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Full text of "Revue Égyptologique"

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REVUE  ÉGYPTOLOGIQUE 


FONDEE 


SOUS   LA  DIRECTION  DE 


MM.  H.  BEUGSCH,  F.  CHABAS,  EUG.  EEYILLOUT. 


TROISIÈME  VOLUME. 


LABOREMUS! 


PARIS 

EENEST  LEROUX,  ÉDITEUE. 

LIBRAIRE  DE  LA  SOCIÉTÉ  ASIATIQUE 
DE   L'ÉCOLE  DES  LANGUES   ORIENTALES  VIVANTES,   DE  L'ÉCOLE  DU  LOUVRE,   ETC. 

28,  EUE  BONAPAETE,  28 

1885. 


VIENNE.  —  TYP.  ADOLPHE  HOLZHAUSEN. 
IMPRIMEUR  DE  LA  COUR  I.  &  R.  ET  DE  L'UNIVERSITÉ. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


Premier  Numéro. 

Page 

Association  de  Ptoléméc  Épiphaue  à  hi  couronne  et  quelques  autres  associations  royales  (E.  Revillout)  1 

Le  tribunal  égyptien  de  Thèbes  (E.  K.) 9 

Récits  de  Dioscore  exilé  à  Gangres  sur  le  concile  de  Chalcédoine.  Second  récit  :  Arrivée  à  Constantinople.  ' 

Conférence  doctrinale  tenue  devant  l'empereur.  Expulsion  de  Macaire  (Suite)  (E.  R.) 17 

Les  prêts  de  blé.  —  §  !*"■  Prêts  de  blé  nicmphites  (E.  R.) 25 

La  vie  du  bienheureux  Aphou,  évêquc  de  Pemdjé  (Oxyrinque)  (E.  R.) 27 

Le  martyre  de  S'  Ignace  (E.  R.) 3i 

Le  papyrus  Anastasi  u°  6,  transcrit  et  traduit  par  M.  Chabas     39 

Index  du  vocabulaire  mythologique  de  M.  Chabas 41 

Nouvelles  acquisitions  du  Musée  égyptien  (E.  R.) 44 

Revue  bibliographique  (E.  R.) 48 

Nécrologie  et  nouvelles 48 

Planches  du  Numéro. 
Trois  héliogravures  de  bronzes  égyijtiens  de  l'ancien  empire  (en  tête  du  numéro). 

Texte  démotique  d'un  contrat  du  règne  associé  de  Philopator  et  d'Epiphane pi.  1 

Texte  démotique  d'un  contrat  de  l'an  12  de  Philopator >  2 

Médaille  de  l'an  36  de  Philométor  et  1'"  d'Eupator >.  3 

Médaille  de  l'an  50  d'Évcrgôte  II  et  l**"  de  Philopator  II »  3 

Texte  d'une  transaction  devant  les  juges  de  Thèbes »  3 

Texte  d'une  autre  transaction  devant  les  juges    »  4 

Texte  d'un  prêt  de  blé  et  d'huile >  6 

Texte  d'un  prêt  de  blé »  7 

Erratum  de  la  légende  de  Mesou ■„  7 

Les  sigles  des  divisions  de  la  drachme    »  8 

Second  Numéro. 

Seconde  lettre  de  M.  Revillout  à  M.  Lknormant  de  l'Institut  sur  les  monnaies  égyptiennes  (Suite).  — 

§  3.  La  proportion  des  métaux  monétaires  en  Egypte     49 

a)  La  pièce  d'or  valant  une  mine 50 

h)  Le  statère  d'or  du  papyrus  de  Leide  et  les  monnaies  d'or  des  Lagides 52 

c)  Le  passage  de  Pollux  mentionné  par  Letronne 55 

d)  Le  taux  de  l'intérêt 64 

e)  Proportion  de  valeur  entre  l'or  et  l'argent 73 

f)  Proportion  de  valeur  entre  l'argent  et  le  cuivre 79 

§  4.  Étalons  monétaires 83 

Première  période &2 

Seconde  période    92 

Troisième  période 95 

Note  annexe  sur  l'argenteus-outen  (E.  R.) 96 

La  vie  d'artiste  ou  de  bohème    en  Egypte   (fragment  d'un  poème  satyriquc  en  vers  démotiques  de 

l'époque  romaine)  (E.  R.) 98 


IV  Table  des  matières. 


Planches  du  Numéro. 

Texte  du  papyrus  Golenischeff     pi.  l 

Texte  d'un  fragment  du  poème »  2 

Note     »  6 

Nécrologie  et  nouvelles »  8 

Troisième  Numéro. 

Page 
La  caste  militaire  organisée  par  Ramsès  II  d'après  Diodore  de  Sicile  et  le  poème  de  Pentaour  (E.  E.)  101 

Le  budget  des  cultes  sous  Ptolémée  Philadelphe  (E.  R.) 105 

Un  registre  budgétaire  sur  le  rendement  des  impôts  en  Egypte  (E.  R.)     114 

Le  papyrus  Sakkakini  (E.  R.) 118 

La  requête  d'un  esclave  (E.  R.) 125 

La  location,  leçon  professée  à  l'Ecole  du  Louvre  (cours  de  droit  égyptien)  (E.  R.) 126 

Comptes  du  Sérapeum  (E.  R.) 140 

Nécrologie  et  nouvelles ■ 147 

Bibliographie  (E.  R.)     148 

Planches  du  Numéro. 

Facsimile  du  papyrus  Sait  700 pi.  1 

Texte  d'une  location  de  l'an  51  d'Evergète  II »  2 

Texte  d'une  location  de  champs  de  l'an  52 »  3 

Teste  d'une  location  de  champs  de  l'an  5  de  Philométor »  3 

Texte  d'un  rachat  de  créance »  4 

Fragment  de  location  d'une  terre  du  dieu  Hormen    »  5 

Déclaration  de  culture »  6 

Pension  alimentaire     »  7 

Location  de  terrains  nus  de  l'an  52  d'Evergète  II »  7 

Gage  sous  forme  de  bail »  8 

Quatrième  Numéro. 

Le  poème  de  Pentaour  par  le  Vicomte  de  Rougé     149 

Lettre  à  M.  Revillout  sur  les  contrats  grecs  du  Louvre  provenant  de  Faioum  par  M.  Wesselt  (de  Vienne)  161 

Les  droits  des  femmes  dans  l'ancienne  Chaldée  par  Victor  Revillotjt 183 

L'impôt  sur  les  maisons  d'après   un    papyrus   grec   inédit  (British  Muséum,  n°  L,  ancien   Sait  976) 

(E.  R.)  .  .  .  .  - 186 

Une  adoption  par  mancipation  sous  le  règne  d'Amasis  et  les  diverses  formes  de  mancipations  relatives 

à  des  êtres  humains  (E.  R.)    187 

Bibliographie  (E.  R.) 193 

Planches  du  Numéro. 

Héliogravure  de  l'acte  d'adoption  de  l'an  32  d'Amasis pi.  1 

Héliogravure  de  deux  contrats  babyloniens »  2 

Photolithographies  d'étotfes  égyptiennes  et  d'un  bas-relief  de  Séti  I*' »  3  et  4 


Imp   Eudes 


BRONZE    EGYPTIEN 
de    l'Ancien    EmT'ire 


rj^ujardin  . 


BRONZE    EGYPTIEN 
■,1':     ;   Ancien    Em-nirc 


I 


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Ilèlioçp  Dirjardin 


Irap  Eudes 


H  0  R  U  S 


REVUE  ÉGYPTOLOGIQUE 

FONDÉE 
SOT7S    LA   DIUECTIOiN^   DE 

MM.  H.  BRUGSCH,  F.  CHABAS,  EUG.  REYILLOUT. 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR 

LrBRAIRE  DE  LA  SOCIÉTÉ  ASIATIQUE,  DE  L'ÉCOLE  DES  LANGUES  ORIENTALES  VIVANTES  ETC.  ETC. 

2$.  KrE  BON'.iPAETE.  28.  A  PARIS. 

m^  année.  N°  I.  1883. 

La  BEVUE  ÉGYPTOLOGIQUE  parait   tous   les  trois  vioL"  par  numéros   de   six  feuilles   au    moins,   avec 

planches,  fac-similé  etc.   —   Aucun  numéro  ne  se  vend  séparément. 

Prix  de  l'abonnement  annuel:    Paris  30  fr.  —  Départements  31  fr.  —  Étranger  32  fr. 

Sommcàre  :  Association  de  Ptolémée  Épiphace  à  la  couronne  et  quelques  antres  associations  royales.  —  Le  tribunal  égAptien  de  Thèbes. 
—  Récits  de  Dioscore,  exilé  à  Gangres,  sur  le  concile  de  Chalcédoine.  —  Les  prêts  de  blé.  —  La  vie  du  bienheureux 
Aphou,  évèqne  de  Pemdje  ^Osyrinque).  —  Le  martvre  de  S'  Ignace.  —  Le  papyrus  Anastasi  n°  6,  transcrit  et  traduit 
par  M.  Chabas.  —  Index  du  vocabulaire  mythologique  de  M.  Chabas.  —  Nouvelles  acquisitions  du  Musée  égyptien  du 
Louvre.  —  Nécrologie   et   nouvelles.  —  Nota.    Sigles  des  divisions  de  la  drachme  lors  de  l'étalon  d'argent  en  Egypte. 


ASSOCIATION  DE  PTOLÉMÉE  ÉPIPHANE 

A  LA  COURONNE  ET  QUELQUES  AUTRES  ASSOCIATIONS  ROYALES. 

Le  décret  de  Rosette  insiste  à  cinq  ou  six  reprises  et  d'une  façon  toute  particulière  sur 
ce  fait  que  Ptolémée  Épiphane  a  reçu  de  sou  père  même  la  couronne  (^zopaXot^iîvTc;  -rr.v  ^^.xzChv.œf 
zapa  TC'J  Tarpcç  —  T.xpx/^ri^iC  patjtXeta;  vr,z  IlTOÀe;a.a'.cj  . .  .  r,v  TrapeXa^ev  zapa  toj  zorrpcç  xjtcu,  etc.  etc.). 
Le  mot  Trapa  est  toujours  aloi'S  rendu,  en  démotique  et  en  hiéroglyphes,  par  nTooT  ou,  o^^  de 
la  main  de  (son  père\  Le  sens  ob-vie  paraît  donc  être  que  le  jeune  monarque  avait  été  associé 
à  la  couronne  du  vivant  de  son  père  —  et  c'est,  en  effet,  ce  qu'avait  soutenu  S^  Martin  K 
Letroxne  -,  au  contraire,  pensait  quil  fallait  prendre  zopa  dans  son  acception  la  plus  vague 
et  dire  simplement  quïl  avait  pris  la  couronne  immédiatement  après  son  père.  Il  croyait 
également  que  les  mots  •::xpaKr,6iç  ^actXs'.a;  rr,ç  II-cA£|jLaioj  r,v  ^apeXagev  ::apa  tcj  r.xipoq  devaient 
partout  s'entendre  du  couronnement  d'Épiphane,  couronnement  qui  avait  eu  lieu  le  17  Méchir 
de  l'an  9  de  son  propre  règne,  c'est-à-dire  lors  du  décret  de  Rosette. 

Il  est  vrai  que  cette  conclusion  paraissait  contraire  au  texte  formel  de  la  version  hiéro- 
glyphique 3  indiquant  que  cette  -apaXr/J/'.ç  avait  eu  lieu  dans   une   autre   tétraménie  au  mois 

'  Nouvelles  recherches  sur  Vépoque  de  la  mort  d^ Alexandre,  p.  87  à  89. 
^  Letbonxe.  Inscriptions,  t.  II  passim. 

\  / -jic    ^v_>  1    P  P  l^     ()     (1  ^  — S_  :  '< Puisque  le  30  ilésore  au  jour  de  naissance  du  dieu  bon, 

0         ^    i         I  cxxii  V©^Jr,'^T"i  1 


Eugène  Revillout. 


de  Paophi,  tandis  que  le  décret  avait  été  rédigé  en  Méchir.  Mais  le  texte  démotique  (con- 
sulté, sur  ce  point,  par  Champollion)  portait  une  leçon  cursive  {c/ji2))  qui  permettait  aussi 
bien  de  lire  Mécliir  (q/  / /\^)  que  Paophi  (0/y_)3);  ^^  ^®  ë^'^^  était  détruit  en  cet  endroit. 
Letronne  conclut  ^  donc  —  contrairement  à  M.  Charles  Lenormant  2  —  qu'il  fallait  partout 
rétablir  Méchir  ^,  et  moi-même  j'ai  admis  cette  correction,  dans  mon  mot-à-mot  des  divers 
textes  de  Rosette  *,  pour  le  jour  ofi  Épiphane  reçut  de  son  père  la  couronne  ev  r^i  TrapcXa^ev 
Tïjv  ^otfftXsiav  -apa  tcu  ^raipo;.  Mais,  en  réalité,  MM,  de  S'^  Martin  et  Lenormant  avaient 
raison.  Épipliane  a  bien  reçu  la  couronne  de  la  main  de  son  père  et  de  son  vivant,  le 
17  Paophi  d'une  année  encore  indéterminée,  et  non  le  17  Méchir  de  l'an  9  de  son  propre 
règne.  Nous  avons  la  preuve  positive  de  cette  association  dans  un  contrat  démotique  du 
British  Muséum ^  qui  est  de   «l'an  15  de  Ptolémée,   fils  de  Ptolémée   et  de  Bérénice,   les 

«vivant  à  toujours,  était  (ou  avait  été)  établie  en  panégyrie  dans  les  temples  antérieurement  et  semblable- 
»ment  le  17  Paophi  dans  lequel  il  fit  les  cérémonies  de  la  royale  manifestation  quand  il  prit  la  royauté 
»de  la  main  de  son  père  .  .  .  que  l'on  célèbre  (maintenant)  ces  jours  17  et  30  dans  chaque  mois  dans  les 
»  temples  d'Egypte  en  totalité.»  Ceci  correspondait  en  grec  aux  mots  :  «at  eTtet  xrjv  Tptaôa  tou  [XEaojpr),  sv  rjt 
Ta  yeveOXia  tou  PaaiXewç  ayeta'.,  o[jloi(jjç  Se  zaï  [trjv  xou  (pawat  STiTa  x.ai  ozy.xvr\^'\  ev  rjt  xapeXa^ev  ttjv  paaiXeiav  Jiapa 
Tou  Tîatpoç,  £j:wvu[i.ou;  v£VO[j.f/.aatv  ev  toiç  lEpoiç,  ai  hr\  ::oXXtov  ayaOtov  ap)^y)yoi  ::aatv  eictiv,  ayetv  Taç  rj[JLEpa;  xauraç 
£opT[TiV  xai  navrjyupiv  ev  Totç  /.olxix  -zr^'i  At]yu7:Tov  lEpot;  -/.axa  [j.7)va.  Enfin  le  démotique  portait  :  «Puisque  le  30 
»de  Mésore,  dans  lequel  on  fait  (ou  célèbre)  ce  jour  de  naissance  du  roi,  a  été  établi  en  panégyrie  et  en 
»fête  à  exode  dans  les  temples  antérieurement  et  de  la  même  manière  le  17  Paophi  (^Jk3>))  J^^^^"  d^iis  lequel 
»il  accomplit  les  restes  de  la  prix  de  la  dignité  suprême  —  c'est  le  principe  des  biens  qui  furent  à  tous 
»les  hommes  que  la  naissance  du  roi  vivant  à  toujours  et  que  la  réception  de  la  dignité  suprême!  —  que 
«l'on  fasse  (que  l'on  célèbre)  aussi  ces  jours  17  et  30  en  panégyrie,  à  chaque  mois,  dans  tous  les  temples 
»dEgypte.  »  (Voir  pour  l'examen  parallèle  des  trois  textes  et  le  mot-à-mot  des  textes  démotiques  et  hiéro- 
glyphiques du  décret  de  Rosette  ma  Chrestomathie  démotique,  p.  49  et  suiv.  et  193  et  suiv.  Voir  aussi  le 
magnifique  travail  de  Letronne  dans  ses  Inscriptions  grecques  démotiques,  t.  II.) 

1  Inscriptions,  t.  II,  p.  252  et  319  et  suiv. 

2  Voir  Letronne,  Ibidem.  Voir  aussi  YInscription  de  Rosette  de  M.  Lenormant. 

3  Notons  cependant  qu'eu  hiéroglyphes  Méchir  |  j  est  essentiellement  différent  de  Paophi 
I          I H  H,     )  et  ne  peut  nullement  se  confondre  avec  lui.    On  ne  peut,  en  hiéroglyphes,  se  tromper  de 

tétraménies  comme  en  démotique. 

^  Voir  ma  Chrestomathie  démotique,  loco  citato.  Pour  le  facsimile  du  groupe  démotique  répondant  à 
Paophi  et  qu'on  avait  lu  Méchir,  voir  l'ouvrage  de  la  commission  d'Egypte,  A,  vol.  V,  pi.  53,  1.  28  du  texte 
démotique. 

^  Le  chiffre  de  l'année  est  effacé  dans  le  texte  démotique  du  contrat,  mais  il  est  très  visible  dans 
l'enregistrement  qui  porte  avec  certitude  :  L  ie.  Voici  le  contrat  en  question  :  «L'an  (15)  ....  du  roi  Pto- 
»lémée,  fils  de  Ptolémée  et  de  Bérénice,  les  dieux  évergètes,  et  de  son  fils  Ptolémée,  —  Démosthénès, 
»  fils  de  Craton,  étant  prêtre  d'Alexandre  et  des  dieux  sauveurs  et  des  dieux  frères  et  des  dieux  évergètes 
»  et  des  dieux  philopators,  Diogénès,  fille  de  Philétos  (?),  étant  athlophore  devant  Bérénice  évergète,  Procé  (?), 
»  fille  de  Sentôous  (■?),  étant  canéphore  d'Arsinoë  philadèlphe,  Ninios,  fils  de  .  .  .  .,  étant  prêtre,  en  la  région 
»de  Thèbes,  de  Ptolémée  et  des  dieux  philopators.  Le  laboureur  Xeraa,  fils  d'Horsiési,  dont  la  mère  est 
»Taoub,  dit  à  la  femme  T-A/emi,  fille  de  Pamaut,  dont  la  mère  est  Nechta  :  Tu  m'as  donné  —  et  mon 
»cœur  en  est  satisfait  —  l'argent  qui  est  le  prix  du  champ  d'une  aroure,  (10)  mesures  se<  (?)  une  aroure 
•»iterum  qui  est  dans  mon  champ  de  T'i  qui  est  sur  le  neter  hotep  d'Amon  à  l'ouest  du  territoire  de  Coptos 
»dans  le  Hat-n-p-oer.  Leurs  voisins  sont  :  au  sud,  mes  deux  autres  aroures  sur  lesquels  je  t'ai  écrit  aupara- 
»vant,  ce  qui  complète  trois  aroures-,  au  nord,  le  reste  de  mes  aroures;  à  l'orient,  les  aroures  de  Horemhat 
»que  l'eau  (le  canal)  du  roi  en  sépare;  à  l'occident  les  aroures  et  le  canal  (3cA.Aot)  d'irrigation  de  Panas, 
»fils  de  Halal,  tels  sont  tous  les  voisins  de  ton  aroure  ci-dessus.  Je  t'ai  donné  cela.  Elle  est  à  toi  —  ton 
»  aroure  ci-dessus  celle-là,  en  dehors  des  deux  aroures  sur  lesquelles  je  t'ai  écrit  antérieurement  —  ce  qui 
»  complète  trois  aroures.  J'en  ai  reçu  le  prix  en  argent  de  ta  main.  Il  est  complet  sans  aucun  reliquat. 
»Mon  cœur  en  est  satisfait  etc.» 

L'écrit  fait  antérieurement  sur  deux  autres  aroures  et  que  le  vendeur  reconnaît  encore  dans  les  der- 
nières formules  de  notre  acte,  se  trouve  actuellement  à  Bologne.  M.  Sledslo  a  bien  voulu  m'en  envoyer  un 


Association  de  Ptolémée  Épiphane. 


dieux  évergètes,  et  de  Ptolémée,  son  lils^,  c'est-à-dire  de  l'an  15  de  Philopator  et  de  son 
fils  Épiphane,  Ainsi,  en  l'an  15  de  Philopator,  Épiphane  était  déjà  associé  à  la  couronne. 
n  ne  l'était  pas  en  l'an  12,  au  mois  de  Méchir,  ainsi  que  le  prouve  un  contrat  de  Bologne 
que  j'ai  aussi  donné  en  note.  Selon  Champolliox-Figéac,  il  naquit,  en  effet,  le  30  Mésori  de 
cette  même  année  douzième.  Encore  est-ce  la  date  la  plus  reculée  possible;  car  M.  Letronne 
le  fait  d'un  an  plus  jeune  et  M.  S^  Martin  de  trois  ans  plus  jeune.  Tout  ce  que  nous 
savons  par  le  décret  de  Rosette,  c'est  que  ses  généthlies  se  faisaient  le  30  Mésori,  et,  par 
conséquent,  quil  était  né  ce  jour-là.  Selon  St.  Jérôme,  il  avait  quatre  ans  révolus  lors  de  la 
mort  de  sou  père  et  selon  Justin  cinq  ans.  Or,  Philopator  a  régné  17  ans  •.  Épiphane  doit 
donc  être  né  le  30  Mésori  de  l'an  12,  210  avant  notre  ère  idate  indiquée  par  M.  Champollion- 
FiGÉAC-i,  ou  le  30  Mésori  de  l'an  13,  209  avant  notre  ère  (date  indiquée  par  M.  Letronîïe^). 
A-t-il  été  associé  aussitôt  à  la  couronne,  c'est-à-dire  le  17  Paophi  suivant,  six  semaines  après 
sa  naissance?  A-ton,  au  contraire,  attendu  jusqu'à  Paophi  de  l'an  13  ou  à  Paophi  de  l'an  15? 
Cest  ce  que  l'avenir  nous  apprendra.  Mais  dans  tous  les  cas,  ses  années  de  règne  ne  comptent 
pas  depuis  cette  association,  comme  le  pensait  S^  Martin  ^;  car  nous  avons  un  contrat  de 
l'an  2  d'Epiphane  dans  lequel  ce  jeune  prince  figure  seul,  et  il  s'est  écoulé  plus  de  deux 
ans  entre  notre  contrat  de  l'an  15  et  la  mort  de  Philopator.  Du  reste,  ce  contrat  même 
nous  montre  qu'en  l'an  15  on  suivait  le  comput  du  père  et  non  celui  du  fils.  Il  a  dii  en 
être  ainsi  jusqu'à  la  fin  du  règne  et  Epiphane  n'a  pu  commencer  son  comput  qu'à  la  mort 
de  son  père  ou  peu  de  temps  après.  Je  dis  peu  de  temps  après  puisque,  selon  les  historiens  ^, 
on  cacha  quelque  temps  la  mort  de  Philopator,  par  crainte  de  troubles  politiques.  En  somme, 
si  S^  Martin  avait  raison  dans  la  question  de  l'association  d'Epiphane  à  la  couronne,  Letronne 
avait  raison  quand  il  se  refusait  à  reporter  quatre  ans  plus  haut  les  dates  du  règne  d'Epi- 
phane et  particulièrement  celle  du  décret  de  Rosette. 

Reste  une  question  intéressante,  celle  du  couronnement  effectif  d'Epiphane. 

calque.  On  y  lit  :  «:L'an  12,  au  mois  de  Méchir,  du  roi  Ptolémée,  fils  de  Ptolémée  et  de  Bérénice,  les  dieux 
«évergètes.  Athénéos,  fils  d'Athénéos,  étant  prêtre  d'Alexandre  et  des  dieux  sauveurs,  des  dieux  frères, 
»des  tlieux  évergètes,  des  dieux  philopators,  Ptolémée.  fille  de  Dionysios  (?),  étant  canéphore  devant  Arsinoë 
«Philadelphe,  Nicanor,  fille  de  Bésis  (,ou  Bassos?),  prêtre  dans  la  région  de  Thébes  de  Ptolémée  le  dieu 
»et  des  dieux  philopators.  Le  laboureur  Xeraa,  fils  d'Horsiési  (?),  dont  la  mère  est  Taoub  (?)  dit  à  la  femme 
»T-A/emi,  fille  de  Pamaut,  dont  la  mère  est  Nechta  :  Tu  mas  donné,  et  mon  cœur  en  est  satisfait,  l'argent 
»qui  est  le  prix  de  deux  aroures  de  champ,  20  mesures  set  (y)-  deux  aroures  Uerum  dans  mon  champ  de  T'i 

:>  qui  est  sur  le  neter  hotep  d'Amon,  à  l'occident  du  territoire  de  Coptos  dans  le  Hat-n-poer  (  1        |      ^^ 

vfe r^    □  Ci    ■/ — '^??Tg '1 l'^<3> 

"  y^^^®  ou  -^^j c,  Brucsch,  Dict.  géogr.,  p.  154  et  8.39).  Les  voisins  en  sont  :  au  sud, 

>mes  deux  aroures  que  j'ai  données  à  Mérain,  fille  dHor  Ut  a;  an  nord,  le  reste  de  mes  aroures;  à  l'orient, 
'les  aroures  d'Horemhat  que  l'eau  (le  canal)  du  roi  en  sépare;  à  l'occident,  le  canal  dirrigation  de  Panas (?), 
•  fils  de  Alal  (on  Halal),  tels  sont  tous  les  voisins  de  tes  deux  aroures  ci-dessus.  Je  te  les  ai  données  tes 
»  deux  aroures  ci-dessus,  etc.  » 

A  la  fin  des  formules  ordinaires  on  lit  l'adhésion  suivante  :  «La  femme  Ta  oub  (?),  fille  de  Pseésé, 
»ma  mère,  dit  :  Reçois  cet  écrit  de  la  main  de  Xeraa,  mon  fils  cadet,  pour  qu'il  fasse  selon  toutes  les 
«paroles  ci-dessus  —  mon  cœur  en  est  satisfait  —  sans  aucune  opposition.  >  Cet  acte  est  rédigé,  ainsi  que 
le  précédent,  par  Pétamen-api,  fils  de  Pétamen-ra-sonter,  < l'écrivain  des  actes  de  la  ^^lle  et  de  la  contrée». 

'  Voir  à  ce  sujet  Letrosne,  loco  citato. 

-  Annales  des  Lagides,  t.  II,  p.  81   et  suiv.  et  392. 

^  Letroxxe,  Inscriptions,  t.  II,  p.  266. 

■•  Loco  citato. 

*  Voir  Champolliox-Figé-\c.  Annales  des  Lagides.  p.  87. 

1* 


Eugène  Revillout. 


Le  décret  de  Rosette,  rédigé  en  l'an  9  du  règne  réel  d'Épiphane,  fut  rendu  par  tous 
les  prêtres  d'Egypte  «qui,  des  temples  du  pays,  s'étaient  rendus  à  Memphis,  auprès  du  roi, 
T>pour  la  panégyne  de  la  réception  de  la  couronne  de  Ptolémée,  toujours  vivant,  chéri  de 
»  Ptah,  dieu  Épiphane,  Euchariste,  laquelle  il  a  reçue  directement  de  son  père  »  .  .  .  ot  asav 
TYjaavTc;  £•/.  Ttov  /.axa  xr^v  y^wpav  ispwv  etç  Mî[j.a;iv  tom  j^aatXsi  :rpo;  rr]v  'KavY)Yup'.v  ty;ç  'iZT.çxxKrfi^tiài:^  tyjç 
liaaiXetaç  tt];;  nTOAc[xawu  a'.a)vo[3'.cy  r^^!X77r^\).v^o'J  utco  to'j  <I>6a  0cou  Emcpavou;  Ei»)^ap'.aTcu  yjv  xapsXalîev 
Ttapa  TC'j  zaTpo;  auTou.  Or,  nous  venons  de  voir  qu'Épiphane  avait  été  associé  à  la  couronne 
au  17  Paophi  et  que  l'on  rendait  le  décret  au  17  Méchir.  Evidemment  on  avait  cherché 
cette  coïncidence  de  jours,  à  quatre  mois  près,  et  c'est  pour  cela  que  le  décret  prescrit  de 
célébrer  tous  les  mois,  xaxa  p-r^va,  le  17  comme  jour  anniversaire  de  la  prise  de  la  couronne, 
au  lieu  de  célébrer  seulement  cet  anniversaire  le  17  Paophi,  comme  cela  avait  été  ordonné 
antérieurement^.  Mdii^  alors  dans  quel  but  spécial  avait  lieu  cette  panégyrie  de  la  prise  de 
la  couronne  qu'il  a  reçus  de  son  peref  Etait-elle  purement  commémorative  ?  C'est  ce  que 
nous  allons  examiner. 

Le  texte  dit  ailleurs  que  le  roi  fit  punir  les  révoltés  faits  prisonniers  à  Lycopolis  le 
jour  «  où  il  vint  à  Memphis  dans  l'intention  de  célébrer  les  cérémonies  prescrites  pour  la 
réception  de  la  couronne  »  Trapa^evoiAevoç  eiq  MefJiçiv,  £xavL»[jLwv  twi  xa-cp'.  xa-.  Tr,t  eauTou  ^aatXstai, 
xavTaç  îy.oÀaccv  •/.aOrj/.ovTa);; ,  y.aO'  ov  /.atpov  7:ap£Y£vr,6r(  zpo;  to  (:uvT£/>£(76Y;[va:  autwi  Ta]  7:poi3r,/.ovTa 
vo|j.tiJ.a  TT)'.  ::apaXY;t];£i  zr^q  ^acCktioic.  Évidemment  il  ne  s'agit  pas  du  jour  de  son  association  au 
trône  par  Philopator,  puisque  le  texte  lui-même  nous  apprend  qu'il  s'agissait  ce  jour-là  de 
châtier  ceux  des  insurgés  qui  avaient  été  pris  au  siège  de  Lycopolis  en  l'an  8  du  règne 
d' Epiphane,  siège  raconté  immédiatement  auparavant  dans  le  décret.  11  s'en  suit  donc  qu'il 
faut  distinguer  avec  soin  le  jour  de  la  prise  de  la  couronne  du  jour  où  le  roi  vint  accomplir 
les  cérémonies  prescrites  pour  la  prise  de  la  couronne,  jour  qui  est  appelé  aussi  panégyrie 
de  la  prise  de  la  couronne.  Cette  panégyrie  de  la  prise  de  la  couronne,  ce  sacre  du  nouveau 
souverain  avait  justement  lieu  le  17  Méchir  de  l'an  9,  et  c'était  à  cette  occasion  qu'était 
rendu  le  décret  de  Rosette.  L'époque  de  la  majorité  égyptienne  était  entre  13  et  14  ans, 
comme  nous  avons  déjà  eu  l'occasion  de  le  dire^,  et  comme  l'avaient,  d'ailleurs,  pensé 
ViscoNTi  et  la  plupart  des  chronologistes  modernes  déjà  cités  par  Letronnb.  Cela  convient 
parfaitement  à  ce  que  nous  avons  exposé  sur  l'époque  de  la  naissance  d'Épiphane.  Cependant 
Polybe  3  nous  dit  que,  quand  ou  fit  les  cérémonies  de  son  couronnement  appelées  par  les 
Grecs   àvaxXYjT^pia,    Vâge  ne  pressait  pas  encore    (oùBétto)  [j.èv  ttjç  Y]Xix(a;  y.aTcTCEiYop-svYjç)  —  sans 

'  /I\  '=^^  ou  n-t-het  antérieurement,  c'est-à-dire  par  suite  d'un  décret  antérieur.   Voir  le  passage  des 
Ci 
trois  versions,  hiéroglyphique,  démotique  et  grecque,  que   nous  avons   donné  plus  haut  et  dont  on  peut 

étudier  le  niot-à-mot  dans  notre  Chrestomathie  déinotique,  p.  49  et  suiv.,  193  et  suiv.  Le  texte  grec  est,  du 
reste,  déjà  suffisamment  clair  :  zat  snei  ttjv  xptaSa  tou  [j.£ao)pr)  sv  rji  t»  yeveôXia  tou  PaaiXeojç  ayerai  o[j.oiwç  6e 
y.at    [ttjv    tou    tpatoipi   iKZOt  zat   Se/.aTrjv]    sv    r;t    KapeXa^ev    ^aaiXeiav  napix  tou  :raTpo;  eTTtovup-ouç  v£vo(j.ix«(tiv  ev  toi; 

lepoi;  ....  ayv.y  xa;  rjjxEpa;  xauxa;  EopTTjV xaxa  [Arjva.    Il  est  trop  clair  que  l'on  met  ici  en  parallélisme 

Yancien  déo-et  (rendu,  sans  doute,  sous  Philopator)  pour  établir  chacune  de  ces  fêtes  une  fois  par  an  avec 
le  nouveau  décret  qui  les  rendait  obligatoires  tous  les  mois.  Dans  l'ancien  sj^stème  il  fallait  admettre  que 
ces  deux  décrets,  l'ancien  et  le  nouveau,  avaient  eu  lieu  en  un  seul  jour,  le  17  Méchir  de  l'an  9,  ou  qu'on 
avait  fêté  ^'avance  l'anniversaire  du  couronnement  qui  devait  avoir  lieu  en  l'an  9. 

2  Voir  notre  article  intitulé  :    Un  prophète  d'' Auguste  et  sa  famille,  2*  année,  p.  98  et  suiv. 

3  XVIII,  38. 


Association  de  Ptolémée  Épiphane. 


doute  parce  qu'Épiphane  u'avait  pas  encore  14  aus  révolus  — ,  mais  que  ses  tuteurs  se 
hâtèrent  parce  qu'ils  espéraient  que,  quand  on  saurait  le  roi  maître  de  lui-même,  les  affaires 
de  l'Egypte  prendraient  une  meilleure  tournure.  Ailleurs,  en  parlant  de  Philométor,  le  même 
auteur  nous  dit  expressément  '  que,  selon  la  coutume  d'Egypte,  les  ava-/.Ar,T:r;p'.a  avaient  lieu 
quand  les  princes  étaient  parvenus  à  l'âge  (otav  eî?  -^/.'./.l'av  à7.0a)ff'.v),  et  Champollion-Figéac 
a  parfaitement  prouvé  qu'en  effet  Philométor  avait  alors  14  ans.  C'est  à  14  ans  également 
que  Pèerenptah  fut  investi  du  titre  de  grand  prêtre  de  Memphis  et  qu'il  couronna  Ptolémée 
Aulète^.  Son  fils  Imouth  lui  succéda  entre  13  et  14  ans^  dans  sa  haute  dignité,  alors 
vacante  depuis  assez  longtemps.  Enfin,  M.  Bernardino  Peyron*  a  aussi  établi  que  c'était  à 
14  ans  environ  que  les  filles  égyptiennes  étaient  circoncises,  puis  mariées  aussitôt  après,  et 
nous  avons  nous-même  retrouvé  cette  coutume  dans  le  roman  de  Setna  '-'.  Tout  nous  prouve  donc 
que  la  majorité  YjX-.y.'.a  —  correspondant  ordinairement  à  peu  près  à  l'âge  de  la  puberté  — 
était  fixée  en  Egypte  à  l'année  qui  s'étendait  entre  13  et  14  ans.  Épiphane  put  donc  très 
légitimement  prendre  à  ce  moment  possession  de  la  couronne,  et  le  texte  de  Rosette  nous 
montre  qu'il  commença  son  règne  en  faisant  mettre  à  mort,  au  moment  de  son  sacre  à 
Memphis,  les  prisonniers  faits  l'année  précédente  au  siège  de  Lycopolis.  C'est  ce  que  Polybe 
lui  reproche  très  expressément  à  lui-même,  eu  disant  que  Ptolémée  fut  alors  aussi  cruel  à 
l'égard  des  prisonniers  de  Lycopolis  qui  s'étaient  livrés  d'eux-mêmes  en  sa  foi  (Bw/.av  joàç 
«ÙTol»;  £?ç  TYjv  ^<xGikéiàq  zîït'.v)  qu'il  le  fut  plus  tard  quand,  le  roi  ayant  alors  25  ans,  Polycrate 
eut  vaincu  les  derniers  des  révoltés.  Nous  avons  déjà  démontré  que  ce  second  exemple  se 
rapporte  à  la  soumission  de  la  Thébaïde,  longtemps  indépendante  sous  les  rois  égyptiens 
Anchmachis  et  Harmachis  et  qui  furent  de  nouveau  réduits  en  la  puissance  du  roi  en  l'an  20 
de  son  règne. 

On  voit  par  tous  ces  troubles  que  l'association  d'Épiphane  à  la  couronne  du  \ivant 
même  de  son  père  n'avait  pas  produit  tous  les  heureux  effets  que  Philopator  en  espérait. 
Cela  n'empêcha  pas  leurs  successeurs  de  tenter,  à  diverses  reprises,  le  même  procédé,  mais 
toujours  avec  un  résultat  peu  satisfaisant.  On  dirait  vraiment  que  ces  sortes  d'associations 
au  trône  ou  de  désignations  officielles  portent  malheur.  C'est  ce  que,  du  moins,  nous  allons 
voir  pour  l'Egypte  dans  deux  faits  analogues  dont  nous  allons  avoir  à  parler. 

Commençons  par  Eupator. 

On  a  beaucoup  discuté  sur  la  mention  du  dieu  Eupator  qui  accompagne,  dans  les 
protocoles  de  plusieurs  contrats  les  noms  des  rois  ayant  un  culte  à  Alexandrie.  Les  uns  ont 
cru  y  voir,  avec  Champollion,  un  fils  de  Philométor;  les  autres,  avec  Letronne,  un  simple 
surnom  ne  nous  donnant  aucun  prince  nouveau  ;  quelques  autres  enfin,  avec  M.  Lepsius,  un 
fils  d'Épiphane**. 

Une  inscription  grecq,ue  citée  par  M.  AVaddington  "  et  datant  du  7-egne  d' Eupator,  fils 

1  Polybe,  XXVIII,  10,  8. 

2  Voir  plus  haut,  p.  103,  note  4. 

3  Ibidem. 

*  Pa/piri  greci  .  .  .  papyrus  XV.  Voir  aussi  la  note  12,  p.  88  et  89. 

5  Voir  mon  Bœnan  de  Setna,  introduction. 

6  Voir  M.  Lepsius,    Ûber  einige,  etc.,  Berlin  1853. 

"  M.  Waddington  a  communiqué  cette  inscription  à  M.  Feuakdent  qui  la  cite  dans  sou  travail  :  Sur 
les  monnaies  des  Lagides. 


6  Eugène  Revillout. 


des  dieux  philométors,  termine  la  question  en  prouvant  que  Champollion  avait  raison.  Mais 
toutes  les  difficultés  ne  sont  pas  terminées  et  il  ne  semble  pas  qu'on  ait  tiré  de  ce  texte 
les  conclusions  nécessaires. 

En  effet;  plusieurs  protocoles  de  contrats  démotiques  déjà  connus  de  M.  Lepsius  ^  nous 
montrent  Eupator  associé  au  culte  d'Alexandre  du  vivant  de  son  père,  de  l'an  31  à  l'an  36 
de  son  règne.  Evidemment,  c'était  là  une  sorte  de  désignation  officielle  comme  héritier  pré- 
somptif, et  nous  voyons,  en  eifet,  par  l'inscription  de  M.  Waddington,  qu'Eupator  a  régné 
seul  au  moins  quelques  jours.  Mais  bientôt  la  male-chance  poursuivit  le  malheureux  prince; 
car  tout  nous  prouve  que  c'est  Eupator  (et  non  Philopator  II  comme  le  pensait  M.  Lepsius) 
qui  nous  représente  ce  fils  de  Philométor,  égorgé  par  son  oncle  Evergète  II,  aussitôt  que 
celui-ci  eut  épousé  sa  mère. 

Quant  à  Philopator  II,  c'est  le  fils  d'Evergète  II  et  non  son  neveu.  Mais  quel  est-il  et 
de  laquelle  de  ses  deux  femmes?    Ceci  est  une  question  qui  vaut  la  peine  d'être  étudiée  2. 

Lorsqu'Evergète  fut  appelé  pour  être  le  tuteur  du  fils  de  Philométor  et  le  mari  de  sa 
veuve,  qui  avait  été  associée  «m  trône  entre  l'an  16  et  l'an  21  du  règne  précédent,  son  premier 
acte  avait  été  de  se  débarrasser  d'un  futur  rival  en  tuant  Eupator  —  le  jour  même  de  son 
mariage,  paraît-il,  et  jusque  dans  les  bras  de  sa  mère.  La  reine  Cléopatre  —  qui  avait  régné 
sur  le  pied  de  l'égalité  la  plus  parfaite  avec  son  précédent  mari,  et  —  pour  la  première 
fois  dans  l'histoire  de  la  dynastie  —  avait  figuré  en  quelque  sorte  comme  roi  dans  les  proto- 
coles :  («sous  les  rois  Ptolémée  et  Cléopatre,  les  enfants  de  Ptolémée  et  de  Cléopatre,  les 
dieux  épiphanes»)  —  dut  peu  à  peu  s'habituer  à  un  tout  autre  régime  avec  un  tel  maître. 
Evergète  ne  put  tout  d'abord  l'écarter  des  protocoles  (dans  lesquels  il  rétablit  pourtant  son 
ancien  comput  —  en  relégant  la  reine  (sic)  au  second  plan).  Il  manifesta  même  une  grande 
joie,  quand  il  en  eut  un  fils,  né  à  Memphis  pendant  les  fêtes  du  couronnement'  et  qu'il  sur- 
nomma, en  conséquence,  Memphitès.  Mais  en  même  temps,  il  eut  soin  de  lui  ôter  toute 
influence  et  de  la  confiner  dans  ses  appartements  jusqu'au  jour  où  il  la  répudia  et  ne  lui 
laissa  plus  que  le  titre  honoraire  pour  épouser  sa  fille  qu'il  avait  violée^  et  qu'il  associa 
aussi  à  la  couronne. 

Au  bout  de  combien  de  temps  ce  dernier  changement  eut-il  lieu  ?  —  C'est  ce  que  nous 
ne  saurions  encore  préciser  avec  certitude.  Evergète  monta  sur  le  trône  en  l'an  25  de  son 
comput  (à  partir  de  sa  première  usurpation  sous  Philométor),  et  nous  avons  déjà  un  acte 
de  l'an  29  ^  «  du  roi  Ptolémée  et  de  la  reine  Cléopatre  et  de  Cléopatre,  sa  femme  »  —  (c'est- 

ï  M.  Lepsius,  p.  10  de  son  travail,  a  bien  vu  qu'Eupator  était  nommé  pour  la  première  fois  dans  un 
protocole  de  Tau  31  de  Philométor.  Mais  il  voyait  dans  Eupator  un  fils  inconnu  d'Epiphane  qui  avait  été 
tué  par  Philométor  au  début  de  son  règne,  puis  associé  au  culte  par  un  repentir  très  tardif. 

2  Pour  l'histoire  de  Cléopatre  je  suis  généralement  d'accord  avec  M.  Lepsius  :  Ûber  einige  Ergebnisse 
der  ilgyptischen  Denkmiiler  fur  die  Kenntnisse  der  Ptolemuergeschichte  (Berlin  1853).  C'est  M.  Lepsius  qui,  à 
l'aide  des  protocoles  démotiques,  alors  en  sa  possession,  en  a  définitivement  établi  les  traits  fondamentaux. 

3  Per  vim  stuprala  (Justin).  Voir  M.  Letroxne,  Inscriptions,  t.  Il,  p.  54. 

^  Voir  le  n°  20  a  de  M.  Lepsius  et  la  page  16  de  l'ouvrage  du  même  savant  illustre  qui  a  donné,  le 
premier,  cette  date  initiale.  M.  Lepsius  cite  aussi  les  n»'  20  a  et  b  de  l'an  34.  Mais  il  ne  possédait  ni  les 
contrats  de  l'an  30  (voir  ma  Nouvelle  Chrestomathie,  p.  32),  ni  celui  de  l'an  37  (papyrus  80  de  Berlin).  Si 
mes  copies  sont  exactes  sur  ce  point,  les  contrats  90  et  91  de  Berlin  sont  de  nouveau  datés  seulement  de 
«l'an  30  du  roi  Ptolémée  Evergète  et  de  la  reine  Cléopatre,  sa  sœur  (et)  sa  femme».  En  l'an  34  (20a  et  b 
de  M.  Lepsius)  on  voit  les  deux  Cléopatres.   En  l'an  35  (dans  Tinscription  grecque  de  Pselcis)  on  n'en  voit 


Association  de  Ptolémée  Épiphane. 


à-dire  de  la  jeune  Cléopatre).  Mais  entre  l'an  25  et  l'an  29  il  y  a  quatre  ans  ',  et  rien  ne 
nous  indique  la  date  exacte  ^  du  second  mariage. 

Il  ne  serait  donc  pas  impossible  qu'Évergète  ait  eu  de  la  veuve  de  Philométor  d'autres 
enfants  que  Memphitès.  C'est  même  l'hypothèse  la  plus  vraisemblable,  puisque  les  auteure 
disent  tous  que  Soter  II  était  l'aîné  (-pTi'ijTccsv  3)  des  fils  de  la  jeune  Cléopatre  et  qu'on  ne 
peut  admettre  l'assimilation  de  Philopator  II  et  de  Mempliitès  égorgé  par  son  propre  père, 
lors  de  la  révolution  suscitée  contre  lui. 

En  effet,  les  Alexandrins  s'étaient  peu  à  peu  indignés  contre  le  tyran  et  se  sentaient 
pris  d'une  sympathie  de  plus  en  plus  profonde  pour  la  veuve  de  leur  bon  roi  Philométor 
qu'ils  avaient  tant  de  motifs  de  regretter.  Au  bout  de  15  ans*  du  nouveau  règne  d'Ever- 
gète  II,  la  mesure  était  comble.  Les  insurgés  mirent  à  leur  tête  la  vieille  reine  Cléopatre 
dont  le  nom  avait  été  effacé  une  première  fois  dans  les  protocoles,  cinq  ans  auparavant  (en 
l'an  35  ^)  puis  rétabli  temporairement  en  l'an  37  pour  être  de  nouveau  rayé  en  l'an  40, 
mais  qu'ils  considéraient  toujours  comme  leur  souveraine  légitime,  et,  vers  l'an  40  ou  41,  ils 
expulsèrent  Ptolémée. 

Celui-ci  continua  cependant  à  posséder  une  partie  de  l'Egypte  et  particulièrement  la 
Thébaïde;  car  nous  avons  plusieurs  contrats  de  cette  provenance  datés  des  années  40,  43, 
44  et  45  «  du  roi  Ptolémée  et  de  la  reine  Cléopatre,  sa  femme,  »  c'est-à-dire  de  Ptolémée  et 
de  la  jeune  Cléopatre,  comme  dans  l'inscription  grecque  de  Pselcis  déjà  citée  par  Letroxne. 
C'est  pendant  que  la  vieille  Cléopatre,  alliée  au  roi  de  Syrie  Démétrius,  régnait  à  Alexandrie, 
et  que  Ptolémée,  allié  à  Alexandre,  le  concurrent  syrien  de  Démétrius,  régnait  en  Thébaïde 
et  à  Chyre,  que,  pour  frapper  la  reine  au  cœur,  Évergète  II  fit  tuer  leur  enfant  commun 
Memphitès  et   lui  en  fit  expédier  les  morceaux  dans  une   corbeille  qui  fut   déposée  dans 

qu'une  (cette  fois  la  jeune).  Eu  l'an  37  (80  de  Berlin)  on  les  retrouve  toutes  les  deux.  Entre  l'an  40  et  45 
(voir  plus  loin)  la  jeune  Cléopatre  figure  seule.  Enfin,  à  partir  de  l'an  46,  la  réconciliation  a  lieu  et  les 
deux  Cléopatres  sont  nommées  jusqu'à  la  fin  du  règne. 

'  Il  est  même  probable  que  Ptolémée  épousa  ou  viola  sa  nièce  en  l'an  29  et  que  la  mère  de  celle-ci 
protesta  et  fit  même  annuler  l'union  nouvelle  puisqu'elle  figure  de  nouveau  seule  comme  sœur  et  femme  en 
l'an  30.  Ce  fut  le  point  de  départ  d'une  lutte  dont  les  contrats,  cités  dans  la  note  précédente,  nous  ont 
indiqué  quelques-unes  des  diverses  péripéties. 

2  C'est  peut-être  à  la  période  du  premier  mariage  que  se  rapporte  l'inscription  des  cataractes  donnée 
par  Letronne  {Insc,  p.  389  et  suiv.)  et  dans  laquelle  figurent  seuls  «le  roi  Ptolémée  et  la  reine  Cléopatre, 
sa  sœur,  dieux  Evergétes». 

^  Voir  Letronxe,  Inscriptions,  t.  II,  p.  56  et  suiv.  Champollios-Figéac,  Annales  des  Lagides,  p.  182 
et  suivante. 

*  Voir  Diodore,  Fragment  cité  par  Letroxne,  Inscriptions,  t.  II,  p.  55. 

5  Inscriptions  de  Pselcis,  commentée  par  Letronxe,  Insc,  t.  II,  p.  38.  Je  ne  pense  pas  qu'on  puisse 
admettre  la  correction  de  35  en  45  proposée  par  M.  Lepsivs.  Cette  correction  serait  parfaitement  légitime 
s'il  s'agissait  d'un  auteur  copié  à  plusieurs  reprises  par  des  scribes  maladroits.  Mais  les  lapicides  ne  se 
trompent  pas  sur  l'année  courante  qui  forme  la  date  du  monument  gravé  pai'  eux. 

6  Le  papyrus  80  de  Berlin,  non  signalé  par  M.  Lepsius,  contient  un  contrat  de  l'an  37  de  Ptolémée 
Évergète  et  de  la  reine  Cléopatre,  sa  sœur,  et  de  la  reine  Cléopatre,  sa  femme. 

•  Voir  le  papynis  de  l'an  40  (rédigé  à  Memphis  et  publié  dans  la  Eevue^  I,  p.  91),  le  papyrus  de 
l'an  43  {ibid.,  p.  130),  les  papyrus  de  l'an  44  {Nouv.  C'hrest.,  p.  103:  Ane  Chrest.,  p.  358  et  Papyrus  du 
Louvre  inédit),  le  papyrus  de  l'an  45  portant  aussi  le  n°  174,  23  à  Turin.  Voir  aussi  M.  Lepsius,  p.  16. 
M.  Lepsius  parle  également  d'un  papyrus  de  Scot  que  je  n'ai  pu  voir  et  dont  je  désirerais  vivement  con- 
naître le  possesseur. 


8  Eugène  Revillout.  Association  de  Ptolémée  Épiphane. 

l'antichambre  du  palais  '.  Ce  plan  atroce  lui  réussit.  La  malheureuse  femme  désespérée  n'eut 
plus  le  courage  de  la  lutte  qu'elle  entreprenait  surtout  pour  son  fils,  et  quand  elle  apprit 
qu'Alexandre  de  Syrie,  le  protégé  et  la  créature  d'Evergète  II,  menaçait,  aussitôt  vainqueur, 
jusqu'à  son  bienfaiteur  et  s'apprêtait  à  entrer  en  Egypte,  le  patriotisme  l'emporta  sur  toute 
autre  considération  et  un  accord  eut  lieu-. 

Ceci  se  passa  entre  l'an  45  et  l'an  46  ^  ;  car  en  l'an  45  «  Ptolémée  et  Cléopatre,  sa 
femme  »  figurent  seuls  sur  les  actes  de  Thèbes,  tandisqu'en  l'an  46  les  contrats  portent  de 
nouveau  :  «le  roi  Ptolémée  et  la  reine  Cléopatre,  sa  sœur,  et  la  reine  Cléopatre,  sa  femme». 
Ces  données  sont,  du  reste,  très  concordantes  avec  celles  de  l'histoire,  puisque,  comme  le 
fait  remarquer  Champolliox-Figéac,  tous  ces  événements  ont  dû  se  passer  pendant  le  règne 
de  Démétrius  qui  dm-a  quatre  ans  et  auquel  succéda  celui  d'Antiochus  Giypo,  rétabli,  en 
dépit  d'Alexandre,  sur  le  trône  de  Syrie,  par  Evergète  et  Cléopatre,  aussitôt  après  leur 
réconciliation.  Cette  réconciliation  se  trouve  donc  fixée  à  quatre  ans  ou  quatre  ans  et  demi 
de  la  révolution  d'Alexandrie*. 

A  pai-tir  de  ce  moment  '",  les  protocoles  restent  identiques  jusqu'à  l'an  52.  Alors  apparaît 
le  nom  dii  dieu  Philopator  II'',  associé  au  culte  des  souverains.  C'est  probablement  une  répa- 
ration tardive  faite  à  la  vieille  Cléopatre  qui  vit  enfin  désigner  son  second  fils  comme 
héritier  présomptif.  Mais  elle  comptait  sans  sa  fille  qui  eut  grand  soin  de  faire  disparaître 
le  jeune  prince  et  se  fit  rédiger  à  elle-même,  par  Evergète  II,  un  testament  lui  confiant  la 
pleine  direction  des  afifaires  et  le  choix  du  futur  souverain. 

Nous  n'avons  pas  à  raconter  ici  l'usage  qu'elle  fit  de  cette  pièce  en  jouant,  pour  ainsi 
dire,  avec  ses  fils  Soter  II  et  Alexandre.  Nous  pouvons  seulement  constater  que  la  vieille 
Cléopatre  disparaît  des  protocoles  à  la  mort  d'Evergète  II  et  que  le  culte  de  Philopator  ne 
semble  plus,  dès  lors,  que  commémoratif.  En  résumé,  l'association  des  princes  à  la  couronne 
ou  leur  désignation  formelle  comme  souverains  futurs  n'a  jamais  empêché,  sous  les  Lagides, 
aucune  révolution,  bien  au  contraire.  La  seule  qui  paraît  avoir  réussi,  est  celle  de  Philadelphe, 
parce  que  Soter  cédait  complètement  le  trône  qu'il  semblait  seulement  partager.  Notons,  du 
reste,  que  cette  association-là  était  tellement  fictive  qu'elle  continua  à  durer  quand  Soter 
était  mort  depuis  20  ans. 

>  Diodore  de  Sicile,  XXXIV,  14. 

2  Voir  ces  auteurs  déjà  cités  par  Champollion-Figéac,  Annales  des  Lagides,  t.  II,  p.  171  et  suivantes. 

3  Voir  les  n°'  22  a,  b  et  23  de  M.  Lepsius.  J'ai  publié,  en  entier,  ces  contrats  dans  ma  Nouvelle 
Chrestomathie. 

*  Annales  des  Lagides,  t.  II,  p.   176. 

^  Je  signalerai  deux  contrats  de  lan  50  publiés  dans  mon  ancienne  Chrestomathie,  p.  85  et  suiv.,  un 
contrat  de  l'an  51  publié  dans  ma  Nouvelle  Chrestomathie,  p.  148  et  deux  contrats  de  l'an  52  (Xouv.  Chrest., 
p.  59).  Ces  deux  derniers  contrats  ont  été  connus  de  M.  Lepsius  qui  leur  donne  les  n"'  24  et  24  a.  Le 
n"  25  de  M.  Lepsius  (contrat  de  l'an  52  également)  a  été  copié  par  moi,  mais  n'est  pas  encore  publié.  J'en 
parle  plus  loin,  car  son  protocole  est  assez  intéressant. 

6  M.  Lepsius  (p.  14  de  son  ti-avail  plusieurs  fois  cité)  a  bien  vu  que  Philopator  II  intervenait  pour 
la  première  fois  dans  les  contrats  du  3  Pachons  de  l'an  52  auxquels  il  donne  les  n""  24  et  24a.  Mais  il 
voyait  dans  Philopator  II  le  fils  de  Philométor  massacré  par  Evergète  26  ans  auparavant,  et  qui,  nous  le 
savons,  n'était  autre  qu'Eupator.  M.  Lepsius  attribue  au  mois  suivant  (Payni  de  l'an  52)  un  contrat  auquel 
il  donne  le  n°  25  et  qui  ne  mentionne  pas  Philopator  (par  oubli,  pense-t-il).  Mais  ce  contrat,  qui  porte  à 
Berlin  le  n"  102,  paraît,  au  contraire,  être  du  10  Méchir.  C'est  donc  entre  le  10  Méchir  et  le  3  Pachons. 
c'est-à-dire  dans  un  intervalle  de  moins  de  trois  mois,  que  Philopator  II  a  été  associé. 


Le  tribunal  égyptien  de  Thèbes. 


LE  TEÏBUNAL  EGYPTIEN  DE  THÈBES. 

Les  textes  hiéroglyphiques,  hiératiques  et  démotiques  nous  montrent  chez  les  Égyptiens 
plusieurs  juridictions  judiciaires. 

Il  y  avait  d'abord  une  juridiction  administrative  —  (comme  chez  nous  celle  du  Conseil 
d'État  >),  —  pour  toutes  les  questions  relatives  aux  fonctionnaires,  aux  comptes,  etc.  Nous 
avons  eu  l'occasion  de  montrer  dans  la  première  année  de  la  Revue  (p.  60),  que  c'était 
à  un  conseil  de  ce  genre  que  s'était  adressé  Amasis,  contrairement  à  toutes  les  coutumes 
égyptiennes,  pour  la  cause  des  biens  ecclésiastiques  réclamés  par  les  temples  aux  auxiliaires 
qui  y  étaient  établis.  Le  roi  avait  alors  ordonné  de  considérer  l'affaire  comme  purement 
administrative  —  parceque  les  soldats  grecs  avaient  été  mis  là  par  ordre  royal  —  et  les 
temples  avaient  perdu.  Dans  d'autres  cas,  lorsqu'il  s'agissait  par  exemple  d'affaires  concernant 
la  personne  royale  ou  de  complots  qu'on  pouvait  faire  rentrer  dans  le  crime  de  lèse  majesté, 
le  roi  désignait  aussi  des  commissions  mixtes  tirées  du  même  conseil  et  spécialement  députées 
à  cet  effet.     Il  en  fut  aussi  pour  une  conspiration  ^  de  sérail  jugée '^  sous  Ramsès  III. 

•  Nous  re\'iendrons  bientôt  sur  cette  question. 

2  Voir  Papyrus  judiciaire  de  Turin,  par  feu  Devéeia,  et  la  3®  série  des  Mélanges  égyptologiques,  de 
M.  Chabas,  p.  7  et  suiv.  M.  Chabas  doune  ainsi  la  composition  de  la  commission  instituée  par  le  roi  :  «  Le  préposé 

»du  trésor  I  ^  c~nYir~r)|  Montemto;  le  préposé  du  trésor  Pefront-,  le  porte-chasse-mouche  (^^^^ 
"00  ïï  I  Koro;  le  contrôleur  (=D=^         1  Pebesa:  le  contrôleur  Katenten;  le  contrôleur  Baarmohar;  le 

»  contrôleur  Peensennou;  le  contrôleur  Thot  va/  nefer;  le  lieutenant  du  roi  (I  /  ^    v^£iAI  Peu  rs 

»  maou  ;  le  scnoe  de  la  bibliothèque  ~  ~  ^.  .   ,     .         .  • 


ra 


v\      ^  I  Phra  em  heb  ;  le  porte-enseigne 
»du  corps  des  domestiques  (^^^^10  '         MM   1   ^'''^^^^^^^'J         "• ^  ^  I  Hora.  »  J'aurai 


l'occasion  de  revenir  bientôt  sur  la  composition  du  conseil  ordinaire  du  roi  comprenant  siirtout  l'ensemble 
des  T   I  ^  ^  1  ou  compagnons  royaux  et,  en  premier  lieu,  les  ministres  qui  font  toujotirs  figurer  les  deux 


titres,  comme  Ut'a  Horresntpa  se  vantant  dêtre     D    "^^^l/^XT^IY         "Y"         (J^\  un  «grand 

û Û^W^^     ^1       I   O  11  #  ^_M^AA^AAA 

prince,  royal  ministre,  l'un  des  compagnons  (royaux)  vivant  pai-mi  eux»  (voir  la  Bévue,  année  1880,  p.  77). 
3  M.  Chabas  fait  remarquer  dans  les  Mélanges  (III,  p.  8  et  suiv.)  que  le  roi,  en  confiant  l'affaire  aux 
membres  de  cette  commission  nommée  par  lui,  avait  eu  cependant  bien  soin  de  leur  recommander  l'impar- 
tialité.  «  Je  charge,   dit-il,  des  criminels  du  pays  le  préposé,  etc en  disant  les  paroles  qu'ont  dites  les 

«hommes,  je  ne  les  connais  pas  :  Allez!  Jugez-les!  —  Allant  et  les  jugeant  et  faisant  mourir  en  leurs 
«corps  ceux  qui  ont  donné  la  mort  de  leurs  mains  —  et  je  ne  les  connais  pas!  —  Et  faisant  châtier  les 
«autres,  —  et  je  ne  les  connais  pas  en  réalité!  —  Or  donc,  je  vous  dis  :  Ayez  du  cœur!  Gardez-vous  de  faire 
«châtier  quiconque  serait  prévenu  de  délit  et  sur  qui  cela  ne  tombe  pas,  relativement  à  eux!  Ne  résistez 
«pas!  Quelque  chose  qui  ait  été  faite,  ceux  qui  l'ont  faite,  que  tout  ce  qu'ils  ont  fait  soit  sur  leur  tête. 
»  Je  protège  i  je  prends  soin  à  toujours.  Je  suis  avec  les  rois  de  la  justice  qui  sont  devant  Amon  Ra,  roi 
«des  dieux,  et  devant  Osiris,  souverain  de  l'Eternité!»  Ce  discours  est  magnifique,  et  M.  Chabas  a  bien 
soin  de  faire  remarquer  (ibid.  p.  4)  que  «cet  extrême  respect  des  Égyptiens  pour  la  justice  et  pour  l'indé- 
«pendance  de  ses  organes  était,  d'ailleurs,  bien  caractérisée  par  les  dispositions  de  cette  loi  citée  par  Plu- 
«tarque  {apophthégmes  usages  des  rois  d'Egypte),  en  vertu  de  laquelle  les  rois  devaient  faire  prêter  aux 
«juges  le  serment  qu'ils  n'obéiraient  pas  si  le  prince  leur  ordonnait  quelque  chose  d'injuste.»  Le  passage 
de  Diodore  que  nous  avons  donné  dans  le  précédent  numéro  de  la  Eevue  (p.  63  et  64),  et  qu'analyse  égale- 
ment M.  Chabas  à  ce  propos,  confirme  le  dire  de  Plutarque  puisque  Diodore  trouve  étrange  que  le  roi  «  ne 
puisse  prendre  en  Egypte  une  décision  ni  punir  quelqu'un,  soit  par  passion,  soit  par  caprice  ou  par  toute 
autre  raison  injuste,  mais  qu'il  soit  obligé  d'agir  conformément  aux  lois  pour  chaque  cas  particulier.» 

2 


10  Eugène  Revillodt. 


Mais,  en  thèse  générale,  on  laissait  l'examen  des  causes  aux  tribunaux  ordinaires,  c'est- 
à-dire  pour  les  causes  correctionnelles  et  criminelles  aux  assises^  présidées  par  le  gouverneur 

'  C'est  le  mot  même  dont  se  sert  avec  raison  M.  Chabas  {Mél.  III,  p.  13] — 133),  à  propos  des  juges 
chargés  d'examiner  l'affaire  en  violation  de  sculptures  que  contiennent  les  papyrus  Abbot  et  Amhurst. 
Voici  par  exemple  le  procès-verbal  de  l'une  des  séances  —  celle  où  fut  acquittée  une  partie  des  coupables 

—  telle  quelle  est  donnée  d'une  façon  fort  concordante  à  quelques  légers  détails  près  —  dans  la  traduction 
du  papyrus  Abbot,  publiée  en  1870  par  M,  Chabas,  et  dans  celle  qui  fut  publiée  en  1874  par  M.  Maspero 

—  (qui  cependant  ignorait,  paraît-il,  l'œuvre  de  son  illustre  devancier)  : 

«L'an  16,  d'Athyr  le  2^  jour.  Ce  jour-là  aux  grandes  assises  de  la  ville  près  des  deux  stèles  d'Amon, 
»à  l'entrée  de  la  terrasse  d'Amon  à  la  porte  de  l'adoration  de  Rekhis. 

«Magistrats  qui  furent  siégeant  aux  grandes  assises  de  la  ville  ce  jour-là  :  le  poliarque  gouverneur 
»Xa-em-uas;  le  premier  prophète  d'Amon  Ea,  roi  des  dieux,  Amenhotep,  le  prophète  d'Amon  Ra,  roi  des 
»  dieux,  le  scribe  Nes-su-Amen,  des  temples  des  millions  d'années  du  roi  des  contrées  supérieures  et  infé- 
»  rieures  Nefer-7ca-7-a  sotep  en  Ra  (Ramsès  IX  le  roi  régnant)  ;  le  contrôleur  royal  Nassviamen,  le  scribe  de  S.  M.  -, 
»le  Majordome  de  la  demeure  de  la  divine  adoratrice  d'Amon  Ra,  roi  des  dieux;  le  contrôleur  royal  Nefer 
»  ka-em-pa-Amen,  le  lieutenant  du  roi,  le  général  Hora  de  la  cavalerie,  le  porte-enseigne  Hora  des  marins, 
»le  chef  primat  de  la  ville. 

'  «  Voici  que  le  poliarque  gouverneur  Xa-em-uas  fit  amener  l'ouvrier  en  métaux  Pa/or,  fils  de  Xari, 
»  l'ouvrier  en  métaux  Djari,  fils  de  Xa  em  apt,  l'ouvrier  en  métaux  Pekamen,  fils  de  Djari,  du  temple  d'Ou- 
»  sor-ma-ra-meri  Amen  (Ramsès  III)  qui  est  sous  l'autorité  du  premier  prophète  d'Amon. 
«Le  gouverneur  dit  aux  grands  magistrats  des  grandes  assises  de  la  ville  : 

«Le  primat  de  la  ville  a  dit  quelques  paroles  des  agents  et  des  ouvriers  du  Kher,  en  l'an  16,  le  19  athyr, 
»en  présence  du  contrôleur  royal,  Nassuamen,  et  du  scribe  de  S.  M.,  et  il  s'est  donné  carrière  relativement 
»aux  lieux  grands  (aux  hypogées)  qui  sont  dans  la  demeure  des  très  bons.  Alors  je  fus  là  en  ma  qualité  de 
«gouverneur  du  pays  avec  le  contrôleur  royal  Nessuamen  et  le  scribe  du  Pharaon.  Nous  avons  vérifié  les 
»  lieux  dont  le  primat  de  la  ville  avait  dit  :  «  Les  ouvriers  en  métaux  de  la  demeure  de  Ea  user  ma  meri  Amen 
»  y  sont  parvenus.  »  Nous  les  trouvâmes  en  bon  état,  trouvant  mensonge  en  tout  ce  qu'il  avait  dit.  Or,  voici 
»que  les  ouvriers  en  métaux  se  trouvent  devant  vous,  déclarant  tout  ce  qui  est  arrivé. 

«  On  délibéra  et  il  fut  trouvé  que  ces  gens  ne  connaissaient  aucun  des  lieux  qui  sont  dans  la  demeure 
»  des  très  bons,  et  au  sujet  desquels  le  primat  de  la  ville  avait  dit  ces  paroles.  Il  a  failli  en  cela.  Les  grands 
»  magistrats  accordent  donc  les  souffles  de  la  vie  aux  ouvriers  en  métaux  du  temple  d' Ousor-ma-i-a-meri 
»Amen  qui  sont  dans  la  demeure  d'Amon  aux  ordres  du  premier  prophète  d'Amen  Ra,  Amenhotep. 
«  En  ce  jour-là  ils  ont  signé  au  registre  qui  fut  déposé  dans  les  archives  du  gouvernement.  » 
Là  ne  se  termine  pas  l'affaire.  On  mit  la  main  sur  les  vrais  coupables  qui,  au  nombre  de  huit,  avaient 
violé  une  des  tombes  royales.  On  les  soumit  à  la  question.  On  fit  la  confrontation  des  lieux.  Malheureusement, 
nous  n'avons  plus  le  compte-rendu  des  assises  dans  lesquelles  ils  furent  condamnés.  Je  le  regrette;  car  nous 
saurions  ainsi  si  les  condamnations  ne  nécessitaient  pas  une  procédure  pins  minutieuse  que  les  simples  ordon- 
nances de  non-lieu.  Les  magistrats  qui  rendirent  celle  que  nous  venons  de  reproduire  intervenaient-ils  seuls 

alors  ou  consultait-on  la  grande  multitude  (-©o)  de  la  ville  <=i  v\       ^     o  c'est-à-dire  suivant  une 

,  T         •  rr^^la  I      I      I  aaaaaaO        I 

des  exphcations  qui  ont  été  données  —  le  peuple  de  Thébes,  qui  était  là  réuni  en  plein  vent  sur  la  place 
d'Amon  —  comme  sur  Yagora  des  villes  grecques. 

La  nouvelle  explication  de  M.  Brugsch  qu'il  a  donnée  dans  son  SuppUm.  au  DicL,  p.  1306  depuis 

l'impression  de  cet  article  est  un  peu  différente.  Mais  elle  arrive  à  peu  près  au  même.  Il  voit  dans      U-p, 

SU 

D  cr~3  et  les  autres  formes  du  même  mot  le  nom  même  de  la  porte  (copte  ^yoTdwi-TOTJk.)  ou  du  pylône 

près  duquel  la  foule  se  réunissait  pour  les  jugements  comme  chez  les  juifs.  De  là  serait  venue  l'expression 

^    poiir  désigner  les  gens  qui  siégeaient  à  la  porte  de  justice,  c'est-à-dire  l'assemblée  des  juges  : 

^aV  "iy?r  73  selon  l'expression  juive  (voir  ibid.,  p.  1308).         ^     £=>   aa^wn  est  aussi  traduit  :  Bas  hoke 

Gericht  der  Stadt.  Ce  mot  prenait  même  l'article  du  féminin  pour  designer  la  justice,  l'assemblée  des  juges. 

D'une  autre  part  le  grand  juge  était  appelé  ^^^7?^^?  «eô  ta  (voir  ibid.  389  et  1036)  selon  ce  mot  d'Hor- 

apollon  (40,  1)  i-pyiYi  Se  ?]  oixaaTrjv  ejîàv  ypacpwat,  xpoaTiQ^aui  tw  y.uvi  1  }?t^^  )  "/-aï  |3aaiXi/.riv  «jtoXtiv  :îapaxEi[jL^vriv  (o<). 

M.  Brugsch  remarque  aussi  que  ce  grand  juge  était  souvent  stratège        \  fCfZ*     titre  que  porte  le  grand 

juge  des  papyrus  judiciaires  publiés  par  MM.  Birch,  Chabas  et  Devéria.  Il  a  donné  plusieurs  exemples  de 


Le  teibunal  égyptien  de  Thèbes.  11 

rc^  ^  ^  )  —  ^^^  ^^^  Lagides  ont  remplacé  par  le  stratège  —  et  pour 
les  causes  proprement  civiles  aux  tribunaux  hiératiques  ',  seuls  interprètes  du  célèbre  code 
en  huit  tomes  dont  nous  entretient  Diodore  de  Sicile.  C'est  de  cette  dernière  juridiction  que 
nous  avons  à  parler  en  ce  moment. 

Ainsi  que  nous  l'avons  dit  dans  des  travaux  précédents ^  l'administration  de  la  justice 
civile  était  surtout  coutiée  au  tribunal  des  trente  juges  sur  lequel  Diodore  de  Sicile  ^  s'ex- 
prime en  ces  tenues  : 

«Les  Égyjrtiens  apportaient  un  soin  tout  particulier  aux  jugements,  pensant  que  les 
»  décisions  prises  dans  le  tribunal  ont,  sous  un  double  rapport,  la  plus  grande  importance 
»  dans  la  vie  sociale  ;  car  il  leur  parut  évident  que  si  les  criminels  étaient  punis  et  si  ceux 
»  qui  avaient  été  opprimés  étaient  secourus,  on  pourrait  aussi  reprimer  les  crimes,  mais  que 
■»  si  au  contraire  la  terreur  imprimée  aux  méchants  par  la  justice  pouvait  être  efifacée  soit 
»par  argent  soit  par  faveur  il  eu  résulterait  le  trouble  de  toute  société.  Ce  n'est  donc  pas 
»  sans  raison  qu'ils  ordonnèrent  de  mettre  à  la  tête  de  la  justice  les  personnages  les  meilleurs 
»des  plus  nobles  cités  et  qu'ils  choisissaient  dix  juges  dHéliopolis,  dix  juges  de  Thèbes  et 
»dix  juges  de  Memphis  (les  trois  principaux  sanctuaires  de  l'Egypte),  ce  qui  formait  une 
»  assemblée  non  inférieure  à  l'Aréopage  d'Athènes  et  au  sénat  de  Lacédémone.  Ces  trente 
»  juges  réunis  eu  un  seul  collège  —  et  certes  un  collège  excellent!  —  devaient  eux-même 
»  choisir  un  grand  juge,  que  la  ville  (dont  il  provenait),  remplaçait  aussitôt  (parmi  les  trente 
»par  nouvelle  élection).  Le  vivre  et  tout  le  reste  était  fourni  à  ces  sages  par  le  roi,  mais 
»  beaucoup  plus  abondamment  au  grand-juge.  Celui-ci  portait  l'image  de  la  vérité  (la  déesse 
■»  Ma  <À\  en  pierres  précieuses,  suspendu  à  son  cou  par  une  chaîne  d'or.  La  cour  entrait  en 
»  délibération  quand  le  grand-juge  se  revêtait  de  cet  emblème.  Alors  toutes  les  lois,  écrites 
»  en  huit  livres,  ayant  été  apportées  auprès  des  juges,  l'usage  était  que  le  plaignant  montrât 
»  par  écrit  ^  le  sujet  de  sa  plainte,  les  circonstances  du  déUt  et  l'estimation  du  tort  fait.  Le 
»  défendeur  après  avoir  reçu  le  libelle  de  son  adversaire,  répliquait  également  par  écrit  à 
»  chaque  chef  d'accusatiou  et  montrait  qu'il  n'avait  pas  fait  l'action  qu'on  lui  reprochait  ou 
»  qu'en  l'accompUssant  il  n'avait  pas  commis  de  faute  ou  du  moins  que  s'il  avait  commis  une 
»  faute  il  méritait  une  moindre  peine.     Ensuite  le  plaignant  répondait  encore  par  écrit  et  le 

ces  associations  de  titres.    Il  admet,  du  reste,  aussi  comme  Devéeia  et  comme  nous,  l'assimilation  entre  le 
tribunal  suprême  des  30  juges  de  Dioscore  et  les  4       présidés  par  le  grand  juge. 

1  Aelien  nous  apprend,  en  effet  {Hist.,  liv.  14,  34),  que  les  juges  étaient  en  même  temps  prêtres.  Il 
parle,  sans  aucun  doute,  des  juges  en  matière  civile;  car  les  juges  qui  assistaient  le  gouverneur  pour  les 
causes  criminelles  étaient  pris,  comme  l'a  fort  bien  fait  remarquer  M.  Chabas,  à  propos  du  passage  d' Aelien 
{Mél.  III,  136).  «non-seulement  dans  l'ordre  sacerdotal,  mais  dans  les  finances,  dans  l'économat,  dans  l'ad- 
ministration, dans  l'armée  et  même  dans  la  marine.  » 

2  Voir  :    Un  procès  devant  les  laoci-ites. 

3  Diodore,  liv.  I,  cbap.  76.  A'oir  aussi  le  cbap.  48,  où  Diodore  décrit  une  scène  judiciaire  analogue 
à  son  exposé  et  qui  se  trouvait  sur  le  tombeau  d'Osymandias. 

*  Les  séances  judiciaires  du  saa-mn  auditorium  présidé  par  l'empereur,  du  temps  des  Antonins,  étaient 
tout  aussi  courtes  et  solennelles.  Les  plaidoyers  se  résumaient  en  quelques  mots,  puis  venait  la  réplique, 
l'interlocution  de  l'avocat  du  fisc  et  la  décision  impériale.  Nous  avons  encore  dans  le  Corpus  juris  les  repro- 
ductions de  quelques-unes  des  affaires  traitées  ainsi.  Cela  était  indispensable  pour  que  l'empereur  pût  juger 
le  monde  entier  en  dernier  ressort. 

2* 


12  Eugène  Revillout. 


»  défendeur  répliquait  de  même  à  son  tour.  Quand  chacune  des  parties  avait  ainsi  proposé 
»  aux  juges  deux  libelles  c'était  aux  trente  élus  à  dire  chacun  leur  avis  et  l'office  du  grand- 
»  juge  consistait  à  présenter  l'image  de  la  vérité  à  ceux  qui  contro versaient  de  la  sorte. 

«C'est  ainsi  que  tous  les  jugements  se  faisaient  chez  les  Égyptiens  qui  étaient  d'avis 
»  que  les  avocats  ne  font  qu'obscurcir  les  causes  par  leurs  discours  et  que  l'art  de  l'orateur, 
»la  magie  de  l'action,  les  larmes  des  accusés,  entraînent  souvent  à  fermer  les  yeux  sur  la 
y>  loi  et  la  vérité.  En  effet,  il  n'est  pas  rare  de  voir  les  magistrats  les  plus  exercés  se  laisser 
»  séduire  par  la  puissance  d'une  parole  trompeuse.  Aussi  croyaient-ils  pouvoir  mieux  juger 
»  une  cause  en  la  faisant  mettre  par  écrit  et  en  la  dépouillant  des  charmes  de  la  parole.  De 
»  cette  manière  les  esprits  prompts  n'ont  aucun  avantage  sur  ceux  qui  ont  la  parole  plus 
»  lente,  les  expérimentés  ne  l'emportent  pas  sur  les  ignorants  ni  les  menteurs  et  les  effrontés 
»  sur  ceux  qui  aiment  la  vérité.  Tous  jouissent  de  droits  égaux  ;  car  un  temps  suffisant  est 
»  accordé  par  la  loi  aux  adversaires  pour  exposer  ce  qu'ils  ont  à  dire  l'un  contre  l'autre  et 
»  aux  juges  pour  comparer  et  juger  leurs  dires  contradictoires.  » 

Diodore  de  Sicile  est,  somme  toute,  comme  je  l'ai  dit  ',  d'une  grande  exactitude  dans 
cette  description  comme,  du  reste,  dans  tout  ce  qui  concerne  les  lois  égyptiennes,  dont  il  avait 
fait  une  étude  approfondie;  nos  conti-ats  démotiques  nous  ont  souvent  démontré  ce  fait  avec 
une  évidence  incontestable.  Mais  en  ce  qui  touche  ce  tribunal  suprême  des  trente  juges 
nous,  avons  des  renseignements  d'une  antiquité  beaucoup  plus  grande  encore.  Les  trente 
suteni  il         0  0   H  ou    I  n  ou    I  ou  encore  11)  sont  en  effet  mentionnés  dans 

\  T    /\f\AJ\/V\     lin  T     A/'A/WV   n  I     AA/^AAA  III  Ci  I  / 

une  foule  énorme  de  documents  hiéroglyphiques  de  toute  époque,  Nous  voyons  même  par  la 
stèle  B  26  du  Louvre  que  dès  la  douzième  dynastie  ce  tribunal  existait  et  comptait,  outre 
les  ti-ente  conseillers  officiels,  un  certain  nombre  de  magistrats  inférieurs.  Car  cette  stèle 
mentionne  un  setem  ou  auditeur  de  la  demeure  des  trente  qu'on  pourrait  comparer  à  nos 
auditeurs  au  conseil  d'état  et  aux  anciens  conseillers  auditeurs  des  cours  royales  sous  la  restau- 
ration. La  stèle  E  3294  nomme  aussi  un  chef  des  trente  suten  1  ^^  4  i  )  ou  plus  exacte- 
ment des  trois  dixaines  de  royaux  comme  traduit  Devéria  et  le  monument  portant  dans 
notre  collection   le  n"  A  60  ^  représentait  en  pieds  un  autre  président  de  ce  même  conseil 


'   Chrestomathîe  démotique,  V^  fasc.  p.  CXXII. 
2  Voici  la  principale  des  inscriptions  du  socle 


1    I    lil       ®è^  li|!nnn11  ^' 


«Le  grand  prince,  royal  ministre,  aimé  de  son  maître,  choisi  par  le  roi  dans  le  sanctuaire  de  Ptah 
»(nom  sacré  du  sanctuaire  Memphite)  à  cause  de  sa  vertu;  (étant)  dans  le  cœur  de  son  dieu-,  le  régulateur 

>  de  la  justice  dans  le  conseil  des  trente,  dont  toutes  les  paroles  sont  équité  (même  racine  que  1  /K  Q^" 
»en  est  la  forme  intensive),  dont  toute  la  fortune  (vices  ejusj  est  dans  les  bonnes  œuvres  (l'œuvre  lumi- 
»neuse  honorable.)» 

«  Le  sam,  chef  de  V œuvre  (grand  prêtre  de  Memphis)  Ptahméri  dit  :  Si  il  y  a  honneur  à  faire  la  vérité, 
»  je  serai  honoré,  je  suivrai  Oun  nofre  (l'Être  bon  —  Osiris).  J'ai  fait  les  transformations  divines  dans ...» 


Le  tribunal  égyptien  de  Thèbes.  13 

sous  la  dix-huitième  dynastie.  Ce  haut  personnage  est  appelé  grand  prince  royal  ministre 
(sans  doute  ministre  de  la  justice;  car  nous  avons  vu  ceux  qui  portaient  ce  titre  chargés 
des  départements  les  plus  différents)  ;  et  l'inscription  ajoute  expressément  qu'il  était  parti- 
culièrement aimé  de  son  souverain  qui  l'avait  choisi  à  cause  de  sa  vertu  dans  le  temple  de 
Ptah  (c'est-à-dire  dans  le  grand  temple  de  Memphis),  dont  il  devint  sam  ou  pontife  suprême. 
C'est  de  là  qu'il  fut  envoyé  comme  député  de  Memphis  au  tribunal  des  trente  dont  il  devint 
le  président;  car  notre  texte  lui  donne  le  titre  de  régulateur  de  la  justice  dans  le  conseil 
des  trente.  Ptahméri,  notre  grand  juge,  est  représenté  aveô  une  longue  robe  d'étoffe  rayée, 
tombant  jusqu'aux  pieds  et  recouverte  d'une  peau  de  panthère,  insigne  ordinaire  des  pontifes 
de  Ptah.  Ses  pieds  sont  chaussés  de  riches  sandales  à  larges  brides  et  munies  de  grosses 
boucles  en  métal.  Mais  la  statue  étant  brisée  à  partir  de  la  ceinture,  nous  ne  pouvons  voir 
s'il  portait,  comme  Diodore  l'affirme  pour  le  grand-juge,  une  figurine  en  pierres  précieuses  de 
la  déesse  Vérité.  Nous  possédons  au  Louvre  (Devéria  l'a  déjà  remarqué  dans  son  étude  sur 
le  papyrus  judiciaire  de  Turin,  p.  84)  des  figurines  de  ce  genre  de  la  déesse  Ma  (la  vérité 
ou  la  justice  personnifiée),  qui  sont  sculptées  sur  lapis  lazuli  avec  une  admirable  finesse, 
ainsi  qu'un  cercueil  de  momie,  portant  au  cou  cette  même  image.  L'affirmation  de  Diodore 
de  Sicile  paraît  donc  très  probable. 

Nous  ne  mentionnerons  pas  ici  les  autres  monuments  —  innombrables  —  dans  lesquels 
il  est  question  des  trente  juges;  et  nous  nous  bornerons  à  faire  remarquer  que  leur  prestige 
devait  être  grand,  puisque,  choisis  par  l'élection,  ils  devaient  ensuite  de  par  la  loi  rester  en 
dehors  de  toute  situation  pouvant  influer  sur  leur  impartialité  '.  Mais  on  conçoit  que  ces 
magistrats  —  quelque  admirables,  zélés  et  expéditifs  qu'ils  pussent  être  —  ne  pouvaient  à 
eux  seuls  juger  toutes  les  causes  de  l'Egypte  et  jusqu'aux  affaires  les  plus  infimes.  Il  fallait 
donc  nécessairement  qu'en  dehors  de  cette  cour  suprême  si  honorée  il  y  eut  d'autres  tribu- 
naux d'un  ordre  inférieur  dans  la  plupart  des  villes  importantes.  C'est  ce  que  nous  prouvent 
en  effet  les  textes,  particuUèrement  pour  la  ville  de  Thèbes.  Uu  curieux  papyrus  qu'a  fait 
connaître  M.  Erman^  nous  apprend  même  la  composition  de  ce  tribunal  sous  les  Ramessides 
pour  une  cause  purement  civile  et  il  vient  confirmer  le  dire  d'Aelien,  cité  plus  haut  sur 
l'origine  sacerdotale  de  tous  les  juges  ordinaires  de  l'Egypte. 

Comme  dans  la  cour  suprême  des  trente  juges,  choisis,  selon  Diodore,  dans  les  sanc- 
tuaires de  Thèbes,  Memphis  et  Héliopolis,  ce  tribunal  civil  d'ordre  inférieur,  séant  à  Thèbes, 

Malheureusement,  la  suite  est  sans  cesse  interrompue  par  les  lacunes.  Ptahméri  parle  ensuite  des  biens  et 
offrandes  funéraires  qui  lui  seront  accordées,  et  il  dit  qu'il  accompagnera  le  soleil  dans  son  voyage  vers 

l'hémisphère  inférieur  et  qu'il  ne  sera  pas  retardé  dans  sa  navigation  vers  le  neteryet- ...    '  r]  .^a^  (j 

^  A . . .  ^iz^i  }^  ^n^ '^'^w.A  ^  n  .  .  . 

On  peut  comparer  cette  légende  avec  cette  autre  d'une  palette  du  Musée  du  Louvre  citée  par  Brugsch- 
Pacha,  p.  392  de  son  Supplément  (paru  depuis  l'impression  de  cet  article  :     D    . ^^ p  loAJi  /i\cn 

o^Sj  ■  •  •  •  vÇ^T^yfPki^lMrM^)- 

«Le  grand  prince  agent  du  roi  d'Egypte  pour  ses  jugements,  grand  juge  de  la  porte,  poliarque,  grand 
»  chef  de  l'œuvre  et  sam  (grand  prêtre  de  Memphis)  Ptahmès,  proférant  la  vérité  dans  la  maison  du  roi.  » 
Ptahmès  était  comme  Ptahméri  grand  prêtre  de  Memphis  et  président  du  tribunal  des  30  juges. 
*  On  peut  cependant  douter  qu'il  en  ait  été  toujours  ainsi. 
2  Zeitschrift  de  Berlin. 


14  Eugène  Revillout. 


est  exclusivement  composé  de  prêtres;  car  il  lui  fallait  rendre  la  justice  non  pas  d'après 
les  simples  principes  d'équité  naturelle  comme  dans  les  questions  de  faits  entachés  de  crimi- 
nalité et  soumis  aux  assises,  mais  d'après  les  termes  mêmes  des  huit  tomes  de  la  loi  écrite 
qui  fixait  seule  les  questions  de  famille  et  de  propriété  et  formait  le  domaine  exclusif  des 
castes  sacerdotales  ^  Dans  l'espèce  il  s'agissait  alors  d'un  champ  cédé  à  un  temple  par  le 
scribe  Nofre  ahu  qui  s'en  était  réservé  l'usufruit.  Cet  usufruit  dont  il  ne  s'était  pas  ser\i 
pendant  un  certain  temps  lui  avait  été  refusé  quand  ensuite  il  l'avait  exigé  et  le  tribunal 
avait  à  décider  l'affaire.  Hâtons-nous  de  constater  en  passant  que  la  procédure  alors  suivie 
rentre  admirablement  dans  les  règles  générales  posées  par  Diodore.  Comme  devant  les  trente 
juges,  on  ne  voit  figurer  aucun  avocat.  Les  parties  sont  interrogées  successivement;  le 
demandeur  d'abord  puis  le  défendeur.  Seulement  le  tribunal  étant  sans  doute  moins  occupé 
que  la  cour,  il  leur  est  permis  de  s'exprimer  de  vive  voix  au  lieu  de  se  borner  à  de  simples 
notes  toujours  plus  brèves.  Enfin  (après  la  faculté  d'une  double  réplique),  les  juges  se 
prononcent  et  dans  l'affaire  pubhée  par  M,  Erman,  ils  ne  font  guère  que  confirmer  une 
transaction  en  justice  arrachée  aux  parties  par  la  force  de  la  vérité.  Bien  qu'il  eut  à  plaider 
avec  un  prêtre  devant  un  tribunal  sacerdotal,  Nofre  abu  eut  gain  de  cause,  ce  qui  est  une 
preuve  évidente  de  l'impartialité  des  juges.  Voici  maintenant  la  composition  de  ce  tribunal 
telle  qu'elle  est  donnée  dans  le  procès  verbal  de  la  séance  : 

«L'an  46,  le  14  de  Paophi,  sous  sa  Majesté  le  roi,  seigneur  des  deux  pays,  Ra  user 
»  ma  sotep  en  ra,  fils  du  soleil,  seigneur  des  diadèmes,  Ramessu  meri  ameyi  hek  An  (Ramsès  .  .  .) 
»  aimé  d'Amon  ra  le  roi  des  dieux,  doué  de  vie  éternellement.  —  En  ce  jour.  —  Fait  dans 
»la  grande  salle  du  tribunal  de  Pharaon  dans  la  ville  du  Sud  (à  Thèbes),  près  du  pylône 
»  Heri-her  ma  (satisfait  par  la  vérité)  à  la  grande  porte  de  Ramsès  II,  eu  face  d'Amon.  — 

« —  Magistrats  de  ce  jour 

«Le  premier  prophète  d'Amon  Bok  n  /onsu 

«  Le  prophète  d'Amon  User  mentu 

«Le  prophète  d'Amon  Rama 

«Le  prophète  Oun  nofre  du  temple  de  Maut 

«  Le  prophète  Amen  mau  du  temple  de  Chons 

«Le  père  divin  Amen  em  apt  du  temple  d'Amon 

«Le  prêtre  Xerheb  d'Amon  Amenhotep 

«Le  prêtre  Xerheb  d'Amon  Ani 

«Le  prêtre  Hui  du  temple  d'Amon 

«Le  scribe  des  comptes  Hui  du  tribunal  de  la  ville 

«  Le  scribe  Nofre  abu  se  plaint,  etc.  » 

Tous  les  juges  mentionnés  ci-dessus  font  partie  du  sacré  collège  des  prêtres  d'Amon. 
Or  justement  un  contrat  démotique  que  nous  avons  copié  l'an  passé  à  Londres,  nous  montre 
qu'il  en  fut  de  même  pour  un  procès  —  également  civil  —  dans  lequel  on  ne  voit  mettre 
en  cause  aucun  prêtre  —  comme  on  pourrait  le  dire  pour  celui  de  Nofre  abu.  —  C'est  donc 
bien  Aelien  qui  a  définitivement  raison. 


*  Nous  reviendrons  sur  ce  sujet. 


Le  tribunal  égyptien  de  Thèbes.  15 

Voici  l'acte  en  question  : 

«L'an  17,  durci  Ptolémée,  fils  de  Ptolémée  et  d'Arsinoë,  les  dieux  frères,  Mennas,  fils 
»  de  Menetios  étant  prêtre  d'Alexandre,  des  dieux  frères  et  des  dieux  évergètes.  Bérénice, 
»  fille  d'Adaeos  étant  canéphore  devant  Arsinoë  philadelphe. 

«Le  taricheute  de  la  nécropole  de  Djème  Nofre  ....  fils  d'Amenhotep  dont  la  mère 
»est  Tset  Thot  dit  à  la  femme 

«J'ai  fait  transaction  avec  toi  devant  les  juges  des  prêtres  d'Amon  au  sujet  de  ton 
«appartement  oriental  et  des  pavillons  qui  en  dépendent  et  de  la  moitié  du  jardin  et  de  la 
»  moitié  de  la  *\iA.  Que  tu  montes  par  l'escalier  à  la  partie  supérieure  de  tes  lieux  indiqués 
»  ci-dessus.  Que  tu  puisses  bâtir  sur  les  murs  de  la  maison  nommée,  qui  est  dans  le  quartier 
»nord  de  Thèbes  dans  le  Rotem  de et  dont  est  à 

«Les  voisins  de  la  maison  entière  sont  :  au  sud  la  maison  de de  Silo  et  la 

»  maison  close  et  couverte  de  Thot  ne-/t  (?),  au  nord  le  terrain  vide  (o^peç^)  des  charpentiers, 
»à  l'orient  la  maison   de  Troian,  le  feimier  qui  est  pour  Thot  son  ....  ;  à  l'occident  la 

»  maison  de  Sotem  qui  est  pour  Sesou  l'homme  de tels  sont  les  voisins  de  toute  la 

«maison  bâtie,  couverte,  ci-dessus  dont  tu  as  la  moitié,  ainsi  que  la  moitié  du  pavillon,  la 
»  moitié  du  jardin  et  la  moitié  de  la  *Ai\  qui  en  fait  partie.  Que  tu  montes  par  l'escalier 
»au  dessus  de  tes  lieux  ci-dessus.  Que  tu  puisses  construire  sur  les  murs  de  la  maison 
»  nommée.  Que  tu  sortes  dehors  par  la  porte  qui  est  au  milieu  de  la  maison  nommée  sur  la 
»rue  du  roi.  Les  juges  ont  donné  acte  de  ces  choses  à  ma  charge.  A  toi  ton  appartement 
»  oriental  et  le  pavillon  qui  en  dépend,  etc.  Je  n'ai  plus  aucune  parole  au  monde  à  te  faire 
»à  ce  sujet  depuis  le  jour  ci-dessus.  Celui  qui  viendra  t'inquiéter  pour  cela  je  le  ferai 
»  s'éloigner  de  toi  de  force,  sans  délai.  Je  t'obligerai  un  droit  résultant  de  l'écrit  de  cession 
»que  tu  m'as  fait  sur  les  pavillons  situés  sur  la  montagne  de  Djème  en  l'an  17  du  roi  à 
»vie  éternelle  pour  que  tu  en  accomphsses  le  droit  en  tout  temps.  Moi,  je  te  céderai  tes 
»  lieux  ci-dessus  sans  aucune  opposition.  A  écrit  Chons  Thot,  fils  de  Hor.  » 

Nous  retrouvons  des  formules  juridiques  très  analogues  dans  un  autre  acte  que  nous 
pubUons  et  commentons  (p.  135  et  suiv.)  dans  notre  Procès  d.'Hermias,  autographié  depuis 
un  an  et  demi  •  jusqu'à  la  18®  feuille  (environ  moitié  de  l'ouvrage),  mais  qui  n'a  pas  encore 
paru.  H  nous  paraît  utile  de  rapprocher  cet  acte  de  Berlin  de  l'acte  de  Londres. 

«L'an  29,  Pharmouthi  12,  du  roi  Ptolémée  Évergète,  fils  de  Ptolémée  et  de  la  reine 
»  Cléopatre,  et  de  Cléopatre  sa  femme,  sous  le  prêtre  d'Alexandre  et  des  dieux  sauveurs  et 
»des  dieux  frères,  des  dieux  évergètes,  des  dieux  philopators,  des  dieux  épiphanes,  du  dieu 

»philométor,  du  dieu  eupator,  du  dieu et  sous  l'athlophore  de  Bérénice  Evergète, 

»et  la  canéphore  devant  Arsinoë  philadelphe  et  la  prêtresse  d' Arsinoë  philopatre,  comme  ils 
»  sont  établis  à  Alexandrie  ;  et  sous  celui  que  le  roi  a  établi  dans  la  région  de  Thèbes, 
»  prêtre  de  Ptolémée  Soter,  et  sous  le  prêtre  du  roi  Ptolémée,  le  dieu  évergète,  et  sous  le 
»  prêtre  de  Ptolémée  philopator  et  sous  le  prêtre  de  Ptolémée,  le  dieu  Épiphane,  euchariste, 
»et  sous  le  prêtre  du  roi  Ptolémée,  et  sous  la  prêtresse  de  Cléopatre  la  mère,  la  déesse  épi- 
»phane,  et  sous  la  canéphore  devant  Arsinoë  philadelphe, 

'  Il  y  a  maintenant  trois  ans  et  demi  de  cela.  Le  premier  a  été  distribué  à  l'Académie. 


16  Eugène  Revillout.  Le  tribunal  égyptien  de  Thèbes. 

«Ont  dit,  d'une  seule  bouche  :  le  pastophore  d'Amon  Api,  de  l'occident  de  Thèbes, 
»Pecliytes,  fils  d'Hor-si-ési  dont  la  mère  est  (Tinoun)  et  Nechutès,  fils  d'Asos,  dont  la  mère 
»  est  Taia,  et  Téepbib,  fils  d'Amenhotep,  dont  la  mère  est  Tahba,  en  tout  trois  personnes  — 
»  au  pastophore  d'Amon  Api,  de  l'occident  de  Thèbes,  Hor,  fils  d'Hor,  dont  la  mère  est 
»  Senpoer  : 

«  Nous  avons  fait  transaction  avec  toi  devant  les  juges  qui  font  justice  à  Thèbes  ', 
»  au  sujet  de  la  part  du  septième  de  l'o^peç^  de  maison  (v\riA.oTonoc)  qui  est  dans  le  canton 
»sud  de  Thèbes,  à  l'ouest  du  dromos  de  Chons-em-uas-Nofre-hotep  en  face  du  fleuve,  oirpcç^ 
»  de  maison  dont  l'étendue  totale  est  de  14  aroures  et  un  tiers,  en  jhet  1433  et  un  tiers,  en 
»  aroures  14  et  un  tiers  encore.  Les  voisins  en  sont  :  au  sud  la  maison  de  Petichons,  le 
«chanteur,  et  la  maison  de  Celendja,  et  la  maison  de  Psemin,  fils  d'Ereius,  au  nord  la 
»  maison  de  Pahor,  fils  de  Panofre,  qui  pour  Tachelou,  sa  fille,  et  la  maison  de  Psechons  le 
»  charpentier,  maisons  qui  sont  séparées  de  la  propriété  par  la  ruelle  de  maison  ;  à  l'orient 
»la  rue  du  roi;  à  l'occident  le  canal  de  Tmoui  Amen  que  l'on  appelle  Tamaut.  Tels  sont 
»  les  voisins  de  tout  l'o-rpeç^  de  maison,  dont  Amenhotep,  fils  d'Amenhotep,  Montemhat,  fils 
»  d'Ereius  et  Amenhotep,  fils  de  Téephib,  (ce  qui  fait  trois  personnes),  possèdent  les  autres 
»  tiers  15®  et  35*^  (en  d'autres  termes  :  les  trois  autres  septièmes),  par  part  du  septième  pour 
»  chacun  et  dont  nous  possédons  aussi  le  tiers,  le  15®  et  le  35®  (les  trois  septièmes),  par 
»  part  du  septième  à  chacun,  y  compris  la  superficie  d'une  aroure,  eu  jhet  100^  une  aroure 
yiterum,  au  sujet  de  laquelle  on  a  fait  un  écrit  pour  argent  (un  acte  de  vente),  au  nom 
»  d'Amenhotep  fils  de  Téephib,  et  qui  compte  dans  sa  part  du  septième. 

«Les  juges  (f)  ont  donné  acte  à  notre  charge  pour  la  part  du  septième  de  l'oTpeç  de 
»  maison  ci-dessus  et  les  choses  qui  en  dépendent.  Nous  n'avons  plus  aucune  réclamation  à 
»te  faire  à  ce  sujet.  Celui  qui  viendra  t'inquiéter  pour  cela  en  notre  nom,  nous  l'éloignerons 
»de  toi  sans  délai,  sans  opposition.  A  écrit  Hor,  fils  de  Pabi,  qui  écrit  au  nom  des  prêtres 
»des  cinq  classes  di!Amon  ra,  roi  des  dieux,  et  des  dieux  frères,  des  dieux  évergètes,  des 
»  dieux  philopators,  des  dieux  épiphanes,  du  dieu  philométor,  du  dieu  philopator,  des  dieux 
»  évergètes.  » 

Nous  allons  maintenant  indiquer  ce  que  ces  deux  actes  nous  suggèrent  de  plus  important 
sur  les  tribunaux  grecs  et  égyptiens  sous  les  Lagides,  les  questions  de  législation  et  de  pro- 
cédures appartenant  à  chaque  forme  judiciaire  et  enfin  sur  les  transactions  et  les  partages 
en  justice  faits  à  la  mode  égyptienne. 

(La  suite  prochainement.) 


Récits  de  Dioscore.  17 


EÉCITS  DE  DIOSCOEE 

EXILÉ  A  GANGRES 

SUR  LE  CONCILE  DE  CHALCÉDOINE. 

Second  récit. 

Arrivée  à  Constantinople.   Conférence  doctrinale  tenue  devant  V  empereur. 

Expulsion  de  Macaire. 

(Suite  1.) 

Le  lieu  de  réuiiiou  des  évêques  était,  comme  lors  du  concile  d'Ephèse  et  du  conciliabule, 
près  de  l'empereur,  à  Constantinople.  C'est  de  ce  côté  qu'on  se  dirigea  d'abord'^. 

L'empereur  voulait  tenter  d'apaiser  les  esprits  et  d'éviter  un  concile  proprement  dit, 
en  faisant  souscrire  à  tous  les  prélats  la  lettre  de  S*  Léon.  C'était  le  conseil  que  le  pape 
lui-même  lui  avait  donné;  car  il  craignait  la  réunion  d'un  synode  dans  cet  Orient  où  Dioscore 
jouissait  depuis  plusieurs  années  d'une  puissance  presque  absolue.  Il  était  à  craindre,  en 
effet,  que  les  évêques,  qui  avaient  souscrit  en  masse  au  conciliabule  d'Ephèse,  refusassent  de 
revenir  publiquement  sur  leur  décision.  Le  mieux  était  de  les  amener  seulement  en  parti- 
culier, à  consentir  à  la  définition  si  admirablement  orthodoxe  de  S*  Léon,  et  même,  s'il  était 
possible,  d'y  faire  souscrire  Dioscore  en  personne.  C'est  pour  cela  que  l'empereur,  se  débar- 
rassant de  l'entourage  du  prélat  égyptien,  avait  mandé  l'archevêque  seul.  S'il  se  soumettait, 
tout  était  bien.  Si  non,  on  tenterait  les  chances  d'une  lutte  :  et  Marcien,  au  besoin,  déposerait 
et  exilerait  Dioscore. 

Remarquons  que  cette  coutume  de  conférences  tenues  en  présence  du  souverain,  et 
précédant  les  conciles  généraux,  était,  depuis  le  temps  de  Constantin,  tout-à-fait  traditionnelle 
dans  l'empire  romain.  S*  Athanase  et  S'  Cyrille  avaient  été  obligés  de  s'y  soumettre  et  on  les 
avait  d'abord  confrontés  ainsi  avec  leurs  adversaires.  Dans  un  autre  travail  nous  verrous 
encore  le  même  fait  se  produire  du  temps  de  Justinien  avant  la  réunion  du  cinquième  concile 
général.  Nous  possédons  encore  en  grec  dans  la  grande  collection  des  conciles  les  actes  de 
la  conférence  tenue  alors  par  l'empereur  avec  les  sévériens,  et,  en  copte,  ceux  d'une  assemblée 
du  même  genre  à  laquelle  assistaient  les  égyptiens  jacobites.  Le  document  que  nous  rappor- 
tons a  ceci  de  très  précieux  que,  seul,  il  nous  renseigne  sur  la  conférence  qu'avait  présidée 
Marcien,  et  dont  le  peu  de  succès  nécessita  complètement  la  tenue  du  concile  de  Chalcédoine. 

Dioscore  poursuit  donc  en  ces  termes  : 

TOI  ç^iûjTq.  ôwCjepoTVû)  n;x.e  iieTpoc  ni2s.i&.Ka)n  nciïc-ivq  nd>.q  ace  dkÊfiôw  >\.ek.K<vpi  e>.pi'^opin  n^e^n^ûcoc 
€u*TawiHOVT  2ce  n^HÀ  £epA.n&.nTdwn  enois^po.  ncoce  iiijkVA.Re>.pioc  newq  ace  ii&.u|Hpi  hçht  Muoirpo  ^e^j*. 
cçoxe  He^içûcûC   exTOi    ç^itor    wo^^his.   tiRtofe   hcott.    neiwç;^-   epoi    uowuiHpi    ace   eue    OTconTHi    ttCA.nH.e- 

1  Voir  Eevue  1880,  p.  187,  1881,  p.  21. 

2  Chalcédoine  est,  du  reste,  très  près  de  Constantinople. 


18  Eugène  Revillout. 


^ficoc  eTA.ek.AV.  cçotc  ma.!  ne..in&.THiTOT  ç^iûjt  nTe».cpf^opin  çwq  n^ei^nçficoc  enen.nc-y  ci^hA  ecpis.TAdknTdwn 
cnoirpo  ix3(;c.  niciOTp  r^e^p  ncM.  nI^^!kTpIRIOC  evoç^i  cpe^TOT  cnOTpo  tiTe  TiôkiHOCAv.oc  otoç^  ujô^ttihc 
eepr\>opin   nç^jvnoÊtoc    ene^ncir    ace    nTOTVoirfonç^  eÊoÀ    ciroi    nc«>,ie    ci^otê   hh    gtoç^i    epekTOT  THpoir. 

(sic) 

t5>eki  0(0  ne  n«kpH-\"  ciihc  mavoi  ei&pe^  eTc^iy^H"  ecpCkSi  «eAv.  Tes».  (^eA.onH  ujd^'^'^e  nni  nTii>.TOJA.T 
eJiH  eTA.  Tôk\|jT-!r;xi"  JA.enpiTOTj"  exe  KoCknnKC  ni6d>.nTicTHC  ne  ncM.  eAiceoc  ninpoii^HTHC.  ne>.i  cs^e. 
eqastojAVMWOTT  «.lepujc^Hpi  CDcen  neqc«.2ti  eTÇoAac.  oiroç^  Avenenc*.  ne^i  e^TO'iTen  eSOTH  uj«k  noTpo 
OTO«j^  dkTepRtoAin  nA.ÊÛ«>.  AV.AKevpi  eujTejA.Çûi'X  eSOTii  encirnea^pion  neAVd^n  ncste  niceAcnTia^pioc. 
oiroç^  ô.q2ca)  A\.Tiô.ic<s.ati  Avninô^T  eTejA.AVdwT  cCiactOAVAVoc  ace  ninoç^  exoi  nr^  npo  Av.ndkqctoA.n  n^wAejyv.. 
Rôkti  icasLfe  Av.neTen^An  eSo^n  «kA.Ae>.  ic  r^  Sen  TA.ei\e^p;)(^iew  ôkTi  eSOTti  eoTonTWOTj'  MixiTôkOcpo  uTe 
nindkÇ;^'  eçoxe  enicnonoc  niÊen  otoç^  ceoi  neA\.Tiipoc  eAV&.u|a>.  eknon  a».e  eT«wi3toiru}T  MTXin&.u" 
eni*eA.A.o  eqoveç^  nc(oi  evicp  eAvf^pH'^-  icacen  eTeiwT;)(^ek  neiwÀei>.c  ç^ipen  mpo  j«.ek.AAon  a^e  Tôwe^^e. 
n'^-nOT  èkiHOTi^  eswineswT  eOTrnoTA.pioc  eqoç^i  ep&.Tq.  neas-Hi  n&.q  ace  ^pi'^ow^ôwnH  dwniOTi  j«.nawieTiic- 
Honoc  rtHi  cSOTr«.  epc  ndwacwAV.  itTOTq.  otoç^  n&.ipn-^  ekTr^A.q  càOTPrt.  eTivqccoTeAv  a^e  eniaccOTd». 
eTOTr2ca>jA.AVûiOTJ"  nate  ni^epeTinoc  dwcpekrte^q  eu}eu|  no^po  otoç^  eepdk«dk«eA\.e>.Ti5irt  JA.jrt.oq,  èkAA.d». 
Av.neq3ccjA.  pfa)jA.i  eep€pjA.HtieTjn  riA^q  enia^H  ne^pe  c^jrt.OTr  ^oA.2c  nroTq  ne  jrt.c^pH'^'  HOTptojrt.1  eT^w^ejA 
XM.oq  eoTTô^piCTOH  le  OTM.dwnu}eA.eT.  ne^q^co  i5&.p  AVJrt.oc  ne  Sen  ncq^KT  ote  ekqu}dwnjw.OT  eacen 
jnnev.ç;^  htc  nujnpi  m^-\"  OTrAv.eTA\.ô.pT-rpoc  Te. 

«Quand  nous  parvînmes  au  rivage,  le  saint  abbé  Macaire  était  revêtu  de  vêtements 
»  sordides.  Le  diacre  Pien-e  lui  dit  :  Abbé  Macaire,  mets  des  vêtements  convenables.  Nous 
»  allons  près  de  l'empereur. 

«Macaire  répondit  :  Le  cœur  dé  l'empereur  est  bien  des  fois  plus  vil  que  les  vête- 
»ments  dont  tu  me  vois  couvert.  Crois-moi,  mon  fils,  si  j'en  avais  de  pires  que  ceux-là,  je 
»  les  aurais  mis,  afin  de  mériter  un  jour  d'être  revêtu  splendidement  quand  j'irai  vers  le  vrai 
»roi,  le  Christ. 

«Les  eunuques  et  les  patrices  qui  se  tiennent  autour  du  roi  de  ce  monde  s'empressent 
»  de  se  couvrir  de  beaux  vêtements,  afin  de  paraître  plus  magnifiques  que  tous  ceux  qui  les 
»  entourent.  Moi  aussi,  de  même,  je  m'empresse  de  garder  immaculée  ma  tunique  —  ce 
»  haillon  —  afin  d'arriver  à  m'approcher  de  ceux  que  mon  cœur  aime  —  de  Jean  Baptiste 
»et  du  prophète  Elisée. 

«J'écoutais  ces  choses,  admirant  la  douceur  de  ses  paroles. 

«  Après  cela,  les  silentiaii*es  nous  amenèrent  près  de  l'empereur  et  ils  voulaient  empêcher 
»  Macaire  de  pénétrer  dans  l'assemblée.  Il  leur  dit  :  La  corde  à  trois  brins  ne  se  rompt  pas 
»vite.  Quand  bien  même  vous  m'empêcheriez  de  pénétrer,  il  y  en  a  trois  de  ma  province 
»qui  sont  entrés  et  qui  possèdent  l'orthodoxie  de  la  foi  plus  que  tous  les  évêques  et  sont 
»très  savants. 

«A  cet  instant  je  regardai  le  vieillard  qui  était  derrière  moi.  J'étais  comme  si  j'avais 
«laissé  derrière  la  porte  ma  langue  ou  plutôt  encore  ma  tête.  Je  me  retournai  alors,  je  vis 
»un  garde  note  (noTd^pioc)  debout  et  je  lui  dis  :  Ayez  la  bonté  de  faire  entrer  cet  évêque 
»près  de  moi.  Il  a  entre  ses  mains  mes  papiers.  —  Et  ainsi  on  le  laissa  pénétrer. 

.    «Quand  il  entendit  les  blasphèmes  que  prononçaient  les  hérétiques,  il  lui  plut  d'insulter 
»  l'empereur  et  de  l'anathématiser.    Mais  il  ne  trouva  personne  pour  lui  servir  d'interprète. 


Récits  de  Dioscoee.  19 


»La  mort,  en  effet,  lui  semblait  douce  comme  un  banquet  ou  une  noce,  et  il  s'était  dit  dans 
»son  cœur  :  Si  je  meurs  pour  la  foi  du  fils  de  Dieu,  ce  serait  mi  mart^Tc!» 

Enfin  venait  le  moment  solennel,  l'entrevue  avec  la  plupart  des  Métropolitains,  l'empe- 
reur et  la  cour  entière.  Dioscore  était  en  entrant,  comme  nous  l'avons  vu,  tout  troublé.  Mais 
il  sentit  bientôt  qu'il  fallait  appeler  à  lui  toute  son  énergie  et  essayer  de  vaincre.  D'ailleurs 
l'ardem-  du  terrible  Macaire  qui  avait  toujours  été  —  nous  aurons  occasion  de  le  dire  — 
aussi  dur  pour  les  autres  que  pour  lui-même,  était  là  pour  lui  servir  d'exemple.  Dioscore  eut 
honte  de  sa  faiblesse.  Le  tragique  héros  d'Ephèse  ne  devait  pas  avoir  peur.  Il  reprit  donc 
son  rôle  de  sévère  enthousiasme  et  se  présenta  hardiment  au  combat. 

Le  patriarche  continue  son  récit  : 

e*o-yn  A.n^€MCi  otoo^  ne^T^H  A^M^ekT  ne  iiate  j*.&.2ij*.oc  r^e^  ek.nTio^iô>.^  neA\.  10-yÊenA.A.ioc  '4>a.  iAh.w. 
nt.M.  «v.rtek.ToA.ioc  -^ôk  RajcTeknTino-vnoA.ic  ncA*.  CT£',\>dwiioc  '^&.  e(|>ecoc  ncj*.  «^noK  Sa.  nieA.A.^xicTOc 
•^lOCKOpoc  tiÊA*.  nOTpo  nej*.  -^-ujotujt  enTA.O"ve  necp&n  noA.;)(^£piôk.  A.n«k  jM.ek.Hewpioc  a^^c  û».qi  eiorn 
ne>t  ncqcon.  ninOTTion  e<-^oç.M.ci  CA.A^.cnçe  nieniCROnoc  Mne^pôkAiô^-.  ôkA.A.eik  nn  eTcnscw  avmooot 
ncA*.  nOTpo  cecwTc.M.  eptoOT.  nc2£.e  nOTpo  ace  A\.ek«a>u}  tievn  enine^o;^  nTCTenuje  ntoTen  enexcn- 
TOuoc.  ewiepOTtii  eics.uj.WM.oc  n&.*4  ace  •^iia.o;^-  nnenio-^  ujikTnoT  iiTenoTdkOtj  Re^Te^poq^  k2cûjmm.oc 
ace  oeknop«^oa».050C  e^n  ne  nenic-\-  eTe^-y^ek.  ninewO;\-  ne^n  e^pHi  exe:  owA.e5eknai.p0c.  ncjw.:  «k-&A.nA.- 
cioc.  nej*.:  «^eo'v^TAAoc.  ne^.:  KTpiA.A.oc.  ncjw.  lO-rAioc '^ekptoMH.  nej«.:  inoRenrioc.  ncM:  ReA.ecTinoc. 

(»ic) 

nevi  a».e  THpoT  eTe^iDcOTOT  eiOTtouj  CTevOO  no-rc&.2ci  5en  ptoq  ace  eujcon  qa"!  j*.m.(ùOt  le  qn&.c<oTeA\. 
enoTpd>.n    ic    otr   OTn   ne*4nev.o;\-   coTTton.    e^-^epOTto    nace    (T)A.i,T)ieknoc*    eekqcA.aci    nvyopn    eno-rpo 

'  Une  erreur  du  copiste  a  échangé  les  noms  des  métropolitains  dAntioche  et  d'Ephése.  Le  texte 
porte  ici  j«.&.  pReWoc  '^&.  e-^ecoc  et  plus  loin  CTe?^&.noc  î5>&.  è>.nTio;x;iô..  Or  c'était  à  Eplièse  qu'Etienne 
était  évéque  et  d'aUleurs  c'était  à  Tévêque  dAntioche  qu'appartenait  la  prééminence,  selon  les  Égyptiens 
^après  les  évêques  de  Eome  et  d'Alexandrie)  et  non  à  celui  d'Ephése  qui  venait  en  dernier  lieu.  C'est 
peut-être  par  haine  contre  les  nestoriens  de  Syrie  que  cet  échange  a  été  fait  dans  la  copie.  Mais  il  faut 
restituer  avec  certitude  :  .^^.a.  ^i-"*-  oc  '^û^  e^nxio;^!*.  et  plus  loin  CTe'.5>&.noc  t^a.  e-^ccoc. 

î  Le  texte  porte  ici  nekpA.ji*.ie«>. 

3  Nous  voyons  dans  les  actes  du  conciliabule  d'Ephése  que  c'était  là  la  thèse  favorite  de  Dioscore 
(comme  précédemment  de  S^  Cyrille)  :  Après  le  concile  de  Nicée,  toute  définition  nouvelle  de  foi  était  selon 
liù  inurile  et  interdite.  Les  conciles  n'avaient  autre  chose  à  faire  que  de  frapper  ceux  qui  s'écartaient  des 
définitions  de  Nicée. 

*  Le  texte  donne  ici  la  ieçon  (5)\&.Éiô.noc  (tandis  qu'il  écrit  plus  loin  r5>^«>^'5'i«>^noc,  comme  les  actes 
conciliaires  et  les  pièces  officielles  contemporaines,  le  nom  de  l'ancien  évéque  de  Constantinople,  déjà  mort 
et  remplacé,  d'après  lui-même,  par  Anatolius,  expressément  nommé),  et  il  ne  fait  pas  figurer  ce  ç^^^^^^'^^'^oc 
parmi  les  principaux  évêques.  indiqués  comme  présents  à  la  séance.  Il  est  certain,  en  eôet,  d'après  notre 
document  même  qu'il  ne  s'agit  pas  de  St  FlaWen.  mais  d'un  magistrat  laïque,  comme  ceux  que  nous  voyons 
siéger  au  concile  de  Chalcédoine  et  diriger  les  débats.  Justement  le  principal  de  ceux  qui  figurent  dans 
les  actes  est  Tik.TiA.noc.  préfet  de  la  ville,  chargé  en  cette  qualité  de  l'instruction  et  de  la  poursuite  des 
affaires  litigieuses.  Je  crois  donc  qu'il  faut  corriger  ((^A,)&.(û)ièknoc  en  (T)ek(T)ieknoc,  bien  que  le  nom  de 
Flave,  alors  porté  par  les  empereurs,  ait  été  très  fréquent.  Notons  du  reste  que  le  discours  de  Dioscore 
semble  avoir  été  rédigé  après  coup,  daprés  d'anciennes  notes  par  Pierre  Mouge,  l'un  des  secrétaires  de 
Dioscore  qui  plus  tard  lui  succéda.  Ce  Pien-e  Mouge,  dont  nous  publierons  encore  une  des  œuvres,  ne 
paraît  pas  très  consciencieux.  Il  ne  serait  pas  impossible  qu'il  se  soit  lui-même  —  peut-être  volontaû-ement  — 
trompé  sur  le  nom  propre,  afin  de  laisser  les  simples  croire  à  l'ingérence  du  condamné  d'Ephèse,  St  Flavien,  dans 
cette  aô'aire,  alors  que  —  pour  les  gens  instruits  —  il  donnait  un  récit  très  véridique,  à  trois  lettres  prés. 
Nous  savons  par  les  historiens  ecclésiastiques  et  par  la  suite  de  notre  document  que  les  Monophysistes  avaient 
également  répandu  le  bruit  de  la  convocation  de  Nestorius.  l'ancien  adversaire  de  S^  Cyrille,  au  concile  de 
Chalcédoine,  (dans  lequel  il  se  serait  du  reste  rencontré  avec  plusieurs  de  ses  anciens  amis,  Ibas,  Théodoret,  etc.) 

3* 


20  Eugène  Revillout. 


ixeace^q  hhi  ace,  a^iocKOpoc  çoi  cpOR.  niik.p5(^eoc  ôwTCini.  ÇHnnc  ic  oe^nûcpi  e^-rujtoiii  ère  &noti  ne, 
OTTOç^  dwicpoiTûj  neacHi  nev.q  ace  icacc  nn  ^Tt,.  nenio-^-  ce^JiKTOT  n<s.n  ^cn  niCTUocvoc  nd>.i  TÊTeit- 
ujopujep  M.M.()iOts-  le  OTHOim  '^epcrniCTeiknin  A^.AvOI  jA.nekp&.û«^THC.  A.qs'ajpcj.v  cnOTpo  noe.e.  {T)i<{'r)\is.noc 
C'&peqûiui  JA.TITOMOC  nA.ea)n.  otoç^  et  a.  noirpo  cpRcA.eiritv  e-e-pOTaci  Av.ni2e.a>M..  d^iepoTCi)  iiessLHi  :^e 
OT  ne  (^A,i  cTCRini  MMoq  exeitM.H'^-.  nToq  :^c  ncatc^q  ace  '^'cniCToA.H  nre  Aetatt  ninivTpiCwp3(^Hc. 
OTOç^  eiwi(û'\i  ^niactùAV  nTOTq  jA.ninoT&.pioc  d>.ic&.Tq  cûoç^  otoç^  neacni  n&.q  ace  Avnepini  ek.n  c-ô^ja.h'^ 
nniaceo-yA.  utc  t\)H  eTCMA\.ekT.  M.AV.on  '\-n&.5(;<o  n'^-noA.ic  THpc  jitc  "^-.weTOTpo  Se^  ni«ki:^opicJrt.oc 
nTCk^e  nHï.  ey.C£poirto  nacc  '\'OTp<o  noA.;xi^P*'^  neace^c  uni  ace  ott  ne  ^i^i  nTevuepTOÀjAôwn  ee^iq. 
Re^cwp  T«kM.ek-y  Tevoivo  e^pm  nnecr ««.ciç^ht  jw.neKpH'^-  ees.cepe2û>pi5in  jA.j«.oq  uje^.  TeqjA.OT  àen  '^^egtopic- 
Tieiw  ère  ico&.nnHC  ne  nie^patHeniCRonoc  Jire  T&.inoA.ic.  m.h  M.M.on  "^-egOTCiek  jA.jA.àw'v  -^no-y  ccpcgcopi^in 
MAVOR  j.v.ç^pH'^  M.c^H  eTejA.A\.èw-y.  OTOÇ^  neacHi  neikC  ace  otoç^  exe^  i^'^-  uje^ipi  exeM^AVivir  it&.ujnpH"^'.  avh 
jA.nc  oircirpig  I  eûoA.Sert  necM.&n^eAi.ci  nTccT&.o-rc  qetiT  eÊoA.  eÊHA.a£.e  &.cu)e  nek.c  cpek^TOT  nniRevc 
nxe  (^n  e«^oivew6  i(o&.nnKC  Av.jA.on  ne^p  ....  qenT  nôkA.o^A.eq  jA.necctoMek.  THptj.  av.h  xeep^o-^-  ^n 
eTe^pena-TV  cnn  Tnpoip  eTdkTTujtoni  nTCMekir.  ottoç^  ç^h  exe  OTrevujq  &.piTq  nn!  çto.  nAnn  ic:x.e  neTdw  re- 
M.is.TS'  ep  neT^tooir  JA.niek.fioc  icoe^nnnc  cCkCepegûipi^in  jA.jAoq  jsvne  çtofi  ene^neq  u}(oni  uj^v-^no-r.  nAnn 
A\.ekTekAv.oi  e<^no£ii  AV.neiknd>.^'\".  Av.nepep  ncTÇûioir  av.'^'^'  la  no-ypo  ç^^cwi  exepe  neRniqi  àen  necjatiat- 
«wnOR  x^dkp  dwiiOR  nujnpi  noe^npoiAvi  nop^^oai^ogoc  nacû^pi.  cek^(OR  efioA.  a\.avoi  to  AewiROC.  Avnepç^i  ewacni 
eniAV.&.  CTe  t^)'^'  ^^h  AV.Aioq  UTeRÇCi  n5(;a>AeA\..  n-^-ncwUiini  «vii  eact^io  av.a\.or  RA.n  &.Triyei,.n*o«^ûeT  eacen 
nine^ç^  '^ndi.ujini  ncew  ne^Tc^e  niAV.&  exe  ny^c  m.m.o^.  e>.qepo-r<o  nate  «ecas-topiTOC^.  neacd^q  ace  &.non 
Ais.  ni5(^pHCTieknoc  rniA.^*^  rcwTôw  neneitoT  A.e<on.  qacto  ce^p  avavoc  ace  uje^pe  "^Afce«no-B"^  c^copac  eûoA. 
no-ycHOT  nTeqSici  otoç^  nTequ}eneAVR<ikÇ^  Avencncwc  tvTe  Te^Ave^no-y-^  avoç^  A\.ne'4Cco.w.ek  nveqipi 
ntiiacOAV  THpOT.  d>.nOR  a>.e  «^lepoiraj  neacni  nivq  ace  nevitoT  evnOR  RirpiA-Aoc  qaccuAVAvoc  ace  Av.t^pn'^ 
Av.niÊenini  euytân  nTOTenTq  eûo?V.Sen  ni;)(;p<0AV.  eq^oci  nTOTVO^io-yi  eactoq  A^nie^n^np  ace  A\.n«wpe 
ni;}^p<ùA\.  epfiA.o>.nTin  nçA.i  ^iTen  niacino^iOTri  eactoq  A\.nidkn©^Hp  r^^ô-i  ne  Av.'^pH'^'  ti«^A\.e^no-y^  Av.n^c 
ncA\.  TeqA^e^^ptoAvi  eeepROintonin  eniSici  eTc^quionOT  neAV.  nivy«\)Hpi  eircon  Sen  OTTAve^OTs-dwi  ne^T- 
ç\)opac.  II&.I  ci^e  eTdkiacOTOT  &.ti"t<oot5'ii  nace  ni«wp3(^HeniCROnoc  neA\.  nieniCRonoc  ncA\.  ncwacn 
n'XC-yT'RA.HTOC  Tnpc  eiraju}  eèoA.  evacû)AVAv.oc  ace  &.ÀH«^toc  c^ne^ç;^  n;^iocRopoc  c^^nAneq'  otoç^ 
AV.Av.on  çAi  nd^acni  nSHTq.  OT^poq  ne  t^iidkÇ;^'  AV.^A.e>.'yidknoc-.  ey.!\on  nn«kç;\'  Av.c5)pH"^  AV.neiiitoT  i^ioc- 
Ropoc.  e^nOR  :^e  «^iriav.  eptoois"  nTe^aciac  ace  5(^e>p(0TCH.  cojtcav  nicA,  otoç^  eTA.T5(;ô>.ptoo-r.  neacHi 
ntoo-y  ace  TeTennek.ç;^  cni;^  ncTrè^^'ï^eÀion.  ncacûjoir  nni  ace  ce  Tennd.ç-^  epcoOT.  t^n  exe  nqïtdkÇ;^'  e>.!i 
cnia^  neTdwi:'^eAioti  (^o^i  OT^pnCTiCknoc  «^n.  «kiepOTOi  neacHi  ntoOT  ace  RewA.û)C  iw.peTen.2coc.  AV-nine^T 
ovn  eTek.T)"^ek.çAve  inc  cni^on  eTc^Tr^^dw^Aveq  çtoc  nou"^  u)&.ii  çtoc  p(OAV.i.  &.-repOTaj  neacoioiy  nni  ace 
ç^wc  pa)Av.i.  ewiiOR  a^e  ô>.iepoira>  neacni  ntuoir  ace  rô>.A.ûjc  d>.peTen2coc.  ottoç^  Av.nin&.T  eTe>.q«^pc  niAA.û>oir' 

1  Notons  que  Théodoret  (déposé  par  Dioscore)  avait  écrit  quelque  temps  auparavant  une  lettre  à 
St  Léon  pour  protester  de  son  orthodoxie  (epist.  113  ap.  S.  Léon.),  et  qu'il  avait  été  rétabli  dans  l'épiscopat 
(conf.  epist.  118,  114,  119).  L'opinion  qui  suit  peut  appartenir  à  Théodoret,  mais  non  à  S*  Léon. 

2  II  y  a  eu  dans  le  concile  de  Chalcédoine  des  scènes  du  même  genre.  Grand  nombre  d'évêques, 
tout  en  désapprouvant  la  conduite  de  Dioscore  vis-à-vis  de  Flavien,  croyaient  à  la  parfaite  orthodoxie  du 
patriarche  d'Alexandrie  et  demandaient  à  hauts  cris  sa  présence  et  l'oubli  du  passé.  Anatolius  rédigea 
même  d'abord  une  profession  de  foi  tout-à-fait  dans  l'esprit  de  Dioscore  et  qui  fut  acclamée.  Nous  revien- 
drons plus  tard  sur  ce  sujet,  en  publiant  un  autre  travail  assez  considérable,  écrit  depuis  plusieurs  années, 
et  dont  nous  extrayons  seulement  en  ce  moment  les  récits  de  Dioscore. 

3  II  s'agit  ici  de  la  déclaration  doctrinale  de  S*  Flavien  dans  le  concile  de  Constantinople,  déclaration 
qui  amena  sa  déposition  par  Dioscore  à  Ephèse.  Ce  fut  une  des  causes  du  concile  de  Chalcédoine. 


