sa deraande est
raisonnable et fondee, que les femmes recoivent une educa-
tion plus solide , qui Icur ouvre I'acces des sciences et les de--
goute des frivolites, objet de ncs incpris. Conclusion quej'a-
458 LIVRES FRANCAIS.
dople volontiers, mais que j'aurais voulu trouver a la suite
d'un ouvrage qui merilat un examen plus s^rieux. Ch.
193. — * Esprit et conferences des his d'interet general,
qui ont ete vendues depuis la resiauration , ou qui seront ven-
dues a I'm'enir; ])ar MM. Tajan , auteur du Memorial de juris-
prudence , A. Gaze, et C. Messine, avocats a la Cour roynle
de Toulouse. Toulouse, 1826; Devers; Paris, Antoine Ba-
voux , libraiie, rue Git-le-CfKur, n° /,. Se vend par livraisons
de 200 pages , in-8° , au prix de 2 fr. 5o c.
On ne peut bien apprecicr les lois, si i'on se borne a en ctu.-
dier le texte ; il faul encore se penetrer de I'esprit qui a pre-
side a leur redaction, et explorer les circonstances au milieu
dcsquelies elles sont nces. Les discussions qui les ont preparees ,
jetent sur leurs dispositions une lumiere propre a nous eclairer
sur leur objet; et I'histoire des cveneinens, qui se rattache a
celle de la legislalion, n'esl pas nioins necessaire a connaitre
pour nous en donner la jKirfaite intelligence.
Ce travail n'est pas toujours facile; on n'a pas tonjours le
terns de compulser les volumineux recueils ou sont consignes
les debats parlementaires: c'cst done un service eminent, rendu
a toutes les classes de lecteurs et aux jurisconsiiltes particu-
lierement, que celui qui nous en presente un ensemble tout
elabore dans nn petit nonibre de pages.
La collection (jue nous annoncons offre ce precleux avan-
tage. On y trouve exposees en substance, et classees suivant
I'ordre qui a cie observe dans les discussions, les opinions
pour et contre emises par les differens orateurs qui ont ete en-
tendus. Les fragmens les plus imporlans de leurs discours y
sont habilement coordoiinos; et de maniere a ce que, reunis,
ils ne font qu"un seul tout sans incoherence. Le resume forme
de ces fragmens est precede de I'expose succinct des diverses pro-
positions qui ont ete debaltues. Ainsi a I'occasion du projet de
loi avorte sur le droit d' ainesse , les auleurs durecueilindiquent
sonimairement les differens jjoints de vuesous lesquels ce j)ro-
jet fut envisage. « L'ensemble des discours, dlsent-ils, n'eit
que le developpement des propositions suivantes : i" la loi
presentee est contraire au droit naturel ; 2° elle est immorale ;
3" elle porte atteinte aux priiicipes consacres par la cliai te
conslilutionnelle; 1° elle est intempcstive, et se trouve en op-
position avec les principes du gouvernement representatif;
5° elle est funeste a la rlchesse publique et a la prosperite de
letat; 6° elle est capileuse, contradicloire , d'une execution
difficile ,ctc.... » lis en usent de menie a I'egard de la loi sur les
substitutions.
SCIENCES MORALES. 459
A I'occasion de cclle qui est relative a rindemnile a accorder
aux colons de vSaint-Domingue , ils font connaitre en ces terines
la serieuse controverse a laquelle elle donna lieu : «Les orateurs
qui I'onl atlaquee, y lisons-nous , ont souteriu, 1" que le roi
de France ne pouvait pas , sans le consentement des Chainbres,
accorder aux habitans de Saint-Dominguel'einancipation , I'in-
dependance qu'ils sollicitaient; a° que cette einancipalion , cette
concession'd'independance etaient contraires a I'interet public*
Le resume des dcbals y est precede du teste des projets de
loi.s; d'un precis historique bien fait, et qu'on lira avec interet ,
de la legislation ancienne et nouvelle sur les matieres qui font
I'objet des lois proposees; de I'expose des motifs, qui ont de-
termine le gouvernement a presenter le projet; du rapport fait
auxChambresau nom dela commission chargee d'en fairel'exa-
men ; et des amendemens que la commission a juge a propos
d'y apporter: il est terminejjar le texte dela loi, telle qu'elle a
ete adoptee.
Le nom de M. Taj'an, en tele de ceux des collaborateursde
ce recucil, est une garanlie du soin qui sera apporte a I'execu-
tion de I'entreprise. Ce jurisconsiilte , anleur du Memorial de
j urisprudence des Coiirs royales du midi de la France qui se
public a Toulouse, jouit dans cette ville d'une consideration
meritee. II s'est acquis une reputation ctendue par ses ouvra-
ges , et notammcnt par le plaidoyer eloquent qu'il prononca
dans le celebre /;rac(?^ Fualdes (1).
La collection entiere embrassera : 1" les sessions legislatives
depuis I'annee 181/1 jusqua I'annee 1S1S exciusivement; 2° la
.session de iSaS; 3° cellc de 1826; elle sera continuee pour les
sessionssubuequentes. Lesdeux premieres livraisons, qui sont en
vente, comprennent une partie de la session de 1826. On peut
s'abonner pour chacune des Irois collections separement.
Crivelli, avocat.
194. — * PoTHiER analyse dans ses rapports avec le code
civil, et mis en ordre sous chacun des ai tides de ce code; ou
les Legislations ancienne el moderne comparees ; par j^/.Tenet,
avocat a la Cour royale dc Paris. Paris, 1826; I'auleur, rue
Saint- Andre-des Arcs , n° 5i. Alex. Gobelet, libraire, rue
Soufflot n° /,. In-8° de 700 pages; prix , 9 fr. et 1 1 fr. 40 c-.
par la poste.
La legislation n'eiant qu'un moyen d'assurer I'interet ge-
neral , on concoit qu'elle j)eut varier , en meme tems que cet
(i) Cet ouvrage se vend anssi chez Antoine BavoDx, libraire , rae
Git-le-Coenv, n" 4- Prix, 3 fr. , et 4 fr. 5o c. par la posle.
46o LIVRES J'RANCAl.S.
intert't varie; toutefois, il est dcs elumens sans lcsc|uels wnc
societe ne pourrait subsister el qui doivent en consequence so
retrouver dans les lots de tous les peuples : telle est, i)ar
exemple , la proprieiej tels sont le mariage, I'aiitorite patcr-
relle , etc... De la viennent, avec les differences qui scparent
les codes des nations , les noinbreuses ressemblances qui les
rapprochent. Aiiisi, une legislation est rarement oviginale :
Rome emi)runle a la Groce ; I'ancicnne France emprunte a
Rome ; et la I'rance nouvelle a I'ancienne France. Rien u'est
done plus curieux et a la fois plus utile (jue de comparer les
copies avec les modeles , et d'opposer les vieilles raaximes a
celles qui les ont remplacees. C'est un moyen de niieux faire
comprendre les traditions et les innovations.
M. Fenet vienl de nous rendre ce service pour notre code
civil, dans ses rapports avec Pothier , qui pourrait plus que
tout autre en revendiquer la redaction. Souvent I'article est
pris, pour ainsi dire , textuellement dans les traites du juris-
consulte d'Orleans. L'auteur nous indique alors le numero du
paragraphe oil nous le retrouverons avec de sages commen-
taires. Lorsqu'il y a difference ou contrariete entre les deux
textes , une annotation abregee, niais claire , nous fait saisir ,
d'un coup d'ceil les points de dissemblance , et nous met a menie
de juger les progres de la legislation. Nous trouvons, sous ce
rap{)ort, un contraste piquant entre les regies anciennes et
nouvelles de succession. Quelquefois aussi nous avons occasion
de regretter quelques sages mesures oubliees ou meconnucs
par le nouveau legislateur. Ainsi , apres I'article 23, concu en
ces termes : « La condamnation a la mort naturelle eraportera la
mort civile; » nous voyonsque I'ancien droitajoutait : " amoins
qu'elle ne soit prononcee par un conscil de gnerre. » Et nous
nous etonnons avec justice que des deux epoques la notre soit
ici la plus rigoureuse. 11 faut y reconnaitre rinfluence de I'es-
prit militaire qui presidait au gouvernement, lors de la redac-
tion de nos codes.
Ces rapprocheraens , qui peuvent donner mallere a des nom-
breuxapercus philosophiques, sont aussi fort ut lies poureclaircir
le texte meme de ia loi. Les redacteurs , imbus de la legislation
ancienne, en ont employe les termes dans le sens qu'ils avaient
alors, et qu'ils peuvent ne ])lus avoir aujonrd'liiii; d'autres
fois, ils ont pris des mesures qui reglent des points douteux
de I'ancien droit, et qui, pour etre bien comprises, ont be-
soin d'etre rapprochees des elemens de la question. Soll^ ent
enfin , faisant allusion a des coutunies qu'ils voulaienl delruire,
ils ont ccrit des dispositions qui paraissent tout-a-fait oiseuscs ,
1
SCIENCES MORALES. 46r
si I'on ne connait pas I'abus qu'ils ont voiilu reprimer. Par
exemple, apres le premier alinea de I'artide 733, ainsi concu :
a Toute succession echue a des ascendans ou a des collateraux,
se divise en deux parts egales ; Tune pour les parens de la ligne
pa!ernelle , I'autre pour les parens de la ligne maternelle; «
les redacteurs ajoutent: « Les parens uterins ou consanguins ne
sont pas esclus par les germains. « II est evident que eel alinea
etait contenu dans le premier et qu'il fait pleonasme; inais les
redacteurs onl ete entraines a I'ecrire , parce qu'ils repondaient
ainsi a la coutume de I'ancien droit qui donnait tous les meubles
etious les accpietsaux germains, a I'exclusion de tons les autresj
coulume que nous trouvons transcrite sous I'article 733 dans
I'ouvrage de M. Fenet, et qui nous fait coniprendre pour quoi
le l^gislateur, ajires avoir expose sa \olonle d'une maniere
imj)licite , a cru devoir I'exprimer encore explicitement.
Ces observations nous paraissent suffire pour faire con-
naitre I'utilite de I'ouvrage que nous annoncons. Les etudians
y Irouveront I'indicalion des sources oii ils doivent puiser de<
eclaircissemens ; el les horames instruits, un memorial qui leur
rappelera en peu de mots ce qu'ils savent, et leur epargnera de
nouvelles recherches. Adolphe Garnier.
igS.^ — * Collection complete des lois , decrets , ordonnances ,
regleinens et avis du Conseil d^etat , de 1788 a 1824 inclusi-
venient; par/.-j5. Duverger, avocat. T. XIII. Paris, 1826;
Guyot et Scribe, edileurs. In-8° de 543 pages; prix de chaque
voiume, 7 fr. 5o c. el 9 fr. par la posle. (Voy. Ra,-. Enc, t. xxix,
p. 526.)
Ce Ireizieme volume de Timporlante collection de lois de
MM. Guyot et Scribe, part de fructidor an ix, et s'elend jus-
qu'au meme mois de I'an x; c'est-a-dire , qu'il conlient les lois,
rcglemens et arrelcs <jui ont ete promulgues pendant une
annee cntiere. M. Dnvcrgery n joint des notes aussijudicieuses
que celles dont il a enrichi les precedens volumes. Les editeurs
publient aussi , avec cette livraison, le 2*^ n° de 1826. Ainsi , les
souscripteurs auront I'avantage de n'etre pas prives pluslong-
tems des lois et des ordonnances qui ont ete rendues I'annee
derniere. Nous rappeierons que cette edition offre le double
merile de I'economie dans le prix et dans la place qu'elle doit
occuper dans les bibliotbeques; cette derniere circonstance
n'est pas indifferenle , dans un leins ou les livres se multi-
plient avec une si incroyable rapidite. A. T.
196. — * Traite des interets ou Commentaire des articles
ii5, II 54, ii55, 1 905, 1906, 1907 , 1908 et 2089 du Code
civil, precede d'une preface touchant la raatiere des inlerels
46a LIVRES FRA-NCMS.
et coiilrats usuraires , et les vucs du Code civil sur cette matiere
par M. CoTELLE , professeur a la faniilte de Droit de Pari?.
Paris, 1826; Janet et Cotelle. In-ia de 192 pages; f»rix, 2 fr.
Le savant juiisconsulte, auteur de ce traite, n'est pas de
I'avisdequelquescasuistes (jui reprouvent et condamnent toute
perception d'interet sur iin capital; mals il n'est pas non plus
])artisan de la liberie des stipulations sur I'interet de I'argent :
il s'ecarte en ce point des opinions des plus hablles cconomistes
inodernes, qui ont deinontre jusqu'a I'evidence que la mon-
naie, etant une raai'chandise de meme nature que toutes les
autres, doit etre donnee el prise a loyer,a un laux dont I'e-
levation variera suivant les besoins , les convenances et les ris-
ques des preteurs et des emprunteurs. « La niarchandise , dit-i],
n" 12, c'est ce qui a un prix, et le prix n'est que I'argent...
L'argent n'est pas , plus qu'autre chose, le signe de soi meme,
et il ne peut pas former son propre prix. » Cette erreur est
grave; I'argent n'est qu'un iutermediaire des echanges, et le
prix d'une marcliandise pourrait etre stipule en loiiie espece
de produit, anssl bien qii'en nionnaie. Du moment ou I'argent
cesserait d'avoir intrinsequement une valeur reelie, il cesserait
d'etre accueilli comme signe des echanges et comme marchaii-
dise iutermediaire , pour etre reduil au meme rang que le pa-
pier-monnaie , qui , sans valeur par lui-meme , ne vaut que par
le credit qui s'y attache. Les moralistes qui, comme M. Coielle,
s'effraient des consequences de I'usure, melent a la ((uestion
du pret a interet la reprobation de plusieurs deiits cjue les
lois peuvenl alteindre , tels que les abus des besoins dim mi-
neur, el quelquefois meme les escroqucries; mais la possibilite
que des delits soient commls par suite de la liberie dans la
fixation du loyer de Targent, n'est pas un motif suffisant pour
entraver les speculations particulieres et pour niveler sous un
meme tarif des operations contractees au milieu de circons-
tances inegales. Les emprunteurs souffrcnt plus que personne
de ces rigueurs de la loi, parce que les usuriers se font payer
des primes d'indemnile , en compensation des risques auxquels
les poursuites les exposent. Tout en ne partageant pas ['opi-
nion de M. Cotelle sur le prlncipe qui luisert de point de depart,
: nous conviendrous neannioins queson traile renfernie un grand
nombre de vues utiles et de recherches interessantes. Les huit
articles du Code civil menlionnes dans le litre de I'ouvrage
y sont discutes a fond, et examines dans toutes leurs conse-
quences avec une grande sagacite. C. R., avocat.
197. — Bases fondamentnles de C economie politique , d'apres
la nature des choses ; par P.-L,-F.-G. de Cazaux, avcc celte
SCIENCES MORALES. 463
t|)i£;ia|)he liree de Bossuet : « J-a vraie fin de la politique est de
lendre la vie commode et les peuples heureux. » Paris , 1826;
M'"«Huzard. ln-8° de 220 pages; I)rix , 4 fr.
M. de Cazaiix est iin ecrivain renipli de bonnes intentions;
il ne faut , pour en etre convaincu , que lire I'l'pigraphe de son
livre ; malheureusement il faut quelque chose de plus que des
intentions pour faire un bon ouvrage.
L'auteur doule, d'abord, si depuis les terns anciens jusqu'au
tcras present, il a ete decouvert une seule verite en economic
politique : d'ou il suit qu'il considere tons les ccrils relatifs a
celte science , qui ont ete publics depuis un siecle au moins ,
ou comme des tissus d'erreurs, ou comme devaines amplifica-
tions.
M. de Cazaux a une foi pleine et entiere dans la balance du
commerce ; c'est pour iui I'armet de Mambrin. Qui pourrait
avoir la pensee dele lui enlever? Ce.serait une tentative super-
flue; et, si elle reussissait, elle lui ferait tant de peine! qu'on
en juge par celte exclamation que lui arrachent les doctrines
des economistes : « Quoi!... lis ont prononce que la balance du
commerce est un vain mot, une absurdite surannee, souverai-
ncnient ridicule , etc. , etc. En vorite, nous ne revenons pas de
i'etonnement que cela nous cause ! »
L'amour de la balance du commerce ne va point sans les
prohibitions, ou sans des droits de douanes qui en liennent
lieu. Aussi, M. de Cazaux prechcrail-il volontiers une croisade
contre la liberte du commerce. Quel danger pour letat, si
chacun avait la faciilte d'echanger sa pro{)riete contre une
autre proprlete qui lui paraitrait preferable ! N'esl-il pas ciair
que, si chacun faisait bieu ses affaires, lout le monde serait
ruine? Quoi! cet horame qui dcmeure en deca du Pihin, offre
de me donner pour dix francs une marchandise de mauvaise
qualite; etl'onme permettrait d'acheter une marchandise d'unc
qualite supcrieure d'un homme qui demeure au dela du Rhin,
et qui veut me la donner a un prix moins cleve ! Ce serait vrai-
reentun scandale. Nesuis-jepas tenu en conscience de donner la
preference a celui qui a sur son concurrent I'avantage inesti-
mable d'etre soumis au meme prefet que inoi , d'etre surveiile
par la meme police, d'etre ranconne par le meme percepteur ,
d'etre emprisonne par les memes gendarmes?
Les Anglais etablissent chez eux la liberie de commerce ;
mais, prenons-y garde ,• c'est un piege qu'ils nous tendent;
M. de Cazaux nous en avertit. Ces marchands anglais sont si
perfides, qu'ils seraient capables de nous detei'miner a leur
aeheler des marchandises que nous trouverions agreables ,
464 LIVRES FRANCAIS.
commodes et peu chores ! Aussi , nos ministres et nos doiianiers
nousmeltronlal'abri de ce danger; et, si M. Huskisson vcnait
encore demander quelque changcment a nos taiifs, nous lui
rcpondrions, en lui enroyaiitles bases fondamentules dc I'cco-
nomie politique , qui sont ct seroiit encore long-tenis ignorees
dans son pays et dans beaucoup d'autres.
A ramour de la balance du coniineice et des proliibitions ,
M. Cazaux joint I'aversion des machines; non sans douie (ju'il
les proscrive toules indistinctement. Je ne trouve pas c[n'il ait
condamne la plume au moyen de lafiuelleii a ecrit son livre,
ni le canif avec lequel il I'a tai^lee, ni I'enclume , le marteau ,
et la lime qu< ont servi a faire le canif; ni Ics macliines avec
lesquelles on a produit le papier snr lequel il a ecrit; ni les
p/'cssos avec lesquelles I'imprimeura multiplie les copies de son
ouvrage, ni les machines avec lesquelles celles-la ont ete faites.
C'est grace a ces machines que nous avons pour cinquante
sous tin livre que nous ne pourrions avoir , a moins de le payer
deux ou trois mille francs , si M. de Cazaux avail ete oblige de
I'ecrire sur du papyrus, ou sur des tablettes couvertes en cire;
encore eut-il fallii quelques grossieres machines jiour nous
procurer celte jouissance. II doit done nous pardoiiner, si les
machines ne nous inspirent pas la mtme aversion qu a lui. II
n'en est qu'une qu'il ne condamne pas , quant a present : c'est
la charrue. Mais son tour viendra ; rapportcns-nous en a M. de
Cazaux -.pour le moment, dit-il , ilfaut continuer a employer
toules les machines quifacilitent la multiplication des produits ,
elemens de Vaisance. Lorsque nous auroussuppriine la charrue,
nous sup])riroerons la bt^che, et nous serons arrives au dernier
terme de la perfection, quarid nous serons reduits a gratter
la terre avec les mains , et a dechirer notre proie avec les dents.
J'aurais voulu trouver dans I'ouvrage de M. de Cazaux quel-
que pensee originale , quelque idee utile qui n'eiit pas ete ex-
])rimee avant lui. Mais j'ai vainement cherchd : tout ce qu'il a
dil a etc dit par d'aulres et mieux. II se plaint que le grec et le
latin fassent le fond de renseigt^ement : il parait regrelterle
tems ou Ie» femmes passaient leurs journees a tricoter, et ou
les princesses allaient laver leur lingea la fonlaine. Nous soni-
mes loin de cette heureuse sim]ilicitt', et j'ai bien peur que
nous n'y retournions pas delong-leins. On assurequ"aux E'ats-
Unls d'Amerique, le prusident , qunnd la saison est venue, va
faire ses foins, et visiter ses chauijis toul cnmme iViait tin autre
citoyen. Cette siin[)licite vant bien cclle que desire ISl. dc
Cazaux. Nous potirrious nous en contcntcr , diit-elle nous con-
damner a tolcrer ia charrue. Charles Comtf..
SCIENCES MORALES. 465
J 98. —Mchnolres sitries causes qui produisent la stagnation
etle decroissemcnt du commerce en France, et qui tendent a
ancantir I'industrie commciciale; iiiOYcn simple de lesfaiie
cesser ; par M. N.-F. Canard , aTiteur des Principes d'econo-
mie politique, ouvragequi a remportele prix a I'Institut. Paris
1826; Delaunay. In-S" de 48 pages; prix, i fr. 5o c. '
L'auteur s'attache a prouver que uotre commerce et notre
iiulustne out commence a decroitre, prccisemenf depuis le
traite de commerce avec les Etats-Uiiis d'Amerique, et surtout
depuis Ic iraiie rocemmcni conclu avec TAngleterre; il dcmon-
Ue que ces deux traites, sans doute par rinadvertar.ee de nos
mmistres, sent enticrement a I'avanlaoe des Americains et des
Anglais; il appme cette asseriion par des fails constates dans
un rapport fait a I'lnslilnt parM. Ch. Dupin. « De 1820 a 1825
le tonnage des navires francais sortis de nos ports a diminue de
soixante mxlie tonneanx sur irois cent mille neuf; le tonnace
des navncs etrangers s'est accru de gS mille sur irois cent onzc
JDUIe; I induslne francaise qui exportait pour 39?, millions de
iranes de sosprodults, en 1820, n-cn a plusexpoite, en ,82^
( epoque du traite conclu avec Ics Etats-Unis d'Anu'rique )
que pour 227 millions; par consequent, dans sa concnrrencc
avec Jes mduslries rivales , Irois ans out suffi pour lui faire
perdre 63 millions de francs sur ^92 millions, tandis que dans
ie meme intervalle de terns , les cxporlations britnni.iques se
sent accrues au dela de toute expression. «
M. Canard ajoute : c<Le dernier coup a cicporte au commerce
de i^ ranee par 1 ordonnance royale du 8 fevricr dernier sur les
douanes, qui statue qua dater du 5 avril, les vaisseaux fran-
cais qm a leur depart des ports de France ne payaient aucun
droit de tonnage, en paieraient un de S48 fr. par ton.ieau >•
Auxd.scours prononces dans la chambie des deputes conlre
cette ordonnance par M. Casmiir Perier, M. le Ministre des
finances a repondu « que c'etaitnne condition du traite, qu'il
" y av^ait pas charge nonvelle , mais un veritable degrevemenf
qu enhn il n'y avait pas accroissement d'imjiot; et que c'estlk
meme chose de mettre des impSts sur les exportations ou sur le,
importations. »
Quoique Tautenr de cette broclmrc metle en avant des prin-
cipes qu. seraient contestes par plusieurs de nos plus savans
7ZT""\r '^f '""\r".''' -'' 'l^q-'^"- vnes bonnes
et utiles qn elle renf.rn.e. II signale un abus grave qui consiste
a tenir secrets, sous noire regime representatif , !« traites de
commerce qui etaient soigueusement publics, dansl'ancien re-
gime, par letlres patentes, verifieos dans les parlemens.
T. xxxi, — Jout 1826. s 3o
466 I.IVIir.S 1'RA.NCAIS.
Unns lino note j)lacpe a la fin de I'onvragc, M. ("ananl fait
nne riiliqin- ilcs notions sur la balance du commerce enscignccs
par M. Say. P. E. Lanjuinais,
ic)(). — * Dixcour.i prononcc a la dtutxieine seance du conseil
de perfcctionnctncnl de I'ecole sprcialc dc commerce et d'in-
diistric , sous la prcsiileiice lic M. J. Lafitte , en I'absence de
M. Chaptaly jiair de Trance; inenibre do I'liistilut, le i5 juillet
1826. Paris, i8a6; Renard. Iti-8°de8o pages; prix, i fr. 5o 0.
Les ecoles de commerce sont dcs inslilntions indisj)eii-
sables dans iin ])ays ou les liommes livres a I'industrie for-
ujciit an moins iin tiers de la poi)idatiori. Line nation ainsi
compnsce doilsonlir vivement les besoins d'lioinnies inslruils
qui, sachant allier la tlieorie a la pratique, piiissent introduire
de nouveanx peifeclionncmens dans la science du commerce
et dans la carrlcre de I'industrie. Los connaissances cxii;ees
d'un ru'gociatit eclaire s'etendeiit , a uie.sure (]ue les produils
de I'activite liuniaiiic se niultiplienl cl (jue de nouvcllcs cou-
trces oflVeut leur contingent aux transactions conimercialrs.
Cepeiidant, la plupart de nos grandes villcs atleiident encore
des etablisscrnens de ce genre. L'clite du liaut commerce de la
capilale se fait un devoir d'assister aux seances publiques »!e
Tocole speciale de Paris, et de concourir jiar sa pr(''sence i
I'eclat de ses solenniles. Nous n'erilierons ici dans aucun de-
tail sur les discours fori reinarcpiables prononces a la seance
de cette annee par MM. Lafitte , Ch. Dupin, Blanqui , etc.
Nos lecteiirs les contiaisscnl deja par le comple leiulu de cette
seance ( voy. ci-dessus , p. 266 ). Ad. Gonuinet.
200. — * De I'oiistocrtitie consich'ree dans ses rapports aiwc
les prof^res de la civdisation; par M. H. Passv. Pans, i82().
In-S" de 17 feuilles. Adolphe Bossange; prix, 5 fr.
L'anteur consldere surlout les institutions arisfocraliqnes
en elles-niemes, et dans leuis effels relalifs aux divers de^res
de civilisation. Sans citer,a I'egard tlu mode de preeminence
legislative, les lois expresses des difft'rens etals, ce qu'excluait
iaconcision dont il a sei:ti le prix, il s'esl attaclie a poser les
priiicipps d'apres lesquels on pent ajiprecicr ces lois, et en jire-
voir les effels. Neanmoins, pour rendre plus sensible cette
theoiie, si ce mot convient a un ensemble de conserpiences
nalurelles ei difficiles a conle^ter, jioui la confirnier jiar des
exemplcs, M. Passy en clioislt pros de nous, en France, en
An"!elerre , et dans d'autres etals de I'Europe. S'il s'occn|)e peu
des anciens on des peuples eloignes, on voit pourtant ou'il ne
les avail pas oubli'.^ dans ses reclierches, mais qu'il s'est moins
jMOjiose dc faire un traile savant, quedereunir et de coor-
SCIENCES MORAJ.ES. .',67
(lonner des observations d'aiie utilili; plus direcle. D'ailleuis,
coniine il leremarqiie tros-jiistrmpnr,la manierf democraliqu*^
en fiiielque sorte, ou plus oligareliique, ciont tou!e la classe
piivilec;it.'e disfiibue enlre ses inembres les hicns <t les dioits,
ii'a point d'importance loeile dai.s kslleux ou rcnlli're servi-
tude est ie partage du jjlus grand noiiibre des bomnics.
L'arisloeratie naturelle se coinj)()se des jiersonnages qu'ele-
vent individueilemcrit an dessiis du vulgaire, ou des talens
einineris et de grands services rendnsii la jtatrie, ou ineine i:ne
Industrie \aste ou lieureiise, ainsi que les antrcs dons dc la
fortune. M. Passy deniande si ces librcs dislinctions suffisent
aujourd'liijt en Euroj)e, ou s'il faut de plus former et main-
tenir,aux depens de la eorniriunaule, uiie aristocratic faclice
fjui a etc preconisre quehpiefois asspz int.enuiTient , coniniC
dans ce tcxte hindon: L'esclave no doit ricn avoir qui ne soit
a la disposition de ses mailres ; I'aisance de Tcsclave affligc Ie
bralime. Tel est, selon IM. Passy, riinique probleme; il pense
que celte aristoeraiie qu'il nomme factice a pu presenter des
avanlages, on que du moins i) a fallu la subir dans I'enfance
dessocietrs, mais que ces resullals changent avec les progres
de la rivilisation. L«'s convenances, ajou(e-t-il, les exigences
des siecles d'activiti' ou dc lumicres siipposent des formes j)lus
favorables a i'egalite des droits, el <> un regime sous Icquel, au-
cune portion de la rommunaule n'etant avantagee ( d'une ma-
niere lixe ) au prejudice du grand nombre, les distinctions de
rang et d'opulence deviennent Ie parlage des plus habiies, des
plus prudens, des plus heureux. » En dormant les moyens
d'echapper a la servitude primitive, I'exercice de I'industrie en
lout genre excite la juste ])retention de disputer, dans Ie con-
cours general, lesbiens et les Iionneurs.
La richesse excessive du ])etit nombre, a dit un publiciste
anglais, n'etjiiivaut jias quant a la regularite de la consomma-
lion, a la lichcsse plus modi(pie du grand nombre. Ce n'est pas
ie seul inconvenient d'une extreme inegalite; M. Passy Ie moiitre
par I'elat menic de I'Anglelerre ([ui, malgre les ressources d'un
commerce dont la prosperite cs! un fait unic]ue siir Ie globe,
renferme plus d'un million de families privees de tout ter
ritoirc, et auxqrelies ne suffit ])as une aunioiie de deux cent
cinf|uanle millions, parce que des lois particulieres out insen-
siblemenl depouille les masses au profit du ])Ctit nombre. Pour
diminuer ces maux, 11 imporle dc reconnailre les rapports ne-
cessaires « qui lient avec I'etat m.oral des soeietcs, leur etat
ceonomique et inteliectuel;.. il n'est rien de ce qui cor.tribue
au bien-etre physique el aux progres de rintelligeiice qui ne
468 LIVRES FRANCAIS.
tende aussi h ennoblir le caractere dcs masses. » Qiianl A la
question, agitee tant dc fois, dc In grande et de la pelite pro-
piiele, I'auleur lie rexamine ])as ex|)resst''nient , bien qu'elle
rcntre dans son objet ; il nc la rcgarde, avec raison , cjiie coinme
une application particuliere de ses princij)es. « Comroe toules
Ic industries , dit-il, ragricnllure piosjicre sous dcs lois favo-
rables a la surele des bicns et des personnes,au Iibic einploi
des .... facultes ; die doiieiit sous ces lois iniques el restriclives
qui teudent a inainteiiir les classes iiiferieuics dansrigiioiance
ou la pauvretc. » S.
201. — Appcl nil hnn sens dc certnines heresies pnliliques et.
Jlnancieres des plus piriilcieuses , ou opinion dun vieux roya-
lisle sur quelques questions a I'ordre du jonr , cxiraites d'nn
ouviage consacte a la reslauration des finances cspagnoles,
adressu par I'auteur a Sa Majeste Catholicjuo. Paris, 1826;
Tronve. In-S" de 871 p. ; prix, 6 fi-. et 7 fr. aS c. par la poste.
« La societe est Isiuibeeen pourriture ; uo\re chiwievcrheuse
n'est cnlrc les mains des partisans du modLTanlisme ijue le vain
objel d'un bavarda£>e assonrdissant , etc. , etc. » Telles soni les
pretendues verilc;s que proclanie I'auteur anoriynie de cet ou-
vrage. II se jilaiiU avec aniertunie de Tindejiendance des o])i-
nions, qui se manifeste heureuseinent de toules parts; el lui-
inemeil n'est de I'avii; de [icrsonne. II a la publicitc en liorreur
et nous apprenons, dans sa preface, que, depuis Irenle-cinq
ans, il milite ])ar ccrit pour soutenir ses doctrines parliculie-
res : il tonne contre le par-lage dc notre terns, sans prendre
garde (]u'il parle aussi f'ott longuement sur toules sortes de su-
jets. Coninie bcaucoup d'autres,il est done anime a son insu
dc ce inoiistrueux esprit du Steele qu'ii ne nianque pas d'o])po-
sera V esprit des siecles. Celteanlitliese, sur la([uelle il s'appe-
santila ])laisir, nousi)araii peurcflccliic. Clia(|uesiecle produit
des opinions qui lul sonl jnopres, et dont !a ])lace est assignee
dans 1.1 chaine des teins jiour lier entre elles les generations
conseculives. Aux modifications inevitables dans Tordre social
coires|>ondent des niodi(icalions analogues dans les idees com-
munes (pii gouveruent le nionde. Tout, dans la nature, est
<5galemei!t soumis a la loi de mouveinc iit et de continuite.
Ce livre parait ecrit avec des intentions trcs-pures; mais, a
part quelques conseiis utiles an loi d'Esjiagne , il est , selon
nous, reiapli d'errems en econoniie polilicjue ainsi qu'en lua-
liere de iinance, et de jugcrnens qui sonl en desharmonie com-
plete avec I'ctat acluei des clioses. Jd. GoNDINfT.
202. — * Denonciation aux Cours royales , relatiyp.tnent an
sjstevie relif^ieitx et politique signale duns le inemoire a con-
SCIENCES MORA.LES. 46^
suiter; prccedee do nouvel/es ohservatioiis sur ce systeine et sur
lesapolo|;ics (jii'on en a rrccmmeni [)iiblices; parM. le comie de
MoNTLosiER. Paris, 1826; Ambroisc Diipont el con,]), librai-
res , rue Vivienne, n° 16; Baudouin. Iii-S*^ d'cnviron 400 pa-
ges ; prix , 7 fr. 5() c.
Dansson altaclicment sincere a la religion, au trotic, a la
societe, M. de Monilosicr voit entourer do perils ces objels v(5-
iieies de ses plus chercs affections. Emn jiisqn'aii fond de ses
enlraillcs, comnie s'il apeicevait soiidaineraent sa fnniille en-
lacee de serpens, il jette un cri d'nlarme; et ce cri est deja un
secours, un acte de courage. Pour ne point frai)per ce qii'il
aJme, ce qu'il respecte, ct n'alteiiidre que ce qn'il rcdoule,il
appellea son aide les lumicres du passe et du present ; ils'eclaire
du flambeau de I'liisioire, et invoque rinslruclion et I'expe-
rience du barreau francais. C'est la moiiarchie avec la cliarte,
c'esl la religion avec les liberies gallicanes dont il se monire
le defenscur inlrepide autant qu'eclairc. La cliarite semble
venir en lui au secours de la foi; il laisse bien sensibicment
apercevoir le desir de preserver d'eux-memes ceux qu'il alta-
que; il reconnait ceux qui le mc'connaisscnt ; il pardonne a
ceux qui I'offensent. Ses adversaires s'enveloppent de nuagcs
pour echapper a ses coups; il ne s'entoure que de luniieres
pour les conibattre. A Texeniple de Saint-Louis et de nos plus
grands rois, il croil. que I'on pent, que Ton doit attaquer les
pretentions sans cesse rcnaissantes du saint - siege , parce
qu'elles sontde leur nature sans cesse envahissantes, et qu'elles
ont toiijours cjuelque chose d'lioslile , nieme pendant la paix,
ainsi f[u'il resulte de ses protocoles et de ses formnles de clian-
cellerie, dans les moindres actes comme dans les ])lus impor-
tans, forinules qui necessitent un continuel renouvellement de
reserves et de stipulations defensives; a I'exeraple de saint
Charles Borromee, I'illustre archeveque de Milan , il rroit qiic
Ton peut etre chrelien, et mcme saint, sans aimer les jesiiites;
(jue le cliristianismc a tout a perdre et rien a gagner a leur
admission. Les lettres de ce venerable prelat en font foi malgro
la moderation de ses expressions: on voit assez claircment tout
ce qu'il a eu a souffrir des excesdes jesuitesde Milan; on voit
qu'il a eu besoin de toule sa patience de saint pour Icnr tenir
tete. II n'est pas inutile derappeler ces leltres, soit a cause du
noni de leur aiiteur qui estune aalorite dans la maliere, soil
parce que I'esprit d'intrigueet detracasserie de la compagniede
.Irsiis y cat fidelement signalec ( Voy. Rev Enc, t. xxt:, p. /|<)7'.
Quand la milice de Loyola s'est vue en nnrnbre, (]nand cllc-
s'esx crue en force, ellc a avouo, declare son existence; elie
470 LIVRES ^RAN(;AIS.
s'est nominee, croyant sans doute trouver dans son noiii une
arme de plus, nu avoir |>ioclialnenieiit un arrjiiinent deinoius
conire elle, iiuousse (|n'il scrait deja pur I'liabitude on par
I'usage. Toute celte inilice a einployc coiilre M. dc MontlosLer
les arnies qui liii soni f'amilierts; les sopliismes, les saicasmes
ne lui ont pas >'tc epargnes, les lieux coinmnns ont elii proiU-
gucs ; indcpendammeiit des attaques quoiidierines, oil plus
d'une fois les borucs de la bieriseance ont ele fraricliics, on a
vu paiaitre contie le gcnereiix ecrivain ([ue tout le luoiide lit,
de p relent! lies reiul a I ions qu'on nc lit j)as. On eut dt'sire avoir
pour arbitres, pour jnges dans celte granile lulte les anciens
parleniens, si deja noire niagislrature n'a^ait donne d'liono-
rabies preuves de ses disposilions a veiller an mainlien de nos
vieilles rnaximes et de nos lois fondaincnlalcs. Le depot de nos
liberies civiles et religietises ne saurait pericliter en des mains
aussi fermes qu'habiles.
Dans son nonvcl ecrit, de IVl. Montlosier repond a cc qu'il y a
de plus specieux dans les raoycns de sesadversaires; il en prend
occasion de niieux develo])per les fails qn'il denonce, et de
niieux signaler les perils inuninens qui ont provoque son zele.
II es(iuisse rai)idinient noire histoire religiense depuis la res-
lauia'ion, il decrit les aberrations dii jiarti josuile et dii parti
ullramontain qn'il a tort de distinguer; au\ fails qu'il expose
il joint les preuves a I'appui et termine son ecrit par une de-
noncialion en ibrme, adressee a 31. ic premier president de la
Cour royalc de Paris. C'est dans I'ouvrage nieme (ju'il faut lire
celte piece importante, et lous les developpemens luniinenx
qui la precedent et la niotivent, et les pieces justificatives qui
I'accompagnenl. Lorsqu'U s'agit d'intchets aussi graves, tous
les regards sonl fixes sur la magistrature francaise, toules les
esperances se confient dans sa noble independance, tous les
voeux secondent I'ecrivain conragcux et desinteresse qui prend
avee autant de talent que de zele la defense de nos liberies
religieuses, civiles et politiques. E.
2o3. — * Consultation adressee a In Cour royale , [JOur
M. le comic de Montlosier, avec celte epigraphe : Nunquam
tantuin riialuin in republicn fuit , nee ad plures , nee ad plura
pertinens. Tite-Liv. Lib. xxxix. Paris, 1826; Ambroise
Duponl. In-8° ; prix 6 fr.
II elait reserve sans doute au barreau de Paris de repondre
le. premier a I'appcl de M. de Monllosier, el de diriger sa mar-
che dans le temple de la jus'.ice : une premiere consulialion ,
porlanl la dale du mois d'avril dernier, el revetue des signa-
tures de MM. Dupin , Me.riUiou , Berville , Cofjinieres ct De-
SCIENCES MORALES. 471
vaux, vient d'etre suivie d'un plus aiii]ile travail, trace sans
doule sur una pins grande eclietle. C'est de cette derniere pro-
duction que nous allons rendre compte.
Lesf]uatre grands griefs y sont rappeles, analyses , examines.
Le conseil par consequent, traile d'abord des congregations,
selon fjue les det'init M. de Monllnsicr, reunions qui ont pour
objet apparent des exeicicesde piete, ou quelque fin ])ieuse;
niais qui , iiees par !e menie e>prit et sous une direction
centrale , tendent , a raison d'engagemens divers , de pro-
messes, de serniens ou de voeux, a se composer dans I'etat
une influence pnrticuliere, au raoyeri de laquelie elles es[)tTent
mailriser I'adminisliation, ie niinistere et le gouvernement. Le
danger de ])areillcs associations ne saurait eire conteste; le
devoir des magistrals est done d'en reclierclier i'origine, d'en
nieltre a nu les clemens, d'en dejouer les ressorts , d'en pro-
curer la dissolution; a celte fin, le conseil cite et accuinulc
toutes les lois anclennes, et lonles les lois nouvelles; il n'omet
pas les opinions des jurisconsultes , ies ordonnances, les edils
et les arrets rendus dans la n)aliere viennent aussi corroborer
son avis. L'opiiiion de M. Billecocq est rappelee d'autant pins
a propos que cet estimable avocat I'avait publiee, avanl les
deux derniers ecrils de M. Montiosier. Le conseil a Iris-bien
pose les princijies quirrgissent I'espece. I's sont, en meme terns,
ceux de I'ordre, de la tranquiliiie, de la liberte elle-meme ;
s'il en elait aulremenf, de perpetutUes maciiiriaticns pour-
raiefit eire praiiquees et mises en oeuvre au sein de i'etat et
compromettre son existence.
Les armes par lesqiielles le conseil repousse I'admission des
jesnites sont plus fortes et plus piiissantes encore. A ce litie;
la bulle de Clement XIV devait figurer en premiere ligne,
donnee a Home, le xi jnillet 1773, cette bulle est fondeesur
ce motif principal , " qn'il est a peu ])res impossible que cette
socicle subsistant , I'egli e put jouir d'uiie paix veritable et per-
luanente. » Ensniteles edits rendus par LouisXV,par LouisXVI,
et enregistres nu parienient ; le premier est cite en entier. Cette
legislation est complel<?e par I'assemblee constitnante q»jl abn
lit les viKUX perpeluels. En 1804, les j(''suites ayanl clif rclie a
se re])roduire sons les rioms dcguisos d^ii peres tic la foi , de
paccanaristes, etc., un dccret special ordonna de les dissoiidre.
Les jesnites ont done conlie eux la generalite des lois qui ont
aboli tons les ordres, loules les congregations, cl la specia-
lite des arrets et des edits qui les conecrnent nominalivement
En conibaltant avec V!. de Montiosier, les congregations et
ies jesuites , les auteurs tic la con^sidlation croient devoir moirs
r\->. MVRliS FRANCVIS.
'nsisler sur le Iroisieine chef (I'ncciisation, iion qu'ils en mc-
connaissent rimpoiiancc, nmis ils ont voulii eviler Icschicants
ou les (lifficulti's lie competence. Le qnaJrieme chef, qnoique
f^rave, ni; leur a point pnrii donnfr assez dc prise a {'action
jtidiciairc qui ne ])cut s'exercer que sur dcs fails. Cettc piece
imporlanteest rcvctiiedesplusjlionorab'.es signatures, en letedcs
quelloson u'esf point etonne dc voir figKi'orcclie de M. Dupin. I.
204. — -* Resume' de rHistoire iiniverscUe. Dcuxicme parlie,
contcnant le tableau rapide des eveneinens et des revolutions
(jui se sont succede cliez les diffcrens T)cuples, depuis leur
origine jusqu'a ce jour; par MM. /''. dc r.uoTONNE et Jtl. Lau-
GiER. Paris, iSa'i ; an bureau de f Enryclopedie pnrtathte ,
rue du Jardinct. In - "ii de 840 pages; [)rix, 3 fr. 5o c. et 3 fr.
80 c. jiar la pos.le.
L'editeur prevoit que I'on sera surpiis de voir paraitre nnc
histoirc universclle en ii;i volnrne in - 32. En effet, reduirc
I'histoirc du nionde a (]uclques feuilles in-32, c'est fairc plus
(juc rappelisser un grand tableau de Veronese a nne n)inia-
lure d'wn denii-pouce de baut. U est evident que , dans un
cadre aussi resscrre , on ne pcul indiquer que quelqucs eve-
nemens principally; c'est ce qu'ont fait les aisteurs du petit
Resume de VHistoire universelle. Ils comiuencent ]iar les terns
fabuleux; puis, ils passent aux terns beroiqucs de la Grece et
a I'Histoire Romaine qui est entrecoupee \>ar celle d' Alexandre.
Arrives aux eiiipereiirs Romaiiis, ils retracent les invasions des
Barbares et la fondalion de I'emijire des Francs. Les derniers
chapitrcs sont intitules : Terns de Charlemagjie , terns dcs
Croisades , terns de Francois I"' et de C/iarles - Quint , terns de
Louis XI f^; cnt]t\, terns de la Repuhlirjue, de I' Empire et de
la restauratiun en France. Le recit , rapide el serre, n'cst
point enibarrasse par des plirases ou par des reflexions super-
flues. Si les auteurs se sont arretes plus long-tems sur les eve-
neniens relatifsa la France que sur ceux des autres pays, c'est
sans doute parce qu'ils destinaient leur oiivrage principaie-
ment aux Franeais. Le coup d'ltil qu'ils jettent sur i'ensemblc
de I'histoire, qneUjue ra|iitle (|u'il soil, ne laisse pas d'etre
instruclif ; riiomme le plus verse dans les details a quelqnefois
besoin de resuraer les gcneralites. Les deux auteurs avaient
fait preccdcr celte deuxieme partie d'uue especc d'introduc-
tion a I'etude de I'histoire, qui forme un petit volume a part ,
divise en trois sections : de la inanierc d'ecrire I'histoire, de
ses sources et de son esprit. lis enlrent dans le domaine de la
liltcraturc, an sujet de la composition et des differens genres
d'ouvrages historique';. lis divisent lea sources de i'histoirr ,.
SCIENCES MORALES. /,73
Pii SOURCES traditionnrlles , inoniunen talcs et errites. Sous le
litre dJEsprit de V Histoire , ils jcttent un coup d'oeil rapide et
philosophique sur les princip.tux peii]>les ancient et modcrncs,
el sur les jjrands eveneraens qui ont chani^e la face des clioses.
Le cadre etail trop petit pour perniettre de faire des citations;
iiiais on trouveala fin, conime dans tous les volumes de cette
in\cTessnnlG Encyclopedic porlativcu I'indication des principaux
ouvrages relatifs n la matierc qui s'y trouve traitt^e. La suc-
cession assez rapide des volumes de cetle collection semble
indiquer que le public a goute son plan, et qu'il reconnait
des avantages reels a cette Encyclopedic de poche , qui du reste
est trcs-bien impriniee. D — c.
2o5. — * Tdbleau historique de la Grece ancienne et mo-
deine , par M. Bues. Paris, 1826. Louis Janet, 2 vol. in-i8,
avec trois cartes gcngrapltiqttes ; prix, 8 fr.
En vain les erudits, et tous ies depreciateurs plus ou moins
sinccres de ces mclhodes liouvelles, j)ar Icsquelies on essaie
de repandre I'instruclion dans toutes les classes, ont reclame
et meme doclaine contre les resumes ; ce genre d'ouvrages est
plus que jamais en faveur aupres du jiublic. Est-ce un mal ?
Le blame dont on les poursuit est-il fonde ? Sans doule, la
lecture d'un abrege quelconque serait peu profitable pour
tout lecteur absolument etranger a la matiere du livre; elle
ne laisserait dans son esprit que des traces legeres qui bientot
s'effaceraient pour toujours; mais , pour peu qu'il ait quclques
notions , meme vagues , sur le sujet de I'ouvrage , cette lec-
ture les etendra , les classera avec plus d'ordre dans sa me-
moire , les y gravera avec jilus de fixite. Done, a notre avis,
les resumes, s'ils sont peu utiles au lecteur tout-a-fait igno-
rant , ne sont pas sans avantage pour le demi-savant, ou, si
I'on vcut , pour I'liomme du monde qui se coMfenle de recueil-
lir, daus les sciences physiques, les principes le plus genera-
lement admis , et dans les sciences historiques , les faits les
plus iniportans , ceux qui ont influe sur la destinee des na-
tions.
Mais, ]iOur obtonir de tels resultats, les resumes ne doivent
pas etre I'ouvrage do quelque ecliappe «ie college qui ne prend
d'autre peine (|uc d'extraire , ou meme simplement de reco-
pier les cahiers qu'il ecrivait nagucre sou<i la dicfee de son
professeur. La composition en est plus difficile qu'on nepense;
elle deniande de I'art, du gout, et plus de science qu'on n'en
doit faire para lire.
C'est te qu'a (res-biei: setiti M. Bres , auleur deja connu
dans le monde lith'-rairo , par des poemes tres-piquans et par
474 LIYBES FRANCAIS.
diverses productions d'un genre plus grave, qui lui ont tv6-
rlt>'? I'estirne et !es sulfrages du public. Son ouvrage sur la
Giece est plus (|u'un simple resume de rhisloire de ce pays :
aussi , I'a-t-il appele avec raison Tableau historique.
L'abbi; Barlliclemi , dans son admirable introduction au
f'oyaf^e d' Anacliarsis, avail peint , a grands traits , une partie
coubiderable de riiistoiie ancienne de la Groce. C'est le nio-
dc.'e i|ue ine semble avoir ciioisl M. Bies; el, en cela, il a fait
preuve de gout.
Cel auteur n'a pas cle cpouvante de la multitude des objets
qui devaicnt conij)oser son tableau : on diroit mtme qu'il s'e.st
])lu a en agrandir le cadre. II y a fair entrer non-seidement la
Grece proprement dite, mais la Grece d'Asie, la Sicile et
loule la partie de I'ltalie qu'on appelait la grande Grcre.
La Grece des lemps fnbuleux et heroiques ; la Grece sous
des Rois ; les nombreuses republiques cj[ui remplacerent les
gouvernemens monarthiques , quand les peuples furent plus
eclaircs; leurs rivalites, leurs guerres; les conquetes d' Alexan-
dre, celles des Romains;les malheurs de ces belies conlrees
dans le moyen age; renvahissement des Turcs ; les tentalivcs
des Grecs pour secouer le joug ottoman; lels sont les grands
spectacles que M. Bres fait passer raj)iden)ent sous nos yeux,
et , ce dont il faut surtout le feliciter, avec ordre, sans
confusion. Chaque peiiode historique a sa nuance , la couleur
qui la distingue; les grands personnages dans tons les genres
qu'elle a produils , y apparaissent avec les caracteres, et
presquc les formes qu'on leur doniie ou qu'on se jtlait a
leur supposer.
Dans uri pays comme la Grece , I'liisloire litteraire et I'his-
tolre des arts sont inlimement lii'es a I'Listoii e politique : lous
les poeles, les liisloriens, les philosojilies , les artistes celebres
qu'a produils cette contree, dcpuis les plus anciens tenis jus-
qu'a nos jours, viennent s'offrir , les uns api'cs les autrcs,
aux pinceaux de M. Brcs ; et, a sa maniere de les peindre,
on juge qu'il les a etudies et apprecies. Je me peimettrai une
ou deux observalinns.
J'aurais desire que, dans le tableau des temps mytholo-
giques, M. Bres eut cite plus souverit les explications c|ue les
erudits ont essayc de donner de fjits evidemmeni fabuleux ,
inuis qui cachent des verltes. En esquissant les aventures de
Mcdee, il dit, par exemple : « Elle fit mourlr par des moyens
intonnus jusqu'idors , Creuse, filie du roi lie Corintlie... , tt
se fit, dil-on , porter a Ailienes par des dragons ailes. » Peut-
etre fallail-il indiquer ici ce que les historieus et les enidits
SCIENCES MORALES. 47?
eiitendent par ces dnii^ons ailes. L'abbc Bannier ilit un mot
lie leurs conjectures, clans ses rotes sur le vii'' livre des Me-
tamotphoses d'Ovide.
Voici une obseivaiion plus iniportante. M, Bres, a la page
5o du tome 1*^'', somble regarder Vasseinblee ties amphiclyona
tomiue nil coiiscil general, dans l((|ue! etaient representes par
des deputes les peuples ou jdusieurs peuples de la Grece, et ou
se traitaient les affaires [)olitiques les plus impoitantes. 11 dlt
meme a ce sujet : Si les Etats-Unis d'Arnerique u'avaient point
nn president; si les cantons suisses n'etaieni jias regis par un
landainman , I'organisalion politiqvie de ces conlrees offrirait
une analogic complete avec celle des villes ampliictyonitjues. «
Je crois que c'est la une errenr a la(]uelle ont pu donner lieu
qnelques phrases de I'abbe Bartlieleini , cjui peint sous de
trop brillantes couleuis le conseil des amphictyons. La su-
perstition I'avait instilue ; et il ne s'occupait gueie, comrae
le pense De Paw, que de matieres relatives a la religion. On
lui souinit bien quelquefois des questions politir|ues ; mais 11
n'avait qu'une puissance morale, pour ainsi dire, sur les
jieuples de la Grece. Ce n'etail point un de ces corps politiques
qui peuvent rendre des decrets, et ont loute I'autorile, tons
les moyens necessaires pour les faire executer. Oh! si tous
les etats de la Grece avaieiit eu des representans dans une
grande assemblee vraiinent nalionale , ou se seraient decidees
les questions d'interet general pour la confederation , et ipii
eut ete investie d'immenses pouvoirs , les rivaliles entre les
republiques grecques , fcaiises de tous leui's malheurs , auraient
ete comprimees ; la Grece cut forme un faisceau compacte ,
indestritclible que ne seraient jamais parvenus a rompre ni
les rois de Macedoine, ni les empereurs roniains. Nous aurions
peut-etre encore aujourd'hui les Etats-JJnis de la Grece ; et
j)eul-etre le monde entier aurait-il subi une autre destinee.
La ]iartie de I'ouvrage de M. Bres, consacree a Ihistoire
des evenemens contemporains, est d'une e.xtreme brievete :
I'auteur s'arrete au massacre du palriarche grec a Constan-
tinople. Voici comme il motive son silence sur les evenemens
tres-remarquables qui ont succede : « Contemporains de ces
evenemens, nous devons attendre , pour en ecrire I'hisloire ,
que la providence leur ait donne une fin conforme a ses de-
crets. Chretiens , nous faisons des voeiix pour la prosperile
de nos freres ; amis des arts , des lettres et des sciences , nous
souhaitons une patrie aux malheureux desceudans des niaitres
danstouies les facuites de I'esprit ; hommes , nous desirons de
f,-;(i LIVRE8 1RANCA.IS.
voir cesser Ics massacres et Iriompher I'liumanit '•. ■> Tels soiit
lies sentimetis qui dominent dans tout I'ouvragc.
Si lous Ics resume's elaient ecrils avec autani de soin et dc
pliilosophic , et par des autcnrs aussi mailres de leurs sujeis,
la collection de ces sortes d'ouvrages , quelque volumineuse
qu'elle fut, ineriterait une place distinguce dans toutes les
bibiiotheques. Amaurj Duval, wembrc de I'lnsdtut.
206. — * Resume de I'hisloire roinaine , depuis Romulus
jusqu'a Constantin , suivi d'lin tableau de la decadence et de
la cliule de Tempire romain; ])ar yl. Roche. Paris, 1826;
Mansut fils, edifcnr, rtie de I'P^cole de Medecine, \\° 4- In-18
de 3oo pages; prix, 2 fr. 5o c.
Les auleurs de la nombreuse Collection des resumes histori-
ques semblaier.t avoir oublie d'y placer I'hisfoire ancienne.
Peut-etre av;iieiit-ils juge que I'ljistoire roniaine et I'liisloiro
grecque, si riches en details interessans et en traits sublimes,
etaient moins j)ropres que I'histoire niotlerne a etre reduitcs
en abreges. Cependant, unepareille omission laissait une \aste
lacune dans cette petite bibliotheque populaire. M. Roche a
entrepris de la remplir en partie, en publiant un Resume de
I'histoire romaine , depuis la Jondation de Rome jusqua Cons-
tantin. II a diviso son ouvrage en six epoques principalcs. Dans
beaucoup d'endroils, la rapidite de la narration ne laisse rien
a d^sirer. Mais I'auleur decrit , avec une ])rofusion de details
qu'on ne s'attendrait guere a rencontrer dans un abrege aussi
succinct, les guerres dc Rome avec les nations environnantes,
et les querelles du scnat et du peuple. Eu revanche, il consa-
cre a peine Irois pages au regne d'Augusle, et ne dit pas un
mot de la littcrature latine dont les progres clans cc siecle ont
eu de si imj>ortans resultals. On trouve, a la fin de la sixieme
epoque, un tableau assez bien trace de la chute du ])olytheisme ;
mais ceiui de la decadence de I'empire est d'une concision por-
tee jusqu'a I'exces : il renferme dans six i)ages I'espace dc
1 1 00 ans. II est terminc par le noble vani qne forme I'auteur
de voir enfin les rois chrctiens deiivrer les Grccs d'une trop
longue servitude. Le style rachete, ])ar lane clarle conlinne,
ce qui pourrait lui manquer sous d'autres rapports. On regret-
tera peut-eire <}iie I'auteur ait etc trop ('coiiome de ces re-
flexions coiiites et profondes qui donnent lant de prix a I'oii-
vrage de Montesquieu , quoique depourvu de t'aits historiques.
NeanmoinSj nous ne doutons pas que le public ne s'empresse
de joindre ce nouveau resume a ceux de MM. Felix liodin ,
Coquerel, Lami , Rnhbc , Schejfer ^ L. Thiesse, etc., cl des
SCIENCES MORALES. 477
nutres ^crivains qui onl contiibue au succes de celle iinpoilante
collection. B.
207. — * Histoire de France, abregce , critique et philoso-
phique , a I'lisage des gens du monde; parPiCAULT - Lebrun;
avec cette cpigraphe : Z« verite , toute la verite, rien que la
verite. T. V. Paris, 186; Barba. In-8° de vi et 544 pages;
prix , 8 francs ( ^oj". , pour les premiers volumes, iJec. Enc,
t. XXI, p. 188, t. XXIII, p. 355, t. XXIV, p. 461 ).
Nons avons doja recominande les premiers volumes de cet
ouvrage a I'attention de nos lecteurs.. l^e tome cinquieme, que
nous avons sous les ycux, comprend I'liistoire de Charles-le-
Sagc , auqiiol M. Pigaiilt-Lebriin voudrait avec raison que Ton
donnat seulemenl le tilre de prudent; celle de Charles - I'ln-
sense, queia precipitation ])opulaire a gratifie nial a propos du
nom de hien-ainic dont la posterile a fait justice ; enfin , celle
de Charlexle-Victorieu.T , a qui Ton jicul laisser ce nom; card
ne rappclle jias autre chose que la clrconstance heureuse qui
I'a rendu niailrc du royaume.
II est assez inutile de rappeler ici ce qui fail la mailere de
chacun de ces regnes : la pacification presque generale de la
France sous Cliarles-le-Sage, I'influence Ircs-reiiiarquable de
ce monarque sur tons les lieux soumis a sa domination et sur
les princes contemporains; le boidieur tlont jouirenl en general
ses etats, sa moderation et sa boii'e, qui ne se demenlirent
presque jamais; enfin, la double faute qu'il fit, d'abord a I'e-
gard de la Bretagne qu'il voulut, malgre le voeu de ses Labi-
tans, soumettre a sa domination, ol ensuite, a I'egard de la
France enticre qu'il envelopjia insensiblenient dans les filets
d'un despotisme absolu dont les Francais devaient plus tai'd
cprouver les funestes consequences : sous Charles I'lnscnse ,
les premiers effets de ce despotisme qui livra a des princes
ambitieux et sanguinaires la puissance piesque illiuiitee d'un
roi dont I'enfance devait peser quarante-denx ans sur sou
inalheureux royaume : les infames concussions des dues de
Berry, de Bourgogne et d'Oileans; la mort Iragique de celui-
ci, assassine par son oncle; la misere d'un i>eu[)Ie que les
exactions forcaient de se soulever, et qu'on deciniait ensuite,
quand des promesses, violees presque aiissilot que failes ,
ra\aient fait rentrer dans I'obeissance; Taffreuso solitude du
roi que ses parens laissaicnt au soin de (|uelqnes douiesliques ,
que sa femme luorae ( Isabelle de Baviei'e) abandonnait pour
vivre scandalensemeni avec son beau-frere , le due d'Orleans;
les calainites ainent'es sur notrc jiatrie par la folic du roi ;
Tambition demesurce des princes et des grands; la hideuse
4-S LIVRES FRANCAIS.
felonie de celle Isabelle qui, traliissant a la fois son luari et
son ills, et cliercliant a les faire pcrir, s'unissait aux ennemis
de sa famille et de la paliie , appelait les Anjjlais en Fiance,
soiiriait anx laches flatlcurs qui irouvaient une vols jjotir ap-
plaudirau dechireiTicnl de leur j^ays; etifin, la niorl solltairp
de Charles qui, pour le bieii de soti peiiple, n'aiiralt jainais dii
naitre : sous Charles-le-Victorieux , les siicces de nos arinees ,
le cour.tpie renaissant de ties guerriois, et ati-dessus d'eiix les
hauls fails de Jeanne d'A.rc, qui apparut comnie iin aslie con-
solatenr; la condamnalion et le suppjico de cetle brave et
illustre fille ; regoisme du roi qui I'avait lachement abandon-
nee; enfin , la ])acificalion du royaume, et I'esperance tiop
souvent trompee d'un bonheur ]);iyo ])ar tant de sang et de
larnies: voila ce que M. Pigaiilt-Lebrun a ])eint avec nne
grande rapldite et une rare cnergie. Son style, s'il n'est pas
toujours aussi elegant, aiissi harmonieiix C|iic celui de Vertot
et de Saint-Real, est en general ferme , sententieux et grave ,
sauf quelques plaisanteries que lui arrache le mepris qu'il ne
])ciit conlenir pour les jiersonnagos dorit il rapporte les ac-
tions.— II dqilore suitout le supplice affreux de Jeanne d'Arc
avec une sensibilite et une indignation qui seront pariagees par
tous les lecteurs , jdus facilemeiit, je pense, que I'ojjinion (]iril
emet sur cetle heronie, qu'elle elait douee de eetie secomle vuf
des Ecossais que Walter-Scott nous a si bien fait connaitre. II
renvoie, pour s'expliquer sur ce sujet avec plus de details, a
ce qu'il dira du regne de l.ouis XVI, sur ie(|uei il existe en
effet plusieurs predictions, el une entre autres de Cazolfe, qui
ne peut nianquer d'etonncr ceux qui y croTent, mais (pii ne
touchera guere ceux qui la regarden> comma faite apres coup,
ou comme tres-embellie par Laharpe.
MaiSjCe qui interessera beaucoiip plus (pie ces cioyancesmys-
terieuses et mesnieiiques, ce sont les observations placees jjar
I'auteur a la fin de chaque regne, oii il traite rapidement du
gouvernement, des finances , de I'universite, de la bibliolheque
duroi, des beaux-arts, des cosiunies, des dignites, dos jiivcii-
lions et des usages de i'epoque.
II est en linissant, bon de prevenir, nos lecleurs (]ue les
Charles dont les regnes remplissent ce volume, y sont jilaces
sous les nombrcs VI, VII, VIII, taiidis que j)artout aillcurs
on les trouvc conune les V^, VI* et \1V du nom : il est facile
de voir (pi'un onbii, ou peul-elre quelque raison qui a echappe
a la *agacile de nos hisloriens, a fail niellre <le cote Chnrics-le-
GAOsdeiueiiieqtielesannalistes anglaisn'oiit ]ias comptc les trois
Edouurds saxi us. R7. Pigaull-I.obrnn avojdn reparer I'crrcur :
SCIENCES MORALES. 47!)
il a evidemment rai*on en ))rlnci])e; mais il en resultera Tin
inconvenient, c'est (]u'il sera force de donner nn dementia
toufcs les iiiedailles et a loutes les monnaies, et que pour eire
consequent , il Ini fandra noinmer noire roi acluel , Cliarles XI,
en depit de ses notes formels et de I'oplninn generale. B. J.
208. — * Hisloire des revolutions de In ville et du royaume de
Na/jles. Paris, 1826. Sautelet. 1 ■vol. in 8°; prix, 16 fr.
C'est une reimpression de I'onvraf^e du comte de Modene,
ptiblie ponr la premiere fois en 166G el 16G7, et dont la se-
conde edition ])arut I'annee soivante ( 1668.) Celle hisloire qni
comprend un espace d'environ dix niois, raconte en detail la
revolution qui cominenca par le soidevement qii'excita Masa-
niello, en jnillet 1647 , et qui finit par la souinission de Naples
aux forces espagnoles, en avril 1648. I.e comte de Modene,
apres avoir ete page de Monsieur, frcre de Louis XIII, s'at-
laclia a la fortune du due de Guise, son j)arent , qui joua un
role assez considerable dans la revolution napolitaine, et dont
il fut le mestre de carap general. Cet ouvrage, compose par un
liomnie quia pris une part active anx evenemens qu'il raconte,
est I'un des plus interessans qu'on ait ecrits sur cette revolu-
tion singuliere, ou I'on vil un niarchand de poisson, age de
24 ans, ])erdu jusqu'aiors dans les derriieres classes du peuple,
apparaitre tout a coup comme un colosse de puissance, au
milieu d'une vasle population , dont il fut I'arbitre des le pre-
mier jour, Nu-pieds, vetu senlement d'une chemise et d'un
calccon de toile, coiffe du bonnet des pechcurs, il faisait un
geste , et plus de cent mille hommes olicissaient avec respect et
enthousiasme. Ce regne , qui dura neuf jours, fut termine ])ar
un assassinat. — II serail hors de propos de donner ici I'analyse
d'une production connue depuis plus d'un siecle et demi. Nous
nous bornerons a rappeler au lecteur que les fails y sont pre-
sentes avec exactitude, et que le style est ]ilein de vivacite et
de mouvement. Nous pourrions blamer quelques longueurs ,
quelqties details oiseux , si nous ne considerions ce livre , moins
comme une histolre que cornme des memoiT-es traces par un
temoin ocuiaire : sons ce rapport, il inerite d'etre place dans
la collection des ouvrages de ce genre; il etait devenu rare , et
Ton doit savoir gre au savant edileur de I'avoir reimprime. II y
a joint une notice tres-curieuse des ouvrages relalifs a la re-
volution deMasanicllo et nn mcmoire, jusqu'a present inedit ,
sur la ncgociation pai' JaqneUe le baron de Modene obtint la
restitution de Verceil , en i6j8. Q;;ant a la i^e'nealogie de la
maison de Raiinond-Tvlodene , qui occupe 60 pages du premier
48o LIVRES FRANC AIS.
volume, nouscroyoiisqu'ellc ne pout iiilcrcsserquelcsmeinbri'S
lie cetlc famillc. M. A.
9,09. — * Manuel Jilstori<] lie da dcpartetnent de t Aisne ^
par J. 1'". L. Dkvisme. Laon , i82(), Leblan -Cuurtois; Paris,
Dclalain. In-8° de ])res de 5oo pages ; piix, 8 fr.
« II n'csl jias seulemenl curieux , il esl souvent utile el
qiiclqnc'fois iiecessaire de connailre les raoiiuniens liistoriqucs
d'lin pa\s. L'liomme studieux y veiifie Ics fails, les families y
retlierciieiit leurs litres ; les comniiinnes s'y instruisent de
leuis droits... Le departement de I'Aisne est une terre eiiii-
uemineiit hislorique. C'est la que Cesar jirelude a la coriquete
des Gaules par la defalle des Beiges. C'est la qu'est le ber-
ceau de la monardiin francaise; la qu'une revolution iiu'mo-
rable fait passer le sceptre a la dynaslie regnante; la aussi
que sa roslaiiralion est prc{>aree par un dvenement decisif.
L'une de ces villes a etc plusieurs fois la capLtale d'un royaume
(jui portait son noni. Ufic autre a cic , pendant quatre-
\ingls ans, le siege de toule la nionarchie. On rencontre
partout , snr son territoire, des lieux illustros par le sejour
dcs rois , par des batailles sangianies , ])ar des sieges meur-
triers , par des monuniens logislatifs , par de celebres traites
diploiiiatitiues. Lesintt^ets les jilus gra\es y ont etc disciJtc.s
dans nonibre de concilcs el d'assemblces nationales. L'eglise y
a vu naitre deux ordres religieux qui ont etendu partout leurs
rameanx. NuUe j)art encore la feodalite n'a brilli' de plus
d'eclat. Quels soni , en effel , les grands feudalaires qui
ecli]>sent les conitcs de Vermandois , de Rouci , de Soissons ,
les sires de Cout:i , les dues de Guise ? et quel sang j)lus au-
giiste que ceiui des princes qui tiiirent leur coar dans les niurs
de Saint-Qnentin , de Braine , de Soissons , de la Fere et de
Ciiateau-Tliierry ? A rote de cette gloirc sotivent falale au
jieuplc, s'eltne une institution tutelaire qui lui rend ses droits
nalurels. Les communes prennent naissance a Saint-Qucniin ,
a Vervins , a Laon. Ce signal des affrancliissemens est eniendii
partout, et la France a un tiers-etat. »
On voit que M. Devisme , assocle correspondant de la
Societe royale des Antiquaires de France, et anteur d'line
bonne Histoire dc Laon , etait appele a composer le Manuel
historiquede I'Aisne. La chronologieen esl faite avec un grand
soin ; elle est suivie de la galerie bistorique de cinq a six cents
bommes qui out laisse un nom sur les bords de I'Aisne. On
sail que ce ]iays a jirnduit, dans Racine et La Fontaine, "deux
des hiiit grands pceie^ doni la I'ranee s'honore. » Nous avons
SCIENCES MORALES. 48i
lu avec plaibir rarticle qui concerne le general distingue , I'ora-
teur illustre (Foy) , objei des regrets sincercs de tous ses con-
citoyens.
n Sa perle laisse la Irtbune veuve da plus eloquent defen-
seur des libertes publiques. Quelle preuve plus solennelle et
plus loucliante des regrets de la France entiere , que ce
concours inoui de toiites les classes des liabitans de la capi-
tate qui lionora ses obseques ; que celte souscriplion , sans
exemple cliez nous, qui a pour but de dedommager ses en-
fans de la niodicite du patrimoine dont I'accroissement ne
I'occupa ])oinl ! Sa carriere fut , a la verile, trop courte pour
nous! Qu'y manque-t-il cependant pour qu'elle ait ete com-
plete ? La inorta attendu pour le frapper, qu'il fut a I'apogee
de la gloire a laquelle 11 bornait le prix de ses travaux. >>
L— E.
2IO. • — * Histoire critique du passage des Alpes pai- Annibal,
dans laquelle on determine la route qu'il suivit depuis lesfron-
tieres d'Espagne jusqu'a Turin; par feu J.-L. Larauza, ancien
mailre de conferences a I'Ecole norraale. Paris, 1826; Dondey-
Dupre. In-S" de 222 pages, avec une carte ; prix, 1 fr. 5o c.
La question qui fait le sujet de ce memoire n'est pas nou-
velle. II en est peu (lui aient ete aussi soiivent debatlues. Avant
que M. Larauza entreprit de determiner , d'apres les temoi-
gnages des historiens, et I'inspection attentive des b'eux , par
quelle route Anuibal penetra en Italic, cette difficulte histo-
riqueavait excite la curiosile eteserce la critique d'un grand
nombre de savans dont 11 serait trop long de donner ici la liste,
mais dont on trouvera les divers systemes exposes et discutes
dans I'ouvrage que nous annoncons. La solution de M. La-
rauza se distingue de celles qui I'ont precedee par un caractere
particulier. Elle coneilie les relations de Polybe et de Tite-
Live que Ton n'avait pujusqu'ici accorder ensemble. Ce resnl-
tat sutfirail seul pour lui donner gain de cause, s'il n'avait
d'ailleurs appuyc son opinion d'un grand nombre de preuves.
a I'evidence desquelles on ne pent guere se refuser. Son itlne-
raire repond a toutes les indications des deux historiens , a lous
les accidens que retracent leurs rcciis ; enfin , a la nature et a la
configuration des lieux que , dansplusieurs voyages successifs,
M. Larauza a curieusement etudies. On trouverait difficlle-
ment une critique plus consciencleuse , plus d'exactitude et
plus de sagacite. Loin d'eluder ou de trancher superficielle-
ment les difficultes dii probleme, I'auteur les recherche et les
epuise toutes; et, si Ton pouvait lui reprocher quelque chose,
cfi serait de irop prodiguer les moyens de convpincTe. La sa-
T. XXXI. — Aoui 1826. , 3 1
48a LIVRES FRANCAIS.
vaijte discussion <les textes anciens, la determination precise
deslieux et des distances, I'eAamcn d'un assez grand nombre
de questions geograpliiques ct archeologi(|nef impnrtantes, le
merite d'une exposition ciaire et rapide , d'un style pur, ele-
gant, ct qui s'aninie toiites les fois que lesujetle permet , re-
coinniandent ce travail auqucl s'.ittache d'ailleurs uti interet
bien douloureux. C'cst la premiere et dcrniere jjroduction
d'un ecrivain qu'une inort prcmatnroe a receinment enleve aux
leltres et a la science qu'ii eut cultivees avec gioire, a I'instruc-
tion publiqiie a qui, jeune encore, il avail rendu de longs et
d'importans services, a la religion et a la patrie pour lesquelles
il professait le plus saint devounient; enfin, a ramitic qui ne
se consolera point d'liiie telle perte. Un de ceux qu'elle a du
le plus ])rofondenicnt affecter , s'est charge du tiistesoindc
publier cet ouvrage, etde reiulre a son auteiir rhommagedu u
ses lalens et a ses .vertus. Les pages qu'il lui a cunsacrees rap-
pellent d'une nianicre toucliante tout ce que ses amis esti-
maient et cherissaient en lui. lis y reconnaitront I'image de celui
qu'ils regrettent et I'expression de ieurproprc douleur. Nous
donnerons sur M. Laranza quelques details dont le grand
nombre de notices necrologitpies inserecs depuis quelques
raois dans notre Revue a jusc|u'ici relarde I'inserlion. ( Voyez
ci - aprcs, a la fin de notre section des Nouvelles I'artlcle
Necrologie ) H. P.
211. — * Biographic universelle et portatii'e des contempo'
rains, ou Dictionnaire kistoriqiie des hommes celebres deloutes
les nations, inorts et vivans; par une Sociele de puhlicistes ,(fe
legislateurs , d'/ioinmes de lettres , d' artistes , de militaires et
d'anciens rnagistrats; iin scul volume in-8° , orne de 35o por-
traits. 4^, 5"^, G*" et 7"^ livraisons. Paris, 1826; au bureau de la
Biographic, rue Saint-.Vndrc-des-Arcs , n° 65 ; prix de la )i-
vraison, 2 fr. fio c. ( Foy. ci-dessus, page 200 ).
Nous avons deja signale I'apparition de cet ouvrage que
nous rcgardons comme le plus consciencieusement fait entre
les compositions du meme genre. Les auteurs et les cditeurs ,
fideles a leurs engagemeiis, font jiaraiire leurs livraisons avec
ime prompte exactitude. Leur impartiali'e est toujours assez
remarquable. Cependant , ils nous p^raissent avoir ote plus
que severes, ou plutol Icgers, au sjjet de Tun des persou-
nages de la serie BAR. Pourquoi, dans un monument histo*
rique, juger les hommes qui se sont trouves jetes dans les
tems les plus difficiles ile nos troubles civils , d'apres des on
dit, el reproduire a tout piopos sur leur compte des phrases
usees qui ne tiendraient pas derant le moindrc examen. II est
SCIENCES MORALES. 48!^
convenu, en parlant de la personne en faveur de laquelle nous
auronsiin jour le courage de reclamei' , dc I'accuser de pcur,
parce qu'elle etait veritableraent moderee, et qu'elle ne voulut
p.is s'associer a certaines conspirations m;il concncs ; deratla-
cher son noin par le mot baroque de Carmagrio/es aux rap-
])orts brillans et splrituels qu'il faisalt surles succcs herculcens
des armees d'alors; enlin, de lui pieter un propos, alroce
sans doule , mais qui ne lul appartient poir.t , C|ui fut prononce
pour la premiere fois par les royalistes, dans les anciens trou-
bles de I'Ecosse, et qui fut repeto , soit par les Jeffries des rois
d'Anglclcne , soit par cpielques farieu'i de nos jours qui
croynicnt servir le inonanjue legitime, en faisaiit un axiome
de cette infcrnale verite. L'homme eloquent el cclnire qui pu-
blla le Point diijour, modcle dimpailialiie et de raison, qui
le premier defendit la liberie de la prcsse; qui fit accorder une
pension par la it'publique a la veuve de J. J. Rousseau; qui
demanda remancijiation desliommes de couleur ; ot fjui , dans
la Cliambrc des cent jours, on sa moderation se fit remarquer,
vota constammcnt pour que les representans dti peiiple eussent
leur part d'initiaiivc dans la proposition des lois,meritc qu'on
ne reproduise pas sur son compte une de ces dcnomliiations
odieuses , que les diffamatcurs de la revolution aiment a pro-
diguer a lous ceux qui ont servi la cause de la liberie. Nous
eussions desire que les rJdacteurs ajoutassent a I'arlicle que
noussignalons, cetie phrase qu'on trouve dans celui ileBeau-
marchais : « Peu d'liommes ont ele plus calomnies que lui ;
mais il est vrai de dire qu'il a valu mieux que sa reputation. i>
— L'article qui concerne la fameuse prostituee Dubarry est
ecrit avec beaiiconp de moderation ct doit etre cite comma
tres-remarquable. B.
212. — Dc Vinjluence clesfemmessurln Utleraturefrancaise,
comtne protcctriccs des lettres , ct cornme auteurs; ou Precis
de thisloiredesfemmesfraucaisesles plu-scelebres ; parM""^ de
Genlis. Paris , 1826; Lecointe et Durey. 2 vol. in- 12;
prix , 5 fr.
Nous nous bornerons a annoncer cette reimpression d'un
ouvrage (niblie et juge depuis long-tems, et a la(Juelle ilnous
semblequel'aulcurestetrangere. SiM'^'^deGenliseutdonneelle-
memecetle piiblication nouvelle, clle cut sans doute com[)lL'te
son ouvrage, en y njoutant des notices sur plusieurs feiiimes
celebres, mortes depuis la publication de la premiere edition ,
notamment M""' de Siael; et elle cut aussi certainementraodi-
fie quelques-uns de ses jugera^'ns , qui lui ont jadis attire le
48/, LIVRES FRA.NCAIS.
ju^tc leproclie d'une excessive sevcrite, pour ne pas dire plus.
M. A.
21 3. — * Mcmoires de M. rfe Falkenskiold, ojficier gene-
ral oil sen-ice de S. M. le roi de Daneinark , a l'e//oque du mi-
nistere et de la catastrophe du comte r/c Struensee; precedes
d'line Notice stir la vie de I'auteitr; par M. Phil. Secretan , et
publics aprcs la mort de ce dernier. Paris, 1826. In - 8° de
XXIV el 4/i7 p^K^*- Treultel el Wiiriz ; prix , 7 fr.
II nous est daiitaiit plus atifrcable d'annoncer la publication
de ces interessaas ineiiioirci, qu'ils justifient piusiours asser-
tions, que nous avons piecedeinment emises, et qu'ils prou-
vent rexactilude de ([iiel((ues anecdotes que nous avons ra-
contees, a I'occasion d'lin autre ouvrage, m{[\\x\v : Histoire
de Chretien Vll; par M. J. - K. Host. On aurait tort d'ele-
ver des doutes sur la fidelite des recils de notre auleur ,
quoiqu'il se soil trouve implique dansla calastroplie du cointe
de Strucnsec. Lc fait est quM n'y a eic iinpliquc, ainsi que
Ic comte de Brandt, qu'en qualilo d'and de Struenstie : M. de
Falkeiiskiold eut cependant Tavaiitag-e de se tirer de I'af-
faire plus lieureusenient (pie BI. de Brandt. II en fat quilte
i)Our une detention de qualre ans dans la forteresse de Munk-
holm , en Norvege , en vertu d'une lettre de cachet , et non
d'une condamnation en regie, tandis que le comte de Brandt
fut execute a mort avec Struensce , afin que ce dernier eut un
compagnoii de voyage, consnie le disait alors une chanson po-
pulaire tres-repandue. Au reste , depuis plus de quarante ans ,
celte scene sanglante a etc appreciee en Danemark a sa juste
valeiir; et, si Ton convient que Struensee n'etail pas entiere-
ment innocent, du moins on reconnail getieraleinent qu'il n'e-
taitcoupable que de cette espece de delits, qui sont commis
tous les jours inq)unemenl par d'aulres ministres, favoris des
rois. Devenu puissant, il eiit la fniblcsse de croire que sa puis-
sance n'aurait jamais de bornes. Favor! da roi, il conlracta
une partie des vices de cetlesorte d'liomines : il aurait cu leur
sort, celui d'etre renvoye avec des honneurs et des richesses,
s'il avait nppartenu a la caste de la haute noblesse; mais il n'e-
tait que mcdecin; il avait voulu alleger le joug oppressif sous
Icquel rinsoleiice des nobles et des ci-devant laquais accablait
les autres classes de citoyens; des lors, il dut perir. Notre
auteiir lui donne, a ce sujet, un cioge mcrite, lorsqu'il dit
(page i36): « Siruensee ne fut pas sans doule cxciiipt d'er-
reiirs; mais il chercha sincerement a procurer le bien de I'etaf,
et pbisieurs de ses rcformes doivent honorer son administra-
tion, et lui assurer la reconnaissance de son pays, v
SCIENCES MORALES. 485
Nous voudrions faire ici le recensement des fautcs dont on
accuse Siruensee, ainsi que dcs excellentes institutions qui lui
sont dues; mals, cominc ce recensement serait trop long,
nous renvoynns nos lecteurs aux patjes i34-i/(G de ces me-
moires; ils jugeront facilement combien scs errcurs elaient pcu
nombreuses , si on les compare avec le £;iaii(i iiombre desame-
lioralions (lu'il eut le boiilienr d'introduire dans I'administra-
tion dii pays, ainsi que (le ceiles qn'il avait projetces , ct qui
avaient recu un coniinenrement d'execution. Quant aux pre-
tendties liaisons d'intiinile avec la reine Caioline-Mathilde ,
dont Slrnensee fut jjubliqufinent accuse, M. de Falkenskiold
cherclie a juslifier les deux parlies, et nous aimons a croire
qu'il n'y a pas irop mal reussi. Qiioi qu'ii en soit , comme, dans
de paretics affaires , les preuves materiellesmanquent presque
toujours, nous ne nous permettrons pas d'emettre une opi-
nion j)ositive sur ce sujet. Seulenienf , et pour faire connailre
I'esprit qui aniniait la commission char^'ce d'interrogcr et de
juger celte nia'heiireuse reine et ses co -accuses , nous ne pou-
vons nousemfieclier de rei)r()duirc ici une anecdote (jue nous
avoiis (lejii ci'ee , et nous emprunlerons les juopres paroles de
M.de Falkenskiold. « Le conseiller Sc/uir/r, dit-il , jiage 233 ,
])resi(lait la commission cliargce d'interroger la reine an cha-
teau de Cronborg, ou elie etait enfermee. Ccfte princesse Te
recut d'abord avec hauteur, et temoigna beauconj) d'indigna-
tion, quand il lui j)arla de ses liaisons avec Struensee. Alors,
Schack lui fit Icciure de la declaration que Struensee avait
faite, et il obscrva que cet accuse subirait un supplice tres-
cruel , si la declaration etait fausse. La reine examina un ins-
tant cette declaration; puis, rt'flechissant sur cet ificidcnt inat-
tenilu: « Quoi! dit-elle aSchack, ])ensez-vousque, sijeconlirme
cetle declaration, jc siiuverais la vie a ce malheureux ? » Schack
repondit par une inclination profon^le. La reine prit la j)lumc,
signa la premiere syllabe de son iiom et s'evanouit. Schaik
acheva la signature. »
En ce qui concerne personnellenient M. de Falkenskiold ,
nous avons deja dit qu'il subit un emprisonneinent de qiiatre
ans; il fut ensuite mis en liberie a des conditions, dont voici
lesprincipales : i°qu'ilsereudrait immediatement , et par mer,
en Provence ou en Languedoc, pour y etablir sa residence;
2° qu'il s'engagerait a ne jamais revenir en Daneraark, et a ne
point quitter le pays qu'd aurait clioisi pour sa residence, sans
la permission du roi ; 3° qu'il u'entreiait au service d'aucunc
puissance eli'angere, et qu'il n'agirait ni n'ecrirait in aucune
maniere contre le roi cuconire la faniille royalc.
«
486 LIVRES FRANCAIS.
Ala fin de I'aii 1787 , lorsque la {;;uerre ilait sur le point
d'eclater cnfre le Uanemaiketla S'lcde, M. de I'alkenskiold,
donl les talensmilitaires avaientele bien apprecics, fut rappcle
dans sa patrie. Le dOcrcl d'exil poite contre lui f'ut annule, et
il revint, au iiiois do mars 1788, a Copenhague, oil I'aiiteurde
cetaiiicle se rappelle fort bien de I'avoir rencontre deux on
trois fois. CepenJant, cctte guerre ayanl eu unc fin aussi su-
bite que son commencement avaitele imprevu, M. de Faikens-
kiold quitta une seconde fois sa ])atrie pour aller s'etablira
Lausanne, oil il est niort le 3o sept(;nibre 1820 , honore de
I'amitie et de I'estinie de tous les homines dont il se trouvait
entoure, et a I'age de 82 ans el quelciucs niois-
Ces uu'nioirrssont suivis d'lin autre mcmoire sur i'etat mili-
taire du royaurae de Dauemark, ecrJ!, a ce qu'on voit claire-
ment, il y a plus de t rente ans. Aussi , bcaucoup de vices de son
organisation , que I'aulenr y rcleve , ont disparn avec le lems;
il en reste neaninoins un bon nombre, que probablement I'ave-
nir fera disparnitre. Parmiccs \ice5, M. de Falkenskiold compte
avec raison !e nombre prodigieux de iroupes de terre , que le
Danemark entrctenait alorsen terns de paix , et qui eiait loul-
a-fail hors de proportion avec les ressources du pays. Les ca-
dres etaient alors de soisante-six niille liommes, ct il prouve
la verite de ses assertions par ce (;ui nrriva en 1762, lorsque
les menaces de I'enipereur Pierre III obligerent le roi de Da-
nemark de mettre en activiie une armee de vingt-cinq mille
hommes. Get armement, pour leqnel le Dancmark dut con-
Iracter une dette de cjuarante-deux millions de livres sans par-
ler des ressources ordlnaires du Iresor, fut bicniot reduit a
vingt mille hommes, parce que I'armee manquait de tout;
cependani, eile ne fut que six mois sue le pied de guerre, et
n'eut aucun ennemi a combattre. Aussi dit - il avec raison
(page 3i8) : « S'il est vrai , comme I'liistoire le dernontre, que,
depuis pres de deux siocles , les troupes de terie du Dane-
mark ont presquc lotijonrs ele bat lues par celles de Suede , il
faut recnnnaitre qu'independamment du courage des deux
peuples , il y a dans le gouverneinent danois quelque chose
qui conlrarie les disposiiions natioiiales , et que ce vice intc-
riciir a produit cette suite coniinue de re\ers, dont le tableau
est si affligeant i)Our tout vrai Danois. «
Nous ne savons pas exactement jusqu'a quel point, dansces
derniers tems, on a porte la diminution du nombre des trou-
pes de terre; mais il est certain qu'encore aujourd'hui , lout
Comme alors, I'arraee de terre est hors de toute proj;ortion
avec la population et les ressources du royaume, et qu'elle ne
SCIENCES MORALES. 487
doil son developpeinent monstriieux qu'aux privations que i'on
fait subir a la marine inilitaire daooise; et ceijendanl , la ma-
rine est la veritable arnie defensive de la nation. Pour se con-
vaincre de la vtrite de cetle assertion , il snffu de jeler un coup
d'ceil siir une carte geographique. Ajoulons un fait, ijui est a
la coniiaissance de tout le nionde, et que nous aiinons a con-
fii mer jiar une citation extraile des nienioires de M. de Falkens-
kiold." Par un contraste frappant, dit-il, page ^72 , tandis que
raimee de terre du Daneniark n'a eprouve que des revers, son
armee de mer s'est signalee par des exploits brlllans , et a con-
serve une superiorite bien decidee surles flottessuedoises. »
M. de Falkenskiold, ayant servi avec une grande distinction
dans I'armpe russe , i>endant la guerre de 1 769 et 1 770 contrc
la Porte otloinane, avail ccrit des Considerations sur ces deux
campagnes des Ritsses centre les Turcs , que I't'diteur a mises
en tele des autres inenioires. Comma I'auleur y a caracterise
plusieurs hommes distingues , avec lesquels il a en des rela-
tions , nous croyons faire plaisir a nos lecleurs , en copiant ce
qu'il dit , page 34 , sur le celebre comte deRomanzoJf: « C'e-
tait un homnie de beaucouj) d'esjirit naiurel , mais de pcu
d'instruction ; entete dans ses opinions , fort porle a la jalou-
sie , incertain et indetermine dans les ordres qu'il doniiait, par
crainte de se comprometlre. Son secrelaire disait naivenient:
« II m'a si fort accoutume a tcrire d'une maniere equivoque et
vague , que mes parens ne peuvenl dccouvrir , dans les lettres
queje Icur ecris, si je me parte bien ou mal. »
Le deposiiaire de ces uiemoires, M. Secretan, vice-presi-
dent de la Cour des appels supre.-nes du canton do Vaud, etant
in6rt avant leur publication, elle a etc soignee par un ano-
nyme, auquel ont cchappe deux erreurs , certainement tres-
excusables de la part d'un etranger qui neconnait ])as bien le
Danemark. Dans sa courte preface, il donne d'abord a M. de
Falkenskiold le litre de comte qu'il n'a jamais eu; ensuite ,
page IX, il fait du principal raoteur de la conspiration conire
Struensee, de M. Guldberg , unchapelain qui devint })lus tard
premier ministre. I\I. Guldberg est en effet devcnu ])remier
ministre ; mais il n'a jamais ete ecclesiastique. Voici ce que dit
( page i55 ) sur son compte I'auleur des mcmoires , et ce quia
pn induire eu erreur notre anonyme : « Guldberg, fils d'un
meunier, ayant ete destine a I'etat ecclesiastique , s'appiiqua
•Tahordaux etudes rtlatives a sa vocation, et se fit connaitre
par des ouvrages de theologie. La faveur de quelques personnes
considerables lui fit confier I'educalion du prince Frederic, et
lui donna I'occasiou de s'insinuer aupres de la reine douairiere
488 LIVRES FRirVCAIS.
Julie- Marie , doiit il gagiia la contiance. GuKlberg couvrait
d'un e.iti'rieur pieiix , el du larigaf:c d'ttn humble prelrr une
ambition profonde. Du sein de son obscurile niodeste, ilepiait
le moment favorable jioiir employer Rant/ati ct son p.irli au
projet quil mcditait de niettreles renes de I'etat dansles faibles
mains du prince Frederic et de Julie-Marie, d'oii il les ferait
aiscment passer dans les siennes. i' Que ce portrait soil vrai on
faux, e'est ce que nous ne voulons pas examiner. FeuM. Gnld-
Lerg a sans doute eu des torts; m.sis on ne doit pas oublier
que, pendant son minislere , il a constammcnt p.rote^:;e les
hommes de lettres, et qu"il a puissammenl contribiie aux pro-
gres des bonnes etudes en Danemark. Cependant , la verit6
nous oblige d'ajouter ici ce que dit I'autcur des mcmoires
(page 20J ), en commeniant un des chefs d'accusation de
'Slruensee, celui d'afoir congeJie , sa.-is /brine de proces , et
sans en rejorer a la justice , un s:randnombre d' employes :
■v Obscrvons, dit-il, que les memes hommes qui imputent ce
grief a Slruensee, out depouille ainsi de lenrs emplois ceux
qui leur deplaisaient , et meme leur ont ravi la liberie et leurs
biens. Ce que j'al eprouve personnellement, me met certes eu
i^tatdcn juger. u
II y a une autre erreur, qui appartient sans doute a I'auteur
des memoires lui-nieme. C'est lorsqu'aux pages ao5 et aSi il
parle d"un chateau de Gripshohn , <[\u est un chateau des rois
de Suede. II faut lire Hirschholm. II n'est pas etonnant qu'un
vieillard, eloigne de sa patrie depuis un demi-sicc'.e, ait pu
confondre ces deux noras. Mais une erreur, qui n'est pas a lui,
etdont nous ne pouvons accuser (jue ie prote, est celle de la
page i3a, repetce plus de trente lois, oil il est parie d'un
M. de Stolh. Aucun personnage de ce nom n'a jamais existeen
Danemark. II faut lire : le Comte de Hold. D'autres noms
propres sont aussi mal orthographies; mais, commeilsappar-
tiennenta des indlvidus pcu coniius et peu importans, il n'est
pas necessaire d'en indiqucr la veritable orthographe.
Les memoires de M. de Falkenskiold seront lus avec un vif
interet : ils se distinguent par une grande et severe impar-
tialite. Heibkrg. ^
21 4- — * Memoires reltUi/s a la fu mi He royale de trance , ■
pendant la rei-olution ; accompagnes d'anecdotes inconnues et •
aulhentiques sur les princes contemporains et autres jierson-
nages celebres de cette epoque; publics pour la premiere fois
d'apres le Journal , les lettres et les entreiiens de la princesse
de Lamballe, par une dame de qualile altachec au service
confidentielde cette infortunee princesse. Paris, 1826 ; Treuttel
SCIENCES MORALES. 489
et Wurtz, rue de Bourbon, n° 17; Strasbourg, m^nie niaisoii
dc commerce. 2 ■vol. in-8" , avec le portrait de la princessc et
le chiffre de la correspondance secrete de Maile- Antoinette ;
prix, i5 fr.
Apr6g tant de memoires sur la revolution , en voici de nou-
•veaux qui contiennent encore plusieurs faits inconnus, ct
meme qiielques revelations imporlantes. En general , on les
lira avec intcret; luais on aurait tort de les lire sans defiance.
Ce n'est pas que je ]irefende nier raulhenticite du Journal de
la prince?se. Qiiclqiies feuilles publicjues avateut cleve des
doutes sur ce jjoint; d'autres avaient meuie fait plus; et le
voile de I'anonyine dont s'enveloppait I'editenr semblait don-
ner du poids a leurs assertions. Mainlenant , on sait que cet
editeur est M™'= la marquise de Govion-Broglio-Solari. Eile vient
de se nommer , et, dans une letlre imprimee , apres avoir pro-
voque ses accusaleurs a se nommer a leur tour, ellc lianscrit
le serment qu'elle avait deja preie, I'annce derniere devant le
lord-maire de Londres, pour attester que son livre n'etail, dans
tout ce qui jiortait le litie de Journal de la princesseclc Lam-
balls, qu'unetraduction fldeledes notes ecrites en italien, qui lui
furent coniiecs ])ar la princesse elle-meme, en 1792. Je ne
sache pas qu'on ait repondu a celte letlre, et il faut convcnir
que i'on ne peut guere demander de plj;s grandcs sureles, a
moins d'exiger la representation du manuscrit original auto-
graplie, chose a laquelle il scrait peul-ctie ulile de sounieltre
en general loutcs les personnes qui publient des onvrages de
ce genre , mais dont on a dispense tant d'editeurs. Aussi , quasid
j'ai pp.rle de defiance , ai-je \oulu dire seulement que la posi-
tion de la princesse , ses affections, son entourage , avaient du
souvent la tromper sur les lionimes et sur les evenemens. Pour
n'en ciler que deux exemi)les, qui ponrra croire mainlenant
que les empereurs .loseph II et Leopold aient ete fmpoisonn(5s
par des agens de I'assemblee nationale, et que, dans un comile
secret, la meme assemblee ait decide de faire perir de la meme
maniere Louis XVI et toute sa famillc? Ce sont de ces ciioses
qui peuvent se tramer dans un conseil compose de cinq ou
six individus, mais C|ui ne s'agitent jamais dans les assemblees
des representans d'une nation , pas plus en comite secret qu'en
seance ])ublique. Le poison n'est pas I'armc des peuples.
Pour que la princesse de Lamballe ait pu ajoulcr foi a des
bruits si absurdes , il a fallu que ses ressenlimens fissent etran-
gement violence a sa raison qui, sur d'autres objels, parait
souvent droite et eclairee. Je citerai, pour appuyer cet eloge ,
les regrets qu'elle eprouvait dc i'imprudente demande d'lm
Ago LIVRES FRANCAIS.
jecours ^iranger. « PlAl a Dieti, disait-elle a la iiiaii|uise dc
Solari , plul a Dieif qu'on n'eut jamais provoque I'inlervention
c'trungeie ! Oli ! pour(iuoi la Reiiie a-i cllo refuse deinecroire!...
Jamais Ics armc'-cs ne soumellront les nations, une nation sur-
tout exaltee ])a!' la conqucte n'-cente de son indcpendance el
de sa libeite, apres avoir subi le joiig d'un gouvernement
faiblc et corrompu. •
Conime le journal de la princcsse offrait de grandes lacunes ,
I'editeur a conii)Ose, pour )es remplir, un certain nombre de
chapitres. Ceile partie de I'ouvrage n'est pas la moins inte-
ressante. On y remarqiiera j)tincipalement des details sur la
corres[)ondance de la reine axec les princes etraiif;ers, ct suif
des plans soumisa Louis XVI par lefameux Burke. Get hoinme,
a qui Ton a voiilu faire la reputation d'un politique, proposail
an roi de singuiiers moyens de saint. Le principal consistait
a lever, pour le conipte du gouvernement fran^ais, soixante
inille soldats irlandais, charges de venir successivement, par
tiers, remplacer en France les troupes nationales qu'on aurait
envoyecs dans les colonies. Presse de finir, j'ajouterai seule-
ment que M""' de Solari etend son recit jnsqu'a la mort de la
]irincesse Elisabeth , et reniplit ainsi tout ce que proinet le
titre de son livre qui ne ])ent manquer d'avoir du succes. Z.
2 1 5. — Souvenirs et melanges litteraires , politiqiies et bio-
graphiques ; par M.-L. de Rochefort. Paris, 1826; Bossange
pere, Bossange freres. 2 vol. in-S" de xiv , 46/1 et 5 , 448 et
5 pages; prix , 14 fr. et 17 fr. par la poste.
Tout se trouve melange dans ces d?ux volumes : anecdotes
politiqucs el lilteraires, epigrammes et madriganx , feuillelons
moraux , caiembouis, notices biographiques , etc.; et I'ou
doit bien s'altendre a rencontrer, dans cet assemblage confus
demateriaux( rudis indigestaque moles ), beaucoup de clioses
vieillies on insignifianles et peu dignes de paraitre au grand
jour.
L'au'eur recneillait ses souvenirs, de 1796 a i8r>5, tour ^
tour sous le dircctoire, sous le consnlat et sous I'empire. Aussi,
les peisonnages et les evenemens de la revolution sontils ex-
poses a ses jugemcns, on plulot a ses critiques, souvenl in-
justcs, pariiales, passionnees. M. de RocheCort, si toulefois
I'auteur n'a ]>as cache son veritable nom , appartient a cette
classe d'homities qui n'ont vu . dans noire grande commotion
polili(]ue, suite nccessaire de la inarcbe progeessi\e de la civi-
lisalion, quune rebellion sanglante. qu'une imitation terrible
et bnrlesque a la fois de la Ligue et de la Fronde. 11 nepargne
ni les declamations, ni les plaisanteries contre la liberie, I'ega-
SCIENCES MORALES. A91
liio, les philosophes et les sans-culoltes , conire les demagogues
decarrefoursetles Iribuuaiix revolutionnaires. Fermant lesyeux
Mjr les iinmensesbienfaiis ([ue la France doit au nouvel ordre de
clioses, il rie cesse de ciier la Concierii;erie, le Temjile, les Sep-
tenibi'iseurs, la Guillolineet laTerreur; il secroit bon Francais,
lorsque acciieiUant avec avidite toutes les calomnies qu'inventa
I'esprit de parii, il a pu ajouter un crime a la liste de ceux
que riiibtoirea lieja consacies. Et cependant, ces crimes appar-
tiennent a lous les terns; ils ont sigiiale toutes les lutles po-
piiiaires, dont ils sonl les inevitables resultats; et , sans re-
monler a des tems Ires-recules , nos annales nous f'ournissent
des forfatts aussi atroces, sons Louis XI, sons Charles IX et
sous les rois leurs sTiccesseurs.
Ce qui distingue la rcvoliilion francaise de la plupart des
revolutions ])aliliques, c'est le but de legeneration et d'anje-
Jioration vers leiiuei aspU-ail dans I'origine toule la nation : ce
sont les juincipes <]ue cette revolution a propages, les abus en-
jacines qu'elle a detruits , les institutions (ju'elle aelablies;
fnfin les vertus et les lalens qu'elle a reveilles chez des hora-
mes condamnes sans elle a Tinaclionel a i'obscurite. On pour-
rait, en elfet, ©iposer avccavantage mix compilations perfides
oil Ton se plait a enumerer des fautes, des erreurs et des
forfails , une galerie de belles actions, de devoumens heroi-
ques, dont le spectacle serait consolant ])our Fhiimanite, et
honorable pour la patrie.
Nous pourrions, en onposant a M. de Rochefort le revers
de la medaille qu'il nous prescnte , liii proiiver que les amis
de la liberie ne furent point tous des hoiiiiries de sang, et que
beaiicoup d'hommes sanguinaires et couveits ile crimes furent
de boiis et ardens royalistes. Nous lui piouverions aussi que,
dans Tun et I'autre parti, se manifestcrent des caracteres ele-
ves et de sublimes vertus. Cette demonstration I'engagerail sans
doute a retranther de son ouvrage certaines epigrammes, dont
rinteution seule est mechante, entre aiitres des vers atiribues
a Deliile el d'aulres d'un certain M. Dropecq, 011 le frere
d'armes, I'ami de AVasliington est compare a Cromwell et k
Marat I
Chose etrange! I'auleur f|ui a recueilli avecun soin scrupu-
leux les anecdotes souvent calomnieuses, les epigrammes du
moment, dirigees conire les liommes de la revolution, parait
n'avoir jamais entendu jiarler des reprciailles de la Vendee,
des socieles de Jesus et du Soleil ; il ne trouve aucune occasion
de signaler les crimes du parti aristocratique et de verser sur
lui les traits d'une vertueuse indignation , ou ceux d'unc mor-
/.ga LIVRES FRANCA-IS.
daiite satire. N'l.ublions pas, cependant, qu'il a eu la bonne
foi d'exlraire des ia[)ports de la ])olice pour les anneesi76'i,
1764, etc., un certain nombre d'histoires scandaleuses , qui
ne font guere honneur a I'ancien regime, niais qui, vu leur
dale, ne peuvent coinpronioitre en ricn la noblesse conlera-
poraine.
Si nous passons a la parlic litleraire de ccs souvenirs , nous
y trouverons encore bieii des traces do I'esprit de jiarli. Voici
un jugenient sur I'anleur de Tibi'ie et de YEpi'tre sur la calonf
nie , qui n'csl point de M. de Rocliefort, niais auqiiel il ne
rouglt pas de donner son assentiment. « Point de genie, peu
d'esprit, de la faclure, de la mi'nioi;e, un long exeicice. »
Suivent, dispersc^es dans le conrs des deux volumes, quelqnes
cenlaines de vers, dlctes a la mediocrite \iAT I'envie et par les
Laines ])olili(iues; mais la lionle et le ridicule , loin d'atteindre
jusqira Clienier, retombent lout cntiers sur les auteurs obscurs
de ccs diatribes riinccs. Delille , Parny , Lpgouve, Boufflers,
Desmotitiers, Tlieveneau, voire nicnie Lebrnn, auquel on re-
proche neanmoins des odes inj nines contre les rot's, sonttraites
avec moins de defaveur. Des jiioductions peu connues de ces
poetes, quelqnes details interessaiis sur leurs ])ersonnes, et iin
petit nombre d'anecdotes neuvcs, et qui paraisscnt averees,
formenl la parlie saine de ce recueil. Nous I'avons Ine avec in-
tcret et nous la recommandons avec le nicme plaisir tpie nous
aurions eu a louer tout I'ouvrage, si Ic choix de I'autenr avail
ele plus consciencieux et plus severe; s'il avait eu la prudence
de ne pas adopter avenglumcnt et de ne ]ioint reproduire de
tristes et odieuses caloninies; s'il n'avait pasafficlic des opinions
polili(iucs exagcrccs ct intolcrantes qui ne peuvent qu'cloigner
un grand nombre de lecteurs; s'il avait conseriti a laisser dans
I'oubli certains vers, donl lout le merile est d'etre nes au sein
de sa coterie; enfin , s!il avait pu se rcsoudre a parler moins
souvent de sa personne, et a I'aire un usage moins frequent
des dernieres bribes de son portefeuille. IN*.
a 1 6. — * Notice sur la vie de M. le due de Montmorency ;
par M. Vetillart, vice-president de la Societe royale d'agri-
culture du Mans, etc. Le Mans, i8'26; imprimerie de Mon-
noyer. In-8° de 19 pages.
Feu M. de Montmorency ctait proprieiaire du clialeau de
Bonnutable, depariement de la Sarilie; c'cst ce qui juslifie le
tribut d'eloges et de regrets qui lui a ele paye spccialement
dans cette contree. On jugera de I'esprit et peut-etrc aussi du
style de Torateur par la phrase suivante , qui fait allusion aux
elections : « l.e deparlement de la Sarll.e, grace aux Montmo-
SCIENCES MORALES. — LITTERATURE. /igS
reiicy, grace aux Breteuil , rcprit son rang debou departement
(p. 4). » Ces mots renferment une insinuation injurieuse pour
deux grands citoyens que le departement de la Sarllie a comp-
les pendant quelques annees , au nombre de ses deputes, et en
meme terns, une approbation assez formelle, des inanoeiivres
coupables et fletiies aujourd'iini par tous les partis, a l"aide
dest|uelles on n'a que trop reiissi a coini)rimer en France la
liberte des elections. De la naitraient facilement des reflexions
ameres que nous siipprimons, pour ne pas nous engager dans
une poiemiqneliorsdeslimites et des proportions del'opuscule,
qui aurait du n'etre rempli que de paroles d'union et de j)aix,
pour etre digne de celiii dont on a voulu lionorer la memoire.
X.
LiU'-raturc.
217. — * Atlas historique et chronologique des litteratures
anciennes et modernes , des sciences et des beaux - arts ,
d'aprcs la inethode et sur le plan de I'atlas de A. -A. Lesage,
(comte de Las-Cases ) , et propre a former le complement de
cet ouvrage , par A. Jarry de Mangy. Deuxicnie livraison.
Paris, 182S. J. Renouard. Un caliier grand in-foi. contenant
deux tablea!ix. Prix de chaque livraison de deux tableaux
pour les souscripteurs , 8 fr. L'ouvrage entier se composera
de 25 tableaux an plus.
Nous avons annonce deja la premiere livraison de cet titile
atlas, (]ui contenait le tableau historique ct clironologique de
I'Academie francaise et de rAcadumie des inscriptions el belles-
lettres. (Voy. Rei'. eric, t. xxix,p. S/jS). Nouslrouvons dans cette
livraison une rnappemonde des langues, ou tableau general
des langues anciennes el modernes, ct un tableau historique
et chronologique de la litteraturc romaine ou laiine. J.
218. — Essai sur les mojens de J'acUlter V elude du grec et
du latin, d'apres un |)roce(!e iiouveau; par le baron N. Fri-
RiON , lieutenant - general. Paris, 1826; Anselin et Pochard.
In-8" de ij et /jo pages; prix , 1 fr.
M. Frlrion avail I'lntenlion de se consacrer a I'educatiou de
ses enfans , el d'appliquer a lour instruction une methode donl
il croit devoir fjiirt' partau public. Son proccde n'a, selon nous,
rien de Ires-nouveau : t'est la mi'tliode de I'abbe Gauthier,
dont I'un des a^aniages , dans la traduction interlinoaire, con-
sisle a etablir une disposition des lignes telle C{ue les mots ranges
de gauche a droile, dans I'ordre de la phrase latine, i)uissent
de haul en bas ^tre Ins dans I'ordre analytique de la langue
francaise.
igl, LIVRES FRANCAIS.
M. Tririoii jnopose, en ouire, des cahiers d'analyse grani-
maticalc et de traduction. Ces divcrscs formaliles, ct cctic
tenue de caliicrs ne soni pas non [ilus uno rliose nouvelle,
mais nn nioyen de ctinstatcr Ics Ir,.vaiix de I'elove et iin gage
de ses ])rof;i-es. Usi resle , les diiruulti's que I'eiifant irouve
dans I'etude des niols isolcs, declim's ct eonibinrs, nous sem-
blrni toujonrs subsi.ter dans leur enlier et aitendre pour dis-
parnilte, d'lieiinuses innovations dans renseignenient eleinen-
taire. B. J.
219.- — * Dibliothequc lalinc-francaise , ou collection des
classiqucsla'ins, avec la triiduclion en regard. Troisieme livrai-
son : Les Icltres de Pline le jeune , ImdiiiU'S par de Sacy,
nouvelle ccUlion levuc el coirigce par Jules Pierrot. T. I'''^
in-8" de l^GG p.iges. Quatrieme livraison : Satires dc Juvenal,
tradniies jiar /. Dusaulx , nouvelle edition revue et corrigee
par Jules Piehrot. T. II, in-8° de 386 pages. Paris, 1826;
C.-L.-F. Panckoucke, editcnr , nre des Poitcvins, n° 1 4. Prix
de chatjue volume, 7 fr.
Nous avons apprrcie d(''ja le merite du j)reniier volume de
la Iradnction des satires de Juvenal [ voy, Rev. Enc. , t. xsx,
p. 199 \ Nous ne jjourrions qu'adiesser les jneir.es eloges a
M.Pierrot p')!ir ce second voltime, ou S'.- rcproduisent la nieme
erudition et le ineme talent. Les hiiinanistes doiycr.i egaleinent
bien accueillir la traduction de Pline le jeune , revue et corri-
gee ])ar le savant professenr, et sur laqiielie nous reviendrons
qiiand die aura paru tout cntierc. B — u.
220. — * OEuvres completes de Michel L'Hospital, chance-
lier de France, ornces de portraits el de vues dessines et gra-
ves par A. TARniKU, et preci'dees d'un. Essai sur sa 7He et ses
ouvrages , par P.-J.-S. Dufey, avocat. T. III. Paris, 1826
A. Boulland; F. Didot. In- 8° de 627 jiages; pri.x , 9 fr.
221. — * OEuvres incdites de Michel L'Hospital, chancelier
de France, ovuies At portraits et de vues dessines et graves
])ar A. Tardieu, s-uivies d'un Tableau de la legislation fran-
caise au seizieme siecle , et accompagiiees de notes historiques ,
par P. -/.-.S". Dufey, avocat. Paris, 1825-1826; A. Boulland;
F. Didot. 2 vol. in-8^*. de vii-/,o6, et 377 ; l^ix , 18 fr.
Celui de rjos col!aborateurs( M. Dupin aine), qui a deja
consacre qutltpies pages a Tesamfn des ceuvres de Tiiluslre
chancelier ( voy. /lei'. Enc, !. .\xv, p. 632), s'occupera inee.sam-
inent de I'analyse de ces derniers vohiuies , que recominandent
a la fois el rimportance des mnticres <jui s'y iroin ent traitees,
et les ^minerites f[n3!il(''s de leur auteur. J.
222. — ' Classique<: francais, ou Bibliollieqne po; lalive de
LITTER ATURE. 4y5
ramatciir, composee des chefs-d'oeuvre, en prose et en vers, de»
meiileiirs auieurs , cent volumes in -"^2. — GEui'res pnsthurnes
rfeDucis, forinant la 27^ livmison (1). Paris, 1826 ; L. Debure,
libraiie-edilenr J I'ue de Bussy, n° 3o. 2 .vol., ensemble de
cxxxii-5i9 pages; ))iix , 5 fr. ei 5 fr. 60 c.
Ces OEiivres posthumes de Ducis se coinj)osent de deux tra-
gedies, Amelisc et Fcedor et ff^ladimir , la premiere et la
dernierc qu'iiait donnees au ibealie, de (\nQ\(iues poesies , de
Jrrigmcns , de son Discours de reception a I'Acndeinie fian-
caise , el de qualre-viiigt-tieize lettres exlraites de sa corres-
pondance. Los deux iragcdies ne peuvetit rien ajouter a la re-
putation de Taiileur d'//ir//«/e/,- elles aiinoncent I'aurore et la
decadence d'un des plus beaux talens qui aient honore notre
scene nioderne, et le raoiiidre diifaul de la derniere est de pre-
senter , dans un siijet russe, des iioms qui jiour la pluparl n'ont
jamais apparlenu a ia Riissle. Kn revanche, les poesies, a bicn
pevi d'exct'ptlons pies, sont dignes de leur anteur,qui brilia
davantage pai' la fraiicliise et l'ti[ierj;ie de son style ([ue par sa
purete. Nous avon-. surtout remarque V Epitre h Thomas , de
I'Acadeinie francaise, avec lequel Ducis fut lie d'line ainitie
qui les honora tons deux, et qu'il est trop rare de voir exisler
entre des hoinmes de lettres. On sail que Ducis occupa le
fauteuil de Voltaire a rAcadeiiiie. On a pretendu pendant
long-teras que son discours de reception etail I'ouvrage d'une
amilie discrete elzelee; la inaniiie do Thomas, qui se fait sentir
dans plusieurs parties de ce discours, et la defiatice generale
ou Ton etail a I'egard dii talent de Ducis pour la prose, purent
bien faire naitre dos doute*; mais ils doivent se dissiper au-
jourd'hui. Ou a retrouve le maiuiscrii origizial de ce dis-
cours (2), ccrit en enticr de !a main de son auleur, avec les
notes de Thomas, que Ducis avail consulte. « Les notes de Tho-
mas, dit M. Campenon , sont d'uue excessive brievele. On lit
en marge, a huit ou dix reprises, ces mots ecrils de sa main:
(i) Nous avons rommls une erreur dans I'ordre des liTralsons, en
annoncant, il y a trois mois ( voy. cahier d'avril 1826, t. xxx , p. 201),
qnelqnes nouveanx volumes de celte jolie collection. Les fi volumes
de la Nuiivelle Helohe eu forment les 24° et 25° livraisons; les OEnvres
de Grksset et les deux poemes de la Religion et de la Grace, par Louis
Kacine, la 26"^. Nous annoncons aujourd'hut la 27*; les 28* et 296 li-
vraisons, qui oat paru et que nous examinerons ince.ssamraent, se com-
posent des (Xuvres de Gilbert et de Saint-Lambert, des Conies rf'Hi-
MiLTON et des Memoires du chevalier de Graminont , par le meme.
(2) Ce raanuscrit appartient a M. Georges Ducis, son neveu.
496 LIVRES FRANCAIS.
supprimer, abreger. Le pocle, docile a ce conseil, a pas*«i un
trail dc plume sur tous les niorceaux dont son ami lui avail de-
mande le retranchemertt, et, par nne deference, poussec Imp
loin, poul-etre, il a presque toujours retranclic ce qu'on lui
consi'illait seuleincnt d'abrcger. » Les suppressions faites dans
ce di.icours, dont I'excessive longueur eiait le defaut capi-
tal, out porte quelquefois du reste sur des passages regrelta-
bles; telles sotit suriout les observations aussi justes qu'inge-
nieuses sur lei causes ([ui ont euipeclie Voltaire dc reussir au
thealre, comme poete comicpie. » Elles proavent avec quelle
justesse de vue, le poete avail su observer et di'-meler les
nuances, trop souvent mcconnues, qui distinguent les differens
genres de gaitd- : celle qui fait sourire noire malignlte dans la
satire ou repij^ramme; celle qui, dans la socicte, amuse notre
esprit ou salisfait noire gout; celle enfin qui , sur la scene, par
une lieureuse opposition d'inierels, de caracleres ou de si-
tuations, excite en nous ce rire nalurel et franc, dont il est
impossible de se dtifendreaux comedies de Moliere. »
Apres ce fragment , qui est un excellent morceau de critique
littcraire et que tous nos jeunes jjofetes comiques devraient
appiendre par coeur , ce que nousavons trouve de plus lemar-
quable dans ces deux volumes des oeuvres postliumesde Ducis,
ce sont ses lellres, que nous devons aux soins de M. Campe-
non, auteurd'unewof/ceun peu longue, mais ires-interessante
sur ce poete ottogcnaiie qui fut son ami , et dans laquelle il a
peul-elre eu la faiblesse de se montrer un peu trop. Ces leltres
seules pouveraient que la prose n'etail pas elrangere au talent
de Ducis; elies nous semblent meme, en general, ecrites avec
j)lus de correction que ses vers. Mais, ce qui les rend le plus
dignes d'attention, c'esl le caraclerc de noblesse, d'indepen-
dance et en meme terns de bonhomie qu'clles signalent dans
leur auteur; c'est son amour et son devoument pour sa mere,
])our sa famille et pour ses amis; c'est son altaehement si pur
et si fidele a la cause des princes qui I'avaient honore de leurs
bonles, et qui le porta consiaminenta refuser toutesles faveurs
(|ue lui offrirenl tour a lour la republiqne et I'cmpirc. 11 faut
lire (p. i65) sa leltre a M. Pare, rninislre de Tinterieur sous
la Convention , lequel venalt de lui annoncer sa nomination i
la place de conservaleur de la Bibliotlieqiie nationale, celle oil
il rercercie M.Lacepede, grand chancelier de la Legion-d hon-
neur, qui luiannoncaii sa nomination comme membre de cette
legion ( p. 201 ), celle qu'il adressait a M. Odogarthy de la
Tour (p. a6i ) pour refuser I'honneur qu'on voulait lui faire,
en lepoitant en tete de la lisle des concurrens aux prix decen-
LITT^RATURE. 497
naux; enfin, dans la notice ( p. lvih), le rmt de deux con-
versations qu'il eut a Malmaison avec le premier consul, c|ui
vouliit plus tard le porter au Senat, pour avoir la mesure de
toute la dignite que peuvent donner les ietlres. C'est ainsi que
le vrai talent echappe aux obsessions du pouvoir, qui est ob-
sede a son tour par I'intrigue et la rnediocrite, dont il finit
presque toujours par s'entourer. Une letlre ecrlte ])ar Duels ,
a son ami Vallier , au plus fort de la terreur revolutionuaire,
prouve de quelle energie son ame elait douee, et Ton tesse,
en comparant sa vie et ses ouvrages, de s'etonner de celte
alliance dc Shakespeare avec La Fontaine, qu'il reunit tous
deux dans son cuite. II s'appropria le genie du premier et eut
toute la philosophic du second. II fut heureux dans la pau-
vrete, a laquelle iln'echappa qu'au retour du Roi, et put dire
avec raison : ( 1. 11 , p. 56. )
Cest un Tceu; j'y serai fidele.
Oui, tant que Dien me souliendra,
Jamais For ne me seduira.
Donx serment, je te renouvelle !
J«; plaindrai blen qui me plaindra.
2a3. — OEuvres completes de G. Lecoxjvk. T. I*"". Paris,
1826; L. Janet, i vol. in-8° de vix-475 pages, imprime par
.1. Didot et orne de 1 gravures; prix , 8 Ir. II y aura un 2° vo-
lume pour les oeuvres connues de I'auteur, et un 3° pour ses
OEuvres posthumes ; ce dernier, pris scparement, se vendra
J fr. , avec le portrait de Legouve.
Un norabre considerable d'exemplaires du Merite des femmes
et de plusieurs autres poemes charmans de Legouve; tels que
les Soui'enirs, la Sepulture , la Melancolie , repartis en France ,
dans les formats in-12, in-i8 et in-Sa, n'ont pu satisfaire la
curiosite pnblique, excitee par le charrae que I'auteur a repandu
sur toutes ses productions. Dans un moment oii les classiques
semblent occupesa inventorier nos richesses lilleraires, comme
si nous avions a craindre une invasion de la part de nouveaux
Barbares, ce poete aime des femmes merite de prendre une
place distinguee dans nos bibliotheques, en paraissant avec tous
ses litres a notre eslime. Un ami de Legouve, M. Bouilly,
s'est charge de les rassembler et de nous les offrir en trois vo-
lumes in-8°, decores de tous les accessoires qui font rarement
passer un mauvais ouvrage, mais que I'on airae a rencontrer
dans I'edition soignee d'un bon auteur.
Celle que nous annoncons s'ouvre par le theatre de Lcgouv^;
T. XXXI. — Aodt i8-i6. 32
iiij6 LITRES FRANCAIS.
ce llieatre, compose de cinq tragedies qui ont ^te representees
avec pins ou iiioins de sutccs, n'avait pas encore ele reuiii en
corjjs d'oiivrage. II comj)rcnd la Mart d'Abel, Lpickaris et
Neron , Quinliis Fabiiis , Etc'ocle et la Mart de Henri IV ; une
Preface de I'anieiir a la premiere de ces pieces , une A])ostr6plie
en vers a la Liberte, qui precede la seconde, une Drdicace de
la troisieine a M. Ducis, ini AverlisseniciU jionr la qualricme
et iin Avant-propos pour la cinquieme , qui est suivic d'obser-
valions lastoriques sur la inert de Henii IV, conipletent ce
volume.
La nouveaute du stijet que I'autcur a essaye de trailer dans
la jiremiere deces])ieces, et qui est expose dans sou epigraphe :
primi parenles, prirnn mors , primus luctus , Textreme simpli-
cite du plan qu'il a suivi et I't^leganle purete de sa diction ont
soulenu cet ouvrage au theatre, et le font apprecier encore
mieux a la lecture. Le Neron de Legonve parvenu au dernier
degre de scek'ratesse, et se frappaiit d'une main tremblante
pour eviter I'affiont de se voir trainer vivant aux gemonies,
etait moins draniatique peut-efre que le Neron nnissant de Ra-
, cine . partage enire le crime et la verlu. Toutefois , cette nou-
velle trageilie est venue ajouler a la gloire de son nuteur , mais
nous adoplons I'avis de quehiues criliques jiidicieux, qui au-
raient desire voir Seneque jouer un role dans cet ouvrage a la
place <lu poete Lucain, que I'auteur a peinl avec verite, mais
dont le personnage doit paraitre un ])eu froid dans une trage-
die. Si les deux pieces de Quintus Fahius et ^Eteocle n'ont pas
eu le ineme succcs que les precc^dentes, il faut surtoiit s'cn
prendre aux sujels, qui ciaient I'un et Tautre trop eloignes de
nos moeurs : cette austerile de la discipline dans les arniees
romaines doit nous paraitre trop exagcree, a nous qui la faisons
reposcr sur Tordre et la raison , sans y meler de vaines su-
perstitions, lelles (jue le respect pour les aruspices; et les mal-
heurs d OEdipe et de sa famille etaient trop uses au tlicaire,
pour que Legouve put se flalier de nous inleiesser a une action
plus terrible que drairaliqne, enlreprise nu Ra-'ine avait
cchoue lui-.menie. Quant a la Mort de Henri IF , on sail que
Legouve a ele blame d'avoir iinjilique troj) legerement dans
I'assassinat commis par Ravaillac sur la personne de ce roi, le
due d Epernon, la courd'Espagne et la reine nieme Marie de
Mcdicis. ('eite opinion peut cei)endant eire souteuue jusqu'a
un eerl;iin point, el I'auleur d'un poeme inoderne sur la mort
de Henri IV , M. Paillet de Plouibieres ( voy. Rev. Enc. , t. xxir ,
p. 199I, la partage. Ce n'est done pas la le plus grand repro-
clie que nous ferons a Legouve; on n'exige pas d'un pocle la
LITTERATURE. 499
vdrite et I'imparlialite d'uu historien , et nous ne penserlons
pas a disputer avec I'auteur sur le plus ou le moins de part que
ses personnages ont pu prendre a I'attentat qui priva la France
d'un aussi bon roi, si Taction et ses developpemens etaient plus
dramatiques. La jalousie de la reine n'est pas assez raolivee
pour la porter a consentir au crime que fait froidement execu-
ter d'Epernon, et ce dernier n'est qn'un intrigant vulgaire,
qui ne saurait exciter cet inleret dont on ne peut se defendre
pour un Brutus. D'Epernon se cache, et paie des assassins. C6
n'est d'ailleurs ni pour la religion, ni pour la liberte qu'il
conspire; ce n'est que pour devenir le favori d'une regente :
Brutus immole a sa patrie les affections les plus cheres; et ,
loin de se cacher au moment de I'esecution , c'est lui qui porta
les premiers coups a celui qu'il regarde comme le tyran deson
pays. Cette difference de position, plus encore que la diffe-
rence de talens, explique le sort conlraire des deux tragedies
de Voltaire et de Legouve. Ajoutons que la bonhomie et la
gaite du caractere de Henri IV, trop connues et trop gravees
dans noire souvenir pour etrealterees sur la scene, elaient un
obstacle de plus au succes de I'ouviage de ce dernier, et con-
cliions en reconimandant a nos jeunes auteurs le choix deleurs
sujets, dont dependent plus souvent qu'on ne croit le bon-
heur et la reputation d'un auteur. Legouve lui-meme en offre
un exen)[)le dans son ])oerae du Merite desfernines, sur lequel
est principalement basee sa gloire lilteraire et que nous retrou-
verons avec plaisir dans le prochain volume que nous aurons
a examiner. E. Hereau.
224- — * OEuvres completes de M. le vicomte de Chateau-
briand, Pair de France, merabre de 1' Academic francaise;
ornees dun portrait d'apres Girodet, premiere et deuxieme
livraisons. Paris, 1826; Ladvocat. 4 volumes in-8°, imprimes
sur carre fin des Vogcs; prix, 7 fr. 5o c. le volume et 9 fr.
par la poste. L'ouvrage aura de 25 a 27 volumes.
La premiere livraison se compose des tomes VIII et XVI; ce
dernier contient un avertissement de I'auteur sur Vcdition des
oeuvres completes ; une preface generate ; une preface d'Jtala
et de Rene (edition in-12 de i8o5), ces deux outrages suivis
des y4 ventures du dernier /Ibencerage, des notes et des critiques
sur Atala. — Le lome VIII est le P'" volume de Vllineraire de
Paris a Jerusalem. — Les tomes XI et XXI forment la deuxieme
livraison; I'un est le I*' volume du Genie du Christianisme ;
I'autre comprend , sous le litre de melanges litteraires, des
articles insercs dans divers journaux par I'auteur sur les
ouvrages suivans : de V Angleterre et des anglais ; Essai sur la
5oo LIVRKS FRANCAIS.
lit lerciture /inf;laise :Yo\ir\^; Shakespeare; Bcatlic; Voyages Ae
Mackenzie; la Lrgislntion Primitn'c ; Ic Priutcms d un proscrit ;
V Histoire dc la vie tie Jrsiis-Christ ; les OEuvrcs de Roll in ; Ics
Essai.i de morale es de politique ; les Meriioires de Louis XI f;
des Letlres et des gens de Lettres ; le Voyage en Espagne de
M. DeLaborde; les Annnles litteraires de M. Dussawlt ; la Vie
de Malesherbcs , ])ar M. Bois^y-d'Anglas; Panorama de Jeru-
salem; le Voyage au Levant, par M. de i'orbin; quelques ou-
trages historiques el litteraires , quelques romans ; un Voyage
(le M.de Hnniboldt; Histoire des dues deBourgogne ; Histoire
des Croisades, par M. Micliiiud.
Bien que la plu])art des ouvrnf^es de M. de Clialeaiibriand
aieiil deja etc appiecics par la critique, et (lue ropinion pnbli-
<|ue soit generalement fixce sur le talent de cet ecrivain, iiean-
inoins, le rang elevc qii'il occupe dans la litlerature et dans la
polilique nous a paru cxiger un examon approfondi et impar-
tial de ses oeuvres dont la Revue Encyclopedique n'avait pas
encore cu I'occasion de rendre coiupte. En consequence, a
mesure que les livraisons en seront publiees, elles fourniront,
pour notre section des analyses, le snjet d'une serie d'articles
il^tailk'S, dans lesquels, apres avoir apprccie le merite litle-
raire de M.de Chateaubriand, nous examinerons I'influence
(ju'il a exercee. ©
225. — * L' Espagne pottique; choix de poesies castillanes
tlepuis Charles-Quint jusqu'a nos jours , mises en vers francais ,
avec une dissertation couiparee snr la langue et la versification
fspagnoles; une introduction en vers et des articles biogra-
))hiques , historiques et litteraires, par Don Juan Maria
IMaury, ouvrage orne de plusieurs portraits. Tome P"'. Paris,
ICS26; Mongie aine. In-8" de viii et 4/1O pages; prix, 7 fr. 5o c.
Grace au litterateur etranger, verse dans les langues fran-
caise et espagnoie et dans la poesie des deux nations ,
auquel nous devons I'ouvrage que nous aniioncons, les
muses castillanes seront desormais appreciees en deca des
Fvreni'es. II anivera , pour la poesie, ce qui est arrive au
siijet de I'ecole de peinlure espagnoie. Pen de personnes sa-
vaicnt, it y a un derni-siecle , qu'il y eut des tableaux admi-
rables t'aits par des peintres esjjagnols. INIurillo, Alonzo Cano,
Ribera, et tant d'autres, n'ont commence que depuis peu a
fixer chez nous I'aiteniion des amateurs. lis semblait que les
beaux arts ne juissent avoir cte cullives avec fruit dans un pays
oil I'elranger effraye ne voyait (jue I'liorrible inquisition;
mais on decouvre, chaque jour, que, malgrc I'institiilion bar-
bare qui a travail !o j>endant des siecles a ctouffer les facultes
LITTERATURE. 5oi
iiilellecluelles des Espagnols , le genie ardent ct vigoiireiix
de ce peuple a produit , dans les lettres comrae dans les arls,
des beautes de Tordre le plus eieve.
M. Maury a pensc que la lilteratuie francaise gagnerait
autant que la lltterature espagnole a la traduction des poeics
castillans en francaisj il en est de la lilterature, coratne dii
commerce : tous deux vivent d'echanges. On rend a la fois
service a la nation cliez laquelle on naturalise les ccri-
vains clrangers, et aux ecrivains que Ton fait parlor dans une
autre langue que la leur. Toutefois, on pourra s'etonner de
I'aiidaced'untraducleur qui fait parlerdespoetes dans une langiie
qui n'est pas la slenne. Sans doule, M. Maury eut cnlrepris une
lache plus facile, s'il eut traduit en prose : mais il a cfu vrai-
si-mblablement , comme I'auteur de cet article, que la pocsic
ptut seule rcndre la poesic. 11 a meme aspire a iniiler les
I liyilimes des poetes qu'il a traduits. Un talent analogue a sun
enireprise en a souvent justifie la liardiesse. M. Maury dedie
.son travail a deux poetes espagnols, amis de sa jeunesse: Don
Manuel Quintana et Don Juan B. Arriaza , rivaux a p!u.i
d'un litre, trop souvent, aujourd'hui encore, places par la
politique dans les positions les plus opposees : leur rival et It ui-
ancien ami a lire de toutes ces circonstances des tableaux d'un
artifice heurcux , qui donnent une sorte d'intcrt't public aux
rai>ports privt's de I'ecrivain.
Chacun des poetes castillans adrais dans la collection de
M. Maury, est d'abord I'objet d'une notice biographique et
litleraire. Ces articles sont ecrits avec beaucoup de charme et
1 cniplis de details curieux. 'L'Espagne poetique commence avec
le seizieme siecle: elle est partagee en deux divisions; la pre-
miere, qui romonte en deca de I'annee 1600, est occupee par
Garciiaso , Ste.-Tlierese, le P. Louis de Leon, Herrera, Or-
vantes et Gongora. La seconde division, embiassant les deux
tiers du dix-seplieme siecle , renferme Lope de Vega , les deux
Argensola, Quevedo, Rioja el Villegas. L'inlroduction , con-
sacree aux terns anterieurs, traite du poenie dont !e Cid eil le
heros, des j)oetesHispano-Arabes, deBerceo, de Loi'enzo , du
roi AlphonseX , de Tarchipretre d'Hita, de Jean de Mcna , de
Villena et de Santiilane, de Manrique, enlin , de Boscan et de
Mendoze.
Les bornes de cet article ne nous pennetlent pas d'offrir des
passages des traductions de M. Maury; nous renvoyons le
lecteui' a I'ouvrage; et , malgre quelques laches et quelques
negligences, il sera surpris agrenblement de la facilite avec la-
quelle la poesie fran^aise vienl so pietera des imitations de la.
poesic castil'ane.
5oa UVRES FRANCAIS.
Nousdevons faire une mention spcciale de Vavant-propos ,
dissertation spirituelle et savanle sur les langucs vulgaires ,
d^rivees de la langue latine, et sur les versifications modernes. 11
serait a desirer que I'auteur voulut developper dans un ouvrage
special les idees, dont il a seulenient depose le germe dans
cclui-ci, sur la versification des anciens.
Muriel.
226. — - Le Siege de Paris , tragcdie en cinq actes, par M. le
vicomte d'Arlincourt; representee potiria premiere foissur
le Theatre-Francais, le 8 avril 1826. Paris, i826;Leroux ct
Constant-Chantpie, editeurs; Betliet aine, au Palais - Royal.
In-8° de xiv et 1 1 5 pages ; prix , 4 fr.
Nous avons dit notre pensee sur cet ouvrage, alV'-poque de
la representation [Yoy. Rev. Enc, t. xxx, p. 268). On y a
joint, en rimpriniant, un Avant-propos de I'editeur , ou Ton
dit : « Aucune tragedie ne fut attaquee a une premiere repre-
sentation avee plus de rage et de deinence que le Siege de Pa-
ris ; et pourtant, aucune tragedie ne fut plus applaudie aux
representations suivantes. « Et un peu plus bas : « Toutes les
feuilles publiques, h I'exception de trois ou quatre, se sont
dechainees avcc fureur contre le Siege de Paris ; on s'est in-
digne, dans le monde , depuis le brillant succes de la piece, de
leurs inconcevables articles. « Cede rage, cette indignation ,
ce brillant succes sont autant de choses dont nous ne nous
sommes point apercus ; la piece est morte paisiblement , apres
neuf ou dix representations; c'est ce qu'il y a de ])lus posilif
dans son histoiie.L'editeur est probablemeut un amiiutime dti
poete ; un entbouslasme un peu plus calme eut luieux servi les
inspirations de son zele; le public scdefie d'uneamitie si pas-
«ionnce ;
Miens vandrait un sage ennfmi. M. A.
227. — Poesies de M. le corate Anatole de Montesqdiou.
Deuxieme edition, augment^e d'un quatrieme livre. Paris,
1826 ; Ladvocat. In-i 2 de 2 60 pages ; prix, 3 fr. 5o c.
Autrefois, quelquespetitsvcrs, un madrigal, un impromptu,
un bouquet ;i Chloris, suffisaient pour faire la reputation d'un
poete. Que les terns sont changes! Aujourd'hui, le public, tout
entier aux combinaisons fiiiancieres, aux grands debals de la
politique , jctte un coup-d'oc;il dedaigneux sur les produc-
tions litteraires : les elegies, les odes , les iragedies , les come-
dies meme en cinq actes et en vers , jusqu'a dcs poemes epiques,
tout passe inapercu.
M. de Montesquiou se presente avcc un volume compose
d'epitres , de contes et de fables. Co bngage est un peu legcr
LITTliRATURE. So-^
aux ycux d'un siecle serieux comme le noire ; inais ne paraitra
pas^sans interet, si Ton se souvient ijue deux on Irois idylles
ont acquis a M""- Deslioulieres des litres a riminortalite , et
que, pour avoir raconte les fails et Ics gestes de Ronge-inaille,
deRominagrobis , de Jcannot lapin, celui qu'pn appelait le
Bonkomrhe , futaussi surnomme Y Inimitable.
La muse de M. de Montesquiou est une muse agreable et
sans pretention. En general , ses poesies respiront une morale
douce, et annoncent un esprit d'lin commerce aimable. La
simplicilc, I'elegance et une grande facilite sont les qualiles
dislinclivcs du style de I'auteur. Jc dirai seulement, pourfaire
la part de la criiique, qu'on est fache quelqnefois de voir celle
facilite serapprocher un peu de la negligence. — La piece du
Petit Savoyard vair'ixc d'etre remarquee j^armi les conies; et
parmi les fables, eeile qui est inlitulee : les Poissons. Je cede
au plaisir de la citer en entier :
Sar le sein azure d'une eaa calme et profomle ,
Je vols avec chagrin le liege du pechear
Quelques instans fremii- et se plonger dans I'onde :
C'est un indice de malheiir!
t'liyez, petils poissons!... ce piege seducleur
A I'art cruel de vous atteindre.
Mais, qaand vous v^us laisscz cbarraei',
Quand vous ne poiivez vous coulraiudre,
Helas ! j'ai le droit de vons plaindre ,
Et non celui de vons blanier.
Les succes de la troniperie
Souf frequeos aussi parini nous;
Et rentrainemeni est s! doux,
Qu'avec un peu de ihiilerio
On me pteadrait lout ccmme \ uus.
L'auteur nous aiinonce qu'il a entrepris el doja fort avancu
la traduction en veri de tonics les poesies ilaliennes de Pe-
trarque. A en jiigcr par les trols sonnets qu'il a in eres dans
le volume que j'ai sons les yeux , il me senible que M. de Mon-
tesquiou ferait bien de se rapproclicr davantagedu lexleita-
lien. C'esl un conseil que je hasarde, tout en rcconnaissant
combicn il est difficile de faire passer dans noire langue les
beautes de Potrarque. Louis Crivklli.
228. — Voyage dans les Hautes-Pyrcnees , par le comte de
Marcellus, pair de France, dedie a S. A. R. Mg"" le Due de
Bordeaux. Paris, 1826; Firmin Didof. In - 18 de 180 pages;
prix , 3 fr. 5o c.
M. de Marcellus nous prcvient qu'on ebercherait en vain
5o4 LIVRES FRA-INCAIS.
dunsce Voyage de nouveaux details de geograpLie et d'his-
toire , de nouvelles observations de geologic , de rain^ralogie,
ou de botanique. Son but a ete uniquement de rctracer les
impressions dont le spectacle des racrveilles de la nature a
frappe son kme. M. de Marcellus est plein de la lecture des
anciens. Sa prose est elegante et parfois pittoresque; ses vers
ne manquent ni de doucenr, ni d'harmonie. Mais toujours des
niontagnes, des \allees, des torrens, des cascades, et puis des
cascades, des torrens, des vallees et des niontagnes ! II faii-
drait un talent bien plus robuste et plus original que le sien
pour nous faire supporter la monotonie de ces eternelles
descriptions. Chose singuliere! le plus chretien de nos oraleurs
est Ifi plus payen de nos poetes. Ce sont toujours chez lui les
Nymphcs, les Naiades, Flore, Pomone, Ceres, voire iiieme
Cupidoi). Voila d'etranges personnagcs a meltre a cote de la
Fierge-mereetde YHominr-Diru.l,3i mytliologie est sans doute
la plus poetique de toutes les croyances; inais elle est usee, el!e
est morte, et la poesie ne peut se nourrir (|ue de croyances
vivantes. Des qu'on voit apparaitre aujonrd'hni dans des vers
quelques-unes de ces divinites de la fable, on sent que Ic poete
a puise ses inspirations dans le souvenir de ses classes, plus
que dans ses propres impressions, et un froid glacial saisit le
lecteur. Cn.
2 ay. — Le Budget d'ltn sous- lieutenant en re/brrne, par ^.
Roy, officier reforme. Dieppe, 1826; Marais fils. In-S" de
22 p.; prix , I fr. 5o c.
On remarque, dans cclle legere jiroduction, ut;c poesie
facile et correcte, qnelques plaisanteries de bon goiit,et d'ho-
norables sentimens exprimes avec verve.
Trois cent clnqiiante francs sont tonte ma fortune.
— Quoi! point d'autre resscnrce ?— He! nion dieu ! non; aacuiw.
J'ai voula in employer, niais j'ai peida mes p.Ts;
Toujours en tenis de paix on n'a tjne trop de Lras;
Et du sollicileur quand je n'ai pas Faudace,
Comment puis-je esperer d'obtenir une place.'
Apres avoir fait an public ce premier aven, I'anteur dclibere
sur les ressources qui peiivent lui resler pour vivre , outre cette
inodique solde de reforme. Se fcra-l-il labonreur ?
Pour mon mailre et pour mol ce serait un tourment ,
Je ne distingae pas le seigle du fronicnt.
Le souvenir de Cincinnatus senible un instant le ranimer; H
fait grand cas d'un exemple aussi beau. '
LITTltRATURE. 5o5
Oul, mais Cincmnatus etait proprietaire ;
C'elait a sou profit qa'il labourait la terre ;
Tandis que je n'ai pas, et voila mon chagrin,
Sai' la face da globe un pouce de terrain.
Croyez-vons pour cela qne je doive me pendre?
Non. « Son ame a pour soutien I'Auteur de la naliiro; » il se
resigne,cn attendant de melUeurs jours, a son existence pre-
sente, qu'il nous peint, dans un tableau piquant, comme le
parfait niodele d'une vie sevcreinent ecoriomique , et cependant
agreable. II ajoute a celte description pleine de variete une
pensee gt3nereuse, ou respire I'ame d'un soldat palriote :
J'ai Lien qnelqoes regrets, lorsque parfbis je pense
A des terns plus heureux , a mon ancienue aisanct;
Puisque j'ai fait la faule , il me faut I'expier ;
Oublions qu'autrefois je me vis officicr;
Mais je n'en perdrai pas assez bien la memoire
Pour etre jamais sonrd a la voix de la gloire ;
Si la France le veut, elle u'a qu'a parler,
Le reste de mon sang est tout pret a conler.
B— u.
23o. — Satire Menippee. — Paris, 1826; Touquet. In- Sa
de 128 pages ; prix , 60 c.
Lorsqu'au dire de Lucicn ( Dialogue des Marts, Diogene et
Pollux), le philosophe Menippe riail si fort, dans Athcnesou
a Corintlie, des vaines arguties dc sopbistes qui disputaient
serieusement sur des rlens, il ne se doutait pas qu'un jour ,
chezlesGrecs etchez nous, sonnom deviendrait celui deces sa-
tires vigoureuses ou la verlu et la justice se vengent par le ri-
dicule des vaines pretentions et de I'orgtieil du crime trioni-
phant. Tel devait etre , tel a ele le sort de la satire Menippee :
des pensces hardies, voilecs sons un stvle toujours plaisant, des
ironies mordantes ; des uaivetes plus sanglantes encore, voila
ce qui en a fait le raerite et la reputation : elle a leve ce voile de
respect et de superstition qui couvrait I'ambiiion des chefs de
la Ligue; elle a livre au ridicule, elle a convert dc honte et de
mepris ceux qui se metlaicnt a la solde de I'Espagnol , et ven-
daient leur pays a I'etranger : par la , elle a peul - etre , aiiisi
qu'on i'a dit plusieurs fois, ete aussi utile a Henri IV' , que les
combats les plus sanglans.
On a reuni, sous le norn de satire Menippee, en deux ou
trois volumes in 8° plusieurs des pamphlets que les j oyalistes
firenl paraitre a cette epoque. Les editeurs actuels n'ont pris
que ce qu'il y avait de plus interessant , savoir I'excellente
5o6 LIVRES IRANCAIS.
critique dc la vertu du Catholicon , el I'liisloire de la lenue iles
tHais dc la Ligne ou Ton romarque les di.^cours de M. le lirii-
lenaiit ( Ic ducde Mayenne), du cardinal de Prilleve, de M. De
Lyon, de M. le recteur Rose, du sieur Uieiife de Pierrefond,
pour la noblesse francaise, et de M. d'Aubray, pour le liers-
ctat. Get orateur est le seul ([ui s'altacbe dans son discours a la
JMstice et an blcn penoral, tandis que tons les aiitres ne se sont
occupcs que de leurs priviici^es ou de leurs inleiets personnels :
Texpression dn droit et <lu patriotisme se trouvait naturelle-
ment dans lA bouclie d'nn reprcsentant du jieuple.
La satire Menippee forme I'nn des premiers volumes d'une
bibliothenue populaire qui dolt etrepubilee dans !c meine for-
mat, et a ties-bas prix : nous csoyons que cetleentrcpiise pent
devenir fortavantagense. Nous souhaltonssurtout que les edi-
teursnese bornentpasa I'imiiression d'ouvrages nouveaux on
;i celle de la satire Menippee : mais qu'i's remettent en luiniere
qnelques ouvrages dignes d'etre connus, comme ies Lttlres
d hommes ohscurs , le Cymbalum mundi , les A\'cnUires du ba-
ron de Fceneste , etc. La raison a toujours trouvc en France
d'eloquens inlerpretps, lorsqu'elle les a choisis dans ce tiers-
ctat que les deux ordres privilcgies affectaient de mepriser , et
surtout lorsquelesevcnemens ou la position des auteurs leuront
laisse une liberie sans laquclle on ne peut rienfairede bon. B. J.
2^1. — * Sainte - Ferine. Souvenirs contemporains , par
M. Valery. Paris, i8a6, Ponlhieu. In- 12 de aSo pages;
prix, 4 fr.
L'auteur de celte Nouvelle s'est fait connattre fort avanta-
geusement, en 1823, par *de3 ZiV:/^/^? morales, politiques et
litteraires, dont nons avons rendu nn compte assez 6lendu.
(Voy. Re^: Eur. tome \xiii, pages 100-109.) Le merite d'une
obset valion delicate et juste , d'une expression elegante et inge-
nieuse, qui nous avait paru marqner celte premiere produc-
tion , se retrouve ici , sous les formes moins graves d'une
fiction romanesque. Une fable d'une simp'.icite touclianle y
sert de cadre au tableau de la sociele francaise, et meme des
socieies t-trangeres, pendant la seconde moitio du dernier
siecle et le commencement du noire. C'est une cpoijue feconde
pour le moraliste , et M. Valery en a rassemblc, avec beauconp
d'art et de gout, les principaux caracteres. On liii a reproche
d'avoir donne a certaines remarques une gencialiie qui leur ote
queique chose de leur juslessc. Peut-etre, en effet, est - il per-
mis de iror.ver Irop absolns et trop severes quelqnes-uns des
jugemens qu'ii porte sur les travers de nos voisins. Et toutefois,
il est facile de s'apercevoir qu'il a cherch^ a les adoucir par
LITTERATURE— BEAUX-ARTS. S07
des restrictions , a emousser en quelqne sorte le trait salirique,
avant de le lalsser parlir; la juslice, rimparlialile sont des
qualites qu'on ne saurait liii refuser. II est du petit nombre de
ces csprits , amoureux du vrai ci de I'honnete , qui les clierchent
et les decou-vrent sous leurs formes diverses , sans se laisser
preocuper de tons les prejugcs de sectes et de partis. Au«si , ses
affections personnelles , qu'il ne deguise point, ruisent bien
rareraenta la verite de sps apercus. 11 inele avec discernement
I'eloge etle blame, anssi eloigne de la fadeur du panegyrique
que de ramertume de I'epigrarame. Celte moderation de vues et
de pensees est habilement rclevee par le mouvement rapide , la
vivacile piquanle du style. M. Valery connait I'art de dire beau-
coup en peu de mots , et de laisser entendre a son Iccteur plus
encore qu'il ne lui dit. Les mots, chose rare de notre tems ,
sont employes par lui dans leur veritable acceplion et selon les
regies de I'analogie ; le tour est hardi et anime , sans etre
barbare; les images et les comparaisons ont de la nouveaute
sans bizarrerie.il y apcud'evenemensdans cettenouvelle ;rau-
teur apparfient a la classe de ces conteurs moralistes , qui font
plutot I'histoire des mouvemens interieurs de I'arae que de la
vie exlerieure du monde. Sainte-Perine , sous ce rapport, se
rapproclie beaucoup des ingenieuses compositions de I'auteur
A Edouanl et A'Ourika. La placer en si bonne compagnie, c'est
assez dire I'estirae que nous en fesons,et nous ainions a finir
par cet eloge auquel nous ne pourrions guere ajouter. H. P.
Beaux- Arts.
232. — * Etudes sur le beau dans les arts ; par Joseph Droz ,
del' Academic {ranci'MC. Seconde edition .Varis , 1826; Rcnouard.
In-8° de 235 pages ; prix , 4 fr. 5o c. et 5 fr. 5o c, par la poste.
Cette seconde edition attestele succts des etudes de M. Droz.
Nous rappelonsce litre, parce qu'il caracterise autant de jus-
tesse d'esprit, que de modestie dans I'auteur. II est raoins
difficile en effet de reconnaitre le beau en I'eiudiant, qued'eu
donner une definition salisfaisante. -< La plupartde nos expres-
sions, dit M. Droz, ressemblent a ces rouleaux de monnaie
quicirculent sans etre jamais comptcs. « On a cependant vonlu
souvent e valuer la beaute, mais y a-t-on rcussi, et I'a-t-on
mieux definie que la grace ? L'une et I'aulre s'expliquont mieux
par leurs effets que par leurs causes, et le pliilosoplie qui veut
definir le beau ressemble beaucoup a I'enfant qui effeuille la
rose. La grace, c'est ce quicharme; le beau, c'est ce qui excite
I'admiration, ce qui nous ravit par le sentiment dc la perfec-
tion. Nous n'en saurons jamais da vantage ; nous pourrons seu~
5o8 LIVRES FRANCAIS.
lemeut etuilirr , comme I'a fait M. Droz, les condilions aux-
quelles notre ame eprouve I'admiration, le sentiment de la
perfection. Nous apprendrons avec lui que ces impressions
reunies de la grandeur, de I'ordre, de rharmonie, que louies
cellcs (jiii (.'levent Tame, ratlendrissprit, I'e.xahent, produisent
en nous le sentiment du beau , d'oi'i il rosulte, coiiinie le dit
encore tres-bien M. Droz, que <. lu beaute jiar excellence, est
celle de la verlu. » Nous ne dirons ccpendant pas avecun ecri-
vain tres-recomniandable, <iue beau soit synonyme d'uti^e.
11 entend, ;\ la verite, en definitive, par utile, ce qui est con-
forme a la convenance generale ilesetres, ou a I'ordre universe].
Mais le mo t/////e, dans son accept ion fjenerale que n I >usnesaiirions
changer, emjjorte I'idee de persounalite , d'egoisme, et dans ce
sens, il est ;)recisement I'opposo de beau. Les observations
ingenieuscs et sonvent plausibles dont le meme auleur s'esi
etaye pour decrediler Vidcal ne nous out pas non (ilus con-
vaincus. Ces observations tres-judicieuses, tant c|ti'clles ont
pour but et pour effel de jelcr le ridicule sur I'abus de \' ideal,
nous semblent depasser le but, lorsqu'elles frapfient Videnl
meme. 11 y a en nous quelqiie chose qui proteste conire lous
les raisonnemens, et notre ame, trop souvent nial a i'aise dans
cemonde, a le sentiment vague, si Tonveut, niais reel, li'tin
ordre et d'une beauie superieurs a ce que nous voyons. Ce
sentiment est iiccessaire a I'artiste pour produire le beau dans
sa perfection. De la, le pouvoir de la miisique sur ceux qui
sont susceptibles de I'eprouver. On s'estbeaucoup moque de la
nielancolie du nord , et rien de plus ridicule assurement que la
pretention a la melancolie. C'est cependant un sentiment na-
turel, et qui serait a [)eu pres inexplicable, si Ton rejeiait le
besoin et le pressentiment de qucltpie chose de mieux que ce
que nous possedons.
Ces idees que nous avons relrouvees en partledans recritdc
M. Droz, nous ramenent a lui. Son livre plait et eclaiie, parce
qu'il revele une ame elevee et douce, un goiitpur, bcaucoiip
de sagaclte, et que I'auteur appuyant ses conseils d'henreux
exemples, sail donner de la couleur el de la vie a son style
toujours noble et elegant avec simplicite. V.
233. — * La Chine; m(Kurs ., usages, costumes, arts et
metiers , peines civiles et militaires , ceremonies religieuses ,
rnonuinens et passages, A' apres les dessins originaux du P. Cas-
tiglione , du peintre chinois Pu - Qua , de W. Ale.randre ,
Chambers, Dudley, etc.; par MM. Deveria , Regnikr ,
.ScHAAL, ScHMiT , ViDAi. , ctc. , avec dcs Notices crplicativcs
ct une introduction , preseiiiant I'etal actuel de I'empire clii-
BEAUX-ARTS. 509
nois , sa statistique , son ftouTcrnenient , ses instllutions, les
cultcs qu'il admet 011 tolere, et les grands chanjreniens poli-
tiques qii'il a subis jusqu'a ce jour; par D. B*** de Mal-
piKRE. Sixieme livraison. Paris, 1826; I'editeur, rue Saint-
Denis , n° 188, tin caliier grand in - 4**. Prix de chaque
livraison, i5 fr. ; par souscriplion , la fr. (Voy. Rev. Enc,
t. XXX, p. 827.)
En rendant compte de ce bel onvrage, nous n'.ivons point
a entretenir nos leclcurs de I'antiquite de I'einpire chinois,
iii a romparer la morale sublime de ses phllosophes avec celle
des pliilosophes des aulres nations. Nousn'essaierons ]jas,non
I)ltiS, d'apprccier par quels moyens cct empire s'est constam-
menl soiilenu au memo degro de splendeur et d'eclat ; comment
il a pu soumettre a ses lois et a ses usages les nations barbares
qui ont si souvent envalii ses provinces. C'est a M. de Malpiere
qu'il appartient de fiiire ressorlir et de developper ces con-
sideralions. Les parties de son travail qui ont deja paru nous
prouvent qu'il s'en acquille avec talent.
