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Full text of "Réimpression de l'ancien Moniteur"

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RÉIMPRESSION 


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L'ANCIEN  MONITEUR. 


TOME  VINGT-TROISIÈME. 


.*    V       V-     -     .     PARIS    TYPOCilAPÉUS  DE  HINRI  PLON-  .     *    . 


d«e 


RÉIMPRESSION 


DB 


L'ANCIEN  MONITEUR 

D«   LA 

RÉVOLUTION  FRANÇAISE 

BKPDIS  U  ElONIOli  DIS  ÉUTS-fiÉNÉUDI  JUSQU'AU  CONSOUT 


ÀtEC    DBS    N0TB8*  BXPLICATI VBS. 


ÉDITION  ORNÉE  DE  VI6NETTES,  REPRODUCTION  DES  6RKVURES  DU  TEMPS. 

Qo*il  est  utile,  6  Athéniens,  qu'il  est  bon  d'avoir  des 
archives  publiques!  LA,  les  écrits  restent  fixes  et  ne 
varient  pas  sel^  le  caprice  de  l'opinion. 

IHa€,  «TEêcmmm  cMfM  CiMf  4m. 


TOME  VINGT-TROISIEME. 


CONVENTION  NATIONALE. 


<=>^^xy^3^~ 


PARIS. 

HENRI  PLON,  IMPRIMEUR  ÉDITEUR, 

RUB    OAhANCIBIIB,    8. 
1802 


J^  .    \<\nSO 


GAZETTE  NATIOMIE  ».  LE  MONITEUR  UiVERSEL. 

N*  91.         Primidi  !«'  Nivôse,  Van  3®.  (Dimanche  21  Décembre  1794,  vieux  style,) 


AVIS  DE  l'ancien  MONITEUR. 

A  compter  du  I*'  de  ce  mois,  et  pour  les  raisons  que  nous 
•Tons  données  dans  nos  feuilles  du  mois  dernier ,  le  pris  de 
Tabonnement  au  Moniteur,  pour  Paris,  est  de  90  lir.  par  an, 
de  48  liv.  pour  sis  mois,  et  ae  S5  liv.  pour  trois  mois. 

La  souscription  pour  les  départements  est  de  109  lir.  par 
an,  de  54  lir.  pour  six  mois,  et  de  38  liv.  pour  trois  mois. 

Nous  prenons  rengagement  formel  de  diminuer  ce  pris 
dès  qu*une  réduction  dans  celui  des  matières  et  dans  celui 
de  la  mainHl*œuTre  nous  permettra  de  nous  livrer  à  cette 
mesure. 

Nous  n*avons  aucun  bureau  intermédiaire,  k  Paris,  pour  la 
recette  des  abonnements  :  les  lettres  et  Targent  doivent 
être  adressés,  francs,  au  citoyen  Aubrj,  rue  des  Poitevins, 
no  18. 

11  faut  avoir  soin  (attendu  le  grand  nombre  de  lettres  qui 
a*égarent)  de  charger  celles  qui  renferment  des  assignats. 


POLITIQUE. 

TURQUIE. 

Congtantinople  f  le  15  octobre,  —  Il  sVst  tenu ,  le  26  du 
mois  dernier,  un  grand  conseil  enlre  tous  les  membres  du 
ministère  et  les  chef:»  des  différents  départements.  On  s'y 
est  occupé  à  mettre  promptement  Gn  aux  troubles  inté- 
rieurs. Il  résulte  d*un  rapport  fait  au  Grand  Seigneur  que 
les  insurgés  qui,  au  printemps  dernier,  ont  levé  des  cou- 
tributions  dans  les  environs  d'Andrinople,  reparatssenten 
plus  grande  force.  Ils  arrêtent  les  caravanes  et  les  TO^a- 
geurs,  quMls  pillent  et  traitent  d'ailleurs  sans  humanité; 
mais  tous  les  employés  du  gouvernement  sont  tués  impi- 
toyablement. On  assure  que  la  Porte  va  prendre  des  mesu- 
res de  viguear  contre  ces  rebelles. 

Le  divan  continue  à  mettre  la  marine  ottomane  sur  on 
pied  respectable.  On  construit  partout  des  l>Aliments  de 
guerre  de  différentes  grandeurs;  quelques-uns  sont  déjà 
entrés  dans  ce  port  et  dans  la  mer  Noire. 

Il  est  question  en  outre  de  bfttir  ici  on  nouvel  arsenal 
pourlaciliter  les  armements» 

—  Les  frégates  françabes  qui  sont  en  obsenration  à 
Smyme  font  souvent  des  prises  sur  les  ennemis  de  la  ré- 
publique» 

SUEDE. 

Stockholm,  le  24  novembre,  —  Le  baron  de  Staël,  ci-de- 
vant ambassadeur  en  France,  est  parti  pour  une  mission 
en  Suisse.  11  est  en  ce  moment  à  Copenhague,  où  il  a  de 
fréquentes  conférences  avec  le  premier  ministre  Bernslorfl*, 

—  La  proclamation  faite  le  11  octobre  dernier  dans 
toutes  les  provinces,  au  nom  du  gouvernement ,  a  produit 
tout  reflet  que  la  cour  s'en  était  promis.  Il  arrive  de  toutes 
parts  des  députés  pour 'féliciter  le  régent  de  son  zèle  et  de 
ses  travaux  pour  le  bien  public. 

—  Le  colonel  Rosenstein  vient  d*étre  nommé  comman- 
dant du  port  de  Stockholm  et  de  la  flottille  qui  s'y  trouve. 

—  Le  jeune  roi  acommencé  les  cours  d'instruction  qu'il 
doit  taire  dans  les  différents  bureaux  de  l'administration.  Il 
assistera ,  pendant  trois  mois ,  aux  audiences  de  chacun 
des  collèges  de  la  cour. 

—  On  apprend  de  Copenhague  que  le  professeur  Bah- 
bcck,  rois  en  justice  pour  avoir  inséré  dans  son  journal 
une  chanson  contre  la  cour  de  Londres,  a  été  acquitté. 

ALLEMAGNE. 

De  la  Bavière,  le  24  novembre,  —  Le  sel  est  un  des  prin* 
clpaux  revenus  de  l'électeur;  aussi  la  régence  a-t-elle  tou- 
juun4oiuié  ses  soins  à  cette  branche  de  l'administralioD*  La 

9^Séri€.^Tom€X. 


fraude  ayant  néanmoins  rendu  infructueuses  les  prccau« 
tions  qu'on  avait  prises ,  le  dicastère  a  publié  un  ordre  en 
vertu  duquel  les  paysans  seront  tenus  de  conduire  aux  fron-' 
tièresde  Souabe,  moyennant  un  prix  fixe,  et  sur  plusieurs 
milliers  de  voitures,  l'immense  quantité  de  sel  qui  encom- 
bre les  divers  dépôts  de  la  Bavière. 

—  L'électeur,  cédant  aux  énergiques  représentations  du 
conseil  aulique,  s'est  enfin  décidé  à  laisser  un  libre  cours 
à  la  justice  dans  le  procès  de  son  ex-ministre  Bettschard. 
Eu  conséquence ,  des  commissaires  se  sont  rendus  der^ 
nièremenl  à  la  prison  de  cet  accusé.  Celui-ci ,  prévenu 
d'avance,  refusa  d'ouvrir  sa  porte,  et  il  fallut  l'enfoncer. 
On  le  dépouilla  de  ses  divcrseè  décorations,  conformémeni 
à  l'esprit  féodal  des  vieilles  lois  bavaroises ,  qui  ne  per« 
mettent  pas  qu'un  noble  soit,  comme  tel,  jugé  criminel- 
leroent.  Il  fut  ensuite  transféré  à  la  prison  criminelle  ordi« 
naire,  rois  aux  fers  et  traité  en  tout  comroe  les  malfaiteurs 
destinés  à  la  mort.  Son  ci-devant  secrétaire  Hausmann  , 
et  le  ci-devant  chancelier  des  états,  de  Neubourg,  regar- 
dés comme  ses  complices,  le  suivront  incessamment  dans 
sa  prison  actuelle. 

La  commission  ne  tardera  pas  à  s'occuper  de  l'interro- 
gatoire des  prévenus. 

Ehrenbreitstein,  le  !•»  décembre,  —  Les  armes  prises  à 
Cobleniipar  les  Français  seront  conduites  dans  l'inté- 
rieur de  la  république.  On  va  de  même  transporter  le  fer, 
le)cuivre  et  les  autres  objeUi  mis  en  réquisition. 

On  dit  que,  dans  un  souterrain  de  l'abbaye  de  Saint- 
Maximin,  les  Français  ont  trouvé  un  dépôt  d'argenterie 
pour  la  valeur  de  30,000  écus. 

Tous  les  meubles  et  effets  de  la  résidence  électorale  ont 
élé  conduits  au  delà  des  frontières.  Les  malades  qui  étaient 
ù  Schoënbornslust,  principal  hospice,  viennent  d'être 
transportés  à  Trarbacb. 

—  Les  Français  continuent  de  construire  des  redoutes 
formidables  vis-à-vis  les  flèches  de  Manheim.  Les  batteries 
des  flrclies  tirent  sur  les  travailleurs.  Les  Français  leur  ré- 
pondent de  leurs  redoutes  du  centre  établies  sur  la  chaus- 
sée d'Oggersheim.  11  est  arrivé  à  ces  derniers  un  renfort 
d'artillerie. 

—  Le  baron  de  HufT,  ci-devant  commandant  deMayence, 
a  été  envoyé  à  Prague. 

—  Le  général  Bcsius,  qui  commandait  à  Bheinfelds, 
vient  d'être  enfermé  à  Ziegenhayne,  et  les  officiers  incul- 
pés comme  lui  à  Spangenberg. 

ANGLETERRE. 

Londres^  le  18  novembre,  —  L'aveu  de  la  prise  de  Ni- 
mèguepar  les  Français,  qu'on  ne  pouvait  cacher  plus 
longtemps,  a  été  enfin  consigné  par  les  ministres  dans  la 
Gazette  de  la  Cour» 

—  Le  chevalier  MortonEden  vient  d'être  nommé  à  l'am- 
bassade de  Vienne. 

—  Des  lettres  reçues  hier  au  café  de  Lloyd's  annoncent 
que  la  troisième  division  de  la  flotte  de  la  Méditerranée 
n'a  dû  partir  de  Lisbonne  que  le  24  octobre,  il  reste  en- 
core quelques  inquiétudes  sur  le  sort  de  ce  convoi,  dont 
l'escorte  se  borne  à  un  seul  vaisseau  de  74  canons  et  à  une 
seule  frégate. 

—  Suivant  des  nouvelles  de  Saint-Domingue,  apportées 
par  le  paquebot  d'Halifax ,  les  Français  ont  renouvelé  les 
hostilités  dans  le  district  des  Goaves  ;  ils  l'ont  fait  avec 
succès.  Le  gros  Morne,  Terre-Neuve ^  et  tout  l^pays  dont 
ios  Anglais  s'étaient  emparés,  est  retourné  au  pouvoir  des 
Français.  Ceux-ci  sont  toujours  maîtres  de  la  ville  et  du 
port  du  Cap  ;  mais  on  dit  que  le  défaut  de  vivres  et  la  fiè- 
vre jaune  leur  enlèvent  beaucoup  de  monde  dans  cette 
ville.  La  Gazette  de  <a  Jamaii/ue  apprend  que  le  brigadier 
général  Horneck  était  au  moment  de  partir  pour  aller 
prendre  le  commandement  à  Saint-Domingue ,  où  lei  An« 
glais  Ksfflhlent  mécontents  du  général  White. 

1 


s 


^Ofi  apprend,  par  des  lettres  de  New-York,  des  2  et  3 
octobre,  que  le  général  Waine,  comoiandant  Parmée  des 
Btals-Unis,  a  battu  complètement  les  sauvages  ;  mais, 
snirantles  mêmes  lettr€8,  la  fièvre  jaune,  qui,  après  avoir 
ravagé  les  Antilles,  avait  passé  de  là  à  Philadelphie,  où 
elle  s*était  enfin  éteinte  après  avoir  moissonné  beaucoup 
de  monde,  règne  aujourd'hui  avec  force  dans  quelques 
parties  de  P Amérique  septentrionale,  et  surtout  à  Balti- 
more. 

Du  2i.  —  Une  proclamation  du  roi,  datée  du  A9,  re- 
cule encore  jusqu'au  30  décembre  la  rentrée  du  parlement, 
qui  devait  avoir  lieu  le  28  novembre.  Beaucoup  de  gens 
I  parient  que  le  parlement  sera  encore  prorogé  de  nouveau 
juiqu'après  la  lete  de  la  naissance  de  la  reine. 

<—  Le  départ  de  fambassadeur  chargé  d'aller  à  Bruns- 
wick chercher  la  priqcesse  qui  doit  épouser  le  prince  de 
Galles  est  encore  différé.  On  en  donne  pour  raison  les 
acrapules  qu'a  conçus  la  future  épouse  à  l'occasion  des 
premiers  liens  du  prince  de  Galles  avec  M»«  Fili-Hcrberf, 
dont  le  mariage  a  été  célébré  sous  le  double  rite  anglican 
et  catholique.  Il  est  aussi  question  de  payer  les  énormes 
dettes  de  l'héritier  présomptil  delà  couronne,  etd'en  trou- 
fer  les  moyens  sans  surcharger  le  peuple.  On  n'en  voit 
guère  d'autres  que  d'autoriser,  par  un  acte  du  parlement, 
la  YCBte  des  terres  du  duché  de  Comouailles  ;  le  titre  de  la 
pairie  resterait  néanmoins  toujours  attaché  au  fils  aîné  du 
I9i  d'Angleterre. 

«—  Suivant  un  papier  estimé ,  le  ministre  américain , 
11*  laj,  est  à  la  vdlle  de  terminer  ses  négociations.  Les 
ministres  consentent  enfin  à  la  reddition  des  forts  que  les 
Anglais  occupent  sur  les  firontières  du  Canada. 

Les  anti-ministériels  en  concluent  qu'à  quelque  chose  au 
moins  malheur  est  bon ,  puisque  les  embarras  et  les  revers 
peuvent  donner  une  sorte  d'esprit  de  modération  et  de  jus- 
tice an  cabinet  de  Saint-James. 

— -  Il  circule  dans  la  capitale  une  lettre  écrite  par  un  offi- 
cier &  bord  du  vaisseau  le  Âirly-CasUe,  en  date  du  2 
août,  et  apportée  du  cap  de  Bonne-Espérance  par  un  bâti- 
ment étranger.  Cette  lettre  apprend  que  la  flotte  anglaise 
des  Indes  orientales,  partie  le  2  mai  de  Sainte-Hélène,  a 
été  dispersée  par  un  coup  de  vent  le  18  juillet,  peu  de 
jours  avant  celui  où  elle  devait  entrer  au  Cap.  Lorsque 
rofficier  a  écrit,  il  n'y  avait  encore  d'arrivé  dans  ce  port 
qùK  te  Jirlff'CaêtU. 

—  Les  secours  pécuniaires  quele  gouvernement  donnait 
■QZ  émigrés  firançais  ont  cessé  depuis  le  i*'  novembre. 

—  Le  président  du  congrès  américain  a  convoqué  le 
rps  législatif  pour  le  i*'  de  septembre. 

—  Les  Français  sont  en  force  sur  les  côtes  d'Amérique; 
Ils  y  ont  trois  vaisseaux  de  ligne,  douze  grandes  frégates, 
et  un  nombre  considérable  de  corsaires  qui  font  beaucoup 
de  tort  au  commerce  anglais. 

Celui  des  Américains  va  très-bien.  L'exportation  qui 
s'est  faite  du  port  de  Philadelphie,  dans  les  mois  d'avril, 
mai  et  juin»  sacs  y  comprendre  le  commerce  des  côtes ,  a 
été  un  objet  de  1  million  702,000  dollars,  quoiqu'il  y  ait 
eu  dans  les  mois  d'avril  et  de  mai  un  embargo  de  cin- 
qpante-trois  Jours. 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 
TBIBUIIAL  CBIMINBL  BEVOLUTIONIfAIRB. 

SvUii  de^a  froeédure  du  eomilé  révolutionnaire 
de  Nanlei. 

Pierre  Chon,  gendarme,  dépose  de  faits  relatifs  à 
des  enfants  de  quatorze  à  quinze  ans  ;  il  parle  aussi 
des  noyades  et  fusillades. 

Jean  Sandroe^  chef  de  division  des  transports  et 
convois  militaireSfdéposequ'ayantunami  incarcéré, 
il  demanda  son  élargissement  au  comité;  qu'ensuite 


il  s*adressa  ù  Laloi,  qui  l'engagea  â  venir  d^ncr  avec 
lui,  et  qui  le  conduisit  dans  une  galiote  hollandaise. 
«Quel  fut  mon  étonnement!  Je  descends  dans  le  fond 
de  cale;  je  vois  une  table  de  quinze  à  vingt  couverts; 
je  demande  ce  que  c'est  que  ce  dîner,  quelle  est  la 
galiote  où  je  me  trouve?*  C'est  la  grande  tasse  des 
prêtres,  me  repond  Laloi  ;  et  comme  Lambertye  a 
fait  cette  expédition,  Carrier,  pour  L'en  récompenser, 
lui  a  donné  la  galiote.* 

•  Je  fais  la  même  demande  à  d'autres,  et  ils  me 
font  la  même  réponse;  enfin  on  se  met  à  table.  Lam- 
bertye était  à  droite,  et  Laloi  à  gauche;  Foucault, 
Robin,  Sullivan  étaient  aussi  du  nombre  des  convi- 
ves; le  dîner  fut  fort  gai.  Lambertye  fil  le  récit  de 
ses  belles  expéditions;  il  déclara  qu'il  faisait  sortir 
ses  victimes  deux  à  deux,  qu'il  les  rouillait,  les  atta- 
chait, les  faisait  descendre  dans  la  gabare,  et  les 
précipitait  ensuite  dans  l'eau. 

«Chacun  des  assistants  ne  manquait  pas  d'applau- 
dir ;  on  indiquait  à  Carrier  les  braves  camarades  qui 
avaient  contribué  à  cette  expédition.  • 

Carrier,  après  avoir  fait  différentes  interpellations, 
pour,  disait-il,  connaître  la  moralité  du  témoin, 
voyant  qu'il  ne  pouvait  en  retirer  le  fruit  qu'il  s'en 
était  promis,  finit  par  nier  la  déposition. 

L'accusé  Sullivan  déclare  qu'il  était  {présent  au 
dîner  ;  il  certifie  la  vérité  des  faits  articulés  par 
Sandroc. 

Carrier  nie  les  faits. 

Le  président,  à  Carrier  :  Quels  fruits  vous  promet- 
tez-vous de  vos  dénégations,  lorsque  déjà  plusieurs 
témoins  s'accordent  a  déposer  des  mêmes  faits? 

Carrier  :  Tout  Nantes  conspire  contre  moi  ;  les 
Bretons  n'agissent  que  par  coterie.  (On  rit.) 

Le  président  invite  le  public  à  la  constance,  à  la 
décence  ;  il  répète  qu'un  accusé  en  présence  de  ses 
juges  est  un  objet  sacré  que  le  peuple  doit  respecter. 

Carrier  rend  compte  des  Adresses  de  félicitations 
qui  lui  ont  été  données  à  son  départ  de  Nantes  ;  il 
parle  de  ses  services. 

On  procède  à  l'audition  du  témoin  Thomas. 

Ce  témoin,  officier  de  santé  de  première  classe, 
dépose  qu'"obl!gé  de  se  rendre  chez  Carrier  pour  y 

rirendre  ses  ordres,  il  figura,  comme  les  autres, dans 
'antichambre  de  ce  représentant,  qui,  en  l'aperce- 
vant, se  porta  vers  lui  aux  violences  et  aux  injures 
les  plus  grossières  ;  qu'à  toutes  ses  demandes  il  lui 
répondit  :  Merdel  merde  !  et  autres  ordures  de  ce 
genre. 

1 1  accuse  Carrier  d'avoir  ordonné  au  général  Haxo, 
après  la  prise  de  Noirmoutier,  de  fusiller  tous  les 
brigands  sans  distinction ,  et  de  brûler  toutes  les 
propriétés  delà  Vendée. 

«La  commune  de  Loroux  était  venue  se  rendre  ; 
elle  avait  déposé  les  armes,  et  ne  demandait  pour 
toute  grâce  que  la  vie  sauve  :  je  sais  que  1rs  habi- 
tants de  cette  commune  ont  été  conduits  dans  les 
prisons,  et  j'ai  lieu  de  croire  qu'ils  ont  péri  parles 
fusillades,  puisqu'on  ne  les  a  point  vus  reparaître 
depuis. 

•  J'accuse  Carrier  d'avoir,  sur  l'indication  des  me- 
neurs de  la  Société  populaire,  fait  incarcérer  beau- 
coup de  citoyens  irréprochables. 

»Je  l'accuse  d'avoir  fait  noyer  ou  fusiller  quatre- 
vingts  cavaliers  qui  s'étaient  rendus  sur  la  place  du 
département,  et  de  les  avoir  ainsi  sacrifiés,  nu  mé- 
pris des  réclamations  des  autorités  constituées.* 

Le  président,  au  témoin  :  Ces  cavaliers  étaient-ils 
accompagnés  de  la  force  armée,  ou  sont-ils  venus 
sans  escorte? 


Lêiémotn  :  J*ai  vu  entrer  ces  cavaliers  sans  escor- 
te, sans  armes;  vingt  avaient  été  fusillés  au  poste, 
les  autres  sont  arrivés  sur  la  place  du  département  ; 
tous  demandaient  du  service,  et  pour  toute  grâce  la 
vie  sauve;  ils  promettaient  de  convertir  leurs  cama- 
rades au  giron  de  la  république,  si  on  voulait  laisser 
partir  quatre  d*entre  eux,  tandis  que  le  reste  demeu- 
rerait en  otages;  Carrier  a  refusé  de  faire  droit  à 
leurs  réclamations,  et  leur  a  refusé  toute  espèce  de 
satisfaction. 

J*accuse  Carrier  d*avoir  fait  fusiller  sans  jugement 
des  brigands  ;  d'avoir  maltraité  le  général  Moulin  à 
coups  de  sabre  dans  une  embrasure  de  croisée,  et  de 
l'a  voir  fait  ensuite  incarcérer  au  Bouifay,  pour  avoir, 
après  la  déroute  du  Mans,  donné  des  laissez-passer 
à  des  rebelles  qui  demandaient  à  rentrer  dans  leurs 
foyers.  J'observe  que  le  général  Moulin  avait  été  au- 
torisé par  le  représentantllentz  à  délivrer  ces  laissez- 
passer. 

,  Le  président,  à  Carrier  :  Vous  venez  d'entendre 
là  déposition  du  témoin;  vous  allez  y  répondre. 

Carrier  :  Thomas  est  un  fédéraliste.  Je  suis  bien 
éloigné  de  désavouer  ma  lettre  au  général  Haxo, 
contenant  ordre  d'enlever  tous  les  grains,  d'exter- 
miner les  brigands.  Une  proclamation  delà  Conven-  i 
tion  m'autorisait  à  en  agir  ainsi.  | 

Le  président  :  Le  général  Haxo  a-t-il  attaqué  les  , 
communes  voisines?  i 

Carrier:  Haxo  n'a  jamais  fait  qu'exécuter  mes  or- 
dres ;  j'ai  toujours  marché  à  ses  côtés;  il  n'a  jamais 
attaqué  Tennemi  qu'en  colonne.  On  oublie  mes  ser- 
vices signalés,  et  cependant  toute  l'armée. en  est 
témoin,  il  y  avait  cent  cinquante  mille  brigands  ;  à  1 
la  colonne  de  Mayence,  nous  n'avions  que  neuf  mille  | 
hommes  pour  leur  faire  face.  Je  ne  sais  pas  si  on  a 
alimenté  la  Vendée  ;  mais  ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est 
qu'on  a  mis  des  patriotes  à  la  torture,  et  cependant 
nous  avons  volé  de  victoire  en  victoire.  A  mon  dé- 
prt,  les  brigands  étaient  réduits  à  trois  cents  ;  et  si 
les  communes  voisines  ont  été  attaquées  par  le  géné- 
ral Haxo,  ce  n'a  pu  être  qu'après  mon  départ,  et 
contre  le  but  de  mes  ordres. 

Le  témoin  Thomas:  J'ai  vu  les  volontaires,  con- 
formément aux  ordres  à  eux  donnés,  se  jeter  les  en- 
fants de  main  en  main,  les  faire  voler  de  baïonnette 
en  baïonnette,  incendier  les  maisons,  et  brûler  des 
enfants  de  quatorze  ans. 

Carrier  :  Etais-je  présent  à  ces  actes  d'inhuma- 
nité ;  et  quand  cela  s'est-il  passé? 

Le  témoin  :  Ces  scènes  ont  suivi  la  prise  de  Noir- 
moutier;  je  ne  puis  assurer  si  vous  étiez  encore  pré- 
sent ;  mais  on  s  autorisait  de  vos  ordres. 

Carrier  :  Et  moi  je  les  désavoue. 

Le  président,  à  Carrier  :  La  déposition  du  témoin 
s'accorde  cependant  parraitement  avec  les  ordres 
écrits,  par  vous  donnés  au  général  Haxo,  et  je  vais 
vous  en  faire  donner  lecture  : 

Carrier,  représentant  du  peuple,  au  général  Haxo, 

t  II  vous  est  ordonné  dMnccndier  toutes  les  maisoDs  des 
rebelles,  d*ea  massacrer  tous  les  habitants,  et  d'en  cnle- 
ver  toutes  les  subsistances.  » 

Un  témoin  dit  que  Carrier,  au  lieu  d'être  à  la  tête 
de  l'armée,  comme  c'était  son  devoir,  s'était  porté 
en  queue  de  cette  armée  avec  son  cheval  sans  licou, 
et  qu'il  fuyait  de  toutes  ses  forces. 

Carrier  :  Je  me  suis  trouvé  à  l'affaire  de  Cholet, 
à  la  tête  de  l'armée,  à  travers  les  balles  et  les  bou- 
lets, et  J'ai  eu  on  cheval  tué  sous  moi;  quant  à  la 


lettre  qui  m  est  opposée,  je  réponds  que  je  me  suis 
borné  à  exécuter  les  ordres  de  la  Convention  et  à 
les  notiâer  au  général  Haxo. 

Le  président  ordonne  la  lecture  du  décret  de  la 
Convention,  qui  prescrit  la  conduite  à  tenir  avec  les  \ 
rebelles  pris  les  armes  à  la  main  ;  il  observe  que  les 
dispositions  de  ce  décret  sont  absolument  conUraires 
aux  ordres  donnés  par  Carrier  au  général  Haxo. 

Carrier  cherche  à  éluder  la  question  :  ses  réponses 
n'ont  aucune  suite  d'idées. 

Le  président  lui  observe  qu'il  est  prouvé  gue 
vingt-  deux  communes  se  sont  rendues  volontaire- 
ment, et  qu'elles  n'en  ont  pas  moins  été  fusillées. 

Carrier  :  Dans  la  Vendée  il  ne  restait  que  des 
brigands;  d'ailleurs  tous  ces  mouvements  ne  se  sont 
pas  faits  de  mon  temps,  et  c'est  au  général  Turreau 
qu'il  faut  en  demander  compte. 

Le  président:  Je  demande  à  Carrier  s'il  s'est  choisi 
des  défenseurs,  et  si  celui  qui  lui  a  été  nommé  d'of- 
Gce  a  accepté  sa  nomination  ? 

Carrier  :  Je  serai  moi-même  mon  défenseur. 

Le  président  :  Tout  accusé,  c'est  le  vœu  de  la  loi, 
doit  avoir  un  défenseur. 

Antonelle  est  nommé.  Il  explique  les  causes  qui 
l'empêchent  d'accepter  la  défense  de  Carrier. 

Le  président  demande  le  tableau  des  défenseurs, 
attendu  qu'il  n'y  en  a  pas  un  qui  ne  doive  se  faire 
un  devoir  de  défendre  un  accusé. 

Carrier  réitère  sa  demande  pour  qu'il  lui  soit  per- 
mis de  se  défendre  lui-même. 

Le  président  répond  une  la  loi  s'y  oppose,  et  le  tri- 
bunal nomme  d'oftice  le  citoyen  Giroud  ;  ordonne 
que  sur-le-champ  il  lui  sera  expédié  un  ordre  par 
un  huissier  de  la  salle. 

Carrier  :  J'interpelle  le  témoin  de  dâ^larer  si  les 
horreurs  dont  il  a  parlé  ne  se  sont  pas  conunises  trois 
mois  après  la  prise  de  Noirmoutier. 

Le  témoin  :  Ces  faits  se  sont  passés  neuf  à  dix  jours 
après  la  prise  de  Noirmoutier. 

Carrier  :  Quel  est  le  général  qui  commandait? 

Le  témoin  :  C'était  le  général  Haxo.  Je  suis  bien 
loin  de  l'inculper;  je  dois  dire  qu'il  s'est  toujours 
bien  comporté,  et  que,  quatre  à  cinq  fois,  en  vovant 
de  telles  norreurs,  il  a  voulu  ^e  brûler  la  cervelle. 

Chaux':  Je  demande  la  parole  pour  un  feit  im- 
portant. 

Je  déclare  que,  trouvant  un  jour  Carrier  à  la  porte 
de  la  Convention,  il  me  dit  de  prendre  des  mesures 
afin  que,  par  la  suite,  on  ne  nous  inquiétât  pas  sur 
la  quantité  des  individus  noyés;  que,  quant  à  lui 
Carrier,  il  avait  eu  soin  d'écrire  à  la  commission 
pour  ajouter  dix  hommes  de  plus  à  chaque  jugement 
de  la  commission. 

Carrier  :  Je  nie  avoir  tenu  ce  propos  à  qui  que  ce 
soit  ;  et  quant  à  l'ordre  prétendu  donné  au  présidenl 
de  faire  guillotiner  sans  jugement,  je  ne  répondrai 
à  ce  fait  que  quand  les  minutes  me  seront  représen- 
tées, parce  que  je  ne  me  rappelle  pas  avoir  donné  ces 
ordres,  et  que  l'on  pourrait  m'avoir  subtilisé  ma  si* 
gnature. 

On  procède  à  l'audition  d'un  autre  témoin. 

Brondes,  commissaire  des  guerres  à  l'armée  de 
l'Ouest,  déclare  qu'il  ne  peut  déposer  d'aucuns  faits 
relatifs  à  l'accusation  contre  Carrier,  mais  qu'il  est 
en  état  de  rendre  compte  d'un  événement  propre  à 
convaincre  le  tribunal  du  courage  et  de  l'intrépidité 


dont  Carrier  s*est  vanté  dans  les  précédentes  séances. 

«  Carrier,  dit  le  témoin,  en  a  imposé  au  peuple, 
en  écrivant  et  voulant  persuader,  dans  sa  défense  au 
tribunal,  qu*il  a  contribué,  à  Cholet,  à  la  défaite 
des  brigands.  La  vérité  est  qu'au  lieu  d'être  sur  le 
champ  dç  bataille,  comme  c  était  son  devoir,  il  se 
sauva  sur  le  derrière  de  Tarmée  avec  tant  de  préci- 
pitation qu'il  ne  se  donna  pas  le  temps  de  brider  son 
cheval,  et  qu'il  le  conduisait  avec  le  seul  licou. 

«  Carrier  arriva  vers  moi  tout  hors  d'haleine,  con- 
tinue le  témoin  ;  il  me  pria  de  lui  faire  donner  une 
bride  ;  j'assure  au  tribunal  que,  si  la  bataille  n  été 
gagnée,  c'est  au  courage,  à  l'intrépidité  du  repré- 
sentant Merlin  (deThionville),  deTurreau  et  autres, 
que  l'on  est  reaevable  du  gain  de  cette  bataille,  et 
nullement  à  Carrier.  • 

Carrier  nie  les  faits,  et  désigne  le  témoin  comme 
un  aristocrate. 

Le  témoin  repousse  ces  inculpations  par  la  lecture 
de  certificats  honorables  des  représentants  du  peu- 
ple près  l'armée  de  l'Ouest,  et  du  général  Canclaux. 

Louis  Foumier,  directeur  de  l'hospice  révolu- 
tionnaire, dépose  qu'un  jour,  en  arrivant  sur  la 
place  de  l'Egalité,  il  remarqua  quatre-vingts  insur- 

§es  conduits  par  le  général  Hector,  qui  se  rendit 
ans  le  moment  chez  Carrier,  fit  ensuite  prendre  les 
armes  à  sa  troupe,  et  prit  le  chemin  de  la  plaine  de 
Mauves,  où  ces  prisonniers  furent  fusillés  ;  il  observe 
que  dans  ces  quatre-vingts  insurgés  il  y  avait  des 
enfants. 

Carrier  :  Je  réponds  n'avoir  jamais  donné  d'ordre 
à  Hector  pour  la  fusillade,  et  n'en  avoir  pas  même 
eu  connaissance. 

Guillaume  Erard,  commis  aux  écritures  de  l'ad- 
ministration des  effets  militaires ,  dépose  qu'étant 
Sorteur  d'un  arrêté  du  conseil  du  2«  bataillon  de 
antes,  à  l'effet  d'avoir  des  souliers,  il  se  présenta, 
en  nivôse,  chez  Carrier,  qui  lui  répondit  :  «  Va  te 
faire  foutre;  merde,  je  n'ai  pas  le  temps!  • 

«  Quelques  instants  après,  continue  le  témoin,  je 
vois  un  courrier  porteur  des  dépêches  de  Lorient  ; 
Carrier  prend  lecture  du  paquet,  et,  cette  lecture 
achevée,  il  s'écrie  avec  des  vociférations  furibondes: 
•  Vous  êtes  tous  des  sacrés  f.....  contre-révolution- 
naires à  Lorient;  il  faut  que  je  purge  cette  ville 
comme  celle  de  Nantes.  Je  m'y  transporterai  dans 
huit  jours  ;  je  ferai  jeter  préalablement  la  moitié  de 
la  ville  à  la  mer,  et  j'aviserai  aux  moyens  de  réduire 
le  reste.  ■ 

«Jevoisarriverquatre-vingtsbrigandssurla  place 
de  l'Egalité,  avec  trois  pièces  de  canon  ;  je  recon- 
nais un  gendarme  de  la  légion  Germanique;  je  lui 
demande  comment  il  a  passé  chez  les  brigands.  «  J'ai 
été  fait  prisonnier,  me  répond  ce  gendarme  ;  depuis 
quelques  joursje  les  ai  déterminés  à  se  rendre;»  et  si 
les  amnisties  avaient  été  bien  exactement  observées, 
beaucoup  de  brigands  auraient  mis  bas  les  armes. 
J'ai  vu  beaucoup  d'enfants  qui  avaient  les  pieds  dé- 
chirés ;  et  depuis  j'ai  appris  qu'ils  avaient  été  fusillés. 
Nous  avons  sauvé  de  l'Entrepôt  un  enfant  de  treize 
ans,  dont  nous  fîmes  un  canonnier,  dans  la  crainte 
que  Carrier  ne  le  fit  fusiller.» 

Carrier,interpelIésurcettedéposition,  nie  les  faits, 
traite  le  témoin  de  muscadin. 

Pheliftpes  TroncjoUy,  président  du  tribunal  révo- 
lutionnaire, dépose,  comme  il  l'a  fait  précédemment 
lors  de  son  audition  contre  les  membres  du  comité 
révolutionnaire,  que  Carrier  lui  a  ordonné  de  faire 
fusiller  sans  jugement  des  brigands ,  même  des 
femmes  enceintes  et  des  enfants. 
Le  préiideiUt  au  témoin  :  N*y  a-t-il  pas  eu  une 


assemblée  des  corps  administratif,  tendant  à  déter- 
miner le  sort  des  détenus? 

Le  témoin  :  C'est  Carrier  qui  a  provoqué  cette 
assemblée,  et  qui  a  fait  agiter  la  question  de  sa  voir  si 
on  les  ferait  ou  non  périr  en  masse,  et  ce,  sans  ju- 
gement. Cette  motion  déplaisait  beaucoup  aux  corps 
administratifs,  mais  ils  n  osaient  contrarier  les  vues 
de  Carrier,  qui  opinait  pour  que  tous  les  détenus 
fussent  fusillés  en  masse  sans  être  jugés.  Carrier  ap- 
puyait de  toutes  ses  forces  cette  mesure  sanguinaire, 
et  moi  je  la  combattis  de  tout  mon  pouvoir  ;  je  fus 
assez  heureux  pour  faire  écarter  la  proposition  bar- 
bare, et  plusieursmembresdescorps  constitués,  entre 
autres  La  marie,  m'en  adressèrent  des  remerciements. 

Le  président^  au  témoin  :  Peux-tu  indiquer  au 
tribunal  ceux  d'entre  les  accusés  qui  ont  assisté  à 
à  cette  assemblée? 

Le  (émoin  :  J'ai  remarqué  Goulin  et  Chaux;  Gou- 
lin  était  de  l'avis  de  Carrier,  il  me  traitait  de  prési- 
dent contre-révolutionnaire. 

Craignant  eue  la  mesure  cruelle  qui  avait  été 
proposée  ne  fut  exécutée  pendant  la  nuit,  je  passai 
ce  temps  au  greffe,  et  le  projet  fut  éventé. 

Lebalteux  m'a  dit  que  Carrier  avait  donné  droit 
de  vie  et  de  mort  à  Lambertye  et  Fouquet.  Les  7  et 
1 1  nivôse,  pour  mettre  On  aux  extractions  fréquentes 
qui  se  faisaient  dans  les  prisons,  je  rendis  une  ordon- 
nance qui  défendait  aux  concierges  des  prisons  de 
laisser  extraire  aucun  détenu  sans  ordonnance  du 
tribunal  ou  sans  autorisation  de  la  Convention  ;  et, 
pour  avoir  voulu  faire  exécuter  cette  ordonnance,  je 
fus  incarcéré  sous  le  prétexte  de  fédéralisme,  quoi- 
que les  corps  administratifs,  la  Société  populaire,  et 
même  les  représentants,  eussent  reconnu  d'un  com- 
mun accord  que  je  n'avais  point  eu  de  mauvaises 
intentions,  et  que  je  n'avais  été  qu'égaré...  Je  parle 
à  Carrier  des  noyades,  je  l'engage  a  en  arrêter  le 
cours.  Il  me  répond  :  •  Vous  autres  juges,  il  vous 
faut  des  jugements;  f.....-les-moi  à  l'eau,  c'est  bien 
plus  simple.  • 

Un  jour  qu'il  exigeait  de  moi  que  je  fisse  guilloti- 
ner sans  jugement  des  brigands,  je  lui  observai  qu'il 
y  avait  des  enfants,  et  que  l'humanité  répugnait  a  de 
telles  exécutions.  Carrier  répond  :  •  La  guillotine, 
toujours  la  guillotine!  » 

Le  président,  au  témoin  :  A  quelle  époque  com- 
mença la  terreur  dans  Nantes?  quelle  en  était  la 
source? 

Le  témoin  :  La  terreur  existait  à  Nantes  avant 
l'arrivée  de  Carrier  ;  elle  s'y  est  maintenue  de  son 
temps  et  après  son  départ;  et  je  crois  que  le  comité 
était  d'accord  avec  le  représentant  pour  comprimer 
la  commune  de  Nantes,  et  y  jeter  l'alarme  et  l'effroi. 
(J.a  suite  incessamment,) 


Dubuisson,  juge  du  district  de  Jossé;  Rambour 
agent  national  du  district  de  Besançon  ;  et  0ut- 
chaud'Lion,  administrateur  du  déparlement  de 
la  Charente-Supérieure  Jurés  au  tribunal  révo- 
lutionnaire, aux  rédacteurs  du  Moniteur. 

Paris,  le  38  frimaire,  Tan  3e  de  la  république 
une  et  indivisible. 

Citoyens,  un  décret  rendu  par  la  Convention  nationale, 
dans  sa  séance  de  ce  jour,  concernant  le  tribunal  révolu- 
tionnaire, fuit  planer  un  soupçon  sur  la  conduite  de  tous 
les  membres  qui  le  composaient  indistinctement,  et  notam- 
ment  sur  la  section  qui  a  prononcé  sur  Tafialre  du  comité 
réf  olutionoaire  de  Nantes, 

Nous  dcTon»  au  peuple  français,  è  l'Europe  entière,  à 


iHM  condlojens  et  à  nos  familles,  compte  de  notre  conduite 
et  des  opinions  que  nous  avons  émises  dans  le  procès  du 
comité  révolutionnaire  de  Nantes  «  sur  lequel  tous  les  yeni 
étaient  fixés. 

Isolés,  impassibles  au  milieu  des  partis  qui  s'entrecho- 
quaient ,  qui  nous  entouraient  sans  avoir  osé  nous  appro- 
cher ,  nous  arons  émis  librement ,  et  dans  le  calme  de  nos 
consciences,  un  tœu  que  la  justice  et  Thumanité  seules 
nous  ont  inspiré. 

Nous  af  ons  donc  déclaré  que  les  faits  étaient  constants; 
que  les  accusés  Carrier,  Moreau,  dit  Grandinaison ,  Pi- 
nard, Goulin,  Chaux,  Bachelier,  Perrochaux,  Durassier, 
Hichard,  Robin,  Dbéron  et  Forget  étaient  couTaincus d'en 
être  les  auteurs»  et  que  leurs  intentions  étaient  crimi- 
nelles. 

Nous  TOUS  infitoDS,  citoyens,  d*insérer  la  présente 
4ans  votre  journal. 

^lut  et  fraternité. 

DuBuissoN,  Rambodb,  E*  Quichaud-Lion. 


Tréiùrerie  nationale.  —  Liquidation  de  la  dette 
viagère. 

Les  créanciers  de  la  dette  viagère  sont  avertis  que  les 
inscriptions  des  lettres  initiales  D  et  E  des  parties  consti- 
tuées sur  une  seule  tête,  sans  expectative  ni  survie,  poup 
ront  être  retirées  primidi  prochain,  i*'  nivôse,  au  bureau 
établi  à  cet  effet,  rue  Vivienne,  en  face  de  la  Trésorerie. 
Le  payement  en  sera  effectué  de  suite  à  bureau  ouvert. 

Ceux  qui  viendront  retirer  les  inscripllons  auront  soin 
d'écrire  au  dos  du  bulletin  de  remise  dont  ils  sont  porteurs 
une  décharge  conçue  en  ces  termes  : 

c  Reçu  Tinscription  viagère  de  la  somme  de  au 

nom  de 

f  A  Paris,  ce. t 


CONVENTION   NATIONALE. 

Présidence  de  RewbelU 
8ÉANCB  DU  29  FBIHAIRE. 

Les  citoyens  d*Aix  félicitent  la  Convention  sur  la 
mémorable  journée  du  9  thermidor,  et  applaudissent 
au  décret  que  la  Convention  a  rendu  sur  les  Socié- 
tés populaires,  et  principalement  à  celui  qui  a  fermé 
la  salle  des  Jacobins  et  suspendu  leurs  séances.  Ils  Tin- 
vitent  à  ne  plus  laisser  subsister  ces  dénominations, 
Maratistei  et  Jacobites.  •  Rappelez-votis ,  disent- 
ils,  les  actions  de  la  compagnie  Marat  à  Nantes,  de 
Tarmée  révolutionnaire  à  Bordeaui,  et  celles  des 
Jacobins  à  Paris.  Il  n'est  qu*un  seul  nom,  comme  un 
seul  point  de  ralliement:  Républicains  français  et 
Convention  nationale!  • 

Mention  honorable,  insertion  au  Bulletin. 

—  Plusieurs  autres  Adresses  félicitent  de  même  la 
Convention  sur  ses  travaux,  et  l'invitent  à  rester  à 
son  poste. 

—  Le  citoyen  Pinglin,  homme  de  lettres,  présente 
la  pétition  suivante  ; 

«  Législateurs,  sous  le  régime  de  la  tyrannie,  l'a- 
brutissement est  peut-être  un  bien  ;  on  sent  moins 
le  poids  de  ses  cnaînes  ;  mais  un  peuple  qui  les  a 
rompues  ne  saurait  cultiver  sa  raison  avec  trop  de 
soin.  11  faut  qu'il  soit  sans  cesse  en  garde  contre  les 
sophismes  de  la  perfidie,  contre  la  séduction  de  l'é- 
loquence, contre  les  conseils  de  l'enthousiasme.  Son 
premier  besoin  est  une  saine  logique,  qui  préside  à 
toutes  les  délibérations,  qui  dirige  tous  ses  suffra- 

fes,  qui  lui  fasse  pressentir  tous  les  pièges  de  l'am- 
ition. 
«  l<^lateurs,  de  grands  philosophes  ont  assuré 

3ue  la  politique  et  la  morale  étaient  susceptibles  de 
émonstrations  aussi  rigoureuse  une  la  géométrie  r 
mais  ils  n*ont  pas  transmis  U  métoode  qui  les  avait 


conduits  à  cette  découverte.  Vingt  ans.de  re- 
cherches et  de  méditations  me  l'ont  révélée,  et  j'ai 
assez  approfondi  l'art  de  raisonner  pour  le  réduire 
à  un  seul  principe,  accessible  à  tous  les  âges,  à  tous 
les  sexes,  a  tous  les  esprits,  principe  dont  les  diffé- 
rentes règles,  tracées  jusqu'ici  pour  la  recherche  de 
la  vérité,  n'étaient  qu'une  application  imparraite. 

«  Résolu  d'ouvrir  le  15  nivose  un  Cours  de  nou^ 
velle  logique  (1),  et  de  publier- périodiquement  la 
substance  de  mes  leçons  en  faveur  de  ceux  qui  ne 
pourront  y  assister,  je  vous  prie,  législateurs,  d'en 
agréer  Thommage ,  et  d'autoriser  la  commission 
d  instruction  publique  à  m'accordcr  pour  mes  leçons 
un  local  convenable  au  public.  » 

La  mention  honorable  et  le  renvoi  au  comité  d'in- 
struction publique  sont  décrétés. 

Joseph  Lacombe,  au  nom  du  comité  des  finances: 
Par  votre  loi  du  21  frimaire  courant,  vous  avez  pro- 
rogé, en  faveur  des  créanciers  des  hôpitaux,  au  l«r 
ventôse  les  délais  originairement  fixés  au  1^'  nivose, 
pour  le  dépôt  de  leurs  titres  de  créance. 

Depuis  cette  époaue,  votre  comité  des  finances  a 
reçu  de  nouvelles  réclamations  qui  lui  ont  paru  mé- 
riter également  votre  attention  et  devoir  provoquer 
votre  justice  en  faveur  des  créanciers  des  communes, 
districts,  départements,  des  académies,  et  de  l'éoole 
militaire. 

Ces  réclamations  nous  parviennent  de  toutes 
parts,  tant  par  lés  créanciers  eux-mêmes  que  par  le 
commissaire  liquidateur  et  les  corps  administratifs. 

Les  créanciers  en  grand  nombre,  principalement 
les  fournisseurs  et  ouvriers,  prétendent  que  le  délai 
prescrit  n'a  pu  leur  suffire  à  se  procurer  les  pièces 
nécessaires  pour  démontrer  la  justice  de  leurs  pré- 
tentions, ou  au  règlement  de  leur  mémoire. 

Le  commissaire  liquidateur  qui  correspond  habi- 
tuellement avec  les  administrations  chargées  des 
travaux  préparatoires  nous  a  instruits  que  beaucoup 
d'entre  elles  ignoraient  encore  jusqu'à  rexistence  de 
la  loi  du  23  messidor;  que  conséquemrnent  elles 
n'ont  pas  pu  se  mettre  en  mesure  pour  son  exécu- 
tion, qui  devient  impossible  d'ici  au  l^r  nivose.  U 
nous  a  démontré  en  outre  qu'un  nouveau  délai  de 
deux  mois  ne  saurait,  dans  aucun  cas,  nuire  à  l'acti* 
*  vite  si  essentielle  de  ses  bureaux. 
,    Les  corps  administratifs  insistent  aussi  fortement 

fiour  obtenir  ce  nouveau  délai,  sans  lequel  des  mil- 
iers  de  créanciers  peu  fortunés  seraient  injustement 
privés  de  leur  propriété  contre  la  volonté  toujours 
constante  de  la  Convention  nationale.  C'est  surtout 
le  département  de  Paris,  qui,  faisant  fonctions  de 
district,  est  tenu  de  viser  les  titres  des  créances  sur 
cette  commune,  créances  sur  lesquelles  il  n'a  pu 
jusqu'à  ce  jour  se  procurer  aucun  .renseignement 
définitif,  puisque  les  pièces  et  registres  qui  doivent 
former  son  opinion  sont  encore  sous  les  scellés,  mal< 
gré  ses  efforts  multipliés  pour  eu  obtenir  la  levée. 

Citoyens ,  votre  comité  s'occupe ,  en  vertu  dei 
I  pouvoirs  que  vous  lui  avez  confiés,  de  faire  cesser 
cet  état  funeste  d'inaction  forcée,  et  bientôt  le  dé- 
partement aura  des  moyens  suffisants  pour  alimen- 
ter ces  travaux  de  la  liquidation  générale,  en  procu- 
rant aux  créanciers  dont  il  s'agit  la  justice  qui  leur 
est  due. 

Mais,  comme  il  paraît  indispensable  de  rendre  à 
ceux-ci  un  peu  plus  de  '  latitude  pour  remplir  les 
formalités  prescrites  par  la  loi,  je  suis  chargé  de  vous 
soumettre  le  projet  de  décret  suivant  : 

f  La  Convention  natioDale,  cul  son  comité  des  finaoceff 

(I)  On  souscrit  rue  Thoinss  du  Louvre,  n*  44.  Le  prii  de 
rabonnement  est  de  9  liv.  pour  cinquante-sis  numéros.  Il  co 
p«rtitra  an  moiDi  deui  par  décade.  A.  II. 


6 


décrète  que  les  dispositions  portées  dans  Tarticle  III  de  la 
loi  du  21  frimaire  courant,  relatives  aux  créanciers  des 
hôpitaux,  seront  étendues  aux  créanciers  des  communes, 
districts,  départements,  des  académies,  de  Técole  mili- 
Caire,  des  douze  collèges  en  dépendant,  et  de  tous  autres 
collèges.  > 
Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  Guyfon  présente,  au  nom  du  comité  de  salut 
public,  un  fusil  à  deux  coups,  dont  le  citoyen  Chris- 
tophe Burkard  fait  hommage  à  la  Convention  natio- 
nale. Le  représentant  du  peuple  Merlin  près  les  ar- 
mées du  Rhin  et  de  la  Moselle,  en  lui  faisaut  passer 
celte  arme  supérieurement  exécutée,  l'invite  a  pro- 
poser la  mention  honorable  cl  Tinsertion  au  Bulletin 
de  rhommage  de  cet  artiste,  dont  il  pense  que  l'on 

f pourrait  employer  les  talents  d'une  manière  utile  à 
a  république. 
Ces  propositions  sont  décrétées. 

—  Sur  le  rapport  de  Pottier,  le  décret  suivant  est 
rendu  : 

c  La  Convention  naUonale»  snr  le  rapport  de  ion  co- 
mité de  législation,  décrète  : 

«  Art.  I*%  Les  déclarations  des  décès  des  citoyens  qui 
ont  péri,  le  14  fructidor,  par  l'explosion  de  la  poudrerie 
de  Grenelle,  et  qui  n*ont  pas  été  trouvés  dans  les  décom- 
bres, ou  qui,  ayant  été  trouvés,  n*ont  pas  été  reconnus,  se- 
ront reçues  par  le  commissaire  de  police  de  la  section  des 
Invalides,  dans  rarroudissemenl  de  laquelle  est  située  la 
poudrerie  de  Grenelle,  avec  les  formes  qui  suivent. 

«  II.  Il  sera  fourni  par  les  parents  du  décédé  un  certifi- 
cat délivré  par  Tagence  des  salpêtres  et  poudres  de  la  répu- 
blique ,  constatant  que  tel  citoyen  était  employé  à  la  pou- 
drerie de  Grenelle  lors  de  son  explosion,  et  qu'il  était  pré- 
sent à  rappel  foll  dans  les  ateliers,  le  14  fruclidor,  ou  le 
loir  de  la  veille;  ce  certificat  sera  délivré  sans  Trais. 

tt  m.  Sur  le  vu  du  cerUficat  mentionné  dans  Tarticle 
précédent,  et  d'après  les  déclarations  de  trois  proches  pa- 
rents du  décédé,  ou,  à  défaut  de  parents,  de  trois  voisins 
qui  attesteront  que  le  citoyen  dénommé  dans  le  certificat 
n'a  pas  reparu  depuis  le  14  fructidor,  quil  n*a  pas  été 
trouvé  dans  les  décombres,  ou,  qu^ayant  été  trouvé,  il 
n^a  pas  été  reconnu ,  le  commissaire  de  police  en  dressera 
proâs-verbal ,  qu'il  signera  avec  les  déclarants. 

f  IV.  Le  commissaire  de  police  se  conformera,  au  sur- 
plus, aux  dispositions  des  lois  des  20  septembre  et  10  dé- 
cembre 1792 ,  sur  Tétat  civil  des  citoyens.  » 

—  Oudot,  au  nom  du  comité  de  législation,  pro* 
pose,  et  la  Convention  adopte  le  projet  de  décret 
suivant  : 

a  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  de  législaUoii  sur  la  pétition  du  citoyen 
Seran ,  tendant  à  obtenir  la  restitution  de  grains  saisis  par 
la  municipalité  de  Boulogne,  qui  ont  été  déclarés  confis- 
qués ,  quoique  le  pétitionnaire  se  fût  conformé  à  la  loi  du 
4  mai  1798,  en  déclarant  les  grains  dans  le  lieu  de  son  do- 
micilr. 

«  Décrète  que  le  procès-verbal  de  saisie  du  i 4  juillet, 
les  arrêtés  des  23  juillet  et  3  août  de  la  même  année,  qui 
ont  déclaré  la  saisie  des  grains  dont  il  s'agit  bonne  et  vala- 
ble, en  ont  prononcé  la  confiscation  et  ordonné  Texécution, 
sont  nuls  et  comme  non  avenus. 

•  Ordonne  que  les  officiers  municipaux  et  le  procureur 
de  la  commune  de  Boulogne,  qui  étaient  en  place  à  Té- 
poque  de  Tenlèvement  des  grains  du  citoyen  Seran,  seront 
tenus  solidairement  à  lui  restituer  une  quantité  de  grains 
égale,  et  de  même  qualité  que  ceux  qui  ont  été  enlevés 
chez  lui  le  18  août  1793. 

•  Charge  sa  commission  des  administrations  civiles,  po- 
lice et  tribunaux ,  de  rendre  compte  de  Texécution  du  pré- 
sent décret  au  comité  de  législation  »  dans  la  décade  qui 
suivra  sa  promulgation. 

f  Renvoie  à  ce  comité  pour  prononcer,  s'il  y  a  lieu,  la 
destitution  des  oflQciers  municipaux  et  de  l'agent  national 
qui  étaient  en  place  à  Tépoque  de  la  saisie  des  grains  du 
citoyen  Seran ,  le  18  août  1793.  > 

MauCi  au  nom  des  comités  de  la  marine  et  des  co- 


lonies, et  militaire,  réanis  :  Citoyens,  vous  arez  dé* 
crété,  le  13  brumaire  dernier,  que  tout  officier  mili- 
taire et  agent  civil,  soit  de  terre,  soit  de  la  marine, 
retiré  du  service,  par  quelque  motif  que  ce  soit,  de- 
puis et  compris  le  14  juillet  1789  et  non  pensionné, 
serait  tenu,  avant  le  l«r  nivôse  prochain,  de  décla- 
rer à  la  commission  du  mouvement  et  de  Forgani- 
sation  des  armées  le  lieu  de  sa  résidence  actuelle« 
sous  peine  d^étre  incarcéré  et  détenu  jusqu*à  la  paix. 

Quelques  dilBcultés  se  sont  jusqu'à  présent  ren- 
contrées dans  Texécution  de  cette  loi.  Elles  provient 
nent  principalement  de  ce  que  la  définition  des  indi^ 
vidus  sur  lesquels  elle  portait  n*a  pas  été  assez 
précisée  ;de  ce  que  d'ailleurs  la  commission  du  mou- 
vement et  de  l'organisation  des  armées  de  terre 
n'était  pas  le  centre  naturel  auquel  devaient  parve- 
nir les  déclarations  relatives  aux  officiers  militaires 
et  aux  agents  civils  précédemment  attachés  au  ser- 
vice de  la  marine  et  des  colonies,  sur  les  talents,  sur 
les  services,  sur  la  conduite  politique  desquels  cette 
commission  ne  possède  aucuns  renseignements  ;  et 
enfin,  de  ce  que  le  délai  fixé  au  l«r  nivôse  prochain 
était  véritablement  trop  court  pourvue  votre  loi  pût 
être  connue  et  ponctuellement  exécutée  par  ceux 
des  officiers  militaires  ou  agents  civils  retirés  ou  ré- 
formés, que  la  médiocrité  de  leur  fortune  ou  tout 
autre  motif  a  déterminés  à  se  fixer  dans  de  petites 
communes,  ou  dans  des  asiles  enfoncés  dans  les 
terres. 

Ces  considérations  ont  déterminé  vos  comité  de 
la  marine  et  des  colon ies^et  militaire,  a  vous  propo- 
ser d'interpréter  la  loi  du  13  brumaire,  et  de  proro- 
ger a  trois  mois  le  délai  fixé  au  \^'  nivôse  prochain, 
pour  envoyer  les  déclarations  des  lieux  de  rési- 
dence. 

Quant  aux  motife  oui  ont  provoqué  de  votre  part 
rémission  de  la  loi  au  13  brumaire ,  ils  subsistent 
toujours.  Quelques-uns  de  ces  motifs  deviennent 
même  plus  impérieux  que  jamais  par  le  défaut 
d'exécution  complète  de  cette  loi  jusqu'à  ce  jour,et 
par  la  nécessité  ae  mettre  le  eouvernement  à  portée 
de  connaître,  à  l'ouverture  d'une  nouvelle  campa- 
gne de  terre,  et  à  la  reprise  d'une  campagne  de  mer 
plus  générale,  plus  formidable,  toutes  ses  ressources 
en  omciers  et  en  administrateurs  et  en  agents  civils 
quelconques.  L'heureuse  direction  donnée  enfin  par 
vous  à  l'opinion  publique  lui  permettra  de  jeter  ses 
regards  et  d'étenare  sa  .confiance  sur  un  grandnom- 
bre  de  citoyens  que  la  défiance,  le  découragement, 
l'intrigue  et  la  terreur  avaient  tenus  jusqu'à  présent 
éloignés  du  service,  et  que  le  retour  invarianle  des 
vrais  principes  animera  d'un  nouveau  zèle  pour  la 

§loire  et  la  prospérité  de  leur  patrie,  et  le  triomphe 
e  la  république  démocratique. 
Voici  le  projet  de  décret  que  vos  comités  m'ont 
chargé  de  vous  présenter  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  ses  comités  de  la  marine  et  des  colonies,  et  mili- 
taire réunis,  interprétant  son  décret  du  13  brumaire,  dé- 
crète ce  qui  suit  : 

•  Art.  !•'.  Le  délai  dans  lequel  tout  officier  militaire  et 
agent  cifil,  soit  de  terre,  soit  de  la  marine,  retiré  du  ser- 
vice depuis  le  14  juillet  1789,  et  non  pensionné,  est  obligé 
de  déclarer  le  lieu  de  sa  résidence  actuelle,  sous  peine 
d'être  incarcéré  jusqu'à  la  paix,  est  prorogé  jusqu'au  f 
germinal  prochain, 

c  IL  Les  déclarations  de  cette  nature  remises  jusqu'à 
présent  à  la  commission  du  mouvement  et  de  Torganisa- 
tion  des  armées  de  terre,  de  la  part  des  officiers  militaires 
ou  d'agents  civils  dépendant  de  Tancien  département  de 
la  marine  et  des  colonies,  seront  snr-le-champ  transmises 
à  la  commission  de  la  marine  et  des  colonies* 

€  III.  A  Pa venir,  cette  dernière  commission  recevra  èx* 
clttiivement  les  dédaratioi»  rdativta»  soit  aux  officiers 


tuilltaiics,  soit  aux  agents  et  employés  civils  quelconques, 
précédemment  attachés  au  senice  de  ia' marine  et  des  co- 
lonies. 

c  Quant  à  celles  concemantlesOiSciersmililaires,  agents 
H  employés  civils  quelconques,  ci-devant  attachés  au  ser- 
vice de  la  guerre,  elles  continueront  d*étre  reçues  par  la 
commission  da  mouvement  et  de  Torganisation  des  ar- 
mées. 

•  IV.  L*arlicle  II  du  décret  du  A3  brumaire  est  main- 
tenu ;  en  conséquence,  tout  officier  militaire  ou  agent  ci- 
vil mentionné  ci-dessus  sera  tenu  de  remettre,  avant  le  i" 
germinal  prochain,  un  double  de  celle  déclaration  au  co- 
mité révolutionnaire  de  sa  commune  ou  de  son  district, 
lequel  en  inrormera ,  dans  les  trois  jours,  Tune  ou  Taulre 
desdites  commissions. 

•  V.  Le  présent  décret  sera  inséré  au  Bulletin  de  correa- 
pondance.  » 

Lbtournbur  (de  la  Manche)  :  Il  me  semble,  ci- 
tovcns  collrguefi,  que  l'article  III  ne  remplit  pas 
suhisamment  robjet  que  vos  comités  se  sont  pro- 
pose. On  vous  a  dit  que  le  but  de  cette  loi  était  non- 
seulement  de  connaître  ceux  des  agents  civils  et  mi- 
litaires (jui,  par  incurie,  malveillance  ou  haine  de  la 
révolution,  se  sont  retirés  du  service,  mais  encore 
ceux  qui,s'ëtant  retirés  ou  ayant  été  réformés  par 
cause  majeure  et  légitime,  pourraient  être  replacés 
d'une  manière  utile  à  la  république.  Il  faut  donc 
coonaitre,  pourremplir  ce  vœu  delà  loi,  la  nature  et 
la  durée  du  service  des  agents  dont  il  est  question. 
En  conséc(uence,  je  propose  par  amendement  d'ajou- 
ter à  l'article  III  :  «  Ces  déclarations  devront  indi- 
quer en  outre  la  nature  et  la  durée  du  service  desdits 
officiers  ou  agents,  jusqu'à  Tépoque  où  ils  se  sont 
retirés  ou  ont  été  réformes.  • 

IIarec  :  J'adopte  l'amendement  proposé  par  mon 
collègue,  comme  infiniment  juste. 

La  Convention  nationale  décrète  l'amendement. 

Le  projet  de  décret,  amendé  par  Letourneur,  est 
adopté. 

—  Sur  le  rapport  d'un  membre  du  comité  des 
finances,  les  articles  additionnels  suivants  sont  dé- 
crétés: 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  des  finances  sur  rexécution  du  décret 
du  17  fructidor  dernier,  concernant  la  liquidation  de  la 
ci-devant  Nouvelle  Compagnie  des  Iodes,  décrète  ce  qui 
toit: 

c  Art.  !•'•  Le  montant  des  droits  d^enregistrement  et 
du  triple  droit  dû  pour  les  mutations  des  actions  de  la  ci- 
devant  Nouifelle  Compagnie  des  ludes,  et  des  inscriptions 
au  livre  des  tramierts  effectuées  sans  que  le  droit  ait  été 
acquitté,  sera  pris  sur  le  résultat  total  de  la  liquidation  et 
avant  le  partage  entre  les  intéressés. 

•  II.  Il  sera  prélevé  pour  le  trésor  public  on  droit  d'en- 
vffistrement,  et  un  triple  droit  pour  la  première  inscrip* 
lion  des  actions  portées  au  livre  des  transferts,  et  dont  le 
droit  n'a  pas  été  préalablement  acquitté. 

•  m.  Cependant  les  actionnaires  qui  ont  fait  enregis* 
Irer  leurs  actions  sans  les  porter  au  livre  des*  transferts 
leronl  exempts  de  la  contribution  aux  sommes  à  prélever 
en  exécatÎM  des  denx  articles  précédents. 

•  IV.  L'article  XIV  de  la  loi  du  17  fructidor  est  applica- 
ble à  tous  les  créanciers  de  la  ci-devant  Nouvelle  Compa- 
gnie des  Indes,  même  à  ceux  qui  exercent  des  droits 
litigieux  :  leurs  instances  devant  les  iribuiiaux  sont  en 
conséquence  supprimées,  saui  aux  parties  intéressées  à  se 
conformer  à  la  loi  précitée  d'Ici  an  1*'  ventôse  prochain, 
pour  tout  délai. 

•  V.  Le  décret  du  29  fructidor,  concernant  la  liquida- 
UoB  dcf  compagnies  financières,  n'est  point  applicable  à  la 
•Mevant  Nouvelle  Compagnie  des  Indes. 

■  VI.  Les  Tonclions  et  le  traitement  attribués  aux  com- 
■Imairet  vérificateurs  som  prorogés  fusqu'au  1*'  germinal 
prochain ,  pour  tout  délai,  à  peine  déterminer  la  liquida- 
tion sans  rétribution. 

«  VIL  Les  directeurs  et  syndics.dc  U  d-dcvaftt  Nou- 


velle Compagnie  des  Indes,  et  même  les  préposés  dont  la 
présence  sera  jugée  nécessaire  pour  Texpédition  des  alTai- 
res,  sont  pareillement  maintenus  dans  leurs  fonttions  et 
leur  traitement ,  sous  la  même  peine  et  aux  mêmes  condi« 
tiens. 

■  Le  présent  décret  ne  sera  point  imprimé  :  il  sera , 
pouf  sa  publication,  inséré  au  Bulletin  de  correspond 
dance.  » 

—  On  reprend  la  discussion  sur  les  impositions 
de  1794. 

Plusieurs  articles  sont  adoptés.  Nous  les  donne- 
rons après  la  rédaction  définitive. 

Rouzet  développe  à  ce  sujet  des  vues  générales 
dont  la  Convention  ordonne  Timpression  et  le  dis- 
tribution. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  30  FRIMAIBB. 

Un  des  secrétaires  fait  lecture  d'une  pétition  de 
quatre  veuves  dont  les  maris  ont  été  condamnés  : 
elles  réclament  la  suspension  de  la  vente  des  biens 
de  leurs  maris,  •  attendu,  disent-elles,  que  l'on  com- 
prend dans  cette  vente  leur  propre  mobilier.  • 

Lecointre  (de  Versailles)  :  D'après  votre  loi  qui 
annulle  le  décret  oui  ordonnait  la  suspension  provi- 
soire de  la  vente  aes  biens  des  condamnés,  vous  ne 
pouvez  qu^accorder  des  secours  à  ces  quatre  ci- 
toyennes. Relativement  à  l'objet  particulier  de-leur 
réclamation,  je  demande  que  votre  comité  des  do- 
nraines,  en  poursuivant  la  vente  des  biens  des  con- 
damnés, fasse  la  distraction  des  effets  mobiliers  qui 
appartiennent  aux  veuves. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

—  Une  députation  de  la  commune  de  Colombes, 
près  Paris,  vient  applaudira  la  conduite  énergique 
delà  Convention  depuis  le  9 thermidor,  et  la  remer- 
cier du  décret  qui  rappelle  dans  son  sein  les  soixante- 
treize  membres  qui  en  avaient  été  injustement  éloi- 
gnés. 

Lecointre  (de  Versailles)  :  Citoyens,  c'est  dans  la 
saison  qui  ne  permet  plus  aux  guerriers  d'occuper  la 
campagne  que  vos  comités  de  gouvernement  doivent 
travailler  a  accorder  les  retraites  aux  militaires  que 
l'âge,  l'ancienneté  de  service, des  blessures  honora- 
bles, mettent  hors  d'état  de  servir  activement  la  pa- 
trie ;  qu'ils  doivent  s'occuper  de  désigner  les  places 
que  chaque  oflicier  supérieur,  chaque  général,  doit  - 
occuper  à  l'ouverture  de  la  campagne  prochaine  ; 
qu'enfin  ces  comités  doivent  opérer  les  réformes  de 
cette  nuée  d'ofGciers  généraux  que  la  brigue,  les  ca- 
bales, l'esprit  de  parti  et  de  domination  créèrent  en 
faveur  de  nos  derniers  tyrans  et  de  leurs  complices; 
officiers  qui  infestent  nos  armées,  et  dont  l'inexpé- 
rience, l'immoralité,  la  bassesse,  ont  fait  tout  le  mé- 
rite, et  qui,  en  dilapidant  le  trésor  public,  ont  porté 
le  désespoir  dans  le  cœur  de  tant  de  braves  militaires 
qui  ont  si  bien  servi  la  patrie  depuis  le  commence- 
ment de  la  révolution,  et  qui  ont  été  oubliés  pen- 
dant le  règne  de  la  tyrannie.  Les  grades  appartien- 
nent à  ceux  seulement  qui  ont  supporté  les  fatigues 
de  la  guerre,  et  non  à  cet  essaim  déjeunes  gens  pro- 
tégés, dont  le  dévouement  scrvile  aux  derniers  ty- 
rans faisait  tout  le  mérite. 

Je  demande  donc  que  le  comité  de  salut  public 
s'occupe  sur-le-champ  de  ce  travail ,  qu'il  rende 
compte  à  la  Convention  nationale  de  la  promotion 
aux  grades  militaires  supérieurs  qu'il  aura  crue  utile 
pour  le  service  de  la  campagne  prochaine,  des  re- 
traites accordées  aux  braves  officiers  que  l'âge,  l'an- 
cienneté de  service,  ou  des  blessures  honorables, 
mettent  hors  de  service  actif;  enfin,  des  destitutions 
de  oe^  etfaim  de  pygméet  militaires  qui  dévorent  les 


8 


pinces,  les  subsistances  et  les  richesses  de  la  répu- 
blique. 

•  La  Convention  nationale  décrète  ({ue  son  comité 
militaire  lui  présentera,  dans  un  mois,  un  projet  de 
loi  tendant  à  iixer  d*une  manière  irrévocable  le  nom- 
bre d'officiers  généraux  nécessaire  pour  le  service 
des  armées  en  temps  de  guerre. 

•  La  Convention  nationale  charge  en  outre  son 
comité  de  salut  public  de  lui  faire  connaître,  un  mois 
après  le  rapport  du  comité  militaire,  le  nom,  le  nom- 
bre des  officiers  généraux  employés,  ainsi  que  de 
ceux  qui  se  trouveront  destitués,  et  de  ceux  qui,  à 
raison  de  leur  ancienneté  de  service  ou  de  leurs  infir- 
mités, auront  obtenu  des  pensions,  des  retraites,  ou 
qui  auraient  droit  d*en  réclamer.  • 

—  Un  des  secrétaires  donne  lecture  de  la  lettre  sui- 
vante : 

Ruelle,  représentant  du  peuple  près  les  armées  de 
Brest  et  de  Cherbourg ^  à  la  Conventionnalionale. 

Ifantes,  le  tt  frimaire,  l*an  3«  de  la  répubUque 
française,  une  el  indivisil>le. 

■  Votre  décret  d'amnistie  en  fd?eur  des  insurgés  a  été 
accaeiUi  avec  transport.  Plus  de  quatrr-vingl  mille  indi- 
vidus composant  cette  cité  ont  spontanément  béni  ci*  grand 
acte  de  la  généroMté  nationale.  L'assurance  d'une  réunion 
prochaine ,  Tespoir  d'embrasser  bientôt  des  frères  égarés, 
rendus  à  la  patrie,  à  eux-mêmes,  ont  porté  la  joie  et  la 
consolation  dans  tous  les  cœurs.  L'eipression  me  manque 
pour  peindre  l'allégresse  de  ce  peuple  bon  par  caractère, 
trop  longtemps  calomnié  et  persécuté. 

•  L'armée  entière  a  partagé  ses  sentiments  :  soldats, 
généraux ,  tous  ont  accepté  avec  reconnaissance  el  enthou- 
siasme ce  présage  certain  du  calme  et  de  la  félicité  publi- 
que, et  les  regards  se  sont  tournés  sur  ces  contrées  ferti- 
les, encore  fumantes  du  sang  des  Français.  J'ai  pensé  que 
les  effets  de  la  bienluisance  ne  de?aicnt  plus  être  retardés  ; 
en  recevant  TOire  décret,  je  l'ai  fait  réimprimer  et  distri- 
buer avec  profusion  ;  je  sais  qu'il  est  déjà  connu  dans  tou- 
tes les  parties  de  la  Vendée,  et  qu'il  y  a  fait  la  plus  grande 
aensaUon. 

«  Partout  les  rebelles  semblent  se  livrer  à  la  joie  ;  ceux 
qui  occupent  les  bords  de  la  Loire  ont  tout  à  coup  con- 
vertl  leurs  murmures  et  leurs  injures  en  conversations 
familières  avec  nos  volontaires.  Di'puis  deux  jours  ils  ont 
substitué  à  leurs  cris  continuels  de  vive  le  roi!  ceux  de 
vive  la  république  l  et,  s'il  m*est  permis  de  juger  de  l'ave- 
nir par  le  présent ,  j'ai  lieu  de  croire  que  les  intentions  de 
la  Convention  auront  tout  le  succès  qu'elle  en  doit  at- 
tendre. 

«  Trop  heureux,  citoyens  collègues,  de  coopérer  &  ce 
grand  œuvre  de  sagesse  et  de  clémence,  je  hâterai  de 
tout.mon  pouvoir  l'époque  à  jamais  mémorable  où  l'on 
pourra  dire  sans  imposture  :  La  guerre  de  la  Vendée 
exista. 

«  Salut  et  fraternité.  Signé  Robllb.  • 

Cette  lettre  est  interrompue  par  de  vifs  et  fréquents 
applaudissements.  (La  suite  à  demain.) 


THÉÂTRE  DES  AMIS  DE  LA  PATRIE, 

BUE  DE  LOUVOIS. 

DtpuU  longtemps  on  annonçait  à  ce  théâtre  une  tragédie 
lyrique  sous  le  titre  de  Sapho,  La  nouveauté  d*un  pareil 
genre  à  ce  théâtre ,  qui  ne  •*était  destiné  jusqu'ici  qu*à  des 
ouvrages  d*u ne  bien  moindre  importance;  le  sexe  de  Tau- 
teur  du  poème,  et  surtout  le  nom  célèbre  et  chéri  du  com- 
positeur, que  les  amis  de  Part  musical  regardent  comme  l'un 
des  derniers  soutiens  du  bon  goût,  avaient  attiré  une  grande 
a/Huence  à  U  première  représentation ,  et  c*eit  un  écueil 
auquel  résistent  bien  peu  d'ouvrages  préconisés  d'avance. 
Ccltii-ci  a  sa  le  swrnoater  \  l'auenu  iù  wnkttm  iptcta« 


teurs  a  été  satisfait« ,  au  moins  en  grande  partie  ;  la  pièce  , 
malgré  ses  défauu ,  dont  la  plupart  sont  inhérenU  au  si^f  t 
néme,  a  beaucoup  réussi. 

Sapho  parait  abîmée  dans  une  douleur  dont  aes  élèves,  par 
leurs  chanU,  cherchent  en  vain  à  la  distraire.  Phaon,  qa*elle 
adore,  et  pour  qui  seul  elle  vent  vivre,  a  fui  en  lui  enlevant 
la  plus  chère  de  ses  élèves,  une  jeune  orpheline  oui  n'esis- 
Uit  que  par  ses  bienfaiU.  Dans  son  désespoir ,  elle  veut  se 
précipiter  du  haut  du  rocher  de  Leucade.  Un  vieillard  ,  son 
ami,  parvient  à  la  retenir,  mais  non  pas  k  la  consoler.  Bien- 
tôt son  ingrate  élève,  cette  même  Cléis,  enlevée  par  Phaon, 
revient  aux  pieds  de  Sapho,  ramenée  par  les  remords.  Cette 
amante  abusée  se  persuade  que ,  si  Phaon  a  pu  trahir  Cléis, 
c'est  par  un  retour  de  tendresse  pour  elle-même  ;  elle  par» 
donne  à  tous  deux,  et  elle  va  consulter  Toracle  sur  son  hy- 
men. Cependant  une  femme  qu*elle  croit  son  amie,  et  dont 
la  jalousie  au  contraire  a  juré  sa  perte,  gagne  les  prêtres 
d*Apollon  à  Leucade,  et  leur  fait  |  ometUre  de  favoriser  l'hy- 
men de  Cléis  avec  Phaon. 

L*oracle,  que  Ton  prononce  avec  l'ambiguïté  ordinaire^atte 
les  vœux  de  Sapho;  elle  prépare  un  pompeux  sacrifice;  Phaon 
n'ose  lui  avouer  que  son  cxur  est  toiiyours  k  Cléis  ;  ces  deux 
jeunes  amants  sacrifient  l'amour  k  la  reconnaissance,  et  Phaon 
veut  véritablement  épouser  Sapho  ;  mais  l'ennemie  cachée  de 
celle-ci  aposte  des  mariniers  «pii  s'emparent  de  Phaon ,  de 
Cléis,  et  les  embarquent  malgré  eux. 

Au  moment  de  l'hyménée,  on  cherche  en  vain  Phaon.  Sa- 
pho, livrée  k  un  nouveau  désespoir,  tombe  (fans  le  délire; 
elle  échappe  k  la  foule  rassemblée  pour  son  hymen,  et  gravit 
le  rocher  de  Leucade,  lorsqu'une  tempête  violente  ramène  à 
sa  vue  le  vaisseau  <^ui  porte  Cléis  et  Phaon  ;  elle  les  aperçoit 
sur  le  tillac,  se  croit  de  nouveau  trahie,  et  se  précipite  dans 
la  mer.  La  foudre  tombe  en  même  temps  sur  le  vaisseau,  oà 
elle  écrase  Pennemie  de  Sapho,  et  sur  le  temple  des  prêtres 
imposteurs,  qu'elle  embrase. 

On  peut  voir  par  cette  analyse  une  partie  des  défauts  de 
l'ouvrage.  Le  plus  grand  est  le  manque  d'intérêt.  Une  femme 
qui  aime  sans  être  aimée,  deux  amants  qui  ne  sauraient  être 
heureux  sans  devenir  coupables,  n'en  peuvent  inspirer. 
L'action  est  d'une  lenteur  extrême,  et  la  pompe  extraordi- 
naire du  spectacle,  quoique  parfaitement  soignée,  n'en  rem- 
plit point  les  vides,  et  ne  soutient  pas  suffisamment  l'atten- 
tion. Il  n'est  pas  vraisemblable  que  Sapho  puisse  se  soustraire 
aux  efforts  d'une  foule  nombreuse  qui  veut  l'empêcher  de  se 

Srécipiter.  Le  spectateur  quitte  la  scène  incertain  du  sort 
e  Cléis  et  de  Phaon,  qui  ne  peuvent  être  unis  ensemble,  et 
qui  pourtant  ne  sont  pas  asses  coupables  de  ce  meurtre  in- 
volontaire pour  en  être  punis. 

Mais  ces  vices  sont  rachetés  par  un  grand  nombre  de  beau- 
tés. La  pièce  est  écrite  avec  une  élégance  et  une  pureté 
soutenues.  Le  style  de  l'auteur  est  plein  de  grâce ,  de  goût 
et  d'imagination.  La  musique  est  ennn  de  la  musique  drama- 
tique, d^nt  les  oreilles  délicates  sont  privées  depuis  si  long- 
temps. On  y  trouve  partout  du  chant ,  et  les  j>ichesses  de 
l'orchestre ,  habilement  distribués ,  n'en  détruisent  pas  Tèf- 
fet,  et  les  accompagnements  ne  remplissent  que  remploi  qui 
leur  est  propre,  celui  de  soutenir  le  chant  etdele  faire  valoir. 
S'il  fallait  absolument  y  trouver  des  défauts ,  on  reproche- 
rait un  peu  de  longueur  dans  quelques  morceaux,  et  l'em- 
ploi des  cordes  aiguës  trop  prodigué,  dans  le  rêle  de  Sapbo  » 
pour  la  cantatrice  auquel  il  est  destiné. 

La  citoyenne  Schreuzer ,  qui  le  remplit,  s*y  est  montrée 
sublime  :  Mtte  actrice  a  une  chaleur,  une  sensibilité,  une 
profondeur  d'intelligence  qui  n'appartiennent  qu'aux  artistes 
du  premier  rang  ;  elle  mérite  donc  qu'on  lui  parle  avec  fran- 
chise. Elle  est  toujours  vraie,  mais  elle  oublie  quelquefois  la 
dignité  de  son  personnage  ;  et,  pour  rendre  certains  mouve- 
ments de  l'âme ,  elle  prend  le  ton  familier  pour  celui  de  la 
nature,  et  c'est  une  erreur  dans  laquelle  un  talent  comme  le 
sien  ne  doit  pas  tomber.  U  ne  lui  manque  que  de  sentir  celte 
nuance,  et  de  se  surveiller  sur  quelques  gestes  d'habitude  qui 
manquent  aussi  de  noblesse,  pour  être  ce  qu'on  aura,  vu  au 
théâtre  de  plus  parfait. 

La  pièce  est  montée  avec  un  luxe  extraordinaire;  rien  n*5 
est  négligé  :  les  costumes  et  tous  les  accessoires  sont  aossi 
vrais  que  magnifiques. 

LVchestre  mérite  aussi  des  éloges  pour  l'ensemble  et  le 
soin  de  son  exécution. 

On  a  demandé  les  auteurs;  la  citoyepoe  Pipeler  et  le  d* 
toy«B  llarUw  «Bt  p««. 


GAZETTE  NATIONALE  oc  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


N*92. 


Duodi  2  NiYOSE,  Fan  3«.  (lundi  22  DicBMBBs  1794,  vieuœ  stylé). 


POLITIQUE. 

<TATS*UNI8   D'AMÉRIQUE. 

Pe  PhiUuUtphiêf  U  38  aoûf,  —Les  Français  oot en  ee 
moment  sur  les  cAies  d^Amérique  trois  ?  aisseaux  de  ligne 
et  doute  grosses  frégates  i  le  nombre  de  leurs  corsaires  est 


'  —  Le  général  américain  Wayne  a  remporté  une  victoire 
snrles  Indiens,  au  bord  dn  Miami,  près  de  Roche-Dcboot 
et  d*un  fort  anglais.  11  a  rendu  un  compte  officiel.  Les  In- 
dien» élaieot  au  nombre  de  deux  mille  i  le  corps  américain 
était  de  oeol  cents  hommes.  Les  premiers  ont  été  mis  en 
déroute  et  repoussés  dtos  les  bois  »  après  avoir  feit  une 
perte  considérable. 

Le  général  a  détruit  les  filtages,  champs  et  jardins  voi- 
sins du  Miami»  et  a  ftUt  élever  deui  forts  où  il  a  mis  gar- 
nison. 

La  maison  de  Fagent  anglais  auprès  des  Indiens,  prin- 
cipal auteur  delà  guerre,  a  été  aussi  détruite  par  lés 
Américains. 

'  '  Le  bureao  de  la  goerre  de  New-York  a  reçu  aussi  la  cor- 
respondance entre  le  major  anglais  Campbell  et  le  général 
Wayne.  L'Anglais  y  demande  en  termes  peu  mesurés  pour- 
quoi le  aénéral  venait  porter  la  guerre  dans  celle  contrée  ; 
à  quoi  PAméricain  a  répondu  en  demandant  à  son  tour 
par  quelle  autorité  le  majur  avait  élevé  un  tort  dans  les 
limites  d^un  territoire  apppartenant  aux  Etats-Unis. 
Ga  différend  parait  prendre  la  tourporela  plus  sérieuse. 

ESPAGr«E. 

De  Madrid i  le  h  novembre,  ^^Ia  cour  a  caché  jnsqu^à 
oamoneoi  au  public  la  prise  de  la  rorlrres^te  de  Bellegarde. 
Il  était  défendu  d*en  parler  même  en  Catalogne.  Plusieurs 
personnes  ont  été  mises  en  prison  pour  avoir  annoncé  celte 
ftetoire  de  Tannée  française;  mais,  malgré  les  précautions 
tyranniques  du  gouvernement,  la  prise  de  Bellegarde  est 
la  sujet  4e  Tentretien  publie. 

On  avait  aussi  dissimulé  longtemps  la  défaite  des  Espa- 
gnols près  de  Moorocfa;  mais  le  public  en  a  été  informé  par 
on  rapport  oflicivl  du  générai  La  Uniun. 

personne  n*ignore  Ici  que  nos  pertes  sont  énormes,  et 
que  lesl^rançais  s*avanoent  triomphants  dans  nos  prof  in» 
œs.  On  assure  néanmoins  que  le  ministre  Alcudia  s*opi- 
Qiâtre  à  coutiooir  la  guerre.  Il  est  certain  qu'il  a  ordonné 
de  nouveaux  préparatil:»,  et  qu*il  s*e&t  tenu  dernièrement 
un  conseil  où  se  sont  irouvén  tous  les  ministres  et  quel- 
ques membres  dn  conseil  de  Casiille.  On  dit  quM  a  été 
question  d'une  nouvelle  levée  formée  de  trente  mille 
bommes  pour  loule  l'Espagne.  Il  est  sorti  une  ordonnance 
portant  an.nistie  pour  tous  les  déserteurs  qui  ne  sont  cou- 
pables que  de  désertion  ou  de  contrebande. 

--rLa  cour  vient  d'apprendre  que  le  convoi  attendu  de 
la  Havane  était  entré  en  grande  pariie  à  Caiix.  On  écrit 
ans!«i  de  ce  dernier  port  que  le  brigadier  Melgarejo  doit 
mettre  Incessamment  ft  la  voile,  avec  sept  vaisseaux  de  li- 
gne et  one  frégate,  pour  renforcer  Pcscadre  stationnée 
dam  la  baie  de  Rosat,  près  Barcelone. 

HOLLANDE. 

Jk  la  Baifif  fe  U  nopemh-e.  —Le  quartier  général  do 
prioee  d'Orange  vient  d'être  transféré  à  Amarogeo. 


— Oa  a  fait  élabl  r  no  pool  de  bateaux  entre  Grep  et 
'agenfaigen.  Las  ooviroos  de  Grqi 


I  sont  couverts  par  l'i* 
«pané  la  Mite  pria 


d'Amhem,  est  entrée  dans^  la  Gueldre ,  et  a  pris  sa  posi- 
tion près  de  Zutpben.  La  ci-devant  garnison  hollandaise 
de  Maastricht  est  en  ce  moment-ci  avec  ses  cbef^,  le  prince 
de  Hesse,  le  baron  de  Wilcke,  et  le  comte  de  Welderen. 
Le  premier  doit  retourner  en  Allemagne. 

—  Les  états  généraux,  dans  la  vue  de  remédier  è  Tex* 
tréme  besoin  d'argent  où  ils  se  trouvent,  ont  arrêté  qu'à 
l'avenir  toutes  les  obligations,  lettres  de  change,  etc.  n'au- 
ront de  valeur  légale  qu'après  avoir  été  munies  d'un  uou« 
veau  timbre  qui  vient  d'être  établi. 

On  travaille  à  un  autre  projet  qui  a  pour  but  de  mettre 
en  réquisition  tous  les  ouvrages  d*or  et  d'argent,  pour  être 
convertis  en  esp^^es.  On  parie  aussi  d'un  papier-monnaie. 
Enfin ,  il  a  été  décidé  de  suspendre  pour  deux  ans  lepay^ 
meoCdes  intérêts  des  obligations. 


«•MHit  — 7maX 


REPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

TBIBUMAL  CRIMINEL  BÉVOLUTIONNAIBB. 

Suite  de  la  procédure  du  comité  révolutionnaire 
de  Nantes. 

Le  président  :  Il  convient  de  donner  aux  jurés 
connaissance  de  la  lettre  suivante.  (Celte  lettre  osl 
celle  que  Carrier  écrivit  le  23  frimaire  au  général 
Haxo.  Elle  a  été  publiée  dans  la  discussion  de  la 
Convention.) 

Le  président,  h  Carrier  :  Avez-vous  des  explica- 
tions a  donner  sur  ces  ordres? 

Carrier:  Lorsque J*aurai  vu  la  minute  de  cette 
lettre,  j*y  répondrai  catégoriquement;  j'observe, 
en  attendant,  que  celte  lettre  est  littérale  et  coniorme 
aux  décrets. 

•  Je  vais  déchirer  le  voile,  a  dit  Thomas  ;  j*ai  vu , 
après  la'prise  de  Noirmoutier,  massacrer  une  muni- 
apalité  en  écharpe,  qui  était  venue  pour  désigner  un 
repaire  de  brigands;  un  soldat  avait  enlevé  vingt- 
quatre  louis  d  or  à  un  brigand  qui  avait  été  tué;  un 
autre  soldat  tua  son  camarade  pour  avoir  cet  or,  et 
vingt -cinn  ou  trente  se  tuèrent  ainsi  successivement. 
J'ai  vu  brûler  vifs  des  hommes,  des  femmes,  des  vieil- 
lards enfermés  dans  leurs  maisons;  j'ai  vu  cent  cin- 
quante soldais  maltraiter,  violer  des  femmes,  des 
biles  de  quntorxe  à  quinze  ans,  les  massacrer  ensuite, 
et  jeter  de  baïonnette  en  baïonnette  de  tendres  en- 
fants qui  étaient  à  côté  de  leurs  mères  étendues  sur 
le  carreau.  ^Tout  l'auditoire  retentit  d'un  lonç  fré- 
missement (l'horreur.).  Et  c'étaient,  a  continue  Tho- 
mas, les  héros  de  500  liv.  qui  se  livraient  à  ces  atro- 
cités,*et  on  n'osait  encore  rien  dire!  • 

Carrier  :  Je  n'étais  point  alors  à  l'armée.  Je  suis 
parti  quelques  jours  après  la  prise  de  Noirmoutier, 
et  c'est  Turreau  qui  doit  répondre  à  ces  atrocités,  et 
Don  Haxo,  qui  a  reçu  mes  ordres,  et  n'a  jamais  atta- 
qué des  communes  soumises. 

A  l'éeard  de  la  déposition  de  Troncjolly,  Carrier 
nie  les  laits  et  donne  la  même  réponse  qu'à  la  Con- 
vention sur  les  dénonciations  diverses  de  ce  témoin. 

Le  président,  à  Carrier  :  Avez-vous  connu  Avril 
etLelMitteux,  et  n'avez-vous  pas  donné  une  force 
armée  à  ce  dernier? 

Carrier  :  11  y  a  eu  plusieurs  insurrections  dans  le 
MefflMbaB;  Gnaviile  «l  Oeney  éuïwt  menacés  par 


10 


les  brigands,  de  concert  avec  Pitt;  il  devait  se  faire 
une  descente  de  trente  mille  Anglais  sur  les  côtes  du 
Morbihan;  il  a  donc  fallu  prenare  des  mesures  rë- 
pi:essives  contre  les  ennemis  de  Fintérieur ,  et  se 
mettre  en  force  contre  les  ennemis  de  l'extérieur. 

Le  président  :  Voici  un  ordre  relatif  à  Lebatteuz. 

Au  procureur-iyndie  de  Redon. 

If aniet ,  le  4  oÎTOse. 

•  Il  est  ordonné  an  procnrenr-syndic  de  mettre  sur-le- 
cbamp  en  liberté  Lebattenx,  et  de  déclarer  infâme  cdai 
qui  Ta  (ait  incarcérer;  de  faire  déScnse  au  général  Qué- 
baut  d'obéir  à  Tréhouard ,  représentant  fanatique  et  con- 
tre-révolutionnaire  ;  de  mettre  LebaUeux  sous  la  sauve- 
garde de  la  loi.  La  force  armée  de  Nantes  traitera  comme 
suspects  tous  ceux  qui  persécutent  les  bons  républicains.* 

Le  président  :  Tels  sont  les  ordres  émanés  de  vous, 
et  ((ue  vous  ue  pouvez  méconnaître  ;  c*est  à  vous  à 
lesjustiGer. 

Carrier  :  Des  patriotes  m*a  valent  certifié  le  civisme 
de  Lebatteux;  qu*il  avait  été  emprisonné  sans  aucua 
motii  valable,  raison  pour  laquelle  je  le  fis  mettre 
en  liberté.  À  l'égard  de  mon  arrêté  pris  contre  Tré- 
houard, j'avoue  mes  torts  sur  ce  fait;  je  ne  devais 
ni  ne  pouvais  prendre  cet  arrêté. 

On  procède  à  Faudition  de  Robin  le  jeune,  ci- 
devant  aide-de-camp  du  lieutenant  général  Lam- 
bcrtye,  nommé  commissaire  des  guerres  par  Gillet, 
a  Tarmée  de  Sambre-et-Meuse,  et  à  présent  détenu 
à  la  Conciergerie.  Il  fait  un  long  récit  de  ses  cam- 
pagnes dans  la  Vendée.  A  son  retour,  il  fut  nommé 
8 résident  de  la  Société  populaire  de  Vincent -la - 
lontagne,  à  Nantes;  •  et  quinze  jours  après,  at-il 
dit ,  je  fus  nommé  commissaire  pour  venir  à  Paris 
demander  des  subsistances.  Pendant  mon  absence, 
il  y  eut  à  Nantes  des  noyades.  Lambertye  m'assura 
qu  il  avait  des  ordres  de  Carrier  de  noyer  les  bri- 
gands pris  les  armes  à  la  main.  Il  me  prévint  que, 
pendant  la  nuit,  il  exécuterait  une  noyade  ;  il  m'en- 
gagea à  m'y  trouver,  je  m'y  reudis.  J'ai  assisté  à 
deux  ou  trois  noyades.  On  attachait  les  brigahds;  on 
les  faisait  descendre  dans  une  gabare;  ou  ouvrait 
les  soupapes,  et  ils  étaient  engloutis.  J*ai  parlé  de 
ces  noyades  à  Carrier;  il  disait  qu'un  décret  ordon- 
nait de  mettre  à  mort  sans  jugement  les  brigands 
ftris  les  armes  à  la  main.  J'ai  dîné  sur  la  galiote  hol- 
andaise  avec  Carrier,  Foucault,  Lambertye,  O^Sul- 
livan  et  d'autres;  nous  y  avons  même  chanté  des 
chansons  patriotiques. 

•  Carrier  convoqua  plusieurs  membres  des  admi- 
nistrations, pour  former  un  comité  secret,  où  l'on 
disait  d'abord  que  l'on  s'occuperait  d'un  transfère- 
ment  de  prisonniers;  mais  ce  fut  pour  une  fusillade. 
La  liste  fut  tormée,  et  l'ordre  signé  pendant  la  nuit. 
Je  n'osais  résister  au  comité  ;  mais  je  dis  que  plus  les 
mesures  seraient  générales,  moins  elles  auraient 
d'exécution.  • 

Le  président,  au  témoin  :  As-tu  vu  Carrier  sortir 
de  sa  poche  le  ÈÊoniteur^  dans  laquelle  une  lettre 
par  lui  adressée  à  la  Convention  étai  t  insérée,  et  cette 
lettre  ne  parlait-elle  pas  des  noyades? 

Robin  :  Je  ne  me  le  rappelle  pas. 

D'autres  interpellations  sont  adressées  au  témoin, 
pour  fixer  la  question  de  savoir  quelle  a  été  la  pro- 

Ï position  agitée  par  les  corps  administratifs;  par  qui 
a  proposition  relative  au  sort  des  détenus  a  été  faite, 
et  quel  a  été  le  résultat  de  celte  assemblée. 

Le  témoin  :  Tantôt  il  était  question  d'un  simple 
transfèrcmcDt  de  détenus,  taolOt  c'était uoeooyaM; 


je  sais  qu'il  a  été  fait  une  liste  de  détenus,  mais  je 
ne  puis  indiquer  le  provocateur  de  la  liste ,  ni  quel 
était  son  objet. 

Goulin  :  Carrier  et  Robin  ont  connu  tous  deux  les 
motifs  de  la  délibération,  et  y  ont  adhéré. 

Càhrier  :  Le  témoin  s'est  trompé  en  disant  que 
j'avais  convoqué  les  corps  administratifs.  Sur  la  dé- 
nonciation d'une  conspiration  dans  Nantes ,  ils  s'as- 
semblèrent d'eux-mêmes;  je  ne  convoquai  que  le 
comité  révolutionnaire,  d'après  l'avis  de  Boulet.  Je 
n'ai  entendu  parler  que  d'un  transfèrement  ;  je  n*ai 
provoqué  aucun  ordre.  Je  n'ai  jamais  dîné  sur  la 
galiote,  malgré  que  les  témoins  se  soient  coalisés 
pour  l'affirmer;  il  a  quelquefois  été  question  de 
prêtres,  mais  jamais  de  noyades. 

Robin  :  J'atteste  qu'on  parlait,  en  présence  de 
Carrier,  des  noyades  des  prêtres  et  des  brigands,  et 
que  Carrier  a  dîné  sur  la  galiote. 

Le  président^  à  Carrier  :  Vous  n'avez  signé  qu'ua 
mois  après  Texécution  des  détenus  Tordre  de  trans- 
fèrement; c'est  une  garantie  sollicitée  de  vous  par 
le  comité,  et  cet  ordre  de  transfèrement  couvrait  la  < 
noyade. 

Carrier  :  Ce  fait  a  été  écarté  par  la  Convention, 
et  je  ne  dois  pas  répondre.  Les  déclarations  des  té- 
moins ne  signifient  rien. 

Un  juge  :  Puisque  Carrier  conteste  la  connexité 
de  l'ordre  de  noyade  avec  la  liste  de  proscription, 
je  lui  observe  que  l'ordre  de  fusillade  est  du  15,  et 
que  le  16  Carrier  s'est  trouvé  à  cette  expédition. 

Un  juge  y  à  Robin  :  Peux- tu  donner  des  renseigne* 
ments  sur  les  quatre-vingts  cavaliers  qui  se  sont 
rendus  volontairement? 

Le  témoin  :  J*ai  entendu  dire  qu'ils  avaient  été 
fusillés. 

JoUy  :  Ces  cavaliers  ont  été  jugés  par  la  commis* 
sion  et  fusillés. 

Le  président  :  Si,  comme  Goulin  l'a  déclaré,  les 
cavaliers  sont  arrivés  le  27,  et  qu  alors  il  n'y  eût  pas 
de  commission,  il  s'ensuit  qu'ils  n'ont  pas  été  jugés. 

La  discussion  se  prolonge  sur  le  fait  de  la  fusillade 
des  quatre-vingts  cavaliers,  et  il  ne  paraît  pas  cer- 
tain qu'ils  aient  eu  ce  sort. 

Alexis  Monneron^  négociant  à  Nantes,  dépose  que 
la  terreur  n*a  cessé  d'exister  à  Nantes,  pendant  toute 
la  durée  des  fonctions  des  accuses ,  et  que  les  ci- 
toyens estimables  de  la  commune,  en  voyant  le 
comité  révolutionnaire  ne  se  former  que  d'hommes 
immoraux  et  réprouves  par  l'opinion  publique, 
avaient  prévu  d'avance  tous  les  maux  dont  Nantes 
fut  depuis  accablé. 

•  Si  le  comité  révolutionnaire  avait  mis  la  terreur 
h  l'ordre  du  jour  dans  notre  commune.  Carrier  ne 
nous  délivra  pas  de  cette  terreur  par  sa  présence. 

•  Je  puis  comparer  l'arrivée  de  ce  représentant  à 
Nantes,  continue  le  témoin,  à  ces  vents  brûlants  du 
Midi  qui ,  à  certaines  époques,  parcourent  les  côtes 
de  l'Afrique,  et  qui ,  par  leur  souffle  aride,  détrui- 
sent des  caravanes  entières  de  pèlerins. 

•  Carrier  a  tout  fait  pour  soulever  les  paisibles 
habitants  de  Nantes;  il  disait  que  les  négociants  dé- 
positaires des  proi)riétés  du  peuple,  de  l'abondance 
et  des  ressources  à  l'usage  du  public,  étaient  des  ac- 
capareurs qui  ne  cherchaient  qu'a  priver  les  citoyens 
de  leur  nécessaire,  tandis  que  ces  négociants  sont 
les  meilleurs  amis  de  leurs  concitoyens.  Quand  donc, 
s'écriait  Carrier,  les  têtes  de  ces  scélérats^de  com- 
merçants roiikrontr«Uei?  Noos  sonmcs,  ma  leaime, 


11 


mt  fille  et  moi,  Jelés  <jlans  la  prison  de  TEperonnière, 
naison  destinée  à  ceux  qui  devaient  être  transférés 
à  Paris. 

«  Le  commerce  éprouvait  tout  genre  d'oppression  ; 
Mouqiiet ,  agent  de  la  commission ,  8*emparait  des 
propriété  de  tout  le  monde  au  prix  du  maximum  ; 
et  quand  on  lui  demandait  le  payement  des  marchan- 
dises, il  exigeait  un  certificat  de  civisme  ;  et  c*est  de 
cette  manière  qu'il  s'appropriait  les  propriétés  d'au- 
trui,sans  bourse  délier. 

m  Vers  la  fin  de  pluviôse.  Carrier  m*envoya  à  la 
commission  de  Paris;  je  n'ai  vu  Carrier  qu'en  pas- 
sant, et  comme  les  sauvages  connurent  le  diable. 
Je  le  vis  à  Paris,  je  l'enlendis,  au  comité  de  salut 
public,  dire  beaucoup  de  mal  de  Goulin  et  de  Chaux  ; 
il  disait  qu'ils  lui  avaient  fait  prendre  des  mesures 
outrées,  et  qu'ils  étaient  des  scélérats ,  parce  qu'ils 
avaient  fait  périr  Fouquet  et  Lambertye,  les  meil- 
leurs patriotes.  Je  dois  dire  cependant  que  Carrier 
n'aurait  pas  vexé  Nantes  au  point  où  il.  l'a  été,  s'il 
B*avait  trouvé  des  hommes  de  sang  dans  le  comité.  • 

Le  préiidini ,  au  témoin  :  Sais-tu  quelque  chose 
des  noyades? 

Le  témoin  :  J*en  ai  eu  une  parfaite  connaissance  ; 
elles  se  faisaient  en  plein  jour ,  et  le  mode  de  ces 
expéditions  a  souvent  varie. 

Le  fMrétideni  :  As-tu  des  renseignements  sur  les 
fusillades? 

Le  témoin  :  Plusieurs  fois  le  bniit  de  ces  expédi* 
tious  a  retenti  à  mes  oreilles. 

Le  préeident  :  Sais-tu  si  elles  se  sont  faites  après 
Jugement,  ou  sans  jugement? 

Le  témoin  :  Je  me  suis  bien  gardé  de  demander 
eomment,  et  en  vertu  de  quelle  autorité  se  faisaient 
les  fusillades;  cette  curiosité  de  ma  part  m'aurait 
exposé  à  y  figurer. 

Carrier  :  Je  nie  la  déposition  du  témoin  dans  tous 
1C8  points,  et  singulièrement  d'avoir  provoqué  con- 
tre les  marchands  l'animosité  du  peuple,  d'avoir 
prêché  le  pillage;  d'ailleurs,  cette  déposition  est 
isolée;  Monneron  est  le  seul  qui  me  fasse  de  sem- 
blables reproches. 

Le  préiideni^  à  Carrier  :  A  votre  dénégation  d*a- 
voir  provoqué  le  pillage,  et  soulevé  le  peuple  contre 
les  marchauds  et  les  approvisionneurs  publics ,  je 
vous  oppose  vos  propres  ordres  contre  les  courtiers^ 
banquiers,  agents  de  chang[e ,  les  acheteurs  et  ache- 
teuses  de  denrées  de  première  nécessité ,  les  mar- 
chands et  les  n^ociants. 

Carrier  :  Je  n*ai  sévi  contre  eux  que  sur  les  plain- 
tes du  peuple,  qui  les  accusait  d'aller  à  la  rencontre 
des  approvisionneurs,  et  de  ne  vendre  qu'aux  riches. 

Le  témoin  :  11  m'était  échappé  des  faits  dont  je 
demande  à  rendre  compte.  J'ai  entendu  Carrier  dire 

à  Robin  :  •  Tu  es  un  bon  b ,  mais  Lambertye 

vaut  mieux  que  toi.  •  Je  l'ai  vu,  le  sabre  nu ,  à  la 
Société  populaire;  emporté  par  la  chaleur  avec  la-  |i 
quelle  41  pérorait  à  la  tribune  pour  dominer  les 
opinions  et  ramener  tous  les  membres  à  son  avis, 
je  I  ai  vu  cauper  les  chandelles  avec  son  sabre. 
Carrier  m'a  dit  qu'il  ferait  guillotiner  Goulin  et 
Chaux,  pour  avoir  fait  mettre  en  arrestation  Fou- 
quet et  Lambertve  ;  j'ai  entendu  dire  que  les  noyades 
se  disaient  par  les  ordres  de  Carrier. 

Le  prétident^  à  Carrier  :  Que  répondez-vous? 

Carrier  :  Je  ne  me  rappelle  pas  ces  faits,  et  je  les 
soutiens  faux. 

GouHn  :  11  faut  que  je  rende  au  tribunal  une  con- 
versation que  J'ai  eue  avec  Carrier  chez  un  traiteur. 


•  N'est-il  pas  vrai,  disais-je  à  Carrier,  qu'au  milieu 
des  mesures  de  sévérité  que  tu  ne  cessais  de  nous 
commander,  et  des  circonstances  difficiles  où  nous 
nous  sommes  trouvés ,  nous  avons  bien  su  tout  con- 
cilier, et  amener  les  Nantais  au  point  de  soumission 
et  d'attachement  à  la  révolution?— Vous  avez  bien 
fait  d'en  agir  ainsi  ;  autrement  j'aurais  fait  sauter 
toutes  les  têtes  du  comité,  répond  Carrier.  Je  suis 
cependant  fâché  d'avoir  été  si  doux;  si  j'avais  pu 
prévoir  ce  qui  est  arrivé,  j'aurais  déclaré  Nantes  en 
rébellion,  et  j'aurais  immolé  les  contre-révolution- 
naires les  plus  prononcés  de  cette  commune.  •  De 
cette  conversation  il  résulte  que,  loin  d'avoir  exas- 
péré Carrier,  loin  de  lui  avoir  dicté  des  mesures  de 
sanç,  souvent,  au  contraire,  nous  avons  lutté  conlro 
sa  sévérité,  souvent  nous  avons  combattu  sa  férocité. 
Carrier  :  Je  me  suis  trouvé  au  dîner  dont  Goulin  ^ 
parle;  mais  je  désavoue  le  propos  qu'il  me  prête  : 

Seiidant  six  mois,  j'ai  alimente  Nantes ,  je  me  suis 
onné  mille  mouvements  pour  approvisionner  cette 
commune. 

Un  juré  :  Je  désire  que  le  témoin  s'explique  sur  le 
fait  d'approvisionnement  articulé  par  Carrier. 

Le  témoin  :  C'est  aux  corps  administratifs  à  ré- 
pondre sur  ce  fait;  au  surplus,  ie  déclare  ne  pouvoir 
avouer  ni  contester  la  déclaration  de  Carrier  sur  le 
fait  des  vivres. 

Le  juré  insiste ,  et  le  témoin  répond  qu'à  Nantes , 
au  lieu  de  regarder  Carrier  comme  l'approvision- 
neur de  la  commune,  comme  l'ange  tutélaire,  on  le 
regardait  au  contraire  comme  l'ange  exterminateur. 

Un  témoin  vient  à  l'appui  de  cette  déclaration;  il 
soutient  que  les  représentants  Gillet  et  Ruelle  firent 
des  réquisitions  dans  différents  départements,  pour 
approvisionner  la  commune  de  Nantes;  que  ce  sont 
ces  représentants  qui  ont  rempli  les  magasins  pu- 
blics ae  blés  dont  on  avait  besom,  et  que  Carrier  ne 
s'est  occupé  en  aucune  manière  de  ces  approvision- 
nements. 

Carrier  :  J'avais  chargé  Godin  de  fiiire  venir  du 
blé  par  mer,  et  je  soutiens  que  Nantes  n'a  eu  d'aii- 
tres  vivres  que  par  moi. 

Le  peuple  de  Nantes  avait  tant  de  confiance  en 
moi  que ,  si  j'eusse  prêché  le  pillage  dans  cette  com- 
mune ,  comme  on  m'en  accuse ,  le  pillage  aurait  eu 
lieu. 

Real  :  Carrier  vient  de  vous  fournir  une  nouvelle 
preuve  de  sa  domination ,  de  son  despotisme  dans 
Nantes;  car,  s'il  eût  suffi  à  ce  représentant  de  prê- 
cher le  pillage  pour  le  faire  réaliser,  quelle  était 
donc  sa  toute- puissance  dans  la  commune? 

Carrier  :  Je  répète  que  le  peuple  me  regardait 
tellement  comme  son  bienfaiteur,  qu'à  la  fête  de 
Toulon  il  a  fait  pleuvoir  sur  ma  tétc  une  nuée  de 
couronnes  civiques.  Eh!  qu'on  n'attribue  pas  ces 
couronnes  à  la  terreur;  tout  le  monde  sait  que  b 
crainte  commande  le  silence,  et  non  les  éloges;  ol 
se  tait  devant  un  tyran  ;  on  se  dispense  de  Tencenser. 

On  entend  des  murmures  de  toutes  parts. 

Le  jtréiident^  à  Carrier  :  Les  détenus  ont-ils  par- 
ticipé à  cette  distribution  de  couronnes  civiques? 

Carrier  :  Les  incarcérations  ne  sont  pas  mon  ou- 
vrage. Je  suis  étonné  qu'un  fait  aussi  constant  que 
les  couronnes  civiques  oui  m'ont  été  offertes  pro* 
voque  les  murmures  publics. 

Chaux  :  Il  faut  expliquer  au  tribunal  comment  les 
couronnes  civiques  oont  Carrier  se  prévalait  il  y  a 
quelques  instants  ont  plu  sur  la  tête  de  ce  représen- 
tant. Voici  le  fiait. 


1^ 


Wcslermann  venait  de  remporter  une  grancfe  Yfc- 
toire  sur  les  brigands;  î(  paratt  le  lendemain,  à 
Nantes;  le  peuple,  toujours  reconnaissant,  se  réunît 
autour  de  ce  g<*néral  et  s'emprrsse  de  le  couvrir  des 
lauriers  qu'il  avait  si  bien  niérilé  :  Carrier  était  à  côté 
de  ^Vestrrmann,  il  a  pu  en  recueillir  sa  part.  Il  vous 
a  dit  qu*il  avait  rcrusé  ces  couronnas,  qu'il  les  avait 
fait  distribuer  aux  généreux  défenseurs  de  la  patrie. 
Si  Carrier,  comme  il  le  dit,  a  repoussé  loin  de  lui 
les  couronnes  civiques  qui  lui  étaient  oflertes,  parce 
que  sans  doute  on  le  coxifondait  avec  Westermann, 
Carrier  alors  n'aurait  fait  que  se  rendre  justice,  c'est- 
à-dire  convenir  tacilement  qu'il  n'avait  rien  fait 
pour  mériter  les  récomnenses  décernées  par  le  peu- 
ple à  la  bravoure  et  à  I  intrépidité. 

Carrier  :Lcs  couronnes  civiques  dont  parle  Chaux 
ont  été  présentées  à  moi  comme  à  M^estermaiin; 
mais  ce  ne  sont  pas  celIrs-Li  que  je  réclame,  ce  sont 
celles  nui  m'ont  été  offertes  dans  une  circonstance 
parliculrère,  et  dont^'ai  été  accablé  en  quelque  sorte, 
sur  une  montagne  ou  je  me  trouvais.  (On  rit.) 

R^al  :  Le  témoin',  en  commençant  sa  déposition , 
avait  annoncé  avoir  à  révéler  des  faits  non  contenus 
dans  facte  d'accusation  ;  il  a  demandé  la  permission 
de  les  développer.  Le  tribunal,  religieux  observateur 
du  décret  de  la  Convention,  s'est  tu.  Je  réclame  ces 
renseignements  comme  précieux  à  ceux  que  je  dé- 
fends; ce  sont  des  moyens  justifîcalUs  pour  les  accu- 
sés qui  m'ont  donné  leur  confiance. 

Le  tribunal,  après  avoir  délibéré,  et  faisant  droit 
sur  le  réquisitoire  de  Béai ,  ordonne  que  le  témoin 
sera  entendu.  1 1  commence  en  ces  termes  ; 

•  Je  me  suis*  trouvé  à  dîner  avec  Carrier;  il  lui 
arriva  de  s'oublier  dans  ce  repas ,  et  il  me  dit  que  le 
gouvernement  avait  lait  la  récapitulation  de  la  po« 

EulatioD  de  la  France,  qu*il  avait  reconnu  l'impossî- 
ilité  de  nourrir  tant  le  monde;  qu*il  avait  été  pris 
des  moyens  pour  diminuer  la  masse  de  cette  popu- 
lation, pour  en  retrancher  une  certaine  porlioD,  les 
nobles,  les  magistrats,  les  prêtres,  le^  agents  de 
change,  les  négociants,  les  ennemis  présumés  les 
plus  prononcés  ou  peuple.  Carrier  ensuite  s'échauf- 
fant,  continue  le  témoin,  s*écrie  :  Tuel  lue!  «Dans 

•  le  département  où  j'ai  donné  la  chasse  aux  pré- 

•  très,  disait  Carrier,  jamais  je  n'ai  tant  ri ,  éprouvé 
«plus  de  plaisir,  qu'en  leur  voyant  faire  leur  gri- 
«  mace  pour  mourir.  •  Carrier  fit  la  réflexion  qu'il 
•e  trouvait  avec  des  marchands,  et  que  cependant 
il  avait  enveloppé  cette  classe  dans  son  arrêt  de 
proscription;  il  ajouta  donc,  par  réflexion, qu'il  y 
aurait  un  choix  des  contre-révolutionnaires  les  plus 
déclarés.  Je  me  mis  à  rire  de  l'exception,  et  le  l'en- 
gageai à  continuer.  Je  lui  demandai  ce  que  devien- 
drait la  Convention.  Oh!  pour  ce  corps  constitué,  il 
ne  faut  pas  y  toucher  !  c'est  le  palladium  de  la  liberté  ; 
nous  devons  tous  nous  rallier  sous  ses  drapeaux,  dit 
Carrier;  cependant  je  crois  que  nous  serons  tous 
guillotinés  les  uns  après  les  autres.  • 

.  Carrier  crie  a  la  calomnie,  et  nie  la  totalité  de 
celte  déposition. 
Ou  procède  a  Taudition  d'un  autre  témoin. 

D^eron,  inspecteur  des  vivres  militaires,  accuse 
Carrier  de  lui  avoir  donne  Tordre  de  fusiller  dans  la 
Vendée  des  commissaires  qui  voulaient  partager  les 
subsistances  de  ce  nays  a  vpc  ceux  de  Nantes,  quoique 
les  commissaires  de  la  Vendée  qui  se  trouvaient  en 
concurrence  avec  ceux  du  département  de  la  Loire- 
înférieure,  nommés  par  lui  Carrier ,  fussent  égale- 
ment revêtus  des  pouvoirs  des  représentants  du 
peuple. 

•  Nous  informâmes  Carrier,  continne-'t-îl,  des 


prAentiona  dei  commiiaafrea,  et  de  letnv  pomrolrt;* 
Carrier  nous  répondit  en  lurent  à  son  ordinaire  i 

•  F ,  je  veux  que  tous  les  grains  de  la  Vendée' 

soient  emportés;  fusillez-moi  tous  ces  bouffres-li. 
—  Donne-nousr  donc  un  ordre,  dis-je  à  Carrier, 
—Point  d'ordre  par  écrit,  répond  Carrier  ;  ma  parole 
ne  sufBl-elle  pas?  Exécute  mes  volontés;  va-t-en  f  • 

Le  témoin,  interrogé  sur  les  noyades,  a  dit  en 
avoir  entendu  parler;  par  suite  d'inlerpi» Hâtions,  il 
a  été  convaincu  de  s'être  montré  à  la  Société  popu- 
laire avec  des  oreilles  de  brigands  et  des  parties  gë* 
nitales  qu'il  faisait  baiser  aux  femmes;  d'avoir  mai- 
sacré  et  lait  massacrer  impitoyablement  des  entantt 
de  treixe  à  quatorxe  ana,  qui  bisoient  patlre  leurt 
moutons  dans  la  campagne* 

Le  témoin  Dhéron  est  convenu  de  tons  eesfiits;  II* 
s'est  retranché  sur  ses  services  rendus  dans  les  conw 
bats  contre  les  rebelles,  Il  a  prétendu  que  souvent 
les  enfants  de  l'Âge  de  ceux  par  lui  massacrés  étaient 
porteurs  de  cartouches,  qu  ils  servaient  d^esnions  § 
leurs  pères  et  mères,  et  nue  souvent,  sur  l'inqicatlon 
de  ces  enfants,  les  volontaires  dé  la  républiquei 
avaient  été  enveloppés  et  fusillés  au  moment  où  il 
s'y  attendaient  le  moins.  , 

Sur  le  réquisitoire  de  rtecnfitettr  publie,  Il  a  été 
ordonné  que  Dhéron,  comme  prévenu  de  plusieurs 
as^ssinats,  et  autres  atrocités  reprochées  au  comîtéi 
serait  mis  aux  débats,  après  l'observation  des  for- 
malités ordinaires. 

Sur  le  réquisitoire  dé  l'accusateur  public,  Lefèvre, 
adjudant  général  de  brigade;  Massé,  Marfn  et  Rolnn 
le  jeune,  commissaire  des  guerres,  comme  ct^mpliees^ 
des  noyades  et  autres  horreurs  reprochée^  au  comité, 
sont  rangés  au  nombre  des  accusés,  et  chacun  d'eux 
décline  ses  noms. 

Le  premier  déclare  se  nommer  Glande* François 
Lefèvreâgé  de  quarante  et  un  ans,  natif  de  Pôrt-ller, 
adjudant  général  de  brigade ,  nomm^par  lesrepré^ 
sentants  Prieur  et  Hentx. 

Le  second  se  nomme  Pierre  Massé,  âgé  de  qua« 
rante-six  ans,  natif  de  Montoire,  département  Je  la 
Loire-Inférieure ,  marin. 

Le  troisième,  Pierre  ftobin ,  ^gé  de  vingt  et  un  ans, 
natif  de  Nantes,  ci-devant  étudiant,  et  é  présent 
commissaire  des  guerres,  domicilié  à  Sances,  à  pré* 
sent  détenu  à  la  Conciergerie. 

Lecture  faite  de  l'acte  d'accusation ,  il  en  résulta 
contre  les  susnommés  qu'ils  sont  tous  complices  des 
noyades  et  fusillades  dont  il  est  question  au  procès. 

Lefèvre,  en  particulier,  est  prévenu  d'avoir  exé- 
cuté des  ordres  qui  ont  été  donnes  de  noyer;  Massét 
d'avoir  participé  aux  noyades;  et  Robin,  de  les  avoir 
dirigées  de  concert  avec  le  comité  et  Carrier, 

Bernard t  concierge  de  la  maison  du  Bouffay, 
dépose  que  des  agents  du  comité  se  présentèrent  eo 
la  maison  d'arrêt  confiée  a  ses  soins,  pour  en  extraira 
des  femmes,  et  que,  sur  la  demande  par  Ipi  faite 
d'ordres  de  nature  à  autoriser  ces  extractions,  et  sur 
le  défaut  de  représentation  de  ces  ordres,  il  refusa 
de  délivrer  les  prisonnières  qui  lui  étaient  dcnuiu- 
dées. 

•  Le  lendemain,  continue  le  témoin,  l'ordre  de 
Carrier  me  fut  exhibé;  les  femmes  dont  il  s'agit  re- 
mises au  porteur  d'ordre,  et  de  suite  elles  Turent 
guillotinées  sans  jugement.  • 

Carriit  :  Je  répondrai  à  cette  déposition  quand 
on  me  représentera  les  minutes  des  ordres  qui  me 
sont  opposés. 

Mnriê  PitM^  femme  de  eonfiance  à  la  maison  du* 


a 


Boufhy^  dépose  <raé  des  femmes  arrivées  te  sotr 
dans  cette  maison  aarrêt  ont  éié  guillotinées  le  len- 
demain, par  les  ordres  de  Carrier,  et  que,  peu  de 
temps  après»  quatre-vingt-six  perso nnesîuri>nt  ame-» 
neVs  en  la  même  maison,  et  qu'elle  a  entendu  dire 
quelles  avaiaut  été  toutes  fusillées  paf  iea  mêmes 
Ordres. 

Carrier  :  Je  nie  le  fait,  et  Ton  doit  avoir  d'autant 
moins  de  confiance  dans  le  témoin  qu'elle  a  pris 
naissance  dans  une  commune  remplie  de  brigands. 

IftWe,  administrateur  du  département:  Mes  com- 
munications avec  Carrier  ont  toujours  été  fort  ora- 
geuses; ce  représentant  était  dans  l'habitude  de 
traiter  de  modérés,  de  contre-révolutionnaires,  ceux 
qui  n'étaient  point  de  son  avis  ;  cependant  il  était  fa- 
cile de  le  ramener  à  la  raison  quand  il  était  seul. 

J'accuse  Carrier  d'avoir  opprimé  les  patriotes,  et 
d'avoir  reiusé  des  places  à  des  volontaires  couverts 
de  blessures. 

3e  Taccuse  d'avoir  maltraité  de^  gendarmes  qui 
s*étaient  battus  glorieusement  dans  la  Vendée,  d  a- 
voir  it  fusiller  saps  jugement  quatre-vingts  cava- 
liers qui  s'étaient  rendus  volontairement,  malgré 
les  promesses  qu'il  avait  faites  à  la  municipalité  de 
ne  poiol  sévir  contre  ces  cavaliers. 

•  La  qnestion  s'engase  ensuite  sur  les  arrêtés  qui 
avaient  pu  être  pris  clans  les  assemblées  des  corps 
administratifs.  Le  témoin  désigne  Goulin  et  Carrier 
comme  ayant  assisté  à  ces  assemblées,  et  comme 
étant  ceux  qui  écartaient  les  mesures  de  clémence 
proposées  en  faveur  des  détenus. 

Le  président,  au  témoin  :  Quels  sont  les  corps 
constitués  qui  ont  assisté  à  cette  assemblée?  Par  qui 
a-t-elle  été  convoquée? 

Le  témoin  :  La  municipalité,  le  district,  le  comité 
et  le  département  ont  assisté  à  cette  assemblée,  non 

Easen  totalité,  mais  par  quelques-uns  de  leurs  mem- 
res;  je  crois  qu'il  v  a  eu  une  lettre  invitative  de 
Carrier  ;  j'assure  (ju'il  n'a  été  pris  aucun  arrêté  dans 
la  séance  du  14  trimaire,  et  que  rassemblée  s'est 
dissoute  en  se  déclarant  incompétente  pour  délibé- 
rer sur  les  mesures  proposées. 

J'accuse  Carrier  d'être  venu  dire  au  département 
qu'il  fallait  enfoncer  les  boutiques  des  marchands  et 
Us  mettre  au  pillage. 

Carrier  :  Je  ne  me  rappelle  pas  ces  faits,  mais  j'ai 
quelquesinterpellations  à  taire  au  témoin. 

Je  fui  demanderai  d'abord  si  le  département  a  tenu 
des  séances  secrètes,  combien  il  en  a  été  tenu  de 
semblables,  quel  était  l'objet  de  ces  séances,  et  si  j'y 
ai  assisté? 

Le  témoin  :  Carrier  sait  aussi  bien  que  moi  qu'il 
y  a  eu  plusieurs  séances  secrètes,  parce  que  les  cir- 
constances exigeaient  ces  précautions;  il  n'ignore 
{las  qu'il  n'y  a  jamais  été  question  que  des  subsis- 
ances,  puisqu'il  a  assisté  lui-même  à  troiS  de  ces 
séances. 

Carrier  :  Le  département  n'a-t-il  pas  dénoncé  une 
conspiration  è  Gillet;  et  ce  représentant  n'a-t  il  pas 
répondu,  lorsqu'on  l'interrogeait  sur  les  mesures  à 
prendre  en  pareille  cii^onstance,  que  le  comité  ré- 
volutionnaire avait  tous  les  pouvoirs,  et  que  les  cir- 
constances l'autorisaient  à  les  excéder,  s'il  le  jugeait 
nécessaire? 

Le  témoin  :  Je  me  rappelle  que  cette  réponse  a 
éW  fnite  à  Gicqueau ,  sur  la  dénonciation  faite  a 
Gillet  d'une  conspiration. 

'  Carrier  :  Il  était  donc  question  de  conspiration 


avant  moi,  puisçfae  je  ne  snis  arrivé  que  neuf  jonrs' 
après  la  dénonciation  ;  je  ne  suis  donc  point  l'inven- 
tenr  de  ces  conspirations.  Pourquoi  ne  parle- t«oiii 
pas  des  pouvoirs  de  Gillet?  pourquoi  revieut-oasans^ 
cesse  sur  moi? 

Quant  aux  quatre-vingts  cavaliers ,  je  me  snit 
borné  à  les  faire  mettre  en  sûreté;  je  n'ai  point  donné 
l'ordre  de  les  faire  fusiller. 

Goulin  :  Jamais  la  terreur  n'est  entrée  dans  le* 
administrations.  Ce  département  qui  nous  accuse 
maintenant  était  parfaitement  d'accord  avec  noua 
sur  toutes  les  mesures  révolutionnaires.  Il  est  faux 
que  j'aie  proposé  des  mesures  sanguinaires,  de  faire' 
périr  les  détenus  en  masse  :  il  y  eut  beaucoup  de  tu- 
multe dans  cette  assemblée,  et,  quand  j'y  arrivai, 
Forget  finissait  de  parier.  J'assure  qu'il  fut  question 
de  laire-fusiller  oir  de  juger  les  détenus,  et  je  propo- 
sai la  formation  des  listes  de  ceux  que  l'on  regarde- 
rait comme  contre-révolutionnaires. 

Le  témoin  confond  les  personnes  et  les  choses, 
quoiqu'il  présidât  l'assemblée,  et  qu'il  dûtconnaîtrc 
mieux  que  tout  autre  le  résultat  de  la  discussion.     ^ 

6rodtn,propriétaire  de  moulins,  et  ci-devant  agent 
de  la  commission  de  commerce,  dépose  qu'il  a  plu- 
sieurs fois  entendu  Carrier  déclamer  à  la  Société 
populaire  contre  les  habitants  de  Nantes.  •  Envoyé 
en  mission  a  Paris  pour  les  subsistances,  dit  le  té- 
moin, J'apprends  à  Orléans  la  présence  de  Carrier; 
je  lui  communique  l'opinion  dans  laquelle  j'étais 
que  son  voyage  a  Orléans  avait  pour  but  les  subsis- 
tances dont  Mantes  avait  le  plus  pressant  besoin.* 
Pour  Nantes,  me  répond  Carrier,  je  m'en  moque; 
merde!  De  quoi  vient  me  parler  ce  j...-f....,?» 

Carrier  nie  le  faiL 

Le  président ,  à  Carrier  :  N'étiez-vous  pas  en  cor- 
respondance avec  Hérault  de  Séchelles,  et  n'avez* 
vous  pas  conformé  votre  conduite  aux  principes  de 
cet  ex-constituant,  qui  était  d'avis  qu'un  fonction- 
naire public  devait  faire  peser  toute  la  responsabi- 
lité sur  ses  agents,  et  ne  donner  aucuns  mandats  par 
Icrit? 

Carrier  répond  négativement. 

Le  président  :  Il  est  bon  que  le  public  connaisse 
les  maximes  de  Hérault  de  Séchelles:  îe  vais  vous 
lire  quelques  fragments  de  ses  lettres.  Voici  comme 
Hérault  s'exprimait  : 

•  Quand  un  représentant  est  en  mi^on,  et  ^u'il 
frappe,  il  doit  frapt)er  de  grands  coup»,  et  laisser 
toute  la  responsabilité  aux  exécuteurs;  il  ne  doit  ja- 
mais se  compromettre  par  des  mandats  écrits.  • 

Carrier  :  En  supposant  que  le  représentant  Hé« 
rault  ait  professé  ces  maximes,  qu'il  me  lei  ait  écri« 
tes,  que  pourrait-on  en  conclure?  Il  serait  de  toute 
injustice  de  supposer  que  ces  principes  étaient  les 
miens,  que  je  les  aie  adoptés,  et  que  j'en  aie  fait  la 
règle  de  ma  conduite. 

Carrier  soutient  ne  s'être  point  trouvé  à  la  séanct 
du  14  frimaire,  mais  seulement  à  celle  du  15.  - 

Goulin  et  les  autres  accusés  soutiennent  que  Car« 
rier  a  assisté  à  la  séance  du  14,  et  les  débats  établis 
sent  l'aflirmalive  d'une  manière  incontestable. 

Louis  Naud  déclare  que  Carrier  disait  dans  cette 
assemblée  :  •  Il  faut  faire  tomber  les  têtes  de  tons 
ces  bougres- là  ;  •  que  ce  fut  dans  la  séance  du  14 

?[u'il  fut  fait  une  liste  deS  détenus  qui  devaient  être 
usinés;  mais  qu'il  ne  peut  assurer  si  Carrier  ap- 
puyait ou  non  cette  mesure. 
Le  président,  à  Carrier  :  Avez- vous, ou  non,com- 


u 


battu  la  mesure  de  Taire  périr  les  détenus  en  masse? 

Carrier  :  Cette  proposition  n*a  point  été  faite, 
nais  bien  celle  de  juger  les  détenus  et  de  les  trans- 
férer. 

PheUppet'  TrùnejoUy  :  Je  me  suis  trouvé  aux  séan- 
ces des  14  et  15  frimaire;  j'assure  qu'on  a  agité  dans 
ces  deux  séances  la  question  de  savoir  si  on  ferait 

Sérir  les  détenus  en  masse  :j*ai  constamment  com- 
attu  cette  mesure.  Carrier  a  assisté  à  toutes  ces 
séances;  il  savait  qu*il  s'agissait  de  faire  fusiller  les 
détenus ,  et,  dans  la  séance  du  15,  il  a  appuyé  cette 
mesure  de  toutes  ses  forces  :  il  traitait  de  modérés, 
de  contre-révolutionnaires,  ceux  qui  n'étaient  pas 
de  cet  avis,  et  il  a  eu  une  parfaite  connaissance  de  là 
liste  de  fusillade  faite  au  comité,  et  de  Tordre  donné 
à  Boivin  de  prendre  une  force  armée  suffisante  pour 
fiiire  fusiller  en  masse  les  détenus. 

Carrier  nie  tous  ces  faits,  et  soutient  qu'il  n*a  ja- 
mais été  question  que  d'un  ordre  de  transfèrement. 

{La  suite  incessamment.) 


CONVENTION  NATIONALE- 

Présidence  de  Rewbetl* 

8DITB  A  LA   SéARCB  DO  80  PMMAIBl* 

Claozbl  :  Citoyens ,  en  eccepiant  l'honorable,  maïs  pé- 
nible fonction  de  représentant  du  peuple,  l'abn^atîon  de 
ooQs-mémes  a  été  notre  premier  devoir;  aucune  considé- 
ration ne  doit  donc  nous  arrêter  lorsqu'il  s'agit  du  salut  de 
la  patrie.  A  peine  réunis  en  Convention  nationale,  vous 
fîtes  aux  yeux  des  peuples  libres  le  plus  grand  acte  de  jus- 
tice: aux  yeux  des  tyrans  coalisé*,  le  plus  grand,  le  plus 
irrémissible  des  crimes,  celui  de  rabolilion  de  la  royauté 
cl  l'établissement  de  la  répui>lique.  Vous  afei  donc  bravé 
à  l'unanimité  tous  les  poignards  des  rois.  Je  viens  aojour* 
d'hui  braver  encore  celui  de  la  faction  qui  couvrit  trop 
longtemps  la  France  de  deuil  et  d«'  consternation.  Je  parle 
de  la  (action  de  la  commune  conspiratrice,  qui  a  provo- 
qué dans  toutes  les  parties  de  la  république,  et  notamment 
dans  la  ville  de  Paris,  le  vol,  le  pillage,  le  menrire.  Tas- 
aas<«inatet  la  révolte  contre  la  représentation  nationale. 

Il  est  maintenant  reconnu  qu'Hébert,  Vincent,  Ronsin, 
Danriot,  Robespierre,  Coutbon,  Saint-Just,  étaient  quel- 
ques-uns des  chefs  de  cette  faction  ;  il  faut  vous  démontrer 
Sue  plusieurs  de  leurs  complices  existent  encore;  qu*on 
lit  Timpostible  pour  les  sauver;  que,  si  vous  n*anéantissex 
les  restes  de  cette  Action ,  vous  ne  pourrei  asseoir  les  l>ases 
de  votre  gouvernement  ;  que  le  peuple  se  fatiguerait  de 
tant  d'agitations;  que  vous  le  replongeriex  dans  l'escla- 
vage;  qu*avec  sa  liberté  vous  perdnex  pour  toujours  celle 
de  tous  le%  peuple*  ;  que  vos  noms,  enfin ,  ne  passeraient 
à  la  postérité  que  ooaverts  d'opprobre  et  d'exécration. 

Oui,  les  complices  d'Hébert  «  Vincent,  Ronsin,  d'Han- 
riot  e(  de  Robespierre  exbtent  encore. 

Lorsque  Bourdon  (de  IX)ise)  et  Phélippcoui  eurent  le 
courage  de  dénoncer  les  traîtres  Vincent  et  Ronsin,  lorsque 
vous  les  fîtes  arrêter,  lorsque  vous  eûtes  chargé  l'ancien 
comité  de  sûreté  générale  d'examiner  la  conduite  de  ces 
traîtres,  qui  est-ce  qui  prit  hautement  leur  défense  à  cette 
tribune  I  Gollot  d'Herbols  ne  vint-il  pas  vous  faire  le  long 
panégyrique  de  RoniSn  ?  deux  membres  du  comité  de  sûreté 
générale  n'eurentils  pas  Timpudeur  de  venir  vous  décla- 
rer, à  diverses  reprises,  qu'il  n'y  avait  aucune  dénoncia- 
tion contre  Vincent  ni  Ronsin,  tandis  que  celle  de  Phé- 
lippeaiix ,  contenue  dans  un  long  mémoire  imprimé,  avait 
été  distribuée  à  tous  les  membres  de  la  Convention  ? 

jtoriei-votts  oublié,  citoyens,  que,  poor  fhire  mettre 
Ronsin  et  Vincent  en  liberté,  les  mêmes  membres  do  co- 
mité de  sûreté  générale  tinrent  tous  dire  à  cette  tribune 


t  que  phuiennbûM  dtogreia»  et  notamncnl  les  i 
composant  le  club  des  CordeHers,  s'intéressaient  pour  les 
patriotes  Ronsin  et  Vincent;  que,  si  leur  mise  en  liberté 
n^était  pas  prononcée,  on  ne  pourrait  l'impnter  au  comité 
de  sûreté  générale,  qui  déclarait  n'avoir  aucun  motif  pour 
Ici  tenir  plus  longtemps  en  arrestation?  t 

BocBOoa  (  de  l'Oise  )  :  C'est  Danton  qui  plaida  leur  cause 
ici  contre  mon  opinion. 

Claoxbl  :  Et  d'antres  aussi. 

toute  la  Convention  ne  sait -elle  pas  que,  lorsque 
les  témoins  qui  ont  déposé  contre  cette  faction  detant  le 
tribunal  révolution oaire  voulaient  parler  de  Pache,  le 
président  leur  imposait  silence  ?  Ancun  de  vous  n'a  oublié 
qu'au  lien  de  vons  rendre  compte  de  la  lettre  que  le  tri- 
bunal écrivait  an  comité  de  sûreté  générale,  pour  deman- 
der que  plusieurs  de  ses  membres  fussent  entendus  en 
témoignage,  ce  même  comité  se  hSta  de  venir  vons  sur- 
prendre un  décret  qui  donnait  au  tribunal  la  tacultë  de 
meure  hors  des  débats  quand  bon  loi  sembleraiL  Mais  ce 
que  la  Convention  ignore  peot-élre  encore,  c'est  que  le 
représentant  Voolland,  on  des  défenseors  officieux  de 
Vincent  et  Ronsin,  a  donné^ao  concierge  de  la  maison  des 
Anglaises,  me  de  Lourcine,  l'ordre  de  laisser  promener 
librement  dans  on  grand  jardin  son  ami  Pache,  et  qu'on 
les  vit  s'embrasser  très- cordialement. 

Elle  Lacoste,  un  des  membres  de  l'ancien  comité  de 
sûreté  générale,  que  Je  n'assimile  pas  néanmoins  à  ceux 
que  Laurent  Lecointre  et  toute  la  France  vous  dénoncent. 
Elle  LiBCOSte  vous  dit  à  cette  tribune,  après  la  mort  d» 
Robespierre,  et  Collot  d'Herbois  l'a  déclaré  aussi,  qu'il  y 
avait  pins  de  six  mois  que  ce  tyran  avait  proposé  aux  co-' 
mités  de  suspendre  les  séances  de  la  Convention.  Eh  bien  • 
toutes  les  démarches,  tontes  les  propositions  de  Robes- 
pierre n'ont-elles  pas  été  imi:écs,  appuyées  fortement  par 
les  sept  décemvirs  qu'il  vous  reste  à  faire  joger  ? 

Eh  I  dans  votre  Sme  et  conscience,  représentants  du 
peuple,  n*étes-vous  pas  convaincus  que  les  décemvirs  étaient 
parfaitement  d'accord  ;'qu'ils  ont  exercé  sûr  vous,  comme 
sur  toute  la  France,  et  pendant  neuf  à  dix  mois,  la  plus 
cruelle  de  toutes  les  tyrannies?  que,  sans  la  désunion  qui 
est  heureusement  survenue  parmi  eux,  la  république  ver- 
rait encore  ces  milliers  d'échalaiids  qui  soulèveront  Tin- 
dignation  des  générations  futures  comme  ils  avaient  effrayé 
la  néire,  et  sur  lesquels  la  tète  de  plusieurs  d'entre  nous 
serait  d^à  tombée  ?  O  honte  1 6  perfidie!  ces  hommes  Iroo- 
vent  encore  des  partisans  qui  veulent  les  sauver,  qui  ne 
veulent  pas  que  les  Pache,  les  Bouchotte,  leorscomplkes, 
reliquataires,  suivant  Cambon,  envers  la  république,  de 
plusieurs  centaines  de  millions,  rendent  leurs  comptes, 
afin  de  leur  laisser  en  main  les  moyens  de  stipendier  leurs 
satellites ,  pour  agiter  sans  cesse  le  peuple  et  le  fatigoer  do 
gouvernement  républicain. 

Cahbor  :  On  semble  m*lncnlper  par  cette  phrase.....  Je 
déclare.... 

Claoxel  :  Non,  U  n'est  pas  question  de  toi,  poisqoe  tu 
as  eu  la  loyauté  de  nous  déclarer  ici  qo'il  avait  été  impoa* 
Bible  de  leur  faire  rendre  compte. 

Citoyens  on  ne  veut  pas  laisser  non  plus  loger  Fooqoier- 
Tinville,  parce  qu'il  dévoilerait  les  intrigues  de  cette 
faction ,  dont  il  n'a  été  que  trop  le  perfide  iutrument. 

On  répand  des  calomnies  contre  le  greffier  Fabridns, 
parce  qu'il  fut  cruellement  persécuté  pour  avoir  pris  le 
parti  des  patriotes  assassinés  au  Champ-de-Mars  ;  parce 
que,  ne  voulant  pas  servir  cette  iaction,  Robespierre  l'a- 
vait plongé  dans  les  cachots,  et  peut-être  encore  plus  parce 
qu'il  a  su  mettre  à  l'abri  de  tout  enlèvement  des  pièces  qui 
déposent  contre  les  traîtres. 

Enfin  •  on  insinue  à  qoelqoes  Représentants  qo'on  égare 
qu*il  est  temps  de  soppprimer  le  tribonal  révolotionnaire. 
Eh  !  par  qoi  cette  idée  a-t-elle  été  mise  eo  avant  ?  Remar« 
quex-lebien,  amb  de  ta  patrie,  par  ceux  qui  criaient  aux 
CordeHers,  aux  Jacobins,  qo*!!  fallait  s'insorger  contre  la 
Coiiventioa  nationale.  Remarqoei  bien  encore  qoe  c'est 
ao  moment  où  l'oo  parie  de  royalisme,  qoe  ce  sont  ceux* 
là  même  qoi  étaient  asseï  déboutés  poor  vooloir  faire  eiolre 
qoe  le  comité  de  sûreté  générale  le  bvorisait.  qui  i 


15 


ioA  h  destroetion  de  l^époof  1111111  »  de  l*arme  la  pins 
terrible  pour  empêcher  le  moostre  de  renaître. 

Daas  le  temps  que  le  tribunal  réTolutlonoaire  pouvait 
être  dirigé  par  les  partisans  de  la  tyrannie  de  Robespierre, 
9ù  aurait  traité  de  oontre-réfolntionnaire  celui  qui  aurait 
mt  parier  de  sa  suppression. 

Aujourd'liui  que  tm  comités  de  gouTemémeUt  ne  sont 
mus  que  par  les  sentimenU  de  la  justice  et  de  lliuaMnité» 
Il  est  naturel  que  les  ennemis  de  ces  deux  vertus»  comme 
de  la  représenUtion  nationale^  clierchent  à  se  délivrer  de 
tout  ce  qui  peut  contrarier  leurs  projets  d'anarchie  el  de 
terrorisme. 

Je  ne  viens  pas  ici  déihpprouTer  votre  décret  de  suspen- 
sion des  fonctions  du  tribunal  révolulionnairct  ni  celui  de 
rarresuiion  des  malfaiteurs  de  Nantes*  absous  par  les 
jurés,  que  lesjug;es  auraieut  dû  envoyer  devant  les  tribu- 
naux criminels  ordinaires,  ou  tout  au  moins  retenir  comme 
suspecU,  ainsi  qu'ils  en  avaient  le  droit.  Si  vous  n*aviei 
prisées  deux  mesures,  je  les  provoquerais;  mais  je  de- 
mande : 

1*  Que  les  comités  vous  présentent  demain  la  loi  sur 
Torganisation  du  tribunal  révolutionnaire,  que  vousaves 
laiie  depuis  le  10  thermidor,  d*après  le  rapport  de  Merlin 
(  de  Douai  ),  qui  a  été  mal  à  propos  suspendue,  et  que  vous 
leviez  celte  suspension  : 

S*  Que  vous  rcnouvelies  le  tribunal  révolutionnaire; 

S*QueFouquier-Tinville,  Pache  et  Bouchotte  el  tous 
la  complices  de  la  lÎMlion  robespierristey  soient  jugés  sans 
retard; 

4*  Qu*après  ceux-ci»  le  tribunal  s'occupe  des  Individus 
traduit»  devant  lui  pour  crime  de  royalisme. 

Citoyens  «  ce  n*est  qu'en  montrant  à  la  France  entière 
que  vous  ne  voules  ni  participer  aux  atrocités  qui  l*ont  dé- 
solée, ni  laisser  parmi  vous  les  crimes  impunis,  que  vous 
ju»tifieres  la  confiance  dont  le  peuple  vous  a  honorés.  Ehl 
qu'on  ne  vienne  pas  me  répéter  qu*on  veut  faire  le  procès 
à  la  Convention  nationale  tout  entière;  qu'uu  grand  nom- 
bre de  représentants  envoyés  en  mission  sont  dénoncés  aux 
comités. 

Je  répondrait  sur  le  premier  fait ,  que  la  meilleure  ma- 
nière de  ne  pas  laisser  avilir  la  Convention ,  c*est  d'exami- 
ner la  conduite  de  ceux  que  Lecointrie  dénonce,  et  de  les 
punir  s'ils  sont  ooupatiles. 

Quant  à  la  crainte  que  de  grands  criminels  veulent  in- 
spirer à  plusieurs  représentants  du  peuple,  c'est  une  per- 
Bdie  et  une  manière  trop  usée  par  tous  ceux  qui  cherchent 
à  sauver  leur  tête. 

On  a  fouillé  les  cartons  du  comité  de  sûreté  générale,  et, 
d'après  toutes  les  recherches,  il  est  certain  qu'à  l'exception 
de  la  conduite  des  oeuf  représentants  dont  l'examen  a  été 
renvoyé  à  vos  trois  comités,  celle  de  tous  les  autres  mem- 
bres de  la  Coevenlion  a  dci  droiu  à  la  reconnaissance  et 
à  l'estime  publique. 

Babaooii:  Je  demande  l'impression  du  discours  de 
Clauiel.  Il  est  important  que  toute  la  France  sache  ce  qui 
se  dit  à  cette  tribune;  il  est  important  surtout  que  ce  dis- 
court ne  soit  pu  défiguré. 

RoAiips  :  Pal  été  en  mission  pendant  quatorxe  mois,  et 
le  déclare  que  je  n'ai  pas  besoin  du  suffrage  du  comité  de 
sûreté  générale  pour  dire  que  je  suis  pur.  Je  le  méprise 
trop  pour  cela.  Il  vaudrait  mieux  être  Cbarette  que  député. 

Un  grand  nombre  de  membres  demandent  vivement  que 
Ruamps  soit  rappelé  à  l'ordre» 

**^  :  Je  dénonce  Ruamps  pour  avoir  dit  qu'il  aimerait 
mieux  être  CbareUe  que  député. 

Quetqutê  vois  .*  Il  ne  Ta  pas  dit  I 

Vnpwkénùmhnd^wtru:  Sil  sil  C'est  un  propos  de 
loyaliste;  à  l'Abbayel  à  l'Abbayel 

BAaAiLOR  :  Je  soutiens  que  celui  qui  a  dit  qu'il  voudrait 
être  Cbarette  est  Charette  lui-même. 

RoAMPs  :  Je  demande  la  parole.... 
.  Toute  l'assemblée  demande  qu'il  aille  à  la  tribune. 
Rvam  :  Je  ne  le  veux  paa.  (Il  se  détermine  cepeadaat 


à  y  venir.  )  J'ai  dît  que  vous  avfei  accordé  une  amnistie 
aux  brigands  de  la  Vendée,  et  qu'il  suffisait  d'être  député 
ou  d'avoir  commis  quelque  erreur  pour  être  ici  dénoncé. •« 
Ptutieurt  9oix  :  Ce  n'est  pas  çal 

***  :  C'est  une  singulière  erreur  que  celle  qui  fait  périr 
les  citoyens. 

RoAMPs  :  J'ai  dit  qu'il  vaudrait  mieux  être  dans  la  posi- 
tion de  Charette  que  dans  celle  d'un  d^uté.  (  On  crie  de 
nouveau  :  Ce  n'est  pas  ça  1  )  Ceux  qui  font  aujourd'hui 
poursuivre  tels  de  nos  collègues  en  feront  poursuivre 
d*autres  demain. 

Beaucoup  de  voi^  :  Non,  non  I  nous  ne  craignons  rien  i 
notre  conscience  est  pure,  à  nous  i 

La  Convention  passe  à  Tordre  du  jour. 

VouLLAND  :  Je  n'étais  pas  dans  la  salle  lorsque  notre 
collègue  Clauiel  a  lait  une  dénonciation  contre  moi  ;  il  m'a 
imputé  d'avoir  été  à  la  prison  des  Anglaises  tirer  Tache  du 
secret,  et  ordonner  qu'on  le  laissât  promener  dans  le  jar- 
din. Si  Clauzel  eût  été  à  cette  époque  membre  du  comité 
comme  je  l'étais,  il  aurait  su  qu'en  eiécution  d*un  décret 
de  la  Convention  nationale  le  comité  de  sûreté  générale 
m'avait  chargé  de  tirer  du  secret  toutes  les  personnes  qui 
y  avaient  été  mises.  J'allai  dans  toutes  les  prisons  remplir 
cette  tâche  honorable  ;  mais  je  ne  me  rappelle  pas  d*avoir 
embrassé  Pache. 

Je  sais  que  toutes  les  personnes  que  je  tirai  du  secret  « 
comme  Pache,  reçurent  avec  reconnaissance  ce  bienfuit 
de  la  Convention.  Au  surplus,  j'étais  accompagné  d'un 
secrétaire-commis  du  comité,  appelé  Basile;  il  pourra  se 
rappeler  des  faits  que  ma  mémoire  ne  me  fournil  pas:  mais, 
je  le  répèle,  je  ne  me  souviens  pas  d'avoir  embrassé  Pache. 
Il  est  un  second  fait  sur  lequel  Clauiel  m'a  accusé;  il  m'a 
reproché,  dit-on,  d'avoir  fait  le  rapport  sur  Vincent  et 
Ronsin.  C'est  au  nom  du  comité  de  st^reié  générale  que  je 
vins  faire  ce  rapport  à  la  tribune;  il  ne  fut  pas  long.  Je 
dis  :  «  Citoyens,  c'est  pour  la  troisième  fois  que  je  vous 
déclare,  au  nom  du  comité  de  sûreté  générale,  qu'il  n*a  en 
son  p«Mivoir  uucuoe  preuve  ni  à  la  charge  ni  â  la  décharge 
de  Ronsin  et  Vincent  ;  il  m'a  chargé  en  conséquence  de 
vous  proposer  de  les  mettre  en  liberté.  • 

Faut-il  ici  déchirer  le  voile?  fant-il  dire  la  vérité  tout 
entière?  Eh  bien ,  je  vous  assure  que,  si  vous  n'eussiei  pas 
pris  cette  mesure  alors,  vous  auries  Ait  naître  des  événe- 
ments bien  plus  désa^^treux  que  ceux  qui  se  sont  passés. 
Ces  hommes  avaient  de  nombreux  partisans ,  chaque  jour 
c'étaient  les  Jacobins,  les  Cordeliers,  les  sections  en  massa 
qui  venaient  réclamer  la  liberté  de  ces  hommes  ei  nous 
savions  qu'il  se  tramait  des  complots  pour  les  enlever  des 
prisons  et  les  amener  ici  en  triomphe.  Au  surplus,  cette  me- 
sure fut  généralement  approuvée;  et  ce  qui  prouve  sa  bonté, 
c'est  qu'elle  fut  Técueil  contre  lequel  Ronsin  et  ses  com- 
plices allèreot  se  briser;  ils  profitèrent  de  leur  liberté  pour 
aller  dans  leurs  sections  pérorer,  faire  du. tapage,  et  ils  se 
perdirent.  Voilà  quelle  fut  ma  conduite;  si  j'ai  commis 
une  faute,  je  me  soumets  à  la  peine  que  la  Convention 
voudra  m'imposer. 

DcMONTfdu  Calvados):  Il  est  bien  étonnant  que  la 
gouvernement  d'alors,  qui  était  si  puissant,  qqe  ce  gou- 
vernement qui  faisait  trembler  la  France  entière,  ait  eu 
peur  de  Ronsin  dans  les  fers.  Il  avait  de  nombreux  parti- 
sans, dit-on;  mais  c'est  parce  qu'il  avait  un  appui  dan^ 
les  comités  du  gouvernement  eui-même«. 

Rappelei-vous  que  Vincent  fit  placarder  une  lettre  de 
Vadier,  membre  du  comité  de  sûreté  générale,  dans  la- 
quelle celui-ci  le  traitait  de  patriote  par  excellence.  C'est 
ainsi  que  les  hommes  que  la  Convention  frappait  étaient 
défendus  par  les  membres  des  comités.  C'est  ainsi  que  ceux 
qui  étaient  flétris  par  l'opinion  publique  étaient  loués  par 
les  dépositaires  de  l'autorité  nationale.  De  là  naquit  Tirré- 
solutioo  du  peuple,  qui  fut  si  favorable  aux  (actions.  Si  la 
Convention  fut  obligée  de  consentir  à  la  mise  en  liberté  de 
Ronsip  et  de  Vincent,  quoiqu'il  eiistât  contre  eux  des  dé- 
nonciations formelles,  ce  n'est  pas  sa  faute,  mais  celle  du 
comité  de  sûreté  générale,  qui  avait  su  opposer  l'opiaiod 
publique  à  celle  de  la  représentation  nationale. 