Récits  de  Dioscoee.  21 


cp  Hpn  eTôk.  n&.iMHini  ujcûni  eûoA.ç^iTOTq  otoc  nOT-^-  u|e«.n  ocûc  poiAVi.  c^TcpoTto  nci^wOT  hhi  ace 
niocûû  OTOnç^  cûoA.  ace  çtoc  noT-^.  e>.noiv  a^-t  neacHi  ntoOT  ace  j*.ne.  Teqjw.e-etoo'B*'^  t^ûipsc  eTeq- 
Me^ptojM.!  no-ycoTCOT  nxe  OTpiRi  nÊ«w\.  ic  onnne  ek.iTik.o£  «^Hitoir  *cn  pwTen  cpcTcnoi  MM.e-»pe 
n'X-w.c^'W^Hi-  OTOO  eTdwTCWTeA».  en&i  ek.Tr^f<pa)OTr  j^nOTrujatcAvatOAV  ncâ^sci  nejA.Hi  ace  mm-Oiito-b* 
Cd>.2e.i  M.M&.TT  e2£.(o.  ni(T)pife<ùn  3S.6  ncj*.  niccXcivTApioc.  ncj*.  nipeqe(epicnTe>.pioc  «cm.  nio;ir- 
ixôkTOC  neM  ninA.TpiRioc  ne>.Tû)U}  eÊoA.  THpoT  Sen  OTniuj-^-  ncj*H  e-y;x.coMJkvoc  2«e  ^.«.pe  noTpo 
wni  «}&.  £neo,  MMOn  «a.ç;V  M'^ipH-^-  M':\>ek.  a^iocROpoc,  MMon  çA.i  nevacni  nSHTq.  epe  tiirocavoc 
THpq  c.sv.on  c^Êe  ç\)e<i.  ç^ioti  ce>.fioA  .vv.MOn  nnAiiiA.ekiioc  AV.K\.ev.ni;x^eoc.  Avncii^pcqepo&.3c  A\.MOn 
nate  necTopioc.  iv^OTtou}  ecoRTcn  neAve^q  eneqTekKO.  o-yatewi  nOTpo  ciiikotc  nre.  niOTOcup.  newi  2k.e 
Sen  nac  in«^pOTr2c.OT0-y  dwiio-ypo  kija.  eniAVHUi  nTtqatiac  e«^po-r;>(^e^pa)OT  nceaciCMH.  neate  noTpo  uni 
2CC  n^^OK  M.M.«wTA.TR  feTCOci  àcK  ncMi.  CKC&.a£.i  jA..w.on  ntTC-nOT  AV.AVOR.  A\.neR^e^  nctoacn  ntvienic- 
ROnoc  c«^pOTCek2£.j.  AVH  rt^OR  .>A..>A.ek.T&.TR  c«^nev-\-«^tou}  n&.it  eninewo;\-.  e^irepo-yto  nate  nicniCROnoc 
ncacojo-v  ate  c5)h  erepe  a>.iocROpoc  2ta>  Av.Moq  &.non  ncTacw  mmo*^  ee^itcp  a^^iocROpoc  nAivC  n«kïi. 
HH  THpOTJ"  eTcqac.cojA.MWOT  o<s.nMe«^MHi  ne  MMOn  ç\i  tid^acni  niKTOT.  «knc^pe^Re^THC  ^  s^e  ^n  eT&.ncp- 
ujopn  nc&aci  epoq  ne  ott  ^epeTiROc  ne  MniCHOT  eTejw.M.«kU*.  &q(oA.i  nicâe^i  nre  ni^epeTiROc  «^^thitoï^ 
Mnovpo  e^jactûMMOc  *en  OTi\ô>.ppHCiiv  ate  imh-^  nxe  ak^iocRopoc  uje  ne^q  cfioX^en  TenMH-\^  Tcn- 
n«k^OT(onç^  e&oA.  «^n  .«.niTOMOC  nAewn  T\ine<Tpi«wp5CHC.  cvyton  a».e  neactooT  *vpcvyA.n  '^e>.i  uje  ne>.q 
eÊoA.  Sen  tchm.h'^"  ^ne^ipi  nowÊ  niûen  eTeone^R.  -^-nOT  ace  .«.e^peqiye  nA.q  «Te  nieniCROnoc  nTc 
nieRRA.HCi«».  c^A.!  e^^rpA.t\)toc  OTOO  nTenepA.nis.2<^topjn  otoç^  Menencev  «^pcnuje  ne^n  evpiReA.eTin 
e«^peni  eâOTn  M.Me<TA,Ten  otoç^  TennèkTe^MOR  enipH-\-  ereciye.  otoç^  «knepe^nev^Xlcopin  Mnie^ooT 
eTeM.M*kT.  TUMAinOT-^-  :^e  niRCTf^c  ôkqoA.Ten  eSOTn  cncqHi  neM  A.otra.c  ninpecÊTTepoc.  niç^e- 
peTiRoe  a.e  oojot  <vTuac  ntoOT  eSOTn  eninek^\ek.TiOrt  Menence^  «^peni  eÊoA..  niMe^inOT"^  :^c  niRHTô^c 
ne  OTOn  nTe^q  nOTujHpi  mmcwT  eneqpevn  t\c  micc^hA.  eOTCiOTp  ne  ^en  niriek.A.&.Tion.  nevqom  epevTq 
ne  MHinikT  eTe^TcuA.!  nç^epeTiROc  e^OTn  u}«s.  noTpo  otoç^  nA.qctoTeM  enn  eTOTacco  mmûjot  AvnOTpo 
neM  "^-OTpûj.  &.qepReA.eTin  nace  noTpo  expe  niç^epexiROc  RoAAievÊi^in)  mt^tomoc  nAeton  ençopoc 
nniReA,  otoo  nceepnpek^in  j*.j*.oq.  ekqoTe^^cekOni  a^e  e«^pc  ■\'CTnoa>.oc  ♦toOT-^'  e;>(!*^^'^'*^^'^"  *^^  °^" 
no\ic  niyA.qHTC  ace  o^ine».  ncecpegtopi^in  .v\.M.on  chima.  CTCMMekT.  ni«k\oT  as.e  .<\ïca.hA.  «^.qi  eq- 
(Toaci  eek.qTek.sv.e  neqiwT  ace  MCi^pe  ne<i*eA.\o  net'inTioc  '^n  CTek.q-ope  nenfie^A.  neeXe'-^Jioc  niRpH- 
T*kpioc  ne^T  eAVÛoA.  Avekpeq'^toT  otoo  nTequjTeM  OTOino^  eÊoA  enisvH  e^nOTpo  epReXeTin  e«^pOT- 
io^ûeq  àcn  OTS-y^ian  e€>6e  nn  cta.  niç^epeTiROc  acOTOT  .vvnOTpo  ncM  nn  on  eTA,q«ivujOT  ncMtoOT. 
nôwi  s^e  eTdkico^^MOT  e^Êe  «.êê».  .sve^Rekpi  ek.OTniu}"\"  ncAVRe^ç^  u}(oni  *cn  ni^ç^HT.  iiAnn  «kiep  c^avcti 
Mni^opdi.M.ek  eT&.inf<T  epoq  *en  niacoi  ^toc  epe  nn  e^&OTivÊ  itoeknnHC  nipeq-^^tOAVC  ncM  cA.ïccoc 
mnpo'^HTHC  actoAVAvoc  nni. 

«Revenons  en  maintenant  an  moment  où  on  nous  amena  près  de  Marcieu.  Lorsqu'on 
»nous  eut  fait  entrer,  nous  nous  assîmes.  Il  y  avait  là  Maxime,  évêque  d'Antioche,  Juvénal 
»de  Jérusalem,  Anatole  de  Constantinople,  Etienne  d'Ephèse,  et  moi,  cet  intime  Dioscore, 
»  auprès  de  l'empereur  et  de  cette  femme  dont  j'iiésite  à  prononcer  le  nom  :  Pulchérie. 

«  L'apa  Macaire,  lui,  entra  avec  son  frère  Pinoution  et  alla  s'asseoir  derrière  les  évêques 
»  de  Paralie,  Mais  ils  entendaient  notre  entretien  avec  l'empereur. 

'  C'était  un  des  officiers  sacri  cubictUi. 


22  Eugène  Revillout. 


«L'empereur  dit  :  Décrétez- nous  la  foi  et  retournez  vous  en  eliez  vous! 

«  Je  lui  répondis  en  disant  :  La  foi  de  nos  pères  jusqu'à  cette  heure  c'est  elle  que  nous 
«suivons.  Tu  dis  que  nos  pères  n'étaient  pas  orthodoxes  ceux-là  qui  nous  ont  laissé  la  foi, 
«c'est-à-dire  Alexandre,  Athanase,  Théophile,  Cyrille,  Jules  de  Rome,  Innocent,  Célestin!  Je 
»  nommais  tous  ceux-là  parce  que  je  voulais  me  servir  de  leurs  paroles  comme  d'une  épreuve 
»et  voir  si  l'empereur  les  recevrait,  ou  du  moins  s'il  saurait  entendre  leurs  noms,  ou  si  au 
»  contraire  sa  foi  n'était  pas  orthodoxe. 

«  Tatien,  s' étant  d'abord  entretenu  avec  l'empereur,  dit  :  Dioscore,  il  suffit.  Les  anciens 
»ne  sont  plus.  Voici  que  maintenant  il  n'y  a  plus  que  des  hommes  nouveaux,  c'est-à-dire 
»  nous  ! 

«Je  lui  répondis  :  Si  ce  que  nos  pères  ont  établi  dans  les  Conciles  vous  le  détruisez, 
»je  ne  puis  m'associer  à  votre  prévarication. 

«  Tatien  fit  un  signe  à  l'empereur  pour  qu'il  ordonnât  de  lire  le  tome  de  Léon  et  l'empe- 
»reur  prescrivit  de  prendre  le  livre. 

«Je  m'écriai  :  Qu'apportez-vous  au  milieu  de  nous? 

«Il  répondit  :  C'est  la  lettre  de  Léon  le  Patriarche. 

«Alors  je  pris  le  livre  de  la  main  du  garde-note.  Je  le  jetai  à  terre  et  je  dis  :  !N'ap- 
»  portez  pas  ici  les  blasphèmes  de  cet  homme.  Sinon,  je  mettrai  toute  la  \àlle  impériale  sous 
»  l'interdit  et  je  m'en  irai. 

«L'impératrice  Pulchérie  me  répondit  en  disant  :  Qu'as-tu  osé  faire?  Ma  mère  a  chassé 
»  les  orgueilleux  de  ton  espèce.  Elle  a  exilé  Jean  Chrysostome,  l'évêque  de  cette  ville,  jusqu'à 
»sa  mort.  N'ai-je  donc  pas  le  pouvoir  de  t'exiler  comme  celui-là? 

«Je  lui  dis  :  Et  comment  Dieu  l'a-t-il  châtiée?  Est-ce  qu'elle  n'a  pas  eu  une  fistule  qui 
»  rendait  des  vers  de  telle  sorte  que,  si  elle  n'était  allée  (prier)  près  des  ossements  de  S*  Jean, 
»les  vers  auraient  dévoré  tout  son  corps?  Ne  crains-tu  pas  en  voyant  tout  ce  qui  est  arrivé 
»à  ta  mère?  Eh  bien,  fais  moi  aussi  ce  qu'il  te  plaira,  si  le  mal  que  ta  mère  a  fait  à  S*  Jean, 
»en  l'exilant,  te  semble  une  belle  chose! 

«Dis -moi  seulement  en  quoi  je  pèche  dans  la  foi.  0  empereur!  ne  fais  pas  le  mal 
»  contre  Dieu  qui  tient  ton  souffle  en  ses  mains;  car  moi,  je  suis  le  fils  d'hommes  orthodoxes 
»et  puissants.  Écarte-toi  de  moi,  ô  laïque!  Ne  viens  pas  souiller  le  lieu  où  Dieu  réside  de 
»peur  d'être  bientôt  précipité!  Non!  je  ne  craindrai  pas  de  te  reprendre,  et  quand  bien  même 
»on  devrait  me  tuer  pom:  la  foi,  je  chercherai  les  choses  du  ciel,  sanctuaire  du  christ  Dieu! 

«  Théodoret  dit  :  Nous,  chrétiens,  nous  croyons  comme  notre  père  Léon  ;  car  il  dit  que 
»  la  divinité  était  séparée  et  distincte  au  moment  où  le  Christ  souffrit,  et  que  la  divinité  rem- 
»pHssait  son  corps  quand  il  faisait  tous  ses  miracles. 

«Moi  je  lui  répondis  :  Mon  père,  a  moi,  Cyrille  dit  :  Comme  le  fer  quand  on  le  met  au 
*  feu  devient  ardent  et  peut  supporter  les  coups  de  marteau  tandis  que  la  flamme  du  feu  ne 
»peut  être  frappée  par  le  marteau,  ainsi  il  en  est  pour  la  divinité  du  Christ  unie  d'une  façon 
»  indissoluble  à  son  humanité  tant  pour  les  souffrances  qu'il  a  supportées  que  pour  les  miracles 
»  qu'il  a  faits. 

«Lorsque  j'eus  dit  ces  paroles,  les  archevêques  et  les  évêques  se  levèrent  ainsi  que  tout 
ï>le  sénat  et  ils  s'écrièrent  en  disant  :  Véritablement  la  foi  de  Dioscore  est  bonne.   Il  n'y  a 


Récits  de  Dioscore.  23 


»eii  elle  aucune  erreur  :  C'est  une  tromperie  que  la  foi  de  Flavien!  Nous  croyons  comme 
»  notre  père  Dioscore! 

«  Moi  j'agitai  la  main  (comme  pour  dire)  :  Silence  !  Écoute,  Israël  ! 

«Ils  se  turent  et  je  leur  dis  :  Vous  croyez  aux  quatre  évangiles? 

«Ils  me  dirent  :  Oui,  nous  croyons.  Celui  qui  ne  croit  pas  aux  quatre  évangiles,  n'est 
»pas  chrétien. 

«  Je  repris  :  Vous  dites  bien.  —  Quand  Jésus  fut  invité  à  la  noce,  fut-il  invité  comme 
»Dieu  ou  comme  homme? 

«Ils  répondirent  :  Comme  homme. 

«  Je  leur  dis  :  Bien  !  —  Et  quand  il  changea  l'eau  en  vin,  fit-il  ce  miracle  comme  Dieu 
»ou  comme  homme? 

«Ils  répondirent  :  L'événement  montra  que  c'était  comme  Dieu. 

«Je  leur  dis  alors  :  La  divinité  ne  s'est  donc  pas  séparée  de  son  humanité  un  seul 
»  instant.  Voici  que  je  vous  ai  pris  étant  de  votre  propre  bouche  les  témoins  de  la  vérité. 

«Ayant  entendu  cela  ils  se  turent  et  ne  purent  parler  avec  moi  parce  qu'ils  n'avaient 
»plus  une  parole  à  dire. 

«Alors  les  tribuns,  les  silentiaires,  les  référendaires,  les  consuls,  les  patrices,  crièrent 
»tous  d'une  grande  voix  :  Que  l'empereur  vive  éternellement!  Il  n'y  a  pas  de  foi  comme 
»  celle  de  Dioscore.  Aucune  erreur  n'est  en  elle  !  Le  monde  entier  convient  de  cela  !  Chassez 
»  loin  de  nous  ces  séducteurs  Manichéens  !  Ne  permettez  pas  à  Nestorius  de  nous  tromper  ! 
»I1  veut  nous  entraîner  avec  lui  à  sa  perdition!  Sauvez  l'empereur  des  ruses  de  ces 
»  chiens  ! 

«Tandis  qu'ils  disaient  cela  l'empereur  fit  à  cette  multitude  signe  de  la  main  pour  la 
»  faire  se  taire  et  écouter. 

«L'empereur  me  dit  :  Toi  seul,  sublime  en  connaissance,  tu  parles  sans  que  personne 
»  ne  t'interroge.  Tu  ne  laisses  pas  les  autres  évêques  parler.  N'est  ce  pas  toi  seul  qui  doit  nous 
»  donner  des  règles  de  foi? 

«Les  évêques  répondirent  :  Ce  que  dit  Dioscore,  nous  le  disons  aussi.  Nous  avons  fait 
»de  Dioscore  notre  langue.  Tout  ce  qu'il  dit  est  vérité  sans  tache. 

«  Andracatès,  dont  nous  avons  parlé  plus  haut,  était  en  ce  moment  là  hérétique.  Il  prit  les 
«écrits  d«s  hérétiques.  Il  les  donna  à  l'empereur  en  disant  avec  assurance  :  Si  Dioscore  ne 
>s'en  va  du  milieu  de  nous,  nous  ne  pourrons  faire  voir  le  tome  du  Patriarche  Léon.  Si,  au 
»  contraire,  disait-il,  il  s'en  va,  tu  feras  tout  ce  que  tu  voudras.  Maintenant  donc  qu'il  soit 
»  écarté,  afin  que  les  évêques  des  différentes  églises  souscrivent,  et  que  nous  puissions  ensuite 
»  nous  retirer.  Quant  nous  serons  sortis,  ordonnez  que  nous  revenions  seuls  et  nous  vous  mon- 
»trerons  la  manière  à  employer. 

«Nous  sortîmes  ce  jour  là  et  le  pieux  Nicétas  nous  emmena  dans  sa  maison  avec  le 
«prêtre  Luc. 

«Quant  aux  hérétiques,  ils  retournèrent  au  palais  lorsque  nous  en  fûmes  sortis. 

«  Le  pieux  Nicétas  avait  un  fils  dont  le  nom  était  Misael,  et  qui  était  eunuque  dans  le 
»  palais.  Il  s'y  trouvait  quand  on  amena  les  hérétiques  près  de  l'empereur  et  il  entendait  ce 
»  qu'ils  disaient  à  l'empereur  et  à  l'impératrice.  L'empereur  ordonna  à  ces  hérétiques  de  joindre 


24  Eugène  Revillout.  Récits  de  Dioscore. 

»la  lettre  de  Léon  au  symbole  de  Nicée.  Il  prescrivit  aussi  de  réunir  le  concile  à  Chalcé- 
»  doine  ',  la  ville  maudite,  afin  de  nous  déporter  en  ce  lieu. 

«Le  jeune  Misael  vint  en  courant  avertir  sou  père  de  tout  cela.  Il  lui  dit  aussi  :  Que 
»ce  vieillard  égyptien  (Macaire),  qui  a  guéri  les  yeux  de  Séléphius,  s'en  aille  au  plus  vite 
»et  qu'il  ne  paraisse  plus;  car  l'empereur  a  ordonné  de  le  mettre  à  mort  en  secret  à  cause 
»de  ce  que  lui  ont  dit  les  hérétiques  et  de  ce  qu'il  a  décidé  avec  eux. 

«Quand  sur  l'abbé  Macaire  j'entendis  ces  choses,  une  grande  douleur  remplit  mon  cœur. 
»Entin  je  me  rappelai  la  vision  que  j'avais  eue  dans  le  navire  et  ce  que  S*  Jean  Baptiste 
»  et  le  prophète  Elisée  m'avaient  prédit  à  son  sujet.  » 

Dioscore  voyait,  en  effet,  ses  plus  sombres  prévisions  s'accomplir.  Son  intelligence  était 
trop  perspicace  pour  qu'il  se  laissât  tromper  par  les  succès  momentanés  de  sa  parole.  H  savait 
dès  longtemps  combien  de  partisans  il  avait  dans  le  corps  épiscopal  d'Orient.  Mais  il  savait 
aussi  que  ses  ennemis  se  réunissaient  peu-à-peu,  et  que  l'on  allait  amener  contre  lui  le  ban 
et  l'arrière  ban  des  Syriens,  qui,  secrètement  attachés  à  Nestorius,  comme  auparavant  à  Arius, 
baissaient  profondement  les  égyptiens,  leurs  vainqueurs  des  dernières  luttes.  D'un  autre  côté 
le  pape  allait  sans  doute  se  faire  représenter;  et,  après  ce  qui  s'était  passé  dernièrement  à 
Nicée,  les  orthodoxes  occidentaux  ne  pouvaient  pardonner  à  Dioscore,  Enfin  l'empereur  était 
contre  lui  et  à  cette  époque  où  le  seul  moyen  de  transport  commode  était  la  poste  officielle 
que  l'État  mettait  à  la  disposition  de  qui  il  voulait,  on  devait  bien  s'attendre  que  les  partisans 
du  conciliabule  d'Éphèse  et  spécialement  les  égyptiens  n'arriveraient  que  bien  difficilement 
au  concile  puisqu'on  en  écartait  déjà  Macaire,  ce  compagnon  de  S*  Cyrille,  sur  la  présence 
duquel  Dioscore  comptait  tant. 

Cependant  le  concile  décidé  secrètement  en  principe,  comme  nous  l'avons  vu,  n'était 
pas  encore  officiellement  réuni.  La  conférence  même,  bien  qu'on  ne  la  convoquât  plus,  n'était 
pas  dissoute  et  le  patriarche  égyptien,  résidant  par  ordre  impérial  à  Constantinople^,  jouissait 
toujours  de  tous  les  honneurs  qui  appartenaient  à  sa  haute  dignité.  Il  paraît  surtout  qu'il  avait 
conservé  d'excellentes  relations  avec  Anatolius,  égyptien  qu'il  avait  intronisé  lui-même  après 
l'assemblée  d'Ephèse  sur  le  siège  archiépiscopal  de  Constautinople.  Cela  doit  nous  sui-})rendre 
d'autant  moins  que  même  après  la  condamnation  de  Dioscore,  Anatolius  soutenait  à  Chalcé- 
doine  toutes  les  doctrines  de  son  ancien  maître,  et  qu'il  faillit  faire  réussir  une  formule  que 
Dioscore  aurait  pu  signer  des  deux  mains. 

Voici  comment  poursuit  notre  auteur. 

(La  suite  à  un  prochain  numéro.) 

^  Dioscore  abrège.  Le  concile  fut  d'abord  convoqué  à  Nicée  eu  Bythinie,  mais  bientôt  transporté  à 
Chalcédoine,  parce  que  l'empereur,  selon  ses  lettres,  tenait  à  y  assister  et  que  Chalcédoine  était  tout  près 
de  Constautinople. 

^  Notons  que  quand  les  légats  du  pape  arrivèrent,  ils  firent  de  même  et  restèrent  à  Constautinople, 
en  protestant  qu'ils  n'iraient  au  concile  que  quand  l'empereur  lui-même  pourrait  y  assister.  Ils  n'allèrent 
aussi  jamais  à  Nicée,  où  beaucoup  d'évêques  attendaient  l'ouverture  du  synode,  et  se  rendirent  directement 
ù  Chalcédoine  depuis  la  ville  impériale. 


Les  prêts  de  blé.  25 


LES  PRÊTS  DE  BLÉ. 

Les  documents  relatifs  à  des  prêts  de  blé  sont  assez  nombreux  dans  les  collections 
égyptiennes.  Nous  allons  donner,  selon  leur  provenance,  les  principaux  textes  de  ce  genre 
qui  nous  sont  parvenus  et  dont  nous  étudierons  ensuite  les  données  diverses  dans  une  seconde 
partie. 

§   1". 
Prêts  de  blé  memphites. 

Tous  les  documents  de  ce  genre  et  de  cette  provenance  qui  nous  sont  parvenus  émanent 
d'un  seul  prêteur  qui  vivait  sous  les  règnes  de  Soter  II  et  de  Ptolémée  Alexandre, 

Voici  d'abord  un  contrat  que  nous  avons  copié  au  Vatican. 

«An  9,  Tybi  21,  des  rois  Cléopatre  et  Ptolémée,  les  dieux  Philométors,  Soters,  sous  le 
»  prêtre  d'Alexandre  et  des  dieux  Soters  et  des  dieux  frères  et  des  dieux  Évergètes  et  des 
»  dieux  Philopators  et  des  dieux  Épiphanes  et  du  dieu  Eupator  et  du  dieu  Philométor  et  du 
»  dieu  Philopator  et  du  dieu  Évergète  et  de  la  déesse  Philométor  et  des  dieux  Philométors-Soters, 
»  et  sous  la  prêtresse  de  la  déesse  Cléopatre,  la  déesse  Évergète,  Philométor,  Soter  ',  qui  aime 
»  la  justice,  la  dame  du  Xopes  et  la  Stéphanéphore  de  la  reine  Cléopatre,  la  déesse  Évergète, 

»  Philométor,  Soter,  qui  aime  la  justice,  la  dame  du  Xopes  et  la -  phore  de  la  reine 

»  Cléopatre,  la  déesse  Évergète,  Philométor,  Soter,  qui  aime  la  justice,  la  dame  du  Xopes,  et 
»la  Canéphore  devant  Arsinoë-Philadelphe,  et  l'Athlophore  devant  Bérénice  Évergète  —  qui 
»sont  à  Racoti. 

«  Dit  le  cultivateur  habitant  de  Pa dans  le  nome  d'Héliopolis  Téephib,  fils  d'Hor- 

»mai,  dont  la  mère  est  Tétoua  (Tavé),  au  taricheute  de  l'Anubéinm,  dans  le  territoire  de 
»  Memphis,  Harmachis,  fils  d'Héri-Anup,  dont  la  mère  est  Tétounbès  : 

«  Tu  m'as  donné  le  prix  de  trois  mesures  Y  et  demie  de  froment  nouveau  et  de  44  Aor 
»  (-AovjXr^  d'huile  de  Tékem  (;/■'■■/.'■),  leur  moitié  est  un  Y  et  trois  quarts  de  froment  et  22  7V.or  d'huile 
»  de  Tékem,  trois  Y  et  demi  de  froment  nouveau  et  44  A.oiv  de  Tékem  eu  tout.  Que  je  te  solde 
»  les  blés,  les  huiles  de  Tékem  ci-dessus  :  Les  blés  purs,  sans  mélange,  rendus,  conduits  et  soldés 
»en  ta  main,  dans  ta  maison  de  l'Anubéium,  selon  la  mesure  entière  du  dromos  d'Anubis, 
»en  mesures  complètes  (combles),  sans  frais  ni  dépense.  Ne  reçois  pour  ces  choses  ni  compte 
»ni  explication  (parole  quelconque)  jusqu'aux  mois  de  Pachons-Payni  de  l'an  9,  c'est-à-dire 
»  dans  le  5^  mois  de  l'année  ci-dessus.  Que  je  te  solde  les  huiles  de  Tékem  ci-dessus  en  huiles 
»  pures,  sans  mélange  de  mauvais  liquide,  sans  que  je  les  délave'^  par  aucun  mauvais  liquide 
»  au  monde  —  les  dites  huiles  soldées  en  ta  maison,  dans  le  Sérapéum,  sans  frais  ni  dépense. 
»Ne  reçois^  aucun  compte  ni  aucune  parole  à  ce  sujet  jusqu'au  mois  d'Épiphi  de  l'an  9.  Les 
»blés  et  les  huiles  en  question,   si  je  ne  tes  donne  pas  en  leur  temps  (fixé)  ci-dessus  pour 

1  Je  laisse  tous  les  noms  royaux  au  masculin  comme  dans  le  démotique. 

2  Voir  p.  126,  note  5. 

3  Je  suis  obligé  do  me  servir  de  cet  idiotisme  de  franche-comté  —  re/i  signifie  proprement  laver. 

*  us-OTcu}  signifiant  sans  se  trouve  avant  le  verbe  recevoir  :  mot-à-mot  :  «  sans  réception  de  etc.  ». 

4 


26  Eugène  Revillout. 


»  (les)  solder,  comme  il  est  écrit  ci-dessus,  je  te  donnerai  leur  hémiolion  '  en  plus  le  mois 
»  après  le  terme  fixé,  de  force,  sans  délai,  dans  le  délai  de  deux  jours  à  partir  de  la  récla- 
»  matiou  que  tu  m'en  feras  après  leur  temps  de  paiement  ci-dessus,  comme  il  est  écrit  ci- 
»  dessus,  et  cela  de  force,  sans  délai.  Je  ne  puis  te  dire  :  je  t'ai  donné  le  blé  et  l'huile  de 
»ces  mesures  sans  écrit  (sans  prendre  de  reçu).  Je  ne  puis  te  fixer  pour  cela  d'autre  temps 
»ni  d'autre  jour.  Si  je  ne  fais  selon  toute  parole  ci-dessus,  comme  il  est  écrit  ci-dessus,  je 
»  donnerai  deux  argenteus,  en  sekels  10,  deux  argenteus  en  tout,  pour  les  sacrifices  et  les 
»  libations  des  rois,  dans  le  délai  de  deux  jours,  et  cela  de  force,  sans  délai.  Ton  agent  d'afi"aires 
»  prend  puissance  pour  toute  parole  qu'il  dira  avec  moi  au  nom  de  toutes  les  paroles  ci-dessus. 
»  Que  je  les  accomplisse  selon  son  ordre,  et  cela  de  force,  sans  délai.  » 

Cet  acte  signé  par  le  notaire  Horsiési,  fils  de  Sit  .  .  .,  a  été  enregistré  en  grec  le  même 
jour  (21  Tybi)  à  l'Anubéium.  Peu  de  jours  après,  le  29  Tybi  de  la  même  année  9^,  Harma- 
chis  faisait  rédiger  par  une  certaine  Dapbné  un  contrat  fort  analogue.  Le  voici  ^  : 

«L'an  9,  le  29  Tybi,  des  rois  Cléopatre  et  Ptolémée,  les  dieux  Pbilométors,  Soters,  et 
»sous  le  prêtre  d'Alexandre,  des  dieux  Soters,  des  dieux  frères,  des  dieux  Évergètes,  des 
»  dieux  Pbilopators,  des  dieux  Epiphanes,  du  dieu  Eupator,  du  dieu  Pbilométor,  du  dieu^ 
» .  .  .  .  pbilopator,  du  dieu  Évergète,  de  la  déesse  Pbilométor  .  .  .  ^  des  dieux  Pbilométors, 
»  Soters,  et  sous  la  prêtresse  de  la  reine  Cléopatre,  la  déesse  Evergète,  Pbilométor,  Soter, 
»  aimant  la  justice,  la  dame  du  Xopes,  Acropole,  grande  Isis,  Evergète,  mère  divine,  et  sous 
»  la  prêtresse  d'Arsinoè'  Pbilopator,  et  sous  la  Stépbanépbore  de  la  reine  Cléopatre,  aimant 
»  la  justice,  la  dame  du  Xopes,  et  sous  la  ^  .  .  .  .  pbore  de  la  reine  Cléopatre,  la  déesse 
»  Evergète,  Pbilométor,  Soter,  aimant  la  justice,  la  dame  du  Xopes,  et  la  Canépbore  devant 
»  Arsinoë-Pbiladelpbe,  et  l'Atblopbore  de  Bérénice  Evergète,  —  qui  sont  à  Racoti. 

«  Dit  la  femme  Tafnut  (Dapbné),  fille  de  Pasi,  dont  la  mère  est  Héréia,  au  taricbeute, 
»  babitant  de  l'Anubéium  (Pa-Anup)  sur  le  territoire  de  Mempbis,  Harmacbis,  fils  d'Héri-Anup, 
»  dont  la  mère  est  Tétounbès  : 

«  Tu  m'as  donné  3  Y  et  demi  de  froment,  Jeur  moitié  est  un  et  trois  quarts,  trois  Y  et 
»demi  de  froment  en  tout,  en  créance.  Je  les  ai  reçus  de  ta  main.  Mou  cœur  en  est  satis- 
>fait  sans  avoir  à  faire  aucune  objection.  Que  je  te  verse  les  blés  ci-dessus  eu  blés  purs, 
»  sans  mélanges,  rendus,  conduits  et  payés  en  ta  main,  dans  ta  maison  de  l'Auubéium,  selon 
»  la  mesure  entière  du  dromos  d'Anubis,  eu  mesures  complètes  (combles),  sans  frais  ni  dépense. 
»Ne  reçois  aucun  compte,  aucune  parole  au  monde,  jusqu'à  l'an  9^  Pacbons-Payni,  dans  le  5®  mois 
»  de  l'année  ci-dessus,  pour  les  blés  ci-dessus.  Si  je  ne  te  les  donne  pas  à  leur  terme  ci-dessus, 
»  comme  il  est  écrit  ci-dessus,  je  te  donnerai  par  unité  une  unité  et  demie,  dans  le  terme  de 
»deux  jours  après  la  sommation  pour  les  payer  que  tu  me  feras  après  leur  terme  ci-dessus, 
»  comme  il  est  écrit  ci-dessus,  et  cela  de  force,  sans  délai.  Je  ne  puis  dire  :  je  t'ai  donné  le 
»blé  de  ces  mesures.   Je  ne  puis  te  fixer  pour  cela  un  autre  temps.  Tous  les  biens  qui  sont 

'  Mot-à-mot  :  «pour  leur  unité  une  unité  et  demie». 

2  Cet  acte  porte  à  New-York  le  n°  375. 

3  Ici  se  trouve  un  premier  qualificatif  peu  lisible.  Voir  aussi  dans  ma  Chrestomathîe,  p.  400. 
*  Autre  qualificatif  peu  lisible. 

^  Pour  ce  titre  voir  aussi  ma  Chrestomathîe,  l.  c.  Je  crois  qu'il  s'agit  d'un  sceptre  portant  le  n.  Le 
mot  démotique  est  l'éqxiivalent  de  ce  signe  avec  le  déterminatif  du  bois.  Cléopatre,  aimant  la  justice. 


La  vie  du  biexheueeux  Aphou.  27 

»à  moi  et  que  je  posséderai  sont  en  garantie  du  droit  de  lacté  ci-dessus.  Ton  agent  prend 
»  puissance  pour  toutes  les  paroles  qu'il  dira  avec  moi,  au  nom  de  toutes  les  paroles  ci-dessus. 
»  Que  je  les  accomplisse  selon  son  ordre,  et  cela  de  force,  sans  délai.  » 

Cet  acte,  écrit  par  le  notaire  Horsiési,  a  été  enregistré  également  à  l'Anubéium  le  jour 
même  de  sa  rédaction,  c'est-à-dire  le  29  Tybi  de  l'an  9®. 

Nous  possédons  deux  autres  actes  analogues,  tous  les  deux  écrits  à  la  fin  de  Tybi  de 
l'an  9*,  payables  en  Pachons-PajTii  de  la  même  année  et  adressés  à  notre  Harmachis,  fils 
d'Héri-Anup.  L'un  porte  à  New- York  le  n°  373  et  a  pour  débiteur  un  certain  Téephib,  fils 
d'Hormai,  qui  paraît  différent  du  personnage  du  même  nom  que  nous  avons  rencontré  plus 
haut.  Il  porte  sur  six  mesures  et  spécifie  rii}i)0thèque  générale  sur  les  biens  présents  et  à 
venir  de  son  auteur.  L'auti-e,  ayant  à  New- York  le  n**  37-4,  est  rédigé  '  au  nom  d'un  certain 
setemas  nommé  Harmachis,  dont  la  mère  est  Tset-Hapi.  H  porte  sur  14  mesures  Y  et  spécifie 
une  amende  -  de  deux  argenteus  par  mesure  aten  à  payer  pour  les  sacrifices  et  les  libations 
des  rois,  si  les  conditions  de  l'acte  ne  sont  pas  scrupuleusement  accomplies. 

Les  quatre  débiteurs  sont  également  du  même  bourg  du  même  nome  d'Héliopolis  et  ils 
empruntent  au  même  personnage  dans  la  même  semaine.  Mais  s'agit-il  véritablement  d'un 
prêt?  Je  crois  plutôt  que  la  forme  de  prêt  est  une  fiction  légale,  et  qu'il  s'agit  d'une  vente 
à  terme.  Harmachis,  fils  d'Héri  Anup,  a  payé  comptant  d'avance  et  a  droit  de  se  faire  Uvi-er 
sa  marchandise  aux  époques  fixes.  Cet  Harmachis  (Har-m--/u\  fils  d'Héri  Anup,  est,  du  reste, 
connu  par  le  papyrus  grec  X*"  de  Turin,  nous  apprenant  que  Horns,  fils  d'Héri-Anup  (Qpoq 
EptovcjTûioç),  possédait,  avec  son  frère  Téephib,  une  maison  située  dans  le  bourg  de  Kallid 
.  .  .  (îv  %(i);jLr,'.  y.aX/.ic  1  et  contre  l'Anubéium.  C'est  là  le  bourg  de  l'Anubéium,  dont  il  est 
souvent  question  dans  nos  contrats  démotiques.  Quant  au  nom  Harmachis,  il  est  toujours 
transcrit  Horus  en  grec.  Jamais  ou  ne  trouve  dans  les  documents  ptolémaïques  la  trans- 
cription complète  du  mot  Harmachis  l  Notons  du  reste  que  plusieurs  noms  commençant  par 
Horus  s'abrégeaient  souvent  ainsi,  alors  même  que  parfois,  ailleurs,  ils  se  transcrivaient  en 

entier. 

La  suite  à  un  prochain  numéro.) 


LA  VIE  Dr  BIEXHErEEIX  APHOE, 

ÉVÊQUE  DE  PEMDJE  (OXYEINQUE\ 

Le  bienheureux  Aphou,  évêque  d'OxjTinque  ^,  dont  il  est  question  ici,  est  un  person- 
nage historique.  Il  est  appelé  AfiFy  par  le  livre  5®  des  Vitae  Patnim  [jp.  955  de  l'édition  Migse)  : 
«Narraverunt  de  episcopo   civitatis  quae  vocatm*  Oxyrinchus   nomine  Afiy  quia   cum   esset 

>  Il  a  été  rédigé  et  enregistré  le  21  Payui  comme  l'un  des  actes  cités  plus  haut. 

-  Les  prêts  Memphites  qui  portent  l'amende  aux  rois  n"ont  pas  l'hypothèque  sur  tous  les  biens  et 
vice  versa.  L'amende  est  ici  notablement  plus  forte  que  dans  le  premier  acte  donné  par  nous. 

3  Ne  pas  confondre  ce  nom  avec  celui  d" Armais  «  l'ami  d'Horus  »  pour  l^iiuel  les  bilingues  démotiques 
et  grecs  (papyrus  Casati  et  de  Berlin  etc.)  nous  donnent  une  orthographe  démotique  toute  différente. 

*  Pour  la  ville  toute  monastique  d'Oxyrinque,  dont  Aphou  était  évêque.  voir  Vitae  Patmm,  liv.  II, 
p.  459,  de  l'édition  Eoswxide. 

4* 


28  Eugène  Revillout. 


monaclius  etc.  »  Les  documents  coptes  et  grecs  nous  parlent  aussi  d'un  Aphou  le  hufjle  «.t|)OT 
nu|o^  (ZoEGA,  366 — 367)  et  de  moines^  vivant  parmi  les  buffles  (Mingarelli,  p,  CCCXLI. 
Pelasge,  édition  de  la  Bigne,  t.  IX  et  liv.  III  inter  apopht.  patrum,  p.  812^  n°  9,  10,  11,  — 
Georgi  Colluthe.  p.  95 — 96.  —  Zoega,  p,  16  et  347). 

Mais  cette  fois,  nous  avons  la  vie  authentique  du  pieux  anachorète,  devenu  un  grand 
évêque;  car  le  papyrus  de  Turin,  d'où  elle  est  tirée,  est  contemporain  de  S*  Cyrille  et  de 
Dioscore  et  antérieur  au  schisme,  ainsi  que  toute  la  bibliothèque  sur  papyrus  du  Tonoc  de 
S*  Jean  Baptiste,  et  S*  Aphou  fut  ordonné  évêque  par  Théophile,  oncle  de  S*  Cyrille.  Nous 
trouverons  dans  notre  document  le  récit  très  curieux  de  cette  ordination  et  de  ses  causes  et 
nous  aurons  l'occasion  de  mieux  connaître  ainsi  le  caractère  altier  de  Théophile  et  son  pouvoir 
despotique  sur  tous  les  évêchés  d'Egypte.  Le  rôle  de  S*  Aphou  dans  le  changement  d'opinion 
et  de  conduite  de  Théophile  à  l'égard  des  origénistes  et  des  authropomorphistes  est  bien  remar- 
quable ;  car  cet  événement  eut  les  plus  grandes  conséquences  historiques  et  amena  les  mal- 
heurs de  S*  Jean  Chrysostome.  Dans  la  discussion  entre  Aphou  et  Théophile  on  remarquera 
surtout  ce  qui  a  trait  à  l'eucharistie.  L'argument  a  été,  pour  ainsi  dire,  retourné  dans  les 
Vitae  Patrian  (voir  le  copte  dans  Zoega,  p.  313  et  le  latin  dans  les  Vitae  Patrum,  édition 
MiGNE,  p.  973). 

Notre  récit  nous  donne  aussi  un  nouvel  exemple  de  l'adjuration  au  seigneur  pour  empê- 
cher les  ordinations,  adjuration  dont  S*  Jérôme  dans  ses  lettres,  l'histoire  Lausiaque,  chap.  XII, 
etc.  etc.,  nous  avaient  parlé  également. 

Nous  reviendrons  du  reste  ailleurs  sur  toutes  ces  questions.  Aujourd'hui  nous  nous 
bornerons  à  donner  le  texte  de  cette  vie  fort  intéressante. 

nûioc  n&,ïies.  c^ç^ott  i\&.ud>,3(^copiTHC  A.irro  iieniCHOnoc  A\.neA».2£.e 
licO'yasLOirTOTrG  «.-©oott. 

A\.jincô^  n*.ï  OT&.ne\.x^R&.iou  ne  expeup  nAv.eeire  .s^ncniCKonoe  eTO-trevô^û.  ne>.ï  epe  neqpektt 
.M.en  oii  up(OA\.e  ne  evc5>OT.  eTAVOTTe  on  epoq  Oïi  iipû).sv.e  ace  neTO'Av.o'o.Kv.  ujopii  Aven  ueevqiycone 
^es.  «^irnoTevx^H  n^GnptOAV-e  nctoTn  e^iraj  j>\.txictoc.  nô.ï  owoir  ou  tifà^ts-Tà^qç.  ooïtve  ç^itav  a\.a.«hthc  iiiits.- 
nocToAoc.  &.q&.«evCTpe(i^Tr  ;i..G  He>.Te>.  netrûioc  iicGA\.noii.  Avniic*.  TpeinvROTH  :^e  evqujcùacn  .s\.es.ivô>.èwq. 
eqcooTu   .vvA\.evTe   nOTrcou.    nô.ï    çwtoq    oiv    nTôwqaticfiû)    éTCmûcoR    eopA.ï    GTne 

ujTHn  Av.nev^«>.noc  to  oiaxoq  uqcoiTAV  cnTevujcotiu}  AvnevC[)(;«k.  çiv  TCRKA.HCiev  A\.ïiCAvac£.  à^voi  ncAvepe 
Aes.d^^  cOTCùnq  Tie  ujevTqei   eç^pôwï  ëneqAvev.  uequjooix'  Di^e  ne  nTeïo^e  taevUT^c^p^ci  éTMiiTçA.?V.o. 

iKTUi  ueqtTAv.o'OAv  ne  nevp&.  uTÛnooTe  eTqA\.oouje  HA\.A\.A.ir.  n&.ï  A\.e»  «^.Trcoirûijuq  it«>e  iioiruîÛHp. 
ATCii  on  neirA\.e  Av.svoq  n«>e  noirujtoc.  eir'^-jsv.TOn  nevq  eAv.ô.Te  n«^e  noenptoM^e  nAoïriROc  çcuc  nTô^^ir- 
TOuyoTT  ne^q  eûcAoïTU  Tenpono\ev  eTOTJVô^û  eÊso^Dce  e».irnevTr  ênAV.&.ein  AvneTracoeic  eqxo  ^icoûjq. 
^n  Tenpoj  Aven  netyôwTTRTO  e^OTn  epoq  ^(ocxe  (neq)^A\.OM  qn  xeiVAVHTC  u«e  AvneTujoon  qn 
OTCRHnn  eTÛe  tcv^h  nnniqe  eTTe^^ô  AVM.oq.  ô^ttûi  niyaiAV  on  ooavoiûjc  neujevTrpçe».ï£>ee  epoq.  eq- 
^&.nujb>ne  2».e  on  nOTOO(JTr  nqr.sv.eiaff'J^s'OAV.  CA\.oouje  ncwoir  e(T5')nek.6o3R  eoirtoM  neuj^pe  ooïnc 
«jtrtatTi  çe^^THq  éM.eTRe^.*.q  A\.ôkTre>.dwq.  nxe  nReceenc  on  êcor  nccA\.ooH£.  t^^iù  nceeine  nek.q  oii  tct- 
Tdwnpo  nneTqndkOTO.Nvoir. 


La  vie  du  bienheureux  Aphou.  29 


nàJi  2^e  iiTe».qooAvo'A.Ofei  ma\.oot  acinTè^qp  enicRonoc  efioA.  ace  «^ttmhhuic  ^v  iigciihtj"  ^er- 
çtoTq  €T(ev)itivCTpo*^H   2SLe  CTÊe  ô^uj  nevïTiôw  e^KnoAiTeTre  iiTcïoe.   UTOq   ï&.c   <!kq(&j)uj    cpooir    ûne^ï   ace 

&.nOR  MCii  '^ujA.ei.T  CAv.e..TC  i\ uivïewTAv.  cnMevRA.pioe  a^e^TTCia».  cqacû)  mavoc  im&.ç^pM  nnoirTe  ace 

Ô.UOH  a>.e  A-ïp  «^e  iiniTÛiiH  uu&.opes.H.  i<'ic(arM.  on  eTÛe  Hcei.iô.c  ace  <vqA\.ooujc  eqKHKivç^Hir.  *.t(o 
TiKeCooTcne  er^Hp  MA\.oq  eaciv  Teq-\-ne  6.qTpeqÊoA  efioA.  neuctoTHp  2,.6  on  nacoeic  JÂnTHptj  e^ï- 
ouiq  ÇA».  i\Rek.T&.AV.dwpROC  eqaco)  ja.a\.oc  ace  nequjooii  ne  jmi  ne«^Hpion. 

eyyace  TxnOTPTe  «Te  Avn  neqT\eTOir&.&.û  ûwr  o«v  nioice  THpoir  ètêhht  noco  jA.e^'A.Aon  A.nOR 
neïeûiHn. 

evcujtone    ix.e    eTi     eqiyoon    M.n   ne^^npion    eTpeqei    eÊoA    énT&.iyeoeiu|    Avnn<s.c5(^A.    eTOTrôkdkft. 

A.qcûjTAV  a>.e  eirAe^ic  n(c)cTrAvr|)onei  A.n  A\.n  hcooth  Av.nennek.  eTOTrA.A.6  çwcTe  nqujTopTp 
eAVôkTe  eacAV  niyik.ace. 

Kivi  T'&.p  otron  niAv.  nT«vTrcoTA\.eq  e.irATvnH  «wvco  ek.Tru}TopTp  otooT.  nAnn  nevxrt'eAoc  Avnacoeic 
&.qoTyeç^t<s.çne  A\.iiA\.ô.Hevpioc  e>.'-^o;r  4TA\.Tpe''4è.A\.eAei  énuîek.ace.  eqacto  avavoc  n<s.q  ace  *.-îrTO^H  eûoA 
f^iTM.  nacoeic  expeRÛtoR  uje.  pevROTe.  nx^'Te^çe  T\eïu}d>.ace  epe^Tq.  ï\^ek.ace  s>^e  eTJ«.A\.ôwTr  ne  ottti- 
A\.ine  ire.  otoc  ace  eqaciee  AviieooTr  AvnnOTPTe  <^m.  nujôwace.  &.qp  ïiAv.eeTe  7iTÂCnT(yto6  îïnptoAve.  es.Tr&) 
neacô.q  ns-i  nexç-rnox^opeTe  ace  u  T&.Ï  e>.n  Te  «^iRa>n  A».iinoirTe  tàï  <s.non  eTn:5>opei  a».a^oc  e^non 
nnpcoAve  (sic). 

nTcpeqcajTAV  a,.e  ènA.ï  iia'i  nAVô^Rô^pioc  «kC^OTS"  ewC^AVoirç^  èÊoAçjrt.  nenu*.  eTOirdwekû.  à^Tra  «v^ô^tio- 
a.HA».ei  èTTToAic  pevROTe.  eq(^opei  noTujTHn  (Av)nA<re.  A.q&.ç^e  a>.e  epe^Tq  utTi  iiA\.es.Res.pioc  «.na. 
iv.r\)0-r  çipAv  npo  AvneniCROnoc  nujOAvnT  noooT.  e».Trûj  Avne  Aôi.ôwTS'  ac(iT)q  na^q  eçoTn.  (e)Tnek.ir  énpcoAve 
eu}ace  otoisî^iwthc  ne.  Auinca,  n&.ï  &.q'\-  ÇTH(q)  époq  nfyi  otta.  nneRAHpiROc.  <vqnô>.T  6(T)eqçirnOAVonH 
dkq«kic«^ekne  ace  OTrpajA\.e  nxe  nuo'S'Te  ne.  à^TOi  c^qûcoR  eçoirn.  ô.qTA.Ave  ne^p^ieniCROnoc  ace  eic 
OTptOM.e  nç^HRe  o^rpAV  npo.  ôwqacw  A^.AVOC  ace  eqoTTcouj  ed.nds.nTo.  epoR.  «.non  a..e  Av.nenevyToAA\^ek.  énTq 
ne^R  eçoTvn  eneia^n  Av.n  ç^6c<ô  o^itotoq  eqT&.HHTr  (sic). 

nTeTPnOT  a^e  evyace  nTA,irRiA\.  epoq  çita\.  nnoirTe  &.qoTeç^CA.ç>ie  eTptTvacixq  n&.q  eço^rn. 
nTepeqe.«3e  a».e  ep«kTq  AvneqAVTO  éÊoA  «^qacnoTq  éTôsÏTie..  ô>.qoTra>ujû  ace  A«.dwpe  n^v.acoïc  '  nenic- 
ROnoc  ctoTAV.  enujikace  AvneqçAvçe^A  q\i  OTô^ç'Ann  Av.n  OTc^no^H.  neace^q  ne.q  ace  &.2ciq.  «vq- 
OTrtou}6  ntri  nAVfk.Rik.pi oc  «k.n&.  «k'^OTS"  ace  '^•coOTn  nTAvnT^^^pc  nTeR\\^fT^H  ace  rtr  oirpfOAve  npeq- 
aciujoacne.  eTÉe  n&.ï  ôki-^"  nikOTOï  èç^OTn  èTeRAvnTnoir'.  eï^^ikppei  ace  nt'nekUjec  niyôkace  e>n  nTAvnT- 
eTTceÛHC.  RôkU  eôkqiytone  eÊoA  oiTOOTq  noirptoA^e  nçHRe  exe  i^nOR  ne. 

^eo'^iAoc  a>.e  neskp^seniCROnoc  neacekq  nek.q  ace  niAv  nôkTnOTTTe  nexnekpek^^HT  nTeïo^e  çoiCTe 
CTCTe  OT5"U}ek.ace  eûoA  nTe  nnOTTTe  eTÊe  Askôk^r  nçcoÊ. 

«kqoirtoiyÊ  nai  ô^^^ot  ace  A\.A.pe  nokacoeic  ReAetre  ncetouj  epoï  Avnç^icon  AvnTekiijeoeiyy 
eneÏ!^H  ekïctoTAV  e-rAe^ic  nOHTq  nccTAV^onei  *.n  avh  nex'pdkt^H  nniqe  nTe  nnOTTe.  *.nOR  c^e  Av(nj) 
niCTeTe  ace  nTèkCes  efioAçiTOOTR.  ekAAô.  nTCkïacooc  ace  AVHnoTe  uTev  ncrn^pekt^peTC  vywqT  eT- 
CÇA.Ï.  Tekï  ÎÏt  «k  ç>ç^  oji  neTTceÛHC  aciacpon  eTÛHHTC.  çcoCTe  uceAVRôkÇ  uçht  eAve^Te. 

ekqReAeire  nTe-rnoir  na'i  «kndk  «^eot^iAoc  nôkp^cieniCROnoc.  &.iveine  Avnçieou  A\.nT&.ujeoeiuj. 
nxepOTrikp^Ct»    2^t   ntoiy  ek-yntoç  eTAegic  eTAVAVA.-T.    nTeirnoir  ôwqnikÇTq  na"!  dknA.  «k-^OTr  eqacto  a\.av.oc 

1  acoïc  a  cette  oithograplie  au  lieu  de  acoeïc  quand  il  se  trouve  terminer  une  lig'ne  dans  une  colonne 
régulière  et  que  la  place  manque.  Il  en  est  toujours  ainsi  dans  nos  papyrus  ainsi  que  dans  Mingarelli. 


30  Eugène  Revillout. 


«kqoTûJ^fi  ns'i  ixA-px'^"'*^*^®""*^  ^^^  ïTtoc  utor  j.vakU"&.ekK  2kK^&2c.e  ovÊe  TeïAcgi'ic)  ewTO) 
JA.TTG  KeAekek,-!r  (u}<one)  ^^\  nTOOxq  HAVM^y.R.  neocc  a^niv  en.^OT  ate  ji^nOK  2s.e  •\-«^«kpp£i  3cg  Hndk.-^  tootk 
i\j«.j«.&.ï.  a.TtD  nTTttô.-^-  e>.rt  eçoirn  eç^pa-ï. 

iieace  nd^p^ienicwonoc  ace  n&.u|  n^e  eRne^ujatooc  exfic  oire(5'û)U}  Dte  «^iRCon  tc  AvnMOTTe.  h 
OTôk  eqcoû^.  H  OT(5'ôkAe.  h  ottûA-Ac. 

«wqou*û)^6  non  TiMekR<v.pioc  «kiiiv  ôw^ot  isce  cRUjivnTA.i'G  n&.ï  nTGÏAvine  eRn&.ujù)ne  eR-^Twn 
Âm  neTA.q2cooc  ace  A^e^pnTekM^io  HOTpcujw.e  RO>.Tew  ncneinc  av.h  TençiR<«>n. 

ekqoirwu}6  nu'i  na^p^ieniCROnoc  sec  mh  ^cnoiTO.  ekA.A.«k  eiA^-Ceirc  eTX&.ï  ace  Cwîvaav  A^èkirekdkq 
TTenTekTT&.AMoq    Rô^Ta».    iieqeitve   Avn   Teq^iRton.    nuynpe   r^c   nTe^'^acnoOT   Mnnccoq   nceeine   jA.jA.oq  ek.n. 

ô>.qOTr(ou}6  na'i  «wHa.  «k^^***^  cqatû)  m.m.oc  ace  rô^i  M.i\n  M.nnces.  Tpc  nnoiTTe  ca\.h  :^i&.«hrk  j^n 
ncDoe  jA.nncek.  nRek.T&.RATCJA.oc.  ujôk^acooe  n«k.q  ace  neTnd>.nco^T  eÊoA  «lOTj^ctioq  npcûM.e  cen&.neçT 
ntoq  eÉoA.  éneq.wew  ace  nTdkTT«kJA.ie  npco.we  çi\  «iROiti  MnnoirTe. 

neate    n<vp;)(;ieT\iCRonoc    ace    -^-pçoTe    éacooc    OTrpa)Av.e    npequjwne    npeqiyn  ......  ace   eq- 

_  _  (^•'=)  _  -         _ 

(^opei  n«^iR<on  AvnnOTTe.  (n)ewT\ôk.^HC  iteTTHAee.    eu}ô>.qçAvooc  çi^iÊoA  RCjne^pôkCReTe^^e.  n«k.uj  nçe  (r)h&. 

AveeTcc  epoq  j\n  nOTroein  jA.M.e  eve  Av.epe  A.evA.Tr  acooÊeq. 

Tierce  «wt^JOv  nô>.q  ace  CRU|&.Hace  ne^ï  on  cenôwacooc  ênccoAV&.  JA.nc;x;c  eTitacO)  avmocj.  ace  iiToq 
e>.n  lie.  nïOTas.eikï  ci^p  nA.acooc  ace  ne^uj  nçe  Raci  nOTOeiR  (e)ev  nRJVÇ  (Tei)OTO  eÊoA.  j^vjA.oq  çii  OTÇa^ce 
jA.nncfa)c  nr^niCTeire  epoq  (eR)acw  Av.j.voq  ace  t\&.ï  ne  ncdiJA.*.  Avnacoeic. 

neace  n&.p;)(;ieTïiCROTTOc  nis.'~\  ace  nTCïçe  e>.«  Te.  noeiR  x^e^p  ne  ivA.H«^&jc  Avn<!kT«\TèkA.O'4  eatjA. 
ne«^irciekCTHpion.  ç^av  nTpenTA.Aoq  eacM.  iic«^Trci&.CTHpion  iiTtieniRivAei  AvnnoiTTe  eç^^«k.ï  eactooir  (sic). 
nociR  jA.en  vya^qiycone  hcûjav^ôw  Avne^c  &.vû>  (rt)Te  nd^nOT  u|Cone  ncnoq.  Re^Te^  «^e  jiTô^qacooq  iiiieq^va- 
«^HTHC  ace  aci  rtctiiot'ûjja  nô^i  rte  nA.C(OA\.«w  jA.n  n&.cnoq.  ev.irû)  on  TAVuiCTeTG. 

neace    ôk.nek    iv^OT    ne^q    ace    n«^e    exe    07rôwn&.x»RÔLion    ne     eniCTe-yc     enivï.    OTeknekX^Re>.ion    ne 

eniCTeTre    e ace    nT&.TTevJw.ie    (Av.njpû>Av.e (ei)ne  (M.ti   ^i)v.(an   (Avn)nOTTe.   nenTdwqacooq 

^&.p  ace  e^nOR  ne  noeiR  nTek.qei  66oA.çn  vne.  nToq  on  nenT&.qacooc  ace  neTna^ntùçr  eûoA.  noircnoq 
npto.i^e   etrnôwncçT   ncoq    eûoA    eneqjw.ek   ace   nTdkTT«>.JA.ie   npû>JA.e    Çji    «^iRwn    A^.nnOTj*Te.    eTÛe    (neo)o-5* 

;^e  jw.nAver:e^oc  nnOTTe    n«k.i    eT  .  .  .  .   ujs'oja.  expe  A&.e^-y   n epoq    ^  .  .  .  .  neqou* 

n&.TT(&.çoq)  .  .  .  dkTVto  exÊe  Tjw.nTCtofi  nTjA.nTeTTcAHC  jA.np(OM.e  Rek.T&.  ntrwacfi  nTc^Trcic  eTncooTn 
M.v\.oov.  enj^v.eeTe  nTGï^e  ace  n«^e  no-yppo  eqne>.RGÀeTe  HCC5fa)T^pA.<:5*'  nOT^iRCon.  evTto  on  u)«.pe  OTon 
aiM.  ^oj*.oA.OT5ei  avja.oc  ace  «^iRwn  jivnppo  Te.  ç^ei.j.vek  as.e  on  cecoo^rn  THpoT  ace  otu}g  Te  Avn  ç^en 
nôkÇ^pe.  o-rak-e  i^a^p  nuî&.dknTC  acoce  ci^n  n«^e  jA.nA.  np(OAV.e.  ovî^e  necA\.eik&.acc  n«^c  nnck  nç^o  Mnppo. 
OTTî^e  on  nc^&.3ce  A.n  nTeq^e.  d^Toi  neï(5'wac6  TnpoT  eTAVAioc  Aiepe  A.&.A.T  p  neTPj«.eeTre  e^p 
çoTe  ÇHTC  nT&.noi^eikCic  Avnppo.  ace  ek.qacooc  ace  TCki  Te  TôwÇ^iROjn.  jA.e>.AA.on  a»>e  epu}fK.H  oire».  ToA-Me^ 
e&pnek  ava\.oc  ace  n  «^iRwn  <vn  Te  A\.nppo  ujdk.TAVoOTTq  ace  ekqaciOT5"dk  epoq.  A\.ekÀieTi<  ace  lye^pe 
ne^OTTCiA.  ctoOTÇ^  epoc  e-y^eooTr  nç^enn«.cre  nuje  Avn  oenna^o^pe  eTÉe  *OTe  JA.nppo.  eujace  u|2ik.pe 
nôwï  (fe  ujcone  notrç^iRCon  CAvn  nncw  .\\.a\.oc  oiv:^e  jM.ecRiJA.  eco  n  .  .  .  .  (&.)^ctoc.  n<0COAvev.A\on  np(OM.e 
(eT)epe  nen(He«.  Avn)nnOTTe  n^HTq.  eqenepT:'ci  a-tw  cqTdwïKU*  newp^!w  n^toon  THpOTr  eT^iacAV  nRa>.ç^. 
eTÛe  Ta>.ie!k.(^opdw  as.e  nnu)(one  Avn  n&.Trekn    ....  j*.n  nCtoacû   eTnoHTn   ci eircic   na^n   erfee 


La  vie  du  bienheueeux  Aphou.  31 


nes.-TA.oc  oe.(a  avmoc  ace  n^ooiTT  t«<>.p  ncujuje  a.ii  epoq  eçwÊc  nTt(q&.ne). 

iiTepeqcûiTjA.  C2».e  en&.ïui&.3ce  n<Ti  nM&H&pioc  HA.p3(;ieniCKOnoc.  AqTtoOTn  A.qn&.OTq  eatj*. 
neq^&.ivç^c  tqatto  ja.moc  sce  outcoc  cnpcntï  cTpe  Tjw.nTpcrj'^-cûûj  u{û>n£  iÏtootou»  nneTCTr3(;&.3c 
^ô.Trô.A.Tr.  A.HOR  1  ^A.p  iiAox^'icxot  jA.iiençiiT.  THÇ^  cpon.  çtoCTt  CTpenujtoqr  iÏTeï^e  THpc  qn.  otaÛÎto.t- 
cootth. 

A.irto  nTCTiiOTT  ô.qcçA>ï  eûoA  ^n  Tc^ctopa.  xnpc  eqA.nORtrpHCcc  nrAe^ic  eTM..M.«k.T  ace  ecujoqT. 
ôwTû)  ^n  o:rA*.nTakiiOHTOc  nTe^JAte-re  2  epoc. 

ALUivcô.  nô^ï  ô.qTô>pRe  njA.ô.Hô.pioc  cqacaj  mjw.oc  ace  ja.&.t&.m.oï  ace  oir  ne  ncHÊioc  &.ir<o  ÎÏtk 
oirpA».  Tton  ^M.  n£RT»eiioc.  'ynft.T  r&.p  èntRCA^OT  n«^e  nnçTva^itoTHC.  ■^cojtJÂ.  a>.c  çcotoq  èneRU)<k.a£.e 
eiratoce  cA^e>.Te  ne^peiw  kôw  nco^oc. 

&qo'<r(avyû  eqacco  avmoc  ace  evïoirtoui  jA.cn  comç^  ^(oc  j*.oiia.3COc.  nAnu  ■^-othtt  cûoA  jÂnT&.ciô 
i.TM.M.A.TS'.  à^Tùi  on  evnx'  OTpjA.ncMacc.  &.AAôw  encia^n  nTo(R)  n(c)TG  TnTd.!x.(p)o  eac-ïï  TCRCOt\>iô.. 
CTÊc  nt^'i  is.  nacevace  ^iTOOxq  cp  nd>.ï  ^itootr.  eqc(ooT5"n)  atc  o^rn  OTrjw.HHUje  ndw:x.iac.po(n).  ctêc 
n«wï  ncc-^-occ  nccTMCtoTjA.  cnujek.as.c  nTccfi(û))  (c)TOir«kdwû  CTnnîr  cÊoA^  pcoR.  nAnn  ctêc  nMC 
(c)Tujoon  nç^KTR  cçoirn  cnnOTTTC  cic  çhhtc  evRa^pô  ccjaot  niM.  nROTC  ÏÏtc  ni^idkÊoAoc  ^av 
nTpcRCWTAV.  cnu}&.2C-c  nTdkM.nTcA&.5(;iCTOC.  JA.nq(T'JA.a'oj«.  ve^p  c:s.ôwCtr  CTcnonoidw  n<ri  nAtci^ce^oc 
CTnoHTR.  çtocTc  CTpc(q)&.,M.&.ÇTC  cacM  ncROTTCou}  M.M.M\  JA.JA.OR.  ô.AAd«.  AROTtoiïç^  cûoA  nTMnTRO-yï 
CTÇA*.  nc;x!*^-  "^^  ^totoq  ^nnoa'  mûjtckc  cè>.qc<OTjw.  nCA.  ïto^op  nOTTHHÊ  JAM&.a..içek.M.  cnd,.ï  nd^jA.c 
nenTA.    nctOTnp   acooq    nncRciOTC    nô>.nocToAoc    atc    cTcrn rctth-tth   nTcxnp-ec    nni- 

U)HpCU}HM.. 

nxoR  as.c  «kROTTOnç^R  cûoA  ne^MC  atc  «kRRTOR  TnpR  c6oAçj«.  natocc  nç^HT  cçott»  énTÛÊio  jA.n 
Tj«.nT^ôknAoTC  w.n  TA\.nTROTÏ. 

j«.nncô.  wiK'i  ô^qccnctonq  (cjTpcqo-to  njA.JA.««.q  n^cn^ooir.  nroq  a^c  ô.q(n)dkpei>.(R&.A)ci  cqacw  avmoc 
atc  OTPA.T^'oj^  nevï  ne  n&.ï.  dwirco  Tt<'i  tc  «^c  nra^qc!  cûoAoïTOOTq  ç^n  OTCipnnH  M.ii  OTrTiA\.H  ncq- 
JA.ORO  a^e  uoKT  cqnHT  cÊoAç^iTOOTq  u«^g  nOTrujnpc  cpc  ncqcitoT  mooujc  cûoAç^iTOOTq. 

Mnncô.  u}OA\.nT  ay.c  npOMnc  acinTA.  nA.ï  ujtonc  ek.qnROTR  ntri  ncniCROnoc  MncMacc.  ei^Tto  RevTd». 
n^c^oc  e<  TnoAic  Tnpc  cwotvç^  cnccepHir  çn  OTCiTMf^tùniA.  noirwT.  ew-rto  ats"^  ■vJrirt^icjA.e».  ÇjB>.  ot 
nncnpecÊ-TTcpoc  o^êt(cc)êhc  çûwoq  ne.  A.TracooTq  cpA.ROTC  j«.n  ne\yTri^icjw.ek  ace  eTred.ôkq  ncnic- 
ROnoc.  nTcpeqaci  ak.e  nnee^A.ï  nui  nekp3(;ieniCROnoc  e^nin.  «eoc^iAoc.  ekqoTr<o|yyû  eqacco  ja.ja.oc  ace 
ô^r^OT  ovA\.onôk.;xi°*^  "^^  ^"*^  TCTnnoAic  ne.  evniq  na.!  Te^e^ô^q  nnrn  ncniCRonoc.  «kT^OTrouiyû  a^c  nTi 
ncnpecfeTPTcpoc  ciracaj  ja.a\.oc  ace  e^non  pton  nxncooivn  e^n  AV.JA.one>.;)(^oc  on  ncuTOiy  ace  A.r^»©!''-  a.'vûj 
(nT)nj«.eeir6  ace  j«.n  oiron  (n)^HTn  cooirn  jA.jA.oq. 

«kqoTûj^û  a>.e  on  ntri  n&.pxieniCROnoc  cqacto  ja.jaoc  ace  cuioinc  nrcTnnevnTq  A,n  "^nôwncuin 
pcajM.e  niiTn  e^n  TcnoT. 

nTOOT  a^c  ô-TTCi  cûoA^iTOOTq.  e>.ir£iajR  eTCTnoAic.  e^Triymc  nccw  npa>jA.c  e^-raj  ^nOTrcOTConq 
ôjÂ.  nTOuj  THpq.    cncqujoon  ^e>.p  e^n  jA.n  npa)JA.c.  «vAAa.  M.n.  ne«^Hpion. 

nTcpoT^^Aiûe  a».e  ewirctooT^  cçoirn  njA.Av.on«k.^oc  a-Tto  <vTacnOT5"OU"  cnpwMC.  «kqoTTCoiyû  :^e 
n<3'!  ncTCOOTn  Âij«.oq    hç^htott  ace    ce   "^-cooirn   jA.jA.oq  ^hk^h  j«.nooT.    ncuje.ïtrnTq  cve  ç^n  TepHJA.oc  cq- 

1  Lire  &.non  ou,  au  contraire,  plus  loin  :  M.ne».^KT. 

2  Lire  nra-q.  On  peut  cependant  croire  à  une  citation  textuelle. 


32  Eugène  Revillout. 


Te>.j«.ooT  ace  equ}&.ncij«.e  cnevï  as-e  eTCTuvyine  jicto^  Ga.&.q  nemcRonoc  cqn.&.ncûT. 

nCcpek<3'c  «ye  e^.is'a'Cûpa'  epoq  «j^n  «ei5'(yop(rc.  «wIvû)  &.qei  eûoA.  ïitctuih  ace  cqn&.cûj  jaoot  jsvn 
ttu}Ou|.  riTe-THOTT  2>.c  »-  rt!î'ep«>.<re  qws'e  cattoq.  &.T(yonq.  a«.T5'(«L)A\.ek.^(T)e  MM.oq.  «>.qu}ek.ace  rvc  nAVJ«.&.(-T) 
ace  ers-  ue  neTnçtoû  hav/a.*.!  eTeTn»-JA.e>-ÇTe  m.ja.o(ï).  &.nr^  oirpa)Av.e  çwtoT  nTCTn^e.  euiace  eTeTn(5'eTi 
TÊtiH  eic  nujoui  ekTeT«(yonq.  neac&.Tr  n^q  ace  Tticoo(Tn)  ace  utr  oirpaiAve  («^)Tra>  e«i(R)toTC  nca>K. 
eTÊe  n«.ï  ^.no'onR.  neace^q  itekT"  ace  «vror  ot».  ne(T)eT(H)uïï«c  nccoq  d.A.toTR  ncd».  110.1  j^vô>pcqûtoR. 
nTCTROir  «vTROi  eûoA  j.\.t\u|OU}.  ev-TTôkA-oq  (njTeirnOT.  dkis'(iiT)eq  epek.Tq  jA.Tiekp^ieniCROnoc.  nTepeqnek^ir 
t^ô.p  epoq  ivqpôwuje  ejA.ivTe.  a.tj"co  nTepoT5*Tô.A\.oq  e«^e  RTe^T<riTq  jm.m.oc  es.qpu}nHpc  eM.&.Te.  (o^Tia) 
ïicacei».q  ace  iVRei  iy.r^OTr  (ikm.ots'  ç6))(or  nx^'uinç^ice  avr  neRujÊpMeA^(oc). 

u|iv  nooi'  eRAViu}C  epOR  AVOkTVôwèkR  CR(TOiraco)  avj.\.or.  (tcroit)  çtotoq  rtor  ni:'T&.ac(pe)  ncRCRH-r. 
nx^Av.!vae  eacû)(o-5'  ra\.)jiV&.r.  ô>.qOTr(o^û  ntTi  Ck.ndk  dk.<^oir  ace  o>.rx:^  (riav)  e^ROR  nacoeic  nowacoeic  ace  eRe- 
ace  Reïujôkace  Rè^ï  RTeïçe.  ek.noR  T:'&.p  a.r^  o-vpoiAve  R&,c«heRHC.  Ow-rco  exûe  TCwMRTCûiÊ  HTe<ïntùT 
cûoA.  RTCTVRTex'*^  RnpcoAve  ace  (eie)ûoi)R  (eÊoA)  ç^av  rtcùç^  rrçocim  avriêioc.  TenOT  •^Te^.pRO  ava\.(or) 
jkvnacocic  è(T)A\.TpeRaciT  ««roRC.  neïçtoÊ  t&.ço  rô^ï  r^vtcoav. 

ne<p;)(^ieniCROROc  is^e  A.q(A:rnei)  e^e^Te  erfie  n&.R<vuj  Avnacocic.  &.Tra>  neac<s.q  Hev.q  ace  qORÇ^ 
R<Ti  nacoeic   ace   eRTA\.6o('\)    eûoA   Avnd.HA.uj   RTev.RAv.opT  RÇ^HTq  -^eipe  avavor  rujm.av.o   crt(oç^   AvnTHpq 

RRe5Cpi(eTl)«kROC    ^M.    RlikltOR    .WR    neTRHT. 

RTe-TROT  a^e  ek.qn<\.^Tq  rcTi  «vRa.  (ôv^otc)  eqacûi  j\m.o(c)  ace  ii.'is'(ùr{Ti).  nivï  ^«^p  OTU}A.oq  nt^Çi) 
ne  CV.TCO  OTr«^A.i\yic  tc  uja.  eReç^.  eic  ç^hhtc  "^çôv^thr  eiyace  •^■ROwUjp  nçtoû.  &.pipe  R&.Ï  R«^e  expe^RûvR. 

RTeTTROTT    ai.e   dkqndwÇ^Tq   ace   roi   rcvï   efioA.  iïô«,acoeic  HeiwT.    ewoi   ivqnoujReq  i\q(aco)OTq  eTeq- 

RoAic.    RTepcqô>.p5(^ei    î^e    eTMRTeniCRonoc   &.qek ReRen(p)&.RTiRon   RTiAv.iRe.    TAVRTenic- 

Ronoc  ....  e^pTH  ....  RTôwq&.d>.c  Mnqp  ots'O-î'ujh    rottcot    rrrotr    ^r    troAic    oiva^e   Av.nqoi^eAv.   0:5"- 

OeiR    ROTTtOT    RÇHTC    eUTHpq    ROTTÇ^OOTr    ROTtOT. 

ev.A.Ais.  Reqg'eeT  MekTrôk.dvq  ne  ^r  otavor&.cthpior  avrêcA.  rtroAic  ....  ncdkÊÊ&.TOR  CReujdkqei 
eTeRRAnciik..  d^TM  nqcooTÇ^  irÀikOC  (eq)u|ûvace  RJw.JA.&.q  çja.  iiu}«wace  AvnnOTTe  ujev.  po^r^e  ev-rto  Reiyèk.TS'p 
Te-r(u}H)  AvncikÊ  ....  e-y  ...  .  u|Ah*V.  jw.r  .  .  .  \y&.AjA.oc  ....  d>.^epA.Tq  ç^  .  .  .  .  e-r  çr  R\(iTOi5'p)r:iek. 
eTOTi\ekfi    &.T(a    or    Reuj«kq'Riv«^H);)(;ei     A\.AV.oo7r     ne     uje^    acncô    RTRTpievRR    RqekR«k;)(;<opei    or    ene- 

AVORA.CTHp!OR    UJA.    nCes.66<VTOR. 

evqRev«^iCTô>.    a^-e   AvnenpecÊ'PTepoc    (RT)iv.TaciTq    eô>.e<q    ReniCROnoc    eç^pivï   eacR    tcrA.oi:^iicth 

THpC    RT6RRA.HCIdw. 

.       —  _  (-=)  _ 

A.Ta>  Reujô.q'Y  RRWn  RTeRRÀHCicv.  Ro('yc)on  TepOAV.ne.  cs.t(ù  Reujavq  ceene  Tnpq  en^RÇO- 
A.OMak  RTeRRA.HCi«w  ReujCkqacooq  eÊoA  eRÇ^HRe  rtroAic  .«.r  ReTÇHR  epoq.  ooiCTe  ncep  nfoÊuj  av- 
nç^  ....  avrt^h(rc)  eTÛHHTq  ....  rcvI  T:^A.p  Refpe)  .  .  .   RRCA.p;)(^(coR)  .  .  ■\'  RTOOTq  ne  jw.nûoA  .... 

HRdk    RTeRRA.HCI«v. 

èk-yto  Re  .  .  .  "^  .  .  RA.q  R^cn(e)pHT  avr  ^(cRJ^^topon. 

èvTTûi  neqn(û)iy)  mja.oot  n(e)  (e)acfR  ot'OR    ri.vv.)  .  .  Rek.Tdw  «^c  eTcpe  nOTev  .  .  .  p  XP'*'  •''^•^^  •  •  • 

ncev6û<s.T  ....  a>.e  Req  .  .  .  &.q  ne   ^ït 

ue(Te)u}eivek.T  a\.r  neTacHir  riTorc  Reuî&.qpcouje  CReT^P"^-  ô^ivco  ReqAVRR  eûo\  ne  eq(co)OTrR  çe^ 
(Te)-VAVRTÇ^poT(o  UJ&.  acR  \ViTe.  D!t(iR)  îtacn  "v^iTe  eç^pA.ï  ujA-qcpqe  e(ne)u}'\HA  eTOT(«ke>.)fi  u|«».  nRakU" 
Rpo-yç^e  nqcTTMôk.t'e  mavooit  nqei   eÊoA  .  .  or  Rq^^nOMiRe  enOTUjn  Rpoeic  ujen.  nRe^ir  R(uj)6i)pn. 


La  vie  du  bienheureux  Aphou.  33 

ne(M.e)pe  \ek&.ir  a^^c  ncç^iMt  ToAM^k  e^a>n  cpoq  éaci  epc  A.AdwT  nnovÊ  jm.av.oc.  t«.ï  tc  -»c  nxa^q 
n&,p&.i:«ç'ciAe  exMTpc  Ad>.<v7r  ncç^ijA.e  çton  eç^oirn  cpoq  eati  e&oAçM.  nccoM^v  Mn  nccnoq  ÂTne;)^.  cpe 
A.A^ip  nnoTÛ  M.M.OC  eqoTTonç^  eÊoÀ.  h  A.ek«kir  nçoïTC  eqfô)  ne>.TV«kH.  efioA.:^e  nepe  ni>i.i&H6>n  ne>  pooTe 
ÇHTq.  &.irû>  n€T*.ç^epô,TOir  H&.T&.  opa..iuo»i  R&.T&.  po  exeiTRè».  ?V.a.«wt  éÊ<OH  eç5>:rn  ei(j«.H)Tei  encT  epc 
TMnTceA».noc  to  ç^Jtooir.  exe  nt^i  ne.  çwûc  j«.neTr^(o)  m.»,  ueiro'iac..  &.u"a>  nKcç(o)ïTe  ctto  ç^iûjott. 
ne  Ç£(n)  eûoA.  &.n  ^«i  OTattiifTc.  npeqatea-copT.  à^T<a  on  epe  neTr^x^pcoAVA.  npcitoOT  e-rô  nA&.j^npoc. 
na^iek.HOnoc   on  ç^omokoc  ne  &.Tro-r&.^o:r  ne  hca.  Teqooe  e^n  A&.&.T  hçhtoit  p  ç^ftoû)  nA.c&.mon  ov3».c 

"*■"«  =>-£  JA.ô>1^^s.A.1^ \e>.oc  AvnacLOeic.  R^y.^  ^&.p 

neu|&.qocooc  epooTr  ne  nçd^ç^  ncon  nTKè>.TH;x!"<^*<^  eqatto  j«.moc  ace  j«.epc  nA.ç^KT  j[i.KA.^  çev  n€nT^k.^^- 
atiTOTT  no'onc  n^e  nneTaci  no-onc.  nenTô^TratiTOiv  x'&.p  noronc  eqoTrto^  n&.ir  efioA  nTjw.nTepô 
nM.nH-s*e.  npeqaci  no'onc  eu-qûia'e  m.m.ootf  M.i^Ti)<t>.-y  j\m.oc.  &.tû)  eipou-touic  nt^T  eûoA.  ÂinT&.RÔ. 

u|&.cu)(one  a.e  on  n^&ç  ncon  nq6>nu|  efioA..  à^T(û  neu|A-T3t(o  cpoq  ne  nnexiyoon  on  Tno7V.ic. 
«kTTû)  neu|A.qTe>.jA.e  nA.A.oc  ne  eTpeu*j«.eTawnoei  ekirto  nqRCuAire  nxoprn  CTÂvTô^ç^ooir. 

Rô.n  epui&n  neT\VA.AAei  u|<oqT  no-rÀe^ic  h  nq(n)oonec  neu|ekqRûiîV.ire  i.rM.\  nKa^à^T  uiixnxq- 
atoOTT  eûoA  nq2>.iop«>ou"  j*.nei\ydwA.MOC  &.Tto  neuje^qacooc  eqpijM.e  eqatw  ja.moc  ace  neïui&ace  n&. 
oirp6>M.e  nppo  ne.  ô-qocooir  çn  ^ennHCTei&.  M.n  oira'ooTrne.  &.non  ce  çn  OTS"jA.nT&.T6oTe  nTO.^ 
ÇTH(n)  epooTT. 

iKTia    &.cu|a>ne    nTcpeqatfOR    cfioA.    jM.neqûioc    &.    necnnir    '\-    AvneirOTOï    epoq    eqn«kMOu*.     ç^<oc 

eir-oewppei   n j«.ni(ROc)Avoc  TMnTR<y.^e>.poc  nroq  neniCROnoc d^-roi  neatakU"  n&.q  ate  nen- 

eitûT    Tdkire   OTs^vy^vate    epon   Mna^TRÛtoR   eûoA.oiTOOTn.    nToq    aw.e   Aquje<ac.e    nMMMr    eqatto  ja.m.oc   ace 

dwnOR  OTÇ^oifi  noirtoT  nc^-çcon  M^oq  e  .  .  .  .  THirTn  eTAVTpe  Àdwdk.-v  MMCoren  eni«^irjrt.ei  eA«w«kir  mmiÏt-  X 

noff".     (T&.Ï)     rei^p    A.noR    A\.nnc&.    (n)T&.ïna>(ç^)(jw.)*».oc    (1.    epoc)    avoïmc    e&.ïcjw.o'OJA.   e^e>.pe^   e(H)enTè».ï- 

atnooir   çn   TM.nTM.oa.i^'^oc..    TAvnTeniCROnoc   :^6  n"\-A».eeTre   «^n  ace   Vi-^-^Hir   M.M.oe.    qn    Aôkè^ip    nowÈ. 

«kTûJ  on  JA.ox^ic  dkïo'M.a'OjA.  eç^&.peç^  epoï  è«^e  c^-ô  (m)ja.oc  nvyopn. 

«k-yw  nToq  equie^nnoire  cntoujn  noirak.iA.ROnoc  JA.eq;)(;eipoa.onei  j*^>A.oq  niyopn  eÏMHTei  îiq- 
««.nocTH^i-je  nacOTTTH  j«.'vyô..AMOc  d^irto  eniCTO?V.H  cnre  n&.nocToA.oc.  dwirw  ou-jA.epoc  neirik^ï'eA.ion. 
evycone  ai^e  OTrnpecfiTTepoc  ne.  OTj-j«.epoc  çjw.  nTeTPTeponoj«.ion.  m.\i  OTj*.epoc  çj*.  jM.nekp^oiJA.i2i>.  «w-rto 
RCAvepoc  çn  Hceki«wC.  «wircu  exÊe  nnoMOc  nT&.qewM.ekÇTe  nçHxq  ne  M.n.  çaç^  npb>M.e  ne'\-  MneiroTroï 
eçoirn  e^(o&  nTeÏA\.ine  eiMHTei  ncecÛTtùTOir  nvyopn.  çn  topat  nij*..  oiras^e  on  A».ne  çtoû  lycone  enTnpq 
nTC  A.&.ikir  ati  ç^OAvnx  eTÊe  ç<oû  n^cipoa^oniei».  qti  neq^oois-.  d^AAdw  çoT*.n  CTruiô^nceTn  oirk  eÊoA.ojÂ. 
nA.^)k.oc  cnjAd^  CTOirp-^piew  jA.AV.oq  CAVè^ir.  neu}&.qTpeTrçA^ooc  nvyopn  qn  oir^irnOAionH  nceOTrcono 
eûoA.  ace  ceAA.e  A*.nuiè>,ate  Av.nnOTrTe  aceRd^c  çtoou"  on  CTn&,R(toT)  Av.n?V.ô.oc  çn  TeïçipnoAv.onH  nTeïAv.ine 

dwTûj  TAÏ  Te  «e  nT&.qac.ei>R  eûoA.  Av.neq6ioc  Re^Atoc  e&qû&>R  epe^rq  A\.nnoTTe  çn  OTveipnnH  on 
(coT5")ac.oirTOTre  neooiTT  çav.  ne;)(^c  ic  nenatoeic  n&,ï  eûoAç^iTOOTq  neooir  Av.nnoTrTe  neiwT  njwAv.&.q 
Avn  nenn&  eT07r«kawû  igew  ene^ 

ncneç^ 

Ç«kAV.Hn. 

'  Ce  ne  semble  ici  assez  singulier  si  la  leçon  de  la  copie  est  bonne. 

(La  suite  à  un  prochain  nunaéro.) 


34  Eugène  Revillout. 


LE  MARTYEE  DE  S^  IGNACE. 

Le  martyre  de  S*  Ignace,  dout  nous  donnons  aujourd'hui  les  versions  thébaine  et  mem- 
phitique,  a  été  publié,  depuis  peu  d'années,  en  grec.  Mais  les  savants  qui  voudront  comparer 
la  version  grecque  avec  nos  versions  verront  que  celles-ci  apportent  à  celle-là  une  grande 
lumière.  Je  citerai  seulement  la  date  initiale  qui  est  complètement  fautive  et  inintelligible 
dans  le  grec  et  fort  intelligible  dans  le  copte.  Nous  examinerons  minutieusement  toutes  ces 
choses,  en  donnant  la  traduction  de  ce  martyre  dans  un  prochain  numéro  de  la  Bévue.  En 
attendant,  voici  le  commencement  des  textes,  qui,  au  point  de  vue  de  la  linguistique  égyp- 
tienne, sont  des  plus  intéressants  et  des  plus  riches. 

Eugène  Revillout. 


TEXTE  MEMPHITIQUE. 

(Musée  du  Vatican.) 

^MivpTTrpiow  nT€  iiiek.noc  ifn&.î^ioc  c\)h  CTOirMOirTe'  epoq  dc^c  «toc^opoc  exe  t^n  eTcpi^opei* 
•'^'^'V-  ^"  CTô>.qep  CTiiCHOnoc  eô>,nTiO'j(;i»  Avencnc*.  iriç^ioiiuj  UTe  nièwnocToA.oc.  Cd^qoceR  Teqj«.ekpTTpiek 
tûoA.  Scn  p<ojA.H  ncoTT^  js\.T\iiv6oT  cnHTi  Sen  oivcipHïiH  nre  cJ^'V- 

*en  «^Md.ç«^  upoj^ni  ivTe  TMe^^H^^CAvton  nTpe^id^noc  Kec^lkp  exe  «m&.^ê'^^  npojw.ni  iic  nve 
'\'jw.«kOCRx^   npoMTii   nTc   oATTMniôkC  Sen   '\;-^u"ïTei«.Tidk    nevTTiROC   ou-pfeton   ncM   A\.ekp(ReA)Aoc.    i^nckTioc 

(sic) 

HÊTTiCROnoc  nô.i\Tio^iôw  ed>.qep  j^ô^çû  Avences.  niei.nocToAoc.  civ02>.ioc  x^&p  ne  niiyopu.  eT^s.^3■I  «."^M-ex- 
eniCROnoc.   ek.T<yiTq  2>.c  eptoj«.H   eirptoïc  epoq  *en  otthiuj'^'  ucnOTr3>.H.    eûoAç^iTcn  nH  eTôwiroiropnOT. 

(sic) 

HH  2ce  cneikTr&.peç^  epoq  ne^iripi  (nxne)'  *en  TOTHni   eç^ewnnp02..iRT(ûp  nrc  Tp&.iô>.noc  noirpo  ne. 

nowi  :^c  ne  noirpown.  ROpnH^ioc.  c^icton.  iottêihoc.  cea^oc.  ÛôwTttoc.  AeA&.p;x!®*^-  nivAM&.c.  ôlTmhii. 
Êdkpû&.poc.  A-TMiTOc.  ç&.npcojM.i  ne  n&.x'pioc  Sen  OTMeTOOiro.  eoTOn  nTWOTr  AVAv.ô.ir  nçekncjA.OT  u^^Hpion. 

es.Tj"(ri  2».c  j«.niA\.ô>.Rdwpioc  eqconç^  d^iri  efcoAsen  'Vx(^P)'^  ^'^'^  '^•«wCid»..  ottoç]  eÊoAscn  niAv.&. 
eTejAJA.ek.-T  ô.iri  e-\-«^pivRH  nej«.  pncson.  con  j«.en  *en  nijAtoiT  cou  a.e  dcn  c5>ïoja..  ctv'^-  mrô^ç^  Avnic^iReoc. 
eiroDqi  jAJAoq  Sen  oij-AveT^OTO  nieç^ooiv  nejA.  meacûip^. 


TEXTE  THEBAIN. 

(PapjTus  de  Turin.) 

^ennpoTHRTtop  ne    en Tpd>.ïeknoc   iippo.    ctc    nevï   ne   ncTp&.n.  RopnHAioc.    nicoin.    £i«>.-ira^oc. 

^eA.&.p^oc.  dwAA-iHn.  £i&p£t&.poc.  Aoivtioc.  ïoirÉinoc  ceTOc.  ixA.Aj«.ev.c.  ^enpwMe  now^pioc  cne^oiro 
€irnT&.TV  AVMCwTV  n^encA\.OT  n^iipion. 

dwirati  AvnjAd^Revpioc  eqjAHp  «^irci  efioA.cn  re^wp*.  nTes.ci«w.  e^Tto  efioAçAv.  tïma.  eTM.M.«>ir.  ère 
-»pOkRH  Avn  ç^pHï'ion.  cou  Av.en  çn  ne^ioOTe  con  ïs^e  on  çn  nee&.Ad>.ccôw.  eTAVOTr(H)ç^  jiA.nss.iRô>.ioc  &.Ta> 
ctptoqe  .w.JA.oq  ene^OTO  AvneçooTr  j«.n  TeiruiH. 

'  jAC^r"^. 

^  Lire  j^ex. 


Le  maetyre  de  S"^  Ignace.  35 

RCTOi.  cpc  ivicnHOT  Hô^Tô^  T\oAic  "^  noiQ-y  nçewnniuj-^-  iitaio.    ace  ç_ines.  UTOT-^-aiCO  c<i^He«OTek6. 
&A.A.&  jA.i\e  o\i  *en  na^i  oepi  M.nOTr3ta>nT  «^Wd^  nA.TÇ02c.o^e3c  AV.Tn2».iReoc  Acn  o&.nÊ&A.  n<v«u]ini 

Ke^Tek.  '^pH-\-  n^oq.  eTcqoi  MMC^pe  *en  otti  nneqeniCToAii.  cqatto  mmoc  Av.nekipH-^'. 

ace  &.I  icace  iiTCTpiew.  u]«>.p(OM.H.  ixe  Scn  niAvtoiT.  itg  *eii  ncTujOTOiOTr.  itc  ôen  c^ioav.  eiMOuji.  iica». 
Hi«^Hpion.  eiconç^  jiTOTq  avi  mm.oti.  eve  niM.«kTOi  ne.  na>.i  dk^ui&ncp  ne^n&neq  ntooT  uia^TTÇo  «h^otto. 

€TA.Tini  OTii  Ània^iRCOC.  eûoA^en  pHt:'ion.  gtujc  côoth  épwMH.  A.Tcpc-yj«.€niH  Mi\iei>.TPTO- 
Rpek.Ttùp  nTeqnekpOTCiôk. 

TOTc  &.qOTA.ç^Côwçni.  e«pOTT&,çoq  cpa^Tq  n&.q.  ee^q^^ûjOT-^^  ii-\^cirnRA.HTOC  THpc.  inccépKOip. 
OTOç^  nc2c.A.q  n&.q.  rsce  n^OR  ne  'n'nùk!i..ioc.  '4*h  eTe^qTOTnoc  "^noAic  ekiiTiô^x^iÀ  çtocTc  e^pe  neRCtoiT 
i  n&M.&u|2c  lïte  ek.RTô.c^c  "^-cirpusk  THpc  eûoA.ç«k  nujCMuii  hHinou"\-.  eSoirn  ena|eMU)i  lini^pHCTiivnoc. 

&.qepoTCD  noce  n^n&.2>..ioc  ne3c.&.q  ace  a.avoi.  ia  noirpo  ekina>.uj2£.eM3cOM.  nrakC^OR  ç^cor.  eÊoAâen 
ncycMU)!  nniii^oiAon.  enpocciteiTRe  Amor  ^\-  otoç^  eiviR  nui'^Hp  Mniniuj-\-  noivpo  n^c  ace  ç^in«k. 
rtTeqTfiLÎïtpo  nTeRAV.eTO-rpo. 

ivqepOTO)  note  xpakiô^noc  ne2ca.q  ace  icate  ^^otûiuî.  e-^  nni  n^dkn;)(^èkpicj«.«w.  otoç^  eepeRiycùni 
eRHn  neM«>.n  nuj-;^Hp.  y^bi  nccoR  nTô^ix'najAv.H  nreRep  «^irciik  nninoT"^'  ottoç^  ;)(;nè>.u}ûjni  ndkp3(;Hcpeirc 
Àniniui'Y  iii^eTC.  otoç^  tiTCRcp  OTpo  neM.Hi. 

«k.qepOT(ij  nate  ■n:«ii&.2i.ioc.  ace  otçwû  eTecuje  A.n  w  nOTpo  e-\^  nç^&.n3c&.picjw.a>.  eTnekepûAd>.nTi« 
\^'Tr;)(^H  OTOÇ^  hccaiTc  cniRoAckCic  uje<  éiieç^. 

(sic) 

iteRtou]  ak.e  eT^vRcou}  A\.Ma)o-v.  eTHiTOT  hhi.  -xton  j*jw,û>ot  «^h.  ace  ceM.u|dk  n^A.i  enxHpq.  otoo 
OT5";^e  '^■ivôw^cjA.iuï   «>^"  no&.miOT-\^  n-^ctoOTn  MJ«.a>OTr  &.«. 

Rft.1  TOI  epe  itecivHT  rô^tô,.  noAic  \  ïh^tf  nç^ennoo'  n(Te>.eio)  accR&.c  e(Tre)'\-  &.nHcic  JinneTO-r&.ei>,fe. 
dkA.AA,  jivne  A.ek.«w-y  nn&.ï -y  ç^pOR  j^neT(nnaw).  «wAA&.  neirçoacçac  Mna>.iRikioc  çn  ^enûe^A  n&.Tu|ine.  à<T<a 
n«k.(Tn«k).  RikTôk.  «^e  eTqp  MUTpe  on  o-s-ei  nneqenicToAH  eqaccD  j«.moc  nTcï^e  ace  a^ïei  acin  TcirpiÂ. 
U|&  ç^ptOAVH.  ciTe  ^Av  nRek.ç^.  eiTe  on  «^e>.\«kCcek.  «kiAvooiye  M.n  ne^^npion  eïconç.  nTOOTOi"  mm.ht 
M.M.OTÏ  eTe  M.M.is.TOï  ne  eT(aci)  mmoï (eTU)«kn)p  nnexiiAnoirq  m^-y  ^^a.tf^o  nçoiro. 

nTepo-yaci  o-yn  jkvn2».iRdkioc  eèoA.  çn  ç^ptOAiH  &.TCHAA.&.ne  jA.n&,TTORp&T(ap  nTeqnekpoiPCiik..  élirai 
&.qoTeçcdLÇ^ne  eTevÇ^oq  epe^Tq.  eA.qctooTÇ^  nTCTi^R^HTOc  eneccpHT.  à<-y(a  neacè^q  na^q  acene  nTOR 
ne  ïmevTioc  nenT«kqA.nek^cT&.TOT  (sic)  nTnoA.ic  n^nTiO'^iis.  çwcTe  eTpe  neRCoeiT  ei  end^MJkdwace  ace 
&RRTe  TCTrpiA.  THpc  eûoA.  jA.nu|M.u|e  nn^eA.A.Hn.  cç^oirn  enu|jM.u|e  nne^piCTiivnoc. 

a^cjOTTûiuifi  niTi  iVnes.Tioc  ace  ç&.j«.oï  la  nppo  nneïn&uia'M.tT'OM.  hrtor  ^(oûjr  eûoA^n  Tj*.nTpeq- 
u}jA.u}e  €iak.to\on.  enpocenci^RC  jm.jm.or  jA.nnOTTe  j«.nTHpq.  a.-tû>  e&d^R  nujÊnp  ene;xic  aceR&.c  eqniwacpo 
eTeRjw.nTepô. 

jyqoTCoujû  n<ri  Tpa^ïa^noc  neac&.q  ace  eujace  rottcou}  e-^^  ne^i  n^en;)ceikpic  &.Trco  eTpeRvyû>ne 
CRHn  j«.n  n&.u|ûep  (rû>)  ncioR  nT(eï)v:'n6>AiH  n^^p  «Tcia^  nnnou'Te  «wirw  Rn&u|(one  na^px^^P^^^  j*nno<i' 
5eirc  Aivft)  n^p  ppo  njM.jM.«kï. 

«wqoira)u)Ê  na'i  n^na^Tioc  neaca^q  ace  n  OTneTtujuje  e^n  ne  e-^-  ç^(cn);)(^èkpic  (eTrn«w)6\«knTci 
noirV^T^H  A.Tp(o  eirnikaciTc  cnRoA.A.cic  uja^  eneç^. 

neRepHT  nT«kRT&.(A,ir)  nA.ï  ^(ùjv  jm.jm.oot  ace  n\\)  JM.nu|&.  JA.j*00Tr  e^n  cnTHpq  d.Tû>  n'\^HCkUjj«.u|e 
&n  nçennOTTTe  n-\'coOTrn  j«.jM.ooTr  a^n. 


36  Eugène  Revillout. 


OTTOÇ  ni^ÊTC  j«.£rt  eTÊKcekaci  cpoq  '^'tM.i  e^n.  atc  oirekUi  ncA\.OT  ne.  otoç^  ■»j*.CTOTrpo  av.it6wI- 
HOCM^oc  "^epcni^^T^iit    epoc  A.n.    ein«k'\;  çhot  x^a^p  hoir.   «..luid^nsccM.   ^hott  M.n&.iHOCM.oc  Tnpq.    nTe^*^ 

oci  tiTevr^Tcx"- 

ô.q£poTrto  nace  Tpôi.iôk,noc.  neiXLektj  ace  ^oivono^  efeoA.  ate  JÀ.M.oit  ç\i  nec^HCic  jÀ.M.eTR«>.ojiT. 
e«^ûe  ç^ôki  «..Kujcjujq  nnia^topee»..  eTa^ioirtouj  eTHiTO^r  newK.  otoç^  ^nôw^piactùiiT  riTÔLepRoA&.3ni  à\.av.ok 
den  Ti^topidw  niûcn.  otr  jM.onoii  çtoc  t^TCùircM..  dwAAek  otoc  èkTujcnOAVOT.  ottoç^  eqepcwnTiAex:'!!!  OTrûe 
nia».OfMèk.  nxe  '^cirnRA.HTOC.  e^OTr&.fe.  oiroç^  enqep  ^tciôw  e^n  nnino-y^. 

AqepOTTca  nace  ix^nd^Tioc  ne2c-A.q  ace*  é^piOTri   nni.  Kàk.Tew  t^H  eTpèkiidwR  Ji  nOTpo. 

evnOR  ^ôwp  '^nek.ep  ^TCiis.  d^n.  OTra».e  va.p  AM.on  ^pwM.  OTr:^e  mmou  CTà^^rpoc.  MJ*.on  actonT 
n-^Hpion.  .W.AV.OII  ujtoT  cfioA  iliiiAv.eAoc.  newUjaceA\.acOM  e^n.  e'.^'^P^^''"  cûoAçik  ç\>"\'  eTonS. 

'^jA.ei    K^ôkp   Ô.II  jA.nowiROCAV.oc.    e«.?V.Aew    eiM.ei    ja.ç^h   èTdkqjw.oir   â&pon   n'x.c.  eôkqTwnq  êûoXàen  nn 

e«^MtùOTT. 

ôw  '^cirnRA.HTOc  xnpc.  epOTCto  neaca^c.  ace  Ànoii  rencwoirn.  ace  ninoir'^  ç^8wn«wTjA.oir  ne.  n«wUj 
Apn^^;  Racto  ja.ai.oc  tv«^OR  ace  e».  ny^z  j«.oiv.   co^no^"^  ne. 

A.qepoTû>  liace  it^n&.ak.ioc.  neacevq.  ace  na^ot  e^nOR.  R«wti  icace  ôkqjA.OTr  RèwTaw  OTOiROnOA*.iè>,. 
e«^ûe  nenOTracA.1.  ô^qTtonq  jM.niMdkÇi:<  neç^ooT. 

nn  eTexenacaj  àmoc  cpcoOTr  n^foxen  ace  noT-^-.    *wTrA\.OTr  ^(oc  peqjw.0JOTrT.   otoç^  ÀvnOTTûiOTnoT. 

ace   ^môk   nrcTeneM.!    ni^CTC   JA.en.    q«OA\.c   ^en   RpnTH.    ekCRAnnioc   ai^e    «kTp*.STq.   ^ixen    ot- 

(>ic)  (Hle) 

Repdwiriioc.   qujon  Sen  6(T)«^(0Tr)pHC.  ek'^p02s.j!i.i  a»,  e.  ec^ojA.c  *en  nijA.^ô>,ir  nej*.  niRHnnoc.  Hpd.RA.HC. 
ôkTpoRçq  ^iTen  OTr3(^pûJAv.  e&.qa>u|ejA.. 

dwiro)    ^eirc   nô>.ï   eTRU}&.ace    epoq   Tenoir   n'^cooTn   ô^n   ace   otj"{&.u|    JA.)Avine    ne.    (&.^a)    T)AvnTepo 

j«.nROCJA.oc  n'^eni^^TTAV.ei  d>.ti  epoc.    cin&.'\'  ^ht noir.    (eiigôwH'^)    çhtt nROCJA.oc  THpq 

nTek(Tek.Ro)  nTèw\\nr^H. 

A.qoTrû>iyfi  nCi  TpA.iiy.noc  (neacjôwq  nek.q  ace  ROTOno^  eûoA  ace  au;  a.ic^hcic  AVAvnTpAv.nç^HT 
nçHTR.  eTÊc  nôkï  RCtoujq  nita^copea.  i\Td>.ïepHT  ava^oott  ne*.R.  tK'rta  RndkTpdwekTTA.nôkRTei  RTâwTiA\.ûipei 
A\.AV.OR  çn  TiAvcopiow  niAv..  OTT  Avonon  çtoc  e>.TC<oTAV  ey.'.\A&.  ^(oc  «wTuinç^AVOT.  a.tpûj  eqdwnTiAex^e  oirfie 
nak.oi:'jA.es.  utctti^rAhtiroc  eTOT<vdwfi.  nq^^ire  &.n  nnnoirTe. 

ô-qo-rtoiyû  n<ri   i^hatioc  ace  &pipe  m^ï  Rè^TA  neTpe^ne^R  â>  nppô. 

-V  -  ,  _  _         _  _C-e)_  _       _  _ 

&nOR  T^ivp  n'Xtt«>^p  ^TTCiiK  ivn.  oiras^e  x'es.p  Av.n  rû>ot.  Avti  c-f^ov.  jA.n  (TtonT  n«^Hpioit.  avk  vycùWT 
eûoA.  «AVAveAoc  nd.o'jA.tj'OAV  eCdkÇ^oiï  eûoA  Avnno-yTe  CTOnç^. 

n'^Ave  fi^p   &.ti   jA.niROCAv.oc.    e^AA*.    eiAve  Av.neiiTik.qAv.OT    oa^poï   nc^c   ei^qTûjOTrn    eÊoA  on   ncT- 

AV.OOTrT. 

A.  TC^nRAHTOC  oirtoujû  ncace^c  ace  ô>.non  TncooTn  ace  nno^'Te  çi^eniikTAVOT  ne.  n<vvy  noe  nTOR 
Hac(OAv.Av.oc  ace  «w  n^y^c  m.ot  eirnoiTTe  ne. 

A.qOTr<o^û  ns"!  iVne^Tioc  ntac&.q  ace  ne^acoeic  r&.p  ncy^c.  R^n  eujace  d^^AvOT  on  Re^TA.  ot- 
oiRonOAV.i&,.  cTÛe  nenoirace>.ï.  A.AAek.  A.qTû)OTrn  oav.  nAV.eoujOAV.nT  nçooir. 

neTCTnacw  a^^e  avav.oc  epooT  ace  roittc  &.TrA».OT  çcdc  peqAVOT.  a.tû>  j*.nOTrTa>OTn. 

aceRAC  a,.e  (eR)nô.eiAve.  ^(eTrc)  Aven  eqTOAvc  çn  RpnTH.  nACRAnnioc  a..e  ATp^^Tq  ç^iTn  o:r- 
RepAirnoc.  çn  neno^oirpoc.  t&.'.5*P®^'1"«  2>.€^  ecTOAvc  çji.  nTAt^oc.  Av.n  RTrnnpoc.  ohpa.rAhc  a.e  att- 
Anç&,AicRe  AVAvoq  ç^iTn  ottrûjçt. 


Le  papyrus  Anastasi  6.  37 


neTcnnOT-t  ceM.u|&.  nOTTijA.û>pia.  jA.n&.ipn'^^  e^yfie  ate  (çi^)«.nd.Te.j«.a.ç^i  ne.  ottoç^  lipeç^ep  ner- 
OûJOT.    OTOÇ^  npeqTèkRO.    nniptoMi. 

—  .  —  (»ic) 

ncnot  a.c  n^o-\  n^^c.  rô-h  icatc  e^TrcpcTa^-rptonin  Amo^.  o-too  Ik'^m.ot-  eROircio:rc.  «.Wa.  e.q- 
OTCono  g6o\  iiTc^stOM..  Sen  natiiK^pcqxtonq  c6o\*en  nn  e^^MWOTT.  otoç  ô^qtri  Jm.u|iu|  nnK  éT«.Tr- 
So^ficq  cûoAç^iTGn  «►HtiOTT  niptoMeoc.  OTOç^  ncTenio-V  «.tj-o-i  jm.u|iu)  mmwot  cfioA.ç^iTen  ç^  ç^coc 
epi'a.THC  JÏTC  'V*'^'*'-  nenoc  a.e  n^oq  eTa.qj*.oi3-  eûoAç^iTen  oei^HpoiMi  MÇ^j^^otinpoc.  ÀnoTU|q«.i 
cç^pHi  *ô.poq  cqat'^io  Skm.(ùot  ceÊt  noTnerçcùO-y.  ce^-rcp  evTjgençMOT.  M.enenc&.  nii\c«nô.ne-T  eT&.q- 

«wITOV    nCûOT. 


neTnnoTTTe  r&.p  eM.iy&.  noenTiM.û>pi&.  nTCÏMine  ate  çn&.Ta.j*&.ÇTe  ne.  ô.Trû>  ç^enpeqp  ne^ooir 
ne.  iKTOi  npcqTôkRO  p(OM.e. 

nen(3c.06)ic  2>.c  nroq)  ne^^c  eu|2te  «.ttc-^Ôt  MJW.oq  «.tûi  *>q;k*.OT  «.AAe.  «.qoTtonç^  efcoA  nreq- 
S'oj*.  <IM.  nxpeqTfooTn  eûoA.on  neT>*.ooTT.  a.tû>  &.q2ciR6Â.  nnenTewirj*ooTTq  qirn  THTTn  w  ncç^pto- 
M.&.10C.  &.TÛ3  nemnOTTe  JA.en  À.-r2ciR(ûk)  MM.oo-r  e6(oA.)  ostm.  nn(o-î')Te  otoc  cp(T:'è.)THC  nT(RA.)R(iè>.). 
i\e(H)ac.oeic  iTe  eTo.qAv.OT  oiTn  ^enpûi/A.e  j*.i\OHHpoc.  eMno-reujqi  epoo-r  eq3c.m(o)  mjm.oo-t.  erfie 
neirne^oo-ir.  ea^irp  eikTujn^M.OT  jA.nncd>.  jA.neTn«wnOTOT  TnpoT  cnTôwq&.6.-r  n&.T. 

(La  suite  à  un  prochain  numéro.) 


LE  PAPYEUS  ANASTASI  N«  6, 

TRANSCRIT  ET  TRADUIT 

PAR 

M.  Chabas. 


%r«l.J^r^iMiPra^ 


J 


o^srT-^^^M— ^-v^î^o^.: 


^  01 


:^J.m\-'^^\H. 


V  col.  ^1.  7  et  8.) 

Le  '  scribe  ....  pour  la  satisfaction  de  son  maître  ^ 

Cet  envoi  est  fait  pour  faire  savoir  à  mon  maître,  à  savoir  :  j'ai  exécuté  toutes  les 

commissions  qui  m'ont  été  données  d'une  manière  complète  et  entièrement  parfaite.    Je  ne 

serai  pas 

2^  col. 

1  repris  par  mon  maître. 

Il  est  que  j'ai  fait  un  voyage  à  l'endroit  où  est  mon  maître,  conduire  l'ouaou^  de 

'  Au  commencement  du  papyrus  on  lit  en  six  lignes  le  protocole  du  roi  Séti  Ménéptah  II,  protocole 
qui  ne  présente  aucune  difficulté  et  que  M.  Chabas  n'avait  pas  traduit.  (E.  R.) 

2  La  leçon  complète  du  texte  est  :  «  son  maître  le  scribe  du  trésor  Ka/abu  —  vie,  santé,  force  !  »  (E.  R.) 

3  Le  capitaine  ou  lieutenant  de  barque  portait  ce  titre.  A^oir  l'inscription  d'Ahmés  et  Bbugsch,  Did. 
242  à  243  et  664.  (E.  R.) 


38 


Fe.  Chabas. 


jmm^M^^r.-K 


(0        (D  2  i"""'r 


C^CD^^^^ û[]| 


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^   Il 


,^4fl^f^k^1^^8l-i^^ 


;7kia^C«^r^ei]fiP^^^T«¥, 


2  barque,  qui  me  livra  son  cultivateur  ;  il  fut  placé  dans  l' Ath  ',  en  la  ville  de  Teben-t  ^. 

3  II  laboura  pour  le  scribe  militaire  Samer  Menmon,  qui  est  établi  dans  la  ville  de  Teben-t; 

—  qu'il  fit  3 

4  abandon  23  jours  :  et  sa  ferme*  fut  abandonnée;  l'intendant  Tiaou  y  fit  toute  espèce  de 
mal;  il  fit  aller 

5  trois  serviteurs 

—  et  on  fut  à  conduire  devant  le  Mer  militaire  Hui  et  le  scribe  Ptahemheb 

—  et  l'on  fut  à  faire 

6  que  j'inventoriasse  les  Mérous  en  un  rôle,  et  il  emmena  l'atelier  et  il  fut  dans  sa  ville. 

7  —  Et  il  arriva  qu'il  me  fit  inventorier  le  rôle  dans  le  temple  de  Ramsès  Mériamen, 
et  les  hommes  furent 

'  Brugsch-Pacha  dans  son  supplément  au  lexique,  p.  165  traduit  ce  mot  ath  (d'après  notre  document 
même)  par  prison  ou  cachot  (das  Gefangniss)  (E.  R.). 

2  Brugsch-Pacha  dans  son  Dictionnaire  géographique,  p.  644  et  931  à  932  assimile  la  ville  de  Teben 
ou  Teben-t  à  la  Daphnae  d'Hérodote,  Tell-Defenney  de  nos  jours.  Elle  était  située,  selon  lui,  non  loin  de 
Tanis-Ramses.  Il  cite  à  ce  propos  notre  passage  du  papyrus  Anastasi  6  qu'il  traduit  ainsi  :  «il  fut  empri- 
sonné dans  la  ville  de  d^ahen,  en  labourant  la  terre  du  grammate  des  soldats  Pemomeumen  qui  est  stationné 
dans  la  ville  de  &aben.    On  le  retenait  ainsi  pendant  23  jours».    Il  faudrait  plutôt  traduire  :  «il  fut  placé 

dans  la  garde  (custodia)  des  gens  qui  sont  dans  la  ville  de  Teben.  Il  y  laboura  etc.»  Le  mot  [loQ^O'  crzi 

que  l'on  peut  traduire  par  custodia^  comme  l'a  fait  M.  Brugsch,  répond  au  mot  copte  cotç^  ligare  qu'on 
retrouve  en  démotique  sous  la  forme  ath,  déterminé  par  le  bras  armé,  et  qui  signifie  :  lier,  saisir,  faire  proie. 
Voir  Revue,  2"  année,  n»  II  et  III,  pi.  15,  2«  col.,  1.  3.  (E.  R.) 

3  Brugsch-Pacha  transcrit  au  lieu  de  ^—      (E.  R.) 

*  Lire: "^      et  non  ^^|^     .    Le  syllabique  est_écrit  en  hiératique   comme  plus  haut  dans  le  mot 

'^  v\    s û  que  M.  Chabas  avait  d'abord  transcrit 

Brugsch,  Dict.  973.)  (E.  R.) 


puis  corrigé,  comme  ci-dessus.    (Conf. 


Le  papyrus  Anastasi  6. 


39 


r    I    \^ 


^'¥5i»i1^rmri 


V 


1 1 1 


:A- 


m' 


AAAAAA    U  AAA/NAA 


1^,^4!1^ 


#   I 


_zri  I  I 


8  avec  lui'  dans  sa  ville  et  il  ne  se  présenta  pas  devant  les  magistrats  avec  moi; 

—  qu'il  2  fit  emmener 

9  l'atelier 3  dans  le  temple  de  la  déesse  Nebhotep;  et  il  emmena  deux  autres  ouvrières^  de 
moi,  en  disant  : 

10  qu'il  ne  négligeait  pas  les  ordres  du  Merhatpa  ^ 

U  ....  m'obligea  à  inventorier  les  Mérous,  et  il  mit  des  hommes  après  moi,  pour  dii-e  que 
le  travail  des  Mérous  soit  chez  lui 

12  et  je  fis  passer  le  travail  des  Mérous  devant  le  Merhatpa, 

—  et  que  fut  fait  prendre 

13  leur  travail,  le  2  de  Paoni,  au  soir  (vid.  Pap.  Sait.)  et  après  son  commencement  5  mois. 

14  Et  il  emporta  les  toiles. 

H  est  que  je  les  ferai  passer  devant  le  Merhatpa. 

Kote*^  pour  faire  savoir  à  mon  maître  les  toiles  qu'il  a  emportées,   pour  les  faire  voir 
au  Merhatpa 


1  Mot-à-mot  :  «dans  sa  main»    V\  *e=^.  Conf.  Bkcgsch,  Dict.  1665.  (E.  K.) 

2  M.  Chabas,  ici,  (comme  à  la  fin  de  la  ligne  3  et  dans  tout  le  reste  du  récit.)  considère  [1  ^ 
comme  dépendant  de  la  locution  plus  complète  []  Vi>H.=^@    w     V^  ^T  '^'^^'  ^*  ^^  ^"^^'^  '^"^^  ^^ 
(voir  ligne  7)  ou  /vww^  M  VÇû          VQi  (ligne  1),  etc.  Il  traduit  donc  [1  M^  par  «qu'il»  en  sous-entendant  «il 

arriva».  (E.  R.)  _  ^  .  o    o 

3  M    Chabas  traduit    IJx  t r     ^^  les  Meroi/s  et  o  V\  i r     Slill  ralelier.  Comme  l'a  fort  bien 

m  I  I    I    I  _^  I J    '.  ' 

dit  M.  Bbcgsch  {Dict.  672),  ce  mot  qui  prend  l'aiticle  pluriel  et  l'article  femmin  singulier  signifie  :  la  masse 

des  habitants,  le  vulgaire  etc.  C'est  un  mot  très  vague.  (E.  R.) 

*  Ce  mot  est  comparé  par  Bbugsch  à  OTOei  agricola  dans  son  supplément  au  lexique,  p.  506.  (E.  R.) 

'=  Ou  pour  traduire  le  titre  :  de  l'intendant  du  trésor.  (E.  R.) 

6  M.  Chabas  a  donné  deux  traductions  de  ce  passage.  Je  prends  la  dernière.  Il  avait  écrit  d'abord  : 
«  Tableau  pour  faire  connaître  à  mon  maître  les  toiles  qu'il  a  emportées  et  que  le  Merhatpa  a  \-ues,  etc.  »  (E.  R.) 


40 


Fr.  Chabas. 


■-^5-n  ^  Y'î^^^- 


innnniii 
I nnnn  1 1 1 


"»    e»  AAAAAA 


A 


A\5A 


c=s=]  ...Ol 

AAAAAA  .* 

XaaÎvv^OOOIJÏ  l 


.^f]l.(l^-,  ? ,'  'k^^  h  V  =^0^-. 


AAAAAA  I    J 


A/^iA/W    [^  AAAAAA 


I    I    r 


;^A 


15  toile  Souten  pièces 
toile  Mak         » 


300_^      I 


^       Ci        O' 


.  .  87 
.  .  64 

^         .  .  .  .  27 

Total     178. 

16  Après  le  recolement  j'ai  fait  juger  les  hommes  par  les  Oérous,  et  les  Oérous 

1  lui  dirent  :  Laisse  les  hommes  là  où  est  leur  maître,  et  il  m'en  ajouta  quatre  selon  (le 
jour  de)  l'ordre  ' 

2  qu'avaient  fait  les  Oérous.  Il  fit  aller  deux  scribes  militaires  2  pour  recueillir  l'impôt  ^ 

3  et  ils  emmenèrent  deux  autres  ouvrières  de  Pesehemou,  en  disant  :  qu'on  lui  donne  Oua, 
enfant  de 

4  et  il  n'était  pas  avec  moi,  et  il  était  après  le  bétail  de  l'intendant  Mesou  et  fut  l'homme 
qui  était  avec  lui  comme  aide,  il  fut  avec  le  scribe  Ptahembeb 

5  qui  fit  le  recensement  avec  le  Mer  de  troupes  Hui^. 

6  Lui  il  s'occupa  des  grains  dans  le  temple  de  Nebhotep. 

Or  l'enfant  s'enfuit  et  aborda  dans  la  ville  ^ 

*  Ici  note  illisible  de  M.  Chabas.  (E.  R.) 

2  II  faut  lire  :  «Le  scribe  militaire.» 

3  Ceci  est  une  correction  postérieure  de  M.  Chabas.  Il  avait  d'abord  écrit  :  «  Pour  inspecter  .  .  .  »  (E.  R.) 

♦  Voir  page  2,  1.  5  (note  de  M.  Chabas). 

^  Pour  les  lignes  6,  7,  8,  9  et  10  de  cette  page  nous  avons  encore  deux  traductions  de  M.  Chabas. 
J'ai  choisi  la  plus  récente.  Voici  l'autre  :  «Or  le  garçon  était  avec  lui  et  il  arriva  à  la  ville  où  était  le 


Index  du  vocabulaire  mythologique. 


41 


I  I  I 


^,r:^^k 


7  d'où  était  l'enfant;  il  fut  à  ne  point  ramener Je  ramenai 

8  les  ouvrières  à  l'homme  que  lui  était  avec  lui. 

(La  suite  à  un  prochain  numéro.) 


INDEX  DU  YOCABULAIEE  MYTHOLOGIQUE 


M.  Chabas. 

M.  Chabas  avait  recueilli  un  vocabulaire  mythologique  très  considérable.  Ce  vocabulaire 
formait  deux  volumes  compris  dans  un  lot  de  manuscrits  que  M.  Maisonneuve  avait  estimé 
500  fr.  dans  son  catalogue  imprimé.  Le  Louvre  fit,  par  mon  intermédiaire,  l'acquisition  de  ce 
lot.  Mais  avant  qu'il  nous  panint  —  et  même  avant  que  nous  ne  l'ayons  vu  et  acheté  au 
prix  marqué  —  un  des  autres  amis  de  M.  Chabas,  M.  de  Horrack  '  avait  emprunté  chez 
Maisonneuve  le  volume  contenant  le  vocabulaire  et  n'y  avait  laissé  que  l'index.  Lorsque  nous 
lui  parlâmes  de  cela,  M.  de  Horrack  nous  promit,  du  moins,  de  remettre  le  vocabulaire,  si  l'État 
faisait  la  publication  des  œuvres  de  M.  Chabas.  Mais,  comme  on  pourrait  attendre  longtemps, 
nous  croyons  devoir  obtempérer  à  la  demande  de  plusieurs  égyptologues,  en  commençant  tout 
de  suite  la  publication  de  l'index,  seul  entre  nos  mains.  Les  numéros  indiqués  en  tête  de 
chaque  article  se  rapportent  à  la  pagination  du  cahier  de  M.  Chabas,  contenant  le  corps 
même  du  vocabulaire.  Mais  il  y  a  aussi  des  indications  supplémentaires,  dont  les  renvois  ont 
été  alors  soigneusement  indiqués  par  notre  illustre  maître.  Malheureusement  ces  renvois  sont 
souvent  peu  nets  et  il  nous  a  été  souvent  aussi  impossible  de  les  vérifier  vu  la  pauvreté  de 
la  bibliothèque  du  Louvre.  La  difficulté  était  plus  grande  encore  quand  nous  n'avions  que  les 
numéros  se  rapportant  au  Dict.  mythologique  de  M.  Chabas  qui  n'est  pas  enti'e  nos  mains. 
Aussi  prions-nous  le  lecteur  d'excuser  les  fautes  nombreuses  de  cette  publication  provisoire. 
Nous  avons  pensé  qu'il  était  utile  de  donner  d'abord  —  d'une  façon  telle  quelle  —  ces  pre- 
miers matériaux  —  en  attendant  la  publication  définitive  de  cette  œuvre.  (E.  R.) 

garçon.  Il  fut  à  ne  pas  l'emmener.  Il  n'amena  pas  les  travailleurs  à  l'homme  qui  était  avec  lui.  Moi,  étant 
avec  lui,  je  suis  en  Khati.  Il  fait  que  je  sois  comme  un  homme  qui  n'a  pas  de  maître.  Qu'on  lui  fasse 
selon  ce  qui  m'a  été  dit  devant  les  Oérous  sur  la  conduite  que  tu  as  faite  des  étoffes  des  Mérous  devant 
le  Merhatpa.  » 

'  M.  DE  HoKKACK  avait  déjà  reçu  de  la  famille  le  magnifique  dictionnaire  manuscrit  de  M.  Chabas  et 
plusieurs  autres  œuvres  inédites  très  importantes.  M.  de  Horrack  n'a  encore  fait  paraître  que  quelques 
traductions  choisies  —  sans  textes  ni  commentaires.  Mais  les  vrais  trésors  de  M.  Chabas  restent  toujours 
inédits. 

6 


42 


Eugène  Revillout. 


13àl3e 

3 

115 
36 
54 
31 
39 

128 
81 
82 

102 
145 
149 

107 
125 


103 


145 
5 


r^^'^^^  f\rit^^^o 


5 
164 


^^mi.i 


n 


:i 


Thoth 


Jj  femme  de 


Rashpu 


AAA/W\    O 


^1 


jf  j^   Àa?.  50/4 

^PJo^^- 1^^44/20 
i?ec.  IV,  52/10 


176 


Dk.   III, 
276/2 


1r-\r-i1         M  ' 

50/3 


()D()^^(Hathor) 


130 

156 

12 


ait.  T.  I,  10,9 

ft/WAAA     '    -^      WXV    I  I  I  I  I 

mu 


177 

118 
141 


[1  D  w  1  "^  Hathor 

(j^.^^  II.  m.  32 

(]P[[]pII.HL35aY,  10 
(]  ^O^  II,  HI.  57  Centre 

iVo^.  379.         ^ 
à  tête  de  Chien,  419 

I  i>A;.  m, 
76  b,  Todt.  75,  3 
Todt.  98,  5 


i)/^.  III,  203,  29 


I  AA/\^AA 

39 


[1  H^=^  singe  debout 

|]|(](j^Zei^.  1872,89 

27/2 


PPP.  63 


77 
171 


-|]-1/T\  tête  d'Ibis,  Z)A;. 
III/171 


Dk.llL 


204/55 


o 


id. 


'     204/60 


87 

79 

111 


id.  204,  64 


i^ec.  IV,  53/22, 


54/43 


\  '^c=s=i  J  Todt. 
95,  2 

^m^ftiai82 


177 


Dk.  III, 


204/63 


AAAAAA  VJ 


O 


;]^:^ 


135 


171 


Todt.  141.  13 
rfll  i?ec.  IV,  69/12 

z3  A   1     Ub  (E  o 


ait.  T.  10/e, 
16/e,  TocZ^  125.  33 
Bauurk. 


XIV 

Sali.  IV,  10,'ô 


O  I 


Index  du  vocabulaire  mythologique. 


43 


^^  Xephthys 

/WNAAA  /|V  I     Xa VILLE    IV 


21 


12  à  12* 

94 

94 

134 


122 
122 


157 

6à7e 


:J 


■^    jj  à  Osiris  6  d 

§'|5;iXei)hthys),i). 
ni,  224/ï 


Jo'* 


36  25 
fl^l  Sali.  IV,  21/6 

-^.^J?ec.  IV,  54/61 


e 


03 

159 

5 

167 

151 
132 
132 
132 


^     I 


et  var. 


du  soleil  Hathor 


91 


Kal.  117,  10    I        5 

n^^D^  Dk.  m, 

37.  6 
33/26 


30/bas,  ait.  T.l,  25 


,.'û  Ch.  A"o«.  408 


e?e 


SI 


SAA 

IV,  39/12 
WL  Kal.  102/10 

MPÂ 


48 
100 


155 
81 

Zeit.1$65.I 


106 
136 
131 


a 


IkZ  H"""»- 


rxi 


DAD,  69 


TJl- 

ait.  T.  I,  10/c,  16/c 


•«v£^*eo.IV,39/ll 

I      I      II      I      I  '         ' 


125.  33 

=>J()(]^ro(Z#.  78.38 

"^  62.2 


^^  rtlVh  le  so- 

leil  fondateur  de  la 
race  égypt.  i)i-.  lU, 
136.  6  Tomb.  Séti  F"" 

le  soleil 

D 


m,  203/23 

203/34 

=>J^|Bq.Vn.6 


D  ^ 

V 

I 

V 


^àH« 


Hathor 


138 


lo^xli 


(3 


^  ^       1      i?ec.  IV, 
34/2 


D  xii 


D    X   c. 


I    I    I 

AAftAAA      Q       ^ 

O       A   (^ 


lîM 


X*"  heure 


V 


D    D 


D 


mil 


162 
162 
162 


77 
134 


'«'0''^  7®  heure,  jour, 

Dict.  961 
^^1  An.  m,  4/3 


39/5 
l^'ja;^  T.  1,45/20 

H}    lu.  m.  55.  5 

Y=:^3^'  zzrrlj  0  Xaville 
VIII,  4 


(La  suite  prochainement.) 


6* 


44  Eugène  Revillout. 


NOUVELLES  ACQUISITIONS  DU  MUSÉE  ÉGYPTIEN. 

Nous  consacrerons  désormais  quelques  lignes  dans  la  Revue  aux  nouvelles  acquisitions 
du  Musée  égyptien  du  Louvre. 

Parmi  celles  que  j'ai  procurées  dernièrement  au  Musée,  je  signalerai  :  1°  une  fort 
belle  collection  de  scarabées,  d'antiquités  et  de  papyrus  grecs,  coptes  et  arabes  qu'a  cédée 
Brugsch-Pacha.  2"  deux  collections  de  papyrus  démotiques,  grecs,  coptes,  arabes,  pehlevis, 
hébreux,  etc.  et  de  tessères  venant  de  M.  Chester.  3°  un  important  contrat  démotique  du 
règne  de  Darius  cédé  par  M.  Leroux  et  déjà  publié  dans  la  Revue.  4°  divers  objets  achetés 
de  M.  Allemant  et  qui  comprennent  :  une  figurine  du  dieu  Set  en  or,  deux  statuettes  de 
l'ancien  empire  d'un  admirable  travail,  un  cylindre  curieux  au  nom  du  roi  Sabaka,  un  sei-pent 
diadème  représentant  la  déesse  Ranen,  un  fort  beau  pied  de  meuble  sculpté  venant  de 
Der-el-Bahari,  une  suite  des  figurines  funéraires  trouvées  à  Der-el-Bahari  par  M.  Maspero, 
une  pierre  gnostique  figurant  Anubis-Taricheute,  une  bague  en  or  portant  le  cartouche  de  la 
reine  (  tl^'^nin^Û]|fi|  1;  épouse  d'Ameuophis  IV'.  5°  une  intéressante  boîte  funéraire  de 
fort  petit  calibre  au  nom  du  scribe  Sutimès,  etc.  Enfin  j'ai  eu  le  bonheur  d'introduire  au  Musée 
diverses  donations  des  plus  importantes  parmi  les  plus  récentes  desquelles  je  tiens  à  signaler  : 
V  une  très  importante  collection  de  papyrus  coptes  que  vient  —  à  l'instant  —  de  me  livrer 
le  si  aimable  évêque  anglican  de  Limerick  (L'iande);  2°  un  précieux  contrat  démotique  sur 
poterie  offert  par  le  Révérend  Armitage  (d'Oldhan  Angleterre)  ;  3°  un  petit  vase  eu  bronze 
présenté  par  M.  Eustace  Smith,  du  parlement  anglais.  De  son  côté  M.  Egger,  de  l'Institut, 
avait  précédemment  donné  une  importante  collection  de  tessères  démotiques,  grecques  et  coptes 
—  et  il  nous  avait  attiré  également  la  disposition  testamentaire  par  laquelle  M.  Chasle  nous 
a  légué  les  papyrus  grecs  contenant  un  fragment  d'Hypéride  et  la  lettre  à  Apollonius  sur 
la  syntaxis  du  temple  d'Amon  à  Thèbes  —  en  même  temps  que  notre  savant  maître  M.  Weil, 
de  l'Institut,  nous  obtenait  de  M.  Firmin  Didot  le  papyrus  grec  publié  par  lui  et  contenant 
les  fragments  d'Euripide  et  d'autres  poètes  grecs. 