L'ouvrage que nous avons sous les yeiix est jdcin de do-
cumens rares et curieux , de renseignemens choisis avec gout
et heureusement varies. Le plan adopte par I'edileiir raerite
des eloges. En nous inlroduisant dans les paiais des empereurs
et dans riiumble atelier de I'artlsaii, il reunit a I'agrement de
riiisfoire I'attrait seduisant des voyages. Tour a tour , en effet ,
le Iccleur s'arrete aupres d'une fenime thinoise qiii tient son
enfant dans ses bras ; il accompagne la gondole de ce man-
darin en voyage; il assiste au saciifice qu'offre ce jeune bonze
a ses idoles , et observe curicusement les luses, les fourberics
de ce preire de Fo qui exploitc la superslilion populaire ;
marin, il s'abandonne snr ce bateau leger qui descend le
cours du grand flcuve; soldat, il can)[)e avec un officier du
corps des archers, et, fatigue d'un long voyage avec un cour-
rier tarlare, il va se reposer sous le loit Jiospitalier d'une
jnlic maison ruslique. Discijjle des prelres de Fo , il se rend
a la pagode pour y deposer son offrande. Arrive a Yang-Fou,
il suit son guide cliez un libraire; I'accompagne dans Fatclier
d'une jolie brodeuse qui travaille a son metier; il prend avec
lui le plaisir d'une peche au cormoran. La variete infinie des
scenes de la vie domestique que cet ouvrage reproduit ne
permet d'en citer qu'un tres- petit nombre. II suffit de dire
que tout est rendu avec verite dans cette collection jirecieuse,
que les dessins sont pleins de vigueur et d'expression ; que
les couleurs les plus pures et les plus heureusement diver-
sifiees lesaniraent et scmblent leur prefer un nouveau charrae.
5io LIVRES FRANCAIS.
une nouvetle \ie. Nousle rcp^tons, I'auteiir nous fait voyager
aveclui; et , si noiis cprouvons encore qtielque embarras , si
Ics tableaux ne nous instruiscnt pas suffisammerit , la lecture
des notices qui Ics accompagnent vient eclaircir nus doutes
el nous iiiitiir aux arts, aux coutunies , anx nioeurs du peuple
chiiiois. IVous savons a qiioi allribiier I'clat dc stiipcur et
d'ignorance dans lequel vcgetc auiourd'liui cetle nation dont
les cominencemens sont presque fabuleux.
M. de Malpiere eleve , dans son ouvr.ige, un monument
anx arts; 11 ai)i)articnt a ceux qui les cultivent et (\u[ les aiment
d'cncouragcr ses efforts. — La sixieme livrnison qui vienl de
paraitre , et (jui comprend la Balelicre , le Murchand de
pipes, les Equilibristcs , le Maljciitcur cnchaine a une tige de
fer , des Chiiiois riverains, et un joli jjaysage reprt-sentant
une fumille dc pecheurs , achevent «le pronver que I'editenr
n'cpargne ni soins , ni dcpenses , pour reiidre son travail aussi
parfait que possible. Z.
234. — * Les Roses ; Y'^T P. -J. Redoute, avec le texte, par
C.-A. Thory. 3i""=,3i.™''et33'"'' livraisons.Paris, 1826; Panc-
koucke, tditeur. 3 cabiers in-8**, conlenant cbacun (|uatre
jilantlics coloriees; prix de la livraison ou du cabier, 3 fr, 5o c.
( Voy. Rev. Enc. , t. xxx , p. 829. )
235. — * Cefit grai'ures pour les eeuvres de Voltaire , conve-
nables a toutes les editions in-8° ct in-12, publiees par M. Le
Cerf, d'a[(resles dessins de MM. Ueveria et Chasse^at. 16"'
et i-™^ livraisons. Paris, 1826; Panckoucke. 2 cabiers in-S" ,
contenant cbacun quatreplancbes. Prix de la livraison, a f. 5oc.
(Voy. /?ei'. Enc, t. xxx, p. 829. )
Ces deux livraisons conliennent trois gravures pour la Pu-
celle , deux pour Zndig^ une ]K)ur Zaire , une pour la Hen-
riade, une pour le Temple de lag hire.
236. — * Collecdon des portraits historiques de M. le baron
Gerard, premier jieintre du roi, graves a I'eau-forte par
M. P. Adam; preci-dt'e d'unc Notice sur le portrait historique.
Paris, 1826. Urbain Canel. L'ouvrage se composera de douze
livraisons coniposces cbacune de six plancbes tirces sur jiapier
de Cbine; el de six feuilles sur lesquelles sont indiqnes le nom
du personnages represente, et le litre qu'il portaitau moment
ou son portrait a etc fait. II a dejii paru trois livraisons. Prix
de cbar|ue livraison, aS fr.
J'ai annonce cet ouvrage, a Toccasion des deux premieres
livraisons ( voy. Rev. Enc. , t. xxx , p. 828 ) ; la troisieme qui ne
s'est pas fail attendre, contient , comme les deux precedcntes,
BEAUX- ARTS. 5ii
d«5 noms hislorlqncs qui sc llenl aux evencmens de xix*" siecle.
Enexainin:int cliaque portrait, I'un upres I'autre, on croitpar-
courir snccessivemenl i)Iusieurs cliapilres de I'liistoire tie
France; (ians le nombre, il lmi est qui ra])pe!leni des evi'iiemens
douiourciix ; inais, loin de les redouter, on recheiclie les emo-
tions de cette nature. Le succes de Toiivrage de M. de Segur,
sur la dcsastieiise campagne de Russie, en est une preuve.
Considerce sous le rajiport de I'ai I, eel le galerie n'est pas moins
interessanle; on y \oit un bomine de genie, renfermo, par
son sujet dans dcs liniilcs eiroites, lutter conlre ces obstacles
avec un talent et une grace qui out rcpanilu ses ouvrages et
sa reputation dans toute rEurojic. La collection, gravee par
M. P. Adam, destince a reproduire ladisposition et lecaraclere
particulier dcs portraits qui la composent, a oblenu et conti-
nuera d'obtenir le succes (jue mcrite ie talent de I'un des plus
grands ])ein!res que la F.ance ait produits. P. A.
237. — * Edifices de Rome moderne, dessines et publics par
L. Le Tarouilly, arcliitecte. 3™*, 4™" et 5""'= livraisons. Paris,
1825 ; Tauteur, rue Richelieu, n° 49- L'ouvrage aura i4li-
vraisons environ, in - fi)lio atiantique, cliacun de 6feuil!es gra-
vees au trait. Prix, a Paris par livraison sur colombier fin d'Au ■
vergne, 6 fr. , sur colombier vclin, 12 fr. ( Voy. Rev. Enc. ,
I. XXIX, p. 85o ).
Les livraisons que nous annoncous ne se sont pas fait alten-
dre; elles ont succeile iminedialeinent aux deux premieres:
voici quelqiics details sur leur connposition :
3™' Livraison. Plans, elevations, coupes et details d'une raai-
son situee -via del Governo veccliio, des jiaiais Niccolini, Vc-
rospi, del Bufalo, du petit palais, Piazza di campo Marzo, et
vue du vesiibute; plan de deux maisons via delie cinque Lune
et Piazza Madama.
4'"^ Livraison. Details de la porte d'entree du palais del Go-
vernalore , des palais Patrizi et Tomati; coupe sur la petite
cour du palais Palrizi; elevation et details de la partie construite
du palais Capraiiica ; plans, elevations, coupes du palais Pa-
trizi, siiue pres de Teglise S. Catarina de' Funari; elevation
d'un palais j)res la Piozza dtUa Face; plan d'une niaison pre*
leglise Santa - Maria della Pace et vue du vesiibule ; plans de
deux maisons via Uell'orso ct via delle Quatire Fontane.
5°><' Livraison. Plan, elevation et detail de la chapelle S. Gio-
vanni in Oieo, situee pres la porte Latine; elevation du petit
palais Spada ; plan, elevation et coupe de I'eglise S. M. de
Monti et college de Neofite ; elevation du palais Muti Papaz-
zussi; plan et coupes du palais della Consulta , aujourd'hui ca-
5ia LIVRES FRANC AK.
sernc des gardes nobles et plan des souterrains ; vue de la cour
de ce palnis.
Ces livraisons sont gravoes an trait avec iine rare perfection ,
ot nons devons ajouler que ce luerite d'exccuiion se fait g6ne-
ralcmeiit jemarquer dans toiites les planches qui ont ete pu-
bliees jusqu'a present. Confiee aux meilleurs artistes en ce
genre et constainment surveillce par M. LeTarouilly, !a gra-
vure ne pent manquer par son ensemble d'obtenir rassenliraent
des arcliilectes , des eieves, des constrncteurs et des amis des
arts anxquels I'ouvrage est plus parliculiorement destine.
L. S. M.
Memoires et Rapports de Societcs savantes et cVutilite
puhlique.
238. — * Memoires et dissertations sur les antiquites nalio-
nales et etrar?geres , publics par la Societe royale des antiquaires
de France. T. VI et VII. Paris, 1826; J. Smith, imj)rimeur-
libraire, rue Montmorency, n" 16, et au bureau de I'almanacli
ducommerte, rue .I.-,F. Rousseau, n° 20; prix , iG fr. et 20 fr.
par la poste.
UAcadeinie celtique avait public cinq volumes; heritiere de
ses travaux dont eile a beaucoup etendu le cercle, et pour
Icsquels elle nous parait suivre une meilleure direction, la So-
cicte royale des antiquaires de France , dont la collection se
composait deja d'uu pareil nombre de volumes, vient de met-
Ire au jour les tomes vi et vii de ses memoires. On y Irouve
decrits des monnmens en lout genre , des inscri;)tions, des
medailles , des usages, des dialectes, des traditions. I>a, vien-
dront piiiser les ecrivains qui voudront remplir quelques-unes
des lacunes qui existent dans I'lnsloire des evenemens et des
arts de la Gaule et de la France jusqu'au xvi^ siecle inclusi-
venient.
Le tome vi est consacre a des dissertations sur les langues
et sur les patois, lant du royaume que des aufres pays. II
commence par une notice de M. CiRBiiio sur la Grammaire
de Denis de Thrace , et par rouvrage( en grec, en armenien et
en francais) de ce savant philologue qui florissait, il y a deux
mille ans. On doit a M. I'abbe LAiiOUDERiE le livre de Ruth en
hebreu et en patois auvergnat, ainsi que laparabolc de I'enfaut
prodigue dans ce dialecle et en syriaque. RI. Bert.iat Saint-
Prix enlretlent ses lecteurs de I'enjploi de la laiigue laline dans
les actes anciens, et de sa prohibition au xvie giecle; M. de
Gervillf. , des anciens noms de lleux en Normandie; M. Jait-
jiKRT DE Passa , des recherci.es bistoriqucs sur la langue cata-
MEMOIRES ET RAPPORTS. 5i5
lane ; cet auteur donne le Roussillon pour palrie au poete
Guillatime de Cabeslaiiig, tandls que, d';ipres Boccace, Nos-
tiadamus, Crescimbeni Mannis, etc. M. Ladoucette , dans son
Troubadour , I'afail naitre en Provence. Le volume est termine
par la parabole de I'enfant prodigue, traduite en 86 patois; ce
travail a ele snivipar M. Coquebert de Montbret; nous au-
rions desire qu'il y joignit la carte oh il a divise la France,
suivant les divers dialectes que Ton y parle. Dans le tome vii ,
le raerae M. de Montbret a traite de la religion des liabitans de
la Grande-Bretagne et de ses rapports avec celle des Gaulois;
M. Van Alpen , d'Hercule Saxanus et Magusanus ; M. Girault,
des monumens celtiques de la Coted'Or; M. Hennequin, des
fouilles d'une voie romaine aupres de Metz; M. de Gerville,
des camps remains de la Manche; M. Beaulieu, du camp re-
main, dit la cite d'Jfrique , aupres de Nancy; M. Caix, du
pays des Gabaii ; M. Drojat , de Cerebelliaca , dans ia Drome ;
M. SAiNT-AMANDj.de Cassignolius. en Aquitaine. MM. Lemais-
tre, Morelot, Lejeune , Boujon, Penchaud , Vtran , Teissier ,
Thibault ont decrit des objets d'antiquiles , decouverts dans
I'Aisne, la Cote-d'Or, la Meurthe , le Puy-de Dome, les Bou-
ches-du-Rhone, la Charente , la Moselle et I'Yonne.
Le monument antique, connu sous le nom de mnrbre de
Thorigny , et qui vient originairement de Vieux ( Viducasses ) ,
est maintenant a Saint-Lo, chez M. Clement, raaire de cette
vilie, qui le destine a la maison commune : I'abbe Lebeuf n'en
avaitpas scrupuleusem.ent donne I'inscription; M. Ladoucette,
ayant vu le monument , a envoye a M. Clement le procede dont
M. Jaubert de Passa s'etail servi en Espagne et qui nous a pro-
cure avec la plus grande esactitude^eyrtc-f//rt//e de la fameuse
inscription de Thorigny , sur laquelle on trouve un rapport
de M. BoiLEAU DK Maulaville. M. Artaud, conservateur du
musee des antiquites a Lyon, nous fait connaitre la lettre de
Sextus-Fadius , gravee sur un monument existant a Narbonne;
M. Drojat, un cippe a Taurobole, qu'il a examine a Die.
Nous nous plaisons aussi a citer M. Ddlaure , pour son rapport
sur la notice de M. Jouannet , relative a I'eglise de sainte Croix a
Bordeaux; M. Depping, pour ses recherches sur le culle de
St-Arras et sur les Cahursins ou Coarslns du moyen age;
M. Berriat Saint-Prix , pour celles qui ont eu pour objet une
r^ponse attribueea Sully ; etM. de Montbret, pour I'estrait de
I'inventaire du cardinal Mazarin, quoique ces deux dernlers
ouvrages aient depasse les limites du xvi" siecle, que la So-
ciete des antiquaires semblait s'etre Imposees. La Societe royale
a perdu dans MM. Langles et Babbie du Bocage , deux de ses
T. XXXI. — ^oz<V 1826. 33
5i4 LIVRES FRANQAIS.
membres les plus distingues; on lit avec plaisir Teloge de ees
deux savanspar MM. Aucuis et Bottin. [P^oy. aussi les notices
qui lour out rte consacroes dans la Revue Encyclopi'diqitc , dont
ils ^taicnt collaboraleurs , t. xx\iii , p. 35/|, ett. xxix,p. 906).
Nous aurions dii comuiencer par le rapport de M. Bottin, se-
cretaire. 11 aiteste Le zele et les liiraieres de son autciii-; et con-
tribue a donner une liautc idee de la varieie, de riinportance
des etudes et des travaux de TAcademie. La publieation des
volumes dont nous rendons compte, ne peut qu'accroiire la
juste reputation dont la Socicte royale des anliquaires jouit en
France et dans tous les pays etrangers. L — e.
Outrages periodcques.
aSo. — * Journal clinique. Recueil d* observations sur les dij-
formites dont le corps huinain est susceptible h toutes les epo-
quesdelavie (premiere partie), et sur la uiecanique et les
instruinens employes par la chirnrf,'ic ( scconde parlie) ; avec
figures; par C. A. Maisonaee, D. M. Paris , 1826. Chez I'au-
teur, maiion du traitement de di verses difformites et de para-
lysies, rue de Clievrouse, n" 4» pres le boulevard du Mont
Parnasse; Bet-het jeune, place de I'ccole de Mcdecine. — Ce
journal ])arait quatre foisparan, en Janvier, avril, juillet et
oclobre. Prix de I'abonnement pour I'annee, 12 f'r.
L'etablissement forme par M. Maisonabe pour corriger plu-
sieui's difformites du corps, n'est pas une irinovalion dans Part
de la cbirurgie : la Suisse, I'llalic et Paris meme ont deja vu
d'heureux essais de ces nioyens de lejiarer les aberrations de
la nature. Mais un seid ctablissement ne suffit point; les inte-
rets de I'liumanile exigent que M. Maisonabe puisse avoir
beaucoup d'imitateurs, qii€ son experience soitulile, meme a
ceux cpii ne peuvent recevoir ni scs soins, ni ses conseils. Un
cours special sur les a])plications de Part auquel il s'est con-
sacre, repand deja autour de lui les fruits de cette experience,
et forme ses collaborateurs, non-seulenient pour la cajjilale,
mais pour une partie de la France. Afin d'etendre encore cette
bienfalsante propagation de luniieres et de secours, le profes-
seur s'est decide a publier, sous la forme d'un jonrnal, tout ce
qu'il enseignc dans son cours, les observaiions qu'il fail succes-
sivement sur le ujeme objet, et les docuniens (]ui lui sont
cnvoyes par les niedecins et les chirurgiens qui venlent bien
seconder ses louables travaux. Quatre numeros ont deja paru;
le redacteur ne s'attache point a etablir une sorte dVqnilibre
eBtr^ les deux divisions de son travail; ce qui, en effet , ne
OUVRAGES PERIODIQUES. 5i5
pourralt «jtre maintenu qu'aux depens de I'une ou de I'aulre ,
siiivant I'abondance ou la rarele des observations, des docu-
mens, des decouveites et des inventions. D'ailleuis, la seconde
partie ( celle de la mecanique el des instrumens de chirurgie )
est principalement eclaircie par les planches , et pent ^tre Irai-
tee avec plus de concision. La premiere difformite dont M Mai-
sonabe s'est occupe est la courbure de la colonne vertebrale:
il expose ce que Ton a tente jusqu'a present pour la redresser;
il passe ensuite a I'explication des moyeus qu'il eniploie lui-
nieme, et qui lui ont le mieux rcussi.
liG pied hot est un autre vice de conformation qui pent,
dans beancoup de cas, etre corrige ])ar un cbirnrgien liabile.
Le quatrieme numero du Journal cUnique contient beaucoup
de faits sur cet objet, dont I'utilite n'est peut-elre pas moin-
dre que le redressement de la colonne vertebrale. Pour cette
derniere operation, M. Maisonabe ne cite aucun homine qui
s'y soit souniis , en sorte qu'il n'a traite que des fcmnies j)lus
ou moins agees. Mais ses experiences, quoique tres-nom-
brenses, peuvent-elles etre regardees comme completes , tant
qu'il n'aura pas opere sur les deux sexes? esl-il bien certain
que Vextensibillte est la meme dans I'un et dans I'autre?
liCs instrumens decritsjusqu'ici par M. Maisonabe sont ceux
dentil se sert dans son etablissement, et ceux que Ton em-
ploie, soit pour extraire les pierres de la vessle, soit pour les y
briser. La description des ressources deju imtnenses et toujours
croissantes de I'art est sans doute tres-rassurante : raais elle est
necessairement accompagnee de details penibles sur les infir-
mites liumaines. De quelque nature que soient les niaux qui
nous affligent, s'il etait un art de les eloigner, de les rendre
cxtremement rares, il faudrait le cultiver avec plus de soin
encore que celui de guerir ces maux quand ils sont venns.
Esprrons que les travaux de M. Maisonabe obtiendront lout
le succes que racritent les talens et le zele de cet ami de I'huma-
nite , que son cotirs et son journal etendront au loin et con-
serveront pour I'avenir ses yues bienfaisanles et les fruits de
ses observations. F.
240. — * L'Herm'^-s , journal du Magnetisme animal, par
^xuc societe de mcdecins de la faculte de Paris, Paris, 1826.
M™« Levi, libraire , quai des Auguslins; n° 25. Ce jourrval
parait tous les mois, par cahier de deux a trois feuilles in-S"";
prlx , 12 fr. pour I'annee.
La doctrine du magnetisme animal , apres avoir ete Tobjet de
discussions locg'ies et animees , lorsqu'elle fut introduite en
5i6 LIVRES KRAKCAIS.
France par Mesiner, en 1778, avait ^1^ n«gligee et presque
oubliee pendant notre revolution. Le calme dont a joui notre
pays , dans les piemieies annees dc Tcmpire , ayaut permis de
repreudre avec une nouvelle ardetir I'elude des sciences, on
recoRimenca a s'occuper du niagnetisme , qui s'etait, pour ainsi
dire, rcfugie dans les pays etrangers. — L.'Histoire critique du
Magnelisme animal, publiee a cette cpoque par M. Deleuze,
propagea rajiidement la pratique de ce nouveau moyen de
s'uerir. Les partisans de cette decouverte desiiant etablir entre
eux un moyen de communication , trois ecrits periodiques :
les Annales du magnetisme animal, la Bibliotheque mngnetique,
et\es Archives du magnetisme , furent ])ublics depuis i8i4jus-
qu'en 182/4, sous les auspices de MM. de Puysegur, Deleuze, etc.
Aujourd'hui que les phenomenes du niagnetisme , long-tems
neglige"' par les savans, sont devenus, dans I' Academic royalcde
medccine jl'objet d'une discussion publique, 6t que cette societe
a nomme, le 1% fevrier dernier, une commission chargee d'exa-
miner la nature de I'agent magnetique , il ctalt convenable que
cette bianche des sciences physiologiques eut de nouveau un
organe quirendit compte des observations auxquelles elle doit
donner lieu. Tel est le but qiie se proposent les redacteurs de
V Hermes. Considerant les discussions de 1' Academic de medecine
comme formantune nouvelle ere dans I'etudedu niagnetisme, ils
les ont prises pour point de depart; ils annoncent , dans leur in-
troduction, qu'ils suivront pour regie invaiiable cette exactitude
dans les observations, celte impartialite dans les jugemens, qui
forment le caractere de I'epoque scientifique actuelle. lis tache-
ront de faire connaitre I'histoire de la decouverte de Mesmer,
d'en esposer I'utilite therapeutique et les dangers, de rendre
compte des progres qu'elle pent faire , d'analyser les ouvrages
publics sur cette matiere , et de consigner tous les faits interes-
sans qui s'y rapporleiit.
Les cinq numeros de ce journal, qui ontdeja paru depnis Ic
mois de mars, renferment un grand nombre de documens cu-
rieux. Nous y avons distingue une analyse tres-etendue des dis-
cours prononces a 1' Academic de medecine, dans les mois
d'octobre , de novembre et de decembre iSaS , Janvier et
fevrier i8?.6 , pour ou contre la proposition d'un nouvel exa-
men du magnetisme animal, par MM. Orfila , Marc, hard,
Guersent, Magendie , Georget , Case, Laennec, Recamier,
Double etc.; le rapport fait sur cette question par M. Husson,
■vice-president de I'Academie , etl'eloquente replique adressee
par ce savant medecin aux adversaires de I'examen ; un article
8ur les rapports du magnetisme, avec les diff^rentes branches
OUVRAGES PliRIODIQUES. 5 17
des connalssances humaines, qui suppose uiie elendue de vues
irop rare dans ceux qui s'occupent du raagnctisme; une critique
de I'ouvrage de M. le D' Bertrand , par M. Deleuze , aussi
reniarquable par lelegance du style que par la solid ite du rai-
sonnesiient; nous y avons lu , surtout avec plaisir, des fails
constates et publiquement certifies par des hommes, tels que
MM. Ampere , Adelon , Ribes , Las Cases , etc.
Si les redacteurs de YHermes continuant a reniplir avec le
uieme zele et la meme sagesse la taclie qu'ils se sont j)rescrite ,
nous csperons qu'ils parviendront bientot a fixer eiifin I'opi-
nion des savans, si long-iems incertaine sur la question du
inaguetisme animal. Bouillet.
1[^l. — Le Phare du Havre, journal du commerce et de
I'industrie. Feuille quotidienne. Le Havre , 1826. In-folio. On
s'abonne, au Havre, cliez Alyhonse Lemale, rue des Drapiers;
a Paris, chez Sautelet. Prix, 5o fr. par an; aS fr. jjour six
mois; i3 fr. pour trois. On ajoute 6 fr. par an, pour les frais
de port par la j)oste.
Ce nouveau journal ne se borne point a une correspondance
commerciale et a des nouvelles de mer et de commerce. 11 com-
prend aussi des articles, specialement sur la canalisation de la
Seine, ou sont discutees avec etendue et maturite des questions
d'une haute importance pour nos ports de mer et pour notre
prosperite inlerieure. — Un tableau du mouvement des ports ,
en France et dans les pays elrangers, des arrivages et ira por-
talions et des departs, occupe la quatrieme et derniere page
de chacun des nuraeros. J.
242. — Bulletin des capitalistes , des speculateurs et des ren-
tiers. On s'abonne, a Paris, rue Neuve-Saint-Marc , n° 4-
Prix, 7 fr. pour un mois; 18 fr. pour trois mois; 35 fr. pour
six mois; 69 fr. pour I'annce.
CeMe nouvelle feuille, destinee specialement a faire connaitre
lesentreprisesfinancieres, agricoles ouindustriellesquise font en
France, apour butde servir a fixer C opinion sur le degre d'utilite
publique ouprivee, sur la bonne ou mauvaise administration,
et sur les garanties reelles oujictives , que presente chacune de
ces entreprises. Plusieurs elablissemens utiles, et diverses en-
treprises sont effectivement annonces et examines dans les
numeros que nous avons sous les yeux. Si la sagesse et I'im-
partialite president toujours aux observations des redacteurs ,
nul doute que leur journal ne puisse etre reellement utile. II
renferme aussi des renseignemens sur la situation de la Caisse
d'amortissement et de la Banque de France, avec des nouvelles
de I'interieur et de I'etranger. Chaque numero est termine par
5i8 LIVRES FRANCAIS.
des aiinonres et des avis , qui inteiesscnt le commerce el I'in-
duslrie. — On doit y ti Oliver enfin !e cours des actions qui ne
sont point colces a la Bourse. A. de V.
243. — * La Psyche , clioixde pieces en vers et en prose, dcdii
aux dames. Paris, Mars, Avril, Mai et Juin 1826. Au bureau
du journal, cLez M. Benard, rue du Bouloy, n" 8. k cahiers
in- 18, de 8 fcuilles et deinie chacun , avec \igneitcs. Prix dc
I'abonnement pour troisinois, 8 fr. 5o c, ponrGmois, 16 fr.,
pour un an , 3o fr.
Voici un recueil qui raanquait a notre lilterature. Depuis
quelques annces, le nombre des journaux consacres a la critique
s'est accru , en raison inverse des progres obtenus dans cet art
si difficile, et tout a la foissi ingrat, circonstances qui peuvent
fort bien s'espliquer I'une par I'autre. II devail paraitre eton-
nant que personne n'eut songe a recueillir sous une forme
periodique les meilleures productions de nos poetes modernes,
pous nous les offrir dans ieur nouveaute et , pour ainsi dire,
brulantes encore du feu de I'inspiration. Cette entreprise, com-
mencee par M. Benard, il y a cinq mois, se poursuit avec
succes, et deja nous possedons quatre cahiers de ce recueil,
que les Muses ont avoue et que les Giaces ont pris sous Ieur
protection. Les noms desauteurs donl les productions figurent
avec lionneur da-ns ces quatro livraisons, doivent paraitre un
sur garant du succes. Cependant, les lecteurs ne se laisseront
pas imposer par la reputation que quelques-uns d'entre eux ont
meritee; quelquefois ils s'arreteront a des noms molns connus et
qui, n'ayantpas encore acquis le privilege de faire tout admirer,
sont tenus de faire un pen plus de frais pour plaire au public.
A ceux-la seuls aussi la critique peutetre de quelque utilite, et
nous nous reservons de Ieur offrir plus tard nos conseils et nos
encouragemens, Aujourd'bui,nous noiis adresserons seulement
a I'editeur, que nous engagerons a sacrifier davantage a la nou-
veaute, en rassemblant le plus de pieces inedites qu'il lui sera
possible; il ne faut pas qu'il emprunte rien aux autres recueils;
il faut, au contraire, que le sien devienne une mine fcconde
pour ceux qui paralssent au commencement de cliaquc annee,
et qui ne veulent pas devoir uniquement Icurs succes au choix
deleursgravureset au luxe dela1yi)ograplue.Mais il ne doit pas
neanmoinsadmettreindistinctement tout ce qui lui paraiiranou-
veau ; il est de ces nouveautes litteraires que le gout reprouve et
qu'il doit severement ecarter. Tels sont les morceaux qui ont
pour litre: I'Espagnolet son chien, fragment en prose par M.
O. B... (mars, p. 91) et lejeu de cache-cache, nouvelle de M.Am and
GuiLLAUME. II ne doit pas perdre de vue qu'au merite de satis-
LivRES Strangers imprimis en France. 519
faire I'orellle et I'esprit par des sons habilement combines, et
par des images vraies et ingenieuses, la poesie doit joindre celui
(ie parler a la raison et au cceur, en exercant sur tous deux une
lieureuse influence. Des tableaux pareils a cenx que nous venous
(le citer ne sont propres qu'a produire uu effet entieiement
oppose a ce noble but. E. Hereau.
Livres en langues etrangeres, imprimes en France.
244. — * Deutsches Lescbuch, etc. — Lccons de litterature
allemande : Nouveau choix de morceaux en prose et en vers ,
extraits des meilieurs auteurs allemands; a I'usage des ccoles de
France, et des personnes qui ctudient la langue allemande;
par C.-F. Ermeler. Paris, 1826; Baudry. In-12 de viii et
376 pages ; prix , 4 fr.
Avec des extraits bien choisis de Lessing, de Herder, de
Gessner, de Muller , de d'ArclienhoIz , de Klopstock, de Bur-
ger, de Schiller, de Goethe, de Wieland et des autres maitres
dela litterature allematide, M. Ermeler est parvenu a compo-
ser un recueil dont la lecture ne sera pas moins atlrayaiife
qu'inslructive. Ceux qui I'aiiront etudie avec soin, et qui se
seront habitues ainsi aux differentes formes de style auxquelles
la langue allemande a ete soumise, parviendront facilement a
bien apprecier les details des belles compositions que TAllema-
giie doit a ses poetes, a ^s historiens et a ses philosophes.
Nous ne pouvons que recommander cet utile ouvrage aux
maitres et aux eleves. J-
245 * / Lusiadi, etc. — La Lusiade du Camoens, tradnile
en octave r/wrt, par A. Briccolani. Paris, 1826; J. Didotj
le traducteur, rue des Poltevins, n° 5. In-24 ; prix, 5 fr.
La traduction de ce poeme par M. Millie dont les lettres ont
a deplorer la perte rccente, a dii en faiie connaitre tout le
mcriteaux liuerateurs francais. ( Voy. Rev. Enc, t.xxvi p. 4i6-)
Je puis done , sans m'elendre sur I'cloge de I'ouvrage origi/ial,
rappeler seulement qu'nn poete italien, Charles Nicolas Pacgi,
qui vivait au milieu du xvii^ siecle , avait dtja lento de s'ap-
l)roprler le chef-d'oeuvre de la poesie portugaise par une ver-
sion qu'il en donna sous le litre de la Lusiada. Mais cet essai
ne fut pas heureux et tomb:i promptement dans I'oubli. M. Bric-
colani n'a point a craindre le iiieme sort pour le travail qui!
vlent de publler.
II a suivi le teste de Souza:sa version est partout fldeie: il
s'attache trop souvent peut-etre a traduire stance par stance;
mais il cherche egaieoient h rendre I'energie ct la vivacite du
520 LIVRES ETRANGERS IMPRIMPIS EN FRANCE.
l>oete , et il y reussit presque toujours. Enfin, I'llalie peut se
flatter d'avoir, dans cet oiivrage, une estimable traduction du
Camoens.
La belle edition qu'en a faite M. J. Didot inerite des eloges;
elle est entierement conforme, pour le caractere, le format et
le papier, a I'edition portugaisc, publiee a Paris, en i8a'3 ,
par J. P. Aillaud. F. S.
2/|6. — * Select britisk Novels , etc. — Chois de remans an-
glais, publics jiar M. J.-JV. Lake. Premiere llvraison conte-
iiant : la legende de Montrose, ( I'Officier de fortune), par
hir IValter Scott, Bart. Paris, 1826. Firmin Didot. 2 vol.
in-32 de xLWi-201 , et 224 pages ; prix dii volume, H fr. 5o c.
II faut que la connaissance et le gout de la langue et de la
litterature anglaises se soient bien repandus en France, de-
puis plusieurs annees : aujourd'hui, Londres et Edimbourg ne
voient eclore aucune nouvelle production de Scott , de Moore,
on de Icursemules, quinesoitaussitot offerte au public parisien,
noa plus seulement dans une traduction inforrae , mais encore
dans Tine edition en langue origlnale, presque aussi correcte et
plus economiquc, que celle des Constable ou des Murray. Sans
doute, les speculateurs coraptentbeaucoup, pour le debit de leurs
livres, sur les nombreux visiteurs anglais, que raraenite des
mceurs francaises, la douceur du climat, et d'autres causes en-
core attirent a Paris et dans nos belles campagnes ; mais ils
ont a repondre aussi a d'autres demandt's , a d'autres besoins.
Si la foule lit aujourd'hui les traductions qui ne sortaient point
autrefois d'une certaine sphere , du moins il est un bon nom-
bre d'hommes qui, profitant d'une instruction plus etendue et
plus liberale , vont chercher a la source les productions du
genie, avant que le penible travail des interpretes les ait re-
froidies et decolorees. C'est done avec de nombreuscs chances
de succes que Ton entreprend de publier les chefs-d'oeuvre de
Swift, de Foe, de Fielding, de Smolett, de Richardson, de
miss Burney, et de Scott. Cette collection, imprimce avec
beaucoup de gout et d'elegance , ne deparera aucune biblio-
theque , et I'on peut lui promettre une place assuree dans
celles des amateurs de la belle litterature anglaise.
Outre les auteurs que nous venons de ciler, les editeurs se
decideront sans doute a publier les cliarmans ouvrages de
Sterne , de Mackenzie , de Goldsmith , ces romans moraux ou
miss Edgeworth a continue pour un age plus avance les excel-
lentes lecons qu'elle avail d'abord presentees a I'enfance, et
quelques ouvrages plus modernes que I'Angleterre et la France
ont accueillis avec un egal empressement. A — e.
IV. NOUVELLES SCIENTIFIQUES
ET LITTERAIRES.
AMERIQUE SEPTENTRIONALE.
New-Yohk. — Bateaux a vapeur. — Jamais les cominuni-
cations entre celle ville et les etats voisins n'ont cte aussi ac-
tives que de nos jours : il y a mainlenaiit c[ua'tre lignes dis-
tinctes de bateaux a vapeur, de New-York a Philadelphie;
14 batimens du menie genre sont eA activite sur rHudson , ou
Riviere dunord. D'autres fiaquebots font le service pour Flas-
liing, Sawpits, Bridgeport , New-Haven , Hartford, Norwich,
New-London, et Providence. Tous ces bateaux, au nombre
de3o, partent regulierement de New-York pour leiir desti-
nation respective, et sont employes.principalement au trans-
port des passagers. II serait difficile, et pcut-etre impossible
de determiner le nombre des voyageurs qui s'y embarquent ;
mais il doit etre tres-grand; car il parait qu'il s'accroit aussi
proraptement que les paqnebots a vapeur se multiplient. La
rapidite des passages est d'ailleurs prodigieuse. Les voyageurs,
partis de Philadelphie a 6 heures du matin , vont dejeiiner le
jour suivant a Albany , parcourant ainsi une distance de cent
lienes. M.
I'Tecrologie. — John Adams. — Jefferson. — Ces deux grands
citoyens que la republique des Etats-Unis a perdus le meme
jour, occupent dans I'histoire une place si eminente, et sont si
bien connus comme hommes publics, qu'il ne reste plus qu'a
les peindre dans la vie privee. Cette tache si douce a remplir,
et si utile pour I'instruction morale des peuples , la Jlerue
encyclopecUque ne la negligera point; mais il faut du terns
pour I'accomplir. Nous nous attacherons a recueillir les faits
avec une scrupuleuse exactitude ; oar ce n'est pas un monument
de flatterie qu'il faut eiever a des hommes aussi veneres. En
parlant de vies dignes de servir de modeles, on manquerait
aux bienseances, si Ton cessait un seul moment d'etre simple,
vrai, exempt de toute passion et meme de I'enthousiasme de la
vertu.
Le jour de la mort de ces deux grands hommes fut preci-
sement le cinquantieme anniversaire de I'independance a la •
521 AM^RIQUE CENTRALE.— ANTILLES.
■qnelle ils avnient si pnissnmnieiit concotiru el dont ractejiorle
leurs si^'natui-es. John Adams affaibli p.ir son grand Jit^c
(ga ans) cntendit le brnlt des rejouissances publiques, et il en
demanda la cause ; et des qu'il I'eul connue : voila un bien beau
joui-, dil-il, ct i! expira. JtKi krson , nialade depuis long-lems ,
iieforinait qu'un vicn, cehii de vivre jusqu'au 4 juillct, jour de
ranniversaire, et il en etait bien pres lorsqu'il exprirnait ce
desir, qui fut cxaucc. F.
AMERIQUE CENTRALE.
Guatemala. — Climat. — Commerce. — line leltre adiessee
a la Gazette dv Baltimore , par un jeune Ainericain voyageant
sur les cotes de cetle conlrce dans I'Ocean Pacifique , donne
Jes di'tails suivans sur I'ctat des ports, la salubrite, et le cota-
merce de cette parlie du pays — A Realejo , I'extcrieur des
hobitans indicpie assez I'insalubrite du lieu. Le brick, le Junius ,
dans un sejour d'environ deux semaines, y a perdu Iroishoin-
mes et a eu tout son equipage et ses officiers nialades. San-
Carlos est de pen d'iniportance. Au port de Libertad, leniouil-
lage est mauvais, et il faut transporter les niarchandises a dos
de mulct, a la ville, a une distance de sept licues. L'endroit
passe pour etre sain. Les taxes sont moderees , et on ne paie
pas de droit d'ancrage. Le jeune voyageur atlribiie a juste titre
la pauvreic ct I'ignoraiice du peuple a I'ancienne administra-
tion espagnole. Le gouvernemeut actnel emploie tous les
inoyens convenables pour encourager I'industrie etpour atti-
rer les capitaux etrangers. — Les habilans de ces cotes parais-
sent prcfcrer les niarchandises de fabrique americaine , aux
produits anglais. T,es farines de I'Amerique y trouvent un mar-
cbe a la verile fres-iiniite ; elles s'y vendenl a Ires-liaut prix.
Le tenitoirc aux environs de Realejo donne plusieurs rccollcs
par an , et produit abondanimment quelques articles de snL-
sistance, qui ne demandent que des consummateurs. Avec de
pelits caj)itaux, on ferail faire de rapides j)rogres au commeicc
de cette cote. Le prix de la raain-d'ceuvie y est toiijours tres-
bas. A Lecn et aux environs, la journee d'un ouvriern'est que
de 2 a 3 reaux. Mais , du mois d'aout au raois de septembre ,
les pluies qui font deborder les rivieres , rendent le jiays insa-
lubre. Les maladies ont ett§ , I'anneederniere, plus nonibrenses
que de coulurae, dans la province de Leon; la pluj)art dea
etrangers y ont ete altaquesde fievres intermitlentes. La pro-
vince de Saii-Sahador exporte beaucoup de sucre et d'indigo;
c est la i ariie du pays la plus commercante. A. V.
I
523
ANTILLES.
Haiti. — Emprunt, commerce. — Au moment oil ce nouvel
lilat preiid son rang parmi les peoples libres et gouverncs avec
sagesse , il est important do bien constater sa situation acluelle ,
ind^pendammentde la ronte qu'il a suivie pour arriver a cette
situation qu'il faut dosormais regarder comme son point de
depart , et non comme le but auquel il devait se fixer. Greve,
l)endant cinq ans, d'une contribution extraordinaire de Irente
millions , il ne peut la payer que sur les produils de son terri-
toire ; d'un autre cole, sa population, d'environ un million
dhabitans, qui n'est pas a beaucoup pres le dixitnie de ce
qu'elle doit nalurellement devenir, ne suffit point a Tetendue
des cultures dont I'excedanl fournirait a I'exportation une va-
leur de 3o, 000,000 de francs. 11 est done contraint a suivre
I'exemple des antres nations; il entre dans la voie perilleuse
des emprunis. Mais, peut-il satisfaire aux conditions qu'exige
tout credit? Son etat politique est-il parfaitement stable? Ses
ressources presentes, et surtout celles de I'avenir peuvent-elles
rassurer ses creanciers , et lui procurer un emprunt qui ne soil
pas trop onereux? Des commissaires viennent d'etre envoyes
en France pour cet objet qui est de la plus haute importance
pour la republique liaitienne. II devient done tres-ulile de re-
cueillir sur cette ile des documens authentiques et dignes de
confiance. II est incontestable que, lorsque tout le territolre
sera mis en valeur, et cullive avec intelligence, le seul impot
foncier pourra fournir plus que la sixieme partie des impots
que la France paie aujourd'liui. II suffit, pour s'en cor vaincre,
d'evaluer, d'apres la carte, I'etendue des terres cultivables ,
en comparant le sol d'Haiti a celui de I'un de nos departemens
cadastres, et en tenant comple de la valeur respective des
produits. D'un autre cote, si une partie des lerres encore in-
cultes est vendue au profit de I'otat , et si Ton veut tirer
parti du territoire, tel qu'il est, on y trouvera certainement
une hypotheque plus que suffisante pour un emprunt ; peu
de nations en Europe sont en etat d'offrir a Ipurs creanciers
des garanties aussi reelles. Une autre source de revenus dont
il ne parait pas qu'on ait f;ut usage jusqu'a present, ce sont
ies richesses minfhales de I'ile : elles eurent autrefois beaucoup
de reputation ; et , quoiqu'elles ne puissent etre comparees aux
produits de la culture, elles ont sans doute une valeur qui ne
sera pas negligee. Aujourd'liui que la question politique rela-
tive a I'ancienne Saint-Domingue est irrevocablement decidee,
les rechercljes et les ecrits sur cette ile doivent changer d'objel:
524 AMERIQUE CENTRALE.
il s'agit de la coiisiderer par rapport a la culiure, au com-
merce, a I'indiistrie, aux finances, landis que les chefs qui la
gouvernent s'otcnpcronl dc radministralion interieure , avec
les connaisnnces locales el Jes lecons de I'experience. Les rela-
tions comnierciales avec ce jiays et les moyens de credit que
son goiivcrnement pent se procurer ne inerilent pas moins
notre attention que celle des Hnitiens eux-memes ; c'est done
vers ces objets qu'il fant dirigcr les auteurs de staiistiques.
Dans les questions qni seront agitees en Euroiie, enire la
France et Haiti, il est a desirer que Ton ait de part et d'aulre
des informations exactes, et que le parti que Von prendra
soit conforme a I'equite, c'est-a-dire, a I'interet des deux
nations. ( Foy. ci-apres, pag. 5Gi.)
— Port-au-Prince. — 1% juin 1826. — Enseignemenl mutuel
et enseignemenl industriel. — Notre gouverneraent ne restera
pas en arriere des autres gouvernemens pour favoriser la pro-
pagation des nouvelles methodes qui contribuent d'une ma-
nicre si efficace aux progres de la civilisation. Dans noire heu-
reuse palrie, I'cducation et I'instruction ne sont point livrees
a la surveillance des prelres. Le fanatisme est inconnu. Notre
clerge, respectable par scs vertus, reste modestcment dans les
sublimes fonctions qui lui sont atlrlbuees.
— Legislation. ■ — Code civil. — Introduction du jury. — No-
tre corps Icglslatif, compose Ansenat et de la chambre des
communes , vient de dccreter un code civil, entiercment cai-
que siir le code civil de France, sauf quelques modifications
relatives a nos localites. — L'institution du jury pour les causes
criminelles vient aussi d'etre consacree par la loi. — On s'occupe
de rediger un Code penal et un Code de procedure qui seront
termines et publies d'ici a peu de terns.
— Finances. — Imp6t extraordinaire. — Une lol nouvelle eta-
blit Tin impot extraordinaire, annuel de trois millions de
gourdes (quinze millions de francs) pendant dix ans, pour
I'acquittement de I'emprunt de cent cinquante millions de
francs, contractes en France, qui est A^cXave dette nationale.
— Mines. ■ — Une compagnie anglaise s'est chargee de I'ex-
ploitation des mines d'or et d'argent de la partie orienlale de
1 lie. EUe a obtenu , pour cette exploitation , un privilege dont
la duree est de quinze annees. D'autres mines de cuivre, de
fer, de houille, existent sur plusieurs points et seront successi-
vement esploitees. S.
AMERIQUE MERIDIONALE.
CoLOMBiE. — Liberte dc la navigation par la vapeur. — Un
AMERIQUE MtRIDIONALE. SaS
avis de M. E. Barry , agent de la Colonihie pour les interets
du commerce, avis insen'; dans la feuille deNew -York ( Daily-
advertiser) dii 9 juin i8a6, annonce que, par decret dii con-
gres coiombien , tout privilege exclusif cesse pour la naviga-
tion par la vapeur sur les cotes et les fleuves de la republique,
et (jue cette navigation est desormais livree a la concurrence
des entreprises particulieres. On avait accorde un privilege au
colonel Hamilton pour la navigation par la vapeur sur I'Ore-
noque et ses branches. Les conditions attacliees a ce nio-
nopole n'ayant jias ete remplies par le concessionnaire, le fou-
vernement lui a retire le privilege , etce fleuve raagnillqueest
ouvert a tous ceux qui voudront y introduirelenouveaumode
de navigation. A. de V.
Bresil. — Traite des negres. — L'infame trafic des esclavcs
africains fait au Bresil des progrcs effrayans. M. D'Jndrada ,
dans son mcinoire de 1823 , evalue a quarante mille le nombre
de ceux qui entrent annuellement dans ce pays. Ce nombre
s'est beaucoup accru depuis, et ce n'est pas sans un profond
regret que nous avons trouve dans les registres du port de Rio-
Janeiro les preuves d'un fait aussi affligeant. Void le resultat
d'un seul mois.
Bdumens qui one apporle des esclaves. Nombre d'escl. Marts.
Mars a3. La galtre le Qiialre Avril , de Mozambique. 807 jo
Id. de Fernambouc. loG >•
Id. La goclelte Cutia, du Bengale.
27. Le brick le Grand Rocker, d'Angole.
Avril. 5. Id. I'Esperance , du Bengale.
8. Id.le Trajan, id.
a4. La galere la Nouvelle 'vengeance.
». Id. I'Invincible.
». Le brick la Nouvelle Saintc-Rosc, de Cabinde.
Morts pendant la traversee.
Debarques a Rio-Janeiro.
Ainsi, voiladu i?> mars au 24 avril de cette annee, dans le
rourt espace d'un seul mois , 4)034 negres embarques pour
Rio-Janeiro , sur lesquels 364 sont morts dans la traversee.
Restent 3,670, arrives vivansaleur destination. Les arrivages
ont ete plus nombreux encore dans le mois de Janvier, puis'-
que douze batimens, entres dans le meme port du 4 au 3o,
ont debarque 5,672. esclaves. Portant a une somme egale le
norabre de ceux qui ont ete re^us dans les autres ports prin-
35c,
39
483
84
43i
68
445
i3
555
90
475
5o
•_i'L_
»
4,o34
364
364
3,670 ne
gres.
5a6 AMERIQUE MERIDIONALE.— ASIE.
cipaux du Bresil, nous trouvcrons que, dans I'espace de trois
aiis, Ic trafic de chair Immaine s'y est augmente du double.
Ces infortunees viclimes africaines, depuis le moment oil elles
toinbent dans les mains de leurs atroces persecuteurs, jiisqii'a
celui ou elles touchent la tone d'exil , se voient decimoes par la
luort, durantune traverseequi n'est qu'une longue suite de pri-
vations el demiseres. Lesloisciviles qui aulorisent ces crimes, dit
M. D'Andrada, nesont pas seulement responsabIes<le tomes les
calamites que souffre cette portion de notre espece, mals aussi de
tousles attentats, de tous les meurtres que commetlent les es-
claves, et de tous les crimes que doit enfanter encore, d'ici a
pen d'annces, le d^sespoir de cetle multitude d'homraes de-
grades et ])ousscs a la revoke par I'injustice et par Toppression
et la tyrannic. Ce trafic lionteux, tout- a - fait indigne d'un
peuple Chretien, d'un peuple libre, blesse, a la fois, la religion,
la raison, I'humanite , les vrais interels du commerce et de la
politique. 11 faut que les Irgislateurs du Bresil fassent enfin
disparaitre cette couluine baibarc qui deshonore lenr nation.
« Sortez enfin, leur dit M. D'Andrada, dusommeil lethargique
qui vous enchaJne. Vous ne pouvez ignorer que I'agriculture,
ni aucune Industrie ncsauraient prosperer abandonnees a des
esclaves grossiers et vicieux. L'experience et la raison nous
montrent que I'aisance et le bien-etre sont les fruits de la li-
berie et de la justice et non de I'esclavage et dela corruption.
Si le mal existe, ne I'agravez pas, en augmentant chatjue jour
le nombre de vos ennemis doraestifjues, d'esclaves qui n'ont
lien a perdre et qui auraient tout a esperer dans une insur-
rection contre leurs oppresseurs. »
L'injnstice a la fin produit rindependance. D.
ASIE.
Inue Britannique. — Progres de I'eclucation publique. —
Quels que soient les abus trop reels que Ton a signales dans
raduiinistralion delaCompagule anglaise dansl'Inde {yoy.Rcv.
Enc, t. XXX, p. 3/(4), on peut esperer que, mieux eclalree sur
ses devoirs et sur ses veritables interets, la nation anglaise re-
pandra dans TOrienl les m^mes bienfaits que liii doivent quel-
ques autres contrees. Elle detruira les superstitions barbares, et
fera triomplierles lumieres et la civilisation dans ces pays dont
lespeupleslanguissent, depuis taut de siecles, dans une immo-
bilil6 qui excluait tout espoir d'araelioration. Par les soins du
gouvernement et par les fondalions de simples particulicrs ,
ASIE. — AFRIQllE. Sa?
uiie multitude d'etablissemens ont ele crees, dans ces dernieres
annees, pour donner quelqne instruction aux diverses classes
de la population indlenne. ,Aux quatre colleges de Benares,
Agra, Nuddeah et Tirlioot , on vient d'en ajouter un plus
vaste, dot('; de 80,000 francs de rente, et dans lequel on en-
seigiie la languc sanscrite et la Hlteratiire brahminique. Un
coinitc d'instruction publique a ete institue a Calcutta, pour
former et encourager Ics ecoles primaires et secondaires , qui
ae niulli[)lient d'une manicre elonnaiite. On compte 3ooo In-
dous et Mahometans dans celles qu'a fondiics M. May, ministre
dissident, yjlein de zele et de piete, et qui a reussi, nialgr^
I'exiguiie de ses ressources pecuniaires , a creer 3G eiablisse-
mens; on compte 4000 enfans dans les ecoles de la Societe des
inissionnairesde Calcutta; ily a 2800 garcons indigenes, instruits
aux dppens de la Societe des ecoles de la meme villr; et 400 jeu-
nes fillessont eleveesgraiuitenient dansune institution speciale.
AScrampore. 5oo ccollers recoivent une instruction etendue,
appropriee a leursbesoins , des missionnaires dissidens qui ad-
mellenf sans distinct ion les Indous, les Musul mans etlesmembres
desdifferentessectes clireliennes.il serait troplong d'enumerer
ici tous les ctablissemens de ce geni'e, fondes recemment dans
I'lndeBi itannique; mais nous devons faire unemcntion particu-
llerederassociationformec a Calcutta pour procurer au public
gratuilenient , 011 a tres-bon inarche , des livres utiles aux
ecoles et aiix etablissemens scientifiques. Cette excellente insti-
tution adeja dislribue 10/4,000 exemplaires, dont8,55i en an-
glais, 9,/|8i en snglais-asiatique , 6,538 en indoustani, 7,961
en persan, 3oo en arabe, 3Ao en Sanscrit, et plus de 70,000
en bengal! et dans les autres dialectes indiens. Puissent les pro-
raoteiirs de ces bienfaits en trouver la digne recompense dans
I'esiime j)ublique, et dans le sentiment delicieux d'avoir rendu
de tels services a I'liumanite! A. Moreau de Jonn£S.
AFRIQUE.
Sief.ra-Leone. — Voyage a Vinterieur de C Afrique — La
gazette de Sierra-Leone annonce I'arrivee dans cette colonie
du batiment anglais le Brazen , et son depart j)our le golfe dc
Guince. Le capitaine Clapperton , qui est a borrl dc ce batiment
avec trois autres voyageurs appeles a seconder sa mission, doit
etre debarque sur la cote de Biaffra, afin de se rendre a Sac-
catou, residence du sultan Bello, dont on espere que la puis-
sance favorisera I'etablissement de communications commer-
ciaIes,avecl'Afriquecentrale.L'opinionducapilaine Clapperton,
appuyee sur les renseigaemeiis qu'il a recueiilis dans son der-
528 AFRIQUE.
nier voyage, est f|iic le Niger ou Joiiba, qui ])asse a tres-ped
de distance de Saccatou, a ses emboucluires dans le golfe de
Guinee , et forme le Rio-Lagos et Ics autres fleuves voisins. On
suppose que Ics cataractes de Yourie sont le seui obstacle qui
inlerronipe la navigation lluviale enlre Benin et le pays des
Fouiahs; et I'on se llatte de Tespoir de faire parcourir par un
navire a vapeur, cat ospace immense qui embrasse une region
nouvelle pour les Europeens. On vante beaucoup la bcciute et
la quantitc des pro(iuits, donnes dans les pays environnans ,
par le cotonnier et Tindigotier; et Ton imagine pouvoir vi-
siter Ics mines d'or, qui fournissent aux liabitans de Saccatou
et de Tombouctou ce pr«5cieux metal , qui y est apporte de
I'occident et du sud-ouest. II semble certain que I'identitc du
Lagos et du Niger est connue, depuis fort long-tems , des Por-
tugais qui en ont fait un mystere, afin d'oloigner de leurs eta-
blissemens de la Guinee les auties peuples commercans de
I'Europe. On n'est pas sans quelques inquietudes sur les diffi-
cultes que cette rivalite peut faire naitre sur le chemin des
intrepides explorateursde I'Afrique ccntrale. — Des nouvelles
postt^rieures ont fait connaitre que I'insalubrite du pays ou
sont debarc|ucs les voyageurs, a deja fait succomber le capi-
laine Pearce et le docleur Moxrisson. Le capitaine Clapperton,
apres avoir ete atteint de la maladie qui leur a donn^ la mort,
a quittela ville de Djennah, se diiigeant a travers les monta-
gnes de Kong, sur Katongo, on il esperait arriver en une
douzaine de jours. Les defiles oil il voyageait sont a plus de
800 metres au dessus du niveau de la mer; et quoicjue sous
le huitiemc parallele, il n'eprouvait qu'une chaleur de 3i a
32 degres centigrade, c'est-a-dire semblable a celle que nous
avons eue a Paris, dans les derniers jours dejuiliet; mais dans
la plaine, le thermometre se tenait au 36" ou meme au 87,
29** de Reaumur. 11 parait qu'un marcliand anglais, norame
Houston, a rendu aux voyageurs les services les plus signales ,
tant parson devoument et son activile , que par son influence
personnelle sur les chefs de cette partie de I'Afrique.
M. de J.
N. B. Pendant que M. Clapperton continue avec tant de
courage et de perseverance son penible voyage, un de ses cora-
pagnons , M. Dickson, penetre dans I'interieur de I'Afrique par
le Dahomey et sous la protection du roi de ce pays, qui lui a
fait I'accueil le plus brillant; et le major Laing, deja connu
par une precedente enlreprise , s'approche de Tombouctou, et
annonce, dans une lettre dateed'Ensala, du 4 decerabre 1825,
qu'il a deja reuni d'importans renseignemenssur la geographic
de I'Afrique. J.
AFRIQUE. 5-29
tciPTK. — Extrait d'une lettre ecrite d' Alexandrie , par un
voyageur /'rancfiis. ( i^'' jiiillet 1826.) — Reflexions sur le.i
relations de la France avec une paYtie du Levant , et sur V envoi
de quarnnle jcnncs egyptiens it Paris , pour y etre eleves sous la
direction de pliisieurs savans francais. ( Voy. Rev. Enc. t. xxx,
{). 577. ) — L'etabiissenient des Anglais a Maite ayant ete
occasionc par les premiers changeinens operes dans celte ile,
et par I'invasion de I'Egyple en 1798, on a souvent allrlbue
a ces derniers cvcneniens la diminution du commerce de la
France aveo le Levant. La prevention seule a empeclie de sen-
tir (|u'un changemeiit sifuneste tenait surtouta des causes plus
genoi'ales , et qu'apres une guerre de vingt ans, ou , inalgie
des joprnees gloricnses dans nos annales, la marine anglaise,
deja puissanle auparavant, s'etait enricliie des pertes de la
notre , il elait impossible que le jiavillon britannique ne prit
pas de I'asccndant sur la Mcditerranee. En s'emparant de Gi-
braltar, la Grande-Bretagne a\ait commence a se nieltre ea
possession des compioirs du Levant. Tandis qu'elle entretenait
des relations actives dans tous ces ports, que faisait lu France?
Elle en dcsappreiiait les routes, et abaniionnait successive-
mcnt les avaiitagcs de ses' anciennes relations; elle se laissait
remplacer par des Italiens, ou memepar des Auiricliiens. Noa-
sciilement , nos fabriques du midi njanqnaieiit de debouches;
mais rinf'eriorile de leurs prodiiiis en detraisait la reputation.
A I'cpoque de la paix, au lien de s'occuper a reparer le mal,
on iaissa croitre encore le credit de I'elranger dans ces pa-
rages. Pour rendre de I'activite a noire commerce, autrefois
siflorissant, avec Alcxandrle, il n'a pas failu moins que la pre-
dileclion que montrait pour la France 5Iohammed-Aly. Cetait
une consequence de son projet de rugeucrer cesvieux rivages,
en y ramcnant I'esprit d'ordre , et quehpie chose de celte
impiihion du genie moderne, qui spmblait avoir remonti^ le
Nil , a la suite des vainqueurs des jiyramides. ConsiJerc comme
admir:istraleur de I'Egypte , comme protettcur du commerce,
Mohammed-Aly n'est ]>lus , en quelquc soric, Icmeme homme
qui, par des vues ambitieuses et d'ailieurs impoiitif]ues, mals
surtout contraires aux vues genernles de la civilisation euro-
peenne, a pre^endu s'asservir la Morec, au nom de la Porte,
en remeltant sous le joug toutc la Gr^ce. II ne I'avait pas ineme
atiaquee, lorsqu'il se plut a favoriscr nos commercans, et a
mettre a profit, sous ce rapport, tant de souvenirs honorabies
laisses dans le pays par notre armee vingt ans auparavant. Des
reflexions plus mures persuadcront sans doute a cet homme
T. XXXI. — Aout 1826. 34
Sao AFRIQUE.
fail pour saisir la vt-iitt' , que I'ligypte, la Nubie et une paiiie
lie I'Aiabie liii suffiiaient, que la est sa vraie force, et que ce
serait assez pour sa gloire (ie s'y niontrer actif et huniain ,
prudent ou etlaire.
Propager les lumiores sous le clel meme dc I'Afrique , ce sera
scrvir indircciement, mais sous des rapports essenticls, la cause
des Grecs. Delivr^s enfin d'une agression ])our laquelle le Pa-
cha d'Egyi)te doit etre las dc cousumer ses forces, et d'etre
rinstrument d'line lyrannie odieuse, ils ne pourront qu'ap-
plaudir enx-inemes a ce qn'il y a des a present de plus genc-
reux , ou de plus sage , dans ses vues en faveur d'un peuple
livre si long-tems a la stupiditd des beys, et a la rapacite des
raamelouks. Deja les Grecs domicilies en Egyple y jouissentde
beauconp de securite. Dans les iles de Chypre el de Candie ,
la moderation des troupes de Mohammed-Aly ne permet pas
de regarder Icur chef comme I'ennemi personnel des chreticns.
II est, au contraire , le premier musulman peut etre qui , sen-
tant bien ce qui manque en general au mouvement des es-
prits dans Tislaniisme, ait songe a faire passer chez les Chre-
tiens meme un certain nombre de jeunes g^ns , ])our qu'ils
fussent instruits dans les sciences de I'Europe. Ce ne sont ])as
ces eleves qui , a leur retour dans les villes de I'Egypte ,
s'arnieront contre la Grece ; si on voulait ieur inspircr de
serablables sentimens, on ne les fcr.iit ]>oint passer en France,
ou les resolutions lieroiiques des Grecs ont excite un iute-
ret si vif et si profond. Nous pouvons espcrer, au contraire,
que nos diverses communications avec I'Egypte haieront le
moment d'une pais indispensable aux horitiers des vertus poli-
tiques d'Aratuset dePhilopoemen, poiirarhever, avec I'ajiplau-
disseraent d'une parlie du monde, le grand ouvrage de leur
regeneration.
On ne saurfit approuver indistincteinent loutes les mesures
que jieut prendre un |)acha dans les pays sur lesquels il appe-
santit son bras, tutelaire a d'autres egards ; niais, enfin , Mo-
hamined-Aly desire (jue tons les arts coiicourent a I'ameliora-
tion du sort des Egyptiens, et il s'efforce de naturaliser paimi
eux la civilisation dont les premiers germes ont ele inlroduils
par Taimee dEgypte, ou par les savans qui I'acc jmpagnaient ,
sur une terre illustree vingt siecles avant les progrcs de I'Euro-
pe. II creuse des canaux , il les alimente au moyen de nos ma-
chines, il ouvre et pianle des routes, il ameliore ragriculiure,
et il acclimate des vegotaux elrangers. Abjurant le fatalisme ,
doctrine , pour ainsi dire , asiatique, il (^tablit des lazarets, il
AFRIQUE. 53 1
accueillela vaccine; il creedes bibliotheques, des imprlineries,
des telcgraphes. II a chasse les Bedouins , et cette cavalerie
nrabe qui meltait les provinces a contribution. Tandis qu'une
partie de I'Europe repousse encore la machine a vapcur, elle a
recu le droit de cite en Egyj)te : on j fait jilus, on y inslitue
des ecoles publiques. Deux colleges , ou rcducation est gra-
tuite , sont com])oses de Grecs , de Syriens, d'Arabes, d'Ar-
nieniens; et on a vu le pacha indeinuiser les parens des eleves
pour les determiner a souffrir qu'on donnat de I'instruction ^
lenrs fils. Une sorte de lycee est ouvert pour douze' cents jeunes
gens ; et deja plus de sept cents y etaient reunis , I'annee der-
nierc. On y enseigne plusieurs langues \ivantes, ainsi que
I'anatoraie, la medecine, le dessin et les elemens de la geo-
nietrie. Des ouvrages francais , anglais el italiens y son! traduits
en arabe et en lure, et on les imprime dans I'etablisseinent
racme.
C'csl le resultat de ces premiers essals d'lnstniclion qui a
determine Mohammed-Aly a envoyer en France une quaran-
taine de jeunes Egyptiens, pour y recevoir une education plus
elendue. Son desir est que « ces jeunes gens , a leur tour, soient
en etat de communiquer les connaissances qu'ils auront ac-
quises, el dc propager dans tout le pays I'instruction et la
civilisation. » En peu d'annees, ces jeunes gens auront d^-
pouille, pour ainsi dire, I'homme barbare ; ils transmettront
a leurs compatriotes des idees de justice, des principes d'hu-
manitc ou dephilantropie, desmaximes de cette morale univer-
selle que seconde partout I'education bien dirigee. lis auront vu
dans I'histoire (juelsfurent et leurs ancetres, et ces memesGrecs
dont les descendans paraissent aujourd'hui sacrifies aux com-
blnaisons accidentelles d'une froide politique; enfin, ilssauront
ce que peuvent , pour la prospcrite d'une nation , I'agriculture j
I'indnstrie et le commerce proteges jiar les lois. Sans doiite , ces
idees s'arcorderonl difficilement dans leur esprit avee plusieurs
consequences du systeme qui est encore suivi en Egypte ; mais
le terns achevera de le modifier. II arrivera, par la seule force
des choses, que des liommes, sortis de cette institution nor-
male egyplienne , se placeront a la lete de rinslruction publi-
que sur lesbords du Nil; et , menie apres avoir consolide ses
pi'opres institutions , la Grece pourra recevoir un grand avan-
lage de cette atleinle poitee au fanalisrae, comme a I'esprit
d'incrtie des vulgaires disciples du Coran
53a
EUROPE.
ILKS BRITANNIQUES.
— Tableau des dcrnicrs emprunts Journis par les capita-
listes anglais, a Lonclrcx, indiqitant Ic. prix des achats et
le cours actuel de ces foruh.
!^
1
liMTRUNTEURS.
CAriTAr,
RECU.
" s
MOriTANT.
rERTt.
E51^RD^TE.
— 5
1. St,
1. St.
1. St.
1. St.
Cl'csil
3,20 ,000
80
2,56o,ooo
5o
1 ,6on,ooo
c|6o,ooo
Biictios- Ayres. .
1,000,000
85
85o,ooo
49
4<;io,ooo
■360,000
Cliili.
1,200,000
70
840,000
33
3;|6,ooo
444,000
Colouibie
2,000,OPO
84
i,63o,ooo
26
620,000
1,160,000
Cr)lombie(i824).
4,760,000
88i
4,2q3,75o
28
i,33o,ooo
2,873,750
Daneinavk ....
3,5oo,ooo
7^
2,625,000
54
i,Sqo,ooo
735,000
Giccc
800,000
5c)
472,000
10
80,000
392,000
Giccc (1824). . .
2,000,000
5(>i
i,t3o,ooo
1 1
220,000
qi 0,000
Mfxique
3,200,000
58
1,856,000
38
1,216,000
640,000
Mexique (1S25).
3,200,000
90
2,880,000
45
1,440,000
1,440,000
Naples
2,5oO,OO0
<)''\
2,3l2,500
70
1,750,000
■ 562, 5oo
I'prou
88
396,000
23
joJ,5oo
202, 5oo
Perou(.824). . •
700,000
82
615.000
22
i65,oon
450,000
Espwgne
10,000,000
56
5,6co,ooo
7
700,000
4,900,000
Espagne (1823).
12,000,000
3o
3,600,000
4
480,000
3,120.000
TOTII, EN L. ST.
5o 550.000
3<,62o,25o
i2,38o,5oo
19,239.750
En PRiNcs.
i,263,'7io,ooo
790,5o6.25o
3oc),5i2,5oo
480,993,760
Ainsi, rAnfrletcrre a perdn siir ccs diffcrcns emprunls la
somme enorinc de 19,9.89,750 liv. slerl-, ou ;'(8o,g93,75o fr.,
c"cst-a-dire , environ 61 pour cent.
[E jr. trait du Timf.s, juillct 182G.)
w. D. R. — Qiioiqiiccetie iiolice passe en Angleterre pour un
document assez exact, die n'obtiendra point en Fiance le
meme degrc d'attcraion e' ile confiancc. Qiiel((ues-nns de nos
concitoyens, bons juges en ces malieres, ;)e!)seiit qu'il faiit mo-
dilicr pinsieurs ariicles; ot d'ailktiis, on ne voit fignrer sur ce
tableau ni la France, ni I'AulrJche , ni la Russia, ni la Prusse,
nienfin le Portugal. L'Esi.agne, le Uanemark et Naples sont
les sculset;ils europoens (pie Ton y voie , el nc sont ceitaincr
ment pas l^vS seuls debiteurs de la Grande-Bretagnc.
ManchestV.r. — Sccoursdonnes aux ouvriers re.sles sans pain
par la stagnation du commerce. — Celte annee qui a commence
ILES BRITANNIQTJES. 53^
sous les auspices les plus deplorables pour I'exploilalion
des rnanufaclures en Angleterre , iie laisse pas encore pre-
voir le terme des maux cpii affligent cclte classe immense
d'oiivriers renvoyi'S des ateliers. C'est a Manchester , que
Von- peut rctjarder comme la premiere ville iTianufacIuriere
de la Grando-Bretagne, que la trise acluelle s'est manifestee
avcc le plus de violence. Le mal qui avait loujours rte
en croissant depuis le mois de Janvier , devint alaimant ,
vers la fin de mars ; des lors , nne pliilaniropie active
lie cessa d'offrir des secours aux milliers d'inforlunes qui sc
trouvaient livrcs aux angoisscs de la misere. L( s citoyens vin-
rent a I'envi deposer leurs offrandes. Les sousc.iptions ct les
dons ii'etaient po-Int regies sur la fortune dc ceux qui don-
naient, et la generosite n"avait aucun besoin d'etre excitco par
I'exemple. Sans compter les pauvres nourris habilnellernent
dans les etablis5eniens (!e charite , lenombre des indigens, re-
durts a cet elat par les circoiistanccs, s't'leve aujoiird'hiii, pour
Manchester ct Salford (1)58 65, 000 indlvidus qui, depuis trois
mois, sont alimentcs par des fonds extraordinaires coniies aux
comites de bientalsance. La soilicitude des citoyens respecta-
bles qui comjiosent ces comites nc se borne pas a dislribuer
indislinclement des secours: elle s'attaclie a verifier dansl'inle-
rieur des families la realite des besoitis. Deux comites se parta-
gent les solns, que reclame la repailillon de ces secours ; I'lm
est cliarge de la reception des fonds, de rexamen a domicile
de la position des necessiteux, de la distribution des cartes de
chante et du visa de ces cartes, au moment de la livraison des
vivres. L'autre coinitc s'occupe de I'achat des de.nrces. Chacpie
carte coute a la caisse de secours 18 pences par semaine, et
vaul 3 slieliings pour celni qui la presente a la distribution,
piiisqu'cn proportion de la valeur de sa car!e, il recoil des vi-
vres au prix auquel ils ont etc achetcs en grande quanlite. Au
jour indique, le portcur vient niontrer sa carte au bureau de
secours de son cparlier, ou elle est revelue d'un vifii; puis, elle
lui est rendue, avec trois bons de la valeur de six pence tha-
cun, et portant I'un, nne llvre de lard sale, I'antie dtux livres
et demie dc farlne, etie troisieme, vingt li\res de jiommcs dc
terre, ou une certaine mesnre de pois. Les magasins do ces
differentes especesde co'.nestibles sont situes tous les deux au-
(i) Salford forme une ville partlcnliere , independante de I'adminis-
tralion de Manchester; tuais elle nVst separee de cette derniere que par la,
riviere d'Airwell.
534 , EUROPE.
pres du bureau des bons. On peut facileinent juger, d'apresces
donnees, quelle somme enorme a deja tile employee aa soula-
gement des pauvres oiivriers, et quels sacrifices exigeront en-
core les riouveaux besoins ([ui se d(5clarent chaque jour. Ce
tableau de la misere, quoique deja tres-affligeant anjourd'hui,
deviendrait desesperant, si, d'icia I'entree de I'hiver, un nou-
vel elan n'etail donne aux vastes operalions commerciales de
ce pays. • D. Albert.
Publication des livres sacres et historiques dc Ceylan. — Sir
Alexandre Johnston , qui a rempli a Ceylan les fonctions de
premier jiige, ctque sesconnaissances ont porte a lavice-presi-
dence de la Societe Asiatique de Londres , tend anjourd'hui
a I'erudition un service non moins signale, que celui dont la
civilisation lui etait deja redevable parretablissement du jury
dans cette grande colonic angiaise , ( voy. t^- dessus , p. 5 ).
II a remis a M. Upham les livres sacres et historiques de cette
ile, traduits en anglais du Pali. Un prosjieclus, public jjarce
dernier, et que nous avons sous les yeux , en annonce la publi-
cation par souscription, en deux beaux volumes in - 8°. Sir
Alexandre Johnston a surveille lui-meme cette traduction faile
sur le Pali, et il aensa possession le manuscrit chingulais. Cette
edition comprendra :
Le Maha-Vami; ou la doctrine ^ la race et la genealogie de
Bouddha ;
Le Rcija-Vall ; ou la serie des rois ;
Le Rhja - Ratnacari , ou la Mine precieuse, ou I' Ocean des
rois.
On sait que I'ilc de Ceylan a toujours etc reverc^e par les
sectateursde Bouddha, comme la patrie et le sejour de Guad-
ma, leur divinite supreme. Tous les pays des regions indo-
chinoises la reconnaissent comine la source primitive de leurs
lois et de leur doctrine. Mindesagee-Praw , predecesseur lie
I'empereur actuel des Birmans, envoya a deux reprises, a Cey-
lan, des pretres instruits , afin de s'y procurer des copies
exactes des livres sacres qu'il jugeait necessaires pour raniener
le culte Birman a sa simplicite primitive. La doctrine du Boud-
dliisme , dans sapurele,sc retrouve coinpleteraent dans la
traduction du Maha-Vansi.
Les deux livres Palis de I'histoire chingulaise, le Raja-Vali ,
et le Raja - Ratnacari nc sont pas moins iraportans, comrae
contenant beaucoup de documens historiques origiuaux que
I on ne pourrait puiser a aucune autre source.
En se procurant ces livres precieux, sir Alexandre Johnston
a fait preuve de son zeie pour les progies de nos connaissances.
ILES BRITANNIQUES. 535
II s'est montre le digne ernnle du celebre fVilliam Jones, don t
les travaux out si puissamment excite I'esprit d'examen el dc
recherclies dans les mines si riches, et que Ton n'avait point
encore exploiteos, des ouvrages palls et sanscrits.
Les progres et les deconvcrtes de I'Eiirope dans la littera-
ture orientalc out prouve I'itlenlite parfaile des divinites clas-
siques de la Grece ct de Rome, ct de celles de I'lnde. Les
iidmiraleurs des brillantes fictions de I'antiquite doiveni desor-
mais en cliercher I'origine siirles rives de I'lndus et du Gange.
Les livies sacres et I'histoire de Ceylan n'ont pas seulement
une grande importance classlque et litleraire; on doit les con-
siderer encore, entre les mains des Anglais, comme un puis-
sant moyen d'obtenir sur les liabitans de rimmense contree
soumise a leur domination , une influence toujours croissanle.
Des millions de leurs sujets dans I'lnde suivent le culte de Bra-
ma. Leurs ■victoires sur les Birmans ont range sous leurs lois
des provinces qui professent celui deBouddha. Les dcuxcultes,
quoique tout-a-fait distincts, se touclient par beaucoup de
points. Les sectes diverses de I'lnde oftVerit loules les grada-
tions du polylheisme, depuis les rites barbares de la vie sau-
vage, les sacrifices humains , I'adoralion du chien et du tigre,
jus((u'aux prcceptes plus doux du Bouddliisuie. Sa doctrine la
la plus pure, offerte en exemple aux Indous dans les livres sa-
cres qui la rcnf'erment, peut devenir le premier instrument do
leur civilisation , le premier moyen d'introduire chez eux un
meilleur systeme social.
Un Essaisur le Pali, public a Paris, conlient un extraitdu
Raja-Vali, dont I'objet est d'etablir les eres du Bouddhisme.
On peut csperer que d'aufres parlies des livres hisloriques
scrviront aussi a etendre nos connaissances sur les grands em-
pires de rindus et du Gange, et sur les croyances pi imitives du
genre humain.
Tels sont les motifs que fait valoir I'editeur en faveur des
livres sacres et de I'histoire de Ceylan, II y joindra un Essai sur
le Bouddhisme, avec des notes liistoriques et lilteraires. Celte
publication ne i)eut manquer d'etre accueillie generalemenl par
tous ceux qui s'lnteressent aux progres des lumieres.
Le prix de la souscriplion est de i 1. st lo sh., payables en
recevant I'ouvrage. On souscrit chez les principaux libraires
de Londres, et ;\ Paris, chez Doiidev-Du[)re, Renouard, eic.
A. de V.
Necrologie. — Weber 'J2h(irles-Mane dc), inorl a Londi < s,
le 5 jiiin 1826, naquit a Eulin, petite ville du Holstein. Des
son enfanro, il manifcjla le gorit le plu'i \ if poin' les beaux-
536 EUROPE.
arts, et surlont pour la niusiqiie et la peinture. Le pere cic
Weber, loin d'opposer lies obstacles a la noble passion de son
ills, le condiiisit a Hidbouigliausen ci lui donna pour maitrede
piano Heiischel , habile instruuienliste sons lecpiel il fit dts pro-
gros ra[)idc's ; place des lors par son talent d'execution ;iu rang
des bons ])ianistes de I'Opoq'ie, il fnt cnsuite confie a Michel
Haydn qui pouvait Lien egaler son fnre Joseph en .science,
niais qui elait loin de ])osscder conimc lui cetle biillante
imagination , I'aine de toule production des arts. Weber,
qui se sentait sans ccsse tourmcnie par ses idecs , ne put se
plier a I'espril sec et melliodique d'un tel inailre ; il ne tira
point de i)rofit de ses instriiclions. En 1798, il pidilia son pre-
mier ouvrage. Six Fugues a qualre parlies ; tons les composi-
teurs s'accorderent a vanter la jjurete et la correction de son.
style. II se rendit ensuite a Munich, pour y prendre des lecons
de cliaut, exeinj)le que tout comi)oslicur dcvrait iiniter, siir-
tout en France. Ce fiit Valesi Cjui lui ensei!j;na cetle parlie si es-
sentielle de la niusique. Entin , il terniina son education mu-
sicale sous Kalcher, et les lecons de ce niailre furent cclles dont
il profita le plus II coinposa sous ses yeux divers ouvrages pour
I'eglise, le theatre et la chanihre. En 1800, parut son opera
de JVeinshcrg qui obtint un grand succes sur les theatres de
Dresde, de Prague, de Berlin et de Saint-Petersboiirg. 11 avait
alors (jualorze ans. Cctle prodiiclioii lui sembla dans la suite
indigne de lui, paice qu'elle n'offrait que dcssaillies quia ses
yeux ne jiouvaient constituer un bon ouvrage: plus tard il en
publia une ediiion r.ouvelic, enliprement refondue.
Tout-a-coup, un article du Journal de musique remue
toutes les idtes de AVeber; il i/uagine de rernellre en vogue
plusieurs instrumens abandonnes et d'a]i]>eler a son secours
toutes les formes serrees et vigourcuscs de I'ancien conlre-
point, sans pourfant cesser d'etre exjiressif et dramalique :
il esjicrait tii-er de cetle combinaison des etfets nouveaux et
piltoresques, ct c'est dans ce systeme (jii'il coniposa Pierre
Schmoll. Cette tentative n'eut aueun succes; mais les eludes
auxquelles 1 auleur avait etc force de s'appliquer pour ecrire
cet ouvrage lui furent dans la suite d'une grande utilile : il
re s'avisa plus de prt'iendre tirer de I'oubli des insl rumens
tombes en desuelude, et dont I'usage est, en general, peu
regrettable; mais il parvint a se rendre maitre absolu de son
orchestre, a en fondre habilement toutes les parties el a
tircr des vieilles formes du contrepoint des idees tout-a-fait
nouvelles et remplies de la plus piquante originaliio.
Weber voyagea eusuile jusijn'a I'age de i8 ans et parcouiut
ILES BRlTANiMQLES. 5^7
divcrses contr^es de rAUemagne formant des collections d'ou-
viages theoriques et ])ratiqijes, reciieillant les conversations
des savans et des lioiumes de gout , el rysseniblant de toutes
[•arts les inatcriaux d'uii grand ouvrage qu'il nieditait encore,
loc.qne la niort est venue le frap[)fr. La fortune de son pere
lui donnant uiie existence lieureuse et independante , il put
s'adonner pendant deux annees constculivesal'etnde desijrands
niaitres. II etait a Vieniie et piofitait des conseils du celebre
abl)e Vogler, lorsqu'il fnt appele a la dlrectinn du theatre de
Bresiau. Arrive dans cette vilie, il y forma un orchestre nou-
%'eau , et a])prit par divers e.'sais a connaitre parfaitement les
resultats divers des voix et des inslrumeris , soit reunis, soit
separes. Bicntot il se fatigua des soins d'aiiininistration aux-
quels I'astreignait sa jdace et accepta la proposition qui lui
fut faite ])ar le prince Eugene de Wnrtemberg de venir s'ela-
blir a Carisruhe. Dans ceite ville, il I'crivit divers morceaux de
muslque instrtimentale et nne cantate qui oblintun trcs-grand
succes. Weber repnt, quelque tems ajires , le cours de scs
voyages et composa , pendant son sejour a Vienne, son opera
d' Jhoul Hassan sous les yeiix de I'abbr^ Vogler.
El) i8i3, on ie nomma directeur de TOpcra de Prague; ils'y
coridulsit conime a Bresiau et le public applaiuiit .i toutes ses
refonnes. Enfin , il prit, en 1816 , la resolution de quitter tout
eniploi qui pourrait le distr.dre de la coinposilion. Mais de
tons cotes on lui fesail les offres les jdus scduisantes , il finit par
ceder au rol de Saxe qui le nomma son maitre de cliapcUe; il
vint done a Drcsde oil il fonda nn theatre d'opera allemand.
Ce fut dans cette capitale qu'il composa deux messes , plusieurs
cantates de circonstances et son Fieyschulz , connu en France
sons le titre de Robin des hois. Ce grand compositeur sernble
avoir reiini toutes les puissances de son esprit pour cet admi-
rable ouvrage. Avec quel talent sa bouillante imagination sait
eviter les ecarts, comme il narait tout-a-coup maitrise par les
regies, au moment ou Ton croit (|u'il va les violer. Quelle diffe-
rence enire eeltc ctonnante production et celles qui inondent
anjourd'hui la scene et n'offrent que des fragmens de melodic
sans suite et sans ensemble, aiixquels se trouve accolee une har-
monic plaie et mestpiine. La point de ces pretendus ornemens
au moyen desqnels on croit deguiser la jjauvrete du fond et
qui sont Je lout point semblables a ces vers a ef/i-t qui , dans la
poesie, frappent les geus superficiels, bien qu'ils ne presentent
(jue des pensees vides ou rebatlues. Et ijue Ton ne pense pas
que c'est seuleinent rimagination ([ui aninie Weber; ceux qui
ont travaille la composition s'apercoivcnt facilcment, en etu-
538 EUROPE.
tliant ses i)ailitioiii; que soiiveiit ses plus heureuses inspira-
tions sont le resultat des combinaisons liarmoniqiies que lui
fournissait la science appiofondie du contrepoini, science
traitoc aujourd'liui avcc une cxtri^me legerete et sans laqueile
cepcndanL un compositeur u'obiieiidra jamais des succes du-
rables.
Enrianthe , opera que Weber composa depuisle Freyschutz,
obtint un succes uieritc a plusieurs cgards, puisqu'il renferme
|)lusicurs niorceaux du premier ordrc. Nc'aniHoins , ii est fort
inferieur au precedent; son caractere est en general lugubre
et pea aniiuc. Cel ouviage ful le dernier que I'anteur ecrivit
dans sa pati ie : il se rendil a LonJres pour y composer I'opcra
d' Oberon , ou Ic roi des nains , et conduisil I'orcheslre a la pre-
miere reprcscntalion , qui eut lieu, le 12 avril dernier, sur le
theatre de Covent- Garden. Les papiers anglais ont beaucoup
vanle celte production, qui ne tardera pas a etre connue en
France ( I ).
L'atmospliere de I'Angleterre ne pouvait etre favorable k
Weber, attaque depuis long-teras d'une affection pulmonaire.
Le mauvais elat de sa sanlci ne lui permit point de frequenter
la societe de Londres; ses amis ne tarderent pas a reraarquer
en lui un grand changement d'humeur : il temoignait sans cesse
le desir de reiourner dans son pays; et, lorsqu'on I'exliortait
a ne point precipiter son depart, il tombait dans une extreme
tristesse. Toutefois, les raedecins ne jugeaient pas qu'il dut
etre si promplement moissonne; et , la veille meme de sa mort,
le danger ne leur paraissait pas imminent. Weber n'avail point
perdu Tappet il, un de sescorapatriote soupaavec lui, le 4 juin ,
et le (]uiita vers onze heures , le laissant dans un etat calme en
apparence. Le lenderaain, a 7 heures du matin, il avail cesse
d'exister. II ciait dans sa quarantieme anisee. Ses funeradles
onl ele celebrees avec la plus grande pompe a I'cglise catholi-
que de Londres; tons les musiciens qui se trouvaienl dans
celte capitale se sont fait un honneurde concourir a I'execution
du Requiem de Mozarl et de donncr ce dernier temoignage
d'interet el d'admiralion a la meraoire du celebre auteur du
Freyschutz.
Weber n'etait pas seulement un grand compositeur, il avail
une vaste instruction , ccrivail tres-puremenlsa langue el par-
(i) Deja I'liQ de iios plus habiles profesieurs de harpe,IVI. Stockuau-
srN , u public le premier iicte 6'Oberon , arrange pour harpe et piano :
cette prodaction , doiit le siiccts u'esi paj doiilenx, se frouve chez I'au-
Jeiir, rue dii Paradis-Polssnnniere , n^ iS.
RUSSIE. 539
lait lesautres avec assez de correction. 11 contesia rinvenlion
de la Uthofirapl.ie a M. Senefelder, et fit , a cctle occasion , plu-
sieurs experiences qu'il ne tarda pas i abandoinier , pnrce que
ces operations iui semblaient loules materielles ct peu dignes
d'occuper son active imagination.
Weber est ai.tcur de plusieurs poesies repandues dans ditte-
rens recueils. II laisse im nianuscrit intitule : la Fied'unjeune
artiste 11 parait qu'll a renferme dans ce cadre diverses aven-
tures de sa jeunesse et porte des jugemcns sur les pnncipaux
compositeurs qu'il a connus J- Ad.ukn-Lafasge.
P.USSIE.
Traduction des ecrivains grecs. — Malgre quelques impor-
tations de la Muse romanlique en Russie, nous voyons avec
plaisir nu'on s'y occupe encore de I'ctude des classiqnes. Les
Feuilles bibliographiques ]mbliees a Saint - Petersbourg par
M. KoEPPEN , font mention , dans lenr mimero du 23 aout
1825, des travanx de M. Martinof your naturaliser les ecri-
vains grecs dans sa patrie. Void la li>re de ceux qu'd a deja
publics : 1° les Fables d'Esope; 2° les Hymfies de Callimaque,
avec des observations; 3° cinq tragedies de Sophocle (OEdipe-
Roi, Antigone, les Trachiniennes, Ajax fnrieux, et Plnloc-
tete ); et 4° dlx - buit chants de VJliade, avec une notice
sur Homere et des observations, formont trois volumes. En
ce moment, on imprime un 4'= volume d'Homere, et YElectrf!
de Sophocle. En outre, I'auteur promet de donner , dansle
cours des a.mees 1826 a 1828 , 1'Odjssee d'Homere , les OEu-
vres de Pindare, VHisloirc d'Herodote, le Traite du Sublime
de Longin , et les Odes d'Anacreon.
M. Martinof s'etait deja fait connaitre depuis long-lems , en
Russie, par la publication de plusieurs journaux , entre autres
les Muses, le Courrier du Nord el le Lycee ; par des traduc-
tions du francais et par des ccrits originaux sur la botanique.
E. H.
Odessa. — Monument consacre au due de Richelieu. — Voici
des details sur le monument qu'on eleve dans cette ville au feu
due de Richelieu, et qui avait obtenu I'approbation de I'empe-
reur Alexandre.
La statue, qui doit etre placc-e au centre du boulevard
neuf, sur I'esolanade qui domine le port, rcpresente M. de
Richelieu en costume antique, avec une couronne civique sur
la lele , el tenant un rouleau dans la main gauche; dc la droite,
il monlrele poi I d'Odessa , commeun de ses plus grands turw
54o EUROPE.
dc<jloire, et semble indiqiiera la Russie, par ses regards four-
litis vers le nord , la source de richesse el de prosperiie qu'il a
ouverte a cet empire. Les Irols bas-reliefs roprc'sentent I'agri-
cultnrc, le coininerce et la justice. L'inscription en langiie
russe, porte ce qui suit : « A la memoire (C Emmanuel , due de
Ric/ieiieu , qui, depuix iSo"} j'usqu'en i8i/(, a gouverne la^
Nouvellc-Russie , et qui a pose les fondcmens de laprospcrite de
la ville d' Odessa ; les hahitans reconnaissans , de toutes les
conditions tanl de eetie villc que des gouvernemens de Calheri-
noslavle , de Cherson et de Tauiide , out elcve ce monument, I' an
i%i6,sous I'administration du comte Voronzof,gomcrneur-
general de la Nouvelle Ilussie. »
Le pii'deslal seia execute en granll rose, tire des rochers
qui bordcnt le Boug, dans les environs de la -ville de Vosne-
zensk. Les qnatre blocs qui le composcront scront inccisam-
nient transportos de Vosnczensk a Odessa.
Cl.aciin, selon scsmpycns, a voulii contribuer a ce monu-
ment. Nous citerons memo les hordes de Nogais, etablis par
M le due de Richelieu, il y a dix-huit ans sur les bords de la
Molotchnaya ( gouvernement de Tauride ) qui , malgre les de-
sastres qu'ils out eprouves dans ces dernieres annees par la se-
cheresse, les sauterelles et la stagnation du commerce, ont
envoye leur contribution pour la construction du monument
eleve a la memoire de Icur bienfaiteur. Y.
NORVEGE.
Christiania. — Unifersice. — L'universile de cette ville
compte aujourd'hui deux professeurs j)nur la theologie , \u\
■ponv \n Jurisprudence , tpialre de 7«rV/ec««e. Deux professeurs
y enseignent les langues latine et grecque ; un troisieme, les
langues orienlales. \J hisloire , les mathcinatiques , ]ap//ysique
et la chimie , Yhistoire naturelle, la hotanique , la tnineralogie ,
Vastronomie el la philosophie sent professees par differens mai-
tres; et Ton pent y ajiprendre en outre les langues allemande ,
francaise , ariglaise et italienne. On s'elonne avec raison de
voir qu'il n'y a qu'un seul professeur de jiirisj)rudence ; ce qui
evidemment ne siifiit point. La philosophie semble aussi ^tre
un peu negligee. Ne pourrait-on pas desircr encore qu'il y eut
un professeur A'economie politique , et qu'il ne ful pas permis
aux professeurs de I'universite de cnmuler d'autres fonctions
publiques, qui les empechent de remplii' leurs devoirs les plus
imjiortans.
La meme universite a celcbre, depuis quehiue terns, deux
ALLEMAGNE. 641
f^tes publiqiies : la premiere, ie 10 novembre i8'i5, en coni-^
memorationtle la reformation de Lutiier; la seconde, le 26 fe-
vrier iiSaG, anniversaire de la naissance dii roi actuel. Aces
occasions, M. Buggk, professour delangue laline, a public deux
programmes d'invitation, doni le premier tiaite de I'cspiit dans
lequel un vrai liitlicrien doit, lire lessaintes Ecrilures; I'autre a
pour sujet les diffiirens litres d'honncur que le scnat de Piome
a decerrcs autrefois a plusieurs grands liommes de la repiibli-
que et de rempire, tels que ceux d'lrnpcrator, Ac Princeps Au-
gustus, et celui de Pere dc la patrie , accordc d'abord a Caniille,
plus lard a Ciceron, et 11 (jiielques autres boinmes uioiiis di-
gnes de cette distinction. L'auteur du programme demnnde
que le meme litre soil decerne a S. M. Charles - Jean, Roi dc
Suede et de Nor\egc. Heiberg.
ALLEMAGNE.
Prusse. — KoENiGSBERG. — Socictc p'lur V amelioration dcs
jeunes criminels. — La fondation dc celte societe est due a la
philantropie ardente et eciairce d'un jeune liomme que nous
avoiis vu a Paris, il y a un an : RL Edouard- David Fried-
lander, neveu d'un medecin-philosojilie du meme nom , dont
les recherches snr I'education d-.;» enfans et sur la morlalite
sont bien connues. En quitlant Paris , M. Friedlander se ren-
dit a Londres, oil il fut aecueilli pyr M^l. Buxton , Gurnej,
Cunningham , JHoare, et la celebro el admirable rnadame Frj ,
qui, comme on le sait , ont veritablement provoque les der-
nieres ameliorations introduilcs dans les prisons de I'Angle-
terre. A Paris, il avait aussi connu ijutlques amis zebis du
bien qui ae sont niiienient occii]k;s du meme objet.
De refour dans sa patrie, M. Friedlaru'er a voidu luifaire
partagiT les bienfaits des utiles institutions qu'il avait appris
a connaitre. 'Non-seulement , il a determine la creation de la
societe que nous annoiicons, mais encore il a fait ouvrir,
sons son inspection, un asile ou , le 27 juiliet de celle annee,
dix enfans diriges par un maitre habile et doux , donnaient
deja des prcuves fju'ils abandonnaient la \oie du vice pour
entrer dans celle de la verfu.
Les aulorites de Ivoenigsberg ])rennent , ainsi que tousles
ciioyens, un vif inleret a cet etablissement. Enfin, le regle-
raent de ia maison, ou i'on on.piera bientoi \;n jilus grand
nombre d'enfans , et les stainis de la societe sont maintenant
soumis au Roi de Prusse; et »i nous en croyons notre corres-
pondant, on altend de Sa Majesle d'autres avantages qu'une
54« EUROPE.
simple sanction, qui seiile cependant conlribucrait an succes
lie I'entrepiise de M. Filedlnnder. V.
Hallk. — Littcrature orientale. — PuBlicatlon prochaine. —
Depnislong-tcmsles amateurs de litteratmearabe demandaient
avec instance une edition complete de V Anthblogic , appelee
Hnmasa. Us n'en avaicnt a leur disposilion que ce que Schiil-
len en a donne dans la grammaire arabe d'Erpenius. Dans
un prospectus francais ])iiblie a Bonn , M. Treytag vient de
developper Ic projel qn'il a concu , de salisfaire au voeu des
connaisseurs. Le public et le gouvernement fnvoriseront sans
doiile une enlreprise anssi penible et aiissi dispendieuse, qui,
selon la remarqiie dii celebre Gesenius dans la Gazette de
Halle, porte sa garantie dans le nom meme de son autenr.
II donnera le texte arabe, et le commentaire de Tebrizi ; le
texte sera imprime avec les voyelles : le tout formera de 90 a
100 feuilles in -74", qui ])araitront en six livraisons , et coule-
ronl chacune 10 fr. L'impression sera commencec des que le
nombre des soiiscriptenrs sera suflisant pour couvrir les frais.
Sile succes de Touvrage repond a ce qu'on a droit d'en atten-
dre, M. Freylag y joindra une traduction latine et un com-
mentaire SUCclliCl. P. DE G.
SUISSE.
ExTR \iT crime Lettre. — Coire , i o aoilt 1826. — Coup-d'ceil
sur I'elat actual du canton des Grisons. — Vous avez visile les
Grisons, il y a vingt-cinq ans; si j'avais le meme avantage, je
pourrais, en rapprocliant les progres effectifs de la civilisation
des causes qui les ont ralentis oufavorises, rendre beauconp
pins instructive I'excursion que je fais aujourd'hui dans leur
pays. Quoique cet intcrct maiKjue a ines remarques, il est en-
core ciirieux d'observer les vieiiles mceurs, deja ebranlecs par
le contact de la revolution francaise, en presence des interets
nouveaux qui les modifient rapidement.
S'il faut en croire de vieiiles traditions , les Grisons , sortis
iibres de leur lutle avec rAuIriche , n'ont point encore repare,
depuis pres de 4oq ans, les nianx que leur avait fails celtc
()uissance. La population du j>.iys , qui est a peine de 90,000
ames, a, disent-ils, etc double de ce nombre, et c'est sur les
tombeaux de leurs peres, sur les mines de leurs chauroieres ,
que leurs ancetres ont conquis la liberie. On concoit , surtout
loisqu'on vient de visiter le royaunie lombard-venitif^n, qu'un
amour i).'issionn('' de I'independance ail survecu a celte lulte
glorieuse, el (jue cette independance ait long-Iems ete le but
unique et la base de tonle I'organisalion sociale du pays. Si les
SUISSE. 543
hommes du teins jadis tevenaient aujourd'hui, ils s'indigne-
raient sans doute de voir les Grisons aplaiiir eux-memes le
renipart naturel des Alpes, provoquer rexploitalion des mines
oil Ton ne voyait autiefois qu'im appiitpour la cupiditede 1 e-
Iranger, renoncer a I'anticjiie pauvrete et preparer, dans les
besoios qu'ils se crecnt, des moyensd'action a la tyrannic. Mais
les terns sont changes; la gueire est devenue une Industrie
meurtriere qui exige d'enormes capilaux ; la seule bravoure ne
sufiit plus. Les Grisons, quoi qu'ds fissrnt, ne sauraient au-
jourd'hvii repousser seuJs I'invasion d'une grande puissance;
Jes garanties de leur independance cnt cliang^ de nature; elles
se trouvent acluelleinent dans les jalousies des rois f{ui voient
de mauvais ceil les agrandissemens de leurs voisiiis, dans leur
reunion a la Suisse , dans le besoin de repos de I'Europe , et
surtout dans I'esprit des peoples: tous les hommes eclaires de
I'Europe , tons les amis du bonheur et de la liberie des nations
sont aujourd hui compatriotes, quelle que soit leur langue ;
celte sainte alliance au berceau s'affennit autant par les obs-
tacles que par les succes , et les gouvernemens en subissent
nialgre eux I'influence.
Tranquillcs siir leur existence politique, les Grisons se li-
vrent aujourd'hui avec securite a ramelioration de leur pays,
et elle niaichera d'autant plus rapidement , qu'une grande
amelioration morale s'est inlroduite dans leur democratic, de-
puis que la Valteline a cesse d'etre leur sujette. L'exercice du
pouvoir corrompt I'homme, a dit Washington; la chose est
surtout vraie , quand Ic pouvoir est exerce colleclivement et
sans responsabilite. Les Grisons, ayant toujours eu le bon sens
de n'attacher que de tres faibles emoluniens a leurs niagistra-
tures, les ambitions des prctendans aux fonclions publiques se
tournaient nalurellemeiit vers les bailliages de la Valteline :
celte ])rovince , tres - mal et Ires - despotiquenient admi-
nistree , payait, comme de raison , de Ires-forts appoiiitemens
a ses baillis. Les nominations etaient failes par les communes
de la Ligue Grise, et c'etait par l-js moyens de corruption
grossiers qui conviennenl a une democratie ignorante, que
s'obtenaient les suffrages; les depenses des elections faisalent
passer une partie des benefices du bailliage cntre les mains, ou
plulot , dans le gosier des electeurs ; ia paresse , I'ivrognerie,
ia demoralisation qu'alimentaient les depouilles de la Valte-
line, piinissaient ses souverains de leur injustice et de leur
durete.
L'affranchi^sen^cnl de la Valteline a cte I'un des resultats
des victoires des armees francaises en Suisse et en Italic; elle
544 EUROPE.
est depuis tombt'e sons un autre joug; qu'elle ne le rejiroche
pas a la France! les fruits tres-r'''els de cetle separation sont
aujourd'liul recueillis par les Gi isons qui, m.ilgre les jicrtes de
fortune que cit evenemcnt a eausees a quelriues families, en
eompreiincnt tout I'avautage. La ('(UTuplion politi(|ue s'eteint,
faute d'aliincnl; le premier uiaf;islrat de la republique n'a
qii'un traiteineut d'envirou a,aoo fr. de noire monnaie:; la cu-
pidile s'est cloignec des emplois ; le jiatrioli-ime et les liunie-
res presrnlent seuis des caudidals au i)eu])le; les citoyens,
degages de I'euibarras ct des vices qu'cngoiidie la domination ,
sont tout cnticrs aux veiitablcs interets du pays.
Deja la contree a chaug^ d'asiu'cl a plusieiirs egards; na-
gueres, elle etait a jieu pros iriaccessible; on y arrive nujour-
d'hui, de Zurich et de .Suint-Gall , par des routes passables, et.
le canton en a fait d'excellentcs de Coire a Bellinzona et a
Chiavenna, par le Saint-Dernardin et le Splugen. I^a ])rcmiere,
dont la seconde est un embrancliement , a 128,000 metres
( 32 lieues ) de longueur; le col des Alpes qu'elle traverse est
au niveau de celul du IMont-Cenis, ct les obst.TcIes a franchir
etaient a peu pros les memes des deux cotes. Comme le canton
des Orisons n'a ]ioint ces administrations qui paralysent sou-
vent les entreprises d'utilite publique, ces Sa lieues de route
ont ete exccutccs en irois ans. On a jete sur le Rhin , a Rei-
chenau,un ponten bois d'une seuiearche de G8 metres d'ouvcr-
ture; les plus grandes difllcultes nyant ete franeliies ou evitees
avec une sagacile el une ccononiie adiuirables, la route parait
ctre revenue a environ 10 fr. par metre couranl.. Cette route
donne passage a une immense quantite de marcliandises de
ritalie, de soies surlout, qui se rendcnt, en Al!en)agne, en
France et en Anglelerre : ninis,dans ce bien meine se trouve un
des nonibreux abus Cjui liennenl a rancienneignorance, et dont
le tenis fera justice; la route est engrande ])ailie I'ouvrage des
communes ; elles ont voulu reparlir enti c elles les beneiiccs du
transit; et, pour y parvenir, on a ordonne un dechargement
force a Coire, ou les habhans des communes environnantes
chargent a toiu' derole :les voituriers perdcni un tPiv.s enorme
a atlendre Icur tour, et il en resulle une augmentation de frnis
extremcment favorable aux aulrcs voies de transports qui peu-
vent se trouver en concurrence avec celle-ci. Je cite ce fail,
comme indiquant le point d'avanccment de la science econo-
mique dans le lieu dont je vous ecris; il prouvc une autre
chose, c'est le peu de prix qu'on y attache au tems , negligence
qui Concorde toujours avec le defaut d'induslric et le mauvais
etat de I'agriculture.
SUISSE. 545
La circulation active qui s'etablit aujoiird'liui an iniiieu des
(l!isons])re[)ai-e ])eut-elre la ilestruction du |)liis grand obstacle
tju'y epiouve la niarche de la civilisation , je veux parler d'une
independance des communes qui va jusqucs a I'intolerance el
I'isolement. L'independance est I'ame de I'esprit municipal;
mats ce pouvoir doit eire circonscrit dans les limites ou il peu t
operer le bien ; et I'rin des priucipaux interels de la commune
est d'etre liospilaliere. C'est sans doute a la portion de souve-
rainete qui repose sur la tete de cliaque Grison cpi'est due
I'introdiiction de je ne sais quelle Icgitimile , qni ne veut pas
com prendre (lu'eile ne perdrait pas plus au partage de ses
droit;;, r;u'un flambeau ne perd sa luniiere lors qu'on y allume un
autre flambeau. Le droitmunicipal est confere par la naissance,
et non par Thabitation ou la propriete; ainsi, le plus grand
jiroprii'taire d'une commune, s'ii n'en est pas habitant ne, n'y
cxerce pas plus de droits que I'etranger qui ne fait qu'y pas-
ser ; et , comme les munici])alites sont beaucoup jiliis puissantes
que ne I'exigerait la tranquillite des citoyens, on concolt que
les capitaux et i'industrie ne reglent jias touta-fait leur marche
sur les besoins et les avantages nalurels qui les solliciient :
c'est peut-etre pour cela que, non loin de terrains qui se
paient un prix exorbitant, on en trouve d'autres quilanguis-
sent sans culture; au dessous de Thusis, et vis-a-vis Mayen-
feld, le Rhin a devaste d'immenses ctendues de terrain qu'un
bon sysleine d'andignage et d'altcrissemcnt pourrait rendre a
leur ancien elat; ces grandos operations ne sauraient se faire
avec les capitaux de la localite, et il est difficile qy'il s'on pre-
sente d'autres, lorsque les institutions politiques reduirnienta
uneespeced'ilotisme , jusquesaux compairiotesqui viendiaient
conquerir des terres sur des marais et des tonens. On m'a
assure , a Thusis, que ce travail trouvait un autre obstacle dans
la crainte qu'avaient les proprietaires des terrains productifs
d'une concurrence dans la vente de Jeurs recoltes. Je venais de
■voir les beaux travaux de la f^ia Mala, et je n'ai pu croire a
un egoisme si stupide. Les dissidences religieuses peuvent etre
aussipour quelque chose dans cette intolerance municipale :le
canton est en partie catbolieiue, enpartie reforme, et j'ai cru re-
marquer , dans quelques paroisses calholiques , que la residence
d'un protestant y serait vue de fort maiivais ceil; elles sont
souvent desservies par des capucins italiens qui ont phis de
zele que de lumieres. J'ai entendu assurer, dans une de ces
paroisses, qu'unemadonne pleuraitpour qu'on lui fit une riche
chasse et qu'on rebatit sa chapelle, et j'ai craint que les capu-
cins ne repugnassent quelqnefois a montrer au peuple m^me
T. XXXI. — Aout 1826. 35
J 46 ];L:1\0I>1',.
le pen (lu'ila saveiil. Lc clerpti catlu>li(|iio ilos (iiisoiis a cciien-
daiit tlevant Ics yciix un noble exrninlc; il flevrail se souxenir
que, \)i>ritii Ics trois forKuileiirs de ia liberie du l)nys, Otait uii
pretre, I'nbbe dc Dissf.ntis, et se demander si ce Decius oiire-
tieii t'erail aujourd'hui i)leiircr des raudonnes.
Quoi f|irjl en soit, il Tie depend maiiiieiianl de personne
d'arrclei" le inouvcr.ient d'amelioratiou que les yeux les moins
exerces aperooivent dans le eanton des Orisons, il sera pnis-
saminent seconde par la generalioii qui s'eleve au collef^e can-
tonaTde Coire;de bons ciloycns, coniprenant bien toiite I'elen-
due de leur mission, sont a la tete des affaires, el Ton trouve ,
dans les bonimes les plus depourvns d'inslructiori , re bon sens
etcelle confianee, qui sont (ouiours cliez >in peuple le resultat
fl'une loiigue liabilude de la liberie. Avec dc pareilles disposi-
tions, tout ce qui est bon et raisonnabic est facile : o'e.-t ainsi
fpi'en mollis d'une annce on est parvenu it f;eneraliser dans le
](ays rappljf;alion de la -vaccine. Quand on voudra , il suffira,
cornme dans le canton de Vaud, de trois mois |)our y nalura-
liser lc sysleme mi'lrique. Telle est la puissance ties gou\erne-
mens qui n'ont jamais trompti Ics pen]iles, on plutot lels sont
les peuples qui savent faire rnarclier leurs gouvex'nemens dans
la iigne Sn devoir. /.-/. 1?.
Fribourg. — Societe philhcllenique. — Sans autre inlention
(pie.ilc lemplir I'un des devoirs les jiius esscnticls du (tiiri.s-
tianisni?;', pbisicurs liabitans de Fribourg oat forme dans cetle
vdle line ft-vwiiete qui se cliarge de recevoir les dons destines
aux Gi ecs , «\ de les lenr faire parvenir. Parrai les fondalexirs
tie cette Soci<;tii se frouvcnt qiielques - uns des ciioyens les
plus diitingues du canton , parmi lesrpiels rions cilerous seu-
lement MiYI. de Vkrro , Kueni.in , Fegf.li , Laniierset, etc.;
leurs donsiront grossir les gen(?reuses offraniles que la Suisse
cliretieiuie , libre et (3clairec, consacreau soulagemetit des mal-
heurs d'uiic nation (|ui cDmhal pour sa religion , son Indc-
pyndancc et sa civilisation. .1.
ITALIE.
Milan. — Invention des bateaux h vapour. — Une let t re de
M. de Navarettf. au baron de Zicn, dont tous les jouniaux
ont inst-t'c des extraits , fail renionter jnstpi'an sciiiemc siecie
une invention que Ton cioit tuul-a-fait nioderne; on y lit ce
qui suit : — « Des bateatix a vapeur fureni jiroposes a Charles-
Quint, en i5/|3, par un cajiiiaine, nomintj Blasco Loyola. La
])remiere epreuvc en fut faile avcc succes, a Barcelonne; mais
ties envieux et des detraclcnrs vinrcnt a bout de faire avorler
ITALIF.. 5/, 7
celtc enlrepiise, qiioiqin; I'inventeur cut rccu dcs teinoignages
de la siitisfaclion du priiicf. Par la suite, les gueires dont ce
moriarquc fiil occiipe firent perdre de vue la decouverte du
Capitaine de Loyola. Les proces-verbaux qui coiistatent celte
decouverte ;.oiit <luposes <iaiis les ar'chives de Sima/icas, et j'ai
ciitre les mains uiie leialioii detaillee des resullats de I'expe-
riencu. ( Extrait du recueii inlitnie : AnnaU universali di
statistka , imprime a Milan. — iS'j.6.)
Ts'aplks. — Academic royale des sciences. — Norninntions
d'associes etrangers. — Necrologie : Piazzi. — Cette academic
vifnt de noininer deux assocics correspondans etrangers :
M. le niar(|uis de Fortia , connu par plusieurs ouvrages sa-
vaiis , et M. Hachette, ancieii professeur a recole Polytechni-
que. lis avaienl ete proposi's j)ar le c-'lebre aslronome Piazzi ,
j)rt'sidenl de racndemie, qui vient de terminer sa carriere. II a
ete cnleve ])ar une fluxion de poitrine, le a3 juillet dernier,
ai;<.'' de 80 aus. C'est une perte immense pour les sciences, ct
doiit tons les hommes instruits doivent s'affliger; on dt'signe
pour son sucoesseur le comteZuRLO, ex-miiiistre de I'iiUerieur,
«•! lun des honiines les plus majqunus du pays. L'academie des
scierici's e.st uiie branche dela Societe royale bourbonienne'y&ox-
boiilca ) que le roi Ferdi.naiid inslitua , peu a]>res sa rentree
a Naples, en iSifj. C'est le premier coi'ps savant du royaume;
il est organise a I'instar de I'lnstitut de France^ct jouit des
■intiiies ])ierogalives. Le Roi s'est reserve le droit d'approu-
vcrdefinitiveinentle choix des nouveaux candidats. Le royaume
<le'Naple> possede encore deux antressocietes litteraires sous les
tiires d'liislitiit d'encourageinent, et d'Acadernie de Pontanus
( Pontaniaiia )^ niais ce ne sont que dcs inslltuls secondaires.
C'est la Snciele Borhonica qui remplace niaintenant la celebre
Academic d'Hercu/anurn, fondee ])ar Charles III en 1755,
( I TAcadi'mie des sciences ct belles-lettres, que le meme roi
jVrdinand avail creee en 1780. U.
Necrologie. — Santarelui [Jean Antoine), professenrpour
la taille dcs jjicrres precieuses, ne dans le royaume de Naples,
mart a Florence au niois de inai^ernier, a I'age de 67 ans. Cet
arlisle celebre avait ac(|uis uiic haute reputalion a Pionie avant
qu'il \int s'etablir a Florence. Son sejour dans cette vdle lui
procura le bonheur doiit il efait digne par s-^s talens et par ses
qualites ])ersonnelles. Sa carriere fut paisible; il fut recherche
avec einpressement par les gens dc bien, les-savans et les amis
des arts, et jamais I'eii vie ni la mechancetc he dirigerent centre
ini aucun des traits qu'elles lancont avec tant de profusion; c'est
la seule martpie d'estime qu'il ii'ait pas obtenue. F.
5/,8 KUROPE.
I'AYS-BAS.
Bruxelles. — Fondntion dun ohsen'atoirc el dun jardin
hotanique. — S. M. le Pioi ilesPays-Bas,(lont la munificence ne
cessed'encouragei'l'instruciion publl(|ut; ct clierclic a multiplier
les monumcns utiles, vient de prendre nn nouvel arreic pour
etablir iirt observatoiic ii l>iuxelies. I.a ri};eiice de la villo,daiis
la vue de seconder un j)rojet aiissi honorable dont elle doit
recueiilir les jjrincipaux fruits, a deuiando a i)rondre part aux
(Vais de constructions et a offert un terrain dans un des plus
beaux quartiers. Le soin de dresser les ])lans a I'ti- conliea
M. A. QuETEi.ET,professenr dc mathematiques et d'astronon)lo
aumusee, qui doit s'entendre pour cet objet avec M. Walter ,
inspecteur general de I'instruction publifjue. — On s'occupe
aussi a Bruxelles, dans ce moment, de la formation d'un vasle
jardin botanique, d.estine principalernent a favoriser les jjrogres
de rhorliculture. L'acquisiliou du terrain qui se trouve dans le
voisinage de I'observatoire projete, s'est faite ])ar des actions
dont les interels seront payes au moyen de i 2,000 florins des
Pavs-Bas(plus de 26,000 francs) qui sont assures annuellenient
a I'etablissement \>ar le gouvernement el la ville de Bruxelles.
On cite comme un des principaux actionnaires , M. Dbapier,
di'ja fort avantageuscment connu par plusieurs ouvrages scien-
tiliques.
— Formation d'une commission de sttitistique. — Sur la pro-
position du ministre de I'interieur, le Boi vient d'ordonner la
formation d'une commission de statistique qui publiera perio-
dlquement tous les renseignemens qui pourronl inleiesser la
science ou I'industrie. Les administrateurs des differentes
branches du uiinistere de I'interieur seront de droit inerabies
dc celte commission. Celte nouvelle institution no reiidra sans
doute pas moins de services que les precedenles : on connait
les resultats importans qu'on a d^ja letires en France des do-
cnineus cpie public annuellement M. Ic prefet de la Seine, et
qui sont coordonnes par des personnes anssi instmites qu'ac-
tives. (Voy. les comptes rendus des Recherches statistiques sur
le departemeat de la Seine et de la ville de Paris , publics par
M. de Chabrol , Bet'. Enc. , t. xx , p. 3So ).
Tournay. — Education industritlle. — Notre ville doit a
una administration active et cclniree I'avantage de voir se
developper successivement dsns son sein les germes de touics
les ameliorations sociales j)iojetecs el lavorisecs par le jiou-
vernement. Peu de villcs oflrcnt nn enscignement primaire
PAYS-BAS. 5/, 9
jnieux ciganise et inieux ydapte aux besoins de I'artisan et
«lu pauvre. M. Renard , architecle de la regeiice , connu par
la delicatesse et la siirete de son goiit, et I'etude profonde
t]u'il a faite des arts du dessin , secondanl a cet egard les
\'nes eclairccs de M. Lehon , magislrat qui , jeune encore, s'est
deja disliiigiie dans nos sessions legislatives, vient d'introduire
dans noire acaddmie de deS'sin et dans nos ccoles d'enseigne-
mcnt imiluel des cours de dessin lineaire , avec de noinbreux
d(heIoppeinens dont I'idee lui appartient. On espere que
I'exenijjle donnc par Tournay trouvera des imitaleurs empres-
ses dans la piupart de nos villes mannfacturieres, ou la con-
naissance dn dessin lineaire doit ])roduire les phis heureux
resultats. On espere encore (]nc M. Renard livrera an public ,
])ar la voie de la iiihographie , les dessins qui servcnt de mo-
dcles a ses non)breux cleves. Q-
Amsterdam. — Vne Snricte Israelite forince dans cette ville
pour la langue et la Uttcralure hebraiques , continue ses recher-
clics et ses publications avec perseverance el avec succes. Les
dit'ferens caliiers qu'elle a fait parailre sont remplis de poesies
vX de dissertations philosopliiques qui se distinguent par la
])urete d'un liebreu correct et elegant, el par une profonde
connaissance des antiquites juives. Les caliiers publics sous Ic
litre de Peri-toele.i, fruits utiles , ne sont pas nioins recherclies
jiar les amateurs de I'exegese de tous les cultes, que le celebre
journal hebreu c|ui paraissait, \ers la (in du siecle dernier, a
Berlin, sous les auspices des Moses Mendelson. Le secretaire
de la Societe, M. B. Muder, Iraducteur jure, est en nieme tenis
un des coUaborateurs les plus actifs de ce journal.
Bruxelles. — Sncu'tepour V encouragement de la langue hol-
landaise. — On a forme, depuis quelques annees, dans cette ville
une Societe lilleia ire, in titulee Concordia, e\ii laqueilelegouvei'-
nemcnt desPays-Bas pi end un interct particulier : son objetest
do favoiispr dans les provinces de la Belgique , et surtout a
Bi uxelles memf , la pro]i3galion de la langue et de la litterature
liollandaiscs, et repuralioii de I'idioiue du i)ays, \cjlainand,
(juin'est (]uc le liollaitdaij slationnaire defigure. — Cette Societe
coiii])osee de nieiubrcs actifs el de siniples souscripteurs nnia-
lenrs, lient aussi des seances jmbliqnes. Dans I'une de ces
seances, qui a eu lieu dernlerenicnt, on a enleiidii avec inte-
ret une dis^ei talion savanle sur les myiiiologies du nord, dont
I'autenr, M. K. Soinmcrluuishen , s'etail deja fait connaitrc par
d'utiles travaux publics en holiandais et en francais, et par un
tableau svncliroiiologiqiie de i'iiisioire ancieni.e et moderne.
M. B.
55o
FRANCE.
ItYOy (R/idne). — ISavi^ddon stir la Sadnc. — NouvcUi'
entreprisc cle bateaux a vapeur, a roues dc cote intcrieures.
— Ce nouvel elablissement de bateaux a vapcnr est annniicc
pai" \ Eclaireur clu Rhone (i] , a qui nous en euipriintoiis
rindicalion , coinme devant etre realise au inoyeii d'un capital
de l\oo actions de looo fr. chaciine, et dont la souscriplion
est OTiverle. Ellc est fonnee par M. Lasge , ancicn ins]jecleur
des bateaux u vai)eur sur la Saone, <(ui compte trente ans
de prali(|ue dans la navigation de cette riviere. On aunonce
des ameliorations iinportantes : i° dans Ics appai-eils a vapeur
d'ou resultent pour les machines beauconp de puissance, de
legcrete , d'economie dans la consornmaf.ion dn coinbustibie
et dans les reparations; a" dans la foiine des bateaux, ce C|ui
les rend plus lestes , plus solides et tres-facilcs a gouverner,
rend iniijiles les engrenages, les arbres de couclic etbeancoup
d'autres pieces de mecanique, fait cesser tout bruit dcsagrcable
pour les voyagcurs , met les roues a aubes a I'abri de toutes
avaries , et diminue le tirant d'eau, de manierc a ce que roa
puisse naviguer par les plus grandes sccheresses. L'examcn
des modeles par les homines de I'art leiir ^ ete ties- favo-
rable. I.
Besancon ( Doubs). — Anliquiles. — Canal dc construclion
romaine. — On a d(5couvert depnis pe'i, dans ia rue du Clia-
teur, niaison Martin, n''4j "" canal de construclion roni;iine.
La hauteur en est de six pieds , et la largeur de dix-neuf ijon-
ces. On conjecture qu'il foruiail nne espece de parallelograrnme
reclangle ou carre long. Le cote le plus grand a vingt-sept
pieds de longueur, dans la direction du nord-estau sud-onest;
mais on n'a pas pu mesurer les autres cotes avec exactitude ,
a cause des eboulemens. Ce canal , qui passait probableineni
sous un edifice au-juel il servait d'egout , est conslruit enlierc-
ment en pierres, avec beaucnup de soin et de regnlarite, mais
sans chaux ni morlier. La forme et le genre de celte construc-
tion semblent appartenir au bas-erapire : le canal est si bien
(t) Ce journal, consacre au commerce , a I'iDdnstrie et a la lillerature,
et remarqnalile p.Tr une redactioQ soii^ee el par le ehoix et la variete
des snjets qu'il traite, parait a Lyon depuis qnelqnes niois. II vienl de
se reunir a I'Ini/ependiinl , dont il conserve le tilre, et nierite d'clrc con-
suite par tous ceux qr.i veuleot conaaiire les progres de Vinduslric dans*
la seconde ville de France et dans les departemens qui I'environnent.
DEPARTEMENS. 55 1
conserve dans les parties qui subsisteiit encore, que le pm-
]iriel;iii'e actncl a ].u !e reiulre a son ancicnne deilinulion
siuis I'-lie oblige de Ic x'cparer. [Petit Album JrQnc-cointois.^
Dieppe (Seine-Inferieure). — Antiquites. — Visile de S. A. R.
yjiidtiDie. — Nous avions an nonce (voy.TJ^r. Enc, t.xxv, p.86/|,
mars i SaS) les tra vaux entrepris au camp de Cesar on citcdc lime.\,
\)'SL<: M. P. Fkret, poui" la docouverte des antii]iiir('s gauloises et
roinaiaes qiierenfermecet oppidum : nous nous fai^oiisiin devoir
d'i:itbiniet' nos lecterns que le vceu que nous forniions nlors de
v;iir I'esprit d'associalion fouinir aiix uioyens de conliniier ces
JMiporfariies reclierches, s'est realise. Uii adniinislraleur eclaire ,
M. de ViEi; Castel, a son arrivee dans cet ariondissement ,
s'<'st uiis a la tete d'uue souscriplion que les amis des sciences
et des arts n'ont pas larde a remplir. On a repris les fouilles
qui etaient suspendues; elles offrent mainienant des mines
rouiaines que Ton suppose ajipartenir a un edifice religieux ou
fiiiieraii'e , on y a trouve des anneaux en verre , des debris de
c;;s;|ues et d'agrafes, des inedailles du bas et du liaut-einpire ,
el des pieces ccltitjues. Ces fouilles viennent d'etre honorees de
la visile de S. A. R. Mauamf.; M. P.Feret a eu I'lionncur de
liii expliquer le resultat de ses explorations. S. A! R. a paru
jtivndi e un vif interet a des travaux utiles a I'liistoire du l^ays,
et non seulement a promis de les encourager, mais encore
vient d'ordonner a ses frais de nouvelles fouilles sur divers
points intcressans, aux environs de Dieppe. B. G,
Societes savantes ; Etahlissemens d'utilite puh/ique,
LiANcouuT. ( Oise. ) — Ecole dc geometrie et de mecanique
industriflte. — Le venerable ])hilanlrope auquel on doil ce
couis , si bien i-lace dans I'uri des cantons les plus nianufac-
iuriers de ia France, ne s'est pas borne a ce que peut faire
un fondateur ; il y a joint les soins eclaires et le zele d'un ami
lie I'indusuie , assislant lui-meme aux lecons , encoura|^'eant le
prnfesseur et les eleves , et applaudissant aux succes dc I'en-
jeigncment. Incessaniinent, des chefs d'ateliers d'urie instruc-
tion Ires-remarquable pourront diriger, non-seuleinent toutes
les fabrli]iics des cantotss de Liancourt et dc Creil , niais se
repandre dans le de[)arteinent de I'Oise, et y faire sentir I'ulile
influence du savoir qu'ils ont acquis. Ce bienfait , quoique
ties-yrai>d , n'est ueul-etre ])as celui dont le canton de Lian-
court doive etrc le plus rcconnaissant , c'est sur les lieux
iiit'uK's qn'il fajit voir ce (|ue peuvent pour !e bonlieur dc^.
55u IR.VNCK.
lioinmcs, ie boa eiriploi du teins et des riclicsses , ct I'auloiltt:
dc 1,1 sagesse et de la vcrtii.
Nancy ( Meurthe ). — Sociele des amis du travaU. —
Stance annuellc du \ly mat 1826. — Le but primilif de celie
association, fondec en 1825, est de former les jeitnes israe-
lites indigens a I'csercire des arts et metiers. On a reuni
a cet apprentissage qui lenr assure du travail ct des iiioyens
d'existence, les bienfaits de rinstruction morale et religieuse.
La Socicte recouipcnse par des prix ceux d'entre eux qui
se distinguent par la meilleure condulte. E!le pourvoit a
la nourriture , a I'entretien et a rhabillemcnt des ap])ren-
tis; «;uarante-einf| sujets out etc admis dans le cours de I'an-
nee. La Sociote soulieut les npprentis devenus ouvriers , pour-
voit aux premiers frais de leur ctablissement , et ilonne des
secours a ceux qui en sont juges dignes. La rccette et la dr-
pense se sont elevees a 7,982 fr., saut'un excedant de recetle do
3() fr. 86 c. Le compte rendu par M. Aron, avocat a la cour
royale et mcmhie de la commission adminislralive, al'.este le
zcle plillaiitropi([ue et eclalre de cette utile association. Le
rapport imprlme (Nancy, 182G. In-8'' de 3G pag.) se termine
par deux listcs assez nombreuses , et qui s'accroitront encore ,
desoustiripleurs et de donateurs. — Puissent des institutions du
meme genre se multiplier dans nos departemens ! car , tandis
que beaucoup de congregations soi-disant religieuses, et qui
ne sont bion souvent ni morales, ni socialcs, se retablissent
ou s'organisent et ramenent a leur suite le liideux cortege des
pauvrcg et des mendians, auxquels on donne des primes d'en-
cour^gementpar d'imprudeutesaumones, c'est surtoutl'amour
d« travail, germe fecond des bonnes habitudes el des vertus,
qu'il faut exciter et rccompeuser , pour combattre les depio-
rables fleaux que nous voyons renaitrc. I.
PARIS.
Institut. — Academic des sciences. — ■ Mois de juili.et
1826. — M. Guillaume Brandes fait liommage de son ouvrage
intitule : De repcntinis variationdms impressione almospherw
ohservatis. II ecrita 1' Academic pour lui exposer i'objet de scs
rccherclies et pour demander la communication des documens
que Ton jugerait propres a ])erfeclionner son travail. M. Arago
communique a ce sujet le resuUat de diverses observations
relatives a de grandes observations baroinetri(|ues. — L'Aca-
dcraie recoit le ineuioire de M. le professeiir Simonof , » sur
la cauiC dc la lif/rrcnvc dc tcmpcrnlurc dans les deux hemis-
PARIS. 553
p/ieres clu globe tcrrestre , fondi'e .iiir ([uelqites observations
therinouielriques faites par I'auteur pendant son r>(>yage an-
tour (la inonde. » Casan, iSaS. — M. Arago communique jjIu-
sieursresultats de ses reclierches , fjui out principalement poiu'
objet de nouvelles experiences concernant rinfinencc des sub-
stances les plus diverscs sur les mouvemens de Taiguillc ai-
raantee. — M. Poisson annonce cpi'il a redigc iin memoire
iheorique sur ce genre de questions, et qu'il le remetira dans
la seance prochaine. — Le minisire de rinterieur fait parvenir
a rAcaciemie un memoire que liii a adresse le ministie des
affaires elrangercs, et qui est intitule : Memoire sur les calculs
des mouvemens de coiretes, par Maurof, conseiller d'etat de
I'empereur de Russie et correspondant de I'Acadcinie impe-
riale de Saint-Petersbourg. (MM. Bouvard et Damoiseau,
commissaires. ) — Leministre de I'interieur adresse a I'Acadc-
mie la copie dii rapport de M. le prefet des Coles -du-N ord ,
concernant une secousse de tremblement de terre ressentie a
Saint-Briejix. — M. La Billardiere fait un rapport verbal au
sujet de I'histoire phiiosopliique, litteraire, economique , des
plantes de TEurope, par M. Poirel. — Une lettre de M. d'AR-
CET refute les assertions contenues dans la lettre pseudonyrae
quia ete lue a la dernlere seance, et qui avait pour objet de
reclamer en faveur de M. Mascagni la priorite de quelques
decouvertes relatives a la dissolution des calculs urinaires par
le moyen des bi-^carbonates alcalins, et au mode d'action de
ces substances sur I'nrine et sur I'acide produit dans I'estomac.
M. d'Arcet prouve que I'auteur de la lettre n'etait nullement
fondc a reprocher aux cliimisles francais le defaut de citation.
II presente, a ce snjet, deux ecrits qu'il a publics depuis long-
tems et qui sont intitules : Premiere note pour servir h I'histoire
des eaux thermales de Vichy. Note sur la preparation et P usage
des pastilles al /(alines digestives contenant du bi- carbonate de
sonde. M. Magendie communique des remarques entierement
conformesa celles deM. d'Arcet. — M. Deshayes, auleur d'uu
ouvrage sur les coquilles fossiles des environs de Paris , annonce
que des circonstances nialheureuses I'obligent d'en suspendre
la publication. 11 espere que I'Academie ajjpuiera par son suf-
frage In demande qu'il se propose de faire a ce sujet au minis-
tre de I'interieur. — • M. Berard lit, au nom de M. Balard ,
pharmacien et preparateur de chimie a la faculte des sciences
de Montpellier, un memoire sur une substance parliculiere
contenue dans I'eau de mer, et qu'il designe sous le nom dc
niuride [MM. V'aunueiin, Gay-I.ussac et Tlienard, rommissai-
^S'l FRAiMCK.
res). — M. IIaspau, <lo:)iie lediiie d'uii iiieiiioirc dont ii rU
rauleiir, sur I'lionicino, lci;lutenet la diflicriltc d'isoler Ics dif-
fi'jens i)rinci|)es licuit sc coinpose ime Caiine par les j)roci'.l. s
en },-rand, siiivis de nolts sur la stearine , le sagou etsur i'ador-
ganihinc. (BIM. Dcyeux , Tlienard etMirbcl, comiuissaiics.)—
?.f. HuzARD est rcelti meinbre de la commission cenlralc adini-
iiislralive.— M. Magendie presente mi nieiiioire de M. Hoiis-
siT, negociant a Bordeaux , intiliilc : Observations siir le mid
com/nun (MM. Tcssier et Bosc, coiniiiissaires).
— Du lo. — Ufi second incii;oire de M. de Montlivaui.t
siir la cosinnlogie est renvoye a I'examen de MM. Arat;o et
Fiesnel. — M. Caucuv prescnte la tvoisiemc paitie du r es'iaM"
(les lecons qu'il a doniices a I'EcoIe jiolytechnique. — MM. dv.
Prouy, de Rossel et ^ingo font iin rapijort sur la sonde marine
presentee a TAcademie par M. dc Geandpre. — MM. Ampere
et Frf.snel font nn rapport sur la lettre de M. Gaudix, relative
a la nature du calorique. Voici les concJnsions. « L'hypotiiese
e>;|)osee i)ar M. Gaudin ii'est jias nouvelle, du nioins dans sa
partie essenlielle, ^avoir : cpie lo calorique est le produit de
la reunion des deux electricites.( Elle est due a M. Bcrzeliiis.)
i.esraisonneraens par lesqncls il cherclie a prouver rJdentit.;
de ce compose et du caiorique ne noiissembleni pas concluans,
et rexperience qu'il propose est inutile, puisque le resuitat eii
e:t coiiDu d'avance, el qu'on ne peut en tirer aucune conse-
quence positive , ni pour , ni cnntre son liypotbese. { Adopio. )
— M. PoissoN lit son iupmoire sur la llitorie du magnelisuie
en mouvement. • — M. Civiale lit une note 5ur les peifiction-
liemens qu'il a apporles a ses instruniens lilhonlripleurs. (MM.
Chaussier, Dumeril et Duiiuytren, commissaires, }
— Du 17. — Le minialre de I'inlerieur fait parvenir i;n
fragment d'acrolithe tonibe recemment dans les environs d'^
(.astres ( Tarn). Ce fragment sera reinis a une commissioji
composie de MM. Vntiquelin et Thenard, et Son Excellence
sera price de procurer tons les renseigneniens qu'on pourrait
avoir recueillis au sujet de cet aerolitlie. — M. Amussat declare
l)ar une Ifttre, ({ue I'inslrument presente par M. Civicde dan;.
!a derniere ieance, a ete construit sur le meme principe que
ceiui dont lui-meme avait donne connaissance a plusieiirs j)i r-
sonnes, el qu'i! a monlrc notamment a !\1M. Portal, tlhauisier
1 1 Mat;endie. (Renvoye a la commission nonnnee pour le me-
moire de M. Civiale. ) — M. Chriitophe dc Suint-Jorre de-
jiiande la comnioricalion des doeiimcns qui auraienl etc cou-
serves dans lej. ardnves , concernant la teinlnre ecarlatc, diio
PAULS. :>>->
julienne. Ce procede a etu lobjet d'ua inlvilcge accor.lj ;)arh;
roi a M. Julikn , inort en 1763. M. de Saint-Jorre, son ijarent,
est charge de rediger nne notice hislorique oil il desire f'aiie
mention de ces documens, s'ils existent. La leltie de M. dc
Saiiit-.Iorre sera remise an secretariat, el il sera (ait des recher-
ches dans les archives. — M. Mj-.irieux rappelle qu'a la seance
du 27 fevrier, en presentant de nouveaux inslrnmens, il a an-
noiice diverses modificalions (lu'il a failcs au lilhoiiirip(eur,
et qn'il a fait de|)uis des experiences a rHotel-Dieu, en pre-
sence d'un grand nombre de personnes. II declare que i'instni-
incnt prcsente rccemment ])ar M. ' Ci\'iale est fonde sur le
ineme principe et est le nienie instrument que le sien.(Ren-
voye a la commission nommee pour examiner ies travaux tit^
iM. iliviale. ) — M.Lavocat, ancien chef de bataiiion du genie,
reitere la demande qu'il a faite de divers eclaircissemens sni-
I'emploi des roues a tympan. ( M. Navier, con;missaire. ) —
M. CoLLAUi) deMautigny depose uii paquetcachele. — M. Ma-
^endle presente, au nom de M. Amussat, une nouvelle sonde ,
dite ucoustique , qui sert a reconnailre par I'effet du son ia
presence des ralculs dans la vessie.(MM Eoyer et Blagendif,
commissaires. ) — M. de Humboldt communique la decouveiie
faite par M. Boussingault du veritable giseinent da plaline.
Ce metal n'avait etc troiive jnsqu'ici que dans des terrainj
d'alliivions au Choco , au Bresil el a I'Oiiral. M. Boussingauk
a decouvert des grains arrondis de platine melcs a des grains
arrondis d'or nalif , dans la gangue des filons de la province
d'Anlioquia. Ces iilons traversent une formation de grunslein ,
diorite, et syenite. — JM. Dupi.tit Thouars lit la premien;
partie d'un memoire intitule : Recherches sur les parlies qu'on
doit noinmer organes dans les vrffetaiia:. — M. Prony annonce.
(lue M. dc Grandpre retire son nicmoire sur la sonde marine.
En consequence, il ne sera donne aucune suite au rapport
propose dans la derniere seance. MM. — Pra/ijet Navif/font vn
rapport surle plan d'un moulin a air presente par M. Huygens
DE Beaitfond, propriefaire a la Martinique. II en resulte que
cette machine ne pent etre approuveepar I'Academie. (Adopte)
— M. Paravey lit un mcmoire snr I'origine commune des chif-
frcs et des lettres dont les differens peuples ont fait usage.
( MM. Latreille et Ampere, commissaires. )
— Du 24. — M. Thlnard rend un comple verbal de roii-
vrage de M. Alibert snr les eanx minerales. — M. Tiinoleon
Taili.i.fer, medecin, adres'ie un memoire snr une nouveilc
meilioflc pour trailer la listnle iacrymale. (MM. Boyer et Ma-
jfendie, commissaires. _) — 'MM. Girard, Jrago , Diilong e^
556 FRANCF.
Dupin ionl iin rnppart sur la proposition faite j)ar M. Prony ,
el londanle a faiic adniellrc deux iioTivellcs miifes de mesure.
La discussion dii rapport est renvoyte a Tune des seances sui-
vantes. — M. Raymond, horioger, lit un inv5moire intitule:
Exposition et developpcment d'un nouveau xjsterne de ha/an -
ciersans compensation , applicable nua: horloges , et plus pro-
pre a. inssurer le terns avec iinijonnite. ( MM. Molard et
Malhicn, conmiissaires. ) — M. Morf.au de Jonnes lit deux
notes : i"^ Apereus stalisticjnes sur I'etendue et la valeur du
ooinnierce de colon, de l;i fabrication des tissiis de ceKe ina-
tiere et de Icur consoinniaiion aelueile dans les piincipales
contrees de I'Europe ; 2° Tremblcment de terre a la Martinique ,
dans la nuil du i*'''au 2 niai dernier.
— Dii'ii. — M. Saint- Andre, professeur de therapeuliqne
ct de matiere medicale a I'Ecole de medecine de Toulouse ,
adrcsse ;i I'Aeademie un meinoire sur de nouveaux produits
des analyses de plusieurs quinquinas, clioisis ])armi les nieil-
leure." especes officinales. (MM. Vauquelin et Thenard, com-
missaires.) — M. Mop.eau de Jonnes communique divers de-
tails sur I'irruption recenie de ia fievre jaune aux Antilles, et
sur la topographie medicale des villes oil celle maladie s'est
dcclaree. — 31. Perrin adresse un memoire concernant I'e'm-
ploi d'un nouveau grapir. d'abordage. ( MM. Rossel et Dupin,
eommissaires. ) — Le menie autcnr jiresenle un manuscrit
intitule : Vocahulnire sie.<^anographique , on Vartde communi-
quer prompteinent le jour ou lanuit,a des distances eloignees.
(MM. Matliieu etFresnrl, eommissaires.) — M. Aeago presente
les resultats d'observalionn ct de mesuics barometriques faitcs
a la Chappelle, par M. BREAT3Ti. , de 1819 a 1823. Ces notes,
au sujct desquelles M. Arago donne divers eclaircisseinens ,
contiennent le tableau des variations diurnes du barometrc ;
eiles indiquent des differences remarquables, a raison de la
diversite des hauteuis et des situations. Plusieurs resullats de
ce travail de M. Breaute concerne !a difference de niveau enire
Paris et la mer; les meines riotes indicjuent la temperature
moyenne des deux principales sources qui sortent d'unc cote
elevee sur les bord de la valiee d'Arques. — MBI. Jingo,
Dulonget Girard , rajjporlciirs , font un rapjiort sur le me-
moire de M. IFilliam Rawson, relatif au procede dc M. Per-
kins, ].our former dc la vapcur d'eau a un liant degre de
tension, et jjoiw a])])li(|ner cette vapeur au mouveinent des
machines. « II aurait ete a desirer, dit le rapporteur, fpic
rautcur ci\\ appnye toutcs ses assertions sur des experiences
PARiS. 557
aulhcnllques. Les seulcs qu'il produit sont celies qui ont ete
f'aifes sur le fusil a vapcur de Perkins, en presense dii due de
Wellinf;ton ct d'un coniilc compose d'ofiiciers d'artillerie et
du genie. II resulte d'une de ses experiences qu'iine balle de
plornb, l.'incee de 33 metres de distanee par un fusil ii v.ipeur,
perca 1 1 |)lanclies de hois de sapiii tres-dur, d'un pouce d'e-
paisseur, et separees d'un ]>once les unes des amies. M. Raw-
son annonce Tintention de inettre incessamment sous les yeux
de vos couimissaires un appareil semblable a celui que nous
avons decrit. Jnsques-la, vos commissairesne peuvent (pj 'ex-
primer le desir de voir bienlot les nouvelles experiences dont
la machine de Perkins , introduite en France , ne peut manquer
de devenir I'objet, eclaircir I'importante Iheorie des machines
a vapeur. » — MM. Tes.sier et Bosc font un rapport sur un
raemoire de M. Housset , de Bordeaux : Observations sur le
miel cominun. 11 en resulte que le niemoire de M. Housset
oflre de bonnes vues , mais nul fait nouveau, nul raisonne-
nient complet. L' Academic se borne a le remercier. — M. Bosc
fait un rapport verbal au sujet d'une des dernieros iivraisons
du Iraite des arbres fruitiers de Duhamel , imbiiees par
MM. TuRpiN et PoiTEAU. — M. Savary lit un menioire sur les
phenomenes d'aimantation produits par lescourans eleclriques.
( MM. Arago , Ampere et Dulong, commissaires.)
A. MiCHELOT.
— Academic des Inscriptions et Belles - Le tires. — Seance
publique du vendredi 28 juillet 1826, prcsidee par M. Abel
RiiMUSAT. — Ordre des lectures. — i" Annonce des sujets
de prix proposes au concours pour les annees 1827 et 1828;
2" jugeiuent des memolres envoyes aux deux concours ou-
verts pour cette annee, et proclamation des prix. — Le sujet
d'un de ces prix, remis I'annee derniere au concours,- et
renvoye a celle-ci, etait «r/e comparer les doctrines des di-
verses secies Gnostiques eldes Ophites, en s'attachant speciale-
mcnt h leurs caracteres essentiels ; de rechercher les origines
de ces secies, et d'en determiner, autant qu'on le pourrait ,
la succession ; d' examiner qu'elle influence elles ont pu exercer
sur les autres sectcs contemporaines , soit religieuses , soil phi-
losophiques.
Le prix, consistant en une medaille d'or de la valeur de
quinze cents francs, a etc adjugeau memoire enregistre sons
le n" 3 , et dont I'auleur, M. Matter, professeur d'liistoire
ecclesiastique a TAcademie de Strasbourg, a remporl^ , en
1818, le prix dont le sujet etait VHistoire de I'ecole d'Alcxan-
5 J 8 FRA^NCE.
(/i-/c f rfrpiiii- .scs cotnmenf.cinens juxquaux premieres nnnt'-eA
flu troiiienie xi'ecle tie I'erc rhretienne.
Le siijel d'lin autre jirix elait. <le rcchercher quels sont en
I'rnncr , /I's prnri/ires , viilrs , tcrres et chateaux dont Pliilippe-
Jiigitste (I Jail I'acqitisition , et comment it les a acquis, soil
par voie e/e conqiiete , soil par achat ou i'chart^e ; de deter-
miner, entre ces domaines , quels sont ceux dont ila dispose
par donation , par vente ou par echa/ige , et ceux qu'il a re-
tenus entre ses mains et renin's- d la couronne.
Le prix , consislant en ime inoHailic d'or dc la \alcur de
qtjinze cents franrs , a ele adjuj'e au inemoire enrfjjisire sous
le n" a , et dont I'auteiir est M. Cai'efiguk, de Marseille ,
one l'Aca(k^mie coinonne cetle annce pour Fa tro-sienic fois.
L'acadomie renonvelle rannnncc qu'clle fit, I'annee der-
Tiiere, du siijet de ])rix qu'clle adjiigcra dansla seance ])ublique
(111 inois do juillet 1827. Le siijei consiste a rechercher quel Jut
I'etat politique des cites grecques de V Europe , des ilcs et de
t Asie mineure, depuis le cominenceinent du deuxieme siecle
avant notre ere , j'usqua I'etahlisscment de f empire de Cons-
tantinople.
Les conciurons devroiit recnelllir dans les ('crivainset dans
Irs inonuincns de tout genre, tons les faits ])roj)ies a faire
connailie soit I'adininistration inlerieure de ces cites, soil leiirs
lappnrls entre elies et avec I'Empire. — Le prix sera une mc-
daille d'or de la valeur de (]uinze cents francs.
Les onvraj^es envoyrs au concours devront eire ecrils en
francais on en latin , et ne seront rccus que jusqu'au i^'' avril
1827.
L' Academic projiose ponr snjet d'un aiilrc prix, qu'elle ad-
jiigera dans sa seance pnblique du mois dc juillet i8a8 :
Tracer le tableau des relations cornmerciales de la France et
et des divers etats de V Europe meridionale ai'cc la Syrie
et ri^gypte, depuis la decadence de la puissance des Francs
dons la Palestine , jusqu'au milieu du scizicme siecle ; deter-
miner la nature et ff'tendue de ces relations ; fixer la date de
Cetahlissrment des consulats en Egyj'te et en Syrie ; indiquer
les ejj'ets que produisirent sur le commerce de la France el dc
r Europe meridionale avec le Levant , la decouverte du passage
par le cap de Bonne-Espcrance , et I'etablisscrnent des Por-
tugais dans I'Jnde. — Le prix sera unc mcdaille d'or de qninze
cents francs. Les ou\rages envoycs au concours devtont etre
ecrits en francais ou en latin, et ne seront reciis (jue jusqu'au
r' avril iSaS.
PARIS. 5JC)r
On a entendu la lecture d'une Notice hUluritjuc sur la vie
I't les Otwroi^cs de M. Barbie du Bocagc, pnr M. Dacieh , s(»-
crclaire perpetucl; puis, d'observations, par M. Hase, S'lr
(les aniiqiiitL'S natioiiales ot dcs inscrijitions romairips decou-
verlcs depuis peu dans qiieiques deparieinons de lii France;
— d'uii [Vlenioire sur la restitution du tomijenu de Porseniia .
(i'ajires la debcription de Varrori, par I\I. Quathkbif.ut-. n;.
Quincy; — eiifui , d'un Memoire tics-inieiesiant dc M. Dl-
KEAii nii LA Malle sur les produitsde I'llalie sous la duiaiiia-
tion romaine. — Le tems n'a point jiermis d'enteudre la lec-
ture d'un Memoire sur !e ]iort Caipe, par M. Gail. B.
Prix proposes </«.r autt'ius dcs meilleurs oui'iagcs sur diverses
questions d'litilite publiqnc. — A deux reprises, la Ra-ue Ency-
clopedique avai; propose des questions d'lnteret juiblic et as-
sigiie des prix pour les uienioire-i dans lesqneis ccs questions
auraient et(i Iraitees de la niauicre la plus saiisfaisaute et la
])ius complete. (Voy. Rew Enc, I. v, p. 401 , el t. xix, ]). 247).
— Le meme service est rendu aujourd'liui aux sciences mo-
rales et politiques et a la societc par plnsieurs de nos citoyens
les plus recominandables qui ontouvert un concours annonce
a la suite du jjrospectiis de V Enryciopedie jjrogressii'e. —
M. Teunalix se ])ro])(>se de faire les f'onds A'nn pri.r de 'i,oooJ'r.
qui sera dccernc, par une cominissiori comjiosee de p.iirs de
I'rance, de deputes , de magistrals , de mauui'aclurlers , a lau-
teur du uiellleur memoire sur la question siii\anle:<( Quels
sont, en France , les obstacles qui s'opposen! a une bonne
legislation sur les patentes et les hrei'ets d invention pour les
decouvertes industrielles ? Quels sonl les meilleiirs nioyens a
prendre pour ueulraliser ou faire dispaiaiire ces obit.icle.s?
Quelles sonl enfin les iiieiilefsrs dispositions a etablir pour
former surcetle parlie le projet de l''gisiafion lo plus complet
• l le plus en harnionie avec les besoins el Icj progrci de I'iti-
dustrie ? »
M. Casirnir Pep.ier propose nu prix de 3, 000 francs (lui
sera aussi decerne, comme tous les aulres prix du meme genre
[)3r une commission comjiosee de j:iges com])et<'ns, a I'auteur
<lu meillcur memoire tjui remplira louies les conditions du
iirogramme suivant : « Quels sont eu France les vices et ie>
laciines des dispositions legislatives et administraiives concer-
nnnt le pret hjpothecaire ? Quels sont les obstacles qui s'opjjo-
sent a la direction des capitaux vers cetle nature d'emploi ?
Quelles seraieiit les ineilleurcs dispositions a etablir j^our for-
mer sur cette partle le projet do legislalion le plus compkt et
5()0 I'RANCE.
leplus en harmonic avcc Jes bcsoins du (isc, cetjx dcs eniprun-
teur&, et !es garanties qu'ont droit d'cxiger les pieleurs ? >- Les
conciirrens devront surtout examiner les questions du libre
taux de I'interet, de la transmission des contrats, de la vente
a iiimerc, de I'expropriation forcee, etc. »
Vn prix de 2,000/rafics sera donnc par un ANONYMEa I'an-
teur qui jeinplira le mieux les condirions du programme
suivant : « Determiner parmi les modes de corislruction des
chemins vicinaux , en usage dans les divers I)ays , quel est
celui qui presenle le phis d'avanlages, quant a I'eeonomie,
a ]a promptitude, a la facilito de construction et a la du-
ree , en tenant compie du clioix possible des maleriaux ,
suivant la nature du terrain et des localites en France ? — Quel
serait le meillear mode de proc^der pour determiner (juels sent
les chemins necessaires, etreglerles confliis qui pourraients'c-
lever sur le trace et la direction de ccj chemins? Quelle serait
enfin la marche a suivre ])Our la perception , ladministration
et I'cmploi des fonds necessaires a ia construction et a I'entre-
lien des chemins vicinaux , soit que cliaque commune aitseule
a supporter les depenses de ses chemins , soit f|ue les frais soient
repartis entre les interesses, parliculicrs, communes et depar-
temens ou gouvernement , de nuinicre a economiser les de-
penses etles retards qu'entraine toujours une comptabilile trop
compliqxiee ? « — Les concurrens devront examiner quelle se-
rait surtout la contribution la jilus avantagcnse, et si la ])X"esta-
tion en nature ne doit pas toujours (}tre le rachat volontaire de
la prestation en argent.
MM. P. mettent au concouis le sujel suivant : « Les diverses
tenlatives f'ailes pour comprimer le gaz et le rendre propre a
alimenler les larapcsporlatives, ayant eteinfniclueusesjusqu'a
ce moment; d'autre part, les lampes dites a la Carcel, etant
d'un prix troj) cievejjour elre a la portee des fortunes un pen
restreintes, xinprix de 2,000 francs sera donne au inodele de
lampes qui, pour le tems le plus long etavec la raoindre quan-
tite d'huile, produira une masse de lumiere egale a cede que
donnent les lampes dites a la Carcel. — Le modele de lampe
presente devra etre d'un entrelienassez, faciie'et })resenter assez
d'economic dans les prix et dans I'usage pour convenir au plus
])lus grand nombre possible deconsommateurs. Les concurrens
devront s'atlacher a cviter lapromjJte carbonisation de la nie-
che , et a rechercher quelle autre substance pourrait etre avAn-
lageusement substituee au coton , ou quel nouveau procede de
fabrication des meches pourrait retarder leplus possible cette
carbonisation." Les concurrens sontprevcnus qu'a meiite egal,
PARIS. 56 1
le modcle qui sera dii prix le plus modifjue, obtiendra la pre-
ference.
M. G. propose nn prix de "i^ooofrancs a I'auteur dumeilleur
mcraoiresur la question suivante : « Quelserait pour la France
le systeme de douanes leplus convenable a I'etat du commerce ,
de I' Industrie et de I'ac^riculture ; et la meilleure classiflcation du
tarif pour rendre la perception des droits plus facile au fisc et
nioins onereuse au commerce? — Quelle serait la marche a
suivre pourarriver, sans secousse , au systeme indique sans
compi-otnetlre I'e.xislence des etablissemens crees sur la foi des
reglemensactuels? » — Lesconcurrens devront examiner «quels
sent les avantages et les inconveniens du systeme de Braw-
Bak, et des primes accordees a I'exportation de certains pro-
duits. Si, dans I'elat actuel, les droits de douane doivent etre
seulement nn moyen d'equilibre et une prime d'encouragement
pour certains produits, on continuer a etre en meme terns I'une
des branches les plus importantes des revenusde i'etat. Enfin, si
le principe de liberte absoluedn commerce, proclarae par quel-
ques economistes , peut etre admissible , et a quelles conditions
politiques et fiscales , et si dans ce cas I'abolition ou la diminu-
tion des droits sur tous ou sur certains produits pourrait etre
compensee par raccroissemeut de recette , ou par la creation
d'autres ressources de revenu pour le tresor publico
\Jn prix de ^,000 Jrancs sera donne par un anonyme a I'au-
teur du memoire qui expliqnera le raieuK « quelles sont le.s
causes de la crise que vient d'eprouver le commerce , et qui s'est
etendue a toutes les classes de la societe dans les divers pays ?»
Quels peuvent etre ses rapports generaux avec les crises qui
ont eu lieu a d'autres epoques ? — « Quels seraient enfin les
moyens a prendre pour en neutraliser les effets et en eviter le
retour?»
Les memoires , sans nom d'anteur , mais avec une epigraphe,
et accompagnes chacun d'un paquet cacbete dans lequel cette
epigraphe sera reproduite avec le nom de I'auteur, seront re-
cus jusqu'au 3o juin 1827, au bureau de I'Encyclopedie pro-
gressive, rue Chantereine , n" 10.
Emprunt d' Haiti, {voy. ci-dessus, pag. 523.) — (Paris,
3 1 aodt) — Le gouvernement d'Haiti vient d'envoyer en France,
par la Corvette VHebe, un million de piastres, ou environ cinq
millions de francs. Cette circonstance reporte naturellement
Vattention sur une republique si interessante depuis plusieurs
annees, et par I'application constante de ses chefs, le concours
d^voue de ses citoyens pour etablir, dans toute I'etendue de
T. XXXI. — y^Ott^ 1826. 36
4(b FRANCE.
I'ile, I'ordre social , la ri^gularite administrative , I'unit^ poli-
tique, la civilisation, ct par le resiillat memo qui, I'annee der-
niere, a couronne ses efforts gcncreux et unanimes, en lui
donnanl pour prix une existence politique enire les nations,
unc ere iiouvelle d'iiidependancc, un brillant avenirde pros-
perite.
De tous cotes, depuis un an. Ton entend re])eter cette
question: Les Haitiens paieront-ils Ics i5o, 000,000 dont ils
ont contracte I'obligation? Le terns et I'espace nous manquent
nujourd'hui pour Iraiter a fond ce sujet, et pour developper quels
trtjsors cette jeune republiq'ue pent puiser dans son epargne;
quels produits clle retire de ses impots ct de ses douanes ; qucHcs
ressources nouvelles son gouvernement vient de creer, en fai-
sant commencer I'exploitation des riches mines du Cibao , en
appelant ses citoyens a concourir, soit par des dons volontaires,
soit par une contribution legale, a rallcgcment des charges de
la patrie. Nous nous contenterons de faire observer que les fonds
qui arrivent sont tires du sein mcme de I'Etat, et que, si la
somme n'est pas assez considerable pour etablir evidemment les
moyens de payer, du moins le fait seul de cet envoi prouve
d'une maniere incontestable la bonne foi et le desir de s'ac-
quitter.
Ce point reconnu , on ne doit point perdre de vue cepen-
danl que le gouvernement Haitien n'a jamais eu I'intenlion
d'extraire du pays, en cinq ans, la somme excessive de cent
cinquante millions, et qu'il a annonce, des le princupe , sur
I'invitation et avec le concours du gouvernement francais, la
volonte de trouver dans un emprunt la faculte de repartir cetle
enorme obligation sur un espace de tems plus etendu, Et en
effet , si les puissances les j)lus policees et les plus riches font
face a leurs depenses ex'.raordinaires avec le secours des em-
prunts, c'est un devoir plus rigoureux encore d'y avoir recours
pour un (5tal qui ne fait que de naitre et qui a besoin de toutes
ses ressources pour tirer parti de sa position nouvelle. Mais,
d'un autre cute, la crisefinanciereet coramercialeouse trouvent
I'Europe , et surtout I'Angleterre et la France , doivent faire
craindre de grands obstacles a la realisation actuellc d'un em-
prunt. Quelles que soient les garanties offertes, le moment
n'est pas favorable pour invoqucr le credit. Les horames
eclnires de toutes les opinions penseront qu'il est de I'interet,
comme de la dignie de la France, de seconder les efforts de sa
nouvelle alliee, dans I'etat de malaise general qui paralyse le
commerce et les finances. La main blanche ne se sera point
jointe a la main de couleur, pour chercher k I'entrainer dans un
PARIS. 56?i
abyme, inais pour lui donner un appui , comme elle lui offre
un gage de bonne-foi et d'union. B*.