H 


Pftniteis  :  Je  me  sais  aperça  t  dans  1«  motion  de  mon 
eoUègue  Clauiel ,  qu*Elie  Lacoste  éuH  loapçonoé  d*avoir 
au  moins  commis  quelque  erreur;  ie  crois  que  ce  repré* 
éentani,  qui  est  maintenant  en  mission,  devrait  ôlre 
rappelé  ;  car  il  est  nécessairement  compris  dans  le  nombre 
dei  membres  qui  composaient  les  anciens  comités  de  gou- 
vernemeut,  et  dont  les  comités  actuels  sont  cliargés  d'exa» 
miner  la  conduite.  J'ajouterai  d'ailleurs  que  les  adminis- 
trations dn  département  dans  lequel  il  est  envoyé  n*ont 
point  encore  été  épnrécs  ;  qu'elles  n'ont  pas  même  pris  le 
soin  de  prévenir  les  mouvements  qui  pourraient  avoir  lieu 
I  l'occasion  des  subsistances.  Je  demande  en  conséquence 
qu'il  soit  enToyé  un  autre  membre  à  la  place  d*Elie  La- 
coste. 

Rouz-Fazillac  :  Je  réponds  aa  préoploant,  qui  a  semblé 
Touloir  faire  un  jeproehe  à  Blie  Lacoste  dt  n'avoir  pas 
é|)uré  les  administrations  du  département  de  la  Corrèxc, 
que  notre  collègue  n'avait  d'autres  pouvoirs  que  ceui  dç 
aurteillei;  la  manaiactare  de  Tulles,  et  qu'ainsi  l'on  ne 
peat  pas  le  blâmer  de  »'étre  restreint  dans  les  Tooctlon^  qui 
fui  ont  été  confiées.  Au  surplus,  ses  pouvoirs  se  terminent 
tfansonelques  Joars;  Je  demande  que  la  Convention  passe 
I  l'ordre  dn  Jour  sur  la  motion  de  Pénières, 

hionkïïù  BooBDOii  t  Voulland  a  répondn  à  l'article  qui 
le  regardait;  je  demande  que  sa  réponse  soit  imprimée  à 
la  suile  de  la  dénonciation  de  Claucel. 

CLAUiaL  :  Je  ne  m'oppose  pas  à  l'impression  de  la  ré- 
ponse de  Voulland,  mais  je  demande  qu'on  imprime  aussi 
robsenration  que  je  vais  faire.  Voulland  a  dit  qu'en  esécu- 
Uon  d'un  décret  de  la  Convention  il  a  éié  chargé  de  tirer 
du  secret  tous  ceui  qui  y  étaient  détenus;  je  voudrais  qu'il 
nous  dit  auasi  pourquoi  il  avait  donné  à  Pacbe  la  permis- 
sion de  se  promener  dans  le  jardin,  quand  celte  faculté 
ilait  interdite  à  tous  les  autres  prisonniers  ;  je  voudrais 
encore  que  Voulland  pût  accorder  la  déclaration  qu'il  fit 
an  nom  du  comité  de  sûreté  générale,  qu  il  n'avait  en  son 
pouvoir  aucune  pièce  à  charge  ou  à  décharge  de  Ronsio  et 
de  Vincent,  avec  l'eiistent  e  connue  alors  de  la  dénoncia- 
tion imprimée  de  Pbéiippeaux  et  de  Bourdon  (  de  l'Oi^e), 
dénonciaiion  que  tous  les  papiers  publics  s'empressèrent  ^ 
«lors  de  répéter* 

Bourdon  f  de  l'Oise)  i  Je  rappelle  à  la  Convention  les 
motifs  de  tagesHC  et  de  prudence  qui  l'ont  déterminée,  le  8 
brumaire,  â  décréter  le  renvoi  h  ses  trois  comités  de  toute 
dénonciation  qui  serait  faite  contre  les  représentants  du 
peuple.  Je  ne  veoi  pas  circonscrire  la  liberté  des  opinions, 
nais  je  vois  avec  peine  que,  tandis  que  les  comités  sont 
aaisis  d'une  dénonciation,  on  vient  encore  en  entretenir  la 
Convention* 

Si  c'était  ici  le  lien  de  a'expliqner  snr  les  faits  et  sur  les 
Individus  dont  on  a  parlé,  j'aurais  aussi  quelque  chose  à 
eiter  sur  leurcompte;  je  relèverais  au^si  quelques-unes  des 
asF«i  tion^  de  Voulland  ;  mais  il  I4UI  obéir  à  la  loi ,  et  toute 
difeussion  doit  cesser» 

Je  pense  que  les  mêmes  motifs  qui  empêchent  que  l'on 

fi»illiqlle  ici  snr  la  dénonciation  doivent  empocher  aussi 
mprerision  de  la  dénonciation  elle-même;  et  je  suif;  per- 
suadé que  Clausel  est  trop*ami  de  la  patrie  pour  insister 
lur  la  publication  de  son  opinion  ;  je  n'épouse  ici  aucun 
parti,  mais  j'appelle  l'exécution  de  la  loi. 

CtsuzKL  :  Je  ne  demande  point  l'impression  ;  i'ob<«rve 
feulement  que  tout  ce  que  j'ai  dit  m'a  semblé  un  préalable 
nécessaire  pour  motiver  les  propositions  que  j*ai  laites. 

L'assemblée  renvoie  le  tout  aux  trois  comités, 
^  La  séance  est  levée  à  quatre  bcures* 


GEOGHAPHIE. 

^ CiUU  rouUhf  dm  théâtre  de  la  guerre  sur  les  frontih^ 
d'Espagne,  cemprenani  dtpuU  Bordeaui  jutqn'k  M«d^d,  où 
se  trouvent  les  Pyrtnéethantct,  bancAet  orieaUlen  ;  dreisée 
par  Ç^,  Çhaumier,  l'an  se  de  la  eépnUs^ne;  en  une£aaille. 
Prix  !  I  liv. 


Cartt  dé  U  prÎHcipautide  Catalogne,  dressée  par  H:  Jail« 
lot,  avee  les  départeaienis  limitrophes,  corrigée  etaugmen)* 
tée  par  P.  Longchaaips  fils  ;  en  deux  feuilles.  Prix  :  *  Itv. 

Carie  t^uiiire  des  royaumes  d'Espagne  et  de  Portugal, 
dressée  par  0.  Jaillofc  •  avec  les  départewenU  limilhropbas , 
corrigée  et  augmentée  par  P.  Longobampa  fils ,  d'apnbs  les 
cartes  de  Lopes  en  1793,  en  deux  feuilles.  Prix  :  3  liv. 

La  même,  eo  une  feuille,  dressée  d'après  les  olMervatlone 
des  meilleurs  géographes.  Prix  :  80  s. 

A  Paris,  ches  Basset,  marchand  d'estampes,  me  Jacque% 
an  coin  de  celle  des  Malhurios. 

Le  départemêat  du  MotUmBlanô,  i^oni  à  la  république 
firançaise,  divisé  eo  aeptdistriou  et  quatro-viagutrois  can- 
tons, gradué  d'après  la  division  décimale. du  qaari  du  méri* 
dien;  par  J.>B.  EayouMi,  iogéoieur-gëographe.  Prix  :  6  liv* 

Celte  earte  a  été  présentée  h  la  Convention  nationale,  qui 
en  a  décrété  la  mention  honorable,  l'insertion  an  Bulletin,  et 
le  renvoi  au  comité  d*ioatn4Ction  publique. 

A  Paris,  chez  l*auteur,  rue  des  Maçons-Sorbonne,  n^  44I , 
et  elicx  le  citoyen  Béraud,  ingénienr-yéegvayhe,  eeor  Guil- 
laume, rue  de  la  Loi. 


LIVRES  DIVERS. 

Le  Sens  commun  ,  ouvrage  adressé,  aux  Américains,  dans 
lequel  on  traite  de  l'origine  el  de  l'objet  des  gouvernements, 
de  la  constitution  anglaise,  de  la  monarchie  héréditaire  et  de 
la  situation  de  rAmériquo  septentrionale. 

Traduit  de  l'angleis  de  Thosaas  Payée ,  aeoonde  édition 
corrigée.  Prix  :  I  liv.  10  s.,  et  i  liv.  15  e.,  par  la  poate.  A 
Paris,  chex  Gueffier  jeune. 

r/mo/éofi,  tragédie  en  trois  actes»  avec  des  cbcrars,  par 
Marie-Joseph  Chénier,  député  li  la  Coiiveotion  nationale,  mu» 
slqne  de  Mehnl  ;  précédée  d*nne  -ode  sur  la  situation  de  la. 
république  durant  Toligarchie  de  Robespierre  et  de  ses  corn* 
pliees.  Prix  :  40  sous. 

A  Paris ,  chef  Maradan ,  libraire .  me  du  Cimetière*An- 
dré-des-Arcs,  n*9;  et  Détenue,  libraire,  maison  Egalité. 
nO«  i  et  a. 

Portrait  de  Kozctusko ,  célèbre  général  polonais ,  faisant 
la  révolution  de  Pologne;  ovale  de  cinq  pouces  trois  lignes 
de  haut,  dessiné  d'après  nature,  en  1793,  au  phjMOOotracei 
par  Quenedey ,  rue  Croii-des-P«lits-Ghamps,  n**  10  et  $1 , 
a  Paria,  où  il  se  vend.  Prix  t  f  Kv. 

Il  est  représenté  invoquant  le  cîcrnonr  qu'il  puisse  ta 
battre  encore  pour  la  liberté  de  sa  patrie. 

—  Trtùté  des  opérations  de  chirurgie,  per  Berirandt,  tra- 
duit de  l'italien  par  Sollier  de  la  KomilUia,  aonvelle  édi* 
tion:  in -S»»  fig.,  broché.  Prix  :  6  liv.  ro  a.  A  Paris,  ches 
Théophile  Barrois  le  Jeune,  libraire,  quai  des  Auguslios, 
n»l8.  . 

— Code  des  successions,  donations,  tuhstituti^nSt  lestamente 
et  partages,  avec  une  ihiroducii'oo  des  tahleaut  géoéalogi* 
ques  et  une  table  alphabétique  des  matières;  par  Te  citoyen* 
A.-C.  Guichard,  avantageusement  connu  par  ses  codes  des 
juges  de  paix,  du  tribunal  de  famille,  police,  etc.,  etc.i  dont 
il  va  paraître  de  nouvelles  éditions. 

A  Paris,  chez  Garnery,  rue  Serpente,  n®  17.  Prjs  :  S  liv» 
10  sous,  et  4  Ht.  lO  sous  franC  de  port,  par  la  poste. 


PayûmenU  à  la  ItétofrU  fialton«<e. 

lA  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre* 
micrs  mois;  il  sera  fait  à  tons  ceux  qui  seront  porteurs 
d*ioscripUons  au  grand  Uvre.  Celui  pour  lea  rentes  viagères 
est  de  hnit  moto  vioft  et  un  Jeun  de  Pamiée  1708  (viens 
atito)' 


GAZETTE  NATI0N1U;Ë  o.  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

H^  03.  Tridi  3  Nivosb,  Pan  3^.  {Mardi  33  DécEMBBB  1794,  vieux  ttyle.) 


POLITIQDE. 

POLOGNE. 

'  De  Variovie,  le 95  novembre, — Les  Rosses  ont  confié  le 
gonvernement  aa  roi  Stanislas,  qui  sera  secondé  par  le  ci- 
devant  conseil  permanent,  remis  en  vigueur.  Stanislas  a 
rappelé  auprès  de  lai  le  général  Josepli  Poniaiowsài,  son 

MVCU. 

Les  Rosiestont  en  petit  nombre  dans  la  Villes  les  uns 
•tinpenl  à  Praft/  qni  n*est  plut  qu*uo  monceau  de  oen« 
dref  ;  les  autres  occupent  les  reirancbemeoti  abandonnés 
par  les  Prussiens,  et  leur  quartier  général  est  ft  Mokalow. 
oè  était  celui  de  rini«irtuné  Koiciusko,  Les  quartiers  de  la 
garnison  de  cette  vilie  sont  dans  la  rue  appelée  du  Ifow 
9§au»àlon4e9 

Les  braves  Polonais,  sortis  de  Varsovie  lors  de  la  reddl- 
tlon,  se  sont  rassemblés  au  nombre  de  trente  mille  dans  le 
palatioal  deSandoprir,  ajrant  à  leur  tête  le  généralissime 
Wawnowski,  quelques  autres  généraux  et  plusieurs  mem* 
Intoa  du  oanteil  souverain  i  mais,  manquant  do  Iseuucoup 
^objrts  nécessaires,  presses  d'un  cùié  par  les  Russes,  et 
de  J*autfepar  les  Prnislena  aux  ordreadu  général  de  Kiei^t, 
ils  ont  vu  leur  inianterie  se  débander  près  d'Opoeino,  et 
presque  toute  leur  iriillerie  esi  tombée  au  pouvoir  des 
alliés.  La  mciUeure  partie  de  leurs  muoitiooi  a  éprouvé  le 
iBéme»ort» 

Cependant  les  glorieux  débris  de  ce  corps,  au  nombre 
de  sii  mille  bommes,  presque  tous  de  cavalerie,  ont  fait 
vù  nouveau  serment  à  la  liberté,  ont  pris  ta  résolution  de 
s'ouvrir,  è  quHque  prix  que  ce  soit,  un  passage  vers  la 
Gailicie.  Le  brave  Wawnowski  est  encore  à  leur  tète.  Ces 
kèros  sont,  en  ce  moment,  à  ce  que  l'en  présume,  dans 
les  en  visons  de  Je<*dnpiov. 

Le  Polonaia  KUInski«  l*nn  de  eeux  qni  ont  le  plus  mar^ 
4sé  dant  la  révolution  »  a'éttit  réfugié  en  PoMWoie.  On  l*a 
mis  en  état  d*arrestation  quelques  instants  eprès  son  ar- 
rivée. 

PRUSSE. 

Tkotmt  U  iS  no9êmbre.  •—  Les  Insurgés  ne  seront  pas 
HMMÛs  de  longtemps  dans  la  Prusse  méridionale,  lis  se 
«Btranchent  dans  des  souterrains  ineonnus  aux  troupes 
pmssieiiiies  \  là  ils  se  eaebeni  quand  l<-urs  ennemis  sont  en 
pins  grand  nombre  t  et  en  sortent  tout  à  coup  quand  ils 
peuvent  se  mesurer  sans  diaproportioo.  Ils  sont  coniman* 
dés  par  le  général  Lipski,  On  assure  que  le  projet  de  ce 
dernier  csl  d'aller  altaquer  Cienstocbow,  où  il  jr  a  peu  de 
troupes* 

11  se  tronve  I  Greudents  beaucoup  de  prisonnier»  polo- 
Mb.  Deux  commissions,  présidées  parle  commandant  de 
Tbom  e(  par  cehii  de  Grandenit ,  ont  été  établies  pour  in« 
elruire  leur  afalre. 

'  Le  général  DombrovskI  vient  de  démentir  le  brnft  de  sa 
fuite  et  de  celle  du  général  Madalinski.  Le  premier  a  fait 
répandre  une  lettre  circulaire  à  ce  sujet,  avec  injonction 
de  livrer  des  fourrages,  des  ebemises,  des  bottes,  et  des 
honoies  pour  eampiéter  son  infanterie  et  sa  cavalerie.  Les 
•dminislratioos  prussiennes,  de  leur  cdté,  i<*nt  des  procla- 
mations pour  contenir  on  ramener  les  babitants  qu'elles 
disent  égaréêp 

—  Un  nouveau  seiilèvemeat  s'est  organisé  dans  les  en- 
tirons  de  Gralx* 

Un  des  chefs  des  insurp;és ,  Lukosmi,  s^est  jeté  dans  le 
palatinatde  Poscn,  et  y  porte  le  ravage.  Les  Prussiens  dés- 
espèrent de  le  réprimer,  parce  que  son  corps  de  troupes, 
augmenté  de  liNM  les  Poloaal*  qui  ont  éebappé  aux  fureurs 
des  Russes,  se  tirnt  cacbé  ùuni  les  bréls,  et  de  U  inler- 
jDipte  les  munitions ,  les  trans|)ort$ ,  les  vivres  »  et  se  préci- 
pite Impunément  snr  Tes  Prussiens. 

La  Prusse  occidentale  est  aussi  violemment  agitée.  Les 
iaaaiféa  y  «à  Ikit  aux  Prussiens  de  grands  enlèvements 
d^argipC,  ai  Jeor  ont  lud  beaucoup  de  monde» 

La  tranquillité  paratt  se  rétablir  dans  la  Prysse  orleA» 
laie  et  dm  ia  «stria  Ile  réélit 
t«5^ri«.-.TemeX. 


PAYS-BAS. 

De  Bruxelle»,  le  35  frimaire,  —  Une  partie  de  Parmèe 
aux  ordres  du  général  Jourdan  reflue  vers  Berghen  et  Aix^ 
la-Cbapelle,  pour  y  prendre  ses  quartiers  dMiiver,  tandis 
que  la  plus  nombreuse  partie  se  cantonne  vers  les  bords 
du  Rhin,  à  refTet  de  surveiller  les  mouvements  de  l'armée 
autrichienne. 

—  Les  préparatifs  se  continuent  avec  vigueur  vers  les 
rives  du  Wahal,  dans  la  vue  de  passer  ce  fleuve  avant  que 
la  pluie  et  les  neiges  n'en  grossissent  les  eaux. 

•*  Le  Ibrt  Saint-André  est  en  ce  moment  canonné  avec 
la  plus  grande  vivacité.  Malgré  les  secoure  que  le  prince 
d'Orange  s'ellorce  déporter  aux  deux  places  de  Grave  et 
de  Bréda ,  elles  sont  plus  que  jamais  resserrées.  Cent  bou- 
ches à  feu  foudroient  la  première,  qui  fait  la  plus  vive 
résistance.  On  assure  que  c'est  un  jeune  officier  qui  y  com- 
mande. 

•—  La  garnison  de  Luxembourg  fait  quelquefois  des 
sorties. 

—  Depuis  l'arrivée  du  général  PIrhegru  à  Nimègue,  une 
petite  partie  de  l'armée  du  Nord  entre  en  cantonnement. 
La  colonne  commandée  par  le  générai  Delmas  va  hiverner 
I  Boivle-Duc. 


RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE. 
TBIBUMAL  CBIMINEL  BÉVOLUTIONItAlBE. 

Suite  de  la  procédure  du  eomité  révolutionnaire  de 
Nantes, 

Le  présideni  :  Voici  une  lettre  que  vous  adres-; 
siez  au  gdoéral  Dufour;  elle  était  conçue  en  ces 
termes: 

•  Continue,  camarade,  de  servir  la  rëpiibliqne  et 
d'exécuter  les  ordres  que  je  te  donnerai.  Qui  peut 
être  à  Tabri  des  délations  dans  les  circonstances  oh 
nous  nous  trouvons?  Je  te  rendrai  justice;  brûle, 
brûle  toujours,  mais  sauve  les  grains,  denrées  ot 
fourrages,  et  n'en  laisse  point  dans  la  Vendée;  c'est 
Carrier  qui  te  le  recommande.  • 

Carrier  ;  J'avais  reçu  les  ordres  les  plus  posiliB 
de  la  Convention;  on  m'avait  même  envoyé  des  ma- 
tière^i  inflammables  pour  consumer  les  repaires  des 


J  ai  cependant  épargné  les  rebelles  de  Cholet,  et 
f  ai  empêché  que  leurs  maisons  fussent  incendiées. 

Le  témoin  Brondes  :  Carrier  faisait  brûler  tontes 
les  propriétés  des  rebelles;  il  a  fait  incendier  l'église 
deThypbone;  il  y  a  lui-même  mis  le  feu,  et  cepen* 
dant  Tennemi  avait  été  battu  la  veille;  il  n'y  avait 
plus  que  les  paisibles  habitants,  qui  n'avaient  pri's 
aucune  part  à  la  rébellion. 

Carrier:  On  brûlait  avant  mon  arrivée;  il  est 
vrai  que  Thyphonea  été  brûlé,  que  nous  en  avons 
donne  l'ordre  avec  Merlin,  Turreau  et  Gillel;maii 
Thyphone  était  un  repaire  de  brigands,  situé  sur 
une  grande  hauteur;  ce  poste  était  des  plus  redou- 
tables; avec  deux  pièees  de  canon  il  était  inacces* 
tibje  :  cette  place  était  d'ailleurs  fortifiée  par  un  châ- 
teau fort,  et  les  habitants  venaient  y  renfermer  tous 
leurs  effets. 

Gicqueau^  administrateur  de  département,  témoin 
déjà  entendu,  fait  de  nouveau  le  tableau  de  la  situa- 
tion de  la  ville  de  Nantes;  il  ajoute  : 

•  Carrier,  apprenant  que  beaucoup  de  marchands 
refusaient  de  livrer  au  oiaximum,  nous  disait  qti*ii 
faU#U  anfipsccr  leur  boutiques  H  coupa  de  bacbei 


13 


L*nn  de  nous  lui  rcpoudit  :  •  Vions-tu  ici  nous  pré- 

•  cher  le  pillage?  •  Carrier  répond  :  •  Vous  m'inju- 

•  juriez  ;  je  dis  qu*il  faut  «voir  la  loi  d*uoe  maio,  et 

•  la  hache  de  l'autre.  • 

•  Nous  étions  entre  deux  feux;  d*un  côté  nous 
avions  à  craindre  rapproche  des  brigands,  et  de 
TautreTeffet  des  conspirations  qui  se  tramaient  jour- 
nellement dans  les  prisons;  nous  crûmes  qu*il  était 
de  la  prudence  de  dissimuler  avec  le  représentant, 
et  de  ne  point  nous  plaindre  des  horreurs  qu'il  fai- 
sait commettre  dans  la  Vendée,  et  de  celles  qu'il 
méditait  encore.  En  effet.  Carrier  nous  disait  que  le 
sort  de  cette  contrée  était  arrêté,  qu*il  fallait  Tex- 
terminer  pour  éviter  une  guerre  civile  au  printemps. 

•  11  arrive  à  Nantes  de  jeunes  brigands  qui  se  ren- 
dent volontairement,  et  qui  promettaient  de  con- 
vertir plusieurs  communes  au  giron  de  la  républi- 
que, si  on  voulait  les  laisser  retourner  dans  le  pays 
pour  porter  des  paroles  de  paix. 

•  Nous  sondons  les  dispositions  de  Carrier;  il  fait 
semblant  d*étre  de  notre  avis,  et  le  lendemain  il  or- 
donne de  fusiller  ces  brigands  égarés,  qui  étaient 
venus  se  mettre  à  notre  merci. 

«  Nous  nous  efforçons  de  faire  sentir  à  Carrier  les 
conséquences  funestes  d'un  ordre  aussi  cruel  ;  nous 
lui  observons  que  le  Morbihan  menace  d'une  insur- 
rection, et  que  les  mesures  outrées  contre  les  bri- 
gands sont  plus  propres  à  en  augmenter  le  nombre 
(]u'à  le  diminuer;  gue  beaucoup  de  rebelles  sont 
égarés  par  leurs  chefs,  par  leurs  prêtres.  Nous  n'ou- 
blions rien  pour  faire  rétracter  Tordre  sanguinaire. 

•  Carrier  nous  répond  que  si  nous  renvoyons  les 
douze  cents  briganas  venus  à  Nantes,  ils  grossiront 
l'armée  des  rebelles,  et  que,  si  on  les  fait  entrer  dans 
Nantes,  ils  soulèveront  cette  commune. 

«  Mais,  lui  répliquons-nous,  si  nous  parons  à  tous 

.ces  inconvénients,  consentiras-tu  à  nos  demandes? 

Carrier  se  contente  de  nous  répondre  :  •  J'ai  des  or- 

•  dres,  il  faut  que  je  les  suive;  je  ne  veux  pas  me 
«  faire  guillotiner.  • 

•  Carrier  qualifiait  de  brigands  les  réfugiés  de  la 
Vendée  qui  avaient  quitté  leurs  foyers;  il  les  fit  re- 
léguer à  vingt  lieues  de  Nantes;  il  les  traitait  de  la 
manière  la  plus  cruelle,  et  les  fit  repentir  souvent 
d'avoir  quitté  leurs  foyers.  • 

8BANCE  DU  16  FRIMAIRE. 

Au  commencement  de  cette  séance,  Goulin  de- 
mande la  parole. 

Goulin:  Carrier  hier  m'interpella  pour  une  révé- 
lation qu'imprudemment  j'avais  annoncée  la  veille; 
et  de  (juel  droit  ose-t-il  invoquer  la  vérité  en  sa  fa- 
veur, lorsqu'il  la  trahit  journellement  contre  nous? 
Le  tribunal  me  permettra  de  désobéir,  et  plût  à  Dieu 
que  ma  désobéissance  datât  de  plus  loin  ! 

Hier  j'entamai  une  réponse,  et  une  indisposition 
subite  m'empêcha  de  poursuivre;  hier  je  dis  qu'un 
moment  de  trouble,  occasionné  par  la  présence  des 
témoins  qui  devraient  plutôt  partager  nos  souffran- 
ces qu'en  être  les  auteurs,  m'avait  arraché  un  demi- 
aveu,  m'avait  fait  commettre  une  indiscrétion. 

Hier  je  dis,  et  aujourd'hui  je  le  répète,  que,  rendu 
par  mes  réflexions  a  mes  principes  et  à  mon  carac- 
tère, je  mourrais  plutôt  que  de  révéler  le  secret  que 
j'avais  étourdiment  promis. 

Je  demande  donc  pardon  et  aux  patriotes  et  à  la 
chose  publique;  oui,  à  la  chose  publique;  car  dé- 
noncer des  patriotes,  c'est  apprêter  des  jouissances 
et  des  succès  à  l'aristocratie. 

D'ailleurs,  qu'importe  à  ma  cause  d'y  attacher 
eelle  d'un  patriote  aeplus?  En  serai-je  moins  cou- 
pable en  faisant  siéger  près  de  moi  de  nouveaux  ac- 
cusés? Mes  fautes  sont  a  moi,  et,  quoi  qu'elles  doi- 


vent me  coûter,  je  ne  serai  pas  assez  lâche  pour  les 
verser  sur  autrui.  . 

Entièrement  opposé  au  système  machiavélique 
d'Hérault  de  Séchelles,  je  méprise  également  et  celui 
qui  le  prêcha,  et  celui  qifi  put  le  pratiquer.  Nul  de 
mes  (Hïrits  n'est  équivoque  ;  j'appelle  un  chat  un 
chat  ;  et  mon  vocabulaire  n'offre  pas  pour  synony- 
mes les  mots  noyade  et  trantlaiion.  Toutes  mes  dé- 
marches sont  franches;  jamais  je  n'eus  la  bassesse 
d'interposer  des  victimes  entre  la  justice  et  moi. 

Tous  mes  actes  sont  ostensibles  :  si  l'on  me  juge 
d'après  eux.  certes  je  suis  coupable,  et  j'attends  mou 
sort  avec  résignation  ;  mais  si  l'on  juge  mes  inten- 
tions, je  le  dis  avec  orgueil,  je  ne  redoute  ni  le  juge- 
ment des  jurés,  ni  celui  du  peuple^  ni  celui  de  la 
postérité. 

Carrier,  toi  qui  me  sommes  de  déclarer  la  vérité, 
plus  que  toi  j'ai  droit  à  t'adresser  la  même  somma- 
tion. Jusqu'à  présent  tu  en  as  constamment  imposé 
et  à  tes  juges  et  au  public  ;  tu  as  fait  plus,  lu  as  menti 
sans  cesse  à  ta  propre  conscience. 

Tu  t'obstines  a  nier  lès  faits  les  plus  authentiques. 
Je  t'offre  un  bel  exemple;  imite-moi,  sache  avouer 
tous  tes  torts,  si  non  tu  t'avilis  aux  yeux  du  peuple, 
sinon  tu  te  déclares  indigne  de  l'avoir  jamais  repré- 
senté  

Depuis  longtemps  tes  coaccusés,  tes  agents  subal- 
ternes, disons  mieux,  tes  malheureuses  victimes, 
jouent  ici  ton  rôle.  Crois-moi,  il  est  temps  encore, 
reprends  celui  qui  t'appartient;  sois  grand  et  vrai, 
comme  doit  l'être  un  mandataire  du  peuple  ;  recon- 
nais ton  ouvrage ,  confesse  tes  erreurs  ;  et  ,si  tu 
éprouvais  le  sort  fatal,  du  moins  tu  emporterais 
dans  ta  tombe  quelques  regrets  de  tes  concitoyens. 

Voilà  mon  espoir  à  moi,  qui  suis  et  fus  toujours 
véridique;  et,  je  l'avoue,  c'est  ce  qui  cause  la  séré- 
nité, je  pourrais  dire  la  gaîté,  qui  m'accompagne 
dans  les  fers. 

Carrier  :  A  tout  ce  que  vient  de  dire  Goulin,  je 
n'opposerai  que  des  faits. 

Goulin  vient  de  vous  déclarer  qu'il  mourrait  plu- 
tôt que  de  révéler  le  secret  dont  il  parla  hier ,  qu'il 
avait  cependant  promis  de  révéler  lorsqu'on  I  exi- 
gerait. Il  n'y  a  pas  de  doute  que  l'on  a  dit  qu'il  avait 
existé  une  conspiration  ;  elle  fut  dénoncée  à  Gillet 
avant  mon  arrivée  à  Nantes;  mon  collègue  dit  que 
le  comité  avait  des  pouvoirs  suffisants,  et  que,  lors- 
qu'il s'agissait  du  salut  du  peuple,  il  pouvait  les  ex- 
céder. 

On  me  cite  un  fragment  de  lettre  de  Hérault  de 
Séchelles;  il  faudrait  lire  cette  lettre  pour  voir  ce 
qui  précède  et  ce  qui  suit  ;  je  ne  me  souviens  pas 
qu'il  m'ait  écrit  pendant  que  j'étais  à  Nantes;  mais 
ce  qui  m'étonne,  c'est  son  supplice. 

Les  pièces  pour  lesquelles  la  Convention  avait 
envoyé  un  courrier  extraordinaire  à  Nantes  étant 
arrivées  et  envoyées  au  tribunal,  on  les  présente  à 
Carrier  qui  reconnaît  sa  signature. 

Le  président  donne  lecture  de  deux  listes  de  fusil- 
lades; la  première  est  du  27  frimaire,  et  contient 
l'ordre  de  fusiller  sans  jugement  vingt-quatre  bri- 
gands. 

La  seconde  liste  est  du  29,  et  donne  l'ordre  de  fu- 
siller, encore  sans  jugement,  trente  brigands. 

Carrier  réclame  une  heure  pour  prendre  commu- 
nication de  ces  ordres,  et  présenter  ensuite  ses  ob- 
servations. 

Le  président  :  J'observe  que  les  débats  sont  ou- 
verts, et  que  Carrier  doit  fournir  les  explications 
sur-le-champ. 

Carrier  avoue  les  signatures  des  deux  ordres  qu'on 


19 


Si! 


loi  à  représentas,  mais  il  dëclare  aux  juges  qu*elles 
)ni  otat  été  subtilisées;  assertion  d*autant  plus  admis- 
sible que  rien  n'était  plus  aisé  oue  de  lui  surprendre 
ces  signatures  au  milieu  d*nne  foule  de  papiers  qu'on 
lui  présentait  à  signer. 

Carrier  reconnaît  une  lettre  qu'on  lui  présente,  et 
[ul  est  adressée  par  lui  au  comité  de  salut  public; 

le  est  conçue  en  ces  termes  : 

•  Vos  recommandations  de  brûler  les  fours  et  les 
moulins  sont  superflues;  toute  espèce  de  bâtiments 
sont  brûlés.  • 

Carrier,  avec  colère  :  Toutes  les  maisons  ne  sont 
pas  brûlées,  puisqu'il  en  existe  encore;  il  faut  exa- 
miner le»  époques  et  le  temps  que  je  suis  resté  dans 
les  cantons  désignés. 

Pendant  toute  ma  mission,  on  a  bien  peu  brûle; 
on  n*a  livré  au  feu  que  les  fours  et  moulms  ;  mais, 
après  mon  départ,  les  incendies  ont  été  multipliés. 

Phelippei'TroneJoUy  :  Il  est  bien  satisfaisant  pour 
moi  de  voir  la  représentation  des  pièces  originales 

3ui  certifient  la  vérité  des  faits  par  moi  articulés  :  je 
éclare  au  tribunal  que  CarHer  s*est  rendu,  dans  sa 
voiture,  auprès  de  la  guillotine,  pour  faire  exécuter 
sans  jugement  les  vingt-quatre  brigands  dont  il 
s'agît  ;  il  y  avait  des  hommes,  des  femmes,  et  des  en- 
fants de  treize  ans;  j>n  fis  robservation  à  Carrier  ; 
il  persista  à  exiger  que  les  femmes  et  les  enfants  fus- 
sent expédiés  cpmme  les  autres. 

Carrier  :  Les  faits  sont  faux;  j'ai  donné  ma  si- 
gnature pour  juger  les  détenus,  et  j'ai  convoqué  le 
tribunal  révolutionnaire  à  cet  effet. 

(La  suite  incessamment,) 

Avis  eonctfmanl  U  Mercure  Français,  historique, 
politique  et  littéraire. 

Depuis  que,  par  des  éTénemenU  fàvoribles  lax  progrès 
de  l'eiprit  public  et  dePopinion,  la  liberté  delà  presse  a 
été  dégagih!  des  entraves  dont  la  tyrannie  Pavait  diargée, 
on  9  pu  s'apercevoir  du  degré  d'intérêt  qu*on  s*est  efforcé 
de  donner  à  ce  journal,  soit  dans  h  pjirWe  philotophique 
et  Ultcraire^  soit  dans  la  politique,  soit  dans  les  débats  de 
la  Convention.  L*artîcle  Paris  continuera  d'offrir  des  ré- 
flexions importantes  sur  les  matières  qui  intéressent  le 
plus  la  liberté  publique,  et  sur  les  principes  qui  doivent 
coneourir  au  réUhlissement  de  l'ordre  et  préparer  la  sta- 
Mlité  du  gouveniement  Les  événements  intérieurs,  les  jn-^ 
gements  du  tribunal  révolutionnaire,  les  nouvelles  oOknet- 
les  des  armées  y  occuperont  toujours  une  plaee  essen- 
tielle. Quoique  la  révolution  et  la  guerre  soient  les  deui 
grands  objets  qui  fixent  en  ce  moment  TaUention  publique, 
la  morale,  l'instruction,  les  sciences  et  les  arts  sont  dignes 
paiement  de  la  partager,  L*on  sabira  avec  empressement 
toutes  les  circonstances  qui  pourront  augmenter  l'utilité  de 
ce  journal,  qui  jouit  de  quelque  estime. 

En  paraissant  deux  fois  par  décade ,  il  se  trouve  au  ni- 
veau desCeuilles  du  jour  dans  la  plus  grande  partie  des 
départements  où  le  service  des  postes  n'est  pas  journalier. 

Le  prix  de  Tabonnement  est  de  43  livre* ,  fr^nc  de  port. 

On  s'adressera,  pour  souscrire,  au  citoyen  Gutb,  me 
des  Poitevins,  n*  18. 

GRAVURES. 

Cipotition  des  modèles  d'écriture  en  tout  genres ,  om^» 
de  traitf  de  plume .  de  la  composition  du  citoyen  Lécliard  ^ 
dcriTain-Térincateur ,  profeueur  national  et  membre  du  di<^ 
rectoiro  du  Lycée  des  Arts. 

Cet  ouvrage  connu,  dans  lequel  on  est  enfin  parvenu  à 
rendre,  par  la  légèreté  du  burin,  les  trais  effets  de  la  plume» 
a  été  déposé  an  comité  d'iostruction  publique.  L'auteur  vient 
d'y  ajonter  une  instruction  très*détaillée  sur  les  différent  et 
écritures,  posées  et  espédiées,  qui  composent  ce  livre.  Pris  : 
1  liv.,  et  8  liv.  avec  l'iostructioD. 

A  Paris,  cbes  Vérité,  graveur,  rue  Jacques,  vis4-vis  celle 
des  Matiittrins,  n*  51 ,  et  cbes  Lavoie ,  me  de  la  Madeleine , 
••4. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Préêidenee  de  Rewbett» 
SÉANCB  DU   l^r  NIVOSE. 

Un  des  secrétaires  donne  lecture  des  lettres  sui- 
vantes: 
Les  représeniants  du  peuple,  dans  Us  déparlements 

du  Var  et  des  Boucha-du-Rhéne,  à  la  Conven» 

tion  nationale. 

Marseille,  le  S3  frimaire,  Tan  8*. 

«  Citoyens  collègues,  vous  appreodres  sans  doute  avec 
satisfaction  que  la  tranquillité  règne  dans  les  départements 
des  Bouches-du-Rbéne,  et  surtout  à  Marseille.  Les  vrais 
patriotes  respirent,  les  agitateurs  gardent  le  silence;  ou» 
s'ils  essayaient  de  troubler  le  bon  ordre,  nos  mesures  sont 
prises  d*avance  pour  rendre  leurs  menées  impuissantes, 
La  voix  publique  accuse  beaucoup  d*individus  de  dilapi* 
dations  ;  mais  nous  n'avons  encore  reçu  à  ce  sujet  aucune 
réclamation  positive*  Nous  livrerons  ces  dilapidateurs  ant 
tribunaux  dès  que  nous  aurons  des  preuves  contre  eux. 

«  Il  ne  tient  qu'à  la  Convention  nationale  de  donner  au 
commerce  de  cette  ville  ton  activité  ordinaire.  Les  négo- 
ciants de  Marsdlle  ne  demandent  pas  celte  liberté  illimi- 
tée, qui  seule  peut  le  faire  fleurir;  ils  savent  que  les  cir- 
constances s'y  opposent;  ils  demandent  à  être  traités  com- 
me les  n^ociants  des  puissances  neutres.  Asseï  longtemps 
la  Convention  nationale,  induite  en  erreur,  a  ruiné,  sans 
s'en  apercevoir,  le  commerce  national  pour  enricbir  celui 
des  étrangers  ;  il  est  urgent  qu>lle  n'écoute  plus  les  agents 
de  la  commissioo.de  commerce,  et  qu'elle  adopte  un  autre 
système. 

•  Frappés  de  la  mauvaise  qualité  du  pain,  nous  avons 
voulu  en  connaître  la  cause;  nous  avons  visité  les  maga- 
sins à  blé,  et  nous  nous  sommes  convaincus  quenos  ageuts 
dans  Tétranger  n'acbetaient  que  des  blés  avariés,  piqués  du 
charançon,  remplis  de  graines  étrangères,  enfin  si  mau- 
vais que  nos  collègues  à  l'armée  d'Italie  sont  obligés  d'en 
envoyer  ici  trente  mille  quintaux,  dont  ils  ne  peuvent  faire 
du  pain,  et  que  nous  n*emploierons  qu'en  les  mêlant  avec 
le  blé  du  pays.  Celui  qui  est  importé  directement  dans  le 
port  par  les  puissances  est  de  beaucoup  supérieur  en  qua- 
lité, et  livré  habituellement  à  IS  et  15  pour  100  à  meilleur 
marché.  Que  la  Convention  décrète  que  le  blé  importé  par 
les  négociants  français  pourra  être  vendu  au  même  prix 
que  celui  qu'il  l'est  par  les  étrangers,  et  bientôt  la  concur* 
rencefera  économiser  plusieurs  millions  au  gouvernement, 
et  le  Midi  ne  manquera  pas  de  subsistances.  La  Conven- 
tion aura  peine  à  croire  qu'il  existe  dans  un  magasin  na« 
lional  de  Marseille,  depuis  sept  mois,  huit  mille  cuirs  en 
poil  qui  y  sont  comme  oubliés,  tandis  que  les  tanneurs 
n'ont  rien  à  faire,  et  que  les  insatiables  faiseurs  de  réqui- 
sitions en  amoncellent  de  nouveaux  dans  les  magasins  ;  et 
bientôt  la  comission  de  commerce  vous  proposera  d'en- 
voyer du  numéraire  à  Tétranger  pour  acheter  des  cuirs 
prépares.  Nous  allons  faire  délivrer  ces  cuirs  en  poil  à  des 
tanneurs,  afin  que  les  défenseurs  de  la  patrie  ne  soient 
pas  exposés  à  commencer  la  campagne  sans  souliers. 

t  C'est  à  la  suite  de  ce  même  système  que  les  flibricants 
de  savon ,  émigrés  de  Marseille,  et  établis  à  Gênes  et  à  Li- 
voume,  ont  la  liberté  de  vendre  sous  nos  yeux  le  produit 
de  leurs  fabriques  à  9  et  A  liv.  la  livre,  tandis  qu'on  a 
refusé  aux  fabricants  restés  fidèles  à  la  patrie  la  faculté  de 
le  vendre  à  40  sous  ;  et  c'est  ainsi  que  nous  avons  anéanti 
cette  branche  de  commerce,  qui  s'élevait  de  35  à  80  mil- 
lions par  an.  Nous  ne  cesserons  de  vous  le  répéter:  rendes 
la  liberté  au  commerce,  et  la  Fronce  ne  sera  plus  tribu- 
taire des  autres  nations. 
•  Salut  et  fraternité. 

«  Signé  CsnaoT,  EsFsaT;  Morval,  secrétaire,» 

Jourdan,  représentant  du  peuple  en  mission  dans 
les  départemenU  de  la  Nièvre,  de  l^Yeume  et  au- 
tres, a  la  Convention  nationale. 

Clamecy,  le  t7  frimaire,  l'an  8*  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 
«  Citoyens  collègues ,  j'ai  reçu  le  décret  qui ,  sur  le  rap- 
port du  comité  de  salut  public,  approuve  les  mesures qiie 
l'ai  prises,  ainsi  que  mon  collègiie  Robhi,  pour  J^H»f»0- 


fîsîoominêiit  de  Paris  «  en  bôîi  ci  durlRnit  et  qui  nous 

•utorise  k  ordonner  autant  de  coupes  extraordinaires  que 
nous  le  jugerons  nécessaire  poor  rassurai  d'une  manière 
certaine  ei  invariable. 

•  Parti  de  Paris  le  28  Tcndéroiairc,  et  arrivé  dans  celte 
vlllf  le  dO,  époque  où  jamais  on  ne  i^Vst  occupé  de  la  con- 
struction des  trains,  parce  qu'il  c^t  d'usajçe  qu*ils  étaient 
Ipus  aciievés  avant  le  1*''  de  ce  mois ,  je  n'ai  trouvé  aucun, 
des  matériaux  nécessaires  a  leur  confeclioii }  il  fallait  les 
faire  couper.  Trois  mille  voitures  ou  environ  étaient  indis- 
pensables pour  leurs  charrois.  L^ssubsisianc<'s  manquaient; 
tout  a  été  prévu,  à  l'aide  d'un  agent  général  du  commerce 
et  a pp rot iiionnement  de  la  république,  qui  est  resté  près 
de  mol  plus  de  trois  décades.  Tous  les  obstacles  ont  été 
surmontés  ;  ceux  de  la  saison  rigooreuse  ô6  nous  sommes 
soMt  les  seols  qui  pourront  8*opposer  a  ce  que  sotxante-dlx 
itiille  foies  de  bois  partent  de  ces  ports  ;  déjà  cinq  cents 
trains  et  plus  en  sont  soKis  ;  le  reste  ne  tardera  pas,  si  le 
temps  continue  d^étre  favorable. 

«  Si  les  patriotes  de  fraîche  date  n^eusi^ent  pas  vexé  im- 
pitoyablement dei  hommes  nécessiteux  et  de trfsbons ci- 
toyens; si  un  des  pins  Airts  entrepreneurs  de  flottage  n'eftt 
lias  été  incarcéré  sous  le  prétexte  révoltant  £fep<i/ri0/«  rnav- 
vffffle  iHe;  si  le  commerce  n'eût  pas  été  entravé  par  des 
Ctres  qui  ne  s*occupalent  que  d*embaUiller  plutôt  pour  as- 
souvir lenn  passions,  que  pour  servir  la  chose  publique; 
si  tous  les  marcliands  de  bois,  tous  les  voyageurs,  tous  les 
ouvriers,  même  les  plus  pauvres,  n'eussent  pas  appréhendé 
d*aborder  cette  cité,  de  crainte  d'y  être  Incarcérés  ou  bat- 
tus, ou  chassés  des  ateliers,  faute  d*avoir  des  certificats  de 
dvisme,  Paris  aurait  tiré  de  ers  contrées  son  approvision- 
fiement  ordinaire  en  bois  de  chauffage.  Mais,  soit  malveil- 
lance, ignorance,  exaspération  ou  projet  contre-révolu- 
tionnaire, tout  y  a  été  employé  pour  l'empêcher,  te  juge 
de  paix  est  chargé  dMnfnrmer  de  ce  crime  ;  s'il  y  en  a  «  U 
sera  connu  et  distingué  de  Terreur. 

-  Le  comité  de  salut  publie  a  mis  des  fonds  è  ma  dispo- 
sition pourgratifler  tous  ceux  qui  auraient  contribué  à  ac- 
éélércr  la  provision  de  Paris  en  bois  de  chauffage  et  char- 
bon. 

•  Une  récompente  plus  flatteuse  me  paraît  être  méritée 
et  digne  de  tous  les  ouvriers  qui,  dans  les  environs  des 
Communes  de  Clamecy,  ont  concouru  avec  ceux  qu'elle 
contient,  par  un  zMc  infatigable  et  opiniâtre,  à  braver 
toutes  1rs  intempéries  de  la  saison.  Une  mention  au  Bulle- 
tin, accordée  ù  leurs  pénibles  travaux,  serait  pour  eux  le 
plus  grand  prix  et  un  encouragement  précieux  pour  l'a- 
venir 

'  «  Comptes»  citoyens  collf'gues,  sur  mon  dévouement 
entier  a  remplir  la  mission  dont  vous  m'avei  chargé. 

•  Salut  et  fraternité.  JocaaAa.i 

.  La  Convention  nationale  dëcrèite  la  mention  ho- 
norable du  zèle  dea  citoyens  désignés  dans  la  lettre, 
et  le  renvoi  au  comité  de  salut  public. 

Jai^s-Panvilliers  :  Je  demande  la  parole  pour 
une  motion  d'ordre. 

Citoy<^n8,  Je  viens  remplir  un  devoir  indispensa- 
ble pour  tout  bon  citoyen  ;  Je  viens  vous  dénoncer 
des  abus;  ils  sont  encore  relatifs  à  la  vente  et  à  Tad- 
mitiistration  des  domaines  nationaux,  sources  fé- 
condes de  tant  de  friponneries  et  de  spéculations  ini- 
ques, et  ils  sont  d*autant  plus  rci)réliensibles  que 
c*est  sous  le  spécieux  prétexte  de  Tintérét  public 
qu*on  les  commet. 

Par  vos  décrets  antérieurs,  notamment  par  celui 
du  27  thermidor  dernier,  vous  avez  mis  à  la  dispo- 
sition des  municipalités  les  ci-devant  presbytères, 
pour  servir  tant  au  logement  de  l'instituteur  qu'à  re- 
cevoir les  élèves  pendant  la  durée  des  leçons;  vous 
en  avez  par  conséquent  suspendu  la  vente;  mais 
vous  ifavez  pas  parlé  des  jardins  qui  en  dépendent ,  / 
et  des  hommes  avides  ou  égoïstes,  secondéss  par  des  f 
administrateurs  imprévoyants»  ont  proGté  de  votre 
silence  pour  contrarier  vos  vues  et  taire  des  spécu- 
lations contraires  au  bien  public. 

Déjà,  dans  plusieurs  districts,  ces  jardina  sont  ven- 
dus ou  mis  en  vente  :  on  n'en  a  pas  même  excepté 


ceui  qui  tiennenl  inamédiitanoit  à  ttê  iMoea»  H 
sur  lesquels  ellea  ont  leurs  ouverturea.  Ce  sont  au. 
contrnire  ceux  qui  ont  été  principalement  robietdei 
spéculations  que  je  vous  dénonce,  parce  qu  étant, 
pour  ainsi  dire,  nécessaires  aux  maisons  dont  ils  dé-, 
pendent,  les  acquéreurs  sentent  que  ai  les  presby- 
tères sont  du  nombre  de  ceux  qui  serviront  de  mai- 
sons d'éducation,  les  instituteurs  y  seront  log^,  et 
ceux  qui,  à  la  campagne,  ne  peuvent  guère  se  pas* 
ser  d'un  jardin,  seront  obligés  de  souscrira  à  toutes 
les  conditions  qu'on  voudra  leur  imposer,  ou  de  ae. 
voir,  pour  ainsi  dire,  claquemurés  dans  leurs  ap- 
partements; et  certes  c>at  contrarier  les  vues  de  la- 
Convention  nationale»  qui  ne  veut  sûrement  pas 
avoir  pour  les  i nst i tuteurs  moins  d'égards  que  TA»-, 
semblée  constituante  n*en  avait  eu  pour  les  ci-de- 
vant curés.  Les  mêmes  considérations  qui  avaient 
fait  accorder  à  ceux-ci  la  jouissance  d'un  jardin  de. 
demi-arpect  au  moins  militent  en  faveur  des  insti- 
tuteurs :  on  pourrait  même  y  en  ajouter  de  relatives 
à  la  simplicité  des  mœurs  que  vous  devez  exiger  des 
hommes  auxquels  vous  devez  conGer  Téducation  des 
élèves  de  la  république,  et  dont  il  n'est  pas  à  propos 
de  donner  ici  le  développement. 

Quant  aux  presbytères  nui,  à  raison  des  arrondis- 
sements qui  seront  formes  pour  établir  une  école 
primaire  par  mille  habitants,  ne  se  trouveront  pas 
employés  à  ces  étnblii^semi'nts,  les  sp^ulatioîis  sur 
les  acquisitions  des  jardins  qui  en  dépendent  sont 
encore  plus  perfides,  parce  qu'elles  les  assurent  aux 
adjudicataires  au  prix  de  l'estimation  lorsqu'ils  se- 
ront mis  en  vente  ;  car  quel  est  le  particulier  qui 
voudra  acheter  à  la  campagne  une  maison  sans  jar- 
din, et  dont  souvent  on  pourra  lui  borner  la  vue  par 
un  mur  élevé  à  la  très-courte  distance  prescrite  par 
les  règlements?  Il  n'en  est  pa.sun  seul.  Les  spécu- 
lations que  je  vous  dénonce,  auxquelles  des  admi- 
nistrations se  prêtent  |)ar  incurie  ou  par  connivencei 
sont  donc  aussi  contraires  à  l'intérêt  public. 

Dans  quelques  districts  on  vend  aussi  les  cime- 
tières. Je  ne  puis  croire  que  la  Convention  natio- 
nale approuve  cette  mesure,  qui  ne  peut  être  sug- 
gérée que  par  des  convenances  d'intéi^t  particulier, 
si  elles  ne  le  sont  pas  par  le  fanatisme.  Dans  une 
commune  qui  m'a  fait  parvenir  sa  réclamation,  on  a 
provoqué  la  vente  du  cimetière  au  moment  où  les 

I)rotestants,  qui  y  sont  en  grand  nombre,  abjurant 
e  préjugé  qui  jadis  leséloignait  de  déposer  les  corps 
de  leurs  proches  à  côté  de  ceux  d'une  secte  intolé* 
rante  et  persécutrice,  ont  commencé  h  rendre  hom- 
mage aux  principes  de  Téçalité  et  delà  fraternité,  en 
venant  déposer  les  restes  inanimés  de  leurs  parents 
ou  de  leurs  amis  dans  le  même  Heu  que  les  catho- 
liques. 

Mais  quand  la  vente  de  ces  terrains  n'aurait  pour, 
objet  que  des  vues  d'intérêt  particulier,  elle  devrait, 
être  interdite  par  des  consideralions d'intérêt  public 
et  de  salubrité,  qui  exigent  que  les  eorps  morts 
soient  enterrés  dans  un  lieu  commun  et  éloigné  d^ 
habitations. 

Vous  devez  donc  faire  cesser  ces  abus  et  les  répa- 
rer ;  mais,  quelque  répréhensibles  qu'ils  soient,  j'en 
ai  un  autre  bien  plus  important  a  vous  dénoncer  : 
c'est  celui  qui  résulte  de  la  coalition  de  quelques  in- 
dividus, pour  accaparer  les  fermes  des  domaines  na-- 
tionaux.  Je  connais  un  district  dans  lequel  quatre 
particuliers  se  sont  déjà  fait  adjuger  quinze  ou  senee 
fermes  de  domaines  nationaux,  en  se  servant  réci- 
proquement de  caution ,  ce  qui  démontre  suffisam*- 
ment  leur  connivence. 

Le  moindre  inconvénient  qui  résulte  de  cet  ecoa- 
parement  est  la  ruine  des  malheureux  cultivateurs , 
parce  que,  les  nouveaux  baux  ne  s'adjugeant  que 


S( 


peu  de  temps  avant  rerpiratfon  dea  anciens ,  cent 
des  laboureurs  qui  ne  savent  où  se  retirer  sont  obli^ 
gës  de  souscrire  à  toutes  les  conditions  onéreuses 
([tie  la  cupidité  veut  leur  imposer,  et  le  mat  est  en- 
core pins  grand  pour  la  république  quand  les  labou- 
reurs aiment  mieux  abandonner  leurs  fermes  que  de 
sacrifier  les  épargnes  ou  fruit  de  leurs  pénible^  tra- 
vaux à  rambilîon  de  ces  adjudicataires  accapareurs; 
car,  dans  la  disette  actuelle  de  bras ,  la  plupart  des 
champs  restent  sans  culture  ou  sont  mat  cultivés, 
parce  que  les  adjudicataires,  qui  ne  sont  pas  des  la- 
boureors,80ntoDligésd'employerlespremiers  venus 
ou  d*avoir  recours  à  l'administration  de  district, 
souvent  d'intelligence  avec  eux ,  pour  faire  cultiver 
leurs  ebamps  par  vote  de  réquisition.  Vous  sentez , 
dloyens,  que  ce  n'est  pas  le  moyen  d'avoir  une  cul> 
lare  bien  soignée.  De  là  tous  les  maux  qui  en  sont 
la  suite  inévitable  :1a  stérilité  des  champs,  Tinsuf- 
fisance  des  récoltes  et  le  renchérissement  nécessaire 
des  denrées  de  premier  besoin,  et  le  malheur  du  peu-* 
pie. 

Mais  quand  tous  ces  maux  ne  résulteraient  pas  de 
Tabus  que  j(^  vous  dénonce;  aiiand  même  TagricnN 
ture  ne  souffrirait  pas  des  spéculations  qui  en  sont 
l'objet,  serait-il  prudent  de  laisser  entre  les  mains 
de  trois  ou  quatre  hommes  une  aussi  grande  quan- 
tité de  subsistances  que  celle  que  doivent  produire 
quinze  ou  seize  fermes;  et  cet  accaparement  de  fer- 
mes ne  serait-il  pas  un  accaparement  de  grains  anti- 
cipé? Ces  questions  ne  me  paraissent  pas  douteuses. 
Je  crois  qu'il  est  du  devoir  de  la  Convention  natio- 
nale de  prévenir  les  inconvénients  aue  je  viens  de 
vous  indiquer ,  et  d'intéresser  les  cultivateurs  eux- 
mêmes  aux  succès  de  l'agriculture,  en  ne  permet- 
tant pas  que  des  spéculateurs  avides  accaparent  les 
fermes  des  domaines  nationaux ,  pour  les  sousaffer- 
mer  ensuite  à  des  prix  exorbitants ,  au  détriment 
même  de  la  république. 

Pourcet  effet,  je  soumets  la  question  desavoir  s'il 
ne  conviendrait  pas  de  décréter  que  les  baux  à  ferme 
des  biens  nationaux  ne  pourront  être  adjugés  qu'à 
des  citoyens  qui  s'engageront  à  les  l'aire  valoir  par 
eux-mêmes,  et  qu'il  ne  pourra  être  adjugé  plus  d'un 
bail  à  la  même  personne.  On  m'objectera  peut-être 
que  de  pareilles  dispositions  pourraient  nuire  au 
prix  des  adjudications;  mais  je  répondrai  à  cela  qu'il 
importe  moins  à  la  république  d'avoir  quelques 
mille  francs  de  plus  que  de  favoriser  Tagricuiture , 
d'augmenter  par  conséquent  le  produit  des  récoltes, 
et  de  procurer  au  peuple  des  subsistances  abondan- 
tes et  au  plus  bas  prix  possible.  Il  n'est  pas  un  de 
vous  qui  ne  sache  que,  SI  le  renchérissement  des  den- 
rées est  dû  souvent  à  la  cupidité  des  détenteurs  de 
grains,  le  reproche  ne  peut  en  être  fait  qu'aux  fer- 
miers oui  ont  de  nombreuses  exploitations,  et  non 
aux  colons  partiels ,  que  vous  devez  toujours  favo- 
riser. 
^  Au  reste,  la  question  que  je  vous  propose  mérite 
d|être  examinée,  et  je  me  contenterai  aujourd'hui 
d>n  demander  le  renvoi  h  votre  comité  des  finances, 
bien  persuadé  qu'elle  lui  paraîtra  assez  importante 
pour  vous  en  faire  im  prompt  rapport.  Je  demande- 
.  roi  que  le  comité  examine  s'iJ  convient  aux  intérêts 
de  la  république  que  des  adjudicataires  de  baux  de 
[domaines  nationaux  puissent  se  cautionner  réci- 
proquement. Pour  moi,  je  pense  que  cette  récipro- 
cité de  cautionnement  en  neutralise  tout  l'avantage , 
cl  je  me  réserve  de  le  démontrer  lorsque  la  question 
sera  traitée  au  fond  dans  cette  assemblée.  En  atten- 
dant, je  vous  propose  le  décret  suivant  ; 

^  •  ArU  !*'•  La  Convention  nationale  décrète  que  lei  jar» 
dins  dépendant  des  ci<devaot  presbytères  à  Tépoqua  de. 
leur  lappnBsston  ne  seront  point  mis  en  vente  :  elle  an- 


nnlle  toutes  celles  qnl  pourraient  avoir  été  faites  iasqu*& 
ce  jour. 

•  II.  Les  ventes  des  cimetières  publics  de  chaque  com* 
munes ,  non  Interdits  dans  les  fomes  légales,  sont  éga* 
lement  suspendues  et  annulées, 

«  m.  Leeoniiié  des  finances  fera  incessamment  un  rip*' 
port  sur  la  motion  d'un  de  ses  membres  tendant  t 

al'Acequelesbauxè  ferme  des  domaines  nationaat 
ne  puissent  être  adjugés  qu'4  des  citoyens  qui  les  feront  : 
valoir  par  eux-mêmes  ; 

«  2"  A  ce  que  le  même  individu  ne  puisse  se  rendre  ad- 
judicataire de  deux  baux  pour  en  jouir  en  même  temps  i 

1 8*  A  ce  que  des  adjudicataires  de  baux  de  domaines 
appartenant  à  la  république  ne  puissent  se  cautionner  ré* 
ciproquemenl.  • 

Ce  projet  de  décret  est  renvoyé  au  comité  des  do- 
maines. 

EscHASséaiAUX ,  au  nom  du  comité  de  législa- 
tion :  Depuis  longtemps  la  question  sur  les  pères  et 
mères  d'émigrés  demeure  indécise  ;  il  faut  enfin  que 
la  Convention  nationale  considère  qu'elle  est  dans 
ce  moment ,  de  toutes  les  questions  importantes  sur 
lesquelles  elle  doit  prononcer,  une  de  celles  dont  la 
solution  est  la  pins  urgente.  Je  viens  donc  a  cet  ef- 
lel  appeler  ici  votre  attention  sur  la  loi  du  17  fri- 
maire, qui,  en  même  temps  qu'elle  prive  de  tous  les 
moyens  d'existence  les  pères  et  mères  d'émigrés» 
ainsi  mie  leurs  Himilles,  par  l'effet  du  séquestre  au« 
quel  elle  a  assujetti  leurs  propriétés,  donne  en  même 
temps  lieu  aux  abus  les  plus  préjudiciables ,  en  ce 
que  non-seulement  elle  paralyse  ces  propriétés  qull 
est  si  essentiel  d'utiliser  dans  les  circonstances  ac- 
tuelles ,  mais  les  expose  encore  à  des  dilapidations 
de  tout  genre.  Je  dois  le  dire  ici;  la  nécessite  d'accor- 
der des  secours  aux  pères  et  mères  d'émigrés  devient 
de  plus  en  plus  pressante  ;  mais  commele  mode  de 
répartition  de  ces  secours  tient  essentiellement  au 
di'veloppement  du  principe  que  vous  avez  établi  par 
la  loi  du  17  frimaire,  je  demande  oue,  pour  faire 
cesser  le  plus  tôt  possible  cet  état  cfe  choses,  vous 
ordonniez  à  vos  comités  de  législation ,  de  salut  pu- 
blic et  des  finances  réunis,  de  vous  présenter  sous 
trois  jours,  pour  tout  délai,  les  bases  qu'ils  jugeront 
les  plus  propres  à  remplir  les  vues  de  justice  natio-. 
naJe  et  d'intérêt  public  que  vous  devez  vous  propo- 
ser dans  l'exécution  de  cette  loi.  J'ajouterai  encore 
ici,  citoyens,  que,  par  un  abus  que  vous  ne  pouves 
tolérer,  on  met  dans  ce  moment  en  vente  les  pro- 
priétés des  pères  et  mères  d'émigrés  en  quelques  dé- 
partements. Je  pense  que  vous  jugerez  également  de- 
voir le  réprimer,  en  défendant  aux  corps  administra- 
tifs d'excéder  à  cet  égard  les  dispositions  de  la  loi. . 
Je  vous  propose  en  conséquence  le  décret  suivant  :    ] 

«  La  Convention  nationale  décrite  que  les  comilésde 
législaMon,  de  salut  public  et  des  fmances  réunis,  lui  pré- . 
senteront,  sous  trois  jours,  pour  tout  délai,  le  mode  d'exé^ 
cution  de  la  loi  du  17  frimaire  an  S,  qui  met  tes  propriétés  * 
des  pères  et  mères  de«  émigrés  sons  la  main  de  la  nation. 

4  La  Convention  nationale  décrMc  en  outre  qo*li  sera 
sursis  à  toute  vente  des  biens  dcsdiis  itères  et  mères  d*é* 
migres.  » 

Ce  projet  de  décret  est  adoptét 

Chênibr,  au  nom  du  comité  d'instruction  publi-  . 

aue  :  La  liberté  conquise  par  la  puissante  énergie 
u  peuple  ne  s'affermit  que  par  aes  lois  sages,  ne  . 
s'éternise  oue  par  les  mœurs.  Tous  les  préjugés  ten- 
dent à  la  uétruire,  et  les  plus  redoutables  sont  ceux 
qui,  fondés  sur  des  idées  mystiques  »  s'emparent  de 
limagination  sans  donner  aucune  prisée  l'intelli- 
gence humaine.  Ainsi,  sur  les  deux  continents,  les 
nations  se  sont  égorgées  pour  des  religions  rivales, 
mais  également  ennemies  des  nations  ;  et  le  sang  des 
hommes  a  coulé  pour  des  opinions  que  les  hommes 
ne  comprenaient  pas.  C'est  avec  une  raison  active  et . 
pratique,  c'est  avec  des  institutions  tutélaires  de  la 


2t 


liberté,  qu*il  fout  attaquer  des  institutions  tyrannw 
qups  et  anti-sociales.  La  philosophie  ne  commando 
pas  de  croire;  les  dogmes,  les  mystères,  les  miracles 
lui  sont  étrangers;  elle  suit  la  nature ,  et  n*a  pas  la 
folle  prétention  de  changer  ses  lois  immuables,  d'in- 
terrompre son  cours  éternel.  Aussitôt  que  Timpos- 
/fure  domine,  elle  étend  un  joug:  de  fer  sur  les  con- 
fdences;  mais  la  vérité  ne  doit  pas  avoir  ses  inqui- 
siteurs comme  Timposture.  Quand  le  fanatisme 
persécute,  il  avance  sa  perte  ;  quand  il  est  persécuté 
par  un  fanatisme  contraire,  il  se  prépare  des  triom- 
phes; et  dans  les  matières  religieuses,  dans  les  ma- 
tières politiques  même,  l'édifice  de  Terreur  n*a  ja- 
mais été  cimenté  que  pnr  le  san^  des  martyrs. 

C'esl  d'après  ces  réflexions  préliminaires,  qui  peut- 
être  auraient  dû  guider  constamment  les  législa- 
teurs, et  dont  l'examen  sérieux  importe  plus  que  ja- 
mais, dans  les  circonstances  actuelles ,  que  votre 
comité  d'instruction  publique  vient  aujourd'hui,  par 
mon  organe,  nrésenter  à  votre  méditation  quelques 
idées  sur  les  fêtes  décadaires. 

Le  projet  de  décret  que  je  dois  vous  proposer  en 
son  nom  pourra  sembler  insufGsant  et  aride  au  pre- 
mier aperçu;  mais  votre  comité  ayant  discuté  plu- 
sieurs rois,  et  à  différentes  époques,  la  question  qui 
nous  occupe,  a  pensé  qu'en  ce  point,  comme  en  tous 
les  autres,  il  ne  fallait  pas  confondre  les  mesures  lé- 
(pslatives  et  les  détails  qui  appartiennent  à  l'exécu- 
tion. 

Un  décret  n'est  pas  un  tableau  ;  une  loi  n*est  pas 
une  description. 

Quand  il  s'agit  de  fêtes  publiques,  quand  un  peu- 
ple entier  doit  se  réjouir,  il  est  absurde  de  lui  pres- 
crire tous  ses  mouvements  ainsi  que  l'on  commande 
l'exercice  à  des  soldats.  11  est  donc  nécessaire  d*unir, 
dans  l'organisation  des  fêtes  décadaires,  et  la  préci- 
sion législative,  et  la  simplicité  qui  convient  à  la  ma- 
jesté d  une  grande  nation. 

Il  est  néc(*ssaire  de  ne  pas  resserrer  la  pensée  pu- 
blinue  dans  le  cercle  d'un  règlement  minutieux,  et 
de  laisser  pour  l'exécution  des  félcs  toute  lu  latitude 
qu'exige  le  génie  du  peuple  français. 

Sans  doute  la  question  des  fêles  nationales  est 
d'une  grande  étendue,  et  tellement  délicate  que  dans 
ces  graves  circonstances  il  y  aurait  une  présomp- 
tion ridicule  à  prétendre  les  organiser  complètement 
en  quelques  heures  de  discussion.  Cette  organisa- 
tion complète  se  prépare  ;  les  essais  peu  satisfaisants 
qui  ont  été  présentés  jusqu'à  ce  jour  ont  dû  rendre 
lé  comité  extrêmement  circonspect  dans  l'adoption 
des  idées  premières  qui  doivent  le  conduire  à  un  ré- 
sultat général.  Il  faut  même  avoir  le  courage  de  le 
dire  :  les  entraves  ont  été  multipliées  sans  cesse.  La 
morale  populaire  désorganisée,  heurtée,  poussée  en 
tous  sens  par  les  tyrans  de  l'esprit  public  qui  se  sont 
rapidement  succédé  sur  le  théâtre  révointionnaire, 
soumise  tour  à  tour  aux  influences  individuelles, 
dominée  par  tous  les  fana tismes,  fatiguée  de  vexa- 
tions et  de  folies,  cherche  encore  un  point  d'appui 
solide.  Il  faut  que  l'esprit  sectaire  s'amortisse,  que  le 
besoin  d'idées  comprime  la  manie  du  partage,  que 
l'on  se  raccoulume  à  penser,  pour  que  l'opinion  va- 
gue et  tourmentée  puisse  enfin  se  rasseoir  sur  l'éter- 
nelle base  des  principes. 

En  attendant  cette  époque,  ({u'il  est  dans  votre 
vœu,  qu'il  est  dans  votre.pouvoir  d'accélérer  ;  en  at- 
tendant le  travail  important  que  le  comité  d'instruc- 
tion publique  médite  sur  les  fêtes  nationales  consi- 
dérées dans  tous  leurs  rapports  politiques,  dans  tous 
leors  effets  moraux,  dans  tous  leurs  moyens  d'exé- 
cution, relativement  aux  arts,  nous  avons  cru  devoir 
TOUS  offrir  sans  délai,  comme  une  mesure  de  gou- 
vcmemeott  quelques  articles  dont  l'exécution  suf- 


fira pour  préparer,  pour  déterminer  peut-être  les 
lois  a  venir. 

Dans  le  moment  où  les  préjugés  menacent  d'un 
débordement  général ,  il  faut  leur  opposer  de  nou- 
velles digues.  Quand  la  Convention  nationale  ren- 
drait un  décret  provisoire,  il  est  de  la  destinée  des 
f premiers  législateurs  d'une  république  de  travailler 
ongtemps  ainsi,  durant  le  cours  d'une  révolution, 
puisque  Vétat  révolutionnaire  est  lui-même  un  état 
provisoire. 

Les  lois  que  le  temps  respecte  sont  le  fruit  du 
temps;  mais,  quand  il  s'agit  de  sauver  le  navire 
lancé  en  pleine  mer  et  battu  par  la  tempête,  il  est  oi- 
seux et  funeste  de  s'occuper  gravement  des  moyens 
de  le  reconstruire  quand  il  aura  gagné  le  port. 

Sans  donc  embrasser  pour  le  moment  le  système 
entier  des  fêtes  nationales;  sans  même  avoir  égard  à 
la  dénomination  de  chaque  fête  décadaire,  dénomi- 
nation qui  nous  entraînerait  dans  une  discussion  il- 
limitée; sans  déterminer  d'une  manière  précise  les 
différentes  cérémonies,  les  différents  signes  qui  doi- 
vent distinguer  les  fêtes  entre  elles ,  immense  objet 
d'exécution  que  le  temps  seul  peut  perfectionner, 
nous  nous  bornerons  à  vous  présenter  un  petit  nom- 
bre de  mesures  législatives  qui  ne  préjugent  point 
des  questions  peut-être  encore  inaccessibles. 

Nous  y  joindrons  quelques  dispositions  morales 
qui  offriront  une  nouvelle  preuve  de  votre  respect 
pour  la  vieillesse  et  pour  le  caractère  sacré  des  pères 
de  famille. 

Nous  terminerons  par  vous  présenter  les  princi- 
paux moyens  d'exécution,  moyens  que  complétera 
la  sagesse  réfléchie  des  représentants,  que  réalisera 
le  génie  des  arts,  que  fécondera,  de  jour  en  jour,  la 
pensée  rapide  et  profonde  du  peuple. 

Des  instructions  morales,  écrites  dans  un  style 
élégant  et  correct,  sans  cette  enflure  qui  déguise  mal 
l'absence  d'idées,  sans  cette  familiarité  qui  est  tri- 
viale et  non  populaire;  des  hymnes  civiques ,  dont 
la  poésie  soit  simple  et  grande,  la  musique  mélo- 
dieuse et  pure;  des  danses  non  étudiées,  non  assu- 
jetties à  des  formes  théâtrales ,  mais  les  danses  de  la 
joie  et  de  la  liberté,  voilà  les  résultats  dont  l'exécu- 
tion facile  peut  avoir  lieu  sur-le-champ  dans  toutes 
les  communes.  Plusieurs  hymnes  sont  déjà  univer- 
sellement adoptés;  l'Institut  national  de  Musique, 
même  en  ce  moment  où  il  n'est  pas  définitivement 
organisé,  peut  communiquer  prompte  ment  à  la  ré- 

fiuDlique  entière  des  chants  dignes  de  la  liberté.  Des 
ittératcnrs  dont  le  talent  est  justement  célèbre 
s'occupent  d'un  cours  d'instructions  morales;  tous 
les  citoyens  qui  cultivent  avec  succès  la  philosophie, 
la  littérature  et  les  arts,  s'empresseront,  a  la  voix  des 
représentants,  de  payer  leur  tribut  à  la  patrie.  Le  co- 
mité se  réserve  de  vous  faire  un  rapport  particulier 
sur  les  récompenses  qu'il  convient  de  leur  décer- 
ner; mais  nous  osons  d'avance  vous  garantir,  au 
nom  de  tous,  que  le  prix  le  plus  doux  sera  pour  eux 
d'avoir  servi  la  chose  publique  et  secondé  les  vues 
philosophiques  de  la  Convention  nationale. 

Puissions-nous  toujours,  puissent  nos  successeurs 
se  bien  persuader  que  des  moyens  de  cette  nature 
sont  les  seuls  dont  la  réussite  ne  soit  pas  incertaine, 
dont  les  conséquences  ne  soient  pas  désastreuses 
quand  on  veut  s'opposer  au  torrent  de^  erreurs  su- 
perstitieuses. Les  préjugés  sont  des  maladies  chro- 
niques; la  patience  et  le  régime  guérissent  le  malade, 
les  remèdes  extrêmes  lui  donnent  la  mort.  La  guerre 
redoutable  aux  préjugés  est  une  guerre  philosophi- 
que :  les  préjugés  sont  des  opinions:  on  ne  tire  pas 
le  canon  contre  eux.  On  peut  tuer  les  hommes,  on 
ne  saurait  tuer  l'opinion.  Tout  pouvoir  fondé  sur  la 
violence  doit  périr  ;  la  raison  seule  est  étemelle.  L'o- 


as 


l 


piiiion  publique  peut  suivre  quelqncrois  une  direc- 
tion dangereuse  :  alors  ungouverneoient  habile  lève 
des  philosophes,  et  non  des  armées.  Quand  Topinion 
est  roulée  aux  pieds,  il  y  a  oppression  ;  et  quand  il 
T  a  oppression,  la  force  s  insurge  en  plein  jour, ;ia  fai- 
DJesse  assassine  pendant  la  nuit  ;  les  crimes  appel- 
lent les  crimes ,  et  ne  les  appellent  jamais  en  vain. 
Si  la  tyrannie  fait  la  Saint-Barthéiemv  et  la  guerre  des 
Camisards,  la  vengeance  fait  les  Vêpres  siciliennes 
et  les  massacres  d'Irlande  (1). 

Certes  des  législateurs  ne  doivent  jamais  perdre 
de  vue  que  le  sceptre  et  la  tiare  sont  unis  par  une 
chaîne  qui  pèse  sur  les  peuples.  Certes  les  rois  et  les 
prêtres  ont  toujours  été  de^iailiés  naturels,  et  la  Con* 
vention  nationale  a  besoin  de  toute  sa  fermeté  pour 
réprimer,  pour  anéantir  les  scélérats  qui  voudraient 
faire  de  Fautel  le  piédestal  de  leur  statue  ou  la  pre- 
mière marche  de  leur  trône;  mais,  si  Ton  ne  veut 
perdre  la  chose  publique,  il  faut  bien  se  garder  d'é- 
couter encore  les  declamateurs  énergumenes  •  qui , 
dans  leurs  deliauches  d'athéisme,  prenant  Tivresse 
pour  de  Tenthousiasme,  voudraient  égarer  la  raison 
du  peuple  dans  le  chaos  de  leurs  abstractions  dé- 
lirantes ,  et  qui,  trop  peu  politiques  pour  savoir 
attendre,  trop  peu  penseurs  pour  savoir  douter, 
dénonceraient  Fénelon  et  Las  Casas  comme  des  per- 
sécuteurs fiinaliques,J.-J.  Rousseau  comme  un  dévot. 
Voltaire  comme  un  homme  à  préjugés,  Bayle  et 
Montaigne,  ces  sceptiques  célèbres,  comme  des  mo- 
dérés en  philosophie. 

Vous  avez  fait  de  grandes  choses,  représentants  : 
il  vous  en  reste  encore  à  faire,  çt  la  republique  les 
attend  de  vous.  Le  jur^r  des  siècles  s'avance;  il  pè- 
sera vos  actions,  vos  lois ,  vos  intentions.  On  ne  rait 
jamais  un  pas  rétrograde  quand  on  marche  vers  les 
principes.  Malheur  au  gouvernement  insensé  qui 
veut  mettre  un  impôt  sur  les  consciences  !  Les  pas- 
sions font  de  mauvais  législateurs.  L'injustice  est 
toujours  impolitique.  Toute  la  politique,  toute  la  lé- 
gislation sont  renfermées  dans  ces  trois  choses  :  rai- 
son, justice,  humanité. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

«  Art  !•'•  Une  flHe  civique  sera  célébrée,  chaque  dé- 
cadi, dans  toutes  les  commanes  de  la  répal>liqae. 

•  IL  Les  communes  choisiront  elles-roéiDet  le  local  qui 
cooTieodra  le  mieux  à  la  réunion  des  citoyens  :  la  fête  sera 
céléiMréc  eo  pleio  lir,  quand  le  temps  le  permettra. 

•  IIL  Les  seiagéoaires  des  deux  sexes  uuront  une  place 
honorable  dans  le  lieu  où  les  citoyens  se  rassembleront 
pour  célébrer  la  fête  décadaire. 

•  IV.  La  lète  commencera  par  une  instruction  morale, 
mise  à  la  portée  de  tous  les  citoyens.  Cette  instruction  sera 
confiée  à  des  pères  de  famille. 

t  V.  Un  membre  du  conseil  général  de  la  commune, 
et,  dans  Paris,  chaque  président  de  section  lira,  immé- 
diatement après  riostroction ,  les  décrets  eoToyés  par  la 
Convention  nationale  dans  le  courant  de  la  décade. 

«  VI.  Des  chants  patriotiques  succéderont  k  la  lecture 
des  décrets. 

«  VIL  La  fête  sera  terminée  par  des  danses  et  par  d'au- 
tres eiercices  adaptés  aux  mœurs  républicaines. 

«  VIIL  Le  comité  dMnstruction  publique  est  autorisé  à 
employer  les  gens  de  lettres  et  les  artistes  les  plus  distin- 
gués par  leurs  talents  et  par  leur  cifisme ,  afin  d'accélérer 
la  composition  d*an  cours  d'insUructions  morales  et  d*un 
recueil  de  chants  palrioques,  conformément  aux  articles 
UletlV. 

(I)  L«  massacre  de  la  Stiot-Barthëlemy  commeoça  le 
U  août  1871. 

Le  soulèvement  des  Camisards  dans  les  Cëvenoes,  en  1703, 
Alt  apaisé  par  ViUars  en  1704. 

Les  Français  forent  massacrés  è  Palerme  et  dans  toute  la 
Sicile  le  30  mars  ttSt. 

Ba  Irlande,  les  catholiques  massacrèrent  près  de  cent 
nUle  Anglais  proicstanU»  le  13  octobre  1641. 


•  IX.  Le  comité  d'instruction  publique  fera  un  rapport 
à  la  Convention  nationale  sur  les  récompenses  à  décerner 
aux  gens  de  lettres  et  aux  artistes,  qui  seront  chargés  de 
composer  les  ouvrages  indiqués  dans  Tarticle  précédeoU 

•  X.  La  commission  eiécutive  de  finstructiou  publiquo 
?e' liera  h  la  prompte  exécution  du  présent  décreU  » 

On  demande  ri  m  pression  et  Pajoumement  du  pro- 
jet de  décret  présenté  par  Chénier. 

Albittb  :  Ce  projet  ne  présente  pas  tout  ce  qu*on 
pourrait  désirer;  mais  n'oublions  pas  que  le  fana- 
tisme et  rignorance  font  tous  leurs  eflforts  pour  ex- 
citer des  troubles.  Je  pense  que  ce  projet  doit  être 
adopté; faisons  bien  aujourd'hui,  nous  ferons  mieux 
demain,  et  déjouons  les  projets  de  nos  ennemis. 

Baillbul  :  Je  demande  l'ajournement  à  quatre 
iours  après  l'impression.  Je  ne  crois  pas  qtie  ce  dé- 
lai puisse  occasionner  les  maux  que  l'on  craint;  et 
il  permettra  de  méditer  assez  pour  trouver  peut-élro 
des  idées  plus  précises  et  perfectionner  le  projet. 

Lepiot  :  Je  demande  aussi  l'impression  et  l'ajour- 
nement du  projet  de  décret  :  mais  il  me  semble  qu*il 
est  un  article  qui  ne  doit  pas  être  ajourné;  c'est  ce- 
lui qui  autoriserait  le  comité  d'instruction  publique 
à  taire  composer  un  cours  d'instructions  morales  et 
un  recueil  de  chants  patriotiques.  Rappelez-vous,  ci- 
toyens, que,  lorsque  vous  décrétâtes  rétablissement 
des  écoles  normales  et  des  écoles  primaires,  le  co« 
mité  d'instruction  publique  promit  de  vous  présen- 
ter sous  peu  les  livres  à  l'usage  de  ces  écoles,  et  nous 
n'en  avons  point  entendu  parler  depuis  ;  ainsi  l'on 
promettoujoursau  peuple,  et  l'on  ne  tient  jamais  rien. 

Je  demande  donc  que  le  comité  fasse  composer  les 
hymnes  et  les  discours  propres  à  célébrer  les  P^tes 
décadaires.  Je  demande  aussi  qu'il  rende  compte  de 
la  composition  des  livres  oui  serviront  à  l'instruc- 
tion dans  les  écoles  normales  et  dans  les  écoles  pri- 
maires. 

Lequinio  :  Je  déclare  à  mon  collègue  que  déjà 
des  hommes  justement  célèbres  s'occupent  de  ce 
travail. 

La  Convention  décrète  l'impression,  etTajourne- 
ment  à  trois  jours  après  la  distribution. 

Gbéqoirb  :  Vous  avez  fondé  la  république  :  il  vous 
reste  une  grande  tâche  à  remplir,  celle  d'en  conso- 
lider l'existence;  nous  avons  juré  de  ne  poser  les 
armes  qu'en  dictant  à  nos  ennemis  les  conditions 
d'une  paix  glorieuse;  un  moyen  infaillible,  mais  in- 
dispensable, pour  obtenir  cette  paix  au  dehors,  c'est 
de  commencer  par  l'établir  au  dedans.  Pour  réta- 
blir dans  l'inténeur ,  nous  devons  imiter  le  naviga-l 
teur,  qui,  après  avoir  été  battu  de  la  tempête,  mo- 
difie ses  manœuvres  à  mesure  que  la  houle  diminue 
et  que  les  lames  s'affaissent  ;  car  nous  aussi  nous  sor^ 
tons  de  la  tempête;  nous  devons  donc  mettre  gra- 
duellement en  activité. les  lois  qui  assurent  au  peu- 
ple les  bienfaits  de  la  liberté ,  cicatriser  les  plaies 
dont  la  révolution  a  été  l'occasion  plutôt  que  la 
cause,  ranimer  toutes  les. affections  douces  et  pures 
qui  resserrent  le  lien  social.  Citoyens,  rapprocher  les 
cœurs,  établir  l'union  entre  tous  les  membres  de  la 
grande  famille,  c'est  gagner  une  bataille  :  soyons 
unis,  nous  serons  inébranlables,  et  le  despotisme  ne 
pourra  nous  entamer. 

J'ai  conçu  quelques  idées  que  je  crois  utiles  aa 
bonheur  de  ma  patrie  ;  les  taire,  ce  serait  trahir  ma 
mission.  Dans  leur  développement ,  je  discuterai 
comme  législateur  les  causes  et  les  remèdes  des 
troubles  religieux  qui  ont  agité,  qui  agitent  encore 
la  France.  Je  voudrais  détruire  tous  les  germes  de 
division  et  empêcher  de  nouveaux  déchirements.  Si, 
d'après  cette  annonce,  quelqu'un  voulait  étouffer 
ma  voix,  je  croirais  qu'il  redoute  la  vérité  ;  s'il  pré- 
tendait me  combattre  par  des  divagations,  des  dé- 


14 


damatioDS*  an  moyen  desquelles  oo  obtient  des  ap- 

Slaudissf meots  nombreux  et  faciles ,  il  m*aurait 
piioé  la  mesure  de  sa  raison  ;  s'il  exhalait  ces  in- 
lures  rebattues,  et  dont  à  Tavance  j*ai  dressé  la  liste, 
as  lui  en  céderais  tout  Tavantage  ;  je  lui  dirais  : 
Examine,  non  qui  ie  sois,  mais  ce  que  je  dis;  dis- 
cute les  faits  queyallègue,  les  principes  que  je  pose; 
mais  si  tu  refuses  de  ui'entendre,  tu  es  I  oppresseur 
de  ma  ^nsée  ;  et  si  tu  ne  m*entefids  jusqu  à  la  con- 
clusion, tu  ne  m*auras  pas  sufGsamment  compris. 
Hous  tendons  au  même  résultat,  Tafiiermisseuieut 
de  la  liberté.  Partons  du  même  point  ;  et  si,  daHS  la 
course,  nous  suivons  quelquefois  des  sentiers  diffé- 
rents, embrassons-nous  en  arrivant  au  même  iNit* 
(Applaudissements.) 

Le  dogme  de  l'égalité  politique  repousse  toutes 
4istioctioiis;  il  n*est  qu'une  caste,  celle  des  citoyens; 
fl  la  seule  chose  qu  ou  puisse  exiger  d'uu  membre 
du  corps  social,  c*est  qo  en  tout  et  partout  il  rrm- 

Kise  les  devoirs  d*un  bon  citoyen  ;  en  cela  consiste 
te  l'action  des  lois  à  son  émird.  Dans  ce  peu  de 
UioU  nous  traçons  lecerele  quelles  peuvent  parcou- 
rir et  la  limite  qu'elles  ne  peuvent  franchir.  Un  gou- 
yernement  qui  se  conduira  par  d'antres  principes  ne 
sera  jamais  que  le  régime  de  la  tyranuie. 

Il  serait  possible  ce|>endaot  que  les  abus  anti-so- 
ciaux qui ,  avant  rétablissement  de  la  liberté,  au- 
raient dégradé  quelques  professions*  eussent  laissé 
kur  levaiu  dans  l'âme  d'une  partie  des  individus 
voués  à  ces  professions. 

Cette  réflexion,  qui,  du  plus  au  moins,  s'applique 
è  l'homme  de  loi ,  de  ûnance ,  et  d'église  ,  nécessite 
sans  doute  un  examen  plus  sévrre  pour  s'assurer  de 
son  patriotisme;  mais, en  dernière  analyse,  il  faut 
toujours  en  revenir  à  cette  maxime  :  «Quel  que  soit 
un  individu,  frappe- le  s'il  est  mauvais»  protége-le 
s'il  est  bon.  •  Le  principe  reste  dans  toute  sa  force,  et 
ta  liriucipes  seuls  peuvent  nous  sauver. 

Ainsi,  crier  sans  cesse  contre  des  castes  qui  n'exis- 
tent plus,  c'est  les  recréer  par  le  Aiit.  (Applaudisse- 
ments.) [Réclamer  sans  cesfie  contre  des  nommes  dont 
par  là  même  on  ulcère  lecceur,  au  lieu  de  les  ratta- 
cher il  la  république  par  l'égalité  des  droits  et  le 
bienlait  drs  lois,  c'est  une  erreur  politique.  Eave- 
lop|)er  dans  une  qualification  commune  une  classe 
•ntière  d'individus  dont  les  uns  onlété  des  scélérats, 
les  autres  des  citoyens  eatimable8,c'est  une  injpstice. 

Persécuter  onelqu'un  uniquement  parce  qu'il  est 
flnancier,  ci-aevant  noble,  avocat,  procureur  ou 
prêtre,  cette  conduite  est  digne  d'un  roi. 

Mais  les  opinions  religieuses!...  Une  opinion  qnel- 
aooque  est  le  résultat  des  opérations  de  l'esprit;  ces 
opérations  ne  peuvent  être  modifiées  que  par  le  rai- 
sonnement. Une  opinion  cède  è  l'éclat  de  la  lumière, 
jamais  à  la  violence  ;  vouloir  commander  k  la  pensée, 
o'fist  une  entreprise  chimérique ,  car  elle  exchk  les 
fprces  humaines  ;  c'est  une  entreprise  tyra unique, 
car  nul  n'a  le  droit  d'assigner  les  bornes  de  maratson. 

Dès  qu'il  m'est  permis  d'avoir  des  pensées;  je  puis 
ks  émettre,  je  puis  en  faire  la  règle  de  ma  conduite, 
tl  le  culte,  qui  en  est  une  suite,  est  une  faculté  de 
droit  naturel  et  parallèle  à  la  liberté  de  la  presse. 
Lui  porter  atteinte,  ce  serait  anéantir  la  base  du  con- 
trat social. 

te  gouvernement  ne  peut  adopter ,  encore  moina 
aalarier  aucun  culte,  quoiqu'il  reeonnaise  dans  cha- 
que citoyen  le  droit  d'avoir  le  sien.  Le  gouverne- 
ment ne  peut  donc  sans  injustice  refuser  protection, 
ni  accorder  prélérenee  à  aucun.  Dès  lors  il  ne  doit 
se  permettre  ni  discours  ni  acte  qui ,  en  outrageant 
ne  qu'nne  partie  de  la  nation  révère,  troublerait 
l'harmonie  on  romprait  l'égalité  politique.  Il  doit  les 
lawr  tons  dans  la  juste  halaoca ,  el  empêcher  qu'on 


ne  les  trouble  et  qu'ils  ne  troublent.  (Applaudisse* 
meots.) 

Il  faudrait  cependant  proscrire  une  religion  qui 
n'admettraitpas  la  souveraineté  nationale, la  liberté, 
Fégalité.  la  fraternité  dans  toute  leur  étendue  ;  mais 
dès  qu'il  conste  qu'un  culte  ne  les  blesse  pas,  et 
que  tous  ceux  qui  en  sont  sectateurs  Jurent  'fidélité 
aux  dogmes  politiques,  qu'un  individn  soit  baptisé 
ou  circoncis»  qu'il  crie  Allah  ou  Jéhova,  tout  cela 
est  hors  du  domaine  de  la  politique.  (Applaudisse- 
ments.) 

Si  même  il  était  un  homme  assex  insensé  pour  vou^ 
loir,  comme  dans  l'ancienne  Egypte ,  adorer  un  lé- 
gume et  lui  ériger  un  autel,  on  n'a  pas  le  droit  d'y 
mettre  obstacle,  car  ce  qui  n'est  pas  défendu  par  la 
loi  est  permis  ;  et  certes  je  me  garderai  bien  de  trou- 
bler un  Juif  dans  sa  synagogue,  un  musulman  dans 
sa  mosquée ,  un  Indou  dans  sa' pagode;  ce  serait 
violer  un  des  plus  beaux  de  leurs  droits,  celui  d'ho- 
norer l'Etre  suprême  i  leur  manière.  Si  je  me  trompe, 
dirait  alors  ce  citoyen,  tu  dois  me  plamdre  et  m'ai- 
mer;  instruis-moi,  mais  ne  me  persécute  pas;  qu'im* 
porte  d'ailleurs  ma  croyance,  pourvu  que,  confon- 
dant mon  intérêt  dans  l'intérêt  national,  par  mes 
efiorts réunis  à  ceux  de  mes  frères,  la  liberté  pros- 
père etla  république  triomphe?  (Applaudissements.) 

Si  ces  pnncipes,  invoqués  par  tous  les  philoso» 
phes  et  proclamés  par  l'immortel  Fénelon ,  avaient 
été  suivis  par  W  tyran  Louis  XIV,  on  n'eût  pas  vu 
des  milliers  de  protestants  industrieux,  contramts  de 
s'expatrier,  porter  ailleurs  notre  commerce  et  nos 
arts,  et  les  annales  de  la  France  ne  seraient  pas  souil- 
lées par  les  dragonnades  (1)  et  les  massacres  des 
Cévennes. 

C'est  par  une  conduite  opposée  que  la  Hollande 
s'éleva  au  plus  haut  degré  de  richesse.  Ce  sont  là  les 
maximes  que  Baltimore  et  les  catholiques  qui  l'aC" 
compagnèrent  dans  ie  Naryland  s'empresMrrnt  de 
consacrer  solennellement;  c'est  sur  leur  adoption 
que  l'Amérique  libre  a  fondé  sa  puissance  et  son 
oonheur,  car  cette  république  se  composa  surtoutde 
ceux  qui  fuyaient  les  persi^cutions  religieuses  de 
l'Europe;  et  c'est,  dit  un  de  ses  écrivaias,  avec  les 
débris  eusauj^lantés  de  l'ancien  monde  qu^elle  a 
élevé  un  édibce  nouveau. 

Appelons  l'expérience  du  passé  i  la  direction  du 
présent;  or  l'expérience  de  tous  les  siècles,  de  tous 
les  peuples,  prouve  qu'en  froissant  les  idées  reli- 
irieusef  on  leur  donne  plus  de  ressort;  ait,  suivant 
"expression  du  philosophe  Forster,  on  accroît  leur 
élasticité.  L^  persuasion  ou  Tamour-propre  rendent 

f»lus  chère  une  croyance  qui  a  coûté  des  tourments  ; 
a  persécution,  en  isolant  Icshommes  et  les  opinions, 
les  entoure  d'une  vénération  favorable  au  prosély- 
tisme, et  multiplie  le  nombre  de  ceux  qui  veulent  se 
dévouer  au  martyre.  (la  iuile  à  dmain.) 

Kb  B,  ^  Daosla  téaBce  du  S«  iohamiot,  au  nom  des 
comités  d*agricaflure  et  de  commerce,  de  fioaivees,  de  fa« 
lui  publie  et  de  sûreté  générale,  a  présenté  des  vues  sur 
le  commerce,  lei  domeinei  oaliooaui  et  les  vttfnau,  et 
proposé  un  projet  de  décret  portant  que  les  négociants  et 
conmercunls  pourront  s'approTiâionner  par  le  conanieree 
lii»res  quMI  n'y  aura  plus  de  réquisiliom  qaepour  les  ap« 
proTîsionneaients  des  armées;  que  toutes  Ifi  narehaodl» 
«et  qui  BC  leur  sont  pas  iBdisJMQsables  et  qui  se  troureiiC 
dans  les  magasins  de  la  république  seront  sans  délai  mia 
en  venie  ;  que  les  fouroilures  pour  les  armées  seront  don- 
nées par  adjudication  au  rabab. 

Ce  rapport  et  ce  projet  opt  été  vlfemeot  applaudis;  la 

Convention  en  a  ordonné  Pimpres^o  et  ra^araenieot  à 

trois  jours  apiis  la  distribuUoni  qui  se  liera  aprfes^demaio* 

(t)  Les  ffuerres  fiites  aux  protettauu  par  fuila  de  la  rêva* 

tatîMdardditdar 


GAZETTE  NATIONALE  .»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

No  94.  Quartidi  4  Nivôse,  Van  Z^.  {Mercredi  24  Décembre  1794,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

RÉPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Ptfrîj,  U  Z  nivôse.  -  Voici  Tétat,  nouvellement  envoyé 
de  Brest,  des  vaisseaux  qui  se  trouvent  dans  ce  port. 

Cet  état  ne  comprend  point  les  vaisseaux  qui  sont  en 
commission  ou  en  radoub,  mais  seulement  ceux  qui  sont 
dans  la  rade  ou  en  mer.  L^escadre  est  composée  de  neuf 
divisions,  et  de  deux  divisions  légères» 

Vaisseaux, '^Le  Majestueux,  la  Montagne,  le  Terrible, 
de  118  canons  cbacun  ;  le  Républicain,  le  Révolutionnaire, 
de  HO;  le  Scipion,leNeur-Thermidor,  TlndompUbledeSO; 
le  Montagnard,  le Trente-et-Un  Mai,  le  Jcmmapes,  TA- 
quifon,  le  Patriote,  TEntreprcnant,  le  Gasparin,  le  Nep- 
tune, la  Révolution,  le  Tourville,  leMarat,  le  Superbe, 
TAlexandre,  le  Redoutable,  le  Nestor,  la  Convention,  le 
Lcpdietier,  le  Trajan,  leTyrannicide,  TEcole,  le  Jean- 
Bart,  PAudaeieux,  le  Tigre,  le  Zélé,  le  Mutin,  le  Témé- 
raire, les  Droits  de  THomme,  tous  de  74*  —  Au  total  95 
yaisseiaz  de  ligne* 

Frepotej.— La  Surveillante,  la  Tribune,  la  Néréide, 
rinsnrgente,  la  Railleuse,  la  Bayonnaise,  la  Tamise,  la 
Précieuse,  la  Charente,  le  Républicain  Français,  laFra- 
teraité,  la  Vertu ,  TEmbuscade.  —  Au  total ,  iS. 

Corvetttêf  bricks  oa  culferr.— La  Bergère,  Tlmpatient, 
la  Montagne,  le  Berceau,  le  Papillon,  le  Bonnet-Rouge, 
le  Las-Casas»  TEspion,  TAtalante,  les  Trols-Couleurs,  le 
Tigre.— Au  toUUl. 

£o  tout  y  cinquante-neuf  voiles* 


TBIBUNAL  CBIMINEL  BÉVOLUTIONNAIBE. 

Suite  de  la  procédure  du  comité  révolutionnaire  de 
Nantes. 

Leprétideni,  à  Carrier  :  Que  répondrez- vous  à  la 
dëpositioo  de  Crepin ,  qui  déclare  au  tribunal  avoir 
été  chargé  par  Troncjolly  de  vous  prévenir  que, 
parmi  ceux  que  vous  vouliez  faire  guillotiner,  il  y 
avait  des  enfants?  * 

Carrier  :  Le  fait  est  faux ,  et  j'atteste  que  Tronc- 
jolly est  venu  me  demander  ma  signature  pour  les 
raire  juger.  Je  déclare  en  outre  que  je  n'ai  jamais 
ordonné,  en  connaissance  de  cause,  de  faire  nisillcr 
sans  jugement. 

Le  président  :  Je  vous  observe  qu'il  est  établi  au 
procès  que  les  rebelles  dont  il  s'aeit,  étaient  exécu- 
tés deux  jours  avant  la  descente  de  Troncjolly  dans 
votre  domicile? 

Carrier:  Pourquoi  le  tribunal  par  moi  convoqué 
n*a-t-il  pas  jugé? 

Interpelle  sur  sa  conduite  à  l'égard  du  représen- 
tant  du  peuple  Tréhouart,  Carrier  donne  les  mêmes 
explications  qu'il  a  déjà  données  dans  sa  défense  à 
la  Convention. 

•  J'avouerai  cependant,ajoute-t-il,quej'aieutort 
de  sévir  contre  Tréhouart  auparavant  d'en  référer  à 
la  Convention,  parce  que  je  devais  respecter,  dans 
la  personne  de  ce  député,  la  représentation  natio- 
nale, seule  capable  de  prononcer  sur  les  bons  ou 
mauvais  services  de  Tun  de  ses  membres. 

Marc-Ânloin€  Julien^  âgé  de  dix-neuf  ans,  dé- 
tenu à  U  maison  de  santé  de  Notre-Dame-des- 
Champs,  ci-devant  commissaire  du  comité  de  salut 
public ,  et  membre  de  la  commission  d'instruc- 
tion, dépose  qu'étant  en  mission  dans  le  Morbihan, 
on  lui  dit  que  Carrier  avait  une  armée  révolution- 
Aairequi  mettait  tout  à  feu  et  a  sang,  qui  poussait 
la  cruauté  jusqu^à  faire  creuser  aux  victimes  qu'elle 
voulait  immoler  leurs  propres  tombeaux;  que  celte 
armée,  marchant  sous  le  titre  faux,  mais  imposant, 

Z*  Série, -^  Tome  X 


de  révolutionnaire,  s'est  niômc  permis  de  faire  en- 
terrer des  hommes  tout  vifs.  «Je  me  rendis  à  Vannes, 
pour  vérifier  ces  faits ,  et  prendre  connaissance  de 
la  conduite  de  Lebatteux  et  Avril ,  agents  de  Car- 
rier. Ces  agents  me  furent  dénonces  de  toutes 
parts. 

•  J'en  écrivis  au  comité  de  salut  public,  avec  in- 
vitation pressante  de  rappeler  les  bataillons  aux  or- 
dres de  Lebatteux  et  Avril,  parce  qu'il  se  permet- 
taient plus  d'atrocités  et  de  brigandages  que  les 
brigands  eux-mêmes.  Lebatteux  fut  arrêté;  et  ce 
fut  alors  que  Carrier  s'oublia  au  point  de  déclarer  cet 
agent  inviolable,  et  de  noter  d'infamie  les  auteurs 
de  l'arrestation  de  Lebatteux. 

•  Révolté  de  toutes  les  horreurs  ordonnées  par 
Carrier,  j'eus  le  courage  de  manifester  cette  indi- 
gnation dans  la  Société  populaire  ;  Carrier  avait 
des  espions  partout;  il  ne  tarde  pas  à  être  instruit 
de  mon  audace;  il  me  fit  arrêter  la  nuit  par  le  gé- 
néral Vimeux.  Je  suis  consigné  dans  une  voiture, 
et,  après  une  heure  de  marche,  je  suis  déposé  chez 
Carrier. 

«  Comme  j'avais  souvent  entendu  parler  des  accès 
de  fureur  de  ce  tyran  et  de  son  arme  redoutable^ 
dont  il  menaçait  tous  les  citoyens,  j'eus  soin  de  me 
placer  à  l'un  des  coins  de  la  chambre,  à  une  très- 
grande  distance  de  Carrier,  qui  me  dit  avec  empor- 
tement :  «C'est  donc  toi,  sacré  gueux,  qui  te  per- 

•  mets  de  me  dénoncer  au  comité  de  salut  public; 

•  c'est  donc  toi  qui  oses  blâmer  mes  travaux  ?  Sais- 
«  tu  qu'en  un  instant  je  puis  trancher  le  61  de  tes 
«jours?  Et  comme  il  importe  quelquefois  au  bien 
■  général  de  se  défaire  de  certaines  gens  en  secret, 
«je  ne  me  donnerai  pas  la  peine  de  t'envoyer  à  la 

•  guillotine,  je  serai  moi-même  ton  bourreau  et 

•  celui  de  tous  Us  scélérats  qui  peuvent  te  rçssem- 
«  bler.  •  Je  fais  tous  mes  efforts  pour  être  entendu 
de  Carrier,  pour  lui  donner  des  explications  sur  les 
reproches  qu'il  m'adressait;  enfin,  convaincu  du  re- 
fus du  représentant  à  admettre  ma  justification,  j'eus 
assez  d'énergie  pour  terminer  mes  observations  ea 
ces  termes  :  Tu  es  le  maître  de  mon  sort;  mais  sou- 
viens-toi que,  si  tu  me  tais  périr  aujourd'hui ,  dans 
huit  jours  tu  seras  guillotiné  ;  j'ai  des  patriotes  qui 
vengeront  ma  mort,  et  qui  sauront  dévoiler  les 
grands  coupables. 

•  Carrier  se  calme,  prend  un  ton  mielleux,  en- 
tame une  conversation  sur  des  choses  indifférentes, 
et  semble  vouloir  capter  ma  bienveillance.  Il  s'a- 
perçoit que  je  ne  lui  réponds  qu'à  demi-mot;  il  ap- 
pelle le  général  Vimeux,  lui  parle  bas,  et  lui  dit  de 
me  reconduire  où  il  m'avait  pris. 

•  Je  crus  que  c'était  un  ordre  de  se  défaire  de  moi 
comme  de  tant  d'autres;  pour  cette  fois  seule- 
ment le  tjran  avait  respecte  l'innocence,  ou  plu- 
tôt il  avait  redouté  les  suites  d'une  nouvelle  injus- 
tice; je  fus  donc  mis  en  liberté.  Le  lendemain  je  me 
rends  à  la  Société  populaire  ;  je  dénonce  l'acte  ar- 
bitraire que  l'on  a  voulu  exercer  envers  moi;  je  re- 
trace toutes  les  cruautés,  toutes  les  injustices  de 
Carrier;  je  détermine  l'assemblée  à  faire  une  Adresse 
tendant  a  solliciter  le  rappel  de  Carrier.  L'Adresse 
est  rédigée,  présentée  à  la  Convention;  elle  a  tout 
le  succès  qu'on  en  pouvait  désirer;  la  Convention, 
toujours  juste,  toujours  sage  dans  ses  décisions, 
prononce  le  rappel  de  Carrier. 

«J'ai  le  malneurd'êtreregardécommeun  homme 
de  sang;  je  suis  accusé  de  correspondance  avec  Ro- 
bespierre; mais  je  déÂre  être  traduit  au  tribunal  ré- 


se 


Tolutionnaire,  pour  prouver  mon  innocence  et  re- 
couvrer la  liberté  et  Vestime  des  patriotes.  • 

Le  président,  à  Carrier:  Que  rëpondrez-vous  à 
cette  déposition  ? 

Carrier:  Je  n'ai  jamais  connu  les  atrocités  repro- 
chées  à  Lebatteux ,  et  il  m'a  été  désigné  comme  un 
vrai  patriote;  on  me  l'a  réclamé  comme  tel  :  voilà 
les  motifs  qui  m'ont  fait  ordonner  sa  mise  en  liberté. 
Quant  au  témoin  Julien ,  il  m'avait  été  dénoncé 
comme  étant  Jullien  (de  Toulouse).  Aussitôt  queje  le 
vis,  je  reconnus  Terreur,  et  j'ordonnai  sa  mise  en 
liberté.  A  l'égard  de  l'armée  prétendue  révolu lion- 
Qaire,  répandue  dans  le  Morbihan,  je  déclare  qu'il 
ii*y  en  a  jamais  eu;  les  volontaires  dont  on  se  plaint 
étaient  du  bataillon  de  la  colonne  de  Mayence,  etje 
ne  suis  point  garant  de  leurs  faits. 

Dauhianyf  détenu  au  Luxembourg,  et  ci-devant 
adjoint  du  comité  de  la  guerre,  dépose  qu'étant  à 
dîner  chez  un  traiteur ,  dîner  auquel  se  trouvait 
Carrier,  il  entendit  Carrier  parler  des  noyades  ,  des 
ftisillades,  des  bateaux  à  coulisses,  et  que  Carrier 
ajoutait  :  «  11  fallait  voir  comme  j'expédiais  les  bri* 
gands  dans  la  Vendée  !  > 

Carrier  atteste  qu'il  n'a  pas  tenu  les  propos  qu'on 
loi  impute. 

Dans  la  séance  du  17  frimaire,  on  procède  à  Tau- 
dîtion  du  général  Turreau. 

Turreau  :  Je  n'ai  rien  eu  de  commun  avec  Car- 
rier, aucune  correspondance  avec  lui;  pendant  sa 
mission  à  Nantes,  je  regardais  Carrier  comme  chargé 
de  révolutionner,  comme  quelqu'un  auquel  les  dé- 
tails de  la  guerre  étaient  absolument  étrangers. 

Le  préêidenl,  au  témoin  :  Avez-vous  reçu  des 
èfdres  du  général  Haxo  ? 

Lelémotn  :  Jamais  Haxo  ne  m'a  communiqué  des 
ordres  de  Carrier.  Lorsque  les  douze  colonnes  s'é- 
branlèrent dans  la  Vendée,  Carrier  était  encore  à 
Mantes. 

Leprésideni^  à  Carrier  :  Vous  ne  pouvez  nier  que 
TOUS  avez  demandé  à  Turreau  communication  de 
ses  plans  de  campagne,  et  qu'il  y  a  eu  entre  vous  et 
éecénéral  une  contestation  à  ce  sujet? 
'    Carrier  :  Je  ne  me  rappelle  pas  ce  fait. 

Turreau  :  Je  n'ai  aucun  souvenir  de  cette  con- 
testation ,  et  je  n'ai  rien  communiqué  à  l'accusé 
Carrier. 

JL'accui^O'5uiItoan:Ayanteuoccasiond'allerchez 
Carrier,  j'étais  prêt  à  entrer  dans  sa  chambre,  lors- 
.  queje  fus  arrêté  par  le  bruit  extraordinaire  qui  re- 
tentissait âmes  oreilles;  alors  je  donnai  mon  atten- 
tion à  ce  qui  se  passait,  et  j'entendis  une  explication 
des  plus  vives  entre  Turreau  et  Carrier;  je  rcmar- 

auai  qu'il  était  question  d'un  plan  de  campagne 
ont  Carrier  voulait  avoir  connaissance ,  et  que 
Turreau  ne  voulait  pas  communiquer. 

Turreau:  Je  n'ai  aucune  idée  de  cette  conversa- 
tion. 

Le  président,  au  témoin  :  N*a-t-on  pas  fait  massa- 
crer sans  pitié  des  femmes  et  des  enfants,  sous  les 
spécieux  prétextes  que  la  Convention  l'ordonnait 
ainsi? 

Le  témoin  :  Il  est  possible  qu'il  y  ait  eu  des  fem- 
mes fusillées ,  parce  qu'elles  avaient  été  prises  les 
armes  à  la  main  ;  mais  ce  n'a  jamais  été  par  mes 
ordres;  je  connaissais  les  décrets  de  la  Convention 

Sii  admettaient  une  exception  en  faveur  des  femmes 
des  enfants,  et  j'étais  trop  jaloux  de  m'y  con^ 
former. 

Le  président,  à  Turreau  :  N'avez- vous  pas  or- 
donne de  brûler  le  port  la  Clet ,  et  n'était-ce  pas  un 
port  important  à  conserver? 

JDe  témoin  :  Ce  n'est  pas  précisément  moi  oui  ai 
donné  Tordre  de  brûler  ce  port  ;  cet  ordre  m  avait 


déjà  été  notifié,  et  je  n*al  fait  que  iii*y  conformer; 
dans  le  principe,  tout  l'avantage  de  ce  poste  m*était 
inconnu,  et,  lorsque  j*en ai ëteinstruit,  j'ai  ordonné 
de  le  converver. 

Mais  ce  que  nous  avions  peine  i  concevoir ,  c'est 
que  les  brigands  connaissaient  tous  nos  mouve- 
ments, c'est  que  toutes  nos  marches  étaient  eonnues 
des  rebelles  fort  longtemps  avant  d'être  exécutées; 
on  a  tout  fait  pour  remonter  à  la  source  de  ces  ira*- 
hisons,  mais  les  recherches  n'ont  procuré  aucun 
fruit,  aucune  découverte. 

YHUmain,  négociant  à  Nantes  ;  J'ai  vu  à  la  So- 
ciété populaire  les  convulsions  révolutionnaires  de 
Carrier.  •  Vous,  mes  braves  bougres,  disait-il,  vous, 
mes  bons  sans-culottes,  qui  êtes  dans  l'indigence 
tandis  que  d'autres  sont  dans  Tabondance,  ne  saves* 
vous  pas  que  tout  ce  que  possèdent  les  gros  nég;o- 
ciants  vous  appartient?  11  est  temps  aue  vous  jouis- 
siez à  votre  tour:  faites-moi  des  dénonciations;  le 
témoignage  de  deux  bons  sans-culottes  me  suffira 
pour  faire  tomber  les  têtes  des  gros  négociants.  •  Il 
a  ruiné  entièrement  le  commerce  de  Nantes;  les  ca- 
pitaines de  navire  venaient,  suivant  l'usage,  à  Nantes 
pour  les  assurances;  ils  voyaient  les  magasins  fermés; 
ils  apprenaient  que  les  négociants  étaient  incar- 
cérés, et  prenaient  bien  vite  la  fuite,  dans  la  crainte 
du  même  sort.  De  là  sont  venues  la  diiette  et  la 
misère. 

•  Dans  ces  moments  de  la  détresse  publique  Carrier 
ne  s'en  livrait  pas  moins  à  ses  débauches  ordinaires; 
il  faisait  des  orgies  à  l'hôtel  d'Henri  iV,  avec  ses 
amis,  et  avec  des  filles  qu*il  avait  mises  en  réquisi- 
tion. 

Dans  un  diner  fait  aux  Champs-Elysées»  et  où  se 
trouvaient  Carrier,  Monneron,  Rosier,  Prévôt,  le 
petit  Robin,  et  Villers,  représentant  de  la  Loire-In- 
férieure, Carrier  fît  des  aveux  épouvantables  sur  les 
faits  de  Fouquet  et  Lambertye;  et,  parlant  des  prê- 
tres et  de  la  chasse  qu'il  leur  donnait  dans  son  pays, 
il  rappelait  •  le  plaisir  qu'il  goûtait  en  voyant  les 

•  gnmacesque  ces  b...o"là  faisaient  en  mourant,  t 
Passant  ensuite  à  la  population  de  la  France, 

Carrier  dit  que  le  gouvernement  avait  reconnu  l'im- 
|)ossibilité  d'alimenter  toute  cette  population;  qu'il 
était  décidé  qu'on  en  diminuerait  la  masse,  et  qu'on 
la  réduirait  à  sept  cents  habitants  par  lieue  carrée, 
au  lieu  de  mille  qu'on  y  comptait. 

Carrier  ajouta  que  la  population  des  villes  était 
trop  considérable  ;  que  les  riches  n*Bimeraient  ja- 
mais les  sans-culottes  ;  qu'il  fallait  niveler  la  popu- 
lation, sans  quoi  l'ordre  et  la  tranquillité  ne  s  éta- 
bliraient pas;  sans  quoi  il  ne  pouvait  exister  de 
république.  Il  termina  ses  calculs  en  disant  que  la 
population  de  Lyon  serait  réduite  a  ving*cinq  mille 
habitants.  Je  me  rappelai  ce  qui  s'était  passé;  je 
m*aperçus  que  la  guerre  de  la  Vendée  entrait  dans  le 
projet  de  cette  réduction. 

Monneron,  présent,  confirme  les  détails  donnés 
par  Villemain. 

Carrier  :  Les  témoins  se  font  un  jeu  de  me  diffi- 
mer;  ils  s'encouragent  réciproquement  à  me  calom- 
nier. Il  est  faux  que  j'aie  jamais  prêché  le  pillage  ni 
la  mort  des  négociants;  j'ai  seulement  dit  que  les 
gras  négociants  avaient  fomenté  la  guerre  de  la 
Vendée  :  on  m'accuse  de  m'étre  vantô  d'avoir  donné 
la  chasse  aux  prêtres  dans  mon  pays;  la  ealomnie  est 
bien  évidente ,  puisqu'il  n'y  a  pas  de  prêtres  dans 
mon  département,  puisqu'auoun  n'a  été  rebelle  à  la 
loi,  ni  sacrifié  dans  mon  département;  je  n'ai  parié 
que  de  l'agiotage  scandaleux;  enfin  je  n'ai  soupe 
qu'une  seule  fois  à  l'hôtel  d'Henri  IV  avec  le  gène* 
rai  Vimeux  et  quatre  à  cinq  autres  personneti  nuria 
il  p*y  a  pas  eu  dç  filles. 


Vf 


tifréiiâent,  à  Carrier  :  N'avcz-vous  pas  dit  que 
la  légion  Germanique  était  passée  en  entier  chez  les 
brigands? 

Carrier:  U  n*eQ  était  pas  resté  plus  de  cinq  à 
six. 

Le  prMéêni  :  11  est  bon  de  fixer  Topinion  des 
jurés  sur  U  véracité  de  co  fait,  et,  pour  éclairer  leur 
religion,  je  vais  donner  lecture  d'une  lettre  de  Ma- 
gin,  chef  d>scadon  au  !«'  régiment  de  hussards. 
Voici  comme  elle  est  conçue  : 

«  Carrier  a  déclaré,  dans  son  interrogatoire  du  11 
de  ce  mois,  aue  la  légion  Germanique  était  passée  en 
entier  chez  les  brigands  de  la  Vendée;  je  lui  donne 
un  démenti  formel,  et  je  l'appuie  de  Tarrêté  des  re- 
présentants du  peuple  formant  la  commission  cen- 
trale près  Tarmee  de  TOuest,  en  date  du  22  juin  1703, 
qui  ordonne  de  former  de  cette  légion  deux  corps 
qui  ont  la  dénomination  du  11^  régiment  de  hus- 
sards et  226  d*infanterie  légère.  Ces  deux  régiments 
•A*ont  cessé,  depuis  leur  forma tion,d*élre  aux  avant- 
.postes  de  Formée,  et  se  sont  signalés  chaque  jour  par 
des  victoires.» 

Carrier:  H  ne  faut  pas  prendre  à  la  lettre  ce  que 
j*ai  dit.  (La  suiU  ineessammenl.) 


CONVENTION  NATIONALE. 

Préêidenu  <U  RettfbelU 

Opinion  iur  lei  causée  de  Véiat  présent  du  com- 
merce et  de  l'industrie  y  et  les  moyens  de  les  ré- 
tablir sur  Us  véritables  bases  de  P économie  po- 
litique^ prononcée  par  Eschassériaiux  ainé^  Mns 
Vunedês  précédentes  séances. 

Citoyens,  une  politique  prévoyante,  votre  posldoa  ae- 
taelle,  celle  où  Vous  ailes  vous  trouver  peut-être,  le  vœu 
et  le  besoin  de  la  nation,  votre  propre  sentiment,  vous 
commandent  de  plus  en  plus  Impérieusement  de  fous  oc- 
cuper sans  relftefaie  de  la  prospérité  nationale  :  la  tribune 
de  la  Gon? eotlon  vons  appelle  depuis  longtemps  à  la  dis- 
cussion de  cet  objet  important. 

Si*vous  Youlei  achever  avec  gloire  la  mission  qui  vous  a 
été  donnée,  et  léguer  à  vos  successeurs  le  bonheur  réel  du 
peuple.  Il  fànt  qoe  chaque  stade  de  la  carrière  politique 
quMl  vous  reste  à  ({areourir  soit  marqué  par  un  bienfolt, 
par  on  pat  de  plus  vers  la  prospérité  publique. 

Ce  serait  en  vain  que  chaque  Jour  la  valeur  de  nos  sol- 
dats agrandirait  le  cercle  brillant  de  nos  conquêtes  et  por- 
terait à  i*aonnementet  à  Tadmiratlon  des  peuples  la  célé- 
brité des  Français  ;  ce  serait  en  vain  que  leur  heureux 
courage  aurait  reofcrsé  à  la  fois  les  esclaves  des  despotes  et 
les  ennemis  Intérieurs  de  la  république,  si  Ton  ne  voyait  ^ 
8*élef  er  enfin  au  milieu  de  la  patrie,  au  milieu  de  nous»  ^ 
deux  temples  fameux  que  i*oo  vit  jadis  au  sein  de  Rome 
triomphante  et  libre,  celui  delà  Concorde  et  du  Bonheur. 

Yousdeves  faire  plus  pour  votre  propre  gloire  et  pour 
celle  de  la  nation  qui  vons  u  envoyés.  Vous  avez  fait  avec 
elle  nue  grande  révolution,  et  une  révolution  ne  doit 
point  ressembler  à  une  conquête  de  Tartares,  où  Ton  ne 
voit  que  des  ruines  et  des  débris  à  côté  des  triomphes  ;  où 
'  les  cris  plaintifs  des  victimes  de  la  guerre  viennent  se  mêler 
aux  chants  de  la  victoire. 

Vous  avet  été  courageux  législateurs,  soyezbienfaisants; 
vous  devet  laisser  après  vous  tout  ce  qui  peut  consoler  cl 
réparer  les  malheurs;  toutes  vos  pensées  ne  doivent  être 
qu*utte  pensée  de  bonheur  pour  le  peuple,  tous  vos  senti- 
ments un  vœu  pour  qu*il  soit  heureux,  tous  vos  dééreis 
une  création,  le  reste  de  voure  vie  un  sacrifice  à  la  répu- 
Miqoe. 

Les  rèvoludODS  que  Tambltlon  du  rang  suprême  opère 
daus  les  palais  des  rois  ne  font  que  renverser  une  dynastie, 
et  changer  un  despotisme  et  un  esclavage  pour  un  autre  : 
les  révolutions  qu'enfante  Pamour  de  la  liberté  doivent 
laisser  après  elles  tous  les  biens  et  toutes  les  vertus. 

Vous  devez  faire  plus  encore  :  si  la  fbtalité  a  attaché  à 
lOMi  learéTolatioDs  des  infortunes  inéviubles,  vous  de< 


vez  à  la  postérité,  qui  Jugera  un  Jour  la  févointlon  fhm- 
çaise,  montrer  les  sentiments  qui  animèrent  les  représeft* 
tanis  du  peuple  et  le  génie  qui  dicta  vos  décreU;  vottS 
devez,  comme  un  générai  républicain  après  une  grande 
bataille,  dire  ce  que  vous  avez  Tait  pour  la  victoire. 

Tandis  que  la  calonanie,  calculant  en  silence  les  mauk 
qu'a  entraînés  la  révolution ,  se  réserve  de  vous  imputer 
un  jour  ceux  même  que  vous  avez  taché  d'éloigner  de  la 
pairie,  vous  devez  séparer  votre  ouvrage,  les  vrais  pritt« 
cipes  de  la  Convention,  d'avec  les  principes  atroces  et  les 
crimes  que  le  génie  destructeur  de  quelques  hommes  a 
lancés  parmi  vous  et  autour  de  vous;  U  faut  que  le  phUo^i 
snphe,  en  en  parcourant  l'histoire^  voie  d'un  côté  vos  lois 
honorablement  inM:riles  sur  ses  pages  glorieuses,  et  de 
l'autre  votre  justice  sévère  gravant  Tignominie  surlatomba 
des  conpirateurs  que  vous  avez  frappés. 

Vous  devez  prouver  a  la  postérité  que  si  l'audace  de  vm 
ennemis  vous  a  forcés  de  lancer  la  foudre  sur  leurs  têtes 
coupables,  vos  mains  pures  ne  se  sont  point  armées  de  la 
hache  du  Vandale  pour  briser  les  ouvrages  des  arts  et 
nnéa ntir  rindusirie.  Vous  devez  convaincre  la  postérité  que 
vous  avez  voulu  qu'il  4i'y  eût  aucun  principe  méconnu, 
aucun  qui  ne  fût  vengé. 

C'est  donc  l'industrie  nationale  qui  vient  aujourd'hui 
vous  demander  une  juste  réparation  :  le  commerce  se 
trouveencoreau  milieu  des  ruines  que  vous  avez  à  relever.. 

Je  vais,  législateurs,  vous  dire  la  vérité;  vous  l'aimes, 
daignez  m'entendre  :  il  ne  faut  que  porter  ses  regards  sur 
ce  qui  nous  environne,  et  pénétrer  les  résultats  cruels  oft 
notre  position  pourrait  nous  conduire,  pour  sentir  la 
nécessité  de  changer  promptement  un  lystème  d'écono- 
mie aussi  ruineux  que  funeste,  et  de  donner,  d'après 
d'autres  principes,  tous  les  moyens  de  vigueur  à  Tin- 
dustric  nationale  et  à  la  reproduction  des  richesses  de  no» 
tre  territoire. 

Vous  avez,  dans  une  de  vos  dernières  sôances,  cooh 
mencé  à  porter  la  main  sur  la  plaie;  vous  devez  la  sonder 
aujourd'hui. 

Une  grande  nation  ne  doit  point  cacher  ses  maux,  lors- 
qu'elle a  dans  ses  mains  des  remèdes  poissants  pour  Ici 
guérir.  Des  manufactures  à  demi  ruinées,  des  ateliers dè-^ 
serts,  les  bras  et  les  arts  qui  les  fécondaient  découragés, 
quelques-uns  expatriés;  les  matières  premières  manquant 
au  travail  de  l'ouvrier;  les  contrées  qui  produisaient  le  Un, 
sortant  tout  récemment  de  la  dévastation  de  l'ennemi  i 
d'autres  contrées  où  croit  abondamment  le  chanvre,  en- 
core en  proie  a  la  rébellion  d'un  ennemi  intérieur;  le  com- 
merce effrayé,  découragé,  n'osant  importer  les  produo» 
lions  étrangères  qui  donnent  le  mouvement  et  la  vie  à  nos 
manufactures;  nos  exploitations  nationales  partout  ralen* 
lies,  nous  forçant  de  verser  des  capitaux  immenses  cbez 
l'étranger  pour  acheter  nos  besoins  divers  ;  les  moyens  et 
les  éléments  de  l'agriculture  diminués  ;  les  canaux  de  la 
circulation  olMtrués  ;  une  administration  contre  naturct 
contre  tous  les  vrais  principes^  dirigeant  tout;  tel  est  à 
peu  près  le  tableau  de  notre  position  intérieure.  IMais  tout 
ce  que  cette  position  peut  avoird'alarmant  doit  disparaître 
devant  un  territoire  fertile  et  une  nation  industrieuse.  La 
prospérité  nationale  n'a  été  que  suspendue^ 

Les  révolutions  ressemblent  à  ces  grands  mouvements 
de  la  nature  qui  offrent  le  spectacle  ou  plutôt  l'ppparence 
d'une  destruction  instantanée,  pour  répandre  partout 
des  principes  de  vie  et  d'une  régénération  nouvelle. 

Ce  n'est  point  par  l'effet  lent  d'un  mauvais  système 
de  législation  que  le  commerce  a  été  réduit  à  l'état  de  lan* 
gueur  où  il  se  trouve.  Le  commerce  est  dans  ce  moment 
un  corps  vigoureux  blessé,  prêt  à  reprendre  toutes  ses  fur- 
ces  aussitôt  qu'une  main  salutaire  y  aura  porté  la  gué- 
rison. 

Ce  n'est  point  loin  de  nous,  ce  n'est  point  à  travers  les 
mers  que  nous  avons  besoin  d'aller  prendre  les  éléments 
nécessaires  pour  ranimer  notre  commerce  et  l'Industrie  na- 
tionale; nous  n'avons  besoin  que  de  les  demander  à  la  na- 
ture et  au  sol  que  nous  habitons;  nous  n'avons  besoin  que 
de  les  demander  à  cette  activité  courageuse  d'un  peuple  qui  a 
préparé  en  si  peu  de  temps  la  foudre  qui  a  renversé  les 
tyrans:  il  faut  déployer  pour  le  commerce  la  même  éner- 
gie que  pour  la  guerre»  et  nous  aurons  en  peu  de  temps, 
avec  la  vlctolreiun  commerce  florissant  et  rabondanoé. 


38 


Citoyens,  toot  se  prépare  déjà  pour  cette  régénération; 
h  république  est  prête  à  receToir  Timpulsion  et  TactiTité 
que  fous  tlles  lui  donner  vers  l'industrie  commerciale. 
Les  grandes  filles,  ces  arsenaux  des  arts»  tournent  leurs 
regards  et  leurs  espérances  vers  fOus.  L'industrie  impa- 
tiente TOUS  demande  la  liberté*  des  encouragements  et 
du  travail.  Les  hommes  que  la  ruine  de  leurs  ateliers  a 
forcés  d'aller  porter  leur  main-d'œuvre  chez  Tétranger  n'at- 
tendent peut-être  de  vous  qu'un  signal  pour  rentrer  dans 
leur  patrie  ;  maisil  faut  que  vous  leur  donniezenfin  ce  signal. 

Les  métiers  sont  prêts  à  reprend n*  leur  mouvement; 
mais  beaucoup  sont  abandonnés,  quelques-uns  détruits: 
il  faut  que  vous  leur  fussiez  des  avances;  il  faut  qu'en 
brisant  toutes  les  entraves  de  l'agriculture,  une  justice 
rigoureuse ,  en  mettant  le  prix  de  ses  travaux  en  propor- 
tion avec  celui  de  tous  les  autres  objets,  rende  enfin  aux 
manufuctures  les  matières  premières  sans  lesquelles  il  n'y 
a  ni  art,  ni  création. 

Prenez  des  mesures  pour  anéantir  enfin ,  pour  tout  ce 
qui  n'est  pas  subsistance,  une  loi  funeste  que  vous  imposa, 
contre  tous  les  principes,  la  force  des  circonstances;  une 
loi  qui  a  ruiné  l'industrie  à  sa  racine,  qui  a  trompé  la  pro- 
bile  fidèle  aux  lob,  enrichi  la  criminelle  avidité  qui  les 
brave;  qui  a  enfanté  un  autre  agiotage  plus  dangereux 
peut-être  que  celui  que  vous  avez  détruit  dans  les  finances, 
et  qui,  semblable  à  ces  maux  secrets  dont  on  n'aperçoit 
pas  d'abord  le  danger,  a  desséché  tous  les  canaux  de  pro- 
spérité, et  nous  a  amenés  lentement  à  cet  état  de  gêne  que 
nous  subi5sons. 

Ce  n'est  pas  assez  encore  :  le  travail,  la  création  des 
arts  ne  sont  qu'une  partie  de  la  richesse  d'une  nation  ; 
c'est  à  la  terre,  qui  en  est  la  première,  la  véritable  source, 
aux  hommes  qui  la  cultivent  et  la  trempent  de  leurs  sueurs, 
que  la  législation  doit  porter  tous  les  encouragements  et 
les  bienfaits.  Que  les  lois  lui  rendent  donc  enfin  ce  que  la 
justice,  la  reconnaissance  réclament  depuis  la  révolution 
pour  elle. 

Il  est  uo  principe  économique  que  Ton  ne  peut  trop  re- 
tracer :  les  manufactures  et  le  commerce  le  plus  florissant 
appartiendront  toujours  à  la  nation  qui  aura  Tagriculture 
la  plus  florissante.  Un  peuple  qui  trouve  autour  de  lui 
tous  les  aliments  de  son  industrie,  de  l'industrie  des  autres 
peuples,  sera  toujours  le  plus  riche  et  le  plus  puissant. 
C'est  sous  cet  aspect  que  la  poiitque  doit  toujours  considé- 
rer le  territoire  d'une  nation. 

Celui  de  la  république  offre  aussi  des  ruines  en  agricul- 
ture, et  réclame  dans  plusieurs  contrées  vos  soins  répara- 
teurs; il  appelle  dans  d'autres  l'industrie  et  la  culture. 

Le  séjour  de  l'ennemi  sur  nos  frontières ,  les  fureurs  de 
la  guerre  ont  détruit  pour  un  moment  une  des  branches 
les  plus  précieuses  du  commerce  de  la  république;  les  cul- 
tures qui  produisaient  le  lin»  les  métiers  qui  le  travail- 
laient ont  été  frappés  de  la  même  destruction.  Une  multi- 
tude de  manufactures,  dont  les  travaux  actifs,  depuis  les 
rives  delà  Somme iusqu'à  celles  de  la  Seine,  faisaient  vi- 
vre un  peuple  industrieux,  ne  sont  plus;  il  faut  que 
l'administration  se  hftle  de  porter  des  secours  encoura- 
geants et  les  germes  de  la  reproduction  dans  ces  pays  dé- 
vastés; il  faut  sehftter  de  raviver  un  commerce  presque 
éteint. 

La  Vendée  n'attend  plus  que  la  défaite  des  rebelles  pour 
rendre  ses  terres  fécondes  à  l'agriculture  et  ses  produc- 
tions au  commerce,  pour  voir  renaître  entre  des  mains  li-- 
bres  l'activité  de  ses  fabriques. 

Le  Midi  s'indigne  de  voir  verser  tous  les  ans  18  millions 
dans  le  Piémont  et  la  Sardaigne,  pour  acheter  les  soies 
qui  alimentent  nos  manuidotures,  tandis  que  l'industrie 
pourrait  si  aisément  accroître  sur  son  territoire  fertile  la 
culture  des  mûriers. 

L'Espagne,  l'Italie  et  l'Angleterre  sont  enrichies  tous 
les  ans  de  30  millions  que  vous  y  portez  pour  fiibriquer 
vos  draps;  l'éducation  de  vos  races  de  bestiaux,  le  perfec- 
tionnement de  vos  laines  ne  vous  ont  point  encore  affran- 
chis de  ce  honteux  tribut. 

Commandez  enfin,  législateurs,  par  des  instructions  et 
des  récompenses,  au  génie  des  Français;  commandez  à 
Totre  territoire  ce  genre  d'industrie  rurale  auquel  la  fer- 
tilité et  la  température  l'appellent,  et  vous  surpasserei 


bientôt  en  beauté  les  laines  étrangères  qu'un  < 
ruineux  vous  apporte. 

Il  est  un  autre  genre  de  richesses  que  la  nature  semble 
celer  à  l'indolence, ^t  qu'elle  n'accorde  qu'au  travail  pa- 
tient et  courageux  :  ce  sont  les  mines.  La  nature  a  placé 
dans  le  sein  de  la  terre  des  ateliers  tout  prêts  dans  les  mé- 
taux qu'elle  y  a  enfouis,  et  dans  les  matières  qui  les  fon- 
dent et  les  préparent.  -Jusqu'ici  une  exploitation  lente  et 
peu  encouragée  a  négligé  ces  nouvelles  richettes.  Heureux 
colons,  nous  nous  sommes  contentés  de  recueillir  celles 
que  la  nature  a  prodiguées  sur  le  sein  de  la  terre.  Il  a 
fallu  que  le  génie  de  la  liberté  et  le  besoin  de  vaincre  nous 
ramenassent  sur  les  mines. 

Le  gouvernement  n'a  jamais  réveillé  l'intérêt  national 
sur  cette  partie  essentielle  de  son  commerce,  et  une  habi- 
tude ruineuse  nous  a  toujours  entraînés  dans  les  mers  du 
Nord,  pour  y  aller  chercher  le  fer  qui  forge  nos  armes ,  le 
cuivre  qui  double  nos  vaisseaux ,  et  les  métaux  qui  occu- 
pent nos  usines.  Rendons  enfin  ces  nouvelles  ressource» 
aux  besoins  de  la  patrie,  et  Fart  perfectionné  des  mines  à 
la  postérité. 

Dans  le  sein  de  la  terre  et  sur  sa  surface  la  nature  féconde 
offre  à  votre  industrie  les  éléments  d'une  nouvelle  création, 
d'une  nouvelle  puissance.  Prenez  la  volonté  ferme  de  faire 
exécuter  les  plans  de  dessèchement  que  vous  ordonnerez  à 
votre  comité  des  travaux  publics  de  vous  proposer;  rendez 
30  millions  de  matières  premières  à  votre  commerce, 
en  restituant  à  la  culture  quinze  cent  mille  arpents  de 
marais  enlouis  et  perdus  sous  les  eaux.  Que  des  franchises, 
des  exemptions  viennent  encourager  la  culture  de  vos  vi- 
gnes, la  fabrication  de  vos  eaux-de-vie  et  de  vos  sels,  et 
toutes  les  productions  indigènes  que  la  nature  a  refusées 
au  sol  desautres  nations,  mais  qu'une  habitude  impérieuse 
et  des  goûts  avides  leur  ont  rendues  nécessaires.  Que  tous 
les  genres  de  votre  industrie  reçoivent  enfin,  d'un  bout  de 
la  république  k  l'autre,  une  nouvelle  impulsion,  une  ac- 
tivité nouvelle  ;  que  partout,  sur  un  territoire  bien  cultivé, 
chaque  famille  présenteune  fabrique,  chaque  Tille  un  vaste 
atelier,  chaque  contrée  un  art  nouveau  approprié  à  la 
qualité  de  son  sol  etau  génie  de  ses  habitants.  Que  partout 
l'on  voie  l'amour,  l'on  entende  les  chants  républicains 
d'un  travail  honoré ,  heureux;  que  le  gouvernement  soit 
là  pour  protéger  tant  de  bonheur  et  de  vertu  ;  et  défiez  en- 
suite hardiment  les  autres  peuples  de  rivalber  avec  vous 
de  richesses  et  de  puissance  commerciale.  ^ 

Oui,  c'est  la  nature  qui  a  appelé  le  peuple  français  à 
être  le  plus  commerçant  comme  le  plus  libre  de  l'univers. 
Son  territoire,  couvert  d'un  peuple  immense,  ingénieux, 
abondant  en  toutes  les  productions  diverses,  en  face  du 
nouveau  continent,  communiquant,  par  les  deux  plus 
grandes  mers  du  monde,  à  l'Occident  et  h  toutes  les  riches 
contrées  de  l'Asie  ;  offrant  des  côtes  et  des  ports  faciles  aux 
vaisseaux  de  toutes  les  nations  ;  coupé  par  des  rivières  qui 
portent  les  productions  de  la  terre  et  des  arts  à  toutes  les 
contrées  ;  placé  par  la  nature  comme  pour  transmettre  aux 
nations  qui  sont  derrière  loi  celles  de  la  riche  Amérique , 
sa  position  unique  sur  le  globe  semble  avoir  mis  le  com- 
merce et  les  besoins  des  autres  peuples  sous  sa  dépen- 
dance, et  les  avoir  rendus  tributaires  de  son  génie.  Tyr, 
Sidon ,  Alexandrie,  Carthage,  colonies  jadis  célèbres,  dont 
l'histoire  a  tant  vanté  la  splendeur,  ne  durent  leur  fonda- 
tion et  la  prospérité  de  leur  commerce  qu'à  des  conquêtes 
et  à  des  révolutions  heureuses,  et  furent  bientôt  renversées 
par  d'autres  révolutions.  Le  commerce  se  promena  long- 
temps dans  les  mers  de  l'Asie,  cherchant  en  vain  un  vaste 
territoire  fertile  et  une  grande  naflon.  Réduit  à  se  reposer 
un  moment  sur  quelques  villes,  il  n'eut  qu'une  position 
de  circonstances  et  de  hasard,  et  un  éclat  passager.  Poussé 
tour  à  tour  d'un  peuple  à  un  autre  peuple,  d'une  contrée 
à  une  autre,  détruit  tour  à  tour  par  les  conquérants,  il 
éprouva  longtemps  la  même  destinée  sans  se  fixer.- 

Avant  la  renaissance  des  arts  en  Europe,  avant  que  les 
lumières  eussent  éclairé  cette  partie  du  monde,  lorsqu'une 
civilisation  peu  avancée  cachait  encore  à  la  société  une 
partie  des  jouissances  et  des  commodités  delà  vie;  lors- 
que, dans  des  Ages  plus  près  de  nous,  la  féodalité  étendait 
ses  fers,  le  fanatisme  son  ignorance  et  ses  fureurs  sur  des 
peuples  abrutis  ;  lorsque  des  contemplations  ridicules  et 
de  faines  disputes  religieuses  absorbaient  partout  le  génie 


2» 


dellMMnme;  lorsqn'encore,  parmi  ces  fléaux  des  sociéiés 
oisWes,  la  politique  insensée  des  temps  barbares  agitait 
partoat  les  torches  sanglantes  de  la  guerre  civile,  la  France 
alors,  séparée  t  comme  tous  les  pays  de  TOccident,  du 
lierceau  des  arts,  du  foyer  des  lumières,  par  des  fleuves  et 
des  mers,  des  diatnes  de  montagnes  et  des  déserta,  avec 
iineiia?igationqui,  commençant  à  peine,  D*osait  se  fier 
aux  éléments  et  voyait  partout  les  bornes  de  Tunivers,  la 
Fkvnce  ignora  longtemps  Vindustrie  et  le  commerce. 

Mais  depuis  que  la  boussole  et  la  hardiesse  des  naviga- 
fletirs  ont  joint,  pour  ainsi  dire,  ensemble  Tancien  et  le 
Bonveau-monde;  depuis  que  la  politique  o  uni  les  deux 
continents  par  des  intérêts  communs,  l*babitude  par  les 
mêmes  goftts  et  les  mêmes  jouissances,  le  sentiment  par 
Tatirait  d*une  fraternité  mutuelle,  Tinstinct  de  la  nature 
par  le  même  amour  de  la  liberté,  il  faudrait  changer  le 
tours  de  la  nature  avant  de  ravir  à  la  France  la  supérioriié 
de  son  commerce.  (  La  suite  demaiii.) 


SUITE  A  LA  SÉANCE  DU  l^r  NIVOSE. 

Suite  du  discourt  de  Grégoire. 

Alors  le  gouvernement  est  contraint  d*avoir  nne 
action  forcée,  qui  n'est  jamais  en  ëqtiilibre  avec  la 
vérité,  la  justice,  ni  Tintérét  national.  Eh!  quelle 
tranquillité  pourrait-on  se  promettre  dans  un  pays 
où  subsiste  sans  discontinuer  ce  foyer  de  division? 
Tous  les  monuments  historiques  déposent  sur  ce 
sujet,  et  prononcent  sur  le  sort  futur  d*un  Etat  qui , 
accumulant  victoire  sur  victoire  au  dehors,  serait 
déchiré  au  dedans  par  toutes  les  horreurs  qu'entraîne 
après  soi  la  haine  de  tous  les  cultes  contre  un  gou- 
vernement qui  les  oprimerait  tous. 

Réfléchissez  bien  aue  Teffet  inévitable  de  la  per- 
sécution est  d'abâtardir  le  peuple  ;  c'est  le  premier 
Sas  vers  Tesclavage.  Un  peuple  c[ui  n'a  pasde  liberté 
e  culte  sera  bientôt  sans  liberté. 

La  persécution  est  donc  un  calcul  détestable  en  po- 
litique; j'ajoute  aue  c'est  calculer  bien  mai  pour  sa 
gloire.  L'inflexible  burin  de  l'histoire  se  hâte  d'im- 
primer une  flétrissure  indélébile  sur  le  front  des  per- 
sécuteurs, et  d'associer  leurs  noms  à  ceux  de  Néron 
et  de  Charles  IX. 

Je  crois  avoir  posé  des  principes  incontestables 
pour  quiconque  a  cultivé  sa  raison.  Je  viens  à  leur 
application. 

Les  orages  de  la  révolution  ont  pu  nécessiter  quel- 
ques mesures  de  rigueur.  Des  représentants  du  peu- 
ple en  mission  ont  cru  que  le  bien  public  comman- 
dait la  suspension  provisoire  de  certaines,  assemblées 
religieuses  dans  plusieurs  départements  où  le  souffle 
du  royalisme  empoisonnait  encore  l'atmosphère  ; 
mais  ces  mesures  doivent  cesser  avec  le  besoin.  En 
prolonger  la  durée,  lorsqu'elles  ne  trouvent  plus 
leur  excuse  dans  le  prétexte  du  bien  public,  ce  serait 
îeler  dans  le  découragement,  dans  le  désespoir,  des 
Aomme^  qui  n*y  verraient  plus  qu'une  persécution 
réfléchie,  pour  le  plaisir  de  les  mettre  à  la  torture  ; 
et  le  zèle  aigri  devenant  plus  industrieux,  plus  actif 

gour  éluder  une  prohibition  odieuse,  ferait  refluer  sa 
aine  sur  le  gouvernement,  et  calomnierait  la  liberté 
républicaine. 

Quel  est  l'état  actuel  des  choses  à  cet  égard?  La 
liberté  des  cultes  existe  en  Turquie,  elle  n'existe 
point  en  France  ;  le  peuple  y  est  privé  d'un  droit 
dont  on  jouit  dans  les  Etats  despotiques,  même  sous 
les  régences  de  Maroc  et  d'Alger.  Si  cet  état  de 
choses  doit  persévérer,  ne  parlons  plus  de  Tinquisi- 
tion,  nous  en  avons  perdu  le  droit,  car  la  liberté  des 
cultes  n'est  que  dans  les  décrets,  et  la  persécution 
tiraille  toute  ta  France. 

Depuis  trente  ans,  presque  tous  les  gouvernements 
de  l'Ëarope  commençaient  à  devenir  tolérants;  on 


en  faisait  honneur  à  la  France,  oui  a  philosophie 
tonnait  contre  la  rage  persécutrice.  Eût-on  jamais 
cru  que  les  efforts  des  philosophes ,  surtout  de  celui 
que  vous  avez  porté  dernièrement  au  Panthéon , 
aboutiraient  à  faire  demander  la  tolérance  aux  fon- 
dateurs de  la  liberté  française? 

Quelle  insulte  plus  grave  pourrait-on  faire  au 
peuple  que  de  lui  ravir  l'exercice  d'un  droit  fondé 
sur  la  nature  et  consacré  par  la  sagesse  de  la  Con- 
vention nationale? 

Lorsque,  par  votre  ordre,  nous  sommes  allés  dans 
le  Mont-Blanc  et  les  Alpes- Maritimes  leur  imprimer 
les  formes  républicaines,  en  votre  nom,  au  nom  de  la 
loi ,  nous  avons  juré  aux  citoyens  de  ces  contrées  la 
liberté  des  cultes  dont  ils  redoutaient  la  perte;  ils 
l'ont  perdue,  et  je  ne  veux  oas  être  parjure. 

Quand,  dans  les  pays  ou  pénètrent  nos  armées 
victorieuses,  on  proclame  cette  liberté,  comment 
voulez-vous  que  les  peuples  ne  regardent  pas  ces 
proclamations  comme  une  dérision ,  lorsqu'ils  savent 
que  chez  nous  on  a  incarcéré  ceux  qui  réclamaient 
l'autorité  de  la  loi  ? 

Par  son  heureuse  position  la  France  peut  devenir 
le  centre  commercial  de  l'Europe;  elle  le  deviendra 
si  l'agriculture,  les  manufactures,  les  arts  et  mé- 
tiers acquièrent  tout  le  développement  dont  ils  sont 
susceptibles  ;  ils  l'acquerront  si  nous  donnons  à  l'in- 
dustrie étrangère  la  facilité  de  s'identifier  à  la  nôtre; 
mais  jamais  elle  ne  viendra  se  naturaliser  chez  nous 
si  l'intolérance  la  repou!^.  Je  dis  plus  :  l'industrie 
nationale  aurait  bientôt  le  même  sort  que  lorsqu'on 
révoqua  l'édit  de  Nantes.  Cette  compression  intolé- 
rante aurait-elle  été  suggérée  par  le  cabinet  de  Saint- 
James,  et  n'est-elle  pas  le  dernier  anneau  de  cette 
chaîne  que  la  faction  abattue  le  9  thermidor  voulait 
imposer  à  la  Convention  nationale  et  au  peuple 
français? 

Vous  auriez  maintenant  la  mesure  de  cette  intolé- 
rance et  de  ses  effets  contre-révolutionnaires,  si  des 
millions  d'hommes  haletant  d'effroi,  et  tenaillés  par 
la  pers^ution ,  étaient  sûrs  de  franchir  la  frontière 
sans  rencontrer  la  guillotine  ou  les  cachots.  Et 
qu'est-ce  donc  qu'une  liberté  qu'une  immensité  de 
citoyens  industrieux  et  patriotes  s  apprêtent  à  fuir? 

Mais,  dit-on,  il  est  permis  à  chaque  citoyen  de 
pratiquer  son  culte  dans  sa  maison.  Quoi  !  la  Décla- 
ration des  Droits,  la  Constitution  et  des  lois  publiées 
avec  appareil  auraient  uniquement  pour  but  de  sta- 
tuer que  dans  ma  chambre  je  puis  faire  ce  que  je 
veux  !  S'il  est  permis  de  déraisonner,  qu'au  moins 
ce  ne  soit  pas  d  une  manière  si  grossière. 

Je  ne  rappellerai  pas  d'ailleurs  qu  un  espionnage 
tyrannique  a  été  exercé  jusqu  au  sein  des  familles, 
et  que  la  liberté  du  citoyen  a  été  outragée  dans  l'a- 
sile même  de  ses  foyers. 

Rien  de  plus  trivial  désormais  que  cette  phrase 
banale  :  La  supertlition  et  le  fanatisme  relèvent 
une  tête  audacieuse.  La  superstition  et  le  fanatisme. .. 
ce  sont  là  les  deux  fléaux  les  plus  redoutables  ;  c'est 
la  peste  au  moral  ;  mais  ne  serait-il  pas  à  propos  de 
déterminer  enfin  l'acception  de  ces  mots?  car,  en  ne 
les  définissant  pas,  on  leur  fait  signifier  tout  ce  qu'on 
veut  pour  persécuter  sans  obstacle. 

Parce  que  Voltaire  croyait  en  Dieu,  un  jour  il  fut 
traité  de  fanatique  par  un  homme  encore  vivant; 
et  si  je  veux  fixer  le  sens  de  ce  terme ,  dois-je  con- 
sulter les  discours  merveii  Icuxconcernant  les  déesses 
de  la  Raison ,  ou  ceux  qui  chantent  le  Dieu  de  la  li- 
berté !  Choisirai-je  la  harangue  dans  laquelle  Ana- 
charsis  Cloots  prêche  l'athéisme ,  ou  celle  dans  la- 

3uelle  Robespierre  fait  à  l'Etre  suprême  l'honneur 
e  le  reconnaître? 
Comme  les  idées  fausses  ont  besoin  d'exagération, 


80 


une  tactique  trop  ordinaire  est  de  crier  vite  au  fa^ 
naiitmt;  mais  parce  que  des  bommps  paisibles  se 
seront  rc'uuis  pour  prier  à  leur  manière,  ne  semble- 
t-il  pas  que  la  coutre-révolution  s'opère  ?  Je  le  de- 
inande  aux  hommes  que  Q*aveugle  pas  la  passiou  : 
vouloir  représenter  ces  réunions  calmes  comme  un 
aUrouptmêni ,  une  faelian ,  n'est-ce  pas  abuser  dtê 
Icrnrts  ? 

Mais  la  guerre  de  la  Vendée  1...  La  Vendée,  c'est 
la  plaie  lu  plus  hideuse  que  des  monstres  aient  faite 
ù  la  révolution  ;  c'est  la  réunion  de  tous  les  maux  et 
de  tous  les  forfaits. 

Bien  de  plus  atroce  que  des  prôtres  scélérats  qui  » 
au  nom  du  Ciel,  prêchaient  le  carnage  ;  mais  si  Ton 
s'obstinait  à  conlondre  ces  prêtres,  qu'on  ne  peut 
appeler  des  hommes,  avec  ceux  qui,  soumis  à  la  loi 
ont  concouru  k  londer  la  république,  ce  serait 
mettre  sur  la  mémo  ligne  les  briganiis  de  la  Vendée 
et  1(^6  braves  défenseurs  de  la  patrie. 

On  ne  peut  se  dissimuler  que  parmi  des  associa- 
tions religieuses  qui  sont  eu  France  il  en  est  une 
contre  laquelle  ont  été  |j1us  particuUèrement  diri* 
gécs  les  mesures  de  rigueur  ;  je  n'examine  pas  si , 
comme  on  Ta  prétendu ,  des  hommes  cachés  der* 
rière  le  voile  conduisent  ce  mouvement,  dont  ils 
rattacheraient  le  111  à  Tinflucnce  des  puissances 
étrangères;  il  m'est  plus  doux  de  penser  que  cette 
association,  étant  la  plus  nombreuse,  présentait  aux 
actes  de  sévérité  une  surface  plus  étendue  ;  d'ail- 
leurs il  était  à  craindre  que  le  souvenir  d'une  antique 
opulence  n^eût  alimenté,  ches  bien  des  prêtres  des 
regrets  inciviques;  et  enlin  il  fallait  déraciner  les 
germes  de  royalisme  disséminés  par  des  pontifes 
orgueilleux  de  l'ancien  régime,  qui  tenaient  leurs 
ricTiessesde  la  royauté  dont  ils  étaient  les  esclaves, 
les  drogmans  et  les  complices. 

Mais,  citoyens,  vous  êtes  trop  justes  pour  leur 
assimiler  des  prêtres  qui,  avec  vous,  se  sont  élancés 
sur  la  brèche  pour  combattre  le  despotisme,  qui 
vous  présentent  une  caution  bien  sûre  dans  leur  in- 
térêt propre  ;  car,  si  l'ancien  régime  pouvait  se  ré- 
tablir, ils  seraient  les  premières  victimes.  Des  hom- 
mes, qui  sont  restés  patriotes  en  perdant  place  ^et 
fortune,  pourraient  bien  en  valoir  d'autres  qui  ont 
le  mérite  d'être  patriotes  en  obtenant  place  et  for- 
tune: peut-être  que  leur  persévérance  dans  ce  qu'ils 
apnelleut  principes,  et  ce  que  d'autres  nomment 
préjugés,  vaut  bien  ces  déclamations  multipliées,  il 

Îa  un  an,  à  notre  barre,  et  dont  la  traduction  était 
peu  près  ceci: 
•  Je  vous  déclare  que  pendant  de  longues  années 

f'ai  été  un  imposteur  et  un  fripon  ;  en  conséquence 
e  demande  que  vous  m'estimiez  et  que  vous  m'ac- 
cordiez une  ploce.  •  (  Vils  applaudissements.) 

H  y  a  quatre  ans  qu'on  tourmentait  les  prêtres 
pour  pnHer  le  serment  ;  ensuite  on  les  tourmenta 
pour  l'abjurer.  La  faim ,  les  injures,  les  cachots  ont 
été  leur  partage;  et  l'on  nous  parle  de  la  Saint- 
Darthélemy,  des  noyades  de  Carrier  !  mais  je  préfé- 
rerais périr  dans  un  court  supplice  plutôt  que  d'être 
peudant  des  mois,  des  années,  abreuvé  d'amertumes, 
ot  rassasié  de  don  leurs  1 

La  persécution  est  toujours  exécrable,  soitqu'elh; 
s'exerce  au  nom  de  la  religion,  ou  au  nom  de  la  phi- 
losophie; franchement ,  dans  la  supposition  de  fa- 
natisme, s'il  fallait  opter  entre  deux  extrêmes  que 
J'abhore.  Je  préférerais  encore  le  fanatisme  des 
persécutes  a  celui  des  persécuteurs  (on  applaudit); 
•tje  dirais  comme  Guise  à  Poltrot  :  «Si  tu  religion 
l'ordonne  de  m'assassiner,  la  mienne  veut  que  je  te 
pardonne.  »  (  Applaudissements.  ) 

M'appliquons  donc  qu'avec  discernement  l'info* 
miato  ^ithètft  de  fanatique. 