Je  reviendrai  sur  ces  diverses  acquisitions  et  sur  les  autres  du  département.  Je  ferai 
même  graver  les  plus  curieuses  au  point  de  vue  de  l'art  et  je  donnerai  quelques  détails  sur 
celles  qui  sont  précieuses  au  point  de  vue  scientifique.  Mais,  en  attendant,  je  crois  devoir 
dire  de  suite  un  mot  de  deux  monuments  que  m'avait  cédés  M.  Brugsch-Pacha  et  que  j'avais 
payés  moi-même  depuis  trois  ans,  mais  qu'il  m'avait  été  impossible  de  faire  revenir  du  Caire 
à  cette  époque.  Notre  émineut  directeur  M.  de  Ronchaud  les  a  fait  transporter  au  Louvre  et 
le  comité  consultatif  a  confirmé  l'acquisition  qui  avait  été  faite  par  moi  à  mes  risques  et  périls. 

•  Voir  K'onigshuch  de  Lepsius,  n°  389  et  397,  etc.,  pour  cette  reine  qui  est  ordinairement  appelée  : 
«  sœur  et  femme  principale,  douce  mère  »  ou  bien  «  femme  principale,  régente  du  midi  et  du  nord,  maîtresse 
des  deux  pays»,  etc.  Son  nom  subit  plusieurs  variantes  dans  les  textes,  surtout  en  ce  qui  touche  l'ordre 
des  signes.  Le  mot  aten  est  généralement  écrit  dans  un  sens  contraire  à  celui  du  reste  du  cartouche,  souvent 

il  est  mis  entre  les  quatre  premiers  T  et  le  cinquième.  Une  autre  variante  ne  donne  qu'un  seul  T  et  ne  contient 

„,,,  fi    o  0  0 

pas  1  élément  M         o.  Mais  c'était  avant  la  révolution  religieuse  opérée  par  le  roi  novateur  (n°  387).  Le 

nom  paraît  avoir  été  d'abord  «Nofert-iti»,  puis  après  la  révolution  dont  nous  venons  de  parler  :  «Neferu  — 
(4)  —  aten-(ra)  —  Nofert-iti.  »  C'était  l'époque  où  Aménophis  IV  avait  seulement  gardé  son  ancien  prénom 
et  changé  son  nom  d'Amenhotep  contre  celui  de  Xu-en-aten,  par  dévotion  exclusive  pour  le  disque  solaire. 


® 


Nouvelles  acquisitions  du  Musée  égyptien.  45 

Je  uai  qu'à  me  louer  de  la  bonue  pensée  de  mon  illustre  maître  M.  Brugsch.  Ces  deux 
monuments  feront  honneur  à  notre  Musée. 

Le  premier,  entièrement  inédit,  est  une  statue  de  granit,  représentant  un  personnage  assis, 
mais  dont  le  haut  du  corps  a  disparu.  Les  deux  mains  sortent  sur  les  genoux  —  probable- 
ment des  ouvertures  de  la  robe  —  mais  sans  qu'on  puisse  voir  trace  des  bras  auxquels  ils 
se  rattachent.  Les  deux  inscriptions  qui  le  couvrent  sont  à  étudier  aux  points  de  vue  géogra- 
phique et  mythologique.  Il  s'agit  d'un  prêtre  de  Ro-nofir  ^^I"^.  Cétait,  comme  l'a  établi 
Brugsch  dans  son  Dict.  géogr.,  p.  456,  le  chef-lieu  d'un  nome  supplémentaire  du  même  nom 
([ui  suivait  le  nome  de  ^^^'^  seten  (^v^-eneTc.!,  voir  ibid.,  805  à  806),  et  précédait  celui  de  /T\ 

Hib  ou  Behbeit.  Le  nom   T    ,  pom-  la  prononciation  duquel  Brugsch  hésite  enti-e  Ro-nofii 

et  Ro-a-nofir,  pourrait  peut-être  être  comparé  à  i — ri  ,  dont  il  est  aussi  question  dans  le 

Dict.  géogr.,  p.  992,  et  qui  avait  pour  dieu  principal  un  Osiris  spécial  H  o  |  ^  1  .  Il  faudrait 

alors  voir  dans  t — r  le  déterniinatif  du  bassin  qui  con^ient  à  ro  dans  le  sens  d'embouchure, 
porte  d'un  cours  d'eau  ou  d'un  canal.  Ce  qui  est  certain,  d'après  l'inscription  même  que  nous 
allons  publier,  c'est  que  Ro-nofir  avait  pour  dieu  principal  un  Osiris,  appelé  tantôt  :  Osiris  sah 
seps,  «Osiris  en  momie  î;e?2eVa6?e »,  tantôt  :  Osii^is  -/as,  «Osiris  au  repos  ou  endormi»,  ce  qui 
revient  à  peu  près  au  même  comme  sens.  Il  s'agit  de  l'Osiris  dont  le  cœur  ne  bouge  pas,  c'est-à- 
dire  d'Osiris  mort,  attendant  sa  résuiTection  et  qu'escortait,  suivant  notre  monument  même, 
les  quatre  génies  funéraires  présidant  aux  divers  organes  des  défunts.  Parfois  nos  textes  le 
nomment  aussi  simplement  yas  «le  dieu  calme,  immobile»,  (conf,  Brugsch,  Sup.,  896)  sans  mettre, 
avant  ce  qualificatif,  son  nom  :  Osiris.  Nos  nouveaux  textes  nous  apprennent  aussi  qu'on  véné- 
rait à  Ro-nofir  toute  la  triade,  c'est-à-dire  Osiris,  Isis  et  Horus  —  en  même  temps  que  le  dieu 
sebek  (symbole  ordinaire  de  Set-Tj-jDhon).  Ce  double  culte  est  assez  curieux.  Mais  tels  n'étaient 
pas  les  seuls  dieux  vénérés  dans  Ro-nofir.  Il  y  avait  sans  doute  un  lyaiif  ou  plérome 
de  neuf  dieux  comme  dans  beaucoup  d'autres  sanctuaires.  L'inscription  du  dos  parle  du 
IL  irn  11  TTI^Im.  '  .À  ^^  ^®  ^^^^  ^^^  dieux  qui  y  étaient  renfermés.  Parmi  ces  dieux 
figurait  sans  doute  le  reste  de  la  famille  d'Osiris,  c'est-à-dire  Nephthys  et  Auubis.  Un  monu- 
ment appartenant  à  la  collection  Clot-bey  et  que  cite  M.  Brugsch  dans  son  Dict.  géogr., 
p.  558,  parle  d'une  <Xephthys  dans  Hat/as»   TT / ^s:^      .    M.  Brugsch  ajoute  «localité 


inconnue».  Nous  savons  maintenant  qu'il  s'agit  d'un  sanctuaire  de  Ro-nofir,  sanctuaire  dont  le 
grand  prêtre  portait  le  titre  de  «parent  royal»  suten-rey.  Le  temple  de  Sebek  de  Ro-nofir 
avait  en  outre  un  prêtre  spécial  portant  le  nom  de  mehi-sem  «  celui  qui  inonde  la  mèche  de 
cheveux  ou  la  tempe»  (Brugsch,  Dict.,  689,  1224,  Sitpp.,  1053\  Ces  deux  dignités  étaient  réunies 
sur  le  même  personnage  à  l'époque  de  la  statue  dont  nous  allons  maintenant  donner  les  textes. 
Voici  d'abord  l'inscription  placée  sur  les  genoux  : 


46  Eugène  Revillout. 


^SN.    <^p>  f  "^  V_-7  l^ri]  r—û—. 


«Proscynème  à  Osiris  sali  seps  (Osiris  en  momie  vénérable),  dieu  grand,  seigneur  de 
Ro-nofir  —  des  milliers  de  pains,  de  liquides,  d'étoffes,  de  graines,  de  libations,  de  vin,  de 
lait,  d'offrandes  et  de  vivres  en  abondance,  des  milliers  de  choses  bonnes,  pures  et  agréables 
au  ka  divin  du  parent  royal  (suten-rex)  dans  Hat  xas,  —  du  mehi-sem  de  Sobek,  dévot  auprès 
d'Osiris  /as  (Osiris  endormi  ou  au  repos'),  dieu  grand,  seigneur  de  Ro-nofir,  Hor-pén-ésé 
véridique,  fils  de  l'homme  de  même  dignité  An/pchrat  (Xa-oypaTY;ç).  —  Son  fils  a  fait  ceci,  à 
savoir  le  parent  royal  (suten-rex)  dans  Hat  xas  le  mehi-sem  de  pa-Sobek,  le  3®  prophète  d'Osiris, 
d'Horus,  d'Isis  et  de  Sobek  de  Ro-nofir,  Sé-isi,  enfanté  par  la  prêtresse  (ahi)  de  -/as  (Osiris 
-/as),  seigneur  de  Ro-nofir,  la  dame  Hotept  (ou  Neb-pa-hotep-t)  véridique.  » 

Au  dos  de  la  statue  on  n'a  plus  que  la  fin  des  colonnes. 

st^^^Jl^  X^i        (^  ) «Xasi,  seigneur  de  Ro-nofir,  Horus,  Isis,  Sebek,  Amset, 

Hapi,  Tiumutf » 

La  seconde  colonne  :  jF  M  1  11  II  II  I  ^IIt-^- Ji'^-^^^'^^^  '  *  '  *(*^^^  les  dieux) 
du  sanctuaire  des  neuf  dieux  qui  est  dans  Ro-nofir  —  qu'ils  donnent  ....  » 

La  troisième  :  ^j]1  _^M^  ni  ^  Ao  +  #  TT Z: I '^^  "  "  '  ^<^' ^^"^*^ 
auprès  d' Osiris  sah  sepes,  le  dieu  grand,  seigneur  de  Ro-nofir,  le  sutenrey^,  le  mehi-sem » 

La  quatrième  :  '^^^^-=:^  '^^         \\  \\  rr(j\  "S^  I  ^  |  y  fi      «  Son  fils  —  il  l'a  fait  —  le 


Xasi,  seigneur  de  Ro-nofir,  —  prophète  d'Isis.» 

La  cinquième  :  ^^  r  (1  (|c>  «Sé-isis  enfanté  par  la  dame  Héri.  »  Puis  après 

cela  en  grand  la  figure  de  la  femme  ainsi  appelée. 

Tel  est  l'ensemble  de  notre  premier  monument,  dont  il  serait  maintenant  très  intéressant 
de  connaître  la  provenance  exacte  2. 

Le  second,  également  inédit,  est  le  socle  d'une  statue  de  Ramsès  V. 

On  voit  encore  sur  le  plat,  près  des  pieds,  ses  cartouches;  et  autour  du  socle  se  trouve 
la  double  inscription  suivante  : 

(f)1î=ll4l^îîfeBE^r?MSC?Sl]^rT,CSB]A 


,C°JËM]Afil 


'  Voir  Brugsch,  Supp.,  896. 

2  Notre  cher  maître  M.  Brugsch  a-t-il  là-dessus  quelque  souvenir? 


Nouvelles  acquisitions  du  Musée  égyptien.  47 


«  Le  dieu  bon  a  édifié  (des)  obélisques  dans  la  demeure  de  sou  père  bon,  parce  qu'il  ' 
lui  a  donné  le  midi  comme  le  nord  en  roi  et  seigneur  des  deux  hémisphères,  Ra-neb-pehti, 
fils  du  soleil,  seigneur  des  resplendissements  Ra-mésès-hiq-ma-t  2  doué  de  vie,  stable  comme  le 
soleil  —  à  jamais  et  à  toujours.» 

«Le  dieu  bon  a  orné  la  terre  par  ses  plans  divins,  il  l'a  guidée  (mot-à-mot  :  conduite  au 
port)  par  l'excellence  des  qualités  glorieuses  du  roi-seigneur  des  deux  hémisphères  Ka-ueb- 
pehti,  fils  du  soleil,  seigneur  des  resplendissements  Ra-mésès-hiq-ma-t  doué  de  vie,  stable 
comme  le  soleil  —  à  jamais  et  à  toujours.  » 

P.  S.  J'ai  attendu  quelques  jours  pour  donner  la  mise  en  pages  de  cet  article;  car  je  tenais  à  indi- 
quer les  résultats  de  la  vente  Posno  en  ce  qui  touche  le  Musée  du  Louvre.  J'ai  le  bonhenr  de  pouvoir 
annoncer  que  nous  avons  acquis  dès  la  première  vacation  les  véritables  perles  de  cette  collection,  c'est-à- 
dire  :  1"  l'admirable  statue  de  bronze,  chef-d'œuvre  de  l'art  égj-ptien,  qui  porte  le  n'^  524  et  ai)partient 
certainement  à  l'ancien  empire  ;  2°  les  quatre  sujets,  en  terre  émaillé,  polychromes,  représentant  des  prison- 
niers nègres,  asiatique  et  Ij'bien,  qui  portent  les  n*'*  58,  59,  60,  61  et  sont  les  plus  beaux  spécimens  connus 
des  célèbres  émaux  de  Tell-el-yahoudeh  fvicus  judaeoram).  Ces  deux  acquisitions  montent  à  40.000  frs.  Ce 
sont  les  plus  importantes  que  le  Musée  ait  faites  depuis  un  très  grand  nombre  d'années  et  je  me  hâte  de 
les  faire  connaître  tout  de  suite  à  nos  abonnés.  Ajoutons  que  dans  une  des  dernières  vacations  nous  avons 
acheté  en  outre  pour  une  trentaine  de  mille  francs  la  grande  statue  de  bronze  n°  468,  datant  aussi  de 
l'ancien  empire  et  fort  curieuse,  quoique  d'un  travail  beaucoup  moins  fin  et  parfait  que  la  première.  Ce 
n'est  pas  une  raison  pour  la  croire  plus  ancienne,  comme  on  l'a  dit:  car  nos  chers  maîtres  E.  de  Eougé 
et  Mariette  —  Mariette  surtout  —  ont  très  bien  établi  qu'à  l'opposé  de  ce  qui  s'est  passé  en  Grèce  les 
plus  anciens  chefs-d'œuvre  de  l'art  sont  en  Égj-pte  ceux  du  travail  le  Tplus  fin,  le  plus  libre  et  le  plus 
parfait.  La  magnifique  statue  du  scribe  accroupi  découverte  par  Mariette,  et  qui  est  un  des  plus  beaux 
ornements  de  notre  Musée  égyptien,  est  là  pour  ser\ir  de  preuve  à  cette  doctrine  constante  de  nos 
maîtres.  On  peut  citer  également  parmi  des  multitudes  d'autres  exemples  la  célèbre  statue  de  bois  du 
Musée  de  Boulaq  que  tout  le  monde  a  tant  admirée  à  l'exposition  de  1867  et  qui,  trouvée  dans  une  des 
chambres  non  %iolées  des  pyramides,  est  certainement  la  plus  antique  des  œuvres  d'art  connues.  Quant 
aux  trois  statues  de  bois  acquises  il  y  a  quelques  années  par  le  Musée  du  Louvre,  elles  ne  sont  nulle- 
ment comparables  à  celle-là.  Deux  n'ont  pu  être  attribuées  à  l'ancien  empire  qu'à  cause  des  tresses 
de  la  coiffure.  Mais  elles  n'ont  pas  la  liberté  d'allures  qui  caractérise  l'ancien  empire.  Elles  sont  aussi 
raides,  aussi  artificielles  dans  leur  pose  que  les  statues  plus  modernes  —  et  de  plus  fort  laides,  de  toutes 
manières  bien  inférieures  aux  petites  figurines  de  bois  achetées  l'année  dernière,  et  dont  nous  reparlerons. 
Une  seule,  celle  du  milieu,  rappelle  l'art  antique  de  l'Égj-pte,  et  même,  de  loin,  par  certaines  touches, 
en  certains  endroits,  la  statue  de  bois  de  Boulaq.  Mais  notre  seconde  statue  de  bronze  —  moins  fine  cepen- 
dant que  la  première  —  offre  certainement  des  qualités  tout  autres.  Nos  abonnés  pourront  apprécier  du 
reste  ces  deux  belles  acquisitions;  car  nous  devons  à  M.  Posxo  la  communication  des  deux  magnifiques 
héliogravures  Dujardix  qu'il  avait  fait  faire  et  qui  accompagneront  ce  numéro.  Nous  ferons  exécuter  égale- 
ment des  chromo-lithographies  pour  les  prisonniers  en  terre  émaillée  et  nous  les  donnerons  dans  un  des 
prochains  numéros.  Terminons  par  une  remarque  :  La  statue  de  bronze  n°  524  n'est  pas  une  figure  d'imagi- 
nation :  c'est  un  portrait,  le  portrait  d'un  personnage  de  l'ancien  empire.  L'inscription  qui  nous  apprend  ce 
détail  important  est  écrite  sur  la  poitrine,  en  face  d'une  image  d'Osiris,  tenant  le  fouet  et  le  pedum.  Elle  se 
lit  :  n^  l^è\-c2:^A.v^AAQy>-Q  1  |  AK^  ÎTT  J.^v\  S)  (sic)  «Mesu,  fils  de  la  femme  Ment-bu-psasu».  Ment-bu-psasu 

signifie  ^le  peuple  du  lieu  (du  pays)  de  pèasu.»  Le  dernier  élément  plasu  est  l'ethnique  égj-ptien  bien 
connu  de  la  race  des  pasteurs  sémites.  Peut-être  la  mère  de  Mesu  appartenait-elle  à  cette  race  comme  captive. 
Les  captives  et  les  esclaves  portaient  souvent  dans  l'antiquité  un  nom  qui  n'était  que  l'ethnique  de  leur 
pays,  écrit  —  comme  celui-ci  —  dans  la  langue  du  vainqueur.    Quant  au  nom  de  Mesu,  il  est  purement 

1  II  ne  faudrait  pas  voir  ici  :  1  O.  c'est-à-dire  le  surnom  «  beau  do  visage  »  qui  s'applique  ordinairement  à  Ptah.  Le  mot  nofre. 
est  un  attribut  de  père.  —  Quant  au  mot  iQ   c'est   la  préposition  oi  pour.    Mot-à-mot  :  «pour  son  action  de  lui  donner»,  etc. 

'  L'addition  \  /\\\  Im-ma-i  «régent  de  vérité»  au  nom  de  Ramsès  I"  est  intéressante.  Son  cartouche  se  lit  d'ordinaire 
I  Ofîirl,^  I  (Kamessou),  Ramsès  IV  portait  an  contraire  le  même  nom  (Ramsés-hiq-ma-t  avec  la  nouvelle  addition  mi-amun).  Mais  son 
cartouche  prénom  était  très  différent  de  celui  de  Eamsès  I'^''  que  nous  avons  ici. 


48  Eugène  Revillout. 


égyptien  (voir  le  papyrus  Anastasi  6,  etc.).  Espérons  que  nous  pourrons  encore  obtenir  l'acquisition  de  la 
magnifique  et  colossale  statue  d'Horus,  appartenant  aussi  à  l'ancien  empire. 

Au  dernier  moment  nous  apprenons  que  M.  le  Ministre  vient  d'autoriser  pour  33.000  frs.  cette  troi- 
sième et  très  importante  acquisition.  On  en  verra  également  l'héliogi-avure  aux  planches.  Eeste  à  acquérir 
la  quatrième  statue  de  bronze,  certainement  plus  moderne,  mais  fort  curieuse  par  ses  incrustations. 

(La  suite  prochainement.) 


EEVIJE  BIBLIOGRAPHIQUE. 

Nous  ne  pouvons  qu'indiquer  aujourd'hui  les  titres  de  quelques-uns  des  ouvi-ages  reçus  dernièrement 
par  nous  —  en  nous  réservant  de  donner  notre  appréciation  de  certains  d'entre  eux  dans  un  de  nos  pro- 
chains numéros.  En  attendant  signalons  :  1°  une  fort  intéressante  étude  du  nouvel  exemplaire  du  décret 
de  Canope  par  M.  Miller,  de  l'institut  (extrait  du  Journal  des  savants).  2"  une  auti*e  étude  de  M.  Dabeste, 
de  l'institut,  sur  le  droit  égyptien  résultant  de  la  comparaison  des  papyrus  grecs  et  des  papyrus  démo- 
tiques expliqués  par  nous  (autre  exti'ait  du  Jom-nal  des  savants).  3°  l'étude  de  la  21''  dynastie  de  Manethon 
de  M.  Lepsius  (extrait  de  la  Zeitschrift  de  Berlin).  4°  une  lecture  faite  à  l'académie  de  Berlin  par  M.  Lepsius 
sur  la  nouvelle  édition  du  livre  des  morts.  5°  une  inscription  historique  de  Pinodjem  III,  grand  prêtre 
d'Amon  à  Thèbes,  traduite  et  commentée  par  M.  Naville  (Paris).  6°  le  catalogue  général  du  Mixsée  égyptien 
de  Turin  par  MM.  Fabretti,  Rossi  et  Lakzone.  7°  les  mathématiques  égyptiennes  par  M.  le  Professeur  Cantoe 
de  Heidelberg  (extrait  de  son  ouvrage  Sur  Vhistoire  des  mathématiques).  8°  un  essai  sur  le  système  métrique 
assyrien  par  M.  Aurès.  1®'"  fasc.  Paris.  9°  la  troisième  partie  du  même  essai  autographiée  à  Nîmes. 
10°  le  fascicule  III  de  l'ouvrage  de  M.  Bortolotti  déjà  signalé  par  nous  et  intitulé  «Del  primitivo  cubito 
egizio»  et  le  supplément  à  ce  III*  fasc.  (Modéne).  11°  un  autre  volume  intitulé  :  «La  coudée  étalon  linéaire 
des  Egyptiens  ^>  par  M.  Rodenbach  (Bruxelles).  12°  les  «Prologomena  ad  papyrorum  graecorum  novam  collec- 
tlonem  edendam»  de  M.  Wessely  (Vienne).  13°  ein  «  Griechischer  Paj)yrus  aus  dem  Jahre  487»  de  M.  Habtel 
(Vienne).  14°  le  papyrus  grec  de  Berlin  n°  163  publié  et  commenté  par  M.  Landvehr  (Gotha).  15°  «Le  mi- 
grazioni  degli  antichi  popoli  delV  Asia  minore  studiata  col  sussidio  dei  monumenti  egiziani»  par  M.  ScmAPARELLi 
(Florence).  1 6°  «  Assyriens  og  Aegyptens  garnie  Historié  »  par  M.  Valdemar  ScHjnDT  (2  gros  volumes ,  Copen- 
hague). 17°  le  catalogue  du  Musée  de  Copenhague  par  le  même.  18°  «Cities  ofEgypt»  by  Poole  (London). 
19°  «Le  décret  trilingue  de  Canope,»  texte  hiéroglyphique  par  M.  Pierret  (Paris).  20°  le  livide  des  morts 
par  le  même.  21°  «Die  Wiener  Papyrus  Nr.3J,  Anhang:  eine  Inschrift  auf  Thon  Nr.  5591»  par  M.  Wesselt 
(Vienne).  22°  un  ouvrage  intitulé  :  Descrittori  italiani  delV  Egitto  par  M.  Lumbroso  (Rome).  23°  le  catalogue 
des  signes  hiératiques  par  M.  Sdiéon  Levy  (Turin).  24°  les  listes  royales  éthiopiennes  par  M.  Drouin  (Paris).  25°  un 
opuscule  égyptologique  de  M.  le  comte  de  Schack,  que  je  ne  retrouve  pas  sous  la  main  et  dont  je 
reparlerai  dans  le  prochain  numéro.  (E.  R.) 


NÉCROLOGIE  ET  NOUVELLES. 

Nous  avons  la  profonde  douleur  d'apprendre  la  mort  de  M.  Laboulaye.  Il  laissera  un  vide  bien  difficile 
à  remplir  tant  à  l'Académie  des  Inscriptions  qu'au  Sénat,  et  tous  ceux  qui  ont  eu  l'honneur  de  le  connaître 
ne  sauront  assez  regretter  l'homme  éminent  et  aimable  que  la  France  vient  de  perdre. 

M.  Maspeeo  a  récemment  découvert  une  église  antique  qui  contenait,  paraît-il,  des  inscriptions  coptes 
importantes  dont  nous  attendons  la  publication  avec  impatience. 

Nous  devons  signaler  le  succès  toujours  croissant  des  cours  que  M.  le  Ministre  vient  d'instituer  au 
Louvre.  Pendant  l'année  scolaire  qui  va  finir,  le  nombre  des  élèves  et  des  élèves  sérieux  s'est  maintenu 
à  un  niveau  vraiment  exceptionnel.  M.  Bertrand,  de  l'Institut,  avait  toujours  foule  à  son  cours  si  intéressant 
sur  l'archéologie  nationale,  cours  dont  je  puis  parler  puisque  j'ai  eu  l'honneur  de  le  suivi-e.  Moi-même, 
sans  avoir  un  pubhc  aussi  considérable,  je  n'ai  qu'à  me  féliciter  du  nombre  et  du  zèle  de  mes  élèves  tant 
pour  mon  cours  de  droit  égyptien  que  pour  mon  cours  de  démotique.  (E.  R.) 

Nota.  Sigles  des  divisions  de  la  drachme  lors  de  rétalon  d'argent  en  Egypte.  Nous  avons  retrouvé  ces 
sigles  dans  plusieurs  papyrus  grecs  d'Athènes,  du  Louvi-e,  de  la  Bibliothèque  nationale,  etc.  et  nous  les 
reproduisons  ci-après  aux  planches.  (E.  R.) 


L'Éditeur  Ernest  Leroux,  Propriétaire-Gérant. 


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REVUE  ÉGYPTOLOGIQUE 

FONDÉE 
SOUS    LA  DIRECTION  DE 

MM.  H.  BRUGSCH,  F.  CHABAS,  EUG.  REVILLOUT, 


ERNEST  LEROUX,  EDITEUR 

LIBRAIRE  UE  LA  SOCIÉTÉ  ASIATIQUE,  DE  L'ÉCOLE  DES  LANGUES  ORIENTALES  VIVANTES,    ETC.  ETC. 
28,  RUE  BONAPARTE,  28,  A  PARIS. 


IIP  année.  N»  II.  1883. 


La  JÎEVUE  E GYPTOLOGIQUE  paraît   tous   les  troi?  mois  par  numéros   de   six  feuilles   au   moins,   avec 

planches,  fac-similé  etc.   —  Aucun  numéro  ne  se  vend  séparément. 

l'ri.c  de  l'abonnement  annuel:    ravis  30  fr.  —  Dépai-tetnents  31  fi:  —  Étranger  33  fr. 


Sor/i'inaire  :  Seconde  lettre  de  M.  Revillout  à  M.  Lenormant,  de  l'Institut,  sur  les  monnaies  égyptiennes.  (Suite  )  §  3  La  propor- 
tion des  métaux  monétaires.  A.  La  pièce  d'or  valant  une  mine;  B.  Le  statère  d'or  de  Leide  et  les  monnaies  d'or  des 
Lagides;  C.  Le  passage  de  Pollux  mentionné  par  Letronne;  D.  Le  taux  de  l'intérêt;  E.  La  proportion  de  valeur  entre 
lor  et  Urgent;  F.  La  proportion  de  valeur  entre  l'argent  et  le  cuivre.  §  4.  Etalons  monétaires.  Première  période 
beconde  période.  Troisième  période.  —  Note  annexe  sur  l'argentens-outen.  —  La  vie  d'artiste  ou  de  bohème  en  Egypte 
Jbragment  dune  pièce  en  vers  démotiques. 


SECONDE  LETTRE 

DE  M.  REVILLOUT  A  M.  LENORMANT  DE  L'INSTITUT 

.SUR 

LES  MONNAIES  ÉGYPTIENNES. 


(Suite'.) 

§  3.  La  proportion  des  métaux  monétaires  en  Egypte. 

Permettez-moi  de  m'arrêter  sm-  cette  proportion  de  24  pour  V,o,  120  à  1,  d'après  laquelle 
j'ai  fait  jusqu'à  présent  tous  mes  calculs.  Cette  proportion  est  toute  différente  de  celle  qu'avait 
établie  Leteonne  et  que  vous  semblez  conserver  encore  2,  ainsi  que  M.  Mommsen.  Il  est  triste 
pour  moi  de  constater  qu'il  existe  ainsi  sous  ce  rapport  un  schisme  complet'entre  deux  sciences 
aussi  parallèles  que  la  numismatique  et  l'étude  des  manuscrits;  car,  il  faut  le  dire,  parmi 
ceux  qui  s'occupent  actuellement  avec  succès  des  papyrus  grecs  ptolémaïques,  il  n'est  plus 
personne  qui  admette  l'ancien  calcul  de  Letronne.  MM.  Bernardjno  Peyron,  Leemans,  Lum- 
BROso  sont  arrivés  à  des  calculs  tout-à-fait  identiques.  Tous  ils  acceptent,  comme  moi-même 
la  proportion  de  1  à  120  entre  l'argent  et  le  cuivre,  et  chacun  en  apporte  des  raisons  diffé- 
rentes de  celles  qu'on  avait  d'abord  données.  Examinons  donc  rapidement  les  bases  sur  les- 
quelles s'appuyait  le  calcul  de  Letronne,  puisqu'il  en  est  encore  question. 

Toute  l'argumentation  de  Letronne  repose  sur  deux  papyrus  de  l'époque  lagide    aux- 
quels il  compare  un  passage  de  Pollux   dont  il  reconnaît  lui-même  les  grandes  difficulfés, 

>  Voir  dans  la  Revue,  2«  année,  n°  II— III.  p.  201  et  suiv.  la  Première  lettre  et  p.  245  et  sniv.  la  seconde. 
2  Je  ne  fais  que  reproduire   ici  les  termes  primitifs  de  ma  lettre;    car  nous  sommes   maintenant, 
M.  Lenormant  et  moi,  parfaitement  d'accord. 

7 


50  Eugène  et  Victor  Revillout. 

difficultés  telles  qu'on  s'accordait  g-énéralement  à  le  corriger.  Il  s'agit,  en  première  ligne,  d'un 
papyrus  de  Leide  qu'avait  déjà  signalé  Eeuvens,  et  dans  lequel  il  est  question  de  statère 
portant  intérêt  de  60  draclimes  de  cuivre  par  mois,  720  drachmes  par  an.  M.  Letkonne 
pensait  que  ce  statère  était  le  statère  d'or  dont  Pollux  avait  dit  :  pàv  -^âjvaTo  ô  ypjsou;  ctxty;p, 
et  il  y  comparait  le  p-vastov  vo[j,'.Œp.a  ypjatou,  dont  parle  un  papyrus  du  Louvre  publié  par  lui. 
Ce  iJ.voct'.Q'/  voij.tc7[j.a  /puTio'j  qu'il  assimile  au  statère  d'or  aurait  représenté,  selon  lui,  une  mine 
d'' argent  (de  cent  drachmes),  ce  qui  en  faisait  probablement  l'octodrachme  d'or  des  Lagides.  En 
supposant  de  plus  l'intérêt  de  12  pour  cent  usité  encore  maintenant  dans  le  Levant,  et  en  cal- 
culant (d'après  ces  bases  et  d'après  l'isonomie  et  l'isométrie  pondérale  des  trois  métaux)  l'intérêt 
indiqué  par  le  papyrus  de  Leide,  il  eu  concluait  la  proportion  de  1  à  12 '/j  entre  For  et 
l'argent  et  la  proportion  de  1  à  60  entre  l'argent  et  le  cuivre.  Voici  la  phrase  de  Leteonne 
qui  résume  le  mieux  son  opinion,  en  la  retournant  :  «  Dans  le  papyrus  de  Leide  il  est  dit  que 
»  l'intérêt  d'un  statère  d'or  sera  de  60  drachmes  de  cuivre  par  mois  et  conséquemment  de  720 
»par  an;  en  réduisant  ces  720  drachmes  de  cuivre  en  argent  d'après  la  proportion  soixantième, 
»on  a  une  drachme  par  mois  et  12  par  an;  et  comme  le  statère  d'or  valait  100  drachmes 
»  ou  une  mine  d'argent  »  —  d'après  la  donnée  du  papyrus  de  Paris  nous  parlant  d'un  |ji,vactov 
vo[;.[C7[j.a  /p'JCTtou  dont  M.  Letronne  fait  un  statère  —  «nous  retrouvons  le  taux  de  12  pour 
»  cent  par  an  » . 

Ce  système  était  très  ingénieux.  Mais  il  croule  par  toutes  ses  bases  à  la  fois  : 

A.  Le  [j.vastov  vo\).<.'j\m  ypuatou  £-v7Y;p.o'j  du  papyrus  du  Louvre  valait  une  mine  de  cuivre 
et  non  une  mine  d'argent. 

B.  Le  statère  du  papyrus  de  Leide  est,  selon  l'observation  déjà  faite  par  M.  Leemans, 
le  statère  d'or,  décrit  par  les  métrologistes  grecs  et  bien  connu  en  numismatique,  qui  valait 
2  drachmes  et  non  8  drachmes  d'or. 

C.  Le  texte  de  Pollux  cité  —  à  regret  —  par  Letronne  s'appliquait,  selon  la  remarque 
fort  judicieuse  de  Hultsch,  aux  monnaies  de  Sicile  (comme  le  texte  que  M.  Mommsen  allègue 
dans  le  même  sens)  et  non  aux  monnaies  d'Egypte. 

D.  L'intérêt  était  de  30  pour  cent  en  Egypte,  ainsi  que  nous  l'apprennent  positivement 
les  textes  et  que  nous  l'avons  déjà  établi  après  MM.  Peyron  et  Leemans  dans  notre  article  sur 
le  papyrus  grec  XIII  de  Turin,  et  non  de  12  pour  cent  comme  le  pensait  Letronne. 

Il  suit  de  là  qu'en  partant  de  l'isonomie  complète  des  différents  métaux  telle  qu'elle  ressort 
de  ce  qui  précède,  nous  retombons  : 

E.  Sur  la  proportion  de  1  à  10  entre  l'or  et  l'argent,  proportion  indiquée  par  tous  les 
anciens. 

F.  Sur  la  proportion  de  1  à  120  entre  l'argent  et  le  cuivre,  qu'avaient  déjà  admise 
MM.  Beenardino  Peyron,  Leemans  et  Lumbroso,  et  que  nos  textes  démotiques  prouvent 
également  d'une  façon  désormais  indubitable. 

Nous  allons  développer  séparément  tous  ces  points  dans  le  présent  paragraphe. 

A.  La  pièce  d'or  valant  une  mine. 

En  ce  qui  concerne  le  premier  point,  il  suffit  de  lire  avec  attention  le  beau  travail  de 
notre  grand  Letronne  sur  la  récompense  promise  .  .  .   pour  voir  nettement  à  quelle  mine  se 


Seconde  lettee  sur  les  monnaies  égyptiennes.  51 

rapportait  le  ;j./a£::v  v:;j.;c;j.a  -/zjz'.zj  £z::r,;j.sj  dont  parle  le  papyrus  du  Louvre  commenté 
par  lui. 

Ce  papvrus,  comme  l'établit  Letroîtse  avec  toute  certitude,  a  été  rédigé  pendant  les 
négociations  des  Cariens  en  Egypte,  négociations  qui  commencèrent  sous  Épiphane  et  se  ter- 
minèrent sous  son  fils  en  l'an  146  avant  Jésus-Christ;  mais  très  vraisemblablement  sa  date 
plus  précise  est  l'an  25  d'Évergète  II.  A  cette  époque  l'étalon  monétaire  était  très  certaine- 
ment en  Eg}-pte  l'étalon  de  cui\Te,  ainsi  que  nous  aurons  à  le  dire  plus  loin  et  que  le  prouve 
du  reste  avec  évidence  l'ensemble  des  papjTus  grecs  contemporains.  Toutes  les  fois  que  les 
pap}Tus  mentionnent  alors  sans  autre  désignation  des  drachmes,  des  talents  ou  des  mines, 
c'est  de  drachmes,  de  talents  ou  de  mines  d'airain  qu'il  s'agit.  Si  l'on  veut  parler  d'autres 
monnaies  —  d'or  et  d'argent  —  on  a  soin  de  le  spécifier  très  expressément.  On  joint  même  assez 
ordinairement  au  nom  du  métal  as-,osisj  ou  /cj'-.îj  le  mot  t~<.zT,\).zj  frappé,  marqué  ou  monnayé, 
qui  ne  figure  pas  à  l'époque  de  l'étalon  d'argent  ',  mais  était  devenu  fort  utile  pour  distinguer 
des  lingots  ordinaires  les  monnaies  frappées  dans  un  autre  métal  que  celui  de  l'étalon,  c"est-à- 
dire  que  le  cuivre-.  C'est  ce  que  fait  notre  texte  par  les  mots  (vcja:s;j.2)  /pja-.îj  t-:zT,-^.zj  que 
Letroxse  a  rapprochés  lui-même  de  la  fonnule  y.p';jz:cj  tT.:zr,-j.zj  zzT/;^.y.<.  du  papyrus  grec  8  de 
Turin,  daté  du  même  règne.  Si  l'auteur  de  notre  document  avait  eu  en  \T.ie  dans  [xvastîv  la 
mine  à'arqent,  il  aurait  certainement  procédé  de  même,  en  indiquant,  tout  au  moins,  cju'il 
voulait  parler  de  l'argent.  Cette  considération  seule  suffirait  pour  montrer  qu'il  s'agissait  de 
mines  de  cuivre  (conformes  à  l'étalon  égyptien)  et  non  de  mines  d'argent  qui  étaient  alors 
très  rarement  employées. 

Ajoutons  du  reste  que  s'il  s'agissait  de  la  mine  d'argent  (ce  que  nous  n'admettons  pas), 
il  ne  s'en  suivrait  pas  que  la  pièce  d'or  valant  une  mine  fût  un  octodrachme  lagide  d'or. 
On  pourrait  plutôt  songer  alors  à  la  pièce  d'or  de  34  grammes  et  plus  {à  peu  près  le  poids 
des  décadrachmes  d'argent  dArsinoë)  frappée  en  Syrie ^  (pays  avec  lequel  la  Carie  devait 
avoir  de  fréquents  rapports),  pièce  qui  valait  8  drachmes  syriennes  ou  attiques  et  10  drachmes 
d'or  ptolémaïques,  ce  qui  répondait,  avec  la  proportion  réelle  dun  à  dix  entre  l'or  et  l'argent, 
à  100  drachmes  ou  une  mine  ég}iîtieune  d'argent. 

Mais  il  faut  laisser  cette  hj-pothèse  par  les  raisons  indiquées  plus  haut  et  en  arriver  à 
une  auti-e  conclusion  beaucoup  plus  vraisemblable  et  qui  me  paraît  même  tout-à-fait  certaine, 
parce  qu'elle  se  rapporte  à  l'étalon  de  cuivre  usité  à  cette  époque.  En  effet,  le  ;j.va£'.îv  vo;j!.'.:7;j.a 
(dont  rien  n'indique  dans  le  texte  la  relation  avec  le  statère  du  papyrus  de  Leide)  nous  re- 
présente îine  monnaie  bien  connue  dans  le  pays  même  d'où  venaient  les  ambassadeurs  qui  font 
faire  l'avis  en  question. 

'  Yoii-  le  papyrus  gi-ec  Q  de  Leide  du  temps  de  Philadelphe  1^-. 

2  On  ne  trouve  les  mots  -/a)./.oj  £-'.tt,u.o-j  que  dans  un  passage  dé  Polybe  dont  nous  aurons  à  reparler 
et  qui  est  relatif  à  des  talents  de  enivre  monnayé  donnés  par  Épiphane  à  des  Grecs  étrangers  à  l'Egypte. 
Cette  mention  précise  était  alors  utile,  parceque  les  talents  de  cuivi-e  monnayé  n'étaient  guère  d'usage 
qti'en  Egypte  et  quil  ne  fallait  pas  qu'on  put  croire  qu'il  s'agissait  d'un  poids  d'airain  en  lingots  comme 
celui  qne  Démosthénes  mentionne  pour  la  garantie  d'une  dette.  En  somme,  le  mot  £-'.7T,aoj  sert  à  faire 
disringuer  les  indications  monétaires  des  indications  pondérales  (drachmes  ou  talents)  pour  les  métaux  qui 
ne  rentrent  pas  dans  l'étalon  surtout  connu  du  lecteur.  Le  mot  efket  «gravé»  a  le  même  but  en  démotique. 

3  Nous  parlons  plus  loin  de  cette  pièce  qui  a  été  frappée  par  Antiochus  et  par  plusieurs  rois  de  Syrie. 


52  Eugène  et  Victor  Revillout. 


En  admettant  la  proportion  de  1  à  120  entre  l'argent  et  le  cuivre  et  de  1  à  10  entre 
l'or  et  l'argent,  la  mine  de  cuivre  (de  100  drachmes  de  cuivre)  valait  les  Vg  de  la  drachme 
d'argent;  c'est-à-dire  les  Vgo  o^^  V12  de  la  drachme  d'or,  autrement  dit  la  demi-obole  d'or  ou 
le  quart  d'hecté,  puisque  l'hecté  était  lui-même  le  6®  du  statère.  A  Athènes  M.  Beulé  avait 
cru  retrouver  la  demi-obole  d'or  et  même  d'autres  monnaies  plus  petites.  Mais  MM.  Muret, 
Friedlânder  et  Erman  y  voient  avec  raison  des  bractéates,  semblables  à  celles  que  l'on 
possède  dans  différents  pays  et  à  différentes  époques.  Ce  n'est  donc  pas  au  monnayage  athé- 
nien que  se  rapporte  la  demi-obole  d'or.  Au  contraire  on  a  beaucoup  de  demi-oboles  d'or  (pesant 
de  0.27  à  0.42)  en  Cyrénaïque,  en  Chypre,  à  Abydos,  en  Troade  et  surtout  en  Carie  \  La  demi- 
obole  d'or  frappée  en  Carie  par  le  roi  Pixodarus,  et  pesant  de  0.30  à  0.35,  est  certainement 
l'une  des  principales  monnaies  d'or  de  ce  pays  et  de  beaucoup  la  plus  fréquente.  Il  est  tout 
naturel  que  nos  ambassadeurs  cariens  en  aient  été  surtout  munis  et  aient  remis  trois  pièces 
de  ce  genre  à  leur  esclave  avant  sa  fuite.  Cette  question  nous  paraît  donc  complètement 
vidée  et  nous  pouvons  affirmer  que  le  [j-vaeiov  (vo|j,icT[j.a)  xpu^iou  £Tr[arj[;,o'j  désigne  la  petite  pièce 
d'or  carienne  et  pas  du  tout  le  statère  d'or  dont  parle  le  papyrus  de  Leide. 

B.  Le  statère  d'or  du  papyrus  de  Leide  et  les  monnaies  d'or  des  Lagides. 

Il  faut  maintenant  que  nous  examinions  à  son  tour  ce  statère  du  papyrus  de  Leide  et 
pour  cela  que  nous  suivions  M.  Letronne  dans  sou  étude  générale  des  monnaies  d'or  lagides. 
Voici  comment  il  les  résume  : 

«La  pesée  des  principales  de  ces  monnaies  m'a  donné,  pour  les  pièces  d'or,  les  poids 
suivants  : 

Les  plus  grandes 520  à  542  grains  2. 

Les  moyennes 260  à  264  grains. 

Les  petites    64  à     66  grains. 

«Ces  poids  sont  exactement  dans  les  rapports  8,  4,  1.  La  dernière  pièce  est  évidemment 
l'unité  monétaire;  d'où  l'on  voit  que  les  premières  sont  des  octodrachmes,  les  deuxièmes  des 
tétradrachmes  et  les  troisièmes  des  drachmes  simples.  Le  grand  médaillon  d'argent  d'Arsinoë 
pèse  648  grains  ou  dix  fois  l'unité  :  c'est  donc  un  décadrachme;  les  autres  monnaies  d'argent 
donnent  aussi  260  à  265  grains;  ce  sont  des  tétradrachmes,  toujours  dans  le  même  numéraire 3.» 

Ce  tableau  est  exact,  mais  il  n'est  pas  suffisamment  complet.  Nous  allons  exposer  ici 
les  données  que  nous  avons  recueillies  nous-même  à  ce  sujet. 

Les  monnaies  frappées  par  les  Lagides  appartiennent  à  plusieurs  périodes  bien  distinctes 
que  nous  avons  déjà  signalées  à  propos  des  monnaies  d'argent  et  de  cuivre. 

Les  premières  monnaies  d'or  (comme  les  premières  monnaies  d'argent  et  de  cuivre)  ont 
d'abord  été  frappées  au  type,  au  nom  (et  au  poids)  d'Alexandre,  représentant  Hercule,  mais  avec 
la  peau  d'éléphant.   Puis  le  nom  d'Alexandre  a  disparu;  puis  il  a  été  remplacé  par  celui  de 

'  La  ville  de  Milet  située  sur  la  côte  de  Carie  frappait  aussi  de§  demi-oboles  d'or.  Il  en  existe  une 
de  31  centigrammes  dans  la  collection  de  Luyues. 

-  M.  Letronne  compte  toujours  par  grains;  tandis  que  l'habitude  a  prévalu  de  compter  par  grammes, 
suivant  le  système  décimal  :  nous  comptons  également  de  cette  dernière  manière. 

3  Papyrus  du  Louvre,  édition  de  l'académie,  p.  188.  M.  Letronne  néglige  ici  bien  des  monnaies  d'argent 
mentionnées  par  nous  plus  haut,  comme  bien  des  monnaies  d'or  dont  nous  aurons  à  parler. 


Seconde  lettee  sue  les  monnaies  égyptiennes.  53 


Ptolémée;  puis  la  figure,  les  emblèmes  de  Ptolémée  Soter  ont  définitivement  succédé  à  ceux 
d'Alexandre.  Enfin  certaines  médailles  ont  été  frappées  à  d'autres  types  lagides  que  celui 
de  Soter. 

D  y  a  d'abord  à  Londres  un  didrachme  d'or  qui  appartient  à  la  première  période,  et 
qui  a  le  nom,  (le  poids)  et  le  type  d'Alexandre  sous  sa  forme  ég}-i)tienne,  c'est-à-dire  avec  la 
peau  d'éléphant.  Nous  avons  ensuite  deux  autres  didrachmes  sans  nom  et  de  l'époque  de 
transition.  Ce  tj-pe  a  été  décrit  par  M.  Waddingtox.  Ils  présentent  au  droit  la  tête  d'Alexandre 
(avec  la  peau  d'élépbaut)  tournée  cà  droite,  au  revers  la  proue  de  navire,  également  à  droite, 
et  qui  semble  indiquer  une  frappe  phénicienne.  Le  poids  eu  dépasse  8  grammes  50.  Un 
exemplaire  s'en  trouve  dans  la  collection  de  Paris  et  un  autre  dans  la  collection  Démétrio. 
M.  MoMMSEN  (p.  52,  note  1)  signale  aussi  un  didrachme  qui  porterait  à  la  fois  le  nom  d'Ale- 
xandre et  celui  de  Ptolémée.  Mais  il  parle  sans  doute  d'une  médaille,  dont  la  légende  est 
un  peu  effacée,  qui  paraît  être  de  Cyi-ène  et  qui  est  à  la  Bibliothèque  nationale.  On  y  voit 
au  droit  une  tête  casquée  (de  Pallas'?),  comme  sur  les  /.pj'îj;  ordinaires  d'Alexandre,  au  revers 
une  victoire  debout  à  gauche  '.  La  légende  est  nTo\e.v\.â.io3-,  puis  quelques  lettres  dans  les- 
quelles on  a  cru  reconnaître  les  débris  du  nom  d'Alexandre,  et  qui  se  rapportaient  au  con- 
traire au  nom  des  Cyréuéeus.  Elle  est  d'un  poids  un  peu  plus  faible  que  la  précédente. 

Mais  il  existe  d'auti-es  statères  ou  didrachmes  bien  plus  faibles  et  qui  ont  :  dun  côté. 
la  tête  de  Soter  avec  nTo\eA*.d.io^  Êd^ciAcwe  en  deux  lignes  à  l'ancienne  mode;  de  l'autre  Soter 
dans  un  quadrige  traîné  par  des  éléphants.  A  Berhn  on  en  a  acheté  un  assez  grand  nombre 
1^14,  paraît-il)  qui  avaient  été  trouvés  avec  d'autres  médailles  anciennes  et  surtout  des  Philippe 
et  des  Alexandre.  Ces  didrachmes  avaient  dû  être  cachés  peu  de  temps  après  leur  émission  : 
aussi  leur  conservation  était-elle  excellente.  Un  nombre  à  peu  près  semblable  de  didrachmes 
de  la  même  fouille  est  maintenant  à  Athènes.  D'autres  pièces  du  même  genre  sont  à  Gotha, 
à  Paris,  à  Londres,  etc.  D'après  la  disposition  de  la  légende  (en  lignes  droites)  ces  didrachmes 
sont  les  plus  anciennes  des  monnaies  d'or  portant  le  nom  de  Ptolémée  avec  le  titre  de  roi. 
Les  plus  certainement  intactes,  celles  de  Berlin,  varient  entre  7  gr.  14  et  7  gr.  18.  Celles  de 
Londres  et  de  Paris  varient  entre  7  gr.  12  et  7  gr.  07  {ce  qui  donne  une  drachme  forte  de  3  gr. 
590  à  3  gr.  535).    Il  en  a  même  une  qui  ne  pèse  que  7  gr.  1. 

A  côté  de  cette  monnaie  nous  en  avons  une  autre  avec  la  disposition  de  la  légende 
définitivement  adoptée  pour  les  monnaies  lagides.  Elle  a  la  tête  diadémée  de  Soter  à  droite 
comme  les  monnaies  d'argent  et  au  revers  l'aigle  reposant  sur  un  foudre  à  gauche.  La 
légende  nToAcALd.ioT>  Êe^ciActoc  est  sur  une  ligne  circulaire.  Les  pièces  de  cette  série  sont  des 
pentadrachmes,  comme  la  dit  M.  Mommsen"-.    Le  poids  eu  varie  entre  17  gr.  83  et  17,  68 

1  Cette  même  victoire  debout  à  gauche  se  retrouve  sur  deux  médailles  à  tête  de  Soter  diadémée 
(Paris,  Londres),  et  qui  pèsent  de  2  gr.  78  à  2  gr.  82.  Ce  sont  des  tétroboles  (ou  double  hccté)  de  cette 
série.  Celle  de  Paris  ua  pas  de  légende  et  celle  de  Londres  porte  nToA.eA\.&.ioiy  ÊcvciAetoc. 

2  Selon  la  remarque  de  Letroxxe,  le  double  pentadrachme  ou  décadrachme,  existe  aussi  en  argent  dans 
les  monnaies  d'Arsinoë.  On  retrouve  également  une  monnaie  d"or  d'un  poids  analogue  dans  le  monnayage 
syrien.  Nous  en  avons  une  d'Antiochus  le  Grand  dans  la  collection  de  Paris.  Cette  pièce  pèse  34  grammes 
comme  certains  décadrachmes  d'Arsinoë.  Elle  porte  une  proue  de  navire  qui  semble  dénoter  une  origine 
phénicienne  et  la  date  pie.  C'est  une  des  plus  anciennes  des  monnaies  sjTiennes  datées.  Elle  représente  un 
octodrachme  du  système  syrien  et  un  double  pentadrachme  (ou  décadrachme)  du  système  ptolémaïque,  vu 
la  diminution  (déjà  notée  par  M.  Mosdisen)  des  pièces  d'or  égyptiennes  depuis  l'époque  de  Philadelphe.  En 


54  Eugène  et  Victor  Revillout. 


(ce  qui.  donne  une  draclime  variant  entre  3.532  et  3.560).  Il  y  en  a  même  une  qui  ne  pèse 
que  17;  62  et  que  nous  avons  écartée  pour  nos  moyennes,  comme  celle  de  7,  1  de  la  précé- 
dente série.  Nous  possédons  le  10®  de  ce  pentadrachme  dans  une  autre  monnaie  de  Soter, 
la  plus  fréquente  de  toutes  ses  monnaies  d'or,  dont  le  poids  varie  entre  1,  68  et  1,  80.  Ce 
sont  des  demi-drachmes  ou  tri-oboles,  équivalant  à  5  drachmes  d'argent.  Le  type  en  est 
identique  à  celui  des  médailles  précédentes,  sauf  que  l'aigle  est  époyé. 

Tel  est  l'ensemble  des  médailles  d'or  appartenant  au  monnayage  de  Soter.  Quant  au 
monnayage  de  Philadelphe,  il  est  sensiblement  différent.  En  eifet  Philadelphe  a  changé  le 
poids  proportionnel  de  la  monnaie  telle  qu'elle  était  frappée  par  Soter,  pour  abaisser  celui  de 
'  i  drachme  d'or.  Dans  ce  but  il  a  fait  de  grosses  monnaies  qui  se  rapprochaient,  comme 
poids,  des  anciennes  pièces  citées  dans  la  lettre  précédente  —  et  représentant  le  roi  perse 
dans  un  char  suivi  du  roi  d'Egypte  marchant  à  pieds  —  ainsi  que  de  la  pièce  d'argent 
de  28  grammes  de  Soter,  dont  nous  avons  également  parlé  plus  haut,  et  qui  avait  servi 
pour  la  transition  vers  le  monnayage  lagide  après  le  monnayage  néo-attique.  Les  nouvelles 
médailles  de  Philadelphe  sont  à  deux  types  différents.  Les  unes  portent,  d'un  côté  les 
têtes  associées  de  Soter  et  de  Bérénice  tournées  à  droite  et  surmontées  du  mot  ♦ewn,  de 
l'autre  côté  les  têtes  de  Philadelphe  et  d'Arsinoë  tournées  à  droite  et  surmontées  du  mot 
e<2>.eA«^ûjn.  Les  autres  sont  frappées  à  l'effigie  d'Arsinoë  diadémée  et  voilée  et  portent  au 
revers  la  double  corne  d'abondance.  Ces  deux  monnaies  sont  également  des  doubles  tétra- 
drachmes  ou  octo-drachmes  d'or.  Elles  pèsent  entre  27  gr.  60  et  27  gr.  94.  Nous  n'en  con- 
naissons pas  qui  atteigne  28  grammes.  On  possède  aussi  des  pièces  formant  la  moitié  des 
précédentes  (tétradrachmes  simples)  avec  les  mêmes  types.  Le  poids  en  est  de  13  gr.  85  à 
13  gr.  90.  Il  existe  de  plus  des  drachmes  d'or  d'Arsinoë,  pesant  3  gr.  50  environ,  et  repré- 
sentant la  valeur  du  décadrachme  d'argent  d'Arsinoë,  ainsi  que  d'autres  drachmes  d'or  d'un 
poids  plus  faible  selon  la  tendance  générale  des  Ptolémées  à  abaisser  le  poids  proportionnel 
des  monnaies  divisionnaires.  J'en  dirai  autant  de  certaines  demi-drachmes  d'or  d'un  poids  faible. 
La  collection  de  Luynes  eu  possède  une  qui  ne  pèse  que  1  gr.  52.  C'est  ce  monnayage  de 
Philadelphe  qui  a  été  imité  par  plusieurs  de  ses  successeurs  '. 

effet,  la  drachme  d'or  déduite  des  pièces  ptolémaïques  qui  ue  portent  plus  le  nom  de  Soter  n'atteignait 
même  pas  une  moyenne  de  3  gr.  50  et  la  pièce  d'Antiochus  n'atteint  pas  tout-à-fait  35  gr.  C'était  donc  une 
pièce  de  raccordement,  comme  la  pièce  d'or  de  Soter  citée  plus  haut.  Ces  pièces  d'or  de  Soter  pouvaient  en 
effet  passer,  comme  vous  le  dites,  dans  le  reste  du  monde  pour  des  tétradrachmes  néo-attiques  d'un  poids  très 
fort  et  en  Egypte  pour  des  pentadrachmes  ptolémaïques,  ainsi  que  le  dit  M.  Momîisen.  Les  décadrachmes 
existaient  du  reste  dans  les  monnayages  d'Alexandre,  comme  ils  avaient  existé  dans  le  monnayage  athénien 
proprement  dit  :  M.  Beulé  l'a  démontré.  Nous  avons  vu  un  décadrachme  attique  d'argent  dans  la  collection  de 
Luynes.  Mais  il  paraît  que  la  plupart  des  décadrachmes  d'Alexandre  viennent  de  la  Babylonie.  Quant  au 
décadrachme  d'argent,  il  avait  en  Egypte  le  grand  avantage  de  représenter  le  demi-argenteus.  Non  seulement 
il  y  en  a  beaucoup  au  type  d'Arsinoë,  mais  il  en  existe  aussi  au  type  de  Bérénice.  Je  citerai  un  décadrachme 
de  ce  dernier  genre  qui  est  à  Londres  et  pèse  35  gr.  85.  Il  porte  air  droit  la  tête  voilée  de  Bérénice  et  au 
revers  la  corne  d'abondance  avec  la  légende  ûcpeniRHC  Êd-ciAiccHC.  Quant  aux  monnaies  d'Arsinoë,  elles 
se  sont  continuées  très  longtemps.  On  a  d'abord  les  séries  A,  B,  etc.,  puis  les  séries  AA,  BB,  etc.  Cela 
fait  au  moins  50  ans  pour  ces  monnaies  de  culte,  sans  compter  celles  qui  n'ont  plus  de  marques  de  séries. 
Les  pièces  d'Arsinoë  pèsent  entre  34  gr.  et  35  gr.  40.  Notons  que  les  décadrachmes  de  cuivre  d'un  poids 
analogue  sont  extraordinairement  nombreux  dans  le  monnayage  ptolémaïque  de  la  seconde  époque.  Ces 
décadrachmes  représentent  le  demi-argenteus  de  cuIm-c  o\i  la  demi-obole  par  rapport  à  l'argent. 

'  Nous  citerons  les  monnaies  au  nom  et  à  la  figure  de  Philopator,  celles  qui  ont  une  tête  couronnée 
qu'on  a  cru  être  celle  d'Evergète  I*'',  etc. 


Seconde  lettre  sue  les  monnaies  égyptiennes.  55 

Il  nous  reste  à  parler  des  mouuaies  de  Bérénice  '.  Elles  appartiennent  à  deux  séries  bien 
distinctes.  Les  unes  rentrent  complètement  dans  les  poids  ptolémaïques.  C'est  ainsi  que  nous 
avons  des  octodraclimes  d'or  de  Bérénice  d'un  poids  tout-à-fait  régulier.  I\  en  existe  deux 
dans  la  collection  Demetrio  (décrite  par  M.  Feuardext)  de  27  gr.  60;  un  autre  à  Londres  de 
27  gr.  72,  un  autre  dans  la  collection  de  Luynes  de  27  gr.  80.  Ces  monnaies  sont  tout-à-fait 
comparables  aux  tétradraclimes  d'argent  de  la  même  Bérénice  qui  pèsent  14  gr.  dans  la  col- 
lection Demetrio,  d'après  M.  Feuardent,  et  14  gr.  25  dans  la  collection  de  Berlin  2.  Mais  à 
côté  de  ces  médailles  il  en  est  d'autres,  également  de  Bérénice,  et  dont  l'étude  est  beaucoup 
plus  difficile.  "S'oici  l'énumération  de  celles  que  nous  avons  vues  eu  or  : 

Londres 1,  36 

Id 1^  55 

Berlin 1,  60 

Londres 1,  70 

Paris 1,  90 

Feuardent 2,  10 

Berlin 2,  12 

Londres 2,  138 

Paris 2,  19 

Id 4,  19 

Berlin 4,  27 

Londres 10,  62 

Berlin 10,  67 

Luynes 21,  30 

Paris 21,  38. 

En  argent  on  trouve  : 

Feuardent .'     .     18,  20 

Berlin 19,  82 

Londres 21,  11. 

Tous  ces  chiffres  sont  bien  étranges.  Ce  qui  paraît  certain  c'est  que  ces  monnaies  sont 
des  pièces  de  raccordement  avec  plusieurs  systèmes  monétaires,  c'est-à-dire,  par  exemple,  soit 
avec  le  système  de  la  Cj-rénaïque  sous  sa  forme  néo-attique,  comme  l'a  dit  M.  Poole  (c'est 
ce  qui  expliquerait  le  mieux  les  plus  petites  de  ces  pièces),  soit,  en  même  temps,  avec  le 
système  des  pièces  de  l'Asie  mineure  établies  d'après  le  double  sicle  d'argent  darique  (c'est 
ce  qui  explique  le  mieux  les  monnaies  de  10,  55  à  10,  70,  et  leurs  doubles  les  monnaies  de 
21,  11  à  21,  38.  On  sait  qu'Évergète  F""  a  recommencé  les  grandes  campagnes  d'Alexandre 
et  est  allé  jusqu'au  fond  de  l'Asie.  Il  serait  assez  naturel  qu'il  eût  imité  les  pièces  des  pro- 
vinces asiatiques  qu'il  avait  soumises.  Quant  à  la  CjTénaïque,  Bérénice,  sa  femme,  eu  était 
reine  avant  de  devenir  reine  d'Egypte.  Évergète  aurait  donc  attribué  à  Bérénice  toutes  les 

'  Nous  ne  ])arlous  pas  ici  des  Bérénice  à  tête  non  voilée  que  nous  aurons  bientôt  à  étudier.  Il  y  en 
a  une  (à  Londres)  de  6,  40,  une  (à  Berlin)  de  6,  50,  ti-ois  (à  Londres)  de  6,  70,  une  (à  Londres)  de  6,  64. 

2  Nous  avons  aussi  cité  plus  haut  les  décadrachmes  d'argent  de  Bérénice  tout-à-fait  parallèles  aux 
décadracluues  d'argent  d'Arsinoë.  Par  contre,  notons  que  la  collection  de  Paris  possède  une  Arsiuoë,  appar- 
tenant à  la  série  H  H  et  qui  pèse  29,  G5,  chiffre  très  irrégulier. 


56  Eugène  et  Victoe  Revillout. 


pièces  qui  ne  rentraient  pas  dans  le  monnayage  égyptien.  Ce  dernier  point  nous  paraît  du 
moins  incontestable;  car  il  est  impossible  non-seulement  de  rattacher  les  médailles  indiquées 
plus  haut  aux  poids  lagides,  mais  même  de  les  faire  rentrer  toutes  dans  un  monnayage 
unique.  Notons  seulement  que  la  pièce  de  10,  55  à  10,  70  paraît  être  celle  que  les  métrolo- 
gistes  '  anciens  nomment  statère  de  Bérénice  (d'après  une  drachme  de  5,  27  à  5,  35),  et  qu'ils 
comparent  au  statère  de  Darius,  au  statère  de  Philippe,  au  statère  d'Alexandre  et  au  statère 
de  Ptolémée.  Ce  statère  d'or  de  Bérénice  (analogue  comme  poids  à  la  double  darique  d'argent 
et  à  la  drachme  de  Milet,  telle  que  l'évalue  M.  Mommsen)  était  encore  notablement  plus  élevé 
en  poids  que  le  statère  par  excellence,  darique  d'or  ou  /pucouç  athénien,  conservé  par  Ale- 
xandre, et  surtout  que  le  statère  d'or  ptolémaïque.  On  le  spécifiait  donc  très  expressément  dans 
le  commerce. 

Ceci  nous  amène  à  traiter  la  question  du  statère,  que  nous  n'avons  fait  jusqu'ici  que  préparer. 

Mais,  auparavant,  commençons  par  donner  les  résultats  généraux  de  nos  recherches. 

En  laissant  de  côté  les  pièces  étrangères  de  Bérénice,  et  en  réunissant  les  monnayages 
égyptiens  de  Soter  et  de  Philadelphe,  nous  trouvons  pour  l'or  les  monnaies  suivantes  :  1°  des 
octodrachmes^  ;  2"  des  pentadrachmes;  3''  des  tétradrachmes  ;  4°  des  didrachmes'';  5°  des 
drachmes;  6"  des  demi-drachmes. 

Dans  le  tableau  des  monnaies  d'or  de  Letronne  nous  avions  seulement  des  drachmes, 
des  tétradrachmes,  des  octodrachmes,  mais  pas  un  didrachme.  Il  paraissait  tout  naturel  de 
chercher  au  hasard  le  statère  d'or,  puisque  le  vrai  statère,  qui  est  le  didrachme  d'or,  n'appa- 
raissait nulle  part  en  Egypte.  Maintenant  cette  théorie  devient  insoutenable.  Nous  avons  un 
très  grand  nombre  de  didrachmes  d'or  égyptiens.  Ces  didrachmes  d'or  représentent  donc  avec 
certitude  le  statère,  également  assimilé  à  la  darique  d'or  et  au  xpusouç  d'Athènes,  suivant 
l'enseignement  de  tous  les  métrologistes  anciens  :  dc\  \t.v)  yo\>QQ\.  atai^ps?  o\  Aape'.y.o{  (Hultsch, 
310)  ô  o£  yj^'jcaxiz,  q-zoltc^Ç)  S'jo  y\-(z  opayj^.à;  'ÂTTixaç  (ihid.  297)  /.al  o\  [Jièv  Aap£ty.ol  è/aXoGvTO  GTar^pcÇ, 
cl  oè  <ï>'.A'!7U7:£iO'.,  01  o'  'ÂAs^âvSpetot,  xpucol  -jravTs;  ovtsç.  xat  s?  \i.hi  /puaou;  e'iTUOiç,  7rpoauxa/,o6£Tat  6 
GTaT-(^p  .  .  .  {ihid.,  p.  283;  conf.  ihid.  281,  306,  307,  311,  326,  328,  335,  354,  etc.  etc.).  Ainsi 
se  trouve  confirmé  ce  passage  déjà  cité  de  Pollux  qui  compare  le  stature  ptolémaïque  au  statère 
darique,  à  celui  de  Philippe,  d'Alexandre,  etc.  etc.  :  l'awç  Se  vopi.ia[ji,aTa)v  v.aTix\ôyiù  Tïpocy^xouaiv  ol 
Kpci'cîtot  c-ar^psç  -/.a).  ^ùS-Kiztioi  -/.al  Aapsty.oî,  y.al  xb  B£p£v{/,£tov  v6i;,io-pi,a  ■/.ai  'AX£^avSp£tov  xat  nToX£- 
.u.aïy.bv  ...  Le  Statère  ptolémaïque  est  en  eifet  une  réalité  dont  il  faut  désormais  tenir  compte: 
et  ce  statère  d'or  représentait  l'unité  d'or,  comme  la  drachme  d'argent  représentait  l'unité 
d'argent,  dans  tous  les  monnayages  dérivés  du  monnayage  attique. 

La  raison  en  est  facile  à  comprendre.  A  Athènes  l'étalon  était  d'argent,  —  étalon  d'autant 
plus  naturel  qu'Athènes  tirait  directement  ses  monnaies  de  ses  mines  d'argent  du  Laurium  — 
et  l'on  avait  calculé  la  drachme  d'argent  comme  la  moitié  du  poids  de  la  darique  d'or  et  le 

^  Hultsch,  294. 

2  Les  octodrachmes  d'or  de  Letronne. 

3  II  semble  que  le  didrachme  ou  ypuaoui;  a  été  aussi  appelé  «drachme  d'or».  Une  série  d'inscriptions 
du  Corpus,  à  propos  des  inventaires  du  Parthénon,  parle  ainsi  d'un  tétradrachme  d'or  (sans  désignation  de 
provenance  et  qui  doit  être  attique),  tétradrachme  pesant  environ  8  drachmes.  D'après  ce  mode  de  compter, 
nos  didrachmes  d'or  seraient  des  drachmes  d'or,  l'unité  d'or  —  xpuaou;  ou  statère  —  unité  double  de  poids 
de  l'unité  d'argent. 


Seconde  lettre  sur  les  monnaies  égyptiennes.  57 

viug-tièmc  de  sa  valeur.  Quant  à  l'or,  on  n'en  frappait  primitivement  pas.  Les  dariqnes  suf- 
fisaient aux  besoins  du  commerce.  Le  /oj^cj;  ou  statère  ne  fut  qu'une  imitation  postérieure 
et  resta  toujours,  comme  unité  d'or,  dans  les  mêmes  proportions  avec  la  drachme,  unité  d'argent. 
C'est  ce  que  nous  remarquons  notamment  en  Egypte  pour  le  statère  didrachme  au  type 
d'Alexandre  et  le  statère  didrachme  au  type  de  Soter. 

Mais  plus  tard  le  quadruple  de  ce  statère,  unité  d'or,  est  devenu  une  pièce  plus  com- 
mune, comme  le  quadruple  de  la  drachme  ou  unité  d'argent.  Ce  fait  se  produisit  non  seulement 
en  Egypte  avec  les  poids  de  la  drachme  réduite,  mais  en  Syrie  avec  les  poids  attiques  ou 
d'Alexandre.  Là  aussi  on  trouve  des  tétradrachmes  d'argent  et  des  tétrastatères  d'or.  Je 
citerai  pour  cette  dernière  monnaie  la  pièce  d'Antiochus  dont  j'ai  déjà  parlé  plus  haut  et 
qui  vaut  huit  drachmes  d'or  syriennes  et  10  drachmes  d'or  égyptiennes.  A  cette  pièce  ré- 
pondaient exactement  les  octodrachmes  d'or  égyptiens  si  communs  dont  parle  Letroxne.  Le 
tétradrachme  d'argent  l'emporta  en  même  temps  et  partout  sur  la  drachme,  au  point  de  faire 
disparaître  presque  entièrement  celle-ci  dans  le  monnayage  attique  et  dans  ses  dérivés.  Et 
cependant  la  drachme  d'argent  resta  toujours  l'unité  de  compte  pour  l'argent  dans  les  calculs 
écrits  en  grec.  Jamais  le  tétradrachme  d'argent,  alors  même  qu'il  était  frappé  à  peu  près  seul,  ne 
prit  le  nom  de  drachme  et  ne  se  substitua  dans  les  comptes  à  la  drachme  d'argent.  Dans  les 
inscriptions  et  les  papyrus  de  toutes  les  provenances  l'argent  est  toujours  compté  en  grec  par 
drachmes  et  l'or  par  statères  ou  -/p'jco'jg.  Il  suffit  de  parcourir  le  Corpus  inscriptionum  grœcarum, 
le  Corpus  insaiptionum  atticarum  ou  les  diverses  collections  de  papyrus  grecs  pour  s'en  assurer. 
Ajoutons  d'ailleurs  que  le  poids  de  ces  statères  et  de  ces  tétrastatères  d'or  suivit  dans  les 
divers  pays  toutes  les  oscillations  du  poids  de  la  drachme  d'argent  et  du  tétradrachme  d'argent. 
Le  statère  de  Soter  pèse  en  conséquence  moins  que  le  xpuscjc  athénien  et  représente  la  ré- 
duction subie  par  l'unité  d'or,  isonome  de  l'unité  d'argent.  De  même  sous  les  successeurs  de 
Soter  le  poids  avait  encore  un  peu  baissé  dans  le  tétradrachme  et  le  téti'astatère.  De  même 
aussi  lors  du  traité  romaiu-étolien  la  drachme  d'Athènes,  calculée  d'après  son  quadruple  le 
téti'adrachme  alors  en  usage,  avait  beaucoup  perdu  de  son  ancien  poids  sans  cesser  d'être 
l'unité  de  compte.  L'unité  de  compte  ayant  toujours  été  en  Attique  la  drachme  pour  l'argent, 
le  /.pj-cj;  ou  statère  didrachme  pour  l'or,  ceux  qui  comptaient  à  l'athénienne  auraient  conservé 
ces  unités  même  s'il  n'y  avait  eu  chez  eux  ni  drachme  ni  statère.  A  plus  forte  raison  les 
Égyptiens,  qui  avaient  eu  le  statère  dans  leur  premier  monnayage,  ne  purent-ils  pas  changer 
cet  usage  du  jour  au  lendemain.  Ce  principe  des  unités  de  compte  conservées  quand  même 
explique  le  double  calcul  par  drachmes  d'une  part,  par  argenteus  ou  sekels  de  l'autre,  usité 
en  Egypte.  Chacune  de  ces  pièces  avait  existé.  —  L'argenteus  représentait  l'ancien  poids 
monnaie,  déjà  mentionné  sous  Amasis  et  sous  les  Persans;  et  le  sekel,  son  5",  le  tétradrachme 
ptolémaïque,  qui  était  devenu  la  monnaie  d'argent  la  plus  fréquente  sous  les  Lagides. 

En  résumé,  la  règle  qui  demande  la  représentation  par  une  pièce  existante  à  un  moment 
quelconque  pour  les  monnaies  devenues  ensuite  des  unités  de  compte,  avait  été  observée 
pleinement  pour  l'unité  de  compte  d'or,  unité  existante  d'abord  dans  l'Attique  et  conservée 
ensuite  dans  les  pays  qui  s'étaient  inspirés  de  l'Attique  :  le  statère  didrachme  '. 

'■  Dans  la  dernière  conversation  qu'il  a  eue  avec  moi  à  propos  de  la  présente  lettre  que  j'étais  en 


58  Eugène  et  Victor  Revillout. 

C'est  évidemment  de  cette  imité  d'or  qu'il  est  question  dans  le  papyrus  0  de  Leide  que 
Reuvens  avait  signalé  à  Letronne  et  que  M.  Leemans  a  publié  depuis. 

Ce  papyrus  contient  un  prêt  fait  en  l'an  26  de  Ptolémée  Alexandre  par  Cliououphis  à 
un  certain  Pétimoutli.  Pétimouth  reconnaît  avoir  reçu  12  drachmes  d'argent  monnayé  à  l'effigie 
des  Ptolémées  (apjjpioo  eizicr^iJ.o'j  llToXsi^-aïy.cu  voiJ.tc7[j,czT:;  cpayjj^ac;  osy.aouo),  intérêts  compris,  et  il 
s'engage  à  rendre  la  somme  dans  10  mois.  S'il  ne  paie  pas  au  terme  fixé,  il  devra  donner 
l'hémiolion  en  plus  (c'est-à-dire  en  tout  18  drachmes  d'argent)  et  il  ajoute  qu'il  paiera  de 
plus  l'intérêt  de  60  drachmes  de  cuivre  par  staûre  et  par  mois  à  partir  de  cette  époque.  Le 
statère  d'or  (deux  drachmes  d'or)  équivalait  k  20  drachmes  d'argent,  suivant  la  proportion 
établie  par  les  métrologistes  grecs,  et  le  capital  de  18  drachmes  en  était  peu  éloigné.  On 
comprend  donc  fort  bien  comment  on  a  fixé  ici  le  taux  de  l'intérêt  par  statère,  répondant 
comme  valeur  à  l'argenteus  égyptien',  c'est-à-dire  d'après  l'unité  de  compte  la  plus  proche. 
Il  en  aurait  été  tout  autrement  s'il  s'était  agi,  comme  le  pensait  Letronne,  de  grosses  pièces 
de  huit  drachmes  d'or,  pièces  qui  n'auraient  plus  eu  de  relations  directes  avec  la  somme  à 
réclamer,  M.  Leemans  a  donc  fort  bien  résumé  l'état  de  la  question  quand  il  dit  dans  son 
commentaire  du  papyrus  de  Leide  (sur  lequel  nous  reviendrons  plus  loin)  que  le  statère  en 
question  était  le  statère  didrachme  d'or,  valant  20  drachmes  d'argent  ou  2400  drachmes  de 
cuivre,  et  })roduisant  60  drachmes  de  cuivre  par  mois  au  taux  de  30  pour  100  par  an. 

Mais  avant  d'en  arriver  à  cette  question  de  l'intérêt  2,  il  faut  que  nous  en  finissions  avec 
le  statère  octodrachme  de  Letronne,  et  que  pour  cela  nous  examinions  les  rapprochements 
qu'on  a  faits  avec  certains  passages  de  Pollux. 

C.  Le  passage  de  Pollux  mentionné  par  Letronne. 

Le  passage  de  Pollux  sur  lequel  s'appuie  Letronne^  est  tout-à-fait  parallèle  au  passage  de 
Pollux  sur  lequel  s'appuie  M.  Mommsen^  pour  soutenir  la  même  thèse. 

L'un  de  ces  passages  est  ainsi  conçu  :  6  Bè  xpuioO;  oxy-xr^o  \jm5.v  -^Suva-o^.  L'autre  :  -qo'xta-o  Se 
xb  Toîi  ypuGÎou  xàXavTov  içiv.q  /pusoj;  'ATTr/.ouç  *'.  Quant  au  talent  de  3  /p'jîo'jç  ou  6  drachmes  athé- 
niennes, c'est,  par  rapport  à  l'or,  ce  qu'est,  par  rapport  à  l'argent,  le  talent  dont  parle  Diodore 
dans  le  passage  sur  les  poids  qui  a  été  reproduit  par  Hultsch  (p.  299  à  300).  Diodore  com- 
mence par  rappeler  que  le  talent  attique  contient  60  mines,  la  mine  100  drachmes,  la  drachme 
6  oboles,  etc.  Puis  il  ajoute  :  «C'est  le  talent  qu'on  nomme  maintenant  attique.  Mais  chez  les 
Siciliens  l'ancien  talent  était  de  24  nummus  et  le  talent  actuel  de  12  nummus.  Or  le  nummus 
vaut  trois  demi-oboles  o6vaia:  lï  5  vou|j,[j.oç  xpîa  Y;;j.ta)i3iX'.a  ^  »  —  Trois  hémioboles  font  V12  de 

train  de  rédiger,  notre  illustre  et  bien  regretté  numismate,  M.  de  Longpérier,  s'est  écrié  :  «Cela  est  certain. 
On  ne  peut  pas  admettre  d'autres  statères  d'or  que  le  statère  didrachme». 

'  C'était  d'ailleurs  d'après  l'argenteus  qu'on  calculait  toujours  en  égyptien  et  que  par  conséquent 
tous  les  taux  et  tous  les  tarifs  même  ceux  de  valeur  entre  les  métaux  étaient  rég'lés.  Nous  avons  ici  une 
simple  synonymie  grecque. 

2  A^'oir  plus  loin  au  4". 

2  Papyrus  du  Louvre,  p.  187. 

*  Histoire  de  la  monnaie  rqmanie,  édition  française,  t.  I,  p.  55. 

5  Conf.  Hultsch  282. 

6  Hultsch  281. 

■^  M.  MoMMSEN  (t.  I,  p.  104  et  suiv.)  explique  qu'on  nommait  nummus  la  grosse  litra,  mais  que  toutes 
les  litra  n'étaient  pas  des  nummus.    La  petite  litra  ne  se  nommait  pas  nummus  selon  lui  (la  petite  litra 


Seconde  lettre  sur  les  monnaies  égyptiennes.        59 


drachmes  attiques;  12  fois  V12  du  drachme  font  trois  drachmes;  24  fois  V12  fo"t  six  drachmes. 
Ainsi  le  talent  sicilien  que  Diodore  nomme  -0  xpyaizv^  était  de  six  drachmes  attiques  d'argent 
l)our  le  talent  d'argent,  et,  par  imitation,  de  six  drachmes  attiques  d'or  ou  trois  /puffo-jç  pour 
le  talent  d'or.  C'est  ce  talent  qui  avait  été  récemment  réduit  lorsqu'écrivait  l'auteur  reproduit 
par  Diodore,  sans  qu'aucune  modification  nouvelle  eût  été  alors  apportée  à  la  litra,  pièce  déjà 
très  petite  par  suite  de  réductions  nombreuses. 

Notons  que  le  comique  athénien  Philémon  dont  parle  M.  Mommsen  ',  comme  ayant  donné 
(entre  autres)  ce  témoignage  sur  le  talent  de  trois  /pusojç^  a  pu  le  faire  dans  son  ouvi-age 
intitulé  :  «le  sicilien»,  ouvrage  dans  lequel  il  parlait  également  des  litra  de  Sicile  (conf. 
HuLTscH,  p.  298  et  354).  Or  Philémon  vivait  vers  la  fin  du  iv^  siècle  et  au  commencement 
du  iii^  siècle  avant  Jésus-Christ,  bien  peu  temps  après  le  moment  où  Aristote  avait  décrit  une 
des  réductions  subies  par  la  litra.  Le  talent  le  plus  ancien  qui  ait  été  établi  sur  le  nummus 
dont  parle  Diodore  était  donc  celui  dont  les  Siciliens  faisaient  usage  au  temps  où  Philémon  place 
sa  comédie.  On  retrouve  la  même  équivalence,  toujours  à  propos  des  Siciliens,  (c.  X'.y.sA'.s-.)  dans  un 
passage  de  Pollux  ttcoI  T:xv.v,f,q  reproduit  p.  297  de  Hultsch,  et  dans  lequel  il  cite  l'expression 
~vt-yl:-çiz-/  employée  par  Sosicrate  dans  son  écrit  intitulé  r.j.^y:/.yhr;/:r^.  C'est  dans  cet  écrit  traité 
que  le  même  Sosicrate,  bien  évidemment  à  propos  du  même  pays,  parle  également  du  statère 
d'or  valant  une  mine  (Hultsch,  282).  Pour  que  le  statère  d'or  ait  valu  une  mine,  il  a  fallu 
qu'à  l'époque  en  question  le  nummus  sicihen,  la  litra,  ait  valu  20  fois  plus  qu'à  l'époque  qui 
précédait  l'auteur  reproduit  par  Diodore  et  que  celui-ci  nomme  ancienne  par  rapport  à  une 
réduction  évidemment  plus  récente.  Or  M.  Mommsen  (p.  113),  d'après  le  témoignage  d' Aristote, 
])arle  d'une  série  de  réductions  de  la  litra  qui  avaient  eu  lieu  antérieurement,  et  qui  avaient 
abouti  à  faire  «du  nummus  ou  litra  d'argent  une  pièce  de  10  litrae  de  compte».  M.  Mommsen 
ajoute  :  «Cette  proportion  de  10  litrae  de  compte  pour  une  litra  d'argent  subsistait  encore 
du  temps  d' Aristote.  »  Rien  ne  nous  prouve  qu'à  une  certaine  époque  de  l'histoire  ancienne 
de  Sicile  le  nummus  •'  n'ait  pas  eu  une  valeur  double  de  la  litra  d'argent  valant  10  litra  de 

valant  le  10*=  de  la  grosse  ou  du  nummus).  Malheureusement  le  texte  de  Diodore  est  formel  et  nomme 
nummus  les  trois  demi-oboles,  ce  qui  ne  permet  pas  l'explication  de  M.  Mommsen. 

La  litra  (trihémioboliou)  =  V4  d'une  drachme.  12  litra  =  3  drachmes.  120  litra  =  30  drachmes  d'argent 
ou  3  fb-achmes  d'or;  et  quand  il  fallait  le  double  de  litra  pour  faire  un  talent,  240  litra  égalaient  3  /pjaoj:. 
BoECK  a  trouvé  dans  les  inscriptions  120  litra  pour  un  talent.  Or  120  litra  feraient  un  talent  d"or  dans  les 
temps  récents  d'après  le  texte  de  Diodore  et  notre  explication,  pnisqiie  le  talent  d'argent  est  dix  fois 
moindre.  Quand,  ainsi  que  le  dit  Diodore,  il  fallait  24  litra  au  lieu  de  12  pour  le  talent,  240  litra  repré- 
sentaient 3  ypjGO-j:. 

1  «Philémon,  auteur  comique  d'Athènes  et  après  lui  les  gi-ammairiens  (voir  Pollux  IV,  173),  parlent 
s> souvent  d'un  talent  d'or  valant  trois  pièces  d'or  attique  ou  six  drachmes  d'or  de  la  même  monnaie;  or 
»  l'Egypte  se  trouve  être  le  seul  des  pays  en  relation  avec  Athènes  où  une  somme  put  être  indifféremment 
»  comptée  en  pièces  dor  ou  en  talents  de  cuivre:  de  plus,  les  historiens  et  les  inscriptions  attiques  de 
«l'époque  plus  récente  font  souvent  mention  des  pièces  d'or  et  de  cuivre  que  la  Grèce  tirait  de  l'Egypte. 
»I1  est  donc  tout-à-fait  probable  que  par  talent  d'or  l'auteur  veut  parler  ici  du  talent  de  cuiwe  évalué  en 

>  pièces  d'or.     Eustathe  qui  en  parle  l'appelait  talcTit  macédonien  et  ces  deux  locutions  s'accordent  parfaite- 

>  ment,  puisque  c'est  du  talent  des  Lagides  qu'il  s'agit.  »  (Mommsen,  Histoire  de  la  monnaie  romaine,  t.  I,  p.  55.) 
Voir  plus  loin  notre  réponse  à  ces  deux  arguments  de  M.  Mommsen. 

2  Voir  Hultsch,  p.  354,  20  :  zo  TaXavtov  -/.«Ta  to-j;  -aÀs'iol);  yp-jo-ou;  e;/î  tosî";.  o-.o  zal  «PtXïjjxcov  o  y.coaty.ô; 
çr,3t  •  o-jo  £t  Àst^oi  TaXavTa,  -/pudouç  'èÇ  lycov  à-ot'CT£Tai. 

2  En  effet,  quand  on  nommait  le  niimmus  décalitron,  ce  décalitron  était  aussi  assimilé  à  un  statère 
de  Corinthe.  Or  le  statère  de  Corinthe  équivaut  comme  poids  à  un  didrachnie  attique  de  l'ancienne  époque 


60  Eugène  et  Victoe  Revillout. 


compte,  que  par  exemple  la  pièce  de  Corintlie  assimilée  plus  tard  à  un  décalitrou  ue  l'ait 
pas  été  d'abord  à  ce  pentalitron  dont  Sosicrate  nous  a  gardé  le  nom.  Aussi  Hultsce,  t.  II, 
p.  197,  dit-il  que  le  passage  :  h  '/pj^oO;  axavr,p  [j.vàv  -^ojvaTC  se  rapporte  probablement  à  la 
monnaie  sicilienne  :  «An  de  Siculis  agitur»,  absolument  comme  le  talent  équivalant  à  3  ypuaoj;'. 
En  effet,  selon  Polémarque  (Hultsch,  307,  3)  le  xpuc^cuç  est  égal  à  2  drachmes  d'or,  la 
drachme  d'or  à  10  drachmes  d'argent,  cinq  /purou;  valent  une  mine  d'argent  et  100  drachmes 
forment  une  mine  :  ô  Sa  ypusou;  7:ap'  'Atti7.oÏ;  SûvaTai  opa/jj.àç  eue,  wç  noXcjxapyoç  çr,ci  •  Spa/p.Y)  Sa  tou 
yp'jscO  voiJ.'.^[j.y.'oç  àç^upiou  opa/jj-à;  Béy.a  •  [j.vàv  oè  AeYCUjt  xouç  tïÉvts  -/pucouç  •  sy.aTîv  opa/y-al  TrotoOsi 
[j.vàv  [j.(av.  Les  mêmes  renseignements  se  retrouvent  dans  plusieurs  autres  sources  métrologiques 
(voir  Hui/rscH,  p.  328,  16 — 17,  311  et  335,  etc.).  Il  ne  peut  y  avoir  à  ce  sujet  l'ombre  d'un 
doute,  et  quand  Pollux,  dans  le  passage  déjà  cité,  (Hultsch,  297,  18)  a  dit  :  5  §è  /pysouc  c-atv;p 
oùo  Ti^z  opy.yiJ.'y.ç  A-T'.y.aç,  -cb  oè  -ïâXxv-cv  tpsT;  /pucoj;,  c'est  par  suite  d'une  de  ces  confusions  qui 
ne  lui  sont  que  trop  habituelles.  Il  en  est  de  même  dans  plusieurs  autres  passages,  notam- 
ment dans  celui  qui  se  trouve  p.  281  de  Hultsch.  Pollux,  avec  son  manque  absolu  de  critique 
et  de  connaissances  vraiment  numismatiques,  ayant  trouvé  dans  les  auteurs  d'une  part  le 
talent  d'or  des  Siciliens  à  trois  /pjjo'j;,  d'une  autre  part  le  talent  proprement  dit  d'argent 
attique  à  60  mines,  les  a  faits  rentrer  dans  le  même  système  monétaire,  en  disant  :  •^oûva-o 
os  -0  TO'j  yp'jsîo'J  xàXav-ov  xpei:;  /p'jcouç  A~'.7.o'j;,  xb  0£  tou  àpY'jcîou  è^-^^y.ovxa  [xvà';;  'ÂTi'.y.aç.  Ce  passage 
de  Pollux  a  été  reproduit  dans  la  collection  grecque  dite  de  Bernard'^  (Hultsch,  306,  23), 
qui  quelques  lignes  plus  loin^  donne  la  vraie  proportion.  Tout  Pollux  est  tissu  de  confusions 
de  ce  genre,  comme  nous  avons  déjà  eu  l'occasion  de  le  voir  à  propos  du  talent  égyptien 
de  1500  unités.  Il  faut  toujours  se  rappeler  qu'on  a  affaire  à  un  grammairien  et  faire  la 
distinction  critique  de  ses  sources  \  En  ce  qui  touche  la  question  qui  nous  occupe,  M.  Hultsch 
nous  paraît  avoir  dit  le  dernier  mot,  en  ramenant  à  son  point  de  départ  sicilien  les  indications 
numismatiques  que  Letronne  et  M.  Mommsen  voulaient  rattacher  à  l'Egypte. 

Ce  qui  est  certain  c'est  que  Philémon  n'a  pu  faire  allusion  au  talent  de  cuivre  égyptien, 
comme  le  dit  M.  Mommsen;  car  le  talent  de  cuivre  égyptien  n'existait  pas  à  l'époque  où  il 
écrivait,  c'est-à-dire  du  temps  de  Soter  et  de  Philadelphe.  Nos  papyrus  grecs  et  démotiques 
prouvent  en  effet  d'une  façon  indubitable  que,  de  Soter  à  Philopator,  l'étalon  en  usage  était 
l'étalon  d'argent  et  qu'à  cette  époque  le  cuivre  ne  s'employait  que  pour  les  monnaies  divi- 
sionnaires de  la  drachme.  C'est  seulement  Philopator  qui  a  permis  de  payer  en  cuivre  les 
sommes  supérieures  à  la  drachme,  et  ses  successeurs  Épiphane,  Philométor,  Evergète  qui  ont 
définitivement  substitué  l'étalon  de  cuivre  à  l'étalon  d'argent.    L'explication   de  M.  Mommsen 

(8  g-r.  60  et  plus)  et  la  monnaie  la  plus  fréquente  de  Sicile  parmi  les  plus  anciennes  pèse  comme  le  tétra- 
drachme  attique  de  la  même  époque,  c'est-à-dire  le  double.  Il  est  assez  probable  que  c'était  l'ancienne 
monnaie  par  excellence,  l'ancien  nummus. 

1  Page  218  du  même  volume  Hultsch  corrige  aussi  Ma/.eoovt/.ov  en  StzsXi/.ov  dans  le  passage  précé- 
demment cité  par  M.  Mommsen  et  relatif  au  talent  (sicilien  et  non  macédonien)  valant  3  pièces  d'or. 

2  rjô'jvaTO  oà  tou  ypuufou  xb  xâXavxov  xpsî;  ypuaoij;  'Axxix.oûç  "  xo  oe  xou  àpyupfou  sÇ^y.ovxa  avà;  'ATXixâç. 

3  0  ôk  ypudouç  7:ap'   'Axxf/.ot;  Sûvaxai  8pa)([j.àç  oio,  etc.  (Voir  plus  haut.) 

■•  Le  regretté  M.  Boucherie,  dont  mon  frère,  le  professeur  Ch.  Revillout,  a  eu  récemment  à  faire 
l'éloge  à  la  Faculté  de  Montpellier,  a  fort  bien  mis  en  lumière  ce  caractère  extra-scientifique  et  inintelli- 
gent de  Pollux. 


Seconde  lettre  sur  les  monnaies  égyptiennes.  G1 

se  heurte  donc  contre  un  anachronisme,  et,  si  ion  croit  positives  les  données  de  Philémou,  on 
doit  songer  à  la  monnaie  sicilienne  comme  pour  Pollux. 

Il  est  vrai  qu'on  peut  recourir  encore  à  une  autre  explication. 

Le  passage  écourté  de  Philémon  (donné  par  Didot,  Poètes  grecs,  fragment  91,  p.  129 
d'après  YEtymol.  magnum)  signifie  :  «S'il  a  pris  un  talent,  il  sera  porté  en  compte  comme 
ayant  ti'ois  ypucsuç.  »  Or  il  est  à  remarquer  que  trois  /pjsoj;,  équivalant  à  60  drachmes  d'argent, 
font  juste  le  centième  d'un  talent  de  6000  drachmes.  Le  comique  Philémon,  sans  doute  repro- 
duit de  seconde  main  par  \ Eiymologicum  magnum,  n'y  a-t-il  pas  été  mal  compris?  Ne  s'agit-il 
pas,  non  d'une  évaluation  du  talent  en  /putrcuç  (ce  qui  ne  signifierait  rien,  à  ce  qu'il  semble), 
mais,  comme  trait  de  mœurs,  d'une  faveur,  consistant  à  n'être  porté  que  pour  le  centième  de 
ce  qu'on  a  pris  (par  quelqu'un  de  trop  bien  intentionné  à  l'égard  du  débiteur).  Le  passage 
de  Philémon  aurait  alors  un  tout  autre  sens  que  celui  qu'on  lui  attribue.  Il  se  rapporterait 
tout  simplement  au  népotisme,  plaie  sociale  de  tous  les  temps. 

En  tout  cas,  grâce  à  nos  textes  contemporains  grecs  et  démotiques  si  précis,  nous  savons 
à  quoi  nous  en  tenir  sur  les  questions  monétaires  de  la  vallée  du  Nil. 

L'Egypte  n'a  connu  ni  le  talent  de  trois  /pusojc,  ni  le  xpjjojç  z-.y-r^z  équivalant  à  la  mine. 

On  ne  peut  donc  plus  songer  au  statère-octodracbme  d'or,  puisque  nous  avons  déjà  vu 
que  le  •)o\j.>.z\ja  jj.vae-.sv  xpjs'.cu  szisrdj.sj  du  papyrus  de  Paris  représentait  une  très  petite  monnaie 
d'or,  équivalant  à  une  mine  de  cuivre  et  qui  n'avait  aucune  analogie  avec  le  statère  ou 
didrachne  d'or  du  papyrus  de  Leide.  En  réalité,  le  mot  statere  était  dès  l'origine  un  synonyme 
du  mot  sekel,  et  comme  on  distinguait  primitivement  dans  le  système  assyro-médique  deux  Sp'^I?  '  : 
1°  le  bp*\2J  faible  (de  8  grammes  40),  soixantième  de  la  mine  faible;  2"  le  bpti?  fort  (pesant 
entre  16  et  17  grammes),  soixantième  de  la  mine  forte,  —  on  distingua  par  la  suite  deux 
statères  :  1°  le  statère  faible  ou  darique  d'or  ou  didrachme  d'or;  2°  le  statère  fort  ou  tétra- 
drachme  d'argent.  Ce  sont  les  seuls  types  de  statères  dont  parlent  les  métrologistes  anciens 
et  ils  en  parlent  tous  avec  un  ensemble  admirable.  On  ne  peut  en  admettre  d'autres.  Dans 
le  monde  grec  le  statère  d'or  fut  normalement  un  sekel  faible,  c'est-à-dire  un  didrachme,  et 
le  statère  d'argent^  un  sekel  fort,  c'est-à-dire  un  tétradrachme,  depuis  que  la  darique  d'or  avec 
sa  division  par  2,  étant  reproduite  dans  le  monnayage  néo-attique  et  d'Alexandre,  fût  devenue  le 
prototype  du  monnayage  de  l'or  et  de  l'argent  3.  Seulement  lorsque  la  drachme  vint  à  varier 

'  Voir  plus  haut  {Revue,  2®  année,  p.  177  et  suivantes)  mon  article  intitulé  :  Poids  némitico-égyptiens. 

2  Notons  que  le  statère  cVargent  de  Corinthe  répondait  au  side  faihle  et  non  au  sicle  fort.  Son  poids 
était  à  peu  prés  celui  du  didrachme  attique,  et  cependant  les  anciens  le  nomment  stath-e  de  Corinthe.  Ce 
statère  se  di^isait  par  3  dans  la  monnaie  du  pays.  Pourtant  il  existe  dans  la  collection  de  Paris  une  pièce 
pesant  4  gr.  15,  et  qui  paraît  la  moitié  du  statère  de  Corinthe  de  8  gr.  40.  Cette  pièce  porte  au  droit  une 
chimère  comme  d'autres  pièces  qui  portent  au  revers  le  pégase  de  Corinthe.  Mais  aucune  pièce  de  Corinthe 
n'a  les  initiales  de  cette  ville. 

3  Dans  notre  article  sur  les  poids  sémitico-égyptiens  (p.  177  et  suiv.)  nous  avons  dit  qu'autre  était 
le  système  persan.  Le  sicle  d'or  de  8  gr.  40,  formant  le  ec  de  la  mine  faible  babylonienne,  y  était  en  parallèle 
avec  le  sicle  d'argent  de  5  gi-.  60,  formant  le  90*=  de  la  même  mine.  Avec  la  proportion  de  1  à  13  ('/g)  indiquée 
par  Hérodote  entre  l'or  et  l'argent  perses,  la  pièce  d'or  équivalant  en  poids  au  60*=  de  la  mine  babylonienne 
coiTCspondait  exactement  comme  valeur  à  20  pièces  d'argent  dont  chacune  pesait  le  90^  de  cette  même  mine. 
Mais  dans  le  monde  grec  la  proportion  de  l'or  et  de  l'argent  était  autre  :  de  1  à  10  (suivant  tous  les  anciens 
métrologistes,  que  l'étude  des  monnaies  appuie).  Tout  en  ayant  des  monnaies  d'or  de  même  valeur  que  la 
darique  dans  le  monnayage  néo-attique,  on  fit  donc  frapper  d'après  cette  proportion  les  monnaies  d'or  et 
celles  d'argent,  devenues  pleinement  isonomes.  Seulement  l'unité,  sekel  ou  statère,  fut  un  didrachme  ou  sekel 


62  .  Eugène  et  Victoe  Revillout. 


dans  certaines  contrées,  les  statères  suivirent  ordinaii-ement  la  même  fluctuation.  En  Egypte, 
par  exemple,  le  didrachme  ou  statère  d'or  tomba  à  un  peu  plus  de  7  gr.  26  et  le  sekel  ou 

faible  pour  l'or  et  im  tétraclrachme  ou  sekel  fort  pour  l'argent.  Ces  deux  statères  étaient  comme  valeur 
dans  la  proportion  de  1  à  5,  de  même  que  l'argeuteus  et  le  sekel  démotique.  On  les  retrouve  dans  le  monnaj-age 
attique  et  dans  le  monnayage  d'Alexandre.  Ou  peut  donc  dire  que  les  anciens  Grecs  possédaient  également 
comme  valeurs  l'argenteus  et  le  sekel,  aussi  bien  que  les  Égyptiens  de  l'époque  lagide.  Quant  à  l'argeuteus 
d'argent,  que  l'on  appelait  aussi  argenteus  de  Ptah,  nous  le  retrouvons  —  nous  venons  de  le  constater  —  dans 
les  textes  d'époques  persane  et  même  antérieure  aux  Persans  (sous  Amasis  par  exemple),  aussi  bien  que  dans 
les  textes  contemporains  des  Ptolémées.  C'est  probablement  lui  qui  aura  servi  de  modèle  à  Sotcr  (ou 
Philadelphe),  lors  de  la  grande  réforme  monétaire  de  l'Egypte.  On  aura  réduit  le  tétradrachme  de  manière 
à  ce  qu'il  formât  le  5"  de  la  valeur  de  l'argeuteus,  comme  le  tétradrachme  attique  ou  statère  d'argent 
formait  (avec  la  proportion  grecqiie  de  1  à  10)  le  5*  de  la  valeur  du  didrachme  ou  statère  d'or  du  même 
monnayage.  Dans  le  monnayage  alexandrin,  avec  les  poids  isonomes  de  l'or  et  de  l'argent  et  la  même 
proportion  grecque  de  1  à  10,  le  nouveau  didrachme  ou  statère  d'or  se  trouve  également  répondre  à  l'argeu- 
teus d'argent.  En  était-il  de  même  à  l'époque  persane  et  la  darique  d'or  équivalait-elle  alors  à  l'argeuteus? 
Cela  est  au  moins  douteux.  Si  on  l'admettait,  il  faudrait  croire  que  l'argenteus  (qui  d'après  les  équivalences 
des  monnaies  lagides  devait  peser  entre  71  et  73  grammes)  était  avec  la  darique  d'or  de  8  gr.  40  dans  la 
proportion  de  8  2; 3  à  1.  Ce  rapport  serait  celui  de  l'argent  à  l'or  en  Egypte,  tandis  qu'à  la  vième  époque  le 
rapport  entre  l'argent  et  l'or  était  certainement  en  Perse  de  1  à  13 '/j  et  en  Grèce  (ou  à\i  moins  dans  le 
monde  attique)  de  1  à  10.  Jean  Baptiste  Say  évaluait  le  rapport  de  l'or  à  l'argent  de  8  à  1  au  Japon,  de 
12  à  1  en  Chine,  de  15Y2  à  1  en  France,  de  lû^/g  à  1  au  Mexique,  etc.  A  la  rigueur  la  proportion  égj-ptienue 
ancienne  de  1  à  8-/3  ne  serait  donc  pas  invraisemblable-,  car  les  Égyptiens  ont  eu  de  tout  temps  beaucoup 
plus  d'or  que  d'argent.  Ils  possédaient  des  mines  d'or  en  Nubie  et  c'était  en  Egypte  qu'aboutissait  le  com- 
merce de  la  poudre  d'or  venant  du  Soudan,  etc.  (tandis  que  les  Athéniens  avaient  leurs  mines  d'argent  du 
Laurium).  L'unité  d'argent  (suivant  ce  système,  tout  différent,  sous  ce  rapport,  du  système  perse  et  du 
système  attique,  mais  tout  aussi  logique)  aurait  été  également  de  même  valeur  que  l'unité  d'or.  Mais  nous 
venons  de  dire  que  l'argenteus  de  Ptah  existait  avant  les  Perses  et  que  le  satrape  Aryandés  n'a  pu  qu'y 
mettre  temporairement  sa  marque  lorsqu'il  fondit  en  Egypte  les  grosses  pièces  d'argent  qui  —  selon  Hérodote  — 
lui  attirèrent  l'inimitié  du  roi  Darius.  Il  n'y  a  donc  aucune  nécessité  à  admettre  une  proportion  régulière 
entre  les  monnaies  persanes  d'or  et  les  monnaies  égyptiennes  d'argent.  Le  mécontentement  du  grand  roi 
pour  un  système  monétaire  satrapique  différent  du  sien  s'expliquerait  ainsi  tout  aussi  bien  que  son  in- 
difl'érence  en  ce  qui  concernait  une  monnaie  fiduciaire  de  temple.  Quant  aux  prêtres  de  Ptah,  il  est  tout 
naturel  de  penser  qu'ils  n'avaient  pas  rectifié  leurs  pièces,  d'ailleurs  antérieures,  d'après  le  cours  égyptien,  en 
sorte  qu'elles  pussent  correspondre  comme  valeur  à  la  pièce  royale  ou  darique  d'or  (pas  plus  qiie  les  Egyptiens 
contemporains  du  papyrus  hiératique  de  M.  Chabas  n'avaient  sans  doute  calculé  l'isométrie  pondérale  des 
pièces  d'or  et  d'argent,  isométrie  qui  nous  donnerait  la  proportion  de  3  à  5  entre  l'or  et  Targent).  Ce  qui  semble 
prouver  pour  l'époque  persane  cette  dernière  opinion  de  non-isométrie,  c'est  que,  comme  nous  l'avons  dit, 
le  papyrus  démotique  darique  de  M.  Goléxischeff  donne  séparément  l'addition  des  argenteus  et  des  aureus 
au  lieu  d'en  faire  un  seul  total,  comme  il  aurait  dû  le  faire  si  l'argenteus  avait  alors  répondu  en  valeur 
à  la  darique  d'or  (ou  aureus). 

Disons  quelques  mots  de  ce  curieux  document.    Le  texte  est  peu  facile.    Outre  le  mauvais  état  du 

papyrus,  la  principale  difficulté  consiste  dans  l'acception  d'un  mot  :  le  mot  ^ c.  Ce  mot  sous  la  forme 

Tû>^  signifie  en  copte  :  «établir»,  acception  que  nous  trouvons  aussi  parfois  en  démotique.  En  hiéroglyphes, 

au  contraire,  (voir  Brugsch,  suppl.  au  lexique,  1340)  signifie  separare,  separari.    Il  se  rapproche 

D  I  s\  T» û 

aussi  de  s, o  (copte  noiuj)  qui  partout  veut  dire  :  «partager». 

(—2—1  n  i*^*-^  n 

Si  l'on  admet  la  première  explication  (vers  laquelle  je  penche  à  cause  des  synonymes    I  a   et 

AH     _  n\  I       AA^AAA    IJ 

Y  ),  ou  aurait  affaire  à  un  inventaire  de  temple  tout-à-fait  analogue  à  ceux  que  nous  trouvons  dans 

le  Corpus  insc.  c/rœcarum,  et  contenant  rénumération  des  objets  précieux  du  sanctuaire,  ainsi  que  des  sommes 
en  argent  qui  y  avaient  été  apportées  soit  en  don,  soit  en  dépôt.  Si  l'on  admet  la  seconde  explication,  au 
contraire,  il  s'agirait  de  sommes  que  les  prêtres  auraient  partagées.  Dans  tous  les  cas,  les  indications  que 
contient  notre  papyrus  sur  le  numéraire  en  usage  sous  Darius  en  Egypte  sont  des  plus  intéressantes. 

Voici  la  contexture  générale  du  document  : 

La  première  colonne  actuelle  débute  ainsi  : 

«Sont  les  comptes  de  Tor  et  de  l'argent  qu'a  reçu  le  sanctuaire  du  temple  d'Hor-merti  pour  les 


Seconde  lettre  sue  les  monnaies  égyptiennes.  63 


statère  d'argent  à  14  gr.  53  environ.  Le  statère  dor  équivalait  alors  comme  valeur  à  l'argen- 
teus  ;  et  le  statère  d'argent  i  que  les  papyrus  ptolémaïques  nomment  également  '^  était  le  sekel 
démotique  égyptien.  C'est  ce  deniier  sekel  qui  représentait  le  statère  pondéral,  dont  la  pesée 

facrions  I  j  de  l'établissement  (recoleinent)  ou  du  partage  ( ^ z\  quou  a  fait  en  Méchir » 

Le  reste  du  titre  est  en  trop  mauvais  état  pour  être  déchiffré.  Nous  vojons  seulement  répéter  à  la  tin  le 

Cl 

«  ^ û  de  Méchir». 


Vient  ensuite  le  texte  suivant  : 

"tNous  donnons  leur  énumération  : 

«.  .  .  .  d'or  72  eu  aureus  145 

'(reii  d'or  (aureus)  52 

"i-eti (aureus)  25 

«  Herutai  4  i  conf.     '  ^     I    vases)  (aureus)  1 3 

«Argenteus  eu  argent  1350 

tA  l'eporter  : 

-^  Aureus  235 

<argenteus  1350.» 

Les  aureus  145  -}-  52  -j-  25  -{-  13  =  235,  et  les  1350  argenteus  sont  comjjtés  à  part. 

La  deuxième  colonne  contient  dabord  le  titre  suivant  : 

«Ceux  qu'on  a  établis  (  A  V  \  —  rt^oe,  dans  le  sanctuaire  de  Hor-merti  en  l'an  43  du  roi  Darius, 

toujours  vivant,  paophi. 

<Les  ont  établis  il  r  1)  ^^®  prêtres  de  Hor  merti  :  à  savoir  :  les  aureus,  les  argenteus :» 

Après  cela  venaient  trois  lignes  et  demie  dont  une  déchirure  du  papjrus  nous  a  enlevé  la  plus  giande 

Ci 

partie.  On  distingue  encore  dans  la  dernière  le  mot  s,       r_  Puis  tiennent  les  alinéas  suivants  : 

I   s\   I  ^  \ 

«An  3,  Choiak,  les  aureus,  les  argenteus  qu'ont  établi  (en  dépôt  ou  divisé  s a]  les  prêtres 

I    vv    I  / 

d  Hor  merti  .... 

«Nous  donnons  le  nom  des  prêtres  qui  les  ont  établis  l'ou  di\isés  s cl.» 

Après  cela  tiennent  effectivement,  dans  une  série  d'alinéas  distincts,  les  noms  d"nn  grand  nombre 
de  personnages,  noms  toujours  siii\is  de  celui  du  père  de  chacun  d'eux  et  d'un  chiffre  d'argenteus  ou  d'aureus. 
L'un  est  marqué  pour  45  aureus,  un  autre  pour  7  aureus,  un  autre  pour  5  aureus,  un  autre  pour  2  argenteus, 
un  autre  pour  2  aureus  et  '/,(,,  un  autre  pour  5  aureus,  un  autre  pour  50  argenteus,  un  auti'e  pour  20  argen- 
teus, un  autre  pour  5  aureus,  un  autre,  à  lui  seul,  pour-  30  argenteus  et  3  aureus  et  ^/jq. 

Ces  mentions  de  3  aureus  et  7in,  2  aureus  et  '/jo  sont  surtout  fort  intéressantes;  car  elles  montrent 
que  l'aureus  ou  darique  d'or  avait  déjà  son  >pr  ou  drachme  d'or.  Les  ^  jo  d'aureus  ou  de  darique  corres- 
pondent à  une  monnaie  que  nous  connaissons  bien  :  la  monnaie  de  Tyr  et  de  Cithium  de  cette  époque 
même.  Si  l'on  admet  l'explication  d'un  établissement,  c'est-à-dire  d'un  apport  fait  au  temple,  la  première 
liste  contient  des  objets  donnés,  puisqu'aucun  nom  pi'opre  n'intervient,  tandis  que  la  seconde  pouiTait  con- 
cerner des  dépôts  que  pouvaient  réclamer  ceux  dont  les  noms  étaient  indiqués  sur  l'inventaire. 

En  ce  qui  touche  la  première  liste,  nous  remarquerons  que  les  72  premiers  objets  d'or  mentionnés, 
s'ils  représentaient  des  valeurs  monétaires,  répondaient  à  des  sekels  forts  (voir  Revue,  IP  année,  p.  183) 
doubles  de  la  darique  ou  sekel  faible  d'or  ou  aureus  (car  la  darique  est  l'unique  pièce  d'or  frappée  de  ce 
temps  qu'on  pouvait  mettre  en  parallèle  avec  l'argenteus).  Quant  aux  Herutai,  ils  valent  dans  ce  compte  un 
sekel  fort  et  demi  ou  3  dariques.  tandis  que  les  reti  d'or  seraient  trop  légers  pour  équivaloir  dans  aucun 
cas  à  des  outen,  puisqu'ils  correspondent  à  52  des  mêmes  aureus.  Il  s'agit  alors  d'objets  d'or  encore  incon- 
nus et  ayant  les  poids  indiqués. 

D'une  autre  part  l'aureus  se  retrouve  dans  le  roman  de  Setna,  (rédigé  sous  les  Ptolémées.)  en  même 
temps  que  l'argenteus.  Mais  l'auteur  pensait  sans  doute  au  statère  d'or  ou  /j; jjoj;  ptoléma'ique  ;  et  non  à 
des  monnaies  réellement  existantes  du  temps  de  Ramsès  II  —  moment  choisi  pour  l'intrigue  du  roman 
(voir  Setna,  p.  23  et  127  de  mon  édition).  Dans  l'un  de  ces  passages  il  est  question  de  dix  aureus,  dans 
l'autre  de  cent  argenteus.  Si  l'on  voyait  dans  l'aureus  et  l'argenteus  des  monnaies  de  même  poids,  ces  deux 
sommes  seraient  absolument  équivalentes  avec  la  proportion  ptoléma'i'que  de  1  à  10  entre  l'or  et  l'argent. 

'  Papyrus  gi-ec  60  de  l'édition  académique,  1.  32  :  xz---jp.oj  sTa-rro-ov  .  .  . 


64  Eugène  et  Victoe  Revillout. 


se  retrouva  dans  certaines  pièces  de  cuivre  '  quand  on  imita  en  chalques  les  types  pondéraux 
des  grosses  monnaies  d'argent,  y  compris  l'argenteus  de  Ptali  (devenu  obole  en  cuivre)  -.  Mais 
les  deux  seuls  statères  ^  monétaires  véritables  étaient  les  deux  sicles,  faible  et  fort,  c'est-à-dire 
le  didrachme  d'or  et  le  tétradracbme  d'argent  ^,  et  il  faut  définitivement  renoncer  aux  autres 
types  de  statères,  inventés  par  les  modernes-^. 

Quant  au  statère  d'argent,  on  ne  peut  y  songer  pour  le  papyrus  de  Leide  ;  car,  suivant 
la  calcul  de  M.  Lumbroso,  ce  statère  d'argent  nous  ramènerait  au  taux  d'intérêt  de  Reuvens  *^, 
taux  inadmissible,  de  120  d'intérêt  pour  100  de  capital  par  an,  ou  même  en  réalité  de  150 
pour  100.  Il  faut  donc  nécessairement  nous  arrêter  encore  au  statère  ou  didrachme  d'or. 

Ceci  nous  force  à  examiner  rapidement  la  question  du  taux  de  l'intérêt,  la  seule  des 
bases  de  M.  Letronne  que  nous  n'ayons  pas  étudiée  dans  cette  lettre. 

D.  Le  taux  de  V intérêt. 

Nous  avons  déjà  vu  dans  notre  commentaire  du  papyrus  XIII  de  Turin  (voir  p.  134 
et  suiv.)  que  l'intérêt  était  beaucoup  plus  élevé  en  Egypte  que  ne  l'avait  pensé  Letronne. 
Cet  intérêt  était  légalement  de  30  pour  cent  et  non  de  12  pour  cent.  Nous  citerons  seulement 
pour  mémoire  quelques-uns  des  chiffres  déjà  relevés  par  nous.  L'un  des  textes  les  plus  clairs  est 

1  Papyrus  C  de  Leide,  2^  col,  1.  13,  p.  118  de  l'édition  Leeiuans  :  /aX/couç  <j-:aTrjp£'.r,ojç. 

2  Selon  tous  les  traités  gréco-romains  relatifs  aux  poids,  l'once  pondéral  équivaut  à  2  statères,  le  statère 
(moitié  de  l'once)  à  2  didrachmes  et  4  drachmes  (voir  Hultsch,  p.  228,  231,  285,  237,  245,  253,  255,  265,  268, 
274,  276,  278,  etc.).  Les  textes  métrologiques  relatifs  aux  monnaies  lui  donnent  2  drachmes  s'il  s'agit  de  l'or 
(et  l'identifient  alors  à  la  darique  et  aii  /puaou;),  et  4  drachmes  s'il  s'agit  de  l'argent.  Voir  Hultsch,  283, 
294,  303,  304,  305,  307,  315,  325,  326,  331,  335,  342,  etc.  Le  atx.Xo;  suit  les  mêmes  vicissitudes.  Notons 
cependant  que  si  le  sicle  pondéral  est  plus  souvent  le  tétradrachme,  il  était  parfois  aiissi  le  didrachme. 
C'était  alors  du  vieux  poids  hébreu  bpiy  qu'on  voulait  parler.  Le  sicle  tétradrachme  ou  sicle  fort  adopté 
universellement  depuis  la  réforme  ptolémaïque,  tant  en  Egypte  qu'en  Syrie  et  en  Inde,  était  le  seul  sicle 
dont  on  continuât  à  se  servir  comme  poids  et  comme  monnaie  d'argent  (voir  notre  article  Sur  les  poids 
sémitico-ériupliens,  et  conf.  Hultsch,  p.  231,  245,  265,  268,  275,  305,  325,  etc.). 

3  C'est  comme  équivalant  au  sicle  que  le  CTiar/)p  est  considéré  par  les  anciens  comme  barbare  (Hultsch, 
331).  Car  le  mot  est  grec  (conf.  Hultsch,  353). 

*  Le  statère  d'argent  est  mentionné  dans  un  papyrus  grec  ptolémaïque  de  la  première  période  lagide 
que  nous  allons  publier,  je  veux  parler  des  comptes  du  navire.  —  Quant  à  la  mention  du  statère  que  l'on 
avait  cru  trouver  dans  la  circulaire  des  finances  (n°  62  de  la  publication  académique),  et  qui  nous  donnerait 
une  évaluation  intéressante,  elle  résulte  d'une  fausse  lecture.  Le  texte  porte  CuTTjpaç  et  non  atairipa;. 

^  M.  Lumbroso  a  voulu  dernièrement  partir  de  la  supposition  de  Letronne  pour  le  statère  octo-drachme 
d'or,  et  il  a  supposé  par  imitation  un  statère  octo-drachme  d'argent.  C'était  bâtir  sur  le  sable.  M.  Lumbroso 
a  néanmoins  cru  trouver,  d'après  cela,  et  la  proportion  de  1  à  125  et  l'intérêt  de  60  pour  100  dans  le  papyrus 
de  Leide.  Mais  ce  calcul  ne  peut  tenir  et  les  autres  arguments  qu'il  apporte  pour  sa  thèse  rentrent  tous 
beaucoup  mieux  dans  notre  intérêt  de  30  pour  100,  ainsi  que  nous  l'avons  déjà  prouvé,  et  que  nous  l'éta- 
blirons encore  (voir  Lumbroso,  p.  173). 

6  Reuvens  part  pourtant  d'une  bonne  base.  Il  dit,  comme  Leemans,  qu'il  est  question  du  statère 
didrachme  d'or.  Seulement  il  s'est  laissé  égarer  par  la  proportion  de  1  à  30  qu'avait  proposée  Peyron  entre 
l'argent  et  le  cuivre.  Pour  Eeuvens,  «il  est  de  toute  probabilité  que  le  statère  d'or  en  Egypte,  comme 
d'ailleurs  en  Grèce,  pesait  deux  d'-achmes  et  avait  une  valeur  de  vingt  drachmes  d'argent,  et  ici  il  serait 
peut-être  l'équivalent  du  prêt  combiné  avec  la  peine  stipulée  en  sus  ou  18  drachmes  d'argent.  Suivant  le 
rapport  de  1  à  30,  proposé  par  M.  Amédée  Peyron  entre  la  monnaie  d'argent  et  celle  de  cuivre,  Reuvens 
en  arrive  à  un  capital  fictif  de  600  drachmes  de  cuivre  au  denier  dix  (60  drachmes  de  cuivre)  par  mois 
ou  à  raison  de  120  pour  cent  par  an!»  (Voir  Lumbroso,  p.  172.)  M.  Leemans,  partant  du  même  statère,  a 
fort  bien  rétabli  ce  calcul,  en  adoptant  le  rapport  proposé  par  Bernardino  Peyron  de  l  à  120  entre  l'argent 
et  le  cuivre,  ce  qui  fait  2400  drachmes  de  cuivre,  donnant  60  drachmes  par  mois  et  720  par  an,  ou  le  30 
pour  cent. 


Seconde  lettre  sue  les  monnaies  égyptiennes.  65 

celui  du  papyrus  2443  du  Louvre,  daté  de  Méchir  de  l'an  36  de  Philadelphe  et  qui  porte  : 
«Tu  as  trois  argenteus,  en  sekels  15,  eu  argenteus  3  en  tout,  à  me  réclamer  au  nom  des 
»  argenteus  que  tu  m'as  donnés.  Que  je  te  donne  5  argenteus  et  7  dixièmes,  en  sekels  28  et 
»  demi,  en  argenteus  5  et  7  dixièmes  en  tout,  pour  cela,  en  l'an  39,  le  30  Tybi,  c'est-à-dire  en 
»ti'ois  ans  ou  36  mois.»  —  «Il  est  facile  de  constater  que  l'intérêt  annuel  de  15  sekels  à  30 
pour  cent  est  4  sekels  et  demi,  ce  qui  fait  en  trois  ans  13  sekels  et  demi,  total  28  sekels  et 
demi,  puisque  les  intérêts  des  intérêts  étaient  interdits  en  droit  égyptien'  comme  en  droit 
romain  et  en  droit  français». 

«  C'est  exactement  le  taux  que  M.  Leemans  a  tixé  d'après  le  papyrus  grec  0  de  Leide, 
c'est-à-dire  d'après  le  texte  même  qui  fournissait  à  31.  Letronne  le  taux  de  12  pour  cent. 
Dans  ce  document,  Chonouphis,  fils  de  Petèsis,  prête  à  Petimouth,  fils  d'Horus,  12  drachmes 
d'argent  (intérêts  compris).  Si  au  teime  de  10  mois  Petimouth  ne  paie  pas,  il  devra  en  outre 
l'hémiolion  et  l'intérêt  sera  ensuite  par  mois  à  60  drachmes  de  cuivre  par  statère.  ]\I.  Leemans 
fait  à  ce  sujet  les  réflexions  suivantes  :  «Promittit  Petimuthes,  nisi  stato  tempore  duodecim 
»  drachmas  reddiderit,  se  sescuplum,  itaque  18  drachmas,  soluturum  et  praeterea  usuram  inde 
»a  31  die  mensis  undecimi  Epiphi,  computatam  secundum  rationem  usurae  menstruae 
»60  drachmarum  aeris  sortis  stateris  unius  aurei;  quae  ratio  usurae  computandae  eo  tempore 
->in  Aegypto  recepta  fuisse  videtur;  de  statere  argenteo  hic  accipi  non  posse  re  ipsa  patet. 
»Valebat  stater  aureus  20  drachmis  argenteis  sive  2400  drachmis  aeneis,  veluti  sequitur  ex 
»caleulo  quem  B.  Peyron  ad  Pap.  Brit.  XIII  annot.  p.  77  etseq.  recte  omnino  instituisse  videtur. 
«Usuram  ita  hahemus  iis  temporibus  haud  ita  immoderatam  720  drachmarum  per  annum 
»sive  30  7o». 

Dans  le  papyrus  gi*ec  XIII  de  Turin,  publié  ci-dessus  par  nous"^,  le  capital  était  de  cinq 
cents  drachmes  et  au  bout  de  quatre  ans  on  demande  1268  drachmes,  y  compris  le  prix  de 
certaines  mesures  de  céréales  qui,  suivant  le  contrat  primitif,  auraient  dû  être  soldées  en 
nature.  «  D'après  les  données  positives  de  notre  papyrus,  si  nous  calculons  à  2  drachmes  d'argent 
chacune  des  mesures  d'olyre,  les  60  mesures  feront  120  drachmes,  qui,  jointes  aux  72  drachmes 
payables  en  argent  d'après  le  contrat,  donnent  un  total  de  192  drachmes  par  an  pour  500 
de  capital,  c'est-à-dire  un  taux  de  38  et  ^/,o  pour  100.  Mais  il  est  probable,  ainsi  que  nous 
l'avons  dit,  que  ces  mesures,  s'il  y  avait  retard  dans  les  paiements,  étaient  remboursables  au 
prix  du  cours  actuel,  comme  cela  est  spécifié  pour  un  prêt  de  blé  dans  le  papyrus  grec  7 
du  Louvre.  Le  créancier  bénéficiait  donc  ici  de  la  plus  value  des  céréales  :  et  ces  variations 
de  prix  étaient  alors  très  notables,  comme  on  peut  le  voir  en  comparant  les  différents  chiffres 

déjà  relevés  par  M.  Lumeroso En  calculant  d'après  notre  taux  d'intérêt  de  30  pour 

100,  les  500  drachmes  d'argent  produiraient  150  drachmes.  Le  débiteur  devait  en  donner 
72  en  argent  et  78  en  céréales.  Chacune  des  mesures  qu'il  devait  solder  représentait  donc 
une  valeur  d'une  drachme  3  dixièmes  au  moment  où  fut  rédigé  l'acte,  et  si  elle  est  estimée 
à  2  drachmes  par  Chonouphis  dans  sa  requête,  quatre  ans  après,  c'est  par  suite  de  l'augmen- 
tation du  cours  du  marché  r,  ssoi^-evr,  ev  -r/  oL-^cpx:  t'-jj-y;,  comme  dit  le  papyrus  7  du  Louvre. 

'  Au  contraire  im  fragment  de  Ménandre  (p.  87  édition  Didot)  semble  indiquer  qu'ils  étaient  admis 
en  droit  grec  t'»v  toxcov  è'/cov  ■zô/.ojç. 
2  Revoie,  2^  année,  n»»  II— III. 

9 


66  Eugène  et  Victok  Reyillout. 


C'est  également  le  30  pour  100  par  au  que  nous  trouvons  daus  le  papyrus  54  du  Louvre 
contenant  les  comptes  des  jumelles  eu  l'an  19,  de  Tliot  à  Mésoré  {am  ôwut  Yiw;  [i.tzopr,).  Il 
s'agit  d'un  prêt  fait  un  peu  plus  de  6  mois  avant  la  fin  de  Mésoré,  c'est-à-dire  daus  le  courant 
de  Phaménotli.  Ce  prêt  se  montait  à  4300  drachmes  de  cuivre  (répondant  à  36  drachmes 
d'argent  moins  une  obole").  Sur  cette  somme  le  prêteur  a  reçu  un  à  compte  de  1200  drachmes 
de  cuivre  (ou  10  drachmes  d'argent)  et  un  intérêt  de  700  drachmes  de  cuivre  (6  drachmes 
d'argent  moins  une  obole)  7:3c|X£voi6  a;  [—  H7at[j.a'.o;  a-r/£i  ::ap'  bij.o-j  ^—  ^r  tij-wv  ccr.zyiù  |—  kc  -/.ai 
To/.o'j  \-f  '.  C'est  30  pour  100  d'intérêt  en  calculant  sur  un  prêt  fait  non  pas  le  1'^''  ou  le 
30,  mais  dans  le  courant  de  Phaménoth.  Or,  il  faut  remarquer  que  dans  nos  comptes  des 
jumelles  ou  indique  souvent  ainsi  le  mois  pour  un  jour  quelconque  du  mois,  comme  le  prouve 
la  comparaison  des  différentes  expéditions  d'un  même  compte.  Au  contraire  quand  il  est 
question  de  Mésoré,  terme  auquel  tous  les  comptes  se  réglaient,  c'est  de  fin  Mésoré  qu'il  s'agit. 

Le  papyrus  57  du  Louvre,  contenant  un  registre  du  même  genre,  nous  donne  un  nouvel 
exemple  fort  concordant.  H  s'agit  également  d'un  compte  de  fin  d'année  r,wq,  iJ.z.copr,  et  le  prêt 

sic 

a  été  contracté  le  30  payni  (Tcauvt  Â),  c'est-à-dire  juste  deux  mois  auparavant.  Aussi  l'intérêt  de 
1000  drachmes  est-il  de  50  drachmes  —  30  pour  100  —  r.xr.  Â  orre/j;  Tiap'cp.oj  /a/atov  j—  ^ 
TO/.OV  l—  n. 

Le  papyrus  23  du  British  Muséum,  utilisé  dans  l'antiquité  pour  des  semelles  de  sandales 
et  contenant  le  registre  d'un  usurier  ou  prêteur  d'argent,  porte  de  nombreuses  mentions  de 
cet  intérêt  légal  à  30  pour  100.  Seulement  l'intérêt  était  parfois  arrondi  un  peu  pour  arriver 
à  un  chiffre  commode,  comme  cela  se  faisait  également  —  nos  contrats  démotiques  nous  le 
prouvent  —  pour  l'hémiliou  dû  en  cas  de  retard  dans  tous  les  prêts  égyptiens. 

C'est  ainsi  que  dans  le  second  compte  ^  du  papyi-us  23  le  capital  de  1800  drachmes  est 
calculé  comme  s'il  était  de  2000,  et  produit  en  conséquence  50  drachmes  par  mois  (au  lieu 
de  45  que  1800  devaient  donner).  Le  prêt  avait  été  fait  en  l'an  23  (Epiphi)  et  dura  jusqu'en 
Epiphi  de  l'an  24,  c'est-à-dire  12  mois,  ce  qui  fait  un  intérêt  de  600  drachmes,  à  50  par 
mois,  à  ajouter  au  capital.  Cette  addition  du  total  et  de  l'intérêt  manque  maintenant  dans 
notre  document,  mais  elle  est  facile  à  suppléer  (2400  drachmes)  \ 

Le  troisième  compte   est  incomplet.    Nous   savons  seulement   que  le  capital  était  de 

'  Dans  le  n°  II — III  de  la  2^  année,  p.  137,  j'ai  calculé  l'intérêt  d'après  le  dernier  chiffre,  celui  de 
là  compte  payé  en  négligeant  le  point  de  départ  et  le  jour  de  règlement  également  certain  de  la  dette. 
J'ai  donc  vu  dans  700  l'intérêt  de  23  mois  20  jours  de  1200  drachmes  (692  drachmes  et  en  arrondissant  700). 
C'était  là  une  grosse  erreur  puisqu'il  faut  calculer  d'après  le  capital  de  4300  drachmes  et  que  les  dates 
initiale  et  terminale  sont  connues. 