Reclamation. — L'cdlteur du Journal des sciences miliiaires;
journal que nous avons annonc^ avec eloge, comme devant
interesser une classe nombreuse de lecteurs (voy. Rev. Enc.
1. xxxx, p. 220) , et dont nous continuerons afaire quelquefois
mention , se plaint que, dans un article sur un nouveau recueil
elabli en concurrence du sien, noire Revue ait laisse ^chapper
une assertion inexacte, en signalant son journal , sans le nom-
mer, comme portant sur son litre les noms de redacteurs qui
n'y travalllent point. II prouve, par une Jongue liste de ses
collaborateurs et des articles qu'ils lui ont fournis et qui ont
ete publics , qu'en effet un assez grand nombre d'hommes tres-
honorables , dont quelques-uns sont associes aux travaux de
la Revue Encyclopedique, ont pris part a la redaction de son
journal. Nous retablissons volontiers la \erite, qui s'est trouvee
alteree, en ce qu'on avait trop positivement affirme d'une ma-
niere absolue ce qui aurait du n'etre dit qu'avec restriction.
Theatres. — Odeon. — I" representation de VAclrice ou les
deux portraits, comcdie en un acte ct en vers, par MM. Auer et
FoNTAN. ( Samedi 29 juillet. ) — Ernest, jeune peintre distin-
gue, fait le portrait de la belle Sophie, qu'il aime avec passion;
un doux espoir anime son talent ; c'est peut-etre pour lui-meme
qu'il travaille. Cependant , un rival I'inquiete. Lord Dalton a
vu Sophie au theatre; epris de ses graces, il lui fait une cour
assidue , et lui aussi se flatte que le portrait lui est destine. Son
impertinente confiance desole Ernest, bien plus timide, parcc
qu'il est bien plus amoureux. Le gout de cet autre Lovelace
pour Sophie n'est en effet qu'un caprice; il cherche aupres
d'elle quelque distraction a des querelles de menage; il a quitte
Londres et sa feinme , dans un moment d'humeur. Mais une
femme delaissee court toujours apres son mari; c'est la regie
au theatre. La belle lady arrive done, elle se presente chcz
Ernest, sous prctexte de se faire peindre, raais en effet pour
y rencontrer Sophie; elle recoil de la jeune actrice des conso-
lations el de bons conseils; et quand son volage epoux arrive,
persuade que Sophie va combler ses voeux en lui donnant le
portrait apres lequel il soupire , c'est celui de lady Dalton qui
lui est offert. Cette epouse outragee parait, elle acheve la
lecon par ses reproches, et la piece finit par I'union des deux
amans et par la reconciliation des deux epoux. Cette csquisse
legere est dessinee avec esprit; de jolies scenes, un dialogue
564 FRANCE.
])iquant, en ont assur6 le siicces, et annoncent chez les au-
teurs un talent iligne d'oser autre chose. Un tableau de
moeurs franchement touclie est pr<5ferable au roinan le plus
iiigenieux.
— Premiere representation du Millionnaire , com<^'die en
trois actes et en prose, par MM. Martin et Mauie.( Jeudi !^
aout. ) — On a montre bien souvent au theatre des lioinines
que Ton crolt pauvres , et dont la richesse, aussilut qu'elle est
seulernentsoupconnee, eveille autour d'eux la cu])idite, ettous
les sentimens les plus personnels qui se cachent dans le coeur
humnin. Ces sorles de sujets sont feconiis en peripelies, et
ejj situations coniiques ; mais la donnee est un peu usee.
Pour la rajeunir, les auteurs dvi Millionnaire I'onJ retoiirnee;
ils nous ont presente un hoinmearrivant d'Ameriqne plus paii-
vre qu'il n'y etait alle, niais auquel on suppose de grandes
richesses ; tous ces millions dont on le croit possesseur , et
qui ne sont que dans la tete de ses parens , lui valent les atten-
tions les plus empressees, des restitutions sur lesqnelles il ne
comptait }j;uere, et nieme de riches cadeaux qu'il emploie a
doter un jeune homme aime de sa niece, mais qu'on ne voulait
pas lui laisser epouser, parce qu'il n'ctait pas assez riche.
Cette conception ressenible beaucoup a celle donj elle est la
contre-partie , et les situations qu'elle offre n'ont point paru
plus nouvelles; malheureusement, le dialogue n'est pas assez
piquant ])our faire oublier ce qu'il y a de comraun dans I'inlri-
gue. La piece n'a point amuse le parterre; et, au theatre , des
juges qui ne rient pas sontseveres; le Millionnaire , fort bien
recu par ses parens, n'a pas obtenu du public un accueil si
favorable ;il nefera probablement pas unlongsejour al'OdeoD,
dont 11 n'enrichlra pas plus le caissier qu'il n'a enrichi sa fa-
milie. M. a.
Beaux-arts. — Sculpture. — Lorsqu'en 1821 je publiai dans
ce recueil (torn, xi p. 29) une dissertation sur I'es sculptures du
Parthenon qui ornent maintenant le Museum Britannique , a
I'occasion des copies en plalre que le gouverncment francais
avail fait venir de Londres, j'exprimai le voeu que , dans I'in-
teret de I'histoire et de Toiude de I'art, il fiit etabli un niusee
special de platres moules sur les plus belles productions de
la sculpture, eparses dans les diverses collections de I'Eu-
rope. Ce vceu commence a se realiser : on vient de reunir
dans une salle du Louvre, et d'exposer aux regards des artistes
et des connaisseurs, une assez grande quantite de platres de
cette nature.
Le colosse de Montecavallo est I'un des morceaux les plus
I
PARIS. 565
iinportans et, sans contredit, le plus considerable de celle
collection. Cette figure, d'environ dix-hnit pieds de li;iut, est
une production extremement remarquable de I'art statuaire;
malheureuseraent,elleest dansunespacetrop etroit. On trouve,
en outre, dans celte saile , les sculplnres du Parthenon qui ont
donne lieu a ma dissertation ci-dessus rappelee, et les bas-re-
liefs du meme temple represenfant les panatlienees, fetes insti-
tueescn Thonneurde Minerve.Cfs bas-reliefs ont etc moulcs sur
les marbres qui faisaient partie de la collection de M. de Choi-
seul , et que le ministcre de la maison du Roi a fait acheter. Les
figures du fronton du grand temple d'Egine, d^couvert depuis
un petit nombre d'annees, font aussi partie de cette riouvelle
collection, ties dernicres sculptures qui remontent a la plus
liaute antiqtiitti, et dont lecaractere particulier est maintenant
designe par le nom de scuplture eginitique, merite d'exciter
I'attention des artistes et des archeologues. J'ai regrette de
ne point tronver dans cette salle les figures de Kiobe dont
le grand due de Toscane a envoye , il y a deja quelques
annees, des platres qui sont ensevells a I'Ecole des beaux-arts
ou ils finirontpar etre detruits, comme ceux que Louis XIV
avail fait venir.
II faut maintenant accroitre cetle collection le plus possible ;
inais, ce qui est surtout aussi pressant qu'indispensable, c'est
que le colosse de Montecavallo soit mis dans une salle assez
spacieuse pour que i'on puisse en bien saisir I'ensemble.
— Peinture. — Depuis mon dernier article sur Y Exposition
au profit des Grecs {voy. ci-dessus, p. 278), il a paru, a celte
exposition, rnais seuleraent pendant quelques jours, un tableau
qui a vivement excitti I'attention et meme la curiosite publiques.
C'est un interieur cV app art erne nt , orne avec beaucoup de gout,
dans lequel unefemme est assise surun canape, tenant un iivre
a la main. Elle vient d'interrorapre sa lecture pour tourner ses
yeux vers le portrait de M'"^ deStael, par M. Gerard. En consi-
derant ce portrait, sa physionomie a pris un caractere pensif ,
peut-etre meme un peu melancolique. Celte circonstance parti-
culiere, la beaute de la femme couch«''e sur le canape , ont fait
reconnaitre une dame celebre en France, et meme en Euro})e,
pour les graces de son esprit, les charnies de sa personne et la
vive affection qui I'unissait a M™' de Stael.ill regne, dans cet ou-
vragc, une delicatesse de pinceau extremement reraarquable;
les accessoires sont rendus avec beaucoup de soin ; I'effet ge-
neral est tres-bicn entendu et tres-harmonieux ; enfin , il fait
honneur a M. Dejuinnf. , qui a deja pris un rang honorable
dans notre ecole par des productions importantes ct justemfn^
166 FRANCE.
rcmarqudes. On dit que ce tableau est destine au prince Au-
guste de Prussc.
— Lithographie. — Les arts , comnie la po(5sie , vi^ent d'erao-
tion ; quelle source plus feconde (jue le spectacle de cette nation
h^rok'que qui se debat contre ses feroces oppresseurs pour re-
co'.ivrrr jine liberie qu'ils auront payee, s'ils I'obtiennent, au
prix dc tout ce que les liommes ont de plus cher. — La lutle des
Grecs contre les Turcs, c'est-a-dire, de la civilisation, de la
religion, de la liberie, contre la barbaric, I'ignorance et le
despotisme, est le drame le plus horrible et le plus sanglant
dont I'humanitc ait eu a geinir depuis plusieurs siecles.
M. Langlois et M. H. Vernet, son mailre, ont puise dans
les scenes que produit cette lalte deplorable, les sujets de trois
tableaux qui vont etre successivement reprcduits par la litlio-
graphie. Le premier de ces artistes a reprcsenlc la mort de
Marc Bolzaris , et la prise de Missolonghi. Le sujet choisi par
M. H. Vernet lui offre les moyens de developper la variete et
I'etendue de son talent : c'est I'intrepide Canaris incendiant la
flotte turqtte.
M. Maurin, charge de lithographier la mort de Botzaris ,
a terinine sa planche qui vient d'etre publiee. Cette lithographic
eseculee avec beaucoup de verve , et ou Ton remarque beau-
coup d'habilele, coute 12 fr. sur papier de Chine , et 10 fr. sur
papier blanc. La prise de Missolonghi paraiira dans un mois ,
et I'incendie de la flotte turque , peu de terns apres. Cette belle
suite ne peut manquer d'avoir beaucoup de succes ; il ne s'agit
pas la des Atrides , ou des aventurcs de quelque heros fabu-
lens , mais d'evenemens qui se sont passes de nos jours et
dont Ic recit fait battre le cceur de tous ceux qui n'ont pas re-
nie tout sentiment gcnereux.
— Tous ceux qui se sont occupes de I'enseignement sa-
vent combien les bons livres elementaires sont rares : il
en est de meme du dessin. Les maitres ne pouvant faire des
modeles pour tous leurs eleves, en font graver ; mais les procedes
de la gravure et du dessin different esscntieilement; I'eleve
se donne une peine inutile, contracle meme souvent de mau-
vaises habitudes, en voulant rendre I'extreme fini et la regu-
larite des travaux de la gravure. Ponr remedier a cette difficulte,
deux horames de beaucoup de talent, MM. Dejdinne et Cha-
TiLLON se sont propose de donner une suite graduelle et com'^
plete de modeles qu'ils ont empruntcs a I'antique, a Raphael,
a Girodet, leur luaitre , et a d'aulres grands artistes. lis ont
employe la lithographic, qui n'est elk-merae qu'un dessin im-
prime, et, consequemment , le moyen le plus propre a don-
I
PARIS. 567
ner une idee juste du dessin. Voila un de ces ouvrages dont
le succes doit etre plus solide que brill^nt; mais le merite en
sera appreciede tous ceux qui se livrent a la carriere honora-
ble et difficile de reduction. Deux cahiers ont paru et coutent
chacun 3 fr. ; les plancbes se vendent isolement. Paris, chez
Engelmann , imprimeur-lilliographe, editeur. P. A.
Necrologie. • — Larauza. [Jean-Louis). — Les lettres et
I'instruclion publiqiie ont fait une peite fort regrettable
dans la personne de M. Larauza , docteur es-letlres, officier de
I'universite , ex-inailre de coiferences a I'ecole normale , bi-
bliothecaire de la faculle de iheologie de I'Academie de Paris.
— M. Larauza etail ne a Paris, le 8 mars 1793. II fit au
lycee Napoleon , aujourd'hui le college royal de Henri IV,
d'excellentes etudes , couronnecs par de brillans succes. Son
nora , qui retentissait cliaque annee avec eclat dans loutes les
solennites acadcmique3,fut bientot inscrit sur la liste des elevcs
de recole normale. Aprcs y avoir acheve le cours d'etudes
prescrit par les reglemens, et avoir pris le grade de docteur-es-
lettres, 11 professa, pendant quelques anniies , la granimaire,
les liumanites , et la rhetorique dans les colleges de Paris et
des departcmens. Enfin , en 181 5, son inerite qu'avaient accru
de fbngs et patiens travaux, et I'experiencc de Tenseignenient,
altira plus particulierement I'attention des chefs de I'univer-
sile ; il fut juge digne de professer dans retablissemeut dont
il avait etc I'un des disciples les plus dislingues , et fut nomm^
maitre de conferences a I'ccole normale. II remplit les fonc-
tions de cette nouvelle ])lace avec beaucoup de zele et de succes
jusqu'au moment ou fut supprimee sans motifs qu'on osat
avouer, aver, une sorte de legerele brntale, cette ecolc utile et
raodeste qui sans eclat et sans bruit avait, dans I'espace de
quelques annees, renouvele noire instruclion publique. M. La-
rauza conlribua puissamment a cette restauration des etudes
par scs excellentes lecons. Charge specialement de I'enseigne-
ment des langties anciennes et de la grammalre generale , il
y porta un esprit de critique fort remarquable , et Ton doit
vivement desirer , dans I'inleret de la science cornme dans
celui de sa rt'putation , que les ecrits qu'il a laisscs sur ces
lOatieres soient en etat d'etre publics. A des travaux d'un
genre si grave, M. Larauza unissait les delassemens que donrse
la culture des arts. II ctudia la niusique, et particulierement
la composition , avec celte ardeur infaligable , cette sagacllc
de conception, qui eiaienl les traits distinctifs de son esprit;
i! y Kt en peu de tems assez de progres jwur qu'il put se
568 FRANCE.
flatter de resoudre les problemes jusqua ce jour insolubles que
presente aux recherches de la critique la musique des anciens ,
et pour composer, dans le style de Gluck et de Mozart , des
chants d'un caractere gracieux et noble , qu'on doit conser-
ver precieusementcomine I'expression la plus vivanto qui nous
reste aujourd'hui de son ame. Pousse par la passion des arts,
et le desir d'en admirer les raonumens , M. Larauza sut meltre
a profit les loisirs forces que lui avail faits Tuniversite, et se
rendit en Italie , oil I'aclive curiosite de son esprit, avide
d'emotions et de connaissances , soutint son courage contre
les difficultes de tous genres que peut rencontrer sur une terre
etrangere un voyageur depourvu tout a la fois de sante et de
fortune. II revint, ivre de joie, rapportant de cette expedi-
tion litteraire , une foule d'observations curieuses qu'il a ne-
glige malheureusement de rediger, et dont sa niodestie nous
a prives , autant que sa mort inattendue. Toutefois , il s'est
applique a trailer une question qui I'avait vivement preoc-
cupe, et dont il est a croire qu'il a enfin trouve la solution,
vainemenl cherchee par un grand nonibre d'hommes habiles.
(Voyez ci-dessus , Bulletin bibliographique , page 481.) On
sail que les critiques ne sonl pas d'accord sur la route que
suivit Annibal a tracers les Alpes pour penetrer en Italie ; les
divers ouvrages ou cette question est de'battue , ne paraissffient
pas a M. Larauza I'avoir suffisamment eclaircie ; il chercha de
nouvelles lumieres dans un examen plus allentif des documens
que nous ont latsses les anciens, el surtout dans I'inspection
scrupuleuse des lieux. II a consigne le fruit de ses conscien-
cieuses et perseverantes recherches dans un meraoire remar-
quable tout ensemble par la science et la penetration , et qui
doit interesser vivement tous ceux qui s'occuj)ent de la con-
naissance des antiquites ; ce memoire avail deja obtenu le
suffrage d'un assez grand nom-bre de savans, et allait enfin
6tre lu a Y Acadernie des inscriptions et belles-lettres , et at-
tirer ainsi a son auteur la plus glorieuse recompense de ses
peines , lorsqu'une maladie subtle et terrible I'a enleve en quel-
ques jours a ses etudes, a ses succes, a ses amis, a sa famille. II est
mort le 29 septembre dernier. Le soin d'honorer sa memoire
appartient a celui de ses collegues que son coeur avail plus
particulierement distingue, et qu'il cherissait comme un frere,
(M. ViGUiER ). C'est a lui de mettre au jour ces travaux que
la mort a interrompus, et qui ne seront sans doute pas perdus
pour la science qui les reclame ; c'est a Ini de rendre hommage
au nom des amis nombreux de M. Larauza , a toutes les qualites
a^mables, a toutes les vertus qui le leur rendaient si cher; a s^.
PARIS. 569
religion austere el tendre ; a son ardenle passion poui" le beau
et le vrai; a son devouement sincere et enlier aux devoirs de sa
profession et aux interets de ses amis ; au cliarmede son com-
merce si facile et si doux,a torit ce qu'ils n'oublieront jamais ,
etdont le souvenir leur sera toujoursdoiiloureiix etcher. Deja ils
ont trouve d'eloquens interpreles de lenrs regrets dans I'au-
teur d'un article insere dans le Globe (n° 1 66, /» octobre i SaS), et
dans celui d'un discours funebre prononce avec j^eine , le jour
des funcrailles , au milieu des sanglots et des larmCs de I'au-
diloire et de I'orateur (M. Victor Cocsix ). Celui qui ecrit
cette notice , trop longue peul-etre pour le recueil qui veut
bien I'admettre, mais trop courte pour sa juste douleur,
trouve quelque consolation a s'unir a eux dans un si trisle
. rainistere. H. P.
— Oberlin [Jean Frederic) , pasteur a Waldbach (Ban de la
Roche, departement du Bas-Rhin ), mort le i*'' jnin i82G,age
de 86 ans. — Le departement du Bas-Rliin vient de jierdre
un de ses citoyens les plus recommandables, et I'Eglise pro-
testante, un rare modele de toutes les vertns chretiennes. Le
respectable pasteur Oberlin , frere du celebre pliilologue de
ce nom, apres avoir exerce pendant cinquante-neuf ans les
fonctions pastorales dans un pays ou I'influence de ses vertns,
de sa bienfaisante activiie , de ses constans efforts , de ses utiles
travaux, a presque cntierement change , par les plus heureuses
ameliorations, I'ctat de Tagricnlture , de I'industrie, etsurtout
le caractere moral et la condition desliabitans, a succombe, le
premier juin dernier, dans la 86^ annee de son age, a une
maladie douloureuse. II a emporte dans la tombe les regrets
de toutes les communes circonvoisines , et de loute la popula-
tion alsacienne, sans aucune distinction de culte. Nous puisons
dans une notice qui vient d'etre imprimee a Paris ( Crapelet.
In-4° de 4 pas*^*) quelques particularites sur la ])ersonne de
ce venerable ecclesiastique et sur les services qui ont fait si
vivement sentir sa j)erte, et qui liii assurent une place hono-
rable parmi les bienfaiteurs de I'humanite.
Sur la limite des departemens du Bas-Rhin et des Vosges se
trouve un territoire nomme le Ban de la Roche, autrefois
isole et a demi sauvage, aujourd'hui !'un des endroits les plus
remarquables par Tinslruction, I'industrie et la moralite des
individus. Entouree de roches arides et sans moyens de com-
piunication, cette triste contree serait sans doute restee etran-
gere a la civilisation, si la Providence n'y avail successivenient
appele deux respectables pasteurs, dont le dernier surtout a
570 FRANCE.
chang(5 en quelque sorte la nature du pays, et regendre le mo-
ral de scs habilans.
Le pasteur Oberlin , transporte au Ban de la Roche, vit tout
ce qu'une telle mission imposait a son aclivite. Mu par une
piiite vraiiuent religieuse, et ])ar un zele infatigable pour le
bien de I'liuraanite , •Iconiprit qu'il ne devait pas se borner a
pourvoir anx besoins Sjjirituels de ses conciloyens, mats que,
parlour ou il y avait du bien a faire, il en devait I'exemple.
Le pays inanquait de communications au-de/iors, il entreprit
d'en ^tablir : muni d'instrumens et de poudre, il se met a la
t^le des habitans pour faire sauler les rocliesel ouvrir des rou-
tes; la terre, faute d'eiigrais, etait en grande ])artie inculle, il
la fi'conde par des moyens arliflciels; il fait venir du Nord les
semences des plantes les plus appropriees a la nature du ter-
rain, on encourage la culture; et bientot, par ses soins, les
coteaux arides et steriles prennent une face plus riante , et four-
nissent non seulement aux besoins du pays, mais encore a des
esportations, dont les jiroduits servent a des ameliorations
nouvelles. Toujours occujx; du bien-etre de ses paroissiens, il
pourvoit aussi a leurs besoins en cas d'accidens et de maladies;
il fait apprendre aux uns a manier la lancette ; a d'aulres, a
exercer I'etat de sage-femme ; et lui-m^me familiarise avec la
connaissance des plantes mcdiclnales, II compose, a I'usage du
])ays, une petite pharmacie, et en dirlge gratuitement I'emploi.
Sa sollicitude pour les besoins physiques ne ralentissait en
rien le zele de ce digne pasteur pour ranielioration intellec-
tuelle et morale des habitans, et surtout pour leur education
religieuse, (ju'il co-nsidcrait comrae le premier des besoins.
C'elait dans la religion qu'il puisalt ses motifs et sa force; c'etait
aussi par elle et pour elle qu'il entendait operer le bien. II
crea des t^coles ou, par des methodes perfecliontiees , I'enfance
recut les premieres instructions; ou I'adolescence, imbue des
preceptesde I'Evangile, acquit I'espril: d'ordre, I'amourdu tra-
vail et le gout de toutes les choses honnetes : la porte du pas-
teur etait ouverte a toutes les irifortunes et a toutes les neces-
sltes; chacun trouvait chez lui les secours , les consells, I'appui
et les consolations dont il avait besoin. Lorsque le dimanche
ses paroissiens se reunissaient dans le temple, il les exhortait ii
la praiitiue des vertus domestiques et chr<5tlennes dont 11 leur
monlrait a la fois les avantages et I'exemple; el quand dans la
semaine il avait ap})rls que quelqu'un s'elait ecarte de ia bonne
vole, ou s'etait brouille avec un parent, un ami, un voisin,
il savail si bien le ramener, que souvent, apres le service dl-
PARIS. 571
vin , le paroissien atteudait le pasteur, le remerciait el s'em-
pressait d'aller reparer la faute qu'il avait commlse. Rareinent
un proces s'engageait entre les habitans du Ban de la Roche;
et lorsqiie le digne pasteur ne pouvait parvenir ii concilier les
panics, on I'a vu plus d'une f'ois payer de sa propre bourse
la somme, objet de la contestation , pour retablir riiarmonie
dans les families.
Devenu ainsi le bienfaiteur, et, pour ainsi dire, I'ame de
cette interessante peuplade, dont la renommee avait successi-
vement r.ttire et fixe dans le pays plusieurs homines de bien ,
jl exercait sur elle la plus heurcuse influence. Rapportant tout
k Dieu, el se confiant en sa divine providence, Ic pasteur
Oberlin , pere de plusieurs enfans, etait le promoleur zele de
toutes les oeuvres chretiennes; malgre la modicite de ses res-
sources ( son traitement naguere encore n'excedait pas 1 000 fr.),
il savait suffire a lout; il avait, a son exemple, fait contracter
a ses paroissiens la precieuse habitude de raeltre a part, cha-
que semaine nne jjortion de leurs ejjargnes pour les employer
a de bonnes oeuvres; et par ce nioyen ils se trouverent en
etat d'encourager , de seconder, de soutenir plusieurs institu-
tions failes dans le veritable esprit de I'Evangile.
Tant de vertus et de qualites reunies en un seul homme ne
pouvaient rester long-tems inconnues. Plusieurs Societes phi-
lantropiques s'empresserent de le nommer membre honoraire;
notre premiere assemblee nationale declara qu'il avail bien
merite de la patrie; la Societe d'agriculture du departement
de la Seine lui dccerna plus tard une medaille d'or ; enfin,
Louis XVIII, sur le rapport du miiiistre de I'interieur, le de-
cora de la Legion d'Honneur.
Quelque honorables que fassent, pour M. Oberlin, ces te-
moignagesd'intertit ; quelque flatteuse qnefut la visite de beau-
coup d'etrangers de distinction, qui de toutes les parties de
I'Europe allaient voir le Sage du Bandela Roche,'\\ scmblait ne
mettre de prix reel qu'a la teudre affection, soil de cette mul-
titude d'eleves dont il avait eclaire I'esprit et forme le coeur,
soil de ses nombreux paroissiens, qui lui devaient la civilisa-
tion et le bien-etre. Get attachement, qui ne s'est jamais de-
menti, et qui survivra long-tems a la mort de leur j)asteur , s'est
manifeste d'une maniere bien touchanle dans la ceremonie de
ses funerailles. Les annales de 1' Alsace offrent peu d'exemples
d'une solennite aussi imposante, relevee par le concours d'un
nombre immense d'habitans du pays et des dej)artemens voi-
sins ; tous velus d'habits de deuil , venant dans un morne si-
lence contempler une dcrniere fois les traits de leur bienfaiteur,
572 FRANCE.
de leur i)ere(i), dont le corps etait renferiiie dans nn cerciieil
a vilrage, que I'ingenieuse delicatessc d'un desparoissiensavait
ainsi dispose a cet effet.
Dans la vuc dc conserver Ic souvenir de ce vdncrablc pas-
teur, une sousciiplion a etc ouverte pour faire dans le pays
ineinc qu'il a regenero, une Fondation de charite qui por-
lerait le nom d'OiiEULiN, et qui, destinee a pourvoir aux
besoius physiques el raoraux des habitans du Ban de la Roche,
pcrpc'tuerait parmi les generations futures ['influence de ses
bienfaits et I'exemple de ses vertus.
On a la confiance que non-seulemcnt les liabitans de I'Alsace,
si long-lenis tdmoins de son zele , mais encore lant de person-
nes de I'interieur de la France et des pays ttrangers a qui le
nom du pasteur Oberlin , si souvent cite, ne saurait ^tre in-
connu , airaeront a honorer sa memoire en concourant a cette
pieuse fondation, monument vivant de sa blenfaisance eclairee,
et le plus approprie aux sentiinens et au caraclere de ce grand
et honorable citoyen.
On souscfit : a Fouday {^Ban de la Rocfte), deparlement du
Bas-Rhin, cliez MM. Legrand, pere et fils; a Paris, a Stras-
bourg et a Londres , chez M. Treuttel et Wurtz.
N. B. La liste de MM. les Souscripleuro sera imprimee et
deposee dans les archives du pays. Y.
— Attumonelli [Michel), n. m., membra de la Societe de
medecine et de la Sociele medicale d'cniulation de Paris, ne a
Andria , dans la terre de Bari, royaume de Naples, en 1760 ,
mort a Paris le 17 jnillet 1826. — Le savant etranger, dont
nous consacrons ici la memoire, s'est ac(]uis des droits au
litre de Fraiicais par le long sejour qu'il a fait en France, et
par I'estime que lui out merilee son caraclere et ses utiles tra-
vaux. II s'instruisit dans la medecine, des sa pins tendrejeu-
nesse, a I'ecole des cclebres Ci/il'.o et Cotugno , professeurs de
celle Universite de Naples qui a ])roduit tant d'hommes dis-
tinu;nes. Apres avoir continue ses etudes sous Vhenzio, me-
decin de la reine, il passa a Salerne oil il fut recu docteur en
philosojjhie et en medecine; de retour a Naples, il y remplaca,
pendant (juelque terns, le D' Villari, professeur de clinique a
i'liospice royal des Incurables. Independamment des connais-
sances approfondies qu'il avait acquises dans son art , plusieurs
des principales branches de la litteralure ancienne, la theologie,
(t) Qualification (]ui lui etait donnee par tout le Ban de la Roche , soti,s
le nom dc Papa Oberlin.
PARIS. 573
Ja jiliysiquc,riiistoirenaturelIe,labotaniqneIuifurentfaniilieies.
Ces diverses sciences etaientsi bien classees dans sa meiiioire, que
I'on ne savait si Ton devait louer davantafje la \ariete de ses
connaissances, ou la methode avcc laquelle il ies avait coordon-
nees. line logique saine , uiie critique juste, unc perspicacile non
coiTimune aplanissaient pour lui Ies difficultes d'un art souvent
conjectural, et dans lequcl on est si souvetil Ircmpe jiar I'ap-
jiarence. Ces avantages le mirent a ineme d'entreprendre iin
grand nombre de cures qui etablircnt de bonne henre sa repu-
tation. Jeune encore, il coinposa I'ouvrage intitule : Elemenx
de physiologic rnedicale , ou Physique du co7-ps /iumain,imprimf-
a Naples en 1787 et 1788, travail aussi remarf[uable par I'cru-
dition avec laquelle la matiere y est traitee , que par la jus-
tesse des vues et par resj)rit philosophique de I'auteur. Les
armeesfrancaisess'etant retirees de la vilie do Naples, en 1799,
Attumonelli, qui avait traduit la Politique de la France rege-
neree de Condorcet, quitta sa patrie a laquelle il ditun eternel
adieu, pour venir s'etablir a Paris. On peut dire que, depuis
cette epoque, une nouvelle existence cornmenca pour lui. A
peine arrive dans cette ville, en 1800, le liasard lui fit con-
nailre MM. Paulet Tryaire qui fondaient alors le vnste etablis-
semeut de bains de Tivoli , le plus considerable qu'aient possede
et que posscdent en ce genre la capitale de la France et peut-etre
I'Europe. Attumonelli ecrivit, a cette occasion, son opuscule
intitule : Memoire sur les eaux minerales de Naples et sur les
bains de vapeur , dans leqxiel il Iraite des quatre principales
eaux de ce pays volcanique, c'est-a-dire des eaux sulfureuses,
ferrugineuses, alumineuses et alcalines. li n'est pas inutile
d'ajouter combien la inaison de Tivoli a du a cette belle pro-
duction, etdequel secours Attumonelli lui a toujours ete depuis.
Un homme decemerite ne pouvaitresterlong-tems ignore dans
une ville, centre de lumieres. Attumonelli s'y fit bientot con-
naitre et s'y crea une brlllante clientelle , dont plusieurs princes
souverains firent partie, independamment d'un grand nombre
de personnes distinguees. Toutefois, il ne se contenta point de
visiter lesmalades, de frequenter la sociele la plus choisie ;
son erudition lui rendait necessaire une grande bibliotlieque ;
il prit soil! de reunir une collection de plus de trois mille
volumes. Le grand ouvrage sur i'Egyple ayant paru, il senlit
combien racquisition de cet immense depot, ou Ton a reuni
tout ce que contient de plus singulier celle antique contree,
etait au-dessus des raoyens pccuniaires des amateurs, et
surtout des gens de lettres : il concut le plan d'un travail qu'il
574 FRANCE— PARIS.
laisse mallicureusemeiit int-dit ct qu'il a destine i ^Ire divis^
en trois ou quaire volumes. Ce n'est cependant pas un simple
extrait de roiivrage cite; il a ajoute beauconp de choses, en
partic netives, en parlie tirees des ouvrages du cardinal Gae~
tano , dn clianoine Mazochi , de I'abbe Martorelli , de Zoega,
iVEnriius Quirinus Visconti , etc. Ami de la verite , il n'ctudiait
que pour la connailrc ; aucune j)reventton ne I'cgara jamais
dans ses rechcrches; ancuu sysleme exclusif en medecine ne
commanda jamais a ses opinions. Si Ton remarqua, parfois,
en lui, avec deplaisir, une cerlaine indecision, on doit I'altri-
bucr plutot a son esprit medilatif qu'a une sorte d'indiff^-
rence pour les progres de la science. II poussait si loin la
modestie, qu'il fallait le frequenter long-tems, avant de cora-
prendrc quelle etait I'etendue de ses lumieres. Ces belles
qualitcs ont trouve leur juste recompense dans I'attachement
de totis ceux qui ont eu le bonheur de le connaitre ; en effet , il
etait difficile de le voir et de ne pas devenir bientot son ami.
Parmi les personnes illustres qui I'honorerent de Icur protec-
tion , nous citerons M°"' la princesse de Wagrara , qui eut pour
Michel Attumonelli une constante bienveillance, nous oserons
dire , une amitie parliculiere. Sigismond Visconti.
TABLE DES ARTICLES
CONTENUS
DANS LE QUATRE-VINGT-DOUZIEME CAIIIER.
J OUT 1826.
I. MEMOIRES, NOTICES ET MELANGES.
I. Notice surles Societes savantes des Etats-Unis. *. aSg
a. Notice sur les ouvrages de Jeremie Bentham. T. 198
3. Notice sur la langue des sauvages de I'Amerique du Nord.
IfJorenas. 3o8
II. ANALYSES D'OUVRAGES.
4. Theorie du navire , par M. le marquis de Poterat. Ferry. 820
5. Fragmens philosophiques, par Victor Cousin. $ 827
6. Education domestique , par Mine Guizot. P. B. 335
7. 1°. Histoire de Sardaigne, par M. Mimaut.
a*. Voyage en Sardaigne, par M. Albert de La Marmora.
Amauri Duval. 34fi
8. Memoires inedits de Mra^de Genlis. V. L. 3fi3
9. Chefs-d'oeuvre des Theatres etraugers. I«r article.
Leon Thiesse. 879
III. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
Annonces de ixQ ouvrages , francais et ctrangers.
Amerique septewtrionale. — Etats-Unis , 2 394
— Mexiqiie, i 399
Edkope. — Grande-Bretagne , 12 , dont 8 ouvrages periodiques. Ibid
— Riissie, 3 4o5
— Norvegc , 1. — Danemark ,4 4o9
— Allemagne, 5 412
— Suisse, 1 4^8
— Italie, 8 422
— Pays-Bas, 8 4^9
France, 78, savoir : Sciences physiques et naturelles, 16 482
— Sciences religieuses , morales , politiques et historiques , 27. . . 455
— Utterature, i5 49^
— Beaux- Arts, 6 607
— Meinoires et Rapports de societis savantes, i 5i2
— Ouvrages periodiques ,5 5i4
— Livres en langues etrangeres , imprimis en Prance, 'i Sig
^jd TABLE DES ARTICLES
IV. NOUVELLES SCIENTIFIQUES ET LITTERAIRES.
Amerique septentkiomale. — JiiaCs-U/iis : B^temix a vapeur ;
Necrologie : John Adams; Jefferson Sat
Ameuique centkale. — Cuaiemala : CWmat.; commerce. . . . 5a2
Antilles. — Haiti : Emprunt; Commerce; Enseignement mutuel
etenseignement industriel; Legislation , code civil, iutroduc-
tion du jury ; Finances, impot extraordinaire; Mines SaS
Amerique meriuionale. — Colombie : Liberte de la navigation
par la vapeur. — Z?r«;7 ; Trnite des negres 524
AsiE. — Inde Britaniiiqiie : Progv(;s de I'education publique. . . 5a6
Afuique. — Siena-Leone : Voyage dans Tinterienr de I'Afrique.
— £^/ji;fe;Extrait d'une leltre d'Alexandrie Say
EUROPE.
Iles Britanntques. — -Tableau des derniers emprunts fuurnis
par les capitalistes anglais. — Manchester: Secouis donnes aux
ouvriers indigens. — Publication des livres sacres et histori-
ques de Ceylan. ■ — Necroioifie : Weber SSa
RussiE. — Traduction des ecrivains grecs. — Odessa: Monument
consacre au due de Richelieu SSg
NoRviiGE. ^ — Ckrisiiania :'Uniyershe 54o
Alle.iiagne. • — Prusse; Keenig^bei g :Soc'ii\.e pour I'amelioration
des jeuues criminels. — y/rt//e:Litterature orientale; publica-
tion prochaine S41
Suisse. — Extrait d'une lettre : Coup-d'oeil sur I'etat actual du
canton des Grisons. — i^/;6o«/-^;Societe philhellenique. . . . 54a
Italie. — ,Wi7rtn .• Invention .des bateaux a vapeur. — i\'^a/'/« ;
Academie royale des sciences. JSicrologic : Piazzi , Santa-
relli 546
Pays-Bas. — Brtixclles : Fondation d'un observatoire et d'un
jardin botaniquc ; Formation d'une commission de statistique.
— 7'o«A«ej: Education industrielle. — ^'«ifc/i^rt/«.- Societe Is-
raelite. — linixeltes : Societe pour I'encouragement de la
Jangue hoUandaise • • • 548
France. — Lyon .'Navigation de la Saone. — Besancon : kati-
quites. — D/fp/)e; Antiquites ; yisite de S. A. R. Madame. —
Societes savantes : Liancourt : Ecole de geometric et de meca-
nique industrielle. — A'««cx .-Societe des amis du travail. . . 55o
Paris. — Institut: Academie des sciences: Seances du mois de
juillet. Academie des inscriptions : Seance publique du
28 juillet. — Prix proposes aux melUeurs ouvrages sur diverses
questions d'utilite publique. . — Emprunt d'Haiti. — Recla-
mation.— Theatres: Odeon , i''* representation de VActrice,
et du MilUonnaire , comedies. — Beaux - Arts : Scuplture ;
Peinture; Lithographic. — Necrologie; LaraAza; Oberlin ;
Attumonelli • SSy
(' '■/..
Avis AbX AMiTtUBS HE LA LITTtlV ATU .'.K ETRAKCEKK.
On peut s'adresser a Paris , par I'entreraise du Bobeau cextbai. ub
LA Rbvuk EwcycLOPEDiQUK, a MM. Treuttel et WiJRTZ, rue de
Bourbon , n° 17, qui cnt aussi deux maisous de librairie, Tune a Stras-
bourg , pour rAllemagiie, et I'autre a Londres ; — a MM. Arthu»
Bebiramd, rueHautel'euilie, n° a3; — Rekouard, rue deTournontn" 6;
— Levrault, rue des Fosses-M.-le-Prince,n° 3 1, el 4 Strasbourg; — Bos-
SANGB/iere, rue Richelieu, n"'6o; et a Londres, pour se procurer les
divers ouvrages Strangers, anglais, allemands, Italiens, russcs, polo-
nais, hollandais, etc., ainsi que les autres productions de la litterature
etrang^re. Le prix de ces ouvrages rendus a Paris sera celui des pays
eti angers ou ils se publient, augraente de 10 pour 100, pour frais de
port, droit d'importation et de commission, etc. — La Direction de la
Revue Encjrclopediquevia d'autre but, en publiant cet avis, que de faciliter,
par tous les moyens qui resuhent de ses publications mensuelles , les
communications scientifiques et litt6raires entre la France et les pays
Strangers.
AUX academies et ADX SOCIETES SAVANTES dc tOUS ICS pOJS.
Les Academies et les Soci]fcrES'SAVANTEs et d'utilite pobi-iquh,
francaises et etrang^res, sont invitees a faire parvenir exactement,//-a/)c
de port , au Directeur de la Revue Encyciopediqae , les comptes rendus
de leurs travaux et les programmes des prix qu'elles proposent , afin
que la Revue puisse les faire connaitre le plus promptement possible a
ses lecteurs.
AUX EDITEDRS d'oDVRAGES ET ADX LIBRAIRBS.
MM. les ^diteurs d'ouvrages p^riodiques , francais et etrangeis , qui
desireraient echanger leurs recueils avec le notre, peuvent compter sur
le bon accueil que nous ferons a leurs propositions d'^changes , et sur
une prompte annonce dans la Revue, des publications de ce genre el
des autres ouvrages , nouvellemeot publics, qu'ils nous auront adresscs.
Aux ESITBURS DES RECUEIX.S FBRIODIQtJES EH AnGLEIERfiE.
MM. les Edlteurs des Recueils periodiques publics en Angieterre sent
pries de faire remettre leurs numeros a M. Degeorge, correspondantde
ia Revue Encyclopidique a Londres, v° 38, Norfolk-street, Strand, chez
MM. De Crusj', Cabet et Marbot, maison de correspondance et de com-
mission ; M. Degeorge leur transmettra, cliaque mois , en echange,
les cahiers de la ^ecue Encjyclopedique , pourlaquelle on peut aussi sous-
crire chez lui , soit pour I'annee courante, soit pour se procurer les
collections des annees ant^rieures, de 1819 a i8i5 inclusivemeut.
AUX LIBRAIRBS et AUX EDITEURS s'oUVRAGES eh AI.I,EMAGIfF.
M. ZiRGis, libraire a Leipzig, est charge de recevoir et de nous faire
parvenir tous les ouvrages publics en AUemague , que MM. les libraires,
le» editeurs et les auteurs desireront faire annonc«r dans la Revue Une)-
rlopidiqiic.
LiBUAiRES r/tez Icsquels on souscrit dans les pays ETRAHCEr.s.
Aix-la-Ch/ipclle, Laruelle Cls.
Jmsterdfiin, G. Dufuur; — Dc!a-
cliaud
I C^- •*
iSI
Londres, Dulan et Compagnie ; —
Treuttel et Wiirtz; — Bossauge.
Madrid, Denne-e; — Perfcs.
DJi/a/i, Gie{jlei;— Visniara; Kocca.
Moscoii, Gaiitler;— Riss j)i>i c el (lis.
Naples , Borel ; — Rlarotta et
Wanspaiidock.
Neuchdtel (Suisse), Greslcr.
.Vetv-1'o'A ( Etats-Unis ), Berard
ct Moudon.
Nonvelle -Orleans , Joujdan ; —
R-Oclie , fi( res.
Palerme (Sicile), Pfidonne et Mu-
ratori ; — Band" (C!i.).
Pclfrshourg, S.iliil- Floj ent ; —
Graefi';— Wcylit^r;— iHuchart.
Stuttgart ct Tiibitti^en , CoUd.
Utrecht, Van Sclioonlioven.
Todi , li. Scalabrini.
Turin , Bocca.
f'arsoiie, Glucksbcrg ; — Zii-
V ad sky.
f'ieiitie ( Autriclie ) , Gerold ; —
.Schauiuboure ; — Schalbarhcr
Jnvers , Ancelle.
yirait (Suisse), Sauerlander.
Ilerlin, Scldesinger.
Heme, Clias , au cabitiot lliU'-
raire ; — Bourgdorl. ■
lireslnu, Tb. Koii).
/iriiueiles , Lecharliftr; — Denial.
Ilriiges , Bogaert ; — Uuraprtier.
Fityreace, Piatfi.
F.'ibourg (S:\h:>i') , Aloisc Eggen-
doiTcr.
Francfortsar-Mein , Scliaeffcr ; —
Brtianer.
Caiid , Vandenkcrckoven Eh.
Gt-n^fe, T.-J. Paschoud; — Bar-
bezat et Delarue.
la Htiye, les freres Langenhuysen.
£rtrtf«M7/c, Eisclicr.
/^ri/)s.'g-,Gi icsliairnner; — G.Zlrgos.
Lilji-e , Jalheau jii-re.
Lishctnnc , Paul Mai tin.
COLO^'IES.
Gtiad'toupc (roinie-a-Piuu), Piolot aF.ic.
Ih-de-Frnuce (Port-Louis), E. Burdet.
V'-'.vjiy/if, Thoiuicns, Gaujoux.
ON SOUSCRIT A PARIS,
Axi BuKr.An oe K£n\ctiQ.j<, hue D'Enrim-SAiisT-MicHEr, , n" i8,
ou doivent ctre envoyiis j-.i^nncs deport, les livros , dessins et gra-
viiies, d mt on desire ranuouce, et les Letlrps, Meinoircs , Notires
ou Estraits destines a £'tre iiiseiies dans ce Kecucil.
CuEJiTKEurrEt kt Wiiaxz, iue de Bonrlioij*^ n" 17;
Ri.Y i'tGrvviek, quai dts Augusdns, n« 55;
Charles Rixuet, lihraire-comni'" ,■ quai des Augustins , w" 67 ;
DoxnEY-DurKE, rue Saint-Louis, 11° 46, an i\Ta>nis; it me
Richelieu, n'' ^7;
MoKC'iEaine, hi.'ulevaid Poissonniere, n" iS;
Eymeky, rue Ma7.;irine, n" 3o ;
Rohet , rue llautefeuille , n" 1 a ;
Bacheliek, quai des Augustius. n" 54 ;
Lr.vRAULT, rue desFosses-M.-le-Prlnce, n" 3i , et a Strasbourg ;
A. Baudouin , rue de Vaugirard, n" 17 ;,
Delaunay, Pei-tcier, Pomhieu, au Palais-Royal;
Uhbaik Cakel, rue Saint-Gcrmain-des-Pres ,ii°9.
A i,A Teste, Cabiket Litterathe, tenu par M. Gadiikh, anciea
inilitairc, Galerie de Bois , n" 197, au Palais-Royal.
A'l'te. Les ouvrages annonccs daus la Revue se trouvrut aussi cliczRoaKT , rue
Hautcfcuille , u" 13.
-i-r. i.'iiirT.ii>.i r.ir. ui: hh.acix,
Tome III-i8a6. ( 3i^ de la collection. )
93^ LI VII A ISO JV.
^^^K'
'V^^
REVUE
ENCYCLQfi^DIQUE
ANALYSE RaTSoNNEE x^^.
DES PRODUGTION^^S PLUS REM ARQU ABLE
DANS LA LITTI:RAT«H|^ES SCIENCES ET LES ARTS.
1° Pour les Sciences phjrsiques^t mathematiques et les Arts industriels:
M>I. AiipiRE, Ch.Dupik, FocniER,GiRARD,NAviEB,de I'liistitut;, Coqdkrel;
Casaseca, <le Madrid; Ferry, Francoedr , Ad. GowniSET, LeKormawu,
profi'sieur <le technologic ; A. RIlcuici.OT, de Mohtgery , Moread de Joknes,
P0UH.1.ET, T. Richard , Warden , etc.
2" Pour les Sciences natiircltes: MM. Geokfroy Saikt-Hxi.Aire, de I'lnstitut;
Bop.T i>E .Sat«t-Vikcent, correspoiidaut dc I'lnstitut , V. AoDonrn, MATniEU
BoKAFODs, deTuriu; Bp.ongniakt fils, DesmaRest , FlOukems, D.-M. ;
B. Oaillom , de Ditppe; V. Jacquewomt; etc..
3" yourXei Sciences medicales : MM. Auelon, BAi,i,T,DAMrROH , G.-T.DoiN,
Amedf.k Ucpad, Ksquirol, Fossatj.Gasc, A.GRiMAUD,d'Aug?rs ; Georgkt;
KrK( KHOFF, d'Auvers; Orfila; R1G01.1.0T fils, d'Amiens.
/)'' VouT les Sciences pliilosoy/iiques et morales, poUtiqiies , geographigues et
liistoi'iqiies .•tUM. M. A. JuLLiRji, de Paiis, Fondateur-l)ircct«ur de la Revue
EitcyclnpeJique; Degkrakiio, Ai.ES. be i.a Borde, Jomard , Larjimnais, de
I'lnstitut; Agobb, Artacd, M. A VENEi., BARBrE DD Socage fils, Behjamin-
(oKSTANT, Chari.es Comte, Deppimg, Adoipiie Garhif-P, Guigwiact,
Gui/.oT, A. Jacbert, Lafom de Ladebat, Alex. Lameth , Lamjcinais ills,
P. Lam I , Lesueuk-Meri.ih, Masmas, A. Metral; Meyer, d'Amiterdam ;
DR WORVIKS, PaREKT-BEAI., EuSKBE SAtVERTE, J.-B. SaY, SlSMOWDE DE
Sis-MOSDi, de Gcoeve, etc. DrpiM aine, Bervim.e, A. Beugnot, Bocchehe-
LeFPR, CRIVELT.t,DonBr.ET-DE-BoiSTHIBADI,T, OuFAU , DUFRAYEK , DuVER-
gier , Ghadet, CIi. Ernooard, Taillandier, avocats, etc.
5* Pour la Litterature Jrancaise et etrangere, la Dihtiographie , \' Archeologie
c\\ci Beaux- Arts :TAyi. AwDRiEtJX, Amaury-Duvai., Bertox, J. Droz, Ekieric
David, Lemercier , Naudet, de SEGCR,de riostitut; M'oeL.-Str. Bei.t.oc;
MM. Bariseab, BiANCHi.M. Berr, J.-P. Bres, Felix Bodin, Borwoup fits,
Chauvet, CBRifEDoi.i.E, dc Liege; P. -A. Coupis , Fr. Degeorge.Dumersan,
Ed. Gaottier , Pa. Golbery, Heirerg, Uekrichs, E. Hereau, ACGtrsTE
Jiii.i.r£N,fils; Kalvos, de Zante; Adrien-Lafasgb , J.-V. Leclerc, Loeve-
Veimars, a. Mahul, Mauviel, Mazois, Albert-Montemokt, Monnard,
de Lausaooe; NicOLO-Poui-o, C. Pagasei.,H. Patij.', Pongirvii,i.e;Qoete-
i.et, dk Reiffebbero, de Bruxelles ; Roli.e , bihliothccaire de la ville de
Paris; de Stassart, Fk. Sai.fi, M. Schinas ; ScBWEiGH.EnsER , de Stras-
bourg; Lech Thiesse,P. F. Tissot, Vernecii., Yillesave, S.Viscowti, etc.
A PARIS,
AU BUREAU CENTRAL DE LA REVUE ENCYCLOPliDIQUE,
Rue d'Enfer-S.iint-Micliel , n° 18;
ARTHUS BERTRAND , rue Hautefeuille, n» ?3;
Au IVlusEB ENGYCLOPEDtQUE, CHEZ BossASGE p6re,rue Richelieu,
n" 60;
Rehouahd, rue de Tonrnon, n" 6;
.O'NDRES. — Generai. FoREiGM A&eikcy Office, n" 38, Norfolk-
street, Strand; THEtJTTEL etWurtz; Bossasge; Dux.*c etcomp- ;
P. Roi,AMOi, n" 20, Berners-street , Oxford-street.
SEPTEMBRE 1826.
AVIS ESSENTIEL AUX SOUSCRIPTEURS.
MM. LES sotrscRiPM^^ dont Tabonnement est expire
LE 3o juiN DERNiE^^Rnt invites a le faire rbnod-
VELER iNCESSAMMENT, poiiF que Ic Service des envois
n'eprouve aucun retard.
CONDITIONS DE oBuSCRIPTTON.
Depuis le moisde Janvier iSrg, il parait, par ann^e, douze cahiers
de ce Recueil ; chaque cahier , public le 3o du mois, se compose d'en-
viron i4 feuilles d'impression, et plus souvent de ifi ou i8.
On souscrit h Paris, au Bureau central (fabonnement et d'expidition
indiqu^ sur le litre.
Prix de la Souscription.
k Paris 46 fr. pour un an ; 26 fr. pour six mois.
Dans ies departemens. 53 3o
A I'^tranger ...... 60 34
La difference entre le prix d'abonnement, h Paris, dans Ies departe-
mens et dans titranger, devant 6tre proporlionnelle aux frais d'expe-
dition par la poste, a servi de base a lafixation port^e ci-dessus.
A ce sujet, la Direction de la Revue Encjclopddiqiie croit devoir faire
observer que , cette base ayant ^te calcul^e d'apres le nombre de qua-
torze feuilles promises mensuellement aux abonnds, Ies frais deport
occasion's par raugmentation successive des cahiers sont reste-s enti^-
rement a sa charge.
Le montantde la souscription, envoye par la poste, doit 5tre adresse
d'avance , FKAif c deport, ainsi que la correspondance, an Directeur
de la Revue Encyclopidiqiie, rue d' En fer-Saint- Michel , n° 18. C'est a la
mdme adresse qu'on devra envoyer Ies ouvrages de tous genres et Ies
gravures qu'on voudra faire aunoncer, ainsi que Ies articles dont on
d'sirera I'insertion.
On peut aussi souscrire chez Ies Directeurs des postes et chez lei
principaux libraires, a Paris, dans Ies departemens et dans Ies pays
etrangers.
; Trois cahiers ou livraisons forment un volume. Chaque volume est
lettnin6 par une Table des mati^res alphabetique et analytique, qui
'claircit et facilite Ies recherches. Cette Table est toujours jointe au
i" cahier du volume suivant, a I'exception de la dernifere Table de
lann'e, qui est exp'diee isol'ment a tous ceux qui peuvent y avoir droit.
On souscrit, seulement 4 partir de deux ^poques , du i" Janvier on
du j^fuillet de chaque ann'e , pour six mois , ou pour un an.
On trouve, 10 BnREi.u centrii., Us collections des annees 1819, i8jo,
i8a r , i8aa , i8»3, 1824 et iSaS, au prix de 5o francs chacone.
^
REVUE
ENCYCLOPEDIQUE,
ou
ANALYSES ET ANNONCES RAISONNEES
DES PRODUCTIONS LES PLUS REMAKQUABLES
l>AJyS LA LITTJERA.TUUF., LES SCIENCES ET LES ARTS.
I. MEMOIRES, NOTICES,
LETTRES ET MELANGES.
NOTICE
SUR L' APPLICATION DES AEROSTATS
A DIVEKS OBJETS RELATIFS AUX SCIENCES ET AUX SERVICES
PUBLICS.
L'iNVENTioN i)Es AEROSTATS n'a pas cncorc obtenu le rant;
qu'elle doit occuper un jour par.mi les dons que les arts ont
recus des sciences. Peu s'en faut qu'on ne la regarde aujour-
d'hui avec indifference, comme un objet de curiosile qu'il faut
reserver pour la pompe des fetes, ou pour d'autres applica-
tions tout-a-fait etranyeres aux progres des connaissances. Cettc
opinion, qui s'litablit inmnediatement apres les premieres expe-
riences aerostatiques , n'etait pas celle de Franklin . de Monge
et de presque tons les savans du premier ordre : ce n'etait pas
celle de l' Academic des sciences, avant que cette societe fut
dissoute, au milieu des crises violentes de notre revolution.
C'esl a I'interct (jue prit lAcademie aux nouvcaux moyens
T. -wxi. — Hcpteiuhic 1826. i"
573 IXOTICE
irobscrvalious et de docouvertcs dont rarrostalion pouvait
I'liiichir Irs sciences, que nous sommes ridevables ilu beau
travail tie Muunier sur celte matiere. Quelques annees plus
tart! , ou \ ii painitre les aerostats niilitaires, et ccs postes
eleves qui uiettaienl a Jecouvert loutts les disposilions de I'eu-
neuii, qui rcndaicnt iiuitiles tous les uiysteres de la tactique,
furen.t confies a luie troupe organisee pour ce nouveau service.
DaiiS Ic aieme leuis , des essais de ti'lcgraphie acrostatique
obtenaient un plein succes. L'art qui etait snr ie point de rece-
voir de grands developpeineas avant la revolution et dont la
France )i'publicaiiic avait fait d'heureuses ai)plications, fut
neglige sous le gouvei neraentde Bonaparte. II est nieme a crain
dre (]u'on tie perde la connaissance des acquisiiions que cct art
avait faites, et (pi'il ne faille reinventer nn jour beaucoup de
clioses que les generations precedentes savaient tres-bien. Le
meinoire de Meunier sur les aerostats n'est pasimprime. M. ie
colonel CouTEi.LE, ancien commandant des aerostiers, a bien
voulu nous communiqaer ime notice sur les aerostats niili-
taires et sur I'usage que Ton en fit ; nous inserons en enlier
cet ecrit que plus d'un lecteur trouvera trop court, et dont il
demauderait volontiers le complement a I'aiiteur. IVous niet-
trons a la suite une analyse dii niemoire de Meunier, et quel-
ques details sur les essais de telegraphic acrostatique. Les ini-
litaires desireraient sans doiite iju'on litw cut fail counaitre
I'orgauisation , le service et les niaiiojuvres ties aerostiers. Es-
perons qu'un ami des sciences et des arts prendra soiu de ras-
sembler les precieux nialeriaii.x d'un ouviagesur cet art dont
on ne peut nieconnaitre I'origine francaise, et qui, jusqu'a
present, n'a rien recu des etrangers; que ces mateiiaux seront
mis en ordre et completes, autant que peuvent le permetire
la mobilite des circonstances et le desordre des terns ou furent
faites les principales experiences aerostatiqnes. Un lel ouvrage
ramenerait pcut-ctre ratleution des savans sur les aerostats,
consideres comme moyen de decouvertes. L'appareil dont
M. Oay-LusS4c a fait une si heureuse application n'a pas ac-
compli sa destinee; c'esl des sciences qu'il tire son origine, et
k
V'
SUR L' APPLICATION DES AEROSTATS. 679
les creations de cette nature, sont comme les sciences menies,
d'line utilite dural)le ct variee. C'c.tt I'enfant qui. vicnt de nai-
ire , (iisait Franklin, ;\ I'apparition ties premiers balions; cet
enfant a deja pris des forces; avant de juger de ce que Ton
peut en esperer, aidons son adolescence, et attendons qu'il
soil tout-a-fail devcioppe.
SUR LES AEROSTATS MiLlTAIRES.
Premiere eaperiencc de la decomposition de I'eau dans de
grands appareils pour etahlir un aerostat aux arinees.
Le comito de saint public avalt reuni aupres de lui une
commission dans laqnelie on comptait les savans Mojvoe, Ber-
THOLET, FouRCROY, GuY.TON , clc. , ttc. II J flit proposc par
Gnyton de fairc servir Tatroslat aiix arnjties , conime nn moyen
d'observation. Cette proposition fut acccptee, sous la condi-
tion de no pas emp^,oyer I'acide sulfnrique, le soufre etantrare
alors, et neccssairc pour la fabrication dela poudre.
La commission se proposa d'employer la decomposition de
I'eau siir le fcr; m;iis celto expciience, faite par le ceiebre La-
voisier, et repctee dans nos cabinets, n'avait pu donner que
de faiblcs resultats. Une experience en grand etait necessaire;
il fallait pouvoir extraire 12 a i5,ooo pieds cubes de gaz, dans
le terns le pins court, imaginer des appareils, etc., etc.
J'avais un assezbcau cabinet de physique: j'y avals rassem-
ble les meiilcurs appasfilspour les experiences sur relectricile,
la lumiere et les gaz. Guyton etait venu plusicurs fois chcz moi
faire ses experiences. Il y avait conduit, avec le doctciir Cuaus-
siKR , I\I. flc VoLTA , lorsqu'il vint a Paris communiquer aux
savans sa belle experience sur la detonalion dii gaz liydrogene
combine avec le gaz oxygene.
Guyton me proposa a la commission pour faire le premier
essai de la decomposition de I'oau dans de grands appareils.
Je fus adresse an ministre de Tinterieur , charge de iournir les
fonds pour la depense du materiel. Honore du choix d'une
commission aussi dislinguee, j'acceplai celle que me signa le
ri8o IN'OTICE
niiiiistrc, sons hi condition do ne reci-voii- aiicnn tiailcnicnt
pour luoi.
Jc fns chiMi^e ile faire reparcr iin aerostat de 27 pieds de
diametre (|ui avail ete mis a la disposition du ministre (1) , de
faiie fain; tons !es appareils, et de choisir nn lieu non ferme
et conveiKible ponr celte experience ;je m'etablis dans lejardin
(li'S Feiiillans.
L'aerostat etait repare, le fourneaii qui renferniait iin tnyan
de fonte renipli de fer (2) etait coustrnit , les caisses et les
inyanx etaient disposes, etj'etais pret a metlre le feuaiifour-
iicTii : je desirais avoir des teinoins.
J'avais connu M. Cokte dans les coiirs de physique de
Charles mon ami, dont j'avais ete plusieiirs fois le pievot^
i'allai 111! proposer de venir voir rexpeiiencc, j'in vital ega-
Iv^ment ('hailes, blen dispose a recevoir leurs consells.
L'e\perience reiisslt; je retirai environ 5oo pieds cubes do
j^az (3). Les membres de la commission, qu^ avaient snivi cette
operation, furent contens du resultat, et des le lendemain, on
nie proposa de pai tir pour ]WauLeu!j;c et d'aller proposer ati
generalJourdan I'emploi d'un aerostat a son armee. Je partis;
I'armee etait a Beaumont, a six lleucs, au dela de Maubeuge.
L'ennemi, a inoins d'une lieue , pouvait attaquer a cbaque ins-
tant. Le general me fit cetle observation, qu'il m'cngagea de
reporter au comite ; j'arrivai a Paris , apres avoir employe dc-n\
jours et demi et deux nulls a cette expedition (/,).
(c) Le ministre mit a ma disjiosition la sails des Marechaux au\
1'ui'eries pour cette reparatipn.
(2) Le luy.iu de fonte etait de trois pieds de long sur (juiiize pouces
iiiterieurement , rcmpli de cent livres de rognuies de tole et de co-
peaux de fer tournc.
(3) L'operatiou dura qiiatre jours et trois nuitsde suite, parce qu'il
fallut rcniplacer par des tuj aux de cuivre soudes a la soudurc forte ,
eeiix do fer blanc proposes par Guyton : quoiqu'ils fussent plongcs m
dans lean, ils se dissoudaient et letain coulait. 1
(4) Ell arrivaiit a Beaumont, couverl de boue (j'avais ete oblige
d'i.llei deMauheiige a Beaumont it franc etiier par des clieniius epou-
i
SUR L' APPLICATION DES AEROSTATS. 58 1
La commission sciitit ia necessitu de faire I'experieiice cn-
tiere avcc iin aerostat piopre h enlevcr rlcux personncs. !(•
ininistre mit a ma disposition Ic jardin ct le petit chateau dc
Meiidon.
Co nV-tait pas frop de dcnx personncs pour la composition
d'un fournean dans lequel je cms necessairc de placer sept
tuyaiix (i). Il fallait en outre imaginer des appareils, des cu-
ves trausportahles aux arraees. Je proposal a la commission de
m'associor Conte que je lui avals fait connaitre lors de nia
premiere experience. Conte consenlit a venir m'aider; mais il
nevoulut aiicnne commission, ni se charger d'aiicune respon-
sabiliteril vint s'etablir avec moi a Sleudon. Nous concumcs
tout ensemble, et je reslai seul comptable , charge des details et
dc la correspondance avec la commission.
Tdfetes les difficultes furent levees, le fourneau construit ,
les sept tuyaux places ainsi que les appareils, et mon premier
aerostat <le 27 jiieds rempli. J'envoyai averlir la commission
qui vint faire faire la premiere experience d'une ascension, at;
moyen d'un ballon tenu par deux cordes (2).
Pour la premiere fois, je montai Jans la nacelle; ks com-
missaires me donnerent une suite de signaux a repeter et d'oL-
servations a fiure. Je me fis successivement elever de toiite la
longueur des cordes, 270 toises; j'etais aiors a 35o toises cnvi
vantables) , je trouvai le reprcsentanl Duqncsnoy a table: il ne le-
coiinut point I'ordre du comile de salut public dont j'etais porteui ,
encore moins I'aerostat dont on lui parlaif. II me nienaca de me faire
fusilier avant de m'entendre; il se radoucit et finit par me faire des
compliinens sur mon devoument.
(i) On remplissait les tuyaux, conime dans la premiere expr
rieiice ; mais il fallait les fouler, eii battant le mouton pour leui' en
faire contenir chacuii 400 livres ; ils avaient 8 pieds de long , 12 pou-
ces en dedans et pesaient vides 1600 livres.
(5)C'est par erreur que, dans plusieurs dessins, on a place pin ■
dc deux cordes ; I'aerostat etant toujours sous le vent, deux cdidcs
srules peuvent tirer.
58a NOTICE
ron ail dcSsus clii niveau de la Seine. Je dislinijuais avec ina
lunette Ics sept coi\dcs que forme la Seine jiis([tra Menlan.
J'otiidiai les moyens d'obseiver, dc correspondre , au snoyen
de sit;naii\ siispondus a la nacelle et d'aiitres que Ton etoiidait
a leric. Apres plusienrs hemes d'obscivation , jc donnai lo
signal de nic faire desccndrc.
l,a commission fut satisfaite de ce piea)ier cssai, dans leqiiel
cependant je ne lui dissiniulai pas les diflicultes d'observer
pendant une oscillation continnelle et un balancement plusou
moins grand, suivant la force du vent. Pen de jours apres,
je recus le bievet de capitaine commandant les aorostiers ,
attache a I'etat major general dans I'arme de I'artilleric (i).
Jc recus en meme terns I'ordre d'organiser une compagnie
et de me rendre dans le plus bref delai a Maubeugc.
Le huitieme jour, je partis, emmenant avec moi un officicr,
apres avoir dirige quelques soldats sur celte place.
Avant mon depart, j'avais engage la commission a demander
au ministre une commission pour Conte, afin qu'il restat a
Meudon pour faire disposer et m'envoyer les equipages dont ,
j'aurais besoin.
Arrive a Maubeuge, mon premier soin fut de choisir un
emplacement, de construire mon fourneau (2) et de faire tou-
les les dispositions, en attendant I'arrivee de I'aerostat et des
appareils qui avaient servi a ma premiere experience de Meu-
don (3).
Pen de jours apres leur arrivee, je pus mettre le feu au four-
eau , et I'aerostat fut rempli en nioins de 5o heures. Alors ,
(i) J'etais autorise a presenter les officiers, qui ctaient confiruies
par le gouvernemeiit ; a nommer les sou.s-officiers , et je pouvais re-
querir dans I'lnfanterie les soldats ouvriers que je croyais utiles a mon
travail.
(2) Outre les fondations et le massif, qui etaient eii pierres , j'em-
ployai environ sept milliers de briques.
(3) Les difft'reus corps de I'arnK^'e ne savaient de quel ceil regarder
des soldats dont Ic service leni ('-tait inconnu. Le general commanda
SUR L'APPLICATION DES AEROSTATS. 58^
deux fois par jotir, p;ir ortlre tin t^eneral commaiulaiit, je
ui'elevais a une pins on moins graiule ('levation pour observer
les Iravaiix do rennemi, ses positions, ses moiivemens et ses
forces (i).
Lt'S details seraient trop loiii;s, s'il fallait decrirc tout ce
qu'il en coiite de peines, de fatigues et d'inquietndes pour coii-
servei- et condnire une niacliine aussi fragile, uii globe de taf-
fetas de 27 pieds, un autre de 3o, pour contenii' une voile
aussi etendue, lorsque le vent est fort, et lorsqn'il suivient
une Icmpote.
Je ne puis qu'indiquer les difficultes que j'eprouvai pour
sorlir d'une place de guerre, on la traverser: |)asser dans les
fosses , par dessus les rcmparts et les portes , faiie eiisuite douze
lieues pour arriver devant Cliarleroi et observer la place as-
siegee; rester deux jours apres ueuf heures en observation
pendant la bataille de Fleurus.
Je me contenterai d'ex]ioser les avantages et les inconve-
niens de cet cssai, les effets que I'aerostat ni'a paru produire
sur les deux armees, et les causes qui I'ont fait abandoiincr.
Je repeterais egalement une partie de ce que je viens de dire ,
si je donnais les details de ce qu'il ni'a fallu faire pour organise)-
une secoude ccmpagnie a I'aruiee du Rliin, apres avoir laisse
une sortie contre les Autiichiens retranches a iiiie [)or(ee de canon
de la place; je demandai a ^tre employe avec ma petite troupe : deiix
des miens furent grievemeiit blesses. Nous rentrSiiies dans hi place
au rang des soldats de I'armee.
(i) Le cinquieme jour j une pi6ce de 17 , emhusquce dans un ravin
a demi portee de la place, tira sur "aerostat, aussitot qu'on le vit
s'elever ; le boulet passa au dessus ; un second coup que je vovais,
distlnctement charger et tirer, passa si pr^s que je cms I'aerostat
perce ; au troisienie coup le boulet passa plus bas. Je resfai deux
heures en observation; lorsque je donnai le signal dedescendre, nies
soldats y ruirent une telle activite que la piece ue put tirer que deux
coups; les bouieis traversaieiit la place et tombaient au milieu dii
camp retranche. Le lendeinain , la piece e'ait retiree.
iS/i NOTICE
le commandement de la premiere a nion lieutenant, toujour?
sous raes ordres (i).
Mais, ce qu'il m'importe d'ajouter , c'est que Conte etait dc-
venu men ami, que sans doute il aurait reclame , si on luieut
attribue la premiere operation pour remplir un aerostat par
la decomposition de I'eau. II savait trop bien que je I'avais ap-
pele, que je lui avais fait partager tputesles operations a Meu-
don, et que j'avais seul commande et dirige les operations a
I'armee, oCi il failait a chaque instant inventer, perfectionner,
suivant les circonstances (2), et qu'enfin j'avais seul ete choisi
(i) Je fus noninie chef de batnillon par le direcloire executif.
(2) A Maubeuge , pendant que je remplissais nion aerostat , une
indisposition me forca de me reposer quelques lieures. Un des offi-
ciers crut avancer I'operation en forcant le feu : deux tuyaux furent
perces; il falltit en disposer d'autres, pendant que le fourueau refroi-
dissait. L'operation, qui devait etre terminee dans 48 heures, dura
8 jours et 7 nuits,sans qu'il me fut possible de prendre aucun repos.
A Borcette pr^s Aix-la-Chapelle , les briqises qui formaient les bou-
ches de mon fourneau fondirent et obstruerent les deux entrees : je
fus oblige de faire des briques avec moitie d'argile et moitie de vieux
creusets reduiis en poudre ; apres une demi-cuisson , je refis les bou-
ches du fourneau; le travail ue fut suspendu que pendant quelques
heures et I'aerostat fut rempli dans Sa heures. Ma compaguie suffisait
a tout le travail ; aucun de nous n'avait vu faire de briques. En arri-
vant pres de Bruxelles , un coup de vent porta I'aerostat sur mi
eclat de bois qui le fendit : une petite partie du gaz s'echappa, pendant
qu'on reparait raerostat endonimage par cet accident. J'avais heu-
reusement dans rnes equipages un petit tuv.iu; j'entrai dans le pare
d'artillerie ou je formal une enceinte avec une simple ficelle qui fut
respectee ; j'etablis un petit fourneau au moyen duquel je remplacai
le gaz perdu : nous rejuignimes Taimee a marche forcee , le qua-
trifeme jour
N. /I. Je cite les faits, auxquels j'eii pourrais ajouter beauconp
d'autres pour faire voir qu'un officier simplenient charge d'executer
des ordres ne peut pas conduire un aerostat , s"il n'a pas des connais-
sances physiques et mecaniqlies, s'il ne peut pas donuer lexemple
d'un travail presque continuel , do jour et de nuit.
SU.R L'APPLICATION DES AEROSTATS. 585
par la commission , et commissioniie par les minislres pour fairc
en grand la premiere experience.
Observation. Je ne dirai pas, comnie ceux qui louent on
qui blament avec exageration tout ce qui est nouveau, que
I'aerostat a fait gagner la hataille dc Fleurns. Tons les corps ;,
danscette journee memorable, ont fait leur devoir.
Ce que je peux as-surer , c'est que bieu exercii a me servir <le
ma lunette, raalgre le mouvement d'oscillation continu et de
balancement qui est en raison de la force du vent , je distinguais
les corps dinfanterie, de cavalerie , les pares d'artillcrie, leurs
mouvcmens,et en general les masses; que je voyais parfaite-
ment devant Maycnce les personnes qui marchaient dans les
rues et sur les places.
Je dois cependant convenir qu'il est difficile de vaincre, dans
le premier moment, I'impression que fait le balancement lors-
que le vent est fort, ainsi que le bruit que fait le ballon, lors-
que le coup de vent, comprimaut le cote qui lui est oppose,
forme une calotte rentrante qui, en se retabiissant par I'elas-
ticite du gaz, chaque fois que le vent cede, fait un bruit ou
coup de fouet qui s'entend dans toute I'armee.
Les officiers-gcneraux et tons les autres dans I'armee enne-
mie ont toujours regarde avec admiration et jalousie notre
aerostat. .I'en ai eu la preuve, chaque fois que je me suis trouve
avec eux, par la maniere di^tinguee avec laquelle j'en ai ete
traite.
Lorsqueje m'elevai devant Mayence, a demi-portee de ca-
non de la place jj'etais seul, parce que, le vent etant fort, je
voulais lui resister davantage avec 3oo livrcs environ d'exces
de legerete. Trois bourrasques successives me rabattirent suc-
cessivement jusqu'a terre,a la distance de la longueur descor-
des qui me retenaient, i5o toises; !a seconde fois, trois des
barreauxqui soutenaient le fond dc la nacelle furent brises.
Chaque fois que la nacelle avail touche la terre, I'aeroslat
se relevait par un mouvement acceh'ie, avec une telle vitesse
586 NOTICE
que 64 personnt's, 'ia a chaqiie corde , ctaicnt cntiainccs i une
i,'ian(le distance, et pliisieurs restaient suspendiK's(i).
L'enuenii iie liia point; cinq ofliciers, au coiilraire, soiti-
rentdela place, en niontrant un pavilion parlenicntaire. Nos
generaux alierent au devant d'eiix; lorsqu'ils se rencontre-
rent, le general qui coinmandait dit au notre : Monsieur le
general, je vous prie de faire descendre ce brave officier; le
vent va le faire perir; ; il nefaul jjas qu'il periase par un acci-
dent etranger a la guerre ; c'est inoi qui aifait tirer sur lui a
Mauheuge. Lorsque le calme fut retabli, je dounai le sij^nal
de descendre, je trouvai ma petite troupe et \ph soldats auxi-
liaires pAles et consternes. lis n'avaient pas ete comme moi
exposes aux regards et a I'interet de plus de i5o,ooo homines.
Une autre fois , j'etais devant Manheim sur les bords du
Rhin. Le general qui nous commandait ni'envoya en parlcmen-
taire sur I'autre rive. Aussitot que les ofliciers autrichiens ei:-
rent appris que je commandais I'aerostat, lis me comblerent
d'amities et mc firent mille questions. Un officier obsorva que,
si les cordes cassaient , je pourrais tomber dans le camp en-
nemi.
Monsieur C ingenieur aerien , rcpondil un officier superieur ,
sei-ait traitc comme un officier distingue. C'est moi , ajouta-t-il ,
en m'adressant la parole, qui vous ni fait remarquer aa prince
de Cobourg [dont j'e su is aide-de-camp) a la bataille de Fleams.
Il me temoigna le plus grand desir de connaitre mes opera-
tions pour remplir I'aerostat; je lui proniis de les lui faire voir
dans le plus grand detail , s'il obtenait I'autorisation de venir
dans noire camp.
Jelui fis observer qu'on nc devait pas m'interdirc la vne de
la place, piiisqiie, en m'elevant sur I'autre rive je plongerais
dessus. Le lendcmain, notre general recut I'invitation de ni'y
faire passer; mais nous fumes obliges de partir.
(i)Sij'avais employe uue luacliine qui ni'avait ele envoyee pour
fixer les cordes a tevre, le Clet aurait ete brise si les cordes n'avaient
pas casse par la resistance.
SUR L'APPLICA.TION DES AEROSTATS. 587
Generalemenl, les soldats autrichiens, qui tous voyaicnt tin
observateiir dans la nacelle, croyaicntne poiivoir faire un pas
sans etre apcrcns. De notrecote, ndtre armee voyait I'aerostat
avpc plaisir. Celte arinc, jusqu'aiors inconiiiie, leur donnait
de la gaietc et de la confiance; souvent dans nos inaiclies pe-
nibles, des soldats de troupes Icgeres apportaient du vin a ma
troupe.
On se battait depuis plus de dix heures a la bataille de Fleu-
rus, lorsque le general Jourdan me donna I'crdre de monter
une seconde fois pour observer notre droite, et me fit donner
une note. Un corps qui avait recu I'ordre de se porter sur un
autre point par le plus court chemin , passa sous mes cordes;
les soldats disaient qu'on les faisait battre en retraite; un
d'eux que je distinguai parfaitcment leur dit : Si nous hattions
en retraite , le ballon ne seraitpas la.
II est terns de terminer un memoire dtja trop long, nialgre
tout ce que je pourrais y ajouter. Force dc m'occuper unique-
ment de cette machine, pendant plus de trois ans; d'cprouver
des obstacles et de vaincre des difficultes que I'onne pent point
calculer dans le cabinet, je crois etre fonde a regarder la di-
rection des aerostats comme etant presque impossible, qiioiquc
plusieurs hommes de nicrite soicnt d'une opinion contraiie a
la mienne; Guyton etait de ce nomhre. CouxELLr.
Apres cette narration interessante a tous egards, et par les
faits qu'elle contient, et par le ton de veracite du narrateur,
passons a une autre application des aerostats. Celle dont nous
allons parler ne futque projetee; e!le restera dans le domaine
des sciences mathematiqucs et physiques, jusqu\^ ce que I'ex-
perience ait confirme les resultats du calcul, et fait voir que
I'enumeration des causes est esacte , que tons les effets ont ete
prevus. Elle marque le point de depart pour les I'ccherches
ultericures; on y trouvera la solution, ou I'une des solufious
de quelques problemes qui n'ont point cesse d'occuper les aen)
nautes auxquels le travail de Meunior n'etait pas connii.
588 NOTICE
Memoirks sun les aerostats, par Meunier, ojjicierdu gvnie ,
ineinbrc de l' Academic dex sciences.
L'autoiir de cc Mcnioirc se lit ej^'alement rcmanjiicr dans Ics
scieuces, dans Ics arts et dans la j^iicrrc. Lcs Alleniaiuls sc sou-
vieiidront long-tems de la construction rapide des fortifications
de Cassel, operation qu'il dirii;ea, de la defense de cette tetc
dc pont sans laqiielle Mayence u'eiit pn soutenir iin siege aussi
long, de la prise de la redoute de Costheiin ct d'uue multitnde
de faits d'armes on ee chef, aussi brave qii'habile, semblait
etablir , contre I'opinion coratnune, la siiperiorite de la defense
sur I'attaque lorsqii'iin boiilet de canon fit voir que cetle su-
jieriorite ne tenait (ju'a iin seul lionime. Mais c'est du savant
et nou du guerrier tjue nous allons nous occnper.
Dans scs recherches sur les aerostats, Meunier ne se propo-
sait rien nioins que de faire servir ce moyen de transport a
des voyages de long cours. II fallait done s'attendre k se trou-
ver quelquefois an milieu des tempetes, se disposer a soutenir
le elioc des courans divers et quel(|uefois opposes qui agilent
i'atmosphere dans les couches accessibles aux aerostats, meltrc
tout I'appareil a I'abii des secousses violeiites, (juelle qu'eii
fut la cause ; la necessite desatterages devait etre prevue, aiusi
que leurs dangeis; i! fallait pouvoir jeter I'ancre et s'arreter ;
apareilicr, s'elevcr et se tenir a la hauteur que Ton jugeait la
plus convonable; se mouvoir dans un air tranquille, modifier
sa direction et sa vitesse.
Dun autre cote, comme aucune des enveloppes dont on pout
faire les aerostats n'est absolument impermeable a I'hydrogene,
il etait indispensable de trouver un moyen de conserver ce gaz,
ou d'en reparer la perte. Apres avoir trouve des reponses sa-
tisfaisantes aux questions ainsi posees, il leslaita determiner
la forme et les dimensions d'lm aerostat capable de transpoi tcr,
outre ses agres , son equipage pour Ics niancenvres, les ob-
servateurs ot Icnrs instrumens, et une quantile de piovisions
proportionnec a la durec de !a plus longue navigalioii (]ne i'on
SlIR L'APPLICATION Dl!:S AEROSTATS. 58;)
aiirait a f^iire en des lieiix qui ne pourraieiit rien foiirnir mix
voyai;enr.s. Enfin, il fallait faire le devis de la construclion de
I'aerostat, du greement et de tousles ftais de rcutiepris^e :
voila le sommaire de ce que contient le Memoire de Meunier.
L'habile inecanicien a vaiiicu presque loules les difficultes
du sujet qu'il avail a trailer, en meltanl une seconde enveloppe
a son ballon, Celle addition lui procure les nooyens de resister
aux vents, aiix secousses, aux chocs inevitables dans les alte
rages; la faculte de monter el de descendre, de se tenir a la
hauteur oii il veut etre ; enfin, il evite toutes les causes de perte
du gaz hydrogene,ou rend leur effet si pen sensible qu'ou
peul le negliger sans inconvenient. Voyons comment des resul
lats aussi imporlans , et d'une nature aussi diverse, ])eiivenr
tenir a une seule disposilion de I'ajjpareil.
L'hydroyene est contenu dans un ballon de laffetas enduit
tic cdoutcliouc( goinme elaslique ). Cette enveloppe doit etre
aussi legere qu'il est possible, plus grande que le volume du
g;iz qu'elle contient, ensorle qu'elle ne soil jamais tendue. On
la nomme enveloppe impermeable , quoique Ton sarhe bieu
(ju'une certaine quantite de gaz s'en echapperait conlinuelle-
menl, si elle etait tendue par mi flnide comprime.
La seconde enveloppe, dite deforce , pent etre de toile , et
(I'autant plus epaisse cpie I'aerostat est plus grand ; on la foriifie
encore a I'exterieur par un reseaii de cordes. Elle doit etic
impermeable a I'air atinospherique comprime : mais oh sait que
ce Quide est plus facile a contenir que I'hydrogene , et qu'un
enduit qui laisserait tamiser le gaz leger pent interdiie le pas-
sage au plus pesant. On laissc entre les deux enveloppes im
assez grand espace dont nous allons expliijiier I'usage.
Un luyau de me.-ne lissu que Tenvcloppe de force fait com-
muniquer cette enveloppe avec une pompe foulanle etablie
dans la gniidole. On pent, au moyen de cette pompe,. conden-
ser I'air entre les deux enveloppes, diminuer le volume de
I'hydrogene , et augmenter ninsi la pesanteur specifique
moyeune du fluide contenu dans I'aerostat. Coinme I'envelopjH'
est disposee pour u'etre presque pas extensible, el conime ks
Sgo NOTICE
cordos dont die est armce a rexterieur ne Itii permettcnl pas
<le changer dc forme, on pent regardcr le volume dc raerosl;it
conime variant Ircs-peu , tandis que son poids augmente ou
dimiiuic en raison dela pesanteiir spccilique moyenne des deux
gaz qu'il contient. Ces gaz s('pares I'un de I'autie par I'envc-
loppo impermeable, sont conslammcnt en cijuilihrede part et
d'antro de cette envclopjie qui, n'elant jamais tcndue et ne sup-
portant aucun effort, pent etredu tissu le plus mince etleplus
ieger. Ainsi, lorsque les aeronautes sont a une grande hauteur ,
il leur suffit, pour descendre, de faire agir la pompc foulante :
to'.u le poids de I'air atmospherique qu'ils inlroduisent entre
les dt iixenvcloppes est ajoule a celui de I'aerostat qui ne pent
plus rosier en equilibrc que dans nnc conclie plus dense, et
par consequent, plus basse.
Ainsi, la conservation du gaz estassuree. On est dispense de
se charger de lest, qui ne pent servir qu'une seule fois, qu'il
A\ut jeler pour selever, et qu'on ne retrouve plus pour des-
cendre. Quand on vent s'elevcr , il sufiit d'ouvrir une soupape ,
et de laisser echapper I'air atmospherique comprime entre les
deux enveloppes : pour descendre, ou relabiit la compression
de 1 air. Lts aeionautes sont mis en possession de toutes les
couches de I'air, jusqu'a cclle ou le gaz hydrogene remplirait
presque toute la capacite de sa mince cnveloppe.
II faut encore un mecanisme pour se niouvoir dans im air
tranquille. Meuniern'y emploie point d'autre force molriccqne
les bras de Tcquipagc. En eff'et, la superiorite d'un autre mo-
teur ne pourrait ctre de que'qiie importance, si menie elir
n'etait pas tou!-;i-fait illusoirc. Ce moteur serait un iioids de
* ... .
plus; les appi'ovisioiinemens qu'il exigerait augmenteraient
encore le surcroit de change : il faudiaitun plus grand aerostat
et un equipage plus nombreux.
Le ehoix du moteur etant fixe, la nianiere la plus avanla-
geuse de I'employer etait deja eonnue. L'auteur du Memoire
('•lablit des rames inclinees conune les ailes d'lui moulin a vent,
et fixi'es a un axe horizontal que I'equipage fait lourner. Ce
mecanisme ne j)rocurerait qu'une marche tres-lentc (vm pen
SUR L'APPLICATION DES Af'ROSTATS. Sgi
plus d'ane lieue h riieure ) : mais, snivant Mennier, le mou-
veiTient de tianslalion nc devait servir, on lo combinant avcc
le niouvement ascensionel, qu'a cheiclier dans I'atmosphere
iin coiiranl qui portat les acronautes vers les lieiix oil ils voii-
draient se rendre. II n'avait pas le projet de les condnire a
leiir destination par la seule action des rames.
On volt que le niachiniste a rempli sa lache; ceile du geo-
nietrc va conimencer. II s'agit d'assigner les conditions de la
stabilite de I'aerostat, et d'y salisfaire; de donner a toutes les
parties de cette grande machine des formes qui opposent au
inouvenient de translation le moins de resistance qu'il serait
possible, sans oublier que I'enveloppe de force doit etie telle
que sa capacite ne clianj',e pas sensiblement par Taction de
I'air atmospherique plus on moins comprime entre les deux
cnveloppes. On jjense bien que cette partie du Memoire n'est
a la jiorlee que des lectem's familiarises avec les hautes ma-
iticmatiques.
MoKGE, piofitant du nioyen imagine par Mennier pour
monter et descendre avec une asscz grande rapidite, avait
concn la possibilile de tirer de ce mouvement vertical celui
de lianslation horizontale. Meunier n'employait qu'iui seul
aerostat pour transporter tons ses voyageurs : Mongo les
repartissait entre vlngt-cinq petits ballons auxquels ils con-
servait la figure sphcrique, au lieu que Meunier alongeait le
sien en forme d'ellypso'ide. Monge attachait les uns aux autres
tons ses ballons, en sorte qu'ils formassent nn assemblage
flexible dans tous les sens, susceptible d'etre deveioppe en
li.;ne droite, courbe en arc ile cercle dans toute sa longueur,
oil sei-ilement dnns une partie ; de prendre, avec ces conrbures,
ou ces Ibrmes rectilignes, la situation horizontale, on differens
degres d'inclinaisou. Ce systenie de globes montant et descen-
dant alternativement avec la vitesse que les aeionautes lui
auraient im|)rinii'e, eut imile dans I'air le ujouvemont du ser-
pent dans I'eau. II est bien a regretter que I'illustre geoaietre
u'ait pas donne suite a cette premiere conception, et qu'il ne
I'ait pas sonmi^'o au calcul.
i()i NOTICE
Le leste du Menioiic dc Meunier est consacre aux details
d'execiuion et an calcnl des depenscs, niatieres qui n'excilent
point la ciiriosite du lecteur, et qui cependant coutent souvent
a I'auteur plus de travail que tout le reste. L'aerostat propose
par Meunier eut ete fort chor, sans doule, et ne le serait pas
moins aujourd'hui : niais, pour une premiere experience en
t;rand , pour I'application d'nn nouvel art h des recherches
d'une haute importance, on pent, comnie on I'a dit de quel-
ques autres depenses dont rutilile pent etre contcstee,ypr/72e/-
ies yeux et ouvrir la bourse.
L'interieur de I'Afrique ne pourrait-il pas etre reconnu par
une expedition aerostatique ? Les observateurs qui se charge-
raientde resoudrece grand problemede geographic n'auraient
plus rien a craindre des pernicieuses qualites du sol et du
climat, ni de la ferocite des habitans : le courage et le talent
n'iraient plus chercher, en pure perte, une mort presque cer-
taine dans ccs regions inaccessibles aux hommes civilises. Si
le projet de les parcourir en ballon n'cst pas tout-a-fail impra-
ticnble, il est bien digne d'etre discute par les amis des sciences
geographiqiies : et pour ne rien omettre dans cette discussion,
il faiit commencer jiar lire le Memoire de Meunier.
Essais de telcgraphie aerostatique.
Les orages de la revolution n'etaient point apaises ; mais
les savans n'etaient pins traines a I'echafaucl. On commencait
a respirer ; une esperance encore timide laissait entrevoir
dans I'avenir le terns oil la France serait heureuse et libre;
mais il fallait conqnerir la liberie : I'Europe armee nous la
disputait. Organiser les armees , pourvoir a leiirs besoins,
concerter les operations, etablir des correspondances sures
et rapides, rechercher avec soin tout ce qui pouvait con-
tribuer a la victoire et la faire fructifier, occupait alors
la pensee de tons les Francais. Co fut a celte epoque que
Ton proposa des lignes telegraphiques mobiles dont les si-
gaaux ne fussent point assiijetis a occnper des licux de-
signcs par le relief dti terrain. Les aerostats elaient precise-
SUR L' APPLICATION DES AEROSTATS. SgB
merit ce qii'il fallait pour clever les signaiix a une hauteur
suffisante, pour les rendre visibles malgre I'inferposition des
bois, descoteauxetde toutceqiii intercepte lavue danslespays
qui ne sout pas couverts de hautes montagnes : niaisil s'agis-
sait de les manoeuvrer a terre, et d'y faire toutes les observa-
tions. Les moyens que Ton eniploya, quoique tres-siniples,ue
sont peut-ctre pas les meillenrs : ils out rinconvenient de de-
venir impraticables par un grand vent, et il suffit que I'un des
postes soit arrete par cette cause pour que toute une ligne
telegraphique soit reduite au silence. Un telegraphe etait
compose de sept cylindies ou tambours, legers, formes d'une
toile noircie, attaches a deux cerceaux. Leur hauteur etait a
peu pres d'uu metre, et le rayon, de trois decimetres. lis
etaienl suspendiis a une tringle de bois, de sorte que les
deux cerceaux fussent raaintenus dans la situation horizontale,
et, par consequent I'axe du tambour fut vertical. On les
tenait ecartes I'un de I'autre, a une distance de cinq a six deci-
metres. Une ficelle correspondante a chaque tambour servait
a le manoeuvrer, c'est-u-dire , a le tenir plus haut ou phis bas ,
de sorte que ceux qui etaientelevcs Aissent tous sur une meme
ligne horizontale , ainsi que ceux que Ton tenait abaisses. La
combinaison dfs places occupees par les fambou'rs sur ces
deux lignes fournissait plus de signaux qu'on ne pouvait en
employer. La tringle de bois, le systeme des tambours et de
leurs ficelles, et les cordes pour amarrer le telegraphe, enfin
le poids total de la machine etait tenu en I'air par un ballon
qui n'avait guere plus de seize decimetres de rayon. II n'est
pas facile d'iniaginer un appareil phis portalif.
L'experience, faite entre Dammartin et Meudon , reussit
tres-bien. Des phrases assez longues furent echangees, a peu
pres dans le meme terns que par les autres telegraphes. Lorsque
I'aerostation sortira de I'oubli, on pensera sans doute anssi
que la telegraphic aerostatique pent rendre quelques services ,
et que les soins qu'on lui aura donnes ne seront point
perdus. Ferry.
T. XXXI. — Septembre 1826. 38
EXTRAITS
dii Rapport cEisERAii fait au Ministre de la marine,
SUR LENSEIGNEMENT DE t,A GEOMETKIE ET DE LA ME-
CANIQUE APPLIQUEES AUX ARTS, par M. CJl. DuPlN.
II est, dans la geometric ct dans la niecaniqne, certaincs
verites eleraentaires, fecondes, qui sont Ics plus simples rap-
ports des dimensions, des mouvcmens et des forces; voil^ les
connaissancesdont il importe que chacun se rendc un compte
raisonnc. Notre repos, notre action sur ce qui nous entonre,
et Taction de tons les objets sur notre etre, sontsoumisa ces
lois de I'etendue, de I'equilibre et du mouvement. Le tems s'e-
coule, en mesurant la duree de ces phenomenes de tous les
lieux et de tous les momens, suivant des loisqui reglent I'ordre
physique des cffets merae que nous croyons fortuits et sans
harmonic, dans les oeuvres de la nature et dans les travaux de
nos arts.
Guidcr le travail de I'homme , pour qu'il soit conduit vers
un but utile et certain par ces rapports que la science revele ,
voila la marchefructueuse; et j'ajouterais : voila le seul moyen
qui puisse convenir aux grands progrcs de I'industrie. Mais il
ne suffit pas d'apercevoir le but que Ton doit desirer d'attein-
dre ; il faut s'assurer qu'on pent en effet y parvenir. A cet
ci^ard , j'ai trouve des doutes cliez les savans les plus illustres ,
ct chez les hommes etrangers a toute notion mathematique :
chez les ims, paixie qu'ils voyaient les sciences avec trop de
grandeur pour esperer qu'on put en rendre les principes po-
pulaires et les notions vulgaires ; chez les autres, parce qu'ils
s'effrayaient, sans s'en rendre compte, d'un resultat que leur
(rivolite ne pouvait concevoir.
Afiu de composer un cours normal qui convienuc aux bc-
soins i\e I'industrie, j'ai choisi, dans les principes et dans les
melhodcs de la geomettie et de la mecauique, tout ce qui m'a
paru susceptible d'applications frequentes et d'un grand interet
pour nos arts habituels ct pour les usages dc la vie. J'ai rap-
RAPPORT SUR L'ENSEIGNEMENT INDUSTRIEL. Siy'S
jiroclie ces principes de leiirs applications varices, et surtout
de cellcs qui nous sont tellement familieies, que nous ne les
soupconuoris point. La vaiiete de ces applications, I'utilite
pal|)able des resultats, ont un attrait parliculier qui fait dis-
paraitre raridile des conceptions abstraites. L'esprit trouve un
plaisir vif et toujours nouveau dans cette explication des ve-
ritcs par les faits, et des faits par les veriles; dans I'impor-
tance donnee aux pratiques de I'industrie, par les principes
niathematiques qu'elies renfermaient a notre insu , et qu'on
nous revele tout a coup; enfin, dans cette ulilite qu'on recon-
nait a la theorie, lorsqu'elle fournit des methodes qui font ap-
procher du but plus aisemcnt que la simple routine n'aidait a
s'cn ecarter. — Ainsi, les applications de k geometric et de la
mccanlque sont a la fois rcndues plus varices et moinsarides:
leur etude devient commune a I'artiste et a I'artisan.
Un jour qui, j'ose I'espcrer , touche a I'epoque oii nous vi-
vons, un jour viendra qu'anx humanites, qui sont la base
litlcraire de toute education libcrale, on joindra I'etude facile
de la geometric et de la mecanique appliquees aux arts. Depnis
que I'industrie a recu et recoit sans cesse les bienfaits de ces
deux sciences, depuis que cette Industrie est un puissant ele-
ment de bien-etre et d'opulence pour les particuliers, de cre-
dit et de force pour les gouvernemens, de prosperite pour les
nations, la connaissance des moyens generaux de I'industrie et
d'une theorie nouvelie qui la conduit surement a de grands
resultats, ne peut plus rester indifferente aux citoyens eclai-
res; elle se place au rang des notions fondamentales sur les-
quelles I'homme public doit asseoir ses principes, ses actes el
ses dcsseins.
Pour exposer avec ordre le tableau des efforts tentes pour
propager le nouvel enseignenient, et des resultats obtenusjus-
qu'a ce jour, je suivrai le littoral de la mer, en commencant
par le point le plus septentrional des coles de I'Ocean. Jc
franchirai les Pyrenees et suivrai le littoral de la Mediterranee,
jusqu'aux limites du territoire fran^ais.
Lc premier port qui s'offre a nous est celui de Dunherque ,
5y6 RAPPORT
le se<il ])oit maritime dn (iepartcment du Nord , I'un des pUi»
riches, des plus iictifs et des plus peuplcs du royaume. Cetle
ville est an deboucbc de iiombreiix canaux; ellc est le point
oblige par lequel s'exporte une gr.inile cpiantitc dc produitsde
la culture ct de I'indiistrie de I'anoienue Flandre francaise : en-
fiii , c'est par Duukerque que sont importes dans nos departe-
mens septentrioiiaiix bcaucoup de produits exotiques et de
denrees coloniales. En y propapeant la connaissance raisonnee
des applications de la gcomctrie ct de la niecanique, on trou-
vera les moycns de perfectionner les constructions navales du
commerce, et tons les arts qui se rattaclient a rarmement, a
I'instaliation , au greement des navires; la structure et la ma-
noeuvre des bateaux employes sur les cananx; plusieurs bran-
ches d'industrie pratiquees avec plus ou moinsde succes dans
les departemens du noid. L'enseignement est confic a M. Pe-
tit-Genet , professeur recommandabie , plus instruit que ne
I'exigent les fonctions dont il est charge; ses coiinaissances
litteraires lui donnent le moycn de presenter ses idees avec une
clarte rare, et d'ecrireavec une elegance remarquable. Quoique
les habitansde Dunkerque soient, en grandc partie, plus fami-
liers avec la langue flamande qu'avec la langue francaise, le
nouveau cours n'en compte pasmoius 80 auditeurs qui le sui-
vent avec une assiduitc tres-exemplairc.
Le port de Calais est, apres Dunkerque , le premier on Ton
troiive im professeur d'hydrograpliie. Un enseignement regn-
lier de la geometric et de la mecanique en faveur de I'indus-
trie est particuUerement bien place dans cette ville , lieu de
passage d'un grand nombre de personnes qui viennent dc la
Grande-Brctague, ou qui s'y rendent. Des difficulles locales y
ontretarde I'ouverture ducouis, malgre le zeie el I'activite du
conimissaire de la marine. Enlin, cet adminisrratcur a trlom-
pVie de toutes les difficuites, et c'est a Uii que Ton doit surtout
que dc plus longs retards n'aient pas prive la ville de Calais
du nouvel enseignemeiit. Le cours, pi-ofcsse par M. Legrand,
comptait jo eleves, des I'origine; il en compte 5o aujourd'hui;
il en comptera 100, lorsque rautorile inunicipalo , justement
I
SUR L'ENSEIGNEMENT INDUSTRIEL. 597
penetree de riinportance tl'iin pareil resultat en lavcur de Ca-
lais, croira devoir preter iin local suffisant.
La situation de Boulo^/w donne lien anx memes considera-
tions que celle de Calais : en raison de la population de Bon-
loi^ne, double de celle de Calais, les consequences du nouvel
enscii;ncmcnt sont encore plus iniportantes. La seule difliculte
(|u'on eprouva fut de trouver un local asscz spacieux pour le
zele professeur M. Legrix.
On ne pent guere esperei' que la petite ville de Saint - fa~
lerj-sur-Soinine presente de grands resultals, obtenns |)ar le
nouvel enseignement : cepeudant, c'est un des lieux oii il pro-
met de porter dlieiu^euxfiuits. Lors(|u'oa aura terniine les tra-
vaux considerables qui doivent ameliorer I'ent.ree en mer du
canal qui forme le lit de la Somme, Saint-Valery pourra deve-
lopper son Industrie nautique, et le faire avec d'autant plus de
succes que sa popidation induslrieuse possedera plus d'instruc-
tion reunie a I'experience pratique.
L'exeniple donne par Dunkercjue, Calais, Boulogne et Saint-
Valery n'a pas etc sans fruit pour les departeniens du Nord ,
du Pas-de-Calais et de la Somme. Deja , dans le premier de-
parlement, la ville deZ)o//flj jouit d'uncours de geometric et de
mecaniquc appUqaees aux arts. L'autorite niiinicipale a fonde
cet enseignement, et la Soriete d'emulatioa de Douay , nuie
par un noble sentiment, vient de voter une nfedaille d'or poui
recompenser le ineilleur artiste qui sera forme parcette ecole.
Esperous qu'un pareil exemple excitera I'emulation la plus
genereuse entre les autorites municipales et les Sorietes sa-
vantes du departement du Nord, pour fonder des cours qui
seront de la plus haute ntilile a Lille , a Rcubaix, a Turcoing ,
a Valenciennes et a Camhrui.
Le conseil municipal (V Arras n'a point voulu (]ue le chef-
lieu du Pas-de-Calais restat prive d'un moyen d'instruetion qui
])roduit les phis heureux effets dans les villes secondaires de
Boulogne et de Calais ; ii vient de voter une chaire de geome-
tric et de mecanique appliquees aux arts. Enfin , le conseil mu-
nicipal d'Jiniens, sur I'invitation motivee de la chambre du
5.J8 RAPPORT
commerce, et d'apres nti rapport j)lein de sagessc, redige par
ime commission speciale, vicnt d'arreter que le chef - lieu du
departementdela Sommejouiraaussi du nouvel enseignement,
auquel on joindra celui du dcssin lineaire. On dolt esperer
c[u ydbbeville , riche, popnleuse et manufacturiere , imitera cet
exemple. Ajoutons quele nouvel enseignement se trouve fonde
dans lesdepartemens de I'Aisne, des Ardennes, de la Moselle,
du Haut etdu Bas-Rhin , a Saint-Quentin, a Sedan , a Mezieres,
a Metz, a Colmnr , i Mulhouse , a Strasbourg.
A Dieppe, I'autorite munieipale a seconde de la maniere la
plus digne d'eloges I'empressement de Tautorite maritime.
D'un coramun accord, le sous-prefet, le maire et le comniis-
saire des classes ontsalisfait rapidement a toutes Ics demarches
preliminaires qu'il fallait faire pour I'ouverture du cours; elle
a eu lieu le 23 octobre iSaS. Quoique Ton eut a vaincre
beaucoup de prejuges defavorables , I'habile professeur
M. BtouET a compte, des le premier moment , 60 auditeurs ;
il en compte aujourd'hui 71, etcenombre ne pourra qu'aug-
menterparla suite.
Des prejuges plus grands encore , secondes par une apathie
singuliere , avaient cloigne du cours les ouvriers de Fecamp,
Le professeur de cette ville n'eut d'abord que 1 elcves; il leur
continua ses lecons avcc une perseverance digne des plus
grands eloges. Bicntot apres , il vit s'elever a 10 le nombre de
ses auditeurs. Lors de la reprise de son enseignement, on avail
eu le tems d'apprecier les connaissances que le cours doit re-
pandre ; le professeur, M. Vasse, ancien eleve del'Ecole poly-
technique, eutjusqu'a 32 auditeurs.
La ville du Havre nous offre un lout autre spectacle. Des
que Ton y connut la mcsure generale adoptee pour I'etablisse-
ment des cours, la chambre de commerce offrit un vaste local,
consacrea ses reunions. Des le niois d'octobre iSaS, M. Ro-
bert j professeur royal d'hydrographie , put y faire son cours :
il compta , des le premier moment, i5o auditeurs, et ce nom-
bre s'acciut bientot avec rapidite.^Un tel resultat est d'autant
plus renin rquable, qu'il etait moins espcre. Dansl'ete de 1825,
SUR L'ENSEIGNEMENT INDUSTRIEL. Sgg
ayant eu I'occasion de visiter le Havre, et de pressentir quel-
ques-uns des habitans les pluseclaires sur le succes qu'on pou-
vait attendre du nouvel enseignement dans cette ville, je n'a-
vais trouve de leur part qu'apprehensions et regrets sur ce
qu'un pareil enseignement leiu seniblait devoir etre pen goute
et pen suivi par les hommes de la classe industricuse.
La capitale du departement de la Seine-Inferieure, si favo-
risee par sa position qui I'a vendue Tune des villes les plus
peuplees et les plus industrieiises de la France, ne pouvait ac-
cueillir avec indifference le nouveau moyen de prosperite qui
etait offert a son Industrie. Le conseil nnunioipal de Rouen s'cst
empresse de voter une somnie considerable pour dispo-er un
vaste local dans lequel seront enseignees les sciences appliquees
^ I'industrie. Ces travaux preparatoires ont ete d'autant plus
longs qu'ils etaient plus considerables, et n'ontpermis a M.le
professeur Mabire I'ouverture du cours de geometrie et de
mecanique appliquees auxarts, que dans le commencement du
niois d'avril. L'exempie du chef-lieu produira les plus heu-
reux effets dans le departement et dans I'interieur de la Nor-
niandie. Aux portes memes de Rouen , les villages que I'indus-
trie a transformes en cites, dans les vallees de Darnetal, de
Deville et de Bolbec, voudront jouir d'un avantage possede
par des villes moins opulentes et moins industrieuses , telles
que Fecamp et Saint-Valery-sur-Somme. Les fabricans d'Ei-
boeuf ont deja fixe leursidees sur les moyens d'etablir un cours
dans leur ville.
Le nouvel enseignement s'est propage dans le departement
de rOise, et c'est le bourg de Liancourt qui , par le bienfait
d'lin illustre pair, en a donne le premier exemple.
Dans le departement de I'Eure, les habitans de Louviers ont
compris que la nouvelle institution ajouterait aux moyens de
prosperite de leur brillante industrie. Poni-Audemer trouvera
des avantages niaritinies dans un pareil etablissement. Un pro-
fesseur ^Evreux s'est offert pour enseigner gratuitement dans
ce chef-lieu du departement, et M. le prefet de I'Eure s'oc-
cupe, en ce moment meme, de fonder les nouveaux cours dans
6oo RAPPORT
ce departcment, I'un des plus riches de Fiance , et qui possede
quinze cents usines ou manufactures.
Dans le departcment du Calvados, la ville de HonJIeur ,
dont la population n'excede pas 10,000 habitans , compte 100
personnes qui suivent le cours de M. Pottier, ct qui font, par
leurnombre meme, Telogc de leur maitre. La ville de Caen ,
chef-lieu du departcment dont Honfleur n'est que le chef-lieu
de canton, est loin de presenter un aussi beau resultat. 11 me
serait difficile d'expliquer completement le pcu de sncces d'un
cours qui, pour prosperer , a besoin du noble encouragement
des classes supericures de la societe, etde la bienveiilance par-
ticuliere des officiers municipaux. II fan I attendre beaucoup
du terns, dans les lieux ou ce nouvel enseignement n'est pas
encore apprccie.
Cherbourg, chef lieu du premier arrondissement maritime ,
peut retirer un grand avantage des lecons donnees par M. Lr-
MONNiER aux ouvriers constructeurs et a ceux qui praliquent
d'autres professions marilimes. Quoique la population de Cher-
bourg ne soil guere que le quart de celle de Caen, cepcndant
le nombre des personnes qui y suivent le nouveau cours est
plus grand que dans la capitale du Calvados. C'estM. le major
de la marine royale qui a preside a I'ouverture de ce cours
oCl, dans un discours sage et bienveillant, il a invite la classe
ouvriere i profiter du bienfait quilui est offert.
Granville , dans le departcment de la Manche, eprouve en-
core les difficulles qu'il a fallu vaincre dans la ville de Fecamp.
Le nombre des auditeurs est tres-peu considerable; mais le
professeur, M. Decrevoisier, verra qu'avec de la Constance et
son talent, les obstacles disparaitront par degres, surtout avec
le concours des autorites municipales et maritimes. Jc dois dire
aussi que I'obstacle principal qui s'opposea cette instruction ,
c'est que les plus simples notions de lecture et d'ecriture sont
tres-peu repandues parmi la claisse ouvriere. L'autorito muni-
cipale de Granville reconnaitra I'importance de soigner par-
ticulierement , sous ce point de vue , I'educalion de cette
classe.
SUR L'ENSEIGNEMENT INDUSTRIEL. 60 1
Saint-Malo, celcbre par ses navigateurs et par son com-
merce maritime, est Tune des premieres villes qui aient ap-
precio rimportance du iiouvel enseignemorit pour les progres
de I'industrie. La chambre de commerce de cette ville, non
moins eclairee et non moins bicnvcillanfe que celle du Havre ,
s'est fait un plaisir d'offrir le local de ses seances pour y tenir
le nouveau cours. Une maladie grave n'a pas permis au pro-
fesseur, M. Michelle, de commencer aussitot qu'il I'aurait
desire; mais, sans attendre son entier retablissement, ce pro-
fesseur plein de zelc s'est empresse, des le commencement de
cette annee, d'ouvrir son cours auquel ont assiste 60 personnes
adonnees adifferentes professions.
La population de Sainl-Brieux a etc poussee dans la voie de
Tinstruction et du perfictionnement par les autorites civilcs ,
maritimes et religieuscs, qui se sont reunies avec un accord
admirable pour obtenir ce resultat. M. le prefct, M. le maire
et M. le commissaire de la marine ont pris avec empressement
les mesurcs necessaires poursubvenir a toutes les depenses du
nouvel enseignement qui a commence le 16 octobre. Dans
ime seance d'ouverture, lenue le dimanche, au sortir des ce-
remonies religieuses, M. le prefel a prononco un discours plein
de vues elevecs et genereuses, pour appeler la po[)ulalion de
son departement a I'acquisition des connaissances quipcuvent
donner une impulsion nouvelle a tons les arts utiles cultives
dans la Bretagne. Le commissaire de ia marine a pris ensuite
la parole, et cette seance memorable, honoree par la pre-
sence de Ms"^ I'eveqne, s'est terminee par un discours plein de
couvenance et de raison, qu'aprononce leprofesseur, M. Du-
BDS , ancien eleve de I'Ecole polytechnique. 60 auditeurs sui-
vent le cours. Une ecole de dessin lineaire va terminer, a Saint-
Brieux , I'cnseignement industriel.
A Morlaijc, le professeur d'hydrograpbie, M. Drkppe , qui
a donne a la marine un fils, ingenieur distingue, a fait I'ouver-
ture de son cours le 27 octobre. Reduit d'abord a 20 audi-
teurs, il a vu leur nombre s'accroitre successivement jusqu'a
45. Cetaccroissement, occasione par les communications per-
6o2 RAPPORT
sonnelles des premiers auditeurs avec le leste de la classe ou-
vriere, est iin losultat d'estime sentie, accordee par degres aiix
connaissances scientifiques appliquees aiix besoins des arts.
Si, dans la ville de Brest, I'autorite municipale avail pu
foiirnir un local assez spacieux, I'enseiijnenjent aurait offert
des resultats dignes en tout des talens et du zele du savant pro-
fesseur, M. Porquet. Le loca|( dont la marine a pu disposer ne
contient que lOO personnes; et, nieme avant I'ouverture du
cours, i5o s'ulaient presentees pour suivre les lecons.
Dans la ville de Quimpcr un premier appel avai't ete fait a
la classe iiidustrieuse, et personne ne s'etait presenle pour
suivre Ic cours. Les autorites ne se sont pas decouragees, et
3o ouvriers recoivent aujourd'hui les lecons du profcsseur.
Quelques difficultes pardculieres ont retarde long-tems I'ou-
verture du cours dans la ville de Loricut; on ne peul encore
faire connaitre aucun resultat relatif a ce port.
La salle fournie par la mairie de Nantes ne pcut contenir
que 200 personnes ; c'est a ce nombre que s'est reduit I'audi-
toire de M. Caillet, professeur dont le zele et le merite sont
dignes des plus grands eloges. A I'embouchure de la Loire, le
nouvel enseignement est etabli dans le port de Paimboeuf.
L'exgmple des villes maritimes de Bretagne a porte ses fruits
dari^^lacapitale de cetteancienne province : un eleve de I'Ecole
normale, professeur de mathcmatiques au college de Rennes ,
s'est offert pour enseigner gratuitement la geometric et la nie-
canique appliquees aux arts , avec I'approbation de I'Univer-
site et I'autorisation municipale. II a commence , des le mois
de Janvier de cette annee, un cours que suivent assiduement
i5o auditeurs.
Arretons un instant notre attention sur les resultats tres-re-
marquables obtenus dans deux des principales provinces de
I'ancienne division de la France. Dans la Normandie, celebre
par son industrie et par I'avancement general dela civilisation,
le nombre total des personnes qui suivent les nouveaux cours,
danshuit villes differentes , s'eleve a 843. En Bretagne, pour
neuf villes ou les memes cours sont etablis, lo nombre des au-
SUR L'ENSEIGNEMENT INDUSTRIEL. 6o3
diteurs est de 860. Ainsi, la province qu'on aurait pu croire la
moins propre a sentir le bienfait des iioiivellcs connaissances ,
et qui devait presenter le moins de snjets disposes h les actjue-
rir, a la superiorite, sous ces deux points de vue. Peut - etre
doit-on un pareil resultat aux scins ^enereux d'un nouveau
Vincentde-Paule, dont Taclive charite s'est consacree tout
entiere a la propagation des premieres connaissances de I'en-
jjeignement populaire en Bretagne. Ses ecoles, m'assure-t-on,
suffisent des a present pour etiseigner ;i 82,000 enfans la lec-
ture, I'ecriture et les premieres regies du calcul. Je ne puis, en
passant, m'empecher de rendrehommage a ce zele bienfaisant,
et je forme des voeux pour qu'un tel exemple ne reste pas ste-
rile dans les autres parties du royaume.
Aux Sables d'Olonne , seule ville maritime que la Vendee
possede, le profcssein-, M. Veillon, a commence, en donnant
ses lecons a un seul eleve, et ensuite a 10 autres, esperons que
ses soins ne seront point sans recompense. Son cours seral'un
des premiers et des plus puissans moyens pour tirer de I'en-
fance les arts utiles dans la Vendee.
A La Rochelle, des le 1" juillet 1825, M. Guigon de Grand-
VAL, professeur royal d'hydrographie, anime par le plus loua-
ble zele, avait ouvert un cours de geometric appliquee aux
arts. II a ete seconde dignemcnt par le maire, M. Viault, an-
cien eleve de I'Ecole poly technique.
Nous arrivons a Rochefori, celui de nos grands ports qui
presente dans son arsenal les machines les plus completes et
les plus ingenieuses, qui ont fait la reputation d'un savant
ingenieur. Tout concourait, dans ce port, a faire sentir I'im-
portance de la geometric et de la mecauique appliquees aux
arts : aussi , I'enseignement de ces connaissances y a - t-il ob-
tenu un succes eclatant. Des le premier jour ou le cours fut
annonce, plus de 200 auditeurs se firent inscrire : la grandeur
du local put seule limiter leur nombre. J'ajouterai qu'un tel
succes tientbeaucoup aux talens du professeur M. Lehuen.
L'exemple des villes de Nantes, de La Rochelle et de Ro-
chefort a decide les magistrals de Poitiers el Ap Limoges a eta-
Go/, RAPPORT
blir !es iioiiveaux coins dans chaciine de ces villes. Celui de
Limoges prospoie dei)iiis trois inois ; celui dc Poitiers a du s'oii -
vriraii mois d'aviil. Des deinaiches sont faites pour procurer
lememe avantage a Niort , \ille opulente ct industricuse.
Libourne, eu egard ineme a sa population, est une des villes
qui presentent les rcsuUats les plus remarquables. Sur une
po[)ulation de 8,000 ames, plus de 100 auditeurssuiveut le cours
de M. BuRGADE, ancicn eleve de I'Ecole poly technique. Cette
affluence doit elre attribuee, non-seuleinent au zele de I'auto-
rite nuiuicipalc et au talent du professeur, uiais aux. bienfaits
d'uu noble pair qui a consacre la grande autorite dont il a joui
durant quelques aunees, et sa fortune privec, pour develop-
per avec un succes extraordinaire Tinstructiou elcnientaire
dans la ville do Libourne. L'exemple donne par cetle ville
fait voir combien notre populatiou est propre aux ('tudcs les
plus serieuses et les plus utiles.
Blaye est la seule ville maritime oil les officiers muuicipaux
aient cru devoir prendre tuie deliberalion aiin de declarer,
par anticipation, I'inutilite supposce du nouvcl euseigncment.
Eclaires par l'exemple de Libourne , de Bordeaux , de Roche-
fort, ils se formeront sans doute des idees plus exactcs des
services que celte instruction peut rendrc ;\ I'induslrie deleurs
adminislres.
Le cours de Bordeaux , confie au savant M. Lancelin, a
commence, dans le mois de Janvier de cette anriee, avec un
auditoire d'environ aSo personnes; c'est toutce que pouvait
contenir le local affecte a cet enseignement.
Sur rinvitation bienveillante de M. le president du conseil
des ministres , Toulouse s'occupe des moyens d'etablir un
cours. Celui de Montauhan est en activite, et suivi avec suc-
ces. Bordeaux, Toulouse et 3Iontauban occupent les positions
centrales les plus importantes dans le beau bassin de la Gi-
ronde, ou des cours d'eau si nombreiix arrivent des sommites
des Pyrenees, des Cevennes et des montagnes d'Auvergne. Une
etude raisonnee des applications de la geometric et de la nie-
canique, faite dans ces trois villes, y donnera le moyen de per-
SUR L'ENSEIGNEMENT INDUSTRIEL. 6o5
fectionner la confection des machines hydraiiliques et des
moiilins de toute espece (jui devicndront pour une foiile dv
vallees, les instrnmens prodiicteiirs d'une opulence inesperee.
Dejii, un simple oiivrier, forme par le nonvel enseignement,
vient d'offrir d'incienieuses combinaisons pour procurer des
canx a la vilie de Beziers , an nioyen d'une macliine a vapeur
qui a merite I'approbation de savans ingenicurs. D'apres la
decision du conseil general des pouts et chaussees , ce systeme
sera mis incessamment a execution.
A Bayonne , I'enseignement conGe a M. Paradis compte
70 auditeiirs ; et ce nombre sera trouve tres-considerable, si
Ton reilechitque la grande majorile des habitans de celte par-
tie du royaume connait a [)eine quclques mots de la langue
fraucaise, A Saint- Jean-dc- Luz , deux petites villes voisines
reunissent leurs habitans industrieux pour suivre Ic nouveau
cours. Les difficultes de la langne s'y font sentir encore plus
qu'a Bayonne.
Passons maintenant aux cotes de la Meditorranee. La faible
population de Collioure ne pcrmet pas d'en esperer de grauds
resuitats. II n'cn est pas de menie de Narbonrte : dans cette
ville de 10,000 habitans, 100 personnes siiivetitles lecous don-
necs avec zele par M. Esmieu. Bienlot, la ville de ^ezJer^- jouira
aussi des fruits du nouvel enseignement : le premier magistral
de cette ville u promis de s'en occuper avec zele, et tout fait
presumer que ses soins nc soront pas infruclueux.
Le port d'Ji^r/e, ou professe M. Maihicu Esmieu est en pos-
session du meme avantage. A Ce«e, M.Sire compte 106 eleves,
de toutes les classes de la societe. A MoritpeUicr , un ancieu
officier de la marine francaise s'est offert a professer gratnite-
ment la geometric et la mecanique applicpiees aux arts. Une
commission speciale, nommee par le conseil de la ville, s'oc-
cupe de cette proposition , et nous apprenons qu'elle est ac-
ceptee. A Nimes, la cliambre de commerce, le prefet, le maire
et le conseil nmnicipal sc sonl montres unanimes pour fonder
la nouvelle institution.
C'est seulement au niois d'octobre prochain, que le cours de
6o6 RAPPORT
geonietrio et ilu mecanique appliquees aux arts doit ctre ouverl
dans la ville d'^rles.
Nous arrivons a Marseille, qui s'est placee au premier rang
parmi les villes manufaclurieres de la France. Toutes les auto-
ritos s'y sont reunies pour donnerau professeurlcs ninyens do
faire ptosperer le nouvel enseignement. Ce professeur a digne-
nient rcpondu a Icur attentc : plusde 3oo personnes ont assisto a
la premiere seance, et cenombre s'est bien to taccrujusqu'a 55o,
le plus considerable qu'aucun professeur des villes maritimes
soit parvenu i reunir; le prtfet des Bonches-dti-Rhone, M. df.
ViLLENEtJVE, a preside lui-niome la seance d'ouverture, et a
prouonce un discours tres-propre a exciter le desir d'acquerir
les connaissances que le cours va repandre. II s'est occupe des
moyens d'etablir de pareils cours dans les autrcs villes de son
departement, et surtout a ^dix. Dans cette dernierc ville, un
ingenieur de la marine, ancien eleve de I'Ecole poly technique,
M. DusiONTEiL s'est offert a professer gratuitement ; son offre
a ete accueillie, et je ne doute point que son enseignement
n'obtienne un succes tres-reniarquable. Dans la petite ville de
La Ciotat , qui ne coinpte pas plus de 5ooo habitans, plus do
loo artisans suivent les Iccons du zele professeur, M. N\lis.
Le seul grand port dont je n'aie point fait mention , est ceUii
de Toulon. C'etait celui doRt on pouvait le moins esperer,
parce que , jusqu'a ce jour, ses habitans ont paru peu portes
a I'etudedes sciences. Les rcsultats ont dementi cette prevision.
M. le professeur d'hydrographie ayant represente que ses oc-
cupations ne lui perniettraient pas de faire le nouveau cours,
cette honorable mission a ete conliee a M. Barthelemy. 5oo
personnes dc toutes professions suivent assiduement les lecons
decejeune professeur : ce sera I'epoque d'un changement total
dans les habitudes et dans les connaissances de ia classe ou-
vriere de Toulon. Les autorites de la marine ont concouru
avec une extreme bif nveillance au succes de I'institution, non-
seulement a Toulon , mais dans tons les ports de la Mediter-
ranec.
Les deux sculs ports de Fiance dont il me rcste a parler,
SUR L'ENSEIGNEMENT INDUSTRIEL. G07
sontceuxde Saint-Tropez et A'Antibes. Dans le premier, M. Ic
professeur Cornibert, qui, en iSaS, avail donne tous ses
soins a 2 eleves seulenaent, en a compte 3o, lorsqu'il a re-
pris son cours, au prin terns de 1826. Dans Ic port d'Antibes,
I'enseignement, confie a M. Barbaut, prospere depuis plu-
sieurs mois. Enfiu, le cours de Bastia , fait par M. Rizzo,
produit deju d'excellens effets, et Ton a lieu d'esperer que,
I'annee prochaine , Ajaccio ne restera pas en arriere.
Dans cette vaste etcndue de coJes que nous venons de par-
courir, on remarque avec peine qu'une grande partie du littoial
est habitee par une population qui n'a point encore adopte gene-
ralement la langue francaise comme langue nationale. II est a
desirer que des ecoles elementaires, sufSsamment muUipliees,
s'appliquenl de plus en plus a repandre I'usage de notre langue,
ainsi que la lecture et I'ecriture. Ces connaissances ont besoin
d'etre plus conimuues qu'elles ne le sont aujourd'hui, menne
dans les provinces que Ton regarde conime les plus avancees.
En suivant le littoral de la France, j'ai parfois jete mes
regards vers I'interieur pour y montrer le nnuvel enseigne-
ment propageant ses himiercs jusqu'a la fronliere de Test et
jusqu'au luidi. J\'ignon, Lyon , faience , Aurillac , Clermont,
Gap, Bourg, j\anlua, Salens possedent deja les nouveaux
cours; il faut en. dire autant des villes de Saint- £ tienne , de
Nevers , de Dijon , d' Orleans, etc. Aujourd'hui 8000 artisans
ou chefs d'ateliers et de manufactures suivent avec assiduite
des cours gratuits qui leur sont offerts dans 70 villes. Tout fait
esperer qu'avant la fin de I'annee , le nombre de ces villes de-
passera celui de 100. S. E. le ministre de I'interieur a fait
connaitre a tous les prefets du royaume qu'il approuvera les
depenses votees pour le nouvel enseignement par les conseils
municipaux des villes industrieuses. De loutes parts, les auto-
rites locales s'empressent de repondre a I'invitation des auto-
rites superieures. Cet admirable concours n'a trouve d'excep-
tion que dans une ville dont je m'abstiendrai de citer le nom.
Je suis persuade que cette exception ne durera pas long-tems
dans I'une des cites les plus importantes que la France pos-
6o8 RAPPORT SUR L'ENSEIGNEMENT INDUSTRIEL.
sede sur le vcisant des Alpes, dans une contree riche en
cours d'eau que la mecaniqiie peut scule donner le moyen
de rcndre tios-utilcs.
MoNSEiGNEUR i.E D.vuPHiN, atniial de France, a pris un
intcret special a ce progrcs intellectuel des contrces mari-
times; il a recompense par son noble suffrage les efforts tentes
"pour faire naitre et developper nn lei progres que Sa Majcste
elle-nieme a daigne prescrire, afin d'accomplir une pensec
niagnanime.
NouvEAXJX Principes d'Economie politique. — Jour
qu'ils peuvent jeter sur la crise qu'eproave aujour-
dliui V Anglcterre.
Il y a deja sept ans que je publiai mes Nouveaux Principes
d'Economie politique^ dont je prepare aujourd'hui une edi-
tion nouvelle, considerablement augmcntee (i). Je ne dis-
sjmulerai pas que cet ouvrage n'obtint point I'approbalion
des homines qu'on regarde aujourd'hui, avcc raison, commc
ayant fait faire les progres les plus signales a la science.
Je dois nienie attribuer a leur bionveillance pt-rsonnelle
les menagemens avec lesquels ils combatlirent mon livre.
Je ne m'etounai point de n'a voir pas fait une impression plus
profonde. Je remeltais en doute des principes (jue Ton regar-
dait conime arreles; j'ebranlais une science qui par sa simpli-
cite , par la deduclion claire el niethodique de ses lois, pa-
vaissait une des plus nobles creations de I'esprit humain.
J'attaquais une orthodoxie enfm, entreprise dangereuse en
philosophic comme en religion. En meme terns, j'avais un
desavantage de plus : je nie separais des amis dont je partage
les opinions politiques; je signalais le danger des innovations
qu'ils recommandent; je montrais que plusieurs institutions
qti'ils ont long- terns attaquees comme des abus, avaient eu
des consequences bienfaisantes; j'invoquais enfiu , en plus
(i) Ellep.iraitra , nv.Tiil Li fin de I'annee, chez Delaunay, libraire,
Palais-Royal , en ■>. forts volumes in-S".
NOUVEAUX PRINCIPES D'ECONOMIE POLITIQ. 609
d'une occasion, lintcrvenlion du pouvoir social, pour regler
les progres de la richesse, au lieu de reduire Teconomie poli-
tique a la maxime plus simple , et eu apparence plus liberale,
de laisser faire et laisser passer.
Je n'avais aucun lieu de me plaindre, j'attendis; car la ve-
rite est plus forte que I'esprit de systeme. Si je m'etais trompe ,
la suite des fails ne pouvait manquer de me le reveler : si, au
contraire, j'avais decouvert des principes nouveaux, mais qui ,
a mes yeux meme, commencaient seidement alors a acquerir
de I'importance, les faits ue tarderaient pas a se produire a
leur appui; et, tout en respectant I'autotite des pontifes de la
science , je pourrais dire, conime Galilee : eppur si muove.
Sept ans se sont ecoules , et les faits me paraissent avoir
victorieusement combattu pour moi. lis ont prouve , bien mieux
que je n'aurais pu faire, que les savans dont je m'etais separe
etaient a la poursuitc d'une fausse prosperite ; que leurs theo-
ries, la ou elles etaient mises en pratique, pouvaient bieu ac-
croitre la richesse materielle, mais qu'elles diminuaient la
masse des jouissances, reservees a chaque iudividu; que, si
olles tendaient a rendre le riche plus riche, elles rendaient
aussi le pauvre plus pauvre, plus dependant et plus de-
pour vu. Des crises tout-a-fait inatlendues se sont succede
dans le monde commercial : les progres de Tinduslrie et de
I'opulence n'ont point sauvo les industriels qui creaient cette
opulence, de souffrances inouies : les fails n'ont repondu, ui
a I'attente commune, ni aux predictions des sages; et, malgre
la foi implicite que les disciples en economie politique accor-
dent aux enseignemens de leurs maitres ,i]s sont contraints de
demaiider ailleurs des explications nouvelles, pour des phe-
nomenes qui s'eloiguent si fort des regies qu'ils croyaieut
etablies.
Parmi ces explications , celles que j'avais dounees par
avance se sont trouvees parfaitement conformes aux resultats.
Peut-etre faut-il attribuer a celte coincidence I'ecoulcment
plus rapidc de nion ouvrage , et la demands qui m'a ete faite
T. xxxi. — Septetnbre 1826. 89
6io NOUVEAUX PRINCIPF.S
il'en preparer line nouvelle edition. C'est en Angleterre que je
me suis acquitte de cette tache. L' Angleterre a donne nais-
sance aiix plus celebres ecor.omisles ; Icur science y est pro-
fessee aujourd'hui memc avec un redoublement d'ardeur; on
y a vn des ministres d'etat, dejii adeples dans la doctrine dc
-la fortune publique, suivre Ics cours d'un des plus habiles
professeurs d'economie politique; on les a entendus invoquer
x;onstamaient ses principes dans le parlement. La concurrence
universelle, ou I'effort pour produire tonjours plus, et tou-
jours a plus bas prix, est depuis long-tcins le systeme de
I'Angleterre, systeme que j'ai altaque comme dangereux. Ce
svsteme a fait faire a I'industrie anglaise des pas gigantesques ;
mais il a precipite, a deux reprises, les nianufacturiers dans
une detresse effrayante. C'est en presence de ces convulsions
de la richesse, que j'ai cru devoir me placer, pour revoir mes
raisonnemens et les comparer avec les faits.
L'etude que j'ai faite de I'Angleterre m'a confirme dans mes
nouveaux principes ; j'ai vu dans ce pays surprenant, qui sem-
ble subir une grandc experience, pour rinsfrnclion du restc
du mondc, la production angmenter, tandis que leajouissances
diminuent. La masse de la nation semble y onblier, aussi bien
que les philosophes, que I'accroissement des richesses nest
pas le but de l\iconomie politique, mais le moyen dont elle
dispose pour procurer le bonheur de tons. Je cherche ce bon-
heur dans toiitcs les classes, et je ne sais ou le trouver. La
haute aristocratic anglaise est, en effet, arrivee a un degre
de richesse et de luxe qui surpasse tout ce qu'on voit chez
toutes les autres nations; cependant, elle ne jouit point elle-
meme d'une opulence qu'elle semble avoir acquise aux depens
des autres classes : la securite lui manque ; et dans chaque
famillc, la privation se fait senlir a un plus grand nombre d'in-
dividus que I'abondancc. Si j'entie dans ces maisons dont la
splendeur est toute royalc, j'cntends Icurs chefs affirmer que,
si on supprime le monopole du ble, qu'ils exercent contre leurs
concitoyens, leurs fortunes seront aneanties; car leurs terres
qui s'etendent sur des provinces entieres, ne paieront plus les
D'ECONOMIE POLITIQUE. 6ii
frais de culture. Autour de ces chefs, je vois uu nombre d'er-
fans, sans exeniple parlout ailleurs, dans la classe aristocra-
lique; plusieuis en comptent dix, dotize, quelquefois davan-
tage; mais tousles fils cadets, toutesles filles,sout sacrifies a
la vanite de I'aine; leiir partai;e en capital n'equivaudra pas
a une annec de rente de leur frere; ils devront vieiilir dans
le celibat, et leur depcntiance, a la fin de kur vie, leur fait
payer bien cher le luxe de leurs premieres annees.
Au-dessous de cette aristocratie titree et non titree, je vois
le commerce occuper un rang distingue ; il embrasse le monde
entier dans ses entreprises; ses agens bravent les glaces dcs
deux poles et les ardeurs de I'equateur, tandis que chaciin dcs
chefs qui se rasseniblent an palais du change pent disposer
de millions. En meme terns, dans toutes les rues de Londres,
dans celles des grandes villes d'Angleterrc, les magasins eta-
lent des marchandises qui suffiraient a la consommation de
I'univers. Mais la richesse a-t-elle assure au commercant an-
glais I'espece de bouhcur qu'elle est propre a garanlir ? ]N"on :
dans aucun pays les faillites nc sont aussi frequentes. Nulle
part, ces fortunes colossales, qui suflisaient seules a remplir
un emprunt public, a soutenir un empire ou une republiqtie,
ne sontrenversees avec tant de rapidite. Tous se plaignent que
les affaires sont rares, difficiles, et pen lucratives. A peu d'an-
nees d'intervalle, deux crises terribles ont ruine une partie
des banquiers, et ont etendu la desolation sur toutes les manu-
factures anglaises. Dans le meme tcnis , une autre crise a ruine
les fermiers, eta fait sentir ses contre-coups au commerce de
detail. D'autre part, ce commerce , malgre son immense eten-
due, a cesse d'appeler a lui les jeunes gens qui cherchent ime
carriere : toutes les places .sont occupees ; et dans les rangs
superieurs de la sociele, comme dans les inferieurs, le plus
grand nombre offre en vain son travail, sans pouvoir obtenir
de salaire.
Cette opulence nationale, dont les pi'ogrcs maferiels frappcnt
tous les yeux, a-t-elle enfin tourne a I'avantage du pauvre ? Pas
davantage. Le penple, en Angleterre, est en meme terns prive
(Ui T^OrVEAUX PRINCIPES '
(•t d'aisancr dans lo moment present, ct de secuiiie pour
I'avenir. II n'y a pins de paysaus dans les campagnes; on les
a forces do faire place a»ix jonrnaliers. II n'y a presfpie plus
il'arlisans dans les villes, on de chefs independans dune pelitf
Industrie, niais seulcment des manufacluriers. iSirifhistriel ,
pour employer im mot cp:e ce systeme hii-menie a mis a la
mode, ne sail pins ce tpie c'est que d'avoir un etat; il gagne
spulement un salaire; et, comme ce salaire ne saurait lui suf-
lire egalcment dans toutes les saisons, il est presque chaqne
aunee rednit i dcmander I'anmone a la bourse des pauvres.
Cette nation si opulentc a Ironve pins ('conomique de vend re
lout I'or etl'artjent qu'elle possedait, de se y^asser de niimc'raire,
et de faire toute sa circidalion avec da papier; elle s'est ainsi
volontairement privee dii plus precieux entre les avantages
dii ntuTieraire, la slabilile de son prix. Les portenrs de billets
de banqiies provinciales eourent chaque jour le danger d'etre
ruiiies par les faillites freqiicntes, et en qnelqne sorfe epidemi-
ques des ba.iquiers; ct I'ctat entier est expose a une convul-
sion dans toutes les fortunes, si une invasion ou une revolu-
tion ebranlait le credit de la banque nationale. La nation
an^laise a frouve plus economique de renoncer aiix cultures
qui demandent beaucoup de main-d'oeuvre, et elle a congedie
la moitie des cuUivafeurs qui babitaient ses champs; elle a
trouve pins economique de remplacer par des machines a
vapeur les mannfacturiers, et elle a congedie, puis repris, puis
congedic de nouveau les ouvriers des villes; et les tisserands
ccdant la place aiix power looms (metiers mus par la vapeur),
snccombent aujourd'hui a la famine; elle a trouve plus eco-
nomique de reduire tons les ouvriers au salaire le plus bas
avec lequel ils puissent vivre; et les ouvriers, n'etant plus que
proUtaires , n'ont pas craint de se plonger dans une niisere plus
profonde encore, en elevant des families toujours pins nom-
breuses. Elle a trouve pins economique de ne nouf'rir les
Irlandais que dc pommes de terre, et de ne les habiller que de
haillons; et aujourd'hui, chaque paquebot Iiii npporte des
legions d'Irlandais, qui, fravaillanf a meilleur maveho qnelos
D']i:CONOMIE POLITIQUE. 6i3
Anglais, chassent ceux-ci detous les metiers. Quels sont. doutles
fruits de cette immense richesse accumiilee? Wont - ils ea d'autre
effet que de faire partager les soucis, les privations, le danger
d'uno mine complete a toutes les classes? L'Angleterre, en
oubliant les hommes pour les choses, n'a-t-elle pas sacrifie la
fin aiix moyens?
L'exemple de I'Angleterre est d'autant plus frappant, que
c'est une nation libre , eclairee, bien gouvernee, et que toutes
ses soiiffrances procedent uniquement de ce qu'elle a suivi
une fausse dirertion economique. Sans doute, I'etranger est
frappe en Angleterre des pretentions arrogantes de I'aristo-
cratie; ct I'accumulation des richesses dans les memcs mains
tend a les accroitre sans cesse; dans aucun pays, ccpendant,
Tindependance de toutes les classes de la nation u'est niieux
garantie; dans aucim pays, le pauvre, a cote d'une deference
qui nous etonne, ne conserve mieux, au fond de lame, la
conscience de sa propre dignitej dans aucun pays, le senti-
ment de confiance dans la loi , et de respect pour sou autorite
ue penetre davantage toutes les classes; dans aucun pays, le
sentiment de commiseration n'est plus general, on les riches ne
sont plus empresses de venir au secours de toutes les detressejj<:
dans aucun pays, I'opinion publique n'est plus puissante; dans
aucun, le ministere n'est plus eclaire, plus determine a clier-
clier le bien general, et plus habile a le trouver. Tant de
moyens, taut devertus seraient-iis done inutilcs aux societes
humaines? Oui, lorsqu'elles ont le malheur de s'engager dans
une fausse direction. L'Angleterre, plus eclairee, plus libre,
plus puissante que les autres nations, n'en est arrivee que
plus tot au but qn'une erreur lui faisait poursuivre. Sa force
vitale et les lalens de ses hommes d'etat I'aideront, quand eilc
en aura la ferme volonte, a rentrer plus aisemcnt qnune autre
nation dans la bonne voie; mais la science a ses piejuges, los
peuplcs ont leurs habitudes; et anjourd'hui memo, dans leur
detresse, les Anglais ne prcnuent encore aiicune mesure qui
ne tende a I'aggraver.
J'ai cherche a etablir, dans le livre qu« je prescnterai bieulot
6i4 NOUVEA.L)X PRINCIPES
de nonveau an public, que, ponr que les richesses contribuent
au bonlieur dc tons, en tant qu'ellcs sont U; signe de toutes Ics
jouissances niatericlles de riiommc, il faut que leiir accroisse-
meiit se conforme a raccroissement de la population , et que
leur distribution se fasse, parmi cette population, dans una
proportion qu'on ne pent troublcr sans un extreme danger.
Je me suis jiropose dc faire voir qu'il est necessaire, pour Ic
bonheur de tous, que le revcnu croisse avcc le capital; que la
popidation ne depasse point Ic revenu qui doit la faire vivre;
que la consommation croisse avec la popuUition, et que la
reproduction se proportionne egalcment, et au capital qui la
produit, etila population qui la consomme. Je fais voir en
meme terns que chacun de ces rapports peut ctre trouble ,
independamment des aulres; que le revenu souvent ne croit
point en proportion du capital; que la population peut s'ac-
croitrc, sans que le revenu soit augmente; qu'une population
plus nombreuse, mais plus miserable, peut deraander une
moindre consommation ; que la reproduction enfin peut se
proportionner aux capitaux qui Vaclivent, etnon a k popula-
tion qui la demande; mais que, chaque fois que I'un ou I'autre
de ces rapports est trouble, il y a souffrance pour la societe.
C'est sur cette proposition que sont fondes mcs Noitveaux
Principes , c'est par I'importance que je lui attribue que je
differe essentiellement des pliilosophes, qui, de nos jours, ont
professe d'une maniere si brillante les sciences economiqucs ,
de MM. iSay, Ricardo , Malthus et Macculloch. Ceux-ci me
paraissent avoir constamment fait abstraction des obstacles
qui les embarrassaient, dans renchaineraent de leurs theo-
remes,et etre arrives i^i des conclusions fausses, pour n'avoir
point distingue ce qui leur donnait quelque peine a distinguer.
Tous les economistes modernes, en effet, ont reconnu que
la fortune publique, n'etant que I'agregation des fortunes pri-
vees, naissait, s'augmenlait, se distribuait, se detruisait, par
les memes procedes que celle de cliaque particnlier. Tous sa-
vaient fortbieu que, dans une fortune privee, la parlie la plus
essenlielle a considcrer, c'est le revenu : que sur le revenu doit
D'ECONOMIE POLITIQUE. 61 5
se rei^ler la consommation ou la depense , sous peine de de-
tniire le capital. Oependant, cominedans la fortune puMique,
le capital de I'un devient le revcnu de I'autre , ils out cte em-
baFrasses a decider ce qui ctait capital, ce qui etait revenu ,
et ils ont trouve plus simple de retrancher absolument le der-
nier de leurs calcals.
Ej: nej;ligeant une qnanlite aussi essentielle a determiner,
MM. Say et Ricardo sont arrives a croire que la consommaiion
etait une puissance illimifee, ou du nioins quelle n'avait point
d'autres borucs que celles de la production , tandis qu'elle est
bornee par le revenu. Ils ont annonce que toute richesse pro-
duite Irouverait toujours des consommateurs , et ils ont en-
couraj;e les producteurs a causer cet engorgement des marches
qui fait aujourd'hui la detresse du monde civilise, tandis qu'ils
auraient du avertir les producteurs qu'ils ne devaieut compter
que sur les consommateurs ayant un revenu , et que toute
production nouvelle qui ne correspond pas a un revenu nou-
veau, cause la detresse de quelqu'un. D'apres le meme ou-
bli, M. Malthus, tout en signalant le danger d'un accroisse-
ment desordonne de la population , ne lui a donne de limites
que dans la quantite de subsistances que la terre pent produire,
quantite qui sera long-tems encore susceptible de s'accroi-
tre avec une extreme rapidile, tandis que, s'il avait pris
en consideration le revenu, il aurait bientot vu que c'est la
disproportion entre la population travaillante et son revenu
qui cause toutes ses souffrances. M. Macculloch, dans un petit
ccrit destine h eclairer le peuple sur la question des salaires,
affirme que le salaire du pauvre se proportionne necessaire-
raent au rapport entre la population et le capital ; tandis que
le salaire , consequence de la quantite de travail deman-
dee , doit aussi se proportionner a la consommation ,
qui se proportionne elle - meme au revenu. Dans le memi*
ecrit, il exhorte le pauvre a proportionner I'accroisscment de
sa famille a raccroissement du capital national , quantite dont
U lui est impossible de se former la notion , meme la plus
6ifi NOUVEA.UX PRINCIPES'
confuse ; tandis qu'il aurait pu remarqiier que tout liomme ,
en se niariant, ot formant une famille, est toujouis appele a
se rejjlcr sur son propre rcvenu ; d'ou il est facile de con-
clure qu'il suffit a la nation que tons les lioninics se reglent
sur le revenu dc tons, et qu'uue nation dans laquclle les plus
pauvies aurout quelque chose, ct pounont connaitie le revenu
qu'ils transmettront a Icurs enfans , ne courra aucun risque
de souffrir d'un accroisscmcnt dcsordonne de la population.
Je crois done devoir reproduirc avcc confiance mes Nou-
veaux Principes d'economie politique^ noa point tels qu ils
etaient , niais tels que I'obseivalion de la grande lutte entre
tous les interets des peuples industrienx ni'a mis a portce de
les completer. Leur til re un pen vague pourrail laisser suppo-
ser que je les destinais seulement a etre un nouvcau manual
des rudimens de la science. Je porte plus loin mes preten-
tions. Je crois avoir place I'economie politique sur une base
nouvelle , soil par la determination du revenu de tous, soit
par la rechercTie de la distribution de ce revenu qui repand
le plus de bonhcur sur la nation , et qui , par consequent, at-
teint le mieuxle but de la science.
D'autres principes, egalement nouveaux, mais d'une ap-
plication moins generale, decoulent encore de ceux - la.
J'ai raontre que la i ichesse territoiiale etait d'autant plus
productive, que le cultivateur avait une plus grande part
dans la propriete du sol ; que les lois destinees a conserver
aux anciennes families leurs patrimoines causaient la ruine
de ces families memes; que I'equilibre entre les benefices d'in-
dustries rivales, sur lequelles economistes modernes ont fonde
leurs calculs, n'etait jamais atteint que par la destruction
des capitaux fixes , et la mortalite des ouvriers engages dans
une manufacture perdante : que, quoique I'invention des ma-
chines qui accroissent les pouvoirs de I'homme soit un bien-
fait pour I'humanile, la distribution injuste que nous faisons
de leurs benefices les change en fleaux pour les pauvres ; que
le numeraire metallique d'une nation est, entre ses depenses
D'ECONOMIE POLITIQUE. 617
publiques , la plus utile, entre ses magnificences, la plus rai-
sonnable : que les fonds publics ue sonl autre chose qu'un
capital imaginaire, une assii;nalion sur le rcveiui qui naitra
du travail et de I'industrie : que les limites naturellcs de !a
population sent toujours respcctees par les honimes qui ont
quelque chose , et toujours dcpassees par les homines qui
n'ont rien. Qu'on ne ra'accuse done point d'avoir voulu fairc
faire des pas retrogrades a la science; c'est plus avaiit , au
contraire, et siir un nouveau terrain que je I'ai portee. C'est
la que je demande avec instance qu'on veuille bien me suivre,
au nom de ces calamites qui affligeut aujourd'hui incme un
si grand nombre de nos freres , et que la science ancienne ne
nous enseigne ni a comprendre ni a prevenir.
Les critiques auxquelles la j^remiere edition de mes Nou-
veaux Principes ont ete en butte n'ont pas ete perdues pour
nioi. J'ai refondu presque cntierement cet ouvrage. Le plus
souvent , j'ai cherche a eclaircir ce qui pouvait etre demeure
obscur, en fixant I'attcntion de mes lectcurs sur I'Angleterre. Je
voulais montrer, dans la crise qu'ellc eprouve, etia cause de
nos souffrances actuelles , d'apres la liaison qui existe entre
les diverses industries de tout lunivcis, et 1 histoire de notre
propre avenir , si nous continuous a agir d'apres les prin-
cipes qu'elle a suivis. Mais j'ai aussi quelquefois montre ma
deference aux critiques qui m'ont paru justes , par des sup-
pressions ou des changemens. Cependant, je crois devoir re-
clamcr contre la maniere si souvent legerc, si souvent fausse,
dont un ouvrage sur les sciences sociales est jugc dans le
monde. Le probleme qu'elles presenlent a resoudreest bienau-
trement complique que tons ceux qui naissent des sciences na-
turellcs , et en meme terns il s'adresse au coeur aussi bien qu'a
la raison. L'observaleur est appele a reconnaitre des souf-
frances cruclles , des souffrances injustes,qui procedent du
fait de rhomme, et dont I'homme est la victime. II ne saurait
lesconsiderer froidcment, et passei- outre sans invoquer quel-
que renicde. Ces rcmedes choqueiont quelquefois ou les sen-
(5 1 8 NOUVEAUX PRINCIPES D'^CONOMIE POLITIQ.
limens, on Ics prcjuges des lecfcurs; ils scront quelquefois
oil siipcrfliis, oil iiiapplicables. Ce £ont autant d'erreurs , sans
doute ; mais ce sont des errcurs en administration , plutot
qu'en economic politique. L'autcur on le lecteur penvent se
mepreiidre sur I'application, parce que toiitesles circonstances
qui sont Ics bases de cette application ne se trouvent point
dans le livie. L'enchainemcnt des principes ne saurait toutcfois
etre ebranii- par qiielqnes corollaires livrcs a la eontroverse ,
oil a la malii^nite nioqncuse. Si ses principes sont vrais , s'ils
sont noiiveaux, s'ils sont feconds,ils auront, en depit de quel-
ques errcurs, reelics ou supposees, fait avancer la science
sociale , la plus importante entre les sciences ; car c'est celle
du bonheur de rhomme.
J. C. L. DE SiSMONDI.
II. ANALYSES D'OUVRAGES.
SCIENCES PHYSIQUES.
DiAGRAMMES CHIMIQUES , Oil RcCUCil cle 36o figUVeS
(siir 112 plaiiclies) qui exphquent succinctement les
experiences par Vindication des agens et des produits,
h cote de Vappareil,, et qui rendent sensible la theorie
des phenomenes ^ en representant lejeu des attractions
par la convergence des lignes : ouvrage elementaire,
aiiquel on a ajoute, pour les etrangers, un Essai de
nomenclature chimique, en six langues, et pour les
conimencans, i" un Vocabulaire , contenant I'etjmo-
logie et la definition des mots techniques ^ 2° une serie
de tableaux synoptiques qui representent la prepara-
tion et Les parties proportionnelles des produits; par
M. Decreaips (i).
L'espace nous a manque jusqu'ici pour rendre un compte un
peu detaille de cet ouvrage, remar^uable par I'erudition et
le zelc de I'auteur. Nous pensions qu'une notice trop courte
ne le ferait point assez connaitre; que les fruits de plusieurs
annees de travaux assidus, exposes avec une methode qui
permeltait de les resserrer dans un espace plus limite que la
grosseur du volume ne semble I'annoncer, n'en etaient pas
moins nombreux , moins imporlans , ni moins dignes d'etre
passes en revue, tant dans leur ensemble que dans les prin-
cipaux groupes qu'ils composent. Les circonstances ont cons-
■ (1) Paris, iSaS; Carilian- Goeuri, quai des Grands -Augustin*.
Grand in-4° de lay psges et i la planches ; prix , 3o fr.
6ao SCIEINCES PHYSIQUES.
tainincMit «;xii^i; d'aiitres insertions; en soite tjue, pour iie pus
taider plus lonjj; tenis i nicttrc sous les yeux do nos Icclfurs
\ci Duigrciiunii-s chliniqucs de M. Dicremps, nous soinmes
reduils a ieur consacrcr on article beaucoup nioins etendu
que nous ne I'avions projete.
L'autcur debute par un abregc de nomenclature chimique
en six langues (francais, anglais, italicii, latin, allcniaud ,
espaj^Miol). Ces langues sont apparenunent celles des auteurs
d'ouvrages sur la chimie ; car on compte un plus grand nombre
d'idionies paries par ccux qui cultivent la science. II semblu
queM. Decromps n'a pasY-te juste envers lesSuedois, ct qu'il
se niontre fort liberal envers les Espagnols. Quant a la langue
russe, il parait <jue lo peuplc qui la parle n'a pas encore le
projet de remployer a cultiver les sciences. Dans tons les licux
ou sa domination s'est etablic, il ne s'est ))as cnntente d'ap-
prendre la langue du pays, suivant la niaxime de Philotas ;
et victoribus ct victis externa lingua disccnda est; cliez hii-
nieme, son idiome tombe en desuetude parmi les houinies
inslr uits et s'altere de pins en plus, faute d'une culture dirigee
jjar le gout et le savoir.
Le vocabulaire qui contient I'etymologie et la definition des
mots techniques employes en chimie est, en general, assez exact.
Nous n'anrons garde de reproclur a I'auteur quelques incor-
rections sans importance, et qui ne peuvent tromper les lec-
teurs. Lorsqu'il dit, par exemple, que le cuivre, en s'unissant
avec I'acide acelique, forme le vert de gris, on sait bien que
o'est de I'oxide de cuivre qu'il a voulu parler. Quelques-uues
de ses etymologies pourraient etre contestees: apres avoir
expose sept opinions diffcrentes sur I'origine du mot chimie ,
il ajoute : « Ceux qui n'admettent aucune de ces etymologies
peuvent considerer le mot chimie comme primilif, et par hii-
meme insignifiant. » Cette opinion, ne sera pas plus adoptee
que les etymologies du mot : I'idee d'une science ou d'un art
est tres-complexe ; on ne sent le besoin de lui donner un nom ,
que lorsqne la langue est formee, qu'elie a ses racines, sa
grammairc, ses lois pour la composition des mots nouveaux.
SCIENCES PHYSIQUES. fiir
A cetle epoqup, iine langiie ne sanrait admettre des mots pri-
mitifs; etsi, dans ces terns modetnes, on a senti la nccessite
d'en introduirc dans le vocabulaire des sciences, c'est parte
que DOS idiomes dejii suicomposis n'offrent aiicune ressource
pour la composition des ternies propres a exprimer certains
systemes d'idees. A\i reste, une bonne definition est encore
plus instructive que la discussion la plus lumineuse sur I'ori-
gine d'un mot. Pour definirlacliimie,M. Decremps a recoiirs a
trois anteurs, Fourcroy, Thomson et Blak. On oprouve ici les
inconveniens de I'erudition poussee trop loin; car le resume
des trois definitions de la meme science, par trois professeurs
du premier merite, n'est point satisfaisant. «Lachiniie, dit
M. Decremps, est une science qui nous fait connaitre Taction
moleculaire et reciproque de tous les corps, qui en expliqueles
divers changemens , et qui observe les effets de la chaleur et
des melanges pour en decouvrir les lois et pour perfeclionner
les arts utiles. » Une definition bien faite est plus precise, et
assigne en moins de termes le caractere distinctif de la science
dont il s'agit. — Le mot diagramme devait etre expliquc ici.
« Cost un assemblage de ligues qui, a I'aide de qnelques mots,
designent des verites qu'on ne ponrrait exprimer que par un
long discours. n Pour rendre cette definition plus claire et plus
complete, I'aufeur figure I'exemple suivant:
Su
Ifate
de
potasse.
Potasse.
' Acide
>
Sulfate 1
de _ {
sulfririque.
1
1 Carbonate
J de
magnesie.
V M<igncsie.
Acide
carboniquc.
1 potasse.
I
Carbonate de magnesie.
« Ce diagramme indique : i° la composition de 4 sels dont les
noms sont ecrits en dehors de la figure, et vers le milieu des
accolades, taudis que les parties composantes occupent, en
6aa SCIENCES PHYSIQUES.
dedans, les qiiatre coins : il signilie, d'ailleurs, que, si on jetle
dans la nieme can les deux sels ocrits a droite et a gauche, il
en rc'sultcra diux autrcs sels, savoir; du sulfate de potasse
qui restant dissous occupe la |)arlie supericure, et du carbo-
nate de magnosic qui se depose an fond du vase, ainsi que le
idesigne son nom ecrit au bas de la lignie. » L'auteur cite en-
core plusienrs autres exempJes tires de I'ouvrage de M. Mac-
KENSiE, intitule : Mille experiences chimiques , etc. Si Ton pen-
sait que des notions de cette nature ne peiivent etre exprimecs
qu'en prose , on serait desabuse a I'article metal de ce vocabu-
laire, ou les pesanteurs specifiiques des mefaux sont le sujet
d'un distique latin paraphrase en vers francais. 11 n'y est point
question des grandes decouvertes qui ont plus que double le
nombre des substances metalliques; a I'exceplion du platine, les
nouveau-venus n'obtiennent pas encore Thonneur d'etre cele-
bres en vers; qu'ils attcndcnt. Les Muses inspirent bien rare-
menl les poetes sur de tcls sujets, et les auteurs des deux
chefs-d'oeuvre cites par M. Decremps auroiit peu d'iniita-
teurs.