Le  culte  catholîqi»  est  celui  d'une  grande  pirtte 
de  la  nation  ;  et  puisqu'on  l'a  présente  comme  in«> 
compatible  avec  la  république,  il  est  du  devoir  d'ni 
législateur  de  discuter  cette  objection.  (On  inter» 
rompt.) 
Maure  et  Taillefer  parlent  dans  le  bruit. 
GtéooiRB  :  11  est  aisé  de  calomnier  les  intentions 
et  de  crier  à  la  guerre  civile.  J'ai  dit ,  au  commen* 
cément,  que  si  vousnem'écoutiezpas  jusqu'à  la  fin, 
vous  ne  m'auriez  poiut  entendu.  Je  réclame  la  toUÎ^ 
rance  et  la  liberté  d'opinion. 

Dans  cette  discussion  les  faits  répondent  é  touU 
Voyez  les  catholiques  des  Btats-Unis  de  rAmérioM 
et  des  petits  cantons  suisses,  et  trouvez^moî  des 
hommes  plus  attachés  simultanément  à  leurs  pria* 
cipes  religieux  et  républicains.  Avec  quel  transport, 
au  sein  de  l'Helvétie ,  j'ai  vu ,  dans  les  temples,  as- 
socier aux  signes  religieux  les  héros  du  calendrier 
politique.  Là  Guillaume  Tell, WinckelriedetMechtal 
respirent  sur  la  toile  et  le  marbre ,  et  commandent 
encore  à  leurs  enfants  l'amour  de  la  république  et 
la  haine  de  la  maison  d'Autriche. 

TaiLlbfbb  :  Les  grands  hommes  rougissent  de  se 
voir  ainsi  accolés.  (  On  rit.) 
'  Gbeooibb  :  Je  n'aime  pas  à  parler  de  moi  ;  mais 
permettez  qu'ici  j'invoque  le  témoignage  de  mes  co« 
députés  et  de  tout  le  département  qui  m'a  procuré 
l'honneur  de  siéger  parmi  vous  ;  qu'ils  disent  sî, 
dans  le  temps  où  vous  aviez  encore  un  roi.  Je  n'avais 
pas,  moi  catholique  de  cœur  et  d'esprit,  célébré  chei 
eux  les  funérailles  de  la  royauté,  et  proclamé  l'exis-» 
teoce  anticipée  de  la  république! 

Tels  hommes,  dontle  prétendu  patriotisme  fascine 
encore  d'autres  yeux  que  les  miens ,  ont  peqt-étre 
donné  dix  mille  hommes  i  la  Vendée  par  des  dis* 
cours  qui  serviront  à  l'histoire  ;  et  moi ,  par  mon 
obscure  correspondance,  j'ose  dire  que  J'ai  empêché 
des  Vendées. 

Lors  de  la  subversion  du  culte ,  autour  de  mol  se 
pressaient  des  hommes  qui  voulaient  en  réclamer  la 
liberté  ;  je  leur  disais  :  Vous  êtes  catholiques;  à  force 
de  vertus  forcez  Testime  de  vos  ennemis  ;  il  est  un 
caractère  auquel  je  veux  qu'on  vous  reconnaisse  ! 
.  est  en  redoublant  d'amour  pour  la  république , 
c  est  en  multipliant  les  sacrifices,  en  vous  sacrifiant 
nous-mêmes,  s'il  le  faut,  pour  l'àfiermissement  de  la 
liberté. 

Que  les  violateurs  des  droits  de  la  nature  et  des 
sages  décrets  de  la  Convention  nationale  s'expli- 
quent, et  qu'enfin  nous  sachions  si  Charles  IX  et 
Louis  XIV  sont  ressuscites,  et  s'il  faut,  comme  les 
protestants  après  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes, 
nous  arracher  à  une  patrie  que  nous  chérissons,  pour 
nous  traîner  sur  des  rives  étrangères ,  en  menaient 
un  asilo  et  la  libertél  (Murmures dans  une  partie  de 
la  salle.  ) 

GuYOMABD  :  11  n'y  a  pas  d'intolérance  aemblable 
a  celle-là. 

DuMoifT  (du  Calvados)  :  Je  demande  la  parole 
pour  une  motion  d'ordre. 

GuYOMABD  :  Grégoire  doit  être  entendu  jusqu'à  la 
fin.  Toutes  les  motions  d'ordre  dans  ce  moment 
sont  des  motions  de  désordre  ;  on  aura  la  faculté  de 
répondre  après. 
GrAgoirb  :  J'en  vais  passer  la  moitié. 
Plutieun  voia  :  Non ,  non  ! 
RicHOux  :  Nous  voulons  nous  éclairer;  parle, 
Grégoire.  (Applaudissements.) 

Gréooibb  :  Un  sage  politioue  doit  calculer  d'ail- 
leurs l'esprit  et  le  caractère  d'une  natiou  ;  dans  des 
circonstances  données  et  absolument  parallèles,  il 
est  le  même.  Pendant  un  siècle ,  les  protestnnts  fb- 
rent  l'objet  d*one  perséeution  atroce  ;  oo  chassait , 


a 


on  emprisonnait,  on  pendait  leurs  ministres;  on 
flmiait  leurs  temples  ;  leurs  assemblées  étaient  trai- 
tées de  séditleusesp  Après  un  siècle  dé  tourments, 
lorsqu'à  TauroredeU  réf  olutioQ  ilspurent  respirer, 
paruMOt  tout  à  coup  trois  millions  de  protestants  eu 
France  ;  et  i'oa  mrétendrait  que  quelques  années  de 
éédamationa  et  de  violenoes  ont  changé  la  masse  des 
eîtoyenal  Non,  n*f  eroyei  pas;  la  persécution  a  froissé 
kars  opinions,  mais  elle  n*a  ni  oon?aincu  les  esprits 
wi  ôbangé  les  eœors. 

Que  raire  donc ,  dans  Timpossibilité  ni  d*éteindre 
les  principes  religieux,  ni  de  réunir  tout  à  coup  les 
cUoyens  dans  la  même  croyance?  Cest  de  garantir 
tmièrc  et  indélini$  liberlé  de  tous  Us  cuUes ,  sauf 
à  rappeler,  dans  une  Adresse  au  peuple ,  les  règles 
da  sagesse  que  commande  cetordre  de  choses»  dont 
la  direotioQsera  confiée  aux  représentante  du  peuple 
qui»  dans  les  dirers  départemente,  iront  exercer 
leursur?eillance;  par  là  vous  neutraliseres  Tinfluence 
p«litiqu«  àê  ces  eultes. 

Proposer  un  ajournement  sur  cet  acte  de  justice 
après  lequel  la  nation  soupire,  ce  serait  compro- 
mettre la  liberté  en  outrageant  tous  les  principes. 
H  est  temps  enfin  de  leur  faire  amende  honorable. 
La  philosophie  dévoue  les  persécuteurs  à  Texéeration 
de  la  postérité I  tandis  qu'elle  présente  les  fonda- 
teurs, les  défenseurs  de  la  liberté  à  Testime  de  tous 
les  siècles. 

Il  M  suffit  pas  de  passer  à  Tordre  du  jour,  motivé 
sur  rexistenec  da  la  loi ,  puisque,  malgré  la  loi ,  on 
persécute.  Il  Vagit  de  garantir  l'exercice  de  ce  droit. 
Sil  est  eneore  des  agitations  intestines,  ce  moyen  est 
k  plus  elheacc  pour  les  éteindre.  Par  là  vous  arra<* 
cherez  aux  malveillants  un  prétexte  pour  calomnier 
la  Convention  nationale  et  inquiéter  fe  peuple.  D'ail- 
leurs la  publicité  appelle  les  regards,  et  rend  Tin- 
apietibQdu  magistrat  plus  facile  que  dans  ces  réu- 
nwiis  olandeatinea  où  les  persécutés  vont  exhaler 
leur  douleur. 

Qu'aucune  rellsion  ne  prétende  usurper  la  domi- 
nation, ni  forcer  la  volonté  de  personne.  Aux  yeux 
du  législateur  elles  ont  toutes  des  droits  égaux.  11 
peut  même  interdire  hors  les  maisons  de  rassemble- 
ment des  divers  cultes  tous  les  signes  extérieurs  ;  et 
certes,  des  processions,  des  clocnes,  des  prières  en 
langues  inconnues  ne  constituent  l'essence  d'aucune 
religion.  Si  des  aristocrates,  des  malveillants  qui 
veulent  s'insinuer  partout,  se  rattacher  à  tout,  s'in- 
sinuaient dans  ces  assemblées,  l'intérêt  de  toutes 
sera  d'accord  avec  leurs  devoirs  ;  elles  s'empresse- 
ront de  les  dénoncer  à  l'autorité  dvile. 

Mais,  dira-t-on,  comment  concilier  les  jours  de 
travail  et  de  repos  consacrés  par  vos  idées  religieuses 
■veo  ceux  qu'a  établis  la  Convention  nationale  ?  La 
loi  exista*  la  loi  doit  être  exécutée  ;  tous  les  citoyens 
de  tous  lescultes,  amis  vrais  et  sincères  de  la  patrie, 
sauront  toujours  concilie/  leurs  devoirs  rebgieux 
avec  les  devoirs  sociaux,  de  manière  que  la  chose 
publiaue  n'en  souffre  pas. 

Bh.^  pourquoi  le  même  temple  qui  réunira  suc- 
ecasivement  i^  citoyens  des  divers  cultes  aux  pieds 
de  rsternel,  pour  leurs  actes  religieux,  ne  les  réuni- 
rait-il pas  simultanément  autour  de  la  statue  de  la 
Liberté,  pour  les  fêtes  civiles  et  politiques? 

ë*ll  est  une  religion  qui  s'occupe  sans  cesse  à  con- 
soler rhumanité,  en  déiendantjcelui  qu'on  outrage, 
en  soulageant  celui  qui  souffre  ;  si  elle  commande 
aux  citoyens  de  s'aimer,  de  se  respecter,  quelle  que 
soit  la  disparité  de  leurs  opinions;  si  elle  épure  la 
morale  {UPivëa  at  publique,  en  proscrivant  tous  les 
vices  qui  altèrent  rordre  social ,  en  commandant 
Ipotea  las  vertus  qui  raffermissent;  si  elle  arme 
Il  raison  ooatN  Im  aaoouaaaa  dea  passions»  lea  illu- 


sions delà  prospérité  etlestiraillementsdu  malheur: 
si  elle  agrandit  l'âme,  en  rattachant  toutes  ses  affec- 
tions au  principe  intelligent  duquel  tout  émane  ;  si 
elle  augmente  la  propension  à  faire  le  bien  par  dea 
nK)tifs  oui, suivant  Texprcssion  d'un  orateur,  reten- 
tissent dans  Favenir  ;  si,  reportant  sur  la  société  ces 
motifs  qui  émeuvent  puissamment  l'esprit  et  le 
cœur ,  elle  fortifie  l'attachement  du  peuple  pour  sea 
lois  et  sa  confiance  dans  ses  représentants;  si,  don- 
nant plus  d'énergie  ù  l'amour  de  la  république,  à  la 
haine  de  la  royauté,  elle  dispose  le  citoyen  a  se  sa- 
crifier sans  cesse  pour  celle-là  et  contre  celle-ci, 
certes  une  telle  morale  consoliderait  les  institutions 
sociales,  elle  serait  une  deç  plus  termes  colonnes  du 
gouvernement  or  tels  sont  les  sentiments  de  toutea 
les  sociétés  religieuses  qui  sont  dans  la  république. 

Voulex-vous  séréniser  les  cœurs,  répanore  la  joie 
dans  la  plupart  des  familles ,  imprimer  un  nouvel 
élan  vers  la  liberté  et  consolider  la  démocratie,  qui 
n'aura  presque  plus  de  contradicteurs?  Assurez  la 
liberté  des  oulteî. 

Ils  recevront  comme  une  grftce  l'exercice  d*un 
droit  que  personne  ne  peut  leur  ravir,  et  sans  lequel 
un  gouvernement,  de  quelque  nom  qu'on  le  décore, 
ne  sera  jamais  qu'une  tyrannie. 

Qu'à  la  voix  paternelle  de  la  Convention  nationale 
tous  les  cœurs  se  raniment  donc  et  se  dilatent.  Di- 
sons aux  citoyens  :  Sous  l'ombre  tutélaire  des  lois, 
il  voos  est  libre  d'accomplir  les  actes  de  votre  culte; 
mais  écartez  ces  dissensions  qui  ont  si  souvent  con- 
sterné la  raison,  trouble  les  peuples  et  ensanglanté 
le  monde.  Point  de  rivalité  que  celle  du  patriotisme 
et  de  la  vertu. 

Cultivez  vos  champs,  perfectionne!  les  arts,  ani- 
mez l'mdustrie ,  soignez  l'éducation  de  vos  enfants , 
qui  doivent  transmettre  aux  hommes  de  l'avenir 
1  héritage  de  la  liberté.  Quelles  que  soient  vos  opi- 
nions religieuses,  aimez- vous,  puisque  le  Père  coni" 
mun  vous  aime  tous. 

La  patrie  est  notre  mère  commune  :  autour  d'elle 
doivent  se  rallier  tous  les  cuites  également  amis  de 
l'ordre,  du  bonheur  et  de  la  gloire  nationale.  Ap- 
puyés sur  vos  vertus  et  sur  votre  courage,  vos  re- 
présentants termineront  une  révolution  glorieu<;c, 
et  le  faisceau  républicain  sera  le  lien  indissoluble  de 
tous  les  Français. 

Voici  le  projet  de  décret  ; 

•  Les  autorités  constituées  sont  chargées  de  ga- 
rantir à  tous  les  citoyens  l'exercice  libre  de  leur 
culte,  en  prenant  les  mesures  que  commandent 
l'ordre  et  la  tranquillité.  « 

Proposant  ce  projet  de  décret,  je  demande 
écrète  celui  des  fêtes  décadaires. 

Legendrb  (de  Paris)  :  Je  croyais  que  nous  étions 
assez  avancés  en  révolution  pour  ne  plus  nous  oc- 
cuper de  religion.  Si  nous  renouvelons  ces  discus- 
sions, nous  allons  ramener  les  temps  où  les  prêtres 
rétrécissaient  l'esprit  public,  et  ne  souffraient  pas 

Sue  le  peuple  pût  penser  par  d'autres  que  par  eux. 
tre  bon  mari,  bon  fils,  bon  père,  bon  citoyen,  c'est 
là  la  seule  religion  du  républicain.  (  Applaudisse- 
ments.) Le  républicanisme  est  le  complément  de 
toutes  les  vertus.  (Nouveaux  applaudissements.) 

Je  ne  prétends  point  tomber  en  masse  sur  la  classe 
des  cldevant  prêtres;  je  voudrais  que  lorsqu'ils 
manquent,  ils  fussent  punis  comme  les  autres  ci- 
toyens, sans  aucune  distinction ,  sans  aucune  quali- 
fication particulière  ;  mais  je  me  souviens  que  ce 
sont  toujours  les  prêtres  qui  ont  été  les  olus  fermes 
appuis  du  trône ,  que  c'est  au  nom  de  la  religion 
qu'on  cardinal  arma  la  main  de  Chartes  IX  pour  as- 


En 
qu'on 


S2 


sassincr  le  peuple.  (  Nouveaux  applaudissements.  ) 

Je  ne  doute  pas  des  bonnes  intentions  de  Grégoire; 
mais  je  crois  que  son  discours  pourrait  faire  beau* 
coup  de -mal.  Je  demande  Tordre  du  jour. 

L  ordre  du  jour  est  adopté  au  milieu  des  plus  viCi 
applaudissements. 

Lecarpentieb  :  Je  demande  que ,  pour  détruire 
les  impressions  €|ue  peut  faire  le  discours  de  Gré- 
goire, on  discute  a  Tinstant  le  projet  sur  les  fêtes  dé- 
cadaires. ' 

CouppÉ  (des  Côtes-du-Nord )  :  La  Convention 
s'est  assez  prononcée  en  passant  a  Tordre  du  jour,  et 
rétablissement  de  ces  fêtes  est  assez  imporUnt  pour 
qu'on  le  médite.  J'insiste  pour  le  maintien  de  Tajour* 
nement 

L'ajournement  est  maintenu ,  et  la  séance  levée  à 
trois  heures. 

SÉâNCB  DU  SOIB  DU  i^'  IflYOSB. 

Cette  séance  étoit  consacrée  au  renouvellement  du 
bureau.  Bentabole  a  obtenu ,  pour  la  présidence,  la 
pluralité  des  sufiOrages.  Les  nouveaux  secrétaires 
sont  Boucher-Saint-Sauveur,  Daunou  etChiappe  (d« 
la  Corse.) 

SEANCE   DU    2   NIYOSE* 
Préndenu  de  Bentabote, 

Vu  des  secréuires  donne  leetore  des  lettres  soi? aotcs  : 

Le$  reprétentants  du  peuple  prés  le*  ports  et  eétes  de 
Brest  et  de  Lorient  au  président  de  la  Convention  «a- 
iionoU. 

Brest,  le  t4  frimaire,  Tan^S*  de  11  répnbliqoe 
une  et  iadÎTijible. 

•  Citoyen  président»  h  la  lecture  du  décret  qui  renvoie 
au  comité  de  sûreté  génénle  4  examiner  la  ooodaite  des 
instigateurs  et  ligoataires  de  l'Adresse  présentée  au  nom 
de  la  Société  populaire  de  Rmant ,  district  de  Brest ,  nous 
pensâmes  qa*étant  à  portée  et  chargés  du  département  do 
Finistère,  noos  ne  devions  pas  négliger  les  mesures  qui 
pourraient  fournir  les  renseîgoements  nécessaires  au  co- 
mité, pour  rendre  à  la  Gonfention  nationale  le  compte 
qu'elle  lui  a  demandé. 

•  Nous  devons  rendre  à  Renant  la  jastiœ  qu*elle  mérite 
par  sa  conduite  dans  cette  circonstance;  Ton  n*a  pu  in- 
duire en  erreur  qu'un  seul  de  ses  citoyens;  encore  a-t-on 
profité  du  moment  qu'il  était  ivre  pour  extorquer  sa  signa- 
ture; les  rédacteurs  et  les  instigateurs  sont  les  intriganU 
du  i*'  bataillon  du  34*  i^giment,  qui  regrettent  le  régime 
de  Robespierre.  Nous  les  afons  ftilt  arrêter,  et  nous  ferons 
relever  le  bataillon.  Le  commandant  avait  mis  tout  en 
œuTre  pour  rappeler  les  désorginisaleurs  aux  vrais  prin- 
dpes  ;  mais  le  meneur ,  qui  est  un  sous-tleutenant ,  lui  te- 
nait léte.  et  c'est  lui  qui  avait  égaré  dixsept  de  ses  frères 
d'armes,  dont  trois  seulement  nous  ont  P«'«  J™'"^"] 
cou|>«bl^  ï  nous  adrcwons  les  pièces  au  comité  de  sûreté 
générale.     . 

•  Signé  TBéaovAiT  et  AnAaia  rAoaa  (de  la  Creuse),  t 

La  CouTcnUon  ordonna  nnierlion  de  celle  lettre  au 
Bulletin. 

Charles  Dêlaeroiw,  représentant  du  peupU  d  f^ersailles  et 
eommunes  environnantes  ^  d  la  Convention  nationale. 

Versaillei,  le  •  nivote,  Ttn  3«  de  la  république 
une  et  indivitible. 

«  Citoyens  collègues,  un  journaliste  a  couvert  d*oppro- 
bre  In  mémoire  du  dernier  maire  de  Versailles  ;  il  est  de 
non  devoir  de  rétablir  les  faits. 

«  La  confiance  de  ses  concitoyens  l'avait  fait  appeler  à 
ce  poste  honorable  ;  Il  y  a  vécu  entouré  de  leur  respect. 
Un  instant  d'Imprévoyance  ou  de  mollesse  se  perdait  dans 
cinquante  ans  de  probité,  l'étais  appelé  h  le  réparer  et 
non  à  le  punir  ;  mais  l'infortuné  n'a  pas  pu  supporter  l'i- 
AéM  de  voir  se  flétrir  dans  sa  main  la  palme  d*estime  que 
MfgoocUoyeni  lai  aillent  déiMe  1 11  a  pM  foor  «voir 


été  trop  sensible  à  cette  crainte  dn  mépris»  qnl  est  la  gi« 
rantie  la  plus  sûre  des  vertus  publiques  et  privées.  U  esl 
faux  qu*un  ofilcier  municipal  ait  disparu. 

•  J'ai  dû  réorganiser  la  municipalité  et  y  appeler  des 
hommes  capables  par  leur  énergie  et  leurs  lumières  d'épar> 
gaer  à  leurs  concttoyena  de  nouvelles  erreurs» 

•  J'ai  provisoirement  fermé  la  Société  populaire;  leiO 
thermidor  était  perdu  pour  elle;  elle  n'avait  point  eesté 
d'être  le  théâtre  de  dénonciations  incohérentes,  de  vodCé- 
rations  incendiaires  ;  elle  venait  même  d'arrêter  qo'il  tous 
serait  présenté  une  pétition  pour  réclamer  le  rapport  du 
décret  qui  fixe  le  prix  dn  blé,  comme  si  le  cultivateur 
n'avait  pas  droit  a  une  augmentation  do  produit  quand  il 
est  forcéde  quadrupler  ses  dépenses  pour  le  salaire  de  ceux 
qui  partagent  ses  travaux,  et  de  Phabitant  des  villes  qui 
pourvoit  à  une  partie  de  ses  premiers  besoins» 

•  rai  fixé  a  neuf  heures  du  antin,  les  décadis,  la  tenue 
dos  assemblées  de  section  ;  ellet  seront  nécessairement  plus 
calmes,  plus  propres  à  propager  l'esprit  public^  le  respect 
pour  les  lois ,  le  dévonesMut  a  la  patrie. 

•  Je  m'occupe  assidûment  de  la  réorganisation  des  au- 
tres autorités  oonstttoées  et  des  communes  environnantes  ; 
et  fespère  pouvoir  bientôt  rentrer  dans  votre  sein  et  par- 
tager vos  travaux. 

•  Salut  et  fraternité. 

«  U  repriêintani  du  pevpU  Caïaus  Daiàcaotx»  • 


(  La  suite  demain,  ) 


li.  B.  —  Dans  la  séance  du  8,  la  Convention  s'est  oc- 
cupée de  la  loi  sur  le  maximum  ;  après  la  discussion  l'aitir 
cle  suivant  a  été  décrété. 

•  Toutes  les  lob  portant  fixation  d'un  maximum  snr  le 
prix  des  denrées  et  marchandises  cesseront  d'avoir  leur  ef- 
fet à  compter  de  la  publication  de  la  présente  loi.  ■ 


De  Ports.  •—  On  annonce  d'Angers  avoir  été  informé, 
par  le  représentant  Ruelle,  que  les  généraux  ennemis, 
ayant  voulu  requérir  dans  plusieurs  villages  une  force  ar- 
mée de  quinze  cents  hommes  pour  aller  surprendre  un 
de  nos  convois,  les  habitants  s'y  sont  refusés  en  leur  rap- 
pelant l'amnistie  t  et  qu'en  outre  il  était  temps  de  finir  la 
guerre  ; 

Que  le  lendemain,  35  frimaire,  les  généraux,  brigands 
et  chouans,  se  sont  assemblés  pour  délibérer  sur  le  parti  à 
prendre,  d'après  la  proclamation  de  la  Convention,  dont 
ils  avaient  connaissance  ; 

Qu'il  venait  de  mettre,  lui  représentant,  toute  la  famille 
Cbaretie  en  liberté  ;  que  cette  mesure  avait  déterminé  la 
sœur  et  les  autres  parents  de  ce  dernier  d'aller  le  trouver, 
pour  lui  persuader  qu'il  n'y  avait  aucun  danger  de  revenir 
au  sein  de  la  mère-patrie  ; 

Et  qu'en  attendant  le  résultat  de  cette  démarche,  une. 
troupe  de  brigands  s'est  présentée  à  Ancenis,  sur  la  rive 
gauche  de  la  Loire;  qu'ils  ont  demandé  une  barque  pour 
se  rendre ,  et  qu'une  trentaine  s'est  effectivement  rendue* 


LIVRES  DIVERS. 

Cange,  ou  U  Comnuuionnait'e bienfaisant, Xnit  historique 
en  UQ  acte ,  représente  pour  la  première  fois  sur  le  théâtre 
de  la  Cité- Variétés ,  le  10  brumaire  de  la  S*  aooée  républi» 
caine.  Pris  :  tO  sous  ;  et  se  Tend  au  profit  du  citoyen  Cange, 
ches  Plassan,  libraire,  rue  du  Cimetière^André-dea-Arcs , 
n*l0. 

Cette  pièce,  dont  nous  avons  rendu  compte  dans  le  n®  44 
de  cette  feuille  (article  Spectacles),  est  des  citoyens  Viller  ei 
Gouffé, 


PayemenU  à  la  trésorerie  nalionale. 

Le  payement  du  jperpétuel  est  ouvert  pour  les  sis  pre- 
miers mois  ;  il  sera  fait  à  tous  cens  qni  seront  porteurs  d*iik> 


scriptions  au  ^and  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères  eA 
de  buil  mois  vugt  et  un  jours  de  rannée  1793  ('  ' 


^^) 


GAZETTE  NATIONALE  »„  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

!!•  95.  Quintidi  6  Nivosb,  Fan  8«.  {Jtudi  26  Décembre  1794,  vieux  style,) 


POLITIQUE. 

DANEMARK. 

Copenhapte  te  h  décembre,  —  La  frégate  danoise  U 
Kronàsurg,  ayant  voulu  sortir  du  port  de  Bergen  en 
Horwége,  y  a  été  ramenée  par  les  Tents  contraires.  Lors- 
qu'elle t  été  forcée  à  regagner  le  port»  quatre  frégates 
françaises  qui  s*y  trouvent  lui  ont  proidigué  tous  les  secours 
qui  étaient  en  leur  pouvoir.  Le  commandant  des  frégates 
française!  a  en  outre  donné  une  (été  au  chef  de  la  fr^te 
danoise. 

Outre  les  quatre  frégates  qui  sont  à  Bergen ,  il  y  en  a 
froif  autres  à  Risoer,  qui  seront  renforcées  de  trois  nou- 
Tellcf. 

—  La  cour  fient  de  promettre,  par  forme  d*eDcoura- 
pement,  à  tous  ceux  qui  feront  des  armements  pour  la 
grande  pèche  au  détroit  de  Davis  et  vers  le  Spitzberg ,  une 
prime  de  8  rixdalers  par  last  de  commerce,  pendant  cinc^ 
années  consécutives,  pourvu  que  le  port  des  navires  aille 
1 180  lasts  de  commerce. 

—  On  écrit  de  SoédeqQe  Tamiral  Krasenstiemest  mort 
I  Garlscrona. 

—  La  province  suédoise  d*Ostrogothie  a  remercié  la 
eour  de  Stockholm,  par  Torgane  d'une  députation|  deses 
loins  à  maintenir  la  paix  au  dedans  et  au  dehors. 

—  Six  cents  hommes  travaillaient  depuis  un  an ,  en 
Suède»  au  canal  de  la  fameuse  cataracte  de  Frollbatia  ;  ils 
viennent  d*étre  relevés  par  un  bataillon.  Ce  canal  est  le 
eommenoement  d*une  communication  par  eau  k  établir 
entre  StpcUioIm  et  Golhenbourg. 

ALLEMAGNE. 

Deêfrontiéret  de  Moravie^  (e  15  novembre,-'  On  assure 
qu*il  règne  à  Constantinople  une  grande  fermentation.  Le 

Sind  visir  a  été  déposé.  Son  successeur  est  Isel-Méhémet, 
-devant  pacha  du  Caire.  Celui-ci  est  arrivé  le  30  octobre 
ft  Constantinople,  et  a  été  aussitôt  installé.  C^estun  homme 
de  quarante-cinq  ans,  qu*on  dit  plein  d'ardeur,  etrenommé 
pour  ses  lumières.  On  sait  <fu*il  est  Pami  intime  du  reis- 
effendl  et  du  eapitan-pacha.  Comme  ces  deux  derniers  ont 
toujours  naru  portés  à  la  guerre ,  on  en  infère  que  les 
préparât!»  actuels  ne  sont  pas  sans  objet. 

Extrait  d^une  lettre  de  Raiitbonmef  du  IS  décembre»-^ 
Les  collèges  ont  délibéré,  le  5  de  ce  mois,  à  la  diète,  sur 
la  question  de  savoir  •  Si  et  comment  Pempire  d'Allema- 
gne peut  entrer  en  négociations  de  paix  avec  la  France.  • 

•  La  grande  majorité  des  wffrages  tend  ft  prier  l'empe- 
reur de  Bégodert  le  plus  tôt  possible»  avec  Tassistance  de 
ect  alliés,  une  soipeoaioo  d'armes,  ai  la  France  veut  y 
€Oiifentir« 

CVtt  aujourd'hui  qu'on  doit  coutiuner  de  recueillir  les 
euffrages  dci  trois  eolléges.  Dans  celui  des  électeurs,  ceux 
es  Bohème  et  de  Hanovre  n'ont  pas  encore  votéi  dans  ce- 
lui des  princes  il  y  a  eu  cinquante-cinq  votes  i  celui  des 
f  iUcf  impériales  n'a  encore  émis  aucune  opinion. 

-CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Bentabole, 

SuiU  de  Vopinion  $ur  lee  causes  de  Vêlai  présent 

du  eommetee  ei  de  Vinduslrie ,  et  les  moyens  de 

Us  rétablit  sur  les  véritables  bases  de  C économie 

politique^  prononcée  par  Eschassériaux  aine, 

dans  Vune  des  précédentes  séances. 

•.    Cest  en  vain  que  l'ignorance  et  la  tyrannie  conjureraient 

pour  l'anéantir  ;  c'est  en  vain  que  tous  les  faux  principes 

.feraient  ligués  pour  le  perdre  :  on  pourrait  le  décourager, 

'ttais  jamais  le  détruit;  il  renaîtrait  sous  la  hache  des  ty- 

Ttni  et  des  principes  destructeurs, 

*  Veyet  les  eou|>s  que  lui  ont  portés,  h  diverses  époques  j 
et  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes,  qui  chassa  les  arts, 

immola Tindustrie  au  fanatisme,  et  le  système  insensé  de 
Law,  qui  subvertit  toutes  les  fartuneteoBunerciales;  dans 

dmimnim  unff«i  ^  ^nHib  p«ifde  dt  eoimmos  nûdn 
V  Série.  "^TamêX. 


è  l'Angleterre  par  une  cour  corrompue  ;  voyei  toutes  leO 
plaies  que  lui  ont  laites  l'ignorance  et  les  crimes  des  mi* 
oistres,  nos  lois  anciennes,  nos  privilèges  «  nos  prohibi* 
lions,  nos  chaînes;  il  a  survécu i  tout;  et,  quoiqu'il  ait 
MHiflreri  encore  dans  la  révolution,  impatient  de  réparer  set 
pertes ,  génie  bienfaisant  de  la  patrie,  il  reprend  ses  forces 
pour  s'élancer  sur  les  mers,  et  chercher,  sous  le  pavillon  de 
la  liberté,  les  besoins  d'une  grande  république  victorieuse. 

Mais  je  m'arrête  un  moment,  citoyens;  le  génie  de  la 
démocratie  me  commande  ici  de  prononcer  sur  ses  craintes 
politiques;  et  permeltex-moi  encore  quelques  réflexions. 

Le  jugement  de  quelques  écrivains  éclairés,  anciens  et 
modernef ,  un  poêteioélèbre,  qui  a  écrit  sur  le  tombeau 
d'une  grande  république  les  causes  de  sa  ruine,  ont  accusé 
le  commerce  et  le  luxe.  Les  esprits  qui  ont  l'habitude  d*at* 
tribuer  à  des  causes  étrangères  ce  qui  est  l'effet  des  vices 
des  gouvernements  ont  cru  voir  aussi,  dans  le  luxe  qui  est 
amené  par  le  commerce  et  les  arts,  la  chute  des  Etats  et 
des  empires;  quelques  hommes,  dans  notre  révolution, 
ont  saisi  ces  préjugés  pour  justiâer  les  maux  qu'ils  avaient 
faits  an  commerce  ;  il  est  du  devoir  du  législateur  de  ras- 
surer l'austérité  républicaine  qui  pourrait  s'alarmer  de  ces 
faux  principes  transmis  jusqu'à  nous. 

Non,  ce  n'est  point  le  commerce  qu'il  faut  accuser  des 
maux  du  luxe;  c  est  l'oisiveté  des  peuples  chei  qui  le  luxe 
a  fait  des  ravages,  ce  sont  leurs  mauvaises  institutions.  Il 
perdit  les  Romains,  parce  qu'il  entra  dans  Rome  par  un 
commerce  de  rapine  etile  brigandage ,  et  qu'il  ne  fut  point 
l'ouvrage  de  l'industrie  des  citoyens  ;  il  eût  également 
renversé  Sparte,  où  les  lois  de  Lycurgue  avaient  désho- 
noré le  travail  en  l'abandonnant  aux  mnios  des  esclaves. 

Ce  ne  fut  point  dans  les  ateliers  de  Rome  que  furent 
tissus  ces  ornements  précieux  dont  se  couvrait,  au  déclin 
de  la  république ,  l'orgueil  patricien  et  la  parure  des  fem* 
mes  romaines.  Il  n'y  eut  des  Âpicius  et  des  LucuUus, 
des  Messalinesetdes  Poppées,  que  lorsque  la  conquête  eut 
entassé  dans  Rome  les  riches  dépouilles  de  l'Asie ,  et  que 
cette>ille  regorgea  de  l'or  des  nations  :  ce  fut  alors  qu'un 
peuple  oisif,  qui  ne  se  repaissait  plus  que  de  jeux  et  de  - 
s|>ectacles,  aspira  les  richesses  qu'il  n'avait  point  gagnées 
par  le  travail ,  qu'il  vendit  sur  la  place  publique  ses  suffra- 
ges à  l'ambition,  et  que  la  liberté  fut  perdue. 

Mais  les  nations  laborieuses,  les  nations  chei  qui  le  tra- 
vail est  honoré  comme  la  première  vertu  du  citoyen,  les 
nations  qui  sont  ramenées  toujours,  par  leurs  institutions, 
vers  le  travail ,  ne  doivent  point  craindre  également  le 
commerce  et  le  luxe  :  ce  ne  furent  point  eux ,  ce  furent  les 
divisions  qui  perdirent  Athènes,  lorsqu'elle  transportait 
sur  ses  galères  les  ouvrages  de  ses  arts  dans  les  villes  de 
l'Asie-Mioeure,  dans  la  Grèce  et  dans  les  lies  de  la  Méditer- 
riuée  ;  ce  ne  furent  point  le  commerce  et  le  luxe,  mais  la 
jalousie  d'une  faction  puissante,  l'injustice  du  sénat  et  les 
fautes  d'Annibal  qui  détruisirent  Carthage  t  sans  cela, 
Rome  n'aurait  été  peut-être  qu'une  colonie  carthaginoise, 
etn*eùt  point  asservi  l'univers. 

La  corruption  elle  travail  ne  marchent  jamais  ensemble; 
lef  arts  du  luxe  ne  sont  funestes  qu'aux  peuples  oisifs ,  déjà 
corrompus  par  leurs  institutions,  et  dont  les  mains  ne  l'ont 
point  préparé  :  c'est  alors  que  le  coniact  leur  en  devient 
dangereux;  c'est  alors  qu'éblouis  d'abord,  enivrés  bientôt 
par  son  éclat  étranger,  ils  s'endorment  avec  lui  dans  les 
voluptés  et  les  plaisirs,  d'où  ils  ne  se  réveillent  que  pour 
être  précipités  dans  les  chaînes  de  la  servitude. 

Vous,  dont  l'austérité  des  principes  ou  les  préventions 
redoutent  le  commerce,  parce  qu'il  traîne  l'appèt  du  luxe 
à  sa  suite,  voyez  les  premiers  hommes  réunis  qui  figurent 
sur  le  globe;  voyex  l'instinct  de  la  nature  et  le  besoin  de  la 
société  les  entraîner  à  la  découverte  des  côtes,  des  golfes,, 
des  mers ,  pour  transporter  dans  leurs  contrées  les  produc- 
tions et  les  richesses  des  contrées  étrangères  ;  voyei  Tin* 
dustrié,  presque  dès  l'enfance  du  monde,  regardant  avec 
avidité  autour  d'elle,  sonder  les  golfes  et  les  mers,  gravir 
les  montagnes,  fouiller  dans  les  entrailles  delà  terre,  pour 
y  chercher  les  éléments  du  commerce;  voyei  le  commerce 
.  affrontant  tous  les  dangersd*une  navigation  faible  et  ineer- 
I  ttine«  firanchir  des  promoutoire^  et  poursuif ra  de  long» 

6 


84 


Toyages  pour  s'emparer  d*uiie  anse,  établir  uo  port ,  bâtir 
une  ville  ou  fonder  unecolouie  ;  Toyex  les  arts  naître  à  me- 
sure que  les  établissements  se  perfectionnent,  et  parcourir 
la  terre;  voyeila  nature  elle-même  donner  Texempleaui 
hommes,  aui  EUts,  en  créant,  en  traTaillaot  sans  cesse, 
en  s*eotoarant  de  toutes  les  productions  diverses.  Eh  quoi  ! 
les  progrès  de  la  société  pourraient-ils  donc  lui  devenir 
funestes  I  Le  génie  de  Tbomme  serait-il  donc  en  contradic- 
tion avec  le  bonheur  ?ers  lequel  le  dirige  la  nature? 

Le  commerce  produit  le  luxe  malfaisant  :  eh  bien,  t  la 
mer  engloutit  quelques  Taisseaui,  a  dit  un  grand  politi- 
iiue ,  et  cependant  elle  est  utile  aui  hommes,  t  Faut-il 
donc  renoncer  au  commerce  à  cause  du  luxe  ?  PTest-il  pas 
la  source  des  premiers  biens  de  la  terre?  Il  transporte  le 
travail  dans  la  vie  oisive,  la  civilisation  dans  Tétat  bar- 
bare, la  culture  dans  les  pays  arides,  un  climat  dans  un 
autre,  en  rendant  communes  les  productions  et  les  riches- 
ses de  toutes  les  contrées;  il  donne  partout  une  direction 
salutaire  h  l'esprit  htmiain.  Voyet  les  nations  qui  ont  eu  le 
malheur  de  ?iTre  oisives  se  dérorer  par  des  guerres  af- 
freuses, et  se  consumer  dans  les  maux  du  fanatisme. 

Si  vous  craignez  parmi  tous  les  aru  du  luxe  qui  sont  les 
enfants  du  commerce,  que  des  institutions  sages  et  sévè- 
res, au  sortir  des  mains  de  Tiodustrie,  s*empressent  d*en 
transporter  le  siège  chez  les  nations  dont  le  luxe  est  la  pa« 
rure  des  rangs  et  ralimeotde  Torgueil  :  les  esclaves  en  au* 
ront  toujours  besoin  pour  décorer  leurs  fers. 

Telle  est  aujourd'hui  la  oâture  des  choses,  qu'une  na- 
tion dans  TEurope  commerçante,  qui  aurait  Timprudence 
de  détruire  ou  de  négliger  son  commerce ,  descendrait 
bientôt  de  son  rang  politique  parmi  les  autres  nations. 

Dans  un  élat  social  peu  avancé,  où  le  temps  n'aurait  pu 
développer  encore  les  progrès  des  lumières  et  des  arts,  où 
la  puissance  physique  des  peup^  se  bornerait  k  leur  terri- 
toire, la  paurreté  d'une  nation  serait  peut-être  un  des 
meilleurs  garants  de  son  indépendance;  mais,  à  cette  épo- 
que où  le  génie  et  Tiodustrie  sont  les  créateurs  de  la  po- 
pulation ,  des  richesses  et  de  tous  les  moyens  de  défense  des 
nations,  la  pauvreté  ne  serait  plus  un  rempart  pour  la  li- 
berté ;  la  force  et  la  puissance  seront  toujours  entre  les 
nains  des  peuples  qui  auront  du  commerce  et  des  arts. 
C'est  le  commerce  qui  créa  les  républiques  de  Venise ,  de 
Gènes,  qui  a  placé  les  Hollandais  au  rang  des  peuples, 
qui  appelle  les  Américains  ft  la  grandeur  :  une  des  plus 
grandes  nations  du  Nord ,  celle  dont  l'ambition  et  Tagran- 
dissement  doivent  peut-être  un  jour  alarmer  TEurope, 
doit  9on  existence  politique  et  sa  puissance  au  progrès  qu'a 
fait  son  commerce  depuis  un  siècle. 

Citoyens ,  j'ai  cru  devoir  faire  précéder  de  ces  lumières 
politiques  la  question  importante  que  j'agite  devantTous. 

Chez  un  peuple  républicain,  chez  un  peuple  qui ,  pour 
se  régénérer,  a  besoin  de  rompre  les  liens  de  toutes  les  er- 
reurs, le  jour  de  toutes  les  vérités  doit  luire,  et  on  est  plus 
sûr  de  sa  marche  quand  on  suit  les  traces  de  l'expérience. 

Il  me  reste  maintenant  à  vous  montrer  les  causes  qui 
ont  détruit  notre  commerce  dans  l'intérieur,  celles  qui 
s'opposent  à  ses  progrès  au  dehors.  Je  rétablirai  ensuite  les 
bases  de  l'économie  politique  de  tout  peuple  commerçant, 
surtout  de  celle  qui  convient  le  mieux  k  notre  territoire  et 
à  noire  situation  politique  en  Europe. 

Pour  arriver  à  la  liberté,  il  a  fiillu  donner  à  la  révolu- 
tion une  espèce  de  dictature  sur  les  règles  ordinaires;  mab 
si  nous  Toulons  parvenir  promptement  à  la  prospérité  na- 
tionale', il  faut  retourner  aux  principes  :  la  société , 
comme  la  nature,  ne  marche  que  par  des  lois  constanleà  ; 
tout  est  désordre  quand  on  en  rompt  le  cours  :  en  fait  de 
commerce  surtout ,  chaque  infraction  d'un  principe  est 
marquée  par  un  embarras  ou  une  détresse.  Il  laut  donc 
rendre  au  commerce  sa  liberté,  ses  éléments,  ses  encoura- 
gements, ses  lumières  ;  et  telles  sont  nos  espérances  que, 
pour  le  Toir  prospérer  bientôt,  nous  avons  plus  d'entraves 
à  briser  que  de  lois  à  faire. 

Si  nous  jetons  les  yeux  autour  de  nous,  et  que  nous 
examinions  l'état  du  commerce  intérieur,  nous  le  voyons 
«iTironné  de  tous  les  obstacles  et  de  tous  les  décourage- 
1  qui  peuvent  arrêter  sa  marche,  et  Jeté,  par  les  év6- 


Maém  h  son  eiat  d'aclivité  WoreUe, 


Une  expositioD  franche  de  notre  état  commerçai  et  de 
notre  économie  intérieure  tous  éclairera  mieux  qu'une 
longue  discussion  sur  des  vices  que  vous  avez  aperçus  déjà. 

Gomment  voulez-rous  que  le  commerce  et  l'industrie 
renaissent  lorsqu'une  situatidh  politique  extraordinaire  a 
fiiit  mettre  longtemps  les  vrais  principes  en  problème; 
lorsque ,  par  une  interversion  politique,  un  système  vi- 
cieux,des  circonstances  imprévues,  ont  rendu  le  gouver* 
nement  le  manufacturier,  le  commerçant  général  d'un 
Etat;  lorsqu'une  commission  executive,  concentrant  trop 
en  ses  mains  tous  les  éléments  du  commerce,  a  enlevé  aux 
arts  leur  industrie,  à  l'intérêt  ses  spéculations ,  à  l'acti vite 
ses  travaux  productif;  lorsque  l'industrie  nationale, 
frappée  dlnaction ,  n'a  pu  inTenter,  agir  que  par  l'impuU 
sion  et  les  secours  du  gonvemeraent  ;  lorsque  celui  qui 
fabrique,  exploite,  importe,  se  ruine  en  voulant  travail- 
ler et  spéculer  ;  lorsque,  par  la  nature  des  choses,  la  ma- 
tière brute  est  devenue  plus  chère  que  le  prix  de  la  matière 
perfectionnée  ;  lorsqu'une  mesure  forcée,  en  .dévorant  la 
racine  de  l'arbre  du  commerce,  en  dessèche  le  tronc  et  les 
branches,  et  que  presque  tous  les  genres  d'objets  decom* 
merce  et  de  subsbtanœ  sont  arrêtés  dans  les  canaux  qu'ils 
devraient  parcourir  rapidement  ? 

Lorsqu'à  ces  Tices  d'adihinistralion  se  joignent  encore 
d'autres  causes  également  meurtrières;  lorsqu'une  grande 
masse  de  domaines  de  l'Etat  est  soumise  à  une  régie  dis- 
pendieuse, à  une  exploitation  incertaine ,  et  entraîne  des 
non-Taleurs  immenses  pour  le  revenu  public  ? 

Lorsoue  la  multiplicité  du  signe  a  rompu  toutes  les 
proportions  entre  les  objets  qu'il  représente,  a  rendu  les 
updations  du  change  ruineuses,  coupé  les  relations  exté- 
rieures du  commerce;  quand  la  ruine  de  l'industrie  natio- 
nale, nous  rendant  forcément  tributaires  de  l'industrie  des 
autres  nations,  a  rompu  toute  balance  commerciale,  et 
nous  oblige  d'aller  prendre  tous  nos  besoins  ches  les  autres 
peuples  ? 

En6n ,  lorsque  le  commerce  étranger  éprouve  des  ob- 
stacles et  des  lenteurs  dans  nos  ports ,  que  les  commissions 
executives  agissent  sans  concert,  et  que  les  rênes  des  ad« 
ministratîons  ne  sont  pas  rattachées  à  un  centre  unique  et 
toujours  actif? 

Citoyens,  voilà  nosmaux  :  vous  les  connaissez  ;  tous  en 
avez  le  remède  dans  vos  mains  ;  hStez-vous  de  les  faire 
cesser;  h&tez-vous  de  détruire,  si  vous  croyez  le  pouvoir 
sans  danger,  un  système  d'administration  que  des  circon- 
stances Tiolentes  ont  créé,  mais  qui  ruinerait  la  nation  en 
entraînant  ses  richesses  chez  l'étranger;  un  sy.stème  qui  a 
découragé  et  tari  toutes  les  sources  de  fécondité  et  d'in- 
dustrie, qui  a  enlevé  la  confiance  au  commerce,  a  para- 
lysé ses  capitaux,  a  vexé  et  eifrayé  le  spéculateur  bounêlo 
pour  favoriser  les  crimes  du  spéculateur  avide. 

Si  la  natOre  de  notre  position  vous  force  de  conserver 
encore,  pour  quelque  temps,  quelques  éléments  de  cet 
ordre  de  choses,  détruisez  le  reste;  ne  laissez  snbsister 
que  les  instruments  nécessaires  aux  besoins  de  nos  armées 
victorieuses  et  de  la  république;  brisez  tous  les  obstacles 
qui  enchaînent  la  reproduction  et  la  circulation,  sans  les- 
quelles vous  ne  pouvez  attendre  de  commerce  intérieur  ni 
de  prospérité  ,  et  avec  lesquelles  nous  pouvons  donner 
une  grande  valeur  à  notre  monnaie  nationale,  et  relever 
le  cràit  public  (La  iuite  demain,) 


SUITE  A  LA  SEANCE  DU  2  MVOSE. 

Les  administrateurs  du  district  de  Mâcon ,  dépar- 
tement de  Saône-et-Loire ,  félicitant  la  Convention 
nationale  de  ses  glorieux  travaux.  Ils  l'invitent  à 
rapporter  les  lois  qui  entravent  le  commerce ,  em* 
pécnent  la  libre  circulation,  et  nuisent  aux  échanges 
entre  particuliers,  lis  applaudissent  aux  mesures 
vigoureuses  qu'elle  a  prises  pour  assurer  le  bonheur 
du  peuple. 
Les  représentanU  du  peuple  près  les  armées'  d$ê 

Côtes  de  Cherbourg  et  de  Bresi^  et  départemiuU 

twoirùnnaïUStau  président  de  la  Convention  na-^ 

tionale. 

Rennes,  le  S7  firimaire,  l'an  3*  de  la  répabli^ 
«ne  et  indivisible. 

«QtoyenooUègiief  notre  eoUègtieLtDJQiDtis  vient  de 


S5 


if  Jeter  dans  IHM  bru  et  nous  demander  sûreté  pour  se 
rendre  à  Paris»  et  il  doit  se  mettre  k  la  disposition  de  la 
Gonrention  naUonale. 

•  Noos  t*enf  ojoDS  expédition  do  sau  tondait  que  noos 
venons  de  lui  délirrer*  et  nons  t'invitons  4  en  donner  oon- 
aaissance  à  rassemblée. 

«  Envoyés  pour  propager  les  principes  de  Justice  qui 
doivent  ratiier  tous  les  Français,  nous  nous  sommes  em- 
pressés de  les  appliquer  à  un  collègue  que  la  Convention 
nationale  a  déjà  soustrait  au  décret  de  circonstance  qui 
Tavait  frappé,  et  sur  lequel  elle  a  d'ailleurs  ordonné  qu*il 
serait  Incessamment  fait  un  rapport* 

•  Salut  et  fraternité. 

«  Signé  GoBamoa^  Goniioet  Bollst.  t 
La  Convention  nationale  décrète  le  renvoi  au  co- 
mité de  sûreté  générale. 

JoHAififOT,  au  nom  des  comités  de  salut  public , 
de  sûreté  générale ,  de  législation ,  de  commerce  et 
des  finances  :  Après  avoir  dissipé  les  orages  qui 
s'étaient  formés  sur  Thorizon  politique  de  la  France, 
vous  voulez  assurer  enfin  à  la  nation  qui  vous  a 
confié  ses  destinées  le  bonheur ,  l'ordre  et  la  tran- 
quillité; vous  voulez  connaître  notre  situation,  nos 
moyens  et  nos  ressources ,  et  fonder  un  gouverne- 
ment juste  sur  des  bases  inébranlables. 

Pour  exécuter  un  plan  si  di^ne  de  vous ,  ce  n'est 
point  â  quelques  parties  isolées  de  l'ouvrage  que 
vous  entreprenez,  mais  à  toutes  ensemble,  qu  il  faut 
s'attacher. 

Des  lois  de  détail  sur  les  finances,  le  commerce  ou 
l'agriculture ,  quelque  bonnes  qu'elles  fussent  en 
elles-mêmes,  deviendraient  absolument  nulles,  si 
elles  ne  se  liaient  à  un  système  général  de  réforme 
et  d'amélioration. 

Pour  diriger  vers  un  but  grand  et  utile  l'ensemble 
de  Tadmfnistration ,  il  faut  se  placer  à  cette  hauteur 
d*où  on  peut  embrasser  à  la  fois  toutes  ses  parties, 
et  parcourir  successivement  leurs  dépendances  et 
leurs  rapports. 

'  Les  grands  mouvements  des  empires  tiennent 
presque  tous  aux  finances;  c*est  donc  vers  les  finan- 
ces que  doivent  se  tourner  nos  premières  vues  : 
Tagriculture ,  le  commerce  et  le  crédit  les  occupe- 
ront ensuite. 

Les  relations  extérieures  appelleront  à  leur  tour 
notre  attention. 

Il  faudra  traiter  de  l'esprit  public ,  de  la  nécessité 
et  des  moyens  de  fixer  ses  incertitudes  :  ces  ques- 
tions importantes  nous  conduiront  peut-être  à  en 
résoudre  plusieurs  autres. 

Si  nous  voyons  dans  la  marche  trop  vacillante 
du  gouvernement  les  principales  causes  de  nos 
ro^ux,  nous  trouverons  dans  sa  stabilité  leurs  véri- 
tables remèdes. 

Nous  ne  venons  point  jeter  des  alarmes,  ni  dé- 
courager vos  généreuses  intentions  :  toutes  les  er- 
reurs peuvent  être  focilement  réparées,  et  c*est  pour 
cela  qu*on  i^e  craint  point  de  les  découvrir. 

L'Euro|)e ,  liguée  contre  nous ,  fuit  devant  nos 
armées  triomphantes  :  nous  ne  craindrons  pas  de 
parler  devant  elle  des  fautes  que  nous  pourrions 
avoir  commises.  Cet  aveu  annonce  la  volonté  de  les 
réparer  toutes  :  qu*il  soit  pour  nous  le  présage  de 
nouvelles  victoires;  qu'il  soit  pour  nos  ennemis  le 
signal  de  nouvelles  défaites! 

La  première  question  des  finances  qui  occupe  le 

Elus  les  esprits  dans  ce  moment  est  celle  de  la 
ausse  des  aenrées  et  marchandises. 
'  Une  opinion  assez  générale  n'attribue  l'embarras 
de  notre  situation ,  l'avilissement  de  notre  change , 
et  tous  les  inconvénients  qui  en  sont  la  suite,  qu'à 
li  trop  grande  abondance  des  assignats  ;  l'on  se 
fonde  sur  ce  principe  que,  dès  que  le  signe  se  mul- 
tiplie» la  valeur  qu'il  représente ,  décroît  en  propor- 


tion, et  que  le  prix  des  denrées  s'élève  dans  nne  me- 
sure  progressive. 

L'on  croit  s'opposer  efficacement  au  principe  de 
nos  maux  en  retirant  une  certaine  quantité  d'assi* 
gnats  et  en  cherchant  à  rapprocher  la  masse  du  pa« 
pier-monnaie  en  circulation  de  celle  de  l'ancien  nu- 
méraire qu'il  a  remplacé. 

Cette  opinion  est  fondée  à  quelques  éeards;  on  ne 
niera  point  que  l'excessive  émission  des  assignats 
ne  puisse  avoir  une  influence  dangereuse  sur  ropi- 
nion  qu'on  attache  à  leur  valeur,  et  qu'il  ne  résulte 
un  bien  réel  de  leur  diminution  opérée  avec  pru- 
dence, et  par  des  moyens  que  la  plus  rigoureuse 
équité  puisse  avouer. 

Mais  qu'on  ne  s'y  trompe  pas  :  cette  mesure  par- 
tielle n'aura  jamais  que  des  effets  bornés;  elle  ne 
sera  qu'un  palliatif  à  des  plaies  profondes  qu'il  fout 
sonder  plus  avant  pour  les  guérir. 

Les  assignats ,  quelle  que  soit  leur  masse,  repo- 
sent pourtant  sur  une  hypothèque  supérieure ,  et 
dont  la  valeur  augmente  a  mesure  qu'on  les  multi- 
plie. 

C'est  à  cette  progression  suivie  et  correspondante 
entre  le  cours  de  la  monnaie  républicaine  et  le  prix 
des  propriétés  nationales ,  que  nous  devons  ces  res- 
sources inépuisables  qui  ont  étonné  l'Europe  et 
préparé  les  triomphes  de  quatorze  armées. 

La  prudence  exige  que  nous  ne  hasardiotis  rien 
qui  affaiblisse  la  confiance  due  à  notre  papier  et  à  la 
valeur  du  gage  qui  en  fait  la  sûreté  ;  les  moindres 
ombrages  peuvent  avoir  des  conséquences  funestes. 
L'expérience  n'a  que  trop  prouvé  que ,  dans  les 
temps  les  plus  paisibles ,  toute  atteinte  aux  mon- 
naies amenait  des  secousses  dangereuses  dans  les 
empires. 

Il  est  rare  que  des  administrations  qui  osent  ten- 
ter une  pareille  mesure  ne  soient  accusées  d'infidé- 
lité, d'imprudence  ou  d'impéritie.  En  effet,  dès  qu'on 
répand  le  bruit  d'un  changement  quelconque  dans 
le  signe ,  les  esprits  s'alarment ,  la  confiance  dispa- 
raît ,  tous  les  intérêts  particuliers  se  mettent  en 
défense  contre  le  gouvernemeut;  on  se  hâte  de  con- 
vertir en  valeurs  certaines  le  signe  menacé  d'une 
altération,  et  de  là  doit  provenir  nécessairement  une 
hausse  subite  dans  le  prix  de  toutes  les  denrées  et 
marchandises.  Ces  ooservations ,  tant  de  fois  justi- 
fiées par  l'événement ,  se  vérifient  encore  sous  nos 
yeux;  et  les  alarmes  conçues  au  seul  soupçon  d'une 
nouvelle  mesure  relative  aux  assignats  ont  déjà  pro- 
duit plus  de  mal  que  leur  diminution  ne  peut  pro- 
duire d'avantages. 

On  n'ignore  pas  que  nous  sommes  obligés  d'en 
émettre  une  certaine  quantité  tous  les  jours  pour 
suffire  à  nos  besoins.  Quelle  solidité  trouvera-t-on 
dans  ces  nouveaux  assignats ,  si  les  anciens  subis- 
sent tant  de  métamorphoses? Les  exemples  du  passé 
ne  feront-ils  pas  naître  de  justes  craintes  pour  l'a- 
venir? 

Dans  cette  situation  critique ,  qui  ne  peut  se  pro- 
longer sans  les  plus  grands  dangers,  il  faut  présen- 
ter sans  délai  des  moyens  équitables  et  libres  de 
faire  rentrer  des  assiguats ,  en  écartant  tout  ce  qui 
porterait  atteinte  au  crédit  et  à  la  bonne  foi. 

Mais  il  faut  en  même  temps  détruire  les  préven- 
tions de  ceux  qui  attribuent  tous  nos  maux  unique- 
ment à  la  masse  des  assignats. 

La  première  année  ae  notre  république  fournit 
une  preuve  frappante  que  ce  n'est  point  à  leur  masse 
plus  ou  moins  grande  qu'il  faut  attribuer  leur  prin- 
cipal discrédit. 

Quand  Dumouriez  finit  avec  tant  d'ignominie  une 
campagne  qu'il  avait  commencée  avec  gloire,  après 
cette  honteuse  retraite  de  la  Belgique,  nos  assignats 
perdirent  plus  qu'ils  ne  perdent  en  ce  moment  9  et 


te 


of  pendant  leur  circulation  était  alors  moindre  de 
moitié. 

Quelles  furent  les  causes  de  cette  chute  rapide  de 
ncs  assignats? 

Elles  se  trouvent  aisément  dans  l'inquiétude  de 
tous  les  esprits ,  dans  les  orages  qui  menaçaient  le 
berceau  de  la  république,  dans  Tinstabilité  de  Topi- 
iiion  qui  flottait  sans  cesse  entre  les  factions  diver- 
ses sans  savoir  où  se  fixer;  en  un  mot,  dans  le  défaut 
de  principes  «  sans  lesquels  il  n'existe  ni  sûreté  ni 
cunliance. 

Nous  verrons,  en  traitant  de  Tesprit  public,  que, 
si  ces  motifs  accessoires  n'avaient  eu  en  divers  temps 
une  influence  plus  ou  moins  funeste  sur  le  crédit  de 
nos  assignats ,  aucun  motif  réel  n'aurait  dû  Tébran- 
1er.  Des  calculs  certains  attestent  aue  leur  hypothè* 
que  excède  15  milliards.  Cette  évaluation  est  fondée 
sur  les  revenus  effectifs  des  biens  nationaux ,  tels 
qu'ils  sont  entrés  au  trésor  public  ; 

Savoir  :  en  germinal,  30  millions  852,000  livres  ; 
en  floréal,  %4  millions  189,000  livres;en  prairial, 26 
millions  358,000  livres,  en  messidor ,  26  millions 
688,000  liv.; en  thermidor,  24  millions  10»000liv.; 
en  fructidor,  25  millions  168,000  liv.;  d'où  il  résulte 
que  le  revenu  d'une  année  de  biens  nationaux  inven- 
aus  est  d'environ  800  millions,  qui,  calculés  au  de- 
nier 40,  prix  auquel  se  vendent  communément  les 
domaines  nationaux ,  présentent  une  valeur  réelle 
de  12  milliards.  11  est  vrai  que,  dans  les  revenus  in- 
diqués ci -dessus,  se  trouvent  confondues  quelques 
recettes  provenant  de  ventes  de  mobiliers;  mais  cet 
objet  est  beaucoup  plus  que  balancé  par  le  mobilier 
invendu  qui  est  supérieur  a  celui  dont  les  ventes  sont 
effectuées* 

Nous  devons  ajouter  la  valeur  des  bâtiments , 
maisons  et  autres  fonds  non  loués  «  ou  objets  oui 
ne  sont  point  en  valeur,  et  que  l'on  estime  au  plus 
bas  2  milliards  :  reste  à  y  lomdre  1  milliard  pour  ce 
qui  reviendra  à  la  nation,  dans  les  héritages  des  émi> 
grés  :  cela  forme  une  valeur  effective  de  15  milliards 
servant  de  gage  aux  assignats. 

L'on  observera  qu'il  faut  en  déduire  ce  qui  est  dû 
aux  créanciers  des  émigrés;  mais  cet  objet  est  ba- 
lancé par  ce  qui  reste  dû  sur  les  biens  nationaux 
déjà  vendus,  et  par  ce  qui  doit  rentrer  pour  produit 
des  transactions  à  faire,  en  conséquence  de  votre  dé- 
cret ,  avec  les  associés,  veuves  ou  enfants  descom* 
merçants  émigrés  ou  condamnés.  Jamais  napier- 
monnaio  a-t-il  porté  sur  une  base  aussi  solide  (1)  ? 
Le  gage  do  vos  assignats  deviendra  plus  sûr  encore 
par  Tordre  et  l'éconounequ'ou  introduira  dans  vos 
linances. 

Le  règne  des  dilapidations  est  passé;  vos  dépenses 
doivent  «Ure simplifiées;  car, on  Ta  dit  plusd'ime 
fois  :  réconomie  est  le  premier  bienfait  des  gouver- 
nements envers  les  peuples.  On  ne  vous  proposera 
pas  cette  économie  éin^ite  et  impolitique  qui  dé- 
truit toute  la  dignité  nationale,  qui  refuse  ou  ne  ré- 
pand qu'à  regret  les  encouragements  les  plus  léçi- 
tinieji.  et  nui  «rnMf  en  tout  gt»nre  l'essor  des  grandes 
pensée»  ;  la  parcimonie  fait  peut-être  plus  de  tort 
itiu  empire:!  que  la  prodigalité.  On  ne  parle  que  de 
ce»  reltiruje*  nécessaires,  grandes  et  utiles  par  leur 
wlijet  t»l  leura  rt'suUats.  Telles  seront  des  réduc- 
lluiiM  dans  li>  nombre  des  commis  et  des  employés, 
une  or^iinistttion  mieux  entendue  dans  les  agences 
t{  eommijuiionîi  administratives,  des  réformes  dans 
Ira  travaux  publics,  dans  les  abus  résultant  des 

(n  UrnuU  que  ce  rapport  wl  à  l'impreisUn,!*  rapporteur 
a  *»uinuii  un  lietail  fort  rflendu  et  trèa-lumioeui ,  fait  par 
U  i  «mmmuwUmi  lira  rovenui  iwlioDaui  aur  dea  baaea  différen- 
U*,  rt  (loiii  lei  réiuUaU,  ae  trouvant  lea  némei,  forment  une 
preuve  aena  réplfqa*  de  l'etictitude  de  P^vtluation  dea  do- 
miim  iMUiaMiM  lértaal  de  p|a  aux  aiilentU,     A.  V. 


contreseings,  et  de  radminist^tlon  dtt  poMl» ,  Um 
la  consommation  inouïe  de  papier  etd'imprêftioii; 
on  trouvera  surtout  de  grandes  économies  dans  une 
meilleure  administration  des  '' 


des  armées,  et  en  adoptant  le  système  des  adljudicib» 
tiens  au  rabais. 

Montrez  le  compte  général  de  toutes  les  recettes 
et  dépenses  faites  par  la  trésorerie  depuis  le  moneni 
de  sa  création  jusqu'à  ce  jour;  que  li  France  oon» 
naisse  avec  exactitude  l'état  des  assignats  et  de  toute 
espèce  de  valeurs  entrées  et  sorties  de  la  trésorerie  ; 
qu'une  commission  en  fasse  dresser  les  états ,  de 
concert  avec  le  comité  des  finances.  La  publicité  est 
la  base  de  la  confiance  comme  la  sauvegarde  de  la 
liberté. 

Il  résultera  de  cet  examen  qu'après  avoir  fait  naf- 
tre  en  un  moment  un  million  de  soldats ,  qu'après 
avoir  créé  à  grands  frais  tout  ce  qui  a  été  nécessaire 
pour  soutenir  avec  succès  la  guerre  la  plus  terrible, 
qu'au  milieu  des  désordres  et  des  dilapidations  iné^ 
vitables  à  la  suite  des  grands  mouvements  révolu- 
tionnaires, et  avant  d'avoir  pu  les  régulariser,  nos 
dépenses,  quelque  immenses  qu'elles  aient  été,  sont 
inférieures  6  ce  que  l'on  devait  attendre ,  et  que  les 
ressources  qui  nous  restent  leur  sont  encore  bien 
supérieures. 

Vous  verrez  que  nos  dépenses  effectives  n'excè^ 
dent  pas  9  milliards;  nos  recettes  se  sont  élevées  à 
3  milliards  :  la  dépense  est  ainsi  réduite  à  6  miU 
liards  :  il  faut  déduire  de  cette  somme  les  remboucr 
sements  faits  sur  la  dette  publique .  et  les  dépenses 
du  gouvernement  qui ,  dans  tous  les  cas,  auraient 
eu  lieu;  il  restera  donc  une  somme  d'environ  4  mil- 
liards pour  les  dépenses  de  la  révolution.  Nous  a  vonâ 
fait  tête  à  l'Europe;  nous  avons  assis  la  liberté  sur 
des  fondements  solides.  Comparez  ces  grands  résul- 
tats à  ceux  de  l'ancien  gouvernement ,  qui  dépensa 
1,500  millions  pour  soutenir  nos  alliés  de  l'Améri* 
que  septentrionale! 

En  même  temps  que  les  fondements  du  crédit  se 
raffermiront  par  la  connaissance  exacte  de  nos  res^ 
sources  et  par  un  ensemble  de  mesures  utiles,  nous 
opérerons  sans  secousse  et  sans  alarmes  la  rentrée 
d'une  partie  des  assignats. 

La  vente  rapide  du  mobilier  des  émigrés ,  appat- 
tenant  à  la  nation ,  et  qu'il  faut  ravir  aux  dilapida- 
tions de  toute  espèce  ;  la  vente  prompte  de  tous 
ceux  des  bâtiments  nationaux  non  loués,  qui  se  dé- 
gradent et  s'absorbent  en  frais  de  garde  et  de  répa- 
rations ;  les  sommes  qui  doivent  rentrer  lorsque 
vous  aurez  réglé  avec  la  famille  des  émigrés  fa 
portion  revenant  à  la  nation  dans  l'héritage  ;  les 

Srompts  payements  qui  vous  seront  hits  à1a  suite 
es  transactions  que  vous  avez  déjà  décrétées  avec 
les  associés,  les  veuves  et  les  enfants  des  émigrés  et 
condamnés;  tout  vous  promet  des  rentrées  considéra- 
bles. Cependant  ces  moyens  ne  sont  pas  suffisants 
encore  pour  remplir  vos  vues,  et  vos  comités  vous 
présenteront  successivement  les  divers-projets  dont 
Ils  se  sont  occupés.  Le  court  délai  que  vous  leur 
avez  donné,  l'étendue  et  les  détails  de  ces  projets 
ont  décidé  vos  comités  à  en  faire  l'objet  d'un  rap- 
port particulier,  dont  le  but  sera  d'effectuer  dans  le 
cours  d'une  année  la  rentrée  d'environ  4  milliards 
en  assignats,  par  des  moyens  libres  et  purement  vo- 
lontaires. 

Cependant,  il  ne  fant  point  vous  le  dissimuler,  ces 
rentrées  successives  ne  rempliront  pas  en  entier  le 
but  que  vous  vous  proposez. 

En  effet,  ce  n'e^  pas  seulement  la  surabondance 
dujigne,  mais  c'est  surtout  la  rareté  des  objets 
qu'on  se  procure  avec  lui,  qui  fait  hausser  leur  prix, 
et  qui  épuise  le  gouvernement  où  leur  besoin  se  fait 
sentir.  Rappelez-vous  que  lea  denrées  coloniales  ofit 


tfiielqQêfbis  trfptë  de  prix,  qaoique  îa  quantité  du 
signe  fût  la  même  ;  n'oubliez  pas  que  les  vins  dou- 
blent de  râleur  lors  des  mauvaises  récoltes  :  ajoutez 
à  cela  la  difficulté  des  transports,  le  prix  des  assu- 
rances de  mer,  et  l'augmentation  considérable  de 
nos  consommations.  Quand  vous  aurez  diminué  les 
assignats,  vous  n  aurez  pas  augmenté  la  quantité 
des  matières  premières,  et  levé  toutes  les  autres  dif- 
âcultés;  c'est  cependant  le  but  qu'il  faut  atteindre  : 
que  faut-il  pour  y  parvenir? 

11  est  aise  d'expliquer  la  pénurie  que  nous  éprou- 
vons. Une  des  premières  causes  se  trouve  dans  le  ré- 
sultat de  la  balance  comparée  de  notre  commerce 
avant  et  depuis  la  révolution.  L'avantage  de  cette 
balance  était  pour  nous  de  80  millions  en  1788.  On 
ne  sait  que  trop  aujourd'hui  combien  elle  a  tourné 
à  notre  désavantage  ;  cette  différence  ne  paraîtra 
point  extraordinaire  à  ceux  qui  y  réfléchissent. 

LVtatdes  revenus  effectifs  des  colonies  françaises 
était,  en  1788,de2S5  millions;  la  source  des  riches- 
ses coloniales  est  momentanément  fermée. 

La  fabrique  de  Lyon  faisait  entrer  environ  60  mil- 
rionsdaiisrintérieur. 

Lecommercede  nos  échelles  du  Levant  produisait 
un  revenu  de  30  millions  :  il  est  suspendu  jusau'à  ce 
que  le  pavillon  français  ait  reconquis  la  Méditer- 
ranée. 

Toutes  ces  causes,  réunies  à  tant  d'autres  qu'il  est 
inutile  de  vous  rappeler,  ont  opéré  le  déficit  actuel 
dans  la  balance  ou  commerce.  En  diminuant  la 
masse  des  assignats  on  ne  changera  pas  le  résultat 
de  ce  déficit,  qui  produit  la  rareté,  et  par  consé- 
quent le  renchérissement. 

Les  esprits  bornés  qui,  se  conformant  aux  préju- 
gés populaires,  répétaient  sans  cesse  que  notre  terri- 
toire produisait  tout  ce  qui  était  nécessaire  à  nos  be- 
soins, ont  bientôt  été  démentis  par  Texpérience. 
C'est  cette  erreur  qui  a  enfanté  le  maximum. 

Depuis  longtemps Topinion  publique  le  réprouve; 
votre  comité  de  commerce  va  vous  mettre  à  même 
d'en  prononcer  la  condamnation. 
,  Cest  encore  des  erreurs  que  nous  venons  de  citer 
que  sont  sorties  toutes  les  lois  destructives  du  com- 
merce et  de  rindustrie,  qui  se  sont  succédé  si  ra- 
pidement. La  politique  la  plus  fausse  et  la  plus 
étroite  semblait  ne  considérer  la  France  que  comme 
un  pays  absolument  isolé  ;  chaque  décret  de  ce 
genre  était,  en  dernier  résultat,  une  défense  de  nous 
approvisionner  quand  nous  manquions  de  tout,  et 
devait  nécessairement  nous  conduire  au  déuûment 
le  pi  us  absolu. 

Si  l'on  n'avait  pas  chargé  le  commerce  d'entra- 
ves ,  si  on  l'avait  abandonné  à  lui-même ,  si  les  plus 
innocentes  spéculations  u'étaient  pas  devenues  des 
crimes  aux  yeux  de  l'ignorance,  l'activité  des  négo- 
ciants aurait  approvisionné  la  France,  malgré  les 
4i&astres  de  la  guerre,  comme  ils  l'ont  fait  plus 
cTune'fois;  mais  le  gouvernement  s'est  mis  à  la  place 
des  négociants,  el  dès  lors,  en  détruisant  l'industrie 
des  particiiliers,  il  a  détruit  ses  propres  richesses,  et 
s'est  vu  dans  l'impuissance  de  les  renouveler. 
,  41  n'a  pu  employer  que  des  moyens  violents.  On  a 
successivement  consommé  tous  les  objets  d'échange 
qu'un  pouvait  offrir  aux  étrangers  ;  notre  numé- 
raire, nos  vins,  le  mobilier  des  émigrés,  tout  dispa- 
raît pour  payer  des  approvisionnements  indispensa- 
btlea. 

[  Au  défaut  du  numéraire  et  des  objets  d'exporta- 
tion, 3u  défaut  du  crédit  des  négociants,  qui  est  en- 
core paralysé  par  le  séquestre  des  biens  des  étran- 
gers, que  nous  reste-t-ii  à  présenter  maintenant  à 
iMM  voisins?  Notre  papier-monnaie,  qui  n'aura  de 
valeur  que  par  la  confiance  dont  ils  nous  croiront 
dignes.  Cette  position  a  pu  entrer  dans  les  calculs  de 


M 


ge 
les 


la  politique  européenne.  Les  rob  coalisés  ont  pensf 
que  nos  victoires  nous  amèneraient  h  l'épuisement  ; 
pour  déguiser  leurs  défaites ,  ils  disent  qu'ils  ont 
ajourné  leurs  vengeances  jusqu'à  cette  époque. 

Leurs  criminelles  espérances  seront  déçues.  Mon- 
trez-leur que  l'immensité  des  ressources  qui  noua 
restent  permet  à  la  France  de  ne  poser  les  armes  quo 
lorsqu'^eile  voudra  dicter  la  paix. 

Voulez-vous  multiplier  vos  ressources  :  encoura- 
ez  de  toutes  les  manières  le  commerce  :  il  peut  seul 
es  alimenter  et  les  accroître.  La  prime  naturelle  à 
lui  accorder  est  la  suppression  momentanée  des 
droits  d'entrée  sur  les  objets  dont  nous  avons  uu 
pressant  besoin.  Décrétez  cette  suppression  sur  les 
marchandises  dont  votre  comité  de  commerce  vous 
présentera  le  tableau. 

Ne  laissez  subsister  qu'une  légère  rétribution ,  dans 
le  but  unique  de  faire  passer  les  marchandises  aux 
bureaux  et  de  pouvoir  ainsi  dresser  annuellement 
d'une  manière  exacte  l'état  des  importations.  Cet 
état  est  nécessaire  pour  connaître  la  nalance  de  vo- 
tre commerce. 

Que  ce  comité  y  Joigne  celui  des  marchandises 
dont  la  sortie  restera  provisoirement  prohibée; 

Que  l'importation  et  l'exportation  soient  libres, 
et  uu'on  supprime  toutes  les  conditions  qui  ont 
rendu  si  longtemps  tout  échange  impossible  pour  le 
commerce  ; 

Que  le  gouvernement  fasse  parcourir  les  départe- 
ments par  des  gens  experts  dans  l'exploitation  des 
mines,  iCùn  d'accélérer  les  moyens  d'eu  extraire  des 
richesses  abondantes  ; 

Que  des  commissaires  habiles  visitent  les  districts 
et  communes  manufacturières, 'pour  leur  donner 
toute  l'activité  nécessaire  à  la  prospérité  publique. 

L'art  a  par  des  prodiges  approvisionné  la  France  de 
fusils,  de  canons, de  poudres etde  salpêtres  ;  dirigez' 
les  arts  pour  qu'ils  produisent  avec  la  même  rapi- 
dité des  moyens  d'échange. 

11  en  est  surtout  un  puissant,  dont  il  ne  faut  pas 
nous  priver  plus  longtemps.  Mettez  promptement  le 
numéraire  en  valeur  ;  songez  que  ce  métal  enfoui 
est  mort  pour  la  chose  publique,  et  que  nous  pou- 
vons avoir  la  famine  avec  des  trésors  dans  les  caves. 

Que  l'or  sorte  de  ces  retraites  de  l'avarice  ou  de  la 
cramte  :  il  ne  sert  qu'à  l'agiotage  des  fripons»  et  s'en 
échappe  peu  à  peu  par  des  crimes. 

Les  matières  premières  sont  la  véritable  richesse 
des  nations,  celles  qui  les  possèdent  sont  plus  opu- 
lentes que  celles  qui  n'ont  que  dé  l'or. 

Avec  le  génie  inventeur  du  peuple  français  on  est 
sûr  de  renare  bientôt  les  autres  nations  tributaires 
.  de  son  industrie. 

Décrétez  que  le  numéraire  pourra  éUre  exporté  ^ 
une  seule  précaution  est  nécessaire:  exigez  qu'en 
exportant  des  métaux  l'on  contracte  l'engagement  de 
faire  rentrer  la  contre-valeur  en  objets  de  première 
nécessité.  Vos  comités  de  salut  public,  des  finances 
et  du  commerce  vous  présenteront  les  moyens  de 
prévenir  les  abus. 

Vous  avez  encore  à  répondre  au  vœu  général  de 
toutes  les  places  de  commerce  et  de  tous  les  amis  de 
la  justice  et  des  principes,  en  rapportant  le  décret  qui 
a  soumis  au  séquestre  les  biens  des  étrangers.  Par  ce 
décret  vous  tenez  enchaînés  les  négociants  au  mo- 
ment où  vous  les  invitez  à  agir  ;  vous  rompez  les 
transactions  individuelles  au  moment  où  vous  vou- 
lez recréer  un  commerce  oui  ne  repose  jamais  que 
sur  des  transactions  individuelles. 

Le  temps  est  venu  de  ne  plus  taire  aucune  vérité. 
S'il  en  est  une  certaine,  c'est  que  nul  pouvoir  sur  la 
terre  n'a  le  droit  de  prescrire  a  la  prooité  ce  qui  lui 
parait  ipjuste.  La  conscience  de  i'oommede  bien  est 
un  sanctuaire  où  le  législateur  lui«-m£me  ne  peut  «t- 


38 


If  iadre.  Malheur  ao  gouTernemenl  qui  oserait  le 
violer!  il  en  serait  bieDtôtpuni;  il  trouverait  sa  pro- 
pre ruine  dans  celle  des  premiers  principes  qui  for- 
ment la  base  du  contrat  social. 

En  levant  le  séquestre  vous  supprimerez  Tinqui- 
sition  établie  pour  intercepter  toutes  les  correspon- 

Îinces,  et  vous  rendrez  la  libre  circulation  aux  ef- 
ts  du  commerce. 

Comment,  au  milieu  de  tant  d*espions  et  de  bour- 
reaux, le  commercesortirait-il  de  ses  ruines? 

11  nous  reste  à  vous  parler  de  Tacte  de  navigation  : 
les  principes  qui  en  sont  la  base  sont  bons  et  utiles  ; 
on  les  a  seulement  mal  appliqués  aux  circonstances 
actuelles:  on  a  voulu  former  des  matelots  français, 
et  ce  motif  doit  être  respecté.  Mais  les  temps  de 
guerre  sont  hors  des  mesures  ordinaires:  laissons 
faire  momentanément  le  cabotage  aux  neutres. 

L'assurance  d'un  nayire  français,  de  Bordeaux  au 
Havre,  ou  tel  autre  port  de  la  Manche,  est  de  27 
pour  100,  tandis  que  sur  un  vaisseau  neutre  elle  est 
de  5  pour  100  ;  c*esl  donc  un  renchérissement  de  2% 
pour  100  à  la  perte  du  commerce  français. 

On  raffermira  encore  le  crédit  et  on  amènera  l'a- 
bondance par  des  relations  sages  avec  les  puissances 
neutres,  et  par  la  bonne  foi  qir elles  doivent  attendre 
de  nous. 

li  est  un  peuple  avec  qui  nos  rapports  doivent 
être  plus  intimes  :  c*est  le  peuple  américain.  Il  nous 
a  donné  de  grands  exemples  ;  il  attend  de  nous  des 
relations  fraternelles:  cependant  nous  avons  suivi  à 
son  égard  ceux  des  perlides  Anglais,  ses  oppresseurs. 
Ils  ont  violé  le  droit  des  gens  en  saisisssant  sur  les 
navires  américains  les  propriétés  ennemies  :  ne  les 
imitons  pas  ;  hâtonsrnousde  d^reter  que  le  traité  de 
commerce  avec  les  Américains  sera  maintenu  dans 
toute  son  intégrité^  et  qu*i1  soit  défendu  à  tous  offi- 
ciers civils  et  militaires  d*y  porter  la  moindre  atteinte. 

S'il  est  pressant  de  renouer  tous  les  liens  de  la  con- 
corde et  de  la  confiance  entre  les  neutres  et  nous,  il 
ne  Test  pas  moins  d*attacher  tous  les  intérêts  indivi- 
duels à  celui  de  la  république,  et  de  multi|)Her  les 
conquêtes  de  la  révolution  au  dedans  en  lui  faisant 
des  amis. 

Loin  de  nous  sans  doute  ces  lois  contradictoires  et 
imprudentes  qui  imprimeraient  un  mouvement  ré- 
trograde aux  esnrits:  le  patriotisme  et  la  prudence 
les  repoussent  également.  Mais  il  est  des  mesures 
générales,  oui,  e;i  fermant  tout  retour  à  de  coupa- 
bles et  de  cnimériques  espérances,  donneraient  un 
grand  exemple  de  justice,  et  propageraient  dans 
toutes  les  classes  Tamour  de  la  république. 

Telle  serait  celle  de  liquider  promptement  et  en 
masse  tous  les  créanciers  des  émigrés,  et  de  décré- 
ter, comme  on  Ta  fait  pour  ceux  du  clergé,  qu'ils 
sbnt  directement  créanciers  de  l'Etat.  Qu*on  calcule 
tous  les  frais  d'administration  dont  il  sera  soulagé. 
Si  on  veut  procéder  à  la  liquidation  des  dettes  des 
émigrés  suivant  les  formes  actuelles,  quel  inextrica- 
ble labyrinthe  de  formes,  de  bureaux  et  d'embarras 
de  toute  espèce  !  Que  d'hommes  seront  intéressés  à 
prolonger  ce  travail,  et  que  d'autres  souffriront  jus- 
qu'à ce  qu'il  soit  achevé  !  Douze  ans  peut-être  ne  le 
verront  pas  finir,  et  douze  ans  de  dilapidations  et  de 
mécontentements  doivent  bien  balancer,  aux  yeux 
du  législateur,  l'inconvénient  de  quelques  pertes  né- 
cessitées peut-être  par  l'opération  rapide  qu'on  pro- 
pose. Au  surplus;  rassurez- vous  :  il  existe'un  moyen 
de  mettre  à  couvert  les  intérêts  de  la  république.  On 
ne  paiera  point  les  créanciers  qui  ont  imprudem- 
ment confie  leurs  fonds  à  des  personnes  insolvables. 

Une  enquête  sommaire  sur  la  commune  renom- 
mée devra  établir,  préalablement  à  la  liquidation, 
la  solvabilité  des  débiteurs,  au  moment  où  leurs 
biens  ont  été  réunis  aux  domaiaes  nationaux. 


On  croit  cette  liquidation  i  la  fois  morale  el  poli- 
tique. L'intérêt  et  la  reconnaissance  de  huit  cent 
mille  créanciers,  liquidés  avec  tant  de  promptitude 
et  de  loyauté,  donneront  une  nouvelle  force  à  la 
haine  qui  doit  poursuivre  les  émigrés,  et  confirme- 
ront sans  retour  le  bannissement  perpétuel,. qu'ils 
ont  mérité. 

Une  autre  mesure  doit  concourir  à  celle-là  :  il 
faut  enfin  régler  avec  les  parents  des  émigrés  la 
portion  revenant  à  la  nation  dans  l'héritage  ;  que 
cette  mesure  porte  sur  des  évaluations  par  arbitres, 
avec  des  formes  simples,  et  en  fixant  des  payements 
rapprocha:  vous  retirerez  ainsi  une  forte  masse 
d'assignats.  Au  moyen  de  tes  dispositions,  le  séques- 
tre sera  levé  à  l'instant,  et  lestiamilles  seront  ren- 
dues à  la  liberté. 

Ces  lois  seront  véritablement  révolutionnaires, 
parce  qu'aucune  autre  ne  pourra  consolider  au 
même  degré  l'hypothèque  des  assigjnats. 

A  ces  erandes  mesures  s'en  joignent  naturelle- 
ment quelques  autres,  dictées  par  le  même  esprit  de 
politique  et  de  générosité. 

Adoucissons  Ta  riglieur  des  lois  rendues  sur  les 
déchéances:  les  réclamations  qu'on  vous  adresse 
avertissent  le  législateur  que  quelques-unes  de  ces 
lois  sont  peut-être  trop  sévères. 

Que  l'État,  magnanime  avec  ses  créanciers,  soit 
indulgent  avec  ses  débiteurs  ;  qu'on  admette  les  com- 
pensations, et  qu'on  procure  amsi  aux  débiteurs  tou« 
tes  les  facilités  de  se  libérer. 

Les  moyens  qu'on  vous  propose  seront  grands, 
mais  leur  efficacité  dépend  cTe  l'impulsion  que  vous 
donnerez  à  l'esprit  public,  et  de  la  garantie  sous  la- 
quelle vous  les  placerez.  Il  faut  que  le  gouverne- 
ment prenne  une  marche  ferme  et  régulière.  Faites 
connaître  le  but  que  vous  voulez  atteindre.  Présen- 
tez aux  idées  flottantes  et  incertaines  un  point  d'ap- 
pui solide,'où  elles  puissent  se  prendre  et  s'attacher. 
Jusqu'ici  le  système  du  gouvernement  s'est  vu  trop 
souvent  la  proie  de  toutes  les  passions  qui  ont  régné 
tour  à  tour  par  des  moyens  plus  ou  moins  violents, 
et  sous  des  formes  plus  ou  moins  populaires. 

N'en  doutons  pas,  et  ne  craignons  pas  de  le  dire 
hautement:  c'est  surtoiit  à  cette  variation  perpé- 
tuelle que  doivent  être  imputés  tous  nos  maux.  Nos 
annales  républicaines  n'embra!«sent  pas  encore  trois 
années,  et  vingt  siècles  semblent  en  avoir  rempli  le 
cours.  Les  révolutions  ont  succédé  aux  révolutions; 
les  hommes,  les  choses,  les  événements  et  les  idées, 
tout  a  changé,  tout  change  encore,  et  dans  ce  flux 
et  reflux  perpétuel  de  mouvements  contraires,  c>st 
en  vainque  le  gouvernement  prétendrait  à  cette  con- 
fiance qui  ne  peut  naître  que  d'une  conduite  sage  et 
mesurée,  et  de  l'observation  des  mêmes  principes. 

Le  commerce  a  dû  promptement  disparaître  à  tra- 
vers cette  étonnante  succession  de  contrariété,  et 
dans  un  pays  où  lés  individus,  ne  pouvant  faire  au- 
cun calcul  assuré,  ne  voyaient  autour  d'eux  qu'une 
longue  perspective  de  changements. 

Le  crédit  est  une  plante  fragile,  qui  a  besoin  de 
vents  doux  et  réguliers,  et  qui  ne  peut  croître  sur  un 
sol  orageux  et  souvent  bouleversé. 

Il  est  temps  de  finir  le  règne  des  incertitudes  et  de 
fixer  d'une  manière  invariable  les  principes  de  justice 
d'équité  et  de  loyauté,  qui  doivent  diriger  toute  no- 
tre conduite.  Hâtons-nous  de  soumettre  les  mouve- 
ments de  l'administration  intérieure  à  un  ordre  con- 
stant :  prenons  garde  surtout  qu'aucune  démarche 
ne  puisse  jamais  alarmer  l'imagination  sur  le  gage 
des  assignats. 

Quand  le  gouvernement,  sûr  de  sa  marche,  en 
aura  montré  le  véritable  but  ;  quand  il  se  sera  rendu 
compte  à  liii-méne  et  aux  autres  du  système  4u*il 
veut  suivre  ;  quand  la  Convention  nationale,  rejetant 


39 


les  malheureuses  disseosions  qui  ont  trop  de  fois 
entravé  sa  marche,  s'occupera  uniquement  du  bon- 
heur du  peuple;  quand  elle  ne  cessera  de  repousser 
avec  indignation  toutes  les  mesures  qui  pourraient 
donner  la  plus  I^ère  atteinte  aux  principes  de  fidé- 
lité et  de  bonne  loi  qui  la  dirigent  :  alors  toutes  les 
alarmes  disparaîtront,  et  ce  ne  sera  point  en  vain 
qu*on  travaillera  au  rétablissement  des  finances,  du 
crédit  et  du  commerce. 

Voici  le  projet  de  décret  que  je  suis  chargé  de 
vous  présenter  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  ses  comités  de  commerce,  finances,  lé- 
gislation, salut  publiée!  sûreté  générale  réunis,  dé- 
crète ce  qui  suit  : 

«  Art.  Kr,  Usera  nommé  une  commission  compo- 
sée d'un  membre  de  chaque  comité,  pour  dresser, 
avec  celui  des  finances,  Tétat  général  de  situation, 
de  l'entrée  et  de  la  sortie  des  assignats,  et  de  toutes 
les  recettes  et  dépenses,  soit  en  métaux,  en  assi- 
gnats ou  toutes  autres  valeurs,  faites  par  la  trésore- 
rie nationale,  depuis  son  établissement  jusqu'au 
!«'  nivôse,  et  en  rendre  compte  à  la  Convention  na- 
tionale. 

«  Ce  compte  fera  connaître  d'une  manière  parti- 
culière la  situation  du  trésor  public  aux  époques  du 
21  septembre  1792  (vieuxstyle),  et  du  16  thermidor 
dernier. 

^  II.  Le  comité  des  finances  présentera  incessam- 
ment l'état  des  dépenses  ordinaires  du  gouverne- 
ment, et  les  moyens  d'y  pourvoir. 

•  m.  Les  comités  de  la  guerre  et  de  salut  public 
réunis  proposeront  les  moyens  d'ordre  et  d'écono- 
mie dont  les  dépenses  extraordinaires  peuvent  être 
susceptibles. 

•  IV.  A  compter  de  ce  jour,  les  commerçants  et 
manufacturiers  s'appravisionneront  par  la  voie  du 
commerce  libre.  Le  gouvernement  se  renfermera 
dans  la  partie  des  approvisionnements  des  armées 
de  terre  et  de  mer  ;  les  matières  premières  qui  n'y 
sont  pas  relatives,  et  qui  se  trouvent  dans  les  maga- 
sins de  la  république,  ou  en  réquisition  pour  son 
compte,  seront  mises  en  vente  sans  délai. 

«  Les  approvisionnements  de  la  république  se  fe- 
ront, autant  que  possible,  par  adjudication  et  au 
rabais. 

•  V.  Les  droits  d'entrée  en  France,  sur  les  mar- 
chandises de  première  nécessité,  seront  provisoire- 
ment réduits  à  la  perception  indispensablement  né- 
cessaire pour  en  connaître  le  mouvement.  Le  comité 
de  commerce  présentera  sans  délai  l'état  de  ces 
marchandises,  et  de  celles  dont  la  sortie  restera  pro- 
hibée. 

•  VI.  Il  ne  sera  plus  donné  de  suite  aux  décrets  re- 
latif au  séquestre  des  biens  des  sujets  des  puissan- 
ces avec  lesquelles  la  république  est  en  euerre.  Les 
sommes  versées  par  des  Français  à  la  trSorerie  na- 
tionale, en  conséquence  de  ces  décrets,  seront  rem- 
boursées. 

«  Vn.  Il  est  permis  aux  citoyens  qui  ont  du  numé- 
raire de  l'exporter,  à  la  charge  d'en  faire  rentrer  la 
contre-valeur  en  objets  de  première  nécessité.  Les 
comités  de  salut  public,  des  finances  et  de  commerce 
réunisprendront  les  mesures  nécessaires  pour  régler 
le  mode  de  ces  exportations,  désigner  les  objets  à 
importer,  et  prévenir  les  abus  qui  pourraient  s'in- 
troduire à  cet  égard. 

•  Vm.  L'acte  de  navigation  est  provisoirement 
suspendu  jusqu'à  ce  que  les  comités  de  la  marine  et 
du  commerce  aient  présenté  leurs  vues  sur  les 
moyens  à  employer  pour  en  rendre  l'exécution  plus 
certaîi^B  et  plias  utile. 

•  IX.  La  Convention  nationale  enjoint  à  tous  les 


agents  de  la  république,  à  tous  les  commandants  âé 
la  force  armée,  aux  orficiers  civils  et  militaires,  de 
faire  respecter  et  observer  dans  toutes  leurs  disposH 
tions  les  traités  qui  unissent  la  France  aux  puissan- 
ces neutres  de  l'ancien  continent,  et  aux  Etats-Unis 
de  l'Amérique.  Aucune  atteinte  ne  sera  portée  à  ces 
traités.  Toutes  dispositious  qui  pourraient  leur  être 
contraires  sont  annulées. 

•  X.  Les  créanciers  des  émigrés  et  de  tout  individu 
frappé  de  la  confiscation  de  ses  biens  sont  déclarés 
créanciers  directs  de  l'Etat. 

«  Sont  exceptés  les  créanciers  de  ceux  qui  étaient 
en  faillite,  ou  notoirement  insolvables  à  l'époque  de 
la  confiscation.  L'état  de  situation  des  biens  sera 
constaté  par  une  enquête  sommaire  sur  la  commune 
renommée. 

•  Les  comités  de  législation  et  des  finances  pré^ 
senteront  incessamment  leurs  vues  sur  la  manière 
prompte  et  sûre  d'accélérer  celte  liquidation,  et  sur 
la  nature  des  titres  de  créance  qui  seront  admis. 

«XI.  Pour  rendre  prompteroent  les  biens  des  émi- 
grés  et  des  condamnés  à  l'agriculture,  les  mêmes  co* 
mités  présenteront  sans  délai  le  moyen  de  régler 
avec  les  parents  des  émigrés  la  portion  qui  revient  à 
la  république  dans  les  héritages.  Le  séquestre  mis 
sur  les  biens  des  familles  sera  levé  immédiatement 
après,  et  elles  seront  mises  en  liberté,  s'il  n'existe 
d  autres  causes  de  détention. 

«  XII.  Tout  le  mobilier  des  émigrés  appartenant 
à  la  république  sera  vendu  sans  délai  ;  le  comité  des 
finances  proposera  le  moyen  de  le  réunir  pour  en 
faire  des  ventes  publiques,  de  la  manière  la  moins 
dispendieuse  et  la  plus  utile. 

«XIII.  Il  sera  dressé  incessamment,  par  la  com- 
mission des  revenus  nationaux,  un  état  des  biens 
3u*il  est  utile  de  vendre  avec  célérité,  de  même  que 
es  bâtiments  et  des  maisons  non  loués,  qui  surchar- 
geât la  république  de  frais  de  garde  et  de  répara- 
tions. 

«  Le  comité  des  finances  présentera  ses  vues  sur 
les  moyens  d'en  accélérer  l'aliénation,  de  manière 
qu'elle  s'élève  à^  milliard  dans  le  courant  de  l'an- 
née. 

«  XIV.  Le  comité  des  finances  fera  incessamment 
un  rapport  général  sur  les  lois  portant  peine  de  dé- 
chéance envers  les  créanciers  de  la  république,  afin 
que  la  Convention  nationale  soit  à  même  dfe  modi- 
fier celles  qui  lui  paraîtront  trop  rigoureuses. 

•  XV.  La  commission  chargée  de  réviser  l'organi- 
sation actuelle  du  gouvernement  fera  incessamment 
son  rapport  sur  les  moyens  d'en  assurer  la  marche^ 
de  lui  donner  toute  l'activité  et  la  force  nécessaires, 
et  sur  les  économies  et  les  réformes  que  l'intérêt 
public  et  h  ponctualité  du  service  sollicitent,  soit 
dans  les  contributions  administratives,  soit  dans  les 
attributions  qui  lui  sont  confiées.  •         ' 

RicHoux:  L'impression,  rajoiirnement  et  la  dis* 
ciission  trois  jours  après  la  distribution. 

Bbbabd:  Il  est  intéressant  de  discuter  le  plus  tOt 
possible  ce  projet  de  décret  ;  il  ne  suffit  pas  de  dé» 
créter  la  discussion  trois  jours  après  la  distribution, 
il  faut  fixer  le  temps  aussi  où  la  distribution  sera 
faite.  Je  demande  que  ce  soit  dans  deux  jours.  On 
augmentera  le  nombre  des  imprimeurs  si  cela  est 
nécessaire.  Ce  rapport  ne  pourra  être  imprimé  de- 
main, mais  il  pourra  l'être  après-demain.  Je  demande 
de  plus  la  discussion  deux  jours  après. 

Ces  propositions  sont  décrétées. 

—  Giraud,  au  nom  des  quatre  mêmes  comités, 
fait  un  rapport  dans  lequel  il  développe  les  maux 
que  la  loimi  maximum  fait  au  commerce  et  à  l'agri- 
culture ;  les  manx  plus  grands  encore  qu'a  entraînés 
celle  des  réquisitions,  par  laquelle  on  a  voulu  rcmé- 


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dier  à  1a  première.  Il  propose  l*ibolitioD  de  toutes 
les  lois  portant  fixation  du  prix  des  denrées  et  mar- 
chandises, et  la  suppression  des  réquisitions  à  l*a- 
venir. 

La  Convention  ordonne  l'impression  du  rapport 
et  du  projet  de  décret,  et  ajourne  à  demain  la  discus- 
sion* 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  S  NIVOSB. 

Pbpin ,  au  nom  du  comité  de  législation  :  Par  vo- 
tre loi  du  8  messidor  vous  avez  voulu  que  tout  ci- 
toyen fût  tenu  de  faire  à  <a  municipalité,  et  dans  des 
délais  prescrits,  la  déclaration  détaillée  du  produit  do 
ses  différentes  récoltes;  c'est  ce  que  porte  l'art.  IV. 

Vous  avez  prévu  que  l'égoTsme,  la  négligence  et 
la  malveillance  peut-être  pourraient  faire  enfreindre 
cette  loi,  dont  le  maintien  était  d'autant  plus  néce.v- 
saire,  aue c'était  le  seul  moyen  de  faire  connaître  la 
totalité  des  récoltes  de  la  republique,  et  faciliter  les 
mesures  du  gouvernement  pour  que  chacune  des 
parties  du  territoire  français  fût  alimentée  ;  c'est  ce 
qui  a  nécessité  l'art.  Vlil  de  la  même  loi,  portant 

3ué  :  •  Celui  dont  la  déclaration  sera  trouvée  évi- 
emment  fausse  sera  puni  par  la  confiscation  au  pro- 
fit de  la  république  de  ce  qu'il  n'aura  pas  déclaré.  • 
Mais  l'article,  ni  aucun  autre  de  la  même  loi,  ne 
porte  textuellement  de  peine  contre  celui  qui  n'au- 
rait pas  fait  du  tout  de  déclaration  ;  il  est  constant 
cependant  aue  dans  ce  cas  la  loi  est  également  mé- 
prisée et  enrreinte  que  dans  celui  d'une  fausse  dé- 
claration, et  cette  infraction  ne  doit  pas  rester  im- 
punie, lorsque  Ton  applique  constamment  la  peine 
contre  la  fausse  déclaration. 

Votre  comité  de  législation  a  reçu  à  ce  sujet  diffé- 
rents référés  des  juges  de  paix  chargés  déjuger,  mais 
il  ne  lui  appartient  pas  plus  ({u'à  ces  juges  de  don- 
ner une  explication  a  la  loi ,  quel(][ue  naturelle 
qu'elle  paraisse;  il  a  pensé  que  celui  qui  n'avait 

tas,  en  conformité  de  TarticlelV,  fiût  la  déclaration 
u  produit  de  ses  récoltes,  devait  être  traité  comme 
iklui  qui  en  aurait  fait  une  fausse  :  il  m'a  charge.de 
vous  présenter  le  projet  de  décret  suivant  : 

c  La  ConventtoD  nationale,  aprîs  avoir  entendu  son  co- 
mité de  legislaiion,  expliquant,  en  tant  que  besoin  serait, 
la  lot  du  8  messidor,  qui  enjoint  h  tout  citoyen  de  faire  à 
fa  nunicipaHlé,  qui  époques  des  SO  thermidor  et  vendé- 
siairp,  la  déclaration  du  produit  de  tes  différentes  récol- 
tas, décrète: 

«.Les  citoyens  qui  n'auront  pas  fait  la  déclaration  prés- 
ente par  Tarticle  IV  de  ladite  loi  seront  soumis  aux  peines 
portées  en  Pariiele  VIII  contre  ceux  qui  auront  fait  une 
déclaration  fausse. 

«  Le  présent  décret  sera  Inséré  an  Bulletin  de  correspon- 
dance, a 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

BÉAL,  au  nom  du  comité  de  salut  pnblio  et  des 
finances  :  Les  citoyens  Pierre  Mellot  et  Frédéric  Ro- 
chel  lont  valoir  pour  le  service  de  la  république  les 
forges  de  Boze,  Drambon,  Seine-sur-Vingeanne,  et 
IIontigny,ainsi  que  les  fourneaux  de  Licey,  Bler'et 
Drainbon. 

Toutes  ces  usines,  situées  dans  le  département  de 
la  Cdte-d'Or,  donnent  des  fers  d'une  excellente  qua- 
lité. 

La  majeure  partie  se  verse  dans  les  magasins  de 
la  commission  des  armes  à  Paris,  ainsi  qu'il  est  jus- 
tSIié  par  les  marchés  des  soumissionnaires  qui  ont 
souscrit  pour  trois  mille  cinq  cents  lames  à  canon 
par  mois,  et  cent  cinquante  milliers  de  fer  d'écban* 


Le  surplos  sert  à  r&pprovisiànnement  de  Gom^^ 
mune-d'Armes  et  du  Port-la-Monta^e. 

L'excédant  des  fontes  non  converties  en  fer  est  eo»i 
ployé  à  la  fonderie  des  creusets. 

Mellot  et  Bochel  sont  entrés  en  jouissance  des 
usines  de  Drambon  au  l«f  janvier  1790,  pour  neuf 
années  consécutives,  en  vertu  d'un  bail  iibns  seing 
privé,  passé  le  26  décembre  1786. 

Comme  ils  ne  s'attendaient  point  à  être  troublés 
dans  leur  jouissance,  ils  ont  fait  leurs  approvision- 
nements ordinaires  en  bois,  charbons  et  mines  né- 
cessaires à  la  fabrication  de  la  fonte  et  du  fer. 

Cependant  le  percepteur  des  revenus  nationaux 
poursuit  contre  eux  la  résiliation  du  bail  des  forges 
de  Drambon,  sur  le  motif  que  les  fermiers  actuels 
n'ont  pas  fait  enregistrer  leurs  baux  au  district  dans 
le  délai  fixé  par  la  loi  sur  les  émigrés. 

Les  forges  de  Drambon  appartenaient  à  la  fi^mme  . 
du  citoyen  Jean  Fiot,  qui  est  morte  en  1702,  lais- 
sant pour  héritiers  un  fils,  émigré,  et  une  fille  qui 
n'a  point  quitté  le  territoire  delà  république. 

Si  la  formalité  de  l'eori^istrement  n'a  pas  été 
remplie  à  la  lettre,  le  directoire  du  district  n'en  a 
pas  eu  moins  connaissance  du  bail,  puisqu'il  a  en- 
joint aux  fermiers  d'en  payer  le  prix  entre  les  mains 
du  percepteur  des  revenus  nationaux  ;  ce  qui  a  eu 
lieu.  L'objet  de  la  loi  est  donc  rempli. 

Vos  comités  de  salut  public  et  des  finances  ont 
pensé  que  des  raisons  majeures  d'intérêt  public  de* 
valent  faire  maintenir  ce  bail  à  ferme,  nonobstant 
l'omission  de  cette  formalité. 

Les  différentes  usines  que  font  valoir  Bochel  et 
Mellot  travaillent  toutes  pour  le  service  exclusif  de 
la  république. 

Betirer  aujourd'hui  des  mains  des  fermiers  nne 
partie  de  ces  usines,  par  le  renouvellement  dtr  bail 
des  forges  de  Drambon,  ce  serait  paralyser  l'activité 
des  autres  forges  qu'ils  exploitent,  parce  que  l'on 
conçoit  qu'ils  ont  dû  établir  une  corrélation  entre 
le  service  respectif  de  ces  usines,  et  les  coordonner 
de  la  manière  la  plus  avantageuse  pour  l'ensemble 
de  leurs  travaux. 

Ce  serait  enfin  nuire  aux  intérêts  de  la  républi- 
que en  réduisant  les  fermiers  actuels  à  l'impossibi- 
lité de  remplir  leurs  soumissions  envers  le  gouver- 
nement pour  les  approvisionnements  en  ter  et  la 
fabrication  des  armés.  <     - 

Voici  le  projet  de  décret  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap» 
port  de  ses  comités  de  salut  public  et  des  finances,  dè> 
crête: 

•  Que  le  bail  des  forges  et  fourneaui  de  Drambon,  passé 
le  26  décembre  1786  (vieux  style),  par  Jean  Fiot,  aus  ci* 
toyens  Rochcl  et  Mellot,  demeure  confirmé.  ■ 

La  Couveutioo  adopte  ce  projet  de  décret. 

(La  iuitê  demain,) 


LIVRES  DIVERS. 

L'OmbrÉ  de  F/onan,  ou  recueil  de  romancMnouvellei, 
aVec  une  notice  tur  m  vie  et  ses  ou?ragef,  et  la  romance  d« 
son  tooibcau.  On  jr  a  joint  on  décadaire  pour  la  S*  année  de 
Père  républicaine.  A  Paris»  ches  Tessicr,  libraire»  rue  àê 
U  Harpe,  n«  151. 


Payemenêê  à  la  irésorerii  nationale. 

Le  payement  du  perpémel  est  ouvert  pour  les  six  pre* 
mlers  mois;  U  sera  fait  à  tous  eeux  qui  seront  porteurs 
d'InseripUons  au  grand  Uvre.  Celui  pour  les  rentes  viagères 
est  de  huit  mois  vingt  et  un  Jours -de  Tawide  1788  (vltw 
sUfli).        .      ■  ■  ... 


GAZETTE  NATIONALE  o„  LE  MONITEUR  IIVERSEL. 

N**  96.  Sextidi  6  Nivôse,  l'an  3®.  {Vendredi  26  Décembre  1794,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

De  Jecdezejow ,  le  20  novembre»  —  Le  brave  Wawr- 
xewski,  à  la  lête  desix  JDille  hommes  détermines,  avait 
résolu  de  s^ouvrir  un  chemin  par  le  palulinul  de  Cracovie 
et  la  haute  Silcsie,  pour  se  rendre  en  (iallicie;  mais,  ayant 
toujours  les  Russes  à  dos  el  les  Prussiens  sur  sun  flanc 
droit,  il  a  été  forcé  de  capituler  le  18  de  ce  mois.  Ce  der- 
nier défenseur  de  la  liberté  polonaise,  et  avec  lui  les  gêné-  | 
raux  Dombrowski ,  Gielgud,  Gendrowick,  Micszkowski,  i 
etc.,  se  sont  rendus  prisonniers  de  guerre.  Madalinski  s*est  ' 
échappé  avec  quelques-uns  de  ses  amis,  et  s*cst,  dit-on, 
réfugié  en  Gallicie.  Le  président  du  conseil  Zakczowski  a 
repris  la  route  de  Varsovie  ;  les  membres  du  conseil  se  sont 
dispersés.  On  ne  connaît  point  encore  la  retraite  du  chan* 
cclier  Kollootay.  On  assure  qu'il  est  porteur  de  sommes 
d'argent  et  d'effets  précieux  pour  ta  valeur  de  300,000 
ducats,  dépôt  que,  sans  aucun  doute,  il  reservait  comme 
une  ressource  extrême  dans  le  péril  où  était  la  liberté  pu- 
blique. 

Ainsi  a  fini  la  plus  juste  des  guerres,  entreprise  pour  la 
cause  la  plus  belle  et  la  plus  glorieuse  qu*uxi  peuple  ait  û 
défendre. 


REPUBLIQUE    FRANÇAISE. 

Paris ^  le  5  nivôse,  —  Voici  la  copie  de  la  lettre  écrite 
par  le  comité  de  salut  public  au  citoyen  Barthélémy,  am- 
bassadeur de  la  république  française  en  Suisse  : 

Du  3  nivosc,  Pan  3e  de  la  république  française, 
une  et  indivisible. 

•  Nous  sommes  instruits,  citoyen,  que  les  émigrés  et  les 
prêtres  déportés  affectent  de  répandre  qu'ils  sont  à  la  veille 
de  rentrer  en  Fiance,  et  qu'ils  sont  parvenus  à  donner  de 
la  consistance  ù  celte  étrange  «ssertion. 

•  Nous  ne  pouvons  attribuer  qu'à  ces  faux  bruits  la  faci- 
lité avec  laquelle  les  cantons  catholiques  paraissent  les  to- 
lérer sur  leur  territoire.  Il  en  résulte  que  ces  hommes  se 
trouvent  âr  portée  d'intriguer  dans  les  départements  limi- 
trophes et  d'y  préparer  des  désordres  et  de»  malheurs. 

«  Nous  te  chargeons  de  déclarer  à  tous  les  cantons  que 
les  émigrés,  justement  couverts  de  l'exécration  et  du  mé- 
pris de  toute  l'Europe,  ne  cesseront  jamais  d'être  regardes 
par  la  nation  française  comme  des  traîtres,  et  que  sa  juste 
▼engeance  les  poursuivra  partout  ou  elle  pourra  les  al- 
leiiulre. 

•  Nous  ne  doutons  pas  que  celte  déclaration  ne  suffise 
pour  déterminer  un  gouvernement  qui  nous  a  donné  tant 
de  preuves  de  sa  loyauté,  de  sa  franchise  et  de  sa  bonne 
amitié,  pour  le  détcnniner  à  se  débarrasser  de  celte  horde 
impure  qui  ne  respire  que  les  désordres  et  les  crimes ,  et 
qui  n'userait  de  rhospilalitc  d'un  peuple  généreux  que 
pour  allumer  dans  son  sein  les  divisions  et  les  déchire- 
ments, et  se  venger  ainsi  de  l'attachemeut  invariable  qu'il 
a  témoi^é  au  peuple  français. 

I  Signé  les  numbres  du  comité  de  salut  public,  • 

CONVENTION    NATIONALlî. 

Présidence  de  Bent aboie. 
Suite  de  Vopinion  sur  les  causes  de  Vclal  présent 
du  commerce  et  de  lindùslrie ,  el  les  moyens  de 
tes  rétablir  sur  les  véritables  bases  de  l'économie 
poliliaue  ,  prononcée  par  Eschassériaux  aine , 
dans  l'une  des  précédentes  séances. 

Si  nous  approfondissons  Icscausesqui  peuvent  s'i)pposcr 
audehorsàraccroissemcnl  du  commerce,  nous  les  trouve- 
rons dansquelquesdisposiiionsdusystèmedenos  douanes. 
Sans  doute  il  faut  conserver  avec  soin  cette  brandie  pré- 
cieuse du  revenu  public  ;  il  faut  que  les  riclicsses  commer- 
ciales {iaient  aussi  la  patrie  qui  les  protège;  i  ûut  aussi 

.">'  Sc'ie,  —   Tom c  \» 


que  le  commerce  de.  l'étranger  nous  rende  les  tributs  qu'il 
impose  sur  le  nôtre  ;  mais  il  faut  que  celle  vengeance  de  la 
tyrannie  commerciale  ne  retombe  pas  sur  nous  :  la  politi- 
que ne  doit  pas  établir  des  représailles  que  réprouverait 
l'intérCt  de  la  patrie. 

Le  commerce  cherche  naturellement  les  lieux  où  ou 
l'attire  ;  il  fuit  les  lieux  où  on  l'opprime.  Il  ne  faut  pas  que 
les  rivages  d'un  peuple  civilisé  lui  présentent  l'aspect  des 
côtes  d'un  peuple  barbare. 

Des  douanes  trop  rigoureuses,  des  lois  dures,  des  for- 
mes embarrassantes ,  repoussent  le  commerce ,  et  portent 
la  concurrence  dans  les  endroits  où  des  douanes  plus  mo- 
dérées l'appellent. 

Le  calcul  a  déjà  prouvé  que  la  force  des  droils  qu'un 
peuple  impose,  sur  les  objets  de  son  commerce  retombe , 
en  dernière  analyse,  sur  la  culture  et  l'industrie,  renché- 
rit les  matières  premières,  augmente  la  main-d'œuvre,  et 
surhausse  le  prix  de  toutes  les  consommations  ;  elle  en- 
chaîne le  commerce  national  dans  les  ports,  en  éloignant  - 
celui  que  les  étrangers  apportent  ;  elle  appelle  tous  les  gen- 
res de  fraude  à  tromper  la  rigueur  même  des  lois. 

Les  fermiers  généraux  firent  des  douanes  un  instrument 
d'avidité  et  de  tyrannie  :  il  faut  que  la  politique  d'un  peu* 
pie  républicain,  en  faisant  de  cet  élablissemeni  une  soL.rce 
principale  de  son  revenu ,  le  pose  en  même  temps  sur  les 
bases  de  la  justice  et  de  l'intérêt  national. 

C'est  au  législateur  à  revoir  souvent  sou  système  des 
douanes,  quêtant  d'abus  peuveut  atteindre,  et  que  les 
révolutions  du  commerce,  les  jalousies  de  la  politique 
commerciale  des  autres  gouvernements  fuicent  quelque- 
fois de  modifier  ou  de  changer. 

L'état  de  guerre  violent  dans  lequel  nous  ont  jetés  nos 
ennemis,  et  la  justice  des  représailles,  nous  ont  diclé 
quelques  articles,  quelques  formes  sévères,  que  le  retour 
de  la  paix  et  l'inlérèt  approfondi  de  la  nation  nous  fe- 
ront adoucir  dans  la  suite  :  ce  sera  à  la  prudence  de  la 
Convention  à  corriger  son  ouvrage,  à  la  politique  à  voir  le 
commerce  en  graud ,  et  à  rétablir  les  rapports  qui  lui  se- 
ront le  plus  favorables. 

Vous  avez  jeté,  par  votre  acte  de  navigation,  les  fonde- 
ments d'une  marine  puissante;  mais  je  crois  que  l'intérêt 
de  la  nation,  la  prospérité  de  notre  commerce,  deman- 
dent que  vous  lui  donniez  plus  de  perfection  en  y  t* joutant 
quelques  modifications  particulières. 

Ou  ne  voit  pas  dans  un  instant  tous  les  avantages  ou  les 
vices  d'un  acte  de  législation  commerciale  :  sans  doute  , 
sous  les  aspects  du  conimcrce,  de  la  population,  de  l'in- 
dustrie el  de  la  force  d'une  grande  nation,  une  grande  ma- 
rine marchande  est  nécessaire;  sans  doute  un  peuple  qui 
laisse  l'aire  aux  autres  une  navigation  et  des  transports 
maritimes  qu'il  pourrait  faire  lui-même,  diminue  les  for- 
ces de  son  commerce  et  de  sa  puissance  ;  ce  sont  des  prin- 
cipes, vous  avez  voulu  les  constater  par  votre  at  te  de  na- 
vigation :  mais,  en  donnant  aux  navires  français  seuls  le 
droit  de  faire  au  dehors  le  commerce  de  la  république,  ne 
remettez-vous  pas  entre  les  mains  de  quelques  armateurs 
une  espèce  de  privilège  exclusif,  défavorable  au  corps  en- 
tier de  la  nation  ?  n'enrichissez-vous  pas  quelques  particu- 
liers à  son  préjudice?  n'éloignez-vous  pas  de  la  république . 
cette  concurrence  précieuse  du  commerce,  qui  fait  valoir 
les  productions  et  les  arts  de  son  territoire?  u'établissez- 
vous  pas  une  espèce  de  prohibition  funeste  contre  vous? 

L'intérêt  de  tout  peuple  dans  ses  relations  commerciales 

avec  les  étrangers  est  le  même  que  celui  d'un  négociant 

I   qui  traite  avtc  différentes  personnes  :  c'est  d'acheter  le 

I  meilleur  marché,  et  de  vendre  le  meilleur  prix  possible  : 

;  n'enlevez-vous  pas  ces  avantages  en  détruisant  tout  d'uu 

coup  la  concurrence  des  étrangers  dans  vos  |)orts,  ea 

chargeant  teuls  vos  vaisseaux  d'un  commerce  immense» 

qui  se  débordera  par  tous  les  points  de  votre  territoire 

lorsque  vous  l'aurez  élevé  à  son  degré  de  puissance  ?  n'eu- 

I  chainez-vous  pas  votre  commerce  et  celui  des  étrangers 

à  votre  préjudice  ?  Sous  un  autre  aspect  encore  ,    ne 

I  poussez-vous  pas  la  nation  avant  le  temps,  avant  quo 

I  votre  agriculture  el  votre  industrie  nationale  soient  rc- 

6 


43 


montéeit  à  fener  font  d*uQ  cotip  trop  de  caplUax  sur 
la  meft  dans  Totre  commeroe  maritime?  Une  sage  et 
prévoyante  politique  ne  tous  prescril-elle  pas  d*olMenrer 
des  proportions  et  des  grades  dans  votre  marche  vers  la 
prospérité  nationale  ?  Prenez-y  garde,  citoyens,  la  pros- 
périté d^ane  grande  nation,  qui  a  de  la  terre  et  des. 
mers,  se  compose  de  trois  éléments ,  de  sa  richesse  territo» 
riale,  de  ses  manuAietares  et  de  sa  narigatioQ  ;  mais  il  tant 
que  radministratien  tienne  toojoan  ces  trots  éléments  en 
harmonie  les  uns  avec  les  autres,  pour  les  faire  prospérer 
également  t  une  (bute  en  politique  est  un  coup  lïappé  sur 
plusieurs  siècles  t  et  les  blessures  en  sont  profondes. 

Golbert,  dans  le  siècle  dernier,  sacrifia  tout  aux  manu* 
factures,  jeta  une  partie  de  la  population  dans  les  ateliers, 
et  11  ruina,  par  cette  préférence,  en  portant  tous  les  capi- 
taux Ters  les  arts  de  luxe,  la  première  source  de  la  richesse 
nationale,  Tagriculture. 

L'Espagne,  avant  Texpulsion  des  Maures,  comptait 
dans  son  sein  quatre-vingts  filles  du  premier  rang,  et  une 
population  que  les  historiens  de  ee  temps-là  font  monter  ft 
cinquante  millions  d'hommes;  son  territoire  était  un  des 
plus  fertiles  de  l'Europe. 

Gourant  ambitieusement  après  une  richessse  fbelice, 
die  versa  ses  capitaux ,  sa  population  sur  les  mers  et 
dans  toutes  les  parties  du  globe  :  l'agriculture  languit  sur 
son  territoire  abandonné;  ses  manufactures  et  ses  arts 
tombèrent  insensiblement  en  ruine  ;  et  sa  population,  sui- 
vant la  décroissance  de  sa  richesse  territoriale,  est  descen- 
due de  cinquante  à  neui  millions  d'hommes  ;  elle  a  laissé 
aux  peuples  un  exemple  frappant  des  fautes  de  la  politique. 

Il  faut  encourager  la  marine,  parce  qu'elle  est  une  par- 
tie de  la  puissance*  Une  grande  marine  est  la  colonie  na- 
turelle d'un  grand  peuple  dont  le  territoire  domine  les 
mers;  mais  sa  grandeur  doit  sortir  surtout  de  la  prospé- 
rité d'un  peuple.  Celui  qui  aura  Tagriculture  et  l'indus- 
trie la  plus  florissante,  avee  des  ports  de  mer,  aura 
lou|ours  la  marine  la  plus  formidable,  le  commeroe  mari- 
time le  plus  étendu. 

Je  puis  me  tromper,  citoyens,  dans  les  réflexions  que  |e 
Totu  soumets  ;  mais  je  prie  la  Convention  de  les  prendre 
en  considération,  parce  qu'un  peuple  n'a  rien  de  plus  irn* 
portant  que  de  bien  asseoir  son  économie  politique. 

C'est  la  jalousie  que  donne  la  cupidité,  la  haine  qu1n« 
spire  la  rivalité,  les  lois  physiques  de  leur  territoire,  qui 
firent  imaginer  aux  Anglais  leur  acte  de  navigation;  un 
sentiment  de  Tengeanoe  le  dicta  contre  la  Hollande.  Une 
position  différente,  des  intérêts  plus  réfléchis,  doivent  di- 
riger les  actes  de  notre  légblation.  Vous  examinerei,  ci- 
toyens, si  votre  situation  présente ,  l'inlérét  de  votre  coni- 
■leree,  ne  tous  demandent  pas  d'ajouter  quelque  perfection 
•neore  ft  votre  acte  de  navigation,  d*y  apporter  quelque 
modification. 

Qu'il  me  soit  permis,  en  finissant  cet  article,  de  fbire 
ici  un  vœu  qui  lionore  la  tribune  d'une  nation  libre.  La 
haine  de  nos  ennemis  ne  l'entendra  pas;  mais  l'humanité 
et  la  raison  ont  des  asiles  encore  sur  la  terre;  il  sera  en- 
tendu de  ces  gouvernements  et  de  ces  peuples  justes  qui 
balMent  la  domination ,  sur  quelque  élément  qu'elle  pa* 
raisse ,  qui  savent  respecter  les  droits  de  la  nature. 

L'ambition  s'est  divisé  les  mers  :  on  s*est  battu  ponr 
ttn  golfe,  une  tle«  un  continent,  comme  on  se  l>atirait 
pour  sa  patrie;  les  mera  ont  vu  les  proscriptions,  le  com- 
merce a  été  tour  à  tour  une  proie  et  un  brigandage;  et  le 
génie  qui  aurait  dû  porter  partout  des  passions  douces  et 
bienfaisantes  comme  les  productions  de  la  nature,  comme 
la  paisible  industrie,  a  eu  aussi  ses  guerres  et  ses  fbreurs  : 
les  flots  ont  ronlé  le  sang  humain. 

C'est  sur  les  tyrans  qui  Youdraient  encore  renouveler 
ees  foreurs,  enchaîner  la  liberté,  et  usurper  le  sceptre  des 
mers,  que  toute  la  haine  et  la  colère  des  peuples  devraient 
s'appesantir.  Ceux-là  doivent  être  regardés  comme  les  en- 
aemis  de  la  prospérité  et  du  bonheur  du  genre  humain, 
fui  déshonorent  leur  puissance  en  l'employant  à  troubler 
•n  détruire  le  coun  et  les  bienfaits  du  commerce  des 
mers,  que  la  nature  a  créés  librrs  ponr  tous  les  hommes. 

Citoyens,  fe  tous  al  tracé  les  infortunes  du  commerce , 
les  causes  de  sa  destruction  et  de  notre  détresse  ;  je  vous  ai 
montré  la  grandeur  de  nos  ressources,  les  moyens  de  ra- 
tilmer  et  d^cucoorag er  en  même  tempe  le  commerce  et 


l'industrie  nationale;  Je  ▼oui  al  Indlqtié  les  défliuts  dei 
lois  qui  en  arrêtaient  les  progrès  dans  l'intérieur  et  au-de« 
hors;  je  rétablis  maintenant  devant  ?  oui  l'économla  poU« 
tique  sur  ses  véritables  bases. 

Un  système  d'économie  est  bon  quand  les  vrais  principes 
sont  r^andus  dans  un  Etat ,  et  que  le  peuple  a  placé  sa 
confiance  dans  leur  exécution,  lorsque  le  travail  et4es  pro« 
duits  du  territoire  sont  regardés  eomme  la  première  ri« 
cbesse  d'une  nation ,  que  la  prospérité  nationale  repose 
sur  les  deux  premières  bases  de  toute  prospérité,  l'agri« 
culture  et  le  commerce  ;  lorsque  l'agriculteur,  le  fobricant 
et  le  commerçant  jouissent  de  Ir  pleine  liberté  de  leur  pro- 
priété, de  leurs  productions  et  de  leur  industrie. 

Un  système  d'économie  est  lK>n  quand  le  commerçât 
semblable  à  ces  rosées  salutaires  par  lesquelles  la  nature 
se  régénère,  parcourt  librement  toutes  les  contrées  qu!U 
enrichit  ;  quand  les  ateliers  offrent  le  spectacle  de  l'émula* 
tion  et  de  l'activité  de  tous  les  arts;  quand  les  campagnea 

{irésentent  tous  les  moyens  de  fécondité  ;  quand  les  uns  et 
es  autres  travaillent  à  l'envi  pour  les  besoins  mutuels  de 
la  société;  lorsque  l'art  des  manufactures  s'attache  parti* 
cùlièrement  à  enrichir  les  matières  et  productions  du  sol  | 
lorsque  l'industrie,  en  créant  les  ouvrages  que  le  luxe,  le. 
besoin  ou  la  curiosité  des  étrangers  nréfèrenti  rend  les  au^ 
très  nations  tributaires  du  génie  national. 

Un  système  d'économie  est  bon  quand  une  marine  nom- 
breuse, des  exportations  heureusement  oombinées«  ver- 
sent ches  l'étranger  le  superflu  de  nos  productions  terri* 
toriales  et  de  nos  arts ,  et  appellent  en  échange  de  riches 
et  nombreux  retours  ;  quand  des  lois  sages  provoquent 
pour  la  nation,  par  la  concurrence  des  étrangers,  le  meil- 
leur prix  possibledans  les  achats  et  dans  les  ventes  ;  quand, 
dans  une  république,  l'austérité  de  la  nation  repoussant 
par  sentiment,  plutôt  que  par  des  lois,  toute  frivolité  inu- 
tile, sait  n'admettre  ches  elle  que  les  productions  étraiH 
gères,  nécessaires  à  ses  arts  ou  à  ses  besoins. 

Un  système  d'économie  est  bon  quand  des  lois  et  une 
administration  monétaire,  claires  et  précises,  dirigent  les 
finances  ;  quand  la  valeur  du  signe  marche  en  proportion, 
autant  qu'il  est  possible,  avec  la  valeur  des  denrées  et  des 
productions  de  rart;  quand  Pagiotageet  l'usure  sont  bannis 
des  affairestquand  le  goufeAiement  encourage  et  propage 
tous  les  genres  d'industrie,  sans  se  mêler  d'en  faire  aucune  | 
quand  de  bonnes  lois  politiques,  des  douanes  modérées, 
la  facilité  des  échanges,  appellent  le  commerce  et  les  arts 
étrangers  sur  notre  territoire,  comme  sur  une  terre  hospl* 
talière;  quand  l'étranger  arrive  content  dans  nos  ports,  et 
qu'en  quittant  nos  rivages,  la  satisfaction  d'un  commerce 
heureux,  l'espoir  de  nous  revoir  encore,  raccompagnent 
sur  ses  loyen  pour  le  ramener  bientôt  sur  nos  côtes. 

Enfin,  un  système  d'économie  est  bon  quand  le  peuple 
est  entouré  de  tous  les  objets  et  de  tous  les  moyens  d'une 
subsistance  alx>ndante  :  c'est  alors  que  le  philosophe  re- 
garde avec  une  Sme  attendrie  une  société  qui  sait  ainsi  se 
gouverner»  se  rendre  heureuse,  et  que  le  dd  sourit  à  son 
bonheur. 

Hfttex-vnus,  législateurs,  hàtet-vous  de  réaliser  le  plan 
de  prospérité  publique  que  nous  venons  de  tracer  ici  s  {c 
sais  que  l'ordre  des  choses  présentes,  et  notre  position  po- 
litique ,  ne  vous  permettent  pas  d'ordonner  rexécutlon 
de  tous  les  prindpes  que  |e  votis  ai  exposés  et  que  vous 
avex  dans  le  coeur;  mais  tous  pouves  détruire,  dès  ce 
moment ,  les  principaux  rices  de  notre  économie  poli- 
tique; vous,  pouves  rendre  au  commerce  la  liberté,  sans 
danger  :  s'il  fut  cupide,  avare  dans  la  révolution,  ordon- 
nex-lui ,  au  nom  de  la  palrict  de  rentrer  dans  le  sein  de 
la  probité.  Il  est  devant  vous,  il  jure  obéissance  à  vos 
lois  :  vous  avex  dit  à  la  victoire  de  triompher  de  vos  enne- 
mis, Yos  ennemis  sont  vaincus  :  dites  au  commerce  de  re« 
prendre  son  cours,  de  réparer  ses  fkutes  et  ses  pertes,  et 
bientôt  vous  verres  renaître  tous  les  genres  dlndustrie; 
vous  aures  rendu  la  vie  aux  manuf^nres,  à  vos  fabri- 
ques; la  navigation  reprendra  son  cours;  vous  verres  le 
commerce  parcourir  toutes  les  contrées,  chargé  des  pro- 
dudion^  du  territoire,  et  s'agiter  bientôt  dans  nos  ports 
pour  aller  porter  à  l'étranger  le  produit  de  nos  arts;  vous 
verres  bientôt  la  république  entourée  de  tous  les  moyens 
de  prospérité. 

(UêmitêdimâlM.) 


43 


SnrS  DB  LA  SÉAlfCB  DU  3  IflVOSB* 

BiKL ,  au  nom  du  comité  des  finances  :  Je  viens, 
«u  nom  de  votre  comité  des  finances,  vous  proposer 
de  foire  eesserun  doute  préjudiciable  à  Tintérét  pu- 
blic, qui  8*e8t  élevé  dans  la  perception  du  droit  d'en- 
registrement concernant  les  reventes  ou  rétroces- 
sions des  domaines  nationaux. 

L*artitle  II  du  décret  du  M  juin  1700  porte  t  •  qa*U  ne 
sera  perçu*  pendant  cinq  années*  pour  aucune  acquisi- 
lioo,  adjudication,  fente,  subrogation ,  revente,  ceision 
et  rétrocaMÎon  dei  domainei  naliooaui,  aucun  autre 
droit  que  celui  du  contrôle,  qui  sera  fixé  à  i5  sous.  • 

Aux  termes  de  ce  décret ,  il  est  clair  qu'il  n'était 
dû  qu'un  droit  de  contrôle  de  15  sous  pour  chaque 
vente  ou  revente  qui  pourrait  avoir  lieu  pendant 
cinq  années ,  tant  de  la  part  des  adjudicataires  et  de 
leurs  acauéreurs  que  des  propriétaires  subséquents. 

Mais»  bientôt  après,  le  décret  fut  modifié  par  la  loi 
du  10  décembre  1790,  relative  au  droit  d<cnregisr 
trement. 

Le  dernier  paragraphe  du  titre  des  exceptions,  qui 
est  à  la  suite  du  tarif  des  droits  d'enregistrement, 
8*exprime  en  ces  termes  : 

•  Toutes  les  acquisitions  de  domaines  nationaux ,  faites 
par  des  particuliers,  la  vêntt  et  eesiion  qu*ils  en  feront,  ne 
seront  assujetties  qu'an  droit  fixé  de  15  sous  pendant  les 
cinq  années  accordées  par  le  décret  du  29  juin  dernier.  » 

D'après  cette  dernière  loi ,  il  est  évident  que  la 
première  adjudication  et  la  vente  que  fera  l'adjudi- 
cataire direct  des  biens  nationaux  sont  les  seuls  actes 
qui  ne  soient  passibles  que  du  droit  fixe  de  15  sous, 
et  que  toutes  les  autres  ventes  et  reventes  qui  peu* 
vent  avoir  lien  pendant  le  cours  de  cinq  années  doi- 
vent être  soimiises  au  droit  proportionnel. 

Bn  effet,  les  dispositions  de  la  loi  du  19  décembre 
1790  sont  claires  et  précises  ;  il  est  dit  : 

t  Toutes  les  acquisitions  des  domaines  nationaux  faites 
par  des  particniiers,  la  vntê  et  eestion  qnHU  en  feront,  s 

Ces  expressions  ne  peuvent  s'«ntendre  que  de  l'ac- 
quisition des  domaines  nationaux  que  les  particu- 
liers font  directement  de  la  nation,  et  de  la  vente  et 
cession  seulement  que  font  ces  particuliers,  et  non 
point  des  reventei  et  rétrocessions  qui  en  sont  faites 
par  les  propriétaires  subséquents,  et  le  décret  du 
mois  de  juin  1700  peut  d'autant  moins  être  opposé 
è  cette  opinion  qu'il  est  antérieur  à  l'établissement 
du  droit  d'enre^trement ,  et  qu'on  ne  doit  suivre 
pour  la  perception  de  ce  droit  que  les  lois  qui  le  con- 
cernent. . 

Bn  conséquence,  pour  faire  cesser  quelques  doutes 
qui  s'étaient  élevés  à  cet  égard ,  votre  comité  vous 
propose  le  projet  de  décret  que  voici  : 

«  La  Convention  nationale,  api^  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  des  finances,  décrète  ce  qoi  suit  t 

•  Les  acquisitions  de  domaines  nalionanx ,  autres  que 
eclles  bites  directement  de  la  nation  par  des  particuliers, 
et  la  première  vente  ou  cession  qu*en  feront  les  acquéreurs 
directs,  pendant  les  cinq  années  accordées  par  le  décret 
du  mois  de  juin  1790  et  par  celui  du  8  janvier  1 798,  sont 
assujetties  au  droit  proportionnel  d'enregistrement ,  sur 
le  pied  fixé  per  la  XVI*  section  de  la  V  classe  du  tarif  an* 
nexé  a  la  loi  du  10  décembre  1790. . 

Ce  projet  de  décret  est  adopté, 

Lbcouctbb  (de  Versailles)  :  Vos  comités  ont  pro- 

Ï)osé  de  retirer  la  loi  du  maximum  de  dessus  toutes 
es  marchandises,  grains,  fourrages,  etgénéralement 
sur  tous  obiets  commerciaux  dans  toute  l'étendue 
de  la  république. 

,  Cette  grande  mesure ,  qui  tient  aux  principes  de 
liberté,  a  égalité,  du  commerce,  de  relationsentre  les 
oembresd^ne  immensesociété,  peut-elle  être  adop- 
tée indistinctement  sur  toute  espèce  de  marchandi- 
ses etde  dcuiées?Tel  est  l'objet  qui  fixe  aujourd'hui 


Tattention  de  la  Convention  nationale;  il  est  digne 
d'une  discussion  réfléchie  et  approfondie. 

Pour  moi,  citoyens, je  ne  crois  pas  que  vous  puis- 
siez vous  livrer  au  penchant  de  votre  cœur  en  ren- 
dant une  pleine  liberté  dans  la  détermination  du  prix 
de  toutes  les  denrées  et  marchandises ,  produit  du 
sol  de  la  république. 

Quinze  cent  mille  hommes ,  tant  sous  les  armes 
qu'employés  au  service  des  armées  de  terre  et  de 
mer ,  tous  salariés  et  recevant  des  rations  de  pain, 
viande ,  grains  et  fourrages  de  vos  magasins  ;  trois 
cent  mille  autres  occupés,  dans  les  différents  maga- 
sins et  ateliers  de  la  republique,  aux  différentes  fa- 
brications ;  cent  vingt  mille  chevaux  employés  à  ce 
même  service,  nourris  et  entretenus  de  même,  peu- 
vent-ils permettre  que  vous  abandonniez  le  prix  de 
leur  existence  à  la  cupidité  des  propriétaires  de  ces 
denrées  de  première  et  indispensable  nécessité,  et  à 
celle  de  vos  propres  agents ,  plus  cupides  peut-être 
encore  que  Ic^  |)remiers ,  sans  .qu'il  y  ait  un  prix 
connu  et  déterminé  dans  chaque  localité,  et  tel  que  ' 
ni  les  uns  ni  les  autres  ne  puissent  tromper  aisément 
la  foi  publique  ? 

Pour  moi,  je  ne  crois  pas  que,  dans  la  situation  oi^ 
vous  êtes,  vous  puissiez  adopter  la  mesure  proposée 
par  vos  comités,  de  lever  le  maximum  sur  toutes  les 
marchandises  et  denrées  de  quelque  nature  qu'elles 
soient. 

Pour  ne  point  surcharger  Tattention  de  rassem- 
blée ,  je  déclare  que  je  pense ,  comme  vos  comités, 
que  le  maximum  doit  être  levé  sur  toutes  marchan- 
dises et  denrées,  excepté  sur  celles  dénommées  ci» 
après: 

Le  blé-froment,  blé  de  mars,  seigle,  orge,  mab, 
sarrasin,  l'avoine,  les  foins,  la  luzerne  et  la  paille. 

Indépendamment  des  raisons  que  je  vous  ai  don* 
nées,  tirées  de  la  nécessité  de  savoir  comment  et  à 
quel  prix  vos  armées  seront  approvisionnées,  je  dit 
que  tous  ceux  qui  font  valoir  quelque  grande  occu- 

f>ation  n*ont  aujourd'hui  aucun  besoin  de  vendre  de 
ours  productions;  que,  l'entière  liberté  leur  étant 
rendue  de  les  vendre  au  prix  qu'ils  voudront,  il  les 
porteront  à  un  taux  si  excessif  qu'il  fera  le  dése»^ 
poir  des  petits  propriétaires,  des  rentiers,  des  pen- 
sionnaires, des  gagistes ,  des  fonctionnaires  publics 
sans  fortune  personnelle ,  et  surtout  de  vos  militai- 
res, dont,  dans  bien  des  endroits,  lorsqu'ils  ne  re- 
çoivent pas  leurs  rations ,  la  solde  et  les  appointe- 
ments deviennent  absolument  insuffisants;  enfin,  de 
cette  classe  nombreused'duvriers  dont  les  talents  ne 
sont  pas  propres  à  être  employés  dans  les  ateliers 
de  la  république  et  qui  se  trouveraient  sans  travail, 
si  la  dépeuse  dans  ce  genre  venait  à  doubler ,  même 
à  tripler,  comme  cela  ne  manquerait  pas  d'arriver. 
En  vainoti  médit  :  la  liberté  du  commerce  va  ame- 
ner la  concurrence ,  et  avec  elle  l'abondance.  Oui, 
citoyens,  cela  sera  vrai  pour  les  objets  qui  ne  sont 
pas  d'une  indispensable  nécessité,  et  dont  l'excessive 
cherté  des  autres  objets  va  forcer  les  citoyens,  même 
les  plus  aisés,  de  se  passer  ;  mais  non  pour  le  pain, 
l'avoine,  les  fourrages,  dont  nous  n'avons  jiistement 
qu*en  proportion  de  nos  vrais  besoins,  auxquels  rien 


cet  avide  laboureur,  qui,  l'après-midi,  à  l'instar  du 
marchand,  voi^dra  vendre  sou  blé,  son  avoine,  son 
fourrage,  un  quart  de  plus  que  le  matin  ;  car  la  faim 
ne  s'ajourne  pas  au  lendemain. 

Citoyens,i)Our  que  lecommerce  opère  de  lui-même 
son  niveau,  il  faut  que  la  quantité  de  marchandises 
soit  plus  abondante  que  la  consommation  présumée; 
autrement  les  spéculations  de  l'homme  avide  soat 


u 


cnnsc  que  les  marcliaudises  manquent  au  besoin  ;  et 
cVst  malheurcusementle  cas  où  nous  nous  trouvons. 
Il  lafit  donc  de  toute  nécessité  prévenir,  arrêter  Ta- 
viditc  du  propriétaire,  ou  le  gouvernement  succom- 
berait lui-même  à  cette  avidité  particulière  En  eflct, 
votre  loi  ne  porte-t-elle  pas  que  les  réquisitions  qui . 
seront  faites  pour  les  armées  seront  payées  au  cours 
que  vaudront  les  denrées  le  jour  de  leur  enlève-, 
ment?  (Article  VIII  du  projet  de  décret.)  Mesure 
absolument  mauvaise  et  impolitique;  car,  d'intelli- 
gence entre  eux,  des  propriétaires  du  même  canton, 
chez  lesquels  desgrams  ou  marchandises  sont  en  ré- 
quisition ,  deviennent  lés  maîtres ,  pendant  l'inter- 
valle de  la  réquisition  à  la  livraison,  d'en  faire  aug- 
menter le  prix,  parce  que,  la  réquisition  ayant  rendu 
la  denrée  absolument  rare,  il  n'y  a  plus  d'abondance, 
et  c'est  elle  seule  qui  forme  la  concurrence,  et  par 
conséquent  la  baisse  du  prix.  Or,  je  vous  le  de- 
mande, où  en  scriez-vous  si,  au  bout  du  mois  de  la 
réquisition,  le  laboureur  qui  lui-même  aurait  pro- 
.  voqué  la  hausse  des  denrées,  vous  disait:  Je  veux 
vendre  mon  blé  49  Irv,,  50  liv.  le  quintal,  mon 
avoine  le  même  prix,  les  autres  grains  et  fourrages 
en  proportion  ?  Quelles  sommes  immenses  ne  vous 
coûterait  point  l'approvisionnement  de  vos  armées? 
et  certes,  vos  agents  ne  s'entendraient  aue  trop  avec 
les  cultivateurs  pour  la  hausse,  la  plus  légère  fraude 
dans  cette  partie  devant  leur  rapporter  des  bénéfices 
immenses,  et  sans  qu'on  puisse  les  taxer  de  fraude, 
par  la  collusion  qui  régnerait  sur  les  prix  entre  le 
vendeur  et  l'acheteur. 

Mais  ce  mal,  tout  grand  qu'il  est,  ne  serait  pas  le 
plus  pernicieux  :  que  deviendrait ,  je  vous  le  de- 
mande, le  journalier  dont  les  talents  ne  peuvent  être 
employés  utilement  aux  travaux  de  guerre  de  la  ré- 
publique; le  petit  rentier,  le  petit  marchand  dans 
les  campagnes?  ou  plutôt  que  deviendraient  les  fer- 
miers eux-mêmes ,  ces  gros  cultivateurs  qui ,  par 
l'excès  de  leur  avidité ,  auraient  poussé  la  patience 
du  peuple  à  bout  ?  Car  l'excès  des  maux  ferait  qu'il 
tournerait  contre  eux  sa  fureur ,  et  ce  dernier  mal- 
heur serait  le  plus  grand  de  tous. 

Ces  raisons,  et  beaucoup  d'autres  qui  ne  peuvent 
.  être  détaillées  ici,  me  déterminent  à  penser  que  le 
maximum  doit  avoir  lieu  dans  toute  l'étendue  de  la 
république  sur  les  grains  seulement  servant  à  la 
nourriture  de  l'homme  et  à  celle  des  chevaux  ;  que 
ce  maximum  doit  être  porté  à  un  prix  tel  que  le  cul- 
tivateur y  trouve  aisément  le  produit  de  ses  travaux, 
le  prix  de  ses  fermages,  le  déaommagcnlent  enfin  de 
ses  frais  de  culture,  avec  un  bénéfice  proportionné  à 
l'importance  de  ses  occupations. 

La  dernière  fixation  n'avait  pas  été  suffisamment 
proportionnée  aux  frais  immenses  qu'a  nécessites  la 
cherté  des  chevaux ,  outils,  instruments  aratoires, 
gaçes  et  nourriture  des  domestiques  et  des  ouvriers, 
qui  sont  successivement  montés. 

Je  proposerais  de  fixer  le  prix  du  quintal  de  blé, 
par  exemple,  en  prenant  la  base  de  1790,  au  double 
du  prix  ({u'il  valait  alors,  au  lieu  de  13  liv.  que  vous 
l'aviez  fixé;  de  sorte  que  si ,  en  1790,  le  quintal  de 
blé  valait  U  liv.,  il  serait  porté  à  22  liv.,  et  sur  tous 
les  autres  grains  en  même  proportion. 

A  régara  du  maximum  sur  les  fourrages,  vu  l'a- 
bondance que  la  récolte  de  cette  année  nous  a  pro- 
duite en  fom  et  fourrages  de  toute  espèce ,  je  crois 
qu'on  pourrait  se  dispenser  d'y  mettre  un  maximum; 
mais  je  voudrais  q»i*un  recensement  général  de  tous 
les  fourrages  se  fît  sur-le-champ  et  avec  la  plus 

grande  exactitude  :  je  voudrais  que  les  propriétaires 
e  ces  fourrages  fussent  tenus  de  faire  porter  aux 
marchés  voisins ,  de  décade  en  décade ,  une  portion 
de  leurs  fourrages,  proportionnée  à  la  quantité  qu'ils 


auraient,  de  façon  qu'au  l^r  fructidor  prochain 
leurs  greniers  fussent  épuisés  ;  je  désirerais  que  les 
commerçants  dans  la  partie  des  fourrages,  qui  achè- 
teraient des  laboureurs,  fussent  tenus  de  faire  sui- 
vre, de  décade  en  décade,  une  quantité  proportion- 
née aux  approvisionnements  qu'ils  auraient,  aux 
marchés  voisins,  afin  de  les  tenir  garnis. 

J'estime  qu'aucune  commune  delà  république  ne 
peut  avoir  le  droit  de  payer  le  pain  à  un  prix  infé- 
rieur à  celui  qu'il  doit  valoir ,  comparé  avec  celui 
du  blé. 

Cet  abus,  outre  qu'il  rompt  tous  les  liens  de  la  li- 
berté et  de  l'égalité,  qu'il  excite  le  peuple  des  com- 
munes des  départements  voisins  à  de  vivesj^t  justes 
réclamations,  c'est  qu'il  attire  dans  cette  commune, 
que  chacun  regarde  alors  comme  privilégiée,  une 
multitude  d'hommes  oisifs ,  fainéants ,  amateurs  de 
nouveautés,  esprits  remuants  et  perfides  sous  tous 
les  gouvernements,  qui ,  au  moyen  du  pain  et  des 
spectacles,  dont  ils  ont  si  facilement  la. jouissance, 
troublent  tout  ordre  social. 

Je  désire  aussi  qu'après  la  taxe 'des  grains  dans 
chaque  district ,  la  police  municipale ,  dans  chaque 
commune,  veille  à  ce  que  le  prix  du  pain  n'excède 
jamais  (les  frais  de  boulangerie  prélevés)  le  prix  au- 
quel il  doit  être  fixé  d'après  celui  du  blé  ;  qu'enfin 
de  bonnes,  de  sages,  de  prudentes  lois  de  police 
soient  faites  à  ce  sujet,  et  que  les  mesures  les  mieux 
combinées  soient  prises  pour  leur  exécution. 

Je  demande  donc  que  la  Convention  nationale  dé- 
crète la  révocation  de  la  loi  du  maxi^mum  sur  toutes 
les  marchandises  et  denrées  généralement  quelcon- 
ques, excepté  celles  nominativement  exprimées  dans 
le  décret  à  intervenir. 

RiCHAUD  :  S'il  ne  s'agissait  que  de  répondre  aux 
objections  qui  viennent  d'être  faites  contre  le  projet 
de  décret  qui  vous  est  proposé,  cela  ne  serait  pas  dif- 
ficile ;  elles  se  réduisent  à  deux  principales  :  la  pre- 
mière, qu'il  en  coûtera  beaucoup  plus  à  la  républi- 
3ue  pour  l'approvisionnement  de  ses  arméeset  places 
e  guerre  ;  la  seconde,  que  les  pauvres  rentiers  et  les 
malheureux  qui  n'ont  pas  la  faculté  de  pouvoir  tra- 
vailler, ou  qui  n'ont  pas  de  forts  salaires,  ne  pour- 
ront pas  vivre,  au  prix  où  la  cupidité  et  l'égoTsme 
des  fermiers  et  laboureurs  vont  porter  leurs  grains 
et  fourrages,  lorsqu'une  fois  ils  n  auront  plus  le  frein 
du  maximum. 

Je  dirai  qu'il  n'en  a  pas  moins  coûté  à  la  républi- 
que lorsqu'il  a  fallu  tirer  du  dehors  des  subsistan- 
ces de  toute  espèce  qui  coûtaient  fort  cher,  et  qu'elle 
vendait  dans  l'intérieur  au  maximum,  et  que  le  riche 
comme  le  pauvre  profitait  des  pertes  énormes,  que 
faisait  le  gouvernement  à  ce  commerce  ruineux. 
Dans  le  nouveau  système  il  n'y  aura  au  moins  de  sa- 
crifices à  faire  que  pour  les  troupes,  et  des  secours  à 
donner  qù*^ux  indigents. 

Si,  comme  l'a  dit  l'opinant,  nous  avons  à  craindre 
l'égoïsme  et  la  cupidité  des  fermiers  et  des  cultiva- 
teurs,  combien  n'est-elle  pas  plus  dangereuse  avec 
le  maximum  !  Alors,  ne  trouvant  pkisdans  le  prix  de 
leurs  grains  le  remboursement  de  leurs  frais  et  avan- 
ces, et  trouvant  au  contraire  un  grand  bénéfice  à 
cultiver  d'autres  denrées  ou  objets  non  maximes,  la 
culture  du  blé  serait  alors  absolument  négligée,  ou 
servirait  à  l'engrais  des  volailles  et  autres  animaux 
qui  ne  se  vendraient  pas  au  maximum.  11  faut  donc, 
puisque  les  fermiers  et  les  cultivateurs  ont  de  l'é- 
goïsme et  de  la  cupidité,  tâcher  de  les  faire  concor- 
der autant  que  possible  avec  l'intérêt  public;  car 
encore  vaudra-t-il  mieux  payer  plus  cher  les  subsis- 
tances que  de  n'en  pas  avoir. 

D'ailleurs,  citoyens,  que  l'expérience  que  nous 
avons  faite  nous  éclaire  :  avons-nous  été  jamais  plus 


45 


ina1hc;urcux  pour  les  subsistances  que  depuis  que  le 
maximum  existe?  Dans  beaucoup  de  départements 
de  la  république  l'on  n*avait  plus  que  du  pain  d'a- 
voine et  d'autres  mauvaises  graines  ;  encore  n'y  en 
avait-il  gu'en  petite  quantité. 

A  Paris  même  n'a-t-on  pas  fait  ces  tristes  expé- 
riences, et  pour  la  viande,  et  pour  le  beurre,  et  pour 
beaucoup  d'autres  objets?  Le  peuple  lui-même  a 
bientôt  reconnu  les  inconvénients  du  maximum  ;  et 
lorsqu'il  s*est  aperçu  qu'il  conduisait  à  la  disette,  il 
a  préféré  acheter  de  gré  à  gré,  trois  h  quatre  fois  plus 
cher,  les  objets  dont  il  avait  besoin,  que  de  passer 
des  parties  de  la  nuit  et  des  journées  entières  à  la 
porte  d'un  boucher  ou  d'un  autre  marchand,  pour 
avoir  la  petite  portion  qui  lui  était  assignée.  Ces  jour- 
nées précieuses  de  l'ouvrier,  de  l'artisan,  du  journa- 
lier, étaient  perdues  pour  la  république  et  pour  eux 
surtout,  et  rendaient  l'objet  qu'ils  obtenaient  enfin 
beaucoup  plus  cher  qu'ils  ne  l'auraient  acheté  de  gré 
à  gré. 