2  Du  1"  compte  il  ne  porte  plus  que  : (■/.cy)aXatwi  auvaye-ai 

3  Le  compte  portait  :  «Un  tel  fils  de  (Trip)toléme,  au  mois  d'Epiphi  de  l'an  23,  1800  drachmes,  dont 
l'intérêt  par  mois  est  de  50  drachmes.  Ces  1800  drachmes  il  les  conserve  jusqu'en  Epiphi  de  l'an  24.  Il 
faut  y  joindre  l'intérêt.  Voici  le  compte  de  l'intérêt  joint  au  capital  à  savoir  :  1800  drachmes  de  capital.  Ce 
capital  a  comme  intérêt  600  drachmes.  Total  2400  drachmes.»  Le  grec,  très  fragmenté  à  chaque  ligne,  porte  : 

ToXcjiou  E-/EI  pou  KF  L  (ano  jji^  ejteîy  | —  e>.aj) 

tov  To/.o;  xaia  [xï]  | —  n 

(a;  eyjet  (t)ou  KA   L  sùj;  etieiç 

(  .  .  .  .  a)i;  auvayETai  toxo;  tjj(v) 

(/.£'^aX)at(oi  auvaysTat  «^co 

s-/.£^  f-  X  (  /  f-  '^^)  •  •  •  • 


Seconde  lettre  sue  les  monnaies  égyptiennes.  67 

1000  drachmes,  l'intérêt  total  de  350  drachmes  et  le  total  des  deux  chitfres  de  1350  drachmes. 
Il  s'agissait  donc  cette  fois  d'un  prêt  de  14  mois  à  25  drachmes  dintérêt  par  mois'. 

Dans  le  quatrième  compte  un  homme  d'Alexandrie  touche  la  somme  prêtée  en  Tan  24. 
Cette  somme  prêtée  manque,  mais  doit  être  de  2000  drachmes  {o\\  tout  au  moins  1800')  puis- 
qu'elle produit  50  drachmes  d'intérêt  par  mois.  Le  prêt  a  été  contracté  en  Thot  de  l'an  24. 
Xous  ignorons  son  terme  et  le  reste  du  calcul-. 

Nous  eu  savons  encore  moins  pour  le  6®  compte  relatif  au  prêt  d'un  talent  3. 

Le  papyrus  9  de  la  publication  académique  *  nous  a  conservé  un  auti-e  registre  de  prêteur. 

' (-Xy-oi  [-)  Tit 

.  .  .   (t)coi  /.cçaXaiw.  /  | —  A.Tn 
- AÀ£;avop£'.ai  e/£'.  tou  KA   L 

.  .  (l-  «k)  wv  To/.oç  xa-a  iat].  | —  n 

.  .  .  (0)to6  -o-j  KA  L  £w(ç) 

3  Du  5^  compte  il  ne  reste  que  les  mots: 


.  .  .  .   zaï 

~X 

t/v. 

P 

.  .  .   (3)co; 

TOJ 

.  .  .  .  tt;; 

"/. 

K 

sic 

7^ 

....    TO 

Oi    7 

....    ■/.£= 

)aX 

Du  6^  que  les  mots: 


*  Nous  allons  donner  une  copie  plus  exacte  de  ce  papyrus  dont  toutes  les  indications  métrologiques 
et  mathématiques  ont  été  complètement  déformées  dans  le  texte  imprimé  de  la  publication  académique.  Mais 
auparavant  voici  quelques  notions  indispensables  à  l'intelligence  de  ce  précieux  document. 

L'unité  de  mesure  est  certainement  l'artabe  dont  la  sigle  (n)  se  retrouve  également  dans  le  pa- 
pyrus 13  de  Turin.  Mais  cette  sigle  s'omet  souvent  (comme  cela  avait  également  lieu  pour  la  sigle  de  la 
drachme).    Le  principal  chiffre  précédant  les  fractions  ou  donné  isolément  se  rapporte  ainsi  toujoui-s  à  la 

sic  sic 

principale  unité  :  l'artabe.  L'artabe  se  divisait  par  moitié  («-),  -'3  (h),  1 3  (f-)  et  le  tiers  de  2  3  (  i)  ou  -  9. 
>50uvent  les  fractions  se  trouvent  seules  (^  surtout).  Elles  expriment  donc  de  vi-aies  mesiu-es.  Souvent 
aussi,  nous  l'avons  dit,  elles  suivent  le  chiffi-e  de  la  principale  unité.  La  sigle  de  la  moitié  d'artabe  ré- 
pondait à  la  mesure  apet  et  valait  6  /ojc,  3  OTOine.  (Voir  notre  article  sur  les  mesures  de  capacité,  Revue, 
t.  II,  n°II— III.)  Le  û  (I3  d'artabes)  répondait  à  8  /ojç,  4  o-roine.  Le  ^  (tiers  de  ^)  à  2  /ou;  23^  ou 
8  chenices,    16  hins,  32  cotyles. 

ajTo;  

7:apaooO£vTo;  auTto'.  aiTOu 

-jpcov  n  »e^ 

zat  £v  TO'.ç  unoys uîvo'.ç 

cScXzîsOat  £t;  to  lA   L 

OErjdct.  a-jTOV  ::ai;ocoo'j(va'.) 

£V  TtjJi  XJTW.  ypovcoi  xa(8toç) 

<7-jv£y(i)i57;jav  j:po;  auTOv. 

Epiï'.  <I>aTp£Ou;   Sia  <p£Ya)v.o;   a£)>'.!7 

CTO-jpyou  T.:ip.    £r'A  ^''  '^°  Y  ^  i  /  ■®'- 

Tavous;'.  AaTav'.o;  fi^  tov  to  «-  «>.  r**  ''(t') 

ITa^T'.  IlavaTo;  B^   lov  to  ^  *.  [^  lA  (L) 

sic 

T£vojy£'.,  012  6oTpw.a'.o;  to'j 
TeXI'.v'.oç,  ï'  [V  avQ'cDV  n  -^  "-• 
'J"(7£aa'.v£t  TT/.  ITopTiTo;  yu'^aizi, 
oia  ^'îvaao-jvioç  to'j  IIt(o'.t)o;, 
aç   £$£1   aJTr,v  oojvai   l'i  tw.  6  L  Z  «- 

9* 


68  Eugène  et  Victor  Revillout. 

Cette  fois  il  s'agit  d'un  prêteur  de  blé,  et  nous  voyons  que  pour  ce  genre  de  prêts  ou  calculait 
d'ordinaire  l'intérêt  à  un  tiers  du  capital  (33 1/3  pour  100  au  lieu  de  30  pour  100).  Les  mesures 
usitées  dans  les  prêts  de  blé  se  divisaient  surtout  en  effet  par  tiers  et  sixièmes,  comme  nous 
avons  eu  l'occasion  de  le  voir.  Il  était  donc  beaucoup  plus  facile  de  calculer  par  tiers  que 
par  30  pour  100  pour  de  semblables  créances  en  nature. 

Dans  le  papyrus  9  il  est  souvent  question  de  l'bémiolion  dû  en  cas  de  retard  (lignes  11, 
12,  19  et  dernière).  Mais  généralement  les  intérêts  sont  compris  dans  le  chiffre  de  la  créance, 
(comme  dans  les  prêts  de  blé  démotiques  et  grecs  possédés  par  nous).  Cependant  nous  trouvons 
quatre  mentions  formelles  du  taux  de  l'intérêt  : 

1°  à  la  ligne  13  et  suiv,  l'apport  fait  à  Ténouchis  par  l'intermédiaire  de  Thotrois,  fils 
de  Psellinis,  se  montait  à  3  artal)es  et  un  tiers,  avO  ojv,  à  la  place  desquelles  il  lui  fallait  payer 
4  artabes  et  demie. 

2"^  à  la  ligne  15  et  suiv.  Tsemminis  devait  donner  7  artabes  et  demie  en  l'an  9,  et 
en  l'an  11  elle  a  été  taxée  (par  justice)  à  13  ou  12  (le  second  chiffre,  dont  il  ne  reste  que 
la  hampe,  est  douteux.) 

3°  à  la  ligne  9  et  suiv.  dans  le  prêt  fait  à  Héreius,  l'intérêt  est  d'un  tiers  {—  y)  c'est- 
à-dire  de  2  artabes  Vo?  po^r  6  artabes  ^3,  total  9,  eu  arrondissant,  suivant  la  coutume,  cette 
fois  d'un  9®  d'artabe. 

4°  à  la  ligne  26,  dans  l'addition  générale,  on  compte  30  artabes  et  demie  de  capital 
(%B<D(x\(x'.o'S)  et  dix  artabes  et  demie  d'intérêt  (oiaotps-j  ')  (enwon  le  tiers  —  cette  fois  on  ar- 
rondit de  2/g  d'artabe  — )'^,  ce  qui  fait  au  total  41  artabes. 

Ev   0£   -on   lA    L   EiaçaTO   oouctv   ç\  l6    (oU  IX?) 
IlePwt  <l>aTp£ou;  ot  'Eptîto;  fi   |^   cov  lo  «-  e^  (f-) 
EyoEOcZia'.  ô'  rj[j.iv  Eptsuç. 
TtupEi  TTji  Epieu;  yuvat/.t  oia 

ri/cflTcpTlUTO;    EZ    TOU    I     L    «>.    /    «w    L. 

IIopTtTt  AvaÇayopou  ex  tou   1  L   ^ 

H'sfjLjjL'.vEt  Htpio;  8ia  ITE-CEyvrjiTo; 

Tou  utou  EV  Tcoi  lA   L  j:up.   ^. 

,,/   xEspaXatou  j^  A.  «-  8ta-^opou  i    ■-  /  ^o». 

ojffx'  Etvat  EV  n£X(jT)Ei  Ei;  to  IA  L 

^■^P  n  "^ETA  ■''■P'O  i*?^  •-   L  apa/-ou  a.  r^  "-'^TÂP-  *    h- 

OcpEiXo[j.Ev  o'auTtot  xi[x.r)v  7zpo^a,{iwy) 

xai  8ia  ncT07)pioç  oiSovrat  v^^''  i[xaTia)'. 

£15  TO  IA   L  TZ'jp  f)    g^  tov  Kup.  TO  •-  '^  /  ■©■• 
Notons  que  la  sigle  de  l'artabe  ressemble  bien,  comme  Peykon  l'avait  dit  à  propos  du  papjTus  XIII, 
à  un  figuratif  fj.    Mais  en  la  regardant  de  plus  près,  surtout  à  la  ligne  26  de  notre  document,  on  croit  j- 
voir  Jr*  c'est-à-dire  la  lettre  double  A  et  P,  surmontée  d'un  trait.  Or,  dans  de  nombreux  papyrus  du  même 

temps  l'artabe  est  aussi  désignée  par  les  mêmes  initiales  ainsi  ligurées  :  up.  Quant  à  la  sigle  ^,  elle  se 
rapproche  beaucoup  dans  l'original  du  B  de  notre  papyrus,  mais  d'un  B  surmonté  d'un  long  trait  droit  ana- 
logue à  celui  qu'on  trouve  pour  r^  et  pour  U,.  Cette  dernière  sigle  que  nous  n'avons  pas  estimée  ci-dessus 
et  qui  suit  la  demie,  pourrait  avoir  été  constmite  sur  le  rj  de  cette  écriture.  Elle  vaut  peut-être  un  huitième, 
mais  nous  n'avons  pas  de  moyen  de  contrôle  pour  cette  dernière  assimilation. 

'  Voir  pour  le  sens  intérêt  de  ce  mot  le  Thésaurus,  t.  II,  p.  1386.  Ce  sens  n'est  pas  douteux  d'après 
les  classiques  cités.  On  ne  voit  donc  pas  pourquoi  on  a  mis  un  point  d'interrogation  après  cette  traduction 
dans  l'index  du  volume  de  l'Académie  p.  474. 

^  Les  intérêts  des  prêts  de  blé,  etc.,  n'étaient  pas  du  tout  assimilés  dans  le  monde  romain  aux  intérêts 
des  prêts  de  numéraire.  Loin  d'être  limités  à  12  pour  100,  suivant  Saumaise  ils  n'avaient  aucune  limite  avant 


Seconde  lettee  sur  les  monnaies  égyptiennes.         69 

Notre  registre  nous  donne  aussi  d'autres  indications  moins  formelles,  mais  tout  aussi 
convaincantes. 

Ainsi  dans  deux  comptes  successifs  (ligne  23  et  suiv.)  les  débiteurs  devaient  rendre 
2  tiers  d'artabes.  Le  capital  versé  avait  été  d'une  demi-artabe  ou  d'un  apet. 

Ailleurs  et  dans  trois  comptes  divers  il  aurait  fallu  donner  au  terme  2  artabes  ^  3.  Le 
chiffre  primitif  était  donc  de  2  artabes  :  l'intérêt  de  V3  d'artabes.  Mais  on  n'avait  pas  payé 
au  terme  :  on  devait  par  conséquent,  comme  amende  de  retard,  l'hémiolion  en  plus,  c'est-à-dire 
1  artabe  et  un  tiers,  ce  qui  joint  aux  2  artabes  2/g^  donne  un  total  de  4  artabes,  c'est-à-dire 
juste  le  double  du  chiffre  primitif  Quant  au  capital  de  6  artabes  ^/g  que  devait  rendre 
Héreius  et  dont  l'intérêt  (du  tiers)  était  de  2  artabes  2/,^^  total  9,  il  résultait  sans  doute  aussi 
d'un  prêt  primitif  de  cinq  artabes,  dont  le  tiers  est  de  1  artabe  %,  total  62/3  '•  Peut-être  le 
débiteur  avait-il  offert,  au  terme,  soit  de  payer  le  capital,  soit  de  continuer  à  solder  les  intérêts 
une  seconde  année.  De  là  proviendrait  la  remise  de  l'hémiolion  dû  en  cas  de  retard.  En 
tout  cas,  dans  les  prêts  de  blé  le  système  duodécimal  des  mesures  forçait  à  l'intérêt  par  tiers, 
33 '/3  pour  100,  comme  dans  les  comptes  en  numéraire  le  système  décimal  des  monnaies  propre- 
Constantin.  Par  une  loi  de  ce  prince,  insérée  dans  le  code  Théodosien,  au  titre  De  mûris,  ils  furent  réduits 
à  la  moitié  en  plus,  à  une  troisième  mesure  supplémentaire  si  le  pi'êt  était  de  deux.  St.  Jérôme,  dans  son 
commentaire  sur  Ezéchiel,  chapitre  XVIII,  parle  aussi  de  la  moitié  Qn  plus  (l'hémiolion,  qui  en  Egjpte 
n'était  donné  que  comme  amende  en  cas  de  retard  dans  les  paiements).  Le  concile  de  Laodicée  interdit 
pour  les  clercs  ces  hemioUa  ce  que  Denys  traduit  par  sescuplas.  (Voir  aussi  à  ce  sujet  les  autres  canons 
de  conciles,  également  cités  par  Saumaise,  De  modo  usurarum,  p.  273  à  340.) 

1  A  côté  de  l'argent  prêté  et  dont  le  débiteur  répondait,  argent  dont  le  taux  variait  non  seulement 
suivant  l'époque  et  l'abondance  de  numéraire,  mais  suivant  les  garanties  et  la  solvabilité  du  débiteur  —  ce 
que  Saumaise  nomme  syyuo;  toho;,  prêt  garanti  (c'est  ainsi  qiie  du  temps  de  Lysias  Eschine  le  socratique 
emprunta  d'abord  à  36  pour  100,  puis  à  18,  que  du  temps  de  Démosthènes,  l'argent  étant  très  abondant,  la 
plupart  des  prêts  se  faisaient  à  12,  paifois  à  10,  mais  aussi  parfois  à  16  même  sur  hypothèque,  comme  on 
le  voit  dans  le  plaidoyer  contre  Nicostrate,  ou  à  18,  comme  on  le  voit  dans  le  plaidoyer  d'Eschine  contre 
Timocrate),  —  il  y  avait  l'argent  mis  en  œuvre  sous  forme  d'esclaves  travaillant  dans  un  atelier,  par  exemple. 
Quand,  en  prêtant  une  somme  d'argent,  on  prenait  pour  garantie  un  atelier  de  ce  genre  à  exploiter  soi-même, 
en  en  gardant  les  produits  annuels  en  guise  d'intérêts,  avec  les  risques  de  maladie,  de  mort,  etc.,  on  voulait 
que  l'argent  ainsi  placé  rapportât  30  pour  100.  Par  exemple,  dans  le  plaidoyer  contre  Aphobos  on  voit  que 
le  père  de  Démosthènes,  ayant  prêté  à  un  homme  peu  solvable  40  mines  d'argent,  reçut  en  garantie  un 
atelier  de  20  ouvriers  en  meubles,  qui  lui  rapportaient  12  mines  de  bénéfice  net  par  an.  Cette  somme  de 
12  mines,  il  la  gardait  comme  représentant  l'intérêt  de  40  mines.  C'est  juste  30  pour  100.  La  valeur  des 
esclaves  employés  au  commerce  était  évaluée  semblablement  d'après  le  produit.  Ainsi  dans  le  même 
plaidoyer  on  voit  que  le  père  de  Démosthènes  possédait  en  propre  un  atelier  de  32  à  33  esclaves  qui  lui 
rapportaient  30  mines  de  bénéfice  net  par  an.  Si  ces  trente  mines  eussent  représenté  l'intérêt  annuel  d'un 
capital  à  30  pour  100,  le  capital  eut  été  de  100  mines.  Cent  mines  divisées  par  le  nombre  des  esclaves 
(32  à  33)  donne  une  moyenne  de  valeur  qui  dépasse  3  mines  pour  chaque.  Aussi  Démosthènes  nous  dit-il 
que  chacun  de  ses  ouvriers  valait  au  moins  3  mines,  quelques-uns  jusqu'à  5  ou  6.  Il  est  à  noter  que  dans 
le  prêt  à  Panténéte  sur  une  exploitation  garnie  de  30  esclaves  aux  mines  de  Maronée  l'intérêt  demandé 
par  les  prêteurs,  qui  deviennent  pseudo-propriétaires,  à  l'emprunteur  pseudo-locataire,  est  calculé  à  12  pour  100 
bien  qu'il  s'agisse  d'une  exploitation  industrielle.  Mais  cela  n'est  pas  en  contradiction  avec  l'intérêt  à  30 
pour  100,  exigé  par  le  père  de  Démosthènes  lorsqu'il  prit  en  gage  un  atelier  d'ouvriers  en  meubles.  En 
effet,  le  père  de  Démosthènes  exploitait  lui-même  à  ses  risques  et  périls,  tandis  qu'ici  c'est  l'emprunteur 
qui  continue  à  exploiter,  qui  paie  à  l'état  le  droit  annuel  au  jour  fixé  et  à  ses  risques  et  périls  (ainsi  qu'on 
le  voit  plus  loin  dans  le  même  plaidoyer,  nous  montrant  qu'un  retard  le  fit  condamner  au  double).  C'est 
donc  un  placement  ordinaire  bien  garanti  par  un  bon  gage  et  rapportant  un  intérêt  fixe,  au  lieu  d'être  un 
argent  placé  dans  le  commerce  à  intérêts  aléatoires.  Ceux  qui  ont  prêté  à  Panténéte  pourront  toujours 
exiger  de  lui  les  12  pour  100.  Au  contraire,  le  père  de  Démosthènes  s'est  arrangé  de  manière  à  pouvoir 
retirer  de  son  argent  30  pour  100,  mais  les  circonstances  peuvent  faire  qu'il  ne  retire  rien,  qu'il  soit  même 
en  perte,  et  dans  tous  les  cas  son  emprunteur  ne  lui  devra  que  le  capital. 


70  Eugène  et  Victor  Revillout. 

ment  égyptiennes  (outen  et  kati)  forçait  à  l'intérêt  de  30  pour  100.  L'un  et  l'autre  devaient 
donc  avoir  été  permis  pour  ces  raisons  par  la  loi  de  Bocchoris  et  ils  avaient  subsisté  jus- 
qu'aux Ptolémées. 

Ces  intérêts  des  prêts  de  blé  se  confondent  en  quelque  sorte  (les  questions  de  métro- 
logie mises  à  part)  avec  l'intérêt  à  30  pour  100  que  nous  trouvons  en  Egypte  pour  tous  les 
prêts  de  numéraire.  Je  n'en  grossirai  pas  ici  la  liste  et  je  ne  mentionnerai  que  pour  mémoire 
les  papyrus  grecs  7  et  13  du  Louvre  et  les  papyrus  démotiques  de  Marseille,  103  de  Berlin, 
2436 «  et  h  du  Louvre,  376  de  Leide,  dont  j'ai  déjà  longuement  parlé  dans  mon  commentaire 
du  papyrus  13  de  Turin. 

Je  ferai  remarquer  cependant  que  l'intérêt  de  30  pour  100  existait  à  Atliènes  même, 
comme  intérêt  commercial,  soit  quand  il  s'agissait  de  l'argent  mis  en  œuvre  sous  forme 
d'esclaves  travaillant  dans  un  atelier,  soit  pour  les  locations  d'hérédité'  appartenant  à  des 
mineurs  incapables  d'agir  eux-mêmes,  soit  pour  les  prêts  à  la  grosse  aventure  ou  de  na- 
vigation 2.  On  trouve  même  souvent  dans  le  monde  antique  des  taux  supérieurs.  Dans  ses 
lettres  à  Atticus  (livre  V,  lettre  VI)  Cicéron  parle  du  taux  de  48  pour  100  auquel  le  vertueux 
Brutus  prêta  et  fit  prêter  au  sénat  de  Salamine,  en  se  faisant  autoriser  à  cet  effet  par  le 
sénat  romain.  Cicéron  parle  aussi  de  taux  d'intérêts  non  moins  excessifs,  réclamés  d'après 
des  contrats,  et  qu'il  réduisait  à  12  pour  100^  dans  la  province  de  Cilicie  administrée  par  lui, 
tout  en  y  permettant  encore  l'anatocisme  annuel,  c'est-à-dire  le  calcul  rapidement  progressif  des 
intérêts  des  intérêts  ^  Une  inscription  de  Naples  nous  prouve  qu'en  Italie  du  temps  des  Césars 
l'intérêt  de  25  pour  100  paraissait  d'une  modération  telle  qu'on  éleva  une  statue  à  un  prêteur 
qui  s'en  contentai 

1  De  même  qu'on  calculait,  ainsi  que  nous  venons  de  le  voir  dans  la  note  précédente,  le  capital  com- 
mercial d'après  l'intérêt  à  30  pour  100,  de  même  on  exigeait  cet  intérêt  à  30  de  ceux  qui  prenaient  entre 
les  mains  l'héritage  d'un  mineur  pour  l'exploiter,  commercialement,  s'ils  le  voulaient.  Dans  le  plaidoyer 
contre  Aphobos,  déjà  cité,  on  voit  que  le  mineur  Antidore  ayant  pour  capital  3  talents  et  3000  drachmes, 
l'intérêt  avait  fait  plus  de  6  talents  en  6  ans.  Le  capital  étant  de  21000  drachmes,  l'intérêt  avait  produit 
ainsi  plus  de  36000  drachmes  ou  plus  de  6000  drachmes  par  an,  c'est-à-dire  30  pour  100.  Démosthénes 
calcule  que  son  capital  à  lui  eût  au  moins  triplé  en  10  ans,  si  on  l'avait  placé  ainsi. 

2  Dans  l'affaire  Chiysippe  contre  Phormion  il  est  question  d'un  prêt  nautique  de  2000  di-achmes,  ayant, 
comme  d'habitude,  pour  garantie  un  chargement  de  valeur  double,  c'est-à-dire  de  4000.  Le  capital  de  2000 
drachmes  portait  intérêt  de  600  drachmes  (30  pour  100)  pour  un  voyage  d'aller  et  retour  au  Bosphore. 

Dans  le  plaidoyer  contre  Lacrite  il  s'agit  d'un  prêt  à  la  grosse  de  3000  di-achmes  devant  produire 
225  par  mille  (221/2  pour  100),  si,  le  voyage  étant  raccourci,  le  retour  se  fait  avant  l'automne,  et  300  (30 
pour  100)  si  le  retour  se  fait  seulement  à  l'automne.   Le  capital  de  garantie  est  aussi  de  valeur  double. 

Dans  le  plaidoyer  d'ApolIodore  contre  Callipe  il  est  également  question  d'un  prêt  à  la  grosse  pour 
un  voyage  en  Thrace.  Mais  le  voyage  ne  fut  pas  fait,  et,  comme  nous  aurons  occasion  de  le  voir  dans 
une  des  notes  suivantes,  l'intérêt  spécial  fut  en  conséquence  contesté  par  l'emprunteur. 

3  Avec  les  intérêts  des  intérêts  comptés  à  12  pour  100  la  somme  était  presque  doublée  en  6  ans, 
presque  quadruplée  en  12  ans,  plus  que  décuplée  en  20  ans;  tandis  que  sans  anatocisme  à  30  pour  100  le 
capital  ne  produisait  comme  intérêt  que  son  sextuple  en  ces  20  ans. 

^  Plutarque,  dans  sa  vie  de  LucuUus,  raconte  aussi  que  ce  général,  commandant  en  Grèce  et  en  Asie, 
réduisit  le  premier  à  12  pour  100  (centesimam  =  ezaioarriv)  l'intérêt  qui  était  de  beaucoup  plus  élevé. 

5  Juvenal  (1.  III,  satyre  XI)  parle  aussi  de  Pollion  qui  ne  trouvait  pas  de  fous  pour  lui  prêter  à 
intérêts  triples.  C'était  là  de  l'usure.  Mais  le  prêt  à  la  journée  (prêt  à  la  petite  semaine)  est  mentionné  en 
Grèce  et  à  Rome.  Théophraste,  dans  la  IMizpoXoyta,  parle  d'un  prêteur  qui,  recevant  par  mois  la  semi-obole 
par  drachme  pour  intérêt,  exigeait  en  outre  les  intérêts  des  intérêts  (chose  qui  paraît  alors  hors  d'usage  en 
Grèce).    Ailleurs,  dans  I'Akovoik,  Théophraste  nous  donne  un  renseignement  encore  plus  curieux.  Il  s'agit 


Seconde  lettre  sue  les  monnaies  égyptiennes.         71 


Eufin  les  taux  de  36  et  48  pour  ceut  se  retrouvent  aussi  clans  le  monde  grec. 

Le  taux  légal  de  30  pour  100  dut  donc  lui-même  être  un  progrès,  surtout  combiné  avec 
la  loi  de  Bocclioris  qui  interdisait  de  faire  monter  l'intérêt  au-dessus  du  double  du  chiffre 
primitif  de  la  créance. 

Cette  loi  de  Bocclioris  qui  nous  est  attestée  par  Diodore  de  Sicile  était  surtout  fonda- 
mentale en  Egypte  et  nous  la  voyons  appliquée  sous  les  Persans  et  sous  les  Grecs',  même 
quand  l'intérêt  légal  se  trouvait  quadruplé  comme  pénalité  dans  certains  cas,  sans  doute  prévus 
et  permis  par  la  loi  et  qui  ne  rentraient  nullement  dans  le  prêt  ordinaire  2. 

En  règle  générale  on  peut  considérer  comme  certain  le  taux  légal  de  30  pour  100  en 
Egypte.  Ce  taux  légal  fixe  (à  part  des  arrondissements  minimes)  est  tout-à-fait  curieux  à 
noter;  car  il  n'existait  rien  de  pareil  et  d'aussi  strict  dans  le  monde  grec  de  cette  époque. 
C'est  pour  cela  que  dans  nos  contrats  de  prêts  de  blé  démotiques  et  grecs  on  ne  spécifie 
pas  les  intérêts,  mais  on  se  borne  à  dire  que  dans  le  total  indiqué  ils  sont  compris  jusqu'à 
telle  date.  Semblablement  dans  les  requêtes  relatives  à  des  prêts,  ou  même  à  tout  autre  genre 
de  dettes,  on  donne  soigneusement  le  chiffre  du  capital  et  on  se  contente  d'ajouter  «et  les 
intérêts  amassés»,  en  se  référant  à  l'intérêt  légal.  Dans  les  autres  droits  antiques  la  spéci- 
fication de  l'intérêt  était  au  contraire  de  rigueur,  et,  si  le  prêteur  ne  l'avait  pas  fait  fixer  au 
moment  du  prêt,  le  débiteur  aurait  seulement  été  forcé  de  rendre  le  capital.  Au  point  de 
vue  économique  il  y  a  là  une  différence  essentielle.  Eu  effet,  dans  tout  pays  dépourvu  de  taux 
légal,  l'intérêt  n'est  exigible  que  s'il  a  été  consenti  formellement  par  les  parties.  Il  devient 
de  droit  au  contraire  si  la  loi  en  fixe  le  taux  3,  comme  dans  le  droit  égyptien  et  dans  le 

d'un  usurier  qui  exige  par  jour  trois  serai-oboles  pour  une  drachme,  le  quart  du  capital.  De  même  Plante 
dans  l'Epidicus  :  Id  adeo  argentum  ab  danista  apud  Thebas  sumpsit  fœnore,  in  diem,  minasque  argeutis 
singulas,  nummis.  (Voir  sur  ce  point  Saumaise,  De  modo  usurarum,  p.  62  et  suiv.) 

'  Voir  l'article  de  la  Revue  Égyptohgique,  qui  est  consacré  à  ce  sujet  :  «  La  loi  de  Bocchoris  et  l'intérêt 
à  30  pour  100»,  Revue,  2«  année,  n°  II— III,  p.  142. 

2  Je  publie  dans  ce  numéro  même  un  curieux  contrat  du  règne  d'Artaxercès  qu'il  est  bon  de  consulter 
sur  cette  question.  Il  s'agissait  d'un  bœuf  qui  devait  être  immolé  pour  un  sacrifice  à  époque  fixe.  On 
pouvait,  en  cas  d'accident,  en  livrer  un  autre  à  sa  place  à  l'époque  désignée.  Mais,  si  on  ne  l'avait  pas  fait, 
on  devait  10  jours  après  payer  le  quadruple  de  sa  valeur.  Si  ce  quadruple  n'était  pas  payé,  on  devait  verser 
comme  intérêt  un  dixième  par  mois  (120  pour  100  par  an),  c'est-à-dire  aussi  le  quadruple  de  l'intérêt.  Mais 
ceci  s'explique,  puisqu'on  avait  fait  manquer  un  sacrifice  aux  dieux,  et  notre  contrat  n'a  rien  de  commun 
avec  un  prêt  ordinaire;  cependant  même  alors  notre  texte  a  soin  de  stipuler  que  les  intérêts  ne  s'élevront 
que  jusqu'à  concurrence  d'une  somme  n'atteignant  pas  le  capital. 

3  Chez  les  Romains  une  révolution  populaire  avait  fait  fixer  à  12  pour  100  le  maximum  de  l'intérêt. 
Mais  ce  n'était  qu'un  maximum  et  l'intérêt  ne  devenait  exigible  que  s'il  avait  été  l'objet  d'une  stipulation 
spéciale.  Chez  les  Athéniens  il-  n'existait  même  aucun  maximum  de  ce  genre.  On  pouvait  déterminer  comme 
on  le  voulait  l'intérêt  à  payer.  Si  on  ne  l'avait  pas  fait,  le  débiteur  ne  devait  que  le  capital.  On  peut  con- 
sulter à  ce  sujet,  dans  les  plaidoyers  civils  de  Démosthènes,  l'affaire  d'ApoUodore  contre  Timothée.  Apollodore 
y  relève  beaucoup  de  sommes  prêtées  par  son  père  à  llmothée,  à  diverses  reprises,  9,  10  ou  11  ans  avant 
le  procès;  mais  il  ne  parle  pas  d'intérêts,  parceque  c'étaient  des  avances  faites  sans  contrats  et  portées 
seulement  en  compte  à  la  banque.  De  même  les  débiteurs  de  l'état,  ne  paraissent  pas  avoir  eu  d'intérêts  à 
payer  pour  les  amendes  prononcées  contre  eux,  etc.  Ils  étaient  frappés  d'ativiie,  atimic  qui  passait  du  père  dé- 
biteur au  fils  héritier  jusqu'à  parfait  paiement  et  ne  leur  permettait  pas  de  juger,  de  paraître  aux  assemblées 
populaires,  etc.  En  outre,  au  moins  en  certains  cas,  comme  les  fermiers  publics,  en  cas  de  retard  ils  avaient 
à  payer  le  double  de  ce  qu'ils  devaient  au  peuple  et  le  décuple  de  ce  qui  revenait  aux  dieux.  Ces  chiffres 
du  double  et  du  décuple  se  retrouvent  pour  les  voleurs,  qui  devaient  restituer  au  double,  s'ils  rendaient 
l'objet  en  nature,  au  décuple  dans  le  cas  contraire.  (Voir  le  plaidoyer  de  Démosthènes  contre  Timocrate.) 
Mais  il  n'était  pas  alors  non  plus  question  d'intérêt  légal  (voir  Démosthènes  contre  Aristogiton).    L'intérêt 


72  Eugène  et  Victoe  Reyillout. 

nôtre.  Le  taux  légal  de  l'intérêt  avait,  du  reste,  l'avantage  d'empêcher  sur  ce  chapitre  toute 
contestation,  et  Bocchoris  avait  eu  pour  l'adopter  des  raisons  particulières.  En  effet,  tandis 
qu'il  faisait  de  la  vente,  par  exemple,  un  contrat  nécessairement  écrit  et  transmettant  la  pro- 
priété d'une  façon  authentique  et  définitive,  tandis  que  toutes  ses  lois  étaient  inspirées  par 
un  point  de  vue  identique,  il  avait  admis  cependant,  —  Diodore  nous  l'apprend,  —  l'exception 
formelle  du  prêt,  qui  pouvait  résulter  d'un  simple  engagement  verbal  et  se  prouver  par  le 
serment  déféré  au  débiteur.  De  là  vint  l'expression  Sanch  «adjuration»,  désignant  en  égyptien 
toutes  les  créances,  même  consignées  par  écrit,  bien  que  —  nous  l'avons  prouvé  —  aucun 
serment  n'y  intervint  alors.  Du  moment  où  la  parole  humaine  —  mise,  il  est  vrai,  sous 
l'inspection  et  l'inspiration  des  dieux,  —  pouvait  être  appelée  à  décider  souverainement,  il 
importait  de  limiter  autant  que  possible  son  champ  d'action.  Aussi  ne  lui  demandait-on  ici 
que  deux  points  :  le  montant  et  la  date  de  la  dette.  La  loi  se  chargeait  du  reste  et  fixait 
l'intérêt,  comme  la  limite  dernière  où  cet  intérêt  pouvait  monter,  limite  qui  consistait  seulement 
à  doubler  dans  un  temps  donné  (trois  ans^  environ)  le  capital,  avant  tout  règlement.  Par 
un  motif  de  simplification  du  même  genre,  Bocchoris  assimila  sous  ce  rapport  tous  les  genres 
de  dettes,  même  ceux  où  il  n'y  avait  pas  eu  emprunt  proprement  dit,  mais  apport  dotal  ^, 
héritage,  etc.,  c'est-à-dire  ceux  où  la  loi  romaine  ne  concédait  que  les  fruits,  aussi  bien  que 
ceux  où  elle  permettait  les  intérêts  (au  maximum  de  12  pour  100).  En  Egypte,  pour  tous 
ces  cas,  quand  le  paiement  devenait  exigible,  on  devait  donner  en  outre  30  pour  100,  et 
quand  il  s'agissait  d'une  créance  proprement  dite  à  date  fixe  et  que  cette  date  était  passée, 
on  y  joignait  d'ordinaire  l'hémiolion  (la  moitié  eu  plus).    Mais  cette  condition  prévue  par  la 

n'était  fixé  par  la  loi  à  Athènes  que  dans  des  cas  tout  particuliers,  par  exemple  s'il  s'agissait  de  la  dot 
de  la  femme  ou  des  biens  des  mineurs.  Ceux  qui  détenaient  la  dot  de  la  femme,  après  la  fin  du  mariage, 
ou  en  qualité  de  futurs  maris,  mais  sans  que  l'union  conjugale  s'accomplit,  en  devaient,  d'après  la  loi, 
payer  les  intérêts  à  18  pour  100  par  an  (1  draclime  et  demie  par  mine  et  par  mois).  Les  tuteurs  qui 
s'étaient  servi  pour  leur  usage  des  deniers  de  leur  pupille  en  devraient  payer  les  intérêts  à  12  pour  100 
(voir  les  plaidoyers  de  Démosthénes' contre  Aphobos).  Les  magistrats  qui  n'avaient  pas  accompli  leur  devoir 
par  négligence  devaient  aussi  payer  un  intérêt  des  sommes  compromises  par  leur  faute,  mais,  comme  ils 
n'en  avaient  bénéficié  en  rien,  cet  intérêt  était  inférieur  à  1  pour  100. 

Dans  les  prêts  oi'dinaires  —  nous  l'avons  dit  —  les  conventions  faites  entre  les  paities  décidaient 
de  tout.  Elles  décidaient  de  l'intérêt,  comme  elles  décidaient  de  l'amende  à  payer  en  cas  de  retard  (tandis 
qu'en  Egypte  cette  amende  seule,  qui  légalement  était  de  l'hémiolion,  devait  être  spécifiée  par  contrat  — 
l'intérêt  étant  de  droit  et  le  taux  en  étant  forcé).  Parfois  aussi  à  Athènes  on  stipulait,  comme  amende, 
que  si  la  somme  n'était  pas  rendue  dans  les  30  jours,  elle  serait  portée  au  double  (c'est-à-dire  à  moitié 
plus  qu'en  Egypte  en  cas  pareil).  Voir  le  plaidoyer  d'Apollodore  contre  îsicostrate.  Les  débiteurs  de  l'état 
pour  droits  de  mines  devaient  également  le  double  en  cas  de  retard  (plaidoyer  contre  Panténète).  Quant  au 
taux  de  l'intérêt,  comme  il  n'était  pas  fixé  ou  limité  à  Athènes  par  une  loi,  mais  par  les  seuls  termes  du 
contrat,  il  pouvait  résiilter  de  cet  état  de  choses  des  contestations  dans  des  circonstances  particulières. 
Ainsi  dans  le  plaidoyer  d'Apollodore  contre  Callype  on  voit  qu'un  Héracléote,  nommé  Lycon,  avait  prêté 
à  la  grosse  à  Mégaride  d'Eleusis  et  à  Trasylle,  son  frère,  une  somme  de  40  mines  pour  un  voyage  en 
Thrace.  Mégaride,  ayant  ensuite  changé  d'aAis  et  ne  voulant  plus  faire  le  voyage  ni  courir  de  risques,  Lycon 
redemanda  ses  fonds.  Mais  il  ne  put  s'entendre  avec  Mégaride  sur  le  compte  des  intérêts.  Mégaride,  sans 
doute,  ne  voulait  pas  payer  sans  risques  les  mêmes  intérêts  qu'avec  risques  :  ce  que  voulait  au  contraire 
Lycon.  De  là  résulta  une  contestation,  puis  un  procès.  Des  affaires  de  ce  genre  étaient  fréquentes  à 
Athènes.   Elles  étaient  impossibles  en  Egypte. 

'  Encore  avons -nous  vu,  à  propos  des  prêts  de  blé,  que  dans  les  prêts  à  termes  fixés  l'hémiolion 
dû  en  cas  de  retard  permettait  de  doubler  le  capital  en  un  an;  mais  on  ne  pouvait  aller  plus  loin  sans 
règlement. 

2  Voir  la  requête  d'Amadocus. 


Seconde  lettre  sur  les  monnaies  égyptiennes.  73 


loi  devait  être  cependant  spécifiée  dans  l'acte,  ce  que  l'on  n'était  pas  obligé  de  faire  pour 
l'intérêt. 

Il  ne  nous  reste  plus  qu'à  tirer  nos  conclusions  sur  la  valeur  proportionnelle  des  différents 
métaux.    Commençons  par  celle  de  l'or  et  de  l'argent. 

E.  Proportion  de  valeur  entre  l'or  et  l'argent. 

De  même  que  la  proportion  de  l'or  à  l'argent  dans  le  monde  persan  nous  avait  été 
indiquée  par  Hérodote,  celle  qui  existait  dans  le  monde  grec  nous  est  indiquée  par  l'univer- 
salité des  métrologistes  anciens.  Je  ne  donnerai  pas  ici  leurs  innomlrahles  témoignages  :  ce 
serait  indéfini.  Bornons -nous  à  signaler  le  texte  formel  qui  a  été  reproduit  par  Hultsch 
(p.  290)  sur  l'or,  de  valeur  décujîle  de  l'argent,  cet  autre  (p.  304),  qui  se  reproduit  sous  mille 
formes  diverses,  que  nous  avons  déjà  cité  et  d'après  lequel  le  /p'jcsj;  vaut  deux  drachmes,  la 
drachme  d'or  dix  drachmes  d'argent,  cinq  xpjjojç  valent  une  mine  de  100  drachmes  (d'argent), 
et  enfin  celui  (p.  331)  d'après  lequel  la  darique,  égale  au  y.pjtjoj;,  vaut  20  drachmes,  et  la  mine, 
5  dariques. 

C'est  d'après  ce  dernier  calcul  que  Xénophon  a  pu  assimiler  3000  dariques  à  10  talents 
(d'argent)  dans  un  passage  dont  nous  avons  déjà  parlé  plus  haut  '. 

Cette  proportion  de  1  à  10  entre  l'or  et  l'argent,  que  nous  retrouvons  dans  les  données 
du  papyrus  0  de  Leide  plusieurs  fois  cité  ci -dessus  2,  est  du  reste  tellement  bien  établie, 
tellement  incontestable  que  M.  Mommsen  lui-même  s'est  vu  réduit  à  l'admettre  au  moins 
comme  valeur  commerciale  (et  réelle).  Seulement  cet  illustre  savant  qui,  comme  me  le  disait 
naguère  un  de  ses  compatriotes  les  plus  instruits,  cherche  toujours  de  préférence  les  solutions 
originales,  aussi  éloignées  que  possible  des  données  trop  claires  et  trop  positives  des  textes, 
cet  illustre  savant,  dis-je,  a  voulu  reconnaître,  en  dehors  de  cette  valeur  commerciale  ou  réelle 
de  l'or,  une  valeur  monétaire  ou  fiduciaire  complètement  différente  dans  presque  tous  les  pays 
battant  monnaie  dans  l'antiquité. 

Cette  hjiîothèse  paraît  d'autant  plus  étrange  que  nous  ne  voyons  rien  de  pareil  dans 
les  temps  modernes. 

Economiquement  parlant  on  peut  formuler  cet  axiome  (contraire  à  l'opinion  de  M.  Mommsen)  : 
L'écart  entre  la  valeur  commerciale  ou  réelle  et  la  valeur  fiduciaire  ou  monétaire  peut  être 
d'autant  plus  grand  que  la  valeur  commerciale  ou  réelle  est  moindre.  Pour  le  papier,  dont  la 
valeur  commerciale  est  nulle,  la  valeur  fiduciaire  peut  être  indéfinie.  L'écart  peut  être  plus  grand 
pour  le  cuivre  que  pour  Vargent.   Il  devient  très  faible  pour  l'or. 

C'est  à  propos  de  l'or  et  de  l'argent  que  M.  Baudrillard  dans  son  manuel  classique  pose 
formellement  cette  loi  :  «  Le  gouvernement  ne  peut  donner  à  la  monnaie  une  valeur  fictive  3.  » 


'  Notons  que  si  les  vieilles  monnaies  d'Athènes,  soit  d'or  soit  d'argent,  avaient  pesé  un  peu  plus 
que  les  monnaies  d'or  correspondantes  du  royaume  perse,  dans  le  dernier  monnayage  caractérisé  par  un 
hibou  sur  une  amphore  le  poids  persan  devient  pour  ainsi  dire  un  maximum.  Les  tétradrachmes  de  cette 
série  sont  de  beaucoup  les  plus  nombreux. 

2  Comme  l'a  dit  d'ailleurs  M.  Leemans,  le  statère  didi-achme  d'or  de  ce  papyrus  valait  20  drachmes 
d'argent  comme  le  /pjaou;  a-a-7;p  des  métrologistes. 

3  Manuel  d'écœiomie  politique,  5®  édition,  1883,  p.  281. 

10 


74  Eugène  et  Victor  Revillout. 

C'est  à  propos  des  métaux  précieux  par  eux-mêmes  qu'au  commencement  de  ce  siècle 
Jean  Baptiste  Say  a  mis  eu  lumière  ces  principes  fondamentaux  de  l'économie  politique  : 

«  La  monnaie  est  reçue  dans  les  échanges^  »  nous  dit-il,  «  non  par  l'autorité  du  gouverne- 
»ment,  mais  parceque  c'est  une  marchandise  ayant  une  valeur  qui  lui  est  propre  ....  L'au- 
»  torité  publique  a  cru  qu'elle  pouvait  à  son  gré  augmenter  ou  diminuer  la  valeur  des  monnaies, 
»  et  que  dans  l'échange  d'une  marchandise  contre  une  pièce  de  monnaie  la  valeur  de  la 
«marchandise  se  balançait  avec  la  valeur  imaginaire  que  le  prince  donnait  à  sa  monnaie  et 
»non  avec  la  valeur  que  le  besoin  qu'on  avait  de  cet  argent,  combiné  avec  sa  quantité, 
»  pouvait  lui  donner  naturellement.  Ainsi,  quand  Philippe  I*''",  roi  de  France,  mêla  un  tiers 
»  d'alliage  dans  la  livre  d'argent  de  Charlemagne  qui  pesait  12  onces  d'argent  et  qu'il  appela 
»  du  même  nom  de  livre  un  poids  de  8  onces  d'argent  fin  seulement,  il  crut  néanmoins  que 
»  sa  livre  valait  autant  que  celle  de  ses  prédécesseurs.  Elle  ne  valut  cependant  que  les  deux 
»  tiers  de  la  livre  de  Charlemagne.  Pour  une  livre  de  monnaie  on  ne  trouva  plus  à  acheter 
»  que  les  deux  tiers  de  la  quantité  de  marchandise  que  l'on  avait  auparavant  pour  une  livre.  » 

Avant  que  le  développement  extraordinaire  des  établissements  de  crédit,  les  banques  où 
toutes  les  monnaies  sont  changées  les  unes  pour  les  autres,  l'affaiblissement  de  la  valeur  du 
métal  précieux  en  lui-même  par  rapport  aux  auti-es  richesses  et  l'usage  général  de  la  monnaie 
de  papier  pleinement  fiduciaire  eussent  mis  en  relief  dans  la  masse  de  la  population  le  côté 
surtout  fiduciaire  et  d'échange  des  monnaies,  le  même  fait  se  produisit  toujours  et  partout' 
quand  le  poids  ou  la  nature  des  monnaies  d'argent  et  d'or  fut  altéré.  M.  Say  a  fait  un 
relevé  des  plus  intéressants  de  ce  qui  se  produisit  à  ce  sujet  à  bien  des  reprises  en  France,  etc. 
Tous  les  peuples  procédèrent  de  même  instinctivement,  et  cela  aussi  bien  dans  l'antiquité  que 
de  nos  jours,  toutes  les  fois  qu'il  s'agissait  des  métaux  vraiment  précieux  2.  Ce  n'est  qu'à  des 
matières  de  peu  de  prix  comme  le  cuivre,  le  fer,  etc.,  que  des  législateurs  ont  pu  attribuer 
une  valeur  conventionnelle.  Le  cuivre,  le  fer,  le  papier  ne  sont  alors  que  des  moyens  d'échange; 
tandis  que  l'or  et  l'argent,  l'or  surtout,  sont,  ainsi  que  l'a  dit  J.  B.  Say,  de  véritables  mar- 
chandises, dont  l'altération  ou  la  plus  value  devient  une  fraude,  réprimée  et  punie  par  le  bon 
sens  public.  Ajoutons  du  reste  que  les  anciens  n'y  ont  eu  recours  que  dans  des  temps  de 
décadence  et  de  corruption.  Les  monnaies  persanes  sont  très  pures,  ainsi  que  la  plupart 
des  anciennes  monnaies  grecques  et  que  les  premières  monnaies  ptolémaïques.  Ces  dernières 
ont  fini  par  être  fraudées,  mais  seulement  par  l'addition  d'un  mauvais  métal;  car  aucune  des 
pièces  ptolémaïques  —  pas  plus  que  les  pièces  persanes  ou  attiques  —  ne  porte  une  ins- 
cription indiquant  la  valeur  (moyen  de  fraude,  très  inutile  d'ailleurs,  souvent  employé  par 
nos  rois).  Songer,  dans  de  telles  conditions,  à  une  valeur  fiduciaire  obhgatoire  supérieure  à 
celle  que  fournissaient  le  poids  lui-même  et  la  valeur  proportionnelle  des  métaux  entre  eux  me 
paraît  une  hypothèse  tout-à-fait  insoutenable.  D'ailleurs,  si  les  gouvernements  l'avaient  tenté 
et  avait  établi,   par  exemple,   comme  le  pense  M.  Mommsen  (Histoire  des  monnaies,  édition 

'  La  raison  en  est  bien  simple  :  Comme  l'a  dit  J.  B.  Say,  ce  n'est  pas  le  gouvernement,  mais  le 
penple  qui  fait  en  réalité  la  monnaie.  S'il  se  persuade  que  tel  objet  d'échange  est  une  bonne  monnaie  et 
qu'il  vaut  tant,  c'est  une  bonne  monnaie  et  il  a  la  valeur  indiquée.    Sinon  non. 

2  Si  le  métal  précieux  est  choisi  comme  monnaie  c'est  à  cause  de  sa  valeur  intrinsèque.  Il  n'est  pas 
loisible  au  gouvernement  de  changer  cette  valeur  à  sa  volonté. 


Seconde  lettre  sue  les  monnaies  égyptiennes.  75 


française,  t.  1,  p.  78 1  une  proportion  de  valeur  monétaire  de  1  à  16  à  côté  de  la  proportion 
de  valeur  intrinsèque  de  1  à  10,  il  serait  anivé  tout  simplement,  comme  la  fort  bien  dit 
M.  J.  B.  Say  (livre  1,  chap.  2J,  §  5),  que  Ion  aurait  dans  le  public  rectifié  la  proportion 
légale:  «Avant  la  refonte  des  pièces  d'or,  ordonnée  par  arrêt  du  30  octobre  1785,  les  louis- 
»  d'or  (de  24  livres)  se  vendaient  contre  de  l'argent  25  livres  et  quelques  sols.  On  se  gardait 
»  bien,  eu  conséquence,  de  payer  en  monnaie  d'or  les  obligations  stipidées  en  livres.  On  aurait 
y  réellement  pavé  25  livres  et  8  ou  10  sols  pour  chaque  fois  24  livres  contenues  dans  la  somme 
»  stipulée.  ...  En  Angleten-e,  ime  fixation  différente  a  produit  des  effets  contraires.  En  1728, 
»le  cours  naturel  des  échanges  avait  établi  la  valem-  relative  de  l'argent  fin  et  de  l'or  fin 
»dans  la  proportion  de  1  à  157(24  ou  pour  faire  une  fraction  plus  simple  15'/, 4-  ^^ais  l'argent 
réprouva  successivement  plus  de  demande  que  l'or;  le  goiit  de  la  vaisselle  et  des  ustensiles 
»  d'argent  se  répandit;  le  commerce  de  l'Inde  prit  un  plus  grand  essor  et  emporta  de  l'argent 
»de  préférence  à  l'or,  parce  qu'en  Orient  il  vaut  plus,  relativement  à  l'or,  qu'en  Europe;  finale- 
»ment  la  valem*  relative  de  l'argent  était  devenue  à  la  fin  du  siècle  dernier,  par  rapport  à 
»  celle  de  l'or,  comme  1  est  à  14 '/^  seulement,  tellement  que  la  quantité  de  monnaie  d'argent 
»qui  frappée  en  espèces  valait  3  li\Tes  17  sous  10 '/j  deniers  sterling  pouvait,  si  elle  était 
»  fondue  en  lingots,  se  vendre  4  livres  sterling  contre  de  la  monnaie  d'or.  Il  y  avait  donc  à^ 
»  gagner  à  la  fondre  en  lingots  et  l'on  perdait  en  faisant  des  paiements  en  espèces  d'argent. 
»Cest  iwur  cela  que,  jusqu'au  moment  où  la  banque  d'AngleteiTe  fut  autorisée  en  1797  à 
»  suspendre  ses  paiements  en  espèces,  tous  les  paiements  se  faisaient  en  or.  Des  lors  on  na 
y>plus  payé  qu'en  2)apier.y>  (J.  B.  Say,  livre  1,  chap.  21,  §  8.)  Ainsi  voilà  le  papier  accepté  eu 
AngleteiTe  universellement  au  moment  où  l'on  refuse  un  cours  de  proportion  légale  factice 
entre  deux  métaux  précieux.  Ou  consent  à  recevoir  un  chiffon,  comme  dit  Say,  en  quahté 
de  signe  d'échange,  quand  ou  ne  veut  pas  voir  frauder  une  «marchandise  précieuse-».  Et  ce 
fait  n'est  pas  isolé.  Nous  le  voyons  à  toutes  les  époques.  Les  Lacédémoniens  se  contentent 
longtemps  d'un  fer  sans  valeur,  les  anciens  Romains  de  cuivre  ',  etc.  Il  y  a  mieux  :  nous 
allons  Inentôt  voh-,  dans  un  des  ])rochains  paragraphes,  que  les  Égyptiens  ahandonnerent  l'étalon 
d'argent,  qu'ils  avaient  d'abord,  pour  prendre  tout-à-coup  l'étalon  de  cuivre,  c'est-à-dire  une 
monnaie  surtout  fiduciaire.  (C'est  à  peu  de  chose  près  le  même  phénomène  qui  s'est  passé 
à  Londres  pour  le  papier.^  —  Et  tout  cela  se  fait  sans  grande  difficulté  :  tandis  qu'il  est  im- 
possible à  toute  époque,  sous  aucun  gouvernement,  de  frauder  légalement  de  quelques  sous  une 
pièce  de  métal  très  précieux  sans  que  le  pubUc  s'en  aperçoive  et  remette  cette  pièce  à  son 
véritable  cours.  La  thèse  de  M,  Mommsex  croule  donc  sous  l'expérience  universelle  des  siècles. 

Mais  je  m'aperçois,  mon  cher  ami,  que  je  me  laisse  entraîner  dans  un  sujet  qui  serait 
plutôt  du  ressort  (pardonnez -moi  cette  expression")  de  l'Académie  des  sciences  morales  et 
politiques  que  de  celui  de  l'Académie  des  Inscriptions,  à  laquelle  vous  appartenez.  J'en  viens 
donc  au  plus  AÏte  à  la  partie  plus  technique  de  nos  études  et  à  1  examen  des  textes  anciens 
sur  lesquels  semble  s'appuyer  M.  Mommsex. 

Voici   son   argumentation    sur  les  monnaies   d'Athènes  :  «Xe  voyons -nous  pas  que  le 

1  Absohiment  comme  les  Abyssins  de  sel-monnaie,  d'autres  peuples  de  coquilles  sans  valeur,  etc.,  etc. 
Mais  chez  la  plupart  des  peuples  on  en  est  an-ivé  aux  métaux  précieux,  dont  le  cours  ne  peut  s'élever  trop 
tout-à-coup.  Voir  J.  B.  Sat,  livre  1,  chap.  21. 

10* 


76  Eugène  et  Victor  Revillout. 


»  comique  atliénien  Cratès  (Olymp.  LXXXII,  3,  304  de  Rome)  dit  positivement  que  Vt][).ivATo^j 
»7pucou  valait  huit  oboles?  C'est  bien  de  l'or  attique  que  Cratès  parlait  et  il  ne  faut  pas 
»  oublier  qu'à  cette  époque  l'unité  de  compte  n'était  plus  le  statère  de  Solon,  mais  la  drachme. 
»Si  nous  appliquions  au  statère  la  division  par  6,  ryj[^.i£/,Tcv  deviendrait  l'obole  d'or  et  tom- 
»berait  au  dessous  de  sa  valeur  métallique,  en  le  calculant  à  8  oboles  d'argent,  ce  qui  est 
»  impossible.  Au  contraire,  si  nous  considérons  Tr^xicXTov  comme  un  yjiJ-tojîoXtov,  nous  obtenons 
»  pour  les  pièces  d'or  les  valeurs  suivantes  qui  sont  dans  des  proportions  tout-à-fait  admissibles  : 

Pièce  Valeur  intrinsèque  du  métal        Valeur  monétaire 

»  Statère 20  drachmes     ...  32  drachmes 

»  Drachme 10         »  ...  16         » 

»Triobole 5        »  ...     8         » 

»Diobole 20    oboles    ....  32  oboles 

»  Obole  (hecté) 10        »        ....  16 

»Tritémorion '^'/i     ^'        ....  12       » 

»Hémiobolion  (hémihecton)      .     .     5         »        ....     8       » 

»  Tetartémorion 27-2     »        ....     4       » 

»  Huitième  d'obole IV4     »        ....     2       » 

«Ainsi  les  Athéniens  donnèrent  à  leurs  pièces  d'or  une  valeur  de  convention  dans  la 
»  proportion  de  1  :  16  et,  par  conséquent,  beaucoup  plus  élevée  que  leur  valeur  métallique.» 
La  base  de  cette  augmentation  repose  sur  l'assimilation  impossible  entre  l'hémihecton 
et  l'hémiobolion.  En  réalité  partout  et  toujours  c'est  le  diobole  qui  est  l'hecté  et  l'obole  qui 
est  l'hémihecton.  L'hémihecton  ou  obole  d'or,  valant  8  oboles  d'argent  d'Athènes,  pesait  un 
peu  plus  de  0*58.  On  trouve  de  ces  poids  à  Corinthe,  et  M.  Mommsen  (p.  81,  note  2)  les  con- 
sidère lui-même  comme  représentant  l'hémihecton  de  Corinthe.  Il  y  a  aussi  bien  d'autres 
pièces  de  ce  genre  à  Agrigente  de  Sicile,  etc.,  etc.  A  Athènes  ou  fondait  peu  d'or  et  l'on 
se  servait  surtout  soit  de  l'or  perse  (darique  égale  au  xpuaouç  d'Athènes),  soit  d'or  d'autre  pro- 
venance grecque.  Il  est  tout  naturel  qu'on  se  soit  servi  d'un  hémihecton  étranger,  car,  quoique 
en  dise  M.  Mommsen,  rien  ne  prouve  l'origine  athénienne  de  l'hémihecton  de  Cratès.  Ce  pas- 
sage nous  est  arrivé  dans  Pollux  IX,  62,  et  est  ainsi  conçu  :  -^[j-iexTov  Ècri  xpuaou,  [j.avOav£'.ç, 
o-ATÙ)  o^oAct.  Rien  de  plus  vague,  M.  Mommsen  dit  en  note  :  «C'était  évidemment  la  pièce 
d'or  bractéate  de  0'35,  qu'il  voulait  désigner.  »  Il  a  été  pour  les  bractéates  induit  en  erreur 
par  M.  Beulé.  Mais  on  est  maintenant  parfaitement  d'accord  pour  dire  que  les  bractéates  ne 
sont  pas  plus  des  monnaies  à  Athènes  que  dans  tous  les  autres  pays  (très  nombreux)  qui 
nous  en  ont  fourni  dans  l'antiquité.  La  pièce-monnaie  de  0-35  n'existait  pas.  Le  monnayage 
athénien  véritable  en  pièces  frappées  des  deux  côtés  (et  non  de  telle  sorte  que  l'eftigie,  unique, 
soit  en  creux  d'un  côté  et  en  bosse  de  l'autre)  ne  descend  pas  au-dessous  de  l'obole.  Cet  hémi- 
hecton ne  peut  donc  être  un  r^\).lo?>ok^ov  athénien  imaginaire.  C'est  ou  bien  un  r,[^.t£XTcv  d'or, 
appartenant  à  un  monnayage  étranger,  ou  bien  une  pièce  à  titre  bas.  En  effet,  les  pièces  pâles 
à  titre  bas  dans  lesquelles  il  entrait  20  à  25  pour  100  d'argent  (voir  Mommsen,  p.  8),  alors 
même  qu'elles  auraient  pesé  selon  les  poids  d'Athènes,  n'auraient  valu  que  8  oboles  et  non 
10  dans  la  circulation  publique.  Les  bractéates  étant  repoussées  par  tout  le  monde,  nous 
voyons  disparaître  en  même  temps  un  autre  argument  très  puissant  de  M.  Mommsen.  Dans  son 


Seconde  lettee  sur  les  monnaies  égyptiennes.  77 


tableau,  reproduit  plus  haut,  les  monnaies  d'or  correspondent  très  régulièrement  aux  monnaies 
d'argent  avec  la  proportion  de  1  à  10,  jusqu'à  l'obole  d'or  inclusivement,  c'est-à-dire  jusqu'à 
la  dernière  monnaie  réelle.  On  a  ainsi  un  statère  d'or  valant  20  drachmes  d'argent,  une 
drachme  d'or  en  valant  10,  un  triobole  5,  un  diobole  ou  hecté  valant  20  oboles  d'argent  ',  une 
obole  ou  hémihecté  10  oboles  2  d'argent.  Cette  proportion  de  la  valeur  réelle  est  au  moins  aussi 
satisfaisante  que  celle  de  la  valeur  monétaire,  proposée  par  M.  Mommsen.  Plus  bas,  pour  les 
bractéates,  il  n'en  serait  plus  de  même.  Aussi  M.  Mommsen  s'écrie-t-il  :  «  On  estime  qu'en  général 
»  l'or  vaut  10  fois  l'argent,  et  cette  proportion  peut  être  exacte  au  point  de  vue  du  commerce 
»  international,  car  l'Athénien  ne  pouvait  certainement  pas  faire  accepter  en  Perse  son  statère  d'or 
»  au-dessus  du  prix  auquel  la  darique  était  cotée  à  Athènes.  Mais  il  est  impossible  d'admettre 
»  que  les  Athéniens  aient  basé  sur  ce  rapport  la  valeur  de  leurs  diverses  monnaies.  L'échafau- 
»  dage  ingénieux,  consti-uit  sur  cette  supposition,  s'écroule  devant  les  faits  et  devant  l'impossi- 
»  bilité  qui  en  résulterait  de  faire  concorder  les  monnaies  d'or  avec  celles  d'argent.  Comment 
»  admettre,  par  exemple,  que  le  huitième  d'obole  en  or  valait  une  obole  un  quart  d'argent  3  plutôt 
»  qu'un  chiifre  rond.»  —  Du  moment  où  il  est  bien  démontré  et  admis  par  tous  les  numis- 
mates que  les  bractéates  ne  sont  nulle  part  des  monnaies,  tout  ceci  n'a  plus  de  raison  d'être 
et  nous  en  revenons  tout  prosaïquement  aux  données  qui  résultent  du  témoignage  universel 
des  anciens. 

Suivant  ce  témoignage,  la  darique  ou  statère  d'or  (xpucouç  didrachme  d'Athènes)  répondait 
comme  valeur  à  20  drachmes  d'argent.  Ce  statère  d'or  représentait,  comme  nous  l'avons  vu, 
le  sékel  faible.  Il  était  en  parallélisme  avec  le  statère  d'argent  ou  sicle  fort  (téti-adrachme) 
et  se  divisait  par  moitié  (PpD)  en  drachmes,  par  quart  en  trioboles,  par  6®  en  dioboles,  par 
12®  en  oboles.  Toutes  ces  subdivisions  se  retrouvaient  également  dans  le  monnayage  d'or  et 
dans  celui  d'argent  avec  des  proportions  décimales  fort  exactes.  Ce  qui  s'écroule  seulement  c'est 
le  système  ingénieux  de  M.  Mommsen  qui  voudrait  admettre  deux  proportions  contemporaines, 
l'une  réelle  et  l'autre  légale  et  fictive,  entre  l'or  et  l'argent.  On  ne  peut  pas  dire,  comme  il 
l'a  fait,  que,  si  Xénophon  parlait  de  la  propoiiion  de  1  à  10,  c'était  comme  valeur  réelle  des 
métaux  en  Grèce,  valeur  qui  n'empêchait  pas  la  proportion  de  1  à  16  pour  les  monnaies 
frappées  :  car  Lysias  (De  bonis  Aristophanis),  par  exemple,  nous  donne  pour  l'argent  monnayé 
à  Athènes  la  même  proportion  que  Xénophon. 

Il  s'agissait  de  l'argent  en  monnaies  attiques  que  Conon  avait  laissé.  Selon  l'orateur  il  avait 
consacré  dans  les  temples  de  Minei-ve  et  d'Apollon  de  Delphes  5000  statères  (100.000  drachmes), 
il  avait  attribué  à  un  neveu  10.000  drachmes,  à  son  frère  3  talents  (18.000  drachmes),  à  son  fils 
17  talents  (102.000  drachmes),  ce  qui  fait  40  talents  moins  1000  drachmes  ou  230.000  drachmes. 
Or,  le  texte  ajoute  :  toûtwv  oè  xsçâXatôv  -t  YÎ^vcTat  Tispt  TetxapâxovTa  lâXavca.  Le  total  se  monte  à 
quelque  chose  comme  40  talents  environ. 

1  C'est-à-dire  3  drachmes,  plus  un  diobole,  pièce  existante  en  argent  à  Athènes. 

2  C'est-à-dire  soit  une  drachme  et  un  tétrobole,  pièce  existante,  soit  deux  pentoboles,  pièces  également 
existantes  en  argent  à  Athènes,  Le  pentobole,  le  tétrobole  et  le  diobole  sont  aussi  bien  distingués  par  leur 
type  que  par  leur  poids. 

3  Cet  argument  dans  tous  les  cas  n'aurait  pas  été  décisif,  attendu  qu'il  existe  dans  le  monnayage 
d'argent  des  pièces  d'argent  représentant  Vobole  et  quart.  Ces  pièces  avaient  même  un  type  spécial  qui  les 
distinguait  également  bien  de  l'obole  et  demi  et  de  l'obole.  Dans  le  monnayage  ptolémaïque  en  cuivre 
l'obole  et  quart  existe,  aussi  bien  que  l'obole  et  demi  et  l'obole. 


78  Eugène  et  Victor  Reyillout. 


Or  si  au  lieu  de  20  drachmes,  ou  prenait  comme  valeur  du  statère  32  drachmes  d'ar- 
o-ent  ainsi  que  le  voudrait  M.  Mommsen,  puisque  le  statère  d'or  pesait  2  drachmes,  ce  total 
se  trouverait  tout -à- coup  augmenté  de  10  talents  (60.000  drachmes),  puisque  5000  statères 
vaudraient  160.000  drachmes  au  lieu  de  100.000.  Ce  ne  serait  donc  plus  environ  40,  mais 
environ  50  que  représenterait  le  total  arrondi'. 

Ménandre,  dans  sa  comédie  intitulée  Ilapay.aôr.y.Y;  ip.  38 — 39  de  l'édition  Didot)  parle 
aussi  d'un  jeune  Athénien  auquel  son  père  donne  un  talent  d'or  : 

oAy.ï;v  TaAavTou  /p'jdîcj  ce,  Traie bv, 

ecTTYjy.a  Tï;pwv 
et  il  ajoute  immédiatement  après  : 

[j.x/.ip'.oç  èy.£l!voc  Béy.a:  TaXavia  v.y.xy.^y.-^;6i'/. 
«L'heureux  coquin  qui  mange  10  talents»  (d'argent),  texte  dont  PoUux  (Hultsch  290) 
concluait  déjà  avec  raison  la  proportion  de  1  à  10  entre  l'or  et  l'argent  à  Athènes.  C'est 
exactement  un  calcul  semblable  à  celui  par  lequel  Xénophon^  assimile  3000  dariques  d'or  à 
10  talents  d'argent,  et  cela  ne  doit  pas  nous  étonner,  puisque  les  villes  de  l'Asie  mineure  dans 
lesquelles  Xénophon  place  le  fait  dont  il  parle,  avaient  été  longtemps  soumises  aux  Athéniens, 
avant  de  l'être  aux  Perses,  comme  elles  l'étaient  du  temps  du  jeune  Cyrus. 

Nous  avons  donc  là  des  preuves  positives  de  l'exactitude  des  évaluations  de  la  totalité 
des  métrologistes  anciens,  recueillies  par  Hultsch,  et  nous  affirmant  dans  le  monde  attique 
la  proportion  de  1  à  10  entre  l'or  et  l'argent  3.  Cette  proportion  attique  entre  l'or  et  l'argent 
suivit  tout  naturellement  le  système  des  monnaies  attiques,  étendu  par  Alexandre  à  tout  l'en- 
semble de  son  empire  ^.  Elle  représentait  du  reste  à  ce  moment  la  valeur  réelle  que  le  com- 
merce international  avait  peu  à  peu  établie  par  suite  de  l'abondance  de  plus  eu  plus  grande 
de  l'or.  Seulement  en  Egypte  on  réduisit  le  poids  de  la  drachme  et  de  ses  multiples,  ou,  pour 
parler  plus  exactement,  des  statères  (sicles  fort  et  faible)  et  de  leurs  subdivisions,  de  manière 
à  les  faire  concorder  avec  l'ancien  argenteus,  dont  la  valeur  fut  identique  à  celle  du  statère 
ou  didrachme  d'or,  appelé  en  démotique  aicreus  comme  le  /.ojctouç  grec  quil  représentait.  Mais 
la  proportion  resta  de  1  à  10  et  non  de  1  à  12 1/2  comme  l'ont  pensé  pour  l'Egypte  MM. 
Letronne  et  MoMMSEN  (p.  54).  Nous  avons  déjà  eu  plus  haut  l'occasion  d'examiner  les  argu- 
ments de  ces  savants  illustres.    M.  Letronne  s'appuyait  sur  la  supposition  impossible  dun 

1  L'habitude  d'aiTondir  ainsi  les  chiffres  était  générale  chez  les  orateiu's.  Dans  la  première  action 
contre  Aphobos,  Démosthènes  évalue  d'abord  dans  la  fortune  de  son  père  les  capitaux  productifs  à  4  talents 
et  5000  drachmes,  les  autres  à  8  talents  plus  30  mines,  et  il  indique  comme  total  14  talents  au  lieu  de 
13  talents  2000  drachmes.   Il  y  a  beaucoup  d'exemples  analogues. 

2  Loco  citato. 

3  Cette  proportion  se  maintint,  du  reste,  en  Grèce  pendant  de  longs  siècles  puisque  Tite  Live  (livr.  XXXVIII) 
nous  la  donne  encore  pour  le  traité  des  Étoliens  :  «  pro  argento  si  aurum  dare  mallent,  darent  convenit,  dum 
»pro  argenteis  decem  aureus  unus  valeret».  Polybe  (XXII,  15,  8)  reproduit  aussi  en  grec  les  clauses  du 
même  traité  des  Etoliens  avec  l'équivalence  d'une  mine  d'or  contre  dix  mines  d'argent  «en  argent  attique  ou 
équivalent».  C'est  donc  toujours  de  la  proportion  gréco-attique  qu'il  s'agit.  Mais  il  faut  noter  que  dans  le 
bas  empire  la  proportion  entre  l'or  et  l'argent  en  vint  peu  à  peu  à  osciller,  comme  l'a  prouvé  M.  Mommsen, 
entre  le  taux  de  l'antique  proportion  persane  (de  1  à  13I/3)  et  le  taux  actuel  (de  1  à  15). 

••  Nous  avons  eu  l'occasion  de  voù-  dans  la  précédente  lettre  que  la  proportion  persane  de  13'  3  avait 
été  aussi  pendant  quelque  temps  celle  du  monde  oriental.  Les  Phéniciens  dune  part  et  certains  Grecs 
ioniens  de  l'empire  perse  de  l'autre  semblaient  l'avoir  abandonnée  cependant  antérieurement  à  Alexandre  pour 
adopter  la  nouvelle  propoi-tion  de  1  à  10,  qu'avaient  également  les  Athéniens. 


Seconde  lettee  sur  les  monnaies  égyptiennes.  79 

statère  octodrachme  et  sur  la  comparaison  des  données  d'un  papyrus  de  Leide,  d'un  papyrus 
de  Paris  et  d'un  passage  de  Pollux.  Nous  avons  longuement  discuté  tous  ces  témoignages 
qui,  comme  nous  l'avons  vu,  ne  prouvent  rien  pour  la  thèse.  Tout  établit  au  contraire  l'exac- 
titude de  la  proportion  de  1  à  10  dans  le  monnayage  des  premiers  Ptolémées,  proportion 
conservée,  d'après  les  documents,  même  après  l'établissement  de  l'unique  étalon  de  cuivre. 
Mais  à  partir  de  ce  moment,  la  seule  monnaie  légale  devenant  le  cuivre,  il  fallut  spécifier 
expressément  dans  les  actes  chacune  des  autres  monnaies,  qui,  dans  l'espèce,  ne  devaient  plus 
être  que  des  lingots  vérifiés  et  frappés  (comme  le  proposait  de  nos  jours  M.  J.  B.  Say)  pour 
les  deux  métaux  précieux,  mais  qui  le  plus  souvent  à  cette  dernière  période  lagide,  l'étaient 
bien  frauduleusement.  L'examen  des  monuments  numismatiques  montre  en  effet  que  les  pièces 
d'argent  ne  furent  guère  en  bon  métal  que  tant  que  subsista  l'étalon  d'argent,  et  qu'ils  devinrent 
en  billon  lors  de  l'étalon  de  cuivre.  Ce  résultat  n'est  certainement  pas  celui  qu'aurait  désiré 
M.  J.  B.  Say  dans  son  projet  de  réforme,  d'ailleurs  si  sage. 

F,  Proportion  de  valeur  entre  l'argent  et  le  cuivre. 

De  tout  ce  qui  précède  il  résulte  que,  selon  le  calcul  déjà  fait  par  M.  Leemans,  il  faut 
nécessairement  admettre  dans  le  papyrus  de  Leide  la  proportion  du  taux  légal  de  1  à  120 
entre  l'argent  et  le  cuivre,  déjà  proposée  aussi  par  Bernardino  Peyron  d'après  les  prix  com- 
paratifs du  blé  en  cuivre  et  en  argent.  Or,  ce  taux  légal  est  —  nous  l'avons  vu  —  formellement 
indiqué  dans  les  documents  démotiques,  qui  parlent  toujours  de  monnaies  de  cuivre  dont  l'équi- 
valence est  de  24  pour  Yjo  «par  rapport  aux  monnaies  parallèles  d'argent  du  même  nom  et 
du  même  poids  »  '. 

La  question  est  donc  définitivement  jugée.  Mais  il  faut  maintenant  la  débarrasser  de 
plusieurs  arguments  que  M.  Lumbroso  avait  apportés  pour  confirmer  cette  proportion  de 
1  à  120.  Selon  l'éminent  savant  italien,  quand  on  achetait  des  pièces  d'argent  frappées,  on 
tenait  compte  de  leur  poids  ou  de  leur  plus  ou  moins  grande  pureté.  Les  pièces  des  premiers 
Lagides  en  argent  fin  passaient  soit  au  pair  du  taux  légal,  soit  même  au-dessus  du  pair.  Au 
contraire,  les  pièces  d'argent  frappées  sous  les  rois  postérieurs,  qui  étaient  de  mauvais  métal 
ou  de  mauvais  poids,  se  voyaient  réduites  dans  le  cours  ordinaire  du  marché  à  leur  valeur 
réelle.  Ptolémée  aurait  ainsi  acheté  des  drachmes  d'argent  au  taux  de  1  à  106.  M.  Lumbroso 
s'appuyait  pour  cela  sur  un  passage  du  papyrus  grec  59  du  Louvre  ainsi  lu  par  ses  éditeurs  : 

1  Cette  proportion  de  1  à  120  entre  l'argent  et  le  cuivre  est,  du  reste,  celle  qui  subsista  dans  le  monde 
romain  sous  l'empire.  M.  Mommsen  a  parfaitement  établi  ce  point  dans  son  Histoire  de  la  monnaie  romaine, 
tome  III,  p.  155  et  suiv.  Il  cite  à  ce  sujet  le  décret  de  396,  donné  dans  le  code  théodosien,  XI,  21,  2,  et 
dans  le  code  de  Justinien,  X,  29,  1,  des  gloses  monétaires  grecques,  des  inscriptions  latines,  etc.,  qui  ne 
peuvent  laisser  l'ombre  d'un  doute.  Dans  son  premier  volume  (p.  17)  il  concluait  même  que  telle  devait 
être  aussi  la  valeur  vénale  du  cuivre  par  rapport  à  l'argent  sous  les  Ptolémées.  Mais  il  pensait  que  les 
monnaies  de  cuivre  avaient  été  tarifées  au  double,  ce  qui  est  certainement  inexact  d'après  nos  documents 
démotiques  et  grecs,  indiquant  la  valeur  de  1  à  120.  Cette  proportion,  nous  la  retrouvons  également  (nous 
aurons  occasion  de  l'établir  bientôt)  dans  le  système  des  monnaies  attiques,  système  qui  servit  de  modèle 
aux  Ptolémées  et  à  la  plupart  des  peuples  de  l'antiquité.  Il  est  vrai  que  M.  Mommsen  (t.  I,  p.  102  et  suiv.) 
admet  la  proportion  de  1  à  250  en  Sicile  (et  par  imitation  à  Eome)  à  l'ancienne  époque.  Mais  son  calcul 
ne  repose  que  sur  une  évaluation  très  douteuse  des  litra  de  Sicile,  interprétées  d'après  un  passage  d'Aristote, 
et  la  supposition  d'un  talent  sicilien  qu'il  reconnaît  très  problématique.  Je  crois  qu'il  faut  donc  renoncer 
à  cette  estimation  et  s'en  tenir  aux  données  positives  et  aux  textes  précis  recueillis  par  M.  Mommsen  et 
par  nous. 


80  Eugène  et  Victor  Revillout. 


a'KOUM'Hoq  'ktoXeijmox.  xwt  Traxpci  yxipeiv.  tov  aovov  tcov  y^aXxtov  aTrea-r^xa  \—  M  ap^uptou  |—  ACE 
y.at  -âapa  C70u  1—  A  TïcTrpaxa  to  oOoviov  f—  4>  -mi  xo  £t[j.aTtov  f—  TII  |^  â  A  |—  PM,  «Apollouius  à 
»  Ptolémée  sou  père,  salut.  Je  reuds  le  couipte  des  chalques  ;  drachmes  40  d'argent  :  drachmes 
»  4200  :  de  toi  drachmes  1000  :  j'ai  veudu  l'étoffe  drachmes  500  et  l'habit  drachmes  380  :  total  : 
»1  taleut  140  drachmes  (ou  6140  drachmes).»  —  «Or,  je  dis  —  reprend  M.  Lumbroso  — 
»4260  +  1000  +  500  -f-  380  =  précisément  6140.  Les  parties  et  le  total  s'accordent  par- 
»faitement.  L'addition  embrasse  les  4260,  1000,  500,  380  drachmes,  laissant  de  côté  le  chiffre 
»40  du  commencement;  donc  l'auteur  de  l'addition  réduit  les  40  drachmes  d'argent  en  cuivre 
»(4260)  pour  pouvoir  les  sommer  avec  les  autres  drachmes  de  la  même  espèce  1000,  500, 
»380,  ce  qui  donne  106  drachmes  de  cuivre  pour  une  drachme  d'argent».  Ce  calcul  était 
très  admissible.  Malheureusement  le  texte  original  porte  très  visiblement  H  (8)  au  heu  de 
M  (40).  Les  8  drachmes  d'argent  en  question  n'ont  aucun  rapport  avec  les  drachmes  de 
cuivre  qui  suivent  :  elles  sont  mises  à  part  :  et  l'addition  ne  porte  que  sur  les  drachmes 
de  cuivre. 

Ajoutons  que  ces  8  drachmes  d'argent  (précieusement  conservées)  figurent  déjà  dans 
les  comptes  de  l'année  précédente.  Là  aussi  elles  ne  sont  pas  assimilées,  comme  on  l'a  cru, 
avec  les  drachmes  de  cuivre  qu'elles  accompagnent.  Voici  ce  que  M.  Lumbroso  [disait  au  sujet 
de  ce  second  texte  :  «Au  revers  du  22''  papyrus  britannique  se  trouve  une  autre  addition 
.»qui  porte  :  «total  drachmes  4100,  d'argent  drachmes  8,  total  3  (?)»,  c'est-à-dire  je  pense  :  total 
«drachmes  4100,  soit  8  drachmes  d'argent  pour  1000  drachmes  environ  de  cuivre,  en  tout 
»  3  drachmes  d'argent  (?)  —  ce  qui  donnerait  125  drachmes  de  cuivre  pour  une  drachme  d'ar- 
»  gent  » . 

Le  texte  portait  suivant  la  copie  de  Forshall  :  toutojv  aoyo;  aa^r^q  toOr/io;  o6ovtou  Ttfj.ov  \-  B 
(fyMpr,v.  OTvBova  [—  BP  (^  |—  AP  apjjpwu  |—  H  /  A  T.  La  sigle  du  talent  7\  excluait  l'opinion  de 
M.  Lumbroso  et  l'idée  de  trois  drachmes  d'argent.  D'ailleurs  —  comme  le  reconnaît  M.  Lumbroso 
lui-même  —  Forshall  (dont  la  transcription  lui  servait  de  texte)  disait  que  le  T  est  douteux. 
Aussi  suis-je  allé  revoir  le  document  pendant  mon  dernier  voyage  à  Londres,  et  j'ai  constaté 
que  le  papyrus  portait  très  lisiblement  T  et  non  T.  Forshall  avait  été  sans  doute  effrayé  par 
le  chiffre  de  300  talents.  Mais  les  documents  analogues  de  la  même  époque  nous  prouvent 
qu'il  faut  lire  «un  talent  et  300  drachmes».  Notons  de  plus  qu'à  la  ligne  suivante,  ajoutée 
après  coup,  après  un  blanc,  ou  trouve  un  chiffre  qui,  avec  les  4100  drachmes  du  premier  total, 
complète  le  total  général  :  un  talent  et  trois  cents  drachmes.  On  lit  en  effet  :  «tuoXXwv  .... 
f—  BC.  «Apollonius  (ou  à  Apollonius)  drachmes  2200.» 

Or,  je  dis  :  2000  -\-  2100  =  4100.  D'une  autre  part,  4100  +  2200  =  6300  ou  un 
talent  et  300  drachmes.   Les  8  drachmes  d'argent  sont  donc  aussi  comptées  à  part. 

La  seule  question  qui  peut  être  douteuse,  c'est  celle  de  savoir  s'il  s'agit  dans  la  dernière 
ligne  d'un  chiffre  cherché  sur  un  total,  ou  d'un  chiffre  d'abord  oubUé  dans  ce  total.  En  effet, 
la  première  addition  est  annoncée  par  (^  sigle  bien  connue  représentant  -^v^eTT.'.;  la  seconde  par 
un  simple  trait  /  désignant  souvent  aussi  des  totaux,  mais  susceptible  d'une  autre  inter- 
prétation. 

On  peut  donc  traduire  : 


Seconde  lettee  sue  les  monnaies  égyptiennes.  81 

Compte  de  ces  choses 
Asgès,  fils  de  Tothés  (a  payé  )  le  prix  de  l'étoffe     .    2000  drachmes 

Habit  de  lin  livré  à  Phatrès 2100  drachmes 

ce  qui  fait    4100  drachmes 
—  sans  compter  :  8  drachmes  d'argent^  —  sur  uu  talent  et      300  drachmes 
(de  cuivre  actuellement  en  caisse) 

(Complément  :  )     Apollonius 2200  drachmes 

ou  bien  croire  que  l'auteur  du  compte,  en  copiant  son  calcul  et  reportant  le  total,  ne  s'était 
aperçu  qu'après  coup  de  l'oubli  d'un  des  chiffres  {ce  qui  lui  arrive  très  souvent'). 

Au  fond  cela  revient  à  peu  près  au  même,  et  dans  l'un  et  l'autre  cas  les  8  drachmes 
d'argent  n'ont  rien  à  voir  dans  le  compte  des  drachmes  de  cuivre.  Elles  restaient  en  caisse, 
précieusement  conservées,  sans  qu'on  y  touchât,  et  c'est  pour  cela  que  nous  les  retrouvons  dans 
les  comptes  successifs  de  deux  années  —  à  côté  de  sommes  fort  diverses  en  cuivre. 

Aucun  fait  n'est  donc  encore  venu  établir  les  écarts  de  1  à  106  et  de  1  à  125  qu'admet 
M,  LuMBROso  autour  de  la  proportion  légale  de  1  à  120. 

On  se  serait  d'ailleurs  mal  expliqué  la  plus  value  des  drachmes  de  cuivre  (au-dessus 
du  taux  légal)  sur  les  monnaies  d'argent  même  de  bas  métal;  car  la  valeur  du  cuivi-e  est 
de  beaucoup  la  plus  conventionnelle. 

Tout  ce  que  nous  trouvons  de  réel  —  en  dehors  de  la  proportion  légale  —  c'est  le  prix 
de  change  que  la  banque  royale  demandait  aux  publicains  qui  voulaient  payer  en  cuivre  les 
fermes  dont  l'état  exigeait  le  prix  en  argent  ou  bien  payer  en  cuivre  «dont  le  change»  les 
fermes  dont  l'état  exigeait  le  prix  en  cuivre  isonome. 

Je  dois  dire  que  ce  passage  du  papyrus  62  du  Louvre  n'a  pas  été  compris  jusqu'ici. 
•  La  publication  académique  portait  :  twv  ce  r.poz  ap(Yup)'.ov  wvwv  TrpoaStaYpatj/ouctv  x/Xa^r^^f  w; 
rr,z  iJi.va;  5  /.a-  y.aTaYWY'sv  .  .  .  v.t.  Ti|JLr,v  s-up'.Bwv  y.*-,  t'  aÀXa  av/;Àa);aaTa  A  J  e  ur:'  e;va'.  I  B  /  -/.xi  twv 
T.poç  yxK-AC'f  isovo.y.({i)v\  -TaTY;pac  [xev  X^pcç  -r,q  'j'r.oy,v.\iVir,z  eic,  rr,v  £7:tsx£'JY;v  Spay[ji,Y;ç  A  7,x:  e'.q  to 
y.aTaYcoY'.îv  aAAxç  B  wst  ctvat  F.  twv  Se  Xo'.zwv  wvwv  twv  (~poç  xaAy.ov)  /(opiç  "wv  aro  tou  yj'.piG[>.ou  .... 
y.a'.  £'.ç  T'.;j.r//  sz-jpiîwv  y.x;  Ta  3:vr,).o);xaTa  .... 

M.  RoBiou  dit  à  propos  de  ce  texte  :  «  Une  indemnité  proportionnelle  était  accordée  aux 
»fenniers  pour  frais  de  change  r.pzz  ap-fjp-.cv  xlhx-^;r,ç,  frais  de  versement  /.aTavwvicv,  frais  de 
»  bureau  T'.;ji.r,v  szjp:Bwv,  et  autres  dépenses  accessoires,  en  tout  douze  drachmes  par  mine  (12  pour 
»  100)  dont  V-2  drachme  pour  le  change  ....  :  si  le  versement  se  faisait  en  or  (sraTYipcç),  on 
»  accordait  2  drachmes  par  mine,  en  sus  de  celle  qui  était  accordée  pour  le  matériel  du 
»  transport  (rr;;  ■jzoxc'.fjLsvr,;  sic  tr/;  stt'.txsj-/;;)  ».  Il  est  difficile  d'aller  plus  loin  dans  l'en-eur. 

M.  LuMBRoso  avait  l'esprit  trop  fin  pour  se  laisser  entraîner  jusque  là.  Il  paraît  avoir 
même  compris  une  partie  de  ce  règlement  et  vu  qu'il  s'agissait  non  d'une  indemnité  accordée 
par  l'Etat  aux  fermiers,  mais  d'un  droit  perçu  par  l'Etat  sur  les  mêmes  fermiers.    Il  sentit 

1  Dans  le  papyrus  54  du  Louvre  on  avait  oublié  ainsi  dans  le  compte  de  la  2^  colonne  un  article  de 
1000  drachmes,  et  on  avait  additionné  malgré  cela  1  talent  2700  drachmes  (au  lieu  d'un  talent  1700  dr.). 
Mais  le  compte  fut  rétabli  tel  qu'il  devait  être  dans  la  col.  3.  Dans  le  papyrus  56,  au  contraire,  on  s'était 
d'abord  trompé  de  100  drachmes  en  réalité,  et  le  second  compte  rectifié  tient  compte  de  la  différence  dans 
un  nouveau  total. 

11 


82  Eugène  et  Victoe  Revillout. 

aussi  que  la  coupe  de  la  seconde  phrase  était  mauvaise  dans  l'édition  académique,  et  que 
cette  phrase  devait  commencer  par  les  mots  y.x-.  -wv  T.pz:  -/aXy.iv  '.o-îvo;j.  ....  au  lieu  de  com- 
mencer après  ces  mots.  Mais  alors  le  mot  c-avr^px-  venait  l'embarrasser.  Il  n'hésita  donc  pas 
à  voir  dans  ces  statères  des  statères  de  cuivre  —  statères  de  cuivre  ^  qui  n'ont  jamais  été 
admis  par  aucun  ancien  ni  par  aucun  numismate  moderne. 

En  réalité  le  texte,  revu  par  moi  avec  soin,  ne  fait  aucune  mention  de  statères,  et  il 
porte  très  visiblement  ce  qui  suit  : 

sic 

TOjn  2>.e  npoc  i^px^irpion  wncoii  npoc:^iekX5pô>.'v^fOTCiïi  A,A.A.ewT^Hi\  toc  thc  .KvndkC  i  ■_^  c-K«ki  Kev.T&.- 
TWK'ion  )  Hôki  TiAVHti  cn^pia^ton  rôwI  Te^AA-ô».  eknHA.toM&.Ten.  «v^c  (oct  ein«.,i  i  dj.  Rik-i  Tcon  npoc 
;)i^&.Akoii  iconojkv  ....  ziTTHpekC  .v\.en  [x^topic  thc  -rnOReiMcnHC  cic  thiv  cniCRCTHti  2^pev5(^.s\.HC  «>. 
RCk.1   eic  TO  RA.TôkX'to^ion  dk^^Aevc  û  coct'  eindki  xr.  TCon  a^^c  Aoinûjji  (oncon  np(oc  3(;«kîV.ROn  ....  ^topic 

Tton    èvTlO    TOT    3(;£ipiCJA.O-r Rôkl    CJC    TIJ«.Htl    Cmvpia^tOH    Rôkl    Tô>.    eiwnHA.aiAV.&.Tèk 

Le  mot  zvTHpô.c  à  la  place  de  cTevTHpe^c  est  tout-à-fait  certain.  Il  est  écrit  identiquement 
comme  dans  cette  phrase  de  la  col.  4  du  même  papyrus  :  ai  o'  avaçcpa;  p.£p'.s6r(SovTa'.,  tt,;  jj.sv 
Lurr^paç  Tr^z  ytv^.ep'.rr,q  îça.aYîvcj,  hz^(Ccp.t^/z'j  tî'j  p.r//c:  e;  r,[^.îp(ijv  As,  r^c  c£  6£p'.vr,ç  îç  •^y.îpwv  y.î,  twv 
aXXcov  covtov   £y.  ts'j  y.aTa  Ao^cv  twv  u-apyouswv  |J.£Xp'.  toj  A  L  etc. 

L'impôt  sur  le  ^.u-:;;  (orthographe  égyptienne  ordinaire  ^  de  î^j6o;,  bière)  était,  en  effet,  un 
des  plus  importants  à  cette  époque.  Le  papjTus  64  du  Louvre  met  la  ferme  de  ljty;p5:  à  la 
tête  de  toutes  les  autres  fermes  payables  en  cuivre  et  parmi  lesquelles  se  trouvent  les  impôts 
sur  les  différentes  denrées  alimentaires,  sur  le  vin,  sur  le  nitre  \  etc.  C'est  pour  cela  que  la 
circulaire  administrative  aux  employés  des  finances  qui  porte  le  n°  63  et  d'où  sont  extraits 
les  deux  passages  reproduits  plus  haut,  cite  toujours  aussi  en  première  ligne,  comme  exemple, 
la  ferme  de  î^uTY;px  toutes  les  fois  qu'il  est  question  de  fermes  payables  en  cuivre. 

Voici  donc  l'explication  que  nous  proposerons  pour  notre  texte  relatif  aux  frais  de 
change,  explication  dans  laquelle  nous  supposerons  connus  les  renseignements  nouveaux  donnés 
plus  loin  par  nous  sur  les  sigles  des  fractions  de  la  drachme. 

«Pour  les  fermes  (payables)  en  argent  (et  que  les  fermiers  voudront  payer  en  cuivre) 
»on  calculera  (en  outre  de  la  somme  principale)  un  change  {a\KX'{r,\)  d'une  drachme  deux 
»  oboles  et  demie  par  mine,  plus  pour  transport  (du  cuivre^i  y.xiaYcovisv  un  triobole,  pour  prix 
»des  corbeilles  (a-upiSwv)  et  autres  frais  une  drachme  et  un  triobole,  ce  qui  fait  en  total 
»  12  drachmes  et  un  triobole. 

«Quant  aux  fermes  (payables)  en  cuivre  isonome':  pour  la  ferme  de  çjrriçy.  d'abord  —  en 
»  dehors  de  la  drachme  destinée  au  chargement  (eT.>.<7/.zur^  —  on  calculera  deux  autres  drachmes 
»pour  transport,  ce  qui  fait  trois  drachmes.  En  ce  qui  concerne  les  autres  fermes  payables 
»  en  cuivre,  etc.  » 

Ceci  nous  amène  à  la  question  des  étalons  monétaires  dont  nous  avons  maintenant 
à  parler. 

^  Ces  mots  d'un  des  songes  de  Ptolémées  yaÀy.oj;  ataTr.pîioj;  que  M.  Leemaxs  traduit  justement 
chalcos  staterts  pondu.9  cequante-s  exchient  l'idée  de  statères  de  cuivre  proprement  dits,  c'est-à-dire  portant  par 
eux-mêmes  le  nom  de  statères. 

2  Une  déchirure  n'a  laissé  que  i —    Le  i  numéral  est  long  comme  cela  était  assez  l'habitude  alors. 

^  Conf.  papyrus  60  de  la  publication  académique. 

*  Voir  la  publication  de  ce  papyrus,  faite  par  nous  dans  ce  numéro  même. 


Seconde  lettre  sur  les  monnaies  égyptiennes.         83' 
§  4.  Étalons  monétaires. 

Lors  de  l'établissement  de  la  monarchie  Lagide  les  monnaies  avaient  été  réglées  dans 
des  conditions  analogues  à  celles  quelles  ont  aujourd'hui.  En  tête  de  la  série  se  trouvaient  : 
1°  l'or,  valant  10  fois  plus  que  l'argent;  2"  l'argent,  principal  étalon  monétaire  en  Egypte 
comme  à  Athènes.  Quant  aux  petites  monnaies  divisionnaires,  elles  étaient  représentées  par 
des  pièces  de  cuivre.  Ces  pièces  de  cuivre  étaient  toutes  de  faibles  dimensions  lors  du  mon- 
nayage au  type  et  au  nom  d'Alexandre,  pendant  l'époque  de  transition  précédemment  décrite, 
qui  préparait  le  nouveau  monnayage  ptolémaïque,  et  probablement  pendant  la  première  période 
de  ce  monnayage.  A  l'ancienne  époque  c'était  en  argent  que  l'obole  était  frappée,  et  l'on  ne  se 
servait  de  cuivre  que  pour  les  petites  sommes  inférieures  à  la  drachme  et  encore  —  comme  nous 
le  verrons  —  les  calculait-on  par  rapport  à  l'argent  en  quahté  de  subdivisions  de  la  drachme 
d'argent  :  ou,  pour  mieux  et  plus  simplement  dire,  de  la  drachme;  car  la  drachme  de  cuivre  ne 
paraît  pas  avoir  existé  à  ce  moment.  Tout  semble  nous  prouver  au  contraire  que  l'on  suivait 
encore  en  Egypte  l'ancienne  division  athénienne,  c'est-à-dire  que  la  drachme  se  partageait  en 
6  oboles,  l'obole  en  8  chalques  (48"  de  la  drachme^  etc.  Les  textes  nous  donnent  à  ce  sujet 
des  indications  très  précises  et  fort  importantes  qui  ne  permettent  plus  d'hésiter  h  ce  sujet. 

Eu  effet,  on  n'a  pas  remarqué  jusqu'ici  que  nous  possédions  en  grec  même  plusieurs 
documents  contemporains  d'une  période  monétaire  toute  différente  de  celle  que  nous  four- 
nissaient les  autres  papyrus  grecs  et  pleinement  parallèle  à  celle  de  nos  papyrus  démotiques 
de  la  première  époque  Lagide. 

Pendant  cette  première  période  nous  ne  trouvons  mentionné  que  l'étalon  d'argent;  tandis 
que  dans  la  dernière  c'est  l'étalon  de  cuivre  qui  se  rencontre  partout,  et  les  monnaies  d'argent 
ne  deviennent  plus  que  des  monnaies  exceptionnelles. 

Sur  ces  points  l'accord  est  complet  dans  les  deux  langues. 

Nous  avons  vu  plus  haut  que  sous  Soter,  Philadelphe  et  Evergète  les  seules  monnaies 
mentionnées  dans  les  actes  démotiques  que  nous  possédons  étaient  des  monnaies  d'argent, 
c'est-à-dire  1°  le  sékel  ou  tétradrachme,  2"  l'argenteus,  valant  5  sekels  ou  20  drachmes.  Quant 
aux  monnaies  plus  faibles,  elles  étaient,  disions -nous,  calculées  par  rapport  à  ces  premières 
unités  et  comme  fractions  soit  de  l'argenteus,  soit  du  sékel. 

C'est  identiquement  le  même  système  que  nous  trouvons  dans  les  papyrus  grecs  du 
même  temps.  Seulement,  comme  nous  l'avons  remarqué  déjà,  au  lieu  de  prendre  pour  unités 
de  compte  les  principales  et  les  plus  fréquentes  monnaies  de  cette-  époque,  les  Grecs  calcu- 
laient d'après  la  drachme  ('/^  du  sekel)  et  ses  subdivisions. 

Venons  en  maintenant  à  l'examen  de  ces  curieux  textes  grecs  dont  on  n'avait  pas 
compris  jusqu'ici  l'importance.  L'un  de  ces  documents  est  daté.  C'est  le  papyrus  Q  de  Leide 
de  l'an  26,  19  Tybi,  de  Philadelphe.  'SI.  Leemans  avait  voulu  l'attribuer  à  Ptolémée  Denis. 
Mais  ce  prince  ne  s'appelait  pas  Philadelphe.  Son  titre  officiel  était  Philopator- Philadelphe. 
Jamais  dans  aucun  texte  grec  ou  démotique  la  seconde  expression  n'était  séparée  de  la  pre- 
mière et  celle-ci,  seule,  s'employait  parfois  isolément  ainsi  que  nous  le  voyons  dans  le  papyrus 
Khind.  On  peut  donc  affirmer  avec  certitude  qu'il  ne  s'agit  pas  de  Philopator-Philadelphe  dans 

le  papyrus  de  Leide.  D'ailleurs,  au  point  de  vue  paléographique,  le  texte  de  Leide  est  presque 

11* 


84  Eugène  et  Victor  Revillout. 


identique  à  l' enregistrement  grec  du  papyrus  démotique  de  l'an  33  de  Philadelphe  ^  que  nous 
possédons  au  Louvre  et  dont  le  protocole  détaillé  ne  permet  aucune  erreur.  Dans  ce  texte  le 
Trpr/.-wp  Nicator  reconnaît  avoir  reçu  du  docymaste  Orsenouphis  la  somme  de  vingt  drachmes 
d'argent  due  au  Philadelphe  tw.  ç'.XaBsAtpo)'.  pour  une  irrégularité  commise,  paraît-il.  Une  ins- 
cription grecque  —  également  du  règne  de  Philadelphe  —  que  notre  cher  maître  M.  Miller 
va  publier,  contient  une  série  d'amendes  à  payer  par  ceux  qui  entreraient  dans  le  temple  de 
Ptolémaïs  après  certaines  impuretés  légales.  Les  chitfres  montrent  avec  certitude  qu'il  est 
question  de  drachmes  d'argent. 

Ces  documents  grecs  sont  complètement  parallèles  à  nos  documents  démotiques  de  la 
première  période  lagide,  mentionnant  seulement  l'étalon  d'argent,  et  même  à  des  textes  hiéro- 
glyphiques. En  effet,  une  troisième  source  d'informations  s'offre  maintenant  à  nous  :  M.  Na ville 
vient  de  trouver  et  va  publier  une  stèle,  rédigée  dans  la  langue  sacrée  pendant  le  règne  de 
Philadelphe,  stèle  qui  contient  la  mention  de  nombreux  impôts,  soldés  en  argent,  en  argent 
seulement. 

Ce  n'est  pas  tout. 

Non  seulement  nous  avons  des  mentions  fréquentes  et  constantes  des  principales  unités 
de  compte  en  argent,  mais  encore  —  nous  l'avons  dit  —  de  leurs  diverses  subdivisions. 

Parmi  les  documents  ^  qui  nous  les  donnent  en  grec,  le  plus  clair  et  le  plus  décisif  est 
certainement  le  papyrus  Sakkinis,  au  sujet  duquel  M.  Egger  a  fait  en  1873  une  si  intéressante 
lecture  à  l'Académie,  lecture  alors  publiée  par  le  Journal  des  savants.  Seulement  M.  Egger 
n'avait  pu  déchiffrer  les  sigles,  se  rapportant  aux  indications  de  monnaies,  qui  forment  non  seule- 
ment la  partie  la  plus  intéressante  par  elle-même  de  ce  compte,  mais  la  clef  de  toutes  les  esti- 
mations, si  curieuses  au  point  de  vue  de  l'économie  politique.  Voici  ce  que  disait  à  ce  sujet 
M.  Egger  : 

«  Les  difficultés  d'une  telle  tâche  (le  déchiffrement  de  notre  papyrus)  sont  grandes  même 
»pour  un  philologue  depuis  longtemps  familier  avec  l'étude  des  papyrus  gréco-égyptiens.  En 
»  effet,  les  signes  numériques  que  nous  présentent  les  papyrus  de  ce  genre  ne  sont  pas  encore 
»tous  expliqués.  Même  après  les  efforts  de  Peyron,  de  Letronne,  de  Brunet  de  Presle, 
»  quelques-unes  de  ces  notations  restent  pour  nous  des  énigmes  d'autant  plus  obscures  que 
«souvent  elles  sont  tracées  avec  négligence  et  réduites  à  de  simples  sigles.  ...» 

Puis  plus  loin  M.  Egger  ajoute  : 

«Les  notations  numériques  que  nous  offre  le  papyrus  Sakkinis,  sont  dignes  d'une  attention 
»  particulière,  et  pour  leur  forme  et  pour  leur  fréquente  répétition  qui  permettra  un  jour,  je 
»  l'espère,  d'en  trouver  la  clef.  .  .  .  Outre  les  lettres  proprement  dites  et  le  signe  désignant 
»  l'année,  ces  sigles  me  paraissent  se  ramener  à  8  ou  9,  dont  voici  la  forme.  ...» 

Puis,  après  le  tableau  : 

«Une  première  conclusion  qui  ressort  de  l'examen  du  tableau  ci -dessus,  c'est  que  les 

•  Nous  voyons  aussi  que  les  Grecs  appelaient  déjà  Philadelphe  le  mari  d'Arsinoë  Philadelphe  (Arsinoë 
qui  aime  son  frère),  tandis  que  les  Égyptiens  réservaient  en  démotique  cette  appellation  à  la  femme  (et 
sœur)  et  appelaient  les  deux  époux:  les  dieux  frères.  Ce  titre  ôeoi  aSsXcpot  était  plus  officiel  et  se  retrouve 
dans  les  protocoles  des  deux  langues. 

2  Pour  ce  qui  suit,  voir  ma  lecture  sur  Vétalon  d'argent^  dans  laquelle  j'ai  emprunté  quelques  pages 
à  cette  lettre. 


Seconde  lettre  sur  les  monnaies  égyptiennes.         85 

»  signes  numériques  en  question  ne  représentent  ni  des  poids  ni  des  mesures,  puisqu'on  les 
»voit  appliquées  même  à  des  valeurs  abstraites,  comme  des  frais  de  route  et  des  journées 
;>  d'ouvriers.  Ils  marquent  donc  le  prix  en  monnaie  de  ces  objets  divers,  et  s'il  y  a  quelque 
»  chance  de  les  expliquer,  ce  doit  être  par  une  comparaison  méthodique  avec  les  signes  em- 
»  ployés  sur  d'autres  registres  pour  les  mêmes  objets.  » 

M.  Egger  commence  alors  une  comparaison  qui  porte  malheureusement  sur  des  comptes 
de  la  seconde  période  lagide  contemporaine  de  l'étalon  de  cuivre.  Les  comptes  ainsi  visés  ne  ren- 
ferment aucune  de  nos  sigles,  se  rapportant  aux  fractions  de  la  drachme  d'argent,  surtout  em- 
ployées lors  de  l'étalon  d'argent.  M.  Egger  conclut  ensuite  :  «  De  ces  divers  rapprochements,  si 
»  incomplets  qu'ils  soient,  on  peut  du  moins  conclure  que  dans  les  cotes  numériques  du  papyrus 
»  Sakkinis  nous  devons  chercher  des  drachmes,  des  multiples  ou  des  fractions  de  la  drachme.  » 

Cette  conclusion  est  exacte.  Mais  on  peut  aller  beaucoup  plus  loin.  Ce  qui  faisait  penser 
aux  multiples  de  la  drachme,  c'était  la  donnée  universellement  admise  de  l'évaluation  unique 
en  cuivre  dans  les  papyrus  grecs  Lagides.  Des  fractions  de  la  drachme  de  cuivre  ptolémaïque 
—  déjà  si  petite,  si  rare  et  de  si  peu  de  valeur  —  n'étaient  pas  admissibles  dans  les  éva- 
luations du  papyrus  Sakkinis.  Aussi  n'est  ce  pas  de  fractions  de  la  drachme  de  cuivre,  mais 
de  fractions  de  la  drachme  d'argent  qu'il  s'agit. 

Je  constatai  tout  d'abord  que  les  sigles  du  papyrus  Sakkinis  existaient  dans  d'autres 
documents  gréco-égyptiens.  J'en  signalerai  deux,  les  papyrus  60  lis  et  62  de  Letronne,  qui 
ont  été  publiés  par  MM.  Brun-et  de  Presle  et  Egger  dans  le  volume  des  papyrus  grecs 
du  Louvre  et  de  la  Bibliothèque.  Il  est  vrai  que  pour  les  reconnaître  il  faut  recourir,  soit 
à  l'original,  soit  aux  planches  de  la  pubhcation  académique,  et  non  au  texte  imprimé  :  là 
elles  sont  inexactement  reproduites  et  complètement  méconnaissables.  Le  papjTUS  QOhis  con- 
tient même  3  additions  intéressantes,  et  on  en  trouve  une  autre  dans  le  papyrus  Q2.  Mais 
le  papyrus  Sakkinis  en  renferme  bien  davantage.  Malheureusement  les  extraits  de  facsimile 
donnés,  fort  exactement  d'ailleurs,  par  M.  Egger,  étaient  trop  partiels  pour  permettre  une 
vérification  sérieuse.  Je  m'adressai  donc  à  Athènes,  et  M.  Postolacca,  le  si  aimable  conser- 
vateur du  Musée  numismatique,  eut  l'extrême  bonté  de  calquer  pour  moi  toutes  les  sigles  et 
tous  les  chiffres;  il  n'était  plus  possible  de  ne  pas  voir  la  vérité'. 

Le  papyrus  Sakkinis,  ou  plus  exactement  Sakkakini,  contient  les  comptes  de  dépense 
d'un  officier,  ou  plutôt  d'un  bas-officier,  commandant  un  poste  de  l'armée  macédonienne.  Cet 
officier  tenait  avec  beaucoup  d'ordre  ses  registres  de  dépense  —  tant  pour  lui-même  que 
pour  les  frais  de  route  des  soldats,  la  solde  à  payer  à  son  collègue  ou  compagnon  d'armes 
{Q'^'^\).oLym),  à  plusieurs  autres  militaires,  au  forgeron  des  Memnonia  (c'est-à-dire  du  fort  de 
Djème,  qui  paraît  le  lieu  de  sa  garnison),  à  un  nommé  Deiiys  qui  lui  servait  de  planton  et 
faisait  son  ménage,  etc.,  etc.  Le  bois,  le  pain,  le  sel,  les  ragoûts,  la  viande,  les  salaisons,  les 
condiments,  les  légumes  les  plus  divers,  l'huile  fine  ou  de  sésame,  l'huile  de  •/.'./.t  (appelé  tekem 
par  nos  documents  démotiques  i,  la  poirée,  le  blanchissage,  les  bains,  l'eau  chaude,  les  parfums 
et  même  la  vidange  figurent  aussi  bien  des  fois  dans  ce  registre.   Chaque  jour  l'addition  de 

'  Depuis  l'impression  de  cet  ai-ticle,  M.  Eggek  a  eu  l'extrême  obligeance  de  me  remettre  les  copies 
de  ce  papyrus  prises  par  M.  Dcmoxt  de  l'Institut,  et  qui  lui  avaient  été  confiées  pour  sa  publication  du 
Journal  des  savants.  Ces  copies,  très  exactes,  sont  en  tout  conformes  aux  fac-similé  de  M.  Postolacca. 


86  Eugène  et  Victoe  Revillout. 

la  dépense  est  faite  comme  dans  les  maisons  bien  réglées  de  notre  temps,  et  au  bout  de  la 
semaine,  je  veux  dire  de  la  décade,  remplaçant  la  semaine  en  Egypte  suivant  les  documents 
de  toute  époque,  on  trouve  une  addition  générale.  Au  bout  du  mois  une  nouvelle  vérification 
avait  lieu,  et  c'est  ce  que  nous  indique  l'entête  de  notre  document  :  « Mesoré  30  —  Sur  ce 
»  que  j'ai  donné  au  compte  de  Dionysios  le  jeune  —  le  lui  ayant  donné  pour  la  dépense  — 
»  Voici  la  dépense  de  chaque  jour».  Puis  vient  un  compte  récapitulatif  à  partir  du  30  Epiplii. 
Malheureusement  ce  qui  nous  reste  du  papyrus  s'arrête  au  17  Mesoré.  Mais  c'est  bien  suffisant 
pour  constater,  par  les  additions  de  chaque  jour  et  l'addition  générale  du  10,  la  valeur  des 
sigles  de  notre  si  intéressant  document. 

En  voici  le  tableau,  avec  la  valeur  de  chacune  des  fractions  de  la  drachme  d'argent  eu 
drachmes  de  cuivre,  suivant  la  proportion  légale  de  1  à  120,  que  MM.  Bernaedino  Peyron, 
Leemans  et  LuMBRoso  avaient  déjà  établie  d'après  la  seule  étude  des  papyrus  gréco-égyptiens 
et  que  nos  papyrus  démotiques  rendent  maintenant  indéniable  par  la  mention  tant  de  fois 
répétée  à  propos  des  talents,  des  argenteus  et  des  sékels  de  cuivre  :  «  en  airain  dont  l'équiva- 
lence est  de  24  pour  ^  i,^»  du  même  poids  d'argent. 

X  chalquei  ^y^^  de  la  drachme  d'argent),   "/^  de  l'obole,  valant  2  drachmes  '/j  de  cuivre 

1  Le  chalque  est  une  monnaie  relativement  récente  dans  le  monnayage  attique.  A  Athènes  jusqu'à 
l'archontat  de  Caillas,  suivant  SAu^LiISE,  il  n'existait  pas  d'autres  monnaies  que  les  monnaies  d'or  et  d'argent. 
Ces  dernières  comprenaient  le  tétradrachme,  le  didracbme,  la  drachme,  l'obole  et  ses  multiples  et  les  di- 
visions de  lobole  par  quart.  Le  tétartemorion,  quart  d'obole,  pesait  environ  18  centigrammes;  il  s'en  trouve 
deux  échantillons  dans  la  collection  de  Paris  (Luynes),  Tun  de  16,  l'autre  de  18  centigrammes.  Si  l'on 
comptait  la  valeur  de  l'argent  d'après  le  poids  au  taux  actuel,  cela  ferait  une  pièce  d'un  peu  moins  de 
quatre  centimes.  A  Athènes  la  division  n'allait  pas  plus  bas;  mais  en  Sicile  il  y  avait  des  pièces  d'argent 
beaucoup  plus  petites.  Ainsi  une  monnaie  de  Syracuse,  fort  bien  frai^pée,  pèse  10  centigrammes  (deux  cen- 
times), une  autre,  qui  porte  la  marque  de  Carthage  et  de  ses  colonies  siciliennes  pour  les  petites  monnaies 
(la  tête  de  cheval),  pèse  5  centigrammes  (1  centime).  Ou  ne  possède  pas  à  Athènes  de  pièce  aussi  petite. 
C'est  le  chalque,  la  pièce  de  cuivre  la  première  frappée,  qui  y  représente  la  valeur  de  la  pièce  de  Syracuse 
mentionnée  plus  haut,  c'est-à-dire  la  moitié  du  quart  d'obole  ou  tétartemorion.  Le  chalque  d'après  la  pro- 
portion de  1  à  120  entre  l'argent  et  le  cui^Te  (que  nous  trouvons  en  Egypte  et  qui  devait  avoir  été  em- 
pruntée comme  tout  le  reste  au  système  attique)  devait  peser  il  grammes  environ.  On  trouve  beaucoup 
de  pièces  d'Athènes  qui  ont  ce  poids.  Ce  sont  les  plus  grosses  dans  la  collection  de  Paris  à  l'exception  de 
deux  monnaies  très  oxydées  et  d'une  autre  qiii  représente  le  chalque  et  demi. 

Sous  les  Ptolémées  en  Egypte  et  dans  les  pays  circonvoisins  on  ne  trouve  de  monnaies  d'argent  in- 
férieures à  la  drachme  qu'à  la  première  époque,  lorsque  les  monnaies  portaient  encore  le  type  d'Alexandre 
avec  la  peau  d'éléphant.  Il  y  avait  alors  des  oboles  d'argent.  Nous  en  avons  même  entre  les  mains  une 
qui  nous  a  été  envoyée  de  l'ancienne  Sidon  et  qui  pèse  72  centigrammes,  comme  les  oboles  athéniennes.  Il 
y  avait  sans  doute  aussi  des  divisions  de  la  drachme  plus  faibles  que  l'obole;  car  une  monnaie  qui  se 
trouve  à  la  bibliothèque  nationale,  nous  paraît,  comparée  à  la  précédente,  représenter  plutôt  un  tritétarté- 
morion  un  peu  léger  comme  poids. 

A  cette  même  époque  on  trouve  avec  la  tête  d'Alexandre  revêtue  de  la  peau  d'éléphant  des  tétra- 
ch-achmes,  des  didrachmes  et  des  drachmes.  Les  poids  en  sont  d'abord  tout-à-fait  athéniens,  puis  s'abaissent 
progressivement  en  se  rapprochant  de  plus  en  plus  des  poids  ptolémaïques.  Une  pièce  de  3  gr.  0,3  de  la 
bibliothèque  nationale  pourrait  bien  être  un  pentobole,  comme  une  pièce  de  Berlin  de  1  gr.  75  un  triobole. 
Il  paraît  probable  que  toute  la  série  athénienne  d'argent  a  été  d'abord  représentée  en  Egypte  par  les  Ale- 
xandre avec  ou  sans  nom. 

Les  monnaies  de  cuivre  (toutes  celles  qui  portent  la  même  tête  ou  la  tête  à  grosses  boucles  d'Ale- 
xandre II)  sont  généralement  petites.  Il  en  est  fort  peu  qui  dépassent  le  poids  du  chalque,  et  la  plupart  sont 
des  divisions  de  ce  chalque. 

A  l'époque  du  système  franchement  ptolémaïque  il  n'y  a  plus  de  monnaies  d'argent  inférieures  à  la 
drachme,  et  fort  peu  de  drachmes  ou  de  didrachmes,  mais  seulement  des  tétradrachmes  (comme,  à  partir 
de  Philadelphe,  surtout  en  or  des  tétrastatères).    Mais  on  retrouve  en  cuivre,  avec  la  proportion  légale  de 


Seconde  lettre  sue  les  monnaies  égyptiennes.  87 

7^;  2-^  01^  U  tétartémorion,  ('/24  de  la  drachme  d'argent,)  V4  d'obole,  valant  5  drachmes 
ou  Yio  et  demi  d'argenteus  de  cuivre. 

C  C  hémiobole,  (V12  de  la  drachme  d'argent,)  1/2  obole,  valant  10  drachmes  ou  Vio  d'ar- 
genteus en  cuivre. 

—  obole  (6®  de  la  drachme  d'argent)  valant  20  drachmes  ou  un  argenteus  de  cuivre. 

=  diobole  ('/g  de  la  drachme  d'argent)  valant  40  drachmes  de  cuivre. 

j  demi-drachme  d'argent  (triobole)  valant  60  drachmes  de  cuivre. 

j—  demi -drachme  et  obole  (tétrobole,  4  oboles,  ^/^  de  la  drachme  d'argent^i  valant 
80  drachmes  de  cuivre. 

^=  demi -drachme  et  diobole  (pentobole,  5  oboles,  %  de  la  drachme  d'argent)  valant 
100  drachmes  de  cuivre'. 

1  à  120,  toutes  les  divisions  de  la  drachme,  y  compris  l'obole,  qui  sera  plus  tard  l'argenteus  de  cuivre.  La 
série  se  compose  alors  surtout: 

1°  du  trihémiobolion  (obole  et  demie)  '/4  de  la  drachme  (pesant  entre  100  et  108  gr.); 

2°  de  l'obole  et  quart,  pesant  entre  82,  75  et  90  gr. -, 

3°  de  l'obole  (monnaie  la  plus  commune  de  toutes  parmi  les  grosses),  pesant  de  67  à  72  gr.; 

4°  du  tritétartémorion  ou  tritémorion  {^/^  d'obole),  pesant  de  50  gr.  75  à  54  gr.  ; 

5°  du  pentachalque  (^  §  d'obole),  pesant  de  40  gr.  85  à  45  gr.; 

6°  de  l'hémiobole,  pesant  de  33  gr.  50  à  36  gr.; 

7°  du  trihémitétartémorion,  trichalque,  ^g  d'obole,  pesant  de  25  à  27  gr.  ; 

8°  du  tétartémorion  (',4  d'obole)  double  chalque,  pesant  de  16  gr.  75  à  18  gr.  ; 

9°  du  chalque  ('/g  d'obole),  pesant  de  8  gr.  35  à  9  gr.; 
10°  du  demichalque,  pesant  de  4  gr.  17  à  4  gr.  50. 

Notons  qiie  toutes  ces  fractions  de  la  drachme,  ou  à  peu  près,  se  trouvent  représentées  par  une  ou 
plusieurs  sigles  dans  les  documents  contemporains  de  l'étalon  d'argent,  particulièrement  dans  le  papyrus 
Sakkinis  et  qu'elles  ont  aussi  leurs  correspondants  exacts  dans  le  monnayage  attique  avec  des  marques  spé- 
ciales.   Ainsi  nous  avons  déjà  eu  l'occasion  de  voir  : 

1°  que  l'obole  et  demie  (trihémiobolion)  en  argent  porte  à  Athènes  la  chouette  vue  de  face,  étendant 
ses  deux  ailes  que  surmontent  deux  feuilles  d'olivier; 

2°  que  l'obole  et  quart  en  argent  porte  deux  hiboux  se  regardant  et  ayant  entre  eux  une  branche 
d'olivier; 

3°  que  l'obole  d'argent  a,  comme  imité  principale  par  elle-même,  le  même  type  que  la  drachme; 

4°  que  le  tritétartémorion  ou  tritémorion  d'argent  a  pour  type  quatre  croissants  adossés; 

5°  que  le  pentachalque  d'argent  a  pour  type  trois  croissants  entourant  comme  d'un  cercle  les 
lettres  aOe; 

6°  que  l'hémiobolion  d'argent  a  tantôt  pour  type  la  chouette  de  côté  comme  la  drachme,  tantôt 
—  mais  avec  un  poids  un  peu  fort  —  la  chouette  de  face  surmontée  de  deux  croissants; 

7"  que  le  trihémitétartémorion  (trichalque)  d'argent  a  pour  type  la  corbeille  de  Minerve; 

8°  que  le  tétartémorion  d'argent  a  pour  type  un  seul  croissant: 

9°  que  le  chalque,  monnaie  de  cuivre,  /«a/.ou,  par  excellence,  qui  n'existe  jamais  en  argent,  est  re- 
présenté par  une  pièce  de  cuivre,  pesant  environ  11  gr.,  monnaie  très  commune; 

10°  que  le  demichalque,  moitié  de  la  pièce  précédente,  existe  également,  aussi  bien  même  que  des 
monnaies  plus  petites. 

Avant  de  finir,  notons  que  dans  le  système  ptolémaïque  c'est  évidemment  l'équivalence  de  poids  de 
l'obole  de  cuivre  et  de  l'argenteus  d'argent  (20  drachmes)  qui  a  entraîné  tout  le  système  d'isonomie  des 
drachmes  de  cuivre  et  des  drachmes  d'argent  pendant  la  seconde  période  lagide.  La  même  isonomie  se 
retrouve  aussi  —  nous  l'avons  vu  —  à  Byzance;  car  on  possède  des  drachmes  de  cuivre,  portant  les  mots 
Apa-/  BuÇ  et  ayant  le  même  poids  que  les  drachmes  d'argent. 

'  Notons  que  les  fractions  supérieures  à  l'obole  qui  sont  indiquées  dans  notre  tableau  des  sigles 
répondaient  aussi  dans  le  système  attique  à  des  monnaies  très  réelles. 

1°  Le  diobole  en  argent  avait  pour  marque  deux  corps  de  hiboux  avec  une  seule  tête; 

2°  le  triobole  (1/2  drachme)  avait  pour  marque  un  hibou  de  face,  ailes  fermées; 

3°  le  tétrobole  deux  hiboux  se  faisant  face; 


Eugène  et  Victoe  Revillout, 


Nous  ferons  remarquer  que  chacune  de  ces  sigles  nous  était  déjà  parvenue  par  quelque 
autre  voie.  Ainsi  la  sigle  C ,  indiquant  soit  la  demi,  soit  la  demi  obole,  et  dans  cette  dernière 
signification  souvent  retournée  "^^  se  retrouve  constamment  dans  les  inscriptions  de  l'Attique 
et  dans  les  divers  documents  grecs  avec  cette  valeur  bien  connue.  Dans  ces  mêmes  inscriptions 
l'obole  est  aussi  figurée  par  un  simple  trait  et  2  oboles  par  deux  traits.  Mais  ce  trait  (ou 
ces  traits)  est  droit,  au  lieu  d'être  couché.  D'une  autre  part,  on  sait  que  chez  les  Grecs  les 
monnaies  servirent  aussi  d'unités  pondérales.  Nous  possédons  bien  des  tableaux  de  poids  et 
mesures,  rédigés  par  les  anciens  et  recueillis  par  Hultsch  dans  son  livre  publié  à  Leipsic 
en  1864  et  qui  a  pour  titre  Metrologicorum  scrijptorum  reliquiœ.  Or,  dans  ces  tableaux  nos 
sigles  mêmes  sont  indiquées  à  bien  des  reprises.  Dans  l'un  d'eux,  intitulé  :  Tabula  de 
mensuris  ac  ponderihics  vetustissima,  qui  provient  d'Egypte  et  a  été  publié  à  la  page  207  du 
premier  volume,  le  trait  couché  —  est  indiqué  comme  équivalant  à  l'obole,  les  2  traits  couchés 
=  comme  équivalant  à  2  oboles,  le  j,  ou  s  latin  ('PwiJ.atV.cv  Gi-(\).y)  comme  équivalant  au  triobole. 
La  combinaison  de  V  s  du  triobole  et  du  trait  de  l'obole,  s — ,  comme  équivalant  un  tétrobole, 
d'où  il  était  facile  de  conclure  que  la  combinaison  de  l's  et  des  deux  traits  valait  semblable- 
ment  5  oboles,  ce  que  notre  texte  ajoute  cependant.  Quant  à  l'abréWation  du  mot  chalque 
par  un  simple  ■/,  elle  était  également  connue  :  pour  le  nom  du  cuivre  dans  les  paj^yrus  gréco- 
égyptiens  et  pour  le  nom  du  chalque,  48®  de  la  drachme,  dans  de  nombreux  documents  métro- 
logiques  signalés  par  Hultsch  à  la  page  171  de  son  livre.  D'autres  tableaux  de  Hultsch, 
publiés  p.  224,  p.  244,  etc.,  et  analysés  par  lui  p.  171  et  173,  reproduisaient  les  mêmes 
indications  et  nous  enseignaient  directement  ce  que  nous  disions  tout  à  l'heure  à  propos  des 
inscriptions  attiques,  à  savoir  que  l'obole  pouvait  être  représentée  par  un  trait  droit  couché 
ou  simplement  penché. 

Restait  donc  à  assimiler  la  seule  sigle  du  tétartémorion  (V4  de  l'obole)  ou  des  deux 
chalques,  ce  que  nos  additions  multiples  permettent  de  faire  en  un  instant. 

Ajoutons  que,  ces  sigles  monétaires  une  fois  connues,  nos  estimations  en  argent  du  pa- 
pyrus Sakkinis  concordent  d'une  façon  vraiment  admirable,  soit  avec  les  estimations  eu  cuivre 
des  autres  papyrus  gréco-égyptiens,  soit  avec  les  estimations  en  argent  ou  en  cuivre  de  nos 
papyrus  démotiques.  H  y  a  là  le  sujet  d'une  série  de  mémoires  fort  intéressants  pour  l'éco- 
nomie politique  et  que  je  me  propose  de  faire  avec  tous  les  développements  nécessaires.  De 
simples  estimations  en  cuivre,  monnaie  fictive  et  de  convention  par  excellence,  ne  nous  disaient 
rien  sur  la  valeur  réelle  des  objets.  Il  n'en  est  plus  de  même  pour  les  monnaies  en  un  métal 
précieux  tel  que  l'argent  et  la  même  certitude  vient  atteindre  jusqu'aux  monnaies  de  cuivre 
du  moment  où  la  proportion  légale  entre  les  deux  métaux  est  bien  connue.  Il  y  a  aussi  à 
comparer  les  estimations  de  nos  documents  égyptiens  avec  celles  des  documents  attiques  de 
l'époque  de  Lysias,  Démosthènes  et  des  inscriptions,  c'est-à-dire  surtout  des  deux  siècles  qui 
ont  précédé  la  conquête  d'Alexandre  et  le  règne  des  Lagides.  Ce  que  je  puis  affirmer  main- 

4°  le  pentobole  un  hibou  de  face,  ailes  étendues. 

Dans  le  système  proprement  ptolémaïque,  comme  on  ne  frappait  plus  de  monnaies  d'argent  inférieures 
à  la  drachme  ni  de  monnaies  de  cuivre  plus  grosses  que  l'obole  et  demie,  il  fallait  nécessairement  emploj'er 
pour  ces  divisions  plusieurs  monnaies  différentes.  Les  sigles  traditionnelles,  indiquant  de  véritables  unités 
monétaires  attiques,  n'en  subsistaient  pas  moins. 


Seconde  lettre  sue  les  monnaies  égyptiennes.  89 

tenant  c'est  qu'en  ce  qui  touche  le  prix  du  froment,  de  Fhuile  et  des  autres  denrées  néces- 
saires à  la  ^ie,  ces  estimations  ne  diffèrent  pas  dans  une  très  large  proportion. 

Donnons  seulement  deux  ou  trois  chiifres  d'objets  calculés  en  argent  dans  le  papjTUS 
Sakkinis  et  en  cuivre  dans  le  papyrus  C  de  Leide. 

Le  sel  est  estimé  partout  par  le  papyrus  Sakkinis  2  chalques',  ce  qui  fait  eu  cuivre 
5  drachmes.  Il  est  estimé  aussi  partout  5  drachmes  de  cuivre  par  les  comptes  des  jumelles. 

Les  légumes  partout  aussi  deux  chalques  ou  5  drachmes  dans  le  papyrus  Sakkinis, 
5  drachmes,  10  drachmes,  20  drachmes  dans  les  papyrus  de  Leide. 

L'ail  deux  chalques  ou  5  drachmes  de  cuivre  par  le  papyrus  Sakkinis  —  5  drachmes 
de  cuivre  également  par  le  papyrus  C  de  Leide. 

Le  pain  était  pris  en  plus  grande  quantité  par  notre  officier  que  par  les  jumelles.  On 
trouve  de  6  chalques  à  une  obole  et  2  chalques,  c'est-à-dire  de  15  à  25  drachmes  de  cuivre 
de  pain  par  jour  dans  le  papyrus  Sakkinis  et  de  5  à  10  drachmes  de  cuivre  dans  le  papyrus 
de  Leide.  Mais  on  en  trouve  pour  30  drachmes  dans  le  papynis  57  bis  du  Louvre,  pour 
25  drachmes  et  même  pour  15  drachmes  dans  le  papyrus  55  bis. 

Quant  à  l'huile  de  •/.■.y.-.,  le  prix  eu  est  toujours  égal  dans  le  papyrus  Sakkinis.  Elle 
coûte  une  obole  ou  20  drachmes  de  cuivre. 

Il  s'agit  évidemment  d'une  mesure  bien  connue  et  fréquemment  employée.  Telle  nous 
paraît  être  en  Egypte  le  hin  i^iv.ov)  que  les  Ptolémées  avaient  assimilé  à  la  double  cotyle 
ou  au  72^  de  la  métrète  artabe  et  que  l'on  nomma  plus  tard  cs^tty;;.  Or,  l'inscription  631  du 
Corpiis  inscriptionum  atticarum  ^^tome  2,  p.  389)  estime  chaque  cotyle  à  une  demi-obole  — 
estimation  identique  à  celle  du  papyrus  Sakkinis  2. 