Il serait tres-difficile, et necessairement tres-long, de don-
ner a uos lecteurs une idee complete des cent douze planches
ou l'auteur a represente les appareils des experiences, le
nombre et la position respective des matieres employees, I'or-
dre des combinaisons et la formation du nouveau compose,
Ou le resultat de la decomposition. La nouvelle scrie de dia-
gram mes , qui vient ensiiite et qui termine I'ouvrage, oppose
encore les mcmes obstacles a I'analyse que nous aurions voulu
en faire, sans le secours des figures, ou meme en usantavec
reserve de ce moyen de nous rendre intelligibles. Le but de
l'auteur a ete de former des tahleaua: synoptiques de la prepa-
ration et de la composition des produits chimiques les plus in-
teressans. Ces tableaux sont divises en sept chapilres, et pre-
sentcnt les faits chimiques rclatifs : i° a I'attraction molecu-
laire; a° au calorique ; 3° aux composes gazeux et aux corps
simples concrets, non metalliques; /|° aux bases salifiables ;
5° aux acides, 6" aux mctaux; 7" aux corps organiques. En
SCIENCES PHYSIQUES. 6^3
general , I'auteur s'y inontre an niveau des connaissances ac-
quises, quoique Ton apercoive de terns a autre qiielques ves-
tiges des theories abandonnces. Le premier chapitre commence
par ime assertion que Ton pent contcster; <- il est, dit M. De-
crcm[)s, des corps qui n'ont entr'eux aucime affinilc sensible;
par exemple, I'huile et I'eaii. >- Cet exemple n'est pas heureuse-
ment choisi ; car, apres avoir agile long-tems, iin melange
d'huiie et d'eau , si on donne a ces malieres le terns de se se-
parer par le repos, ni I'une ni I'autre ueseront dans le meme
etat qu'avant le melange, et par consequent, elles ont agi I'une
sur I'autre. — Le volume est termine par un essai d'application
de I'algebre a la chimie, et par des observations, en espagnol
et en francais, sur les nombreux services que cette science a
rendus , et sur ceux que Ton pent en esperer encore. Ce que
I'auteur a presentu sous la forme algebrique, n'est qu'un calcul
arithmetique; mais on ne pent douter que la recherche des
lois de I'altraction moleculairo, combinee avecles aulres pro-
prietes des corps, n'cNige I'application de Tanalyse mathema-
tiquc. Peut-etre meme, cet instrument universcl n'est-il pas
assez perfcctionne pour nous conduire a la soluiion des pro-
blemes les plus importans, en physique et en chimie.
Nous sommes a la fm du livre, et cependant notrc article
n'est point termine; car nous n'avons rien dit de I'averlis-
sement, ni de I'epigraphe. Les lecteurs qui liraient de suite
I'ouvrage, sans s'arreler a raverlissement, comprendraient
mal leurs interets; car ils n'auraient pas sur I'auteur et sur sa
mcthode des notions qui peuvent repandrc quelque jour sur
certaines explications ou doctrines un p«u obscures au pre-
mier coup-d'oeii , mais qui devienncnt plus claires, lorsque
leur origine est conniie. L'autear nous apprend qu'avant de
publier son livre , il avait entendu Fourcroj et Thenard a
Paris, et les Majors a Genes, BnignatelU a Pavie, Dnndolosx
Venise, la Chimie des dames ;i Milan, Chaptal dans les Ce-
vennes, Orfila dans les Pyrenees, Plench a Vienne, Klap-
/5ro/A a Berlin , ^'wrzpr a Marbourg, Boerhaave en Hollande,
Thomson , Parkes a Londres : k Voiia , dit-il , les sources purci
6'ih SCIENCES PHYSIQUES.
oCl nous avous puise IfS verites que nous publions sous une
nouvollc forme. » Mais la chimie nous appiend que le melange
do liqueurs tres-limpides, et Ires-peu differentes Tune dc I'autre
peut etre trouble, jusqu'a ce qu'unc combinaison intime dc
tous les elemens ait etabli I'hoaiogeneite de la masse. Si la
science elait parvenue au dernier degre de sa perfection, elle
serait unc, la meme dans loutcs les tetes etdans tons les livres:
en de^ii de ce dernier tcrme, il existe necessairement quel-
ques legeres dissemblances entre les theories admises par des
savans egalement recommandables par leurs travaux el ieurs
ecrits. Ces nuances d'opinions ne doivent point paraitre dans
un livre, si ce n'est pour les discuter et pour choisir ; et en-
core vaut-il niieux, si le livre est elementaire, que le clioix
soit fait d'avance , sans que le lecteur assiste aux debats. —
Des considerations tres-justes sur les niethodes d'exposilion
qui conviennent le niieux aux ouvrages sur la chimie , et des
vers anglais et francais, terminent cet avertissement tres-digne
d'etre lu.
Enfiu , nous voici a I'epigraphc. L'auteur emprunte a Ho-
race deux vers cites frequemment, et que M. Daru traduit
ainsi :
Du recit le plus clair on est moins affect^
Que d'un tableau fidcle , a nos yeux presente.
Horace est plus exigeant que son traducteur : ce sont les per-
sonnages et Taction dramatique qu'il conseille de substituer
aux recits, toiijours un peu froids sur la scene. La maxime du
legislateur du Parnasse , comprise dans le sens deM. Darn , ne
parait pas faite pour les livres ; car auctm de ceux ou Ton a
tente de Tappliqucr n'ajustifie son cpigraplie, ni sa preface.
Si les diagrammes de M. Decremps ont quelque utilite , ce n'est
■jpoivil comme tableaux , mais comme ecriturc plus rapide, et
se pretant micuxaux mouvemens en sens divers de la pensee,
aux rapprochemens plus ou moins eloignes entre des Jdees
excitees simuUanemcnt. On ne peut douter que cette ecriture
perfectionnt'c ne devienne un bon instrument des sciences;
SCIENCES PHYSIQUES. 6^5
Tntilite des tableaux synoptiques est reconnuc , et les dia-
grammes sont une forme particuliere de ces tableaux , pour
des groupes d'objets moins iiombreux, et consideres sous un
point de vue plus special. L'epigraphe du livre ferait perdre de
vue la nature et la veritable destination de ce mode d'expres-
sion ; on croirait leperfectionner par un dessin plus correct , o»i
par uu choix de figures plus analogues a la chose designee ;
le peintre se substituerait au chimiste, tandis que la science
ne peut etre perfectionnee que par des recherches absolument
etrangeres aux formes.
Quelque opinion que Ton ait de la melhode de M. Decremps,
et quel que soit I'usage qu'on en fera, son livre <doit exciter la
curiosite, et merite une place dans les bibliotheques. L'erudi-
tion de I'auteur nous rappelle celle du chevalier de Jaucodrt,
ooutinuateur de la premiere encyclopedic, dont il a fait a lui
seul plusieurs volumes, disciple de Boerhaave dont il avait
ecoute et transcrit les lemons dans de volumineux cahiers dont
il ne se separa jamais, meme apres qu'ils furent devenus illi-
sibles, a la suite d'un naufrage oil le savant et ses nianuscrits
icoururent les plus grands dangers. F.
T, XXXI. — Septernbre 1826. Ao
SCIENCES MORALES ET POLITIQUES.
Papers relative to codification and pubmc instruc-
tion , including correspondence with the Rusxian
Emperor, and divers constituted authorities in the
American United States; published by Jeremy Ben-
THAM (i).
Pieces relatives a la codification (2) et a l'instruc-
TiON publique, comprenant une correspondance avec
VEmpereur de Russie, et diverses autorites constituees
des Etats-Unis d'Amerique; par Jeremie Bentham.
(Voy. ci-dessus, p. 298 •Zo-j : Notice sur les ouvrages de Bentham).
De tons les hommes qui de nos jours se sont voues a I'otude
exclusive du droit, de tous cenx qui se sont occupes de re-
formes legislatives, Bentham, par rimmensite de ses travaux,
par le degre de maturite auque! ses conceptions sont parve-
nues, est sans contreditle plusremarquable. Des I'annee i8o2>
ses Traites de legislation , et q'uelqucs annees plus tard , sa
Theorie despeines et des recompenses, vinrent reveler au monde
savant des routes jusqu'alors inconnues dans la science du
droit. Ce n'etait plus de ces laborieuses compilations, si cou-
teuses i leurs auteurs et si pen profitables a I'humanite; ce
n'etait plus de ces conceptions si brillantes, si concluantes en
apparence dans les hauteurs de la speculation, et souvent si
vaines dans les humbles voics de la pratique ; c'etai^ unc
(i) Londres , 1817, i vol. in-8". — Ce qui, dans ce recueil, con-
cerne I'instruction publique, n'y tient qu'une tres-petite place, ct
est entitlement etranger a la codification , qui fait seule I'objet de cet
article.
(2) Reunion en un corps nietliodique de fonte la niaticre legale.
I
SCIENCES MORALES ET POLITIQUES. 627
science toute noiivcUe, toiite complete, ayant sa nomencla-
ture et ses classifications propres, line analyse rigoureuse et
profonde , qui , faisant marcher de front la theorie et I'applica-
tion , donnait en qiielque sorte des lois en meme terns qu'elle
en montrait Ics principes. Le premier deces deux ouvrages eut
la fortune inoiiie de devenir autorite, presque aussitot qu'il
parut, et de valoir a sonauteur le privilege de voir son nom
place dans les productions officielles des legislateurs du terns.
Ce fut, comme on le sait, aux travaux d'un autre savant
publiciste, M. Dumont , de Geneve , que la science fut rede-
vable de ces deux importans ouvrages. Bentham, tout entier
au soin d'elever un corps coniplet de droit, semblait voidoir
ne se produire lui-meme, que lorsqu'ilaurait accompli la tache
qu'il s'etait imposee. Cinquante ans de travail et de meditation,
un esprit vaste et perseverant paraissent avoir enfin triomphe
d'uue si grande entreprise; Bentham a embrasse le champ tout
entier de la legislation ; et aujourd'hui qu'il s'en croit maitre ,
il offre au monde civilise le resultat de ses travaux: il lui pro-
pose de substituer des lois fondees sur leprincipe de I'utilite
generale , c'est-a-dire , du plus grand bonheur pour le plus
grand nombre des membres de la societe, et justifiees dans
toutes leurs dispositions par des raisons tirees deceprincipe,
a des lois dictees le plus souvent par des interets anti-sociaux,
ou par des volontes aveugles. II propose surtout de substi-
tuer le droit ecrit au droit non ecrit, une legislation fixe et
expresse, qui soit a la portee de tout le monde, a des tradi-
tions, a des coutumesincertaines et variables, livrees al'inter-
pretation arbitraire d'un corps special d'inities. Bentham re-
commande enfin avec chaleur la codification aux peuples et
aux gouvernemens.
Le systeme de la codification , qui fait I'objet special del'ou-
vrage ou plutot du recueil que nous annon^ons, presente une
question du plus hautinteret; raais, pour bien en coniprendre.
I'importance, pour en apercevoir toute la portee, il convieiit
d'abord de se remettre sous les yeux les divers partis qui divi-
sent la science a laquelle cette question se rattache, et pour
6a8 SCIENCES MORALES
cela, tie perdre do vue un moment Bcntliam «t la codification
elle-meme.
L'ensemble de toiitcs Ics theories siir ic droit, de tons Ics
systemcs de legislation, a etc diviso, dans les dcrniers terns, en
deux ecoles principales : I'une historique , I'antrc non hisio-
rique , ou pkilosophique. J c suivrai d'abord cette division.
UJ^cole historique s'est elevee en Allemagne, depuisla re-
volution fran9aise. Elle y est nee de deux circonstances princi-
pales: d'abord, de la reaction qui se developpa generalcment,
dans le cours de cette cpoque, contre les doctrines pliiloso-
phiquesdu xvin* siecle, alors discredilees ])ar les exces qu'on
leur attribiiait, et aussi du penchant particulier des Allemands
pour les etudes historiques et philologiqucs.
Cette ecole, deja recommandable par ses travaux, dejaim-
portante par I'influence qu'elle a exercee sur beaucoup d'es-
prits distingues, n'est encore que tres-peu connue en Europe,
et ne Test presque point en France; d'abord, elle a pris pen
de soin de rcpandre sa doctrine; puis, ce qu'elle en a public
n'a pas encore ete transporte dans notre langue (i).
(i)Nous devons rappeler ici a noslecteiirs que I'lincdes produclions
les plus importantes de I'ecole historique allemande, VUistoire du
droit roinain pendant le mojen age, par M. de Savigmy, conseiller
d'etat et professeur a, Berlin, a ete traduite en francais, et doit ^tre
incessamraent publiee. Si Ton en juge par des fragmens et des ex-
traits que plusieurs journaux, specialement la Themis out donnes de
cet ouvrage, il doit joindre, a I'avantage de nous bieii faire connaitre
I'ecole historique d'Allemagne, celui dejeter une grande luniiere sur
I'histoire, I'organisation politique et judiciaire et sur le syst^nie
d'enseignement suivi pendant le inoyen age en Europe, et surtout
en France.
La Themis que nous venons de citer, et que nous recomiuandons
avec conGance a tous ceux qui s'interessent aux progres de la juris-
prudence historique , contient plusieurs articles iiistructifs et curieux
sur les codes qui out ete recemment publics , ou que Ton prepare
dans les divers etats de I'Europe et de I'Amerjque. M. Bx.osdeau ,
professeur a I'tcole de droit, a Paris, auteur de la plupartde ces ar-
ET POLITIQUES. 629
Le droit, selon I'ecole historique, n'cst point une science
tibsoliie, luiiverselle , reposant siir des bases immtiables : il est
divers, comme les sociclt^s, et variable comme elles.
II ne pent jamais etre I'effet d'une volonte arbitraire. II nait
avec la socictc et se developpe avec elle, insensiblement ,
comme tons ses autres produits, et simiiltanement avec eiix. II
n'a point, a propremcnt parier, d'existence independante , et
n'est, dans la realite, qu'une des nianieres d'etre de tous les
faits dout la societe se compose.
Le droit, dont le developpement se confond ainsi avec celui
de la sociele , est le seul efficace , le seul capable de produire
de bons effets. Toiite legislation apriori , toute regie arbitraire
est necessairement impuissante ou fvmeste.
La marche des societesest progressive et non interrompiie ;
mais cette marche est soumise a des lois de gradation rigou-
reiises: 011 ne pent ni la suspendre,ni la precipiter.
De toutes parts, pourtant, le veritable droit social est obs-
carci par les iiombreux essais qui ont ete faits dans I'un ou
lautre sens; c'est par-la que se sont manifestees toutes les er-
reurs sur la nature des societes, et sur I'essence du droit. Or ,
s) ces essais ont etc vains , quant \ leur objet principal , ils
n'ont cependant pas ete sans effet sur le sort des societes : ils
n'ont sans doute ni arrete , ni accelere leur marche ; mais, par
les luttes et par les resistances qu'ils ont developpees dans leur
sein , ils I'ont embarrassee et ralentie. Dans cet etat de choses,
I'intervention de la science est devenue necessaire; il s'agit de
deliyrer les societes de toutes ces entraves, et de les rendre a
leur propre impulsion.
Mais, pour demeler dans le chaos des lois et de la jurispru-
dence , ce qui apparticnt au developpement social, de ce qui
tides, s'est fait connaitre depuis long-tems pax des tableaux sjnop'
tiqites clii droit prive dans lesgnels il a su metlre d profit les ideas de
Benlham, exposees deja dans ses ttaitis de legislaiion civile etpenale ,
mis en ordre et publics en franqais par M. Dumomt, d« Cenive. ( Voy,
ci-dessus, p. 3oy). N. d. R.
6:^0 SCIENCES MORALES
lui est etranger,il faut comiaitre, d'abord , I'etat actuel, la
nature intone des societes. Or, cette science du present ne peut
s'acquerir qu'a une condition expresse, la science du passe.
Une societe n'est point iin produit spontanc : quelle que
soit cclle que Ton imagine , et a quelque instant qu'on la
prenne , on n'y peut voir toujours que le prolongenient, que le
resultat d'un ordre de choses antericur. Pour connaitre I'etat
actuel d'une nation , il faut done d'abord remonter a sa source,
s'einparer, s'il est possible, dc scs fails primitifs, les suivre
pas ^ pas dans leurs developpemens, dans Ics modifications
qu'ils ont subies en se combinant avec des faits nouveaux ;
parcourir par le menie procede I'histoire de tous les peuples
dont I'existence s'est trouvee melee ou associee a celle de celte
nation, ct redescendre ainsi lentement jusqu'au fems present.
Tel est Timmense travail qu'il faut avoir aclieve a I'egard de
chacune des societes existantes, pour connaitre leur nature
intime, etpouretreen etat de distinguer, dans I'ensenible du
droit qui les regit , ce qui leur est propre de ce qui leur a ete
impose.
Le resultat de cette grande conquete sur le passe se reduif,
pour I'ecole historique, telle quelle est nee et qu'elle se main-
tient en AUemagne, a un service puremenl negatif: delivrecla
societe de ses entraves et la rendre a elle-meme. Pour quel-
ques-uns des disciples de cette ecole , ce resultat semble plus
etendu : pour eux, le developpement du droit parait se con-
fondre un pen moins avec celui de la societe ; mais j'indique
ici I'existence d'une modification, pi ntot que je n'en fais con-
naitre la nature. La seule chose importante d'ailleurs a consta-
ter pour le sujet qui nous occupe, est que , dans I'opinion des
fondateurs, comme dans celle des disciples, le droit, quel que
soit d'ailleurs le mode de sa formation , ne doit jamais prendre
I'initiative sur la societe, mais la reflechir.
Sous le nom d'ecole non historique ou philosopkique , on a
range indistinctement tons les systemes de droit, etrangers a
celui de I'ecole historique. Ainsi, Hohhex , Loche,Rousseau,Kant,
Bentham, etc., nialgre la diversitede leurs systemes, appartien-
ET POLITIQUES. 63 1
draient egalement a I't-cole philosophique. Mais, on voit d'abord
qu'une pareille ecole ne saurait avoir d'existence reelle, le mot
d'ecole emportant avcc lui I'idee d'unite de doctrine et de
methode, etles systemeswow hisloriques n'ay^inl soiwent d'au-
tre trait de ressemblauce entre eux que d'etre egalement des
produits de I'esprit humain. Ceux qui les ont associes ainsi ,
ont cru a la verite decouvrir entre ces systemes un caractere
communpar lequel ils differaient essentiellement de I'ccole his-
toriqne, savoir, de reposer tous sur des idees speculatives
tandis que cette ecole seule procedait par I'observation; mais
il est, je crois, facale de demontrer que cette difference, qui
parait avoir ete consideree comme vieille et radicale par ceux
qui I'ont etablie , n'est en effetqu'apparente.
S'il est vrai que toutes nos idees premieres , elemeutaires
soient en nous le produit de notre contact avec les choses
exterieures , on peut dire en ce sens que toutes les conceptions
humaines reposent sur une meme base, I'observation; mais on
n'indique ici que leur source eloignee, et c'est de leur source
prochaine qu'il s'agit... A ce titre , I'observation proprcment
dite, I'observation pure, disparait pour toutes sans exception.
Aucun-systeme ne sort immediateraent de I'inspection d'un
ou de plusieurs faits , mais bien du jugement que Ton porte
sur ces faits et des rapports que Ton etablit entre leurs pro-
prietes, leur tendance et les proprietes et la tendance d'un
autre ordre de fails quelconque. Or, juger, etablir des rap-
ports, est une operation tout arbitraire; et cette operation,
c'est la speculation. Ainsi definie, la speculation se presents
comme la source la plus prochaine de tous les systemes hu-
mains; source fort incertaine , j'en conviens, mais a laquelle
I'ecole liistorique se flatterait en vain d'avoir echappe. II fau-
drait, pour ccla, que les jugemens qu'elle a portes sur les fails
de I'histoire, fussent necessaires et obligatoires pour tous les
esprits; mais I'experience nous prouve le contraire; et, tandis
que les disciples de cette ecole voieut dansl'homme historique
un etre absolument variable, dissemblable a kii-meme, selon
I'epoque qui le p roduit ou la terre qui le porte, I'immutabiiit
632 SCIENCES MORA.LES
du mcme homme, son identitL' a traversles terns, les climatsel
les couturacs, sont encore des lioux conimuns pour un grand
nombre de raoralistcs. Je n'ai pas la pretention de prononcer
sur Ic nierite de ces differentcs manieres de voir : Ic seul objet
que je me propose ici, est de montrer que tous les systemes
imaginables reposent et doivent necessairement reposer sur
des vues arbitpaires, sur la speculation, et que toute classifica-
tion enlre eux, fondee sur la difference des actes de I'esprit
dans Icur production, est eviderament chinierique.
La plupart des sciences sont susceptibles de sc diviser par sys-
temes; toutes celles qui se trouvent dans ce cas doivent I'etre,
re fut-ce que comme un moyen de classer les idees nouvelles
qui naissent successivement dans leur sein, et d'apprecier leur
relation avec celles qui les ont precedees. Mais, pour qu'unc
pareille division presente ce genre d'utilite, il faut d'abord
qu'elle repose sur une base reelle, et ensuite qu'elle soit com-
plete. Or , celle que nous examinons ne remplit ni Tune ni
Tautre de ces conditions, et devient par cette raison a peu pres
sans objet. Ainsi, par exemple , en suivant les donnees qu'elle
presente, on pent bien voir d'abord , que la codification doit
etre repoussee par I'ecole historique; mais, dans quel rapport
ce systeme se trouve-t-il h I'egard de ce qu'on a appele I'ecole
non historique ? C'est ce dont on ne pent se former aucune idee,
parce qu'il n'y a li qu'un mot, non un etre reel, defini ou sus-
ceptible de I'etre. Il faut done abandonner h la fois cette divi-
sion et son principe.
Un systeme de droit, quel qu'il soit, ne pent etre qu'une
consequence, une application d'un systeme plus etendu, plus
general : c'est dans cet ordre d'idees immcdiatement superieur,
et qui, malgre la diversite qu'il presente, est tout entier le
produit d'un meme precede de I'esprit, qu'il faut chercher la
base d'une classification du droit. En suivant cette raethodc ,
pnpourrait arriver, je crois, h le diviser comme il suit :
En droit absolu , ou invariable ;
En drou rclatif , ou variable.
ET POLITIQUES. 633
All droit absolii je lattache incUstinctement Ions les syslemes
qui preiinent leur point d'appui sur des fails consideres comme
priniordiaiix et invariables : tcls sont ceux qui se fondent on
sur des croyances rcligicuses , et c'est la proprenient le droit
divin; ou sur des relations purementinttllectuelles auxquelles
on suppose une existence indepcndante ct absolue, comme la
raison,\aL justice, etc., et ce sera le droit mdtaphysique ; ou
enfin, sur les proprietes abstraites et invariables de la nature
humainc, et c'est alorsle droit naturel.
Au droit relatif ou variable appartiendront tons les systemes
qui ne reconnaissent ni dans rhomnie, ni hors de I'homme,
aucune de ccs donnees primitives, f^ssenticUes, immuables,
capables a la fois de servir de base a la legislation et de lui
communiquer ces divers caracteres, soit que, dans ces sys-
temes, I'homme se presente comme un resultat toujours certain
de la volonte actuelle du legislateur, ou qu'il soit considere
comme le produit necessaire de Taction successive et fatale de
tons les faits qui I'ont precede; d'ou naitront deux ecolcs bien
differentes : celle du droit arhitraire ou Legal, et celle du
droit historique.
II s'en faut de beaucoup que ces differens systemes soient
aussi distincts, aussi exclusifs dans I'application que dans la
theorie : Taction simultanee de diverses necessites sociales,
une sorte de transaction entre la raison, le sentiment et Tha-
bitude, les confond toujours a un degre ou a un autre dans les
institutions des peuples. Un systeme de droit absolumcnt pur,
qjbsolument isole, n'a pcut-ctre jamais ou d'existence que dans
les speculations de la science; ce que Ton peut dire des conse-
quences d'un pareil systeme ne saurait done aussi se verifier
completement que dans cette region.
Le seul usage que je pretende faire de la classification que
je hasarde ici, est de montrer le rapport du siijet qui nous oc-
cupe avec les differens ordrcs d'idecs qui pcuvent servir de
base a la theorie du droit. Or, il me semblc que, dans tons
les systemes dc droit absolu, la codification , c'est-a-dirc , la
reunion en un corps methodique et permanent dc toutes les re
r)3/, SCIENCES MOPxALES
gles d'<iclio/i , se prosento daus dcs liniitcs plus ou moins res-
serrees, comme iine forme necessaire, tandis que, dans les
autres systemcs, an contraire, clle ne sc presente plus que
comme vine inconsequence , une veritable contradiction.
Tout doit flecliir devant im principe absolu : cclui qui fait
rcposer le droit sur unc telle base, n'a plus ;\ s'occupcr ni de
eiiconstauces particulieres, ni d'accidens possibles; la legisla-
tion dolt prendre a ses yeux le caractere d'inflexibilite, d'uni-
versalite dn principe qui la domine. Elle doit etre fixe et
expresse: la matierequ'elle embrasse etant necessaire, la filia-
tion do ses parties, leur arrangement, leur distribution, doivcnt
I'ctre aussi. Un esprit rigoureux, en partant d'un tcl principe,
ne pent concevoir la legislation que comme un tout indivi-
sible, comme I'osuvrs d'un scul jet et sous la forme d'un code.
Dans les divers systemes du droit relatifou vaiiable, i! en
doit etre tout autrereent : s'agit-il de I'ecole historique ? L'homme
et ce qui I'entoure changeant ou se modifiantsans cesse, il faut
bien que le droit puisse a tout moment subir des variations
analogues ; la loi , dans ce systeme , doit etre en quelque sorte,
comme son objet, le produit de cliaque jour; il n'y a point la
de code possible. S'agit-il du droit arbili'aire? L'bomme ici
n'etant plus soiunis a I'empire d'aiicune loi generalc, et pou-
vant a tout moment recevoir une direction nouvelle au gre du
legislateur, et selon ses vues particulieres, la fixite dans les
lois ne saurait avoir ni motifs, ni garanties; et sans fixite, il n'y
a point de code.
Les questions que presente la codification ne sont done,
sous un certain point de vue, que celles-la raeme qui se troiP-
vent renfermees dans les divers principes fondamentaux de la
science du droit. La solution des unes doit done entrainer ne-
cessairement la solution des autres. Voila ce que j'ai cru im-
portant d'etablir. J'arrive maintcnant aBentham.
Dans I'ensemblc des ouvrages de ce savant jurisconsulte ,
dans ses divers essais de legislation pratique , on ne trouve
pas qu'il ait eu en vue aucun peup!e en particulier. Son sys-
teme apparlient done au droit absolu ; et, comme il repose
ET POLITIQUES. 6'i5
tout entier siir une vue abstraite do la sensibilite humai-
ne, c'est particulieremcnt a I'ecole dii droit naturel qu'il se
rattache. II est vrai que , tout en avan^ant que la sensibilite
est invariable dans son essence, il admet aussi qlie les causes
susceptibles de raffecter peuvent varier et varient en effet,
selon les tems et selon les licux , et qu'en consequence il re-
commande an legislateur d'etudier les circonstances particu-
lieres a chaque peuple,^et d'y conformer scslois, en quoi il
paraitrait se rapprocher de I'eeole historique ; niais il est
clair que ce rapprochement n'est qu'apparent. Dans la diver-
site des traits qui distinguent les peuples cntre eux , cette
derniere ecole voit autant de differences abcoliies ; Bentham
n'y voit. que des formes diverses des memes proprieles essen-
tielles. Aussi admet-il que les meilleures lois possibles pour
im peuple peuvent toujours, a I'aide de certaines modifica-
tions dont il indique les regies, s'adaptcr utilement aux bcsoins
de queique autre peuple que ce soil. La codification est, comnie
on voit, la consequence naturelle d'un pareil systeme.
Ce n'est pas seulement de cette espece de codification qui
lient a la nature menie du principe de la loi , que Bentham se
declare le partisan; mais bien encore de la forme de la c^pdi-
fication prise en clle-meme, et independamment de la matiere
quelle embrasse. Pour le comprendre dans cette vue abstraite
dusujet, il ccnvient d'abord de connaitrc son opinion sur le
droit non codifie.
Dans ce cas, se trouve tout systeme de legislation for-
me par agregation , soit qu'il se compose de lois expresses ,
soil qu'il resulte de traditions et de precedens, comme ce
qu'on appelle la loi commune , le droit coutumier ou non
ecrit.
Les parties dont se compose une legislation ainsi formee,
ayant pxis naissance a des epoques plus ou moins eloignees
entre elles, repondant a des circonstances , a des besoins plus
ou moins differens ou meme opposes, no se fondant sur aucune
vue generalc, sans prevoyance possible de I'avenir, sans motif
dcs'en occuper; en supposantqu'elles aient ele les plus conve-
636 SCIENCES MORALES
iiablcs pour les difforens terns oi\ ellcs paruieiU , devraicnt
c^lie, par cette raisoii ineine, selon Rcntham, Ics moins appro-
prices aux exigences du present. Voil;\ done tout systeme de
droit de cette nature, condanine a priori^ quant an fond.
Pour qu'uneloi soil executee, pour que ses bienfaits puLs-
sent etre reclames, ses perils cvites, il faut qu'elle soil con-
nue. La notoriete est done la premiere condition de la puis-
sance de la loi ; c'est le premier interet qui resulte de
son existence pour ceux qu'elle concerne. Or, c'est de sa
forme que depend absolument sa notoriete. Tons les moyens
exterieurs de publicite, toules les formes imaginables de pro-
mulgation seront k peu pres sans effet, si, par sa propre
contexture, par sa distribution, la loi ne se prete ellc-meme
k penetrer dans les enlendemens. Sous ce rapport done ,
toute legislation de I'espece de cellc dont il s'agit est encore,
et necessairement , vicieuse dans la forme.
Ici, le mal consistc d'abord dans I'immensitc du volume,
inconvenient necessaire d'une legislation formee sous rempir'i!
des accidens, et ne statuant par consequent que sur d'etroites
specialites , ou meme comme la loi commune, sur des cas
lout-a-fait particuliers. Ilconsiste encore dans ledefaut d'har-
nionic entre les parties, defaut qui, en otanta I'esprit la faculte
de les remiir sous des gencralites , les rend impropres k se
graver dans la niemoire.
Ces deux obstacles essentiels ii la notoriete se trouvent au
plus haul degre possible dans la loi commune ou non ecrite ,
qui , par son mode particulier de developpement , presente
encore les inconveniens les plus graves; comme, par exemple,
de confondre les fonctions judiciaires et legislatives, et de la
pire de toutes les manieres,puisqu'ici le juge n'agissant comme
comme legislateur qu'a I'oceasion d'uu cas particulier, et en
prononcanl sur ce cas, ne rend ])Our cetlc raison que des
\ois ex post -facto. La legislation devient alors un mensonge
et une sanglante ironic, au lieu d'offrir des garanties reelles.
Car leslois ne sont plus que le produit des caprices arbitraircs
des administrateurs ou des juges.
ET POLITIQUES. G37
ll serait inutile dc rcprotluire en detail lous los reproclies
que fait Bentham au droit iion ecrit. II sufiit de dire qu'il li-
regarde corome I'un des plus grands fleaux dont les peuples
puissent ctre frappes; toutc securite , selon hii, est bannie des
lieux oil il regne.
Revenons : toute legislation formee par agregation , ct snr-
tout la loi commune, ctant essentiellenient vicieuse dans Ic
fond , s'opposant par la nature necessaire de sa forme a toute
notoriele, seul adoucissenient que puissent recevoir les vices
do ses dispositions , ii s'ensuit que' la codification prise en
elle-mome , independamnieut de la valeur intrinseque des
lois quelle pent comprendre, et considerec seulenient comme
moyen de notoricte, est encore un bienfait partout ou elie se
substitue a un tel systeme de droit. C'est dans ce sens que
Bentham, en parlant de la codification francaise , ne craint
point d'afiirmer que cctte operation , eut-elle etc aussi mal
executte que le comportait I'etat de la societe, serait encore
infiniment preferable au chaos qu'elle a remplace.
Dans cette vue abstraite de la codification, Bentham ne fait
acception d'aucun mode particulier. On doit done entendre
ici par codificadcn tout ce qui pent donner a la maliere legale
d'un pays les proprietes exterieiires d'un corps, un commen-
cement, une fin , des contours determines, la fixer enfin par
des expressions precises et invariables, fussent-elles meme mal
choisies. Il n'y a rien, sans doute, de bien rigoureusement ap-
preciable dans une forme presentee d'une manieresi generale ;
aussi , I'importance que Bentham y attache est-elle toute rela-
tive : ce dont on pent juger surtout par les conditions aux-
quelles il la soumet dans son propre systeme dont je vais es-
sayer de donner un apercu.
Entre autres qualites ou proprietes que Bentham exige dans
un corps de droit , il insiste sur les trois suivantes : noloiiete
ou plutot aptitude a la notoriete ; integralitc ; justification.
De V aptitude des lois a la notoriete. Tout ici depend d'abord
de la forme: Bentham , pour lui donner cette propriete, in-
dique les quatre prindpes de division suivans :
638 SCIENCES MORALES
i" Dans I't-nscmble dii corps de droit , distingiier Ics parties
qui iuteressent egalement tout ie moiide, de celles qui nc con-
cernent que ccrtaines classes ou denominations de pcrsonnes
deternainees. Division correspondante : Lois cVinteret nniver-
sel , his d' in U'-ret special ; les unes formantle code general, ks
autres, le systeme des codes particuliers.
2" Dans le code general, aussi bien que dans chaqiie code
))arliciilier , distinguer ce, qu'il importe a chacun d'avoir sans
cesse present a I'esprit de ce qui pent en etre eloigne sans in-
convenient. Division correspondan.te : Lois d'interet perma-
nent, lois d'interet occasionet. — Une loi d'interet occasionel
estcelle qui s'applique a tel ou tel accident, qui pent survenir
inopinement et qui ne laisse point de terns pour I'exanien de
la deliberation ; comme , par exemple , certaincs attaques en -
vers Ja personne ou la propriete.
3" Dans les lois d'interet permanent, distinguer celles qui
s'appliquent aux cas les plus graves , et dans lesquels de plus
grands interets peuvent se trouver comproinis, de celles qui
n'ont rapport qu'a des faits de raoindre imporlance. Division
correspondante : Z.o/i' d'interet majeur , lois d'interet secon-
daire.
4" Distinguer, dans toute espece de lois, mais principalc-
ment dans celles d'iateret permanent , les regies ou prescrip-
tions , des explications ou des definitions dont elles sont
susceptibles. Division correspondante : Texte principal, ex-
position.
De I'integralite du corps de droit. Le corps de droit doit em-
brasser, sans exception, toutes les regies d'action ; il doitpre-
voir tous les rapports , tons les cas susceptibles d'etre souniis
a I'empirc de la loi. Toute omission en ce genre suppose un
interet sans garantie , et laisse une porte ouverte k I'arbi-
traire. Pour faire un corps de droit complet, il faut done avoir
embrasse le champ tout entier des pensees et des actions hu-
raaines.
Pour etre com[)lel , le corps <^le droit doit non - seulement
prevoir tous les cas , mais encore les regler definitivement, et
ET POLITIQUES. ' 639
nc s'en refcici- sui aucnn point a des lois antc-iieiues 011 a vo-
iiir, sous peine dc rentrer dans la confusion et dans le vague ,
dans I'infini, dans I'arbitraire, et de peidre la premiere et la
plus cssentielle de ses proprietes , la notorietc.
Quelle que soit la source d'ou le legislateur tire la niaticre
de ses lois , que ce soil de la loi commune, de statuts , de son
propre fonds, ou de ces trois sources ensemble, peu importe:
celte maliere doit etre line pour lui; et dans la forme qu'il lui
donne , il ne doit etablir , entre ses parties , aucune distinction
tiree de leur ori^ine.
De la j ustijication des lois. Pour que la loi produise de bons
resultats, il ne suffit pas qu'elle soit bonne en elle-meme, c'est-
adire utile; il faut encore que son militc soit reconiiue , et
pour cela qu'elle soit deinontrec. Bentham veut done que la
loi soit accompagnee d'un commentaire i-aisonne, dans lequcl
toutes ses dispositions se trouvent justifieos par I'expose des
considerations qui ont du leur donner naissance dans I'csprit
du legislateur. C'esl ce qu'il appelle la matiere rationnelle de
la loi.
Ce commentaire, devant , selon Bentham, se composer de
considerations puisees dans la nature meme de I'homme, se
trouverait par cette raison, et au moyen d'une harmonic en
quelque sorte preetablie, a. la portee de tons les esprits; par
line raison toute seniblable, les lois qui en seraient I'objct de-
vraient facilemen''ty penetrer et s'y graver a sa suite.
L'obligalion de justifier les lois par des raisons servirait a la
fois de guide, de barriere et d'appuiau legislateur : de guide ,
pour lui montrer le droit chemiu, en lui supposant de bonnes
intentions; de barrieres, pour I'empecher d'eu sortir, en lui
en supposant de mauvaises ; et enfin , d'appui contre I'opposi-
tion de ses constituans, en tant que Tignoranoe en serait la
source.
Le commentaire des lois exercerait sur les fonCtions dnjuge
exactement la meme influence que I'obligafion de le faire et de
le produire exercerait sur celies du legislateur. II feraitcom-
prendre aux fonctionuaires de tons les ordres la nature et
64o SCIENCES MORALES
rimporlancc dc Iciirs devoirs ; enfin , il pourrait encore servir
lie guide aiix citoyens, dans ceiix-la niume dc leuis rapports
qui nc sent plus que du domaino dc la morale proprement dite.
11 fouruirait un moyen d'interpretation pour Ics lois, dans Ic
cas mcme ou leur sens serait douteux ou obscnr.
En presentant ces divcrses utilites de la promulgation des
raisons des lois, Bcntham refute les opinions qui repoussent
cet appendice comme dangereux. II soutient que de mauvaises
raisons, c'esl-a-dire, des raisons sans harmonic avec le texte
de la loi, peuvent seules presenter des inconveniens. Selonlui,
le refus d'expliquer et de justifier les lois ne pcut provenir que
de deux causes : rignorance et la mauvaise foi. Deja il avail
dit, dans ses traites de legislation : « Celui qui se sentirait la
force de fournir cette carriere , ue rcnoncerait pas a la parlie la
plus flatteuse de son emploi. S'il n'en avait pas besoin pour sa-
tisfaire I'opinion publique, il le voudrait pour se salisfaire lui-
meme. Il sentirait qu'on ne peut prendre le privilege de I'in-
faillibilite qu'au moment ou Ton renonce a celui de la raison.
Celai qui a de quoi convaincre les hommes , les traite en
hommes; celui qui se borne a commander, avoue I'impuissancc
de convaincre. »
Mais, siledefautde justification des lois a souvent pour cause
une absence correspondante de raison dans I'esprit du legi^la-
teur, plus souvent encore, selon Benthani, ce defaul tienta des
considerations particulicres aux interets du pouvoir, qui , dans
les occasions meme ou il pourrait avouer les motifs de sa vo-
lonte, doit toujours etre dispose a les lenir secrets; soit que,
dans un cas^particulier, il veuille eviter de se tracer des liraites ;
soit qu'il craigne d'accoutumer les esprits a ces sortes de justi-
fications, de mauiere a ne plus pouvoir s'en abstenir. C'est prin-
cipalement a ces causes que Bentham attribue I'absence de
raisons, qu'il signale dans les Codes Napoleon. [V expose dex
motifs ne s'y applique point en particulier aux details de
chaquc loi.)L'imporlancepriucipalc des trois proprietesdontje
viens de parlcr scmble, au premier aspect, nc porter que sur
un scul et niomc objet, savoir, de repandre et d'affermir la
ET POLITIQUES. 641
connaissance des lois : c'est aussi la pensee qui domine dans le
recueil que j'ai sous les yeux, et c'est en effet celle qui devait
y domincr , en raison de la specialite da sujet que I'auteur y
traite; mais 11 est facile de s'apercevoir que ces proprietes n'in-
teressent pas moins I'essence meme de la loi que sa forme,
qu'elles y sont intimcment liees, et quepeut-elrc ne pourraient-
elles se trouver que dans un code dont Bcntham aurait fourni
la matiere. En proposant la codification avec de telles condi-
tions , ce n'est done pas seulement une forme que ce savant
legiste propose, mais bien aussi ses principes de legislation
dans toutes leurs consequences.
Ds tons les systemes dc droit qui ont paru denos jours,
celui de Bentham et celui de I'ecole historique me paraissent
etre les seuls qui raeritent de fixer I'attention des bons esprits.
Parties de points diametralement opposes, ces deux ecoles ont
constammcnt marche en sens contraire. L'une des deux est-
elle absolumcnt dans I'erreur ? se sont-elles partage le domaine
de la verite, et sont-elles par consequent susceptibles de se
reunir? existe-l-il quelque transaction possible entre leurs dif-
ferentes manieres de voir sur la codification?
Ee tems ne me parait point etre venu encore de resoudre ces
diverses questions. II faut d'abord que les deux ecoles sortent
de I'isolement ou elles sont restees jusqu'a ce moment l'une a
I'egard del'autre; qu'elles ne dedaignent point de s'attaquer
directement , et que la discussion sur la matiere qui les divise
soit dcvenue aussi generale qu'elie peut I'ctre. De celte lutte
seule peuvent jaiilir les lumieres qui nous manquent encore
pour prononcer entre elles en connaissance de cause.
Saint-Amand.
T. XXXI. — Seplembre 1826. I\i
LITIERATURE.
MeMOIRES INEDITS DE M"" LA CoMTESSE DE GenLIS, SUV
le dix-huitiemc siecle et la revolution Jrancaise^ de-
puis ijoGjusqu'ci no s jours (i).
SECOND ET DEENIER ARTICLE. ( Foj. Cl-dcSSUS, p. 363-378.)
En lisant les deniiers volumes de ces Memoires , j'ai cent
fois maiidit I'engagement que j'avais pris d'en rendre compte.
Commenl, en effet, concilier les egards dus an sexe,a I'age,
au talent, ^ la renommoe de rauteur, avec le devoir de
s'elever centre des mepiises qui, pouretre involontaires, n'en
sont pas moins des calomnies ? Permis a madame de Genlis
de trouver la conversation du ci-devant roi Jerome fort ai-
mable, el ceile de Fontanes a peu pres .sans esprit. EUe peiit,
si ce jeu I'amuse, pescr dans la menie balance, et le ton et
les manieres de tons nos contemporains. Si meme elle se bor-
nait .i donncr son opinion sur leur carriere politique, on se
contentorait de wofe/- qu'a ses yeiix I'antique Alexandre fut
beaucoup inoins digne du nom de grand qu' Alexandre dc
Russie. Si elle se oontentait d'attaquer sans menagemens leur
renommee et leurs titres litteraires , on se bornerait a repon-
dre que I'Essai sur les Moeurs et I'Esprit des nations est
pour elle vin o\i\ra\^e fort plat , eiVEmile « un livre ennuyeux ,
en general mal ecrit (2) ». Mais si madame de Geulis renon-
(i) Paris, liiaS. Ladvocat et Baudouiii frferes, 8 vol.in-8'';prix,(i4fr.
(3) » C'est un Lien mauvais livre en tout sens, il est in(5nie en gene-
ral inal ecrit, a V exception d'un petit nonibre de raorceaux. ■> II eut,
ce semble, ete bon de mieux ecrire une phrase destinee a nou."!
appreiiclre cjue VEmi/f est :nal ecrit. Rl""" de Geniis ajoute, t. vr,
LITTERATURE. ' 643
velle , au inoins en partie , I'execrable accusation qui mit
Chenicr dans la tombe , etqueses ennemis mdme ont dementie
apres sa mort, sera-1-il encore permis de se tairo(T)? Si
qiielqtic manvais plaisant, assez effronte pour se faire un jeu
d'egarer sa confiance, est parvenu ji liii pcindrc Gingiiene
(que tres-evidemment elle n'a point connn), sous les traits
les plus opposes, iton-senlement a la verite, inaisa tonte vrai-
semblance; si dans son crreiir elle imprime toute cette mys-
tification, ne faudra-t-il point lui appreudre que laiUeur de
VHistoire litteraire d'ltalie , ouvrage dont il existe deja deux
traductions en langne italientie , nc s'est ^omljait aider dans
ce miserable travail (2"), en payant a bas prix des manoeuvres
qui liii fournissaient des extraits tout fails , etc. Ginguene,
sorti sans fortune des places qui auraient pu Tenrichir, loin
de payer le travail d'autrui, avaitbesoin de son travail pour
vivre avec dignite et indopendance. II n'avait , il ne vovilait
avoir ni logemcnt a I'Arscna! , ni pension de six niille francs
sur la cassette de Tempcreur , ni mille ecus de pension sur les
budgets de Hollande. II n'avait pas meme la ressource de
vendre assez frequemment ^d'opulens amateurs dejolis petits
recueils de dessins ou de fleius peintes. Comment aurait-il
fait pour tcnir a sos gnges des travailleurs en sous-ordre?
on ne lui a jamais vu meme un secretaire. Ses grands ou-
vrages, ses Rappnrts a I'lnstitnt, ses articles de journaux
arrivaient tous a I'imprimeur, ecrits tout entiers de sa main.
Enfin , comme cet aiiteur qui netait ni vcritablement instruit,
ni laborieux , avail contractu , dans sa jeunesse, et a garde
jusqu'a sa mort, I'habitude de se mettre a I'etnde, ete comme
p. 164 : « Le style en est egaleraent neglige, incorrect et diffiis, et ciiun
je ne coniiais pas de livre plus ennuyeux. » En verite, c'est fort
plaisant.
(i) Voy. Rev. Enc. , goe livraison, t. xxx, p. 8r6.
(2) Si ce travail est aussi miserable que rEmile est ennuyevx , il ne
faut pas s'etonner que les meileiirs jiiges d'llalie le regardcnt comme
classiqiie.
644 litti5:ra.ture.
hivcr , des cinq heures dn matin , et de nc quitter Ic travail
qu'apres cinq heures du soir, je prie niadame de Genlis do
croire que ce n'etait pas preciscment un paresseux. Je la pric
de croire surtout qu'un homme de ce caractere n'a point
ameute contre elle la foule Acs folliculaires , dontil n'a jamais
dispose. . . et, pour parler U'autre chose , je la prie de croire
aussi que Lebrun n'a po'uMproi'oque la profanation des tomhes
royales, en 179^, par la publication d'une ode qui n'a etc
imprimt'c qu'en lygS (i).
Mais pourquoi multiplier ces remarques ? Relever toutes
les imputations dc ce genre est impossible; Vespace qui ni'est
accorde n'y suffirait point. En relever seulement un grand
nombre , seiait me donner I'apparence de passer condamna-
tion sur les aulres. II vaut mieux faire, une fois pour toutes,
une declaration generale, et la voici : L'autcur de cet article
a beauconp vu , beaucoup connu , plusieurs de nos contom-
porains dont les portraits viennent, a tour de role, remplir
les pages de ces Memoires. La plupart lui ont paru defigures
et meconnaissables. On pent tenir pour non avenus , juscju'a
nouvel examen, \es jugetnens de I'auteur. Mais, si Ton veut
absolument en faire usage, qu'on les prenne , corome dit
Montaigne, a contre-poil : en dcplacant I'eloge et le blame,
on pourra se tromper encore ; mais , a coup sur, on s'eloignera
moins de la justice et de la veritc.
Apres cette declaration formelle, et que je regarde comme
raccom|)lissement d'un devoir, je reprends I'analyse de I'ou-
vrage. — Nous nous sonimes arretes a la fin du quatrieme vo-
lume.Lecinquiemecoumience par le recit du sejourque M™" de
Genlis fit a Berlin, dans les derniers tems du Directoire. Ce
qu'on y trouve de plus curieux, c'est la representation d'une
tragedie allemande, racontee avec toute la grace, tout le selct
le bon gout qui distingiient les meilleures narrations de I'au-
( I ) M'ne de Genlis n'est pas tres-forle sur la chronologic. Elle place
le me^irlie dti due d'Enghien apres la bataillc d'lena. Ces clioscs la , et
de plus curieuseb encore, (ouimillciU iLins ses Memoires.
LITTER A TURE. G45
tear. Je mc borne a rindiquer ( page 10 ), presse que je suis
d'arriver a des choses d'lm autre ordre. M™'^ de Genlis,qui
connut a Berlin le general Beurnonville , alors ambassadeur
de la republique francaise , lui persuada aisement qi\'elie n'a-
sHiit jamais ete emigre e , et ob tint, par son entremise, avec uue
egale facilite, la permission de rentrer en France. Ne retrou-
vant a Paris aucune fortune, et rediiite a vivre de son travail,
elle eut le courage d'ecrire contre la philosophie et les philo-
sophes , quoiqu'elle n'ignorat point que le Premier Consul eiit
fait une visite a M""-' Helvetius , en lui disant qu'il avail voulu
voir la veuve d'un grand hoinme. M'"" de Genlis voudra bien
me permettre de retablir id les fails.
Bonaparte, tant qu'il ne fiit qu'officier d'artillerie et jacobin,
aima beaucoup certains philosophes dont la doctrine, et meme
le style, lui auraient plu beaucoup moins, s'il avait eu plus de
gout et de vraie philosophie. Ses auteurs de predilection en
ce genre etaient Raynal et Helvetius. Parvenu a la dictafure ,
sous le titre de consul, il conserva, on il montra des vestiges
de ses ci-devant affections, aussi long - terns qu'il lui parut
utile de laisser voir, sous la toge consulaire, Ic houtde man-
c/ie de la carmagnole. Mais, des lors, il y avait peu de courage
a s'elever contre Voltaire, qu'il n'avait jamais goute, contre
Rousseau, dont on savait qu'il redoutait lesfolics. Les hahiles,
comme dit La Bruyere, ceux qui savaient voir et prevoir,
ceux qui, onze ans auparavant, avaient crie les premiers a
Varistocratel et cinq ans apres , au modere! commencaieut, de
toutes parts, a crier au philosophe ! Ce n'etait plus seulenient
flatter les voeux secrets du maitrc; c'etait deja suivre son
exemple. Cefutlui qui mitala mode la plume ehonteede Geof-
froi. Avez-vouslu le Feuilleton? demandait-il asescourtisans,
quilerapportaientaulibelliste. Je connais unhommed'espritqui
fit, a cette epoque, un voyage de qualre-vingt-six lieues pour
voir, disait - il, deuv illustres , le premier consul et Geoffroi.
Quand le consul se fut elu et proclame empereur, quand on
lui eut fait litiere de toutes les liberies publiques, de tous les
sentimens geuereux , on s'empressa, pour lui plairc, de Irai
6,\6 LITTKRATURE.
uer dans la nicine fiinye lous les grands hommes du siccle der-
nier (i). On ne pardonua pas nienie a Montesqiiioii, ca favcnr
de ce niai^nifique et faux portrait fie Charlemagne, dansle-
quel tons les grands corps de I'etat avaient reconnu son legi-
time keritier.lJn jciine honime arrive a Paris, dans les premiers
jours de I'ernpirc. En repoussanl avcc degout les declama-
tions frenetiques de qiielques soi - dhant p/iilosopkes , il veut
du moins consacrer le pen de forces que lui donne sa jeunesse
a la defense ties principes sans lesqnels 11 ne saurait y avoir ni
dignlte pour les nations, nieine an sein de la vicloire , ni gran-
deur morale pour les hommes, raeme an faite des lionneurs.
Un vieillard, quolque philosopAe , lui dit ccs propres paroles :
>t C'est vous perdre! vous venez, apres la bataille, vous cou-
clier parmi les morts. » — « Malta renascentur quce jam ce-
ciderev lui repondit lojeune homme; et peut-etre avait-il rai-
son ; mais le vicillard avail raison aussi : car, en attendant,
c'etait bien reellement se perdre que ilechoisir une telle route.
Du moment que vous y aviez fait un pas, il vous fallait renon-
cer a tout, excepte aux injustices et aux injures : on , si des
succes d'un certain eclat attiraientsur vous I'attenlion , on vous
faisaitdesoffres si brillantes, on ouvraita votre amour-propre
et a votre ambition de si vastes perspectives, que vousnepou-
vicz plus douter de la condition tacite quis'y trouvait altachee.
N'avait-on pu vaincre vos refus ; on lancait d'abord sur vous
la meute officielle des jotunalistes a gage, et votre excommu-
nication commencait. Quant a ceux qui , avec leur plume , vou-
(i) Les plus mortals ennemis de ces pauvres philosophes ne sauraient
se defendre de quelque pitie, en reflt-chissant aux bizarreiies que
presente leur destinee, dans I'espace d'un demi-siecle. On a vu d'au-
tres grands hommes s'accoramoder de tous les regimes : pour eux, au- J^
cun regime n'a pu les souffrir. Livres avant 1789 aux cacliots de la iM
Bastille , pendant la teireur, au bourreau , et sous I'empire, a Geoffroi,
quel est nuiintenant leur sort, et quel sera-t-il ? M">e de Genlis parait
avoir la conGance que le moment est veiui d'en finir avec leurs liorrt-
bjes doctrines.
LITTfiRATURE. 647
Wient/aire leur chemin , tout leur devenait facile : on ne lenr
dcniandait point de grands frais d'iniagination. II fallait seule-
ment deux clioses : ne voir dans la revolution que des victoires
et des crimes; voir, dans la philosophic, toute la revolution,
hormis ses victoires; en un mot, il fallait montrer le meme
j^enre de courage que M"" de Gcnlis.
Du reste, il ne paraft pas que cela lui ait trop mal reussi. A
peine de retour en France, elle demaude an ministre un loge-
ment : on lui en destine un fort beau, mais elle en prefere nn
autre, et il lui est accorde de la meilleure grace du moi^de.
Elle se trouve assez de credit pour rendre un grand service a
M. Fievee. M. Fievee , mis en prison par le Consul pour une
correspondance politique (i), devient le correspondant poli-
tique du Consul. Il vent lui ecrire que M™!^ de Genlis n'a rien
retrouvc en France , et qu'elle vit absolument de son travail.
M°" de Genlis s'oppose a une demarche qui le compromettra
siirement. II ne se compromet point , et le fruit de sa demarche
est que le Premier Consul envoie M. de Remusat, prefet du
palais (2), dire a M™'' deGenlis, enpropres termes, « qu'il vient
d'apprendre sa situation; que s'il I'avait sue, a son arrivee en
France, elle n'y seraityawa^j restee une minute, et qu'il lui
fait demander ce qui peut la rendre heureusc. » II est vrai que
M"' de Genlis eut la generosite de repondre qu'elle ne deman-
dait rien. Mais le Consul , pins genereux, lui donna, ce qu'elle
n'eut jamais demande , des larmes, qui la rendirent fort heu-
reuse." Marigne pretend que je vous envoie les larmes du Pre-
mier Consul , et que cela vaut mieux qv,e des vers», ocrit a
jime (jg Genlis une de ses amies. Voici le mot de I'enigme : le
Consul avait lu Madame de la Valliere, il I'avait lue tout d'un
trait, sans pouvoir la quitter, et il avait ^^X^nvk -.c' est un fait
positif. Ce suffrage enchanta M™'' de Genlis ,„/?e;-e J'^POi>ya;V
(i) Avec Louis XYIII. ( Kote de HI'"^ de Genlis. )
(2) « .... Le premier consul m'envoya M. de Remusat , pre/et du palais ,
ponr me dire en propres termes , que le premier consul veuait d'ap-
prendre, etc. » T. V, p. 134.
64» LITTERATURE.
pleurer le plus grand capitaine tie son siecle : et, dans ce pre-
mier enchantement d'un si glorieux s:tcces , elle fit un im-
promptu en vers qu'elle envoya sur-Io-champ, et dans Icquel
on trouva de la verve; car le sentiment ct la verite en donnent
toujours.
Quelque tems apres, M. de la Valette fut charge de lui ap-
prendre que le Premier Consul , dcvenu empereur, desirait
qu'elle lui ecrivit, tous les quinze jours , sur la politique, les
sciences , la littcrature , la morale , sur tout ce qui lui passerait
par la tele. Correspondant politique, comme son ami M. Fie-
vee, M""= de Genlis eut encore le courage d'ecrire a Sa Ma-
jeste contre les philosophes. Mais , comme elle eut egalement
I'intrepidite de lui dire : « I'cmpereur confirme bien ccs belles
paroles de 3Iassillon , que les princes sont sur la terre une pro-
vidence visible , >> la punition de tant d'audace fut une pension
sur la cassette. Cette pension , tres-graeieusement annoncee,
etaitdesix mille francs; elle venait a I'improviste, comme les
larmes du Consul ; et M™'' de Genlis en fut presque aussi flat-
tie, attendu que /^ maximum des pensions des gens de lettres
etait, dit-clle , de quaire mille francs. II faut qu'elle tienne un
pen a cette idee de maximum : elle y revient cinq ou six fois
dans le cours de ses Memoires; elle y revient encore apres,
dans un dialogue entre JfJ"" la Comtesse de Choiseul ( nee
princesse de Beaufreniont ), et l'aiiteur[ tome viii, p. i'25 ).
« Napoleon, dit M""' de Genlis, dans ce dialogue, a ete mon
bienfaiteur, le seul que j'aie eu parmi les souverainsj et desnn
propre raouvemcnt, sans la moindre soUicitation de ma part.
Depuisjje ne lui ai rien demande pour moi, mais j'ai obteuu
pour d'autres une infinite de graces... » La Comtesse lui repond :
« Je crois que vous vous exagerez beaucoup ce pretendu sujet
de reconnaissance; il faisait des pensions a tous les gens de
k'ltres : pouvait - il se dispenser de vous en donner une ? » Et
M™" de Genlis replique : « I.e maximum de ces pensions etait
de quatre mille francs; il m'eu a donne six mille. >- Au hasard
d'affaiblir un peu une reconnaissance de si bon gout , il
faut bien lui dire qu'elle se trompe, et que tel ecrivajn don.t
LITl'ERATURE. 64^
clle parle assez mal, Bernardin-de -Saint-Pierre , par exemple,
avail, comnae elle, et avant elle, une pension de six mille fr.
L'hoinme a qui nous autres Francais avions livre nos millions,
ft qui savait oi!i en prendre d'autres, se montrait fort gene-
reux : il n'y avail pas de maximum aux faveurs de sa cassette.
La Correspondance de M"« de Genlis , si bien venue au
Chateau , lui fit alors, quoique secrete, un nombre considerable
d'ennemis. On alia jusqu'asupposer qu'elle n'amusail I'empe-
reur qu'en lui disanl du mal de tout le monde. Pour confondre
la calomnie, elle imprime aujoiird'hui des fragmens de ses
lettres, et ces fragmens sont decisifs : au lieu du denigre-
nient, on y voit partout la bienveiilance. M. Treneuil est un
sujeti^i) affectionne et un vrai poete; M. de Bonald a un esprit
plfin de finesse, et un prodigieux genie. Si, dans un endroit ,
M"*^ de Genlis ne trouve en France que trois hommes dignes de
travailler a I'histoire de S. M. I., MM. Dassault, de Bonald cl
Fievee ; dans un autre passage, en revanche, ellecompte quinze
ecrivains par qui la Utterature francaise tient encore le premier
rang entre toutes celles des nations, civdisees (2) : elle nomnie,
dans le nombre, un philosophe, et mcme une fcmme ; elle
nomme aussi des liberaux, qui passent pour etre bien avec
son libraire, et ne pas manquer de credit dans lesjournaux,
MM. Etienne, Jay , de Barante. Il y a ici une difficulte. La
lettre ful ecrite en 1806 , comme nous en avertit expressement
uue note placee au bas de la page. Or, en 1806, M. Etienne
(i) C'est Mmede Genlis qui souligne.
(2) Je fais , autant que je puis , grUce a M™" de Genlis de tous les
vivans qu'elle cite, et de tous ceux qu'el'le ne cite pas. Mais,iine
parler que des ecrivains mores depnis 1806 , il paraitra singulier que ,
sur cetle liste de quinze grands hommes, ni Bernardin de Saint-
Pierre, ni Parny, nl Duels, ni Cabanis , ul Ginguene, niMillevoie,
dcja couronne par I'lnstilut, n'aient eu I'honneur de trouver place
entre Dussault et Treneuil. II est vrai que Ducis et Ginguene , par
exemple, ne montraient pas a cette epoque le menie genre de courage
que M'n« de Genlis.
65o LITTERATURE.
n'avait encore tloiuie aucuiie ties pieces qui oitt faitsa ii'|juta-
tion : M. de Barante, alors fort jcune, u'avait absolument rien
public; il debuta, deux ou trois aiis aijrcs, par un Tableau
littcraire du xviii" siecle qui avail concouru sans succes pour
le jirix de I'lnstitut: eufin, le debut dc M. Jay fut un ouvrage
sur le ineme sujct, plus heureux que celui de M. de Barante,
inaisqui ne parut qu'en 1810. — Jusqu'ici, on trouvait assez
meriloire, dans ccux qui avaient I'oreille desrois, de desi-
gner a leur bienveiliance les falens aimes du public ; mais
nomaier, trois ou quatre ans d'avance, ceux qui doivent se
faire un nora; designer, coinnie etant la gloire d'un regne,
des ecrivains qui n'ont encore rien ecrit, c'est, il faut en con-
venir, un procede beaucoup plus genereux. II semble toute-
fois difficile de juger une correspondance sur de tels echan-
lillons ; et M""dc Genlis, toujoursX^i polie envers sa memoire,
aurait bien quclqiiesreproches a meler aux complimens qu'elle
lui fait.
Tout ce qu'on vient de lire ici, analyse le plus brievement
possible, remplit en grande particle cinquieme volume deccs
Meinoires ; c'est ce que les quatre derniers in'ont parusoutenir
de plus iuteressant. Je ne pousserai pas plus loiu cetle analyse:
quand I'espace me le permettrait, le lecteur neniele pardon-
nerail pas.S'il y a deja bien des choses futiles dans les conimen-
cemens de Touvrage, elles se pressent, fourmillent dans la se-
conde moitie. Cela va quelquefois au point de passer toute
croyance. En voici un exemple qui rae revient sous les yeux ,
pages 40, 4r et 42 du tome viii. M"'' de Cell«s, petite-
fille tie M""' de Genlis , va partir pour I'llalie. M""" de Genlis
voudrait bien que M""^ Gerard , aussi sa petite-fille, fut du
voyage. Mais peut-cire M"" Gerard repugncrait-elle a con-
fier , pour sept ou liuit mois, h une bonne , deux de ses cnfans
en bas age. Dans ce cas , M"'° de Genlis lui offre des'en char-
ger, ce qui lui est tres-possible, « restant , dit-elle, a Paris
dans un logement quelle a ancle dans I' exterieur d'un couvent,
aux dames de Saint-Michel , rue Saint-J deque s , avec un beau
j'ardin sur le Luxembourg. » Et voila ce qui fournit deux pages
LITTERATURE. 65 1
aux Memoir es sur le dix-huitieine siecle et la Revolution fran-
caise !
Au milieu de cespetits details, qu'oii a enrimpolitessed'ap-
peler du commeiage, il arrive quelquefois a M°° de Cenlis
d'agiter de graves questions ; mais sa maiiiere de les envisager
et de les resoudre ne parait pas de nature a y repandre beau-
coup de clarte. Par exemple, elle se declare , on ne pent plus
franchement, pour les liberies de lEglise gallicane , j)ar res-
pect pour X inJallUbilile des papes, inspires par V Esprit Saint
dans toutes les chases relatives ei la religion (i). Ailleurs ( tome
VI , p. 36c et suivautes ) elle renouvelle les predictions sur la
fin du monde, et voici son raisonnement : Le Crealeur n'a rien
fait en vain; ainsi le monde nejinira, que lorsque le globe
sera connu..., et lorsque Xhomme aura acquis toutes les con-
naissances et toute I'ijidustrie que son intelligence et I'expe-
rience peuvent lui donner. Depuis I'invention de rimprimerie ,
il avancea pas de ge.^.nt... Les progres de la navigation ontfait
faire d'immenses dccouvertes; nous avons acquis un nombre
prodigieux de plantes nouvelles, denictauxet demi-metaux...
II reste nioins de choses a decouvrir qu'on u'en a decouvert et
perfectionne depuis cent ans... Dans un siecle et dcmi on deux
siecles au plus, tout sera connu, tout sera su. « Quant a la mo-
I'ale, elle a eu le dernier degte de perfection, quaiidl'Evangile
a ete preche; mais les vices et les passions, en produisant une
corruption presque generale, ont rempli I'Europe d'erreurs et
de principes faux et contradictoires; aujourd'hui, tout est con-
fondu dans la morale, et, par une consequence necessaire ,
tout le sera dans les gouvernemens; un desordre universe!
dans ce genre sera le resultat du philosophisme. Tour ix tour,
ranarchie, les revolutions, les guerres civiles et exterieures
bouleverseront I'Europe; mais les monumens des arts et des
sciences, les artistes et les savans, les bibliolheques immenses
(i) Ce!a est incroyable, mais on peut le voii-, t. vii , ji. i34 , i35
et i36. Voila de quoi refuter le poete qui s'etait permis de faire de-
M^'de Geiilis une ?Jcra dc rci/^isc.
65* LITTERATURE.
ctablics daus toiUos les villcs, coiiservcront Ic Jej)6t des con-
iiaissances hiimaines; apres avoir soiiffert tons les maux qn'en-
frainerU dcs passions extravaL;aiites et Timpiele, le bien naitra
du nial, I'esprit fatii^nc- s'aucantira dans le besoin du repos ;
on piolitcra enfin dus lecons dc I'experience qn'on a jusqu'ici
repoussecs; on reviendra a la raison , a la religion ; on rcnon-
cera a de fiinestes prcjuges qui existent depuis si long - tems ;
les gouvernemens n'auront plus Vodieuse immoralite d'elablir
des loteries, et d'inf;imes impots sur les maisons de jeu ct les
lieux de debanche; les duels et les guerres offensives feront
horreur; alors, on verra reuaitre le plus brillant ;ige d'or : ce
sera celui d'uiie ])arfaite civilisation; le nionde assez vieuxpour
se coiivertir , sera ainsi prepare a rendre le compte universe! ;
c'est a cette epoque memorable que, toutes les destinees de
rhomme etant accomplies , toutes ses facultes ayant ete mises
en oeuvre, tous les tresors de la nature et de la creation etant
connus, le terns finira et se perdra dans reternite. Je crois
que cinq ou six cents ans suffisent pour operor toutes ces
choses. »
Nous voila bien avertis de ne pas etendre nos esperances
terrestres au-delade quelques six cents ans. II reste de la marge
encore. L'Eiirope fut pleine, il y a cinq siecles, de gens qui
donnerent leurs bieiis aux moines, adventante mundi vespero :
maintcnaiit, ces predictions avaient perdu leur credit. Si rien
pouvait le leur rendre , ce serait la politesse de M""' de Genlis ;
ou n'a jamais annonce le JugementUniversel avec une telle obli-
geance. Nous sommes trop savans pour que le monde dure;
voila qui est bien flatteur. Nous seron.t raisonnables elpieux;
il n'y aura plus de loteries, plus d'impots sur les maisons dejeu,
plus de duels et plus de guerres; doncle monde finira, apres
s'etre convcrti danssa vielUesse. Ceci, quoique edifiant,peut
donncr quelqnc scrupule. L'esprit humain est en marche, nous
le savions , on nous I'avait dit; mais , htlas ! ou marche-t-il ? a la
destruction de I'univers. Chaque decouverte que nous ferons
sera done un coup mortel portc d'avance a notre posterite, dont
elle halira fa fin procliaine. C'est ufic idee affligcante. N'im-
LITTER ATURE. (55?
porte; ils seront bien heureux ccux qui viendrout dans cet age
d'or oi\ Ton saura tout! 3' avs'is cm jusqu'a present que nous
savions si peu de chose I
• jvime dg Genlis parait bien convaincue de la certitude de sa
prediction; elle y revient, deux volumes plus loin , avee toute
confiance: mais je dois a la verile de dire que c'est la seule
prophetic qu'on trouve dans ses Memoires. Ce qu'on y ren-
contre le plus abondammcnt, apres toutefois les causcries de
societe, de famille, on moine de menage, c'est la critique des
auteurs et celle de leurs ecrits. J'ai fait connailre, a mesure que
I'occasion s'en est presentee, un assez grand nombre de ses
jugemens; et je m'empresse d'avertir que ce ne sont pas les
meilleurs qu'on put tirer de son livre. Parmi ceux dent je n'ai
point parle, plusieurs sont justes , bien penses, exprimes avee
moderation et mesure ;beaucoup meparaissent etre absoiument
tout lecontraire; quelqucs-uns n'ont pas du tout le mcritc de
la nouveaute. Telle est , au second volume , une critique de
Melanie , tres-ingenieuse, tres-piquante, mais qui frapperait
davantage, si les Memoires de Palissot n'avaient pas devance
ceuxde M°"=de Genlis. Ce qu'elle dit, ( t. viii ) pour justifier
Caveirac, indignement accuse d'avoir fait I'apologie dela Saint-
Barthelemi, est aussi tire de Palissot (i), qui I'a tire dc Saba-
tier(2), qui I'avait tire de Linguet (3). Sabatier n'ajoute rien a
Linguet; mais Palissot ajoute a Sabatier : il denonce le medecin
Naude, qui ecrivait sous le ministere de Mazarin, commc le
veritable apologiste de la Saint-Barthelemi, et il denonce les
philosophes qui n'ont pas denonce Naude, par menagement,
dit-il, pour cet ecrivain un des precursears de leurs doctrines
incendiaires (4). Or, M^ede Genlis repcte encore tout ccla. Ce
(l) Tome I'"'' des Memoires pour servir a Vhistoire Je notre litieratiire,
et t. IV de la Collection des ccuvres de Palissot.
(a) Les trois siecles de la litteratiire , tome premier.
(3) Reponse aiix docteiirs modernes.
(4) N'eft-il pas plus simple de croire que , s'il n'ont point accuse
Naude , c'est qu'ils ne I'ont jamais hi ? Le veritable litre de son livre
est : Considerations politiqiies stir les coups d'etat.
654 LITTERATURE.
qu'on lit h la fin de son livre, siu- les lilogcs publics chez les
pcuples clel'antiqiiite, et sih- I'oraisoti funebrc, clans nos litte-
ratures niodernes , n'cst pas moins evidemment un extrait fort
superficiel de VEssac sur les eloges , dont quelqiies pages plus
hauf, elle a fort maltraite I'auteur : mieiix aiirait vaiu le citor.
Eu revaiiclie, Mmcde Genlis, qui aime beaucoup la lecture,
ne lit pas un livre uouveau, sans en tirerquelque citation dont
elle nous gratifie. Ici nous avons trois pages d\me petite bro-
chure de M. Ficvee, ou nnus devons admirer une grnnde siipe-
riorite de talent et d'e.iprit ( tome vi, p. SSg et suivantes) : li,
onze pages d'une Lettre de Galltts, parM. le chevalier d'Hcr-
mensen , omTage le plus rnonarchique et le plus catholique qu'on
puisse lire, ( t. vii, p. ia4 ct suiv. ) : ailieurs, 8 ou 9 pages d'w/z
petit Hire excellent, les Maxlmes de M. de Lingre ( t. vii,
p. 1 53 ) : puis , 4 pages d'un article insere dans le Mercure
royal, par M. de Verdolle ( t. vii, p. 2o5 ) : puis encore , 6 pa-
ges d'un discours prononce par M. Boisbertrand a la Societe
des Bonnes-Lettres, et imprime dans les Annates de la littera-
ture et des arts ( t. vii, p. 217 ). Le volume suivant commence
par des extraits de M. Valery, aufour des Etudes morales, po-
litiques et littcraires : c'est seulement a la page 16 que IVI'"'^ de
Genlis termine a regret ses citations ; et a la page 4^, on lit :
« Mon ami, le docteur Alibert, m'a envoye son dernier ou-
vrage qui a }^Q\.\r Mre: Physiologic des passions;... et voila
encore neuf pages de faites pour les Me moires sur la revolution
et le i8« siecle. C'est trailer lestemcnt le public, et peut-otre
ses souscriptcurs.
II me resterait maintenant a considerer I'ouvrage dans son
ensemble, s'il y avait dans cet ouvrage un ensemble et un
plan. Malheureusement, il n'en est pas ainsi. M""^ de Genlis
Tavoue, et elle s'en felicite. « Souvent, dit-elle (i), j'ecris ces
memoires sans aucun ordre et sans suite methodique; mais il;
n'en plairont (jue mleux aux gens qui aiment le naturel ct la
verite. » A la bonne heure! mais je dois avertir qn'au milieu do
(r)T. VI, p. 61.
LITTER ATURE. G55
cedesordre, des redites continiicUes, dii manque de dates etde
transitions, il est bien difficile de se reconnaitre, plus difficile
de se retrouver, dans les zig-zag perpetuels de cette immense
causerie en kuit tomes i/i-8'\
Le style est, comme tout le reste , fort inegal. Vous rcncon-
trez des pages charmantes, et tres-purementecrites, ou le gout
le plus exigeant ne trouverait a rcprendre qu'un peu d'unifor-
mite, et n'aurait a desirer qu'un peu plus dc feu et de coloris.
Vous en renconlrez d'autres ecrites avec une negligence incon-
cevable, et on les fautes merae sont frequentes. Quand on a
recu publiquement (i) I'eloge d'avoir ntteint le plus haul degre
de la perfection du style, et qu'on ajoute soi-meme, que cet
eloge n'a pas cte conteste (2) ; quand on affiche un dedain su-
perbe pour rclocution des plus grands maitres en I'artde bien
dire; quand on voit, menie dans Rousseau, beaucoup de fau-
tes de langnge (3), on devrait se garder d'ecrire (4) : « Toutes
les precautions qui peuvenl eviter a sa veuve les desagremens
des scelies , etc. ; » car eviter est im verbe actifh un seul regime,
et eviter a, pour epargner a , est nnejaute positive de langage ,
quoiqu'en dise le Dictionnaire univcrsel de M. Boiste. II fau-
drait eviter avec soin les expressions tres-impropres; nc pas
<lire par exemple, la memoire d'une femme vivante, au lieu de
sa renommee ou de sa reputation , et surtout, ne pas louer le
personnel ( pour la personne , la figure , les graces, etc. ), d'une
jeune demoiselle k marier, comme on vante dans les gazettes
le personnel d'une Administration. Il faudrait enter les distrac-
tions qui ressembleut trop a des naivetes : « Nous passdmes
I'hiver d'ensuite dans la rue du faubourg St-Honorc oii je restai
tout rhiver. » T. vi, p. 127. « Ce qu'ilj a de certain , c'est que
cette fourberie cachait certainement un complot Ires-noir. »
T. V, p. 83. « J'ai entendu lire a Villiers quelques fragraens
(i) Dans le Journal des debate , article de M. Hoffmann.
(2) T. VI , p. SIS.
(3)T. ler, p. 399.
(4) T. VIII, p. 63.
65f> LITTERATURE.
d'lin poi-nie en vers. » T. vi , p. i33. « Le merite et les talens
de cetle inslitutrice merite nt ^ etc., » mcme volume, p. 22.
Quand on qualiGe de galimatias et de barbouillage les fautes
des ecrivains les plus chatios, il serait prudent de ne pas se
permettre des phrases comme celle-ci : « Mantes dont I'excel-
lent air, la tranquillite parfaite, et les personnes qui m'entou-
raient convenaient si bien a mon coeur. « T. vii, p. 359, etc.
On feraitmeme sagementde ne pas tropmultiplier les construc-
tions plus qu'irrcyulieres et les tours aniphibologiques, tels
que : « on donna promptement, apres la premiere , une seconde
edition de Palmyre. » T. vi , p. 33o : « Je ne le connaissais point
du tout (M. de Chateaubriand) lorsqu'tV m'envoya, quand il
parut, le Genie du Christianisme , etc. » T. v, p. 344- "■ Son
troisieme article ( de M. de Ronald ), est une belle critique de
la tragedie des Templiers, la seule on selon moi, il y ait eu a
lafoisdujugementjde I'csprit, etd. T. v, p. 166. II y a ici un
compliment; mais pour qui? II faut, avant de repondre, oter
I'eqnivoque de Tarticle la ; car, si ce doutcux article se rapporte
a la tragedie, la seule oil ily ait eu a lafois du jugement et de
(esprit, c'est a M. Raynouard que remonte la louange; et, au
contraire, elle retourne a M. de Bonald , si Varticle se rapporte
a sa critique, la seule oil il y ait eu tout cela. L'^quivoque,
fort legere, est purement grammaticale, j'en conviens; mais,
par cette raison meme, il etait bon de la relever. Ces obser-
vations de detail que nos critiques negligent, je ne dirai pas
pourquoi, pourraient seules conserver au moins la syutaxe
. d'une langue qui se corrompt et se perd.
Que conclure de tout ce qui precede ? Qu'il ne fautchercher ,
dans le dernier ouvrage de M^-^ de Genlis, presque rien de ce
que promet son litre, et que cet ouvrage, on plutot ce rccueil ,
fort inegal, est surtoutdemesurementlong. On pourrait, sur los
huitvolumes, en retrancher a pen pres six : ce serait sauver les
deux autres; car, le monde diit-il 6nir, comme le predit i'au-
teur , dans quelque cinq ou six siecles , je craindrais qu'il n'eut
encore le terns d'onblier une grande partie de ces Memoires.
Ce qu'il y a de bien certain, c'est qu'on les qnittera sans peine
LITTERATURE. GS?
jioiir rcliie, oii les jolics pieces dii Theatre d'education, on la
charmante nouvelle cle Mademoiselle de Clermont , on enfin
Madame de La Valliere qui lit pleurer le Consul, comme il I'ap-
pritjui-memea Fontanes, qui I'a dit a M"'<'de Bon, quil'ecrivit
a M"« de Genlis. V. L.
Chefs-d'OEuvre des Theatkes etkangers, allemand,
anglais, chinois, danois^ espagnol, hollandais ^ in-
dien, italien , polonais , portugais ^ russe, suedois, etc.;
traduits en francais ^ par ime Sociele de gens de
left res (i).
SECOND ARTICLE. — Theatre francals.
(Voy. ci-dessus, p. Sjg-SgS.)
Les critiques difficiles qui, apres deux siecles de gloire lit-
teraire, se sont avises de contester a la France la propriete
de son theatre , out oublie que cette propriete peut s'acquerir
de deux manieres, et que le choix de sujets tires de I'histoire
particuliere d'un peuple , de ses traditions , de ses croyances ,
n'est pas le seul caracterc auquel on puisse reconnaitre qu'un
theatre est national. Ce qui fait qu'une nation est elle-meme,
qu'elle se detache au milieu des autres, c'est la qualite parti-
culiere de son esprit, sa physionomie m,orale, son gout,
I'etendue et la direction de ses facultes intellectnelles : voila
proprement cc qui constitue un peuple considere coninie in-
telligent et civilise. Si le thetUre d'un tel peuple porte I'em-
preintc de son genie , de son gout; si, conforme a ses idees
habituelles , il est dans la mesure de son intelligence, quelle
que soit la forme, quels que soient les sujets qu'il affectionne,
ce theatre sera national ; il sera la propriete de la nation ,
(i) Paris, iSao-iSaS; Ladvocat, libraire, et Thoisniei-Desplaces,
i5 volumes iii-8°; prix, i5o fr.
T. xxxi. — Seplemhre 1826. 42
658 T^lTTtRiVTURE.
parce qu'il aura <'te fait pour cllo, parce qu'il lui conviendra
plus qu't\ tout autre, parce qu'il sera prccisemcut lo scul qui
puisse lui plaire et qu'elie puissc admettrc.
L'objection t'lrce du caraclere imitalif d'uue litterature ne
m(; touclio cpie faibleuient. A bien c>;aniiner les choses, tout,
en litterature, tourne daus un cercle pcrpetuel d'imitation. Si
les premiers poetes, ecrivant sans niodeles, n'ont imite que
la nature, leurs ouvrages sont devenus des objets d'imitation
pour les nations qui leur ont succede. La raison en est simple.
Outre que le genie s'electrise par le contact du genie, la per-
fection dans les arts resulte de certaines lois , de certains
precedes , qui , une fois decouverts, n'ont pas du ensuite etre
negliges , parce qu'ils etaient I'expression certaine de la
verite. II en est d'ailleurs de la litterature comme de tonics
les connaissances hnmaines ; ce sont les travaux anterieurs
qui servent de flambeau pour des investigations nouvelles.
Avant de s'ouvrir une route non encore frayee, le genie se
fortifie de I'cxperience des devanciers ; et Ton pent dire avec
exactitude que c'est toujours an moyen de riiiiitation que Ton
arrive a la creation. Pour ne parler que des comj)Osilions lit-
teraires , les seules dont il soit question dans ce mon)ent, qui
pent douter que la Jerusalem delivrce , le I'anidis jcrdu, les
Lusiades , XEnfer , le Roland fuj-ieux , nous d irons meme le
Messie , ne soient des emanations plus on moins eloignees
I'e Xlliade et de XEneide? Le genie le plus independant,
meme alors qu'il dedaigne de suivre les modelcs , les etudie
encore; et c'est en interrogcant leur route qu'il apj)rend a
s'en ecarter.
Il ne faut done point s'etonner si tous les theatres modernes
ont plus on moins emprunte des auciens; les poetes qui ont
fonde ces theatres pouvaieut-ils empecher qu'il exislat avant
eux de nombreux chefs-d'oeuvre , que ces chefs-d'aMivre scr-
vi.ssent de base a Teducation publique et privee ? de ladmira-
tipn a I'imitation , la consequence etait inevitable. Penetres des
ouvrages antiques, les modernes ont du se modeler siu- eux.
Mais ceux qui possedent veritablement le don de la poesie.
LITTER ATURE. fiStj
ne save lit pas se borner a des copies serviles; ils s'a[iproprieiU
ce qii'ils imiteiit: ils creent en iriiitanl. lis font plus : le besoin
<Ju succes les asseivit au gout du peuple pour lequel ils ecrivent.
Soius Icur plume, les cmprunts a I'anticpute se dcguisent, se
modifient; combines d'apres une nature et dcs idees diffe-
rentfs , d'apres un climat et des mosurs d'une autre especc,
ils perdent insensibleinent la trace de leiir origine. L'iinitation,
appropriee au gout d'une nation nouvelle, prend bientot tons
les caracteres d'une composition originate ; c'est ainsi qu'une
societe nioderne acquiert avecle teins une lilterature vraiment
nationale.
Cet expose offre I'histoiie fidele i\n theatre francais. Sans
doute, ce theatre doitbeaucoup a la Grecc, bicn qu'il n'cn tire
pas immediatement son origine; mais il n'en est, en aucune
facoo , la servile copie. Successlvement compose d'imitalions,
prises tantot chez un peuple , tantot chez un autre , il les a
combinees avec des elemens nationaux ; et ces imitations ont
insensiblement obtenu le droit d'asile. La France a possede
un theatre national, qui est non-seulement le meilleur, mais,
eu egard a sou es])rit particulier , le seul qu'elle put avoir.
Et d'abord , pour demontrer Tevidence de cette derniere
proposition, remonions a I'origine de ce theatre; essavons
de le suivre dans sa marche, dans ses variations successives ,
et dans ses progres. L'histoire a la main , exposons naturel-
lement la formation du theatre francais. Ce sera le meil-
leur et peut-etre I'uniqne moyen de resoudre les questions
que Ton souleve depuis quelques annees.
L'histoire politique et l'histoire litteraire ont entre elles
une ttroite liaison , et Ton voit dans les annales de loutes
les nations le sort et la direction des litteratures dependre
presque entierement des evenemens publics. Les croisades
nous avaient donue le spectacle des my s teres ; la lutte
sanglante prolongee depuis Louis XII jusqu'a Francois I",
entre la France et I'ltalie , jeta uos premiers ecrivains dans
I'imitation des poetes italiens , et bientot apres dans I'etude
de I'anliquite , remise eu honneur par les Medicis ; enfin, les
66o LITTERATURE.
i;uciics cuntinnc!l;s, livrt'os contre U-s Rspni^nols <U'[)iiir. Irt
formation de la liguc jnsqu'A Henri IV , introdnisirent on
Franco la litrcralnre es[)ai;nole.
Ce rapprocliomcnt ontre les ovencmcns politiqnes dies essais
litteraliesexigeqnelquesdeveloppcmens. Revennsdcscroisadc?
avec im esprit do mysticitc , melc dc superstition grossiere, lea
Francais etaient naturellement prepares an spectacle des my.i-
teres, el les confreres de la passion qui arriverent, comme
on lesait, dc la terre sainte, ponr representer leurs pieuses
momeries, repondirent a un des besoins de I'epoqne. Lorsqiie
Charles VIII entreprit ces expeditions d'ltalie, qui dcvaient se
prolonger pendant pres d'lin si^clc, et obtint quelqnes succes
suivis de grands revers, iin long sejour siir cette terre classi
que, mela la population francaise avec la population ilalienne;
la languc de Petrarque devint familiere en France; les pre-
mieres compositions dtmeliiteraturc plus avancee que la noire,
provoquerent des imitations; et ie ileau de la gnerre ne fut pas
sans fruit pour lesprogres de I'intelligence. Te! fut I'echange
intellecluel qui s'etablit entre les homnles iusiruits des deux
pays, que la renaissance des letties, sous Leon X, se propa-
gea rapidcment en France; notre litterature a cette epoque
snbit une premiere modification ; elle devint riniitation com-
binee des modeles de la Grece et des compositions italiennes.
L'alliance de Catherine d(^ Med-cis avec Henri II, en intro-
dnisant a la cour de France une fonle de seigneurs et de poetes
italiens, favorisa cette direction de la litterature francaise.
Mais elle devait bientot subir une modification nonvelle, et
ce furent les desordres de la ligue, soutenue par I'Kspagne,
qui lui donnerentce nouveau caractere. Alors, le melange, qui
s'etait jadis opere entre les populations francaise et italienne,
se Jit entre les Francais et les Espagnols. La langue de Lope de
Vega balan^a parmi nous I'empirc de la langue de Boccace.
Nous avions eu des concetti, des pointes, de fades jenx de
mots ; nous les echangeames ponr le style de la galanleric mau-
resque; on aima les rodomontades, les grands coups d'epce,
les mcrvcilles de la chevalcrie; la scene, partagec jnsqu'alors
I.ITTERATURE. GGi
eiitre Ics pastorales italiennts, ct les imitations servilcs du
i^rec, admit Ics intrigues {.•onip!iqiu';es, et celtc galarilcric,
cette ficrte chcvaleresque, qui ferment le principal trait duca-
ractere espagnol. Cette seconde revolution dans notre litlera-
ture flit plus durable que la premiere. Soil que le genie des
Espagnols s'.iccordat mieux avec le noire que le genie des Ita
liens, soil toute autre cause, la litterature francaisc put couti-
nuer a se modifier d'apreslcs niodeles antiques; mais sa direc-
tion fut desormais fixee. Le theatre francais fiit une emanation
du theatre espagnol, approprie a notre gout, et ramene a la
vraisemblance par robscrvation des unites grecques.
Les faits viennent h I'appui de cet expose. Depuis Jodelle
(usqu'a Carnier, or voit notre litterature, fidele a I'impulsion
du siecle de Leon X, n'offrir que des copies du grcc et de
litalien. Le theatre comique naissant est envahi par des bouf-
fonneries, melees dc quolibets , ou par ccs sortcs de pieces
nommees bergeries ou pastorales. Tandis que Ronsard et ses
imitateurs derobent aux litteratures grecque et latine Icurs
formes, etjusqu'a leurs mots, Jodelle, Grevin et Garnier cal-
quent leurs tragedies sur la tragedie de Sopliocle et de Sene-
que. Sans avoir le genie du premier, ou meme le talent du
second, ilscomposenldes drames tailles absoluincntsurlememe
patron ; chacun drs actes se compose d'un monologue et dime
scene; lechoeur, presque toiijours present, occupe ia meme
place que dans Ics ouvrages antiques; la mesure des vers varic
sanscesse; les tragedies sont parsemees de stances et d'odes
morales et philosophiques, a I'exemple des tragedies grecques.
Enfin , le sujet, dune simplicite nue, n'offre ni incideiis, ni
intrigue. C'est alors qu'on pent dire que le theatre francais est
la copie servile des Grecs et des Latins.
Mais, cette simplicite extreme, cette absence d'effcts do
theatre, d'incidens, d'action, ce style declamatoire, celte
ignorance du dialogue , n'etaient point conformcs au gout d'lme
nation vive, qui aimc le mouvciuent, dont I'csprit vent eire
occupe; etle genre niis en credit par .lodellc ne dura pas phis
que cehii de Ronsard. La litleiaturc coiumcn^ait a resscntir
tiGa LITT^RATURE.
rinfliience espagnole, lorsque Alexandre Hardy s'cmpara dii
theatre, et I'approvisioTina pendant longiics anntes de ses in-
~noinbrables pieces. Si ce poete , aiissi mediocre que fecond ,
ignora la pUipart des secrets de I'art, reveles a ses siicces-
seurs , 11 n'en niarqua pas moins le passage de I'imitalion
grecqiie a I'imitation espagnole , et n'en fut pas moins le pre-
mier qui donna a la tragedic la forme qu'cUe devait conserver,
en la perfectionnant. On n'a pas assez rcmarque I'influence
cxercee par cet aiiteur, dont les cuvrages sont la transition
naturellc de Gamier a Corneille. Hardy, connaissant le gout
de sa nation , introduisit dans ses drames de I'intrigue, du dia-
logue, quelquefois mcme des caracteres; s'il ne fit pas faicc
a I'art des progres remarquables, il ouvrit la route; et c'est la
im titre de gloire tres-reel.
Tristan lui emprunta sa Mariamne; Rotrou, Mairet et Du-
rier n'allerent plus loin que parce qu'ils s'intruisireni a son
ecole. Enfin, Corneille nous apprend, dans I'examen de jl/e-
U%e , qu'il n'eut d'abord que Hardy pour guide : si ce grand
homme cut bicntot laisse dcrriere lui son premier modeie, il
ne faut pas meconnaitre toufefois et ce qu'il dut a la lecture de
Hardy, et ce que son genie recueillit ensuite du commerce de
I'Espagne. Le Cid , emprunte a Guillen de Castro , et partout
empreintdes moeurs clievaleresqnes deslberiens, determina le
gout du public francais. Le sentiment du beau se developpa ;
I'art du critique suivit immediatement les premiers travaux du
genie. L'Academie francaise, recemment instituee, veilla au
perfectionnement de la langue; de nombreux ecrits repandi-
rent la lumiere sur les tenebres qui cnvironnaicnt encore le
berceau de I'art dramatique, et insensiblement, les imitations
etrangeres se modilierent, suivant nos moeurs et notre genie
particulier. Une etude approfondie des anciens, des poetiques
d'Aristote etd'Horace, revela les lois immuables de Tintoret
dramatique; alors, sans revenir ;\ de simples copies, on appli-
qua aux formes du theatre espagnol, les vrais principes de
I'art; on recounut les nombreux defautsde Lope de Vega, de
Calderon ; le bon sens du public bannit ces defauts de notre
LITTER ATURE. 6C3
scene, qui ne conserva de ces ecrivains que Icui galanterie
chevaleiesque, alors d'accord avccnos mceurs; entrc leurs in-
trigues obscures et compliquees et la simplicite grecqiie, on
i,'arda iin juste milieu; les convenances de la scene fiirent bien-
tot couuiics; et, apres avoir pris des iecons au-deUi des Pyre-
nees, ie theatre francais eclipsa bientot ses modeles. La tra-
i^edic nationale etait trouvec ; et Corneilie, grandi par I'etudc
des anciens, avail determine Ie caractere de ce theatre, en le
portant au plus hant terme de sa gloire.
La tragedie francaise acquit, sous la plume de Racine, une
nouvelle perfection. Done plus que Corneilie, dn genie qui
acheve, il conniit mieux I'art secret de la fable tragique, et la
disposition des diverses parties dudrame. Son expression, plus
elegante, fut plus vraie et plus pure. Familier avec les anciens,
il leur voua une espece d^ culte, mais son bon sens exquis lui
apprit a s'eloigner des imitations serviles. Ceux qui ont pre-
tendu que le theatre de Racine etait I'iinage iidele du theatre
grec, n'ont jamais pris la peine de rapprocher ces deux thea-
tres, lis eussent etc frappes des enormes differences qui existent
entre eux : lis eussent rcconnu que Racine, meme dans les
sujets le plus evidemment empruntes aux Grecs, a toujours
renforce I'intriguc , etendu Taction, elargi le cercle du drame,
multipliantles personnages, variant les caracteres, appropriant
tcUement a notre gout ses emprunts les plus reels, que sa com-
position est devenlie originalc.
J'ai raconte I'histoire de la tragedie en France ; et ce recit
repond suffisamment aux criliqucs pen instruiis qui nous re-
fusent un theatre national. On vient de voir comment I'art
s'est forme par degres; comment le" genie de nos poetes, ins-
pire par ce gout sage, cette haute raison, et surtout ce senti-
mcns exquis des convenances, qui caracterisent la nation
francaise, a perfcctionne ses primitifs el grossiers modeles. II
me reste a indiquer quelques traits particuliers, quelques ca-
racteres distinctifs de notre scene, qui la separent uon-scide-
mcnt dn theatre grec , mais de lous les theatres modernes
])arce qu'ils appariienucnt specialemeut au genie de notrt;
664 LITTERATURE.
nation. Sans parler de ramonr, sentiment prestjue elranger
aiix pieces antiques, et snr lequcl la plupartdc nos pieces sont
fondees, notre theatre sera toujours rcniarquable par I'oliser
vation la plus severe el la plus ctroite dcs convenances. Celtc
observation est due au tact tout particulier d'un peuple qui,
doue d'une rapidite extreme de perception , ne supporte rien
dc confus et d'equivoqiie. Je nc crains pas de dire que I'art
dene jamais blesser les birnseances, que le respect du public
et de la conscience du spcctateur , n'ont ete portes nulle part
aussi loin qu'en France : les Grecs eux - memes nc peuvent cn-
trer sous ce rapport en coroparaison avec nous.
Un autre caractere de notre scene, et Ton observera que je
ne parle que des chefs-d'oeuvre, seules productions qui puis-
scnt servir de base a une discussion, c'cst la juste proportion
qui repne entre les parties du dranie. Nulle part encore , on
n'a su mieux seborner, qu'en France; cet art difficile de nc
dire rien de trop , de tenir le milieu entre la secheresse et les
longueurs, a ete particulierement connu de nos ecrivains ; mais
la gloire neleur en revient pas tout entiere. EUe appartient a I'es-
prit meme d'une nation vive, quidevine aisement, qui en tend a
demi-mot, qui saisit en meme terns une idee et toutes scs con-
sequences. Feuilletez les drames etrangers, ceux qu'on nous
vante le plus, et dites-nous s'ils ont jamais rien offert qui ap-
proche de ce prodigieux merite.
Sans parler du genre admiratif, cree par le genie de Cor-
neille, et qui est la propriete exclusive de notre litterature,
on conviendra ensuite que , scule entre les theatres modernes,
la scene francaise fut toujours un spectacle de gens bien oleves.
On n'y souffre que difficilement les vices bas, et les moeurs
corrompues : c'est le fondateur de notre theatre, c'est Cor-
neille qui lui a donnc cette sortc de pudeur a laquelle il est
reste fidelc, et qui convenait particulierement a des spectateurs
instruits et delicals. Je sais qu'au nombrc des perfections dc
Shakespeare, scs admiraleurs complcul cclle d'etre a la porfee
des gens du peuple, el de plairc a un partem; rempli d'oii-
yricrs et dc malclDls. Je convicns encore que la tragt^dic n'ost
LITTtRATURE. 665
passpecialcmcnt dcstinee aux savans; cependant , ce ne scrait
pas saus quelque peine que I'on verrait ce bel ait descendre aii
niveau de la populace, en puisant dans les tavcrnes el dans
les cchoppes ses scenes et ses tableaux. En tout etat de cause,
on nous permettra de penser que Corncille, en mettant I'ins-
tiuction a cote du plaisir, a i-endu h I'art le plus beau service
qu'il ait jamais recu du genie.
L'ordre, I'observation des convenances, la juste mesure du
drame, et la dignite des tableaux, forment done les caracteres
particuliers de la scene francaise. Un dernier et puissant me-
rite, c'est le respect le plus etroit pour la vraisemblance. On
avu, dans I'article precedent, en quoi consiste la vraisem-
blance dramatique. Ajoulons qu'entre la verite reelle et la ve-
ritc; theatrale , il existe une difference, ordinairement mecon-
nue des critiques; nos voisins ont souvent prefere la verite
commime ; les poetes francais, pins lideles au but de I'art, n'ont
admis que la verite theatrale. lis ont donne de I'ideal aux li-
gures ; ils ont clioisi leurs tableaux. Pour revenir a la vraisem-
blance, aucune nation n'a mieux compris que la France la,
necessite de proportionner le tableau au cadre , et de n'intro-
duire sur la scene que ce qu'elle pent contenir. Le theatre
francais n'admet point cettc muUiplicitc de personnages qui
nous choquc dans les pieces anglaises ; il ne souffre guerc
rintroduction de roles parasites ; il ne veut point que des per-
sonnages incocnus soient jetes a I'improviste dans les dernicrs
actes d'une piece. II ne tolere pas I'emploi des machines, des
effets de decoration, distinguant la tragedie de I'opera, et per-
suade que de beaux vers de situation ct un recit eloquent va-
lent mieux que toutes les combinaisons du machiniste.
Le bon sens de la nation francaise n'cciate pas moins dans
le style que dans la combinaison de la fable. C'est en France
surtout que Ton conserve precicusement cet axiome : le style
fait vivre les oeuvres du genie; et que Ion fait pcu de cas du
drame !e mieux combine , s'il est mal ecrit. Quelques personnes
accusent encore la langue francaise de pauvrele el d'inconi-
patibililc avec la poesie. Ccs reproclics , si souvent repctes.,
G66 LITT£RA.TLRE.
n'ont auciin fondcniont; disons plus. II est picsque sans exem-
ple qu'aucunc lani,'ne aitete I'objet d'aiUant d'etiides, air snhi
aiUant d'experiences que la lang;;e fraiicaise. Depuis qu't-Ue
est sortie do rcn/aiice, iin corps litterairc, compose en parlie
dcs illustrations de chaque epoque, a etc commis a sa garde.
Des grammairiens habiles I'ont decomposee ct analysee avcc
soin; des criti(]ues nombreux ont examine son genie particii-
lier j des grands ecrivains I'ont sanctionnee par lears chefs-
d'oeuvre. La langue francaise s'est pliee si tous les tons, a tons
les styles: si quelques auteurs I'ont trouvee trop methodique,
d'une allure trop simple, ils ont oublie que, creee pour les
Francais, elle devait porlcr I'cmpreinte dc I'esprit national, et
repondre a I'inipaticnce des lecteurs, par la clarte et la rapidite
naturelle de sa marche.
Lc style dramatique n'a pas cte moins etudie en France que
tous les autres styles, et le genie a bientot demele son vrai
caractere. Elegance, noblesse et simplicite, tels ont du etreses
divers merites. Des speclateurs, cnnemis des sentimens faux,
autantquc des idecs vulgaires, n'auraient supporte ni un style
qui se fut perdu dans les nues, ni un style bas et rampant. II
a fallu prendre le milieu; et ce que Corneille avait admirable-
menl rencontre dans quelques scenes, devint, avec plus d'ele-
gance, la maniere habituelle de Racine: auteur admirable qui
sut toujours proportionner I'exprcssion a la pensee; portant
la sagesse/ la plus exqcise dans scs hardiesses les plus eton-
nantes; n'oubliant jamais, dans ses plus beaux developpemens
poetiques, qu'il fait parler des personnages, et que son pre-
mier devoir est d'etre naturel. Jamais ecrivain ne connut mieux
la puissance d'un mot mis a sa place; jamais ecrivain ne comprit
mieux le secret de la simplicite noble, I'alliance de la poesie
et de la verite.
En exposant I'hisloire et les principaux merites de la tra-
gedie francaise, il a ete loin de notre pensee de preteudre
quelle soit exempte dc defauts. La perfection n'est point I'apa-
nage du genie de rhomme. Mais ces defauts , si ameremefit
reproches au theatre frai.^ais, sont ceux nieme de la nation.
LITTERATURE. 667
II ne fant pas s'etonner si iine scene faite pour nous poitenotre
empreinte fidele. Le drame francais etant rcgulier par excel-
lence, on i'a accuse de froidciir. Renferme par I'observalion
des trois unites dans les bornes d'une exacte vraisemblance,
on I'a denonce comme faible, commc resserre dans des pro-
portions mesquines. N'admettant ni le faux ni I'exagere, on I'a
prespnte comine allant terre a teire, comine nianquant d'ima-
gination, dc genie. Enfin, conime il repousse le mysticisnie ,
les sentimens quintessencies, le spiritualisme religieux, on a
pretendu que, toujours positif, il manquait de poesie e't d'ins-
piration. Ces reproches, fondes ou non , il faut les adresserau
caracteie francais, plus spirituel qtie passionne , preferant a
tout la verite et I'ordre, et ne sachant pas s'emouvoir, si sa
raison n'est salisfaite. Les Francais ne sont ni mystiques , ni
enthousiastes religieux; avant de corriger leur tragedie , il fau-
drait commencer par changer leur nature.
Mais, on reproche a quelques tragedies francaises des de-
fauts qui tiennent aux epoques; on reproche a Corneille des
raisonnemens alambiques, a Racine une galanterie fade, trop
de faiblesse pom- les moeurs de son siecle, et a Voltaire I'abus
des sentences philosophi(]ues. En convenant que ces reproches
sont a quelques egards fondes, je demanderai qu'on me cite
un seul ecrivain qui n'ait pas sacrifi'e a son siecle? Le geant de
la tragedie anglaise, Shakespeare n'a-t-il pas subslitue aux in-
trigues electorales des Romains les manoeuvres de la cite de
Londres ? Le mysticisme qui regne dans les pieces des auteurs
actuels de I'Allemagne, n'est-il pas plutot le caraetere de I'e-
poque, que celui des terns dont elles reproduisent I'image? Dans
tons les pays, dans tous les terns, les ecrivains ont sacrifie et
sacrifieront a leur siecle, parce que le genie a besoin de parcoii-
rir une route semee de succes; I'accnsation dirigec contre notre
theatre atteint tous les theatres et toutcs les litteratures.
On I'a dit : la perfection n'appariient point a Thiimanite, et
notre scene cut dans tous les tenis des defauts que les ages
suivans out signales et qu'ils ont taclie d'cviter. Ainsi, les har-
diesses judicieuses de Voltaire ont elargi le cercle de I'art,
668 LITTliRATlJllE.
ttop restrciut, tlans I'aijc precedent , par louservation iij|,oii-
reuse ties trois unites. Le niome eerivain a foi lifle le double
ressort de la tcrreui ot de la pitie , affaiblis par les succcsscurs
dc Racine; il a donne phis de vcrite au costunu', ct dc dcve-
loppenicns aiix passions. On avait cpuisc Ics snjets j^rccs it
romains; des poctes dramatiqiics ont choisi dcs snjets mo-
dernes, prouvant que nittre Melpomene n'etait ennemic d'an-
cun snjet, ct ne s'etait fcrme aucnne des sources do rinterut.
Enrichi de nouvelles conqnetes, notre theatre s'est approprie
successivement toutes les beautes el range res; ue les modclanl
pas, comme on affecto de le repeter, sur un type uniforme,
mais les soumettant au goiit particuiier de la nation (Vancaise.
Le cercle de ces conqnetes pent s'etendrc encore. A Dieune
plaise qu'une admiration intolerantc pour nos grands hommes
nous fasse rcgarder la source des succes comme desormais tarie !
raalheur a qui prctendrait assigner une borne aux efforts du ge-
nie! nous irons plus loin; ehaque siecle, ayant scs idees, ses
moeurs, sa direction particnlierc, ouvre des routes nouvelles
aux grands ecrivains , et I'art dramatique jicut se rajeunir ,
se renouvcler avec les generations. La galantoric qui donii-
nait le siecle de Racine, et a rintlneiicedelaquellcil no putscsous-
traii-e , ne serait plus un moycn de succes ; I'esprit philosophique
du dix-huitieme siecle a subi de notables modifications, depuis
notre memorable revolution. Les formes sentencieuscs dc Vol-
taire auraient aiijourd'hui quclque chose de suranne. Mais, dc
ces maximesisoIees,nousavons passe a I'application; nos idees
sont devenues plus mures et plus eclairees. L'art dramatique
pent trouver une nouvelle source d'instruction et d'effets dans
nos habitudes recentes, dans cetle vie nouvelle qui anime la
societe. Aux intrigues des cours, il pent snbstituer les grands
niouvemens des peu|ilcs; aux scenes amoureuscs, il pent faitx'
succedcr les passions populaircs, les guerres intestines, lo ta
bleau des discordes publiques. La libcrte peut devenir la muse
dramntiqne dudix-nouvieme siecle.
Mais, si nosniocurs ont change, si dc nouveaux inli'iets, des
pcnsces plus utiles s'emparcntde noire inleiligence. le gout tic
liiti!:rature. GG9
la nation , sou bon sens, n'ont siibi aucunc alteration. La mode ,
la noiivcautc, out pii S(Jcluire qiielqnes osprits biases; on a pu
eprouvcr un niomeut do sniprise ai^reable, a la Icctiue do ces
drames monslrueux, dans lesquels le genie allemand se livie a
tons les ecarts, et risque toutcs les folies; mais la masse eclairee
de la nation est restee etraugere a ces aberrations dignes de
I'enfaucede i'art. En permettantanxecrivainsde puisera toutes
les sources, et d'ouvrirdes routes nouvelles, la generation pre-
sente leur commande de respecter les lois de la raison , celles
de la vraisemblance, et siirlout ces bienseances dramatiques,
sans lesquelles I'art perd sa dignite, et renonce a ses plus no-
bles nioyens de succes. L. Thiesse.
( La suite cm prochain cahier).
Chansons de P. -J. de Berangeii (i).
second et dernier article.
(Voy. Rev. Enc, t. xxx , pag. 38 1 -385.)
Le legislatcur du Parnasse francais , Boileau, a dit , en
parlant de la poesje lyrique :
Son style impetiieux souvent marche ati ha sard ;
Chez elle uu be<iu desordre est uii ef/et de Van.
J'en demande bien pardon a Boileau ; mais je ne puis ctre de
son avissur ce point. Jenecomprcnds en aucune facon comment
un desoidrc pent etre beau ; et, loin de voir dans le desordre
un ej/et de I'art, je n'y vois qu'un effet de I'impuissance de
I'arliste. L'ordre n'est pas moins necessaire dans ime ode que
dans imehistoire, on dans un discours; seulement, cet ordre
(i)Paris, iSaS; Baudouin freres. a v.in-8"; prIx, 8 fr.' — Lesniemes
libraiies viennent de publier una jolie edition des Chansons de Beran-
geren 4 vol. in-Sa , qne la modicit^ du prix (6o c. cliaque volume ),
I'elegance de rinipression et la commodite du format feront reclier-
cher par les nombreux amis du poete national.
G70 LITTER ATURK.
se laissc nioins ap^'icevoir; on pliilot, c'cst un ordr«; d'unt-
autre nature. Le but du poeto lyrique n'est pas le meme que
lo but do lorateur ou del'liisiorien; leursmoyens doivent done
ctrc dilfcrcns. L'un ne veut qu'eclaircr rosi)rit; I'autre veut
frapper riniaginaliou et toucher le eccui- : run suivra done,
dans le developpenient d'un sujet, la marche rationnelle des
ideas; I'autre suivra Tordrc des ini])ressions que le sujet aura
fait naitre dans son anie. L'un choisit la route la plus directe ;
I'autre, cellequi prcseute a la vne les plus beaux aspects. Tous
deux, ccpendant, obeissent a des lois creees par la nature et
revelees par le gout: tous deux se conduiscut d'apres line lo-
gique egalement sure : seiilement, chez le premier , c'est la lo-
gique de I'intelligence; clicz le second, c'est la logique du
sentiment et de I'imagination.
Transporter au milieu d'lme belle campagne un peintre, un
izeometre , lous deux egalement habiles dans leur art. Leurs
procedes seront-ils semblables ? Non , sans doute. L'un des deux
agira-t-il done au hasard? pas davantage. Chacun procedera
suivantles lois de son art: tous deux serontdiversement fuleles
a la raison et a la ^erite. Celni-ci niesurera methadiquenient
les dimensions, nivelera les surfaces, calculera les distances;
vous aurez un plan rempli d'exactitude et de clarte : celui - la
clioisira le point de vue le plus frappant , rassemblcra les ae-
cidens les plus pittoresques, opposera heureusenient I'ombre
et la Inmicre; vous aurez un brillant tableau de paysage. Voila
le poete, et voila le prosateur.
Chcrchons, dans les ouvrages de M. Beranger , quelques
exemples de cette maniere de composer qui distingue le poete,
ctnous reconnaitions que, si la marche en est plus hardie, plus
rapide, plus originalc quecelle d'un ouvrage purement didac-
tique,clle est loin pourtant d'etre livree«w hasard.
Le poete veut nous montrer le fleau de la barbaric pret a
s'elancer des glacesduNord sur I'Europecivilisee. S'il ne vou-
lait qn'indiquer a notre raison le danger qui nous menace, il
nous peiudrait le midi de I'Europe, affaibli par ses discordes
intestines; Us chefs ties nations, uniquement occupes de re-
LITTERATURE. 671
primer chcz les pcnples rfs|>rit de libertt", inscnsibles aiix
perils plus reels qui nieiiacenl a la fois les peiiples et les rois;
11 nous presenterait , en regard, Ic geant du Nord, grandis-
sanl.dc jour en jour, etendant deja sur !e Midi son bias redou-
table : il exhorterait les nations el les monarques a deposer
leurs vieilles qnerelles, a s'linir pour conjurer la ruine com-
mune : telle est la marche que le simple apercu du sujet peut
suggerer a tout le monde. Eile est irreprochable aux yeux de
la raison; niais vous n'y rcconnaissez point la main du poete.
L'aiiteur eiit-il mcme execute uu tel plan en beaux \ crs,il n'au-
rait fait encore qu'une ceuvre de prosateur. Voulez-vous main-
nant connaitre comment s'y prend un poete? Ecoutez ces
acccns sauvages; c'est le chant du Baibare, qui, des bords du
Tana'is, menace cette Europe, qu'il regarde deja comme sa
proie, devore en esperance nos lichesses et les fruits de notre
industrie, et, s'enivrant dtja de sang et de carnage, excite
son coiirsier, feroce comme lui, a fouler aux pieds les lois,
les arts et la civilisation europeenne. C'est ainsi qu'il vous
frappe de terreur , qu'il vous met en face du danger, et qu'il
vous force a le contenipler dans tout ce qu'il a d'horrible.
Meme artifice dans Psara, ou le Chant de vtctotre des Otto-
mans. Ce sont des hurlemens de fureur, c'est la sanguinaire
exultation des exterminaleurs de Chios el de Psara, rcproduils
avec la plus effrayante energie. Quel dedain dans ce refrain
desBarbares, que rauteiir nous a fait entendre six fois :
Les rois chretieiis nc la vengeront pas!
C'est le reproche le plus terrible peut-etre qu'ait fait relenlir
aToreilledes puissans de la terre rhumanit*; outragec.
Mais la scene a change : nous voici dans un riant paysage.
Des groupes de jeunes garcons et de jeunes filies folatrent sui-
le gazon avec la securite de I'innocence : tranquilles sur la foi
d'nn ciel pur, i!s dansent gaiement aux chansons. Cependant,
dans le lointain , vous entrevoyez I'orage qui se forme et les
eclairs qui commcncent a sillnnner la nue. Rien de plus gra-
672 MTTTfiRATDRE.
cieux, lion ilo plus loucliant que cette scene allegoiiquc: c'ost
iin tableau du Guide on de I'Albane.
Qiiclqncfois, une opposition hafjilenient amcnce vient ajou-
ter a reffetde la composition. Promenons-nous un instant dans
cette campagnc, eclairce par un soleil pnr ct doux : la, desvil-
lageois, heureux dans leur pauvrete, dansent au son dc la
musette. Regardez un pen plus loin : quel est cc pale fantome
qui apparait entreces barrcaux,au milieu de cent ballebardcs ?
C'estle vieux tyran de Plessis - les - Tours, qui s'avance, le
chagrin sur le front, le soupcon et I'effroi dans le coeur. II
vient essayer de sourire aux cbals des joyeux paysans : mais
leur gaite le desespere ; ilfidt avec sonfavori. Cette peinture,
cc contraste, ne rappellent-ils pas le fameux tableau du Pou-
sin, avec plusde profondeur encore dans la pensee et une plus
haute moralite dans la le9on ?
Dans Octane , M. Beranger a fait du contraste un usage ega-
lenicntheureux. Dejeunes Romains,le front couronne de fleurs,
chanteiit leurs plaisirs et appellenta d'innocentes voluptes la
])eaute que I'ambition condamneasubir les caresses de Tibere.
Dans cette piece, M. Beranger a su entremeler I'energie de
Juvenal a la grace d'Anacreon.
C'etait encore up sujet eminemment dramatique que celui
du Cinq Mai. Un guerrier, dont la main puissante ebranla le
monde, expire abandonne sur un roc, a cinq mille lieues de
son pays, de son epouse ct de son fils. Quoi de plus touchant,
quoi dc plus profondenient moral que cette opposition entre
ce qu'orit de plus cblouissant la prosperite et le genie, et cc
que I'adversite a de plus amer ! L'ecueil d'un pared sujet etait
la declamation ct Tabus des lieux communs. Mais ce n'est pas
avec M. Beranger qu'un tel abus est a craindre. Voici le drame
qu'il a concu.
Aprcs la double invasion denotre territoire, un soldatfran-
^ais s'est exile dans I'lnde. Cinq aus ecoules, il cede au bcsoin
de revoir son pays. II monle sur un navire espagnol et reprend
le chemin de I'Europe. Pendant la traversee, il sourit d'a-
vance a la patrie qu'il va revoir, a la famille qu'il va relrou-'
LITTERATURE. 673
ver, an tils bien-aime dont la main fermera ses yeux. Cepen-
dant, le pilote a nomooe Sainte-Helene : un drapeau noir est
suf la live.i. A cette vue, les yeux du vieux guerrier se rem-
plissent de larmes, et d'une voix eteinte , il repete encore ce
refrain, qui renferme le siijet tout entier :
Pauvre soldat, je reverrai la France ;
La main d'un fils me fermera les yeux...
Get art de faire ressortir , sans paraitre y songer, et par la
seule maniere de disposer son tableau, la pensee dominante
d'un sujet, est I'un des secrets du talent : les exemples en sont
nombreux chez M. Beranger.
Si les bornes de cet article nouslepermettaient, nous nous
ferions un grand plaisir d'analyser aussi quelques-unes de ses
chansons satyriques. Ce genre, on le sait, est un de ceux
dans lesquels excelle notre auteur. Toutes sont etincelantes
d'csprit et de gaite; plusieurs sont des raodeles de composition
poetique.
On peutreconnaxtre, d'apres tout ce que nous venonsdedire,
que parmi les qualites qui distinguent le talent de M. Beran-
ger, on doit surtout compter laraison qui preside a ses con-
ceptions lyriques : non cette raison froide et methodique, qui
marclie u pas comptes et ne s'ecarte jamais de la ligne droite ;
mais cette raison creatrice et feconde qui discerne le vrai et le
faux , qui devine les convenances, presse les effets, dispose
les moyens, et revelc secretement an talent qu'elle inspire les
formes les plus heureuses dont sa pensee puisse se revetir.
C'est un grand exemple offert a quelques-uns de nos jeunes
ecrivains , qui, sur la foi du vers de Boileau , se croient trop
souvent dispenses d'avoir le sens commun en poesie, et sem-
blent chercher le desordre avec autant de soin qu'il en faudrait
raettre a I'eviter.
II nous reste a parler du style de M. Beranger. Ce n'est pas
la partie la moins brillante de ses ouvrages. On y trouve reu-
nis la correction et la verve, le gout et I'imagination , la vi-
gueur et la grace; point de maniere, point de vague, pOint de
T. XXXI. — Septcmhre i8a6. 43
674 LITTI?RATURE.
faux brillans; partout une expression franche , ferme, heureu-
sement figuree. A ces qualitos, deja si rares, M. Beranger joint
line qiialite plus rare encore; 11 sail varicr son style : U sait
prendre tous les tons , dcpiiis la gaite bouffonnc et maligne du
Marquis cle Carabas ou de la Marquise dc Prctintaille , jns-
qu'a I'elevation majcstueusc des Enfansdc la France cX. de quel-
ques strophes du Dieu des bonnes gens; depuis la mollesse
anacreontique de la Bonne Vieille ^ de VOrage , des Deux
Soeurs de charite, jusqu'a lapre et severe cnergie de Psara et
du Chant du Cosaque.
C'est surtoul en parlant de la tyrannic que M. Beranger a
porte an plus haut degre leioquence de I'mdignalion. On
pourrait dire de lui, comme de Tacite : Quand il peint les ty-
rans , ils sont deja punis. Dans Octavie , le poetesemble avoir
emprunte le pinceau de Juvenal pour peindre les amovirs lion-
teux de Tibere. Tout ee que le degout, le mepris et Tindigna-
tion reunis peuvent inspircr d'amer et de sanglant, se trouve
dans ses vers qui paraissent une vengeance terrible dc la pos-
terife.
Au milieu de nos sinceres eloges, la critique ne doit pas
perdre ses droits. Nous nereprocherons point a M. Beranger
quelquesinadvertances de prosodie eparses dans deux volumes
de vers excellens. C'est a lui, mieux qu'a nous, dejuger, par
exemple, s'il n'y a pas une syllabe de trop dans ce vers :
Aniions soudain deux millions de soldats.
II y aurait de l.i pedantcrie a insister sur des negligences si le-
geres et si faciles a faire disparaitre. Mais nous adresserons a
notre poete un reproche plus grave. La clarte est le premier
merite d'un ouvrage de poesie, et siu'tout de poesie lyriqiie ;
et le style de M. Beranger manque parfois de clarte. A force
de chercher la precision, il lui arrive dc toniber dans I'obscu-
rite : ses vers, si fermes, si brillans , ne sont pas toujours
exempts de quelque contrainlc. Ici, c'est une metaphore qui
n'est point preparee, et qui deconcerte I'esprit au lieu dele
frapper :
J
LITTfiRATURE. 675
Si le Dieu qui vous aime
A voulu nous punir,
Pour V0U5 sa main resseme
Les champs de Vavenir...
La,c'estune allusion que I'mtelligence ne pent saisir, sans
un retour de reflexion :
Trahi deux fois, ce grand homme a su vivre :
Mais quels serpens enveloppent ses pas?
De tout laurier un poison est Vessence.
Ailleurs , c'est une pensee qui , faute de developpement ,
semble manquer de justesse:
Vierges, I'outrage ajoute a vos appas...
Peut-etre, SOUS ce rapport, reste-t-il un progres a faire h
M. Beranger. Quel que soit, au reste, le merite de nos observa-
tions critiques , son talent n'en reste pas moins en premiere
ligne parmi les talens de notre epoquc. Nous dirons plus : nous
pensonsqu'il a, surses contemporains les plus distingucs , I'a-
yantage de posseder un talent complet. Plusieurs de nos jeunes
poetes offrent des parties aussi brillantes; mais cet ensemble
de qualites diverses, qui seul donne aux ouvrages toute leur
perfection, cet accord si rare de Yinvention qui cree , du juge-
ment qui choisit et dispose , de V imagination qui colore, et du
g^OMf qui epure et assortit les couleurs, voila ce qui leur reste
encore a acquerir; voila ce que nous trouvons chez M. Be-
ranger.
Berville.
Til. BULLETIN BIBLIOGKAPHIQUE.
LIVRES ETRANGERS(i).
AMERIQUE SEPTENTRIONALE.
ETATS-UNIS.
247. — * Sampson's discourse, and correspondence with
various learned jurists, etc. — Discours de Sampson , et corres-
pondance de ce jurisconsulte avec plusieurs autres savans, au
sujet de I'blstoire des lois ; essais, traites et documens sur la
meine maliere, recueillis par Pishey Thompson. Washington,
1825. In-8" de 202 p.
Ce fut en 1 823 que M. Sampson prononca, dans une seance de
la Soclcte liistorique de New-York, le discours ini])rime dans
ce recueil. L'edileur y a reuni plusieurs ocrits relatifs au meme
objet, mais entre lesquels II n'existe ])oint d'autre liaison que
celle qui pent resulter de cetic conforniite dans les matieres
'qu'ils traitent. Le livre est dedle aux deux chambres du 19®
congres, cbargees, dit I'editenr, de defendre les interets ,
d'augmentcr le bien-etre , de pourvoir aux besoins , de remplir
les vosux de tout le peuple de I' Union. Heiireux le pays oil les
jurisconsultes sont cclaires par la vraie pliilosophie, guides
dans leiirs recherches par la connnlssance de riiomme, le res-
pect de ses droits, le dosir de !e rendre lieureux sous des lois
dignes de ce nom ! C'est aux Elats-Unis que la reforrae des
codes eprouveralt le inoins d'obstatles, et serait plus pres de
la perfection ; rien n'cmpecherait que Ton y appliquat toutes
les verites connues. Cepcndant, ce rie sera peut-etre pasl'etat
republicain qui prendra I'iniliative de ce grand acte de raison;
I'Angleterre serable disposee a le devancer. En Amerique, on
ne connait encore que deux Etats dont les gouverneurs aicnt
propose a la legislature de proceder a la redaction d'un nou-
veau code ; et jusqu'a present, on ignore si cette proposition
(i) Nous iudiquons par un asterisquc (*) , jilaoc a c6te du litre de cliaque
onVTage, ceux des livres ctrangers ou francais qui paraitrout digues d'lioe atten-
tion particuliere , et nons en rendrons quclqiiefois compte daus la section des
Analyses.
I
LivREs Strangers.— ETATS-UNis. 677
est adoptee. L'Angleterre et TAinerique Iravaillent en ce mo-
ment pour I'instruction des juiisconsultes de tons les pays ; c'est
dans CCS deux contrees que la science fait des progres reels, et
les ouvrages tels que celui que M. Thompson a public, s'ils ne
peuvent conlribuer beaucoup a ces progres hors du pays ou i!s
furenl ecrits , rOpandront neaiimoins quelques luniieres jusques
dans les lieux les moins disposes a se laisser cciaircr. F.
Ouvrages periodiques.
248. — * The North American Rewiew , etc. — Revoe Nord-
Americaine, n" 52. Boston, 1826. In-8°.
Ce cahier de la Revue Nord-Americaine \ient au secours de
la Revue Encyclopediqne , et trace un de ces tableaux dont nous
nous attachons a former une collection. On y voil avec le plus
grand interet ce que les Iravaux des savans aniericains ont
ajoule aux sciences naturelles.A la seance du mois de fevrier
1826, M. James Deray en a fait le resume, avec beaucoup
d'ordre et de clarte : nous mettrons ce resume sous les yeux de
nos lecteurs, avec des observations sur les travaux correspoh-
dans de nos savans eiiropeens. Mais , nous lisons , dans le meme
article de la Revue Nord-Americaine, quelques particularites
sur la situation biblio^raphique des Elats-Unis , qui meritent
aussi notre attention. .. Un des grands obstacles au progres des
sciences dans ce pays, c'est qu'on y manque de livres, de ca-
binets, et en general de moyens matcriels d'instruction. New-
York , dont la population est de 170,000 habitans, a 10
bibhotheques publlques ou I'on couiple 4/',, 000 volumes; pour
line population de 70,000 habitans, Baltimore posscde 4 biblio-
Iheques et 3o,ooo volumes; Philadelphie offre a ses 160,000
citoyens ly bibliolheques et 60,000 volumes; Boston en a i3
et 55,000 volumes, pour 60,000 habitans... Mais on s'empresse
de loutes parts de completer les moyens d'instruction; les
bibliotheqiies de Boston vont recevoir des augmentations con-
siderables; les collections mineralogiques s'aceroissent egale-
ment; un cabinet d'anatomie comjiaree va s'elever a portee
des autres etablisserncns j)our les sciences. Parmi les institu-
tions qui les propageront avec le plus de succes, VAlhenee de
cette villa est sans contredit au premier rang. Lorsque ses
administraleurs auront termine I'execulion des j)rojels ancles
par le conseii, la bibliolheque de cet etablisseinent sera la
plus riche qu'il y ait en Amerique. » Une seule famiUe ( celle de
MM. Perkins ) a contribuc de 36,ooo dollars ( 180,000 fr.),
pour doter celte institution, et la pourvoir do lout ce qui pcut
678 LivRES Strangers.
assurer le succes de I'enseignement. Dans un pays ou le zele
dcs citoyens suffirait i)Our repandre partout les lumicros de
I'instruction, les universites paraissent peu necessaires : il y en
a une poiirtant, a Boston; elle est florissante, et ne reste en
arriere sur aucune des parlies de I'enseignement qui lui est
confie. La science pcnelre partout; toutes les voies lui sont
ouvertes el personne ne sc plaint qu'elle devienne trop com-
mune. F.
249. — Le Propagateur , journal Francais-Americain. —
New- York, 1826. Maiden - lane , n** 20. Ed. Louvet, edileur.
In - 4° de 8 pages ou 24 colonnes, petit texle, parait tous les
samedis. Prix, 18 fr. pour six raois; 32 fr. pour I'annee. On
souscrit aussia Paris, cliez Ponthieu, libraire, au Palais-Royal.
On peut s'adresser pour Ics depots d'ouvrages francais a en-
voyer au Propagateur , ou pour les echanges de journaux
francais a faire avec lui, a M. Isidore Lebrun, rue Coq - He-
ron, n° I , a Paris.
Plusieurs journaux francais avaient etc fondes a New -York
et a Philadelphie;niais ils n'avaient pu se soutenir au-dela du
deuxieme trimestre. L'un d'eux paraissait, en 1823 , sous I'in-
fluence d'un ambassadeur; mais , dans i'Union , de pareils
moyens de succes sont repousses par Topinion. La raauvaise
redaction des autres a sans doute cause lour chute , que Ton a
eu tort d'attribuer a I'indifference des Americains pour la lan-
gue francaise.
Les Americains savent que la France est, pour ainsi dire,
la terre classique de la litterature et des beaux-arts : ils sentent
Ic besoin de les cultiver ; et cette elude va etendre et fortifier
les relations de plus en plus actives que les deux nations en-
tretiennent par le commerce. New-York possede , depuis huit
mois , un opera ilalien que dirige avec beaucoup de succes
M.Garcia : cette ville jouit aussi de rexpositiou du tableau
du sacre de Napoleon par Daviu el d'un panorama d'Alhenes.
La litterature francaise fait une partie essentielledereducation
de la jeunesse americaine; et la langue francaise qui continue
d'etre celle de la Louisiane et dn Canada , est un besoirl dans
les ports tels que New-York , Boston, etc. Aussi le francais
est la langue parlee dans I'ecole de haul cnseignenient que di-
rigent les freres Pcngt)et, a Mont-Vernon, a quatre milles de
New-York.
Nous avons annoncti dans l'un de nos derniers caliiers( voy.
Rev. Enc, t xxix, p. i33 ) un nouveau journal francais public a
New-York. Plus heureux que ses devanciers, le Rcrciln obtenu
dcs son debtit un asscz bon nombrc d'abonnes , qui depuis s'est
liT ATS -UNIS. — CANADA. 679
acciu. Le choix des articles qu'il a einpruntes aux lecueils et
iiu\ jourtiaux francais, offrait sans douie de I'intert't a ses lec-
tetns , et nous ne pounions nous pjalndre qu'il ait mis souvent
nctre Rei'ue a conliibulion, s'il avail toujoiirs avoue les ein-
prunls qu'il lui faisait. Mais le Heveil laissalt desirer un meil-
leur plan, un arrangement des matieres plus melliodique,
enfJn, une jilus grande variete. L'editeur M. Edouard Louvet se
propose d'adopter le ])lan que lui a propose son correspondant
M. Isidore Lebrun. Le n° du /J£''m/,du 2/| juin dernier, annonce
quece journal va prendre, le premier juilief, le litre de Propaga-
ieur, et qu'il conlinuera a trailerde la litterature, de lapolilique,
de Virtflustrie , des sciences et des beaux-arts. Mais il contien-
dra, en outie, des extrails des jotirnaux de I'Union en parti-
culier , el de I'Amerique en general. On ne recoil en France
et en Angleterre qu'un petit nombre de ces journaux, les plu^
estlmes, il esl vrai; mais on en public plus de einq cents dans
les Elats-Unis. Le Propagateur fidele a son li(re de francais-
aincricain , saura faire , nous I'esperons, ui\ excellent choix
parmi ces feuilles inconnnes en Europe. II nous ])rocurera ainsi
des details inleressans sur les moeurs et I'administration, des
renseigneniens precieux au commerce el a I'industrie , des in-
dications uliles aux sciences el aux lellres E. N.
CANADA.
aSo. ■ — * Jn Essay on the juridical history of France , etc. —
Essai sur I'histoire de la jurisprudence francaise consideree
par rapport aux lois de la province de Bas-Canada ; discours
prononce dans Tassemblce speciale de la Societe liltcraire el
historique cle Quebec, le 3i mai iSa/i , par M.-J. Skwell, pre-
sident du tribunal du Bas Canada. Quebec, 1824; iini)rinierie
de Th. Gary. In- 8" d'une feuille.
Le premier magistrat d'une province autrefois francaise, et
soumise depuis long- toins au gouvernement anglais, croit
devoir puiser dans I'liistoire de notre nation une con:ia:ssanoe
plus a|)i)rofondie des lois qui regissent encore les peuples de
sa juridictioii.il remonte a I'origine de la monarchic francaise,
el suit avecexacliliide lesprogres ou les diverses modifications
de notre jurisprudence, en Europe et dans nos colonies en
Americjue. II ne se borne point a consulter les auleurs fran-
cais; il conipare ieurs narrations el leurs doctrines a celles des
historiens et des jurisconsultes anglais. Apres avoir trace les
traits principaux del'imniense variete d'objels renfermes dans
son tableau, M. Sewell passe aux moyens de rei)ainlrc dans le
Bar.-Canada plus de connaissanccs des lois, en rendani cclle
<>8o LIVRES fiTRANGERS.
^lude plus facile. « L'experience de tous les pays et de tousles
terns a fait voir que les elemens de cetle science sont inieux
enseignes dans un cours public, mieux compriset retenusplus
siirement qu'ils ne peuvent I'etre par aucun autre nioyen. Le
professeur guide scs elevcs dans des recherches toujours ari-
des, souvent embarrassantes ; 11 abrege leur travail, et lerend
plus fructueux. Ici , I'etude des lois n'a point ces ressources et
ces encouragemens; I'etudiant travaille seul, se dirige au ha-
sard dans le labyrinlhe des fails, des lois, des ordonnances;
il quitte le plus tot qu'ille peut ce travail rebutant, et n'acquiert
point, memepar I'exercice des foncllonsjudiciaires, I'instruc-
lion dont il devrait etre pourvu, des son entree au baneau. »
L'orateur propose a la Socirte litteraire et historiquc d'etablir
un cours public pour les eludians en droit. « J'espere, dlt-il ,
que sous les auspices et par I'influence de la Societe, la legis-
lation ne sera pas privee plus long-tenis de I'institution qu'elle
reclame ; qu'elle obtiendra I'honneur d'etre enseignee comme
une SCIENCE. — Et cetle science, si negligee jusqu'a present,
est une des plus importantes pour le bonlieur des horaraes , et
suivant I'energique expression de Burke, malgre tous ses de-
fauts , ses redondances et ses erreurs , elle est le compose de la
raison des siecles passes , la plus belle oeuvre de I' intelligence
hurnaine. »
25i. — La liibliotkequecanadienne. Montreal, iSotS; impri-
merie du journal, rue St-Lambert. Ii)-8° de 2 feuiJles. Ce jour-
nal parait une fois par mois. Prix, 4 piastres par an, payables
d'avancede 6 en 6 mois.
Cette publication, dont un seul numero nous est parvenu ,
( celui d'octobre 1825 ) nous fait retrouver des corapatriofes :
noire langue , noire litterature, une P'rance , en un mot , trans-
portee en Amerique, et qui a conserve dans le Nouveau-Monde
son caractere national. Les etrangers en pensent, sans doiitc ,
le bien et le uial qu'ils disent des Francais d'Europe; nos cora-
palrioles americains ne sont ni plus epargnes, ni moins goutes
que nous-memes; iis subissent notre reputation; mais ils ne
ressentent point nos calamites; puissent-ils en etre preserves
a jamais ! leur felicltesera toujours I'objet de nos voeux, etpour
nous-m^mes un motif de consolation et d'esperauce. Rien ne
peut nous etre plus agrcable que d'entrelenir avec les Fran-
cais d'Amcrique une correspondance litteraire : ils ont tant de
chosesa nous apprendre sur leur pays, sur ses habitans, an-
ciens et nouveaux ; sur les progres qu'ils ont fails , sur les cau-
ses qui ont avance ou retarde Tinslruction, les arts et les autres
elemens dc civilisation, etc. Cet exchange d'observations et de
CANADA. — EUROPE. — GRArjDE - BRETAGNE. 68 1
pensees , Ires-profitable pour nous, ne sera pas non plus sans
ulilite pour nos ancieus compatriotes : nous serons siiiceres
avec eux; et gardiens fideles du dt-pot de noire langue com-
mune, nous veillerons a ce qu'elle ne s'altere point en Ameri-
que, afin que toutes nos ricliesses Jntellectuelles aient conslam-
inent la meme valeur dans les deux mondes. Nous aurons soin
que les sciences n'envolent au-dela de Tocean , que lours pro-
ductions les plus precieuses, que les sources ou la jeunesse
doit puiser soient bien indiquees , et que Ton ne soit point ex-
pose a se troinper sur le choix si impoitanl des ouvrages des-
tines a I'enseignement. Dans le nuniero de \a. Bibliothcque cana-
dienne que nous avons entre les mains, noi:s Irouvons des
observations grammalicales tres-jusles, et des fautes de gram-
maire; nous y remarquors que sur lesbords du fleuve Saint-
Laurent, la bolanique en est encore au point ou Charlevoix
I'avait laissee ; que I'instruclion mineraloglque n'y a pas suivi
la marche rapide de cette science en Europe. Nous y trouvons
aussi de bons vers, des narrations agreables , et nous ne dou-
tons point f|ue ce journal ne puisse occu])er quelque jour une
place distinguee dans noire litleiature qui le reclame a bon
droit. Que les rcdacteurs s'atlaclient surtout a la correction de
la langue; que les descriptions scientifiques soient au niveau
des conuaissances actuelles ; qu'un goiit severe proscrive tout
ce qui est use, peu digne d'attention, obscur, vague, vide
de pensees; en un mot, que la Biblintheque canadienne evite
les fautes dans lesquelles tombent chaque jour certains journaux
soi-disant litleraires , ])ublies a Paris: alors, il sera bien plus
interessant pour nous de prendre un abonnement a Montreal
que dans quelques bureaux de notre capitale. Y.
EUROPE.
GRANDE-BRETAGNE.
aSa. — Anti-Slavery monthly reporter. — Rapport mensuel
centre I'esclavage. N'"' 8-i3. Londres, 1826. Arcli., Cornhill.
In-8<^ de 124 pages ( 7 j-196).
253. — Report of the debate. — Debats qui ont eu lieu dans
la chambre des communes, en juin i8i5, sur la motion du
D'' LusHiNGTON, concernant la deportation de MM. Lecesne
el Escoffery , de la Jamaique , I'un et I'autre homines de cou-
leur. Londres , 1826. In-8° de 19 pages.
Noas avons recu de Londres la siiite de i'ii^teressant re-
cueil, destine a combattre I'esclavage, et d'autres ecrils diri-
ges vers le meme but, tels que le troisieme rapport de la
68a LIVUES ETRANGERS.
Socicle qui , par la mitigation de i'dclarage , en prepare C abo-
lition tU-Jiniti\-e.
Lc rapport de la discussion a la cliainbre iles communes sur
la jioiioncialion faitc par le docteiir LushiriL'ton conlre I'acle
arbitraire par lequel deux liomnies de coulcur MM. Lecesne
el Escoffcry out ('tc deporfos de la Jamaifpic, nous rapjielle
les hoircurs contmises a la Martinlfiiie conlre des citoyeiis de
couleur vexes, lourmenlos, dcportos, doni plusieurs ont suc-
combti sous le poids des persecutions; car la tyrannic a par-
lout les menies caractercs. Dans Ics details de cetle discussion ,
il est parle d'un Francais, nonime Villegraine, qui fut coii-
vaincu de fanx tenioignage conlre les deux accuses.
Le gouvernemcnt anglais a cru devoir etablir dans scs pos-
sessions lointaines des cvcriucs anglicans, entr'autres a la
Jamaique ct aiix Barbades. Leurs rapports concernant I'etal
des esdaves el les nioyens de ranicliorer, paraissenl emprcints
d'ignoraiice et de prejuges coloniaux. Celui de ia Jamaique
croit qu'un moyen prcalable ])Our repandre (juehjues connais-
saiices parnii les noirs serait d'etabllr de nouvelies eglises;
ce qui nmenerait I'ctablissemcnt d'ecoles pour les instruire.
On lui fait observer avec raison que, depuis cent cinquante
ans , il y a des eglises a la Jaiiiaique, el que Ton n'y a jamais
vu une seule ecole pour les enf'ans noirs.
La tenacite des colons est presqu* partout la meme pour le
maintien des abus et des horreurs de I'esclavage. La legislature de
la Dominique a fall tous ses efforts pour etablir enlre toutes les
lies occidentales une confederation , dont le but ctait de main-
tenir I'usage du fouet dans toutc sa j)lenitude. Quelques-unes,
com})osant avec la necessile des circonstances, souscrivent de
mauvaibC grace a un petit nombre de modifications inefficaces.
La colonic de la Trin'ulad est cellc qui justju'a present adojite-
avec francliise les mesures preparatoires pro])osees par le gou-
vernemcnt anglais. Grace a I'ascendant des propiielaires ,
pour la plupart noirs et sang meles libres, ils obtiennent une
preponderance qui tempere ou neutralise la resistance des
colons blancs.
IJn ouvrage ircs-important, parmi ceux qui ont paru cette
annee , est une edition nouvelle de celui qui a pour litre : Les
colonies a esdaves, ou peinture de I'esclavage tracec par les
colons cux-mcines. I,a sont groupes leurs aveux forces donl
I'ensenible foi ine \ii\ tableau liidcux, fonde sur les leinoiguages
irrt'cusablcs (its proprietaires.
On j)cul tenir pour certain que la mardie progressive des
GRANDE -BRETAGNE. 583
cveiiemens ainenera un nouvel oidre de choses diins Jes pos-
sessions anglaises qui contiennent encore 83o mille osclaves.
Le zele eciaire et courageux des oboliiionistes ne se ralentira
point. Ceux qui , dans la cliambre des communes, avaient de-
fendu la cause des Africains, ont ete la plupart reelus dans
les elections qui viennent d'avoir lieu. Ainsi nous pouvons
esperer que la cause de I'liumanite triomphera. — Puisque les
blancs repugnent si fort a faire partager aux esclaves le bien-
fait de la legislation anglaise, un moyen infaillible pour ob-
tenir promptement le resultat desire "serait de souniettre les
blancs au regime qui pese sur les esclaves. Sans blesser la cha-
rite, on pourrait desirer que Ton en fit I'cssai. G.
254- — * Diccionnario de Hacienda para el uso dela supre-
ma direccion de eU.a. — Dictionnaire des Finances, a I'usage
de ceux qui sont charges de leur direction; par D.-Jose Can-
CA Arguelles. i", i" et 3' cahiers. Londres, 1826; Calero.
3 vol. in-8° de 80 pages chaeun.
255. — * Elementos de la cienria de Hacienda. — Eicmens
de la science des Finances; par le meme auteur. Londres,
1825 ; Calero. In-8° de 402 pages.
Le Dictionnaire des Finances, premier ouvrage que Ton ait
public en langue espagnole sur ce sujet, est de la plus haute
importance pour tous ceux (jui s'occupent d'une maliere aiissi
inlimement liee au bonheur public. La science des finances est
enticremenl developpee dans cet ouvrage, ou les explications
les plus delaillees, ainsi qu'une masse de faits pen connus, ct
de renseignemens precieux, sont presentcs avcc clarte et con-
cision.
Get ouvrage offre a ceux qui se livrent a I'elude de cette
partie de I'economie publique des tableaux des revenus, des
depenses et des dettes de toutes les nations europcennes. On y
voit un expose des ressources extraordinaires employees par
les financiers espagnols, dans les cas d'urgence. En un mot,
les rapports commerciaux de I'Espagne avec les nutres puis-
sances, I'analyse des traites de commerce qui existent entre
elles, la slatistique de la Peninsule et des contrees de FAine-
rique qui furentses colonies, sont pre>entes avec une giande
exactitude et appuyos dc notes, d'etats et de memoires qui
n'ontpas encore etc publics. Parini ces renseignemens curieux,
on peutciter le tableau suivant des tributs que le dcy d'Algcr
se croit eu droit de lever annuellement sur ies puissances de
TEurope; ce qui n'est pas sans inleiei .ians un moment oii <e
684 LIVRES STRANGERS.
forban menace I'Espagne de la guerre pour lui arracher 6 mil-
lions de reaux.
Danemark 1,100,000 fr.
Espagne i,aoo,ooo
France 1,175,000
Hollande 625,000
Portugal 3,470,000
Angleterre 900,000
Prises des corsaires algeriens. . 600,000
/ Bancous des captifs 90a, 5oo
9,972,500
Place dans les postes les plus eminens en Espagne, I'auteur
a pujuger, mieux que personne, de la faclieuse influence que
le manque de donnees et de connaissances financieres a exercee
sur ses compatrioles. Penetre de cetle verite, et cedant aux
instances de son digne ami, D. Vicente Rocafcerte, cLarge
d'affaires du Mexique a Londres, il redigea d'abord \&% Ele-
TTiens de la science des finances. La premiere edition de cet
ouvrage ayant ete promptemenl epuisee , et tres-bien accueillie
en Ameriqijc, I'aiitenr pubiia son Dictionnaire, etc., qu'il avait
compose depuis cpielqnes annees, au fond d'unc prison od il
etait plonge, pour avoir servi sa patrie.
Cet ouvrage est precieux , non-seulement pour les liommes
occupes des sciences econoraiques, raais encore pour ceux que
le choix de leurs concitoyens appelle dans les assembles na-
tionaies; il doit interesser particulierement les Espagnols et les
Amuricains, et iiierite aussi I'attention des etrangers. Nous re-
commandons viveinenl les deux ouvrages de M. Canga Ar-
guelles; on ne saurait trop louer la noble conduite de cet
ecrivain qui, loin d'etre decourage par les actes d'oppression
et de cruaute doni il etait victime, n'a cesse de travailier pour
le bien de ses coiiciloyens. Exile sur un sol etranger , il a con-
tinue de rendre a son pavs les seuls services qui fusscnt en son
pouvoir, en lui cousacrant, dans ces deux ouvrages, le fruit
de son exjierience et le Iribul de ses lumiercs. P. M.
Oui'ragcs periodiques.
— 256 * The Quarterly Review. — La Revue trimestrielle ,
N° 67. Londres, juin 1826; John Murray, Albemarle-street.
In-8" de 3o4 pages ; prix , 6 shellings.
L'un des redacteurs de cette Revue anglaise a eprouve ,
durant le dernier trimestre , un redoublement de fievre,ac-
i
GRANDE-BRETAGNE. 685
compagne du plus etrange delire. Qu'il ait ecrit dans ce
tems ou la maladie doininait sa raison, nn article aiissi plein
d'extravagance que\72iitoire de V Industrie anglaise, et coup-
d'ceil stir ses produits , cela peut ctre; mais , qu'une telle
production ait vu le jour; que des hoinmes raisonnables et de
sang-froid n'aient pas fait entendre conibien il est indecent de
prodigucr ainsi le plus grossier eiicens a sa propre nation ,
et a toutes les aufres I'injure et le mepris ; c'est ce que Ton a
]>eine a concevoir. On ne croira nuUe part , meine en Angle-
terre, que le produit des fabriques anglaises surpasse de beau-
coup celui du travail de tous les autrespeuples , ragriculture
exceptee , et que parmi les nations les plus industrieuses ,
il n'en est aucune qui fabrique , tant pour sa consoinmation
que pour son commerce, la deux centieine partie de ce que
les manufactures de la Grande-Brelagne versent dans le com-
merce exterieur , etc. Si , malheureusement pour I'Angleterre,
I'auteur de I'article n'a\ait point depasse prodigieusement les
bornes des exagerations permises , la crise qui se fait sentir
au - dela de la Manche scrait le commencement de la plus
funeste et de la plus inevitable catastrophe : la Grande-Bre-
tagne devrait se hater de renoncer a ses machines , fermer
ses ateliers et les laisser tomber en ruines , comme ses ab-
bayes. Elle ne peut se dissimuler que des industries rivales la
menacent de toutes parts; que chaque peuple aspire apourvoir
lui-meme a ses besoins, et a faire circuler au-dehors quelques
produits de ses arts perfeclionnes. Le terns n'est pas loin oil
les nations qui ne sont pas sans industrie ne demanderont
plus au commerce exterieur autre chose que des niatieres
premieres; alors, le commerce anglais, restreint aux na-
tions sans arts et a ses propres colonies, sera ce qu'il doit
etre , ramene au seul mode d'existence durable sur lequel il
puisse compter.
L'auleur de rarlicle dont nous parlons a prodiguc des
chiff'res que personne ne verifiera ; cette logique ne fera
point disparaitre I'absurdile des resuitats. Il n'est pas dif-
ficile sur le choix des autorites , lorsqu'il s'agit de vanter sa
nation auxdepens de la notre. Ne va-t-il pas jusqu'a exhumer
un journal dont la burlesque apparilion en France ne fut
qu une de ccs fausses speculations litleraires , abandonnees
apres quelques tentalives infructueuses ? La fin de I'article
en raontre assez I'esprit et la tendance: apres avoir expose
les avantages de I'induslrie et du commerce, I'auteur ajoute :
n Si les generations futures demandent quelles causes erape-
cherent si long-lems d'etablir entre les peuples des relations
686 LIVRES ETRANGERS.
aussi conformcs a rimmaiiitc el a la sagcsse , on repondra
que CO fill la Fhance, avec les flots dc sang de sa revolution
et I'intolorable despotisnie dc la gloire : si I'on vent connaitre
le pays qui i'ut la source de scs biens; d'ou ils se lepandirent
parlout , I'histoire dira que ce fut rANCLKXERRE. » F.
W. 15. Ces accusations reci])roqucs , ces rcciiminalions de-
plorables et iiiutiles, ces gernies des anciennes inimities natio-
nales , souveul I'eproduits et raniniei j)ar des plumes empoi-
sonnees, devraient enfin faire place a des sentimens plus rai-
sonnables et plus jusles, qui resultcnt nalurellement d'une
appreciation exacle des interets coinmuns de la grande famille
liuraaine a laquelle apparticnnent tons les peuples civilises.
Non,les malheurs el I'inferiorite de la France ne seraienl point
un avanlage pour I'Anglelerrf ; la decadence de I'Angle-
lerre ne serait nullement profitable a la France. Mais la
prosperile crois^ante de chacun de ces pays est necessaire
a celie de I'autre. Un elat ne s'enriclill point de I'appauvris-
semcnl d'un elal voisin. La politique comme la inorrde privee
devrail enfin adopter franchemenl celte maxime : Fais a au-
Irui tout le bien que tu voudrais (ju'on te fit; aime ton pro-
chain coainie toi-mcme. Les prejuges odieux, les maximes
barbarcs, les prohibitions absurdes , qui constituent la poli-
tique et le patriotisme de quelques pretendus hommcs d'etat ,
meme preuiiers ininislres, et de quelques ccrivains publics,
qui trahissent ieur noble mission , celie d'cclairer, de rap-
procher les nations, de faire disparailre les barrieres ou les
preventions liaineuses qui les divisent , ne sauraient plus
convenir a notre elat actuel de civilisation. M. A. J.
257. — * Ocios de Espanoles erncgraclos , etc. — Lolsirs des
Espagnols emigres, n" 7.[\. Londres, mars 1826 ; Dulau et C®.
ln-8° de six feuilles ; prix, 3 sh.
Ce litre bien modesle ne repond pas au merite du recueil
qu'il designe. Qui croirait, en effel , que sous cette enseigne
frivole, sonttrailees les matieres les plus importantes en poli-
tique, en legislation, en hisloire, et que les delassemens de
quelques proscrils soul employes a faire connaitre aux nations
etrangeres les ricliesses litteraires de Ieur malheureux pays.
En raconlant ses maux, souvent on les soulage.
En parlant de sa palrie, on croit pouvoir oublicr qu'on en
estprive. En rappelant ce qu'elle a ele, ce qu'ellc est digne
d'etre , on se console de I'abaissement dans lequel elle est mo-
raenlancment tombee. Ces sentimens animent lesredacleursdu
GRANDE -BRETAGNE. G87
recucll que nous annoncons. Jetes sur une terre eUangere ,
sans protecteurs , sans appui,ils ont scnii le besoin de s'entre-
tenirde leurs dicux domestitiiies. Denonces par i'arislocralie
dont ils ont devoile les projets , caloranies par Ics pretres dont
ils ont signale Tintolerance , poursuivis ])ar les rois, parce
iju'ils out voulu siibstliuer le pouvoir constitutlonnel au pou-
volr ;!bsolu,ils ont cherche a repousser les accusations injustes,
niensongcres et fletrissantes dont on s'efforcait de les noircir.
Amans d'une sage liberie, ils ont inontre que I'Espagne serait
capable d'enjouir; admirateurs du savoir des autres peuples,
ils ont prouve que leur patrie avait aussi ses litres littcraires a
offrir a radmiiation de I'Europe. lis ont alteint leur but. De-
puis ie mois d'avril 1824 i ce rccneil defend dignement la cause
de I'eniigration espagnole, et il expose les droits de la Penin-
su>j a la consideration du uionde savant. On y traite toutes les
matieres; c'est a MM. Canga - Auguell^s et Mendibil , que
Ton doit cette serie d'articlcs dans lesquels sont traites avec
autant de raison que d'iinpartialite les differens evenemens de
rbistoire des derniores aunees de la monarchic espagnole.
M. Vilianuevay joint de savan'es disctissions sur les liberies
de I'eglise de ce royaume. Si Ton veut lire toute la partie re-
lative a riiistoire du gouvernemcnt constitutionnel de la Pe-
ninsule , et notamnicnt cclte reponse energique et concluante
adressee a la Quarterly Review , et inseree dans les Ocios ,
on se convaincra cjne la masse de la nation espagnole n'a
point meritc les maux cju'elle souffre. Qu'on suive les redac-
teurs des Ocios dans leur revue de la litterature moderne do
leur pays, et Ton resliluera a cette contree une partie de la
gloire litteraire quelle possedait, a I'epoque des Cervantes et
des Lope-Vega.
Le thoix desmorceaux inseres dans les Ocios est gcnerale-
ment assez bon. Les questions d'histoire, de politique, de fi-
nances sont traitees avec savoir et profondeur. On desirerait
pourtant que, dans les discussions qui inleressent I'Amt^rique,
les rcdacleurs ^ussent oublier qu'ils sonl espagnols et qTi'ils
ont regne sur le sol des jeunes rcpubliques ainoricaines. Les
matieres reiigieuses sonl traitees dans ce recueii avec une
grande erudition ; peut-etre meme,rerudition s'y monlre-t-elle
trop. On s'y occupe de details minutieux, et Ton neglige, pouc
des objcts de discipline, Tetude des grandes rcfomies reii-
gieuses que deiuande I'etat actuel de la civilisation. En gene-
ral , les article^ en prose sont bien ecrits ; mais les raorceaux
de poesie paraisscnt (juelquefois d'une extreme faiblesse. Nous
avons neanmolns admire dans cc caliicr un petit poeme inti-
688 LIVRES ETRANGERS.
tul6 : Ic's Ridnes de Rome, II inanquail a ce journal un peu plus
d'ordre dans ses raatieres; notre Revue lui a offert le modele
d'lme classification naturelle qu'il a siiivie en parlie, et dont
sans doiite il se rapprochcra davantage encore. Nous avons
remarque dans les Ocios trois autres articles : i° nne analyse
de riiisloire dos Arabes, de M. Conde; 2° des observations
sur Ic commerce de I'Angleterre; 3° un article de M. Lanjui-
nais, sur les memoires de Scipion de Riccl, article extrait de
notre Rci'ue ( t. xxix, p. 280 ) , deja tradiiit en anglais dans le
Mercure de LondrOs, et reproduit en espagiiol dans les Ocios,
comme tire de ce dernierjournal qui se I'etait approprie, sans
citer le recuei! auquel il I'avait emprunte. F. D.
Revue sommaire des rccueils pcriodiques sur les sciences , les
lettres et les arts, publics dans la Grande-Bretagne. —
Onzieme article. ( Voy. Re^'. Enc, t. xxvit,p. 767-770,
t. XXVIII, p. i49-i56, 799-80/1; t. XXIX, p. 141-148,
463 -468 et 747-7^6, et t. XXX, p. 121-126,. 4i9-424> et
ci-dessus p. i24-i3i , et 4o2-4o5.)
Suite des journaux hebdomauaires.