Observons  ensuite,  citoyens,  que  le  commerce 
que  nous  voulons  remettre  en  vigueur,  et  qui  est  le 
véritable  approvisionneur  des  nations,  le  commerce 
ne  vous  fera  jamais  d'importations  de  denrées  de 
première  nécessité  tant  qu'elles  seront  soumises  au 
maximum;  car,  en  les  achetant  dans  Tétranger,  elles 
lui  reviendront  fort  chères  au  cours  où  sont  aujour- 
d'hui les  changes;  et  si  en  arrivant  dans  rinlérieur 
on  l'oblige  de  les  vendre  à  perte,  il  ne  pourra  pas 
continuer  ses  opérations.  Je  ne  me  dissimule  cepen- 
dant pas  les  inconvénients  qui  pourraient  résulter 
de  la  levée  du  maximum,  surtout  dans  les  premiers 
moments,  et  jusqu'à  ce  que  les  importations,  la  li- 
bre circulation  et  l'activité  des  fabriques  soient  par- 
faitement rétablies ,  et  aient  ramené  Tabondance. 
Cest  pourquoi  je  demande  que  l'on  donne  à  la  dis- 
cussion de  cet  objet  important  toute  l'attention  et 
toute  la  latitude  qu'il  mérite  ;  car  il  ne  sufHt  pas  que 
nous  soyons  tous  convaincus  que  la  détermination 
que  nous  prendrons  sera  la  moins  mauvaise,  il  faut 
encore  que  le  peuple  qui  nous  entend  en  soit  con- 
vaincu aussi  pour  qu'il  y  ait  confiance  ;  qu'il  seconde 
de  toute  sa  constance  et  de  tonte  son  énergie  l'exé- 
cution de  vos  décrets  et  la  libre  circulation  des  sub- 
sistances, aussi  nécessaire  au  corps  social  que  celle 
du  sang  l'est  à  l'existence  du  corps  humain. 

Bepfroy  :  Dans  toute  la  république  le  renchéris- 
sement progressif  des  objets  de  consommation  pre- 
mière éveille  Tinquiélude,  les  esprits  agités  en  cher- 
chent partout  la  cause. 

Le  plus  grand  nombre  des  cultivateurs  la  trouve 
dans  la  quantité  du  signe  en  circulation  ;  d'autres 
pensent  qu'il  ne  faut  la  chercher  que  dans  l'inexécu- 
tion des  lois  sur  le  maximum.  Quelques  opérations 
sûrement  mal  entendues,  des  dissensions  scandaleu- 
ses dans  la  représentation  nationale,  la  levée  d*une 
armée  considérable  avaient  tout  à  la  fois  amené  la 
rareté  des  objets  de  consommation  et  le  discrédit  du 
signe  contre  lequel  ils  devaient  être  échanges;  ces 
circonstances avaientnaturellement amené  la  hausse 
de  toutes  les  valeurs,  et  les  salaires  commençaient  à 
s'y  proportionner,  lorsque  l'idée  du  maximum  fut 
présentée  à  la  portion  laborieuse  du  peuple  sous  les 
dehors  les  plus  propres  à  la  séduire. 

Des  hommes  sans  principes  comme  sans  expé- 
rience, frappés  de  l'effet  sans  en  apercevoir  la  cause, 
égarés  par  les  machiavélistes  perfides  qui  méditaient 
la  perte  de  la  liberté,  arrachèrent  de  vive  force  à  la 
Convention  nationale  le  décret  fatal  par  lequel  le 
prix  des  objets  de  consommation  fut  taxé. 

Cette  loi,  aussi  immorale  qu'absurde  et  destruc- 
tive,contrariant  tous  les  intérêts,  coupa  tous  les  liens 
de  la  société,  brisa  les  ressorts  de  l'agriculture,  du 


commerce,  de  l'industf  rect  des  arts;  on  l'avait  prévn;' 
les  travaux  de  tout  genre  diminuèrent  progressive- 
ment; la  reproduction  n'eut  plus  lieu  ;  le  négociant 
trouva  les  ports  fermés,  et  toutes  ses  spéculations 
jitilcsi  ses  provisions  se  resserrèrent. 

Le  défaut  de  reproduction,  l'inertie  forcée  du  com- 
merce, les  excès  commis  de  toute  part  contre  les 
cultivateurs,  le  joug  d'un  code  bien  plus  homicide 

Sue  pénal  rendaient  impossible  l'approvisionnement 
e  nos  nombreuses  et  formidables  armées;  on  aurait 
f)u  reniettre  encore  toutes  choses  en  état  si  on  se 
ût  moins  occupé  du  bénéfice  de  (juelques  commer- 
çants intelligents,  qui  eussent  évité  des  frais  énor- 
mes à  la  république  en  la  servant  bien  ;  mais  la  ma- 
nie des  régies,  presoue  toujours  onéreuses,  fut 
substituée  aux  règles  ae  la  sagesse  ;  une  parcimonie 
scandaleuse  donna  l'origine  à  la  prodigalité  la  plus 
inconcevable  ;  tout  fut  fait  au  compte  oe  la  républi' 
que,  comme  s'il  lui  eût  été  possible  de  suivre  les  dé 
tails  de  ses  opérations.  Bientôt  les  chevaux  payés 
3,000  liv.  furent  enlevés  au  cultivateur  pour  900  liv.; 
il  perdit  les  moyens  et  le  goût  des  entreprises  et 
même  de  ses  travaux  ordinaires.  Le  commerce  dis 
parut;  l'industrie  une  fois  paralysée,  le  peuple  com 
mença  à  calculer  que  le  temps  qu'il  perdait  à  atten^ 
dre  la  distribution  des  objets  taxés  les  lui  faisait 
acheter  à  un  prix  excessif. 

La  terreur  était  entièrement  à  Tordre  du  jour  ; 
l'exagération  des  idées  était  portée  au  plus  haut  pé- 
riode ;  une  sorte  de  délire  se  substituait  à  la  raison  ; 
on  crut  augmenter  les  ressources  et  la  fortune  pu- 
blique car  la  destruction  des  fortunes  particulières; 
on  perdit  de  vue  cette  maxime  :  que  bénéfice  illégi- 
time n'est  pas  gain.  Et  tous  les  moyens  les  plus  pro- 
pres à  altérer  le  crédit  des  assignats  furent  successi- 
vement employés  avec  tant  de  force  et  de  rapidité 
que  le  mal  en  devint  général. 

C'est  au  maximum,  à  la  violation  des  principes, 
aux  actes  arbitraires,  à  la  versatilité  du  gouverne- 
ment, à  l'effet  rétroactif  donné  à  plusieursTois,  à  l'in- 
stabilité des  actes  législatifs ,  a  l'oppression  sous 
laquelle  la  Convention  nationale  est  longtemps  de- 
meurée à  la  vue  de  la  nation  entière,  alors  trompée 
ou  stupéfiée,  qu'il  faut  principalement  attribuer  le 
discrédit  des  assignats.  Ce  discrédit  force  la  na- 
tion à  des  émissions  plus  considérables,  qui  contri- 
i)uent  elles-mêmes  à  déprécier  le  signe. 

Mais  déjà  les  premiers  pas  sont  faits  vers  la  gloire 
que  nous  devons  ambitionner  ;  sans  doute  vous  n'hé- 
siterez pas  à  abolir  le  maximum,  cette  loi  dès  long- 
temps proscrite  dans  l'opinion  de  ceux  à  qui  on- l'a- 
vait présentée  comme  un  talisman  qui  devait  assurer 
leur  prospéçité. 

Le  maximum  n'existant  plus,  vous  livrerez  à  l'en- 
treprise les  approvisionnements  de  vos  armées,  et 
les  transports  qui  les  concernent  ;  chaque  chose  étant 
surveillée  par  l'entrepreneur  intéressé,  vous  verrez 
bientôt  rendre  à  l'agriculture,  aux  arts  et  à  l'indus- 
trie, une  multitude  de  chevaux  et  de  bras  inutiles,  et 
qui  coûtent  des  milliards  à  la  république. 

Alors  vos  dépenses  éprouveront  une  réduction 
considérable ,  et  vous  ne  serez  plus  contraints  de 
grossir  la  masse  des  assignats  en  circulation,  dans 
une  proportion  aussi  révoltante. 

Les  rentiers  de  l'Etat  ne  doivent  pas  avoir  une 
condition  pire  que  celui  qui  n'a  qu'un  citoyen  pour 
débiteur.  Vous  vous  déterminerez  sans  doute  a  dé- 
créter que  les  rentes  inscrites  au  grand  livre,  ayant 
déjà  été  soumises  à  la  retenue  du  cinquième ,  ne 
pourront  être  assujetties  à  aucune  retenue.  Peut- 
être  porterez-vous  aussi  un  coup  d'œil  sur  les  rentes 
viagères,  et  croirez-vous  devoir  en  discuter  le  prin- 
cipe. Car  la  question  de  savoir  s'il  est  utile  à  la  ré- 


46 


publique  d^augmenter  ta  somme  dea  rentes  consti* 
tuées,  pour  diminuer  les  rentes  dont  Textinction  se 
fait  tous  les  Jours,  n*a  point  été  traitée. 

Beffroy  propose,  à  la  suite  de  ces  réflexions,  plu* 
sieurs  projets  de  décrets  dont  il  a  développé  les  prin- 
cipales dispositions  dans  son  discours. 

ScBLUBB  :  Les  deux  décrets  que  tous  avex  rendus  ^ 
les  6  et  1 S  frimaire,  pour  rendre  au  commerce  la  vi- 
gueur qu'il  n'a  perdue  que  par  la  mauvaise  foi  des 
orateurs  et  des  prôneurs  de  fa  loi  du  20  septembre, 
ne  feront  encore  rien  pour  faire  fleurir  le  gou- 
vernement et  empêcher  de  retirer  du  trésor  na- 
tional des  sommés  immenses,  qui  n'ont  profité  que 
dans  les  mains  des  intrigants  et  des  prôneurs  de  l'a- 
narchie, si  vous  ne  vous  hâtes  de  venir  au  secours 
du  commerce  en  détruisant  une  loi  désastreuse  sous 
tous  ses  rapports. 

Ce  n*est  pas  assex  que  vous  soyex  convaincus  de 
la  nécessité  de  lever  le  maximum,  il  fout  aussi  que 
voussachiex  qu'il  n'a  jamais  reçu  son  exécution,  ou 
plutôt  que  cette  exécution  s'est  concentrée  dans  le 
petit  nombre  des  citoyens,  toujours  fidèles  à  la  loi  et 
toi\jours  victimes  de  Tintri^ue  et  de  l'agiotage  ;  vous 
oe  rencontrez  que  des  patriotes  qui  ont  fait  constam- 
ment des  sacrifices  depuis  89  ;  ils  ne  se  plaignent 
pas ,  ces  bons  citoyens  :  c'est  encore  un  hommage 
qu'ils  offrent  à  la  patrie. 

Une  des  grandes  causes  de  l'inexécution  du  maxi- 
mum, c'est  qu'il  a  été  fait  par  des  hommes  qui  gé- 
néralement n'avaient  aucune  idée  du  commerce. 

M'était-ii  pi^  ridicule  de  présenter  pour  hase  de 
rétablissement  de  cette  loi  un  mode  sans  calculs  et 
sans  raisonnements?  Il  fallait  d'abord  maximer  les 
journées  des  ouvriers. 

La  première  cause  de  la  hausse  des  marchandises 
ne  provient  pas,  comme  on  a  voulu  le  faire  entendre 
souvent,  de  !a  grande  quantité  de  papier-monnaie 

3 ne  vous  avex  en  circulation  aujourd'hui  ;  une  cause 
evenue  plus  sensible  produit  cet  effet,  parce  que  là 
où  il  y  a  plus  de  numéraire  que  de  matière  repré- 
sentative du  numéraire,  il  faut  que  tout  hausse. 
Remettez  la  balance  du  commerce,  et  tout  diminuera. 
Mais  reportez-vous  sous  le  ministère  de  Pachc,  et 
vous  verrez  que  c'est  de  là  que  viennent  nos  pre- 
miers maux.  Il  fallait  habiller  quatre  cent  mille  hom* 
mes;  ce  ministre  inepte  et  fourbe  voulait  se  faire 
des  créatures;  il  envoya  dans  toute  la  république 
des  agents  qui  faisaient  leurs  affiiires  sous  le  manteau 
du  gouvernement;  ils  se  croisaient  souvent  dans  les 
fabriques  ou  endroits  de  grande  consommation;  et 
comme  les  bénéfices  étaient  proportionnes  à  la 

Fraude  valeur  des  achats,  ils  enchérissaient  l'un  sur 
autre,  et  les  marchandises,  par  ces  manœuvres,  se 
sont  trouvées  presque  aussi  haut  montées  au  com- 
mencement de  1793  qu'elles  le  sont  aujourd'hui. 

Me  croyez  pas  encore  que  nos  maux  viennent  seu«» 
lement  de  l'avidité  des  négociants;  sans  doute  il  en 
est  quelques-uns  qui,  accoutumés  à  spéculer  sur  la 
misère  du  peuple,  ont  fermé  leurs  magasins  aux  be- 
soins. Vous  aurez  beau  faire  des  lois  pour  ceux-là, 
ils  trouveront  toujours  le  moyen  de  les  éluder;  mais 
encore  vous  faudra-t-il  des  mesures  pour  pouvoir 
les  atteindre  et  sévir  rigoureusement  Ils  ne  sont  pas 
bons  citoyens  ceux-là  qui  ne  veulent  rien  apporter  à 
la  masse  commune. 

L'objet  le  plus  essentiel  dans  cette  discussion  est 
le  rapport  du  maximum  des  grains.  C'est  ici  que 
votre  attention  doit  être  grande.  Prenons  garde  aux 
malveillants  qui  nous  entourent  et  qui  voudraient 
nous  faire  faire  une  faute  en  politique,  pour  en  pro- 
fiter contre  la  liberté.  Me  perdons  pas  de  vue  que  les 
apôtres  du  terrorisme  sont  constamment  éveillés 
pour  saisir  tous  les  moyens  qu'ils  croient  propres  à 


lenrs  projets  criminels.  Ils  regrettent  trop  le  régime 
passé  pour  avoir  sitôt  abandonné  l'espoir  de  le  nire 
renaître.  Déjouons  leurs  complots  par  notre  sagesse. 

Le  cultivateur  a  été  sans  contredit  un  de  ceux  que 
la  loi  du  maximum  a  frappés  plus  partieulièrement; 
tenant  dans  ses  greniers  la  nourriture  de  tons  les  ci- 
toyens, il  devait  naturellement  être  le  premier  sur 
qui  pesât  plus  particulièrement  sa  rigueur.  La  mau- 
vaise admmisbration  dans  les  réquisitions,  le  des|)0- 
tisme  des  agents  qui  y  étaient  employés,  l'inearcéra* 
tion  d'un  grand  nombre  de  cultivateurs,  le  rf^e  de 
sang  enfin,  voilà  ce  qui  a  comblé  nos  maux. 

Il  est  donc  nécessaire,  pour  réparer  une  grande 
partie  de  ces  maux ,  de  rendre  la  liberté  tout  entière 
au  commerce,  en  levant  le  maximum  ;  mais  pouvons- 
nous,  devons-  nous  lever  le  maximum  sur  les  grains? 
Voilà  ce  qu'il  fout  examiner  avec  la  plus  haute  at- 
tention. 

Je  ne  vois  dans  le  rapport  du  maximum  snr  les 
grains  qu'un  avantage  pour  le  cultivateur,  et  qui  ne 
peut  être  balancé  avec  l'intérêt  général  :  c'est  celui 
de  vendre  à  prix  défendu  le  grain  qu'il  a  r^olté,  quo 
les  uns  regardent  comme  sa  propriété,  et  dont  je  dis 
qu'il  n'est  que  le  dépositaire. 

Une  augmentation  d'un  tiers  en  sus  de  votre  der- 
nière taxe  doit,  ce  me  semble,  être  adoptée;  le  cul- 
tivateur y  trouvera  un  dédommagement  de  ses  pei- 
nes, et  ce  prix  contrebalancera  les  autres  objets  sur 
lesauels  vous  levez  la  loi  en  entier. 

Il  faut  aussi  que  vous  rétablissiez  les  marchés;  sans 
cela  pas  d'abondance.  Décrétez  que  le  cultivateur, 
pour  indemnité  des  frais  qu'il  est  forcé  de  faire  pour 
vendre  ses  grains  ailleurs  que  dans  sa  commune, 
pourra  passer  le  quart  en  sus  du  prix  fixé  par  la  loi  ; 
alors  tout  rentre  dans  la  balance  ;  le  particuliertrouve 
le  moyen  de  s'approvisionner  et  le  cultivateur  une 
indenmité  de  ses  peines. 

Le  besoin  de  nos  nombreuses  armées  doit  fixer 
aussi  toute  votre  sollicitude.  Si  vous  décrétez  la  le- 
vée du  maximum  et  de  toutes  les  réquisitions  pour 
l'avenir,  il  faut  que  vous  trouviez  un  mode  d'appro- 
visionnement facile,  pour  que  le  service  des  armées 
ne  manque  jamais.  Au  lieu  de  disséminer  dans  toute 
la  république  une  légion  d'agents,  comme  l'a  fait 
jusqu'à  ce  jour  la  commission  du  commerce  et  des 
approvisionnements,  ordonnez  qu'elle  traite  de  gré 
à  gré  pour  tout  ce  qui  est  nécessaire  à  l'habillement 
et  équipement  de  nos  armées,  que  toutes  les  opéra- 
tions se  fassent  par  des  soumissions  volontaires,  vous 
trouverez  assez  de  citoyens  qui  viendront  vous  of- 
frir ;  mais  aussi  il  faut  qu'il  soit  établi  un  ordre  de 
payement  qui  ne  fasse  plus  souffrir  pendant  une  an- 
née entière  les  citoyens  soumissionnaires. 

Que  les  grains  que  cette  commission  fera  acheter 
soient  paya  aussitôt  leur  livraison  ;  et  donnez  aussi 
à  la  commission  le  pouvoir  de  les  payer  comme  ceux 
achetés  sur  les  marchés,  à  la  condition  par  le  culti- 
vateur de  les  porter  au  chef-lieu  de  son  district  seu- 
lement. C'est  avec  cette  jurande  justice  pour  tous  les 
intérêts  que  vous  parviendrez  facilement  à  appro- 
visionner vos  armées  sans  résistance. 

Il  faut  s'attendre  que  le  rapport  du  maximum  va 
être,  entre  les  mains  de  ceux  qui  ont  saisi  toutes  les 
chances  de  la  révolution,  un  nouveau  moyen  d'agio- 
tage ;  il  ne  faut  pas  vous  abuser  sur  la  secousse  que 
quelques  denrées,  les  matières  et  marchandises  sur- 
tout, vont  essuyer  par  l'effet  du  rapport  de  cette  loi. 
Il  faut  au  moins  prendre  des  mesures,  non  pour  em- 
pêcher celui  qui  a  de  gros  fonds  d'acheter  beaucoup, 
mais  pour  qu  il  ne  puisse  soustraire  momentanément 
de  la  circulation  les  objets  qu'il  aura  en  dépôt. 

Tous  les  citoyens  attendent  votre  décret  pour  re- 
prendre leur  portion  d'industrie.  Le$  mers,  couver* 


47 


tes  des  riches  productions  des  colonies»  vont  ramener 
l'abondance  en  tout  genre.  Le  cultivateur  sèmera  son 
champ  avec  confiance,  et  désirera  le  moment  d*une 
nouvelle  récolte  pour  ofifrir  à  la  patrie  le  prix  de  ses 
sueurs.  L'ouvrier,  tranquille  dans  son  atelier,  fabri- 
quera avec  courage  et  confiance  Tarme  qui  doit  por- 
ter la  mort  aux  tyrans. 

Bourdon  (de  TOise)  :  Il  est  démontré  çiue,  dans  un 
grand  nombre  de  départements,  les  frais  de  culture 
sont  tellement  augmentés  que  le  laboureur  ne  retire 

Îias  ses  dépenses.  Telle  est  la  position  où  nous  a  mis 
a  loi  du  maximum.  Attendez  encore  six  mois,  et 
Tagriculteur,  épuisé  par  les  semences  d'hiver,  n'aura 
pas  de  quoi  faire  les  semailles  de  mars» 

D'un  autre  côté,  le  prix  des  bestiaux  augmente 
dans  une  proportion  effrayante.  Le  soc  de  la  charrue, 
qui  coûtait  autrefois  50  sous,  est  monté  aujourd'hui 
a  32  livres;  je  vous  demande  si,  avec  des  frais  sem- 
blables ,  le  laboureur  peut  supporter  la  taxe  des 
grains?  Vous  désirez  qiie  les  étrangers  vous  en  op- 
portent  ;  mais  vous  ne  devez  pas  espérer  qu'ils  feront 
les  sacrifices  qu*ont  fait  les  agriculteurs;  ils  nes'as- 
sujettiront  pas  au  maximum.  U  faudra  donc  en  reve- 
nir à  vos  propres  moyens;  mais  les  laboureurs  sont 
hors  d'état  de  faire  les  semences  de  mars,  si  le  maxi- 
mum subsiste. 

Pblst  :  Je  conviens  que  la  loi  du  maximum  a  eu 
des  effets  funestes;  mais  je  crois  que  nous  devons 
nous  reporter  au  temps  où  elle  fut  rendue,  ou  plutôt 
nous  ressouvenir  de  quelle  manière  elle  fut  arrachée 
â  la  représentation  nationale.  Si  elle  fut  rendue  avec 

firécipitation,  c*est  une  raison  de  plus  pour  calculer 
es  effets  funestes  gui  pourraient  résulter  de  sa  sup- 
pression trop  subite.  Le  rapporter  du  comité  de 
commerce  a  fait  le  procès  à  cette  loi  de  la  manière 
la  plus  victorieuse  ;  les  membres  qui  ont  parlé  après 
lui  ont  porté  l'évidence  sur  cette  matière,  mais  au- 
cuns n*ont  réfléchi  sur  la  position  où  nous  sommes. 
Si  le  maximum  est  supprimé  sur-le-champ,  n'y  au- 
ra-t-il  pas  à  craindre  que  les  grandes  communes 
n'envoient  des  commissaires  pour  s'approvisionner  ? 
Ces  commissaires  ne  se  trouveront-ils  pas  en  con- 
currence avec  ceux  que  le  gouvernement  emploiera 
pour  l'approvisionnement  des  armées  de  terre  et  de 
mer?  N  y  a-t-il  pas  à  craindre  que  les  agioteurs, 
profitant  de  la  grande  masse  d'assignats  qui  se  trouve 
en  circulation,  ne  se  livrent  exclusivement  au  com- 
merce jdes  grains,  ne  fassent  des  accaparements  et 
n'occasionnent  une  hausse  effrayante? 

La  république  compte  un  million  de  défenseurs 
sous  les  armes;  ils  u  ont  pour  toute  solde  que  10 
sous  par  jour  :  comment  voulez-vous  qu'ils  vivent 
avec  ces  10  sous  dans  le  pays  ennemi,  si  la  loi  du 
maximum  ne  subsiste  pas»  et  s'ils  ne  là  font  pas  exé- 
cuter? 

i.e  prix  des  denrées  se  met  en  équilibre  avec  la 
quantité  des  signes  représentatif  ;  il  en  résulte  que, 
quoique  les  assignats  aient  pour  hypothèque  i5  mil- 
liards, c'est-à-dire  une  valeur  qui  surpasse  de  trois 
fois  la  quantité  en  émission,  cependant  ils  doivent 
augmenter  le  prix  des  subsistances  ;  faut-il  abandon- 
ner cet  effet  à  l'impulsion,  au  mouvement  naturel 
des  choses,  on  le  diriger  avec  art,  pour  que  la  com- 
motion ne  soit  pas  trop  brusque? 

Je  conçois  que  la  position  du  laboureur  est  pé- 
nible ;  car  l'homme  qui  est  propriétaire  de  100  livres, 
et  qui  paie  10  livres  la  journée  de  travail  qu'il  ne 
payait  que  20  sous  en  17^9,  éprouve  nécessairement 
une  diminution  dans  le  produit  de  son  champ,  par 
la  diminution  du  nombre  de  journées  de  travail  qu'il 
aurait  pu  y  employer  pour  le  même  prix.  Mais  telle 


est  notre  position  çiu'elle  ne  changera  pas ,  soit  que 
le  maximum  subsiste,  ou  non  ;  il  n'y  a  que  le  temps 
qui  puisse  nous  procurer  de  l'amélioration  :  jamais 
nous  ne  détruirons  les  passions  des  hommes;  le 
grand  art  du  législateur  est  de  les  diriger.  Mous  de» 
vous  prendre  des  mesures  pour  que  le  peuple  puisse 
toujours  atteindre  le  prix  du  pain  ;  je  pense  qu'il  fan« 
drait  que  le  gouvernement  se  chargeât,  vis-a-vis  dn 
cultivateur,  du  déficit  qu'il  éprouve.  (Murmures.) 
11  me  semble  qu'au  lieu  de  donner  ce  dédommage- 
ment aux  boulangers,  comme  on  l'a  fait  dans  les  vil- 
les, il  vaudrait  mieux  le  donner  au  cultivateur» 

Le  Rappobteur  :  Je  n*ai  qu'une  simple  observation 
à  faire  sur  la  proposition  de  conserver  le  maximum 
pour  les  grains,  et  de  l'abolir  pour  le  reste.  Vos 
agriculteurs  seront  donc  obligés  de  donner  leur  blé 
à  18  livres  quand  ils  verront  payer  50  livres  celui 
qui  viendra  du  dehors?  Songez  aussi  qu'un  domes- 
tique qui  leur  coûtait  100  livres  leur  en  coûte  700; 
le  journalier  qu'ils  payaient  50  sous»  ils  le  paient 
10  livres,  et  le  reste  à  proportion  :  craignez  ae  dé- 
tourner les  capitaux  de  l'agriculture;  on  les  portera 
sur  des  spéculations  plus  attrayantes  parce  qu'elles 
seront  plus  lucratives.  Par  la  même  raison  vous  ven- 
drez moins  vos  domaines  nationaux,  et  vous  al&ibli- 
rcz  le  gage  des  assignats. 

***  :  Les  grandes  communes  ne  s'approvisionnent 
que  par  la  liberté  du  commerce;  je  pose  en  fait 
qu'excepté  Paris  et  les  armées,  il  n'y  a  pas  denx 
grandes  communes  en  France  qui  soient  approvî- 
siounées  pour  deux  jours.  Si  vous  ôtezle  mai^imum, 
nous  paierons  cher;  mais  si  vous  le  gardes,  noos 
mourrons  de  faim. 

Cochon  :  Il  s'agit  moins  de  savoir  si  on  conservera 
le  maximum  que  de  savoir  si  on  le  recréera,  car  il 
n'existe  nulle  part.  Nous  marchons  entre  deux 
écueils  :  ne  rien  avoir,  ou  payer  cher. 

Le  second  vaut  encore  mieux  que  le  premier;  entre 
deyx  maux  il  faut  choisir  le  moindre.  Jamais  on  n'a 
importé  plus  de  six  cent  mille  quintaux  de  blé  en 
France  ;  mais  d'où  vient  la  disette  factice  ?  Le  fermier 
garde  son  blé  qui  est  maxime,  et  vend  des  denrées 
qui  ne  le  sont  pas  ;  il  le  fait  manger  a  ses  cochons,  à 
ses  volailles,  qu'il  vend  ensuite  ce  qu'il  veut.  (Ap-* 
plaudi.) 

Breard  :  Qu'est-ce  qui  a  tué  le  commerce,  anéanti 
l'agriculture?  le  maximum.  (Applaudissements.) 

S  fui  est-ce  qui  eût  osé  approvisionner  la  France  de 
ênrées  de  première  nécessité,  quand,  sous  peine 
d'être  poursuivi,  on  était  obligé  ae  les  donner  pour 
moins  qu'elles  ne  coûtaient?  quand  on  les  enlevait 
aux  agriculteurs  à  force  armée?  car  le  fait  est  vrai, 
c'était  à  force  armée!  11  suffisait  d'avoir  100,000  liv. 
de  bien  pour  être  regardé  comme  un  mauvais  ci- 
toyen. (On  applaudit.)  Ceux  qui  avaient  établi  ce 
système  affreux  et  dévastateur  savaient  bien  pour-* 
tant  que  la  fortune  publique  ne  se  compose  que  des 
fortunes  particulières.(NouveauxapplaudissemenU(.> 
Ramenons  les  Français  aux  vrais  principes.  Quoi! 
parce  qu'un  citoyen  aura,  par  son  travail,  acquis 
quelque  fortune,  il  sera  moins  considéré  que  son 
voisin,qui  aura  croupi  toute  sa  vie  dans  la  plus  hon- 
teuse oisiveté  I 

Pourtant,  tel  qui  n'avait  jamais  rien  hït  pour  la 
patrie  que  de  porter  un  bonnet  rouge  et  des  mousta- 
ches (on  rit  et  on  applaudit  longtemps)  était  devenu 
impunément  l'arbitre  de  la  vie  et  de  la  fortune  des 
citoyens  utiles.  Trop  longtemps  la  Convention  a  été 
opprimée;  elle  se  relèvera  de  toute  sa  majesté;  elle 
consacrera  les  vrais  principes.  (Applaudissements.) 


48 


La  libre  circulation  des  grains  est  aussi  nécessaire 
que  celle  de  toutes  les  autres  denrées.  Quoi  !  i*ugrl- 
culteur  vendrait  son  blé  à  un  prix  lixe,  et  achèterait 
tout  ce  dont  il  a  besoin  à  des  prix  libres!  Cela  serait 
injuste.  (On  applaudit.)  Trop  longtemps  le  bonheur 
a  disparu.  Ramenons-le.  Reudonsla  vieauxcitoyens 
utiles;  j'entends  par  là  ceux  qui  combattent  pour  la 
liberté  en  travaillant  à  l'affermir.  Je  voudrais  que 
nous  fussions  débarrassés  des  autres!  11  y  a  long- 
temps que  c'était  un  présent  à  faire  ù  nos  ennemis. 
Rétablissons  l'agriculture  et  le  commerce,  la  pro- 
spérité renaîtra  ;  le  peuple  reprendra  toute  sa  vertu  ; 
des  scélérats  l'avaient  entraîné  au  bord  de  l'abîme; 
il  l'a  vu,  ne  craignez  pas  qu'il  y  tombe.  Tous  les  ci- 
toyens doivent  f^ire  un  effort  qui  ne  sera  pas  péni- 
ble à  leur  amour  pour  la  patrie.  Si  vous  détruisez  le 
maximum,  on  paiera  tout  cher,  il  est  vrai  ;  mais,  si 
TOUS  le  maintenez,  on  manquera  de  tout.  Le  passage 
pourra  être  difticile,  mais  le  génie  de  la  liberté  plane 
sur  la  France;  rien  n'est  impossible  aux  Français 
quand  il  s'agit  de  la  patrie.  Méprisez  les  vils  entre- 
preneurs d'émeutes  et  de  factions,  ils  périront  a  cette 
épreuve;  leurs  tentatives  échoueront  toutes,  elles  se 
briseront  contre  votre  sagesse  et  celle  du  peuple;  il 
ne  leur  restera  que  la  honte  et  le  remords;  il  vous 
restera  la  gloire  d'avoir  fait  une  loi  utile  au  peuple, 
le  bonheur  que  cette  loi  aura  préparé  et  avancé.  Oui, 
encore  une  lois,  abolissez  une  loi  abominable,  et  re- 
posez vous  sur  l'amour  du  peuple  pour  la  républi- 
que et  la  liberté.  (Les  applaudissements  recommen- 
cent.) 

Plasii^urs  membres  demandent  la  parole;  d*aulrepart 
00  réclame  la  clôture  de  la  diicussion. 

Lbgbndre  (de  Paris)  :  Non  ;  que  tout  le  monde 
parle  :  plus  vous  discuterez,  plus  le  peuple  verra  que 
son  bonheur  vous  est  cher,  que  la  loi  que  vous  allez 
porter  est  sage;  ceux  qui  vous  entendent  iront  vous 
rendre  ce  témoignage  dans  leur  famille;  les  autres 
le  trouveront  dans  les  feuilles  qui  rapporteront  la 
séance. 

Mathieu  :  L'homme  de  la  cam|fagne  tourne  toutes 
ses  spéculations  vers  Tagriculture,  et  met  son  bon- 
heur à  arrondir  son  petit  domaine  ;  cependant  les  as- 
signats s'accumulaient  entre  les  mains  des  cultiva- 
teurs, et  s*avariaient  en  quelque  sorte  sans  qu'ils 
osassent  faire  la  moiudre  acquisition,  même  de  do- 
maines nationaux;  sur-le-champ  ils  eussent  été  re- 
gardés comme  suspects.  Aujourd'hui  que  la  liberté 
(l'acquérir  et  la  sûreté  de  posséder  leur  sera  garan- 
tie, on  y  trouvera  le  double  avantage  et  d'augmenter 
la  valeur  des  domaines  nationaux,  et  d'avoir  des 
denrées  en  plus  grande  quantité  et  à  meilleur  mar- 
ché, parce  que  les  cultivateurs  feront  plus  d'cntre- 
prisos- 

RÉAL  :  Les  craintes  que  divers  membres  ont  mon- 
trées ne  sont  pas  fondées  :  le  peuple  est  sage,  et 
n'exigerajamais  l'impossible;  je  demande  seulement 
que  1  assemblée  fasse  une  instruction  au  peuple,  qui 
ne  demande  qu'à  être  éclairé  sur  la  justice  et  la  sa- 
gesse de  la  loi  qu'elle  va  porter. 

Quelques  membres  ajoutent  encore  diverses  considéra* 
lions  à  celles  déjà  émises,  et  l'assemblée  décrète  le  premier 
article  du  projet  de  décret ,  tel  que  les  comités  Tont  pro- 
|K>sc  ;  la  discussion  des  autres  articles  est  ajournée. 

Voici  Tartide  décrété. 

I  Toutes  les  lois  portant  fixation  d'un  maximum  sur  le 
prix  des  denrées  et  marchandises  cesseront  d*avoir  leur  effet 
&  compter  de  la  publication  de  la  présente  loi.  » 

—  Un  des  secrétaires  lit  lu  IcUre  suivante  : 


Paehe  à  la  Convention  nationale» 

fl  Citoyens  représentants  du  peuple,  incarcéré  depuis 
huit  mois  sans  être  entendu  de  vos  comités,  et  cependant 
déchiré  de  quinzaine  en  quinzaine  par  de  l&cbes  et  absur- 
des calomnies,  et  moi  aussi  je  sollicite  d'être  traduit  au 
tribunal  révolutionnaire. 

fl  Je  vous  le  demande  pour  prix  de  mes  travaux  ;  je  vous 
le  demande  surtout  pour  le  salut  du  peuple,  qui,  dans 
les  débats  sérieux,  réguliers  et  calmes,  distinguera,  d*a« 
près  des  faits  ramenés  à  la  vérité,  les  hommes  qui  le  ser- 
vent de  ceux  qui  le  Urahissent. 

•  Vive  la  république  française,  une  et  indivisible I 

fl  Dans  la  maison  de  détention  du  Luxembourg, 
Le  2  uivose ,  Tan  3.  Signé  Pacup«  a 

La  Convention  nationale  renvoie  cette  lettre  aux  trois 
comii«s  réunis  de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  de 
législation. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demi^. 

siincE  7.D  4  mvosB* 
Un  des  secrétaires  fait  lecture  de  la  lettre  suivante  : 

Lozeau^  représentant  du  peuple^  chargé  <P assurer  Cap^ 
provisionnement  deParis^  à  ta  Convention  nationale, 

Chartres,  le  30  frimaire.  Tan  3«  de  la  république 
fraoçaiie. 

«  Les  grains  destinés  pour  Tapprovisionnement  de  Paris 
arrivent  avec  activité  daus  les  magasins  destinés  à  les  rece- 
voir. Partout  les  cultivateurs  s*cmpressenl  de  fournir  les 
demandes  qui  leur  sont  faites,  partout  le  peuple  veut  le 
règne  de  la  justice  et  des  lois.  Des  meneurs,  des  intrigants 
cherchent  encore  |  s'agiter  dans  les  Sociétés  populaires; 
mais  ils  seront  déjoués.  Ordonnez,  c*en  est  fait,  ils  de« 
viennent  impuissants  pour  nuire,  et  tout  rentre  dans  Tor* 
dre  naturel.  Décrétez  qu*aucun  fonctionnaire  public  ne 
pourra  être  membre  d'aucune  Société  populaire  :  cette 
mesure  est  indispensable  pour  le  mainUen  de  Tordre,  de 
la  tranquillité  et  de  l'exécution  des  lois,  t 

Cette  lettre  est  renvoyée  aux  trois  comités  réunis  de  sa- 
lut public,  de  sûreté  générale  et  de  législation. 

—  Sur  la  proposition  de  Carnot ,  le  décret  suivant  est 
rendu. 

I  La  Convention  nationale  décrète  que  le  nom  du  gêné* 
rul  de  division  Marescot  et  celui  de  sa  femme  seront  rayés 
de  dessus  la  liste  des  émigrés  ;  qu'il  sera  sursis  à  la  vente  ' 
de  leurs  possessions  mobilières  et  immobilières,  et  que 
celles  qui  seraient  déjà  vendues  leur  seront  restituées. 

t  La  conduite  qu*ont  tenue  à  cet  égard  les  administra- 
teurs des  districts  de  Saint-Flour  et  Âurillac  est  renvoyée 
au  comité  de  législation,  pour  être  examinée. 

«  La  Convention  nationale  renvoie  également  au  comité 
de  législation  Texamen  de  la  proposition  faite  de  condam- 
ner personnellement  les  diverses  administrations  aux  frais 
que  leurs  fautes  auraient  occasionnés  sur  les  biens  des 
prétendus  émigrés  ou  autres,  qui  auront  légalement  et  eo 
temps  opportun  prouvé  leur  résidence  ou  leurs  droits.  > 

{La  suite  demain,) 

N.  B,  —  Dans  la  séance  du  5,  Richard,  au  nom  du  co« 
mité  de  salut  public,  a  annoncé  un  nouvel  avantage  rem- 
porté par  Tarmée  des  Pyrénées-Occidentales. 


Payements  a  ta  trésorerie  nationale* 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  premiers 
mois  ;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs  d*iiiscrip«i 
lions  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères  est  de 
huit  mois  vingt  et  un  jours  de  Tannée  1705  (vieux  style^. 


GAZETTE  NATIONALE  o»  LE  MOITEUR  llVERSEl. 


W  97. 


Septidi  1  N1VO6E,  Van  Z^.  {Samedi  21  Décembre  1794,  vietix  ttyk,) 


POLITIQUE. 

ANGLETERRE. 

Ltmâm,  le  26  nooembrâ.^  la  Gtuefle  de  la  Cour  ft  ao- 
nonce  ofaciellemeni  qat ,  le  19  novembre,  la  Grande-Bre^ 
tngne  et  le«  Etats-Unis  de  l'Amérique  septentrionale  ont 
conclu  un  traité  de  commerce  et  de  navigation,  qui  a  été 
signé  par  lord  Grenville  et  M.  Jay,  munis  de  pleins  pouyolm 
à  cet  effet. 

—  Le  bruit  court  que  le  due  d'York  a  eu  sur  le  Wahal,  à 
une  deml-lieue  de  Nimègne'i  une  conférence  avec  le  com- 
mandant de  l'armée  française.  Nais  ce  que  l'on  voudrait  sa* 
voir,  et  que  l'on  ne  sait  pas  du  tout,  c'est  de  quoi  il  a  pu 
y  tftre  question.  Au  reste,  Il  faudrait  savoir  avant  tout  si  ef- 
fectivement la  conférence  a  eu  lieu.  Mais  ce  n'est  encore 
qu'un  bruit  public,  il  est  vrai ,  mais  qui  peut  être  foui 
comme  tant  d'autres. 

—  Hier  24  11  s'est  tenu  un  conseil  privé,  auquel  le  comte 
Spencer,  H.  Wlndham,  H.  Dupdai  et  lord  Mulgrave  ont 
assisté. 

—  On  donne  comme  très^posliif  que  lord  Mulgrave  va  te 
mettre  A  la  léte  de  quinie  mille  hommes  pour  une  cipédi* 
tion  secrète. 

w.  Dlvenes  troupes  étrangères  vont  passer  eooora  4  la 
solde  de  la  Grande-Bretagne,  bien  décidée,  dit-on,  à  contl" 
nuer  |a  guerre,  la  Trance  ne  voulanii  à  ce  qu'on  assure,  ac- 
céder à  la  paix  qu'à  des  conditions  auxquelles  Thonneur  et 
l'intérêt  de  la  Grapde-Brelagne  lui  défendent  é^lemept  de 
souscrire: 

!•  La  rétrocession  de  toutes  les  possessions  françaises» 
taniani  GrandM^lodes  qu'aux  Indei-Occidentaiest 

V  Une  indemnité  des  pertea  caiMéei  k  la  nation  française 
dans  le  port  de  Toulon  i 

3*  L'érection  des  Pays-Baa  outrichiena  en  un  Etat  lndé« 
pendant,  parfaitement  le  maître  do  se  donner  la  forme  da 
gouvernement  qu'il  lui  plaira; 

4*  La  mise  en  liberté,  sans  rançon,  de  tous  les  prisonnlen 
français,  et  l'extradition  absolue  de  tous  les  émigrés. 

Cependant,  à  d'autres  égards,  la  paix  pourrait  peut-être 
encore  avoir  lieu,  s'il  est  vrai,  eomrae  on  le  croit,  que  le  mi- 
nistre américain,  H.  Jay,  va  se  rendre  d  Paris  pour  un  objet 
auquel  l'Angleterre  et  l'Europe  entière  ont  le  plus  grand  in- 
térei.  On  ajoute,  et  cela  est  vraiseniblable,  que  les  dernières 
nouvelles  venues  d'Espagne  n'ont  pas  peu  contribué  à  faire 
prendre  ces  dispositions  au  cabinet  de  ÇaJQt-JamÇSf 

PATS-BAS. 

Bruxelles  y  lêdO  frimaire.^  L'armée  du  ^Hord  se  prépare 
à  effectuer  le  passage  du  Wahal.  Il  parait  que,  pour  achever 
cette  opération,  on  attend  l'époque  de  la  gelée,  temps  favo- 
ral>le  pour  agir  vivement  dans  le  terrain  marécageux  de  la 
Hollande. 

—  La  place  de  Grave  est  chauffée  avec  tant  de  rigueur 
qu'elle  ne  sera  bientôt  plus  qu'un  tas  de  décombres.  Les  as- 
aicgés  résistent  avec  opiniâtreté. 

—  Le  général  Jourdan  est  parti  pour  aller  visiter  l'armée 
de  la  Motelle  et  les  positions  à  prendre  devant  la  forteresse 
de  Luxembourg,  pour  assurer  la  réduction  de  cette  place 
Importante.  Après  cette  tournée,  le  général  reprendra  la 
route  de  Haêstrlcht,  où  se  trouve  déjà  son  état-major. 

—  L'armée  autrichienne  qui  se  trouve  au  delà  du  Rhin , 
avant  |)ris  des  cantonnements  sur  les  rives  de  ce  fleuve,  et 
plus  avant  dans  l'Allemagne,  h  cause  de  la  grande  difficulté 
des  vivres,  l'armée  républicaine  vient  aussi  de  snlvemer 
Jusqu'à  œ  que  le  printemps  loi  ramène  de  nouveaux  com- 
bats et  de  nouvelles  victoires.  Les  principaux  quartiers  d'hi- 
▼er  sont  dans  les  villes  de  Cologne,  Neuss,  Bolduc,  Berghen, 
Jullers^  Aix-la-Chapelle,  Limbourg,  Gueldrc  et  ftlaêsu  icht. 

S«5^ne.— 7ome^ 


C'est  dans  cette  dernière  YlUe  que  le  quartier  général  a 
été  transféré.  Différents  corps  de  troupes  ont  été  laissés  sur 
les  bords  du  Rhin,  à  l'effet  de  surveiller  sans  cessâtes  ntOU* 
vements  de  l'ennemi. 


RÉPUBLIQUP  PRAWÇAISB, 

TBIBUIiAl,  CBIMINEL  SÉVOLUTIOUNAIBB» 

SuiU  de  la  procédure  du  comté  f4voWtiQnn^ir§ 
de  Nantes. 

Pierre  Mergot,  huissier  i  Nantes,  dépose  que« 
dans  le  mois  de  frimaire,  il  ayait  deuj  volontaires 
iogës  chez  lui^  qui  sortaient  tous  les  matins  avec 
leurs  armes  ;  que,  leur  ayant  demandé  0(1  Hsallaient, 
et  quelle  était  leur  mission, ils  lui  répondirent  qu'ils 
allaient  du  côté  de  Gigand,  pour  fusiller  des  bri-  ' 
gands,  et  qu'ils  en  expédiaient  cent  par  jour;  que 
ces  brigands  étaient  pris  à  TEntreput,  et  qiie  tou( 
cela  se  taisait  par  les  ordres  de  Carrier,  •  Ces  voloa*» 
taires  ne  sont  restés  que  huit  jours  ch^x  moi»  dit  le 
témoin ,  et  ils  oqt  fusillé  au  moms  six  centsbrigaQds,» 

Carrier  :  Je  conviens  qu^on  a  ftîsillë  ceol  cin* 
quante  où  deux  cents  prisonniers  par  jour  ;  maisc^é- 
tait  par  ordre  de  la  commission,  et  ce  fait  m*est  ab- 
solument étranger.  J*ai  informé  la  Convention  qu'on 
fusillait  des  brigands  par  centaine  ;  elle  a  applaudi 
à  cette  lettre,  elle  en  a  ordonné  .riosertion  au  Bul- 
letin. 

aie  foisaient  alors  ces  députés  qui  maintenant 
arnent  contre  moi?  Ils  applaudissaient.  Pour* 
quoi  me  eontinuait-on  alors  ma  mission?  J'étais 
alors  le  sauveur  de  la  patrie,  et  maintenant  je  suis 
un  homme  sanguinaire.  A-t-on  donc  oublie  qu'il  , 
avait  péri  cent  cinquante  mille  défenseurs  de  la  pa- 
trie avant  mon  arrivée  ?  J'ai  repris  aux  brigands  cent 
pièces  de  canon. 

Le  président  observe  de  nouveau  à  Carrier  que,  si 
la  Convention  avait  applaudi  à  sa  lettre,  c'est  qu'elle 
avait  cru  qu'il  s'agissait  de  brigands  jugés  par  ime 
commission. 

Jean-Heclor  Legros^  adjudant  général,  chef  de 
brigade  a  l'armée  de  l'Ooest.et  détenu,  dépose  qae| 
depuis  deux  ans,  il  combattes  rebelles  de  la  Vendée; 
il  priHend  avoir  rendu  les  services  les  plus  essentiels^ 
et,  pour  récompense,  avoir  été  abreuvé  d*amer-» 
tume  et  d'humiliations,  conduit  de  brigade  en  bri- 
gade, de  prison  en  prison,  comme  un  ennemi  de  soq 
pays,  quoiqu'il  n*a)t  jamais  cessé  de  le  servir. 

11  raconte  les  différentes  expéditions  dont  il  a  été 
chnrgé  avec  Savary  ;  il  déclare  <jiie  Carrier  lui  avait 
défendu  de  faire  aucun  nrisonmer,  ordre  auquel  il 
n'a  cependant  pas  déféré. 

•  J'ai  perdu  cet  ordre,  ajoute-t-il,  mais  d'Henné-» 
bourg  et  deux  citoyens  d'Ancenis  l'ont  ru. 

•  Je  conduisis  environ  quatre-vingts  brigands  ) 
Nantes;  je  me  rendis  chez  Carrier,  qui  m'ordomm 
de  les  faire  fusiller,  ainsi  que  les  eûfants.  Ils  périreat 
à  la  plaine  de  Mauves  ;  les  enfants,  enlevés  parplq^ 
sieurs  citoyens,  échappèrent  à  ce  supplice* 

«  Le  régiment  de  La  Marck  manquait  de  sonliers  t 
je  fus  chez  Carrier  pour  lui  en  demander;  on  me  dit 

1 


60 


Î[u*il  dînait  sur  la  gaIiote:je  Ty  trouvai.  Fouquet 
rappait  sur  une  table,  et  disait  :  «  Si  tu  ne  fais  pé- 
«rirtousIescontre-révoIutionnaires,toutest  perdu.» 

.  «  Je  n'ai  fait  périr  ni  femmes  ni  enfants  sur  la 
rive  droite  de  la  Loire  ;  j'ai  sauvé  quelques  indivi- 
dus qui  se  rendaient  à  moi;  si  on  Tavait  su,  j'aurais 
été  fusillé. 

•  Quand  nous  voulions  parler  en  faveur  de  ceux 
qui  se  rendaient,  on  nous  répendait  que  la  force 
armée  devait  obéir.  • 

Carrier  :  Il  est  possible  que  j'aie  donné  Tordre  de 
ne  pas  faire  de  prisonniers,  et  je  trouve  ma  garantie 
dans  les  décrets  de  la  Convention. 

Le  président  donné  lecture  de  la  loi  du  1®^  août 
1793,  portant  :  •  Les  femmes,  les  enfants,  les  vieil- 
lards seront  conduits  en  lieu  de  sûreté,  et  traités 
avec  humanité.  • 

Carrier  :  Je  n'ai  point  ordonné  de  fusiller  les 
femmes  et  les  enfants,  et  je  ne  me  souviens  pas  que 
le  témoin  soit  venu  me  trouver  sur  une  galiote. 

Le  témoin  :  Tu  as  dîné  sur  une  galiote,  Carrier, 
tu  devrais  en  convenir;  un  homme  qui  ment  devant 
le  peuple  est  capable  de  tout. 

Robin  :  Sois  de  bonne  foi.  Carrier  ;  tu  étais  sur  la 

galiote,  et  après  le  dîner  tu  médis:  «  Petit  b , 

petit  révolutionnaire,  chante  la  Gamelley  la  chanson 
de  la  Montagne;  •  et  je  chantai. 

Carrier  :  Je  me  rappelle  avoir  entendu  chanter 
cette  chanson  quelquetbis. 

V accusé  Gauthier  .-'Hector  a  aussi  dîné  sur  la 
galiote,  et  il  avait  des  moustaches  rouges. 

Le  témoin  Hector  :  Je  nie  le  fait. 

Hector,  en  terminant  sa  déclaration,  expose  les 
causes  de  la  prolongation  de  la  guerre  de  la  Vendée, 
et  annonce  qu'il  a  un  ouvrage  sous  presse  sur  cet 
objet. 

Le  témoin  Leroux,  capitaine  de  navire,  dépose  de 
la  fusillade  de  quatre-vingts  cavaliers  amenés  sur  la 
place  du  Département. 

Lasalle,  courtier  de  navire,  dépose  avoir  entendu 
Bobin,  Foucault  et  Lambertye  s'entretenir  des  noya- 
des comme  leur  étant  commandées  par  Carrier. 

Kobin  :  Je  conviendrai  des  noyades  qui  m'ont  été 
commandées  par  Carrier,  avec  la  même  franchise 
que  je  les  ai  exécutées. 

Protper  Bonami,  négociant  :  Chargé  d'une  mis- 
sion pour  les  subsistances,  je^me  rendis  chez  Carrier; 
je  trouvai  chez  lui  une  audience  nombreuse.  Car- 
rier, sans  doute  averti  de  l'objet  de  ma  démarche,  se 
mit  à  dire  :  «  Le  premier  b qui  me  parle  de  sub- 
sistances, je  lui  f...  la  tête  à  bas.  •  Sans  aucun  égard 
pour  SCS  menaces,  j'aborde  Carrier;  je  réclame  des 
subsistances,  et  il  se  contente  de  me  répondre  :  •  J*ai 
bien  a  faire  de  vos  sottises!  • 

Carrier  :  Je  n'ai  cessé  de  m'occuper  des  subsi- 
stances dont  Nantes  pouvait  avoir  besoin  ;  c'est  moi 
seul  qui  ai  approvisionné  cette  commune. 

Simon  Pouffl,  serrurier,  ensuite  capitaine  de  gen- 
darmerie, dépose  qu'en  ventôse  ou  pluviôse  Carrier 
vint,  avec  son  costume  de  représentant,  haranguer  la 
brigade  de  Cordelier,  et  lui  adresser  ces  mots: 
«  Braves  défenseurs,  vous  qui  avez  porté  le  nom 
d'armée  tn/emaîf ,  je  vous  conjure,  au  nom  de  la 
loi,  de  mettre  le  feu  partout,  de  n'épargner  per- 
sonne, ni  femmes,  ni  enfants,  de  tout  fusiller,  de  tout 
incendier  !  • 

•Malheureusement  pour  les  communes  de  Cholet 


Beaupreau,  Mortagne,  Coron  el  autres,  dit  le  té- 
moin, ces  ordres  n'ont  été  c^ue  trop  fidèlement  exé- 
cutés :  une  partie  des  habitants  a  été  envoyée  à 
Nantes,  les  autres  ont  été  fusillés,  sans  exception  de 
femmes  ni  d'enfants.» 

Carrier  .*  Il  y  a  un  faux  matériel  dans  cette  dépo- 
sition, parce  qu'à  l'époque  désignée  on  ne  m'a  vu  ni 
pu  voir  à  la  colonne  de  Cordelier. 

Louchet^  secrétaire  du  comité  de  sûreté  générale, 
dépose  que  les  brigands  et  les  patriotes  demandent 
tous  à  grands  cris  la  tête  de  Carrier ,  et  que  les  Nan- 
tais sont  aussi  joyeux  de  ce  que  Carrier  est  traduit 
en  jugement  une  le  chasseur  de  la  bête  du  Gévaudan 
était'satisfaitaavoir  détruit  cette  bête  vorace. 

Carrier  :  Je  ne  figure  au  tribunal  que  pour  avoir 
fait  expulser  de  la  Société  des  Jacobins  deux  députés 
qui  voulaient  troubler  ses  délibérations. 

François  Lamarie,  administrateur  du  départe- 
ment, après  avoir  confirmé  les  faits  relatifs  a  l'as- 
semblée convoquée  pour  délibérer  sur  le  sort  des 
détenus,  et  rappelé  l'énergie  de  Phelippes-Tronc- 
jolly,  qui  s'opposa  aux  mesures  cruelles  qu'on  vou- 
lait prendre,  dépose  que  Carrier  disait  à  qui  voulait 
l'entendre  :  «  Nous  ferons  un  cimetière  de  la  France 
plutôt  que  de  ne  pas  la  régénérer  à  notre  manière, 
et  de  manquer  le  but  que  nous  nous  sommes  pro- 
posé. > 

Carrier  était  tellement  un  objet  de  terreur  pour 
tout  le  monde,  et  même  pour  les  corps  constitués, 
que,  quand  nos  fonctions  nous  appelaient  chez  ce 
représentant,  nous  entr'ouvrions  ta  porte,  pour  sa- 
voir dans  quelle  situation  se  trouvait  Carrier,  et  pour 
nous  assurer  s'il  avait  ou  non  une  figure  furibonde* 

Carrier  nie  les  faits,  et  répond  par  des  injures. 

Jeanne  Latigne,  marchande,  dépose  que  Carrier, 
soupant  un  jour  chez  Phelippes-Troncjolly,  elle  en- 
tenait  dire  a  ce  représentant  :  •  Bah  \  bah  !  à  vous 
autres  luges,  il  faut  cent  témoins,  cent  preuves  pour 
juger  des  accusés  ;  foutez-les  dans  la  rivière,  ce  sera 
plus  tût  faiL  • 

Carrier  :Ce  fait  est  faux. 

iirnaiMfan,  commissaire  civil  du  département  et 
du  district,  dépose  que,  le  28  pluviôse,  pendant  son 
séjour  à  Ancenis,  Carrier  dit  à  la  Société  populaire 
de  cetteville:  Jevois  partout  des  gueux  en  guenilles; 

•  vous  êtes  ici  aussi  bêtes  qu'à  Nantes  ;  l'abondance 

•  est  près  de  vous,  et  vous  manquez  de  tout  ;  igno- 

•  rez-vous  donc  que  la  fortune,  les  richesses  de  ces 
■  gros  négociants  vous  appartiennent,  et  la  rivière 

•  n'cst-ellepaslà?» 

•  Le  peuple,  ajoute  le  témoin,  fut  indigné,  et  ré- 
volté d'entendre  prêcher  une  telle  morale.  • 

Carrier  :  On  a  empoisonné  tout  ce  que  j'ai  dit. 
Quand  j'annonçais  que  les  chouans  laissaient  passer 
les  Nantais  qui  viennent  de  déposer  contre  moi,  je 
ne  me  trompais  pas;  l'opinion  est  changée,  mais  la 
mienne  ne  changera  jamais.  Le  calme  politique  de  la 
France  ne  m'étonne  pas  ;  mais  comment  pouvoir  ju- 
ger ce  qui  s'est  passé  il  y  a  un  an?  Si  à  cette  époque 
les  ministres  plénipotentiaires  des  chouans  avaient 
demandé  ma  tête  pour  avoir  la  paix,  il  y  a  longtemps 
que  je  la  leur  aurais  livrée. 

Si  la  fin  de  cette  guerre  malheureuse  dépend  de 
mon  existence,  je  provoque  la  vengeance  nationale; 
s'il  existe  un  plan  de  transaction  entre  Charette  et 
d'autres,  j'invite  le  tribunal  à  verser  tout  sur  moi. 

Corneret,  fabricant,  accuse  Carrier  d'avoir  dit 
plusieurs  fois  à  la  tribune  de  la  Société  populaire  : 

•  Tous  les  riches,  tous  les  marchands  sont  des  acca- 


51 


pareurs,  des  contre-révolutionnaires;  frappez,  de- 
noncez-Ies-moi/et  je  ferai  rouler  leurs  têles  sous  le 
rasoirnational. 

«  Il  est  encore  des  fanatiques  qui  ferment  leurs 
boutiques  les  dimanthes;  dénoncez-moi  cette  espèce 
de  contre-révolutionnaires I  et  je  les  ferai  guillo- 
tiner. • 

Carrier  :  Je  ne  suis  pas  surpris  que  ce  témoin 
vienne  déposer  contre  moi  :  c*est  Pennemi  le  plus 
prononcé  de  son  pays;  c'est  uu  homme  qui  a  vexé 
nombre  de  ses  concitoyens,  et  qui  a  fait  plusieurs 
banqueroutes. 

Le  témoin  repousse  ces  inculpations. 

Carrier  observe  au  tribunal  qu*un  dérangement 
de  santé  ne  Itii  permet  pas  d'assister  plus  longtemps 
aux  débats;  il  sollicite  la  permission  de  se  retirer, 
et  la  séance  est  levée  à  midi. 

(La  suite  incessamment,) 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Bentabolc. 

Fin  de  Vopinian  sur  les  causes  de  Y  état  présent  du 
commerce  et  de  l'industrie^  et  les  moyens  de  les 
rétablir  sur  les  véritables  bases  de  Téconomie 
politique  ,  prononcée  par  Eschassériaux  aine, 
dans  Vunc  dés  précédentes  séances. 

Législateurs,  voilà  le  bien  que  vous  avez  à  faire  ; 
achevez  ainsi  votre  ouvrage  :  vous  avez  mis  la  gloire 
du  peuple  français  au-dessus  de  celle  des  autres 
peuples  da  monde;  il  dépend  de  vous  de  surpasser 
celle  des  anciens  législateurs.  Les  anciens  legisla- 
tears  ont  fait  des  lois,  vous  avez  fait  une  révolution. 
Vous  ne  serez  point  jugés,  ni  comme  Lycurgue,  ni 
comme  Soloo  ;  ils  reprimèrent  c[uel()ues  riches,  ils 
apaisèrent  auelques  séditions;  ils  brent  quelques 
réformes ,  changèrent  quelaues  institutions.  Tout 
était  en  paix  autour  d'eux  ;  la  Grèce  était  attentive 
à  leur  ouvrage  ;  leur  génie  travaillait  sur  des  peuples 
encore  près  de  la  nature;  ils  étaient  entendus  des 
sages  de  leurs  contrées.  Vous,  vous  avez  eu  à  vain- 
cre la  tyrannie,  la  guerre  civile,  toutes  les  fureurs 
du  fanatisme,  l'Europe  presque  entière  liguée  contre 
TOUS,  et  l'amas  de  vingt  siècles  de  préjugés ,  de 
vices,  de  crimes,  de  corruption  et  de  servitude  à 
renverser. 

La  révolution  que  vous  avez  faite  a  vengé  le  mon- 
de ;  mais  vous  avez  encore  la  plus  difficile,  la  plus 
grande  victoire  à  remporter.  C'est  en  vain  que  vous 
auriez  détruit  la  tyrannie,  tous  les  anciens  préjugés 
et  les  crimes  héréditaires  des  nations ,  si  vous  lais- 
siez après  vous  despréjugés  nouveaux,  de  nouvelles 
et  cruelles  infortunes  dévorer  les  hommes.  11  est, 
dans  le  système  de  la  nature,  des  productions  jadis 
existantes,  dont  le  temps  a  détruit  Tespèce  et  qui  ne 
se  retrouvent  plus.  Ah  !  si  nous  ne  pouvons  efifacer 
de  la  terre  entière  les  passions  funestes  au  bonheur, 
qu'elles  ne  se  trouvent  plus  au  moins  parmi  nous! 

Le  temps  n'a  roulé  jusqu'ici  que  des  malheurs  : 
quelques  sages,  quelques  peuples  ont  échappé  au 
torrent  qui  a  entraîné  et  englouti  les  générations. 
Les  siècles  passés  nous  ont  laissé  plus  de  crimes  que 
de  vertus,  plus  d'erreurs  que  de  sagesse;  vous  n'au- 
riez rien  fait  pour  l'espèce  humaine,  si  vous  ne  lais- 
siez aux  âges  à  venir  plus  de  perfections  et  de  vertus 
que  vous  n*en  avez  eu  pour  modèle. 

Les  nations  qui  ne  sont  plus  semblent  n'avoir 


travaillé  que  d'instinct  à  leur  bonheur  ;  elles  ont  peu 
songé  à  ceux  qui  devaient  leur  succéder.  Elles  nous 
ont  transmis  peude  monuments  qui  attestent  qu'elles 
aient  eu  desplansde  sagesse  :  presque  toutes,  durant 
la  période  de  leur  existence,  se  sont  élancées  après 
des  chimères;  rien  ne  nous  dit  qu'elles  furent  heu- 
reuses. 

La  postérité  compte  vos  décrets  ;  il  faut  que  vous 
léguiez  à  vos  descendants,  au  monde  entier,  tous  les 
projets  et  les  idées  de  la  félicité  humaine  ;  ce  n'est 
qu'à  ces  conditions  que  la  nature  vous  appela  à  opé- 
rer la  plus  grande  des  révolutions,  et  que  vous  se- 
rez aimés  des  hommes.  Ah  !  il  n'y  a  que  ceux  qui 
auront  fait  le  bien  sur  la  terre  qui  seront  chers  à  la 
postérité,  et  dont  tous  les  âges  révéreront  la  mé- 
moire. 

Pourrions-nous  ressembler  à  ces  nations  qui,  sem- 
blables à  ces  phénomènes  qui  ont  plus  d'éclat  que  de 
durée,  n'ont  signalé  leur  passage  sur  la  terre  que  par 
une  courte  grandeur  et  de  longues  infortunes? 

Porterions-nous  dans  le  berceau  de  la  plus  glo- 
rieuse des  républiques  toutes  les  passions  dévoran- 
tes, tontes  les  factions  qui  déshonorèrent  jadis  les 
beaux  jbursHi'un  peuple  libre,  hâtèrent  leur  déclin, 
et  plongèrent  la  liberté  romaine  au  tombeau  ? 

Non,  vous  serez  dignes  de  la  destinée  qui  vous 
appelle. 

Vous  avez  étonné  le  monde  par  vos  victoires  ; 
vous  devez  mériter  son  amour  par  vos  vertus  et  la 
sagesse  de  vos  lois  ;  que  ces  maximes  aillent  se  gra- 
ver sur  les  portiques  des  palais,  dans  les  conseils  où 
les  chefs  des  nations  délibèrent,  et  que  l'univers  ap- 
prenne à  être  heureux  par  vous! 

Projet  de  décret. 
Section  ire, 

•  Art.  I«r.  Toute  protection,  liberté,  sûreté  est 
assurée  par  la  loi  au  commerce. 

«II.  11  sera  établi  un  conseil  de  commerce,  chargé 
spécialement  de  méditer  les  moyens  et  l'exécution 
de  tout  ce  qui  peut  ranimer  et  encourager  l'industrie 
nationale. 

•  111.  Tout  ouvrier  à  qui  le  défaut  d'ouvrage  aura 
fait  abandonner  sa  patrie  pour  aller  chercher  de 
l'oôcupation  chez  l'étranger,  pays  neutre,  est  rap- 
pelé par  la  présente  loi.  Le  comité  de  législation  est 
chargé  de  présenter  un  mode  par  leçiuel  un  ouvrier 
fabricant,  actuellement  hors  du  territoire  de  la  ré- 
publique, pourra  être  admis  à  constater  qu'il  n'en 
est  sorti  que  pour  aller  exercer  son  travail  et  son  in- 
dustrie. 

«  IV.  11  sera  nommé,  par  le  comité  de  salut  pu- 
blic, un  nombre  suffisant  de  gens  de  l'art  pour  aller 
sur  les  lieux  prendre  connaissance  de  l'état  des  dif- 
férentes manufactures  et  fabriques  de  la  république, 
des  moyens  et  des  encouragements  dont  elles  au- 
raient besoin  pour  être  rendues  à  une  pleine  activité. 

•  V.  Les  mêmes  commissaires  sont  aussi  chargés 
de  désigner  les  endroits  de  la  république  où  l^n 
pourraitplacerutilementdc  nouvelles  manufactures. 

•  Il  sera  fait  des  avances  aux  ouvriers  dont  les 
métiers  ou  manufactures  auraient  été  ruinés  ou  au- 
raient souffert  pendant  la  révolution  ;  ces  avances 
leur  seront  délivrées  à  mesure  qu'ils  en  justifieront 
l'emploi  ;  il  leur  sera  accordé  le  délai  de  dix  ans 
pour  le  remboursement  du  prêt  qui  leur  aura  été 
fait  par  le  gouvernement  ;  il  sera  toujours  nécessaire^ 


52 


pour  obtenir  l'âvàttcc,  que  Tart  et  le  produit  de  la 
manufacture  soient  assurés. 

>  VU.  Chaque  directoire  de  district  est  tenu  de 
faire  parvenir,  sous  trois  mois,  aux  comités  de  salut 

Subiic  et  de  commerce,  un  tableau  de  Tindustrie, 
es  exploitations  et  fabriques  qui  peuvent  se  trou- 
ver dans  l'arrondissement  de  son  territoire,  ainsi 
qu*un  exposé  de  ses  vues  ^ur  les  améliorations  dont 
Ces  objets  seraient  susceptibles. 

«Vlll.  La  Convention  charge  son  comité  d*agn- 
culture  de  lui  proposer  des  moyens  d'encourager  et 
d'étendre  la  culture  des  mûriers,  des  lins,  chanvres 
et  garances,  et  de  Cxer  dans  chaque  contrée  le  genre 
d'industrie  le  plus  convenable  à  la  nature  du  sol  et 
au  génie  des  habitants. 

•  IX.  La  Convention  nationale  charge  aussi  son 
comité  des  secours  publics  de  lui  proposer  des 
moyens  d'utiliser  pour  les  arts  et  manufactures,  se* 
ion  leur  choix  et  leurs  talents,  toutes  les  personnes, 
hommes,  femmes,  entants,  qui  sont  dans  les  hospices 
de  la  république. 

•  X.  La  Convention  nationale  décrète  qu*il  sera 
remis  à  la  disposition  du  comité  de  salut  public  une 
somme  de««.«.,pour  encourager  les  manufactures  et 
les  arts. 

•  XI.  La  Convention  nationale  charge  son  comité 
de  commerce  de  déterminer  un  système  de  primes 
ti  d'encouragements  k  accorder  aux  manufacturiers 
Et  négociants  français  qui  exporteront  le  produit  de 
leurs  manufacture^,  et  importeront  en  retour  des 
matières  et  productions  essentielles  à  Tactivité  de 
ces  manufactures  et  aux  besoins  de  la  républiquf^. 
Ces  encouragements  devront  être  dirigés  pârticulif» 
rement  vers  les  objets  de  l'industrie  qui  sont  de  pré- 
férence recherchés  et  Achetés  de  l'étranger. 

«  XII.  La  commission  de  commerce  est  tenue,  sous 
sa  responsabilité,  de  régler,  sous  un  mois,  tous  les 
comptes  et  affaires  de  la  république  avec  les^tran- 
^erset  neutres  qui  se  trouvent  actuellement  retenus 
dans  les  ports.  • 

SBOTIOfI  IL 

«Art.  I^'é  La  Convention  charge  ses  comités  de 
commerce  et  de  marine  de  revoir  les  décrets  qu'elle 
a  déjà  rendus  sur  les  douanes,  sur  les  droits  impo- 
iés  sur  les  marchandises  sortant  de  la  république  et 
Venant  de  l'étranger,  et  d'approfondir,  sous  tous  les 
rapports  politiques,  s'il  ne  serait  pas  de  l'intérêt  de 
la  république  d'adopter  quelque  modification  ou 
exception  à  son  acte  de  navigation. 

«11.  La  Convention  nationale  charge  la  commis* 
fiion  des  travaux  publics  de  procéder,  le  plus  promp- 
tement  possible,  à  l'achèvement  des  canaux  déjà 
commencés,  et  d'assurer  au  commerce,  dans  toute 
la  république,  les  moyens  d'une  navigation  prompte 
et  facile. 

«  III.  Le  comité  de  commerce  sera  tenu,  tous  les 
trois  mois,  de  faire  un  rapport  sur  l'état  des  manu- 
factures de  la  république,  de  proposer  des  moyens 
d'eu  accélérer  les  progrès,  et  de  lui  présenter  une 
instruction  sur  les  principes  qui  doivent  diriger  le 
commerce. 

«  1V«  Les  noms  des  manufacturiers,  fabricants, 
ouvriers,  qui  se  seront  le  plus  distingués  par  l'acti- 
vité de  leurs  travaux,  par  le  génie  de  leur  invention, 
|;)ar  les  spéculations  utiles  à  la  république,  seront 

S  rodâmes  tous  les  ans,  le  jour  de  la  fête  du  Travail, 
la  tribune  de  la  Convention  nationale,  et  leurs 
noms  inscrits  honorablement  dans  le  procès-verbal 
de  ses  séances. 


•  V.  On  prix  tiational  sera  décerné,  chaque  Année, 
à  celui  qui  aura  surpassé  les  autres  par  un  outrage 
d'industrie  particulière,  ou  par  l'introduction  d'une 
nouvelle  branche  de  manufacture. 

«VI.  La  Convention  nationale^  voulant  récom-^ 
penser  le  travail  et  le  génie,  décrète  que  Oelui  qui 
aura  fondé  un  établissement  d'agriculture  oU  de 
commerce  aura  bien  mérité  de  la  patrie.  • . 

emn  db  la  aéAiicB  du  4  hivosb. 

Noël  Pointe  monte  à  la  tribune,  pour  fbirê  lecture 
d'un  discours  sur  les  dangersdout  il  dit  que  la  patrie 
est  menacée.  11  commence  par  se  plaindre  de  ce  qur 

\  des  Intrigants  ont  converti  la  Couvention  en  um 

^  arène  de  gladiateurs. 

j  •  La  révolution  du  9  thermidor,  dit-il,  a  conduis 
à  l'échafaud  Robespierre  et  ses  complices.  Elle  a 
rendu  la  liberté  i  de$  patriotes  qui  gémissaient  dans 
les  fers.  Mais  qu'a-t-on  fait  depuis?  La  terreur  n'a 

I  fait  que  passer  en  d'autres  mains.  Les  riches  mar- 
chands insultent  à  la  misère  du  peuple,  et  menacent 
de  vendre  bientôt  au  poids  àtê  a^âignats  Id  nourri- 
ture du  pauvre.  Les  gens  de  lettres,  au  lieu  de  cal- 
mer les  inquiétudes  publiques,  s'occupent  de  les 
augmenter  par  la  perspective  d'un  avenir  plus  ef- 
frayant encore*  Je  Souhaite  que  le  rapport  de  la  loi 
du  maximum  nous  remette  l'abondance;  je  souhaite 
que  la  liberté  de  la  presse  ne  serve  qu'à  démasquer 
les  faux  patriotes  t  mais  je  crains  que  les  agioteurs 
ne  profitent  de  l'un,  et  les  calomniateurs  de  l'autre. 

•  L*aristoôrâtie  veille  tôtis  ce$se  pôiUr  tourner  à 
SOh  profit  ce  que  nous  disons  pour  le  bonheur  du 
peuple.  Jamais  elle  n'a  poUsIë  plus  loiu  qu^àujour-  - 
d'hui  sOn  insolente  àudàoe  ;  jaâiàiâ  lé  fàdatisâie  ta*a 
déployé  pluâ  de  fureurs.  En  sortaât  d*un  extrême, 
fié  tombons  pas  dans  uU  autre.  La  léthargie  du  mo- 
dérantismé  n  est  pas  moins  fUneste  ^ue  la  vfgilance 
de  la  terrêUr.  Je  vois  aved  elTrOi  la  côntrë-révolutioà 
empoisonner  de  sOA  Souffle  tibertiéide  l'horizon  poli- 
tique. 11  h'y  à  paà  d«  Choix  a  faire  :  il  faut  sauver  la 

fatrie  ou  périr.  Tant  qile  nOus  serons  en  guerre  avec 
ennemi  extérieur,  n'espéronS  pas  la  paix  avec 
l'ennemi  intérieur.  Je  démande  ûUé  là  loi  du  t  sep- 
tembre, sur  les  gens  supects,  Soit  eïécUtéede  point 
en  point.» 

Quelques  membres  demandent  l'impression  du 
discours  de  Noël  Pointe.  (Un  murmure.) 

Barailon  :  Je  ne  vois  que  de  dangereuses  erreurs 
dans  ce  discoursi  qui  devait  nous  révéler  de  grandes 
vérités.  Remarques  que  c'est  au  moment  où  vous 
vous  occupez  des  moyens  de  raviver  le  commerce  et 
de  ramener  l'abondance ,  que  l'on  ose  traîner  votre 
loi  dans  la  boue  et  empoisonner  vos  intentions.  Il 
n'est  personne  qui  ne  sache  que  la  loi  du  maximum 
avait  tué  le  commerce  et  organisé  la  famine;  l'ex- 
périence du  passé  vous  a  éclairés  ;  vous  ne  vous  lais- 
serez point  entraîner  par  des  déclamations,  vous  ne 
retomberez  plus  dans  ces  erreurs...  {Non^  non!  s'é- 
crie-t-on  de  toutes  parts  en  applaudissant.)  Je  re- 
garde ces  réflexions  comme  Touvrage  de  la  malveil- 
veillance.  qui  voudrait  vous  faireadopterdesmesures 
contre-révolutionnaires,  vous  faire  rétablir  la  loi  du 
maximuin.  Je  demande  la  question  préalable  sUr 
l*im  pression* 

Lbsagb-Sbnault  :  L'impression  I 

Pluiiéurs  voiat  :  Non,  noni 

On  parte  dans  le  bruit* 

Lbgendbb:  Président,  maintient  leailence,  autre- 
ment il  serait  impossible  de  prouver  à  la  Convention 


53 


qvfaLfW  d'éicellentes  Inuiition^  on  ptnï  être  la  dupd 
de  quelques  coquins.  (Applaudissements.) 

Gaston  descend  d*une  extrémité  de  la  salle  et  sô 

Erécipite  sur  Legendre  en  levant  un  bâton.  L*a6sem- 
lée  tout|entlère  témoigne  son  indignation.  Les  mem- 
bres qui  sont  auprès  de  Gaston  le  retiennent,  et  le 
forcent,  avec  beaucoup  de  peine,  de  remonter  à  sa 
place. 

Un  ûftmi  M0ifi6r«  û$  mêvJiru  :  A  i^Abbayel  k 
r Abbaye  1 

Lbobndbb  :  Je  déclare,  afin  que  le  soupçon  ne 
plane  pas  sur  les  hommes  auxquels  ie  reconnais  des 
intentions  pures,  auc  je  n'ai  entendu  parier  que  de 
trois  scélérats  (vis  applaudissements]  que  tant  de 
fois  Tai  dénoncés  nominativement,  (^fouveaux  ap- 
plaudissements.) 

Je  déclare,  non  à  la  Convention  nationale,  non 
au  peuple  de  t'aris,  mais  au  peuple  de  la  république, 
qu'aucune  puissance  ne  m*arrachera  jamais  mon 
énergie  et  mon  amour  pour  mon^pays  (les  applau- 
diisementa  redoublent);  qu*aucune  puissance  ne 
m*cmpéchera  jamais  de  poursuivre  les  trois  coquins 
qui  ne  veulent  que  troubles  et  que  désordres.  L'ha- 
bitude ou  la  pusillanimité  leur  laissent  encore  quel- 
ques créatures,  car  il  n*est  pas  un  député  qui  ne  les 
connaisse  bien.  Vous  avea  fermé  les  Jacobins  parce 
qu*on  y  prêchait  la  révolte;  mais  vous  n'avez  bas 
sévi  contre  les  prêcheurs.  Vous  avez  fait  arrêter 
qtielques  misérable^  qui  se  traînaient  sur  les  pas  des 
meneurs,  qui  n'étaient  que  leurs  échos,  tandis  q^ue 
les  principau3(  séditieux  sont  encore  dans  votre  sein. 

Ne  vous  y  trompez  pas,  les  hommes  qui  ont  osé 
dire  que  les  partis  étaient  eil  présence,  que  la  brèche 
était  ouverte,  lorsqu'il  n'existait  d'autre  parti,  d'au- 
tres factieux  en  Pfàncé  qu'eux  et  leurs  satellites,  ces 
hommes  ne  cesseront  jamais  de  semer  la  discorde  ; 
voos  en  avez  la  preuve  dans  un  discours  qu*ils  ont 
soufflé  à  un  homme  pur. 

Je  demande  la  question  préalable  sur  Timpres^ion. 
(Applaudissements.) 

La  Convention  rejette  l'impression. 

Collot  d'Herbois  demande  la  parole. 

PhiiwLU  menAtu  :  La  suite  de  la  discussion  sur 
lé  matimum. 

Collot  insiste  pour  avoir  la  parole. 

La  Convention  passe  h  l*ordre  du  jour. 

LesBge-Senault  crie  dans  le  bruit. 

fiASTOff  :  Je  jure,  par  les  douze  cent  mille  défen"- 
seurs  de  la  patrie  et  par  quatre  millions  de  patriotes 
qui  sont  liai  sur  tous  les  points  de  la  république, 
que  la  contre^révolution  ne  se  fera  pasi  Je  demande 
la  parole. 

Pluêi€ur$  voim  :  L'ordre  du  jour  I 

Gaston  vient  à  la  tribune. 

Pluêiiun  voix  :  Le  maintien  du  décret! 


r( 


Lb  PftÊstDEKT  :  Il  est  Impossible  de  maintenir 
rordre  si  Ton  ne  fait  pas  silence.... 


Lesage-Senault  ]  Tu  n'as  pas  besoin  de  le  trou* 
bler. 

Le  PBÉBiDÊift  !  La  Convention  a  décrété  l'ordre 
dujoiir..».' 

'*'  s  Bile  a  décrété  une  injustice. 

Plutieun  voix  :  A  l'ordre  ! 

Lesage*8enauU ♦  Montant,  Lanot  réclament  dans 
le  bruit;  ils  demandent  qu'on  mette  aux  voix  si 
Gaston  sera  entcndui 


La  Convention  refhse  la  parole  à  Gaston. 

—  La  Convention  reprend  la  discussion  sur  le 
maximum. 

Les  articles  du  projet  des  comités  sont  adoptés 
successivement  en  ces  termes  : 

«  Art.  11.  Toutes  les  réquisitions  foltes  jUMpi'A  ce  JôUr 
par  la  commission  da  commerce  et  d'approttsIonDemenls, 
ou  par  les  représentants  du  peuple  en  missiou,  pour  let 
sub.«(lstances  des  armées  de  terre  et  de  mer,  et  pour  l'appro- 
vlsioaoement  de  ParISi  seront  exécutées. 

i  111.  Toutes  les  rémiisltlons  fhltes  pour  les  dtstrlcui  ou 
communes,  seront  maintenues  jusqu'à  la  concurrence  de  la 
quantité  de  grains  nécessaire  à  leurapproYlslotmementpea* 
dant  deux  mois. 

<  IV.  Les  matières»  denrées  on  marchandises  qui  seront 
livrées  en  Tertu  des  deux  arUcles  précédent»  seront  pnyëet 
au  prix  courant  du  chef-Ueu  de  chaque  district  à  l'époque 
ob  elles  seront  délivrées,  ce  qui  sera  constat<l  par  ies  mer- 
curiales ou  registres  tends  à  cet  effet. 

•  V.  Dans  le  cas  où  les  marchés  ne  seraient  pas  approvi- 
sionnés.  les  districts  sont  autorisés,  pendant  un  mois  à  rlater 
de  la  publication  de  la  présente  loi,  chacun  dans  leui*  afron- 
dissementf  à  requérir  tous  marchands,  cultivateurs  ou  pro- 
priétaires de  grains  ou  farines,  d'en  apporter  aux  marchés 
la  quanUté  nécessaire  pour  leur  approvisionnement. 

«  VI.  La  commission  de  commerce  et  approvisionnements' 
aura  droit  de  préemption  ou  de  préférence  sur  tous  ies  ob* 
jets  nécessaires  à  l'approvisionnemont  des  armées  et  places 
de  guerre,  jusqu'à  la  concurrence  des  besoins  du  service* 

t  VU.  Les  marcbandisea  ou  denrées  ainsi  préacbetées  se^ 
ront  enlevées  dans  ie  mois  qui  suivra  la  préemption*  et  se« 
ront  payées,  k  l'époque  de  la  déUvrance,  suivant  ie  prix 
commun,  lors  de  la  préempUoDf  de  la  place  od  les  achati 
auront  été  faits. 

I  VilL  Là  commission  de  commerce  et  approvislonAc- 
menu  sera  tenue  de  présenter,  dans  le  délai  d'une  décndo. 
au  comité  de  salut  public,  U  ttibleau  des  préemptions  è 
faire  pour  compléter  les  besoins  des  armées  jusqu  4  la  ré" 
coite. 

d  IX.  Au  moyen  du  prient  décret  <  la  olrculaUon  dea 
grains  sera  entièrement  libre  dans  l'intérieur  de  la  républi- 
que; ia  formante  des  acquits-Â-caution  ne  sera  maintenue 
que  dans  les  deux  lieues  des  côtes  et  des  barrières  des 
douanes. 

t  X.  Tout  pardcuiiér  qui  transportera  dans  lesditeé  deux 
lieues  des  grains  ou  farines  sera  tenu  de  se  présenter» 
avant  l'enlèvement»  à  la  municlpaiitë  di4  Ueu,  et  d'y  prendra 
un  acquil-a-caution,  lequel  sera  signé  du  maire  et  de  l'agent 
national,  et.  en  leur  absence,  par  deux  officiers  municipaux. 

•  XL  ces  acquits-A'caution  seront  délivrés  gratuitement 
et  sur  papier  non  Umbré.  et  porteront  soumission  de  rap- 

gorier,  dans  un  délai  fixe  &  un  Jour  par  cinq  lieues,  certH 
cat  de  rarrlvéeau  lieu  de  la  destinaUon.  signé  des  officiers 
municipaux  t  le  tout  a  peine  de  confiscation  des  grains  ou 
farines,  ou  du  payement  de  la  valeur. 

i  xn.  Les  propriétaires  des  grains  ou  farines  (fcA  no 
prendront  point  d'acquit'a-oouUon  •  dans  les  cas  où  cette 
formalité  est  exigée»  seront  punis  par  la  confiscation  deë 
grains  ou  farines  dont  ils  seront  trouvés  saisis;  ils  seront  en 
outre  condamnés  à  une  amende  double  du  prix  des  grains 
oU  farines  confisqués.  Là  Inollié  dû  produit  fiët  de  la  vente 
appartiendra  au  dénonciateur  ou  saisissant,  l'autre  moitié 
à  la  commune  du  Ueu  où  la  saisie  aura  été  faite.  Les  lois 
sur  l'exportation  des  grains  a  l'étraflger  sont  maintenues 
tout  contrevenant  aoxdltes  loto  aéra  condamna  a  la  peina 
de  mort. 

<  XllL  En  aucun  cas  Uê  thevauf  et  volinrai  ne  pourronc 
être  saisis  et  confisqués  ;  ceux  qui  le  seraient  en  vertu  de  ju« 
gement  rendu  avant  la  promulgaUon  du  présent  décret  se- 
ront resUtuës  àux  proprléuiires,  l'ils  ne  sont  pas  vendus. 

t  xrv.  Toutes  procédures  commencées  pour  violation  falta 
aux  lois  sur  le  maximum  sont  anéanties;  Il  ne  pourra  étra 
donné  aucune  suite  aux  jugements  rendus  sur  cet  objet,  qui 
n'auront  pas  été  exécutée^  Les  citoyens  détenus  an  vertu  de 
ces  jagemenu  seront  mis  en  Uberté  sans  délai. 

•  XV.  Toutes  réqolslUons  de  denrées  ou  marebandiies» 


54 


antres  qoe  celles  ci-dessus  ëooncées,timt  annulées  à  compter 
de  la  publlcaiion  du  présent  décret. 

«  XVI.  L'inserilon  ou  Bulletin  de  correspondance  du  pré- 
sent déctet  tiendra  lieu  de  publication.  9 

—  Richard,  au  nom  du  comité  de  sdlut  public, 
fait  un  rapport  sur  une  organisation  nouvelle  de  la 
commission  de  santé. 

La  Convention  nationale  en  ordonne  Timpression 
et  Tajournement. 

Babailon  :  La  Convention  nationale  est  juste,  et 
la  patrie  n>st  pas  une  marâtre.  Chez  un  peuple  phi- 
losopne,  les  lois  ne  peuvent  tendre  à  faire  des  dupes 
ou  à  iaire  des  victimes. 

In  forçant  des  fonctionnaires  publics  à  Toption, 
en  prononçant  sur  l'incompatibilité  des  fonctions 
administratives  et  judiciaires ,  vous  n*avez  pas  en- 
tendu, le  21  vendémiaire,  punir  ceux  qui  ne  prévoi- 
raient pas  une  loi  oui  ne  devait  être  prononcée 
qu'un  mois  après.  Sûrement  vous  n*avez  pas  alors 
voulu  réduire  à  Textréme  indigence  des  familles  en- 
tières et  en  sacritier  les  chefe. 

Je  dois  observer  ici  que  les  notaires  qui  se  sont 
retirés  des  tribunaux  ou  des  corps  administratifs 
pour  obéira  la  loi,  ou  qui  ont  été  remplacés  par  des 
raisons  de  politique  ou  à  cause  de  leur  mauvaise 
santé ,  ou  quelquefois  par  suite  des  artitices  dont 
on  a  circonvenu  et  finalement  égaré  les  représen- 
tants du  peuple  en  mission  ;  je  dois  observer,  dis-je, 
que  souvent  ces  mêmes  notaires  n'avaient  opté  qu'à 
la  pressante  sollicitation  de  leur  pays;  que  leur  pa- 
triotisme, leur  intégrité,  même  leur  utilité  sont  gé- 
néralement avoués  de  leurs  concitoyens. 

Vous  ne  les  confondrez  donc  pas  avec  les  mé- 
chants ;  le  républicain  ne  sera  pas  traité  comme  l'a- 
ristocrate, et  la  vertu  n'éprouvera  pas  le  châtiment 
du  crime. 

Je  vous  propose  en  conséquence  le  projet  de  dé- 
cret suivant,  qui  est  une  conséquence  de  ceux  des  24 
vendémiaire  et  17  frimaire  derniers. 

•  La  Convention  nationale  décrète  que  les  notaires  pu- 
blics oui,  à  raison  de^a  loi  du  24  vendémiaire,  avaient  opié 
pour  des  fonctions  administratives  ou  Judiciaires,  et  qui  ont 
été  ensuite  dépossédés  par  celle  du  17  frimaire  ou  par  toute 
autre  cause,  pourvu  que  ce  ne  soit  pas  pour  fait  d'incivisme, 
d'immoralité,  d'imprubité  ou  de  malversation,  pourront  re- 
prendre les  foncUons  de  notaire  qu'ils  exerçaient  avant  leur 
option,  f 

La  Convention  décrète  le  renvoi  au  comité  de  lé- 
gislation, pour  en  faire  son  rapport  dans  deux  jours. 

Jars-Panvillibrs,  au  nom  du  comité  des  secours 
publics  :  Ce  serait  une  tâche,  presque  impossible  à 
remplir  pour  tout  homme  sensible  que  celle  d'avoir 
a  fixer  chaque  jour  son  attention  sur  les  maux  aux- 
quels les  événements  de  la  guerre  exposent  les  dé- 
fenseurs de  la  liberté,  si  elle  n'avait  pour  objet  de 
vous  mettre  à  même  de  prononcer  sur  les  récom- 
penses ou  indemnités  qui  sont  dues  à  ces  braves  mi- 
li^Ajr^s.  Cette  idée  soutient  le  couraee  de  ceux  qui 
se  dévouent  à  ce  travail  vraiment  pénible,  et  c'est 
une  consolation  pour  votre  comité  des  secours  pu- 
blics de  savoir  qu'il  n'invoque  jamais  en  vain  les 
sentiments  de  votre  reconnaissance  envers  ceux  qui 
ont  versé  leur  sang  pour  la  patrie. 

Je  réclame  aujourd'hui  votre  justice  en  faveur  de 
près  de  six  cents  de  ces  hommes  intéressants,  que 
des  infirmités  contractées  par  les  fatigues  de  la 
guerre  ou  par  les  suites  de  leurs  blessures  ont  mis 
hors  d'état  de  continuer  leur  service. 

Ils  ont  des  droits  incontestables  à  la  reconnaissance 
nationale  ;  mais  si  la  patrie  leur  doit  des  secours,  la 
Convention  nationale  doit  les  leur  dispenser  avec  une 


juste  économie  ;  car  c*est  une  partie  de  la  fortune  da 
peuple  qu'elle  distribue  à  quelques  citoyens  qui  ont 
souffert  pour  la  cause  commune,  et  elle  ne  doit  ja- 
mais la  prodiguer.  C'est  ce  qui  a  déterminé  votre 
comité  à  vous  proposer  de  borner  les  indemnités  a 
accorder  à  quelques-uns  de  ceux  dont  les  infirmités 
sont  moins  graves  à  leur  admission  dans  la  maison 
nationale  des  Invalides,  ou  à  la  pension  qui  la  re- 
présente, et  à  rejeter  la  demande  de  ces  mdividus 
dont  les  services  ou  les  infirmités  ne  lui  ont  pas  paru 
de  nature  à  mériter  des  récompenses. 

Voici  le  projet  de  décret  que  je  suis  chargé  de 
vous  présenter  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  son  comité  des  secours  publics,  décrète  : 

t  Art.  l".  La  trésorerie  nationale  paiera,  à  titre  de  pen- 
sions, aux  militaires  infirmes  ou  blessés,  dénommés  dans 
l'état  annexé  au  présent  décret,  la  somme  de  291,026  Uv. 
13  s.  4  den.,  qui  sera  répartie  entre  eux,  suivant  les  propor- 
tions établies  dans  ledit  état. 

<  U.  Chacun  des  militaires  recevra  la  pension  qui  lu!  est 
accordée  par  le  présent  décret  à  compter  du  Jour  où  il  aura 
cessO  de  recevoir  la  subsistance,  et  à  la  charge  par  lui  de 
remplir  toutes  les  formalités  exigées  des  pensionnaires  de 
la  république. 

•  lit.  11  n*y  a  lieu  &  délU)érer  sur  la  demande  des  citoyens 
Charles  Richard  ,  palefrenier  des  remontes  générales ,  et 
Pierre- Victor  Bouurain,  cSnlevant  volontaire  au  8'  bataillon 
de  Paris. 

t  IV.  L'état  annexé  an  présent  décret  ne  sera  point  Im- 
primé. • 

Ce  décret  est  adopté. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

séance  du  5  mvosB* 

Un  officier  paraît  à  la  barre  avec  d^  drapeaux. 

RiCHABD,  au  nom  du  comité  de  salut  public  :  L'ar- 
mée des  Pyrénées-Occidentales  vous  fait  passer  les 
drapeaux  que  vous  voyez,  en  échange  de  celui  que 
vous  lui  avez  envoyé.  (On  applaudit^ 

Richard  lit  les  lettres  suivantes  : 

Le  général  en  chef  de  l'armée  des  Pyrénées-OeH- 
dentales  au  président  de  la  Cimvention  nalto- 
nale. 

Au  quartier  général,  à  Bayonne,  le  19  firimaire, 
Tan  t«  de  la  république  française. 

t  Citoyen  président ,  Tinauguration  du  drapean  que  la 
Convention  nationale  a  décerné  à  l'armée  des  PyrénéesOo- 
cldentales  a  été  faite  A  Tolosa,  au  milieu  des  troupes  victe- 
rieuses  à  la  Journée  de  Bergara,  au  son  d'une  musique  nar 
tionale  et  guîerrière  et  aux  cris  mille  fois  répétés  de  vive  la 
Contention  nationale!  vive  la  république  !  Les^  drapeaux 
que  mon  aide  de  camp  est  chargé  d'offrir  à  la  Convention 
ornaient  cette  fête  civique,  qui  émit  aussi  triomphale  pour 
les  braves  frères  d'armes  que  J'ai  l'honneur  de  commander. 
Deux  cents  Espagnols,  échappés  au  fer  redoutable  de  nos 
invincibles  colonnes,  admiraient  dans  la  stupeur  celte  fête 
maiestoeuse,  présidée  par  les  représentants  du  peuple  Car- 
reau, Delcher  et  Baudot.  LA,  en  présence  de  vos  collègues 
et  sous  les  auspices  de  la  victoire,  nous  avons  tous  Juré  d'ac- 
complir le  serment,  si  funeste  pour  les  ennemis  de  la  répu- 
blique, de  vivre  fibres  ou  de  mourir. 

«  Salut  et  fraternité. 

^  Signé  JAojMXt,  t 

Le  général  en  chef  de  V armée  des  Pyrénées- Oeet- 
dentales  aux  représentants  du  peuple  composant 
le  comité  de  salut  public. 

A  Bayonne,  le  19  frimaire,  TanS*  de  la  république 
française.' 

•  J'avais  donné  ordre,  citoyens  représentants ,  de  Caire 


55 


occnper  Castelon,  village  à  une  llene  et  demie  à  la  gauche 
de  Tolosa,  plongeant  le  chemin  de  Lecombery.  L'ennemi 
Tarait  occupé  ayant  nous;  il  était  en  force.  Le  l"  bataillon 
de  chasseurs  basques,  protégé  par  ceux  du  2*  du  Tarn  et  7* 
du  Gers,  a  emporté  le  village  de  vive  force,  et  y  a  établi  son 
caotOBoemenl.  Le  combat  a  été  vif;  l'ennemi,  coupé  dans  sa 
retraite,  a  fui  avec  précipiiation,  laissant  un  grand  nombre 
de  morts»  et  notamment  le  colonel  des  Catalans. 

•  J*espère  que  ce  choc  le  dégoûtera  d'établir  ses  canton- 
nements trop  près  des  nôtres;  s'il  s'y  obstinait,  nous  l'en  fe- 
rions repentif  derechef. 

«  Salut  et  fraternité. 

«  5/^  MORCBT.  » 

Garreau  et  Baudot ,  représentants  du  peuple  pris 
l'armée  des  Pyrénées-Occidentales^  au  président 
de  la  Convention  nationale, 

-  A  Bayoooe,  le  SO  frimaire,  Tan  3*  de  la  république 
française. 

€  L'année  des  Pyrénées-Occidentales,  citoyen  président, 
après  avoir  reçu  l'étendard  tricolore  que  la  Convention  na- 
tionale lui  a  donné,  nous  a  remis  en  échange  sept  drapeaux 
Eris  par  elle  sur  les  Espagnols  en  différentes  circonstances, 
c  citoyen  Forgues,  aide  de  camp  du  général  en  chef,-  est 
chargé  de  les  présenter  à  la  Convention.  L'armée  ne  tient 
point  sa  deUe  acquittée  par  une  si  légère  offrande  :  c'est  le 
premifr  mouvement  de  sa  reconnaissance;  ses  efforts  offri- 
ront .'davanuge,  et  continueront  tant  que  ki  Convention  na- 
tionale l'ordonnera,  et  que  les  Intérêts  de  la  république  l'exi- 
geront. 

t  II  y  a  presque  chaque  jour  des  escarmouches,  ou  des 
attaques  de  poste  dans  quelques-unes  de  nos  divisions;  l'a- 
vantage reste  constamment  du  côté  de  la  liberté.  Les  suites 
en  sont  ordinairement  trop  peu  conséquentes  pour  les  faire 
connaître  en  déUil ,  mais  elles  le  sont  toujours  assez  pour 
assurer  en  général  que  nulle  part  la  bravoure  et  la  modestie 
ne  sont  plus  à  l'ordre  du  jour  que  dans  cette  armée. 

•  Salut  et  fraternité. 

<  Signé  Bacdot,  GARREAt}.  ^ 

Le  citoyen  Forgues,  capitaine  au  24^  régiment  de 
chasseurs  à  cheval ,  aide  cle  camp  du  général  en  chef 
de  l'armée  des  Pyrénées-Occidentales,  porteur  des 
drapeaux,  prononce  à  la  barre  le  discours  suivant  : 

•  Représentants ,  vos  collègues  près  l'armée  des 
Pyrénées-Occidentales,  et  le  général  en  chef  qui  la 
commande,  m*ont  chargé  de  présenter  à  la  Conven- 
tion les  quatre  dra|)eaux  enlevés  aux  Espagnols  dans 
raffaire  du  8  frimaire,  à  Berçara. 

«  Ils  ont  ftii  encore  une  fois  devant  nous,  ces  su- 
perbes soutiens  du  trône  ébranlé  des  Bourbons  d*Es- 
pa^ne;  et  dans  leur  fuite,  que  les  gazetiers  de  Ma- 
drid appelleront  sans  doute  retraite  savante,  ils  nous 
ont  abandonné  ces  drapeaux  qui  sont  aujourd'hui  à 
votre  barre  ;  ils  ont  aussi  laissé  le  champ  de  bataille 
couvert  de  leurs  morts  ;  et  deux  cents  prisonniers 
faits  dans  cette  journée ,  soustraits  au  carnage  par 
rhumanité  de  nos  guerriers ,  seront  dans  nos  mains 
de  nouveaux  garants  de  la  capitulation  de  Collioure. 

•  Un  corps  que  4a  renommée  avait  mis  au  rang 
des  meilleures  troupes  de  TEurope,  ces  gardes  du 
corps  du  despote  espagnol ,  ont  aussi  fui  devant  nous, 
et  deux  de  leurs  escadrons  auraient  été  exterminés 
à  Bergara,  si  la  vitesse  de  leurs  chevaux  ne  les  avait 
soustraits  au  fer  de  nos  républicains. 

•  Représentants ,  je  suis  encore  chargé,  par  vos 
collègues  et  le  général  en  chef  de  l'armée  des  Pyré- 
nées-Occidentales, de  vous  présenter  ces  trois  autres 
drapeaux,  que  les  soldats  de  cette  armée  enlevèrent 
dans  la  province  de  Guipuscoa,  lorsque  leur  courage 
eut  forcé  les  redoutes  terribles  d'Yrieux  :  ce  sont 
des  monuments  honorables  de  la  valeur  républi- 
caine ;  vous  en  accueillerez  sûrement  l'hommage 
avec  intérêt. 

•Représentants,  l'armée  des  Pyrénées-Occiden- 
tales saura  terminer  avec  honneur  la  tâche  qui  lui 


est  imposée  ;  elle  forcera  la  victoire  à  lui  rester  fi- 
dèle ;  et,  pleine  de  conGance  dansia  Convention  na- 
tionale, elle  ne  cessera  d'applaudir  à  ses  travaux  et 
à  ses  vertus.  • 

Le  Président,  à  l'officier  :  Citoyens,  si  les  manœu- 
vres des  royalistes,  des  factieux,  dçs  ambitieux  et 
des  hommes  pervers  qui  se  sont  saisis  de  la  révolti- 
tion  comme  d'une  proie,  pouvaient  ébranler  un  in- 
stant la  confiance  des  patriotes,  le  spectacle  de  nos 
victoires  et  des  trophées  que  lu  nous  présentes  fe- 
rait bientôt  disparaître  les  nuages  dont  on  voudrait 
obscurcir  l'horizon  de  la  république. 

Vos  victoires,  vos  blessures,  vos  travaux  ajoutent 
de  nouvelles  pages  à  la  gloire  de  notre  révolution, 
et  prouvent  que  nos  armées  n'avaient  pas  besoin, 

Ïïour  vaincre  les  tyrans,  qu'on  répandît  la  terreur  et 
a  mort ,  et  que  l'on  joncnât  d'échafauds  le  sol  de  la 
liberté. 

Retournez  combattre  les  tyrans  au  dehors ,  pen- 
dant que  la  Convention  nationale  combattra  au  de- 
dans les  royalistes  et  les  brigands  de  toute  espèce. 

Pouvons-nous  douter  du  succès?  La  Convention 
nationale  vous  imitera  :  elle  mourra  s'il  le  faut  pour 
la  république. 

Sur  la  proposition  deCavaignac,  la  Convention 
décrète  que  son  président  donnera  l'accolade  frater- 
nelle à  ce  citoyen,  qui  la  reçoit  au  milieu  des  plus 
vifs  applaudissements. 

—  Un  secrétaire  fait  lecture  de  la  lettre  suivante  : 

Blutel^  représentant  du  peuple  dans  les  ports  de  La 
Rochelle,  Roehefort,  Bordeaux,  Bayonne  et 
ports  adjacents,  a  la  Convention  nationale. 

Rochefort ,  le  SS  frimaire ,  Tan  3*  de  la  répablî- 
que  une  et  indivisible. 

«  Citoyens  collègues,  l'horizon  politique  se  dégage  enfin 
des  vapeurs  empestées  qu'avait  produites  l'effusion  du  sang 
humain  ;  qu'il  est  doux  d'être,  dans  cet  instant,  l'organe  de 
la  Convention  dans  ces  départements  !  Ce  ne  sont  plus  ces 
démonstrations  gigantesques  de  quelques  hommes  qui,  gor- 
gés de  crimes,  de  pillage  et  de  sang,  criaient  qu'ils  étaient 
patriotes  ;  ce  ne  sont  plus  les  partisans  égarés  de  ces  hommes 
trompeurs,  dont  la  Iwuche,  aussi  froide  que  le  corar  était 
faux,  se  contractait  pour  faire  entendre  le  cri  de  vive  ta 
Conventionl  à  l'instant  où  ils  machinaient  dans  leurs  âmes 
les  moyens  de  la  détruire;  ce  ne  sont  plus  ces  tribunes  des 
Sociétés  populaires  payées  pour  applaudir  tel  individu,  dont 
souvent  elles  n*avalent  point  entendu  les  discours.  C'est  le 
peuple,  le  peuple  en  masse,  qui,  par  un  mouvement  naturel 
et  spontané,  bénit  la  Convention  nationale,  applaudit  à  ses 
travaux,  et  reverse  sur  ses  commissaires  les  effets  de  la  sa- 
tisfaction qu'il  éprouve. 

«  O  ma  patrie,  quel  beau  Jour  se  lève  pour  toi  !  c*est 
d'aujourd'hui  seulement  qu'il  existe  une  patrie  pour  Phomme 
vertueux.  Qu*iis  sont  coupables  ceux  qui  avaient  conçu  le 
dessein  criminel  de  faire  du  séjour  des  talents,  de  TlndusUie 
et  de  rurbanité,un  antre  de  brigands,  d'anthropophages  et 
de  Vandales,  et  du  plus  beau  pays  de  Tunlvers  un  désert 
couvert  seulement  de  ruines  et  de  cadavres!  La  terre,  plus 
humaine  qu'eux,  a,ouvert  son  sein  au  sang  qu'ils  ont  répandu, 
et  s'est  empressée  de  couvrir  leurs  forfaits. 

«  Le  peuple  en  est  Indigné,  mais  tous  les  sentiments  s 
toutes  les  expressions  de  son  âme  étant  dirigés  vers  vou, 
par  la  reconnaissance.  Il  n'y  reste  aucune  place  pour  hi 
vengeance;  Il  a  bien  souffert,  mais  vous  le  consolez,  ses 
maux  sont  oubliés;  Français,  Je  vous  reconnais  à  ce  trait  de 


«  Dans  quel  état  était  la  commune  de  Rochefort  lorsque 
J'y  suis  arrivé  !  dans  un  eut  d'abattement,  de  désespoir  et 
de  terreur.  Une  poignée  d'hommes  perdus  de  débauche  et 
de  crimes  osait  proscrire  le  patriotisme  vertueux,  parce  qu'il 
ne  partageait  pas  leurs  transport  sanguinaires.  On  y  osait 
dire  que  «  l'arbre  de  la  liberté  ne  pouvait  prendre  racine  que 
dans  dix  pieds  de  sang  humain. t  On  contraignait  les  Jeunet 
citoyennes  à  venir  s'abreuver  de  sang  sur  les  échafaudt 
mêmes  qui  venaient  d'en  être  couverts  ;  et  si  les  mœurs 
pures  de  quelques-unes  semblaient  s'cfFraycr  de  ce  tableau 


&6 


déchirant,  on  les  menaçait  de  les  mettre  en'arrcstation.  Un 
eltoyen  paisible  s'éioIf^Dait-ll  de  ce  spectacle;  on  l'y  traînait, 
et  il  n'avait  à  choisir  qu'entre  la  prison  et  Thorreur  de  l'é- 
chafeud. 

t  Des  femmes  publiques,  notoirement  connues  par  leurs 
débauches,  étaient  chargées  d'épurer  des  mères  de  famille, 
des  filles  Tertueuses  ;  et  ces  dernières,  pour  échapper  aux 
désagréments  d'une  détention ,  étaient  réduites  A  faire  ac- 
cueil à  ces  courtisanes,  et  à  se  plier  à  leurs  volontés  arbi- 
traires. Le  bourreau  lui-même  descendait  de  Téchafaud  et 
venait  présider  la  Société  populaire,  les  mains  encore  teintes 
du  sang  qu'il  venait  de  verser. 

•  Quelques  Intriganu,  arrivés  tout  exprès  des  colonies,  se 
sont  distribué  les  places;  et  comme  ils  étaient  patriotes  ex- 
clusifs ,  ils  ont  trouvé  du  danger  pour  la  chose  publique  à 
les  confier  à  d'autres,  et  les  ont  entassées  en  leurs  personnes, 
de  sorte  que  les  malheureux  qu'ils  voulaient  opprimer  ne 
iqniittaient  point  leurs  mains  depuis  le  moment  de  la  dénon- 
ciation jusqu'A  la  mort 

ft  En  effet,  ces  hommes  étalent  Installés  membres  du  co- 
mité d'épuration  de  la  Société  qu'ils  dominaient;  ils  étaient 
membres  du  comité  révolutionnaire,  Jurés,  souvent  juges,  et 
presque  toujours  témoins  du  tribunal  révolutionnaire.  On 
dit  qu'il  n'est  pas  rare  que  les  Jugements  de  ce  tribunal 
aient  été  dictés  dans  des  oiigfes  ob  se  trouvaient  réunis  les 
Juges,  les  jurés  et  le  bourreau  lut-méme.  On  reproche  à  un 
d'eux  d'avoir  dit  :  ■  C'est  de  la  manière  dont  nous  posons 
•  les  questions  que  dépend  le  sort  des  accusés.  • 

c  J'ai  fait  arrêter  un  de  ces  hommes  qui,  dans  la  Société 
populaire,  a  osé,  même  en  ma  présence ,  outrager  la  Con- 
vention nationale.  J'en  al  rendu  compte  au  comité  de  sûreté 
générale. 

t  Je  viens  de  donner  des  ordres  pour  en  felre  arrêter  un 
autre,  accusé  d'avoir  dit,  lors  du  décret  qui  fermait  les  Ja- 
cobins :  t  Us  ne  sont  que  sept  cent  quarante-cinq  à  la  Con- 
«  vention;  nous  sommes  douze  mille,  nous,  et  nous  roar» 

€  cherons »  Je  n'ai  point  de  pouvoirs  pour  renouveler 

les  autorités  constituées;  mais  je  ne  puis,  sans  compromettre 
la  chose  publique ,  laisser  en  place  des  hommes  qu'on  ac- 
cuse d'avoir  conspiré  contre  la  Convention  nationale,  et 
contre  lesquels  les  accusations  soPt  sigoées  et  attestées  par 
le  peuple  entier. 

t  Je  demande  que  la  Convendon  approuve  ma  conduite, 
Je  tire  un  voile  sur  des  horreurs  trop  multipliées  sans  doute, 
mais  qu'il  était  boa  de  vous  faire  connaître.  J'appelle  vos 
regards  sur  un  tableau  plus  satlsfeisant.  A  peine  entré  dans 
la  Société  populaire,  je  m'aperçus  bientêt  qu'elle  était  com- 
primée; je  ne  dis  que  ces  deux  phrases  :  t  J'apporte  parmi 
vous  la  justice  et  le  vœu  de  la  Convention  nationale  :  elle 
veut  que  la  vertu  règne  sans  oppression,  et  que  le  crime  op- 
presseur disparaisse  sans  retour.  Organe  de  la  Convention, 
je  garantirai  les  droits  de  tous  contre  quiconque  oserait  les 
vi<Mor.  t 

■  Ma  voix  fut  entenduei  les  intrigants  pâlirent,  et  la  vertu 
reprit  son  énergie.  La  Société  populaire,  auparavant  dé- 
serte, Alt  remplie  d'un  concours  prodinieux  du  peuple;  l'atr 
de  confiance  se  répandit  sur  tons  les  visages.  On  parla  d'é- 

fmrer  la  Société,  et,  pour  le  faire  sans  passion,  on  appela 
es  citoyens  présents  à  donner  leur  avis.  Les  faits  s'accumu- 
lèrent avec  une  gravité  étonnante;  dix  mille  hommes  étalent 
là{  le  président  les  interpella,  au  nom  de  la  Société,  de  dé- 
clarer si,  parmi  ce  concours  prodigieux  de  citoyens,  Il  s'en 
trouvait  quelqu'un  qui'voulùt  prendre  la  défense  des  accu- 
sés ;  le  plus  profond  silence  fut  la  réponse.  Le  président  les 
engagea  ensuite  k  émettre  leur  opinion  sur  les  individus,  el 
à  déclarer  s'ils  avaient  leur  confiance  ;  tout  se  tut  encore  ; 
dans  l'éprouve  contraire,  tous  se  levèrent  d'un  nu>uvemenl 
spontané,  aux  cris  mille  fols  répétés  de  vive  la  Convention 
nationale!  L'épuration  se  continue,  et  la  même  afflueoce 
de  citoyens  se  rend  A  la  séance.  Si  elle  se  tenait  dans  un  lieu 
assez  grand,  je  ne  doute  pas  que  tout  le  peuple  de  Roche- 
fort  ne  s'y  trouvât;  car,  je  le  répète.  Il  est  bon,  aime  la  vertu 
et  la  Convention  nationale. 

«  Un  fait  que  j'oubliais  de  vous  rapporter.  Dans  une  visite 
faite  par  le  comité  révolutionnaire,  avec  l'appareil  militaire 
le  plus  effrayant  •  on  s'y  comporta  de  telle  manière  que  la 
sœur  de  l'épouse  de  notre  collègue  Nion,  enceinte,  vil  son 
terme  avancé ,  et  que  la  mère  l'enftint ,  la  domestique  el  la 
nourrice  sont  tous  morts  en  peu  de  jours. 

€  Salut  et  fraternité.  Blotbi.. 

«  P.  S.  La  Société  et  le  peuple  présent  m'ont  demandé  de 
prêter  en  mes  mains  le  serment  authentique  de  mourir 
plutôt  q|ue  de  souffrir  Jamais  que  la  vertu  soit  comprimée , 


et  t|iie  le  erime  relève  sa  tête  altlère  Je  vous  fsis  paieer  ise 
serment,  que  Je  u'ai  reçu  qu'en  votre  nom.  t 

Lo  Convetilion  renvoie  cette  lettre  aux  coniitésde 
salut  public  et  de  sûreté  générale. 

Martin  Valooni  :  11  s*élève  do  toutes  parts  des 
réclamations  de  différentes  maisons  de  commerce 
qui  avaient  expédié  des  marchandises  pour  Lyon , 
qui  avaient  été  arrêtées  en  route,  et  dont  la  loi  du 
16  vendémiaire  ordonne  la  restitution»  L'article  V 
de  cette  loi  porte  que  les  propriétaires  des  marchan- 
dises expédiées,  soit  antérieurement,  soit  postérieu- 
rement au  décret  qui  déclare  en  état  de  rébellion  la 
commune  de  Lyon ,  soqt  admis  à  les  réclamer  de- 
vant la  municipalité  du  lieu  ob  elles  se  trouvent  ar- 
rêtées. L'application  de  ces  dispositions  est  sans 
difliculté  lorsque  les  marchandises  sont  encore  en 
nature  ;  mais  lorsque ,  comme  cela  s'est  fait  dam 
plusieurs  districts,  ces  marchandises  ont  été  ven- 
dues, et  le  prix  versé  dans  les  caisses  nationales,  le 
prix  doit-il  être  restitué  au  propriétaire ,  et  dans 

giielle  forme  la  restitution  doit-elle  s*en  opérer? 
'est  une  Question  sur  laquelle  votre  comité  des  fi** 
nances  a  été  consulté.  Après  en  avoir  conféré  avec 
celui  de  commerce ,  il  a  pensé  qu'il  convenait  d*y 
statuer  de  la  manière  suivante  ; 

Voici  le  projet  de  décret  qu'il  m'a  chargé  en  con- 
séquenee  de  vous  présenter  : 

•  La  Convendon  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  iinani^s  sur  là  néeessitë 
de  prescrire  un  mode  pour  la  restitution  du  prix  des 
marchandises  destinées  pour  Lyon,  qui  doivent  être 
rendues  h  leurs  propriétairçs ,  conformément  à  la 
loi  du  10  vendémiaire  dernier,  dans  le  cas  où  elles 
ont  été  vendues  par  les  corps  administratifs^  dé- 
crète : 

c  Art.  r*.  Le  prix  des  marchandises  vendues  sera  remis 
aux  propriétaires  qui  y  ont  droit,  conformément  A  la  loi  ci- 
tée, en  JusUfiant  du  titre  de  propriété  par  les  citoyens  qui 
ont  fait  l'acquisiUoD.s'U  est  encore  dans  leurs  mains. 

c  11.  S'il  a  été  vessé  dons  les  caisses  des  receveurs  de 
district,  la  resUttttion  en  sera  faite  en  vertu  des  ordoonanccs 
expédiées  par  U  commission  des  revenus  nationaux  sur  la 
trésorerie  naUonale. 

c  III.  Si  le  prix  a  été  payé  entre  les  mains  des  receveurs 
de  l'agence  de  Tenregisu^ment  et  domaines  nalionaux ,  la 
remise  en  sera  faite  par  ces  receveurs,  dans  la  forme  usltéo 
pour  les  resUiuUons  qui  se  font  directement  par  cciic 
agence. 

t  IV.  Dans  tons  les  cas,  le  montant  des  frais  de  vente 
sera  retenu  et  restera  A  hi  charge  du  propriéuiire  des  mar- 
chandises. 

«  V«  Le  présent  décret  ne  sera  point  imprimé)  Il  sera 
inséré  au  BulleUn  de  correspondanêe^  qui  Uendra  lies  de 
promulgation,  t 

Ce  décret  est  adopté. 

TopsBiiT  :  Le  décret  du  20  frimaire,  qui  autorise 
le  comité  de  salut  public  à  nrendre  les  mesures 
d'exécution  ordonnées  par  celui 'du  IS  du  même 
mois,  concernant  la  rentrée  des  officiers  mariniers, 
matelots  et  novices  qui  se  trouvent  actuellertient  en 
pays  éUranger,  a  donné  lieu  à  la  malveillance  de  ré- 
pandre dans  le  public  que  la  Convention  nationale 
rappelait  les  officiers  de  rancienne  marine,  émigrés. 

Comme  il  convient  de  faire  taire  cette  calomnie, 
11  est  bon  d'observer  que  le  grade  d'ofBcier  dnns  la 
marine  est  correspondant  à  celui  de  sergent  et  capo- 
ral dans  l'armée  ae  terre. 

Brbaid  :  On  ne  peut  se  méprendre  à  Texpression 
du  décret  où  ae  trouvent  ces  mots,  officiers  mari- 
nt>ri,  qui  n'ont  jamais  pu  s'appliquer  aux  officiers 
gradâ  dans  l'ancienne  marine. 

La  Convention  nationale  décrète  l'insertion  de 
TobservatioD  de  Topsent  au  Bulletin  de  correspon* 
dance.  {La  êuiu  demain?) 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  98.  Octidi  8  NivosE,  l'an  S«.  (Dimanche  28  Décembre  1794,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEiMAGNE. 

Hanovre^  6  décembre,  —  On  assure  que  quinze  mille 
lioiiiroes  des  Etals  de  Brunswick  et  de  Hanoyre  yont  se 
réunir  pour  former  un  cordon  sur  la  frontière  de  West- 
phalie.  Il  est  arrivé  déjà  plusieurs  régiments  à  Brunswick. 

—  Il  s*est  élevé  dans  ce  pays  des  troubles  et  des  difficul- 
tés gra? es  au  sujet  des  patentes  de  la  régence,  qui  ordon- 
naient rincorporation  des  régiments  provinciaux  dans  ceux 
des  régiments  dMnfanterie  qui  se  trouvent  encore  dans  le 
pajrs  d'Hanovre.  Le  gouvernement  a  publié  un  nouvel  édit 
qui  modifle  les  dispositions  de  ses  premières  patentes. 

•—  Un  des  aides  de  camp  de  Cusline  vient  de  publier, 
à  Francfort,  les  Mémoires  posthumes  de  ce  général,  en 
deux  volumes  iihS*,  enrichis  de  gravures. 

Priesenheim^  îli  décembre»  —  Les  Français  travaillent  à 
nne  ligne  de  communication  entre  les  cinq  redoutes  quUls 
ont  élevées  devant  les  flèches  de  Manheim.  Leurs  travail- 
leurs sont  nombreux,  surtout  derrière  la  digue  qui  fait 
face  à  la  Mulhau.  Ils  y  ontpercé  des  embrasures  destinées 
à  placer  des  ohusiers. 

—  Le  général  républicain  Kléber  est  arrivé  devant 
Mayenee  pour  en  diriger  et  en  presser  le  siège.  Il  s^oocupe 
en  même  temps  d*accélérer  l'envoi  des  munitions  de  guerre 
nécessaires  à  cette  grande  opération. 

L'artillerie  de  siège  n'arrive  que  partiellement  devant 
eette  place,  à  cau^e  de  la  difficulté  extrême  qu'on  éprouve 
à  se  procurer  le  nombre  suffisant  de  chevaux.  Cependant 
les  Français  ont  mis  en  réquisition  tous  ceux  du  Palatinat, 
et  on  a  ordre  de  les  conduire  à  Landau. 

—  Les  alliés  ont  jeté  un  nouveau  pont  de  bateaux 
entre  Offenbach  et  Kesselstadt. 

Ils  travaillent  à  mettre  en  état  de  défense  la  rive  droite 
du  Rhin ,  entre  le  Mein  et  le  Necker,  et  entre  le  Mein  et 
la  Lahn.  On  élève  des  batteries,  et  Ton  se  dispose  à  con- 
struire plusieurs  petits  forts. 

Six  redoutes  viennent  d'être  établies^  par  les  Allemands, 
près  de  Branbacb. 

PRUSSE. 

Tkam,  28  novemhreé  —  On  prétend  que  le  cabinet  de 
Berlin  a  conçu  un  extrême  déplaisir  des  derniers  succès 
des  troupes  russes  contré  les  braves  et  infortunés  Polonais. 
Il  n'a  pu  manquer  en  effet  d'observer  à  cette  occasion  que 
les  troupes  prussiennes  avaient  toujours  écboué  contre  ces 
défenseurs  de  la  liberté.  La  cour  pru!(sienne  montre  un 
grand  mécontentement  contre  les  généraux  qu'elle  avait 
chargés  de  couper  la  retraite  de  Madalinski  et  Dom- 
brovrski  sur  Varsovie.  On  parle  même  de  la  formation 
d'un  conseil  de  guerre  pour  examiner  leur  conduite. 

—  On  a  réitéré  à  Dantsig  la  défense  de  l'exportation  des 
grains.  Les  représentations  des  négociants  ont  été  sans  ef- 
fet. On  doit  même  faire  une  visite  dans  les  greniers  et 
magasins,  poar  vérifier  les  quantités  de  grain  qui  s'y 
trouveut. 

ITALIE. 

lÀPOume,  6  <l^eem6re.— Beccaria,  l'illustre  auteur  du 
traité  Des  Déliti  et  de»  Peina,  est  mort  le  28  novembre, 
ù  Milan.  Le  nom  de  ce  philosophe  était  déjà  mis  au  rang 
de  ceux  qui  ont  le  plus  servi  l'bumanité. 

—  Un  grand  nombre  d'émigrés  français,  après  avoir 
quitté  l'E^gne,  sont  arrivés  à  la  Spe^ia. 

«-  La  cour  d'Espagne  a  rappelé  de  son  exil  dans  la  Ga* 
lice  le  ci-devant  ministre  don  Acunha,  destitué  du  minis- 
tère au  commencement  de  cette  année. 

— «  Le  vaisseau  de  ligne  espagnol  le  Saint^hidore,  de 
Ik  canons»  qui  portait  à  Cadix  des  troupes  et  de  l'argent 

f  Série. '^  Tome  X. 


pour  l'armée  de  Catalogne,  a  écboué  sur  la  côte  au  mo- 
ment de  sa  sortie.  On  n'a  sauvé  que  l'équipage* 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 
TRIBUNAL  CRIMINEL  BÉVÔLUTIONNAIBEr 

Suite  de  la  procédure  du  comité  révolutionnaire 
de  Nantes.  —  Du  21  frimaire. 

Lecoq,  concierge  des  moulins  de  la  Sëcherie, 
déclare  avoir  vu ,  à  la  fin  de  ventôse  ou  au  com- 
mencement de  germinal,  Robin,  dans  la  dernière 
noyade,  frapper  un  homme  sur  la  tête  à  coups  de 
sabre. 

Robin  :  Je  n'ai  frappe  qu'une  seule  fois  des  bri- 
gands gue  l'on  noyait;  plusieurs  d'entre  eux  s'é- 
taient détachés  dans  la  gabare  ;  ils  voulaient  s'ac- 
crocher au  batelet  dans  lequel  nous  étions,  se  sauver 
ou  nous  faire  périr  avec  eux. 

Carrier  :  Remarquez  que  je  n'étais  plus  à  Nantes 
à  cette  époque,  car  j'arrivai  a  Paris  le  5  ventôse. 

Goulin  :  Je  n'ai  pas  connaissance  qu'il  y  ait  eu, 
à  Nantes,  des  noyades  après  le  départ  ne  Carrier. 

Robin  :  Je  partis  le  28,  cl  j'arrivai  à  Paris  avec 
Carrier. 

Carrier  :  Ce  que  vient  de  dire  le  témoin  prouve 
qu'il  y  a  eu  des  excès  commis  à  Nantes  après  mon 
départ;  il  est  également  démontré  que  les  noyades 
ont  commencé  a  Angers,  à  Saumur,  à  Châteaugon- 
tier,  à  Paimbœuf,  etc.,  et  que  ce  n'est  que  par  la 
suite  qu'elles  ont  eu  lieu  à  Nantes.  On  rappelle  au- 
jourd'hui le  souvenir  de  ces  scènes  qui  afQigent 
l'humanité (Murmures.) 

Le  président  :  J'observe  à  l'auditoire  que  la  dé- 
fense d'un  accusé  est  de  droit  naturel ,  et  qu'on  ne 
doit  pas  Finterrompre  dans  sa  justification. 

Carrier  :  Je  Te  demande  à  ceux  qui  murmurent  : 
Est-ce  moi  qui  ai  ordonné  les  noyades  d'Angers,  de 
Saumur,  etc.? 

Le  président  :  Carrier  se  rappelle  sans  doute  la 
lettre  qu'il  a  écrite  à  Francastel? 

Carrier  :  C'est  à  la  Convention  que  j'ai  adresse 
cette  lettre  ;  elle  a  été  insérée  au  Bulletin  et  connue 
de  toute  la  France.  Aujourd'hui  que  Ton  est  dans  le 
calme ,  ces  horreurs  font  frémir  ;  mais  reportez- vous 
au  temps  et  aux  circonstances;  rappelez-vous  les 
tortures  que  les  rebelles  ont  fait  éprouver  à  nos  bra- 
ves défenseurs  :  dans  une  guerre  civile  on  use  mal- 
heureusement de  représailles;  cependant,  lorsqu'on 
annonçait  que  quatre  mille  cinq  cents  brigands 
avaient  été  précipités  à  Fontenay,  on  applaudissait. 
C'était  l'opinion  d'alors. 

A  cette  époque  on  se  persuadait  qu'on  ne  pou- 
vait être  patriote  sans  être  exalté.  Le  gouvernement 
était  instruit  de  ces  mesures;  pourquoi  ne  s'y  oppo- 
sait-on pas?  Aujourd'hui  tout  roule  sur  ma  tête, 
quoique  tes  patriotes  y  aient  participé.  On  ne  peut 
me  reprocher  que  des  excès.  Un  témoin  m'a  accusé 
maladroitement  d'avoir  été  [)ayé  par  Pitt  et  par  Co- 
bourg,  et  c'est  moi  qui  ai  fait  arrêter  les  parents  do 
Pitt.  Ma  femme  et  moi  nous  n'avons  pas  10,000  liv. 
de  capital  ;  j'ai  cependant  eu  des  millions  dans  les 
mains,  et  il  ne  me  reste  que  31  liv.  On  m'accuse 


58 


d*aToif  TOiilo  étertiJUT  la  gn«Te  de  fa  Vendée;  Je 
désire  qu  elle  finisse  par  la  voie  de  la  douceur  ;  mais 
il  u*y  a  pas  d'exemple  que  les  guerres  civiles  aient 
été  ainsi  terminées.  Mon  intention  fut  toujours  de 
respecter  les  communes  paisibles,  mais  mon  projet 
était  de  réduire  Charette  ;  alors,  pour  le  service  de 
la  patrie,  j'aurais  dispersé,  sur  des  bâtiments,  tous 
ceux  qui  auraient  porté  les  armes  contre  la  rtfpubli- 
que,  et  je  lègue  ce  projet  à  ma  patrie. 

Au  commencement  de  cette  guerre ,  j*avais  vu 
que  la  douceur  avait  tout  pcruu  ;  je  crus  devoir 

f  rendre  d'autres  mesures  ;  mais  j'iguorais  que  sept 
huit  personnes  menassent  la  Convention  ;  je  ne 
connaissais ,  et  je  ne  consultais  que  les  décrets  :  ce 
ne  fut  qu'à  mon  retour  que  je  fus  instruit  de  ce  qui 
se  passait.  Je  vis  que  tout  était  comprimé,  et  je  I  é- 
tais  moi-même. 

Les  décrets  ordonnaient  d*incendier  et  d'extermi^ 
lier.  Je  déclare  que  j'ai  instruit  de  mes  opérations 
la  Convention ,  et  notamment  le  gouvernement. 

Je  revins  à  la  Convention,  j'y  fus  bien  reçu,  et  un 
an  après  ou  m'attaque  ! 

Des  municipalités  ne  roulaient  pas  reconnaître 
les  districts;  des  administrés  refusaient  même  de 
reconnaître  les  administrations  qu'ils  avaient  nom- 
mées, enfin  tout  le  monde  était  maître.  La  terreurs 
sauvé  la  France;  mais  elle  devait  cesser  il  y  a  un 
an.  Les  circonstances  ayant  changé,  les  mesures  ne 
devaient  plus  être  les  mêmes. 

Méal ,  défenseur  :  Je  dois  à  Carrier,  je  dois  aux 
Jurés  un  fait  qui  jettera  de  la  clarté  sur  ce  qui  vient 
d*étre  dit.  11  est  évident  que  le  gouvernement  d'a- 
lors connaissait  le  plan  de  destruction.  Dans  le  mé- 
moire de  Lequiuio,  fourni  au  comité  de  salut  public, 
et  lu  à  ce  comité  le  12  germinal ,  on  lit  : 

H^  6a.  «La  eireonscription  actuelle  est  infiniment 
trop  étendue,  trop  difficile  à  garder,  et  plus  difficile 
eacore  à  réduire,  si  l'on  persiste  dans  les  mesures 
da  rigueur  de  tout  égorger^  parce  que  quatre  cent 
nulle  bommes,  instruits  quils  n'ont  aucune  res- 
source pour  échapper  à  la  mort,  vendent  nécessai- 
rement leur  vie  à  tout  le  prix  que  le  désespoir  peut 
y  mettre,  et  doublent  par  là  leur  énergie.  • 

N<>  105.  •  Toute  la  dinicutlé  qui  se  présente  est  de 
savoir  si  l'on  prendra  le  parti  de  rfiidulgence^  ou 
8*U  est  plus  avantageux  de  continuer  le  plan  de  des- 
truction totale.» 

ho  107.  «Si  l'on  persiste  dans  le  plan  de  destrne- 
tion,  on  force  tous  ces  malheureux  à  se  retirer  dons 
les  bois, où  ils  seront  longtemps  inexpugnables,  etc<» 

N<>  109.  «Nous  ne  pouvons  opérer  cette  destruc- 
tion sans  perdre  nous-mêmes  beaucoup  de  monde.... 
Ja  désire  me  tromper;  mais  je  crains  beaucoup  que 
nous  ayons  à  bous  repentir,  si  nous  persistons  dans 
ce  pUn  de  destruction.  • 

Ce  plan,  ajoute  Real,  existait  donc. 

Catriet  :  Ce  plan  existait  pour  tous  les  brigands 
qtt)  avaient  passé  la  Loire  ;  Levasseur  proposa  une 
amnîsiie,  elle  fut  rejclée.  Peut-être  un  jour  rendra- 
ton  justice  à  ces  malheureuses  victimes  qui  sont  à 
côté  de  moi.  Je  dirai  tout ,  pour  qu'elles  ne  soient 
pas  atteintes  ;  j'administrerai  à  cet  effet  toutes  les 
preuves  matérielles  que  je  pourrai. 

Le  mémoire  de  Lequinio  prouve  que  ce  plan  de 
destruction  existait  ;  considérez  que  je  voyais  Tanar- 
chif ,  que  nos  frontières  étaient  envahies ,  etc.  Je 
votais  Lyon  et  Toulon  en  rébellion  ;  je  lisais  les  dé- 


r«ipmieru4  moment.) 


Carfiêf  :  Lorsque  je  parie  pour  mes  eo^icensés, 
je  ne  me  fatigue  pas. 

J'observe ,  en  finissant,  qu'il  a  été  accordé  une 
amnistie  aux  brigands  qui  rentreraient  dans  le  de- 
voir, et  qu'on  se  propose  d'en  accorder  une  aux 
malheureux  patriotes  égarés,  ou  qui  ont  obéi  ;  il  me 
semble  que  la  même  indulgence  devrait  être  accor- 
dée aux  victimes  qui  sont  a  côté  de  moi  ;  ils  ont  pu 
se  tromper,  ils  ont  pu  partager  cette  erreur  avec 
beaucoup  d'autres. 

(Nous  devons  observer  que  plusieurs  témoins, 
dans  le  cours  des  deliats,  et  notamment  dans  cette 
séance,  ont  rendu  un  témoignage  favorable  à  la  bra- 
voure, au  patriotisme!  à  l'humanité  et  à  la  probité 
de  plusieurs  détenus. 

Du  2S.  -—  UtùuhUn^  grenadier-geiidame  pr^ 
la  Convention,  assigné  à  la  requête  de  Carrier,  a  dé- 
claré n'avoir  rien  a  dire  contre  ce  représentant 

Carrier^  au  témoin  :  A  la  colonne  oà  tu  ServaiSf 
faisait-on  fusiller  à  l'iustant  les  brigands? 

Létoublon  :  Les  prisonniers  étaient  condnits  dans 
un  dépôt,  et  ensuite  fusillés,  maisjlgnoté  par  quel 
ordre. 

Carrier  :  Les  brigands»  malades  ou  bleaséSf  et  dé* 
posés  à  l^hôpital  de  Châteaugonthier,  oat-ila  tflé  Ja- 
téà  à  l'eau  ? 

Léioublon  :  Je  l'ignore. 

Carrier  :  As-tu  vu  fusiller  des  brigands  ant  Ponts* 
de-Cé  et  à  Saumur  ? 

Léioublon  :  J'ai  été  témoin  de  cette  axéctftioii, 
mais  je  dois  dire  qu'ils  avaient  été  jugés. 

Parai,  Brout  et  Rode,  aussi  grenadiet^-gendsr- 
mes  près  la  Convention,  assignés  de  même,  et  inter- 
pellés par  Carrier  sur  tes  mêmes  faits,  répandent 
qu'ils  en  ont  entendu  parler. 

Carrier  :  La  terreur  est  telle,  qu'on  n'ose  dira  la 

vérité.  (Murmures.) 

Brout  :  Je  déclare  que  je  ne  Crains  rien. 

P.  Crosnier,  témoin  à  décharge,  âgé  de  quarante» 
huit  ans,  ex-fermier,  inspecteur  des  relais  militaires 
à  Nantes  :  Je  déclare  avoir  connu  Carrier,  au  café 
Beaucaioe ,  à  Paris,  où  se  réunissaient  Icsj^triotes, 
l'avoir  vu  depuis  à  Montaiffu»  où  il  accueillit  les  bri- 
gands qui  venaient  se  rendre  à  lui» 

Arrivé  à  Nantes,  je  fus  chargé  da  conmander 
l'artillerie,  et  d'aller  chercher  &s  gmiiis  dans  la 
Vendée  ;  je  recevais  les  ordres  du  représentant  €ar«* 
rier.  J'ai  entendu  parler  ûe»  noyades  à  Nanles; 
mais  il  y  avait  alors  des  crises  violentes;  on  amenait 
journellement  des  brigands;  le  peur>le  de  Nantes 
demandait  pourquoi  on  les  amenait  r  pourquoi  on 
ne  les  fusillait  pas  ?  Ils  disaknl  qu'ite  apportaient  la 
peste. 

Un  jour  que  je  condoissîi  dïwis  cette  fflte ,  sur 
une  voiture,  deut  chasseurs  grièvement  blessés, 
quatre  bateaux  chargés  de  brigands  descendaient  la 
Loire  ;  le  peuple,  indiguéda  traitement  que  ces  deux 
chasseurs  avaient  reçu  de  la  paît  des  brigands,  vou- 
laient précipiter  ceux  qui  passaient  dans  ces  ba- 
teaux. 

Du  23.  —  A  l'ouverture  da  la  aéanee^  Cartiar  de- 
mande la  parole» 

Carrier  :  Commt,  par  des  conseils  fonesieset  des 
ménagements  ûiulilés^  i'ai  pu,  dans  plusirurs  cir- 
constances, avoir  cache  la  vérité;  owmne  U  exista 
une  multitude  de  laits  et  d'événements  dont  ja  aa 
me  suis  pas  rappelé  et  dont  je  ne  me  rappeHa  pas 
eneoffo,  ja  prie  (a  tribunal  da  êûê  hkm  dea  auesifnnr, 
si  tous  ces  détails  ne  se  vepcésaoteiU  fMS  a  l'instant 


£9 


à  ma  mémoirat  Je  les  donnerai  le  lendemain.  Je  ne 
tairai  rien.  11  est  vrai  que,  par  des  conseils,  par  des 
ordres  supérieurs  ou  égaux  aux  miens,  j'ai  quelque- 
fois été  oblige  de  frapper  ceux  que  la  loi  désignait  ; 
mais  je  n'ai  jamais  participé  aux  détails  des  exécu- 
tions. Si  les  Nantais  étaient  vrais,  ils  diraient  que 
plus  d'une  fois  ils  m'ont  vu  pleurer,  sans  en  con- 
naître les  moliEs,  des  ordres  que  j'ai  reçus;  plusieurs 
sont  égarés  :  je  livrerai  ceux  qui  me  restent»  et  je 
donnerai  des  preuves  de  ma  franchise. 

Celui  qui  a  paru  donner  le  plan  d'impulsion  à  tons 
ces  mouvements,  c'est  Lalloué;  il  se  disait  l'ami  et 
l'envoyé  de  Robespierre  :  à  cette  époque ,  vous  le 
savex ,  Robespierre  était  estimé. 

Quant  BU  dtner  sur  la  galiote,  un  jour  j'avais  mal 
à  la  tête;  plusieurs  personnes  étaient  chez  moi.  On 
m'engagea,  pour  me  dissiper,  à  aller  dîner  sur  cette 
galiote  ;  nous  nous  y  rendîmes  tous ,  mais  sans  mau- 
vaise intention  ;  je  ne  me  rappelle  pas  du  tout  ce  qui 
y  fut  dit .  mais  je  promets  de  dire  la  vérité  tout  en- 
tière et  de  donner  tous  les  renseignements  que  ma 
mémoire  fournira. 

Parmi  les  témoins  entendus  à  la  décharge  de  Car- 
rier, on'distingae  les  représentants  Bô,  Hentz  et 
Franeastel ,  quiont  déclaré  ne  l'avoir  jamais  connu 
gue  comme  un  patriote  dont  les  mesures  avaient  pu 
être  outrées,  mais  dont  les  intentions  n'avaient  cessé 
d'être  pures. 

Af'aJ,  défenseur  :  Carrier  «  dit ,  il  y  a  deux  jours, 
et  il  a  répété  aujourd'hui  qu'il  révélerait  de  ^ands 
secrets  ;  je  l'invite,  je  le  somme  même  de  faire  ses 
déclarations. 

Carrier  :  Outre  les  décrets,  j'avais  des  ordres  de 
ne  faire  aucun  quartier  aux  brigands  qui  avaient 
passé  la  Loire.  Lalloué  vint  à  Nantes;  je  ne  prétends 
pas  l'inculper,  mais  il  me  dit  qu'il  avait  une  mission 
de  Robespierre,  et  que,  dans  peu,  le  gouvernement 
m'enverraitun  commissaire.  Il  m'ajouta  qu'il  entrait 
dans  le  plan  du  gouvernement  d'alors  de  ne  pas  plus 
laisser  subsister  de  prêtres  que  de  brigands.  A  cette 
époque,  je  donnai  1  ordre  qu'on  connaît  à  Lamber- 
lye  ;  il  m  en  fît  donner  un  autre  pour  retirer  la  garde 
qui  était  sur  la  galiote  des  prêtres,  et  ils  furent 
noyés;  mais  je  n'ai  jamais  commandé  de  noyer  les 
femmes.  Les  agents  ont  passé  leurs  pouvoirs  :  c'était 
Lalloué  qui  était  à  la  tête  de  ces  expéditions. 
.  J*ai  égaré  beaucoup  de  pièces  ;  si  je  les  retrouve, 
je  les  donnerai  ;  si  elles  sont  perdues,  il  est  inutile 
d'en  parler.  Je  suis  dévoué  :  ma  vie  n'est  rien  ;  mais 
je  déclare,  pour  ma  mémoire,  que  mon  cœur  n'a  ja- 
mais participé  â  aucune  expédition. 

Carrier  rappelle  encore  les  circonstances  terribles 
où  il  s'est  trouvé,  les  dénonciations  de  conspirations, 
les  propositions  faites  de  Tusil  1er  ou  de  juger  en  masse 
les  prisonniers  de  Nantes,  l'état  de  cette  ville  et  de 
la  Vendée. 

On  lui  fait  plusieurs  interpellations  sur  son  appa- 
rition, le  16  frimaire,  au  greffe  du  comité,  où  les 
ordres  furent  donnés,  en  sa  présence,  à  Colas  et  à 
Affilé,  de  préparer  les  bateaux  à  soupapes;  sur  ce 
qui  a  précédé  et  accompagné  la  noyade  du  24  au  25; 
lur  l'ordre  d'une  prétendue  translation  de  prison- 
niers a  Belle-Ile,  signé  par  Carrier  postérieuremeni 
à  leur  noyade,  et  pour  la  couvrir  ;  il  donne  des  ré- 
ponses vagues,  mais  il  promet  de  se  rappeler  ces 
laits,  et  de  déclarer  demain  ceux  sur  lesquels  il  n'a 
pas  enoore  donné  des  renseignements  positifs. 

Du  24.  —  A  neuf  heures  et  demie  le  président  de> 
mande  aux  accusés  s'ils  ont  encore  quelques  inter- 
pellations à  faire.  Les  jurés  en  font  plusieurs  à  Car- 
rier. Cal  accusé  déclare  que  beaucoup  de  détails  lui 


sont  échappés,  qu'il  a  repassé  cette  nuit  tons  les  CAs 
sur  lesquels  il  fut  interpellé  hier,  qu'il  ne  s'est  rap- 
pelé d'aucuns,  mais  qu  ou  peut  prendre  ses  inoerâ*- 
tudes  pour  des  aveux. 

On  m'a  demandé ,  ajoute  Carrier,  les  preuves  que 
le  gouvernement  avait  connu  les  mesures  dont  il 
est  question  ;  je  le^  avais,  ces  pi-euves,  il  m'en  res- 
tait encore  quelques-unes  il  n'y  a  pas  longtemps;  je 
n'ai  pas  voulu  les  conserver,  j'ai  voulu  tout  enseve- 
lir avec  moi. 
A  dix  heures  et  demie  les  débats  ont  été  fermés. 
Le  suhslilul  de  l'accusateur  publie  :  C'est  en  vain 
que  certains  individus  veulent  persuader  au  peuple 
que  c'est  faire  le  procès  aux  patriotes  que  de  poursui- 
vre la  réparation  de  tous  les  actes  arbitraires  com- 
mis dans  la  Vendée.  Punir  les  brigandages,  les  atro- 
cités les  plus  révoltantes,  les  violations  faites  aux 
lois,  ce  n'est  pas  détruire  la  révolution ,  c'est  la  con- 
solider. 

Le  substitut  retrace  ensuite  avec  clarté  et  préci- 
sion tous  les  faits  de  cette  volumineuse  procédure. 
La  séance  est  suspendue.  -—  Elle  est  reprise  à  cinq 
heures. 

Le  président  déclare  que  l'affaire  sera  terminée 
sans  desemparer. 

Tronçon-Ducoudray,  Real ,  Villenave,  Gaillard  et 
Villain ,  défenseurs,  prononcent  successivement  en 
faveur  des  accusés  dont  la  défense  leur  a  été  confias 
des  discours  pleins  de  force  et  d'éloquence. 

Ducoudray  s'empare  de  l'ensemble  du  système 
révolutionnnaire  de  l'ancien  gouvernement;  il  en 
développe  avec  sagacité  et  avec  énergie  les  vices  et 
les  effets,  et,  s'altachant  à  démontrer  l'influence  fu- 
neste de  la'terreur  et  de  l'exaltation  sur  les  agents 
appelés  à  le  servir,  il  en  tire  des  inductions  pressan- 
tes, sinon  pour  justifier  la  conduite  des  coaccusés  de 
Carrier,  du  moins  pour  la  faire  pardonner  comme  le 
résultat  de  Faction  irrésistible  des  circonstances. 

Real  prend  une  marche  plus  insinuante;  il  s'el* 
force  de  persuader  que  les  accusés  dont  il  a  embrassé 
la  cause  sont  dignes  encore  de  l'estime  de  leurs  con- 
citoyens; il  appelle  la  sensibilité  du  tribunal  et  de 
l'auditoire  par  tout  ce  c|ue  des  principes  de  philan- 
thropie et  la  cause  de  l  humanité,  si  longtemps  ou- 
tragée, lui  fournissent  d'idées  et  d'expressions  tou- 
chantes ;  saisissant  ensuite  plusieurs  traits  cités  an 
procès,  et  qui  déposent  en  faveur  de  la  moralité  de 
Goulin ,  il  essaie  d'effacer  l'impression  funeste  et 
trop  récente  des  tableaux  affreux  retracés  dans  cette 
affaire.  Plusieurs  accusés,  et  Goulin  avec  eux,  ver- 
sent des  larmes;  Real ,  ému  lui-même,  prononce  ces 

mots  avec  chaleur :  «  Sa  tête  fut  exaltée ,  son 

cœur  est  celui  d'un  patriote  pur,  est  celui  d'un 
homme  de  bien....*  Des  sanglots  se  font  entendre; 
Gallon,  un  des  accusés,  se  levé  hors  de  lui-même, 
et ,  fondant  en  larmes,  il  ne  peut  articuler  que  ces 
mots  en  faveur  de  Goulin  :  •  C  est  mon  ami,  c'est  un 
honnête  homme,  c'est  mon  ami  ;  je  le  connais  de- 
puis neuf  ans;  il  a  élevé  mes  enfants;  tuez-moi,  mais 

sauvez- le ■  Ces  mots,  répétés  plusieurs  fois  avec 

l'accent  du  désespoir,  attendrissent  tout  l'auditoire» 
Gallon  est  oblige  de  sortir.  Tous  les  accusés  fondent 
en  larmes.  Real  s'écrie  en  les  montrant  :  «Jurés, 
sont-ce  là  des  hommes  féroces  !  • 

Le  26,  à  minuit  et  demi ,  la  parole  est  accordée  à 
Carrier.  11  rappelle ,  à  dater  de  juillet  1793,  tontes 
les  missions  qu'il  a  eues  dans  les  départements  de 
l'Eure,  du  Calvados,  de  la  Loire-Inférieure,  et  la  con- 
duite qu'il  y  a  tenue  ;  il  répète  tout  ce  qu'il  a  dit  dans 
le  cours  de  Tinstruction.  A  quatre  heures  et  demie, 
il  termine  ainsi  sa  défense  :  «Fatigué,  exténué  Je 


60 


m'en  rapporte  à  la  jostice  des  jor^.  Ma  moralité  est 
décrite  daus  une  Adresse  de  mon  département.  Je 
demande  tout  ce  qui  peut  être  accordé  pour  mes  co- 
accusés; je  demaude  que,  si  la  justice  nationale  doit 
peser  sur  quelqu'un,  elle  pèse  sur  moi  seul.  • 
\  Villain,  nommé  par  jugement  défenseur  de  Car- 
rier, se  renferme  dans  les  considérations  générales 
fournies  par  la  difficulté  des  circonstances  politiques 
et  les  malheurs  trop  réels  de  la  guerre  de  la  Vendée. 

Le  président  résume  et  pose  les  questions.  A  cinq 
heures  du  matin  les  jurés  se  retirent  dans  leur  cham- 
bre pour  délibérer. 

^Nous  donnerons  en  entier,  dans  un  prochain  Nu- 
méro, la  déclaration  du  jury  et  le  jugement  qui  en  a 
été  la  suite.) 


AVIS. 

Le  citoyen  PlaMan,  imprimear4ibraire,  me  du  Cimetière- 
AndrMea-Arcs ,  a  mis  touf  preise  les  deux  ouirraget  tui- 
YtnU: 

VÀriosU,  eo  italien ,  en  quatre  volumes  in-8<* ,  grand  pa» 

5ier,  imprime  en  caractères  de  Didot  jeune ,  avec  figures 
oubles,  dessinées  et  gravées  par  les  plus  célèbres  artistes  ; 
Le  Virgile  de  Desfontaines ,  quatre  volumes  in-S»  ,  grand 
papier,  aussi  en  caractères  de  Didot  jeuue,  avec  dis-huit  gra- 
vures, dessinées  par  Uoreau  le  jeune  et  Zocchy. 

Pour  avoir  de  bonnes  épreuves  il  est  nécesuire  de  se  faire 
inscrire,  ces  deua  ouvrages  étant  tirés  en  très-petit  nombre. 
Il  y  tara  quelques  exemplaires  in-4<*  et  in^<*  en  papier 
vélin. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  BentaboU* 
SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU  5  NIVOSE. 

Une  députalioQ  de  la  secliou  des  Arcb  est  admise  à  la 
barre. 

L'orateur:  Représentants  du  peuple,  la  section  des 
Arcis  vient  invoquer  voire  humanité  en  faveur  de  Tinfor- 
Innée  veuve  Semillard.  Une  mort  cruelle ,  commandée  par 
des  hommes  féroces,  lui  a  arraché  son  époux  et  son  fils. 
Il  est  écrit,  dans  le  numéro  35  de  Curateur  du  Peuple, 
que  ces  deux  êtres  malheureux  ont  été  jugés  sans  avoir 
même  paru  au  tribunal.  Déj4  la  section  se  disposait  à  vous 
prier  de  faire  consiater  le  fait  ;  mais  la  dernière  loi  sur  cet 
obiet  De  lui  permet  plus  de  réclamer  votre  justice  à  cet 
égard* 

Elle  vient  dans  ce  moment  émouvoir  vosflmes  sensibles, 
intéresser  vos  cœurs  généreux  par  le  tableau  le  plus  affli- 
geant qu*on  puisseoflTrir  à  des  législateurs  justes  ei  humains. 

Est*il  rien  en  effet  de  plus  déchirant  que  de  voir,  d'un 
eùié,  la  preuve  évidente  de  rinnoceoce  de  deux  viaimes 
dont  le  sang  crie  vengeance,  et,  de  Tautre,  la  situation 
critique  d^une  épouse  et  mère  livrée  presque  au  désespoir? 

Le  6  vendémiaire,  le  comité  de  sûreté  générale  a  fait 
parvenir  au  comité  civil  de  notre  section  la  mise  en  liberté 
des  citoyens  Semillard  père  et  fils. 

Hélas  1  ils  n'étaient  plus Mais,  ô  double  fatalité  1  ils 

bissent  encore  après  eux  celte  épouse  et  mère,  Agée  de 
soixante-trob  ans,  à  qui  il  ne  reste,  pour  ainsi  dire,  que 
tes  larmes  et  ses  vertus.  Vous  ne  souffrirex  pas,  citoyens 
législateurs,  qu'une  misère  affreuse  mette  le  comble  à  ses 
douleurs  cuisantes,  puisqu'il  est  vrai  que  l'innocence  de 
tes  deux  soutiens  a  été  reconnue  par  vos  deux  comités. 

Vous  vous  plairet  sans  doute  à  honorer,  par  un  acte 
éclatant  de  bienfaisance,  la  mémoire,  et  d'un  époux,  bon 
citoyen,  et  d'un  fils,  défenseur  de  sa  patrie,  déjà  blessé 
en  combattant  pour  la  cause  sacrée  de  la  liberté.  Vous 
êtes  pères  citoyens  représentants...  vous  êtes  éooux...  c'esi 
en  direasscx.....  apprécieila  triste  position  de  l%coaso- 
Ubleveai^  Sémillant 


Cette  péUtioD  est  teiiToyée  aa  eoniUé  de  sûreté  gé« 
Dérale.» 

—  Une  dépotailon  de  la  section  de  la  Fontaine  de  Gre* 
nelle  est  admise  à  la  barre. 

L'orateur:  Qtoyens  représentants,  la  section  de  la 
Fontaine  de  Grenelle  vient  de  nouveau  féliciter  la  ConTen- 
tion  nationale  de  Pénergie  qu'elle  déploie  dans  toutes  les 
circonstances  où  la  patrie  est  menacée  par  la  feciioo  que 
vous  avei  terrassée  le  9  thermidor.  Législateurs,  vous  avei 
consacré  deux  grands  principes,  celui  de  la  liberté  des 
opinions,  en  rappelant  dans  votre  sein  soixante-treiie  vic- 
times de  la  plus  criminelle  des  tyrannies,  celle  qui  veut 
comprimer  la  pensée  ;  et  celui  qui  ne  veut  pas  que  l'auto- 
rite  réside  trop  longtemps  dans  les  mêmes  mains,  en  dé- 
crétant le  renouvellement  du  tribunal  révolutionnaire,  et 
en  vous  assurant  de  cet  hommes  que  la  société  repousse. 

Grâces  immortelles  vous  soient  rendues  de  cette  triple 
mesure.  Nous  ne  vous  dirons  pas  qu'elle  est  sanctionnée 
par  le  peuple  :  l'allégresse  qu'il  a  manifestée  ne  tous  laisse 
aucun  doute  sur  cette  vérité,  ainsi  que  sur  le  résultat  de 
cet  horrible  procès  qui  fait  encore  g^nir  la  France  entière. 