•  Je  transcris  ici  /aA/oj;  par  chalque.  Le  mot  latin  est  calcus  qu'on  transcrit  calque. 

2  II  est  vrai  que  par  le  mot  cXaioy  on  désignait  sans  doute  l'huile  dolive,  principale  production  de 
l'Attique,  tandis  que  le  papyrus  Sakkinis  parle  de  l'huile  de  /.i/-.,  huile  nationale  par  excellence  des  Égyptiens. 
L'huile  fine  —  même  de  sésame  —  valait  en  Egypte,  selon  les  divers  papyrus  grecs,  le  double  de  l'huile 
de  y.tzi.  Mais  c'était  objet  d'importation  et  les  orateurs  athéniens  nous  apprennent  qu'on  estimait  les  risques 
de  la  navigation  au  tiers  de  la  valeur  de  la  marchandise.  Il  fallait  donc  —  pour  qu'il  y  eût  bénéfice  — 
vendre  l'huile  fine  en  Egypte  le  double  de  ce  qu'elle  coûtait  en  Attique  :  et  puis  on  doit  aussi  tenir  compte 
de  la  différence  de  la  drachme  attique  avec  la  drachme  ptolémaïque.  On  pouvait  d'ailleurs  avoir  l'huile  de 
y.'./.',  en  même  prix  qu'on  payait  en  Attique  pour  Ihuile  fine,  c'est-à-dire  ', ,  drachme  la  cotyle,  et  une  drachme 
le  hin.  Ce  prix,  nous  le  retrouvons  également  dans  d'autres  documents  grecs  et  démotiques  d'Egypte.  Un 
papyrus  démotique  de  Londres  estime  chaque  •/.spaij.'.ov  d"huile  de  tekem  ou  ■/.'./.'.  à  36  argenteus  de  cuivre, 
répondant  exactement  à  36  oboles  d'argent  ou  6  diachmes  d'argent.  Or,  suivant  les  métrologistes  anciens,  le 
xspajjL'.ov  ou  amphore  était  la  demi-metréte,  l'ancien  apet-épha  des  textes  hiéroglyphiques  et  hébreux.  L'amphore 
équivalait  à  36  hin-çsaTr;;,  72  cotyles,  6 /ojç  (veir  Hultsch,  p.  230  et  236).  D'après  cette  proportion  chaque 
youç  (répondant  à  6  hin-;£cïTr,;  ou  à  12  cotyles)  valait  donc  6  oboles,  comme  le  hin-Çca-oj;  en  valait  une  et  la 
cotyle  V2.  La  métrète  (.double  de  l'apet  ou  /.cpaLuov)  était  estimée  à  72  oboles  ou  12  drachmes  d'argent  et 
en  cuivre  à  1320  drachmes.  Dans  notre  article  sur  la  valeur  de  l'huile  nous  avons  déjà  montré  que  le  pa- 
pyrus T  de  Leyde  semblait  estimer  la  métrète  d'huile  de  •/.■./.■.  à  environ  16.50  drachmes  de  cui\Te.  Je  dis 
environ;  car  il  s"agit  d'un  total  de  1320  drachmes  pour  3  artabes  et  demie  de  blé  et  deux  yo-j;  d'huile  de 
xiz'..  Nous  avons  estimé  les  trois  artabes  et  demie  de  blé  à  1045  drachmes,  suivant  le  prix  donné  pour  une 
semblable  quantité  l'année  précédente.  Eestait  donc  275  drachmes  pour  2  7 ou;  d'huile  de  •/.'./.'.,  ce  qui  mettait 
la  métrète  à  1650  drachmes.  Ce  chiffre  n'est  qu'une  approximation;  mais  une  approximation  qui  se  rapproche 
tellement  de  nos  nouvelles  données  qu'on  ne  peut  assez  admirer  l'accord  des  papyrus  grecs  et  démotiques 
contemporains  de  l'étalon  d'argent  et  de  l'étalon  de  cuivre.  Les  documents  hiéroglyphiques  d'époque  pha- 
raonique s'en  rapprochent  aussi  singulièrement.  Nous  citerons  cette  évaluation,  déjà  citée  par  M.  Chabas  dans 
son  mémoire  sur  le  prix  d'un  taureau,  et  d'après  laquelle  11  hin  d'huile  valaient  10  outen  de  cuivre.  L'ar- 
genteus  de  cuivre  forme  comme  poids  les  \  5  de  l'outen  de  cui^Te,  et  nous  avons  vu  que  sous  les  Ptolémées 

12 


90  E-UGÈNE  ET  Victor  Revillout. 

Je  pourrais  commenter  de  même  les  prix  d'à  peu  près  toutes  les  autres  choses  du  papyrus 
Sakkinis  (publié  in  extenso  par  nous  comme  annexe  de  cette  lettre  ')  et  montrer  leur  parfaite 
concordance,  soit  avec  les  estimations  en  argent  de  l'Attique,  soit  avec  les  estimations  en 
cuivre  de  nos  papyrus  de  la  seconde  période  Lagide.  Mais  cela  me  mènerait  beaucoup  trop 
loin  et  je  passe  de  suite  au  papyrus  60  his  de  Paris ,  également  contemporain  de  l'étalon 
d'argent  et  pour  lequel  il  faut  aussi  consulter  le  facsimile  et  non  le  texte  imprimé. 

Le  papyrus  60  bis  —  que  nous  donnerons  aussi  en  entier  —  est  le  compte  des  dé- 
penses d'un  navire,  se  rendant  de  la  haute  Egypte  à  Alexandrie.  On  y  voit  figurer  la  paie 
des  officiers,  des  pilotes,  des  hommes  de  l'équipage,  y  compris  les  nouvelles  recrues,  que 
l'on  distingue  avec  soin  des  anciens,  la  naulisation  du  navire,  les  provisions  de  toutes  sortes, 
les  dépenses  faites  à  Memphis,  c'est-à-dire  à  moitié  route,  etc.  Notons  1°  que  les  pains  purs 
y  figurent  pour  18  drachmes  et  4  oboles  et  le  prix  du  transport  des  pains  à  l'Hellénium 
pour  une  drachme.  Deux  artabes  de  pains  ■Aa/.Y;ç  sont  aussi  estimées  15  drachmes,  et  la  fa- 
brication des  pains  deux  oboles;  2°  que  l'on  a  distribué  aux  officiers  11  mesures  de  vin  à 
2  oboles  2  chalques  chaque  mesure,  ce  qui  fait  4  drachmes  V2  obole  et  2  chalques,  selon  l'ad- 
dition de  notre  document  lui-même;  pour  la  custode  12  mesures  de  vin,  à  2  oboles  la  mesure, 
ce  qui  fait  4  drachmes,  aux  inspecteurs  et  quartier-maîtres  du  navire  16  mesures  de  vin  à  deux 
oboles  2  chalques  chaque  —  ce  qui  fait  6  drachmes  —  sans  compter  la  bière  livrée  aux 
anciens  et  estimée  à  deux  drachmes  et  une  obole.  On  y  mentionne  aussi  de  l'argent  prêté 
(peut-être  par  avance  de  solde),  de  l'argent  du  trésor  du  temple  et  même  l'acquisition  de 
statères  d'argent  pour  16  drachmes  5  oboles  et  demie.  Cette  dernière  mention  surtout  est 
curieuse;  le  statère  d'argent  est  toujours  un  tétradrachme,  comme  nous  avons  eu  l'occasion 
de  le  dire;  4  statères  d'argent  répondaient  donc  seulement  à  16  drachmes,  s'il  s'agissait  de 
la  même  monnaie.  Mais  —  nous  l'avons  vu  — -  on  avait  aussi  en  Egypte  des  statères,  (sékels 
ou  tétradrachmes  d'argent)  appartenant  soit  au  monnayage  à  type  d'Alexandre,  soit  au  premier 
monnayage  au  type  de  Soter,  qui  avaient  encore  le  poids  attique  ou  formaient  une  sorte  de 
moyenne  entre  ce  poids  et  le  poids  ptolémaïque  proprement  dit.  Ces  tétradrachmes  passaient 
à  prime  et  devaient  être  très  recherchés  sur  le  marché.  On  peut  aussi  admettre  des  statères 
étrangers,  par  exemple  des  statères  rhodiens,  pesant  de  14  à  15  grammes,  ou  des  statères 
athéniens  qui  pesaient  alors  beaucoup  moins  qu'à  l'époque  antérieure  et  surpassaient  de  ti-ès 
peu  le  poids  des  statères  ptolémaïques. 

Quant  au  papyrus  62  du  Louvre,  contemporain  de  l'étalon  de  cuivre,  mais  faisant  mention 
des  fermes  payables  en  argent,  j'en  ai  déjà  parlé  dans  le  précédent  paragraphe.  Qu'il  me 
suffise  de  rappeler  que,  par  mine,  le  prix  du  change  (estimé  en  argent)  était  coté  dix  drachmes 
2  oboles  et  demie,  le  transport  du  cuivre  {y.a.Toqod'^io'))  un  triobole,  le  prix  des  corbeilles 
(cTTuptBwv)  et  autres  frais  de  bureau  une  drachme  un  triobole  et  un  hémiobole  —  ce  qui  fait 
au  total  12  drachmes  et  un  triobole. 

un  hin  d'huile  de  >iixt  valait  un  argenteus  et  un  hin  d'huile  de  sésame  deux  argenteus.    Notre  évaluation 
hiératique  est  entre  les  deux. 

'  Ce  papyrus  ne  sera  publié  que  dans  le  numéro  suivant  (n"  3)-,  j'avais  d'abord  l'intention  de  réunir 
en  un  numéro  double  les  documents  relatifs  à  la  métrologie;  mais  diverses  circonstances  me  déterminent 
à  agir  autrement. 


Seconde  lettke  sttr  les  monnaies  égyptiennes.  91 

Voilà  donc  trois  papyrus  contenant  également  des  additions  et  qui  ne  peuvent  laisser 
l'ombre  d'un  doute  pour  la  valeur  de  nos  sigles. 

Notons,  du  reste,  que  le  système  isonomique  des  drachmes  de  cuivre  et  des  drachmes 
d'argent  s'appliqua  même  aux  divisions  de  la  drachme  de  cuivre. 

Je  citerai  à  ce  point  de  vue  le  papyrus  grec  XXXI  du  British  Muséum,  contenant, 
comme  le  papyrus  de  M.  Chasles,  publié  par  M.  Egger  et  actuellement  au  Louvre,  un  des 
papiers  de  finances  du  banquier  royal  ApolloniiLS. 

On  y  voit  iîgurer  une  somme  de  1066  drachmes  et  4  oboles  et  plus  loin  un  total  de 
13  talents,  5736  drachmes,  4  oboles.  M.  Forshall  avait  pensé  que  la  sigle  ^ —  des  4  oboles 
devait  représenter  '/g  de  drachme.  Là  était  l'erreur  :  Cette  sigle  vaut  juste  %  de  drachme. 
Mais  le  même  compte  contient  plusieurs  fois  la  sigle  =,  valant  deux  oboles  ou  un  tiers  de 
drachme.  On  voit  notamment,  lignes  9  et  10,  figurer  deux  sommes  dont  le  total  donne  exac- 
tement 2000.  La  première  est  de  1066  drachmes,  4  oboles,  la  seconde  933  drachmes,  2  oboles. 
Nous  possédons  en  effet  en  cuivre  des  monnaies  ptolémaïques,  pesant  de  1  gr.  à  1  gr.  16  ou 
de  2  gr.  à  2  gr.  32,  qui  représentent  '  3  ou  "-/s  de  drachme  de  cuivre  [2  ou  4  oboles  de  cuivre). 
Mais  notre  banquier,  après  avoir  reproduit  ces  fractions  pour  l'exactitude  de  ses  comptes,  les 
néglige  dans  la  répétition  du  total,  comme  on  le  fait  souvent  pour  les  centimes. 

Le  triobole  ('2  drachme)  se  retrouve  aussi  plusieurs  fois  dans  le  papyrus  T  de  Leide. 
M.  Leemaxs  avait  vu  qu'il  s'agissait  alors  d'une  demi-drachme  de  cuivre.  A  la  page  92,  dans 
son  tableau  des  sigles,  M.  Leemans  donne  aussi  j  (le  triobole)  comme  valant  la  demie.  Mais 
il  en  fait  un  doublon  de  ^,  marquant  également  la  demie.  En  réalité  -^  s'appliquait  dans 
les  papyrus  ptolémaïques  aux  artabes  et  aux  diverses  mesures  pour  la  demie,  taudis  que  j 
ne  marquait  alors  que  le  triobole  ou  la  demi- drachme,  soit  d'argent,  soit  de  cuivre. 

Enfin  la  sigle  5 —  des  4  oboles  se  trouve  dans  le  papjTus  de  Zois  et  a  été,  cette  fois, 
fort  bien  comprise  par  Amédée  Peyrox  qui  y  voit  "-  3  de  drachme  eu  s'appuyant  sur  le  calcul 
suivant  :  «Je  dis  2  talents  plus  4000  drachmes  ^^16000  drachmes*.  Son  soixantième  est  266 
»  drachmes  -3.  Son  centième  est  160  drachmes.  Total  :  deux  talents  4426  drachmes  Va-* 

Seulement  Petrox  croit  que  la  sigle  ^ —  est  s  une  espèce  de  :»  et  il  se  demande  «si 
3>elle  ne  pourrait  pas  s'appliquer  à  une  fraction  quelconque».  EWdemment  le  coptologue  Pevron 
pensait  au  mot  copte  pc  qui  signifie  fraction  (voir  son  Dict.  copte,  p.  175 — 176).  Mais  il  ne 
faut  pas  confondre  le  copte  avec  le  grec,  et  d'ailleurs  notre  sigle  n'a  rien  de  commun 
avec  le  z. 

Dans  le  papyrus  67  de  la  publication  académique  (2338*"  du  Louvre),  papyrus  que  nous 
publions  également  comme  pièce  anuexe,  on  trouve  même,  je  crois,  les  sigles  du  triobole  et 
de  l'obole,  appliquées  —  tout  théoriquement  —  au  cuivre.  Mais  ces  notations  sont  un  peu  dou- 
teuses; et  généralement,  dans  les  papyrus  contenant  des  comptes  en  cuivre,  on  ne  descend 
guère  au  dessous  du  tiers  de  drachme  i^deux  oboles).  A  plus  forte  raison  ne  reucontre-t-ou 
pas  l'hémiobole,  le  tétartémorion  et  le  chalque  (48^  de  la  drachme),  si  fréquents  lors  de  l'étalon 
d'argent.  Le  mot  clinique,  loi-s  de  l'étalon  de  cui^Te,  s'applique  à  toutes  les  monnaies  de  cuivre  et 
même  à  toutes  les  monnaies  en  général.  On  dit  alors  :  «mes  chalques»  pour  dire  :  «mou  argent». 

Ce  furent  les  Komaius  qui  firent  abandonner  ce  système,  en  substituant  de  nouveau 
l'étalon  d'argent  à  l'étalon  de  cuivre.  Tibère  et  ses  successeurs  firent  même  fondre  en  Egypte 

12* 


92  Eugène  et  Victor  Revillout. 


des  tétradrachmes  d'argent,  analogues  comme  poids  aux  anciens  tétradrachmes  d'argent  pto- 
lémaïques.  On  ne  compta  plus  dès  lors  en  grec  qu'en  drachmes  et  en  oboles  d'argent.  Mais 
même  à  cette  époque  —  nos  sigles  des  divisions  de  la  drachme  furent  soigneusement  con- 
servées.   C'est  ainsi  que  dans  la  tessère  bilingue  portant  au  Louvre  le  n°  7174   les  calculs 

sic 

faits  en  chiffres  et  en  lettres  portent  d'une  part  o^olouq  ouoj  et  d'une  autre  part  la  sigle  = 
des  deux  oboles.  Le  texte  démotique  correspondant  est  malheureusement  incomplet  par  suite 
d'une  cassure.  Nous  ne  savons  donc  encore  quel  était  en  démotique  le  mode  de  notation  pour 
les  fractions  de  la  drachme.  Nous  avons  vu  qu'à  l'époque  ptolémaïque  la  drachme  elle-même 
était  nommée  demi-dixième  d'argenteus  ou  quart  de  sékel.  Les  tessères  7173  du  Louvre  (du 
règne  de  Néron)  et  5789  du  British  Muséum  (également  d'époque  romaine)  prouvent  que  les 
noms  du  sékel  et  de  l'argenteus  subsistaient  toujours  en  Egypte.  La  dernière  tessère  est  bi- 
hngue  et  nous  donne  même  l'équivalence  de  2  argenteus  =  40  drachmes.  Mais  la  drachme 
à  cette  époque  était  aussi  parfois  prise  pour  unité  en  démotique  (au  moins  à  Eléphantine). 
Le  n°  7174  du  Louvre  qui  est  de  cette  provenance  et  que  nous  avons  cité  à  propos  de  l'obole 
semble  l'indiquer.  L'avenir  nous  éclairera  là-dessus;  car  il  existe,  paraît-il,  un  grand  nombre 
de  tessères  bilingues  qui  ne  sont  pas  encore  arrivées  'dans  les  collections  publiques. 

Pardonnez -moi,  mon  cher  ami,  d'être  entré  dans  tous  ces  détails  et  permettez -moi  de 
vous  prier  de  comparer  maintenant  les  divisions  de  la  drachme  que  nous  venons  d'indiquer 
d'après  les  textes  avec  celles  que  nous  fournissent  les  monnaies  et  que  nous  avons  signalées 
dans  notre  paragraphe  sur  le  poids  des  monnaies  de  cuivre  '. 

On  est  surpris  de  voir  combien  les  textes  concordent  admirablement  avec  les  monnaies. 

Examinons  maintenant  comment  se  classent  nos  divers  documents  à  ce  point  de  vue 
exclusivement  monétaire. 

PREMIÉEE  PÉRIODE. 

Sous  Soter,  Philadelphe  et  Evergète  l",  ainsi  que  nous  l'avons  dit  souvent,  on  ne  voit 
intervenir  dans  les  papyrus  démotiques  —  comme  dans  nos  papyrus  grecs  —  que  des  monnaies 
d'argent,  c'est-à-dire  en  démotique  l'argenteus  et  le  sékel  sans  aucune  mention  du  cuivre. 
Evidemment  les  seuls  métaux  monétaires  réels  étaient  l'or  et  l'argent  —  l'argent  surtout, 
d'après  lequel  toutes  les  sommes,  y  compris  les  plus  fortes,  étaient  calculées  —  et  le  cuivre 
ne  servait  que  comme  monnaie  divisionnaire  représentant  des  fractions  plus  ou  moins  petites 
des  monnaies  d'argent,  seules  nommées  dans  les  comptes,  alors  même  qu'on  avait  dû  payer 
en  cuivre.  Ces  règles  ne  souffrent  jusqu'ici  aucune  exception. 

SECONDE  PÉRIODE. 

Mais  à  Philopator  commence  la  période  de  transition  entre  l'étalon  d'argent  et  l'étalon 
de  cuivre.  Depuis  ce  moment  les  deux  métaux  sont  désignés  parallèlement  et  d'une  façon  qui 
paraît  d'abord  un  peu  ambiguë,  quand  on  n'y  est  pas  habitué.  Il  faut  donc  faire  la  plus  grande 
attention  aux  documents  démotiques  de  cette  période  de  transition  que  nous  avons  entre  les 
mains  et  dont  nous  allons  donner  l'énumération  : 

An  3  de  Philopator  (Revue,  L,  p.  113)  contrat  de  mariage  thébain.  Dot,  pension  et  amende 
en  argenteus  anciens  sans  mention  supplémentaire  (argent). 

'  Voir  Revue,  IP  année,  p.  260  et  suivantes. 


Seconde  lettre  sue  les  monnaies  égyptiennes.  93 


An  5  de  Philopator  {Chrest.,  p.  301;  Revue,  l.,  p.  121)  prêt  thébain.  Le  débiteur  doit 
payer  5  argenteus  et  Vio;  o"  26  sékels,  5  argenteus  V^o  en  tout  (en  monnaie  cV argent)  ou 
en  monnaie  d'airain  au  taux  de  24  unités  d'airain  pour  Vio  d'unité  d'argent. 

An  7  de  Philopator  [Chrest.,  p.  373)  donation  tliébaiue  sous  forme  de  vente,  avec  une 
amende  de  20  argenteus  ou  100  sekels  sans  mention  supplémentaire  (argent). 

An  11  de  Philopator  (acte  du  Vatican)  location  thébaine,  avec  amende  conditionnelle  de 
10  argenteus  sans  mention  supplémentaire  (argent). 

An  4  d'Harmachis  {Nouvelle  Chrest.,  p.  109,  110,  111)  contrat  de  mariage  thébain.  Ar- 
genteus sans  mention  supplémentaire  (argent). 

An  5  d'Harmachis  (ibid.  et  Bevtie,  I.,  p.  121)  prêt  thébain.  Le  papyrus  porte  :  «tu  as 
»2  argenteus  '/to;  en  sékels  10 '/2;  en  argenteus  2Vio  «  me  faire  (c'est-à-dire  :  à  me  réclamer 
»  ou  plutôt  à  me  faire  payer)  ou  en  équivalence  de  24  pour  ^/lo  ^'>7  c'est-à-dire  :  ou  en  airain 
au  taux  de  24  unités  d" airain  pour  Vio  d'unité  d'argent.  Ici  la  coupe  de  la  phrase  est  ti-ès 
importante  à  noter.  L'intercalation  de  e-cp-newi  «à  me  faire»  entre  les  deux  genres  de  monnaies 
est  très  significative. 

An  14  d'Anchmachis  (Ane.  Chrest.,  p.  395  et  396  ;  Revue,  2^  année,  p.  148)  contrat  de 
mariage  thébain  :  argenteus  sans  mention  supplémentaire  (argent). 

An  20  d'Épiphane  {Nouv.  Chrest.,  p.  160)  vente  de  liturgies  de  fort  peu  d'importance 
faite  à  Thèbes  après  la  conquête.  Impôt  du  10«  s' élevant  à  3  argenteus,  15  sékels,  3  ar- 
genteus, en  tout,  à  l'équivalence  de  24  pour  ^  ,^  (cuivre). 

An  8  d'Épiphane  (Revue,  t.  L,  p.  129)  acte  memphite  du  Louvre,  cession  de  hturgies,  etc. 
Amende  de  100  argenteus  ou  500  sékels  sans  mention  supplémentaire  (cuivre). 

An  21  d'Épiphane  (autre  acte  memphite  du  Louvre)  cession  de  liturgies,  etc.  Amende 
de  2000  argenteus  10.000  sékels  sans  mention  supplémentaire  (cuivre). 

An  5  de  Philométor  (acte  de  Dublin\  acte  de  partage,  contenant  une  amende  de  1000  ar- 
genteus ou  5000  sekels  en  airain  dont  l'équivalence  est  de  24  pour  Vio  (cuivre). 

An  1 1  de  Philométor  (Taricheutes  et  choachytes)  contrat  de  mariage  thébain.  La  dot  est, 
suivant  l'ancienne  coutume,  eu  argenteus  d'argent  sans  mention  supplénientiiire ;  l'amende 
également  (argent).  Mais  lestimation  des  objets  apportés  par  la  femme  est  en  argenteus 
d'airain  dont  léquivalence  est  de  24  pour  ^/j^,  et  la  pension  annuelle  de  même  (cuiwe). 

En  résumé  :  1"  à  Thèbes,  sous  Philopator  et  sous  les  rois  révoltés,  les  argenteus  et  sékels 
sans  mention  supplémentaire  désignent  des  monnaies  d'argent.  Mais  on  spécifie  dans  les  prêts 
seideraent  qu'on  en  peut  faire  le  change  en  monnaies  d'airain  dont  la  proportion  est  de  24  unités 
pour  -  if,  des  unités  parallèles  d'argent. 

2°  Sous  Épiphane,  à  Memphis,  l' argenteus  sans  mention  supplémentaire  désigne  un  ar- 
genteus de  cuivre,  c'est-à-dire  une  pièce  de  20  drachmes  de  cuivre,  et  le  sékel  sans  mention 
un  sékel  de  cuivre. 

3°  Sous  Épiphane,  à  Thèbes,  après  la  conquête  et  la  défaite  des  rois  révoltés  —  en  l'an  20  — 
l'argenteus  et  le  sékel  à  l'équivalence  de  24  pour  2  j^^  semble  désigner  également  l'argenteus 
et  le  sékel  de  cuivre.  (Nous  n'avons  pas  d'argenteus  sans  mention  supplémentaire.) 

4**  Sous  Philométor,  à  Thèbes,  (depuis  l'an  11  tout  au  moins,)  l'argenteus  sans  mention 
supplémentaire  diacritique  désigne  l'argenteus  d'argent;   et  l'argenteus  dont  l'équivalence  est 


94  Eugène  et  Victor  Revillout. 

de  24  pour  7,0  un  argeuteus  de  cuivre,  au  moins  depuis  Tan  5.  (Nous  verrons  à  propos  de 
la  troisième  période  que  cette  dernière  désignation  est  devenue  universelle  et  constante  à  partir 
de  ce  moment.) 

De  tout  cela  il  est  aisé  de  conclure  que  :  1°  sous  Philopator  on  avait  déjà  établi  l'iso- 
nomie  complète  des  monnaies  de  cuivre  et  d'argent  et  fondu  nombre  d'argeuteus,  etc.  en  cuivre. 
S'il  y  en  avait  avant  ce  prince,  ou  les  calculait  comme  fractions  de  la  drachme,  oboles  etc.,  mais 
il  n'existait  pas  de  drachmes,  d'argenteus,  de  sékels  ^  d'airain  :  pas  d'isonomie  entre  les  monnaies 
du  même  poids  d'argent  et  de  cuivre.  Cet  ingénieux  système,  basé  sur  la  proportion  pré- 
existante de  1  à  120  et  l'assimilation  secondaire  de  nom  des  mêmes  unités  pondérales  mo- 
nétaires ne  paraît  remonter  qu'à  Philopator.  Il  est  même  douteux  qu'à  l'ancienne  époque  on 
ait  eu  des  monnaies  de  cuivre  atteignant  l'obole  d'argent,  puisque,  dans  les  papyrus  grecs 
contemporains  de  l'étalon  d'argent,  le  chalque  porte,  le  premier,  le  nom  du  métal  de  cuivre, 
comme  chez  les  Athéniens.  Mais  il  était  plus  rare  comme  monnaie  que  le  double  chalque, 
(tétartémorion)  véritable  unité  monétaire  —  sans  cesse  mentionnée  dans  nos  comptes,  — 
comparable  au  sou  et  qui  représentait  comme  valeur  le  24^  de  la  drachme  et  comme  poids 
5  drachmes,  avec  la  proportion  légale  de  1  à  120  entre  les  deux  métaux.  C'est  de  cette  pro- 
portion qu'on  partit  sous  Philopator  pour  le  nouveau  système  d'isonomie,  permettant  de  rem- 
placer toujours  l'argent  par  du  cuivre.  Cette  révolution  monétaire  s'explique  facilement,  quand 
on  se  rappelle  les  dépenses  folles  et  l'appauvrissement  de  l'Egypte  qui  avait  dû  résulter  tant 
des  frais  de  la  guerre  avec  Antiochus  le  grand,  etc.,  que  des  prodigalités  de  cette  cour  dépravée. 
Il  est  très  probable  que  le  crédit  du  roi  avait  sensiblement  diminué.  Philopator,  pour  trouver 
de  l'argent,  avait  dû  recourir  à  des  expédients  financiers  et  il  n'avait  rien  mi  de  mieux  que 
de  faire  frapper  une  grande  quantité  de  monnaies  de  cuivre,  dont  il  établit  le  cours  forcé, 
même  lorsqu'il  s'agissait  de  grosses  sommes,  avec  la  proportion  de  1  à  120  avec  la  monnaie 
d'argent.  C'est  sans  doute  eu  vertu  d'un  TzgcaToc-^im  de  ce  prince  que  l'on  put  toujours  payer 
en  cuivre  une  dette  conti-actée  en  argent.  De  là  la  mention  obligatoire  dans  les  prêts  de  la 
monnaie  à  l'équivalence  de  24  pour  2/,^  dont  on  pouvait  se  servir  à  l'échéance'^  à  la  place 
de  la  monnaie  d'argent.  L'argent  dut  à  ce  moment  disparaître  vite  de  la  circulation.  A  l'étranger 
(où  Philopator  allait  recruter  ses  troupes)  on  ne  recevait  bien  que  l'argent  d'Egypte,  fort  peu 
sou  cuivre  et,  d'une  autre  part,  en  Egypte,  on  était  obligé  de  se  contenter  de  papier  —  je 
veux  dire  de  monnaies  de  cuivre.  Le  vide  se  fit  donc  vite  et  les  rois  eux-mêmes  en  subirent 
dans  la  suite  les  conséquences.  Ils  ne  trouvèrent  plus  d'argent  pour  négocier  à  l'éti-anger  et 
durent  en  arriver  à  exiger  de  la  population  pour  certains  impôts  et  certaines  amendes  un 
argent  alors  introuvable  sur  le  marché.  Il  est  très  probable  que  les  mesures  vexatoires  qui 
résultaient  en  définitive  de  cette  réforme  financière,  durent  au  plus  haut  degré  mécontenter 
les  Égyptiens  et  causer  la  révolte  générale  qui  éclata  à  la  mort  même  de  Philopator. 

2°  Sous  Epiphane  l'état  des  choses  s'empira  encore  ^  dans  les  provinces  qui  lui  étaient 

•  Le  sekel  de  cuivre  (de  14  à  15  gr.)  est  beaucoup  plus  rare  que  l'argenteus-obole.  Il  u'appartenait 
sans  doute  pas  à  l'ancien  monnayage.  Il  aura  été  inauguré  par  Philopator  et  continué  par  ses  successeurs. 
Mais  il  resta  toujours  une  des  unités  de  compte  égyptiennes. 

2  Notons  que  dans  Démosthènes  (ApoUodore  contre  Timothée)  il  est  question  d'un  dépôt  de  cuivre 
mis  en  gage  pour  assurer  une  dette  en  argent. 

'  Ces  données  sont  conformes  à  celles  des  historiens.  Selon  Polybe  (V,  83,  1),  Philopator  promit  aux 


Seconde  lettre  sur  les  monnaies  égyptiennes.  95 

soumises.  La  révolution  força  les  tuteurs  du  roi  de  faire  venir  à  grands  frais  des  troupes  de 
Grèce.  Le  trésor  se  trouva  bientôt  à  sec.  Au  double  étalon  de  cuivre  et  d'argent  qu'avait 
établi  Philopator,  on  fut  donc  obligé  de  substituer  l'étalon  unique  de  cuivre  et  de  monopoliser 
en  quelque  sorte  l'argent  dans  les  caisses  de  l'état  qui  le  versaient  ensuite  à  l'étranger.  Ce 
fut  sans  doute  à  ce  moment  qu'à  Mempbis  le  gouvernement  déclara  que  toutes  les  monnaies 
appelées  dans  les  contrats  drachmes  en  grec,  ou  argenteus  et  sékels  en  égyptien,  seraient 
réputées  en  cuivre.  C'est  ainsi  que  dans  nos  papyrus  démotiques  Memphites  de  cette  époque 
l'argenteus  n'est  plus  que  l'argenteus  de  cuivre,  le  sékel  que  le  sékel  de  cuivre. 

3^  A  Thèbes,  pendant  la  domination  des  rois  révoltés,  on  en  était  resté  au  régime  mo- 
nétaire du  double  éta,lon,  établi  sous  Pbilopator.  Mais  quand  Épiphane  s'empara  de  la  Thébaïde, 
ses  monnaies  le  suivirent  naturellement  dans  ce  pays.  Seulement  pour  qu'il  n'y  eût  pas  d'am- 
biguité  —  puisque  les  Tbébains  connaissaient  surtout  les  monnaies  d'argent  —  on  dut  ex- 
pliquer qu'il  s'agissait  d'argenteus  à  l'équivalence  de  24  pour  Vio-  Cette  ancienne  formule 
ne  désigna  donc  plus  un  change,  mais  une  monnaie,  et  nous  la  retrouvons  également  avec 
cette  valeur  eu  l'an  11  de  Philomélor.  Notons  seulement  qu'à  cette  époque  —  tout  au  moins  — 
l'argenteus  sans  mention  désignait  encore  à  Thèbes  —  dans  l'usage  ordinaire  —  l'argenteus 
d'argent  et  non  l'argenteus  de  cuivre,  comme  à  Memphis.  Il  ne  serait  pas  impossible  que  la 
loi  d'Épiphane  eût  semblé  trop  sévère  et  qu'après  la  conquête  et  l'appaisement  général  on 
eût  permis  aux  Thébains  de  garder  en  égyptien  les  appellations  simples  pour  les  monnaies 
basées  sur  l'ancien  étalon  d'argent,  à  la  condition  de  les  distinguer  d'une  façon  suffisamment 
claire  des  monnaies  dépendant  du  nouvel  étalon  officiel  de  cuivre.  Ou  compta  de  la  sorte  à  la 
fois  à  Thèbes  par  l'ancien  argenteus  thébain  (d'argent)  et  par  le  nouvel  argenteus  memphite 
de  cuivre.  La  seule  question  douteuse  est  une  question  de  date.  Quand  cette  tolérance  fut-elle 
accordée  à  Thèbes?   Est-ce  sous  Épiphane  ou  Philométor? 

TROISIÈME  PÉRIODE. 

Nous  désignerons  sous  ce  nom  la  période  qui  commence  au  second  règne  d'Evergète  II. 
Le  diacrétisme  est  alors  poussé  aussi  loin  que  possible.  H  n'y  a  plus  d'argenteus  ou  de  sékels 
sans  mention  explicative  et  toutes  les  monnaies  se  classent  en  démotique  sous  l'une  de  ces 
trois  rubriques  : 

1°  ou  bien  en  qualité  d'argenteus  fondus  du  temple  de  Ptah,  avec  le  calcul  de  ^/p, 
Vto;  V30J  Veo;  Voo-  Il  ïî'y  ^  P^s  alors  de  doute  qu'il  s'agisse  du  vieil  argenteus  d'argent, 
puisque  l'on  a  la  formule  même  qui  sert  depuis  Darius  et  dont  on  a  continué  l'usage  sous 
Artaxercès,  Philippe,  Evergète  P",  etc.,  etc.,  pour  ne  parler  que  des  textes  possédés  par  nous; 

2°  ou  bien  en  qualité  d'argenteus  et  de  sekel  «en  pièces  d'argent  gravé».  C'est  la  for- 
mule qui  sert  désormais  (depuis  Evergète  II)  pour  toutes  les  pièces  d'argent  frappées; 

Rhodiens  trois  cents  talents  d'argent  et  mille  talents  de  cuivre.  Le  même  historien  (liv.  XXIII,  9,  3)  dit 
qu'Épiphane  envoya  aux  Achéens  200  talents  de  cuivre  vo|j.ia[jLaToç  £7:iffr)p.ou  /^aXxou.  L'unique  étalon  de  cuivre 
se  substituait  ainsi,  même  pour  les  dépenses  faites  à  l'étranger,  au  double  étalon.  Il  est  vrai  qu'il  s'agit 
d'un  don.  Épiphane,  pour  avoir,  en  Grèce,  les  troupes  qu'il  employa  contre  les  révoltés  d'Egypte,  dût  sans 
doute  les  payer  en  argent.  Ajoutons  qu'avant  Pbilopator  les  historiens,  comme  les  papyrus,  nous  montrent 
en  Egypte  l'étalon  d'argent. 


96  Eugène  et  Victor  Revillout, 

3°  ou  bien  en  qualité  d'argenteus  ou  de  sékels  d'airain  dont  V équivalence  est  de  24 
(unités  d'airain)  pour  2/^^  (d'unité  d'argent).  C'est  d'après  ces  argeuteus  ou  ces  sékels  d'airain 
que  se  trouve  toujours  calculé  le  kerker  (rin<r6>p  ou  'T\'2  (talent)  dans  les  textes  qui  nous 
sont  parvenus.  Le  kerker  compte  ainsi  300  argeuteus  d'airain  ou  1500  sékels  (ou  tétradraclimes'i 
de  cuivre.    Je  ne  connais  pas  de  texte  démotique  qui  parle  de  kerker  d'argent. 

Dans  les  papyrus  grecs  de  la  même  époque  il  en  est  de  même.  Le  talent  est  toujours 
un  talent  de  cuivi-e.  Cela  tient  peut-être  au  peu  d'importance  des  sommes  contenues  dans  les 
papiers  du  Sérapéum,  puisque  les  auteurs  comptent  par  talents  d'argent.  Cependant  la  mine 
paraît  pour  l'argent  une  unité  de  compte  plus  réelle,  ainsi  que  le  prouve  un  passage  déjà  cité 
du  papyrus  62  du  Louvre,  bien  qu'on  calculât  également  par  mine  de  cuivre.  Quant  à  l'unité 
inférieure,  c'était  en  grec  la  drachme.  H  en  entrait  6000  dans  le  talent  (ou  kerker)  et  cent 
dans  la  mine.  S'il  s'agissait  de  drachmes  d'argent,  on  avait  bien  soin  d'employer  dans  les 
contrats  ^  la  formule  que  nous  avons  déjà  rencontrée  en  démotique  pour  les  unités  ég}-i)tiennes 
d'argent  et  l'on  appelait  en  grec  ces  di'achmes  apvupiotj  cxtar^jj-oj  'Kxz\z\>.d-f.o-j  ^o'^.iz\).y.xzz  Bpaxuat 
ou  «pYupou  z^KK<yr^\).o■o  Spayjx.,  de  même  que  l'on  disait  en  égyptien  :  argeuteus  ou  sékels  en 
pièces  d'argent  gravé.  Si,  au  contraire,  il  s'agissait  de  drachmes  de  cuivre,  on  écrivait  parfois 
les  mots  yjxXxo'j  opayjj..  ou  ioCk.  ;  mais  on  omettait  souvent  l'indication  du  métal  ;  car,  sous  l'étalon 
de  cuivre,  la  drachme  par  excellence  était  la  drachme  de  cuivre,  comme  c'était  la  drachme 
d'argent  sous  l'étalon  d'argent.  Les  autres  monnaies  n'étaient  plus  —  nous  l'avons  dit  — 
que  des  espèces  de  lingots  gravés,  mais  gravés  et  vérifiés  par  l'autorité  royale.  De  là  l'ad- 
dition du  mot  extOTQ;j.cu  après  le  nom  du  métal  précieux  (or  ou  argent)  qui  était  ^isé  dans 
l'acte,  toutes  les  fois  qu'il  ne  s'agissait  plus  de  monnaies  conformes  à  l'étalon  de  cuivre.  En 
effet,  les  pièces  d'or  ou  d'argent  appartenaient  bien  au  monnayage  Ptolémaïque  {r,xz\t\).yi:y.ou 
vo|ji,iCT[ji.aToç),  mais  ce  n'était  plus,  pour  ainsi  dire,  qu'à  titre  supplémentaire.  Le  cuivre  seul 
était  pleinement  officiel. 

Telles  sont  les  principales  données  que  nous  avons  pu  réunir  :  1'^  sur  l'étalon  d'argent, 
2°  sur  les  étalons  simultanés  d'argent  et  de  cuivre,  3*^  sur  l'étalon  de  cuivre.  Ces  renseigne- 
ments complètent  notre  travail  sur  les  noms,  les  équivalences  et  les  proportions  des  monnaies 
égyptiennes.  Il  ne  nous  reste  plus  maintenant  qu'à  étudier  les  valeurs  réelles  de  ces  monnaies 
en  elles-même,  comme  marchandise  et  comme  terme  d'échange,  c'est-à-dire  par  rapport  aux 
objets  de  nécessité  et  de  luxe  contre  lesquels  on  les  échangeait.  C'est  ce  que  je  tâcherai  de 
faire  dans  ma  troisième  lettre  qui  paraîtra  dans  un  des  prochains  numéros. 

Veuillez  agréer  etc. 

NOTE  ANNEXE  SUR  L'ARGENTEUS-OUTEN. 

Nous  avons  vu  que  l'argenteus  d'argent  est  toujours  assimilé  à  5  sékels  ou  20  drachmes  d'argent. 
A  l'époque  du  monnayage  ptolémaïque,  l'argenteus  de  20  drachmes  ptolémaïques  pesait  les  ^5  de  l'outen 
égyptien  de  M.  Chabas.  Mais  en  était-il  de  même  à  l'ancienne  époque,  pour  l'argenteus  du  temps  de  Darius, 
par  exemple?  Je  le  pensais  et  je  croyais  aussi  que  les  Ptolémées  étaient  partis  de  cette  base  de  l'ancien 
argeuteus  pour  réduire  le  poids  de  la  drachme  attique,  de  manière  à  le  faire  concorder  avec  20  drachmes 
d'argent.  D'après  ce  calcul  un  seul  point  restait  difficile  :  l'origine  de  l'argenteus,  puisque  cet  argeuteus  ne 
correspondait  pas  à  un  poids  égyptien  primitif  :  J'avais  d'abord  expliqué  cette  origine  par  la  grosse  monnaie 

'  Dans  les  comptes  de  dépenses  on  se  bornait  parfois  à  écrire  apyjp'.oj  opr/jx. 


Note  annexe  sur  l'argenteus-outen.  1>7 

d'argent  frappée  par  Aryandès.  Mais  ensuite  j'avais  trouvé  la  mention  de  l'argenteus  —  avec  les  mêmes 
calculs  —  antérieure  à  Darius  et  à  Aryandès.  J'en  étais  là  quand  M.  Naville  m'a  communiqué  une  très 
remarquable  inscription  hiéroglyphique,  de  l'an  21  de  Philadelphe,  qu'il  a  récemment  découverte,  et  qui 
contient  une  liste  de  sommes  perçues  pour  l'impôt  foncier  et  pour  l'impôt  personnel  ou  la  capi- 

tation  des  habitants  c»c>l  Jî^^  m  ^=:Mîs  :.  Toutes  ces  sommes  sont  en  argent  —  ce  qui  confirme  admi- 
rablement mes  conclusions  sur  l'étalon  d'argent  pendant  la  première  partie  de  la  domination  lagide.  Mais 
ce  n'est  pas  là  la  seule  donnée  métrologique  précieuse  de  notre  stèle  (si  intéressante  d'ailleurs  au  point 
de  vue  de  l'économie  politique).  Nous  y  voyons,  par  exemple,  s'échanger  l'argenteus,  exprimé  comme  en 

démotique,  par  le  seul  caractère  de  l'argent  fw^i,  et  l'outen  d'argent  ^^fwTi  principale  unité  pondérale 

antique  des  Égyptiens.  On  sait  que  dans  la  Bible  il  en  est  de  même  et  que  le  eiD3n  bp]V  sékel  d'argent 
(principale  unité  pondérale  et  monétaire  des  Hébreux)  s'échange  avec  la  simple  mention  !]D3  urcjeniem.  Il 
faut  donc  nécessairement  admettre  que  l'argenteus  était  primitivement  (sous  Amasis  et  Darius,  par  exemple) 
un  outen  d'argent.  Cette  conclusion  paraît  d'autant  plus  naturelle  que  la  sigle  ^  qui  se  joint  parfois  à 
celle  de  l'argent  (^)  pour  désigner  l'argenteus  ressemble  beaucoup  à  certaines  ligatures  désignant  l'outen 
en  hiératiqiie.  Mais  comment,  alors,  en  est-on  venu  à  assimiler  l'argenteus  ou  outen  d'argent  à  20  drachmes 
ou  5  sékels-tétradrachmes  ptolèmaïques  ne  pesant  que  les  V5  de  l'outen  antique?  II  me  semble  que  ce 
problème  n'est  pas  difficile  à  expliquer.  Nous  avons  eu  l'occasion  de  voir  que  Ptolémée  Soter  avait  com- 
mencé par  frapper  des  drachmes  attiques,  comme  Alexandre,  et  n'en  était  venu  que  progressivement  au 
poids  dit  Ptolémaïque.  Lors  des  drachmes  attiques,  20  drachmes  pesaient  87  grammes  :  et  l'outen  antique 
n'en  pesait  que  90  environ.  L'écart  était,  on  le  voit,  peu  considérable  et  l'on  avait  trouvé  commode  de  faire 
concorder  ainsi  les  poids-monnaies  des  Grecs  avec  les  poids-monnaies  des  Égyptiens'.  En  partant  de  la 
même  drachme,  le  sekel  fort,  babylonien  et  sémitique,  équivalant  comme  poids  à  la  double  darique  d'or  des 
Persans,  valait  aussi  4  drachmes  ou  environ  le  5®  de  l'outen.  Cela  avait  l'avantage  de  faire  concorder  encore 
avec  le  système  égypto-grec,  le  système  des  provinces  asiatiques  possédées  par  les  Ptolémées.  Ainsi  fut  fait  : 
et  l'on  conserva  les  mêmes  équivalences,  quand  le  tétradrachme  baissa  de  poids  jusqu'à  tomber  d'abord  de 
17  gr.  40  à  14,  50  au  maximum  pour  se  rapprocher  de  la  pièce  d'argent  de  Philippe  ^  et  enfin  à  12  environ  sous 
Evergète  II  par  suite  de  fraudes  successives.  Lors  de  l'assimilation  primitive  des  poids-monnaies  le  10®  de 
l'outen,  le  kati  ou  ritc,  avait  pris  également  la  valeur  du  didrachme  puisque  l'outen  valait  20  drachmes. 
Cette  valeur  lui  resta,  comme  celle  de  20  drachmes  à  l'outen,  lors  de  la  diminution  progressive  des  poids 
et  c'est  ainsi  que  Rire  signifie  toujours  en  copte  didrachma,  signification  qui  n'a  été  à  peu  près  exacte 
(comme  celle  de  l'outen)  qu'à  l'époque  de  la  drachme  attique.  Tout  devient  ainsi  parfaitement  clair  dans 
les  noms  monétaires  démotiques  et  coptes.  On  aurait  seulement  tendance  à  s'étonner  de  la  persistance 
du  nom  d'argenteus,  s'appliquant  non  plus  seulement  à  l'outen  d'argent,  mais  à  l'outen  de  cuivre.  Ce  fait 
montre  que  fw^  (comme  s^ca  chez  les  Hébreux)  était  devenu  le  nom  principal  de  l'unité  monétaire  en 
usage,  c'est-à-dire  en  Egypte  de  l'outen,  du  temps  de  l'étalon  d'argent. 

Ajoutons  que  l'argenteus-outen  primitif  se  retrouve  même  assez  tardivement  à  l'époque  ptolémaïque 
sous  le  nom  cV ari/enteus  fondu  du  temple  de  Ptah.  Cet  argenteus  fondu,  ancien  lingot-outen  (  ',  était  expressé- 
ment distingué  de  l'argent  (jravé  (ef-ket)  (xpyjpio-j  zr.'.<Trj^o'j,  c'est-à-dire  à  la  frappe  des  Ptolémées.  On  a  soin 
de  spécifier  pour  le  lingot  marqué  qu'il  s'agit  de  la  fonte  du  temple  de  Ptah,  c'est-à-dire  du  joids  sacré 
et  non  du  poids  monétaire  ordinaire.  De  même,  pour  éviter  l'erreur  de  chitires,  on  donne  un  calcul  par 
fractions  :  «21  argenteus  fondus  du  temple  de  Ptah  ou  20  argenteus  plus  ^1^,  i/,o,  Vao,  Veo,  Veo  (valant  un 
entier),  21  argenteus  fondus  du  temple  de  Ptah  en  tout»  au  lieu  de  dire,  comme  pour  les  monnaies  gravées  : 
«21  argenteus  ou  120  sekels  (tétradrachmes  ptolèmaïques),  21  argenteus  en  tout  »  ou  bien  encore,  mais  pour 
d'autres  sommes,  comme  dans  les  exemples  suivants  : 

/Ai  v^fti 'i>21^  ^^"b  (s, /ii/i^1/V  t<|>, 

«en  outen  d'argent,  argenteus  5,  en  sékels  25,  en  outen  d'argent,  argenteus  5  en  tout,  argenteus  gravés» 
ou  bien  encore  : 

•  Nous  avons  déjà  fait  remai-ciuer  que  l'outen  d'argent  (argenteus  de  20  drachmes)  répondait  comme  valeur  à  la  principale  unité 
d'or  ou  "/p'jaou;  didrachme  des  Athéniens. 

2  Voir  dans  la  Revue,  t.  II.  n°  II — III.  p.  219,  229,  232  et  suiv.,  ce  que  nous  avons  dit  de  ces  pièces  de  Philippe,  d'après  les- 
quelles Ptolémée  Soter  fit  fondre  les  tétradrachmes  propi-ement  ptolèmaïques.  Ptolémée,  qui  passait  pour  fils  de  Philippe,  tâchait  de  se 
rattacher  le  plus  possihle  à  ce  prince  et  il  n'avait  pas  eu  de  peine  à  renoncer  peu  à  peu  au  nouveau  système  purement  attique  imaginé  par 
son  frère  putatif  Alexandre.  Le  poids  des  pièces  de  Philippe  varie  généralement  entre  14,  56  et  14,  06.  Il  s'en  trouve  même  de  plus  légères. 

13 


98  Eugène  Revillout  et  Keall. 

«  en  outen  d'argent  gravé  argenteus  5,  en  outen  d'argent  gravé  5  en  tout  »  ou  bien  encore  : 

2  l^fc^  .15  /u1r  1  O-i  i^U  tf^ 

«en  outen  d'argent  gravé  5,  eu  sékels  25,  en  outen  d'argent  5  en  tout.» 

Dans  tous  ces  derniers  cas  il  était  clair  qu'il  s'agissait  de  l'outen  monétaire  actuel,  et  non  de  l'antique 
outen  pondéra],  lingot  pesant  un  cinquième  en  plus  et  en  argent  pur,  sans  alliage.  Cette  distinction  entre 
l'outen  monétaire  et  l'outen  pondéral  ou  commercial  a  ses  analogues  dans  le  système  attique.  En  effet  nous 
sommes  parfaitement  d'accord  avec  MM.  Boeck  et  Mommsen  pour  admettre  que  la  mine  dite  commerciale 
(zii.r.op'.y.ri)  de  l'inscription  n°  12.3  du  Corpus  bvscriptionum  grœcarum^  mine  qui  devait  peser  138  drachmes 
monétaires  contemporaines,  représentait  bien  une  ancienne  mine  de  100  drachmes  monétaires  d'une  autre 
époque,  avant  qu'on  eiit  réduit  le  poids  de  l'unité  d'argent  dans  la  proportion  indiquée. 


LA  YIE  D'AETISTE  OU  DE  BOHÈME  EN  EGYPTE. 

(FRAGMENT  D  UN  POÈME  SATYEIQUE  EN  VERS  DÉMOTIQUES  DE  L'ÉPOQUE  ROMAINE.) 

(LECTURE  FAITE  A  L'ACADÉMIE  DES  INSCRIPTIONS  EN  AOUT  1833.) 

Le  genre  sapieiitial  est  certaiuemeiit  un  de  ceux  qui  ont  le  mieux  réussi  aux  Égyptiens. 
Le  papyrus  Prisse,  que  M.  Chabas  nomme  avec  raison  le  flus  ancien  livre  du  monde,  est  déjà 
un  recueil  de  maximes  morales  et  satyriques,  des  plus  curieux,  des  plus  instructifs.  J'en  dirai 
autant  du  célèbre  papyrus  de  Boulaq  signalé  et  traduit  pour  la  première  fois  par  notre  illustre 
maître  M.  de  Eougé,  et  auquel  M.  Chabas  a  consacré  les  deux  beaux  volumes  de  son  Jour- 
nal égyptologique.  En  démotique  nous  possédons  également  de  nombreux  ouvrages  analogues, 
parmi  lesquels  je  signalerai  seulement  deux  papyrus  du  Louvre,  un  papyrus  d'Edimbourg  et 
un  papyrus  de  Vienne.  C'est  de  ce  dernier  que  je  veux  dire  aujourd'hui  quelques  mots. 

L'un  des  côtés  de  ce  papyrus  contient,  d'une  part,  un  curieux  texte  d'administration 
romaine,  récemment  publié  par  M.  Wessely,  d'une  autre  part,  un  certain  nombre  de  sentences 
et  de  préceptes  affinnatifs  et  négatifs  fort  analogues  à  ceux  des  papyrus  de  Paris  et  d'Edim- 
bourg. Mais  c'est  l'autre  côté  du  document  qui  nous  semble  le  plus  intéressant  des  deux. 

On  y  trouve  cinq  colonnes  d'un  texte  serré,  divisé  en  vers  mis  à  la  ligne  et  relatif  à 
la  vie  d'artiste  ou  de  bohème  chez  les  Égyptiens.  Sauf  que  c'est  de  la  poésie,  au  lieu  d'être 
de  la  simple  prose,  ce  texte  rappelle  d'une  façon  vraiment  frappante  d'une  part  le  tableau 
que  Théophraste  nous  fait  de  l'impudent  dans  ses  inimitables  caractères  et  d'une  autre  part 
les  récits  si  curieux  que  notre  cher  maître  M.  Caussin  de  Perceval  a  recueillis  sur  la  vie 
d'artiste  chez  les  Arabes  pendant  les  premiers  siècles  de  l'hégire.  Nous  savons,  du  reste,  par 
l'auteur  de  la  vie  de  Saturninus,  que  les  Égyptiens,  à  l'époque  romaine,  étaient  célèbres  par 
leurs  poésies  satyriques  qu'ils  chantaient  souvent  dans  les  rues. 

Qu'on  me  permette,  tant  en  mou  qu'au  nom  de  M.  le  Dr.  Krall,  mon  élève,  privât  docent 
à  Vienne,  de  citer  une  page  de  notre  curieux  document,  traduite  d'après  la  copie  au  crayon 
que  ce  jeune  savant  distingué  a  bien  voulu  faire. 

Il  s'agit  d'un  musicien  dont  on  ne  nie  pas  les  connaissances  théoriques.  Il  était  com- 
positeur et  avait  écrit  un  livre  estimé  d'enseignement  musical.  Mais  ses  talents  avaient  été 
gâtés  par  l'amour  de  l'oisiveté  et  de  la  bonne  chère.  —  Il  allait  à  toutes  les  fêtes  pour  y 


La  vie  d'artiste  ou  de  bohème  en  Egypte.  99 

manger  et  boire  et  non  pour  y  chanter.  Il  faisait  ainsi;  par  sa  gloutonnerie  sans  vergogne, 
la  honte  de  ses  confrères  les  ménestrels  de  l'époque,  caste  à  laquelle  pourrait  bien  avoir  appar- 
tenu l'auteur  de  notre  portrait.  Il  est  certain  qu'on  avait  en  vue  un  homme  connu  :  Hor  Ut'a 
surnommé  Pspiu  (le  corrompu)  n'était  pas  le  premier  venu  pour  les  lecteurs  contemporains. 
On  sent  également  que  les  reproches  adressés  à  ce  bohème  sont  trop  vifs,  trop  haineux,  pour 
être  parfaitement  sincères.  Il  y  a  là  dessous  une  vieille  inimitié  personnelle.  Mais  il  faut  bien 
reconnaître  en  même  temps  un  talent  littéraire  distingué  à  notre  satyrique  qui  rappelle  par 
certains  traits  les  Martial  et  les  Juvenal.  Il  n'est  guère  inférieur  en  somme  à  Théophraste, 
si  nous  n'avons  pas  affaire  à  une  imitation  poétique,  fort  habile  en  tout  cas,  pleine  d'art,  mais 
comme  un  tableau  de  Téniers,  du  9®  caractère  de  cet  illustre  moraliste.  Notons,  du  reste,  que 
Yimpiident  de  Théophraste  n'était  pas  un  musicien. 

Voici  la  traduction  littérale  de  ces  vers  démotiques  dont  nous  respectons  avec  soin  la 
coupe  :  On  y  entend  les  cris  d'auberges  : 

il  a  la  science  :  il  n'a  pas 

la  manière  d'oimir  la  bouche  :  il  a  un  cœiu*  qiii  ne  peut  se  porter  au  bien  : 

le  nerf  est  détruit.  —  Il  a  rempli  un  livre  dans  lequel  tout  enseignement  est  renfermé  : 

—  mais  il  ne  sait  pas  de  chanson,  si  ce  n'est  une,  depuis  l'enfantement  qu'on  a  fait  de  lui  : 
«J'ai  faim.  —  Il  faut  que  je  boive.  —  Est-ce  qu'il  n'y  a  pas  quelque  chose  à  manger? 
«Qu'y  a-t-il  donc  à  mastiquer?»  —  Devant  lui,  il  voit  de  la  viande  : 

ses  entrailles  sont  en  sang  :  (avide)  plus  que  la  mouche  qui  s'élance  à  la  vue  de  l'ordure, 
il  saura  cela  depuis  quatre  jours  :  il  (pressent),  il  voit  les  mets  :  il  s'habille  : 

—  on  lui  a  parlé  de  viande!  —  sans  sentir  toute  honte  qui  est  eu  lui  :  —  avec  la  harpe  par  devant. 

—  lî  n'a  pas  de  rassasiement  :  —  (c'est  un  gouffre),  la  gorge  de  cet  homme,  qui  déshonore  ses  con- 

frères ! 
Après  qu'il  a  reconnu  (qu'il  y  a  du)  vin,  de  la  viande,  il  faut  qu'il  aille  à  ceux  qui  ne  l'ont  pas  invité  : 
qu'il  parle  avec  les  convives  :  «Je  ne  puis  chanter  :  —  j'ai  faim. 

«Je  ne  puis  porter  la  harpe  pour  chanter  sans  avoir  bu,  mangé.»  —  «Du  vin!  —  apportez! 
«  —  pour  qu'il  boive  le  vin  comme  deux,  qu'il  mange  comme  trois  le  pain  pur!»  —  pour  ne  pas  chanter  !  ! 
La  harpe  est  trop  lourde  pour  son  cœur  —  lourde  plus  que  des  fardeaux  nombreux 

—  pour  qu'il  chante  encore  !  —  «  Quatre  coups,  pour  une  chanson  !  » 

—  Il  a  l'habitude  de  porter  la  harpe  pour  s'enivrer,  en  montrant  en  lui  toute  espèce  de  vices. 
Il  chante,  sur  le  sol,  vers  ceux  qui  ont  la  bouteille  en  main  :  «Servez  nourriture,  dites  donc!» 
Il  se  tourne  de  ce  côté  :  Il  sait  bien  parler  de  l'éloignement  des  brocs. 

Il  a  coutume  d'enfler  ses  services  :  sa  bouche  dit  ses  prouesses  : 

Point  (vraies)  ses  paroles.  «Est-ce  qu'on  ne  témoigne  pas  de  ses  services?»  —  Tombe  sa  voix  :  — 

tombe  la  harpe. 
Pour  mettre  à  mal  (à  néant)  ses  services,  parlez  de  lui  imposer  de  chanter! 
Honte  et  pudeur!  on  n'a  pas  coutume  de  mettre  cela  en  son  œil! 

—  On  ne  le  reçoit  plus  dans  le  lieu  où  il  descend  :  —  —  —  on  l'expulse  : 
il  s'en  retourne,  tenant  la  harpe  :  —  il  s'attarde  :  —  puis  il  s'en  va  : 

En  sorte  qu'il  fait  passer  le  moment  de  dilater  son  visage. 

Je  n'en  dirai  pas  plus  long  sur  la  triste  destinée  dun  bohème  en  déconfiture.  L'effon- 
drement se  produit  de  plus  eu  plus  dans  sa  vie  —  «jusqu'à  la  mort  qu'il  fait»,  comme  dit 
notre  texte. 

Ce  texte  a  certainement  été  écrit  à  l'époque  romaine,  environ  un  siècle  après  les  entre- 
tiens philosophiques  du  chacal  koufi  et  de  la  chatte  éthiopienne,  ce  long  livre,  si  intéressant, 
dont  j'ai  traduit  une  partie  dans  la  Revue  égyptologique.  Mais  la  date  du  manuscrit  ne  nous 
donne  pas  d'une  façon  certaine  la  date  de  la  rédaction.  M.  Brugsch  qui  a  copié  notre  do- 
cument sans  le  traduire,   ou  du  moins  sans  en  faire  connaître  la  traduction,  m'a  dit  y  avoir 

13* 


100  Eugène  Revillout  et  Krall.  La  vie  d'artiste,  etc. 


retrouvé  des  passages  extraits  mot  pour  mot  du  papyrus  Prisse.  Je  ne  saurais  vériiier  le  fait, 
car  pendant  ma  mission  de  Vienne  il  ne  m'a  pas  été  permis  de  copier  ce  précieux  document. 
M.  Krall  ne  m'a  envoyé  que  les  5  colonnes  du  verso.  Les  passages  dont  m'a  parlé  M.  Brugsch 
doivent  se  trouver  sans  doute  sur  le  reste.  Quant  au  portrait  du  musicien,  sa  rédaction  ap- 
partient certainement  au  courant  littéraire  de  la  fin  des  Ptolémées  ou  du  commencement  de 
l'époque  romaine.  C'est  à  cette  époque  que  nous  trouvons  des  vers  proprement  dits,  coupés, 
scandés,  mis  à  la  ligne.  Le  hiératisme  a  alors  complètement  disparu  :  le  style  prend  un  tour 
vif,  tout-à-fait  occidental,  et  les  classiques  grecs  font  sentir  leur  influence  aux  Égyptiens  eux- 
mêmes  par  l'intermédiaire  de  la  puissante  école  d'Alexandrie.  Cela  n'a  rien  qui  doive  nous 
étonner,  puisque  l'un  des  papyrus  grecs  du  British  Muséum  nous  a  fait  connaître  l'existence 
d'un  enseignement  littéraire  et  linguistique  qui  mettait  en  rapport  les  deux  nationalités.  Nous 
pouvons  constater  ce  que  cet  enseignement  avait  de  tin  et  de  recherché  dans  les  poésies  bi- 
lingues démotiques  et  grecques  de  Moschion  récemment  publiées  dans  la  Revue  égyptologique 
et  qu'il  sera  intéressant  de  comparer  pour  le  rhythme  à  celle  du  papyrus  de  Vienne.  Moschion 
était  sans  doute  quelque  privât  docent  de  l'époque.  M.  Weil,  si  expert  dans  la  versification 
grecque,  a  constaté  ses  connaissances  sérieuses  sous  ce  rapport,  comme  nous  avons  pu  admirer 
nous  même  l'ait  remarquable  de  sa  composition  démotique. 

Ces  influences  littéraires  étrangères  unies  aux  qualités  propres  à  l'Égyptien  se  remarquent 
aisément  dans  le  livre,  à  peu  près  contemporain,  du  chacal  koufi  et  de  la  chatte  éthiopienne. 
Evidemment  l'auteur  de  cette  composition  philosophique  si  remarquable  connaissait  très  bien 
l'œuvre  de  la  plupart  des  plus  illustres  sages  de  la  Grèce,  et  même  de  l'Inde  —  pays 
qui  était  alors  en  rapports  constants  avec  l'Egypte  et  que  cite  souvent  Origène  et  les  autres 
chefs  de  l'école  païenne  ou  chrétienne  d'Alexandrie.  De  même  que  c'est  à  l'imitation  grecque 
qu'il  faut  rattacher  les  poésies  telles  que  celles  que  nous  trouvons  dans  la  bilingue  de  Moschion 
et  dans  le  papyrus  de  Vienne,  de  même  c'est  à  l'imitation  indienne  qu'il  faut  attribuer,  par 
exemple,  le  plan  même  de  cet  ouvrage  dans  lequel  on  voit  discuter  deux  animaux  —  une 
chatte  et  un  chacal  —  remplaçant  alors  les  interlocateurs  de  Platon  et  soutenant,  chacun, 
des  idées  et  de  principes  tout  différents.  Au  milieu  de  leurs  controverses  se  trouvent  racontées 
—  par  eux  mêmes,  comme  arguments  —  des  apologues  dont  l'origine  étrangère  n'est  pas 
moins  évidente.  Je  citerai,  par  exemple,  celui  du  lion  et  de  la  souris,  que  M.  Brugsch  a  traduit 
et  qui  a  le  même  sujet  que  la  fable  Ésopique.  On  nous  permettra  même  de  dire  que  la  version 
grecque  est  certainement  inférieure  à  la  version  égyptienne.  Peut-être  celle-ci  a-t-elle  imité 
directement  l'original  indien;  car  c'est  de  l'Inde,  on  le  sait,  que  semblent  venir  la  plupart 
des  fables  qui  se  sont  répandues  de  là  dans  le  monde  entier. 

Telle  ne  peut  être  l'origine  d'un  autre  apologue  que  cite  le  chacal  pour  prouver  sa 

thèse  si  darwinienne  et  que  j'ai  déjà  fait  connaître  dans  la  Revue  égyptologique;  car  c'est  alors 

aux  idées  chrétiennes  que  s'attaque  directement  notre  esprit  fort  '  .  .  .  .  Combien  on  sent  que 

l'Egypte  était  alors  le  théâtre  de  toutes  les  doctrines  s'eutrechoquant  les  unes  les  autres! 

Aussi  notre  chacal  a-t-il  soin  de  dire  ailleurs  plaisamment  que  les  dieux  des  pays  étrangers 

s'ennuyaient  d'être  en  Egypte  et  aspiraient  ardemment  à  retourner  chez  eux. 

*  Je  ne  reproduirai  pas  ici  la  fable  du  lion  et  des  chacals  que  j'ai  lue  à  l'Académie  et  que  nos 
lecteurs  trouveront  dans  le  n°  II-III  de  la  précédente  année  de  la  Revue. 


L'Éditeur  Ernest  Lerocx,  Propriétaire-Gérant. 


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Vc^'Ka'  e^  uA/\     C-'V^  «^  fi»--  H  ic^  tx  C<t-^^"'t<?  »^    fi*  ^^*^    CX>^-  >ctcv    Ccv^tc  i/f-t^ 

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TovA.V(7w*fcx>    a  «t  cWe     <-^cxv^-^    WoT'u^   coeu-^t^  , 


REVUE  ÉGYPTOLOGIQUE 

FONDÉE 
SOX7S    LA  DIRECTIOIST  DE 

im.  H.  BRUGSCH,  F.  OHABAS,  EUG.  REAILLOUT. 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR 

LIBRAIRE  DE  LA  SOCIÉTÉ  ASIATIQUE,  DE  L'ÉCOLE  DES  LANGUES  ORIEXTALES  VIVANTES.     ETC.  ETC. 
28.  RUE  BONAPARTE.  28.  A  PARIS. 

in^  année.  N"  m.  1883. 

La  IÎE\  UE  E GYPTOLOGIQUE  parait   totis   les  trois  moiii  par  numéros  de  siœ  feuilles   au   moins,   avec 

planches,  fac-similé  etc.  —   Aucun  numéro  ne  se  vend  séparément. 

Prix  de  l'abonnement  annuel:     Paris  30  fr.  —  Départements  31  fr.  —  Étranger  32  fr. 

Sommaire  :  La  caste  militaire  organisée  par  Eanisès  II  d  apiès  Dicdore  de  Sicile  et  le  pcème  de  Pentaonr  (E.  Eevillotjt)., —  Le 
budget  des  coites  sons  Ptolémée  Ihiladelphe  lE.  R.'.  —  Tn  registre  budgétaire  sur  le  rendement  des  impôts  en  Egypte 
(E.  R.).  —  Le  papyrus  Sakkakini  lE.  R.i.  —  La  requête  d'an  esclave  (E.  R.).  —  Leçon  sur  la  location  en  Egypte, 
professée  à  l'école  du  Louvre  (E.  E.).  —  Comptes  du  Sérapéum  (E.  et  V.  Eeviliout).  —  Nécrologie  et  nouvelles.  — 
BibUographie. 


LA  CASTE  MILITAIRE 

ORGANISÉE  PAE  RAMSÉS  II  D  APRÈS  DIODORE  DE  SICILE  ET  LE  POÈME 

DE  PENTAOLTR. 

Les  biens  ecclésiastiques  étaient  très  considérables  eu  Ég:ypte.  Les  auteurs  grecs  nous 
aftirnient  que  la  terre  dÉgypte  était  divisée  entre  le  roi,  les  prêtres,  les  guerriers  i^ affirmation 
confirmée  par  les  témoignages  des  papjTus  déjà  recueillis  par  nous  dans  notre  cours  de  droit 
égj'ptien). 

Cette  divisou  triparti  te  de  la  propriété  éminente,  réduisant  la  propriété  individuelle  à 
une  sorte  de  fermage  iudéiîuiment  continué,  aurait  eu,  d'après  les  témoignages  antiques,  une 
double  origine.  Selon  la  Genèse,  le  Pharaon  de  Joseph,  qui  appartenait  aussi  à  la  race  étran- 
gère des  pasteurs  sémitiques,  profita  dune  famine  pour  dépouiller  les  habitants  à  la  seule 
exception  des  prêtres,  qu'il  voulut  bien  nourrir  gratis.  Quand,  ensuite,  les  Égyptiens  d'origine 
reprirent  le  dessus,  cet  abus  royal  ne  disparut  pas.  En  effet,  l'auteur  de  la  Genèse  nous  ajoute 
que  la  nouvelle  division  subsista,  depuis  ce  jour  jusqu'à  son  époque.  Probablement  cet  état 
de  choses  fat  régularisé  lors  de  l'expulsion  des  pasteurs  et  de  la  nouvelle  domination  des  rois 
égyptiens  de  race  :  et  la  division  bipartite  des  terres  prit  alore  la  forme  tripartite.  Le  Pharaon 
qui  vit  grandir  Mo'ise  est  Ramsès  II,  au  profit  duquel  les  Hébreux  construisirent,  selon  le  texte 
sacré,  la  \ille  de  Ramsès.  Or,  c'est  justement  ce  Ramsès  II,  le  grand  Sésostris  ou  Sésoosis,  si 
dur  pour  les  Sémites,  que  Diodore  nous  indique  comme  s'étant  occupé  spécialement  de  la 
distribution  des  terres  et  de  l'organisation  générale  du  sol  de  l'Égj'pte.  Il  passait  à  ce  titre 
pour  le  second  législateur  des  Égyptiens  et  succédait  directement  en  cette  qualité  au  légen- 
daire Sasychis.  Son  œuvre  spéciale,  ses  lois  particulières  concernaient  :  J''  les  terres,  2°  les 

14 


102  Eugène  Revillout. 


soldats.  On  lui  attribuait  rorganisatioii  et  la  division  détiuitive  des  36  nômes  de  l'Egypte, 
à  la  tête  de  chacun  desquels  il  mit  un  préfet  chargé  de  gouverner  et  de  recueillir  les  impôts 
royaux.  Cette  mention  vient  deux  fois  dans  Diodore  (I,  liv  et  lxxiii)  et  la  seconde  fois  le 
texte  joint  à  cette  organisation  des  nômes  celle  de  toute  la  terre  d'Egypte  ',  partagée  entre  les 
prêtres  qui  sont  représentés  comme  les  plus  anciens  possesseurs  de  leur  sol,  (à  cause  de 
l'origine  théocratique  des  institutions  égyptiennes,)  le  roi  qui  prend  part  avec  eux  d'abord  comme 
dans  la  Genèse,  et  les  guerriers  qui  viennent  eu  dernier  lieu.  Il  semble,  en  effet,  que  cette 
double  réforme,  politique  et  économique,  a  dû  être  faite  parallèlement.  L'indication  même 
des  guerriers  le  prouve;  car,  selon  le  paragraphe  54,  Sesostris  réserva  une  bonne  partie  des 
champs  d'Egypte  à  la  caste  militaire  quand  il  la  constitua  définitivement,  en  fixa  le  con- 
tingent à  620,000  piétons  et  24,000  cavaliers,  leur  désigna  1,700  chefs.  C'est  pour  cela  que 
dans  le  paragraphe  94  (liv.  F""),  relatif  aux  législateurs,  Diodore  insiste  surtout  sur  les  lois  données 
par  Sesostris  à  l'ordre  militaire.  C'était  en  effet  sou  organisation  la  plus  personnelle,  si  l'on 
admet  une  division  bipartite  du  sol,  contemporaine  de  Joseph.  Le  roi  national  n'aurait  ainsi 
fait  que  suivre  l'exemple  fourni  par  un  cruel  oppresseur  étranger,  mais  en  ajoutant  à  sa 
réforme  tout  un  nouveau  chapitre  pour  faciliter  désormais  non  seulement  la  défense  de  la 
patrie,  mais  les  glorieuses  guerres  d'envahissement  qu'il  allait  entreprendre. 

Ces  données  de  l'historien  sont  du  reste  confirmées  ex})ressément  par  le  poème  officiel 
de  Pentaour  que  Ramsès  II  fit  graver  sur  les  murs  du  temple  de  Karnak,  etc.  Les  reproches 
que  le  roi  adresse  à  ses  guerriers,  qui  s'étaient  mal  comportés  dans  une  des  batailles  qu'il 
livra  contre  les  Chétas,  rappellent  les  faits  dont  parle  Diodore  :  «Voici  que  sa  Majesté  appela 
ses  soldats,  avec  sa  cavalerie,  et  également  ses  chefs  qui  n'ont  pas  combattu.  Le  roi  leur 
dit  :  Votre  cœur  s'est  affaibli,  ô  mes  cavaliers!  et  mon  cœur  à  moi  commence  à  ne  pas  se 
remplir  de  vous  tous.  Cependant,  il  n'est  pas  un  seul  d'entre  vous  à  qui  je  n'aie  fait  un  sort 
heureux  dans  ma  terre.  Si  je  ne  m'étais  pas  tenu  debout  comme  seigneur,  vous  étiez  à  l'état 
de  misérables.  Je  vous  ai  faits  grands  dans  mes  biens,  chaque  jour.  Je  mets  le  fils  sur  les 
choses  de  son  père.  S'il  vient  un  malheur  (une  année  mauvaise)  quelconque  daus  le  pays, 
je  vous  laisse  quelque  chose  de  vos  services.  Est-ce  que  (dans  ce  cas)  je  ne  vous  donne  pas 
d'autres  choses  que  celles  qui  vous  ont  été  enlevées?  Quiconque  (de  vous)  vient  me  prier  par 
des  requêtes,  je  le  protège  par  moi-même  chaque  jour.  Il  n'y  a  pas  de  seigneur  faisant  pour 
ses  soldats  ce  que  (Ma)  Majesté  a  fait  pour  vous.  Je  vous  ai  fait  demeurer  daus  vos  demeures 
et  dans  vos  villes.  Et  l'ordre  (de  départ)  n'a  pas  été  donné  })ar  le  capitaine,  et  mes  cava- 
liers de  même  ont  agi.  Je  vous  ai  donné  la  route  vers  vos  villes  afin  que  je  vous  trouve 
tous  ensemble  au  jour  et  à  l'heure  de  marcher  au  combat;  or,  voyez,  vous  avez  fait  une 
action  lâche  enseml)le!  pas  un  d'entre  vous  ne  s'est  levé  pour  me  prêter  la  main!»  Ainsi 
Ramsès  avait  donné  en  héritage  perpétuel  certains  biens  (de  son  domaine)  aux  soldats,  dans 
leurs  villes,  avec  des  points  en  concentration  en  cas  de  guerre.  C'est  toute  l'organisation  dé- 
crite par  Diodore.  Notons  que  Pentaour  parle  aussi  du  droit  de  pétition  directe  au  roi  accordé 
aux  membres  de  la  caste  militaire.  Ce  droit,  nous  le  voyons  encore  exercé  par  les  soldats 
comme  par  les  prêtres  à  l'époque  lagide.  Quant  à  la  division  des  terres  en  terre  sacrée  (tspa 

1  Hérodote,  de  son  côté,  raconte  qu'à  cette  occasion  Sesostris  établit  l'arpentage  général  des  terres 
et  leur  division  en  aroures,  etc. 


La  caste  militaire,  etc.  103 


Xn)  en  démotique  neterhotep,  terre  des  guerriers  {[j.y.y}\>.w))  et  terre  du  roi  ((iaj'.Aty.Y;),  elle 
est  sans  cesse  mentionnée  dans  les  circulaires  ptolémaïques,  dans  le  décret  de  Rosette,  les 
contrats  démotiques,  etc.  Nous  n'avons  qu'à  renvoyer  pour  cela  à  notre  cours  de  droit 
égyptien. 

Venons  en  maintenant  à  l'étude  détaillée  du  texte  du  poème  si  admirablement  traduit 
par  notre  illustre  maître  M.  de  Rougé.  Nous  allons  reproduire  son  mot-à-mot,  avec  quelques 
légères  modifications  pour  des  nuances  de  sens  indiquées  en  note.  Notre  traduction  suivie, 
déjà  donnée  ci-dessus,  repose  sur  ce  mot-à-mot,  mais  est  notablement  différente  de  celle  qui 
est  contenue  dans  le  1"  fascicule  du  Recueil  de  Vieweg. 

Papyrus  Sallier,  V,  1.  10. 


I  I  I 

Voici   que     appela    le      roi  ses  soldats  V        avec  sa  cavalerie  et 

également      ses      généraux         qui       n'ont      pas    combattu.  Dit       à        eux     le       roi  •  Vous  avez 

p.  Sal.  V,  11. 
Louqsor,  46. 

été  affaiblis  dans  votre '  cœur,       ô     mes      cavaliers!        Et  ne  commence  pas  à  se  remplir  mon  cœur      de 


vous      tous.     Or        il    n'est  pas   un  seul  d'entre  vous  à  qui  je  n'aie  fait  un  bon        sort       dans  ma 


AWvAA 
I         I         I 


terre.  Si  je  ne  jn'étais  pas  tenu  debout  comme  un  seigneur,   vous  étiez  à  l'état  de  misérables.  Je       fais 


vous    grands       dans  mes  biens     chaque  jour-,  je  fais  le  fils  dans  les  choses  de  son  père;     est    venu     un 


I         I         I 


'  Mot  à  mot  :  votre  cœur. 

2  Louqsor  et  le  Pap.  Sallier  n'ont  pas  la  négation.  L'un  serait  la  forme  de  V insinuation,  l'autre  celle 
de  la  négation  (E.  de  R.). 

3  .  Sens  très  variés.  Eu  copte  con,  vices.  En  égyptien:  «fortune,  condition».  Ici  l'ensemble  des 
bienfaits  du  roi  (E.  de  R.). 

*  Nemehi-ti.  Ce  thème  se  présente  parmi  les  péchés;  cela  veut  dire  :  «faible»  (ch.  125).  Deux  péchés 
parallèles  :  le  premier  \ PS\  s o,  nem,  «violent»;  puis  :  nemeh,  «faible».  On  trouve  :    '/(^  \i  «affaiblir», 

et  avec  le  déterminatif  ^,   «invoquer,  supplier»  (Piankhi).  Au  Papyrus  Rhind  nemmeh  est  traduit  par  : 

afnn^  eÊiHit,  «malheureux,  pauvre»  (E.  de  R.).  Ce  dernier  sens  qui  est  celui  de  Brugsch  :  «petit,  pauvre, 
malheureux  »  {Dict.  766)  est  celui  que  j'ai  adopté  (E.  R.) 

5  Le  Pap.  Sallier  passe  la  figure  du  roi  1  ^^^^  [ J  sic)  (E.  de  R.).  Le  déterminatif  et  le  pluriel 

prouvent  qu'il  ne  s'agit  pas  du  thème  prononcé.  J'ai  modifié  en  conséquence  la  traduction  de  mon  illustre 
maître.  Conf.  1 I  .    w  ,  |     j    ^     / 1^   I  îf-  <*  ''«■«)  possessiones  »  —   1434,  Dict.  Brugsch  (E.  R.). 

^  Le  Pap.  Sallier  remplace  kketu  par    ^^\  ,  akharu  (E.  de  R.). 


104 


Eugène  Revillout. 


j3 
11 


malheur  quelconque  dans  ce  pays,  je      laisse       à  vous     de     vos 


".%AAAA  I 

I     I     I 


Est-ce  que 


^1 


je  ne  donne  pas  à  vous  d'autres  choses  que  celles  qui  ont  été  enlevées  à  vous?    Quiconque     prie   par    des 
requêtes,      je  fais       protection    de  moi-même  à  lui  chaque  jour.     Il  n'y  a  pas  de  seigneur  faisant  pour 


(1 


ses  soldats  les  choses  qu'a  faites      S.  M.      pour  vous.  J'ai  fait  demeurer  vous      dans      vos    demeures 


Il    I    I' 


A,\AAAA  AAAAAA 


A.      pour  vou 

e^  par  le  capitaine  et   mes 


1  A  ^ u    i^iiiiiè^liiilJT^     c>      DX 

et    dans    vos      ailles.  Et   pas   fait  l'ordre  ^  par  le  capitaine  et   mes 


1      1      I 


III 

cavaliers 


IIILl\_Z1-^III       i^l  € 

de  même  ont        agi!    J'ai  donné  à  vous  la  route    vers  vos  villes,  afin      que  je  trouve  vous  ensemble,  au 


jour  et  à  l'heure 


Û^ 


D   ^ 


de  marcher  au  combat!  Or  voyez! 


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1    I    iD   © 


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Vous  avez    fait    une  action  ^  mauvaise, 


klX'àl^ 


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»^A^A/^^  ■ 
I      I      I 


ensemble,  pas  ne  s'est  levé    un  d'entre  vous  pour  donner    sa  mam    à     moi! 

Il  ne  nous  reste  plus  qu'à  exprimer  l'espoir  de  voir  bientôt  publier  en  entier  dans  cette 
Eevue  même  l'étude  détaillée  du  poème  de  Pentaour  telle  qu'elle  a  été  faite  par  M.  de  Rougé 
dans  son  cours  du  collège  de  France.  C'est  là  une  des  œuvres  capitales  de  notre  maître  si 
regretté  et  il  importe  de  ne  pas  voir  quelque  autre  bénéficier  de  son  travail.  Je  dois  ajouter 
que  notre  cher  ami  M.  Jacques  de  Rougé  a  bien  voulu  promettre  d'en  faire  jouir  nos  abonnés. 


1  Bek-u,  ordinairement  déterminé  par  le  papjrus  :   '^  i  :  vaiie  avec   aaaaaa   semti,  «tributs,  impôts» 

AAAj^^/v 

(E.  DE  R.).  J'ai  préféré  conserver  le  sens  le  plus  ordinaire  (conf.  Brugsch,  Dict.,  431,  sup.  453).  (E.  R.) 

2  A  Louqsor  et  à  Karnak  il  n'j-  a  que  :    ^Cv     1\    M  s  ^^^^^   */'    i]  ^      ^^     '^' 

3  Mon  cher  maître  a  mis  ici  «  surveillance  »  et  en  dessous  un  point  d'interrogation.  Il  en  était  donc  venu 
à  douter  de  cette  interprétation  qui  lui  avait  été  fournie  par  le  contexte.  J'ai  préféré  y  substituer  le  sens 
ordinaire  ordre  de  message  (conf.  Brlgsch,  p.  54,  supp.  p.  55  et  suiv.).  M.  J.  de  Rougé  m'a  écrit  en  m'envoyant 
la  copie  textuelle  du  passage  en  question  des  mot-à-mot  de  notre  illustre  maître,  mot-à-mot  déjà  entendus 
par  moi,  il  y  a  12  ans  environ,  dans  le  cours  auquel  j'avais  assisté  :  «Je  pense  que  c'est  le  passage  de 
Pentaour  que  vous  me  demandez.  Je  l'ai  repris  sur  les  notes  tel  que  je  l'ai  trouvé.  Puisque  vous  étudiez  en 
ce  moment  la  caste  militaire,  la  fin  de  ce  passage  n'indiquerait-il  pas  que  les  troupes,  auxquelles  Ramsès 
adresse  des  reproches,  avaient  des  cantonnements  dans  leurs  villes  avec  un  point  de  concentration  en  cas 
de  guerre  et  que  le  reproche  de  Ramsès  porte  sur  ce  que  ces  troupes  ne  se  sont  pas  rendues  à  ce  point  de 
concentration?»  C'est  justement  parce  que  je  le  pensais  et  que,  de  plus,  je  tenais  à  reproduire  le  mot-à-mot 
même  de  mon  bien  regretté  maître,  à  peine  modifié  sur  quelques  points  indiqués  en  note,  mot-à-mot  forçant 
à  ce  sens  (parallèle  à  celui  du  passage  de  Diodore  rappelé  par  moi  à  M.  J.  de  Rougé)  que  j'avais  demandé 
communication  des  notes  personnelles  de  M.  E.  de  Rougé,  pour  ne  pas  sembler  vouloir  substituer  ma  tra- 
duction à  la  sienne  (E.  R.). 

*  Une  conduite  lâche  (E.  R.). 


Le  budget  des  cultes,  etc.  105 


LE  BUDGET  DES  CULTES  SOUS  PTOLÉMÉE  PHILADELPÏÏE. 

Daus  im  précédent  travail,  publié  dans  cette  Revue  (I'®  annéC;  n°  11)  j'ai  raconté  com- 
ment le  roi  Amasis  avait,  le  premier,  osé  mettre  la  main  sur  le  neter-hotejj  ou  sur  les  pro- 
priétés et  revenus  sacrés  des  dieux,  qu'il  avait  en  partie  distribués  à  ses  mercenaires  grecs. 
Selon  notre  chronique  démotique,  le  tort  fait  ainsi  '  aux  sanctuaires  pendant  le  règne  d'Amasis 
est  estimé  à  quatre  millions  46  myriades  quatre  mille  quarante-trois  argenteus-outen  (ou  outen 
d'argent)  et  demi,  ce  qui,  en  estimant  seulement  l'argenteus  à  20  drachmes  attiques  selon  le 
calcul  monétaire  officiel  de  Ptolémée  Soter,  équivaudrait  à  quatre-vingt-neuf  millions  deux 
cents  quatre-vingt  mille  huit  cents  soixante-dix  drachmes,  ou  14,880  talents,  plus  870  drachmes, 
sans  compter  divers  revenus  de  casuel  supprimés  par  le  même  souverain. 

S'il  faut  en  croire  notre  chronique,  ce  vol  sacrilège  fut  la  cause  véritable  de  la  con- 
quête de  l'Egypte  par  Cambyse  presque  immédiatement  après  la  mort  d'Amasis. 

Sous  Cambyse,  l'état  des  choses  s'aggrava  encore  pour  les  temples  :  les  collèges  des 
hiérogrammates  furent  dispersés  et  «une  grande  calamité  s'abattit  sur  la  terre  entière». 

Nous  avons  vu,  au  contraire,  que  Darius,  s'inspirant  d'idées  toutes  différentes,  rétablit 
les  collèges  des  hiérogrammates,  rendit  aux  temples  les  neter-hotep  qui  leur  avaient  été  enlevés, 
en  expulsa  les  étrangers  etc.,  bref  fit  tout  dans  le  sens  d'une  véritable  contre-révolution.  Le 
papyrus  Golénischeff,  publié  dans  notre  dernier  numéro  et  contenant  un  état  des  masses 
d'or  et  d'argent  déposées  dans  le  temple  d'Hormerti  sous  le  règne  de  Darius,  nous  montre 
qu'en  effet  on  en  était  revenu  dans  les  sanctuaires  à  une  véritable  ère  de  prospérité.  On 
comprend  par  là  comment,  selon  Diodore,  le  roi  Darius,  tout  Perse  qu'il  était,  était  con- 
sidéré par  les  prêtres  égyptiens  comme  un  de  leurs  législateurs  et  un  de  leurs  meilleurs 
souverains. 

Quand  les  Grecs  s'emparèrent  de  l'Egypte,  ils  suivirent  la  même  politique.  Alexandre 
se  fit  donner  par  les  prêtres  égyptiens  son  investiture  religieuse  et  proclamer  fils  du  soleil 
et  fils  d'Amon  d'après  la  coutume  traditionnelle.  Il  en  fut  de  même  pour  Ptolémée  Soter,  qui 
alla  plus  loin  encore  dans  ce  sens  :  Il  voulut  incarner  pour  ses  sujets  le  patriotisme  religieux 
des  Égyptiens,  et  pour  cela,  dans  une  stèle  du  règne  nominal  d'Alexandre,  fils  d'Alexandre, 
sous  «le  sati'ape  Ptolémée»,  il  rendit  les  plus  grands  honneurs  à  la  mémoire  de  x^bas,  le  roi 
égyptien,  glorieusement  révolté  contre  le  Perse  Xercès. 

'  «Pour  ces  choses,  argent  de  la  valeur,  qui  est  comptée  en  argent  :  argenteus,  six  myriades  cinq 
»  cents  trente-deux  et  demi  (répondant  d'après  l'isonomie  ptolémaïque  à  1,210,650  drachmes  attiques  ou  en 
»  d'autres  termes  à  201  talents  4650  drachmes).  Pour  les  blés  :  dix  myriades  deux  cents  dix  (répondant  à  deux 
»  millions  quati-e  mille  deux  cents  drachmes,  ou  en  d'autres  termes  à  334  talents  plus  200  drachmes).  Pour 

»  les  terres  (  (1  n  "^  )  quatre  millions  trente  myriades  trois  mille  trois  cents  un  (répondant  à  quatre-vingt-six 
«millions  soixante-six  mille  vingt  drachmes,  ou  en  d'autres  termes  à  quatorze  mille  trois  cents  quarante- 
»  quatre  talents  plus  deux  mille  vingt  drachmes),  pour  clôturer  (         -o^^^  Brugsch,  Dkt.,  1465)  le  compte, 

»  en  laissant  de  côté  (tu  id)  les  bois  de  chauffage les  papyrus,  les  embarcations,  les  parfums,  etc.  » 

La  traduction  précédente  diffère  un  peu  de  celle  que  j'avais  donnée  précédemment.  J'ai  revu  avec 
soin  le  texte. 


106  Eugène  Revillout. 


D'après  ce  principe  de  conciliation  les  temples  turent  naturellement  ménagés.  Un  régime 
mixte  et  concordataire  semble  s'être  dès  lors  établi.  Sous  ce  régime,  le  roi  grec  lit  bien, 
il  est  vrai,  payer  à  sa  caisse  des  impôts  qui  sous  Darius  encore  se  payaient  à  la  caisse 
sacerdotale,  comme  l'impôt  du  dixième  sur  les  ventes  contractées  à  Tlièbes.  Il  continua  aussi 
à  laisser  dans  les  temples  des  garnisons  '  de  soldats  grecs,  nommés  en  démotique  même 
G-poL-'M-TtÇ,  et  dont  parlent  sans  cesse  nos  contrats  du  Sérapéum  aussi  bien  que  les  papiers 
des  reclus  grecs  du  même  temple,  soldats  qui,  d'après  un  autre  document,  se  partageaient 
en  entier  et  louaient  à  des  Egyptiens  le  neter-hotep  ou  domaine  sacré  (tapa  7-/])  du  dieu  Hormen. 

Il  s'attribua  bien,  en  outre,  à  lui-même  une  bonne  partie  de  ces  mêmes  domaines,  et 
dans  ceux  qu'il  laissait  aux  prêtres,  il  ne  leur  abandonnait  que  des  parts  dites  convenables,  en 
grevant  encore  d'impôts  énormes  les  jardins  et  les  vignes  dont  l'usage  leur  était  directement 
conservé.  Mais  en  même  temps  qu'il  réduisait  ainsi  la  -.spa  77;  à  un  nom  presque  vide  de  sens^ 
et  confisquait  en  réalité  la  plupart  des  biens  ecclésiastiques,  il  dut  en  revanche  assurer  un 
budget  suffisant  aux  besoins  du  culte.  De  là  pour  les  temples  et  les  prêtres  trois  sortes  de 
revenus  indiqués  dans  les  décrets  trilingues  et  les  documents  du  même  genre  : 

1°  les  x'Kzy.o'.pa  ou  parts  convenables  (to)  assignées  sur  ce  qu'il  restait  de  biens  ecclésias- 
tiques libres; 

2°  les  cjv-a;t<;  (de  auv-ra^-w  organiser,  établir,  ordonner)  ou  budget  royal  touché  par  les 
temples; 

3"  les  aYVc'.a  (ab)  purifications,  mot  qui  désignait  spécialement  les  lustrations,  c'est-à- 
dire  le  troisième  genre  d'offices  religieux  après  les  sacrifices  et  les  libations,  mais  qui  s'ap- 
pliquait d'une  façon  générale  à  tout  le  casuel  des  temples. 

Parmi  ces  trois  revenus,  le  plus  important  était  le  budget  royal  ou  les  cjvTa;'.<;  payées 
par  le  roi  aux  sanctuaires,  genre  de  contributions  sans  cesse  nommé  dans  les  papiers  du 

1  Nous  trouvons  aussi  sous  les  Lagides  le  droit  pour  les  foiictionuaires  de  descendre  dans  les  sanc- 
tuaires et  de  s'y  faire  nourrir  aux  frais  des  prêtres.  Letronne,  dans  ses  Inscriptions  dÉgypte,  a  publié  une 
requête  des  prêtres  de  Philes  à  Évergète  II  qui  est  ainsi  conçue  :  «Au  roi  Ptolémée,  à  la  reine  Cléopatre, 
.»sa  sœur,  à  la  reine  Cléopatre,  sa  femme,  les  dieux  Évergètes,  salut!  Nous,  les  prêtres  d'Isis  adorée  à  Abaton 
»  et  à  Philes,  déesse  très  grande,  considérant  que  les  gens  de  passage  à  Philes,  stratèges,  épistates,  thébarques, 
»  basilicograrnmates,  chefs  des  Phylacites  (ou  gendarmes),  tous  les  autres  officiers  publics,  les  troupes  qui  les 
»  accompagnent  et  le  reste  de  leur  suite,  nous  contraignent  de  fournir  aux  frais  de  leur  présence  et  qu'il 
«résulte  de  tels  abus  que  le  temple  est  appauvri  et  que  nous  courons  le  risque  de  n'avoir  plus  de  quoi  suffire 
»aux  dépenses  réglées  par  la  loi  pour  les  sacrifices  et  les  libations  qui  se  font  pour  la  conservation  de  vous 
»et  de  vos  enfants;  nous  nous  supplions,  dieux  très  grands,  de  charger,  s'il  vous  plaît,  Nuniénius,  le  parent 
»et  épistolographe,  d'écrire  à  Lochus,  le  parent  et  stratège  de  la  Thébaïde,  de  ne  point  exercer  à  notre 
»  égard  de  ces  vexations,  ni  de  permettre  à  nul  autre  de  le  faire,  de  nous  donner  à  cet  effet  les  arrêtés 
»  d'usage,  où  sera  comprise  la  permission  d'élever  une  stèle,  etc.  >  Numénius  le  parent,  épistolographe  et 
prêtre  d'Alexandre,  des  dieux  Sauveurs,  des  dieux  frères,  etc.  (fonction  qui  avait  été  réunie  à  la  charge 
d'épistolographe  depuis  le  moment  où,  sous  le  règne  précédent,  on  cessa  de  mentionner  les  noms  de  ces 
prêtres  éponymes),  transmit  en  effet  peu  de  temps  après  —  avec  une  lettre  de  lui  —  l'arrêté  royal  adressé 
au  stratège,  et  il  permit  eu  même  temps  directement  aux  iirêtres  d'élever  la  stèle  qui  nous  a  fourni  le 
texte  officiel  de  ces  trois  pièces  précieuses.  Par  une  curieuse  conservation  d'usages  iuvétérés,  nous  voyons 
les  moines  du  temps  de  Théodose  II  se  plaindre  en  Egypte  des  mêmes  abus  de  la  part  des  stratèges 
et  des  généraux.  (Voir  «  Sénuti  le  prophète  ■>  dans  la  Bévue  de  t histoire  des  religions.) 

-  Notons  cependant  qu'on  voit  souvent  dans  les  contrats  démotiques  des  ventes  ou  locations  de 
neter  hotep  faites  par  des  prêtres  à  des  laïques. 


Le  budget  des  cultes,  etc.  107 


Sérapéum,  aussi  bien  que  dans  le  décret  de  Eosette.  le  bon  à  toucher  pour  la  cuv-rari;  des 
prêtres  d'Amou  de  Tbèbes  ',  etc. 

Uue  véritable  bouue  fortune  me  permet  de  dire  à  combien  s'élevait  ce  budget  des 
cultes  sous  Ptolémée  Philadelpbe.  Mon  cher  confrère  M.  Xaville  vient  de  m'envoyer  en 
effet  un  passage  fort  important  d'une  stèle  découverte  par  lui.  encore  inédite,  et  qui  appar- 
tient à  l'an  21  du  roi  Ptolémée  Philadelpbe.  Voici  le  passage  en  question,  pour  lequel  j'ai  revu 
avec  soin  l'excellente  ti-aduction  de  notre  éminent  confrère,  d'après  le  texte  hiéroglAiihique, 
texte  qu'il  ne  m'est  pas  permis  de  publier  encore. 

«Compte    de    tout    ce   que   Sa  Majesté    fait    donner    comme    dignes    honoraires-    aux 


'  Ce  mot  a-jvTaç:;  se  trouve  employé  par  les  orateurs  et  les  auteurs  athéniens  depuis  la  seconde 
hégémonie  d'Athènes.  Callistrate  en  introduisit  Tusage  pour  désigner  les  contributions  que  les  alliés  ver- 
saient pour  les  frais  de  guerre,  contributions  qui  venaient  s'ajouter  aux  sommes  fournies  par  la  ville  elle- 
même.  Les  Lagides  se  servirent  ensuite  de  cette  expression  pour  les  contributions  royales  qu'ils  ajoutaient 
aux  revenus  propres  laissés  par  eux  aux  temples  ou  plutôt  à  la  part  des  contributions  perçues  sur  les 
habitants  de  l'Egypte  qu'ils  abandonnaient  eux-mêmes  aux  temples.  (Voir  une  des  notes  suivantes  et  con- 
sulter aussi  à  ce  sujet,  dans  le  n»  II — III  de  la  première  année  de  la  Berne,  mon  article  sur  la  syntaxis  ou 
budget  des  temples.) 

2  Ce  mot  me  paraît  mieux  rendre  que  «revenus»  le  mot  ^     .  Voir  Brcgsch,  112  115  et  lOGO.  Conf. 

'    '    '  /fl        ® 

Bévue  égyptologique,  premièi'e  année,  n°  II  pa^iim.    Comme  Fa  bien  compris  M.  Brugsch.  ce  mot    ^^^ 

(yn)  signifie   tout  ce  qui  est  bon,   excellent,  digne,  convenable,  honorable,  etc.,   et  les  snbstantifs  qui  en 
dérivent,  comme  hmineurs,  etc.    Aussi  lui  trouve-t-on  dans  l'inscription  de  la  statue  naophore  un  sens  très 

large.  On  y  parle  de  «rétablir  le  temple  de  Xeith  dans  tous  ses  /u  comme  auparavant» 


n     T^     ^^  y  nr  Bl,  quand  on  expidse  les  étrangers  qui  occupaient  les  biens  du  sanctuaire. 

L'auteur  de  la  stèle  se  vante  d'avoir  fait  connaître  à  Sa  Majesté  (à  Darius)  tous  les  yu  existant  dans  le  sanctuaire 

^-— -,  /^A/^AA^ 

et  que  les  rois  avaient  (établis)  à  cause  de  la  grandeur  du  sanctuaire  résidence  de  tons  les  dieux     c^  ^ 

loin  il  raconte  comment  il  a  sauvé  les  habitants  dans  la  grande  calamité  qui  eut  lieu  sur  la  terre  entière. 

leur  faisant  tout  yu  au  moment  convenaldc  pour  le  leur  taire  — " —  *^^  v y  M  v^  \  O  D 

■f\  "'-'•^^  '^'^■^^       .'  .  /www  ^AA^w^  Jj   r    I    I  ^  Jh  <rr>  I 

v\  — «- — .    Ailleurs  encore  il   mentionne  le   rétablissement  des  collèges  de  hiérogrammates  opéré  par 

lui,  au  nom  de  Darius,  comment  il  les  repeupla  des  meilleurs  sujets  placés   sous  la  direction  des  savants, 
et  les  munit  de  tous  leurs  ytt,  de  tous  leurs  approvisionnements  qui  étaient  sur  les  anciens  écrits,   comme 

cela  était  antérietirement  Q   ^    |l— ;^>,    ,    ,^|^_™^  o^Wt^.^"   " 
parle  aussi  de  ses  frères  (les  membres  de  la  caste  sacerdotale  de  Sais)  auxquels  il  a  donné  la  dignité  de 

^^  C      ^^5    I  selon  l'ordre  du  roi.  Il  les  a  comblés  de  yu, 

comme  un  père  le  tait  pour  son  fils  — " —  ^^^  ^_^  y  M  Z^^L^^.    De  son  côté,  il  a 


/V\A/V\A    AA.V\/N.\ 

été  inondé  de  décorations  d'or.  On  lui  a  fait  à  hii-même  tous  les  yu  — h —    ^  ®  ^^  .  Et,  cependant. 

/ww^^      21  Jy\      I      I 

il  s'écrie  en  s'adressant  aux  dieux  :  «"Vous  vous  souvenez  de  tous  les  yu  qu'a  fait  le  grand  sun  (c'est  dire 
lui-même).    Quels  yu  ferez -vous  i)our  tous  ces  yu?    Etablissez  son  bon  nom  sur  cette   terre  à  jamais. 

n  <?   c  1 — •'    ^     ^—7  -<s>-        < — ««  ri  ^  -cs^-  '^^^'-   /21     v_^  n  ^^^^^  <ci:>  1=  a  n  ° ^ 

Ijy^        ^^  "^^^  „  J  ^=^.-     ®S^         1        ^It^^^        ^ 

I        X    &J.     /WWV.  JA       i         I        l<=>  0  1  Ci  A.VWVV   *^-=—  .yj        I        I        II       AAA,-VSA    *V-=--   0_HF?:^  AAW.A===\ 

D'après  ces  exemples  on  voit  que  /u  (qu'on  i)eut  rapprocher  de  ujot  dignus,  comme  l'a  fait  M.  Brcgsch) 
signifie  proprement  le  du  appartenant  essentiellement  et  divinement  pour  ainsi  dire  à  un  être,  conformé- 
ment à  sa  nature  et  au  droit  sacré.  La  lumière,  la  flamme,  tout  ce  qui  resplendit  est /?<  ^^  m  (Be.  112). 
Les  âmes  sont  -/m,  les  esprits  sont  /?/.  Mais  aussi  les  êtres  inférieurs  peuvent  participer  à  cette  nature 
divine.    La  terre  est  ainsi    ^^  #      quand  ou  eu  fait  bon  usage.    La  nourriture    ^^^'N^.  les  approvi- 


108  Eugène  Revillout. 


»  temples'  de  la  Haute  et  de  la  Basse-Egypte,  comme  impôt  2  de  chaque  année  dorée  3  :  Sa 
»  Majesté  fait  donner  150,000  argenteus  (500  talents  d'argent)  ^. 

«  Compte  de  tout  ce  que  Sa  Majesté  fait  donner  comme  dignes  honoraires  au  temple  de 
»  Pikerehet,  taxes  exigées  pour  les  maisons  de  cette  ville  ">  et  taxes  exigées  des  habitants  ", 
»  comme  impôt  de  chaque  année  :  950  argenteus''  (3  talents  plus  1000  drachmes).  Sa  Majesté 
»  donne  cela  dans  la  première  panégyrie  de  son  père  Tum  dont  sont  issus  ses  membres  et 
»qui  lui  a  donné  la  vie,  qu'il  a  reçue  de  lui  par  les  mains  d'Isis  et  de  Nephthys''  le  30  du 
»  mois  d' Athyr  ".  » 


sionnements  des  temples  __,  une  demeure  splendide  et  convenable  ^  v:^ etc.  V.  Br.,  DicL,  115,  1060, 

sup.  903  etc.). 

'  Les  signes  WW  que  notre  savant  confrère  ne  traduit  pas  signifient  «les  temples»  dans  le  décret 
de  Rosette   (voir  ma  Nouvelle  chrestomathîe  démotîque,  p.  185  et  38).     Les   expressions  \?)/\?)/ D  I  ^1/    w    y  l'é- 

f        A)^  .  ^^       ^* 

pondent  en  eifet  à  \'^'^^  I  /A/^^-2,  |   <  les  temples  d'Egypte  et  à  ttov  tspwv  -/.xza.  ttjv  )rtopav.    La  stèle 

de  M.  Na VILLE  porte  \l)/  W;  //  rY   ce  qui  revient  exactement  au  même  et  répond  à  /        cr~zi  D  I  x  1^  qu'on 

<5  O  ©f   ©  t  [Z~I]         ^'^ 

lit  dans  le  membre  de  phrase  parallèle  que  M.  Naville  traduit  fort  bien  :  «temples  de  la  Haute  et  de  la 

Basse-Egypte  ». 

2    I  X  <=>  0  @  j     .Le  mot  9  <:z:>  désigne  spécialement  les  impôts,  comme  l'a  très  bien  vu  d'ail- 

I   X^ n  I  O  A  i; c  i   /    t^  C 

leurs  M.  Naville  (conf.  Brugsch,  Dicl.,  1012).  Dans  le  décret  de  Rosette,  on  a  v  /  ^  '^^^/l'/O  1  O 
répondant  à  twv  rîpoaoôojv  xat  cpopoXoYiwv.  Ainsi  que  je  l'ai  déjà  fait  remarquer  dans  ma  Chrestomathie  démo- 
tîque, le  premier  terme  indique  l'impôt  direct  (çto-^  =  tributum).  Le  second  terme  est  plus  vague.  Il 
marque  le  fermage,  la  location  (ujo'Hp,  pretium  rei  emptae  locatae  vel  conductaé).  C'est  le  mot  thébain  u|K&p 
qui,  dans  le  cartulaire  de  Boulaq  et  dans  un  contrat  démotique,  désigne  la  location.  C'est  pom-  cela  qu'on 
s'en  sert  pour  indiquer  les  redevances  indirectes  payées  au  roi,  comme  une  sorte  de  droit  de  fermage. 
Epiphane  réduisit  également  les  impôts  et  les  l'edevances  (voir  ma  Chrestomathie  dérnotique,  p.  12).  Quant 
à  Philadelphe,  il  semble  s'être  réservé  les  revenus  provenant  de  l'impôt  foncier. 

f >iin<^  me  paraît  avoir  seulement  ce  sens  «annus   aureus»  et  je  n'y  vois  pas  une  équi- 


I  0 


Cl)   AA/VAA/N 

valence  entre  l'or  et  l'argent.  Notons  du  reste  que  le  parallélisme  des  phrases  suivantes  nous  conduit  à  ne 
pas  insérer  d'éléments  semblables  dans  des  membres  qui  se  répondent  si  bien  et  qui,   pour  les  formules. 


ne  contiennent  guère  que  des  variantes  graphiques  comme  ,.p:^=^  ~wvva  i    ^ ,  ou  '^:^.  ,T=n  ^"^^  î  ^i 

u  ^ 


et  ailleurs  X  ^ d,  ou  'nSSï!,  etc. 


.1    I    IITD  I 


^c=»k  ^^^  /j\  ''  ^  .  Le  mot  c^c=^,  copte  «ie».T,  exlgere,  désigne  toute  espèce  d'exaction. 


6 

III  

(Conf.  Bkugsch,  Bict.,  1413).  Il  s'applique  même  aux  liturgies  réclamées  par  les  Choachytes  à  leurs  pratiques. 

oAiiiçssnn 

AAAAAA  m 

8  Ici  je  m'écarte  notablement  de  la  traduction  de  M.  Naville.  La  stèle  porte  :  ;^\\\.  *u=^ 

I  ■"  w]  Q  w  (  5  fjtrr  '  ^*  notre  éminent  confrère  traduit  :  «  il  a  été  pourvu  à  ses  besoins  par 

les  mams  d'Isis,  de  Nephthys,  le  trentième  jour  du  mois  d' Athyr»,  ce  qui  ne  va  pas  du  tout  avec  le  contexte 
si  bien  établi  par  lui.  M.  Naville  voit  sans  doute  dans  ^—     le  mot  (ED  =  *pc,  cXbus,  suivi  de 

l'affixe  possessif  (Bk.,  Bict.,  1122),  et  nous  y  voyons,  nous,  la  préposition  copte  *fs.  {ibid.,  1120),  suivi 

du  pronom  personnel.  "^—-^ 

3  En  résumé,  nous  trouvons  dans  nos  formules  comparées  au  décret  de  Rosette  quatre  termes  finan- 
ciers distincts  :  1°    (ED    «choses»  s'appliquant  aux  impôts  d'une  façon  large;  2°  c^=^  =  uj&.t  qui  marque 


Le  budget  des  cultes,  etc.  109 


Commençons  par  noter  que  Philadelphe  prend  l'argent  qu'il  destine  au  budget  des  cultes 
dans  l'impôt  direct  '  par  excellence;  la  capitation  et  la  taxe  sur  les  maisons.  Ce  double  impôt 
avait  été  institué  par  Téos  (ou  Tachos)  (^§'1  selon  les  Économiques  attribuées  à  Aristote. 
L'Athénien  Chabrias  lui  en  aurait  fourni  l'idée  :  à-K  o'.y.îaç  oè  éxacr/;?  è/.éXsuasv  ocTraviaç  eîcevéYy.ai 
Ta^avTa  3  oet  xal  àzb  xcu  cw[x«tîç  waaixwç.  Ce  texte  a  été  généralement  peu  compris.  Les  diverses 
éditions  successives  ont  rendu  sr/^a  par  colonia;  c'est  ce  que  fait  encore  l'édition  Didot,  qui  tra- 
duit :  «.De  unaquaque  colonia  suasit  ut  imperaret  certain  pecuniam  frihufi  nomine,  itemque  de 
singulis  corporibus.»  Eu  réalité,  o-.y.ta  répond  au  mot  czi  maison  de  la  stèle  de  M.  Navii^lb 
comme  ?a)[xa  au  mot  m  cznz  M?i  i  hommes,  habitants,  de  la  même  stèle.  L'impôt  sur  les  corps 
ou  les  hommes,  —  la  capitation,  —  a  subsisté  jusqu'à  l'époque  romaine.  Nous  avons  sur 
tesseres  un  grand  nombre  de  reçus  s'y  rapportant^.  Quant  à  l'impôt  sur  les  maisons^,  il 
n'est  pas  moins  certain  par  la  comparaison  de  ces  documents.  Le  roi  prélève  sur  ces  deux 
taxes  foncières  le  budget  royal  des  cultes,  ce  qui  est  assez  naturel,  puisqu'on  avait  retiré  aux 
temples  les  revenus  et  l'usage  de  la  plupart  de  leurs  biens-fonds. 

Ce  budget  régulier  n'a  rien  de  bien  exagéré  :  500  talents  d'argent  par  an  pour  tous 
les  temples  d'Egypte.  Saint-Jérome  (in  Dan.  11,5)  fait  monter  le  revenu  annuel  de  Phila- 
delphe à  14,800  talents  d'argent,  sans  compter  les  artabes  de  blé  —  chiffre  assez  probable 
quand  on  se  rappelle  qu'il  possédait  alors  de  nombreuses  provinces  en  dehors  de  l'Egypte. 

toute  espèce  de  perception,  soit  de  l'autorité,  soit  même  des  particuliers  quand  ils  y  ont  droit  par  leurs  offices; 
3°  9  i; a  =  ÇWT,  trihutum,  l'impôt  direct;  4°  ^  / ^^^3  =  u}R«.p,  mot  qui  désigne  les  fermages,  les 

locations  et  les  redevances  indirectes.  Les  trois  premiers  termes  seuls  sont  employés  (comme  synonymes) 
dans  notre  stèle  budgétaire. 

1  M.  Letronne  avait  déjà  fait  observer  (en  note  à  la  phrase  du  décret  de  Rosette  :  r-ç^oïka-^t  os  zat 

Ta;  ::poao'ôou?  tôjv  \tpil>'4  /.ai  -à;  ot8op.^va;  et;  aùià  -/.ai"  èviauxbv  suvTa^Eiç [j.ev£iv   ïrA  ywpa;)  que   le    mot 

CTjvTa?'.;  s'entend  proprement  des  contributions  recueillies  pour  être  affectées  à  un  emploi  déterminé.  En  con- 
séquence il  pense  que  ces  contributions  ne  provenaient  peut-être  pas  directement  du  trésor  royal,  «elles  devaient 
plutôt  résulter,  dit -il,  d'un  impôt  particulier,  espèce  de  centimes  additionnels  colligés  (tjyv-a-Toacva)  par  un 
mode  spécial  de  perception.  Cette  idée  me  semble  en  effet  comprise  dans  le  mot  auvrâ^si;  d'après  les 
exemples  cités  par  Villoison  et  d'autres  qu'on  y  pourrait  ajouter  >'.  La  stèle  de  M.  Na ville  nous  semble 
pleinement  confirmer  cette  vue  de  Lethoxne,  en  prouvant  qu'à  l'origine  au  moins,  les  auvtaÇtç  que  rece- 
vaient chaque  année  les  temples  ne  provenaient  pas  directement  du  trésor  royal,  mais  étaient  prélevées 
sur  des  contributions  déterminées  dont  elles  formaient  une  part  analogue  à  celles  que  constituent  chez 
nous  les  centimes  additionnels.  Telle  serait  donc  la  raison  d'être  primitive  de  l'emploi  du  mot  auvraÇiç  pour 
les  sommes  attribuées  aux  temples  par  le  roi,  et  ce  mot  se  serait  maintenu  jusqu'à  la  plus  basse  époque, 
alors  que  souvent  il  ne  représentait  plus  qu'une  sorte  d'aumône  parfois  dérisoire. 

2  Pour  ce  mot  m  ^  ^\  W^  ou  [J1\X    vVjrm'  '^O""  Brugsch,  Dict.,  p.  68  et  899. 


^  Voir  ci-dessous  l'article  sur  Vassiette  des  impôts. 

*  A  propos  de  l'impôt  sur  les  maisons  nous  rappelerons  les  quittances  démotiques  traduites  par  nous 
dans  le  n°  II— III  de  la  2*=  année  de  la  Revue  (p.  116 — 117)  et  relatives  à  un  droit  fixe  de  deux  dixièmes 
et  demi  d'argenteus  (5  drachmes  d'argent)  pour  des  constructions  de  diverses  natures.  On  ne  voit  alors 
indiquer  ni  vente  ni  vendeur  (comme  dans  les  reçus  démotiques  relatifs  à  des  aliénations  et  à  des  partages), 
mais  un  propriétaire  qui  paie  pour  une  bâtisse  effectuée.  Dans  un  contrat  de  l'an  24  d'Évergète  P'',  publié 
par  moi  pi.  2,  n"  4  de  mon  travail  intitulé  Taricheutes  et  Ghoachytes  {Zeitschrift  de  1880),  il  est  aussi  question 
de  cet  impôt  :  «Que  je  bâtisse,  construction  sur  le  lieu  de  repos  de  Petnofrehotep,  fils  de  Pahi  le  hesi,  tu 
»m'as  donné  le  prix  du  hei  de  bâtisse.  Que  je  le  paie  pour  toi  (en  ta  main)  en  bâtissant  ....  Que  je 
»  fasse  la  déclaration  de  la  bâtisse  à  l'homme  du  hei  (l'homme  qui  percevait  l'impôt  en  question)  au  nom 
»des  argenteus  que  tu  m'as  donnés  pour  cela.»  Ce  texte  sert  pour  ainsi  dire  de  commentaire  aux  quittances 
citées  plus  haut,  quittances  si  claires  d'ailleurs.  Notons  que  dans  les  reçus  démotiques  de  capitation  (ape) 
l'objet  précis  de  l'impôt  n'est  pas  moins  expressément  précisé. 

15 


110  Eugène  Revillout. 


Son  père  Ptolémée  Soter  demandait,  selon  Diodore  (18,  14,  1),  8000  talents  à  l'Egypte  seule- 
ment et  Diodore  regarde  cela  comme  de  l'humanité  «.Uzohzy.xXoq  [jiv  à/.'.vc6va);  TrapéXa^e  Tr;v 
AÏYU77U0V  v.oà  xotq  [ibf  i-^y^uip'.oïc,  ffitXavÔpw-a);  ■::poG£cpépîTO,  TrapaXat^wv  Bè  oy,iT/,'.QyjX'.7.  xâAav-x,  etc.  » 
Ainsi  que  l'a  remarqué  M.  Lumbroso,  à  la  même  époque  Antigone  avait  un  revenu  annuel 
de  11,000  talents  (Diodore  1,  56,  5);  et  à  la  fin  de  la  monarchie  lagide,  Ptolémée  Aulète 
en  touchait  12,500  \  selon  un  renseignement  de  Cicéron,  reproduit  par  Strabon  (17,798).  Ce 
renseignement  n'est  pas,  comme  ou  l'a  cru,  contraire  à  celui  de  Diodore  (17,52),  affirmant 
que,  quand  il  est  allé  eu  Egypte,  ceux  qui  tenaient  les  registres  de  l'état  civil  des  habitants 
lui  ont  dit  que  la  population  s'élevait  à  plus  de  trois  cents  mille  hommes  libres  (de  nationa- 
hté  grecque,  sans  compter  les  esclaves,  les  Égyptiens  et  les  sémites),  et  que  le  roi  touchait 
d'impôts  sur  les  habitants  d'Egypte  plus  de  6000  talents  (y.a6'  ov  yàp  •^jj-eT;  7:ape^aXo[j,£v  -/pîvov 
£iç  A'i'j'u'ftTOV,  êçaaav  ol  xàç  àvaypaçàç  zyo^nzc,  twv  y,aToac6vTO)v  elvat  Tobç  èv  aÙT^  SiaTpîpovxaç  èXsuôé- 
pouç  TcXei'ouç  Tûv  Tp[«y.cvTa  p.uptâooov,  èx,  Bà  twv  'âpcffôSwv  xwv  y.at'  A'i'yutctov  Xœ^jJ^Tizv^  xbv  paitAéa 
TcXeîo)  Tûiv  é^ay-tcrx'Aîojv  laAavTwv).  Diodore  qui,  dans  tout  le  paragraphe,  parle  du  nombre  et  de 
la  grandeur  des  villes,  de  l'abondance  de  la  population,  etc.,  veut  seulement  dans  ce  passage 
en  donner  une  preuve,  en  indiquant  ce  que  le  roi  touchait  de  contributions  directes  sur  cette 
population.  Aussi  a-t-il  soin  de  dire  que  ceux  qui  lui  ont  fourni  ce  renseignement  sont  ceux 
qui  tiennent  les  registres  des  habitants  (tûv  y.a-oiy.ojvTwv),  c'est-à-dire  ceux  qui  percevaient  les 
impôts  directs  nommés  plusieurs  fois  dans  notre  stèle  :  la  capitation  et  l'impôt  sur  les  maisons, 
impôts  dont  les  temples  touchaient  une  faible  proportion  par  la  générosité  de  Philadelphe. 
Les  contributions  indirectes,  les  douanes,  les  droits  de  mutation  et  les  autres  revenus  de  toute 
nature  devaient  s'élever  à  un  chiffre  égal,  formant  un  total  double  ^,  comme  l'indique  Cicéron, 
et  comme  le  donne  à  penser  Diodore  lui-même  dans  les  passages  cités  plus  haut  et  relatifs  aux 
revenus  de  Soter,  si  modérés  selon  lui,  et  qui  cependant  s'élevaient  déjà  à  8000  talents,  et 
aux  revenus  de  11,000  talents  qu'il  attribue  à  Antigone. 

Toutes  les  sources  s'accordent  donc  à  nous  montrer  le  budget  ordinaire  des  rois  Lagides 
oscillant  entre  les  8000  talents  de  Soter  et  les  14,000  talents  de  Philadelphe.  Quant  au 
passage  d'Appien  (préface  10)  que  l'on  a  si  souvent  cité  et  d'après  lequel  Ptolémée  Phila- 
delphe aurait  laissé  dans  le  trésor  740,000  ^  talents  égyptiens,  il  résulte  d'une  confusion  de 
l'historien.  Celui-ci,  nous  dit-il,  avait  entre  les  mains  des  papiers  officiels,  mais  des  papiers 
officiels  qui  n'étaient  certainement  pas  contemporains  de  Philadelphe  et  de  l'étalon  d'argent. 
Nous  montrerons  bientôt  qu'il  s'agit  sans  doute  d'un  rapport  du  ministre  des  finances  d'Ever- 
gète  II,  (peut-être  d'Hérode,  ministre  dont  nous  avons  déjà  immédiatement  ou  médiatement 
plusieurs  circulaires,  papyrus  63,  62,  61  et  65  du  Louvre)  qui  réussit  à  faire  relever  le  taux 
de  divers  impôts  abaissés  sous  Épiphane,  entre  autres  l'impôt  du  20"  sur  les  ventes,  remis 
sous  Évergète  II  au  10^,  comme  sous  Évergète  F""  et  Darius,  et  bien  d'autres  taxes  dont  le 
décret  de  Rosette  nous  mentionne  le  dégrèvement.  L'œuvre  qu'il  paraît  avoir  poursuivie  avec 

1  Évidemment  les  12,000  talents  de  Strabon,  comme  les  6500  de  Diodore,  ont  été  calculés  eu  rédui- 
sant en  argent  les  sommes  touchées  en  cuivre,  selon  l'étalon  légal  alors  en  usage  en  Egypte,  mais  inconmi 
partout  ailleurs. 

2  Voir  ci-dessous  l'article  intitulé  Vassiette  des  impôts  sous  les  Lagides. 

3  Le  chiffre  dont  Amasis  frauda  les  temples  pendant  son  règne  ne  s'élève  même  pas  à  quinze  mille 
talents. 


Le  budget  des  cultes,  etc.  111 

uue  ténacité  quelque  peu  tracassière  consistait  à  combler  le  déficit  du  budget  causé  par  les 
guerres  et  les  orgies  de  son  souverain.  Il  était  dès  lors  tout  naturel  qu'il  comparât,  dans 
quelqu'un  de  ses  rapports,  la  prospérité  dont  le  trésor  jouissait  sous  le  grand  roi  Pbiladelphe 
à  l'état  de  gêne  et  d'expédients  auquel  on  en  était  réduit.  Pour  cela,  il  fallait  naturellement 
ramener  les  chiffres  à  un  terme  commun  et,  comme  l'étalon  monétaire  légal  avait  changé  dans 
l'intervalle,  calculer  en  cuivre  sous  Évergète  II  ce  qui  avait  été  calculé  en  argent  sous  Pbi- 
ladelphe. Les  talents  égyptiens  dont  parle  Appien  sont  donc  des  talents  de  cuivre,  de  valeur 
120  fois  moindre  que  les  talents  d'argent,  selon  la  proportion  légale  entre  les  métaux  moné- 
taires. Les  740,000  talents  laissés  par  Pbiladelphe  ne  représentent  en  réalité  que  6166  talents 
environ;  ou  plutôt  6000,  car  les  copistes  ont  sans  doute  écrit  740,000  pour  720,000,  autre- 
ment dit  74  myriades  pour  72  myriades.  Le  B  et  le  A  se  confondent  en  effet  souvent  dans 
l'écriture  ptolémaïque  —  du  papyrus  9  de  la  publication  académique  par  exemple.  Quant  au 
calcul  par  myriades  en  chiffres,  le  papyrus  66,  fort  bien  expliqué  par  Peyron,  nous  en  donne 
de  nombreux  exemples,  analogues  aux  expressions  Ivmvj.q  [^.yptc.,  dix  fois  dix  mille,  sr/vOca-At; 
lj;jp'.o;,  vingt  fois  dix  mille  etc.  '.  Ce  chiffre  de  6  mille  talents  n'a  plus  rien  d'exagéré,  puis- 
qu'il n'égalait  même  pas  une  année  de  revenu.  Le  trésor  que  Sully  montra  si  fièrement  à 
Henri  IV  ne  représentait  pas  non  plus  une  année  du  budget  de  la  France;  car  le  budget 
d'un  état  comprend  des  dépenses  toutes  aussi  fortes  que  les  recettes,  et  c'est  un  roi  bien 
économe  que  celui  qui  peut  mettre  de  côté  une  année  de  revenu  pendant  tout  le  cours  de 
son  règne. 

En  partant  du  chiffre  de  14,000  talents  indiqué  par  Saint -Jérôme  comme  le  budget 
annuel  de  Pbiladelphe,  la  somme  de  500  talents  donnés  aux  temples  représentait  pour  le 
budget  du  culte  un  28*^  du  budget  général-.  On  voit  que  nous  sommes  bien  loin  des  15,000 
talents  d'argent  environ  qu'Amasis  enleva  aux  temples  d'Egypte  pendant  tout  le  cours  de 
son  règne.  Mais  il  faut  remarquer  que  dans  ces  quinze  mille  talents  on  doit  compter  la  valeur 
des  biens  fonds  expropriés  en  quelque  sorte  par  le  roi. 

Si  le  budget  des  cultes  était  déjà  de  500  talents  sous  Soter  (comme  sous  Pbiladelphe), 
c'est  une  somme  d'un  dixième  en  plus  de  ce  budget  que  selon  Diodore  (1,84)  Ptolémée  Lagus 
prêta  aux  prêtres  de  Mempbis  pour  rendre  plus  brillantes  les  funérailles  de  l'Apis  mort  en 
ce  temps-là.  Cet  apport  paraît  d'abord  bien  modeste  :  et  cependant  on  ne  dépenserait  certaine- 
ment pas  maintenant  un  dixième  du  budget  de  la  guerre  pour  les  funérailles  du  ministre 
de  la  guerre. 

Ajoutons  du  reste  que  si  Pbiladelphe  était  modéré  dans  le  chiffre  de  la  syntaxis  ou 
budget  ordinaire  des  cultes,  il  savait  aussi  être  prodigue  en  certaines  occasions  extraordi- 
naires. C'est  ce  qui  arriva  par  exemple  en  l'an  21  de  son  règne  selon  la  précieuse  stèle  de 
M.  Naville.  Voici  comment  ce  document  s'exprime,  après  le  passage  déjà  donné  plus  haut  : 

'  Cette  notation  en  chiffres  est  parallèle  à  celle  qui  comptait  les  mille  jusqu'à  999,  en  marquant  les 
lettres  d'un  iota  souscrit  à  gauche  ou,  à  l'époque  ptolémaïque,  d'un  crochet  placé  au-dessus  de  la  lettre. 
Pour  les  myriades,  on  met  sous  la  lettre  une  sorte  de  demi-cercle  ou  de  M  ([jiup'oi). 

2  Hérodote  dit  que  du  temps  des  Perses  le  grand  roi  tirait  de  l'Egypte  et  se  faisait  envoyer  à  la  cour 
700  talents.  Mais  il  s'agit  seulement  alors  de  la  partie  de  la  liste  civile  payée  par  l'Egypte  et  non  du  budget 
total  devant  subvenir  à  toutes  les  dépenses  de  la  satrapie  en  question.  Darius  avait  donc  en  bénéfice  net 
200  talents  de  plus  que  la  somme  accordée  aux  temples  par  Philadelphc. 

15* 


112  Eugène  R«villout. 


«En  l'an  21,  au  mois  de  Clioiak,  sous  le  règne  de  Sa  Majesté  —  compte  de  ce  que  le  roi 
»a  donné  comme  dignes  lionoraires  aux  temples  de  la  Haute  et  de  la  Basse-Égjpte  :  taxes 
»  exigées  pour  les  maisons  d'Egypte  90,000  outen  d'argent  '  (300  talents  d'argent)  :  taxes 
«exigées  des  habitants  comme  impôt  de  chaque  année  :  650,000  argeuteus-  1^2166  talents  et 
»  4000  drachmes).  Ces  dignes  honoraires  ont  été  inscrits  sur  cette  stèle  en  face  de  son  père 
»  Tum,  etc.  » 

Cette  largesse  de  740,000  argenteus  ou  2466  talents  et  4000  drachmes  n'est  point  or- 
dinaire et  s'appliquant  à  tous  les  temps  comme  la  précédente.  Elle  a  une  date  fixe  :  l'an  21 
au  mois  de  Choiak.  Quel  était  le  motif  qui  détermina  le  roi  à  faire  une  telle  dépense  — 
dépense  supérieure  au  prêt  de  2000  talents  que,  selon  Appien  {de  re  Sic.  I),  les  Carthaginois 
sollicitèrent  en  vain  du  même  Philadelphe  pour  pouvoir  continuer  leur  guerre  contre  les 
Romains,  et  bien  plus  encore  aux  800  talents  que,  selon  Arrien  (7,96),  également  cité  par 
M.  LuMBROso,  Philippe  laissa  comme  dette  à  son  fils  Alexandre,  et  qu'Alexandre  emprunta 
avant  de  quitter  la  Macédoine  pour  conquérir  le  monde?  Evidemment,  une  telle  générosité 
avait  un  motif,  et  ce  motif  devait  être  considérable. 