Litterature.
258. — The London literary Gazette. — La Gazette litteraire
deLondres, n°5oi. Londres, samedi 26 aout 1826; W. A.
Scripps. In-4° de 16 pages, impriraees sur trois colonnes; pris ,
8 pence, ( 85 cenlinies ).
aSg. — The literary Chronicle. — La Chronique litteraire ,
ii"38i. Londres, samedi 2 septembre 1826; Davidson. 10-4°
de 16 pages, imprimces surtrois colonnes; prix, 6 pence.
260. — The News of Literature and Fashion , Science and
Arts. — Nouvelles de la liiterature , des modes , des sciences et
desarls. N" 108. Londres, samedi I'^'jnillet 1826; J. E. Scott.
In-8° de 16 pages, imprimees sur trois colonnes ; prix , 6 pence.
Ccs trois feuillesoccupent un rang important-parnni les nom-
breux journaux qui sont publies a Londres. Elies offrent dans
les quarante-huit colonnes, imprimees en caracteres /^eW
remain, dont se compose cliacun de leurs nnmeros, I'analyse
ou plutot le recensemcnl de tous les ouvrages de sciences, de
beaux - arts et de litterature qui s'impriment dans les trois
royaumes , el Ton pent croire que la vogue et la cclebrile s'ob-
tiennent par elles, bien plus encore que par les Magasinimen-
suels et les Revues trimestriellcs. On s'accorde^ assez gencrale-
ment sur I'ulilitc de ccs trois feuiiles liebdomadaires; mais , on
GRANDE-BRETAGNE. 689
«st divise d'opinlons sur leur merite respectif. Si Ton eji troit
M. MuDiE , rauteur de Babylon the Great ( \oy. Rev. Enc,
t. xxvui , p. 458) le journal intitule : The News of literature
andfashion doit etre mis au ])remier rang. Suivanl le Philo-
inatic journal ( n° 7, p. 209 ) , la Literary Chronicle a droit a
tet honneur , que, fiere de ses cinq a six mille abonnes, reven-
dique a son tour la Literary Gazette.
Ce dernier journal, dont M. .Tourdan est I'editeur, a le grand
avanlage d'annoncer presque toujours le premier les ouvrages
nouveaux, de compter au nouibre des j)oetes qui enrichissent
ses pages, la'jeune et charinante miss Landon, et, a defaut
d'une grande erudition, de clioisir avec discernement et d'of-
frir a ses iecteurs les meilleurs morceaux des volumes dont il
rend com pie.
En politique, la Literary Gflze^^e professe le torysrne ; et
c'est en jiartie aux attaques qu'elle dirige contra ies idees libe-
lales qu'elle doit ies faveurs de I'aristocratie anglaise et son en-
tree a "Windsor et a Cailton-House. Sa critique est parfois
parliale et epigramraatique; et souvencl'envie de placer un bon
mot, ou une plaisanterie mordante, luifait sacrifier la raison ,
la justice et la verite. C'est cetle feuille qui, faisant le proces
de plusieurs dictionnaires, raiJla longuement notre i?et'«e, au
sujet de I'orthographe francaisedu mot wigh , substituea whig;
c'est elie qui, traduisant avec infidelite unpassage de notre
article sur le dernier poenie du docleur Southey, nous preta
des bevues dont e!le-merae fnt obligee de recounaitre ensuite
la non-existence; c'est elle, enfin, qui, entre beauconp d'au-
tres forfanteries de cette espece , assurait qu'ii n'existait aucune
branche des connaissances humaines dans laquelle la nation
britannique ne piit compter quatre savans superieurs a tous
ceux dont s'enorgueillil la France. L'urbanite et la modestie
nesont point les defauts de la Gazette. Le Panoramic Miscel-
lany, n° 4> F- 468, a repousse, eii la decorant de nom de gas-
connade anglaise, english gasconnading ■, ccWc ■^xiWn\\on de
superiorite scicnlitique et litleraire, soutenue par un des re-
dacleurs de la Gazette ; et nous pourrions de notre cote, apres
avoir donne de justes eloges a quelques portions des letlres sur
Paris, inserees dans ses dernicrs numeros , y relever des erreurs
graves dans I'orthographe denosnoms franca is, etjce qui est plus
serieux,y fairevoir, ainsi quel'a dit un denos coliaborateurs en
parlanld'un autre ouvrage, "comment certains etrangers,substi-
tuant I'esprit de parti a I'esprit d'observation , egares par des
idees fausses, pardes pre ven lions deplorables, font usage de Thos-
pitalite qu'ils recoivent sur le sol francais pour travestir nos
T. xjixi. — Septemhrc \'6i^. l\l\
690 LivRES Strangers.
moeurs et pourcalomnier a I'aide de ficlions plusou moinsingc-
nieuses noire c.'iractere national... >. Mais, nous nevoulons point
exercer unccritiquc severe a I'egard de la Literary Gazette; nous
ne rechcrcherons pointsilfsaccusationsdcpartialiieet de niau-
\aise foi dirigces contre elle par quekjues journaux anglais, sont
ou non fondces. Nous avons souvent trouve dans cette feuille
d'excellens articles : hi poesie en est oidinairenient bonne; les
esquisses dc moeurs, agreables et piquantes, et les nouvelles
scientifiques , exacles et instructivcs. Nous avons reiuarque,
parmi les nonibreux niorceaux instres dans ses dcrniers nu-
nieros , queiques strophes de miss Landon d'une poesie admi-
rable; des esquisses siir la pcinture , attrlbuees a la plume
facile de M. Pine ; la description d'un nouvel agent locomo-
teur a I'usage des voitures et des charriots ; la traduction du
memoire de noire savant collaborateur M. Euscbe Salverte,
sur les dragons et les serpens monstrucux ( Voy. Rev. Enc. ,
t. XXX , p. 3oi et 6^3) ; et enfin en compensation d'un article
louangeur sur I'incorrecte et mechante traduction ilalienne
« Passatempi morali » , une analyse savante et remarquable
des « Considerations sur les volcans de ScROPE. »
La feuille intitulee: Literary Chronicle, est la rivale et I'an-
tagoniste de la Gazette litteraire. Son prospectus de cette an-
nee contenait une declaration de guerre contre ce journal,
qui n'a pas cru devoir lui repondre. M. Thomas Ryerlet ,
que la mort vient d'enlevera sa famille et aux lettres, fut pen-
dant long-tems I'editeur de la Chronique dont il agrandit le
cadre et ameliora la redaction; I'oditeur actuel parait suivre
les errcmens de son predecesseur et vouloir ruaintenir dans la
r<5daction de la Literary Chronicle unejiiste impartialite el un
sage esprit de libcralisme et de tolerance. Inferieure a la Gazette
sous le rapport de la poesie, la Chroniquc\'Gm\)OVle&\ive\\e\)av
la justesse de sa critique et la bonne foi de ses jugemens. Nous
pourrions lui reprocher I'iuserlion d'une apologie de I'ou-
vrage du reverend G. Wright contre Tiustruclion des classes
ouvrieres, qui est en opposition avec ses idees habituelles;
raais ces contradictions se prcsentent rarement, etunegrande
concordance de principes existe generalement entre les diffe-
rens articles dont se compose la Chronique litteraire. Comme
la gazette, elle contient des analyses d'ouvrages, des esquisses
de mceurs, des poesies fugitives, et des nouvelles scienlifiques
et litteraires. Elle offre , en outre , une revue sommaire de quel-
ques-uus des principaux journaux et recueils periodiques qui
se publient en Europe, et auxquels elle emprunte souvent des
raorceaux du plus grand inter^t. Nous citerons le caractere du
GRANDE-BRETAGNE. Gyi
ministre Canning , extrait du fVeehiy Timex ; les letlres sur les
dernieres (ilections anglriises traduilcs du Globe; et une piece
de poesie, ayant pour litre : Time's Changes tiree du Blach-
n'ood's magasine. Parnii les analyses inserees dans les derniers
numcros dc cette meme feulUe, cellcs de VHistoire de la repii-
hlique par Godwin, du reman Alia giomata, et de la vie
de Benjamin Franklin, nons ont paru digues d'une attention
particuliere. Le coinjUe rendu de la derniere exposition des
tableaux de I'Acadeniie royale de pcinture de Londres merite
aussi une mention honorable. Nous n'avions trouve dans la
plupart des journaux anglais que des eloges prodigues avec une
complaisance banale anx artistes en reputation; nous avons
remarque ici une'critique cclairee et une juste distribution de
la louange el du blame.
Pent-elre, a I'epoque oil M. Mudie publiait sa description
de Londres, les News of literature and fashion merilaienl-ils
les eloges que cetecrivain se plaisait a leurdonner. Nous nous
rappelons avoir lu nous-memes, dans cette feuille des articles
spirituels sur les moeurs et la litterature de I'Angleterre, et sur
(juelques pcrsonnages dignes d'attenlion. Les aventures du ma-
telol Ben Mizen, raconic'-es dans ses numeros de fevrier et de
mars i825, n'avaient rieu de comparable [lOur la naivele du
style, le naturel de la narration et riiUerot dela fable. Les no-
tices sur les membies du jjarlement anglais annoncaient un
biographe instruit et consciencieux , et les analyses d'ouvrages
indiquaienl des ecrivains exerces dans I'art de la critique. Cette
feuille n'avait point adopte le plan suivi par la Gazette et la
Chronique; la politique speciale , rejelee par celles-ci, occupait
cliez clle line place importante et les esquisses ile moeurs, qui
ne sont qu'un accessoire cliez les deux autres, conslituaicnt
rexcellcnce des Nouvelles de la litterature el des modes. Redige
dans des jirincipes liberaux, ce journal, dont M. Walkf.r ctait
I'edileui', obtinl d'abord un assez grand succes; uiais, ayant
change de plan et de principes, il ne tarda pas a tomber, em-
porlant la honte d'avoir sali ses colonncs de dcgoiitantes dia-
tribes conire ies callioliques d'Irlande et d'avoir terni sa repu-
tation par une fouledeplagiats \i\icv:iiie&.'L(i Monthly Magazine
se plaignait, dans son caliier de jiiillet dernier, des longs ex-
Iraits que les journaux hebdomadaires empruntenl p.uxouvrages
dont iis rendenl coinple, ])orlant ainsi prejudice aux interets
des auteurs dont les oeuvres, copiees par ces frelons, restent
sans acheteurs dans les magasins des libraires. C'est surtout
aux Noiifelles de la litterature et des modes que s'adressait ce
reproche. Les tribunauxfrancais condamneraieut certainement
692 LIVRES ETRANGERS.
a des dominages et interets Ic joiirnal qui, au lien d'analyser,
pillerait iin iivrc; ici la feuille que nous signalons, a rempii
soixante-douzc de ses colonncs de purs exlrails, sans critique,
sans commentaires et sans observations, du dernier ouvrage
de Waller Scott, et !es tribunaux sont inipuissans pour repri-
mer une telle piraterie.
Joiirnauxfranca'ts, iinpriinvs en Aiigletcrre.
a6i. — L'Echo de Paris. Londres, samedi 2/1 juin 1826.
Brydges street. In-4" d'une 1/2 feuille; prix , 8 ])ence.
262. — Le Mercuie de Londies. Londres , juillet 1826.
N° 17. Maddox street. In-/,° d'uue i;2 feuille ; prix, 2 sh.
263. — Le Fiiret. N" 21. Londres, samedi 26 aout 1826.
N° 27. Little Mary - le - Bone street. In ■ 4° d'une i72feullle;
prix, I sli.
A quelle cause attribuer le non succes des iiouibreux jour-
naux francals publics a Londres depuis la ])aix ? Est-ce faute de
goiit de la part du public, ou manque de talent du cole des
redacteurs? La lecture des trois feuilles annoncees en lete de
cet article rcpond A cette question. Elle apprend pourquoi ,
dans une ville de douze cent mille anies, ou la langue fran-
caise fait parlie de I'cducation publique, ou la litterature fran-
caise est I'objet d'une sorte de predilection, ou un iheatre pu-
blic lui est consacre, jjas un seul des Irente ou quarante jour-
naux francais publics en Anglelerre depuis six ans, n'a obtenu
au dela de cinquante abonnes et comptc plus d'une iinnee
d'existence effective.
Presque tous les cditeurs des feuilles francaises ont fre-
quemment oublie, que ce cpii conviendiait au public de Paris,
peut tres-bien ne pas convenir a la population de Londres.
Les principes , les nireurs, les idees des habitans des deux ca-
pltales , sont loin de se ressembler en tout , et VEcho de Paris ,
pour avoir puise trop exclusivement et trop au liasard dans
les chroniques parisiennes , est torabc, au bout de quelques
mois.
Le Mercure de Londres a dii a ces memes. causes et a d'autres
encore une destineetoute semblable. Nouveau Protee, BI. Cha-
TELAiNessaya toutes les formes pour reussir. Son journal chan-
gea plusieurs fois de tilres, quitta et reprit son cpigraphe ,
parut dans tous les formats, fut public, toutes les semaines;
puis tous les mois, puis, tous les dix jours, et mourut enfin d'i-
nanition , au commencement de I'ele dernier.
Le Furet ne s'occupe gucre que des spectacles et des modes.
GRANDE-BRETAGNE. — RUSSIE. GcyS
Destine aux acleurs, il pouria obtenir quelques succes, s'ii
a])porle loujours la meine impartialite dans ses critl(]iies et le
Hionie goiii dans le cholx de ses esquisscs de moeurs. Le Meu-
nier de Neinouts et M. Bernard sont des originaux qui font
souj-ire le iecteur; I'iiistoife de Korin est interessanle; I e dia-
logue parisien est spiritiiel ; mais la guinguette nous semble un
jieu graveleiise pour le public anglais. F. D.
RUSSIE.
264. — * Gossoudarslvenna'ia vnechnaia torgovlia , etc. —
Le commerce exterieur de I'empire en 1824, considere sous
ses differens rapports. Saint-Peteisbourg, 182C; au departe-
raent du commerce exterieur. ln-8°; ptix, 7 fr.
La statistique s'enricliit de cette publication, destinee a ex-
poser la marche progressive du commerce de la Russie avec les
nations exterieures. Quoique le volume que nous anuoncons
s'occupe seulement de I'annee 1824 1 dont il rappelle la legis-
lation comraerciale et les evenemens ies plus remarquables, dans
leur rapport avec le commerce , son contenu est neanmoins
tres-important et ricLe en donnees instruclives et interessantes.
En voici les principaux chapitres : 1° balance generaledu com-
merce exterieur de la Russie; 2° balance commerciale, avec
J'indication de la valeur des importations et exportations et des
douanes et barrieres ou elles ont passe; 3° tableau general des
exportations; 4° tableau general des importations ; 5" produc-
tions du sol russe qui entrent dans le commerce, douanes par
ou on les exporte ; 6° marchandises etrangeres, lieux de leur
importation; 7" importations et exportations d'or et d'argent,
en lingots ou monnoyes en cspeces etrangeres; 8° marchan-
dises et monnaies confisquees; 9° commerce de transit; 10° ta-
bleau du commerce de la Russie avec le royaume de Pologne ;
11° avec le grand duche de Finlande ( qui forme, comme la
Pologne , un pays a part, ayant ses lois et ses moeurs, comme
ila ses frontieresdislinctes); 12" navigation marcliande; i3° ta-
ble des prix moyens des marchandises russes et etrangeres;
1 4° fluctuations du cours de I'argent et du change; i5° liste
des negocians qui font le commerce avec I'etranger.
La Gazette alleinande acadernique de Saint-Petersbourg et
la Gazette du commerce de cette ville contiennent souvent des
articles reputes officiels sur les rcgleiuens de douanes et sur le
systeme suivi par le minlstre des finances. Les mesures du gou-
vernement ysont justifiees et des objections suggerces par une
connaissance iniparfaite des rai)pnrts locaux et des circ.ons-
694 LIVRES ETRA.NGERS.
tances fortuites y sont combat lues d'une maniero plus ou moiiis
victorieuse.
265. — * Principesde la {^rammai.re franrttise , mis en 36 le-
cons , ct a I' usage des Russes , par Ch. dc Saint-Hilaire ,
ancien offlcier de cavalerie, conseiller boiioraire, etc. Seconde
edition, revue , corrigc'C ct considcrublesnenl au2;mentee. Saint-
Petcrsbourg , 1826; Sleunine. In-8" de 173 pages; prix,
3 roubles. ( Voy. Rev. Enc. , t. xxviii , p. 808 I'annonce de la
1''^ edition ).
La Russie est la lerre classique des langues. On en sail
peut-^lre plus en Allemagne; mais nulle part on n'en parle
plus qu'en Russie , et surtout dans la capilale de cet immense
empire. En province , j'ai vu des enfans de douze ans posscdant
deja quatre langues, au point de s'en servir indistinclement
pour exprJmer toutes leurs idees; a Petersbourg , il n'est guere
de famille aisce ou Ton n'cniende a la fois parler russe , fran-
cais, allemand , et meme anglais. Quant a la langue francaise,
il est reconnu qu'on la parle parfaitement en Russie, tant I'or-
gane des Russes est flexible. Outre le grand nombre de gouver-
nanles et de precepleurs francais ou suisses , rej)andus sur
tout Ic sol de I'empire, ou enseigne le francais dans la plupart
des etablissenicns publics; on fait meme en francais un grand
nombre de cours, et les salons ne retentisscnt jamais que de
cette langtie. Nous devons cependant observer que les Russes,
en general, n'evitent pas assez les expressions \icieuses ou su-
rannees. lis ont adopte un grand nombre de mots qui jamais
n'ont etc francais , et ils en ont conserve d'autres auxquels on
a renonce en France. •
Une grammaire francaise, adaptee aux besoins des Russes ,
n'est done point une chose superflue(i), el son auleur est d'au-
tanlplus sur deseconcilier leurs suffrages qu'il a trouve le secret
de dire beaucoup en pcu de mots. II n'a pas suivi la methode
ordinaire, f|ui consiste a faire succeder la syntaxe a la grammaire
proprement dite ; il les a fondues habilemenl I'une dans I'autre.
II aborde toules les difficullcs reelles; mais, pour ne pas trop
erabarrasser sa marche, il s'abstient dc trailer des locutions
difficiles dont I'usgge n'est pas frequent. On ne irouvera, dans
(l) II ne faut pas oublier qu|il en existait deja pluiieurs en possession
de resliine publique; telles sont telles de Charpehtier, de Maudku , de
Hamoniere et de Reiff. (Voy. Rev. Enc, t. xx, p. 587 , I'aunonce de
cette dernieie. ) M. Tappe avalt pnblie la sienne, a I'usage des Allemands ;
et recemment , M. Valerio vient d'en falie pai-aitre ane qui sera tres-utile
anx Italieos. (Voy. Rev. Enc. , I. xxix, p. 469.) N. d. R.
RIJSSIE.— POLOGNE. 695
son ouvrau;e , aucune nouvelle donnee, mais uiie marche mc-
Uiodi<]ue, et iine exposition claire et simple. La premiere edi-
tion, qui a jiaru en 1822, avail oblenu beaucoup de siicces i
celle-ci est plus correcle, et I'ensemble on est pbis parfiiit. On
y a joint : i" un petit traite des sons propres et accidenlels des
consonnes; 2" un arbre figuratif de la conjugaison des verbes
reguliers; 3° un essai d'analyse logique; 4° une table de recti-
fication des locutions vicieuses, introduites en Russia , soitpar
des personnes qui s'cxpriment incorrectement, soil par des
traductions trop litterales du russe en francais; 5° une llste
exacle des mots ou la leltre H est aspiree; 6° un vocabulaire
des horaonymes et des homograplies, expHques en francais et
Iraduits en russe, dans leurs diffcrenies accepiions. L'auteur
de cet ouvrage s'occupe pour le completer, de quelques autres
livres elementnires qui, avec celui-ci, formeront un cours de
langue francaise. J. H. S.
266. — Theatre d' Auguste Yt^orz^fivv. , comprenant les pie-
ces Ics plus recentes de cet autenr, Iradnit de I'alleniand en
russe, par M. Fedor Ettinger. Saint-Petersbouig, i825-
1826. In-12.
Kotzebue est un auteur dramatique, presqne aussi populaire
en Russie qu'en AUemagne; pendant long-tems, ses produc-
tions out figure pour moitie dans le repertoire des deux trou-
pes russes de Saint-Petersbourg et de Moscou. lis n'est done
])as etonnant qu'il ait eu plusienrs fois les honneurs de la tra-
duction. A la liste assez longue des ouvrages de ce dramaturge
allemand que la litterature russe s'est appropries, M. Sopikof,
dans son Essai de biographic russe , t. iii, pag. 329, ajoufe la
mention d'une traduction complete de son theatre, publiee a
Moscou pendant les annees 1802 a 1808, en 20 vol. in-12.
S'il faut en croire les journaux russes, et surtout le Tvlrgra-
phe de Moscou (Moskovskoi Telegraf), la nouvelle traduction
de M. Ettinger que nous annoncons ici , ct dont 11 a paru deja
cinq volumes, n'aurait pas toutes les qualites desirables pour
faire oublier ceiles qui I'ont precedee. E. H.
POLOGNE.
Revue des journaux et des recueils periodiques qui se publient
a Varsovie , en 1826.
Depuis 1819 , 3 journaux scienlifiqnes, 6 feuilles politl(|ues
liberales, 2 journaux satiriques, 7 litteraires, 2 journaux de
dames, i feuille litteraire et musicale, i journal d'agricul-
ture,et i journal destine aux Israelites, out etc forces par
696 LIVRES ETRANGERS.
diff^rens motifs a ne plus paraitre drms la seule vi!Ie de V.'«r-
sovie.
Voicilesjournaux queronpublieinaintenant dans eel te ville.
267. — Dziennifi praw.- — Bulletin des lois. In-8", de 20 a aS
feiiilles.
Le litre seul iiidiquc le but de ce journal : il contient les lois
adoptees dans les dietes, Ics decrels du roi et de son lieutenant ,
relatifs a I'administi-aiion generale du pays.
268. — Rocznil, /.roleivafdegn TowarzyxUva przyiaciol nauh
warszawsfciego — Annnairc de la Socicte royalc philomatique dc
Varsovie. II en parait, tons les ans , i v. in 8" de 20 a 25 feullles.
11 se compose dc disserlations sur les sciences et les arts,
ecrites par les nienibres de la Societe. Depuis sa f'ondalion en
1801 , il en a paru aS volumes.
269. — Pamientnik umieientnosci i szlitk. — Memoires sur
les sciences et les arts. II en parait, tous les quatre mois, iin
cahier de i5 a 20 feuilles in-S".
II renferme des dissertations sur les sciences et d'autres ar-
ticles scientifiques , originaux, ou Iraduils. Ce recueil est re-
dige par les niembres de la Soce'ele pour les livres clcmcnlaires.
270. — * Sylix'an , dziennifc lesny. — Sylvan, journal d'eco-
nomie foresticre. Ce recueil parait, tous les trois mois, par
cahlers de loa i5 feuilles in-8° , avec planclies.
Sa publication, inlerrompue pendant quelque terns, a de
nouveau repris son cours. On doit au soin de M. le comte Louis
Plater, conseiller d'etat, remplacant leministre de finances,
I'etablissement d'une ccole forestiere en Pologne , ou une ins-
titution de ce genre etait surtout necessaire. Les professeurs
de cette ecole, a la tete desquels se trouve le meme savant,
sont les redacteurs de ce journal.
271. — Dzienni/i JFarszawsli. — Journal de Varsovie,
consacre aux sciences et aux malieres (|ui concernent particu-
lierement la Pologne. i caliier in-S" de 8 a 10 feuilles, par
mois, avec des planches.
Avantla publication de ce recueil , il en existait deja plu-
sieurs a Varsovie, consacres aux sciences exactes et aux nou-
velles scientifiques des pays etrangers. L'editeur, pour arriver
au but qu'il s'etait propose, celui de repandre dans le pays les
connaissances utiles , a du adopter un plan tout nouveau, dont
nous allons donner une esquisse. Chaque numero doit offrir
au moiiis une dissertation sclentifi(]ue originale. Auciin article
tradnit, qui ne concerne pas la Pologne, nc pourra e!re insere
dans le Journal de Varsovie ; il en sera de meme des critiques
d'ouvrages insignifians , ct des debats litt^raires de pen d'inte-
I
POI;OGA^E. fi;)7
rel. Le journal rerifermer.t des analyses raisoniuesdes ouviages
marquans, qui parailiont dans le p'lys, et des tableaux do sa
slalislique ; tout cequi scraltaclie a sa bibliograjiliie ancieriiic;
dos poesies, excej)!*? des jiieces fugitives; des tiaduclions d'ar-
licks publics par des Polonais en langues clrangeres, et d'ar-
ficles olrangers concernant la Pologne. Quelles que fussent les
difficidies de I'ext'cutioii d'un tel plan , le rciiacteur , a I'aide de
quelques savans, est parvenu a les vaincre, et peut sVpplaudir
d'lu) succes toujours croissant. Cha(]ue dissertation, inseree
dans ce recueil, pouvant etre consideree conime un oUvrage
a part, il n'est pas sans inieret d'en citer les principales :
1° quelle influence la legislation romaine a-t-elle pu avoir stir
la legislation ])o!onaise et lilliuaiiienne ? pa;: M. Alexandre
Mitzkp:vjtch ( Michiewicz ). !i" Une autre dissertation de
M. Francois Moge ( Morze ), sur le menie sujet. L'une et
I'autre sont enrichies de notes d'un des premiers savans ]ioIo-
nais, M. Joachim Lelevfel. 3" Pourtjuoi cludions-nous le
droit romain? par M. If!;nace Matzieiovsri ( il/rt«'e«on'^/7 ).
4° De I'influence des mathomatiques sur le perfcctionneinent
de riionime ; parM. Joseph Goi,ochovsr.i ( GoUichows/d) meni-
bre de la Societc royale philomaiique , ci-devant professeur de
])lulosophie a rnniversile de Wilna. 5° Sur les inonnaies an-
ciennes, deterrces a Tcliebougne ( Trzebun ) , village sllue
dans le palatinat dePlolzk,par M. Joachim I.elewf.l , de la
merae societe, ci-devaut professeur d'histoiie a I'universite de
Wilna. Get ecrit jettc de grandes liimieres surla nuinismatique
du moyen age de I'Alleinagne , de I'Angleterre, de la Pologne
et de la Boheme. 6° De I'histoire , de son elendue , et des sciences
qui ont quelque rapport avec elle; dissertation erivoyee au
concours pour la cliaire d'histoire a I'liniversite de Wilna, par
le meme. 7° De la inaniere d'enseigner I'liistoire dans les uni-
versites, par le meme ; pouvant servir de coinplenient a I'ecrit
precedent. 8° Sur la theorie d'Adani Smith, dissertation par
M. Jean Dziekoonsri [Dziehonsli). g° Projet d'une traduction
francaise du Talmud, avec des observations sur la reforme de
juifs en Euro])e , et parliculieremenl en Pologne (i) , par
I'abbe Chiarini, ])rofesseur a I'linivcrsile royale de Varso-
vie. 10° De I'esprit de la poesie classitiue, par M. Maurice
MoHNATZKi ( Mochnac/ii) ; dissertation iiiseree sans litre
dans le cours d'une analyse de Touvrage de M. Jean
vSniadetzrj ( Sniadechi ") sur les deux genres de poesie
(t) Voy. Rev. Enc. , t. xxx , page 565. Nous inscrerons procliainc-
ment an article plus etendti stir cet inleressant ecrit. N. d. R.
Gg-S LIVRES STRANGERS.
classi(iueet rnniauti(|iic. i i°Desdialccles slavonsetdela langue
xinscn'te , par M. Aiiclie KoLnARSRi [Kuc/iars/,i). 12° De laso-
c'ietc secrete des chevaliers- Iczards ( /jctvzc iaszcziir/,oix'i) de
la Prusse polonaise , pour servir a I'liistoire de la Pologne du
xve siecle, conlcnant des details importans, et incorinus jus-
qualors, siir la nouvelle reunion des etats prussicns a la Po-
logne, en i/|66; dissertation redig;eed'aj)res i'ouvrage allemand
du professeiir P^oii^t , de Koenigsberg, et enrichie de comple-
inens , par M. Michel PonTCHACHicNSKi i^ Podczaszynshi ).
i3° Petite chroniijiie des rapporis diploniatiques enire la Po-
logne et I'Angletcrre, par un (inonyme. Ces dissertations,
et plusieiirs autrcs articles, parini Icsquels on distingue deux
lettrcs, une du feu cointe Joseph Ossolignski [ O.ssolifisAi)
ecrite au prince Adam Tchartoryski (^Czartorys/d.) sur I'his-
toiie de la litteratiire polonaise ; une autre sur la ])OL\sie na-
tionale des ])eiiples slavons, adressee au directeur dn journal
])ar M. Casimir Buodzignsivi [ Brodzins/d); les poesies de ce
dernier; celles de M. Dohdan Zalesri ; de M. Adam Mitzke-
vjTCH [Micklewicz) , qu'on place au nombre des illustres
poetes vivans, elc., out paru dans Ics treize caTiiersde ce journal,
dont les iiublicalionsont commence en juin iSaSjSous la direc-
tion deMM. 7^//r/^e/PoDTcnACHlGNSRI et Maurice Mohnatzki;
mais ce dernier a, depuis cette annee, abandonne I'entreprise.
272. — Izys polsha. — Isls polonaise. II en j)arait, tous les
ruois, un cahier de 8 a 10 fenilles, in-S" avecplanclies.
Ce recuei! est unlquement consacre aux connaissances utiles
au pavs sons le rapport de I'industrie et de ragricultnre. II
renferme aussi des extraiis des journanx anglais, francais et
allemands, concernant les inventions nouvelles , les decouver-
tes, etc. Ce jotirnal es! d'une grande utilite en Pologne , ou les
guerres continuelles pour la defense du pays ne perniettaient
pas aux habitans d'elever des fnbriques; mais, depuis le reta-
blissement du royaume en i8i5, I'industrie a fait des jirogres
etonnans. De toute part s'elevent des manufactures ; lesprojirie-
taires s^occujient de la theorie de Teconomie rurale, et com-
mencent a se servir de machines pour Tagricultiire ; les forets
sont adminislrees de la nieine maniore que celles des autres
pavs. Les expositions des produils de I'industrie nationale , tpii
ont lieu tous les deux ans, altestcnt les pas qu'elie a fails. Le
fondateuret le premier redacteur de ce journal etaitM. Gracien
KoRviNNE ( Korwin ). Depuis qu'il est raort, son collabora-
teur, M. Antoine Lelovski s'occupe seul de la redaction.
278. — Kozrywki dladzieci. — Divertissemens pour les enfans.
Uncalilerin-S" tous les mois, compose de 3 feuilies avec figures.
Le but de ce recueil est moral et palriotique; le lecteur y
POLOGNE. (hj^)
Irouve retracees les actions dcs jjrands hoinmes i|ui se sont
illuslres dans les conseils, sur le charnp d'honnenr, ou dans
I'eglise , et qui ont donne des preuves de leur altaclienient pour
la patrie. Ccs notices sont ecrites de maniere a elre faeilement
corrtprises des enfans. En evoquani les ombres de ceux qui fu-
rent dans leur tenis rornement et le soutien de la patrie, en
prescntaiit pour niodeles les vies de ces Iiommes vertueux ,
rempiies d'actions sublimes; on parvient aisenient a former la
jeunesse, a lui impriiner le gout des saines etudes ; a lui ensei-
gner de bonne heure a pratiqucr la vertu. A cha(|ue biogra-
phic est joint un portrait , afiii de presenter aux jeunes lectcurs
les trails de cliacun des personnages, en raeme teins que leurs
actions. Pour repaiuhede la variete dans ce reciieil, le redac-
teur y insere de tenis en terns des articles sur I'education, des
maximes morales tirecs des meilleurs ecrivains polonais et la-
tins, et a la fin de chaque cahier, de pelites histoires luorales
et religieuses a ['usage des enfans, de maniere que les per-
sonnes de tout age se plaisent a lire ce journal. Les parens et
les instituteurs irouvent, dans les articles concernant I'educa-
tion , des conseils tres-sages; les cceurs des jeunes gens se
forment par le recit des hauts-faits de leurs ancelres; les
enfans s'aniusent a cetle lecture, et apprennent de bonne
Leurc a aimer la vertu, la religion et la patrie. Honneur
a M'le Clementine Tagnsra ( Ttin^ka) jeune Polonaise, qui
seule redige jjresque tous les articles de cet utile journal. Sa
soeur , M™^ Marie Hermann dessine de su main toutes les litlio-
graphies qui s'y Irouvent jointes. Pour se rendre utile a ses
compatrioles, M'le Tagnska iie se iaisse effrayer par aucun tra-
vail. Souvent, pour trouver la biographic d'honimes qui ont
vecu dans les premiers terns de I'existence de la Pologne, ellc
est obligee de faire des recherches dans les anciens historiens ,
qui presque tous sont ecrils en latin, et de fouiller dans les
\ieux nianuscrits : elle choisit et traduit elle-meme du latin des
inaximes morales tirees des meilleurs ecrivains nationaux du
xvi^ siecle; enfin, elle entreprend des travaux au dessus de
son age et de son sexc ; elle merite non-seulement la reconnais-
sance de la generation qui s'eleve, mais encore Testiniede tous
les hommes sensibles et vertueux. Elle a public, il y a quel-
ques annees, un excellent ouvrage pour reducation des demoi-
selles , intitule : Pamiontka po dobrvy matce ( Souvenirs d'une
bonne mere ); t)uis , un autre d'un cgal nierilc, inlilule : Ame-
lia matho ( Amelie mere ) , qui fait suite au precedent, et divers
ecrils du nieme genre. Les sentimens patriotiques, les pensees
morales et religieuses, que I'dd puise dans ces ouvragcs , en
700 LIVRES ETRANGERS.
font nil trcsor pn'-cieux pour chaque famillo, et pour tontes les
niaisons d'educalion. Nous aiiuons a payt^r ici a M""-' Tagn!.ka le
tribut de la f;ralitride de tous les Polonais.
27/1. — Polnisclw Miscetleit. — Vari(5tcs polonaises; jour-
nal inensuel de 6 a 8 feuilics in -8°; spcctalenieni consacro a la
littcraliire polonaise.
Le prospeclus de ce rectieil a etc pulilie il y a deux mois;
raais aucun nuniero ne nous est encore parvenu. II doit ])araitre
en languc allemande, et contiendra des exiraits d'ouvrap;es et
de joiirnatix polonais. Les compalrioles de redileur I'approu-
veront sans doulc, dans rinteret de leur propie gioire, d'avoir
senii que, pour I'aire connaitre a I'Enrope savante I'etat des
sciences et des lettres en Pologne, un journal de ce genre de-
venatt indisi^ensable. La langue polonaise est Tune de celles
(pi'on etudie le moins dans I'Europe ; et, par celte raison, sa
belie litlerainre rcste inconnue. M. le baron Drack doit s'oc-
cuper de la redaction de ce journal.
275. — Bihlioteha polska , etc. — Bibliotheque polonaise,
journal consacre aux arts, aux sciences, a la lltteralure, a
I'histoire, etc. , etc. Deux numcros in-8° par mois, de 3 feuilles
chacun.
Une societii de plusieurs jeunes litterateurs se forma, en
1825, pour publier ce journal; a leur tetese trouvait M. Fran-
cois-SalezeT)MovLo\Sf^i , connu par ses traductions de VAndio-
/rtO(7«e de Racine, de Marius a Minturnes, de plusieurs co-
medies de Moliere et de beaucoup de pieces fugitives. Mais,
tous ces jeunes gens abandonncrent bientot M. Dniohovski;
les uns, parce que d'autres occupations ne leur permettaient
plus de cooperer an journal; les aulres, parce que des affaires
imprevues les forcaient de quitter Varsovie. Tout le poids de
la redaction tombant sur M. Dniohovski, il se vit, des le
commencement, oblige de changer le plan de I'ouvrage, en
conservanl cependant le litre priinitif. II en resulta (jue le
contenu ne repondait plus an tilie; le cadre du journal elait
d'ailleufs beaucoup Iroj) resserre pour toutes les matieres qu'il
devait einbrasser. Le redacteur se borna done a inserer des
discussions litteraires, des extrails de nouveaux ouvrages (\u\
paraissaient en Pologne, de \a Revue Encjclopedique , de la
Bibliotheque Universelle et de quelques journaux publics en
France; des exiraits de romans , de voyages, et d'ouvrages
philosophiques; entre autres, de ceux de MM. Droz et Dege-
rando, du llvre dc M""=Remusat sur I'educalion ; de morceaux
extraitsdela Force commerciale de V Angleterre , parM. Ch.Du-
pin, traduitspar M. Emimmuel Gmicrsberg , qui se propose
POLOGNE. 701
lie piiblier incessaniinent la traduction complete de cet impor-
tant ouvrage. Ncanmoins, M. Dniohovski merite beaucoup
(i'eloges; non-seulejnent, ii redige seul tout le journal , mais
encore il traduit lui-meme presque lous les articles , tires des
ouvrages francais.
276. — Rozmaitosci wnrszawshi.e. — Varieles de Varsovie;
grand in-4°, une fois par semaine. i a 2 fc^uilies.
Ce journal, dedie en partie au beau sexe, contient des nou-
velles, des poesies, etc., et c|uelques docuuiens scientifiques.
Jl est redige par M. Francois Gjimala ( Grzyinala), ci-devant
rudacteur de la Sibylle des bonis de la Fistule , recueil politique
ct liberal.
277. — Dziennik woiewodztwa Mazowiechiego. — Journal
du palatinat de Maso\ie; in-4°. 2 feuilles.
11 parait chaque semaine, et contient (ies annonces, des or-
donnances, des actes officiels, etc.
278. — fP'arschauer abendblatt. — La feuille du soir de Var-
sovie; en langue allemande ; in-4°, publiee deux fois par
semaine.
Ce journal est a I'usage des classes inferieures du peuple
allemand qui habite la Pologne. Le nombre des Allrmands s'ac-
croit tous Ies jours davantage dans ces classes, Ics ciloyens
protegeant beaucoup Ies fabricans et ies ouvriers etrangers.
279. — Gazeta horrespondenta , etc. — Gazelle du corres-
pondant de Varsovie et des pays elrangers; in-/,", parait qua-
tre fois par semaine
280. — Gazeta JVarszawsha. — Gazette de Varsovie; in-4*',
quatre fois par semaine.
281. — Monitor JFarszawshi. — Moniteur de Varsovie;
quatre fois par semaine, grand in-folio , avec des supplemens.
282. — Kurjer fVarszawski. — Courrier de Varsovie; petit
in-4°. Journal quolidien.
283. — Gazeta Polska. — Gazette de la Pologne; in-folio.
Journal quotidien.
Nouveau journal dontnous ne connaissons queletilre.
Ces cinq feuilles sent consacrees aux nouvelles politiques et
lilteraires.
284. — Lutnia. — Le Luth , journal musical ; recuei! de mor-
ceaux de musique , public trois fois par raois.
285. — Ceres, dziennik rolniczy. — Ceres, journal d'agri-
culture.
On"le doit a feu Stanislas Stachitz (Staszic), ministre dotat,
londateur de beaucoup d'elablissemens utiles en Pologne , d'une
academic des mines a Keltze ( Kielce), et d'uu institul agro-
702 LIVRES ETR ANGERS.
nonnquc a IMaricmoiit , dans I'encoiDtc tie Vaiso\io. Le direc-
tciir dc ce derniti' c'lnblisseinenl, M. Ii.att i)iil)lie re journal,
(|ui parait par caliier dc lo a i5 feiii'.Ies in-S" , a dcs epotjues
indeteEminees. M. P.
NORVEGE.
286. — * Fre(h'richs.sU'cn. — La Forteresse de Frederlchss-
toen, pendant le siege, en 1814. Rapport officiel , augmcnte
de quelques details liistoriques; par un mililaire norvegicn.
Chrisliania , iSafi. In- 8".
La ville de Fredericlishald , en Norvegc, sitnee snr I'exlrenic
frontiere dii pays, du cote de la Suede, est defendue par une
forteresse, appelee Frederichssteen. C'est au pied de celte for-
teresse (|ue fut lue, en 171S, le roi de Suede Charles XIL En
i8i/i , elle soutint un IjosTibardement de cjuinze jours, et re-
ieta cinq sommatlons consecutiyes, dont la derniere, ainsi que
nous le lisons a la page 4o tie ce rapport officiel, etait conciie
en termes que nous croyons peu usites parmi les ])euples
civilises, puisqu'elle dit exj)resseinent que, dans le cas oil la
place lie se rend rait pas iinmediatetncnt ^ son commandant se-
rait PEwnu , lorsque plus tard elle aitralt ele prise , soitde vive
force , soil par ///^c capitulation quelconquk. Telle etait nt^an-
moins la fermete du brave commandant et de tous ses snbor-
donncs, que le parlementaire fut renvoye avee nn refiis forinel,
et il est probable que la place eutresisle encore long-tcms , si
line depeolie, signee de la propre main du prince Chretien-Fre-
deric , gouverneur, et pendant quelques iiiois roi dcNorvcge,
n'eut ordonne }a reddition de la place , el sa remise aux troupes
suedoises. Ces troupes y furent introduites pendant la nuit,
parce qu'on craignait la fnreiir de la garnison, qui etait tres-
decidec a se dcfendre jusqu'a la derniere extremite. — Nous
ainions a pouvoir ajouter , cequihonore le roi actuel de Suede
e) de Norvege , que, sans craindre son luecontentement, un
oflicier norvegien a pu llvrer ce rapport au pTdilicpar la voic
de rimpression. Ala verile, la publication cstanonyme; luais
son auleur ne peut rcster inconnu, j;uisqu'il appartenail a la
garnison, et que son rapport est officiel. Ce fait prouvc evi-
demraent que la presse est encore assez libre en Norvege.
Puisse le jiays ne jamais perdre ce palladium de sa iiberte !
Heiberg.
DANEMARK.
287. — * Folkets Opljsning, etc. — L'inslruction du peu-
nle, salulaire au prince; discours jirononcc en latin, dans
DANEMARK. 7o3
I'universil^ de CojiejiliJiguc, a ranniversaire de ia naissance
de S. M. le loldc Daneiiiark; par M. 11. C. Oirsted, profes-
seur a I'liniversito, etc. Copenhague,ii]ar8 1826. In-4° de i 2 p.
Ce discours doit exciter iin grand interef, autant par les
principes (jui s'y Irouvent professes, que par le 110m et I'au-
torite lilteraire de son aiileur. M. Oersted trace d'abord iin
tableau du bonJieur dont jouit Ic Dancinark , sorjs le sage gou-
veriierocnt de Frederic VI. Puis, apres avoir di'peint ces I'au-
teurs de I'lgnorauce qui senibleut relever la tete dans plusieurs
pays, et qui nc sont pas nvoins enneniis des jirincos que des
peuples, il montre que rinstruction populaire est, sous beau-
coup de rapports, aussi avanlageuse au gouverneinent qu'a la
nation clle-meme. « On a prctendu , dil-il, que les hommes
dont resj)rit etait Inculte , devaient, etre en general plus intre-
pides; mais, ce qui fit quelquefois triompher les peuples bar-
bares dans lenrs guerres eontreles nations civilisees, ce fut la
depravation de la civilisation meme. Un faux savoir passait
pour une science reelle; et , ce qui est le signe iiifalilible de cet
etat de degradation, le uiepris de la nioralite s'appelait inde-
pendance des ]irejuges. Ce u'est que par un abus des mots,
qu'on donne a cet etal le nom de civilisation : la lumiere y est
eteinte ; la raison y est degenoree en folic. »
II fait observer que les enneniis du perfectionneirsent uni-
verse! voudraient nous reporter au luoyen age, et qu'ils le j)re-
sentent sans cesse comme un terns plusheurcux que le notre, en
s'appuyant surtout des descriptions des poetes : « mais, dil-il, il
estde la nature dela poesie desepreter aux illusions et d'etre in-
terpretee faussement paries fanatiques. EUe pare de fleurs cliaque
age de la race liuniaine : dans I'ignorance, la poesie volt la simple
innocence; dans la fermentation sauvage des esprits, elle admire
la vigneurde I'lieroisme ; et dans la barbaric raffineedu moyen
age, ellcse plait a trouver une douce alliance entre I'amour et
la vertuguerriere. Les poetes nous fourniraient fncilcment une
peinture seduisante de cliaque siecle; on pourrait nieme com-
poser un brillant tableau , en reunissant les plus belles actions
du moyen age. Cependant, si nous ecoulons les lecons de
I'histoire, oserons-nous dire que c'etait le terns heureux des
rois, lorsque Tempereur Henri IV jiresentait I'etrier ausairit-
pere, lorsque I'empereur Frederic II etait persecute a Rome ,
ou lorsque le dernier rejeton de sa famille portait sa tete suv
I'echafaud. «
Apres avoir refule les principales objections des adveisaires
du perfeclionnenient des peuples, conire Fulilile de I'instruc-
tion generale,M. Oersted montre la vanite de leiirs tentatives.
7o4 LITRES ETRANGERS.
en proiivant que le diisir de s'iiistruire esl inherent a iiotrc
espece. •> La socieie est assujelie coinrae la nature a des lois
fixes. ]l esl vrai que chaqne membre de la societe jouit d'une
force qui siibsisic ])ar elle-meiiie; niais I'actlvite de cette force
individuelie depenti felienienl des lois generales , qn'nne ten-
tative de I'individu, si ello est dirigee contre les lois univer-
selles, deviendra tout-a-fait nulle... Legcnie humain asjiire a un
ordre social, regie par la raison;des lors, cliaquehoinme, j)orle
vers ce but, aspire a se perfectionncr. Vouloir agir contre celte
tendar.ce des esprits , c'est voulnir changer la nature des cho-
ses. On pourrait satis doute, a I'aide d'une machine, prescrirc
a I'eau d'une soTirce de monier, au lieu de chercher le point le
plusbas; ma is, si ronessayait de del oiirner les fleuves vers leurs
sources, on ne le pouirait. II en est de meme de la niarche de
I'esprit humain. Yous pouriez I'arreter ca et la pendant quel-
ques jours ; mais qui oserait se croirc assez fort pour encliainer
chez tous les peuples ce desir d'avancer ? Combien d'injustices
et de violences ne f.iudrait-iJ ])as coinmettre jiour approcher
de ce resultat , ct a ciiielle ex])losion des forces coniraires ne
serait-on pas ex[)ose?... Pourquoi enfin arreter ce progres du
peuple? Est-ce pour cvitcr quelques abus? Mais rinstruction
a-t-elle ete plus sujette a Tabus que le pouvoir lui-mtine? Et
pourlant nous jugerions insense celui ([ui conseillerait de re-
noncer a tout gouvernement. L'instrucilon vousest-elleodieuse,
parce qu'elle semble s'opposer a vosinleiels personnels? Peut-
etre n'avourez-vous ])as un tel motif; niais j'osc dire que cette
crainte n'est qu'imaginaire. II est viai, la distance (jui vous
separait dn peuple diminue; uiais ce rapprochement ameneune
confiance recijjroque , sans laquelle il n'y aurait. que desordre
et anarchic: en couipensation de vos pi-elendues perles, vous
obtenez la securite. »
Ces courts extraits du discours de M. Oersted suffiront pour
en jndiquer I'esprit. On aime a connailre la luaniere depeiiser
d'un savant ceiebre, qui a contribuo i)ar de beaux et utiles tra-
vauxaux progres des counaissanceshumaines. Sans doute aussi,
il pent paraitre curieux de comparer les opinions, professees
hauienicnt en Daneniark, et sous les auspices d'un gouverne-
ment sage et bienfaisant, avee les diatribes furibondes que se
permettent dans certains pays , ies organes du parti qui , selon
I'expression d'un poete spirituel,
Au chai' de la raisou s'.TUele par dcrricre.
DANEMARK. -oS
a88. — * Margaretlia, Dronning, etc. — MargiiPiite, reine
de Danemark, de Norvege et de Suede; par M. C.-F. Wich-
MAKN. Copenhaguc, 182^. In • 8" de xii et 167 j)ages, a\ec
\e portrait de la reine.
La reine Margueriie figure avec beaucoup d'eclatsur la iiste
des femmes qui ont gouverne de vastes cfats. Ses talens dislin-
gues , sa grande liabilele politique , et la finesse de son tact en
diplomatie lui avaient acquis le surnom de Semiramis dii Norch
elle I'a garde jusqu'a ce que, quatre sieclrs plus fard, il fut
Iransfere a une irapcratrice qui le meritait d'axitant mieux que
possedant les memes qualiles , elle ressemblait encore a la reine
de rOrient, sous des rapports moins honorables. C'estla reine
Marguerite qui, nee en i353 , et morle en 1412, sut reunir
par des negocialions, les frois royaumes du IVord. Cette reu-
nion ne dura que depuis 1 897 jusqu'a i Saa , epoque a laquelle
la Suede, seseparant des deux autres royaumes, elut pour son
roi le celebre Gustave Vasa. L'auteur de Touvrage que nous
annoncons a traile son sujet avec talent; il raconteles evene-
mens avec precision et clarle, etnous ne trouvons auciindelail
qui paraisse inutile. II a ete moins heureTix , a notre avis , dans
son introduction, qui expose la situation du Danemark et de
la Norvege, depuis les terns les plus anciens jusqu'a I'avene-
mentde Marguerite. Celte introduction comprend 64 pages en
pctits caracteres, et forme, par consequent, presque la moitie
de I'ouvrage entier. La lecture en est fatigante, ce ((ui provieut
en partie de la longueur des periodes. On serait portca croire
qu'elle n'est pas du meme auteur que le reste de I'ouvrage.
289. — * Om Kong Har aid Klahsdaab. — Sur le bapt^me
du roi Harald, surnomme Klak, et sur I'origine duchristia-
niiime en Danemark. Cojjenhague, 1826. In -8° de 99 pages.
En 826 , sur I'invitation du roi de France , Louis -le- Pieux ,
])lus connu sous le nom de Debonnaire , Harald, surnomme
Klah , roi de Danemark, ou plutot de Jutland, accor.ipagne de
la reine , de toute sa famille etd'une suite nombreuse , se ren-
dit a Ingelheim, j)res de Mayence, pour abjurer le paganisme,
embrasser la religion chretienne et se faire bapliser. Cette cc-
remonie cut lieu dans les premiers joi:rs rlu mois de juin de la
meme annee. Ainti, mille ans se sont ecoules depuis I'intru-
duction du cliristianisme en Danemark. En commemoration
d'un evenement d'une si haute importance, le roi actuel de
Danemark a ordonne la cek-bratiop d'un jubile, quia dii avoir
lieu dans toules les eglises de son royaume, le 14 mai dernier,
jour de la Pentecote. S. M. a voulu, en outre^ qu'a cette oc-
casion il fut public, pour rinstructiou du peuple danois, un
T. XXXI. — Septernbre 1826. 45
7o6 LIVRES ETRANGERS.
rccitdetoiitesles circonstances qui ontciiquelque rapport avec
cet evcneinent memorable, et que ce r<5cit fut redige de ma ■
niere a etre a la portee de toiites les classes de la societe. Telle
est I'origine de I'opuscule que nous annoncons, et dont I'au-
teiir, qui toutcfois a garde ranonyme, est le savant M. Mun-
TER , evet|ue de Selande. Un expose de I'elat religieux el moral
du royaume de Danemark, au commencement du ix* siccle,
sert d'lntroduction a son ouvrage , ou Ton trouve ensuite la
description de toutes les ceremonies quiaccorapagnerent i'acte
solennel, objet de ses recherches. L'exactitiide du recit et de
ses details nous est garantie par la grande erudition de I'au-
teur. On trouve intercalee dans cet ouvrage une traduction en
vers d'un poeine A'Ernoldus Nigellius , en vers elegiaques la-
tins. EUe est due a M. Rahber, dont le gout et les taiens sont
trop connus pour qu'il soit necessaire d'en faire I'eloge. M. Rah-
bek a cru devoir viser plutot a I'exactitude lilterale qu'a I'ele-
gance du style, de sorte qu'on ne trouve pas dans son travail
toute la purete que Ton est accouturae a rencontrer dans ses
nombreuses productions. Enfm, le livre est termine parqualre
psaumes destines a etre chantes dans cette occasion solennelle.
ils ont pour auteurs MM. Ingemann et Schmidt , tous deux
poetes tres-distingues , et un anonyme. Heiberg.
ALLEMAGNE.
290. — * Symholce ad carcerum disciplinain, etc. — Vues
sur le regime des prisons. — Dissertation qui sera soutenue
publlquement dans I'Acadcmie Albertine , le i5 juillet 1826,
pour obtenir la permission de donner des lecons publiques ,
par Eberh.-Bav. Friedlander, docteur en philosophic (sui-
vent les noms du repondant et des opposans). Koenigsberg,
1826. In-4° de 47 pages.
Avant de parler du merite de cette dissertation , nous in-
vitons nos lecteurs francais a s'arreter un moment sur le litre.
Plusieurs y apprendront avec surprise ce que c'est qu'une
universite. C'est d'une these qu'il s'agit, et d'une these latine
sur quelques idees toutes vivantes , toutes jeunes, de la phi-
lanlropie moderne. Une these latine, soutenue dans les formes
de I'ecole, peut done aujourd'hui encore signifier quelque
chose , repondre a la pensee du siecle et contribuer a ses
progres ! Dans les murs de cette Sorbonne, chef- lieu de
notre Academic parisienne , cela ferait surement crier au
miracle, ou bien au scandale ; el c'est pourtant ce qu'on
ALLEMAGNE. 707
trouve tout simple dans les universites de rAUemagne. Chez
nous, uu piofesseur qui s'etendrait un peu sur les doctrines
contempoiaines , en niatiere de philosophic et d'ordre public,
se ferait suspendre de ses fonctions; nous en connaissons
deux ou trois exemples singuiierenient approprles h la matiere :
et voila un savant qui, pour se faire autoriser a donner des
iet'ons piibliques a I'universlte de Koenigsberg, pro venid le-
gend i , figure, suivant I'usage etabli au-dela du Rhin , dans
un acte public dont il va prendre le texte chez les societes
philantropiques qu'il a frequentees dans ses voyages. C'est
que, chez nous, il n'y 2 plus des long-teras d'universites,
et que la elles vivent encore dans toute leur force , raalgre
quelques alleinles qui leur out ete porlees depuis quelques
annees. La, coinme dans les i5^et 16^ siecles, les universites
sont au niveau ou plutot a la tete des travaux contemporains.
La, I'enseigneaient superieur se censure lui-meme, et se di-
rigc s(ir tons les points oil I'appelle le besoin des esprits.
Tontes les idces susceptibles de produire une doctrine vont
se fondre et s'eprouver avec la masse des etudes ; elles y
prennent aussitot une forme scientifique, favorable a la dis-
cussion et a I'examen. En raison de leur importance, la con-
currence et la contradiction s'etablissent librement. Les condi-
tions, actes i)ublics , et aulres formalites universitaires ne
sont (jue des garanlies prealables contre I'ignorance ou I'in-
capacite des personnes; elles n'imposent jamais ni doctrines
speciales, ni limites a Tenseignement. Sans cela, tout y perirait:
la routine mettrait en fuite les talens , les lumicres , I'emula-
f ion. C'est ce qui est arrive ailleurs par diverses causes. Mais
venons a la dissertation de M. le docteur Friedlandcr.
Ce travail est le resultat d'un scjour de I'auteur a Paris et
a Lotidres , pendant lequel il a visile plus particulierement les
lieux de detenlion, et s'est lie avec les liommes les plus verses
dans la theorie et dans l:i pratique des moyens propres a les
ameliorer. Apres une courte preface, viennent i^quinze pro-
positions posees et succlnctement developpees, sur les distinc-
tions de caraciere , d'age , de sexe a faire entre les detenus
pour les separerconvenablement; sur le genre d'occupations ,
d'enseignement , de consolations qu'il faut leur donner; enfin,
sur les personnes et les associations destinees a les surveiller;
2° une comparaison rapide de la legislation prussienne sur
cet objet avec celle de I'Angletcrre ; 3** I'esquisse d'un reple-
ment a faire pour la classification, I'inspection et I'instruction
ou I'education des detenus; 4" ^^ description d'un plan de
prison donne en Angleterre, par G. Ainslie, et adopte par
7o8 LIVRES ETRANGERS.
la Societe de Lomlrcs pour I'arjielioration du sort des prison-
iiiers : on y a joint nne planche lilliograpliiee ; 5" cnfin , une
lisle clironologique des y)rincipaux onvrages jiublies depuis
cinquante ans sur la matiere, par les Anglais.
On voit que Tanteur a moins cherche roriginalilc que I'uti-
lite; ce qui prouve qii'il est aniine d'uti dcsir sincere d'intro-
duire dans son pays des reformes utiles di''j;\ essayees, ou
du moins deja approuvees ailleurs. A la suite des regies gc-
nerales, qu'il etablit avec bcauconp de solidite, sans pi-etendrc,
comme il cut pu le vouloir, les faire deriver d'une theoiic
absfraite de la morale ot des droits sociaux , il s'applique
surtout a distinguer Ic.s divers genres de prisons et les divers
ordres de prisonniers qui leiir conviennent, avec des subdivi-
sions dans cliacun de cos ordres. Toules ces distinctions sont
assez nombreuses; nous eussions desire que rauieur qui -voii-
draitles appliquerac/jwiyHe/Torwc^, lint compte de Timmense
difference qui existe entreles])rovincesallemandesoii les crimes
sont rares dans une population assez egalemeut repartie sur Ic
terriloire , ot les deux cayiitales qui lui ont suggere ses idees. 11
senible que ces ni,nsses cojossales, comme de veritables anoma-
lies de la civilisation , exigent une economie morale et politique
toute parlicnliere. Yoici, du reste , les six especes de prisons
qui doivent etre separees , et que le plan de G. Ainslie pre-
senle avec celte condition, sous Tine fornie simple et inge-
nieuse : i'* Cuxtodice (Haftgefsengnisse) , m.■^i^ons d'arrot pour
s'assurer des prevenus. Les jirisonniers doivent y ctrc occupes
autant que possible, maisa leur gre ; ils doivent y conservcr ,
aulant que possible, les habitudes de leur rang dans la so-
ciete.— oP Career ( Gefncngniss ) , prison des condamnes a un
an au plus de detention , et dont le delit ne suppose pas une
perversity decidee. La privation de liborte doit etre leur seul
cbatiment. Occupations et habitudes , comme ci-dcssus. — •'^"
Erga.stitla ( Zuchthjeuser ], maisons de correction. Coupables
encore jeuTies , deja entres dans la voie du desordre. Peines
en deca d'une annee. Travail imjvose , niais non trop rigou-
reux. L'esprit de douceur doit prevaloir. — l^^ Pcenitentiaria
(Slrafgefrengnisse ). C'est le Carcere duro des Italiens. Crimes
supposant une perversite habituelie. Travaux forces. Espe-
rance d'etre recommandes a la clemence du prince pour ceux
qui se conduisent bien. — 5° Vincida ( Festungen }. Prison
plus dure d'un degre que la prcceclente pour les criminels
desesperes , dont la peine s'etend au - dcln de dix annees.
Travaux rigonrenx. Extreme severile, sans renoncer jiourtant
a Ja charite et a la clemence. — 6° Carceres correctionis ( Uos-
4
\LLEMAGNE. 709
serungshxuser). Prisons pour la reforine des vagaboiuls et des
ineiidians niiisibles a la socieK'! , sans specification d'tiiicuii
crime ni delit. Severite relacliee progressivenienl jiisqu'a ce
que Ics detenus soient en etat d'etre rendus a la liberte. Les
sous-divisions, dans la cloture de ces six ordres de prison-
niers , doivent etre deterniiiiees par le sexe , I'ai^c , le degre
d'educalion , les dispositions morales , et la conduite journa-
liere.
On s'apercoit aisement que I'auteur n'a pu suffire dans un
espace aussi limile a toutes les parlies de sou sujet, Celles
qui sont traitees dans sa dissertation meritent loute I'attention
des bons esprits et des amis de rhumaniie. Les developpe-
niens que I'auteur a du donner de vivo voix , dans la dis-
cussion publique qu'il a soutenue , lui ont sans doule permis
de completer plusieurs apercus iniportans qu'il se conleiite
d'indiquer rapidement au passage. Nous lie doutons pas qu'il
n'ait tronve une premiere recompense de son utile travail
dans les applaudissemens de ses collogues et de ses compa-
triotes; nous lui en souhaitons une autre encore : celle de
voir ses vues bienfaisantes realisees autant que possible par
le zele des citoyens et la sagesse du gouvernement ( Voy. ci-
dessus , p. 541 )- V.
291. — * Ueher gelehrte Schulen. — Sur les ecoles savantes,
surtout par rapport a la Baviere; par Frederic Thiersch. Mu-
nich, 1826.
Quoique rUaiversite de France, tidcle auxvieilles routines,
n'ait guere I'habitude de s'inforiner des ameliorations que Ton
introduit ailleurs dans I'enseignement public, nous croyons
devoir appeler son attention sur cet ecrit d'un habile profes-
seur bavarois. En Baviere, Ton ne croitpas, comnie a la Sor-
bonne, qn'il n'y ait rien a ameiiorer dans I'instruction des
colleges : le roi actuel a demande un ])lan d'etudes conformes
aux besoins et a I'esprit du siecle. M. Thiersch jelte un coup-
d'oeil sur I'histoire de rinstruclion en Baviere; il fait connaitre
les vices des anclennes methodes , les tatonnemens et les er-
reurs de I'ancien gouvernement; il traite ensuite du but des
ecoles savantes, dti corps enseignant, de I'instruction religieuse
et classique, de I'enseignement de I'allemand et des mathema-
tiqiies, de la discipline des ecoles, etc. D'autres professeurs
feront peut-etre, a son exemple, connaitre leurs vues et les
resultats de leur experience, et aideront le gouvernement ba-
varois a dresser un bon plan d'etudes pour les colleges qui ,
dan« plusieurs pays, laissent encore beaucoup i desirer. D — c.
292. — * Meine Lehensschichsale als Vorslehtr mciner Erzie
710 LivRES Strangers.
hungsinstitute. — tvenemens de ma vie cotnmc chef des insti-
tutions d'education a Bouri^doif ct Yverdun; ])ar Pkstalozzi.
Leipaig, 1826; Fleischer. In 8" de aSr paj^cs.
Apres les eloges nombreiix et meiiti's qu'ontobtenushi me-
thode d'cducation du celebre Pestalozzi, et les etablissemens
fondes par ce venerable philantrope (i); apres tous les on -
vrages el les discours publics i)ar Peslalozzi menie et par ses
coliaborateurs, on sera sans doute surpris de Tapparition de
cetle espcce de confession publique par laquellc le vieillard , au
ternae de sa carriere, et sur les debris de ses etablissemens,
avoue Ires ingcnument qu'il s'est trompe, et qu'il a accu-
mule faute sur faute. En effct, le genie inventif, I'imagination
active , la bonhomie et toute la maniere d'etre de Pestalozzi le
rendaienl incapable de diriger et de surveiller i'administraiion
el reconomie d'une grande maison;et comme il avait , sous ce
rapport, tres-mal place sa confiance, il a ete souvent trompe,
et les etablissemens ont succombe, par des causes tout-a-fait
independantes de la bonte de la methode que Ton aurait du
y pratiquer avec perseverance, et dans I'esprit du foiidateur.
A Tepoque de la revolution francaise qui araena celle de
la Suisse, lorsque resaltation des esprits faisait juger facile
I'execution des conceptions les plus grandps , des projets
les plus vastes et les plus extraordinaires , Pestalozzi , en-
traine comme d'autres amis du bien, porta ses vues sur la
reforme totaie de I'education. Seconde par des hommes gcne-
reux qui partageaient son enthousiasme, et par un jmblic
bienveillant qui encourageait les tentatives d'ameliorations en
tout genre , le reformateur Suisse fonda une institution qui fut
bientot citee comme un modcle , et ou les parliculiers, ainsi
quelesgouvernemens, vinrent ou envoyerent puiser des lecons.
Pestalozzi crut lui-meme de bonne foi au plein succes de son
entreprise philantropique. En effet, tout alia d'abord au gre
de ses voeux; les enfans etonuaient par leurs progres;les pa-
rens elaient satisfaits, les etrangers enchantes : Pestalozzi qui
(i) Les personnes qni voudraient etudier la methode de Pestalozzi,
ponnont consalter I'ouvrage de M. Tllarc-Antoine Jcllien, intitule :
Esprit de la methode d' education de Pestalozzi, avec un Pidcis sur
I'institut d'education d'Yverdun.MWan, 1812. 2 vol. in-S". — II n'eu
reste plus que 20 exemplaires , au bureau de la Revue Encyclopcdique :
Tedltion est epnisee. Le metne onvrage a ele jnge par le departement de
I'instractiou publique en Prasse le traite le plus coioplet sur la metbode
de Pestalozzi; et S. M. le Roi de Prusse avail envoye, par ce motif,
ep ( 8 1 3 , une loedaille d'or a I'auteur.
ALLEMAGNE. 711
avail rcellement des viies admirables sur I'educafion , etait porte
aux nues dans loute I'Europe. Cependant, reiicliantement
cessa bientot, au inoins dans rinteiieiir des etablisseniens. Pes-
lalozzi , aiissi faible que bon , elait incapable de diriger une
grande entre[iri5e; il lui manquait meme I'instruction neces-
saire pour guider ses collaborateurs : ses elabllsseinens , en
apparence si prosperes, furent dechires par la discorde et par
I'anarchie qu'il ne sut ni prevenir, ni reprimer; quelquesniai-
tres , en s'eloignant de lui , porterent les premiers a la connais-
sance du public ces dissenlions intestines ; et aujourd'hui , Pes-
talozzi confirme, par la franchise de ses aveux , tons les bruits
qui ont couru a eel egard. On voit, dans ses confessions,
riionune de bien qui n'hesite point a s'accuser de ses faiblesses,
et a convenir qu'il n'a pas ete capable de realiser les reves de
son enthousiasme. Sans le concours et la noble perseverance de
quelques amis devoues, tout I'edifice se seraitccroule long-tems
avant I'epoque qui vit en effet sa chute definitive. Le desordre
de sa maison fut lel que Peslalozzi faillit perdre la tete. II fait a
ce sujet des revelations singulieres , et qui prouvent jusqu'a
quel point ce faible et bon vieillard elait facile a tromper et a
conduire.
'< J'entrai , dit Peslalozzi, dans une espece de fureur qui
allail eclater en rage, et par laquelle je courais risque de per-
dre entierernentlaraison et detomberdans une apathiefuneste.
Un ami devoue me sauva de ce malheur avec le meme calme
et la meme energie qu'il deploya pour tout ce qui me concer-
nait. Des le leiidcmain du jour oii le dechirement de raon ame
sVtait manifesle d'une maniere si terrible, il me conduisit sur
le Jura dont les fraiches collines agirent avec une rapidite in-
concevable sur raes nerfs , et j)roduisirenl sur moi I'effet le plus
salulaire en faisant disparaiire le danger d'une alienation com-
plete; cependant il me resta un grand abattement, joint a une
vive inquietude, et un profond decoiiragement , suite ordinaire
d'un commenceuient de desespoir... Je me sentais sur la mon-
tagne, comnie ecliappe aux lourmens de I'enfer, et j'eprouvais
une felicite ineffable. Je ne voulus point retourner chez moi.;
pendant quelques semaines, je ne voulus pas meme entendre
parler de ma maison. Tous les snirs, un de mes anciens eleves ,
devenu chef de mon instilul, a})res avoir rerapli sa tciche a
Yveidun , venait nie voir, passait la nuit avec moi, et cherchait
a me distraire; le Icndemain malin, il retournait a I'elabiisse-
ment. » Un jjareil elal de choses ne pouvait rester long-lems
cache; retablissemenl d'Yverdun cessa d'exister; et Peslalozzi,
detrompe de ses illusions , a la fin de ses jours, ou plulot egare
par son imagination aussi prompte a lui exagerer le mal que
712 LI V RES Strangers.
!e bien, iic troiive de consolations que dans le sentiment intime
d'avoir tonjourseu les intentions les pluspures. Celte idee et ia
veneration (|ue liii ont vonoe tant d'honitnes respectables, doi-
vent le soutenirdans son n)alhenr;cl en avonant ses fautes, i!
s'honore par sa candenr menie. Les causes do la decadence de
I'inslitut d'educalion d'Yverdiin seront peui-etre unjour expo-
s6es et developpccs par un homme qui a visite I'instilution dans
le tenisdesa prosperitc et a I'epoque de sa rulne, et qui, elran-
ger par sa position a Tinslitntion elle-meme et aux petltes
passions, anx disscntions interieiires qui ont amene sa cliute,
pourra dire loute la veritc snr les homines el sur lesclioses,
et nionlrer comment Pestalozzi anrait pu conseiver son ou-
trage , et comment les torts graves de ceux qui I'cnvironnaient,
et qui ont abuse trop souvent de sa confianee et de son carac-
tere bun jusqu'a la faiblesse, n'ont rien de commun ayec les
excellens principes qui consiiluent sa melhode. Celte methode ,
bien comprise et bien appliquee par des inslituteurs dignes de
leur noble profession , et dans uiie maison adniinistree avec
une fermete melee de douceur , avec oidre et economie , aurait
produit, en t'aveur dcs enfans, eta la satisfaction de leurs
parens , les bons resultats du developpemenl harmonique et
simultane des facultes physiques, morales, inlellectuelles et
sociales des enfans, tel que se I'c^tait propose Pestalozzi. Vou-
loir et concevoir le bien est une chose facile; executer avec
sagesse et avec succes les ineilleures concejjlions, est iine lache
qui presente toujours de grandes difficulles. D — o. J — n.
293. — Serbische Hochzeitslieder. — Chansons nuptiaies des
Serviens , traduitcs en vers allemands et precedces d'une in-
troduction ; par jE'z/g<?/2e Wessely. Pesth, 1826.
ag/,. — Nekolihe Piesntze. — Chansons serviennes, en partie
recueillies, en partie traduites ou composees par S. M***. Leip-
zig, 1826. In-i2.
On s'est pris en AUemagne d'une belle passion pour la lit-
t^rature poetique des Serviens, quel'on connait seulement de-
puis quelques annces. Un Servien , nomme Stefamowitch,
publia le recueil des chansons de toute espece qui sont dans la
bouche du peuple en Servie. Ce recueil a fait fortune en AUe-
magne : on I'a traduit, on I'a comblc d'cloges, on I'a present^,
presqtie comme une nouveile source de richesses poctiques. II
est pourtant de fait f|ue les chansons sei-viennes sont generale-
menl ])auvres de poesie et d'invention. Souvent eltes se redui-
sent a de simples pensees, a des reflexions communes, a des
allusions aux occupaiions et aux evenemens vulgaires de la
vie. II y en a que les femmes chanlent en filant , et qu'elles cora-
posent elles-memes, en vaquant a leurs Iravaux. Les chansons
ALLEMAGNE. 71?
d'ainour nesontguere plus remarquables. li n'y a que les ciiau-
sotis lieroiques qui , conservant rempreiiUe du caiactere belli-
queux de la nation, ou se rapporlant a (]es evenemens liisto-
riqnes, pit-senlent un interet particulier. On cite iin rapsode
aveugle, noramc Phii-ippe, qui itnprovisait des clianls guer-
riers , meme de ])lusieuis centaines de \ers. I' se ])eut, an
reste, que cette poesie servienne gagne dans la langue origi-
nale, par la naivetu on roriginalite de I'expression ; mais tou-
jours est-il vrai que, dans les traductions al'.emandes, elle o
tres-peu de coulcur e! tie traits piquans.
II fa ntdi re aussi que jusqu'a])t'esenl toil tes les poesies quel'on a
recueilliesetaien I rouvraged'honmiesillcltrcs. Les compositions
des hoinmesd'un esprit cuitivecommencentseulement a paraitre.
Les Ne/iOli/,e Piesnize appartiennent a cette derniere classe :
leur auteur, ne a Sarailia, s'appelie Sitneon Milutinowitch.
On a publie aussi cette annee, en Aulriche, un almanacli ser-
vien , sous le titre de Daniza, ou V Etoilc du matin : il conlient
plusieurs morceaux en prose et des poesies popniaircs. L'edi-
leur ou peut-ctre I'auteur de cet alinanach est le nteine Jf^ouli
Stkfanowirch KaradI'ITCH qui a le raerile d'avoir jjublie le
premier recueil de ])oesies de sa nation, et d'avoir atlire ainsi
I'aitention de I'Europe sur les essais poetiques d'un peuple qui
est subjugunpar le despotisme, comme les Grecs, etquipeut-
etre s'aifranchira un jour, comme ceux-ci.
295. — Irischc EIJ'enmarcke?j . — Conies des fees irlandais ;
traduits par les freres Grimm. Leipzig, 1826. In-S*^.
Les traditions populaires pcuvent servir a faire conuaitre le
genie, les niceurs, les superstitions, les prejuges d'un peuple;
il n'est done pas inutile de les recueillir. Cest ce qu'on a fait
pour rirlande, dans un ouvrage public a Londres en ibaS.
11 vient d'etre traduit en aliemand par les freres Grimm, au-
teurs d'un recueil semblable de contes populaires allemands.
lis I'ont fait preceder d'une introduction sur les fees, quel'on
appelle Elfes dans le Nord, ^Elfen dans I'anglo-saxon, Alfar
en islandais , Elfar en suedois et Ehc en danois. En Irlande ,
on se represente les Eifes comme un petit peuple de nains ,
d'ordinaire assez paisibles, dont le corps est transparent, ae-
rien et d'une beautc parfaite. Dans les belles nuits d'ete, ils
forment des rondes dans les campagnes solitaires; car ils ai-
nient passionnunient la danse et la musique. On leur attribue
encore Thabiiude de voler les enfaus et d'y substituer des
inonsties. D'apres cette tradition irlandaise, les Elfes sont des
anges dechus qui, demeurant entre le ciel et I'enfer, vivent
dans I'incertilude penible dn sort qui leur est reserve au juge-
71 4 LIVRES ETRA.NGER.S.
nieiit dernier. En Ecosse, on suppose IcsElfos trcs-linbilcs dans
Ics arts in6cani(|iies et surfoul dans I'art d'enlever des enfans
et nieine de grandes personnes. lis se plaisent, dit-on , a alti-
ler les etres huniaiiis dans lenrs rondes. Walter Scott , dans
les notes de ses poesies, et Grant Stewart ,A7i\\^ son ouvrage
sur les supcj-stitions populaires des viontagnards ccossuis ,
( Edimboiiig, 1823), ont donne des details interessans sur ces
contes des montagnes.
On trouve, dans I'inlroduction des freres Orimin , des rap-
l)rocheniens ciirieiix entre les superstitions des divers pays dii
Nofd; vieuncnt eiisuite vingl-sept contes irlandnis, ou ces su-
perstitions sosit niises enactions. II y en a ((uel(]ucs-uns donl
le personnnge |)riiicipal est la Phouha : sous ce nom, les Ir-
landais el les Ecossais se figiircnl nn etre inysterieiix donl on
se sonvient couime d'un reve pcnible, on d'un cancliemar, et
<iui, s'atlachanta I'liomme sous la forme d'un cheval noir , ou
d'une chauve-souris, I'entraine par nionts et par vaux , par-
dessus les abimes, el ineme jusrjues dans la lune. D — o.
296. — * Hcbraische Gramniatick , etc. — Gramraaire he-
braique; par Guillaitine Gesenius, professeur de theologie.
Halle, 1826; Paris, Dondey-Duj^re. In-8° de 260 pages.
La iangue liebraique, langue de i'ancien Testament, et la plus
ancienne qui nous soil connue, langue niorle dejiuis vingt sie-
cles, clail projireinenl I'idiome du pays de Canaan , c'cst-a-
dirCjdela Palestine, et j)robablenient de loute la Plienicie.
C'etait un simple dialecte d'une autre langue commune autre-
fois a la Syrie, a la Mesopolaniie , a la Chaldcie, a I'Arabie et a
I'ElIiiopie. Les cliretiens de I'Euiope ne I'unt guere etudiee,
avant le xvie siecle; cl , a vrai dire,ils n'en ont pu avoir unc
connaissance approforidie, f|ue depuis environ centans, c'est-
a-dire, dejiuis (ju'ils I'ont degagee des leveries rabbiniqucs ,
depuis qu'ils I'ont coniparee a ce que Ton peut savoir de tons
ses dialectescollateraux , etexpliquee specialement d'apres I'a-
rabe. II faut le recounaitre , c'est aux Allemands que sont dus
les derniers et les plus utiles travaux sur cette branclie irnpor-
tanle de la philologie. L'ecrivain qui de nos jours s'y applique
le plus profoiidemenl et avec le plus de succes est s»ins contre-
dit M. le professeur Gesenius, a qui Ton doit, 1° la Gram-
maire, sujet decetlc annonce , et qui est arrivee a sa /iiiitirnie
edition, sans compter les traductions deja ])ubliL-es en plusicurs
langues vivantes ; 2° an Exanien critique de I'idiome hebreu ,
el des dialecles hebra'iques (Leipzig, 1817. In-8" j ; 3" unc
Histoire de la langue et de I'ecrilure des Hebrenx ( Leii)zig,
i8j5. In-8°)j /(°un tres-docte Commentaire surle lexte ori-
SUISSE. 71 5
ginal d'Isaie ( Leipzig , 1821. In-8" ) ; 5*^ uii Dictionnaire Iie-
breu, chaldeen el allemand, dont la Iroisienie edition va pa-
railre en 1827 (2 vol. in - 4° ); enfin , divers aulres ouvxagts
moins considerables mais dans le nicinc genre. Voila des sujets
d'etudes beaucoup trop negliges en France par nos jeuiies
theologicas. Lakjuinais , de I'lnstitul.
SUISSE.
207. — * Manuel militaire pour V instruction des ojficiers
suisscs de toutes arrnes , on Essai d'un systeme de defense
de la conjedcration helvetique : avec une petite carte dc hi
Suisse , et qnatre ])Ians sur les mouvemens des troupes et les
manoeuvres de combat; traihiit de Tallemand, sur la seconde
edition, et sous les yeux de I'auteur , par F. Kuenlin. Bale,
1826. Paris , Anselin et Pochard. In-S'* de 496 pages.
L'auteur de I'ouvrage traduit par M. Ruenlin est M. le
lieutenant-colonel WiELAivn, de Tetat-major federal. I, 'impor-
tance , I'etendue et la iiouveaute du sujet qn'il a ti-aite , nous
im[)osent i'obligalion d'en rendre un compie assez developpe,
pour que I'ot) puisse apprecier un aussi grand travail , jnger
de ce qu'il offre aiix meditations des railitaires , des hoiumcs
d'efat et des peuples. L'auteur dedie son livre aux Suisses.
Voici comment ii termine celte epitre qui sert de preface, oii
les plus nobles pensees sont exprimees avec la simplicite de
la raison.
« Magistrals , ])eres de la patrie ! vaillans frcres d'armes !
el vous tons , Suisses libres , habltans des Alpes et du Jur.i ,
des rives du Rhin , du Leman et de I'Aar ! groupons-nous
autour de la banniere fcderale , afin que nos vingt-deux can-
tons ferment une nation , unie de coeur et d'affection , el dis-
linguee autant par ses institutions sociales , que pai- la bonne
organisation de tous ses elemens de resistance. Que cliacun
de -vous apporte le contingent de ses lumieres et de sa bonne
volonte , pour Taccomplissement de celte ceuvre ])atriotique ;
que, d'une extremite dn territoiie 3 I'autre, toutes les voix
se retinissent jjour rcpeler , et giavcr dans tous les coeurs cot
axiome : L'ordre , la discipline et le devoilinenl des confe-
deres , diriges avec ensemble et sngesse , peuvent seuls assurer
le repos , la paix , I'honneur el Cindependance de tous.n
Sil est encore en Europe un jjenple ((ui puisse offrir au
Nouveau - Monde des exemples et de i'inslruclion , c'est la
nation Suisse. Ii parail qu'aux Etats-Unis , le travail de Tor-
ganisalion des milices avance lenteractif et avec d'extremcs
71 (> LIVRES 1i:TRANGERS.
difficnltes. Quelle cjiie soit ileSnilivemenl I'organisation de
Itiir force publiqiie, il y a cerlainement dans le Manuel de
RI. VVielaiid pea de tlioses a changer pour I'approprier a cetle
organisrition. C'est encore pour notis un motil" de nous eui-
presser de faire connaitre cet ouvrage dans tons les lieux ou
la Revue encyclopcdique pent avertir les lioiiimcs studieux ,
les amis de leur ]>atrie ot de riiuinanilo. F.
298. — Beaux Jours et Mclnnmlie ; nniivelles ecossaises;
par Artliur Austin; ouvrage traduit dc Tanglais. Geneve,
1S26; Pasciioud. Paris, le meme. 2 vol. ia-ia de 164 et
iSy pages; prix , 6 fr.
(let ouvrage a obtenii quehjue succes en Anglelerre. C'csl
uiie galerie de tableaux , enipruiiles a la vie commune, et eni-
bellis des couleurs que leur pretc une imagination vive et sou-
vent cmpreinte demelancolie. La scene est toujours enEcosse;
le plus souvent, dans an village, au milieu d'une campagne
pittores(|i3e. Les personnages, choisis dans des classes diffe-
rentes, se ressemblent presque tons par leurs sentimens mo-
raux et religieux , par leur pieuse rcsig£ialion aux decrets de
la providence. L'auteur parait se complaire aux recils desmal-
iieurs qui accablent I'liumanite; niais sa Iristesse n'a rien de
sauvage ; elle porte un caractere tout particulier de douceur.
Le Iraduc'eur anonyme a parfaitement reussi a reproduire
le coloris de I'original : on voit qu'il a consacre a son travail
ces soins consciencienx et cette application severe, dont se dis-
pensent trop souvent les inlerpretes des ecrivains etrangers. Si
ses Nouvelles ne sont ])ns bien accueillies en France, M. Aus-
tin ne devra pas s'en prendre a son traducteur, comme pour-
rait le faire plus d'un poete ou d'un romancier anglais. Quant
a nous , nous les avons lues avec plaisir et nous aimons acroire
que le grand nombre des lecteurs les accueillera avec empres-
sement. A — e.
ITALIE.
293, — * Orazione per Vesequie anniversarie de'benefattori
della casa di ricovero c d'industria in Padova. — Discours
])our les obseques anniversaires des bienfaiteurs de la maison
de refuge et d'induslrie a Padoue, par Joseph Bakbieri. Pa-
doue , 1826 ; Crescini. In-8°.
Ce titre seul fait honneur a M. Barbieri qui a consacre sou
eloquence a unsujctsiiinportant.il a fait, dit-on une telle im-
pression sur ses r.ombreux auditeurs , que tous out contribuc
plus ou moins, par des dons volontaires aux frais de I'utablis-
senient en favcur duquel il voulait reveiiler I'inleret public.
ITALIE. 717
Get exemplc devrait encourager nne foule d'omteurs , a la fois
sacres etsteriles, a Irailer des siijels scmlilablcs, ct a employer
cette eloquence qui touclie ])lus le coeur que I'esprlt.
3oo. — Alcimi ritratti di donne illustrl venezione , etc. —
Quelques portraits de feminescelebres de Vciiise, jjublics par
Barthelemy Gamba. Venise , 1S26 ; impriiuerie Horjopoli.
In-8".
Ce recueil contient 12 portraits de dames, remarquables par
leurs talens ou par leurs aventures : Isotia Nogarola , de Ve-
roiie, qui fut adn)iree par Bessarion; Cassandre , Venitienne,
cel«bree par le Politien ; Irene de Spilinbergo, du FrioTil, eleve
du Titien et qu'admira Le Tasse; Gaspara Slampa dont les
vers et les amours font encore verser des larmes; Ferouica-
Franco , Modestade Pozzo , Marietta Tcutorrctto , routes trois
de Venise; JxnbeUa Jndreini, de Padoue, qui brilla dans les
academies , par ses vers , et stir les theatres de France et d'lta-
lie, par sa declamation; Hctene Cornaro Piscop/a , aussi de
I'adoue; enfin, Rosalba Carrierc, Louise Bergalli Gozzi et
Eiiiahcth Caminer-Turra , Venitiennes, qui ont fleuiidans le
siecle dernier. La plupart de ces gravnrcs ont eie exccutees
avec talent d'apies des portraits fails ])ar des peinties conlem-
porains. Elles font lionncur an gorit generalement connu de
M. Gamba. Que nos Italiennes d'aujourd'liui cl.erelienla meri-
ler de semblables liommages.
!^oi. — * Sopra il teatro tragico itnliano considerazioni, etc. —
Considerations sur le tlicaire tragiqne italien , par G. U. Pa-
GANi Cesa. Florence, iSaS; Magheri.In-8°.
L'auteur commence son ouvrage par une leltre adressce a
Charles Goldoni; et il estslngulier qu'en se montrant fort de-
goute de ce bas-monde,qu'il trouve rerapli de vices honleux,
il ait eu la patience de s'occuper serieusement du theatre. Pre-
venu en faveur des classiques , il regarde les nouvelles pieces
dramatiques comme scandaleuses , et destinees a detruire le
gout. Voulant en meme terns conserver ou retablir Tordre
dans le theatre, il expose ses opinions qui nous semblent i)ar-
fois aussi etranges fjue plusieurs de celles (ju'il a I'inlention
de combattre. Sa disseitalion est divisee en deux parties. Dans
la premiere , il examine si i'ltalie est vraiment inferieure ,
comme on I'a dit, aux autres rations, dans le genre tra-
gique ; et il passe en revue les nations anciennes etmndernes
qui se sont distinguees dans la meme carriere. A la fin de
cette premiere partie, I'auieur change de ton, et jji'cnd le
style familier du dialogue, ce qu'il repete encore ailleurs ,
et ce qui paraitrait convenir mieux a un romantique qu'a
7i8 LIVRES ETRANGERS.
un classique. —-Dans la seconde partie, I'auteur se propose
d'exaininer si le drame puremei)t Hagique est arrive , en
Italic, a un certain degrd do perfection. II nous entrctient,
a ])ropos de cette question , de I'illusion iheatrale, (les uni-
tes dramatiques , du roniantisme de quelques especes de tra-
gedies , des confidens, du style, des decorations, de la ver-
sificalion , etc. En Irailant chacun de ces sujets, il ne manque
pas de nous informer d(i caractcre et du nierite iilti-raire de
plnsieurs poctes de ce genre, italiens et eirangers. Souvent
il les compare on Ics apiirecie , et q»iek|uef()is d'une n)aniere
qui ne pent satisfaireni les uns ni les autres. La versification
de Victor Alficii ne lui plait pas; il admire celle de Metas-
tase , et cette 0])inion nous seinble seule prouver la maniere
de senlir et de pcnser de I'auteur. II admire aussi la versifi-
cation de Charles Dottori dans son Jrislodeme , Iragedie pu-
bliee en 1657. ^" trouve, a la fin de ce traite , divers
exemples de style tragifiue, tires du Mahomet el de la Se-
mtrainis de Voltaire, traduilspar Cesarotti, et du Polybete
du jfune Forciroli. Certes , cette dernierc tragcdie ne manque
])as de merite; mais rauieur ra])prouve surtout, parce qu'il
la trouve, quant a la versification , plus eonformc a la maniere
de Dottori, de Cesarotti, et particulicrement de Melastase.
M. Pagani Cesa fait cclatcr sou indignation contre tout ce
qui tient au roniantisme. Les theories de M. Schlegel , malgre
le langage imjiosanl dont dies sont revetues, lui seniblent
des bizarreries ; il tourne en ridicule les di ames romantiqnes ,
et les journalistes qui s'cfforcent de les accrcditer. Enfin , il
traite de charlatans les roniantiques et ceiix (]ui les favo-
risetit; ce c|ui passe les bornes d'une critique lilteraire judi-
cieuse et imparliale. Nous nous contentons d'indiqner les
opinions de I'auteur , d'autant plus qu'elles ont ete longuement
disculees daus trois articles inseres dans V Anthologie tie Flo-
rence (N°* 62 , 63 et 64). Ces trois articles torment une espece
de tiaite abregc, mais interessant, de ce que le systeme ro-
manii([ue contient de relatif a la poesie draraatique. L'auteur
exjjose avec art , el quelqnefois developpe avec chaleur ce
qu'onl dit de nieilleur les apotres les plus zelos de ce systeme.
Ncn-sculement il fait valoir I'importance de leurs raisons; il
seml'lc en insposer par le nonibre et I'aiitorite de leurs noms.
Bien que nous n'adojuions pas toutes ces maxinies,no\is aimons
a louer la maniere decente et vraiment philnsopliique dont il
defend sa cause. Quand meme on ne trouverait d'autre merite
dans I'ouvrage de M. Pagani Cesa , on ne peut lui contesler
celui d'avoir fait naitre ces trois articles de I'Anthologie de
ITALIE. 719
Florence , que pouiTont utilement consulter ceux qui aiinent
ce genre de discussions.
302. — II Clotaldo , poema , etc. — Le Clotalde, poeme,
par Louis Career. Padoue , 1826; Minerva. In-4''.
C'est une epopee romanesque en trois chants , et ce que les
Italiens appellent poemecto. Le jeune auteiir s'est livre aux
exacerations inisanthropiques de Byron, et au niysticisrae de
M. Lamartine. Clotalde est d'abord emprisonnc , et , malgre
sa delivrance , il reste misanthrope, et croit que le mysti-
cisme est I'objet le plus important de la poesie moderne.
Nous signalons celte doctrine, pnrce que le jeune auteur
qu'elle a seduit possede plusieurs taleiis, dont il pourra faire
un lieureux usage , s'il consulte plutot ses propres inspi-
rations que les raaximes specieuses et vagues de ces rheto-
riciens qui aspirent a une espece de merite nouveau dont !a
definition est encore altendue. Ces vers ne manquent point
d'harmonie ni de sensibilite. Qu'il tache d'etre ilalien et de
s'attacher aux sujets que reclame son siecle ; il trouvera dans
son pays, s'il en abesoln, des exemples d'un gout plus sur
que ceux qu'on va chercher dans les ecoles du Nord.
303. — * De monumend , etc. — Les monumens; ])oeme,
d'.^/^g'e/o MoccHETTi. Panne, iSaS; Bodoni. In-4° figure.
L'autear eleve trois monumens poeliquesa la mcmoire du
savant ZoHW Bella, son precepteur, du celebre Antoine Ca-
nova, et de Picrre-le- Grand, coiisidere comme le fondateur de
la civilisation de la nation russe. I! est toujours honorable pour
le poete de corisacrer son talent a chanter les horauies dont on
ne pent plus recevoir aucune recompense. Mocchetti serable
un peu trop s'eloigner de son sujet, surtout dans sa premiere
composilion, destince au tombeau desou maiire ; on est expose
a Toubiier en visitant plusieurs autres monumens. Depuis quel-
({iie terns, les Ilaliens semblent cultiver avec predileclion ce
genre de poesie sepulcrale. i\I. Hippolyte Pindeinonte , poete
remarquable par ses talens et scs vertus, donna le signal, et
])ublia ses Sepolchri. M. Foscolo suivit heureusement son exem-
ple ; M. Torti, eleve de I'ecole de Parini , qu'il semble vou-
loir abandonner, suivit lours traces. ( Voy. Rev. Enc, t. xxxi ,
p. 7^7 ). On pent citer comme poesie du meiue genre , // colpo
di martello del campanile di San Marco , le coup de maiteau
du clocher de Saint-Marc a Venise.
3o4. — * L'ulii'o di Roernia , terzine , etc. — L'Olivier de
Boheme , tercets de Cec//w De Luna-Folliero. Naples, iSaS;
Marotta et Vanspandoch. In-8°.
Cette dame poete s'etait deja fait connaitre par ses Rimes,
7^0 LITRES ETR ANGERS.
publiiies en i8a3. Nous signalons ces vers parmi beaucoup
il'autrcs poesies fugilives, parce qu'ils sont I'ouvrage d'iine
persoiinc distingiiee, opouse, fille et mere, ct parce quils ex-
prinu'nt les all'ections los ])lus temlres et les i)Ius vraies. Pour
bien comprendrc srs Tercets, il faut connailrc les circonstances
qui en ont fonrni le siijet. Noire savant litterateur, M. Charles
PouGENs, ayant cormii les exceJlentes qualites de cttte dame
et s'etant lie avec elle ])ar les noeuds d'une estinie et d'nne
amilie rcciproqiies , a vouhi consacrer, par une sorte dc mo-
nument celte affection, e^alement clicre aux deux ames gene-
reuses qui i'eprouvaient, et il a plante , en I'lionneur de son
aimable nnise, dans son jarilin de la vallce de Vauxbuin, pres
Soissoas, un olivier de Bolieme, et a cote un lierre de Grece,
comme les symboles les plus convenables de leurs sentiniens
rnuluels. C'est a I'ombredeces deuxjeunes plantes que celte
muse chante et consacre ses souvenirs et sesesperances.
3o5. — Una stale a T'aresc c ne' dintorni , leltcre ad Erminia.
— Un ete a Varese et dans ses environs, letires adressees a Er-
minie. Lugano, iSaS; Vanelli et comp. In 32.
C'est le premier ouvrage que public le jeune Dandolo, pour
prouver qu'ilclierclie a profiter des lecons deson jiere. Varese
presente des objets dignes d'altention; et quoiqiie plusieurs
ecrivains se soicnt attaches a ics peindre, cetle maliere est loin
d'etre epuisce. Erminie, a qui ces lettres s'adressent, parait de
terns en terns distraire I'auteur. Cen'estpas que nous proscri-
vionsl'amour danscc genre d'ecrits; nous aurions meme desire
qu'il se trouvat exprime dans ceslettres avec un peu plus de force
et de verite. Cette remarque ne blessera point ce jeune et esti-
mable ecrivain ; il preferera les critiques dont il peat profiter ,
adeseloges qui endormiraient sa vigilance. Al'agedeaS ans,
il est <loue de qualites recomiuandaliles qui font esperer de lui
des productions encore plus importantes. II a lu de bons au-
teurs ; il a fait, dans ses voyages, des observations utiles, et
il se niontre anime du noble sentiment deja gloire litteraire :
nous pourrions le prouver en cilant de nombreux passages dc
ses le; Ires.
3oG. • — * Discorso preliminare all' architettura di Vitruvio ,
iUustrata,etc. — Discours preliminaire pour le traite d'architec-
ture de "Viiruve , eclairci par Jean Poleni et Simon Stratico.
Udine , iSaS ; Matteuzzi. In-S".
On connaissait deja sur I'ouvrage classiquc de Vitruve les
travaux des deux Italiens, les marquis Galiani et Poleni. Le
celebrc profcsseur Stratico a sans doute ajoute aux reraarques
de Poleni , comtne celui ci a celles de Galiani. On attend main-
ITALIE. 721
tenant cetouvrage avec impatience. II est precede Ju discours
preliminaire (lue nous annoncons, ct qui appartient a M. Qui-
ricQ Viviani, Comnie il i'a ecril en italieti, le professeur Pierre
Peruzzi i'a irnduit en latin poi'.r les etrangers. On y Irouvera
tout ce qui regarde la biographic des deux savans, Polcni et
Stratico. On peut reraarquer que Stratico etson biographe ne
sont pas prevenus en faveur de I'architecture golhique. On
I'avait dcpreciee; mals est ce une raison pour I'exalter immo-
derement. Un esprit judicieux evile ces exces : le vrai beau et
le sublime se font admirer, sans qu'il soil besoin de tant d'ef-
forts pour en reveler le merite. F. S.
807. — * Intorno varj anlic/ii monumenti scoperti in Brescia
Dissertazione , etc. — Dissertation sur plusieurs monumens
decouverts a Brescia par M. Jean Labds. — Relation du pro-
fesseur Rodolphe Vantim sur le meme sujet; et Essais sur
quelques fouiiles qui ont eu lieu a Brescia, par M. Louis
Basiletti. Publication de V Alhenee de Brescia. Brescia , i SaS ;
Nicolas Beftoni. 10-4" de i43 p. avec 4 planches.
M. Clement Delorme , Lyonnais et ancien fonctionnalre en
Italie, ou il a laisse des souvenirs tres-honorables, s'est oc-
cupe, dans un voyage qu'il vient de faire a Brescia, de se
"procurer I'ouvrage que nous annoncons, afin de I'offrir au
Musee de Lyon, sa patrie. — Cet ouvrage n'ayant cte tire qu'a
cent exemplaires, tous deslines a des souscripteurs, il n'ctait
pas facile d'en faire I'acquisilion ; et le zele cclaire de M. De-
lorme en est d'autant plus digne d'eloges.
En 1822, en posant les fondemens d'une maison a Brescia,
on trouva, dans la direction de Test a I'ouest, divers fragmens
de monumens: des pierres, des chapiteaux el des ornemens
d'architecture romalne. L'administration municipalc, jalouse de
conserver les souvenirs d'une ville antique , invita M. Rodolphe
Vantini a recueillir parmi ces debris lout ce qui pouvait inte-
resser les arts et les sciences. Non-seulenient, M. Vanlini s'est
acquitte de cette commission avec zele, mais il a public a ce
sujet une relaiion, sur laciuelle nons croyons devoir inserer
ici I'opinion de M. Visconti, architecte a Paris. « En lisant,
dit-il, la Dissertation de M. Vantini, on y reconnait une grande
sagacile dans les observations et une instruction solide. Ses
remarques sur le chapiteau antique de I'ordre ionien trouve
dans les fouiiles faites a Brescia, sont d'une grande finesse; il
observe que ce chapiteau est le seul qui ait les (juatre volutes
augulaires sans coussinet ; en effet , parmi ceux (jue Stuart a
donnes dans les antiquites d'Alhenes il n'y en a pas un seul
pareil a celui dont parle M. Vantini. Les Grecs ont bien donne
T. xjtxi. — Septembre 1826. 46
722 LIVRES I^TRANGERS.
des formes diffirontes aux cJiapitcatix places aux angles de
Irnrs temples et a ceiix qui f'aisaient face an porliijiie; niai.i
ils n'ont fait ce cliangeinent qu'en snpprimant le eoiissinet a la
face latcrale de la colonne, de iiianiere que les faces internes
du portique ont deux coussinels (|ni se louclient. M. Vanlini
peut donner le chapiteau qu'il jjublie conitne nn exemple des
anciens, non pas toutefois du terns des Grecs , mais du lems
des Remains; il est d'une assez belle forme; nous devons
remercier le savant 7)rofesseur de I'avoir mis au jour. » Telle
est roj)inion de M. Visconti.
En poursnivant les fouilles, on trouva , au milieu des debris
meles de quelques couches de cliarbon, des fleches et d'aulres
armes et equipemens niilitaires, ainsi que des ossemens hu-
mains. De tous ces indices, on peul deduire, suivant M. Basi-
LETTi , que I'incendie et les desastres de la guerre ont sans
doute contribue a la destruction des monumens dont on a
retrouve les resles.
Ces travaux etant suivis avec ce zele qui caract^rise les habi-
tans d'une ville fiere de son antiqtiite (i), on decouvrit les
restes d'un temple d'Hercule, ceux d'un theatre d'une belle
forme, ceux d'un «5.difice que Ton croit avoir ete une curie,
et le pilastre d'un temple. Le fronlispice du temple est sou-
tenu ]iar huit colonnes , qui sent en fiartie sur pied ; on attribue
leur depl.icementauntremblement de terre; ellesdebordent de
trois et de six pouces. Le peristyle est pave en marbre d'orient ,
et I'entree principale est precedoe de tres-beanx escalicrs. Ces
monumens out ete constriiils en marbre indif;ene. On troiive
dans les fortifications, et dans les edifices publics de Brescia,
des pierres qui indlquent qu'ils ont ete batis en partie avec
des debris de ces monumens. En considerant I'ordre d'archi-
tecture des masses encore exlstantes, on le trouve depouillc
de ces ornemens surcharges, en jisage dans les tems posl^-
rieurs aux regnes de Trajan et des Antonins; ce qui condui*
M. Basilelli h penser qu'ils ont die construits sous ces empe-
(i) On pretend que Brescia fnt batie par Brennus, cbef des Gaulois.
Elle passe pour etre plus ancienne qne Vcrone. Quelques ecrivaius ve-
ronals Ini ont dispute cet avantage : les auteurs bresciaus s'appuient sur
ce vers de Catnlle :
Brixia , f^eronw maler umata mea.
Au reste, cette ville est reconnue pour etre, apres Rome, celle qui est
la pins rithe en inscriptions qui attestent I'antiqnite ile son origino et
son aucieonp celc-brite. N. d. K.
ITALIE. ■^aS
tcui'S. Quelques parlies d'ordre corinthien sont tres-remar-
quables. Le temple d'Hercule etait pave en marbre blanc, et
lesmiirs avaient des revetemens en marbre precieiix, de cou-
leur jaune et rouge, en granit, en porphyre et en marbre
jasp6.
Le meme auleur, M. Basiletti, attribue les premieres devas-
tations des monumens qui ornaient I'antique Brescia h la pre-
miere irruption des peuples du Nord , vers le iv<= siecle de I'ere
vulgaire.
On a trouve, dans les fouilles qui ont ete faites, diverscs
inscriptions et des morceaux d'une statue en marbre blanc
oriental. Cette statue d'un jeune homrae d'environ 20 ans , et
celle d'une femme, etaient I'une et I'antre d'un travail achevc.
Les monnaies qui ont ete recueillies sont en bronze et en
argent; les plus anciennes apparliennent aux regnes des em-
pereurs Severe, Gordien et Constance, et les autres sont de
I'ere romaine, de 900 a 1400.
On a egalement decouvert a Brescia, dans la maison du
comte Arsenio d'EMiGi.i, une pierre, en mosaique antique,
d'un travail exquis. L'administration municipale a voulu la
faire enlever a ses frais pour en d^corer un nouveau niusee
dont Tetabiissement est vivement desire.
La dissertation de M. Labus est riche d'une erudition qui ne
parait pas toujours necessaire a I'intelligence du sujet. Au reste,
cet auteur, tres-verse dans la numisniatique et I'archeologie , a
tire un bon parti d'une inscription retrouvee a Brescia, pour
appeler de nouveau I'attention et I'interet des antiquaires sur
le theatre que Ton a decouvert, il y a pen d'annees. Debt.
OuvT-ages p^riodiques.
'io8. — * Annali universali di tecnologia , etc. — Annales
universelles de tcchnologie , d'agriculture, d'economie rurale
et domestiqueel d'arts et metiers. — Premier volume. — Cahier
dejuillet. Milan, 1826. Cliez les edileurs At^ Annales Ae me-
decine^l^e statistique. — Ces Annales'^iTAitront tous lesmois;
chaque cahier sera de 6 feuiUes au moins ; trois cahiers com-
poseront un volume. Prix de I'abonnement , 18 Icvres par an ,
payables d'avance par trimestre. Les abonnes, qui prendront
en meme terns les Annales de statistique etcellesde technologie ,
ne paieront que 82 Ih'res pour les deux abonnemens reunis.
Aunombre des redacteursde ce nouveau journal, oncompte
M. LoMENi , savant agronorae, M. le comte Bossi, et plusieurs
724 LIVRES ETRANGERS.
ecrivains qui servent, en Italic , la cause desletires et de I'in-
struction piibliquc.
L'apparilion de ce nouveau recueil est tine bonne nouvelle
pour ritalie. On sent dans ce pays , aussi bien que dans le reste
de I'Europe, combien il est dangereux pour una nation de ne
pas suivre les progres de I'industrie , ct quels immenses avan-
tages sont assures aux etats qui devancenl les aiitres dans cette
noble carriere. II est terns que rinstruction dont I'industrie a
besoin, penetre partont, et que tous les nioyens dela repandre
soient mis en usage. L'Angletcrre abonde en ouvrages perio-
diques consacres aux arts ; I'industrieuse Allemagne n'en a
|>eut-etre pas moins, quoique leur influence soit inoins sen-
sible; la France \ienl ensuite, et n'a pas encore donne ace
moyen d'enseignement industriel I'elendue et I'importance
qu'il devrait avoir. Puisque I'ltalie se dispose a I'employer
aussi pour developper les iranienses ressources qui sont a la
disposition des arts, dans cetle belle contree, on pent espcrer
que les jours de prosperite de son commerce reparaitront ,
que ses manufactures relrouveront leur ancienne celebrite, et
qu'une louabie concurrence va s'etablir entre les principales
nations de I'Europe , non pour des interets politiques, mais
pour le bien general, pour le bonheur de I'humanite.
Le premier cahier du nouveau journal industriel commence
par des Fues generates sut- la technologic. L'auteur de cet ecrit,
M. le comteBossi, a rassemble dans quelques pages beaucoup
de fails, d'idees, d'instruction. Ses definitions sont exacles, il
expose avec fidelity I'histoire des sciences et des arts donl il
parle; il se montre parfaitement au courant de ce que Ton a
ecrit, en France et en Angletei're, sur les sujets qu'il traite.
Avec I'esprit d'ordre et d'analyse dont M. Bossi fait preuve
dans cet ecrit , un tel coUaborateur est une acquisition pre-
cieuse pour le nouveau journal.
Une analyse des memoires de M. Bonafous sur I'education
des vers-a-soie ; une notice sur la fabrication du papier,
par les Cbinois; une autre sur les diligences a vapeur , de
MM. BuRSTALL et Hill ; un grand nombre d'indications de
procedes nouveaux, dont plusicurs sont juges avec discerne-
ment et reduits a leur juste valeur : tout ce qui compose ce
premier cahier fait augurer favorablement de ceux qui le sui-
vront. Les redacteurs s'attacheront sans doute a reunir des ar-
ticles originaux , et s'abstiendront , aulant qu'ils le pourront,
defaire desemprimts auxautresjournaux. Dans la fouledespu-
blicationsperiodiqiicsde tous les payset surtoutes les malieres,
k
ITALIE.— PAYS-BAS. 725
les seuls articles originaux , separes de tout le reste, sont loute
la subs'.ance reellement contenuedans plusieurs milliers de vo-
lumes, et n'en rempliraient peut-etre pas nnecinquantaine. F.
PAYS-BAS.
309. — Leere der Scheikunde , etc. — Theorie de la chimie,
concernant principalementles proprietes et les proportions des
principes constituans des corps; par M. Overduin, pharma-
cien. Breda, i8a6; imprimeriede Slerk. In-8°de vii-aBg pages.
L'auteur de celivreest avantageusementconnu en Hollande
par ses Iravaux chimiques, specialement par son elaine (huile
epuree), dont les horlogers se servent avec succes. Cet ou-
vrage, au niveau des progres que la chimie a faitsdansces
derniers tems , est un abrege qui se recommande surtout a
ceux qui veulent avoir des notions somraaires sur I'ensemble
des connaissances chimiques.
3 10. — Dissertatio medica de opio , etc. — Dissertation me-
dicaie surTopium ; par G.-J. Mulder. Utrecht, iSiS; impri-
merie d'Aliheer. In-8° de iiS pages.
Parmi le grand nombre de substances medicamenteuses du
regne vegetal .qui onl etc soumises a I'investigalion deschi-
mistes modernes, I'opium, en raison de £on ufilite en raede-
cine, devait attirer surtout leur attention. La dissertation de
M. Mulder offre un resume interessant des divers Iravaux
dissemines sur I'analyse de ce medicament ; les effets de To-
pium et de ses principes sur ['economic animale sont tres-bien
exposes et comparativement determines; et apres avoir trait^
son sujet sous les rapports pliysiologique et pathologique ,
M. Mulder donne quelques corollaires pratiques.
3 1 1 . — Dissertatio medica de macroglossa , scu Itrtguce enor-
mitate. — Dissertation medicale sur la grosseur de la langue ;
par /?.-F. Van Doeveren. Leyde, 1824; Imprimerie de Ha-
zenberg. In-8°de 106 pages, avec deux planches.
Cette dissertation est etrite par un jeune medecin, fort ins-
truit. Nousregrettons de neTavoir pas annoncee plus tot. L'au-
teury areuniplusieurs cascurieux de grosseur extraordinaire
de la langue; il examine avec beaucoup de methode et en de-
tail la nature, les causes et les symptomes du mal qui fait le
sujet de sa brochure ; et le traitement qu'il indique est tres-
rationnelet appuye sur I'experience de praticiens justemeift
celebres. De Rircrhoff.
3 1 2. * Abrege de Vhistoire du duche de Brabant, du marqui-
sat d'Jnvers et de la seigneurie de Malines, par demandes et
726 LIVRES £TRA.NGERS.
par rcponsos; par M. Dewez. Bruxelles, iSaS; veuve Stapleaux
In-i2 de iv-i42p, avec Ja traduction hollandaise en regard.
Si la forme du dialogue parait pen convenablc ])our les
grandes compositions historiques, elle peut neaninoius etre
utile dans Ics livres elcmentaires, et nous ne blamerons pas
M. Dewez d'avoir, a cet egard , suivi I'exemple du judicieux
Fleury. Cet ^brege n'ajouier a rien sansdoute a la reputation
de I'auleur ; mais 11 est unenouvelle preuve desonpatriotisme
et de la constante sollicitude avec laqueile il s'attache a faci-
liter I'etudede I'histoire beige. Peu d'liomines ont rerapli d'une
manierc plus honorable que M. Dewez leurlaborieuse carriere.
La seconde edition de son grand ouvrage sur la Belgique lui
donnera bienlotde nouveaux droits a la reconnaissance de ses
concitoyens. Stassart.
Outrages periodiques.
3 1 3. — Journal d' agriculture , d'economie rurale et des ma-
nufactures du royaume des Pays-Bas. Bruxelles, juin 1826;
auBureau dujournal, Montagne des Aveugles, i\° 886. In-8".
(Voy. Rev. Enc. , t. xxx, p. 460 ).
Ce cahier renferme un extrait d'un memoire tres - inte-
ressant d'un cultivateur anglais, M. Boys, sur I'education
des moiitons de la fameuse race de Southdown. Des animaux
de cette race parviennent, a 20 raois, au poids de i6o a 170
livres. Sous ic rapport de la qualito prolifique, elle n'a point
d'egale', car, dans les grands troupeaux de M. le due de Bed-
ford et de M. John Ellmann, le rapport du norabre des nais-
sances d'agneaux a eelui des brebis portieres est comme 3 : 2.
V.J.
3 14. — * Tydschrift voor-genees-heel-verlos-en-scheikundige
fVetenschappen. — Recueil periodique consacre aux sciences
medicales, et publie par la Societe de medecine de Hoorn. Am-
sterdam , 1826; imprimerie de Vink. In-8°.
La Societe de medecine de Hoorn ne fait pas comme tant
d'autres Compagnies savantes, dont les travaux qb consistent
qu'a delivrer des diplomes et a flatter I'ambition de quelques
particuliers ; elle travaille avec zele pour se rendre utile. Le
recueil que nous annoncons en fait foi. II est redige par
MM. KuYS, Rynders, Swaan, Jorritsma et Van Marken, el
se publie depuis 1828. La Sociel^ promet de continuer a en
faire paraitre, cliaque annee, deux ou trois cahiers. Cbacun
de ceux qui ont paru est de neuf a dix feuilles d'impression.
Cc recueil est divise en trois sections. La premiere est con-
LIVRES ]£TRANGERS.— LIVRES FRANCAIS. 727
sacrtie aux analyses d'ouvrages nouveaux ; la seconde lenfenne
des iiiemoires originaux et des observations sur I'art degnerir,
fournis par les niembres de la Socicte, et la Iroisieme se com-
pose d'exiraits traduits des ouvrages de medecine les plus re-
marqiiables publics en langnes etrangeres. Dans le dernier
cahier qui vient de paraitre , nous avons remarque des notices
sur les traductions lioUandaises del'y^natoinie generate de Bi-
ihat et de la Nosographie chirurgicale dc Lassus. A.-pxks> I'an-
iionce de plusieurs traductions et de livres nouveaux , on lit
une jjartie d'un apercu historique de M. le docieurMENSERT,
oculistediiroi, sur les maladies des yeux observeesdanslesPays-
Bas ; ensuiie, diverses observations medicales et chirurgicales,
recueillies par MM. Landsrroon, Nottelman, Rynders et
JoRRiTSMA, ainsi que des extraits traduits avec des notes, par
MM. Svt^AAN et JoRRiTSJi A, du mcmoire de M. Ually sur I'usage
therapeutique de I'acelate de morphine, De Rirckhoff.
LIVRES FRANCAIS.
Sciences physiques et naturelles.
3 15. — *j4rt de cultiverla vigne et defaire du hon vin inalgre
le climat et C intemperie des saisons ; suivi des moyens : 1" de
faire avec le vin de la basse Bourgogne, du Cher, de Tou-
raine, etc. , des vinsde St-Gilles, de Roussillon, de Bordeaux;
1° decomposer, avec les vins de ces derniers pays, du vin de
premiere qualile de Bourgogne et de Bordeaux; 3° de fabri-
quer les vins de liqueur, les caux -de-vie, les vlnaigres ; /(" de
retirer la potasse des prodnits de la vigne; par M. Salmon,
chimiste et marchand de vin en gros. Paris, 1826. In-12 de
270 jiages et 2 planches ; prix, 3 fr. et 4 ft"- ^5 c. par la poste.
3 16. — * Manuel du Bouuier , ou Traite dela medecine pra-
tique des betes a comes , ouvrage utile a ceux qui veulent cle-
ver les animaux, les dresser au travail et leur conserver la
sante; par /cye/?/^ Robinet, artisle velerinaire; e'</iV«'o« aug-
mentee da notes traduites de I'anglaispar M. HuzARD^/.y. Paris,
1826; M™*^ Huzard, rue de I'Eperon, n" 7. 2 vol. in-12,
388 — 340 pages; prix , 6 fr. et 7 fr. 5o c. ])ar la poste.
Le premier de ces deux oavrages sera lu d'abord avec un
peu de mefiance; I'auteur promet beaucoup : on craindra qu'd
ne reste au dessous de ce qit'il annonce. Mais, a raesure qu'on
III son petit livre, la confiance revient. On n'y trotive pas, il.
est vrai, toutce que contiennent les nombreux ouvrages sur,
la culture de la vigne et la fabrication da vin:raais il etait
7^8 LIVRES FRANCAIS.
difficile de renfermer plus d'inslruction sous un aussi petit
volume. Neanmoins , en nous rcvelant les secrets des niarchands
de vin , ii ne parviendra point a nous inspirer plus de confiance :
on redoutera peut-^tre que la chimie ne s'empare un peu trop
de nos caves et de nos tonneaux , et que le savoir des niar-
chands ne soil beaiicoui) i)Ius profitable pour eux-memes que
pour leurs chalans. Au reste , les melanges indiquds par M. Sal-
mon ne peuvent jamais etre nuisibles a la sante ; et , si le gout
n'a pas a se plaindrc , personne ne reclamera centre raj)plica-
tion de ses preceptes. II indique avec soin les melanges reelle-
ment dangereux, et les moyens de les reconnaitre. Les culti-
vateurs et les proprietaires peuvent le prendre pour guide ,
aussi bien que les marcliands; les simples consommateurs se
trouveront bien aussi delo consulter de tems en tems.
Le Manuel du houvier , par M. Robinet se presente dans
cclte edition, avec d'imporlaiites augmentations. C'est princi-
palement en Amerique que M. Huzard les a cliercbees, hommage
honorable pour les sciences agronomi<jues du Nouveau-Monde.
En lisant cat ouvrage, on est effraye du nombre des maladies
qui attaquent ceux de nos animaux domestiques auxquels on
ne refusera certainenient pas le second rang , en laissant le
premier aux chevaux. On ne pent douter qu'une partie de ces
raaux ne soicnt les resultats de la doraeslicite : heureusement,
I'art de les prevenir fait des progres sensibles, et met a profit
les connaissances acquises par I'art de les gucrir. Un extrait
d'un raemoire de M. Josiah Quincy sur la lenue des bestiaux
a I'etable merlte d'autant plus d'attention , que le regime con-
seille par I'agronome americain est plus oppose aux habitudes
des ferniiers francais. Suivant une experience de M. Quincy ,
17 acres peuvent nourrir'a I'etable aulant de bestiaux que
5o acres employees a la maniere ordinaire. Un autre emprunt
que M. Huzard a fait aux agronoraes des Etats-Unis, est un
extrait d'un memoire de M. Ci.ine sur \a forme des animaux,
relativement a t amelioration des races. Les observations de
i'auteur sont tres-remarquables. <' La tete, dit-il, doit etre
petite; cette condition rend la naissance facile. La petitesse de
cette partie apporte d'autres avantages , et indique generale-
nient une bonne race... Les cornes ne sont d'aucun usage a nos
animaux domestiques : il n'est pas difficile de creer des races,
sans cornes; les nourrisseurs de gros betail et des betes a laine
ne se doutent pas des pertes qu'ils en eprouvent, non parce
que ces animaux ontces defenses, mais parce qu'ils ont beau-
coup plus d'os au crane pour les supporter, et ensuite, une
quantit(5 proportionnelle de maliere gelatineuse presque de
SCIENCES PHYSIQUES. 729
nulle valcur , et de parties musculaires qui , dans la region du
coujsont de moindrequalite.» Beaucoup d'aulres observations,
et des faits importans sont exposes dans cet extrait. M. Ciine
rapportedesexemplesdesraauvaiseffets diicroisementdes races,
dans lesquelles on n'a pas consulte ce qu'exigent la naissance
des animaux de race croisee, leur nourriture et le regime qui
leur convient. II parait que les meprises des speculaieurs, et
meme des administrateurs de haras ont souvent compromis les
races que Ton pretendait perfectionner : a Londres, en Nor-
mandie et aux Indes, les memes erreurs ont ete suivies des
meraes consequences , jusqu'a ce qu'on ait abandonne ces ten-
tatives contraires anx lois de la nature.
La nouvelle edition de ce manuel doit compter sur un accueil
favorable : les editeurs n'ont rien neglige pour la rendre digne
des suffrages du public. F.
317. — * Des For^ts c?d la France , considerees dans leur
rapport avec la marine tnilitaire, a I'occasion du projet de
Code forestier , par M.Bonard, ingenieur de la marine, an-
cien directeur du service forestier maritime des bassins de la
Saone et du Rhone, etc. Paris, 1826. M"* Huzard. In-8° de
219 pages; prix, 3 fr. et 4 fr. par la poste.
Pour elever la science forestiere , en ce qui concerne I'ar-
chilecture nautique, au niveau des lumieres de notre terns,
le probleme a resoudre est celui-ci : Trouver le mode d'ame-
nagemenf qui doit faire produire a une superficie determinde
le plus grand nombre possible d'arbres doues de proportions
superieures. Mais la solution de ce probleme, ne serait en-
core qu'une vaine theorie , si Ton ne s'occupait en meme terns
d'introduire I'esprit de suite et de duree dans une adminis-
tration deslinee a suivre une ligne immuable a travers les fluc-
tuations politiques, et malgre la raobilite de noire civilisation.
M. Bonard , fort de spn experience el de I'exemple de nos
voisins d'outre-Rbin , si habiles dans la regie des bois, sou-
tenu de I'assentimcnt unanime des ingenieurs de la marine
attaches a ce service , appuye sur les savantes previsions des
Buffon et des Duhamel , nous propose , dans ce but , un
systeme complet, qu'il regarde comme le senl propre a retirer
nos forets de I'etat de degradation ou elles sont aujourd'hul,
et qui finirait par leur aneanlissement total , si le gouverne-
menl ne s'empressait d'y apporter un remede efficace par des
lois conservatrices. Au lieu du mode de pleines fulaies qui tire
son origine de Topuience des forets du moyen age, et dont il
fait ressortir les inconveniens; au lieu de I'emploi moins ancien
des futaies sur taillis qu'il condamne ^galement, il veul qu'on:
73o LIVRES FRANCAIS.
suive avec quelques modific.itlons, la mefhode allemande qui
consiste a cantonner les futaies navales sur des terrains de
choix , exclusivement consacres a cette cidture , et k gouverner
lenr developpement par le precede inoderne des eclaircies et /
du recensement natural. Dans son plan , ces eclaircies s'effec-
tiieraient , tous les viugt ans, de sorle que cliaque hectare
donnerait huit produits, dans le cours de cent soixante annees,
terme ordinaire de la croissance des chenes. Le premier lot a
couper serait age de vingt ans ; le second , de quarante; et
ainsi de suite. On reserverait les quatre inille cinq cents tiges
les plus belles de I'age de quarante ans; a soixante ans , elles
ne seraient qu'au nonibre de quinze cents; il n'en rcsterait
enfin que cent cinquante au dernier pcriode. Pendant long-
tems , on maintiendiail ainsi I'etat serre, le seul propre a
donner aux arbres un grand elancement.
II rejetle le martelage et toutes les servitudes imposees ,
dans I'inleret de la marine , aux proprietes forestieres des
particuliers, de meme qu'a celles des communes (|u'il leiir as-
simile , a cause des exigences de I'esprit de localile. D'apres
ses calculs, que nous regrettons de ne pouvoir donner ici ,
le sol de la France suffirait abondanimcnt a toutes les con-
sommations si Ton ensemencait (avec tros-peu de frais), une
partle des landes de Bretagne , et surtout celles de Bordeaux ,
oil Ton a remarque tout recemment des exemples nombreux
d'une halivite extraordinaire pour les chenes et pour d'aulres
especes de choix. Feu Bremontier avail deja fait cette ob-
servation , il y a une vinglaine d'anuees ; le ])reraier il
signala ce fait important dans ses memoires sur les plantations
des dunes, qui furent inserces plus tard parmi ceux que public
annuellement la Societe d' agriculture.
Longuement medite, le plan de M. Bonard offre peu de
prises K la critique. On peut cepend.-nt lui reprocher d'etre
trop systemalique: pourquoi renoncer, par exemple, au tribut
quepeuvent offrir a rapprovisionnement maritime les forels
communales , lorsquc nous n'avons rien pour le remplacer ?
Sorames-nous asscz riches en ce genre pour negliger ainsi
des ressources naturelles dont on peut long-temps encore tirer
un parti avantageux ? Dans quelques bois communaux, notam-
mentsurlesversansdesPyreneeSjl'onvoitunemultituded'arbres
raagnifiques etaler aux regards du voyageur la superbe vegeta-
tion de leurs formes colossales. Tributaires de I'etranger pour
une partie considerable de nos approvisionneniens, nous avons
importe, pendant 1824, en bois de construction et merrains,
pour la somme de 20,000,000 fr. , tandis que nos exportiilions.
SCIENCES PHYSIQUES. 7^1
en \ins n'ont ete que de 64,000,000 ; c'est-a-dire un peu phis
du triple. Cetle insuffisance commence a sefaire sentir partout
en Europe , et nos volsins vont chercher des mats jusque dans
la Nouvelle-Hollande. Que sera-ce, quand dans le cours des
siecles fulurs , tons les peuples tant de I'ancien que des deux
nouveaux conlinens, porteront dans les relations maritimes,
les prodnits innombrables d'une activite universelle. Alors ,
de toute necessite , le fer remplacera le bois dans la construc-
tion des navires, comme il I'a fait pour tant d'autres usages
de la vie. M. Bonnard s'efforce d'en demontrer rimpossibiiitc;
mais nous ne sommes nnllement convaincus par ses raison-
nemens. Deja nous voyons naviguer sur la Seine des bateaux
a vapeur en fer, offrant de belles dimensions , et , s'il faut en
croire les feuilles publiques , I'Angleterre commence a em-
ployer ce metal dans la mature de ses gros vaisseaux.
j4cl. GoNniNET.
3 18. — * Ristoire mcdicale des marais , et traite des fievres
inter mittentes causees par les emanations des eaux stas;nanles ;
par /. - B. MoNFALcoN, D. M. Seconde edition, entierement
refondue, corrigee et augmentee. Paris, 1826; Bechet jeune.
In-8° de SaS pages; prix, 7 fr. 5o c.
Quoique nous ayons deja parle de la premiere ddition de cet
Guvrage ( Yoj. Ref. Enc. , t. xxiv, p. 606 ), nous reviendrons
encore sur celle-ci, pour I'utilite de nos lecteurs. Nous compa-
rerons I'une a I'autre les deux editions, afin d' observer I'ordre
et le developpement des pensees de I'auteur, les progres des
sciences medicales et ceux de I'art de faire des livres, progres
qui devraient etre toujours sensibles, dans de nouvelles edi-
tions. Mais cet exaraen atlentif que nous devons nous imposer
exige un terns qui n'est pas toujours a notre disposition : il
faudx'a done , malgre nous , remeltre a un autre cahier le compte
que nous aurions voulu rendre des a present de la nouvelle
forme sous laquelle M. Monfalcon nous prcsente son important
ouvrage.
319. — Manuel de medecine etde chirurgie domestiques ,
contenant un choix des moyens les plus simples et les plus
efficaces pour la guerison des maladies internes et externes qui
affligent le corps humain ; avec la maniere de les administi-er
soi-mdrae, et le regime a observer dans les diverses incommo-
dites qui surviennent dans le cours ordinaire de la vie ; par /.
MoRiN, D. M. P. Deuxieme edition , entierement refondue et
considerablement augmentee. Paris, i826;Roret. In - 18 de
482 pages ; prix , 3 fr. 5o c.
3 20. — Traite pratique sur la colique metalliquc , c.onnuc
73a LIVRES FRANCAIS.
vulgairementsous le noin de colique des peintres , on exposition
de la melhode anliphlogistique appliquec k cette maladie et
employee avecsucces dans les hopitaux de Paris; par Benjamin
Palais, D. M. P. Paris, iSaS; Mequignon Tuine. In - 8° de
1 36 pages; prix, i fr. 5o c.
On tiouve, dans cette brochure, douze observations de
colique metaliiqne dont ctaienl surtoutatteints des ouvriersde
la manufacture de ceruse de Clichy, savoir neuf traites a
I'hospice Beaujon par M. le D'' Rcnaudin , et trois autres a
rH6tcl-Dieu,par M. Hu.ison. Tous ont cte gueris tres-promp-
tement par des applicalions de sangsues sur Tabdonien et par
des moyens adoucissans. Ces observations sont tres - interes-
santes et de nature a ebranler la confiance c[u'ins[iire a la plu-
part des medecins le traitement , dit de la Charito , et (pu con-
siste a administrer les vomitifs , Ics purgalifs el les opiaces. A
la verite, ce dernier mode de traitement, depuis forllong-tems
en usage, a plusieurs fois rcsiste a de pareilles attaques; des
praticiens celebres ont essayeenvain de lui substituer la me-
thode antiplilogistique. Pense-t-on qu'il suffise de remplacer la
saignee qu'ils proposaient par des sangsues pour operer enfin
cette reforme? — De ce que le traitement antii>lilogislique a
reussi , M. Palais conclutque la maladie consiste dans une in-
flammation de la membrane muqueuse des inleslins. II nous
semble que , pour adopter cette opinion, il faudrait qu'elle fut
appuyee sur d'autres preuves, et surtout sur des preuves plus
directes , puisqu'on a plusieurs fois trouve cette membrane in-
lacte sur des sujets qu'une violente attaque de colique metal-
lique avail emportes. Rigollot, fiis, d. m.
321. — * De I'emploi des chlorures d' oxide de sodium et de
chaux ; par A.-G. Labarraque, pharmacien de Paris, membra
de r Academic royale de medecine, etc. Paris, iSiS; I'auteur,
rue Saint-Wartin, n° 6g. M"« Huzard , rue de I'Eperon-Saint-
Andre, n° 7.In-8° de 48 pages; prix, i fr.
L'efficacite du chlore el de ses combinaisons pour dcsinfecter
et preserver des miasmes dangereux n'estjjlus contesteeaujour-
d'hui : I'experience aprononce; ics Societessavantcs et tousles
medecins, auxquels la chimie n'est pas etrangcre , sont d'ac-
cord sur ce point. II ne s'agissait plus que de preparer conve-
nablement et avec economic, ces puissans moyens hygie-
niques, et d'en diriger I'emploi: c'est ce qn'a fait M. Labar-
raque. D'honorables suffrages et des prix academiques ne sont
pas la recompense laplusprecieusede ses travaux : il en trouve
une plus grande encore dans le sentiment du bien qu'il a fait,
dans les services qu'il a rendus a I'humanite. Pour bien appre-
SCIENCES PHYSIQUES. 735
cier de pareils services, il suffit d'avoir le courage de lire les
tri.stes details des cures operees par les chlorures de soude et
de chaux,d'arreter quelquesinstans son imagination siir le re-
butant spectacle des contagions, des ulceres, de ce que les ma-
ladies et la mort ont de plus hideux. La brochure deM. La-
barraque etonnera peut-etre meme quelques medecins et leur
offrira des ressources dans plusieurs cas oii ils n'auraient plus
rien espere, ni de I'art, ni de la nature. L'auteurnous promet
un ouvrage plus etendu dontil ne public en ce moment qu'un
extrait, ct dans lequel il chcrchera « a demontier les causes et
les phenomenes de la putrefaction des matieres aniinales,sui-
vis de la maniere d'arreler, dans diverses circonstances , ce
mouvement desorganisateur. »
Les lecteurs qui redoutent les impressions douloureuses ,
meme lorsqu'il s'agit d'acquerir une instruction d'une haute
importance, pourront lire avec interet, a la fin de cette bro-
chure, le recit de quelques fails remarquables qui eurentlieu,
en 1825, Jors du curage de I'egout Amelot. Un ouvrier fut
rendu a la vie, apres 48 heures d'asphyxie. Les etranges cir-
constances de cet accident, etles effetspresquemiraculeux des
chlorures paraitraient incroyables dans un ouvrage d'imagi-
nation; mais ici, tout se passe sous les yeux des hommes les
plus eclaires, sous la surveillance des autorites publiques : on
ne pent meconnaitre la verite; ellesemanifeste par tout cequi
la caracterise, et surlout, par le bien dent elle est une inta-
rissable source. Y.
323. — Rapport general sur les travaux du Conseil de salu-
brite de Nantes, depuis le 4 mars 1817, jusqu'au 3i decem-
bre 1825. Nantes, 1826; Mellinet Malassis. In-8° de 38 p.
Ce rapport contient I'historique des travaux du Conseil de
salubrite de Nantes , dont I'utile intervention s'est principa-
lement elendue sur la police sanilaire des fabriques , des
constructions nouvelles, des abattoirs, de I'ecoulement d'eaux
stagnantes, des fumigations pres des marais , etc. II serait a
desirer que toutes les villes de province fondassent un conseil
de ce genre compose principalement des medecins et des phar-
maciens du lieu. Celui-ci doit son existence a M. Louis de
Saint- AiGNAN, alors maire de Nantes, depuis prefet des
Cotes du-Nord, et qui plus tard aux honneurs de sa place
prelera I'honneur de voter selon sa conscience : noble exemple
qui devrait etre erige en dogme politique au sein de tous
les partis. Jd. Gondinet.
323. — Theorie complete de V Arithmetique , a I'usage des^
734 LIVRES FRANCA-IS.
personnes qui se preparent a subir des exaraens. Paris, 1826^
Didot. In-S" dc i52 p.; prix, 3 I'r. 75 c.
Les definitions, la numeration, I'nddition, la soustraction ,
la multiplication des nombrcs entiers et des deciinales, les
equations, la division, la regie des signes, les monomes, poly-
nonies, et les quatrc regies sur ces quantites; les fractions
ordinaires, pcriodiques; les norabres com]>lexes, le systeme
metriqne, les carres et les cubes, les proportions et les regies
qui en dependent, suivies de la raelhode pour resoudre les
equations du 1" degre; les progressions, logaritlimes et com-
plemens : telles sontles principales divisions de ce livre, et tel
est I'ordre que I'autenr a pref'ere. II s'etait projjose « de pre-
senter I'arithraetique degagee des cas particuliers qui en voilent
souvent I'esprit, et de faciliter clans son exposition les per-
sonnes qui se preparent a subir des examens ». Pour parvenir
a ce but, il a rejete tons les exemples. Les quatre regies fon-
danientales sur les entiers, les fractions, les nombres com-
plexes, quelqaes operations d'un ordre plus eleve , n'en
presentent aucun, de sortc que I'eleve, apres avoir fait d'assez
grands efforts pour comprendre une methode de calcul, ne
pourra I'appliquer qu'en se proposant des questions dont il
lui sera presque impossible de verifier les resultats. L'auteur,
« qui a forme de norabreux cleves, » n'a-t-il pas eu I'occasion de
remarquer que c'est seulement par des applications noni-
breuses qu'on se rend mailre des theories; les precedes sont
des machines qu'il faut faire jouer pour les comprendre. Du
reste, cet ouvrage ne renferme que les methodes et les de-
monstrations qu'on retrouve dans tous les Iraites d'arithme*
tique; il n'en dlffere que par son tilre de Theorie complete,
par des definitions souvent peu exactes, et en ce qu'on y a
seme les notions les plus elementaires de I'algebre.
T. Richard.
324. — Solution geometrique et rigoureuse du fameux pro-
hleme de la quadrature du cercle ; par Malacarnb, Italien.
Paris, 1826; Bachelier. In- 8" de 24 pages et 1 planche; prix ,
I fr. 5o c.
L'auteur de cette brochure a depose chez M. Bachelier la
somrae de 3oofr. pour celui qui, avant le 3i octobre prochain,
lui aura dtniontre qu'il est dans Terreur ; il exige que la refu-
tation soil signee par deux membres de I'Academie des scien-
ces, classe de mathematiques , etpar deux professeurs de I'E-
colepolytechniriuc. 11 est sans doute inutile d'ajouter qu'aucun
des ju^cs compelens aiixquels nous avons communique cette
prelendue solution ne I'a trouvee satisfaisante. I.
SCIENCES PHYSIQUES. 7 35
'iaS. — Ddveloppement d'une pensee de D'Alembert^ etc.;
par M. Gaudin( Voy. Rd'. Enc, t. xxvi. Mai iSaS. p. AgS ).
Paris, 1826; Bachelier. In-8°.
L'ouviage de M. Gaudin est maintenarit accompagne d'une
note relative a I'article de notre Revue signe F. , oil j'ai fait
quelques observations sur la manieredeconcevoir etd'exposer
la iheorie des quantites negatives. M. Gaudin attribuant , par
erreur, cet article a M. Francoeur, adressa sa reponse a notre
savant coliaborateur; et cette meprise a donne lieu , entre le
professeur de Paris et celui de Nantes, a une correspondance
que j'aurais voulu leur epargner. Depuis, M. Gaudin m'a fait
remettre de nouvelles explications sur I'iinportante question
des quantites negatives : je me serais enipresse de les inserer
dans la Revue , si le but de ce recueil et la forme de sa redac-
tion I'eussentpermis. Apres avoir medileces explications, ainsi
que celles de la note imprimee, je n'ai point change d'avis ,
quant aufond de la question, et je ne doute point que M. Gau-
din ne finisse aussi par adopter mon opinion. — Le ton de la
noteXinise voir un peude ressentiment ; il y en a aussi dans les
dernieres explications de M. Gaudin. Mais les juges impartiaux
ne trouveront, dans la note imprimee, rien qui puisseobli-
gerl'autcur a faire aucune reparation a qui que ce soit.
Ferry.
326. — * De la tenue des litres en partie double ; Traite
elcmentaire a I'usage des jeunes gens qui se destinent au com-
merce; par Jacquet, negociant, avec cette epigraphe; fli»M-
reux celui qui peul etre utile! Paris , 1826; Brissot - Thivars.
In- 1 2 de IV et 87 pages; prix, 2 fr.
Le choix de son epigraphe indique assez dans quel but
M. Jacquet a corajjose son ouvrage, et nous pouvons assurer
qu'il I'a completeraent atteint. II a su presenter, d'une maniere
claire et precise, les princlpes elementaires de la tenue des
livres , ot initier ses lecteurs , par de norabreux exemples, a
presquetouteslesapplications que lapratiquepeutaniener. Son
ouvrage i)eut tenir lieu de guide dans I'art assez simple, raais
tres-utilo, qu'il enseigne, etnous le recommandons aux jeunes
gens (jui desirent consacrer quelques instans a cette etude. J.
327. — * Nouvelles experiences d'artillerle faltes pendant les
annces 1787, 1788, 1789 et 1791, oix Ton determine la force
de la poudre, la vitesse initiale des boulels de canons, les portees
des pieces a differeutes elevations , la resistance que I'air op-
pose au mouveinentdes projectiles, les effets desdifferentes lon-
gueurs des pieees, des differentes charges de poudre, etc., par
C/iarles Hutton , incmbre de la Societe royate de Londres, etc. ;
736 LIVRES FRANCAIS.
traduit de I'anglais par O. Terquem, professeur de mathema-
tiques aux ecoles royales d'artillerie, etc. Secondeparlie. Paris,
i8a6. Bachelier ; Anselin et Pocliard. In - 4° de 23o p., avec
deux planches gravces ; prix , i o fr.
M. Terquem rcgarde I'ouvrage qu'll a fradiiit comme la
seconde partie des oeuvres de Hntton sur I'artillerie, donl
M. de Villantroys a traduil la premitrc parlie , en 1802. L'ou-
vrage original, public a Londres en 3 volumes, est divise en
38 traitcs. Le premier volume et la plus grande partie du
second rcnferment 33 de ces divisions, on sujets divers; les
cinq suivantes sont consacrees a I'arlillerte. M. de Villantroys
n'a point termine la traduction du 34''; il a omis les details
d'experiences donl le professeur anglais a docrit avec beaucoup
d'exactilude loutes les circonstances. M. Terquem a pense (|ue
cette exactitude et ces details dont I'observateur avail du tenir
compte meriiaient aussi d'etre mis sous les yeus des lecleurs :
ila termine la traduction du 34" Iraile, et en y joigiiant les
Irois suivans, il presente I'ensemble le plus com|)let d'expe-
riences balistiqiies que Ton ait publie jusqu'a present, et les
metliodes de calcul que I'auteur en a deduites. « Tout ce que
I'arlilleur peut desirer que la science lui fournisse pour prati-
quer avec succes son art ; tous les problemes les plus iniportans
de la balistique pratique sont resolus d'unc maniere satisfai-
sante pour les besoins du service, dans le 37^^ traitc auquel
Hutton a donne le titre de Theorie et pratique de V artillerie . «
Cet eloge est peut-etre exagere; et, si les melhodes de calcul
applicables aux projectiles de I'artillerie ne convenaient pas
egalement bien a tous les mouvemens des corps dans I'atmo-
sphere, on n'aurait pas le droit de les rcgarder comme une
theorie. S'il n'est question que de la mesure de precision dont
la pratique peul se contenter, il y a tout lieu de croire qu'on
I'obtiendrait par des moyens encore plus faciles et plus courts
queceux de M. Hutton : la theorie eprouve encore d'immenses
besoins, et ses applications ne sont pas arrivces au dernier de-
gre de perfection.
Le traducteur a conserve les raesures anglaises, sans les con-
vertir en mesures nalionales, parce qu'il ne s'agil, comme il le
remarque, que de rapport entre des resultats, et non de gran-
deurs absolues. Cependant, la coniiaissance de ces grandeurs
eut pu servir quelquefois, et les rapports auraient et^ dcduifs
aussi facilement des mesures converties que de celles de I'auteur
anglais.
Le 35* traite est la description d'une eprouvelte tres-com-
naode, et dont les resultats sont plus reguliers et plus certains
que ceux des pelils niortiers qui servent au menie usage. Le
SCIENCES PHYSIQUES. 7X7
36° traite a pour objet la determination de la resistance de
Vair , au moyen d'uH j?iouveinent de rotation. Ces series d'ex-
periences laisseront toujours bejiucou]) a desirer. Loin de sini-
plifier la quesllon, coiume il le faudrail pour mesurer separe-
ment rinfluence de cliacune des caiises qui concourent a la
production de I'effet, on y introduil une circonslance nouvelle,
une forme determinee de inoiiveraerit, et I'agitatiou de I'air
dent I'effet, quoique tros-faible sans douie, est copendant reel;
I'exactitude du calcul demanderaa que I'ou en lint cuuiple.
Le 37^ traite est le plus approprie aux besoins des officiers
d'artilleiie, et par ce motif, on regrettera que la traduction ait
conserve les niesures anglaises; ce cjui rend raoins commode
toute application des formules aux mesures francaiscs. On ne
pent doulcr que I'original anglais ne convienne mieux aux
officiers d'artillerie d'Angleterre , que la traduction ne peut
convenir a nos artilieurs. L'ouvrage de Hutton deviendrait
beaucoup plus utile, si on lui faisait subir une 1 efonte gcnerale;
les reductions de mesures, les corrections neccssaiies, une
meilleure disposition des niatetiaux rendraient le livre plus
facile a lire : il serait phis court , quoique tout aussi plein de
choscs ; on n'y conserverait que ce qui est reeliement instructif.
Au resfe, le cou?s de balistique , (jue M. Terquem doit publier,
ne laissera cerlainement rien a cbercher dans les ouvrages qui
ont paru jusqu'a present sur le meuie sujet : il les remplacera
tous pour les applications. F.
328. — Manuel pratique de t art dude graisseur , ou instruc-
tion sur les moyens faciles d'enlever soi-meme toutes soitesde
taches. Troisierne edition ,xe\ue ^corr'ia^eid et considerablement
augmentee, et suivie d'un Appendicc renfermant : 1° une ins-
trucli(in sur la preparation et I'emploi du lac-lahe et du lac-dye ;
2° des observations sur le hablali ou tannin oriental ; par
L.-Seh. Le Normand , professeur de technologic. Paris , 1826 ;
Bachelier. In- 12 ; prix , 3 fr. , et 4 fr. par la poste.
Cet ouvrage doit etre distingue parnii les innombrables
Manuels que Ton public dejjuis quelque tcms. Celui-ci , du
moins , remplit bien sa destination ; il donne au lecleur alten-
tif les corinaissances que son litre j)roinet. Trop souvent, les
manuels sont plutot fails pour le libraire que pour le public;
on veut piquer la curiosite; on annouce des instiuctions nou-
velles; et ou livre a I'acheteur, bientol desabuse , un exirait
pur et siniple d'anciens ouvrages. D'autres fois,r£ncyclopedie
fait a elle seule tous les frais de la composition d'un manuel ,
rajeuni ])ar son tltre ctpar une ou deux planches au trait. Tel
n'est point l'ouvrage de M. Le Normand. Le noni de I'auteur,
T. xxM. — Septewbre 1826. -I?
73« MVRES FRANCAIS.
deux editions lipiiisccs , des aiignicnlations utiles, tout semble
jui'sager a cette troisieine edition iiu smcccs inerile. OE.
329. — * Secrets tie lu cliasseaux oiscuux , contenanl la ina-
nicre de fabriqucr les (ilets, ies divers pieges , ajipeanx, etc. ;
riiistoire naturelle des oiscaiix qui so trouvent en France, I'art
de les clever, de les soigner , de les gucrir, et la meilleiire
inaniere de les emi)aillcr ; ouvrage orne de 8 planches lenfer-
manl plus de 80 hgnres ; par M. G. . . , amateur. Paris, 1826.
Raynal, rue Pavce Saint- Andre-des-Arcs, n" i3. In - i'2 de
328 pages; prix, 3 fr. 5o c.
Nous n'avons pas eu I'occasion de comparer ce ])etit ouvrage
a X Aviceptolo^ie Jrancahe , et aux autrcs ecrits sur le m^ine
sujet : nous ne pouvons savoir s'il coutient quelques dccou-
vertes modernes dans I'art de depeupler nos forets et nos bos-
quets de leurs plus aimables Jiabitans. Quoi qu'ilensoit,on n'y
trouvera que trop de pieges, d'appeaux, de filets, etc. , et de
plus, la fabrication de tons ces instruinens de dommage. L'au-
teur a diviseson travail en quatre parties ou livres, dontle pre-
mier seulenient est consacre a la cliasse aux oiseaux ; le second
tralte de I'art de les conserver, c'est-a-dire, de les empailler.
Le Iroisieme enseigne des secrets plus miserlcordieux , au
inoins en apparence; c'est lamaniered'e'/ecfr les oiseaux, c'est-
a-dire de les priver de leur liberte, et de les soumettre a nos
caprices. Enfin , le quatrieme donne des notices abregecs sur
les oiseaux de la France. On voit que I'auteur a mis a profit
toules ses pages, et que son petit volume ne contiendrail pas
autant de cboses interessantes, s'il I'avait rempli de details su-
perflus, de discussions oiseuses. On y decouvrira sans doute
quelques omissions; car il est bien difficile que ces sortes
d'ouvrages soient complels : les Provencaux remarqueront
qu'il n'y est pas c|uestion de la cliasse appelee tesc; ailleurs,
on y cherchera vaincment la description de quelque chasse con-
finee dans un canton , el que tout le reste de la France ignore.
Ces lacunes sont tres-excusables, et n'empcclient point que
I'ouvrage n'attcigna son but, qu'il ne soit tres-bien place
dans une bibliotliequc de campagne, et meme de ville.
330. — * Dictionnaire geographique unlversel, contenant la
description detous les lieux du globe, interessans sous le rap-
port de la geographic physique et politique, de I'histoire , de
la statistique, du commerce, de I'industrie, etc. , i)ar une .S^o-
ciete de geographes. Tome III. Premiere partie. CHIO - DIN A.
Paris, 1826; J.Kilian;Ch. Picquet. In-8° de 392 pages; prix
du volume, i/, fr. (V. /lec. Enc, t.xxvii,p. 49, et t.xxix,p. 5 12).
Cet utile dictionnaire, rcdige toujours avec les memessoins,
SCIENCES PHYSIQUES. 739
repond k I'alteiite du juiblic et continue a nieriter les eloges
que nous avons donnes anx volumes precedens. Dans celui qui
vient de jiarailrc, nous avons surtoul reinarque Jes articles
suivans : Cotornbte , Constantinople , Cosaques , Cuba, Dane-
mark^ Danube , Darfour , Deux-Siciles , etc. , etc.
33 1. — * Nouvel Atlas du loyaume de France : Cartes des
qtiatre-vingt - six dcpartemens et des colonies francaises. Cha-
que carte est accompagnee d'un tableau stalistique el histo-
rique; par MM. A.-M. Perrot et /. A-UPIck; public par Z.
DupRAT - DovERGER. 27^ — 3i^ livraisons. Paris , 1826; I'edi-
teur, rue des Fosses-Saint-Germain-des-Pres, n° i3. 5 cabiers
in-folio oblong ; prix de I'Atlas complet, contenant 98 cartes
et 110 tableaux, 210 fiancs; cliaque carte se vend separement,
a fr. jcelle de Corse excej)tce qui coute 3 fr.
Ces cintj livraisons rcnferment les cartes et les tableaux des
departemens At Seine-et-Oise , des Cotcs-du-JVord, du Cantal,
du Puj-de- Dofne, de la Gironde , de la Haute- Garonne, de
VHeitiult et de la Corse ; une belle carte de la France actuelle ,
"et celles de la Gaule et de la France ancienne, divisee en 32
gouverneniens. Les cartes des colonies francaises , parmi les-
quelles on a compris Haiti ( dont la carte a dejaparu j, vien-
dront bientot completer cet important Alias dont nous avons
deja piusieurs fois signale rulillte et rexcellcnte execution.
( Voy. Rev. Enc, t. sxviii, p. 532). J.
32. — Carte generale de la Grece , ou Turquie d' Europe ;
partie meridionule ; presentani, d'apres les meilleures cartes et
les documens les plus recens, les divisions, fant de celte partie
de Terapire ottoman cjue de la Grece ancienne et moderne.
Strasbourg et Paris, 1826; Levraull. 1 feuille de 2 pieds 8 p. ,
s?ir I pied 10 pouces: prix , 3 fr.
Cetle carte, purement de circonstante, qui n'a pas ete faite
pour les savans, peut neanmoins servir a la lecture des jour-
iiaux. EUe est sans noni d'auteur ; sa partie materielle n'a pas
ele tres-soignee : nous devons en etre d'autant plus etonnes,
que, des 1823, il est sorti de la lilhograpliie de M. Levrauit ,
ie jilan rediiit de Strasbourg par M. Ch. Rothe, qui etaitlres-
remarqiiable par sa belle et harmonieuse execution.
L. S. M.
333. — * Voyage dans la Russie ineridionale et par ticuliere-
ment dans les provinces situees au dela du Caucase ; fait depuis
1820, jusqu'en 1824, par le cbevalier Gamba, consul du Roi
a Tiflis. Paris, 1826; Trouve. 2 vol. in-8° de lx — 444 > et 480
jiages a\ec quatre cartes geographiques , et nn atlas contenant
740 J.IVRES FRAiNClIS.
des c.irtes , des pians, des drssiiis de [laysages et de costumes ;
piix , 18 fr. , et 60 fr. avec I'atlas.
En attendant que nous puissions donner I'analyse do cet
important onvrage, public iini(jncment dans I'iiilcrcl dn com-
merce ct des manuCactiues , nons nc ]K)uvons assez appelcr
I'atten'.ion snr riiitrodiiclion plact'c en lefedii premier volume.
Celte introduction coniprend, dans 60 jiages trcs-snbstan-
tielles, beaucoup de tails insiruclifs. L'aulonr y dcvcloj)pe avec
clartii ies progres successifs de la ])uissaiice de rAngletcrre,
ses envaliiasemcns, scs concpieles , et clierche a ])roiivcr qn'clle
a seule dciruit I'ccjnilibrc de I'Europe, en s'emjiarant de la
domi:)ation maritime ct en cteuJant son commerce a riulini.
II indique ensuite an continent Ics moycns de remedier a cet
etat de choses, en adoplant un systcmc ile doiianes })lus I.irgc,
mieux appropiic a notre epoque, et en liant I'Asie a I'Europe
par la nier Noire.
« Sices nniivelles communications, dil I'auteur, etaient fa-
cililccs par le coui-s dn Danube, si Ics projcts de canaux inte-
rieurs pour la France ctrAllemngcie recevaicnt lenr excculion,
alors Ies soies ecrnes du Gliilan ct Ies colons do I'Armenie,
cmbarqncsal'emboucliure du Danube, arriveraient sur Ies me-
mes bateaux, d'abord au Rhin juscju'a Strasbourg, qui devlen-
drait un immense entrejjot general; puis, de ceSte ville, Ies
raarchandises scraient distribuees en Hollande, en descendant
le Rliin; eiles se rendraient dans la Mcdilerranee ])ar lo canal
qui doit joindre le Doubs , la Saone ct le Rhone, et dans
rOcean, par le canal qu'on a le projet d'etablir entrela Marne
et le Rhin, en partant de Saint-Dizier. Ainsi, co!te grande
pensee de Lo:tis XIV, (|ui dctermina la jonclion de I'Ocean et
de la Meditenance, ajipliquce a unc plus grande ochelie, reu-
niralt, par des couimunications fluviales, la mer Noire, celle
du Nord, la Mediterrance et I'Occan. Alors on opposerait
i'accord de I'Europe ct de I'Asie a cettc association colossale
qui unit le liouveau-Monde lout eniier a I'Angletcrre el aux
Elats-Unis; une navigation flu\iale et des transports interieurs,
a la domiualion maritime; Ies relations libres des jjcuplcs du
Continent, au iuono[)ole exerce par I'Angletcrre; la culture
des denrees colonialcs dans I'Asie mineure, en Armenie, sur
Ies bords de la mer Noire, a la culture de ces memes denrees
en Amerique et dans I'lnde.
« Mais , la Turquie n'est pas la seule contree (jui soit appelee
a voir cesser la bai'baric qui la couvre; I'Asie occidentale tout
enliere depuis I'Indus jus([u'a la Mediterrance, lend egalement
SCIENCES PHYSIQUES. 741
versl'Eiirope des mains suppliautes,et liii dcmande uri ctatde
tranqulllite et une eliiicelle de sa civilisation. »
Nous boriieronsici notre citation, ct nous renvoyons a I'ou-
vrage memc pour le tableau de I'Asie occideiitale , depuis I'ln-
dus jusqu'a la MoJitcrrancc. On doit savolr gre au consul d»
Pioi a Tiflis, a une opoque ou les esporances que Ton ;ivait
concues sur I'Amerique sTKTifiionale sent rnouienlnnement
dccues , d'avoir fixe I'attenlion du commerce et des gouverne-
mens de I'Europe vers une ])arlie du inonde ( I'Asie occiden-
tale, de i'lndus a la Mediterranee ), doiit la jiopulnilon de
pres de /i8, 000, 000 d'liabitans , assurerail aux produils de
I'industrie europeenne iin immense deboucho, le jour ou elle
cesserail d'etre sourai.'e a des gou\ernemens arbitraires.
A.
33/(. — * Voyage de deux Anglais dans le Perigord , fait en
iSaSet traduit sur leur journal manusorit. Perigueux, 1626;
Dupontpcre et fils. In-18, de 107 pages.
Cet opuscule, extiait de \' Annuaire de la Dordognc pour
1826, est inteiessant et agreable a lire. L'un des deux vova-
geurs, M. Hastings, est un de ces anglais a qui un patrio-
tisme exagore fait regarder comnie r.(5cessairement inferieur
tout ce qui n'a])pai ticut pas a la Grande-Bietagne. L'autre,
qui est I'auleur anonyme de cetle relation, paiait anime de
senlimensplns pliilosopliicpies; il immole (juelquefoisavecbeau-
coup de grace I'orgueil briianniriuc de son conipagnon de
voyage. La geologic, la mineralogie , les aniiquites , les arts,
I'induslrie, I'agricullure, les mceurs des liabitans , sont lour a
lour I'objet de leurs observations. Nous leur emprunterons les
details suivans sur la verrerie duLardin, diiigeepar M. Bkakd,
homme aussi distingue commc pliilantrope que comnie savant,
et qui, suivant M. Hastings, merileiait d'etre anglais:-. Les
ateliers du Lardin occupent au inoins 200 honimes. En iSaS ,
le directeur fonda une caisse de secoitrs , destinee a subvenir
aux frais d'un nicdecin, d'un chiiurgien, d'un pliarmacien ,
et a aider les ouvriers qui ])0urraient avoir des besoins.