Nous  avons  déjà  demandé  l'épuration  des  autorités  con- 
stituées, de  cette  pépinière  de  commissions,  d'adminis- 
trations et  d'agences,  où  l'ignorance  préside;  nous  vous 
la  demandons  encore  avec  instance  :  le  saint  de  la  patrie 
en  dépend.  Qu'un  faux  patriotisme,  qne  l'intrigue  et  la 
scélératesse  ne  tiennent  plus  lieu  de  talents  et  de  vertus.  Il 
est  des  fonctionnaires  publics  qui  ne  sont  pas  dignes  de  la 
confiance  qu'ils  ont  usurpée;  il  est  des  commissaires  de 
police,  des  juges,  de  paix  de  section,  des  commandants 
de  la  force  armée  qui  tiennent  encore  par  leurs  principes 
et  leurs  liaisons  au\  intrigues  et  à  la  (action  que  tous  avei 
démasquée. 

Rendex-les  à  leur  obscurité  première  ;  qu*ils  y  appren- 
nent à  devenir  meilleurs  citoyens  et  à  respecter  la  justice 
nationale. 

Tel  est  le  tcsu  bien  prononcé  de  tous  les  citoyens  de  la 
section  de  la  Fontaine  de  Grenelle. 

Cette  Adresse  est  renToyée  aox  trois  comités  rénnis  de 
talut  public,  de  sûreté  géntale  et  de  législation. 

PÉNiÈBES  :  Toutes  les  sections  de  la  républiqtic 
ont  émis  leur  vœu  pour  le  renouyellemeot  des  au- 
torités constituées  :  il  en  est  encore  un  çrand  nom- 
bre qui  n*ont  pas  subi  Texamen  des  représentants  du 
peuple,  et  dont  Tezistenee  est  un  malheur  public.  Je 
demande  que  les  comités  prennent  des  mesures  pour 
l'épuration  des  administrations;  sans  cela  la  révolu- 
tion du  9  thermidor  restera  incomplète,  et  le  pou- 
voir demeurera  dans  les  mains  des  scélérats.  (On 
applaudit.) 

BovÈBE  :  On  vient  de  vous  parler  des  départe- 
ments où  Tabsence  des  représentants  du  peuple 
laisse  germer  des  principes  réprouvés  par  la  Conven- 
tion nationale.  Je  viens  vous  entretenirde  ceux  où 
la  présence  même  de  vos  collèeues  suffit  à  peine 
pour  contrebalancer  les  efforts  des  partisans  de  la 
tyrannie. 

Cadroy  et  Espert  m'écrivent  de  Marseille,  en  date 
du  24  frimaire,  que,  malgré  leur  iutention  de  satis- 
faire mes  inquiétudes  sur  le  sort  de  cette  contrée,  ils 
ne  le  peuvent  faire  d*une  manière  positive.  Des  in- 
trigants s'assemblent  clandestinement  et  délibèrent 
s*ils  emploieront  contre  nous  la  ruse  ou  la  force  ;  *Is 
lisent  publiquement  des  lettres  qu*ils  disent  leur 
être  écrites  par  nos  collègues  Maignet  et  Granet, 
dans  lesquelles  on  annonce  la  prochaine  arrivée  de 
vingt-huit  scélérats  traduits  au  tribunal  révolution- 
naire. 

Nos  deux  collègues  terminent  par  m'assurer  qu*ils 
ne  cesseroYit  d*exercer  la  plus  rigoureuse  surveil- 
lance sur  les  hommes  qu*ils  indique(it. 

Quelques  membres  :  Cette  lettre  n*est  point  adres- 
sée à  la  Convention  :  Tordre  du  jour  ! 

RovàiE  :  Un  administrateur  du  département  de 


61 


Vaucluse  m*ëcrit  que,  de  différentes  communes  du 
district  d'Apt,  il  part  pour  Paris  des  individus  qui 
annooceots'y  rendre  pour  soutenir  les  Jacobins. 

(Rires  de  queloues  membres.  —  Murmures  d'une 
partie  de  rassemblée.) 

Bdamps  :  Je  demande  que  Rovère  soit  envoyé  à 
rObservatoire....  (Murmures.) 

RoTÈRB  :  Il  est  bon  que  le  comité  de  sûreté  géné- 
rale connaisse  ces  individus,  afin  qu*il  prenne  con- 
tre eux  les  mesures  nécessaires.  (  On  applaudit.  )  Le 
fameux  Monnier,  Jourdan  fils,  Legros-Durund  sont 
du  nombre  des  hommes  dont  il  serait  bon  de  s'assu- 
rer à  leur  arrivée  à  Paris.  (On  applaudit.) 

RicHoux  :  Je  demande  le  renvoi  de  ces  lettres  au 
comité  de  sûreté  générale. 

AoGUU  :  J'arrive  des  départements  dont  il  est 
question  en  ce  moment;  j'y  ai  vu ,  je  dois  le  dire, 
une  tranquillité  apparente  qui  exige  toute  votre 
surveillance.  11  existe  dans  les  départements  méri- 
dionaux une  classe  d'homme  qui,  sous  la  monarchie, 
demandaient  la  république ,  et  qui ,  sous  la  répu- 
blique, prétendent  a  un  gouvernement  particulier. 
Il  est  une  vérité:  c'est  que  ces  intrigants  paraissent 
liés  à  ceux  de  Paris.  Déjà  dans  les  lieux  publics 
ces  scélérats  ont  bu  à  la  santé  du  mois  prochain, 
qu'ils  espèrent  être  fatal  à  la  république  :  ils  sa. 
trompent;  le  mois  prochain  ne  sera  employé  qu'à 
consolider  le  bonheur  et  la  hberté  publique.  (Vifs 
applaudissements.  ) 

Citoyens,  nous  avons  renouvelé  toutes  les  auto- 
rités constituées;  et  si  nous  pouvions  assurer  n'avoir 
pas  été  trompés  par  ces  nommes  qui  dix  fois  par 
jour  changent  de  masque  ,  nous  pourrions  vous  dire 
que  nous  avoAs  fait  de  bons  choix  :  mais  un  fait  sa- 
tis^isant  doit  rassurer.  Les  subsistances  sont  assu- 
rées dans  ces  départements ,  et,  tant  que  le  besoin 
impérieux  sera  satisfait,  le  peuple,  toujours  bon, 
toujours  fidèle  aux  principes,  reconnaîtra  facilement 
les  mouvements  de  ses  ennemis ,  et  réprimera  leurs 
cris  séditieux. 

CoDTUBiBB  :  La.  pétition  qui  vous  est  présentée 
par  la  section  de  la  Fontaine  de  Grenelle  prouve 
que  le  moment  n'est  point  encore  arrivé  ou  vous 
pourrez  vous  reposer  et  jouir  vous-mêmes  du  hon- 
neur de  tous  les  Français.  J'avoue,  citoyens,  que  je 
m*étonue  du  peu  d'activité  de  vos  comités  de  gou- 
vernement. Us  sont  charffés  de  deux  rapports  im- 
portants: le  premier  relatif  au  tribunal  révolution- 
naire; le  second,  sur  la  dénonciation  de  notre 
collègue  Lecointre.  Pourquoi  ces  rapports  n'occu- 
pent-ils  pas  la  tribune?  Nous  avons  établi  des  formes 
^ui  garantissent  les  représentants  du  peuple  de  l'in- 
justice des  partis;  conservons  ces  formes,  mais  con* 
servons  une  rigueur  nécessaire ,  si  nous  ne  voulons 
pas  cesser  de  mériter  l'estime  publique. 

Il  est  des  faits  que  la  politique  doit  taire  ;  il  en  est 
d'autr«s  que  l'intérêt  public  doit  dévoiler  ;  éclairer 
sur  notre  situation  ,  c  est  la  rendre  moins  difficile. 
J'appelle  la  surveillance  continuelle  de  la  Conven- 
tion sur  l'état  actuel  des  choses ,  une  activité  sans 
relâche  de  la  part  des  comités  de  gouvernement,  et 
je  demande  qu'ils  soient  tenus  de  nous  présenter, 
dans  le  plus  bref  délai,  le  rapport  qu'ils  doivent  faire 
sur  le  tribunal  révolutionnaire  et  sur  la  dénoncia- 
tion de  Lecointre.  (On  applaudit.) 

GiBOD-Poozoï.  :  Les  comités  sont  constamment 
occupés  des  objets  intéressants  dont  on  vient 
de  parler  ;  il  en  est  un  sur  lequel  il  n'est  pas  moins 
instant  de  statuer  :  c'est  l'organisation  de  la  police 
générale  qui  nous  est  nécessaure.  LescirconstanceSi 


citoyens,  sont  impérieuses;  de  toutes  parts  on 
cherche  à  faire  naître  des  troubles  qui  annoncent 
le  retour  du  règne  de  la  tyrannie;  partout  on  cherche 
à  détourner  les  effets  de  la  révolution  du  9  ther- 
midor ,  c'est  à  vous  à  la  compléter  :  n'attendez  pas 
de  sûreté  publique  tant  quelle  ne  le  sera  pas: 
occupez-vous-en  sans  cesse,  le  salut  public  y  est  at- 
taché. 

Depuis  le  9  thermidor  on  ose  dire  que  les  pa- 
triotes sont  opprimés  ;  mais  le  disait-on  quana  la 
Convention  nationale  était  sous  le  glaive  de  la  pro- 
scription ;  quand  les  yeux  du  peuple  ne  se  levaient 
que  sur  des  échafauds;  quand  le  sang  inorfdait  toutes 
les  parties  de  la  république?  Depuis  celte  époque 
mémorable,  le  sang  ne  coule  plus;  les  citoyens  sont 
rassurés  sur  leurs  propriétés,  et  commencent  à  res- 
pirer l'air  pur  de  la  liberté;  l'espérance  de  la  félicité 
publique  éteint  au  fond  des  cœurs  des  souvenirs  trop 
déchirants;  et  c'est  ce  moment  que  l'on  choisit  pour 
proclamer  que  tes  patriotes  sont  opprimés! 

Où  tendent  ces  cris  séditieux?  On  a  ôté  aux  san- 

Quinaires  le  pouvoir  d'égorger;  veut-on  le  leur  ren- 
re?  La  terreur  a  disparu  le  9  thermidor;  veut-on  la 
rappeler?  On  a  anéanti  une  Société  rivale  de  la  Con- 
vention nationale;  veut-on  l'armer  encore  des  tor- 
ches de  la  sédition?  Ceux  qui  prétendent  la  rétablir 
ignorent-ils  qu'ils  seraient  renversés  par  elle? 

Une  police  sévèrement  organisée  vous  est  néces- 
saire ;  le  comité  de  sûreté  générale  doit  s'appliquer 
surtout  à  celle  de  Paris,  et  y  employer  au  moins  la 
moitié  de  ses  membres,  au  lieu  de  quatre  seulement 
qui  s'en  occupent. 

Chargez  le  comité  de  s'occuper ,  avec  la  plus 
grande  activité  ,  de  cette  partie  de  gouvernement  : 
vos  deux  comités  travaillent  sans  relâche ,  et  seront 
bientôt  en  état  de  vous  faire  les  deux  rapports  que 
vous  attendez. 

Bounii^  :  Je  demande  la  parole  pour  justifier  les 
comités. 

Pluiiiurs  voix  :  Il  n'en  est  pas  besoin. 

Boudin  :  Couturier  en  parle  bien  à  son  aise.  Je  lui 
demanderai  s'il  a  déjà  eu  le  temps  de  lire  la  volumi- 
neuse dénonciation  de  Lecointre  :  je  parie  qu'il  ne 
l'a  pas  lue.  (On  rit.)  Le  rapport  ne  peut  pas  se  faire 
demain,  car  c'est  demain  que  les  comités  se  réunis- 
sent pour  prendre  un  parti  ;  avant  de  dire  s*il  y  a 
lieu  a  examen,  il  fallait  bien  examiner.  (On  applau- 
diL) 

Pelet  :  Sans  doute  il  faut  épurer  les  autorités, 
remplies  encore  et  des  aristocrates  depuis  1789,  et 
des  nouveaux  aristocrates  qui  voulaient  la  révolution 
pour  eux,  qui  pillaient  pour  s'enrichir,  qui  égor- 
geaient des  générations  entières;  aux  yeux  de  qui 
avoir  de  la  fortune ,  du  talent  et  de  la  reconnais- 
sance, était  un  crime  impardonnable.  Mais  les  trois 
comités  sont  surchargés  par  des  renvois  d'affaires 
particulières  ;  il  faudrait  aussi  que  l'assemblée  créât 
une  commission  particulière  pour  examiner  l'état 
du  gouvernement ,  à  la  place  de  celle  qui  existe,  et 
qui  est  composée  d'un  membre  pris  dans  chaque  co- 
mité. 

L'assemblée,  après  quelques  débats,  passe  à  l'or- 
dre du  jour. 

BoissY-d'ANGLAS,  au  nom  du  comité  de  salut  pu- 
blic :  Je  viens,  au  nom  de  votre  comité  de  salut  pu- 
blic ,  vous  parler  d'un  des  prodiges  de  la  liberté. 
Déjà  le  charme  de  ses  avantages  a  suffi  pour  déter- 
miner douze  mille  étrangers ,  habiles  dans  Part  de 
l'horlogerie ,  à  quitter  le  sol  qui  les  a  vus  naître, 
pour  habiter  celui  de  l'alité.  Déjà  il  est  arrivé  pour 


63 


nn  art  ce  que  vous  pourez  espérer  pour  tous.  Car  si 
notre  exemple  ne  réussît  pas  en  peu  de  temps  à  con- 
Tertiren  masse  les  nations  voisines  à  la  liberté ,  au 
moins  nous  allons  former  un  centre  irrésistible  d*at- 
traction  pour  tous  les  individus  généreux ,  énergi- 
ques, qui  sauront  où  Ton  Jouit  de  ses  bienfaits. 

L'horlogerie  est  un  des  arts  les  plus  perfectionnés 
des  temps  modernes.  C'est  peut-être  celui  où  la 
main-d  œuvre  donne  le  plus  de  valeur  à  la  matière 
première;  et  cet  avantage  suffit  pour  le  rendre  re- 
commandable  à  une  nation  qui  connaît  toutes  les 
bases  sur  lesquelles  elle  doit  asseoir  sa  richesse  et  sa 
prospérité  :  car  tous  n'ignorez  pas  que,  si  l'agricul- 
ture est  le  premier  des  arts,  parce  que  ses  produits 
pourvoient  aux  premiers  besoins  de  l'homme ,  il  en 
faut  une  inlinite  d'autres  à  une  nation  qui  veut  se 
conserver  une  grande  population ,  et  qui  est  accou- 
tumée k  rendre  les  autres  peuples  tributaires  de  son 
génie.  Le  prix  du  travail  par  leauel  des  mains  in- 
dustrieuses donnent  à  la  matière  nrute  mille  formes 
utiles  et  agréables,  est  ce  qui  assure  la  subsistance 
des  trois  septièmes  d^une  nation  à  la  fois  agricole  et 
manufacturière;  et  quand  les  lois  sont  bonnes,  cette 
partie  de  la  population  qui  ne  produit  pas  de  sub- 
sistances alimentaires ,  loin  de  nuire  aux  progrès  de 
l'agriculture ,  stimule  son  activité  par  l'exemple  de 
la  sienne,  et  par  la  certitude  qu'elle  lui  procure  de 
remploi  de  ses  produits. 

Quelques  peuples  voisins  ont  senti  plus  tôt  que 
nous  ces  vérités,  et  se  sont  appliqués  avec  une  ar- 
deur extrême  au  travail  des  produits  industriels. 
Par  eux-mêmes  nous  nous  sommes  souvent  laissé 
dérober  des  arts  nés  ou  perfectionnés  chez  nous ,  et 
qui  ont  été  fleurir  ailleurs.  L*horlogerie  est  de  ce 
nombre.  Des  persécutions  l'avaient  exilée  du  sol 
français.  Depuis,  nous  avons  bien  eu  des  artistes  cé- 
lèbres en  ce  genre ,  mais  ils  ne  nous  ont  donné  que 
des  ouvrages  Gnis  et  chers.  Ce  n'est  pas  là  positive- 
ment ce  qui  suffit  au  commerce  ;  ce  qu'il  demande 
ordinairement,  ce  sont  les  qualités  moyennes,  c'est 
le  bon  marché  ;  et  sous  ces  rapports  nous  sommes 
bien  loin  de  TAngletcrre,  où,  par  les  ressources  in- 

fénieusesdes  procédés  mécaniques  et  de  la  division 
u  travail,  on  est  parvenu  à  pouvoir  livrer  au  prix 
de  1  ffuinée  une  montre  à  secondes  et  à  double 
boîte  d^argent. 

11  se  faitpar  an,  en  Europe, environ  trois  cent  cin- 
quante à  quatre  cent  mille  montres,  indépendam- 
ment des  pendules,  des  cartels  et  des  pièces  recher- 
chées qui  constituent l'hortoeerie  mécanique,  des 
tabatières  à  carillon ,  des  pendules  où  Ton  voit  des 
hommes  ou  des  animaux  indiquer  par  leurs  mouve- 
ments uniformes  les  diverses  divisions  des  temps, etc. 
Tout  ce  travail  peut  occuper  vin^t-quatre  mille 
bras,  et  valoir  60  millions ,  aont  le  sixième  au  plus 
est  le  prix  des  matières  employées.  Eh  bien,  des  cir- 
constances heureuses  peuvent  donner  à  la  France  U 
plus  grande  partie  de  ce  commerce  et  réaliser  des 
espérances  déjà  connues. 

Un  homme  dont  la  gloire  s'est  réfléchie  avec  tant 
d'éclat  sur  son  siècle  et  sur  la  nation  française,  Vol- 
taire, avait  établi ,  il  y  a  vingt  ans ,  à  l'extrémité  de 
notre  territoire,  une  fabrique  d'horlogerie,  et  ce 
grand  homme  semblait,  sur  la  fin  de  sa  vieillesse , 
mettre  sa  gloire  è  naturaliser  parmi  nous  une  por- 
tion si  intéressante  de  l'industrie  de  nos  voisins.  La 
manufacture  de  Feroey  fut  florissante  tant  qu'il  put 
intéresser  l'Europe  entière  à  ses  succès;  elle  cessa 
d'être  avec  lui  :  mais ,  en  1793 ,  des  artistes  et  des 
négociants  en  horlogerie,  persécutés  dans  les  manu- 
factures étrangères,  parce  qu'ils  unissaient  leurs 
vœux  anx  nôtres  pour  les  succèa  de  )a  liberté,  quit- 
tèrent Genève ,  Neuohttel  et  Loadrea  »  et  se  retiré- 


rent  à  Besançon;  ils  j  fiirent  accntllliifar  mm  «rt* 
lègues  Bassal  et  Bernard  (  de  Saintes).  Ceni-a  letr 
assurèrent  quelques  avances  ;  une  maîaon  aatioiitk 
fut  vendue  a  quelques-uns  d'entre  eux ,  et  des  in- 
demnités pour  frais  de  voyajse  fareni  payées  tus 
premiers  des  élèves  qui  arrivèrent. 

Besançon  avait  été  choisi  par  les  artlslet«mHn(- 
mes.  Ils  voyaient  des  avantages  à  y  fixer  rétablisse- 
ment, et  entre  autres  celui  ciu  voisinace  deNauohâ- 
tel,  d'où  ils  attiraient  successivement  les  artistes»  «C 
d'où  ils  tiraient  des  secours  nécessaires  i  une  maiMi» 
facture  qui  ne  pouvait  encore  fabriquer  aasn  m 
grand  pour  être  tout  à  lait  indépendante. 

Ceux  qui  savent  ce  que  c*est  qu  une  manu&iclttm, 
ceux  qui  ont  étudié  celle  de  Lyon  et  des  grandes 
villes  commerçantes  de  l'Europe,  sentiront  eombien 
il  est  avantageux  à  la  produeUon  qne  tous  les  indi- 
vidus qui  fcMuieut  un  nouvel  établissement  soient 
réunis  dans  la  même  ville.  U  fiiut  même,  s'il  se  peut, 
qu'ils  soient  tous  dans  un  même  quartier,  et,  ^il  est 
possible  encore,  les  uns  près  des  sutres  dans  1«b 
mêmes  maisons.  Cette  proximité  fournit  aux  entra» 
preneurs  la  faculté  de  mieux  diviser  le  travail;  sut 
ouvriers,  celle  de  s'aider  en  mille  eiroonstanees;  al 
la  vérité  que  les  grands  succès  d'une  manufactura 
tiennent  è  tous  ces  petits  détails  n'est  plus  ienorés 
de  tous  ceux  qui  sont  véritablement  versés  dans  la 
j;)ralique  des  établissements  d'industrie. 

Slais ,  malgré  la  protection  accordée  à  la  eolonis 
naissante  par  Bassal  et  Bernard ,  elle  eut  des  eom* 
mencements  difficiles.  II  fallut  que  les  ohebde  tt 
manufacture  fissent  de  fréquents  voysges  s  Paris , 
pour  V  solliciter  de  la  oommisâion  d'agriculture  des 
arrêta  favorables.  Le  nombre  des  ouvriers  augmen* 
tant,  la  commission  demanda  pour  eux  dea  secours 
pécuniaires  bornés  è  60,000  liv.,  la  cohcesston  pett«> 
dant  quinze  années,  et  sans  loyer,  d'une  maison  na- 
tionale, pour  y  loger  au  moins  cinquante  artistes  « 
et  l'engagement  de  la  part  du  gouvernement  de  se 
charger  des  ouvrages,  à  prix  d'experts,  pendant 
trois  ans,  lorsque  les  fabricants  n'en  trouveront  pss 
l'emploi. 

Cette  assistance  de  la  commission  d'agriaultnre 
n'a  pas  produit  de  grands  effets.  Les  agents  mili- 
taires se  sont  refus£  à  évacuer  provisoirement  un 
couvent  de  ci-devant  Bénédictins,  qui  avait  éls 
choisi  pour  l'emplacement  à  accorder  à  eea  nou- 
veaux naturalisés,  parce  que  ce  couvent  contieni 
des  fourrages  que  I  on  pouvait  néanmoins  aiséme»! 
placer  ailleurs. 

Le  comité  des  finances  n*a  encore  rien  fait  sor 
la  demande  que  le  comité  d'agriculture  lui  a  faite  pin* 
sieurs  fois  relativement  à  celte  propriété  nationale. 

Ces  contre-temps  découragent  les  meilleurs  artis- 
tes, au  nombre  desquels  on  compte  un  Autière  la 
père,  connu  à  Londres  même  par  ses  talents,  inveii^ 
teur  des  recouvrements  de  boîtes  et  des  charnières 
perdues,  et  l'un  des  principaux  chefs  de  la  manufac- 
ture de  Voltaire;  son  gendre,  artiste  célèbre  dans  le 
genre  des  répétitions,  des  montres  à  équatioui  et  des 
montres  à  bagues;  enfin  un  Lemaira,  également  es- 
timé pour  l'invention  et  pour  Texéoutioo ,  dont  la 
genre  est  l'horlogerie  automatique. 

Cependant  une  foule  d'autres  artistes  des  mana- 
factures  étrangères ,  disposés  à  venir  Joindre  en 
France  leurs  amis,  n'attendent ,  pour  partir,  qun 
d'apprendre  que  ceux  qui  les  ont  précédés  sont  deli* 
vrés  des  entraves  laissées  jusqu'ici  à  leur  établisse- 
ment. Cette  dernière  considération  suffit  pour  faire 
sentir  l'importance  de  lever  ces  entraves.  C'est  à  U 
célérité  que  la  Convention  nationale  y  mettra  qite 
tient  le  succès  de  la  plus  belle  manufacture  doAt  011 
puisse  enrichir  le  territoire  de  ta  république.  . 


68 


Il  fauiassttrer  Vêpprovision  neme&t  en  subsistanceg 
ilii  dôme  oeotf  ou? rkrs  qui  sont  a  Betançon  et  de 
ItimfiiBillAi»  La  géoe  qy'on  épronve  dans  le  pays 
MT  em  a?Me  lea  m  regarder  itëfiivorableaient  par 
WêiàHi^mêSfïpti leaaeeusent  à  tort  do  remchëris^ 
•efléftt  des  ttf  res.  Cest  é  votiê  â  eitirper  dès  sa  uaiS' 
ttneecégerfliede  mésfntellijffetice,  qui  peut  devenir 
reneste,  et  qui  éât  au  moins  très^impoliuqué. 

llconTiendra  peut-^tre.  pour  attacher  les  indigè- 
i/t^  auï  GoIoDa«  d'astreindre  eeui-ci  k  prendre  des 
Aèf  ea  antre  las  enlaiita  des  dtfenseurs  de  la  patrie, 
eîoé  les  ahaisîr  daM  Beaaoçoo. 
,  Il  acra  peul-ltre  utile  da  larer  la  défense  d*expor- 
Mian  iur  lliorlogarie  ^  dapnia  le  mooTeaient  brut 
Jinqu'à  la  moBtreeflibotr^,eaf  on  ne  peut  sortir 
M^iardtRii  que  lesaKmremeiitsfinis.L*exportation 
iea  moof  emettts  bmts  â  été  prohibée ,  parce  qu'on 
i  em  par  là  pgnèt  la  main-d'ceuvre  de  finissage,  et 
K  défense  de  sortir  les  montres  emboîtées  a  été  faite 
Mtar  retenir  les  matières  d'or  et  d'ar^t,  comme  si 
Qtk  poutait  Cure  le  cemmeree  ettériaor  avec  cette 
èiiirava. 

ÛB  pourra  aeti? «  la  Urkatlon  par  des  prioMa 
dTauoouragentBt  délivréeeè  rentrapraneor  qui  oo- 
attpera  le  ploa  d'oofriers ,  et  qui  lirrera  de  owil- 
laoTM  qoalUéB. 

Enfin,  il  laudra  favoriser  les  établissements  d'ate 
ttaia  aeeendaîrea  pour  leachalaettes,  les  ressorts^  les 
fan  duûa,  laa  cadrans,  les  limes  et  les  ootils. 

Teulea  les  mesures  profitables  à  la  nouvelle  ma'- 
MrfMnre  ne  doivent  être  prises  qu'après  un  examen 
approfondi  de  Tétat  dea  enoses.  La  ConTention  ne 
pifiit  ffom  fixer  immédiatement  son  attention  sur 
ces  détails:  il  faut  qu'elle  en  remette  le  soin  à  une 
entOfité  intermédiaire  »  assez  grande  pour  arrêter 
provisoirement  tout  ce  qui  paraîtra  bon  et  utile ,  et 
petir  ! eversnr-fend^mp  les  obstacles  qui  pourraient 
résnlter  de  la  négligence  ou  de  l'opposition  des  au- 
torités secondaires. 

Bu  conséquence,  votre  comité  de  salut  public 
▼eiiapropMad'aftvoverà  Besançoo  un  membre  de 
la  €eBvciitMB,  revéln  dea  mêmes  pouvoirs  que  ceux 
^i  éeat  délégiiëa  aux  représentants  en  mission  dans 

idépariemenla. 

Celle  mesore  sera  nû  signe  éclatant  de  la  sollici- 
tude nationale  en  foveur  de  la  nouvelle  colonie. 
BMeairrasita  h»  indécis  daoa  la  résolution  de  venir 
en  fMmec;  elle  aar»  nême  eneourageante  pont  Vn^ 
niversalité  des  arts;  car  la  protection  accoraée  à  l'un 
lait  aisément  coi^ecturer  ce  que  les  autres  sont  fbn^ 
des  a  espérer  dans  des  circonstances  pareilles. 

Votre  collègue  examinera  l'esprit  public  de  la 
commune  et  de  la  eofonie;  if  assurera  les  subsistan- 
ces; il  statuera  provisoirement  sur  les  demandes  en' 
caiMjBsîau  iTeaàptaeeflieâlseatiooaax;  il  appréciera 
leéoirteiiefieed^  dive^  ^res  d'enconragemenis 
à  igioréee  t  enfla  it  (ktmn  une  nouvelle  vie  â  la 
faArtqdei  ^tt  tés  premiers  succès  assurés,  tous 
pourrez  ^Ottsreposer  sur  la  seule  influence  de  la  li- 
berté pour  gtnmtlf'  ft  la  f  raûce  la  j^rmanence  de  sa 
prospériléw 

Voici  le  projet  de  décret  qui  vous  est  proposé. 
-  tArLl«'.Lefapr4scDUntdttptopla  Calé»,  aetueUe- 
ment  eo  miition  dans  le  département  de  la  Côte-d*Or,  se 
rendra  sar-le-champ  à  Besançon,  poar  y  prendre  toales 
les  Dcsarw  pvapasa  à  AiverHar  le»  proerè»  «a  la  fMrique 
éThoriogerie,  et  à  la  délivrer  de  ses  entraves. 

•IL  Usera  ceiêtii  de  loua  les  neuvoirs  dél4gii4»  aux  re^ 
prlMOUHa  da  peuple  dans  les  dépaftemeots. 

J^tlL  t||  rendra  oattple  da  ses  opérations  an  comilé  de 
adtt  fm^  ft  ée  mmm  I»  e^mlté  d'agrlcollure  et  des 
surMi 

•  IV*  Il  ait  paraUlcmaat  chargé  d'entratenir  en  acll^ 


£ 


dans  les  départements  da  Donbs  et  autres  enriroanaats» 
la»  forges  et  foarocaux  qal  alimentenc  les  fonderies  de  ea- 
Bon,  de  fer  et  manufactures  drames.  » 
Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  Un  membre  du  comité  de  législation  propoiet  et  le 
ConTention  adopte  le  projet  de  décret  suivant  s 

f  La  Gonfanllon  nationale,  après  avoir  entends  le  rap* 
port  de  son  comité  de  législation  sur  la  pétition  de  la  eom« 
arane  de  Nariionne,  tendant  à  être  déchargée  d'une  late 
de  100,000  lirres  imposée  sur  elle  par  arrêté  du  repré^ 
amant  do  peuple  Mllbaud,  du  7  ventôse,  à  cause  du 
relard  des  citoyens  d*obéir  à  une  réquisition  pour  le  char^ 
gtmeni  de  fonrrages  dcstiaés  à  Tarroée  des  PtrénéesK)rfe» 
taies; 

t  Considérant  que,  «I  Is  nécessité  pressante  d'accéléré? 
rtypération  que  commandait  Tapro vision netnent  de  Par- 
Ibée  jmlifie  pleinement  la  mesure  prise  par  le  représen- 
tant du  peuple,  d*uD  autre cOlé,  le  très-dburt  délai  entre 
la  proclamation  qui  contenait  la  réquisition  et  le  moment 
de  reiécntion  ;  Terapressement  qu'ont  mis  ensuite  les  ci« 
toyens  de  Narbenne  à  faire  lé  travail  qui  leur  a  été  de« 
mandé;  les  preuves  écrites  multipliées  qu'apporte  celle 
commune  du  dévouement  de  ses  habitants  à  la  cause  de 
la  liberté,  et  des  sacrifiées  qu'ils  ont  faits  potir  en  assurer 
le  succès  :  enfin ,  les  témoignages  uniformes  des  représen* 
tâois  du  peuple  envoyés  en  mission  dans  te  département  de 
TAude,  font  disparaître  tout  soupçon  de  mauvaise  volonté 
delà  part  des  citoyens  de  Narboùne,  prouvent  leur  patrio- 
tisme, le  bon  esprit  qui  lés  anima»  et  là  Justice  de  leur 
deinande  ; 

c  Décharge  la  commune  de  Itarbdnne  de  fa  taaa  da 
100,000  livres  qui  est  portée  dans  rarrété  da  rapréseolant 
du  peuple  Slilhaud,  du  1  veatose  i 

fDéerèlequeee  qw  e»  a  été  perça  lai  sera  rfmil,é** 
duction  faite  néanmoins  de  la  soosaie  de  8,000  livres, 
employées  aai  frais  de»  speetaele»  patriotiqoes  éooaé»  au 
peôplaw 

t  ht  pfésent  décret  ne  sera  point  Imprimé  ;  Il  sera 
adressé  manaseric  à  la  maaidpalité  de  Narboane.  « 

Plosieufs  pétitionnaires  sont  entendus» 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures* 

SiABGB  Ûa  d  MM^mEê 

ttirtaoe  s  Je  demanda  la  parak  poor  oot  aMMioa  é>MiM 
dre. 

Citoyens,  la  loi  qui  abolit  le  raaitBBnm  «ppeMe  béate- 
ment la  bonne  foi  sur  cette  terre  tourmentée  depuis  omq 
ans  paf  des  SgitatiOfià  Vlolémes  é(  couUnuelles;  elie  se 
fixera  parmi  nous  cette  têrtu  tiitélairé  des  républiques; 
elle  s'y  aOTermira  en  foulant  aUX  pieds  le  vice  enfin  terrassé  : 
j'en  accepte  Tauf  ura  ave»  Iran  spart,  et  repeasse  de  mon 
esprk  lOMle  loqoiéliide  el  tonte  Mée  aonrrairR  Oal»  le 
cultivateur  et  le  négociant.  Sert  de  la  coaaaiiee  d^see  n»» 
lion  libre,  et  guidés  par  cette  vertu  républicaine,  agiront 
avec  nous  en  frêit^.  Le  marchand  se  ointtîntera  du  gain 
qui  saflira  &  réfitretiétt  de  sOn  commerce.  L'artisan .  Pou* 
vrier,  l'homme  de  pétrie  régleront  leur  salaire  sur  les  bc' 
aoÎBS,  et  non  sor  vne  oupidité  fofle  et  effrénée  ;  l'adminis- 
Iratk»  distribuera  à  teaips  le»  seeaers  nécessulres  et  or- 
donnés I  elle  rendra  vae  justice  exacte  et  prmnpte  tnx  ge ih 
dont  elle  »'est  déclarée  débitrice  s  c'est  ainsi  que  to(*s  au- 
ront concouru  au  bonheur  de  tons  ?  tef  est  le  vfsf ,  mais 
l'uuique  système  de  la  prospérité  publiqtte;  chacmi ,  se 
contentant  pour  le  présemd'uaa  eaisteitee  soppertable, 
trouvera  des  jouissances  dans  le  salut  da  la  patiia,  amoié 
par  nos  victoires  et  consolidé  par  notre  union. 

Llnsertion  au  Bulletin  est  décrétée 

Rfcaaaai  an  aam  de  eamVié  de  salaf  peftilé  s  Un  étéae* 
meni  désastreux  vient  #er  frapper  là  vffte  de  Léndae. 

L*drsenal  de  cette  piscé  à  sauté  eu  psftie»  lé  ^0  frimaire, 
à  hait  heures  nu  quart  du  macku  PinsliilrS  maisons  oai 
été  renversés»  mi  ^Aâmmât^VUtUAMilM  dé  Cette  via- 
leeteaipMoii; 


64 


On  Ifoore  encore  si  ce  malheur  est  le  résultat  de  quelque 
trahison,  ou  s*ii  ne  doit  être  aitribué  qu*à  des  causes  ordi- 
naires. On  Tait  toutes  les  recherches  qui  peuvent  conduire 
û  découvrir  la  vérité. 

Par  un  de  ces  hasards  qu*on  ne  peut  expliquer,  deux, 
magasins  à  poudre  contigus  ù  l'arsenal  n'ont  point  sauté, 
n'ont  pas  même  été  endommagés. 

Une  certaine  quantité  de  munitions  de  guerre  et  d'au- 
tres objets  nécessaires  à  la  place  ont  été  incendiés  ou  alté- 
rés, et  plusieurs  habitants  ont  vu  détruire,  avec  leurs 
maisons,  leurs  meubles  et  eflels. 

Les  citoyens  de  Landau,  la  garnison,  les  autorités  civiles 
et  militaires,  les  habitants  des  communes  voisines  ont  fait, 
dans  ces  malheureuses  circonstances,  tout  ce  qu'on  pou- 
vait attendre  de  leur  courage  et  de  leur  civisme.  Les  se- 
cours ont  été  prompts,  et  les  travaux  ont  été  poussés  avec 
une  inftiigahle  activité.  En  peu  de  temps  on  est  parvenu  à 
arrêter  et  à  éteindre  un  incendie  qui  pouvait  avoir  les 
suites  les  plus  funestes. 

Le  dévouement  républicain  y  a  été  porté  au  plus  haut 
degré,  et  chacun  a  paru  oublier  ses  pertes  particulières 
pour  ne  s'occuper  que  de  la  chose  publique  et  épargner 
des  pertes  à  la  patrie. 

Le  représeotani  du  peuple  Féraud  s'est  rendu  à  Lan- 
dau aussitôt  qu'il  a  été  instruit  de  cet  événement.  Il  a  pris 
des  mesures  pour  le  soulagement  des  blessés  et  de  tous 
ceux  qui  ont  souffert  des  suites  de  l'explosion,  et  la  répa- 
ration des  maisons  renversées  ou  endommagées.  Mais  ces 
mesures  ne  sont  que  provisoires;  il  faut  que  vous  en  pre- 
niei  de  plus  étendues,  et  11  n'appartient  qu'à  vous  seuls 
de  réparer  les  pertes  publiques  et  particulières,  et  d'arrê- 
ter la  misère  dont  plusieurs  citoyens  de  cette  ville  sont 
menacés. 

Il  a  péri  plusieurs  personnes  dans  ce  désastre  ;  mais  le 
nombre  n'en  est  pas  aussi  grand  qu'on  devait  le  craindre. 
Jusqu'à  présent  les  procès-verbaux  dressés  le  font  monter 
à  dix  tués  et  à  vingt-trois  blessés. 

Au  surplus,  notre  collègue  Féraud  emploie  tous  les 
moyens  possibles  pour  découvrir  les  causes  de  ce  désastre. 

Si  c'est  une  trahison ,  elle  n'aura  pas  les  suites  qu'en 
attendaient  les  coulre-révolutionnaires,  car  il  reste  à  Lan- 
dau tous  les  moyens  de  défense  qui  lui  sont  nécessaires 
dans  ce  moment,  et  des  ordres  sont  donnés  pour  remplacer 
ce  qui  a  été  détruit. 

Si  c'est  le  résultat  de  quelque  négligence  ou  de  quel- 
que imprudence,  il  faut  qu'en  réparant  tous  les  dommages 
on  fasse  punir  sévèrement  ceux  qui,  par  leur  incurie 
dans  le  service  dont  Ils  étaient  chargés,  ont  ainsi  compro- 
mis le  salut  d'une  place  importante,  et  causé  une  grande 
perle  à  la  république. 

Voici  le  projet  de  décret  x 

t  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  de  salut  public  sur  l'explosion  de  l'ar- 
senal de  Landau,  décrète  ce  qui  suit: 

•  Art.  I*'.  La  Convention  nationale  approuve  les  arrêtés 
pris  par  le  représentant  du  peuple  Féraud,  relativement  à 
l'explosion  de  Tarsenal  de  Landau. 

c  II.  Il  sera  pris  les  mesures  les  plus  actives  pour  réparer 
promplement  les  dommages  occasionnés  par  cette  explo- 
sion aux  édifices  publics  et  particuliers. 

«  III.  Les  comités  de  salut  public  et  des  secours  publics 
présenteront ,  dans  le  plus  bref  délai ,  les  moyens  d'accor- 
der des  indemnités  et  des  secours  à  ceux  qui  ont  éprouvé 
des  pertes,  aux  blessés,  aux  veuves  et  aux  enfiints  de  ceux 
qui  ont  péri  par  celte  explosion. 

•IV.  Il  sera  envoyé  un  représentant  du  peuple  à  Landau,  à 
l'effet  de  surveiller  l'exécution  des  décrets  de  la  Convention 
relatifs  à  cet  événement,  et  d'en  rechercher  les  causes  et 
les  auteurs.  ■ 

Dbntzbl  :  Je  demande  que  l'assemblée  applique  à  ceux 
qui  ont  souffert  de  l'explosion  de  Landau  la  loi  faite  pour 
ceux  qui  ont  souffert  de  celle  de  Grenelle. 

Sur  Tobservation  du  rapporteur,  que  le  projet  de  décret 
prê^nté  n'est  que  provisoire,  l'assemblée  renvoie  la  pro- 
position de  Dentzel  au  comité  de  salut  public 

TopsxRT,  au  nom  du  comité  de  la  marine  :  Qtoyens»  il 


est  parvenu  k  ?os  eomités  de  marine  et  de  oommeree  mia 
pétition  des  pilotes  lamaneurs  de  la  rivière  de  Seine,  qnl 
réclament  une  augmentation  de  salaire.  Ces  dtoyens m» 
présentent  que  le  tarif  du  i"  mal  1783  (vieux  style),  fixé 
par  le  ci-devant  tribunal  d'amirauté  de  Quilleboeuf ,  n'a 
pour  but  que  de  fixer  l'égalité  des  sommes  dues  à  chaque 
pilote,  soit  que  le  navire  monte  ou  descende  la  rivière,  cl 
que  le  surplus  n'est  qu'un  résumé  de  celui  qui  datait  de 
plusieurs  siècles. 

Etant  obligés  de  vivre  toute  Tannée  hors  de  leurs  do- 
miciles, soii  pour  attendre  les  navires  au  Havre,  à  Honflenr 
ou  en  mer,  afin  de  les  conduire  dans  cette  rivière,  soit  pour 
les  attendre  &  la  Meilleraie  ou  à  Vlllequier,  afin  de  les  con- 
duire en  mer,  chacun  sait  combien  les  sables  qui  bouchent, 
pour  ainsi  dire,  le  passage  de  Quillebœuf,  font  éprouver 
de  retard  aux  opérations  de  ces  citoyens,  et  les  mettent 
souvent  dans  le  cas  de  passer  quinie  jours,  quelquefois 
même  un  ou  deui  mois,  à  bord  de  chaque  navire,  non 
compris  le  temps  qu'ils  passent  à  les  attendre,  sans  recevoir 
autre  chose  que  leurs  salaires  ordinaires;  ils  observent  en 
outre  que  le  fret  des  navires  et  tous  les  appointements  des 
marins  sont  quintuplés.  C*est  d'après  ces  considérationt 
que  vos  comités  de  marine  et  de  commerce  réunis  ont 
pensé  unanimement  que  la  réclamation  des  pilotes  lama- 
neurs de  la  rivière  de  Seine  est  fondée,  et  qu'il  est  impos- 
sible que  ces  citoyens  puissent  faire  subsister  leurs  ftmil- 
les  avec  nu  traitement  a  ussi  modique  ;  en  conséquence,  vos 
comités  m'ont  chargé  de  vous  proposer  le  projet  de  décret 
suivant  : 

•  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  ses  comités  de  marine,  colonies  et  commerce  réu- 
nis décrète  que  le  salaire  des  pilotes  lamaneurs  de  la  ri- 
vière de  Seine,  fixépar  un  tarif  du  mois  de  mai  4783  (vieux 
style),  sera  provisoirement  augmenté  de  moitié,  et  sup- 
porté par  tous  les  bâtiments  de  la  république  indistincte- 
ment, soit  qu'ils  appartiennent  à  la  nation  ou  au  com- 
merce, et  par  les  bâtiments  étrangers,  quand  même  ils 
seraient  chargés  pour  le  compte  de  la  république. 

•  L'insertion  du  présent  décret  an  Bulletin  tiendra  toi 
de  promulgation.  ■ 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

(La  suite  demtin») 

N,  B,  Dans  la  séance  du  7,  Merlin  (de  Douai) ,  au  nom 
des  trois  comités,  a  fait  le  rapport  sur  la  dénonciation  de 
Laurent  Lecointre,  et  déclaré  qu'ils  estiment  qu'il  n'y  a 
pas  lieu  à  examen  contre  Voulland,  Amar  et  David,  et 
qu'il  y  a  lieu  à  examen  contre  fiillaud-Varennes ,  Collot- 
d'Herbois,  Darère  et  Vadicr. 

Une  commission  de  vingt  et  un  membres  sera  nommée 
dans  une  séance  extraordinaire,  convoquée  pour  le  soir. 


LIVRES  DIVERS. 

La  Loire  vengée ,  ou  Becneil  kiitoriqoe  des  crimes  de 
Carrier  et  du  comité  révolationnaire  de  Nantes,  «Tec  les  dé- 
tails de  la  procédure ,  première  partie,  in-S«.  Pris  :  S  liv. 
i  0  s.,  franc  de  port.  A  Paris,  ches  Veuraot,  libraire,  cloître 
Honoré. 

Nota,  Le  second  volume  paraîtra  incessamment. 
Le  portrait  de  Carrier  se  vend  séparément  iO  sous. 


Paymnenlt  à  la  IrétorerU  naiionaU. 

Le  payement  du  perpémel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 
mière mois;  Il  sera  fait  A  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscriptions  au.  grand  livra.  Celui  pour  les  rentes  viagèiet 
est  de  huit  mois  vingt  et  un  joun  de  faimée  1793  (vieux 
style). 


GAZETTE  NATIONALE  «a  LE  lONITEUR  UNIVERSEL. 

IP  99.  Nonidi  9  Nitosb,  Van  3«.  (Lundi  29  Dbcbhbrb  1794 ,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

éTATS^^UNlS  D'AMERIQUE. 

BalUmore^  U  10  oeiobn.  «—  Des  hommes  mal  iostrnlu 
00  mallotentioapés  avalent  répanda  la  bruit  que  la  fièvra 
^une  foisait  de  (prands  rarages  à  Baltimore.  Le  comité  de 
iaiilé  de  ctlte  Tille  a  ftilt  des  recherches  à  ce  sujet.  U  vient 
de  déclarer  quil  n'y  a  même  aucmi  indice  de  maladie  con- 
tagieuse dans  cette  yilie,  et  que  les  maladies  dk>nt  quelcioes 
personnes  sont  atcaquéft  soat  ordinaires  dans  la  saison 


Les  dlrtnes  Soelécés  établies  en  Amérique  s'empressent, 
dtpols  rinsnrreolloo  excitée  dans  la  Pensylvaole  ocdden* 
|»e,  de  montrer  leur  attachement  au  flonvemement  de  l'U- 
nloti.  La  Société  répobllcaine  établie  a  Baltimore  rient  de 
prendre  4  l^nlanimtté  les  résolutions  sutraotes  x 


cL* 


de  la  fkH:léCé  est  que  toute  espèce  d'entreprise 
sr  par  In  Corée  à  reiéention  des  lois  constitua 


tlenneUes  eetdanierevse  pour  la  liberté. 

«  Bile  pense  qne  TentrepriaB  qui  a  eu  lieu  dans  In  partie 
occidentale  de  la  Pensyivanle,  pour  s'opposer  à  la  taxe  sur 
1^  eau<-de-vlet  mérite  d'élre  désapprouvée  et  censurée ,  et 
^elle  tend  à  renvener  entièrement  tous  les  premiers  pou^- 
fnirt  du  gonteMement,  et  A  produire  ranarcbie  et  la  guerre 


«  Qm  voftm  opposmon  é  eal  acte»  eieepté  celle  qui  peut 
«voir  llea  par  remontrance  ou  par  le  recours  A  une  autorité 
constitntlonnelle  •  est  également  digne  de  oensnrs  et  dange- 


<  Bnfin  elle  établit  que  la  conduite  do  président  des  BtaU- 
Onto  est  prudente  et  sage»  et  mérite  l'approbation  de  In 
Boci^é*  s 

AIXEMA6NE. 

Jlfvvlad,  h  fi  âéeembre.  —  La  graiide  armée  impériale 
prendra  les  qnartiers  d'hiver  de  Weizlaer,  de  Moetabans 
m  de  Ifassau-DIetz.  H  ne  restera  sur  les  bords  do  Rhin  que 
des  postes  avancés,  qui  seront  répartis  de  la  manière  sul- 


L'aile  droite  s'étendra  d'Emmerlch  à  Mulheim;  le  centre , 
depuis  SIeiigbonrg,  par  Autkircà,  Hakenbonrg,  Montabans 
et  IfasBu,  Jusqu'à  Wetsiaer  ;  et  l'aile  gniche,  depuis  Weti- 
lacr  Jusqu'à  Mayeooe. 

—  La  renommée  de  In  bonne  oondulte  des  Français  ra- 
mène dans  leurs  foyers  un  grand  nombre  d'habitants  de 
Trêves  et  de  Coblentz.  Plus  de  cent  familles  de  Cobleniz  y 
sont  rentrées  successivement,  et  Trêves  s'est  repeuplé. 

•—  Des  flibrleants  CBberfeld ,  qui  ont  un  grand  nombre 
d'ouvriers  à  Jullers,  ont  envoyé  des  agents  aui  représentants 
dn  peuple  auprès  de  l'armée  fttmcelse,  ponr  leur  faire  di- 
verses demandes.  Ces  agents  se  louent  beanooop  de  la  ma* 
Bièra  dont  ils  ont  été  accoeUlla. 

— On  discute  &  la  diète  du  cercle  de  Franoonle  les  moyen» 
de  pacification  à  adopter.  11  va  être  fait  à  ce  sujet  par  le 
eeftie  de  fortes  représentations  à  la  diète  de  l'Empire.  Le 
cercle  de  Franconle  doit  insister  expressément  pour  que^  dès 
le  moment  aetod,  on  cherche  à  procurer  ua  armistice  au 
corps  germnnlqoe.  Ceux  de  Souabe,  de  Bavièra  e%dn  Hant> 
BBIn,  ont  pria  les  mémea  réeolutions. 

HOLLA^IDB. 

ÎS  Bmfêt  le  10  âécemire.  —  Le  quartier  général  de  Tar* 
mée  angio-honandalse  est  toujours  à  Bruheim. 

—  Le  due  d^foili  vient  d'être  rappelé  en  Anglclerre.  U 
eut  peasé  le  9  de  oe  mots  par  cette  vilir.  Il  alogé  chez  le  lord 
Baint-Helenst  ambassadeur  britannique,  et  a  continué  le 
lendemain  sa  roule  pour  liondres.  On  ne  croit  pas  qu'il  re- 
vienne prendre  le  commandement  des  troupes  anglaises^ 
q^l  a  été  confié  en  son  absence  au  général  firsUne.  Il  pa-' 
ta|t  que  le  général  Valmoden  commandera  les  tfoupes  hes* 
iMiM  et  faanovrienoes. 

^La  ville  de  Delfk  vient  d'éprouver  une  grande  agitation. 
La  BontmolBle  a  ttinté  l'entrée  de  la  Ttfle  mot  bÔpltMa 
«glaiitll  m foBa  lia  logar  à  reMériiBff. 

gtSéH^  —  TbmeX 


—  On  élève  quelques  batteries  pour  empêcher  les  Pran* 
cals  de  passer  le  RhUi  du  côté  de  Lobeth. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Bent aboie» 
SUITB  DB  LA  SBANCB  DU  6  IflYOSB. 

GossuiN,  au  nom  du  oomité  militaire  :  Citoyens, 
il  se  commet  journellement  dans  Paris  et  ses  envi- 
rons des  Tols  et  des  assassinats  qu*il  est  d'une  bonne 
rlice  de  faire  cesser;  votre  comité  militaire  aurait 
se  reprocher  s'il  ne  vous  proposait  des  moyens 
propres  à  assurer  la  liberté  du  commerce,  la  sûreté 
des  citoyens  et  rarrivëe  des  subsistances.  La  mal- 
veillance exerce  plus  particulièrement  ses  ravaees 
iu  centre  du  gouvernement ,  et  c>st  ce  qui  doit 
promptement  nxer  vos  regards  ;  il  est  druiontré  à 
votre  comité  que  la  geodarnierie  nationale  à  cheval, 
de  résidence  à  Paris  et  dans  les  districts  voisins,  est 
insuffisante  pour  faire  les  tournées  et  patrouilles  que 
lui  impose  la  loi  de  1791  ;  d*ua  autre  côt4^,  les  auto- 
rités constituées  emploient  cette  troupe  pour  des 
commissions  étrangères  à  leur  service,  en  sorte  que 
son  temps  est  inutilement  absorbé.  La  république, 
en  soldant  la  |;endarmerie,  exige  d*elle  qu  elle  rem* 
plisse  ses  véritables  fonctions,  il  est  donc  indispen- 
sable, citoyens,  d'activer  cette  force  armée,  de  Taug- 
menter,  de  lui  donner  une  orgaiiisation  et  des 
instructions  qui  règlent  Tordre  et  les  détails  de  son 
service,  de  manière  à  ce  que  la  voie  publique  et  les 
propriétés  soient  parfaitement  en  sûreté.  * 

votre  comité  s  occupe  d*un  travail  sur  une  meil- 
leure organisation,  et  sur  un  nouveau  mode  de  ser- 
vice des  divisions  de  gendarmerie,  tant  à  pied  qu*à 
cheval,  établies  dans  les  différents  point  de  la  répu- 
blique. Vous  trouverez  juste  que  les  citoyens  qui  Ja 
composent  soient  dégagés  de  la  dure  et  dangereuse 
obligation  de  se  monter  et  de  s'équiper  à  leurs  frais. 
Celui  qui  est  doué  des  meilleures  dispositions  pour 
servir  son  pays  a  droit  d'en  attendre  des  ressources. 
Votre  comité  vous  proposera  cette  mesure  que  l'in- 
térêt public  vous  commande. 

Vous  avel  à  proximité  des  hommes  et  des  che- 
vaux, il  faut  les  utiliser;  les  sections  de  cette  vaste 
cité,  dont  le  zèle  pour  le  salut  de  la  patrie  ne  s'est 
jamais  démenti,  s'occuperont  sûrement ,  iMir  la 
choix  des  citoyens  appelés  à  renforcer  la  genoarme- 
rie  de  Paris,  de  répondre  bien  vite  à  l'entière  con- 
fiance que  vous  leur  accordez.  Des  hommes  probes, 
habitués  aux  localités ,  rempliront  avec  succès  les 
vues  utiles  qui  vous  animent,  et  vous  aurez  la  cer- 
titude enfin  que  vos  immenses  travaux  ne  seront 
plus  interrompus  par  des  récits  déchirants  dont  votre 
comité  avait  malheureusement  à  vous  entretenir. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

(  La  CouTenUon  nationale,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  son  comité  militaire,  décrète  : 

I  Art.  1**.  La  gendarmerie  à  cherat,  faisant  le  aenrlce  dans 
Paris  et  ses  enrirons,  sera  augmentée. 

t  IL  Chaque  secdoo  de  Paris  fera  choit,  dans  son  arfon* 
dissement,  d'ici  au  13  de  oe  mois,  de  Shi  citoyens  sains  et 
robustes,  recommandatrle»  par  leur  républicanisme  et  leurs 
services  militaires,  ayant  l'exercice  du  cheral,  pour  renfor- 
cer el  faire  parUe  de  ladite  gendarmerie  distant  dans  lln- 
térlenr  de  cette  conuntuie. 

€  m.  Les  brigades  de  gndarmerle  nationale  établies  dans 


66 


let  dépiflemenu  de  Paris,  de  Seineet-Hanie  et  Sdne-et- 
Oise»  seront  mises  sur-le-champ  au  complet. 

t  IV.  Il  en  sera  créé  quarante  noufclles,  qui  seront  pro- 
Y)solrement  attachées  à  la  première  division,  composée  des 
trois  dépariemeDU  d-dessns  ;  elles  seront  réparties  dans  les 
dtolriets  de  Frandade,  Bourg-l'Egalité,  Cortieil,  Versailles. 
SaintrGermain.Pontoise,  Gooesse,  Meaux  elMelun. 

<  V.  La  commission  de  ('ormisation  et  du  mourement 
des  armées  de  terre  Indiquera  le  nombre  d*honunes  A  pren- 
dre dans  les  différenU  dépôts  de  troupes  A  cheTal  pour  for- 
mer lesdltes  brigades,  et  compléter  celles  existantes. 

f  VI  Les  conseils  d'administration  desdlU  dépôts  choisi- 
ront les  militaires  qui  réuniront  les  conditions  prescrites 
pir  l'article  II. 

I  VII.  Les  officiers  que  nécessite  cette  augmentation  de 
gendarmerie  seront  tous  nommés,  pour  cette  rois  seulement, 
par  la  Convention  nationale,  sur  la  présentation  du  comité 
de  salut  public  ;  et  les  sous-officiers  pris  parmi  d'anciens 
militaires  de  ce  grade,  par  ledU  comité. 

«  VIII.  Les  sous-officiers  et  gendarmes  destinés  A  com- 
pléter cette  force  armée  seront  montés,  équipés,  hahlilés  et 
armés  aux  frais  de  la  répuBllque,  suivant  le  mode  prescrit 
par  les  lois  rendues  A  cet  égard  pour  les  troupes  A  cheval. 

t  IX.  Les  chevaux  des  élèves  du  camp  de  Mars  seront 
employés,  ainsi  que  leurs  équipements,  au  service  des  gen- 
darmes de  l'intérieur  de  Paris. 

«  X.  La  commission  des  transports  et  convois  milltalrea 
disposera,  pour  l'usage  des  gendarmes  qui  résideront  hors 
des  barrières,  de  la  ouantité  nécessaire  de  chevaux  existant 
dans  les  différents  déiiôts  A  proximité  de  Paris. 

t  XI.  Les  comités  de  sûreté  générale  et  militaire  réunis 
arrêteront  une  Instruction  particulière  pour  l'ordre  et  les 
détails  de  service  auxquels  cette  gendarmerie  sera  assujettie. 

<  XU.  Elle  sera  entièrement  organisée  et  mise  en  activité 
d'ici  au  SO  nivôse. 

«  XlU.  Il  est  expressément  défendu  aux  autorités  consti- 
tuées d'employer  dorénavant  aucun  des  gendarmes  d-dessus 
désignés  pour  porter  des  lettre»  ou  paquets.  > 

c  XIV.  Les  emplacemento  des  brigades  extérieures  et  les 
lieux  de  résidence  des  officiers  seront  indiqués  par  les  co- 
mités de  salut  publie  et  militaires  réunis,  qui  demeureront 
autorisés  de  les  Mre  alteraer  et  diviser  suivant  les  besohis 
du  service  et  les  localités. 

■  XV.  Elles  feront  Jouméllemenf  des  marches,  tournées» 
courses  ei  patrouilles  dans  les  arrondissements  qui  leur  se- 
ront désignés;  elles  rempliront  leurs  fonctions  conformé- 
ment au  S  U ,  titre  VII,  de  la  loi  du  16  février  1792 ,  et  au 
titre  VI  de  celle  du  39  avril  1792  (vieux  style),  en  tout  ce 
qui  n'y  aura  pas  été  dérogé. 

«  XVI.  La  commission  du  mouvement  et  de  Torganisation 
des  armées  de  terre  et  de  mer  rendra  compte,  le  31  de  ce 
mois,  aux  comités  de  salut  public  et  militaire,  et  ceux-ci 
deux  Jours  après  A  la  Convention  nationale,  des  mesures 
prises  pour  l'éxecution  du  présent  décret. 

t  XVll.  Le  comité  militaire  fera  Incessamment  un  rap- 
port sur  le  mode  d'organisation  et  du  service  de  la  gendar- 
merie nationale,  tant  A  pied  qu'A  cheval. 

t  XVm.  L'insertion  de  cette  loi  au  Bulletin  tiendra  lien 
de  promulgation,  t 

Après  quelques  débats ,  ce  projet  de  décret  est 
adopté. 

Clauzel  :  Pères  de  la  patrie,  venir  vous  parler  des 
dangers  qui  la  menacent,  vous  entretenir  des  moyens 
qui  sont  dans  vos  mains  pour  Ten  préserver,  c'est 
ottirer  toute  votre  attention. 

Je  vous  prouvai ,  décadi  dernier,  que  les  princi- 
paux chefs  de  la  faction  Robespierre,  Chaumette, 
Vincent  et  Hébert,  respirent  encore,  qu'ils  ont  été 
leurs  défenseurs  à  cette  tribune  ;  que ,  quoiqu*ils 
sussent  que  Robespierre  avait  demandé  la  suspen- 
sion des  séances  de  la  Convention ,  c'est-à-dire  la 
dissolution  delà  représentation  nationale,  non-seu- 
lement ils  ne  vous  avaient  pas  instruits  à  temps  de 
ces  forfaits,  mais  qu'ils  avaient  agi  toujours  de  con- 
cert avec  ce  tyran,  jusqu'à  ce  qu  une  heureuse  més- 
intelligence survenue  entre  eux  vous  avertît  qu'il 
fallait  se  délivrer  de  tous. 

Accusés  d'être  allés  influencer  les  jurés  pour  faire 
condamner  Camille  et  Phélippeaux ,  quelques-uns 


ont  eu  Taudace  de  vous  afBrnier  qu'ils  n*avaint  point 
paru  au  tribunal,  et  qu'ils  ne  parlèrent  ni  aux  jurés, 
ni  aux  juges  :  eh  bien,  deux  de  nos  collègues,  Duval 
et  David  (de  l'Aube),  dignes  de  toute  votre  estime, 
se  trouvèrent  présents  lorsque  trois  décemvirs, 
membresdu  comité  de  sûreté  générale, remirent  aux 
juges  le  décret  surpris,  portant  la  faculté  de  la  miso 
hors  des  débats,  en  leur  disant  :  •  Voilà  de  quoi  vous 
mettre  bien  à  l'aise.* 

Il  ne  suffit  pas  que  les  projets  de  lois  se  préparent 
dans  la  méditation  de  vos  comités  ;  il  ne  suilSt  pas 
que  ceux-ci  méritent  votre  confiance,  et  qu'ils  sur- 
veillent en  secret  les  malveillants  ;  il  faut  tout  révé- 
ler à  cette  tribune. 

Apprenons  au  peuple  que,  tandis  que  la  ConyeiH 
tion  nationale  s'occupe  de  son  bonheur,  les  hommei 
à  terreur  cherchent  encore  à  préparer,  à  fomenter 
la  révolte  pour  ramener  le  système  de  pillage  et  dé 
sanjg;  dans  lequel  ils  se  sont  vautrés  pendant  quinze 
mois  ;  apprenons  aux  bons  citoyens  les  moyens  que 
ces  révoltés  emploient  pour  perdre  la  liberté ,  qui 
nous  a  coûté  tant  de  sacrifices  ;  et  cette  poignée  de 
brigands  disparaîtra  au  premier  clignotement  des 
yeux  du  peuple,  comme  les  Pygmées  s'évanouirent 
au  réveil  d'Hercule. 

Un  représentant ,  égaré  sans  doute  dans  les  séan- 
ces de  la  rue  Honoré ,  lorsqu'un  des  tyrans  annon- 
çait le  prochain  déchaînement  du  lion,  s'avisa,  après 
avoir  mis  son  bonnet  rouge  dans  sa  poche,  de  crier 
hautement,  dans  le  jardin  des  Tuileries,  qu*il  fallait 
encore  un  million  de  têtes  pour  consolider  la  révo* 
lution.  Le  peuple  voulait  l'en  faire  repentir  :  la  peur 
saisit  le  prédicateur  de  cette  monstrueuse  doctnne  : 
il  montre  sa  carte,  il  est  respecté  ;  mais,  ne  pouvant 
croire  que  son  mandataire  ait  pu  se  livrer  à  une  dé- 
marche aussi  criminelle ,  le  peuple  le  conduit  au 
comité  de  sûreté  eénérale,ou  le  fait  fut  constaté. 
Ce  citoyen  s'assied  journellement  à  côté  des  trois 
individus  contre  lesquels  s'éleva  notre  collègue  Le^ 
gendre. 

Apprenons  aussi  au  peuple  que,  dans  la  rue  Con- 
trescarpe ,  près  celle  André-des-Arcs ,  il  se  tenait 
des  assemblées  nocturnes ,  oit  Ton  organisait  une 
révolte  d'ouvriers  de  quelques  ateliers  de  Paris, 

2u'on  voulait  réunir  à  quefaues  hommes  que  les 
gorgeurs  ont  fait  venir  des  aépartements.  Disons- 
lui  que  les  principaux  meneurs  étaient  des  iurés  de 
l'ancien  tribunal  révolutionnaire,  des  membres  des 
anciens  comités  révolutionnaires;  que  plusieurs 
rapports  désignent  le  chef  de  ce  repaire. 

Votre  comité  de  sûreté  générale  a  fait  mettre  en 
arrestation  plusieurs  de  ces  hommes  séditieux  :  s'il 
laissé  le  chef  en  liberté,  la  bande  ne  fera  que  chan- 
ger de  caverne. 

Mais  voici  encore  le  comble  de  la  scélératesse  : 
notre  collègue  Roux,  chargé  de  surveiller  Tarri- 
vagedes  blés  destinés  à  l'approvisionnement  de  Pa- 
ris ,  nous  annonce  que  quelques  émissaires  des  en- 
nemis du  gouvernement  actuel,  des  hommes  de 
sang,  cherchent  à  égarer  les  citoyens  des  départe- 
ments voisins,  en  leur  disant  «  qu'ils  sont  bien  dupes 
de  laisser  partir  du  blé  pour  Paris  ;  que  les  maga- 
sins de  cette  grande  cité  en  regorgent  ;  que  le  grain 
y  germe  à  tel  point  qu'on  l'y  voit  croître  comme 
l'herbe  dans  les  prés  ;  que  les  nombreuses  réquisi- 
tions ne  sont  que  l'effet  de  la  malveillance  du  gou- 
vernement, qui  veut  la  contre-révolution.  » 

Peuple,  connais-tu  bien  maintenant  toute  la  per- 
fidie des  tigres  qui  voulaient  t*ailamer,  pour  t  en- 
traîner à  quelque  mouvement  au  moyen  duquel  ces 
Insensés  osent  espérer  que  leur  tyrannie  renaîtrait? 

Monstres ,  votre  domination  est  passée  ;  nos  ar- 
mées  vous  connaissent  ;  vous  êtes  en  exécration  à  la 


67 


oatiire  entière.:  toute  la  France,  moins  une  poignée 
de  fripons,  vous  abhorre.  Quelle  est  la  famille  dont 
TOUS  n*ayez aspiré  le  sang?  D'Antibes  à  Cherbourg, 
de  StrasDoure  à  Bayonne ,  tout  demande  pourtjuof 
les  maîtres  ae  Carrier  n'ont  pas  encore  subi  sa 
peine.  Que  les  comités  fassent  imprimer  les  lettres 
que  vous  écriviez  pour  ordonner  le  carnage  à  l'a- 
troce Lebon  ;  qu'on  nous  distribue  aussi  les  arrêtés 
sanguinaires  que  vous  prîtes  contre  les  infortunés 
habitants  de  Bédouin  et  d'Orange  ;  qu'on  nous  dise 
enfin  si,  depuis  le  10  thermidor,  tous  les  satellites 
et  toute  Tarmée  de  Robespierre  ne  sont  pas  sous  les 
étendards  de  la  révolte  ? 

Les  repré-sentants  dénoncés  par  Lecointre  croient 
répondre  victorieusement  à  Tinculpation  qui  leur 
est  faite ,  d'avoir  été  les  complices  de  Robespierre, 
en  rapportant  un  arrêté  de  la  commune  conspira- 
triée,  qui  les  met  hors  la  loi. 

Certes  il  faut  bien  désespérer  de  sa  cause  pour 
croire  qu'un  aussi  misérable  sophisme  pourra  faire 
fortune  devant  une  assemblée  qui  a  souri  de  pitié 
am  menaces  du  réveil  du  lion  et  du  détachement 
des  rochers  ;  devant  une  assemblée  qui  ne  croit  pas 
que  les  batailles  se  gagnent  en  redoublant  le  mou^ 
venent  de  la  guillotine ,  en  battant  monnaie  sur  la 
piaee  de  la  Révolution;  qui  ne  croit  pas  que  les 
gouvernements  doivent  se  fonder  en  faisant  transpi- 
rer le  corjKi  politique ,  ni  qu*on  doive  de  la  recon* 
naissance  à  un  comité  de  sûreté  générale,  parce 
qn'il  aurait  procuré  un  milliard  au  trésor  national 
par  des  mesures  barbares,  puisées  dans  le  tissu  des 
atrocités  de  Néron.  Nous  savons  bien  que,  quelques 
Jours  avant  le  9  thermidor,  Robespierre  guerroyait 
avec  ses  complices  pour  savoir  à  qui  resteraient  les 
rênes  de  la  tyrannie  ;  nous  savons  bien  que  les  dé- 
cemvirs  survivants ,  effrayés  de  la  supériorité  que 
Robespierre  avait  sur  eur,  non  en  perndie,  mais  en 
popularité ,  cherchèrent  à  transiger  avec  lui  sur  le 
droit  d'opprimer  leur  patrie  ;  nous  n'avons  pas  ou- 
blié que  le  8  thermidor  au  matin  ils  répandaient  par- 
tout, et  jusqu'à  cette  tribune,  que  leur  chef  était 
un  homme  vertueux ,  ami  de  son  pays  ;  mais  nous 
savons  aussi  que  la  scission  entre  les  décemvirsne 
s^opéra  réellement  que  dans  la  nuit  du  8  thermidor, 
lorsque  les  sept  tyrans  dont  s'occupent  nos  trois  co- 
mités virent  que  Robespierre  avait  manifesté  aux* 
Jacobins  la  ferme  résolution  de  les  perdre,  pour  ne 
plus  partager  la  tyrannie  avec  eux.  Ainsi  donc ,  en 
mettaut  les  sept  décemvirs  hors  la  loi,  une  des  fautes 
de  la  commune  conspiratrice  fut  d'avoir  cru  le  parti 
de  Robespierre  plus  puissant  que  celui  de  Billaud 
et  consorts  ;  car  personne  ne  doute  aujourd'hui  qu'il 
n'y  eût  deux  conspirations  pour  perdre  la  représen- 
tation nationde,  et  avec  elle  la  république. 

L'une  était  composée  des  membres  de  la  commu- 
ne; l'autre  des  décemvirs,  divisés  eux-mêmes  en 
deux  partis.. 

La  plus  bible  ou  la  moins  cauteleuse  a  dû  néces- 
sairement succomber  la  première  ;  la  seconde ,  en 
se  vovant  démasquée ,  doit  naturellement  déclarer 
qu'elle  était  l'ennemie  mortelle  de  sa  rivale  ;  c'est  la 
marche  ordinaire  qu'on  a  vu  tenir  de  tous  les  temps 
à  tous  les  conspirateurs,  à  tous  ceux  qui  ont  voulu 
parvenir  au  despotisme. 

Ainsi  tombe  l'induction  que  voudraient  tirer  à 
leur  appui  les  sept  décemvirs ,  de  la  mise  hors  la 
loi  prononcée  contre  eux  par  la  commune  rebelle. 

Rieprésentantsdu  peuple,  n'est-il  pas  évident  pour 
vous  •  comme  pour  toute  la  répunlique ,  que  les 
complices,  les  continuateurs  de  Robespierre  tour- 
mentent encore  la  France?  Rappelez- vous  qu*ils 
voulaient  se  perpétuer  dans  leurs  pouvoirs;  qu'a- 
près la  mort  de  '.eur  chef  ils  eurent  l'impudéooede 


venir  vous  proposer  de  les  leur  continuer  ;  que  Bil- 
laud trouva  mauvais  au'on  rapportât  le  décret  qui 
leur  donnait  le  droit  de  nous  faire  arrêter  ;  que,  se 
servant  des  expressions  du  tyran  abattu,  on  l  enten* 
dit  s'écrier  dans  cette  assemblée  :  •  Je  crois  qu'on 
murmure  !  • 

Pères  de  la  patrie,  s'il  vous  restait  encore  le  moin- 
dre doute  que  les  décemvirs  dénoncés  par  Lecointre 
n'eussent  pas  envahi  l'autorité  nationale,  descendez 
dans  vos  âmes  :  dites-nous  de  quelle  terreur  ne  les 
avait  pas  frappées  l'infâme  décret  qu'on  vous  arra- 
cha pour  taire  sanctionner  l'atteinte  que  les  décem- 
virs s'étaient  permise  contre  les  droits  du  peuple,  en 
faisant  arrêter  plusieurs  de  ses  représentants  sans 
les  entendre  ! 

Dépeignez-nous  lès  anxiétés,  les  angoisses  mor- 
telles de  ceux  d'entre  vous  qui  n'osaient  plus  repo- 
ser à  côté  de  leurs  épouses  éplorées,  dans  la  crainte 
qu'un  ordre  des  décemvirs,  donné  dans  les  ténèbres, 
ne  vint  vous  enlever  de  vos  domiciles  pour  vous 
mener  à  l'échafaud  ! 

Ne  nous  cachez  pas  les  alarmes  réciproques  qui, 
par  les  mêmes  appréhensions,  empoisonnaient,  ren- 
daient insupportaole  la  vie  du  per^  vertueux ,  des 
enfants  pleins  de  respect  et  des  amis  sincères. 

Ecoutez  les  voix  plaintives  des  victimes  immolées 
par  centaines  pendant  les  quatre  décades  où ,  sui- 
vant l'aveu  de  ses  complices ,  Robespierre  n'allait 
plus  au  comité.  Interrogez  les  mânes  indignés  qu'on 
ait  tranché  le  fil  de  leurs  jours  sous  prétexte  aune 
conspiration  de  prisons  qui  n'a  existé  que  dans  l'i- 
magination de  ceux  dont  le  raffinement  de  cruauté 
surpasse  le  génie  de  l'inventeur  du  taureau  du  bar- 
bare Phalaris. 

Maintenant ,  citoyens ,  il  ne  me  reste  qu'à  vous 
conjurer  de  songer  à  la  garantie  de  la  souveraineté 
du  peuple  :  elle  a  été  usurpée ,  cette  souveraineté, 
par  des  hommes  n^  sans  doute  pour  déshonorer  la 
France ,  si  elle  pouvait  l'être.  Laisserez-vous  plus 
longtemps  impuni  cet  horrible  attentat?  Qui  répon- 
dra au  peuple  que  les  mêmes,  ou  d'autres  tyrans, 
n'envahiront  plus  son  autorité?  Comment  voulez- 
vous  que  les  puissances  de  l'Europe  osent  vous  de- 
mander paix  ou  alliance ,  tandis  que  vous  laisserez 
dans  le  sénat  les  chefs  de  la  faction  qui  déchire  la 
république  ?  qui  leur  assurera  la  réciprocité  dans 
les  engagements?  Me  répliqueriez-vous,  avec  Cam- 
bacérâ ,  que  tous  les  factieux  qui  chercheront  un 
appui  dans  la  Convention  y  trouveront  leur  tom- 
beau ?  Mais  n'est-ce  pas  déjà  trop  longtemps  laisser 
incertaine  l'opinion  publique?  lui  sera-t-il  permis 
de  mettre  en  question  si  la  Convention  nationale 
veut  rendre  une  justice  impartiale?  si  elle  entend 
que  la  rigueur  des  lois  soit  seule  pour  le  peuple,  et 
rimpunité  pour  les  représentants  coupables  ?  Souf- 
frirez-vous  que  quelaues-uns  de  ceux-ci  puissent 
agiter  sans  cesse  ce  même  peuple,  uniquement  pour 
assouvir  leur  soif  de  dominer? 

Ces  hommes  ne  se  corrigeront  pas.  Ouvrez  l'his- 
toire dé  toutes  les  nations  ;  toutes  vous  avertissent 
qu'une  fois  parvenus  à  la  tyrannie  les  usurpateurs 
ne  peuvent  plus  la  quitter  que  pour  descendre  au 
tombeau. 

Représentants  d'une  grande  nation ,  votre  sollici- 
tude pour  sa  tranquillité  serait-elle  moins  ardente 
que  celle  des  états  du  ci-devant  Languedoc  pour  les 
habitants  du  Gévaudan  ? 

Une  bêle  féroce  y  avait  dévoré  une  femme  et  deux 
ou  trois  enfants  ;  à  peine  la  nouvelle  en  parvint- 
elle  à  Montpellier,  que  les  ordres  furent  données  au 
commandant  d'envoyer  trois  régiments  pour  la  dé- 
truire. 

Des  milliers  de  victimes  ont  été  immolées  par  la 


M 


fureur  des  dëcemvirs;  li  Frauce  entière  a  éU  eou- 
Terte  de  deuil  et  de  consternation  pendant  leur  ty« 
rannie  ;  le  plus  grand  de  tous  les  crimes,  Tusurpa- 
tion  de  la  souveraineté  du  peuple ,  a  été  commis. 
Tant  de  forfaits  ne  demeureront  pas  impunis  :  non, 
car  vous  êtes  justes. 

Je  demande  : 

l«  Que  vos  comités  vons  fassent  demain  leur  rap- 
port sur  les  sept  représentants  dénoncés  par  Le«- 
cointre  et  par  toute  la  France  ; 

t^  Que  le  comité  de  législation  tous  présente 
aussi  demain  un  projet  de  loi  tendant  à  remettre  de 
suite  en  activité  le  tribunal  révolutionnaire,  en 
écartant  néanmoins  tous  tes  juges  et  jurés  qui  en 
faisaient  partie  avant  le  10  thermidor. 

Les  propositions  de  Clauzel  sont  adoptées  au  mi- . 
lieu  des  plus  vifs  applaudissements. 

Pluêieun  voix  i  L'impression  du  discours. 
DcjHBM  :  Je  demande  la  parole. 
Pluêieun  voix  :  A  la  tribune  ! 

DuHEM  :  Je  ne  veui  pas  y  aller  ;  je  ne  veux  pas 
être  agoni  de  vos  sottises.  (Murmures.)  La  tribune 
de  l^homme  libre  est  partout  où  il  se  trouve. 

Je  crois  que  les  principes  et  les  décrets  de  la  Con- 
vention s'opposent  à  ce  que  ce  discours  soit  impri- 
mé, comme  ils  auraient  peut-être  dû  s'opposer  a  ce 
qu'il  fût  prononcé  (murmures),  et  je  le  prouve.  Tout 
le  monde  sait ,  et  surtout  un  grand  nombre  de  mes 
collègues  qui  sont  membres  des  comités,  que  ces 
comités  s'occupent  jour  et  nuit  de  l'affaire  dont  il 
s'agit  ;  tout  le  monde  sait  aue  nous  sommes  jurés 
d'accusation ,  que  nous  ne  Je  vons  pas  nous  laisser 
influencer  de  quelque  manière  que  ce  soit.  Pour- 
quoi ,  l'autre  jour,  après  une  sortie  pareille  a  celle 
qu'on  vient  de  faire  aujourd'hui ,  avez-vous  refusé 
la  parole  aux  accusés?  (Quelques  applaudisse* 
ments.) 

Si  j'avais  une  motion  à  faire  sur  la  dénonciation 
de  Lecointre,  je  lui  donnerais  la  plus  grande  éten« 
due ,  et  je  lui  demanderais  qu'une  fois  pour  toutes, 
afin  que  la  Convention  et  les  comités  puissent  s'oc* 
cuper  utilement  du  salut  de  la  patrie^  je  dem^inde-^ 
rais  que  ces  comités  examinassent  la  conduite  des 
trente  à  quarante  membres  sur  lesquels  porte  cette 
dénonciation  ;  car,  après  les  sept  qu'on  poursuit  dans 
cet  instant,  il  y  en  a  encore  trente-trois  autres  qu'on 
accuse.  Hier,  des  membres  des  comités,  dont  j'estime 
la  véracité,  m'ont  dit  qu'ils  ne  pouvaient  s'occuper 
que  de  cette  affaire.  (Murmures.) 

Reynaud  et  Ruomps  parlent  dans  le  bruit. 

DuHEM  :  Je  ne  reconnais  aucune  espèce  de  tyran- 
nie, et  je  n'invoque  que  la  justice  qui  veut  que  l'on 
écoute  tous  les  partis.  On  avait  élevé  des  doutes 
sur  la  manière  dont  je  voterais  dans  l'affaire  de  Car- 
rier ;  eh  bien,  j'ai  voté  d'après  ma  conscience,  et  je 
ferai  encore  de  même  dans  celte  affaire-ci.  Les  co- 
mités s'en  occupent;  et  si  Clauzel,  que  je  regarde 
comme  un  infâme  calomniateur (Violents  mur- 
mures.) 

Clauzel  :  Je  demande  à  répondre  à  Duhem. 
DuBEM  :  Si  Clauzel,  qui  a  eu  l'audace  de  médire 
en  face  que  j'étais  en  correspondance  avec  les  émi- 

§rés  retirés  en  Suisse,  ne  me  prouve  pas  ce  fait,  je 
éclare  que  je  l'assassinerai  moi-même.... 
L'assemblée  et  tous  les  citoyens  des  tribunes  ma- 
nifestent la  plus  vive  indignation. 
Duhem  Ole  sa  cravate. 

***  :  Je  demande  que  l'assassin  Duhem  soit  rappelé 
i  l'ordre*  (Vifs  applaudissements.) 


PkuUiÊn  vùix  e  A  FÀbbeye  !  à  1* Abbaye!  (Letip- 
plattdisaements  redoublent.) 

DiWABS  :  Un  homme  qui  s'est  déclaré  aasai^  M 
doit  pas  si^er  dans  la  Convention. 
DUHKM  :  J*a!  la  parole. 

Lb  PaisiDENT  :  Dewars  a  demandé  la  parole  pour 
une  motion  d'ordre,  et  je  la  lui  ai  accordée. 

BuAHPf  ei  quelques  autr$$  :  11  n'y  a  pas  de  notkMi 
d'ordre. 

DuHBH  :  Vons  n'assassinerez  pas  iropanément  le 
peuple...  (Des  huées  Fempéchent  d'achever.) 

Dewars  prend  la  parole  ;  Lesage-Senault  Tinter- 
rompt  à  plusieurs  reprises. 

La  Convention  décrète  que  Deiiirars  sera  entendu*. 
(On  applaudit  vivement.) 

Duhem  parle  dans  le  bruit. 

Dewais  :  Je  pense  qu'un  représentant  du  peuple 
qui  a  eu  l'atrocité  de  se  déclarer  assassin  doit  être 
exclus  de  cette  assemblée ,  au  moins  pendant  treis 
mois,  et  envoyé  à  TAbbaye.  (Vifs  applaudissements.) 
Il  y  a  longtemps  que  nous  savons  que  l'assassinat 
est  votre  moyen  favori,  celui  qui  ne  vous  a  jamais 
manqué  pour  parvenir  à  vos  fins.  (Les  applaudisse- 
ments redoublent.) 

Lesage-Senault  crie  dans  le  bruit. 

Dewabs  :  Vous  osez  dire  que  nous  roulons  assas- 
siner le  peuple  français!  ffest-oe  pas  vous  qui  l'avex 
assassine  en  faisant  périr  ses  représentants  r  Le  sang 
de  quarante  ou  cinquante  de  vos  collègues  que  vous 
avez  égorgés  ne  sulBt-il  pas?  (Duhem  rit.  Je  de* 
mande  que  Duhem  soit  envoyé  à  l'Abbaye.  (Nou. 
veaux  applaudissements.) 

DoHBM ,  à  la  tribune  i  Lorsque,  sans  pouvoir  ré* 

Ïiondre ,  on  est  sans  cesse  assassiné  moralement, 
orsqu'un  cceur  indigné  ne  peut  obtenir  justice,  il  a 
le  droit  d'assassiner  ...i.  (L'indignation  la  plus  vio- 
lente se  manifeste  de  nouveau  de  toutes  les  partiel 
de  la  salle.) 

Un  grand  nombre  de  voix:  A  TAbbaye  !  à  l'Ab- 
baye !  —  Le  président  met  aux  voix.  — -  La  grande 
majorité  de  la  Convention  se  lève  pour  que  Duhem 
aille  à  l'Abbaye.  (On  entend  les  plus  vifis  applaudis» 
*  sements.) 

Duhem  remonte  à  la  tribune. 

Lbgbndbb  :  Je  demande  la  parole. 

Duhem  :  C'est  à  moi  de  parler  ;  on  m'a  refusé  la 
parole.  (Murmures.) 

Montaut-Maribon,  et  quelques  autres  qui  siègent 
à  côté  de  lui,  demandent  aussi  à  aller  6  l'Abbaye.  -^ 
Le  tumulte  augmente.  --^  Le  président  se  couvre.  — 
Le  bruit  cesse  peu  à  peu.  —  Le  président  se  dé- 
couvre» 

Le  Pbésident  :  On  ne  m'accusera  pas  d'avoir  mis 
aux  voix  avec  trop  de  précipitation.  tJne  grande 
partie  de  l'assemblée  avait  déjà  demandé  à  différ 
rentes  reprises  qu'elle  fût  consultée  lorsque  j'ai  fait 
l'épreuve  qu'on  ne  m'a  pas  donné  le  temps  d'achever. 

Legenorb  :  Je  demande  la  parole  avant  que  la 
contre-épreuve  soit  faite.  Certe^  la  Convention  doit 
être  assez  grande,  assez  majestueuse,  pour  passer  à 
Tordre  du  jour  sur  une  vocifération.  (Violents  mur- 
mures.) Ceci  est  un  jeu  pour  effrayer  une  partie  de 
cette  assemblée  :  on  a  dit  qu'on  voulait  poursuivre 
quarante  membres ,  tandis  qu'on  ne  s'occupe  que  de 
trois...  • 

Duhem  :  Apprends  que  Je  ne  veux  pas  être  traité 
de  voleur. 

Ptmiewrêwnx:  A  l'ordre!  à  l'Abbaye! 


et 


5' 

61 


PouM  :  Lepoliitre^Bi*a  traité  de  volear,  Fréron 
aussi.  19  Leffeodre  aime  sa  probité  »  moi  j^aime  la 
mieDoe  :  je  ocmande  la  mort  ou  rhonneur,  La  Con- 
vention ne  peut  pas  souffrir  plus  longtemps  une  ty- 
rannie qui  empêche  ses  membres  de  parler. 

LBOBNDaK  :  On  veut  faire  croire  à  quelques-uns  de 
nos  collègues  qui  ont  été  en  mission  qu'on  8*00* 
cupe  d>uz  ;  il  n'en  est  rien.  Je  demande  ({ue,  sans 
^ardau.proposqueDohem  a  tfnu  pour  intimider 
la  Convention  ;  que,  sans  prendre  garde  à  ses  voci- 
férationa,  Ton  passe  à  rorqre  du  Jour* 

Pluiiiun  voùp  :  Non,  tion,  à  l'Abbaye! 

CLAtJZEL  :  J'appuie  la  proposition  de  Legendre. 
Duhem  a  prétendu  que  je  l'avais  accusé  d^etre  en 
corresponaance  avec  les  émigrés  retirés  en  Suisse; 
il  y  eut  dernièrement  une  explication  à  ce  sujet  au 
comité  de  sflreté  générale  :  plusieurs  de  mes  collè- 
gues, que  J'Interpellai,  avouèrent  qu'ilavait  été  lu 
dans  la  réunion  des  comités  une  pièce  qui  prouvait 
[ue  les  Jacobins  étaient  en  correspondance  avec  les 
migres  retirés  en  Suisse;  mais  je  n'ai  jamais  dit 
qu*aucun  de  mes  collègues,  et  notamment  Dubem, 
ait  eu  parte  cette  correspondance. 

DoBEM  :  Tu  me  l'as  dit,  infâme  calomniateurl 

PbuUuTi  vùi»  i  A  l'Abbaye  1 

CLAdZBL  :  C'est  faux;  Je  te  défie  de  le  prouver. 
En  appuyant  la  proposition  de  Legendre... 

DcBBM  r  Je  n*en  ai  pas  besoin  ;  calomniateur,  tu 
rougis!...  (Violents  murmures.) 

^**  :  Cet  homme  est  incorrigible  ;  il  faut  renvoyer 
à  r  Abbaye.     - 

Lmbndib  :  L'ordre  du  Jour! 

BouaBON  (de  l'Oise)  :  Je  demande  que  Ton  mette 
ani  voix  Tordre  du  Jour,  pour  terminer  ces  débats 
qui  font  gémir  tous  les  bons  patriotes. 

La  Convention  passe  &  l'ordre  du  jour. 

bocB0Of«  (de  l'Oise)  :  En  entrant  ici  J*ai  vu  une 
ar^ne  où  les  passions  s'entre-choquaient;  et  pour* 
quoi?  parce  qu*il  s*agit  de  faire  un  rapport  sur  des 
hommes  qu'on  regarde  comme  de  grands  coupables. 
Citoyebs  y  défiel- vous  des  passions  :  il  faut  être  cal- 
mes» la  veille  d'un  jugement  qui  doit  venger  la  na- 
tion on  innocenter  des  hommes  violemment  soup- 
çonnés. (  Applaudissements.  )  Je  ne  peux  concevoir 
comment  on  croit  servir  la  patrie  en  offrant  au  peu- 
ple \e  Spectacle  d'hommes  animés  les  uns  contre  les 
autres.  D'un  côté,  j'ai  entendu  une  proposition  qui 
pourrait  mettre  la  liberté  en  péril,  si  l'on  s'accoutu- 
mait â  l'adopter.  Rappelons-nous  que  la  loi  du  8 
brumaire  a  été  établie  pour  la  garantie  de  la  repré- 
sentation nationale;  rappelons-nous  qu'indépen- 
damment de  cette  garantie  de  la  loi  il  est  encore 
pour  elte  une  garantie  morale,  te  respect  du  peuple. 
Ne  faisons  Jamais  rien  qui  puisse  nous  en  priver  ; 
occupons-nqus  des  moyens  de  faire  fleurir  le  com- 
merce, de  ramener  l'abondance,  de  rendre  nos  con» 
citoyens  heureux;  discutons  les  vues  qui  nous  furent 
présentées,  il  y  a  quelques  jours,  par  Johannot  ;  ne 
donnons  rien  aux  passions,  et  donnons  tout  au  bien 
public. 

Saladin  •  Je  ne  réclame  pas  contre  l'ordre  du  jour 
que  l'assemblée  vient  d'aiiopter;  mais  je  demande 
que,  pour  l'avenir,  on  prenne  un  moyen  d'empêcher 
les  débats  tumultueux,  les  injures  et  les  outrages  de 
quelques-uns  d'entre  nous.  Ce  nVst  qu'avec  du 
calme  que  nous  pouvons  faire  le  bonheur  du  peuple; 
etsM  dépend  d'une  petite  partie  des  membres  de  cette 
assembli*e  de  la  troubler  sans  cesse  par  des  câlom* 
nies  et  des  atrocités,  il  est  impossible  que  nous  puis- 
sions  jamais  remplir  notre  mission. 


Lorsque  dernièretiitiit,  dana  ttne  eireoottaiice  im« 
portante,  nous  avoni  réclamé  la  parole  pour  déve- 
lopper notre  opinion,  nous  n'avons  pu  l'obtenir» 
Est-ce  la  justice  ou  Tintrigne  qui  ont  triomphé  os 
jour-là?  C'est  l'intriffue.  (Applaudissements*)  C'est 
l'intrigue  qui  triomphe  encore  aujourd'hui... 

Clai;zbl  :  Le  maintien  de  Tordre  du  Jour! 

Maure  parle  dans  le  bruit.' 

BoUBDOM  (de  l'Oise)  :  Ma  motion  est  appuyée. 

Saladin  :  Je  n'ai  point  interrompu  Bourdon ,  Je 
lui  ai  même  cédé  la  parole  que  j'avais  avant  lui;  je 
le  prie  de  me  laisser  parler. 

Le  discours  de  Clauzel  avait  été  entendu  dans  le 
calme,  le  décret  avait  été  adopté;  et  c'est  lorsqu'il 
s'est  agi  de  l'impression  que  Duhem  a  semé  le  trou* 
ble  en  outrageant  et  en  menaçant  la  Convention.  Je 
demande  que  le  comité  de  législation  soit  chargé  de 
nous  présenter  demain  un  moyen  de  réprimer  de 
pareilles  insultes,  et  que  le  discours  de  Clauzel  soit 
imprimé. 

***  :  Bourdons  demandé  l'ordre  du  Jour,  en  rap- 
pelant la  loi  de  garantie  de  la  représentation  natiO'^ 
nale;  mais  cette  loi  ne  s'applique  qu'aux  délits 
inconnus;  maisquantà  ceux  dont  l'assemblée  a  con- 
naissance, qui  se  passent  sous  ses  yeux,  dont  elle  est 
convaincue,  ils  doivent  être  punis  sans  renvoi  aux 
comités.  Duhem  se  trouve  dans  ce  cas;  il  doit  être 
censuré  pour  l'atrocité  qu'il  n'a  pas  rougi  de  pro* 
nonccr.  Je  demande  qu'on  suive  le  règlement  à  son 
égard,  et  qu'il  soit  censuré. 

BotmnoN  (de  l'Oise)  :  D*après  la  proposition  de 
mon  collègue  Legendre,  l'assemblée  avait  déjà  passé 
à  l'ordre  du  Jour  sur  le  scandale  occasionné  par  Du- 
hem. 

La  Convention  passe  è  l'ordre  du  jour  sur  la  mo« 
lion  de  Clauzel  et  sur  l'impression  de  son  discours.- 

MéNARD,  au  nom  du  comité  de  législation  :  La 
Convention  nationale  a  renvoyé  au  comité  de  légis- 
lation la  pétition  de  Julien  Leroi,  de  la  commune  de 
Nantes,  dont  la  destinée  était  d'échapper  à  un  de  ces 
attentats  afireux  qu'un  tyran  imagina  pour  outrager 
la  nature,  et  dont,  après  tant  de  siècles  écoulés 
sans  rencontrer  un  autre  Néron,  il  ne  devait  pas  être 
réservé  au  nôtre  de  perfectionner  l'invention  pour 
détruire  l'humanité. 

Cependant  les  annales  de  la  république  transmet- 
tront à  la  postérité  des  forfaits  inouïs  jusqu*à  ce  Jour; 
elles  lui  apprendront  avec  quel  raffinement  de  bar- 
barie et  d'atrocité  quelques  nommes  se  firent  un  jeu 
cruel  de  faire  périr  par  milliers  leurs  semblables, 
en  les  accouplant  comme  un  vil  bétail  pour  les  en- 
gloutir dans  les  flots.  L'histoire  de  Julien,  destiné  à 
augmenter  le  nombre  de  leurs  victimes ,  y  passera 
avec  cet  intérêt  qu'elle  inspire  à  ses  contemporains; 
et  si  quelque  mouvement  d'indignation  se  mêle  à  la 
douce  Joie  de  l'avoir  vu  échapper  à  leur  Hireur,  ce 
sera  sans  doute  d'apprendre  que  la  conscience  des 
juges  fut  égaré  en  prononçant  sur  ces  assassins,  lors- 
que la  prSence  de  la  victime  les  avertissait  sans 
cesse  que  les  crimes  contre  l'humanité  ne  sont  Ja- 
mais excusables. 

Mais  si  la  postérité  s*indigneen  voyant  un  si  grand 
scandale,  elle  admirera  le  courage  que  vous  avez  dé- 
ployé pour  en  arrêter  les  funestes  conséquences  ;  et 
dans  ces  moments  éloignés  où  les  passions  se  taisent, 
et  où  toutes  les  actions  sont  Jugées  avec  une  impar- 
tiale équité,  elle  vous  justifiera  de  tous  les  reproches 
que  la  malveillance  cherche  à  diriger  contre  vous 
pour  perdre  la  patrie. 

Il  paraît  que  Julien  avait  été  condamné  à  six  ans 
de  détention  par  jugement  d*ttn  tribunal  criminel  ou 


70 


de  qndqoe  eomminioa  partieiilière.  La  procédure 
qui  a  du  être  faite  D*est  point  panreoue  aa  eomité, 
el  il  ne  connaît  pas  les  motifii  qui  ont  pu  déterminer 
ce  jugement. 

Lt%  débats  qui  ont  en  lieu  au  tribunal  révolution- 
naire, où  Julien  a  été  appelé  en  témoignage  dans  Taf- 
faire  du  comité  de  Nantes,  lui  ont  appris  seulement 
que  les  juges  avaient  cru  s*apercevoir  que  sa  déten- 
tion fut  légèrement  prononcée,  et  ils  lui  en  ont 
donné  la  d&laration. 

Mais  le  comité  a  pensé  que  le  renvoi  qui  lui  avait 
été  fait  de  la  pétition  de  Julien  n'avait  point  pour 
objet  de  revoir  cette  procédure  et  d'en  rendre  compte 
à  la  Convention,  il  a  dû  voir  dans  le  liref  délai  qui 
lui  a  été  6xé  pour  foire  son  rapport  qu'il  s'agissait  de 
proposer  une  mesure  qui  décidât  définitivement  le 
sort  de  ce  particulier;  et  c'est  à  quoi  il  va  se  borner. 

Détenu  dans  lesprwooa  de  Nantes,  Julien  y  subis- 
sait la  peine  portée  par  son  jugement. 

C'est  de  là  qu'on  enlevait  cEaque  jour  les  malheu- 
reuses victimes  que  le  comité  révolutionnaire  de 
cette  commune  entassait  dans  des  bateaux  pour  les 
faire  précipiter  dans  la  Loire,  où  elles  trouvaient 
une  mort  aussi  cruelle  que  certaine. 

Comme  on  faisait  périr  ces  malheureux  prison- 
niers sans  choix ,  on  formait  les  listes  sans  précau- 
tion. Julien  fut  porté  sur  une  de  ces  listes  de  pro- 
scription, et  conclu  it  dans  la  barque  iatale  où  il  devait 
trouver  avec  ses  compagnons  d^infortune  la  fia  ter- 
rible de  son  existence. 

L'expédition  va  commencer ,  tout  est  prêt  pour 
l'exécution;  on  a  garrotté  les  victimes  :  le  bateau 
s'enfonce,  l'eau  entre  de  toutes  parts;  Julien  s'agite 
et  parvient  à  rompre  sa  chaîne  ;  il  se  jette  à  l>au 
malgré  les  menaces  qu'on  lui  fait  et  les  coups  dont 
on  veut  l'atteindre  ;  ii  échappe  et  nage  dans  1  obscu- 
rité. L'élément  qui  devait  l'engloutir  se  montre 
moins  impitoyable  que  ses  bourreaux ,  il  favorise  sa 
fuite,  et,  par  une  espèce  de  prodige,  il  se  sauve  à 
travers  les  pilotes  inhumains  que  le  comité  avait  pré- 
posés pour  faire  périr  dans  la  Loire  ces  cargaisons 
u'hommes  voués  à  ce  nouveau  senre  de  supplice. 

Cet  événement,  publié  dans  Tes  séances  du  tribu- 
nal, a  excité  la  sensibilité  de  tous  les  spectateurs. 
La  présence  de  la  victime  a  augmenté  l'intérél  (]ue 
le  récit  de  ses  malheurs  a  fait  naître.  Quelques  hom- 
mes aurontpu  n'apercevoir  dans  cet  ev^ment  que 
le  simple  effet  du  hasard,  qui  se  joue  aveuglément  de 
nos  destinées  ;  mais  il  a  porté  dans  la  conscience  du 
peuple  la  conviction  que  ce  fut  alors  la  Providence 
|ui  veilla  au  salut  de  Julien  pour  mieux  confondre 
le  crime ,  en  évoquant ,  pour  ainsi  dire,  du  sein  des 
tombeaux,  un  témoin  qui  dût  JCsire  pâlir  d'effroi  ses 
auteurs. 

Ils  sont  grands,  les  crimes  qu'ils  ont  commis;  mais 
l'intérêt  qu'a  manifesté  la  Convention  pour  la  sïiiitf- 
tiiation  affreuse  où  ils  avaient  placé  l'infortuné  Ju- 
lien annonce  le  désir  qui  l'anime  de  soulager  le 
malhour.  C'est  par  de  grands  actes  de  justice  et  d'hu- 
manité, de  l'humanité  surtout,  qui  a  été  si  barbare- 
ment  outragée,  qu'elle  veut  faire  oublier  tant  de 
maux  dont  leur  brutale  cruauté  a  épouvanté  la  terre; 
et  si  leur  infâme  scélératesse  a  su  mettre  entre  leurs 
forfaits  et  sa  bienfaisance  une  barrière  qui  aura  quel- 
quefois rendu  ses  intentions  inutiles ,  elle  sentira 
qu'il  est  beau  d'aller  chercher  dans  les  débris  de 
1  espèce  humaine  qu'ils  avaient  proscrite  quelques- 
unes  des  victimes  qui  ont  échappé  à  leur  sanguinaire 
fureur. 

Le  comité  croit  donc  qu'il  aura  bien  saisi  le  mou- 
vement de  sensibilité  qui  a  agité  cette  assemblée  au 
récit  des  malheurs  de  Julien  «lorsqu'il  lui  proposera 
de  prononcer  définitivement  sa  liberté. 


?; 


Personne  ne  po^nm  dire  qiM  e*esl  an  mépris  des 
principes  et  du  respect  qu*on  doit  aux  jugements 
émanes  des  autorités  telles  qu*on  demande  à  la 
Convention  de  faire  grâce.  Le  comité  sent  ses  de- 
voirs ;  il  est  attaché  aux  prindpes,  et  il  ne  se  laissera 
jamais  égarer  par  un  sentiment  d'humanité  dont  les 
suites  pourraient  devenir  funestes  à  l'intérêt  public 
et  à  l'ordre  social;  mais  le  respect  qu'on  doit  aux 
lois,  le  respect  qu'on  doit  à  l'homme ,  est  bien  aussi 
imposant  que  celui  que  réclame  l'autorité  d'un  tri- 
bunal ;  cette  autorité  n'a  pas  même  été  respecta,  et 
l'on  peut  dire  que  son  jugement  a  été  anéanti  par  le 
jugement  de  mort  prononcé  aussi  arbitrairement 
qiril  a  été  cruellement  exécuté. 

Oui,  citoyens,  Julien  a  éprouvé  toutes  les  hor- 
reurs du  trépas  ;en  un  instant  il  a  vu  rassemblés  sur 
sa  tête  tous  les  dangers;  son  Ima  a  dié  ouvertf  à  la 
terreur,  plus  cruelle  encore  que  lecmip  qui  termine 
notre  existence.  Ce  n'est  pas  ce  dernier  instant  delà 
vie  qui  est  le  plus  alRreux  à  supporter,  c'est  le  k»^ 
appareil  du  supplice,  c'est  l'aspect  ethrayant  de  tout 
ce  qui  annonce  notre  prochaine  destrueuon,  ee  sont 
tons  les  tourments  qui  se  présentent  i  l'Imûinalion 
troublée,  et  qui  laissent  à  peine  la  faculté  de  sentir 
le  dernier  de  tous. 

Julien  a  éprouvé  toute  ces  sensations  cruelles  :  il 
•a  eu  quelque  temps  la  certitude  de  mourir;  le  gouf- 
fre qui  devait  l'engloutir  s'est  ouvert  sous  ses  pas  : 
alors  même  qu'il  échappe  à  ses  bourreaux,  l'inquié- 
tude la  plus  affreuse  raccompagne.  11  est  loin  de 
leurs  regards,  et  il  les  voit  encore,  la  férocité  peinte 
sur  leur  visa§[e,  le  poursuivre  avec  tous  les  instru- 
ments meurtriers  qui  arment  leurs  bras  pour  lui  ar- 
racher la  vie.  Lorsqu'il  évite  leur  fureur  homicide , 
lorsqu'il  vient  se  r«ugier  dans  le  sein  de  la  Conven- 
tion nationale,  vous  ne  souffrirez  pas  qu'un  ordre 
inhumain  le  replonge  dans  ces  mêmes  lieux  où  il  en- 
tendit prononcer  son  arrêt  de  mort. 

En  vous  proposant  de  le  mettre  définitivement  en 
liberté,  le  comité  ne  vous  demande  que  de  confirmer 
le  vœu  public. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

■  La  CoDTentioo  nationale ,  après  avoir  enteada  le  rap- 
port de  son  comité  de  légisUtloD,  décrète  que  JoUen  Leroi, 
appelé  au  ttibanal  révolatiooDaire  séant  à  Paris  pour  y  dé- 
poter dans  Taffoire  du  comité  réyoltttionimire  deNantet, 
tera  définitivement  mis  en  Uberté. 

•  La  Convention  nationale  décrète  Fiasertion  da  rapport 
et  du  décret  au  Bulletin.  • 
'  Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SiAKCE  DO  7  mfOSB. 


Les  citoyens  de  la  Société  populaire  de  la 
d'Eure,  district  de  Crest,  département  de  la  DrOme,  félici- 
tent la  Convention  sur  le  courage  qu'elle  a  déployé  le 
9  thermidor,  ne  reconnaissent  d'autre  centre  que  la  repré- 
sentation nationale,  applaudissent  aux  principes  contenus 
dans  TAdresse  au  peuple  français.  Ils  expriment  le  désir 
qu'ils  ont  de  voir  encourager  l'agriculture. 

t  La  fatalité,  disent-Ils.  a  toujours  fait  éloigner  les  plans 
qui  vous  ont  été  offerts.  Nous  distinguons  entre  autres  celui 
du  citoyen  Grégoire ,  présenté  à  la  Convention,  le  IS  du 
premier  mois  de  Tan  S*  de  la  république,  au  nom  des  oo* 
mités  réunis  d'Instruction  publique  et  d'aliénation ,  et  qui 
a  pour  objet  les  moyens  d'améliorer  l'agriculture  en  France, 
par  l'éublissement  d'une  maison  d'économie  rurale  dans 
cbaque  département. 

t  l,e  vœu  que  nous  exprimons  à  cet  ^rd  est  aussi  celui 
deradministration  du  district  de  Cresl,  et  d'une  assemblée 
de  cultivateurs  de  chaque  commune,  convoquée  par  l'agent 
national  pour  déUbérer  sur  Tétai  actuel  de  l'agriculture 
dans  ce  district,  en  sulted'na  arrêté  daoQmitéd'aBriculture^ 
da  a  brumaire. 


7f 


t  n ont  doMndôos  doue  que  cet  objet  de  notre  pétition 
•oit  renvoyé  an  comité  d'inMrucUon  pabliqMb  pour  être  prit 
en  con«idératlon.  t 

La  mention  bononUe,  le  renvoi  mx  comités  d'agricultnre 
et  d*iostnicUon  sont  décrétés. 

MsaLiN  (de  Douai)  :  Par  votre  décret  du  15  fri- 
maire dernier,  vous  avez  chargé  vos  comités  de  salut 
public,  de  sûreté  générale  et  de  législation,  d'exami- 
ner la  dénonciation  portée  par  le  représentant  du 
peuple  Laurent  Lecointre  contre  les  représentants 
du  peuple  Billaud-Varennes,  Collot  d^Herbois,  Ba- 
rère,  Vadier,  Voulland,  Amar  et  David.  Depuis,  vous 
leur  avez  renvoyé  celle  de  Jean-Baptiste  Darmaing, 
qui  est  dirigée  particulièrement  contre  notre  collè- 
gue Vadier. 

Vos  comités  ont  obéi  à  vos  ordres  >  le  sentiment  de 
leur  devoir  a  pu  seul  les  soutenir  au  milieu  des  dé- 
goAts  inséparables  d'un  travail  de  cette  nature;  et 
dt^à  ils  y  avaient  employé  plusieurs  .séances  lors- 
aue,  par  un  nouveau  décret,  vous  leur  avez  enjoint 
de  vous  en  présenter  le  résultat  aujourd'hui. 

C'est  ce  résultat  que  ie  viens  vous  présenter,  tel 
qu'il  a  été  arrêté  aujourd'hui  même,  à  six  heures  du 
matin. 

Vos  comités  ont  estimé  qu'il  n'y  avait  pas  lieu  à 
examen  à  l'égard  de  Voulland,  d'Amar  et  de  David , 
mais  qu'il  y  avait  lieu  à  l'égard  de  Billaud-Varennes, 
Collot  d'Herbois,  Barère  et  Vadier.  Ils  m'ont  en  con- 
séquence ordonné  de  vous  proposer  le  projet  de  dé- 
cret suivant: 

t  La  Convention  nationale,  après  nvoir  entenda  ses  comi- 
tés de  saint  pubUc ,  de  sûreté  générale  et  de  législation, 
réunis  en  exécution  de  son  décret  du  15  frimaire  dernier; 
et.  sur  la  déclaration  par  eux  faite  que,  d'après  les  dénoncia- 
tions des  représentants  du  peuple  ijiurent  Lecointre  et  Jean- 
Baptiste  Darmaing,  et  pièces  y  relatives,  ils  estiment  qu'il  y 
a  Uen  à  examen  à  l'égard  des  représentants  du  peuple  Bil- 
laod-Varennes,  Collot  d'Herbois,  Barère  et  Vadier  ; 

t  Déclare  qu'il  sera,  à  la  séance  extraordinaire  de  ce  soir, 
procédé,  conformément  à  la  loi  du  8  brumaire  dernier,  à  la 
nomination  d'une  commission  de  vingt  et  un  membres,  povr 
lui  foire  un  rapport  sur  les  faits  imputés,  par  les  dénoncia- 
tions d-dessus  et  pièces  y  relatives ,  aux  représentants  du 
peuple  BUIaud-Varennes,Collot-d*Herbois,  Barère  et  Vadier. 

Lbgointie  (de  Versailles)  :  Je  demande  la  parole. 

Phuieunvoix  .*  Aux  voix  le  décret  ! 

Le  président  consulte  l'assemblée  pour  savoir  si  le  projet 
de  décret  sera  mis  aux  voix  avant  d'accorder  la  parole  A 
Lecointre. 

L'affirmative  est  décrétée. 

Le  projet  de  décret  est  adopté.  (On  applaudit.) 

Baiàib  :  On  s'est  enfin  rendu  à  l'objet- de  nos 
vœux,  on  a  eu  recours  à  la  justice  suprême  de  la 
Convention  nationale.  Il  était  temps  d'examiner  les 
calomnies  que  depuis  deux  mois  des  pamphlets  inju- 
rieux ne  cessaient  de  répandre  sur  notre  compte. 
Nous  aurions  provoqué  nous-mêmes  cet  examen,  si 
l'on  ne  l'eût  pas  demandé  avant  nous,  afin  de  prou- 
ver que  nous  n'avions  pas  cessé  de  mériter  l'estime 
publique.  On  verra ,  à  la  manière  grande  et  géné- 
reuse dont  nous  nous  défendrons,  que  nous  ne  vou- 
lons qu'éclairer  l'opinion  du  peuple.  Je  dois  donner 
connaissance  à  la  Convention  dfe  deux  faits  essen- 
tiels. 

Fatigués  de  voir  que,  depuis  trois  mois,  des  pam- 
phlets horribles,  dont -les  auteurs  seront  un  jour 
lugéspar  ie  peuple,  empoisonnaient  l'opinion  pu- 
blique ,  qu*on  devrait  conserver  pure  avec  autant 
de  soin  aue  les  vestales  en  mettaient  à  entretenir  le 
fètt  sacre  de  Vesta ,  nous  avons  cherché  k  faire  voir 
combien  nos  ennemis  étaient  injustes.  Nous  avons 
été  demander  aux  inspecteurs  de  la  salle  si  l'impri- 
meur  de  la  Convention  ne  se  compromettrait  pas  en 
imprimant  notre  défense  ;ox  nousl'i  -cfusé,  en  nous 


disant  quMl  fallait  obtenir  un  décret  formel.  Quoi 

?u'i]  en  soit,  un  imprimeurcourageux  s'enest chargé 
quelquêê  vaiœ  :  11  n'y  a  pas  de  courage  à  cela!)»  et 
elle  paraîtra  ce  soir. 

Nous  nous  sommes  rendus  aux  trois  comités  réu* 
nis,  sur  l'invitation  du  président  ;  nous  avons  trouvé 
la  un  accueil  favorable  et  le  plus  profond  silence.  On 
nous  a  engagés  à  dire  tout  ce  que  nous  croiriona 
convenable  pour  nous  défendre.  Notre  défense, 
avons-nous  répondu,  c'est  à  la  tribune  de  la  Con* 
vention  nationale  qu'elle  sera  portée.  Mais  il  est  bon 
de  jeter  quelques  traits  de  lumière  sur  la  conduite 
qu'on  tient  avec  nous. 

Voulland  a  d'abord  demandé  pourquoi  les  trois 
autres  membres  de  l'ancien  comité  de  salut  public, 
et  les  dix  de  celui  du  comité  de  sûreté  générale,  n*é* 
tnient  pour  rien  dans  cette  affaire.  Ils  sont  ou  com- 
plices ou  témoins  du  mal  et  du  bien  que  nous  avons 
fait.  Tous  nos  actes  leur  sont  communs  ;  ce  sont  des 
actes  de  gouvernement  auxquels  nous  avons  tous 
participé.  Nous  avons  demandé  qu'ils  fussent  aa 
moins  entendus  ;  nous  ne  savons  pas  ce  qu'on  a  sta- 
tué à  cet  égard. 

Nous  avons  demandé  aussi  la  communication  des 
pièces  remises  par  Lecointre  (de  Versailles).  On  nous 
a  répondu  en  nous  montrant  la  loi  du  8  orumaire  ; 
on  nous  a  dit  qu'elle  n'ordonnait  la  communication 
des  pièces  que  par  la  commission  des  Viiigt-et-Dn^ 
lorsqu'elle  était  établie.  C'est  aux  patriotes,  aux 
amis  de  la  justice,  à  peser  ces  faits  et  les  réflexions 
qu'ils  inspirent. 

Collot  d'Herbois  réclame  la  parole.  Plusieurs  membres 
demandent  qu'il  vienne  à  la  tribune. 

DuHEM  :  Ils  l'agoniront  de  sottises. 

CoLLOT,  d/a(rt6une  :  Je  dois  commencer  d'abord 
par  expliquer  ce  qu'a  dit  Barère  relativement  aux 
obstacles  oue  nous  avons  éprouvés  poiirfaire  impri- 
mer nos  défenses.  Le  comité  des  inspecteurs  avait 
d'abord  paru  disposé  à  donner  des  ordres  à  l'impri* 
meur  ;  mais,  le  soir,  lorsque  nous  portâmes  nos  ma- 
nuscrits à  l'impression,  nous  trouvâmes  un  arrêté 
du  comité  qui  défendait  à  l'imprimeur  de  les  rece- 
voir jusau'a  ce  que  nous  ayons  obtenu  de  la  Conven- 
tion un  décret  formel  à  cet  égard.  C'était  pour  le  de> 
mander  4\w.  j'étais  monté  ces  jours  «derniers  à  la 
tribune;  mais  j'en  ai  été  repoussé. 

On  nous  a  mis  continuellement  entre  le  silence, 
qu'on  a  pris  pour  un  aveu,  et  la  nécessité  de  jeter  le 
trouble  dans  cette  assemblée  si  nous  eussions  insisté. 

Vous  ne  voulez  que  la  vérité,  et  je  vous  assure 

3'  ue  d'un  souffle  elle  renversera  cette  architecture 
e  mensonges,  de  perfidies  et  de  persécutions,  com- 
binée depuis  quatre  mois  contre  des  hommes  qui,  à 
travers  les  événements  de  l'année  dernière,  sont 
restés  à  leur  poste  quinze  heures  par  jour  pour  ser- 
vir la  patrie. 

Nous  ne  demandons  que  la  justice;  votre  inten- 
tion n'est  pas  de  nous  faire  victimes  (non^  non!  s'é- 
crie-t-on  de  toutes  parts  )  ;  les  passions ,  surtout 
celles  des  contre-révolutionnaires,  tuent  et  égorgent 
les  hommes;  mais  vous,  vous  les  jugez;  vous  ne  sui- 
vez que  les  principes  de  la  justice  et  de  la  sagesse 
éternelles;  principes  qui  sont  les  seuls  dignes  de  la 
représentation  d'un  ^rand  peuple.  La  persécution 
qui  nous  accable  n'a  jamais  troublé  le  calme  de  no- 
tre conscience  ;  elle  nous  est  due  ;  nous  la  méritons, 
nous  sommes  glorieux  de  l'éprouver ,  et  nous  som- 
mes certains  que  vous  ne  prononcerez  qu'après  nous 
avoir  entendus. 

Je  demande  que  la  Convention  décrète  qu'il  sera 
permis  à  son  imprimeur  d'imprimer  nos  défenses. 
{C'est  Juste  .'s'écric-l-on  de  toutes  parts) 


TJ 


Cette  proposition  est  adopté». 

GAimcB  (de  Saintes)  :  La  Convention ,  en  accor- 
dant une  amnistie  aux  rehellesde  la  Vendée,  n*a  pas 
entendu  sans  doute  restreindre  cette  faveur  aux  seuls 
habitants  de  ce  dé|iartement  ;  il  est  dans  l'esprit  de 
•on  décret  qn'il  soit  applicable  aux  communes  des 
départements  voisins  qui  ont  partagé  leur  erreur; 
telle  est  celle  du  Mans,  dont  beaucoup  de  citoyens 
ont  été  égarés  par  des  nobles  et  des  prêtres. 

Plusieurs  de  ces  individus  ont  été  punis,  d'autres 
gémissent  dans  les  fers  depuis  un  an.  Je  demande 
qoe  le  tribunal  criminel  de  la  Sarthe  soit  autorisé  à 
les  mettre  en  liberté,  et  que  les  municipalités  leur 
donnent  des  passeports  ponr  retourner  dans  leurs 
foyers,  en  leur  faisant  néanmoins  prêter  le  serment 
exigé. 

BouBDOif  (  de  roise  )  :  Après  tant  d*années  de  se-' 
Çousses  et  d*aj{itatioos  perpétuelles  et  terribles  dans 
leurs  eOets,  je  suis  loin  de  combattre  aucun  des 
moyens  qu'on  peut  Juger  convenable  de  mettre  en 
nsage  pour  ramener  la  tranquillité  et  rendre  à  la 
patrie  des  enfants  égarés.  Cependant  la  justice  ne 
permet  pas  de  mettre  en  liberté  les  parents  de  ceux 
qui  porteraient  les  armes  contre  la  république , 

Erce  que  ce  sont  en  quelque  sorte  des  otages,  et 
ut-étre  ce  sera  un  moyen  efficace  pour  ramener 
Bucoup  de  rebelles,  que  de  leur  donner  Texpecta- 
tive  de  procurer  par  leur  retour  la  liberté  de»  per- 
sonnes qui  leur  sont  chères. 

Je  demande  le  renvoi  de  Tobservation  de  Garnier 
aux  comités  réunis. 
La  GonfenUon  décrète  le  reofoK 

~~  Johannot  soumet  à  la  discussion  le  prc^et  de  décret 
qu'il  a  présenté,  an  nom  des  quatre  comités,  sur  les  finances 
elle  eoouBerctt. 

Boisty  d'Aogias  l'appuia  par  an  dlseours  que  nous  Stroas 
oonnalire* 


aolr. 
La 


asHtf^àlTQto 


le  à  came  de  la  séance  dn 
et  demie. 


siàBGB  00  SOm  DO  7  MTOSB. 

Un  secrétaire  donne  lecture  de  la  loi  du  8  brumahre  sur 
la  garantle'de  la  représentation  nationale.  CeUe  lecture  est 
blentét  iaierroiDj^  par  plnsienrs  membres,  qui  fbnt  obser- 
ver que  la  loi  est  asseï  eonniie,  et  réclement  l*appel  nominal. 

On  allait  le  commencer  lorsque  lluhl  demande  la  parole 
ptur  une  motioa  d'ordre.  Il  est  vlvenienl  appuyé  par  qoeU 
çiies  membres  qui  stégest  à  rnne  des  aU^âmliés  de  la  salle. 

Le  président  oonsulie  rassembMa  pour  saTOir  s*ll  sera, 
eaisBda. 

L'anemblée  lui  remise  la  parole. 

On  demande  de  nouveau  rappel  nominal. 

Il  s'élève  un  grand  tumulte  dans  la  partie  de  la  salle  qui 
•valt  appuyé  Ruhl.  —  Le  oahne  se  réialilit  peu  à  peu. 

Le  président  déclare  que  Lesa(];e-Senault  vient  de  l'apo- 
alivpher,  en  lui  disant  :  ^aouitèe-noutt  —  Il  rappelle  Le- 
saflê-Senault  à  Tordre,  pour  avoir  manqué  au  respect  quil 
doit  à  rassemblée. 

U  luniulie  se  renouvelle.  —  On  demande  eacere  que 
nubl  loll  entendu.  —  La  parole  lui  est  aooordée. 

hmit  (Jlloyens,  voulei-vous  vous  déchirer veus-mémeiî 
LssIIgnes  des  ennemUsoatnlusfoHesquejMMls.lIt  bordent 
las  rives  du  ahla,  et  I  explosion  de  Taraeiuil  de  Undau  ne 
peut  éire  que  refT^i  des  iolellitfencei  qu'IU  ont  dans  œlie 
place.  Il»  ne  manqueront  pas  de  Mrs  tous  leurs  eftoru  pour 
sa  profiter.  Voulei-voos.  par  voi  dlijentlons  Intérieures. 
réjouir  les  AulHc hiens  et  les  Prussien»?  Commues  la  g^ierre 

Intesilae  que  voua  semblea  voas être déelarée (H  sélève 

de  vlolenu  murmures.) 

PhiêêUN  9ôHê  /  L*appel  aomiael  I 

Qasioa  et  plasieari  aatras  crient  dans  le  bmlt  On  les  an- 
iNid  demaadif  qaa  lUiM  loH  aaieada. 


Après  quelques 
eaoore. 


•  W 


sarltabUt 


RuHL  :  Je  n'étais  point  présent,  ce  matin,  an  rapport  des 
trois  comités  sur  la  déaondatloo  de  lieeolotre.  Je  n  attaque 
point  ce  rapport ,  mais  je  rtm  seulement  Mre  observer 
qoe,  dans  la  circonstance  présente,  il  s'i^t  ou  des  fautes 
personaeUes  de  ceux  dont  on  doit  esamincr  la  coaduite,  oa 
des  fautes  des  anciens  oomilés*  SI  l'on  attaque  tes  anciens 
comités  en  masse.... 

LaPaismcaT  :  Je  rappelle..... 

Le  tumulte,  qui  rseommenoe  à  Tune  des  eUrémlléi  de  le 
ealle,  empéofae  le  président  de  eontlaner.  U  asile  la  son* 


DoBBM  :  Président,  maintiens  la  parole  à  Rnhl;  lu  n*as 
pas  le  droit  de  la  lui  ôter. 

***  :  Veut-on  empêcher  qu'on  examine  Ui  oooduite  des 
membres  incuipés,en  ne  peiînettaat  pas  de  Donuaer  la  com> 
mission? 

La  PaisioBin;  :  La  séance  est  oonsacréeà  rappel  nomiaai. 

Le  bruit  augmente. 

Lecointrb  (de  Versailles]  :  L*appel  nominal! 

PluOeun  wumhreê  :  Oui ,  oui ,  l'appel  nominal  I 

La  Président  :  Il  m'est  impossible,  dans  le  tumulte  qui  se 
Mt,  de  prendre  les  ordres  de  l'assemblée.  (Le  bruit  non- 
tiaue.) 

*'*  :  Président,  exécute  le  décret. 

^  :  Je  demande  que  le  président  soit  rappelé  à  l'ordre, 
poar  ne  pas  exécuter  la  loi. 

Lecoihtre  (de  Versailles)  :  Je  demande  le  rapport  du  dé- 
cret qui  a  accordé  la  parole  à  Rubl. 

CM  grand  nombre  de  voix  :  Appuyé,  appuyé! 
Le  président  métaux  voix  la  motion  de  Leeointre;  ella 
est  décrétée  au  milieu  des  plus  vifs  applaadissemems. 

QÊuique$  wHx  :  Silence,  silence!  Isaard  préside.  (Vlo- 
ienti  nrarmiires.) 

Les  mêmes  membres  apostrophent  vivement  les  tribunes 
en  disant  qu'elles  sont  composées  de  soélérau  et  de  roya» 
listes. 

Gàeroa,  se  loamaal  vert  ies  trtkaus:  Peuple,  on  fassas- 
siael  (Des  murmures  d'indignation  couvrent  sa  voix.) 
On  procède  enfin  S  Tappel  nominal. 

L*appel  fini,  le  président  agite  l'urne  qui  renfermait  les 
scrutins,  et  les  citoyens  Sei^nt ,  Beaucbamp,  Bernard  (de 
Saintes).  Dubusc,  Chénier,  Vlellet,  Vasseur  (de  la  Somme). 
Heyer,Réal,  Chevalier,  Saladin,  Johannot.  Battelier.  Lo-. 
binhes,  Sauvé,  Cbnnard.  Sleyès,  Boutrouê,  Montaigu,  Cour* 
tois  et  Thomas  sont  désignés  par  le  sort  pour  composer  la 
commission  des  Vingt-et-Uo. 

La  séance  est  levée  à  minuit. 

ff.  B.  Dans  la  séance  du  8,  snr  le  rapport  des  comités  de 
salut  public  et  de  législation,  la  Oonvenfion  a  adopté  de 
nouveau  la  loi  qu'elle  avait  décrétée  le  t3  thermidor,  pour 
une  nouvelle  organisation  du  tribunal  révoluUoaaaire. 

^  Dubem  a  dénoncé  une  brochure  Intitulée  :  ie  Speetth 
imrfhiMfBiipindaM  legouvememmi  révoiuiioimê&e,  oa* 
vrege  qui  roeUaii  en  doute  si  le  gouveraeaient  répuMIceia 
est  le  vœu  du  peuple,  et  prêchait  le  royalisme. 

La  GonvenUon  s'est  fortement  prononcée  onotre  cet  oa- 
vrage,  a  ordonné  l'arresutioa  de  l'auteur  et  sa  traduciloa 
au  tribunal  révolutionnaire. 


P,'J.  LQzeau,  refirésentanl  du  peuple,  au  rédacteur 
du  Rtonltoor. 

Psrit,  le  6  nivese,  Tae  8*  de  la  répeblifve. 
Tu  as  mis  sur  mon  compte,  daas  le  numéro  dS  du  Sisal 
teur,  une  lettre  écrite  A  la  Convention  par  Ineo  eoll^gue 
Loiseau.  chargé  d'assurer  rapprovisionnenseat  de  Paris.  Je 
te  prie  de  lui  rendre  ce  qui  lui  appartient  ;  car  mon  opialoa 
est  entièrement  de  moi  et  à  mol  ;  Je  ne  veux  pas  qu'on  m*alp 
tribae  celle  d'aotrui. 
Sahttetnntemité. 

5^Losiàn.* 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N»  100.  Décadi  10  Nivôse,  Van  3o.  {Mardi  30  Décembre  1794,  vieux  style.) 


POLITIQOE- 

ALLEMAGNE. 

Prague  t  te  20  novembre.  —  La  cour  de  VienDc  se  dis- 
pose à^proGter  de  l*iorortuneetdes  désastres  de  la  Pologne. 
Son  armée  de  Gallicie  ?a  être  augmentée  de  six  bataillons. 
Le  gouvernement  publie  qu^il  est  déterminé  à  ces  mesures 
par  la  crainte  de  voir  les  débris  de  l'insurrection  polonaise 
refluer  vers  la  Gallicie,  et  s*établir  de  nouveau  dans  les 
palatinats  de  Cracovie  et  de  Sandomir^  où  la  révolution  a 
d*abord  éclaté. 
Plusieurs  bataillons  qui  étaient  dans  les  districts  de 

~Pilsner  et  de  Gers  viennent  de  passer  par  cette  ville,  pour 
se  rendre  en  Gallicie.  D'autres  troupes  vont  prendre  inces- 

,  samment  le  môme  chemin.  Un  bataillon,  revenu  des  Pays- 

'  Bas ,  formera  la  garnison  de  Prague. 

Brème t  U  ib  décembre,  —  La  cour  de  Vienne,  par  un 
édit  du  mois  de  septembre  dernier,  avait  défendu  à  tous  les 
peuples  de  sa  domination  d'entretenir  aucune  liaison  de 
commerce  avec  les  provinces  de  France,  ni  avec  celles  tom- 
bées au  pouvoir  des  Français  ;  les  ministres  d'Autriche  ont 
proposé,  il  y  a  quelques  semaines,  à  la  diète  deRatisbonne, 
d'étendre  les  mêmes  mesures  pour  tout  l'Empire  germa- 
nique; mais  les  ministres  de  plusieurs  autres  princes 
d'Empire  y  ont  opposé  les  protestations  les  plus  formelles. 

Le  minisire  électoral  de  Saxe  soutint  qu'une  pareille  dé- 
fense serait,  dans  la  situation  actuelle  des  affaires,  plus 
nuisible  ^  plusieurs  Etals  de  l'Empire  qu'à  la  France  elle* 
même. 

Bonn^  U  6  décembre,  —  Le  corps'  autrichien  destiné  à 
concourir  à  la  défense  de  la  Hollande,  et  commandé  par 
le  général  Alvinzi,  a  son  quartier  général  k  Louisbourg.  Le 
général  Werneck,  qui  coounande  sous  lui,  a  le  sien  à 
Emmerich. 

•—  Le  général  Jettvitz  est  arrivé  le  3i  à  Dusseldorf,  et 
en  a  pris  le  commandement  à  la  place  du  général  Lamotjle. 

—  La  régence  d'Hanovre  se  dispose,  dit-on  ^  à  faire 
marcher  quinze  bataillons  et  seize  escadrons  vers  les  fron- 
tières du  pays  de  Munster  et  d'Osnabrûck,  aCn  de  les 
mettre  à  couvert. 

—  11  vient  d';êlre  ordonné  de  travailler  à  la  réparation 
des  chemins  depuis  Cologne  jusqu'à  Liège.  Les  magistrats 
des  communes  situées  dans  les  quatre  lieues  de  rayon  des 
grandes  routes  sont  invités  à  envoyer  des  travailleurs  de 
l'âge  de  dix-huit  ans  jusqu'à  celui  de  cinquante. 

—  Les  Autrichiens  ont  mis  en  état  de  défense  la  rive 
droite  du  Hhin ,  surtout  entre  Emmcricli  et  Pandcro,  lieu 
où  le  Rhin  a  beaucoup  d'Iles  et  fait  un  grand  nombre  de 
coudes. 

—  La  place  de  Gra?e  continue  à  se  défendre  avec  opi- 
niâtreté, quoique  les  habitations  intérieures  soient  pres« 
que  entièrement  détruites. 

Le  prince  d'Orange  a  fait  un  mouvement  %ux  environs 
de  Gorcum,  dans  la  vue  de  marcher  pour  secourir  Grave 
ou  Bréda* 

—  Le  local  des  ci-devant  Chartreux,  à  BruxelUs,  va 
êtreiransformé  en  un  vaste  arsenal.  La  fonderie  des  canons 
est  déjà  en  pleine  activité,  et  les  autres  parties  sont  plus 
avancées  encore. 

—  Une  grande  quantité  de  chariots  sont  occupés  h  trans- 
porter en  Flandre  beaucoup  de  bois  de  conslruclion,  qui 
seront  ensuite  embarqués  sur  les  canaux  de  Bruges  et  de 
Fumes,  d'où  ils  passeront  à  Oslcnde  et  à  Duukerque,  et 
de  là  dam  différents  port^  de  laTépublique. 

ANGLETERRE. 

Londres^  U  38  novembre,  —  Le  ministre  américain, 
M.  Jay,  dont  on  avait  annoncé  le  départ  pour  Paris,  n'y 
va  pas  encore  ;  il  attendra  1^  ratification  du  traité  de  com- 

f  Série. -^  Tome  X, 


merce  entre  TAngleterre  et  les  Etats-Unis.  Ce  retard  semble 
être  un  indice  déplus  de  la  conlinution  de  la  guerre;  tout 
en  effet  parait  l'annoncer.  On  parle  toujours  de  presser  les 
nouvelles  levées  et  de  mettre  la  marine  sur  le  pied  le  plus 
formiduble.  Cependant  il  y  a  un  obstacle  presque  insur-  , 
montable  à  ces  mesures;  les  vaisseaux' ni  l'argent  ne  man- 
quent point,  mais  on  n'a  pas  su£Qsamment  d'hommes  pour 
les  équiper. 

Malgré  cette  disette  d'hommes,  on  a  donné  Tordre  d'é- 
quiper une  escadre  qui  se  rendra  dans  la  mer  du  Nord ,  où 
les  Français  ont  longtemps  nui  et  nuisent  encore  au  com« 
merce  britannique. 

i—  L*amiral  Howe  continue  de  tenir  la  mer;  il  a  établi 
sa  croisière  entre  l'embouchure  de  la  Manche  et  la  latitude 
de  Brest,  pour  assure»  le  passage  des  flottes  marchandes 
de  Lisbonne,  de  Cadix  et  d'Oporto,  les  plus  riches  qui 
depuis  longtems  soient  arrivées  en  Angleterre.  On  assure 
que  les  vaisseaux  de  guerre  qui  les  convoient  ont  beaucoup 
d'espèces  à  bord. 

—  L'amiral  Hood ,  nouvellement  arrivé  en  Angleterre, 
a  été  gratifié  d'une  pairie  d'Iriande.  Le  comte  Fitz-William , 
nommé  à  la  vice-royauté  de  ce  pays,  a  reçu  ses  pouvoirs 
dans  un  conseil  tenu  mercredi.  Ce,  lord  lieutenant  est  di) 
parti  Portiand,  et  remplissait  la  présidence  du  conseil  privé 
du  roi ,  qui  devient  vacante. 

—  Hier  le  greffier  des  états  généraux  a  pris  congé  du  roi, 
dont  il  a  reçu  l'accueil  le  plus  distingué;  mais  on  n'en  sait 
pas  davantage  si  M.  Fagel  est  parvenu  à  rcn^plir  l'objet  de 
sa  mission. 

—  On  attend  incessamment  à  Londres  le  duc  d'York , 
à  qui  l'on  a  retiré  le  commandement  de  l'armée  anglaise 
en  Hollande,  et  que  rappelle  d'ailleurs  le  mariage  du  prince 
tie  Galles ,  son  frère,  qui  doit  se  célébrer  le  i  2  janvier. 


REPUBLIQUE  FRANÇAISE.' 

Paris,  le  9  nivôse,  —  Voici  Textrait  d*une  lettre 
de  Genève,  du  30  frimaire  : 

«  L'Espagne  avait  proposé  à  la  république  du  Va- 
lais une  capitulation  pour  un  re'gitnent  à  sa  solde', 
qu*elle  espérait  lever  dans  ce  pays. 

«  La  diète  du  Valais,  assemblée  en  ce  moment  à 
Sion,  a  été  appelée  à  délibérer  sur  cette  proposition, 
pour  le  succès  de  laquelle  l'ambassadeur  d  Espngne 
en  Suisse  avait  fait  beaucoup  de  démarches  et  ré- 
pandu beaucoup  d'argent. 

-  Malgré  les  efforts  de  ce  ministre,  le^  intrigues 
de  ces  agents  de  la  coalition  et  les  conditions  avan- 
tageuses faites  par  l'Espagne,  qui  se  chargeait' de 
totis  les  frais  d'armement  et  de  recrutement,  le  pro- 
jet a  échoué.  La  proposition  a  été  rejetée  à  la  majo- 
rité des  dizains.  La  diète  a  fort  bien  senti  que  le  Va- 
lais n'aurait  pu  déférer  au  vœu  de  l'Espagne  sans 
déplaire  au  gouvernement  français  et  sans  contrarier 
les  principes  de  la  neutralité  helvétique. 

•  Il  ne  fai»t  pas  attribuer  cette  résistance  du  Valais 
aux  derniers  avantages  qu'ont  obtenus  les  Français; 
car  la  nouvelle  n'en  était  pas  encore  parvenue  dans 
le  pays,  lorsque  la  diète  s'est  déterminée  à  un  refus. 

•  La  fermeté  et  la  prudence  qu'ont  déployées  dans 
cette  occasion  les  dizains,  et  surtout  celui  de  Siou, 
vont  donner  une  nouvelle  impulsion  à  la  marche  du« 
gouvernement  valaisan,  et  atterrer  les  intrigants  el 
malveillants,  qui  se  flattaient  que  l'opinion  du  pays 
leur  serait  plus  favorable.  »^ 

40 


74 


TBIDU9AL  CBIMINEL  BÉVOLUTIONflAlBB. 


Jugement  rendu  à  la  tuite  de  la  procédure  contre 
Carrier  et  le  comité  révolutionnaire  de  Nantes ^ 
le  26  frimaire. 

Vu  la  déclaration  du  jury,  portant  quil  est  con- 
stant qu*il  a  existé  dans  le  département  de  la  Loire- 
,  Inférieure,  et  particulièrement  à  Nantes,  des  ma- 
nœuvres et  intelligences  contre  la  sûreté  du  peuple 
et  la  liberté  des  citoyens  ;  en  ordonnant  et  commet- 
tant des  actes  arbitraires  ;  en  ordonnant  d'exécuter, 
sans  jugement,  des  brigands,  parmi  lesquels  il  y 
avait  des  femmes  et  des  entants;  en  disposant  de  la 
vie  des  citoyens  qui  n^étaient  point  brigands;  en  fai- 
.  sant  cruellement  périr  par  des  noyades  et  des  fusil- 
lades des  prêtres  sujets  à  la  déportation,  et  des  ci- 
toyens contre  lesquels  il  n*y  avait  aucune  preuve  de 
délit,  ou  qui  expiaient  par  une  détention  momen- 
tanée une  faute  légère;  en  s*emparanl  des  fortunes 
et  des  propriétés  ;  en  comprimant,  par  la  terreur, 
tous  les  citoyens;  en  armant  les  citoyens  les  uns 
contre  les  antres  ;  en  abusant  des  pouvoirs  délégués 
par  le  peuple  (la  déclaration  du  jury  a  été  affirma- 
tive sur  tous  ces  points,  à  Texception  de  celui  qui 
porte  :  en  armant  les  citoyens  les  uns  contre  les  au- 
tres) ; 

I.  Que  J.-B.  Carrier ,  représentant  du  peuple , 
s*est  rendu  auteur  ou  complice  d'aucun  de  ces 
faits,  qu1l  a  cherché  à  avilir  la  représentation  na- 
tionale : 

to  En  donnant,  les  27  et  29  frimaire,  l'ordre  à 
Phelippes-Troncjolly,  président  du  tribunal  criminel 
du  département  de  la  Loire-Inférieure,  de  faire  exé- 
cuter sur-le-champ,  et  sans  jugement,  des  brigands 
parmi  lesquels  étaient  des  enfants  et  aes  femmes  ; 

2®  En  faisant  poyer  et  fusiller  un  grand  nombre 
(le  brigands  qui  avaient  déposé  leurs  armes,  à  la  fa- 
veur (l  une  amnistie  ; 

3«>  En  faisant  subir  le  même  sort  à  Quatre-vingts 
et  quelques  cavaliers  qui  s'étaient  volontairement 
rendus,  et  promettaient  de  livrer  leurs  chefs,  si  on 
leur  accordait  la  vie; 

40  En  ordonnant  ou  tolérant^des  noyades  d'hom- 
mes, d'enfants  et  de  femmes  ; 

50  En  donnant  des  pouvoirs  illimités  à  Lambertye, 
qui  s'en  servait  pour  noyer  hommes,  femmes  et  en- 
fants; 

60  En  défendant  de  reconnaître  l'autorité  de  Tré- 
houard,  représentantdu  peuple,  envoyé  en  mission 
dans  le  département  du  Morbihan,  parce  qu'il  avait 
fait  arrêter  le  nommé  Lebalteux,  à  qui  il  avait  con- 
féré des  pouvoirs  absolus  dont  il  abusait,  pour  lever 
des  taxes  arbitraires,  et  condamner  à  mort  les  ci- 
toyens qu'il  lui  plaisait  de  désigner  ; 

70  En  donnant  l'ordre  au  général  Haxo  de  faire 
exterminer  tous  les  habitants  de  la  Vendée,  et  d'in* 
ceudier  toutes  leurs  habitations  ; 

80  En  donnant  à  chacun  des  membres  de  la  com- 
pagnie Marat  des  pouvoirs  illimités  dont  ils  abu- 
saient pour  attenter  à  la  liberté  des  citoyens  : 

II.  QueMoreau  Grandmaison  est  auteur  ou  corn- 

F  lice  de  ces  manœuvres  et  intelligences,  en  signant 
ordre  du  15  frimaire  de  fusiller;  celui  donné  à  Af- 
filé, charpentier;  celui  du  24  trimaire  ;  en  assistant 
à  la  noyade,  et  mutilant  les  victimes  qu'il  a  conduites 
a  la  mort,  etc.  ; 

III.  Que  Pinard  est  auteur  ou  complice  de  ces  ma* 
nœuvres  et  intriligenees,  en  exécutant  les  ordres  les 
plus  arbitraires;  en  tuantet  massacrant  impitoyable- 
ment femmes  et  enfants  ;  en  volant  4,800  livres  à  la 
famille  Labauche;  eu  iuceodiant  tout  dans  les  cou<^ 


trées  qu'il  parcourait,  et  de  ravoir  fait  avec  des  in- 
tentions criminelles  et  contre-révolutionnaires; 

Le  tribunal  a  condamné  les  trois  susnommés  à  la 
peine  de  mort.  ' 

IV.  Que  Goulin  s'est  rendu  auteur  ou  complice  de 
ces  manœuvres  et  intelligences ,  en  donnant  et  si- 
gnant l'ordre  du  15  frimaire,  pour  faire  fusiller  cent 
trente-deux  prisonniers  pris  au  Bouffay  ;  en  signant 
et  donnant  des  ordres  a  Affilé,  pour  construire  les 
bateaux  à  soupape,  qui  ont  servi  aux  différentes 
noyades  ;  en  signant  uo  ordre  de  déportation  décent 
cinquante-cinq  individus  oui  ont  été  noyés  la  nuit  du 
24  frimaire  ;  en  assistant  a  l'extraction  des  prison- 
niers, et  en  les  conduisant  au  bateau  avec  lequel  ils 
ont  été  engloutis;  en  imprimant -la  terreur  par  des 
actes  arbitraires  ;  en  abusant  de  ses  pouvoirs  pour 
faire  incarcérer  sans  examen  des  citoyens  paisibles  ; 
en  levant  des  taxes  arbitraires,  et  traitant  avec  déri- 
sion les  malheureux  qu'il  fiiisait  injustement  incar- 
cérer, etc.; 

V.  Que  Chaux  s'est  rendu  auteur  ou  complice  de 
ces  manœuvres  ou  intelligences,  en  signant,  le  15 
pluviôse,  un  ordre  donné  à  Forget  de  faire  transférer 
a  sa  galliote  tous  lés  mauvais  sujets  qu'il  jugera  sus- 
ceptibles de  sortir  de  la  maison  d'arrêt  de  Sainte- 
Glaire  ;  en  exigeant  des  taxes  vexatoires,  en  com- 
primant l'énergie  des  citoyens,  en  ordonnant  et 
signant  des  arrestations  arbitraires  et  illéples,  et  cq 
violant  les  droits  de  propriété;  mais  qu!il  n'est  pas 
constant  que  ledit  Cnaux  ait  exigé  des  taxes  vexa- 
toires, imprimé  la  terreur  et  signé  les  arrestations 
arbitraires  et  illégales,  violé  les  droits  de  propriété 
en  abusant  de  ses  fonctions  ; 

VI.  Que  Bachelier  est  auteur  ou  complice,  etc., 
en  signant  les  ordres  donnés  à  Affilé,  en  participant 
aux  autres  opérations  du  comité,  en  signant  des  ar- 
restations arbitraires,  en  imposant  des  taxes  vexa- 
toires, en  s'appropriant  les  pièces  d'argenterie  prises 
chez  des  citoyens  arrêtés  comme  suspects  ; 

VII.  Que  Perrochaux  estauteur  ou  complice,  etc., 
en  signant  l'ordre  du  15  pluviôse,  en  assistant  à 
toutes  les  délibérations  du  comité,  en  y  donnant 
son  adhésion,  en  imprimant  la  terreur  par  des  actes 
et  incarcérations  arbitraires,  en  opprimant  les  pa- 
triotes, et  en  échangeant  pour  des  assignats  l'ar- 
gent qu'on  enlevait  chez  des  particuliers  qu'on  ar- 
rêtait; 

VIII.  Que  Mainguet  est  auteur  ou  complice,  etc., 
en  signant  l'ordre  du  15  frimaire,  en  coopérant  à  la 
noyade  du  24  frimaire,  en  signant  et  donnant  des 
ordres  arbitraires,  en  imprimant  la  terreur,  en  levant 
des  taxes  vexatoires ,  en  changeant  des  assignats 
pour  de  l'argenterie  enlevée  chez  des  citoyens  arrê- 
tés comme  suspects  ; 

IX.  Que  Lévéque  est  auteur  ou  complice,  etc.,  en 
signant  l'arrêté  de  déportation  du  24  frimaire,  en 
donnant  des  ordres  arbitraires,  en  imprimant  la  ter- 
reur et  en  exigeant  des  taxes  vexatoires,  en  parta- 
geant les  opérations  du  comité  ; 

X.  Que  L.  Naud  estauteur  ou  complice,  etc.,  en 
signant  les  trois  ordres  donnés  à  Affilé,  celui  du  24 
frimaire  et  celui  du  15  pluviôse,  en  signant  des  ar* 
restations  arbitraires,  etc.  ; 

XI.  Que  Bolognie  s'est  rendu  auteur  ou  com- 

Plice,  etc.,  en  signant*  les  ordres  donnés  à  Affilé, 
arrête  de  déporUition  du  24  frimaire  et  l'ordre  du 
15  pluviôse,  en  ordonnant  et  signant  des  actes  arbi- 
traires, etc.  ; 
.      XII.  Que  Durassier  est  auteur  ou  complice,  etc., 
I  en  exécutant  les  ordres  arbitraires  du  comité,  en  ap« 


75 


pelant  etdésignnntles  victimes  qui  ont  été  conduites 
a  la  noyade  du  24  frimaire,  etc.  ; 

XUI.  Que  Jolly  est  auteur  ou  complice,  en  exécu- 
tant le^  ordres  arbitraires  du  comité,  en  liant  les 
victimes  destinées  aux  noyades,  fusillades,  etc.  ; 

XV.  QueR.  Naud  est  auteurou  complice,  etc.,  en 
exécutant  les  ordres  du  comité  et  en  assistant,  sur 
la  gabare,  à  la  noyade  du  24  frimaire  ; 

XVI.  Que  Chartier  est  auteur  ou  complice ,  etc. , 
en  exécutant  et  obéissant  aux  actes  arbitraires  du 
comité,  en  conduisant  du  Bouffay  jusq^u'au  port  les 
personnes  qui  ont  été  noyées ,  la  nuit  du  24  fri- 
maire, etc.  ; 

XVI.  QueDucou  est  auteur  ou  complice,  etc.,  en 
liant  les  prisonniers  du  Bouflfay,  en  les  conduisante 
la  gabare,  en  assistant  à  la  noyade,  etc.  ; 

XVII.  Que  Coron  est  auteur  ou  complice,  etc., en 
exôcutanlles  ordres  du  comité,  en  coopérant  à  Tex- 
traction  et  à  la  conduite  des  détenus  jusqu*au  port  ; 

XVni.  Que  Boursy  est  auteur  ou  complice,  en 
exécutant  les  ordres  du  comité,  en  assistant,  sur  la 
gabare,  à  la  noyade  du  24  ft-imairc  ; 

XIX.  Que  Boulay  est  auteur  ou  complice,  etc.,  en 
exécutant  les  ordres  du  comité,  en  assistant  sur  la 
gabare  à  la  noyade  du  24  frimaire  ; 

XX.  Que  Gauthier  est  auteur  ou  complice,  etc., 
en  exécutant.les  ordres  arbitraires  du  comité,  en  as- 
sistant sur  la  gabare  à  la  noyade  du  24  trimaire,  et 
à  plusieurs  autres  noyades  ; 

XXI.  Que  Guilletest  auteur  ou  complice,  etc.,  en 
signant  I  ordre  à  Affilé,  en  signant  la  déportation  du 
24  ftimaire,  en  ordonnant  des  actes  arbitraires,  en 
imprlmatit  la  terreur  et  en  abusant  de  ses  pouvoirs; 

XXII.  Que  Crepin  est  auteur  ou  complice,  etc., 
en  exécutant  les  ordres  du  comité,  en  assistant  sur 
la  gabare  i  la  noyade  du  24  frimaire  ; 

XXIIL  Que  Ridiard  est  auteur  ou  complice,  etc., 
en  exécutant  les  ordres  du  comité,  en  préparant  une 
noyade  de  prêtres,  se  disputant  avec  Lambertye  l'a- 
vantage de  la  faire,  se  saisissant  de  leurs  dépouilles 
qu'il  emporta  chez  lui,  et  qu*il  ne  rendit  que  vingt- 

auatre  heures  après,  sans  au  préalable  en  avoir  ren- 
u  un  compte  fidèle; 

XXIV.  Que  Foucault  est  auteur  ou  complice,  etc., 
en  coopérant  et  assistant  à  plusieurs  noyades,  et 
donnant  des  ordres  à  des  militaires  pour  assister  à 
une  noyade  faite  à  Paimbœuf  ;  , 

XXV.  Que'CySullivan  est  auteur  ou  complice,  etc., 
en  coopérant  à  diflR^rentes  noyades  ,  en  exerçant 
des  cruautés  inouïes  envers  les  victimes  qu*il  livrait 
aux  flots  ; 

XXVI.  Qne  Robiaest  anteur  ou  complice,  etc.,  en 
assistant  etcoopérant  aux  noyades  ; 

XXVII.  Qu'il  est  constant  qne  Lefèvre  a  ordonné 
et  fait  exécuter  nne^  noyade  d'hommes,  de  femmes  çt 
d'enfants,  et  a  commis  des  actes  arbitraires; 

XXVIII.  Qu'il  est  constant  que  Macé  a  exécuté 
des  ordres  arbitraires,  en  faisant  une  noyade  à  Paim- 
bœuf; 

XXIX.  Qu'il  est  constant  que  Dheron  a  commis 
des  assassinats  d'enfants,  porté  publiquement  à  son 
chapeau  nne  oreille  d'homme  qu'il  avait  tué,  et 
tué  deux  enfants  qui  gardaient  paisiblement  leurs 
troupeaux  ; 

XXX.  Qu'il  est  constant  que  Forget  a  pris  part  à 
tout  ce  qui  s'est  passé  à  Nantes,  et  a  proposé  de  faire 
juger  en  masse  les  prisonniers,  et  coopéré  aux  listes 
faites  la  nuit  du  15  rriuiaire,  pour  fusiller  les  prison- 
niers; 


XXXI.  Que  Proust  est  anlenr  ou  complice,  en  si- 
gnant les  ordres  donnés  à  Affilé;  en  donnant  des  or- 
ares  arbitraires  et  en  comprimant  les  citoyens  par  la 
terreur  ; 

I>ous  convaincus,  etc.,  mais  ne  l'ayant  pas  fait 
avec  des  intentions  criminelles  et  contre -révolu- 
tionnaires, le  tribunal  les  a  acquittés  et  mis  en  li- 
berté. 

XXXII.  Gallon,  non  convaincu  d'avoir  exécuté  les 
ordres  qui  lui  étaient  donnés  par  le  comité; 

XXXIII.  Vie,  non  convaincu  d'avoir  exécuté  les 
ordres  arbitrairesdu  comité;  de  s'être  trouvé  présent 
à  l'extraction  des  prisonniers  du  BoiiflTay,  etc.,  ont 
été  également  acquittés  et  mis  en  liberté. 


Trésorerie  nationale.  —  Liquidation  dé  la  dette 
publique  viagère. 

Les  créanciers  de  la  dette  viagère  sont  avertis  que  les 
inscriptions  des  leUres  initiales  F  et  G  des  parties  consti- 
tuées sur  une  seule  tôle,  sans  expectative  ni  survie,  pour- 
ront être  retirées  primidi  prochain  ii  nivôse,  au  bureau 
établi  à  cet  cQet,  rue  Viviennê,  en  face  de  la  trésorerie. 
Le  payement  sera  effectué  de  suite  à  bureau  ouvert. 

Ceuï  qui  viendront  retirer  les  inscriptions  auront  soin 
d  écrire  au  dos  du  bulletin  de  remise  dont  ils  sont  porteurs 
une  décharge  conçue  en  ees  termes  : 

•  Reçu  Pinscription  viagère  de  la  somme  de 
au  nom  de 

oA  PariSf  ce 0 


Lycée  républicain. 