En  effet,  pour  le  roi  il  ne  s'agissait  de  rien  moins  que  de  payer  les  frais  de  sa  divi- 
nisation. Je  ne  sais  s'il  est  question  de  ce  motif  dans  la  stèle  de  M.  Xaville,  dont  mon 
aimable  confrère  ne  m'a  envoyé  que  les  deux  passages  cités  ci-dessus.  Je  n'en  suis  pas  moins 
en  mesure  d'affirmer  complètement  ce  fait  d'après  la  seule  comparaison  des  dates: 

En  effet,  ainsi  que  je  l'ai  démontré  dans  mes  notes  chronologiques  sur  les  Lagides, 
d'après  la  série  de  mes  contrats  démotiques,  le  culte  d'Alexandre  et  des  dieux  Adelphes  fut 
institué  entre  l'an  19  et  l'an  21  du  règne  de  Philadelphe. 

En  l'an  19,  au  mois  d'Athyr,  il  n'existait  pas,  et,  en  l'an  21,  au  mois  d'Athyr  ou  de 
Phaménoth  (car  il  y  a  doute  entre  ces  deux  mois),  il  apparaît. 

Or,  la  largesse  en  question  est  justement  de  l'an  21,  au  mois  de  Choiak,  c'est-à-dire 
un  mois  après  Athyr  et  trois  mois  avant  Phaménoth.  On  ne  peut  donc  hésiter  que  sur  un 
point,  celui  de  savoir  si  Philadelphe  a  payé  d'avance  ou  après  coup  son  apothéose.  Nous 
inclinons  visiblement  pour  la  seconde  hypothèse  —  d'autant  plus  que  nous  le  voyons  déjà 
en  l'an  20  faire  les  premières  démarches  auprès  des  prêtres  pour  arriver  à  ce  résultat. 

Qu'il  nous  soit  permis  de  rappeler  à  ce  sujet  un  document  déjà  signalé  par  nous  dans 
la  Eevne  égyptologique.  Il  s'agit  d'une  stèle  du  Louvre,  malheureusement  brisée  en  partie,  et 
qui  relatait  d'abord  les  victoires  de  Philadelphe  contre  des  ennemis  maintenant  inconnus. 
Après  avoir  dit  qu'il  «trancha  la  tête  à  ses  ennemis,  et  qu'il  ne  resta  plus  de  têtes  à  ses 
«adversaires»,  notre  texte  continue  : 

«il  a  le  plus  grand  amour  pour  les  dieux  des  deux  Égyptes,  le  taureau  puissant  Pto- 
»lémée,  vivant  comme  le  soleil,  aimé  de  Neith,  dame  de  Sais.  L'an  20,  Sa  Majesté  demanda 
»aux  chefs  qui  sont  près  de  lui  :  Faites  amener  à  moi  les  épistates  gouverneurs  de  temples, 
»les  prophètes,  les  pères  divins  des  temples  de  l'Egypte  du  Sud  et  de  l'Egypte  du  Nord  à 
»(Saïs)  (lacune). 

I   1   in  111^  ©oTiil  1  I  I 


Le  budget  des  cultes,  etc.  113 

« (je  veux  douuer  à  Neith  boimeur  et  gloire  parmi^  les  dieux  et  les  déesses, 

»  puisqu'elle  est  la  fille  de  Dieu.  Je  veux  faire  le  bieu  à  votre  pays  plus  que  ce  qui  était 
»  auparavant.  Ils  dirent  devant  Sa  Majesté  :  la  parole  du  souverain  notre  seigneur,  qu'elle 
»soit  faite  selon  toute  parole  qu'il  a  prononcée. 

«(Partirent  donc)  les  prêtres  ....  les  insignes  du  pays  d'Egypte  en  leurs  mains.  Voici 
»  qu'ils  s'en  retournèrent  au  lieu  où  était  Sa  Majesté,  c'est-à-dire  vers  la  ville  de  Sais,  pour 
»  vivifier  le  pays  après  dévastation.  Voici  que  le  roi  fit  toute  chose  pour  la  rendre  splen- 
»  dide 

«(Après  tous  ces  bons  ouvrages,)  arrivée  fut  faite  par  les  prêti*es,  les  pères  divins  du 
»  sanctuaire  de  Xeitb,  au  lieu  oii  était  Sa  Majesté.  Es  dirent  devant  Sa  Majesté  :  le  roi  notre 
»  maître  a  fait  resplendir  l'image  de  la  reine,  germe  des  deux  pays,  Arsinoé,  sa  sœur  .... 
(lacune). 

«(Le  roi  se  rendit  donc  au  temple,)  et  après  lui  des  chars,  des  chevaux  en  grande 
»  quantité  dont  le  nombre  n'est  pas  connu,  des  soldats,  des  troupes  qui  n'ont  pas  de  fin. 
»  Royale  manifestation  au  sanctuaire  de  la  mère  divine  du  soleil'.» 

Le  reste  manque  et  les  lacunes  nous  ont  enlevé  la  fin  du  discours  des  prêtres.  ]ilais  il 
est  tiicile  de  voir  que  l'on  demandait  au  roi  de  ne  pas  se  contenter  de  la  canéphorie  d'Ar- 
sinoé  Philadelphe,  qui  avait  déjà  été  instituée  antérieurement,  en  l'an  19,  selon  nos  contrats, 
et  d'accepter  les  hommages  divins,  qu'on  rendit  aux  dieux  frères  depuis  l'an  21. 

C'est  exactement  la  même  voie  que  nous  voyous  suivre  aux  prêtres  dans  le  décret  de 
Canope  relativement  à  la  jeune  Bérénice. 

Selon  ce  décret,  les  prêtres  d'Egypte  qui  se  réunissent  chaque  année  auprès  du  roi  se 
trouvaient  en  concile  quand  la  fille  d'Évergète  F''  mourut  tout  à  coup.  Ils  allèrent  donc 
supplier  le  souverain  de  leur  permettre  d'ensevelir  la  princesse  dans  le  grand  temple  de 
Canope  et  de  lui  rendre  les  honneurs  divins.  Le  roi  accéda  à  leure  désirs  et  on  promulgua 
en  conséquence  un  décret  d'apothéose. 

Cette  réunion  de  tout  le  concile  des  prêtres  d'Egypte  près  du  roi  chaque  année  est 
encore  mentionnée  par  le  décret  de  Rosette.  Ce  fut  Epiphane  qui  exempta  le  coips  sacerdotal 
de  ce  voyage,  difficile  en  temps  de  guerre  et  de  révolutions.  Mais  nous  voyons  que  du  temps 
de  Philadelphe  il  était  déjà  en  usage.  Seulement,  selon  ses  ordres,  le  concile  ne  dut  pas  en 
l'an  20  se  réunir  à  Alexandrie,  comme  d'ordinaire,  mais  à  Sais,  lieu  où  le  roi  devait  se 
trouver.  H  est  probable  que  cette  réunion  du  concile  en  l'an  20  ne  fut  pas  la  première, 
puisque  les  contrats  nous  prouvent  que  les  divers  sacerdoces  créés  en  l'honneur  des  Lagides 
l'ont  toujours  été  dans  de  semblables  assemblées,  et  qu'il  existait,  depuis  l'an  19  tout  au 
moins,  une  canéphorie  en  l'honneur  d' Arsinoé  Philadelphe.  Ce  fut  là  le  premier  sacerdoce  de 
ce  genre,  et  probablement  le  désir  qu'avait  le  roi  de  rendre  cet  honneur  à  sa  sœur  et  de 
sanctifier  après  coup,  pour  ainsi  dire,  l'union  matiimoniale  qu'il  avait  contractée  avec  elle, 
malgré  les  usages  grecs,  fut  l'occasion  de  la  première  assemblée  sacerdotale.  Bien  entendu, 
l'initiative  apparente  dut  être  laissée  aux  prêtres,  qui  s'empressèrent  d'obéir.  Mais  bientôt  cela 
ne  leur  parut  pas  suffisant.    Dès  Tannée  suivante,  en  l'an  20,  nous  les  voyons  qui  se  préoc- 

1  Cette  traduction,  corrigée  d'après  un  nouvel  examen  du  texte,  diffère  un  peu  de  celle  que  j'avais 
déjà  donnée  dans  la  Bemie. 


114  Eugène  Revillout. 


cupent  d'hommages  plus  grands  à  rendre  au  couple  royal  et  adressent  dans  ce  sens  leurs 
supplications  au  roi.  Il  ne  semble  pourtant  pas  avoir  été  alors  encore  directement  question 
du  culte  d'Alexandre  et  des  dieux  frères.  Cette  flatterie  délicate  qui  unissait  le  souverain  au 
conquérant  du  monde  n'eut  probablement  sa  forme  définitive  que  dans  le  concile  de  l'année 
suivante,  et  ce  fut  à  cette  occasion,  pour  remercier  le  corps  sacerdotal  sans  doute,  que  Plii- 
ladelphe  fit  aux  temples  les  largesses  décrites  ci-dessus. 

En  fut-il  de  même  quand,  entre  Tan  21  et  l'an  29  de  Philadelphe,  selon  les  contrats, 
probablement  en  l'an  25,  s'il  faut  en  croire  les  monnaies  au  nom  de  Ptolémée  Soter  qui 
partent  de  cette  date,  le  roi  fit  décréter  l'apothéose  de  son  père,  appelé  désormais  «le  dieu», 
sans  pourtant  l'associer  au  culte  d'Alexandre  et  des  dieux  Adelphes?  Nous  ne  saurions  l'affirmer. 

Mais  à  partir  de  Philadelphe,  les  conciles  annuels  égyptiens  n'eurent  plus  d'interraptions 
jusqu'à  Epiphane,  qui  en  restreignit  le  nombre  aux  cas  de  nécessité.  Il  ne  paraît  pas  d'ail- 
leurs que  les  souverains  postérieurs  aient  continué  à  user  envers  les  prêtres  d'une  aussi 
grande  libéralité  que  le  second  des  Lagides,  alors  même  qu'on  leur  décrétait  des  honneurs 
aussi  magnifiques  ou  plus  exagérés  encore  '. 

Nous  reviendrons  bientôt  sur  ces  questions  dans  un  travail  plus  étendu. 


UN  EECtISTEE  budgétaiee 


RENDEMENT  DES  IMPOTS  EN  EGYPTE. 

Nous  ne  possédons  malheureusement  qu'un  fragment  de  ce  registre  grec  qui  porte  au 
Louvre  le  n°  2338  et  dans  la  publication  académique  le  n°  67  l 

Ce  qui  nous  reste  constituait  deux  colonnes  parallèles.  Ou  y  rapprochait,  par  la  com- 
paraison, les  revenus  des  mêmes  impôts  dans  deux  années  différentes. 

Voici  d'abord  ce  qui  nous  reste  du  texte  avant  le  tableau. 

EAACCG3N HNIOC  IBL. 

ù\k  TAC  nPOAEAHAUlVIENAC  TIMAC  EKTOC  TDN 

AICJIKHMENUN  KAGOTI  rErPARTAI. 


Cet  entête  nous  montre  que  l'on  voulait  prouver  la  baisse  survenue  dans  les  enchères 
des  fermes  d'impôts  du  petit  endroit  en  question  depuis  l'an  12  que  l'on  prenait  pour  type. 

1  Pour  les  conciles  postérieurs,  voir  ce  que  nous  avons  dit  dans  nos  notes  chronologiques  sur  les 
Lagides  {Revue,  première  année,  premier  numéro). 

2  Nous  croyons  devoir  en  donner  de  nouveau  les  chiffres,  fort  inexactement  reproduits  jusqu'ici  et 
dont  l'interprétation  a  paru  d'abord  présenter  des  difficultés  à  peu  près  insurmontables.  Ils  sont  cependant 
assez  nets  sur  l'original. 


Un  registre  budgétaire,  etc. 


115 


Pour  cela  ou  met  eusuite  eu  rapport  daus  deux  colouues   parallèles  lanuée  courante  (dont 
les  cMfifres  out  eu  très  graude  partie  disparu)  avec  cet  au  12. 


XAAKOY  OY  AAAAFH 
(ICONOMOY) 

(CÛNEIUN) 
(ZYTHP)AC 

A  XOH  ËYZ 
X  CZ  hTAZ^ 

A  no  h 

XAAKOY  OY  AAAAfH 
ICONOMOY 

UNEilUjN 
ZYTHPAC 
TPOOHC 
OINOY  TEAOYC 
APAXMHC 
NITPIKHC 
TETAPTHC 
EU'  UNIUN  <î>AKEYa)N 
.  HP  .  .  . 

KhC\  .... 
XZZ  hPIA 

AME  ËP 
XA  CJ01\ 

xir  Ë 

|-<j)nA— 

AMr  ËTnr 

XI  ËTD 

rx 

Évidemmeut  les  premiers  chiffres  de  chaque  anuée  coutieuuent  les  totaux  du  cuivre 
reçu  en  caisse  de  la  banque  royale  pour  les  fermes  des  impôts  déterminés. 

Le  premier  total  se  rapporte  au  cuivre  «dont  le  change»,  c'est-à-dire  au  cuivre  qui 
n'était  pas  fondu  d'après  le  principe  de  l'isonomie  de  la  drachme  de  cuivre  avec  la  drachme 
d'argent  '. 

Ce  cui^Te  étant  pesé^  et  non  compté,  on  devait  payer  un  change  (AAAAFH),  change  réglé 
dans  les  circulaires  administratives  dont  nous  reparlerons. 

Le  second  total  se  rapportait  au  contraire  au  cuivre  isonome. 

Nous  pouvons  noter  que  l'an  12  du  roi  régnant  a  été  environ  quatre  fois  plus  productif 
que  l'année  courante.  La  comparaison  était  doue  bonne  à  faire.  Après  les  deux  totaux  géné- 
raux de  chaque  année  vient  le  détail  du  rendement  des  divers  impôts  pendant  cette  même 
année. 

L'un  de  ceux  qui  rapportaient  toujours  le  plus  était  celui  qui  est  nommé  ZYTHPA  et 
qui  paraît  un  impôt  sur  la  bière  ZYGOC,  appelé  aussi  ZYTOC  par  un  de  nos  documents  (pa- 
pyras  60"').  Aussi  est-il  question  de  l'impôt  de  ZYTHPA  dans  nos  circulaires  administratives. 
C'est  lui  qu'on  cite  d'une  façon  toute  particulière  dans  la  colonne  4  du  papyrus  63.  C'est 
de  lui  aussi  que  nous  entretient  deux  fois  i^col.  4,  1.  4  et  col.  5,  1.  16)  le  papyrus  62  :  1°  quand 
il  s'agit  de  la  distinction  du  semestre  d'été  et  du  semestre  d'hiver,  si  importante  pour  les  im- 
pôts; 2°  à  propos  des  divers  frais  de  bureau  et  de  change.  La  fenue  de  ZYTHPA  est  nommée 
d'abord  et  on  comprend  les  autres  fermes  sous  l'appellation  générale  :  TWN  AE  AOIflCON  CONUN. 

Parmi  ces  impôts  celui  qui  nous  est  le  plus  connu  est  celui  de  la  nitrique,  dont  Dorion 


1  Voir  dans  le  numéro  précédent  la  suite  de  notre  seconde  lettre  à  M.  Lenorhant  sur  les  monnaies 
égyptiennes. 

2  C'est  pour  cela  que  beaucoup  des  monnaies  de  cuivre  ptolémaïques  sont  percées  pour  être  mises 
en  collier  sur  la  balance. 


116  Eugène  Eevillout. 


était  fermier.  Les  papyrus  de  Zoïs  nous  donnent  au  sujet  de  la  faillite  de  ce  fermier  les 
détails  les  plus  curieux. 

Les  autres  fermes  d'impôts  dont  nous  avons  encore  la  mention  sont  :  1°  une  ferme  sur 
les  vivres  (TPO<t>HC)  ;  2°  une  ferme  sur  le  vin  ;  3°  la  ferme  de  la  drachme  (par  mine  :  impôt 
proportionnel  de  un  pour  cent)  4"  la  ferme  du  quart  (TETAPTHC)  (^impôt  analogue  à  la  taxe 
du  dixième  sur  les  ventes  à  Tlièbes);  5°  enfin  une  ferme  sur  les  lentilles  à  cuire. 

Voici  maintenant  les  chifiFres  :  parmi  lesquels  nous  remarquons  plusieurs  intéressantes 
fractions  de  la  drachme  '. 

La  première  année  indiquée  (l'année  courante)  on  avait  reçu  en  chalque  dont  le  change 
678  talents  plus  5460  drachmes  et  en  chalque  isonome  207  talents  plus  3937  drachmes  et 
demie.  La  seconde  année  donnée  (l'an  12)  on  avait  reçu  en  chalque  dont  le  change  4210  talents 
(sans  compter  les  chiffres  inférieurs  au  talent  et  malheureusement  effacés),  et  en  chalque  iso- 
nome 67  talents  plus  3111  drachmes. 

L'impôt  sur  la  bière  pendant  la  première  année  indiquée  a  été  de  86  talents  et  3000 
drachmes  et  pendant  la  seconde  année  (prototype)  de  45  talents  plus  5100  drachmes. 

Nous  ne  pouvons  pousser  plus  loin  la  comparaison  des  années,  mais  nous  voyons  que 
pendant  la  seconde  la  ferme  appelée  TPO<l)HC  a  rapporté  un  talent  plus  870  drachmes  plus 2 
une  demi-drachme;  la  ferme  appelée  OINOY  TEAOYC  13  talents  plus  5000  drachmes;  la 
ferme  appelée  APAXMHC  3581  drachmes  et  une  obole;  la  ferme  de  la  nitrique  43  talents 
5983  drachmes;  la  ferme  TETAPTHC  10  talents  5980  drachmes;  la  ferme  En'GJNlUN  OA- 
KEYDN  3600  drachmes  seulement. 

Le  reste  nous  manque  malheureusement.  Sur  plus  de  4277  talents  formant  le  total 
général  de  cette  année  nous  n'avons  le  détail  que  de  117  talents  114  drachmes  4  oboles. 

Dans  notre  compte  budgétaire  ou  distingue  toujours  le  cuivre  isonome  du  cuivre  dont 
le  change,  absolument  comme  dans  le  grand  papyrus  62  du  Louvre  contenant  une  circulaire 
sur  les  finances  et  dont  nous  avons  parlé  dans  le  précédent  numéro  (page  82). 

Cette  circulaire  contenait  le  règlement  suivant,  déjà  reproduit  par  nous: 

TUN  AE  nPOC  APrVPION  WNWN  AlArPAYOYCIN  AAAAfHN  GJC  THC  MNAC  I  =  C 
KAI  KATArunON  \  KAI  TIMHN  CHYPIAUN  KAI  TAAAA  ANHAGJMATA  AfC  WCT  EINAI 
IB\  •  KAI  TUN  nPOC  XAAKON  ICONOM  .  .  .  ZYTHPAC  MEN  XUPIC  THC  YROKEIMENHC 
EIC  THN  EnîCKEYHN  APAXMHC  A  KAI  EIC  TO  KATArDriON  AAAAC  B  UCT  EINAI  V  • 
TWN  AE  AOinWN  DNGJN  HP^OC  XAAKON  OY  AAAAfH)  XGJPIC  TGJN  AHO  TOY  XEIPICMOY 
KAI  EIC  TIMHN  CHYPIAUN  KAI  TA  ANHACÛMATA  .... 

«Pour  les  fermes  (payables)  en  argent  (et  que  les  fermiers  voudront  payer  en  cuivre^, 
»ou  calculera  (en  outre  de  la  somme  principale)  un  change  (AAAAFH)  de  dix  drachmes ^ 
»deux  oboles  et  demi  par  mine,  plus  pour  transport  (àw.  cuivre)  KATAFCOnON,  un  triobole, 
»  pour  prix  des  «orbeilles  (TIMHN  CflYPlAWN)  et  autres  frais  une  drachme  un  triobole  et  une 
»  demi-obole  ce  qui  fait  au  total  12  drachmes  et  un  triobole. 

'  Voir,  plus  haut,  l'étude  du  papyrus  Sakkiuis. 

-  La  sigle  1  -f-  plus  s'emploie  ici  comme  dans  le  papyrus  Sakkinis. 

^  Dans  le  dernier  numéro  de  la  Revue  (p.  82),  les  chiffres  avaient  été  très  bien  reproduits  dans  le 
texte  grec.  Mais  une  faute  d'impression  a  substitué  une  drachme  à  10  drachmes  dans  la  traduction.  Et 
cependant  je  commente  longuement  le  1  numéral  et  le  chiffre  10. 


Un  kegistre  budgétaire,  etc.  117 


«Quant  aux  fermes  (payables)  en  cuivre  isonome  :  principalement  pour  la  ferme  de 
»ZYTHPA  —  en  dehors  de  la  drachme  destinée  au  chargement  (EniCKEYH)  —  on  calculera 
»deux  autres  drachmes  pour  transport,  ce  qui  fait  trois  drachmes.  En  ce  qui  concerne  les 
»  autres  fermes  payables  en  cuivre »  [Les  chiffres  manquent  par  suite  d'une  lacune.) 

Nous  voyons  par  ce  texte  que  certaines  fermes  devaient  être  payées  en  argent  et 
d'autres  en  cuivre  par  les  publicains.  Ceux-ci  préféraient  d'ordinaire  donner  du  cuivre.  Mais 
alors  ils  soldaient  des  frais  assez  forts.  Pour  les  fermes  j)ayables  en  cuivre,  les  caisses  royales 
ne  recevaient  plus  au  pair  que  du  cuivre  isonome,  c"est-à-dire  calculé  d'après  les  poids  paral- 
lèles des  monnaies  d'argent  en  drachmes,  divisions  et  multiples  de  la  drachme  de  cuivre. 
Les  autres  monnaies  de  cuivre,  antérieures  à  cette  réforme  que  j'ai  longuement  racontée 
dans  le  précédent  numéro,  c'est-à-dire  toutes  celles  qui,  ne  rentrant  pas  dans  l'isonomie  entre 
les  deux  métaux,  représentaient  seulement  les  anciennes  fractions  démonétisées  de  la  drachme 
d'argent  et  étaient  estimées  au  poids,  devaient  aussi  subir  un  change  (XAAKOY  OY  AAAAFH), 
change  qui  était  une  nouvelle  source  de  profit  pour  le  fisc.  Il  faut  noter  que  beaucoup  de 
monnaies  de  cuivre  ptolémaïques  ont  été  percées  pour  former  ainsi  des  sortes  de  colliers, 
comme  les  monnaies  chinoises,  et  être  pesées  à  l'état  de  mines  ou  de  talents  dont  le  change. 
Ce  système  qui  consistait  à  peser  les  monnaies  de  cuivre  au  lieu  de  les  compter  était  cer- 
tainement le  plus  commode.  Aussi  dans  notre  registre  budgétaire  les  totaux  en  cuivre  dont 
le  change  sont-ils  de  beaucoup  supérieurs  aux  totaux  en  cuivre  isonome.  Il  est  aussi  pro- 
bable que  bien  des  monnaies  véritablement  isonomes  étaient  ainsi  estimées  au  poids.  On 
l)référait  payer  en  droit  plus  fort  et  en  avoir  plus  vite  fini.  Nous  ignorons  quel  était  le  tarif 
différentiel  du  cuivi*e  dont  le  change.  C'est  probablement  celui  que  le  papyrus  62  indiquait 
en  troisième  ligne  et  dont  les  chiffres  ont  disparu  par  suite  d'une  lacune.  Nous  remarquons 
en  effet  que  dans  le  tarif  du  cuivre  isonome  on  ne  voit  figurer  (jue  les  frais  du  chargement 
et  de  transport  (frais  nécessités  par  le  poids  considérable  du  numéraire  de  cuivre\  mais 
aucun  frais  de  change  ou  de  bureau.  Ces  frais  figurent  au  contraire  pour  le  ])remier  règle- 
ment (celui  de  l'argent  qu'on  payait  en  cuivre)  comme  pour  le  troisième  (celui  de  cuivre 
isonome  qu'on  payait  en  cuivre  dont  le  change)  '.  Mais  il  y  avait  certains  impôts,  tels  que 
celui  de  la  ZYTHPA  i  nommé  en  première  ligne  dans  le  papyrus  64,  comme  dans  notre  pa- 
pyrus 61^  qui  devaient  être  soldées  en  cuivre  isonome.  C'est  pour  cela  que  le  cuivre  isonome 
figure  nécessairement  à  côté  du  cuivre  dont  le  change  dans  notre  papyrus  budgétaire. 

Observons  pour  finir  que  ce  papyrus  doit  être  à  peu  près  contemporain  du  papyrus  63 
contenant  la  circulaire  administrative  envoyée  par  le  ministre  Hérode  à  ses  subordonnés  au 
commencement  de  l'an  7  du  règne  d'Evergète  II.  Comme  l'a  très  bien  fait  remarquer  M.  Bru- 
net  DE  Presle,  le  ministre  Hérode,  à  ce  moment  où  il  était  déjà  question  du  rétablissement 
possible  de  Philométor,  ordonnait  à  tous  les  épimélètes,  hypodiaecètes,  etc.  de  se  référer  à 
l'an  12,  c'est-à-dire  à  la  dernière  année  du  premier  règne  de  celui-ci,  afin  de  n'exiger  rien 
qui  n'eût  été  exigé  alors,  de  peur  de  provoquer  des  mécontentements.  L'employé  qui  a  fait 
la  comparaison  que  nous  fournit  le  papyrus  67  tient  donc  à  établir  que  la  ferme  des  impôts 
a  moins  rendu  dans  sa  circonscription  pour  l'année  courante  qu'elle  n'avait  rendu  en  Tan  12 

'  A'oir  le  texte  reproduit  dans  le  précédent  numéro  de  la  Bévue. 

16 


118  Eugène  Revillout. 


et  il  met  pour  cela,  article  par  article,  en  parallèle  les  adjudications  de  ces  deux  années. 
La  différence  est  considérable.  Mais  la  moins  value  se  comprend  très  bien  pour  une  époque 
où  il  y  avait  deux  compétiteurs  à  la  couronne  et  où  les  adjudicataires  des  diverses  taxes 
pouvaient  craindre  d'être  dépouillés  de  leurs  droits  si  le  frère  aîné,  monarque  légitime,  était 
remis  en  possession  du  trône.  Le  papyrus  63,  écrit  en  l'an  7,  contient,  à  la  suite  de  la  cir- 
culaire citée  plus  haut,  le  brouillon  d'une  sorte  de  mémoire  justificatif  rédigé  par  un  employé 
compromis.  Puis  vient  la  copie  de  l'édit  de  Philantliropia  où  d'amnistie  générale,  daté  de 
l'an  18,  et  rendu  par  un  roi  que  M.  Bruket  de  Presle  d,  démontré  être  Philométor  de  retour 
de  son  exil.  Une  requête  des  jumelles  datée  de  l'an  7  sur  le  brouillon,  l'est  de  l'an  18  sur 
la  copie  au  net.  Nos  hypothèses  sont  bien  confirmées  par  ces  synchronismes. 


LE  PAPYEIIS  SAKKAKTIsL 

Nous  allons  commencer,  d'après  la  copie  de  M.  Dumont  de  l'Institut  et  le  calque  de 
M.  PosTOLACCA,  la  publication  intégrale  de  ce  papyrus,  déjà  analysé  par  nous  dans  le  pré- 
cédent numéro  de  la  Revue,  p.  84  et  suiv.,  et  qui  avait  formé  le  sujet  du  travail  plusieurs 
fois  cité  de  M.  Egger.  Rappelons  seulement  d'abord: 

1°  que  la  drachme  se  divise  en  six  oboles  et  l'obole  en  huit  chalques,  que,  par  con- 
séquent, l'hémi-drachme  représente  trois  oboles  (triobole),  le  tétartémorion  ou  quart  d'obole 
deux  chalques,  etc.; 

2°  qu'avec  la  proportion  légale  de  1  à  120  entre  l'argent  et  le  cuivre  l'obole  d'argent 
vaut  20  drachmes  de  cuivre  et  le  tétartémorion  cinq  drachmes; 

3°  que  tout  total  général  ou  partiel  est  toujours  précédé  dans  les  comptes  gréco-ptolé- 
mftïques,  soit  de  la  lettre  T  (pour  flNETAI),  soit  du  trait  penché  /.  Par  conséquent  tout  chiffre 
devant  lequel  ne  se  trouve  pas  l'une  de  ces  sigles  ne  nous  donne  pas  un  total.  Ces  chiffres 
peuvent  cependant  représenter  le  détail  d'une  opération.  C'est  ainsi  que  dans  notre  compte 
on  trouve  pour  le  30  Épiphi: 

pains      hémiobole  tétartémorion, 

ragoût     obole  hémiobole, 

bois         hémiobole  tétartémorion. 

Après  cela,  notre  grec  dit  :  (deux  tétartémorion  valent  un  hémiobole)  ci-hémiobole  +  ^ 
(trois  hémioboles  et  une  obole  font  2  oboles  et  demie')  ci  :  2  oboles  et  demie, 

total  (/  :)  3  oboles  ou  un  triobole. 

Dans  les  autres  comptes  on- ne  trouve  plus  de  semblables  opérations,  mais  à  chaque 
jour  un  total  partiel  et  un  total  général  avec  les  jours  précédents,  sans  compter  parfois  des 
totaux  se  référant  à  d'autres  comptes  que  ceux  de  la  cuisine  et  qui  rentrent  aussi  dans  le 
compte  général. 

>  La  sigle  -\-  plus  se  fait  dans  notre  papyrus  \.  Le  signe  1  (plus)  +  se  retrouve  Young,  Hieroglyphics, 
pi.  55,  B  11,  où,  dans  un  à  compte  payé,  il  sépare  le  chiftre  des  drachmes  du  mot  chalque.  Nous  l'avons 
aussi  dans  le  papyrus  budgétaire  du  Louvre,  que  nous  publions  dans  ce  numéro  même,  et  dans  plusieurs 
autres  documents. 


Le  papyrus  Sakkakini. 


119 


MECUPH  A 

A<î>  UN  ANHNEFKA  AIONYCICOI 
NEWTEPWI  AEAUKCJC  EIC  A 
NHACJMA  Ir  A  ECTI  TO 
ANHAUMENON  EIC  TO  KAG  H 
MEPAN  EHEIO 


A  APTOI 

C  X 

OYON 

-  C 

lYAA 

C  -L 

C1  =  C,  \ 

MECUPH 

  APTOI 

-  "L 

TAPIXOC 

—    ■ 

ZYAA 

C 

KOAOKYNG 

C  k 

AAEC 

x 

/  \C-k    AC-L 

«Mesoré  30 

«sur  ce  que  j'ai  porté  au  compte  de  Dionysios  le  jeime,  le  lui  ayant  donné   pour  la 
dépense,  drachmes  4.  Voici  la  dépense  par  chaque  jour  : 

date 


enonciation 


estimations 
valeur  des  sigles  eu  monnaie  d'argent   en  drachmes 

de  enivre 


Epiphi  XXX 

pains 

hémiobole,  tétartémorion 

15 

ragoût 

obole  et  hémiobole 

30 

bois 

hémiobole,  tétartémorion 
hémiobole  -|-  2  oboles,  hémiobole  ' 

15 

ce  qui  fait  au  totnl  un  triobole 

60 

Mesoré  I 

pains 

obole,  tétartémorion 

25 

salaisons 

obole 

20 

bois 

hémiobole 

10 

concombre 

hémiobole,  tétartémorion 

15 

sel 

total  du  jour 
total  général  2 

tétartémorion 

5 

triobole,  hémiobole,  tétartémorion 
drachme,  hémiobole,  tétartémorion 

75 

135 

'  Voir  plus  haut. 

2  Ce  total  général  comprend  le  premier  total  et  le  second  total  :  60  -f-  ^^5  =  135.  Notons  que  le 
papyrus  donne  un  compte  rétrospectif  de  tout  le  mois  de  Mesoré.  Ce  compte  se  régla  le  30  selon  la  coutume. 
Nous  voyons  que  celui  du  mois  précédent  avait  été  réglé  le  30  Épiphi  vers  le  milieu  du  jour.  Je  dis  vers  le 
milieu  du  jour;  car  après  cela  Dionysios  le  jeune  eut  encore  diverses  acquisitions  à  faire  pour  son  maître, 
acquisitions  qui  figurent  sous  la  date  du  30  Épiphi  et  sont  annexées,  cependant,  au  mois  de  Mesoré.  Quand 
le  30  Mesoré,  l'addition  de  Dionysios  le  jeune  fut  de  nouveau  apportée  et  toutes  les  dépenses  payées,  on  lui 
donna  un  à  compte  pour  pouvoir  subvenir  aux  besoins  à  venir,  comme  on  fait  encore  actuellement  en  cas 
pareil.  Cette  somme  fournie  d'avance  pour  les  diverses  dépenses  essentielles  s'élève  à  quatre  drachmes, 
somme  forte  pour  l'époque  et  qui  montre  (aussi  bien  que  l'ensemble  de  notre  document)  la  grande  aisance 
du  maître  de  maison.  Cela  n'empêchait  pas  une  scrupuleuse  vérification  de  tout  ce  que  coûtait  le  soin  du 
ménage.    Nous  donnerons  aujourd'hui  la  première  semaine  (décade)  égyptienne  de  Mesoré.    La  seconde 

16* 


120 


Eugène  Revillout. 


B  APTOI 

=  C  -L 

OYON 

s= 

ZYAA 

C 

APTYMATA 

X 

CEYTAION 

C 

/ 

A 

/  B'  c  a. 

r  APTOI 

— 

EAAH 

X 

ZYAA 

c  ^ 

KOAOKYNTA 

c 

APTYMATA 

1. 

AAXANA 

î. 

MEAAN 

/B^C 

n 

paius 

2  oboleS;  bémiobole,  tétartémorion 

55 

salaisons 

2  oboles 

40 

bois 

héniiobole 

10 

coudiments 

tétartémorion 

5 

poirée 

total  du  joui- 
total  général 

hémiobole 

10 

une  drachme 

120 

2  drachmes^  bémioboJe,  tétartémorion 

255 

m 

pains 

obole 

20 

huile 

tétartémorion 

5 

bois 

hémiobole,  tétartémorion 

15 

concombres 

hémiobole 

10 

assaisonnement 

tétartémorion 

5 

légumes 

tétartémorion 

5 

encre 

total  du  joui- 
total  général 

hémiobole,  tétartémorion 

15 

triobole,  hémiobole,  tétartémorion 

75 

2  drachmes,  tétrobole,  hémiobole 

330 

semaine  paraît  avoir  été  recopiée  sur  un  autre  registre  après  le  brouillon  de  notre  papyrus.  Notons  que 
le  compte  dune  joiu-née  est  séparé  souvent  par  des  additions  distinctes  en  deux  :  1°  le  compte  du  ménage; 
2"  d'autres  frais  (payés  peut-être  directement  par  le  maître).  Dans  le  second  compte  on  voit  le  ragoût  payé 
une  drachme  à  Stilbon  ou  pour  Stilbon,  l'huile  de  KIKI  payée  à  Senésis  ou  peut-être  pour  elle,  tout  aussi 
bien  que  la  vidange,  le  mois  de  solde  du  bas  officier  Sosibios,  largent  avancé  par  Dionysios  (selon  ses 
dires)  aux  domestiques  Dorios  et  Ammonios,  la  brique  posée  par  le  maçon  etc.  D'une  autre  part,  dans  le 
compte  du  ménage  on  trouve  des  dépenses  annexes,  telles  que  l'argent  donné  au  serrurier  des  Memnonia, 
l'encre,  les  bains,  le  blanchissage  du  maître  et  du  domestique  etc. 

•  Le  B,  qui  se  confond  facilement  avec  le  A  ptolémaïque,  est  très  visible  dans  le  facsimile  Postolacca. 

^  Le  mot  APTOI,  paim,  a  été  écrit  de  nouveau,  puis  raturé,  comme  le  note  M.  Dumont. 


Le  papyrus  Sakkakini. 


121 


  OTEI^C) (C  î.) 

OYON  ^- 

TAPIXOC  X 

AAXANA  a. 

APTOI  -  C 

KIKI  - 

2YAA  C 

BAAANEI  C  l. 

/  A^ 
KAI  AGJPIUI  KAI 

signes  peu  nets  eotrc-ligneâ 

AMMG3NIUI  EinE  A 
CTIBUNI  EIC  TO  OYUNION  A 

/  B 

/  C--C 


IV 


oiseau  ôtis  • 

ragoût 

salaisons 

légumes 

pains 

huile  de  KIKI 

bois 

bain 

A  Dorios  et  Ammonios,  il  dit  2; 

A  Stibon  pour  le  ragoilt 
total  partiel 
total  du  jour 
total  général 


hémiobole,  tétartémorion 

15 

triobole,  obole 

80 

tétartémorion 

5 

tétartémorion 

5 

obole,  hémiobole 

30 

obole 

20 

hémiobole 

10 

hémiobole,  tétartémorion 

15 

une  drachme  et  un 

triobole 

180 

une  drachme 

120 

une  drachme 

120 

deux  di'achmes 

240 

trois  drachmes,  triobole 

420 

6  drachmes  1  obole 

1  hémiobole 

750 

'  Je  lis  OTEIC  pour  OTIC  ou  CJTIC.  Cet  oiseau  n'est  pas  spécifié  par  le  Thésaurus.  Mais 
Alexandre  y  voit  une  outarde.  Les  comptes  des  jumelles  parlent  souvent  des  XHNEA  XPEA,  \iandes 
doie  achetées  au  détail.  Le  chiffre  manque,  mais  il  se  restitue  aisément  d'après  l'addition.  Une  difficulté 
plus  sérieuse  provient  du  doute  existant  pour  le  prix  des  salaisons  de  ce  quatrième  jour.  La  copie  de  M.  Du- 
MONT  portait  d'abord  une  obole  —  puis  eu  marge,  comme  correction,  au  crayon,  un  tétartémorion.  Le  calque 
de  M.  PosTOLAccA  tient  ici  le  milieu  entre  l'obole  et  le  tétartémorion.  Si  on  lit  l'obole,  le  total  est  exact 
sans  mention  de  l'article  qui  commence  par  OTEI  (et  qu'une  déchirure  a  enlevé).  Il  s'agirait  alors  d'un 
article  annulé.  Si  on  lit  le  tétartémorion,  il  faut  admettre  la  restitution  proposée  ci-dessus. 

2  II  s'agit  d'une  affirmation  de  Dionysios  le  jeune  sur  un  paiement  foit  à  Dorios  et  Ammonios,  affir- 
mation sur  l'exactitude  de  laquelle  il  restait  des  doutes. 


122 


Eugène  Revillout. 


E  TAPIXOC 

-L 

APTOI 

C  k 

OYON 

s 

ZYAA 

C 

KPAMBH 

c 

AIBANUTOC 

c 

KAI  CUCIBIUI 

CYMMAXCOI  TO 

riNOMENON 

TOY 

MECOPH 

/ 

1  /  I 

H 

c  /  1  z 

r  TAPIXOC 

— 

ZYAA 

c 

OYON 

= 

AAXANA 

î. 

APTOI  i 

-  c 

nAYCIMA 

-  c 

KAI  ACOPIUI  nAYCIMA 

c 

K0A0KYNTA2 

k 

V 

salaisons 

tétartémorion 

5 

pains 

hémiobole,  tétartémorion 

15 

ragoût 

deux  oboles 

40 

bois 

hémiobole 

10 

chou 

hémiobole 

10 

parfums  (assaisonnement) 

hémiobole 

10 

triobole,  obole,  hémiobole 

90 

A  Sosibios  mon  compagnon  ^ 

~ 

d'armes  ce  qui  lui  revient 

pour  Mesoré 

total  du  jour 
total  général 

dix  drachmes 

1200 

10  drachmes,  tétrobole,  hémiobole 

1290 

17  drachmes 

2040 

VI 

salaisons 

obole 

20 

bois 

hémiobole 

10 

ragoût 

deux  oboles 

40 

légumes 

tétartémorion 

5 

pains 

obole,  hémiobole 

30 

blanchissage 

obole,  hémiobole 

30 

et  à  Dorios  blanchissage  ^ 

hémiobole 

10 

concombres 

tétartémorion 

5 

'  Les  chiffres  ne  sont  qne  sur  la  copie  Postolacca. 

'  Leçon  également  fournie  par  la  seule  copie  Postolacca. 

3  Notre  officier  payait  le  mois  de  traitement  de  ce  CYMMAXOC  qui  paraît  un  second  choisi  pour  l'aider. 

■•  Le  blanchissage  du  domestique  représentait  le  tiers  du  blanchissage  du  maître.  Dorios  paraît  être 


Le  papyrus  Sakkakini. 


123 


KIKI  — 

/   A  ^  C 
KAI  CENHCEI  EIC  KIKI    = 
nAINGOC  ^- 

ErBOAH  KOnPIUN  - 

A  -  ,    B  \  C  ,   I  ^e  ^  C) 

Z  APTOI  i;-  îs) 

TAPIXOC  (— ) 

AAXANA  î. 

KOAOKYNGA  î. 

/  ^  C  î.  /  K  k 


huile  de  KIKI 

total  du  ménage  eu  ce  jour 

et  à  Senésis  pour  KIKI 

une  brique 

ridange 

total  partiel 
total  du  jour 
total  général  ^ 

paius 

salaisous 

légumes 

concombres 

total  du  jour 
total  général 

obole 

20 

1  drachme,  2  oboles,  hémiobole 

2  oboles  ' 
triobole,  obole 
1  obole  2 

170 
40 
80 

20 

une  drachme,  une  obole 

140 

2  drachmes,  triobole,  hémiobole 

310 

1(^9  drachmes,  triobole,  hémiobole) 

(2350) 

vn 

(obole,  tétartémorion) 
(obole) 
tétartémorion 
tétartémorion 

(25) 

(20) 

5 

5 

2  oboles,  hémiobole,  tétartémorion 
20  drachmes  et  1  tétartémorion  ^ 

55 

2405 

en  effet  le  planton  de  notre  officier  et  il  était  entretenu  par  lui  pour  la  nourriture  et  le  blanchissage.  Dio- 
nysios  le  jeune  était,  lui,  chargé  de  la  cuisine  et  rien  ne  prouve  qu'il  ait  été  entretenu.  C'était  peut-être 
un  traiteur,  un  homme  remplissant  l'emploi  des  femmes  de  ménage  ou  le  propriétaire  de  quelque  hôtel  garni, 
faisant  au  besoin  la  chambre  et  la  cuisine  de  ses  pensionnaires.  Notons  que  Dorios  et  Dionvsios  paraissent 
n'avoir  pas  toujours  été  d'accord.  Un  passage  reproduit  plus  haut  prouve  que  Dionvsios  prétendait  avoir 
donné  une  drachme  à  Dorios  et  à  Ammonios,  drachme  que  ceux-ci  semblent  contester.  De  là  la  formule  : 
€ll  dit  (Dionysios  avoir  donné)  une  drachme  à  Dorios  et  à  Ammonios.  » 

1  Leçon  Postolacca  pour  le  chiffre.  M.  Dtmoxt  marque  une  lacune  au-dessus  de  — . 

-  Sigle  fournie  par  la  seule  copie  Postolacca. 

'  M.  Postolacca  indique  qu'après  le  chiôVe  •.  (10)  il  y  a  une  partie  «endommagée».  C'est  le  com- 
plément du  total. 

*  Le  calque  de  M.  Postolacca  n'a  pour  ce  jour  aucun  des  chiffres  de  détail  ni  aucun  des  totaux. 
Il  paraît  que  ce  papyrus  avait  beaucoup  perdu  depuis  l'examen  de  M.  Doiont  et  avant  que  M.  Posto- 
lacca ne  l'eut  collé  sur  toile.  J'avais  donc  restitué  tous  les  chiffres  d'après  les  mentions  analogues  et 
ceux  des  totaux  qui  précèdent  et  suivent.  La  copie  de  M.  Doicxt  qu'on  ^ient  de  me  communiquer  con- 
firme ces  restitutions  telles  que  je  les  avais  faites  pour  les  deux  derniers  chiâres  de  détail  et  pour  les  deux 
totaux. 


124 


Eugène  Revillout. 


H  APTOI 

-  C 

OYON 

^  -L 

AAXANA 

X 

TAPIXOC 

C 

(APTYMATA) 

-L 

KI(Klj 

— 

IS- 

C  -L 

ê  KiOAOKYNGA) 

C 

ZiYAA) 

C 

A(PTOI) 

^  C 

(KIKIi 

— 

AAXANA 

0-) 

TAPIXOC 

(C) 

K\^ 


I  \-  1^       KfK  \l. 


VIII 

pains 

obole,  hémiobole 

30 

ragoût 

obole,  tétartémorion 

25 

légumes 

tétartémorion 

5 

salaisons  ' 

hémiobole 

10 

parfums  (aromates  i 

tétartémorion 

5 

huile  de  KIKI 2 

total  (lu  joui- 
total  général 

obole 

20 

tétrobole,  hémiobole,  tétartémorion 
20  drachmes,  triobole,  2  oboles 

95 

2500 

IX 

concombres 

hémiobole 

10 

bois 

hémiobole    . 

10 

pains 

.  obole  et  hémiobole 

30 

(huile  de  KIKI  3?) 

obole 

20 

légumes 

tétartémorion 

5 

salaisons  ^ 

total  du  jour 
total  général  5 

hémiobole 

20 

tétrobole,  tétartémorion 

85 

21  drachmes,  triobole,  tétartémorion 

2585 

'  Les  chiffres  des  quatre  premiers  articles  de  ce  jour  ne  nous  sont  donnés  que  par  la  copie  de  M.  Du- 
MoxT.  Les  vers  qui  ont  rongé  en  partie  les  pages  de  ce  papyrus,  selon  l'observation  de  notre  savant  guide, 
ont  continué  leur  œuvre  depuis. 

2  Nous  avons  suppléé  APTYMATA  d'après  la  seule  comparaison  des  chiffres  des  antres  listes.  De 
KIKI  il  reste  Kl  Quant  aux  chiffres  des  deux  articles,  ils  sont  indiqués  dans  les  deux  copies,  ainsi  que  ceux 
des  totaux  suivants. 

3  Mot  restitué  d'après  le  chiffre.  Mais,  comme  on  avait  déjà  acheté  de  l'huile  de  KIKI  le  jour  précé- 
dent et  que  d'ordinaire  cette  huile  n'était  pas  achetée  tous  les  jours,  notre  restitution  reste  douteuse. 

*  Les  chiffres  de  ces  deux  derniers  articles  nous  ont  été  fournis  par  la  seule  comparaison  des  listes 
précédentes  rapprochées  du  total  du  jour. 

^  Le  second  total  n'existe  plus  maintenant  selon  le  calque  de  M.  Postolacca  ;  mais  il  subsistait  encore 
lors  de  la  copie  de  M.  Dumoxt.   Nous  en  avions  du  reste  déjà  restitué  les  sigles  avant  d'avoir  cette  copie. 


Le  papyrus  Sakkakini. 


125 


(T)  APTOi  r-  î.) 

OYON  -  l.) 

(C  JTOI  (  î.) 

AAXANA  (L) 

ZYAA  (C) 

XAAKEI  MEMNWi  NICON 1   (— ) 
AAEC  î. 

nAYCIMA  = 

TAPIXOC  C 

KPEAC  -  C 

A  =  C  ;. 


Kr 


X 

pains 

(obole,  tétartémorion  ) 

(25) 

ragoût 

(obole  et  tétartémorion) 

(25) 

blés  en  nature 

(tétartémorion  1 

(5) 

légumes 

(tétartémorion) 

(5) 

bois 

(hémiobole) 

(10) 

au  forgeron  des  Memnonia  ' 

(obole) 

(20) 

sel 

tétartémorion 

5 

blanchissage 

deux  oboles 

40 

salaison 

hémiobole 

10 

viande 

total  du  jour 
total  général 

obole,  hémiobole 

une  dr.,  2  oboles,  hémiob.,  tétartémorion 

23  drachmes 

30 

175 

2760 

La  suite  à  un  prochain  numéro. 


LA  EEQUÊTE  D'UN  ESCLAAŒ. 

Hérodote  (II,  113)  nous  rapporte  que  de  son  temps  les  esclaves  maltraités  par  leurs  maîtres 
pouvaient  se  réfugier  dans  le  temple  de  Canope.  Un  papyrus  démotique  du  British  Muséum  se 
rapporte  justement  à  ce  droit  d'asyle  appliqué  aux  esclaves.  Il  s'agit  d'un  esclave  qui  avait  à  se 
plaindre  de  sa  maîtresse  et  qui  intente  contre  elle  en  ces  termes  une  véritable  action  rehgieuse  : 

«Ma  voix  —  celle  du  servitetlr  de  Tavé  —  devant  Osorapis,  né  de  Taba. 

«0  toi  qui  es  écrit  ci-dessus,  Seigneur^  grand  qui  fais  de  ta  face  une  protection,  j'ai 
»crié  vers  toi!  —  Je  m'éloignerai  de  ces  gens! 

«Tu  as  entendu  ma  voix,  (tu  as  su)  mon  état  d'anéantissement  qui  m'est  parvenu,  tu 
»  connais  le  petit  serviteur  selon  le  cœur,  tu  feras  connaître  la  perversité  de  ces  gens  grande 
»  comme  la  mer!  A  ma  charge  la  difficulté  qui  en  résulte  et  si  j'ai  un  éloignement  de  tout 
»mon  être  pour  leur  service  et  pour  leur  compagnie! 

«Allons!  il  y  a  une  démarche  (à  faire);  je  la  ferai!  Il  y  a  des  reproches  (à  recevoir); 
»je  les  recevrai!  H  y  a  un  Dieu,  une  image  de  Dieu  (à  invoquer);  je  cours  auprès  d'elle. 
»Je  les  suppherai  (les  dieux).  Qu'elle  fasse  connaître  (Tavé)  celui  que  suppliera  le  serviteur!» 

'  Tous  les  chiffres  qui  précèdent  ont  été  restitués  d'après  les  prix  ordinaires  et  les  totaux. 

17 


126  Eugène  Revillout. 


LA  LOCATION. 

LEÇON  PROFESSÉE  A  L'ÉCOLE  LU  LOTIVUE. 

(cours  de  droit  égyptien.) 

Messieurs, 

Daiis  la  dernière  leçon  nous  avons  examiné  tout  ce  qui  concernait  l'empliytéose  égyp- 
tienne, c'est-à-dire  la  quasi-propriété  que  possédaient  les  paysans  ou  fellah,  taudisque  la  pro- 
priété éminente  n'appartenait  qu'au  roi,  aux  prêtres  et  aux  guerriers.  Il  faut  maintenant  que 
nous  examinions  la  location  proprement  dite,  qui  n'est,  à  proprement  parler  —  pour  les  fer- 
mages de  terres  tout  au  moins  —  qu'une  sous-location. 

C'est  à  cause  du  caractère  tout  particulier  de  la  possession  du  sol  égyptien  et  des 
sous-locations  en  dérivant  que  les  quasi-propriétaii-es,  craignant  de  voir  leurs  locataires  récla- 
mer, à  leur  tour,  des  droits  emphytéotiques  et  prétendre  avoir  loué  une  fois  pour  louer  toujours 
et  à  perpétuité,  ont  bien  soin  de  faire  spécifier  expressément  que  le  locataire  abandonnera 
le  terrain  occupé  par  lui  à  la  fin  de  son  bail  et  laissera  le  propriétaire  le  louer  à  qui  il  voudra. 
La  reconduction  tacite  ou  continuation  tacite  du  bail  est  formellement  interdite,  pour  ne  pas 
créer  un  nouveau  droit,  et,  par  la  même  raison,  les  fermages  des  terres  de  particuliers  sont 
seulement  d'une  année,  usage  qui  existait  encore  pour  les  terres  de  fellah  lors  des  travaux  de 
notre  commission  d'Egypte  '.  Tout  se  conserva  en  effet  dans  la  vieille  patrie  des  Pharaons  : 
—  quasi-propriété  emphytéotique,  organisation  des  locations  :  ■ —  nous  retrouvons  encore  au 
commencement  de  ce  siècle,  à  peu  près  identiquement,  ce  qui  existait  sous  les  Ptolémées,  ce 
qu'avait  établi  Bocchoris  dans  son  code  des  contrats. 

Je  vous  ai  dit,  d'après  Gains  et  Justinien,  que  la  location  et  la  vente  étaient  très  parentes 
dans  le  jus  gentium  admis  par  les  Komaius.  L'une  et  l'autre  constituaient  des  obligations  de 
même  nature,  se  contractant  dans  les  mêmes  conditions  et  pour  ainsi  dire  sur  le  même  modèle. 
La  principale  différence  qui  existait  entre  elles,  c'est  que  dans  la  location  le  bailleur  s'enga- 
geait, non  pas  à  faire  avoir  à  l'autre  partie  une  chose  comme  en  propriété  (praestare  rem 
Jiabere  liœre),  mais  seulement  à  lui  en  procurer  l'usage  ou  la  jouissance  (-praestare  re  uti,  re 
frui  licere).  Dans  l'une  et  l'autre  de  ces  obligations  on  avait  du  reste  affaire  à  un  contrat 
bilatéral,  créant  des  obligations  des  deux  parts  (ultro  cUroque)"^. 

'  J'ai  longuement  étudié  toutes  ces  questions  dans  la  précédente  leçon. 

^  De  là  le  double  nom  d'emptio-venditio  en  latin,  de  (uvrj--pâ(7tç  en  grec.  La  location  était  aussi 
nommée  d'un  double  nom  :  locatio-conductio.  Mais,  comme  je  l'avais  dit  dans  la  leçon  précédente,  «il  y  avait 
■'>  cette  différence  que  YempHo-venditio  en  droit  romain  et  grec  mettait  en  première  ligne  l'acte  du  prenant, 
»en  seconde  ligne  l'acte  du  cédant-,  tandis  que  la  locatio-conductio  mettait  en  première  ligne  l'acte  du  cédant 
»  et  en  deuxième  ligne  l'acte  du  prenant.  Cette  différence  tenait  à  la  situation  de  la  chose  vendue  ou  louée. 
>-La  vente  n'était  qu'une  promesse  de  faire  avoir  à  l'acheteur  la  chose  comme  en  propriété  (praestare  rem 
i'habere  licere)  et  non  point,  comme  la  mancipation  antique  ou  la  vente  égyptienne,  un  transfert  direct  de 
>'  la  propriété.  Aussi  pouvait-on  vendre  un  bien  qui  n'appartenait  pas  encore  au  vendeur,  mais  qu'il  pouvait 
>-  se  procurer  et  transmettre  pour  le  moment  et  aux  conditions  fixées  par  le  contrat.  Le  principal  était  donc 
>'  de  procurer  à  l'acheteur  la  chose  :  c'était  Vemptio;  et  non  le  désaisissement  d'un  vendeur  qui  n'avait  peut- 
»  être  même  pas  la  chose  :  la  venditio.  Au  contraire,  dans  le  louage  cette  distinction  pouvait  d'autant  moins 
«être  faite  que  le  mot  de  louage  fut  appliqué  même  à  la  location  des  œuvres  (operarum)  ou  d'un  travail 


La  location.  127 


Bocchoris  avait  procédé  d'une  façon  très  différente.  Dans  le  droit  égyptien  constitué 
par  lui,  les  contrats  étaient  toujours  unilatéraux.  Il  n'y  avait  qu'une  partie  qui  s'obligeait. 
Pour  la  vente  le  seul  obligé  était  le  vendeur,  désintéressé  d'avance  et  payé  entièrement  sans 
aucun  reliquat,  qui  avait  maintenant  à  défendre  l'acheteur  contre  toute  éviction,  à  lui  garantir 
la  propriété  (déjà  complètement  transmise)  par  tout  acte  fait  antérieurement,  à  toute  époque, 
sur  le  bien  en  question,  et  par  toute  action  civile  ou  religieuse  qu'on  pouvait  encore  exiger. 
On  comprend  très  bien  cette  nécessité  de  livrer  les  actes  touchant  le  bien  à  toute  époque. 
La  prescription  ne  pouvait  en  effet  créer  aucun  droit  contre  la  propriété  réelle  dans  un  pays 
où  la  propriété  éminente,  imprescriptible,  appartenait  au  roi,  aux  prêtres  et  aux  guerriers,  et 
où  la  quasi-propriété  avait  été  établie  sur  le  modèle  de  cette  propriété  éminente,  c'est-à-dire 
également  imprescriptible.  Si  l'on  avait  agi  d'une  autre  manière,  la  faveur  accordée  par  le 
roi  novateur  '  aurait  été  illusoire.  La  possession  donnant  droit  de  propriétaire,  la  quasi-propriété 
n'aurait  plus  été  considérée  que  comme  une  possession  et  les  propriétaires  éminents  seraient 
redevenus  les  seuls  propriétaires  véritables.  Bocchoris  voulait  au  contraire  constituer  un  dua- 
lisme complet  :  et  à  l'imprescriptibilité  du  droit  des  castes  opposer  l'imprescriptibilité  du  droit 
des  individus.  La  même  raison  lui  avait  fait  distinguer  cette  quasi-propriété  imprescriptible 
de  l'usage  ou  de  la  possession.  C'est  pour  cela  qu'il  fallait  deux  actes  séparés  pour  compléter 
toute  vente  :  l'un,  l'écrit  pour  argent,  par  lequel  l'ancien  propriétaire  cédait  à  tout  jamais  la 
propriété  d'un  bien  qu'il  s'engageait  à  défendre  contre  quiconque  au  monde;  l'autre,  l'écrit 
de  cession,  par  lequel  il  abandonnait  l'usage  du  bien  précédemment  vendu  par  lui.  Mais  cet 
acte  d'abandon  d'usage  n'avait  pas  le  caractère  absolu  et  hiératique  de  l'abandon  de  propriété  : 
de  l'écrit  pour  argent.  L'usage  pouvait  être  en  effet  de  bien  des  sortes.  La  location  elle-même 
ne  créait-elle  pas  un  droit  d'usage?  C'est  pour  cela  qu'on  avait  bien  soin  de  distinguer  l'usage 
perpétuel,  concédé  par  l'acte  de  cession,  de  Yusage  temporel,  concédé  par  la  location.  De  là  le 
terme  absolu,  toujours  indiqué  dans  les  locations  et  au-delà  duquel  la  reconduction  tacite 
n'existait  pas  :  «Au  terme  fixé  j'établirai  ton  bien  devant  toi  pour  que  tu  le  loues  à  qui  tu 
»  voudras.  Je  ne  puis  dire  :  je  t'ai  loué  pour  faire  de  même  en  tout  temps,  etc.  »  Sans  cela 
la  quasi-propriété  ne  serait  plus  devenue  elle-même  qu'une  seconde  sorte  de  propriété  éminente, 
au-dessous  de  la  première,  et  celui-là  seul  aurait  été  maître  de  la  chose  qui  en  aurait  eu  l'usage. 

En  résumé,  l'imprescriptibilité  de  la  propriété  éminente  forçait  à  l'imprescriptibilité  de  la 
quasi-propriété,  parce  qu'autrement  il  n'y  aurait  bientôt  plus  eu  de  propriété  que  pour  les 
propriétaires  éminents,  qui  auraient  toujours  eu  le  moyen  d'annihiler  les  droits  des  quasi- 
propriétaires,  en  livrant,  plus  ou  moins  violemment,  la  possession  à  quelque  autre.  —  Premier 
danger  :  premier  abîme.  —  D'une  autre  part,  si  l'on  avait  seulement  distingué  la  propriété 
de  l'usage  et  laissé  celui-ci  se  continuer  par  reconduction  tacite,  les  propriétaires  et  les  quasi- 
propriétaires  auraient  été  bientôt  éclipsés  également  par  les  usufruitiers,  qui  seraient  restés 

»ti  faire  (operis).  Dans  un  semblable  contrat  le  principal  était  tellement  l'acte  tlu  locateur  que  le  contrat 
«n'avait  plus  d'objet  en  cas  de  mort  du  susdit  locateur.  Pour  les  biens  eux-mêmes  il  n'a  jamais  été  de 
»  coutume  de  louer  ce  que  l'on  ne  possédait  pas  encore.  Aussi  a-t-on  conservé  pour  la  location  l'ordre  logique 
»des  deux  actes  parallèles  :  locatio-cmiductio.  »  En  vertu  de  ce  contrat  bilatéral  le  locateur  a  dès  lors  Yactio 
locati  et  le  locataire  Yactio  conducti. 

'  Pour  toutes  ces  questions  voir  d'une  part  la  précédente  leçon  et  d'une  autre  part  les  leçons  relatives 
à  l'état  des  biens. 

17* 


128  Eugène  Revillout. 


seuls  maîtres  du  sol.  —  Second  danger  :  second  abîme.  —  Bocclioris  voulut  éviter  égale- 
ment Carybde  et  Scylla.  De  là  proviennent  les  différences  essentielles  qui  séparent  la  vente 
de  la  location.  Dans  la  vente,  disions-nous,  le  vendeur  seul  est  obligé,  car  il  est  payé  d'avance. 
Dans  la  location  le  locataire  seul  est  obligé,  car  il  doit  payer  plus  tard,  à  la  façon  d'un  débiteur 
ordinaire.  Loin  de  rapprocher,  comme  en  droit  romain  récent,  la  vente  de  la  location,  Bocclioris 
les  a  séparées  autant  que  possible  dans  deux  espèces  toutes  différentes  de  contrats.  Je  dirais 
que  la  vente  égyptienne  ressemble  à  la  maucipation  si  la  vieille  mancipatiou  romaine,  —  basée 
essentiellement  sur  une  revendication  faite  par  Taclieteur,  (qui  a  payé  le  prix  entier,  comme 
chez  les  Egyptiens),  n'était  pas  pour  ainsi  dire  étrangère  au  vendeur,  n'adhérant  que  par  son 
silence,  au  lieu  de  s'obliger  personnellement,  comme  dans  le  droit  de  Bocchoris.  En  somme, 
la  vente  de  la  vallée  du  Nil  participait  de  la  nature  de  la  mancipation  en  ce  que  c'était  un 
transfert  de  propriété  donnant  lieu  à  des  actions  réelles,  et  de  la  nature  des  contrats  en  ce 
qu'elle  créait  sur  le  vendeur  une  obligation  personnelle  —  mais  uni-latérale  —  uniquement 
à  sa  charge,  au  lieu  d'être  bilatérale,  à  la  charge  du  vendeur  et  de  l'acheteur,  ainsi  que  dans 
Yemptio-veîiditioK  La  location  égyptienne,  au  contraire,  tout  en  ayant  un  bien-fonds  pour 
objet,  était  avant  tout  une  o1)ligation  personnelle  du  même  genre  que  le  prêt,  —  ou,  si  l'on 
veut,  que  l'antique  stipulation  romaine,  —  et  qui  tombait  tout  entière  sur  le  preneur,  au  lieu 
de  tomber  tout  entière,  à  la  façon  de  la  vente,  sur  le  bailleur.  C'est  pour  cela  que  le  prix 
de  la  location  doit  être  versé  plus  tard,  soit  en  un  terme,  soit  en  plusieurs  termes,  comme 
dans  les  prêts,  au  lieu  d'être  versé  d'avance,  comme  dans  la  vente.  En  effet  celui-là  seul  est 
obligé  qui  a  reçu  quelque  chose,  soit  eu  biens-fonds,  soit  en  argent,  soit  en  nature  :  en  biens- 
fonds  s'il  s'agit  d'une  location;  eu  argent  s'il  s'agit  d'une  vente,  toujours  soldée  d'avance  en 
argent;  en  nature  s'il  s'agit  d'un  mutuum,  etc.  Quiconque  a  reçu  ainsi  doit  rendre,  c'est-à-dire 
livrer  réellement  et  complètement  l'objet  qui  forme  la  base  du  contrat.  S'il  s'agit  d'une  vente, 
il  doit  livrer  le  bien,  non  pas  une  fois  et  en  apparence,  mais  réellement  et  complètement  — 
toujours  —  c'est-à-dire  en  prouvant  la  légitimité  perpétuelle  de  sa  propriété  et  en  la  défen- 
dant contre  toute  atteinte.  S'il  s'agit  au  contraire  d'une  location  ou  d'un  prêt,  il  doit  livrer 
le  prix  stipulé,  soit  par  le  contrat,  soit  par  la  loi  réglant  le  taux  de  l'intérêt  et  les  autres 
clauses  accessoires.  Dans  l'un  et  l'autre  cas  on  a  vraiment  affaire  à  une  dette  ])ayable  à 
termes  fixes,  aux  échéances.  Les  mêmes  garanties  se  trouvaient  donc  dans  les  deux  genres 
de  contrats,  qui  ont  quelques  formules  presque  entièrement  similaires  :  notamment  en  ce  que 
concerne  l'hypothèque  générale,  assurée  par  le  preneur  au  ])ailleur  sur  tous  ses  biens,  l'amende 
ou  la  clause  pénale,  stipulée  en  certains  cas  pour  non  exécution  exacte  du  contrat,  le  rôle 
du  ret  ou  procureur  du  bailleur,  pouvant  faire  valoir  les  droits  résultant  du  contrat  à  toute 
époque,  etc.  Enfin  c'est  le  locataire  ou  l'emprunteur  qui  rédige  seul  le  contrat  et  s'obhge; 
tandis  que  dans  la  vente  c'est  l'autre  partie  :  le  vendeur.  Notons  cependant  une  différence 
importante  entre  le  prêt  et  la  location.  Dans  le  prêt,  le  bailleur,  ayant  livré  ce  qui  forme 
l'objet  du  contrat,  n'a,  quant  à  lui,  d'obhgations  d'aucune  sorte  par  rapport  au  preneur.  Dans 
la  location,  bien  qu'il  ait  livré  la  chose,  cette  chose  restant  sienne,  il  peut  la  reprendre  :  il 
doit  même  la  reprendre  à  l'échéance.  Tant  qu'il  ne  la  reprend  pas,  il  n'a  d'obligations  d'aucune 

1  Ces  mots  emptio-venditio  sont  cependant  un  souvenir  de  l'ancienne  mancipatio  par  la  place  prépon- 
dérante accordée  à  l'acheteur  sur  le  vendeur. 


La  location.  129 


sorte.  S'il  la  reprend  à  l'échéance,  pas  davantage.  Mais  s'il  la  reprend  avant  ou  s'il  gêne  la 
possession  d'usage  qui  constitue  le  contrat  de  louage,  ce  contrat  est  violé.  N'ayant  pas  livré 
réellement  l'objet  de  l'échange,  le  locateur  se  trouve  lui-même  obligé.  Ce  n'est  pas  là  aux 
yeux  des  Égyptiens  comme  à  ceux  des  Romains  une  bilatéralité  vraie,  ultra  citroque.  Mais 
on  a  affaire  à  une  sorte  de  stipulation  conditionnelle,  dont  les  clauses  pénales  deviennent 
réciproques  si  les  conditions  ne  sont  pas  strictement  accomplies.  Le  preneur  n'entend  en  effet 
s'engager  que  si  on  lui  a  hvré  bien  complètement  la  chose,  suivant  les  termes  du  contrat. 
Dans  les  prêts  d'argent  ou  de  blé,  objets  dont  la  nature  est  d'être  consommés  et  de  devenir 
ainsi  la  propriété  du  preneur,  tout  est  livré  d'avance  et  en  une  fois.  Dans  les  locations  d'objets, 
subsistant  toujours  au  lieu  d'être  consommés,  comme  dans  les  ventes  du  même  genre,  la 
livraison  d'un  bien  qui  persiste  toujours  doit  aussi,  pour  ainsi  dire,  se  continuer  sans  cesse, 
soit  temporairement  pendant  tout  le  temps  de  la  location,  soit  éternellement  dans  la  vente. 
C'est  là  la  sturiosis  et  la  bébaïosis  promises  par  le  vendeur  et  qui  s'appliquent  en  quelque 
sorte  au  locataire,  puisque  le  locataire,  comme  l'acheteur,  a  un  droit  réel  :  c'est-à-dire  sur  la 
chose  :  mais  l'acheteur  sur  la  propriété  et  l'usage  pei*pétuel,  le  locataire  sur  l'usage  temporel 
seul.  En  résumé  :  dans  le  prêt  nous  trouvons  seulement  l'obligation  personnelle  du  bailleur; 
dans  la  vente  l'obligation  personnelle  du  bailleur,  le  droit  réel  du  preneur;  dans  la  location 
l'obligation  personnelle  du  preneur,  le  droit  réel  du  même  preneur. 

Nous  allons  maintenant  vous  donner  le  texte  de  quelques-unes  de  nos  locations  de  teiTCS. 
Commençons  par  un  acte  du  10  Payni  de  l'an  51  d'Évergète  IL  On  lit  après  le  protocole  : 
«Le  cultivateur  (homme  de  peine  pmêûik)  de  Djême,  Efanch,  fils  de  Pamont  dont  la  mère 
»  est  Tathot,  dit  au  pastophore  d'Amon  Api  de  l'occident  de  Thèbes,  Hor,  fils  d'Hor  et  dont  la 
»mère  est  Senpoer  :  tu  m'as  loué  tes  quatre  aroures  de  teiTain  et  leurs  productions  sis  dans 
»  le  terrain  de  ...  .  terrain  qui  fait  53  aroures.  Ce  terrain  est  sur  le  neter  hotep  (domaine  sacré 
»  ou  cspa  yr,)  d'Amon,  dans  l'apanage  d'Amon  Api.  Les  voisins  du  terrain  entier  sont  :  au  sud  le 
»  terrain  de  Cléon,  fils  de  Pétosor;  au  nord  le  terrain  de  Héréius,  fils  de  Pséchons,  et  de  ses 
«compagnons  et  l'eau  (le  canal)  de  Nicandros;  à  l'orient  et  à  l'occident  le  chemin  du  roi; 
»  tels  sont  les  voisins  du  terrain  entier.  Que  je  cultive  tes  quatre  aroures  de  terrain  ci-dessus 
»au  moyen  de  l'eau  de  l'an  51  à  l'an  52.  Que  je  solde  l'ensemencement,  tous  les  frais  de 
«culture  et  de  récolte,  les  impositions.  Que  ton  agent  d'affaire  (ret)  déclare  la  location  de 
«culture  avec  moi.  Que  je  solde  leurs  impositions  (de  ces  aroures)  au  trésor  royal,  selon 
»ce  qui  est  sur  les  écrits  du  roi,  sur  lesquels  il  a  écrit.  Que  je  donne  en  la  main  de  ton 
»  agent,  en  leur  nom  (au  nom  de  ces  aroures)  le  surplus  du  fermage  de  ton  teiTain  ci-dessus  ', 
»  c'est-à-dire  deux  cor  (grande  mesure  thébaine)  ou  Yg  de  triple  cor,  deux  cor  en  tout,  comme 
«redevance  de  ces  ten-ains,  selon  la  bonne  mesure  que  ton  agent  d'affaires  mesurera  avec 
«moi,  en  froment  pur,  sans  mélange,  la  dite  mesure  (le  cor)  faisant  29  ovome.  Ces  blés  seront 
«portés  et  soldés  en  ta  maison  de  Djême  au  terme  de  l'an  52,  30  Pachons,  qui  va  venir.  Je 
«donnerai  cela.  Que  je  donne  cela  avec  son  hémiolion  (la  moitié  en  plus)  le  mois  après  le 
«mois  nommé,  de  force,  sans  délai.  Le  droit  de  la  location  ci-dessus  est  sur  moi  et  sur  mes 
»  enfants.  La  totalité  des  biens  qui  sont  à  moi  et  que  je  ferai  être  (de  mes  biens  présents  et 

1  Le  surplus  nçoTO  ou,  comme  ou  dit  encore,  le  fayz  «  restant  »  qui  se  perçoit  au  nom  du  proprié- 
taire, après  le  myri/  ou  impôt  légal. 


130  Eugène  Revillout. 


»  à  venir)  est  eu  garantie  de  toute  parole  ci-dessus  jusqu'à  ce  que  j'agisse  en  conformité.  Que 
«j'établisse  devant  toi  (que  je  te  rende  la  possession  et  l'usage  de)  tes  quatre  aroures  qui 
»sont  situées  dans  le  terrain  ci-dessus  et  leurs  productions,  pour  que  tu  les  loues  à  l'iiomme 
»à  qui  tu  voudras  les  louer.  L'homme  de  nous  qui  s'écartera  pour  ne  pas  agir  selon  toute 
»  parole  ci-dessus  donnera  1500  argeuteus,  cinq  kerker  (talents),  1500  argenteus  en  tout,  à 
«l'équivalence  de  24  pour  2/10  (d'argenteus  d'argent).  On  l'obligera  à  agir  selon  ces  paroles 
»  en  outre,  de  force,  sans  délai,  sans  aucune  opposition.  » 

Le  bail  est  d'un  an  comme  le  prouvent  :  1°  la  mention  de  l'eau  mise  en  réserve  pour 
l'an  51 — 52,  dont  le  fermier  se  servira  pour  la  culture;  2°  l'unique  indication  d'un  fermage 
de  deux  grandes  mesures,  évidemment  pour  l'année  de  bail,  car  autrement  on  aurait  dit 
«  chaque  année  »  ;  3°  enfin  la  phrase  :  «  Que  j'établisse  tes  quatre  aroures  ....  devant  toi, 
»pour  que  tu  les  loues  à  qui  tu  voudras.» 

Les  autres  baux  sont,  du  reste,  encore  plus  précis  :  ils  spécifient  d'ordinaire  le  terme  de 
l'année,  que  celui-ci  sous-entend.  Souvent  même  le  temps  de  la  location  est  plus  court  —  juste 
ce  qui  est  nécessaire  pour  semer  et  récolter,  c'est-à-dire  neuf  mois.  C'est  ce  que  nous  voyons 
par  exemple  dans  un  acte  adressé  par  le  taricheute  de  la  nécropole  de  Djême,  Amenhotep, 
fils  d'Hor  et  de  Chaboura,  à  un  cavalier  nommé  Camirios  (?),  fils  d'Héracléidès.  Amenhotep 
loue  à  ce  soldat  une  petite  ferme,  comprenant  champs,  grange,  etc.,  située  dans  un  neter 
hotep  des  environs  de  Thèbes,  neter  hotep  envahi  par  les  soldats  grecs.  (Nous  citerons  tout 
à  l'heure  un  document  analogue  à  ce  point  de  vue.)  Après  le  protocole  on  lit  donc  : 

«Le  taricheute  de  la  nécropole  de  Djême,  Amenhotep,  fils  d'Hor,  mère  Chaboura,  dit 
»au  catèque  (y.aToty.s;)  cavaher  Camirios  (?),  fils  d'Héracléidès  :  tu  m'as  loué  ton  champ  et  Varea 
»  (grange)  qui  est  située  au  sud  du  champ,  et  le  lies  qui  est  en  lui  —  le  tout  sis  sur  le 
»  neter  hotep  d'Amon  au  côté  Nord  de  Thèbes.  En  voici  les  voisins  :  au  sud  le  champ  et  Varea 
»  d'Apollonius,  fils  de  Timon;  au  nord  le  champ  et  Varea  d'Hermias;  à  l'orient  la  porte  des 
»  maisons  occidentales  (?)  à  l'occident  ton  lavoir  (?).  Que  je  sois  pour  le  champ  et  Varea  de 
»  champ  ci-dessus  en  l'an  53  de  Thot  à  Pachons,  pendant  neuf  mois.  Que  je  le  cultive  .  .  . 
»  Que  je  l'arrose.  Que  je  le  pioche.  Que  je  m'acquitte  de  l'ensemencement,  de  tous  les  autres 
»  soins  de  culture,  de  récolte  et  des  impositions.  Que  ton  agent  fasse  la  déclaration  de  culture 
»avec  moi.  Que  je  solde  les  impositions  à  la  porte  du  roi,  —  selon  ce  qui  est  écrit  sur  les  écrits 
»que  le  roi  a  écrits  —  et  cela  au  nom  du  champ  et  de  Varea  ci-dessus.  Que  je  fasse  leurs 
«redevances  en  complément  de  parole.  Que  je  fasse  éloigner  (de  toi)  le  roi  (en  le  payant) 
»  pour  ces  choses.  Que  je  donne  en  la  main  de  ton  agent,  au  nom  du  gage  et  de  la  location  du 
»  champ  et  de  Varea  ci-dessus,  17  cor  (ardeh  ou  grandes  mesures  thébaines),  leur  moitié  est  8  et 
»demi,  17  cor  en  tout,  en  froment  pur,  sans  déchet  et  sans  mélange,  la  mesure  (du  cor),  faisant 
»29  oTj-omc,  rendus,  portés,  soldés  en  la  main  de  ton  agent,  en  ta  maison  de  Thèbes,  sans 
«aucun  frais,  aucune  dépense  au  monde,  au  terme  de  l'an  53  Pharmouthi-Pachons.  Le  blé 
«  de  ces  mesures,  si  je  ne  le  donne  pas,  que  je  donne  l'hémiolion  (la  moitié)  en  plus  le  mois 
«après  le  mois  nommé,  de  force,  sans  délai.  Je  ne  puis  dire  :  je  t'ai  donné  blé,  dédommage- 
«ment  quelconque  au  monde,  sans  rachat  établi.  Je  ne  puis  prendre  blé  quelconque,  bien 
»  quelconque,  quoi  que  ce  soit  au  monde,  sur  ton  champ  ci-dessus,  sans  avoir  soldé  ce  qui  est 
»  écrit  ci-dessus.  Il  n'y  a  pas Que  j'établisse  devant  toi  le  champ  et  Varea 


La  location.  131 


»  ci-dessus  pour  que  tu  les  loues  à  l'homme  à  qui  tu  voudras  les  louer.  Le  droit  de  l'écrit 
»  ci-dessus  est  sur  ma  tête  et  sur  celle  de  mes  eufants.  Tous  mes  biens  présents  et  à  venir 
»sont  en  garantie  de  toute  parole  ci-dessus.» 

Dans  un  autre  fermage,  daté  de  Thot  de  l'an  5  de  Philopator,  le  pastophore  d'Amon  de 
Djême,  Snacliomneus  s'adresse  à  Amenhotep,  fils  d'Hor,  prêtre,  gardien  de  tous  les  actes' 
du  sanctuaire  de  Kak  à  Djême,  (fondé  sous  le  règne  d'Amenopliis  III  par  le  basilicogrammate 
et  prince  d'Ethiopie  Ameuhotep,  fils  de  Hui),  pour  lui  louer  certains  champs,  appartenant  au 
susdit  sanctuaire  et  dont  Amenhotep,  fils  d'Hor,  avait  la  jouissance. 

L'acte  est  ainsi  conçu  :  «Le  pastophore  d'Amon  de  Djême,  Snachomneus  .  .  .  .,  dit  au 
»  prêtre,  gardien  de  tous  les  actes  de  Pahotep  n  hoou  ide  Kaki,  qui  sur  la  montagne  de 
»  Djême,  l'épistate  du  basilicogrammate  Amenhotep,  fils  de  Hui,  le  dieu  grand  —  Amenhotep, 
»fils  d'Hor,  dont  la  mère  est  Tséchons  : 

«Tu  m'as  loué  ta  part  de  champs  du  bien  de  Pahotep-en-hoou,  le  neter  hotep  d'Amon, 
»(part)  qui  est  à  l'occident  du  (domaine)  de  Thot  inscrit  à  Djême,  à  l'occident  du  nôme 
»  PathjTite,  sur  le^  côté  sud  du  bien  nommé,  et  à  laquelle  touche  la  part  d' Amenhotep,  fils 
»de  Thot.  Les  voisins  sont  :  au  sud  le  champ  du  neter  hotep  devant  le  basilicogrammate 
»  Amenhotep,  fils  de  Hui;  au  nord  le  reste  du  champ  de  Thot,  déjà  nommé,  qui  est  là  pour 
»Horsiési,  fils  d'Hor  et  pour  toi;  à  l'orient  le  champ  de  Pséchons  qui  est  là  pour  Panofré, 
»  Hes  et  Pséchons,  ses  fils;  à  l'occident  le  chemin  d'Amon  de  Djême.  Tels  sont  tous  les  voisins 
»  des  champs  ci-dessus,  parmi  lesquels  je  t'ai  fait  location  de  tes  champs  provenant  de  ce 

»  bien.  Que  je Que  je  fasse  tout  le  travail  de  culture  et  lensemencemeut.   Mais 

»que  tu  fasses  la  déclaration  de  tout  le  travail  de  culture  en  dépendant,  sans  moi.  En 
2>  l'an  5,  Phaménoth  —  Pharmouthi,  que  je  donne  eu  la  main  de  ton  agent,  le  cinquième,  pour 
»  la  location  et  le  gage  de  ton  champ  ci-dessus,  sur  totaHté  de  bien  quelconque  ou  de  revenu 
»  quelconque  qui  sera  sur  ta  part  de  champ  ci-dessus.  Que  je  donne  à  toi  le  cinquième  de 
»  ce  qui  sera  en  lui,  pour  que  tu  fasses  éloigner  i^en  les  payant  i  le  roi  et  le  dieu  -  pour  ton 
»  champ  ci-dessus.  Je  ne  puis  prendre  un  produit  quelconque  hors  de  ton  champ  ci-dessus 
»  sans  t'avoir  soldé  ton  cinquième,  au  terme  de  l'an  5,  30  Phannouthi.  Je  ne  puis  te  fixer  un 
»  autre  temps  ou  un  autre  jour  après  le  temps  et  le  jour  ci-dessus.  Je  ne  puis  te  dire  :  je 
»  t'ai  donné  du  blé,  quoi  que  ce  soit  au  monde  ....  sans  rachat  ^  établi.  Je  ne  puis  te  dire  : 

'  Nous  avons  des  partages  d'hérédité  provenant  de  cette  famille  et  qui  prouvent  que  ce  titre  était 
porté  également  par  chacun  des  frères.  C'est  pour  cela  qu'il  n'est  question  ici  que  d'une  part  de  ce  neter 
hotep,  part  touchant  à  celle  d'un  autre  co-héiitier. 

2  Le  roi  pour  l'impôt,  le  dieu,  possesseur  du  neter  hotep,  pour  les  droits  féodaux,  venant  de  la  cou- 
cession  de  son  bien. 

^  Le  mot  set  \  ~~^  \  a  dans  les  contrats  démotiques  un  double  sens.  1"  Comme  "^^  et  ta-cto  s'écarter. 

Ex.  :  «Si  je  m'écarte  pour  ne  pas  faire  comme  il  est  écrit  ci-dessus  je  te  donnerai,  etc.»  (Pour  ce  sens 
s'écarter,  très  fréquent  dans  les  documents  démotiques,  voir  aussi  Brcgsch,  Dlct.  1333.)  2°  Le  même  mot  set 
correspond  aussi  à  ccot  pretio  redimere.  Le  groupe  ta- set- 1,  la  marchande,  est  ti'aduit  r,  u.£Ta|3oX'.ç  dans  le 
bilingue  de  Berlin  (voir  Beggsch,  1335  .  J'ai  hésité  entre  ces  deux  sens  pour  iine  clause  qui  se  trouve  souvent 
dans  les  contrats  de  prêt  (et  parfois  dans  ceux  de  location)  vien  set  eflia  erat  e  pshai  nthir  {Chrest.  démo- 
tique, p.  119  Qi  passim).  «Il  n'y  a  point  de  rachat  (ou  d'écart)  pour  l'écrit  ci-dessus.  Le  droit  de  l'écrit 
ci-dessus  est  sur  ma  tête.»  En  tout  cas  on  voulait  dire  que  les  termes  de  l'écrit  ci-dessus  devaient  être 
accomplis  à  la  lettre,  sans  qu'on  puisse  rien  y  changer.  Nous  avons  vu  dans  une  des  leçons  précédentes 
que  le  seul  moyen  d'échapper  à  cette  nécessité  et,  par  exemple,  de  payer  avant  terme,  consistait  pour  le 


132  Eugène  Revillout. 


»je  t'ai  fait  le  droit  de  l'écrit  ci-dessus.  L'écrit  ci-dessus  est  eu  ta  main.  Le  droit  de  l'écrit 
»  ci-dessus  est  sur  ma  tête  et  sur  celle  de  mes  enfants.  —  Au  terme  de  l'an  5,  Pachons,  que 
»  j'établisse  tes  champs  ci-dessus  devant  toi,  pour  que  tu  les  loues  à  l'homme  à  qui  tu  voudras 
»  les  louer.  Je  ne  puis  dire  :  j'ai  loué  pour  faire  de  même  en  tout  temps.  —  La  totalité  de 
»mes  biens  présents  et  à  venir  est  en  garantie  de  toute  parole  ci-dessus  jusqu'à  ce  que  j'aie 
»  agi  eu  conformité.  Ton  agent  prend  puissance  pour  toute  parole  qu'il  dira  avec  moi  au  nom 
»  de  toute  parole  ci-dessus.  Que  je  les  accomplisse  à  son  égard,  sans  aucune  opposition.  » 

L'acte  que  nous  venons  de  reproduire  offre  avec  les  précédents  plusieurs  différences 
sensibles.  La  principale,  c'est  qu'il  s'agit  d'un  métayage  au  lieu  d'un  fermage.  On  sait  eu 
effet  que,  même  actuellement  en  France,  le  métayer  partage  dans  les  produits,  au  lieu  de  payer, 
comme  le  fermier,  une  redevance  déterminée.  Chez  nous  le  métayage  est  le  plus  ordinaire- 
ment à  moitié.  Notre  égyptien  ne  donne  au  contraire  que  le  cinquième  à  son  propriétaire  — 
en  dehors  des  impôts  au  roi  et  de  la  taxe  due  au  seigneur  féodal,  c'est-à-dire  ici  «au  dieu» 
puisqu'il  s'agit  d'un  neter  hotep.  Le  métayer  se  charge,  comme  le  fermier,  de  tous  les  frais 
de  culture,  mais,  à  la  différence  de  celui-ci,  il  laisse  à  son  propriétaire  le  soin  des  déclarations. 
II  ne  dit  donc  pas  :  «ton  agent  d'affaires  fera  la  déclaration  de  culture  avec  moi»,  mais  :  «tu 
feras  la  déclaration  de  culture  sans  moi».  Comme  le  fermier  de  l'acte  précédent,  le  métayer 
s'engage  à  ne  rien  retirer  de  sa  culture  sans  avoir  d'abord  payé  son  propriétaire,  c'est-à-dire 
ici  sans  avoir  versé  le  cinquième  des  revenus,  au  lieu  du  prix  fixe  du  bail.  On  spécifie  aussi 
très  formellement  que  le  métayage  ne  formera  pas  un  droit  emphythéotique  et  que  la  redevance 
payée  au  propriétaire  et  analogue  à  la  redevance  payée  au  seigneur,  ue  rendra  pas  le  métayer 
possesseur  du  sol.  Au  terme  fixe,  «Pachons  de  l'an  5»,  il  doit  établir  les  champs  devant  le  pro- 
priétaire, pour  qu'il  puisse  les  louer  à  qui  il  voudrait  :  «  Je  ne  pourrai  dire,  ajoute  le  locataire, 
j'ai  loué  pour  cela  seulement  que  je  fasse  de  même  en  tout  temps.  »  Non,  il  n'a  aucun  droit 
réel  en  dehors  de  son  année  de  location. 

débiteur  à  rachetei-  sa  dette  et  à  se  mettre  au  lieu  et  place  du  créancier.  Voici  un  de  ces  actes  de  rachat. 
Il  s'agissait  d'un  billet  fait  en  Choiak  de  l'an  44  et  devant  arriver  à  terme  au  mois  de  Choiak  de  l'an  45, 
c'est-à-dire  12  mois  après.  Les  débiteurs  voulurent  payer  avant  (en  Mésoré  de  l'an  44).  Ils  rachetèrent  donc 
la  créance  qui  leur  fut  cédée  par  un  nouvel  acte  ainsi  conçu  :  «L'an  44,  Mésoré  20,  du  roi  Ptolémée,  le 
»dieu  Evergète,  etc.  Le  taricheute  de  la  nécropole  de  Djéme,  Petnofrehotep,  fils  de  Petnofrehotep  et  dont  la 
»mère  est  Maut,  dit  au  taricheute  de  la  nécropole  de  Djême,  Amenhotep,  fils  d'Hor  et  dont  la  mère  est  Cha- 
»boura  :  Je  te  fais  abandon  (ou  cession)  du  droit  de  l'écrit  de  bon  plaisir  que  tu  m'as  fait  avec  ta  fille 
»Héribast,  fille  d' Amenhotep,  en  l'an  44,  Choiak,  du  roi  à  vie  éternelle,  sur  1440  argenteus,  en  talents  4,  plus 
»  240  argenteus,  1440  argenteus  iterum,  en  airain  à  l'équivalence  de  24  pour  deux  dixièmes,  intérêts  compris, 
»à  payer  en  l'an  45,  30  Choiak,  à  la  fin  de  12  mois  complets,  une  année,  12  mois  complets  en  tout.  Tu 
»m'as  payé  aujourd'hui  les  argenteus  sur  lesquels  je  t'avais  fixé  jour  —  avec  leurs  intérêts  —  en  l'an  44, 
»  Choiak.  Tu  me  les  as  donnés.  Je  les  ai  reçus  de  ta  main.  Ils  sont  au  complet,  sans  aucun  reliquat.  Mon  cœur 

»en  est  satisfait Je  te  les  cède.  Je  n'ai  plus  aucune  parole  à  dire  avec  toi,  ni 

»  d'acte  à  invoquer  depuis  ce  jour  où  je  t'ai  fait  l'écrit  de  bon  plaisir  ci-dessus  et  toutes  les  paroles  qui 
»y  sont  écrites.  Je  te  donne  l'écrit  de  bon  plaisir  que  tu  m'as  fait  avec  la  femme  Héribast,  fille  d'Amen- 
»  hotep  ci-dessus.  Il  est  à  vous,  ainsi  que  le  droit  en  résultant,  ainsi  que  toutes  choses,  toutes  paroles  qui 
»y  sont  écrites,  ainsi  que  les  argenteus  et  leurs  fruits.  Je  n'ai  plus  aucune  parole  au  monde  à  vous  faire 
»à  ce  sujet.  Depuis  le  jour  ci-dessus,  celui  qui  viendra  vous  trouver  à  ce  sujet,  en  mon  nom,  je  le  ferai 
»  s'éloigner  de  vous,  de  force,  sans  délai,  sans  opposition.  Si  je  m'écarte,  pour  ne  point  agir  selon  toute 
»  parole  ci-dessus,  je  vous  donnerai  3000  argenteus,  10  talents,  3000  argenteus  en  tout,  en  airain  à  l'équi- 
»  valence  de  24  pour  deux  dixièmes,  et  vous  m'obligerez  à  faire  en  outre  selon  toute  parole  ci-dessus,  de 
»  force,  sans  délai,  sans  opposition.» 


La  location.  133 


Daus  cet  acte  on  insiste  même  plus  que  dans  tous  les  autres  sur  les  formules  qui  assi- 
milent autant  que  possible  les  obligations  résultant  du  bail  à  celles  résultant  dun  prêt.  Il  ne 
manque  presque  aucune  des  clauses  habituelles  dans  les  créances.  Une  tendance  analogue, 
déjà  très  frappante  bien  que  moins  accentuée,  se  remarquait  daus  le  fermage  précédent. 
Aussi  n'y  a-t-il  dans  nos  deux  pièces  aucune  trace  de  cette  sorte  de  quasi-bilatéralité  ou  plutôt 
de  réciprocité  que  nous  avons  notée  dans  notre  première  location,  à  propos  de  clauses  pénales 
s'appliquant  à  celle  des  deux  parties  qui  n'exécuterait  pas  fidèlement  le  contrat. 

Quant  au  taux  de  la  redevance,  se  montant  seulement  au  cinquième,  (taux  d'après  lequel 
on  pourrait  peut-être  calculer  approximativement  la  moyenne  des  prix  fixes  des  fermages, 
aussi  bien  que  le  rapport  proportionnel  des  métayages)  sa  faiblesse  relative  tenait  sans  doute 
à  l'énormité  des  taxes  perçues  par  le  roi  et  par  les  seigneurs  féodaux  ou  propriétaires  éminents. 
Il  y  a  sous  ce  rapport  un  rapprochement  curieux  à  faire.  Selon  la  Genèse  (^él,  23)  lorsque 
le  roi  eût  racheté  les  terres  d'Egypte  len  dehors  de  celles  des  prêtres,  auxquelles  se  joignirent 
un  peu  plus  tard  celles  des  guerriers)  les  anciens  propriétaires  du  sol  devenus  fermiers  du 
trésor  durent  payer  au  roi,  en  tant  que  seigneur  féodal,  le  cinquième  des  revenus  '.  Paul  Orose,  qui 
écrivait  au  cinquième  siècle  de  notre  ère,  rapporte  ce  texte  de  la  Genèse  et  ajoute  :  «Hujus 
tempoiis  argumentum,  historicis  factis  reticentibus,  ipsa  sibi  terra  Aegypti  testis  pronuntiat  : 
quae  tune  redacta  in  potestatem  regiam  restitutaque  cultoribus  suis,  ex  omni  fructu  suo 
usque  ad  nunc  quintîe  partis  incessabile  vectigal  exsolvit-.  »  C'était  ce  cinquième  traditionnelle- 
ment conservé  auquel  taisait  allusion  Diodore  (1,  74^  en  disant  que  «les  agriculteurs  d'Egypte 
passaient  leur  vie  à  cultiver  les  terres  qui  leur  sont  affermées,  à  un  prix  modéré,  par  le  roi, 
les  prêtres  et  les  guerriers.  »  Mais  si  les  quasi-propriétaires  du  sol  affermaient  ainsi,  daus  leur 
empbytéose  perpétuelle  et  héréditaire,  à  un  prix  modéré,  c'est-à-dire  pour  le  cinquième  des 
revenus,  les  terres  de  leurs  seigneurs  féodaux,  il  fallait  qu'à  leur  tour  ils  se  réservassent  un 
prélèvement  analogue  quand  ils  les  louaient  à  d'autres.  Le  pastophore  Snachomneus  payait  de 
la  sorte  :  d'abord  un  cinquième  au  propriétaire*Jeodal,  le  temple  d'Amenhotep,  fils  de  Hui;  puis 
un  cinquième  à  son  quasi-propriétaire,  le  prêtre  Amenhotep,  fils  d'Hor.  Deux  cinquièmes  font 
bien  près  de  la  moitié  i^taux  actuel  des  métayagesX  Pour  le  métayer  ordinaire  ce  n'était  pas 
tout  encore.  Il  lui  fallait  écarter  (^ou  satisfaire)  le  roi,  comme  il  avait  écarté  (ou  satisfait)  le 
dieu.  Il  y  avait  donc  une  troisième  taxe,  l'impôt  royal,  dont  Amenhotep  paraît  avoir  été  exempt 
par  une  sorte  d'immunité  ecclésiastique,  peut-être  parce  que  le  roi  n'avait  laissé  à  ce  sanc- 
tuaii'e  que  de  modestes  3iT.z-^.z:zoL.  M.  Lumbroso^  {Ec.  pol.,  289»  pense  que  du  temps  des 
Lagides  cet  impôt  foncier,  distinct  du  droit  emphytéotique,  était  du  dixième.  Dans  les  écono- 

1  Quand  l'inondation  était  suffisante,  selon  Hérodote,  qui  ailleurs  (II,  13)  dit  que  le  Nil  commençait 
à  arriver  sur  les  terres  à  la  15^  ou  16'  coudée  de  nilométre.  A  l'époque  romaine,  d'après  Pline  ("\',  9),  il 
suffisait  de  14  à  16  pour  une  bonne  année  et  d'après  Strabon  (XVI,  3)  de  14  avant  Petronius.  Le  minimum 
était  de  18  sous  les  Lagides  (v.  p.  137). 

-  M.  LniBEoso  (Éc.  pol.,  p.  94)  rapproche  ces  trois  passages  de  la  Genèse,  d'Orose  et  de  Diodore  et 
fait  bien  voir  qu'il  s'agissait  ici  non  d'un  impôt  foncier  comme  on  l'avait  dit,  mais  du  droit  seigneurial 
résultant  de  l'emphytéose.  Mais  il  repousse  le  témoignage  formel  de  Paul  Orose  pour  son  temps  eu  y  voulant 
voir  une  citation  ex  abrupto  de  la  Genèse,  ce  qui  est  évidemment  contre  la  pensée  de  l'auteur,  teuant  à 
confirmer  la  Genèse  par  les  faits  actuels. 

3  «Comme  au  temps  d'Alexandre  (v.  Ins.  de  Smyrne  in  Frœlich  Ann.  SU.,  p.  135.  Droysen  2,  30, 
>  note  23)  c'est  le  dixième  et  le  %ingtiéme  que  l'on  trouve  le  plus  souvent  dans  les  taxes  des  Lagides  (v. 
»  Fraxz,  Intr.,VÏ,  2),  c'est  la  dîme  qu'on  constate  aloi-s  en  Judée  (Macch.  1,  3,  49;   1,  10,  30;  1,  il,  35).» 

18 


134  Eugène  Revillout. 


miques  attribuées  à  Aristote  et  que  ue  cite  pas  M.  Lumbroso,  cette  hypothèse  est  formellement 
confirmée.  Il  y  est  dit  eu  effet  que  l'impôt  foncier  sur  les  terres  (qu'il  ne  faut  pas  confondre 
avec  l'impôt  égyptien  sur  les  maisons,  z\-/.'.y.,  dont  nous  parle  le  même  livi-e  ainsi  que  l'inscrip- 
tion de  Philadelphe  citée  plus  haut)  rentrait  dans  les  revenus  dits  satrapiques  et  était  appelé 
soit  c-Açoptov,  soit  Ssy.aTsv.  Il  était  donc  du  dixième.  Ce  dixième  joint  au  cinquième  (2/,q)  perçu  par 
le  seigneur  foncier  et  au  cinquième  (2/,(,)  perça  par  le  quasi-propriétaire  faisait  un  total  de  moitié 
des  revenus.  Le  métayer  avait  par  conséquent  moitié  ou  Vio  des  revenus  comme  maintenant.  Si 
le  quasi-propriétaire  cultivait  lui-même,  il  avait  7,0.  S'il  s'agissait  de  ces  militaires  dont  nous 
parle  Hérodote,  militaires  qui  ue  prenaient  aucun  fermier  pour  leur  terre  féodale,  il  gardait  les 
•Vio  et  ne  payait  que  la  dîme  au  roi.  Mais  du  temps  de  Diodore  les  militaires  ou  •^y.yy^oK  (Cala- 
sirites  ou  Hermotibes)  affermaient  souvent  '.  Il  en  était  semblablement  des  caûques  macédoniens. 

Eevenons  en  au  cinquième  payé  au  quasi-propriétaire  dans  les  fermages  ég}nptiens. 

Si  nous  estimons  d'après  cette  base  du  cinquième  la  location  contenue  dans  le  pa- 
pyrus 2328  du  Louvre,  il  s'agit  dans  ce  papyrus  d'une  exploitation  bien  considérable.  Le 
contrat  remonte  au  règne  de  Philopator  et  est  relatif  à  des  biens  de  neter  hotep  concédés 
aux  grecs  épigones  d'Egypte.  Nous  avons  vu  que  la  chronique  démotique  (d'accord  avec  les 
données  d'Hérodote)  parlait  longuement  de  ces  concessions  de  terres  sacrées  à  des  soldats 
gTecs,  faites  déjà  du  temps  d'Amasis.  Les  Lagides  avaient  encore  accru  ces  libéralités  en 
faveur  des  grecs  épigones  et  au  détriment  des  neter  hotep  des  temples,  comme  le  prouvent 
les  contrats,  les  pièces  du  Sérapéum,  etc.  C'était-là  le  plus  grand  motif  du  mécontentement 
des  prêtres  d'Egypte,  mécontentement  sans  cesse  exprimé  dans  la  chronique  et  devant  pro- 
voquer la  révolte,  qui,  peu  de  temps  après  le  contrat  dont  nous  nous  occupons,  c'est-à-dire  à 
la  mort  de  Philopator,  souleva  l'Egypte  entière  contre  les  Grecs.  Dans  ce  document,  des  grecs 
épigones  s'adressent  à  d'autres  grecs  épigones  nommés  par  eux  oïdn  mes  en  Keme  «grecs  nés 
en  Egypte»,  et  louent  d'eux  un  neter  hotep  du  dieu  Hormen  (dieu  déjà  signalé  à  Thèbes 
par  M.  DE  RouGÉ,  I®''  fasc.  des  Mélanges,  p.  18),  mais  un  neter  hotep  concédé  à  perpétuité 
aux  grecs  épigones  et  nommé  pour  cette  raison  terrain  des  grecs  d'Egypte.  Ils  leur  disent 
donc  :  «  Vous  nous  avez  loué  les  terrains  de  Pathot  d'Hormen  situés  sur  le  neter  hotep  d'Hor- 
»men,  le  dieu  grand,  constructions,  terrains  nus  et  champs  du  peuple  des  grecs  d'Egypte, 
»pour  deux  ans.  Nous  vous  donnerons  donc  pour  ce  neter  hotep  d'Hormen,  le  dieu  grand, 
»  200  cor  (grandes  mesures  thébaines  ou  ardeb  de  5  artabes)  chaque  année,  pendant  les  deux 
»ans  ci-dessus,  les  dites  mesures  en  bon  blé,  pur,  sans  déchet,  équivalant  chacune  à  29  oiroinc, 
»  rendues,  conduites  au  sanctuaire  d'Hormen,  le  dieu  grand,  sans  frais  ni  dépense,  au  terme 

»de  .  .  .  .  Nous  ne  pouvons  dire  :  Nous  avons  donné  le  blé  de  ces  mesures  sans 

»  Au  bout  de  deux  ans  de  bail,  que  nous  mettions  devant  vous  vos  terres  et  que  nous  vous 
»  abandonnions  toute  chose  en  provenant  au  nom  (des  paroles  ci-dessus).  » 

Nous  voyons  que  cette  location  porte  sur  deux  années  —  ce  qui  est  contraire  aux 
anciennes  habitudes  égyptiennes,  conservées  encore  par  les  fellah.  Il  est  vrai  qu'il  ne  s'agit 
pas  ici  d'une  terre  de  fellah,  ou  concédée  en  sous-propriété  aux  fellah,  ce  qui  est  le  cas  de  nos 
locations  ordinaires,  mais  de  terres  qui  avaient  été  extraites  pour  ainsi  dire  d'un  neter  hotep  pour 

'  Notons  cependant  qu'ils  étaient  considérés  comme  assez  pauvres  dans  la  circulaire  royale  contenue 
dans  le  papyrus  63  du  Louvre. 


La  location.  135 


être  concédées  eu  bloc  «  au  peuple  des  grecs  d'Egypte  » .  Les  Grecs  qui  occupaient  la  colonie 
du  sanctuaire  d'Hormeu  avaient  une  propriété  plus  sérieuse  (bien  que  collective)  que  les  fellah 
ordinaires  et  ne  craignaient  pas  de  voir  leur  emphytéose  ou  quasi-propriété  se  transférer  à 
d'autres.  Cependant  ils  devaient  encore  sans  doute  payer  le  cinquième  au  temple  d'Hormen,  et 
eux-mêmes  ils  recevaient  en  outre  le  cinquième  de  leurs  fermiers.  II  ne  s'agissait  pas  ici  de 
revenus  essentiellement  variables,  comme  dans  le  métayage,  mais  d'un  revenu  fixe,  comme  dans 
le  fermage,  et  par  conséquent  ce  cinquième  avait  dû  être  calculé  d'a])rès  le  minimum  des  recettes 
et  non  d'après  la  moyenne,  puisque  le  fermage  était  très  court.  Le  cinquième,  estimé  d'après  les 
années  mauvaises,  était  de  200  cor  ou  de  mille  artabes  :  les  "^  5  ou  ^/^^  dus  au  temple  et  aux 
quasi-propriétaires  formaient  deux  mille  artabes;  en  y  ajoutant  le  dixième  du  roi  :  2500  artabes. 
Le  revenu  minimum  de  la  terre  en  question  était  donc  de  5000  artabes  (et  peut-être  de  10.000 
dans  les  bonnes  années).  L'artabe  était  une  mesure  de  36  litres  environ,  ce  qui  donnerait 
pour  les  5000  artabes  1,800  hectolitres. 

Les  locataires  dans  notre  acte  sont  en  nombre,  aussi  bien  que  les  bailleurs.  Ceci  fait  penser 
à  la  coutume  légale  de  la  Thébaïde  (eu  dehors  du  voisinage  immédiat  des  villes),  coutume  légale 
se  rattachant  à  l'ancienne  loi  de  Sésostris  sur  la  quasi-propriété  collective,  plutôt  qu'à  la  loi 
nouvelle  étabUe  par  Bocchoris  (qui  régna  surtout  dans  la  Basse-Egypte)  pour  la  quasi-propriété 
individuelle.  Nous  avons  traité  de  toutes  ces  questions  dans  la  précédente  leçon  et  nous  avons 
vu  que  du  temps  de  notre  commission  d'Egypte  la  loi  antique  du  roi  Ramsès  II,  ou  Sésostris, 
était  encore  en  vigueur  dans  certaines  parties  de  la  Thébaïde,  tandis  que  la  loi,  relativement 
plus  récente,  du  roi  Memphite  Bocchoris  était  universellement  observée  dans  la  Basse-Egypte. 

Dans  un  acte,  très  fragmenté,  qui  se  trouve  au  Vatican,  les  locataires  sont  au  nombre  de 
deux  pour  un  bail  annuel.  Chacun  des  deux  locataires  devait  solder  moitié  du  fermage  et  de 
la  redevance  et  moitié  de  l'impôt  au  roi.  Le  fermage  était  payable  en  partie  en  blé  (froment) 
et  en  partie  en  bois,  parce  qu'il  s'agissait  d'une  exploitation  de  champs  et  de  forêts.  Le  chiffre 
des  cor  de  blé  revenant  au  quasi-propriétaire  était  de  cent,  (_ moitié  du  fermage  précédent.)  Le 
blé  devait  sans  doute  être  livré  en  Pharmouthi  i^au  bout  de  huit  mois)  selon  la  coutume,  et 
était,  dans  certaines  éventualités,  soldable  par  équivalence  eu  argent  :  le  bois  au  contraire 
devait  être  apporté  en  Choiak  de  l'an  10  (c'est-à-dire  au  bout  de  quatre  mois  seulement).  Si 
les  locataires  n'accomplissaient  pas  l'acte  convenablement  et  s'écartaient  des  clauses  stipulées, 
ils  devaient  donner,  à  titre  de  dommage  et  intérêts,  10  argenteus  ou  50  sekels,  et  n'en  étaient  pas 
moins  forcés  d'accomplir  les  conventions  faites.  Point  curieux  à  noter,  chacun  des  locataires 
fait  un  acte  séparé  tout  en  rappelant  que  les  obHgations  étaient  communes  avec  son  coassocié. 
C'étaient  des  co-i-ei  promittendi  :  mais  la  division  de  l'obligation  est  indiquée. 

Xous  avons  vu  citer  dans  une  de  nos  locations  de  terres  du  temps  d'Évergète  II  «les 
écrits  que  le  roi  a  écrits  »  au  sujet  de  l'agriculture.  On  possède  justement  une  circulaire  royale 
de  ce  genre,  de  cette  époque  et  sur  ce  sujet,  qui  est  conservée  dans  le  papyrus  63  du  Louvre. 
Kous  reviendrons  plus  tard  sur  cette  circulaire,  ti-op  importante  pour  être  étudiée  incidemment. 
Nous  remarquerons  seulement  qu'on  y  prescrit  relativement  à  l'agriculture  un  serment  solennel 
par  le  nom  des  dieux  et  par  le  nom  des  rois',  serment  qui  devait  être  écrit.   Un  papyrus 

1  Nous  possédons  aussi  un  serment  fait  du  nom  des  dieux  et  des  rois  (très  analogue  comme  formules 

18* 


136  Eugène  Revillout. 


grec  publié  par  Parthey  contenait  un  serment  de  ce  genre  (malheureusement  incomplet")  et 
nous  en  avons  copié  à  Berlin  un  autre^  dont  le  titre  est  en  grec  et  la  teneur  en  démotique. 
C'était-là  sans  doute  une  partie  de  la  déclaration  que  le  fermier  devait  faire  en  commun  avec 
l'agent  du  propriétaire  suivant  les  termes  mêmes  de  nos  locations.  Voici  la  pièce  : 

«L'an  37,  21  Mésoré,  du  roi  Ptolémée,  le  dieu  Evergète,  etc. 

«  Le  pastophore  d'Amon  de  Djême,  Phib,  fils  de  Phib;  dont  la  mère  est  Tachnumis,  dit 
»  à  Apollonius,  le  fermier  général  du  territoire  de  Thèbes,  et  à  Panas  '^,  le  topogrammate  du 
»  territoire  de  Thèbes  :  je  fais  serment  devant  le  roi  Ptolémée  et  la  reine  Cléopatre,  sa  femme, 
»  les  dieux  Évergètes  —  et  les  dieux  sauveurs,  les  dieux  frères,  les  dieux  Évergètes,  les  dieux 
»  Philopators,  les  dieux  Épiphanes,  le  dieu  Philométor,  le  dieu  Eupator,  les  dieux  Évergètes  ^ 
»  et  Isis,  et  Osiris,  et  tout  dieu,  et  toute  déesse  —  que  je  cultiverai  le  champ  de  Pséosor,  fils 
»  de  Pais  et  le  champ  des  Ala  .  .  .  qui  sont  situés  dans  le  neter  hotep  d'Amon,  au  nord  de 
»  Thèbes,  au  moyen  de  l'eau  de  l'an  37  à  l'an  38.  Que  je  solde  leurs  impositions  à  la  porte 
»  du  roi,  selon  ce  qui  est  sur  les  écrits  que  le  roi  a  écrits  à  ce  sujet.  Que  je  sois  me  tenant 
»  debout  sur  ces  champs,  t'en  montrant  à  toi  les  produits,  sans  fraude,  sans  que  j'aille  sur  la 

»  place  adjurer  temple  divin,  autel  ou  statue Je  fais  serment 

»  sur  ces  choses.  Je  resterai  tranquille.  Je  fais  serment  de  venir  apporter  le  blé  du  serment.  » 

Le  set  ou  fermier  général  {set  signifie  louer)  avait  donc  l'intendance  de  la  culture  d'un 
nôme  sous  l'autorité  du  topogrammate.  Ce  sont  ces  set  auxquels  la  circulaire  administrative 
citée  plus  haut  fait  allusion  à  la  ligne  80  :  ot;  r;  twv  oawv  sT.'.v.ziTy.'.  çpovi'.ç.  Le  serment  des  culti- 
vateurs était  fait  entre  leurs  mains  et  portait  à  la  fois  :  1°  sur  la  culture  des  terres,  qui  ne 
pouvait  être  interrompue;  2°  sur  l'impôt  royal,  qui  devait  être  toujours  religieusement  soldé. 
Je  dis  reUgieusement;  car  le  serment  écrit,  prêté  non  seulement  de  par  les  dieux,  mais  de  par 
les  rois  (opy.ouç  [j.rj  [jlov:v  e-i  twv  ôeiov  aXXa  xa'.  xaxa  twv  (iasiAccov  Ypa-xouç)  obligeait  religieusement 
sous  ces  deux  aspects,  puisque  les  rois  étaient  dieux,  et  civilement  sous  le  dernier,  puisqu'ils 
étaient  les  maîtres  de  l'Egypte.  Ce  dernier  aspect  («XXa  xat)  était  même  le  premier  dans  nos 
formules  écrites.  C'était  certainement  le  plus  important  —  et  cependant,  d'une  autre  part,  en 
vertu  de  cette  adjuration  solennelle,  le  malheureux  cultivateur  se  retirait  d'avance  la  faculté 
d'appel  aux  dieux.  Ce  recours  suprême  était  pourtant  formellement  prévu  par  la  loi  égyp- 
tienne, qui  l'accordait  à  tous  les  opprimés  et  même  aux  esclaves,  ainsi  que,  plus  tard,  cela  avait 
lieu  à  Rome  pour  ceux  qui  se  réfugiaient  près  de  la  statue  de  l'empereur,  et,  dans  les  cou- 
tumes normandes,  pour  ceux  qui  faisaient  l'adjuration  à  Rollo,  —  le  célèbre  Haro,  si  singulière- 
ment compris  par  Lafontaine.  Nous  avons  vu  que  les  esclaves  égyptiens  trop  cruellement 
opprimés  par  leurs  maîtres  pouvaient  échapper  à  leur  tyrannie  en  se  réfugiant  dans  certains 
sanctuaires,  suivant  le  témoignage  formel  d'Hérodote,  concordant  parfaitement  avec  les  docu- 
ments démotiques  contemporains.  L'esclave  faisait  alors  un  appel  écrit  aux  dieux  et  les  prenait 
à  témoin  —  nous  avons  en  démotique  un  appel  de  ce  genre  — .  On  instruisait  ensuite  l'affaire,  et 
si  les  prêtres  lui  donnaient  raison,  il  cessait  d'être  la  chose  de  son  maître  pour  devenir  celle 

initiales  à  celui  de  l'an  34  cité  plus  bas)  qui  a  été  prêté  et  écrit  dans  des  circonstances  toutes  différentes. 
Il  s'agissait  d'une  réparation  pour  une  séduction.  Nous  en  avons  déjà  parlé  dans  la  Bévue  égyptologique. 

2  On  peut  aussi  traduire  peut-être  «fils  de  Panas»;  car  la  marque  de  la  filiation  est  un  petit  trait 
penché  (abrégé  de  ^)  et  je  n'ai  plus  l'original  sous  les  yeux. 

3  Cette  mention  des  dieux  Evergètes  fait  doublon  avec  celle  de  l'en-tête. 


La  location.  137 

du  dieu.  Il  existe  d'autres  adjurations  analogues  concernant  des  personnes  de  condition  libre, 
injustement  traitées  ou  ayant  subi  préjudice,  par  exemple  dans  les  affaires  de  viol,  de  séduc- 
tion, etc.  Xotre  fermier  aurait  donc  pu  de  même  en  appeler  à  cette  juridiction  divine  s'il  ne 
se  l'était  interdit  d'avance  d'une  f-àcon  si  précise  et  si  solennelle,  en  jurant  de  n'implorer  ni 
temple  de  dieu,  ni  autel,  ni  statue.  Désormais  il  était  complètement  entre  les  mains  du  set. 
Dans  cette  adjuration  nous  remarquons  aussi  deux  formules  identiques  à  celles  d'une 
des  locations  contemporaines  d'Évergète  II  que  nous  avons  donnée  précédemment.  Lune  — 
«que  je  solde  leurs  impositions  à  la  porte  du  roi  selon  ce  qui  est  sur  les  écrits  que  le  roi  a 
écrits  à  ce  sujet»  —  se  rapporte  à  la  circulaire  administrative  citée  plus  haut  et  a  été  déjà 

commentée  par  nous.    L'autre  :  —  «je  cultiverai au  moyen  de  l'eau  de  l'an  37  à 

l'an  38  »  —  mérite  de  nous  arrêter  quelques  instants.  Dans  le  serment,  comme  dans  les  loca- 
tions, cette  formule  stipule  le  droit  qu'a  le  fermier  de  se  servir  de  l'eau  annuelle  pour  sa 
culture.  Il  faut  savoir  en  effet  que  l'irrigation  était  aloi^s  en  Egypte  bien  supérieure  à  ce  qu'elle 
est  actuellement.  Xous  avons  à  ce  sujet  de  très  curieux  renseignements  dans  les  documents 
contemporains.  Je  citerai  par  exemple  un  papyrus  grec  concernant  les  ti-avanx  faits  aux 
canaux  des  environs  de  Thèbes  et  qui  nous  montre  combien  la  canalisation  était  déve- 
loppée. Des  ventes  démotiques  donnent  d'autres  détails  su])plémentaires  sur  le  même  sujet 
et  sur  le  même  lieu,  particulièrement  en  ce  qui  concerne  «Veau  de  Xicandros^  et  «Verni 
Lybienne^,  c'est-à-dire  longeant  la  chaîne  Ly bique.  L'eau  annuelle  n'était  pas  autre  chose 
que  celle  qui.  dans  ces  canaux  et  dans  les  petits  conduits  qui  en  dépendaient,  était  réservée 
(après  l'inondation^  pour  la  culture  de  l'année.  Chaque  riverain  y  avait  un  droit  proportionnel 
et  amenait  cette  eau  dans  son  terrain  à  l'aide  d'appareils  fort  simples,  encore  en  usage  au 
commencement  de  ce  siècle.  D'après  une  vieille  loi  égyptienne,  reçue  par  les  Romains  et 
reproduite  dans  le  corpus  jnris,  celui  qui  détériorait  ces  canaux  ou  rompait  les  digues  i  /(oixaTa 
:=  mot  transcrit  chomafci)  était  puni  de  mort.  L'eau  réglait  d'ailleurs  la  récolte;  et  une  loi  de 
Ramsès  II  ou  Sésostris  permettait  de  diminuer  l'impôt  de  ceux  dont  les  terrains  n'avaient  pu 
être  arrosés  d'une  façon  suffisante.  Dans  une  pension  alimentaire  faite  par  un  fils  à  une  mère, 
en  l'an  36  de  Philométor  ',  nous  constatons  également  que  l'obligation  n'est  valable  que  si 
l'eau  monte  jusqu'à  un  certain  niveau.  Ajoutons  en  passant  (car  nous  reviendrons  sur  ce  sujet 
en  étudiant  les  conditions  de  l'agriculture  en  Egypte,  d'après  le  papyrus  63  du  Louvre^i  que 
tous  les  habitants  étaient  obligés  de  contribuer  à  la  culture  de  la  terre.  C'était  la  capifntion  de 
l'agriculture    ^ôcopYiai,  la  corvée  par  excellence,  sur  laquelle  les  circulaires  royales  s'étendent 

'  Cet  acte  est  ainsi  conçu  :  ^  Le  taricheiite  de  la  nécropole  de  Djême,  Amenhotep,  tils  d'Hor,  dont  la 
»  mère  est  Chabonra,  dit  à  la  femme  Chaboiira,  fille  de  Psémonth,  dont  la  mère  est  Tsétamen  :  ils  t'appar- 
i>  tient  d'exiger  — je  t'en  ai  donné  le  pouvoir  —  chaque  année  que  l'eau  i^du  Nil)  remplit  18  coudées  (sur  le 
snilométre)  —  que  je  te  donne  10  cor  (de  blé)  —  leur  moitié  est  5  —  dix  cor  (de  blé),  et  la  valeur  de  la 
»  moitié  du  quart  de  petite  mesure  d'huile  de  tekem  (•/.•./.'.)  en  outre,  le  quart  du  8*  de  quart  de  petite  mesure 
s>de  sel  en  outre,  par  année,  un  m  tous  les  deux  ans.  quand  l'eau  remplit  18  coudées  du  nilométrc.  L'année 
»oà  l'eau  ne  remplit  pas  18  coudées,  pour  que  tu  boives  et  manges  du  seth,  fais  ton  ménage  avec  moi  et 
»que  je  te  donne  une  clef  de  la  porte.  Le  droit  de  l'écrit  ci-dessus  est  sur  moi  et  sur  mes  enfants.  La 
»  totalité  des  biens  qui  sont  à  moi  et  que  je  ferai  être  est  en  garantie  de  toute  parole  ci-dessus  jusqu'à  ce 
»que  j'agisse  en  conformité.  Si  je  m'écarte  pour  ne  pas  agir  selon  toute  parole  ci-dessus,  je  te  donnerai  un 
•  talent,  trois  cents  argenteus,  un  talent  en  tout,  en  airain  dont  l'équivalence  est  de  24  pour  -jfd,  pour  les 
»  sacrifices  du  roi.  Tu  m'obligeras  de  plus  à  m'y  conformer,  de  force,  sans  délai,  sans  opposition.»  Ces 
18  coudées  nécessaires  pour  une  bonne  année  sont  (nous  l'avons  dit  pins  haut  p.  133)  fort  intéressant  à  noter. 


138  Eugène  Revillout. 


longuement.  Les  Égyptiens  des  conditions  les  plus  diverses  y  étaient  astreints,  à  certains 
jourS;  et  venaient  aider  ainsi  les  fermiers  royaux  (BaatX-.xoç  Yswpïo;)  et  les  agriculteurs  propre- 
ment dits,  pour  les  terrains  qui  n'étaient  pas  devenus  tout-à-fait  propriété  privée. 

Jusqu'ici  nous  avons  vu  surtout  ce  qui  concernait  la  location  des  terres.  Comme  nous 
l'avons  dit,  cette  location  (la  première  qu'ait  connue  Rome,  ainsi  que  le  prouvent  l'action  ser- 
vienne,  l'interdit  Salvien  et  l'action  quasi- ser vienne ,  appliquées  ensuite  aux  autres  genres  de 
baux)  cette  location,  dis-je,  était,  en  Egypte,  la  location  par  excellence.  Mais,  à  l'imitation  de 
la  location  des  terres,  on  avait  aussi  établi  la  location  :  1°  des  autres  immeubles;  2°  de  certains 
revenus  de  sources  diiïérentes  :  ce  qui  peut  être  comparé  sous  certains  rapports  à  la  locatio 
operarum  des  Romains. 

A'oici  d'abord  une  location  de  terrains  à  bâtir  :  «Le  cavalier  inscrit  à  Djême,  Chons- 
»  thot;  fils  de  Petrus  et  dont  la  mère  est  Tamin,  dit  au  taricheute  de  la  nécropole  de  Djême, 
»  Amenliotep,  fils  d'Hor  et  dont  la  mère  est  Chaboura  :  —  tu  m'as  loué  ton  oureh  de  maison 
»  ((itXoTOTCoç)  qui  est  dans  le  quartier  sud  de  Djême,  à  l'intérieur  de  l'enceinte  de  Djême,  et 
»dont  les  voisins  sont  :  au  sud  l'enceinte  de  la  ville  (?)  de  Djême;  au  nord  les  oiireh  (terrains 

»nus)  de  Tachons,  que  la  rue  du  roi  en  sépare;  à  l'orient  la  maison  de ;  à  l'occi- 

»dent  les  oureh  (terrains  nus)  de  Maut  ....  Que  je  sois  sur  les de  ton  oureh  de 

»  maison  (iI^iXototcoç)  ci-dessus  depuis  l'an  52,  1'"'  du  mois  de  Méchir,  jusqu'à  la  fin  de  5  années, 
»en  mois  60  ...  en  années  5  en  tout.  Que  ton  agent  déclare  la  location  avec  moi.  Que 
»je  donne  en  la  main  de  ton  agent,  au  nom  de  la  location  de  ton  oureh  de  maison  ci-dessus, 
»par  année,,  trois  argenteus,  en  sekels  15,  trois  argenteus  en  tout,  en  airain  à  l'équivalence 
»de  24  pour  Yio  argenteus  d'argent,  chaque  année  des  teinps  ci-dessus.  Cet  argent,  si  je  ne 
»le  donne  pas  chaque  année,  que  je  te  donne  en  plus,  pour  ces  argenteus,  Vio  P^^'  chaque 
»  argenteus,  le  mois  qui  suivra  le  mois  nommé,  de  force,  sans  délai.  Ou  prendra  (ou  empor- 
»tera)  les  caisses  et  les  bois  que  je  placerai  dans  Voureh  de  maison  ci-dessus  à  la  fin  des  temps 
»  ci-dessus.  Le  droit  de  l'écrit  ci-dessus  est  sur  moi  et  sur  mes  enfants.  La  totalité  des  biens 
»qui  sont  à  moi  et  que  je  ferai  être  est  en  garantie  de  toute  parole  ci-dessus  jusqu'à  ce  que 
»  j'agisse  en  conformité.  Quand  la  fin  des  cinq  années  ci-dessus  sera  (arrivera),  que  j'étabHsse 
»  ton  oureh  de  maison  ci-dessus  devant  toi  pour  que  tu  le  loues  à  l'homme  à  qui  tu  voudras  le 
»  louer.  Je  ne  pourrai  dire  :  j'ai  loué  ces  années-là  pour  faire  de  même  en  tout  temps.  —  L'homme 
»  de  nous  qui  s'écartera  pour  ne  pas  agir  selon  toute  parole  ci-dessus,  donnera  600  argenteus, 
»deux  talents,  600  argenteus  en  tout,  en  airain  à  l'équivalence  de  24  pour  7io-  0^  l'obligera 
»  de  plus  à  agir  selon  toute  parole  ci-dessus.  Ton  agent  prend  puissance  pour  toute  parole  qu'il 
»  dira  avec  moi  au  nom  de  toute  parole  ci-dessus.  Que  je  les  accomplisse  à  son  égard,  en  tout 
»  temps,  de  force,  sans  délai,  sans  opposition.  » 

Nous  remarquerons  d'abord  que  cette  location  est  pour  plusieurs  années.  Mais  elle  porte 
sur  un  terrain  de  ville,  genre  de  terrain  qui  appartenait  réellement  aux  individus  chez  les 
Egyptiens  anciens  et  modernes,  chez  les  Hébreux,  etc.  Ces  terrains  de  villes  ne  produisant 
rien  par  eux-mêmes,  le  fermage  n'est  pas  en  nature,  mais  en  argent,  et  la  dette  est  augmen- 
tée de  l'hémiohon  en  plus  en  cas  de  retard  dans  le  paiement  de  chaque  année.  Notons  que  le 
propriétaire  loue  son  terrain  nu  à  la  charge  pour  le  locataire  de  le  lui  rendre  tel  à  la  fin 
de  son  bail.  Celui-ci  doit  donc  en  enlever  tout  ce  qu'il  y  aura  mis,  sans  pouvoir  rien  demander 


La  location.  139 


pour  les  améliorations  faites  (nous  avons  une  clause  semblable,  encore  plus  explicite,  pour  un 
bien  funéraire  livré  en  gage,  sous  forme  de  location,  à  un  créancier).  La  reconduction  tacite 
(continuation  tacite  du  baili  est  aussi  formellement  interdite  que  dans  une  des  locations  de 
terres  citées  plus  haut  :  «  à  la  fin  des  cinq  années  ci-dessus,  que  j'établisse  ton  ovreh  de  maison 
«devant  toi  pour  que  tu  le  loues  à  Thomme  à  qui  tu  voudras  le  louer.  Je  ne  pourrai  dire  : 
»j'ai  loué  ces  années-là  pour  faire  de  même  en  tout  temps.»  Comme  dans  une  de  nos  locations 
de  terre,  une  amende  est  stipulée  à  la  charge  de"  celle  des  deux  parties  qui  violerait  le  con- 
trat :  nous  avons  expliqué  plus  haut  cet  usage.  L'agent  joue  un  grand  rôle,  ainsi  que  dans 
les  créances  ordinaires.  Il  n'est  pas  question  des  impositions  en  nature  à  payer  au  roi;  mais 
on  mentionne  la  déclaration  qui  doit  être  faite  par  le  locataire  et  fagent  du  propriétaire. 
Cette  déclaration  des  baux  était  donc  indispensable,  alors  même  que  l'on  n'avait  pas  à  faire 
le  serment  de  culture.  Semblable  déclaration  était  aussi  exigée  pour  bâtir;  et  l'on  payait  alors 
un  droit  fixe,  mentionné  dans  les  contrats  et  dans  les  reçus  spéciaux  qui  nous  sont  parvenus. 
Quant  aux  locations  de  revenus  funéraires,  elles  étaient  permises.  Je  vous  en  ai  cité  der- 
nièrement une  à  propos  du  gage.  Il  s'agissait  de  biens  et  revenus  funéraires  livrés  en  location 
par  un  débiteur  à  son  créancier  pour  le  payer  de  sa  créance.  Suivant  les  principes  que  nous 
vous  avons  expliqués  précédemment,  celui-là  soblige  qui  doit  ou  qui  a  déjà  reçu.  Aussi  n'est- 
ce  point,  comme  dans  les  autres  locations,  le  locataire  qui  écrit  l'acte,  mais  le  locateur  ou 
bailleur.  En  effet  c'est  ici  le  locateur  qui  a  reçu  le  premier.  A  lui  d'engager  sa  parole.  Au 
lieu  de  lire  :  «tu  m'as  loué»  on  lit  donc  :  «je  t'ai  loué»  dans  l' en-tête  de  l'acte.  La  loca^ 
tion  doit  durer  trois  années;  car  le  produit  des  biens  funéraires  doit  payer  en  ce  temps 
la  créance,  s'élevant  à  400  argenteus  :  à  savoir  133  argenteus  3%  et  un  tiers  par  an  (inté- 
rêts comprise  Le  locateur  déclare  donc  qu'il  n'a  rien  à  toucher,  qu'il  a  reçu  d'avance  —  et 
que  son  cœur  en  est  satisfait  —  les  400  argenteus,  par  une  dette  antérieure  dont  il  spécifie  la 
nature  et  la  date.  Il  s'engage  à  écarter  dans  le  délai  de  cinq  jours  quiconque  viendrait  ti'ou- 
bler  le  locataire-créancier  dans  sa  jouissance  d'usage.  Mais  il  met  pour  condition  que  le  loca- 
taire établira  au  bout  de  trois  ans  les  biens  en  question  devant  lui  pour  qu  il  puisse  les  louer 
à  qui  il  voudra.  Si,  avant  ces  trois  ans  accomplis,  le  bailleur  retire  quoi  que  ce  soit  des  biens 
loués  à  son  créancier,  il  lui  rendra  ce  dont  il  la  frustré  et  lui  donnera  pour  dommages -inté- 
rêts 3000  argenteus.  Si,  d'une  autre  part,  le  locataire  ne  quitte  pa^  les  biens  funéraires  en 
question  et  ne  s'en  va  pas  avec  ses  gens  «  hors  des  parts  ci-dessus  »,  il  lui  donnera  5000  argen- 
teus, c'est-à-dire  des  dommages-intérêts  plus  élevés  de  Ys;  parce  qu'il  aura  entrepris  non  pas 
seulement  sur  l'usage,  ce  qu'eût  pu  faire  le  bailleur,  mais  sur  la  propriété  des  biens  en  question, 
en  voulant  changer  en  vente  une  location.  Cela  ne  l'empêchera  pas  de  rendre  les  biens  ainsi 
usurpés.  Les  dernières  conditions  sont  :  *tu  ne  pourras  dire  sur  mes  biens  ci-dessus,  comme 
il  est  écrit  ci- dessus  :  j"ai  bâti,  j'ai  couvert,  jai  fait  changement  quelconque  au  monde.  Tu 
ne  pourras  dire  :  j'ai  parole  au  monde  avec  toi  en  leur  nom  (réclamation  à  te  faire).»  Enfin 
l'acte  se  tennine  par  l'hypothèque  générale,  la  mention  du  procureur  et  cette  clause  formelle 
relative  au  temps  du  bail  :  «Je  ne  puis  établir  mes  parts  ci-dessus  pour  personne  au  monde 
intervenante.  Je  ne  puis  rien  ordonner  sur  mes  parts  ci-dessus,  comme  il  est  écrit  ci-dessus.  » 
Dans  cette  location  l'obligation  est  donc  complètement  retournée  pour  ainsi  dire  et  toute  à  la 
charge  du  bailleur  —  par  la  raison  toute  simple  que  c'est  lui  qui  a  reçu  et  que  c'est  lui  qui  doit. 