Les fontls de la caisse se coraposent d'nne journee de rclcnue
par mois sur le salnire de cbaque ouvrier et du raontant des
ameiides iniposees. II dolt tonjours rester 200 francs en caisse;
sur I'excedant se font des prets a cinq pour cent , iiileret dent
la caisse ^irollte. Au niois do Janvier dernier, le restant en
caisse a perinis de mettre a execution une autre niesure salu-
taiie , qui a deja |)roduil un effet tres-sensible sur le moral des
ouvriers: c'est retablisscment d'une eco/c lancastrienne , dont
les cours ont lieu, tous les dimanches de midi a deux heures.
742 LIVRES FRANCAIS.
Tout Tatelier est term d'y assister; nul n'est exempt. Si quel-
qu'un s'absente , il encourt une legere amende qui vient aiig-
menter la masse. Toutes les classes sc font dans la cour de l.»
verrerie , espace assez vaste j.oiir avoir pu y peindrc Ires en
grand sur lesmurs, d'un cote, les tableanx qu'exigcnt le sylla-
baire et la lecture; de I'autre , cenx que deraande j'etnde ele-
mentaire de la geomctrie pratique. Les elcves en etat de lire
couramment passeni de la cour dans une salle oil ils trouvent
les ardoises , les crayons ct les fables necessaires pour ecrirc.
Hastings et nioi, nous avons assiste aiix cours de I'ccole de
Lardin... Notre presence n'embarrassa nullement les elevcs;
chaque groupe, les yeux fixes sur sou tableau, n'etait attentif
qn'a la voix et a la baguette de son nioniteur. Ce moniteur a
quelqtiefois son perc dans le groupe ; tnais il n'en rcsulte au-
cun inconvenient : I'un ne s'enorgueillit point de son savoir
d'hier; I'autre ne rougit pas d'ignorer ce qu'on ne lui avail
point appris. Loin de nuire au respect filial eta la douce union
des families, I'uii des premiers resultats de Tecole a cte de res-
serrer ces liens sacres. » Ch.
Sciences religieuses , morales , politiques et historiques.
335. — * Pdbliotheque choisie des Peres de I'Eglise grecque
et latine, ou Cours d'eloquence sacree , par Marie N. S. Guil-
LON, professeur d'eloquence sacree dans la Faculte de theologie
de Paris, etc. ; Troisieme pnrtie, suite des Peres dogrnatiques ,
tomes XIII® et xiv<^. Paris, 1826; Mcquignon-Havard. In-8° de
625 et 645 p.; prlx du vol. 6 fr. (Voy. Rei\ Enc, t. xxx p. 761).
Ainsi se continue vivement, et avec iin succes bien soutenu,
I'une de 110$ plus utiles collections relatives a la religion ca-
tholique. La distinction des peres dogrnatiques semble ici peu
necessaire; il nous suffit de le dire en passant. Cette livraison ne
contient que des traductions et des analyses tiroes des OEuvres
de Saint-Chrysoslome ; elle estenrichie, comme les precedentes,
de notes du nouvel cdileur et de citations des meillenrs sermo-
naires et autres ecrivains francais, qui out traite les memes
.sujets que I'antique orateur, ou qui ont profile de ses idees.
Le tome xiii est precede d'un discours sur la necessite de la
revelation divine et sur les traits qui la caracterisent. L.
336. — * Veritc du christianisme , prouvee par la nature
menie de cette religion , et par le fait de son etablissenicnt ;
par /.-j5. Sumner , niinistre de la religion anglicane; traduit
de I'anglais par le vicomte P.-E. Lanjuinais. Paris, 1826;
Baudouin freres. In-S*^ de xiv et de 33 1 pages; prix, 6 fi.
SCIENCES MORALES. 743
M. Lanjuinais])erc a annonce,dansla Recue Encyclopedique
[ Voy. t. XXIV , p. 701 ) , restiiD.ible ouvrage de M. Sumner, et
a rendu justice a la niethode facile, a la clarle, a la precision,
a I'elegante sirn])!icite de ce moderne apologisle <lii christia-
nisme. M. Lanjuinais fils , en faisant jouir de cet ouvrage Ics
leclcurs francais, contribiie a repandrc des idees utiles , Ires-
judicieiisement exprimecs. — Nous vivons dans un lems ou
les sentimens religienx sont en honneur. L'incredulile nio-
queuse est tout-a-fait pasSee de mode; el les honimes dont
I'opinion est de quelqiie poids savcnl aujourd'hui, lorsqu'iis
concoivent des doutes sur les dogmes religieux , qu'il y aurait
I'inconvenance la plus folle et la plus generalement sentic, a
s'expriraer avec le ton de la Icgereie ou du dedain , sur les
plus h?u(s objels de meditations qui puisscnt occuper la pen-
see. Le scepticisme qui nie foute existence d'une verite, est
abandonne aux esprits superficiels et eiroits; on sait le dis-
tinguer de ce scepticisme qneleur qui, doulant a la maniere
de Descartes, croit a la verite et la cherche, meme lorsqu'il
ne peut pas se rendre compte du point precis oii il la trouvera.
Le livre de M. Sumner est de nature a produire une vive
impression sur les esprits qui douteni de bonne foi. « Tout
Chretien, dit-il en termmant sa preface, est exliorie dans
I'Ecriture a savotr pourguoi il croit ; on doit esperer que ceux
qui refusent ouretardent leur adhesion connaisscnt les motifs
qui les empechent de croire , ct c'est pourquoi j'ai entiepris de
rendre nies raisonnemens fels qu'ils puissent faire impression
et sur le fidcle et sur I'incredule. » L'autcur insisle jirincipale-
ment sur I'originalite du cbristianisme, et sur limpossibiiite
de n'y voir qu'nn produit humain , resultant du perfeclion-
nement successif de la masse gcneraie des cqnnaissances. C'est
la, en effet, la plus grave de toutes les questions; elleestsur-
tout du domaine de I'histoire. L'auteur et le traducteur , par-
faitement d'accord sur chacun des points priiicipaux , se trou-
vent quelquefois en disseuliuient sur des details qui interessent
le catholicisme ; mais ces cas sont peu nombreux, parce que
M. Sumner a soigneusement evite tout ce qui serait de pure
cantroverse. La traduction de M. Lanjuinais fi!s ne])eut nian-
quer de lui faire beaucoup d'honneur; le choix meme du
livre qu'il a entrepris de reprodiiire en francais, montre qu'il
consacre les annecs de sa jeuiiesse a des i-tudes sericuses et
fortes. II fait bien de s'exercer ainsi a porter dignement I'ho-
norable fardeau d'un nom tel f[ue le sien.
Ch. Renouard, Avocat.
337. — * Elemens de pncuinntologie, ou anatomie des sub-
744 LIVRES FRANC AIS.
stances spirituelles , par Antoine Lkroux, g. a. b. n. T. I*"^.
Paris, 1825 ; Treuttel et V/urtz; Rcnou;ird. In-8" de 370 pa-
ges; prix, 7 fr.
M. Leroux a divisii son ouvrage en deux parties : la premiere
a pour objet les connaissances physiques necessaircs au deve-
loppement de la theorie des etres intelk'ctiiels ; elle comprend
quatre livres. La seconde, bcaucoiip plus otcndue, quoiiiii'elle
ne soit coinpos^e que de trois livres, est le dL'velo[)jH>nient de
la pneuinatologie propremenl dile. Le ])reniier livre seulement
a pu tronver place dans ce volume, a la suite de la parlie phy-
sique : nous ignorons si le second volume est public , et s'il
complelera la science nouvelle , car M. Leroux ne marche pas
sur les traces de ses predecesseurs; il ne s'est pas mis non plus
tout-a-fait a la portee des lecteurs vulgaires, tels que nous;
mais il n'etait peut-etre pas possible de repandre plus de lumie-
res sur lessujets qu'il a traites.. En effel, dans ce premier livre
intitule : Premier dei-e/.oppernent de la pneumatnlogic , I'auteur
commence par demontrer I' existence d'un Dieu. Dans un second
chapitre, il examine : « 1° quelle serait la creat-ion si ce Bieu
avail tout organise sans idees preexistantcs , et par quelles
operations mathematiqnes il aurait j)roduit les elemens et les
Ames; a° ce que serait la creation, si ce Dien avait tout orga-
Hise sur les plans d'idc'es innees; 3° quelle seraii enfin une crea-
tion eternelle dans un Dieu depositaire de toute chose. Le troi-
sieme chapitre traite des trois ages de I'etcrnite , pour decouvrir
quel etait I'etat des choses dans le terns passe, quel il est dans
le tems present, quel il sera dans le terns futur. Enfin, dans
Ic quatrierae chapitre, on examine quel est le raecanisme qui
cntretient la succession des etres sur les srirfaccs habitables. »
Ce dernier chapitre paraissant moins inaccessible que les
autres ou noire intelligence n'a pu se faire jour, nous nous
felicitions de comprendre le commencement , etmeme le milieu;
mais la fin nous a rappele dureraent notre incapacite, il a falla
la reconnaitre , et fermer le livre avec confusion. Mais pou-
vions-nous ignorer que ce livre n'est pas fait pour nous? Dans
une tres -breve dedicace, I'auteur indique et choisit ses lec-
teurs.
« C'est a toi, peuple mysterieux , reste im])osanl d'une
institution sublime; c'est a vous philosophes de toutes lessectes
qui recherchez la verity, que je dedie ces elemens. Mes voeux
seront remplis, si ce flambeau pent salisfaire vos desirs , et
vous procurer la paix interieure, la liberie de pensee el Passu-
ranee future que je doisa sa lumiere. »
Une pre/ace, suivie d'un avant-propos , donne une idee
SCIENCES MORALES. ih^^
soromaire de I'ouvrage, et mettra les leclcurs en otaldc juger
s'ils peuvent aborder les difficiiltes du sujel. L'avanl-piopos
precede d'un sominaire suivant I'usage de I'aiiteiir pour toules
les divisions de son livre, traile de I'origine de la maconnerie
ancienne , ou societe esotcrique , de I'Drigine de la maconnerie
moderne, et de celle des convents ; il indicjue le but que doit
se proposer la n>aconnerie de ce siecle. « Aujonrd'hui que les
nations de I'Europe pnssedent dans leurs classes intermediaires
tons les arts et toutes les sciences qui peuvent faiio fleurlr la
socicte; (pie les croyances religieuses , sepaiees de I'ancien
tronc de la maconnerie , fornient des corps puissans; que I'ad-
ministi-alion et la justice sont conliees a des officiers civils;
que I'exercice du commandenient repose dans les mains des
chefs de nation; la maconnerie ne doit plus avoir d'autre but
que de pcrfeclionner les liorames qui la cultivent en dcvelop-
pant leurs verlus, et d'eclairer I'humanite entiere en decou-
vrant les veritcs surnaturelles dont la societe en general ne
pourrait s'occuper. D'apres cela, toute socleie dont les travaux
auront un autre objet, cessera, quoiqu'elle en conserve les
formes, d'appartenir a la maconnerie de ce siecle. » F.
338. — * Cornf/agnie de colonisation gencrale a la jtijanne
francaise , etc.; par M. de Caze (de Provence). Paris, 1826;
Demon ville, rue Christine, n" 2. In-S'^ de 6 feuilles d'impres-
sion , et prospecius in-4'*.
Les etrangers ont souvent rcproche a la France de ne tlrer
qti'un mediocre avantage de la pluparl de ses colonies ; mais,
sans doule, iln'en sera pas de meme a I'avenlr : I'espritde suite,
dans des entreprises utiles , parait inseparable du caractere plus
grave des generations qui s'habiluent a I'ordre constitutionncl.
En Amerique, la Giiyanne presqiie seule reste anx F'ran-
cais ; mais elle est tres - fertile et riche en metaux. Celle
contree equatoriale, que des travaux bien diriges rendraient
salubre en peu de tems, realiserait les avanlages que promet-
taient le Canada et la Louisiane, et meme ceux qu'offrait Saint-
Domingue. Le projet de M. de Caze pour I'assainissement , le
defrichemenl et I'enticre exploitation d'une surface d'environ
18,000 lieucs carrces, des deux coles de I'Oyapoc , semble
digne de toute raltention du gouvernement , et on assure qu'il
a deja etc \n\s serieusement enconsideratir)n.Ces 18,000 lieues
carrees, formant la plus grande partie de la Guyanne fran-
caise, seront reparties en 6 series de 6,000 actions chacune ,
parce que les diverses parties de celle vaste operation ne peu-
vent etre effectuees que successivement : chaque action rend
proprietairede 9,600 hectares. Leconseil d'administration sera
746 LIVRES FRANCAIS.
compose de quinze membres rcstant en France; vingt -cinq
autres actionnaires fonneront a la Guyanne, iin conseil gene-
ral d'agriculiure. — Les sousciiptions des actionnaires seront
eniegistrces, par ordre de date, cliez M. Beiseon, notaire, a
Paris, rue du Bouloy , n" 12. S.
339. — Obsc/vations Itors tie saisoit. Paris , iSafi; Delaunay.
In-S" de 38 pages; prix, 2 fr.
Cette brochure renferme , sous la forme d'arlicles rcglemen-
taires, quelques vues de detail jjropres a perfcctionner le sys-
tenie d'cducalion, tel qu'il est adopte en France. L'auteur de-
sirerait plusieurs classes d'agriges; il propose aussi de iiouvelles
conditions a remplir par les jiersonnes qui se consacrent a
I'enseigncment; mais, du point de vue ou il s'est place, com-
ment pouvoir einbrasser, dans leur ensemble, les changemens
que reclame I'instruction publique pour se mettre en harmonie
avec une civilisation progressive? II ne parait pas avoir en-
trevu le besoin de commencer des I'enfance a donner aux
jeunes gens des notions applicables a I'usage de la vie, selon
les diverses fonctions qu'ils sont destines a remplir au sein de
la socictc. Peut-etre trouve-t-il fori bonne !a methode actuelle
qui fait Jeter dans lememe moule, jusqu'a I'age de dix-lmit ans,
tonte la jeuncsse du royaume, comme si les litterateurs et les
savans de profession, les ingenieurs et les artistes, les industriels
et les avocals, les negocians et les administrateurs, devaient
exercer au men»c degre ractivite de leur esprit sur I'art d'ecrire
et de parler. Ad. Gondinet.
340. — Le Jesuitisme devoile , par M. I'abbe Henri Le
Maire. Paris, 1826; Ponthieu. In-8° de 141 pages; prix, 3 fr.
Get ouvragc est dedie au clerge de France, et il est digne
de cetle dedicace par les nobles et religicux sentimens que l'au-
teur y developpe, en I'^sumant avec eloquence les perpetuels
griefs des citoyens contre les corrupleurs de la morale et de la
religion , contre les ennemis de la paix , contre les perseculeurs
de toutes les libertes piibliques et privees. L.
341. — * Consttllation , nijesuidqiic, ni gallic ane , nifeodale,
en reponse a la Consultation de M" DupiN. Paris, 1826;
Ambr. I)upon^. In-8"; prix, 2 fr. 5o c.
Lorsque. dans une discussion d'interet general qtii tient a la
fois a ce qu'il y a de jilus inlime en notre nature et de plus
sacre d'une jiait. et (|ui , de I'autre , s'adresse a toutes nos
affections domesllques et sociales, cliacnu prend parti, sui-
vant ses lumieres, ses pvevisions , les donnccs de son expe-
rience, ou, cequi arrive trop sou vent, suivaut les suggestions
de I'ambition ou de la peur , il se forme ordinairement deux
SCIENCES MORALES. 747
opinions principales placees comme deux annces cri presence,
se livrant de freqiientes attaques et meltanl en ojuvre tons les
moyens de se n.'cnager la victoire. C'est ce que Ton a vu toutes
les fois que des objels graves ont etc par le cours naturel des
evenemens, ou par les progres de I'esprit humain , soumis a
• 'attention pubUque ; il ne jjouvait en elrc autrement, dans
Texamen des grandes questions soulevees jiar M. de Montlosier.
Cet exainen remet chaque jour I'opinion en possession de tous
les documens qui peuvent ainener une solution. Celte solution
ne peut etre ni eloii^nee, ni douteuse, si ce sont les documens
historiqnes qui prevalenr, ainsi que les anciennes et impres-
criptibles maximes de I'etat.
Ces maximes sont destinees a proteger la religion de I'ctat,
telle que la Charte lareccniiait. Ellese trouve ainsi preservee
des pretentions envaliissantes d'un gouvcrnement etranger.
Ces. maximes sont la base de ce que la magistrature francaise
a de tout terns rnaintenu, de ce que les Francals catholiques
ont respecte et cheri sous le nom de liberies gallicanes. Nul
ii'elait admis a prendre en France ses grades dans les anciennes
facultes de droit, sans preter serraenl de defendre ces liberies
precieuses, sorte d'enseigne nationale, sous laquelle il fallait
se ranger et au besoin combattre , moven indispensable pour se
reconnaitre, signe de ralliement necessaire pour la defense
commune. L'honorable bonne foi inlierente au caractere fran-
cais semble faire un devoir d'en donner I'empreinte a toutes
les opinions, meme religieuses, que Ton professe. Toutes les
considerations viennent done, dans une matiere aussi grave,
coufirraer I'autorite du ])asse , et nous donner lieu d'csperer
quo la France ne sera pas reduite a avoir les jesuites de plus et
les liberies gallicanes de mciris.
Lorsque I'opinion est ainsi partagee , lorsque ce partage plus
ou moins actif et passionne rcssenible a un veritable t'tat de
guerre, quel ecrivain raisonable, ayant I'honneur d'etre Fran-
cais, peut renier son pays, et renoncer a le nommer, ainsi
qu il est d'usage , en reponse au cri de qui vive? De quel pays
etes-vous done, si vous n'etes pas Francais? C'est la question
que Ton scrait tente de faire aux auteurs de la Consultation
que Ton prcsente comme n'elant ni jesuitique , ni galllcaiie , ni
feodale. Nous ne voyons pas comment on peut renoncer a des
doctrines nationales, gage d'independance, sans embras.ser
des doctrines etrangeres, moyen d'asservissenient, ou leur
ouvrir iniprudumment toutes les porles qui devralenl trouver
dans cLaque citoyen une sentinelle vigilante. Renoncer aux
liberies gallicanes, nous parafl une desertion; preclier leur
748 LIVRES FRANC AIS.
renvcrsemenl dans Ics ecolcs , nous parait embaucliage; c'est
recrulcr pour un gouverneinent eiranger. C'est ce (|ue I'etat
lie peut perinetlre dans renseignemeiit public qn'il survei'.le
et dont souvent il fait les frais. Honneur aux mngistrats qui
ont solennellement rappelc ces niaxiines tutt-laires!
Si Ton en croyait les auteurs de la Consultalion qui se dit
non jt5suitique, il ne faudrait ni lois, ni ordonnaiices pour
autoriser des clabiissemens religieux. La France pourrait se
couvrir de monastcies, sans que !e gouverneinent put y meltre
obstacle. Lc deplorable sort de I'Kspagne, ou il ii'y a de floris-
sant que les moincs, serait reserve a notre belle patric. La
seule conviction que nous laisse cette production, c'est qu'elle
est completement, anii-gallicane, aussi etrangere a toule con-
naissance du passe, qu'a toule prevoyance de I'avenir. 11.
342. — Dc la Direction generale ties siihsislances militaires,
sous te rninistcre de M. le marechal due de 1>ellune, par p. le
general Andreossy , ex-direcfeur-gcncral des subsistances mi-
litaires. Paris, iSa.ij ; Trouve. In-8" de i32 p. ; prix , 2 fr. 5o c.
343. — Meinoire de M. le general Andreossy snr ce qui
concerne les marches Ouvjard. Paris, 1826. Finn in Didot.
In-8° de 122 pages; prix, 1 fr. 5o c.
Dans ces deux uiemoires, M. le general Andreossy cherclie
a disculper I'administralion des subsistances militaires qu'd di-
rigeait, en 1823, des accusations de negligence ou d'imperilie
auxquelles elle avait ele en bntte, lors de la discussion au sein
des chambres, a I'oceasion des marches oiiereux de Bayonne.
Les documens nombreux dont il appuie cette defense et (ju'il
empruute a diverses comptabililes jettent bcaucoup de luiiiiere
sur ces transactions surprenantes qui lestent encore enve-
loppees de iiuages. On est surtont frappe de ce fait inateriel,
que M. Ouvrard n'a pti nourrir I'armee, iininedialeuient apres
le passage de la Bidassoa et pendant les premiers niois de son
sejour en Espagne , fju'au moyen des subsislances accuinulees
dans les magasins des lo*' et 11' divisions militaires par cette
administration lant critiquee. Elle avail verse, au dela des Py-
renees, des vivres pour 107,000 homines, effectif de I'armee,
pendant cent dix-sept jours; pour 32, 000 tlicvaux pendant
quaraiite-quatre jours, sans coaster d'immen«es a])provision-
nemens restant en roagasin. On. ne manquera pas de remaiquer
aussi , precisement au milieu des embarras de I'enlree en cam-
pagne, I'drrivee Inopinee de M. Ouvrard au quartier-genoral,
ou il s'elait fait preceder j)ar quelques-uns de ses agens.
Aj). GoNDlNET.
344- — I^" Mylhologic cmnparrc avec I'histoire; par M. Fabbe
SCIENCES MORALES. 7/,g
i>E Tressan. Omrage adoptc par le Conseil de rUniversite
pour servir a renseigncment dans !es colleges et dans les tcoles
secondaircs. Huitieme edition. Paris, 1826; Dufour et Edmond
d'Ocagne; Amslerdam, cliez les niemes 2 vol. in- 12, ornes de
\6 planches eu taille douce, dansle gout antique, reprcsentant
7.5 sujets. Prix, 6 fr.
Le Conseil de I'Universite, en piacant cet ouvrage au noin-
bre de ceux que !cs professeurs doivent employer pour I'ins-
truttion dans nos ecoles , a du nccessairement assurer son succes,
q;ie sept editions consecutives ne jierinetlent point de rt'voquer
en donte. I>'utililc de I'ouvrage a merite tout a la fois la faveur
dont il a etc I'objet de la part de riJiuversite, el le succes qu'il
a obtenu dans le monde. ■< On ne jieut voyager utilenient, dit
I'anteiir dans son avanl-propos, apprecier les chefs-d'ceuvre des
arts et lire avec fruit les ouvrages des poeles , et siirtout des aii-
teurs anciens , sans avoir des notions gt'nerales sur la mytlioio-
gie. i> Mais I'elude des faits qu'off're cette science pouvait etre
dangereuse pour la jeunesse, presentee sans aucune prepara-
tion , et telle que nous la connaissons ; M. I'abbe de Tressan a
eu riieureuse idee d'expliquer par I'hisloire les fables qu'elle a
consacrees, et de nionlrer I'intenlion souvent morale , toujours
ingenieuse , qui a guide les anciens dans ccs creations du genie
et de I'iuiagination. II en a pris occasion de remonter a I'origine
de ridolalrie, dentil tiace une histoire conforme au caractere
dont il estrevelu, el au but qu'il devait riecesfairement se pro-
])Oser enecrivantpourl'instructionpublique. II a du consiilter
pour son travail tons les auteurs quiavaient ecrit avant lui snr
le menie sujet; mais ii avoue et Ton voit aiscment que I'abbe
Bannier a ele son principal guide.
Le Dictionnaire de lajahle, par Chompre, enriclii des re-
clierclies savantes de M. Millin, est indispensable dans les
grandes bibliolheques. On peut consulter cgalemcnt avec fiuit
le Dictionnaire de mythologie iiniversclle , redigc par M. Noel;
mais nous jiensons (]ue I'ouvrage de I'abbe Tressan convient
sujtout a la jeunesse de nos ecoles. E. .H
34 '). — * Clas\iqties de I'histoire , premiere parlie, conienant :
Discours stir f Histoire unii'erselle ; Histoire des Revolutions Ro-
inaines ; Considerations sur les causes de la Grandeur et de la
Decadence des Roinains. Paris, 1 826 ; Anselin et Pochard. In-8"
de 562 pages, imprimees sur deux colonnes, prix, 12 fr.
Ce volume est destine aux bibliotheques regimentaires, aux
officiers et aux voyageurs, a tous ceux enfin qui rechercherit
les editions compactes. Nous en avons annonce la premiere
livraison (Voy. Rev. Enc, t. xxx, p. 191). Celles qui ont suivi
7 5o LIVRES FRANCAIS.
n'ont pas etc imprimecs avec nioins de soin ni d'elegance ; aussi
celle collection ne peut-elle manqner d'etre recherchee. J.
3/|6. — * Histoire generalc , physique et civile de I' Europe ,
depuis les derniercs annees dii rinqiiieinc sieclc jusque vers le
milieu du dix-liuitieme; par M. de Lacepede. Troisieme et
qiiatrienie livralsons : t. v, vi , vii et vin. Paris, 1826; Maine
et Delaunay- Vallce, cditeurs, rue Gueni'gaud , n° 26; prix
de cliaque Jivraison , 14 Ir. ( Voy. Rev. Eiic, t. xxx, p. 5o7.)
Plus les livralsons de cc bel ouvrage se muUiplient, plus
on y admire le talent qui presenic avec tant de concision ,
<i'ensemble, d'intcret et de rapiditc, le vaste tableau des eve-
neniens qui marquerent les diverses epoques qu'il decrit. Tou-
jours la haine du despotisms , I'liorreur des crimes, et I'araour
des vertus dictent a I'auteur d'eloquentes accusations contre
les souveraius, les pontiles etles peuples qui oublient leurs de-
voirs; partont il recomniande cette religion de Jesus qui repand
les luniieres, avance la civilisation, adoucit les moeurs; dans
toutes les occasions, il fait sentir aux mailres des empires, ({ue
les peuples ont des droits aussi inviolables que les leurs, et
(]u'ils repondront devant Dieu de tout le mal qu'ils auront fait
aux hommes.
Ici , il nous montre « les croises partis uniquement de leur
patrie pour arracher aux Sarrasins la Palestine, la Syrie, la
Natolie, le nord de I'Afrlquc, et n'ayant attelnt leur but qu'eu
partie, rapporter dans I'Europe occldentale des idees, des
habitudes, des souvenirs, des arts, des besoins, des liaisons
commerciales, dans lesquels il est impossible de ne jias voir le
veritable commencement de la renaissance des lumieres, de
raffaiblissement du sysierae feodal, de I'accroissement de I'au-
torite proteclrice des monarques, de la regularite de I'admi-
nistralion generale, des garanties dcnaees aux faibles, de la
reconnaissance de quelqnes droits des ])euples , d'heureux pro-
gres de la civilisation , ct combine tons ces nobles effets de
communications plus intimes, et plus souvent renouvelees,
devaient s'accroitre et s'embellir, a mesure que les peuples
pouvaient secouer les chaines sous lesquelles ils gemissaient.»
La,il rend hommage a cette institution dont les anciens
n'avaient eu aucune idee, « a cette chevalerie, qui, destinee a
produire tant de hants fails et a inspirer tant de grandeur
d'ame, devoiie le courage, le genie, les affections, la vie en-
tiere aux objefs les plus dignes de nos hommages, a Dieu , a
la patrie, a la beaute; rend inviolable la foi donnee, epure le
sentiment, eniioblit meme la gloire, inspire un noble caraclcre
que les siecles ne jjeuvent effacer, prescnte le beau ideal des
moeurs europcenncs. Elle aurait repare tons les maux de la
SCIENCES MORALES. 75i
barbaric, si elie avail reuni I'eclat des luniieres a celuides ar-
mes et des vertus. »
Ailleiirs , apres avoir raconte d'affreux assassinals commis
siir les personiies de plusieurs mauvais princes, qui s'litaient
rapidement succede sur le tione de Damas, il s'ccrie : « lior-
ribles preuves de cette verite terrible , proclamee par tous les
siedes et dans tous les pays, que les lois seules peuvent ga-
rantir la vie des princes, coinine les droits des peuples , et que
la puissance absolue n'est que le signal eclatant, inais funebre,
du plus grand des dangers. Le fer des assassins termine presque
toujours la vie des despotcs. «
Plus loin, il peinlce Cid devant lequel Ireinblaient les Sar-
railns , que le sultan de Perse, frappe de sa renommee, avail
envoye feliciter sur ses merveilleux exploits, el qui meurt cou-
vert de gloire a I'age de 60 ans, et il ajoute : « C'est un grand
spectacle que celui de cette veuve si faraeuse, sortant de la
ville qu'elle a defendue avec tanl d'eclat, traversant tristemenl
les montagnes, suivie des chevaliers de don Rodrigue, de
I'eveque don Jerome, du gouverneur Alvar Fonnoz, de plu-
sieurs autres chretiens, conduisant leligieusement les restes
sacres du Cid , qu'elle va deposer sur un magnifique mausolee ,
dans le monaslcre de St-Pierre de Condagno, et les peuples
accourant en foule, Ijordent la route que suit Chimene , deplo-
ranl la perle de leur sauveur et f'aisanl des vneux pour sa dignc
compagne. L'adniiration publique rcunit les noms du Cid et
de Cliimene : le genie de Corneille devait le preserver a jamais
de I'oubli. »
Henri II, roi d'Angleterre, etait depuis long-tems infirme;
mais, lorsque, apres le traite d'Azay , il rappelle tous les mal-
heurs qui ont assailli sa vie, que toutes les revoltes de ses en-
fans seretracent avec force a samemoire, qu'il se voit dependant
pour ainsi dire, d'un Ills rebelle , depouilie de ses droits, prive
de sa ]juissance, abandonne menie par ce Jean qu'il avail tant
clieri; errant, fugitif, presque suppliant dans ses propres
etals, condamne a trainer une vieillesse infortunee, il ne peut
resister an chagrin qui I'accable, la fievre le saisit , on le trans-
porte a Chinon. A peine deux jours sont-i!s ecoules, tfu'il suc-
coinbe a sa douleur morteile. Geoffroy qu'il avail eii de la belle
Rosemonde , ne Tavait pas quitte. II fail porter les restes de son
pere qu'il regrelte a I'abbaye de Fontevraull dont Henri II
avail fait batir le monaslere, et oil ce monaiqiie avail desire
d'etre enterre. « Et voyez comme la nature et les lois vont elre
vengees, dit I'auleur ; on expose dans I'eglise le corps de Henri,
le respect et la tendresse filiale I'avaienl revetn des habits
75a LIVRES FRANCAIS.
royaiix. Le visage du mallieureux loi ctait decouveit; on venait
en fodle le contempler ct prier autour de son lit funebre. Ri-
chard arrive; il veut peiietrer dans le (emplc, ii liosite; il enlre
coranie pousse par une main invisible; il voit le pere dont sa
conduite vient d'abreger les jours; il voit le roi centre lequel
il a ose lever un etendard coupable : une sccrele horreiir le rend
immobile. Par un de ceshasards t(ue Ton so plait a rei;arder coninie
le signe de la colere celeste, dcs goutles dc sang tonibcnt de
la bouche livide el enlrouverte du cadavrc : les assisiaus sent
frappes de terreur. Le reniordss'empare de Richard; il tombe
au pied du cercucil de son pere; il nc pent s'cn eloigner, il
assiste aux funorailles, dans I'attitude du repcntir etd'un som-
bre desespolr. »
Dansun ouvrage aussibien concu,aussi bien compose, aussi
bien ecrit, tout rcsjiiie la religion la plus vraie, la morale la
plus pure, la politique la plus saiue; on ne pourrait faire
aucune citation qui ne vint a raj)pui de cc jugement. D'A — c.
3.I7. — * Considerations sur les causes de la grandeur ei de
la decadence de la monarchie espagnole; par M. SEMPEaE.
Paris, 1826; Reriouard. 2 vol. in-i2;prix, 8 fr.
M. Senipere e.^t un magistral espagnol, avantageusement
connu i)ar de nombreuses productions sur I'LCoiJomie publique,
sur I'histoire et sur la legislation de son pays. Peu d'ecrivains
espagnols ont montrc de nos jours un zele plus ardent pour la
propagation des lumieres. Dcja, sous le regne de Charles III,
ii avait obtenu la protection du premier ministre, le comie de
Florldabianca , p;ir un travail sur les lois somptiiaires, qni mi''-
rita ranprobation de cet homine d'etat eclaire, et dans leqiiel
il dcfendait des principes econoniic|ues favorables a la liberte
et a I'accroissement de I'induslrie nalionale. 11 fut recompense
de cet ouvrage par la place de procureur du roi a la cour royale
de Grenade. Ce tut luiqui proposa le premier au gouvernement
Ja vente des immeubles possedes par les confreries, par les cha-
pellenies, el aulres cori)oralioris ecclesiasllques , comme un ex-
pedient aussi profitable pour le tresor qu'avantageux pour I'a-
griculture; projet dont on scniit bientot la convcnance, et (]ui
produisit, cii effet, des soinmes considerables a I'elal, en meme
leins (ju'il mulliplia le nombre des propfrietaires interesses a
I'exploitalion ngricole des pro]!rIetes riegligtes on nial cultivees
JHsque-la. II eiit etc a dcsirer que rexecution de cette mesure
eut etc concue sur une echelle plus ctendue : mais {'adminis-
tration, codaut a des craintes plus ou moiiis reflechies, n'osa
])as latter contre les obstacles qu'elle prevoyait , ct elle lenta
seulement un premier essai; dans I'iutenlion de preluder a des
SCIENCES MORALES. 753
mesures plus imporlantes et a des ameliorations essentielles.
Quoi qu'il en soit,ce futM. Serapere cjni suggera ce projel au
gouvernemeul, et qui lui piesenta d'auires vues d'une incon-
testable utilile, en s'occupant en nieine teins de plusicnrs ou-
\rages destines a eclairer ses compatiiotes. La Bibliotheque
econornique espagnole , la Dissertation sur les majorats , la Bi-
bliolheque des ineilleurs ecrivains espagnols , le Rcgne de Char-
les III , sent au nombre des productions de M. Sempere. Plus
tard , il a publie VHistoire des Cortes et VHisloire du Droit es-
pagnol. Tous ces divers ouviages ont ete publies en espagnol
excepte V Histoire des Cortes que I'auteur fit paraitre en f'ran-
cais, a Bordeaux, en i8i5.
Le mome esprit d'invesiigation, la meine ardeur pour les
rccheiches historiques qui distinguent les autres ouvi-ages de
M. Senipcie, se font reniarquerdans cclui que nous annoncoiis
aujoiird'Lui. II y entreprcnd, en homme parfaitement instruit
de I'histoire de son pays, de jiarcourir les differens ages de la
raonarchie espagnole, depuis le tenis des Visigoths jusqu'a nos
jours, pour peindre avec justcsse !es lois, les institutions, les
mceurs, qui ont le plus conlribue , soil a sa grandeur, soit a son
abaissenient : il trace, dans un exj)ose soiumaire, les divers
principes qui ont dirige les gouvernemens de la Pcninsule pen-
dant un grand nouibre de siecles , et les idi'-es qui y ont niai-
trise les csprits de toutes les classes de la societe. Des faits cu-
rieux, pen connus, puises dans des auleurs anciens, ou dans
des docuniens inedits, jettent un nouveau jour sur jilusieurs
poinis de I'blsloire, en meme tous qu'ils ajouient au luerite de
I'ouvrage.
II n'est pas besoin de dire que cet examen pbilosopliique de
I'bistoire du peuple espagnol offre un grand interct : on sait
qu'aucune autre nation , parini celles de I'Europe , ne ])resente
un melange plus singulier de sagesse et d'aberralions, de vertus
et de faiiatismc, de gloire et d'abaiisemcnt que la nation espa-
gnole : circonstancoqui rend I'etude de son histoire plus digne
de I'observateur eclaire, puisqu'eile fournlt une matiere abon-
danlea de hautes considerations poliliques, et deslecons salu-
taires pour les gouvernemens et pour les peuples.
L'ouvrage est divise en trois parties. La premiere commence
a la monarchic des Visigoths et finlt au regne de Philippe II:
dans la seconde, i'auteur examine les rcgnes de Philippe III,
de Philii>pe IV et de Charles II; la troisieme comprend I'ave-
nement de la dynastie des Bourbons et les regnes de ses diffe-
rens nionarijues.
Nous ne pouvons mieux falre connaitre la nianiere dont
T. XXXI. — Septeinbre 182G. 48
754 LTVRES FRANCAIS.
I'auteur a lraiti5 son sujet, qu'en cLtant les articles suivans de
la Table <les maticrcs, placce a la itte du premier volume. —
Chcip. .l'f'7Zdela premiere parlie : I'ctal pitoyable de In Cas-
lille, loisque Ferdinand et Isabelle comraenccrent a regner;
sage politique inise en usage jKUir trari(piilliscr le royaume,
aballre rorgucil des grands et afferniir la inonareliie: creation
de la Santa-Hermaiidad ; dtinolilion des cliaieaiix et des for-
teresses des grands seigneurs; revocation de beaucoup de do-
nations des biens de la couronne; suppression du dioit an-
clennement accorde aux grands de souserire Ics diplomas
royaux ; nouveaii reglemcnt du conseil et de la magislralure;
protection accordee aux sciences et aux arts; reflexions sur les
causes qui pousserent les rois catlioliques a crcer I'inquisition
et a exiler les Tuifs; coup-d'ceil sur les clivers elats de prospe-
rile et de mallieur des Juifs en Espagne.
Cliopitre I"' de la deuxicme pa? tie : Decadence de la monar-
chic espagnole au xviie siccle ; mulliplicalion excessive des
couvens, chapellenies et autres oeuvres pieuses, sous le regne
de Pliilipi)e III; augmentation de la corruption des mceurs
dans ce mt*me terns; ])aix avec les Hollandais; expulsion des
Mauresques de Grenade; dommagcs que ieur causa leur jiros-
cription; rapport du conseil de Castille sur les lualheurs que
souffrail la monarcliie esj)agno]e, et sur les remcdes qii'on y
pouvait apporter.
M. Sempere se plait a faire remarquer les ameliorations que
I'Espagne a cprouvees soiis les rois de la dynastie des Bour-
bons; et parmi les reformcs de plusieurs abus, il cile avec
complaisance les actes par lesquels la nation et le gouverne-
inent se sont affrancliis successivement de la dependance de la
cour de Rome. II y a lieu, en effVt, de se feliclier de celte po-
liti(pie eclairee, si en rapport avec les interels nationaux : car,
tel etait rasservissement produit par plusieurs sieelcs d"abus,
que ni les reclamations energirjues faites de terns a autre par le
conseil de Castille, ni les petitions des Cortes relatives a la ne-
cessite d'introduire des refornies dans le clergc , ni les de-
marches faites ])ar le gouvernement espagnol lui-uieme dansle
but de s'emanciper de la tutelle sous laquelle il elait tonu pax*
la cour de Rome, n'avaient produit aucun resulfal favorable.
L'enseignement de la jurisprudence ullramontaine dans les
universlles , et, par consequent, le mauvais esprit dos juges
avail paralyse lous ses efforts, jusqu'a ce que la dynastie ac-
tuelle, sortant d'une nation eclairee et active, affaiblit la pre-
ponderance deRome jiar les mesures salutaires qu'eile adopta; ce
qui avail contribue a regenerer la monarchic espagnole, en la
SCIENCES MORALES. 755
relevant du lionteux abaissement dans lequel elle ^tait lombee
sous Charles II, et en lui rendant une nonvelle vigueur. Espe-
rons qu'en suivant un plan d'amcliorations devenucs neces-
saires , les rois de celte dynastie parviendront a relever I'Es-
pagne a un certain degre de splendeur. II est permis de faire
des voeux en faveur d'lin peupie si digne d'etre heureux,
et appele par sa position geographique el par les nombreux
elenjens de prosperite que la nature lui a prodignes, a partici-
pcr a tons les bienfaits d'une civilisation avancee. Honneur
aux ecrivaius qui cherclient a I'eclairer ; car, c'est en dissipant
les tenebres de I'ignorance qu'on prepare le bonheur d'un
peupie. M.
348. — * Resume de I'histoire de la Revolution francaise i
parM. Leon Thiessl. Paris, 1826; Lecointe et Durey. In-i8
de 490 pages ; prix , 3 fr. 5o c. et 4 'i'- ^5 c.
Deux ecueils sont egalement a redouter dans la composition
d'un resume histori(|ue, L'ecrivain qui se propose de reunir
dans un merae t;ibleau les traits les plus saillans d'une epoque
memorable, doit se premunir avec unsoin extreme contrela
seclieresie et le decousu de la narration : il s'exposerait, par le
defaut d'ordre et par I'absence des considerations generales
dont I'objet est de ramener a leurs causes communes tons les
eifets semblables , a n'offrir au lecteurquedes elemens divers,
sans lien commun , et son livre se reduiralt a une aride no-
menclalure de fails. II ne doit pas suivre non plus une marclie
trop pliilosophique ; I'histoire vit de portraits animes , de pein-
tures varices, de couleurs locales, de lous ces ornemens en-
fin dont Fimagiiiation se ])lait a embcllir le recit des grands
evenemens : trop de sobriete en ce genre seiait encore un de-
faut. M. Leon Thiesse nous jiarait avoir evitc- ce double dan-
ger avec un cgal bonheur; mais une seduction a laquelle il n'a
pas su toujours reslster, c'est I'entrainement cause par la preoc-
cu])alion des inleretsdumomcnt. L'historien, charge de trans-
mettre le depot sacre de la verile, ne saurait assez fixer ses
regards sur la posterite, toujours imparlialedans sesjugemens.
II faut dire aussi que ce commerce journalier du narrateur
avec les acteurs principaux d'un drame aussi anime que celui
qu'il met sous nos yeux doit rendie bien difficile, ])our ne pas
dire , impossible a rcmplir Ic devoir de ne prendre parti dans
aucune des armees qui se Irouvent en presence. Mais , s'il ne
se met pas lui-merae a la ])lace de ses personnages pour les ap-
precicr; s'il ne se penetre pas de leurs interets divers , des
maximes qui les gouverncnt, des preventions, des prejugcs ,
des causes morales si mullipliees qui delerminent les actes et les
jugemens des hommes , involontairement il nous les montrera
k
756 LIVRES FRANCAIS.
differens de ce qu'ils etaicnt en realite. S'il ne se porlc pas en
meme terns sur im plan asscz eleve pour observer, sans en
Ctre atteint , les niouvctnens des {laitis et les influences secretes
qui les font agir, son coup-d'a'il sera nioins siir et ses opi-
nions raoins libres. On voit, dans le livie de M. Leon Tliiesse,
qu'il a boirenr dii crime, sous quelque couleiir (ju'il se pro-
duise; on reconnait qu'il est done d'uii cneur droit ; mais son
imagination prevenue n'est pas toujours soumise a la fioide
raison.
Une autre observation critique que nous basarderons avec la
meme reserve, c'est que notre bistorim senible parfois consi-
derer la revolution comnie un fdit prcsquc indopendant, sans
filiation avec ceux qui le precedent, et qu'il lui rapporte unl-
qucment les mocurset Ici oi)inlonsde notre cpoque, ceux ineme
des tems a venir. La Revolution n'a ete (^ue la cause occasio-
nelle des changemens qui se sont operes dans Tortlre social ;
elle n'a fait que precipiter une di'composition f[ui devait sans
elle , dans un intervalle de tems un pen \i\us long il est vrai ,
necessairement s'effectuer. Cette effroyable conimolioii a mis
en evidence les forces poliliqiies qui depuis long-terns som-
meillaient au sein de la societe et qui n'oltcndaieiit pour se
montrer au grand jour ([ue rcllncelle cioctrique. Elle fut le
dernier acte d'un combat sourd et continuel , (pioique souvent
inapercu, entre les divers oidres de I'ctat. A partir du xvi'"^
siecle, et surtoiit des gucrres de religion pendant lesqu^llcs les
villes prirent une atlitude indci>endanle, le ticrs-utat inarcbait
d'un mouvement accelere a la conquele definitive du pouvoir
social el tendait par la force des cboses vers son enlier deve-
loppement; la noblesse, agissant aussi en cela conformoinent
a la nature iiumaine, devait, dans son inloret, s'efforcer de
conserver ses antiques prerogatives. Deja sous Louis XV, les
superiorites de fait que donnaitla fortune et lessuperiorifes de
droit fondees sur d'anciens tit res, les puissances inlellecluelles
et les grandeurs scigneuriales sebelirtaient sur les memes routes
et se froissaiont dejour en jour davantagc. II existait de meme
dans le nionde spirituel un etat permanent d'liostilite entre le
clerge et les classes lettrees. On pouvait jin'^voir le moment ou
I'influence jirogressive de rojjinion nalionalerenversera't tous
les obstacles et briserait toutes les forces qui lui etaient con-
traires. La Revolution, en proclamant cette grandc victoire,
a fait reconnaitre par ses borribles decbiremens I'encrgie ct la
profondeur des sentimcnspolitiques qui s'titaicnt formes pen-
dant Irois cents ans de guerre ouverte ou catbee ; elle n'est
done pas un principe, mais une consequence; elle n'est pas une
SCIENCES MORALES. 767
cause , mais un effet. L'etat social dans lequel nons sorames
n'est pas seulemeiit sa suite immediate , comme on pourrail le
croire en lisant M. Leon Thiesse; mais le lesultal nccessaire
de ces lois cnccre inconnues qui, etabllssant les rapjiorls de
dependance des pjencrations successives, doivent se dcrouler
dans un ordre melliodique comme celies qui embrassenl tout
le monde materiel danslenr (ilernel developpement.
Sans nous aneter a cjuelques erreurs de fait qui ont pu
echap|)er a I'auteur, nous rendrons volontiers hoiDmage a la
precision, a la rapiditc de sadiclion, toujours elegante et na-
turelle, et qui ajoute beaucoup a I'interet de son livre.
Acl. GoNmjJET.
349. — Tableaux chronologiques et biogrciphiques , avec des
developperaens Iiistoriques pour servir a I'liistoire de France;
par H. Vallee ; dedles a S. A. R. le due de Bordeaux. Paris,
1825 ; I'auteur, rue Bonne Nouvelle, n'' i. In-8° de 2/,o pages.
Pour faire connaitre cet ouvrage avec plus de detail , nous
attendrons (jue toutes les livraisons aient paru. Aujourd'hui,
nous eiiexposerons sculementleplan. — Les tableaux seront au
nombre de cent quinzc, repartis en sept series. La premiere,
composee de 1 tableaux, comprendra : i^tout ce qui a rapport
aux Francais en general, a leurs moeurs, a leur territoire, a
!eur gouvernement , etc.; 1° tout ce qui ticnt au cierge de
France. — La seconde scriefera connaitre avccquelques details,
dans 5 tableaux : 1° nos rois ; 2° leurs femmes; 3° leurs en-
fans legitimes; 4° leurs mailresses; 5" leurs enfans naturels.
(Ces denx derniers articles nemi'tltaient pas, selon nous, un litre
distinct et separe. ) — La troisieme serie iraitera , dans 26 ta-
bleaux, des grands officiersde la couronne. — La quatrieme, eu
2 1 tableaux, donnern la chronologic des princes, et des seigneurs
possesseurs de grands fiefs, jusqu'a leur reunion au domaine
royal. — La cinquieme serie fournira sur lous les princes con-
tenipcrains des renseigneinens liisloriques. — La sixieme est
consacree aux homines celebres dans tous les genres. — La
seplieme et dernicre contiendra une indication des evcnemens
remarquablcs arrives dans chaquercgne. — Cc livre, s'il donne
lout ce qu'il promet, doit faciliter beaucoup les recherches his-
toriques. Les cinq livraisons qui ont ete publiees font heureu-
sement prejuger du reste de I'ouvrage. B. J,
35o. — * Atlas conslitittionnel, ou Tableaux chronologiques ,
genealogiques et biographiques de la monarcliie representa-
tive en France, depnis le retour des Bourbons, sur le plan de
I'Atlas de Lesage (comte de Las Cases) , par A. -J. de Manct,
T^S LIVRES FRANCMS.
auieur de I'Atlas des litteratures, des sciences et des beaux-arts-
Deuxieine livraison. Paris, 1826; M""" de Brevillc, rue de
rOdoon, n° 32. Un caliicr in-fol. contcnatit un tableau; prix
de la livraison , 4 fr. (Voy. ci-dessus, p. 181).
M. de Mancy, apres nous avoir presente dans un tableau
synopticjue les constitutions des divers etats, en les disposant
de maniere a ce qu'elles pussent etre facilenient rapprochees
et coiuparees , nous donne aujourd'hui le Tableau genealogique
et historique des princes et rois de la maison de Bourbon ; I'his-
toire de leurs ministres , etc. Ce travail est fait avec le meme soin
auquel nous ont habitues les premiers tableaux de M.de Mancy. I.
35i. — * Dictionnairc historique et descriptif des nionumens
religieux , cii'ils et militalres de la ville de Paris , oil Ton trouve
I'indication des objets d'arts qu'ils renferment, avec des remar-
ques sur les enrbellissemens faits ou projetes; dedie a M. de
Chabrolde Volvic, conseiller d'etat, pref'et du departeuient de
la Seine, etc.; par B. de Roquefort, des Societes royales de
Gcetlingue , des antiquaires de France, etc. Paris, 1826;
Ferra jeune, libraire , rue des Grands- Augustins , n° 23. In-8" ;
prix , 8 fr.
Les livres sur Paris sont fort aombreux, ct repondent, par
ce cote dumoins, au legitime empressement qu'ont les natio-
naux et les otrangers de connailre en detail une ville qui est
devenue, en quelque sorte, la capitale du raonde civilise. Mais
la ndcessite de meltre ces livres a la portee de tout le monde,
n'a pas toujours permis a leurs a'uteurs, d'y renferraer tout ce
qui peut interesser les lecteurs jaloux de savoir non-seulement
I'epoque et I'origine d'un monument, d'lin etablissement j)u-
blic, mais encore les faits princi])aux de I'liistoire de celte ville
celebre, de ses fortunes diverses, et des variations de son en-
ceinte , qui, d'une petite bourgade assise sur une ile pen elen-
due, en ont fait I'une des plus grandes cites du monde. C'est
ce que M. Roquefort s'est propose dans I'ouvrage que nous
annoncons ; et peu de personnes etaient aussi bien preparees
que lui pour une semblable entreprise. Ses travaux sur le
moyen ^ge lui ont souvent fait rencontrer des notions sur
Paris dans ses nombreuses reclierches; il les a niises a profit
dans le Dictionnairc historique et descriptif qui vient de pa-
raitre; et ce n'est qu'apres avoir etudie tous les ouvrages rela-
tifs a I'etat de cette ville , qu'il a compose le sien. II cite , comme
la plus ancienne bistoire speciale de Paris, connue par Tim-
pression , Lajleur des antiquites de cette noble et Iriomphante
cite, publiee par le libraire Gilles Corrozet, en i532, et depuis ,
cet historiagraphe a eu beaucoup d'imitateurs. On peut croirc
SCIENCES MORALES. 759
cependant qu'avant Corrozet, rimprimerie avair produit d'au-
Ires guides de Tetranger dans Paiis, et je connais uii petit livre
de 24 j)ages in-4° , intitule : Les rues et les cglises de Paris ,
avec la despencc qui se fait par chascun jour , et que je crois
^tre sorti des presses de Pierre Caron, iuiprimeur a Paris, de
1489 a 1494. Cost la , sans conliedit , la plus ancienne topo-
graphic et slalistique des consoninialions de Paris; an xv" sie-
cle , on ne pensait pas Irop a recueillir ces donnees adminis-
tratives ^ ct cet cuvrage des premiers terns de rimprimerie
n'est indique dansaucune bibliographic. Je ne pense pas, tou-
tefois, qu'il puisse etre d'un grand secours ])our les recherches
comparatives que le zcle et les lumieres de M. le prcfet de
Paris dirigcnt avec une si louable perseverance; et ce n'est qu'a
propos de I'ouvrage de Corrozet, en i532, que je cite cette
description qui le preceda de 40 ans au moins. II y a bien loin
de ces essais informes, a I'etenduc des lecherches de M. de
Ro([uefort. Distribue dans Tordre alphabclique des nialieres,
son ouvrage presente, sous le mot generique , tous les elablis-
seniens analogues, \esfontaines, les eglises, les hospices, etc. et
sous ces mots generaux , leur situation, leur elendue, les ins-
criptions et les objets d'art qui les decorent , leurs auteurs, etc.
A propos de qucKjues - uns de ces etablisscmens , Tauteur
expose les vues de radininistration publique, en loue franche-
nient lesheureux resultats; puis, ilajoute des observations ou
des consei's, pulses (iansTexamen de I'elat des choses, ou les
projets proposes par des hommes qui font autorite sur ces
inntieres dlvcrses. On trouve done ici : 1" I'histoire de chaque
etablissemenl; 2° I'exposc de son ulilile , quanta roinement
de la ville ou aux besoins de ses habitans; 3° des vuos nou-
velles qui tendeuta les ameliorer encore. II serait difficile d'en
extrairc qnelrjues citations, I'etendue des articles les jilus im-
porlans ne le pcrmcttrail pas. Nous croyons recouimander suf-
fisainment cette noiivelle production d'un de nos plus laborieux
ecrivains , en lu signalant comme Jitile a la fois aux citoycus
de Paris, aux eirangers qui visitent cette ville, et a I'adnii-
nistraiion (jui appeile loutes les lumieres a concourir a I'ac-
complissement de ses vues d'anieliorafion. C. F.
352. — Atlas de I'Hisloire physique , cit'ile et morale de
Paris, parDuLAURE. Paris, 1826; Baudouin freres; prix, 5 fr.
Les j)lans destines a rintelligeiice de VH;sloere de Paris
avaient ete places, dans la jiremiere edition , en tete mt-me des
volumes auxquels lis appartenaient. Les eJiteurs ont cru de-
voir, pour ceile que nous annoncons, les reunir tons en un
seal Adas separe. C''t atlas offre au lecteur le double avantage
760 LIVRES FRANC AIS.
de poiivoir mettre constammcnt sous ses yetix le plan qui sc
rapporte a )a periode dont il s'occupe, et de n'elre pas oblige
de recourir souvcnt aux divers volumes dont se compose I'ou-
Trage.
Le 1*"^ plan, Paris sous la domination romaine , reprcsente
cetle ville alors contenue dans I'ile de la Cile, les niomimcns
et etablisseniens situi's au nord et an sud, et les routes et
clieiniiis qui venaient y nboTilir. II facilite la lecture des (''vene-
mens arrives depuis la fondalion de Paris, jnsqu'a la fin de la
domination des Remains. — Le 2° plan , Paris sous le regne
de Philippe- Auffuste , prcsenle les agrandissemens de cette
ville , dopuis la fin de la domination des R.oinains jusqu'a I'an-
nee 1 223. On y voit la trace de la seconde et de la troisieme en-
ceintes qui joignirent a Tile de la Cite une parlie du terriloire
voisin, siiue sur les deux rives de la Seine, et les premiers eta-
blisseniens civils et religieux fondc;s pendant cette periode. —
Le 3^ plan , Paris sous le regne de Francois 1" , conlient I'ac-
croissement de la ville , les nombrcuses rues tracecs, et les ba-
timens construits dej)uis la fin du regne de Pliilippe-Auguste,
jusqu'a la (in de celui de Francois I*'", On y trouve le mur de
cloture oleve dans la partie septeulrionale, et les diverses con-
structions faitcs liors de la ville, et qui formaient les premiers
faubourg's. — Le 4' plan , Paris sous le regne de Louis XIII ,
offre I'etat de la ville a la fin de la domination de ce jjrince. —
Le 5° plan presente Paris dans son etat actuel. Pour lui donner
toute ruliiite possible, on a joint a ce plan un tableau ou no-
menclature, par oidre alphabelique , contenant toules les rues,
tons les (juais, boulevards , places , passages , etc., ainsi que
tons les etablissernens civils, religieux et militaires; monu-
mens el; administrations existans a Paris, avec des renvois au
])lan. A la suite de cette nomenclature , on trouvcra la com-
position du gouvernement , les attributions de chaque minis-
terc, les administrations et les etablissernens qui en dependent,
les jours d'aiidlences des ministres , d'enlrees dans les bureaux
et dans tous les ctablissemcns publics, etc.
On voit que les cditeurs de VHistoire de Paris n'ont rien ne-
glige pour t|ue cet Atlas repondit, en exactitude et en utilite ,
au reste de I'ouvrage, auquel fontjointcs d'ailleurs,a la place
respective qu'elles doivent occuj)er dans cliaque volume, de»
planches, tres bien executres, representant !es principaux mo-
numens et edifices de Paris. Celles de I'Atlas ne soni j)as moins
salisfaisantes , et ajoufent encore au merite et au j)rix d'un ou-
vrage qui devient indispensable dans une bibliothecpie.
E. H.
SCIENCES MORALES. 7^1
353. — * Dictionnaire historique, ou Biographic unlverselle
classique; par le general Beatjvais, auteur des Victoire.s et
Conquetes,et par uue Societe de gens de lettres; en un seul
■volume; revue pour la partie bibUographic|ue par M. ^. - ^.
Barbier, aulcur du Dictionnaire des Anonyuies , et par M. L.
Baebier flls aiiie, eniploye aux bibliollieques ])articulieres dii
Roi. Quatrieme livraison. Paris, 1826; Cli. Gosselin, libraire ,
■rue Saint -Germain -des-Pres, n" 9. In- 8" de 3o4 pages; prix
de chaque livraison, 6fr., et sur papier vclin saline, 8 fr.
(Voy. Rev. Enc. , t. xxx , p. 193.)
Get important ouvrage csl deja parvenu a sa 4" livraison : id
lettre G est commencee. Sa forme compacte, la sagcsse et les
soins qui president a sa redaction , sont des avantages que les
lecteurs saiiront npprccier. lis le trouveront complet, sans
omission ni lacune, depr.is la plus hanle antiquite jusqu'a nos
jours, mais dcgage de loute superfluile. Aux articles consacres
aux homines dont le nom est conserve par I'histoire , on a cru
devoir en ajoiiter qui retracent la vie des peuples, des societes
poliliques et religieiises , des institutions; on n'a pas neglige
non plus lert'cit des fails memorables quicaracterisent le mieux
les hommes et les nations. — Un simple tableau des prineipaux
articles contenus dans cette livraison fera connaitre suffisam-
ment la maniere dont son cadre est rempli; les noms des
divers redacteurs sont connus par des travaux anterieurs qui
offrent rtne sure garantie en faveur de la nouvelle entreprisea
laquelle il.i prennent part; enfin, nous observerons qne cetle
livraison coniient plus de deux cents articles qu'on cliercherait
en vain dans les autresbiographies completes pjibliees juscju'a ce
jour. — Prineipaux articles de cette 4^ livraisons : Par M. le ge-
neral Beauvats, qui revoit soigneusementl'ensemble du travad :
Djengujz- Khan , Djczzar {^ Ahmed) , le cardinal Dtiprat,
Erasme , le general Foj , etc. ; par M. P. de Chamrobert, as-
socie a M. le general Beauvais pour le travail de revision :
Dnmouriez , Duval (I'abbe Legrix) , la reine Elisabeth d'An-
gleterre, le chev. Folard, etc. ; par M. Louis Barrier : Antoine
et Pierre Ea/jre, etc.; par M. Amar : Esope, Eschjle, Euri-
pide , Fracostor; par M. Duviquet : Z'w.wwMf , Foutanes, les
Freron; par M. Boujleet : Saint Dominique ; par M. Clair:
Dumouli?i , Ferrieres , etc.; par RI. Pichot : Fox,' etc.; par
M. B. Maurice : Dryden , Duguesclin , Franklin, etc.; par
M. Angelis : Ferdinand 111 ( I'archiduc ) , M""" Floridia ; par
M. Septavaux : Escoiquitz , Fouche; par M. Soulice : I'abbe
Edgeworth, Fenelon. — Partie historique : Les articles Ecosse ,
Espagne, Etats-Unis, France, dus a M. de Calonne; Egjpte^
76i LIVRES FRANCA.IS. -
de M. B. Maurice; Flandrc , FranrJ'ortsur-le-Mein , Ics ba-
taiiles lie Flettrus, Fronde , etc., par M. de Ciiamrobkrt. E.
354. — * Repertoire universel , historique , biogropliique des
J'einrnes celcbres , rnortcs ou vivantes , etc. ; ]r.\r uiie Societe de
gens lie lettres , auteius du Dictionnaire universel. 1""^ , 3""^ et
l^me livraisons. Paris, 1826. Acliilie Uesaiiges In-8°; prix de
la livraison , 4 fr. 5o c. et pour les sotiscripteurs , 4 f'"- ( Voy.
Ret'. Enc. , t. xxxi , p. 201 ).
Pariiii tous les noms qui ont pris place dans cette galerie, il
en est quckjues-uns de fort obsciirs ; il en est d'autrcs desti-
nes a ne point jierir, et cette proiongation de la menioire de
quelqiies nonis proprcs , que notre orgueil decore du nom
d'tm/nortalite, est lantot la recompense du nierile el de la ver-
tu , tantot le chatiment des vices et du crime. — Entre aiilres
personnages f'anieux , on y remarque June de Boulen , loTir a
tour mailresse, femme et victime de Henri VIII; Catherine de
Medicis AanlXdi niemoiro reste cliargee du crime de la Saint-
Bartheleiny; CatJicrine 1 , cpouse de Pierre-le-Grand ; Cathe-
rine //dont J'histoire of'fre de belles pages, niais plus d'une
taclie ineffacabie; Christine de Suede , beaucoup trop reicbree
pour une abdicalion a laquelle la pliilosopliie-eul peu depart ;
ia comtesse Dubarry, ]a soule femme peiil-etre , qui, durant
nos troubles revolutionnaires mourut sans courage , comn^esi
Ic courage dans oe moment supreme elait une de[«niere gloire
reservee a la vertu ; la marquise Du Dejfant , non moiris spiri-
tuelle qu'egoiste; M"" Dufresnoy dont les Muses francaises
pleurent la perte rccenle; enfin , M""" Elisabeth de France ,
Elisabeth d'yJngleterre , le chevalier ou la clievaliere dCEon, la
comtcsse de La Fayette , Gabrielle cVEntrees, M""" de Genlis ,
M""* Geoff ria , etc. , etc.
Nous conseillons aux redacteurs du Repertoire d'elaguer les
details inutiles; I'ouvragey gagiiera beaucoup: il faut savoir a
propos, disait Champfort, s'enric/ur de ses pcrtes. Nous leur
recommandons egalement de surveiHer le style de tous leurs
articles avec une attention rigoureuse- Bien qu'une notice bio -
grapliique ne soit pas un morceau d'eloquence, et doive sur~
lout eviler les formes oralolres, neanmoins ce genre a ses con-
ditions indispensables : la premiere est une elegante et noble
sim])licile. C. P.
355. — Notice Historique sur Michel Patras de Campaigno ,
dit le chevalier Noir, seneclial et gouverneur du Boulonnais ,
luc a la Si'-ance ])i:bliqiie de la Societe d'agriculture , du com-
merce et des arts dc Boulogne-sur-Mer , le 10 octobrc it<a5,
parM. y^Mr.MARMiN, I'un desesmembres residans. Boulogne,
SCIENCES MORALES. 763
1826; smprimerie de Le Roy-Berger. In-8" de 25 pages, avec
un portrait.
Le chevalier Noir combattit et niourut pour Henri IV; il se
distingua parmi celte foule de braves qui suivaient les eten-
dards de ce heros; niais ses exploits ne parurent ])oinl, siir uii
grand theatre; aussi son noin n'a-l-il pas ele consacre par I'his-
toire. C'cst un de ses coaipatriotes , qui, s'adressant aux habi-
tans des lieux tcmoins de sa vaillance, vient enfin de 'ui clever
le monument auquel il avail droit : ses fails d'annes sent retra-
ces par M. Marmiii , avec des details qu'on lira sans doule avec
interet. J.
356. — Conspiration de llussie. — Rapport de la commission
d'enqttete de Saint-Peiersbourg , a S. M. 1 'empereur Nicolas /<''■ ,
sur les societes secretes decouvertes en Russie, ct ])rcvenues de
conspiration contre I'etat, sur leur origine, leur uiarche, les
devcloppemens successifs de leurs plans, ledegre de participa-
tion de leurs principaux menibres a leurs projets et a leurs en-
treprises, ainsi que sur les actes iiidlvidiiels de chacun d'eux
et sur ses intentions avcrees, Paris, 1826; Ponthieu. In-8° de
144 P<''ges; prix , 3 fr. 5o c.
II resuke dece rapport que depuis 1816, ilse forma en Rus-
sie plnsieurs societes secretes dont le but elait de modifier le
syslemede gouvernemcnt; des hommes ile tousles raugs etaient
engages dans ces societes, et la plupart appartennient aux ar-
mees qui venaient de faire les campagnes de i8i3, 1814 et
i8i5. II faudrait ne pas connaiire la maiche de I'esprit humain
pour s'elonner que des hommes qui avaienl ti:>ut recemment
traverse I'Europe civilisee , (.jui revenaient Iriomphans d'une
guerre dont le succes n'elait du qu'aux sentiuiens de liberte
exaltes a desscin par les rois coalises contre la France, fusseiit
renlres au sein d'un pays gouverne despoliquement sans y ap-
porter quelques idces nouvelles, quelques desirs d'ameliora-
tion. L'empereur vVlexaiidre lui-meme avait bien coinpris ce
resultat des dernieres guerres, lorsqu'en 181S il parlait haute-
ment a la diele de Pologue de ses idees liberales , et promettait
avecsolennilu des changemens dans la forme du gouvernemenl
de Russie. On parvinl bleiitot a detourner ce jjrince de la mar-
che eclairee cju'il voulait sulvre, et aucune modification ne fut
apportee dans un despolisme, qui eul agi plus prudenimeiit
])eut-etre en faisant de lui-meme quelques concessions au pro-
gres des lumieres. La commission a employe environ six mois
a lecueillir ses renseignemens; instituiJe par decret du 17 de-
cembre 1825 , elle a fait son rapport le 3o mai 1826; etle lea-
demain 121 individus furent traduils devant la haute cour cri-<
764 LITRES FRANCOIS.
ininelle , ctablie par ordic supreme. L'enquete classe ces
iiidividus en trois sociotes, raffiiiation du nord, Taffiliation dii
midi, et les Slavons lemiis. On voit ([ue de vagues projets de
refornie occiipaicnt ccs diverscs societes, mass il ne pnrait pqs
qu'aiicun planlYit definitiveinent arrete. On connait maintcnant
la sentence de la Haute-Cour , nous ne devons point nous en
occuper ici : la brochure (]ue nous annoncons ne conlient que
les travaux de la commission d'enquete. M. A.
Lilteralurc.
357. — Grammaire classiqne. de la langiie francaise , par
Francois /?/.f, dit Alexandre. Quatrie me edition. Paris, i8'i6.
Brunot-Labbe. In- 12 de 144 pages; jjrix , 1 fr. aS c.
Get ouvrage est precede d'une preface entiercuient composee
des eloges dont il a ete I'objet dans ies journaux. Maigre ses
iiombreiises approbations , nous exprimerons franchement no-
tre pensee. La graniaiaiie de M, Francois est conime celle de
Lhomond, bonne lout au plus pour reux qui out envie d'ap-
prendre leur Jangue de memoire, mais incapable d'atleindre
aux resultats bien plus avantageux de la grammaire generale.
II est cloniiant qu'apres Dumarsnin et Beauzee., MM. de Sacy
ex. Biirnoiif, Blignieres e\ Destutl-Tracy , on relonibe toujours
dans les vieilles errenrs, et que le public prefere souvent des
metliodes roulinieres a des ouvragcs qui, ainsi que la Gram-
ma ire generale enaction de madame Ortavie de Monglave,
( voy. Re\<. Enc., torn, xxvii , p. 23o) reunissent I'cxactitude
des definitions a la fecondlte des principes. B. J.
358. — * Grammaire analylique , ou Elemcns de grammaire
generale appliques a la langue Jrancaise ., a I'usage des elevcs;
par 31. Letkrrier, chef d'inslitution. Paris, 1826; I'auteur ,
rue du Val-de-Grace, n° 1. Delalain. In-ia de 5 feuilles; prix,
1 fr. 25 c.
Nous ne laisserons pas echapper roccasion d'annoncer au mi-
lieu du grand nombre de grammaires dont nous sommes inon-
des , une mc'tliode vcritablement eli'mentaire et cependant
analytique et raisonnee. Aussi n'a-t-elle pas ete faite avec pre-
cipitation. M. Leierrier la destinait aux cnfans qui, dans son
institution , comnienrent I'ctude de leur langue : il a du en
ecarler loules les ilifficulles iniitiles; mais, en meme leuis,
apres les louabies efforts qu'il a fails pour bannir la routine de
I'enseignement , on etait en droit d'exiger de Ini des divisions
exactes , des definitions justes, des piincipes clairs : I'examen
lapide de son ouvrage va prouver qu'il a satisfalt a ces concH-
tions.
LITTfiRATURE. 765
II definit la grammaire , la science des cHemens et des pro-
cedes de langage. Ces clcmens sont d'une part Ics voix , les ar-
ticulations, Ics syllabes, que nous representons paries lettres,
et qui sont coninie la partie niatiirielle des langues. L'auteur
iudiquc soniniairemenl les ra])ports ger)eraux que I'observa-
tion a fait saisir entre eux et qui sont d'une grande utilite dans
I'ctude des langues comnarees. Viennent ensuite les mots qui,
consideres isoleoient , se groupent en huit classes , dont les ca-
racteies distinctifs sont resumes en liuit lignes a la fin dii cha-
pitre. Un autre cliapitre, fort court, sur IVlymologie, donne
les notions indispensables a I'enfant qui reflediit. Enfin quei-
qucs pages consacrces aux mots que I'usage a ccarlcs de la classe
a laquelle ils devaient appartenir , termine et complete la pre-
miere partie.
Les trois dernieres traiient des procedes du langage , ou des
lois auxquelles les mots sont assujelis pour exprimer nos pen-
sees. L'auteur s'occupe d'abord des terminaisons et des formes
des mots : c'est ce queDumarsais nommailavecraisonles preli-
minaires de la syntaxe ; et, la seulenient , il fait connaiire les
nombres et les genres dans les noms , les adjeclifs ct les pro-
noms; et dans les verbes, les terns, Ics persoiines, lesmodes et
les conjugaisons. Ces formes une fois bien determinccs , il cta-
blit, dans sa troisieme partie, les principes de syntaxe que Ton
retrouve dans toutes les langues, et qui forment par consequent
la syntaxe gcnerale. 11 y traite succinctement, mais d'une ma-
niere complete , i° de la proposiiion el de ses cspeces ; 2° de la
construction qu'il distingue avec Beauzee en analytique el
usuelle; 3° de reraploi des formes des mots, cc qui conslitue la
syntaxe proprement dite.
La qualrieme partie n'est que I'application des jjrincipes de
la syntaxe generale a la langue francaise. Ici se trouvent ex-
poses d'une manierc loute neuve, ]\lus rapide et bien plus com-
plete que dans les autres grammaires, ces regies des parlicipes
entre autres qui font le desespoir de nos enfans.
Resumons- nous. C'est d'apres les grammairiens les plus
estimes, Dumarsais, Beauzee, Condiltac , MM. Lemare et
Destutt-Tracy , que M. Leterrier a clabli presque loules ses
definitions, presque tons ses piincipes. L'habitude qu'il a de
I'enseignement elemenlaire I'a conduit a les appioprier a I'in-
telligence des plus petits enfans. An reste, telle est la generalite
de ses principes , qu'ils s'appliquent avec une cgale facilite a
toutes les langues; et deja M. Leterrier nous fait savoir dans sa
preface, qu'il iravaille a une grammaire laline qui n'aura pas
au-dela d'une soixantaine de pages. II ne nous reste done plus
766 LIVRES FRANCAIS.
a ce siijet qti'iin vceu a former, c'est que cette grammaire,
adoptee par I'universite, contiibue, avec rexcellente metliode
de M. le recleur Ordinaire , a introduire le raisonnement et
I'analyse dans les dernicres classes. D — v..
359. — * Diitionnaire iinii'crsel dcs synonynies de la larigue
francaise ; par M. Koinvilliers. Nom'elle edition. Paris, 1826.
Delalain. In-8° de l. , et 890 pages; prix, 9 fr.
M. BoinvilliiM's est un de ces lioinmes si dignes d'esllme et
d'encoiii-iigemens , et soiivcnt si peu a])[irocics, qui sacrifient
ranibition de se dislingutT ])ar des ])roduclions brillantcs an
dcsir ]))iis lionorabie de servir reellement le public par des
Iravaux utiles. La liste des ouvrages did:icti(jues qu'il a oom-
j>oses, ou dont il a diiige la publicalion, n'ajoutcrait ricn a sa
reputatiou : je me liate d'ari iver an iiouveau livre que j'an-
nonce, iine de ses enirenrises les jilus imporlantcs. Ce n'cst pas
une idee neuve de reunir en un seulrecucil tous les synnnymes
deja coniius de la langue francaise. Un premier diclionnaire
de ce genre, apres avoir eu deux editions, a cie augmenle et
jiei'fectioiine sous tous les rapports, par M. Guizot, dont le
noni inspire une confiance nieritce. Je puis citcr encore la sy-
nonymic J ranraiae de M. PiESTRE, imprimee a Lyon en 1810.
Ces jniblicalions, qui tonics ont rcussi, prouvent combien I'uli-
llto de I'eliiile des synonynies est gcneralement senile. Je ne
pretends ]io;nt assigner le merite resjicclif des differens edi-
teurs ou des leforuiatears d'un ouvrage dont le fonds est em-
prunte tout entier a Gira]d , a Beauzee, a Roubatul^ a ])lusieurs
aulres habiles synonymistcs. Teiiu le dernier, cclaiie par ses
j)redecessenis, M. Boinvilliers devait essentiellement s'efforcer
de les surpasser en quelque chose, de presenter quelfiues amd-
lioraiions nouvelles : je \ais me borner a inditjucr comment il
a satisfait a celtc necessite do sa position. II a place en lete de
son volume \e& prefaces de Girard, de Beauzee et de Ronbaud
(sauf des suppressions dans cette derniere qui etait diffuse);
et il a eu raisou , je crois ^ of jrir au public , comme il ie dit lui-
nieme, des Avant-propos qui renj'crment des refexions pleines
de JNSlesse et de solidite. Sous le tilre modeste A''Ji'ertissement
de f Editeur, il presente ens'iiiteime judicieuse appreciatiou des
trois ])rincipaux auleurs de synonymcs, et un extrait des ob-
jen'<7;/o/?,9 lumineuses de Ronbaud sur la formation des mots,
sur la valeur de leurs inilinles etsurlajorcede leurs desinences.
Son Diclionnaire contient 2/) articles fie plus que le plus complet
des recueils anlerieurs; et ces articles ne sont pas au nombre
des nioiiis curieux (par exempie : abonnc , souscripteur; — sens,
acception, etc. ). Comme MM. Guizot et Piestrc, M. Boinvilliers
UTTERATURE. 767
a donne une noiivelle rcdaclioii a un assez grand nombre des
articles anciens ; je laisse a jugcr aux lecteurs s'ils ont perdu ou
gugne sous sa plume. Mais la plus remarquable, a mon avis,
des amulioialions qui lui sont dues, consisle dons le soin qu'il
a pris de consigner dans ses notes substantielles Vetjniologie de
lods les inotssynonymes corapris dans son diclionnaire, et celle
de certains mots peu iisites qui so trouvent dans jilusieurs arti-
cles. Ainsi, tout en reproduisant, comme ses devanciers, les
nombreux articles de Iloubaud, debarrasses des lon£;ueurs, des
erreurs, des obscurites metaj)hysiques dans lesquelles cet au-
tcur se iaissait souvent entrainer par son gout predominant
et par rimitalion dangerense de Court de Gebclin , ]\I. Eoin-
\iiliers a su conserver et meme etendre le i)recieux avanlage
des etymologies. Si qiielques assertions basardees ou fautives
se sont glissees parnii une quantite de notes si considerable,
on ne saurait lui en I'aire un crime, et jc m'enipiesse d'as-
surer en llnissant que des tacbes legercs et peu iiombreuses
n'empeclient ])oint le nouvcau diclionnaire que nous annon-
cons de meriter d'etre bien accueilii par les bons cloves
et par toutes les pcrsonncs qui portent dans le discours ccrit
ou pailc ce sc/upule sur le choix des mots recommnndes par
rillnstre Biiffon. A. D. Louemand.
060, — Elemens de rhetorique francaise , par M. Filon ,
professeur au college royal de Bourbon. Paris, 1826; Bredif.
In-i2 de IV et,3iSlJ.; prix , 3 fr. 5o c. et 4 fr. aS c. par la postc.
L'autenr annonce, dans sa preface, que son outrage n'est
point compose sur le plan ordinaire des traite's de rhetorique ,
dont I'ohjet special est de preparer des sujets pour le harreau ,
les tribunes politiques ou la chnire (ivangelique. Je ne sais
comment sont fails les trailes de rhetorique dont parle Tau-
teur, mals tous ccux que j'ai -vus traitent exactement, comme
le sien : 1° de I'invention avee toutes ses dej)endances, les
mceurs , les lienx communs et rargiimentation ; 1° de la dispo-
sition ct des parties du discours; 3° de I'elocution, ce qui
comiircnd les pensees, les genres , les qiialites du style et toutes
les figures de pensees et de mots, entre Jesquels meme on etablit
souvent un ordre plus rigoureux que celui cju'adopte I'auteur.
II est vrai qu'il s'occupe avcc detail des prccej)les de la nar-
ration el de la dissertation , qu'il en donne des exemjjles assez
longs, et que ses trerite dernieres pages sont consacrees au
style epistolaire et a I'art de la conversation : mais il n'en a pas
moins fait, comme tout le nionde, un livre pour les orateurs,
les avocats et les predicateurs. 11 paiait d'autant plus blamable
en cela qu'il releve lui - meme ce defaut capital de toutes nos
768 LIVRES FRANCAIS.
classes de rhetorique; tandis qu'on peut, sans irop piesunier
de la bonhomie de beaucouj) de nos rlietcurs, douter ciii'aucun
d'enx comjirennecoinbien son ouviaf^c doit etre inutile. Noire
autcnr tiaite, dans son introduction, de roiigine et des
progrcs du langage et de I'ecriture , jmis , de la granmiaire
generale et de la grammaiie francaise. II serail difficile de
rien troiiver de plus liasarde que ie jncmier chapiire, et de
plus incomplet (jue les deux dcrnieis. D'ailleurs , ces connais-
sanccsappat tiennent specialemetil a la giamniaiie; et, avant
de s'occupcr de la rhetorique, il faut les posseder, ou du inoins
lacherdc les acqui'rir. Mais, dans le premier cas, rintroduclion
de M. Filon est superfine; dans le second, die est insuffisante :
dans I'un el I'aulre , elle n'a rien d'utile.
36r — Annules des concours gcnrraitx. — Malieres des com-
positions de rheiorique. Paris, 1826; Bred if. ln-8°de 128 ]).;
prix , 6 fr.
Ce recueil comprend, comme I'indique son tilre, les ma-
ticres des compositions de discours latins, de discours fran-
cais et de vers latins donnees aux concours des colleges de
Paris, dcpuis le relablisseracnt des lycees par Bonaparte , ct
dies sont precedt'es des malieres de qudques compositions
antcrieures a la revolution.
Les honimes qui raisonnent, et qui ne croient pas qu'un
iragnifique appareil oude nombreux applaudissemens, souvent
surpris et usurpes , soient une preuve ceitaine de la bonte
d'uii systenie, tiouveront, dans ce livre, de nouvdies amies
conire I'etiide de la rhetorique, et snrtout conire la maniere
de I'enseigner. Ouvrons le livre : nous trouvons a la page 53 :
// (Gernianicus) deciira le spectacle que ces lieux leur (a ses
soldats) pi I'Stntent ; id, etc... la, etc... C'est sur cet ici eK. sur
ce la (]ue les concnrrens doivent exercer Icur faconde. A la
phrase la jilus ronflanle, a la peiiode la mieux arrondie , le
pri.v appartiendra sans coutesle. Fous verrtz la place qii...
Encore un noiiveau point d'orgite : honneur a ceux qui le
broderont le mieux. Le tribunal barhare d'oii Icferoce Armi-
nius... Songez que depuis long-tems... C'est sur ces miserables
bouts-rimes qu'on fait jialir notre jeunesse. L'eleve est oblige,
non-seulcnient de penser comme ses maitres, eut-il des idee.s
cent fuis meilleures , et de suivre I'ordre trace par eux, lors
meme que la nature de son esprit lui en ferait choisir un
autre; mais i! est reduit a emi)loyer leurs lournures, leurs
expressions , leurs phrases, quelque vicieuses qu'dles ])uissent
^Ire. O iini:atores !
362. — Resume de I'histoire dela litterature allemande ; par
LITTER ATURE. 769
-/^. LoivE-VEiMARs. Paris, 1826; Louis Janet. In-8" de vm et
^176 pages; prix, 3 fr.
M. Loeve-Veimars prend la liUeralureallemande depuisson
oiigine, rt la conduit jusqu'a nosjours. II a divise I'espace de
terns qu'ftlle comprend en cinq pcriodes. La premiere s'ctend
riepuis les tliants popiilaires les })!us rcciiles , jusqu'a la fin du
xiii""" siecle; ia seconde , jus(|u'au cominencenienr dii xvii""" ;
les trois dernieres sont consacrces aux annees fjuise sont ecou-
lees depuis ce moment jusqu'a nous. Dans celte revue rapide ,
M. Loeve-\ eiinars a tacl-e de n'oniettre aiicun fait imporlant
dans I'hisloire des letlres ; il a voulii tout indiquer; raais ces
indicationssont loin d'etre sufr«antes pour celni fjui ne connuit
pas la litierature allemande. Sana douie, les lecteurs recber-
cheront de preference les niorceaux (jue I'aulcur a traduits des
ecrivains allemands ; nous aurions souhaite qu'il eut multiplie
davaiitage ce moyen d'instruclion , et qu'il ne se fut pas con-
tenle d'expriiner son admiration ])our Klopstock , Goethe,
Schiller ^ Burger, dont il ne cite auciin ])assage quipuisse faire
apprecier lajnstesse de son opinion. L'aversion de M. Loeve-
Veimais conlre tout ce qni ])orlc le nom de regies litleraires
est assez connne par de precedens ouvrages , pour nous dispen-
ser de dire quel est son enlhousiasme pour la poesie nationale
allemande. Au reste , les critiques francais auront beau jeu
avec lui, puisqu'il est le ])remier a convenir ( p. 38^ ] ijue les
meilleuies tragedies du nellleur poete de TAllemagne soul a
])eine dramalicjues. — Quoi qu'il ensoit, ce resume de I'his-
toire de la litterature allemande nous semble propre a en re-
pandre le gout en France : la rapidite et I'eiegance du style,
ainsi que les connaissances de I'auteur procureront sans doute
Leaucoup de lecteurs a son ouvrage. B. J.
363. — Lecons de litterature chretienne , ou choix de prose
et de vers sur la religion et la morale, extraits des meiileurs
aulenrs francais morts et vivans : ouvrage classique a I'usage
des serainaires, des colleges cl des maisons d'education. Paris
i8a6; Beauce - Rusand. 2 vol. in - 8° d'environ Coo pages.
La labie de ce recueil r.-.])proche des norns qui n'onl guere
couiume de s'associer: MlM. de la Mennais, de Maislre et Bo-
nald y figurent a chaque instant a cole de Pascal , A'Jhbadie,
de Rousseau el de Voltaire. Toutefois, I'udileur s'etant gene-
raicmcnt abstcnu de toucher aux matieres qui ont reveille de
no> jouri les controvcrses religieuses, on concoit (ju'll ail pu
faire d'lieureux eniprunts a des ecrivains dont les opinions
sont si divergenles. II se justifie d'ailleurs de ceux qu'il a fails
T. XXXI. — Septcmbre 1826. 4y
770 LIVRES FRANCAIS.
aux philosophes en se conipaiant aux Hebreux, « lorsque, par
nil innocent larcin, Lis (]($lou!nercnt, pour cons;icrer au cnlte
du vraiDieu, les vases d'or de I'Egyple idnlatre. » Cost done
encore ici une fraude picuse. Celle-ci du inoins sert a I'avanlagc
du lecteur. Outre les noms doja cites , ceux de Bossuet , Saurin,
Bourdaloue , Diderot, Mascaron, d' Alcmhert , Fcnelon,Necl(er,
Massillon , Thomas, Flechier , Bernardin de Saint-Pierre ,
Poulle , Laccpetle , Chiiteauhriund , Rnynal, Bujfon, garnn-
tissent, pour le volume de prose, Tine collection de modeles
de style. Le volume de vers coniient le poeme de la Religion ,
les tragedies de Polyeucte,d'Eslher et d'Athalie, et un choix de
morceaux dramatiques et lyriques emprunies a differens poetes.
Nous citerons , parini les vivans , MM. Delavigne , Lamartine ,
Parseval de Grandmaison , Lemercier , Andrieux , Campenon,
Mil" Delphine Gay , etc. De pareils noms acheveront de recom-
mandcr ce recueil. Ch,
36/(. — * Collection des auteurs classiques latins, avec la tra-
duction francaise en regard; publiee par une Societe de Pro-
fesseurs , et dirigee par M. Jmedee Pommier , horame de
lettres. Edition in-12, orneedes portraits des auteurs d'apres
I'anlique. — Cotnmentaires de Cesar , Iraduits par M. de Tou-
LONGEON. T. Iletlll. Paris, 1826; Verdiere, quaides Augustins,
n° a5. 2 vol. in-i2 sur papier iin satine, f'ormant ensemble
714 P'j prix, 3 fr. le volume.
En annoncant le 1^'' volume de la traduction, de M. de Tou-
longeon ( Voy. Rev. Enc, t. xxix , p. 549 ), nous avons dit que
ce qui la caracterisalt, c'etait sa fidelile, sa correciion et sur-
tout la clarte avec laquelle sonl rendus les details relatifs a I'art
militaire. Le 2®etle3* volumes merItentiesmeineseloge5,elnous
paraissent assurer le succes de I'ouvrage. La correction du texte
latin, la beaule du ])apier ct de rim|)ression doivent encore y
contribuer, et faire rechercher une collection qu'il serait diffi-
cile de donner a un prix moins eleve. Nous esperons que
M V^erdiere donnera suite a son utile entreprise , et que la pu-
blication d'une nouvelle livraison n'eprouvera point de retard.
A. M— T.
365. — * Classiques francais , ou Bibliotheque portative de
I'amateur en cent volumes. Vingt-huitieme livraison , composee
des OEuvres de Saint- I,ai\ibert e^ r/e Gilbert. Paris, 1826;
L. Debure. 2 vol. in-32, avec un portrait chacun; prix, 3 fr.
le volume (voy. ci-dessus, p. A94* I'annonce dela precedente
livraison ).
L'edileur de la collection des Classiques /rancais a rcuni ,
dans cette livraison , deux poetes distingues I'un et I'autre ,
LITTER ATURE. 771
mais dont le sort fut bien different. Le piemier, Saint-Lam-
bert , ne d'une famille noble, rival heiireux en amour des deux
plus grands ccrivaiiis dii xviii^ siecle, Voltaire el J. -J. Rous-
seau (i), eull'amitic des princes et des philosophes de ce grand
siecle, et \it son ])oeine des Sai.ton.t luiouvrir, en 1770, les
portes de I'Acadeinie francaise. Le second , Gilbert , dut le
jour a de pauvres cultivateurs, qui s'epuiserent pour lui don-
ner une education dont il leur fit par ia suite un sujet amer de
reproches , vecut pauvi-e, egaleinent repousse des philosophes
et des puissans de la terre, vit ses oeuvres denigrees par I'envie,
ignora prescpae les consolalions de I'amour et de I'amitie, et
inourul a I'hopital, dans toute la force de I'age et du'genle,
atteint d'un raal ou ses malheurs peut-etre eurent plus de part
encore que I'accident aucjuel on I'atlrlbua (2). Sans doute cette
difference dc fortune est due, en grande parlie, a la difference
de leurs caracteres; niais le hasard, qui joue un si grand role
dans leschoses d'ici-bas, y fut aussi pourbeaucoup. Saint-Lam-
bert etalt un liouime du monde, qui avait toutes les qualites
necessaires pour y reussir ; Gilbert, ne avec un caractere
sombre et indepeniiant, \it augmenter ces dispositions par les
injustices reelles dont il eut a se plaindre, a son debut dans la
carriere lilteraire. Deslors, son sort fut decide; il prit le parti
de se Jeter dans la satire, vers laquelle d'ailleurs seinblail le
porter le genre de son talent. Peut-etre I'aniraosite qui est
resultee contre lui de la rigueur de ses jugemens, n'est-elle pas
encore bien eteinte aujourd'hui. La Harpe, qu'il avait d'autant
plus offense, que ses coups avaient quelquefois portc juste,
affectant une fausse pitic pour le sort malheureux de Gilbert,
a pu continuer ale trailer comme un ecolier, dans I'apprecia-
tion qu'ila faite deses ceuvres ; mais on ne concoit pas que Che-
nier , dont le gout etait si sur , I'ait , en quelque sorte, passe sous
silence dans son Tableau de la litterature francaise , oil il se
borne a dire, en parlant des poesies lyriques de Gilbert,
(.\\\eUes qffrent quelques traits eleves ? Et lui aussi, Chenier,
eut a se plaindre des hommcs de son siecle, lui aussi toiirna ses
esprils vers la satire; mais, dans ce genre, Gilbert avait me-
rile d'etre son inaitre , et il eut ete juste a la fois et noble de
(i) On sail que Saint-Lambert fat aime tour a tour de M'"" Duchate-
let, qui vecnt iutiraement avec Voltaire, et de M™« d'Houdetot, dans le
coeiu" de laquelle J. -J. Rousseau teuta vaineraent de le supplanter.
(2) Une chute de cheval que Gilbert avait faite, ea galoppant sur les
boulevards avec deux jeanes Anglais ses eleves, avait oblige de Ini faire
I'operation du trepan.
772 LIVRES FRANCAIS.
I'avoiier. Mais peut-elrc Clicnier, disciple distinguii des ])\n-
losophcs du dix-huiliemo siecle, ne poav.-iit pardoni:er a Gilberl
ses atl;i<iues contre eux. C'es! la, en eff'et, que sonl tons Ics
torts de. CO dcrniei-; il ii'cut ])as tin confondre le jjhilosophisme
avec la pbilosophie, et accuser celle-ci de tous Ics inai:x que
. ses proceptes, an contraire, appreniicnt a eviter. De tous terns
il V enl des liomines qui tirent alms de lout , et nous avons
encore aujourd'hui de ccs faux sages pour lesquels la i)hiloso-
phie n'est qu'uu masque et un nioycn de parvenir a des (ins
iviiscrables ou honteiises. L'ame de Gilbert etaii faite jiour
coini)rcndre et pour aimer la vraie pliilosopiiie, (pii u'est autre
cliose que I'auiour de la veriu et de la liberte. 11 I'a prouve en
tontiaiit avec ciiergie conti-e les nireurs de son sicde; m.iis ees
moeurs n'ctaiciit pas celles des philosophcs, auxqiseis, dans son
ressenlinieiit, il f'eignait de Jes altribucr. Oteicelle apidicalion
de ses satires, elles rcsteront des modelei de courage et de ve-
rite, aussi bien que de poesie.
Le volume que M. Debuie a consacre a ce poete mallieu-
reux , dans sa jolie collection, conliecl loutes ses auvres,
c'est-a dire, ses deux satires ( le Dix^-huitivme Steele et Mon
apologie) , ses odes , ses heroules, ses poesies divcrses, ses imita-
tions de la mart d'Abel , de Gessner , YEloge de Leopold /'■'" ,
une Diatribe sur les prix academiqiies et le Carnaval des au-
teujs , mauvaise satire en prose, que Ton a sans doute attri-
buee a tort a Gilbert, niais qui prouverait , si nialheureiise-
inent elle etait de Isii , jusfju'a quel point I'esprit de ve:igeance
pent egarer le meilleur jugement, el rabaisser meine le talent
le plus distingue.
Quant a Saint-Lambert, le vohraie qu'on nous offreconlient
ses poesies fug^itii'es, parmi lescpielles il y en a de diannanles,
qui sont dans la mcmoire des gens, de gout, et son poeme des
Saisons , beaiicoup trop lone de son terns, surtout par La Harpe
et par Voltaire, inais qui est reste, aveo ceux de Deiille , un
modele duns le genre descriplif, si toutefois eette poesie de
details, qui neglige le plus bel (cuvre de la creation , pour s'at-
tacher a ses accebsoires, merltc d'etre propose comnie sujet
d'etiides speeialos a nosjeu!;es poeles. Saitii-Lambert avail pu-
blle en outre des conies en prose, qui sont pen cstinies, iles
fables orientales , dont la i)recision fait le princi|)al mc'rite, un
Essai sur la vie et les onvrages d'Helvetius , un Essai sur le
luxe , une comedie-ballet, iutitulee : Les Fe'lcs de l' amour et de
I'hyrnen , des Mernoires sur la vie de Dolingbrohe , et enfin un
long Iraite piiilosophiquc, sous le litre de Ctitechismc.
E. Hereau.
LITTER ATURE. 77^
3o6. — * OEuvn-s choisies d' Ei-aristc Parny; precedies d'une
nolice sur sii vie ct ses otn'i-ns^es. Paris , i 826; Paris el Werclie-
rii), editeiirs , rue de Riclielipu , n" 87. I11-8"; prix , 8 fr.
Depnis (juc ic public accneille, pour iiinsi dire, indislincte-
ment Icsbons ttles manvais vers, cljacpjcjour voif eclore nuel-
qiio i!Oiive:iu jjoele, don! les i)roductions i)!us ou moins bizar-
rt's iiionacent de lout coiifondrc, el dfs journalistes benevoles
ap[)laudisscnt au trioraphe du mauvaij gout. Nous aimoiis a
voir les efforts de fmelqnes-nns dc 110s jeunes poeles pour se
sousiiitire an joug d'nnc imitation servile : qu'ils travaillent
d'apres leurs j)ro[)res idees, qu'ils ijiventent des sujels confor-
mes aux gouts et aux usages de leur palrie ; ir.ais qu'ils crai-
gncnt de j)rendre la bizarrcrie pour I'originali'.e, I'obscurite
pour la j)rofoiule;)r , ct les cearts d'u!)C \erve dcrcglee pour les
subliines inspirations du gonie.
C'est pour seconder !e ze!e des critiqiies oclaires (|ue des edi-
tenrs, jjartisans des saincs doctrines lilleraires, tiitilti[)lieiit les
rein;pressions de nos poeles classiques les phis di^tingu^s. Au
nombre dc ces deruiers , on ne peul s'e dispenser de citcr Parr»y ,
doiit on \ient de pubiier les oeuvres choisies. Ses poesies ele-
giaques, snrlout, sulfiraient pour ctablir sa reputation. Ainant
])assionnc, poetc aimable et gracieux , Ic clianlre d'Elconore
f'era tdujonrs lesdelices des feuimes etdesjeiincs gens; I'homme
d'un age niiir le lira avec inleret, et le \ieil!ard, dcsencLante
des ruves dc la vie, se sentira encore emu, en parccui'ant ces
])ages brulantes, oil son aiue est enipreinte.
Parity cut une existence aventurense , comme celle de tous
les lioniuics de genie. ( Voy. Pid'. Enc, t. iii, p. 558, une
notice sur Parny. ) II expia sa gloire par les orages de sa vie.
Jouet des illusions de son cceur, victime d'une passion malheu-
rense, il est toujours poete, soit que, sepaie de I'objet de ses
vceiix , il confie aux sons de sa lyre les regrets et la nielancolie
de I'aniour, soit qu'il en cclebre !es plaisirs ct le bonheur. On
ne lit point le eliantre d'Elconore, sans aimer le peintre qui
nous a trace d'aussi gracieuses images : digne rival dc Tibulle ,
il fall viveineiit senlir tous les tourinens de la crainte, del'ab-
senceou dc I'abandor:. Uii poete ,jeunecoinnie lui, et son rival
dc gloire, Berlin s'cfforca vainement d'obienir les meines succes
que soil ami. II avail peut-cire plus d'espiit; inais celui-ci avail
plus de vrai talent. Ses elegi.'ts iuspirent cetle tristesse qui plait,
qui dispose I'ame a s'i'panchcr , et la rend meilleure en la ren-
daril jjliis teno'rc. Juguste Amic.
367. — OEui-res de J. - F. Ducis. Nouvelle edition. T. II et
III. Paris, i8a6; A.Nepveii. 2 vo'. in-S" de 471 et 5o6 pages;
774 LIVRES FRANCAIS.
prix du volume , r> fr. sur cavalier violin. ( Voy. Rev Enc. ,
f. XXX, p. 2o3 ).
Ces deux volumes terminent la belle iMlition dcs ceuvrcs
completes de Ducis, dans lesquelles se trouve coinpris un vo-
lume d'oeuvies poslhumes. Le tome II contieiit les tra^redics
Ae Macbeth, de Jean-suns-Tcrre, A' Othello ,A' Ahufar, d'OJS-
dipc h Colonne, et le pelit poeme intitule : le Banquet del'a-
milie. Dans le dernier volume soiit reunies plusieurs epilres et
phisieurs pieces fugitives, ainsi que des letires dc Ducis et de
Thomas. Nous ne ncgllgerons pas cette occasion de paver au
genie d'un poete iliustre I'hommage qui liii est du , et nous
consacrerons aux oeuvres de Ducis un examcn dctaille dans
notre section des analyses.
368. — OEitvres completes de M. le vicomte dc Chatkao-
BRiAND, pair de France, membre de 1' Academic francaise.
3' livraison , compos<5e des tomes \" et IX^. Paris, 1826.
Ladvocat, editeur. 2 vol. d'environ /joo p. chacui) ; prix de la
livraison, i5 fr. ,et 18 fr. par laposte. (Voy. ci-dessus, p. 499.)
L'editeur des OEuvres de I\I. de Chateaubriand continue de
remplir ses engagemens avec une louable exactitude. La livrai-
son que nous annoncons excitera vivenient la ciiriosite pu-
blique. Le tome I'^'' contient le i"'' livre de YEssai historique ,
politique et moral sur les resolutions anciennes et modernes ,
considerees dans leurs rapports arcc la revolution francaise ,
precede d'un avertissement de I'auteur , d'une preface nouvelle
relative a cet ouvrage , d'un avis et d'une notice publics a
Londres lors de la premiere edition qui en fut faite. Cet ccrit
est celebre en France sans y etre connu. II a souvent fourni
aux adversaires de I'auteiir des moyens de combattre ses opi-
nions posterieures et de le mettre en contradiction avec lui-
meme. Mais celte polcmique n'en avait mis au jour que quelques
passages, et peu de gens avaient eu la facilite de lire I'ouvrage
entier. II parait aujourd'hui , accompagne de notes ou I'au-
teur s'est refute lui-meme sans aucun menagement. Nous en
rendrons un compte detaille a noa lecteurs, des qu'il aura ete
completement public. Le tome IX , cotnpris dans cette 3'^ livrai-
son, contient les trois dernieres parties dc I'ilineraire de Paris
a Jerusalem. 0.
36g. — * Dialogues du Tasse, traduits par /. - f^. Pf.ries;
traducteur des oeuvres completes de Macbiavel. Paris, 1826;
C.-L.P. Panckoucke. In-32 de x et 214 jiages; prix, 3 fr.
Ces dialogues traduits en francais pour la premiere fois, et
non pas inedits, comme I'annoncc l'editeur, n'eiaient pas tous
deux egalement dignes de figurer dans la collection des classi-
LITTER ATU RE. 775
ques que publle M, Panckoucke. Dans le premier qui a pour
sujet VAmitie, le Tasse a disseque ce sentiment avec toute la
sublilitc de la pliilosophie scolasllque , qui elait en si grand
honneiii" du ferns de ce poete. Les raisonneniens qu'il ])rete a
ses inferlocuteurs sont presque toujours faux ou inintelligi-
bles. Cet ouvrage porte des marques trop visibles de la situation
d'esprit oii etait i'auteur quand il I'a compose. Nous pensons
qu'il eut ete facile de faire un meilleur clioix parmi ses ouvra-
ges en prose. Le second dialogue intitule /e Pere defamille, est
bien superieur an premier. Le Tasse s'y est mis lui-meme en
scene dans une exposition pleine d'interet. Elle a fourni a
M. Tilery le cadre d'un discours qui reroporta , il y a quelques
annees, le prix d'eloquence decerne par I'Academie francaise.
Ce dialogue du Tasse contient sur les devoirs du pere de fa-
miile et sur Tadministralion domestique un grand nombre de
preceptes judicieux, exprimes dans un style plcin de graviie ,
de douceur et d'onction. Nous regrettons que I'edileur n'ait
pas cru devoir placer le texte en regard de la traduction. La
prose du Tasse est fort elegante , et il eut cte agreable pour le
lecteur de pouvoir en juger par ce morceau. N'ayant pas le
texte sous les yeux, je ne puis apprecier d'une inaniere exacte
le merite de la version dc M. Peries. Mais le talent dont il a fait
preuve dans sa traduction de Machiavel , offre au public une
garantie suffisanle. Ch.
370. — Lettres sur la Suisse et le pays des Grisons , par
L. A. DE Chapuys-Monslaville. Paris , 18265 Delaforest. In-S"
prix , 3 fr. 5o c.
M, de Chapnys declare, dans sa preface, qu'il aimait une
jeune personne dont la main lui etait promise ; mais son ma-
riage ne pouvait avoir lieu avant un evenement subordonne a
des chances incertaines ; tourme.nte par son amour , il s'est mis
a parcourir la Suisse , pour tncher d'adoucir unpeu les rigueurs
d'une longue attente; a son retour , il fallait attendre encore ,
et le besoin de distraction lui a fait prendre la plume ; il ne
dit pas ce qui I'a decide a faire itnprimer. Tout entier a son
amour , I'auteur estropie les trois quarts des noms qu'il cite;
il fait de VAlhula, riviere, une monlagne, et ainsi du reste.
Aussi,nous recommanderons son ouvrage aux araessensibles,
plutot qu'aux lecteurs qui cherchent dans un voyage des
observations neuvcs et des renseignemens exacts. E.
371. — * La Saint- Barthelemy , drame en plusieurs scenes;
par Charles ^'Outbepont. Paris, 1826; Firniin Didot. In-S"
de 167 pages; prix, 3 fr.
La verite historique, apres etre rentree dans I'histoire,
776 LIVRES FKANCAIS.
qu'avait loiiij-leins alteiee I'esprit do systeine, ne tardera pas,
on doit le croire , a se nioiitrer sur la scene, ou la rappclle le
va^u du public, mais dont I'ccai-tent encore les precaiilioiis
d'une polilique cralntive, el Ics scrupules d'line pocliqtic non
inoin.s tiniiiie. An milieu de ce niouvemcnt dcs es])rils, (jui jire-
pare une reforme ihrairale, il est naturel (ju'll paraisse des
oiivras;es, lels que celui -ci , moitio dramcs, inoitie liistoires ,
ou les fails soiciit pn'seiites, coiniiie ils se sont jjassi's, sansces
metamorphoses que kur font subir nos regies de convention et
les mcnai;emcns de notie censure. Dans uii livre du moins,
O'n ochaj)pe aux conseils et aux defenses du poiivoii-, a la criti-
que loiitiniere des coulisses, des fcuilletons et du parterre;
on est libre de ne prendre conscil que de sa conscience, dc sa
raison , de son talent, de son snjet,les seuls guides qui puis-
sent conduire I'ecrivain au naturel, a i'original, an nouveau.
II serait injuste de ne jias rappeler (pie plusieurs de nos iioetes
dramatiques onl essaye de faire eiitrtr I'art dans cettc voie, ou
il doit inevitabienicnt s'engaijer un peu plus tot ou uri peu plus
tard : MM. Lerncrc.ier , Alexundre Duval ^ Lebrun , e^c.,auront
la gloire d'avoir prepare pai- dlieureuses tentatives la revolu-
tion liiternire qui s'aT)])rocbe ; el a leurs noms s'associeront ceux
d'ecrlv;iii)s nioins celebies, aux productions desquels on! man-
que la pubiicile et I'eclat de la scene, mais qui n'en anront pas
nioins contribue a changer, par la hardiesse de leurs exemples,
quelque chose a nos anciennes theories. II y a fpielques annces
que, dans un livre trop peu connu, feu le comte J. R. de
Gain-Moiitagnac mit foi t liabilement en scene le proces de
(Jharles I'^'' et I'abdic.-.lion de Charles- Quint. Nousavonseu,
I'annec derniere, les iiigenienses comedies de moeurs qu'nn de
nos])lus jeunes auteurs a produites , sous le nom de I'espagnole
Clara Gaziii. On parlait beaucoup, cet hiver, de deux ouvra-
ges du meiue genre oil la chevalcrie des cjoisades, et la revo-
lution de Saitit-Domingue sont representees avee beaucoup
d'esprit et de -verite. Tout roceniment , on nous a dotine le ta-
bleau aiiime' et vivant de la journee des barricades ( voy. Rev.
Enc, t. XXX, p. 526 ): et voici fpie M. d'Outrepont entrenrend
de rendre au naturel la Saint- Barthcicmy. Peut-elre n'a-l-il pas
asscz profitede i'avaniage qu'il avail d'etre debarrasse des genes
de notre scene , et de la pompe de notre versification Le souve-
nir de I'alexandrin tragique se fail unpen trop seniir danssa
prose; il prtte ases personnages un langage trop soleunel et trop
apprete ; el , pour faire loule la ])art de la critiipie, on pent re-
procherasa ti ici ion des formes trop modernes. Mais, 3 cesdefau Is
pres, ce drameoffre une lecture inleressante. Le sujet , I'uii des
LITTERATURE. 77-7
plus uses «le noire blstoire ,esl raje,uni par la veritii de la pein-
ture; Ics Iraits du tableau soiitbien clioisis, bien rapjiroches. II y
a de I'eiisenible et de la vaeiete dans cetle oeuvre iiouvclle, et
nous y retrouvons ies divers inerites que nous avons cu dernie-
lenient occasion de louer dans Ies Dialogues des morts public's
]iar le meme auteur (voy. Tfrj'. Enc, t. sxx, p. fi^.S). H. P.
372. — * UJgiolage on le Metier a la mode, comedie en
cinq actes et en prose , |)ar MM. Picarh el Empis , icpresenlee
pour la premiere fois au theatre Francais par Ies comedieiis or-
dinaires du Roi , le 25 juillet 1826. Paris, 1826. Bechet aine,
au Palais-Royal. In-b° tie 108 p.iges; prix, /| fr., et 4 fr. 5o c.
Nous avons rendu complc de cetle jolie comedie a I'epoque
de la I'epresenlation (voy. ci-dessus, pag. 269 ) ; elle obtiendra
sans doule a la lecture le succes ([u'elle a conslamment au
theatre.
37^5. — * Romans hi.storiques de C. F. Van der Vklde, tra-
diiits de I'allemand, el precedes de notices , par A. Loeve-Wei-
MARS. Premiere llvraison coniprenant : Les Patricicns , i vol.;
Ies Anabaptlstes , i vol.; Anvcd GyUenstierna , 2 vol. Paris,
1S26. J. Renouard; Gosselln. 4 vol. in-12 , de aSo a 3oo pages
chaeun ; prix, lif'r. L'ouvrageentiersecom[)Osera de 20 vol.
Avec les histoires ou les rois et leurs cours obienaient seuls
I'attention des iiarrateiirs, nous avons eu lesromans qui ne met-
taient en scene (jue les souverains et lenr galanles intrigues, les
grands honimes et leurs faiblesses. De nos jours quelques histo-
rieiis ont ose nous jiresenter dans leurs reeils le peuple etson in-
fluence sur les evenemeiis; iions avons vu fii;urer dans les ro-
inans historiques, non plus des heros , reduils a joiier le role
banal d'amant jiassionne, mais des personnages d'imagination ,
choisis dans toutes les classes, in)bus,des prejugos et professant
les opinions de leur teir.s, et peints avec les passions et sous le
costume de chaque epeque et de cliaque classe. Walter Scott et
Cooper, tons deux remarquables par la vivacite de leurs pein-
tures, par la vcrile originale des caractcres qu'ils ont crees , jjar
I'art admirable avec lequel ils savent ncus rendre presentes les
situations les plus interessantes et les plus varices, ont fait
triompher le genre nonveau qu'une vogue vrniment populairc
a venge des atlaques de certains critiques, injustes et e.xclusifs.
En France, 31. de Sismondi n'a point obtenu des succes aussi ecla-
tans que ses rivaux de I'Ecosse et de I'Amerique : luais, sous des
fornaes peul-etre moins brillantes et moins dramaliques , et sans
eveiller un interet aussi vifqne ses devaticiers, il ale ])remicr im-
prime au genre dont Walter Scolt est le createiir , une direction
toute p}!ilosoi)liique : nourri de I'etude approfondie des sources
7 78 LIVRES FRAN^AIS.
historiques, habitue ii considerer les cveneincns cl Ics hommes
avec une hauteur de vues et d'idces peu coniniuRes, il a fail du
romaii ranxiliaire et le complement de I'histoire. II n'a choisi
dans les terns anciens que les trails caniCtcTistiques et sail-
lans, et les prcsenlant avec les details ct sous les couleurs que
proscrivaient desouvrages plus serieux et d'un plan plus citendu,
il en a fait jaillir des lecons d'une haute importance. Blalheu-
reiisement, et au grand regret de tous ceux qui out lu Julia
Severn , M. de Sismondi n'a peint encore qu'uue epoque.
Waller Scott, Cooper, el M. de Sismondi, ont dii trouver des
iraitnteurs : I'AUemagne a eu Van der Velde, qui est moi t il y a
peu d'annees( voy. Rev. Enc.^ t. xxiii, ]). 75o j, et la Suisse a
applaudi aux productions de Zschokke , I'un de ses ecri vains les
plus lionorables et les jilus dislingues. Les romnns de oe dernier
ne sont point connus en France ; ceux de Van der Velde ne I'e-
taient, avant I'entreprise de M. Loeve-AVeimais, que par d'in-
formes traductions. Aujourd'hui, ils vont enfin obtenir la part
qu'ils meritentdans la f'aveur du public, graces a I'l'legante fi-
delite du travail de cet ccrivain , et a la connaissance appro-
fondie de la langue et de I'histoire de I'Allemagne, qui lui out
permis de nous rendre intelligiblcs beaucoup de choses etran-
geres a nos mceurs et a nos eludes.
La livraison que nous annoncons contient trois romans : Les
patricicns sont une histoire du seizieme siecle : Taction se passe
dans les annees i568 et suivantes, a Schweidnilz, en Silesie ;
cette ville jouissait de nombreux privileges, et les jiatriciens y
exercaient nn pouvoir presque sans bornes. La lutte de cclte
aristocratic bourgeoise, ficie de scs richesses, de son influence,
et portant a la noblesse une haine profonde, contrel'aristocratie
feodale, toujours pleine de niepris pour la roture , et irritee de
la voir ecliajjper a sa puissance, est retraceepa^ Van der Velde
dans Tune de ses circonslances ics ]ilusfeinarquablcs, Frasnie
Freund, bourgmestre de SchweidniSz , vieiilard cnergique et
opiniatre, Franz Freund, son fils, homme emporle et dissolu et
rhypocriteCliristophe, autre fils d'Erasme, sont les chefs du pa
triciat : parmi les nobles, se trouvent le sage Tausiloif et plu-
sieurs chevaliers jeunes ct eniporlcs, qui ne se plaiscnt cju'aux
rixes et aux combats. Le peuplc est represente par !e dizenier
Onoplirius Goldmann, qui perit victime des querelles de ses
oppresseurs. La jjlupart de ces caractcrcs sont a peine esquisscs :
plusieurs scenes cependant sont peintes avec vigueur; mais I'in-
trigue est languissante , ettrop souvent I'interet est detoiirni- de
son principal ol)jet. En un mot , c'est une ebauche dont quelqucs
parties sout finies avec beaucoup de soin et de talent; mais on
LlTTfiRATURE. 7 79
Ton regrette d'autant plus de trouver de nombieuses lacunes.
L'annee i534 et la ville de Munster virent une revolulion
not! moms etonnante que celle de Rome, lorsque Rienzi pre-
tendit faire revivre les siecles du foriini et des tribuns, et celle
de Naples, ou le pecheur Masaniello cxerca pendant neuf jours
le pouvoir supreme. Les Anabaptistes , en precliant la reforme
rellgieuse , deiuandalenl aussi une reforinc poIiti(|ue : zeles
apotres du second baptcme, ils devinrent de furieux demago-
gues; puis, toujours tideles aux extravagans cansei's du fana-
tisine, ils oleverent dans Munster au rang de souverain absolu
le plus habile et le plus corrompu de leurs predicalcurs. Van
der Velde, en racontant les folies , les execs et les crimes des
anabaptistes, s'est servi de quelques personnages de son in-
vention ; niais, a cela pres , son roman n'est guere autre chose
([ue I'histoire de la revolution de Miinster.
Arwed Gyllenslierna nous Iransporte en Suede el en Laponie,
dans le camp de Charles XII, devant Frederiksliall , au Ritter-
holm, maison royale a Stockholm, et sur les bords del'Umea.
L'auteur nous fait assister a la mort de Charles XII, au proces
el a I'executionde son niinistrc le baron de Goertz; jmis aban-
donnaut les donnees historiques, il fait paraitre sur la scene
I'ecossais Mac-Donalbein, qui sous le nom de ISahdoch Le
Noir, et a la tete d'une bande de brigands, a repandu I'effroi
dans toute la Laponie. Dans ce roman, l'auteur a donne plus
de developpemens a sonrecit ;mais il y a moins d'originalite et
de couleur locale que dans les patriciens , le meilleur a notre
avis de ces trois ouvragcs. A.
374. — Robert de France ou V Excommunication , par
M""' J. GoTTis. Paris, iSaS, J. G. Dentu. 4 vol. in- 12;
prix, 10 fr.
« Robert, dcja forme au gouvernement qu'il avail; partage
avec son pere , eut beaucoup plus d'lnquletudes a essuyer de
la cour de Rome qu'il n'en eprouva de la France. Son niariage
avec Berthe , fille de Conrad , roi de Bnurgogrie , lui attira une
persecution sans cxemple. li etait piirent au /("^ degre de cetle
princesse; il avait tenu sur les fonds de bapteme u-ii de ses en-
fans du premier lit. Plusieurs cveques, consulles sur ce double
empechement, donnerent eux-memes la dispense, ouaulorise-
rent le niariage; mais le pape Gregoire V^ se crut en droit de
troublerle royaume pour une affaire qui ne devait occasioner
aucun eclat. Il ordonna, dans un concile d'eveques ilaliens, que
le roi quiltat incessammcnt son epouse ; que I'uii et I'autrefis-
sent sept ans de penitence; que I'archeveque qui les avait raa-
ries et tous les eveqiies qui avaient consenti au mariage fussent
78o LIVRES FRANCA IS.
suspendiis de I'usage dcs s.Tcremeiis juscju'a ce qii'ils eiissent fait
en pers')nnc satisf'aclion ,t!i souvcrain \iQntifc,.->: [ I^/rwenx dc
I'Histoire dc France , par Mii.i.ot. ) Tel est le sujet qu'a traitti
dans Touvrage que nous anuoncons iiru; feinme de leltres,
connne drja par plusienrs roinans liislnriqucs, dont quelqtu'S-
uns ont obtenu du succes (i). Fidele a I'liistoire, elle a peint
des coiilenrs les plus \ raies rexcommunication de Robert el les
suites funestes qu'cllo entraina; son denounieiit mC'ine est con-
forme aiix souvenirs dc celte ejioque. La seule licence qu'elle
ait prise est la supi)osiiion d'un inariage secret entre Robert
de France et Agnis de I'landrc; encore Mizorai, et ajires lui
d'autres auteursont-ils assure qu'il fut mai i-ja Lutgardf , veiivc
du coni'ede Flandre, avant d'tnouser Ber tlie. D'ancienncs chio-
iii(|ues discnt anssi que Robert fit la guerre a son pere; a la
veiite , Velly ni Mezerai ii'en parlent poini; niaiscesdeux cir-
cons!ai)ce5 admises par I'auieur ajoulcnt trop d'inlcrel a son
ouvrage pour que la critique ait a lui demander des prenvcs
bici) rigonreuses de leur aulhcnlicite : i! suffil (pic la vraisein-
blance soil conservee; et c'esl ce qu'on ne pourrait lui contes-
ter sans injustice. Un reproclie que nous f'erons a M"" Gutiis ,
c'est d'avoir essaye , dans qaelque's endroits de son livre, de
prendre un ton qui contra.ste avec la simplicile ordinaire de
son slyle. II ri'est pas d'ailleurs exeinjit d'incorrcctions, ct
nous y avons rcrnarqiit; plnsieurs faules qu'il serait ifaslidieux
d'ennnierer; nous ne signalerons ici que I'eniploi du mot en
imposer pour imposer, que nous avons note plusicurs fois ,
faute presque aussi commune chez les ecrivains modernes que
cclle de I'adverbe d'ordre r/e .<■«/;<? employe pour Tadverbe de
tems tout de suite, sur-le-charjip , a laquelle des academiciens
meine ne peuvent deja pli;s so soiistraire (2]. E. H.
■575. — Brochures in-'i'i. Troisieme edition. Paris, 12 aout
1826 ; Touquet. In-32 de 64 pages ; prix , 5o c.
876 — Petit Code de morale a I'usage de toutcs les classes
(i) Marie de Vahnont , i vol. — Francois !<■'; 2 vol. — Lejeiine Loy.' ,
prince des Francs, 4 vol. — Ermaiice de lieaiifremont, 2 vol. — La
Jeiine Fitle , ou Malheur et f'ertii, 2 vol. — ■ CfUherine /'*, imperatrice
de Riissie, 5 vol. — Marie de Cleves . 3 vol. — Jeanne d'.4rc, 4 vol.
( Voy. Rev. Enc., t. xiii , p. 6S0.) — LAbbaye de Sainte-Croix , 011 Ita-
degonde , reine de France, 5 vol. — La Tour de Bramafan , ou le Cri de
la f aim, 3 vol. — Conies ci ma petite niece , 1 vol. in- 1 8 , 2° edition.
(a) Voy. le Prog mnme de V Academic des Jeiix floraux pour le con-
oours de 1827 , p. 2.
LITTER ATURE. 781
de la societe , ou Choix de pensees , maxinies et rtjlcxions, etc.
Paris, 182G; Acliille Desauges.Iii-Si ile /(4i pages; prix, 76 c.
Le j)rcmier de ces o[)nscules con:ient une courle apologie
des publications in-3'2, atlaquees si lidiculfuient ])ar (juelques
journaux; car ce n'est point le forinat d'un otivrage, c'est
i'ouvrage meiiie ciu'il s'agit d'exaniiner. Puis vient lii lisle detail-
Itie de tous les ouvrages qui ont j^aiu dans ce format, depiiis la
Charte constUittionnelle , a 5 centimes, iinprimee en 1820 et
le Tartiife , a 25 centimes, qui se repand"A*, au uiois de Janvier
dernier, et qui donna I't'veil a tous les entrepreneurs des spi--
culations acttielles du nieme genre.
Ou cniinierc dans cc catalogue 24^ editions econoniiqurs ,
qui, a Irois ou quatre prcs, sont tonles de ce'teannec. Quel-
ques-unes se rattaclient a des collections plus ou uioins eten-
dues, plus ou inoins utiles : la Biblioiht'que populaire , publiee
parM. Touquet ( voy. ci-dessus, p. i(;i);les Annales mi-
litaires (voy. Rev. Enc, t. xxx, p. 787) ; deux BiHiotheques
cconoiniques , et une Uchliot/iegue encyciopediquc ; une Biblio-
th';que d' ouvrages curicux ; le Petit Voltaire constitution nel; le
Repertoire poj)ulaire de M. Desauges. Nous avons coinpte 8
ouvrages relatifs a la Grece; 14 snr le droit d'ainesse, et envi-
ron 54 centre les jesuites el les congiegations. Si Ton calcnle,
d'ajires la niodicile des frais d'impressiun el du prix de vente,
la quantite d'exemplaires que les libraircs ont du debiter , on
croira sans peine que cette multitude innombrable de pam-
lihlcts a j)u cxcrcer quelque influence sur I'opinlon pnblique ,
du moins dans I'enceirUe de Paris, ou ils ont ete jilus parti-
ctilierement repandus. Aussi, les memes bomnies qui se plai-
gnent sans cesse, de la presse et de ses jirelendues licences,
ont-ils reproduit centre le formal en vogue les diatribes furi-
hondes, qu'ils avaienl deja niises en usage contre i'iuvention
de I'imprimerie , contre les ecoles d'enseignement mutuel et
populalrc, en un mot contre toutcs les institutions qui tendent a
proj)ager les lumieres, et jiar conse(juent a ouvrir les yeux des
nations sur les veritables abus, sur ceux dont out long-terns
profile , et dont voudraient proliter elernellement ces enneniis
de toute amelioration.
Mallieurcusement, certaines publications ont paru fournir
des pretexlcs ]>lausibles a ces niaises et fouguciises accusations :
maifi les Biographies , productions scandaleuses et criminelles,
quand elles vinrent s'acharner aux liommes vivans et mcnie a
lenr existence prlvee , ont etejugees par I'opinion jiublique et
par les tribunaux ; et d'ailleurs, le mal ici pese bien peu au-
pres du bien. II a paru 32 de ces biographies in-32,oiiles
faommos de [iresque toutes les classes sont passes en revue, le
7 82 . LITRES FRANCAIS.
plus souveiii par dcs libellisles ignorans, qui ne connaissent
ceux doiit ils jiigenl les opinions, les lalens et monie la vicpri-
voe , que d'aiJies les coramcragesou les panipliiets !os plus uses
et les plus (liscredites.
Nons pouvons ajouter maintenant au catalogue pnblie par
M. Toucjuct, le Code, tie morale, dont nous donnons ici le
tilrc : c'est uu recueil de jiensees empruntees aux pliiloso])hes
de lous les leius, de tous les pays, et qui nierite d'etre bien
accueilli. A.
Beaux- Arts.
377. — * Melanges siir les heaiix-arts ^ par M. Ponce, Paris,
189.6; Leblanc,rue de Fursteniberg, n'' 8. In-8°.
M. Ponce, auc]uel on esL redcvabie de plusieurs articles inte-
ressans, inseres dans la Liogropltie uiin'crselle publice jiar
M. Mic/iaiid , a reuiii, dans le volume que j'annonce, des dis-
sertations ou il examine les arts , soit dans leurs caracleres liis-
toriques et generaux, soit sous des points de vue particuliers et
spcciaux. L'essai j'w/- fetal des arts chez les Grccs ; la disserta-
tion sur le beau ideal; celle sur le degre de perfection de la
peinture dcs onciens , nie seniblent a])parlonir a la premiere de
ces deux classes. Ses reflexions sur le nu et ie costume en sculp-
ture; sur la manierc d'eludier ledessin; les observations gene-
rales sur les plafonds peinis ; les letlres sur la gravure , compo-
sentla secondecategor!e.Enfin,dansplusieurscliapitresrauteur
cherclie a determiner quelle est I'indnence des climais, des
inoeurs et des gonveinemens sur rarchitecture ; quelle fut I'in-
fluence de la peinture chez les anciens peuples, et quelle est
I'analogie qui existe entre les sciences, les lettres et les arts.
Le volume est termine par j)lusieurs notices biographiques
et d'autrcs opiisc(des.
Dans nn cadre aussi vaste, M. Ponce devait rencontrer
quelqiies ccrivains qui ont traite les memes sujets; ainsi, par
exemple, M Eineric David a public deux ouvrages extreme-
ment remarquables : I'un sur la gravure, et I'autre sur la sculp-
ture chez les anciens; M. Coussin, architecte de beaucoup de
talent et tres-instruit dans la partic liistorique de son art,
semble avoir epuise le snjet dans un traite, enriclii de planches,
intitule : du Genie de I'arcliitecture , qui a deja ele annonce dans
la Revue, et dont je me propose de rendre compte prochair.e-
ment d'une maniere parliculiere. M. Ponce ne s'est pas attache
a examiner les oj)lnions de ses prcdecesseurs; il expose les
siennes,et les appuie de I'autorite des historiens ; le seul ecri-
vain systemalique qu'il cite , c'est Paw : je crois qu'il ne faut
BEAUX-ARTS. 783
le consulter qu'avec une extreme mefiance, parce que , en ge-
neral , il violente les fails pour les soiimettre aux systemes qn'U
voulait etublir. An resle, M. Ponce ecrit en liomme qui salt
beaucouj) et quia egalenient beaucoup medite; ses principales
(Ussertalions proiivent une inslruclion aussi variee qu'etendue,
et je ue doute pas que tons ceux c]ui les etudieroct avee soin,
n'en recueilieiitdu fruit. Je ne parlage pas cej)endant toutesses
opinions , et je crois que , dans quehjues circonstances , j'aurai
pour mol les artistes. Ainsi , dans ses reflexions sur le nu et le
costume en sculpture il dit : « Un artiste charge, pour un mo-
nument public, de I'execution de la statue d'un homme eleve
eu dignite, nepeut se permettre, sans blesser les convenances,
de faire usage du nu, ni d'un costume etranger a cette di-
gnite. »
Je ferai remarquera M. Ponce que, dans une statue raonu-
mentale, on doit considcrer deux clioses : la convenance his-
torique et les conditions , ou , pour mieux dire , les moyens de
I'art que Ton emploie; or la sculpture n'a d'auire ressource
que la forme ; si, done, le sculpteur ne pcut s'ccarter en rien
de la verile du costume, I'art disparait; car avec des costumes
te!s que les notres, par exemple, la sculpture, je dirai raeme
la peinture, sent obligees de renoncer aux conditions les plus
importantes de I'art. Ici je pourrais invoqucr Lessing, et citer
pnrmi les productions recentes, la statue de Louis XIV de
M. Bosio , celle de Bontliamp de M. David et tant d'aulres. Je
ne pretends pas dire, loutefois, que la convenance historif|ue,
sous le rap])ort du costume doive eire tout a-fait ccarlce; mais
il est impossible (lu'eile soit observee, telle que M. Ponce le
prescrit, c'est-a-dire, dans toute sa rigucur : c'est ici le cas de
dire avec Horace : est modus in rebus... Au reste tous ceux qui
cultivent les arts savent quellcs entraves cette vcrite des costu-
mes modernes fait naitre, et c'est pour y ecliapper que les
peinlres et les sculpteurs vont toujours puiser leurs inspira-
tions dans cclteriantc mytliologie ou la beautedes formes pent
eIre doveloppee sans coutraiiite, ainsi que dans les epoques
historiques oil les costumes avaient un caractere pittoresque.
Dans son essai sur I'etat des arts chez les Grccs, M. Ponce
indique, comme une des causes du degre de perfection auquel
ils sont parvenus, la faculle, que les moeurs oft'raient aux ar-
tistes, de contempler habituellement la nature dans tous ses
developpemens. Rien n'est plus juste. « La belle Phryne ,ajoute-
t-il, se baignait en presence des Grecs ravis d'admiration a la
vue des cliarmes qu'eile offrait a leurs yeux. A cette epoque les
plus belles filles d' Agrigente furent offertes a Zeuxis , pour lui
784 LI V RES FRANCAIS.
sen'ir fie modelcs pour son tallcnu d' Helene. i< Ce (k'liiier fait
nous est certifie par Pline et par Cic(^ron; mais leiirs lecits dif-
ferent. Celui dc M. Ponce est confornie a ce qui nous a cle
transmis par Pline : c'est (lone par erreiir qn'i! a cile Ciceion.
Ce dernier ecrivain pretend que cc fut jiend.int son sejour chez
les Crotoniates , que Zouxis oblint la faculte de ciioisircinq des
plus belles de leurs (llles auxqueiles il cniprunta ce que cha-
cune d'clles avail de plus parfait pour composer son Helene.
C'est la version que Bellori a adoptee dans son histoire <les
peintres les plus celcbres de I'anliquite. Girodet, qui senible
avoir epuise toutes les so.irces, a pris dans ce recit le sujct
d'une composition qu'il a trait^e avec sa superiorile acooutu-
uice,et ciuej'ai le bonhcur de posseder.
M. Ponce nie pardonnera , j'cspere , cette derniere critique
qu'il pourrait a juste litre, trouver niin-atieiise, mais qui,d'un
autre cote , li:i prouvera le soin avec lequel j'ai lu le livre qu'il
vient dc publier. P. A.
378 — * Souvenirs du Musee des inonumens francais : collec-
tion de l\0 dessins perspectifs graves au trait , reprosentant les
principanx aspects sous lesquels on a pn considerer tons los
monumens ic'.inis dans ce musee, de^sines par M. J.-E. Bikt ,
et graves par MM. NoKM\Nn pire et fils, avec un texie expli-
catif , par M. J.-P. Bres. Dixiejue et derniere livraison. Paris,
1816; I'auteur, rue Grange-aux-Belles , n° i3. ( Voy. Rev.
Enc, \. xxviii, p. 586.)
En changeant nos institutions et nos nnfcurs, la revolution
devait opt^rer sur la surface du sol francais un bouleversement
general. L'abolition des ordres 1 eligieux livra leurs nombreux
domaines et leurs demenres splendidcs a des proprielaires de
toutes les classes; la halne et le mepris qu'inspiraient des pre-
tres inlolerani et corrompus ayant amene momentanement la
chute du culte catliolique , les riches egliscs qui lui avaient etc
consacrees, furent abandon. lees a Ions les usages de la vie pu-
blique on prlvee. Ces niaiions de plaisance , oil la licence et la
prodigalile des cours avaient air.asse tons les ornemens da
luxe et des arts, et les chateaux t-leves du ten;s de la fcodalitc
furent compris dans les terribles ])ersecu!ions que leurs nobles
possesseurs s'elaicnt atlirces. Que devinrent alors toutes les
richesscs , tons les monumens rasscinbles pendant des siecles
dans ces ctllfices privilegies? Ici, le fanalisine les condarnna a
la deslruclioa ; dans d'autres lieux, I'indiiference les laissa dans
I'oubli et daiis I'abandon; inais, sur (juelqucs points, il se
irouva des amis des arts, capables de le:; apprecier, et qui su-
rent les conserver pour des jours plus lieureux. Parmi ces
liommes eclain's 1:11 surtout s'est accpiis des droits a Testime
BEAUX-ARTS. 785
et k la reconnaissance nationales. M. Alexandre Lenoir , fon-
dateur et conservateur du mus^e des monumens francais, ou-
vrit un asile aux nombreux chefs-d'oeuvre que la revolution
avait cpargnes. Sous les auspices dii gouvernement , et grace
au zele et a I'habile direction de ce savant antiquaire, ce
musee devint bientot un des etablissemens les plus curieux de
I'Europe. II occupait , a Paris, I'aricien convent des Petits-Au-
gustins, ou se trouve aujourd'hui I'ecole des beaux-arts ; il se
composait de onze salles ou gaicries, de deux cours et d'un
jardin auquel On avait donnelenomd'Elysee. Une distribution
ingenieuse avait reuni dans urnneme local toules les productions
d'un memesiecle; en parcouiantainsiles differentes gaicries, on
avait sous les yeux une histoire vivante de I'origine , des pro-
gres et des perfectionnemens successifs des arts du dessin, dans
un pays ou ils out brille du plus vif eclat.
Aujourd'hui, ce inagnifique monument n'existe plus. Sa
destruction progressive par divetses decisions ministerielles
qui lui enlevaient ses plus precieux ornemens pour les rendre
3 leiir ancien etat d'isolement, 6tait inevitable, dans un tems
ou Ton se pique de restituer a chacun tout ce qui lui ajiparle-
nait jadis , a bon droit , ou autrement. M. Biet a forme le projet
de perpetuer le souvenir de ce bel etablissement ; grace a son
ouvrage, I'instruclion que Ton allaif autrefois chercher au
miisee des monumens francais ne sera pas entierement perdue.
Les dessins ont ^te reproduits avec une exactitude et un
soln scrupuleux par MM. Normand pere et fils. Dans la der-
niere livraison (jue nous annoncors , se trouve le discours pre-
liminaire, dii a la plume elegante de M. Bres , et ou cet ecri-
vain , en tracant rapidement I'hisloire des arts du dessin chez
les Francais, a signale avec beaucoup de jtistesse et de preci-
sion , les caracteres distinctifs des principales cpoques. A.
879. — * Les Amours des Dieux , recueil de compositions
dessinees par Girodet, et lithographiees par MM. Aubry-le-
CoMTK, Chatillon, CouNis, Coupin de Lacouprie, Dassy ,
Dejuine, Delorme, Lancrenon , MoNANTEriL et Pannetier,
ses eleves; avec un texte explicatif redige par M. P.- A. Coupin.
3* et 4'= livraisons. Paris, 1826 ; G. Engelmann , editeur, rue
Louis-le-Grand, n° 27.2 cah. gr. in- tol. Prix de Touvrage en-
tier, 120 fr. avant la lettre, et 80 fr. avec la lettre.
Ces deux livraisons terminent la publication de I'ouvrage
de Girodet, intitule : les Amours des Dieux , et completent cet
interessant recueil. L'ouvrage comprend ainsi seize planches.
Nous avons rendu compte precedemment des huit premieres :
celles de la troisieme et de la quatrieme livraison r.e sont ni
T. XXXI. — Septetnbre 1826. 5o
786 LIVRES FRANCA^IS.
nioins pooliques dans la composition, ni raoins belles d;ins le
style, ni raoins remaiquables quant au merite de la lithogra-
pliic. Les siijets sont Jupiter et Calisto , Hermaphrodite e( Sal-
rnacis , Cephale et VJurore, Jupiter et Seinele , XErebe ct la
Nuit , Apollon et Daphne , Jupiter ot Junoii , Mars et Venus. La
mythologie sembie ctre relement nalnrel du genie de Girodet.
Ses crayons avaient ete formes pour jicindrc les dieux. Inge-
nieux dans ses inventions, noble et decent dans I'enlacement
de ses groupes, gracieux et fin dans son style, il penetre dans
lapensce despoetosanciens, s'approprie leurs plus riantes ima-
ges, et ajoute a tant de bcaiites une foule de beautes nouvelles,
produit de son imagination et toiijours d'accord avec le snjet.
C'est ainsi (|ue dans les amours de Jupiter el de Semele ,
tandis que la princesse, deja mere de Bacchus, cache son visage
pour se derober aux feux qui vont la devorer , le pere des
dieus modere I'eclat de la lumiere qui I'environne , et repousse
trislement son aigle, embleme de I'ardeur des carreaux celestes.
C'est ainsi que dans les amours de I'Erebe et de la Nuit, les
deux amans sont endormis, et appuyes si etroitenient I'un
contre I'autre qu'on volt a peine une partie de leur \isage.
C'es.t ainsi , encore , que dans les amours de Jupiter et de Junon
sur le mont Ida, I'artificieuse deesse , en tenant son epoux
embrasse, regarde s'il sommeiile, et parait voir avec joie que
sa ruse a reussi.
Ces traits n'ont point, echappe a I'auteur du texte qui accom-
pagne les gravures; il les releve en pen de mots et avec preci-
sion. Digue de I'arliste dont il decrit I'ouvragc, en ce qu'il en
apjirecie dignement le raerite, M. P. -A. Coupin ne Test pas
raoins par la tournure spiritnelle de ses descriptions. Dans un
avant-propos succinct comme tout le resle de son travail, il loue
a la fois Ovide ct Girodet, en montrant les beautes qu'ils sem-
blent se prelcr I'un a I'autre. « L'imagination de Girodet, nous
dit-il, ne le cede en rien a celle d'Ovide; il a remplacc la poesie
du langage par I'heureuse disposition des figures, I'elcvation
des formes, la richesse des accessoires. Partout se decele un
gout aussi sur que delicat; et jusque dans ses attributs qu'il
voulait representer , on retrouve un genie createur alors m^nie
qu'il iraite. »
Nous avons parle precedemment du merite des lithographies
et de rhonorable reunion des eleves de Girodet, qui se sont
associes pour pubtier cet ouvrage de leur niaitre. Leurs noms
honorent tons I'atelier d'ou ils sout sortis. Cette suite de com-
positions, ainsi que celles des sujets A'Anacreon et des scenes
jirincipales de VEneide ( voy. Rev. Enc. , t. xxx , p. 386 ),
BEAUX-ARTS. 787
forniera un des plus beaux titres de gloire de Girodet, et con-
tribuera sans donte jusque dans la posterite a la juste cel^brite
de I'ecole fVancaise. Emeric David.
38o. — * La Chine ; maeiirs, usages , costumes , arts et me-
tiers, etc. , etc. , d'apres les dessins originaux dn P. Cnstiglione y
du peintre chinois Pu Qua, de fV. Alexandre ^ Chambers ,
Dudley, etc.; par MM. Deveria, Recnier, Schaal , Schmit,
ViDAL, etc.; avec des notices explicatives et une introduction ^
presentant I'etat actuel de I'empire chinois , sa sfatistique, son
gouvnrnement , ses institutions , etc. ; par D. B*** de Maipiere.
Septieine livraison. Paris, 1826; I'editeur , rue Saint-Denis,
n° i83. Un cahier gr. in-4°; prix de chaque livraison, i5 fr. ;
par souscription , 12 fr. ( Voy. ci-dessus p. 5o8. )
Cette livraison contient le musicien ambulant; lapeine du
tcha y que Ics Portugais ont appelee la cangue ; une jeune
femme roulant des feuilles de the ; une chaise a porteurs , dont
I'elegance ferait lionte aux notres; un fantassin arrne de son
arquebuse a meche , et une pompe funebre. Cette entreprise se
poursuit avec une perseviTance qui en assure le succes. Nous
ne pourrions que rcpeler les eloges que nous avons cru devoir
faire des lithographies et du texte. T.
38 1. — Le Proprietaire-Archilecte , ouvrage utile aux archi-
tectes , aux entrepreneurs, et principalement aux personnes qui
veulent diriger elles-meines leurs ouvriers : dessine et rcdige
par 6^/-/:'rt//2 ViTRY, architecte; 1''= livraison. Paris, 1826; Audof.
Un cahier in-4° de 24 p. et de 28 planches tres-bien gravees;
prix , 8 fr.
Une grande partie de nos provinces manque d'archilectes ,
et la construction des maisons particulieres confiee a d'io-no-
rans ouvriers est cgalement mauvaise sous le raj)port de la
distribution interieure, de la decoration archilectonique et
metne d'une solidite bien entendue. Un ouvrage qui presen-
terait une collection de projets adaptes a nos usages les plus
ordinaires et qui traiterait de leur construction, serait d'une
grande utilite et obtiendrait un succes merite , si I'auteur
avait soin de ne donner que des plans simples, d'une execution
facile, d'cviter lescolonnes, les portiques, d'employer peu de
moulures dans les elevations, enfm de s'attacher a plaire uni-
queraent par la beaute des proportions. M. Vitry a suivi une
marche diametralement opposee a celle que nous venons d'in-
diquer; il a recherche les formes hizarres dans les plans, les
denlicules, les corniches ornees dans les elevations, et il a de-
ployc un grand luxe de colonnes.
Son ouvrage pourrait cependant, tel qu'il a ete concu, etre
788 LIVRES FRANCAIS.
mile aux architectcs s'il prt'sentait qnelques nioiifs nouveaux,
ou qnelques projets bien ctueHcs : niallieureiisernent, M. Vitry
jiarail ignorei" les premiers principes de rarcliitccluie; les
])r()(ils, donl il donne dcs details, en scraient una preu%e suf-
fisanic : ils sont presijue tons beaucoiip trop niaigres et scraient
d'line execution hicn difficile. Pour incttrc une science ow un
art a la porlee d'un grand iioinbre de personncs, il fant en
posseder ])arlaitemenl tous les secrets, tons les cR-mens ; il f'aut
savoir ch.*isir avec discernemenl les notions les jjIus essentielles,
les I'aits les inieiix avcrcs : c'est en rcinplissanl ccs conditions
qu'on pent parvenir a faire un bon fivre. L. R.
382. — * Catalogue raison/ic et hlstoriqiie rles auliquilcx
decouvertes en Egypte ■, par M. Joseph Passalacqua , de
Trieste, orne de deux planches. Paris, i8i6. In - 8^; piix, 6 (r.
— Se vend a la galciie d'AiUic|uites egyptiennes , ouveite tous
les jours passage Vivienne, n" Sa , an preuiier, de 10 a
5 lieures et dcmie , el: le soir de 7 a lohcurcs.
Ce catalogue raisonne se trouve divisy en trois jiarties
essentiellement distinctcs :
1° Le catalogue proprement dit, ou les antiquites de la
collection de M. Passalacqna se trouvent divisees d'aprcs iine
classification niethodique des monuraens, selon leur desti-
nation primitive, en ohjets de e.ulte ; — d'usage de la vie
civile; — funeraires ; — melanges ;—^ tn{\n la derniere sec-
tion est consacree a t ensemble des ohjets d'un chambre sepul-
crale d'un grand- pre tre egyptien , decouverte dans son parfait
etat d'inlegrite.
2° Une foule de notes et d'observations historiqnes faites
dans les tombeaux et durant ses fouilles , par M. Passa-
lacqua , qui indiquent reniplacemeiit jadis destine dans les
tonibes et sur les momies , par les Egyptiens mcmes , a cliaque
serie d'objels d'antiquites ; notes qui jious devoilcnt une quun-
tile d'usages funeraires de cet ancien peuple, et dont nous
n'avions aucune transcription. M. Passalacqua decrit ensuite
tout ce qu'il a \tn observer de plus inlcrcssant ot d'inconnu
a I'egard des attitudes , enveloppes et cercueils des differcnies
momies egyptiennes et grecqries , donnant une notion gene-
rale des Necropolis de I'Egypte et de leurs souterrains, ipi'il
divise en tombeaux des rois , en tombeaux des families, en
tombeaux publics, et en tombeaux les plus simples jadis
creuscs dans Ic sable , la terre et les debris de ])ierres. II
lermineces relations tout- a-fait noiivelles , par le recit d'un
evdneiueiit affreux , qui malheurensenient lui est arrive aux
fouilles de Thebes, el qu'il a joiYlt a ses notes , dans le seul
<«
BEAUX-ARTS. — MfiM. ET RAPPORTS. 789
but de servir d'exeniple aux exj)lorateurs , qui apies lui scront
dans le cas d'cntrepiendre des fouilles d'antiquiles en Egypte.
3° Des disserlalioas scieiitifiques d» plus haut interet ,
redigees sur plusieuis branches de la Colieclion de M. Pas-
salacqiia , par des savans Iix-s-distingues , savoir : par MM. A.
Brongitiart, pour la minernlogie ; C. Knuth , pour la bo-
tanique ; Gloffroy Saint -Hilaire , Latreille , Isidore
Geoffroy Saint-Hilaire , pour la zoologie ; Vauqup-lin ,
Darcet , Julia, Fontenelle , pour la c/iimie ; Jomard ,
Merimee , pour la technologie industriellc ; Letronne et
PiEYNATjD, ]iour la traduction d' inscriptions et de 'nanuscrits
grecs ou arabes ; de Verneuil et Delattre , pour la theorie
des embaumcmeRs ; et Ch ampollion FiOEAC,pour Wircheo-
logie et la chronologie.
Ce court apercu suffira, nous Fesperons, pour doniier urie
juste idee d'nn ouvrage qui doit interesser toules les personnes
quiontvisile ei qui visiteront la Collection de M. Passalacqiia,
ainsi que les savans , les artistes et les amateurs qni sent ja-
loux de connaitre I'hisloire des moeurs , de la science, des
arts et des superstitions du premier peuple civilise dela haute
anticjuite. E.
Memoircs et Rapports de Societes savantes et d'utilite
pitblique.
383. — Socieles des lettres , sciences et arts ,et d' agriculture
de Melz. iSaS — 182G. Melz, 1826; Laniort, ;mprimeur de
la Societe. In-8'^.
La Socieic des lettres , sciences et arts et d'agriculture de
Melz, dont I'existence date de sept annees , public la vii"^ li-
■vraison de ses travaux. TVous avons lu avec interet le discours
de M. Bergery , president; le compte rendu par M. Renault,
secretaire ; les rapports de M. Thiel sur le concours lltteraire;
de M. MuNiF,R , sur celui des cliarrues; de M. Anspach sur
les prodiiits de Tindustrle deparlcinentale. Nous-iucines nous
avons ele lemoins de I'exposition , la seconde de ce genre dans
le deparlement de !a ^^:oselle. On y distinguait plus paiticu-
lierement les produits chimiques de MM. Bouvier-Dumolard
et Kesslcr, les brodcries de M. Chedeaux , le.« crislaux des ver-
reries de Saint-Louis et de Meisental , la faience a couvcrte
meiallique de Sarreguemines, Irs fers et la fonte dc Hayange
et de Moyeuvre,des usincs de Falk, de Remeldorf, la quiucad-
leiie de MM. Mathieu el Somhorn. Plusieui-s objels on! frappe
raltention,comn)eannoncant de grands progres dans la fabrica-
790 LIVRES FRANCAIS.
lion , tels que les cuirs de M. Gillard, les draps de MM. Hirsche
et Collin-Comble. MM. Marechnl, Labrouc et qnelqucs au-
tres onl expose des tableaux qui ne sunt jias sans inerile. I-a
Soeiete academiqiie a provoque I'exposition Iricnnale des pro-
duits de I'induslrle; eliey decotne des inedailles, dans sa seance
publique; elie donneia, en 1827, des prix aux meilleurs nie-
inoires sur les questions suivantes : i** Diitsrininer le courbeque
forme une eau cournrtte en amont d'un barrage. 1° Quel est le
Sfsteine ct etudes publiques le plus propre a rendre la France
riche etpuissante. La Soeiete a propose, en outre, au recher-
ches des homines instroits et observateurs, pliisienrs sujels,
d'un intcret particulier au departement , svir la litteralure,
Tarchoologie , rhistoire, la geologic, la topographie , la sta-
tistiqne, ragriculture, rindustrie , le commerce; ceux qui
auront envoye des memoires satisfaisans, recevront des mi-
dailles d'encourageraent , ou le litre d'associc correspondant.
C'est en suivant une si bonne direction que la soeiete de Melz
aura bien merite de ses compatriotes, et iju'elle sera cilee
comme modele. L — t.
Outrages periodiques^
384. — * Bibliotkeque physico-economique , instructwe et
atnusante, ou recueil periodique de tout ce que I'agricnltnre,
les arts et les sciences qui s'y rapportent offrent de plus inte-
ressant, etc.; redige par Arsene Tuiebaud de Bernkaud,
secretaire perpetuelde la Soeiete linneenne de Paris, etc. T.xx.
Paris, 1826; Arthus Bertrand, rue Hautefeuille n° 23. Tous
les mois un caliier in-12; prix pour I'annee, 12 fr.
Le redacteur de cet ouvrage periodique recommande les
paragreles avec tout le zele de la conviction. 11 a pour ces ap-
pareils un enthousiasme qui semble exceder celui qu'une per-
suasion ordinaire peut inspirer; dans I'ardeur de sa foi, il se
ftche contre les incredules. Cependant, il faudra bien qu'il
s'accoutume a la contrariete que ce choc d'opinions lui fait
eprouver; car la question n'est rien molns que rtsolue, el le
meilleur conseil que Ton puisse donner aux cultivateurs, c'cst
d'attendre le resultat d'experiences failes avec soin par des
hommes habiles et qui n'aient point a soutenir une opinion
formee d'avance. .Tusqu'a present, il fautle dire, dans tout ce
que Ton a ecrit en faveur des paragreles, on ii'a Irouve que des
applications hasardees d'une theorie mal comprise, et les fails
cites a I'appui n'avaient nidlement les caracteres des experiences
bien failes. On a beau deciamer conire la science et contre les
OUVRAGES PlfcRIODIQUES. 79 1
savans presomptueiix ; la science ne merite peut-eire jamais plus
d'eloges etde reconnaissance que lorsqu'elle oppose la rigueur
de ses iiiethodes Pt la force dcs connaissances acquises a unc
certaine andace de conjectures et d'asserlions qui ne manque
jamais de partisans et d'ajjpuis , parce (ju'elle entraine I'iniagi-
nalion et seduit par sespromesses. L'inventenr des paragreles
rappeilerapeut-^tre, ]}0ur notre terns, I'aventure dupereLana,
inventeur des aerostats, comme Ton sait : en effet , I'art que ce
jesuite crut avoir invente fut trouve, long-tems apres, par
d'aulres nioyens, et avecle secours d'une science plus avancce.
Le probleme des ])aragreles est plus important a resoudre que
celui de la navigation aerienne : mais pour arriver a une bonne
solution, il nous fatidrait des connaissances meteorologiques
plus completes; il faudrait micux savoir comment la grele se
forme, a quelle hauteur sesgrains sent agglomer^setconsolides.
Quoi que puisse dire le redacteur de la Bihliothcque physico-
economique , les services rendus par les Societes d' assurances
contre la grele sent connus et calculables : I'effet preservatif
des paragreles est encore douteux. Quoique les plus habiles
physiciens de I'Europe espriment leurs doules sur la realile de
celte decouverte, cliacun est libre, neanraoins, de croirepour
son propre compte, et de faire dans ses domaines, soit en
paille, soit en fil metallique, autant d'appareils qu'il le veut;
inais ne serait-il pas convenable de s'abstenir de tout prosely-
tisnie, surtout dans les ouvrages pcriodiques? Jusqu'a present,
cette maxime a ete suivie par la Revue Encyclopediquc , pour
tout ce qui est de quelque importance ; nous abandonnons d'ail-
leurs a I'anarchie des opinions les sujels sur lesquels on peut
soutenir sans inconvenient le j)our et le contre.
Tandis que nous sommes disposes a une critique un peu
severe, retablissons dans la bonne reputation qu'il merite le
Ban de la Roche , ce canton des Vosges oil les voyageurs n'iront
malheureusement plus visiter le digne pasteur Oberlin. (Voy.
ci-dessus, p. 56() ). Get homme venerable fut , pendant un de-
mi-siecle, le bienfaiteur des liabitans d'une valleemontagneuse,
sterile , sans industrie. Mais pourquoi comparer I'hiver de cette
region a celui de la Siberie ? A qui persuadera-t-on qu'un sol
qui n'exclut pas les arbres fruitiers , et dont I'elevationau-des-
sus du niveau de la mer n'excede pas beaucoap celle de Geneve,
soit comparable a celui de Tobolsk ou de Berezovv'k? La poesie
meme n'autorise point de pareilles fictions; le panegyriste mal
avise qui a foiirni cetlo notice n'a pas une idee juste des fleurs
qui meritent d'orner le tombeau d'un homme vertueux.
385. — * Journal de la Societe d' emulation des Fosges , seant
792 LIVRES FRANCAIS.
a Epinal. Epinal, 1826 ; Gerard, imprimeur de la pr<?fecturc.
In-8° de 3 fcnilles ou 48 pages par trimestre; prix. 6 fr. pour
I'ann^e.
Ce rccueil tn'meslriel n'est encore qu'a son d(^but, et con-
tient deja des notices interessantes, des materiaux qui seront
rais enoeuvre avec confiance. Si les redacteiirs out soin den'ad-
ineitre que ce qui merite quelque attention et pcut accroitre
les connaissances utiles, ils auront bien inerile, iion-seulemcut
(le leiirs concitoyens.maisde la grande socielehuinaine, de tous
ceiix qui cultivent les sciences et les arts, ou qui en profitent.
Dansle troisieme numei'o (i" Irimeslre de 1826), on trouve
nn rapport sur les paraffreles fait a la Societe d'einulalion, le
8 mars, par M. Parisot, secretaire perpetuel de la Societe.
Apres avoir recueilli les observations que Ton dit avoir etc
faites en Italic , en Savoie et dans quelques lieux de la France,
Ic rapporteur essaie de les rattacher a la theorie de la forma-
tion de la giele : luals eette llicorie, telle qu'il I'expose, n'est
pas complete, et ne comprend ]ias meme les cas les plus ordi-
naires, ceux ou des gouttes de pluie out ete gelees dans I'air ,
non par le froid atniospherique, mais i)ar I'effet de I'evapora-
tion. Ce mode de formation des gouttes congelees est si con-
forme a I'enserable des faits physiques , et si universellement
reconnu, qn'on est surpris que M. Parisot ue voie dans la grele
qu'unphenomene clectrique, et se llvre aussi facilement a I'illu-
sion des paratonnerres, <ii\s paragreles. II est bien remarquable
qu'aucune des eicperiences que Ton cite ne puisse inspirer quel-
que confiance; que I'on n'y reconnaisse point I'oeuvre d'observa-
teurs instruits. Dans cet etat des choses , on doute , on n'admet
point, mais on laisse faire ; c'est le parti qu'ont pris les princi-
pales Societes savantes. L'invention des paragreles paraitfon-
dee sur une fausse physique : pour que ces appareils prodnisis-
scnt I'effet qu'on leur atlribue, il faudrait que Taction des poin-
tes ne se bornat pas a Telectricite, qu'elle s'etendit aux effets
j'urement raecaniques; qu'elle put arreter dans sa chute un
coips (|ui tombe, ou lui faire perdre sa solidite, afin qu'il ne
puisse nuire par son choc. M. Parisot s'est postc sur un terrain
fort difficile a defendre. Quant a I'instruclion pratique par la-
tpielleil termine son rapport, il serait certainement preferable
k lous egards de recommander uu autre preservatif centre les
desastres de la grele, un moyen cprouve dont la Suisse nous a
donn^ I'exemple : c'est une Societe d' assurance mutuellc contre
la grele. F.
H85. — Lc Producteur , journal philosophique de I' Industrie,
des sciences et des beaux-arts. Paris, 1826; Bossange pere.
OUVRAGES P^RIODIQUES. 79H
Tous les mois, un cahier in-8^ ; prix , So fr. jiour Tann^e*
( Voy. Hev. Enc, t. xxx , p. 543.— Mai i8a6 ).