Le  Lycée'républlcain,  consacré  depuis  neuf  ans  ft  Tîn- 
structioo,  ouvrira  ses  cours  primidi  11  nivôse,  à  six  heu- 
res du  soir.  Il  y  sera  prononcé,  dans  cette  séance,  un 
discours  sur  la  guerre  déclarée  par  les  derniers  tyrans  à  la 
raison,  à  la  morale,  aux  lettres  et  aux  arts,  par  le  citoyen 
Laharpe  ;  un  discours  politique  sur  la  Hollande  et  TAngle- 
terre,  par  le  citoyen  Leboc;  un  autre  sur  les  troubles  de 
la  république  de  Florence  et  sur  le  Dante»  par  le  citoyen 
Boldoni  ;  et  le  citoyen  Laharpe  la  terminera  par  la  lecture 
d'un  chant  de  la  Pbarsale* 

D'après  le  vœu  d'un  grand  nombre  de  citoyens  qui  con» 
sacrent  leurs  travaux  ù  la  chose  publique,  les  deux  séances 
décadaires  du  cours  de  littérature  républicaine  auront  lieii 
le  soir.  Celle  qui  suivra  Touverture  est  fixée  au  septidi  17 
nivôse  t  le  sujet  sera  :  Introduction  au  cours  de  littérature, 
ou  idées  générales  sur  Tart  d'écrire,  sur  le  goût  et  le  génie. 
Quelques-unes  des  séances  suivantes  seront  consacrées, 
comme  il  est  dit  dans  le  programme,  à  faire  connaître 
Tabus  des  mots  de  la  langue  appelée  révolutionnaire.  Les 
autres  cours  du  Lycée  seront  proiessés  dans  Tordre  indiqué 
au  prospectus.  Ceux  de  Grammaire  philosophique,  par  le 
citoyen  Sicard ,  et  de  TArt  de  la  représentation  théâtrale, 
par  le  citoyen  Mole,  ne  pourront  s'ouvrir  dans  la  première 
décade. 

On  s*abonne  au  Lycée  républicain ,  rue  Honoré,  près  la 
place  delà  maison  Egalité,  où  Ton  trouve  le  prospectus  et 
de  plus  amples  renseignements. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Préiidenee  de  Bentabole» 
SÉANCE  DU  8  NIVOSE. 

Paganel,  au  nom  du  comité  des  secours  publics  : 
La  lille  de  notre  collègue  Beauvais,  décédé  à  Toulon 
«lartyrde  la  liberté,  gémit  dans  rindigcnce.  Vous 
vous  empresserez  de  venir  à  son  secours,  et  je  viens 
en  conséquence  proposer  le  décret  suivant,  au  nom 
de  votre  comité  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  secours  publics,  décrète 


76 


queîa  citoyenne  Caroline  Beaiivais,  fille  de  Beau- 
vais,  repr(?spnlanldii  po«ple  et  martyr  de  la  liberté, 
recrvra  annuellement,  à  litre  de  secoure,  la  somme 
de  ]«500liv.« 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

*-  Sur  la  proposition  de  Paganel,  le  décret  sui- 
vant est  rendu  : 

«La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
]e  comité  des  secours  publics,  décrète  : 

•  Art.  l«r.  Les  dispositions  de  la  loi  du  27  vendé- 
miaire dernier,  relative  aux  colons  déportés,  seront 
appliquées  aux  habitants  deSaint-Domingue  ou  d'au- 
tr(*s  colonies  françaises,  domiciliés  en  France  avant 
l'époque  des  troubles  survenus  dans  lesdites  colo- 
nies, et  dont  les  propriétés  ont  été  dévastées  ou  dé- 
truites par  les  ennemis  de  la  république. 

«  11.  Ceux  desdits  colons  qui  demanderont  à  jouir 
du  bienfait  de  la  loi  du  27  vendémiaire  seront  tenus 
de  constater  leur  indigence,  et  de  faire  certifier,  soit 
par  des  autorités  constituées,'soit  par  des  représen- 
tants du  peuple  de  leur  députation,  soit  par  les  cor- 
respondants avec  lesquels  ils  traitaient,  dans  les 
ports  ou  villes  de  commerce  de  la  république  pen- 
dant leur  habitation  en  France,  et  avant  les  désas- 
tres des  colonies,  des  productions  coloniales  prove- 
nant de  leurs  propriétés. 

«m.  Les  enfants  des  colons  de  Saint-Domingue 
ou  d'autres  îles  françaises,  domiciliés  en  France 
avant  l'époque  des  troubles  des  colonies,  âgés  de 
douze  ans,  seront  reçus  parmi  le^  Enfants  de  la  Pa- 
trie. 

«  IV.  Ne  seront  pas  compris  dans  le  présent  dé- 
cret ceux  des  colons  appelés  à  la  défense  de  la  pa- 
trie par  les  lois  du  23  août  1793  (vieux  style). 

«V.  Les  colons  indigents  qui  ne  satisferont  pas  à 
toutes  les  conditions  exigées  par  Tarticle  II  du  pré- 
sent décret  recevront,  dans  la  commune  de  leur  do- 
micile, les  secours  communs,  ainsi  que  tous  les  au- 
tres indigents. 

•  VI.  Ces  secours  seront  payés  aux  colons  qui  y 
auront  droit,  d'après  les  dispositions  du  présent  dé- 
cret, à  compterdu  27  vendémiaire  dernier.  • 

Sur  la  proposition  de  Brunel,  la  Convention  adopte 
]*article  additionnel  suivant  : 

•  Le  présent  décret  sera  également  applicable  aux 
colons  des  îles  de  France,  et  de  la  Réunion,  aux  ha- 
hitanls  de  Pondichéry  et  d'autres  établissements 
français  au  delà  du  cap  de  Bonne-Espérance,  avec 
lesquels  leur  communication  est  retardée  ou  inter- 
dite, en  se  conformant  aux  articles  précédents  pour 
ce  qui  les  concerne.» 

:—  Un  des  secrétaires  donne  lecture  de  la  lettre 
suivante  : 

Let  représentants  du  peuple  délégués  par  la  Con- 
vention nationale  dans  tes  départements  des  Bou- 
r^€8-du-Rhône,  du  Var,  et  dans  les  ports  de  la 
Méditerranée,  à  la  Convenliou  nationale. 

Marseille,  le  28  Tri  maire,  Tan  3«  de  la  république 
une  et  indivi«ible. 

«  Citoyens  collègues,  vous  avez  voulu  rendre  au 
commerce  sa  liberté  et  son  énergie  :  la  loi  du  6  fri- 
maire est  un  premier  bienfait  qui  en  présage  beau- 
coup d'autres.  Placés  dans  les  départements  pour 
seconder  vos  vues,  nous  nous  sommes  réunis  pour 
prendre  les  mesures  nécessaires  pour  imprimer  au 
commerce  anéanti  de  cette  grande  ville  le  premier 
mouvement  d'une  vie  nouvelle  ;  nous  avons,  en  cou- 
séquence,  rendu  de  concert  et  fait  publier  l'arrêté 
dont  nous  joignons  ici  copie,  et  que  nous  soumettons 
à  votre  examen. 

•Hais,  quels  que  soient  noseffortspour  encoura- 


ger le  commerce,  ils  seront  impuissants  tint  qtiela 
Convention  nationale  hésitera  sur  le  retour  indis- 
pensable aux  principes,  dont  les  circonstances  impé^ 
rieuses  avaient  fait  une  nécessité  de  s'écarter.  La  loi 
du  6  frimaire,  tout  avantageuse  qu'elle  est,  n'atteint 
pas  le  but  que  vous  vous  êtes  proposé. 

•  D'abord  elle  n'est  pas  conçue  en  termes  assez 
précis  pour  rassurer  le  négociant  sur  le  sort  de  ses 
spéculations.  Il  y  est  bien  dit  que  •  Ceux  qui  im- 
porteront des  matières  premières  en  auront  la  libre 
disposition.  •  Mais  aue  doit-on  entendre  par  là? 
avez-vous  voulu  simplement  affranchir  ces  marchan- 
dises du  droit  de  réquisition  et  de  préemption  ?  ou 
bien  la  liberté  que  vous  accordez  est-elle  absolue; 
en  sorte  que  le  négociant  qui  achètera  cher,  puisse 
vendre  à  un  prix  proportionné  à  celui  de  l'achat,  et 
qui  ne  soit  point  çéne  parla  loi  du  maximum?  Mais, 
si  telle  est  votre  intention,  il  faut  l'énoncer  claire- 
ment, sans  quoi,  nous  ne  concevons  pas  que  la  con- 
fiance puisse  renaître.  - 

«Une  seconde  observation  qui  se  déduit  naturel- 
lement de  la  première,  c'est  que  si  le  maximum  est 
aboli  sur  les  matières  prenuères  apportées  de  l'étran- 
ger, il  ne  peut  pas  subsister  sur  les  marchandises 
manufacturées  (^ui  en  proviendront.  Quel  est  le  fa- 
bricant (fui  achètera  des  matières,  qui  les  soumettra 
aux  différentes  préparations  qu'elles  exigent,  pour 
livrer  ensuite  les  produits  de  son  industrie  à  des 
prix  plus  bas  que  ceux  de  la  matière  elle-même?  Il 
est  évident  que  la  loi  du  maximum  doit  être  rappor- 
tée, ou  qu'il  faut  renoncer  au  projet  de  ressusciter  ie 
commerce. 

•  Nous  souffrons  que,  dans  tous  nos  ports  de  la 
Méditerranée,  des  Génois  viennent  nous  vendre  chè- 
rement les  denrées  les  plus  communes  de  la  vie.  Il 
n'y  a  pour  eux  ni  loi  du  maximum,  ni  gêne,  ni  en- 
trave ;  ils  enlèvent  notre  numéraire  ;  ils  accaparent 
nos  marchandises  ;  ils  sont  un  vrai  fléau  pour  ces 
contrées,  et  nous  ne  rendrions  pa^  à  des  Français  la 
liberté  nécessaire  pour  nous  débarrasser  de  ces  étran- 
gers avides  qui  s'engraissent  de  la  plus  pure  sub- 
stance de  notre  sang  ;  nous  ne  leur  permettrions  pas 
au  moins  de  travailler  en  concurrence  avec  eux  ! 

«L'esprit  de  ce  pays  change  tous  les  jours;  il 
changera  bien  davantage  encore  quand  la  Conven- 
tion nationale  jettera  sur  lui  un  regard  vivifiant.  Le 
commerce  peut  y  reprendre  vigueur  en  assez  peu  de 
temps;  et  le  gouvernement  y  gagnera  non-seule- 
ment la  satisfaction  précieuse  du  bien  qu'il  aura  fait, 
fiais  encore  l'avantage  de  pouvoir  se  passser  de  ces 
nombreuses  agences  qui  font  le  commerce  pour  lui 
et  en  son  nom,  et  qui  jouissent  d'autant  de  privilèges 
exclusifs  qu'il  faut  enfin  détruire. 

«  Salut  et  fraternité. 

•  Signé  MoBRiBTTB,  Jean-Bon  Saint-André, 
EsPERT  et  Cadroy,  représentants  dupeuple.» 

Cette  lettre  est  renvoyée  aux  comités  de  salut  pu- 
blic, de  commerce  et  d'approvisionnements. 

On  lit  ensuite  l'arrêté  des  représentants  du  peuple, 
dont  voici  les  articles  : 

«  Art.  I®'.  En  conséquence  de  la  loi  du  6  frimaire, 
tous  négociants,  marchands  et  autres  citoyens  fran- 
çais qui  voudront  se  livrer  à  des  spéculations  relati- 
ves à  l'importation  des  matières  premières,  denrées 
et  subsistances  nécessaires  à  l'approvisionnement 
des  citoyens,  des  manulactures  et  des  chantiers  et 
ateliers  de  la  république,  pourront  le  faire  libre- 
ment, sans  avoir  besoin  d'une  permission  expresse 
et  particulière  des  représentant  du  peuple,  ou  de 
toute  autre  autorité  supérieure. 

«  11.  Les  lois  et  règlements  relatifs  à  la  police  ma- 
ritime et  civile»  et  celles  qui  Ont  pour  objet  de  pré- 


Tenir  les  émigrations  oa  les  relations  avec  les  émi- 
grés et  autres  ennemis  intérieurs  et  extérieurs  de  la 
république,  continueront  néanmoins  d'être  exécu- 
tées avec  la  plus  religieuse  surveillance. 

•  111.  En  attendant  que  les  circonstances  pcrmet- 
mettent  d^accorder  des  escortes  aux  bâtiments  desti- 
nés pour  les  expéditions  éloignées,  ceux  qui  pour- 
ront naviguer  le  long  des  cotes  seront  mis  sous  la 
protection  des  vaisseaux  de  la  république,  et  il  sera 
pris  à  cet  égard  des  mesures  pour  que  leur  sûreté  ne 
soit  pas  compromise. 

•  IV.  Les  officiers  des  classes  veilleront  avec  soin 
à  ce  que  les  équipages  des  bâtiments  de  commerce 
n'enlèvent  pas  à  la  marine  de  la  république  les  ma- 
rins dont  elle  a  besoin  pour  ses  armements,  et  ils 
demeurent  responsables  des  abus  qu'ils  n'auront  pas 
prévenus. 

•  V.  Les  jeunes  gens  de  la  première  réquisition 
qui  ne  sont  eqcore  attachés  à  aucun  bataillon  pour- 
ront étro  embarqués  sur  lesdits  bâtiments  comme 
novices. 

«VI.  Tout  autre  individu  non  classé,  qui  aurait 
passé  rage  de  la  réquisition,  pourra  pareillement  y 
être  employé;  et,  à  fégard  de  ceux-ci,  ils  ne  pour-' 
ront  être  inscrits  sur  la  matricule  des  classes  que  de 
leur  consentement,  ou  après  la  paix,  s'ils  contmuent 
de  s'employer  à  la  navigation. 

•  Vil.  Les  correspondances  strictement  nécessai- 
res aux  affaires  de  commerce  sont  permises;  mais,  à 
l'égard  des  lettres  envoyées  dans  l'étrangler,  ou  qui 
en  viendront ,  il  sera  établi  une  commission  compo- 
sée de  six  membres,  pris  parmi  les  citoyens  qui  ne 
sont  pas  en  activité  ne  commerce,  qui  sera  chargée 
d*en  faire  la  vérification.  Pour  former  cette  commis- 
sion, les  négociants  se  réuniront  à  la  loge,  en  pré- 
sence de  ragent  national  du  district  et  de  celui  de  la 
commune,  et  ils  formeront  une  liste  de  dix-huit 
personnes,  laquelle  sera  présentée  aux  représen- 
tants du  peuple,  pour  être  par  teux  définitivement 
statué  sur  le  choix  des  six  personnes  qui  doivent 
composer  la  commission.  • 

Bentabole  :  Comme  il  est  important  de  prendre 
des  précautions  pour  empêcher  les  malveillants 
d'inaiiire  le  peuple  en  erreur  sur  le  décret  par  le- 

3 uel  l'assemblée  a  rapporté  la  loi  du  maximum,  je 
emande  qu'il  soit  rédigé  une  instruction  au  peuple, 
dans  laquelle  on  rappellera  les  nombreuses  et  soli- 
des raisons  qu'on  a  lait  valoir  dans  la  Convention,  et 
aui  ont  déterminé  le  décret  qu'elle  a  rendu.  Je  vou- 
rais  aussi  que  cette  proclamation  renfermât  une 
invitation  aux  marchands  de  ne  pas  profiter  de  cette 
loi  pour  écraser  le  pauvre,  mais  de  concourir  au 
contraire  avec  l'assemblée  au  bonheur  de  tous  les 
citoyens,  en  se  contentant  d'un  gain  honnête  et  mo- 
déré. 

Taillefer  :  Il  me  semble  que  cette  proclamation 
est  superflue.  La  révocation  de  la  loi  du  maximum  a 
été  demandée  partout;  sa  nécessité  est  connue  de 
tous  les  citoyens. 

Couturier  prononce  un  discours,  à  la  suite  du- 
quel il  propose  des  mesures  additionnelles  au  décret 
{lour  tenir  le  pain  au  même  prix,  et  pour  découvrir 
es  fraudes  qui  ont  eu  lieu  à  l'ombre  aes  réquisitions. 
U  appuie  en  outre  la  proposition  de  Bentabole. 

Veau  :  J'appuie  aussi  la  proposition  faite  par  Ben- 
tabole. Je  crois  que,  lorsque  la  Convention  a  porté 
la  loi  du  maximum,  elle  était  nécessitée  par  les  cir- 
constances, et  surtout  par  TégoTsme.  Elle  l'a  rap- 
portée parce  qu'elle  était  nuisible.  Il  faut  y  substi- 
tuer l'esprit  de  fraternité;  tous  les  Français  sont 
frères,  vous  avez  leur  confiance,donnez-leur  l'exem- 
ple de  la  frateruité. 


La  Convention  décrète  la  proposition  de  Benta> 
bole,  et  charge  Johannot,  Cambacérès,  et  le  rap- 
porteur de  la  loi  de  révocation,  de  rédiger  la  proc(a« 
mation  au  peuple; 

Bailleul  :  Vous  avez  décrété  hier  qu'il  n'y  a  pas 
lieu  à  examen  de  la  conduite  de  David.  Une  suite  né- 
cessaire de  ce  décret,  c'est  qu'il  doit  être  mis  en  H- 
berté.'J'en  fais  la  motion  expresse.  (On  applaudit.) 

Letoubneur  :  11  y  a  au  bureau  une  lettre  des  élè- 
ves de  David  qui  font  la  même  demande.  J'en  vais 
donner  lecture. 

Il  lit  cette  lettre,  et  la  Convention  décrète  que  Da- 
vid sera  sur-le-champ  mis  en  liberté. 

***  :  Je  demande  qu'on  ajoute  qu'il  rentrera  dans 
la  Convention. 

Plusieurs  voix  :  C'est  de  droit  ! 

—  Merlin  (de  Douai),  au  nom  des  comités  de  sa- 
lut public,  de  législation  et  de  sûreté  générale,  re- 
produit leur  travail  sur  l'organisation  du  tribunal 
révolutionnaire ,  que  la  Convention  décréta  le  23 
thermidor ,  et  qui  fut  rapportée  quelques  jours 
après.  Il  annonce  que  les  comités  ont  cru  devoir  y 
ajouter  deux  articles;  le  premier  portant  que  les  ju- 
rés et  les  juges  seront  renouvelés  en  entier  tous  les 
trois  mois.  Le  second  est  la  réduction  des  juges  a 
douze,  au  lieu.de  vingt-quatre,  et  des  jurés  a  trente 
au  lieu  de  soixante. 

Auœ  voix  !  aux  voix!  s'écrie-t-on  de  toutes  parts. 

Laurence  :  Il  me  semble  que  le  renouvellement 
en  entier  tous  les  trois  mois  nuira  à  la  marche  des 
affaires,  et  qu'il  y  aura  du  temps  perdu.  Je  crois 
qu'il  serait  préférable  de  ne  le  renouveler  que  par 
moitié,  parce  que  les  nouveaux  juges  seront  alors 
guidés  par  ceux  qui  resteront. 

Le  Rapporteur:  Le  renouvellement  en  entier  ne 
peut  nuire  que  dans  les  instructions  où  les  affaires 
ont  une  connexité,  ce  qui  n'arrive  pas  dans  celles  ' 
qui  sont  confiées  au  tribunal.  Le  renouvellement  en 
entier  n'est  proposé  que  pour  éviter  des  abus  que  le 
renouvellement  partiel  ne  détruirait  pas. 

C^fi  grand  nombre  de  membres  :  Aux  voix,  aux 
voix,  le  décret. 

Le  décret  est  mis  aux  voix  et  adopté.  (On  applau- 
dîL) 

(Nous  donnerons  le  texte  de  cette  loi .) 

Treilharo  :  L'un  des  articles  est  conçu  de  ma- 
nière à  faire  croire  que  la  question  intentionnelle 
sera*  toujours  posée.  11  est  des  délits  qui,  comme 
ceux  de  l'émigration,  de  la  fabrication  de  faux  assi- 
gnats, ne  permettent  pas  de  douter  qu'ils  aient  été 
copfimis  avec  des  intentions  nuisibles.  Il  n'en  est  pas 
de  même  de  la  circulation  des  faux  assignats,  car  le 
plus  honnête  homme  peut  donner  un  faux  assignat 
sans  le  savoir. 

Je  voudrais  qu'on  dît  que  la  question  intention- 
nelle ne  sera  posée  que  lorsqu'il  y  aura  lieu.  (Mur- 
mures.) 

Je  demanderais  aussi  que  l'on  décrétât  que  toutes 
les  questions  seront  posées  d'une  manière  simple. 
Nous  avons  eu,  dans  l'affaire  du  comité  révolution- 
naire de  Nantes,  un  exemple  de  l'inconvénient  qu'il 
y  a  à  poser  des  questions  complexes.  Je  suppose  que 
par  esprit  de  vengeance  un  accusateur  public  fasse 
mettre  au  rang  des  condamnés  uu  nomme  qui 
n'aura  point  été  jugé  ;  il  est  évident  que  ce  fonction- 
naire sera  coupable  de  meurtre ,  mais  qu'il  ne 
l'aura  point  fait  dans  des  intentions  contre-révolu- 
tionnaires. Si  l'on  demande  simplement  au  jury  :  Le 
crime  de  meurtre  est-il  constant?  ils  répondront  ; 
Ouii  mais  si  l'on  demande  en  même  temps  :  Le  meur- 


78 


tre  est-il  cooftant»  et  a-t-il  ëtë  commis  dans  des  in- 
tentions contre-réTotutionnaires?  ils  répondront: 
iVoii.  Ainsi»  vous  les  forcez  par  là  d^absoudre  le  cou- 
pable. 

'  Lb  Bappoiteuii  :  J'adopte  la  dernière  proposition 
de  Treilhard  ;  quant  à  la  première,  j'observe  que 
Tarticle  qu'il  a  attaqué  est  copié  sur  la  loi  de  J'éta- 
blissement  des  jurés.  J*avais  déjà  eu  Tintention  de 
proposer  que  le  comité  de  législation  fût  chargé  de 
revoir  cette  loi,  dont  les  vices  sont  communs  aux 
tribunaux  criminels  ordinaires,  et  au  tribunal  révo- 
lutionnaire. Je  demande  le  renvoi. 

***  :  Je  viens  d'entendre  une  disposition  qui  per- 
met au  président  du  tribunal  de  demander  aux  ju- 
rés, après  trois  jours,  s'ils  sont  suffisamment  m- 
struits,  et,  en  cas  d'affirmative,  de  fermer  les  débals. 
*  Je  me  rappelle  aue  c'est  avec  cette  disposition  qu'on 
a,  pour  ne  rien  aire  de  plus,  précipité  desjucements 
qui  n'auraient  dû  être  rendus  qu'après  un  pTus  long 
examen.  Je  demande  que  le  délai  soit  étendu. 

Dubois  :  Il  est  un  article  de  la  loi  des  jurés  qui  me 
semble  applicable  au  tribunal  révolutionnaire  ;  c'est 
celui  qui  ordonne  que  les  jurés  ne  pourront  désem- 
parer ni  communiquer  avec  personne  jusqu'après  lé 
jugement  :  ce  moyen  me  semble  le  plus  propre  à 
sauver  l'innocence  et  à  faire  punir  le  coupable.  Des 
jurés  qui  interrompent  leurs  séances  dans  une  ville 
comme  Paris  sont  bien  plus  exposés  que  d'autres  à 
des  séductions  dangereuses.  Le  nonibre  de  leurs 
connaissances, de  leurs  amis,  des  gens  même  qu'ils 
rencontrent,  ne  serait-ce  même  qu'aux  heures  de 


et  des  suggestions  qui  les  influenceront  davantage 
que  les  débats  eux-mêmes.  Un  jury  fait  plus  de  tra- 
Tail  dans  une  séance  continue  de  quarante-huit  heu- 
'  res  qu'il  n'en  ferait  pendant  quinze  jours,  en  inter- 
rompant les  débats.Si  vous  décrétez  cettedisposition, 
ce  sera  un  avertissement  pour  l'accusateur  public 
de  rassembler  tous  les  témoins  et  toutes  les  pièces 
nécessaires  avant  de  mettre  un  homme  en  jugement. 
Si  cependant  on  croyait  nécessaire  d'accorder  aux 
jurés  un  intervalle,  soit  pour  se  reposer,  soit  pour 
prendre  des  aliments,  je  pense  que  I  on  devrait  leur 
assigner  un  local  près  du  lieu  de  leurs  séances,  pour 
empêcher  qu'ils  n'eussent  de  communication  avec 
personne. 

Toutes  les  propositions  sont  renvoyées  au  comité 
de  législation,  à  l'exception  de  celle  de  Treilhard, 
qui  avait  été  adoptée  par  le  rapporteur. 

DuHEM  :  La  loi  que  vous  venez  de  rendre  me  con- 
firme dans  l'intention  où  j'étais  de  vous  communi- 
quer les  réflexions  pour  lesquelles  j'avais  demandé 
la  parole.  Vous  venez  de  prouver  que  toute  lu  Con- 
vention veut  la  république  (on  rit  et  ou  murmure^, 
et  que  vous  ne  seconderez  jamais  le  fol  espoir  (le 
l'aristocratie  et  du  royalisme  qui  se  montre  impu- 
dcmmenljusqu'à  notre  porte,  qui  voudrait  ramener 
la  constitution  de  91,  et  nous  donner  un  roi.  (Toute 
l'assemblée  se  lève  en  criant  :  Vive  la  république!) 

Le  mouvement  sublime  qui  vient  d'avoir  lieu  no 
m'étonne  pas  et  ne  m'étonnera  jamais  ;  je  connais  fa 
Convention  sur  l'article  du  républicanisme:  cepen- 
dant il  se  répand  un  ouvrage,  qui«  je  le  sais,  a  déjà 
attiré  les  rejgards  du  comité  de  sûreté  générale.  Je 
n'en  connais  ni  l'auteur,  ni  Timprimeur;  mais  il 
prêche  l'amour  de  la  rovauté  ;  je  suis  certain  que  les 
comités  maintiendront  la  liberté  de  la  presse,  et  ils 
sauront  en  même  temps  punir  ceux  qui  prêchent 
l'aristocratie  et  le  royalisme. 


L'ouvrage  dont  Je  Tont  parle  est  intitulé  :  Le 
Sf  éclateur  flrançaù  pendant  U  gouvernement  ré- 
volulionnaire^  par  Lacroix,  ancien  profeueur  au 
Lycéen  A  Parité  chex  Buisson. 

Le  vingt-troisième  discours,  qui  est  un  dialogue 
entre  un  membre  de  la  Convention  et  l'auteur,  me 
paraît  surtout  le  plus  condamnable.  Le  rédacteur 
déclare  d'abord  qu'il  doute  du  vœu  du  peuple  fran- 
çais pour  la  constitution  de  1703.  Si  la  Convention 
le  permet,]'en  ferai  lecture.  (Oui,  out  / s*écrie-t-on.) 

C'est  l'auteur  qui  parle. 

«  Je  commence  par  vuai  avoaer  que  le  véritable  vœtf 
naUonal  est  encore  douteux  pour  moi  ;  que  je  ne  suis  pas 
encore  bien  sûr  que  le  peuple  ait  dans  le  cœur  l*amour  de 
la  république,  ce  sentiment  Intime  qui  résulte  d^une  corn* 
paraisnn  réfléchie  du  fi^ouvcmcmenl  actuel  arec  celui  dont 
vous  Pa'vez  délivré.  Tant  d'individus  vont  machinalement, 
adoptent  ou  feignent  d^adopter  Topinion  qu*on  s*efforce  de 
leur  suggérer,  que  je  ne  me  repose  pas  sur  des  signes  ex* 
térieurs,  ni  sur  des  acclamations  inspirées  par  Sa  crainte 
ou  par  le  désir  de  rimitation,  t 

La  Convention  se  lève  spontanément  en  criant  : 
Vive  la  république  /  (On  applaudit  vivement.  ) 

Duhem  continue  : 

m  Le  député:  Je  pense  bien  »  &  cet  égard ,  comme  vous  i 
mais  comment  acquérir  ccUe  certitude  que  vous  voudriez 
avoir? 

«  Vauieur  :  Voilà,  il  est  vrai,  la  grande  dlflicullé  ;  les 
clubs,  lessections^  les  assemblées  populaires  sont  divisés 
d*opinions.  Les  individus  qui  8*y  réunissent  ne  forment 
pas  la  dixième  partie  de  la  nation  ;  on  peut  d*autant  moins 
statuer  sur  ce  qui  y  est  arrêté,  que  le  lendemain  voit  sou- 
vent déUruire  ee  qui  a  été  unanimement  proclamé  la  veille. 
Si  la  Convention  autorisait  les  assemblées  primaires  que 
Tint rigue  sollicite  aujourd'hui  «  les  agitateurs,  les  anar» 
chisles  y  figureraient  avec  audace,  s'empareraient  des 
élections,  intimideraient  les  citoyens  qui  ne  veulent  que 
l'ordre ,  dirigeraient  sur  eux  par  la  violence  et  les  raeuuces 
le  choix  de  la  multitude. 

t  Un  corps  ainsi  composé  aurait  la  présomption  de  Tlgno* 
rance;  il  sacriflerait  à  un  instant  de  faveur  les  iolérêls 
du  peuple,  en  cédant  à  des  vœux  indiscrets;  il  tarirait 
tout(*8  les  sources  de  l'abondance;  il  dirigerait  la  guerre 
sur  des  plans  téméraires,  renverserait  toutes  les  bases  de 
notre  législation,  attaquerait  toutes  les  propriétés,  porterait 
la  terreur  dans  les  fermes ,  dans  les  magasins ,  dans  les 
manuraclures  et  neturderuit  pas  à  nous  conduire  à  Tépui* 
sèment  de  nos  finances,  de  noire  crédit  et  de  nos  forces 
militaires. 

«  Le  député:  Je  le  crois  comme  vous;  mais  il  faut  que 
la  Convention  prolonge  éternellement  ses  pouvoirs,  ou 
qu'elle  soit  renouvelée.  Or,  pour  la  rcnouv^er,  il  est  in- 
dispensable de  procéder  ft  des  élections  de  députés. 

•  Vauteur  :  Mon  avis  n'est  pas  que  la  Convention  soit 
étemelle;  il  est  encore  moins  qu'elle  soit  renouvelée  dans 
ce  moment.  Puisqu'elle  existe  et  qu'elle  est  invesUe  d'une 
autorité  qu'on  ne  lui  conteste  pas,  il  faut  qu'elle  la  con- 
serve pour  faire  tout  le  bien  qui  dépendra  d'elle  »  et  répa- 

:   rev  les  maux  qu'elle  a  laissé  cnmnicUrè;  elle  a  plus  de  lu* 
I   mières  et  d'expérience  qu'elle  n'en  avait  lorsquelle  a 
I   déployé  sa  puissance;  elle  s'est  purifiée  de  ses  plus  dange- 
reux intrigants  ;  s'il  en  reste  encore,  ils  seront  bientôt  dé- 
masqués, abaUus.  Pour  faire  oublier  ses  erreurs  et  avoir 
de  justes  droits  à  la  reconnaissance  du  peuple,  elle  n*a 
I  plus  qu'ù  ic  péuétrer  de  sa  volonté  et  s'en  rendre  l'or- 
gane. 

•  Le  député:  Qu'appelei-voui  le  peuple?  Q*entendei« 
vous  par  celte  dénomination  vague  dont  on  a  trop  abusé? 

•  Vanteur  :  Je  comprends  tout  ce  qui  a  intérêt  à  la 
prospérité  de  l'Etat ,  tout  ce  qui  s'est  mil  en  société 
pour  retirer  et  apporter  des  avantages  réciproques  et  qui 
en  supporte  les  charges,  et  doit,  par  celte  raison,  en  re- 
cueillir Ia>  bénéfices.  J'en  exclus  tout  ce  qui  le  déshonore 
par  ses  vices,  tout  ce  qui  ne  se  propose  que  d'abuser  de 
ses  dons,  qui  en  exige  beaucoup  sans  lui  rien  rendre; 
qui  ne  lui  tient  pas  par  son  industriel  par  ses  propriétéf ,  . 


79 


par  ses  emplois,  par  ses  services  et  par  les  récompenses 
qa*il  en  a  méritées.  Cette  classe  d'iiommes ,  quelque  nom- 
breuse qu*elle  puisse  être,  n*est  pas  k  mes  yeux  le  peuple 
français.  Son  opinioa  est  nulle  pour  moi.  Ehl  que  lui  im- 
portent notre  gouyemement,  Pétat  de  dos  finances,  la  con- 
sidération dont  nous  jouirons  chez  rétranger,  ramélioration 
de  nos  domaines,  le  gage  de  la  dette  put)lique?  Si  notre 
gouvernement  contrarie  ses  viles  passions,  elle  ira  les 
porter  ailleurs i  si  nous  n*avons  pas  d'argent  pour  alimenter 
son  oisiveté,  on  la  verra  mendier  chez  un  peuple  plus  ri^ 
che;  si  nos  domaines  se  détériorent,  elle  ravira  au  cultiva- 
teur tttsqu*à  sa  semence  ;  si  TEtat  se  déshooork  par  une 
tanqueroute ,  eomme  il  ne  lui  est  rien  d<l,  elle  se  réjouira 
de  la  misère  des  autres.  Les  ateliers,  les  manufactures  qui 
enlèvent  à  si  paresse  toute  excuse,  lui  semblent  plus  fu- 
nestes qu'iUiles.  (On  interrompt  souvent  Duhem ,  en  de- 
mandant qu*il  termine  cette  lecture  qui  ezdte  IMndigna- 
lion  ;  d'autres  membres  l'invitent  à  continuer.  11  reprend.) 

•  Le  député t  Cette  exclusion  soulèvera  bien  des  indivi- 
ÛUB,  et  occasionnera  peut-être  de  grands  troubles. 

c  L'auteur:  La  Convention  est  asseï  puissante  pour 
prescrire  ce  qui  est  Juste  ;  tous  les  bons  citoyens  la  forti- 
fieront. Au  surplus,  d*une  seule  phrase  elle  écarte  bien 
des  sots,  bien  des  vagabonds.  «  Pour  être  admis  à  donner 
•on  suffrage,  il.  faudra  savoir  lire  et  écrire  lisiblement  » 
Ajoutez-y  celle-ci:  •  Pour  voter  dans  une  commune,  il 
sera  indispensable  d'y  avoir  un  domicile  fixe  depuis  un  an, 
et  d*avoir  payé  sa  contribution.  »  N'oubliei  pas  celle-ci  : 
Tout  célibataire  sera  tenu  de  produire  un  certificat  de 
bonne  vie  et  mœors,  signé  de  deux  propriétaires  chefs  de 
Cunille.  • 

«  Le  député  t  Quelle  suite  donnex  vous  à  cette  idée  ? 

•  L'atifmr.'La  Convention  enverra  dans  chaque  dé- 
partement  un  député  chargé  de  recueillir  lu  vœu  national  ; 
il  demeurera  dans  le  chéMieu  du  département;  il  aura 
pour  adjoints  les  agents  nationaux  de  district,  qui  se  ré- 
pandront dans  les  communes,  et  inviteront  tous  les  pro- 
priétaires, tous  les  domiciliés  âgés  de  vingt  et  un  ans,  à 
venir  faire  Inscrire  leurs  noms,  leur  demeure,  leur  pro- 
fession ,  à  présenter  la  quittance  de  leur  contribution ,  et» 
après  quMIs  auront  rempli  cette  formalité,  on  leur  pré- 
sentera un  Imlletin  en  tête  duquel  seront  gravés  ces  mots 
t  Liberté  des  opinions,  maintien  des  propriétés,  bonheur 
public  •  Au-dessous  seront  imprimés  en  colonne  ces  mots 
déiacbéi  t  «  République.  —  Constitution  de  93.  —  Con« 
slitution  de  91.  —  Adhésion  à  une  paix  honorable  i  si  elle 
est  proposée  par  les  puissances  étrangères. ••  » 

BouRpoN  (de  l'Oiise)  :  11  est  infipossible  d'entendre 
plus  longtemps  de  pareilles  horreurs. 

•  Vauteur  :  Chaque  citoyen  auquel  on  remettra  un 
semblable  bulletin,  passera  dans  une  chambre  particu- 
lière divisée  en  plusieurs  cases,  où  il  écrira ,  sans  être  vu, 
à  la  suite  de  ces  quatre  proposition  :  Oui  ou  Non,  II  pliera 
le  papier,  y  imprimera  le  cachet  national,  et  ira  déposer 
son  scrntin  dans  une  boite  fermée ,  sur  laquelle  l'a- 
gent national  appliquera  son  scellé.  Ces  différentes  boites 
seront  portées  au  chef-lien  du  département.  Le  député, 
après  en  avoir  constat^  la  remise  intacte  en  présence  des 
commissaires,  versera  tous  les  scrutins  dans  une  même 
uroe,  qu'il  scellera,  et  qu'il  apportera  à  la  Convention. 

•Quarante  scrutateurs^  pris  dan  s  son  sein,  seront  chargés 
de  procéder  solennellement  à  la  vérification  des  suffrages, 
et  d'en  proclamer  le  résultat. 

•  Le  député:  Je  connais  votre  plan,  mais  il  semble,  mal- 
gré sa  simplicité,  entraîner  de  grands  inconvénients. 

c  Uauteur  :  Quels  sont-Ils  ? 

■  Le  député  :  Si  par  hasard  le  vœu  de  la  majorité  était 
contre  la  république,  s'il  allait  faire  revivre  celte  consti- 
tution de  91  que  nous  avons  anéantie  ?  pourquoi  remettre 
en  question  ce  qui  est  déjà  jugé  ? 

•  L'auteur:  De  deux  choses  l'une  :  ou  la  majorité  delà 
nation  e^t  pour  la  république,  ou  elle  es(  contre.  Si,  comme 
nous  le  présumons,  elle  est  en  sa  faveur,  vous  donnez  à 
l'Eiirope  entière  la  preuve  bien  Importante  que  vous  n'a- 
vez fait  que  suivre  le  vœu  de  la  nation,  et  que  vous  n'avez 
été  que  Porgane  de  sa  volonté.  Si  elle  est  contre,  la  Con- 
vention n'aura  à  se  reprocher  qu'une  erreur  d'autant  plus 
excofible  qne  reffenrescence  populaire  et  une  idée  su- 


blime l'y  auraient  entraînée.  EUeen  acquerra  plusdegloire 
à  se  départir  de  son  opinion  et  à  la  sacrifier  au  vœu  na- 
,tionaI,  qui  lui  sera  alors  bien  connu.  Quant  à  la  consti- 
tution de  91 ,  je  ne  lui  suis  pas  plus  attaché  que  vous ,  vous 
le  savez,  j'en  ai  démontré  les  principaux  vices  ;  mais  bien 
des  gens  sont  encore  persuadés  qu'elle  était  mieux  adap- 
tée au  caractère  du  peuple  que  la  dernière;  qu'on  aurait 
dû  la  modifier  au  lieu  de  la  détruire.  Il  serait  pour  cette 
raison  essentiel  de  démontrer  quMle  n'a  plus  pour  elle  Je 
suffrage  du  peuple.  » 

La  plus  vive  indignation  éclate  de  toutes  parts. 

Plusieurs  voix  :  L'arrestation  ! 

Elle  est  décrétée  à  Tunanimité  et  aux  cris  de  viv$ 
la  répuhîique  ! 

Laionelot  :  Le  comité  de  sûreté  générale  a  déjà 
làDcé  un  mandat  d'arrêt  contre  l'auteur  (applaudis- 
sements), contre  ce  royaliste  ;  car  c'est  proposer  un 
roi  que  de  proposer  la  constitution  de  9t.  Le  comité 
a  également  uécerné  un  mandat  d'amener  contre 
l'imprimeur  Buisson,  et  a  ordonné  que  tous  les 
exemplaires  de  cet  ouvrage  fussent  saisis.  Le  dessein 
du  comité  est  d*euvoyer  Tauteur  au  tribunal  révolu- 
tionnaire. (Nouveaux  applaudissements.) 

Clauzbl  :  Le  tribunal  révolutionnaire  est  snspen 
du  ;  ce  scélérat  ne  pourra  pas  être  jugé.  Je  demande 
'qu'en  attendant  la  réorganisation  du  tribunal  révo- 
lutionnaire on  attribue  au  tribunal  du  département 
de  Paris  le  droit  de  le  juger  révolutionnairement. 

DuHBM  :  Je  suis  convaincu  que  ce  chapitre  est  le 
plan  que  les  aristocrates  ont  pris  pour  feire  la  con- 
tre-révolution. Je  crois  essentiel  de  le  lire  jusqu^au 
bout.  {Plusieurs  voix:  Oui,  oui  !  ) 

•  Le  député:  Tadopte  ces  idées,  parce  qu^elles  se  con- 
cilient parfaitement  avec  celles  du  bon  républicain  ;  ce- 
pendant je  ne  voudrais  pas  abandonner  ma  destlnéé'au 
hasard.  Ne  serait-il  pas  imprudent  de  s'exposer  à  voir  un 
monarque ,  porté  sur  le  trône  par  le  vœu  inconstant  de  la 
multitude,  s'investir  tout  à  coup  d*un  grand  pouvoir  et 
tourner  contre  nons  l'autorité  que  nous  lui  aurions  confé- 
rée? 

•  L'auteur:  Dans  ce  cas,  ce  serait  à  la  sagesse  de  la 
Convention  à  limiter  cette  autorité  dans  de  justes  bornes, 
par  des  règlements  invincibles,  p6r  un  pacte  solennel 
entre  le  prince  et  la  nation ,  qui  serait  bien  certainement 
la  maîtresse  de  mettre  au  don  qu'elle  lui  ferait  de  la  cou- 
ronne les  conditions  qu'il  lui  plairait.....  • 

Bourdon  (de  TOise):  Je  déclare  que  je  ne  met- 
trai jamais  d'autre  limite  à  l'autorité  d'un  roi  que  le 
poignard.  (Vifs  applaudissements.— Tous  les  mem- 
bres se  lèvent  de  nouveau  en  criant  :  Vive  larépu^ 
blique!) 

Paganel  :  Nous  sommes  tous  indignés  jusqu'au 
fond  du  cœur.  J.e  demande  qu'on  cesse  cette  lecture 
et  que  l'asscmbh^e  passe  à  Tordre  du  jour.  (Non^non! 
s'écrie- t-on,  la  lecture!) 

DuBEM  continue. 

•  Le  député  :  Dans  cette  chimérique  supposition ,  quelles 
seraient-elles ,  à  peu  près ,  ces  conditions  préliminaires  que 
vous  jugeriez  devoir  imposer  ? 

L'auteur:  La  première  serait  un  oubli  réciproque  de 
tous  les  faits  relatifs  à  ce  grand  événement;  la  seconde,  la 
reconnaissance  de  la  dette  nationale  contractée  depuis  la 
révolution;  la  troisième,  le  maintien  de  toutes  les  pro- 
priétés acquises  coofor^nément  aux  lois;  la  quatrième, 
tous  les  biens  saisis  sur  le  clergé,  sur  les  émigrés,  affee- 
tés  k  l'extinction  des  assignats;  la  cinquième,  la  con* 
firmation  de  tous  les  emplois  civils  lu^qu'ù  une  non* 
velle  élection  populaire;  la  sixième,  l'établissement  d'un 
jury  tel  qu'il  a  été  décrété  en  1791 ,  comme  un  sûr  gai* 
rantde  la  liberté  publique  et  individuelle;  la  septième  t 
l'égalité  absolue  entre  tous  les  cultes  et  leurs  ministres» 
soldés  par  les  citoyens  qui  voudraient  en  adopter  un 
moins  simple,  moins  sublime  que  celui  qui  est  adressé  k 


80 


rBternel;  la!  huitième, '  la  ratification  de  tous  les  grades 
militaires,  de  toutes  les  .pensions  accordées  à  IMutelligeoce, 
à  la  bravoure  et  au  malheur, 

<  Le  député:  Tout  cela  est  bien  imaginé;  mais  Texpé- 
rience  des  siècles  passés  nous  apprend  qu'un  prince  qui  a 
le  désir  de  régner  promet,  jure  d'observer  tout  ce  qu'on 
exige  délai  avant  de  monter  sur  le  trône»  et  que,  lorsqu'il 
j  est  bien  assis,  il  viole  sans  scrupule  ses  promesses  et  ses 
serments. 

<  L'auteur:  Cela  n'est  que  trop  vrai  ;  mais  c'est  lorsque 
la  nation  s*endort  pendant  qu'il  veille;  c'est  lorsqu'elle 

•  lui  laisse  les  moyens  d'être  impunément  parjure;  c'est 
lorsqu'elle  ne  lui  montre  pas  d'un  côté  amour,  respect, 
grandeur  ;  de  l'autre,  haine,  dégradation  et  abandon  gé- 
néral. 

•  Le  député:  Avec  toutes  ces  mesures,  j'avoue  que  moi 
qui  ai  opiné,  non  pour  la  mort,  mais  pour  la  réclusion  da 
dernier  monarque,  je  ne  me  fierais  pas  au  serment  de 
son  successeur,  et  que' je  redouterais  toujours  sa  ven* 
l^nce. 

•  L*auteur  :  Comme  TOtre  crainte  serait  encore  raison- 
nable,  je  voudrais  la  dissiper  enlièrenient* 

•  Le  député?  Comment  opéreriez-vous  cette  sécurité? 
«  Vauteur  :  Par  un  moyen  bien  simple.  Après  que  vous 

^auries  solennellement  rempli  le  vœu  du  peuple,  en  le  pré- 
servant, autant  qu'il  aurait  dépendu  de  vous,  des  effets  de 
la  tyrannie,  et  avant  d'abdiquer  vos  pouvoirs,  il  serait 
équipé,  en  vertu  de  votre  dernier  décret,  trois  vaisseaux 
sur  lesquels  seraient  embarqués  tous  les  administrateurs, 
tous  les  députés  qui  voudraient  s'éloigner  de  la  France 
et  aller  se  fixer  chex  nos  alliés  de  l'Amérique  septentrio- 
nale. On  chargerait  sur  ces  vaisseaux  tous  les  effets  des  pas* 
sagers;  on  donnerait  aux  députés  qui  délaisseraient  des 
immeubles  ou  des  rentes  la  valeur  des  capitaux  en  numé- 
raire, et  iJs  recevraient  en  outre  20,000  livres  à  titre  d'in- 
demnité et  de  récompense,  pour  les  aider  à  former  leur 
nouvel  établissement.  (On  entend  un  éclat  de  rire  géné- 
ral.) En  supposant  que  trois  cents  députés  crussent  devoir 
s^éloigner  et  profiter  de  ces  secours  honorables,  ce  serait 
p  millions  qu*il.  en  coCkterait  àj  l'Etat  pour  assurer  l'in- 
dépendance de  ses  législateurs.  » 

BouBDON  (de  roise):  Six  millions  pour  avoir  un 
roi! 

VluiieuTs  voix:  11  n'est  pas  nécessaire  de  conti- 
nuer cette  lecture. 

Duhem  descend  de  la  tribune. 

Mailde  :  Il  est  certain  que  les  ennemis  de  la  li- 
berté cherchent  à  détruire  la  république,  et  qu'ils 
attaquent  la  Convention  de  toutes  les  manières  pos- 
sibles ;  leurs  manœuvres  n'ont  point  échappé  à  vos 
comités  de  gouvernement,  et  ils  se  proposent  de  vous 
faire  incessamment  un  rapport  qui  présentera  la  si- 
tuation de  la  France  au  moment  où  la  Convention 
nationale  commença  sa  session ,  sa  situation  au 
9  thermidor,  et  celle  où  elle  se  trouve  depuis.  Nous 
ferons  connaître  toutes  les  menées  Bes  royalistes  ; 
nous  y  développerons  les  principes  qui  constituent 
les  gouvernements  libres. 

Des  hommes  trompés  ou  ignorants  ont  écrit  qu'il 
dé))eiidait  d'un  peuple  de  se  donner  le  gouvernement 

2UI  lui4)laisait;  les  comités  démontreront  l'erreur 
e  celte  assertion.  Nous  ferons  voir  que  non-seule- 
ment il  ne  dépend  pas  d'un  peuple  de  se  donner  un 
roi,  mais  même  que  cette  faculté  ne  lui  est  pas  per- 
mise. (Applaudissements.)  L'objet  de  la  réunion  des 
hommes  en  société  doit  être  considéré  avant  toutes 
les  lois  politiques  qui  ont  été  faites  depuis.  La  souve- 
raineté du  peuple  ne  peut  être  aliénée,  et  le  peuple 
violerait  ses  droits  s'il  rétablissait  la  royauté.  (Ap- 
plaudissements. )  Un  individu,  un  Français  qui  vou- 
drait un  roi,  ne  serait  pas  un  homme  (applaudisse- 
ments )  ;  ce  serait  un  tigre  ennemi  de  I  humanité 
entière.  (Nouveaux  applaudissements.)  Pour  moi  je 
pense  que  l'on  devrait  mettre  sur-le-champ  hors  la 
lu  tout  homme  qui  parlerait  de  royauté.  (Les  ap- 


plaudissements TCÙoub\enU-^Aux  voix!  aux  voixt 
s'écrient  quelques  membres.  ) 

Charlier  :  La  loi  existe.  Je  demande  Tordre  du 
jour  motivé. 

M  aube:  Le  rapport  des  comités  sera  fait  d*ici  à 
deux  ou  trois  jours,  et  ils  vous  présenteront  à  sa 
suite  des  mesures  conservatrices  de  la  liberté  et  de 
l'égalité. 

Lequinio  :.Déjà  depuis  plusieurs  iours  il  est  mani- 
feste à  tout  homme  que  les  malveillants  et  les  inten- 
tions perGdes  des  royalistes  prennent  une  nouvelle 
action.  Jamais  vous  n'imposerez  silence  aux  royalis-. 
tes,  si  vous  ne  leur  ôtez  la  seule  espérance  qui  leur 
reste  ;  je  veux  parler  du  dernier  rejeton  de  la  race 
impure  du  tyran,  oui  estau  Temple.  (On  applaudit.) 
On  a  déjà  demandé  l'expulsion  de  cet  enfant;  je  de« 
mande  que  vos  comités  de  gouvernement  prennent 
des  mesures  et  vous  présentent  les  moyens  de  pur- 
ger le  sol  de  la  liberté  du  seul  vestige  de  royalisme 
qui  y  reste. 

L'assemblée  décrète  le  renvoi  de  là  proposition  de 
Lequinio  aux  trois  comités  réunis. 

Boisstd'Anglas:  La  publication  du  détestable 
ouvrage  dont  on  vient  de  vous  lire  quelques  frag- 
ments n'est  pas  le  seul  moyen  employé  par  les  roya- 
listes pour  attaquer  le  gouvernement  républicain, 
que  vous  avez  juré  de  maintenir,  llscherchentà  ex- 
citer dans  Paris  une  commotion  favorable  à  l'accom- 
plissement  de  leurs  affreux  projets  :  ils  s'attachent 

Pour  cela  à  tromper  le  peuple  sur  le  véritable  état  de 
approvisionnement  de  cette  grande  commune,  en 
profitant  des  difficultés  que  doit  nécessairement  oc- 
casionner la  rigueur  deMa  saison.  11  est  donc  indis- 
pensable de  calmer  les  inquiétudes  que  pourraient 
avoir  les  citoyens.  Malgré  les  glaces  qui  obstruent  la 
rivière,  les  arrivages  en  grains  et  en  farine  sont  aussi 
abondants  qu'ils  I  étaient  i)  y  a  trois  mois,  et  qu'ils 
l'aient  été  depuis  lors  ;  ils  étaient  même  augmentés 
hier.  Le  comité  de  salut  public  a  pris  des  mesures 
pour  faire  arriver  par  teri*e  tout  ce  qui  ne  peut  plus 
arriver  par  eau,  et  il  y  a  longtemps  que  des  repré- 
sentants du  peuple  excitaient  dans  Iqs  départements 
l'exécution  des  diverses  réquisitions  déià  faites. 

Quant  aux  approvisionnements  en  bois,  je  dois 
dire  qu'à  la  vérité  l'état  de  la  rivière  a  arrêté  des 
trains  extrêmement  considérables  à  peu  de  distance 
de  Paris,  lesquels  ne  pourront  y  arriver  qu'au  dégel; 
mais,  en  attendant  ce  moment,  qui  n'est  pas  sans 
doute  éloigné,  ce  qui  existe  dans  les  chantiers  et 
sur  les  ports,  et  les  coupes  extraordinaires  faites  dans 

I  les  bois  environnant  Paris,  suffiront  très-facilement 
à  tous  les  besoins  de  ses  habitants.  Le  comité  de  sa- 
lut public  a  pris  les  mesures  nécessaires  pour  que 

I  les  transports  n'éprouvent  aucun  ralentissement. 
Cambon  :  La  déclaration  que  vient  de  faire  Boissy 
d'Anglas  rendra  ta  tranquillité  à  ceux  qui,  dans  ce 

'  moment-ci,  craignent  pour  les  subsistances.  11  est 

I  bon  que  l'on  sache,  à  l'instant  même  où  l'on  proscrit 
le  royalisme,  que  le  gouvernement  s'occupe  des  be- 
soins'du  peuple.  Je  demande  que  la  déclaration  de 
Boissy  d'Anglas  soit  insérée  nu  Bulletin. 
Cette  proposition  est  adoptée. 

(La  suite  demain.) 

Payements  à  la  trésorerie  naticmaie. 

Le  pavement  du  perpétuel  est  omrert  pour  les  six  pre- 
miers niois:  il  sera  fait  A  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscriptions  an  grand  livre.  Gdai  pour  les  renies  viagè- 
res est  ds  huit  mois  vin^t  et  mi  Jours  de  rannée  1793  (Tiens 
stjlc). 


GAZETTE  NATIONALE  «»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

M*  101,      Primidi  11  Nivosb,  l'an  8«.  {Mercredi  31' Décembre  1794,  vieux  style,) 


POLITIQUE. 

TURQUIE. 

Conitantinopte^  le  30  octobre.  —  Le  rei^s-effendi,  dans 
une  conrérence  quMl  a  eue  récemment  avec  Teuvoyé  de 
Tempereur,  lui  a  déclaré  que  Tintention  de  la  Porte  était 
qu^on  lui  restituât  les  forteresses  de  Dubieza,  Nofi,  Gra- 
diska  et  Dresnick ,  prises  sur  les  Turcs  dans  la  dernière 
guerre.  La  cour  de  Vienne  retient  ces  places  en  se  préva* 
liint  d'un  article  du  traité  de  Scbistowc,  qui  porte  que  ces 
places  ne  seront  restituées  que  lorsqu'on  aura  déCnilive- 
Dient  fixé  la  ligne  de  démarcation  entre  la  Croatie  turque 
et  la  Croatie  autrichienne. 

La  Porte  redemande  aujourd'hui  ses  forteresses;  elle  se 
fonde  sur  ce  que»  les  Bosniaques  n*ayant  point  voulu  con- 
sentir à  la  perte  de  leur  territoire  destiné  à  passer  sous  la 
domination  autrichienne»  et  le  cabinet  de  Vienne  ayant 
annoncé  quMl  consentirait  à  prendre  un  équivalent  dans  la 
Servie ,  l'article  ci-dessus  était  sans  effet. 

On  assure  que  le  ministre  autrichien,  avant  de  donner 
une  réponse,  attendra  les  instructions  de  sa  cour. 

—  Les  travaux  militaires  se  poursuivent  avec  activité 
dans  tous  les  arsenaux  de  l'empire  ottoman.  Les  nouvelles 
milices  dont  la  levée  a  été  ordonnée  seront  portées  à  plus 
de  quatre-vingt  mille  hommes.  Elles  seront  exercées  dans 
la  capitale  ou  dans  les  environs,  et  de  là  se  rendront  aux 
frontières. 

On  parle  en  même  temps  de  la  suppression  des  janis- 
saires.  Ces  anciennes  troupes  ne  veulent  ni  quitter  leur 
costume  incommode,  ni  se  conformer  aux  règlements  de 
discipline  qu*on  s'efforce  d'introduire.  Il  est  question  de 
les  remplacer  par  des  troupes  réglées  (1). 

Le  divan  donne  aussi  la  plus  sérieuse  attention  aux 
préparatifs  maritimes.  Le  nombre  des  vaisseaux  de  ligne 
ottomans  sera  porté  à  soixante  ;  celui  des  frégates  y  sera 
proportionné.  On  va  compléter  le  nombre  de  vingt,  mille 
matelots.  On  leur  construit  des  casernes  dans  celte  capi- 
tale. Les  ordres  ont  été  envoyés  dans  toutes  les  dépendan- 
ces de  l'empire  pour  fournir  le  nombre  d'hommes  propres 
à  ce  service. 

POLOGNE. 

Varsovie,  le  8  décembre»  —  L*anclenne  constitution 
vient  d'être  rétablie  ad  interinu  Ce  qui  restait  de  troupes 
polonaises  a  été  désarmé;  les  piques  de  la  garde  nationale 
ont  été  brûlées,  et  tout  le  fer  en  a  été  jeté  è  Tcau  par  les 
Russes.  Ces  derniers,  en  petit  nombre  dans  la  ville,  y  sont 
commandés  provisoirement  par  le  général  Buxhovden. 

On  fait  choix  d'une  garde  polonaise  pour  Stanislas. 

Ignace  Potockl*  Tun  de  ceux  qui  se  sont  trouvés  à  la 
tète  des  affaires,  a  obtenu  la  permission  de  se  retirer  dans 
ses  terres,  après  avoir  juré  fidélité  à  l'ancienne  constitution. 

Les  Russes  cantonnés  autour  de  Varsovie  vont  entrer  en 
quartiers  d'hiver. 

Le  quartier  général  de  Suvirarow  sera  &  Wengrow  ou  5 
Sokolow,  à  douze  lieues  de  la  capitale.  C^est  le  général 
Dorfelden  qui  prendra  alors  le  commandement  de  la  ville. 

—  Le  corps  qui  était  aux  ordres  du  prince  Joseph  Po- 
nialowski  a  rendu  les  armes  aux  Prussiens.  Ce  dernier  est 
maintenant  à  Varsovie. 

—  M.  Deboli,  ci-devant  ministre  de  Pologne  auprès  de 
la  cour  de  Russie,  se  trouve  en  ce  moment  à  Pétersbourg , 
où  il  a  de  fréquentes  conférences  avec  le  cabinet  impérial. 

—  On  attend  un  courrier  de  Pétersbourg,  pour  savoir 
quel  est  le  sort  réservé  à  la  Pologne,  et  à  quels  arrange- 
ments elle  devra  se  soumettre.  Les  esprits  semblent  parta- 
gés entre  la  crainte  et  l'indiguation. 

(!)  Déjà  les  janissaires  inquiétaient  le  pouvoir.  Leur  des- 
truction fut  résolue  par  Mahmoud  II,  et  le  17  juin  1836  ils 
fureot  BMssacrés  sur  une  place  de  Goastantioople. 


ALLEMAGNE. 

Vienne^  le  8  décembre.  —  Il  arrive  depuis  quelque 
temps  dans  cette  capitale  un  grand  nombre  de  prêtres  fran* 
çais  émigrés;  presque  tous  sont  dans  la  plus  extrême  mi« 
sère.  Une  ordonnance  leur  défend  de  montrer  la  langue 
française,  à  moins  d'avoir  une  permission  expresse. 

—  Un  grand  nombre  de  généraux  demandent  des  congés. 

—  On  attend  ici  le  général  Clairfayt. 

—  La  commission  créée  par  le  ministère  autrichien  a 
terminé  le  procès  des  prisonniers  d'État.  Quatorze  ont  été 
envoyés  sous  escorte  dans  différentes  forteresses  de  la  Hon- 
grie, où  ils  seront  enfermés  jusqu'à  la  fin  de  leurs  jours. 
Quatre  d'entre  eux,  qui  tenaient  au  ci-devant  conseil  au- 
lique  de  guerre ,  ont  été  condamnés  à  être  pendus.  Voici 
les  noms  de  ces  malheureuses  victimes  :  Gillcck,  Heben- 
strcit,  Laskicwix  et  Prandsletter.  Cinq  autres,  Inz,  Uackel, 
Zelleneck,  Frinz  et  Riedel,  ont  été  remis  au  tribunal  de 
justice;  ils  sont  condamnés  à  être  exposés  au  carcan,  la 
corde  au  cou,  et  renfermés  ensuite  dans  des  forteresses. 

L'instruction  du  procès  s'est  faite  à  huis  clos,  La  tyran- 
nie a  mt^rae  dédaigné  jusqu'ici  de  publier  les  sentences  de 
ces  infortunés.  Le  public  ignore  les  crimes  qui  les  ont  fait 
condamner. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Beniabole, 
SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU  8  NIVOSE. 

Cambon  :  Citoyens,  un  fait  qu*il  ne  faut  point 
perdre  de  vue,  c'est  que  le  projet  royaliste  qui  vient 
de  vous  être  lu  n'est  que  renouvelé,  et  que  toutes 
les  factions  ont  voulu  anéantir  la  Convention  na- 
tionale. De  tout  temps  les  contre-révolutionnaires 
ont  voulu  dissoudre  la  Convention,  pour  faire  re- 
naître la  royauté;  pour  y  parvenir  et  faire  dispa- 
raître ce  corps  révolutionnaire  qui  a  fondé  la  répu- 
blique, et  qui  la  soutiendra,  ils  ont  fait  circuler  le 
poison  de  la  calomnie.  Ce  projet  existait ,  et  a  été 
exécuté  en  partie  par  Chabot  et  Fabre  d'Bglantine. 

Oui,  citoyens,  on  cherche  à  diviser  la  Convention 
nationale,  pour  la  perdre;  vous  venez  de  nouveau,, 
et  à  l'unanimité,  de  prononcer  que  le  royalisme  se- 
rait ù  jamais  banni  de  la  France;  actuellement  il  faut 
que  la  Convention  se  prononce  contre  ce  tissu  d'a- 
bominations qu'on  ne  cesse  de  répandre  contre  elle- 
même;  il  n'y  a  pas  un  jour  où  elle  ne  soit  indigne- 
ment attaquée.  Vous  connaissez  les  intentions  de 
ceux  qui  s'attachent  ainsi  à  la  représentation  na- 
tionale ;  vous  savez  qu*ils  ne  font  aue  suivre  les 
plans  de  Pitt  et  Cobourg.  (On  applaudit.) 

Citoyens,  lorsqu'on  veut  préparer  les  esprits  à  la 
royauté ,  vous  savez  que  le  moyen  le  plus  sûr  de 
réussir  est  de  persécuter  les  citoyens  qui  se  sont 
hautement  prononcés  pour  la  république.  Eh  bien  , 
dans  les  départements,  les  citoyens  connus  par  leur 
républicanisme  sont  proscrits  par  les  hommes  qui , 
en  1791,  avaient  pour  devise  :  Laconslilution^  toute 
la  conslilution ,  rien  que  la  conslilution;  il  est 
temps  que  cette  lutte  élevée  entre  les  royalistes  et 
les  républicains  finisse;  il  faut  déclarer  hautement 
si  Ton  veut  continuer  la  guerre  contre  le  républica- 
nisme. (On  applaudit.) 

Citoyens,  le  mot  républicain  n*est  pas,  comme 
ou  a  voulu  le  faire  croire,  synonyme  avec  buveur 
de  sang.  Quand  on  ne  cesse  de  nous  poursuivre,  car 
c'est  à  la  Convention  en  masse  que  l'on  en  veut,  il 
faut  que  nous  prouvions  à  la  France  que  nous  sommes 

11 


8S 


dignes  de  la  représenter.  S*il  y  &  quelques  criminels  I 
parmi  nous,  la  justice  est  là  pour  les  punir;  mais  il 
est  indigne  de  la  franchise  républicaine  de  venir  à 
cette  trmune  faire  des  dénonciations  vagues  et  pro- 
Doncer  des  discours  rédigés  dans  les  boudoirs  et  au 
milieu  des  habits  carrés  qui  assistent  aux  concerts  de 
la  rue  Feydeau.  (Quelques  applaudisseqaents.)  Ces 
discours  sont  accueillis  par  les  hommes  qui  paient 
un  iiacre  600  livres  pour  discréditer  les  assignats 
et  pour  aller  sacrifier  à  l'idole  du  jour,  dont  la  pa- 
rure indécente  et  les  intrigues  semblent  rappeler  une 
nouvelle  Antoinette  (l). 

Citoyens,  pour  être  républicain,  il  faut  être  juste; 
il  est  donc  de  votre  devoir  de  doiuier  aux  mcnibros 
Inculpés  les  moyens  de  se  justifier.  On  nous  assas- 
sine dans  Topimon  publique  par  des  pamphlets  ca- 
lomnieux, et  ensuite  on  vient  dire  à  cette  tril)une  : 
Vopinion  publique  accuse  un  tel  ;  et  conmie  le 
pNBuple  ne  se  trompe  jamais,  nous  demandons  sa  puni- 
ti#n.  C'est  par  de  pareilles  proscriptions  qu'on  par- 
riendra  bientôt  à  l'anéantissement  total  ae  la  Con- 
vention. (Murmures.)  Je  me  résume,  et  je  demande 
qu*on  Tournisse  aux  membres  accusés  d'une  ma- 
nière directe  les (Bruit.)  Si  chaque  député  avait 

unefortunesufGsante,  et  qu'il  pût  taire  imprimera 
ses  frais  sa  justification,  je  n^occuperais  pas  l'assem- 
blée de  cet  objet;  mais  quand,  avec  la  plus  grande 
économie,  un  représentant  du  peuple  peut  à  peine 
vivre  avec  sa  famille,  il  lui  est  impossible  de  faire 
les  frais  qu'entraîne  nécessairement  l'émission  de  sa 
justification,  surtout  lorsqu'un  est  obligé  d'obtenir 
un  ordre  d'un  juge  de  paix  pour  la  faire  imprimer. 
Je  le  dis  avec  franchise,  nous  courbons  la  tête  sous 
une  tyrannie  plus  pesante  que  celle  de  Robespierre. 
(Murmures.) 

Pluiieun  membres:  11  a  raison;  la  tyrannie  de 
Préron  est  affreuse. 

Bourdon  (de  TOise)  :  Le  premier  mouvement  una- 
nime de  cette  assemblée  a  jamais  mémorable,  en 
entendant  la  lecture  de  l'infâme  production  du  roya- 
lisme, a  été  l'indignation  la  plus  fortement  pro- 
noncée-etsa  promesse  de  poignarder  les  rois  :  voilà 
•  ce  que  nos  ennemis  n'apprendront  pas  sans  frémir. 
(Vifs  applaudissements.;  Dans  cet  éerit  on  a  dévoilé 
)e  projet  que  je  vous  ai  dénoncé  il  y  a  trois  mois;  ou 
ne  veut  pas  faire  rettvre  la  constitution  de  1789, 
mais  on  veut  rendre  inutiles  les  succès  de  vos  ar- 
mées et  le  sang  qu'elles  ont  répandu,  en  vous  ren- 
fermant dans  vos  anciennes  limites.  On  sait  bien 
qu*après  cinq  ans  de  république  il  est  impossible  de 
rétablir  la  royauté;  mais  on  veut  vous  faire  faire  la 
paix  dans  vos  limites  et  vous  laisser  7  à  8  milliards 
aassignats. 

Qu'a  fait  l'infâme  libelliste  qui  vous  a  été  dé- 
noncé? Il  a  fait  ce  que  font  tous  les  fripons;  il  a  sur- 
fait sa  marchandise;  il  vous  a  montré  la  rovaulé 
pour  vous  faire  demander  une  paix  hontcnse;'niais 
8on  projet  est  déjoué,  et  vous  verrez,  par  le  rapport 
que  fera  Johannot,  que  vous  êtes  en  état  de  soutenir 
la  guerre  encore  pendant  trois  ans,  s'il  est  néces- 
saire, pour  fonder  la  liberté  du  monde.  (Vifs  applau- 
dissements.) 

Les  scélérats  qui  veulent  foire  exécuter  cet  in- 
fâme projet  savent  bien  ce  que  disaient,  l'année  der- 
nière, nos  bons  alliés  les  Américains.  Un  orateur 
patriote  proposa  de  donner  aux  Français  plus  d'a- 
vantages dans  le  commerce  qu'aux  Anglais.  Un  an- 
ire  orateur ,  non  moins  patriote ,  répondit  :  •  Ce 
n'est  pas  à  nous  à  donner  ces  avantages  aux  Fran- 
çais; un  tel  peuple  saura  bien  se  les  donner  lui- 
même  par  la  conquête  des  trois  fleuves.  • 

(l)Allaii<MiàM-T«HteD. 


Lçs  armes  de  nos  ennemis  sont  usées  ;  il  ne  leur 
reste  plus  que  la  vile  ressource  des  pamphlétaires. 
La  première  fois  que  je  dénonçai  ce  projet ,  on  me 
traita  d'exagéré;  cependant  tout  portait  à  croire  que 
j'avais  raison. 

En  efifet,  comment  pouvez-vous  prétendre  à  rui- 
ner rAngIclerre,  si  ce  n'est  par  la  conquête  des  trois 
fleuves?  Vos  ennemis  le  savent  bien;  et  comme  ils 
sont  assurés  que  la  Convention  nationale  tout  en- 
tière veut  maintenir  cette  conquête,  ils  cherchent  à 
vous  diviser.  (Vifs applaudissements.) 

Citoyens,  vos  succès  sont  rapides  et  certains;  il 
vous  reste  dans  vos  ressources  territoriales,  je  le 
répète,  de  quoi  soutenir  la  guerre  pendant  trois  ans. 
{Pendant  dix!  crient  un  grand  nombre  de  mem- 
bres.) Si  l'assemblée  ne  m'eût  interrompu,  et  il  est 
doux  de  l'être  par  le  patriotisme,  j'allais  ajouter  que« 
ces  trois  années  expirées,  s'il  le  fallait,  chaque  ci- 
toyens offrirait  sa  fortune  pour  le  maintien  de  sa 
liberté.  Voilà  ce  que  vos  ennemis  savent  bien  et  ce 
qui  les  lait  trembler;  ils  savent  aussi  qu'il  existe  de 
grands  criminels,  et  ils  veulent  s'en  servir  pour  faire 
réussir  leurs  projets;  mais  que  fout  deux  ou  trois 
criminels  au  sort  de  vingt-cinq  millions  d'hommes? 
La  justice  les  atteindra ,  et  la  république  sera 
sauvée. 

Montrons-nous  dignes  de  représenter  le  peuple 
français;  suivons  la  trace  de  ces  anciens  Francs  qui 
ne  surent  jamais  reculer,  et  qui,  dans  l'adversité 
même,  mouraient  la  victoire  empreinte  sur  leur 
front.  (Vifs  applaudissements.) 

On  demande  Tim pression  des  discours  de  Cambon 
et  de  Bonrdon  (de  l'Oise). 

L'assemblée  ne  prend  aucune  délibération 
La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  9  NIVOSE. 

Un  des  secrétaires  lit  la  lettre  suivante  : 

Jourdan,  représentant  du  peuple,  en  mission  dan$ 
les  départements  de  la  Nièvre,  t  Yonne  et  autres^ 
à  la  Convention  nationale. 

Clamecy,  le  4  nivôse,  an  3«  de  la  république 
française,  une  et  indifisible. 

«  Ciloyen»  collègues,  ayant  oppris  que  plusieurs  parti- 
culiers, en  faisant  des  fosses  à  peu  de  profondeur,  sur  la 
commune  de  Purrigny,  canton  de  Varzy,  district  de  Cla- 
mecy, déjiartomenl  de  la  Nièvre,  trouvaient  quelques 
morceaux  de  charbon  de  terre,  j'ai  cru  qu'il  importait  ft 
rapprovisionnemenl  de  Paris  et  à  la  république  entière  de 
ne  pus  négliger  dos  renseigoemenls  si  utiles  à  la  prospérité 
nationale;  une  modique  somme  de  4,000iiY.,  quej*ai  mise 
ù  la  disposition  de  TadministratioD  de  ce  district,  pour  faire 
commencer  une  touilliî ,  m*a  procuré  celui  que  je  vous  en- 
voie, numéroté  9  et  1/i,  ce  qui  veut  dire  que  Tun  est  à 
neuf  pieds  de  terre,  et  Pautre  ù  quatorie.  Si  j'en  juge  jpar 
le  peu  de  connaissance  que  j'ai  sur  cette  matière,  j*ai  lieo 
de  penser  qu'il  se  trouve  de  la  meilleure  qualité  qu'il  y  ait 
en  France. 

•  Le  comité  de  salut  public,  à  qui  j'en  avais  envoyé  dans 
le  commencement  de  frimaire,  m'a  marqué,  le  15  de  ce 
mois,  qu'il  Tavail  renvoyé  à  l'agence  des  mines;  n'ayant 
l)oint  reçu  de  ses  nouvelles,  et  la  Convention  nationale  de- 
vant connaître  toutes  les  découvertes  et  les  sources  des  ri- 
chesses de  l'État ,  j'ai  pensé  qu'elle  apprendrait  avec  inté- 
rêt, ainsi  que  toute  la  l^rance,  les  succès  de  cette  recherche» 
qui  ne  me  laissent  aucuns  doutes  sur  l'espoir  de  trouver 
une  mine  fort  abondante.  Il  est  d'autant  plus  avantageux 
de  ne  rien  négliger  pour  parveuir  promptenent  à  In  décou- 
vrir que,  placée  ù  trois  lieues  de  l'Yonne,  que  Ton  pour- 
rait rendre  navigable  par  bateaia,  son  transport  Si  Paris 
ne  serait  point  dispendieux. 

«  Je  vous  invite,  citoyens  collègaesi  à  renvoyer.cet  eisci 


83 


è l*0D  de T08  comités,  pcrnr  que,  diaprés Texamen  qn*il  eo 
fera ,  U  donne  des  ordres  à  Tagence  des  mines,  afin  qu'elle 
m*envoie  dans  ces  contrées  un  homme  de  Part,  avec  les 
inslruroenls  convenables  pour  guider  d'une  manière  esso- 
rée les  recherches  àfaireet  les  travaux  des  ouvriers. 

•  Salut  et  fhitamité*  Signé  Jocbdan.  « 

La  Convention  nationale  décrète  rinsertion  de 
cette  lettre  au  Bulletin  et  le  renvoi  au  comité  de  sa- 
lut public. 

Clauzel:  Hier  la  Convention  nationale  a  montré 
toute  son  indignation  contre  Tauteur  infâme  qui 
roulait  ressusciter  le  royalisme.  Mais  il  est  un  autre 
monstre  contre  lequel  la  Convention  a  encore  à 
combatre;  c'est  le  fanatisme.  Je  ne  sais  par  quelle 
fatalité  les  députés  qui  ont  des  plans  de  léles  déca- 
daires à  proposer  ne  peuvent  obtenir  la  parole.  C'est 
là  cependant  que  le  peuple  pourra  puiser  la  haine 
des  tyrans.  Bouquier,  Lequinio  et  Mathieu  ont  des 
projets  de  fêtes  décadaires  qui  pourront  concourir 
avec  ceux  du  comité  d'instruction  publique.  Je  dç- 
mande  que  la  Convention  les  autorise  à  les  com- 
muniquer et  à  les  faire  imprimer  aux  frais  de  la 
uation. 

Echassériaux  est  aussi  dans  le  même  cas  ;  je  de- 
mande que  l'on  nous  fasse  distribuer  tous  ces  plans. 

Barailon  :  Le  comité  d'instruction  publique  s'est 
déjà  beaucoup  occupé  de  cet  objet,  et  en  a  commu- 
niqué avec  le  comité  de  salut  public;  mais  on  n'aura 
jamais  trop  de  lumières.  J'appuie  la  motion  de  Clau- 
zel ,  et  je  demande  que  tous  les  députés  soient  auto- 
risés à  faire  imprimer  leurs  vues  sur  cette  matière 
importante,  qui  est  la  base  de  toute  constitution,  et 
la  colonne  de  la  république. 

*  •  •  :  J'ajoute  que  tous  les  membres  devraient 
être  autorisés  à  faire  imprimer  ce  qui  peut  être 
utile  au  public.  Je  demande  de  plus  que  l'on  fixe 
lejour  ou  doit  s'ouvrir  la  discussion.  Depuis  trop 
longtemps  le  décret  sur  les  (êtes  décadaires  est  at- 
teudu. 

Lanthénas  :  Je  crois  devoir  dire  à  la  Convention 
que  j'avais,  avant  le  9  thermidor,  composé  un  ou- 
vrage considérable  sur  la  matière  dont  il  s'agit.  Cet 
ouvrage  renfermait  des  vues  sur  l'instruction  pu- 
blique. Je  le  terminais  par  la  morale  qu'il  convien- 
drait de  donnera  la  génération  actuelle.  J'avais  cru 
devoir  alors  le  présenter  à  la  Convention  nationale, 
mais  j'ai  été  retenu  par  l'intolérance  qui  régnait  en- 
core. Je  l'avais  présenté  au  comité  d'instruction  pu- 
blique et  au  comité  de  salut  public,  et  dans  tous  deux 
j'ai  été  écondulL 

Je  demande  aujourd'hui  que  le  comité  d'instruc- 
tion publique  soit  chargé  d'examiner  ce  travail,  et 
de  déclarer  s'il  y  a  lieu  a  le  faire  distribuer,  surtout 
aux  membres  des  comités,  pour  qu'ils  puissent  déli- 
bérer ensemble. 

Je  demande  que  l'on  mette  aux  voix  ma  propo- 
sition. 

Bréard  :  Ce  serait  donner  l'initiative  aux  comités 
(jue  de  les  charger  d'examiner  s'il  y  a  lieu  à  faire 
imprimer  un  ouvrage.  Vous  avez  déjà  décrété  que 
Ton  imprimerait  tous  les  écrits  utiles  à  la  patrie, 
sans  inspection  préliminaire.  Je  demande  que  notre 
collègue  profite  de  ce  décret ,  et  puisse  faire  impri* 
mer  son  travail. 

Chénier  :  Cette  question  de  savoir  quand  com- 
mencera la  discussion  sur  les  fétcs  décadaires  est 
très-importante.  Le  comité  d'instruction  publique  a 
un  nouveau  plan  sur  ces  fêtes. 

Je  demande  que  la  discussion  s'ouvre  primidi  pro- 
chain. 


Nos  collègues  qui  ont  travaillé  sur  cet  objet  liront 
alors  leur  travail,  et  la  discussion  continuera  saûB 
retard. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

—  Pérès,  au  nom  du  comité  de  législation,  pro- 
pose une  liste  de  citoyens  pour  remplir  dans  pli^ 
sieurs  sections  de  Paris  les  fonctions  de  juges  de 
paix  et  d'assesseurs;  elle  est  adoptée  par  la  Coaven» 
tion. 

TnEiLHARD  :  Il  ne  suffit  pas  de  réorganiser  les  ju- 
ges de  paix;  les  tribunaux  civils  des  aistricts  et  ceux 
de  paix  méritent  aussi  notre  attention.  U  est  notoire 
que  beaucoup  de  leurs  tpembres  sont  incapables  d'y 
siéger.  Je  sais  que  le  comité  de  législation  a  un  tra- 
vail tout  prêt  sur  celte  matière,  je  demande  qu'il  le 
propose  au  plus  tard  dans  troisjours. 

Lecarpentier  :  Je  dois  proposer  bientôt  la  sup- 
pression des  tribunaux  civils  des  districts  et  de  Pans; 
j'en  dois  montrer  l'inutilité.  (Murmures.) 

Plusieurs  voix  :  Vous  voulez  donc  l'anarchie? 

Tretlhard:  Je  demande  que  l'on  mette  aux  voix 
ma  proposition. 

La  proposition  de  Treilhard  est  décrétée. 

— Ârmonville  se  présente  à  la  tribune,  son  bonnet 
rouge  sur  la  tête. 

On  crie  :  À  bas  le  bonnet  ! 

Armonville  refuse  de  Tôter. 

Plusieurs  voix  :  Â  bas  ce  signe  des  Jacobins  ! 

Charlier  :  Le  règlement  porte  que  tout  député 
parlera  la  tête  découverte. 

DuROY  :  Je  demande  qu'Ârmonville  mette  soo 
bonnet  sur  la  tête  du  buste  de  Marat. 

Armonville  met  son  bonnet  sur  la  tête  de  Marat; 
il  est  vivement  applaudi  par  l'extrémité  de  la  salle* 

Maure  :  Je  demande  à  expliquer  l'intention  de 
notre  collègue.  Il  n'a  pas  voulu  manquer  de  respect 
à  la  représentation  nationale,  car  tout  bon  patriote 
doit  lui  en  porter.  (On  rit.)  Tous  les  mouvements 
des  bons  patriotes  sont  dirigés  vers  le  bien  public. 
Armonville  n'a  pas  voulu  Oter  son  bonnet,  parce 
qu'il  est  et  sera  toujours  le  symbole  de  la  liberté  des 
Français.  (On  rit  et  on  applaudit.) 

Armonville  entre  ensuite  dans  le  détail  des  faits 
qui  ont  donné  lieu  au  prétendu  propos  qu'on  lui 
impute.  «  Lejour  où  la  Société  des  Jacobins  fut  fe^• 
mee  provisoirement,  je  circulais,  dit-il,  dans  les 
groupes  pour  voir  refret  que  le  décret  du  22  bra» 
moire  y  produisait;  j'entendis  dire  que  tous  les  Ja* 
cobins  indistinctement  étaient  des  assassins  et  des 
voleurs.  Je  démontrai  l'injustice  d'une  accusation 
exagérée.  Je  terminai  par  trier:  «A  bas  tous  les  co- 
quins, de  quelque  parti  qu'ils  soient  !»  A  ces  mots, 
on  me  pressa  de  toutes  parts ,  comme  si  j'avais  pro- 
noncé un  blasphème.  On  me  somma  d'expliquer  ce 
que  j'entendais  par  coquins.  Je  répondis  que  c'était 
le  marchand  et  l'accapareur  qui  fondent  leur  for- 
tune sur  la  misère  publique,  enfin  tous  les  aristo- 
crates, et  le  million  lui-même  s'il  voulait  dominer 
les  vingt  quatre  autres.  Les  messieurs  qui  m'enten- 
daient levèrent  le  bâton  sur  moi,  en  disant  que  j'é- 
tais Jacobin.  ■ 

L'opinant  termine  en  interpellant  Clauzel  de  dé* 
clarer  s'il  est  le  dénonciateur,  ou  s*il  existe  une 
dénonciation  contre  lui. 

Chiappb  :  Il  ne  faut  pas,  citoyens,  que  le  men- 
songe sok  impunément  proclamé  à  cette  tribune; 
Armonville  en  impose  dans  le  démenti  qu'il  pré- 
tend donner  à  Clauzel.  Il  existe  au  comité  de  sûreté 


84 


générale  un  procès-verbal,  signe  de  plusieurs  bons 
patriotes,  contre  lui  :  je  Tai  lu,  a  je  me  suis  trouvé 
présent  la  nuit  même  qu'il  a  été  remis  au  comité. 
Armonville  y  fut  accompngné  par  l'oflicier  de  garde 

2ui  se  présenta,  à  son  invitation,  pour  le  soustraire 
rindignation  du  peuple.  Je  me  souviens  qu*Ar- 
monville  y  était  eu  chapeau,  et  qu'après  les  obser- 
vations de  Bcntabole,  meml)re  du  comité,  il  tira  de 
sa  poche  le  bonnet  rouge,  qu'il  ne  mettait  pas  dans  les 
groupes,  pour  n*éue  pas  connu. 

—  Bien,  au  nom  du  comité  des  transports,  poslcs 
et  messageries,  propose  et  la  Convention  adopte  le 
projet  de  décret  suivant  : 

■  Art.  V\  L*Bgetice  nationale  des  postes  aux  lettres  fera, 
dans  1rs  quinze  premiers  jours  de  chaque  mois,  le  dé- 
compte des  sommes  dues  à  chacun  des  maîtres  de  poste  aux 
chrvuux  pour  le  mois  précédent,  et  fera  passer  directe- 
ment, par  des  enTois  à  découTert,  la  somme  qui  sera  due 
ù  chocun  dVux  pour  le  serTlcc,  sauf  la  retenue  des  avances 
qui  leur  auront  été  fuites. 

«  11.  Dans  les  trois  premiers  jours  de  chaque  mois,  Ta- 
gent  des  relais  sera  tenu  de  fournir  à  ragence  de  la  poste 
aux  lettres  Tétat  des  retenues  à  faire  aux  maîtres  de  poste 
aux  chevaux ,  et  les  noms  de  ceux  qui  les  auraient  rempla* 
céi,  soit  par  mort,  démission  ou  autrement. 

•  III*  Les  maîtres  de  poste  aux  chevaux  continueront 
d^ôlre  payés,  par  les  courriers  ou  conducteurs,  des  malles 
en  supplément. 

•  iV.  Le  salaire  des  maîtres  de  poste  est  fixé  à  3  livres 
par  cheval  et  par  poste,  et  celui  des  posUllons  à  25  sous. 

•  Les  maîtres  de  postes  aux  chevaux  ne  pourront  exiger 
de  la  part  des  courriers  et  conducteurs  le  payement  d*un 
plus  grand  nombre  de  chevaux,  pour  la  conduite  des 
mallrs,  que  celui  fixé  par  le  règlement  des  postes. 

•  V.  L*agence  des  postes  fournira  chaque  mois,  sous  sa 
respouKiibUité  solidaire,  ù  la  trésorerie  nationale ,  un  état 
iomrouire  par  district  des  décomptes  des  maîtres  de  poste. 

•  VI.  La  tréiiorerie  nationale  tiendra  chaque  mois,  à  la 
dii>|H>^ition  (le  ragonce  de  la  poste  aux  lettres,  et  lui  rc- 
intMtru  la  somme  totale  ft  laquelle  montera  le  décompte  des 
OiulticN  de  poste  aux  chevaux. 

«  VU.  Les  sommrs  dues  à  chacun  des  maîtres  de  poste 
snuiit  rnvo^ées  ft  découvert  aux  directeurs  des  postes  aux 
l(*thi»«  1rs  plus  prochaines,  qui  les  paieront  aux  premiers 
ri  «m-  l««urs  qull tances. 

■  VIII*  Les  directeurs  des  postes  enverront  à  l'agence 
%\v%  mt«|tMi  1rs  quittances  dont  il  est  question  dans  Tarticlc 
|Mm4d«»ttl. 

IN,  La  trésorerie  nationale  fera  payer,  dans  le  délai  de 

3UUi#i*jours,  si  fait  n'a  été,  par  les  receveurs  de  districts 
un*  I  arrondissement  desquels  se  trouvent  les  maitres  de 
IMSI0S,  toutes  les  sommes  qui  leur  sont  dues,  et  qui  ont 
été  ordonnancées  par  la  commission  des  transports,  remon- 
Iti,  postes,  relais  et  messageries,  pour  le  service  dts 
nailet  ou  toute  autre  cause. 

•  X.  Le  présent  décret  sur  le  mode  des  payements  à  faire 
oux  maîtres  de  poste  sera  exécuté  h  compter  du  1*'  plu- 
viôse prochain. 

•  XI.  Il  est  dérogé  à  toutes  les  lois  qui  ont  des  disposi- 
tions contraires  à  la  présente.  » 

Prrrin  :  Ce  n'est  pas  tout  de  faire  un  rapport  sur 
les  postes,  il  est  aussi  essentiel  d*cn  faire  tut  sur  Tn- 
gence  des  lois.  J'ai  dej;'i  annoncé  à  la  Convention 
qti'on  faisait  venir  à  grands  frais  du  papier  ici  pour 
le  renvoyer  ensuite  dans  les  départements. 

Unêvoix:  Le  comité  de  salut  public  s'en  occu- 
pera ce  soir. 

Garnieb  (de  Saintes)  :  Je  demande  que  ce  rap- 
port soit  fait  primidi  prochain. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

Bbunbl:  Citoyens,  je  viens  appeler  votre  tendre 
loUicitude  sor  une  classe  précieuse  d'infortunés  qui 


continuent  d*étre  les  victimes  de  la  tyrannie  que 
vous  avez  terrassée  dans  la  glorieuse  jouuruée  du  9 
thermidor.  Veuillez  m'entendre  avec  quelque  in- 
térêt. 

La  Convention  nationale,  à  cette  époque  mémo- 
rable, en  restituant  à  la  liberté  les  patriotes  oppri- 
més et  prêts  à  tomber  sous  le  fer  assassin  des  fac- 
tieux et  des  conspirateurs ,  en  décrétant  que  la 
justice  seule  présiaerait  à  ses  délibérations,  a  rendu 
la  vie  et  l'espoir  à  quantité  de  citoyens  dont  tous  les 
torts  étaient  d'aimer  sincèrement  la  patrie  et  de  dé^ 
tester  les  intrigants  et  les  fripons  qui  regardaient  la 
révolution  comme  un  moyen  de  s'emparer  du  bien 
d'autrui,  s'ils  en  pouvaient  diriger  les  mouvements 
uu  gré  de  leur  cupidité  et  de  leur  scélératesse. 

Trop  longtemps  leurs  criminelles  entreprises  ont 
eu  le  succès  qu'ils  s*en  promettaient;  la  vertu ,  les 
talents,  les  fortunes  sont  devenus  des  sujets  d'envie 
et  des  prétextes  d'incarcération  et  d'assassinats  ju- 
ridiques ,  qui  ont  couvert  la  France  de  ^ang  et  de 
deuil.  Nombre  de  cenx  qui  ont  été  préservés  dés  fu- 
reurs de  la  faction  n'avaient  plus,  en  sortant  de  pri- 
son, ni  bien,  ni  asiles,  ni  amis;  rien  n'avait  échappé 
à  la  rapace  férocité  des  tyrans  modernes.  Les  trinu- 
naux  eux-mêmes,  composés  en  partie  de  membres 
qui  leur  étaient  dévoués,  s'empressaient  d'accueillir 
les  demandes  d'intrigants  qui  poursuivaient  les  dé- 
tenus avec  d'autant  plus  d'avantages  que  tout  moyen 
de  défense  leur  était  ôté  par  la  privation  des  com- 
munications extérieures. 

Oh!  s'il  était  possible  de  retracer  ici  toutes  les 
horreurs  de  ce  genre,  que  de  crimes  se  dévoile- 
raient! que  de  maux ,  que  d'injustices  votre  sagesse 
aurait  à  réparer  I  Ici  vous  verriez  des  débiteurs  se 
parer  des  fausses  couleurs  du  patriotisme  pour  dé- 
noncer, faire  arrêter  et  traîner  à  l'échafaud  des 
créanciers  dont  ils  craignaient  les  poursuites;  là, 
des  administrateurs  infidèles  emprisonnant  des  ci- 
toyens pour  avoir  occasion  de  touiller  chez  eux , 
d'y  enlever  des  titres  en  vertu  desquels  on  pouvait 
les  poursuivre,  et  s'approprier  en  outre  ce  qui  était 
à  leur  convenance.  Vous  verriez  ensuite  ces  mêmes 
citoyens,  dépouillés  de  tout,  abandonnés  dans  les 
prisons  aux  horreurs  de  la  misère  la  plus  affreuse, 
privés  de  la  douce  consolation  de  voir  leurs  parents, 
leurs  amis,  être  poursuivis  dans  les  tribunaux ,  con- 
damnés à  leur  insu,  et  sortir  enfin  de  leurs  sombres 
cachots,  par  l'effet  de  vos  décrets  bienfaisants,  pour 
tomber  entre  les  mains  d'huissiers  exécuteurs  de 
ji'gemcnts  iniques,  obtenus  contre  eux  pendant  leur 
arr;;station. 

Plus  loin  vous  verriez  des  citoyens,  pour  qui  toute 
relation  extérieure  a  été  interdite  penaant  plus  d'un 
au  de  détention,  affaiblis  et  obsédés  par  oes  intri- 
gants à  qui  toutes  les  portes  étaient  ouvertes  pour 
venir  tromper  ceux  qui  passaient  pour  avoir  de  la 
fortune,  et  leur  surpeudrc,  dans  les  fers,  des  obliga- 
tions dont  le  prix  devait  être  la  liberté,  quoique 
l'arrêt  de  mort  fût  souvent  signé  d'avance;  mais 
qu'importait  aux  fripons,  pourvu  qu'ils  eussent  le 
temps  de  faire  revêtir  leur  escroquerie  d'une  forme 
légale!  Le  succès  n'en  était  que  plus  assuré; car, 
suivant  la  doctrine  perverse  qu'on  leur  enseignait 
alors,  «  il  n'y  a  que  les  morts  qui  ne  reviennent  pas.» 

Citoyens  collègues,  c'est  parce  que  j'ai  été  té- 
moin, pendant  quinze  mois,  de  ces  manœuvres  abo- 
minables; c'est  parce  que  je  vois  tous  les  jours  des 
malheureuses  victimes  des  friponneries  qu'on  .i 
exercres  contre  les  détenus;  c'est  enfin  parce  qu'il 
est  de  toute  injustice  que,  dans  les  tribunaux  civils 
comme  dans  les  criminels,  on  ne  puisse  condamner 
définitivement  personne  sans  lui  avoir  donné  les 
moyens  de  se  faire  entendre,  que  je  viens  réclamer 


85 


votre  justice,  base  de  toutes  les  vertus  que  vous 
maintenez  constamment  à  Tordre  du  jour. 

Ostdonc  avec  confiance  que  je  vous  propose  le 
décret  ci-après: 

«  Ls  Convention  nationale  décrète  que  les  personnes  in- 
carcérées depuis  le  31  mai  4793  (vieux  style),  en  vertu  d*or- 
dres  émanés  des  autorité»  révolutionnaires,  contre  Ies< 
quelles  il  a  été  exercé  des  poursuites  et  obtenu  des  juge- 
ments, et  avec  lesquelles  il  a  été  fiit  des  Iran-sactions, 
arrangements  et  conventions  »  de  quelque  nature  qu'elles 
soient,  pendant  leur  détention,  pourront,  dans  un  mois 
k  compter  de  ce  jour,  se  pourvoir  contre  Icsdils  jugements, 
trunsaclioiis  et  conventions,  par  toutes  voies  légales,  et  (|iie 
les  tribunaux  pourront  statuer  comme  si  les  jugements, 
transactions  et  conventions  n'eussent  jamais  existé  ; 

«  Décrète  pareillement  que,  dès  que  les  détenus  se  soroiil 
It^galement  pourvus  contre  lesdits  jugements,  transactions 
et  conventions,  Texécution  en  sera  et  demeurera  suspen- 
due* » 

Maubb  :  L*assemblëe  ne  peut  prendre  rinitiative 
dans  les  discussions  d^intérét  que  les  particuliers 
peuvent  élever  entre  eux. 

Clauzel  :  Je  demande  Tordre  du  jour,  attendu  les 
lois  existantes  contre  les  oppresseurs. 

On  demande  le  renvoi  au  comité  de  législatiou . 

Maube  :  L*on  voudrait  faire  le  procès  h  la  révo- 
lution. 

Une  vùix  :  Cest  abominable  ! 

Baillbul  :  Prouvez  que  cela  est  abominable  ;  c*est 
bientôt  dit. 

L*assemblée  passe  à  Tordre  du  jour  sur  la  propo- 
sition du  renvoi  et  du  décret. 

Babailon  :  Citoyens,  c'est  au  nom  de  votre  co- 
mité d'instruction  publique  que  je  viens  provoquer 
votre  attention  sur  un  objet  qui  intéresse  tous  les  ci- 
toyens en  général,  mais  surtout  les  braves  défen- 
seurs de  la  patrie;  c*est  de  Tinstruction  de  ceux  qui 
sont  chargés  de  les  traiter  dans  leurs  maladies  que 
dépend  la  conservation  des  armées  de  la  répu- 
blique. 

L'article  IX  de  la  loi  du  14  frimaire,  relative 
aux  écoles  de  santé,  donne  lieu  à  une  multitude 
de  réclamations;  d*une  part,  Ton  ne  trouve  plus 
dans  les  districts  des  sujets  avec  les  connaissances 
que  Tarticle  X  exige  des  élèves;  de  Tautre,  on  in- 
terprète de  diverses  manières  le  mot  réquitiliont 
qui  s*y  trouve  trop  vaguement  employé. 

En  effet,  il  y  a  eu  differehtes  réquisitions  ;  les  unes 
par  le  ministre  delà  guerre,  en  vertu  de  votre  loi 
du  l^r  août  1793  (vieux  style). 

Il  y  en  a  eu  d'autres  également  autorisées  par 
d'autres  lois,  et  pour  divers  besoins  de  la  républi- 
que. 

Toutes  enfin  sont  indépendantes  de  celle  qui  a  or- 
donné la  levée  des  citoyens  depuis  dix-huit  jusqu'à 
vingt-cinq  ans  :  elles  n  ont  rieu  de  commun  que  le 
mot;  de  sorte  qu'il  en  résulte  une  grande  obscurité, 
et  nécessairement  de  Tincertitude  pour  les  agents 
nationaux  qui  doivent  veiller  à  Texécution  du  dé- 
cret du  14  frimaire. 

Je  dois  encore  observer  à  la  Convention  que  les 
sujets  les  plus  propres  à  devenir  élèves,  a  faire 
promptemenl  des  oniciers  de  santé,  sont  en  ce  mo- 
ment ou  à  la  suite  des  hôpitaux,  ou  réunis  dans  les 
grandes  communes  pour  hâter  leur  instruction.  Or 
,  certainement  vous  n'avez  pas  entendu  les  exclure 
des  nouvelles  écoles,  et  encore  moins  priver  la  ré- 
publique de  leurs  services,  d'autant  mieux  qu'il  en 
est  un  grand  nombre  qui  peuvent  lui  être  utiles  sous 
peu  de  mois  :  c'est  cependant  ce  qui  résulterait  des 
articles  IX  et  X  que  je  viens  de  citer. 


Connaissant  les  besoins  urgents  de  vos  arméet, 
vous  vous  empresserez  donc  d'y  remédier;  c'est  dans 
cette  vue  que  je  suis  chargé  de  vous  proposer  le 
projet  de  décret  suivant  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port.de  son  comité  dMnstruction  publique,  décrète  que  les 
examinateurs  des  élèves  pour  les  écoles  de  santé,  établies 
par  la  loi  du  14  frimaire*  pourront  désigner,  pour  chaque 
district ,  et  malgré  son  absence ,  le  sujet  qui ,  étant  âgé  de- 
puis seize  jusqu'à  trente  ans  accomplis,  réunit  le  plus  no- 
toirement les  qualités  exigées  par  l'article  X  doucette  mémo 
loi. 

•  L'insertion  au  Bulletin  tiendra  lieu  de  promulgation,  t 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  Sieyès,  que  le  sort  a  appelé  à  la  commission 
des  Vingt-et-Un,  écrit  à  l'assemblée  que  son  nom 
n'aurait  pas  dû  être  mis  dans  l'urne,  parce  que  Tab- 
souce  de  Porcher  Ta  appelé  au  comité  de  législation. 

•*•  :  Sieyès  n'est  que  suppléant  du  comité;  il  n'a 
pris  aucune  part  à  ses  délibérations. 

SiRYÈs  :  Je  demande  que  l'assemblée  se  prononce 
clairement. 

Bernard  (de  Saintes)  :  Il  est  bien  étonnant,  bien 
inconvenant  que  Sieyès  emploie  des  subterfuges 
pour  ne  pas  s'acquitter  de  ses  devoirs. 

Clalzbl  :  Il  est  temps  que  Sieyès  cesse  d'être  in- 
souciant et  qu'il  soit  plus  exact  à  son  poste. 

La  Conveotion  décrète  que  Sieyès  sera  tenu  de 
remplir  les  fonctions  de  membre  de  la  commission 
des  Vingt-et-Uu. 

JoBANNOT  :  Citoyens,  vous  avez  chargé  trois 
membres  de  cette  assemblée  de  rédiger  une  procla- 
mation au  peuple  français,  pour  lui  développer  les 
avantages  de  la  suppression  de  la  loi  du  maximum  ; 
je  viens  vous  la  soumettre. 

«  Français,  la  raison,  l'équité,  l'intérêt  de  la  ré- 
publique réprouvaient  depuis  longtemps  la  loi  du 
maximum;  la  Convention  nationale  Ta  révoquée, et 
plus  les  motifs  qui  ont  dicté  ce  décret  salutaire  seront 
connus,  plus  elle  aura  de  droits  à  votre  confiance. 
En  prenant  cette  mesure,  elle  ne  se  méprend  point 
sur  les  circonstances  difticiles  dont  elle  est  envi- 
ronnée. 

■  Elle  prévoit  que  la  mauvaise  foi  s'efforcera  de 
persuader  à  la  crédulité  que  tous  les  maux  causés 
par  le  maximiim  lui-même  sont  Tefîfct  de  sa  suppres- 
sion; mais  vos  fidèles  représentints  ont  oublié  ces 
dangers,  et  n'ont  vu  que  l'utilité  publique. 

«  Les  esprits  les  moins  éclairés  savent  aujourd'hui 
que  la  loi  du  maximum  anéantissait  de  jour  en  jour 
le  commerce  et  l'agriculture  ;  plus  cette  loi  était  sé- 
vère, plus  elle  devenait  impraticable  :  l'oppression 
prenait  en  vain  mille  formes,  elle  y  rencontrait  mille 
obstacles;  on  s'y  dérobait  sans  cesse,  ou  elle  n'ar- 
rachait que  par  de^  moyens  violents  et  odieux  des 
ressources  précaires  qu'elle  devait  bientôt  tarir. 

•  C'est  donc  cette  loi,  devenue  si  désastreuse,  qui 
nous  a  conduits  à  l'épuisement.  Des  considérations 
qui  n'existent  plus  l'ont  peut-être  justifiée  à  sa  nais- 
sance; mais  une  disette  absolue  en  eût  été  la  suite 
nécessaire,  si  la  Convention,  en  la  rapportant ,  n'eût 
brisé  les  chaînes  de  l'industrie. 

«C'est  à  l'industrie  dégagée  d'entraves,  c'est  au 
commerce  régénéré,  à  multiplier  nos  richesses  et  nos 
moyens  d'échange. 

«  Les  approvisionnements  de  la  république  sont 
confiés  à  la  concurrence  et  à  la  liberté,  seules  bases 
du  commerce  et  de  l'agriculture.  Mais  après  tant  de 
calamités  leurs  bienfaits  ne  seront  pas  si  prompts 
que  nos  besoins  sont  pressants;  tout  passage  subit 
à  un  nouvel  ordre  de  cûoses,  tout  changement,  quel- 


86 


que  utile  qu*il  soit,  n'est  jamais  sans  secousse,  et 
offre  presque  toujours  quelque  ioconvënient. 

•  L*in)patieDce  des  citoyens  a  voulu  dans  ce  mo* 
ment  se  pourvoir  à  tout  prix  des  denrées  nécessaires 
ù  leur  consommation  ;  cette  cause,  jointe  à  l'inclé- 
mence de  la  saison,  a  dû  leur  faire  subir  un  renché- 
rissement momentané;  quelques  jours  encore,  et 
nous  verrons  les  heureux  effets  d'un  décret  que  la 
malveillance  calomniera  sans  doute,  mais  qui  était 
commandé  par  le  salut  du  peuple.  Qne  toutes  les 
cniiiites  disparaissent;  le  gouvernement  veille  nuit 
cl  jour;  vos  représentants  attendent  tout  du  carac- 
tère généreux  qui  distingue  la  nation  française,  et 
les  subsistances  seront  assurées.  La  fraternité  ne 
sera  plus  parmi  nous  un  vain  mot  :  elle  repoussera 
également  les  calculs  de  Tavarice  et  les  fausses  alar- 
mes qui  servent  encore  mieux  Tavidité  des  spécu- 
lateurs, en  produisant  une  disette  factice. 

«  Vous  ne  compromettrez  point  cinq  années  de 
travaux  et  de  sacriGces,  et  le  génie  de  la  liberté 
triomphera  aujourd'hui  de  toutes  les  passions,  de 
ses  besoins  même  et  de  la  rigueur  des  éléments, 
comme  il  a  triomphé  de  tous  les  tyrans  de  l'Europe. 

•  Vos  ennemis  s'agitent  dans  Tombre  et  cherchent 
a  égarer  le  peuple;  mais  il  sera  sourd  aux  insinua- 
tions (le  la  pcrhdie,  et  ne  se  ralliera  qu*à  la  voix  de 
la  patrie. 

«  Hier  la  royauté  semblait  conspirer  encore  du 
fond  (le  son  tombeau;  ses  blasphèmes  ont  retenti 
jUKuiraux  portes  du  sanctuaire  de  la  liberté;  mais 
er  «Irrnier  cri  du  fanatisme  royal,  frappant  d'indi- 
gnation tous  les  républicains,  les  réunit  pour  leur 
prtHf  r  une  énergie  nouvelle. 

•  l.n  jiiitiee  et  la  raison  ramèneront  peu  à  peu  Ta- 
hoiidunce;  le  peuple,  plus  magnanime,  recueillera 
riillii  le  fruit  de  ses  vertus,  et  ses  représentants  trou- 
veront leur  récompense  dans  le  spectacle  de  son 
bonheur.  • 

Dette  proclamation  est  adoptée. 

MtciiAUT  (du  Doubs)  :  Cette  proclamation  est  in- 
MinUanlo  pour  ramener  le  calme  dans  la  républi- 
que. On  vous  a  dit  que  les  patriotes  n'étaient  pas 
pemécutés  dans  les  départements,  et  moi  je  vous  as- 
sure qu'ils  le  sont  ;  je  vous  assure  qu'on  y  traite  avec 
la  même  infamie  et  ceux  qui  ont  tout  sacrifié  pour 
la  république,  et  les  fripons  qui  n'ont  travaille  que 
pour  leurs  intérêts. 

On  veut  détruire  les  Sociétés  populaires  en  masse. 
(Quelques  applaudissements  à  l'extrémité  de  la  salle. 
-^Non,  noni  s'écrie  toute  la  Convention.)  Il  ne 
faut  qu'un  seul  mot  pour  rassurer  tous  les  patriotes, 
et  ce  mot  le  voici  : 

•  La  Conyention  ntUonale  décrète  que  lei  Sociétés  po- 
pulflires  n*ont  cessé  de  bien  mériter  de  la  patrie  (quelques 
■pploudissemenls  à  une  extrémité),  et  charge  les  aulorilés 
constituées  de  les  défendre  et  de  les  protéger.  •  (On  rii.; 

GinoD-PouzoL  :  C'est  au  moment  où  toutes  les 
Soeiétés  populaires  de  la  république  félicitent  la 
Convention  d'avoir  renversé  celle  qui  les  dominait, 
celle  qui  rivalisait  avec  la  représentation  nationale 
(quelquesmurmuresàunedesexlrémitdsdelnsalle; 
ou  entend  les  plus  vifs  applaudissements  dans  les 
autres  parties);  c'est  lorsque  les  Sociétés  populaire» 
applaudissent 

Lksaqi-Sknault  :  Tu  en  as  menti  !  (Violents  mur- 
mures.) 

Lb  Présidint  :  Je  rappelle  h  l'ordre  Lesage-Se- 
ntulti  pour  avoir  \\mM  son  collègue. 
Plmieun  voix  :  A  l'Abbaye  ! 
Lesage-Senault  et  Ruamps  crient  dans  le  bruit. 
OieoihPooiol  :  Tous  les  proeès-rerbaux,  tous 


les  Bulletins  attestent  le  bit  que  ]e  Tient  d*aTaiieer  : 
partout  les  Sociétés  populaires  ont  ienli  que  levr 
premier  devoir  était ae  s'attachera  la  représentatioQ 
nationale,  de  se  rallier  au  peuple,  pour  repoaaser  la 
tyrannie  de  quelques  brigands.  (Qualquet  murma- 
res  à  une  des  extrémités  de  la  salle.)  Leur  op|>r8t- 
sion  a  duré  assez  longtemfM;  ils  ne  nous  domina* 
ront  plus.  (iVon,  non/ s'écrient  tons  lei  tnembras 
en  se  levant.)  Non,  vous  n'êtes  pas  eitovens,  vous 

3U1  ne  voulez  pas  rentrer  dans  la  j^nde  société, 
ans  la  société  du  peuple,  vons  qui  Toules  établir 
une  autorité  rivale  de  la  Convention. 

Chazal  :  Ces  messieurs  veulent  une  noblesse  en 

patriotisme. 

GiROD  :  Le  vrai  républicanisme  est  dans  mon 
cœur;  j'aime  l'égalité.  (Quelques  murmures  à  l'ex- 
trémité. —  Vifs  applaudissements  dans  toutes  les 
autres  parties.) 

Je  n'ai  jamais  cherché  i  tyranniser  personne,  mais 
aussi  je  ne  souffrirai  point  d'oppression.  On  ne  peut 
pas  se  dissimuler  que  les  Jacobins  ont  été  en  révolte 
ouverte  contre  la  Convention.  (Quelques  murmures 
à  l'extrémité.  —  Vifs  applaudissements  dans  toutes 
les  autres  parties  de  la  salle.)  Leurs  chefs,  assis  dans 
notre  sein,  y  marquaient  leurs  victimes.  (Les  mêmes 
mouvements  se  répètent.)  Plusieurs  d'entre  eux  ont 
été  punis.  Vous  avez  fermé  celte  Société  à  cause  des 
dangers  dans  lesquels  elle  mettait  la  patrie;  ainsi 
l'on  ne  peut  pas  nier  que  les  Jacobins,  par  leur  ré- 
volte, n  aient  nécessitéces  mesures  de  rigueur.  (Oui, 
oui!  s'écrie-t-on  de  toutes  parts  en  applaudissant. 
—  Plusieurs  voiœ  :  Ils  sont  encore  en  révolte.) 

Nous  devons  protéger  tous  les  citoyens,  dérendre 
surtout  les  droits  de  la  représentation  nationale. 
{Quelques  voix  :  Les  droits  du  peuple  avant  tout.) 
Nous  devons  défendre  les  pouvoirs  que  le  peuple  a 
confiés  à  la  représentation  nationale  pour  la  garantie 
de  ses  droits. 

On  nous  propose  de  décréter  que  les  Sociétés  po« 
polaires  ont  bien  mérité  de  la  patrie;  mais  a-t*on 
oublié  qu'il  en  est  qui  ont  méconnu  la  représentation 
nationale,  qu'il  eu  est  qui  ont  voulu  l'anéantir? 
A-t-on  oublié  la  révolte  de  la  Société  de  Marseille, 
la  conduite  de  celle  de  Dijon,  et  celle  des  Jacobins? 
A-t-on  oublié  que  plusieurs  de  nos  collègues  ont  été 
obligés  d'épurer  un  ^rand  nombre  de  Sociétés  po* 
polaires  qui  entravaient  la  marche  du  gouverne- 
ment? 

Plusieurs  voix  :  On  a  même  été  obligé  d'en  sus- 
pendre. 

GiROD  :  Je  crois  inutile  de  s'étendre  davantage 
sur  cette  proposition  ;  je  demande  l'ordre  du  Jour. 

Tallien  :  Je  demande  la  parole. 

Du  HEM  :  Je  la  demande  poor  lui  répondre. 

Talubn  :  Si  la  Convention  veut  adopter  Tordre 
du  jour,  je  renonce  à  parler. 

La  Convention  passe  à  Tordre  du  Jour.  —  Ce  dé- 
cret est  vivement  applaudi. 

JoHANNOT  :  Citoyens,  je  viens  calmer  l'efferves- 
cence des  passions  en  vous  proposant  de  vous  occu- 
per du  bonheur  du  peuple.  —  Jobaunot  lit  six  ar- 
ticles de  son  projet  de  décret.  Les  cinq  premiers  sont 
adoptés  ainsi  qu'il  suit  : 

■  Art.  !•'•  11  sera  nommé  une  conmiMon  cemposée 
d'uD  membre  de  chaque  comité  pour  dresser»  avee  celui 
des  finances,  l'état  général  de  sittiaUoa  de  IVotrée  et  di 
la  sortie  des  assignais,  et  de  toutes  les  recettes  etdépen* 
ses,  soit  en  métaux,  assignats  o«  toutes  autres  valeurs» 
faites  par  la  trésorerie  oalioosie  depuis  son  élablistement 
jusqu'au  1«'  nivôse  »  et  eo  rendra  ooisple  è  la  GoaveiitiM 
nationalew 


87 


«  Ce  compte  fera  eobnaitre  d'one  manière  particulière 
la  situaiioo  du  trésor  public  aux  époques  du  21  septembre 
1783  (vieux  ftjrle)  et  du  16  thermidor  dernier. 

•  II.  Le  comité  dei  ûaances  préseotera  iacessamment 
fétat  des  dépenses  ordiBaires  du  gouveroement  et  lei 
moyeo^  d*j  pourf  oir, 

•  III.  Les  comités  de  marine,  de  la  guerre  et  de  salut 

Kublie,  proposeront  lea  mojrens  d'ordre  et  d'économie  dont 
isdépeoief  extraordinaires  peuvent  être  susceptibles. 

•  IV.  ▲  compter  de  ce  jour,  les  cultivateurs ,  les  com« 
merçants,  les  manufacturiers  et  tous  autres  citoyens  s'apr 
proTisionneront  par  la  voie  du  commerce  libre.  Le  gouver- 
•ement  se  renfermeradans  la  partiedes  approvisionnements 
des  armées  de  terre  et  de  mer  et  des  administrations  géné- 
rales. Les  matières  premières  qui  n'y  sont  pas  relatives, 
et  qnl  te  trouvent  dans  les  magasins  de  la  république,  ou 
en  réquisition  pour  son  compte,  seront  mise^  en  vente  sans 
délai  et  à  reoehère. 

-  Les  approvisionnements  de  la  république  se  feront , 
tnlant  que  possible,  par  adindication  et  nu  rabais. 

f  V.  Les  droits  d'entrée  en  France  sur  les  marchandises 
4e  première  nécessité  seront  provisoirement  réduits  à  la 
perception  indispensablement  nécessaire  pour  en  connaître 
le  nsonvemenL  Le  comité  de  eommerce  présentera  sans 
délai  Tétat  de  ces  mardiandises  et  de  celles  dont  la  sortie 
restera  prohibée.  • 

L'article  VI  portait  au*il  ne  serait  plus  donné  de 
suite  aux  décrets  relatifs  au  séquestre  des  biens  des 
sujets  des  puissances  avec  lesquelles  la  république 
est  en  guerre ,  et  que  les  sommes  versées  par  des 
Français  à  la  trésorerie  nationale,  en  conséquence 
de  ees  décrets,  seraient  remboursées. 

Gaston  :  Il  n'est  jamais  entré  dans  l'esprit  d'un 
homme  raisonnable  de  faire  passer  des  fonds  aux 
puissances  qui  lui  font  la  guerre.  On  dit  que  ces 
fonds  ne  seront  rendus  qu'aux  négociants;  mais  ne 
sait-on  pas  que  ces  négociants  ont  des  agents  à  Paris 
auxquels  ils  ont  dit  :  «  Faites  passer  cet  article,  et 
nous  vous  donnerons  la  moitié  de  ce  qui  nous  re- 
Tiendra.  •  (Murmures.)  Cela  est  arrivé  quel<|uefois. 
La  corruption  est  le  seul  moyen  que  les  puissances 
étrangères  puissent  employer  contre  nous.  D'ail- 
leurs vous  avez  déjà  rejeté  cet  article,  sur  des  ob- 
servations très-sages  qui  vous  furent  faites  par  Bour- 
don et  Baudot.  Je  demande  la  question  préalable. 

Girod  parle  en  faveur  de  l'article.  Pour  faire  sentir 
combien  la  loi  du  séquestre  a  été  funeste  au  com- 
merce français,  et  quels  avantages  nos  ennemis  es- 
péraient en  tirer,  il  cite  une  lettre  trouvée  dans  les 
papiers  de  Robespierre,  et  adressée  à  Paris,  à  un 
agent  secret  des  puissances  avec  lesquelles  la  répu- 
blique est  en  guerre.  Cette  lettre  prouve  que  la  loi 
du  séquestre  n  a  été  rendue  qti'à  l  instigation  de  cet 
açerit  secret  et  des  agioteurs  étrangers  qui  avaient 
fait  tous  leurs  efforts  pour  tromper  la  Convention 
sur  ses  effets,  et  avaient  coloré  leurs  démarches  du 
prétexte  de  représailles  envers  les  puissances  belli- 
gérantes. 

CouTUBiER  :  Je  demande  qu'au  lieu  du  mot  biens, 
on  mette  créances,  et  qu'on  excepte  les  biens  ecclé- 
siastiques, de  mainmorte,  et  ceux  appartenant  aux 
princes  étrangers. 

Camboh  ;  Ce  qui  doit  le  plus  importer  à  l'homme, 
c^est  soo  honneur.  On  a  prétendu  que  je  n'avais 
pas  parlé  contre  le  décret  du  séquestre,  et  depuis  ce 
jour,  gfjices  à  un  de  mes  collègues,  on  a  annoncé 
dans  une  feuille  que  j'avais  volé  10  millions.  {Plu- 
sieurs voix  :  ?^s  de  personnalités!)  Je  songe  aussi 
an  bien  de  la  république:  je  ne  veux  pas  parler  de 
moi,  parce  que  j  ai  déjà  demandé  l'examen  de  ma 
conduite,  el  que  j'attends  avec  courage  qu'on  me 
déiiQiioe.  Ma  défense  est  prête,  et  je  pulvériserai 
tous  cet  morpions.  (Quelques  applaudissements  dans 
une  exMtnité.— Violents  murmares  dans  toutes 


les  autres  parties  de  la  salle. — Ruamps  montré  le 
poing  à  une  tribune  en  face  de  lui ,  en  s'écriant  : 
Tous  les  journalistes  sont  des  royalistes  !)  Puisqu'il 
faut  le  dire,  le  gouvernement  lui-même  m'a  repro- 
ché de  n'avoir  pas  parlé  contre  le  séquestre,  et  les 
journaux  du  temps  fournissent  la  preuve  que  je  suis 
descendu  du  fauteuil  pour  m'y  opposer.  Je  l'ai  fait 
dans  un  temps  où  il  y  avait  du  danger  à  s'élever 
contre  Robespierre,  qui  me  traita  de  contre-révolu- 
tionnaire pour  avoir  combattu  son  opinion.  {Quel- 
ques voix  :  C'est  vrai  !)  Le  préopinant  a  dit  qu'une 
lettre  trouvée  chez  Robespierres  portait  que  ce  dé- 
cret avait  coûté  150  millions  à  la  république.  En 
rapprochant  cette  lettre  des  journaux  qui  ont  dit  que 
j'avais  volé  10  millions  à  la  république,  vous  ver- 
rez qu'on  en  tirera  l'induction  que  je  suis  un  robes- 
pierriste. 

DuBEM  :  Il  faut  absolument  faire  imprimer  tous 
les  papiers  trouvés  chez  Robespierre,  afin  qu'on  ne 
s'en  serve  pas  dans  les  journaux  et  dans  les  libelles 
pour  calomnier  les  membres  de  la  Convention.  La 
commission  qui  était  chargée  de  ce  soin  a  manqué  à 
son  devoir. 

RiCHABD  :  Le  comité  de  salut  public,  après  avoir 
attentivement  examiné  cette  lettre,  a  reconnu  q^ue 
Tngent  secret  à  qui  elle  était  adressée  n'était  ponit 
nn  représentant  du  peuple;  c'est  un  nommé  Edouard 
Walkers,  banquier  connu. 

G^ROD  :  Je  dois  une  explication  à  Cambon. 

DuHEM  :  C'est  avec  des  {Poignards  qu'on  assassine. 

Gaston  :  Aûn  que  le  soupçon  ne  plane  pas  plus 
longtemps,  je  demande  l'exécution  du  décret  qui 
ordonne  l'impression  des  papiers  trouvés  chez  Robes- 
pierre. 

Plusieurs  voix  :  L'ordre  du  jour,  motivé  sur  le 
décret. 

LÉONARD  Bourdon  :  Aux  voix  l'impression  ! 

Dubois  :  11  semble  que,  quand  la  Convention  est 
occupée  d'iHïc  loi  propre  à  faire  le  bien  du  peuple, 
on  prenne  à  tâche  d'empêcher  la  discussion. 

Billaud-Vabennes  :  Je  demande  la  parole  relati» 
vement  au  fait  dont  il  e^t  question.  (Montaut  et 
Ruamps  crient  dans  le  bruit.) 

GiROD  :  Il  n'a  pas  pu  entrer  dans  mon  intention 
d'inculper  Cambon.  J'étais  à  la  discussion  du  dé- 
cret, et  Je  l'ai  vu  s'élever  avec  force  contre  ceux  qui 
voulaient  maintenir  le  séquestre.  D'ailleurs  les  let- 
tres initiales  que  portait  l'adresse  de  cette  lettre 
m'indiquaient  assez  que  celui  à  qui  elle  était  destinée 
était  un  étranger. 

Cambon  :  Le  décret  do  séquestre  vous  fut  enlevé 
par  Dufourny,  par  Lhuillicr.  (Plusieurs  voix  :  Par 
les  Jacobins!)  Croyez-vous  que  je  n'aurai  pas  le 
courage  de  dire  la  vérité?  Il  vous  fut  enlevé  par  la 
clique  de  Fabre  d'Eglantine,  par  ces  intrigants  qui 
se  sont  introduits  ici  je  ne  sais  comment,  et  qui'n'ont 
cessé  de  nous  exciter  les  uns  contre  les  autres  qu'au 
moment  où  ils  ont  vu  c^e  nous  nous  entre-égor- 
gions.  (DuHEM  :  Et  la  faction  Danton!  N'oublie  pas 
non  plus  la  Cabarrus(l). 

Fabre  d'Eglantine  voulait  faire  une  jnuroille  au- 
tour de  la  république,  afin  d'amener  la  famine.  Ne 
fiouvant  y  parvenir  lui-même,  il  fit  paraître  ici  Du- 
ournyet  Lnuillier,  quidans  le  même  temps  inon- 
dèrent Paris  d'afliches  pour  seconder  son  projet 
Ainsi,  l'on  sait  que  je  n'approuve  pas  le  séquestre  ; 
cependant  je  m'oppose  au  rapport  pur  et  simule  de 
la  loi  qui  l'a  ordonné* 

(i)  II»*  TaUitD. 


88 


La  dëlcrminalion  que  vous  avez  prise  ne  peut  pas 
être  regardée  comme  injuste.  L*Espagne  avait  saisi 
avant  vous  les  biens  des  Français  ;  vous,  vous  n'avez 
fait  que  séquestrer  ceux  des  puissances  avec  lesquel- 
les nous  sommes  en  çuerre  ;  mais,  je  vous  le  de- 
mande, devez-vous  rendre  à  rEspagnol  les  biens  que 
vous  avez  séquestrés,  tandis  qu^il  saisit  impitoyable- 
ment les  biens  des  Français  qu'il  chasse  à  vingt  lieues 
de  Madrid? Les  rendrez-vous  à  la  Hollande,  qui  nous 
a  enlevé  des  sommes  considérables?  Tout  serait  alors 
à  notre  désavantage,  malgré  que  la  totalité  des  som- 
mes que  nous  avons  séquestrées  ne  soit  pas  consi- 
dérable, car  elle  nes*élèvc  qu'à  25  millions.  Je  suis 
d*avis  qu*on  rende  aux  Belges,  dont  nous  occupons 
le  pays,  les  sommes  qui  leur  appartiennent  :  c'est 
une  justice;  mais  je  crois  qu'à  l'égard  de  l'Angle- 
terre et  de  la  Hollande  nous  devons  dire  que  nous 
ne  lèverons  le  séquestre  qu'autant  qu'elles  le  lève- 
ront elles-mêmes. 

Tbibion  :Si  quelque  chose  peut  éclairer  sur  le 
système  rétrograde  qu'on  veut  faire  adopter  à  la 
Convention,  c'est  l'article  dont  il  s'agit  en  ce  mo- 
ment. Je  n'accuse  pas  l'intention  des  comités;  je 
pense  aussi  qu'il  ne  fallait  pas  donner  à  l'Europe  le 
scandale  de  la  mauvaise  foi  en  séquestrant  les  fonds 
qui  appartiennent  au  commerce.  Je.  sais  que  qiiel- 
ques-uues  des  puissances  étrangères  nous  avaient 
prévenus,  mais  je  sais  aussi  que  d'autres  n'ont  fait 
que  nous  imiter. 

Si  vous  rapportez  le  séquestre,  vous  rendrez  aux 
étrangers,  et  les  étrangers  ne  vous  rendront  pas. 
C'est  donner  à  nos  ennemis  obérés  les  moyens  de 
faire  la  campagne  prochaine.  Il  existe,  pendant  la 
guerre  comme  pendant  la  paix,  un  droit  des  gens. 
Jl  faut  qu'on  nous  rende  écu  pour  écu,  prisonnier 
nour  prisonnier,  million  pour  million.  Je  pense  que 
le  séquestre  ne  doit  être  levé  qu'autant  qu'on  aura 
rendu  à  nos  négociants  la  valeur  des  sommes  que 
nous  avons  à  rendre. 

CoLOMOEL  (de  la  Meurthe)  :  Nous  sommes  tous 
d'accord  qu'on  a  tout  fait  pour  tuer  le  commerce,  et 
qu'on  a  pleinement  réussi.  Je  suis  d'avis  aussi  que 
la  levée  du  .séquestre  est  un  moyen  de  le  raviver; 
mais  je  crois  la  mesure  qu'on  propose  trop  générale; 
elle  donnerait  des  arme^  contre  nous.  Je  crois  qu'on 
atteindrait  le  but  désiré  en  déclarant  qu'on  rendra 
seulement  les  biens  appartenant  au  commerce. 

Rappelez-vous,  citoyens,  que,  pendant  la  guerre 
d'Amérique  les  Anglais,  qui  étaient  alors  nos  enue- 
mis,  se  servirent  du  pavillon  neutre  pour  nous  appor- 
ter des  marchandises  sur  leurs  propres  vaisseaux. 
La  guerre  était  déclarée  entre  les  gouvernements, 
mais  le  commerce  n'en  était  point  altéré.  Je  de- 
mande donc  que  le  séquestre  soit  levé  sur  les  biens 
appartenant  au  commerce,  et  qu'il  reste  sur  les 
biens  des  individus  non  commerçants. 

Chazal  :  Après  avoir  guillotiné  une  partie  du 
peuple*  français,  on  veut  encore  faire  mourir  l'autre 
de  faim  ;  voilà  pourquoi  on  s'oppose  à  la  levée  du 
séquestre,  qui  ranimerait  le  commerce.  (Vifs  ap- 
plaudissements.) 

{La  suite  demain.) 

N.  B.  Dans  la  séance  du  10,  Carnot,  au  nom  du 
comité  de  salut  public,  donne  lecture  des  lettres 
suivantes  : 

Féraud  et  Merlin  {de  ThionviUe)au  comité  de 
salut  public. 
An  quartier  général»  à  Oggcrshcim,  le  5  nivôse,  l*ao  3« 
de  la  république  française,  une  et  indivisible. 

•  Nous  VOUS  cQ\ojfoiis,  clicrs  collègues  i  par  Ta^judaut 


géDéral  Heudelet,  la  eapitalatioa  da  fort  du  lUiin  deMan- 
heim. 

a  Celte  place  importante,  qui  ne  laisse  plus  un  piod  à 
Pennemi  sur  la  rive  nucbe  do  Rhin  entre  Landau  et 
Mayence ,  est  aujourd'hui ,  à  midi ,  au  pouvoir  de  la  répu- 
blique, après  douze  heures  d*UDe  vive  canonnade  et  d*un 
chaud  bombardemeut* 

«  Nous  allons  en  prendre  possession  ;  nous  vous  feront 
passer  le  d^il  et  le  journal  du  siège  quand  nous  aurons 
plus  de  temps  :  Tarmée  tout  enlière  a  bien  fait  son  devoir, 
ipalgré  l'extrême  rigueur  de  la  saison*  » 

Michaud,  général  en  chef  de  l'armée  du  Rhin,  au 
comité  de  salut  publie. 

«  Citoyens  représentants,  le  fort  du  Rbin,  devant  Man« 
heim  ,.est  au  pouvoiiwde  la  république.  L*armée  du  Rhio, 
précédée  par  les  représentants  du  peuple  Féraud  et  Mér* 
lin,  vient  d*en  prendre' possession. 

•  Animés  de  leur  exemple,  généraux,  officiers  et  soldats, 
lous  ont  fait  leur  devoir.  Vos  collègues,  qui  ont  partagé 
les  dangers  et  la  fatigue  de  ce  siège,  sont  à  même  de  vous 
rendre  ce  témoignage. 

«  L'eunemi  a  capitulé  après  quatone  heures  de  bombar- 
dement. 

•  Salut  et  fraternité,  MiatAObb  t 

Capitulation  proposée  par  les  troupes  intérieures 
et  palatines  à  l'armée  française  du  Rhin,  pour 
la  reddition  du  fort  du  Rhin  de  Manheim, 

•  Le  fort  du  Rhin  de  Manbeim  sera  rendu  à  Parmée  as* 
siégeante  le  S5  décembre  1794*  à  midi,  avec  PartUlerle, 
munitions  et  autres  objets  qui  pourront  8*y  trouver  à  Pin- 
stant  de  sa  reddition,  à  la  condition  ci-deNious  : 

K  La  ville  de  Manheim  ne  sera  point  bombardée  tant  que 
la  guerre  n*aura  lieu  que  sur  la  rive  gauche. 

«  A^pon  je.— La  démolition  du  fort  du  Rhin  de  Manheim 
ne  sera  point  inquiétée.  La  moindre  insulte  à  ce  sujet  sera 
regardée  comme  une  violation  du  présent  traité,  et  rè* 
primée  par  le  bombardement  de  la  ville. 
«  A  Manheim,  le 34  décembre  i79è« 

a  Signé  le  commandant  général  commandant  U»  trou* 
pet  de  Sa  Majesté  V empereur  à  Manheim ,  et  aux 
environs,  comte  de  WAnTENSLBBBif,  général  d*ia« 
fanterie. 
•  Le  commandant  général,  gouverneur  de  la  ville  de 
Manheim,  pour  Son  Altesse  sérénissime  éleetoraU 
palatine,  de  Bittsbback.  • 
a  Accordé  au  nom  de  la  république  française  les  demao* 
des  ci-dessus. 

«  Vadjudant  général  chargé  de  pouvoin  suffisants^ 

UlUDELET. 

«  Vu  et  raliGé  au  nom  de  la  république  française  par  les 
représentants  du  peuple  et  les  généraux  commandant  l'ar- 
mée devant  Manheim,  le  5  nivôse  de  Tan  3*  républicain. 
•  Signé  Merlin  (de  Thionville>  et  F&racd.  » 

—  La  Convention  a  rapporté  le  décret  du  7  prairial  et 
celui  du  34  thermidor,  portant  qu^il  ne  serait  plus  fait  de 
prisonniers  anglais,  hanovricns  et  espagnols. 


^rti/enien(  d'assignats. 

Le  9  nivôse,  à  dix  heures  du  matin,  il  a  été  brûlé,  dans 
Pancicn  local  des  ci-devant  Capucines,  la  somme  de  18 
millions  en  assignats,  provenant  delà  vente  des  domaioct 
nationaux  et  recettes  extraordinaires,  lesquels ,  joints  aiù 
2  milliards  401  millions  683,000  Uv.  déjà  brûlés,  forment 
un  total  de  3  milliards  509  millions  693,000  liv. 

Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpéUiel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 
miers mois  ;  Il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscripUons  au  grand  livre.  Celui  pour  les  renies  viagères 
est  de  huit  mois  vinet  et  uo  Joon  de  Tannée  1793  (vieux 
•tyle). 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


N*  lOî. 


Duodi  12  NivosE,  l'an  i^.  (Jmdi  !«'  Ja^ivier  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

SUEDE. 

Stockholm  «  U  fô  NtfveiR  bre,  —  Quinte  (onies  d*lor  en?  I* 
roB  soui  le  iprodiiit  de»  offrande»  patriotique»  qui  ont  été 
portée»  à  U  cbamteo  des  finaoce»  pour  ie  »ou&ieB  de  rbofh 
ncor  et  de  riadépendance  de  la  Suède. 

—  Le  maréclial  du  royaume,  comte  Oxenstiern,  a 
obicnu  UD  congé  de  dcui  an».  Le  comte  Po8»e  remplira  »es 
fonctions  pendant  son  absence. 

^  L^Qsate  du  café  a  été  défenda.  Le  ctub  diplomatique 
ayant  négngé  de  se  conftmner  ft  cette  ordonnance,  une 
défeote  partteaHère  a  été  fatitoée  ati  tencar  de  ce  club.  Ce 
procédé  a  déplu  ft  qttel^ues-ctns  des  fflinfstre»  étrangers ,  et 
pfcisiettn  mm  gra? caent  éerit  à  leur  eoiir  pour  demander 
de»  îDilnKtioa»  »«r  cet  atijel* 

—  Le  «ifsittre  anglais,  lord  Spencef,  crt  parti  à  la  kâtet 
par  ordre  de  »a  court  pour  »a  rendre  à  Berlia* 

—  Ou  terii  de  Copeutogue  que  le»  Jond»  de  la  banque 
dano-aorwégieuna  mleoifoés  pour  le  présent,  à  2  iMUiou» 
400,oad  éeu»  esnèces» 

—  Le  raécanfcien  danois  Dehsen  a  dû  ftiire  à  la  Tour 
ronde,  à  Copenbague»  un  essai  télégraphique. 

ITALIE. 

Gènes ,  U 10  décembre,  —  Le  convoi  anglai»  delà  Médi- 
tetranée  e»t  eaué  à  Lisbonne,  sou»  TeMorie  du  vaisseau 
ai^i»  CÀmerigm*  monté  par  Jacque»  Rodney,  de  deux 
fr^tc»  et  d*wie  cnaloupe.  Ce  convoi  est  composé  de  dix- 
neuf  faiaieat»  hollandais»  de  cinq  împériaua  et  de  qua* 
raote  anglais.  Le»  Talsseaox  marchands  qui  se  trouvaient 
à  Oporto  »>  sont  rénofik 

--»  On  »  apprf»  qn*ttne  eseaifre  française  8*étaft  emparée 
dMpaqaëMl  anglais  In  il  toi,  parti  de  Lisbonne  le  li  sep- 
tmhrVf  et  qui  ataft  ft  bord  150,000  piastres. 

—  Le  pape  a  eaodaaDné  par  nne  bitlle  qUatre-rlngt-^rols 
prapeaitloa»  du  «aDeUe  dioaéiahi  dePl»foit.  Gttte  ccMidoile 
da  1»  cour  de  R»ae  a  paru  aingulière  ;  elle  eai  taipaÉilique 
soo»too»le»  rapporta.  L'easpereur  cl  le  grané  due  ne  Pap* 
prouvefootattUemciit;  en  clléi,  le»  proposition»  qu*il  pkdl 
au  pape  de  condamner  sont  adoptées  dans  toute  la  Toscane 
et  oan»  toute»  les  posseasions  autrichienne»,  en  Italie. 

^-  Il  r^gne  en  ce  moment  une  froideur  marquée  entre 
la  cour  de  Rome  et  le  cabinet  napolitain;  la  première  de 
oeseottfs  estatisslen  démêlé  atec  te  gouvcrnemcnl  suédois, 
dam  elle  a  eieité  le  mécontentement  par  rincai-cération 
'  du  célèbre  graveur  Qrandel,  attaché  en  cette  qualité  â  son 
servler. 

*-*  On  éerll  da  VenlM  que  le  eitoyen  lloél ,  qui  y  réstdnit 
csi  qualité  de  ministre  plénipotentiaire  de  la  république 
française,  san» avoir  encore  été  reconnu  par  le  gouverne- 
neai  vénitien ,  vient  d^étre  remplacé  par  le  cHoyen  Lalle^ 
marid ,  qui  »  le  litre  d'envoyé  extraordinaire.  Ce  dernier  a 
déjà  été  adroi»  devant  la  sénat,  qui  »*e»i  empre»8é  de  re« 
connaître  son  caractère. 

mollaudc. 

i^  Wre»  eu  WtihaU  le  î1  eeptembrê,  -^  Le  corps  autri- 
cbien  venu  au  secours  de  la  Hollande  monte  à  douse  mille 
brnnnies.  Us  sent  placés  le  long  de  TYssel,  et  destinés  à 
couvrir  rOver-Tssel  et  le  comté  de  Zulpben. 

•^  Le»  troupe»  A^nçalse»  conlonnées  à  Pnl  font  de  fré- 
quentes inclbrsions  jusque  sous  les  glacis  de  Bcrgop*  Zoom. 
La  garnison  de  cette  dernière  place  Tient  d*é(re  augmentée 
de  deux  régifflenf». 

^  Bréda  est  étroitement  resserré;  ob  y  {ette  auvent 
dé»  bombe».  Le»  génénmt  français  ont  pris,  à  pca  de 
diaioiiee  de  WiHiatt»iadt  et  de  Gertruydemberg ,  des  posi« 
lion»  q«i  taqtdèieot  beaucotip  le»  eemmtifîdant»  de  re^ 
place». 

€ON¥EKTION  NAIIONALB 

Préskkneê  de  Ëeniabote. 
it^ltfi  DE  LA  SiAUGB  DU  9  NITOSB. 

Bamel  :  11  ti*y  a  pas  de  doute  que  le  séquestre  a 


contribué  à  la  ruine  du  commerce  ;  cependant  il  y  a 
du  dissentiment  sur  la  question  de  savoir  si  ou  le 
lèvera,  si  on  le  maintiendra.  Je  crois  que  de  la  meilr 
Icure  foi  du  monde,  on  peut  embrasser  lune  ou  l'au- 
tre opinion.  Je  vais  tâclier  de  lixer  celle  à  laquelle 
on  doit  s'arrêter. 

Si ,  Tann^.  dernière,  il  eût  ëtë  possible  de  discu- 
ter îa  question  du  séquestre ,  on  aurait  développé 
les  principes  du  droit  des  gens,  et  on  aurait  empê- 
ché que  ce  décret  fût  arraché  ù  la  Convention.  On 
prélendait  par  ce  moyeu  atteindre  les  émigrés,  les 
négociants  et  les  agioteurs,  et  le  décret  a  opéré  un 
effet  totalement  contraire.  Les  émigrés,  qui  avaient 
laissé  en  France  leurs  biens-fonds,  avaient  emporte 
leur  argent  avec  eux  ;  ainsi  le  décret  ne  les  atteignait 
pas.  On  disait  qu'en  n'observant  pas  le  séquestre  on 
favorisait  les  négociants;  on  se  décelait  par  là  ;  on 
voulait  tuer  le  commerce  (]ui  commençait  à  prendre 
de  l'activité,  et  Ton  voyait  à  regret  que  nos  négo- 
ciants expédiaient  pour  l'étranger  uue  grande  quan- 
tité de  marchandises  ouvrées  chez  iu>us.  On  voulait 
frapper  les  agioteurs  en  ordonnant  le  séquestre,  et 
ce  sont  précisément  des  agioteurs  étrangers  qui  ont 
sollicité  ce  décret.  On  le  croira  sans  |>eiue  quand 
on  Se  rappellera  que  les  nations  voisiues,  et  TAngle- 
terre  surtout,  ont  le  plus  grand  intérêt  à  tuer  le  com- 
merce. 

Il  existait  sur  la  place  iine  grande  quantité  de  pa- 
pier sur  Londres  et  sur  Amsterdam  ;  les  agioteurs 
recevaient  en  France,  et  promettaient  de  payer  dans 
Tune  de  ces  deux  villes.  Us  avaient  ainsi  accaparé. 
30  â  40  millions. 

Ils  s^'aperçureut  bientôt  que  le  change  tournait  en 
notre  faveur,  et  ils  se  trouvèrent  par  là  réduits  à 
rimpossibilitd  de  faire  leurs  payements ,  ou  exposés 
à  db  très- grandes  pertes.  Us  agirent  alors  auprès  de 
la  Couvcirtion ,  et  essayèrent  de  faire  passer  le  sé- 
questre, à  la  faveur  duquel  ils  se  dispenseraient  de 
payer  les  engagements  qu'ils  avaient  contractés.  Us 
y  réussirent,  et  cette  mesure  eut  les  conséquences 
les  plus  funestes.  Le  commerce  ne  consiste  pas  seu- 
lement à  acheter  et  à  revendre,  mais  il  consiste  en- 
core ù  se  servir  du  crédit  national,  et  il  u'est  pas  un 
négociant  français  qui  puisse  en  faire  usage.  Les  né- 
gociants qui  habitent  des  pays  avec  lesquels  la  ré- 
publique est  en  guerre  ne  veulent  pas  traiter  à  crédit 
avec  nous,  parce  qu'ils  sont  certains  qu'on  leur  re- 
tiendra leurs  fonds.  Les  négociants  des  pays  neutres 
ne  veulent  pas  non  plus  nous  faire  de  crédit ,  parce 
quils  ne  peuvent  pas  lire  dans  le  secret  de  leur  gou* 
vernement,etqn'iis  courraient  les  mêmes  risques  (|ue 
le  négociant  d'un  pays  ennemi,  si  In  guerre  venait  à 
éclater  entre  nous  et'le  pays  neutre  le  lendemain  du 
jour  où  les  négociants  nous  auraient  vendu.  Il  faut 
distinguer  dans  la  guerre  ce  qui  tient  aux  droits  des 
gouvernements  de  ce  qui  tient  aux  relations  particu- 
fières  ;  elle  rompt  toutes  les  relations  de  gouverne- 
ment à  gouvernement,  mais  elle  laisse  subsister  les 
traités  passée  de  bonne  foi  entre  les  négociants.  Le  sé- 
auestre  n'a  libéré  que  nomentanémeiit  les  débiteurs 
français  envers  leurs  créanciers  étrangers,  car  le 
depdt  n'est  pas  un  payement  :  un  négociant  de  Paris, 
par  exemple,  doit  à  un  négociant  d  Amsterdam  une 
somme  do  100,000  liv.  payable  dans  cette  dernière 
ville;  le  séouestre  que  vous  avez  ordonné,  et  que  le 
négociant  français  aura  effectué,  n'empêchera  pas  le 
négociant  d'Amsterdam  d'obtenir  une  condamnation 
ooatra  son  débiteur  qui  aura  des  fonds  dans  un  pays 
neutre,  à  Bâle,  par  exemple.  (On  applaudit.) 


90 


Maïs  la  disca««ion  oh  feutre  est  inutile,  car  nous 
sommes  tous  d'accord  que  le  décret  est  mauvais  ; 
les  amendements  qu'on  a  proposés  prouvent  que 
nous  serions  tous  d'accord  si  les  puissances  étran- 
gères voulaient  rapporter  le  séquestre  qu'elles  ont 
mis  sur  les  fonds  qui  nous  appartiennentt  Eh  bien, 
je  soutiens  que  c'est  à  nous  à  leur  donner  Texemple 
du  rapport,  parce  que  nous  leur  avons  donné 
Texemple  de  sa  mise.  (On  applaudit.)  Nous  n'avons 
séquestré  aux  étrangers  qu'une  somme  de  25  jnil- 
lions,  et  ils  ont  qu  commerce  français  une  somme 
l>caucoup  plus  considérable.  Si  de  ces  25  millions 
Fou  en  retranche  5  ou  6  dus  aux  Belges,  restera  à 
20  pour  lesquels  nous  continuerons  de  paralyser 
le  commerce.  Ces  25  millions  ne  sont  qu'un  dépôt  ; 
ainsi  ce  qu'on  propose  aujourd'hui  n'est  qu'une  res- 
titution anticipée,  à  laquelle  on  ne  doit  pas  re- 
garder pour  raviver  le  commerce.  Souvenons-nous 
3ue  l'Angleterre,  dont  la  population  ne  s'élève  qu'à 
onze  millions  d'hommes,  et  qui,  à  cause  de  cela, 
ne  devrait  pas  être  regardée  comme  une  des  grandes 
puissances  de  l'Europe,  est  cependant  au  premier 
rang.  La  Hollande,  frappée  de  stérilité  par  tous  les 
éléments,  doit  au  commerce  la  richesse  et  la  prospé- 
rité dont  elle  jouit.  Je  sais  bien  que  quelques  es- 
Erits  bizarres  vont  nous  proposer  d'examiner  d*a- 
ord  laquelle  des  deux  formes  de  gouvernement, 
d'Athènes  ou  de  Sparte,  nous  convient  davantage  : 
je  leur  ré(K)ndrai  que  Sparte  avait  deux  rois,  et  qu'A- 
thènes était  une  démocratie  ;  Athènes  avait  le  Pirée; 
nous  devons  aussi  avoir  des  ports  dans  la  républi- 
que. Les  négociants  qui  y  aboraeront  verront  comme 
les  étrangers  sont  reçus  chez  un  peuple  libre,  avec 
quelle  loyauté  on  y  fait  le  commerce.  Ils  iront  por- 
ter chez  eux  nos  principes  et  nos  vœux  ;  ils  hâteront 
ainsi  la  liberté  du  monde ,  que  nous  désirons  tous. 
BÉAL  :  Après  la  discussion  lumineuse  qui  vient 
d'avoir  lieu  sur  la  question  qui  occupe  l'assemblée, 
je  n'ajouterai  qu'une  réflexion;  elle  a  pour  objet  de 
répondre  à  une  objection  faite  par  deux  des  préopi- 
nants, et  qui  n'a  pas  été  réfutée. 

On  a  dit  que,  lors  même  que  la  Convention  natio- 
nale donnerait  Texemple  de  la  justice,  en  levant  le 
séquestre  mis  sur  les  biens  des  habitants  des  pays 
avec  lesquels  nous  sommes  en  guerre,  rien  ne  nous 

Garantissait  que  les  puissances  étrangères  usassent 
'une  juste  réciprocité  envers  nous  ;  qu'ainsi  nous 
aurions  fait  un  acte  impolitique  qui  tournerait  à  no- 
tre préjudice. 

Je  réponds  que  lors  même  que  nous  aurions  à 
craindre  que  la  réciprocité  n'eût  pas  lieu,  le  peuple 
français  s  honorerait  encore  en  donnant  ce  grand 
exemple  de  respect  pour  le  droit  des  gens  et  les  pro- 
priétés particulières;  que  la  seule  politique  digne 
de  ses  représentants  est  celle  qui  est  fondée  sur  les 
bases  éternelles  de  la  justice  ;  je  n'en  connais  pas 
d'autres. 

J'«'ijoute  que  je  ne  partage  pas  cette  crainte.  Lors 
même  que  les  gouvernements  étrangers  voudraient 
se  refuser  à  user  de  réciprocité ,  reposez- vous  avec 
confiance  sur  l'intérêt  général  du  commerce,  qui 
sollicite  fortement  cette  mesure.  Les  négociants  de 
Londres,  d'Amsterdam  et  de  Madrid,  sauront  bien , 
même  pour  leur  propre  intérêt,  forcer  leurs  gou- 
vernements respectifs  à  rendre  justice  aux  négociants 
français. 

Doutez-vous,  citovens,  que  le  parti  de  l'étranger 
n'ait  pas  concouru  a  vous  surprendre  le  décret  dé- 
sastreux du  séquestre?  N'était-ce  pas  un  moyen 
puissant  entre  les  mains  de  Pitt  pour  naturaliser  la 
guerre  contre  le  peuple  français?  C'est  en  peignant 
ce  peuple  généreux  et  magnanime  comme  violant 
le  aroit  des  gens»  et  brisant  les  contrats  entre  les 


particuliers,  qu'il  est  parvenu  à  anéantir  votre  com- 
merce et  à  vous  isoler  de  toutes  les  natjpns  com- 
merçantes. 

Je  conclus  en  appuyant  la  levée  du  séquestre, 
avec  Tainendement  présenté  par  Colombel,  que 
cette  mesure  n'aura  lieu  que  pour  les  sommes  et  ef* 
fets  saisis  provenant  des  relations  commerciales; 
car  certes  il  n'est  pas  dans  l'intention  d'aucun  de 
nous  d'étendre  cette  mesure  au  séquestre  mis  sur 
les  biens  des  princes  étrangers  situés  en  France,  ni 
aux  sommes  provenant  des  banques  nationales  étran- 
gères. 

Maube  :  Si  vous  rapportez  le  séquestre,  les  gou- 
vernements étrangers  ne  diront  pas  que  vous  avez 
été  iustes,  mais  que  vous  avez  été  faibles.  (Murmu- 
res.) Je  veux  qu'on  accorde  quelque  chose  a  la  poli- 
tique raisonnaole,  et  non  à  la  politique  détestable  . 
de  Machiavel.  Je  demande  la  levée  du  séquestre  à 
l'égard  des  peuples  chez  lesquels  nous  sommes  en- 
tres en  conquérants  :  mais  je  demande  qu'il  ne  soit 
que  conditionnel  à  regard  des  ennemis  de  la  liberté. 
Je  déclare  que  j'ai  l'honneur  d'être  commerçant  et 
Français ,  et  que  je  ne  me  croirais  pas  dégagé  en- 
vers les  étrangers  par  le  rapport  du  séquestre.  (Mur- 
mures.) 

On  veut  vous  faire  faire  une  démarche  qui  com- 
promettra votre  volonté,  et  vous  faire  commettre 
un  acte  de  faiblesse. 

Pblbt  :  Tout  le  monde  convient  que  la  loi  du  sé- 
questre est  une  loi  autrichienne,  faite  pour  natio- 
naliser la  guerre  avec  l'Autriche  et  l'Angleterre. 
Dès  que  cette  vérité  est  constante,  il  ne  doit  pas  y 
avoir  de  dissentiment  sur  le  résultat  qu'on  en  doit 
tirer.  Je  n'étais  pas  d'abord  de  l'avis  de -rapporter  le 
séquestre  ;  mais,  après  avoir  entendu  l'opinion  de 
Ramel  et  de  Real,  il  ne  m'ai  pas  été  permis  de  douter 
que  Ton  avait  voulu  nous  isoler  de  l'Europe  entière, 
et  cela  entre  par&itement  dans  le  plan  dç^  famine 
combiné  par  l'Angleterre.  20  millions  peuvent-ils 
être  une  ressource  pour  la  continuation  de  la  guerre? 
croit-on  que  par  là  nous  secondions  bien  eflicace- 
ment  les  efforts  de  toutes  les  puissances  de  l'Europe? 
Cette  objection  est  misérable  ;  je  vote  pour  l'article 
du  comité. 

BoissY  d'Anglas  :  On  ne  peut  répondre  à  Ramel 
que  par  des  objections  fausses.  Le  changement  opéré 
au  système  qui  existait  il  y  a  six  mois  nécessite  - 
aussi  d'en  changer  les  conséquences.  On  pensait 
alors  qu'il  fallait  centraliser  le  commerce  dans  le 
gouvernement,  et  n'avoir  d'autres  marchandises 
que  celles  qu'il  lui  plairait  de  nous  apporter  ;  d'au- 
tres prétenaaient  que  la  France  pouvait  se  suffire  k 
elle-même ,  et  qu  il  fallait  élever  une  barrière  au- 
tour de  son  territoire  pour  se  séparer  de  tous  les  au- 
tres peuples  ;  l'expérience  a  prouvé  combien  ces  opi- 
nions étaient  mal  fondées.  Après  avoir  aboli  le 
système  de  terreur,  il  a  fallu  aoolir  le  maximum  : 
il  faut  encore  ramener  l'abondance ,  et  pour  cela  jl. 
faut  rendre  au  commerce  la  plus  grande  liberté;  il 
faut  rétablir  la  bonne  foi  sur  laquelle  il  se  fonde,  et, 
pour  l'opérer,  je  ne  vois  pas  de  meilleur  moyen  que 
d'adopter  le  projet  des  comités. 

BounnoN  (de  l'Oise)  :  11  est  du  devoir  d*un  bon 
citoyen  de  tout  sacrifier  pour  le  bien  de  sa  patrie, 
de  revenir  sur  son  opinion  lorsqu'il  lui  est  démontré 
qu'elle  est  fausse.  (Applaudissements.)  J'ai  soutenu 
ici  qu'il  ne  fallait  pas  rapporter  la  loi  du  séquestre, 
et  j'ai  appris  par  cette  imprudence  qu'avant  de  trai- 
ter une  matière,  il  faut  ravoir  bien  méditée.  (Ap- 
plaudissements.) Après  avoir  réfléchi  sur  cette  ques- 
tion, il  m'a  été  mathématiquement  démontré  qu'il 
était  impossible  que  nous  eussions  jamais  aucune 
relation  de  commerce  avec  les  étrangers,  tant  que 


91 


cette  loi  subsisUraît,  parce  que  les  Dcgociants  des  . 
pays  neatres,  craignant  toujours  que  leur  gouverne- 
ment n*entre  en  guerre  avec  le  nôtre,  ne  voudront 
point  livrer^  de  marchandises  sans  être  payés  d'a- 
vance. 