140  Eugène  et  Victor  Revillout. 

Telles  sont  les  principales  données  que  j'ai  recueillies  sur  la  location  proprement  égyp- 
tienne. M.  Blass  m'a  signalé  aussi  une  location  grecque  d'Egypte  copiée  par  lui  à  Berlin. 
Mais  cette  location  paraît  postérieure  aux  Lagides. 


COMPTES  DU  SÉEAPÉUM. 

Nous  allons  donner  le  texte  grec  d'un  papyrus  du  Louvre,  peu  exactement  reproduit 
dans  l'édition  académique  sous  le  n°  56. 

Ce  texte  comprend  trois  colonnes,  qui  se  trouvent  mélangées  dans  cette  publication,  mais 
sont  bien  distinctes  sur  l'original.  Elles  ont  été  écrites  sur  le  revers  et  sur  la  partie  la  plus 
usée,  près  du  bord  droit,  d'une  bande  de  papyrus,  dont  l'autre  face  avait  servi  à  transcrire 
des  maximes  morales  en  langue  démotique.  Déjà  antérieurement  le  papyrus,  dont  fut  détachée 
cette  bande,  avait  été  utilisé  pour  la  confection  d'un  ancien  acte  démotique,  ainsi  que  le 
prouvent  les  8  derniers  noms  d'une  liste  de  16  témoins,  qu'on  aperçoit  encore  vers  le  milieu, 
en  haut  du  revers,  du  même  côté  que  les  trois  colonnes  de  grec. 

Revenons  en  à  celles-ci.  Elles  nous  donnent  l'actif  et  le  passif  de  la  gestion  d'affaires 
dont  Apollonius,  fils  de  Glaucias,  frère  du  macédonien  Ptolémée,  le  pieux  reclus  du  Sérapéum 
de  Memphis,  avait  été  chargé  par  celui-ci  pendant  une  période  déterminée.  Nous  allons  voir 
qu'un  autre  document,  le  papyrus  S  de  Leyde,  nous  permettra  de  préciser  les  dates.  En  effet 
c'est  bien  le  même  compte  en  partie  double  qui  se  trouve  dans  ces  deux  papyrus.  Mais, 
dans  celui  de  Leyde  ce  compte  a  été  dressé  par  Apollonius,  et  dans  celui  du  Louvre,  par 
Ptolémée  lui-même,  qui  à  la  date  du  1"  Payni  faisait  établir  la  balance  et  calculer  le  reU- 
quat  des  sommes  versées  à  son  frère.  Les  écritures  et  les  orthographes  sont  très  différentes. 

Ptolémée,  qui  écrivait  beaucoup  et  qui  recommençait  souvent  à  plusieurs  reprises  le 
brouillon  des  pétitions  qu'il  adressait  aux  souverains  ou  aux  fonctionnaires,  tâchait  de  ménager 
le  plus  possible  du  revers  blanc  de  ce  papyrus,  lequel,  du  côté  droit,  avait  déjà  beaucoup  souffert. 
Il  commença  donc  par  inscrire,  dans  une  colonne  très  étroite,  de  ce  côté,  tout  à  fait  au  bord, 
malgré  les  trous  et  les  lacunes  qui  alors  déjà  existaient  à  ce  niveau,  le  détail  complet  des 
dépenses  faites  en  son  nom  par  Apollonius.  Ici  les  dépenses  sont  groupées,  non  suivant  les 
époques,  mais  suivant  les  espèces  :  d'abord  les  achats  de  papyrus,  puis  les  achats  de  blé, 
puis  une  somme  versée  à  Taloutis,  le  marchand  de  blé,  et  qui  lui  était  sans  doute  due  sur 
un  compte  antérieur.  Pour  le  calcul,  la  méthode  est  la  même  que  dans  le  papyi'us  Sakkinis  : 
d'abord  des  additions  et  sommations  partielles,  puis,  en  remontant  de  bas  en  haut,  la  tota- 
lisation, partielle,  puis  générale,  des  produits  ainsi  obtenus. 

Mais  il  y  eut  plus  d'une  erreur. 

Certains  chiffres  ont  été  surchargés  ou  corrigés  autrement  :  celui  de  la  somme  payée 
pour  deux  artabes  de  blé,  qui,  d'abord  de  560,  est  devenue  de  580  par  la  substitution  d'un 
n  à  un  Z;  celui  du  versement  à  Taloutis,  marqué  d'abord  de  deux  cent  quarante  drachmes, 
porté  ensuite  à  deux  cent  quarante-cinq  par  l'intercalation  d'un  E  dans  l'interligne,  et  enfin 
à  deux  cent  cinquante  tant  par  la  transformation  du  M  primitif  en  N  que  par  la  répétition 
de  la  mention  Ir  CN  à  la  liffne  suivante. 


Comptes  du  Sérapéum. 


141 


Ces  deux  erreurs,  vues  et  corrigées  au  fur  et  à  mesure,  n'influèrent  pas  sur  les  totaux. 
Mais  il  en  fut  tout  autrement  d'une  autre  erreur  plus  grave  portant  sur  le  calcul.  En  addi- 
tionnant les  achats  de  blé,  on  avait  compté  1700  drachmes  au  heu  de  1600  drachmes  pour 
le  prix  de  toute  la  masse  ;  et  par  suite  l'addition  de  ce  produit  partiel  avec  la  somme  payée 
à  Taloutis  donna  1950  drachmes  au  lieu  de  1850,  et  comme  total  général,  y  compris  le  prix 
du  papyrus,  on  trouva  2410  au  lieu  de  2310.  Ptolémée  avait  achevé  d'écrire  cette  première 
colonne  quand  il  reconnut  cette  triple  faute.  11  l'indiqua  par  une  double  surcharge  portant 
sur  le  nombre  1700,  dont  le  Y  fut  surchargé  des  deux  branches  d'un  X  et  sur  le  nombre 
1950  AT  N,  au-dessous  duquel  on  inscrivit  les  lettres  À(i3 .  .  dans  l'interligne;  mais  quant  au 
total  général,  inscrit  très  près  du  bord  inférieur  du  papyrus,  fort  endommagé  à  cet  endroit, 
l'espace  manquait  pour  le  corriger  convenablement  en  l'eiïaçant  et  en  y  substituant  plus  bas 
le  nombre  exact. 

Comme  il  ne  serait  pas  possible  de  figurer  typographiquement  la  substitution  d'une  lettre 
à  une  autre,  de  telle  sorte  qu'un  Z  primitif  fût  transformé  en  II,  un  M  en  N,  un  Y  en  X, 
nous  indiquerons  ces  surcharges  par  de  simples  juxtapositions  dans  la  reproduction  du  texte 
grec,  en  plaçant  à  la  suite  de  la  lettre  posée  d'abord  celle  qui  la  remplace  et  qui  se  trouve 
superposée  dans  l'original.  Nous  aurons  soin  d'ailleurs  d'entourer  de  parenthèses  celle  de  ces 
deux  lettres  dont  il  n'aura  pas  été  tenu  compte  pour  l'établissement  des  totaux.  Nous  procé- 
derons de  même  relativement  aux  nombres  à  substituer  à  d'autres  nombres  pour  suivre  la 
marche  du  calcul  dans  la  traduction  en  regard. 

Voici  donc  comment  se  présentait  cette  première  colonne  après  les  surcharges  et  cor- 
rections : 

150 
70 
240 
jusqu'à  Pharmouthi  30 
cela  fait  :  de  papy- 
rus —  prix  : 
drachmes  460 


PN 

0 

CM         ei 

HCJC  OAPMOY 

r  nAHY    ^ 

POVC  TIMH 

Ir  Y   Z 

Zf. 

AlrCN 

le 

A  1^2  T 

ir 

C_  UPZ 

Zf  B 

Ir  0  (Z)  n 

XI 

i^n 

X  A 

lrC3       A 

r  Cl 

T0Y'2f  E 

/^ 

À  Y  (X) 

artabe  1  :  drachmes  250 

artabe  1  :  drachmes  300 

le  13  (du  mois)  '/j  :  drachmes  160 
artab.  2  :  drachmes  (560)  580 
cho.  10  :  drachmes     80 

cho.  30  :  drachmes  230 

cela  fait  de  blé  artabes  5 
cela  fait  drachmes  1700  (1600) 


1  Une  écaillure  longitudinale  du  papyrus  qui  existait  déjà  et  faisait  complètement  trou  sur  certains 
points  a  obligé  Ptolémée  à  laisser  dans  cette  ligne  et  dans  les  suivantes  un  espace  vide  entre  la  première 
et  la  seconde  partie  de  la  ligne.  Aussi  le  commencement  en  est-il  reporté  un  peu  plus  à  gauche. 

2  Par  suite  d'une  autre  écaillure  du  papyrus,  le  chiffre  T  se  trouve  assez  distant  de  la  sigle  des 
drachmes. 

3  Un  autre  trou  du  papyrus  sépare  le  chiffre  A  de  la  sigle  des  deux  cents  drachmes. 

19 


142 


Eugène  et  Victor  Revillout. 


TAA     OYTI  lrC(M)N 


Ir  C 
/    Ir  À 

y^  ë  Y 


N 
T  N 

(À    (a) 

I 


(245) 
à  Taloutis       drachmes  (240)  250 

(Iraclimes  250 
cela  fait  drachmes  1950 

(1850) 
total  2410 


Les  fautes  commises  étaient  bien  mises  en  évidence.  Mais  ce  qui  n'était  pas  corrigé 
dans  cette  colonne,  c'étaient  les  totaux.  Il  parut  donc  indispensable  d'additionner  de  nouveau 
les  trois  produits  partiels,  en  procédant  en  sens  inverse  pour  faire  en  même  temps  la  preuve. 
Cette  opération  fut  exécutée  dans  une,  seconde  colonne,  qui  prit  place  à  la  gauche  de  la  pre- 
mière et  qui  resta  plus  courte,  car  les  dépenses  n'y  furent  indiquées  que  par  masses,  le  détail 
étant  déjà  donné  précédemment  d'une  façon  suffisante.  Il  y  eut  sans  doute  encore  une  erreur 
de  calcul,  car  une  ligne  de  chiffres  a  été  effacée  avec  le  doigt,  avant  que  l'encre  n'eût  séché, 
où  devait  se  trouver  d'abord  le  produit  de  l'addition  du  prix  des  papyrus  avec  le  prix  des 
blés.  Mais  les  nombres  définitifs  sont  cette  fois  parfaitement  exacts. 

Cette  dernière  colonne  est  ainsi  conçue  : 


nAnYPOYC 

TIMHN  HUC 
«DAPMOVei  Â 
U  YZ 

/  CITOY  1p  E 
TIMHN  UÀX 

/-  fez 

TAAOYTI 

IrCN 

r    IrëTI 


De  papyrus  — 

prix,  jusqu'à 

pharmouthi  30 

drachmes  460 

total  du  blé  :  artabes  5 

prix  :  drachmes  1600 

cela  fait  :  drachmes  2060 

à  Taloutis 

drachmes  250 

cela  fait  :  drachmes  2310 


Apollonius  avait  donc  en  tout  dépensé  pendant  la  période  de  temps  pour  laquelle  il 
rendait  ses  comptes,  2310  drachmes  imputables  sur  les  sommes  qui  lui  avaient  été  confiées 
par  son  frère.  Pour  faire  la  balance,  pour  savoir  au  juste  ce  dont  il  restait  redevable,  il  fallait 
maintenant  établir  à  combien  se  montaient  ces  sommes.  C'est  ce  que  fit  Ptolémée  dans  une 
troisième  colonne,  où  il  eut  soin  de  distinguer  de  ce  qu'il  avait  remis  directement  à  Apollonius, 
ce  qu'il  lui  avait  fait  parvenir  à  deux  reprises  par  l'intermédiaire  d'un  Armais  dont  nous  aurons 
bientôt  à  parler.  Il  y  ajouta  ce  que  son  frère,  avait  touché  pour  prix  d'un  othonion,  tissu  de 
byssus,  vendu  en  son  nom  et  sur  le  sujet  duquel  nous  aurons  également  à  revenir. 

Il  est  à  remarquer  que  dans  cette  troisième  colonne  il  y  a  encore  un  chiffre  changé. 
Dans  la  première  ligne  relative  à  de  l'argent  versé  directement  à  Apollonius,  Ptolémée  avait 
inscrit  d'abord  mille  drachmes  Vk,   puis  il  a  transformé  ce  nombre  mille  en  2180  fePn.  Le 

'  Le  papjTus  ayant  perdu  depuis  lors  un  petit  fragment  à  ce  niveau,  il  est  impossible  de  savoir  si 
la  lettre  N  qui  eût  complété  la  correction  a  été  écrite,  ou  si  Ptolémée,  qui  recommençait  le  calcul  dans 
une  autre  colonne,  ne  s'était  pas  ici  contenté  de  cette  indication  sommaire. 


Comptes  du  Sérapéum. 


143 


papyrus  S  de  Leyde  rend  cette  transformation  très  facile  à  comprendre.  En  effet  la  somme 
de  2180  drachmes  avait  été  versée  en  deux  fois  :  d'abord  1000  drachmes  le  22  Phaménoth, 
puis  1180  le  5  Pharmouthi.  Le  premier  nombre  se  rapporte  donc  à  un  versement  isolé,  et 
celui  qui  le  remplace  à  la  masse  de  la  somme  versée  directement,  considérée  en  bloc. 

Notons  encore  que  la  lettre  fl  de  la  cinquième  colonne  a  perdu  ses  jambages  et  une 
partie  de  son  plateau,  enlevés  ainsi  qu'une  partie  du  sig-ne  ^  reste,  par  une  écaillure  du 
papyrus.  Mais  la  lecture  de  cette  lettre -chiffre  n'est  pas  douteuse,  car  la  différence  entre, 
d'une  part,  le  nombre  auquel  elle  appartient,  nombre  représentant  le  produit  de  l'addition 
des  diverses  recettes  et,  dune  autre  part,  le  nombre  porté  à  la  fin  de  l'autre  colonne  et  figu- 
rant le  total  des  dépenses,  est  exactement  de  1370  ÀTO.  La  balance  à  la  date  du  1"  Pachons 
accusait  bien  ce  reliquat  de  1370  drachmes,  ainsi  que  le  montre  le  calcul  suivant  qui  forme 
la  troisième  colonne. 


AnOAAUNIUI 
APMAEI 
APMAEI  nAAIN 
OeUNlOY  TIMH 

r  i^rxn  n.  i^àto 

nAXCON  À 


ir  (À)  ë  p  n 

IrX 

UY 


A  Apollonius  :  drachmes  (1000)  2180 

à  Armais  :  drachmes  600 

à  Armais  de  nouveau  :  drachmes  400 

prix  d'un  othonion  :  drachmes  500 

cela  fait  drachmes  3680  :  reste  dr.  1370 

le  premier  Pachons. 


Tel  est  le  papyrus  du  Louvre  qui  contient  le  compte  dressé  par  Ptolémée,  fils  de  Glau- 
cias.  Voyons  maintenant  ce  même  compte,  dressé  par  son  frère  Apollonius.  Il  constitue  la 
première  colonne  du  papyrus  S  de  Leyde  publié  par  M.  Lbemans  avec  un  facsimile  partiel 
comprenant  seulement  les  cinq  premières  lignes.  Ces  cinq  lignes  représentent  l'actif,  elles 
correspondent  donc  à  la  colonne  du  papyrus  du  Louvre  que  nous  venons  d'examiner  en  dernier 
lieu.  Apollonius  n'avait  pas  les  mêmes  raisons  que  Ptolémée  pour  distinguer  ce  qui  lui  avait 
été  versé  directement  par  celui-ci  ou  indirectement  par  l'intermédiaire  d'Armais.  Il  savait  bien 
avoir  touché  le  tout.  Ce  qui  lui  importait,  au  contraire,  c'était  de  marquer  exactement  les 
dates  pour  établir  qu'il  en  avait  pris  note  et  n'avait  dû  rien  oublier.  La  publication  de 
M.  Leemans  porte  une  erreur  sur  le  total;  mais  il  est  facile  de  se  rendre  compte  par  l'examen 
du  facsimile  que  cette  erreur  n'est  probablement  pas  le  fait  d'Apollonius.  Ce  doit  être  une 
caillure  du  papyrus  qui  a  transformé  en  Y  un  X  en  lui  faisant  perdre  la  moitié  d'une  de  ses 
branches.  M.  Leemams  a  d'ailleurs  indiqué  dans  une  note  cette  restitution  comme  forcée 
d'après  le  calcul. 

Nous  allons  donner  d'abord  séparément  les  cinq  premières  lignes,  car  le  calcul  en  forme 
un  tout  complet,  embrassant  les  recettes  proveuues  de  Ptolémée.  Puis  nous  passerons  aux 
neuf  dernières,  relatives  aux  dépenses,  et  pour  lesquelles  nous  n'avons  pas  de  fac-similé. 


L  KB  «DAMENOe  KÂ 

AHEXCJ  RAPA  nTOAEMAI(0K"^J  IrÀ 

<t>APMOVei  Ê  UÀPn.TH^^'^^  ÎBlrX 

KAI  TEIMHN  OGUNIOY  Kt>  TH^"'^^  KÊ  IrY 

r  uhxn 


Au  22,  Phaménoth  le  24 
je  reçois  de  Ptolémée  :  drachmes  1000 
Pharmouthi  le  5  :  dr.  1180;  le  12  :  dr.  600 
et  le  prix  d'un  othonion  :  dr.  500  ;  le  25  dr.  400 
cela  fait  drachmes  3680 

19* 


144  Eugène  et  Victor  Revillout. 


Ce  sont  bieu  les  mêmes  éléments  que  dans  la  troisième  colonne  du  papyrus  du  Louvre; 
et  les  époques  sont  précisées.  Ce  compte  en  partie  double  ne  porte  que  sur  un  espace  d'un 
mois  et  sept  jours.  Dans  le  calendrier  égyptien  le  mois  de  Phaménoth  précède  Pharmouthi 
et  le  mois  de  Pacbous  lui  succède.  Or  c'est  le  24  Phaménoth  de  Tau  22  du  roi  Ptolémée 
Philométor  que  ce  compte,  arrêté  le  l*^""  Pachons,  s'était  ouA^ert  par  la  remise  de  mille  drachmes 
faite  directement  par  Ptolémée  à  Apollonius.  Ce  qui  vient  immédiatement  après,  c'est  un 
second  versement  direct  qui  avec  ce  premier  constitue  une  somme  de  2180  drachmes.  Quant 
à  ceux  qui  furent  opérés  par  l'intermédiaire  d' Armais,  l'un  de  600,  l'autre  de  400  drachmes 
étant  ici  classés  d'après  leurs  dates,  ils  se  trouvent  être  séparés  par  la  mention  du  prix  de 
vente  d'un  othoniou.  Il  n'y  a  pas  d'autres  différences  entre  cette  partie  du  pajiyrus  de  Leyde 
et  la  colonne  correspondante  du  papyrus  de  Paris. 

Voyons  maintenant  le  compte  des  dépenses  dans  ce  même  papyrus  de  Leyde.  Il  y  est 
également  classé  d'après  les  dates,  non  d'après  les  espèces;  les  achats  de  blé,  ceux  de  papyrus, 
etc.,  s'y  trouvent  entremêlés;  mais  il  ne  sera  pas  difficile  d'y  retrouver  le  détail  de  tous  les 
éléments  qui  figurent  dans  les  deux  colonnes  correspondantes  du  papyrus  du  Louvre.  La 
longueur  des  lignes  du  texte  grec  ne  permettant  pas  de  mettre  le  français  en  regard,  nous 
avons  pensé  que  le  mieux  serait  de  diviser  la  traduction,  qui  ne  diffère  pas  foncièrement  de 
celle  de  M.  Leemans,  en  alinéas  correspondant  chacun  à  une  seule  et  même  date. 

AnOAADNIOC         Aoroc 

(DAPMOYei  Â  CITOY  tp  A  Ir  C  N 

(n)AnY(P)OYC  IrPN  RAPA  TAAOYTEK*"^^ 

2f  A  I^T  IT  CITOY   C-.    1^P2  CITOY  tp  B  KDH 

KZ  X  I  IrHE  Kë  CITOY  X  A  IrCA 

EP(COjNI  C-  (E)MOI   lrP(^Z  .  .  .)  nAHYPOYC  UT! 

E(MOI  .  .  .1    IrCK  TAAOYTEI  UCM  THI  KH  KAI  KG 

TEAOC  ANHAOMATGÛN  HANTUN  CITOY  KAI  OYONIUN  TOY  <DAPMOVei 

r  fexo 

Apollonius  —  compte 

Pharmouthi  le  1",  de  blé  une  artabe  :  drachmes  250;  de  papyrus  :  drachmes  150 

(^acheté)  à  Taloutis  une  artabe  :  drachmes  300 

le  13,  de  blé  une  demi  (artabe)  :  drachmes  160;  de  blé  deux  artabes  :  drachmes  580 

le  27,  dix  chœnices  :  drachmes  85 

le  29  de  blé  30  chœnices  :  drachmes  230,  à  Her  .  .  .  1/2  pour  moi  drachmes  cent  .... 
papyrus  drachmes  310;  (pour  moi)  ....  drachmes  220 

à  Taloutis  drachmes  240  le  28  et  le  29 

fin  de  toutes  les  dépenses  en  blé  et  aliments  du  mois  de  Pharmouthi 
cela  fait  2670. 

Comparons  maintenant  ces  données  avec  celles  de  la  première  colonne,  à  droite,  du 
texte  du  Louvre. 


Comptes  du  Sérapéibi.  145 


Pour  les  achats  de  papyrus  celle-ci  portait  successivement  les  sommes  de  150;  70; 
240  drachmes.  Le  texte  de  Leyde  marque  à  la  date  du  1"  Pharmouthi  150  drachmes;  et  à 
la  date  du  29,  310  drachmes,  c'est-à-dire  le  total  dune  acquisition  de  70  drachmes  et  dune 
autre  de  250. 

Relativement  aux  céréales,  dans  celui  de  Paris  nous  trouvons  avant  le  seul  quantième 
qui  soit  indiqué,  le  13  d'un  mois  indéterminé,  une  artabe  de  blé  coûtant  deux  cents  cinquante 
drachmes  et  une  autre  artabe  coûtant  trois  cents  drachmes;  puis,  à  la  suite  de  ce  quantième, 
viennent  une  demi  artabe  au  prix  de  cent  soixante  drachmes,  2  artabes  au  prix  de  580  drachmes, 
10  chœnices  à  80  drachmes.  30  chœnices  à  230  drachmes.  Dans  celui  de  Leyde,  la  mention 
du  quantième  du  13  Pharmouthi  est  également  précédée  de  l'évaluation  d'une  première  artabe 
à  250  drachmes  et  dune  autre  arta])e  à  300  drachmes,  puis  viennent  de  même,  ce  jour-là, 
nue  demi  artabe  à  160  drachmes,  2  artabes  à  580;  ensuite  dix  chœnices  dont  le  prix  cette 
fois  serait  porté  à  85  drachmes  au  lieu  de  80  et  30  chœnices  coûtant  230  drachmes  comme 
dans  le  papyrus  du  Louvre. 

Reste  dans  le  papyrus  du  Louvre  le  rehquat  payé  à  Taloutis  dont  l'évaluation  a  varié 
à  deux  reprises.  On  voit  dans  le  papyrus  de  Leyde  que  ce  reliquat  a  été  payé,  au  moins 
en  deux  fois,  le  28  et  le  29,  ce  qui  pourrait  expliquer  dans  une  certaine  limite  ces  hésitations 
de  mémoire.  La  somme  qu'inscrit  Apollonius  est  celle  que  Ptolémée  avait  d'abord  inscrite 
avant  sa  double  correction. 

Jusqu'ici  tout  est  parallèle.  Mais  dans  le  papyrus  de  Leyde,  nous  ti-ouvons  en  outre 
deux  mentions  que  celui  du  Louvre  ue  portait  pas.  Ce  sont  deux  payements;  et  pour  l'un 
d'eux  au  moins  Apollonius  dit  expressément  l'avoir  fait  en  sou  propre  nom  (si^-oc).  Ces  payements 
sont-ils  relatifs  à  des  acquisitions  de  blé  ou  d'autres  substances  alimentaires?  C'est  plus  que 
probable  puisque  Apollonius,  avant  d'établir  le  total,  déclare  qu'il  s'agit  là  de  l'ensemble  complet 
des  dépenses  du  mois  de  Pharmouthi  tant  pour  le  blé  que  pour  les  autres  vivres.  Malheu- 
reusement le  texte  paraît  avoir  soufiFert  à  cet  endroit,  nous  ne  possédons  pas  de  facsimile  et 
M.  Leemaxs  n'a  rétabli  que  d'une  manière  très  dubitative  les  premiers  mots  de  ces  deux 
lignes.  En  ce  qui  touche  le  montant  des  deux  sommes  versées  en  son  propre  nom  par  Apollo- 
nius, celui  de  la  dernière  paraît  seul  certain  :  il  est  de  220  drachmes.  Quant  à  celui  de  la 
première,  31.  Leemans  le  figure  par  un  P  suivi  d'un  Z,  puis  d'un  B,  puis  d'une  sorte  de  ligne 
brisée  se  terminant  par  un  trait  droit  comme  le  dernier  jambage  d'un  N.  Or  le  total  ne  porte 
pas  de  nombre  inférieur  aux  dizaines,  ce  qui  exclut  la  possibilité  d'un  B  représentant  deux 
drachmes;  et  ce  qui  nous  paraît  le  plus  probable,  eu  l'absence  de  farsimile,  c'est  de  supposer 
une  surcharge  remplaçant  un  chitire  par  un  autre,  qui  seul  comptait.  D'ailleurs  la  lettre- 
chiôre  Z  formerait  un  nombre  trop  fort  pour  le  total,  lequel  ne  dépasse  que  de  360  drachmes 
celui  des  sommes  versées  au  nom  de  Ptolémée,  tandis  que  162  ajoutées  à  220  auraient  fait 
382  drachmes. 

Quoi  qu'il  eu  soit,  il  faut  remarquer  que  le  compte  d'Apollonius  dans  le  papyrus  de 
Leyde  ne  se  termine  point  par  une  balance  comme  celui  de  Ptolémée  dans  le  papyms  du 
Louvre.  C'est  un  mémento,  eu  partie  double,  d'uue  certaine  catégorie  de  sommes  reçues  et 
dune  certaine  catégorie  de  sommes  dépensées.  Les  recettes  portées  ici  proviennent  toutes  de 
Ptolémée,  les  dépenses  sont  toutes  relatives  à  des  substances  alimentaires;  mais  la  distinction 


146 


Eugène  et  Victor  Reyillout. 


n'y  est  pas  faite  eutre  les  dépenses  personnelles  et  celles  qui  résultaient  de  laccomplissement 
du  mandat  donné  par  Ptolémée. 

Mais  une  question  se  pose.  Pour  qu'Apollonius  pût  se  permettre  de  payer  indifférem- 
ment avec  les  sommes  qu'il  avait  en  main  les  acquisitions  de  sou  frère  et  les  siennes  propres, 
il  eût  fallu  qu'il  eût  de  l'argent  à  lui,  en  dehors  de  ce  qu'on  lui  confiait.  Or  à  cette  date, 
il  n'avait  pas  encore  été  admis  dans  la  milice;  il  ne  possédait  pas  d'emploi  permanent  et 
lucratif.  Nous  le  voyons  surtout  alors  faire  les  commissions  de  Ptolémée  et  des  deux  prêtresses 
jumelles  dont  Ptolémée  s'était  constitué  le  tuteur,  vivant  dans  le  temple  auprès  de  son  frère 
le  reclus,  sans  exercer  aucune  profession.  Pouvait-il  dans  ces  conditions  avoir  des  ressources 
personnelles,  encaisser  des  recettes  dont  il  fût  dispensé  de  rendre  compte? 

On  dirait  vraiment  qu'il  a  prévu  des  doutes  de  ce  genre  et  qu'il  a  tenu  à  les  dissiper 
pour  la  période  de  temps  en  question,  car  il  a  fait  dresser  par  son  frère,  comme  le  prouve 
l'écriture,  le  compte  détaillé  de  ce  qu'il  a  reçu  en  monnaie  de  cuivre,  probablement  pour 
prix  de  ses  services  loués  occasionnellement  pour  un  jour  ou  pour  quelques  jours,  pendant 
les  deux  mois  de  Phaménoth  et  de  Pharmouthi  de  l'an  22  de  Ptolémée  Philométor. 

Ce  compte  forme  la  première  colonne  du  papyrus  du  Louvre  qui  porte  le  n°  57  dans 
la  publication  académique. 


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Au  22  Phaménoth 

12,  Pour  Apollonius  —  compte 

de  ses  chalques 

le  13  drachmes  105 

le  14  drachmes  100 

le  15  drachmes  100 

le  25  drachmes  130 

cela  fait  jusqu'au  30  Phaménoth  dr.  435 

Pharmouthi 

le     2  drachmes  170 

le     4  drachmes  240 

le     6  drachmes  200 

le     7  drachmes  240 

le  16  drachmes  200 

cela  fait  jusqu'au  16  Pharmouthi  dr.  1050 

Pachons 

le  1"  drachmes  230 


C'est  le  12  Phaménoth  qu'Apollonius,  tout  fier  de  constater  qu'il  gagnait  de  l'argent, 
s'était  fait  ouvrir  ce  compte  à  lui-même.  Il  n'avait  pourtant  rien  reçu,  rien  à  recevoir  ce 
jour-là.  Mais  il  avait  loué  ses  services  pour  les  jours  suivants,  et  en  conséquence,  dès  le  lende- 
main, pour  une  première  journée  il  touchait  105  drachmes,  le  surlendemain,  pour  une  autre, 
100  drachmes,   et  le  troisième  jour  encore   100  drachmes.   Après  cela,  la  série  s'arrête  et 


'  Lettre  douteuse  :  ce  qvi'on  voit  peut  être  le  premier  jambage  d'un  N  ou  un  |. 


Comptes  du  Sérapéum.  147 


jusqu'à  la  fin  du  mois  de  Phaménoth  Apollonius  ne  gagna  plus  que  130  drachmes,  le  25, 
juste  le  lendemain  du  jour  où,  d'après  le  papyrus  C  de  Leyde,  son  frère  Ptolémée  lui  avait 
versé  directement  une  somme  de  1000  drachmes  destinée  à  divers  achats.  Ce  mandat  fut 
en  partie  rempli  le  1"  Pharmouthi,  jour  où  Apollonius  dépensa  700  drachmes  tant  en  papjTUS 
qu'en  artabes  de  blé. 

Mais  déjà  dans  cette  même  journée  recommençait  une  période  d'occupation  lucrative, 
la  plus  longue  dont  il  soit  mention  dans  ce  document,  période  qui  diffère  de  la  précédente  en 
ce  que  le  payement  des  salaires  ne  s'y  faisait  plus  en  général  que  de  deux  jours  l'un  :  c'est 
ainsi  que  d'abord  se  suivent  les  dates  du  2,  du  4,  et  du  6.  A  la  première,  la  somme  reçue 
n'est  que  de  170  drachmes,  moins  du  double  du  prix  moyen  d'une  journée  de  travail;  mais 
c'est  que  la  journée  du  1"  Pharmouthi,  consacrée  en  partie  à  l'accomplissement  du  mandat  de 
Ptolémée,  ne  pourrait  être  comptée  entière  dans  le  règlement  avec  quelque  autre;  le  4,  en 
revanche,  la  somme  est  de  240  drachmes;  le  6,  de  deux  cents  drachmes,  prix  minimum  de 
deux  journées  de  travail.  Puis  le  payement  d'une  journée  double  figure  par  exception  un 
jour  impair,  le  7;  mais  comme  c'est  le  dernier  de  cette  série,  il  est  probable  qu'Apollonius 
avait  obtenu  cette  fois  d'être  en  partie  soldé  d'avance. 

Notons  que  ses  occupations  ne  devaient  pas  l'écarter  beaucoup  du  Sérapéum,  car  durant 
cette  période  de  louage  de  ses  services,  il  avait  pu,  le  5  Pharmouthi,  aller  voir  son  frère 
dans  sa  cellule  et  en  recevoir  directement  un  nouveau  versement  de  1180  drachmes. 

Nous  n'avons  aucun  renseignement  sur  les  journées  du  9,  10  et  11  Pharmouthi.  Le  12, 
Apollonius  s'occupait  pour  son  frère  de  la  vente  d'un  othonion,  et  il  en  recevait  600  drachmes 
par  l'intermédiaire  d'Armais;  le  13  il  achetait  pour  le  même,  d'une  part  une  demi-artabe  et 
d'une  autre  part  deux  artabes  de  blé;  le  15  et  le  16,  il  gagnait,  pour  deux  journées  de  tra- 
vail, 200  drachmes.  Depuis  lors,  chômage  apparent  d'un  demi-mois  :  Apollonius  ne  gagne  rien 
jusqu'au  1*""  du  mois  de  Pachons.  Mais,  vers  la  fin  de  Pharmouthi,  nous  le  voyons  encore 
occupé  comme  mandataire  de  son  frère.  Le  25,  il  en  avait  reçu  400  drachmes  par  l'inter- 
médiaire d'Armais.  Les  27,  28  et  29,  il  achète  pour  lui  du  blé  et  acquitte  une  ancienne  dette. 
Enfin,  le  1"  de  Pachons,  date  des  papyrus  n°  58  et  n°  57  de  la  publication  académique,  il  rend 
à  Ptolémée,  d'un  même  coup,  ses  comptes  pour  tout  l'ensemble  de  son  mandat  actuel,  pour  ces 
trois  périodes  de  recettes  suivies  de  dépenses;  et  la  balance  une  fois  étabUe,  il  lui  verse  le 

reliquat. 

(La  suite  à  nu  prochain  numéro.) 


NÉCEOLOGIE  ET  NOUVELLES. 

Depuis  notre  dernier  numéro  nous  avons  le  regret  d'avoir  à  enregistrer  la  mort  de  notre  cher  ami 
et  collaborateur  M.  François  Lenormant,  de  l'Institut,  ainsi  que  de  M.  Richard  Lepsius,  l'éminent  égypto- 
logue  de  Berlin,  et  de  M.  Albert  Dumont,  d'après  la  copie  duquel  nous  publions  dans  ce  fascicule  même 
le  papyrus  Sakkakini. 

M.  Maspeko  a  été  élu  membre  de  l'Académie  des  Inscriptions.  Un  autre  égyptologue  s'était  présenté 
avant  lui,  mais  il  a  retiré  sa  candidature,  pour  que  celui  qui  doit  représenter  l'influence  française  en  Egypte 


148  Eugène  Revillout.  —  Bibliographie. 

eût  tout  le  prestige  nécessaire.  Par  semblable  raison  tous  les  candidats  s'étaient  autrefois  retirés  devant 
Mariette-Pacha. 


BIBLIOGEAPHIE. 

Nous  ne  pouvons  indiquer  aujourd'hui  qu'une  faible  partie  des  livres  reçus  par  nous.  Signalons 
d'abord  le  beau  Ouîde  au  Musée  de  Boulaq,  publié  par  M.  Maspero;  le  premier  numéro  de  la  Eevue  d'Assy- 
riologie  de  MM.  Offert  et  Ledrain,  revue  à  laquelle  nous  souhaitons  tout  le  succès  possible;  \qs  Monumenti 
egiziani  del  campo  Marzio  de  notre  cher  collègue  et  ami  Schiaparelli,  un  très  intéressant  travail  sur  les  pyra- 
mides et  plusieurs  autres  brochures  du  même  auteur;  L'Ethiopie  au  temps  de  Tibère  et  Die  ugyptische  Kunst 
du  docteur  Alfred  Wiedemann;  Les  actes  du  congrès  des  orientalistes  de  Leyde;  Les  papyrus  du  Lac  Mœris 
et  du  lahyrinthe,  par  le  docteur  Pleyte;  les  ouvrages  intitulés  :  Skizze  der  altagyptischen  Litei-atur,  von 
Dr.  Alfred  Lincke;  Transcrizione  di  U7i  codice  copto,  del  prof.  Francesco  Rossi;  Die  Unterweisung  des  K'ônigs 
Amenemhat  I",  du  comte  de  Schack-Schackenbourg  ;  Aegyptische  Lesestiicke  (2®  partie),  par  le  docteur  Oscar 
DE  Lemm;  Die  dgyptischen  Langenmasse^  du  regretté  professeur  Lepsius;  un  autre  travail  très  important  du 
même  maître  sur  les  mesures  de  longueur  égyptiennes  et  grecques  :  Die  Ldngemnasse  der  Alten;  un  très 
bon  travail  sur  la  géométrie  de  l'ancienne  Egj^pte  publié  dans  les  recueils  de  l'Académie  des  sciences  de 
Vienne  par  M.  le  Dr.  Weyr,  membre  de  cette  académie.  M.  Weyr,  parfaitement  au  courant  de  toutes  les 
récentes  découvertes  de  l'égyptologie,  y  résume  avec  la  plus  grande  netteté  ce  qui  est  actuellement  connu 
sur  cette  branche  de  la  science  antique.  Nous  sommes  heureux  de  constater  que  ce  savant  approuve  expressé- 
ment et  adopte  pleinement  notre  manière  de  voir  sur  les  calculs  du  papyrus  mathématique  se  rapportant  à 
la  construction,  des  pyramides,  etc.  :  La  coudée  égyptienne,  par  M.  Rodenbach  de  Bruxelles-,  divers  autres 
travaux  métrologiques  dans  lesquels  MM.  Bortolotti  et  Aukès  développent  leurs  essais  précédents.  Ce  sont 
de  bons  mathématiciens.  Mais  j'ai  déjà  protesté  et  je  protesterai  toujours  contre  la  méthode  qui  consisterait 
à  vouloir  corriger  d'après  l'idéal  mathématique  ce  qui  est  fourni  positivement  par  les  documents  contem- 
porains. Parmi  les  travaux  qui  demandent  une  sérieuse  étude  au  point  de  vue  égyptologique,  étude  que 
le  défaut  d'espace  nous  force  de  remettre  à  plus  tard,  nous  mentionnerons  encore  :  Les  notes  sur  une  collec- 
tion égyptienne,  par  M.  le  vicomte  Jacques  de  Rougé;  Der  geschnitzte  Holzsarg  des  JTatbastru,  par  notre  cher 
ami  M.  le  professeur  Ebers,  livre  sur  lequel  noiis  reviendrons.  Nous  reviendrons  également  sur  diverses  publi- 
cations des  docteurs  Krall  et  Lagarde,  mais  d'une  toute  autre  manière.  Et  d'abord  M.  Lagarde  ne  pouvait 
ignorer  en  publiant  les  Aegyptiaca  qu'il  reproduisait  plusieurs  des  textes  publiés  par  moi,  puisque  je  les  lui 
ai  remis  en  mains  propres  dans  mon  cabinet,  quand,  il  y  a  plusieurs  années,  il  est  venu  m'apporter  quelques 
opuscules  et  m'inonder  de  ses  éloges.  Lors  donc  qu'il  les  réimprime  avec  quelques  variantes,  que  j'appré- 
cierai, sans  indiquer  ce  fait,  il  commet  un  plagiat  volontaire.  Quant  à  Krall,  pour  lequel  j'ai  été  si  bon 
et  auquel  j'ai  donné  des  leçons  privées  gratuites  pendant  un  an  à  ses  ferventes  prières,  ses  plagiats  ne 
se  comptent  plus.  Mais  il  a  de  plus  osé  faire  une  attaque,  inconcevable  d'ignorance,  contre  une  de  mes 
traductions  démotiques  qu'il  n'est  pas  seulement  de  force  à  comprendre  et  à  suivre  sur  le  texte,  malgré 
mes  transcriptions,  mes  références  hiéroglyphiques,  coptes,  lexicographiques ,  etc.  Je  n'ai  qu'à  renvoyer 
d'ailleurs  à  ce  que  je  dis  à  ce  sujet,  p.  93  et  suivantes,  dans  mon  volume  qui  paraît  en  ce  moment  même  à 
la  librairie  Leroux  et  qui  est  intitulé  :  «Le  poème  satyrique  composé  à  l'occasion  de  la  maladie  du  poète 
musicien  hérault  d'insurrection  Hor  Ut'a  (ApuwGr);),  cours  professé  à  l'école  du  Louvre  pendant  l'année 
1883—1884.  » 

L'Éditeur  Ernest  Leroux,  Propriétaire-Gérant. 


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REVUE  ÉGYPTOLOGIQUE 

FONDÉE 
SOUS    LA   DIUECTIOIS^   I3E 

MM.  H.  BRUGSCH,  F.  CHABAS,  EUG.  REVILLOUT. 


ERNEST  LEROUX,  EDITEUR 

LIBRAIRE  DE  LA  SOCIÉTK  ASIATIQUE,  DE  L'ÉCOLE  DES  LANGUES  ORIENTALES  VIVANTES,  ETC.  ETC. 

28,  RUE  BONAPARTE,  28,  A  PARIS. 

IIP  Volume.  N«  IV.  1885. 

ha  REVUE  ÉGYPTOLOGIQUE  parait   tous   les  trois  mois  par  numéros   de   six  feuilles   au   vioins,   avec 

planches,  fac-similé  etc.   —  Aucun  numéro  ne  se  vend  séparément. 

Prix  (le  l'abonnement  annuel:    Paris  30  fr.  —  liéiiartements  31  fi-.  —  li^triinf/er  32  fr. 


Sommaire  :  1°  Le  poème  de  Pentaour  (J.  de  RocgÉ).  —  2°  Lettre  à  IL  Revilloct  sur  les  contrats  grecs  du  Louvre  provenant 
de  Faioum  (C'H.  Wessely).  —  .3°  Les  droits  des  femmes  dans  l'ancienne  Chaldée  (Victor  Revillout).  —  4°  L'im- 
pôt sur  les  maisons  d'après  un  papyrus  grec  inédit  :  British  Muséum,  n°  L,  ancien  Sait  967  (E.  Revillout).  — 
5°  Une  adoption  par  manicipation  sous  le  régne  d'Amasis  et  les  divers&s  formes  de  manicipations  relatives  à  des  êtres 
humains  (E.  Revilloct).  —  6°  Bibliographie  (E.  R.). 


LE  POÈME  DE  PENTAOUE. 

PAR 

LE  Vicomte  J.  de  Rougé. 

Le  poème  écrit  par  le  scribe  Pentaour  en  l'honneur  des  victoires  de  Ramsès  II  en  Asie 
est  désormais  rangé  parmi  les  morceaux  classiques  de  la  littérature  égyptienne  :  l'allure  géné- 
rale de  la  composition,  la  pureté  du  langage,  l'élévation  des  idées  lui  ont  mérité  à  juste  titre 
cet  honneur,  Pentaour,  de  son  vivant,  put  d'ailleurs  jouir  de  la  réputation  attachée  à  son 
œuvre,  car  on  la  jugea  digne  d'être  gravée  à  de  nombreux  exemplaires  sur  les  murailles  des 
temples  et  reproduite  sur  les  papyrus.  A  Karnak,  sur  la  façade  du  sud,  Champollion  avait 
déjà  pu  en  signaler  de  grands  fragments  que  M.  Brugsch  publia  en  1862  '.  Mon  père, 
pendant  sa  mission  en  Egypte,  fit  complètement  déblayer  cette  muraille,  ce  (pii  permit  de 
copier  l'inscription  entière'-^.  Deux  autres  exemplaires  du  même  texte  étaient  gravés  sur  les 
façades  du  pylône  de  Louqsor  :  sur  celle  du  midi  les  constructions  4:Ies  fellahs  cachaient,  lors 
de  notre  voyage,  la  ranjeure  partie  de  ce  texte  d'ailleurs  en  fort  mauvais  état  :  le  déblaiement 
du  temple  de  Louqsor  entrepris  par  M.  Maspero  permettra  d'en  recueillir  les  débris  l  La  façade 
septentrionale  du  même  temple  en  présentait  une  troisième  copie  :  mais  de  ce  côté  l'en- 
fouissement du  pylône  en  avait  rendu  jusqu'alors  la  copie  impraticable  :  M.  Mariette  ayant 
bien  voulu  le  faire  dégager  pendant  notre  séjour,  nous  pûmes  également  la  copier  et  elle  fut 
publiée  dans  mon  quatrième  volume  d'inscriptions',  sauf  la  fin  des  dernières  ligues  qu'une 

'  Beugsch,  Monuments,  pi.  XXIX  et  suiv.  18G2.  Sa  publication  commence  à  la  ligne  29  du  texte  complet. 

-  Voy.  J.  de  Eougé,  Inscriptions  liiérorjlyphiques,  pi.   CCVI  et  Suiv. 

^  Voy.  Brugsch,  Monuments,  pi.  LUI,  pour  une  partie  de  ces  fragment.s. 

■•  Voy.  J.  DE  Rougé,  Inscriptions,  pi.  CCXXII  et  Suiv. 

20 


150  J.    DE    ROUGÉ. 


«onstructiou  voisine  empêchait  de  déblayer.  Enfin  le  papyrus  Sallier  u°  3^  publié  dans  la  col- 
lection des  papyrus  du  British  Muséum  ',  est  venu  donner  une  quatrième  version  de  ce  mor- 
ceau célèbre;  le  début  manquait  dans  ce  papyrus  :  mon  père  eut  le  bonheur  de  retrouver 
dans  la  collection  Raifet  une  page  du  même  manuscrit,  celle  qui  précédait  immédiatement 
la  première  page  du  papyrus  Sallier,  dont  il  ne  reste  aujourd'hui  d'inconnu  que  le  premier 
feuillet  -. 

La  première  traduction  du  poème  de  Pentaour  fut  celle  que  mon  père  lut  à  l'Institut 
en  1856  3;  elle  avait  été  faite  sur  le  texte  du  papyi-us  Sallier,  fautif  ou  incomplet  sur  différents 
points.  Depuis  cette  époque,  différents  auteurs  ont  publié  des  traductions  courantes  de  ce  texte 
capital.  Mon  père  lui-même  en  donna  une  nouvelle  traduction  eu  1870  dans  le  premier 
fascicule  du  Recueil  de  travaux  relatifs  à  la  philologie  et  à  l'archéologie  égyptiennes  et  assy- 
riennes (Paris,  F.  Vieweg  édit.X  Dans  le  préambule  de  cette  traduction  il  disait  :  «Ayant 
»  éprouvé  par  nous-même  que  l'étude  comparée  de  ces  textes  divers  est  une  excellente  école, 
»nous  avons  le  projet  de  donner,  dans  la  première  livraison  de  notre  Chrestomathie  qui 
«suivra  la  grammaire,  une  édition  où  tous  ces  fragments  seront  mis  en  regard  du  texte 
»  hiératique,  transcrit  en  hiéroglyphes.»  Sa  fin  prématurée  ne  devait  pas  lui  permettre  de 
remplir  cette  promesse.  Je  viens  aujourd'hui  essayer  d'exécuter  son  désir.  N'ayant  pas  pu 
faire  cette  publication  aussitôt  que  je  l'aurais  désiré,  j'avais  en  quelque  sorte  renoncé  à 
l'entreprendre  craignant  qu'elle  n'arrivât  un  peu  tard  :  mais  de  différents  côtés  on  a  bien 
voulu  me  faire  sentir  l'utilité  de  ce  travail  qui  réunira  à  l'œil  les  différents  textes  pouvant 
ainsi  se  compléter  l'un  par  l'autre.  J'ai  particulièrement  cédé  aux  solUcitations  du  savant 
directeur  de  cette  Replie  qui  a  bien  voulu  donner  l'hospitalité  à  mon  travail. 

Aidé  des  notes  prises  au  cours  de  mon  père  au  Collège  de  France,  cours  où  le  poème 
de  Pentaour  servit  de  thème  à  tant  de  leçons  intéressantes,  j'essaierai  de  conserver  religieuse- 
ment ses  explications^.  La  science  égyptologique  a  fait  de  grands  progrès  depuis  15  ans  et 
en  passant  il  me  faudra  noter  les  changements  de  lecture  ou  de  traduction  qui  ont  pu  se 
produire  grâce  aux  découvertes  nouvelles  :  mais  en  étudiant  à  nouveau  cette  traduction 
ancienne,  j'ai  pu  me  convaincre  encore  une  fois  à  quel  point  le  jugement  du  traducteur  était 
sûr  et  combien  la  prudence  de  sa  méthode  le  mettait  à  l'abri  de  corrections  postérieures. 
Dans  cette  publication  seront  conservées  la  plupart  des  remarques  qui  accompagnaient  l'ex- 
plication du  texte  :  un  certain  nombre  de  ces  annotations  paraîtront  peut-être  inutiles,  parceque 
aujourd'hui  elles  sont  entïées  dans  le  domaine  de  la  science  ég3'ptologique  :  toutefois  il  m'a 
paru  utile  de  les  conserver,  soit  pour  donner  la  date  de  leur  apparition  dans  la  science,  soit 
parcequ'elles  peuvent  être  utiles  aux  débutants  dans  l'Égyptologie.  Je  serai  heureux  si  ce  travail 
dont  je  sens  toute  la  difficulté  et  que  je  n'entreprends  pas  sans  crainte,  peut  rendre  quelques 
services  :  c'est  là  toute  mon  ambition. 

1  Select.  Papy  ri,  etc.  1841,  pi.  XXIV. 

^  Cette  page  du  papyrus  est  exposée  au  Louvre  dans  la  1^  salle  du  Musée  Charles  X. 

^  Le  poème  de  Pentaour.  Extrait  d'un  mémoire  sur  les  campagnes  de  Eamsès  II,  lu  dans  la  séance 
publique  des  cinq  académies  le  14  août  1856.  Paris,  F.  Didot.  1856. 

*  J'ai  employé  le  système  de  transcription  dont  s'était  toujours  servi  mon  père  à  son  cours  :  il  cor- 
respond d'ailleurs  à  celui  de  sa  grammaire  égyptienne,  à  laquelle  j'aurai  occasion  de  renvoyer  souvent  le 
lecteur. 


Le  poème  de  Pentaour. 


151 


Louqsor.  Lipe  1, 
Karnak  1. 


m. 

hâ     em  ' 
Commencement 


p-veytu      suten  '/jxhyT\     Ra-iiser-ma-sotep-n-ra - 
fies  victoires  du  Roi  de  la  Haute  et  Basse  Egypte 


L.  1. 
K.  1. 


o 


mmi  A  f 


mÈmmmmmmim.. 

se  râ     Amen-meri  Râmses  ta      âiv/        t'eta         àr-nef  em         pe-ta  n 

fils  du  soleil,    Ramsès-Meriamen ,  doué  de  vie  éternelle,     (qu')  il  a  remportées  sur  le  pays 


L.  1. 
K.  1. 


Sd 


I   Ll       AA/V\AA 


Xeta  Naharin    pe  (Aruna)     Pitasa 

de  Klieta,    le  Naliaraïn,       (Ilioun),        Pidasa, 


em 
sur 


p-  Tartenai 
le  Dardani, 


L.  1. 
K.  1. 


em. 
sur 


AAA/WA 

pa-ta         n 
le  pays       de 


Masa 
Masa, 


evi        p-ta  n 
sur      le  pays  de 


(K)ar(k)isa, 
Karkischa, 


L.  2. 
K.  2. 


(Kai'uatan),      Kifr)kam(is 
(Katzouatan),         Karkemisch, 


Katl^ 
Kati, 


(Anaukai)  ^ 
(Anaoukas), 


em 
sur 


L.  2. 
K.  2. 


K^  (lU 


AAA/V/»A 

I  1       Lj::.J1j  /^aaa/na 


si 


D 


p-ta  n 
le  pays 


Akarit 
d'Akarit, 


Mmanaftj, 
Muschenet. 


(SutenJ 
Le  roi 


renpu 
jeune 


'  Ha-em.  Locution  pour  :  '< Commencement  de».  Le  Livre  des  mort.1  débute  par  : 


5 


A   J 


Commencement  des  chapitres  de  sortir  dans  le  jour». 
-  Râ-user-mci-sotep-n-Rn,  mot-à-mot  :  «Soleil,  seigneur  de  justice,  choisi  par  le  dieu  Râ».  —  La  valeur 
user  pour  le  signe    j  est  prouvée  par  les  variantes  du  nom  du  roi  Userkerhi  écrit  :    |  j     j  O,    \\  j    '  <^i:> 
etc.,    I    I  etc. 

^  La  lecture  kat  pour  le  signe  \L  qui  était  donnée  comme  douteuse,  est  généralement  adoptée  aujour- 
d'hui (v.  Brugsch,  Dictionnaire).  (J.  R.j 

^  Les  énumérations  des  mêmes  peuples  vaincus  qui  se  renouvellent  dans  la  suite  du  texte,  permettent 
de  remplir  les  lacunes  tle  cette  première  liste.  Nous  reviendrons  plus  loin  sur  l'identification  de  ces  peuples. 

20* 


152 


J.    DE    EOUGÉ. 


L.  3. 
k.  2. 

L.  3. 
K.  3. 

L.  3. 
K.  3. 

L.  4. 
K.  3. 


A 


^^ 


^^ 


*^.«=^  _Zl  o    W  i; û 


A         I 

'per  (tôt)  àn-ti  sen-^f  :  yopesul-f'~         usur  cib-f  umeti'-^ 

étend  le  bras,    pas  de  second    à  lui  :      ses  bras    (sont)  puissants,     son  cœur  (est)  ferme. 


Lacune  d'environ 
une  ligne  dans 
les   deux   textes. 


m 

feli-ti^-f  ma  mentu      em 

Son  courage  (est)  comme    Mont       dans  (les  combats). 


an  7-ey-tic  ^^P'f       '/firau  sebti         t'ei'^' 

pas  connus.     Il  commence  le  combat,     (c'est)  une  muraille  solide 


her  tes'"  ...  t 
vers  des  pays 


liai-sen 
Leur 


Karau''  hru  n  yeràu'*         t'au''^ 

bouclier         le  jour    du  combat,  (quand)  il  saisit 


pet  an  mà-ti-f 

l'arc,         pas  de      semblable  à  lui. 


1  1 1  D,  sen,  variante  :   Il     ^  copte  :  chô^t,  duo.  «Il  n'a  pas  son  égal». 

2  Xopes-ui,  qui  signifie  d'ordinaire  les  membres  antérieurs  d'un  quadrupède,  a  également  la  valeur 
de  bras.  Cf.  u}6jnu},  U]ù)£iu],  brachium. 

3  Umeli.  La  valeur  met  pour  le  phallus  est  établie  depuis  longtemps.  Les  deux  doigts  sont  habituel- 
lement le  déterminatif  du  sens  :  milieu;  ici  ils  ne  font  qu'affirmer  la  lecture  mati,  qui  est  celle  du  mot 
milieu.  —  Umeti  au  sens  propre  signifie  :  mur,  muraille;  cf.  otoj*.tc,  arces,  turres;  d'où  au  figuré  :  solide, 
ferme.  «Son  cœur  est  ferme»,  locution  pour  être  brave. 

'  Peh-ti,  vaillance.  Horapollou  transcrit  ce  groupe  par  :  àXarjv.  «Son  courage  est  comme  celui  du  dieu  Mont». 

5  Tes.  L'inscription  d' Una  a  donné  pour  le  signe  Q:£^,  dans  le  sens  de  région,  le  phonétique 
ou  tes.    De  là  :  touj,  limites,  fines,  7-eç/io,  -eoirc,    extrémités.    (E.    de  Rougé,    Monuments   qiion  peut 

attribuer  aux  six  premi'-res  dynasties,  etc.,  p.    126.) 

a.    (^       ^ 
^  O,  t'er-uu  signifie  à  lui  seul  murailles,  mais  dans  le  sens  d'enceinte,  ce  mot  ayant  la  ^'aleur 

de   circonférence.   Cf.  acoi,  accu,  murus.  Mais  il  y  a  un  mot    -"^  t'eruu,  qui   semble  signifier  :  fort, 

puissant.   Cf.  atoop,  fortis,   2£-op,  fortitudo,  munitus.  Ainsi  au  pap.  Boulaq  19,  4  :  «Tu   remplis  ta  main  de 

toutes  les  fleurs  que  ton  œil  remarque»  7a\      -<f>^     ^   1  rC\    M  <==>  i  ©  1  i\ 

^r^^i    .^ a     n^tk  — ^  (S     (3(3    J^%^_Bï^1  J^l  I  I  I       <=:>^ — ûin  ii    ()<=>^\ 

\^     \\  >U— li-  ïîsX    "W        \i>.  «Ponens  debilem  ex  îllis ,   ita  ut   rohustiores    (sorte    honû)   ne  décidant». 

C'^   Jf^  _BS^  U  X  _ttK>   A  I    I    I 

■'  Karciu,  bouclier  :  (t\  scutum.  Cf.  Inscr.  de  Ménephtah  : 

«La  main  du  dieu  est  avec  eux  :  Ammon  est  derrière  eux  comme  leur  bouclier». 
8  Xeràu.  Le  phonétiijue  de  Q^  est  rarement  exprimé,  c'est  :  [1  Q,^  yeràu.  Cf.  ScAïaipi,  adolescens, 

jeune  combattant  :  àe'A.Ai6uj,  cuirasse  (Aiêiuj,   vêtement). 
3    T'au,   cf.   2C.I,  prendre,  saisir. 


Le  poème  de  Pentaour. 


153 


L.  4. 


K. 


Ken      su  er  liufennu  ^    temet'  •^  iem-u     en  Jjer-f  . 

Puissant  lui  plus  que  des  multitudes  réunies  :  (quand)  il  marche  devant  lui  . 


.    hati 
son  cœur 


L.  5. 
K.  4. 


unu-t 
dans      l'heure    de  frapper       sur    ferme  de  cœur 


L.  -5. 
K.  4. 


ma  ka  hem*  (er  ap-t-iâ)   (Hat)  ta  neh       temet' 

comme  un  taureau  qui  se  prépare  à  charger  (des  oiosV)  (Il  a  repoussé)  le  monde  entier  réuni 


L.  5. 
K.  4. 


J^ 


hu  rex  sa 

On  ne       sait  pas    personnes 


^^^'^Si.^^i. 


J^^ 


ya-u-sen  er       lia-t-f       Imfennu  hntesu 

nombreuses-  devant    lui  :    les  multitudes    ont  défailli 


L.  5. 
K.  5. 


n  ptar-f   neb  senta-u       aa 


1^   m   .  I  I 

hem-hem-t-u  '' 


en  voyant  lui.  Seigneur  des  terreurs  (aux)  grands  rugissements  :  grand  (est)  son  cœur  sur 


Le  phonétique  des  trois  têtards  est  x  '^~w\a,  hufennu.  Dans  le  sens  indéterminé  ce 
mot  signifie  :  des  milliers:  dans  les  calculs  il  représente  les  centaines  de  mille. 


:  signe  du  total  dans  l'addition.  Le  phonétique    ^^  temet'  se  trouve  dans  les  inscriptions 

des  anciens  tombeaux  :  il  n'était  pas  connu.  Cf.  twmt,  occurere,  Ttojw.,  conjungere  simul. 

3  =0».    La  lecture  àh  (I    j  ^  pour  le  cœur  a  été  donnée  par  Bbcgsch  {Zeitschrift,  etc.,  1866,  44);  on 
ne  connaissait  jusqu'alors  que  le  phonétique  hati  ^     t^,  comme  ci-dessus  Louqaor,  1.  5,  initio. 

<©>      -TV  .  ^^ 

*     ^      ^  "^     her,  se  préparer  à,  être  prêt.  Ex.  :  Inscript.  d'Ibsamboul,  Eamsés  II  : 


«Afin  que  ne  se  préparent  pas  les  soldats  de  S.  M.  au  combat.» 
Cf.   Pap.    Sal.    I,   4,    heri   er  yet-au ,  prêt   à   combattre.  —  Her  signifie    aussi   se  précipiter  sur.    (Voyez 
Bbugsch,  Dict.) 

*  «On  ne  connaît  pas  le  nombre  de  ceux  qui  étaient  devant  lui». 
6  hemhem,  rugissements.  Cf.  omom.,  rugitus. 


154 


J.    DE    ROUGÉ. 


L.  6. 
K.  5. 


Lacune   (l"une   demie 
colonne  dans  les  deux 

'XmiXmmm'  testes.  ■,„,,„„ 

m      .  WB. 

ta-u  neb vid 

pays  tout comme 


7nàu       liesi  '   em 
un  lion    furieux  dans 


àn-t 


àaut  2 


la  vallée      des  troupeaux. 


L.  6. 
K.  5. 


m 

utu  em  â htr      an     fut        em 

Il  ordonne pas  parole  contre. 


ti^f^@    V 


menyï 
Excellent 


L.  7. 
K.  5. 


seyei-u 
de  conseils, 


nefer  tep-ret^ 
bon  de  décrets. 


kem-tu 
Etant  trouvé 


em  atef'' 
avec  l'atef 


C3C=l^ 

u^eb  ' 
il  prononce 


L.  7. 
K.  5. 


1116 


!□   mmo 

tep-(ro)^        sut'-'         menfiu-f (ait)  àb-f      ma  tu        en  (banj-pe^'^ 

des  arrêts.  Le  sauveur  des  ses  soldats Est  son  cœur  comme  une  montaarne  de  fer. 


S^ 


Longue  lacune 

dans  les  deux 

textes. 


'   Q  Y    ' -^^  ^'^*-  Brugsch  donne  à  ce  mot  la  valeur  de  :  percer,  foudroyer  du  regard.  La  locution  mau- 

hes,  qui  se  rencontre  souvent  dans  les  textes  voudrait  alors  dire  :  le  lion  au  regard  fulgurant.  (J.  R.) 

-  [1  "^v        I   i-^,  àaut,  troupeaux  de  petite  espèce,  chèvres,  moutons,  etc. 

■'  (ihâ,  contre,  déterminé  par  la  corne.  Cf.  ofic,  ovfic,  advei-sus,  contra. 

*  Menx  :  faire,  fabriquer,    toujours    dans   un    sens    favorable;    ce    mot    est    traduit    en    grec    par   : 
Euspycxr,:. 


Leps.,  Denkm.,  III,  30,  on  trouve  : 


I 


Voici  que  fit  le  roi 


Tep-ret  :  lois,  coutumes,  cérémonies.  La  stèle  d'Antef  au  Louvre  donne  la  variante 

_     -^000  ^erfr.  I   -^ 

tout  nte,  toute  loi,  tout  décret.»  —  Cf  Ton,  consuetudo. 

"  Atef,  diadème  d'Osiris  comme  juge. 

''  useb.  Cf.  oTTtûuiû,  respondere.  «  Quand  il  porte  le  diadème  atef,  il  prononce  des  arrêts.  » 

s  Tep-ro.  (Au  propre  signifie  :  la  bouche.  Cf.  Tek.npo,  os,  Brugsch,  Dict^  Au  figuré  :  paroles,  ordres. 

L'orthographe  complète  est  ^        ^  :  c'est  un  mot  composé  qui  au  pluriel  fait  :  ^  .  Ex.  :  Textes 

de  Gkeene,  1.  18  :  m  / JrNJ]  ^     I     "^  Wr>  ^  Jl .  _  Qn  trouve  également  la  phrase  : 

¥^\.    ,  <=>  SO\  y       I  etc.,  «par  ordre  sorti  de  la  bouche  du  roi.» 

9  mt,  faire  en  général  :  sauver.  (Ce  radical  est  très  riche;  il  signifie  également  :  couper,  séparer,  enlever, 
etc.,  Beugsch,  Bict^ 

n  f\  -in  ooo    A^/w\A 

10  Ba-n-pe.  Orthographe  complète  :    1  (1  ^Q\     X^    bàa-en-pe,  mot- à -mot  :  baaÇi)  du  ciel.  Cf 

ftcnini,  ferrum.  —  Brugsch  {Dict.,  p.  1722)  admet  cette  valeur  :  il  en  fait  le  fer  météorique,  par  opposition 


Le  poème  de  Pentaour. 


155 


L.  8. 
K.  6. 


6',  X  Ra  user  via  setepnra     se  va      Amenmeri  Rânises     tu  ânx  este  r-f  ' 

le  l'oi  fils  du  soleil,  Ramsés  Meriamen,  doué  de  vie  :  voici  que  avait 


L.  8. 
K.  6. 


P^^ûl  VU 


sput/^      en  hori-f        jnf  raevfiu 
préparé    Sa  Majesté     son  infanterie, 


taf-nfe-hetar 
sa  cavalerie, 


Sartlna-u^ 
les  Sîirdiniens,  (qui  étaient) 


L.  8. 
K.  6. 


"w — "      A  -^  I  mmmmmmmmmmmmmmm^k:. ;     ///////////////////, 

en  hak-t  lion-f tu-tu-sen,     tep-ret  ^  en  yeràu        nâ-t        pu  àr  '" 

des  prisonniers    de  8.  M avaient  donné     l'ordre    du  combat,     venue     étant  faite 


L.  9. 
K.  7. 


n  hon-f      (em)     (yu)t'-'  menfiu-f  nie  hetar-f  hnd-f     em 

par  S.  M.,      (en)  descendant      le  fleuve,      son  infanterie,        sa  cavalerie       avec  lui    dans 


J 


à  ]  (J  o  '«^ '-'  I'  /jà-n-to,  fjaa  de  la  terre,  fer  trouvé  dans  le  sol.  Lepsius  dans  son  travail  sur  les  métaux 
(trad.  franc.,  p.  55)  n'admet  pas  cette  traduction  :  d'après  lui  ba  désigne  un  minéral  en  général  et  surtout 
la  pierre.  Toujours  est-il  que  la  comparaison  du  poème  de  Pentaour  se  retrouve  ailleurs.  Ainsi  à  Medinet- 
Abou  (Champollion,  Notices,  mss.  347),  les  prisonniers  disent  :  «Grand  soleil  de  l'Egypte  :  (1^^^ 

OOO    ^^'^'^  0-=>     Q;;;^    ^ ^   fv^ 

Q^    plus  grand  est  ton  glaive  que  le  ter  (y)  du  ciel.  »  Et  ifnd.,  p.  369  : 

1     0  ^^  «Plus  grand  est  ton  glaive  qu'une  montagne  de  fer  (?)  ou  de  pierres.»   Les  restes  du 

texte  de  Karnak  permettent  d'après  ces  passages  de  restituer  la  lacune.  (J.  R.) 

1  Aslu-ref.  La  particule  uy'^^  indique  le  prétérit  (de  Eougé,  Abrégé  grammatical,  309). 

'^  Spxit.  Cf.  ccÛTC,  praeparare,  dirigere. 

3  Sartinau,  peuple  du  nord  de  la  mer  méditerranée,  vaincu  par  Ramsès  et  employé  comme  auxiliaire 
dans  son  année  -,  c'est  la  première  fois  que  ce  peuple  apparaît  dans  les  textes.  La  Sardaigne  dans  les  textes 
phéniciens  est  nommée  :  pitt'. 

*   Tep-ret,  règlement,  règles.  Voy.  ci-dessus  :  Karnak,  1.  6. 

D  .    ^.^   . 

pu  àr  sert  a  définir  un  prétérit  antérieur  (V'"^  de  Rougé,  Abrégé 


s  L'addition  des  auxiliaires 


grammatical,  W°  312). 


© 


/ut.  Quelquefois  la  barque  est   représentée  avec  le  mât  abaissé 

AAAAAA 


fleuve  avec  le  courant».   Ce  mot  est  opposé  à  nTh 
de  ;fen<  est  quelquefois  avec  la  voile  enflée  :  '  yi,' 


•^  :  «descendre  le 
xent,  «remonter  le  courant»;  le  déterminatif 


156 


J.    DE    ROUGÉ. 


L.  9. 
K.  7. 

L.  9. 
K.  7. 

L.  10. 
K.     7. 

L.  10. 

K.     8. 

L.   10. 
K.     8. 


///////////////////////////^^^^^^^^ 

^    izzn   J  "  "  I 1  OUI  'mm.  X 

likr-t      nefer-t       er  viâêa       Revpe-t  tm  âhet  sen  n  semu  Jiru  9  (sejSe  ' 

une  route  heureuse    pour  la  marche.     L'an  V,  le  2^^  mois  des  moissons,  le  jour  î)  passa 


Lacune  des  deux 
textes. 


fmjenfu  em  p<iv-f  fes-t    nth  lier  asiet'^ 

semblable  à  Mont  dans  son  apparition,    pays  tout  à  trembler 


dans    leurs  cœurs.      Les  rebelles    tous      vinrent    en     se  courbant 


senia-u    fn)  hiu''      lion-f  .^em-tu  (menfiu)-f       lier  na  taka-tu'' 

crainte    des  esprits    de  S.  M.      Marchèrent      ses  (soldats)      vers  les        frontières  (?). 


A 


spJe,  passer.  Ex.   :  Inscription  de  Toutmès  IIL    -^Dans  le  camp  : 


-^5- 


c passa  la  garde  de  veille.» 

'  Brugsch  ÇDict.  ri^oçjr.,  p.  99.5)  traduit  ce  passage  :  «S.  M.  traversa  la  forteresse  Hétham  de  la  con- 


'^ 


/otem  signifie  :  fort,  citadelle,  de  la 


i? 


,  se  changer,  quitter  le  parti  de  qnel- 
les  rebelles  contre  le  roi  »  (Annales 


trée  de  Zal»,  et  assimile  p-/otem  à  YEtham  de  la  Bible, 
racine  /etem,  fermer.  (J.  R.) 

■'  Asfet,  tremhler  de  peur.  Cf.  ctojt,  treviere. 

*  CIS=I    J   o  V>  ,5'  ^^  sehtn,  rebelle.   Racine  :  r-^^—i     )^  \)> 

quun  :  il  se  construit  d'ordinaire  avec     "^    ;  ainsi  :  <^  '^  y 

de  Toutmès  IIL).  Cf  tgiÊe,  mutare,  u|iêt,  mutatio.  —  251^',  defector,  rehellis.  Le  déterminatif  du  nez  <£?  indique 
toujours  une  idée  de  séparation,  de  défection:  ainsi  on  le  retrouve  dans  les  mots  :   ^^9  t'eteh,  prison; 

M  X^nà,  gynécée,  etc. 

AAAA/\A    1    ^      ^ 

-   Kesu,  se  courher.  Cf.   rccrwc,  resvpinare,  convohere. 

''•  Biu,  les  esprits  :  il  faut  remarquer  que  cette  formule  ne  s'emploie  que  lorsque  le  roi  est  présent. 


Takan.  (Brugsch,   Dict.)  donne   JJ 


tK^%2 


kaut,  bords,  extrémit'-s.  Dans  son  Dict.  géogr.  (p.  995, 


a  1  article  7'soj-),  il  traduit  cette  même  phrase  de  Pentaour  par  :  '<les  soldats  marchaient  sur  les  routes 


Le  poème  de  Pentaour. 


157 


L.  11. 
K.     S. 


^^1 


'mM\ 


I 


ra 


àu-u  (lier  maëaj-u        her         mafennu^        en  (mehi)t     yer       evi-yet  liru 

Ils  furent  (à  marcher)        sur         les  chemins         du  (nord).        Or       lorsque        des  jours 


q     I 


P.  L.  1. 
L.  11. 

K.     8. 


m 


fipk 


kennu'^  her  sa 

quelques-uns  après 


WA 

lient  nen         âstu       hon-f 

ces  (choses),  voici  que     S.  M. 


c*we]  wmu 


Lacune  dans  les 
trois  textes. 


Amen-meri  Ramessu  â.-u.  s.  pa-tima (nà-p)u  àr  en  hon-f 

Ramsès-Mcriamen  la  ville venue    faite       par  S.  M. 


P.  L.  1. 
L.   11. 
K.     9. 


A 


rX 


f 


em  yut^  ....   (yer-m)  yet     peli^-n  lion-f  er      ta  tes-t  en  Kafes^ 

en  descendant Or  lorsque      parvint      S.  M.      vers  le  pays       de  Kadesch, 


étroites.»    —   Mou  père,  dans  son  Mémoire  sur  Vorigine  égypt.  de  r alphabet  phénicien  (p.  48),  rapprochait   JJ 
"^^^      ^-^  '^         haut  de  K:|  (cf.  \^  vallis. 

1  Matennu,  cf.  j^ûjit,  via,  iter. 

2  Ici  commence  la  page  du  papyrus  Eaifet,  actuellement  au  Louvre;  nous  la  désignons  par  les  lettres 
P.  L.  (Papyras  LomTe). 

3  em  xut,  en  descendant  le  fleuve  (voy.  la  note  ci-dessus,  p.  155,  note  6)-,  par  analogie  :  en  allant  vers 
le  nord. 

*  pf>t}>  var.  :  D  \  =S^J,  parvenir;  cf.  «hç^,  noç^,  pervenii-e.  Le  texte  du  papjTus  remjîlace  ce  mot  par 


sper,  var. 


D       A 


,  qui  a  le  même  sens 


du  mot. 


Kadesch.   Nous  reparlerons  plus  loin  de  cette  ville.  Le  texte  de  Louqsor   contient  encore  la  fin 


21 


158 


J.   DE   ROUGÉ. 


P.  L.  2. 

L.  12. 
K.     9. 


^^^ 


W/M'. 

hân         hon-f       5em-u  '     en      linr-f         ma  àtef  mentii  neb  uas-t 

voici  que      S.  M.      marcha       en      avant      comme  son  père  Mont,     Seigneur  de  Thèbes; 


P.  L.  3. 
L.  12. 
K.     9. 


I         I         I     1        AAAAAA        I       A^AAAA 


t'a-f'^  mâsut^     nfe        Arunata^ 
il  traversa  la  vallée    de  l'Oronte 


etti    p-menfiu       tepi  en  Amen 
avec    la  légion    première  d'Ammon 


P.  L.  3. 
L.  12. 

K.  10. 


7na-f  neyt-tth-u  s.  /.     Ra  user  ma  seÀep  en  Ra  a.  u.  s.  (se-ra)  Ramessu  meri  Amen 


qni  donne  les  victoires  an  Roi 


fils  du  soleil,      Ramsés  Meriamen  ^ 


P.  L.  3. 

L.  12. 
K.  10. 


a.  u.  s.  un  an  lion-f  a.  u.  s. 


er   sper*'  jp-timâ 


àstu 


p-yei 


étant 


S.  M. 


dans  l'action  de  s'approcher  de  la  ville,  voici  que  le  (chef)  vil 


1  sem.  Le  papyrus  du  Louvre  donne  la  forme  complète  :  i  /(  i  ^X 

-  A  ^^\  >-J^  OU  quelquefois  seulement  A  A  t'a,  au  propre  :  traverser  en  barque;  puis  en  général  : 
traverser,  parcourir.  Cf.  otmiop,  transfretare,  ti-ansire. 

3  c^  ^V""^^  "^^''-'^  ^  to-}/iô«<?,  la  plaine  (?).  Ce  mot  se  retrouve  plus  loin  (K.  13,  L.  17)  dans  la  phrase  : 
p-menfiu  en  pe-Bû  lier  t'a  ta-mamt  n  sabetun.  Ce  mot  paraît  différent  de  _~j  0  IJ  *"^*'  canal;  peut-être 
serait-ce  MeiycuT,  campus"?  Ma  fait  partie  du  radical,  car  <'«,  traverser,  ne  se  construit  pas  avec  la  particule 
niâ,  et  dans  le  second  exemple  l'article  du  féminin  ta  existe  avant  le  mot.  Brugsch  {Dict.,  p.  616)  met  ce 

mot  en  relation  avec  la  racine  ^^^  s d,  couper;  copte  ujwt,  d"où  ujgt,  canal  du  Nil,  et  le  traduit  par: 

«canal  où  l'on  peut  naviguer »(V}.  (J.  E.) 

'  Il  faut  remarquer  la  variante  du  papyrus  pour  le  nom  du  fleuve  Oroute  :  Anrata,  au  lieu  de  Aranta. 

^  C'est  le  nom  spécial  de  ce  corps  d'armée;  le  papyrus  du  Louvre  conserve  ici  une  phrase  entière 
qui  est  détruite  sur  les  textes  monumentaux. 

D    A;  f^P'ii-,  arriver,  pai-venir,  s'approcher.  Ex.  :  Pap.  d'Orbiney,  4,  2  : 


j\ 


\      A 


Le  poème  de  Pentaour. 


159 


P.  L.  4. 

L.  13. 
K.  10. 


P.  L.  5. 
L.   13. 
K.  10. 


yasi 
misérable 


^^0y</  n    O^  v-^  AAAAAA  ^— -y 


[x^y]. 


seJiu-f-       nef  fes-fu  neh  er  sa'-^ 

de     Khéta  vint,  il  rassembla  pour  lui  les  nations  toutes  en  commençant 


-|    A  A 


<?S,  AAAAAA 


m 

I    r    I 
em  pehu-u  ^ 
(les  extrémités 


\i    AA/VVNA 


en  pa-iuma 
de  la  mer. 


2d 

f/j\ii.  ^      I  rv/x/i 

pa  to  en  yeta 
Le  pays  de  Kheta 


^1 


A 

m  er  t'er-f-' 
vint  tout  entier 


P.  L.  5. 
L.  13. 
K.  10. 


pa-naharina  •> 
le  Naharaïn 


\\ 


,  il  s'approcha  de  son  frère  aîné.  {Ifnd.,  4,  8.) 


I    A 


quand  il  arriva  à  sa  maison,  il   trouva  sa  femme  étendue,  etc.  Il  ne  faut  pas  confondre  ce  mot  avec 

<rz>  ^  speru,  prière,  demande,  louange.  Cf.  cncon,  cenc,  rof/are.  (C'est  peut-être  dans  ce  dernier  sens  qu'il 

faut  entendre  un  titre  assez  fréquent  dans  l'ancien  empire  :  ytèpl  ,  chef  de  l'écriture  des  demandes,  le 
maître  des  requêtes.  (J.  E.) 

^  Le  papyrus  porte  :  p-sar  xasi-xeru.,  le  chef  vil  des  misérables  :  le  texte  de  Karnak  :  p-xer-y/i-ii,  lé 
vil,  misérable  de  Xeta. 

2  Sehu,  quelquefois  M  K  _  ,  rassembler.  Cf.  coovç^,  colUfiere.  Lorsque  la  particule  [1  ',  (1  '  qui 
commence  cette  phrase,  se  trouve  dans  une  proposition  où  deux  faits  sont  exposés,  elle  caractérise  le  plus 
ancien  des  deux,  (de  Rougé,  Ahrégé  gramm.,  309.)  Ici,  quand  Ramsès  s'approche  de  Kadesch,  le  chef  des 
Khétas  avait  déjà  réuni,  etc. 

"  <S'â,  commencement-,  cf.  u|&.,  initium,  usque  ad.  Er  sa  signifie  :  en  commençant  à,  depuis. 

^  Le  papyrus  du  Louvre  restitue  le  mot  peliu-u,  extrémités,  qui  est  passé  dans  les  deux  autres 
textes. 

^  Er  t'er-f,  dans  son  entier-,  t'er,  tout,  entier;  cf.  xHp,  omnis. 

6  Naharina,  D^nnj,  les  deux  tleuves,  la  Mésopotamie  (?).  Le  papyrus  a  oublié  l'N  initiale,  et  orthographié 


haranna.  Le  ^  est  le  déterminatif  ordinaire  du  mot  ^  ran,  nom;  le  scribe  a  mis  ici  ce  détermi- 


natif  abusivement,  ou  du  moins  seulement  comme  déterminatif  du  son  ran. 

'  Aratu,  "îiiS  Aradus,   Arvad.    Cette   localité    est  souvent  citée  parmi    les  villes  de  la  mer.    Tont- 
més  prend  Aratu  en  revenant  de  i^yrie-,  or  on  peut  voir  par  l'inscription  qu'il   revient  par  les  bords  de 


la  mer. 


21* 


160 


J.    DE   ROUGÉ. 


P.  L.  6. 
L.   14. 
K.   11. 


pa-masu^  pitasa'^  pa-kaskas  àruna^  pa-kar 

le  Masu,     Pidasa,  le  Kaschkasch,  Ilioima,  le  Kar- 


P.  L.  6. 
L.  14. 
K.  11. 


kisa  ^ 
kisclia, 


Kat'uatan  ^ 
Katsuatan, 


Kh'kamâië'' 
Karkemisch. 


P.  L.  6. 
L.  14. 
K.  11. 


^  ^^é^  '^ 


l'Auaukas 


ert'er-f 
tout  entier, 


'  Pa-matsu,  var. 


la  MysieC?). 


2  Pidasa,  jusqu'ici  jîas  d'analogue. 

3  Ilioun,  peut-être  IlionV 

"  Karkisa,  répond  au  ^VSt'^l,  Girgaschi  de  la  Bible,  tribu  chanauéenne.  Le  papj'rus  douue  Karkamasa, 
est-ce  une  erreur,  ou  est-ce  Karkemisch  que  le  scribe  a  voulu  désigner  et  qui  est  donnée  plus  loin  dans  le 
•texte  monumental?  Karkemisch  s'écrit  d'ordinaire  avec  v_^. 

5  Leka.  Ce  pays  est  rarement  cité;  on  peut  proposer  deux  identifications  différentes  :  d'abord  la  Lycie, 
mais  c'est  peut-être  un  peu  loin.  Puis,  une  ville  de  ce  nom  existe  plus  tard  en  Judée  :  peut-être  y  avait- 
il  alors  une  tribu  du  même  nom?  Le  papyrus  donne  ailleurs  l'orthographe  complète  de  ce  nom  :  _Êa^, 

""^^^-^  ^^^  fwi  • 

6  Katsuatan.  Inconnu  jusqu'à  présent.  Faut-il  le  rattacher  au  radical  f'p,  limite?  Ce  pays  ne  se  retrouve 
pas  dans  les  listes  du  temps  de  Toutmès  III. 

■  Karkemisch,  déjà  connue.  ï'^ç:"!?,  ville  célèbre,  dont  on  a  longtemps  cherché  l'emplacement,  et 
dont  les  ruines  paraissent  avoir  été  retrouvées  à  l'entrée  de  la  vallée  de  l'Euphrate  à  DjéraUous,  l'ancienne 
Hiérapolis  par  M.  Smith.  (J.  E.) 

s  Akarit,  n'est  pas  encore  identifiée-,  la  leçon  du  papyrus  qui  donne  aktar  semble  fautive,  ou  trouve 
toujoui'S  ailleurs  Akarit. 

9  Kati,  souvent  cité.  Les  Katis  sont  toujours  joints  aux  populations  syriennes.  Le  terme  "r.î,  qui  a 
été  plus  tard  appliqué  à  Cj'tium  de  l'île  de  Chj-pre  pourrait  venir  du  nom  du  peuple  Kati.  Une  tradition 
grecque  donne  à  Persée  le  titre  de  roi  des  Cythiens  :  où  était  son  royaume? 

•"  Anaiikas.,  \\\\q  importante.  Sous  Toutmès  III  elle  apparaît  comme  une  ville  principale  des  Eotcnnou 
supérieurs;  son  territoire  fut  ravagé  trois  fois  par  ce  prince. 


Le  poème  de  Pentaour. 


161 


P.  L.  6. 

L.  14. 
K.  11. 


AA/WVA 


dlil^V  1^    (1  ^  [^     ^^^k^.^     ^"®  papyrus  omet  les  phrases  suivantes  ' 

15m 


mu  i  a  net  ^ 
Mnschenet, 


kates  ^ 
Kadesch. 

(La  suite  prochainement.) 


LETTRE^  A  M.  E.  REVILLOUT 

.SUR  LES 

CO^TEATS  GEECS  DE  LOLTEE  PEOVEXANT  DE  EAIOUM. 

PAE 

Charles  Wessely 

(DE  VrEXXE.) 

Monsieur, 

Ce  fut  dans  l'hiver  de  l'an  1877  à  1878  que  des  paysans  égyptiens  découvrirent  dans 
les  ruines  de  la  ti-ès  ancienne  ville  de  Faioum  (nommée  dans  l'antiquité  Arsinoë,  Croco- 
dilopolis)  une  quantité  .de  papyrns  écrits  dans  des  langues  différentes.  Ils  furent  alors  portés 
au  Caire  et  vendus  à  diverses  personnes.  Une  partie  par^^nt  ainsi  à  Berlin,  achetée  pour  le 
musée  royal  par  le  consul  général  M.  Travers;  une  autre  partie  fut  acquise  par  MM.  Brugsch 
et  RoGERs,  mais  la  plus  grande  partie  fut  apportée  à  Vienne  par  M.  Graf  et  sauvée  pour 
cette  \\i\e  par  un  acte  très  généreux  de  son  Altesse  impériale  larchiduc  Raixer. 

Le  Louvre  possède  aussi  une  très  belle  collection  de  papyrus  et  de  parchemins  prove- 
nant de  Faioum, 

Au  commencement,  on  n'avait  pas  égard  à  cette  découverte,  car  les  pièces,  peu  consi- 
dérables, arrivées  en  Europe  n'étaient  que  des  moins  intéressantes,  et  on  n'avait  pas  l'occasion 
de  se  faire  une  opinion  par  suite  de  la  petitesse  de  ces  fragments  et  de  la  difficulté  de  lire 

'  L'omission  du  papyrtis  est  é\idemmeut  une  erreur  du  copiste;  il  y  avait  deux  phrases  commençant 
par  hu-tiah-f  :  il  a  omis  la  première  par  inadvertance.  (J.  R.) 

-  Muschenet,  n'est  cité  que  dans  ce  texte.  Ce  nom  est  peut-être  dérivé  du  radical  "2?,  dno.  Mischenet, 
avec  la  fonne  phénicienne  du  féminin,  signifierait  :  la  seconde. 

'  Kadesch,  r"T|5,  ville  importante  de  la  Syrie,  placée  à  la  naissance  de  la  vallée  de  FOronte.  Quelques 
noms  de  l'énumération  complète  de  ces  peuples  confédérés  manquent  ici  :  ainsi  M  J  ^J^  Tarteni, 

DardanusC?)  :  j    \\  [^r£:^  yb-bu,  "ispn,  Alep.  Il  y  avait  en  tout  17  peuples. 

*  Cette  première  lettre  dont  nous  donnons  la  primeur  aux  lecteurs  de  la  Revue  forme  le  premier 
chapitre  des  «Lettres  à  M.  E.  Revtllout  sur  les  papyrus  grecs  du  Faioum»  qui  vont  paraître  en  volume 
à  la  librairie  LERorx.  (Note  de  la  rédaction.) 

21** 


162  Ch.  Wessely. 


leur  écriture  effacée  et  entortillée;  mais  la  cliflféreuce  des  langues,  la  différence  des  temps, 
dans  lesquels  ils  furent  écrits^  éveillait  déjà  l'attention.  On  découvrit  alors  de  plus  un  certain 

nombre  de  textes  d'écrivains  grecs  :  d'Homère,  d'Aristophane,  d'Aristote,  d'Euripide 

des  textes  latins  juridiques.  L'intérêt  s'éveillait.  A  présent  ou  connaît  déjà  assez  l'importance 
de  cette  découverte;  il  y  a  maintenant  plus  de  15.000  fragments  conservés  à  Vienne  et  dans 
divers  musées  de  l'Europe  provenant  tous  de  Faioum.  Le  plus  ancien  (papyrus  grec)  fut 
écrit  dans  l'année  94  après  J.-C,  le  dernier  (papier  arabe)  en  958.  La  plupart  sont  écrits  en 
grec  et  en  arabe,  les  autres  en  copte,  en  latin,  en  hébreu,  en  sjTiaque  et  dans  des  langues 
et  écritures  inconnues. 

Nous  avons  déjà  expliqué  les  importants  résultats  obtenus  grâce  aux  papjTUS  grecs  de 
Faioum  pour  la  connaissance  de  l'antiquité,  à  différents  points  de  vue,  dans  d'autres  travaux. 
(Voir  les  Prolegomena  ad  papyrorum  graecorum  nouam  collectionem  edendam,  Vienne,  1882 
chez  Gerold  fils  éditeur;  Eine  Pergamentrolle  des  VI.  Jahrhunderts  dans  les  Wiener  Stiidien 
fur  classische  Philologie,  Vienne,  1882,  Zum  MUnzicesen  der  spateren  romischen  Kaiserzeit, 
ibid.  1883,  Miitheilungen  des  k.  k.  osterreicliischen  Muséums,  Vienne,  1883.)  Nous  en  donnons  ici 
un  aperçu. 

C'est  la  paléographie  grecque  qui  s'enrichit  le  plus;  on  sait  que  la  quantité  des  papyrus 
grecs  n'était  pas  grande  pour  l'époque  romaine  et  byzantine  :  à  présent  on  apprend  le  déve- 
loppement de  l'écriture  grecque  depuis  l'onciale  des  inscriptions  jusqu'à  l'écriture  nommée 
minuscule  des  livres  manuscrits  du  IX®  siècle  après  J.-C.  La  différente  formation  des  lettres 
et  des  ligatures,  les  caractères  propres  des  différentes  époques,  les  qualités  distinctives  des 
divers  genres  de  l'écriture,  c'est  ce  qu'on  peut  constater  le  plus  exactement  et  précisément 
pour  chaque  siècle. 

L'administration  romaine  et  byzantine,  pas  assez  connue  par  suite  de  la  stérilité  de  nos 
autres  sources,  est  très  bien  illustrée  par  un  grand  nombre  d'actes  privés  et  publics.  Le  droit 
romain  ainsi  que  l'égyptien,  s'enrichit  à  ce  point  de  vue. 

La  métrologie  des  temps  indiqués,  privée  de  toute  certitude  par  la  perte  de  presque 
toute  bonne  notice,  deviendra  plus  sûre  par  de  nombreuses  indications  contemporaines  des 
monnaies,  des  diverses  valeurs,  des  poids,  etc. 

Des  questions  très  discutées  de  la  chronologie  s'éclaii'cissent  et  font  des  progrès  grâce 
aux  nouveaux  matériaux  donnés  par  les  curieuses  dates  des  divers  papyrus.  C'est  la  même 
chose  pour  l'histoire  de  la  civilisation  et  l'histoire  politique.  Enfin  les  monuments  datés  sont 
de  la  plus  grande  importance  pour  l'étude  du  développement  de  la  langue. 

Pour  donner  un  avant- goût  des  papyrus  grecs  du  Louvi'e  provenant  de  Faioum  nous 
avons  réuni  un  certain  nombre  de  contrats,  de  lettres,  de  comptes,  de  quittances,  d'actes  indi- 
viduels, etc. 

Nous  nous  chargeons  de  ce  travail  sous  vos  augustes  auspices,  aidé  de  votre  vif  intérêt, 
duquel  vous  n'avez  jamais  cessé  de  nous  gratifier. 


Lettre  a  M.  Revillout.  etc.  163 


I. 
CONTRATS  GRECS  DU  LOUVRE 

PROVENANT  DE  FAIOUM. 

Remarques  préliminaires  sur  les  dates  des  contrats  du  IV —  VII'  siècle  après  J.-C. 

A  l'époque  ptolémaïqne,  on  datait  les  actes  par  l'au  du  règne  comme  sous  tous  les 
rois  égyptiens;  c'est  pour  cela  que  nous  pouvons  dater  presque  tous  les  actes  provenant  de 
cette  époque  avec  la  plus  grande  exactitude.  Les  Romains  ayant  conquis  l'Egypte  laissaient 
partout  les  anciennes  institutions.  En  ce  pays  l'empereur  romain  était  le  iSat^iAsû;  et  successeur 
de  ses  prédécesseurs  grecs  et  égyptiens  :  ou  date  donc  jusqu'à  la  réorganisation  de  l'empire 
par  Dioclétien  et  Constantin  d'après  les  ans  du  règne  comptés  du  29  août  au  28  août  de 
l'autre  au  '^1®'"  Thot  fixe).  Mais  depuis  Dioclétien  on  trouve  aussi  les  noms  des  deux  consuls 
'jr.%-i'.y.  Tôiv  oeTva.  Bientôt  ou  ne  retrouve  plus  les  ans  du  règne  de  l'empereur. 

Depuis  le  dualisme  de  l'empire  romain  l'un  des  consuls  fut  nommé  pour  l'Occident, 
l'autre  pour  l'Orient;  quand  l'un  d'eux  ne  fut  pas  désigné,  on  comptait  [xt-x  Tr,v  ù-y-tiyy  du 
prédécesseur.  Il  va  sans  dire  que  le  consulat  n'était  qu'un  titre  honorifique,  sans  aucune  autre 
prérogative.  Il  est  l)ieu  remarquable  que  les  listes  des  consuls  composées  dans  l'Orient  ne 
vont  que  depuis  Dioclétien  jusqu'à  Héraclius;  voir  l'apograplium  Yossianum,  liste  grecque  des 
consuls,  dans  le  Chronicon  pascbale  éd.  Bounens.  Nous  avons  trouvé  deux  exemples  de  cette 
manière  de  dater  dans  les  papyrus  du  Louvre  : 

a.  486.   'jr.y-'.y.  <P'kxcj\cj  Aîyy{vo'j  tîj  l/.y/^-po-y-zj. 

(Voir  la  revue  :  Wiener  Studien  filr  classische  Philologie,  V,  p.  3.)  C'est  la  date  d'un 
papyrus  grec  de  Faioum  publié  par  M.  Hartel. 

a.  487.  [).z-'y  t);v  ÙTzyv.x/  <l>Aao'j(o'j  Ac^y-''^''^  '-^  Aay.zpcTâTcu. 

a.  532.  p-îTà  TYjv  uTraT'iav  4>Xao'j{cj  'OpésTîj  y.y).  Ay.[j.-y.lhj  twv   èvsîçîtxtwv. 

Les  consulats  étaient  les  dates  des  actes  depuis  le  iv*  siècle  jusqu'à  Justiuien;  nous 
possédons  encore  la  B;â-:a;'.ç  de  cet  empereur  par  laquelle  il  fit  dater  les  actes  publics  par 
les  ans  du  règne  des  empereurs  à  la  première  place,  à  la  seconde  par  le  consulat  et  ensuite 
par  les  autres  dates  :  «ây.eTv;  T.xnuyv  —  dit -il  dans  la  XLVII  Novella,  de  l'an  537  —  zhy.: 
»  csp-vÔTa-ov  y.al  cj[j.^éAa'.ov  y.a;  ij7:6[j.vr,;xa  .  .  .  .  vo;j.'.r:£5v ,  'é~=p  Y.y).  aÙTYJ  -/.aziiA-zy,  t^  Trj;  ^aaïAîta; 
»  [/.vï^lXY)  ....  cOïV  6£CT:îi^o[j.£v  .  .  c'jTw  tm:  az'/tz^y:.  -wv  Q-j\j.'^z'/.y[wt  '  jS^S'-Aî'-o:;  tcjBî  toj  6£'.o?â':c'j 
»  a'jYCÛsTC'j  y.al  aÙToy.pâ-spîç  ï~z'jz  'zzzyJzt  y.al  (j.î"'  ïy^v^y.^  kT,:oiç,v.^)  tyjv  tsj  Gzâisu  msffrjvspfav  -z'j 
»  y.xT'  iyXvto  ~o  oToç  cvtoç  y.al  -pî-ov  tï;v  èztvqAYictv  7:yç,zr.z\i.viz-j  tcu  [Jirjvbç  y.al  -r/;ç  vii^-épa;  ....  c'jtw  ttwç 
»  aÙTwv  Y?«?5Vt(«)v  •  (âactÀsîaç  'Icuariviavoij  toO  ÔetoTst-ou  aÙYSÛcTau  y.al  aÙToy-pâ-opo;  è'Toyç  évSsy.aTou  [j.iiy. 
»-CT,v  'jTiaTSÎav  <î»Aaij''o'J  BsXtsaptou  -ou  Xy.[i.T.zo-xzz\i  è'TOu?  osu-épcu  r.^o  tîswvoî  .  .  à^yy^.biz'^  Se  tsj 
»'AtcpiXaîou  [^.Tjvb;  y.a-rà  -y;v  t.zîù-t^-i  r^-JÀ^y-t,  y.aO'  -^v  r,\j.y.z  z  Osb;  -zlç  'Pwj/aîwv  hr.iQir^zz  r.pxc^.yzi 
»  5u)0£y.a-ov  Its;  (yri^  -^[Xc-épaç  ^jyz'.Kv.yç)  ^^zi'iiz'jz'..  » 

Notons  aussi,  que  depuis  Justiuien  disparut  l'ancienne  manière  de  dater  les  ans  des 
empereurs  du  29  août  (le  1'^''  Thot)  jusqu'au  28  août  de  dernier  jour  épagoménos)  de  l'autre 


164  Ch.  Wessely. 


année,  et  le  temps  du  règne  d'un  empereur  avant  le  1*"'  Thot  formait  sa  l^i"*^  année  quoi- 
qu'il n'y  avait  souvent  que  quelques  jours.  Mais  depuis  Justinien  on  datait  par  exemple  la 
l^i'«  année  de  Phocas  de  son  dies  imperii  le  25  novembre  606  jusqu'au  25  novembre  607. 
Depuis  Justinien,  dans  ce  temps  très  catholique,  on  commençait  tous  les  actes  avec  :  «au 
nom  du  père  et  du  fils  et  du  saint  esprit»  ou  «au  nom  de  Jésus -Christ,  notre  Dieu  et  Sei- 
gneur», etc.  venait  ensuite  l'an  ^y-siXeiaç  /.at  otj-oxeîaç  tsu  Bswoç  aùvoûaTou  /.al  auxoy.pizopoq.  La 
troisième  place  était  réservée  au  consulat.  Mais  après  Justinien  ce  rang  ne  fut  possédé  que 
par  les  empereurs  eux-mêmes,  car  Bélisarius,  le  fameux  général  de  Justinien,  fut  le  dernier 
homme  privé  du  rang  d'un  consul.  Il  va  sans  dire  que  cette  manière  de  dater  disparut  après 
Justinien,  on  ne  la  trouve  que  très  rarement;  par  exemple  dans  le  pap3a*us  n"  6842  des  musées 
nationaux  de  l'an  632  : 

L.    1.   âv  o^i[>.aii T/iffoiJ  Xp'.cro'j  tiu  Gîoij  vSi  crojjr^poç  '^[/.ûv  paciXei'aç  tou  eùse^îc-xTCJ. 

L.  2.  7,at  çiXavOpw'âOU  yjjjlwv  Ssctîôtou  4>Xaou'!ou  *Hpa/.X£(ou  tou  atwvi'ou  aÙYOÛCTSu  %at  aùicxpâTopoç 
£-ro'j];  £Ïz,ccTou  oîUTépou  /,at  ÛTïaxîîa;  r^ç  aÙTwv. 

L.   3.    ct-AOcrc'^ç  •âpwTy;;  /.al  'Hpaz.A£'!ou  KwvcTavTivo'J  /aîcrapoç  etc.]  sto'jç  /.'  â'Trslç;  !!'  ç  ho.  i-z"  'Ap. 

Sur  les  indictions,  dont  Justinien  fait  mention  dans  la  Novella,  il  y  a  des  questions  très 
difficiles.  On  croyait  que  Vindictio  Constantinopolitana,  allant  du  1®""  septembre  au  31  août, 
était  en  usage  partout  dans  toutes  les  provinces  de  l'empire  romain  oriental.  Cependant  les 
actes  trouvés  à  This  eu  Haute -Egypte,  publiés  dans  les  Notices  et  extraits  des  manuscrits, 
t.  XVIII,  2®  partie,  p.  259  et  par  G.  A.  Schmidt,  Les  actes  grecs  de  la  Bibliothèque  royale 
de  Berlin,  1842,  publiés  par  nous  dans  les  Wiener  Studien  fiir  classische  Philologie,  1885, 
t.  VII,  présentaient  de  très  grandes  difficultés,  car  les  années  du  règne  exprimées  dans  ces 
actes  différaient  beaucoup  de  celles  qui  étaient  indiquées  par  les  indictious  (voii*  M.  Brunet 
DE  Peesle  au  lieu  indiqué,  p.  260).  Par  exemple  dans  la  date  citée  plus  haut  l'an  XXII 
d'Héraclius  c'est  l'an  632  après  J.-C;  cependant  l'indiction  de  cet  an  n'était  pas  la  sixième 
mais  la  cinquième;  l'indiction  exprime  donc  l'an  633. 

Pour  lever  ces  irrégularités  j'ai  indiqué  les  voies  à  suivre  dans  les  Prolegomena,  p.  48. 
Il  y  avait  aussi  une  indiciio  Aegyptiaca  ou  Alexandrina  différente  de  la  ConstantinopoUtana ; 
leur  terminus  était  le  temps  de  la  moisson  en  Egypte,  dans  le  mois  de  Payui;  mais  parce  que 
la  moisson  de  l'Egypte  dépend  de  l'inondation  du  Nil,  on  avait  des  irrégularités  aussi  dans 
l'indiction  quand  l'inondation  était  plus  tôt  ou  plus  tard  qu'à  l'ordinaire.  Voir  M.  Krall  dans 
le  Recueil  des  travaux  relatifs  à  la  i^lologie  égypt.  et  assyr.,  1884.  Dans  l'exemple  indiqué 
plus  haut  la  moisson  de  l'an  XXII  de  Héraclius  était  donc  dans  1«  mois  de  Payui  et  l'in- 
diction nouvelle,  la  sixième,  en  Egypte  part  de  ce  mois  :  l'acte  cité  fut  écrit  dans  le  mois 
d'Epiphi;  nous  trouvons  en  vérité  déjà  la  sixième  indiction. 

Pendant  l'invasion  des  Persans  de  l'an  616  à  618  et  dans  le  premier  temps  après  la 
conquête  des  Arabes  on  date  seulement  par  les  indictions;  et  parce  que  le  cycle  des  indic- 
tions ne  s'étend  qu'à  15  ans,  on  ne  put  distinguer  ainsi  que  15  ans.  C'est  la  conjecture  de 
M.  Letronne  dans  ses  Matériaux  pour  servir  à  l'histoire  du  Christianisme  en  Egypte,  en  Nuhie 
et  en  Ahyssinie  (Paris,  1832),  que  les  chrétiens  de  l'Egypte  employaient  après  la  conquête 
arabe  l'ère  nommée  aéra  martyrum  ou  aéra  Diocletiani  partant  de  l'année  284  après  J.-C. 


Lettee  a  m.  Revillout,  etc.  165 


Cette  conjecture  est  très  bonne;  en  vérité  :  on  trouve  dans  les  contrats  grecs  et  coptes  depuis 
le  vii^  siècle  les  dates  exprimées  par  les  ans  de  Dioclétien  : 


a.  657.  è'-o'ji;  A'.o/.A'/)T'.avsLi  xi^' 

a.  660.  £Tou;  Ato/.Ar]Ttav;ij  tcç  indiction  III. 

a.  678.  à'Touç  AtoxXr,Ttavoij  tço  indiction  VI. 

a.  687,  à'-o'jç  A'.ov.XrTtavou  jv  indiction  XIV. 


Papyrus  du  Louvre  provenant 
de  Faioum. 


Papyrus  T''  (a.  486). 

Papyrus  du  Louvre  n°  7128-  haut.  SG"",  larg.  IF"';  pins  que  la  moitié  manque  à  présent. 

1  J'JTiazirx  rp\\,  ÀoYyivo  zoo  Xaiiiz^o^zazoo 

2  cpXj  ïooÀco)  [rco]  XaiJLiuporata)  oùo  to'j[  tr;ç  (xavcapiaç  \xTfi\xriz 

4  axcoorj  'jïck;  TTouoLf?)  ajj-'^TcXoypYO'j  irj<:[  ojJLStcpa?  Xa{j.'7i;p(o'C7]roç)  airo  rr^ç 

5  wùZ'f^Q  TToÀscoç  aico  a[JL^foooy  paaiX[i7,oo  oixo^oya)  jistJLtaô-oiaiV/i 

6  :rapa  r/j[ç  <z\f]ç  Xaii-iupoiTTjtoç  ro  07rap[)rov  aatr^  3V  :rsoc(o 

7  TTjÇ  cTtOWia?  vo|JLptva  too  apa:vo£i-:r>o[  vo(JLr;'j  ct;x:r£À'wXOV 

8  [-/(opLov]  ':r£pi7rc'3iXaatcO{JicVo[v  xat  luspt.-ctsf/iGjj.îvov 

9  [oaov]  cOTL  aav  rcov  £v  aorco  ^ot.[vi%o)v  xat  'f'j-(ov  ^trx'^opwv? 

10  [xat  {jL7]yaVY]ç  vcat  |JLTj/av]oaraatoo[  xac  {xy^'/ocvwcov 

11  [ojpyavwv  sirt  yrpovov  oaov  [  pooXct  a^ro  -'r;ç  îLaio'jar^ç 

12  ^cxarrjÇ  tvoLxtLovoç  ccX'^«p[o'co^  {j.oo  scç  rr^v  ocTicpYa 

13  atav?]  C'^îi^av  [xtocv  ot^'/jpou  xai^apoo  XLtpav[[jLcav  (civctt) 

14  (§s  aoi)]  rpOYOo{i£Vou  to'j  -/(opio'j  [  r/jç  -pDY'/)ç 

15  ....  [Jt]3[p]'^  rpsia  y.aixoL  {i.£[poc  £V  ÀajBstv  o  £[j.s 

16  .  .  ,  ctçj  xaX?^icpYcav  too  oc'J'co'j  ^(^[TrsXc'/toD  /(opLO'j  .... 

17  .  .  .  aTToJ^cofastjv  ^ô  Xoy(o  'fopo'j  £vc[a'jauo(;  .... 

18  ....  -£aaa]pa7cov-a  rpr>iVLxaç  )rpaa 

19  oo'j  'jra]p£/oVTO(:  |3o'jç  xac  raç  [  TCpr>/p£tocç 

20  Tupoc  ap^'/jGJLV  T^xoL  TTpoç  7.vxXr^atv  xo[o  a^Jto'j  /(opio'j 

22 


166  Ch.  Wessely. 


21     ....    TûpjOÇ    TTjV    tr^Ç    «{J-TicXoD    §0 

22 £t  'ccio  ii'j-oo  '/(npiou  ':rap[a§toaa)  tac  po'jç  %ac 

23  ....  y.]aL  r/]ç   {Jiiaç  C^swoc  too  SLpYj(j.cVo[o r^\llcsb^0Qlç, 

i 

24  yyjpioc  %ai  £iicp/ ]  co{J-o  aupr^aoç  axo)ou[  uco^  Trouai 

y. 

25  ....  {Ji£{j.iaOco{j.7.i  7.rj.i  [axoQCoaco  toç  lïpo]  aopTjXioç  a  .  .  .  .  [cypad^a  OTTSp  aoxoo 

26  aYpa[i[j.a]':oo   ovto^  "j* 

27  §[t   £[JL0O  .... 

«  Sous  le  consulat  du  très  illustre  Flavius  Longinus,  à  la  fin  de  la  O*"  indiction.  A  Flavius 
»  Julius  le  très  illustre  fils  de  feu  son  père  Joannes,  propriétaire  terrien  dans  la  ville  d'Arsiuoé 
»  (écrit)  Aurélius  Akou,  fils  de  son  père  Pousi,  vigneron  de  Votre  illustre  Altesse  de  la  même 
»  ville  d'Arsiuoé,  de  la  rue  royale. 

«  Je  reconnais  avoir  loué  de  Votre  illustre  Altesse  la  vigne  que  Vous  possédez  dans  le 
»  territoire  du  lieu  Nombina  de  la  province  d'iVrsinoé,  (vigne)  entourée  d'une  haie  et  de  murailles, 
»  ainsi  que  les  dattiers  et  les  diverses  autres  plantes  qui  y  sont,  avec  les  instruments  et  le  lieu 
»  pour  y  déposer  ces  instruments  et  les  outils  pour  la  labourer,  pour  le  temps  que  Vous  voulez 
»  depuis  le  commencement  de  la  dixième  indiction.  J'ai  reçu,  pour  que  je  la  puisse  cultiver, 
»  un  animal  et  une  livre  de  bon  fer.  Au  temps  de  la  vendange  dans  ce  lieu  trois  parts  d'elle 
»  appartiennent  k  toi,  une  à  moi.  Je  reçois  aussi  pour  entretenir  la  même  vigne  en  bon  état 

» je  donnerai  aussi  comme  tribut  pour  l'année  (d'argent  et  fruits  .  .  .)  40  et  des 

»  dattes  jaunes  ....  Vous  me  donnerez  aussi  des  bœufs  et  des  machines  hydrauliques  pour 
»  l'arrosement,  c'est-à-dire  pour  l'irrigation  de  la  même  vigne,  et  les  autres  choses  pour  leur 
»  culture.  Au  temps  de  la  moisson  je  te  rendrai  les  bœufs  et  ....  et  la  bête  de  travail  que 
»plus  haut. 

»La  location  est  légale;  questionné  je  donne  mon  assentiment  à  tout.  Moi  Aurélius  Akou 
»j'ai  loué  et  je  rendrai  (ce)  qui  (est  écrit)  plus  haut.  Aurélius  A  .  .  .  .  j'ai  écrit  pour  lui 
»  parce  qu'il  ne  sait  pas  écrire.  Ecrit  par  moi  le  notaire.  » 

Au  commencement  des  actes  une  personne  adresse  l'acte  à  l'autre  ou  les  hommes  se 
saluent  nommément  <I>X«ou(q)  'Iouaîw  —  Aùpv^7aoç  ou  dans  les  actes  du  vi"  ou  vu®  siècle  (PXaouîw 
'Io'jX(o)  —  AùprjA'.o;  -/ai'petv.  Les  personnes  sont  nommées  aussi  avec  le  nom  de  leur  père,  de 
leur  patrie  et  du  domicile;  par  exemple  Aurélius  Akou  demeurait  dans  la  rue  royale  d'Arsiuoé. 

n£pi7:c7:AacT£ui;,évov  est  une  faute  de  prononciation  pour  zsptt^s.'ÎAaiTrsup.évov.  Signalons  un 
autre  barbarisme  :  guv  twv  çc.viV.wv  au  lieu  de  cbv  xodç  çoîvt^w. 

Les  irrjxavf/.à  op^^va  et  le  lieu  bâti  où  ils  étaient  conservés  sont  compris  dans  ce  louage 
ainsi  que  les  arbres  plantés  dans  la  vigne,  quoiqu'il  allait  sans  dire  que  ces  choses  appar- 
tenaient à  la  vigne.  Les  actes  sont  composés  avec  la  plus  grande  exactitude  pour  éviter  des 
mésintelHgences. 

î^oetSa  ou  'Coioa  provenant  de  Z,M^io'/  et  'Cwov  est  aussi  une  forme  barbare. 


Lettre  a  M.  Revillout,  etc.  167 


Les  conditions  de  cette  location  sont  très  dures;  le  fermier  ne  reçoit  que  V4  de  toute 
la  moisson  et  il  lui  faut  donner  encore  une  dîme  de  ses  dattiers.  Nous  lisons  ici  cpoîv.y.aç  ypjc .... 
je  crois  bien  que  c'était  une  sorte  des  bonnes  dattes  ou  des  dattes  jaunes  nommées  «datte 
d'or». 

Opbç  àp5-/]c'.v  -Î^TO'.  -poq  à'vîAïj^tv].  Nous  lisons  dans  un  papyrus  de  Vienne  appartenant  à  la 
collection  de  son  Altesse  l'archiduc  Rainer  :  .  .  .  .  ty;v  à-i-'kv.y:)  -l-Tot  àposi'av  «cependant  que 
Vous  donnez  les  bœufs  de  travail,  je  fais  l'arrosement». 

A  la  fin  de  l'acte  nous  lisons  le  consentement  du  fermier;  mais  parce  que  Aurélius  Akou 
ne  sait  pas  écrire  (il  est  ci.-^çâ]i.\>.caoq)  un  autre  Aurélius  souscrit  pour  lui.  Enfin  nous  voyons 
la  signature  du  notaire  oC  èu.su  ....  Tj;j,.3oXat5Yp7.çc'j  èYpxsr,. 


Papyrus  II. 

vi^  ou  vil®  siècle  après  J.-C. -,  haut.  G<^",  larg.  16'5<^". 

ojJLoXoYO)  [iEii-Lo^coGÔ-at  'jrapa  zr^ç,  ^{jLîXcpaç  XajJiTrp/  rr^v  rjirj/^srjrjrj^jrjy  a'jzri  sv 
xîOKo  zoo  aozoo  cTuor/ct/  sv  zo'jzo)  7,olXo'J[j.£Vo:)  lîXocjj.aXo)  atiTïsXo'j  TCcpcïïiSTuXa- 
ar£'j[JL£V*^ç  Y.fJ.1  TUcptT:cri/ia{Ji£V7jç  [ispioa  \xir/.v  [x^za  Tzrjyzoç,  r/jjz-qç  zoo 

Swocto'j  [sirt  /povov  oaov  ^ooXeoHe  ...     . 

«A  un  tel  illustre  .  .  .  demeurant  dans  un  tel  lieu,  écrit,  en  saluant,  un  tel,  natif  de 
»la  ville  d'Arsinoé.  Je  reconnais  avoir  loué  de  votre  illustre  Altesse  une  partie  de  la  vigne 
»(avec  tout  son  droit)  laquelle  vous  possédez  dans  le  territoire  de  ce  même  lieu  (dit  plus 
»  haut)  et  dans  le  terrain  nommé  Plamalo  ;  elle  est  entourée  d'une  haie  et  de  murailles.  » 

Notons  les  abréviations  -/j  pour  -/aîpsiv,  Xa[j,7:pt/  pour  Xatj.Trpir/;;,  Xy.if.-Kpôvr-.o;,  =.t.ov/.'./  pour 
è:îot/.''oi».  Le  mot  àjj.7:£Aoç  à  qui  répond  le  à[j.'::£A[y.bv  /ojpîcv  dans  le  n"  F''  signifie  sans  doute  la 
vigne,  voir  Elien,  De  animalium  natura,  XI,  32. 

Dans  le  précédent  numéro  la  i)ersonne  qui  loue  la  vigne  est  appelée  «  illustre  Altesse  »  : 
ici  nous  avons  encore  une  fois  une  illustre  personne  louant  une  partie  de  sa  vigne;  mais  on 
sait  que  dans  le  temps  byzantin  il  y  avait  des  règles  fixes  pour  la  harangue  :  il  y  avait  un 
iUustrissimatus,  c'est-à-dire  le  rang  harangué  par  «illustre  Altesse»,  d'un  comes  sacrarum  largi- 
tionum,  d'un  prsefectus  prœtorio  per  orientem,  d'un  prœpositus  sacri  cubiculi,  etc.,  mais  je 
ne  crois  pas  que  c'était  une  illustre  Altesse  qui  louait  à  un  fermier  une  vigne  pour  ^4  de 
la  moisson;  or,  nous  trouvons  dans  les  actes  tant  d'autres  Altesses  que  nous  doutons  qu'elles 
fussent  de  véritables  Altesses.  Si  je  ne  me  trompe  pas,  tout  était  comme  chez  nous'  :  le 
pauvre  fermier  était  d'une  telle  soumission,  d'une  telle  obéissance,  qu'il  n'hésitait  pas  à 
nommer  son  seigneur  avec  les  plus  grands  titres. 

'  Je  parle  ici  d'un  usage  contemporain  qui  se  trouve  en  Italie,  en  Espagne,  etc.,  aussi  bien  qu'en 
Autriche. 

22* 


168  Ch.  Wessely. 


Papyrus  III. 

VII*'  siècle.  Papyrus  11°  7073  du  Louvre;  haut.  SA^",  larg.  30<=",  collé  à  gauche  12'='^  de  la  marge. 

1  •}■  £V  GVoiiatL  zoo  7,'jpwj  xoit  ScOTCoro'j  iT;ao'j  ypcaroa  zoo  i9-£oo  xat  acoiT^poç 

2  a0T0Xp/)X7]ç  ScO'EoiVT^ç  rj{j(,o)V  ttjÇ  aytaç  {^corox,/ )  xavrcov  rtov  aytcov  Traovc 

tcTaprr^  svarr;?  tvo/  cV  apawj  'j' 

3  aop'/jXtoç  Yccopytoç  o  y-at.  /,a[A{Ji£aLç  ircoiJiapL'CTjç  aïoç  iraiioarcoo   airo  rr^ç  apat- 

(sic) 
u 

y.XYjpovop.otç  roy  [laxapio  VccXa{j.|Xj 

5  lO'j  xc/.L  por^O-oo  CLTZO  ZTiÇ  aozr^c  Tzoksoiç  y  ofAO^oyo)  [X£[JLta^coa^ai  izapa  iyjç 

y 

6  a{JLLV     £V    -ÎTcOUO     ZaVZCfXoO    TZÇjO(J.GZlOiV    Zr^Ç    TToXâCOÇ    TTCOlJ-aptOV     cTC'.X-apTrOV     (20V- 

OcVTpov  ircpfucrtj^taijievov  xat  xr/XXt 

7  £pYr^[j.£Vov   apoopoiv   oaov   £av   oioiv   go\x  rpocviiccov  y,ai  «porcov   Sia^opcov   xrxc 

Xrj.Y.v.00  v.ai  {iT^yavr^ç  y,ac  |JLrj)ravoataaLou 

8  x,aL  [jL7jyJav]t%(ov   opyavoov   %at  Travioç   aoroo   roo   ^txatoo   ôirt  [ypjovov   oaov 

poo}.£a{)'£  OLTCO  icapTrcov  rr^ç  at>v  eiaioooriç 

9  ^£xatY;Ç  LVo/  7,ai  'jr7.paay£cv  {j.£  tov  |Jita^a)aa{jL£Vov  Y£a)pYiov  OTr£p  aizozaxzoo 

çpopoo  aozoo  eviaoGKûç  o  bgziv  ypOGioo 
10   vo[Ji(t)a{j.aiia  ooo  wç  vo[jitx£yoVTai  yp/  v  |3  œç  vj  to)  {ji£V  £taoov-i  [xr^vt  £'n;£i(pt 

ap/Tj  TT/Ç  a'jtTjÇ  S£'/,a':r|C  ivo/  vo{jLia(JLauo 
U    £v  [xai  -](o  d-Lûd-  {j.T^VL  xo  aXXo  £V  wo\Lio\).C(.  ycipizriciû  §£  ôpiLV  Xoyo)  U'3rrjp£- 

atctç  |j-Lav  §w.  [xiac,  biç  oXov  tov  cV^aaiov 
12 yoyyoXiov    §]£|Jiaxa   cTrra  %ai  Tcopi^ioo   o£{j.a   £V    7,at   rfleoG\i.oo 

§£[jLa  £v  %a'.  irco  xatpco  'cr^c 


Lettke  a  m.  Revillout,  etc.  169 

13 ^(ov  [B£Xoy,L(«v  %ai  ro'j   '/cc-po'j   ô'^rt  {ivjvaç  5'Jo  'mwj.- 

14 x'.'Lpov ca  xai  lupoGctira^  poaç  eveTfi^rj^za  y.7.'. 

-(0  y.aipco  -(ov  TCcpaixoiv 

15  TiaXtv  {icav  o'.c/.  [j.'.7.ç  'iTcpaiy.a  rsaGapjay.ov'ca  xa:  irco  y.aLpo3  r(ov  aarpcov  ttcc- 

16  X7.1  'r;[JL]£tç 'ccfAT^ç  %£parico[v  .  .  .  XJirojv  y.OLi  xa-r/.  •'^j^zr^'^  r^[jL=- 

po'jattoç  uiTT^psacav  |xiav 

17  Àapctv  ]  §  £[JL£  OTcsp  -Y^ç  a'jzT^c,  ocvoo  xctviStv  £|JLoo  -ïoo  (JLtaO-coaaiJLSVO'j  ysojp- 

18  aoto'j  yjcopio'j  %ol'.  Tzapeyo^zoc,  za  ac^r^pa  xcdv  iiY^yavty.tov  opY7.vcov  'Koyza  zo)ç, 

cVoç  OÀo'j  c-ct  {j.T^v  y,7.i  raç 

19  ?  o'JVTj^]  cW.?  -ojv  «p'j/.axcov  y.7/.  xo^j  'Ccy.':o[vo]ç  7,7.1.  -(00  y.£p7.{X£oj;  xat  7./sX(ov 

à{i,cov  Ô£  Tuoco'jvrcov  rr//  av7V£(oaiv 

20  Tcov  |Ji]r//7.viy,(ov   opyavwv   £i  5c  £7.aa)  7a[j.£   |xcav  fj7:Y^p£a'.7.v   £7:1  roj  \k=  11a- 

paa/£'.v  '0  y.£p[j-7.  7.'j-y^ç  %ai  oirotav 

21  pooX7j]^£0Y^i£   a'3rO[37.X£a^7.'.    [j.£   £y,  za'jzr^ç,    zrjç    [X'.a\>(oa£co::    irapa^waco   tov 

aOTOV    XOTTOV    'JU£(ptÀ0%7.XY^[l) 

22  [jL£ra £^  %£p7.i:co)V  y.al^coç  y.7.1  7C7.p£cXY/f ov  y^  jj.iaxJ-coaL;  yyjpw.  £ç  oirap- 

23  aopYjXioç   ^[S(i)rj^(ioç   0   y,7.'.  y,7.{j,{Ji]£acç   0  lupoy.ctfjLj  gzoi/zi  |jlo'.  y^  '7U7pouaj  {l'.a- 

Si   £{10'J   '3r£'UpOO    £Yp/  i* 
Verso  :  effacé. 

«An  nom  de  notre  maîti'e  et  seigneur  J.-C,  notre  Dieu  et  Rédempteur,  roi  des  rois 
»et  perpétuel  souverain,  et  de  notre  maîtresse  (S*^  Marie),  mère  de  dieu  et  de  tous  les  saints; 
»  le  4  Payni  de  la  9®  indiction.  En  Arsiuoé. 

«Aurélius  Georgius  dit  aussi  Cammésis,  jardinier  maraîcher,  fils  de  Pamouthi,  de  la  rue 
»  d'Olympe  de  la  ville  d'Arsinoé,  salue  les  très  admirables  messiem'S,  le  secrétaire  du  district 


170  Ch.  Wessely. 


»  et  les  très  honorables  et  glorieux  frères,  iils  et  héritiers  de  feu  Nilammon,  dit  aussi  Boéthos, 
»de  la  même  ville  d'Arsiuoé. 

«Je  reconnais  avoir  loué  de  Votre  admirable  Altesse  une  plantation  d'arbres  fruitiers 
»  appartenant  à  Vos  possessions  dans  le  terrain  du  faubourg  dit  de  Tantalus  de  la  ville  d'Arsiuoé. 
»Elle  forme  un  fort  bois  de  fruitiers.  Elle  est  entourée  d'une  muraille,  elle  est  en  bon  état, 
»  étendue  un  tel  nombre  d'aroures.  Je  la  loue  avec  les  dattiers  et  les  autres  arbres  et  plantes, 
»  avec  la  citerne,  avec  les  instruments  et  le  lieu  pour  y  déposer  les  instruments  et  les  outils 
»de  travail;  avec  tout  son  droit  pour  le  temps  que  Vous  voulez  depuis  la  moisson  de  la 
»  10*^  indiction,  future  —  avec  Dieu. 

«Moi,  le  fermier  Georges,  je  Vous  donnerai  le  tribut  fixé  :  —  ce  sont  deux  écus  d'or 
»  ayant  cours  ;  —  dans  le  prochain  mois  d'Epiphi  au  commencement  de  la  même  10*"  indiction 
»un  écu  d'or,  et  au  mois  de  Tbot  l'autre  écu  d'or.  Etant  Votre  humble  servant  je  Vous 
»  donnerai  tous  les  jours  par  toute  l'année  des  radis  7  gerbes,  de  coriandre  une  gerbe,  de 
»  menthe  une  gerbe;  au  temps  de  la  moisson  des  légumes  (?)  et  à  celle  des  citrons  un  cueil- 
»loir  plein  assez  pour  deux  mois  et  un  petit  cueilloir  ^  .  .  .  des  autres  citrons  et  une  fois  pour 
«toutes  90  grenades  et  dans  le  temps  (de  la  moisson  des)  pêches  quarante  et  aux  jours  cani- 

»  culaires  200  pêches  et  4  petits  cueilloirs  K  Moi  je  recevrai  (une  chose)  d'une  valeur  de 

»  carats  simples  et  pendant  les  fêtes  chaque  jour  une  gratification,  aussi  comme  gratification 
»  un  cueilloir  de  raisins,  moi  le  fermier  Georges,  faisant  aussi  l'arrosement  du  lieu  et  donnant 
»le  fer  pour  les  outils  en  leur  totalité,  encore  aussi  les  salaires  (?)  des  gardiens,  des  char- 
»  pentiers,  des  potiers  et  des  autres  ti-availleurs.  Cependant  Vous  faites  la  réparation  des  outils. 

«  Quand  je  néglige  un  service  il  me  faut  payer  pour  lui  la  somme  correspondante.  Quand 
»Vous  me  voudrez  congédier  de  cette  ferme,  je  Vous  rendrai  ce  lieu  en  bon  état  et  les  (outils?) 
»  d'une  valeur  de  6  carats,  ainsi  que  je  les  ai  reçus.  Cette  ferme  est  légale;  je  réponds  d'elle 
»avec  tous  mes  biens. 

«Moi  Auréhus  ....  Cammésis  le  susdit  j'en  suis  content;  cette  ferme  est  légale. 

«Ecrit  par  moi,  Pierre.» 

Au  commencement  nous  lisons  une  formule  bien  différente  de  celles  que  nous  trouvons 
dans  les  autres  actes;  Jésus-Christ  est  dit  roi  des  rois  et  x-wv.o;  xj-oy.pâTwp  ;  on  nommait  ainsi 
les  empereurs  byzantins  par  exemple  Héraclius  :  aiwv.oç  auvcu^i:;  /.al  ay-ov-pâ-wp.  Je  crois  que 
dans  le  temps  des  pîiïens  arabes  dans  lequel  notre  acte  est  évidemment  écrit  quand  on  avait 
perdu  en  Egypte  l'espoir  d'être  reconquis  par  les  Grecs,  n'ayant  plus  un  5:-j-i7.pâTwp  teiTestre, 
on  se  dédommageait  en  appellant  Jésus-Christ  son  aîwv.oç  aÙT5-/.pâ-ra)p  2. 

Cet  acte  du  fermier  Aurélius  Georges,  ayant  le  surnom  de  Cammésis,  est  adressé  à 
TOÏç  Oau,u.«citi)-âTO'.ç  y.O'jpwvcTapfo)  xal  zhXo-^G^{o[J.o^rrfCioiq  àSïXçoTç  t£7.vo'.<;  v.cà  /.X-opovijj.c;  tsu  ixay.apto'j 
]^v.Ai\j.\).oy)oq  tsu  -/.y).  Bor,eoD.  C'est  ce  que  nous  remarquâmes  dans  les  contrats  de  This  et  Pano- 
polis,  que  chaque  v.Arjpo;,  chaque  possession  fût  partagée  après  la  mort  du  propriétaire  entre 
les  héritiers.  Le  fils  Pachymios  partagea,  quand  son  père  Psatès  mourut,  les  maisons  de  son 
père  donnant  %  à  son  frère  Jean  et  à  sa  sœur  Marie  (Papyrus  du  Louvre  n°  21*").  Un 
nommé  Aurélius  Arsénios,  fils  de  CaUinicos,  possédait  la  troisième  partie  d'une  maison  dont 

•  Ou  plutôt  un  (4)  pépons? 

2  II  est  aussi  possible  que  le  scribe  profite  d'une  expression  liturgique. 


Lettre  a  M.  Revillout,  etc.  171 

les  deux  autres  parts  appartinrent  à  ses  sœurs  Aurélia  Joliauna  et  Aurélia  Maria  (Papyrus 
Jomard).  Ainsi  dans  notre  acte  il  y  a  des  frères  héritiers,  des  fils  héritiers,  etc.  de  la  posses- 
sion du  feu  Nilammou. 