Quoique nous ayons deja parle de cet ouvrage p6riodiqiie,
Dous croyons devoir appeler de noiiveaurattention de ros lec-
teurs sur le but qu'il veut atleindre, sur la direction que sui-
Tent ses redacteurs et dans laqiielle ilsannoncent la resolution
de se maintenir. Celtc direction est connue anjoiird'hui jiarun
nombie suffisant d'articles sur les diverses attributions du
journal: jiisqua ce moment, ni le prospectus, ni le titre n'a-
vaient pu I'indiquer avec assez de precision pour que I'ons'at-
tendit a voir decider, dans un sens determine, les questions
d'econoraie publique traitees dans le Produrteur. Comme le
mot philosophie est devenu parfaiteinent obscur, on ne voit
pas clairement ce que pent etxe un journal ph.ilosoph.ique,
raeme a I'aide de ce qui precede et de ce qui suit; or, il est
d'expericpce que les journaux sont plus tideles a lenr titre qu'a
leur prospectus. On Toit inaintenant que I'intention des redac-
teurs decc journal est d'etablir quelques principes fondaraen-
Jaux de la science sociale , de les rappeler sans cesse a Tatten-
tion des gouvernans. ce qui est a jieu pres inutile , des philo-
fo/j^ey, desccrivains, de tous les bommes capables de mediter,
ce qui est d'une utilita reelle. Le spectacle de I'esprit humain
cherchant la verite, et la trouvant, malgre les obstacles qw'on
liii oppose , malgre les fausses routes qii'on veut lui faire
prendre eties entraves dont on I'embarrasie, n'est pas moins
digne des regards de la Divinite que cehii de I'horarae de bien
aux prises avec le malheur. Les verites dont le Producteur
s'occupe avec un zele tres-digne d'eloges, qu'il voudrait mettre
hors de doute etrendre applicables a notre etat social, exerce-
raient en effet uue puissante influence sur le bonheur de I'es-
pece humaine: elies cbangeraient, et araelioreralent sensible-
raent le sort du plus grand nombre , banniraient des prejnges
inveteres, redresseraient les opinions, corrigeraient les jnoeurs.
Mais, plus ces resultats sont importans et desirables, plus on
est interessc a ne pas se meprendre sur les moyens de les ame-
ner. Nous pechons quelquefois par un exces de confiance dans
nos meikodesderaisonnement, quoique nous nepuissionsigno-
rer que ces methodes peuvent nous cgarer, et que leurs opera-
tions ont besoin d'etre soumises a un controle severe, a une
verification qui precede par une autre voie. Le pas le plus im-
portant que la raison humaine ait fail dans la science des me-
thodes, depnis Descartes, c'est d avoir sournis les probabiiites
aucalcul. dans les cas ou les eiemens de la question sont sus-
ceptibles de mesure ; et lorsque le calcul ne peut etre applique ^
79/. LIVRES FRANflAIS.
de cl;isser, d'apres uiie analyse assez cxacte, les opinions ])lus
ou nioins probables sur les sujels qui peuvenl en atlinellie plii-
sieurs. Hois du trcs petit noinbre de verites dont I'evidencc
est senile el reconnue par tout le monde, tout notre savoir n'est
compose que d'opinioiis probables sur les clioses et sur leurs
rapports entre elles et avec nous; et malheureusement, il
semble que le degrc de probabilile s'affaiblisse , a niesure (|ue
le sujct dont on s'occupe est plus grave el plus digne de iios
reclierches. La science sociale , si eliactait faite, serait la pre-
miere de toutes et la plus iniportanle par ses applications ;
nous ne pouvons endoutcr. Mais cette science repose sur une
autre dont elle n'est tpi'une application, c'est la science de
I'homme : et Oil en somnies-nous , dans la connaissance de notre
etre ? Avons-nous terniine nos observations, dispose les don-
nees jiour en apercevoir les rapports, les lois , la ibeorie ? Si
nous laissons en arriere toutes ces recberclies, et si, trop inipa-
tiens d'ari iver au but , nous adoptons pour llieorie un systenie
tres-plausible, mais qui ne pent etre demontre ; si nousraison-
nons constanimenl d;ins noire bypotliese, combaltant ce qui la
contrarie, et recevanl avec emprcssement ce quiliii est favo-
rable; a moins que nous n'ayons devirie la verite, nous nous
melirons dans I'lnipossibilite d'arriver jnsqu'a elle, et nous
I'empechcronsde venir jusqu'a noxis. Que lesdogmes politiques,
moraux, etc., s'etablissent apres les observations les plus exac-
tes etles plus comjiletes ; mais qu'lls ne les precedent point : si
nous soHJines encore dans le terns des observations, gardons-
nous de dogmatiser. On pourrait reprocher au Proclucteur une
inflexibilite de doctrines dont il est Lien difficile de se preser-
ver, lorsqu'on est intimement coiivaincu, mais qui nuil a I'ini-
pression que Ton pourrait faire sur les esj)rits qui ne partagent
point encore cette conviction. On voudrait non-seulement )e
trouver, mais le croire tonjours dispose a recounaitre le vrai ,
des qu'il se prcsenlera ; et cette disposition est ([uelque chose
de plus qu'une intention droite,pure, gf5nereuse ; elle consiste
aussi dans rapprecialionexaclc du degre de certitude des opi-
nions, el de la distance qui les separe de I'evidence, sans la-
qucUe une verite ne peul etreadmise comuie principe. Le P/o-
ducteur pent gagner beaucoup , operer })lus de conversions,
obtenir sur ro[)iiiion publique un ascendant plus salutaire,si ,
quittant la tribune pour seconfondre dans la foule de ceux (jui
chercbent la verite, il s'attache a diriger les observaleurs, a
remettre sur la voie ceux qui pourraient s'egarer, a recueillir
et a coordonner les decouvertes, afin qu'elles soient mise.s a
leur place dans i'edifice de la science. II peut rendre de trcs-
OUVRAGES PfiRIODIQUES. 79^
graiuls services. Ses redacteurs ont fait preuve dc falent , de
droiture, de tout ce qui peut assurer leur succes dans la belie
carriere oil ils sent entres ; pour que ieursinlentions ne soient
pas fromjjces, qu'ils exaininent avec une attention nouvelle ce
qu'est la science dont ils s'occupent, ce que nous sommes, et
comment il est possible de nous instruire. Independammentde
la part que I'aniour-propre se reserve dans le succes d'une en-
treprise litteraire , il s'agit ici de mener a bien une entreprise
consacree a I'instruclion des homraes : tout louable moyen de
reussir merite qu'on le recherche et qu'on rem[)loie ; lout ob-
stacle doit etre comb^ttu; et I'un de ces obstacles serait une
trop grande inflexibllite de doctrines.
Entre la litterature, on quelques-unes de ses branches, et
Ics beaux arts, I'analogie de pensees, de preceptes et d'influence
est si grande, que le Producteur rnt peut guere se dispenser
d'agrandir son cadre. La poesie , les chants nalionaux , les
croyances mythologiques ( il en reste plus qu'on nopense),
en un mot, tout ce qui modifie ]esproducUo>is intellectuelles ,
lui ajipartient de droit, et I'usage qu'il en fera ne peut que
contribuer a repandre I'ouvrage , et par consequent, a le reu-
dre plus utile. R.
382. — * Journal des misxions evangeliques. Premiere annee.
W I.Paris, 1826; H. Servicr, rue de I'Oratoire, n" 6.. In-8"
de 96 pages. Ce journal parait, tous les trimestres par livrai-
sons d'environ six feuilles; et, si le nonibre des souscriptcurs
le permet, il sera accompagne de cartes geograjjliiques et erne
de gravures. Prix de I'abonnement, 8 fr. pour la France, tVanc
de ])ort ; 10 fr. pour I'AUeraagne, franc de port; 8 fr. pour la
Suisse, franc de port jusqu'a la frouliere; 10 fr. pour les Pavs-
Bas.
Ce journal, public par la Societe des jnissions de Paris , est
destine a faire connaitre les travaux des serviteurs du Christ
qui propagent son cvangile parmi les peuples non Chretiens ,
et les succes qu'obliennent leurs pieux efforts. 11 comprend les
divisions suivantes : i° souvenirs des missions ancieunes; 2° mis-
sions evangeliques , ou journal proprernent dii ; 3° Sociele des
missions evangeliques de Paris; 4° varietes; 5** nouvellcs re-
centes. Le premier numero, que nous avons sous les yeux,
commence par une introduction dans laquelle les rcdacteiirs
exposent leurs principes en matiere religieuse , les motifs qui
les ont determines a prendre la plume , et le plan qu'ils se pro -
posent de suivre. 'I Nous mettrons a contribution, disent-ils ,
pour les faits que nous devons publier, les rapports et la cor-
respondance de toutes les Societes, et nous presenterons les
796 LIVRES FRANCAIS.
mt-comptes et les niaijvais sncccs apparens des ouvricrs cvan-
j^oliqnes, avec la meinc fidc'litc que Icurs triomplips et Iciirs
prosperites. Ce n'est ni pour servir I'inlrret tl'une secte reli-
gieuse , ni ])our flatter un orf;'jeil purciiient hiimaiii , que nous
conimencons cc recucil , mais ])Oiir nieltre en evidence la na-
ture et les effeis de I'Evangile, dont Ics conqHctes doivent
s'etendre « d'une jner a I'aiitre, et aux exlremitcs de la terre. »
On reniarque, parmi les nombreux articles qui suivent celte
introduction, un Precia hislorique sur lapropogntion du chrls-
liaiiismejusqu'fi In fin du xviti' xiecle ; et unc preiniore partie
d'une Notice nhrcgce sur I'originc el les progres des missions
principales. Les deux seclions '\\\\\\.xi\ii^%: Missions es'angcli-
ques et iiarietes Te.n{c\men\ une foule de traits curieux , de de-
tails inl< ressans , et de renseigneniens jirecieux pour I'hisloirc.
B.
Livres en langues etrangeres, imprirnes en France.
388. — La Venida del Mesias , etc. — La Venue du Messie en
gloire et en majestc; par Juan Josafat Ben Ezra, edition revue
ct augmentee de notes )>ar M. P. de Chabirobert. Paris, iSaS;
Parmentier. 5 vol.- 12 d'environ 3oo pages chaciin; prix , ^5 if.
389. — * Miscelanea de economia pofitica y moral, etc.
— Melanges d'economie politique et de morale, extraits des
OEuvres de Benjamin Franklin, et precedes d'une notice
sur sa vie; iraduits du fraiicais par R. Mangino, Mexicain, et
dedies a ses conciloyens. Paris, iSaS; Bossange. 1 vol. in-i8;
prix , 8 fr.
Cetle ti-aduclion, que nous fnisons connaitre tarl^ , j)arce
(iu'elle ne nous etait pas encore parvenne, a ete faite sur les
Melanges de Franhlin , jiublirs en i8'24 par M. Ch. Re-
NouARD,run de nos .collaboraleurs ( Voyez Revue Encyclo-
pedique , t. xxiv, p. 447. ) — Nous avons remarque avec
etoniieinent que le nom de Tediieur francais n'est mentionne
nulle part, pas mcme a la suite de la vie de Franklin, dont il
est I'auteur, et qui occupe G4 pages dans la traduction espa-
gnole. Toutes les notes sont egalrmcnt cojiiees, avccune grandc
exactitude, el meme avec une sorse de serviUtc. Ainsi, dans la
citation d'un cliapitre de In Bil)lc , Tedilmr avait dit en note :
« On a suivi ici, pour le texte, la traduction franeaise de Le
Maistre de Sacy; » le traducteur espagnol a reprodiiit fidele-
ment celte note qui Tigure assez singulieremeni; an bas d'un
texte f]ui n'esi ])oint en langue franeaise. C'est pousscr trop
loin la fidelite de la traduction. II fani, au reste, se feliciler de
cctfc propagation d'un des recueils les plus jjropres a inspirer
LITRES ETR ANGERS IMP RIMlllS EN FRANCE. 797
le gout de la vciluet ramour du travail, sous des formes
pleines d'enjouement , de finesse et de grace, el qui sera pro-
bableinent acciieilli avecfavenr dans les divers ctats dt- TAmd-
rique dii Sud. L'edidon francaise vient d'etre epiiisee; nous
rendrons couipte incessamment de la seconde cdilion qui est
considcrablement amelioree. C.
3(^0 — * Grammaire italienne , elementaire et raisonnee, pre-
cedee d'un traite de la prononciatioii toscane, suivie d'un re-
cueil d'itaiianisines et d'un travail nouveau sur le retranche-
luont dans les mots; par D. Martelli de Sienne. Paris, 1826;
J. M. Eberhart. In-S^jprix, 5 Ir.
L'auteur de cette nouvelle grammaire italienne s'est tenu en
garde a la fois centre la sechere^se de la methode de Vergani,
et coulre le prolixe etalage des theories de qtielques autres
grammairiens. Dans les regies qti'il propose, il a rtjete lout ce
qui lui paraissait arbitraire , pour ne s'appuyer que sur des
prin-cipes incontestablcs et sur I'autorile des ecrivains vrai-
ment classiques. Nous avons trouve pleines de justesse ses ob-
servations sur les pronouis et les adjectifs, et speciulement sur
les comparatiCs , les diminutifs , les augmeiitatifs et I'article. On
re pcTit qu'approuver aussi ce qu'il dit conccrnant le particine
et le gerondif. Nous remarquons avec plaisir le ton modeste de
sesleconsj il senible parloul preferer I'instruction de ses eleves
a sa propre gloire. Quoique les mellleurs gramuiairiens aienl
indiciue les mots susceplibles de quelques retranchemens, I'an-
teur a pris la peine de presenter tons les cas dans lesquels le
retrancliement peut avoir lieu. Quant a la prononciation
M. Martelli est tie Sienne; ce litre lui suffit pour obtenir toute
confiance dans cette partie de I'enseigDeraent de sa langue.
F. S.
391. — * Nouveau diclionnaire francais-espagnol et espa-
gnol-franQuis, avec la nouvelle orlhographe de I'Acadcmie
Espagnole, redigc d'apres Gattel , Capinany, Nunez, De-
TABOADA, BoiSTE, Laveaux ; suivi d'un Diclionnaire geographi-
que , etabli d'apres l.i division acluelle du globe; par Don Do-
mingo Gian Thapany ; et pour la partie francaise, par A. de
Rosily; revu par C/i. Nodier. Paris, 1826; A. Thoisnier-Des-
])laces, lue de Seine, n" 29. 2 vol. in-8^ de 852 et 1275 pa^es;
piix , 3o fr.
Ce diclionnaire se recommande par le soiu avec leque! il est
redige, par rindication des auteurs que Ton a mis a contri-
bution, par le nom d'un litterateur etranger digne d'estime,
M. Trapany , et par la cooperation d'un des bibliothecaires de
la capilale qui s'est place au rang de nos ecrivains les pins la-
borieux. Cet ouvrage devient surtout precieux et necessaire
798 LITRES ETRANGERS IMPRIMES EN FRANCE,
pour los nouvcaux Etats inil<5pendans de rAmerique du Sud, ct
pour tons Ics Europeens qui vont tenter la fortune dans ces
loiniaines conln'es sous les auspices dc Ja Jiberte. J.
3g2. — * Colk'cliu/i tlesclassiqiies latins, a. Tusage des classes
elementaircs et de grammairc , avec les sij^nes de quantiieet
riiidlcaiion des mots composes, precedes de quelques remar-
ques sur la prosodie et sur les prr-posileo/if: , considcr«5es sous
le rapjioVt -de la coniposilion des mots; edition publiee par
Mfll. Leroy el Prieur, piofesseurs au college royal de Saint-
Lonis. Epitome historicestirrce et Cornelius Nepos. Paris, i8a6;
Lassimc , nre de A angirard , n" Go. 2 vol. in - 18; prixde I'E-
pitome, 75 c. ; du Cornelius, i fr.
Les ediliens des classiques latins, qu'on a mises jusqu'a pre-
sent dans les mains des eieves, presententdes inconveniensplus
ou mollis graves , contre lestpiels les professeurs et les chefs
des etablissenicns d'inslruclion out fait dejusles, niais de vaines
rcclamalions. Dans les unes, le te.xte fourmille de fautes ; dans
les aulrcs, I'lniprcssion, le papier et le format sont egalement
desa^reables; dans toiites, on trouvedes details contraires aux
bonnes niocurs el c|ui mettent le professeur dans une ])osition
faclicuse, soil qu'il cherche pcniblement a en doguiser le sens ,
soil qu'cn les evitant , il excite , malgre lui, chez les eieves ,
une curiiftsite que cenx - ci finlssent par iFalisfaire. — En pu-
bliant In Collection que nous annoncons, MM. Leroy et Prieur
ont pour but, non-seulement de remedier aux ineonveniens
dent je viens de parler , mais, encore de soulager les professeurs
et d'aider les eieves dans leurs travaux : pour y parvenir , ils
ont marque In quantite de loutcs les syllabes qu ils regardent
comme essentielles; ils ont distingue, dans chaque mot com-
pose, par un caraclere different, le radical, du mot qui s'y
trouve joint. Par ces moycns , dontle second apparlienl entie-
reraenl aux editeurs, les eieves s'accoutumeront , des leurs pre-
miers essais de traduction, a prononcer les mots latins, sui-
\ant les regies de la prosodie, et ils auront le grand avantage
d'etre familiarises avec la quantite, lorsqu'ils s'occuperont de
versification ; de jilus, ils s'liabitueront de bonne heure a distin-
giier les radicaux des mots auxiliaires, a se rendre compte du
sens propre de cliacun, et de la modification qu'il apporte dans
le sens general du mot compose, connalssances absolument ne-
cessaires pour bicn Iraduire, et qui cependant nianquent a la
plupart des eieves.
.I'ai sous les yeux V Epitome historice sacrce e\. le Cornelius;
j'ai parcouru uuegtaude partie des texles, sans y renconlrerde
fames; le papier est beau, Timpresslon nctfe et agreable a
I'oeil. Les auteurs ont supprime avecsoin , dans ce Cornelius ,
LIVRES ETRANGERS IMPRIMIS EN FRANCE. 799
tout ce que la morale repiouve. La quanllte m'a pani notee
avec une grande pxaclitude; mais il est beaucouji de syllabes ,
les finales, par exemplc, sur lesquelles j'aurais desire la trou-
ver. Si MM. Leroy et Prieur ciaignaient de trop multiplier les
sigiies il fallait, ce me semble , qn'ils comprissent dans les Re-
warqiie.i sur la prosodic, placees en tete de chaque auteur, tou-
les les regies dont I'cle-veaura besoin poursnppleer aux signes.
Les Remarque.i sur la prosocUe sont siiivies A'Obsen'ations tres-
iililes .vf//- les prepositions et sur le role qu'clles jouent dans la
composition des mots. Les editcurs ont joint au teste les notes
ticcessaires pour en facililcr la complete intelligence. — De-
mandee depuis long-tems, executee par deux professeurs d'un
zele et d'un talent eprouves, confiee a un libraire actif et con-
sriencieux , la Collection des classiques ne peut manquer d'ob-
tenir un succes honorable pour ceux qui I'ont entreprise.
A. MlCHELOT.
393. — * La Grecia supplice; canzone. — LaGrece suppliante,
ode de M. Buttura. Paris, 1826 ; Jules Didot, aine. In-18.
3g4. — * LaCadutadi Missolorigi , etc. — La Chute de JMis-
solongi ; ode de M. Ange Brofferio. Paris, 1826 ; Firmiri
Didot. In-8°.
Ces deux odes prouvent les nobles scnlimens dont les Ita-
liens sont animes pour la cause des Grecs. M. Buttura, tres-
connu par ses poesies lyrlques , annonce le sujet de son ode
par cette epigraphe, qu'il a tiree des Supplians d'Eschyle :
« Grand Dieii ! n'attendez pas pour avoir pitiu de nous qu'il
ne sait plus Icms de nous secourir. « II voit avec surprise
que, pendant qu'un peuple chrctien, a qui nous devons les
premiers prcgres des lumieres et des arts, fait des efforts
magnaninics pour briser ses chaines ; le noble Anglais, le
gencreux Francais etlebon Allemand demourent en quelque
sorte Iranquilles teraoins de ce spectacle d'horreur. II fremit
d'apprendre que les vierges de Sparte et les cnfans d'Argos
sont traines par les navires des calholiques pour etre livres a
la brutallte du feroce Mnsulman. II regarde comme conpables
du racme crime ceux qui le tolerent , et ceux qui le favo-
risent ; et pendant qu'il renouvelle ses reproches , il met sa
confiance dans la verite qui descendra du ciel , pour elairer
les peuples et leurs princes sur leiirs devoirs et sur leurs
vrais interets. II ne cesse de poursuivre ce raonsire , qui
a jusqu'ici usurpe le nom de raison d'Etat ; il prie cnfin
la verite de faire ])enctrer une fois son flambeau , dans le
conseil des rois. — Le jeune M. Brofferio , anime du meme
sentiment, adresse ses vers au venerable philhellene Alex,
8oo LIVRES fiTRANGERS PUBLICS EN FRANCE.
Lameth, I'un dcs membres les jdus actifs du comile grec de
Paris. II semble parlager cette noble j)assion qui a prcduit
lant de vertus tliez les anciens Grecs et que Ton voit revivre
dans leurs dcsceiidans. II croit apercevoir de noiiveanx Tli<S-
inistocles el de nouveaux Lconidas. Mais, voyant tanl d'ef-
forts g^ncreux paralyses par le ilonibre des eiuieiiiis et par
la cooperation de cena qui devraient au conlraire i)roteger
les Grecs, il invoque la malediction du ciel contre ces Chre-
tiens qui ont vendii leurs bias aux interels de Mahomet ,
pour contribuer a !a destruction de leurs fi eres. F. S.
SgS. — * Z«r/ Elegici'n ilber und nach Mlssolonghl ' s Ftdl.
— Deux elegies composees avant et apres la cliule de Misso-
longhi; offerles gratuitcment aux amis des Grecs avee cede
note : Ce que V on seralt parte a offrir volontaircment en pai-
nient de cette production doit etre apporte dans les caisses de se-
cours et d'assistancepour etre employe au secours des rnalheureux
Grecs. Paris, i8a6; de I'lmp. de Smith. In-8*^ d'unedemi-feuille.
Un Alsacien qui hablte Paris et fjui culiive avcc un egal
succes I'eloqucnce francaise dans I'exercice d'edifiantes fonc-
tions religieuses et la pocsie allemande, dont il consacre encore
les accens a la philantropie et a la verlu, a compose, il y a
quelqiie tcnis des stances elcgiaques surla mort du genera! Foy,
(voy. Rev. Enc, t. xxix, j). 565) Aujourd'hui le meme ecrivain,
en voyant I'aifreux abandon de I'heroique Missolonghi par
les etats chretiens, en assistant pour ainsi dire a la chute et a
la destruction de celte ville infortunce, ne pent relenir son in-
dignation et sa donleur;lalyre quiavaitcelebre la perte precoce
d'un illustre et eloquent defenseur derhnnianite nedevait j)oint
restermuette surune des plusrevoitanteseldes plus deplorables
catastrophes qui I'ait affligee depuis long-tenis Comme la pre-
miere des productions du poe'te alleniand, celle-ci tfst pleine
de sentiment, d'iniagination, de force et d'harmonle. La courte
citation par laquelle nous terminerons cet article perraettra
d'en juger : « Quand pour la justice et pour la liberie un peu-
ple se reveille, la tyrannic peut I'egorger , mais elle ne pent
i'enchainer davantage. Noble peuple d'Helenie, tes destinees
s'accompliront : au milieu des dangers et des hasards de la
guerre sacree, tu sauras reconquerir ton antique honncur, et,
soutenu par le dieu de lavevite, obteniravec la victoire la li-
berie et la paix Courage et esperancc! Les regards altentifs ,
les voeux et les esperances despeuplcs de la terret'accompagne-
ront , et pour ihacun de tes lieros qui succombe croit ici- bas
deja une palnie d'iminortalite. >> M. B.
IV. NOUVELLES SCIEN TIFIQUES
ET LITTERAIllES.
AMERIQUE SEPTEIYTRIONALE.
£tats-Unis. — New-Harmony. — Societe cooperative. —
Extraitd'une lettre adressee par un genereux philantrope,/otc-
daleur de beaucoup d'ccole» et d'dtablissernens de bienfaisance
et d'utilite, au Directeur de la Revue encyclopediciue, en date dn
lijuilletiSuQ. (Voy. Rev. enc.,\. xxvi, p. 27o,et t. xxvii, p. 886,
les details anterieurs siir I'etablissenieiit de NewHarraony. )
— Monsieur et ami, je suis restc cbez moi pendant pres d'une
annee, et j'ai fait quelques pas de plus dans mes recherches
sur I'ediicalion. J'al vu avec une vive satisfaction les succes
que M™e Fretageot a obtenus dans rinstruction des jeunes
filles , d'apres le systeme de Pestalozzi; M. Phiquepal a recu
aiissi beaucoup d'encouragemens pendant le peu de teins qu'il
est reste dans le voisinage de I'ecole de celte dame. (Voy. Rev.
Enc, t. xxviii, p. 938.) Quand M. Robert Owen forma son
ctablissement a New-Harmony, M"" Fretageot et M. Phi-
QDEPAL abandonnerent leur entreprise qui etait avantageuse ,
pour enseigner a New- Harmony, ne recevant en echange que
leur nourriture et leur habillement, selon le systerDe de la So-
ciete cooperative , et satisfaits dccontribuer a une aussi grande
amelioration. — Nous avons tons passe les cinq derniersmols a
New-Harmony, et nous y avons elabli une ecole d'apres le
meme systeme. Nous -avons achele de M. Owen les batimens
dont voici le detail : 7 grandes maisons en briques , de 60 sur
40 pieds chacune, pour cequitient a la nourriture des enfiins ;
8 ou 10 maisons plus petites en briques, pour les professeurs
qui sont maries, etc.; 10 ou 12 maisons en bois, a I'usage
des artistes attaches aux ecoles ; 1 vastcs granges et ecuries
pour Vecole experimentale des fermiers ; une grande eglise ,
changee en atelier pour I'instruction des garcons dans les arts
utiles; une salle pour servir de Musee, pour les cours et les
lectures, les concerts, les conversations, les esercices et les re-
creations.— On aurait assez de pbce pour 800 ou 1000 enfans ;
il n'y en a encore que 3 ou 4oo, classes comme il suit : 100 , de
T. XXXI. — Septembre 1826. 5i
8oa AMfiRIQUE SEPTENTRIONALE.
I'ai^e (\e deux a cinq ans , sous la direction do M'"* Fr(5tagent ;
1 80 a 200, de cinq a douze ans , a I'ecolc de M. Naff, assislc
par ses quatrc filles el son fils, tons les cinq elcves de Pestalozzi ;
80 dans Tcglise , sons M. Pliiquepal , qui leur enseigne Ics arts
utiles, les raalliematiques , etc.
On est fonde a croire que toutes les ecoles seront bientot
pleines , tant a cause du bon jnarclie ( 100 dollars on 5oo fr.
par an, pour I'iiabillement, la nourrilnre et I'instniction )
qn'a cause de la solidito des connaissances qn'on y acrjuiert.
MM. Thomas Say , Troost el Lemur juofessent riiistolre na-
lurelle , la cliiniie et le dessin , etc. etc. M. Say arinlrntion de
publier son bel ouvrage siir I'entomologie ,avccdrs planches
coloriees. On a demandc a Paris el a Londres tons les mafe-
riaux ni'cessaires. Les detix fils de M. Owen , la faniille de
M. Applegatli sont deja a I'ecole , et nous altendons d'Angle-
terre des homines du premier talent, tons partisans du sys-
teme. — La communaute a achete de M. Owen 900 acres de
bonnes terres pour les ccoles experimentales des feimiers,
ou des garcons de lout age apprendront ct niettront en pra-
tique les meilleures inethodes d'agrieullure. Coux que dirige
M. Pliiquepal onl produit dans les six premieres semaines ,
une valeur de 900 dollars ( 5, 000 fr. ); ce qui fait espcrer
que les enfans se soutiendiont d'enx-iuemes par un travail
de qnelques heurcs par jour.
Tout ce que la coniniunaute avait aclietc de M. Owen
pouvait etre evaluc a 5o on 60,000 dollars; je I'ai mise en
etat de les payer comptant. J'ai saisi I'occasion de depeiiscr
mon argent, avant de niourir , en contribuant anx progres
d'un systcme que j'ai tonjours regarde commc le ])liis grand
blen que nies concitoyens puissent oblenir. Si je nVusse {)oint
adopte ce sysleme , j'aurais laissc passer ina fortune en
d'autres mains, sans avoir etc tcnioin des heiireux resultafs
de I'usage que j'en ai fait. M. Owen a ctabli sur sa ])ro-
priete trois societi's d'agriculture et de mecanique ; il esperc
en avoir dix ou douze autres avant peu de terns. Le sysleme
se repand de jour en jour. Cette egalite parftiite offre un
charme qui contrcbalance toutes les idees de fortune el d'ani-
bition ,et la sini]>le pensce de travaiiler pour sa nonrriture
rend chacun des membres de notre grande faniille cooperative
plus henrcux que la soif ardente et la perspective souvent
tronipeuse da gain dans la vieille societe. M.
■ — PmLAnELi'HjE. — Recherches philologiques. — Le
gouvernenicnt des Elals - Unis a donne des ordres pour
recueillir des vocabulaires de toutes les langues des tribus sau-
J
AMfiRIQUE SEPTENTRIONALE. 80^
vages de ces contrees. On y joindra des coujugaisons de
verbes et des phrases choisies (Sestinees a faire connaitre ]es
formes grammaticales des difiierens idioiues. Cette idee a ete
suggeree par M. Albert Gallatin , acluellement ministre des
Etats-Unis a Loiidies. D.
Canada. — Mont-Real, 4 juilLet 1826. — -Extra'U d'une lettre
adres.sce,par unvoyageur,a, M. Juli.ien, cleParis. — Je viens de
parcouiir le Bas-Canada, pour obseiver I'l-tat ])rese)it de cette
colonic encore francaise, sotis bien des rapports. Ma rapide
excursion ne m'a penuis de faire qne des observations super-
ficielles ; je vous offVe cependant quelques details.
La po[)ulation du Bas-Canada, qui, lors de la conqnete ,
n'elait que de 60 a 80,000 anies, s'eleve aujourd'hui a pres
d'un dcini-inillion. Sur ce nombre d'babitans, /|2o,ooo environ
sent d'origine francaise ; le reste est d'origine britannioue.
La langue francaise est parlee presque excliisiveraenl dans les
canipagnes , exeepte dans quelques ctablissemens qui sont en-
ticrement anglais, et qu'on appelle les Townships. Dans les
villes, les deux langues sont usitees ; inais ordinairement
chacun ne parle que la sienne. Cependant les personnes ins-
trultes et nieme des enfans parlent les deux langues.
La population de Mont-Real , et celle de Quebec sont 3
pen pres egales. Cliacune de ces villes reaferme de 9.2 a 23, 000
arnes. La population de tout le i)ays augmente rapidenient,
surtout par les raoyens naturels : il n'est pas rare de voir 10
et 12 enfans dans une famille.
Avant la revolution francaise, le penple du Canada etait
en general plonge dans I'ignorance, d'ou le gouvernement
ne cherchait pas a le tirer. L'influetice de cette revolution a
considorablement change I'elat des clioses a cet egard : elle a
fait refluer dans ce pays un grand nombre de pretres pros-
crits , surtout de la congregation de Saint-Snlpice, parmi
lesquels on remarquait des hommes dun grand nierite. lis
ont etc places dans les seniinaires et dans les colleges des villes
ou ils oat donne, a la jeuiiesse des classes superieures,une ins-
truction telle qu'on aurail jiu la reccvoir autrefois en France.
Cette education a forme des liommes qui se dislinguent main-
tenant dariS les places que les colons peuvent occuper , et sur-
tout an barrean. On remariiue M. Papineau , orateur de la
chainbre-basse du parlement colonial, et M. Viger , membre
de ce corps legislatif et avocat : tous deux resident a Mont-
Real. An barreau de Quebec, M. Vallieres de Saint-Real,
conselliei- liu Roi (^King's counsel ), brilie par son eloquence;
M. Plamonden, ^l plusieurs autres qui plaident aupies de lui.
8o4 AMERIQUE SEPTENTRIONALE.— ANTIIXES.
font voir que Ics Fiancais n'ont pas degt'iiere dans ce pays.
On pliiide iiidifferernment dans les deux liingiies. — Les bi-
blioiheqiies dcs avocats canadiens sont bicn fournies , aiusl
que les bouliques des libraires. Je demaiidai chez un libraiie
a Mont- Real, les Tropes de Dumarsais, et la Grarnmairc
generate de Sacy ; ces deux ouvrages me furent ])resentes
sur - le - champ. On imprime dans la meme ville un journal
lilteraire fiancais , in titule : la Bibliotheque canadienne ( Voy.
ci-desssus , page 680). La Revue encyclopedique n'elait pas en-
core parvenue a Mont-Real; je I'y ai fait connaJtre.
Le gouverneur des provinces anglaises de TAmeriquc du
nord, loid Dalhousie, d'une ancienne maison ecossaise, a
des principes liberaux. II a recemment ciabli a Quebec une
sociiite liticraire ct historique , qui doit s'occuper aussi de la
philosophic, et , quoiqu'il ne soit pas tres-riche, il I'a dotee
d'un revenu de cent lonis par an , de sa propre fortune. Cc
trait suffit pour le caracteriser. ^
Le Canada est pauvre en general , et il y a une gratide ega-
lite dans les fortunes, a Texception de quelques seigneurs,
qui profitent encore de I'ancienne coutume feodale. lis ont
des lots et ventes de 8 pour cent a chaque imitation , dcs cor-
vees , des moulins banaux , etc. e!c. Cependant le Canadian
prefere ce regime a celui des lois de la Graiide-Bretagne. II
lie veut pas, non j)liis, se meler avec la poj)ulaiiou an-
glaise. Les classes inferieurcs dii Canada sont toujonrs igno-
rantes; pen d'iiidividus savent lire et ccrire ; inais le gouver-
ment vient de pourvoir a I'elablissement d'ecoles primaires
dans toutes les paroisses: d'ici a i5 ou ao ans , on en verra
les fruits. D.
ANTILLES.
Irruption de la fievre jaune. — Cette redoutable contagion
a paru a la Basse-Terre de la Guadeloupe, desles |iremiers jours
du printems, apres plusieurs raois dune temperature exfraor-
dinairement froide , et avant que la chaleur fiit tres-forte. EUe
a fait perir plusieurs personnes le quatrienie joiir de I'inva-
slon , et le douzieme seulemcnt apres leur arrivee dansl'ile;
elle n'a pas meme epargne quelques-uns de ceux qui seni-
blaient devoir elre accilmales par un sejour de quelques annces
nux Antilles. La ville ou elle exerce ainsi ses ravages est assise
sitrdes rochersvolcaniqueSjloinde tout marccage etde ce qu'on
& Hesigne sous le nom de foyer d'infection. Un mois apres son
ANTILLES. —AMliRIQUE MERIDIONALE. 8o5
apparition, ellen'avait point encore gagne la ville de la Pointe
a Pitre, cpii, selon I'idee qu'on s'est faite des causes de la ma-
ladie, scniblerait devoir y ctre bien autrement exposiie ([ue la
Basse-Terre, puisqu'elle est environnee de paletuviers dont
I'ombrage epais couvre une vase noire, profonde et fetidc.
La Martinique vient d'offrir le meme phenoniene de I'exis-
tence de la fievrejaune dans la ville la plus saliibre, tandisque
celle oil I'air est impur en est exernpte. Le 25 juin dernlei , la
iiialadie ti'avait point encore gagne la ville du Fort-Royal,
(jui est cependant siluee autour du bassin du careenage, signale
conime ayant donne naissance au meme fleau, en 1690; et
preciseinent au contraire , le port de Saint-Pierre , qui n'est
soumis a I'influence d'aucune cause locale d'insalubrite ^ en a
ete infecte, quinze jours avant. Un batiment de guerre, qu'on
assure y avoir introduit la contagion, a recu ordre de mettre
a la mer sur-le-champ, sans doute afin d'arreler les effets de
la maladie , qui lui avait deja fait perdre un oflicier et plusieurs
matelots. II est presque superflu de remarquer que cette me-
sure sanitaire n'est fondee sur aucune idee reflechie, et que la
plus triste experience en a souvent montre le danger. II est
bien a regrctler que I'elude des moyens qui peuvent arreter
ce fleau ne fasse aucun progres ; et que chaque irruption trouve
sans defense , aujourd'hui, commeily a cent ans, les personnes
que leur devoir ou leur destinee exposent a I'atteinte meur-
triere de la contagion. A. Moreau de Jonnes.
AMERIQUE MtRIDIONALE.
Buenos- Ayres. — Imtrucdon publique. — Par un decret du 3
mai 1826, le gouvernement de celte republique a ordonne I'eta-
blissement immediat d'uneuniversite naiionale ouseront ensei-
gnees les lettres et les sciences. Les etudes preparaioires com-
prendronl : le latin et le grec; la philosophic; I'ari'.hraetique, la
geometric etl'algebre; la physique expcrimentale. II y aiira des
chaires d'economie politique, de droit public et ecclesiastique.La
Factilte de medecine sera composee de quatre professeurs; pour
I'analomie et la physiologic; pour la pathologic et la clinique
chirurgicale; pour la medecine legale; pour la matiere medi-
cale et la pharmacie. Le cours d'economie politique sera de
2 ans ; celui de droit public et ecclesiastique, d'une annce , et
celui de medecine ; dc 4 ans. Les principaux professeurs sont
deja nommes. Par deux autres decrels du meme mois, on a
form6 un corps d'ingenieurs-architectcs et d'iog^nieurs des
ponts-et-chaussees.
8o6 AM^RIQUE M^RIDIONALE. — AUSTRALASIE.
BuENOS-AYRF.s. — Monumeiit national. — Le congrcs de
celte republique a decid(5 qu'il serait ^levc sur la place de la
Victoire un monument a la moinoire des atiteurs de la glo-
rieuso revolution da a5 mai 1810, premiers fondatcuts de
I'indepcr.dance nationale. Ce monument consisleia en line
niagnifique fontaine , stir la base de laqueile sera gravee cetle
inscription : La Repuhlique argentine , aux auteurs de la re-
roliition Ju 25 rnai 18 lo. F. D«
AUSTRALASIE.
Nouvkllk-Gallks meridionale. — Progres de la civilisa-
tion.— Nous ])uisons, dans Ic Heraut de I' Orient ( Voy. Rev.
Enc. , t. XXX, p. 34/1. ) et dans la Revue britannique , qui nc
cite point ses autori!«(?s , les renseigncniens suivans : ils ])er-
meltront d'apprecier, sous divers rapporis, les progres dc la
civilisation dans nn pays, devenu digne de I'atlention des
amis des lumieres el de I'humanite. — A peine trenle ans se
sent ecoules depuis le preirier etablissement d'nne colonic
anglaise surj cos plages lointaincs; et deja tous les arts de la
civilisation europeenne y sont naturalises. Sydney, la capitale
de la colonic, et les vllles principales oni vn s'elever dans Icur
sein des edifices publics; des ponls ont «5te constriiits; des
I'outes ont etetracees, et des comintjnications plus faciles" ont
favorisi^ et siiniule les efforts de I'indnslrie naissanfc. Qnand
ces travaux furent termlnes , on pu! disposer d'un grand
nombre de prisonniers pour la culture des terrcs qui bientot
fournircnt a I'exp.ortation nne quantite considerable de grains.
I,es plantations de sucre etablics au port Macquarie sont trcs-
fiorissantes. Non loin de la riviere de Brisban" el de Morcton-
Bay, se trouvcnl des plaincs favorables a la culture de la canne
a Sucre, d.u cafe, du coton, etc.; les vins et les fruits de la
Nouvelle- Galles ont deja acquis de la renommee ; et procurent
un revenu considerable; lestroupeaux couvrent des padirages
immenses et donnent une laine d'une qualite supcrieure;
enfin , on est parvenu a fabriquer avec le coton sauvage
iasctepias cyriacus) une etoffe, cpii tient a la fois de la soie et
de la balisie, et dont on a expoi te, en i8a5 , une grande quan -
tite pour les marches de I'lle-dc-Fiance , dn Caj), et nierne du
Bresii. Rien ne reste slationnairc. Les progres que Ton fait tous
les jours engagent a de nouveaux efforts, et ils auront des re-
sultals plus brillans encore. — D'un autre cote, la moralite des
habitans p.irait avoir subi un pcrfectionnement ren:aiqnable;
et, si Ton en juge d'aprcs les rapports de la i)olice el des cours
AUp'RALASIE. — ASIE. 807
de justice, cetle terre d'exil n'est pas le theatre de crimes plus
noiubreux , que bien d'autres pays , en a])pareDce plus civi-
lises. Mais il existe, parmi cette population, composec d'ele-
mens lielei'ogenes, de graiids dissenlimens religieux. Les
mcthodistes , les unit.iires , Ics anabaptistes , el cinquante autres
sectes redanient des temples parliculicrs. — Un ecclesiastique,
professeur d'humanites et de niatheniatiques a Sydney, M. Lau-
rence Halloran, vicnt de publier sous ce litre : Proposition
de fonder a Sydney une ecole publique et gratuite de gran'-
maire [Proposals for the foundation and support of a public
free grammar schuol], une brochure dont ies vues nous
semblent dirigees vers i'utiiite publique. II propose, e.nire
autres choses, d'olablir, dans son ecole degrammaire, un exa-
men qui aurait pour resultat, chaque annee, I'envoi de trois
cleves, aux frais de I'ecole, a Oxford et a Cambridge : apres
avoir recu I'ordination, ils reviendraient remplir dans leur jjays
les fonctioiis dn miiilstere evangelique. — II resulte de ces fails
Cfu'une nouvelle contree est soumise a Taction bienfaisante
de notre civilisation, au milieu de mejs presque inconnues et
dans des parages ou Ton ne soupconnait mcnie pas , il y a deux
siecles, I'existence d'une terre habitable. De nouvelles decou-
vertes sembifnt proinettre encore une plus grande exiension a
la colonic de la Nouvelle- Galles meridionale; MM. Howell ct
Hume ont parcouru ie vaste Jjays situe entre le lac Georges
ef le Western-Port; ils ont reconnu que les lerres de cetle
partie du coiititienl; de la Nouveile-Hollande, loin d'etre stc-
riles comme on I'avait suppose, ])euvent devcnir d'une grande
fertilite, et que, si I'on Irojivalt un moyen de communi-
caiion enire ces plaines et la colonic, elles deviendraient
pour celle-ci une nouvelle source de richcsses. Ce n'est point
le gouvernement anglais qui negligera de pareils inoyens de
prosperite pour un pays soumis a sa puissance.
A— E.
ASIE.
Sumatra. — Crocodile apprivoise. — M. Anderson , charge ,
en 1823, d'une mission relative au commerce dans I'ile de
Sumatra , vit , pies de I'cmbouchure d'une riviere de cette ile,
un crocodile que les pecheurs avaient ajjprivoise. Get animal
elait de la plus grande laille, ile plus de six metres de longueur.
Son dos cpii s'elevalt un peu au-dessiis de I'eau , ressemblait a
uii rocher. II etait devenu sedentaire, et ne s'eloignait point
des iiabilations des pecheurs qui pourvoyaient largement a sa
nourritrire, en lui abandonnant les debris des gros poissons
8o8 ASIE. — AFRIQUE.
qu'ils preiiaient et prdparaicnt en les decoupanl. Le crocodile
lie inanquait jamais de venir a leur appel, pour prendre ses
repas, se laissait toucher partont, souffrait meme (|ue Ton
jouat avec sa formidable tete. Lorsque M. Anderson le vit
approcher de sa clialoupe, il voulut inettre en siirete plusieurs
objets dont lis craignait que I'animal ne fit sa ])roie : niais les
pecheurs le rassurerent, et lis attesterent qu'il ne leur prenait
jamais rien, et se contentait de ce qu'on lui jetair. II ne per-
mettait point que d'autres crocodiles frequenlassent le lieu
dont il avait pris possession , et soutenait par la force les
droits qu'il s'ctait altribues. Les qualites extraordinaires de
cet individu lui avaient attire la veneration des superstitieux
Malais. II serait a desirer que les observateurs etablis dans les
Indes orientales ne leperdissent pas de vue : les faits de cette
nature sont rares ; on ne peut les produire a volonte; ce sont
des hasards qu'il faut saisir, et qui peuvent conduire a quel-
ques decouvertes. Ainsi, par excmple, le crocodile apprivoisd
de Sumatra, si Ton continuait a I'observer, nous apprendrail
quelque chose de plus sur la duree de la vie de ces grands
reptiles. ( Quarterly Review. )
AFRIQUE.
Voyages scientifiqucs. — Arrcveedu majorl^MixG a Tomhouctou.
{Voy. ci-dessus, p. SaS.) — On arecuau bureau des colonies (a
Londres) des depeclies de M. Warrington, consul d'Angleterre ^
Tripoli; elles sont dalees du i8 juin dernier, et ellesannoncent
I'arrivcedel'intrepide major Laing an point central du commerce
inlerieurdel'Afrique, alavillede Z'owzioMc/ow.Ladale de sonar-
rivee n'estpas precisec; raais, d'apres I'epoque a laquelleila quit-
te Twat , il est probable qu'elle a eu lieu , vers le commencement
de fevrier. La premiere caravaiie qui viendra de Tombouctou
a Tri[>oli, donnera des nouvellesulterieures dela direction que
le major Laing aura prise, S'il n'e[)rouve nucnn retard en descen-
dant le Niger, nous entendrons bientot parler de son retour en
Angleterre : il est heureusement faux que la caravane , avec la-
quelle il voyageait, se soit dispersce, apresavoirquitteTveat. Ac-
couturae au climat africain, et arrive aTombouctou, ao commen-
cement de la belle saison,le major Laing est, selon nous, hors de
tout danger. Le courant du Niger le transportera rapidement
a I'ocean Atlantique, et il n'anra a traverser que des pays ou
le nom seul de la Grande-Bretagne lui servira de garantie.
Deux voyageurs anglais se trouvent dans ce moment dans le
coeur dc I'Afrique ( Voy. ci-dessus, p. 527), et y sont par-
AFRIQUE. — EUROPE. ILES BRITANNIQUES. 809
venus par deux points opposes : c'est ainsi que de grands et
d'importans projets se realisent, quand I'execulion en est con-
fiee a des honimes judicieux et instruits. On n'a recu aucune
uouvelle de Claiterton, depuis celles quiannoncaient sonar-
rivee a Sockatoo ; mais le vaisseau de guerre la Depeche , venant
de la baie de Benin, en a apporte qui, hien qu'anterieures a
cet evenement, sent importantes , en ce qu'elles font connaitre •
la route suivie par Clapperton , ct sa marche sur Sockatoo.
Le 7 mars, il etait a Kalangah, capitale de Yarba ou Yarriba,
pays conrigu a Nyffe; il se disposait a partir pour Kiama, et
dela pour Wanva et Youri, distant de l\ jours de marche de
Wanva. II doit ainsi passer dans I'endroit ou perit I'infortune
voyageur Mungo-Park.
( Extrait de \' Oriental Herald. Sep. 1826. ) C. D.
EUROPE.
ILES BRITANNIQUES.
LoNDRKS. — Ecoles primaircs. — Extrait d'une leltre. — J'ai
visite les ecoles de Londres : en general je les ai trouvees au
dessous de I'idee queje m'en etais forraee d'apres quelques ar-
ticles du Journal d education. Souvent elles sonl bruyantes, et
les verges n'ont point encore disparu. Les mailres de village,
qui acconipagnent leurs eleves a I'eglise, ont a la main une lon-
gue baguette, et, raeme pendant roffice, le moindre desordre
est severement puni.
UEcole normale [British School') , etablle en 1817, dans un
batiraent special , comptait, il y a nn mois, 5oo garcons sous
Ja direction d'un seul maitre, nssiste de quelques jeunes gens
qui se deslinent a I'enseignement. Des missionaires y viennent
chaque jour litudier la methode pour la porter ensuite dans des
contrces loinlaines. Quoi que celte ecole soil fort bien tenue ; je
dois cependant observer que je n'y ai point remarquu cet or-
dre admirable, ce parfait ensemble dont nos journaux ont tant
parle. En France, noire extreme politesse et le desir de bannir
un etroit esprit de patriotisme, nous portent souvent a ne pas
assez apprecier ce que nous possedons, et a accorder a nos voi-
sins une preference qui n'est jias toujours meritee. Je connais
les ecoles de Paris; et il y a peu d'annees j'ai eu I'occasion d'as-
sister aux exercices de quelques ecoles departementales qui re-
sistaient encore a I'orage; je puis affirmer, sans la moindre
prevention nationale, qu'elles pouvaient avantageusement sou-
tenir la comparaison avec les ecoles anglaises. Celte superiorile
qui, en ma presence, a ete reconnue par des etrangers, doit dtre
8io EUROPE.
attribni'c atix obstacles qui sesont opposes a rintrodiiction dcs
methodcs dc Bell et de I^nncastcr. Lesattacpiesdont elles ont etc
I'objetont force a prevenir los objections, en faisant ecarieravec
plus de soin tout ce <]ui pouvait donner naissnnce uux abus. De
leur cote, les maitres se voyaiit entoiires de visileurs dont les
dispositions pouvaietit n'etre pas bicnveiliantcs, et toujours en
■bultc atix petiles intrij^iies et a la nicdisanee, no laissaient p:is
rallentir leur zele, qui, d'aillem-s reccvait une honorable re-
compense dans les eloges de la Socieic d' education. G.
— Socicte des ecolcs pour la Grande - Brctagne et Vetran-
ger. — Appcl fait au public en fa\<eur des Grecs. Get ap])el ,
impiime a Londres en ^rec et en francais, a pour btit d'ex-
citer le zele des Pliilliellenes de tousles pays, et de les engager
a concourir aux effortsde la Societe anglaise des ecoles , afui
d'operer la regeneration morale du pcnple grec. Ce penple,
si etonnant parson intelligence comme parson courage, et que
rendent iiiteressanl ses niallieurs ainsi que sagloire, porle en-
core neanmoins les sligmates de ses fers , et de la barbare igno-
rance a laquellele condamnaient ses oppresseui'S. C'est a ['edu-
cation qii'il est reserve d'effacer les traces d'une longuc ser-
vitude. Deja depuis i?>i'\ , plnsieurs jeunes Grecs ont recu a
Londres, dans I'ecole centrale, Tinslruclion necessairc soit pour
propager I'enseignement a leur retour dans leiir patrie, soit
])our y remplirdiverses fonctions. La Societe britanniqnesepro-
pose surtout I'etablissemenf , sur plusieiirs points de I'Hellade,
d'ecoles dirlgees d'a[)res le systeme anglais. Dans ce dessein la
Societea fait iinprinier, tant sous la foraie delivres qu'en fcuilles
scparees, les lecons en usage dans ses ecoles centrales; mais
pour accroiire ses ressources trop limitees, elle invoque le zele
des amis des (irecs, de la religion et dcs Inmieres. On sent que
I'instruction des m.iitres et des inaitresses d'ecoles, les frais de
leur passage en Angleterre et de leur retour en Grece, enfin
['impression des iivres elementaires destines aux ecoles, exi-
gent des fonds considerables. Les comniunlcations du comite
avec les deputes grecs a Londi'es, et avec le gouvernement grec,
I'ont eonvaincu des va'ux des Hellenes pour une cooperation
active a ces projets bienfaisans. A. deY.
— Etahlixxement d' un Musee national. — Le nombre toujonrs
plus considerable de ceux qui se consacrenl aux arts du dessin,
est justifie y)ar les besoins nouveaiix de ces arts, qui n'avaient
gueres autrefois d'autre destination que d'orner les palais des
rois. Des peuples fpii demeuraient presquo etrangers a Tamour
des arts , en apprecienl mainlenantles chefs-d'oeuvre. II est pen
de voyagenrs russes qui ne reniportent dans leur patrie dcs ta-
ILES BRITANNIQUES.— RUSSIE. 81 1
bleaux de I'ecole francaise. Les riches ])atriclens de la Grande-
Brelagne se sont apercu que )e luxe d'une galerie de peinture
etail Ic seul qui manqiial a leurs delicienses resiliences. Le gou-
vernement anglais, altentif aux progres de la civilisation et du
gout , a ouvcrt aux artistes do I'Europe une sorte de debouchc
nouveau. Abandonnant en cela les habitudes du pnritanisme,
il a ordonne I'elablisscmerit d'un Musce national, et il a fait I'a-
chat de la belle collection d'Angerslein. On vient d'y ajouter
des tableaux des plus grands niaitres : une Sainte-Faniille, du
Corregc , achelee 91,200 fr. ; une apparition du Christ a saint
Pierre, apresle crucifiement , par Annibal Carrathe ; Bacchus
et Ariane, par Tilien; un paysage de Rubens; un paysan es-
pagnol , ]iar Murillo ; une scene de Bacchantes, par Le Poussin,
etc., etc. Les soinnies considerables dont ce gouvernement veut
disposer pour accroitre cette galerie , ne tarderont ])as a y ras-
seinbler ce qu'il y a en Europe de bons tableaux disponibles,
et il y a lieu d'esperer que I'ecole contemporainey sera admise
apres ce qu'on aura pu se procurer des chefs-d'oeuvre du dernier
siecle. A. Morkau de Jonnes.
RUSSIE.
Academic de Saint-Petersbotjeg. — Cette Societe , malgre
les pertes recentes et cnielles qu'eile a faitcs ( voy. T. xxx ,
p. 558 ), cornnte encore un grand nombre de raembres distin-
gues dans son sein. Son i)resident, M. Ouvarof , s'est fait con -
naitre par des travaux interessans sur la litlerature et Vanti-
quite des Grecs. M. Fr-ehn est considere comme un orientaliste
du premier ordre et comme un nuinismate d'une haute distinc-
tion ; tout le monde connait les services qu'il a rendus a i'etude
des manuscrlts et des monnaies qui nous sont venus de I'Orient.
Les travaux de M. Storch sur Vcconomie politique , et spe-
cialement sur les finances, sur la situation de la Russie pendant
le regne d'Alexandre, sur la ville de Saint-Petersbourg et sur
ses environs, etc., ne sont pas inconnus en France. M. Kjjhler ,
conservateur de I'Erraitage, se distingue par ses profondes
connaissances en nurnisnuitique e.tex\ archeologie. EiM.Krug
a contribue, par ses laborieuses rccherches, a debrouiller
I'ancienne histoire des Rnsses. M. Gr.efr est un helleniste dis-
tingue : on regrette qu'il n'ait pas a TUniversite les moyens
convenables pour tirer parti de ses vastes connaissances. Ces
savans et plusieursautresacademlcienssontd'origineallemande,
inais I'Academie coinpte aussi parmi ses membres plusieurs
savans nationaux. Elle lient une seance le lundi de chaque se-
8ia • EUROPE.
maine et ses membres y font tour a tour des lectures, lis sent
charges quelquefois de resoudre des questions que le Minislere
lenr propose; ils veillent aussi aux eludes des c-leves dont I'edu-
cation est coiifice a rAcademie, elparmi iesquels ellese recrute
en partie. Comme on le voit, I'organisalionde cetinstitutscien-
tifique et tres-differcnte de celle des autres corps litlcraires de
I'Europe.
DoRPAT. - — Encouragetnens accordes aux sciences. — L'em-
pereur de Russie vicnt d'accorder a M. Parrot, conseiller
d'etat professeur a I'universlte de Dorpat et jihysicien tres-dis-
lingue , une pension de 5,ooo roubles , a I'occasion de sa relraite
comme professeur emerite. II est autorise a faire usage du ca-
binet de physique qui jusqu'ici avait ete confie a sa direction,
et a reglcr I'emploi de la moitiedes somnies assignees pour ce
cabinet. Sur la proposition du comte de Lieven, curateur des
etablissemcns litteraires du district de Dorpat, rempereur a
aussi accorde a M. Engelhaudt 6,000 roubles et a M. Lede-
BOUR 10,000 ponr entreprendre des voyages mineralogiques et
botaniques dans I'interieur del'empire de Russie : cesdeus savans
sont professeurs dans la meme universite. J.-H. S — r.
NORV^GE.
Christiama. — Phenomene vegetal. — Le pisang [Mus apa-
rarUsinca) est aujourd'hui (aS decembre iSaS) en pleine florai-
sondans lejardin debotaniquede I'liniversite de cette capitale.
C'est la premiere fois que ce phenomene a lieu en Norvege.
Christiansand. — Societe biblique. — Fondee le 3i octobre
1824, cette societe comple aujourd'hui lyi membres, sans
comprendre les fondaleurs. Elie a dcja pris des mesures pour
<]ue la Bible entiere, et pour qu'en particuller, le nouveau Tes-
tament juiissent etre vendus a des prix tres-raoderes.
Necrologie. — Arentz — La -ville de Bergen vient de perdre
un de ses citoyens les plus savans et les plus dlstingues. M. Fre-
deric Chretien Holberg Arentz, petit-neveu du celebre Hol-
herg, estmort, a lage de pres de 90 ans, le 3i decembre 1825.
M. Arentz a profess^ pendant 64 ans a I'ecole publique, ou
au college royal de la ville de Bergen, dont ii a ete le recteur de-
puis 1781. Plusieurs de ses eleves ont fait homienr a leur pro-
fesseur et a leur patrie. Cree chevalier de I'ordre de Danebrog
en 1810, M. Arentz a laiss6 plusieurs ouvrages, et des ni^-
moires interessans. Heiberg.
ALLEMAGNE.
Dresde. p— Societe pour la propagation des sciences natu-
ALLEMAGNE. 81 3
relies et medicales. — La fondation de cetle Soci^te date deji
de plusieurs annees : elle est due aux professeurs de VAcade-
rnie de chirurgie et de medecine etablie a Dresde. Reunis a
plusieurs autres raedecins ou amis des sciences nalurelles , ces
savans se proposerent de seconder dans leur patrie les progres
de la branche des corinaissances humaines a iaquelle ils consa-
craient leurs etudes. Leur but etait de s'aider mutuellement
dans leurs recherches et dans leurs travaux respectifs, d'en-
treprender en conimun des ouvrages qui demanderaient un
concours plus elendu de soins et de lumieres, et parliculieie-
raent d'etudier d'une maniere approfondie les produclions
natiirelles de la Saxe. Si !'on en juge par les 110ms bicn connus
etparles talens deja eprouvts de plusieurs de scs membres, celle
societe doit atteindre son but. Quelques etrangers ont ete ap-
peles a en faire partie , soit coraine membres correspondans ,
et afin de lui communiquer les resultats les plus curieux et les
plus importans de leurs observations, soit comme membres
honoraires. Ces derniers ne sent point comme les premiers,
engages a correspondre regulicrement avec la societe, ils sem-
blent plutot destines a etablir entre elle et les institutions scien-
tifiques des pays etrangers, une sorte de confraternite que la
poursuite commune d'un meme but d'ulilite generale ne peut
manquer d'affermir, meme chez les nations les plus etrangeres
les unes aux autres par leurs moeurs et leur civilisation.
— Nomination academique. — Cette societe vient d'en-
voyer avec une leltre de son secretaire M. de Carus , en date
de Dresde, du 28 juin dernier, et par les soins d'un de ses
membres, M. IV.-G. Lohrmann, in^ecteur du cadastre du
royaume de Saxe , un diplome de incmbre d'honneur a M. Marc
Antoine Jullien, de Paris , auteur de plusieurs ouvrages esti-
mes traduits du francais en allemand : Essai general d' educa-
tion; Esprit de la methode d'education de Pestalozzi; Essai
sur I'emploi du terns, et livrets pratiques d'eniploi du terns
(Agenda general et Biomelre ); Notice historiquecthiograpJiique
sur le general Kosciuszho ; Esquisse d'un essai sur la philoso-
phie des sciences, etc., comme un temoignnge de I'interet
quelle porte a la Revue Encyclopedique el a son fondateur,
et de I'iraportance qu'elle attache a ce recuell qui etablit un
moyen central de corrcspondance entre les savans et les amis
des sciences de lous les pays. N.
ViENNE. — Theatres. — On a joue surle Leopoldstadt Thea-
tre une piece doiit la music[uc est due au maitre de chapelle
Gl.eser. Elle est inlitulee le Diamant du roi des esprits et tiree
de la mine inepuisable des Millc et une nuits. Les journaux out
8i4 EUROPE.
fait un m.igni(i(iue eloge tie celte composition niusicale et out
critkinc tres-vivement le poeine : si nous le jugeons par plu-
sicurs des ouvrages alleiT.ands en ce genre, nous serons assez
disposes a nous ranger a I'avis du public viennois. On rt com-
pare la niusique du Diatnant, par rapport an poeme , a Vlliude
(i'Honiere impriniee sur niauvais papier. Celte comparaisou
nous pronve que, tout en critiquanl les poeines de Icurs opera ,
les Alleniands y altachent bien peu d'iniportance.
Un autre ouvrage, dont la inusique a fail moins de bruit
que cello du Dininnnt, niais dont les paroles ne valent pas
mteux,a paru, sur le nieme theatre, sous le tilic du Tcufelsstein
in Mcedli^cn: la nuisique est de M. Wknzf.l Mulleu, mailre
de chapelle.
Mi'^DoTTi, eleve de I'ecole francaise de M. Choron dans le
terns ou celte inslilution etait destinee a former des sujets ])Our
les theatres lyriques, a obtenu un tres-grand succes dans le
role de Turicrede qu'elie avail choisi pour son debul.
Berlin. — Thcdlres. — Lorsqu'il fut question de rcpre-
senter a Pariset dans los aulres villes de France des opera pa-
rodies sur la niusique des pieces etrangeres, cerlaines gens
crurcnt les theatres lyriques francals perdus, si Ton y naturali-
sait des coinjiositions ecrites en Alleinagne ou en Italie. Un
amour-]iro])re nalionai si deplace etr.it assurement bien peu
honorable pour nos coinpositeurs , puisqu'il semblait les sup-
poser incapablcs de soulenir une lulte avec ceux des autres
pays. Les homines qui ])rofessaienl une telle opinion ignoraient
sans doute que, depuis fori long-tenis, nos meilleurs operas
etaient traduits et joues avec succes en Allemagnc et en Atigle-
terre. Tout ri'ceninienl encore Euphrosine et Coradin de
Mehul et le Macon de IM. Auber out etc accueillis avec une
grande faveur sur le Koenigliches Theater de Berlir;. La Dame
blanche , derniere yjroduclion de M. Boieldieu uioi^itee sous les
yeux et par les soins de M. Spontini, obtient dans celte ville
la meme vogue qua Paris. J. A. L.
SUISSE.
Geneve. — Societe cantonale de physique et d'kistoire na-
turcU.e. — Parmi les institutions qui contribuent a propager
en Suisse I'etude de la nature, aucune n'a rendu plus de ser-
vices a la science rpie \a.Socicte de physique et d'histoire nntu-
re//e. Fondee en 1786, par des honiraespleins de zeleet d'amour
du bien, MM. Deluc , Sennebier , J urine , Tingry , Tollot .
NecJicr. Odier, Micheli, Pictet{ Marc), Huber{ Francois),
SUISSE. 8i5
Voucher, Colladon et Gosse , e)Ie se d6ve!oppa sons les aus-
pices des Bonnet ftX. des Saussure, qui vivaient encore a cette
epoque. Des niemoires du plus grand inleret,et ]>idjlics dans
les divers jouriiaux scieiitifiques, attestaient racliviledcs rnem-
bres de cetle societe. Dans le pelit jardin de botaniqueanpi-es
de Saint-Leger, plusieurs colleciior.s de j)ioduits uaturels se
forinerent, et des observations raeteoioloi^icines fureni recueil-
lies. Malbeiireusement , les circonstanccs ])olitiquts qui ai^i-
taient alors I'Europe interrompirent ces travaus. Sous le goii-
vernement imperial, plusieurs causes rendirent difficiles et
rares les communicalions de la societe. C'esl alors cjue (]uel-
ques uierabres formerent une nouvelle reunion , sous le litre
de Societe ties natuiallstes. Enfin, une nouvelle ere conimenca.
La Societe de physique et d'histoire naturelle prit plus d'ex-
tension , \A\xs de fixite; elle s'adjoignit de nouvenux niembres,
et elle adopta de nouveaux leglemens. En i8i5 , elle devint le
noyau de la Societe Helvetique (voy. Rei'. Enc. , t. xxix, p. S79);
ses divers raembres ont contribue a la creation de plusieurs eta-
blisseniens utiles, du nouveau jardin de botaiiique , du musee
d'histoire naturelle, du cabinet de physique et du laboratoire
de chimie. Le gout des sciences naturelles est deveuu, pour ainsi
dire, populaire dans notre ville. La publication des meinoires
dela Societe, depuis 1821, n'apw qu'ajouteralaconfiance qu'elle
inspirait. Elle se compose de membres ordinaires residans, dont
le nombre est limite ( ils sont 37), el d'un uoinbre indctcr-
mine de raembres honoraires , ( ils sont aujourd'hui 63). Le se-
cretaire est annuel, mais reeligible. Les seances ont lieu deux
fois par mois; elles sont alternativement partlctilleres aux
membres residans, ou generales et communes aux elrangers
qui y sont introduils par les membres ordinaires. Les fouds
de la societe se composent de contributions annuelles que four-
nit chaque membre. { Journal de Geneve. )
Arau. — Enseignement industrlel. — Deux cltoyens de
I'Argovie, convatncus par le sijili[)le bon sens et par I'expe-
rieuce des pays florissans que rien ne contribue plus a perfec-
tionner les arts et metiers et a les faire honorer qu'une ecole
industrielle, viennent de jeter les fond«niens d'une institution
de ce genre pour la ville d'Arau. II y a peu de semaines,
M. Charles Heuose , d'Arau , a donne a sa ville natale une
somme de 25, 000 fr. de Suisse pour la fondaiion d'une ecole
industrielle. Un autre bourgeois de la merae ville, M. le colonel
HuNziKER, membre da conseil municipal, qui avait concu la
meme idee, a joint a ce don une seconde somme de 25,ooo fr.
Les deux fondateurs ont stipule forraellement que I'institution
8i6 EUROPE.
demeureraitexclusivementet pour loujours consacree a former
de jeunes artisans, sans pouvoir jamais ctre detournee de ce
but. A cet effet i!s ont plac(5 leur fondatlon sous la surveillance
de I'autorite municipale. La bourgeoisie d'Arau, louchee de la
generoiite de sesdeux concitoyens, a appris avec plaisir que le
conseil municipal s'etait fait aupres d'eux I'organe de la re-
connaissance publique. Le aS aout a neuf heures du soir, tous
les artisans d'Arau se rassemblerent sur les remparts , aux por-
tes de la vilie et parcoururent les rues avec ordre et en silence ,
a la lumiere dcs flambeaux ; a leur tete on voyait des transpa-
rens representant des attributs de tous les metiers. Le cortege
se rendit devant les demeures des deux citoycns pliilantropes
dont les maisons furent ornees de fleurs, au son d'une niusique
harmonieuse. ( Nouvelliste Faudois. )
ITALIE.
Naples. — Statistique. — Mouvernent de la population dans
ce rojaume de Naples , en 1824 , et comparaison de cette annec
avec les deux annees precedentes.
PROVINCES.
Naples i?P''.'''"
' j Province. . . .
Terre de labour
„ . . ,1 cilerienre. .
PriQcipautes { ...
'^ \ ulterieure. .
Basillcate .
Capitanate
Terre tie Barri
Terre d'Otranle
( cilerienre. . . .
Calabres jnlterienre, 1°.
I olterieure, 2°.
Comte de Molise
cllei'ieure. . .
Abrazzes \ ulterieare, 1°.
ulterieure , 1°.
ToTAUX , ea 1824.
en 1823.
en 1822.
IfAISSANCES.
1 5,046
14,212
23,168
16,917
53,992
20,978
r 34,54
i8,936
15,763
15,717
9,38 t
12,966
14,187
10,908
io,o38
9)667
235,010
221,993
2 1 8,52 5
12,598
8,124
18,570
9.776
9,558
i3,i66
9)457
11,520
io,4i5
9,750
6,353
10,284
12,636
8,836
6,578
6,012
i63,432
i85,3i5
i5o,i34
2,968
2,620
4,432
2,860
2,587
3,8i6
2,289
3,144
2,824
2,5i3
1,936
2,969
2,63o
2,177
1,507
1,533
42,8o5
48,432
47,490
ITALIE. 817
D'ou il resulte que les rapports des naissances, des morts et
des mariages a la population totale sont dans I'ordre qui suit:
1822 1:24 — i:35 — i:in
r8a3 i : 24 — i : 33 — i :^io
1824 1:23 — 1:27 — I : 127
[Annali universali di Statistica , t. ix. )
Milan. — Academce des beaux-arts. — Exposition des ou-
trages couronnes au concours de 1 826. — L' Acadcmie des beaux-
arts de Milan a distribue, dans le niois tie juillet dernier, les
prix qu'elle deccrne a ceux de ses eleves dont les ouvrages ont
obtenu la palme, dans le concours ouvert a la fin de I'annce
scolastique. La ceremonie a eu lieu sous les auspices de M. le
comte Castiglioni, president de TA-Cadcrnie. Nous ne nous
arreterons pas sur les details d'une solennite semblable a toutes
cellesqui ont lememebut; nous preferons mettresouslcsyeux
de nos lecteurs une analyse fidide des qualites et des defauts
qui ont etc generalement remarqucs dans les ouvrages couron-
nes : c'est le moyen de donner une idee de I'etat present des
arts dans la Lombardie.
L'Acadeinie disirlbue tous les ans six prix run depeinture ,
un de sculpture, un de gravure, deux de dessin et mw d'archi-
tecture. — Peinture. — Le prix depeinture a ete reinportepar
M. Sigismond Nappi, de Milan. Le sujelmis au concours elait
le depart de Rcgulus. — La peinture est aujourd'hui cultivee
sanssucces a Milan. Les ouvrages couronnes dansces dix der-
nieres annees et que Ton voit exposes dans une des salles du
palais de Brera , niontrent que les juges sont reduils a encou-
rager les plus faibles esperances. Bossi par ses lecons, Appiani
par ses exemples, ont cherchc a transporter dans leur patrie
la grande revolution que, chez nous, David a fait subir aux
arts du dessin; mais ils n'ont pas etc compris. Leurs eleves,
ne pouvanl atteindre aux beautes de I'Ecole francaise, en ont
maladroitement choisi les defauts. Des artistes, qui oni sous les
yeux les chefs-d'oeuvre de Luini , tant d'ouvrages du grand
Leonard, de Ferrari et de tous les niaitres de I'Ecole lom-
barde, si savans dans I'art de donner aux figures I'expression
la i)lus \raie et la plus belle, ces artistes peignent avec une
secheresse et une roideur que Ton ne pent imaginer. Malgre le
succes de M. Nappi , je me trouve force de le coniprendre dans
cette critique. .Son dessin est sage, et I'architecture de son ta-
bleau fort belle; mais ses tigures n'or.t qu'une expression fai-
ble, ou pins souyent outree, ce qui n'est guere meilleur. Quant
T. XXXI. — Septembre 1826. Sa
8i8 EUROPE.
a son coloris, il est d'line faiblesse extreme; il y a cepeiidanl
a rAcademie des beaux - arts un piofesseur de coloris. ,1 'en-
gage M. Nappi a joindre aux lecons de ce savant I'ctude assi-
diie des t&bleanx du Tlticn qui abondent a Milan. Ccmaitie
pourra lui appremlre a ctre grand sans affectation, vrai s.ins
bassesse, et surtout a ordonncr vin tableau, chose si difficile !
— Sculpture. — Le sujet mis au concours etait uu b.is-rclief a
la raemoire de Canova. A Milan, la jicinture et la sculpture,
quoique soeurs, ne sent ])oinl iinies : cllcs suivent des routes
lout opposees. Qiiand on consldere ies ouvrages des Pacetti ,
des Monti, des Marches I , des Pizzi, des ^Icgui.stc , on dirait
que Canova est encore la, qu'ii anime ses elevcs, qu'il suit
leur niarche d'un ceil severe : aucnn d'eux ne sVcarie de ses
principcs, ils travaiilent sous I'inspiration de son beau genie.
Je ne connais pas M. Jntonio Labus de Brescia , dont I'ou-
vrage a obtenu la couronne ; mais , ouje me lromi)e fort , ou
en travaillant, il a eu sans cesse prcseiis a resjuit Ics moyens
par lescpiels le grand liomme qu'il clait a|)pelL' a celebrer, est
parvenu lui-mume a cetle gloire quele lems ne fera (ju'accroi-
tre. Le bas-relief que j'examine est admirable. Les figures sont
nobles et bien placecs, le travail est a la fois ferme et gracieux:
I'etuile ne se voit pns , le cceur dirigealt le cisean. Canova est
rcpresente rendant le dernier soupir; il est eteiidu sur son lit
de mort. La religion, les arts, I'aiuour ineme, rcntourcnl et
le soutienncnt. Chaque attitude indique une noble douleur ;
celle de Canova annonce i'approclie de la mort , mais d'une
mortcahne, douce, sans agitation. Unc statue du Tibre, placee
a rextremite du bas-relief, rappeile les lieux que Canova s'est
plu a enrichir de ses chefs-d'oeuvre. M. Labus et celul de ses
concurrens qui a oblenu I'accessit, out cru pouvoir introduire
dans leurs bas-reliefs !a rej)rescntaiion du celebre groupe des
trois Graces de Canova; cettemanlcre d'indiquer les divinites
auxquelles ce grand artiste n'a cesse de sacrifier, ct de rappeler
en meme terns un de ses plus dolicieux ouvrages, est sansdoute
tres-spiriluelle; cependant je demanderai jusqu'a quel point le
gciit ])eut approuvef la representation d'objets sculptcs dans
les ouvrages de sculptuie. L'artiste n'ayant que les memes
moyens pour figurer la nature animee, et celle qui ne Test
pas, ne pent rnarqner de diffe-rence entre ces deux choses si
pen semblables : ce melange doit enfanler la confusion. Tout
ce que les grands raaitres ont ose faire a ete de placer dans
leurs bas-reliefs des morceaux d'architccture; encore en sont-
ils tres-sobrcs , comme on peut s'en assurer en examinant les
ITALIE. 8i(j
bas-reliefs de ThorvaUhen et de Canova. CeUe criiique pen im-
portanle n'affaiblira pas, je I'espere, la lumle idee <jue jecher-
che a donner de I'ceiivre de M. Labm. Si cet artiste est encore
a Milan range pariiii les elevcs , il serait place , ii Paris, aupres
des miiities, lionneur fpi'il obliendia promplenieiit dans sa pa-
trie , sil reste fidcie aux grands principes. — Grature. — L'A-
cadt'mie avail dein;mde aux eleves de graver I'oiiviage d'un
bon inaifre. 'ill. Philippe Caporali, de Cremone , a oblenu le
prix ; il a grave un peiit lab!e-au dii Poiissin qui represeiite des
Amours. I^es dimensions des gravures destinees a un concours
sotit trop falbles pour qn'on jjuisse y prendre une juste idee
d'un talent 'p'.i , plus a I'aise, aurait fait niieux. Toutefois la
gravure du laureat est bonne, el annonce de la facilite. On n'y
reconnait pas la force du buriu alleinand; mais il y a de la
grace, comme chez tons les graveurs ilaliens. — Dessin de fi-
gure. — Le siijet du concours etait le jugement de Salomon. Le
prix a ete remporte par M. Mussini de Florence; le dessin de
cet eleve est fort beau, mais faible de composition. Au reste,
Milan abonde en excellens dessinateurs , et, sans sorlir du
palais de Brera, on trouve des dcssins superieurs a celui de
M. Mussini. — Dessin tVornemcnt. — Le sujei rtait un calice
avec sa patene et un ciboire. A Milan on ne pense pas , comme
a Paris, qu'il convienne de laisser sans direction, san-, con-
seils, sans bons exeniples, les artistes occupos de ciselu/e et
d'orfevrerie. Parmi nous ces gens ne sont que des ouvriers ; a
Milan, et dans toute I'ltalie , ce sont des artistes Ires-considt'-
res , f[ui se rappellenl que Cellini vecut dans Tintiinite des plus
fameux pcintres ct sculpteurs de son tenis, marcha leur egal ,
et, comme eux, futflatteou encourage par les souverains. Un
prix est done donne tous les ans au dessin d'ornement. Celte
fois ila ete decerne a M. Joseph Pagani de Mi-an. Le dessin du
calice est d'une grande purete; les details en sont excjuis. La
boi dure du vase represente tin portement tie croix , qui a lui
seul est un tableau tout entier. Avec un parcil raodele , le inoio-
dre orfevre pourrait executcr wn niorceau precieiix. En France ,
ou le commerce des bronzes e^-l si important, un concours an-
nuel pour le dessin d'ornentent rendrait un grand service a
rindusdie. Oes dessinateurs se forineraient ])Ource genre spe-
cial, ct le mnuvais gout, qui menace tonjours les ouvrages
d'orfevrerie ou de ciselure, serait facileuient contenu. — Ar-
chitecture.— L'/Vcademie avait deinandi; le plan d'un lycee dans
unecapitale. i\I. Ferdinand Qkv^osvsi, de MacagnoSuperiore,
a ete couronne ; son travail est beau. Peut-etre en Irouvera-t- on
la conception trop vaste; mais il faut se rappcler que les con-
Rao EUROPE.
coiirs irarchiteclurc ont moins pour but d'obtenir un projcr
reelleinent executable, que do doiiner aux elcves une occasion
de devt'lopper totites letirs idt'cs.
Tel est le resultat du conconrs ouverl cetle annee par I'A-
radeiTiie des beaux-arts de Milan. On voitqiie,la peinture cx-
replee,tous les arts dont le dcssin est la base ont trouve des
inierpretesremplis de talens, et qui tousdonncut phis que des
esperances: on pent done en concUire que I'Ecole milanaise, sur-
tout pour la sculpture, est dans une situation florissante. A. B — t.
Turin. — Necrologie. — Testa [Felice). — M. Testa,
habile sculpieur, niort dans un age pen avance a Turin, lieu
de sa naissancc, avail remporle un prix de j)einture , et conti-
nuait a se perfectionner, a Rome , dans I'art dp Raphael , lors-
que le gout de la sculpture reniporta. Ses ouvrages originaux
les plus estimes des artistes sont un Perxee , une Led a et ua
Cupidon. II executa a Cagliari le toinbeau du comte de Mau-
rienne, et a Sassari, celui du due de Montferrat. On pense (jue
le chagrin a beaucnup abrege sa cnrriere. Ses talens ne le con-
duisirent point a la fortune; le seul heritage qu'il ait laisse a
ses fiUes est une excellente education , Tamour de la vertu et
I'exemple de sa vie. Tout enticr a son art et aux soins domes-
tiques , il abandonnail tout le reste, comme peu digne de son
attention. II travaillait au mausoiee du roi Charles Emmanuel ,
lorsque la mort est venue le fiapper. Y.
TURQUIE.
Mathematiques. — Trisection de Vangle, par Seid Husseiw
Massdariedschisade (fils du rcceveur du peage). — II a paru,
i Constantinople, une petite brochure extremeinent remar-
quable, er; ce qu'elle peut donner une juste idee des progres
ties etudes mathematiques cliez les Turcs. L'auteur de cet ccrit
ne pretend a rieu moins qu'a la gloire d'avoir Irouvc la de-
monstration, jusqu'a present inutilement cherchee i)ar lesgeo-
metres, de la trisection de Tangle. On n'ay)prendra j)oint s.nns
quelque elonnement, non pas t|ue Seid Hussein ail fait prendre
le change au sultan, mais qu'il ait pit s'abuser luinieine, et
«urprendre les suffrages de tons les profcsseurs et adjoints de
TAcademie. Hussein rappelle que dans la grande Encyclo])('dio,
Ic probleine de la trisection de Tangle a ete declare insoluble,
puis il continue en cc-s termes :
'1 Louange, et encore une fois louange ! par la grace de
Dieii... , par les miracles du prophele, iiotre seigneur et sau-
vciir des deux mondes, et par la force du bonbeur fleurissant,
TURQUIE. — PAYS-BAS. 82 1
et I'iiifluence du fruit de justice du moiiarque ornant actuelle-
meiit le Irone, comblant de felicite le monde place sous sa
garde..., extirpateur des inechans qui se revoltent contre lui ;
conservateur de la plus vraie de toutes les religions. .: le plus
faible, le plus debile... de ses serviteurs, Massdariedschisade
Seid Hussein, premier adjoint a rAcadeniie imperiale du genie,
a, le i3^ jourdu mois schaaban de I'annee 1237, heureusement
trouve la demonstration de la trisection de I'angle el de Tare
<|ui en est la mesure , laquelle demonslralion avail ele dcpuis
3o ans jugee introuvable par les geometres... Ma plus liumble
esperance est qu'il plaira a la haute et juste vo!on!e de sa ma-
jeste de faire inserer la relation de cet evenement dans les
annales de I'Empire..., jiour que les geometres de I'Europe ne
puissenl s'approprier celte invention, etc. « [Correspondance
matheinatique et physique de MW. Garnier et Quetelet. )
PAYS-BAS.
Bruxelles. — Academic royale des Sciences et Belles- Lettres.
— Sur onze questions mises auconcours par la classe dChistoire,
une seule relative aux chani^emens sur la cote d' A rivers a Bou ■
logne , a ele resolue d'une nianicre salisfaisante [)ar M. Bel-
PAiRE d'Ostende, auquel la medaille d'or a ele decernee. La
classe des sciences t\u\&s&\{ propose sc})t questions, a .'iccorde
deux medailies d'argent : I'nne a M. Hensmans, deLouvain, au-
teur d'un memoire sur Xcfuinier animal; la seconde a M Tim-
MERMANS, de Gand, qui avail envoye un memoire sur la lioi-
.sieme question {le mouvernent cPune bulle d'air qui s'eleve dans
un liquide). — L' Academic a propose, pour les coucours de
1827 el de 1828, diverses questions parmi lesquelles nous ne
cilerons (|ue celles dont I'interet nous a paru le plus general.
— Classe dhistoire : pour 1827. — 1° Quels sont les services
rendus a la langue el a la litterature grecque par les savans du.
royaurne des Pays-Bas, soil par la composition d' ouvragev di-
dactiques , soit par la publication , la revision , la critique et la
traduction des auteurs grecs? — 2° Les Beiges eiaienl issus en
pariie des Gerniains, en parlie des Gaulois. Les Francs, peu-
ples formes de la reunion de plusieurs nations germaniques du
nord, sont venus repeupler la Belgique dans les iv".et v^ siecles.
Les Beiges ont long-tems conserve les moeurs, les usages, les
arts el les institutions de leurs ancetres. L'Academie demande :
Quels sont dans les terns posterieurs les principaux traits de
ressemblance , d'identite ou d'analogie que I'on retrouve , soit
dans I'kistoire, soit dans les usages, les ceremonies, les amuse-:
822 EUROPE.
mens et les fetes , soil dons les lois , les capitulaires , lex concites
et les principales coutumes des provinces ineridionales avec ces
anciermcs pratiques ou habitudes? — 3°. i" Quels droits et pre-
rogeitiies les rois de France de la premiere race ont- ils exerces
surla nomination des eveques de leur rojaume , et notamment
dans les trois provinces de la Qaule-lielgiqvc , connues pendant
la domination romaine sous les noms de \ ''•= et i" Beli;it|ue et de
2'' Gcriii.aniqUe , t/ont les metropoles etaient Treves, Reims et
Cologne ? 2° Quels sonl les droits et prerogatives que les rois de
France et les empereurs d'Allemagne ont exerces sur la nomi-
nation des evequcs dans les trois memes provinces sous la i" dy-
nastie des rois de France? V^ A queltitrc ces souverains exer-
caient-ils ces droits ? Etait-ce de leur chef, comine souverains
et protecteurs de I'eglise , ou etait-ce par suite d'une convention ?
4" Comment et par qui les eveques et les metropolitains de ces
trois provinces recevaienl~ils la confirmation canonique et'Ja
coniecration pendant les deux epoques sus-mentionnces ?
Pour 1828 : Quelle a ete I' influence de la legislation civile
francaise sur -cede des Pays-Bas espagnols depuis le commence-
ment du seizieme siecle jusqti'h la fin du dix-septieme , ce qui
comprend toute Vepoque de la domination des rois d'Espagne et
des archiducs Albert et Tsabelle ? En d'autifs termes : Quels
sont les changemens et les ameliorations npportes a la legisla-
tion des Pays Bas espagnols en matiere civile dans les edits et
j.'lacards generaux , et qui ont e/e empruntes ou imites des lois et
ordonnances generales publiees en France? L'Academie desire
quo Ton transcrive les textes des deux legislations, ct qne Ton
indique les differences des dispositions des placards belgiques
qi:i n'oiil ete qu'iniitees des lois francaises.
CUsse des sciences : pour 1827. — 1" Quelle est la theorie
quiexpliquede lamaniere la plus satisfaisante les phenomenes
diversque presentet aiguille aimantee? — 2" Assigner la forme et
toules les circonstances du mouvement d'une bulle iC air de gran-
deur finie qui s'eleve dans un liquide, dont la densite est sup-
posee unlforme. — 3° Quelle relation doit-il y avoir entre dix
points de I'espace pour que ces dtx points appartiennent a une
surface du second ordre , ou entre dix plans , pour que ces dix
plans soient tangens h une me'me surface tie cet ordre? — 4° Exa-
miner , d'une maniere approfondie , les differentes especes de
societes d' assurance sur la vie ; etablir , d'aprcs des principes
mathemaliques , quelle est cede qui presente h la fois le plus
■ d'avantnge aux assures et aux assureurs. — 5° Determiner toutes
les circonstances du mouvement iffiniment petit d' un systeme
quelconque Uneaire , flexible , elastique ou non , autour de sa
PA.YS-BAS. — FRANCE. 8 2 3
position cTequiUbre , en ayant egard a la resistance d'unjluide
elastique arnhiant.
Pour 1828 : On suppose que la surface de cheque aiie cTun
inoulin rnu par la force du vent est encendree par une ligne
droite mobile qui s\ip pule toujours , d' une part , a angles droits
sur une droite fixe donnee de position , ct de V autre ^ sur une
courbe plane donlle plan est parallele a la droite fixe. On de-
mande quelle doit etre la courbe directricc pour que C impulsion
du courant d' air sur les ailes du moulin produise le maximum
d'effet.
Le prix de chacune de ces questions sera une medaille d'or
du poids de trente ducats. Les n)eiiioires, ecrits lisiblement en
latin, f'rancais, hollantlais on flamand , seront adresscs, franc
de port, avantle i"fevrier 1827, a M. Detvez, secretaire per-
petuel.
FRANCE.
MoNTiGJJAC ( Dordogne). — Canaux de la Correze et de la
Vezere. — Le ministre de I'interieur ayanl mis en adjudica-
tion, le 7 inr-s 1825, les iravaux des canaux de la Correze et
de la Vezere, M. Eugene Menil, ancien cleve de I'EcoIe poly-
tecliniquc, etc., a etc declare adjudicalaire de ces canaux et
concessionnaire a perpetuite des droits de peage. Ces (ravaus
consistent : 1° dans I'ouverture d'un canal lateral a la Correze ,
depuis la ville de Brives jusqu'a reraboucliure de la Correze
dans la Vezere; 2° dans la canalisation de celte derniere, de-
puis sa jonclion avec le canal jusqu'a son embouchure dans
la Dordogne Le but de Tenireprise est d'etablir une commu-
nication entre Test et le sud-ouest de la France. Cette ligne de
navigation doil surtoiit facililer les relations commerciales
entre deux des plus iraportantes ])laces du royaume , Lyon el
Bordeaux. Depourvus jusqu'ici de nioyens econonii(|ues de
transport, les departemens de la Correze, du Cantal, du Puy-
de-D6me, de la Creuze et de la Dordogne se voyaient prives
de presque toute industrie , et forces de laisser inactives, dans
le sein de la terre, leurs immenses richesses minerales.
La longueur reunie du canal lateral et de la canalisation de
la Vezere, est de 20 lieues. La pente totale des deux rivieres ,
depuis Brives jusqu'a la Dordogne, sera racheteepar Soecluses,
de 2 m. de chute environ. Dans I'etatactuel des choses le mou-
vement commercial , sur la ligne de cette navigation, est evalue
a 120 injlle tonneaus. D'apres le tarif, le merae que celui du
824 FRANCE.
canal du midi, le reveiiu net s'elcvera a 470,000 fr. Le capital
social ctant de 7,25o,ooo fr., on voit (luc le dividendc h. distri-
buer anx actioi)iiairc3 sera de 6 et 7 pour 100. Ces revcnus
augmenteront considerablemcnt par I'exploitalion des mines
de houille, de ])lomb et de cuivre, qui se trouvent dans le
bassin de la Vezere.
Le lu juillel iSaG, on a pose la premiere pierre de I'dcluse
de Montignac. line f'oule considi rable couviail les jolis rivages
de la Vezere, et paraissail lieureuse d'acqucrir la certitude de
raccomplissenienld'une cntreprise qui doit avoir unesigrande
influence snr ses deslinees. Cinq ecluses sont dejii fondces;
plusieurs ponts se construisent; partoiit les cheniins de liallage
s'etablissent, et tout fait esperer qu'a la fin de cetle campagne,
la navigation aura lieu jusqu'a Terrasson, i5 lieues au-dessus
de remboucliure de la ^'ezere. C.-J. Hknry.
CuAEiENTON (^Sei'/ie). — Forges et Fonderies. — Nos lecteurs ne
serontpas faciics de trouvcrici quelqiiesmotssurlebel etablis-
seraent de M M. Manhy, fFihon et Regnier, et d'apprendre que,
dans un petit village aupres de Paris, il existe une ecole nor-
male d'imluslKie faile ])our repandre, de lacapitale jusqu'aux
extremilc.s dcs ])rovinres, queiques-uns des inoyens d'execu-
tion qui conconrenl a la prosj)erilc de la Grande-Bretagne.
Cet utile etablissement comjjle dejacinq annees d'exisience ,
et tout seiiible lui prometire une longue diiree. II a conside-
labiement auginente la population de Charenton : cinq cents
ouvriers y sont encore occupes , inalgre la stagnation des af-
faires. Cinq matliines a vaj)eur, donl les forces reunies corres-
pondent a celles de 114 cfjevaux, font mouvoir les innombra-
bles rouages des mecaniques qui garnissent ces vasles ateliers ,
<iu Ton fabrique d'autres machines a vapeur, qui, elles-memes,
ironi , sur tons les points de la France, animer les metiers,
faire tourner les moulins, et remplacer en tous lieux avec eco-
nomic de tenis el de depenses la force dcs chevaux , ainsi
que celle des courans d'eau et d'air. Des les premiers ])as que
Ton fait dans letablissement , I'uiil decouvre de toutes parts
d'enormes blocs de metal anxquels le moule a donne les formes
les plus exactes el les plus varices. Dernierement plus decent
jeunes gens de I'Ecole polyteclinlque assistant dans ce lieu a
une solennite des arts, on y a coule en leur presence, et d'jin
seul jet, un arbre de vingl-neuf ]iieds de longueur sur trois
de diametre, du poids de 12,000 kilog.
A la grande forge, une machine a vapeur de la force de
60 chevaux , et donl la puissance est encore accrue par uu
DEPARTEMENS. 82';
volant en fonte d'une dimension gigantesc[ue tournant avec
une rapidite vraiment effrayante, donne, d'une partle nionve-
nient a un martinet dii polds de i5oo kilog. sous lequel des
blocs de fer bouillanf viennent recevoir une premiere forme,
ct de I'autre fait touiner de nombreux cyiindres enire lesquels
]e fer s'etire, s'equarrit , s'arrondit ou s'ainiiiciten lole laminee.
La tcrre qui tremble sous ies pieHs, I'air embraso, le roule-
inent des engrenages, Ies coups reiteres du mailcau , la vuc de
ces liommes demi-nus rougis ou noircis i)ar ces feux elincellans
de tous coles a travers I'epaisse fumee dont I'air est obscurci,
ce soin continuel que le si)ectateur doit prendre de veiller a sa
surete, tout concourt a rcaliser dans ces lieux cet enfer ou cet
TLlna que I'imagination des poetes avail enfante.
Plus loin, a la forge d'alfinage, un autre moleur met en
jnouvement un martinet du poids de 3, 000 kilog., sous Ies
coups duquel le fer s'allonge , se polit et prend des formes aussi
])ures que celles que la lime ou le burin pourraient produiie.
Dans I'atelier des lourneurs, un seul arbre horizontal, separant
en deux pailics egales dans le sens de sa longueur une salle
inunense, met en mouvernent a droite et a gauche un grand
nombre de tours de toule espece. Ici sont Ies alezoirs, la Ies
tours a dresser des cyiindres, de ce cote Ies machines a forer,
de cet autre Ies meules d'affutage. Les cisailles enormes se
croisent par un mouvernent continnel, elles coupent a vide en
attendant qu'on leur aj)porte le fer qu'elles tranchent avec une
elonnante facilite , el sans que leur mouvernent habituel en soit
ralienti. Tout marche corame par encliantement , le moteur
univcrsel est cache ; il semble que la vie anime ces blocs de
fonte, ils j.araissent accomplir d'eux-memes les fonctions et les
moiivemens qiu leur sont ])ropres.
Nous n'avons ni I'intention, ni le pouvoir de rapporler ici
lout ce c|ue la fonderie de MM. Manby et de scs honorables
associes renferrae de curieus et d'ulile. Divers journaux, ainsi
que les bulletins de la Sociele d'encouragement en ont deja
entrelenu le public, et d'ailleurs il faudrail consacrer a ce recit
un grand nombre de pages, ])our peu qn'on voulut entrer
dans les details. Ce (|ue nous venous de dire pourra donner
du moins une iilce de I'importance d'un etablisseracnt dans
le(|uel on consume par jour un bateau de charbon de lerre,
et ou la suspension du feu, le dimanche, occasionne une
perte de 5oo fr. M.
^E.vsB.s.( Il/e-et-Filaine). — Extrait d'une lettre adressee
au Directeur de la Revue Encyclopcdique , en date du aS aout
1826. — Statistique morale du pays, — Quoique la classe des
8i6 FRANCE.
{^ens instruits ilans notre ville soil coin[)osee presque exclusi-
vement d'hommes de loi, qui jtianquent en general dc loisir
pour s'occiiper avec attention des progres des sciences et des
ails, vous avez ici ncanmoins nn peril nombre d'aj)i)reciateurs
de votre ulile cnlreprise, qui n'est i)as seulenient scienlifique et
litteraire, inais dont Ic principal avanlage est de former un lien
nouveau eulre les jieuples , et particulierement , dans la France,
onlre les lioninies eclaires et amis du bien , epars dans nos dif-
ferens tloparlemens , tt de contribuer efllcacen.ent a rendre
impossible tout iixouvement retrograde dans la civilisation.
La ville de Rennes est entree plus tard que beaucoup d'autres
dans la carriere des ameliorations; et, quoicju'elle soit res'ee
long-iems en arricre, ses progrcs n'en sont pas moins sensibles.
11 y a quinze ans, elle comptait dans son sein une foule de prole-
taires qui scml)laienl se complaire dans leurmisere , dans ['igno-
rance et dans I'ivrognerie. Les niarcliands, confines dans des
boutiques obsciiieset mal propres, profitaient de la rarete des
communications, pourvendrea un pri\ excessif des marclian-
dises de mauvaise cjiiaiite. On ne comptait dans cette ville que
deux ou trois manufactures, tout-a-fait an ieri'es dansleurs [iro-
cedes. Depuis, les bienfaits inappreciabl«;s de la paix se sont
fait sentir. Des nsines importantes se sont etablies. Le travail
a mis fin a la mibcre de.s basses classes : on ne voit plus, a beau-
coup pres , autanl de gens couverls de haillons. Le nombre des
habitans a augmeute; les boulii]ues. sont aussi bien decorees
(jue celles des grandes villes; des fortunes se sont faitcs dans le
commerce , et lui out donne plus d'influence et de considcra-
lion. Une cliambre de commerce vient d'etre creee ct reniplit
sa laclie avec zcle. Les registres de renregislrenieut font foi
que les acquisitions en irameubles failes par les negocians s'ele-
vent chaque annee a des sommes considerables. Des construc-
tions faites avec elegance s'lilevent dans plusieurs quarliers.
Les Iiabitans voient se realiser dans le sein de leur cite des
projels qu'ils etaient habitues a regarder des leur enfance
comme des chiiueres.
L'instruclion serait necessaire pour devolojiper ces germcs
de firosperite; mais, j'avoue a regret que, dans aucuue autre
ville de France, il n'existe pent-etre aulant d'ignorance. Des
ecoles lancasterlennes avaienl ete fondees , en 18176! en 1818:
des nioyens de toute espece ont ete employes pour les faire
tomber. Le respectable recteur de rAcademie qui les prote-
geait,a ete mis a la retraite. L'universile depuis ne s'est oc-
cupee qu'a deiruire les etablissemens qui devaient faire son
ajipui, et qu'ii favoriser ceux qui lui prcparent une guerre
DEPARTEMENS. 827
moi telle. Des lefus de sacreinens, la crainle de perdre des
pratiques, ont delerniine les artisans a retirer leurs onfans de
ces ecoles. Une seule siibsiste encore de nom; mais le maitre
n'a pu la maintenir qu'en se soumettant a changer eniieremeni
le precede d'inslriiction. II recoit dans son ecole lous les enfans
des gens aises; les enfans des artisans sont instruits par les
freres des ecoles chietiennes, autrement dits ignorantin:,
Vous savez que leur methode consiste a comprimer tout essor
de rintelligence ; qu'ils onl recours a des luethodes vicieuses,
et qi 'ils font fuire des lectures ennuyeuses, pour que les en-
fans contractent une repugnance incurable pour toute espece
d'application.
Les etudes du college royal son! encore bonnes ; mais on y
fatigue les jeunes gens par la multiplicite des exercices reli-
gieus. La piete est devenue le premier litre pour les reconi-
])enses, de sorte qu'on prepare des conquetes a I'liypocrisie
d;ujs i'age meme de la candeur. Deux prix ct quatre accessits
ont ete distribues, cette annee, dans chacune des cinq plus
hautcs classes : ce sont ceux de dissertation religieuse. Nul doute
que ceux qui les ont oblenus ne se soient menage pour Tavenir
de grandes cliances de ftiveur.
Un hoinme d'un grand talent, M. Legrand , a ouvert un
cours d' applicudon des sciences naturelles aux arts mecaniques.
( Voy. ci-dessus, p. 602 ). Soixante a quatre-vingts eleves ont
suivi ses lecons avec une application digne du zele du profes-
seur. J'ai eu le plaisir d'etre temoin de I'iuteret mele de sur-
prise avec le(|uel ses demonstrations elaicnt ecoutees. En rele-
vant, a leurs yeux i'importance de leurs professions , nul doute
qu'on ne les dispose a devenir plus hommes de bien et meilleurs
citoyens. L'annee prochaine, des niedailles seroal distribuces
pour exciter de plus en plus une louable emulation. T — c.
Societes savantes ; Etablissernens d' utilite publique.
Chalons (Marne). — Societe cC Agriculture , commerce,
sciences et arts. — Prix proposes. — Dans sa seance publique
du 28 aout liernier , presidee par M. le due de Doudeauville ,
cette Societe , apres avoir entendu diverses lectures faites par
plusieiirs de ses merabres , a decerne des niedailles d'encou-
ragenient , 1° a M. Povillon-Pierard, membre associe cor-
respondaiit, a Reims, auteur de la statisticjue de Brimonl ;
2° a M Remv , docteur en niedecine , membre associe cor-
respondant , a Chatillon-sur-Marne , pour les vaccinations
nombreuses qn'il a operees. — La societe rappelle qu'elle de-
8a8 FRANCE.
cernera dans sa seance publique du mots d'aout 1827 une
medaille d'or dc la valeiir de 3oo fr. au meillpur memoire
siir cette question : Demontrer In siiperiorite de la morale dc
t Evangile sur la tnorale des philosophes ancien.t el rnodernes ;
et dans sa seance publique de 1828 , une medaille de la nieme
valeur au meilleur niemoire sur ce sujet : Quelle doit ctre , en
France, I'influence du gouvernemcni representatif sur la litteni-
ture ? — La Societe mel au concours jioiu' 1827 et les annees
suivantes, une Biographie des Hotnmes celAbres nes dans le
departemenl de la Marne , on qui s'y sont distinguvs , i° dans
le ministere des differens cultes ; 2° la magistralure , le bar-
reau et V administration civile; iJ^ I'etal milttaire ; 4° les
sciences et les belles - leltres ; 5° le commerce et I'at^ricul-
titre ; 6° les beaux - arts et les arts industriels. — Pour I'an-
nee 1827 , elle dernande la Biographie des lioinraes celcbres
nts dans le departement de la Marne, ou qui s'y sont distin-
gnes dans les beaux-arts et les arts industriels. — Pdut I'annee
1828, elle dernande la Biographic des hornmes cclcbres nes
dans le departement, ou qui s'y sont distingues dans le mi-
nistere des differens cultes. Le prix de chaque division sei'a
une medaille d'or de 200 francs. — La Societe declare que les
hommes vivans ne y)euvent faire ])artie de cette Biographie.
— Des medailles d'encouragenicnt sont offertes , comme les
annees precedenles, 1° a I'auteur de la meilleure Statislique
d'un canton du departement de la Marne ; 2° au medecin ou
chirurgien de ce departement qui aura vaccine le ])lus grand
iionibre dc sujets pendant I'annee 1827. - — Les memoires
doivent elre adresses, franc de port, avant le 1^'' juillet , a
M. le docteur Pkin, secretaire de la Societe.
Marseille ( Bouches-du-Rhone). — Bains de mer. — Un
etablissement qui merlte d'obtenir tous les suffrages, se forme
en ce moment dans notre ville par les soins et aux frais de
M. GiRAUDY DE BouYON, D. M. , auqucl le gouvernement a
fait la concession d'un emplacement. Ce sont des Bains de
mer d'line utilite non moins grande que ceux de Dieppe,
et qui atteindront bientot au degre de renommee de ceux-ci.
lis sont situes sur la ]>lage d'Arene , a un quart de lieue de
Marseille, et ils occupent une superficie de plus de six cents
metres. Chac|ue bain , chaud ou froid a volonle, forme un
petit salou separe. Les eaux sont claires et limpides; elles
sont tres-cliaudes en ete , les bassins etant sables a trois pieds
de profondeur.
Cel etablissement renferme des bains de vapeur , de sable
I
DEPATITEMENS. — PARIS. 829
sature de sel marin a 36 degres de chaleur , pour les rhu-
inalismes, la paralysle, etc.
Atltour dc remplncement sont des maisons de campagne
fort agreables, des reslaurans, des maisons garnies, et le Chd-
tenu-Vert , ou Ton trouve le logement et )a table , et qui est
a Marseille ce qu'est a Paris le Rocher de Cancale.
La beaute du site, la protection des auloritc's locales et dii
gouvernement , les soins nombreux et Ics talens de M. le doc-
teur Giraudy de Bouyon font esperer que cet elablisseirent
acqiierra bientot la renommee et le succes auxquels il a droit
de prctendro. Marids-Gimon.
PARIS.
Institut. — Academic des sciences. — Seance du 7 aoiit
1826. — M. Lafitte presente un memoire sur une nouvelle
maniere d'eniployer le grapin en usage snr les \aisseaux. Ren-
voye a la commission chargce d'examiner un grapin propose
dans I'une des dernieres seances. — On adresse un memoire, en
italien, par M. Seraphin Belli, professeur de matliemaliques
a Pise, intitule : Exposition de quelques principes sur la solu-
tion generate des equations des degres superieurs au premier.
(MM. Ampere et Cauchy, comrnissaire?.) — L'Acadcniie ])ro-
cedc a Selection d'un membre de la section de chimie, en rcm-
placement de M. Proust , decede. Sur 47 votans, M. Chevreul
obtient Sg voix, et il est proclame. Ses concurrens ont oblenu ,
savoir, M. Clement, 6; MM. Pelletier et Laugier, cliacun
une voix. — M. Coriolis lit un memoire sur une nouvelle de-
nomination et sur une nouvelle unite a intsoduire dans la Uy-
naniiqiie. (MM. De Laplace, Fourier et Navier, commissaires.)
— M. Dupuytren communique des observations sur le tralle-
nient du cancer de la machoire inferieure , par I'amputation de
cet OS. II presente trois individus Iraitos par cette methode et
qui sont dans un etat de sante parfaite; d'autres , en plus grand
iiombre, sont rcp.nndus dans les jirovinces. Les suites de I'ampu-
tation de la machoire sont, non-seulement beaiicoup moins
graves, mais encore beaucoup moins longues qu'on pourrait
le penser. La peau est cicatrisee en quelques jours; et pour la
reunion des 7)arties de I'os, il faut tout au plus 3o jours. —
M. Arago fait un rapport verbal sur I'ouvrage dc Mariani ,
relaiif a I'eleclricite dynamiqiie.
— Du ili aout. — On renvoie h MM. Dumeril et Boyer
I'examen d'un onvrage de M. Balme , medecin a Lyon,
intitnie : Observations et reflexions sur les causes, les syrnploines
83o FRANCE.
et le traitcment de la contagion dans diffcrentes maladies, ct
spt'cialement dans la peste d' orient et la fiwre jaune. — Le iiii-
nistre de la marine atiresse un iTiPinoite contenant des obser-
vations zoologiques, falles dans le detroit do Gibrallar, par
MM. QuoY et Gatmard, naluralistes de I'expedition de M. A' Ur-
cillc. (^ MM. Cuvier ct la Treille, rapporteurs. ) — M. le Presi-
dent annonce que MM. de la Place, Fourier et Navier se reu-
niront a la commission ([ui continuera a discuter, sons diffcrens
points de vne, les propositions de M. de Pront, relaiivea a
I'etablissenient de deux iiouvelles unites de mesnrc. — M.Blain-
ville coninnnii(]ne I'exlrait d'une leltie de MM. Quoy et Cay-
MARD , lie I'expcdition de I' Astrolabe , sue diiferens points
d'hisloire natiirelle, et entre auires sur la circidation dans les
hiphores. — M. Pouzin est noramo candidat pour la place de
])rofesscur de pliarmacie, vacante a I'ecole de Monipellier. —
M. le docleur Bordot donne lecture d'une note relative a un
Chinois vivant, age de 1% ans, el qui ])orte sur la paitie ante-
rieure de la poilrine un fcetus accpliale ; la figure, modelce et
coloriee, est mise sous les yeux de I'Acadi'mie. (MM. Dumeril
et Geoffioy-Saint- Hilaire, commissaires. ^ — MM. Vaiiquelin ,
Thenard et Gay-Liissac font un rapport sur un memoire de
M. Balard , qui a pour objet Ip description d'une nouvelle
substance qn'il a trouvce dans les eauxde la mer. M. Balardavait
donne a cetie substance le nom de rnuride; avec son consente-
nient, les commissalres I'ont remplace par celui de hrome (mau-
vaise odeur). Le brome est liquide jusqn'a 18° au-dessous de
Zero. En masse, sa couleiir est d'nn rouge-briin fence; en
couche mince, d'un rouge liyacinthe. Lacouleurdesa vapeur est
semblable a cellede I'acide nitreux ; sa densiteest d'environ 3.
II est (res \oIatil, et bout a /17"; son odeur, tres forte, res-
scmble a celle du chlore; ii detruit les coulenrs a la maniere
de cette substance. II se dissout dans I'eau, I'alcool et I'eliier.
Le chlore est plus puissant que lui; mais , a son lour, il Test plus
que I'iode ; ce (jui pent faire penser que le brome est un com-
])ose de cldore et d'iode, comme I'affinite qu'ii a avec ces deux
corps pouri'alt le faire soiqiconuer. Si Ton veui se former une
idee exacte des proprietes du brome, c'csl au chlore i\xy'\\ faiit
le comparer. Avec I'hydrogene il forme un hydracide, I'acide
hydrohromi(|ue; avec I'oxigene, I'acide btomicpie dont les sels
ont la })lus giande analogic avec les chlorates. Avec le gaz liy-
drogene percarbone, il produit un liquide oieagincux, d'une
odeur cthorec lies- suave. Le poids de son alome est 9,328, en
prenanl celui de I'oxigene pour unite. IW. Balard avail envoye
de pelits echanlillons de brome et de quehjues-unes de ses
PARIS. 83i
combinaisons, sur lesquelles les conimissaiies ont fait dos ex-
piriences ; lis ont meme obtenu dn brome en trailant de I'eau
de mer j)ar le procetle de M. Balard. Lois meme qn'on ])ar-
■viendrait a dcmoritrer (juc le brome n'esi pss nn corps simple,
sa decoiiverte n'en serait pns moins ties importanle pour la
cliimie , et ires-honorable j)Our M. Balard. « Nous pcrisons, dit
en lerminant le rapporteur, que ce jeune cliimiste est tout-a-
fait digue des enconragcmens de rAcademie, et nous propo-
sonsd'insererson memoiredans le renieil des savans etrangers.u
( Approuve. ) — M Hcron-de-VUlefosse fait nn ra;)port verbal
sur I'ouvrage de M. Karsten , intitule : Recherches sur lex sub-
stances charbonneuses du refine mineral, et particulierement sur
la composition des houilles dans les mines de la monarchic prus'
sienne.
— Du 21 aoiit. — M. Navier lit des experiences sur la resis-
tance que presentent diverses substances', leiles que !c fer, le
cuivre , le plomb , etc. , a la rupture causee par nn effet de ten-
sion.— M. Bouvard communique des observations faites par
M. Gambart, a Marseille, et par M. Pons , a Lucques, sur une
nouvelJe comete decomerle dans la constellation de TEridan.
Get astre est tres-petit et sans queue, et la lumiere de la liine
en affaiblit lellenienl IV-clat , que MM. Gambart ot Pons out en
beaucoup de peine a I'obscrver. — ■ MM. Geoffrey Snint-Hi-
laire et Blainville font un raj^port sur le memoire ile M Surum,
relatif aux foetus accphales. Suivant M. Surum , les organes
d'un animal ont deux dogres de <7italite, I'un ipii leur est pro-
pre , I'autre qui est du a I'influence des nerfs. La circulation
sanguineverseabondammontleprincipe vital sur tous les points
du reservoir nerveux. II est separe des inolecules mntei ieiles
du sang, ou il est en grande projtortion. Un corps peut done
se developper, s'animaliser et vivre sans nerfs, lorstpi'il est en
rapport avec quelque partie du systeme sanguin. Chaque nerf
existe par lui-ineme et a une action independante ; il doit le
complement de la vilalite et de sa puissance a sa communica-
tion avec les centies nerveux, avec vine sorte de reservoir ge-
nera! ; d'ou il suit que , jilus le systeme nervcnx est complique,
plus Taction parliculiere de chaque nerf est forte. Par contre,
si le systeme nerveux est incomplet, il pourra bien servir a
entretenir une vie obscure et bornee, mais non une existence
elevee. D'apres cela , M. Surum conceit , dit-il, comment un
animal eieve pent vivre a I'elat de foetus, sans cerveau et sans
moelle epiniere, parce que sa vie est alors bornee a des fonc-
tions pen nombreuses et pen developpces. Mais eeia ne sera
plus possible lorsqu'il aura besoin de fonclions plus clevees.
«3a FRANCE.
Cependant I'anteur adinet le besoiii absolu dc I'influencc ner-
veuse, mediate ou immediate, dans toutesles fonctions, nieine
dans la nutrition. Les commissaires ne donnent aucune con-
clusion sur un ir.ivail qui parait faire partie d'un ouvrage de
pliysiolop;Iepatliolnc;iqueqii'iIs neconnaissent pas. (Approuve.)
— M. CoLLADON lit un intMnoire sur la devialion de raiguiilc
aiinantee, par le courantd'une machine eiectrique el de I'elec-
tricite des linages. ( HI M. Ampere, Fourier etDulong, commis-
saires.") — M. Becqiierel lit un menioire sur les decomposi-
tions chimiques operees avec des forces <51eclriques a trcs-pelites
tensions. (MM. An)pere etDulong, commissaires. ) — M. Dunoiv
lit un memoire sur la sortie du cordon ombilical, aii-devant de
la tete du fcefus. (MM. Royer et Pelleian, commissaires.)
— Du 18 aoili. — MM. Vernet et Gauvrin ))rient I'Aca-
demie de votiloir bien designer des commissaires pour assister
a I'essai d'un sysleme de vaporisation ])ar injection. (MM. Na-
■vier et Prony sont nommes a cet effet. ) — M. Moreau de
JoNNES lit un memoire intitule : Apercu statistique sur la quan-
tite de cereales enlreposee mainlencmt en Europe. — M. Ic
D'' AunouARi) donne communication de deux pieces de corres-
pondance relatives a la fievre jaune. — An nom d'une com-
mission, M. Dexfontaines lit un rapport sur le memoire dc
M. TuRPiN, intitule: Observations sur quclques vegetaux mi-
croscopiques et sur le role que leurs analogues jouent dans la
formation et I'accroissement du lissu cellulalre. L'auteur s'est
propose de faire connaitre le vegetal le plus simple, celui qui
forme le premier degre visible de I'organisation v^gulale. 11
avait CPU d'abord que c'etait les monitia , qui ne sont com-
poses que de pelites vosicules unies les unes aux autres sur une
raeme ligne ; mais , ayant ensuite observe ces raemes vesicules
entierement isolees , il les a regardees corame les premiers
elemens de la vegetation. Si Ton suspend dans une serre chaude
dcsinorceaux de verre, ils sont bientot converts de petits vege-
taux. En les examinant avec le microscope, on voit que ce
sont des globules lulsans, diaphanes, vcsiculeux, immobiles,
de grosseurs differentes , isoies ou reunis en groupes, fixes par
un point au corps sur lequel ils naissent. L'auteur substitue le
nom de globuline a ceux de byssus et de lepra qu'on leur avait
donnes jirecedemment. Oelte substance, le plus ordinairement
verte, offre aussi d'autres couleurs , telles (pie le ])ourpre , le
jaune, le noir. La globuline est, selon M. Turpin, le i" degre
visible du regne vegetal, et n'a jamais presente a l'auteur aucun
signe d'animalite. L'odeur qu'elle repand est celle de la moisis-
sure. C'est une espece bien distincte, qui ne devienl jamais ni
PARIS. 83'.
une trernelle , ni line mousse, et qii'on doit bien se garder de
coiifuiidre a\ cc la matiere verlc des eaux crouiiissantes et des
infusions de \iaiules el de vegetaux, rn.'itiere (jui n'esi qii'un
ainas de peiiis aiiiniaux. La giobiiline n'est pas iion plus une
production sponfanee, puisqu'elle se reproduit par d'antics
pelits globules , iies de ses parois interieures. Si I'on observe
le genre connu srtus le nom de lepra, on voit ([ue les vcsicule's,
elemens de la globuline , au lieu d'etre solitaires, sont reunies
])ar une substance fibreuse, tres deliee, qui leur sert de base,
ce qu'il nomnie globuline enchainee ; c'est le a° degre de la
vegetation. De ce i" degre, on arrive au 3° qui est le ti.'.su
cellulaire , oil Ton reconnait tonjours la globuline , mais sans un
appareil plus complii|ue. EUe peut se dilater par la clialeur
el par I'liumidite; quel(|uefois elle s'allonge et forme un tube
dans I'liiterieur duquel naissent d'autres vesicules. Cette modi-
fication do la globuline conduit a ces vegetaux fdamenteux
qu'on nomine conferves , et qui ne sont que de la globuline
proiongee en tubes. La globuline des conferves nait de leurs
parois interieures ; elle a des formes et des coulenrs tres-varices.
Plusieiirs conferves simples soudees lateralement formentune
lame membraneuse ou uh'u ; enfin, plusieurs de ces lames
applii(u^es les unes sur les autres forment Ic lissu cellulaire , des
differentes raodificalions duquel rosul'.enl les formes si nom-
breiises et si varices des vegetaux. SuivaiU M. Turpin , les cou-
leurs des vegetaux sont dues a la globuline, leintcdes memes
couleurs. Nous ne pousserons pas plus loin cette analyse, qui
suflit pour faire connaitre I'importance des observations nii-
croscopicpies de I'auteur. Son travail a paru a I'Academie Ires-
digne d'eloges , et sera iiisere dans le recueil des savans etran-
gers. — M. RoBiNOT-DESvoiny presente un ouvrage nianuscrit
sur le genie mouclie de Linne , dont il fait une famiile, sous
le nom de myodaires. ( MJL Dumeril , Latreille et Blainville,
coraraissnires.) — MM. Mirbel eX. Fresnel, font un rapport sur
line lettre de M. Sollier, dans laquelle il ])rop<)se d'essayer
I'attiou des rayons colorues de la lumiere soiaire sur les fleurs
incolores, ct d'employer des conducteurs clectriques pour la
correspondance telegrapliitpic. M. Fresnel fait connaitre que
celte letlre ne contient ]>as les descriptions iiecessaires, pour
que la commission puisse exprimer son avis sur les vues de
I'auleur. ( Adopie. ) — M. Gco/froy Saint-Hilaire, au nom d'une
conunlssinn , lit un rapport sur une monstruoslte singuliere ,
doiit le modele a cle apporte de la CLine, et qui a ete pre-
sente a I'Academie par M. le D"" Borclot. II existe, en Chine,
un homrae qui , en Janvier 1826, avail 21 ans, et qu'on inon-
T. XXXI. — Septembre i8a6. 53
834 FRANCE.
trait de province en province , parce qu'il portait attache a
la poitriiie uu foelus accphale. 11 etait arrive depuis Iroi*
ans a Macao, d'oii il passa a Canton; deux luedecins an-
glais, MM. Pearson el Livingston , alors a Canton, employe-
rent deux jours a en fairc I'examen, ct le premier consigna le
rcsidlat de cet examen dans une notice qui fut envoyee en
Angleterre. On fit du jenue homme un modele haul de i/j
]jouces, avec dela pale de riz, que Ton coloria avec beaucoup
de soin. II parait que Ton a specule a Canton sur celle inons-
truosite. On y a mulliplie les exemplaires de la figure et de la
notice ,et trois, a la connaissance des comniissaires , sont ar-
rives a Paris, par la Thetis ^ fregate conimaudce par M. de
Bougainville; de sorte que les cominissaires ont eu tous les
renseignemens qui peuvent constater I'exactilude des fails;
exactitude confirnit'e d'ailleurs par la description de viugt
monstruosiics a peu pres semblables. Le jeune Chinois dont il
est question n'a rien de parliculier dans sa conslitution ; il a
le meme teint que ses comjjatriotes; il n'tst ni tres-inaigrc, iii
tres-gras; on remarque seulemenl que les parlies de la gene-
ration sont peu developpees. Le fcctus est adherent nu sternum ,
depuis la 4* cote jusqu'a la 8'. On remarque, dans cette den-
due, une saillie osseuse qui parait simuler la tele du foetus,
peut-etre seulement une partie de I'occijjital et des lemporaux.
Le foetus ayant ete palpe, on s'est assure (ju'il est prive des
vertebres dorsales et lombaires; il possede les cervicales. II
rcsulte de cette disposition qu'on pouvait a volonte, et sans
causer de douleur au jeune Chinois, ployer le foetus par le
milieu du corps, le rctourner a sens dessus clessoits, et rauiener
les parties anterieurcs pour les placer sous les \eux du specla-
teur. Dans I'etat ordinaire, les deux sujets sont places ventre
contre ventre. Nous ue suivrons pas le savant rapporteur dans
les details anatomiques que sa science et son erudition lui ont
fournis. lis ont pour but de relever quelques erreurs de
M. Pearson, et de deraonlrer que la monstruosite du Chinois
n'est point parfaitemcnt identique avec cellcs du m^nie genre
decriles jusf|u'ici, et que, sousce dernier rapport, M.le docteur
Bordot merite d'auiant mieux les reaiercimens de I'AcadeiBie
poursoninteressantecomniunication.(Approuvi'.) A.MicHELOT.
— Jcademiefiuncaise. — Seance publique annueUe du %[>
aodt i8'^6. — Distribution des prix d' eloquence etde poesie , el
des prix fondes par M. de Monlhyon. — Puisquelcs anciens
usages continuent , meme lorsqn'il ne reste plus de uiolifs pour
les maintenir, sinon, commedit Montaigne, leur barbe chenuc
€t leurs rides ^ le panegyrique de Saint-Louis a etc prononcc ,
PARIS. 835
cette annee, devant quelques membres de I'Academie francaise.
II parait que I'eliquette ne ])erniet pas de con6er a un acade-
niicien cette oeuvie jjurement oratoire, qui ne peut avoir, dans
aucun cas, I'utilile d'un sermon sur la morale ; c'esl un luxe de
la chaire evangi-lique, dont elle ne recoit aucun eclat, et qui a
raeme le grave inconvenient de la souraeltre aux criliques du
gout, de confondre ses oraieurs dans la I'oule, etdeleurini-
poscr des lois qui ne devraient pas (^frefailes pour eux. Cette
ann^e , un jeune pretre, M. Cabanes a ete ciiarge de faire le
cent cinquantieme paiiegyrique du saint roi : il s'en est acf|uitle
de son raieux; si les auditeurs n'ont pas ete satisfails, ce n'est
pas a I'oraieur qu'ils doivent s'en prendre, luais a ceux qui
Tent choisi. Quelques critiques, disposes a I'indulgence , ont
apercu dans son discours les germes d'un talent remarquable
que le tems pourra develo;)per et luurir : maisce talent jiarait
mieux convenir a la tril)une ([u'a la chaire , aux choses profanes
qu'a celles de la religion. L'cloquence sacree se distingue sur-
tout par une moderation pleiue de dignite, par une action
douce , continue , qui peneire sans efforts a travers les obstacles
que lui oppose I'imperfeciioji de la nature huuiaine, et laisse
dans I'ame des impressions salutaires et durables.
I/Academie avail a decerner, dans sa seance publique, le
prix d'eloquence et celui de poesie. — Pour \e prix cf eloquence,
le sujet juis au concours etait Veloge de Bossuet : i\ couxtnaXx.
aux circonstances presentes; et, si c'est par ce motif que I'A-
cademie I'avait choisi , nous devons Ten reinercier. Mais , pour
_le ti'aiter convenablemeut , il ne fallait rien nioins que la ma-
turitc d'un esprit observaleur. Les jeunes talens se trouvaieat
hoi's d'etat d'enlrer en lice ; les talens eprouves ne recherchent
plus les couronnes acadcmiques : le prix n'a pas ete decerne.
Le prix de poesie etait promis , depuis deux ans , a la
meilleure piece de vers sur les legs et les fondations de M.de
Monlhyon. Celle de M. Alfred de Wailly, professeur au college
do Henri IV, a ete conronnee. Les concurrens etaient nom-
breux; un accessit decerne au nuniero i5, la meulion hono-
rable des nuuieros 29, 4, i3 et 28 attestent que nos poetes
sont ins])ires par la reconnaissance , et s'empressent de cel6-
brer les bienfaits.
L'expose des motifs qui ont determine I'Academie a decer-
ner, cette annee, plus de prix a la vertu , ne pouvait etre
ecoute sans un vif intcret. Douze recompenses out et(^ distri-
buees , dans I'ordre suivant :
1° 4,000 fr. a M"« CeVe^^/weDETRiMONT, demeurant a Mou-
chy, arrondissemeut de Dieppe, Seine-Inferieure. Cette de-
8^6 FRANCE.
moisolle a prodlgue ses soins a iine famillc entiere , aftaquce
(In typlius. — 9.° 3,000 fr. a Marie Brun, nee a Monfapny,
canton et arrondisscraent de Loulians, Snoiie-ct-Loire. Elle a
servi et soiilagt- , j)fndant treiite ans, sesinailres toinbes dans
rindif;oiice. — 3" Medaille de 2,000 fr. a Catherine Gautier
eta Jean-Nicolas Rol , son epoux , demeurant a Damas -aux-
Bois , aiTOndissement d'EpInal;ils se sont devours, comme
Marie Brun , pour leurs maitrcs qui sans doute etaient dignes
de tels servitcurs. — 4° Medaille de a, 000 fr. a Dominique
McssET eta Anne Delcuos, son cpouse, a Chateau -. Salins,
departeraent de la Meiirlhe. — 5° Medaille de 1,000 fr. ^
M"" Dklcros, ouvriere en robes, A Paris. — 6" Medaille
de 1,000 fr. a M""^ Louise Coindre , couluriere , a Paris.
— 7" Medaille de 1000 francs a M. Moreau, a la Cha-
pelle - Saint - Mesmin , departement du Loiret. • — 8° Deux
medailles, ile 760 fr. chacime, aux demoiselles Rotjii.le, a
Paris, rue Pierre - Satraziii, n" 4. — 9" Une medaille de
600 fr. a Jeanne Modnicot , femme Pierrette , a Noye, can-
ton (leLembeye, depaitcment des Basses-Pyrenees. — 10° Me-
daille de 5o() fr. a Marie-Elisabeth Austebberthe, veuve
TROTTiER,a Paris, rue Saint- Jacques, n" 332. — ii** Medaille
de 5oo fr. a Anne Couard , veuve Youf, a Paris, rue du Dra-
£fon , n° 3. — 12° Enfln, une medaille d'or, du 7Tiodiile de
I'Institut, a Etienne Lucas , fils du garde champetre de Serqui-
gny , deparlenienl de I'Eure.
Les actes de vertu (]ui ont merite ces recompenses sont des
secours offcrls a I'inforlune par la panvrete , I'adojjiion d'en-
fans abandot)nes, une vie lout entiere consacree a une coura-
geiise bienfaisance, des viclimes arrachees a la mort , au peril
de la vie.
On demandcra pourquoi les classes aisees ne pataissent point
dans ces fetes consacrcesa'la vertu, sice n'est pour en reliaus-
ser la pompe? Pourquoi des conronnes ne leur sont pas decer-
nees? Le fondateur ne s'est pas occupe d'elles; il pensait ap-
paremment que les riches n'ont pas besoin d'etrie extites a la
bienfaisance.
II resfaii a dcrerner le jirix destine a I'ouvrage le plus utile
aux nioeiirs. L'Acadeniie a pcnse qu'aucune des jirodiiciions
lltleraires de cette annee ne incritait tine distinction de cet
ordre ; mais que Irois petits onvrages avaient approche du but.
Des medailles ont ele distiibuecs entre trois ccrivains : M. de
JussiEU, auteur de Pierre Gibernc ; M""^ Panier qui nous a
donne VEcriva in public, el M. Bouili.y, aulcur des Contes
offcrls aux enfuns de Fiance. Le public a regrelte que Ton n'ait
PARIS. 837
point fait connaitie les iiioiifs de cede d^'cision ; il est a crain-
dre qu'il ne la conQrme point. A I'avenir, on devra s'attendre
que I'yVcademie ct I'opiniou publitjue suivront des directions
differenles et ne se reDContreront point. Commc le corps litte-
raire parair soigner assez peu ies inteiets de ia iitterature, le
public se charge d'y suppleer , autant qu'il le peut; et bieniot,
son influence doniinera seule, et fera scniir peut-etre riniili-
litc de TAcadt-mie. Le genereux M. de Montliyon n'a pas pie-
vu cette revolution dans nosmoeurs publiques; anjourd'hui, ses
intentions bienfaisanfes sont mal comprises, et ses fondritions
ne seront pas aussi profitablcs qu'il I'csperait. Depuis que I'A-
cademie francaise a cesse d'etre environnee de ia consideration
pubiiquejclle ne pcut plus etre I'organe de jugemens aussi
graves, aussi soleniiels que ceux qui decerneiit les prix dc ver-
tus etd'utilite morale.
M. de Cfssac, presidant I'Acadeniie en I'absence de Ms'' I'ar-
cheveque de Paris a tennini'- la seanre par I'inauguralion du
bnste de M""' Elisabeth , place en face du bureau du Direcleur.
Cast un des legs fails a I' Academic , par M, de Monthyon. « Le
courage railitaire, a dit M. le chancclier , est recompensi'? au
nom lie Saint-Louis, les signes de I'honneur sont donnus au
nom de Henri IV , et desormais , la veriu sera recoropensce au
nom de M"'« Elisabeth. » <#
L'Academie propose pour le prix de poesie qui sera deccrne
en. 1827, I'affranchissement des Grecs. Elle annotice qn'elle
proposera , pour le prix de prose a decerner en 1828, un dis-
cours sur la marche et ies progres de la langue et de la liite-
ralurefrancaises depuis ie commencement du xvi'^sieclejusqu'eii
1610. ' Y.
— Academic des Beaux- Arts. — Nominalion de M. David,
sculpteur. — L'Acailemie ,'dans sa seance du 5 aonf, a nommc
a la jilace vacanle par la mort ile IM. Stouf, sfaluaire, M. Da-
vid, jeune sculpteur, dont les premiers ouvragcs, \es statues
colossnles du grand Conde , dc Racine, de Fenelon et de
Bonchamp , ces deux dernieres accompagnccs de bas-reliefs,
donnent la plus haute idee de son talent, el les esperances
les iiiieux fondees qu'il souliendra digiicnient dans les arts
le beau nom qu'il porte, ct qu'un nouvcaii David ajoutera
encore a la gloire francaise. M. David est charge d'executor la
statue du general Foy , et quatre bas-reliefs, representant
les e|)Oques les jjIus remarquables dc la vie de ce grand ciloyen,
pour le monument consacrc .n sa njiiuuire par la reconnais-
sance naliona!c ( Voy. Rd'. eric, t. xxx, ]). 58o ) ; enfin ,
on lui de\ra bieiitot deux bi.stcs en mnrbre , I'un du celebre
838 FRANCE.
publiciste et philanlrope Bent/iam ; \'k\u\re , du general La~
fayette , c'galeraent clier a la France el a l'Amerir|uc. On aiine
a voir tour a tour le cisean , le burin et Ic pinceau employes
par des mains li.ibiles a conserver Ics traits des homraes dis-
tingues et utiles , on a transmetlre aux siecles a venir les ac-
tions d'heroisme et de \crtu qui honorent I'humanite.
M. A. J.
Academie royale de medecine. — Resume des deliberations
relatives aii magnetisrne animal, dans les seances du i3 dccem-
bre 1825 , du 10 et du 24 Janvier , et du \l\fevrler 1826. —
Mf.smer, nalif de Vienne, enlreprit , en 1772 , de trailer les
mnladies par nn agent qu'il disait avoir decouvert, et qu'il ap-
pelait jnagnetisrne animal. Selon lui, cet agent etait tin Jluide
nniversel dont chac|uc ctre avait sa ])ortion. Ce fliiide, mu par
la voloiite, pouvait se porter ainsi d'lin corjjs siir un autre.
ToMte maladie eiait occasionee par un defaut d'<5quiiibre de cc
fluide , et en !e meltant enaction, une aiiire personne pouvait
giierir le malade. Telle est la base du systcme de Mesmer ; il
se donna pour en etre I'inventenr, (juoique cetle theorie se
reirouvedans les ecrlts de Van Heimont, de Maxwell, de divers
pliilosophes et nicdecins du xvi' siecle. Mesmer obtenait des
resullats, il gucrissait des malades; son sysleme fut vivement
Vbtlaque et defendu.
En 1784 , 1<' roi nomma treize commissaires pour examiner
la th''orie ct lei precedes de Mesmer; ils etaient pris dans la
Faculto de Paris, dans TAcadenue des sciences, dans la Sociele
royaSe de miviecine, et on comptait parmieux Franklin ^ La-
voisier, deJusiieu et Bailly. Ce dernier fit, au nom dela com-
mission, un rapport dans leque! , rejetantla iheorie du fluide,
ilreconnut I'existenee de violcns e/J'ets , dus ci I'attouchetnent,
it t imagination , ci C imitation. De Jussieu, dans un rapport
parliculier , rejelant egalement la iheorie, n'apercut dans-les
elfets que remission de la chnleur animale , soitpar le frotte-
ment, soit par le contact, et plus rarcment par un simple rap-
prochement ii quelque distance : \\ dcmanda que ceux qui con-
tinuaient le traitement magnetique, fjssent connaitre leurs
decouverles et leiirs observations.
Le rapport de Bailly et les eveneniens de la revolution firent
negliger les traiteinens magiieli(jues. Plus tard, I'observation du
soinnambiiiisnie, qui avait ete ignore de Mesmer, a I'epoque
de Texamen de la commission, et plusieurs ouvrages, surtout
ceux de MM. de Puysegur et Z>e/^wze reporterent I'at ten lion
sur ce snjet. La prati(|ue et laNtheorie meme changerent; des
Ciperiences faites a I'Hotel-Dien, par le doctenr Dupotet , en
PARIS. 859
1820, rendirent assidus a I'observalion dcs fails beaucoup de
jeunes niedecins. Une lettre de M. le docteur Foissac a J'Aca-
demiede medecine, au moisd'aoiit iSaS, annoricaitdes fgcultes
surpienantes reconnues dans Jes somnambules, et provoqnait
I'exarnen du magnetisme animal, ainsi que la nomination de
commissaires pour suivre les experiences. M. Adelon fit part
de ces propositions a ['Academic, et elles y furent le sujet
d'une discussion. Les uns allej^uaient qu'il etait naturel dexa-
miner; les antics pretendaient que le magnetisme animal elait
inort et enterre depuis long-tems, Cesderniers ne remartjuaient
peut-etre pas que la lettre de M. Foissnc ne faisait guore men-
tion que du somnambulisme et de quelques unes de ses famil-
ies, tandis que, dans le fameux rapport de Bailly, qui, selon
eux , avail tue le magnetisme, il n'avait etc nullemcnt question
du somnambulisme alors inconnti. Le president, M. Double ^
concilia les differens avis, en pvoposant de nommer une com-
mission cliargee de faire un rapport sur cede question, s'il
convenatt que I' Academie s'occupcft du magnetisme animal. La
proposition adoptee, MM. Adelon , Pariset , Marc , Russon ,
Burdin furent nommes commissaire? ; etle i3 decembre 1825,
M. Husson fit le rapjiort. Bien (ju'on ait prononce , y cst-il dit,
sur le magnetisme, en 1784, ccn'est point une raison pour ne
pas ordonner un nouvel examen , en siipposant meme que le
premier ait tte convenablement fait. En medecine, comme
dans les autres sciences , de nouvelies lumieres ont sonvent fail
naitre de nouvelies doctrines. Depuis Mesmer, la theorie elles
procedes du magnetisme sont changes , et les effets oblenus
sent differens; un nouveau phenomene , le somnambulisme,
s'esl manifesie ; enfin, dans jjr^'sque tout le nord de I'Europe,
le magnetisme est exerce par des hommes f ut habiles et tres-
peu crcdules, et, si Tuiilile n'en est pas generalement reconnue,
du moins la realite n'en est pas raise en doute. En France, les
docteurs Georget, Uertrand , Rostan , Gersent, et plusdevingt
autres out signe les proces-verbaux des experiences de I'Holel-
Dieu, en 1820; et a leur suffrage s'est joint celui de MM. De~
leuze et de Puysegur , et d'autres personnes distinguees; si
d'ailleurs on considerait le magnetisme comme un rcmcde se-
cret, il serait du devoir de I'Academie de I'examiner pour en
prevenir les abus : daiiscet etal de choses, le rapporteur con-
clut a ce que la section de V Academie charge une commission
speciale de s'occuper de I'etude du magnetisme animal.
Ce rapport fut accueilli tres-favorablemeni par la majorite
de I'Academie, et la discussion s'ouvrit sur les conclusions qu'il
renfermait.
84o FRANCE.
Dans les seances du lo et du 24 Janvier, et du 14 fevrier ^
la pliipartdes niembres presens ont In surcet objet des discnu''s
prepares avee soin. Les nns altaquaicnt le i7iagnetisme ave^
violence, ou avee I'arme du ridicule si puissontc ])arnii nousj
les autrcs le def'endaient avee une ciiconspection et un sce|)ti_
cisme philosojdiiques, ou iis lapportaient des faits observe^
par eux-meines. Parmi les opi)osans, on remar(|ua surlout
le savant docteur Double , doni le discours fut un des plus spr_
rituels et mcrue des mieux raisonnes; niais les partisans du
m'agnetisme regretlerent de le voir rappeler avee tant d'art
des passages Ironques, dont la citation plus exacte n'eut pas
reinpli son objet. Ne pouvant nffrir ici, faute d'espace, I'ana-
lyse de chasjue discours, nous n'en donnerons que la sub-
stance.
Les advcrsaires du magnelisine s'attacherent ponr la plnpart
a prouver qu'il n'elait qu'un effet de rimaginalion , ou me/ne
une jonglerie exposant aux plus graves inconveniens. Recon-
naitre ces dangers , quelle qu'en fut d'ailleurs la cause, c'^tait
adniettre implicltement la realitc du raagnetisme. Vpici leurs
principales objections : i" le magnetisme animal a cte bien
juge et bien observe, en 1784; Railly et Thouret en ont fait
justice. 2° Depuis celte cpoque, le fond dela chose est lememe ,
les mots seals sont changes. 3° Le succcs du magnetisme en
AUemagne et dans le nord ne decide rien, ces pays etant le
berceau de foutcs les reveries philosophiques et scienlifiques.
4" Le magnetisme doit etre considere et juge comme un remede
secret, sans (|u'il soil besoin de nommer a cet effet une com-
mission qui ne pourrait jamais s'occuper avee succes des expe-
riences demandees par les magnetiseurs, et qui, par le seul fait
de sa formation, exposerait I'Academie i> la risee de I'Europe.
5° Le uiagnelistiie n'etant que Tattraclion naturelie des sexes,
enlraine et entrainera de grands abus. 6" Ceux qui s'en occu-
pent sont des ignorans ou des charlatans qui ne meritent aucune
attention. 7° Les faculles attributes aux somnambules, et les
faits rajtporlcs paries magnetiseurs, sont faux, puis(]u'ils se-
raient iniraculeux. 8" La foi declaree necessaire pour pouvoir
magnetiser et eire magnetise, est une condition qui choque la
raison. 9° Le fluide magnetique ne pouvant tomber sons les
sens, il est diflicile de le croire existant. 10° Si le magnetisme
avait des fondemens reels , il serait d'usage depuis long-iems.
Les partisans du magnetisme repondirent : le magnetisme a
ete fort nial observe par les commissaires nomrnes en 1784 :
ils n'ont point rempli les cimditions proposees; et souvent,
lorsqu'on ne les remplit ])as, on peul manquer meme une ex-
PARIS. 841
pcricnce facile. D'ailleurs, ils n"ont j)oiiH nio I'exislence des
ejj'ets; le rapport dit texluellement. « ...on ne peul s'empecher
de reconnoitre a ces ejjets constans une grande puissance qui
agite les mahidcs, les ninitrise , et dont cflui qui magnetise
seinble etre le depositaire. » Depuis I'/S/j , le miigneiismea gagne
dans Topinion , el il s'appuie aujonrd'hui sur une masse de
fails dilliciles a levoqiicr en doute. Depuis Mesmer, non-seu-
Icmeni les mots out change, mais encore hi tlieorie, la pratique
et les rosullats; c'est dej)uis cetle epO(|iie (|iie le somnambu-
lisine, le plus clonnanl clfct du magnelisnie, a ele deiouvert
et observe. On ne jjeut dire sans injustice (]ue I'Alleniagne et les
pays du nord soient le berceau de toutes les reveries, qtie
Kepler, Euler, Leibnitz , BoHrhaave et l.inl d'aiitres n'aicnt ete
que des reveurs. Apiess'eire declare conire le magneUsme, le
ceiebre Htifcland , se rendant a I'evidence , I'a pratique. Des
savans et des niedecins, exempts de fol entbousiasme, s'y sont
attaches vers le Nord, et J'Acaderaie des sciences de Berlin ,
une des plus distinguees dans le monde savant, a mis la ques-
tion dii magnetisnie au conconrs, en 1820. En Prusse et en
Russie, des ordonnances ont attribue aus seuls medecins la
pratique du magnetisme, et en Danemaik, on re s'en est pas
occupe moins serieusement, puisqu'on y exige la surveillance
d'un medecin resjionsable. Le magnetisnie ne pent etre consi-
dere comme un remede secret; on salt que ceux qui lerejeltent
reprochent principaleraent aux magnctiseurs nla manie de vou-
loir convaincre, en promenant parlout leurs miracles. « A la
vcrite, une commission offrirait peu de chances de succes, si
elle agissait en masse; mais, si on la composair de dix ou douze
membres charges d'observer. rhacun de son cote, pendant un
terns, avant de faire son rapport, cemode pourrait amencr des
resultats satisfaisans. Une recherche philoso[>liique n'ex|)ose
jamais qu'a la risee des ignorans. Le premier qui .n parte des
aerolithes, il y a environ 4o ans, a excite le rire dans lontes
les classes de la societe. Cepondant les analyses de Lavoisier ,
et les recherches de I'illuslre Laplace ont bientot change
I'opinion. Sans dotite, le magnetisme pcut occasionner des
abus; mais le remede le plus salulaire, ctant mat adminisire,
pent aussi devenir pernicieux, et les corps savans dont I'ojjinion
fait autorite dans la societe auraient des reproches a se faire,
s'ils refusaient d'examiner les procedes du magnetisme, afin
d'en ecarter les dangers. Tousles jours, un medecin pcnelreplus
avant dans les secrets des malades et les approche de plus pres
que ne le font les magnctiseurs, sans <\ue Ton en eiit conclu la
r.ecessite de proscrire la mi'decine. Presrjue iiiconnii dans la
84a FRANCE.
classe ignorante , le magmHisme n'est soutenu que par les
ouvrages et par la pratique de medecins , de naturalistes ,
de savans dont phisieurs soiit trcs-recommandables; il compte
assez d'aniis sur tous les points de I'Europc , et meme en
Anjiiriqiic ct en Asie , pour qu'il soil diflicile de supposer
que des homines si differens eniro eiix a d'autrcs egards,
s'entendciU afin de iromper le genre linmain. Si meme tous
les jiersonnages attaclins an magneiisme avaient le cervean
exaild , il faudrait du moins supposer a cette nouvelle secte
un genre d'illuminisnie, curieux a examiner. Mais ces prelen-
tendns scctaires ou ces imy)osteiirs ne cachenl point leurs iiiys-
tercs ou leurs artifices ; ils disenl a chaciin : « nous n'avons
point de secret; faites commc nons, et vous obliendrez los
menies effets. » Ils sont convaincus, ]iarce que, en pratiquant,
ils ont vu , tandis que, parmi leurs adversaires, on en trouve
bien pen qui aient vcdu voir, et qui aient essavti ics expe-
riences de la nianiere convenable. Si (pielque magnetiseur ,
nouveliement converti, a parlc avecenthousiasnie des effets sur-
prenans (pi'il a prodnits, ceux (|ui ont beaucoup pratiques sont
plus froids; ils n'apercoivent point de miracles, niaisseulement
de nouveanx phenoinenes dignes d'examen : so'is ce ])oint de
vue, la plupart des experiences de physique paraitraient aussi
merveilleuses. Quanta une certaine foi, elle est demandee,
non pas cnmme indispensable, surtout dans la personoe ma-
gnetisee , ma-is comme ayant de I'influence sur la volonte,
parce qu'il est bien different d'agir avec la conviction d'un
succes Immediat , ou sans cette conviction. D'a<ulies fluidcs
dont Texislence n'est pas contcstce, tel que celui an rnoyen
duquel on charge la matiere electrique, ne frappent pas plus
les sens que le fluide magnetique animal, el n'ont egalement
que des effets particuliers. L'aciion magnctique d'un etre sur
un autre ne doit pas plus etonner que celle des poissons elec-
triques, et que les effets de la pile galvaniquc. La plupart des
decuuveries utiles a rinimanlte ne dalent point des premiers
tems; de nos jours, il a falln se resoudre a reconnaitrel'effi-
cacite de la vaccine, la circulation du sang, Ja theorie de I'ori-
gine des nerfs, et tous les nvsultats d'expt'-riences chimiques,
astronomi(p!es et physiques i|ui avaient d'abord ete mal ac-
cueillies. Une jcunesse studieuse pent adniettre ce que repous-
sent les preventions d'un autre age; enfin il est digne d'un
vrai savant d'a])prendre ce qu'd ne savait pas.
Le 1 /« a vrd ( 1 826 ) M. Hiisson , rapporteur de la commission,
soulint ses opinions precedentes dans un discours Ires-etendu,
cliefd'oeuvre de clarte et de raisonnement : il persista dans
J
PARIS. 84'^
scs premieres conclusions. La section de 1' Academic vola par
la voiedu scrutin. Sur 60 inembres presens, 35 voterent dans
le sens du rapport et la section decida qii'il serait nomme une
commission speciale , pour s'occuper de L' elude etde Cesamen
du magnetisme animal, [y o^j . ci-dessus, p. 5i5, I'annonce
d'un journal, r/i'e/-//ze.f, consacre au magnetisme animal.) E. I,.
Institution royale desjeunes avcugles. — La distribution so-
lennelle des prix dans cet interessant etablissement, le jeudi 3 1
aout, avait attire un grand concours de spectateurs. la seance
etait presidee par M. Lafon de Ladebat, un des administra-
l€iirs de Tinstitution. Dans im discours vraiment paternel , ce
respectable philantrope, ([ue nous nous honorons de compter
au nombre de nos collaborateurs , a paye un juste tribut d'e-
logc aux enfans qu'il venait de couronner; ainsi qu'a MM. Pi-
QuiER, directeur et premier instituteur de I'etablissement, et
DuFAU, deuxieme instituteur et I'un de nos collaborateurs, en-
fin a M""' de Landresse , institutrice desjeunes lilies. A celte
seance assistaient j)Iusieiirs de nos professeurs de musique les
plus distingues, tels que MM. Dauprat , Berhiguicr ^ etc. qui
donnent des soiiis habituels a ces jeunes gens avec le plus noble
desinteressement. U.
Industrie. — Perfectionnement de la trempe des rasoirs.
— Un de nos plus habiles coiitelieis , M. Viilenave est
parvenu a donner une trempe nouvelle aux rasoirs. Celte
trempe est d'uiie telle force qu'elle fait eclater une partie des
lames qu'on lui soumet. II en resnlte que celles qui resistenta
celte epreuve font des rasoirs excellens, et dont la superiorite
sur ce qui s'est fabrique de niieux en ce genre, soit en Angle-
terre , soit en France , ne tardera pas a etre generaleraent re-
connue. C'est une decouverte d'nne tres-liaute importance pour
noire Industrie. La fabrique de M. Viilenave est e'.ablie, place
des Italiens, n° 5, M
Theatres. — Theatre-Francois. — Premiere representation
du Duel , ou Dix ans de trap , comedie enun acte et en prose,
par M. Leon Hai.evy. (Mardi 29 aout.) — La baronne Hor-
tense a trente ans,mais elle est encore jolie , et elle a rendu
tl'importans services a son petit cousin Gustave. Cehii - ci a
vingt ans a peine , il est bien reconnaissant , il se croit amou-
reux, et il a prcmis a Hortense del'eponser. Cependant cette
disproportion d'age inquiele la baronne, et son inquietude
redouble lorsqu'elle s'apercoit que Gnstave est fort occupe de
Delphine, fille du general Maurice, qui est venu pnr.ser quel-
8/,4 FRANCE.
ques joiii-s au chateau. Ce Maurice est beau frere d'Hortense;
elle lui explique le souci ou la met ce projet d'une nouvcUe
imioti ; et lul se charge de deviner le secret du jeime homme.
II spmble qii'il pourrait le lui demandcr tout naturellement,
mais ce n'eut guere ete la peine de faire une coraedie. Maurice
y met plus de facon ; il eugage uue querelle avec Gustave , et
il le pousse tellement, que le jeune hoinine est force d'ac-
ceplerle duel qu'il lui propose; c'estpourle geniralune preuve
que la baronne est aiint-c de Gustave. Hortcnse , qui doutc en-
core , menage a son cousin un tete a tete avec Del|)hine. Si ce
rendez-vous lui fait onblier I'autre, ilsera evident que ce n'est
pas elle qu'on aime. Voila en effet ce qui arrive. Gustave ne
songe il la partie d'honneur que lui a proposee le general que
long terns apres que riieure est ecoulee ; maisils'en dedommage
en tirant le pistolet avec un colonel anioureux de Delphine,
et avec lequel il devait se rencontrer ce meme jour. Au bruit
du coup de feu , Delphine s'evanouit , de sorte que , grace a
la ruse du general , il ne manque rien a la conviction de la
consciencieuse baronne ; elle sait que Gustave ne I'aime pas, et
que de plus il est aime de Delphine. Tout cela n'est ui bicn
neuf, ni bien ralsonnable; niais, il y a une ou deux scenes adroi-
teraent conduites ; le dialogue est spiriluel, mais quelquefois
pretentieux. M. LeonHalevy a fait une traduction d'Horace oii
Ton a remarque du talent pour la poesie ; on regrette qu'il
n'ait pas versifie sa piece ; ou plutot il faut regretter qu'un
jeune honirae qui annonce du talent commence sa carriere
dramatique par une esquisse de boudoir , ou la peinture des
moeurs est completenient oubliee. I! serait facheux que le
succes de cet ouvrage engageat I'auteur a rester dans la mau-
vaise route ou il debute.
— Theatre de VOdeon. — V representation de Baudouin,em-
pereitr, trag^dieen 3actes, parM.LEMKRCiKR. (Mercredigaout).
— La prise de Constantinople par les Croiseset I'avenement de
Baudouin avaient deja fourni le sujet d'une Iragedie represen-
tee au meme theatre, il y a cin(| annees. L'auteur avait pris
son action dans les sanglans demeles qui precederent la chute
de I'empire grec, et la prise de Constantinople etait un des
incidens de sa piece. M. Lemercier supj)ose que Constanti-
nople est soumise , et les vainqueurs s'occupent paisibie-
raent deliii donner un niaitre. Douze electeurs sont assembles;
les candidals entre Ies(]uels »e ])artagent les voix, sont au
norabre de iruis : ie doge de Venise , Dandolo; Baudouin,
conile de Flandre ; et le due de Montferraf. Baudouin, iininie
PARIS. 845
fie I'esprit ties crolsades, aimerait inieux disputer les palmes
suinles sons les inurs de Jerusalem, ()ue briguer une couronne
a Crinstantinople, et il verrait le sceptre avec indifference, si
i'ambition dont sa jeune epouse est devoree re le contraignait
a disputer cette pourpte sanglante. En s'unissanl a Marie de
Cliaiupapjne, niece de Pliilippe-Auguste, Baiidouin lui a jure
que le premier fruit de leuis amours porterait la courojine, et
le moment est venu de saiisfaire a son imprudente promessect
de complaire a une femme qu'il adore. — • Dandolo , vieux ,
aveugie, nourri d'aillcnrs dans les sentimens republicains, de-
daigne le trone , et il consacre tonle son iiifluence a obtenir
I'clection de Baudouin; le due de Moulferrat est done le seul
rival que celui-ci ail a craindre. Ce persounagene parait point;
et, (|uoique ses chances pour arriver au trone ne sembleht
pas bien redoulables pour Baudouin, Marie en est tellemebt
cffrayee qu'elle paie un assassin pour I'effacer de la liste des
candidats ; et, en meme terns, elle rcpand i'or dans I'armee
des Croises , afin de concilier tous les voeux a son epoiix. Ces
manoeuvres devoilees compromettent un instant I'clection de
Baudouin ; raais les efforts de Dandolo trioraplient , et le
comie de Flandre est elti ; un festin som[)tueux suit cetle elec-
tion; I'assassin qui a vendu Ic sang de Motitferrat, mais qui
n'a point consomme son crime, s'assicii a la table imj)criale
et vei'se du poison dans la coupe de Marie, qui e^ipire au mi-
lieu de la ceremonie du couronnemcnt. On voit que , dans un
evcnement si simplcment arrange, et parmi des personnages
dont un seul est anime de passions -vives, i! ctait difficile de
tiouver les elemens d'un diame ; M. Lemercier I'a bien semi,
el il a imagine dejeterau milieu de son action un ])ersonnage
donl la seule presence y repandit le mouvemcnt et la terreur.
Une femme, veuve d'un jirince croise, qui n'est plus connue
que sous le nom d'Atbanasie, consume sa jeunesse dans les
austeritesde la penitence ; retiree sur la colonnede Theodose,
elle y entrelient commerce avec le ciel, elle se croit inspiree ,
et Byzance la revere cosnme une sainte. Ce mysterieux per-
sonnage apparait dans Ic palais du comic de Flandre , et s'ef-
force de le delourner de scs projets ambitieux , en lui declarant
que le jour ou la couronne sera placce sur la tete de Marie,cette
princesse infortunce descendra dans la tombe. Cette effrayanle
revelation inquicte I'amour de Baudouin , sans moderer I'am-
bition de Marie ; mais, an moment oil Teleclion du comte de
Flanilre est connue, et parmi les transports dejoie auxquels Se
livre la nouvelle imperatrice, Athauasie apparait une seconde
foiset lui repete ^elle-memesessinistres predictions. Si vous ne
846 FRANCE.
m'ecoulez pas, lui dit-clle, vous me icvcrrez encore uiie fois)
niais ce ne sera que jiour consolei' vos derniers inoinens. Kn
effet, lorsque , pics de inonler sur Ic tione, Marie pale ct
faible sent les |)rcralers ravages du poison , la troisieme apj)a-
1 itioii de la falale inspiree jette dans i'ame de Marie et de ceux
qui renviroiincnl un prof'ond sentiment d'ellroi.
Ce persoiinage est one de ces creations originales auxquelles
se plait M. Lemercier, et dont on trouvc des exem|)les dans
presqiie toiitcs ses compositions. Son Alhanasle est bicii une
figure de cette epoquc d'illuinination devote et d'exallatiou
theologique; et nous croyons qu'elle aurait fait une im])res-
sion veritablement tragiqne dans une action plus attachante.