Il  n'y  a  pas  d*exemp1e  que,  lors  même  que  toutes 
les  puissances  de  TEurope  ont  été  en  guerre,  ou  ait 
viole  le  droit  des  gens  en  prenant  l^s  propriétés  des 
particuliers.  Ce  ivcst  pas  seulement  le  respect  que 
nous  devons  porter  a  cette  loi ,  mais  c'est  encore, 
l'intérêt  du  peuple  français  qui  nous^ordonne  de  rap- 
porter la  loi  du  séquestre.  En  prenant  cette  mesure, 
nous  verrons  les  étrangers  revenir  dans  nos  ports. 
Nous  verrons  les  Anglais  apporter  eux-mêmes  des 
marchandises,  comme  ils  l'ont  déjà  fait  pendant  la 
guerre  de  l'indépendance  américaine. 

La  plus  forte  objection  qu'on  oppose  à  l'article 
des  comités  est  de  dire  que  les  puissances  étrangè- 
res ne  nous  rendront  pas  les  50  millions  qu'elles  ont 
à  nous.  Les  réflexions  de  mes  collègues  qui  ont  parlé 
avant  moi  ont  prouvé  que  le  seul  moyen  de  faire 
tendre  au  commerce  français  les  sommes  que  les 
étrangers  ont  à  lui  est  de  rapporter  le  séquestre. 

Le  commercé  se  compose  de  relations  directes , 
doubles  et  triples  :  qu'un  Anglais  doive  à  un  négo- 
ciant français;  que  celui-ci  se  présente  à  Bâle,  par 
exemple,  pour  faire  saisir  les  fonds  que  son  débi- 
teur aurait  dans  cette  ville  ;  la  nation  neutre  n'ac- 
cordera par  la  saisie ,  parce  qu'elle  vous  reprochera 
Ilnjustice  que  vous  aurez  commise  à  l'égard  désau- 
tre$  nations  en  ordonnant  le  séquestre,  au  lieu  que, 
si  vous  le  levez,  il  n'y  au|;a  plus  de  motifs  pour  em* 
pêcher  la  saisie. 

L'ancien  gouvernement  nous  disait  que  l'Anglais 
voulait  nous  btoquer  ;  il  faut  avouer  que  nous  se- 
condions parfaitement  ses  efforts  en  nous  coupant 
toute  communication  avec  les  peuples  de  l'Améri- 
que. Je  ne  roueis  pas  de  dire  que  je  me  suis  trompé, 
et  je  crois  qu'il  faut  adopter  l'article. 

La  discussion  est  fermée. 

Cambon  :  Les  Anglais  avaient  saisi  à  la  caisse  d'es- 
compte avant  les  Espagnols ,  ceux-ci  ont  saisi  tous 
les  biens  appartenant  aux  Français.  Dans  les  sommes 
qui  nous  avons  séquestrées  if  se  trouve  2  millions 
ijui  appartiennent  à  la  banque  de  Saint-Charles,  et 
que  les Lecouteulx  doivent  verser  en  solde  de  compte 
pour  an  placement  ep  rentes  viagères  ;  je  ne  crois 
pas  que  le  séquestre  doive  être  levé  sur  cette  somme, 
qui  appartient  au  eouvernement  espagnol. 

DuHBM  :  11  ne  faut  pas  le  lever  non  plus  sur  les 
biens  de  la  Cabarrus. 

Cambon  :  Il  est  faux  qu'une  puissance  puisse  s'em- 
parer dans  un  port  neutre  de  ce  qui  appartient  à 
■ne  puissance  ennemie.  Votre  gouvernement  ne  fait 
cette  opération  que  par  Bâle,  et  jamais  Bâle  ne  souf- 
ùirait,sans  rompre  la  neutralité,  que  des  proprié- 
tés appartenant  aux  Français  fussent  saisies  sur  son 
territoire.  Dans  ce  moment  la  trésorerie  prend  du 
papier  sur  Hamboure,  sur  Bâle  ;  personne  n'arrête 
les  propriétés  particulières.  (Plusieurs  voix  :  La  dis- 
cossion  est  fermée.) 

BouBDOif  (de  l'Oise)  :  On  demande  qu'on  excepte 
de  l'article  les  fonds  appartenant  h  la  banque  Saint- 
Charles,  parce  que  c'est  une  propriété  du  gouver- 
nement espagnol. 

DuHBii  :  Il  faut  excepter  aussi  les  biens  de  la  Ca- 
barrus ;  car,  si  vous  les  lui  rendez ,  on  va  imprimer 
Jans  tout  Paris  des  libelles  pour  égorger  la  Conven- 
tion nationale. 

La  Convention  adopte  l'article  du  comité  avec  l'a- 
Mendement  relatif  à  la  banque  de  Saint-Charles. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


SéANCB  DD  10  RIVOSB. 

Mailhe  :  Dans  la  séance  du  8,  j'ai  dit  :  «  Un  Fran- 
çais qui  demande  un  roi  n'est  pas  un  homme ,  c'est 
un  tigre,  un  ennemi  de  l'humanité.  «Voici  com- 
ment le  rédacteur  du  Journal  des  Débats  eê  des 
Décrets  me  fait  parler  :  «  C'est  un  tigre,  un  ennemi 
de  l'humanité,  un  Turc.  •  Ces  derniers  mots  ne  sont 
point  sortis  de  ma  bouche.  La  Convention  nationale 
se  serait  levée  tout  entière  pour  me  punir  si  j'avais 
osé  proférer  une  pareille  platitude,  un  outrage  aussi 
grossier  et  aussi  peu  mérité,  envers  la  Porte-Otto- 
mane, qui  a  toujours  été  l'alliée,  l'amie  des  Fran- 
çais, et  qui ,  dans  tous  les  temp^,  a  figuré  honora- 
blement parmi  les  puissances  les  plus  attachées  à 
leurs  engagements  politiques. 

Oui,  nous  maintiendrons  en  France  le  gouverne- 
ment républicain ,  le  gouvernement  purement  dé- 
mocratique, et  nous  saurons  atteindre ,  de  quelque 
masque  qu'ils  se  couvrent,  les  ennemis  intérieurs 
qui  chercneraient  à  le  dénaturer.  Oui ,  nous  pour- 
suivrons les  ennemis  extérieurs  qui  ont  attaqué  no- 
tre liberté  ;  nous  les  poursuivrons  jusqu'à  c-e  que 
nous  leur  ayons  dicte  une  paix  honorable;  mais 
nous  respecterons  toujours  les  lois  de  la  neutralité. 
Nous  serons  toujours  fidèles  aux  traités  faits  ou  à 
faire.  La  Convention  et  le  peuple  français  ont  dé- 
claré, dans  l'acte  constitutionnel ,  qu'ils  ne  s'immis- 
ceraient jamais  dans  le  gouvernement  des  autres 
nations.  La  Convention  et  le  peuple  français  ne  s'é- 
carteront jamais  de  ce  principe,  qui  tient  au  droit 
sacré  des  ^ens,  à  l'existence^politique  des  peuples, 
aux  principes  et  à  la  tranquillité  des  gouverne- 
ments. 

La  Convention  nationale  décrète  l'insertion  de 
cette  observation  au  Bulletin,  et  le  renvoi  au  comité 
de  salut  public,  pour  en  faire  parvenir  une  expédi- 
tion à  notre  ambassadeur  à  la  Porte. 

Brival  :  La  loi  du  7  prairial  et  celle  du  S4  ther- 
midor, portant  qu'il  ne  sera  point  fait  de  prisonniers 
anglais,  Jianovriens  et  espagnols,  sont  contraires  à 
toutes  les  lois  ;  elles  contrarient  le  droit  des  gens  et 
de  la  guerre;  elles  ont  été  enlevées  par  une  surprise 
faite  à  la  Convention  :  ces  lois  sont  même  en  oppo- 
sition avec  les  sentiments  qui  animent  nos  braves 
militaires,  qui  savent  vaincre  nos  ennemis,  et  jamais 
assassiner  les  vaincus.  Je  demande  que  la  Conven- 
tion nationale  rapporte  ces  lois. 

Plusieurs  voix  :  Le  renvoi  aux  comités  ! 

Bréard  :  S'il  fut  jamais  une  circonstance  où  un 
renvoi  a  été  inutile ,  c'est  bien  celle-ci.  Ces  décrets 
sont  une  injure  faite  à  la  nation  française.  Nos  sol- 
dats sont  assez  courageux  pour  se  battre  avec  va- 
leur, sans  qu'il  soit  besoin  de  leur  faire  craindre 
une  représaille  de  cette  nature.  Mais,  s'ils  sont  cou- 
rageux dans  les  combats,  ils  sont  magnanimes  après 
la  victoire.  Je  demande  donc  sur-le-champ  le  rap- 
port de  cette  loi  injurieuse  à  l'humanité. 

Le  rapport  est  décrété  au  milieu  des  applaudisse- 
ments. 

Cabnot,  au  nom  du  comité  de  salut  public  :  Ci- 
toyens, les  rigueurs  de  la  saison  ne  peuvent  arrêter 
la  valeur  de  nos  troupes  ;  le  fort  du  Rhin  est  au  pou- 
voir de  la  république.  (On  applaudit  à  plusieurs  re- 
prises.) 

Carnot  donne  lecture  de  la  lettre  des  représen- 
tants du  peuple  Féraud  et  Merlin  (de  Thionville); 
de  celle  au  général  Michaud ,  et  de  la  capitulation 
proposée  par  les  troupes  autrichiennes  pour  la  red- 
dition du  fort  du  Rhin  de  Manheim.  (Voyez  la  notice 
d'hier.) 

Go  demande  un  seconde  lecturA  delà  capitula 

tiOD. 


9t 


Carnol  la  donue. 

Lksage-Senaiîlt  :  Je  demande  que  le  comité  de 
s:ilut  public  lasse  im  rapport  sur  cette  capitulation, 
f/enmnii  paraît  avoir  fait  la  loi  :  c'est  avilir  le  peu- 
ple français. 

Cabnût  :  Aucune  opération  de  campaçnc  ne  mé- 
rite autant  d'admiration  que  celle  dont  je  viens  de 
vous  entretenir;  c'est  dans  les  neiges  et  la  glace 
qu'on  a  fait  les  tranchées.  Il  fallait  tout  le  courage, 
toute  la  constance  de  nos  soldats  et  des  représentants 
du  peuple.  Ceux  qui  réclament  ne  connaissent  pas 
la  situation  des  lieux.  Manheim  est  à  la  droite  du 
Rhin  ,  environ  à  une  portée  dé  canon.  Le  fort  est  à 
In  çauclie,  à  la  t<*te  du  pont  qui  établit  la  couununi- 
cation  entre  le  Palalinat  et  TAIsace,  et  ce  fort  était 
des  nlus  difijciles  à  prendre.  S'il  ne  se  fAt  rendu, 
.Mnnneim  eût  été  réduit  en  cendres;  mais  aussi  le 
siège,  si  on  Teût  continué  sans  accepter  la  capitula- 
lion  ,  nons  eût  peut-être  coûté  six  mille  hommes. 

Vous  voyez  aonc  combien  cette  prise  est  imi)or- 
fnnte,  et  qu'il  était  sage  d'accepter  la  capitulation. 
(Vifs  applaudissements.) 

I.esage-Senault  :  Je  n'ai  jamais  douté  du  couraçe 
de  nos  soldats,  ni  de  celui  de  nos  généraux ,  mais 
j  avais  besoin  de  celte  explication. 

Pelet  :  J*ai  demandé  la  parole  pour  répondre  à 
celui  qui  a  voulu  jeter  de  la  défaveur... 

Plusieurs  voix  :  Il  n'en  est  pas  besoin. 

Caiîwot  :  Jauinis  il  n'y  eut  de  plus  juste  occasion 
de  décréter  que  l'armée  du  Rhin  ne  cesse  de  bien 
mériter  de  la  patrie. 

Celte  proposition  esf  décrétée  à  runanloiité  et  au 
milieu  des  plus  vifs  applaudissements. 

DunEM  :  11  est  étonnant  qu'on  ne  voie,  nj  dans 
le  Bulletin,  ni  dans'le  feuilleton,  le  décret  voté  à 
Tunanimité  par  la  Convention  nationale  pour  l'ar- 
restation du  royaliste  Lacroix,  auteur  du  libelle  dé- 
noncé dans  la  séance  du  8  nivôse.  Il  est  étonnant 
encore  qu'on  ne  voie  dans  le  Bulletin  oueune  nrwn- 
tion  du  mouvement  sublime  «pii  s'est  manifesté  è 
cette  occasion  dans  le  sein  de  la  Convention.  Je  de- 
mande la  rénaration  de  cet  oubli.  (On  applaudit.) 

Maube  :  Il  avait  été  décrété  aussi  que  les  discours 
prononcés  dans  celte  séance  h  celle  occasion  se- 
raient insérés  au  Bulletin  ;  cela  vaudrait  mieux,  pour 
former  Tespril  public ,  qne  les  diatribes  dont  il  est 
rempli.  Je  demande  que  cette  erreur  soit  réparée. 

OuYOMAnD  :  J'appuie  ces  propositions.  A  l'égard 
du  mouvement  snnlime  qui  eut  lieu  ,  je  n'ai  vu  là 
rien  d'extraordinaire  ;  la  Convention  n'o  fait  que  ce 
q«rolle  devait  faire  ,  et  je  ne  pense  pas  qu'il  en  faille 
laire  une  mention  particulière.  Depuis  longtemps  la 
Convention  s'est  fortement  prononcée  ccTntre  le  roya- 
lisme et  pour  la  démocratie  ;  la  Coni'ention  veut  la 
liberté  et  l'égalité,  mais  elle  les  veut  pour  tous,  et 
non  comme  quelques  hommes,  qui  les  veulent  pour 
eux  seuls,  et  qui  prétendent  dominer  les  autres.  (On 
applaudit.)  Enfin, citoyens*  vous  êtes  ici  l'image  des 
-issemblées  primaires;  vous  réunissez  tous  les  pou- 
voirs (le  la  souveraineté  du  peuple,  et  vous  ne  faites 
qu'un  avec  lui.  Ceux  qui  ont  prétendu  le  contraire 
se  trompaient  ou  voulaient  tromper.  Au  surplus, 
cette  omission  vient  sûrement  de  ce  que  le  membre 
qui  a  fait  la  proposition  ne  l'aura  pas  rédigée,  il  est 
bien  singulier  qu'on  appelle  diatribes  les  discours 
dont  la  Convention  ordonne  l'insertion.  Jamais  la 
Convention  n'a  approMvé  les  diatribes.  J'appuie  les 
propositions  de  Maure  et  de  Duhem.  (Nouveaux  ap* 
plaudissetncnts.) 

Montmayau  :  Lacroix ,  ci-devant  professeur  de 
droit  public ,  et  actuellement  professeur  de  roya- 
lisnAe.a  été  arrête  hier  à  son  retour  de  V^riailles, 
Où  il  était  allé  ;  dans  l'examen  de  ses  papiers  on  a 


trouvé  une  lettre  adressée  i  son  libraire,  par  baneUe 
il  lui  disait  qu'il  était  dans  rtotentioD  de  faire  liom- 
mage  de  son  livre  i  la  CoDveotiot) ,  et  que  cela  Je 
ferait  débiter  bien  mieux  *  parce  que  le  BlUIetm  et 
les  journaux  en  feraient  mention. 

Les  propositioi^s  de  Duheai  soni  adoptées. 

—  La  barre  est  ouverte  aux  pétitionnaires. 

On  introduit  BerLècbe«  chef  de  brigade  du  16e  r^. 
gimént  de  chasseurs  à  cheval ,  ci-devant  générât  de 
l'Ecole  de  Mars. 

}1  présente  la  pétition  suivante  • 

•  Représentants  du  peuple^  dans  la  nuit  du  9  aa 
10  thermidor,  on  ui'a  dépeint  a  votre  tribune  comme 
un  conspirateur,  comme  le  complice  et  la  créature 
de  Dumouriez,  de  .Cusline,  de  Beuruonville,  de 
W'impfen  ;  la  Convention  pouvait-elle  reconuaitne 
à  ce  portrait  ce  même  Berteche  Qu'elle  avait  honoré 
d'une  couronne  civique  et  armé  a'un  sabre? 

«  On  n'avait  garde  de  vous  lire  la  lettre  des  re* 
présentants  du  peuple  Robert  Lindet,  Duroy  et 
Boisset,  qui«  le  23  juin  1793,  vous  écrivirent  du 
Calvados  que  j'avais  préservé  de  la  séduction  de 
Wimpfen  le  corps  dont  le  commandement  m*étai( 
confie.  Je  ne  puis  me  permettre  de  vous  rapporter 
les  expressions  trop  flatteuses  avec  lesquelles  ces  re», 
présentautsdétruisaientd'avancelescalomoiesqu'oa 
devait  vomir  contre  moi  treize  mois  après,  dans  un* 
nuit  où  l'intérêt  de  la  patrie  interdisait  à  ceux  qui 
me  connaissent  le  mieux  d'employer  à  ma  défense 
des  moments  précieux ,  et  que  le  salut  public  re- 
vendiquait tout  entiers. 

•  La  diffamation  était  d'autant  plus  lâche,  qu'on 
avait  dû  compter  sur  le  silbnce  des  hommes  probea, 
mais  trop  saffes  pour  discuter  à  contre-temps  sur  la 
réputation  d^un  citoyen,  quand  le  danger  de  la  ré» 
publique  était  pressant. 

«  Tiré  de  Tarmée  par  uo  décret  de  la  Conventiou 
nationale,  je  fus,  contre  mon  atteotei  placé  i  la  tête 
du  camp  des  Sablons» 

«  Le  traître  Hanriot  m'adressa,  dit*on^  des  ordres 
que  je  n'ai  jamais  vus,  et  qui  furent  mterceptés.' 
J'étais  expose ,  comme  tout  commandant  de  la  force 
armée,  k  recevoir  les  messages  du  scellât  auquel 
les  tyrans  avaient  remis  le  commandement  général» 

•  Cependant  mes  persécuteurs  désespérant  de 
m'impliquer  dans  la  conspiration ,  en  furent  réduits 
à  forger  la  fable  la  plus  atroce  et  la  plus  absurde; 
ils  abandonnèrent  l'accusation  chimérique  de  con- 
tre-révolution, pour  me  travestir  en  distributeur  de 
faux  assignats. 

•  Ces  mains  que  la  Convention  nationale  avait  ai 
glorieusement  armées  furent  enchaînées  ;  on  m'at- 
tacha à  la  queue  d'un  cheval ,  et ,  après  avoir  tra«> 
versé  Paris  en  pjein  jour  dans  cet  état ,  on  me  traîna 
au  tribunal  crim'inel  du  département  des  Ardennes, 
à  Mézières,  où  je  fus  acquitté  par  jugement  rendu, 
le  23  vendémiaire,  à  l'unanimité  du  jury. 

«  Un  ordre  particulier  prescrivait  néanmoins  de 
me  retenir  en  arrestation,  même  dans  le  cas  où  je 
serais  absous  ;  ce  n'est  que  le  20  frimaire  que  ma  h* 
berlé  m'a  été  rendue.  Représentants  du  peuple,  les 
partisans  du  système  de  sang  osent  reprochera  votre 
comité  de  sûreté  générale  d'élargir  trop  facilement 
les  détenus.  Eh  bien  !  que  ceux  qui  regrettent  que 
la  France  entière  ne  soit  pas  convertie  en  bastilles 
apprennent  que  j'ai  été  réclamé  pendant  trente  jours 
par  la  députa  lion  de  mon  département  auprès  d'un 
rapporteur  aussi  accessible  qu'impartial,  et  que  l'ar* 
rété  qui  me  met  en  liberté  n'a  été  obtenu  qu'après 
avoir  fouillé  les  archives  du  comité  de  salut  public. 
C'est  en  voyant  les  dénonciations  qui  s'y  sont  trou- 
vées contre  moi  que  s'est  opérée  U  conviction  irré- 
sistible de  mon  innocence. 


M 


•  «VéM-mi  MToir  ti  tbttrce  de  tant  de  pméeu- 
tions?  J'ii  approche  les  triamvirs  lorsque  Je  fus  ap- 
pela pour  commander  le  camp  des  Sablons  ;  je  leur 
parlai  »  avec  la  franchise  d'un  soldat^  de  l'assassinat 
qu'au  mépris  d'un  décret  formel  ils  ont  exécuté  de- 
puis à  regard  de  la  muoicfpalité  de  Sedan ,  ma  pa- 
trie ;  Je  Heur  ils  aue  je  me  présenterais  à  la  barre 
pour  réclamer  votre  justice  :  «Si  tu  l*o$es,  nous  te 
s  ferons  arrêter,  •  Telle  fut  la  réponse  de  Couthon. 

•  Je  n'avaii  pu  me  taire  tur  la  lâcheté  des  vils 
agents  du  triumvirat,  qui  se  cachèrent  dans  les  caves 
pendant  que  les  Sédanois ,  mes  compatriotes ,  péri- 
rent à  mes  côtés  auprès  de  Bouillon,  nu  nombre  de 
trois  cents,  pour  défendre  Sedan,  que  les  suppôts  du 
terrorisme  voulaient  livrer  aux  Autrichiens.  Les 
braves  défenseurs  que  j'ai  vus  mourir  au  champ 
d*honneur  étaient  les  parents  et  les  amis  de  leurs 
in.igistrats,  qu*on  égorgerait  ici  sur  la  place  de  la 
Révolution. 

.  •  Représentants*  le  projet  de  procès-verbal  de 
votre  immortelle  séance  du  9  au  10  thermidor, 
projet  que  vous  n'avez  pas  encore  discute,  contient 
et  doit  eohtenir ,  pour  l'exactitude  des  faits ,  le  récit 
de  la  diffamation  dont  j'ai  été  l'objet;  il  se  trouve 
page  86  et  87.  Loin  de  me  plaindre  du  rédacteur,  je 
reconnais  qu'il  n'a  été  qu'un  historien  fidèle. 

«  Souffrez  qu'un  républicain  viennent  réclamer 
auprès  de  vous  sa  réputation,  et  (^u'il  se  repose  sur 
vous  du  soin  de, la  venger.  J'en  suis  d'autant  plu$ 
jaloux  qu'elle  est  votre  ouvrage  par  le  prix  que  vous 
avez  mis  à  me$  services.  Vive  la  ré|)ublique  !  • 

Poysaaao  :  Pendant  que  j'ai  été  à  l'Ecole  de  Mars, 
j'ai  reconnu  dans  le  citoyen  Bertèche  un  brave  ré- 
publicaio  ,  et  je  n'ai  jamais  remarqué  qu'il  j  eût  la 
moindre  intelligence  entre  lui  et  les  tnumvirs  dont 
vous  avez  fait  justice. 

On  demantle  l'insertion  au  Bulletin  de  TAdrésse 
de  Bertèche ,  et  le  renvoi  au  comité  de  sûreté  ^né- 
rale. 

Ces  propositions  sont  décrétées. 

—  Les  artistes  du  Théâtre  de  l'Egalité  sont  admis 
à  la  barre. 

Lt  ciiayin  VerUuil ,  orateur  de  la  députation  : 
Législateurs,  c'est  au  tribunal  de  l'humanité  et  de  lo 
justice  nationale  que  des  artistes,  dont  les  malheurs 
égalent  le  patriotisme,  viennent, pour  la  seconde  lois, 
présenter  leurs  justes  réclamations  contre  l^es  nctes 
arbitraires ,  si  redoutables  sous  le  rè^ne  des  trium- 
virs, et  qui, semblables  à  ces  fléaux  destructeurs  de 
rhumanitéy  laissent  encore,  longtemps  après  leur 
anéantissement,  les  traces  funestes  de  leur  ravage, 
et  des  plaies  douloureuses  autant  que  profondes  i\ 
cicatriser.  Grâce  à  la  Convention  régénérée  le  10 
thermidor,  l'homme  de  bien  voit  tomber  ses  fers  ;  la 
pensée  n'est  plus  comprimée  par  la  terreur  ;  le  sang 
de  l'innocent  ne  coule  plus;  mais  les  pleurs  des  mal- 
heureux coulent  encore ,  et  les  législateurs,  amis 
de  ta  ji^^tice ,  ont  seuls  le  pou  von*  d'en  tarir  In 
source. 

Citoyens  représentants,  vous  avez  accueilli  la  pé- 
tition que  nous  vous  avons  présentée  le  35  brumaire. 
Touchés  de  nos  besoins  autant  que  de  la  légitimité  de 
nos  réclamations,  vous  décrétâtes,  sur  la  motion 
du  représentant  Legendrc ,  aue  le  rapport  en  serait 
fait  dans  la  plus  prochaine  décade  par  vos  comités 
réunis  des  finances  et  de  l'instruction  publique.  11 
s'en  est  écoulé  cinq  depuis  votre  décret,  sans  que  le 
tableau  de  nos  pressants  besoins  et  nos  sollicita- 
tions (que  l'on  a  le  plus  souvent  trouvées  impor- 
tunes) aient  pu  obtenir  de  vos  comités  un  terme 
à  la  détresse  qui  accable  nos  fa  mil  lies  dans  la  saison 
la  pins  rigoureuse  ;  et  c'est  enfin  sur  le  rehis  formel 
tfA  noua  a  été  fait  de  vous  présenter  le  rapport  sur 


ce  qui  nouseoncemé,  miê  nom  venons  une  seeôtiA' 
fois  implorer  l'appui  de  la  Convention  nationale^ 
qui  n'a  pas  promis  en  vain  protection  aux  arts ,  el 
justice  à  tout  citoyen  victime  de  l'oppression. 

Nous  vous  rappellerons,  législateurs,  que  danseei 
tenips  où  la  terreur  était  à  l'ordre  du  jour,  noni 
avons  été  arrachés  de  la  propriété  de  nos  directeurs^ 
à  rinstant  où  des  recettes  abondantes,  fondées  snf 
les  plus  beaux  ouvrages  patriotiques ,  allaient  noua 
dédommager  de  toutes  nos  pertes  passées.  Nos  in« 
stances  pour  rester  dans  notre  théâtre  furent  vaines» 
H  n'y  avait  pour  l'opprimé  élevant  la  voix  qu'un 
choix  terrible  :  o6étr  ou  mourir.  Nous  fûmes  trans* 
taté«  dans  un  quartier  désert,  établis  dans  un  théâtre 
où  l'on  supprima,  par  des  changements  funestes  i 
la  beauté  du  monument,  tout  moyen  d'y  porter  la 
recette  au  pair  de  la  dépense  ;  enfin,  nous  fûmea 
arbitrairement  entassés  dans  un  nouvel  atelier,  des- 
potiquementdirigéesdans  toutes  nos  opérations  par 
un  agent  national,  nommé  par  l'ancien  gouverne* 
ment ,  et  privés  de  mois  en  mois  de  la  plus  grande 
partie  du  fruit  de  notre  labeur. 

Voyez-nous,  citoyens  représentants,  placés  entre 
le  spectacle  déchirant  des  l>esoins  de  nos  pères  et  de 
nos  enfants;  privés  par  la  nécessité  d'une  portion 
de  nos  effets,  sans  possibilité  de  répondre  à  la  con- 
fiance des  dignes  citoyens  qui  nous  ont  substantéa 
jusqu'à  ce  jour  ;  sans  espoir  de  trouver  à  nous  pla* 
cer  pour  la  prochaine  année  théâtrale,  et  vous  n'atu 
rez  qu'une  laible  idée  des  malheurs  qui  nous  acea* 
bient.  Notre  probité  ne  uous  reproche  rien.  Il  n'est 
aucun  de  nous  qui  n'ait  prévenu  le  comité  et  la 
commission  de  l'instruction  publique  du  déficit 
énorme  que  causerait  an  gouvernement  notre  man* 
que  d'organisation,  et  l'encombrement  de  trois  cent 
quatre-vingt-quatre  artistes  dans  un  local  trop  cir- 
conscrit pour  pouvoir  y  mettre  leurs  talents  en  va- 
leur. Aujourd'hui  le  mal  esta  son  comble. 

Les  artistes  ci-devant  Français  se  sont  retirés  par 
défaut  de  payement,  et  plusieurs  de  nous  ayant  eu 
du  comité  d'instruction  publique  leur  démission,  il 
ne  reste  plus  au  faubourg  Germain  qu'une  masse  iU'* 
complète  d'artistes  écroués  par  la  misère  et  lea 
dettes  qu*ilsontcontractées,et  livrés  au  plus  affreux 
désespoir,  si  votrejustice  ne  répare  pas  les  calamité 
(]ue  l'ancien  comité  de  gouvernement  leur  a  fait 
partager  avec  toute  la  république. 

Nous  ne  venons  pas,  citoyens  législateurs ,  récla- 
mer des  faveurs  ou  des  gratifications  privilegiaires; 
nous  nous  renfermons  dans  la  demande  d'un  sa- 
laire légitimement  acquis,  et  échu  depuis  près  de  six 
iuois,c^st-é-dire  depuis  le  9  messidor  jusqu'au  4  ni- 
vôse, jour  de  notre  clôture  forcée.  C'est  ce  déficit 
dont  nous  avons  remis  le  tableau  ,  avec  les  pièces 
probantes ,  au  comité  des  finances,  que  nous  récla- 
mons sous  le  plus  court  délai  ;  et  vos  cœurs  compa- 
tissants régleront  ensuite  les  justes  indemnités  que 
vous  croirez  devoir  à  notre  situation. 

Persuadés ,  d*après  un  écrivain  célèbre ,  qu'un 
homme  n'est  pas  pauvre  parce  qu'il  n'a  rien ,  mais 
bien  parce  qu'il  ne  travaille  pas,  nous  vous  prions 
aussi  de  rapporter  l'arrêté  de  l'ancien  comité  de 
salut  public,  en  date  du  27  germinal, qui  nous  a  fait, 
malgré  nous ,  occuper  un  local  que  le  vœu  public 
réclame  pour  ses  premiers  possesseurs. 

Rendez-nous  à  notre  première  industrie,  afin  que 
nous  puissions  remplir  partout  honorablement  cette 
partie  de  l'instruction  publiquequ'nn  gouvernement 
philosophe  nous  a  confiée ,  en  noua  rendant  nos 
droits  politiques  et  le  titre  de  citoyens. 

Les  préjugés  que  le  fanatisme  avait  élevés  sous  le 
règne  du  despotisme  sont  morts  avec  les  prêtres,  et 
le  législateur  éclairé  ne  considère  plus  aujourd'hui 


M 


les  théâtres  conime  des  lieux  de  corruption,  mais 
eomme  les  vrais  temples  de  la  morale  républicaine 
et  le  miroir  fidèle  qui  réfléchit  aux  yeux  d  un  peuple 
libre  toutes  les  vertus  sociales,  et  les  traits  d'hé- 
roïsme et  de  courage  dont  il  a  été  capable  pour  con* 
quérir  sa  liberté. 

Cest  par  notre  civisme  à  remplir  ces  devoirs  jus- 
qfx'k  ce  jour,  que  nous  osons  demander  à  la  Conven- 
tion nationale  : 

10  De  nous  faire  payer,  sous  le  plus  court  délai , 
le  déficit  provenant  des  six  mois  d'appointements 
échus ,  d'après  le  tableau  remis  au  comité  des  fi- 
nances ; 

so  De  rapporter  Tarrété  du  27  germinal,  qui  nous 
a  translatés  au  faubourg  Germain ,  afin  que  nous 
soyons  livrés  à  nos  propres  moyens  d'industrie ,  et 
non  plus  à  la  solde  du  gouvernement,  qui,  par  le 
déplorable  état  où  on  a  mis  notre  administration, ne 

Sourrait  nous  considérer  à  l'avenir  que  comme  une 
es  sources  dilapidatrices  du  trésor  national  ; 
3<>  Qu'il  soit  statué  par  les  comités  sur  les  indem- 
nités que  nous  avons  à  prétendre  contre  oui  de  droit 
pour  la  teneur  de  nos  engagements ,  et  rimpossioi- 
fité  presque  certaine  de  trouver  à  nous  placer  avant 
une  année  révolue. 

Législateurs,  c'est  au  nom  d'artistes  patriotes  que 
nous  vous  implorons;  ils  ont  attendu  jusqu'à  ce 
jour  ;  pleins  de  confiauce ,  ils  attendraient  encore  si 
Von  pouvait  ajourner  les  besoins  de  la  vie,  et  si  les 
cris  aéchirants,  arrachés  par  la  nécessité  à  leurs  fa- 
milles intortunées,  ne  portaient  jusqu'au  fond  de 
leurs  cœurs  la  triste  certitude  qu'un  jour  de  douleur 
est  le  plus  long  de  tous. 

Justice,  c'est  notre  espoir  ;  protection  aux  arts, 
c'est  votre  promesse  ;  et  la  notre  est  de  vivre  et 
mourir  pour  soutenir  la  république  et  la  Convention 
nationale.  (On  applaudit.) 

Celte  pétition  est  renvoyée  aux  comités  d'instruc- 
tion publique  et  des  finances. 

—  Les  propriétaires  du  ci-devant  Théâtre  Natio- 
nal ,  établi  rue  de  la  Loi ,  présentent  une  nouvelle 
pétition  pour  être  remis  en  possession  de  leur  pro- 
priété. 

Lecointbb  (de  Versailles)  :  Chaque  jour  nous  re- 
cevons des  plaintes  contre  les  actes  d'oppression 
exercés  par  l'ancien  g;ouvernement.  Il  est  temps  de 
rendre  aux  propriétaires  réclamants  l'objet  dont  ils 
n'auraient  jamais  dû  être  dépouillés.  Je  demande 
que  le  comité  des  finances  îêiàe  dans  la  décade  un 
rapport  sur  cet  objet. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

—  Des  députés  extraordinaires  de  Brest  sollicitent 
la  mise  en  liberté  des  marins  incarcérés  par  suite  de 
la  reprise  de  Toulon. 

Madec  :  Je  convertis  cette  demande  eti  motion. 
La  justice  et  l'humanité  réclament  également  au 
moins  leur  liberté  provisoire. 

La  liberté  provisoire  est  décrétée. 

*'*  :  Je  demande  que  le  comité  des  secours  pu- 
blics fasse  un  rapport  pour  que  ces  citoyens  soient 
secourus  jusqu'à  ce  qu'ils  soient  employés.    • 

La  Convention  renvoie  pour  le  mode  de  secours 
au  comité  des  secours  publics. 

—  Quelques  pétitionnaires  sont  entendus  sur  des 
demandes  particulières. 

La  séance  est  levée  à  trois  heures  et  demie» 

SÉANCE  DU   11   NIVOSE. 

BoissiBi,  au  nom  des  comilés  de  roarine,  dei  colonies  et 
de  salut  public  :  Citoyens,  les  plus  brillants  succès  ont  été 
obtenus  par  nos  armées  de  terre;  elles  ont  porté  cbet  les 
despotes  coalisés  la  terreur  et  la  mort  que ,  dans  leurs  fé- 
tooei  projets  I  Us  voulaient  luire  régner  sur  le  territoire  de 


la  république.  La  victoire  est  la  coupagne  fidèle  4c»  bra« 
ves  défenteurs  de  la  liberté  et  de  l*^lité«  et  aoufent 
vous  aves  déclaré  afec  Justice  qu'ils  ont  bien  mérité  de  la 
paurie. 

Nos  armées  navales  sont  animétf  du  même  esprit  ;  dles 
ont  développé  la  même  énergie  et  le  même  dévouement  à 
la  défense  de  la  république  :  elles  brûlent  de  montrer  surtout 
aai  Anglais ,  ces  odieux  despotes  de  la  mer ,  qu'elles  )oot 
les  dignes  émules  des  armées  de  terre,  en  rabaissant  rorgudl 
de  ces  insulaires  qui,  trop  longtemps»  ont  insulté  sans 
mesure  aux  droits  incontestables  des  nations  OMritimes. 

Déià  un  événement  dont  les  fastes  de  la  marine  fran- 
çaise ne  présentent  que  d'anciens  et  de  rares  exemples 
fient  de  montrer  aux  Anglais  que  leur  pavillon  doit  être 
amené  devant  celui  de  la  république,  comme  leurs  dra- 
peaux et  leurs  guidons  s'abaissent  devant  le  drapeau  tri* 
colore,  et  que  leurs  vaisseaux  de  ligne  peuvent  être  'oon« 
duits  dans  nos  ports  avec  autant  de  facilité  que  leurs 
bataillons  et  leurs  escadrons  sont  exterminés  par  nos  pha- 
langes républicaines,  ou  fuient  devant  elles.  Cet  exemple» 
n'en  doutes  pas,  sera  imité  ;  et  c'est  pour  préparer  et  as* 
surer  à  nos  braves  marins  des  camarades  dignes  d'eux  et 
des  coopérateurs  qui  puissent  les  égaler  dans  le  talent  de 
la  manœuvre,  et  surtout  du  canonnage  maritime,  que  les 
comités  de  marine,  des  colonies  et  de  salut  pùbUc,  vien- 
nent vous  offrir  le  résultat  de  leurs  méditations  sur  ces 
intéressantes  portions  de  l'enseignement  à  donner  aux  jeu* 
nés  citoyens  qui  se  destinent  au  métier  de  la  mer. 

L'éducation  navale  se  ressent  de  la  faiblesse  de  nos  in- 
sUtutions  maritimes  :  c'est  ft  vous  ft  la  faire  sortir  de  l'en- 
fance, et  à  li^  procurer,  par  des  moyens  rapides  et  sûrs,  la 
force  de  l'âge  viril. 

Il  est  temps,  citoyens,  que  vous  donnies  à  la  marine 
quelques  moments  de  cette  attention  sérieuse,  que  vous 
portiei  vers  elle  ces  vues  vivifiantes  qui  partout  ont  été 
suivies  des  résultats  les  plus  avantageux.  Elle  le  mérite 
d'autant  plus  qu'il  est  probable  que  c'est  d'elle  désormais 
que  vous  deves  principalement  attendre  l'abaissement  de  - 
vos  ennemis,  la  reconnaissance  univerMlle  de  la  républir 
que  française,  la  prospérité  de  son  commerce,  et  la  supè* 
riorité  qu'elle  doit  acquérir  sur  toutes  les  puissances  par 
ses  relations  extérieures. 

Citoyens,  vous  avei  porté  dans  toutes  les  parties  du 
gouvernement,  et  surtout  dans  toutes  celles  qui  ont  quel- 
ques relations  avec  la  guerre  par  terre,  cette  acUvité,  ce 
génie  révolutionnaire,  qui  ont  donné  des  résultats  Inespérés, 
qui  ont  créé  des  choses  nouvelles,  et  surtout  des  hommes 
nouveaux. 

Le  matériel  de  la  roarine  a  participé  à  quelques-uns  des 
avantages  qu'ont  obtenus  les  sciences  elles  arts  soumis  aux 
I  calculs  des  hommes  qui  sacrifient  leur  repos  et  leurs  veilles 
pour  préparer  les  succès  de  vos  armes  républicaines.  A  vo- 
tre voix,  les  forêts  les  plus  éloignées  des  ports  viennent  sur 
vos  chantiers  de  construction  se  transformer  avec  une  cé- 
I  lérité  surprenante  en  vaisseaux  de  guerre,  qui  commandent 
l'admiration  par  la  beauté  des  formes  et  l'art  du  construc* 
teur  :  les  usines  ont  suspendu  leurs  travaux  habituels  pour 
nous  fournir  un  immense  approvisionnement  de  bouches  à 
feu  et  de  boulets  ;  il  s*agit  maintenant  de  donner  aux  jeu- 
nes citoyens  qui  peuvent  offrir  le  tribut  de  leurs  forces  pour  ' 
la  délense  de  la  patrie  cette  tendance  vers  la  navigation, 
cette  impulsion  pour  l'art  militaire  maritime,  qui  les  ren- 
dent susceptibles  d'acquérir  sur  aaer  autant  de  aloire  que  ' 
leurs  frères  d'armes  en  ont  acquis  sur  terre  :  il  s'agit  de 
propager  cet  esprit  dans  toutes  les  communes  de  la  répu- 
blique •  et  de  procurer  à  tous  les  Français  les  moyens  de 
concourir,  sur  l'armée  navale,  à  la  destruction  de  nos  en- 
I  nemif. 

Le  principal  moyen  d'y  parvenir  est  de  créer  des  InstI- 
tuiions  navales  dans  les  mêmes  principes  et  à  peu  près  sons 
les  mêmes  formes  que  celles  qui  vous  dut  présenté,' dans  les 
ateliers  révolutionnaires  pour  la  fabrication  des  salpêtres 
et  des  poudres,  et  au  Champ-de-Mars,  des  résultats  dont 
l'inappréciable  avantage  est  incontestable. 

Ces  écoles  révoluUonnaires  de  navigatioD  sont  indis* 

pensables  pour  connaître  les  avantages  que  peuvent  pro- 

\  curer  les  divers  modes  d'instruction  pratique  à  la  mer,  qui, 

;  toujours  vantés  comme  pouvant  seuls  former  de  vrais  ma- 

I  vins»  n'ont  jamais  subi  l'épreuve  d'une  ciécolioo  cooi- 


95 


plètet  eOei  oOHroni  même  quelques  objets  d'utilité  que 
tous  ne  pouYles  attendre  de  l*Ecole  luuriiale  établie  à  la 
plaine  dessablons. 

Cette  dernière  ne  pouvait  que  bien  indirect  ornent  être 
employée  pour  assurer  la  tranquillité  et  la  sûreté  publiques; 
elle  menaçait  les  tyrans»  mais  elle  ne  doit  le  frapper  que  dans 
quelques  {ours  :  celle  que  nous  tous  proposons  aura  un 
objet  plus  direct  et  plus  procbain;  les  atteintes  qu'elle  doit 
porter  aux  ennemis  de  la  Uberté  et  de  Tégalité  se  feront 
plus  tôt  sentir.  • 

Les  élèves  instruiU  dans  les  écoles  révolutionnaires  de 
navigation  vous  présenteront  le  modèle  de  rétablissement 
des  bâtiments  garde-côtes,  dont  l*essai ,  longtemps  désiré» 
n'a  jamais  pu  être  réalisé.  Les  corvettes  et  les  autres  bâti- 
ments légers  quMIs  monteront,  et  sur  lesquels  ils  recevront 
uue  véritable  instruction  navale,  serviront  dans  le  temps 
le  plus  utile  k  convoyer  d*un  porti  Tautre,  et  sans  s'é- 
loigner de  la  côte,  les  bâtiments  de  commerce  destinés  à 
répartir  dans  toutes  les  parties  de  la  république  les  immen* 
ses  quantités  de  denrées  et  dé  marchandises  provenant  des 
prises  faites  en  mer,  et  trop  longtemps  accumulées  dans 
nos  principaux  ports. 

Ces  corvettes  pourront  même,  dans  leurs  fréquentes  sor- 
ties en  se  joignant  à  des  bfttimenU complètement  armés  en 
guerre,  se  livrer  à  de  courtes  croisières,  qui,  dirigées  avec 
IntelligeRce,  seront  destructives  du  commerce  et  de  la  na* 
vigation  de  nos  eimemis. 

Ces  observations  suOissent  seules  pour  détruire  toutes 
les  objections  qui  pourraient  être  élevées  contre  cet  éta- 
blissement sous  le  rapport  de  la  dépensequ'il  occasionnera. 
H  est  même  nécessaire  de  dire  qu'îndépendamiAent  de  Tu* 
tililé  inappréciable  que  ces  écoles  doivent  procurer,  Tarme- 
ment  des  bâtiments  de  mer,  au  moyen  desquels  elles  au- 
ront lieu,  sera  moins  dispendieux  qu'un  armement  de 
même  force  qui  aurait  pour  objet  de  remplir  ce  service  de 
protection»  relativement  à  la  côte  et  k  la  circulation  des 
navi  res  de  commerce. 

Nous  n'entrerons  pas  dans  tous  les  développements  qui 
prouveraient  loTînciblement  Tindispensable  nécessité  des 
mesures  que  nous  vous  proposons  ;  il  suffit  de  vous  dire 
que  lesysième  général  qui  a  été  suivi  jusqu'à  présent  pour 
l'inslructlon  et  la  formation  des  hommes  qui  se  destinent  à 
la  marine,  que  rignoranceet  i'inbabilude  des  choses  de  la 
mer  dans  lesquelles  ont  été  laissés  les  habitants  des  dépar- 
temento  éloignés  des  côtes ,  ne  conviennent  plus  à  une  ré- 
publique qui  veut  établir  en  fait  la  liberté  des  mers,  et 
taire  respecter  soo  pavillon  dans  les  parages  les  plus  ^oi* 
gués»  de  quelque  nature  que  soit  le  bâtiment  qui  le 
porte. 

Il  est  temps  de  développer  le  plan  de  ces  écoles. 

Il  n'est  pas  question  ici  de  faire  un  appel  à  la  jeunesse 
française  qui  n'est  pas  encore  sous  les  drapeaux,  et  de  cher^ 
cher  à  procurer  sur-le-champ. à  la  marine  de  la  république 
tous  les  hommes  dont  on  peut  pressentir  qu'elle  aura  be- 
soin :  cette  vue  serait  trop  vaste  et  n'atteindrait  même  pas 
le  Iwt  que  nous  nous  proposons. 

O^aillenrs  tous  les  jeunes  gens  ne  sont  pas  également 
propres  au  métier  de  la  mer;  et  quoique,  dans  le  premier 
âge»  le  tempérament  puisse  facilement  se  plier  au  change- 
ment d*air»  dccliniat  et  de  nourriture,  il  n'en  est  pas  moins 
vrai  qu'il  y  a  un  choix  à  faire  dans  les  citoyens,  pour  ne  pas 
exposier  ceux  d'une  constitution  trop  faible  à  souffrir  d'un 
changement  d'habitudes  qui  n'influera  en  rien  sur  ceux 
qui  jouissent  d'une  santé  robuste.  Nous  ne  désirons,  dans 
ce  moment»  que  donner  k  un  grand  nombre  de  jeunes 
gens  les  premières  notions  et  les  premières  habitudes  du 
métier  de  la  mer;  que  leur  fournir  les  vrais  moyens  de 
développer  l'aptitude,  les  talents  et  les  connaissances  né- 
cessaires pour  devenir  manœuvriers,  navigateurs,  et  sur^ 
tout  artilleurs  marins. 

En  bornant  ainsi  cette  première  tentative»  et  en  em- 
ployant» sans  déranger  en  aucune  manière  les  opérations 
maritimes  dn  gouvernement,  des  ressources  k  notre  por- 
tée» et  q ni  M  peuvent  même  être  envisagées  que  sous  un 
aspect  favorable,  nous  avons  l'avantage  de  réunir  auprès 
d'un  nombre  circonscrit  d'élèves  tous  les  moyens  d'in- 
struction qui  doivent  leur  être  présentés;  et  l'œil  vigilant 
du  gouvernement  peut  suivre  et  observer  avec  facilité  la 
marche  et  les  résultats  de  cette  entreprise. 


Nous  vous  proposons  de  fbire  choisir»  par  diaque  dia> 
trict,  dix  citoyens  de  l'Age  de  quinie  k  dix-neuf  ans,  parmi 
ceux  dont  les  parents  jouissent  d'une  réputation  bien  éla« 
blie  de  patriotisme.  Ce  choix,  confié  aux  agents  nationaux 
des  districts,  auxquels  on  donnerait  des  instructions  par- 
ticulières sur  les  qualités  physiques  et  intellecluelles  qu'il 
est  surtout  nécessaire  de  trouver  dans  ces  jeunes  gens» 
peut  être  fait  le  80  nivôse;  et  en  Indiquant  pour  point  de 
rassemblement  les  ports  les  plus  i^rlée  des  districts  res- 
pectifi^  les  élèves  peuvent  tous^tre  rendus  à  leur  destina* 
don  avant  le  20  du  mois  suivant. 

Réunis  dans  les  principaux  ports  de  la  république,  ils 
^ont  journellement  conduits  dans  les  charniers  et  les  aie» 
tiers  de  la  corderie,  de  la  voilerie,  de  la  garniture  et  du 
callata'ge,  pour  prendre  une  idée  des  travaux  qui  s'y  exé- 
cutent ;  et  ce  serait  en  concourant  k  la  fabrication  des  ou- 
vrages que  ces  élèves  acquerraient  Thabitude  des  dénomi- 
nations maritimes,  et  s'instruiraient  de  la  destination  de 
chaque  objet  qui  doit  servira  i^armement  d*un  bâtiment  de 
mer. 

Mais  ce  n'est  pas  asseï  d'obtenir  des  cou  naissances  sur 
les  arts  dont  nous  venons  de  parler  :  le  marin  qui  veut 
combattre  pour  la  défense  de  la  patrie  doit  savoir  se  ser^ 
vir  de  la  pique  et  du  fusil»  doit  surtout  savoir  manœuvrer 
le  canon.  Les  élèves  seront  donc  particulièrement  formés  à 
l'exercice  militaire  et  à  celui  de  l'artillerie  de  mer. 

Dans  les  premiers  jours  de  venlose  commencerait  l'ar^ 
mement  des  corvettes  et  des  bâtiments  légers  dans  lesquels 
les  élèves  doivent  s'embarquer;  ils  suivraient  les  travaux 
de  carène,  degréement  et  d'armement  de  ces  navires,  el 
ils  y  concourraient  autant  que  leurs  forces  et  rexpérience 
qu'ils  auraient  déjà  acquise  pourraient  le  leur  permettrez. 
Les  bâtiments  iraient  mouiller  en  rade  vers  le  15  ger^ 
minai»  et  y  resteraient)  l'ancre  jusque  vers  la  fin  du  même 
mois. 

Les  élèves  seraient  dès-lqrs  établis  k  bord,  s'y  livreraient 
à  l'apprentissage  de  la  manœuvre  et  du  canônnage,  ci 
s'exerceraient,  dans  les  chaloupes  et  canots»  aux  évolu- 
tions militaires  relatives  aux  descentes. 

Vers  le  80  germinal,  lorsque  la  navigation  devient  flictie 
et  sûre»  ces  corvettes  et  bâtiments  iraient  le  long  de  la  6Ma 
reoonnuitrc  les  ports  voisins.  , 

L'instruction  des  élèves  présenterait  dès  lors  l'avantage 
précieux  de  joindre  l'exemple  au  précepte. 

Réunis  à  des  bâtiments  complètement  armés  en  guerre» 
les  corvettes  pourraient  aider  à  escorter  des  convois  dont 
la  destination  serait  prochaine,  et  même  se  hasarder  à  quel-^ 
ques  croisières  qui  ne  les  éloigneraient  pas  beaucoup  des 
ports  dans  lesquels  elles  doivent  le  plus  habituellement 
stationner  ou  relâcher. 

La  mer  commence  ordinairement  à  devenir  mauvaise 
vers  la  fin  de  fructidor;  les  corvettes  n'attendraient  pas 
cette  époque  pour  rentrer  dans  les  ports  d'où  elles  sont  or^ 
dinairement  sorties,  et  pour  y  désarmer. 

Cette  opération,  à  laquelle  les  élèves  se  livreraient  avee 
plus  de  facilité,  et  dans  laquelle  ils  procureraient  plus  d'u- 
tilité qu'ils  ne  l'auront  fait  lors  de  celle  de  l'armement,  sera 
probablement  terminée  vers  le  i*'  vendémiaire,  et  serait 
le  terme  de  leurs  travaux  et  de  leur  instruction  pour  cette 
campagne. 

A  cette  époque  ils  justifieront  des  progrès  que  l'initrue- 
tion  leur  aura  fait  faire;  les  talents,  le  goût,  la  vocation  se 
seront  décidés ,  et  l'on  saura  quels  sont  ceux  qui  méritent 
que' la  république  continue  k  les  faire  instruire  dans  les 
ports  et  quels  sont  ceux  qui  peuvent  être  employés  sur  les 
vaisseaux  de  guerre. 

Il  entre  dans  notre  plan  que  la  totalité  des  élèves  ne  soit 
pas  constamment  embarquée  sur  les  corvettes  d'instruc* 
truction  ou  sur  les  autres  bâtiments  qui  naviguent  le  lonf 
de  la  côte  ;  une  partie  d'entre  eux  restera  dans  les  ports» 
y  suivra  les  travaux  des  chantiers  et  ateliers  »  et  ira ,  Ion 
des  relâches,remplacer  ceux  de  ces  jeunes  citoyens  auxquels 
il  conviendrait  mieux  de  rester  quelque  temps  à  terre»  oo 
auxquels  la  mer  serait  contraire. 

A  la  campagne  prochaine.  Il  est  probable  que  la  pres- 
que totalité  de  ces  élèves  vous  procurera  de  bons  mate- 
lots» en  qui  des  connaissances  acquises  par  cette  instruc- 
tion soignée  supléeront  avantageusement  à  l'âge;  des  ca« 
oonnicrsinstriiits  et  quelqttesjcttQesaspiraoUqui|  par  leurs 


06 


progrès  dans  Vurt  oaatiqoe,  dooneront  les  plas  brillantes 
csp^^rances  d'être  oo  jour  de  hardis  et  sarants  naTÎga- 
tetirs. 

Le  serfiee  dans  la  marihe  a  toujours  été  rc(^rdé  comme 
«ne  ressource  a? antageuse  non-seulement  pour  les  indivi- 
dus qui  8*7  limieot  personnellement,  mab  encore  pour 
leurs  familles.  Vous  lui  conserverez  ce  caractère;  et  en  ap- 
pelant ft  s'instruire  sur  les  vaisseaux  de  la  république  les 
citoyens  des  départements  éloignés  des  cdtes,  vous  leur  fe- 
rez connaître  en  même  temps  que  leur  service  et  l*emploi 
de  leur  temps  ne  seront  pas  gratuits. 

Cette  vue  bienfaisante  esi  juste  et  nécessaire  à  ta  fois  ; 
c»r  tous  les  sentiments,  toutes  les  réflexions  doivent  cotir 
courir  à  faire  réussir  proroptement  le  plan  que  noqt  vous 
proposons 

Ainsi,  rinstniction  sera  gratuite,  i*etttretien  sera  aux 
frais  delà  république,  et  ces  jeunes  élèves  olitiendront  une 
sodique  rétribution  qui,  en  acquittant  les  services  qu*ils 
rendront  ft  la  patrie,  leur  permettra  de  se  procurer  quel- 
ques objets  utiles  lorsqu'ils  seront  à  terre. 

i'Ioas  ne  doutom  pas,  citoyens,  que  cet  essai  ne  soit 
ccNironné  des  plus  beureux  succès,  et  que  vousn*ordonniez 
qu*ll  soit  renouvelé.  Nous  ne  doutons  pas  non  plus  qu'il  ne 
donne  une  grande  impulsion  rers  la  marine,  et  vous  aper- 
eevrei  fadlemenf,  dans  le  projet  de  décret  que  nous  allons 
TOUS  soumettre,  que  c^est  le  principal  but  que  nous  nous 

Void  le  projet  de  décret  i 

•  La  Convention  nationale,  après  afofr  entendu  le  rap- 
ptrt  de  ses  comités  de  marlneet  colonies,  et  de  sâlot  public, 
ëéerèle  ce  qui  suit  ; 

•  Art.  1*'.  Il  est  établi  dans  let  ports  qui  seront  désignés 
par  le  comité  de  salut  public  des  écoles  révolutionnaîres 
de  navigation  et  de  caooooage  maiilime. 

•  IL  BUci  seront  ouvertes  à  compter  du  SO  pluviôse  pro- 


■  Les  leçons  qui  y  seront  données  auront  pour  objet  les 
iravaux  da  cordtrie»  voilerie»  garniture  el  calfouge  qui 
Vexécutcstdaas  les  chantiers  et  ateliers  des  ports; ceux  de 
carène,  gréement  et  armement,  et  les  mouvements  des 
bâtiments  de  mèr  i  enfin  l'exercice  militaire,  et  principale- 
nent  celui  de  l'arlillerie  navale» 

•  IlL  Les  baiimenls  légers  employés  à  la  garde  des 
oôleSy  ei  ks  corvettes  destinées  à  Tinstruction  pratique 
à  la  mer,  seront  arméa  dès  les  derniers  jours  de  ventôse. 

•  Les  leçons  indiquées  ctnlessus  y  seront -également 
dunnéci,  et  seront  accompagnées  delà  pratique,  surtout 
relativement  à  la  manœuvre  el  au  canonuage* 

•  IV.  Dis  citoyen*  de  rage  de  quinze  à  dli-neuf  ons 
aoiil  appelés,  de  cliaque  disirici  de  la  république,  à  pro' 
filer  pendant  la  campagne  prochaine  de  celte  instruction 
navale  révolutionnaire;  Paris,  relativement  ik  sa  popu'a- 
tkm,  en  fournira  deux  par  chaque  section. 

.  V.  l»oor  parvenir  au  choix  de  ces  élèves ,  les  feunes  ci- 
toyeoi  qui  se  pré^nteront,  ou  que  leurs  parents  ou  tu* 
icnrf ,  etc./  préscnterotit ,  seront  inscrits  sur  un  registre 
tenu  à  oet  effet  au  directoire  du  district  :  il  y  sera  fait 
mention  de  Page,  de  la  taille,  des  qualités  physiques  des 
iMiividus ,  ainsi  que  des  divers  degrés  d'instruction  qu'ils 
ont  déji  reçus  ;  ee  registre,  ouvert  dès  la  réception  du  pré- 
sêni  décret,  s«ra  clos  le  30  nivôse,  et  remis  à  l'agent^ du 
district,  qol|  après  avoir  pris  les  renwignements  les  plus 
élendos  sur  leur  santé  et  leur  conduite,  ainsi  que  sur  le 
palriolismede  leurs  parents,  choisira  les  dix  jeunes  citoyens 
<fa'll  croira  let  plus  susceptibles  de  profiter  de  rinstrttction 
awale  révolutionnaire  et  de  pouvoir  être  le  plus  pronipte- 
mmt  atilos  à  In  Mtarbie  de  l«  république. 

<  VI.  Il  sera  remis  par  f^agenl  national,  a  chaque  citoyen 
ckoisf^  nn  bulletin  où  celut^î  sera  signalé,  et  qui  lui  indi- 
quera le  porèoft  il  doit  se  rendre ,  conformément  à  Tindl- 
cvtlon  qui  lai  sera  donnée  par  la  commission  de  la  marine 
et  des  colonies, 

-VIL  It  aéra  également  remis  &  chaque  élève  ou  à  ses 
ttt|]entB,  tuteuri,  etc^  une  somme  de  30  îiv.  pour  le  pour- 
vob,  s*li  en  est  besoin ,  de  quelques  objets  de  première 
nécessité  ;  H  sera  fiiit  note  du  payement  de  œtle  somme  sur 
le  balleilB{  âai  maodau  y  retaflft,  tirés  par  le  directoire 


de  district ,  seront  acquittés  par  le  rccercnr,  qui  l**s  en* 
▼erra  de  suite  t  la  trésorerie  nationale,  oft  Ils  seront  reçus 
pour  comptant. 

t  VIIL  L'agent  national  du  district  (burnira  aux  dis 
élèves  une  feuille  de  route  que  ceux-ci  seront  tenus  de  sui- 
vre; ils  recevront  pour  chaque  jour  démarche,  à  raison 
de  cinq  lieues  par  jour,  la  somme  attribuée  aux  soldats 
d'infanterie  par  la  loi  du  3  thermidor  deruier ,  etll^ra 
pourvu  par  les  municipalités  à  ce  qu'ils  soient  logés  et  re« 
çus  comme  le  méritent  de  jeunes  ciioyena  qui  sont  i'eipé- 
rauce  de  la  patrie. 

•  IX.  La  commission  de  marine  et  des  eolonies  iadiquem 
&  chaque  agent  national  la  route  que  devront  tenir  k»  élè- 
ves, et  fixera  des  lieux  de  rassemblemeol  où  ,se  troirveront 
à  jour  fisc  des  agents  chargés  de  la  conduite  de  ces  jeunes 
citoyens,  fille  préviendra  les  corps  admioistratib  et  ■«• 
nici|)aiix  du  lieu  de  leur  passage,  de  leur  ooiubre ,  des  sè> 
jouri  qui  pourraient  leur  iuc  accordés,  et  désigoem  lea 
oi(iets  qu'il  sera  nécessaire  de  leur  fournir. 

•  X.  A  leur  arrivée  dans  les  ports,  il  lenr  sera  fourni  les 
bardes  et  effets  dont  ils  auront  besoin,  conformément  atil 
ordres  que  la  commission  de  la  marine  et  des  eokmies 
adrrsseia  aux  agents  maritimes  ou  sons-cbelii  dea  classes, 
et  d'oprôs  ce  qui  aura  été  arrêté  à  oet  égard  par  le  comité 
de  salut  publiai. 

«  XI.  Les  élèves  seront  entretenus  aox  tn\i  de  la  répu- 
blique, et  logés  soit  dans  des  bâtiments  publics,  soit  chei 
des  citoyens  connus.  Ils  seront  nourris  el  Instruits  gratui- 
tement pendant  toute  la  campagne,  soit  a  terre,  soit  &  fo 
mer. 

«  XII.  Les  élèves  auront,  pendant  le  tempa  qa^Ssserool 
employés,  une  somme  de  6  livres  par  mois. 

■  XI II.  Conformément  à  l'usage  établi  dans  la  aaarûM^ 
les  élèves  pourront  déléguer  une  portion  on  méaae  la  to* 
taliié  de  leur  solde  à  leur  père  ou  à  leur  mère,  et  l'agoni 
national  fora  note  de  cette  disposU'u>B  sur  fo  bullelin  déii* 
vré  à  chacun  d*eux.  Cet  agent  rendra  compte  de  loulealea 
opèralions  dont  il  est  chargé,  relativement  h  i'eaéoylioA 
du  présent  décret,  à  la  commission  de  la  marine  ai  des  co- 
lonies, avant  le  30  pluviôse  prochain* 

«  XIV.  La  commissfon  de  la  marine  et  dei  colonies  don- 
nera des  ordres  et  des  instructions,  pour  rexéciHion  du 
présent  décret,  aux  agrnts  nationaui  des  élsirieis  et  dea 
communes  des  lieox  de  imssage,  aux  commandants  des  m^ 
mes  et  agents  maritime»  des  ports,  ainsi  qu'aux  ageoi» 
chargés  de  ta  conduite  des  élèves  choisis  dans  les  districts» 
et  aux  officiers  qui  seront  chargés  du  commandement  de» 
bâtiments  légers  et  des  corvettes  d'instmctlOB. 

«  XV.  L'instruction  sera  terminée  le  i*'  Tcndémiairc 
prochain.  Il  sera,  à  cette  époque,  fait  un  examen  publie 
des  élèves,  et  le  résulut  en  sera  porté  sur  le  bulletin.  Il 
sera  accordé  des  gratifications  graduées,  depuis  60  livres 
iuAqu'à  300  livres,  à  ceux  des  professeurs,  instituteurs» 
maîtres  d'arts,  d'ouvrages,  de  manœuvre,  de  canonoago 
et  d'exercice  militaire»  dont  les  élèves  seront  reconnu»  avoir 
le  pins  profité  de  Tinslruction  navale  révolutfonmiirf. 

tXVL  Après- cet  examen  Jes  élèves  seront  employés, 
soit  dans  les  ports,  soit  sur  les  vaisseaux ,  dans  le  grade 
dont  Ih  auront  été  jugés  susceptibles,  et  dès  lor»  ils  en  aifl« 
ront  le  titre  et  la  paye. 

•  XVII.  Le  comité  de  salut  publie  prendra  toutes  tel 
mesures  de  détail  qui  doivent  assurer  l'exécution  du  pré* 
sent  décret. 

«  XVin.  L'iaseriîon  du  présent  décret  sa  lUilletin  tki^ 
dra  lieu  de  promulgation.  • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté* 

(Laasffodfaïaîa.) 


Paj^emenU  a  la  ivéêwteriê  naléo— le» 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  ponr  lea  six  pro* 
micrs  mois  :  il  sera  fait  à  tous  cens  qui  seront  porteur» 
d'inscriptions  au  grand  livre.  Celui  pour  lea  rentes  vkgére» 
est  de  huit  mois  vUigt  et  un  jour»  do  ruaée  1198  (vlau 

style). 


GAZETTE  NATIONALE  «»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

If  103.  Tridi  13  Niyosb,  l'an  3«.  (Vendredi  2  Jawvieb  1796.  vieux  êtyU.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Ratitbonne^  te  ii  décembre.  «-  L^oavertupe  du  serutin 
itlslifaux  négociation!  de  paix  adonné  le  réiullat  suivant  t 

Paa  une  seuie  objection  contre  la  paix  avec  la  Fruncf*. 

Cinquantewsept  voix  sa  sont  forroellement  déclarées  en 
flveurdeUipaix* 

Dix  voix  demandent  U  nédlaMon  du  Donemiirl^  ç(  dq  la 
Suède.  . 

Treute*six  désirfpt  quç  le  roi  de  Prusse  soit  chargé  de 
cette  média lioDi 

Trente  votants  ont  déclaré  qu'ils  nç  se  pronoDceralent 
qu*aprè8  avoir  reçu  des  instructions  ultérieures  de  leurs 
commettants. 

L*envojé  de  Hanovre  D*a  pas  voté,  et  sept  autres  votants 
ont  manqué. 

L*envojé  palatin  t*e6t  déclaré  avec  énergie  en  Civaur  de 
la  paix* 

Quoi  qa*il  en  soit,  la  oour  do  Vienne  aflfocte,  an  milieu 
de  ces  démarcliest  une  aorte  d'indifférence  i  çlle  s'occupa 
d*augmcntisr  «^  armées •  on  au  moins  d*ol)tenir  des  som- 
mes qui  la  ma4^(  ^  ^^  ^  supporter  les  dépenses  de  la 
gnerre. 

Son  commissaire,  le  baron  de  Hugelf  a  proposé  à  ceux 
des  Etats  d*|^mpire  qui  n*ont  pas  fourni  leur  contingent 
un  moyen  de  remplir  leur  obligation ,  en  payant  pour 
chaque  homme  la  somme  de  250  florins,  à  compter  du  1*' 
mars  1704josqu^aui**' mars  1795, 

date  proposition  s^est  fhUe  au  nom  du  due  de  Saxe- 
Taiclien ,  ield«maréehal  deTEmpira  ;  ea  général  désire  que 
Torgent  qui  en  sera  le  produit  serveà  Tentretlen  des  trou« 
pei  fvnrnies  par  les  Etau  tombés  au  pouvoir  dai  Français» 
attendu  que  ces  troupes  ont  déjà  fait  la  guerre. 

fienwieif  le  ^hdécem^r0f  -^La  roule,  do  Tautre  eAté  du 
Rbini  est  sans  cesse  couverte  de  troupes  françaises,  de  ca- 
nons, de  chariots  qui  déQlent  d'Andernach  sur  Coblentx. 
Les  troupes  crient  aux  Allemands  qui  sont  sur  la  rive  oi>- 
posée  :  Mayenee  !  Muyente  / 

—  Le  général  Beaulieu  vient  de  ^  rendre  ft  Umbourg ^ 
sur  la  LahOf 

-p«tOn  a  rècemmenttait  entrer  a  Mayenee  deux  batailf 
Ions  d'Infanterie  hongroise  et  quelque»  bataillons  hongroii 
et  bobtoiiens» 

»  On  écrit  de  Munich  que  l'électeur  palatin ,  è  qui  son 
conseil  antique  avait  arraché  avec  beaucoup  de  peine  un 
consentement  de  laisser  agiF  le  cours  de  la  justice  contre 
IVx-ministre  Bettschard,  a  changé  tout  à  coup  d'avis.  Cette 
affaire,  qui  a  pris  tant  de  formes  différentes  ,  vient  d'en 
prendre eni'ore  une  nouvelle.  L'électeur  a  déclaré,  par  un 
reserit  •  que  l'accusé  ayant  été  condamné  ^  une  prison 
perpétuelle,  son  procès  devait  être  regardé  comme  fini.  11 
a  néanmoins  permis  au  tribunal  de  continuer  la  procédure 
pour  parvenir  à  la  confiscation  des  biens  usurpés. 

—  Des  commissaires  chargés  de  former  un  corps  d'émi- 
grés ù  la  solde  de  rAngU'terre  avaient  demandé  au  gou- 
vernement bavarois  la  pinnission  d*établir  des  lieux  de 
rassemblement  dapsses  Etats.  Celle  demande  a  été  refusée. 

Extrait  tCune  lettre  de  Francfort ,  du  25  novembre,  — - 
«  La  garnison  do  Mayenee  est  forte  de  vingt  à  vingt-deux 
mille  nommes,  qui  ont  peu  de  munitions  débouche,  et 
ont  en  omiséquenoe  sommé  tous  les  endroits  eireonvoisins 
de  porter  à  Mayenee  les  comestibles  les  plus  nécessaires. 

•  Afcnt-hier  on  nousdébitala  nouvelle  que|es  Français 
avaient  perdu  huit  cents  hommes  devant  Ifayence;  mais 
aujourd'hui  nous  apprenons,  au  graud  déplaisir  des  Franc- 
fortois^  qoe  la  chose  était  entièrement  (huise,  et  qu'au 
contraire  les  Allemands  avaient  perdu  lieattooQp  de 
Bum4e. 

3*  5rfHe.— Ternie  X, 


«  Les  rj^publicains  ont  enlevé  devant  Mayenee  plusieurs 
batteries  garnies  de  dix  canons,  et  veulent  emporter  la 
forteresse  d'assaut* 

•  Aujourd»hul  le  canon  ronfle  d'une  forée  extraordi- 
naire I  toute  la  ville  est  dans  la  plus  grande  terreur.  » 

Extrait  d'une  lettre  de  Heidetberg^  di«  28  novembre.  -.- 
•  Notre  ville  fourmille  de  soldats;  cependant  les  armée» 
sont  Irèsaffaiblies,  et  encore  les  vingt  mille  Prussiens  qui 
reviennent  ne  se  joindront  pas  aux  troupes  qui  gardent  (o 
passage  du  Rhin  ;  mais  Ils  marchent  dans  la  Wcsiphalic 
pour  couvrir  les  possessions  prussiennes  dans  celte  contrée. 

«  Les  Français  nous  menacent  de  passer  le  Rhin  près 
d'Oppenheim  ;  les  pontons  ▼  sont  déjà  arrivés, 

•  Aussi  longtemps  aue  la  léle  du  pont  de  Man|»^m  no 
sera  pas  prise,  nous  n^avons  rien  h  craindre  Ici;  n^^is  dès 
qu'elle  sera  dans  les  mains  des  Français ,  Manhelm  ne 
pourra  plus  lenir.  Il  y  a  de  mauvaises  casemates,  et,  au 
Cas  d*un  bombardement,  la  saison  ne  permettra  pas  qu'on 
s'y  réfugie  pour  longtemps. 

«Les  habitants  de  Manheim,  Rridelberg ,  Hellbronn , 
Stuttgard  et  Louisbourg  pnt  une  telle  peur  qu'ils  envolent 
dans  la  Bavière  et  même  dans  Iç  Tyroi  tout  ce  qu'ils  peu- 


vent emporter.  » 


PRUSSE), 


De  Posnanie,  te  C  décembre,  —  Les  villes  de  Julrozîn, 
Sarna  et  Guerichen,  avec  les  caisses  publiques  qui  s'y 
trouvaient,  sont  tombées  au  pouvoir  des  Insurgés,  Il  y  en 
a  des  détachements  nombreux  dans  lesenvironsdeSiérada, 
de  VViélun  et  de  Widawa. 

Un  de  leurs  partis,  commandé  par  le  major  Poudoki,  a 
surpris  le  bureau  des  péages  à  Panke,  situé  dans  le  dis- 
trict de  Krxepice ,  dans  la  Siredie. 

Un  autre  parti  d'environ  cinq  cents  hommes  a  enveloppé 
et  fait  prisonnier,  dans  les  environs  de  Klobucio.  un  déta- 
chement prussien.  Les  insurgés,  après  cet  avantage,  sont 
entrés  dans  Kiobuczo  ;  ils  y  ont  levé  des  contributions,  et 
se  sont  retirés.  Le  même  jour,  un  corps  d'insurgés,  aux 
ordres  des  généraux  Lipski  etSlQkowski,  esteniré  ù  Krxe- 
pice.  Les  insurgés  se  réunissent,  s'agitent,  se  mettent  en 
mouvement.  On  assure  qu'ils  ont  d&  projets  sur  Cxensto- 
chow. 

CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Bentabotc, 
SUITE  A  hk  SÉANCE  DU  11  IflVOSB. 

GîBAUD  ;  Citoyens,  vous  ave?  renvoyé  pard(?crcl, 
à  l'examen  de  votre  comité  de  commerce,  la  récla- 
mation faite  ppr  un  de  nos  collègues  sur  un  des  ar- 
ticles de  la  loi  qui  rapporte  celle  sur  le  maximum. 
Cette  réclamation  a  pour  objet  de  no  pas  faire  porter 
les  réquisitions  faites  pour  les  districts  et  commu- 
nes, oti  pour  l'approvisionnement  des  marchés,  sur 
des  districts  (jui  n'auraient  pas  pour  plus  de  deux 
mois  de  subsistances. 

Celte  observation ,  qui  n*avait  point  échappé  h 
votre  comité  de  commerce  lorsqii'il  a  préparé  cette 
loi,  avait  motivé  l'article  VI  du  projet  de  décret  qu'il 
vous  a  présenté. 

Votre  comité  a  pensé  que  l'agriculteur  qui  a  em- 
ployé ses  stjins,  ses  travaux  à  fertiliser  un  champ, 
pur  le  nourrir  lui  et  sa  famille  pendant  son  anué^ 
iigricole ,  ne  pouvait  être  privé  de  celte  portion  de 
jia  [jruiintHL- ,  qui,  dans  Tordre  de  la  nature  et  de  la 
société,  est  bien  la  plus  sacrée  ;  que  cette  même 
SûciétL"  ncpouvait  avoir  de  droits  que  sur  la  portioa 
excéda  [il  ses  besoins.  C'est  en  respectait  ce  phn* 
cipc  que  votre  comité  avait  présenté  Tarticlç  que  : 
vous  avez  supprimé.  '  . 

13 


98 


Les  réclamations  de  Topscnt  vous  ont  frappés,  et 
vous  avez  ordonné  qu'on  les  examinât  de  nouveau. 
Votre  comité  a  pensé  qu'elles  étaient  fondées  sur 
Féquité  la  plus  stricte  ;  qu'il  pourrait  y  avoir  des  in- 
convénients à  obliger  des  citoyens  de  se  priver 
d'une  portion  de  leurs  subsistances  qu'ils  sentiraient 
être  nécessaires  à  leur  existence  ;  que  la  contrainte 
qu'on  pourrait  employer  nuirait  aux  sentiments  de 
fraternité,  de  persuasion,  et  d'intérêt  particulier  qui 
portent  à  de  mutuels  sacrifices. 

Le  comité  a  donc  cru  nécessaire  de  vous  proposer 
un  article  additionnel, qui  calmât  les  craintes  et  po- 
sât sur  des  principes  dont  vous  ne  vous  écartez  ja- 
mais, quand  ils  vous  sont  démontrés. 

Voici  Farticle  : 

•  Nui  ne  pourra  se  refuser  aux  réquisitions  portées  par 
les  articles  111  et  V  de  la  loi  du  à  nivôse,  à  moins  qu'il  ne 
justice qu*il  ne  possède  pas  de  grains  ou  farines  au-delà  de 
sa  consomma  lion  pendant  six  mois,  et  ce,  ù  peine  de  con- 
fiscation des  grains  ou  farines  excédant  ses  besoins  pen- 
dant ce  temps.  » 

Cet  article  est  adopté. 

ScELLiER  :  Avant  de  soumettre  à  la  discussion  de 
la  Convention  nationale  le  projet  de  décret  sur  l'a- 
bolition des  franchises  des  ports  de  Bayonne,  Dun- 
kerque  et  Marseille,  dont  elle  a  ordonné  l'impression 
et  l'ajournement,  je  crois  qu'il  est  nécessaire  d'en- 
trer encore  dans  quelques  détails  sur  le  régime  de 
14arseille,  pour  ne  laisser  aux  veux  du  législateur 
aucun  doute  sur  la  nécessité  ue  la  loi  qui  lui  est 
présentée. 

Je  vous  ai  déjà  dit  que  le  régime  de  Marseille,  re- 
lativement aux  douanes,  est  contraire  aux  principes 
d'unité ,  de  liberté  et  d'égalité  qui  sont  la  base  de 
notre  gouvernement. 

Les  visites  nécessitées  par  ce  régime  sur  les  voya- 

feurs  sortant  du  territoire  de  Marseille  contrarient 
videmment  les  principes  de  liberté;  elles  rappellent 
les  anciennes  cloisons  fiscales  que  l'on  croyait  abat- 
tues; elles  font  penser  que  Marseille  est  un  Etat 
isolé;  elles  donnent  iieu  à  des  discussions  fréquentes 
entre  les  voyageurs  et  les  préposés. 

La  vérification  de  ce  qui  se  passe,  soit  en  allant, 
soit  en  venant ,  nécessite  des  déballages,  d'oii  ré- 
sultent des  avaries  ;  elle  occasionne  également  des 
relards. 

Celui  qui  vient  de  Marseille  ou  qui  y  passe  n'ima- 
eine  pas  qu'il  vient  d'un  pays  étranger  ou  qu'il  y  va; 
H  ne  déclare  pas  ce  qu'il  ne  transpurte  que  pour  son 
usage  :  de  la  des  saisies,  des  conliscn tiens  et  des 
amendes ,  et,  ce  qui  est  encore  plus  fâcheux,  une 
guerre  intérieure  entre  les  préposés  et  les  hommes 
qui  veulent  frauder  les  droits. 

Celui  qui  a  des  marchandises  à  envoyer  aux  colo- 
nies françaises  par  Marseille  les  adresse  à  son  cor- 
respondant en  ce  port  ;  il  ignore  auc  si,  en  passant 
à  Seplémes ,  on  ne  déclare  pas  la  destination  de  ces 
marchandises,  et  que  si,  à  l'arrivée,  le  voiturier  ne 
les  met  pas  sous  la  main  des  préposés  des  douanes, 
elles  seront  traitées  comme  venant  de  l'étranger. 

Par  son  ignorance  il  paie  souvent  sur  des  mar- 
chandises nationales  les  droits  que  doivent  seule- 
ment celles  étrangères. 

Le  voiturier  qui,  pour  aller  de  Lyon  au  Port-Ia- 
Montagne,  ne  fait  qu'emprunter  le  territoire  de  Mar- 
seille, ne  peut  deviner  que,  pour  aller  de  France  en 
France,  il  soit  obligé  de  se  présenter  à  une  douane; 
et  quand  il  sort  du  territoire  de  Marseille,  on  exige 
sur  l'objet  de  son  chargement  les  droits  dus  sur  ce 
qui  vient  de  l'étranger,  auquel  Marseille  est  as- 
simile. 

Un  aegociaut  envoie  à  Marseille  des  quincaille- 


ries ou  d'autres  marchandises  dont  il  ne  trouve  pas 
le  débouché  ;  s'il  veut  iCS  eu  faire  revenir,  il  est 
tenu  d'acquitter  les  droits  comme  sur  quincaillerie 
ou  autre  marchandise  étrangère. 

Ce  détail ,  dont  chaque  article  peut  être  appuyé 
de  faits ,  démontre  combien  le  régime  de  Marseille 
nuit  aux  habitants  des  autres  parties  de  la  répu- 
blique. 

II  procure,  il  est  vrai,  aux  habitants  de  cette  com- 
mune l'exemption  des  droits  sur  toutes  les  produc- 
tions du  Levant,  sur  les  huiles  d'Italie  ou  d'Espagne 
et  de  Portugal ,  sur  les  eaux  spiritueuses ,  sur  les 
drogueries  et  épiceries,  sur  le  chocolat,  les  fruits,  les 
vins  et  les  liqueurs ,  les  ouvrages  en  bois,  buis,  os 
et  ivoire ,  la  faïence ,  et  sur  tous  objets  autres  que 
ceux  dénommés  en  l'article  IV  du  titre  l«r  de  la  loi 
du  l^t  août  1791  ;  mais  cette  exemption  contrarie 
les  principes  d'égalité.  Marseille  doit ,  comme  les 
autres  communes  de  la  république ,  les  droits  sur 
les  productions  étrangères  qu'elle  consomme;  son 
patriotisme  ue  lui  permet  pas  d'avoir  un  autre  vœu. 

Marseille  ne  peut  et  ue  doit  désirer  qu'une  chose: 
c'est  de  n'être  pas  réduite  à  diminuer  ses  importa- 
tions du  Levant^  à  défaut  de  débouché  de  la  partie 
de  ses  productions  qui  passait  à  l'étranger. 

Mais ,  d'un  côté,  nous  n'aurons  pas  cet  excédant 
avant  la  paix  ;  de  l'autre ,  il  continuera  de  passer  à 
l'étranger  en  franchise  de  droits  au  moyen  de  l'en- 
trepôt. Cet  entrepôt  n'atteindra  même  pas  les  laines 
et  les  cotons,  qui  jusqu'à  présent  ont  formé  la  ma- 
jeure partie  des  objets  à  réexporter. 

La  presque  totalité  des  autres  objets  susceptibles 
de  réexportation  sera  à  la  disposition  du  négociant, 
qui  sera  exempt  du  payement  des  droits  sur  la  partie 

3u'il  exportera ,  en  justifiant  de  cette  exportation 
e  la  même  manière  qu'il  a  toujours  été  tenu  de  le 
faire. 

11  n'y  aura  d'assujetti  à  l'entrepôt  réel,  c'est-à-dire 
sous  clef,  que  les  étoffes  et  toileries  de  soie,  fil,  coton 
ou  laine  ;  et  cette  mesure ,  qui  tend  à  empêcher  les 
productions  de  l'industrie  étrangère  d'entrer  dans 
la  consommation  en  fraude  des  droits  établis  pour 
favoriser  les  manufactures  nationales,  n'empêchera 
pas  leur  réexportation. 

Si  les  armateurs  pour  le  Levant  démontrent  qu'il 
leur  importerait  de  pouvoir  y  porter  des  proauc- 
tions  étrangères  sans  qu'elles  fussent  assujetties  aux 
droits  d'entrée  en  France,  on  leur  accordera  l'entre* 
pôt  de  ces  productions  ;  il  en  sera  de  même  des  pro- 
ductions étrangères  dont  ils  pourraient  faire  utile- 
ment pour  eux,  et  sans  nuire  à  la  république,  un 
commerce  intéressant  de  commission  avec  l'étran- 
ger; mais  c'est  à  condition  que  la  même  permis- 
sion sera  commune  à  Bayonne ,  à  Dunkerque ,  au 
Havre ,  et  à  tous  les  autres  ports  qui  justifieront 
(les  mêmes  avantages.  Ces  entrepôts  auront  partout 
un  régime  propre  a  prévenir  les  abus  qui  n'ont  que 
trop  existé  dans  celui  établi  à  Marseille,  qui  devait 
être  dans  une  même  enceinte  et  sur  le  port,  de  ma- 
nière que  les  préposés  eussent  pu  voir  charger  et 
décharger  les  marchandises,  et  qui,  par  la  violation 
de  cette  disposition  de  la  loi ,  est  devenu  la  source 
de  ces  abus. 

Marseille  obtenant  ainsi  tout  ce  qu'il  peutdésirer 
pour  son  commerce  extérieur,  toutes  les  cloisons 
qui  séparent  son  territoire  du  reste  de  la  république 
seront  abattues  :  on  pourra  y  arriver,  en  sortir  et  le 
traverser,  sans  éprouver  les  gênes  inséparables  de 
son  régime  actuel. 

Voici  le  projet  de  décret  que  je  suis  chargé  de 
vous  présenter  : 
c  La  CoaTCotlon  nationale ,  après  STolr  entendo  le  rap* 


99 


port  de  son  comité  de  eommerce  et  des  approvisionne- 
nientSy  décrète  : 

f  Art.  1*%  Les  franchises  de  Dunkerque,  de  Marseille,  de 
Bayonne,  et  du  ci-devaot  pays  de  Labour,  sont  supprimées. 

•  IL  Trois  jours  après  la  publication  du  décret,  les  bu- 
reaux existant  sur  les  limites  intérieures  de  ces  lieux  seront 
fermés,  et  ilen  sera  établi  sur  les  limites  extérieures. 

«  IIL  Pour  assurer  aux  productions  du  Levant  qui  ex- 
céderont la  consommation  nationale  le  débouché  que  lui 
facilitait  la  franchise  de  Marseille,  toute  marchandise  im- 
portée du  Levant  par  le  commerce  français  jouira,  dans 
le  portd*arrivée,  d'un  entrepôt  de  dix-huit  mois,  pendant 
lesquels  elle  pourra  être  exportée,  soit  par  terre,  soit  par 
mer,san8  acquitter  aucun  droit  de  douane. 

>  IV.  Toutes  les  marchandises  manufacturées  provenant 
dudit  commerce  resteront  dans  les  magasins  des  négo- 
ciants ou  commissionnaires  en  entrepôt  réel  ;  celles  qui  ne 
feraient  pas  exportées  après  le  délai  de  dix-huit  mois  paie- 
ront un  droit  de  demi  pour  cent  par  chaque  mois,  jusqu'à 
leur  exportation. 

•  V.  S*il  est  reconnu  qu^au  moyen  d'autres  entrepôts  le 
commerce  puisse  transporter  avec  avantage  des  marchandi- 
ses étrangères  dans  un  autre  pays  étranger,  il  lui  sera  ac- 
cordé toutes  les  facilités  qui  se  concilieront  avec  Tiotérét 
Dationa). 

«  VI.  Tout  bâtiment  sujet  à  la  quarantaine  ne  pourra 
mouiller  dans  aucun  port  de  la  république ,  s*il  ne  justifie 
par  certificats  authentiques  qu'il  s'est  soumis  à  cette  forma- 
lité dans  le  port  de  Marseille  ou  de  Toulon.  » 

Ce  décret  est  adoplé. 

—  La  section  de  Lepelletier  est  admise  à  la  barre. 

Vorateur  :  Citoyens  représentants,  la  section  Lepelle- 
tier vient  applaudir  à  la  sagesse  des  mesures  que  vous  avez 
prises  contre  la  tentative  insensée  d'un  royaliste;  le  mou- 
vement de  votre  indignation  contre  cet  acte  contre-révolu- 
tionnaire détruit  toutes  les  calomnies  que  les  ennemis  du 
peuple  s'efforçaient  de  diriger  contre  le  but  de  vos  derniers 
travaux.  Il  vous  sera  facile  sans  doute,  à  vous  qui  avez  dé- 
truit les  denx  derniers  tyrans,  d'enchaîner  et  de  compri- 
mer les  vils  esclaves  qu'ils  ont  laissés  après  eux  ;  mais  votis 
avez  besoin  de  toute  votre  énergie  pour  écraser  les  factieux 
qui ,  savants  dans  Part  de  mettre  à  profit  les  circonstan- 
ces, ne  sont  pas  moins  habiles  à  les  faire  naître  pour  favo- 
riser leurs  sinistres  projets. 

Vous  les  reconnaîtrez  ces  factieux  ;  déj&  même  ils  ne 
prennent  plus  la  peine  de  se  masquer;  ce  sont  ces  hommes 
qui,  chargés  du  mépris  et  de  la  haine  publique,  n'en  ont 
acquis  que  plus  d'audace,  ne  craignent  point  de  faire  voir 
snr  leur  front  éhonté  la  trace  des  crimes  qu'ils  ont  commis 
et  des  nouvelles  fureurs  auxquelles  ils  s'apprêtent  ;  ce  sont 
ces  bourreaux  de  l'espèce  humaine,  qui,  à  l'instar  des  Né- 
ron, desTit>ère  et  desCaligula,  voient  avec  une  joie  fé- 
roce un  coupable  ;  alors  ils  généralisent  son  crime  ou  sa 
faute;  et,  parce  qu'un  ennemi  des  lois  s'est  permis  de  les 
attaquer,  il  faut,  disent  ces  factieux,  il  faut  comprimer  de 
nouveau  et  incarcérer,  et  rappeler  la  terreur  et  la  mort.  C'est 
ainsi  que,  sous  Robespierre,  on  profitait  d'un  mol  échappé 
b  un  prisonnier,  on  créait  une  conspiration  pour  faire  périr 
de  nouvelles  victimes. 

Mais  vous  n'en  croirez  pas  ces  buveurs  de  sang  humain, 
qui  se  font  gloire  de  cet  horrible  titre  ;  mais  vous  ne  sui- 
vrez pas  leurs  conseils  assassins  :  l'esprit  public  est  formé; 
le  peuple  entier  a  la  confiance  la  plus  absolue  dans  votre  sa- 
gesse et  votre  énergie;  vous  êtes  sa  consolation,  son  uni- 
que espérance.  L'aristocratie  est  à  bas,  les  factieux  seuls 
ne  le  sont  pas. 

Leurs  espérances  paraissent  se  relever  :  ils  se  rassem- 
blent pour  conspirer,  se  répandent  dans  les  groupes ,  dans 
les  assemblées,  pour  y  corrompre  l'esprit  public,  y  semer 
la  défiance  et  l'inquiétude  et  effrayer  le  citoyen  paisible. 

Pourquoi  cet  excès  d'audace  et  ce  funeste  espoir  ?  Ah  1 
nous  ne  pouvons  plus  vous  le  dissimuler;  les  faits  articu- 
lés, attestés  et  signés  par  des  hommes  purs,  ne  fixent  pas 
assez  l'attention  de  l'autorité.  Des  gens  chargés  de  l'exécra- 
tion publique  obtiennent  et  conservent  encore  des  places 
de  confiance;  d'autres,  que  la  société  avait  vomis  de  son 
tein,  sont  élargis.  Les  autorités  constituées,  composées 
fous  le  régime  de  la  tyrannie,  ne  sont  pas  encore  nurgées, 


malgré  les  réclamations  multipliées  du  peuple.  Sans  doute 
les  immenses  travaux  de  vos  comités  ont  retardé  jusqu'ici 
ces  mesures.  Le  gouvernement  a  déjà  t>eaucoup  à  faire  de 
parer  aux  coups  perfides  et  sans  cesse  apprêtés  par  les 
hommes  que  nous  venons  de  désigner.  Mais  ,  citoyens  re* 
présentants,  le  temps  presse;  hâtez-vous  d'écraser  la  tête 
du  serpent  ;  il  n'était  qu'engourdi  par  l'effet  de  son  propre 
poison  ;  mais  déjà  il  reprend  ses  forces,  il  s'avance  pour 
mordre  le  sein  de  la  pairie,  tandis  que  le  lion  se  dispose  à 
s'élancer  sur  vous ,  pour  déchirer  les  membres  qu'il  vous 
a  laissés  ;  cependant  leur  rage  réunie  n'aura  point  d'effet; 
vous  allez  les  prévenir;  et  l'amour  du  peuple  et  son  bras 
invincible  vous  sont  le  garant  d'un  triomphe  assuré. 

Cette  pétition ,  souvent  interrompue  par  des  ap- 
plaudissements, sera  insérée  au  Bulletin. 

—  Une  de'putation  de  la  section  de  la  Butte  des 
Moulins  succède  à  celle  de  Lepelletier. 

L'orateur  :  Un  esprit  délirant  ou  égaré  par  les  sourdes 
menées  des  ennemis  de  la  prospérité  nationale  a  donné  oc- 
casion de  répéter  ces  mots  :  royalisme,  monarchiet  lerro- 
rismi;  et  bientôt,  s'efforçant  de  donner  quelque  consis- 
tance à  ces  propos  enfantés  dans  la  retraite  du  crime,  on  ne 
manquera  pas  de  les  présenter  comme  le  vœu  des  citoyens 
de  la  commune  de  Paris. 

La  section  de  la  Bulle  des  Moulins  vient  à  votre  barre 
prévenir  les  dangereul[  effets  de  cette  artificieuse  perfidie. 
Qui  n'y  reconnaît,  en  effet,  les  derniers  efforts  d'un  parti 
expirant,  pour  qui  le  désordre  est  une  nécessité  ? 

Quoi  1  on  nourrirait  encore  l'affreux  projet  de  nous  te» 
plonger,  par  la  terreur,  sous  le  despotisme  1  Mais  oublie- 
t-on  que  tous  les  mécontents,  que  les  terroristes  ont,  & 
force  de  persécutions,'  détachés  du  char  de  la  révolution, 
votre  justice  les  y  rattache  tous  les  jours  de  plus  en  plus. 

Quoi  1  nous  aurions  renversé  le  trône,  et  du  milieu  de 
ses  débris  nous  souffririons  qu'il  s'en  élev&t  un  nouveau  ! 

Ballottés  de  factions  en  factions,  nous  n'aurons  pendant 
cinq  ans  supporté  tous  les  orages  qu'entraîne  après  elle 
une  révolution  que  pour  nous  revoir  ensuite  replongés 
sous  la  tyrannie  1  Quoi  1  du  nord  au  midi ,  de  l'orienl  au 
couchant,  nos  armées  triomphantes  font  reculer  les  des- 
potes coalisés,  partout  la  victoire  accompagne  nos  pas,  et 
nous  donnerons  à  l'univers  étonné  le  honteux  spectacle 
d'un  peuple  qui  reprend  lâchement  les  fers  qu'il  a  brisés 
sous  tant  de  formes  différentes  1  Comme  alors  tous  les  des- 
potes viendraient  en  raccrocher  tous  les  chaînons  épars  et 
les  river  plus  fortement  1  Encore  des  Néron,  encore  des 
Caligula  !  Trop  de  pages  dans  notre  histoire  ont  été  souil- 
lées de  leurs  forfaits;  la  France  n'a  plus  de  sang  à  leur 
donner;  elle  ne  veut  plus  en  verser  que  pour  consolider 
sa  liberté. 

Citoyens  représentants,  que n'avcz-vous  été  hier  lesté- 
moins  de  la  juste  indignation  que  ces  mots,  royalisme ^ 
terrorisme ,  ont  excitée  dans  le  cœur  de  tous  les  citoyens 
en  assemblée  générale;  tous,  d'un  mouvement  spontané* 
se  sont  levé*,  et ,  les  chapeaux  en  l'air,  on  n'entendait  que 
ce  cri:  Vive  la  république  une  et  indivisible  I  Vous  y  au- 
riez reconnu  l'expression  du  civisme  qui  a  toujours  carac- 
térisé la  section  de  la  Butte  des  Moulins  ;  c'est  alors  que,  se 
rappelant  la  profession  de  foi  qu'elle  fit  au  milieu  des  ora- 
ges du  mois  de  juin  1793,  elle  arrêta  de  venir  aujourd'hui 
vous  la  réitérer,  et  bientôt  elle  sera  suivie  des  autres  sec- 
tions. 

Elle  vous  jure  donc,  comme  au  6  juin  4793  et  dans  tou- 
tes les  autres  circonstances,  qu'elle  combattra  le  despo- 
tisme et  la  tyrannie,  sous  quelque  Torme  qu'ils  puissent  se 
présenter;  qu'elle  maintiendra  la  liberté  et  l'égalité,  et 
contribuera  de  tous  ses  moyens  à  les  établir  sur  des  bases 
inébranlables;  qu'elle  regardera  toujours  comme  un  de- 
voir sacré  d'assurer  le  respect  dû  à  la  représentation  natio* 
nale,  et  de  proléger  la  sûreté  des  personnes  et  des  proprié- 
tés; qu'elle  jure  anathème  et  vengeance  h  toute  autorité* 
puissance,  corps  ou  individu  qui  tenterait  directement  oo 
indirectement  defompre  l'unité  et  rindivisibilité  de  la  ré- 
publique. 

L'assemblée  a  aussi  arrêté,  vu  le  court  délai  accordé 
aux  sections  pour  le  choix  des  six  gendarmes,  d'après  vo« 
tre  décret,  de  vous  demander  une  assemblée  quintidi  pro- 
chain, uniquement  consacrée  pour  cet  objet ,  et  d'élendrc 


100 


!  I 


tictttf  tnesare  à  toutes  le»  sections  âe  Paris;  elles  n*ont  été 

Îirévenucs  qu*bier,  tandis  que  rorgatilbailoo  est  filée  pour 
ei8. 

ANDRE  DuMONT  :  Cette  enceinte  a  retenti  depuis 
quelques  jours  des  cris  contre  le  royalisme»  Certes 
on  ne  ni'accus^ru  pas  d*étre  un  royaliste;  on  ne 
m'accusera  pas  d'avoir  vote  Tappel  au  peuple  ;  Je 
ne  Tai  pas  voté,  et  j'ai  Votd  la  mort  du  tyran.  Mais 
ne  soyons  pas  dupes  de  Ceux  qui  poussent  ces  ciis  ; 
on  voudrait  dgarclr  les  départements  ;  on  voudrait 
leur  faire  croire  que  Paris  est  royaliste,  et  toutes  les 
sections  de  Paris  viennent  de  renouveler  le  serment 
de  vivre  et  de  mourir  pour  la  rt^publique.  Les  roya- 
listes, ce  sont  ceux  qui  cherchent  à  usurper  la  sou- 
veraineté nationale.  (On  applaudit.)  J'abhorre  le 
san^.  (On  applauditr)  Je  n'en  ai  jamais  fait  verser 
une  goutte  ;  c'est  la  consolation  de  ma  conscience. 
(Vils  applaudissements.)  Je  voudrais  même  qu'ex- 
cepté pour  les  royalistes  la  peine  de  mort  put  être 
abolie  aujourd'hui.  Mais  il  raut  détromper  lès  ci- 
toyens ;  il  faut  les  prémunir  contre  le  poison  qu'on 
cherche  à  faire  circuler  dans  les  départements.  Je 
demande  donc  qu'on  insère  au  Bulletin  et  qu'on 
leur  envoie  l'Adresse  qui  vient  d'être  prononcée  a 
la  barre. 

On  vous  a  dit  hier  qu'on  salissait  le  Bulletin  de 
sottises;  jadis  on  y  insérait,  il  est  vrai,  bien  des 
cruautés.  On  voudrait  faire  perdre  à  la  Convention 
Testime,  l'amour  du  peuple,  dont  elle  jouit.  Voulez- 
vous  être  aimés,  soyez  jusl;es.  (Vifs  applaudisse- 
ments.) Un  tyran  sait  qu'il  est  abhorré;  il  lui  faut 
une  verge  de  fer;  mais  un  républicain  ne  répand  pas 
1c  sang  avec  plaisir,  avec  barbarie.  (On  applaudit 
tougtemf)S. 

Maube  :  11  ne  faut  pas  mal  interpréter  des  mots 
qui  me  sont  échappés  ;  mon  cœur  est  pur«  J'ai  gémi 
en  tout  temps  dt^  voir  qu'on  insérait  au  Bulletin  des  | 
choies  qui  ne  tenaient  qu'à  l'esprit  de  parti.  Le  Bul-  | 
letin  n'a  été  institué  que  pour  former  l'esprit  pu- 
blic, que  des  journaux  pouvaient  corrompre; 
tnais  ce  n'est  pas  avec  des  choses  de  parti  qu'on 
forme  cet  esprit.  Les  belles  actions  de  nos  défen- 
seurs ,  les  sages  lois  de  la  Convention ,  voilà  ce  gui 
formera  cet  esprit.  Jamais  je  ne  me  permettrai  rien 
qui  puisse  atténuer  le  respect  dû  à  la  Convention.  Le 
patriotisme  peut  m'entraîner,  mais  mes  intentions 
sont  irréprochables.  On  s'élève  contre  les  buveurs 
de  sang.  Je  déteste  ceux  qui  ont  abusé  de  l'instru- 
ment tranchant  de  la  révolution  pour  satisfaire  leufs 
passions  ;  mais  c'est  nominativement,  non  collecti- 
vement, qu'il  faut  les  désigner. 

L'assemblée  décrète  rinscrtion  demandée  par  André  Du- 
mont  ;  elle  décrète  aussi  la  demande  faite  par  la  section  de 
la  Butte  des  Moulins,  et  convertie  en  motion  par  un  de 
ses  membres  ,  d*une  assemblée  dans  toutes  les  sections* 
quintidi  prochain ,  pour  choisir  six  gendarmest 

^-  La  section  des  Tuileries  vient  aussi  exprimer  son  hor- 
reur pour  le  royalisme ,  le  terrorisme ,  la  tyrannie. 
Insertion  au  Bulletin. 

Lejeunb  :  Je  dis  aussi,  comme  le  président,  que 
le  peuple  de  Paris  ne  veut  ni  tyrans  ni  lyronnie; 
mais  je  dis  qu'il  existe  une  faction  royaliste ,  et  le 
vais  le  prouver.  Il  circule  dans  Paris  un  écrit  inti- 
tulé :  Élrenne»  aux  amateurs  du  bon  vieux  lempt. 
Dans  cet  écrit  on  prêche  hautement  le  royalisme; 
J'en  demande  le  renvoi  au  comité  de  sûreté  générale, 
afin  qu'il  prenne  des  mesures  de  police  contre  son 
infâme  auteur. 

•*•  :  J'ai  connu  Pouvfaçe  infâme  qui  vient  de  vous 
être  dénoncé  ;  Je  l'achetai,  il  y  a  deux  jours,  au  Pa- 
lais-Egalité ;  et  commo  Je  remarquai  qu'il  n*étalt 


point  signé,  et  que  rimprimeur  même  ne  set  nom- 
mait pas  t  je  crus  prudent  de  le  faire  connattro  au 
comité  de  sûreté  générale.  J'aurais  pu,  comme  Le*- 
jeune,  venir  le  dénoncer  à  la  tribune  de  la  Conven- 
tion ;  mais  je  pensai  que  l'homme  qui  le  vendait» 
en  ayant  été  averti,  se  serait  évadé,  et  que  legôa« 
vernemenl  n'aurait  pu  découvrir  rauteur,  fan- 
honce  ft  la  Convention  que  depuis  trois  Jours  lé 
comité  de  sûreté  générale  a  pris  des  mesures  pour 
empêcher  la  circulation  de  cet  écrit.  (On  apptati» 
dit.) 

Lecointe-PuybaVbAu  :  Citoyens,  il  fout  remar<> 
quer  que  les  hommes  qui  se  sont  montrés  les  plus 
féroces  sous  le  régime  de  sang  étaient  royalistes  en 
8d  ;  il  résulte  pour  moi  de  cette  observation  que  eeè 
hommes,  royalistes  sous  le  rè^ne  de  Capet ,  tyrans 
sous  celui  de  Robespierre,  veulent  encore  redevenir 
royalistes  et  l'être  sans  danger  pour  eux*  Je  suis 

Sersuadé  que  les  écrits  royalistes  dont  on  nous  inon- 
e  depuis  quelques  jours  viennent  de  ces  hommes 
destitués  par  nos  collègues  dans  les  départements. 
(Vifs  applaudissements.)  Ces  hommes  ont  dit  :  Nous 
ne  pouvons  plus  rester  dans  un  pays  où  nous  svons 
fait  couler  le  sang  ;  réfugions-nous  dans  une  grande 
ville,  à  Paris,  par  exemple,  où  Fceil  de  la  police  ne 

Sent  pas  se  porter  à  la  fbis  sur  tous  les  Individus.  Je 
emande  que  la  Convention  décrète  que  tout  homme 
destitué  de  ses  fonctions  sera  tenu  dans  le  plus  court 
délai  de  sortir  de  Paris. 

tnÉRON  :  L'écrit  qui  vient  de  Vous  être  dénoncé 
l'avait  été,  par  moi ,  au  comité  de  sûreté  ffénérale, 
il  y  a  trois  jours  :  je  l'avais  remis  à  Giroa-Pousol, 
en  l'invitant  de  prendre  des  mesorfs  pour  faire  ren- 
trer dans  la  poussière  ces  Vili  royabstes.  Mais  «  ci- 
toyens, prenes  garde  que  vos  ennemis  ne  tirent  parti 
d'un  écrit  royaliste ,  contre  lequel  d'ailleurs  vons 
flve2  prononcé  la  peine  de  mort ,  pour  anéantir  te 
liberté  de  la  presse.  La  liberté  de  la  presse  une  fois 
anéantie,  vous  verriez  bientôt  renaître  le  système 
de  la  terreur,  et  relever  les  échaCeiuds  que  la  révolu- 
tion du  9  thermidor  a  si  heureusement  abattus. 
iVïb  applaudissements.  —  Quelques  murmures 
ans  l'extrémité  de  la  salle.)  Oui,  parcs  que  quel- 
ques individus  ont  osé  lever  une  tête  audacieuse,  les 
continuateurs  de  Robespierre  osent  en  profiter  ;  mais 
la  Convention  nationale,  qui  depuis  le  9  thermidor 
s'est  si  bien  prononcée  contre  les  royalistes  contre 
les  buveurs  de  sang ,  ne  souSHra  pas  plus  le  trône 
que  l'échafaud.  (Vifs  applaudissements.)  Je  demande 
que  le  comité  de  sûreté  générale  prenne  contre  les 
royalistes  les  mesures  les  plus  vigoureuses ,  mais 
qu  il  fasse  respecter  la  liberté  de  la  presse,  sans  la- 
quelle il  n'existe  point  de  liberté  publique. 

Clauzel  :  Je  dois  rendre  compte  de  ce  qui  s'est 


passé  cette  nuit  à  la  section  de  Bonne-Nouvelle,  où 
tes  scènes  les  plus  scandaleuse»  ont  eu  lieu  :  vin|t 


révolutionnaire,  de  concert  avec  les  anciens  mem- 
bres du  comité  révolutionnaire  de  cette  section,  ces 
scélérats  proposèrent  une  Adresse  dans  laquelle ,  A 
la  vérité,  ils  s'élevaient  contre  le  royalisme.  Cette 
Adresse  finissait  par  demander  ^u'ott  ne  parle  plus 
d'hommes  de  sang,  ni  de  terroristes,  oes  qualifica- 
tions étant  données  à  des  patriotes.  Non,  citoyens, 
un  pstriote  n'a  Jamais  fait  répandra  le  sang  de  Tin- 
noeent;  il  n'a  ni  volé,  ni  pillé  ;  ce  n'est  point  i  lui 
que  s'adresse  ce  reproche. 

De  grands  criminels  tiennent  les  colonnes  da 
temple,  et  ils  espèrent,  comme  Samson,  le  faire 
écrouler  sur  la  représentation  nationale;  mais  votre 


!0l 

gouvernement  veillé  Huit  et  jôuf;  leurs  eàpëmaces  \  mande  à  dénoncer  ce  système  de  terreur.  (VlolehU 
seront  déjouées,  et  la  république  et  la  liberté  triom-  '  murmures.) 


Eberont.  Je  demande  ({u  on  fksse  sortir  de  Paris  les 
ommes  de  sans  qui  sont  venus  a*y  réfugier  et  se 
réunir  aux  grands  criminels  que  cette  rille  renferme* 

DuflSM  S  Lorsque  Je  suis  monté  à  cette  tribune 
pour  y  dénoncer  Touvrage  de  Lacroix,  Je  croyais 
remplir  un  devoir  civique;  je  ne  croyais  pas  que 
rintrigue  me  présenterait  comme  un  royaliste,  (vio- 
lents murmures.) 

Le  PRÉsiDENt  :  Personne  n'a  traité  Duhcm  de 
royaliste;  si  duelqu*un  se  fût  permis  de  le  faire,  je 
Taurais  rappelé  a  Tordre. 

DuHEM  :  tes  insinuations  qu'on  vient  de  répandre 
sont  assez  sensibles  pour  être  entendues. 

***  :  Je  demande  i  Duhem  S'il  se  reconnaît  pour 
un  partisan  de  la  terreur,  car  on  n'a  fait  que  parler 
d'eux. 

DciiEâi  :  on  a  parlé  de  royalistes  eu  Sd,  qui  sont 
devenus  exagérés  sous  Robesbiene  ;  on  a  eu  raison, 
et  l'un  devait  citer  pour  exemple  Lavaletto.  On  a 
aussi  parlé  de  gens  destitues,  qui,  dit-on,  affluent  à 
Paris»  Pourquoi  n  a-t-on  pas  parlé  de  cette  antique 
aristocratie  qui  a  reçu  l'absolution  générale  le  0  ther  • 
midor?  Pourquoi  n  a^t-on  pas  parlé  de  ces  comtes 
et  marquis^  qui  font  plus  de  bruit  à  Paris  que  les 
prëtenuus  deititués?  (On  murmure.)  Je  défie  rréron 
lui-même  tie  dire  si  J'ai  jamais  attaqué  la  liberté  de 
la  presee. 

FBÉftoH  !  Td  Fas  attaquée  aux  Jacobins. 

DunsM  :  Aux  Jacobins  j*ai  cité  ta  Déclaration  des 
Droits  de  TBomme,  et  cette  déclaration  garantit  la 
liberté  de  la  presse ,  c'est-à-dire  qu'elle  permet  de 
dire  et  d*imprimer  ce  qui  ne  nuit  pas  à  autrui*  (Quel- 
ques applaudissements.)  On  rient  de  dire  que  le<r 
ouvrages  royalistes  qui  ont  été  dénoncés  étaient  pu- 
bliés par  les  robespierristes  ;  eh  bien  «  d'après  les  ren* 
seignements  que  j  ai  pris,  Lacroix  n'était  point  robes* 

Sierriste;  c*esl  un  royaliste  et  un  coustitutionnel 
e  91.  Et  moi  aussi  je  pourrais  dire  comme  André 
Dumont  que,  dans  la  longue  mission  que  j'ai  rempliei 
je  n'ai  point  versé  de  sang  «  et  tes  Bulletinsi  qu'il  a 
salis  plusieurs  fois,  peuvent  nous  faire  juger  tous  les 
deux.  J'ai  eu  le  courage  de  diretioutementcequeje 
faisais^  et  je  rougirais  si  j'avais  eu  la  làohetë  de  dire 
que  J'ai  menti  pendfint  six  mois  a  ta  Convention  na- 
tionale. 

11  faut  que  le  gouvernemeat  Comprime  Us  terroristes 
et  les  royalistes  (vib  applaudissements);  mais  il  ne 
faut  pas  que  les  nommes  qui  ont  signé  les  pétitions 
à  Capet  et  à  Lafayette  viennent  ici  vous  applaudir 
lorsqu'ils  voudraient  vous  étouffer.  (Quelques  ap- 
plaudissei))ents.)  Et  certes,  lorsque  ce  premier  mou- 
vement de  réaction  aristocratique  sera  passé ,  vous 
verrez  que  le  peuple,  dégagé  des  royalistes  et  des 
hommes  qui  voulaient  que  les  bienfaits  de  la  révo- 
lution ne  fussent  que  pour  eux,  rétablira  lui-même 
Tordre  et  la  tranquillité.  Il  faut  que  le  gouverne- 
ment, en  maintenant  la  liberté  de  la  presse,  garan- 
tisse aussi  la  liberté  des  opinions;  car,  tant  que  je 
verrai  les  aristocrates  imposer  silence  aux  patriotesi 
et  leur  dire  :  Si  tu  parles,  je  te  dénonce  au  comité  de 
sflreté  générale,  je  dirai  que  la  terreur  n'a  fait  que 
changer  de  nom.  (Violents  murmures.)  Les  sans*- 
culottes  ne  peuvent  pas  jouir  de  la  liberté  de  la  presse 
peur  répondre  A  leurs  nombreux  calomniateurs;  et 
nous,  qui  n'avons  pas  les  trésors  de  la  Cabarrusi 
nous...  (Grand  bruit.) 
Ttllieii  réclame  avec  force  la  parole. 
LiYAMioii  (de  la  Sarthe)  :  fit  moi  aussi  je  de- 


Plusieurt  voix  :  A  bas  l'assassin  de  Phélippeauxl 

L'assemblée  reste  pendantquelquetempKdansIft 
plus  grande  agitation. 

buoEM  :  Je  conclus,  etje  dis  que  le  çouveriieroent 
doit  favoriser  également  la  liberté  de  la  presse  et 
celle  des  opinions  dans  les  sections. 

Tallien  :  Je  demande  la  parole  pour  faire  cesser 
ces  débats  indignes  de  la  Convention,  indignes  de  la 
majesté  du  peuple.  J'ai  été  inculpé  <  je  demande  à 
répondre  pour  l'honneur  de  la  Convention.  (On  ap^ 
plaudit.) 

Levasseur  (de  la  Sarthe)  crie  dans  le  btult. 

La  Convention  accorde  la  parole  à  Tallien.  (Les 
applaudissements  redoublent.) 

Barras  :  Je  demande  la  parole  pour  Une  motion 
d'ordre.  Il  faut  qu'on  s'explique  absolument.  (Nou<« 
veaux  applaudissements*) 

La  Convention  se  lève  par  un  mouvement  unanime 
et  spontané. 

Barras  s^élance  à  la  tribune.  (On  applaudit.) 

Baobas  :  Oui  I  il  faut  qu'on  s'explique  absolument; 
il  faut  faire  cesser  cette  lulte  indécente  et  scanda- 
leuse; il  faut  que  la  Convention  s'occupe  du  bon- 
heur du  ppuplci  et  non  de  quelques  scélérate  qui  ont 
intérêt  a  empêcher  ses  délibérations,  et  qui  vou- 
draient rétablir  le  terrorisine.  (On  anpiaudit.)  Non, 
le  terrorisme  ne  sera  point  rétabli.  (Vifs  applaudis^ 
sementsO  Est-ce  avec  la  liberté  de  la  presse  que 
nous  le  rétablirions?  Parlez,  vils  histrions,  est-ce 
avec  la  liberté  de  la  presse? 

Dtjnfesi  :  C'est  en  comprimant  les  royalistes. 
Une  voix:  Duhem  se  reconnatt-il  pour  un  histrion? 

BAiiaAa  :  Chaque  jour  on  vomit  Ici  des  injureij 
contre  les  uns  et  contre  les  autres.  Eh  bien,  il  faut 
consacrer  aux  explications  cette  séance,  qui  ne  sera 
pas  perdue  pour  la  république.  Il  faut  que  je  saolic 
jusqu'à  quel  point  sont  fondées  ces  aëclàmations 
atroces dnommes  ivres  la  plupart  dû  temps.  (On 
applaudit.)  11  faut  que  je  sache  si  Tallien  est  un  con- 
spirateur,  si  Fréron  est  un  conspirateur;  il  faut  que 
Je  sache  si  ceux  qui  les  accusent  ne  sont  pas  eux^ 
mêmes  des  conspirateurs.  (On  applaudit.)  Je  de- 
mande que  Tallien  soit  entendu ,  et  qu'après  la  pa- 
role soit  accordée  à  Laignelot  et  A  Auguls  ^  qui  ont 
des  choses  très-importantes  à  vous  dire. 

TallIeti  :  Il  en  coAte  à  un  représentant  du  peuple 
d'entretenir  de  lui  une  grande  assemblée.  Depuis 
longtemps  je  me  suis  imposé  silence ,  soit  par  nwi 
discours,  soit  par  mes  écrits.  J^.al  fait  ù  la  j)atric  te 
sacrifice  de  mon  amour-propre  blessé',  mais  depuis 
quelques  jours  les  calonmies  tes  plus  atroces  ont 
retenti  dans  cette  enceinte.  Je  mets  un  terme  â  inoa 
silence,  parce  quMI  deviendrait  un  aveu  tacite  des 
horreurs  qis'on  déverse  sur  un  représentant  du  f)eu- 
pte.  On  a  parlé  dans  cette  assemblée  d'une  femme... 
Je  n'aurais  pas  cru  qu'elle  dût  occuper  les  délibéra- 
tions de  la  Convention  nationale.  On  a  parlé  de  la 
lille  dcCabarrus.  Ëh  bien,  Je  le  déclare,  au  milieu  de 
mes  collègues,  aU  milieu  du  peuple  qui  m'entend, 
cette  iemme  est  mon  épouse.  (On  applaudit  à  plu- 
sieurs reprises.) 

Tout  â  l'heure  J'ai  remaqué  un  des  assassins  de 
Phélippeaux  qui  demandait  a  venir  m'accuser.  Il  n'a 
pu  pardonner  rafTront  dont  il  a  couvert  le  visage  de 
cette  malheureuse  et  illustre  victime.  Il  voulait  sans 
doute  répéter  ici  ce  qu'il  a  dit  à  2a  tribune  des  Jaco- 


lOS 


bins.  Qnant  à  la  femme  dont  on  a  voulu  occuper 
rassemblée,  je  la  connais  depuis  dix-huit  mois;  je 
Tai  connue  à  Bordeaux  :  ses  malheurs,  ses  vertus  me 
la  Grent  estimer  et  chérir.  Arrivée  à  Paris  dans  des 
temps  de  tyrannie  et  d*oppression,  elle  fut  oersécu- 
tée  et  jetée  dans  une  prison.  Un  émissaire  au  tyran 
lui  fut  envoyé  et  lui  dit  :  «Ecrivez  que  vous  avez 
connu  Tallien  comme  un  mauvais  citoyen)  alors  on 
vous  donnera  la  liberté  et  un  passeport  pour  aller 
dans  les  pays  étrangers.*  Elle  repoussa  ce  vil  moyen, 
et  n'est  sortie  de  prison  que  le  12  thermidor,  et  Ton 
a  trouvé  dans  les  papiers  du  tyran  une  note  pour 
renvoyer  à  Téchafaud.  Voilà,  citoyens,  voilà  celle 
qui  est  mon  épouse.  (On  applaudit  à  plusieurs  re- 
prises.) Loin  de  moi  Vintention  d*inculper  mes  col- 
lègues. Je  sais  que  presque  tous  sont  des  hommes 
vertueux,'  mais  je  sais  que  quelques-uns,  qui  crai- 
gnent pour  eux  la  guillotine  qu'ils  avaient  suspendue 
sur  la  tête  de  tous  les  citoyens,  voudraient  la  dt-toiir- 
nerà  force  d'intrigues  et  de  scélératesse;  je  sais  qu'ils 
voudraient  rétablir  la  tyrannie  pour  échapper  à  la 
vengeance  nationale.  Eh  bien ,  moi ,  qui  dans  cette 
journée  mémorable  du  9  thermidor  ai  contribué  avec 
vous  à  abattre  le  tyran,  je  déclare  que  si  on  voulait 
rétablir  une  nouvelle  tyrannie,  je  monterais  à  la  tri- 
bune pour  y  déployer  avec  vous  le  même  courage  et 
la  même  énergie  :  voilà  ma  dernière  réponse  aux 
calomnies.  Allez  dans  les  comités,  allez  dans  les  pri- 
sons.... Vous  m*cntendez,  vous  qui  êtes  là  haut 

Allez  dans  les  prisons;  vous  y  verrez  les  Julien,  les 
Demayau,  les  Senart,  qui  tramaient  ma  perte. 

Oui,  citoyens,  un  individu  m'avait  écrit  que, 
81  je  voulais  lui  faire  obtenir  sa  liberté,  il  m'indique- 
rait une  correspondance  tracée  dans  les  prisons  pour 
m'inculper.  J'ai  renvoyé  la  lettre  au  comité  de  sû- 
reté générale,  en  l'invitant  è  saisir  les  pièces  qui  pou- 
vaient m'inculper.  Au  reste,  je  suis  prêt  à  aller  dans 
les  comités,  en  présence  de  tous  mes  collègues;  je 
suis  prêt  a  leur  demander  l'examen  le  plus  rigou- 
reux de  ma  conduite;  je  ne  redoute  pas  la  publicité. 

Tallien  descend  de  la  tribune  au  milieu  des  applau- 
dissements. 

Cambon  :  Je  demande  la  parole. 

Le  Président  :  Elle  est  à  Laignelot. 

Cambon  :  C'est  pour  un  bit. 

Barbas  :  Donnez  la  parole  à  Cambon  ;  nous  vou- 
lons tout  savoir. 

Cambon  :  On  a  désigné  une  place  où  j'étais.  {Plu- 
sieurs voix  :  On  ne  t'a  pas  nommé.)  Le  fait  révélé 
par  Tallien  est  vrai.  Avant-hier  j'ai  trouvé  chez  moi 
des  papiers  venant  du  Luxembourg,  et  qui  m'étaient 
adressés  par  des  hommes  qui  me  sont  inconnus.  On 
ne  dira  pas  que  j'ai  des  liaisons  avec  les  terroristes. 
J'ai  pour  moi  des  époques  marquantes,  le  10  mars, 
le  20  février,  le  2  septembre.  J  ai  parlé  avec  véhé- 
mence pour  les  principes  et  pour  la  liberté  de  la  re- 
Srésentation  nationale.  On  a  cru  que  je  pouvais  faire 
es  dénonciations,  conter  des  histoires  à  la  Conven- 
tion, provoquer  un  décret  d'accusation  contre  mes 
collègues.  Un  nommé  Senart,  que  je  ne  connais  pas, 
m'a  envoyé  des  pièces  où  j'ai  trouvé  un  tissu  de  ca- 
lomnies contre  Tallien.  Il  serait  indigne  de  moi  de 
ne  pas  faire  cet  aveu  dans  la  Convention. 

Garnier  (de  Saintes)  :  Senart  est  un  conspirateur. 

Cambon  :  Les  faits  sant  dénués  de  toutes  preuves, 
de  toute  vraisemblance;  voilà  ce  que  je  sais.  L'accu- 
sation n'existe  pas;  et  si  l'on  veut  me  faire  le  cham- 
pion  

JuuEN  (de  la  Drômc)  :  Je  prie  Cambon  de  d'frla- 
rer  si  mon  fils 


Legbndrb  :  Je  demande  la  parole  apràs  CamboDi 

pour  satisfaire  Julien. 

Cambon  :  Sous  tous  les  régimes  on  a  tenté  de  me 
faire  jouer  des  rôles;  lorsqu'on  a  fait  tomber  sous  le 
glaive  de  la  loi  des  hommes  qui  peut-être  n'avaient 
pas  mérité  cette  vengeance,  j'avais  des  pièces  que 
sous  le  règne  de  la  terreur  on  voulait  me  forcer  d'ap- 
porter. J'ai  refuse  ;  je  l'ai  fait  avec  courage,  avec  une 
violence  qui  pouvait  ne  pas  convenir  a  un  législa- 
teur, mais  avec  dévouement,  comme  j'ai  fait  dans 
tous  les  postes  qui  m'ont  été  confiés. 

Je  suis  représentant  du  peuple,  j'ai  le  droit  de  dire 
toute  ma  pensée.  L'assemblée  s'est  souvent  plainte 
de  ce  que  ie  parlais  de  moi;  mais  n'est-il  pas  affreux,, 
pour  un  nomme  qui  n'a  rien,  d'entendre  dire  qu*il 
possède  une  immense  fortune  ;  que  les  voleurs  sont 
payés  par  lui,  que  voler  c'est  eamboniser?  N'est-ce 
pas  en  alta(]uant  son  honneur  que  Ton  parvient  à 
perdre  un  citoyen?  Si  l'on  a  des  preuves,  qu'on  les. 
produise.  Je  suis  aussi  loin  du  fédéralisme  que  du 
terrorisme. 

Legendre  :  11  y  a  environ  deux  décades,  un  nommé 
Dulac  se  trouvait  détenu  dans  la  maison  de  santé, 
rue  ci-devant  Notre-Dame-des-Champs,  avec  Julien , 
Demayau  et  Senart.  Ces  derniers  avaient  avisé  de 
taire  une  dénonciation  contre  Tallien.  Dulac  écrivit 
à  Tallien  :  •  Si  lu  veux  me  faire  mettre  en  liberté,  je 
te  révélerai  ce  qui  se  passe  ici  contre«toi.  •  Tallien 
remit  la  lettre  à  Rewbell,  président  de  la  Convention 
et  membre  du  comité  de  sûreté  générale.  11  était  dé- 
montré qu'on  devait  écrire  à  Cambon  et  à  la  Con- 
vention. Voici  quelle  fut  mon  opinion  sur  cette 
intrigue,  opinion  qui  fut  partagée  par  mes  collègues. 
Je  dis  :  On  veut  profiter  des  mouvements  violents 
de  Cambon,  qui  est  peut-être  aigri  par  les  mots  lan- 
cés contre  lui  dans  les  journaux  de  Tallien  et  de 
Fréron  ;  on  veut  profiter  de  sa  franchise  pour  lui 
faire  lire  une  pièce  d'après  laquelle  on  espère  accu- 
ser un  représentant  du  peuple.  Nous  avons  fait  venir 
Dulac;  il  a  dénoncé  comme  instigateur  de  cette 
manœuvre  le  cousin  d'un  de  nos  collègues,  que  je 
ne  nommerai  pas.  {Quelques  voix  :  C'est  le  cousin 
de  Barère.)  Eh  bien,  oui,  c'est  lui.  Je  ne  voulais  pas 
le  nommer,  parce  que  Barère  est  sous  une  espèce 
d'accusation.  Dulac  nous  apporta  une  pièce  écrite 
tout  entière  de  la  main  de  Julien  fils,  et  cette  pièce 
est  une  diatribe  contre  Tallien,  contre  le  gouverne- 
ment, contre  la  Convention.  Voilà  ma  réponse  à. 
Julien.  Le  comité  a  jugé  à  propos  de  renvoyer  ce 
Dulac  dans  une  autre  prison.  Il  a  méprisé  cet  indi- 
vidu, qui  voulait  acheter  sa  liberté  par  une  bassesse 
qui  répugne  à  tout  républicain. 

Qu'il  me  soit  permis  de  le  dire  à  la  Convention  : 
depuis  quelques  jours  on  a  pris  la  parole  pour  Toccu- 
ptr  de  tel  ou  tel  individu,  de  telle  ou  teHe  femme; 
eh  !  citoyens,  est-ce  là  la  dignité  de  la  Convention? 
(On  applaudit  à  plusieurs  reprises.)  Ou  est  allé  jus- 
qu'au point  d'effrayer  plusieurs  de  nos  collègues  en 
leur  disant  que  les  comités  s'occupaient  de  pièces 
pour  faire  des  dénonciations.  Je  déclare  que  vos 
comités  sont  décidés  à  se  serrer  pour  ôter  du  milieu 
de  nous  cet  instrument  de  mort  qui  a  trop  longtemps 
pesé  sur  la  république.  Moi  aussi  j'ai  cru  devoir  dé- 
noncer trois  nommes;  je  le  ferais  encore  parce  que 
je  les  crois  coupables;  mais  nos  collègues  qui  se  sont 
exaspérés  contre  la  clôture  des  Jacobins  devraient 
nous  le  pardonner,  car  nous  avons  travaillé  pour 
eux.  Si  nous  ne  les  avions  pas  fermés,  ils  étaient  en 
révolte;  le  sang  innocent  aurait  coulé,  et  sans  doute 
ils  ne  veulent  pas  faire  couler  le  sang  innocent.  Je 
rends  justice  à  tous  les  membres  des  comités  ;  il  n*y 
en  a  pas  un  qui,  s'il  prenait  la  parole  pour  dénoncer 


103 


iujusteroent  ses  collègues,  ne  fût  sur-le-champ  rap- 
pelé à  l*ordre.  Nous  sommes  décidés  à  écarter  toutes 
tes  passions  personnelles.  Au  lieu  donc  de  nous  oc- 
cuper des  individus ,  de  nous  occuper  des  femmes , 
occupons-nous  de  Farrivage  des  subsistances.  (On 
applaudit  )  Ne  travaillons  qu'à  Tintérét  général ,  et 
laissons  aller  au  spectacle  celui  qui  ne  trouble  pas 
l'ordre  public. 

AuGUis  :  Je  n*emp1oierai  pas,  pour  répondre  à 
rinterpellation  (jui  m*a  été  faite,  le  langage  des  pas- 
sions et  des  haines  ;  je  me  contenterai  de  citer  des 
faits. 

Oui,  il  a  existé  un  projet  de  détruire  la  Conven- 
tion. Ce  projet  se  rattachait  du  nord  au  midi  ;  il  fut 
conçu  par  des  hommes  qui  ne  respirent  que  le  sang, 
qui  ne  parlent  de  vertu  que  pour  commettre  en  son 
nom  les  crimes  les  plus  exécrables.  (Vifs  applau- 
dissements.) J'ai  vu  qu'on  voulait  établir  des  gou- 
vernements particuliers;  et  je  me  rappelle  qu^après 
avoir  répété  six  fois,  dans  une  Société  où  la  scéléra- 
tesse avait  fait  de  grands  progrès,  vive  la  Conven- 
iion!  on  ne  me  répondit  que  par  ces  mots  :  Vivent 
let  Jacobins!  Les  hommes  atroces  dont  je  vous  parle 
disaient  :  Nous  irons  à  Paris;  en  disant  du  mal  d*un 
tel  et  d'un  tel,  nous  trouverons  des  protecteurs; 
nous  occasionnerons  ainsi  un  désordre  qui  ne  peut 

Sue  nous  être  favorable.  Plusieurs,  en  effet,  sont 
ans  cette  commune  sous  des  noms  étrangers;  j'en 
reconnais  tous  les  jours.  Ce  sont  eux  qui  soufflent, 
qui  concertent  ces  scènes  scandaleuses'  dont  nous 

fémissons  chaque  jour,  ces  débats  tumultueux  où 
on  parle  sans  cesse  du  bonheur  du  peuple  sans  en 
avoir  la  pensée  dansle  cœur!  (Vifs  applaudissements.) 
Si  des  nommes  qui  prononcent  à  chaque  instant  le 
nom  de  Brutus  en  avaient  les  vertus,  ils  se  tueraient 
eux-mêmes,  car  ils  sont  les  premiers  assassins  de  la 
république.  (Les  applaudissements  redoublent.) 

Laigtielot  :  Voyez  avec  quel  art  perfide  des  hom- 
mes, ou  tremblants,  ou  coupables,  jettent  l^r  division 
au  milieu  de  nous!  (Applaudissements.)  Le  comité 
de  sûreté  générale  savait  dès  hier  que  la  scène  qui 
vient  de  se  passer  devait  avoir  lieu  ;  et  pour  le  peu 
que  vous  vouliez  ouvrir  les  yeux,  vous  verrez  qu'elle 
était  commandée.  (Des  applaudissements  éclatent  de 
toutes  parts.) 

Plusieurs  membres  :  CesX  vrai  ;  voyez  les  femmes 
qui  garnissent  cette  tiibune. 

**'  :  Ehbien,  dignes  soutiens  de  Duhem,  vous  res- 
tez muettes? 

Laignelot  :  Je  le  demande,  quels  sont  les  roya- 
listes ,  ou  de  ces  hommes  qui  vont  paisiblement  dans 
leurs  sections,  qui  y  émettent  avec  décence  une  opi- 
nion patriotique,  qui  font  honneur  à  leurs  affaires, 
ne  tuent,  ne  volent  ni  ne  pillent  personne,  ou  de  ces 
hommes  à  bonnet  rouge.  Jacobins  forcenés,  qui 
entourèrent  cette  Société  et  la  commune  scélérate 
dans  la  nuit  du  9  thermidor,  qui  vont  dans  les  sec- 
tions lepoignard  à  la  main,  pour  assassiner  les  hom- 
mes qui  ne  veulent  pas  de  royalisme,  mais  qui  ne 
veulent  pas  davantage  de  terrorisme!  Cela  est  ar- 
rivé hier  soir  dans  la  section  de  Bonne-Nouvelle;  le 
président  et  les  secrétaires  ont  failli  être  assassinés 
par  ces  scélérats. 

Real  :  Ce  n'est  pas  seulement  dans  les  sections 

2u*on  menace  du  poignard  les  hommes  qui  détestent 
paiement  le  royalisme  et  le  terrorisme  ;  on  en  a 
tiré  ici  dans  le  salon  de  la  Liberté. 

Babbas  :  Oui,  et  contre  un  de  nos  collègues. 

Laignblot  :  Qu'on  me  dise  auels  sont  les  roya* 
listes  et  quels  sont  les  patriotes  dans  cette  assemblée. 
Si  j'émettais  ma  pensée,  je  dirais  que  je  vois  les  pa- 


triotes dans  la  majorité  de  la  Convention ,  qui  vou- 
drait sans  cesse  s'occuper  du  bonheur  du  peuple,  et 
3ui  en  est  sans  cesse  empêchée  par  les  scènes  scan- 
aleuses  que  l'on  excite  ici.  (Applaudissements.)  Et 
si  j'osais  accuser  quelquespersonnes,  je  dirais  oue. 
je  vois  les  royalistes  dans  ces  hommes  qui  ont  uo- 
miné  la  France,  qui  ont  versé  le  sang,  qui  ont  pro- 
tégé les  dilapidateurs  de  la  fortune  punlique,  qui  ont 
fait  venir  ici,  pour  les  défendre  et  les  aider,  des  scé- 
lérats que  nos  collègues  ont  destitués,  des  scélérats 
3ui  n'ontjamais  voulu  rendre  de  comptes,  qui  ont 
ressé  des  échafauds  dans  tous  les  départements,  des 
hommes  enfin  qui  sont  couverts  du  mépris  public. 
(Vifs  applaudissements.) 
Gaston  :  Nom  me- les! 

•••  :  C'est  inutile,  ils  doivent  se  reconnaître. 
Laignelot  :  Dans  quel  moment  ces  agitations  ont- 
elles  lieu  ici  et  dans  les  sections?  C'est  lorsque  les 
trois  comités  ont  déclaré  qu'il  y  avait  lieu  à  exa- 
miner la  conduite  d'hommes  que  je  ne  préjuge  pas 
coupables.  (Applaudissements.)  S'ils  sont  innocents, 
il  est  beau  pour  eux  de  se  présenter  devant  le  peu- 
ple avec  tranquillité  et  sans  exciter  de  secousses;  il 
serait  doux  pour  moi  d'avoir  été  accusé  injustement, 
caria  vertu  n'estjamais  plus  brillante  que  lorsqu'elle 
a  été  opprimée.  (Nouveaux  applaudissements.)  Pour- 
quoi donc  toujours  des  trouoles?  pour  avilir  la  Con- 
vention, pour  faire  dire  au  peuple  qu'il  n'y  a  plus 
ici  ni  dignité  ni  majesté,  qu'il  n'y  a  plus  de  repré- 
sentation nationale.  Vos  trois  comités,  qui  ne  con- 
naissent que  les  principes,  et  où,  j'ose  le  dire,  on 
peut  compter  quelques  sages;  vos  trois  comités  ont 
gémi  d'être  obligés  de  déclarer  qu'il  y  avait  lieu  à 
examiner  la  conduite  de  quatre  d'entre  nous;  nous 
voudrions  tous  nous  embrasser  comme  des  hommes 
irréprochables;  mais  la  Convention  doit  être  pure 
comme  l'astre  du  jour,  et  il  faut  que  ceux  qui  sont 
accusés  passent  par  le  creuset  de  l'épuration.  Je  de- 
mande que  la  Convention  s'élève  à  sa  vraie  hauteur, 
qu'elle  ne  souffre  plus  ici  de  dénonciation  vngue,  ni 
que  ses  membres  soient  insultés  ;  je  demande  que  le^ 
règles  de  police  soient  sévèrement  observées,  et  que, 
lorsqu'un  membre  se  permettra  des  outrages  envers  la 
Convention  ou  envers  un  de  ses  collègues,  comme 
cela  est  arrivé  il  y  a  quelques  jours,  il  soit  envoyé  à 
l'Abbaye. 

Les  insultes  et  les  outrages  sont  aujourd'hui  la 
tactiaue  d'hommes  qui  n'ont  plus  d'autre  ressource, 
et  il  faut  être  très-sévère  à  leur  égard.  (Applaudis- 
sements.) Le  comité  de  sûreté  générale  veille,  et, 
s'il  n'y  avait  pas  quelques  hommes  auxquels  il  ne 
peut  atteindre,  il  y  a  longtemps  que  les  troubles  de 
Paris  seraient  finis  ;  maisle  caractère  dont  ces  hom- 
mes sont  revêtus  enchaîne  son  zèle. 

André  Dumont  :  Je  vais  répondre  aux  imputa- 
tions de  Duhem.  Je  lui  déclare  d'abord  qu'il  n'est 
personne  qui  puisse  m'accuser  d'avoir  fait  couler  le 
sang,  et  c'est  la  consolation  de  mon  âme.  (Applau- 
dissements.) 

Duhem  me  reproche  d'avoir  sali  le  Bulletin,  parce 
que  j'ai  attaqué  le  fanatisme  par  l'ironie.  J'ai  cru  et 
je  crois  encore  qu'il  valait  mieux  employer  le  ridi- 
cule quela  guillotine.  (Nouveaux  applaudissements.) 
Vous  me  demandez  encore  pourquoi  j'ai  trompe 
la  Convention;  vous  allez  l'entendre  à  votre  grand 
regret,  vous  qui  m'interpellez.  On  avait  envoyé  dans 
le  département  du  Nord,  où  il  y  avait  déjà  des  re- 

Î présentants,  Saint-Just  et  Lebas,  avec  pouvoir  de 
aire  arrêter  tous  les  riches  et  tous  les  nobles  pour 
les  guillotiner.  Ainsi  ils  allaient  aider  le  tribunal 
féroce,  dont  vous  aviez  ordonné  la  destruction,  à 
commettre  tous  les  assassinats,  tous  les  massacres 
qui  avaient  été  résolus.  On  écrivit  à  tous  les  agents 


104 


nalionauideBdistricU  que  je  parcourais  d'envoyer 
la  liste  de  tous  ceux  qui  payaient  au-dessus  de  20  h- 
Très  de  contribution.  (t.*assemblée  manifeste  un 
mouvement  d*horreur.)  On  disait  en  même  temps 
aux  agents  nationaux  de  ne  pas  avoir  égard  aux  ob- 
servations des  représentants  du  peuple  qui  se  trou- 
veraient sur  leur  territoire,  et  de  ne  pas  leur  donner 
connaissance  des  ordres  qu'ils  avaient  reçus.  On  fit 
usage  de  cette  liste;  ceux  dont  elle  portait  les  noms 
fiu'ent  arrêtés  et  conduits  à  Arras.  Lorsque  je  les  vis 
arriver  en  foule,  j'écrivis  icique  jelenaisJc  fil  d'une 
grande  conspiration  ;  que  j'allais  prier  Lebon  de 
m'cuvoyer  les  pièces  pour  les  mettre  tous  en  juge- 
ment. Lebon,  comme  j'en  étais  persuadé,  ne  m*a 
point  envoyé  de  pièces,  et  les  hommes  vivent  encore. 
(Vifs  applaudissements.) 

Je  ils  encore  plus;  pour  déjouer  les  mesures  que 
Saint-Just  et  Lebas  prenaient  dans  les  six  départe- 
ments du  Nord ,  j'orugnnai  que  les  femmes  et  les  en- 
fants de  ceux  qu'ils  avaient  fait  arrêter  seraient 
arrêtés  avec  eux ,  parce  que  fêtais  sûr  par  là  d'em- 
pêcher les  massacres;  j'étais  sûr  que  la  Convention 
ne  souffrirait  pas  qu'on  guillotinât  des  femmes  et 
des  enfants.  Les  faire  soupçonner  d'avoir  conspiré 
avec  leurs  pères,  c'était  prouver  l'innocence  de  ces 
derniers;  car,  en  les  accusant  tous  du  même  crime, 
c'était  évidemment  les  décharger  tous  ;  des  enfants 
ne  pouvaient  pas  être  suspectés  de  conjuration. 

Je  le  dis  :  j'ai  fait  arrêter  beaucoup  de  monde,  et 
je  suis  persuadé  que  ce  sont  ceux  que  j'ai  fait  arrêter 
qui  me  défendront  partout,  parce  que  je  les  ai  sau- 
vés. En  pouvez-vous  dire  autant,  vous  autres  qui 
m'accus(*z?  (Applaudissements.) 

Citoyens,  voulez- vous  eu  Unir  avec  vos  ennemis; 
soyez  sévères  à  leur  égard*  Croyez  au'on  fera  tout 
pour  ramener  le  régime  passé;  car  il  était  doux  pour 

Quelques  hommes  ue  commander  à  toute  la  France, 
e  se  coucher  chaque  jour  avec  l'idée  que  leur  nuis» 
sance  enverrait  le  lendemain  cent  personnes  à  Técha- 
fuud.  Ces  hommes  tremblent  aujourd'hui  ;  ils  vou- 
draient bien  ne  pas  avoir  à  craindre  pour  eux  ;  mais 
il  ne  fallait  pas  qu'ils  se  rendissent  coupables.  (Vifk 
applaudissements.) 

J'ai  développé  ma  conduite  ;  j'attends  maintenant 
mes  dénonciateurs.  Je  demande  que  la  Convention 
décrète  que  celui  qui  insultera  son  collègue  sera 
envoyée  l'Abbaye. 

Cette  proposition  est  adoptée  au  milieu  des  ap- 
plaudissements. 

BnÉARD  :  Vous  venez  de  prendre  une  mesure  ar- 
demment désirée  depuis  longtemps  par  tous  ceux  qui 
veulent  le  bien  de  leur  pays;  mais  il  faut  tenir  à  sa 
stricte  exécution,  sans  quoi  votre  but  est  manqué. 

Personne  ne  nirra  qu'il  existe  plus  d'un  système 
pour  détruire  la  liberté.  Le  fanatisme,  en  se  cachant, 
cherche  à  exciter  les  passions;  le  royalisme  n'a  pas 
perdu  tout  espoir;  le  terrorisme  en  conçoit  aujour* 
d'hui  plus  qu'autrefois.  J'entends  par  terroristes 
ceux  qui  ont  abusé  de  leurs  pouvoirs  ;  qui,  au  nom 
du  patriotisme,  ont  tué  et  volé  leurs  concitoyens. 

On  a  proposé  des  mesures  qui  ne  seront  bonnes 
qu'autant  qu'elles  seront  limitées  par  la  justice  et  la 
prudence;  il  ne  faut  pas  qu'un  honnête  homme,  fût- 
il  sAul  au  milieu  de  cinq  cents  brigands,  soit  con- 
fondu avec  eux.  Les  uns  nous  disent  ((ue  les  patriotes 
sont  vexés,  et  ils  en  concluent  que  le  système  actuel 
ne  vaut  rien  ;  ils  prétendent  que  nous  n'avons  abattu 
le  despotisme  que  pour  tomber  dans  le  modéran- 
tîsme;  il  faut  bien  aéfînir  ce  qu'on  entend  par  ce 
mot.  Un  homme  modéré  est  un  nomme  respectable, 
parce  quMl  est  saj;e.  (Applaudissements.)  Mais  le 
mpdâraotisme  qui  porta  a  |a  [pusillanimité  est  un 


vice  radical  dans  le  gouvernement  républicain.  (Non- 
veaux  applaudl8sements.)Je  pense  aussi  qu'on  cher- 
che à  exciter  (Aift  mouvements,  pour  que  les  voleurs 
et  les  grands  coupables  échappent  i  la  justice.  Beau- 
coup de  scélérats  sont  dans  Paris,  mais  II  peut  y 
avoir  aussi  des  braves  gens  qui  n'ont  pas  abusé  de 
leurs  pouvoirs ,  qui  n'ont  été  que  les  témoins  souf- 
frants des  horreurs  qu'on  a  commises.  11  ne  faut  pas 
envelopper  ces  gens  dans  la  masure  qui  doit  frapper 
les  ennemis  publics, 

Je  sais  que  tous  les  jours  on  a  cherché  à  nous  ar- 
mer les  uns  contre  les  autres;  des  gens,  en  passant 
près  de  nous  dans  les  rues,  rapportent  des  propos 
tenus  par  quelques-uns  de  nos  collègues.  Ces  propos 
nous  aigrissent,  et  nous  venons  ici  avec  des  impres- 
sious  défavorables.  Je  pense  qu'il  faut  que  le  comitf 
de  sûreté  générale  ne  se  donne  aucun  repos  jusqu'à 
ce  qu'il  ait  renvoyé  dans  leurs  communes  tous  Isa 
gens  justement  «uspects  qui  n'ont  point  aflbire  ici. 

BouBDOfi  (de  roise)  !  J'appuie  la  proposition  de 
Bréard.  Je  ne  parlerai  pas,  comme  un  des  préopi- 
nants, des  modérés,  des  pétitionnaires,  des  signa- 
taires; tout  cela  ne  dévoile  qoe  Penvie  de  semer  la 
dissension.  (Applaudissements.)  Je  dirai  à  la  Con- 
vention :  Ne  prenons  pas  des  mesures  injustes,  car 
nous  ferons  des  mécontents.  Flons-nons  au  comité 
de  sûreté  générale;  il  fera  la  police  avec  courage,  et 
tous  les  bons  citoyens  l'aideront.  Ne  voyons  dans  la 
république  qiie  des  bons  et  des  méchants.  Si  nous 
avons  besoin  de  quelques  pouvoirs  de  plus,  nous  les 
demanderons  à  la  Convention,  qui  ne  nous  les  refu- 
sera pas.  Je  demande  l'ordre  du  Jour,  mptivé  sur 
l'existence  de  la  loi. 

La  proposition  de  Bourdon  est  décrétée* 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

N.  B.  Dans  la  séance  du  12,  la  Convention  a  dis* 
enté  le  projet  de  décret  présenté  par  JohaqnoL  Plu- 
sieurs articles  ont  été  décrétés. 


LIVRB8  DIVEBS. 

Les  Loisirs  utiles,  renfermant  deux  anecdotes  :  LinviiU,  «a 
te4  Plaisirs  de  ia  Vertu;  Eugénie,  eu  Suites  funestes  d'une 
première Jnute;  3  vol.  in-lS,  avec  figurei,  par  le  oitojeD 
Daroaud.  Prit  :  9  liv.  Parii,  chef  I<«p0lit,  librairo,  qoai 
des  Augustins,  n"  33. 

Ce  nouvel  ouvrag*  eu  oileyen  Darnand,  si  connu  dam  l« 
genre  leBtiinfiQial,  vous  parati  devoir  être  In  non-seulement 
ovcc  rintérct  qi|*ii|#pire  ordinairement  cette  aorte  de  pro- 
ductions, mais  avec  fruit  pour  les  bonnes  monirs,  qni  nesotl 
p»s  moins  respectées  dan^  les  Loisirs  uUtei  que  dans  les  aor  * 
très  romans  du  ipéme  auteur. 

Le  titre  général  de  cet  ouvrage  semble  avertir  que  le  ci- 
toyen Darnaud  eo  a  fait  un  cadre  susceptible  d^offrir  un  non» 
bre  indéterminé  d*anecdotcs,  et  qu'il  se  propose  d'en  pu- 
blier de  Bouvelles  pour  faire  seitei  celles  que  nous  anoonceiis. 

V*  Instructions  tirées  des  exemples  des  mnlmmstx,  mn  U$ 
devoirs  de  la  jeunesu),  i  Tusagc  deséeoles  primaires;  aoivlee 
d'observations  «ur  les  avantages  de  la  république;  ue  voluosa 
in>f8,  avec  figures.  Prix  :  !h)  sous.  A  Paria,  c-hes  llsre^afla 
libraire,  rue  du  Gimetière-André-des-Arcs,  p«  9. 


PayemenU  à  la  Irësçrmt  mUitmaiê. 

Le  payenent  da  perpétuel  est  ouvert  pour  les  sli  pie- 
miers  mois;  il  sera  fait  à  tous  oeuy  qui  spnmt  portawi 
d'inscriniioos  au  grand  livre.  Celui  pour  les  routes  ▼laoèpas 
est  de  huit  mois  viii£rt  «t  un  Jours  de  VsPlKb  n93  (vlW 
slyley. 


GAZETTE  NATIOMLE  ..  LE  lONITEUR  UNIVERSEL. 

N^  104.  Quartidi  14  Nivosb,  Pan  3«.  (Samedi  3  Janvier  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ANGLETERRE. 

LoMdreSf  le  28  novembre,  —  Voici  le  précis  de  la  procé- 
dure .'x>olre  Tbomas  Hardy,  secrétaire  de  la  Société  de  cor- 
respondance, mis  en  accusation  avec  Jérémie  Joyce,  Jean 
Hom-Tooke,  Thomas  Hoierost,  Jean-A.  Bonoey,  Jean  Rich- 
ter,  Sleward-Kidd-Jean  Tlidwall  et  Jean  Baxter,  membres 
de  la  même  Société. 

(  Le  défont  d'espace  nous  a  empêchés  jusqu'à  présent  de 
foire  connaître  cette  procédure,  tellement  inléressante 
<Iu'oo  Ut  dans  les  papiers  anglais  que  pendant  son  instruc- 
tion elle  attirait  ezcluslTement  l'attention  publique.) 

Thomas  Hardy  et  ses  coaccusés  ont  été  traduits,  le  29 
octobre,  devant  une  commission  spéciale,  composée  du  lord 
chef  de  Justice  Evre,  du  chef  baron  Mac- Donald,  du  juge 
Baller,  du  baron  Hotbam  et  du  Juge  Grose. 

Les  jum  étalent  :  Thomas-Burk  d'Acton,  chef  du  jury  ; 
Tbomas  Wood»  marchand  de  charbon;  William  Frazer: 
AdamStammetz,  boulanger;  JeanCoonop.disUliateur;  Jean 
Mercer,  marchand  de  forine:  Thomas  Sayer,  distillateur  ; 
Bichard  Carrer,  écuyer;  Natbanicl  Stonard,  brasseur;  Jo- 
seph Nicol ,  fermier;  Jean  Carrigton,  écuyer,  brasseur  ;  Jo- 
seph Ainflis,  marchand  de  charbon. 

D'après  Vindictment  (acte  d'accusation)  porté  par  le  grand 
jury,  les  griefo  reprochés  aux  accusés  sont  : 

1*  D'avoir  formé  le  projet  de  troubler  traîtreusement  la 
paix  et  la  tranquillité  du  royaume ,  d'y  exciter  l'insurrection 
et  Ih  rébelUoa  et  la  guerre  contre  le  roi  ; 

2*  D'avoir  composé  divers  livres,  pamphlets  et  Adresses, 
pour  inviter  k  envoyer  des  députés  &  une  Convention  ; 

V  D'avoir  délibéré  sur  les  moyens  de  former  cette  Con- 
ventiODt  et  sur  le  lieu  où  elle  établirait  ses  séances  ; 

A*  De  s'être  occupés  des  moyens  de  se  procurer  et  de  faire 
fobriquer  des  armes,  pour  renverser  le  gouvernement  et 
dépoâer  le  roi. 

Les  prisonniers ,  placés  k  la  barre ,  sont  Interrogés  ;  tous 
plaident  mon  coupable. 

Après  quelques  plaintes  particulières  de  plusieurs  d'entre 
eox,  et  diverses  réclamations  sur  quelques  défauts  de  for- 
mes, le  procureur  général  exprime  le  vœu  des  accusés  d'être 
Jugés  séparément  H  demande  que  Tbomas  Hardy  soit  Jugé 
le  premier, 

La  Cour  l'ordonne  et  s'ajoome  au  mardi  suivant. 

Le  28,  Jour  fixé  ponr  la  continuation  du  procès,  Thomas 
Hardy  parait  à  la  baire.  Le  priqcipal  clerc  fait  lecture  de 
XimdMmeiU. 

Wood,  l'un  desjnrés»  ouvre  la  procédure  et  récapitule 
les  chefs  d'accusation. 

L'accusé  plaide  qu'il  n'est  coupable  d'aucun  des  foits  con- 
tenus dans  YindUimenU 

Le  procnreor  général  prend  la  parole  ensuite  au  nom  de 
la  Couronne,  et  prononce  un  discours  qui  dure  près  de  huit 
heures,  et  dont  voici  les  traits  les  plus  essentiels. 

•  Tant  que  les  machinations  que  je  dénonce ,  dit  le  pro- 
cureur général,  ont  été  renfermées  dans  certaines  bornes,  et 
ne  se  sont  point  élevées  à  un  point  fait  pour  alarmer,  le  public 
lésa  traitées  avec  mépris,  et  ne  s'est  point  occupé  de  par- 
venir à  les  découvrir.  Mais  bientôt  les  clubs  et  leurs  affilia- 
tions se  sont  tellement  accrus  chaque  jour,  qu'il  était  temps 
que  ceux  dont  le  devoir  est  de  veiller  à  la  tranquillité  pu- 
blique portassent  leur  attention  sur  eux  et  s'occupassent 
d'empêcher  le  mai  qui  se  préparait. 

«  Les  registres,  les  papiers  appsM'tcnant  à  la  Société  ont 
été  saisis;  le  conseil  privé  a  pris  connaissance  de  ces 
objets:  il  y  a  trouvé  les  Indices  d'une  des  plus  dangereuses 
conspirations,  qui  ne  tendait  à  rien  moins  qu'à  détrôner  le 
roi,  renverser  entièrement  la  constitution,  et  à  substituer  un 
•iM^llie  de  démocntie  dont  l'histoire  n'offre  aucmi  exemple 


parmi  les  nations  qui  ont  vécu  sous  cette  espèce  de  gonver- 
nement. 