Il  va  sans  dire  que  dans  ce  cas  un  administrateur  était  le  gérant,  à  qui  on  adresse  les 
actes.  Un  exemple  très  intéressant  est  un  papyrus  arabe  de  la  collection  de  l'archiduc  Rainer 
(je  cite  la  publication  de  M.  Karabacek  dans  les  Mémoires  de  l'académie  de  Vienne,  1882). 

xcvv    ^^\    »^s\    r^K^    ^    (_5^5    ô-iy-'^    ^j-?    «-^-'    tX^r.   ^1^  V^-^*:?    li'       ^ 

jJ.AjLc^     C>JJ     X,Àa«.J     S-y^     1^      ^'^^      tVA£     iaA£     ^     XÀJtV.4.JI     ^J     ^^x  4 

j^Làxîx   y-^-^    ^^    ij^sljJc   y^X'iô    Hjij>^l    v_>jLxJI    t»5«Ji*j    ijàjçi    iX&i       5 

«Au  nom  de  Dieu  très  miséricordieux;  voilà  la  quittance  du  changeur  Maïmoun  de 
»4  deniers  monnayés  récemment  du  titre  dit  de  mitskâle;  Maïmoun  les  a  payés  à  Ja'qoub, 
»  gérant  d'Abdallah  ibn  Naoufâl.  Ce  sont  les  intérêts  de  l'an  203  (819  après  J.-C.)  du  champ 
»  cultivé  par  Maïmoun,  situé  dans  le  territoire  de  la  ville  (d'Arsinoé)  appartenant  aux  autres 
»  champs  du  dit  Abdallah  ibn  Naoufâl.  Ja'qoub  le  gérant  a  donc  reçu  au  mois  de  Rama- 
»  dhan  ces  4  deniers  du  titre  dit  de  mitskâle  qui  sont  les  intérêts  de  l'an  203.  Voilà  les  témoins  : 

i_} Jùij  slvii  ^^<£  iù'oL^j^  v^  cs^T"*^""  ^■)  1^"='  c^^^''"    ^^ 

«  Moi  Yâsiu  ibn  Zeid  el  Kirabiyy  j'écris  ce  témoignage  selon  ce  que  me  disait  le  gérant 
»  Ja'qoub,  écrit  dans  cet  acte.  » 

Le  gérant  fait  tout,  il  traite  cette  affaire  avec  le  fermier,  il  reçoit  le  fermage,  il  quittance 
ce  fermage  —  Abdallah  ibn  Naoufâl  le  propriétaire  ne  fait  rien. 

Le  notarios  dans  notre  acte  grec  c'est  le  gérant  pour  les  possesseurs  héritiers  du  terrain 
du  feu  Nilammon.  Au  commencement  de  l'époque  arabe  (vu — vnf  siècle  après  J.-C.)  on 
avait  partout  les  vo-âptoi  Xptc-iavii'.  Ici  le  mot  -voxaptw  est  précédé  d'un  autre,  il  faut  lire 
xoupo)  -  voTap((|)  selon  les  caractères  que  j'ai  vus  :  voilà  un  mot  mixte  de  y.o6pa  s  s^  «  district  » 
et  voTâptoç;  le  couronotarios  était  donc  le  secrétaire  d'un  district  traitant  les  affaires  de  la  y.ojpa 
et  de  ses  habitants;  le  fermier  adresse  son  acte  «aux  admirables  messieurs,  à  M.  le  secrétaire 
du  district  et  à  messieurs  les  propriétaires  héritiers». 

Le  champ  susdit  était  situé  dans  le  territoire  du  faubourg  dit  de  Tautalos,  TavrxXou 
irpoâcTîta.  Voilà  un  faubourg  de  la  ville  d'Arsinoé  dont  nous  connaissons  déjà  presque  toutes 
les  ruelles  et  les  portes.  Ces  TrpsâcrTcta  étaient  donc  bâtis  devant  la  ville;  ils  ne  signifient  pas 


172  Ch.  Wessely. 


les  champs  situés  devant  la  ville  :  en  ce  cas  il  faut  dire  âv  t.eVm  y.aA5'j[a.évw  ï.  7:p.  (cf.  èv 
T.tl'M  TO'j  YJiASTspou  ÈTOr/.îoj).  Lcs  éciivains  grecs  mettent  en  usage  Trpoaaxsiov  dans  ce  sens  différent. 

La  rue  àij,çôB:j  'OXu[j.7:(oj  mentionnée  plus  haut  est  erronément  écrite  àiJ,cp6oou  'Oautîîou;  le 
[K  était  prononcé  comme  le  tc  suivant,  'OAUTu-âiou,  on  écrivit  même  alors  ('OXu'Ktoij)  avec  un  seul 
•::.  Voir  d'autres  exemples  :  sTCTca;:'.  pour  èV-Tiac,  Adizirr,  Mii.t.t,,  Kar.'Kœ/o  Kajj.'Kavo,  çj^^ihke'j^oii 
Xa^av5;jivcj,  àv£V£y.sTv  chez  G.  Meyer,  Gramm.  Gr.,  §  275,  295  et  ma  note  dans  l'édition  du 
papyrus  de  Dresde. 

Le  mot  7:o\y.âp'.2v  est  d'origine  latine,  pomarium;  on  formait  alors  aussi  un  mot  hybride 
rM\j.y.^'<.vf^ç  et  TAù[xaç,vz<.QG7.  (mot  trouvé  dans  les  papyrus  de  l'archiduc  Rainer),  copt.  ROj.ve.piTHc. 

Un  passage  très  intéressant  pour  la  chronologie  des  indictious  est  le  suivant  :  l'acte  est 
daté  du  4  Payni  de  la  9*^  indiction,  mais  Aurélius  Georgios  se  fait  fermier  «  depuis  la  moisson 
de  la  10'  indiction  »  :  il  payera  au  mois  d'Epiphi  au  commencement  de  cette  10''  indictiou  : 
voilà  la  moisson  qui  est  au  milieu  de  la  9®  et  de  la  10^  indiction.  Mais  pourquoi  donne-t-il 
l'autre  voiJ.'.G\).iv.o^/  au  mois  de  Thot?  —  Les  impôts  de  l'Egypte  étaient  depuis  l'époque  ptolé- 
maïque  les  -théoi).x-o(.  z'.i'.v.y.  et  àpY'jpiv.â,  payés  en  argent  et  en  produits  du  sol.  Dans  les  derniers 
siècles  du  régime  grec  les  indictions  étaient  les  publications  de  ces  impôts;  mais  il  est  bien 
remarquable  qu'il  y  avait  deux  indictions  en  Egypte  :  1°  une  indiction  égyptienne  (voir  plus 
haut),  2°  Vindictio  Consfantinopolitana,  voir  mes  Prolegomena,  p.  50,  papyrus  de  la  collection 

de  l'archiduc  Eainer. 

;j/^lvb;  6à)6   lo   [ivoiv-Ttôivo? 

àoyfi  -''   ("v;;)  3fj~  (aùrïiç)   '.B  iv[St/,Tiôvo; 
papyrus  du  British  Muséum,  publié  par  M.  Revillout,  Revue  égypt.,  I,  102,  n"  1. 

|j.Y;vt  ç-awsi  Yj  tvc  Tptrr;ç  a^y^  id  est  ij.r,vl  ©atoçl  r^    'voixtiûvoç  iç'.rr^ç  ipyri 
papyrus  du  Louvre  6846;  nous  le  publions  à  cette  occasion  comme  notre 

Papyrus  IV.  (a.  592.) 

Haut,  e-ô-^",  larg.  lO-ô'^". 

[èv  ôv6{JLaxt  ..... 

•j 

2  |5aaù~taç  zo  soasP)  -^|ji(ov  osair) 

■j 

3  '^Xj  {X7.apr/.L0'j  zi^Bpio  zo'j  aicovj 

4  aoyouat)  szooq  i  '^awcpt  %C  [ct]p/ 

5  hBv.az'qç,  iv^  cV  ap/ 

6  Vedoç  5t.a%ovoç  aycaç  xaO-oXtxT] 

7  cXxÀT^aïaç  dcoç  aira  .  .  .  o  .  .  'f 

«Au  nom  de  Jésus-Christ  Dieu  et  Sauveur.  Sous  le  règne  de  notre  très  pieux  Seigneur 
»Flavius  Maurice  Tibère  le  perpétuel  empereur,  an  X,  au  mois  de  Phaophi,  27,  au  commencement 


Lettre  a  M.  Revillout,  etc.  173 

»de  la  10"  iudiction  en  Arsinoé.  Nilos,  diacre  de  la  sainte  église  catholique,  tils  d'apa  .... 
»  (a  fait  cet  acte).  » 

On  peut  constater  que  c'était  là  Vindictio  Constantinopolitana  ■  car  le  commencement  de 
l'indiction  égyptienne  est  indiqué  dans  le  papyrus  2\  bis  du  Louvre  : 

■\  lEaccXîtaç  /.a;  'àtQTzozzw.ç  -ou  OîtoTaxcu  r^\).w)  Sssttotou  r/)ç  ot/.ou[AcvrjÇ  ©)./  [ji.aup'.7.tou  -ou  atwvtou 
au^ousTou 

/.ai  auTO/,paxopoç  ôtouç   Ssxaiou  •irauvt  •/.  ûrp/r^   ca   '.v5/  sv  /.tof;//;  Stvoç. 

Je  crois  que  cette  chose  frappante  s'explique  très  bien  :  l'indiction  égyptienne  était 
Vindictio  des  impôts  en  produits  du  sol,  tandis  que  Vindictio  Constantinopolitana  était  rela- 
tive aux  àpYupixà  TSAY],  aux  impôts  en  argent.  Dans  ce  cas  (celui  du  papyrus  III)  il  va  sans 
dire  que  les  hommes  eurent  besoin  de  l'autre  écu  d'or  dans  le  mois  de  Thot. 

On  sait  que  les  monnaies  d'or  en  circulation  perdent  bientôt  de  leur  poids  et  parce  que 
l'or  avait  une  très  grande  valeur,  on  les  rognait  souvent;  c'est  le  motif  pour  lequel  ou  déclarait 
dans  les  contrats  le  plus  rigoureusement  possible  les  sommes  payables  en  or;  par  exemple 
vo[jLtG[;.âita  puTrapâ  étaient  des  écus  d'or  dont  la  surface  est  usée  ;  ici  les  mots  w;  vo;j.tT£ÛcvTa'.  sont 
relatifs  aux  frais  des  monnaies  d'or.  La  somme  est  écrite  en  lettres  et  en  chiffres  /puaîou 
vo[j.tc;p.âtia  Buo  wç  vo[xtT£6ovTat  =  yp  v   [j  w;  vç. 

Malheureusement  nous  sommes  empêché  par  des  grandes  lacunes  de  comprendre  les 
autres  conditions  de  la  ferme,  les  fermages  payables  en  produits  du  sol.  Le  mot  /.optoi'cu  est 
une  autre  forme  pour  xoptâwou,  coriandre.  Le  mot  •/joîccp.cu  est  erronéraent  écrit  ou  c'est  une 
expression  vulgaire  pour  r,BuôGiJ.ou.  Le  mot  ^zXzvSwv  est  sans  doute  dit  dans  l'usage  des  Égyp- 
tiens pour  PeXe-Aioiv  ou  (îsX£-/.o)v.  Tusxôvtv,  pluriel  Trcirôvtx,  porte  la  forme  néogrecque  pour  -cov- 
c'était  donc  la  signification  d'un  petit  cueilloir i. 

poâç  pour  poiaç  prononcé  royas;  on  prononçait  oydoyé  Boyédvomion,  mais  on  écrit  ovos-r; 
Bor(5po[Aia)v  ;  au  contraire  on  écrit  ^oéw,  poâç  en  prononçant  poyéo,  royas. 

El  3è  èccco)  /a[j.at  {ya\)X)  (;.îav  u-r^pcciav  èzt  tw  \>.z  Tzaçiy-fr/j-vi  to  -/Àp^a  aùr^;.  Voilà  une  cons- 
truction elliptique  pour  si  sacw,  èdcrw  èxl  tw  \>.z  TrapacxîTv^  on  lit  dans  d'autres  contrats  :  owcco 
cot  XÔYw  ';:pos-{,ur.ou  io  ■/Àç,\).a.  Ici  le  mot  •Aép[/.a  ne  signifie  pas  les  petites  monnaies  de  cuivre,  il 
est  dit  pour  «argent,  pecunia-»]  comparez  le  mot  français  argent,  argentum.  qï  pecunia. 

'H  [^.îcQws'.ç  xupi'a  £^  ÛTCapxôvTwv  [;.ûu  ■âscvtwvj  nous  lisons  dans  les  autres  contrats  :  •jzoy.£tpi.£va)v 
\i\>l')  -wv  û'âap/ôvTwv  v,yX  iCKap^évTwv  [Jiou  Tïâvtwv  £V£yupou  Xôvw  -/.a'.  'j'::oO-ff/.-/;<;  0'.-/.o(îw  :  Vous  avez  la 
garantie  donnée  de  toutes  mes  possessions  présentes  et  futures  étant  en  gage  et  hypothèque. 

Papyrus  V  (saeculi  VI/VII). 

Papyrus   du  Louvre  n°  7044;  haut.  !&""',  larg.  19'^'»;  collé   à  gauche  10""  de  la  marge;  le  lieu  collé  est 

grand  1'^'". 

0 

1  .  .  .  .  vo{xta[Jiaxiov  sv  p[o]'jrap/  /p  v  a  p/ 

2  yapttYjao)  oô  u{jiiv  Xoya)  O'^rjr^pcaiac  {Jitav  5ca  {jilocç  ctç  oXov  tov  cvcaotov 

1  Nous  alléguons  une  passage  du  Pseudo-Arcadius,  p.  14,  20  B.  r.inor/  tô  x:e-wviov  7:£-(Îjv(?)  K£f;i£y.Tt/.o'v  ; 
s'agit-il  ici  d'un  mot  collectif? 

23 


174  Ch.  Wessely. 


4 V  o£[j-a  cV  7,7.1  to  xczpo'j  c-kL  {JLTjVaç  §ac>  tcocc  xolàolO-co 

5  .  .  .  .  ■x.ixpoo  -ircTTOVia  (?)  xat  ^rpoaaira^  poaç  oVcVTjXovîa 

6  y.(y.i  TCO  v.aipco  t(i)v  ■7t]spaL7.o)V  [TujaXw  [xiav  oia  {Jiiaç  Tîcpacxot,  -Ccaaapay.ovrcx. 

7  %at  rco  xaipto  tcov  aarjptov  irspaiy-a  ^taicoaia  y.a'.  TTô^iovia  tsaaapa  v-oci  t/(J.siç 
8 u^ïT^pcOLav  {Jiiav  y.rxc  ÀctjSîW  {Xc  oivo  y.avco'.v  £v  a'jzr^z  {J-ev 

9 aw^rjpja  TCùv  [XT^yavcov   £{jlo'j  os  tuooovioç  f^v   avtXcL7.v   twj  'joatoç 

10  ....  roo  Tsy-jxovoç   apitv  irapcyciv   a'jv   os  x(ov   rpfJÀaxcov  %£  to'j   xspatxswç 

11 cl  Oc]  [j-c'.VTj  ya[iat  \iiol  ^irvjpcaia  (oars  |Jic  oo'jvoli  zo  y,cp[JLCt  ocj-rr^; 

12 PodXcoO-t;?  rr^ç  jj-ia^coaccog  av-t':rapaQoaa)  ct'jrYj 

13  tov  T07Ï0V  iTc'f  c/.ojy.aXr^îJ-cVov  {j-cta  .zr^z  Trpo/pciaç  y.ccL  tcûv  aior^pcov 

14  xa^wç  y.ai  '^zapciXJr^cp&v  T^[jLia^3  %opia  y.oci  cTrspcoixj  "l*  aop/  '^iKocbvo^ 

y. 

15  0  Tupoj^/  G-ot/ci  {J.OL  T^  {xia^-j  co:  Trpo/ 

17  di  emu  Cosma  esemiotliai  d^^  hi  cJJ-o'j  Koa[JLa 

Le  n"  III  rassemble  beaucoup  à  notre  u°  V.  Ou  peut  conjecturer  que  c'était  le  contrat  de 
ferme  pour  un  autre  fermier  et  peut-être  du  même  jardin.  Le  plus  grand  profit  pour  nous  c'est 
que  les  mêmes  phrases  se  trouvant  dans  les  deux  actes  facilitent  et  assurent  leur  déchiffrement. 

«Moi  le  fermier  Philoxèue,  je  Vous  donnerai  ....  un  écu  d'or  impur;  je  Vous  donnerai 
»  aussi  comme  tribut  (dun  servant)  toute  l'année  des  radis  7  gerbes;  de  coriandre  une  gerbe; 
»de  menthe  ....  au  temps  de  la  moisson  des  citrons  un  cueilloir  ....  et  une  fois  pour 
«toutes  90  grenades;  et  au  temps  de  la  moisson  des  pêches  encore  40  pêches;  et  aux  jours 
«caniculaires  200  pêches  et  4  petits  cueilloirs;  mais  nous  .  .  .  nous  recevons  un  cueilloir  de 
«raisins'  et  le  fer  pour  les  outils;  nous  puiserons  l'eau  dans  le  terrain;  je  payerai  pour  Vous 
«les  salaires  du  charpentier,  des  gardiens  et  du  potier.  Quand  je  néglige  un  service,  il  me 
«faut  payer  pour  cela  une  somme  correspondante.  Quand  Vous  me  voudrez  congédier  de 
«cette  ferme,  je  Vous  rendrai  le  lieu  en  bon  état,  avec  la  machine  hydraulique  et  les  outils 
»  de  fer,  comme  je  les  ai  reçus.  Cette  ferme  est  légale.  Moi  Auréhus  Philoxèue,  le  susdit,  je 
»  suis  content  de  cette  ferme  telle  qu'elle  est.  Ecrit  par  moi  Cosmas  le  notaire.  » 

Dans  un  autre  contrat  nous  lisons  Tupoxpsia  wzkp  à^nAdac,  c'est  donc  la  machine  hydrau- 
lique pour  la  àv-7.ô{a  toj  uBaii;  appartenant  au  jardin  ainsi  que  les  aihr,px'^.  BouXwôy;»;  est 
écrit  avec  un  lapsus  calami  pour  (isjXr^ô^ç. 

1  Cependant  je  trouve  dans  un  papyrus  Rainée  ce  passage  :  oXfya  xavîèia  x:£VTa?caTiaîa  [xou  ^a^iasnoj- 
§aaov  àr.oGzsfKixt.  eî;  xrjv  iop-rrjv,  en  conséquence  il  s'agit  ici  d'une  mesure  de  2*74  litres  pour  le  vin. 

2  Ce  mot  signifie  peut-être  aussi  les  avances  du  propriétaire  faites  au  fermier. 


Lettre  a  M.  Revillout,  etc.  175 

.    Papyeus  VI  (saeculi  VI/VII). 

Papyrus  grec  du  Louvre  162,  6600. 

1    [LBza  Travroç  aozr^z  zo'j  Baacou 

3  apL^{JlOU|JLcVOV    rjiTzrj    %aW(OV    Z'ri[ç    YcVO[JL£VY]Ç 

■J 

4  eu  aozric  puaîcoç  zo'j  oivo  cVca'ja[uoç  .  .  sxaato'j 

5  {jLîpouç  c^  auxT^ç  Tuaps/ovroç  toc  %GO'f[a 

6  syo)  £^ airo  aixiCcXotvwv  tod 

7  spyaaaaôat  £V  aorw  xocc  rc-orov  cTTI 

8  ':roLr^a(o  (oars  {jls  luapcta/cW  a'JTTj  xo  oirsp  a 

9  svta'jrtov  si  h~  %ai  TTSpi'fpovTjaa)  £i?  rr^v  [airspYaacav  -o'j  ycopioo  ro'j 

10  ojjLcrcpoD  r^  y.[araYV(oa6]co  scç  y.XoiiTjÇ  {J.iaç 

11  a'n;c)(a) oltzX 

12  ôTTi  rco  o[j.co[v OTro7,ct[X£V(ov  rwv  'j7ra]pyov[-toV[j,o'j  7:7.vt:cov  tj  (jLcaô-œacç 

13  Tcopia  xai  siucpp/ 

ô  £  O'J 

Verso  >t](o[Jij  aXî^av  vy^go'j  Yc[va][JL)  airo  av 

Voilà  les  débris  d'im  contrat  relatif  à  la  ferme  d'une  vigne  : 

«Je  reconnais  avoir  loné  de  Vons  une  vigne  avec  tous  ses  droits,  étant  obligé,  sans 
»  dédain,  sans  méjOTS,  en  datant  de  la  nouvelle  vendange;  je  te  donnerai  (3)  parts  des  produits; 
»moi  je  me  procurerai  les  cuves  pour  ma  part  (tandis  que  Vous  vous  procurez  les  Vôtres). 

»  Je  travaillerai  dans  la  vigne,  je  conserverai  tout  en  bon  état,  je  payerai  aussi  le  tribut 

»  quand  je  mépriserai  le  travail  ou  quand  je  serai  attrapé  d'un  vol  manifeste  (il  me  faudra  .  .  .  .) 
»le  louage  est  légal. 

«  Louage  d'une  vigne  dans  le  territoire  du  village  Aléxandrou  nésos  fait  par  Anoup  ...» 

Nous  joignons  ici  un  fragment  d'une  à-:B£i;t;  exécutée  aussi  dans  ce  village. 

Papyrus  VII. 

vn®  siècle.  Papyrus  grec  du  Louvre  173,  6583. 

u 

1    Y^^PT^^"^  ^^^"^  icoavvo  zoo  %ac  ao^ax-covoç  xac  [jl 


23* 


176  Ch.  Wessely. 


3  xtcaÔcVroiV  goi  Trap  r^pifov   cTti  y.a)[i)   aXcçavopoa  vrprj'j  zoo  ap[acvoc':o'j  vo|jloo 

4  X SIC  'îîÀTjpïjç 

Verso:'}'  ocTrociÉ^  [xtaâ-  stco 

Il  faut  doue  coustruire  aiusi  :  ïr/^o^  y.al  â7:X-/;pw6r(V  (oià  y.î'.pi;)  FcwpYio; ^apà  cou 

....   j-èp  Twv  y.TtcGévTwv  coi  r.xp'  •^[^.wv   ....    sic  7:X-^p£; vo;j,iq.;.XT'.a 

«Moi  Géorgios,  fils  de  mou  père  Jean  dit  aussi  Sylacoue,   et  moi  M 

»de  la  ville  d'Arsiuoé,  nous  avous  reçu  de  Vous,  Timothéos  l'illustre  pagarque,  pour  l'édifi- 
»  cation  des  bâtiments  faits  pour  Vous  dans  le  %-illag'e  Alexandrou  uésos  (notre)  argent  totale- 
»  meut.  » 

Le  mot  v.vZvy  c'est  notre  mot  hâtir;  dans  le  contrat  II  publié  par  moi  dans  les  Proleg., 
p.  56  un  nommé  Âùp-(;Aio;  MY;vâc,  briquetier,  fournit  30000  tuiles  pour  le  y.T(c[j,a  toj  hztv/lzj  toïj 
y.Tï'Co[J.évcu. 

Elç  ■KAy;pr/ç  est  erronément  écrit  pour  £?;  7:Aï;psç.  Notons  les  abréviations  yM\>.i  =  yM\^.^f^z^ 

Voilà  un  avis  relatif  à  des  affaires  d'un  fermage  d'une  vigne. 


Papyeus  VIII  (saeciili  VI/VII). 

Haut.  O-ô"^"",  larg.  lO"^". 

1  syco  sya)  KoavTjç 

2  Nomeu  propr.  to)  saXapsaiatO) 

3  uco)  ro'j  tr^ç  ô'jXoCjSoix:  {JLfvr^ixr^ç  Nom.  pr. 

4  otvoo  [jLooatoo  soapsaroa 

5  ao'j  ta  y^oo^J-  ir^-^Oc/ovrcov  r[oa  locod  picpo'jç 

6  avajJLfpipoXfoç  By^ja/ft]  \i.[rfK 

«  Moi  Jean  le  fermier  je  suis  prêt  de  donner  à  Vous  le  très  pieux fils  de  feu 

»  le  pieux de  bon  moût  une  telle  quantité,  pourvu  que  Vous  donniez  les  vases  pour 

»  Votre  part;  je  donnerai  cela  sans  aucune  prévarication.» 

Le  fermier  Jean  a  loué  une  ^dgne  pour  trois  quarts  de  la  moisson  qu'il  lui  faut  donner 
au  propriétaire;  c'est  dans  le  temps  de  la  vendange  qu'il  lui  annonce  avoir  le  moût  prêt, 
afin  que  le  propriétaire  fasse  venir  les  vases  pour  y  placer  son  moût. 

Sou  .  .  ,  T.a.ç>zyz^~Mv  est  erronément  écrit  pour  coù  Trapé/ovro;;  l'écrivain  avait  en  tête  le 
j[^.wv  «Vous». 

àva^içi^ûXo);  c'est  dans  les  actes  coptes  le  iiô.Te.M'^iûoA.ie.. 

Voici  un  acte  relatif  à  l'acquisition  des  vases  par  le  propriétaire  terrien. 


Lettre  a  M.  Revillout,  etc.  177 


Papyrus  IX  (a.  635). 

Papyrus  du  Louvre  n°  6908;  '63'^'^  haut.,  6-5'^"  larg. 

u 

1  cV  ovrj[i.azi  nrjaoa]  /pioro  zoo  y,[apt,oo  Yjpicov 

2  xai  Travcwv  ta)v]  ayicov  paaiX/  [xai]  'bscKOz^siaç 

3  Torj  £oacpcaxaxoL>]  xai  cpiXavâ-pcoiroo 

4  Y]{j.a)V  §£01:01:00  ^Xj  YjpaxXsiou  tou  YaX[YjVO'catoo 

5  aoi:o%p[axopO(;]  Ttataapoç  cxooç  %£ 

6  ^apfj-ooxJ-L  %h  oyBoYjC  tVj  £V  ap/ 

7  ro)  X7.[j-7upotat(o  looaxco  uco) 

8  xoo  tYjç  [xaxapcaç  {j.V7][jl7](; 

9  V£tXa[JL|xa)VO(;  airo  tïjç  apaiv) 

10  ':coÀ£coç  aopTjXtoç  avooir 

11  7,o'jçpoy,£pa{j-oopYoç  oioç,  iraoXa 

12  aTuo  rïjç  aoTY^ç  '7roX£a)ç  airo 

13  ajjicpoooy  '7cap£{JnSoXY^ç  yj 

14  o[JLoXoY(o  §£0£yi)-ac  irapa  ttjç 

15  0|X£T£pac  XafJLTcpoxïj-coç 

16  o'7U£p  xataa%£aTQç  %atvoy.oo(p/ 

17  y.axaa7,£uaCo[j.£V(ov  aoxYj 

18  irap  £[Jtoo  sic,  Xoyov  poa£0)c 

19  xTjç  auv  £iaiooa7]ç 

20  £va]xT^ç  ivj  6Tr£p  |j.£V  §003 

21  too  ':rap£X^ov'coc  [J-V]Voç 

22  xo^t  vo{JLta{j.axa  xpia 

23  xat  uir£p  zoo  Tzapovzoç 

24  [XTQVOÇ    (pap{JL0O^L   XYjC 


178  Ch.  Wessely. 


25  Tuapo'JOTjç  oyoGr^ç  ivj 

26  aXXa  vo[JLca(iara  ^oo 

27  o[xoo  vo[j-ta{JLara  tuîvzc 

28  hiya  tœv  aXXtov  tpuov 

29  vo[JLca[JiaT:a)V  cov  coyov 

30  Tzap  rxozT^ç  aizo  zo'j  6a)8 

31  [JlT;VOÇ    TfOV    y-OCL    SY^SipL) 

32  z[ri  'irJpoTcpa  |jlod  o[iciXoYta 

33  y,[at  Trjpoç  0{j.£r£pav  aa^paXciav 

34  xa'Jtr^v  TCS'TCOLT^fJiai  a[jiLV 

35  xTjv  aTTOQci^tv  Tcapiav  ooaav 

36  %ai  c7r£pco{JL3  "}•  aopj  avoo'jr 

37  %c;0(poy,Epa[JLoapY3  azoïyei  {jloc 

38  iravta  (oç  irp  "l* 

ty 
di  emii  iustu  es/  5t  c{xoa  touaxo  syp) 

Verso  :  o{JLoXoY[ta  ]ayp/  avou-rc  %oo«po%£pa[jioDpYj  ctç  zov  Xoc[JL7up/  co'jarov  "i* 

«Au  nom  de  Jésus-Christ  notre  Seigneur  et  de  tous  les  saints;  sous  le  règne  et  le  gou- 
»vernement  de  notre  très  pieux  et  philanthrope  souverain  Flavius  Héraclius  le  sérénissime 
»  empereur  et  césar,  an  XXV  au  mois  de  Pharmouthi  24  dans  la  8^  indiction  en  Arsinoé. 

«A  Juste,  l'illustre  fils  de  feu  son  père  Nilammon,  natif  de  la  ville  d' Arsinoé,  dit  son 
»  salut  Aurélius  Anoup  potier,  fils  de  Paul,  de  la  même  ville,  de  la  rue  de  camp.  Je  reconnais 
»  avoir  reçu  de  Votre  illustre  Altesse  pour  la  fabrication  des  nouvelles  cuves  fournies  pour  Vous 
»  par  moi  pour  la  vendange  de  la  9®  indiction  future  —  avec  Dieu  (pour  y  conserver  le  vin 
»et  le  moût)  —  un  prorata  de  3  écus  d'or  pour  le  mois  passé  de  Tybi  et  pour  le  présent 
»mois  de  Pharmouthi  de  la  présente  8®  indiction  un  prorata  des  autres  2  écus  d'or  —  cela 
»fait  5  écus  d'or.  Les  autres  3  écus  d'or,  que  je  reçus  au  mois  de  Tybi,  ne  sont  pas  comptés; 
»ils  font  le  sujet  de  ma  première  homologie.  Mais  pour  Votre  sûreté  j'ai  écrit  cet  acte  légal 
»et  authentique.  Moi  Aurélius  Anoup,  potier,  je  suis  content  de  tout. 

«  Écrit  par  moi  Justus  le  notaire.  » 

Les  y.ouça  étaient  donc  une  chose  très  chère  et  le  potier  Anoup  eut  de  bonnes  affaires. 
Le  mot  ■/.o'jçoy.£pa;j,cupY6ç  est  composé  de  y.ojça,  y.épa.uLo;  et  -ep^ôç;  le  y.îpa|j.sç  ^rAr^p-*;;  ol'vou  (Herod. 
III,  6)  et  les  ol'vou  y.ouço:  donnent  le  mot  xouçoxepa[jLoç. 


Lettre  a  M.  Revillout,  etc.  179 

Il  va  sans  dire  que  la  vigne  était  très  grande;  on  avait  besoin  de  cuves  d'une  valeur 
de  8  nomismata  pour  y  conserver  les  produits.  Je  crois  que  le  propriétaire  feu  Nilammon 
était  le  même  que  celui  dont  nous  avons  trouvé  mention  dans  le  contrat  III;  il  était  sans 
doute  grand  propriétaire  terrien. 

Les  abréviations  dans  noti-e  acte  sont  ceux  :  [SxïtXc  =  (âaffiXetaç,  çXi  i=  ^Xaouîcj,  -/.ouço- 
X£pa|j.O'jpYj  =  y.ouoo/,epaiJ.cupYÔç,  apctvj  =  'Aps'.vcÏTÔiv,  /j  =  /aîpï'.v,  xa'.vc/,o'Jç/  r=  y.aivcy.ojçwv,  cjv^  = 
Guv  esu),  loGf  =  Sicjcwç,  /.aiJ.-p/  =  Xa|j,7:piv  ou  AaiJ.TTpcTatcv,  zvy,t'.i).y  =  £Yy.£[j;.£V(ov,  ajpc  =  Aùpï^Atcc, 
xpo"  =  T,p-AV-xi,  es/  =  esemiothe  =   £sr,;j.s'.w6y;. 

Au  commencement  notre  acte  diffère  beaucoup  des  autres  contrats  dans  le  protocole  :  âv 
èvî[j-a-i  'Ir,cou  Xp-.c-rcj  tcj  y,jp(c-j  y.xl  ttxvtwv  twv  âv^wv  et  alors  tcO  vaXT/^c-XTou  aiJTOy.pâTCpîc  ■Ay.by.poc- 
on  trouve  presque  toujours  tcu  alwvîcj  aùvoicTTcu  y.at  a'jToy.pâTcpsç;  c'était  autrefois  la  manière 
de  dater  les  actes  des  empereurs  romains,  par  exemple  :  Itouç  SwS£y.aTOj  aù-oy.pâ-cpoç  xxbasoç 
Mâp7.ou  AùpYiA'ou  S£2u-^pîu  'AA£Ç(zvSpcj  e'j7£iicO;  rjTJXîjç  G£3a(jTou  (papyrus  69  du  Louvre). 

La  subscription  est  écrite  en  caractères  latins  et  en  grecs,  voilà  d'autres  exem])les  : 

f  di  emu  Kalu Z',  £jj.*  y.aX'  .  .  .  .  j 

j  di  emu  helia Si  z\).z''  y;a 

f  di  emu  iohannu  .... 

j  di  emu  zacliariu  .   .   .   O'.  z\j^  X.T/y.^'.z^  .  .  . 

t  di  emu  mhna  .  .  .  .  c     e\j.o''  jr/;va 

f  di  emu  strategiu 0/  £[xou  crpar/JY'.oj 


Papyrus  X  (saeciili  VI/VII). 

Haut.  17'^'",  larg.  \Z<='^. 

1  .  .  .  ii:ap£X6](i){j.£V  yj  5La7,coÀoc:to{j,£v  t:ov  pooXo[i£Vov 

2  .....  cV  sC'^î'CYjOêV  TT/^  Trapo'jsav  %0[xtaaa6ac  iroLp  y^jjlcov 

'jrapsX^siv 

r     _ 
4 svcso^cV  |JiY^r£  [JLYjV  oiaxcoXoaai  ov  poXcC  Tcotxa 

5 aorajç  cpyaaaaôaL  aXXa  y.occ  y,r^p£a'.  T/,xa?  sv  TraaTj 

6 i]ov  poXo{JicVov  auraç  cpyaaaa^a'.  00  §L7.xo)X'jaa)[j.£v 

7  oTroarêLXa{JL£VGt  t]]  xpotj^avxaç  ti  ôtc  tcov  ocrj^cov  apoupwv 

8 £<;...  %at  TcaXEoov  £l  §£  'îwap£À6o[Ji£V 

9  7j  OLay.]a)Xyao)|jL£V  riva  Y£a)pYT^aai  aa-uaç  cTïi  xo)  Y][JLCtç 

10  §(oactv  Xoyco  irpoarJiiioD  yyjoioo  vo\Li3\kaziaL  T£aaapa  yp  v  §  (oç  vo[i{JL3 


180  Ch.  Wessbly. 


11  SI  hs  Y.^o^]o\iBV  o[';r]oar£tXa(JL£VOL  zi  sx  t(ov  a'JTWv  otpo'jpwv 

o 

12  Swaôtv  irpoatiiAJo'j  /paato'j  vo[jita{Jta-a  cixoat  /p  v  %  (oç  voiiLisosiai 

13  oizoY.Bizai  0£  £tç  toajto  izolviol  TjiJicov  ra  UTuap/ovra  xat  'JTCapÉovra  xoti 

14  £'îr£p((OTYj\)'ctç)  (D{JLoX(ÔY7]aa) .  .  .]vcpoç  'Jioç  Scwvoçj  TraTïVoGtciç  o  xotc  iraXooç  oloç 

15  oTor/ct  vj[JLtv]  TTCtVTa  ta  TcpoysYpaii.'j.svct  (oç  irpox/  a'jpr^Xtoç  [xapxoç 

16  syp^^*^  ^'^^P  Q^^'"^'''   c<.Ypa[X{iar(ov]ovra)V  ....  ovoi'ftoç   rr^ç  gcy^ccç   xa6oXc%Yjç 

17  »xaptap(o  "l" 

[f  di  emu  helia  esemio[thai  dVe","  5î  £{J-c-'j  r^Xia/J 

« pour  le  cas  où  nous  contreviendrons  à  ces  conditions  ou  bien  où  nous 

»  empêcherions  les  travailleurs,  Votre  Altesse  veut  recevoir  de  nous  cette  sûreté.  Or,  nous 
»  reconnaissons  volontairement,  garantissant  mutuellement,  que  nous  ne  conti'eviendrons  jamais 
»  depuis  ce  temps,  ni  n'empêcherons  homme  quelconque  que  Vous  laisserez  ti-availler  dans  ce 
»  champ,  mais  nous  rendrons  partout  public  qu'un  tel  travaille  dans  le  champ.  Nous  ne  contre- 
»  viendrons  pas  de  telle  manière  que  nous  volions  ou  celions  quelque  chose  relative  à  ces 

»aroures Quand  nous  contreviendrons  ou  quand  nous  empêcherons  quelqu'un  de 

»  travailler  dans  elles  (les  aroures),  il  nous  faut  payer  une  amende  de  4  écus  d'or  comme 
»ils  sont  en  cours;  si  nous  volons  ou  celons  quelque  chose  relative  à  ces  aroures,  il  nous  faut 
»  payer  une  amende  de  20  écus  d'or;  nous  le  garantissons  sur  tous  nos  biens  que  nous  possé- 
»  dons  à  présent  ou  à  venir.  Nous  donnons  notre  assentiment  à  tout.  Moi  .  .  .  .  lils  de  mon 

»  père  Théon  et  Papnouthios,  fils  de ,  dit  aussi  Paul,  nous  sommes  contents  de  toutes 

»les  propositions  écrites  plus  haut.  Moi  Aurélius  Marcus,  j'écris  pour  eux.  Moi  ...  (le  diacre?) 
»de  la  sainte  église  catholique,  fils  d'Amaron,  je  suis  témoin.  Ecrit  par  moi  Hélias  le  notaire.» 

L'acte  est  adressé  à  une  Kocii.zzpôxr^c  ou  une  cùXa^sia,  etc.,  il  faut  donc  construire  ainsi  : 

.    .    .    spoç  jlbç  0£(i)voç  /.al  IlaTr^O'jOtoç   .    .   .   iw  AafjLXpo-âia)   .    .    .  yaîpstv èçi^t7;5£v  -q  Ji^s-spa 

XasA-piTr^ç  Tf,v  -rrapoucav  -/.oi^-fcrauBa'.  -ap'  -^[/wv  àssâXî'.av-  voir  le  grand  papyrus  grec  publié  par 
^I.  Hartel  dans  les  Wiener  Studien  fur  dassische  Philologie,  V,  p.  3  .  .  .  un  tel  adresse  son 
acte  à  <ï>Xaou(w  Eù-o)^îco  tw  [xsvaXo-pctTâîijTaKp  /.al  èvBoqîTaTcp  xôfxiT'.  •  TrposîAÔwv,  dit-il,  TiT.po^y.iv.hrf/.oi 
tt;v  stjV  pieY^^szps'Trc'.av   ■   âl^y^r^sîv   Sa  IC   iy-(poi.oou  b\io\o'(ioiç  ~o  a^saXèc  •rrap'   è\j.o\>  oé^a-Sai. 

Notons  les  abréviations  :  ovT  ^1\e:  ■=  :v  ys  ^îjXîi,  -/p  v  o  wç  voîi,[JLi  =  /pjstîu  '/0'^<.z[i.i-:x 
Tcssapa  o)ç  vc[jL'.-ï£ÛovTa[  (pluriel),  ~poy./  =:  ■rzçcv.s'-'X'.  ou  7:pGX5i[j.£voç,  c-/.-/,A  =  £xx,ay;sÎxç,  ôyp  =  ^Yp^?^ 
ou   ï-^çœlicf.. 

Il  va  sans  dire  que  l'amende  d'un  vol  est  plus  grande  que  celle  d'une  contravention; 
mais  les  4  et  les  20  écus  d'or  étaient  une  amende  exorbitante  que  les  deux  hommes  ne  pou- 
vaient fournir  qu'en  travaillant  plus  de  dix  ans.  Une  belle  maison  par  exemple  ne  coiitait 
que  2  nomismata,  une  petite  deux  tiers  d'un  nomismation;  300  litres  de  bon  vin  1  nomism., 
etc.  Les  hommes  se  gardaient  donc  certainement  de  contrevenir  à  ces  conditions  fixées. 

Nous  donnons  ici  sur  cela  une  série  des  contrats  dits  iaisOwseiç. 


Lettre  a  M.  Revillout,  etc.  181 


Papyrus  XI  (saeculi  VII). 

Papyrus  du  Louvre  7400;  haut.  SO*^",  larg.  11 -S"". 

1  [cV  ovo'jJLCt-'.  zrj'j  '/,'jrjLO'j  y-ai  ozaizozo'j  irpo'j  ypiaTOi)] 

u 

2  [tod  6cOD  y.ct'.  aa)-Y^poç]Y/(JLa)V  3  -r^ç  ayiac  Ôcoroxo 

3  xai  7:a.v[-cDv  tcov  cty.cojv  z'J|3'.  tco  lo  1V3  £V  ap/ 

4  '^Àj  aO[avaaico  -o)]  Àoy^œ-aza)  sxS'.y.o) 

5  za.'jzri[ç,  zr^ç  apaivoi]ro)V  itoXscdc  ÔsoScopo; 

6  '::apa{j,ovap[y7]ç  irpcop'jjrspoç  oioc  roo  {laxaptc* 

7  aojjiswvtoa  [a:ro  zri\ç,  aozriç,  'jîoX[c(d]ç  a-^ro  [apij'f/ 

8  GcpaTTctr^?  yj  ojJLoXoyo)  £X0D[aia  yvcoJiitJ 

9  {ji[c{JLi]a6a)y,=va'.  cfiao-ov  ir^v  (cva  Àoycov)  £7ci 

10  zJEAouvra  -Kpo;  c/.'j-tjv  zy]v  TïapaiAOvr^v  .... 

11  [Xc  irap  cz-'j-r^ç  sytov  svtî  .  .  .  Ài  .  .  %ai  .  .  . 

12  y.ai.  ctypo'j^  oscivrcoç  %at  ay.axaYVa)ara)ç 

13  y.aL  ayaTCtYVcaaro)^  %ctL  cxouaioç 

14  clÇ    cVlCt'J-OV    cV    apt6[J.0'J[J,cVGV    aTTO 

15  VcO[JLr^VcC01Ç    zoo    OVTOÇ    {AYjVOC    TO^l    TïjÇ 

sic 

16  TrapooaY^i;  têaaapaaxctt§£y,aiYjç  ivB/ 

17  y.oLC  0£çciLa6ac  [jl£  irap  a'j-Y]?  Xoyco  [xiaôou  £|jlo 

18  eiç  zov  a'j-ov  £va  EVia'j-ov  acro'j  apzapaç 

19  £vv£a  '/.m  yyjzio'j  vo{JLta|JLa'ctov  £v 

20  api6[jL'.c/V  £yov  xEpctTia  cwoai  xpoa 

21  £y,£p[j.OL':o'j[JL3  co  £5£çoc[jLr^v  -îrap  a'jzriz 

22  s^neobsv  r^'^r^  zo  £tpTj[Ji£Vov  £v  vo}!) 

23  Xap£tv  Z  £[JL£  xai  {j.  £ç£36at  oo^rfiBiaç 

24  Tcov  -£  op'JY^''^  ^^^  EOpTcov  yai  £av  irpo 

25  rr;c  'co'j  £Viac)toL>  a'j|jL':îXY^p[a)a£a)^ 

26  C'^'^'^î^^  avaycopY^aai  £x  xy]ç  'jrapaptovïjç 

27  a)aû£  [i£  avaâoavat  o(jllv  (a)  £lX[y^(p]ov 


24 


182  Ch.  Wessely. 


28  %ap  OLOzriç,  OTCSp  e\}.ou  xai  ajxiaÔov  {j.£ 

29  ava)((i)pY]aat  7]  oixoXoyta  %'jpca  5  sicspo);!)  "j" 

t 

te  ^  _ 

liiabiHGiç,   Y£]vo{JL3   OTTO    -O-cO^copoo   TcapafJLOVap/   uto    ao[jL£(oVetoo    sic 

«  Au  nom  de  notre  maître  et  seigneur  Jésus-Christ  notre  Dieu  et  Rédempteur,  et  de  la 
»  sainte  mère  de  Dieu  et  de  tous  les  saints,  au  mois  de  Tybi  de  la  11®  indiction  à  Arsinoé. 

«  A  Flavius  Athanasius  le  très  savant  syndic  de  cette  ville  d'Arsinoé  dit  son  salut  Théo- 
»  dore  le  paramonarque,  fils  de  feu  Syméonios,  étant  de  la  même  ville,  de  la  rue  de  Thérapéia. 
»  Je  reconnais  avoir  loué  une  chambre  des  appartements  dans  la  même  paramonée  ...  et  des 
»  champs.  Je  l'ai  loué  étant  obligé  sans  dédain,  sans  mépris,  à  partir  des  calendes  du  mois 
»  de  Tybi  (du  1"  Tybi)  de  la  présente  14®  indiction  et  je  recevrai  comme  salaire  9  artabes 
»de  blé  et  1  nomismation  non  payable  en  or  mais  en  petite  monnaie,  23  carats,  pour  cette 
»  année;  ainsi  j'ai  déjà  reçu  le  susdit  1  nomismation;  et  quand  on  coupera  les  digues  et 
»au  temps  des  fêtes  je  donnerai  et  je  recevrai  des  émoluments.  Mais  si  j'essaie  de  m'en 
»  aller  de  cette  7:ap7.[xorr,  avant  la  fin  de  l'an,  il  me  faut  rendre  tout  ce  que  je  reçus  de  Vous 
«et  m'en  aller  sans  salaire.  L'acte  est  légal. 

«Louage  fait  par  Théodore,  fils  de  Syméonios  pour  Athanasios  le  très  savant  syndic.» 

Il  y  a  ici  dans  ce  contrat  des  vulgarismes  très  intéressants,  par  exemples  1.  28  :  à'X-^çov 
pour  eiA-rjça,  formation  analogue  à  ekiv  et  sTiia,  sXaJiov  et  'éXcc^c,  -^Xôov  et  -JîXOa,  sloov  et  sToa, 
OTSffcv  et  OTcca,  T^Ya-fcv  et  vra^x,  etc.  Notons  aussi  T£c-c;apxc/.a'.o£xâr/)  faute  pour  xsaffapsay..,  tyjv 
£va  Xovtov  et  de,  èviauxbv   h. 

Le  mot  opuYwv  dit  pour  opuxûv  signifie  sans  doute  le  temps  de  couper  les  digues,  une 
des  plus  grandes  fêtes  de  l'Egypte.  Neuf  artabes  de  blé  ce  sont  3'54  hectolitres. 

Un  point  très  intéressant  à  noter  c'est  le  v;[j.tcîJ,âT'.ov  iv  àpi'ôjjiiov  è'j^ov  xspâ-cta  slxost  ipîa  èv.ep- 
\iazou\j.viy.  (le  mot  exepp.aTouiJ.eva  est  dit  pour  x£X£p[j.aToitiJ,éva,  voir  è7:oit]it.ai  pour  TCeTOÎrjjxat).  Un 
nomismation  ayant  le  poids  juste  valait  24  carats;  mais  les  écus  d'or  étaient  souvent  rognés 
et  l'or  perd  beaucoup  de  son  poids  par  l'usage;  à  présent  on  ne  respecte  ces  choses  que  peu; 
mais  dans  le  vi®  et  vif  siècle  on  avait  égard  au  poids  des  monnaies  le  plus  rigoureusement. 
C'est  pour  cela  que  Théodore  voulant  exprimer  la  valeur  d'un  voi^-icpiâTiov  puTcapôv  ou  d'un 
vo[j.t(jp,dT'.ov  wç  voi^.'-etjîTai  en  petite  monnaie  ne  dit  que  «23  carats».  Ces  carats  sont  les  x£p[j.a-coç 
xepccTta  dont  nous  trouvons  mention  dans  d'autres  contrats,  voir  mes  Prolegomena,  p.  48. 

Papyeus  XII  (saeculi  VI/VII). 

Haut.  12'^'»,  larg.  7-5<^'". 

1  £V  c^  oXoxX'/jpo  avêcoyfJLSVciV 

2  (oçaarcoç  sic  (Boppa  [Jtsta 

'j 

3  'juav'coç  [aoJTCOv  100  Btxato 


Lettre  a  M.  Revillout,  etc.  183 

5  aico  v£0|JLTjV:aç  ro'j  TrapsX 

6  ^-ovroç  jXYjvoç  /otav. 

7  nrjç  luapoDaTjç  cvar/jç  tvj 

8  xat  Tuapaa/ôtv  (jlô  ûov  zpocLpr^ 

9  (ASVOV    OTUSp    cVOaiO'J 

10  ct'j'Cttv  âvia'JGWo;  /p'ja'.o'j 

11  VO[JLlG|JLa':'.OV    £V    O'JTTapOV 

0  J 

12  /p  V  a  p  Ti  [iiaScoa'.ç  x'jpa 

13  xat  âTrspcotJL^  "j*  y.oa{jLa?  ov£Àai7]ç 

14  GTOiys'.  [JLOi  (0?  -rrpo  "f* 

15  "j*  di  emu  helia  esemioth  hi  £[iô  yjX/ 

«Moi  (Cosmas)  j'ai  loué ]  une  i autre)  maison  orientée  tout  au  nord  avec  tout 

>son  droit  pour  le  temps  que  Vous  voulez,  en  partant  du  l^""  Choiak  déjà  passé  de  la  présente 
>9^  indiction,  et  moi  le  susdit  Cosmas  je  payerai  le  loyer  pour  elle  annuellement  :  1  écu  d'or 

>  impur.  Le  louage  est  légal  et  authentique.  Moi,  Cosmas  muletier,  je  suis  content  de  tout, 

>  comme  il  est  écrit  plus  haut.  Ecrit  par  moi,  Élie.  > 

(La  suite  prochainement.) 


LES  DEOITS  DES  FEMMES  DANS  L'ANCIENNE  CHALDÉE. 

Depuis  que  j'étudie  les  contrats  assyriens  et  babyloniens  sous  la  direction  de  mon 
illustre  et  excellent  maître,  M.  Oppert,  je  suis  de  plus  en  plus  frappé  de  l'évidence  des  vues  nou- 
velles que  mon  frère  a  développées,  relativement  à  l'histoire  du  droit,  dans  plusieurs  des  leçons 
d'ouvei'tiire  de  ses  cours  au  Louvre  et  dans  sa  conférence  de  l'année  dernière  à  la  Sorbonne. 

Il  a  montré  que  le  droit  romain  et  même  le  droit  grec  étaient  loin  d'être  des  progrès 
par  rapport  aux  droits  antérieurs  :  qu'en  ce  qui  touche,  par  exemple,  la  situation  de  la 
femme,  celle  de  l'esclave,  etc.,  le  droit  égyptien,  infinement  plus  élevé,  plus  humain,  plus 
libéral,  représente  un  état  de  choses  qui  avait  existé  un  peu  partout  à  une  époque  plus 
ancienne,  état  de  choses  dont  les  récits  d'Homère  nous  ont  conservé  la  peinture,  et  la  légende 
de  l'âge  d'or,  le  souvenir,  longtemps  persistant  dans  le  cœur  des  peuples. 

Et  en  effet  les  contrats  assyriens  ou  babyloniens,  comme  les  contrats  égyptiens  anté- 
rieurs au  règne  de  Philopator,  nous  montrent  la  femme  égale  de  l'homme,  traitant  elle-même 
ses  propres  affaires  sans  l'assistance  d'un  kurios.  J'en  pourrais  citer  beaucoup  d'exemples. 
Je  vais  commencer  aujourd'hui  par  un  contrat  inédit  daté  de  «Babylone,  mois  de  Kisilev, 
le  23,  année  V  de  Nériglissar,  roi  de  Babylone»  et  relatif  à  une  vente  d'esclaves,  conclue  par 

24* 


184  Victor  Revillout. 


une  femme.  Non  seulement  cette  femme  fait  cette  aliénation  sans  l'assistance  de  personne, 
maiS;  chose  remarquable,  elle  la  fait  avec  formelle  garantie  contre  toute  réclamation  qui  pour- 
rait surgir  au  sujet  de  ces  esclaves.  C'est  elle  qui  se  charge  d'écarter  les  tiers  évicteurs,  affir- 
mant ainsi  pour  les  femmes  le  droit  d'ester  seules  en  justice;  et  en  effet  nous  avons  des  procès 
babyloniens  soutenus  par  des  femmes,  qui  y  iigurent  comme  parties  principales  sans  qu'au- 
cun homme  ait  à  intervenir  pour  compléter  leur  personnaHté  en  qualité  de  tuteur  ou  kurios. 

Ce  n'est  pas  là  d'ailleurs  le  seul  point  à  noter  dans  l'acte  en  question.  Les  esclaves 
vendus  y  sont  mari  et  femme,  portant  ce  titre.  La  seconde  fois  qu'il  en  est  fait  mention, 
le  mari  est  même  seul  nommé  et  l'on  ajoute  simplement  sa  femme  "^^J  ][  ^  Ceux  qui 
ont  suivi  les  cours  de  mon  frère  se  rappellent  ce  qu'il  leur  a  dit  au  sujet  des  liens  de  famille 
dans  l'esclavage  :  liens  que  la  loi  de  fer,  la  loi  des  douze  tables  n'admettait  à  aucun  degré, 
mais  dont  on  constate  l'existence  en  Egypte,  chez  les  Hébreux,  chez  les  Grecs  du  temps 
d'Homère  et,  comme  ou  le  voit,  chez  les  autres  peuples  contemporains. 

Voici  d'abord  le  corps  de  cet  acte  : 

( —  Nous  regrettons  beaucoup  que  l'imprimeur,  d'ailleurs  si  distingué,  de  la  Revue  égypto- 
logique,  M.  Holzhausen,  ne  possède  pas  de  type  babylonien  des  caractères  cunéiformes,  ce 
qui  ne  nous  permettra  pas  de  reproduire  les  textes  autrement  qu'en  héliogravure.  Les  trans- 
criptions en  type  assyrien  ne  sont  admissibles  que  lorsqu'il  s'agit  de  mots  isolés,  car  pour  le 
fond  même  de  la  langue,  entre  Ninive  et  Babylone  les  différences  dialectales  sont  considé- 
rables :  comme  l'enseigne  M.  Oppert,  ce  n'est  pas  une  bonne  méthode  que  de  vouloir  les  négliger 
pour  aboutir  en  définitive  à  des  textes  qui  ne  sont  plus  ni  babyloniens  par  les  caractères,  ni 
ninivites  par  les  expressions  et  qui  choquent  le  lecteur  instruit,  comme  une  suite  de  barbarismes. 
—  Nous  devons  donc  nous  borner  ici,  en  renvoyant  aux  planches  photographiques,  à  une 
simple  transcription  en  caractères  modernes,  accompagnée  d'un  mot-à-mot  interlinéaire.) 

■^   Til-lit-li-tum,     hinit-su-sa     T  Bel-u-se-zih     mar  T  Sa-na-si-su,     ina  hu-ut 

femme  Tillitlitum,         fille  sienne  de  Bel  usézib  de  la  race  de      (hen)  Sanasisu,         dans  la  satisfaction 


lih-hi-su  : 
de  son  cœur  : 

"  Nur-Bel-lu-mur 

Nurbellumur 

U       -^ 
et         f. 

Na-na-ri-ma-ni       dam^-su, 

Nanarimani                 sa  femme, 

en  tout 

2  ta-dan-ut, 

2  (esclaves)  cédés, 

a-na  PI2      ma-na 

pour  IV2             mine 

kaspa 

d'argent 

a-na         sim-gam-ru-tu, 

comme               prix  complet. 

a-na 

à 

T  Nêbo-ahi-iddin,    mar-su-sa     J  Su-la-a     mar-E-gi-hi,    ta-ad-din.       Bu-ut 

Nébo  ahi  iddin,  fils  sien  de  Sulaï  hen  Egibi,  a  donné.       Relativement  à 

'  Dans  quelques  actes  de  Ninive  les  femmes  d'esclaves  (et  d'une  façon  plus  générale  les  femmes 
mariées,  même  quand  leurs  maris  sont  des  hommes  libres  figurant  comme  parties  dans  l'acte)  ne  sont  pas 
désignées  par  l'idéogramme  "^^t^T  dam,  épouse,  mais  simplement  par  l'idéogramme  "^►^  qui  est  le  déter- 
minatif  du  sexe  féminin.  Citons  par  exemple  un  acte  inédit  du  British  Muséum  (K.  425),  copié  par  nous 
dans  notre  dernier  voyage,  et  dans  lequel  un  personnage  bien  connu  de  nous  par  une  multitude  d'autres 
actes,  un  intendant  du  fils  du  roi,  Kalkullanu,  achète  un  esclave  nommé  Ismedi  \t^  \*~  \ T ^T  ^^)  jardinier, 
^^lyV  ï^A  ^T  ^>-T^[,  sa  femme,  '^-\  et  son  frère  ^^m51,  au  total  trois  âmes  (vivantes)  A^  ]jl  TT^ 

I >->"»^  esclaves,  >-^_T  [►>^>^  ^^1  ^^  *^"*  P^'^^  ^*  somme,  relativement  faible,  d'une  mine  d'argent.  Cet 
acte  est  d'ailleurs  très  curieux,  car  il  renferme  une  clause  des  plus  intéressantes  pour  l'étude  du  droit 
iiinivite.  Nous  aurons  à  en  reparler. 

2  Je  ne  transcris  pas  assat,  car  ce  mot,  à  cause  du  t  final,  exigerait  après  lui  Su  et  non  su. 


Les  droits  des  femmes  dans  l'ancienne  chaldée.  185 

nisu  (si-hi-i^?)  nisu     pa-qi-ra-nu,      nisu      ziTcaru      rahutu      u      nisu     siru 

homme     ,    homme  réclamant,  homme        mâle  grandi         et      homme     enfant 

han-u-tu^,        sa        ina-eli        J  Xur-Bel-liL-rnur      u       dam-su  il-la-  ', 
,          qui       au  sujet  de                 Nurbellumnr               et        sa  femme      élèvera  la  voix 

-^   Til-li'U-tum     na-sa-at. 

f.  Tillilitum       se  porte  garante. 

--  La  femme  Tillitlitum,  fille  de  Belusézib,  de  la  race  de  Sanasisu,  dans  la  satisfaction  de  son 
cœur,  a  cédé  Xurbeliumur  et  f.  Xanarimani,  son  épouse,  en  tout  2  (esclaves)  livrés,  pour  une 
mine  et  demi  d'argent,  comme  prix  complet,  à  Xéboahîddin,  fils  de  Sulaï,  de  la  tribu  d'Egibi. 

Relativement  à  tout  homme ,  tout  homme  réclamant,  mâle  adulte  ou  enfant qui 

élèvera  la  voix  au  sujet  de  Nurbellumur  et  de  son  épouse,  la  femme  Tillilitum  est  garante.  » 

Suivent  les  noms  des  témoins,  au  nombre  de  deux,  celui  du  scribe  et  enfin  la  date, 
que  nous  avons  indiquée  plus  haut.  Nous  ne  nous  y  arrêterons  pas,  car  notre  but  est  d'ap- 
peler l'attention  sur  le  corps  de  cet  acte,  sur  les  divers  termes  qui  s'y  rencontrent  et  sur 
leur  portée  juridique. 

La  clause  de  garantie,  dans  la  bouche  d'une  femme,  y  est  des  plus  intéressantes.  Elle 
se  rencontre  souvent  dans  d'autres  bouches,  ainsi  que  nous  en  voyons  un  exemple  dans 
l'acte  suivant,  également  inédit,  daté  du  mois  de  Sabat,  le  6,  de  l'an  6^  de  Xabonid,  roi  de 
Babylone,  et  tout-à-fait  comparable  au  précédent,  car  il  n'en  diffère  que  par  ce  qui  change 
dans  tous  les  actes,  les  noms,  le  sexe,  etc. 

T  Suraa-a,    mar-su-sa     J  e-rib-su,      ina  hu-iit      Ub-bi-su:    '''^]  Ha-si-ba-tuv 

Sumaï,  fils  sien  de  Eribsu,    dans  la  satisfaction  de  son  cœur  :  Hasibatuv 

(sal-lat)  gal(la)-su,  a-na  1  ma-na    kaspa,    a-na   J  Si-Um-bel,    mar-sit-sa   J  Mar-ga 

son  esclave,  pour  1  mine       d'argent,        à  Silimbel,  fils  de  Marga 

mar-daraka,            a-na      sim-gam-e-ru      id-din-nu.       bu-ut       (si-ku-u?) 
de  la  race  de  fbenj  Damka,     comme  prix  complet  a  cédé.      Relativement  à     

pa-kir-ra-nu,   zikani*    rab-u-tu    u    siru  ban-nu-u-tu,  sa      e-li      J  ha-ba-si-tuv 
réclamant,  mâle  adulte        ou    enfant     ,     qni  au  sujet  de     Habasituv 

il-la-tuv,      T  Surna-a,      mar-su-sa       e-rib-su,  na-si 

élevant  la  voix.         Sumaï,  fils  sien  de  Eribsu,        se  porte  garant. 

1  Le  mot  êihou,  éihi  nous  paraît  se  rapporter  à  la  racine  n'ï  decemere,  nous  verrons  comment. 

2  En  transcrivant  ce  mot  banutu,  nous  avons  songé  à  l'expression  abu  banuia  «pater  genitor  meus» 
si  souvent  employée  dans  les  cylindres  d'Assurbanipal.  Le  contexte  demanderait  plutôt  l'idée  d'enfants 
dirigés,  protégés,  en  tutelle  à  cause  de  leur  âge.  que  celle  d'enfants  engendrés,  à  laquelle  on  serait  conduit 
par  la  comparaison  avec  ce  mot  banu.  Mais  la  lecture  est  rendue  certaine  par  la  variante  ban-nu-utn. 

3  Le  scribe  s'était  trompé  sur  le  sexe.  Il  avait  d'abord  mis  comme  déterminatif  celui  de  la  femme 
y^- ,  puis  il  l'a  recouvert  par  celui  de  Ihomme  T.  De  même  il  avait  écrit  d'abord  sa  servante  -^  "^  *^TTr 
puis,  quand  il  a  compris  son  erreur,  n'ayant  pas  la  place  suffisante  pour  écrire  en  entier  le  mot  galla 
esclave  mâle,  à  la  place  de  saUat,  il  s'est  contenté  de  recouvrir  le  mot  sallat  par  la  première  syllabe  de 
gaUa  ^>~  sans  même  corriger  le  pronom  relatif  qui  se  trouvait  autre  :  su  au  lieu  de  .?!/,  à  cause  du  t  final 
du  mot  sallat.  La  correction  pouvait  paraître  suffisante,  car  le  même  nom  propre,  cette  fois  au  masculin 
sans  correction,  se  retrouvait  à  la  7®  ligne  de  ce  contrat. 

'  Le  mot  zikaru  est  écrit  ici  par  l'idéogramme  t^T  au  lieu  de  l'être,  comme  dans  le  contrat  précé- 
dent, par  l'idéogramme  >-       T,  ce  qui  revient  d'ailleurs  exactement  au  même. 


186  Victor  Revillout. 


«Sumaïi,  filg  d'EribsU;  dans  la  satisfaction  de  son  cœur,  a  cédé  Hasibatuv  son  esclave, 
pour  une  mine  d'argent,  à  Silimbel,  iils  de  Marga  de  la  race  (tribu)  de  Damka,   comme  prix 

complet.  Contre ,  réclamant,  mâle  grandi  ou  enfant qui  élèvera  la  voix  au 

sujet  de  Habasituv^,  Sumaï,  fils  d'Eribsu,  se  porte  garant.» 

Le  nombre  des  témoins  est  de  quatre. 

Nous  rencontrons  dans  ces  deux  actes  et,  comme  nous  le  verrons,  dans  plusieurs  autres, 
certaines  expressions  fondamentales  qui  se  rapportent  à  la  garantie  donnée  à  l'acheteur 
d'esclave  par  le  vendeur.  Les  mots  paqiranu,  nasu,  huut,  etc.  ne  se  rencontrent  pas  seule- 
ment dans  les  ventes  d'esclaves,  mais  dans  d'autres  contrats  où  nous  montrerons  qu'ils  y  ont 
bien  le  sens  que  nous  leur  attribuons.  Mais  avant  d'en  venir  à  cette  étude  de  lexicologie 
technique,  nous  avons  encore  à  donner  d'autres  ventes  d'esclaves  qui  se  rapprochent  infini- 
ment par  leurs  formules  des  deux  précédentes.  Ce  sera  le  sujet  d'un  prochain  article  intitulé  : 
Les  ventes  d'esclaves  et  leurs  garanties  à  Bahylone. 


L'IMPOT  SUE  LES  MAISONS 

D'APRÈS  UN  PAPYRUS   GREC  INÉDIT. 

(BRITISH  MUSEUM  N°  L,  ANCIEI^  SALT  967.) 

Dans  mon  article  sur  Le  budget  des  cultes  paru  dans  le  dernier  numéro  de  la  Revue 
j'ai  longuement  parlé  (p.  107  et  suiv.)  des  curieux  passages  de  la  stèle  hiéroglyphique  de 
Philadelphe  où  il  est  question  de  l'impôt  sur  les  maisons  (t^^),  et  j'ai  cité  à  ce  sujet  une 
phrase  intéressante  des  Économiques  attribuant  cet  impôt  sur  les  maisons  (oiy.-.a)  au  roi  Téos 
ou  Tachos,  qui  l'aurait  institué  en  Egypte  d'après  le  conseil  de  l'Athénien  Chabrias.  Dans 
un  voyage  en  Angleterre,  au  mois  d'avril  dernier,  j'ai  trouvé  un  papyrus  grec  inédit  du 
British  Muséum  qui  a  justement  trait  à  cet  impôt  sur  les  maisons.  Il  s'agit  d'une  déclaration 
faite  par  un  grec  habitant  Memphis  (£AXY;vo[j.£ij.a;'.-r,ç)  conformément  à  un  prostàgma  alors  récent, 
déclaration  relative  à  la'  maison  qu'il  habitait,  à  une  autre  maison  où  il  tenait  boulangerie 
et  aux  deux  cours  qui  constituaient  les  dépendances  de  ces  deux  maisons,  le  tout  situé  dans 
le  quartier  de  l'helléuium,  déjà  connu  par  un  papyrus  de  la  BibHothèque  Nationale.  Ces  pro- 
priétés étaient  d'égale  contenance,  bornées  au  nord  par  une  rue  et  séparées  l'une  de  l'autre 
par  une  autre  rue.  La  première  maison,  celle  d'habitation,  portant  peut-être  un  ou  plusieurs 
étages,  est  estimée  deux  fois  plus  cher  que  la  seconde  qui  servait  de  boutique.  Leurs  dimen- 

1  Sumaï  est  un  nom  qui  se  retrouve  dans  les  actes  de  Ninive  (voir  notamment  W.  I.  III,  46,  3, 
31;  W.  I.  III,  46,  4,  36,  etc.)  avec  le  même  idéogramme  pour  le  mot  sum,  suma,  mais  avec  deux  a  terminaux 
inscrits  au  lieu  d'un,  suivant  une  orthographe  qui  n'était  pas  celle  de  Babylone  poui-  les  noms  de  ce 
genre.  Nous  adoptons  ici  la  transcription  aï  pour  le  double  a  de  la  fin  d'un  mot,  malgré  les  objections 
formulées  par  M.  Haupt,  qui,  suivant  la  règle  générale  pour  les  redoublements  de  voyelles  dans  le  corps 
des  mots,  et  aussi  à  la  fin  des  mots  quand  il  s'agit  d'autres  voyelles,  y  veut  voir  seulement  un  allonge- 
ment de  cet  a.  Mais  une  généralisation  n'est  pas  une  preuve  et  il  ne  nous  paraît  pas  certain  qu'il  y  ait 
lieu  de  s'écarter  sur  ce  point  des  vieilles  traditions. 

2  Le  scribe,  qui  avait  pris  d'abord  ce  nom  d'esclave  pour  un  nom  de  femme,  avait  commis  une 
autre  erreur;  il  avait  déplacé  une  syllabe,  comme  on  peut  le  voir  en  comparant  la  première  mention  de 
ce  nom  avec  la  seconde. 


L'impôt  sur  les  maisons.  (E.  R.)  187 

sions  étaient  assez  considérables  puisqu'elles  représentaient,  chacune  une  étendue  d'environ 
32  pieds  de  long  sur  20  de  large,  sans  compter  les  cours.  La  totalité  du  terrain  faisait  juste 
six  de  ces  grandes  mesures  thébaines  de  superficie  désignées  eu  grec  sous  le  nom  de  ':rr,/uç^ 
comme  la  simple  coudée  de  longueur,  et  en  démotique  sous  le  nom  d'aten,  équivalent,  d'après 
les  bilingues.  Uaten  comprenait  100  xet  ou  coudées  carrées  :  un  papyrus  démotique  du  Biitish 
Muséum  nous  donne  le  double  calcul  tant  en  mesures  de  superficie  qu'en  mesures  de  lon- 
gueur —  ce  qui  confirme  l'opinion  de  Peyron. 

(1)    MHTP0AU3PUI    EniMEAHTHI   (2)    HAPA   AnvrXIOC    INAPOVTOC    (3)   EAAHNO 
MEMOITHC    AnOrPA<î>OMAI    (4)    KATA    TO    EK nPOCTArMA    (5)    THN 

KAI  AVAHN 

VnAPXOVCAN  MOI  OIKIAN  (6)  EN  T03I  EAAHNIL3I   EN  TOHCÛI  ....  (7)  ...  .  lEIGJI  HC 

THCMEN  OIKIAC  jhC  A  AVAHC  (a1  EPI  (iFl 

METPA  IKAl  Eni  ri  (8)  TEITONEC  HPOC  NOTON  OIKIA TOC  (9)  OAHGIOC  HPOC 

BOPPAN  nACITOC  APIANIOC  (10)  KAI  OaOC  ANA  MECON  HPOC  AIBA  (11)  CITOHOEION 
MOV  KAI  OAOC  ANA  MECON  (12)  HPOC  AnHAIWTHN  nCKAPHC  HETE  ....  (13)  TOV- 
TUN  OVN  TIMUMAI  î.  À  (14)  KAI  AAAHN  OIKIAN  EN  Hl  CITOnOIOVCIN  (^15)  KAI  AVAHN 
UN  METPA  THC  MEN  OIKIAC  (16)  METPA  (KAI  EHI  (iPl  KAI  THC  AVAHC  Q  (17)  EHI  fifl 
TEITONEC  ONNOOPIOC  GOPOV  OIKIA  (18)  HPOC  BOPPAN  HACITOC  TOV  APIANIOC  KAI 
OAOC  (19)  ANA  MECON  HPOC  AIBA  NEOEPrHPIOC  (20)  HEXPATOV  HPOC  AnHAICJTHN 
H  nPOrEfPAMENH  (21)  OIKIA  KAI  OAOC  ANA  MECON  TAVTCJN  OVN  (22)  TIMUMAI 
XAAKOV  î.  fe  (23)  /  X  A 

«  A  Métrodore,  épimélète,  de  la  part  d'Apynchis,  fils  d'Inarons.  Comme  hellénomemphite 

et  de  la  cour 

»  et  selon  le  prostagma  ....  je  fais  la  déclaration  de  la  maison  qui  m'appartient  dans  l'Hel- 

de  la  maison  et  de  la  cour  4  coudées  sur   IS 

»lenium,   dans  le  lieu  dit Les   mesures  en   sont  21  coudées   sur  13.  Les  voisins  : 

»au  sud  la  maison  de  .  .  .  .,  fils  de  Phaésis;  au  nord  (la  maison)  de  Pasis,  fils  d'Arianis  et 
»le  chemin  qui  tient  le  milieu;  à  l'occident  ma  boulangerie  et  le  chemin  qui  tient  le  miUeu; 
»à  l'orient  Pocagès,  fils  de  Pété  ....  De  cela  donc  l'estimation  est  4000  drachmes.  —  Et 
»  une  autre  maison,  dans  laquelle  se  fait  le  pain,  et  la  cour,  dont  voici  les  mesures  :  mesures 
»de  la  maison  21  coudées  sur  13;  mesures  de  la  cour  4  coudées  sur  13.  Les  voisins  :  (au 
»midi)  la  maison  d'Onnophris,  fils  d'Horus;  au  nord  (la  maison)  de  Pasis,  fils  d'Arianis  et  le 
»  chemin  qui  tient  le  milieu;  à  l'occident  (la  maison)  de  Nephergéris,  fils  de  Pechratès;  à 
»  l'orient  la  maison  sus-désignée  et  le  chemin  qui  tient  le  milieu.  De  cela  donc  l'estimation 
>est  2000  drachmes  de  cuivre.  —  Total  un  talent.» 


UNE  ADOPTION  PAE  MANCIPATION  SOUS  LE  EÈGNE  D'AMASIS 

ET  LES  DIVERSES  FORMES  DE  MANCIPATIONS  RELATIVES  A  DES  ÊTRES  HUMAINS. 

M.  TuRQUET,  sous -secrétaire  d'État  des  Beaux- Arts,  vient  d'autoriser  M.  de  Konchaud^ 
directeur  des  Musées  Nationaux,  à  acquérir  une  magnifique  collection  de  papyrus  démotiques. 


188  Eugène  Revillout. 


Cette  collection^  avait  été  trouvée  cet  liiver,  en  Egypte,  par  notre  excellent  confrère,  M.  Eisen- 
LOHR,  professeur  d'égyptien  à  l'université  de  Heidelberg.  Elle  comprend  (outre  un  papyrus 
ptolémaïque)  trente  papyrus  des  règnes  des  Psammétique  I"  et  II,  d'Apriès  et  d'Amasis, 
faisant  suite,  par  conséquent,  à  la  belle  série  des  papyrus  de  Tahraka  et  Sabaka  que  pos- 
sédait déjà  le  Musée  du  Louvre,  et  s'intercalant  avant  l'unique  contrat  de  Psammétique  III 
qui  nous  soit  parvenu  (toujours  dans  la  même  galerie),  et  les  papyrus  de  Darius  I"  et  d'Ar- 
taxercès  que  se  partagent  surtout  les  collections  de  Paris  (Louvre  et  Bibliothèque),  de  Berlin 
et  de  Turin.  Cette  série  vient  donc  combler  une  très  importante  lacune,  (car  on  n'avait  jus- 
qu'ici qu'un  fragment  d'Amasis,  à  Vienne  -,  et  un  papyrus  d'Apriès,  à  Londres  :  papyrus  qui 
appartiennent  du  reste  à  la  même  famille).  Il  s'agit  toujours  de  ce  cartulaire  des  choacbytes 
de  Thèbes,  dont  les  papiers  partent  du  code  même  de  Bocchoris  et  des  commencements  de 
l'écriture  démotique,  pour  aboutir  au  second  règne  de  Soter  II,  quelques  années  avant  l'ère 
chrétienne.  Le  Musée  du  Louvre  a  seul  maintenant  et  expose  publiquement  dans  ses  ga- 
leries^ tous  les  âges  paléographiques  de  cette  intéressante  période  de  sept  siècles,  puisque, 
après  les  Darius  I®""  que  nous  mentionnions  tout-à-l'heure,  on  y  trouve  l'unique  Darius  Codo- 
man,  l'unique  Alexandre,  plusieurs  Alexandre  II,  les  uniques  Soter  connus,  les  Philadelphe,  si 
rares  partout  ailleurs,  sans  compter  les  Évergète  F""  et  tous  les  autres  Lagides.  On  peut  seule- 
ment regretter  que  le  Philippe  Arrhidée  et  les  autres  papyrus  démotiques  qui  dorment  ignorés 
dans  les  armoires  de  la  BibUothèque  Nationale  entre  les  mains  d'étrangers  à  la  science  égyp- 
tologique,  ne  soient  pas  encore  venus  rejoindre  au  Louvre  leur  place  naturelle,  comme  en  1871 
les  manuscrits  du  moyen  âge  qui  se  trouvaient  à  notre  Musée  des  Souverains  sont  allés  à  la 
Bibliothèque  Nationale,  pour  être  livrés  à  des  conservateurs  compétents^.  Espérons  que  l'illustre 
savant  qui  dirige  la  Bibliothèque  Nationale  sera  frappé  lui-même  de  cette  anomaUe,  et  ne 
voudra  pas  être  en  retard  de  bons  procédés  avec  les  Musées  Nationaux. 

Pour  en  revenir  à  la  collection  Eisenlohr,  qui  va  être  publiée  intégralement  dans  le 
Corpus  pai^yrorum  Aegypti,  nous  y  avons  remarqué  d'inappréciables  richesses,  tant  au  point 
de  vue  des  origines  du  droit  qu'au  point  de  vue  du  déchiffrement  et  de  la  philologie.  Bien 
des  questions  jusqu'ici  douteuses  ou  mal  comprises  sont  éclaircies,  et  bien  des  mots  sont  pré- 
cisés d'une  façon  inattendue.  Le  seul  document  un  peu  intéressant  de  cette  période  que  l'on 
possédait  avant  cette  découverte,  était  le  contrat  de  Psammétique  III  cité  ci-dessus.  Mais  ce 

1  Est-ce  celle  que  M.  Bkdgsch-bey  avait  marchandée  à  Thèbes,  il  y  a  quelques  années,  dont  on  lui 
avait  demandé,  nous  a-t-il  dit,  25.000  francs  (raille  livres  sterling)  et  qu'il  regrettait  vivement  de  n'avoir 
pu  acquérir?  Est-ce  celle  qu'un  marchand  d'antiquités  du  Caire,  en  aoiît  1884,  prétendait  être. entre  les 
mains  d'un  jeune  français  qui  ne  voulait  pas  alors  la  vendre  à  la  France?  —  En  tout  cas  ce  sont  là  des  textes 
trop  difficiles  pour  être  bien  appréciés  par  ceux  qui  désespèrent  de  jamais  s'en  rendre  compte,  mais  dont 
la  valeur  est  inestimable  quand  on  en  doit  tirer  tout  le  parti  possible  pour  les  progrès  à  effectuer  encore 
dans  les  études  égyptologiques. 

2  Dont  j'avais  donné  en  1880  la  traduction  à  Krall,  alors  mon  élève. 

3  Une  salle  d'étude,  bien  éclairée  et  fréquentée  par  tous  les  égyptologues  d'Europe,  est  aussi  établie 
dans  le  Musée  Egyptien. 

*  Par  une  raison  analogue  on  fait  venir  à  la  Bibliothèque  Nationale  les  manuscrits  précieux  qui  se 
rencontrent  dans  les  autres  bibliothèques  publiques  de  Paris.  Et  cependant  il  se  trouve  à  la  Mazarine,  par 
exemple,  des  érudits  connaissant  bien  le  prix  et  l'intérêt  de  leurs  trésors  littéraires.  Pour  l'égyptien  et 
surtout  pour  le  démotiqne  il  faut,  au  contraire,  des  études  spéciales  et  des  comparaisons  constantes  — 
comme  pour  les  médailles,  par  exemple,  que  personne  n'a  songé  à  diviser  entre  le  Cabinet  de  France  et 
le  Louvre. 


Une  adoption  par  mancipation,  etc.  189 

contrat  était  tracé,  en  caractères  souvent  effacés,  sur  une  assiette  en  terre  rouge.  Il  était  donc 
peu  lisible  :  et  de  plus,  comme  les  caractères  ont,  à  cette  époque,  une  forme  absolument  spé- 
ciale et  que  les  pièces  de  comparaison  manquaient,  le  contexte  servait  surtout  de  guide  en 
certains  points  et  pouvait  égarer  même  sur  la  lecture  de  signes  peu  nets.  Maintenant,  au 
contraire,  tous  les  mots  alors  rares  ou  mal  tracés  se  rencontrent  dans  une  foule  d'autres 
textes  bien  écrits  et  viennent  préciser  le  sens  (mais  toujours  dans  la  direction  d'idées  que 
j'avais  indiquée  tout  d'abord).   Je  citerai,  par  exemple,  le  mot  per  i  =  Me),  qui  se 

trouve,  avec  la  même  forme  spéciale  et  arcbaïque,  dans  de  nombreuses  locations  de  terres 
cultivées,  dans  des  reçus  d'impositions,  tout  aussi  bien  que  dans  l'acte  de  Psammétique  III 
et  dans  celui  dont  nous  allons  donner  aujourd'bui  la  primeur  aux  lecteurs  de  la  Revue 
Egyptologique.  J'en  dirai  autant  du  mot  bok  1  ^  '^  =  êwr^  servir,  service),  qui  est  employé, 
avec  ses  deux  orthographes  spéciales,  dans  les  ventes  d'esclaves,  et  qu'un  bilingue  ptolémaïque 
(le  papyrus  Rhind)  nous  permet  de  reconnaître  sous  sa  forme  plus  récente.  De  même  les  mots 
nemau^  échapper,  annu  plaire 2,  «ji^  encore,  etc.  ont  leurs  lectures  et,  par  conséquent,  leurs 
interprétations  précisées  par  la  comparaison  des  textes  analogues. 

Rien  de  plus  ai^logue,  par  exemple,  comme  formules,  que  l'acte  de  mariage  par 
coemptio  ou  mancipation,  daté  de  Psammétique  III,  dépendant  de  l'ancien  fond  de  notre  Musée 
et  un  acte  d'adoption  par  mancipation,  de  l'an  32  d'Amasis,  que  nous  venons  d'acquérir  dans 
la  collection  Eisenlohr.  Mais  il  faut  aussi  rapprocher  de  ces  deux  papyrus  deux  contrats  de 
vente  d'esclaves  du  règne  de  Darius  dont  nous  avons  déjà  eu  l'occasion  de  parler  dans  le 
premier  volume  de  notre  Droit  égyptien.  Quel  dommage  pour  les  comparaisons  paléographiques, 
si  capitales,  que  l'un  de  ces  deux  actes  de  Darius  soit  à  la  Bibliothèque  Nationale,  tandisque 
les  pièces  d'Amasis  et  de  Psammétique  III  sont  au  Louvre  !  Cela  est  d'autant  plus  à  regretter 
que,  pour  comble  de  malheur,  l'on  ne  permet  pas  de  rapprocher  des  fenêtres  les  papyrus  si 
sombres  et  presque  noirs  qu'il  nous  est  permis  d'étudier  dans  une  salle  déjà  obscure.  Aussi 
ai-je  dû  surtout  me  tier  à  des  facsimile  autrefois  publiés  par  M.  Caillaud,  lorsqu'il  possé- 
dait les  Darius  de  la  Bibliothèque  Nationale.  Sans  ces  facsimile  —  bien  inférieurs  cependant 
aux  originaux  —  on  peut  dire  que  ces  papyrus  seraient  complètement  perdus  pour  la  science  \ 
Que  l'on  excuse  donc  les  fautes  involontaires  que  cette  situation  spéciale  a  pu  produire. 

Commençons  par  l'acte  d'adoption. 

Il  est,  mot-à-mot,  ainsi  conçu  : 

«An  32,  Athyr,  du  roi  Amasis. 

«  Hor,  fils  de  Pétésé,  dont  la  mère  est  Taouaou,  dit  au  choachyte  de  la  nécropole  Haret', 
»fils  de  T'eti  : 


V\   /V,       |s,  ^X   [JA   Pierret,  Lex.  266,  Brugsch,  767,  Suppl  675. 
J^^  ou  0  yV^^    —    p-«kn&.i,  Brugsch  194. 


AAAAAA  AAAAAA 


3  /V  =  On,  Brugsch  191.  Le  déterminatif  des  jambes  a  dans  quelques  pièces  la  forme  hiératique. 

*  Il  en  aurait  été  identiquement  de  même  pour  la  Chronique  démotiqiia  dont  l'original  est  également 
très  sombre,  si  M.  Delisle  —  dont  l'intérêt  pour  la  science  est  si  vif  et  la  bienveillance  si  grande  —  n'avait 
pris  sur  lui  de  prêter  quelque  temps  le  papyrus  au  Louvre,  sur  la  demande  de  M.  de  Ronchadd,  directeur 
des  Musées  Nationaux.  Qu'il  reçoive  ici  l'expression  de  ma  vive  gratitude. 

25 


190  Eugène  Revillout. 


«  Tu  m'as  donné  —  et  mon  cœur  en  est  satisfait  —  l'argent  pour  faire  à  toi  fils.  Moi^  (je 
»  suis)  ton  fils,  et  (sont  à  toi)  mes  enfants  que  j'enfanterai  et  totalité  de  ce  qui  est  à  moi  et  de  ce 
»que  je  ferai  être  (de  ce  que  j'acquerrai).  Point  à  pouvoir  (ne  pourra  point)  homme  quel- 
»  conque  du  monde  m'écarter  de  toi,  depuis  père,  mère,  frère,  sœur,  seigneur,  dame,  jusqu'à 
»  grande  assemblée  de  justice  ',  moi-même,  mes  enfants  (qui  seront)  les  enfants  de  tes  enfants 
»à  jamais.  Celui  qui  viendra  à  toi  à  mon  sujet  pour  me  prendre  de  toi  (à  toi)  en  disant  : 
»Ce  n'est  pas  ton  fils,  celui-là  —  quiconque  au  monde  (dis-je)  depuis  père,  mère,  frère, 
»sœur,   seigneur,  dame,  jusqu'à  grande  assemblée  de  justice  ou  moi-même  (fera  ainsi),  te 

(sic)  (sic) 

»  donnera  argent  quelconque,  blé  quelconque  qui  plairont  à  ton  cœur.  Moi,  je  serai  ton  fils 
»  encore,  ainsi  que  mes  enfants  à  jamais!» 

Vient  ensuite  la  signature  du  notaire,  et  au  revers  on  voit  une  liste  de  douze  témoins. 

Le  commentaire  juridique  de  cette  pièce  importante  sera  donné  dans  le  second  volume 
de  mon  Droit  égyptien.  Dès  maintenant  il  faut  remarquer  que,  contrairement  aux  habitudes, 
on  n'indique  pas  la  mère  de  Haret',  le  nouveau  fils  adoptif,  mais  seulement  son  père  naturel 
T'eti.  Il  en  est  de  même  dans  tous  les  actes  très  nombreux  où  il  est  question  de  lui.  Bien 
plus  :  après  son  adoption,  comme  avant,  il  est  toujours  indiqué  comme  fils  de  T'eti,  sans 
aucune  mention  de  son  père  adoptif  Pétésé,  et  cela  jusque  sur  le  protocole  officiel  des  con- 
trats dans  lesquels  Haret'  lui-même  est  partie.  Pourquoi  cette  double  anomalie?  L'absence  du 
nom  de  la  mère,  ordinairement  exigé,  comme  celui  du  père,  dans  tous  les  contrats  et  en 
justice  ainsi  qu'en  témoigne  la  loi  citée  par  le  papyrus  1'^''  de  Turin,  fait  songer  involon- 
tairement à  cette  coutume  légale  en  vigueur  à  Athènes  du  temps  des  orateurs  et  d'après 
laquelle  il  suffisait  que  le  père  déclarât  à  la  phratrie-  qu'un  tel  était  son  fils  et  né  d'une 
Athénienne,  sans  spécifier  quelle  était  cette  Athénienne.  L'enfant  légitimement  inscrit  comme 
citoyen  était  alors  sans  mère,  comme  notre  égyptien  —  et  souvent  même  cette  manière  de 
procéder  était  usitée  dans  les  adoptions. 

Quant  à  l'absence  du  nom  du  père  adoptif  dans  les  actes  postérieurs  à  l'adoption,  elle 
prouve  que  cette  adoption  égyptienne,  faite  selon  des  formes  analogues  à  la  mancipation 
romaine,  se  rapprochait  cependant  beaucoup  plus  de  l'adoption  athénienne.  Le  fils  ne  devenait 
la  chose  de  son  père  adoptif  qu'en  apparence,  en  dépit  des  formules  consacrées  d'après  les- 
quelles il  se  vendait  à  lui,  lui,  ses  enfants  et  ses  biens  présents  et  à  venir.  A  Rome  il 
aurait  cessé  dès'  lors  d'être  le  fils  de  son  père  naturel  pour  devenir  celui  de  son  père 
adoptif.  Ici,  au  contraire,  le  père  naturel  ne  disparaît  pas,  et  le  fils  adoptif  fait  des  actes 
comme  s'il  était  encore  chef  de  famille.  Cela  ne  rappelle-t-il  pas  ce  que  nous  a  appris 
Démosthène  sur  ce  fils  adoptif  qui,  s'étaut  brouillé  avec  son  nouveau  père,  était  entré  en 
procès  avec  lui  et  avait  fini  par  faire  une  transaction  d'après  laquelle  on  lui  rendait  tout  ce 


'  Cest  le  motDvX  (1  (J  Lrt]  ou       M  M     wKj  désignant  d'abord  le  pylône  où  l'on  rendait  la  justice, 
-M^  I   1    U  D  1  1  ^     U 

puis  la  justice  elle-même  et  sur  lequel  on  peut  consulter  le  sui^plément  du  dictionnaire  de  Beugsch,  p.  1306 

à  1308.  Le  syllabique  Tl  ta  a  ici  presque  la  même  forme  qu'en  hiératique. 

-  A  Gortyne,  dont  M.  Dareste  a  récemment  traduit  la  loi  découverte  au  mois  de  septembre  de  l'année 

dernière  par  MM.  Halbherr  et  Fabricius,  l'adoption  se  faisait  par  une  déclaration  de  l'adoptant  non  pas  à 

la  phratrie,  mais  dans  l'assemblée  des  citoyens  :  du  haut  de  la  pierre  où  Ton  monte  pour  parler  au  peuple. 

L'adoptant  donnait  cependant,  comme  à  Athènes,  à  sa  phratrie,  un  repas  et  une  distribution  de  vin. 


Une  adoption  pae  mancipatiox,  etc.  191 


qui  lui  appartenait,  ainsi  que  sou  ancien  état  civil'?  Haret'  aurait-il  pu  faire  de  même?  C'est 
probable.  Mais  il  est  probable  aussi  que  la  forme  de  l'adoption  employée  par  Pétésé  l'avait 
été  pour  déguiser  un  véritable  testament  et  lui  permettre  de  choisir  un  héritier  eu  dehore 
de  sa  famille. 

Peut-être  était-ce  à  une  nécessité  légale  du  même  genre  que,  dans  l'acte  de  Psammé- 
tique  in,  une  jeune  fille  libre  se  pliait,  quand  eUe  choisit,  pour  se  marier  à  un  jeune  homme 
qu'elle  aimait,  la  forme  de  coemptio  ou  de  mancipation  qui  en  faisait  en  apparence  l'esclave 
de  son  nouvel  époux.  Cet  acte,  du  même  type  d'écriture  que  ceux  d'Amasis-,  était  ainsi  conçu: 

«An  4',  Mésoré  27,  du  roi  Psammétique, 

«Dit  la  femme  T'enesi,  fille  d'Anachamen,  à  Amon,  fils  de  Put'a  : 

(sic) 

«  Tu  as  donné  —  et  mon  cœur  en  est  satisfait  —  mon  argent  pour  faire  à  toi  service 
•»  (servante\  Je  suis  à  ton  service  (ta  servante).  Point  à  pouvoir  homme  quelconque  du  monde 
»  (personne   au  monde  ne  poun-a")  m'écarter  de  ton  ser\4ce.  Je  ne  pourrai  y  échapper.    Je 

>  ferai  à  toi  encore  jusqu'à  argent  quelconque,  blé  quelconque,  totalité  de  chose  au  monde  et  mes 
ï  enfants  que  j'enfanterai  et  totalité  de  ce  que  je  possède,  et  les  choses  que  je  ferai  être  (que 
3»  j'acqueiTai\,  et  les  vêtements  qui  >  sonfi  sur  mon  dos,  depuis  l'an  4,  Mesoré  ci-dessus,  à  jamais 
»  et  toujours.  Celui  qui  viendra  i  t'iuquiéter  >  à  cause  de  moi,  au  nom  de  parole  quelconque  du 

>  monde,  en  disant  :  Ce  n'est  pas  ta  servante,  celle-là,  te  donnera  argent  quelconque,  blé  quel- 
5  conque  qui  plairont  à  ton  cœur  :  ta  servante  (sera  ta^  servante  encore  :  ainsi  que  mes  entants. 
»Tu  es  (maître)  sur  eux  eu  tout  lieu  où  tu  les  ti'ouveras.  Adjuré  (soit)  Ammon!  Adjuré  isoit) 
»le  roil  Point  à  te  semr  esclave  encore  me  prends  pas  esclave  encore)  quelconque.  Il  n'y 
»a  point  à  dire  qu'il  te  plaît  (de  faire)  en  toute  similitude  ci-dessus.  Il  n'y  a  point  à  faire 

>  de  similitude  de  ces  choses.  Il  n'y  a  pas  à  dire  également  que  je  puis  échapper  au  service 
^de  la  chambre  dans  laquelle  tu  es!» 

Un  seul  scribe  signe  à  cet  acte,  qui  se  rapproche  —  encore  plus  que  le  précédent  — 
des  simples  ventes  d'esclaves.  En  effet,  dans  l'acte  d'Amasis  le  terme  consacré  est  se  fils. 
C'est  pour  faire  fils  que  l'argent  est  versé.  Ici,  au  contraire,  le  tenue  est  hok  :  c'est-à-dire 
celui-là  même  que  nous  trouvons  dans  les  ventes  fiiites  par  des  tiei*s  pour  des  esclaves 
proprement  dits.  On  ne  se  propose  pas  de  faire  femme  —  mots  usités  dans  les  contrats  de 
mariage  par  dons  nuptiaux,  —  mais  de  faire  une  esclave,  c'est-à-dire  une  de  ces  concubines 
ou  de  ces  épouses  esclaves  que  les  juifs  ont  connues  et  que  je  signalais  à  ce  propos  dans 
mon  cours  de  Droit  égyptien.  C'est  une  union  par  coemptio,  mais  où  la  coemptio  a  encore 
tout  l'aspect  d'une  véritable  vente.  En  droit  civil  le  maître  aurait  pu  prendre  autant  de  ces 
concubines  qu'il  aurait  voulu  et  les  revendre  au  besoin  plus  tard.  Aussi  la  femme  libre  qui 
se  vendait  ainsi  à  lui  en  apparence,  et  en  réalité  se  donnait,  avait-elle  bien  soin  de  recourir 

*  A  Gortyne,  dapiès  la  loi  citée  pins  haut,  c'était  l'adoptant  qui  conservait  tonjoni-s  le  droit  de  se 
débarrasser  de  l'adopté  en  taisant  une  déclaration  dans  Vagora  et  en  versant  une  somme  déterminée,  que  le 
mnémon  du  xénion  (jouant  ici  le  rôle  de  ladministi-ateur  de  l'assistance  publique)  remettait  à  titre  de 
secours  à  cet  enfant  abandonné. 

-  Notons  que  ce  type  ne  commence  que  vers  le  milieu  du  règne  d'Amasis.  pour  se  continuer,  avec 
peu  de  modifications,  sous  Darius  P'. 

3  Cette  date  est  curieuse.  Bien  que  ces  quatre  ans  aient  pu  se  réduire  à  environ  deux  ans  véri- 
tables par  le  comput  commençant  chaque  année  a\i  mois  de  Thot,  on  ne  croyait  pas  le  règne  de  Psam- 
métique III  aussi  long. 

25* 


192  Eugène  Revillout. 


à  une  adjuration  au  Dieu  et  au  roi,  qui  limitait  en  droit  religieux  les  pouvoirs  absolus  de 
son  nouvel  époux  et  le  forçait  d'une  part  à  la  monogamie  et  d'une  autre  part  à  la  perpétuité 
de  l'union. 

Eien  de  plus  touchant  d'ailleurs  que  le  cri  dans  lequel  notre  fiancée  de  second  ordre 
abandonne  à  son  fiancé  non  seulement  ses  biens  présents  et  à  venir,  mais  ses  enfants  et 
jusqu'à  ses  vêtements  qui  sont  sur  son  dos.  Ajoutons  que  ces  deux  actes  —  l'adoption  par 
mancipation  et  le  mariage  par  coemptio  ou  mancipation  —  sont  presque  de  même  date,  à 
quelques  années  près,  et  semblent  se  rapporter  à  une  couche  spéciale  du  droit  égyptien,  car  on 
ne  trouve  rien  d'analogue  dans  la  suite.  C'est  le  même  formalisme  que  dans  la  loi  des  douze 
tables  :  et  ce  formalisme  sera  bientôt  remplacé  par  de  tout  autres  procédés,  particulièrement 
en  ce  qui  concerne  le  mariage.  Quant  à  l'adoption,  elle  paraît  alors  disparaître  entièrement 
par  une  conception  plus  simple  et  plus  naturelle  de  la  famille^.  Venons  en  maintenant  aux 
ventes  d'esclaves  que  nous  rapprochions  tout-à-l'heure  de  notre  coemptio,  dont  elles  reproduisent 
en  grande  partie  les  expressions.  Celles  que  nous  allons  citer  sont  peu  postérieures  à  Psam- 
métique  III,  car  la  conquête  de  l'Egypte  par  le  roi  perse  Cambyse  se  fit  sous  le  règne  de 
ce  prince  :  et  Cambyse,  qui  mourut  bientôt  après,  eut  pour  successeur  Darius  V  : 

«L'an  5,  Pharmouti,  du  roi  Darius, 

«Ahmès,  fils  de  Pamin,  dont  la  mère  est  ...  .  dit  au  pastophore  d'Amon-Ra  Souter 
»  Hor,  fils  de  Neschons,  dont  la  mère  est  Neschons. 

«Tu  m'as  donné,  et  mon  cœur  en  est  satisfait,  l'argent  du  jeune  homme  Psen  .... 
■»  fils  de  Thotmès,  dont  la  mère  est  Seteirban,  mon  serviteur,  que  je  t'ai  donné  pour  te  servir. 
»11  est  à  toi,  ton  serviteur,  celui-là.  Celui  qui  viendra  à  toi  à  cause  de  lui,  soit  en  mon 
»  nom,  soit  au  nom.  d'homme  quelconque  au  monde,  depuis  frère,  sœur,  parent  par  alhance, 
»  père,  mère,  seigneur,  dame,  jusqu'à  moi-même,  en  disant  :  ce  n'est  point  ton  serviteur,  celui- 
»là,  je  le  ferai  s'éloigner  de  toi.  Si  je  ne  le  fais  pas  s'éloigner  de  toi,  je  te  donnerai  5  ar- 
»genteus  fondus  du  temple  de  Ptah,  ou  4  argenteus  plus  y,  jV,  j^,  ^o,  ^^,  5  argenteus  du 
»  temple  de  Ptah  en  tout.  Et  sera  à  toi  ton  esclave  encore,  ainsi  que  ses  enfants  à  jamais!» 

Cet  esclave  qui  est  ici  vendu  comme  un  bien  ordinaire,  avec  une  amende  pécuniaire 
pour  corroborer  la  vente  en  cas  d'éviction,  fut,  l'année  suivante,  revendu  par  l'acheteur  avec 
une  tout  autre  garantie,  celle  de  l'esclave  lui-même.  Reproduisons  ici  ce  bien  intéressant 
document  : 

«L'an  6,  Thot,  du  roi  Darius. 

«Le  pastophore  du  temple  d'Amon-Ra-Sonter,  Hor,  fils  de  Neschons,  dont  la  mère  est 
»  Neschons,  dit  à  la  femme  Tsenhor,  fille  du  choachyte  de  la  nécropole  Nesmin,  dont  la 
»mère  est  Réru. 

'  Nous  aurons  à  leveuir  ailleurs  sur  le  cas  de  Chapochrate  qui  seul  pourrait  faire  songer  sous  les 
Lagides  à  quelque  chose  d'analogue  à  l'adoption.  Je  crois  plutôt  qu'il  s'agit  d'un  changement  de  castes. 
Aussi  Chapochrate  renonce-t-il  à  tous  les  biens  de  sa  famille  du  sang,  auxquels  Haret'  ne  renonce  en  aucune 
manière  et  qu'il  partage  avec  son  frère  dans  un  acte  postérieur  à  l'adoption.  Nous  avons  vu  plus  haut  que 
l'adoption  d'Haret'  n'avait  en  réalité  qu'un  but  testamentaire.  Ce  but  fut  atteint  plus  tard  tout  autrement, 
quand  pour  cela  —  en  l'absence  du  testament  toujours  interdit  en  droit  égyptien  —  on  eut  recours  à  une 
vente  fictive,  à  un  écrit  pour  argent.  (Voir  dans  la  Bévue  archéologique  mon  article  sur  l'état  de  la  pro- 
priété du  temps  d'Amasis). 


Bibliographie.  193 


«  Tu  as  donné,  et  mon  cœur  en  est  satisfait,  l'argent  pour  faire  à  toi  serviteur  le  jeune 
»  homme  Psen  ...  fils  de  Thotmès,  dont  la  mère  est  Seteirban,  mon  serviteur,  que  j'ai  acheté 

>  pour  argent  d'Ahmès,  fils  de  Pamin,  dont  la  mère  est  ...  .  qui  m'a  écrit  à  ce  sujet  un  écrit  en 
»  l'an  5,  Pharmouthi,  du  roi  Darius.  Je  te  l'ai  donné  pour  serviteur.  Lui,  (il  est  à  toi;  ton  servi- 
»  teur  celui-là,  ainsi  que  ses  enfants  et  totalité  de  ce  qui  est  à  eux  et  de  ce  qu'ils  feront  être  (de 
»  leurs  biens  présents  et  à  venir).  Ils  ne  pourront  échapper  à  la  faction  d'esclave  ci-dessus.  Je 
3>n'ai  plus  aucune  parole  au  monde  (aucune  réclamation  à  faire)  à  ce  sujet.  Personne  au  monde 
»n'a  à  en  connaître.  C'est  moi-même  qui  les  écarterai  (les  tiers  évicteurs)  de  toi  depuis  le  jour 
»  ci-dessus  à  jamais.  Celui  qui  viendra  à  toi,  soit  en  mon  nom,  soit  au  nom  de  quiconque  au 
■»  monde,  je  le  ferai  s'éloigner  de  toi.  Que  j'en  justifie  par  tout  acte,  toute  parole  au  monde.  » 

Adhédon. 
«  Le  jeune  homme  Psen  .  .  .,  fils  de  Thotmès  et  dont  la  mère  est  Seteirban,  ci-dessus 
»  nommé,  dit  : 

«J'ai  écrit  pour  faire  toute  parole  ci -dessus.   Mon  cœur  en  est  satisfait.  Je  suis  ton 

>  serviteur  ainsi  que  mes  enfants  et  totalité  de  ce  qui  est  à  nous  et  de  ce  que  nous  ferpns 
»être.  Ils  ne  pourront  s'opposer  à  la  faction  d'esclave  ci-dessus  à  jamais!» 

(La  suite  au  prochain'  numéro.) 


BIBLIOGEAPHIE. 

Nous  avons  à  signaler  parmi  les  travaux  proprement  égyptologiques  reçus  par  nous  : 

1°  un  très  beau  travail,  fort  bien  illustré,  de  notre  cher  ami,  M.  le  professeur  Erman  (de  Berlin)  sur 
l'Egypte  antique.  Il  en  a  déjà  paru  trois  fascicules. 

2°  la  partie  égyptologique  du  6*  congrès  international  des  Orientalistes  tenu  à  Leide  et  comprenant 
les  travaux  :  aj  de  M.  Pleyte  sur  la  couronne  de  j%istification,  les  plantes  qui  la  composaient  et  les  textes 
sacrés  s'y  rapportant;  b)  de  M.  Eisenlohe  sur  la  photographie  des  papyrus  et  monuments;  c)  de  M.  Lleblein 
sur  la  religion  de  l'ancienne  Egypte;  d)  de  M.  Golenischeff  sur  l'origine  alphabétique  de  certains  hiéroglyphes  ; 
e)  de  M.  Leemans  sur  un  hypocéphale  égyptien;  fj  de  M.  Wiedemann  sur  les  cônes  funéraires  égyptiens; 
g)  de  Miss  Amélia  Edwards  sur  la  dispersion  des  antiquités  égyptiennes;  h)  de  M.  Léfébure  sur  quelques 
fouilles  et  déblayements  à  faire  dans  la  Vallée  des  Rois  à  Thébes;  i)  de  M.  Piehl  sur  l'origine  des  colonnes 
de  la  salle  des  caryatides  du  temple  de  Karnak,  et  j)  de  M.  le  professeur  Eisenlohr  (de  Heidelberg)  sur  les 
textes  relatifs  à  la  métrologie  des  champs  à  Edfou  (cette  monographie  a  été  tirée  à  part  et  sera  bientôt 
analysée  par  nous).  Après  cela  viennent  différents  travaux  des  sections  de  l'extrême  Orient  et  de  la  Polynésie 
qui  intéresseraient  peu  nos  lecteurs.  Au  contraire,  nous  leur  rendrons  compte,  aussitôt  après  que  nous 
aurons  reçu  le  volume  s'y  rapportant,  des  études  assyriologiques  du  congrès  —  fort  intéressantes,  paraît-il. 

3°  The  store  city  of  Pithom  and  the  route  of  Oie  Exodus,  par  M.  Na ville.  Nous  avons  déjà  rendu 
compte  dans  The  academy  de  cet  important  volume  et  nous  avons  en  même  temps  fait  justice  des  attaques 
singulières  dont  il  avait  été  l'objet  de  la  part  d'incompétents.  Mais  il  est  un  point  sur  lequel  nous  voulons 
revenir  aujourd'hui.  Dans  les  derniers  numéros  de  la  Revue  égyptologique  nous  avons  longuement  insisté  sur 
la  valeur  très  grande  d'un  passage  métrologique  que  M.  Naville  avait  bien  voulu  extraire  pour  nous  d'une 
des  stèles  qu'il  publie  aujourd'hui.  Ce  passage  était  capital  tant  en  ce  qui  concerne  les  monnaies  qu'en 
ce  qui  concerne  le  budget  des  cultes.  A  ce  dernier  point  de  vue,  il  y  avait  aussi  une  question  historique 
fort  intéressante  :  celle  d'une  largesse  extraordinaire  faite  par  le  roi  Philadelphe  en  l'an  21  de  son  règne  et  à 
propos  de  laquelle  je  disais  {Revue  III,  III,  p.  112)  :  «Cette  largesse  de  140,000  argenteus  ou  2466  talents 

'  Nous  réservons  pour  ce  numéro  les  mot-à-mots  de  tous  les  actes  traduits  dans  le  travail  entier.  Aujourd'hui  nous  nous  borne- 
rons à  donner  à  nos  lecteurs  l'héliogravure  tlu  premier  (l'acte  d'affranchissement  de  la  collection  d'ElSENLOHR). 


194  Eugène  Revillout. 


»et  400  drachmes  n'est  point  ordinaire  et  s'appliquant  à  tous  les  temps,  comme  la  précédente.  Elle  a  une 
»date  fixe  :  l'an  21  au  mois  de  Clioiak.  Quel  était  le  motif  qui  détermina  le  roi  à  faire  une  telle  dépense? 

» Évidemment  une  telle  générosité  avait  un  motif  et  ce  motif  devait  être  considérable.  En  effet, 

»pour  le  roi  il  ne  s'agissait  de  rien  moins  que  de  payer  les  frais  de  sa  divinisation.  Je  ne  sais  sHl  est 
»  question  de  ce  viotif  dans  la  stèle  de  M.  Na ville  dont  mon  aimable  confrère  ne  m'a  envoyé  que  les  deux  passages 
»  en  question.  Je  n'en  suis  pas  moins  en  mesure  d'affirmer  complètement  ce  fait  d'après  la  seule  comparaison 
»des  dates.  En  effet,  ainsi  que  je  l'ai  montré  dans  mes  notes  chronologiques  sur  les  Lagides  d'après  la 
»  série  de  mes  contrats  démotiques,  le  culte  d'Alexandre  et  des  dieux  Adelphes  fut  institué  entre  l'an  19 
»et  l'an  21  du  règne  de  Philadelphe.  En  l'an  19,  au  mois  d'Athyr,  il  n'existait  pas,  et  en  l'an  21  au  mois 
»  d'Athyr  ou  de  Phaménoth  (car  il  y  a  doute  entre  ces  deux  mois)  il  apparaît.  Or,  la  largesse  est  juste- 
»ment  de  l'an  21  au  mois  de  Choiak,  c'est-à-dire  un  mois  après  Athyr  et  trois  mois  avant  Phaménoth. 
»  On  ne  peut  donc  hésiter  que  sur  un  point,  celui  de  savoir  si  Philadelphe  a  payé  d'avance  ou  après  coup 
»son  apothéose.»  Ce  (\y}iQ  j  affirmais  alors.,  j'en  ai  maintenant  la  preuve  positive  dans  notre  stèle  elle-même. 
qui  mentionne  les  statues  élevées  a  cette  date  aux  dieux  frères  :  \  ïf\      M    Y  " 


^</^    «F, 


:  Fut  bâti  un  sanctuaire  à  celle  qui  aime  son  frère.  Des  statues  i, furent  faites)  aux 

»  dieux  frères  dans  ce  sanctuaire.  Furent  faits  tous  les  rites  ....  par  les  prophètes  et  les  prêtres  de  son 
»père  Tutu,  le  dieu  grand  vivant  de  Succoth,  comme  dans  tous  les  temples  d'Egypte». 

4°  Der  geschnitzte  Holzsarg  des  Hatbastru,  par  notre  cher  ami,  M.  le  professeur  George  Ebers  (de 
Leipzig),  avec  de  magnifiques  héliogravures  et  planches  autographiées,  en  outre  d'une  très  intéressante 
dissertation  analytique. 

5°  Ber  Sarkophag  des  Nesschutafnut,  par  M.  vos  Bergmaîtn.  Le  si  distingué  et  si  aimable  consei-vateur 
du  Musée  égyptien  de  Vienne,  M.  von  Bergmaxn,  s'est  adonné  avec  le  plus  grand  succès  à  l'étude  attentive 
de  ce  genre  de  monuments,  généralement  trop  négligés. 

6°  Die  dgyptischen  Denkmdler  des  Provincial -Muséums  zu  Bonn  und  des  Museuins  Walra^'-  Rickartz  zu 
K'ôln,  par  notre  ami,  le  D""  A.  Wiedemann,  privat-docent  d'Egyptien  à  Bonn,  auteur  d'une  très  intéressante 
histoire  d'Egypte  depuis  Psammétique. 

7°  Bruchstucke  der  sahidisclien  BibelUbersetzung,  par  le  D''  Oscar  de  Lemji,  conservateur  du  Musée  asia- 
tique de  l'Académie  de  S*  Pétersbourg,  dont  les  publications  hiéroglyphiques  sont  appréciées  et  qui  s'occupe 
beaucoup  de  copte  en  ce  moment. 

Parmi  les  travaux  de  littérature  et  d'épigraphie  grecque  connexes  à  nos  études  : 

1°  Un  très  beau  mémoire  de  notre  illustre  maître,  M.  Dareste,  sur  la  loi  de  Gortyne  et  un  autre 
mémoire  du  même  auteur  sur  la  transcription  des  ventes  en  droit  hellénique.  Tous  deux  sont  à  consulter 
et  à  rapprocher  des  renseignements  fournis  par  les  autres  sources  juridiques  orientales,  particulièrement 
par  le  droit  égyptien,  qui  fait  le  sujet  d'un  de  nos  cours  et  de  beaucoup  de  nos  publications. 

2°  Un  beau  travail  de  M.  Weill,  de  l'Institut,  sur  un  fragment  d'une  vie  d'Ésope,  contenue  dans  un 
papyrus  appartenant  à  M.  Golenischeff,  et  une  intéressante  brochure  de  M.  Blass  sur  Alkman  d'après 
le  papyrus  du  Louvre. 

3°  Plusieurs  i^ublications  nouvelles  de  notre  cher  collaborateur,  M.  Wessely  :  a)  Amuletten;  b)  Evangelien- 
Fragmente  aiif  Papyrus;  c)  Die  griechischen  Papyrus  der  kaiserlichen  Sammlungen  Wiens;  d)  .  .  .  der  Leipziger 
Universitdts-Bibliothek.  On  y  remarque  une  intéressante  révision  du  papyrus  de  Zoïs  publié  autrefois  par 
Petrettini  et  Petron,  une  nouvelle  publication  du  papyrus  d'Artemisia,  le  plus  ancien  papyrus  grec  connu, 
et  de  deux  papyrus  ptolémaïques  du  Sérapéum,  des  fragments  d'un  précieux  manuscrit  de  Thucydide,  les 
papyrus  grecs  de  This  et  de  Panopolis,  plusieurs  contrats  du  Faioum,  etc.,  etc. 

4°  Une  thèse  inaugurale  remarquable  de  M.  Wilcken,  intitulée  :  Observationes  ad  historiam  Aegypti 
provinciae  romanae,  depromptae  e  Papyris  graecis  Berolinensibus  ineditis,  dans  laquelle  se  trouvent  cités  un 
certain  nombre  de  papyiiis  grecs  inédits,  publiés  depuis  par  le  même  auteur  dans  un  mémoire  intitulé  : 
Arsinoitische  Tenipel-Rechnung  aus  devi  Jahre  215  n.  Chr.  Après  la  thèse  imprimée  se  trouve  une  partie  paléo- 
graphique autographiée.  Ce  qu'il  y  dit  sur  les  sigles  des  fractions  de  la  drachme  à  l'époque  romaine  (fai- 
sant suite  à  notre  travail  sur  les  sigles  monétaires  d'époque  ptolémaïque)  nous  a  vivement  intéressé.  L'o- 
bole et  le  diobole  sont,  comme  je  l'ai  dit  déjà,  restés  semblables  à  ce  qu'ils  étaient  à  l'époque  ptolémaïque. 


Bibliographie.  195 


Suivant  M.  Wilcken  ou  aurait  remplacé,  à  l'époque  romaine,  les  autres  multiples  de  l'obole  par  de  nou- 
veaux signes  conventionnels,  de  telle  sorte,  par  exemple,  que  les  cinq  oboles  auraient  été  figurées  ainsi 
(V/  ",  au  lieu  de  l'être  ainsi  Set:  et  que  le  nouveau  signe  des  trois  oboles  serait  devenu  tout  à  fait 
semblable  à  celui  qui  représentait  antérieurement  les  quatre  oboles  (et  peut-être  réciproquement).  Quoi 
qu'il  en  soit,  il  est  certain  que  les  signes  du  chalque  et  de  ses  multiples  existaient  encore  à  cette  époque, 
tels  qu'ils  étaient  du  temps  des  Ptolémées  :  M.  Wilcken  ne  le  disait  pas  encore  dans  sa  thèse;  mais  à  la 
page  442  du  tirage  à  part  de  son  mémoire  :  Arsinoitische  Tempeî  -  Eechnung,  à  la  ligne  3*^  du  3®  fragment, 
on  lit  très  nettement  écrit  le  nombre  suivant:  Y"  PNC  ~^  CX  c'est-à-dire  156  drachmes,  une  obole,  un 
hemi-obole  et  un  chalque.  Le  Tétartemorion  seul  manque  jusqu'ici,  mais  il  est  extrêmement  probable  que 
c'est  le  signe  déformé  et  divisé  (car  c'était  scripturalemeut  le  plus  complexe  de  tous  (^  ou  ]^  etc.)  à 
la  dernière  ligne  de  la  page  432  du  même  mémoire,  signe  dont  M.  Wilcken  dit  que  «les  signes  qui  suivent 
semblent  être  des  marques  de  fractions». 

Dans  les  comptes  dont  il  s'agit  on  trouve  des  renseignements  d'une  haute  valeur  —  et  dont  M.  Wilcken 
a  tiré  bon  parti  —  sur  le  culte  rendu  aux  empereurs  romains  dans  la  ville  d'Arsinoë,  sous  le  régne  d'Au- 
tonin  Caracalla.  Il  faut  les  rapprocher  de  ce  que  nous  avons  dit  dans  la  Revue  sur  «  un  prophète  d'Au- 
guste» et  de  ce  que  nous  dirons  bientôt,  dans  cet  article  même,  sur  une  question  tout  à  fait  connexe. 

5°  Kritische  Analekten,  par  M.  Froener,  et  Griechisches  Epigramm  aus  Aegypten,  par  M.  Bucheler. 

6°  Inscribed  sepulchral  vases  from  Alexandria,  par  M.  Merriaji.  L'un  de  ces  vases  contient  une  double 
date  par  les  mois  macédoniens  et  égyptiens.  Notons,  du  reste,  que  comme  l'a  prouvé  M.  Wessely,  l'usage 
de  ces  doubles  dates  s'est  conservé  jusqu'à  l'époque  de  Dioclétien,  ainsi  que  l'usage  de  l'étalon  d'argent 
et  des  drachmes  ptolémaïques  (que  Tibère  avait  rétabli).  Dans  un  contrat  démotique  du  règne  d'Auguste, 
étudié  par  moi  à  Londres,  j'ai  retrouvé  aussi  la  mention  du  sacerdoce  d'Auguste,  remplaçant  à  Alexandrie 
l'ancien  sacerdoce  d'Alexandre  et  des  Ptolémées,  et  celle  du  notaire  écrivant  au  nom  du  dieu  local  et 
d'Auguste,  comme  les  monographes  de  Thébes  écrivaient  autrefois  au  nom  d'Amon-ra-Sonter,  des  dieux 
Adelphes.  etc.  M.  Wessely  a  trouvé  également,  vient-il  de  me  dire,  d'assez  tardives  mentions  du  sacerdoce 
impérial  d'Alexandrie.  Ajoutons  qu'à  la  même  époque  le  droit  égj'ptien  s'était  en  entier  conservé,  à  côté 
du  droit  macédonien  et  du  droit  romain.  Celui-ci  est  invoqué  comme  une  sorte  de  troisième  droit  par  une 
femme  qui  se  passe  de  xupîo;  parcequ'elle  avait  accouché  trois  fois.  Dans  la  collection  anglaise  à  laquelle 
nous  faisions  allusion  tout  à  l'heure,  j'ai  eu  l'occasion  de  copier  un  document  qui  prouve  combien  cette 
scission  des  usages  s'étendait  loin.  Il  s'agit  d'un  livre  de  mathématique  mettant  en  parallèle  les  fractions 
égyptiennes  à  un  seul  numérateur  et  les  fractions  grecques  à  numérateurs  multiples.  Les  unes  et  les 
autres  sont  écrites  en  démotique.  Dans  une  première  colonne  se  trouvent  les  fractions  grecques  écrites 
ainsi  :  5®  —  1;  5^  —  2;  5=  —  3;  5*  —  4;  etc.,  et  sur  la  seconde  colonne  les  deux  ou  trois  fractions 
égyptiennes  correspondant  à  chaque  fraction  grecque.  Était-ce  un  simple  travail  de  comparaison  des  deux 
systèmes  ou  bien  un  manuel  permettant  aux  notaires,  par  exemple,  d'écrire  à  l'égyptienne  sans  erreur 
les  parts  revenant  à  chaque  copartageant  d'une  famille,  etc.?  Dans  ce  dernier  cas  le  calcul  aurait  été 
fait  primitivement  par  les  égyptiens  eux-mêmes  à  la  moderne  avant  d'être  écrit  à  l'égyptienne.  Il  ne  s'agi- 
rait ainsi  que  de  se  plier  à  une  \ieille  règle.  J'avoue  que  cette  solution  me  semble,  tout  bien  considéré, 
plus  probable  que  l'autre.  Nous  reviendrons  sur  ces  questions  en  publiant  les  papyrus  du  Found  of  ex- 
ploration qui  doivent  m'être  envoyés  pour  cela  à  Paris.  Ils  vont  m'arriver  sous  peu,  selon  une  nouvelle 
lettre  officielle  qui  vient  de  m'être  adressée  par  M.  Newton  au  nom  du  comité  du  Found. 

Au  point  de  vue  métrologique ,  M.  Michel  Soutzo  (de  Bucharest)  m'a  envoyé  un  beau  mémoire 
intitulé  :  Étalons  pondéraux  primitifs  et  lingots  monétaires.  M.  Soutzo  ignorait  encore  nos  récentes  découvertes 
sous  ce  rapport.  Cela  est  regrettable;  car  la  partie  égyptienne  de  son  œuvre  et  les  comparaisons  qui  en 
résultent  sont  en  retard. 

M.  Oberziner,  notre  ancien  élève  en  démotique,  se  livre  beaucoup  à  l'assyrien  qu'il  a  étudié  avec 
M.  Offert,    et   il  vient    de   nous    envoj'er  un  travail  intitulé  :  Divîsione  poUtica  e  militare  delV  antica  Assiria. 

En  ce  qui  concerne  l'art  égyptien  comparé  aux  autres  arts  antiques,  nous  devons  signaler  l'impor- 
tant travail  de  M.  de  Ronchaud,  directeur  des  Musées  nationaux,  sur  la  Tapisserie  dam  V antiquité.  M.  de 
RoNCHAUD  pose  en  principe  qu'on  se  fait  une  idée  trop  sévère  de  la  sculpture  et  de  l'architecture  an- 
tique. On  oublie  que  la  polychromie  des  statues  existait  en  Grèce,  comme  en  Egypte,  et  que  les  tapisseries 
et  le  luxe  de  l'ameublement  venaient  encore  enrichir  la  décoration.  Il  insiste  avec  raison  sur  le  rôle  que 
la  tapisserie  jouait  dans  l'organisation  intérieure  des  temples,  des  palais,  des  appartements.    Puis  dans 


196  Eugène  Revillout.  Bibliogeaphie. 


plusieurs  chapitres  il  traite  successivement  :  1°  des  tapis  et  étoffes  brodées  dans  l'antiquité  orientale  grecque 
et  romaine-  2°  des  procédés  de  fabrication  et  des  couleurs  décoratives;  3°  de  l'emploi  de  l'étoffe  dans  la 
division  et  la  décoration  des  édifices  de  l'antiquité;  4°  des  tentes;  5°  des  statues  peintes  et  habillées;  6°  de 
la  tente  d'Ion;  7°  des  tapisseries  du  Parthénon;  8°  du  peplos  d'Athène.  C'est  un  livre  à  lire,  n'ayant  aucune 
analoo-ie  avec  les  prétendues  histoires  de  l'art  antique  qui  nous  inondent  aujourd'hui,  et  dont  les  auteurs 
croient  pouvoir  prophétiser  sur  des  civilisations  qu'ils  ignorent,  ne  les  ayant  jamais  étudiées.  M.  de  Kon- 
cHàUD  lui,  s'est  inspiré  aux  bonnes  sources.  :  et  dans  un  sujet  limité  et  très  bien  choisi,  il  a  fait  preuve 
d'un  D-rand  disceniement,  d'un  goîit  fin,  d'un  véritable  esprit  critique  et  de  beaucoup  de  prudence.  Nous 
devons  signaler  aussi  à  l'attention  du  lecteur  les  belles  planches  dont  l'ouvrage  est  orné.  Elles  en  font 
un  de  ces  livres  élégants  auxquels  M.  Eouam,  éditeur  de  la  librairie  de  l'art,  a  habitué  le  public.  Nous  don- 
nons en  spécimen,  quelques  planches  représentant  des  étoffes  antiques  du  Musée  égyptien,  sans  compter 
la  splendide  reproduction  de  notre  bàs-relief  polychrome  de  Séti  I^"',  au  costume  si  riche  et  si  brillant. 

Enfin  pour  les  études  relatives  aux  funérailles  égyptiennes  et  aux  rites  postérieurs  décrits  par  les 
textes  de  M.  Dûmichen  nous  recommanderons  vivement  la  comparaison  du  «  Rituel  domestique  des  funérailles 
en  Annam^,  traduit  par  M.  Lesserteur  (librairie  Chaix).  L'analogie  est  frappante. 

—  Le  «poème  satyrique  contre  le  poète  Hor  Ut'a»  que  nous  avions  annoncé  dans  notre  dernier  nu- 
méro va  être  livré  en  son  entier  au  public  par  la  librairie  Leroux.  Il  comprend  :  1°  de  magnifiques  hélio- 
gravures du  papyrus  de  Vienne  avec  une  préface  renfermant  ma  leçon  d'ouverture  faite  à  l'école  du  Louvre 
en  décembre  1883  (24  pages);  2°  une  partie  autographique  de  263  pages  contenant  le  mot-à-mot  du  texte 
avec  transcription  en  caractères  latins,  renvois  démotiques,  et  équivalences  hiéroglyphiques  et  coptes,  le 
tout  suivi  d'un  long  commentaire  philologique  allant  de  la  page  35  à  la  page  262.  Dans  ce  commentaire 
j'ai  également  répondu  aux  singulières  observations  de  Khall.  Voici  les  conclusions  de  cette  l'éponse  : 

«Ici  s'arrêtait  le  morceau  du  poème  que  j'avais  donné  dans  la  Revue  (III,  2)  et  à  propos  duquel 
■■>  Krall  a  inséré  son  article  «  critique  »  dans  le  Recueil  de  M.  Maspero.  On  ne  saurait  assez  s'étonner  de 
«voir  un  estimable  journal,  contenant,  dans  chaque  numéro,  tant  d'excellents  articles,  donner  asile  dans 
»ses  colonnes  à  une  élucubration  aussi  honteuse  pour  la  science  et  si  bien  faite  pour  déconsidérer  les 
»  études  égyptologiques.  Permettrait- on  à  un  étudiant,  s'étant  occupé  pendant  quelques  mois  de  chinois 
»  commercial,  de  s'ériger  en  juge  pour  les  travaux  de  littérature  chinoise,  de  dire  :  tel  signe  n'a  pas  cette 
»  valeur  parce  que  je  ne  l'ai  pas  vu,  tel  autre  est  inconnu  de  moi  et  par  conséquent  de  l'univers?  Lui 
»  laisserait-on  imprimer  cela  dans  une  reAnie  scientifique?  Le  laisserait-on  se  livrer  aussi  aux  comparaisons 
»les  plus  bizarres  avec  d'autres  langues  pour  déformer  le  sens  des  mots,  précisé  par  des  centaines  et  des 
«milliers  d'exemples  reconnus  par  tous  les  spécialistes  et  enregistrés  dans  les  lexiques  classiques?  Le 
»  laisserait-on  s'abandonner  à  tous  les  rêves  de  l'imagination  la  plus  dévergondée,  traduire  les  phrases  par 
»  des  séries  de  non-sens  dignes  de  Bicêtre,  inventer  des  formes  grammaticales  qui  ne  se  trouvent  nulle  part 
»  (comme  en  démotique  jA.nis.p G  et  nq),  s'attribuer  impudemment  les  découvertes  faites  par  son  maître  dans 
île  travail  même  qu'il  ose  critiquer,  (comme  le  C)3  =  «J».  d'habitude)  :  le  tout  sous  l'excuse  qu'il  est 
»  pauvre  et  qu'il  veut  se  pousser  dans  le  monde  per  fas  et  nefas  (même  en  s'attaquant  à  celui  qui  lui  a 
»  prodigué  gratis,  par  bonté,  et  sans  y  être  obligé,  son  temps  et  sa  peine  pendant  plusieurs  heures  par 
«semaine)?  Et  après  cela  le  laisserait-on  encore  (si  le  précèdent  article  avait  été  imprimé  sans  être  lu,  ce 
»  qui  peut  arriver),  le  laisserait-on,  dis-je,  faire  dans  le  même  ordre  d'idées  et  dans  la  même  spécialité  des 
»  "articles  aussi  insensés  que  celui  que  Krall  a  rédigé  sur  <'un  groupe  démotique»  dans  un  des  derniers 
«numéros  du  Recueil?  Evidemment  M.  Maspero,  qui  a  fait  des  travaux  en  démotique,  n'a  pas  lu  ces  articles 
«remplis  de  choses  si  contraires  à  la  science  vraie  et  à  tout  ce  qu'il  sait  lui-même  ...» 

Je  renvoie  le  lecteur  à  mon  livre  pour  les  détails  philologiques  qui  suivent  et  qui  demanderaient 
l'emploi  de  trop  de  caractères  à  fondre  pour  un  résultat  bien  mince  :  la  nouvelle  constatation,  parfaite- 
ment inutile  d'ailleurs,  d'une  ignorance  trop  évidente. 

Ajoutons  que  si  Krall  ignore  le  démotique  dont  il  parle,  ses  publications  de  papyrus  grecs  dans  le 

Recueil  ne  doivent  pas  lui  faire  plus  d'honneur;  car  nous  connaissons  celui  qui  en  a  tout  le  mérite  et  ce 

n'est  pas  lui.  Ce  qui  lui  appartient  bien,  au  contraire,  c'est  sa  note  sur  les  drachmes  d'argent  qu'il  veut 

voir  mentionner  à  l'époque  byzantine  quand  toutes  les  monnaies  se  comptaient  d'après  l'étalon  d'or.   Ce 

sont  là  de  ces  découvertes  comme  il  appartient  à  Krall  seul  d'en  faire. 

(E.  R.) 


L'Éditeur  Ernest  LERorx,  Propriétaire- Gérant. 


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