Mais on ne s'interesse pas plus a Baudouin, qui se laiise fairc
empereur par faiblesse , qti'aux trames et au triomphe de Ma-
rie ; de sorte que les terreurs repanduespar I'inspiree, et qui
sont ici le seul obstacle ausucces de Taction, perdent tout leiir
effet, comnie ressort dramaiique. Pent - etre aussi eut - il ete
necessaire, pour donner plus de creance aux predlclions d'A-
tlianasie, de re])andre sur toutle sujet une teinte plus jjronon-
cee do sentiment religieux et de la ferveur mystique qui re-
gnaient alors.
Cette iragedie offre des morceaux d'eclat, et jilus d'un trait
qui decclcnt la main du maiire , mais roffel general n'en est
jioint salisfaisant. Nous regretlons (]Ti"uiie conception ()ui, nous
le repetons, est dignc du genie de M. Lemercier, et ])our la-
quelle sans doiite il a compose la ]Hece , n'ait j)as etc placee de
maniere a produire tout I'effet f|u'on en pouvait attei'dre.
Odcon. — Premiere representation de VEcole des Veuves ,
drame en trois actes ct en vers; par M. Gustavc- Fabien
PiLLET. (Mardi ag aout. ) — Tandis f|ue I'auteur du Duel
donnait aux tiemmes de moyen age une lecon sur le Theatre-
Francais , i'auteur de I'Jicole des Fcuves leur rendait le meme
service a TOdeon. Mais M. Gustave-Fabien Pillet est entre
bien plus francbement dans son sujet; son lieroine ne connait
loutes les consequences de son imprudence , que lorsqu'elie
est it reparable ; il en resuUe que la piece presente une lecon
j)lus vive, mais aussi que le denoument est impossible, ou
du moins qu'il ne saurait satisfaire le spectateur.
jvime Belval , veuve d'un riche negociant, s'est remariee a
un jeune homme de af) ans , quoiqu'clle en cut alors 35 ,
et qu'elle fut mere de deux enfans presque d'age k se marier
eux-memes. II n'y a guere que cinq ans qu'elle a fait cette
folic , et dcja son mari a dissipe une partie de sa fortune.
PARIS. 847
Kpris d'une feininesans honneur et sans nioeurs, sur le coiupte
de laquelle 11 est dans le plus complet aveuglemenl; lie avec
un Kiauvais sujel nomine Saint-PIiai', qui encourage des de-
sordres dont il profile ; conipielenient brouilie avec les enfans
de sa feinine , Belval abreuve de chagrins celle qui I'a mis
dans une position brillante , en I'unissant a son sort. Toujours
douce et bonne, M.""= Belval se piaiiit avec tendiesse, (juand
elle aurait droll de gronder; niais rien ne pent raniencr son
ej)oux , qui ce jour mcme est sur le point de laire une nou-
velle extravagance. Belval est informe que Jenny, sa maiiresse,
est viveinent pressee par ses creanclers pour une soninie de
vingl roille francs ; s'il la ])reiid dans sa caisse , 1! se met hois
d'elat de jiayer des billets dont Techeance est arrivee; I'em-
j)ranler ii'est ])as sans inconvenient pour un credit deja
cbranle. Dans cet embarras, Sainl-Phar lui offre un secours
dont 11 ne saurait user sans s'avilir ; un porle-feuille appar-
tenant a M"""^ Belval , se trouve dans un secretaire ouvert j
Saint - Phar s'en saisit et presse Belval d'y prendre Ja
sornnie dont Jenny a besoin ; mais lui rctour vers I'honneur
Tempeche de succomber a cetle teutation, et il est bienlot
rendu cntierement a lui-nieme, en vcyant au tribunal , ou
sou beau-fils I'a conduit , une i'emme et son complice con-
damnes pour escro(}uerie. On deviiie que c'est Jenny el Saint-
Phar. Belval oblient facilemeut son pardon ; inais , inalgui ses
protestations , ou prevoit trop bien que ce u'esl pas la deraiere
fois qu'il en aura besoin. Aussi , comine nous ra\ons dit ,
le denoiiment ne satisfait pas. II eut ele ]ilus vrai et plus
moral, dans le sens draniatique , que la piece se terminal par
une rupture complete entre les deux epoux ; mais ce denoii-
ment eut jete encore plus de tristesse dans I'ouvrage , et I'un
des reproches que nous semble raeriter I'auteur , c'est preci-
sement de n'avoir pas cherche a presenter son sujet sous des
formes comiques. Quand Moliere a voulu mettre au tlieatre
les tristes suites d'une alliance inconsideree , il a fait Georges
Dandin. On repelera peut-etre que la piece n'est pas morale ;
il nous semble qu'on se meprend sur ce point. 11 1'aiit faire at-
tention quece n'est pas I'epouse que le poetea voulu irtslruire ;
c'est au mari qu'il s'adresse , et Ton doil bien csnvenir que
])Our celui - ci la lecon est aussi eloiiuenle qu'elle puisse I'elre,
et le drame le plus lugubre cut cte bien nioins ])ersuasif. Au
reste, ce que nous demandous ici ne pent pas etre !e coup
d'essai d'un jeune horame, et Ton dit que M. G. Fabien Pillet
est tres-jeune. Sa piece n'offre point de situations bien neuves ,
mais elle est sagemenl conduite; il y a pcu d'originalite dans.
8^8 FRANCE.
les caracteres, mals ils sont naturcls ; enfin , le style n'est pas
brillaiu, mais il ne manque ni d'elegance, ni de faciliti?; en
un mot, ce di'bnt donne des esp^rances , et le public a mis
de la justice et de la bienveillance dans I'accueil qu'il a fait
a celte Ecole des veuves. M. A.
Beaux -AKTs. — Antiquites mexicaines. — Un araericain ,
M. Latour-Allard, a recueilli a Mexico, et vient d'apporlcr
a Paris une rollection d'antiquites, aussi curieuses qu'impor-
tantes pour Phisloire de I'art. En i8o5, le gouvernemeut esjia-
gnol chargea M. Dupaix de rechercher tous les monumens
racxicains aiilerieurs a Tinvasion des espagnols, et de les faire
connaitrepar des dessins et des descriptions. Une cirronstance
fort extraordinaire avait, surtout, f;iit naitre cetle dt'termina-
tion : des chasseurs avaieiit trouvc dans leurs courses, loin de
lout lieu liabiie, une ville immense, sur Pexistence de laquelle
les habitaris n'avaient aucune notion. Leur rocil avait d'a-
bord paru fabuleiix; uiais, de nouveaux temoignages I'ayant
confirme, il n'avait plus etc possible de douter de la verite de
leur dc'couverie. Celte ville etait-elle inconnue des indigenes
au moment de la conquete? ou, par suite du seniiment religieux
qui les avaient engages a derober le plus possible aux Espa-
gnols leurs edifices religieux , celte ville, consacne a cefte epo-
que a un ciilte parliculier, aurait-elle fini par demeurer in-
conniie aus descendans des vaincus? Telles sont les questions
qui s'elevent et dont la solution est entouree de diffi( ultcs. En
effer, il senible impossible qu'unc ville enlieie, d'line etendue
de deux lieues et demie , de Test a I'oucst, fut exclusivcmcnt
consacree a un culte queiconque; mais alors on pent demander
])ar quel evenemeiit cette ville avait ele si completenient aban-
<lonnee, et depiiis quel tems ? Ce ne peut etre le resultat d'une
revolution jiliysique, car les edifices sont encore debout, et
])onrraient etre , pour la plupart,liabites. On voit que I'histoire
■de cetle ville, dont M. de Hinnboldl n'a dii que quelques mots,
est enveloppte d'un voile qu'il n'est pas facile de sonlever.
M. Dupaix , dans trois expeditions successives , ou il elait ac-
compagne d'un dessinateur et d'une ccorte suTfisante, explora
done !e Mexi()ue dans loutes les directions. Ce fut dans la der-
niere <pi'il parvini a la \ille recemment dixouverie, sitiu^e a en-
viron 80 lieues de Ciudad-Reai, dans la province de Las Chiapas,
panic meridionaie du Mexique, consequcmmcnt sur les limites
de Guatemala. Celte ville a recu le nora de Palenqui-Viejo, ou
Vieux-Palenqui , parce que le village iiulicn le plus voisin s'ap-
pelle Palenqui. M. Dupaix etant mort pen apres avoir renipli
sa mission, et les evencmens politiqucs ayant rompii les liens
PARIS. 849
qui at!achaient le Mexique a rEs5);ii;ne, le dcssinateur cnit
])Ouvoir disposer du resultat des travaux auxquels i[ avait si
puissammeiit concouru. Ce sont done les dessins, au nombre
de cent-vingt, et les monumens de loutes sortes, fruits de ces
tiois expeditions, que M. Laf.our-AHard a aequis de lui et qu'il
s'est empresse d'apporter en France, dans I'espjirancc que le
merite de cette collection y serait micus apprecie que partoiit
ailleurs et que le gouvernenient en ferait I'acquisition. Cette
espiirance semble devoir se realiser : deja !e ministere de la
raaison du Roi a envoye des personnes fort eclairees en faire
I'examen, et je ne doute pas qu'elles n'aient reconnu que cette
colleclion forme une page, je dirai plus , un chapitre ires inte-
ressant, non-seuleraent de I'histoire de Tart, mais encore de
I'esprit huinain.
Parini les sculptures qui ornent les edifices de Palenqui-Viejo,
il en est une qui est bien de nature a faire naitre les plus serieuses
reflexions. C'est une eroix de forme latine, absolument sembla-
ble a celles qui sont usitees dans les eglises catholiques. Cette
croix repose sur une espece de coeur; une feinme richement
vetue tient sur ses bras un enfant qu'elle semble presenter ii un
])ersonnage convert d'habits sacerdotaux et place vis-a-vis d'elle
Je I'autre cote de la croix. Ces deux figures sont de grandeur
gigantesque etd'un caractere de physiopomie tout-a-fait diffe-
rent de celui des peuples indigenes qui occupent aujourd'hui les
niemes contrees. En general on peut reconnaitre les figures de
Palenqui a I'enorme proportion du nez.
Au nombre des ornemens liieroglyphiques qui enlourent
cette croix, on trouve un t tres bien forme , et celte ciicons-
tance devient d'autant plus remarquable que les mexicains ont
donne le nom de Teocalli , qui veul dire maison de Dieu , a des
edifices consacres a leurs divinites; or si Ton songe aumotTheos,
©saf, qui veut dire Dieu, sans vouloir etablir des rapprochemens
f]ue rien ne semblerait pouvoir justifier quant a present , il pa-
raitra fort elrange de trouver le mot Teo dans la langue mexi-
raine avec la signification de Dieu. Du reste i! semble evident
que le r esrl'iniiiale du mot Teo, et qu'ainsi la croix etait ega-
lemenl chez eux un symbole sacre.
Ces edifices dont je viens de parler, les Teocalli, sont batis
sur des montagues artificielles , dont I'existence est bien re-
marquable dans un pays aussi montagneux que le Mexique.
IV'est-on pas des lors fonde a croire qu'elles ne pouvaient avoir
ipi'un but religieux. Quelques-unes de ces montagnes sont
revetues de briques; en general elles sont construites par assises
de 8 ri 10 pieds, en retraite Tunc sur I'autre; un grand escalier
r. xwi. ■^- Septembre 1826. 54
»W FRANCE.
s'l'teve jmsfiu'au aommet : c'est par la que Ton jotait les corps
(Jes vietimes hunialnes sacriflees aux dieux que Ton y adorait.
II me spiait impossible d'enuinerer lout co que cette collec-
tion contien't de reniarqnable ; M. de Humboldt a deja fait
c«nnaitre, dairs uri ouvrage (jui a escilo raduiiration de I'En-
rope savante , un grand iiombre do nionuniens T^iexicains, de
diverses nattircs; on a iJublit- e;i Angleterre, il y a quelques
annt'es, une parlie des edifices de Palenqui, norarninent la
croix dont j'ai paile : la colleclion de >I. Latour-AUard con-
tieiit tout ce qui est deja connu, ce qui peut servir a constater
rautlienticite du lesle, et :inv* foule d'autres objels, lels que,
Tine slarne de prelresse aztique, des instrumens de musicjue et
de sacrifices , des serpens scnlptes, en granit (on voit sortir de
la gueule de I'un de ces .iniinaux, une lete de femme); unc
tete de leort en pierre volcanique dite tezoncle; une statue en
pierre verte , ligneuse, brillante et sonorc. On sait que I'abbe
Chappe rapporte dans son voyage a la Californie une lettre
d'un genlillioinine mextcain , adressee a I'Academie des sciences
de Paris, dans laquelle ce gcnlilliomme parie d'une pierre
cloche. Cette statue est-elle de celte nature, et cette pierre
a-t-elle qtielqiie analogic avec le marbre sonore de !a Chine?
C'est ce que je laisse a decider aux savans.
Sans doute les formes de ces statues, statuettes, serpens,
chapiteaux et autres objets , sont loin d'etre agreabies : niais
on a bien donnel'entree duLouvre aux antiquites egypfiennes.
Les antiqulles niexicaines appariiennent a nn jieuple moiiis
avance dans la civilisation; mais enfin c'est i'histoire de I'art
cliez nn peuple dont nous soniines loin de connaitre I'origine
d'one maniere certaine. Les rapprochemens que Ton peut
faire enlre plusieurs de ces monumens et ceux de I'Egypte
et de rinds, pourront servir un jour, a decouvrir quelle rela-
tion il a pu exisler entre ces dlverses parties du monde, ei il
est dij^ne du gonvernen^ent frnncais d'en fournir les moyens
aux savans qui s'occupent de ces recherches.
Je fixe encore rattenfiou' des cnrienx sur un volume compose
de 12 feuiUes de grand papier Magiiay, revetues 3'anciennes
peinturci niexicaines symboliques, ou I'on trouve des figures
humaine* en action, des animaux , des fleuves, etc. C'est evi-
demment, un monument liistorlque donl le sav.'mt Boturini ,
mentionne si souvent par M. de Humboldt, a donne une expli-
cation par des notes ecrifes sur le mannscrit ni^me, en langue
aztique.
II exisle a I'Universite de Mexico une statue extremement
remarquable, et une pierre circulaire anciennemen? consacrce
PARIS. 85»
aux sacrifices. Celte pierie est eiitiereinenl revetue de scul[*-
tures. Leon de Gama a public Texplication el la descripiion
de la statue, a Mfexico, en 1792, et c'est un Hes njonnniens
que M. de Humboldt ait fait, le premier, connaitre en Eu-
rope. Ce dernier savant a egalentent donne deux des gro7ij<es
sculptes aulour de la pierre aux sacrifices. Les dessins de
M. Latour-Allard comprennent la tolalite de ces sculptures
qui se con)])osent de (juinze groupes de deux figures. Dans
lous ces gronpes le Mexicain est reprrsentt- sous le raeme
aspect et avec les memes caracteres •, c'est loujours un vain-
«|ueur ; le second pcisonnage , au coiitraire, est loujonrs
divcrsifie et toujours vaincu : ainsi le sens probable de ces
bas-reliefs, c'est que la nation mexicaine avait vaincn quinze
nations diffcrentes.
Je le repete, la collection de M. Latour-Allard est du \)\\\^
grand interet. Je puis invoquera rapi)ui de nion opinion lelle
d'un savant dont le nom fait autorite. M. de Humboldi ,
dans une leltre adressee recemment a M. Latour-Allard, <ii't :
n C'est la collection la plus complete qu'on ait fait en re
genre et qui se lie a I'idee si henreusemcnt concue de suivre les
progres cles arts chez des peuples a demi barbares. 11 serai't
digne de la munificence d'un monarqne de faire deposer les
dessins de M. Dupaix , dont j'ai reconnu la scrupuleuae exacti-
tude, dans une grande bibliotlieque ; la naive simplicite de ces
dessins meme, atteste la veracife du temoignage. >>
— Diorama. — Fue du -village cVTJnterseen , par M. Da-
GUERRE. — Je conseillc a tons ccux ([ui ne tonnaissent pas'Ja
Suisse d'aller voir ce tableau ; je puis leur assurer qu'il ieur en
donnera une idee fideie. J'ai cru que j'avais quitie Paris et que
je me retrouvaisau milieu de ces inontagsies couvertes de neig«*
eternelles oil la lumiere se joue de milie mani«res differenl'es.
Ce sort bien 'la ces uiaisons dc bois couvcrtes de g'lands toils,
dont le caraclere se marie si bien avec les 'lieux qui les envi-
ronnent. IVI. Daguerre a clioisi le moroenl du janr qnc Virgilc
a decrit, d'nne inaniere a la fois si pitloresque et si jmeliffive ,
dans ce vers :
Majoresqiie cadtiHt nhis de mo/itibns tunb/v.
L'ajr ciicule partout, rillusion est paifaile; et , pour ccTlefois,
je n'ai que iles I'-'loges a -doiin^r. P- -'^■
Necuoloo !i . — Yi'csMnric- Gubtii-l-Pirire Lecnul, Iuhvom
de Sai^t - llAori-iv , colore - an^iral, officii': de ii: Lt^ri'^n
85 a FRANCE.
d'honneur et chevalier de Saint-Louis, iie en 1766, d'une
famille dislinguce de la Bretagne , niort a Calais , le 5 sep-
teiiibre 1826, au moment oil il se rcndait en Angleicrrt' ,
d'aprcs I'invitalion d'une societe de ca[)italistes, pour nietlre
a execution son grand et utile projet de Telegraphic unirer-
selle de terre et de mer, de jour et de riuit, ( Voy. Rev. Enc.,
t. IX, pag. 214 , et t. xxviii , pag. 942. )
M. do Saint-Haouen , apres avoir fait de tres-bonnes etudes
dans le college de Quiniper, entra, fort jeune encore , au ser-
vice de la marine pour lequel il avait une vocation prononcee.
II debuta par plusieurs cainpagnes dans les deux Ameriques
et dans les mers de I'lnde , et fut nomme enseigne de vais-
seau. Sa bonne conduite et ses talens le firent parvenir do
grade en grade jusqu'a celui de chef de division des armees
uavales : il n'obtint cependant ce grade qu'en 1796, apres
avoir ele prive de la liberte dans les jours les plus orageux
de la revolution. L'epoque du 9 thermidor le fit sortir de la
prison de I'Abbaye , ou il etait renferme.
Ce fut dans I'an viii [ 1800), qu'ctant chef d'etat-major de
I'amiral Latouche-Treville, il fit les premiers essais d'un nou-
veau systemc de signaux dont il s'occupait deja depuis loug-
tems. Le succes couronna ses travaux , que les missions impor-
tantes qu'il eut a remplir alors, le force-rent d'interronipre :
mais il eut la satisfaction d'obtenir I'approbatlon d'uue com-
mission de I'institut, chargee d'examiner son invention, etqui
en fit un rapport trcs-avantageiix. Son zele et son activite bien
connus le firenl nomnier chef militaire au port de Boulogne, lors
de la grande expedition qui fut projetee contre I'Angleterre.
Entre autres souvenirs des services importans qu'il rondit
dans ce nouveau poste , nous citerons I'ordre du jour de la
flotille , en date du 7 vendemiaire an xii , ou Ton fait une
mention tres-honorable de la manoeuvre brillante et bardie
par laquelle il sut reunir les divisions de Dunkerque et de
Calais a I'armce navale combinee dans le port de Boulogne.
Apres un combat opiniatre , il forca a la retraite les Anglais
qui lui etaient fort superieurs en nombre et en force.
L'annee suivante , il trouva I'occaslon de signaler de nouveau
son intrepidite, lorsque les Anglais dirigerent contre la flotille
des briilots incendiaires. Son attaque impclueuse les forca a
se retirer , ct leur fit eprouver de graodes pertes.
Un long sejour a Boulogne lui permit de s'occuper de son
invention t(51egraphique qu'il perfeclionna par de nouveaux
essais.
Deux ans avant la rentrce du Hoi en France , on lui confia
PAULS. 853
par interim le poste <Ie prefet maritime du preiuier arron-
dissement : Boulogne , C;ilais , Dunkeique el Ostemle. II y fiit
bienlot iioniine definitivement et cliarge par le ininislere de
la marine de remplir la mission d'aller a Harlwell pre-
senler a S. M. Louis XVIII les hommages de la marine fran-
caise. li passa en France avec ce prince qu'il eut le boiilieur
de posseder cliez liii , pendant le si-jour qu'il fit a Boulogne :
une si beureuse circonstance jjai'aissait jiromettre a M. de
Saint-Haouen et a sa faraille Tavenir le plus brillant. Pendant
les cent jours, il se retira avec ses enfans dans une cam-
pagne de Norraandie , oii il prolita de ses loisirs pour s'oc-
cuper excliisivement de I'extension et des perfectionnrmeus
dont son nouveau systerae de signaux clait susceptible.
Les eveneinens qui succederent I'ayant rappele au secvice
du Roi , il fut promu au grade de conire-amiral et nomaie
major-general au port de Brest. II aurait pu dans celte place
rendre encore a son pays les services les ])lus signales, lors-
qu'en 1817, i! fut mis a la retraile.
Livre des lors a des loisirs forces, il chercha dans ses an-
ciens projeis un aliment a son activite naturelle. A la suite
de plusieurs experiences iju'il fit a Paris , il proposa au gou-
vernemont pour la correspondance cntre les batimens et les
coles, ou de navire anavire, une telegrapbie de nuit et do
jour, qui put servir aussi a la communication entre les divers
points imporlans de I'inlerieur , et dont les avantages fussent
communs a tons les peuples, malgre la difference des langues.
Des experiences, repetees au Havre d'apres I'ordre du gou-
vernement et sous les yeux d'une commission !:orunice a cet
effet, eurent le plus brillant succes; et le 20 mars 1821, une
decision du conseil des ministres, presidce par S. IM., fit con-
naitreaM. de Saint-Haouen, qu'une ligne telegraphique serait
etablie , d'apres son sysleme , entre Paris et Bordeaux. On s'oc-
cupa d'abord de I'espace compris entre Paris et Orleans : de
nombreux essais eurent lieu pendant plusieurs mois devant
plusieurs savans, militaiies et luarins, et obtinrent I'appro-
bation de Ms^ le due d'Angouleme et de son auguste pere. La
guerre d'Espagne vint interrompre les Iravaux, mais amena une
nouvelle application de la decouverte de M. de Saint-Haouen.
Une brigade telegraphique fut formee a la suite du quarlier
general du prince generalissiuie , ei rendit quelques services
dans le cours de la campagne.
M. de Saint-Haouen entrevoyait principalement dans son
systeme les services qu'il pouvait rendre a I'humanite en dimi-
nuant le nombre des iiaufroges. II s'occupait en coiiscq-irnce
854 FRANCE.— PARIS.
d'un plan d'etablissement ieli>gra])liique dfs plus vastes ; niais
niio nialadit', rapi(5e dniis.ses jjrogrcs, rerilt'\a iiri'matiirement
:i une faniille nombreuse et a des an)is doiU il ('lait tendiement
cheii.
Le lelc'^raphf dont M. de Saiin-Haoiion a etti rinventenr , est
le premier dont on se solt scrvi la nuit. L'usai;e en est si econo-
niifjue, que cliacun de ses faiiaiix, dont la luniicre, selon sa dis-
tribution, egalc colle de i5 a 120 bougies, ne consume qiie
pour 5 centimes d'huile par lieiir<-. Le langage en est anssi sim-
ple qi!o la com])osition. Sur les tules il aui'ait I'avantage de faire
connaitre pendant la nuit aux lavigateurs ic point prc^cis ou ils
56 Irouvent : cbaque poste tclegi aphique aui ail nn numero par-
licuUcr, vu de jour < t de miit, et qui poumul elre iiu)i(|U(i sur
Ic'S Carles ui.irines. Y.
— CHEVARn,mort a Chartros leg mai i826,arage de78ans.
— D'abord notaire, 31. Chevard (iut a la confiancequ'ilinsjura
d'etre nomtne deux fois maire de Chartres; en quittant le no-
taiiat, il devint conseiller de jjrefecture, puis inspecteur des
])risons et mcmbrede la Socie^te d' agriculture. La statislique du
ddpartemenl d'Eure-et-Loir, Tindustrie agricole dela Beauce,
1 archenlogie, les monumens celtiques devinrent tour a lour
les objels de ses recherches. Comme M. Bcl/ier-Ducftesnay ,
notre com]>atriote, il dirigea ses etudes sur I'liistoire dn pays
chartrain.Riche du travail de Souchet , M. Clievard pubiia en
I'aii X son Histoire de Chartres et de I'ancien pays chtirlrain
(2 vol. in-8°), ouvrage plein d'inlerct, oil la critique ponrrait
trouver a dire sur la chronologic suivie f)ar I'aufeur , partie sur
laquelic les savans sont loin d'etre d'accord. De])uis on a
remarquc, dans differens annuaires du drparlement et drrnie-
remcnt dans le n° 4 du Cours d'agriculinre de M. Forestter, des
disseriations dues aux veilles de M. Chevjird. Cet esceller.l ci-
toyen a bien fourni sa carriire : son desir fut d'etre ulile, el la
reconnaissance de ses concitoycns rccompensa ses gencreux
efforls. DoCBLET de Boisthibault.
TABLE DES ARTICLES
CONTENUS
DANSLE QUATRE-VINGT-TREIZIE\IE CAHIER.
SEPTEMBRE 1826.
I. MEMOIRES, NOTICES ET MELANGES.
I. Notice sur rapplicatiou des aerostcats. Fenr- 5jj
■>.. Rapport sur I'enseignement iiidustriel. Ch. Dupin. 5g4
3. Nouveaux principes d'economie politique.
J.-C.-L. de Sismondi. 608
II. ANALYSES D'OUVRAGES.
4. Diagrammes chimiques, par M. Decremps. F. 629
5. Pieces relatives a la codification , par Jereruie Beatham ,
( Guvrage anglais ). Saint-Amand. 626
6. Memoires inedits de M^^e de Genlis ; deuxlenie et dernier
article. V. L. 643
7. Chefs-d'oeuvre des theatres etrangers; deuxifeme article.
Leon Thicsse. 6^7
8. Chansons de P.- J. de Beranger ; deuxieme et dernier article.
Bcrvillc. 66g
III. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
Annonces de i49 outrages , francais et etrangers.
Ameriqtje septentrionale. — Etats-Uiiis , 3 , dont 2 ouv. per. 676
— Canada , 2 , dont r ouvr.Tge periodique 679
Europe. — Gran de-Bretagne , 12 , dout 8 ouvrages periodiques. 681
— Russie, 3 fi83
— Pologne , 19 ouvrages periodiques publics a Varsovie. . . . 695
— Norvesc, 1. — Danemark ,3 702
— AUemagne, 7 706
— Suisse, 2 716
— Italie, 10, dont I ouvrage periodique "^16
— Pajs-Bas, 6, dont 2 oavrages periodiques 72$
France, 81, savoir : Sciences physiques et natureUes , 20 727
— Sciences religieuses , morales , liistorlques et policiqnes , 22. . . 742
— Lilterature, 20 7(14
— Deaux- Arts , 6 782
— Uleinoires et Rapports de societes savantes, 1 789
— Ouvrages periodiques ,4 79"
— Livres enla'igues etrnngeres , imprimes en Prance, i 796
856
TABLE DKS ARTICLES
IV. NOUVELLES SCIENTIFIQUES ET LITTERA.IRES.
AmeriQUE SEPTENTRIONALE. — Elats-Uiiis. Ncw- Harmony : So-
ciete coopt'Tative. PhilacMphic : Recherches pliilologiques. —
C(t««(/rt : Extrait cl'iine leiire sur la situation cle ce pays. . . . 8oi
Antilles. — Irruption de la fic'-vrejaune 8o4
Amebique bier iuion ale. — Diienos-Ayres :\n%XT\\c\.\on publique;
Monument national 8o5
Austral vsiE. — Nouvclle-Galles mcridionale : Progres de la civi-
lisation 806
AsiE. ^ Az/naf/n ; Ciocodile npprivoiso 807
Afbique. — Voyages scieutiiiques 868
EUROPE.
Iles Br.iTANKiQuiis. — - Lo?idres : Ucoles primaires. Societe des
ecoles: Appel fait au public en faveur des Grecs. Etablisse-
ment d'un musee national 809
RussiE. — Academie de Saint-Petersbourg. — Dorpat : Encoura-
gemens accordes aux sciences 8ii
Norvege. — Chiistiania : Phenomene vegetal. — Christiansand :
Societe biblique. — Necrologie : Arentz 8ia
Allemagke. — Dresde : Societe pour la propagation des sciences
naturelles ; nomination academique. — Fienne : TlieAtres. —
A'cr/in ; Theatres Ibid.
Suisse. — Ge«ei'e ; Societe cantonale de physique et d'liistoire
naturelle. — y^rwH ; Eiiseignement industriel 8r4
Italie. — Naples : Mouvement de la population dans le royaume
de Naples, en 1824. — l\lilan : Academie des beaux-arts ; ex-
position des ouvrages couronnes au concours de 1826. —
T'Hri/i ; Necrclogie : Testa 8i6
TuRQiriE. — Mathcmatiques : Pretendue solution du probleme
de la Irisection de Tangle 820
Pays-Bas. — Driixelles : Academie royale des sciences et belles-
Ifttrcs; prix proposes pour 1827 et 1S28 ■ • • 821
France. — Martignac : Canaux de la Correze et de la Vezcrc. —
Charentoii : Forges et Fonderies. — Rennes : Statistique morale
du pays. Socictes savantes et etablissemens d'utilite publique :
Chalons (JMarne) : Prix proposes par la Societe d'agriculture ,
commerce, sciences et arts. j1/«rj<?j7/e .- Bnins de raer SaS
Paris. — Instkut. Academie des sciences : Seances du raois
d'aout. Academie francaise : seance publique du 25 aoiit.
Academie des beaux-arts. — Academic de medecine. — Insti-
tution des jeunes aveugles. — Industrie : perfectionnement
de la trempedes rasoirs. — Theatres. Theatre fran^ais : Pre-
mi^re representation du Duel , comedie. Odeon : Premieres
representations de Baudouin , tragedie, et de I'Ecole des Veu-
ves , drame. — lleanx-arls : Antiquites mexicaines ; Diorama.
— Necrolofrif : Saint-Haoueii ; Chevard 8^9
TABLE
ANALYTIQUE ET ALPHABETIQUE
DES MATIERES
DU TRENTE-UNIEME VOLUME
DE LA REVUE ENGYGLOPEDIQUE.
JuiLI-ET, AOUT, SePTEMBRE 1 826 (*).
On a reuni ani quatre mots indicatils dcs quatre grandes divisions de
ce Recuell :
I. MEMOIRES , NOTICES P:T MELA.NGES;
II. ANALYSES ET EXTRAITS D'OUVRAGES CHOISIS;
III. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE ;
rv. NOUVELLES SCIENTIFIQUES ET LITTERAIRES ;
Le detail et le renvoi dej articles qui s'y rapporteut; puis, on a caracterise ces
articles, a la suite du nora de leurs autturs, par Tune dcs qiiatre abreviations
ci-apres : M. (memoires et notices) ; A. (analyses) ; B. (bulletin eielio-
graphique); N. (nouvelles scientifiques et litteraires). La designa-
tion C, apres les noms propres, iudique les coUaborateurs de la Revue, lorsqu'il
s'agit des articles qu'ils out fournis.
Au lieu de comprendre sous la denomination generale sciences et arts
(comine dans nos quaire tables des matieres de I'aunee 1819), I'indication des
differentes sciences dont traite ce volume, on a cru devoir, pour rendre les re-
clierclics plus facilcs, et pour mieux caracteriser le eut pliilosopliique de la
Revue Encjrclopediqne , ouvrir un compte partieulier ct special, en lettres ca-
pitales, non-seuleineut a chacunc des branches dcs conuaissances bumaines ,
AGRICULTURE, ANATOMIE, ctc. ; a cliacun des elemens essenticls de la civili-
sation et des moyeus priucipaux de comnmuicalion entre les homaies ; acade-
mies et societes SAVANTES ; DICTIONNAIRES ; ENSEIGKEMENT MDTUEL ;
INSTRUCTION ruBLiQUE; jouRNAux; THEATRES , etc. ; niais cucore a cbacuD
des pays dont il est fait mention dans ce R.ecueil : de mauiere qu'on puisse rap-
procher ct comparer tour a tour, soit I'elat des sciences et des elemens df la
civilisation dans chaqite pays , soit les nations elles-memes , sous les differens
rapports sous lesquels on a eu occasion de les considerer.
Academies, ^oy. Societes.
Accouchement. Foy. Manuel d'ob-
stetrique.
Actrice (L'j , ou les deux por-
traits , comedie en vers , par
Ader et Fontan , 563.
(*) On souscrit, pour ce Recueil scientifique et litteraire, dont il
parait un caliier dc quatorze fciuUes d'inipressiou , tous les inois, au Bureau
CENTRAL d'abohnement, rue d' Enfcr-Saint-Michel , n" i8; chez Arthus
Bertrand, rue HautefeuiUe, u** 28, et chez Renouard, rue deTournon, n" 6.
Prix de la souscription : a Paris, 46 fr. pour un an: dans les departcmens,
53 fr. ; 60 fr. dans I'etranger.
T. XXXI. 55
85f^
TABIE ANAI.YTIQtJF.
Adam (P.) , graveur. Collection
fles portraits hlstoriques de
Gerard, 5io.
Adams (John). Vox- Necrologie.
Ader. yoy. Actricc.
AniWiNisiR.vxiow , 5 , loy , 182 ,
189, 253.
MILITAIRE, 186 , 748.
Adrien-Lafasge (J.)» ^- — N' >
278, 539.
Aerostats (Notice sur I'appli-
cation des) a divers ohjets re-
latifs aux sciences et anx ser-
vices publics , M. , 577.
— (Sur les) militaires , 579.
— (Memoircs sur les), par Meu-
nier, 588.
Affranchissenient et colonisation
des esclaves dans I'etat de New-
York, 235.
Afrique , a37, 45a. 527, 808.
Agiotage (L') , ou le metier a la
mode , comedie en prose , par
Picard et Erapis , 269, 777.
Agriculture, 726, 727, 790.
Voy. aiissi EcoNOMiE rurale.
Air atmospherique (Dissertation
sur 1') , etc. , par J. R. L. de
Kirckhoff, traduite en hol-
landais , par Swaan et Jor-
ritsma , i52.
Alais, ou la Vierge de Tenedos ,
par M""" Adele Damiuois , 2i4-
Albert (D.),C. — N., 241 ,534.
Albert-Montemont , C. — B. 444-
Albert! de Villanova. Voj. Dic-
tionnaire univcrsel.
Algebre , 442. 735.
Alhoy. yoy: Promenades poeti-
ques.
Alibert. Precis historique sur les
eaux minerales , etc. , i5.
Allemagne, i36, a44» 4" »
541 t 706 , 812.
Almanak ten Diensten der Zeelieden ,
i53.
Amerique , aaS.
CENTRALE , i36 , 522.
— MERIDIOKALE, 236, 5a4, 8o5.
SEPTENTRIONAEK, IO9, a35 ,
394 , Sal , (177, 801.
Amic (Auguste), C. — B. , 773.
Amours (Les) des Dieux , recueil
lithographic d'apr^s les dessins
de Girodct , 785.
Amussat. L'Academie des sciences
de Paris lui decerne un prIx ,
259.
Amusemens ( Les ) de la cam-
pagne , par A. Paulin Desor-
meaux, 447-
Analyses (IL) , d'ouvrages an-
glais : Pieces relatives a la co-
dification , etc. , par Jeromie
Benlham {Saint-Ainand) , 626.
— d'ouviages/raHca/5 ; Essai sur
les crj'ptogames des ecorces
exotiques officinales, par A.
L. F^e {liory de Saim-Vincent),
47. — Geometric et mecanique
des arts et metiers et des beaux-
arts , par Charles Dupin {Ferry),
52. — Theorie du Beau et du
Sublime , etc. , par Massias
{A. Gamier), 65. — Traite de
legislation , par Charles Comte
(£. C. F.), 73. — Histoire des
expeditions des Normands , et
de leur etablissement en France
au dixi^me siecle , par G. B.
Depping (/. C. L. de Sismondi),
91. — OEuvres completes de
J. J. Rousseau , en un seul
volume [M. A. JuUien) , 102. —
Theorie du navire , par de Po-
terat {Perry) , 320. — Fragmens
philosophiqiies , par Victor
Cousin (*) , 327. — j^xlucation
domestique , par M"' Guizot
{P. B.) , 335. — Histoire de
Sardaigne, par Mimaut ; voyage
en Sardaigne , par Albert de la
Marmora {Amaury Duval) , 346.
— Memoires inedits de M'""' de
Genlis {V. L.), 363, 642. —
Chefs - d'oeuvre des theatres
etrangers (icon Thiesse) , Syg ,
557. — Diagrammes chimi-
ques , par Decremps (F.) , 619.
DKS MATliRES
— Chansons de P. J. de Be-
ranger {BerviUe), 66i).
Aaatomie, i65.
Ancelot. roj: Pharamond.
Andral (G.) , fils. Foy. Clinique
raedicale.
Audreossy (lieutenant - general).
Memoire sur les depressions
de la surface du globe , etc. ,
164.
— De la direction generale des
subsistances militaires sous le
ministdre du due de Bellune ,
— Memoire sur ce qui concerne
les marches Oavrard, 748.
^ngeloni { L. ). Delia forza nelle
cose polidche, 116.
Angleterhe. Voj. Granpe-Bre-
TAGKE.
Annales acadetnice Rheno-Trajec-
tin<e , 432.
Annales des concours generaux.
Matieres des compositions de
rhetorique , 768.
Annee (L') francaise, ou Memo-
rial politique , scientifique et
litteraire, 194.
Anthropologic (Priacipes d'), ou
les lois de la nature consi-
derees dans Ihomme , par de
Joannis , 178.
Anthologie arabe , appelee Ila-
naasa , publiee a Bonn, par le
professeur Fieytag , 542.
Antilles , 236 , 523 , 804.
Ajttiquites , i52 , 248, 512,
55o , 55i , 721 , 788.
— decouvertes en Egypte. T'oy.
Catalogue.
— Mexicaines , recueillies et ap-
portees a Paris , par Latour-
Allard, S48.
Antommarchi (F.). Planches ana-
tomiques du corps humain ,
publiees par C. de Lasteyrie ,
i65.
AphoTismata opposite! aphon'sina-
tibtis , etc. , 456.
859
Apologues (Recueil d') en qua-
trains, par M. J. D. , 1 33.
Appel an bon sens de certaines
heresies politiques et finan-
cit-res , 468.
— fait au public de la Grande-
Bretagae en faveur des Grecs ,
8x0.
Arc d'Auguste a Rimini, ray: Bri-
ghenti.
Archeologie , 428, 564. fox.
aussi AnTiQuiiis.
Architecture, 129, 174,317,
219 , 5n , 720, 787, 819.
Arentz (F. C. Holberg). foj. Ne-
CROLOGIK.
Argiieltes {J. Canga). Dicc'wnario
de Hacienda, etc. , 683.
— Elementos de la ciencia de Ua-
eienda , 683.
Aristocratic (De 1'), considerde
dans ses rapports avec les pro-
grcs de la civilisation , par
H. Passy, 466.
Arithmetique (Theorie com-
plete de 1') , 733.
— for. Berthevin.
Arlincourt ( V. d' ). Le si^ge de
Paris , tragedie , 5o2.
Art militaike , 224, 715,735.
— yeterinaire, 727.
ARTiLLERiE(Experiencesd'). ;^'oj.
Hutton.
Arts indlstkiels , 257, 444,
737, 843^ foy. aussi Industrie,
et Enseignehieht industriel.
AsiE , ii3 , 237, 526, 807.
Assemblees nationales (Des) en
France , depuis letablissenient
de la nionarchie, jusqu'en 1 6 14,
par le president Henrion dc
Pansey, 181.
AsiRoTvoaiiE , i53 , 260, 261,
442 , 548.
— foy. Lecons.
Ati,as constitutionnel, ou Ta-
bleaux chronologiques , ge-
nealogiques et bibliographi-
ques, pour servir a I'liisioire
de la monarchie repr^senta-
86o TABLE ANA
live en France , etc. , par A. J.
de Mancy, i8i , ySy.
Atlas historique et chronologique
des litteratures anciennes et
modernes , etc. , par Jarry de
Mancy, 493.
— (Nouvel)duroyaumedeFrance,
par A. M. Perrot et J. Aupick ,
7^9-
— de I'histoire physique , civile
et morale de Paris, par Du-
laure , 759.
Attumonelli (Michel). Voy. Ne-
CBOLOGIE.
Auber. Voy. Macon.
Auger. Voy. Nominatiojvs aca-
DEMIQUES.
Aupick ( J. ). Voy. Atlas du
royaume de France.
Austin ( Arthur ). Voy. Beaux
Jours.
AUSTRALASIE , 8o6.
Autoriteroyale. Fq/. D'Aubuisson
de Voisins.
Aventure ( L' ) dans les mon-
tagnes , opera comique norve-
gien , par H. A. Bierregaard ,
409.
Aytoun (James). Voy. Morceaux
choisis.
B
Bailly. Voy. Manuel de physique.
Bains de mer, etablis a Mar^
seilie, 828.
Ballades et chants populaires
anglais, 234-
Balochi. Voy. Viaggio.
Bapt<^Miie (Sur le) du roi Harald ,
surnomme Klak , 7o5.
Barbier d'Aucourt. Voy. Onguent.
Barb'teri. Orazione per tesegiiie
anniversarie de benefattori clella
casa di ricofcro in Padova , 716.
Bartheleniy. Voy. Bibliotlieque
allemande.
Basevi. Degli "fjici del medico ,
453.
1.YTIQUE
— Del magnetiimo animale , 424-
Basiletti (Louis). Sur les monu-
mens decouverts a Brescia ,
7ar.
Bateaux a vapeuk. Voy. Inven-
tion.
— a roues de cote iuterieures ,
55o.
Baudouin , empereur, tragedie ,
par N. Lemercier, 844-
Beauvais (General). Voy. Dic-
tionnaire historique.
Beaux- ARTS, iSa , i55, 278, 4 '7'
5o7, 554,782,810, 817, 848.
Beaux jours et melancolie , nou-
velles ecossaises , par Arthur
Austin , 716.
Belle-au-bois-dorniant (la) , opera
par Planard , musique , par
Caraffa , 273.
Belles-lettres. Voy. Littera-
ture.
Belloc (M""= Louise Swanton-) ,
C. — Les articles signes L.
Sw. B.
Bellune (Due de). Voy. Memoire.
— Voy. Andreossy.
Ben Ezra. La Venida del Messcas ,
796-
Bentham (Jeremie). Notice sur
ses ouvrages , M. , 298.
Papers relative to codification
and public instruction , etc. , A. ,
626.
Beranger (P. J. de). Voj. Chan-
sons.
Berghaus {H. B.). Kane -von Jfrika,
i36.
Bernede (Charles). Voy. Posies. ^
Berlheviu. Elemens d'arithme-
tique complementaire , 171.
Berton. Voy. Pharamond.
Berville.C— A. , (369.
Beugnot (Am^dee). Poy. Palladio.
Bibliographie, 109 , i55 , i56,
298, 394, 677.
Bibliomappe, ou Livre-cartes ;
lecons m^thodiques de geogra-
phie et de chronologie , 175.
Bibhotheqxje. Voy. Catalogue.
UES MATltRES.
— allemande , publiee par Bar-
thelemy et Silhcrmann , 23 1.
— choisie des peres de I'eglise ,
grecque et laline , par Marie
N. S. Guillon , ^4^.
— populaire, 191.
— latine-fraucaise , 494-
— portative de Tamateur, 494 ,
770.
Bierregaard (H. A.) Fjeldevcntyret ,
409.
Biet (J. E.) ^o_>-. Souvenirs.
Bignan (A.) , C— N. , 286.
BlOGIlAPHIE , 118 , 201, 202 , 2o3,
/m, 43i, 492, 7o5, 709,717,
757, 762.
— imiverselle et portative des
contemporains , en un seul
volume , 200 , 4^u.
— uuiverselle , classique. ^oj.
Dictionnaire historique.
Blangini. yoy. Projet de pifece.
Blume (D. M.). I'ragmens pour la
composition de la Flore de
rinde ueerlandaise , ii3.
Boieldieu. /^oj. Phararaond.
— ^oj: Dame Blanche.
Bollinger. For. No-"\iinations aca-
DEMIQUES.
Bonard. Foy. Forets de la France.
Boniface (Alex.). Foy. Langue
anglaise.
Bonne ville (La), ou le maire et
le jesuite , par Isidore Lebrun ,
2l3.
Bonstelten (Cli. Victor de). La
Scandinavie et les Alpes, i4fi.
Borelli (Hippolyte). Analyses des
fondeniens de la niatiere mcdi-
cale , etc. , 422.
Bory-de-Saiiit-Vincent , C. — A. ,
47. — B. , 207, 435.
— Foj. Dictionnaire classique
d'histoire naturelle.
— De la matiere, i58.
Basse (F. A.). Geographice anti-
ques compendium , 429.
BoTANiQUE, 47, ii3, 148, l63,
399, 435,548,812.
861
— (Resume complet de), par J.
P. Lamouroux , 433.
Botaniste (Le) italien , ou Discus-
sions sur la Flore italienne , de
Joseph Moretti , 148.
Bouillet (J. B.). For. Montagne
de la Boulade.
Bouillet , C. — B. , 442 ,517.
Bourgeois (Le) de Reims , opera-
comique , musique , par Fetis,
275.
Bouton , peintre. Le Cloitre de
S.-Wandrille, tableau du Dio-
rama de Paris , 280.
Borne Water {The) , by the O'Hara
fainilj; 122.
Breaute (Nell de). Relation du
voyage du capitaine Guedon a
la baie de Baffin , 45o.
Bredin. Fay. Nominatioks aca-
UEMIQUES.
Bres. Foj. Tableau historique.
— Foj. Souvenirs.
Brescia. Foy. Discours.
Bkesil, 236 , 525.
Briccolani {A.). I. Lusiadi, etc. ,
5ig.
Briffaut. Foy. Nomijtatioks aca.
demiques.
Brighenti,{M.). Illtistrazione deW
Arco d' Augusta in Rimini , i52.
Brochures in-32 , 780.
Brofferio {A.). La Caduta di Mis-
solongi, 799.
— Un Sogno della -vita ed il La-
mento di Dante, i5o.
Brotonne (F. de). P'oy, Histoire
universelle.
Budget (Le) d'un sous-lieutenant
en reforme , par A. Roy, 5o4.
Buenos-Ayres , 8o5.
Bulletin BiBLtOGRAPBtQCE (III) :
AUemagne, i36, 4^* » 709-
— Canada , 679. — Dane-
mark , i35 , 4'o, 702. —
Etats - Unis , 109 , 394 , 676.
— France , 157, 432 , 727. —
Grande-Bretagne , ii4» 399,
681. — Indes orientales , ii3.
86a
TABLE ANALYTIQUE
Italic, 147, 432. 716. — Mexi-
que, 399. ■ — Norvege , 409,
702. Pays-Bas, iSa, 429, 725. —
Pologne, Cnj5. — Russia , i3 i ,
4o5, 693. — Suisse , 146, 418,
7x5.
Burns. J-'oy. Morceaux clioisis.
Biisching. Grabmal des Herzogs
Heinrich des f'ierlen , ^ly .
Buttura. For. Grecia.
Cailliaud (Fred.), ^o/. Voyage a
Meroe.
Canada, 679.
— Extrait d'une lettre sur la si-
tuation de ce pays, 8o3.
Canai. de construction romaine ,
decouvert a Besancon, 55o.
Canard (N. F.). Memoires sur les
causes qui produisentla stagna-
tion et le dccroissement du
commerce en France, 465-
Canaux de la Correze, et de la
Vezere , SaS.
Cantate sur la destruction de
Missolonghi , par Ph. L. i54.
Cap de Bonne-Esperance , 237.
Gapitaine Belronde(le), opera-co-
mique, par Picard, musique
par Cremont , 274.
Cappefigue, de Marseille. L'Aca-
detnie des inscriptions et belles-
lettres de Paris , lui decerne
une mcdaille d'or, 558.
Caraffa. Voj. Belle au bois dor-
mant.
Carove. Ueher die alleinseligitta-
ckende Khc/ie , r38.
Carrer (£.). // Clotaldo,poema, 719.
Carte d'Afrique, projetee et des-
sinee par Henri Bergbaus, i36.
— generale de la Grice , 739.
Catalogue de la bibliotheque
teylerienne , a Harlem, i55.
— de manuscrits orientaux , qui
existent , mais que Ton n'a pas
encore pu decouvrir , 246.
— des antiquiios d^couvertes en
Egypte , par Josejib Passa-
lacqua , ^88.
Catecismas de cienciasy arles , 1 1 4>
Cathedrales francaises, dessinees
et lithograpliiees par Cbapuy,
avec un texte bistorique, par
Jolimont , et publiees par En-
gelmann ,219.
Catruffo. y. Voyage de cour.
Cazaux (P. L.'F.'^G. de). Voy.
Economie politique.
Caze (A.). Voy. Lois d'inter^t.
Caze (De). Voy, Compagnie.
Censure (Procedes de la ) en
Espagne , 252.
Cent epigrammes d'Antoine Perli ,
428.
Ceylan , 5 , 238 , 534.
Chalas (Prosper). Voj. Histoire
des conspirations des jesuites^
Champignons (Guide de I'ama-
teur de), etc., par F. S. Cor-
dier, 435.
Chamrobert (P. de). La Venue
du Messie, etc., par Juan Jo-
sapliat Ben Ezra , 79(1.
Chansons nnptiales des Serviens,
traduites en vers allemands ,
par Eugene Wessely, 712.
— serviennes , en partie re-
ciieillies , en partie traduites
en alleraand , par S. M***,
71a.
— de P. J. de Beranger, A. ,
669.
Chant ,221.
Chant a Bolivar sur la bataille de
Junin , par J. J. Olmedo , 4oo.
Chapuy. Foy. Palladio.
— Vof. Cathedrales francaises.
Chapuys-lMonslaville (L. A. de).
• Lettres sur la Suisse, etc., 775.
Chasse (Secrets de la) aux oiseaux,
par G... , 738.
Chateaubriand (V. de). OEuvres
completes , 499 > 774-
Chatillon Modcles lithographies,
566.
nES MA
Chefs-d'ceuvre des theatres etran-
gers , A. , 379 , 657.
Chevard. Voy. Neckologie.
Childe Harold , aux ruines de
Rome , imitation dii poeme de
lord Byron , par Aristide Tar-
ry, 211.
Chimie , 619.
— (Theorie de la) , par Over-
duin , 725.
Chine ( La ). Mceurs , usages ,
costumes , etc. , recueil de li-
thographies , public par D.
B**'de RIalpiere, Sog , 787.
Chirurgie , 25g. yoy. aussi
SciEMCES MEDICALES.
Chlore. Voy. Labarraque.
Chkomologie , 175, 757.
Ciceron(La Republique de). Nou-
velle edition de G. H. Moser,
a-vec des notes , par Creutzer,
144.
Cimarosa. ^oy. Comedie.
Civiale. L'Academie des Sciences
de Paris lui decerne un pri.t; ,
259.
Claprerton (Le capitaine).Voy age
a I'intej-ieur de I'Afrique ,527.
Classiques grecs. Collection com-
plete publiee en Italic, par
Joseph Pomba, 260.
— francais. Edition de Debure ,
494,^ 770.
— de I'histoire , 749.
— latins , 770.
Clinique medicale de I'Hotel-
Dieu de Rouen , par Hellis ,
170.
, ou Choix d'observations
recueillies a la clinique de
M. Lerminier, et publiees par
G. Andral fils, 438.
— de la maladie .sypliilitique ,
par N. Devergie, 439.
Cloet. Handboek voor Staatsmannen,
etc. , 1 54.
Clotalde. Foy. Carrer.
Cobbett (William). Voy. Histoire
de la reforme protestanie.
TiiKES. 853
Cochenille. On cherche a I'accli-
mater en Espagne , 25 1:
Codes des peines , etc. , par
Charles - Salomon Zacharije ,
4ia.
Codification (Pieces relatives a
la) , et a I'instruclion publique,
etc. , par Jeremie Bentham
A. , 626.
Cohen (Jean). Voj. Tableau de la
Grece.
Colique metalllque (Traite pra-
tique sur la) , par B. Pallas ,
73i._
Collection complete des lois
decrets , ordonnances, etc.
de 1788 a 1824 , par J. b!
Duverger, 461.
— des auteurs classiques latins ,
avec la traduction francaise ,
publiee par A. Pommier, '770.
— des classiques latins, a I'usage
des classes elementaires , etc.,
par Leroy et Prieur, 798.
CoLOMBiE, 524.
Comedie (La) a la Campagne ,
opera , musique de Cimarosa ,
277.
Commerce, 43o, 465,466,5x7,
522, 523 , 735.
— ( Du ) de rOrient , avec la
Russie et la Scandinavie au
moyen age , par Jean Lassen-
Rasmussen, i36.
— (Le) exterieur de I'empire de
Russie , etc., 693.
— de la France en 1824. Foj.
Tableau statistique.
Commission ( Formation d'une )
de statistique pour les Pays-
Bas, 548.
Compagnie de Colon'.sation ge-
nerate de la Guyane francaise,
etc. , par de Caze , 745.
Comte (Charles). Traite de legis-
lation, etc. , A. , 73.
— C— B. , 464.
Concert execute a Amsterdam ,
au profit des Grecs , 253.
864 TABLJJ AN
Conseil dc falubrite de Nantes.
Voy. Rnpport gencial.
Considerations sur les causes de
la grandeur et de la decadence
de la monarchic espagnole, par
Senipere, 731.
Conspiration de Russia. Rapport
de la commission d'enquete de
Saint - Pttersbourg a I'empe-
reur Nicolas 1'^"', 768.
Consultation ;idressee a la cour
royale, pour M. le comte de
Montlosier, 47(1.
— ni jesuitique , ni gallicane , ui
feodale , en reponse a la Con-
sultation de M*^ Dupin , 74^.
CoMTEs de la famille O'Hara ,
132.
— de fees irlandais , traduits en
allemand, par les fr^res Grimm,
— de Xavier Scrofani, i5r.
Cordier(F.S.) Voy. Champignons.
Cortambert (E.). Voy. Geographic
universelle.
Cotelle. Traite des interdts, 461.
Courtin. Voy, Encyclopedic mo-
derne.
Cousin (Victor). Voy. Fragmens
philosophiques.
Coutelle , C.-M. , 587.
Cremont. Voy. Capitaine Bel-
ronde.
Creutzer. Voy. CiceroD.
Crillon. Voy. Vie.
Crivelli , avocat , C. — B. , i85 ,
459.
— (Louis) , C— B. , 5o3.
Crociato {11) in Egitto , opera , per
Meyer-Ben; 274.
Crocodile apprivois^, 807.
CroiseesimpenetrablesaTeauplu'
viale. Voy. Saint-Amand.
Crusolle-Lami , C— B. , 181.
Cryptoganies (Essai sur les) des
6corces exotiques officinales ,
par A. L. A. Fee , A. , 47-
— Voy. Planles.
CuLTE. Voy. Theoiogie.
Curtius (P.). Voy. Villanueva.
ALYTIQUt
D
Daguerre, peintie. Vue du village
d'Unterseen , tableau du Dio-
rama de Paris, 85i.
Daligny. Voy. Legislation penale.
Dame (La) Blanche, opcra-co-
mique , par Scribe , musique
par Boieldieu , 276.
— (La) du Lac, opera-comique ,
par d'Epagny, musique par
Rossini , 278.
Daminois ( M^e Adele ). Voy.
Alais.
Danemark, i35 , 410, 484,
702.
Dante revendicato , 427.
— Voy. Brofferio.
Dassy. Lithographic d'aprfes un
dessin de Girodet , 282.
D'Aubuisson de Voisins. Conside-
rations sur I'autorite royale et
sur radministration locale ,
182.
David , peintre. Voy. Laugier.
David, sculpteur. To;-. Nomika-
TIONS ACADKMIQUES.
Dcbats qui out eu lieu dans la
chambie des comnuines , au
sujet de I'exportation de deux
hahitans de la Jamaiqiie , 681.
Deby, C— B. , 723.
Decuuvertes , 444-
Decremps. Voy. Diagrammes chi-
niiques.
Degeorge (P.), C— B. , ri6 .
i3i , et les articles signes F. D.
Dejuinne , peinlre. Tableau re-
prepentant un interieur d'ap-
partement , 565.
— Modcles lithographies , 566.
Delaije (J. A.), ^oy. Grece.
Delavigne (Germain). Foj-. Macon.
Deleau. L'Academie des sciences
de Paris lui decerne un prix ,
260.
Delle Chiaje (E.). Memorie sulla
storia e notomia degli animali
scnza vertebre , 147.
Denouciation aux couis royalcs ,
relativement au sjsteine reli-
gieux et politique, signale dans
le memoire a consulter, par le
comte de Montlosier, 4'>S.
Denzinger (J.). Prima elsmenta
logices , 429.
Depping ( G. B. ). Histoire des
expeditions maritimes des Nor-
mands , A. , 91.
Depressions de la surface du
globe, f'oy. Andreossy.
Desmazieres (J. B. H. J.) f^'oy.
Plaiites cryptoganies.
Desmoulins (A.). Histoire nata-
relle des races humaiiies du
nord-est de I'Europe, de I'Asie
boreale et orientale , et de
I'Afrique australe , etc. , 160.
Desormeaux (A. Paulin ). Fq>-.
Amusemens.
— • Voj. P^che.
Dessin , 173 , 566 , 819.
— LiNEAiRE , introduit dans I'A-
cadcniie et les ccoles d'eii-
seigneinent mutuel de Tournay,
548.
Determinisme (Le) , ou Hume op-
pose a Kant , par F. G. Hovitz ,
410.
Devergie (N.). Voj. Clinique.
Deveze-de-Chabiiol. yoy. Mon-
tagne de la Boulade.
Devisnie (J. F. L.). yoj-. Manuel
historique.
Devoirs (Des) du mt^decin , par
le docteur Basevi , 4^3.
Dewez Abrege de I'Histoire du
duche de Brabant, etc., 725.
Diagnostic ( Traite elenientaire
de) , de prouostic , d'indica-
tions therapeutiques, etc., par
Rostan, 166.
Diagrammes cbimiques , ou Re-
cueil de 36o figures qui eipli-
quent les experiences par Fin-
dication des agens et des pro-
duits , etc. , par Decremps ,
A. , 619.
T. XXXI.
DES MATIERES. 865
Dialogues du Tasse , traduits par
J. V. Peries , 774.
Diamant (Le) du roi des esprits,
opera allemand , musique de
Ghcser. 81 3.
DiCTioNNiiRE universel de la
langue italienne, dc I'abbc
Alberti de Villauova, 426.
— espagnol, par D. G. Trapany,
797-
— universel des synonymes de la
langue francaise , par Boin-
villiers , 766.
— geographique universel , par
une Societe de eeographes ,
738.
— historique des bomnies cele-
bres de toutes les nations ,
morts et vivans , en un seul
volume, 200 , 482.
— liistoriqiie , ou Biographic
universelle classique , par le
general Beauvais , en un seul
volume, 761.
— historique et descriplif des
monumens de Paris, pai B. de
Roquefort , 768.
— classique d'histoire naturelle,
etc. , dirige par ISory de Saint-
Vincent, 157.
— des sciences , des lettres et des
arts, par Conrtin , 207.
— des finances, par don Jose
Canga Arguelles , 683.
— feodal , 192.
DioKAMA de Paris , 280, 8ji.
DiPLOMATiE, 43 1.
DiscorsopreliminareuW architettttia
di fitruvio , etc. , 720.
Discours prononce a I'ouverture
de I'Athenpe de New-York, par
H. Wheaton, 394-
— prononce a I'Universite de
Lcyde , par H. G. Tydeman ,
43o.
— prononce a la deuxieme seance
du conseil de perfectioniiement
de I'ecole speciale de com-
merce, par J. Lautte , 466.
— pour les obseques anniver-
56
S66 TAHI.K ANALYTIQUK
saires des bienfaiteurs de la
maison de lefuge a Padoue ,
par Joseph Barbieri , 716.
— sur rhistoiie de Brescia , par
Joseph Nicolini, 148.
Dmitricf Jpologui , 1 3 3 .
Documeiis relatifs a I'etat present
de la Grece ,229.
Doin(G. T.), C— M., 1 5.
Don Alonzo , Histoire contem-
porainc , par Srdvaiidy; tra-
duction allemande , 4''i-
Don Sanche , opera-feeiie , par
le jeune Litz , 274.
Don tier Cut till s van Tienhoven. Voj'.
OpinionF.
Doublet de Boisthibault , C. — N.,
854-
Doyle (G.). ^''o/. 'Villanueva.
Droit , 626. foy. aitssi Jubis-
PRUDEKCE.
I'UBLIC , 190.
— • (Le) de succession , considere
dans son developpement chez
tous les peuples, par E. Gans,
1 40.
Droz (Joseph), foj. Etudes.
Ducloz (M°"^). f^oy. Epoux.
Duel de deux Soulioies , 25 1.
— (Le) , ou Dix ans de trop ,
comcdie en prose , par Leon
Halevy, 843.
Dufey (P. J. S.). roy. L'Hospital.
Duges'Ant.). I'oj. Manuel d'obs-
tetrique.
Dnlaure. Vx>r. Atlas.
Dumersan , C. — B. , 221.
Duj)in , avocat. Voy. Cousulta-
tif)n.
Dupin (B. Charles), foy. Geo-
metrie.
— Voy. Rapport general.
Dureau de la Malle , de I'lnstitut,
C.— B. , 453.
Duval (Aniaury) de I'lnstitut,
C.— A. , 34fi. — B., 476.
Duverger(J. B.). Voy. Collection
complete des lois.
E
Eckhard. Foy. Question d'etat.
Eckstein (B. d'). Voy. Lettre.
EcoLE d'enseignemcnt mutuel
nouvellemeut fondee au Bre-
sil , 23(i.
— normale de Londres, 809.
— pour les sourds-rauets a Yver-
dun , 246-
— industrielle , nouvellement
fondee a Aran , 8i5.
— d'aits et metiers , ditc de La
BJartiniire , etablie i Lvon ,
222.
— de geometric et de mccanique,
nouvellement fondee a Lian-
court , departemeiit de I'Oise,
55i.
— speciale de commerce et d'in-
dustrie, fondee a Paris, 4^''-
— - ( L') des Veuves, drame en
vers, par Gustave Fabien Pil-
let, 846.
IicoLEs prima ires de Londres ,
., 809-
Ecoles savantes (Sur les) , sur-
tout par rapport a la Baviere ,
par Frederic Thiersch , 709.
EcOKOMIEDOMESTIQUE, I72, 447>
737.
POLITIQUE , I 5 , I 54 , 1 87, 465,
796.
— (Bases fondamentales de 1'),
d'apr^s la nature des choses ,
par P. L. F. G. de Cazaux ,
462.
— (Nouveaux principes ). Jour
qu'ils peuvent jeter sur la crise
qn'eprouve oujourd'hui I'An-
gleterre , M. , 608.
— KURALE , 25l , 447> 726.
EcossE, 239. Voy. anssiGtikTSOv.-
Bretagnb.
Edifices de Fiomc nioderne , des-
sines et publics par L. Le Ta-
rouilly, 5i i.
Education , 235 , 23g , 746-
— domestique , ou Lettres de
DES MATIERES
fauiille sur rcdiuation , par
M'nc Guizot, A., 335.
— jiublique. Ses piogres dans
riiule britannique , 626.
E\ux iniM5RAi.Es (Quelques ob-
servations sur les), M. , i5.
Eglise (De 1') qui seule pretend
que liors d'elle , il n"v a point
, de salut, parCarove, i38.
Egypte , 287, 529.
Elegien (Ztvey) iiber und nach Mis-
solonghis Fall, 800.
Ellis' {IV.). Narrative of a tour
through Hawaii , etc, , l44.
Eloge historique de M. VoutY c'e
la Tour, etc. , par Honore To-
rombert , 2o3.
— de Godefroy de Bouillon , 43i.
Eloquence, 2o3, 43o, 43i, 702,
716.
— SACREE, 742.
Em^ric - David , de i'lnstitut ,
C— B. , 787.
Emerson (J.). Foj. Tableau de la
Gr^ce.
Empvs. For. Agiotage.
Emprunt de la ropublique d'Ha'i'ti,
523, 524, 5Gr.
Emprunts (Tableau des derniers''
fournis par les capitalistcs a
Londres , 532.
Encouragemeus accordes aux
sciences par I'empereur de
Russia , 8 1 2.
Encyclopedic modenie , ou Die-
tionualre abrege des sciences ,
etc., par Courtin, 207.
Enfans (Les) de Maitre Pierre ,
opera-comique , par deKock,
musique par Kreube , 275.
Engelmann. roy. Cathedrales
franca ises.
Enseigjtement industrikl, 52,
5a4 , 548, 55i , 552 , 594 , 8i5.
MUTUEI, , 236 , 524.
Entomologie (U) , ou i'Histoire
naturelle des insectes enseignoe
en :5 lecons, par R. A. E., 4^2.
Epoux (Les) nialheureux , ou le
I par
M"
867
Du-
voyage a Moscou
cloz , ai5.
Erdiuann [J. /•'.). Beytriige zur
Keiintniss des Jnnern Russlands ,
i38.
Ermder^C. F.). Deutsches Lesebuch,
5 I.J.
EscL,vv.\GE ( Rapport niensuel
contre 1') , 681.
EspAGHE , 25i , 752.
— (L') jioctique , choix de poesies
castillanes , par dou Juan
Maria Maury, 5oo.
Etablissemens indusiriels fond^s
en Egypte par ordre du jiacha
Mohamed-Ali , 337.
Et\ts-Unis, loy, 235, 894,
Sai , G76 , 801.
Ete(Un) a Varese et ses environs,
lettres adiessees a Erminie ,
720.
ETBJfOGltAPHIK , 114.
Etienne (L.). C— B., 142.
Ettinger (Fedor). Foy. Kotzebue.
Elude du grec et du latin. Foy.
Fririon.
Etudes sur le beau dans les arts ,
par Joseph Droz, 507.
Eustot/tii archiepiscopi Thessaloni^
censis commenlarii ad Homeri
Odysseain , i43.
Eveuemens de ma vie , comme
chef des institutions d'educa-
tion a Bourgdorf et Yverdun ,
par Pestalozzi , 709.
Everett (A. H.). Nouvelles idees
sur la population ; ouvrage
traduit de 1' anglais , par C. J.
Ferry, 187.
Expedition (Nouvelle) maritime
du capitaine Parry, au pole
arctique , 239.
Exposition des ouvrages cou-
ronues par I'Academie des
beaiix-arts de Milan, 817.
— de tableaux a Paris , au profit
des Grecs, 278 , 565.
Expositions publiques de fieurs
et de plantes a Harlein et a
Utrecht , a5a.
8es
Fahri ( E. ). Tragedie, I 5 t .
Falkenskiold (De). f'oj. Se-
cretaii.
Faiisse.(La) Croisade, opera-co-
iniqiie, 275.
Foe (A. L. A.), f. Cryptognmes.
Femmes c.-'lebres (Quf-lques por-
traits de ) de Veii'se , par Bar-
thelemy Ganiba , 717.
— f'^oy. Repertoire uiiiversel.
— fraricaises les plus celebres.
^•'or. Genlis ( M''»= de).
Fenet(A. ). Voy. Poihier.
Ferry, C. — M., 693. — A. , 52 ,
39.0. — B., 209, 735. — N. ,
a68,
— Vojr. Everett.
Fetis. Voy. Bourgeois.
I'i^vre jaune (Irruption de la) aux
Antilles , 804.
Filon. Elemeiis de rhetorique
fraccaise , 767-
FiNAKCEs, 528,524, 532, SGr.
— (Elemens de la science des),
par D. Jose Canga Arguelles,
683.
— Voy. Dictionnaire.
Fleurs ( Culture des ) dans les
Pays-Bas, 252.
Flore de 1 Inde iieerlandaise. Voy.
Blume.
Fontan. foy. .Actrice.
Force ( De la) en politique, par
Louis Aiigeloui , n6.
FoRETs (Des) de la France, con-
siderees dans leur rapport avec
la marine militaire , par Bo-
nard, 729.
Forges et fonderies de Chareuton,
prcs Paris, 824-
Fortia ( De ). Foy, Nomina-
TIOKS ACAUEMIQUES.
Fossati, C. — B. , 4^3, ^ifi.
Fouilles entreprises au camp de
Cesar, pres de Dieppe, 55i.
.i^qui ont eu lieu a Brescia , 721.
Fragmens philoso])liiques , par
Victor Cousin, A., 327.
Fkaach , 157, a53, 43a, 477, 55o,
727, 739, 757, 823.
Francois £ils, dit Alexandre. Voy.
Grammaire classique.
Fraiicocur, C. — B. , 17a, 44a-
Fredericlisstecn ( La forteresse
de), pendant le siege, en 1814.
Biipport olliciel , 702.
(•"reytag. f'oy. Anthologie.
I'riecllander ( £. D.). Syinbolae' ad
caiceiiii'i JiscipUnam , etc., 706.
Fririon ( B. N.) , lieutenant-gene-
ral. Essai ."iur les moyens de fa-
ciliter I'etude du grec et du la-
tin, 493.
Froids extraordinaires a la Mar-
tinique , 23fi,
Gamba. Voyage dans la Russie
meridionale , 789.
Gamba (B.). Alcuiii riiratd di donne
illuuri Tci/eziane ,717.
Cans {£.). Das Erbrecht in wellges-
chichtUcher Enlivic/ieliing , 140.
Gardeton (Cesar). F<y. Godwin.
Gernier (Adolpbe) , C. — A. , 65.
— B., 461.
Gaston de Blondeville , ou la
Cour de Henri III a Ardenne ,
par Anne Radcliffe, 400.
Gaudin. Developpement d'line
pensee de d'AIembert, etc., 735.
Gendrin (A. N.). Histoire anato-
mique des inflammations, 168.
Genlis (l\I"ie de). P^oj. Memoires
iiiedits.
— Precis de I'histoire des femmes
francaises les plus celebres ,
483.'
Geoffroy-Saint-Hilaire ( Isidore).
Considerations sur les niammi-
fercs , 162.
Geographie, i36, i38 , 175,
177, 738, 739.
— universelle , par E. Cortam-
bert , 176.
UES MATIERES.
8(j
— ancienne ( Abrege de lit), par
F. A. Bosse, 429.
Geologie, 164 . i65.
Geometrie , 594, 734-
— et mecanique des arts et me-
liers et des beaux-arts, par le
baron Charles Dupiri , A., 52.
Georget, C— B., ifi8.
Georgique (La) des fleurs, poeme
d'Ange Ricci , 149.
Gerard, yoy. Adam.
Gesseniiis ( JVithelin ). Hebraische
Grammatick , 7 1 4^
Gessner. foy. OEuvres.
Gilbert. Poy. OEuvres.
Girardin ( Stanislas ). Opinion
centre le projet de loi destine a
retablir les substitutions, 191.
Girodet. yoy. Amours.
— yoy. Dassy.
Glaeser, compositeur allemand.
^oy. Diamant.
Godwin (M'le). Les Droits des
femmes et rinjustice des hom-
mes; ouvrage traduit de I'an-
glais par Cesar Gardeton, 457.
Goethe ( B. de). f'oy. Nomima-
TIONS ACADEIWIQUES.
Golberv (P. de), C — B. , 146,
418.'
Gondinet ( A.) , C— B. , 466, 468,
73i , 733, 746, 748 , 757.
(iossoudarstvenna'ia "vnechiiaia lor-
govlia , etc. , 6g3.
Gottis (Mmc A.), yoy. Robert de
France.
Gramsiaire, aSa.
— anglaise de Lindley Murray,
233.
— francaise ( Principes de la ) , a
I'usage des Russes, par Ch. de
Saint-Hilaire, 694.
— classiquede la langue francaise,
par Francois fils, dit Alexan-
dre, 764.
— pratique de la langue francaise,
par J. Rowbotham. lar.
— analytique , ouElemens de
grammaire generale appliques
a la langue francaise, par Le-
terrier, 764-
— hebraique , par Guillaume
Gessenius, 714-
— italieiiuc , par D. Martelli ,
797-
Gkvnde-Bretagne , 1 14, 23y,
399, 532 , 68i , 809.
GitivuEEs ,281, 5o8, 5 10, 5ri ,
784, 819.
— (Cent) pour les ceuvres de Vol-
taire, publiees par Le Cerf,
5ro.
Gkece, i54, 197, 198, 199, 329,
aSi, 253, 739, 799, 810.
— (La )., srene lyrique , musique
de J. A. Delaire, 221.
— foy. Tableau.
Grecia {La) siippUce , canzone, per
Bti'.ttira, 799.
Gregoire. Le gouvernenient de
Guatemala ordonne de traduire
en langue natlonale son ou-
vrage sur les libertes de I'eglise
gallicane, 236.
GremiUiet (J. J.) Voy. Probl^mes.
Grimm {Gebrildcr). Irische Elfen-
iniirchen ,713.
Grisons. Coup d'oeil sur I'etat ac-
tuel de ce canton, 542.
GaOENLAND , 45o.
Grosseur de la langue (Disserta-
tion medicale sur la), par H.
F. Van Doeveren , 725.
Guatemala, 236.
— particnlarites y relatives, Saa.
Guedon (Capit.). f oy. Breaute.
GuYAWE , 745.
Guillon (Marie N. S.). For. Bi-
bliotheque des peres de I'eglise.
Guiraud. Vor. NoMrwATiojis aca-
DEMIQUES.
— Voj. Pliararaond.
Guizot (Mine), yoy. Eiiucation
domestique.
H
Hachette. Voy. Nomikations aca-
DEMIQtlES.
8-
H v'iri , SaS, 56 1.
— Diverscs particuliai-ltes y rela-
tives, 5a3.
Ilalevy (Leon), l^oj: Duel.
Heiberg, C. — B. , i3(), 410, 4ti,
4i2 , 488, 702 , 'yo6. — N., 541,
812.
Hellis. T'-'oj. Clinique medicile.
Hcnrion de Pensey. f^oj. Assem-
blees nationales.
Henry ( C.J. ),C.—N., 824.
Hereau(E.), C— B., iio,ai3,
499> 5i9, 77a, et les articles
signes e. h.
Heurteloup. L' Academic des
sciences de Paris lui decerne
un prix, 259.
HisToiRE, 148, I94i 196, 198,
2o3, 2o4, 2o5, 206, 244) 363,
399, 473, 480,434, 488, 490,
558, 70a, 705, 749) 75a, 757,
758, 759, 763.
— universelle ( Resume de 1' ) ,
par F. de Brotonue et A. Lau-
gier, 472.
— romaine (Resume de 1') depuis
Romulus jusqu'a Coustantin ,
par A. Roche, 476-
— critique du passage des Alpes
par Annihal , par feu J. L. La-
rauza , 481.
— generale, physique et civile de
I'Europe , etc. , par de Lace-
pede, 750.
■ — de la reforme protestante en
Aiigleterre et en Irlande , par
William Cobbett, 193.
— de Pierre-le-Grand, 191.
— de la ville de Hanieln , par F.
Sprenger, 142.
— de Sardaigne, ou la Sardaigne
ancienne et moderne , par Mi-
maut , A., 346.
— des* revolutions de la ville et
du royaume de Naples, 479.
— ( Abregc de 1' ) du duche de
Brabant , etc., par Dewez, 725.
— de France abregee , par Pi-
gault-Lebrun , 477-
— des expeditions maritimes des
TABLE ANALYTIQUE
Norniand
et de leur etablis-
sement en France, etc., par
G. B. Dcpping, A., 91.
— de Henri IV, 19a.
— des conspirations des jesuites
contre la maison de Bourbon
en France, par Eugene deMon-
giave et Prosper Chalas , 192.
— ( Resume de T ) de la revolution
francaise , par Leon Thiesse ,
755.
— des lois, 628, 678, 679.
— 1.ITTERAIRE, 483.
— ( Resume de 1') de la litteratui-e
allemande, par A. Lofeve-Vei-
mars, 768.
— (Resume de 1') de la littera-
ture italienne, par F. Said,
209.
HATURELLK, l47, l57, l58,
ifia, 432.
— dc's races humaines du nord-
est de I'Europe, etc., par A.
Desmoulins, 160.
Hom^re. Foj. Eustathe.
Hospice nouvellement fonde dans
le Connecticut, 235.
Hovilz ( F. G. ). Determinismen ,
etc., 410.
— Ultimatum , etc. , 4io.
Hume. Voy. Determinisme.
Hutton (Charles). Nouvelles ex-
periences d'artillerie, etc., tra-
duites de I'anglais par O. Ter-
quem, 735.
Huzard fils. ^0^. Robinet.
HYDhOXECHNIE, 55o, 828.
I
He de la Camargue. ( Boucbes du
Rhone. ) Assainissement et fer-
tilisation de cette ile, 253.
Indes ohientales , ii3, 287,
526.
Industrie, i55, 287, 517, 559,
792,824.
Inflammations, yoj. Gendrin.
Influence (De 1') des femmes sur
DES M4T1ERES.
la litt^rature francaise , etc. ,
par M-ne de Genlis ,' 483.
Institut royal de France. Voyez
SOCIETES.
— pour les sourds-muets des clas-
ses indigentes a Manchester ,
240.
Institution royale des jeunes aveu-
gles de Paris, 843.
Instruction element aire, ii4,
236.
— poptfLAiRE dans la Haute-
Ecosse, 23g.
— puBLiQUE, 709, 8o5. Voyez
nilSsi ECO LES , enseignement
et UNIVERSITES.
— dans I'etat de Massacliussetts,
235.
— a Buenos-Ayres , 8o5.
— (L') du peuple, salutaire au
prince , discours prononce en
latin par H. C. Oersted, 702.
— RELi&iEusE. Vo)'. Levade.
Invention des bateaux a vapeur,
546.
Isanibert. Vo/. Manuel du publi-
ciste.
Italie, 147, 2495 422, 546, 716,
816.
Jacquet. De la tenue des livres en
partie double , 735.
Jardin botanique nouvellemenl
forme a Bruxelles, 548.
Jardinage, aSa, 435.
Jarry de Mancy ( A. ). Voj-. Atlas
historique.
Jasikof. Recueil des voyages chez
les Tatars , etc., i32.
Jefferson. Voy. Necrologie.
Jesoitisme , 192, 211, 2i3, 468,
470-
— ( Le ) devoile , par I'abbe Henri
Le Maire, 746.
Joannis. Voj: Anlhropologie.
Jolimont (J. de). V. Cathedrales
francaises.
871
Jorritsnia. Voy: Air atmospheri-
que.
JOURNAUX et RECUEILS PEP.IODI-
QUES publics en Angleterre : Re-
vue sonimaire des recueils pe-
riodiqucs. Jouruaux hebdoma-
daires, 124, 4o2 , 688. — Jnii-
i/ciferj- month!/ reporter, a Lon-
dres , 68 1. — T/ie Quarterly
Review, a Loudres , 684. —
Ocios de Espanolcs emigrados , a
Londres , 686. — Literary ga-
zette , a Londres , 689. — Lite-
rary-chronicle, a Londres, 6go.
. — • News of literaine and fas-
hion , a Londres! , 691. — Jour-
iiaux francais imprimcs en An-
gleterre, 692.
— publics en Canada : la Biblio-
theque canadienne, a Montreal^
680.
— publics aux Etats-Unis : The
north-am ej-ican medical and sur-
gical journal , a Philadelp'iie,
lit. — The north american Re-
view , a Boston , 677. — Le
Propagateur, journal franqais-
americaiu , a New- York , 678.
— publics en France : Le Specta-
teur militaire, a Paris, 224. —
Revue americaine , journal
mensuel , a Paris, 225. — La
France cbretienne , a Paris ,
227. — Docuniens relatifs a I'e-
tat present de la Grece, a Pa-
ris, 229. — Bibllotbeque alle-
mande, a Strasbourg, 2jr. —
Journ.il cliiiique, a Paris, 5i4.
— L'Hermes , journal du ma-
gnetisnie animal, a Paris, 5i5.
— Le Phare du Havre, au Ha-
vre , 517. — Bulletin des capi-
talistes, des speculateurs et des
rentiers, a Paris, 5i7. — La
Psyche , choix de pieces en
vers et en prose, a Paris , 5 18.
— Bibliotheque pliysico-econo-
mique, a Paris, 790. — Jour-
nal de la Societe d'cmulation
des Vosges, a Epinal ,791- —
Le Pioducteiir, 79J. — Journal
des missions evangeliques , 795.
— publics en Italie : Annali uni-
versali dli tecnologia , a Milan,
723.
— publics dans les Pajs-Bas : An-
nalcs universelles de I'indus-
trie, etc., a Bruxelles, i55. —
Revue bibliographique des
Pajs-Bas, etc., l5(i. — Journal
d'agricuiture , etc. , a Bruxel-
les , 72G. — Tydschrift voor ge-
neeskiindige If'etenschappen , a
Amsterdam , 72(1.
— publics en Pologne : Revue des
journaux et des recueils perio-
diqucs qui se publient a Varso-
vie . 695.
— publics eu Russie : Journal de
la. Societe iniperiale philantro-
pique de Saint - Petei sbourg ,
i34.
Julia-FoHtenel'le , C. — B., 171.
— Foy. Manuel de physique amu-
sante.
Jullien (M. A.), fondateur-di-
reclcur de la Revue enciclopedt-
qiie, C- — A., loa, et les articles
signes M. A. J.
— Voy. Nominations academi-
QUES.
Jullien, marcband de vins. Voj.
Manuel du sommelier.
JURISPKUDENCE , I 4o , I 84, 4o3,
470-
— francaise (Essai sur I'liistoire
de la), etc., par J. Sewell ,
679. ^
Jury (Sur I'etablissement du ) a
I'ile de Ceylan, M., 5.
— Resultat de cet etablissement,
238.
K
Kalaidovitcb. Foy. Nominations
ACADEMIQUES.
Kant. toy. Delerminisme.
Karamzine (Nicolas), f^oy. Ne-
CllOLOGIE.
TABLE ANALYTIQDE
Kiesling (Th^ophile). roy. Tzet-
zf-s.
KircAho//(J. R. L. de). Verhatide-
ling over de danipkringsliicht ,
l52.
f^Oy. No.MINATIONS ACADAMI-
QUES.
— C, — B., ii4, 725, 727.
Kock (De). f^oy. Enfans.
Kotzebue (Aug. de). Theatre tra-
duit en russe, par Fedor Eltin-
ger , 695.
Kreube. Foy. Enfans.
Kreut/er. yoy: Pharamond.
Kuenlin (F.) ^oj. Manuel mili-
taire.
Labarraque (A. G. ). De I'emploi
des chlorures d'oxide de so-
dium et de chaux , 732.
Labus (Jean). Dissertation sur
plusieurs monumens decou-
verts a Brescia ,721.
Lacepede ( C. de). For. Histoire
generale.
Lafitte ( J. ). Fuj. Discours.
La Goy (R. de). Foj-. Medailles
antiques.
Laing (Major), voyageur daus
I'interieur de I'Afrique, arrive
a Tombouctou , 808.
Lake (y. JV.). Select british Aovels,
520.
Lamballe ( Princesse de). For.
Memoires.
Lamouroux (J. P. ) Foy. Bota-
nique.
Langlois, peintre. Deux tableaux
representant la mart de Marc
Botzaris , et la prise de Misso-
longhi , b()6.
Langue anglaise ( Elemens de
la ) , par Sirct. Nouvelle edi-
tion publiee parAlex. Boniface,
232.
— espagnole. Fay. Trapany.
— francaise. Foj: Grammaire
classique.
/-'oy. Gramma ire anal-ytique.
Voy. Dictionnaireuniversel.
Voy: Saint-Hilaire.
Voy. Rowbotham.
— hebra'ique I'oy. Gessenius.
— liotliindaise , 549-
— italienne. Voy. IMartelli.
Voy. Diclionnaire.
— des sauvages de TAmerique
duNord, l\i., 3o8.
— des tribus sauvages des Etats-
Unis. Le gouveriiement doniie
des ordres pour en recueillir
des vocabulaires , 802.
Lanjuinais, de I'liistitut , C.-B.
i4o, 4^6, 7i5.
— (P. E.), C.-E. 466.
— Voy. Sumner.
Lapin (Le) blanc, opera -comique,
375.
Larauza ( J. L. ). Voy. Histoire
critique.
— Voy. Necrologie.
Lassen-Rasmtissen {J.) De Orien-
tis cominerciu cum RtiSiia et Scan-
dinavia , medio CEvo , i36.
Lasteyrie (C. de). Voy. Antom-
marchi.
Latour- Allard. Voy. Antiqultes
mexicaines.
Laugier. Leonidas aux Thermo-
pyles, gravure d'apres le ta-
bleau de David, 281.
Laugier (A. ). f'q/. Histoire uni-
verselle.
Laureal. Voy. Louis XII.
Lebrun (Isidore). V. Bonne Ville.
Le Cerf. Voy. Gravures.
Lecons de litteriiture alleraande,
par C. F. Ermeler, 619.
— de litterature chretienne ,
7^9-
— nouvelles d'Astronomie, par un
ancien eleve de I'Ecole poly-
technique, 442.
Legislation, 5, i85, 191, 235,
396, /\i2, 43o, 458, 459, 461,
524. 559, 626, 679.
— (Traite de), etc., par Charles
Comte, A., 73.
I)F.S MATIERFS. >S7,1
— penale (Essai sur Ics principps
de la), en matiere de tentative
de crime et de delit , par Da-
ligny, 1 85.
Legonve ( G. ) , OEuvrcs com-
pletes, 497-
Le Maire ( I'abbe Henri). Vo;,.
Jtsuitisnie devoile.
I-emercier (N). /'or. Baudouin.
Leniantey(P.E.).r. NiicROLOGtE.
Le Normand ( L. Scb. ) , C.-B.
436. 447-
— Manuel pratique de Tart dii
degraisseur, 737.
Leopardi. Canzorii, 1 4 9.
Lerminier. V. Clinlque medicale.
Leroux. (Ant.). V. Pneumatologie.
Leroy (James). L'acadcinie des
sciences de Paris lui decerne un
prix, 259.
Leroy. Voy. Collection des clas-
siques latins.
LeRoy. f o). Origine desmaladies.
LeTarouilly. /^.Edifices de Rome.
Leterrier. Voy. Grammaire ana-
lytiqiie.
Lettre (Extrait d'une), ecrite d'A-
lexandrie , par un voyageur
francais, 529.
— (Extrait d'une), du Caire, 542.
— ( Troisifenie ), a M. le baron
d'Eckstein, sur les dangers de
son catholicisme indo-chretien,
etc., par N. M., 453.
Lettres sur la Grece , notes et
chants populaires, exiraits du
portefeuilledu colonel Voulier,
19S.
— sur la Suisse et le pays des
Grisons, par L. A. de Chapuys-
Monslaville, 775.
— inedit^s de M""-' de Maintenon
et de M'Me la piincesse des Ur-
sins, 204.
-^ d'un oflicier de la marine
russe, etc , ^oS.
Levade (A.). Reflexions sur I'in-
struction religieuse, sur les tem-
ples, etc , 4'8.
Lexarza (Jean). Voy. Llave.
57
"74 TABLE ANaLYTIQUE
L'Hospital ( Micliel ). OEiivres
completes publiees par P. J. S.
Dufty, /,g4.
— OKuvres inedites publiees par
le m(?me, 494
Liberie des cultes. I'oy. Portalis.
Liberies de I'eglisc gallicane ,
ig2, 236.
LiiiKAiRiE, aSo, 268.
Libre nrbitre (Considerations sur
le), de rbonime, etc., par A .S.
Oersted, 410.
LlTHOGRAPHIE, i65, 2ig, j8i,
566, 785, 787.
LiTTEBATuiiK nllemaiidc , 209,
aSi, 5i(j, 6g5, 768, 777, 800,
8 1 3, — Ancienneciassique, i43,
144, a5o, Syg, 49^,494, 539,
77t> » 798. — Anglaise , 122 ,
210,234, 400, 520, 684. 688,
716. — Arabe , 542. — Belge-
Francaise, i54, 4>»-- — Cana-
dienne , 680. — Chingulaise ,
534. — Danoisc, /\n . — Es;>a-
guole, 4oo> 5oo, 586. — Des
Elats-Unis, 677, 678.— Fraii-
caise, 102, 200, 2ir, 212, 214,
ai5, 216, 258, 261, 266, d63,
4i6, 483, 494) 497> 499, 5o2,
5o3, 5o4, 5o5, 5o6, 5(8, 563,
564, 642, 657, 669, 692, 769,
770, 773, 774, 775, 777. 779,
780, 843, S44, 846. — Hebiai
que, 549. — Hollandaise, i54,
43i. — Llar.daise, 713. — Ita-
lienne, 149, i5o, j5i, 209,
427, 428, Dr9, 717, 719,720,
774, 799. — Noi vcgieniie, 4o9-
— Polonaise, 6g5. — Portii-
gaise, 5rg. — Russe, i33, 406.
— Servienne, 71 2.
Llave (G. de la) et Jean Lexarza.
DcscriptioDs de vegetaux uou-
veaux, 399.
Lo6ve-Veimars ( A. ). Resume de
I'Histoire de la litterature alle-
mande, 768.
— J'oy. Romans bistoriques.
LoGiQUE (Premiers elemens de
la), par G. Denzinger, 439.
Lois d'interdt g^n<<ral ( Esprit et
conferences des), qui ont ete
rendues depiiis la re^tauration,
etc.; par T.ijan, A. Gaze et C.
IMessine, 458.
Loisiis (Les ) d'un habitant de la
campagne ; poesies du paysan
lusse Fedor Slaipouchekine ,
406. ^
Louis XII, opera, par Saint-
Geoi'ge et Laureal, ouvrage pa-
rotiie sur la musique de Mozart,
277.
Lourniand (A. D.). C.— B. 767.
Lucenay (J. de), C. — B. 417.
l.una-FoUiero ( Cecilia de ). L'ulivo
di Doeinia , leizine, 7 ig.
Lusiade (La) du Camoens, tra-
duite en octave rima, par A.
Briccolaui, 5ig,
Lycee d'bistoiie naturelle de
"^ New- York, 235.
M
Macon (Le) , opera -comique, par
Scribe et Germain Delavigne ,
musique par Auber, 274.
Magnexisme antmal (L'Hermes,
ou Journal du) , 5i5.
— (Du) , etc. , par le docteur Ba-
sevi , 4'-4-
— (Expose des cures operees en
France par le) , etc., par S. ,
44/.
— Resiuiie des deliberations y re-
latives de TAcademie royale de
medecine de Paris, 838.
Maintenon (M""? de). Voj. Lettres
inedites.
Maisonabe (C. A.). Journal cii-
uiquc. Recueil d'observations
sur les difformites du corps
bumain, 5i4.
Malacarne. Solution geometrique
et rigoureuse du fameux pro-
bleine de la quadrature du
ccrcle, 734.
Malbeurs (Les) de la Gr^ce,
scene lyrique , par Ph. L., i54.
DES MXTlfcaES.
Malpel. Traite plemeulaiie ilcs
successions nb irilesiat , 184.
Mal|ji^ie (D. B"** de). / oj .
Chine.
Mammiferes. foy. Geoffrey Saint-
Hilaire.
Mancy (A. J. de ). Foj-. Alias
coiistitutionnel.
Mangino (/i.). Miscelanea deeco/io-
mia polidca jr moral , 796.
ItJann: ( P. ). Del trattaine.nto degli
anne^^ati , 4"-»5.
Manuel dii j>ubliclste et de
riioiume d'etat, par Isambert,
190.
— de mcdecine et de chirurgie
domestique , par J. Morin ,
73'. _ _
— d'obstetrique, ou Precis de la
science desaccouchemens, etc.,
par Ant. Diiges , 169.
— de physique arausante , etc. ,
par Juiia-Fontenelle, 435.
— de physique , ou Elemens
abreges de celte science , par
Bailly, 172.
— de perspective, du dessina-
teur et du peintre , par A. D.
Vergnaud, 172.
• — du pecheur francais , par Pes-
son-Maison-Neuve , 172.
— du soramelier, etc. , par Jul-
lien, uiarch.ind de vin , 172.
— mililaire ])our I'instruction
des ofliciers suisses , etc. , par
F. Kuenlin , 715.
— de I'adniinistrateur , du nia-
nufacturier et du iirgociaut ,
par de Cioet , traduit en hol-
landais , par P. Van Grit-
huizeu , 1 54.
— du bouvier , par J. Robinet ,
727.
— du degraisseur , par Le Nor-
niand , 787.
— historique du departement de
I'Aisne, par J. F. L. Devisme,
480.
Manufactubf.s, 726.
Marais. foj-. Moufalcon.
875
Jlarcellus (C. de). Voyage dan*
les Kautcs-Pyieiiees , 5ol.
Marcbangy. Voj. Tristan.
.Mai guerite , rcine dc Danemark ,
dc Norvege et de Suede , par
C. F. Wichmann , 703.
Marie. Voy. Millioiniaire.
Making, 79.9.
Marius-Giinon, C. — N., 829.
Maimin (Alex.). Notice histo-
rique sur Michel Patras de
Campaigno, 76a.
Marmora ( Albert de la ). Vo}-.
Voyage en Sardaigne.
Martelli ( D. ). Gramrna.ire ita-
lienne, 797.
Martin. Voy. Milllonnaire.
Maktinique, 236.
Martinof. Traduction des ecri-
vains grecs en langue russe ,
539.
Massias. Voy. Theorie.
Mathematiques ,171, 260, 442,
733 , 734, 735, 820.
Mati^re (De la), par le colonel
Bory-de-Saint-Viucent, i58.
— uiedicale. y^y. Borelli.
Malter, professeur a I'Academie
de Strasbourg. I/Academie des
inscriptions et i)elles-lettres de
Paris lui decerne une me-
daille d'or, 557.
Maurin. Lilhogra[)hie de la mort
de Botzaris , d'apres le ta-
bleau de Langlois, 5fiO'.
Maury (D. J. M.). Voy, Espagne.
Mecanicien (Le) anglais , ou Des-
cription de toutes les ma-
chines mecaniques appliquees
aux arts industriels , par Ni-
cholson , traduit de I'anglais ,
444-
Mecanique, 62 , afii , 444; 594.
Mcdailles antiques (Essai sur les)
de Cuijobellnus, etc. , par Ro-
ger de La Gov, aao.
Meuecike. foj-. Sciences me-
dicares.
Melanges sur les beaux-aits , par
Ponce, 782,
S~6 TAHLK AN
Mely-Janiii. Foy. Projet de pif-ce.
MiiMoiRE pour M. le niareolial
(Victor) due de Ci'Uune , sur
les marcbi's Ouvrard, 206.
— dn gencial Andreossy, sur ce
qui concerne les marches Ou-
vrard , 748.
IMfiMoiRES , Notices, Lettkes
EX Melvnges (I.) : De I'eta-
hlissement du Jury a i'ile de
Ceylan , 5. — Quelques gt'-iie-
ralites sur les eaux miuerales
{Doin), i5. — Tableau statis-
tique du commerce de la France,
eu 1824 {tloreaii de Jonnes) ,
27. — Notice sur les societes
savantes des Ltats-Unis (il>) ,
289. — Notice sur les ouvrages
de Jeremie Bentliam (T.), 298.
— Notice sur la langue des
sauvagesde rAmeriquednuord
{^Morenas) , 3o8. — Notice sur
I'iipplication des aerostats
{Ferry), $77. — Rapport sur
I'enseignement industriel (^Ch.
Diipin), 594. — Nouveaux prin-
cipes d'economie politique (J.
C. L. de Sismond'i) ^ 608.
- — ET Rapports de Societes sa-
vantes et d'utilite publique en
France, 222, 5 12, 789.
Memoires de la cour de Henri
VIII , par M»'e Thompson ,
399.
— de M. de Falkenskiold , 484.
— sur la guerre de 1809 , en
AUemagne , etc. , par le ge-
neral Pelet, 196.
— lelatifs a la familie royaic de
France, pendant la revolution,
publics d'njires le journal de la
princesse de Lamballe , 488.
— inedits de M">e de Genlls ,
A. , 3fi3 , 64».
— sur riiistoire et ranaloniie des
autmaux sans vertfebres du
royaume de Naples , par E.
Delle Clilaje, i47-
,\Ierville. Foy. Voyage de cour.
ALVriyUE
Mesnard (J. B.). Voy. Morceanx
ciioisis.
Messine (C). yoy. Lois d'interel
general.
Metapiiysique, 178 , 4'o.
Meteobologie , i53,436.
— P'oy. Projet.
Meunier. ^oy. Aerostats.
Mexique , 399.
Meyer-Berr. foy. Crociato.
Michelot (A.) ,' C — B. , 799. —
N., 2(i5, 557, 834.
3Iillionnaire (Le), conuklie en
prose , par Martin et Marie ,
5fi4.
Mimaut. ^oy. Histoire de Sar-
daigne.
miicelanea. Voy. Mangiiio.
Missions, 795.
Missolonghi. Foy. Cantate.
—r yoy. Van dam-Van-Isselt.
— yoy. Brofferio.
— P'oy. Etegien.
— n'est plus. Appel aux amis des
Grecs, par Caniille Paganel ,
199-
Mocbetti (Angelo). Foy. Monu-
mens,
Moafalcon (J. B.). Histoire me-
dicale des marais , etc. , 731.
Monglave (Eugene de). yoy. His-
toire des conspirations des je-
suites.
Monnaie polonaise. EUe doit con-
server tuujours I'effigie de I'em-
pereur Alexandre , 244-
Monsieur Valmore , ou le Maire
de village , par Fred. Rou-
veroy, 4^2.
Montagne de la Boulade (Essai
geologique sur la) , pres d'ls-
soire , par Deveze-de-Cbabrlol
et J. B. Bouillet, i65.
Montesquiou ( G. Anatole de ).
Poesies , 5o2.
Montlosier (C. de). Voy. Denon-
ciation.
— yoy. Consultation.
Montnunency (Due de). y»y. \c-
tillart.
DKS MATIEHES.
877
Moiiunieus (Les) , poeme d'An-
gelo Mochetti , 719.
Monument erige a Buenos-Ayres,
a la m^moire des auteurs de
la revolution du aS mai 18 to,
806.
— eleve dans la ville d'Odessa,
au feu due de Richelieu, 539-
Mora (J. J. de), C— N. . aSa.
— B. , 400.
Morale, 780. ^oy. attssi Sciences
MOHALES.
Morceaux choisis de Burns, tra-
duits par James Aytoun et J. B.
Mesnard, 210.
Moreau de Jonnes (A.) , C. — M. ,
27. — B.,i65. — N., 527,805.
811.
Morenas (J.), f^oy. Notice sur la
langue des sauvages.
Moretli. 11 Botanico italiano , etc. ,
i48.
Morin (J.). Fof. Manuel de me-
decine.
Moser {G. H.). M. TuUii Ciceronis
de Repiiblica libri , etc. , l44-
Mulder (G. Z.). Dissertatio medica
de opio , 725.
Muller (Wenzel) , compositeur
allemand. Voy. Tenfelsstein.
Munter. Om Kong Harald Klaks
daah , yoS.
Muriel, C— B., 5o2.
Murray [Lindley). English grammar,
a33.
MusEE nouvellement fonde au
cap de Bonne-Esperance, 237.
— (Etablissement d'un) national
a Iiondres , 810.
Museum criticum , ou Reclierches
classiques a I'usage de I'Uni-
versite de Cambridge, 399.
MusiQDE , 420.
M YTHOLOGiE (La) comparec avec
I'histoire , par I'abbe de Tres-
san , 748.
N
Naples , 479-
Napoleon Bonaparte est-il ne
fraiicais , 2o5.
Navigation , 257, 3ao , 4o5.
— sur la Saone , 55o.
PAR LA vapeuk, 54fi, 55o.
entre New-York ct les etats
voisiiis , 521.
est rendue libre sur les cotes
et les fleuves de la republique
de Colombie, 524.
dans les Pays Bas, 25a.
NeckoloGIE. Kicolas Karamzine ,
historiographe de I'empire de
Russie , 242. — Jolin AJums et
Jefferson , tous deux successi-
vement piesidens de la repu-
blique des pjlats-Unls , 521. —
Pierre Ed'xiard Lemontey, mem-
bre de I'lnstitut de France ,
282. — Charles Marie de JVeber^
compositeur allemand, a Lou-
dres , 535. — Le celebre asfro-
norae Piazzi , a Naples, 547-
— Le professeur Jean Antoine
SantareUi , a Florence, 547- —
Jean Louis Larauza , bibliotlie-
caire de la faculte de theologie
de TAcademie de Paris, 567.
— Jean Frederic Oberlin , pas-
teur a Waldbacli , departement
du Bas-Rhin . 569. — Michel
Attumonelli , docteur en mede-
cine , a Paris , 572. — Frederic
Chretien Uolberg Arentz , philo-
logue , a Bergen , 812. — Fe-
lice Testa , sculpteur, a Turin ,
820. — Le contre-amiral Yves
Marie Gabriel Pierre Lecoat ,
baron de Saint- Uaouen , a Ca-
lais , 852. — Chevard , auteur
de plusieurs ecrits bistoriques,
a Chartres , 854-
Ne/iolihe Piesnize , 71a.
Nicolini. Delia storia llresciana ,
etc. , 148.
Noces (Les) de Gamache , opera-
comique, 277.
Nominations academiques. Le
baron de Goethe , et J. R. L. de
Kirckiwff, membres correspon-
878 TABLE AN
dans (111 lycee d'histoire natu-
relle de New-York , 235. — l.e
general Van den llosch ; Van
Alphen , de la Haye ; de Scassart,
de Namur ; le recteur Swaan,
de Hoorn ; Van Grithiiizen ,
d'Utreclit ; et le docteur BOl'
linger de Munich , membres
etrangers de la Societc des
sciences et arts de Batavia ,
238. — Kalaidovitch , membre
correspondant de I'Academie
des sciences de Petersbourg ,
242. — Ilredin , membre de
I'Academie des sciences de
Lyon , 258. — Biiffaul et
Guiraud , membres de I'Aca-
demie francaise, 265. — Auger,
secretaire perpetuel de I'Aca-
demie francaise , 266. — Le
marquis de Foriia , et le pro-
fesseur llncheUe , associes cor-
i'espondans etrangers de I'Aca-
demie des sciences de Naples,
547. — Marc-Antoine JuUien ,
de Paris , membre d'honneur
de la Societe pour la propaga-
tion des sciences naturelles de
Dresde , 812. — David , sculp-
leur , membre de I'Academie
des beaux-arts de Paris , 837.
Normand pere et ills , graveurs.
Voy. Souvenirs.
NORVEGE, 409, 540, 702, 812.
Note diplomatique de M. le comte
de Mier, ministre plenipoten-
tiaire d'Autriclie, pres la cour
des Pays-Bas, 43 1.
Notice sur les societes savantes
des Etats-Unis de I'Amerique
du nord, M. , 289.
— sur les ouvrages de Jereniie
Bcntbam , M., 298.
— sur la laugue des sauvages de
I'Amerique du nord , par J. Mo-
renas , M. , 3o8.
— sur la Societe belvetique de
musique , 420.
NonvEi,LE Galles meridiow ajle ,
806.
ALYTIQUE
NOUVF.LLES SCIENTIF[QUKS ET
LiTTihiAiiiEs (IV.) : Afiique,
237, 527, 808. — AUemagne ,
244 , 541, 812. — Amerique
ceiitrale, 236 , 522. — Ameri-
que moridionale , 236, 524.
8o5. — Amerique septentrio-
nale , 235, 621, 8oi. — An-
tilles , a36 , 523 , 804. — Asie,
237, 526 , 807. — Australasie ,
8o5. — Bresil , 236 , 525. —
Buenos-Ayres, 8o5. — Canada,
8o3, — Cap de Bonne-Espe-
rance , 237. ■ — • Ceylan , 238.
— Colombie , 524- — Egyple ,
237, 529. — Espagne , 25 1. —
Etats-Unis , 235 , 52i , 801. —
France, 253, 55o , 823. —
Grande-Bretagne, 239, 532 ,
809. — Grece, 25i. — Guate-
mala, 236 , 522. — Haiti, 523.
— Indes orientales , 237, 526.
— Italic, 249, 546 , 816. —
Martinique, 236. — Norvege,
540, 812. — Nouvelle Galles
meridionale , 806. — Paris ,
258 , 552 , 829. — Pays-Bas ,
252, 548, 821. — Poiogne ,
2 44- — Russie, 241 , 539, 811.
— Sierra Leone, 527. — Suisse,
246, 542 , 8i4- — Sumatra ,
807. — Turquie , 820.
Not'ortim I'egetabiliiim descripliunes,
etc. , 399.
Noyes (Du traitement des) , etc. ,
par Pierre Manni ,425.
NuMissLATiQUE, 210.
o
Oberlin (Jean Frederic). Voy. Nk-
CROLOGIK.
Observations liors de saison , 746.
Observatoire, nouvellement fonde
a Bruxelles , 548.
Odes de Jacques Leopardi , 149.
Oersted {A. S.). Forstatte /letrngc-
ninger, 410.
— (//. C). Folkcts Oplysning , etc. ,
702.
OEuvRES de Jean Racine, en un
seul volume , 209.
— de Gessner, 209.
— de Gilbert , 770.
— ■ de Saint-Lambert , 770.
— de Ducis , 773.
— CHoisiKs d'Evariste Parny,773.
— COMPLETES de Palladio ,217.
de J. J. Rousseau , en un
seul volume, A. , 102.
de Legouve , 497-
de Ciiateaubriand , 499 >
774-
de Michel L'Hospital, 494-
— ISEDITES du meme , 494-
— posTHUMLS de Ducis , 495.
Olivier (L') de Boh(5me , tercets
de Cecilia de Luna-FoUiero ,
719-
Olmedo {3 . J.'), Canto a Bolivar, etc.,
400.
Onguenl pour la brulure , poeme
par Barbier d'Aucourt , 2ri.
Opinions enoiicees par Donker
Curtius vanTienhoven, depute
de la HoUande , sur le projet
de Code de commerce, 43o.
Opium (Dissertation medicale sur
1') , par G. L. IMulder, 725.
Opuscules de J. B. Vermiglioli ,
42S.
Origine des maladies (Reflexions
sur 1), et leurs remedes speci-
fiques modifies d'apres la
theorie du docteurLeRoy, i48.
Othello, opera de Rossini, 277.
Otco (C). Phraenologien , i35.
Outrepont (Charles d'). La Saint-
Barthelemy, 775.
Ouvrard. Fnr- Memoire.
Ofcrduin. Leere der Scheihiinde ,
725.
Paganel (Camille'l. J^oj. Misso-
longhi.
Pagani Cesa {G. li.). Sopra il teairo
tragico italiaiio considerazioni ,
1^7-
DES MATI^RES. 87^
Palladio. (iEuvres completes, pu-
bliees par Chapuy et Beugnot ,
217.
Pallas (Benjamin). Voy. Colique
metallique.
Paris, 268, 552, 758, 759,
829.
Parny (Evariste). Voy. OEuvres
choisies.
Parry (capitaine). Voy. Expedi-
tion.
Passalacqua (Joseph). Voy. Cata-
logue.
Passy (H.). Voy. Aristocratie.
Putras de Campaigno. Voy. Mar-
min.
Pays-Bas, i52, 252, 429,548,
725 , 821.
Pecchio (C). Voy. Tableau de la
Grece.
Peche, 172.
— (La) a la ligne , par A. Paulin
Desormeaux , 447-
— de la baleiue, 45o.
Peintuke , 278 , 280 , 565 ,817,
85t.
Pelel (General). Voy. Memoires
sur la guerre de 1809.
Pcries (J. V.). Voy. Dialogues.
Perli {A.). Cento eplgrammi , 428.
Perrot (A. M.). P'oy. Atlas du
royaume de France.
Pesson-Maison-Neuve. Voy, Ma-
nuel du p^cheur.
Peslalozzi. IHeine Ldbensschichsale
ah Vorstelier meiner Erziehungs-
ins tit lite , 709.
Petit Code de morale h I'usage de
toutes les classes de la societe ,
780.
Pharamond , op^ra , par Ancelot,
Guiraud et Souniet , musique
par Bo'ieldieu, Berton et Kreut-
zer, 273.
Phenomene vegetal, 812.
PuiLOlOGIE, 143, i44j 25o, 3o8,
399' 417, 494, 77O' 798-
Philosophie , 55 , i4'i , i58 ,
327.
Phrenologie (La), d'apres le
8Su
sjstt^mede MM. Gall et Spurz-
heiin , par C. Otto , l35.
PhTSIOLOGIE EXPERIMEKTALK ,
a6o.
Physique , iSa , 17a , 260 , 435.
Piazzi. f''oy. Neckologik
Picard. Foj-. Agiotage.
— T'oy. Capitaine Lt'lroiule.
Pierrot (Jules). Les lettres de
Pliiie le jeune, traduites par
de Sacy, 494-
— Satiies de Juvenal, traduites
par J. Diisaulx, 494-
Pigault-Lebiun. Foy. Histoire de
France.
Pillet (G. F.). Voj: Ecole des
yeuves.
Pisma inorsharo ofuzera, etc. , 4o5.
Planard. Foj-. Belle-au-bois-Dor-
mant.
Plantes cryptogames du iiord de
la France , par J. B. H. J. Des-
mazi^res, i(i3.
Pkeumatologie (Elemens de) ,
ou Anatomie des substances
spirituelles , par Antoine Le-
roux , 743.
PoEsiE , 149 > i5o, i54, aii»
aia , a34 . 2fif> > 4oo , 4o6 , 4^8,
5oo,5o4,5i8, 519,669,712,
7'9. 77^' 799 > 800.
DKAMATIQUE , l5l , 269 , 272,
373 , 274, 275 , 276 , 377, 278 ,
379, 409 ) 4' I » 5o2 , 563, 564,
657,695, 717,775, 777, 8i3,
843,844, 846.
Poesies d' Alexandre Pouchekine,
406.
— du comte Anatole de Mon-
tesquieu , 5o2.
Poleni (Jean), f'oj. Vitruvc.
Politique , 1 16 , i8i , 182 , 191 ,
404 , 43o , 457, 466 , 468 , 470.
POLOGNE , 244 , 695.
Pomba (Joseph). Foy. Cla.<;siques
grecs.
Pouimier ( Amedee ). Collection
des auleurs classiques latins ,
770.
Ponre. Foj^. Melanges.
TABLE AXALTTIQUK
PONTS ET CHAUSSEES , l3l , 56o.
Ponts en chaines ( Description
des ) , executes a Saint-Peters-
bourg, parG.de Traitteur, i3 i.
Popular Uallads and Songs , from
tradil on manuscripts and scarce
editions , a 3 4.
Population. Foy. Everett.
— ( Mouvement de la ) dans le
royaume de Naples, 8i(;.
Portalis (Auguste). Mciiioire en
faveur de la liberie des cultes,
177.
Postes (Des) en general , et par-
ticulifeiement en France , j)ar
Charles Bernede , 189.
Poterat (M. de). Theorie du na-
vire , A. , 32o.
Pothier analyse dans ses rapports
avec le Code civil, etc., par
A. Fenet , 459.
Pouchekine (Alexandre. ) Fay.
Poesies.
Preciosa , drama coupe par des
choeurs , musique de Weber,
278.
Prieur. Fof. Collection des clas-
siques latins.
Prisons ( Vues sur le regime
des), par E. D. Friedlander,
706.
Pkix decernes , par la Societe
des arts et des sciences d'U-
trecht , 2.')2. — par TAcadcmie
des sciences de Paris , aSS. —
— par I'Academie des inscrip-
tions et belles-lettres de Paris ,
557. — par rAcadeniie des
beaux-arls de Milan, 817. —
par I'Academie royale des
sciences de Bruxelles, 821. —
par la Societe d'agricultuic de
Ch^lons-sur-Marne, 827. — par
I'Academie francaise, 834-
Prix proposes , par la Soriet6
des arts et des sciences d'U-
trecht , 253. — par I'Academie
des sciences de Borrleaux , 256.
— par I'Academie des sciences
dc Paris , a6o. — par I'Aca-
DES MATliRES.
88 1
demle francalse , a6(i. — par
I'Academie des inscriptions et
Iielles-lettres de Paris , 558. —
parplusieurs citoyens de Paris,
55g. — par I'Academie royale
des sciences de Bruxelies ,821.
— par la Societe d'agriculture
de Chalons-sui'-Marue, 827.
— par rAcademie fiancaise ;
837.
Probl^mes (Recueil de) amusans
et instructifs , par J. J. Gre-
mlUiet , 4.42-
Productions de la presse fraii-
caise , pendant le premier se-
mestre de la preseute annee,
268.
Progres de la civilisation dans la
Nouvelle-Galles raeridionale,
806.
Projet d'une correspondance a
etablir pour I'avancement de
la meteorologie , 486.
— (Le) de piece , opera-comique ,
par Mely-Janin , musique par
Blangini, 276.
Promenades poetiques dans les
hospices et hopitaux de Paris ,
par Alhoy, 212.
Proprietaire-architecte (Le), ou-
vrage dessine et redigc par Ur-
bain Vitry, 787.
Publication des livres sacres et
historiques de Ceylan , 534-
Quadrature du cercle. Voy. Ma-
lacarne.
Question d'etat civil et liistorique:
Napoleon Bonaparte, iest - il
ne francais? par Eckhard, 2o5.
Quetelet (A.) , C— B. , i54.
u
Racine (Jean). Voy. QEuvres.
Raddiffe (Anne). Voy. Gaston de
Blondeville.
Rapport general fait au Minlstre
de la marine , sur I'enseigne-
ment de la geoni«trIe et de la
mecaniqueappllqueesaux arts,
par Ch. Dupin, M. 5g4.
— sur les travaux du consell de
salubrlte de Nantes, 733.
Recherches philologlques, 802.
Redoute (P. J.). Foy. Roses.
Reformation, igB.
Reiffenberg (De), C— B. 429,
43o, /,3i.
Reinhold {Ernest). Karl Leonhard
Reuiholds Leben und Uterarisches
Wirken, 414.
Religleuse (La) d'Arrouca, 216.
Religion, Voy. Theologie.
Rennes. Extralt d'une lettre sur
la .statlstique morale du pays,
825.
Renouard (Ch.), C— B., 743.
Repertoire universel , historique,
biographique des femmes ce-
lebres, morles ou vivantes, etc.,
201, 762,
Report from the commissioners ap-
pointed to revise the statute laws
of the stale of New-York^ 3()fi.
— of the committee on laws, etc.
109.
Resumes d'histoire. Voy. le mot
HiSTOIBE.
Revolution P'rancaise, 48S ,
755.
Revue sommaire des recueils pe-
rlodlques publics dans la
Grande - Bretagne. 9« io« et
ii<^ articles, 124, 4^2, 688.
— des journaux et des recueils
periodiques qui se publient a
Varsovie, 695.
— des theatres lyriqaes de Paris
pendant I'annee derniere, 272.
FiHEroRlQUE francalse. Voy. Fi-
lon.
— (Matieres des compositions de),
— militaire , hasce sur les e!e-
mens generauxde lalitterature,
etc., par J. Tolmatchef, i32.
58
gC}2 TABLE ANA
Ricci (J.)- La Georglca de fiori ,
poeina, i49t
Richard (T.t.C.—B., 734.
Kichelieu (Feu le due de). Vox,
Monutneat.
RigoUot fils, C— B. 180, 439,
Robert de France 011 rExcomnni-
iilcatioii, par M'n" A. Gottis,
779"
Rohinet ( Joseph ). Manuel du
bouvier, public par Hazard
fils, 737.
Rochefort (L. de), roy. Souve-
nirs.
RoMAKS, 122, i5i, 212, 21^,
214, 2i5, 216, 4t>o, 416, 432,
5o6, 713,779. ,
_ anglais (Choix de), publies a
Paris par J. W. Lake.
_ historiques de C. F. Van der
Velde, traduits de I'alleniand
par A Loeve - Weimars , 777,
Roquefort (B.de). yof. DicUon-
iiaire historique.
Roses ( Les ), par P. J. Redoute,
avecletixte, parC. A. Thory,
5 10.
Rossini. Voj. Viaggio.
Voy. O I hello.
Voy. Darhe du Lac.
Rostan. Cours de niedecine cli-
uique, ififi.
Rousseau (J.J.)^ ^"f- OEuvres
completes. ,, ,. ,
Rouveroy (Fred.). Foj. M. Val-
more.
Iiuwbotkam{J .) A practical srnmmm
of the freiwh language, X2l.
Roy (A.), ^oj. Budget.
RussiE, i3i, 24t,4o5, 539, 6y3,
ySf) 7fi3, 8rf.
_ (Description de I'lnteneur de
la),parJ.T,Erdnianu, i33.
Saint-Aniand. IMoyen de rendre
les croisees absolunieut, iinpe-
uetrables a I'cau pluviale, 174
LYTIQUF,
Saint-Amand, C. — A. (S-iC^.
— Rarthelemy (La) drawe, par
Cliarles d'Ontrei)ont, 775.
George. y^oY. Liiuis XII.
— Ilaouen ( Y. M. G. P. Lecoat
de). ^<'j. Nkckclocie.
— Hilalre ( Ch. de). Grammaiie
frav.caise, (194.
— Lambert. OEuvres, 770.
Sainte-Perine. Souvenirs contem-
poraliis,par Valery, 5o(i.
Salfi(F.). C— B. 148, 429-
Salmon. Art de cuUiver la vigne
ft de faire du bon vin, etc.,
727-
Salvandy ( Dc). Don A.oi/zo, oder
Spanioii, ^iQ>.
Sampsons discourse and conespoti-
dence with vaiioits learned jurists,
etc. , published by G. Thompson,
676.
Sandwich (Iles), ti4-
Santarelli (J. A.). Voy. Necrolo-
GIE.
Sakte puni-iQiiE, 733.
SAlinAI&KE,,34'>-
Satire iMenippee, 5o5^
Scaadiisavie. ^.y. Bonstetten.
Schrant. Lofred ap Godfrtcd van
Uouilloii , 43i-
Sciences niEnicALES, 11 1, i^o,
i35. 148, ififi, «(i8, i69' ^7"'
259, 42J, 4''>3, 424 425, 43s,
439, 440, 4i'. 5i4, 5i5, 725,
yais, 73i, 732, 804.
- MOKALES ET 1>0I.ITIQUES. 55,
177, 327,402, 453,626. 742.
WVUTIQUKS, l53.
I'HYSIIJUES, 47, 1S7, 320,432,
577, fiig, 727.
_ IlEI-'.GIEllSES. r. ThEGXOGIK.
Scribe. Voy. Macon.
Voy. Dame Blanche.
Scrofani. Novelle, l5l.'
•Scui-PxuuE, 564, 8i8-
Secours donues par Ics luibitans
dj Manchester aux ouvners
j-esics sans pain, 532.
Secretan ( Phil. ). Memoires de
DF.3 MaTIERES.
M. de Falkenskiold , officier-
general danols , a I'epoqiie de
la catastrojjhe du comte de
Struensee, 484-
Senipere. Considerations siir
les causes de la grandeur et de
la decadence de la monarcbie
espagnole, 75a.
Sewel's Essay on the juridical his-
ioTj of France, (179.
Siege (Le) de Paris, tragedie, par
le vicomte d'Arlincourt, 5o2.
Sierra Leone, 527.
Silbermann (G.). Vojy. Ijibliotlie-
que allemande.
Sismondi (J. C. L. de), C— M.
608. — A. 91.
Slaipoiichekine, Dassoiigui sellsAavo
gitela, 406.
— L'Academie imperiale russe
■ decerne a ce paysan poete line
medaille en or, 4o8.
SOCIETES SAVAKTES ET D'tlTIilTE
puci.ioun.
— aux Etats - Unis d'AmeriqiTe :
Lycee d'histoire naturelle de
New-York, 235. — Notice sur
les socieles savantes des Etats-
Unis, au nombiede vingt-neuf,
289. — • Societe cooperative de
New-Harmony, 801.
— aux lades orieiilales : Societe
des sciences, et arts de Batavia,
— en Jngieterre : Societe des
ecoles pour la Grande-Bretagne
et I'ctranger, 810.
'— en liiissie : Societe imperiale
pbilantropiqiie de Saint - Pe-
tersboiirg , i34. — Academic
des sciences de Saint-Peteis-
bonrg, 241, 8rl.
— en Z)^Hc/narA; Societe biblJque
de Christiansand, 812. •"
— en A Hemagn e : SocieXc royale
des sciences de Goettingue,
244- — ^Societe pour I'ameliora-
tion des jeunes criminels de
Roenigsberg , 54r. — Societe
pour la propagation des scien-
883
ces natureiles et mcdicales de
Dresde, 812.
— en ^h/^/p ; Societe d'antiquai-
res de Fribourg, 248. — Societe
lielvetique de musique, 420. —
Societe pliilbellenique de Fri-
bourg, 546 — Societe cantonale
de physique et d'iiistoire natu-
relle de Geneve, 814.
— en Lalie : Academie royale des
sciences de Naples, .')47.- — Acade-
mie des beaux-arts de Mi Ian, 8 17.
— dans les Pajs-Bas : Societe
des arts et des sciences d'U-
trecht , 252. ■ — Societe Israelite
d'Amsterdam , 549. — Societe
nouvellement forniee a Bruxel-
les pour I'encouragement de la
langue bcllandaise, 549. — Aca-
demic royale des sciences et
belles-lettres de Bruxelles, 821.
— en France ( dans les departe-
niens ) : Academie royale des
sciences , belles-lettres et arts
deLyon, 222, 258. — Academie
des sciences, belles-lettres et
arts de Bordeaux , 256. — So-
ciete des amis du travail de
Nancy, SSa. — Societe des let-
tres, sciences et arts de Meiz,
789. — Societe d'emulation des
"Vosges, 791. — Societe d'agri-
culture, etc., de Chalons, 827.
— (a Paris) : Institut royal. Aca-
demic des sciences, 258, 552,
827. — Academie francaise ,
365, 834. — Academie des ins-
ciiptions et belles-lettres, 557.
• — Academie des Beaux-Arts,
837.— Academie royale de nie-
decine, 838. — Societe royale
des antiquaires de France, 5 12.
Societe (Projet de) pour Tamelio-
ration des animaux domesti-
ques, 267.
Songe ( Uu ) songe de la vie et la
Lamentation du Dante , par
Ange Broffeiio, i5o.
Soumet. f'oy. Pharamond.
SouKDS-r.T MUETS, 24o. a46.
88 A
TABLE ANALYTIQUE
Souvenirs du Musee des momi-
iiiens francais ; collection do
40 dessins de J. E. Biet , gra-
ves par Nonnand pere et Ills,
publics par J. P. Bifes, 784.
— et melanges litteraires, par
C L. deRochetbrt, 490.
Sprengcr {F.). Geschichte der Stadt
Haineln, i^-x.
Stagnation (Sur la) etle decroisse-
uient du commerce en France ,
par N. F. Canard, 4^5.
Stassart(De). f'oj. Nojiinatioms
academiques.
— C— B. 432, 726.
State {Una) a Varese, etc. , 720.
SxATiSTiQUE, 27, 177, 23g, 247,
2rsi,548, 693, 81(1,825.
Siikhotvorenia Alexandra Poitche-
kina, 4ofi.
Stratico (Simon), Fof. Titruve.
Struensee (C). Voj. Secretan.
Substitutions, ^'q/. Oirardin.
Successions ab intestat. Voy. Mal-
pel.
Suenon, surnomme Grathe , roi de
Danemark, tragedieen vers da-
nois. ^ix.
Suisse, 146, 246, 418, 542, 715,
775,814.
■ — foy. Lettres.
Sumatra, 807.
Sumner (J. B. ). Vcrite du cbris-
tianisnie, prouvee par la nntuie
rn^me de cette religion, etc.,
traduit de I'anglais, par P. E.
Lanjuinais, 742.
Svvaan. For. Air atmospherique.
Foy, NoMIBTATIONS ACADEMI-
QUES.
Syphilis. Foy. Clinique.
Tableau statislique du commerce
— liistoriquedelaGrtjceancienne
et nioderne, par Bres, 473.
Tableaux clironologiques et bio-
graphiques pour servir a I'his-
toire de France, par H. Vallee,
757-
Tajan. /^'oj.Lois d'infer^t general.
Tales of lite O' Hara family , 122.
Tarbe des Sablons. Des modes ac-
tuels de remplacement et de
rengagement, etc., 186.
Tarry ( Aristide ). Voy. Chllde
Harold.
Technologie, 52, 127, 723. Foy.
aussi : Industrie et Aets indus-
TRIELS.
Telegrapiiie, 852.
— (Essais de) aerostatique, Sga.
Tenue des livres. For. Jacquet.
Terquem (O.). Foy. Hutton.
Testa (Felice). P'oy. Necrologie.
Teiifelsstein {Dor') in Maedligen ,
Oper,Hlusick von JFenzel MuUer,
814.
Theatre (Considerations sur le)
tragique italien , par G. U. Pa-
gan! Cesa ,717.
— de Kotzebue , 6g5.
Theatres de Paris, 2^9, 27a »
563, 843. — De Yieniie, b'i3.
— De Berlin, 814.
— (Chefs-d'oeuvre des) etrangers,
A., 379, 657.
Theologie, Beeigion, Cuete,
etc., 117, i38, 177, 227, 418,
453, 45fi, 468, 742, 769.
Theorie du beau et du sublime,
etc. , par le baron Massias, A.,
65.
— du navire, par le marquis de
Poterat , A., 3 20.
Thiersch {Friedriili). Uelier gelehite
•hulen, etc., 709.
esse (Leon), C— A. , 379,
fi57.
de la France ,\>n 1824, M., 27. — Resume de I'histoire de la re-
— de la Grece en 1825 , ou Recit
des voyages de J. Emerson et
du comte Peccliio, traduit do
I'anglais par J. Cohen, iy().
volution francaise, 755.
Thompson {Mr^ A.T.). Memoirs of
the court of Henry the Eighth ,
399-
DES MATlillES.
Thompson (P. ). Voy, Sampson.
Thory (G. A.). Voj. Redoute.
Tolinatchef. Folennoic krasnoretchie,
osnovannoic na obchikh natchd-
lahh sloi'esuosti , iSa.
Tombeau dii due Henri IV a Bres-
lau , par Busehing, 417-
Torombert ( Honore). foj. Eloge
liistorique.
Traductions en aUemand : du
francais, 4i6 ; de I'anglais ,
7i3 ; du servien, 712.
— en espngnol : du francais, 79(1.
■ — ea franeais : de rallemand ,
209) 777; ^^ I'anglais, 187,
193, 196, 210, 211, 444» 457,
716, 727, 735 , 741 ) 742 ; du
chingulais , 534; del'espagnol,
5oo ; de I'italien , 774 ; du latin,
494 5 770; de toutes les langues
cultivees , 379.
— ea hollandais /du francais, 132,
154.
— en italien : du portugais , 5 19.
— en ritsse : de I'allemand, 696 ;
du grec, 539.
Tragedies d'lidouard de Fabri ,
de Cesene, i5i.
Traite DES MEGRES au Bresil ,
525.
Traite des iuterets, par Cotelle,
461.
Traitteur (G. de ). Description
des ponts en chaines executes a
Saint-Petersbourg , etc., i3i.
Trapany (Don Domingo Gian).
Nouveau dictionnairc espa-
^ gno> . 797-
Tremblenient de terre dans la
Martinique, a 36.
Trempe des rasoirs perfection-
nee, 843.
Tressan ( L'abbe de). Fojez jVIy-
thologie.
Trisectioii de Tangle , par Seid
Hussein Massdariedschisade ,
820.
Tristan le voyageur, ou la France
au XIV siecle , par de Mar-
changy, a 12.
885
TORQUIK, 820.
Tydeman (H. G.). 'foj. Discours.
Tzetzac ( Joannis). Uistoriarwn -va-
riarttin chiliades , Ed. Theophilus
Kieslingius , 417.
u
Ultimatum , ou Mon dernier mot
sur le Determiiiisme , etc. , par
F. G. Hovitz , 4ro.
Ukiversites : d'Utrecht , 432. —
de Christiania, 54®. — de Dor-
pat, 812,
Ursins ( M">« la princesse des).
Voy. Lettres inedites.
Vaccinations (Rapport snr les)
pratiquees en France pendant
I'annee 1824, 44o.
Vacciwe (Propagation de la) en
Savoie et a Raguse, 249, 44o.
Valery. Voj. Sainte-Perine.
Vallce ( H.) yoj. Tableaux cliro-
nologiques.
Van Alphen. Voy, Nominations
ACADEBIIQUES.
Van den Bosch. F. Nominations
ACADEMIQUES.
Van dam van Jsselt, Missolonghi ,
i54.
Van Doet'eren (H. F.). Dissenatio
medicalls de macroglossa , 725.
Van Grithuisen (P.) Vo^. Manuel
de I'administrateur.
— Voy. Nominations academi-
QUES.
Van der Velde (C. F.). Voy. Ro-
mans bistoriques.
Vantini (Rodolphe). Sur les mo-
numens dccouverts a Brescia,
721.
Vergnaud (A. D.). Voj. Manuel
de perspective.
Verite du christianisme. Vo^ez
Sumner.
Vermiglioli. Opuscoli , 428.
Veruet ( Horace). Tableau repre-
88G TABLE ANALYTIQU
sentant TiDtrepide Canaris in-
cendwiit la flotte turque, 5'i6.
Vers a soie de la Chine intioduits
en Espagne, aSi.
Visconti ( Sigismond ) , C. — N. ,
5-4.
Vetillart. Notice siir la vie de
M. le duo de Jlontmorency ,
492.
T'ici(gio (//) a licims, opera, per
flalochi e Rossini, "iy^.
Vie de Louis de Berton de Crillon
des Balbes, surnomme Ic brave
Crillon , ao2.
— et travaux litteraires de Char-
les Leonard Reinhold, 4i4-
Vigne (Art de cultiver la), par
Salmon , 727.
Villanueva (J. L.). Meprises des
trcs-ieverends P. Curtius et G.
Dovle conceniant le serment
que les eveques d'lrlande pre-
tent au ponlife remain, 117.
— Observations sur les reponses
du tres-reverend G. Dojle ,
117.
— ( Vie litteraire de don Joa-
chim), etc., ecrite par lui-
meme, iiS.
Vitruve (Discoiirs preliminaire
pour le traite d'architecture
de), eclairci par Jean Poleni
et Simon Statico, 720.
Vitry (Urhin). T'^oy. Proprictaire-
architecle.
Voutier (Colonel). T\r. Lettres
sur la Gri'ce.
Voufy de la Tour. f^oj. £loge his-
torique.
Vovage ( Le) de cour , opera-co-
liiique, par Merville, luusique
par Catruffo , 276.
VoYAGKS :
— Du cnpitaineClapperton a I'in-
trrieur de I'Afriqiie, 027.
— Du major Laingdansl'interieur
de rAtriqiie, 808.
E DES MATIKBES.
— h Mero^, au fleuve Blanc, dans
le midi du royaume de SennSr,
etc., par Frederic Cailliaud,
452.
— a Hawaii ou Owhyhee , par
W. Ellis, 114.
— du capitaine Parry, au pule
arctique , a3g,
— du capitaine Guedon , a la
haie deBaflin, 45o.
— dans la Russle meridionale ,
par Gamba , 739.
— en Sardaigne , de 1819 a 1825,
par Albert de la Marmora , A. ,
346.
— en Grece, de J. Emerson , et
du conite Pecchio , 196.
— dans les Hautes-Pyrenees , par
le comte de Marceilus , 5o3.
— de deux Anglais dans le Peri-
gord , 741.
— (Recueil de) chez les Tatars et
autres peupies de I'Orient, dans
les i3^, i4' et 1 5° siecles , par
Jasikof, i3a.
Wailly (Alfred de). L'Academie
francaise conronne sa piece de
vers sur Jes legs de M. de Mou-
thyon , 835.
Weber (C. M. de). roj. Necro-
I.OGIE.
— f^oj. Preciosa.'
JFcssely ( Eiigen ). Scrbische Uoch-
zeitslieder, 'jxi.
JVheaton's {Henry) Address pro-
voiinced at the opening of the
Aevy-1'or/t Alhena'iim , 3g4.
Wichniann (C. F. ). r'or. Mar-
guerite.
Zachnria; {C. S.). Sirafgesetzduch,
4l2
FIK DE LA TABLE D CI TOME XXXI.
r.RRATA DU TOME XXXI.
Cahier de svil.'LE.t. Page lO, lij. i3 et suivantes, jarement el pres-
qiie jamais , a moins de circoiistauces extraordinaires , il est pcnnis aVo-
vocat fiscal , etc. , lisez : presqne jamais , a moins de circonstances ex-
traordinaires , il n' est permis , etc, ; p. 2 5,1. 12, pour leur eviler , lisez :
pour teiir epargner; p. 66 , 1. 28 , Cecils, lisez; lelles; p. g3 , 1. 3o,
itn boil ouvrage. lisez : tin bon oiwrage ; — • p. gS ,1. 2 et 3 , dinger , lisez :
designer; p. iS^, 1.6, net i^,J'aii Grithiiize/i, Visez: f'aiiGriethuizen ;
ibid. , 1. 7 ^Iter , lisez : /. Atthcer; p. 189 , lignc derniere , les sciences
de la i>ie sociale , lisez : les scenes de la vie sociale ; p. igo, 1. 17,
plus abondante , lisez : plus uboiidantes ; p. 206 , 1. 22 , A. M. , lisez :
M. A.; p. aSa, ligne derniere, de Fkemejvs, lisez de Fremery.
Cahier d'xovs. Page3i7, 1. 20, idieines , lisez ; idiomes ; p. 365,
1. 3o et 3i , le le cattchisirie , lisez : le \;atechisine ; p. 367, 1. 3i , oil le
sujet , lisez : ou le siijet; p. 368 ,1. 10, c'elait alors qiiil etaiit aimable ,
lisez : c'etait alors qu'il etait aimable ; p. 370 , 1. 29 , Ze^ graces , lisez :
les graces ; p. 4oo, 1. lo, Dieu sail , lisez : Dieu suit; p. 4o5 , 1. 21 ,
iMorsAaro ,\ise'i : ilorskavo ; p. 4o6, 1. 6, Stihhotrorenia , lisez : Sti-
khotvoreiiia ; p. 409, 1. 20, Nuri'ege, lisez : Norvege ; p. 4i3, 1- 10,
etaient , lisez ; etaienl ; p. 43l, 1.6, coitr des Pays-Das, lisez: pres
fa cour etc.; p. 464, 1. 16, c' est grace , lisez : c'est grace; p. 466,
1, 12 , les besoms , lisez ; h besoin ; p. 470 , 1. 10, on eiit desire , lisez :
on eutdesire ; p. 497 . i- -ifi, 3/K , lisez : yfr. ; p. 535, 1. 2, par en
has , Eulin, lisez : Rutin; p. 538 , 1. i, ses partitions ; lisez : ses par-
titions , — ibid., 1. 28, compatiiote , lisez : compatriotes.
Cnhicr de septembre. Page 65o , lig. ao ,, soutenir, lisez : contenir;
p. 656, 1. 3o, on , lisez : ou ; p. 668 , I. 23 , a subi , lisez : a suhi ,
p. 677,1. 9, rcwiew , \\SQZ : review ; p. 695, supprimez la virgule
apres le mot dramatique ; p. 702, I. lo , Norvege , lisez : ISorvege ;
p. 713, 1. 25 , contes des fees , lisez : conies defies; p. 747 , 1. 33 ,
raisonable , lisez : raiionitable ; p. 771 , derniere ligne du teste, il eut ,
lisez : (7 cut ; p. 775, 1. 25, I'article qui commence ici est numerote
par erreur 270 , au lieu de 370 ; p. 778, 1. 3 , par en Las , I'interct ,
lisez : Vinteret; p. 811, 1. 22 et 23, c'est a tort qu'un a renvoye ici
au torn. x,\xi de la Revue Encyclopcdi<iue ; .la perte fdite par I'Acade-
niie de Saint-Petersbourg dai;s la personne de trois de ses membres
le? plus distingucs , MM. Schubert , Fuss et Roumanzot' est I'objet
d'un articTe uecrologique , qui aurait dii jireceder I'insertion de
cehil-ci , et qui , par errt,ur, n'a trouve place que dans notre cahier
^octobre , torn, xxxii , p. 220 ; p. 848 , 1. 3 et /\, par en has, Palen-
qui , lisez : Palenque ; p. 85o, 1. T2 , aztique , lisez: azleque; ibid. ,
1, 3o, HJagunj- , lisez : Blaguej.
2 FEB.95
LA LEGISLATION
CIVILE, COMMERCIALE ET CRIMINELLE
DE LA FRANCE,
ou
COMMENTAIRE ET COMPLfiMENT DES CODES FRANCAIS,
TIRES, savoir:
Le Commentaire , de la conference avec le teste des Codes , et , entre eux , des
Proces-verbaux en partie inedits du Conseil d'Etat qui contiennent la dis-
cussion duCoDE Civil; des Proces-verbaux entieremerit inedits de]a. discus-
sion du Code de Commerce , du Code de PnocEDnRE, du Code d'Instruction
CRIMINELLE et du CoDE Penal ; dcs observations , egalement inedites , de la
section de legislation du Tribunat sur les projets des trois premiers Codes ,
ct de celles des commissions du Corps Legislatif sur les deux dcrniers • en-
fin , des Exposes de motifs , Rapports et Discours fails ou prononces , taut
dans TAssemblee generate du Tribunat, que devant le Corps Legislatif;
F.e GoMTLEMENT , dcs lois anterieures auxquelles les Codes se referent; des
lois poslerieures qui les etendent , les niodifient; des discussions dont ces
lois sont le resultat; des Ordounances , Decrets , Avis du Conseil, ct
autres Actes du pouvoir executif et regleineutaire destines a en procurer
I'execution.
Le tout precede de Prolegomenes, ou Ton expose, dans une premiere
partie , le mode de porter la loi qui etoit en usage lors de la confection
des Codes , et quels travaux preparatoires il a produils ; oil , dans une
seconde , on trace I'Histoire generale de chaque Code.
Par M. le Baron LOCRE,
Vncien Secretaire general du Conseil d'Ktat, Avocat a la Cour Royale de Paris, Officier
de la Legion d'Honneiir , auteur de V Esprit du Code Civil, de Y Esprit du Code de Com-
merce, de V Esprit du Code de Procedure civile , etc., etc.
20 a 24 volumes in-S",
dont d parol tra an mains un 'volume tons les niois , a datcv dit \-^ octohre 1826.
^^tofpcchts.
Le livrc que nous annoncons, et dont nous sommesles editeiirs,
contient tout a la fois le Comnientaire et le Complement (les Codes
francais.
Le commentaire e?>t incontestablement le plus sur de tous, puis-
qu'il est fait par le Legislateur lui-meme : son autorite n'est done
( ^ )
pas inferieure a celle de la loi , de laquelie il revele I'esprit et la
veritable intention.
Le complementn est que I'execution de I'ordonnance du 1 7 juillet
1 816', qui veut que les lois accessoires soient placees a la suite
des Codes.
Si le nom sous lequel paroit un ouvrage entierement compose
d'elemens officials, pouvoit ajouter quelque chose a son merite,
il en est peu qui se recommanderoient plus que celui-ci a I'atten-
tion publique.
II se compose en grande parlie des propres travaux de M. le
baron Locre ; c'est-a-dire des discussions du Conseil d'Etat, que
les devoirs de sa charge I'obligeoit de recueillir et de rediger. La
revision qu'ont faite de leurs opinions les membres qui ont parle ,
garantit la fidelite de ces actes. Les arrete's du Conseil , lequel
pendant le cours de la discussion s'est plus dune fois repose sur
eux du soin d'empecher qu'on ne saisit mal le sens de la loi , et
les arretes du Gouvernement leur ont imprime le cachet de I'au-
theiiticite.
Beaucoup de monumens de la jurisprudence attesteroient , au
besoin , leur autorite officielle. Mais ilsuffira de rappeler le celebre
arret rendu le i'^'^ fevrier 1819 par la premiere Cour du royaume,
par la Cour de Cassation , sur i'une des plus importantes questions
que le regime dotal puisse faire naitre. On y dit : Attendu qu'il
REStJLTE DES PuocES-VERBAtix DD CoDE CiviL que les aiiteurs de ce
Code ont voulu maintenir le regime dotal tel gull existoit dans les
pays de droit ecrit, saiif les modifications qiCils out formellemcnt
eccprimees y etquils n'ont nullement deroge a la prohibition qui etoit
faite d la femnic mariee sous le regime dotal, d^aliener , par des
obligations ou autrement , sa dot mobiliere;.... et cette consideration
est devenue le motif determinant de I'arret.
Le public verra sans doute avec plaisir paroitre au grand jour
ces proces-verbaux du Conseil d'Etat qu'il a tant d'interet a con-
noitre. Ceux du Code Civil n'ont ete publics qu'en parlie, et la
partie qui manque n'est assurement pas la moins interessante sous
plus d'un rapport. Ceux des autres Codes sont entierement inedits.
Et quand, aux lumieres que donnent les proces-verbaux du Con-
seil , viendront se reunir celles qui jaillissent des autres travaux
proparatoires , il ne sera plus possible de se tromper sur I'esprit
de la loi.
Voila les elemens dxx conimentaire : reste a dire de quelle maniere
lis sont employes.
Rien nest morcele , tout est entier ; et neannioins, par lui
procede tres ingenieux, M. Locre place dans la main de son ler-
leur un fil qui lui sert a se rctroiiver dans ce vaste dedalc.
(3)
Ce procede conslste dans deux operations:
L'auteur, disciple at grand admirateur de Domat, fait , a son
exemple, preceder les divers travaux preparatoires, de sommaires
analytiques qui en contiennent la substance et en font saisir le
plan lorsqu'on veut les lire de suite, et retrouver facilement les
details lorsqu'on ne veut les interroger que sur quelque point
particulier. A chaque article , ou plutot a chaque disposition d'un
article , sont attachees des notes , egalement analytiques et rai-
sonnees, oii Ton fait ressortir les doutes et les questions qui nais-
sent de la disposition , les explications et les developpeniens dont
la disposition peut avoir besoin , et qui renvoient par des chif fres
correspondans a ceux du sommaire, precisement aux passages ou
les solutions et les eclaircissemens se trouvent. A ce moyen ,
M. Locre concilie deux avantages qui , au premier aspect , semblent
s'exclure mutuellement : d'un cote, il conserve le drame des dis-
cussions, drame des plus interessans , meme pour Thomnie du
monde , et il laisse egalement subsister dans leur entier les
exposes de motifs, les rapports , les discours, dont plusieurs sont
des modeles de raisonnement, de methode, d'eloquence , ce
qui facilite les etudes suivies ; d'autre part , il dispense de lon-
gues et laborieuses recherches les personnes qui n'ont besoin de
connoitre que I'esprit et la portee d'une seule disposition : sous
ce second rapport, son livre devient un commode repertoire.
Des notices historiques dun grand interet sont placees a la tete
de chacune des lois dont la reunion forme chaque Code.
A regard du complement , il est forme par I'addition et la con-
ference des lois anterieures auxquelles il se refere ; par celles des
lois posterieures ou des actes legislatifs qui etendent , deve-
loppent, interpretent , modifient ou abrogent quelqu'une de leurs
dispositions , et qui , par cette raison , en sont les unes et les autres
des parties integrantes ; enfin , par le rapprochement des ordon-
nances , des decrets et des autres actes du Gouvernement destines a
fixer I'execution des articles qui necessitent des reglemens.
M. Locre se trouvoit naturellement appele a ce dernier travail.
II avoit, en 1816, prepare , par les ordres et sous la direction de
Monseigneur le Chancelier de France , les nouvelles editions des
Codes que prescrivoit I'ordonnance du 17 juillet, et a la suite
desquelles la meme ordonnance vouloit qu'on reunit les lois
accessoires. II eut ete egalement charge de preparer cette addition
aux Codes, si les circonstances avoient permis de s'en occuper.
Mais ce n'est pas en compilateur qu'il I'execute aujourd'hui^
ce n'est pas une simple collection qu'il offre au public : il com-
mente , il explique les lois additionnelles par les discussions dont
( 4 )
elles sont le pioduit ; savoir : les lols anterieures a la Charte , par
celles qui ont eii lieu clans le sein des autorites, alors investies
(le la puissance legislative ; les lols posterieures , par les discus-
sions dans les deux Chambres.
Les Prolegomenes, qui precedent I'ouvrage, en donnent en
quelque sorte la clef, en rappelant la nianiere, qui n'est plus
universellement connue , dont, sous le consulat et sous le regime
imperial , on procedoit a la formation de la loi , ct qu'il est abso-
lument necessaire de connoitre pour etudier avec fruit les ele-
niens du commentaire , pour eviter ou pour conibattre I'abus
qu'il est possible d'en faire dans la pratique. Les Prolegomenes
retracent ensuite Ihistoire ralsonnee et tres piquante de chaque
Code. On rencontre la des anecdotes et des details qu'on ignore,
ct qui cependant sont tres instructifs et tres curieux.
Au reste , M. Locre a lui-meme rendu compte de son ouvrage
dans I'ecrit par lequel il le commence , etauquelil donne le titre
de : Idte de ce Lwre{i). C'est de la que nous avons extrait le pen
que nous venous d'en dire.
Treuttel et Wi;RTz.
(i) Nons en avons fait tirei' separement iin petit nonibre d'exetnplaircs pour les per-
sonncs qui voudiont 2)rendie une connoissance plus parfaite de rouviage.
L'ouvrage sus-menlionne formera -20 n 24 volumes in-8. de 5oo a Coo pngcs
fVimpression , caraclere tieuf , interlignc.
Sa publication , deja annoncee par uii premier Prospectus, a ete retardee
par une maladie grave survenue a I'auteur , et qui a dure plus tie liuit mois :
au relour de la sanlc, il a entierement revu son travail, qui, aujourd'hui
lermine , paroilra sans interruption.
A dater du i" octobre 1826 , il en sera pubiie tons les mois au moins un
volume, dont le prix est fixe a 7 fr. pour MM les Souscripteurs , et a g fr.
pour les personnes qui u'auroient pas souscrit d'ici au 5i decembre 1826,
cpoquc invariabicmcut fixee pour la cloture de la souscription.
Lc seul engagement qu'on prend en souscrivant, est de payer d'avance le
dernier volume de I'ouvrage , et de retirer les autres volumes au fur et a
niesure qu'ils paroitronl.
On souscrit^ A PARIS,
Cbez Treuttkl et WiiRTz, libraires , rue de Bourbon, n° 17;
A STRASBOURG et a LONDRES , meme Maison de commerce.
On pent cgaleincnt s'adrcsser a toutcs les bonnes maisons de Librairie
(lc In Frnnce et des pays etrangcrs.
;
KE L'iMrRIMERIE DE CRArELET,
Avis aux amateurs db la litteraturb ^trangere.
On peut s'adresser k Paris, par rentrcmise du Bureau cewtrai. djs
LA Rbyue EifCYCLOPEDiQUE, a MM. Treuttel et Wurtz, rue de
Bourbon , n" 17, qui ont aussi deux maisons de Ubrairie, Tune k Stras-
bourg, pour rAllemagne, et I'autre a Londres ; — a MM. Arthus
BERTKAKn, rueHauteleuille, n" a3; — Renouaru, ruedeTournoii,n''6;
— Levhaui,t, rue des Fosses-M.-le-Prince,n° 3i,et4 Strasbourg; — Bos-
s.KVGU fere , rue Kichelieu, 11° 60; et a Londres, pour se procurer les
divers outrages Strangers, anglais, allemands, italiens, russes, polo-
iiais, hollandais, etc., ainsi que les autres productions de la litt^rature
etrangdre. Le prix de ces ouvrages rendus a Paris sera celui des pays
etrangers ou ils se publient, augraente de 10 pour lOO, pour frais de
port, droit d'importation et de commission, etc. — La Direction de la
RevueEficyclopediqueviA d'autre but, en publiant cet avis, que de faciliter,
-par tous les moyens qui resultent de ses publications mensuelles, les
communications scientifiques et litteraires entre la France et les pays
etrangers.
Aux academies et aux sociETES SAVAHTES dc tous les poys.
Les Academies et les Societes savahtes et d'otiiite publiqu*,
francaises et etrang^res, sent invitees a faire parvenir exactement,//anc
de port ^ au Directeur de la Revue Encyclopediqae , les comptes rendus
de leurs travaux et les programmes des prix qu'elles proposent , afin
que la Revue puisse les faire connaitre le plus promptement possible a
ses lecteurs.
AOX EDITEURS d'oDVRAGES ET AUX LIBRAIRES.
MM. les editeurs d'ouvrnges p^riodiques, fran^ais et ^trangeis, qui
desireraient echanger leurs recueils avec le notre, peuvent compter stir
le bon accueil que nous ferons a leurs propositions d'^changes , et sur
une prompte annonce dans la Revue, des publications de ce genre et
des autres ouvrages , nouvellemeut publics, qu'ils nous auront adrespc.'.
Aux EDITEURS DBS RECUEIIS PBHIODIQUES EH AMGLETERRB.
MM. les lilditeurs des Recueils periodiques publics en Angieterre sont
pri^s de faire remettre leurs numiros k M. Degeorge, correspondantde
In Revue Encxclopedigue a houdres, s" 38, Norfolk-street, Strand, chez
MM. De Crusy, Cabet et Marbot, maison de correspondance et de com-
mission ; M. Degeorge leur transmettra, chaque inois , en ccliange,
les cahiers de la Revue Encyclopidique , pour laquelle on peut aussi sous-
crire chez lui , soit pour I'ann^e courante, soit pour se procurer les
collections des anneesant^rieures, de 1819^ i8i5 inclusivemewt.
Aux LIBRAIRES ET AUX EDITEURS d'oUVRAGES ES ALLBMAGKE.
M. ZiRGis, libraire a Leipzig, estcharg^ de recevoir et de nous faire
parvenir tous les ouvrages publics en AUemagne , que MM. les libraires,
les Editeurs et les auteurs desireront faire annoncer dans la Revue Encj-
elopidique.
LiBnAiBES chez lesquels on souscrit dans les pats iTRANCKUs.
Aix^ia-ChapeUe, Laruelle fils.
/Imsterdam, G. Dufour; — Dela-
chaud.
Anvers , Ancelle.
Aran (Suisse), Sauerlander.
Berlin, Schlesinger.
Berne, CiJas , au cabinet litt^-
raire ; — Bourgdorfer.
Breslaii, Th. Korn.
Bntxelles, Lecharlier; — Demat.
Bruges , Bogaert; — Unmorlier.
Florence, Piatti.
Fribourg (Soisse) , Aloise Eggen-
dorfer. . •
Francfori-sur-Mein , Schaeffer ; —
Bronner.
Gand, Varidgnli^rtkoveu fils.
Genive, J.-J. Paschoud ; — Bar-
bezatetDelarue.
La Haye, les frercs Langenliuysen.
Z<r/(^«««e , Fischer*
/^i/jz/g-.GriesbaHifnerj — G.ZJTgfes.
Londres, Dulau et Compagnie; —
Treuttel etWiirtz; — Bussauge.
Madrid , Den nee; — Perfes.
Milan, Gieglcr; — Vismara;Bo,cca.
A/bico«, Gautier; — Riss p^reet tils.
Naples , Borel ; — Marotta et
Wanspandock.
Neiichdtel (Suisse), Grester.
New-Yorlc ( Elats-Uais ), Berartl
et Moudon.
Nottvelle r Orleans , Jourdan •, —
Roche , freres.
Palerme (Sicile), Pedonne et Mii-
ratori ; — Boeiif (Ch).
Petersbourg , Saiul - Floi enl ; —
Graeff; -Weyher;— f luch.iri.
Stuttgart et Tubingen , Col la.
Utrecht, Van Schoonhoven.
Todi , B. Scalabrlni.
Turin , Bocca.
Varsovie , Glucksberg ; — Z.i-
vadsky.
Vienne ( Autriche), Gerold;— -
.Schanmhourg ; — Schalbachcf.
Liege , Jalheau pferd.
Lisbonne , Paul Martin.
COLONIES.
Guadeloupe (Pointe-a-Pitrc), Piolet aine.
Ile-de-France (Port-Louis) , E. Burdet.
Martinique , Thounens , Gaujoux.
ON SOUSCRIT A PARIS,
At( Bdre\u re REDS.CTION, BtiE d'Ehfer-Saint-Michel , Jl" l8,
oil doivent itre envoyes, francs de port, les livres , dessins et gra-
vurcs , dont on desire I'annonce, et les Lettres , Memoires , Notices
ou Extrails destines a ^tre inscres dans ce Hecueii.
Chez TnEUxxEi. et Wiirtz , rue de Bourbon , p" 17;
Rry bi Gravier , quai des Auguslins, n" 55;
Chnrles Recurt, libraire-comoi" , quai des Augnstins, n" 5";
Dohdey-Ddphk, rue Saint-Loijifi, n" 46, /au Marais ; et rue
Richelieu, n° 67; , ., . •• ■,,, -
MoKGiEaine, boulevard Poissqnpitre, n° 18;
Eymery, rue Mazarine, n" 3o;
■RoREX, rue Hautefcuille, n" 19;
BiCHEJLiER, quai des Augustins, n" 54 ;
LEVK.K.CLT, rue des Fosses-M.-le-Prince , n" 3i , el a Strasbourg ;
A. BiUDOUiN, rue de Vaugtrard,n'' 17;
Deladnay, PELicrER,PoNTHiEu, au Paiais-Royal;
Urbun Canri., rueSaint-Germain-deS'Pies ,n°9.
A LA Temte, Cabiket Littrrammb., tenu par M. Gautteji, ancien
inilitaire, Galerie de Bois , n" 197, au Palais-Ruyal.
/Vi-te. Les ouvragcs amioiices daus la Revte se tronvcjit anssi cbczRoRET, rue
BaQtcfcnille, u'
-HE 1,'lMrntMEBIF. DE RlONOtJX,
iFrancs-n...;, , ..:, c -i:. 1,. ! , i," V
1^