<  On  a  voulu  essayer  d'assimiler  la  Convention  qu'on 
voulait  établir  à  celle  qui  s'est  tenue  en  1688,  mais  11  n'est 
pas  possible  de  faire  aucune  comparaison  entre  elles.  Aceilo 
époque,  Jacques  II,  par  ses  projets  pour  renverser  la  con- 
stitution, par  sa  fuite  et  son  abdication ,  avait  rendu  à  la  na- 
tion anglaise  son  droit  originel  de  se  choisir  un  nouveau  gou- 
vernement, ou  de  changer  entièrement  l'ancien. 

«  La  Convention  fit  choix  d'une  monarchie  limitée,  etôta 
à  la  postérité  la  faculté  d'exercer  le  même  droit.  La  cou- 
ronne a  été  transmise  à  Guillaume,  à  Marie,  et  à  jeurs  héri- 
tiers et  successeurs ,  à  certaines  conditions.  Tant  que  ces 
conditions  sont  remplies,  ils  ont  droit  à  l'obéissance.  • 

Le  procureur  général  s'attache  à  expliquer  ensuite  ce  que 
c'e^t  que  le  crime  de  trahison  :  Il  cite  un  grand  nombre  de 
passages  du  chef  de  justice  Haler  et  du  juge  Fauster,  pour 
prouver  que  le  prisonnier  est  dans  le  cas  d'être  accusé  de  ce 
crime;  il  développe  la  marche  tenue  par  les  Sociétés,  et 
passe  ensuite  ik  l'examen  des  papiers  trouvés  chez  TboiiMi 
Hardy. 

Les  témoins  sont  appelés. 

Erskioe  obtient  la  parole  pour  défendre  l'accusé. 

On  se  rappelle  que ,  dans  l'affaire  Thomas  Payne,  devena 
l'objet  de  la  persécution  de  Pitt  pour  des  écrits  hardis  et 
philosophiques,  Erskine  s'illustra  par  un  plaidoyer  plein  de 
force,  en  favetir  de  la  liberté  de  la  presse;  l'enthousiasme, 
qu'il  produisit  ù  Londres  éclata  par  des  acclamations  univer- 
selles ;  des  couronnes  furent  Jetées  à  l'orateur.  Le  peuple 
de  Londres  honora  dans  sa  personne  un  digne  appui  des 
principes  et  de  la  liberté.  Cet  éloquent  défenseur  ne  s'est 
pas  moins  distingué  dans  le  discours  qu'il  a  prononcé  pour 
la  justification  de  Tbomas  Hardy,  son  nouveau  client.  ISoue 
allons  faire  connaître  quelques  fragments  de  sa  défense. 
(  La  suiU  incessammenL) 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Bentabole» 

Rapport  fait  dam  la  séance  du  8  nivôse,  par  Mer'- 
lin  (de  Douai),  au  nom  des  comités  de  salut  pu^ 
6/tr,  de  sûreté  générale  et  de  législation,  sur  la 
réorganisation  du  tribunal  révolutionnaire^ 
suivi  du  décret  rendu  le  même  jour. 

Citoyens,  je  viens,  au  nom  de  vos  comités  de  salul 

fmblic,  de  législation  et  de  sûreté  générale ,  rappe- 
er  votre  attention  sur  un  objet  qui  a  déjà  été  o&rt 
à  vos  délibérations  ;  je  viens ,  en  exécution  de  votre 
décret  du  29  frimaire  dernier,  remettre  sous  vos. 
yeux  la  loi  que  vous  avez  décrétée  les  22  et  23  ther- 
midor, sur  Torganisation  du  tribunal  révolution- 
naire. 

J'ai  dès  lors  annoncé  à  Taristocratie  que  ce  n*étaii 
pas  pour  détruire  cette  institution  que  vos  comité 
avaient  préparé  le  projet  de  loi  que  je  vous  présen- 
tais en  leur  nom.  Loin  de  la  détruire,  vos  comités« 
fidèles  au  devoir  que  vous  leur  avez  prescrit,  ne 
sVtaient  étndiésqu'à  Taméliorer,  en  la  garantissant, 
par  des  règles  puisées  dans  Texpérience,  de  tout  ce 
qui  aurait  pu  ou  conduire  les  coupables  à  une  im- 
punité funeste  à  la  chose  publique,  ou  devenir  Tin- 
trument  de  la  tyrannie  dans  la  main  perverse  d*uo 
despote. 

On  avait  jusqu*alors  beaucoup  parlé  de  terreur; 
nous  avons  à  cette  époque  parlé  enfin  de  justice,  OU 
plutôt  nous  l'avons  réduite  en  pratique;  car  ils  en 
parlaient  aussi  ceux  qui  la  trahissaient  à  chaque  in- 

U 


10« 


stant ,  poar  démoraliser  le  peuple  et  le  replonger 
dans  Tetelavage  par  la  stupeur  universelle. 

Nous  n*avons  pas  perdu  de  vue ,  dans  cet  impor- 
tant travail,  que,  si  la  terreur  des  méchants  est  le  si- 
gnal des  triomphes  de  la  patrie,  la  terreur  de  tous 
ne  serait  bientôt  que  le  sommeil  précurseur  de  la 
ruine  de  notre  liberté. 

Hommes  purs,  citoyens  tranquilles,  c>st  de  vous, 
e'est  de  votre  repos,  c*estde  la  sécurité  qui  est  due 
an  ealme  de  vos  consciences,  que  vos  représentants 
se  sont  occupés  avrc  le  plus  de  sollicitude  et  de  sen- 
sibilité. Rassurés  depuis  cette  heureuse  époque,  vous 
savez  que  réchafaud  n'attend  plus  que  les  contre- 
révolutionnaires;  vous  savez  queSylia  n'est  plus, 
maïs  que  la  liberté  reste  avec  la  justice  protectrice 
dfs  bons, inflexible  contre  les  conspirateurs. 

Grâces  en  soient  rendues  à  cette  raison  publique 
qu'on  a  si  Justement  appelée  le  génie  tutélaire  de  la 
liberté,  les  grandes  destinées  du  pcqple  français  se- 
ront remplies,  et  le  sang  de  l'homme  juste  n'arro- 
sera point  le  sol  qu*il  a  vivifié  par  son  industrie,  dc- 
liêndu  par  son  courage,  ou  honoré  par  ses  vertus. 

Mais  c'est  par  de  bonnes  institutions  que  nous 
remplirons  cet  objet ,  en  même  temps  que  nous  ne 
cesserons  de  montrer  aux  conspirateurs  le  supplice 
que  la  loi  leur  réserve. 

Sévères,  mais  justes,  c'est  à  la  réunion  de  ces  deux 
oaractères  que  le  peuple  reconnaîtra  en  nous  des 
représentants  dignes  de  lui. 

Une  définition  exacte  et  précise  des  délits  contre- 
révolutionnaires  était  le  premier  objet  qui  se  pré« 
sentait  dans  le  cours  de  ce  travail  :  nous  avons  di- 
rigé DOS  efforts  vers  ce  but  ;  vous  en  avez  consacré 
les  résultats ,  et  par  la  vous  avez  effacé  jusqu'aux 
dernières  traces  de  ces  abstractions  perverses  qu'of- 
frait la  loi  du  22  prairial. 

Par  ce  monument  de  la  tyrannie,  celui-là  était 
répnté  contre-révolutionnaire  qui  altérait  Téner- 
giedu  gouvernement  révolutionnaire.  Voyez  quelle 
latitude  résultait  de  ces  expressions  !  Un  citoyen  pa- 
raissait-il douter  de  la  justice  d'une  mesure  appli- 
quée à  son  voisin  :  il  altérait  l'énergie  du  gouverne- 
ment, il  devenait  contre-révolutionnaire,  il  pouvait 
être  conduit  à  l'échafaud. 

Ah  !  loin  de  nous  une  arme  aussi  perfide,  et  qui, 
suspendue  snr  toutes  les  têtes,  promènerait  inais- 
tnictement  la  mort.  La  révolution  doit  anéantir  tous 
les  conspirateurs,  mais  nous  ne  voulons  pas  que  la 
liberté  rèjçne  sur  des  déserts. 

Vous  n  avez  pas  non  plus  souffert  qu'on  retrouvât 
dans  la  nouvelle  loi  le  droit  dont  on  avait  investi  un 
seul  homme,  celui  de  traduire  qui  il  voudrait  ù  son 
tribunal,  sans  en  référer  à  qui  que  ce  fût  ;  droit  ter- 
rible et  désastreux  dans  ses  effets,  dont  je  ne  puis, 
en  vous  présentant  le  projet  de  cette  loi,  me  dispen- 
ser de  vous  citer  un  exemple. 

Un  fonctionnaire  public,  distingué  piTr  ses  lumiè- 
res, par  son  patriotisme  et  par  ses  vertus,  avait,  au 
mois  d'avril  1792,  reçu  une  lettre  [leu  révolution- 
naire et  scellée  d'un  cachet  à  armoiries  :  en  bon  ci- 
toyen, il  l'avait  dénoncée  à  l'administration  de  son  dé- 
partement, et  elle  y  avait  été  déposée.  On  la  retrouve 
après  plus  de  deux  ans;  une  main  aussi  perfide 
qu'ignorante  s'en  saisit  comme  d'un  moyen  propre 
à  perdre  un  patriote  devenu  incommode  par  sa  pro- 
bité rigide;  elle  parvient  à  l'accusateur  public  près 
le  tribunal  révolutionnaire,  et  Fouquier-Tinville 
fait  è  l'instant  traduire  à  la  Conciergerie  l'homme 
vertnenx,  le  digne  républicain  qui  avait  reçu,  dé- 
noncé et  déposé  cette  lettre  ;  et  il  allait  le  meUre  en 
iagement,  avec  celui  qui  l'avait  écrite ,  lorsque  des 
membres  de  cette  assemblée,  instruits  de  cette 
étrange  eonduite ,  firent  entendre  leurs  voix  auprès 


des  anciens  comités,  et,  par  lenr  démarehe  éaergi- 
que,  parvinrent  à  faire  briser  les  fers  sons  lesquels 
gémissait  l'innocence. 

Jugez  par  ce  seul  trait  de  ce  qu'était,  dans  un  aC' 
cusateur  publie,  le  droit  de  mandat  d'arrêt  ;  juges 
surtout  ce  qu'il  pourrait  être  encore,  dirigé  par  des 
passions  personnelles. 

Le  droit  du  despote  s'y  reconnaît  ;  il  lui  fallait  un 
tel  instrument  pour  imprimer  la  terreur  à  tous  les 
citoyens  de  la  république ,  comme  il  lui  avait  fallu 
le  mandat  d'arrêt  préalable  contre  les  membres  de 
la  représentation  nationale,  pour  étouffer  leurs  voix 
et  faire  plus  facilement  triompher  sa  volonté. 

Ce  système  despotique  a  disparu  de  notre  projet 
de  loi ,  et  ce  n'est  point  la  seule  tache  que  nous 
ayons  eu  à  effacer. 

La  défense  devant  le  jury  était  de  droit  naturel 
sans  doute ,  et  cep(*ndant  ce  palladium  de  la  liberté 
— ^*'iue  avait  été  brisé  ;  et  c  était  la  ce  qu'on  appe- 

>  lVnpriri<^  rpvnlutinnnairi»  !  Ah!  Iai««nn«  anv 


.  tait  de  l'énergie  révolutionnaire  !  Ah!  laissons  aux 
tyrans  et  aux  lâches  les  armes  des  Tibère  et  des 
Louis  XI,  et  que  les  instrumeuts  de  la  révolutîoa 
soient  terribles  sans  tyrannie  et  sévères  sans  ÎB* 
justice.  •  Frappe,  mais  écoute  ;  •  l'homme  de  la  ré- 
volution trouve  dans  ces  mots  la  règle  de  sa  eau* 
duite. 

O  mon  pays  I  tu  resteras  libre,  et  les  principes  ne 
périront  point.  On  ne  verra  plus  l'habitant  du  Nord 
et  celui  au  Midi  enveloppés  dans  la  même  instruc- 
tion sans  s'être  jamais  connus,  et  s'interrogeant 
pendant  le  débat  sur  une  aussi  bizarre  accolade. 
Sans  doute  la  vie  des  hommes  est  aux  yeux  du  lé- 
gislateur quelque  chose  d'assez  précieux  pour  qne 
nous  revenions  à  des  formes  plus  dignes  de  la  jus- 
tice, plus  d'accord  avec  la  raison. 

Loin  du  tribunal  que  nous  vous  proposons  un 
pareil  amalgame  !  il  vaudrait  mieux  le  composer  de 
cinquante  sections  que  de  lui  conserver  un  tel  point 
d'analogie  avec  les  jugements  des  2  et  S  septembre, 
dont  les  auteurs  aussi  osaient  usurper  l'auguste  nom 
de  tribunal. 

Ah  !  croyez,.citoyens ,  que  la  liberté  n'est  point 
ennemie  de  la  nature  et  de  l'humanité.  Sansooute 
il  lui  faut  encore  des  hécatombes,  mais  que  le  mot 
justice  soit  toujours  inscrit  sur  leur  frontispice  ; 
c'est  ainsi  que  le  gouvernement  s'affermira ,  et  que 
les  hommes  vertueux  auront  une  garantie  réelle 
dans  nos  institutions  sociales. 

Je  m'étonne  qu'ils  aient  osé  parler  de  vertu, 
ceux-là  qui  ont  pu  violer  des  principes  aussi  sadHSs! 
Us  donnaient,  disaient-ils,  pour  défenseurs  aux  in- 
nocents det  jurée  palrioles!  Et  à  la  faveur  de  cette 
abstraction,  toutes  les  autres  règles  étaient  anéan- 
tiejs ,  jusqu'à  celles  qui  pouvaient  assurer  iiux  ci- 
toyens le  droit  éternellement  sacré  de  prouver  leur 
innocence.  Des  juré»  palrioln!  sans  doute  il  faut 
qu'ils  le  soient,  et  ceux  que  la  Convention  nationale 
nommera  d'une  manière  digue  d'elle  le  seront  tou- 
jours. On  ne  les  verra  plus  attachés  au  char  de  tel 
ou  tel  triomphateur  (  les  hommes  sont  aujourd'hui 
nivelés);  ils  seront  purs  comme  leur  source;  du 
moins  nous  devons  le  croire,  et  nous  y  tendrons  de 
tous  nos  efforts  ;  mais  la  «garantie  qu'offrent  les  in- 
dividus est  frcle  et  périssable  comme  .eux  ;  les  bon- 
nes institutions  sont  tout  pour  la  garantie  sociale. 
Assurément  celles  qui  existaient  avant  la  loi  du  22 

Srairial  valaient  mieux  que  celles  qui  furent  iutro- 
uites  par  cette  loi  ;  vous  y  êtes  heureusement  re- 
venus depuis  le  10  thermidor;  et, comme  vous  le 
deviez,  vous  avez  toujours  cherché  à  la  perfec- 
tionner. 

Vous  avez  proclamé  des  principes  révolutHHmai* 
res,  mais  justes ,  en  établissant  que  les  jarÀ  vote 


107 


raient  à  haute  voix  et  à  la  simple  pluralité  ;  le  salut 
(le  la  patrie  le  voulait  ainsi  :  ce  fut  une  grande 
victoire  sur  raristocratie  ;  mais  elle  ne  sufGsait  pas 
à  ceux  qni  avaient  des  vues  personnelles,  et  qui  vou- 
laient substituer  des  égorgements  aux  actes  n^ajes- 
tueux  de  la  justice. 

Vous  avez  éloigné  de  nous  ce  dégoûtant  spectacle, 
et,  après  avoir  ramené  les  choses  a  un  état  plus^ia- 
turel,  vous  avez  rempli  la  promesse  que  vous  aviez 
faite  depuis  longtemps ,  d'appeler  des  citoyens  de 
toutes  le»  parties  de  la  république  à  Tezercice  des 
fonctions  de  jurés. 

Mais  il  vous  reste  un  pas  à  faire  à  cet  égard  :  c'est 
d*établir  que  les  fonctions  des  jurés  ne  pourront  pas 
être  perpétuelles  par  le  fait ,  quoique  temporaires 
par  principe  :  ceux-là  ne  connaîtraient  pas  le  cœur 
humain,  qui  ne  verraient  pas  dans  cette  pérennité 
le  germe  corrupteur  de  Tinstitution. 

Ce  que  nous  disons  des  jurés,  Tidentité  de  raison 
veut  que  nous  le  disions  également  des  juges;  et 
d'ailleurs  on  sait  que,  même  dans  les  tribunaux  cri- 
minels des  départements,*  les  juges  alternent  par 
trimestre,  tant  les  idées  sur  la  bonté  et  la  nécessité 
de  cette  mesure  sont  généralement  répandues. 

C'est  à  Taide  de  ces  réformes  que  vous  aurez  une 
loi  que  le  pat^-iotisme  et  la  raison  pourrojit  avouer. 

Toujours  répressive  pour  les  ennemis  de  la  révo- 
lution, elle  saura  les  atteindre  et  les  frapper  ;  elle  ne 
sera  favorable  qu'à  ceux  qui  auront  des  moyens  de 
justiûcation  :  et  comment  ceux-là  pourraient-ils  être 
repoussés? 

Une  pareille  idée  ne  pouvait  entrer  que  dans  la 
télé  des  pervers  auteurs  de  la  loi  du  22  prairial,  de 
ceux-là  mil,  forçant  les  limites  de  la  nature  et  créant 
l'impossible,  ont  tenté  d'introduire  des  preuves  mo- 
rates^  propres  à  suppléer  toute  autre  instruction. 

Tious  connaissons  bien  la  conviction  morale  des 
Jurés  ;  mais  cette  conviction  se  compose  de  preuves 
plus  ou  moins  positives  :  au  delà  nous  ne  voyons 
que  J*arbitraire  et  le  chaos,  la  verge  du  despote  et  la 
mort  de  Tianocent. 

Voilà,  citoyens,  des  vérités  étemelles  qu'il  nous 
est  aujourd'hui  permis  de  proclamer,  et  dont  le  ré- 
sultat va  tourner  au  profit  de  la  seule  innocence. 
'  Comme  ils  se  jouaient  de  la  vie  des  hommes,  les 
scélérats!  Tout  était  confondu,  rien  n'était  gradué  :  | 
la  mort  !  et  toujours  la  mor4  !  Leur  code  pénal  con- 
sistait dans  ce  mot  unique,  la  mort! 

Nous  avons  cru  devoir  sur  ce  point  soulager  vos 
cœurs  et  les  nOtres  en  rétablissant  la  vérité  dans 
ses  droits,  et  en  remettant  tous  les  principes  à  leur 
place. 

Ce  n*est  point  ici  une  philanthropie  malentendue, 
c'est  un  devoir  exact ,  c'est  un  frein  à  la  proscrip- 
tion. Mais  que  les  ennemis  de  la  république  ne 
croient  pas  triompher;  le  glaive  de  la  loi,  pour  être 
dirigé  avec  plus  ae  précaution ,  ne  les  frappera  pas 
moms:  il  n^^pargnera  que  les  innocents;  et  la  li- 
berté, dans  le  nouveau  jour  qui  nous  luit,  n*en  sou- 
rira que  davantage  à  nos  travaux. 

Tels  ont  été,  citoyen^,  les  principes  qui  ont  dirigé 
le  projet  de  loi  que  vous  avez  aaopte  les  22  et  23 
thermidor,  et  dans  lequel  nous  avions  tâche  de  ras- 
sembler tout  ce  qui  a  trait  à  cette  matière. 

Une  dernière  observation  se  présente  naturelle- 
ment ici  :  si  le^  preuves  du  triumvirat  n'étaient  pas 
déjà  trop  multipliées,'  la  loi  tyrannique  du  22  prai- 
rial pourrait  les  8up()léer» 

Vous  l'avez  frappée  d'anathème  ainsi  que  ses  au- 
teurs. En  y  substituant  la  loi  nouvelle  que  nous 
vous  représentons  aujourd'hui  par  vos  ordres,  vous 
vous  êtes  bien  gardés  de  lui  donner  ce  caractère  qui, 
sous  les  formes  d*une  extrême  démagogie ,  mettait 


la  vie  de  tous  les  citoyens  sous  la  main  du  lyres  ^ 
de  ses  ministres  ;  les  monstres  ne  parlaient  que  4e 
vertus,  et  voulaient  se  repattre  du  sang  des  bons 

citoyens! 

Ces  vertus ,  qui  n'étaient  que  sur  leurs  lèvres, 
vous  les  sentez  au  fond  de  vos  cœurs,  vous  les  pra- 
tiquerez toujours,  et  le  peuple,  prononçant  entre 
£ux  et  vous,  dira  :  •  Quelques  ambitieux,  hypocrites 
et  scélérats ,  affectaient  souvent  de  bien  dire  ;  les 
hommes  droits  et  modestes  qui  les  ont  démasqués 
ont  mis  toute  leur  gloire  et  tous  leurs  vœux  à  bien 
faire.  • 

Voici  la  loi  telle  que  vous  l'avez  décrétée,  et  telle 
qu'elle  est  sortie  de  vos  mains  après  la  seconde  tein- 
ture qui  en  fut  faite  à  la  séance  du  23  thermidor. 

Nous  nous  sommes  cependant  permis  d'y  ajouter 
une  disposition  qui  tend  à  faire  renouveler  les  jugée 
en  même  temps  que  les  jurés,  et  à  faire  porter  ce 
renouvellement  sur  l'intégrité  des  uns  et  des  autree. 
Cette  addition  nous  a  paru  extrêmement  importante; 
c'est  à  vous  à  l'apprécier  dans  votre  sagesse. 

La  CoDvenUon  DaUoDale ,  après  avoir  entendu  le  rappdt 
de  comités  de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  de  M^tla- 
UoD,  décrète  : 

Tithe  r*. 

Compétence  du  tribunal  répolutionnaire» 

c  Art.  I*'.  Le  tribunal  révoluUonnaire  connaîtra  de  to# 
les  attentats  contre  la  sûreté  intérieure  et  extérieure  de 
l'Etat,  contre  la  lil>erté.  régallté,  Tunité  et  l'IndlvisibUtiéde 
la  république,  contre  la  représentation  nationale,  et  de  toOl  ^ 
complots  tendant  au  rétablissement  de  la  royauté,  ou  à  fé^ 
tabiissement  de  toute  auu>rité  attenuuoire  à  la  toaveraleelé 
du  peuple. 

•  U.  Il  connalura  pareillement,  conformément  à  la  loi  dli 
19  floréal ,  des  négUgences,  malversaUons  et  autres  déUtt 
mentionnés  dans  la  loi  du  14  frimaire,  dont  pourraient  se 
rendre  coupables  les  membres  et  adjoints  det  commiaaioiit 
exécutiYes,  les  Juges  et  accusateurs  pubUcs  des  tribunaux 
crimineli. 

c  III.  Les  tribunaux  criminels  conUnueront  de  connaître, 
concurremment  avec  le  tribunal  réTOlQilouoalre,  des  déUla 
contre- révoiuUonnalres  dont  la  connaissance  leur  a  été  con- 
servée  par  la  loi  du  19  floréal. 

c  lis  connaîtront  en  ouUre  exclusivement  de  tous  les  tèb 
et  dilapidations  de  deniers  ou  effets  nationaux ,  quolqde 
non  compris  dans  la  loi  du  7  frimaire,  en  observant  les  for- 
mes prescrites  par  cette  loi  et  par  celles  des  14  germinal  U 
21  floréal. 

c  IV.  En  conséquence ,  la  loi  du  29  septembre  1799,  ecn^ 
cernant  les  infidélités  des  agents  ou  préposés  des  admlolt- 
trations  et  fournisseurs  de  la  république,  demeare  restrehili 
à  celles  qui  seraient  de  nature  à  foire  manquer  les  approVl*> 
sionnements  des  armées. 

TlTBB  IL 

Composition  du  tribunal  récolutknmairê. 

c  V.  Le  tribunal  révolutionnaire  sera  composé  de  demi  ^ 
Juges,  dont  un  président  et  deux  vice-présidents,  d'un  aceo* 
suteur  pubUc,  de  trois  subsUtuts  et  d'un  greffier. 

«  VL  11  y  aura  près  le  tribunal  révolutionnaire  treate 
Jurés. 

•  VU.  Le  tribunal  et  le  Jury  seront  renoavelét  en  entUf 
tous  les  trois  mois. 

•  VIII.  Les  citoyens  qui  seront  appelés  aux  fonetlons  de 
juges,  d'accusateur  public,  de  subsUttit  on  de  Jurés  du  trt^ 
bunal  révolutionnaire,  seront  tenus  de  se  rendre  sans  dâd 
û  leur  poste  ;  Us  sont  mis  à  cet  efTet  en  réquisition. 

<  Les  places  ou  emplois  qu'ils  occupent  actuellement  leur 
seront  conservés;  et  s'ils  n'ont  pas  de  suppléants,  ils  seroet 
remplacés  provisoirement  parla  Convention  nationale. 

•  IX.  Les  frais  de  route  leur  seront  remboursés,  tant 
pour  l'aller  que  pour  le  retour,  sans  diminution  det  Indeilh 
nités  et  appointemenU  qui  leur  sont  auribués  par  les  iell 
antérieures.  ^ 


108 


•X.  n  tera  attache  an  tribunal  rérolatloniialre  tix  oom- 
iiila-«refflert,sizcommlff  expéditionnaires,  six  baUtlen^un 
eonderge  et  cinq  garçons  de  bureau. 

«  Il  sera  en  outre  attaché  au  parquet  sept  secrétaires- 
commis  et  deux  garçons  de  bureau. 

"  \  Titre  ni. 

Ordre  du  service' 

'  '     •  XI.  Les  Juges  du  tribunal  révolutionnaire  seront  divisés 
en  deux  sections, 
t  XII.  Chaque  section  sera  composée  de  six  Juges. 

•  XIII.  Ces  six  Juges  seront  tous  les  Jours  et  alternative- 
ment employés  :  savoir,  trois  à  tenir  Taudleoce  pour  juger 
publiquement  les  accusés ,  et  trois  à  faire  en  chambre  du 
conseil  les  actes  d'instruction  qui  doivent  précéder  le  débat 
et  l'examen  public  de  chaque  procès. 

•  XIV.  Les  Juges  seront  répartFs  au  sort  dans  les  deux 
aections  et  ce  répartiment  sera  renouvelé  tous  les  mois. 

«  XV.  Si  néanmoins , à  la  fin  du  mois,  l'examen  d'un  ou 
de  plusieurs  procès  éult  ouvert ,  le  renouvellement  serait 
différé  Jusqu'au  Jugement  de  ces  procès. 

«  XVI.  Les  Juges  d'une  section  pourront  suppléer  ceux 
dune  autre  section. 

•  XVIL  Lorsqu'un  procès  sera  porté  au  tribunal  révolu- 
tionnaire ,  le  sort  décidera  &  laquelle  des  deux  sections  il 
sera  assigné. 

t  XVIII.  SI  néanmoins  une  section  se  trouve  chargée  de 
plus  d'affaires  que  l'autre,  elle  ne  sera  admise  au  tirage 
qu'après  que  le  sort  en  aura  assigné  à  l'autre  un  nombre 
^gal  au  sien. 

«  XIX.  Le  tirage  au  sort  se  fera  en  présence  du  président, 
de  l'accusateur  ou  de  l'un  de  ie$  substitnu,  et  d'un  commis- 
saire de  chaque  section. 

t  XX.  Les  procès  qui  fèrontsuite  ou  qui  seront  connexes 
àcelui  dont  une  section  se  trouvera  saisie  seront  portés  de* 
Tant  cette  section  sans  tirage  au  sort. 

TnnK  IV. 
Traduetion  des  prévenue  devant  le  tribunal  révolutionnaire, 

I  XXI.  Nul  ne  pourra  être  traduit  au  tribunal  révolu- 
tionnaire que 
c  Par  un  décret  de  la  Convention  nationale» 
t  Ou  par  un  arrêté  du  comité  de  sûreté  généitile, 

•  Ou  par  un  mandat  d'arrêt,  soit  du  tribunal,  soit  de  l'ac- 
cusateur public,  dans  les  cas  déterminés  par  les  articles 
XXU,  XXIII  et  LXVI  ci^piès. 

«  XXII.  L'accusateur  public  pourra  décerner  des  man- 
dats d'arrêt  contre  les  complices  des  délits  dont  le  tribunal 
se  trouvera  saisi,  et  les  faire  Juger  conjoiotemenravec  les 
accusés  principaux. 

•  Mais  avant  de  les  mettre  en  Jugement,  Il  fera  décider, 
par  la  chambre  du  conseil,  s'il  y  a  lieu  de  présenter  aux 
Jurés  l'acte  d'accusation  de  complicité  qu'il  aura  dressé 
contre  eux  ;  et  s'il  est  Jugé  qu'il  n'y  a  pas  lieu,  les  prévenus 
seront  mis  en  liberté. 

«  XXIII.  Lorsque  la  déposition  d'un  témoin  paraîtra  évi- 
demment fausse ,  le  tribunal  décernera  contre  lui ,  séance 
tenante,  soit  d'office,  soit  sur  la  réquisition  de  l'accusateur 
public,  un  mandat  d'arrêt  en  vertu  duquel  il  sera  jugé  sur- 
le-champ  par  les  mêmes  jurés  et  les  mêmes  Juges  devant 
lesquels  il  aura  déposé. 

t  XXIV.  Les  représentants  du  peuple  en  mission  dans  les 
départements  feront  conduire  au  comité  de  sûreté  générale 
les  individus  qu'ila  auront  mis  en  état  d'arrestation  comme 
prévenus  de  délits  de  la  compétence  du  tribunal  révolution- 
naire. 

<  XXV.  Les  autorités  constituées  adresseront  dorénavant 
au  comité  de  sûreté  générale  les  pièces  relatives  aux  pré- 
Tenus  de  délits  contre-révolutionnaires ,  dont  l'article  V  de 
la  loi  du  18  nivôse  leur  enjoint  de  faire  l'envol  à  l'accusa- 
'  leur  public  près  le  tribunal  révolutionnaire. 

c  XXVI.  Les  membres  et  adjoints  des  commissions  exe- 
cutives, les  généraux  en  chefietceux  de  division  ou  de  bri- 
gade, ne  pourront  être  traduits  au  tribunal  révolutionnaire 
que  nar  un  décret  de  U  Convention,  ou  par  un  arrêté  des 
«Milles  de  salut  public  et  de  aûraté  générala  réunis. 


TnviT. 
De  la  procédure  devant  le  tribunal  révoluNomurtre^ 


t  XXVII.  Aussitôt  qu'un  procès  sera  porté  an  tribunal  ré- 
volutionnaire, le  président,  en  présence  de  l'assnsaleiir  pu- 
blic ou  de  l'un  de  ses  substltou,  et  d'un  commissaire  de  la 
section  à  laquelle  11  aura  été  assigné,  fera  tirer  au  sort  onxa 
Jurés  pour  prononcer  sur  les  Calu  Imputés  à  l'accusé. 

•  XXVIII.  Dans  chaque  procès  porté  an  tribunal  révolo- 
tionoaire ,  et  vingt^quatre  neures  au  moins  avant  qu'il  ne 
soit  soumis  au  débat,  l'un  des  Juges  d'Instruction,  conunls  k 
cet  effet  par  le  président  de  la  section  à  laquelle  le  procès 
aura  été  assigné ,  fera  amener  devant  lui  l'accusé,  lui  corn- 
raunlquera  l'acte  d'acrusation,  lui  en  fera  délivrer  copie, 
l'interrogera  sur  les  faits  y  énoncés,  recevra  ses  réponses, 
l'avertira  que  la  loi  lui  permet  de  choisir  un  conseil  muni 
d'un  certificat  de  civisme,  et  fera  tenir  acte  du  tout  par  le 
greffier. 

•  XXIX.  Lors  de  l'Interro^toire,  la  liste  des  Jurés  desti- 
nés à  prononcer  sur  \t$  faiu  Imputés  à  l'aecnsé  lui  sera 
communiquée,  et  II  sera  Interpellé  de  déclarer  à  rinstant 
s'il  entend  en  récuser  un  ou  plusieurs. 

t  XXX.  L'aecnsé  qui  voudrait  récuser  on  on  plusieurs 
Jurés,  sera  tenu  de  proposer  ses  causes  de  récusation  lors 
de  son  interrogatoire,  et  le  tribunal  Jugera  la  validité  dans 
les  vingt-quatre  heures.  Il  statuera  dans  le  même  délai  sur 
les  récusations  qui  auront  été  proposées  par  raccusalenr 
public. 

cil  ne  sera  reçu,  soit  de  la  part  de  l'aecnsé,  soit  de  la  part 
de  l'accusateur  public,  aucune  récusation  non  motivée. 

>  XXXI.  Le  conseil  choisi  par  l'accusé  ne  pourra  commu- 
niquer avec  lui  qu'après  son  interrogatoire ,  et  au  moyeu 
d'un  laisse^-passer  de  l'accusateur  public. 

c  XXXII.  SI,  avant  que  des  témoins  ne  soient  entendus  à 
l'audience,  l'accusateur  public  trouve  utile  à  la  manifestadon 
de  la  vérité  de  faire  recevoir  par  écrit  leurs  déclarations, 
elles  seront  reçues  par  l'un  des  Juges  d'instruction,  commis 
à  cet  effet  par  le  président  de  la  section  saisie  du  procès. 

c  XXXUI.  Ces  déclarations  et  les  nétes  de  l'inlerrog»- 
toire  dont  11  a  été  parié  ci-dessus  seront  remises  au  Juge 
qui  devra  présider  a  l'examen  et  au  débat,  pour  servir  de 
renseignement  seulement. 

t  XXXIV.  U  sera  dressé  autant  d'actes  d'accusation  qu'A 
y  aura  de  délits  à  Juger. 

«  On  pourra  néanmoins,  dans  un  acte  d'accusation,  < 
prendre  plusieurs  déiiu  &  la  charge  d'une  mên 

•  XXXV.  Dans  tous  les  cas,  les  complices  d'un  accusé  se- 
ront compris  dans  le  même  acte  d'accusation  que  lui .  sol 
qu'ils  se  trouvent  Impliqués  dans  tous  les  délits  qui  lui  sont 
Imputés,  ou  qu'Us  ne  le  soient  que  dans  un  seul. 

«  XXXVI.  Lorsqu'une  même  personne  sera  prévenue  à 
la  fois  de  délits  contre-révolutionnaires  et  de  délits  ordi- 
naires, l'acte  d'accusation  ne  portera  que  sur  les  premiers; 
et  si  elle  en  est  acquittée  par  le  tribunal  révolutionnaire,  ou 
condamnée  aune  peine  moindre  que  celle  &  Infliger  aux  dé- 
lits ordinaires,  elle  sera  renvoyée  par-devant  le  tribunal  cri- 
minel ou  de  police  correctionnelle,  auquel  appartient  la 
connaissance  des  autres. 

«  XXXVII.  Ne  pourront  être  compris  ni  énoncés  dans 
l'acte  d'accusation  qui  sera  dressé  contre  un  prévenu  tra- 
duit an  tribunal  révolutionnaire  ou  aux  tribunaux  ordinai- 
res les  faits  d'après  l'exposé  desquels  un  décret  des  repré- 
sentants du  peuple  l'aura  mis  en  liberté ,  ou  aura  déclaré 
qu'il  n'y  a  pas  lieu  à  inculpation  contre  lui. 

c  XXXVIII.  Si  le  prévenu  ou  accusé  d'un  crime  contre* 
révolutionnaire  se  soustrait  à  l'examen  delà  Jysiice,  lien 
sera  usé  à  son  égard  conformément  à  la  loi  du  3  thermidor 
sur  les  contumaces. 

Titre  VI. 
De  t  examen  et  de  la  conviction. 

<  XXXIX.  Le  Jour  fixé  pour  l'examen  du  procès ,  l'ac- 
cusé,, en  présence  des  juges,  de  l'accusateur  public,  des 
Jurés  et  des  citoyens,  sera  amené  a  la  barre, libre  et  sans 
fers. 

I  XL.  I^  président  fera  prêtera  chacun  des  onie  Jurés  le 
serment  d'examiner  avec  l'attention  la  phis  scrupuleuse  les 
charges  portées  contre  l'accusé  ;  de  n'en  oommunlquer  aved 


lOÎ^ 


penoniie  josqa'à  leur  déclaration ,  de  n'écouter  nt  la  haine 
ou  la  méchanceté  ni  la  crainte  ou  raffecUon  :de  se  décider 
d'après  les  charges  et  moyens  de  défense,  suivant  leur  con- 
science et  leur  intinyï  conviction ,  avec  l'iroparlialité  et  la 
fermeté  qui  caractérisent  des  républicains. 

<  XLI.  Le  serment  préié,  les  jurés  prendront  place  tous 
ensemble  sur  des  sièges  séparés  du  public  et  du  tribunal  :  Ils 
Seront  plac^  en  face  de  l'accusé  et  des  témoins. 

c  xm.  Le  président  dira  à  Taccusé  qu'il  peut  s'asseoir, 
lui  demandera  son  nom,  son  âge,  le  lieu  de  sa  naissance,  sa 
demeure,  sa  qualité  et  sa  profession  tant  avant  que  depuis 
la  révolution,  et  il  fera  tenir  note  du  tout  par  le  greffier. 

(  XUII.  Le  président  avertira  l'accusé  d'être  attentif  à 
tout  ce  qu'il  va  entendre;  il  ordonnera  au  greffier  de  lire 
l'acte  d'accusation;  après  quoi  II  dira  à  l'accusé  :  c  Voilà  de 
quoi  on  t'accuse;  tu  vas  entendre  les  charges  qui  seront 
produites  contre  toi.  » 

c  XUV.  L'accnsateur  public  exposera  le  sujet  de  l'accu- 
sation ;  Il  requerra  la  lecture  de  la  ioi  sur  le  crime  de  faux 
témoignage,  et,  après  la  lecture.  Il  fera  entendre  les  té- 
moins. 

I  XLV.  Ne  pourront  être  entendus  en  témoignage  un  mari 
contre  sa  femme,  une  femme  contre  son  mari,  les  ascendants 
contre  les  descendants,  et  réciproquement,  les  frères  et 
sœurs  contre  leurs  frères  et  soeurs,  et  les  alliés  au  même 
degré. 

•  XLVI.  Les  tânoins»  avant  de  déposer,  prêteront  ser- 
ment de  parler  sao»  haine  et  aans  crainte,  et  de  dire  la  vé- 
rité. 

«  XLVIL  Hors  les  caa  déterminés  par  les  lois  des  18  prai- 
rial et  3  messidor,  l'examen  des  témoins  sera  toujours  fait  de 
▼ive  voix,  et  sans  que  leurs  dépositions  soient  écrites. 

«  XLVnL  Les  témoins  ne  pourront  jamais  s'interpeller 
entre  eux. 

•  Us  seront  entendus  séparément. 

c  Cependant  l'accusateur  public  pourra ,  après  leur  pre- 
mière déchiration,  demander  qu'ils  soient  entendus  de  nou- 
irean,  en  présence  les  uns  des  autres;  il  pourra  également 
demander  que  ceux  qui  ont  déposé  se  retirent  de  l'audi- 
tohre,  ou  qu'un  on  plusieurs  d'entre  eux  soient  introduits 
pour  être  entendus  de  nouveau,  séparément  ou  en  présence 
les  uns  des  auures. 

<  L'accusé  aura  la  même  faculté. 

«  XUX.  Chaque  ténM>ln  sera  tenu  de  déclarer  s'il  est  pa- 
rent, allié  ou  attaché  au  service  de  l'accusé,  s'il  le  connais- 
sait avant  te  fait  qui  a  donné  lieu  &  l'accusation ,  et  s'il  en- 
tend parler  de  l'accusé  présent. 

«  L.  A  chaque  déposition  de  témoin,  le  président  deman- 
dera à  l'accusé  s'il  vent  répondre  à  ce  qui  vient  d'être  dit 
contre  lui.  L'aocusé  pourra,  ainsi  que  sou  conseil ,  dire  tant 
contre  les  témoins,  que  contre  leur  témoignage,  ce  qu'il  ju- 
gera utile  à  sa  défense. 

•  U.  Les  témoins  assignés  à  la  requête  de  l'accusé,  se- 
ront entendus  alternativement  avec  ceux  qui  auront  été  pro- 
duits par  raccusateur  public 

t  VI,  L'accusé  et  son  conseil  seront  tenus  dé  s'exprimer 
avec  décence  et  modération. 

•  La  disposition  de  la  loi  du  15  germinal ,  qui  est  relative 
à  la  mise  hors  des  débats,  est  rapportée. 

«  LUL  Les  effets  trouvés  lors  du  délit,  ou  depuis,  pou- 
vant servir  à  conviction,  seront  représentés  à  l'accusé,  et  il 
lui  sera  demandé  de  répondre  s'il  les  reconnaît. 

(  UV.  Lorsqu'un  débat  a  duré  plus  de  trois  jours,  le  pré- 
sident est  tenu,  &  l'ouverture  de  la  séance  suivante,  de  de- 
mander aux  jurés  si  leur  conscience  est  suffisamment  éclai- 
rée. 

•  LY.  SI  les  jurés  répondent  non ,  l'instruction  sera  con- 
tinuée jusqu'à  ce  qu'ils  aient  faite  une  déclaration  contraire. 

c  LVL  SI  les  jurés  répondent  qu'ils  sont  sufGsamment  in- 
struit», il  sera  procédé  sur-le-champ ,  ainsi  qu'il  est  pres- 
crit par  les  articles  suivants»  nonobstant  toute  réclamation 
contraire. 

«LVIL  A  la  soite  des  dépositions  et  des  débaU,  l'accu- 
sateur public  sera  entendu  :  l'accusé  on  son  conseil  pourra 
lui  répçBdre.  . 


c  LVin.  Le  président  résnmêra  l'affehne,  fiera  tvmarquer 
aux  jurés  les  principales  preuves  pour  et  contre  l'accusé;  il 
terminera  en  leur  rappelant  avec  simplicité  les  fonctions 
qu'ils  ont  à  remplir  et  posera  dlstinctepient,  après  avoir 
pris  l'avis  du  tribunal,  les  questions  qu'ils  ont  à  décider, 
tant  sur  les  faits  que  sur  l'intention  dans  laquelle  Ils  ont  été 
commis. 

c  Toutes  les  questions  seront  rédigées  avec  simplicité.  Il  • 
ne  pourra  en  être  posé  aucune  dans  laquelle  il  y  ait  rien  de 
complexe. 

«  L'accusé,  son  conseil,  l'accusateur  public  et  les  jurés 
pourront  faire  des  observations  sur  la  manière  dont  les  ques- 
tions auront  été  posées. 

t  LIX.  Le  président  mettra  par  écrit  les  questions  suivant 
leur  ordre,  et  les  donnera  au  chef  du  jury,  qui  sera  toujoura 
le  plus  ancien  d'âge. 

I  LX.  Le  président  ordonnera  aux  jurés  de  se  retirer 
dans  une  chambre  voisine:  ils  y  resteront  sans  pouvoir 
communiquer  avec  personne. 

I  I.XL  L.orsque  les  jurés  se  trouveront  en  état  de  donner 
leur  déclaration ,  ils  rentreront  dans  l'auditok-e,  et  feront, 
chacun  à  haute  voix  et  publiquement,  leur  déclaration  Indi- 
viduelle sur  les  questions  qui  leur  auront  été  remises  par  le 
président. 

«  LXII.  Chaque  juré  prononcera  sa  déclaration  dans  la 
forme  suivante  : 

c  Sur  mon  honneur  et  ma  conscience,  tel  fait  est  constant, 
ou  n'est  pas  constant;  l'accusé  est  convaincu  de  tel  feit,  ou 
l'accusé  n'est  pas  convaincu.  Il  est  convaincu,  ouAÏ  n'est  pas 
convaincu  de  l'avoir  commis  dans  telle  Intention.  • 

I  LXIII.  Chaque  question  sera  décidée  à  la  pluralité  ab- 
solue des  voix. 

(  LXIV.  La  déclaration  du  jury  sera  reçue  par  le  greffier, 
signée  de  lui  et  de  tous  les  juges. 

«  LXV.  Le  jury  ne  pourra  donner  de  déchiration  sur  un 
délit  qui  ne  serait  pas  porté  dans  l'acte  d'accusation,  quelle 
que  soii  la  déposition  des  témoins. 

«  LXYI.  Si  l'accusé  est  déclaré  non  convaincu  du  feit 
porté  d^os  l'acte  d'accusation,  et  qu'il  ait  été  inculpé  sur  un 
autre  crime  par  les  dépositions  des  témoins,  le  tribunal, 
d'office  ou  sur  la  demande  de  l'accusateur  public,  ordon- 
nera qu'il  soit  arrêté  de  nouveau.  Il  recevra  les  éclaircisse- 
ments que  le  prévenu  donnera  sur  ce  nouveau  fait;  et ,  s'il 
y  a  lieu,  il  délivrera  un  mandat  d'arrêt ,  et  renverra  le  pré- 
venu, ainsi  que  les  témoins,  devant  la  chambre  du  conseil, 
pour  être  décidé  s'il  y  a  lieu  à  un  nouvel  acte  d'accusation, 
en  cas  qu'il  s'agisse  d'un  délit  contre-révolutionnaire,  et  de* 
vant  le  directeur  du  jury  du  lieu  du  délit,  s'il  n'est  question 
que  d'un  délit  ordinaire. 

TiTRB  VIL 

Du  jugement, 

t  LXVII.  Si  l'accusé  est  djéclaré  non  convaincu,  le  prési- 
dent prononcera  qu'il  est  acquitté  de  l'accUsation,  et  ordon- 
nera qu'il  soii  sur-le-charop  mis  en  liberté,  à  moins  qu'il  n'y 
ait  lieu  de  le  retenir  en  état  d'arrestation,  soit'd'après  les 
articles  XXXVI  et  LXVI  ci-dessus,  soit  d'après  l'article  X  de 
la  loi  du  17  septembre  1793.  ' 

I  LXVIII.  Il  en  sera  de  même  si  les  jurés  ont  déclaré  que 
le  feit  a  été  commis  involontairement  ou  sans  mauvaise  In- 
tention. 

<  LXIX.  Toute  personne  ainsi  acquittée  ne  pourra  plus 
être  reprise  ni  accusée  pour  raison  du  même  feit. 

I  LXX.  Tout  fonctionnaire  public  acquitté  purement  et 
simplement  rentrera  de  plein  droit  dans  les  fonctions  aux- 
quelles il  avait  été  appelé  avant  d'être  accusé. 

c  LXXI.  Lorsque  l'accusé  aura  été  déclaré  convaincu ,  le 
président ,  en  présence  des  citoyons ,  le  fera  comparaître, 
et  lui  donnera  connaissance  de  la  déclaration  du  jury. 

<  LXXII.  L'accusateur  public  fera  sa  réquisition  pour 
l'application  de  la  loi.  L'accusé  ou  son  conseil  pourra  faire 
des  observations;  les  juges  prononceront  ensuite  la  peine 
établie  par  la  loi,  ou  acqultleront  l'accusé,  dans  le  cas  où  le 
fait  dont  il  est  convaincu  n'est  pas  défendu  par  elle. 

•  L'article  111  du  Utre  U  de  U  lol|  du  10  mars  1798  est 
rapporté. 


110 


c  LXXm.  Traia  «Mndtwtton  à  la  ptlM  48-imirl  em- 
portera la  confiicatioD  des  bien»  da  eondamoé. 

c  LXXIV.  Toat  jQgpmcnt  da  tribunal  révolulioniuitre 
ënooeera  le  nom  dn  oondaroné,  son  Age,  le  lieu  de  sa  nais- 
sanee,  sa  demeure,  aa  qualité,  sa  promslon,  tant  avant  que 
depuis  la  réfolnilon. 

c  LXXV.  Les  jugements  du  tribunal  réTolutionoalre  te- 
ronl  exécutés  sans  recours  au  tribunal  de  cassation. 

c  LXXVI.  Il  est  dérogé  à  toutes  dispositions  des  lois  an- 
térieures qui  seront  contraires  ùl  la  présente  iol.  f 

SéANCB  DU   12  NIYOSS 

Un  secrétaire  fait  lecture  du  procès-verbol  de  la 
séance  du  It. 

Cbarijbb  :  Voici  tin  décret  qui  dit  quê  les  mem- 
bres de  cette  assemblée  qui  se  permettront  des  in- 
jures ou  des  personnalités  envers  leurs  eoUègues  se- 
ront envoyés  à  TAbbaye. 

Sans  doute  un  représentant  doit  respecter  son  ca- 
ractère ;  mais  il  est  possible,  quand  les  passions  se 
heurtent  et  se  choquent,  qu*il  s'oublie  un  instant. 
Alors  il  faut  le  rappeler  i  Tordre.  Il  est  injurieux 
pour  la  représentation  nationale  de  décréter  çiu'un 
membre  ira  à  l'Abbaye  pour  semblables  raisons. 
(Murmures.  —  On  observe  que  cela  est  dans  le  rè- 
glement. )  Si  c*est  ainsi,  on  n*a  donc  pas  besoin  de 
ce  nouveau  décret.  Le  règlement  fait  loi.  Je  de- 
mande alors  Tordre  du  Jour,  motivé  sur  le  règle- 
ment. 

CLAtiZBL  :  Si  Tassemblée  veut  discuter  cette  pro- 

Sosition,  je  demande  qu*elle  attende  le  grand  ordre 
u  Jour«  et  que  la  discussion  soit  renvoyée  à  deux 
heures. 

Andbé  DuHOirr  :  Je  ne  erois  pas  qu'il  soit  néces- 
saire de  renvoyer  une  dtscu^ion  sur  eet  objet  au 
grand  ordre  du  jour.  Depuis  huit  jours,  qui  d'entre 
nous  n*a  pas  été  scandalisé  des  invectives  et  des 
injures  que  Ton  vomit  dans  cette  enceinte?  Citoyens, 
si  vous  voulez  qu'on  vous  respecte ,  respNCCtez-vous 
vous-mêmes.  (Applaudissements.)  Les  indécences 
qu'on  se  permet  sont  telles  que,  si  le  décret  d'hier 
n'avait  été  porté,  je  le  demanderais  aujourd'hui. 
Je  demande  Tordre  du  jour  sur  la  proposition  de 
Clauzel. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

Charlier  :  Je  demande  la  parole  pour  une  mo- 
tion d'ordre; je  ne  dirai  qu'un  mot.  J'ai  déjà  annonce 
ù  la  Convention  que  si  Ton  ne  s'occupait  pas  des 
postes,  bientôt  toutes  nus  communications  seraient 
interrompues.  Je  demande  eu  conséquence  que  la 
Convention  décrète  qu'aujourd'hui  ou  demain  Ton 
s'occupera  de  cet  objet  important. 

Perrin  :  Vous  avez  décrété  que  Ton  ferait  primidi 
un  rapport  sur  l'agence  des  lois;  cependant  ce  rap- 
port n'est  |)as  fait,  et  si  Ton  ne  s'en  occupe  pas  bien- 
tôt, l'espèce  des  chevaux  sera  anéantie.  Charlier  a 
observé,  comme  moi,  qu'il  fallait  de  toute  nécessité 
Jeter  un  coup  d'œil  sur  celte  importante  matière. 
On  dit  que  nous  voulons  améliorer  les  affaires  de  la 
république  ;  eh  bien,  travaillons  comme  de  vrais  pè- 
res de  famille.  (Applaudissements.)  Voulous-nous 
diminuer  la  masse  des  assignats  qui  sont  en  circu- 
lation ;  commençons  par  diminuer  nos  dépenses. 

Je  vous  demande  donc ,  au  nom  de  la  patrie,  qui 
vous  est  chère  comme  à  moi,  que  Ton  fasse  le  rapport 
demain,  et  qti'on  réforme  enliii  cette  nuée  de  commis, 
qui  serait  bien  plus  utile  aux  frontières. 

CicoGNB  :  L'organisation  des  postes  demande  une 
grande  réflexioD.  11  ne  fiiut  pas  croire  qu'elle  puisse 


se  dire  tout  d'un  coup  ;  ont  orgaiiitatloii  lèmMiMt 
ne  se  jette  pas  au  moule.  Je  demande  done  le  renvoi 
aux  comités. 
BoissY  d' Anglas  :  Le  comité  da  lalot  publie  a*att 

occupe ,  et  il  fera  incessamment  son  rapport  sur  cet 
objet  et  sur  d'autres  infiniment  importants  k  la  cboaa 

publique. 

Chabubr  :  Voulez-vous  que  le  aenrîca  des  postea 
se  fasse  bien  ;  qu'un  maître  des  poates  ne  diaa  ja*^ 
mais  :  il  y  a  deux,  il  y  a  trois  mois  que  je  n*ai  été 

payé. 

CicooNB  :  On  a  déjà  ordonnancé  0  millions  pour 

cet  objet. 

Chbnibr  :  Je  demande  que  cette  diaeossion  < 

Je  demanderai  moi-même  la  parole  bientôt  , 
une  quatre- vingtaiue  de  gens  de  lettres  qui  meurent 
de  faim. 

André  Dumont  :  Chénier  rentre  dans  la  discut* 

sion. 

***  :  Le  rapport  dans  trois  jours*. 

Pluiieurt  voix  .-X'ordre  du  jour  ! 

L'assemblée  passe  à  Tordre  du  jour. 

—  Johannot  monte  à  la  tribune. 

Cambon  :  Vous  avez  voulu  être  génèrent ,  mêmà 
à  Tégard  des  nations  qui  ont  été  injustes  envers  la 
France;  il  faut  que  toute  TBurope  connaisse  la  loi 
que  vous  avez  rendne.  Je  pense  que  Vart.  VI,  qna! 
vous  avez  décrété  l'autre  jour,  doit  être  retiré  du 
décret  que  nous  discutons  dans  oe  moment ,  qu'il 
doit  faire  une  loi  particulière.  Je  pense  aussi  qu'on' 
devrait  la  faire  précéder  d'un  conmdérant  dans  le- 
quel on  rappellerait  les  injustices  commises  enven. 
la  France  par  les  puissances  étrangères  ;  dans  lequM 
î  on  dirait  oue  la  Russie  a ,  la  première ,  ordonne  ta 
saisie  des  biens  appartenant  aux  Français,  et  que  la 
roi  d'Espagne  Ta  imitée.  Je  crois  aussi  qu'il  ftiudralt' 
y  ajouter  que  si  la  république  a  usé  de  représaillM' 
dans  un  moment  où  I  on  employait  tous  les  moyens 
possibles  pour  Tasservir,  elle  s  empresse  d'être  gé- 
néreuse, et  de  revenir  aux  principes  dès  qu'elle  eocn* 
mande  à  la  victoire.  Enfin  je  voudrais  qu'on  ettIR. 
un  manifeste  qu'on  traduirait  dans  toutes  les 'lan-' 
gués. 

La  proposition  de  Cambon  est  décrétée. 

Johannot  lit  l'article  VIL 

•  U  est  permis  aux  citoyens  qui  ont  du  numéraire 
de  l'exporter,  à  la  charge  d'en  faire  rentrer  la  valeur 
en  objets  de  première  nécessité.  Les  comités  dt 
salut  public ,  des  finances  et  de  commerce  ,  réunis, 
prendront  les  mesures  nécessaires  pour  régler  le. 
mode  de  ces  exportations ,  désigner  les  objets  a  im- 
porter, et  préveuhr  les  abus  qui  pourraient  s'intro- 
duire ù  cet  égard.  • 

BoissY  d'Amolas  :  Tout  se  lie  dans  un  systèoM 
quelconque;  dès  que  vous  adoptez  un  principe,  il 
faut  nécessairement  subir  toutes  ses  conséquences. 

Le  projet  qu'on  vous  présente  est  tellement  une 
suite  de  ceux  que  vous  avez  adoptés  ces  jours  der- 
niers, que  le  rejeter  ce  serait  en  nécessiter  le  rapport. 

Que  voulez- vous  rendre  au  commerce?  Sa  liberté 
et  ses  moyens  ;  décrétez  donc  Tarticle  prop^,  et 
décrétez-le  sans  modification. 

Que  fait  le  commerce,  sinon  acheter  dana  un  liett 
ce  qu'on  lui  demande  dans  un  autre? Les  négociants. 
si  vous  les  favorisez,  si  vous  leur  offires  un  appui 
solide,  un  intérêt  suflisant,  iront  tous  etercher  cnai 
l'étranger  tous  les  objcU  dont  vous  avez  besoin;  ait 


m 


comme  rien  n'arrête  sa  marche^  plutôt  que  de  vous 
totaser  manquer  dt  paiq,  par  exemple,  ils  iront  chez 
Je  boulanger  de  Pitt,  s'ils  ne  peuvent  en  trouver  que 
lè«  le  forcer,  par  la  sëduelion  d*un  plus  haut  pri^ ,  à 
partager  avec  vons  le  norcean  destiné  à  le  nourrir. 

Les  flottes,  les  vaisseaux,  les  mers,  les  armées 
tnlme  n*arrétent  point  le  commerce. 

Vous  dites  au  négociant  que  vous  voulez  un  vase 
de  porcelaine  qui  se  fabrique  à  la  Chine  ;  s*il  est  sûr 
mie  vous  le  paierez  convenablement ,  il  ira  vous  le 
chercher  et  vous  rapportera. 

Si  vous  vous  servez  de  quelques-uns  de  ces  in- 
Siruments  qui  ne  se  fabriquent  qu'en  Angleterre,  et 
qui  doivent  vous  servir  à  forger  ces  armes  meur* 
irièrcs  qui  défendent  notre  liberlé,  dites  un  mot, 
offrez  un  salaire,  et,  malgré  les  lois  prohibitives  des 
Georges,  les  bills  du  parlement,  et  les  armées  na- 
vales d*Albion ,  ces  instruments  arriveront  dans  nos 
ports,  et  donneront  ractivilë  à  nos  manufactures 
républicaines. 

Mais  le  commerce  ne  se  fait  pas  sur  oarole  ;  en 
dernier  terme,  quels  qne  soient  ses  comoinaisons , 
aes  transporta ,  ses  retours,  il  faut  payer  ce  que  Ton 
■cbète;  il  font  le  payerou  par  d*autres  marchandises, 
on  par  des  métanx.  Des  marchandises,  elles  sont 
60  premières,  ou  manufacturées.  Premières,  elles 
ioni  ou  indispensables  à  l'aliment  de  notre  indus- 
trie ,  à  la  consommation  de  vos  habitants ,  aux  be- 
aoÎM  du  peuple  qui  les  fait  naître ,  ou  iusuffisantes 
pour  les  nombreuses  emplettes  que  vous  êtes  forcés 
de  commettre.  Mauufacturées;  mais  vos  manufactures 
sont  détruites,  vos  ateliers  sont  déserts;  les  créations 
de  notre  industrie  sont  nulles,  et  il  nW  a  que  de 
bonnes  lois»  un  système  de  justice  et  d  humanité, 
qui  puissent  vous  donner  les  moyens  de  changer 
un  Jour,  par  le  génie  et  le  travail,  vos  matières  pre- 
mières en  marchandises  manufacturées,  d* une  valeur 
dix  fois  plus  considérable.  Mais ,  en  attendant ,  vous 
avez  des  besoins,  et  ces  besoins  ne  s'ajournent  pas  ; 
il  faut  donc  que  le  commerce  vous  apporte  ce  qui 
vous  manque,  et  il  ne  peut  vous  l'apporter  si  vous 
Fcmpéehez  d'aller  le  payer  avec  la  seule  chose  qu'il 
puisse  donner,  avec  de  l'argent  ;  permettez-lui  aune 
d'exporter  de  l'argent,  car  sans  cela  il  ne  pourra 
riett  obtenir. 

Vos  assignats  sont  sans  doute  un  effet  d'une  in- 
contestable solidité; c'est  une  dette  de  la  nation, 
hypothéquée  sur  des  propriétés  infaillibles  ;  mais 
c'est  un  effet  qui  n'est  autre  chose  qu'une  promesse 
de  payer.  Cette  promesse  n'est  pas  un  payement,  ce 
B*est  pas  une  monnaie  dans  l'étranger  ;  car  il  n'y  a 
4e  monnaie  que  celle  qui  a  une  valeur  intrinsèque , 
indépendante  du  gouvernement  même  qui  eu  cer- 
tifie la  valeur.  Or,  si  vous  voulez  que  l'étranger 
vous  laisse  emporter  les  marchandises  qu'il  possède, 
bites-lui  parvenir  Targent  qui  doit  les  solder  :  sans 
cela,  vous  n*aurez  point  de  commerce,  sans  cela, 
vous  n'aurez  point  les  objets  qui  vous  sont  néces- 
saires ;  et  avec  votre  or  enfoui  dans  des  caves,  caché 
dans  les  coffres  de  l'avarice ,  vous  péririez  dans  un 
déuAmcnt  absolu.  Et  ne  croyez  pas  que  le  gouverne- 
ment nuisse  pourvoir  à  vos  besoins,  qiTil  puisse 
vous  faire  apporter  tous  les  objets  dont  vous  man- 
quez; et  quand  il  le  pourrait ,  il  faudrait  bien  qu'il 
employa,  pour  les  avoir,  les  mêmes  moyens  que  le 
commerce.  Et  que  vous  demande-t-on  ?  de  laisser 
exporter  dei  Métaux  en  circulation  parmi  vous? 
Non ,  sans  doute;  vons  savez  bien  que  ces  métaux 
M  circulent  pas;  vous  savez  bien  que  leur  existence 
au  milieu  de  voua  est  indifférente  à  votre  prospérité  ; 
nen,  o(i  voua  propose  d'engager  ceux  qui  ont  de 


l'or  enfoui, caché,  en  stagnation,  inutile  par  coosd.r 
quent  é  toutes  vos  opérations  intérieures,  d'aller 
l'échanger  contre  tous  les  objets  dont  vous  manquer 
absolument,  dont  vous  ne  pouvez  vous  passer; 
contre  des  marchandises  qui  circuleront  parmi  vous, 
et  vous  offriront  toutes  les  jouissances  dont  vous 
manquez  absolument. 

La  question  se  réduit  à  cela  :  laisserez-vous  échan- 
ger, par  le  commerce ,  un  or  de  l'égolsme  et  de  l'a- 
varice ,  l'or  que  vous  n'apercevez  pas,  contre  tous 
les  objets  de  première  nécessité  dont  vous  manquez 
absolument?  Et  ne  croyez  pas  que,  sans  cela,  vous 
pourrez  vous  procurer  d'ailleurs  les  mêmes  objets 
si  nécessaires.  Que  votre  gouvernement,  par  exem- 
ple, puisse  se  charger  de  Tes  obtenir  ;  mais  d'abord, 
le  gouvernement  ne  pourrait  user ,  pour  les  avoir, 
que  des  mêmes  moyens  que  le  commerce  réclame  ; 
car  votre  gouvernement  n'est  dans  l'étranger,  lors- 
qu'il achète,  qu'une  véritable  maison  de  commerce.*^ 
Dans  ce  cas,  ne  vaudrait-il  pas.  mieux  laisser  au 
commerce  le  soin  d'exporter  rargent  qu'il  pourrait 
se  procurer  lui-même,  que  de  mettre  votre  gouver- 
nement dans  la  nécessité  d'employer  celui  qu'il  peut 
avoir  entre  ses  mains,  et  qui  sera  toujours  à  votre 
disposition?  Mais  la  vérité  est  que  votre  gouverne- 
ment ne  peut  suppléer,  par  ses  opérations  commer- 
ciales, à  celles  que  riuterét  particulier  peut  inspirer 
è  tous  les  négociants.  Il  ne  peut  vous  procurer  ce 
qui  vous  manque,  pas  même  en  faisant  de  grands 
sacrifices,  pas  même  en  éublissant  beaucoup  d'a- 
gences, pas  même  eu  montant  une  immense  machine 
sous  le  nom  de  commission  de  commerce.  Il  n'y  a 

t'amais  là  qu'un  seul  étabhssement  ;  et  un  seul  éta- 
blissement ,  quelque  vaste  qu'il  soit,  est  borné  dans 
ses  résultats.  Dailleurson  ne  trouvera  jamais  dans 
celui-là  le  vrai  mérite  du  commerce ,  l'intérêt  per- 
sonnel ;  et,  sans  cela,  rien  ne  peut  se  faire. 

Voulez-vous  un  exemple  de  l'insufBsance  du  gou- 
vernement pour  suppléer  au  commerce?  Cet  exem- 
ple, je  vous  l'ai  donné.  Vous  savez  avec  quel  fracas 
votre  commission  de  commerce  a  procédé.  Dix  mille 
agents  sont  employés  par  elle  ;  nartout  elle  a  des 
commissionnaires ,  des  corresponaants ;  elle  achète, 
par  voie  de  réquisition,  tout  ce  qu'elle  peut  envoyer 
a  rétranger;eileusedu  droit  de  préemption;  elle  fait 
des  marchés  libres.  Ici  elle  procure  toutes  les  créa- 
tions du  luxe  de  l'ancien  rf^gime ,  là  des  productions 
de  notre  sol,  ailleurs  d'autres  objets  d'échanee  ;  elle 
a  des  correspondances  dans  toutes  les  villes  de  TBu- 
rope  ;  le  monde  entier  retentit  du  bruit  de  ses  vastes 
spéculations.  Eh  bien,  tout  cela  n*a  abouti  qu'à  faire 
arriver  dans  nos  ports,  dans  l'espace  de  vingt- trois 
mois,  deux  millions  six  mille  quintaux  de  farine, 
c'est-à-dire  la  centième  partie  de  ce  que  vous  en 
consommez  annuellement,  c'est-à-dire  précisément 
ce  qu'il  faut  pour  nourrir  la  république  pendant 
trois  jours.  Et  remarquons  que  cette  administration 
a  été  elle-même  la  cause  d'une  dilapidation  inté- 
rieure, plus  considérable  que  ce  qu'elle  vous  a  pro- 
curé, par  les  transports,  les  einmagasinements,  la 
mauvaise  distribution  ;  et  concluons  de  ce  fait  deux 
choses  :  la  première, qu'il  est  impossible  que  le  gou- 
vernement puisse  suppléer  le  commerce  particulier, 
et  que,  par  conséquent ,  il  faut  s'en  rapporter  entiè- 
rement à  lui  en  lui  donnant  tous  les  moyens  qu'il 
peut  employer;  la  seconde,  et  qui  retentira  dans 
toute  l'Europe,  pour  porter  le  découragement  dans 
le  cœur  des  despotes,  c'est  que,  quels  que  soient  les 
efforts  des  tyrans ,  il  est  impossible  dVntamer  la 
France,  puisque,  environnée  d'ennemis,  chargée 
d'alimenter  quatorze  armées ,  d'approvisionner  des 
villes  menacées  de  sî^ ,  privée  de  toutes  les  imoor* 


lis 


tâlîons  du  commerce ,  et  voyant  son  àgricultare 
flétrie  par  cet  affreux  système  de  san^  qui  paralyse^ 
tout,  livrée  à  toutes  les  fausses  opérations  de  Tigno- 
rance ,  elle  a  vécu  par  ses  propres  moyens  pendant 
vingt-trois  mois,  en  n*emprunlant  de  Tétrangerque 
ce  qui  Talimente  pendant  trois  jours. 

J'ajouterai  en  finissant,  pour  répondre  à  ceux  qui 
craignent  que  cette  mesure  nous  enlève  notre  nu- 
méraire, que  la  prospérité  du  commerce  peut  seule 
Iç  retenir  ou  le  rapporter  ;  et  je  vais,  pour  rétablir, 
poser  quelques  principes  qu'il  est  utile  de  ne  pas 
perdre  de  vue. 

11  s'établit  entre  tous  les  commerçants  d*une 
même  nation  une  soKe  d^association  tacite  dont  le 
résultat  est  le  même,  et  qui,  quoique  formée  d'indi- 
vidus divers,  n'est  pourtaut  qu'une  seule  et  même 
chose,  que  l'on  peut  appeler  le  commerce. 

Quand  le  commerce  d'une  nation ,  c'est-à-dire 

3uund  l'ensemble  de  ses  commerçants,  vend  à  celui 
es  autres  peuples  pour  plus  de  valeur  qu'il  n'en 
achète,  les  autres  peuples  lui  doivent ,  et  cet  excé- 
dant se  paie  dans  la  seule  monnaie  généralement 
reçue ,  en  métaux.  11  s'établit  pour  cela  ,  entre  un 
peuple  et  tous  les  autres,  un  compte-courant;  celui 
qui  doit  commence  par  donner  en  payement  tout  ce 
qui  lui  est  dû  ,  dans  quelque  partie  de  la  terre  que 
soient  ses  débiteurs.  Si  le  commerce  français,  par 
exemple,  doit  100  millions  à  Gènes ,  et  qu'il  lui  en 
soit  dû  50  à  Hambourg,  60  à  Stockholm  et  10  à  Bâie, 
il  commence  par  donner  à  ses  créanciers  de  Gênes 
des  assignations  sur  ses  débiteurs,  et  quand  il  a  dé- 
légué tout  ce  qui  lui  était  dû,  il  solde  le  reste  en 
espèces  ;  seulement  il  perd  sur -les  montants  de  ses 
délégations  ce  qui  peut  en  coûter  à  son  créancier 
de  Gènes,  pour  les  faire  recevoir.  Voilà, en  deux 
mots>  toute  la  science  du  commerce,  toutes  les  opé- 
rations de  la  banque.  I 

Or,  si  vous  voulez,  au  lieu  d'envoyer  votre  argent 
aux  autres  peuples,  faire  que  ce  soient  les  autres  peu- 
ples, qui  vous  envoient  le  leur,  favorisez  lecomr- 
mercc  et  l'industrie  ;  faites  qu'ils  puissent ,  comme 
par  le  passé,  acheter  dans  nos  villes  les  produits  de 
votre  industrie  ;  faites  (|ue  Lyon  puisse  encore  en- 
voyer tous  les  ans  à  l'étranger  pour  60  millions  de 
marchandises,  Nhnes  pour  20,  Sedan  pour  10,  et 
vous  aurez  à  payer  de  moins  le  total  de  toutes  ces 
sommes. 

Wais  soyez  sûrs  que  ce  n'est  pas  en  fermant  vos 
lanières  que  vous  empêcherez  le  numéraire  de 
sortir,  à  moins  que  vous  ne  renonciez  à  rien  tirer  de 
l'étranger  ;  car  si  vos  négociants  ne  peuvent ,  par 
Tt  flel  de  vos  lois,  faire  sortir  aucun  numéraire,  c'est 
au  dernier  terme  ne  pas  payer  ce  qu'ils  se  trouvent 
devoir;  les  étrangers  ne  viendront  rien  leur  vendre, 
et  ils  ne  pourront  vous  apporter  aucune  des  choses 
cjiii  vous  manquent. 

Laissez  donc  sortir  le  numéraire,  puisque  vous 
avez  des  besoins,  et  rendez  ensuite  vos  manufac- 
tures florissantes,  et  faites  ensuite  que  les  étrangers 
viennent  acheter  chez  vous ,  et  vous  verrez  revenir 
le  même  numéraire,  non  pour  l'enfouir  encore,  mais 
jmnr  circuler  librement  parmi  vous  et  vivilier  votre 
industrie. 

Je  conclus  à  l'adoption  de  Tarticle. 

Telet  :  Il  est  peu  d'articles  qui  méritent  une  plus 
grande  discussion  que  celui-ci.  Je  craindrais,  si  lar- 
ticlc  était  adopté,  que  notre  commerce  ,  qui  se  fai- 
sait autrefois  sur  des  objets  ouvrés  dans  nos  manu- 
factures ,  ne  donnât  plus  en  échange,  à  l'exemple  ds 
l'Ëspngnc,  que  de  l'or  et  de  l'argent  ;  cela  nous  de-- 
viendrait  inlinimeut  plus  onéreux. 


On  propose  de  charger  les  comités  de  nous  pré- 
senter les  mesures  qui  assureront  la  rentrée  de  la 
valeur  des  sommes  exportées.  Je  ne  crois  pas  qu'on 
puisse  trouver  un  moyen  de  faire  rentrer  l'or  et  Taiw 
gent,  lorsqu'on  aura  souffert  qu'on  les  exporte  du, 
territoire  de  la  république.  Au  surplus,  ie  demande 
que  la  discussion  soit  solennelle,  et  que  l'on  n'épar- 
gne rien  pour  nous  instruire. 

Crarlier  :  Je  demande,  moi,  au  contraire,  que  la 
discussion  soit  promptement  terminée  ;  un  répablî- 
cain  ne  met  pas  de  différence  entre  un  écu  et  un  as- 
signat; mais  les  spéculations  des  agioteurs  en  ont 
établi  une  ;  c'est  au  commerce  à  rétablir  l'équilibre* 
Il  faut  lui  tout  abandonner,  et  ne  point  entamer  une 
discussion  qui  ne  peut  qu'être  funeste  à  la  fortune 
publique.  (  La  tuile  à  demain.) 


N.  B.  Dans  la  séance  du  13,Carnot  a  annoncé  la 
nouvelle  de  la  prise  de  la  ville  de  Grave,  du  fort 
Saint-André, de  lllede  Bommel  et  d'un  combatsous 
les  murs  de  Bréda ,  dont  les  ligjncs  ont  été  forcées. 
Nous  avons  pris  dans  la  même  journée,  cent  vingl 
bouche  à  feu ,  deux  drapeaux ,  la  caisse  d'un  ri- 
ment, trois  cents  chevaux,  et  fait  seize  cents  prison- 
niers. Dans  ce  nombre  ne  sont  compris  ni  l'artillerie 
ni  la  garnison  de  Grave,  qui  est  prisonnière  de 
guerre  et  qui  vient  en  Fraoce. 

La  Convention  a  décrété  que  Tarmée  du  Nord  ne 
cesse  de  bien  mériter  de  la  patrie. 

— -  La  Convention  a  chargé  ses  comités  de  lui  pré- 
senter les  moyens  de  retirer  une  partie  des  assignats 
en  circulation,  en  leur  prohibant  toute  espèce  de 
proposition  tendant  à  la  aémonétisation. 


LIVRES  DIVEBS. 

Sattdford  et  Merton,  traduction  libre  de  TangUif. 

Le  petit  Giandisson,  traduction  libre  du  holiandaft.ptr 
Derquin,  auteur  de  VAmi  des  Enfants,  éditiou  originale. 

Cesdeui  ouvrages  foment  ensemble  H  vol.  petit  fomal» 
brochés,  d'environ  144  pages  chacun.  Pris,  pour  Paris,  ISliv.; 
et  franc  de  port,  dans  tous  les  départements,  17  liv.  10  a»  A 
Paris,  chei  Rémont,  libraire,  rue  des  Granda-Augustioa, 
presque  vis-à-vis  ceUc  Christine,  n«  24. 

Nota,  Les  lettres  et  les  assignata  qui  ne  seront  pu  aflDrta* 
chis  resteront  au  rebut. 

—  Voyage  en  Afrique  et  en  Asie,  principalement  au  JapoOi 
pendant  les  années  1770  à  1779,  servant  de  suite  au  Voyage 
de  D,  Spnrmann,  par  Charles  Thunberg;  traduit  du  saMoia* 
avec  des  notes  du  traducteur  ;  in-8«,  orocbé  :  7  liv.  Chei 
Fucha,  libraire,  quai  dea  Augustins,  n*  SS» 

—  Nouvelle  Grammaire  italienne  pour  les  citoyenntig 
format  \vt-^^.  A  Paris ,  ches  Desenne ,  libraire ,  au  Jardin- 
Egalité. 

—  Ètreimes  des  républicains  français,  contenant  le  mNH 
veau  calendrier,  avec  les  fêtes  décadaires,  un  recueil  d*hjn* 
nés,  odes,  suivies  du  Catéchisme  militaire ,  pour  apprendre 
sans  maître  Teiercice  en  peu  de  temps,  et  du  Code  pénal  mi^ 
litaire,  utile  aux  officiers  de  tout  grade.  A  Paris,  coei  6im(> 
fier,  libraire,  rue  Gtt-le-Gonir,  n*  16. 


Payemenlê  à  la  trésorerie  natiinmU. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  iti  prt* 
miers  mois  ;  il  sera  fait  à  tous  cens  qui  serottt  portMW»  d'îA* 
scriptions  au  grand  livre.  Celui  pour  les  revtee  viagères  tA 
de  huitjBoil  vingt  et  un  jours  de  Tannée  I79S  (vieus  sljlt)* 


GAZETTE  NATIONALE  «a  LE  MONITEUR  IIIRSEL. 


N*  106. 


Quintidi  16  NivoêB^  fan  S*.  {Dimanche  4  JANViBfi  1795,  titut  ètyU,) 


ALLEMAGNE. 

Francfort  1 1$  84  décembre.  —  Lf  9  Frinçak  ont  ailaquéi 
If  14  au  loir»  le  poste  da  WeisMoau,  et  oot  obligé  les  pi« 
qtiets  allemands  de  se  replier  daoa  les  flècfaesi  les  futil- 
fades  sont  fréquentes 

—  Llmpératrlee  de  Annie  a  fak  aMoncer  è  la  cour  de 
Iftinich  qu'elle  peniettalc  titnporiatloo  dans  ses.Ëlats 
des  marchandises  fabriquées  dans  les  possessions  de  Télec- 
«tttr  palatio. 

-^  La  eoor  éi  Vienne  tt  on  fratid  nombre  de  ses  eo* 
Etal»  a/Ml  InfHé  «iile  de  lerliii  ft  se  Ailre  «nédlalrice  de 
Ja  paiiff  eetlt  dernière 41  répondu  que,  iaftée  d*Hne  telle 
«anfianee,  elle  nMait  emplojrfr  tous  lés  anoyens  qui  dépen* 
dent  dVIie  pour  procurer  la  pi^ix  à  Tlaipirei  cf  (tour  ou« 
trir  en  même  inopti  a'U  eii  f osaibk  #  loi  Toiea  d*iinf  pa- 
eificalion  féuérak^ 

▲NGLBTEnnB. 

Londriê ,  U  h  4B/«efR5re«— A  Pépoque  do  25  novembroi 
Camfral  How é  tenait  toujours  la  mer  ;  il  croisait  entre 
i^enibonefaorc  de  le  Manche  et  fa  latitude  de  Brest,  pour 
Manfer  rarrfvée  dea  flottes  marcbandei  de  Cadix,  de 
LiabonnéCl  d^Opofid,  eonfoyéei  par  ptuaieurs  Tafsscaut 
êê  gnerrty  dool  qnelqnea-ttns  ont  de  fortes  sommes  ft 


Coiiniotleproleelrice  m  tmxtét  à  SpMbead«  le  80 no* 
fembrtf  lena  nwnir  rencontré  dan»  m  croiaière  attcvne  es* 
cadre  françaiae*  liais  le  convoi  de  la  Méditerranée  n*esl 
Oicore  parfenn  «u^en  partie  dan»  Ici  porta  de  In  Orande- 
Brettpie»  dea  lenta  tSulcnta  rajfaal  diâpersé  à  Tcnlrée  dn 
cinaL  s  ^ 

—  La  Uégnt  la  Ctreé  nt  allée  cbercber  en  BoUande  te 
doc  d*York.  On  croit  qa^ll  ne  commandera  piM  sur  le 
«ontioeni,  cf  qoe,  pour  le  dédommager  et  le  consoler  de 
la  perle  «leeecefflimandemeùt,  on  lui  donuen  celui  des 
tnNtpeadermtdrkyr. 

—  Ce  qu'il  y  a  de  certain,  iTeat  qne  les  e^érancea  de 
fm»  a'éfnaouiaaent  éi  jonr  ew  jonr*.  Le  miniiatèfe  tient 
^'ordonner  In  le? ée  de  pluaienr»  noof  enoa  rég inienia,  et 
i'occupe  des  prépnmtife  poor  la  poursolte  de  la  gaerre* 

.  On  arait  compté  que  le  parlement  rentram  le  Si  n»- 
f  embre  fixerait  I  incertittfdo  du  public  sur  cet  oblet  ;  mais 
On  s'attend  &  le  toir  encore  prorogé  (usqu'au  Si  janvier, 
ennmie  eelnl  dlrlande  Ta  été  jusqu*au  22  du  même  mois. 
•^  Il  pinrtt,  d*aptti  des  kllres  de  diff&rents  porta  de 
rAméHqœ méridionale  et  septentrionale,  et  même  quel- 
qnea-pnasagea  de  la  Û€Ut$€^Ântiaoa^  que  les  Français 
ann(  pnrt enna  à  reprendre  fa  GnadeTonpe.  Le  petite  armée 
du  général  Grabam  retourne  en  Angleterre,  mais  aux  con- 
ditioBa  éê  nt  plaaaenlr  contre  la  France. 

—  On  repMie  CMore  d'une  daaeeme  aor  les  eOtes  de 
France»  donUn  condniti  aeraH  conOée  an  tord  Moyra.  On 
prétend  mèoM  %ne  to  duc  d'York  a  été  rappelé  poor  le 
consulter  sur  le^  moyens  de  faire  power  éirectemeM  ft.  Jer* 
tey  les  troupes  employées  Aor  le  oonlioei>L  Elles  serdienl 
embarquées  ft  Ambden  et  à  Memel ,  parce  que  les  Hollan* 
Ma,  qui  en  sont  fbrt  mécontents,  ne  souffriraient  pas 
qii*Hlea  to  fossenl  ft  Helvo  et  Slny^.  Néanmoins  ce  plan, 
domié  comt  font  foge  en  seerétafre  d*Etat  de  Tinlérieur 
M.  WyBdbaB,  ne  tpovfre  pas  grande  croyance  ;  de  même 
qu*on  kesi  pna  fwt  nisposé  i  crorre  aux  cinquante  mille 
Busiea  qne  to  viplslère  MMre  detofr  être  envoyés  inces- 
wimentiur  leabnrdadaiUifn,  pour  renforcer  la  coalition. 

—  On  attend  avec  impatience  des  nouvelles  de  (Vme* 
riea^  valunan  éi  74  ennini,  cbvgé  ée  pih»  de  900,000 
livres  sterling  en  espèces,  dont  oo  i**»pkis entendu  parler 
depuis  le  M  novembre  ^épo^ne  où  ii  avait  éié  aperçu  k  la 
hauteor  du  cap  Léxard:  on  le  flatte  qu'il  num  dirigé  sa 
marche  vers  Hrlande* 

—  L*iss.ue  du  procH  de  Thomas  Hardy  et  de  John  Bor- 
ne-Toote  en  promet  une  heureuses  M.  Thel  wall^l*  der- 
nier dm  nccnsés  Impliqués  diof  lii  même  alTaire. 

-"    wnwrinniWfctBnlfui^anetegédéindé^ 

d*  5crie«  —  Touiê  X* 


(eiise,  et  parmi  les  jurés  il  y  en  a  six  do  caui  qui  ont  absous 
Thomas  Hardy* 

PAYS-BAS.  > 

BfMeUéê^  U  S  nieoBei  -^On  écrit  de  Bonn  qne  le  re« 
présentant  du  peuple  Frécine  a  vMlé  les  différents  can*> 
lonnemems  de  Tarmée  de  Sambre-^-'Meuse,  et  a  parlé 
ainsi  à  la  garnison  de  Bonn,  aprte  l'avoir  pasaée  en  revue: 

•  Généreux  défenseurs  de  la  patrie,  vous  vous  montre* 
rex  dans  ce  pays  dignes  d«  voa  actions  héroïques,  dignes 
de  voire  propre  gloire*  Vous  prouverex  no  peuple,  aux 
yeux  duquel  on  vbus  a  peints  comaoe  de»  brigands  et  des 
cannibales,  que  les  républicains  français  sont  moins  des 
conquérants  que  des  amis  et  des  libérateurs.  Vous  n*a)ou- 
terez  pas  fol  5  ces  fuut  brûlis  de  paix  que  répandent  nos 
ennemis  vdiiicus,  pour  enchaîner  votre  mâle  courage. 

«  La  république  française  ne  recevra  point  lu  paix  des 
tyrans;  elle  la  leur  dfctera ,  après  la  avoir  rédnlis à  i'im- 
puissance  de  lui  faire  la  goerre.  t 
-  —  -  -  - — -,.  ^ .  ^    .  ■   -  - 

CONVENTION   NATIONALE. 

PréêiiUncé  de  Bêniaholê, 

nare  de  la  séANce  Dti  12  NiVôsii. 

DuHEM  :  Je  déclare  que  ^  d'après  les  développe'' 
tnents  contenus  dans  le  rapport  et  ceux  donnés  par 
uu  drs  préopinants  I  je  vote  pour  rak-tio)e;iii8i»j« 
crois  au  en  même  temps  que  doh^  le  décrëteriws  « 
nous  (levons  aussi  décréter  les  neiuresqiie  les  conii<- 
\è»  nous  |)rotn€ttent  pour  empêcher  <iue  ceticdtspu- 
sition  f  exig;e>  par  les  circonstances  ^  ne  tonrne  coih 
tre  la  républî4uS'  Quinze  jours  d'intervnlle ,  miré 
le  décret  qu^on  nous  propose  aujonrd'bui  et  1rs  pré- 
caution^  quil  nécessite ,  donneratPl»!  à  la  mniveîi- 
lai»ce  les  moyens  de  faire  scn'tir  de  France,  sans  au- 
cun profit  pour  li  coniDefC<}  #  une  grande  quaniitë 
d^or  eid^argent. 

L'ar^pnt  n'est  sûrcHMiit  p%A  dans  les  rmiiis  des 
n^rcbamls;  car  cenn-ci,  loin  d'en  cacher,  en  Mil  - 
toujours  aohelë  pour  fournir  à  leurs  spéculations;  et 
yc  connais  à  Lille  des  gens  qui ,  n'ayant  rieir  aa 
commeitcement  de  la  révolution  ,  sont  aujourd'hui 
rkJies  de  \  million ,  qu'ils  ont  gagné  à  faire  passer 
de  Targent  à  l'étranger.  Ainsi  l'argent  n'est  pais  chez 
les  négociants ,  mais  bien  dans  les  mains  des  gros 
propriétaires,  des  riches,  de  ceux  qui  ont  été  pour* 
suivis  par  les  mouvements  révolutionnaires,  de  ceux 
qu'on  appelait  aristocrates ,  et  qui  probablement  le 
sont  encore.  Ces  bommea  ne  sont  pas  les  mieil leurs 
amis  de  la  révolution ,  et  ils  pourront  tréa-bien 
I  profiter  de  l'article  pour  faire  passer  dn  numéraire 
a  leurs  fils,  leurs  neveux ,  leurs  consins  qni  se  bat* 
tent  coiUre  la  république.  Ainsi  nous  nous  trouve- 
rons sans  subsistances,  sana  métil  pour  en  acheter, 
et  je  ne  sais  pas  ce  qu'il  en  pourra  arriver  alors.  Je 
crots  dfone  qu'il  faudrait  exiger  un  cautionnement 
solide,  en  bien  fonds,  par  exemple,  qui  assurera  la 
rentrée  de  la  somme  sortie;  ou  bien  il  ne  faut  décré- 
ter cet  article  qu'après  tous  les  atrtre»,  ahn  que  jus- 
que-là les  comités  aient  le  temps  de  concerter  les 
mesures  qu'ils  se  proposent  die  noua  offrir. 

JoBANNOT  :  Les  comités  vons  proposeront  sâre^ 
ment  le  cautionneme»t  dont  parle  Dnbem.  Ils  ont 
pense  que,  d'après  les  principes  de  vraie  liberté  que 
vous  proclamez  tous  lesjours,  vous  no  poimez  roUf 
dispenser  de  permettre  l'exportatio»  00  l'or  et  dé 
Targenl.  D'ailleurs  notis  éprouvons  éts  besoins  de 
tous  les  genres ,  et  le»  objets  d  exportation  dimi-' 
nuentchaqoejotM*.  \\  faut  donc  fa irr  sortir  des  caves, 
pour  avohr  du  pain  et  da»  vêlements  en  ihondance, 
ottoc  9Û  aaionCMii*  Woi  se  M  poiat  la  rialMMo 

16 


114 


desBtats,  ce  sont  les  manufactures.  Si  un  marchand 
achète  chez  l'étrançcr,  pour  la  valeur  de  1  million , 
des  matières  premières  qu'il  travaille  ensuite,  et  qui 
lui  rapportent  2  millions  en  les  exportant,  il  fait  une 
chose  utile  à  son  pays;  il  (>nrichit  plus  que  celui 
qui  n'y  apporte  que  de  Tor.  Je  crois  qu'on  peut  tou- 
jours décréter  rarticle;  les  comités  présenteront  ces . 
,  mesures  très-incessamment,  et  la  loi  ne  sera  pas  pu- 
'  bliéc  avant  ce  temps. 

Bréabd  :  Je  crois  aussi  qu'on  peut  dès  à  présent 
décréter  l'article,  en  fixant  un  terme  avant  lequel  il 
ne  pourra  pas  avoir  3on  exécution  ;  avant  que  ce 
terme  soit  expiré,  les  comités  auront  présente  leurs 
vues  sur  les  précautions  à  prendre. 

Caubon  :  Le  numéraire  n'est,  aux  yeux  de  tous 
ceux  qui  savent  bien  l'apprécier,  qu'un  métal  beau- 
coup moins  utile  à  la  société  que  le  blé  et  les  autres 
choses  de  première  nécessité.L'Âssemblée  législative 
en  prohiba  la  sortie,  pour  empêcher  qu'on  ne  four- 
nît des  moyens  aux  émigrés  armés  contre  nous  ; 
mais  cette  mesure  fut  illusoire ,  car  on  ne  défendit 
pas  en  même  tenïps  la  sortie  des  denrées  et  mar- 
chandises; de  sorte  qu'on  emporta  toutes  les  choses 
dont  nous  avions  besoin  ;  et  les  émigrés,  en  les  ven- 
dant ,  trouvèrent  l'argent  qu'on  empêchait  de  leur 
faire  passer.  Ainsi  nos  ennemis  eurent  toujours  les 
mêmes  ressources ,  et  nous ,  nous  fûmes  privés  des 
choses  dont  nous  avions  le  plus  besoin. 

Lorsque  nous  vous  proposâmes  de  décréter  que 
les  troupes  cesseraient  d'être  payées  en  argent,  nous 
avions  un  motif  bien  puissant  que  nous  n'osâmes  pas 
déclarer;  mais  maintenant  que  le  danger  est  passé, 
nous  pouvons  le  dire  :  nous  dépensions  par  mois  15 
millions  en  numéraire,  et  il  ne  restait  plus  dans  le 
trésor  public  aue  600,000  liv.  en  espèce.  Depuis 
vous  avez  maUieUreusement  décrété  que  \fi  com- 
merce serait  fait  par  le  gouvernement  ;  eh  bien ,  la 
commission  qui  en  a  été  chargée  n'a  pas  donné 
d'objets  de  luxe  en  échange  des  choses  de  première 
nécessité  qu'elle  recevait;  il  a  fallu  que  cet  échange 
fût  fait  avec  du  numéraire  sorti  du  trésor  public.  Si 
nous  voulons  aujourd'hui  que  les  particuliers  fas- 
sent le  commerce,  il  faut  leur  en  fournir  le  moyen. 
Ils  ne  peuvent  pas  offrir  à  l'étranger  les  produits  de 
nos  manufactures,  puisqu'elles  ont  été  détruites  par 
les  événements,  et  qu'à  peine  pouvons-nous  suffire 
à  nos  besoins  :  il  faut  donc  y  suppléer  en  permettant 
l'exportation  du  numéraire.  Le  décret  que  vous  ren- 
drez à  cet  égard  ne  fera  pas  plus  de  mal  que  le 
système  qu'on  suit  à  présent;  car ,  au  lieu  qu^  ce 
soit  le  trésor  public  qui  exporte  le  numéraire ,  ce 
seront  les  particuliers.  Votre  décret ,  au  contraire , 
ne  peut  qu  être  favorable  à  la  république  ;  les  com  - 
merçants  sont  plus  industrieux  que  le  gouverne- 
ment; ils  nous  approvisionneront  mieux  que  celui-ci. 
On  ne  doit  pas  craindre  que  ce  décret  fournisse 
aux  émigrés  plus  d'argent  qu'ils  n'en  ont;  car, 
quand  vous  ne  le  rendriez  pas,  dès  qu'il  est  permis 
d'exporter  des  objets  de  luxe  qui  sont  d'un  débit 
facile  chez  l'étranger,  ils  peuvent  se  faire  de  l'argent 
en  les  vendant. 

Peut  être  abusera- t-on  de  cette  loi  ;  mais  quelle 
est  celle  dont  on  n'abuse  pas?  Faut-il ,  pour  ne  pas 
s'exposer  à  quelques  abus  de  ta  malveillance ,  que 
nous  mourions  de  faim  ? 

Si  nous  étions  dans  des  temps  ordinaires,  nous  ne 
nous  occuperions  nas  de  la  sortie  et  de  la  rentrée  du 
numéraire;  mais,  dans  les  circonstances  difHciles  où 
nous  nous  trouvons,  il  est  essentiel  de  prendre  des 
précautions.  Nous  ne  vous  proposerons  pas  de  don- 
ner des  acquits-à-caution;  car,  avec  un  acquit-à- 
caution  pour  3,000  livres ,  on  en  peut  faire  passer 
6  à  l'étranger;  mais  je  crois  qu'il  serait  bon  d'or- 
donner que  tous  ceux  qui  ont  du  numéraire  dont 


ils  voudront  commercer  le  déposeront  au  trésor  pur  ' 
blic  ou  dans  les  caisses  de  district ,  et  qu'on  leur 
donnera  i^ne  traite  sur  l'étranger ,  que  la  tréiorerie 
acquittera  au  moment  où  celui-ci  apportera  '  ses 
denrées  de  première  nécessité.  Je  crois,  au  surplus  » 
que  vous  ne  devez  pas  vous  refuser  d'adopter  le 
principe  que,  je  vous  le  déclare ,  nous  ne  vous  pro* 
posions  ^u'en  tremblant.  Je  demande  que  V9HU 
cle  soit  décrété,  et  que  vos  comités  vous  présentent; 
dans  deux  jours ,  IfS  mesures  à  prendre ,  dans  les* 
quelles  vous  tr(»uverez  les  moyens  qne  la  liberté  dn 
commerce  ne  défend  pas ,  et  que  le  bien  de  rsial 
commande. 

BoissiEUX  :  Je  crois  qu'on  gênera  encore  le  com- 
merce en  ordonnant  le  dépôt  du  numéraire  au  des* 
trict.  C'est  absolument  la  même  chose  que  de  sortir 
de  l'argent  ou  des  marchandises  :  ainsiii  ne  faut  pas 
mettre  à  la  sortie  de  l'un  plus  d'entrave  qu'on  n  ett 
met  à  c^lle  des  autres. 

Ehbmann  :  Il  y  a  sur  la  frontière  du  département 
du  Bas-Rhin  une  foire  célèbre ,  dans  laôuelle  nos 
bons  voisins  dépriment  les  assignats  sans  le  vouloir; 
la  raison  est  ^u'il  n'y  a  pas  de  matières  d'échange. 
Si  vous  décrétez  cet  article  sans  le  règlement,  et 
avec  le  mot  de  chotet  de  ^emière  néeeuUé^  ce  qui 
est  très-vague ,  vous  allez  avertir  tous  les  agioteurs 
d'acheter,  en  dessous  main,  nos  assignats  aux  étran* 
gers;  ils  en  feront  un  commerce  indme;  au  lien 
qu'en  décrétant  l'article  avec  le  règlement,  vous 
évitez  cette  perte.  Un  de  mes  coliques  m'assure 
que  depuis  longtemps  cela  se  pratique  à  Sarregue  - 
mines. 

RicHOUx  (de  l'Eure):  U  est  prouvé  que  le  gou- 
vernement est  insuffisant  pour  le  commerce;  ne  lir 
mitons  donc  pas  l'industrie  publique.  Si  di*  100  mil- 
lions en  numéraire  qui  sortiront  de  la  France,  la 
malveillance  ne  permet  pas  qu'il  en  rentre  plus  de 
50 ,  ce  sera  toujours  pareille  somme  que  nous  au- 
rons gagnée  pour  le  commerce  en  la  faisant  sortir 
des  caves  où  elle  était  enfouie. 

La  mesure  que  propose  Cambon ,  de  faire  déposer 
l'argent  dans  le  trésor  public,  qui  acquitterait  les 
traites  données  aux  étrangers ,  suppose  que  ceur-d 
nous  permettront  d'importer  leurs  marchandises 
avant  d'en  avoir  reçu  le  payement  ;  je  ne  crois  pas 
que  la  conduite  de  l'ancien  gouvernement  puisse 
leur  donner  assez  de  conUanee  en  nous  pour  qu'ils 
se  prêtent  à  ces  arrangements.  11  ne  faut  point  d'en- 
traves; laissons  la  plus  grande  liberté  au  com- 
merce ,  et  nous  en  sentirons  bientôt  les  heureui 
effets. 

JoHANNOT  :  J'adopte  l'amendement  de  Cambon. 
D'ici  à  très-peu  de  temps  les  comités  vous  propose- 
ront les  mesures  de  règlement  ;  je  pense  qu'on  peut 
adopter  l'article ,  parce  qu'il  ne  pourra  pas  être 
exécuté  ava.nt  ce  moment. 

L'article  VII  est  adopté  ainsi  qu'il  suit  : 

•  VIL  II  est  permis  aux  citoyens  qui  ont  du  numérafoe 
de  rcxporler,  à  la  charge  d^cii  faire  rentrer  la  oontre-vs« 
leur  en  objets  de  première  nécessité.  Les  comilés  de  salel 
public^  des  finances  et  de  commerce,  réunis,  proposeront 
dans  deux  jours  les  mesures  nécessaires  pour  régler  le 
mode  de  ces  exportations,  désigner  les  objets  à  ioipoilert 
et  prévenir  les  abus  qui  poui;pient  s'introduire  à  ce* 
égard.» 

Le  rapporteur  lit  l'article  VllI,  ainsi  conçu  « 

•  L'acte  de  naTÎgation  est  provisoirement  suspendu  jus* 
qu'à  ce  que  les  comités  de  marine  et  de  commerce  aient 
présenté  leurs  vues  sur  les  moyens  ft  employer  pour  en 
rendre  l'exécution  plus  certaine  et  pins  otile*  • 

Mabec  :  Je  demande  le  renvoi  de  tout  cet  srtielei 
non-seulement  aux  comités  de  marine  et  de  com- 
merce, mais  encore  à  celui  de  salut  public  ;  et  voici 
les  motifis  de  mou  opinion* 


115 


On  TOUS  propose  de  suspendre ,  c*est-â-dlre  de 
bîssor  croir<>  que  vous  pourrez  un  jour  consentir  à 
révoquer  Tacte  le  plus  sublime  de  votre  législation 
maritime  et  commerciale ,  Tacte  constitutionnel  de 
votre  commerce ,  la  seconde  constitution  de  notre 
immortelle  république. 

Je  ne  suis  pas  étonné,  citoyens»  que  le  rapporteur 
de  vos  comités  ait  rendu  quelque  justice  a  notre 
acte  de  navigation.  Le  rapporteur  et  les  comités  sont 
trop  sages,  trop  éclairés,  pour  n*avoir  pas  apprécié 
rhnportance  clii  décret  célèbre  dont  ils  proposent 
aujourd'hui  de  suspendre  Texécution.  Ce  serait  ce- 
pendant s'en  être  formé  une  idée  bien  imparfaite 
que  de  penser  qU*il  n*a  été  décrété  par  vous,  dans  le 
temps  le  plus  opportun,  c'est-à-dire  au  milieu  de  la 
guerre  que  nous  soutenons  contre  les  principales 

{missances  maritimes  de  l'Europe,  et  surtout  contre 
'Angleterre ,  qu'il  n'a  été ,  dis-je,  décrété  au  sein 
^e  ces  grands  orages  politiques,  que  pour  accroître 
le  nombre  de  nos  matelots. 

C'est  un  avantage  bien  précieux ,  sans  doute,  que 
de  pouvoir  augmenter  notre  population  maritime. 
Mais  cet  avant«'ige  n'est  qu'un  des  effets  inévitables 
qui  doivent  résulter  de  la  proclamation  et  du  main- 
tien de  notre  acte  de  navigation  ;  il  doit  aussi  aug- 
menter le  nombre  de  nos  bâtiments ,  raviver  et  faire 
prospérer  toutes  les  branches  de  notre  industrie, de 
notre  commerce  et  dé  notre  agriculture,  accroître  en 
tout  genre  tous  nos  moyens  ae  prospérité  publique 
et  particulière. 

Qu'il  me  soit  permis,  citoyens,  de  vous  rappeler  à 
cet  égard  quelques-uns  des  faits  et  des  calculs  quei 
îe  mis  sous  vos  yeux  le  3  juillet  17j93  (vieux  style)  Jr- 
lorsque  je  vous  fis  à  cette  tribune  le  premier  rap- 
port snr  Facte  de  navigation  que  vous  avez  décrété^ 
au  mois  de  vendémiaire  suivant. 

Je  vous  disais  que  c'est  dans  le  système  commer- 
cial de  l'Angleterre  .dans  le  système  commercial  le 
plus  savamment  combiné  de  toute  l'Europe ,  que 
nous  avons  puisé  cette  idée  qui  était  due  au  génie 
de  Cromweil ,  et  que  Charles  II  maintint  et  sanc- 
tionna de  tout  son  pouvoir ,  malgré  la  haine  qu'il 
devait  porter  au  meurtrier  de  son  père. 

Je  vous  disais  que,  lorsque  le  parlement  de  Crom- 
#e1l  décréta  l'acte  de  navigation,  en  1651,  le  com- 
merce maritime  de  l'Angleterre  ne  se  faisait  qu'avec 
06,000  tonneaux  de  jaugeage  ,  et  qu'en  moins  d'un 
siècle  et  demi,  c'est-a-dire  vers  1790,  ce  commerce 
comportait  800,000  tonneaux  de  transport;  avan- 
tage qui  explique  lui  seul  que  la  prospérité  de  la 
Grande-Bretagne  s'était  accrue ,  sous  tous  les  rap- 
ports industriels  et  commerciaux,  dansl^  propor- 
tion de  ses  transactions  maritimes. 

Je  vous  disais  qu'à  l'époque  de  mon  rapport, 
l'état  de  notre  marine  commerçante  était,  faute  d'un 
acte  de  navigation  française,  dans  une  pénurie,  dans 
un  appauvrissement  presque  semblable  à  celui  où  se 
trouvait  la  marine  commerçante  de  l'Angleterre 
lorsque  Cromwell  conçut  tout  à  coup  le  projet  vrai- 
ment sublime  de  son  fameux  acte  de  navigation  ; 
<|ue,  d'après  les  relevés  recueillis  par  le  ministère  de 
I  intérieur,  et  présentés  a  la  Convention  au  mois  de 
décembre  1792  (  vieux  style  ),  il  résultait  que  le  pa- 
villon français  ne  s'était  montré  que  pour  un  peu 
plus  de  deux  dixièmes  dans  l'ensemble  des  transports 
maritimes  de  tous  nos  échanges  avec  les  Levantins, 
les  Barbaresques  et  les  Anglo-Américains ,  pendant 
une  année  moyenne  de  1787  à  1789  inclusivement  ; 
tandis  que  le  pavillon  anglais  r.vait  paru  pour  quatre 
dixièmes  dans  ces  transports,  et  que  les  quatre  dixiè- 
mes restant  étaient  devenus  le  partage  desHol  landais, 
des  Espagnols  et  des  autres  peuples  maritimes; 
qu'ainsi  nous  étions  dévorés,dans  la  partie  peut-être 
la  pluttobstantielle  et  la  plot  productive  de  notre 


commerce  maritime,  par  ce  système  de  navigation 
intermédiaire ,  qui  résultait  chez  nous, au  seul  pro- 
fit des  étrangers ,  du  défaut  d'un  acte  de>navigation 
semblable  à  celui  d'Angleterre  ,  acte  qui  eût  con- 
centré entre  nous  et  les  commerçants  de  telle  ou 
telle  nation ,  avec  laquelle  nous  aurions  fait  nos 
échanges ,  tous  les  produits  de  nos  transactions  ré- 
ciproques. 

J'ajoute  aue  l'expérience  de  plus  d'une  année  n'a 
fait  que  confirmer  la  sagesse  de  la  mesure  que  vous, 
avez  eu  le  courage  de  prendre  en  proclamant  l'acte 
de  navigation  ;  que  toutes  les  puissances  alliées  et 
neutres  avec  lesquelles  vous  avez  tant  d'intérêtd'en- 
tretenir  et  d'accroître  toutes  vos  relations  commer- 
ciales ont  applaudi  à  ce  décret ,  parce  qu'elles  y 
ont  vu  le  gage  le  plus  certain  de  la  continuité  et  de 
l'augmentation  de  tous  les  avantages  que  leur  pro- 
met votre  alliance; qu'à  Philadelphie  principalement 
la  satisfaction  publique  s'est  manifestée  a  cet  égard 
de  la  manière  la  moins  équivoque;  et  que  jusqu  à  la 
Bourse  de  Londres  on  n'a  pu  s  empêcher  de  rendre 
hommage  à  ce  grand  acte  politique ,  malgré  tout  ce 
qu'il  en  devait  résulter  pour  l'abaissement  futur  de 
la  fortune  commerciale  de  l'Angleterre. 

Je  reviens  mai^ntenant  au  fond  de  la  question ,  et 
j'observe  que  le  seul  motif  qu'on  met  en  avant  |)our 
proposer  la  suspension  de  notre  acte  de  navigation , 
c'est  qu'il  résulte  de  son  exécution  un  préjudice  no- 
table pour  le  commerce  maritime  national ,  puisque 
les  assurances  des  bâtiments  français,  frétés  pour 
aller  de  Bordeaux  au  Havre,  coûtent  27  pour  100, 
tandis  que  celles  des  bâtiments  neutres  ne  coûtent, 
dans  le  même  cas,  aue  5  pour  100. 

Mais  d'abord  je  dis  que  j'ai  quelques  raisons  de- 
douter  de  l'exactitude  de  ces  calculs.  Tous  nos  ports 
sont-ils  donc  bloqués?  Y  a-t-il  une  chaîne  de  nâti- 
ments  ennemis  parallèle  à  tous  les  forts  qui  garnis- 
sent nos  côtes, d'une  extrémité  de  la  France  maritime 
à  l'autre  ?  Toutes  nos  mers  sont-elles  couvertes  de 
flottes,  d'escadres  ennemies,  pour  rendre  la  commu- 
nication d'un  port  de  France  à  l'autre  tellement  dif- 
fice  qu'il  en  coûte  27  pour  100  d'assurance  d'un 
bâtiment  français  frété  de  Bordeaux  au  Havre,  c'est- 
à-dire  pour  notre  navigation  intérieure ,  tandis  que 
le  même  prix  serait  à  peine  admissible  pour  la  navi- 

f cation  au  long  cours;  tandis  que ,  dans  ce  moment, 
es  assurances  de  bâtiments  anglais,  frétés  à  Lon- 
dres pour  la  Jamaïque,  coûtent  à  peine  16  à  17  pour 
100? 

Mais  j'admets  le  calcul  annoncé  pour  les  bâtiments 
français.  Comment  arrivet-il  que  les  bâtiments  neu- 
tres^ qui  ne  courent  pas  dans  ce  moment  plus  de 
risques  de  mer  qu'en  pleine  paix ,  et  qui  alors  s'as- 
surent ordinairement  a  1  ou  I  1  ;2  pour  1 00,  ne  puis- 
sent s'assurer  aujourd'hui  qu'à  5  pour  100?  Je  dis  - 
plus  :  comment  se  fait-il,  si  notre  acte  de  navigation 
est  bien  observé,  comment  se  fait-il  que  les  navires 
neutres  concourent  au  transport  maritime  de  nos 
denrées ,  de  nos  approvisionnements  d'un  port  de 
France  à  f  autre,  sous  la  protection  de  l'autorité  na- 
tionale? Je  ne  conçois  rien  à  cette  assertion.  11  y  a 
'  ici  erreur.  Les  navires  neutres  fréquentent  sans 
doute  nos  ports;  mais  c'est  pour  y  apporter ,  sous  la 
garantie  du  droit  des  gens,  les  productions  de  nos 
amis  et  de  nos  alliés. 

Suspendez  votre  acte  de  navigation  :  vous  rendez 
tous  ces  navires  saisissables;  vous  fournissez  à  l'ami* 
rauté  de  Londres  le  prétexte  de  faire  juger  bonnes 
prises  tous  les  navires  neutres  que  les  Anglais  ren- 
contreront chargés  à  la  hauteur  de  nos  ports;  vous 
fortez  l'atteinte  la  plus  funeste  à  votre  crédit  dans 
étranger ,  à  la  bonne  harmonie  que  vous  désirez 
entretenir  avec  toutes  les  puissances  neutres  et  al- 
liées; suspendez  votre  acte  de  navigation:  vous  ajou- 


116 


Ui,  k  totti  le9  YROonrtfnients  majntrt  qni  ont  rMM 
de  plusieurs  de  vos  lois  antérieurea  sur  le  fait  de  la 
jiculralité  ;  suspendes  votre  acte  de  navigation,  et 
vous  annonce!  à  toutes  les  puissances  amies,  dont 
la  prospérité  doit  trouver  son  principal  fondement 
dans  la  vôtre»  que  vous  déarspérez  d  humilier  Tor- 
gueij  de.  rÂngleterre,  de  mettre  un  frein  au  despo- 
tisme qu'elle  a  exercé  jusqu'à  présent  sur  toutes  les 
mei  s^  de  réduire  enlin  à  de  justes  bornes  ce  com- 
merce colossal  qui  menaçait  d'envahir  toutes  les 
transactions  commerciales  de  TEurope. 

Je  ne  dirai  plus  qu'un  mot.  Les  Anglais,  qui  8*en« 
tendent  bien  aussi  en  matière  de  commerce ,  n*ont 
jamais  suspendu  leur  acte  de  navigation.  On  ne  me 
citera  pas  de  bili  qui  ait  quelquefois  prononcé  cette 
suspension;  mais  la  nature  des  choses  même  J*amène 
nécessnireoient  pendant  la  euerre.  L'acte  de  naviga- 
tion est  alors  suspendu  de  fait  chez  eux  ,  comme  il 
ne  peut  manquer  de  l'être  chez  nous.  Tous  ceux  qui . 
connaissent  les  usages  observés  de  tous  les  temps 
par  les  bâtiments  neutres  navigant  au  milieu  des 
'  nations  en  ffuerre  sentent  parfaitement  la  possibilité, 
la  nécessite  même  d'une  pj^reille  suspensnon. 

Je  pense  donc  que,  si  les  inconvénient  dont  on 
BOUS  a  parlé  pour  le  commerce  de  F/ance  sont  réels^ 
ils  prennent  leur  source  ailleurs  que  dans  l'exis- 
tence  ou  la  continuité  d'exécution  Je  notre  acte  de 
navigation.  Je  pense  aussi  qu'ils  peuvent  être  dé- 
truits sans  recourir  à  la  suspension  proposée  ;  mais, 
comme  les  mesures  à  prendre  à  cet  égard  méritent 
d'être  mûrement  examinées  par  vos  comités ,  no- 
tamment par  celui  de  salut  public,  je  répète  ma 
proposition  de  renvoyer  la  totalité  de  l'article  du 
projet  de  décret  i  vos  trois  comités  réunis. 

JO0ANr4OT  :  Tout  ce  que  vient  de  dire  le  nréopi- 
nant,  concernant  l'acte  de  navigation,  confirme  ee 
qu*a  dit  le  comité  en  sa  faveur  ;  mais  le  comité  a 
pensé  qu'il  y  atait  peut-être  de  l'inconvénient  è  le 
maintenir  pendant  tout  le  temps  que  durerir  la 
guerre  ;  l'Angleterre ,  qui  sait  les  avantages  que  lui 
aonne  son  acte  <)e  navigation ,  n'en  suspend  pas 
moins  les  efiéta  quand  elle  est  en  guerre.  Votre  co- 
mité a  pensé  que  l'acte  de  navigation,  utile  sous  tous 
les  rapports,  et  que  la  France  soutiendra  de  tous  ses 
efforts,  serait  peut  être  dangereux  dans  le  moment 
actuel;. d'ailleurs  il  sera  peut-être  nécessaire  d'en 
•  revoir  quelques  articles.  J'apiiuie  le  renvoi  demandé 
I>ar  Mareo. 

Le  renvoi  de  l'article  aux  comités  est  décrété. 

Le  rapporteur  lit  l'article  IX;  il  est  adopté  en  ces 
termes  : 

•  IX.  La  CoDvenlloo  niUonale  enjointe  tous  les  agents 
de  1»  république,  è  tous  les  commandants  de  la  force  ar- 
mée, aux  olBcierf  civils  ei  milittiires,  de  filre  respecter  et 
observer  dans  toutes  leurs  disposkiont  le»  traités  qui  unis- 
sent la  France  aux  puissances  neutres  de  l'ancien  conll« 
neut,  et  aux  Etats-Unis  de  l'Amérique.  Aucune  atteinte  ne 
sera  portée  à  ces  truites.  Toutes  dispositions  qui  pour* 
raient  leur  être  contraires  soot  annulées,  » 

mit  ensuite  l'article  X. 

Pelet  :  Citoyens,  vous  avez  mis  à  Tordre  du  Jour 
îa  justice  et  la  probité;  c'est  ici  le  moment  de  prou- 
ver  que  vous  voulez  les  y  maintenir  à  jamais.  Si 
l'iult  ntion  de  la  Convention  avait  été  de  faire  une 
loi  fiscale,  je  n'aurais  pas  demandé  la  parole  contre 
l'article  qui  vous  est  proposé  ;  m^is  comme  rassem- 
blée n'a  voulu  faire  qu'une  loi  juste,  je  trouve  que 
l'article  soumis  à  la  discussion  contrarie  toutes  les 
règles  de  la  justice  et  même  de  l'humanité  ;  en  elïet, 
on  vous  propose  de  déclarer  que  les  créanciers  des 
émigrés  et  do  tout  individu  trappe  par  la  loi  sont 
créanciers  de  l'Etat ,  exceptant  cependant  les  créan- 
ciers de  ceux  qui  étaient  insolvables  à  l'époque  de 
U  çonfiscaUoo%  Faites  attention»  oitoycus^qoeoet 


artiete  frappe  un  grand  nontbre  de  fSimines,  et  ane« 
s'il  est  adopté,  l>eaucoup  d^enfanls  sont  réduits  a  la 
misère.  On  vous  propose  de  déelarçr  créanciers  de 
l'Etat  les  créanciers  des  émigrés ,  etc.  Or,  par  cet 
article ,  vous  rangea  au  nombre  de  ces  créanciera 
les  femmes  qui  auront  leur  dot  è  reprendre;  vous 
les  obliges  de  prendre  une  inscription  gùr  le  grand 
livre ,  ce  qu'elles  ne  peuvent  faire  sans  éprouver 
une  grande  perte.  Si  rinteution  de  Partide  est  de 
remlK>ursér  ce  qui  est  dû  aux  femmes  et  aux  enfaula 


Tarticle. 

Ch  ARUBR  :  Pelet  est  sortie  de  la  qnestlon:  car  per* 
sonne  ne  veut  prirer  les  femmes  et  les  enfants  d6 
leurs  droits  :  ces  droits  sont  sacrés,  et  l'on  ne  peu! 
discuter  eu  ee  moment  que  ce  qu(  est  relatif  aui 
créanciers;  et  à  cet  égard  je  trouve  que  l'article  nro« 
posé  est  trop  étendu  ;  je  ne  yeux  pas  qu'un  émigré 
Insolvable  paie  ses  dettes  aux  dépens  de  la  repu» 
blique.  Je  demande  qu'il  soit  mis  dan$  Tarticle 
que  l'Etat  se  charge  des  créances  des  éooigrés  et 
autree  condamnés ,  /uifii'd  concurrence  de  leun 
bieni. 

Camdon  :  La  question  que  nons  traitons  est  très- 
importante,  puisqu'elle  concerne,  d'une  part,  le  sort 
d'un  million  de  citoyens  français;  de  l'autre,  les  fi« 
nances  de  la  république  ;  enfln ,  la  stal)ilité  de  la  ré- 
volution. 

Chaf|ue  Jour  vous  entendex  à  votre  barre  les  té* 
clamations  des  nnalheureux  pères  de  Emilie  qui 
viennent  tous  demander  <;e  qui  leur  est  dû  par  des 
émigrés,  des  déportés ,  ou  par  des  hommes  tombés 
sous  le  glaive  de  la  loi  ;  vons  renvoyés  toutes  ces 
réclamations  à  votre  comité  des  Quances.  eu  lui 
recommandant  de  faire  incessamment  son  rapport* 
Peut-être  Paccusez-vous  de  lenteur  ;  ce  qu'il  y  a  de 
certain,  c'est  que  lescréanciess  en  retard  éprouvent 
les  plus  grands  besoins. 

Il  est  impossible  à  votre  comité  de  répondre  an 
désir  que  vous  avexsi  souvent  manifesté  d'accélérer 
la  liquidation  et  le  payement  de  ces  créances  si  lé- 
gitimes, si  vous  ne  re'formez  la  loi  du  mois  dejuillol 
1793, par  laquelle  vous  avez  déclaré  que  la  nation 
paierait  les  créances  des  émigrés,  déportés  et 
condamnés  jusqu'à  concurrence  de  l'actif  qu'ils  ont 
laissé. 

Vous  voyez  que  cette, dispdsition  est  conforme  è 
la  proposition  que  vous  fait  le  préopinant; ainsi ,  ai 
vous  persistiez  uans  cette  opinion,  vous  n'auriez  rien 
à  décréter. 

Les  comités  réunis  vous  proposent  de  déclarer 
dettes  nationales  les  créances  dues  par  les  émigrés» 
déportés  et  condamné? ,  en  exceptant  celles  des 
personnes  qui  étaient  insolvables,  lesquelles  ne  de«- 
vront  être  payées  que  jusqu'à  concurrence  de  l'actif 
laissé. 

Cette  mesure  accélérera  la  liquidation  des  créaa« 

ciersqui  sont  en  souffrance;  il  me  suffira  de  vous 

démontrer  les  embarras  qu'entratne  Pezécution  de 

la  loi  du  mois  de  juillet  1793,  pour  vous  convaincre 

;  de  la  nécessité  qu'il  y  a  de  la  reformer. 

En  ne  payant  les  créanciers  des  émigm  que  jus- 
qu'à concurrence  des  biens  qu'ils  ont  laissés,  vous 
êtes  obligés  de  tenir  un  compte  séparé  de  Psctîf  et 
du  passii  de  chaque  émigré  ;  de  là  résulte  Pobliga- 
tion  de  vendre  séparément  et  sans  mélange  leurs 
meubles  et  effets;  de  là  des  longueurs  dont  on  se 
plaint  dans  la  vente  du  mobilier  ;  de  là  des  frais  de 
garde  et  des  loyers  de  maison  qui  absorbent  une 
grande  partie  du  produit  de  l'actiu 

Si  la  nation  a  pesoin  de  quelques-uns  des  efets 
âts  émigrés ,  it  faut  qu'eHe  fosse  procéder  à  uue 


117 


estimation  particulière,  pour  en  porter  la  valeur  au 
crédit  du  compte  de  Témigré  auquel  ils  ont  appar- 
tenu. 

Si  un  homme  des  6ouches-du-BhOne,  tombé  sous 
le  glaire  de  la  loi  à  Paris,  est  possesseur  sur  lui  d'un 
bijou ,  il  faut  que  la  valeur  soit  portée  sur  son 
compte  dans  le  chef-lieu  de  son  district. 

Je  me  borne  h  vous  citer  ces  exemples  que  je 
pourrais  multiplier  ;  ils  doivent  vous  faire  sentir  les 
embarras  et  les  obstacles  ique  doit  entraîner  une- 
pareille  comptabilité,  qu^e  je  crois  impossible  à  exé- 
cuter. 

Tous  les  citoyens  qui  ont  eu  le  malheur  d*avoir  des 
débiteurs  en  faillite  savent  que,  lorsqu'on  est  obligé 
d*avoir  recours  à  une  distribution  d^ordredes  créan- 
ciers, on  attend  des  années  entières  pour  être  pla- 
cé en  rang  utile ,  et  on  éprouve  des  frais  considéra- 
bles qui  absorbent  une  grande  partie  de  Tactif. 

Eh  Dien,  d'après  le  prmcipe  décrété,  il  faut  que  la 
nation  procède  à  cent  mille  distributions  d'ordres  de 
créanciers,  car  elle  doit  en  faire  une  pour  chaque 
émigré,  déporté  ou  condamné;  il  faut  qu'elle  traite 
au  moins  avec  un  million  de  personnes  diflérentes,  et 
quVIle  tienne  un  compte  pour  chaque  créancier. 

Pour  pouvoir  exécuter  la  loi  de  juillet  1793,  il  faut 
non-seulement  tenir  uu  compte  séparé  de  l'actif  de 
chaque  émigré,  déporté,  etc.;  mais  il  faut  réunir 
tous  les  créanciers  du  même  émigré  dans  un  même 
chef-lieu  de  district.  Vous  avez  indiqué  pour  points 
de  réunion  les  chels-lieux  de  district  du  dernier  do- 
micile de  rémigré;  mais,  comme  il  se  trouve  que  leS 
biens  sont  souvent  situés  dans  divers  districts,  il  faut 
réunir  dans  ce  point  tout  le  produit  de  leur  actif, 
pour  le  comparer  avec  leur  passif. 

Il  a  fallu  nécessairement  prendre  des  mesures  afin 
qu'un  créancier  non  nécessiteux  ou  malveillant  n'en- 
travât pas  le  remboursement  de  tous  les  autres; 
vous  avez  donc  tixé  un  délai  dans  lequel  on  devait 
faire  enregistrer  au  chef-lieu  du  district  les  titrés  de 
créance,  et,  ce  délai  expiré ,  on  était  déchu  de  tout 
droit. 

Pour  prévenir  tous  les  créanciers,  vous  avez  été 
obligés  ae  foire  imprimer  les  listes  si  volumineuses 
des  émigrés  déportés  et  condamnés  qu*on  vous  a 
distribuées,  et  dans  lesquelles  il  est  si  îliflicile  de  re- 
connaître l'objet  qu'on  cherche. 

Beaucoup  de  citoyens,  sachant  que  leurs  débiteurs 
sont  émigrés,  ou  ont  été  déportes  ou  condamnés, 
sont  encore  embarrassés  pour  savoir  à  quel  district 
ils  doivent  déposer  leurs  titres  ;  il  n*est  pas  un  seul 
jour  que  je  ne  sois  consulté  sur  cet  objet,  et  je  suis 
très*em barrasse  pour  répondre  d'une  manière  posi- 
tive; en  attendant,  les  délais  expirent;  et  lorsqu'on 
se  présente,  ils  sont  échus;  de  là  des  réclamations 
sans  nombre  à  votre  comité  des  finances  sur  les  dé« 
chéances  encourues. 

Cependant,  si  vous  n'aviez  pas  déterminé  un  délai 
pour  la  remise  des  titres,  il  aurait  été  impossible  de 
pouvoir  satisfaire  aucun  créancier;  car,  en  ne  payant 
que  jusqu'à  concurrence  de  l'actif  laissé,  vous  deviez 
vous  assurer  du  montant  des  créances,  vous  deviez 
régler  l'ordre  des  créanciers, a iiu  de  ne  pasfavoriser 
un  chirographaire  au  détriment  d'un  hypothécaire. 
Je  le  répète,  parce  que  j'en  suis  persuadé  :  l'exé- 
cution décrétée  est  impossible  ;  et  tant  que  vous  lais- 
lerez  subsister  le  décret  du  mois  de  juillet  1793,  je 
défle  que  la  liquidation'soit  terminée  dans  cinquante 
ans.  Jugez  actuellement  quelles  réclamations  vous 
éprouverez  de  la  part  des  créanciers  malheureux, 
qui  n'Ont  d'autres  ressources  que  ce  qui  leur  est  si 
légitimement  dA  ! 

Je  n'ai  pas  besoin  de  vous  peindre  la  situation  des 
citoyens  créanciers  viagers,  de  ces  anciens  domesti- 
queS|  de  ces  fournisseurs,  de  ces  femmes  malheu- 


renses ,  qui  réclament  ce  qui  leur  est  légitimement 
dû  par  un  émigré,  déporté  ou  condamné,  et  qui» 
apresbien  des  peines  et  des  fatigues,  obtiennent  pour 
toute  réponse  :  •  Commencez  pas  prouver  que  votre 
débiteur  q  laissé  du  bien  jusqu'à  concurrence  de  ses 
dettes;  ou  :  Prouvez  qu'il  y  a  des  fonds  en  caisse  pour 
payer,  et  que  vous  êtes  en  rang  utile  pour  les  reoe« 
voir.»  Ces  réponses,  qui  dérivent  du  principe  adopte, 
doivent  nécessairement  faire  beaucoup  de  mécon- 
tents, et  altérer  la  confiance,  si  nécessaireaux  admi- 
nistrateurs. 

Je  sais  que  la  disposition  qui  vous  est  proposée 
par  vos  comités  offre  encore  des  difficultés;  elle 

Eourra  même  coûter  quelques  millions  à  la  répu- 
lique;  mais  encore  vaut-il  mieux  que  la  nation 
manque  à  gagner  quelques  sommes  plutôt  que  de 
ruiner  ou  de  faire  mourir  de  faim  un  nombre  infini 
de  familles  qui  sont  restées  fidèles,  et  qui  opt  même 
combattu  pour  la  défense  de  la  liberté. 

Vous  vous  montrerez  toujours  rigides  envers  les 
émigrés,  mais  vous  serez  justes  envers  ceux  qui  n'ont 
d'autres  torts  à  se  reprocher  que  d'avoir  connu  cea 
ennemis  de  leur  patrie. 

Le  principe  qui  vous  est  proposé  accélérera  la  li- 
quidation, tancfis  que  celui  adopté  par  la  loi  de  juil- 
let 1793  la  ferait  traîner  en  longueur.  On  pourrait 
même  dire  qu'elle  ne  serait  jamais  termine.  Ainsi, 
si  on  calculait  les  frais  des  commis  et  des  bureaux 
qu'elle  entraînerait  tantà  Paris  que  dans  lesdislricts, 
il  est  douteux  si  ces  frais  n'excéderaient  pas  l'éco- 
nomie qu'on  croirait  trouver  en  la  conservant. 

On  pourrait  craindre  que  de  faux  titres  de  créance 
n'absorbassent  l'actti  des  émigrés  ;.il  faudra  prendre 
des  précautions  contre  cet  abus;  ce  sera  lorsque 
vous  déciéterez  le  mode  de  liquidation ,  que  vous 
aurez  à  décider  les  titres  que  vous  reconnaîtrez  va- 
lables. 

Un  des  préopinants  a  paru  craindre  qu'en  décré* 
tant  le  principe  proposé  il  n'en  résultat  la  consé- 
quence que  les  créances  des  pères,  mères,  femmes  et 
enfants  des  condamnés  seront  inscrites  sur  te  grand 
livre;  cette  question  est  indépendante  du  principe. 
Ce  sera  lorsque  vous  décréterez  le  mode  de  rem- 
boursement, que  vous,  distinguerez  les  créances  qui 
devront  être  payées  en  assignats,  et  celles  qui  oc- 
vroiit  être  inscrites  sur  le  grand  livre;  c'est  alors 
que  vous  déciderez  si  les  inscriptions  provenaut  de 
c(^  liquidations  seront  admises  en  payement  des  do- 
maines nationaux;  cette  mesure,  que  je  crois  très* 
convenable,  accélérerait  considérablement  la  vente 
des  biens  appartenant  à  la  république  «et  leur  don- 
nerait une  valeur  très -considérable. 

D'ailleurs,  outre  les  diflicuités  et  les  frais  immen- 
ses résultant  de  la  liquidation  actuellement  adop- 
tée, vous  examinerez  s'il  n'est  pas  d'une  bonne  politi- 
auedefaire  disparaître  promptementles  qualifications 
e  créanciers  d'émigrés,  de  déportés  et  de  condam- 
nés. 

Décrétez  que  ces  dettes  sont  dettes  nationales; 
vous  disposez  de  suite  de  tout  leur  mobilier,  sans 
aucune  estimation  ni  formalité  ;  il  n'existera  plus  au- 
cune différence  ni  distinction  dans  la  vente  de.  leurs 
immeubles  avec  celle  des  biens  nationaux  de  pre- 
mière origine  :  accélérez  la  liiiuidation  et  le  paye^ 
ment  des  créanciers  des  émigrés,  etc.,  vous  accelé* 
rez  la  fin  de  la  révolution. 

Je  vous  l'ai  dit  plusieurs  fois  à  cette  tribune  :  li- 
quidez proniptement  tout  ce  qui  a  rapport  à  la  révo« 
lution,  et  vous  avancez  le  rétablissement  de  l'ordre  ; 
fuites  disparaître  les  anciens  titres  de  créance,  pour 
les  convertir  en  des  titres  républicains,  et  vous  at- 
tachez les  propriétaires  au  succès  de  la  république. 
Une  raison  qui  doit  surtout  vous  détcrmlMer  à 
adopter  l'article  qui  vous  est  proposé,  t'est  que  l'é- 


118 


migré  dont  vous  aurez  payé  les  dettes,  sans  en  tenir 
un  compte  séparé,  ne  pourra  plus  prétendre  à  ren- 
trer dans  ses  biens. 
Vous  affermissez,  par  cette  mesure,  la  confiance 
,  dans  les  biens  des  émigrés;  vous  accélérez  leur  vente, 
et  vous  donnez  du  crédit  aux  assignats. 

J'appuie  la  proposition  qui  vous  ^st  faite  par  les 
comités  réunis  ;  mais,  comme  la  question  est  très- 
importante,  je  prie  rassemblée  de  la  discuter  avec 
solennité;  quand  nous  devrions  y  sacrifier  plusieurs 
séances  pour  entendre  toutes  les. opinions  et  cher- 
cher le  meilleur  parti ,  ce  temps  ne  serait  pas  perdu 
pour  la  chose  publique. 

Rkal  :  Représentants  du  peuple,  la  question  qui 
fixe  en  ce  moment  votre  attention  est  de  la  plus 
liante  importance.  De  la  décision  que  vous  pren- 
drez sur  la  liquidation  des  créanciers  des  émrgrés 
dépendent  la  tranquillité  et  peut-être  les  moyens 
d'existence  d*un  million  de  Français. 

Quel  est  Tintérêt  de  ta  nation  et  celui  des  créan- 
ciers dans  la  question  agitée?  L*un  et  Tautre se  réu- 
nissent pour  solliciter  le  mode  de  liquidation  le  plus 
prompt. 

Il  importe  à  la  nation  qu*elle  jouisse  le  plus  tôt 

Sossible  de  la  juste  indemnité  qu'elle  doit  trouver 
ans  les  biens  des  traîtres  qui  ont  provoqué  cette 
guerre  impie  du  despotisme  contre  la  liberté. 

Un  autre  avantage,  c*est  au>n  liquidant  promp- 
tcment  ce$  créanciers,  vous  aonnez  une  plus  grande 
valeur  à  la  masse  énorme  des  assignats,  aux  biens 
nationaux  à  vendre ,  par  la  concurrence  simultanée 
qui  s'établit  entre  eux. 

Il  n'importe  pas  moins  aux  créanciers  des  émigrés 
de  se  voir  prômptement  remboursés.  Que  de  familles 
éplorées  attendent  avec  impatience,  depuis  plusieurs 
années,  un  payement  légitime,  leur  unique  res- 
source! Autant  les  émigrés  méritent  votre  indigna- 
tion, autant  leurs  créanciers  ont  des  droits  à  votre 
bienveillance. 

Citoyens,  lions  sommes  tous  d'accord  sur  un  point: 
c*est  que  les  créanciers  d'un  émigré  dont  l'actif  sur- 
passe le  p«is^if  doivent  être  payés. 

Nous  uediffiTons  que  sur  la  manière  de  constater 
la  solvabilité  de  l'émigré  (et  quand  je  parle  des  émi- 
grés, j'entends  aussi  parler  des  condamnés  et  des  dé- 
portés dont  les  biens  ont  été  conlisqués). 

Quelques-uns  de  nos  collègues  pensent  qu'un 
créancier  d'un  émigré  ne  doit  être  payé  que  lors- 
qu'il aura  été  rigoureusement  constaté  que  l'actif  de 
cet  émigré  excède  son  passif.  Pour  acquérir  la  con- 
naissance exacte  du  bilan  particulier  de  chaque  émi- 
gré, il  désire  qu'aucun  créancier  ne  puisse  être  payé 
avant  que  tous  les  créanciers  d'un  émigré  aient  été 
liquidés,  et  que  son  actif  soit  exactement  connu. 

Cette  mesure  nous  jette  nécessairement  dans  une  < 
liquidation  centrale,  dans  les  longueurs  et  les  frais 
énormes  qui  en  seront  la  suite.  I 

Vos  comités  vous  proposent,  au  contraire,  un  ' 
moyen  simple  et  facile. 

Déclarez  que  tout  créancier  d'un  émigré  qui  était 
notoirement  solvable  à  l'époque  de  son  émigration 
est  créancier  direct  de  la  nation;  qu'une  enquête  de 
commune  renommée,  faite  par  le  conseil  général  de 
la  commune  du  principal  domicile  de  l'émigré,  con- 
state cette  solvabilité;  qu'à  l'instant  chaque  créan- 
cier, porteur  d'un  titre  légitime  de  créance,  soit  li- 
liquidé  définitivement  par  le  directoire  de  son  dé- 
partement, et  payé  sur  ses  loyers.  Enfin ,  soumettez 
a  des  formes  plus  rigoureuses  les  créanciers  de  l'émi- 
gré dont  la  solvabilité  était  douteuse.  Avec  un  moyen 
aussi  simple,  vous  ne  compromettez  point  les  inté- 
rêts du  trésor  public  ;  vous  faites  disparaître  les  en- 
traves, les  embarras  inextricables  d*ane  liquidation 


centrale;  vous  apaisez  les  justes  réclamations  d'un 
million  de  citoyens. 

Dans  une  liquidation  aussi  immense,  n'espérez 
point,  citoyens,  de  pouvoir  jamais  obtenir  une  exac* . 
titude  rigoureuse,  une  précision  mathématique. 

Vous  aurez  atteint  le  but  que  vour  cherchez,  si 
vous  trouvezun  moyen  prompt  pour  tracer  une  ligne 
de'  démarcation  entre  l'émigré  solvable  et  celui  qui 
ne  Test  pas,  de  manière  que  les  intérêts  de  la  répu- 
blique ne  soient  pas  compromis. 

L  enquête  basée  sur  la  commune  renommée  me 
paraît  être  la  boussole  qui  doit  régler  votre  marche. 

Pour  apprécier  ce  moyen,  que  chacun  de  vous  se 
reporte  au  sein  de  sa  commune.  Sur  dix  émigrés  de 
votre  connaissance,  voyez  si  vous  n'êtes  pas  à  même 
d'attester  que  neuf  d'entre  eux  étaient  ou  n'étaient 
pas  solvables;  il  est  facile  de  jugeV  par  l'état  de 
maison  d'un  citoyen,  par  sa  conduite,  par  sa  fortune 
apparente ,  quelle  est  à  peu  près  la  situation  de  ses 
atfaires. 

Je  ne  me  dissimule  point  cependant  que  ce  mode 
pourra  jeter  dans  quelques  erreurs,  et  avoir  quel- 
ques inconvénients. 

Mais  qu'ils  sont  légers  auprès  de  ceux  qu'entrât* 
nera  nécessairement  la  liquidation  centrale  qu'il 
faudrait  établir  à  Paris  ! 

A-t-on  bien  calculé  le  nombre  d'années  qu'il  fau- 
drait pour  opérer  une  pareille  liquidation  ;  la  foule 
immense  de  commis  inU^essés  à  la  prolonger  en- 
core; les  frais  énormes  qui  en  seraient  la  suite;  la 
correspondance  à  établir  entre  tous  les  districts,  et 
même  avec  chaque  créancier;  et,  par-dessus  tout 
cela,  les  longues  privations  et  les  justes  plaintes  d'uo 
million  de  créanciers? 

Veut-on  se  former  une  légère  idée  de  ce  travail  ? . 

En  1764,  le  gouvernement  voulut  liquider  diffé- 
rents emprunts,  où  se  trouvaient  intéressées  qua- 
rante-deux mille  parties  prenantes; il  fallut  cinq  an- 
nées pour  effectuer  cette  liquidation. 

Aujourd'hui  vous  avez  environ  quatre- vingt  mille 
émigrés  ou  condamnés;  on  estime  qu'ils  peuvent 
avoir,  l'un  portant  l'autre,  douze  créanciers ,  parce 
qu'il  faut  ranger  dans  cette  classe  les  pères,  les 
mères,  les  veuves  et  les  enfants. 

Le  nombre  total  des  créanciers  doit  donc  se  por- 
ter à  près  d'un  million.  • 

On  a  donc  eu  raison  de  vous  dire  que  cette  liqui- 
dation était  inexécutable,  et  ^ue  vingt  ans  ne  suffi- 
raient pas  pour  la  conduire  a  sa  fin. 

Dans  cette  position,  quand  le  gouvernement,  ea 
adoptant  le  mode  simple  et  expéditif  proposé  parles 
comités,  courrait  le  hasard  d'acquitter  quelques 
créances  au  payement  desquelles  une  liquidation 
lente  et  rigoureuse  aurait  pu  )e  soustraire,  n*en  se- 
ra-t-il  pas  amplement  dédommagé  par  la  diminu- 
tion dans  les  frais,  par  la  plus-value  des  biens  na- 
tionaux, et  la  satistBction  de  rendre  une  prompte 
justice  ? 

Je  termine  par  une  observation  qui  pourra  dissi- 
per tous  les  doutes  qui  resteraient  encore;  elle  est  ti- 
rée de  l'énorme  excédant  de  l'actif  des  émigrés  sur 
leur  passif. 

11  résulte  d'un  travail  fait  par  la  commission  des 
revenus  nationaux,  que  la  valeur  approximative  des 
biens  confisqués  au  profit  de  la  nation  s'élève  à  la 
somme  de  12  milliaras  (1),  et  que  le  passif  affecté  sur 
les  mêmes  biens  ne  monte  pas  à  la  somme  de  1,500 
millions. 

Il  est  donc  évident  que  Tactif  des  émigrés  excède 
six  fois  leur  pasfif;  ce  qui  concourt  toujours  plus 

(I)  Ce  calcul  est  d*aulant  pins  eiacl  »  que  le  reprétenlant 
du  peuple  Johannot.  dans  son  rapport  ao  non  des  cinq  comi- 
tés réunis,  est  arrivé  au  mène  résulut  par  des  calculs  diffs- 
renu.  A*  M* 


11« 


p 

les 


â  prouver  qa*il  n*y  a  point  de  danger  à  faire  acquit- 
ter les  dettes  passives  des  émigrés  qui  étaient  notoi- 
rement solvablesà  Tépoque  de  leur  émigration. 

Qi/ils  cessent  donc,  les  ennemis  de  la  liberté,  de 
répandre  desdoutes  sur  la  valeur  immense  des  biens 
des  émigrés,  sur  le  saee  de  notre  papier-monnaie  ! 
Outre  les  12  milliards  dont  je  viens  de  parler,  la  na- 
tion compte  encore  dans  son  actif  disponible  plus  de 
3  milliards  en  biens  nationaux  de  première  origine, 
en  domaines  engagés  et  en  forêts  nationales.  Com- 
bien nos  ressources  sont  supérieures  à  toutes  celles 
des  puissances  coalisées  ! 

Oui,  on  ne  saurait  trop  le  répéter  pour  neutrali- 
ser la  malveillance  qui  nous  entoure  :  le  gage  des  as- 
signats est  certain,  la  valeur  de  l'hypothèque  sur  la- 
quelle re|)Ose  notre  papier-monnaie  est  encore  deux 
fois  supérieure  à  la  masse  du  signe  mis  en  circula- 
tion. Que  les  citoyens  se  rassurent  pleinement.  Si 
jamais  le  besoin  de  diminuer  la  masse  des  assignats 
se  Tait  sentir,  les  principes  de  justice  qui  animent  la 
Convention  sont  connus  ;  elle  nVmpioiera  que  des 
moyens  libres  et  purement  volontaires.  Cinq  comi- 
tés réunis  Tont  dcCclaré  par  Torgane  du  rapporteur. 

Je  reviens  à  la  liquidation  des  créanciers  des  émi- 

és,.et  je  conclus  à  l'adoption  du  mode  présenté  par . 
es  comités.  (Applaudissements.) 

TniBioif  :  C'est  parce  que  la  république  doit  être 
juste  envers  tous  Içs  citoyens,  qu'il  ne  faut  pas  favo- 
riser des  hommes  qui  n*ont  aucune  prétention  fon- 
dée, et  les  payer  au  détriment  des  vrais  créanciers. 
Me  pourrait  on  pas  trouver  un  moyen  d'abréger  les 
formessans  les  anéantir  toutes?  N'y  a-t-il  pas  moyen 
de  payer  ceux  qui  ont  une  hypothèque  solide ,  sans 
donner  de  l'argent  à  tous  ceux  qui  se  présenteront 
indistinctement  ? 

Pluiieuri  voix  :  On  ne  propose  pas  ça. 

Tbiriom  :  Je  sais  bien  que  Farticle  porte  une  ex- 
ception pour  ceux  qui  étaient  insol vantes;  mais  le 
moyen  qu'on  propose  pour  reconnaître  l'insolvabi- 
lité est  illusoire.  On  consultera  le  conseil  général  de 
la  commune  ;  mais  il  ne  pourra  répondre  de  l'état  de 
la  fortune  de  l'émigré  que  dans  sa  commune  ;  et 
rbomme  qui  n'aura  la  que  6,000  livres  de  dettes  avec 
un  capital  de  10,000  liv.,  pourra  ce|>endant  devoir 
150  ou  200,000  liv.  dans  les  autres  communes  de  la 
république.  Cet  homme  sera  déclaré  solvable,  et  la 
nation  sera  obligée  de  donner  200,000  livres  pour 
10,000  qu'elle  aura  reçues. (Murmures.)  Ne  pourrait- 
on  pas  inviter  tous  les  créanciers  à  faire  connaître  à 
un  bureau  central  le  montant  de  leurs  créances? 
ainsi,  dans  deux  mois,  nous  connaîtrions  la  masse 
du  passif. 

Plusieurs  voix:  C'est  fait. 

Thibion  :  D'après  quelles  données  cela  est-il  fait? 
On  a  intérêt  dans  ce  moment  à  faire  croire  que  les 
dettes  sont  petites,  j^our  faire  adopter  l'article. 

Plusieurs  voix  :  Vous  supposez  donc  que  les  co- 
mités sont  de  çiauvaise  foi  ? 

TaiBioir  ;  Si  je  connaissais  le  montant  do  passif  et  celui 
de  Tactil  ie  ne  balancrrais  pas  è  consentir  que  la  nalion  se 
cbargcai  d*ane  dette  de  2  mUliards,  si  les  biens  en  f  aient 
1 3  ;  mais,  eomme  ks  calcals  ne  sont  pas  faits,  je  suis  fondé 
à  les  réToquer  en  doute. 

On  a  comparé  la  dette  des  émigrés  à  celle  du  clergé  s  et 
parce  que  Tanea  été  déclarée nalioiiale,  on  en  conclut  qu'il 
faut  aussi  déclarer  Tautre.  C^esl  un  sophisme;  la  nation 
t'est  chargée  des  dettes  de  la  corporation  du  clergé;  mais, 
en  prenant  les  carcs,  elle  n'a  pas  promis  de  payer  les  dettes 
descoréta 

Si  vous  adopiiei  cet  article,  ce  serait  donner  aux  fripons 
an  mode  de  s*enricbir  :  ils  émigreralent  après  avoir  con- 
Iradé  des  dettes  simulées,  que  la  nation  serait  obligée  de 
payer,  et  dont  ils  partageraient  ensuite  la  montant  avec 
ceux  qui  l'iorakot  itçn.  (Mormnra» } 


CtADiu. :  L*orateur  pose  on  pimcipe  finx  :  la confisct* 
tlon  ne  peut  avoir  lieu  qu'après  que  tous  les  créanciers 
sont  payés  ;  la  Convention  ne  l'a  jamais  entendu  autre- 
ment. (Non,  non!) 

Tiibioh:  D'après  le  décret,  les  dettes  des  émigrés  ou 
condamnés  ne  seront  pas  payées  jusqu'à  concurrence  de 
leurs  biens;  un  paiera  tout  ce  qui  se  présentera ,  de  ma» 
nière  que  l'homme  qui  voudra  émigrer  ou  tomber  sous  le 
glaite  de  la  loi  contractera  Pimpossible  de  dettes.  (On  rit») 
Nous  devons  être  d'autant  plus  parcimonieux  de  la  fortune 
que  la  république  a  légitiroeotent  acquise,  qtie  nous  avons 
contracté  des  engagements  immenses  envers  les  dérenseura 
de  la  république. 

BsTPaoT  :  Sans  doute,  si  un  émigré  n*avaitde  biens  que 
dans  le  district  qu^il  habitait,  et  de  créanciers  que  dans 
une  commune  de  la  république,  U  serait  fucile  de  liquider 
promptement  ses  créances,  ei  de  coonaUre  Télat  de  sea 
biens;  mais  comme  cela  n'est  pas,  il  faut  au  moins  cinq 
ou  six  ans  pour  parvenir  è  connaître  TacUr  et  le  passif  des 
émigrés.  Pendant  ce  Ifmps,  des  créanciers  nécessiteux 
vous  demanderont  des  secours  provisoires  que  vous  accor^ 
cUrrex,  et  qui  seront  peut-être  perdus  pour  la  république. 

Ce  qui  retardera  surtout  cette  liquidalion  est  b  difliculté 
qu'il  y  aura,  dans  plusieurs  communes  de  la  républiquet 
de  reconnaître  les  biens  qui  appartiennent  à  tel  émigré  ou 
condamné.  A  Toulon  et  à  Lyon,  par  exemple,  il  y  a  eu 
confusion  ;  on  a  mis  ensemble  les  meubles  des  émigrés  : 
or,  je  vous  demande  comment  vous  pourrex  connaître 
Taclif  de  ces  hommes  et  liquider  leurs  créances ,  si  vous 
adoptez  l'amendement  qui  a  été  fait  de  ne  rembourser 
que  jusqu'à  concurrence  de  leurs  biens?  En  déclarant  iea 
créances  des  émigrés  deUes  nationales  voutf  faites  un  acte 
de  justice,  et  vous  donnes  de  la  confiance  à  vos  biena 
nationaux.  Je  demande  que  la  dette  soit  reconnue  natio* 
nale. 

On  demande  la  clôture  de  la  discussion. 

MéAVLLB  :  Pour  se  déterminer  sur  cet  articlequi  intéresae 
esseotiellemeot  la  fortune  publique,  il  faudrait  d'abord 
comparer  le  plan  actuel  du  comité  des  finances  pour  la  li« 
q nidation  des  dettes  des  émigrés  avec  celui  qu'il  se  propose 
de  soumettre  à  l'assemblée.  Vous  pourries  vous  assurer 
alors  si  la  liquidation  sera  prompte,  et  si  vous  séclierex  les 
larmes  que  chaque  jour  un  grand  nombre  de  familles  ré* 
pandenL  Je  demande  que  l'article  qui  vous  est  proposé  soit 
extrait  de  la  toUlilé  du  projet,  et  qu'on  vous  présente 
d'ubord  les  moyens  d'effectuer  promptement  la  liquidation 
des  dettes  des  émigrés. 

BimoT  :  Le  comité  n'a  pu  vous  présenter  d'abord  les 
conséquenres  d'un  principe  que  vous  n'avez  pas  décrété» 
Adoptex  d'abord  l'article  qui  vous  est  proposé,  et  votre 
comité,  pénétré  des  sentiments  de  justice  qui  vous  ani* 
ment ,  vous  présentera  les  moyens  d^une  prompte  liquida* 
tioo. 

GAaifiaa  (de  Saintes)  :  En  décrétant  aujourd'hui  la  li- 
quidation totale  des  dettes  des  émigrés,  la  république 
gagne  plus  que  de  laisser  ces  biens  entre  les  mains  d'admi« 
nistraleurs  qui  sont  les  requins  de  la  république.  J'appuie 
l'article. 

L'article  proposé  par  le  rapporteur  est  adopté  en  ees 
termes  : 

«  X.  Lescréanciers  des  émigrés  et  de  tout  individu  frappé 
Idc  la  confiscation  de  ses  biens  sont  déclarés  créanciers  dl« 
rccts  de  l'Etat;  en  conséquence,  la  trésorerie  nationale 
portera  dans  les  recettes  ordinaires  les  sommes  provenant 
des  biens  des  émigrés. 

«  Sont  exceptés  les  créanciers  de  ceux  qui  étaient  en 
faillite  ou  notoirement  insolvables  à  l'époque  de  la  con* 
fiscation.  L'état  de  situation  des  biens  sera  constaté  par 
une  enquête  sommaire  sur  la  commune  renommée. 

fl  Les  comités  de  législation  et  des  finances  présenteront 
inci^ssamment  leurs  vues  sur  la  manière  prompte  et  sCtre 
d'accélérer  cette  liquidation,  etaur  la  natare  des  titres  de 
créance  qui  seront  admis,  t 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SiANCa  DU  13  RIVOSB* 

ÇàÈsm  i  Je  viens»  au  nom  dn  comité  de  wlat  pobUe» 


120 


vous  fuire  pari  d'une  noufellc  Tictoîre  remportée  par  Tar- 
mée  du  Nord  (vifs  applaudissement),  ou  plulAt  de  trois 
f  icloires  remportées  par  elle  le  même  jour  sur  les  bords  da 
WuliaU  rt  sur  le  Walial  même  que  la  gelée  avait  rendu 
solide.  (Nouveaux  applaudissements.) 

Noua  avons  eu  déjà  oce«Mlon  de  fooa  indiquer  «m  ftc- 
tlon  dont  le  but  était  d*amollir  lecouragede  noadéfenMurs, 
en  répandant  des bmlts depaii et  d*armistice  ;  des  )oumao« 
corrupteurs  de  l'opinion  publique  ont  dit  que  la  guerre 
était  suspendue  snr  les  bords  de  la  Meuse  \  que  nous  aviona 
été  iMillus  devant  Mayence  ;  que  nous  avions  perdu  trente 
mille  bommes  pér  It^s  inondations  de  la  Hollande;  que  les 
tonditiuna  de  la  paix  serulent  la  rentrée  des  émigrés  (vio« 
lents  murmures  ) ,  la  restitution  de  leurs  biens,  la  révision 
des  jugemenU  rendus  par  l'ancien  tribunal  révolutionnaire; 
qu'un  de  nos  généraux  les  plus  célèbres  et  les  plus  fidèles 
marcbait  sur  Paria»  à  la  tête  d'une  wmét  de  deux  eenl 
mille  bommes.  (  Rumeurs»)  Il  est  à  remarquer  que  cet  per- 
fides rêveries  ont  toujours  été  les  avan(<oureurs  des  vio* 
tolres  les  plus  signalées.  (  Applaodissemeols.^  L^amiëc  du 
Rbio  a  déjà  roami  sa  réponse  à  ces  bruits  par  la  prise  iw- 
porlantf  du  fort  de  la  léle  du  pont  de  BlaoheUn*  L'armée 
du  Nord  envoif  aujourd'hui  la  sienne. 

Noire  colU-gue  non»  annonce  qu'elle  s'est  emparée  de  la 
ville  de  Grave,  de  111e  de  Bommel,  du  fort  Saint-André, 
et  qu'elle  a  battu  le  aiéme  jour  l'ennemi  sous  les  murs  de 
Dréda,  (Vifk  applaudiaseosnts.  —  La  salle  retentit  des  cris 
de  9i99  ta  répuèii^uëJ)Hoi  troupes  onl  Ira  versé  le  Wabal' 
qui  était  gelé  (  il  est  large  dîi  fois  ceame  la.  Seine  ) ,  sans 
artillerie,  et  ont  été  attaquer  avec  leurs  seul<*s  bafonnctles 
les  batteries  ennemies  placées  sur  l'autre  rive.  (  Vifs  ap- 
Blaodiaaementa.)  Ces  batteries  ont  été  enlevées,  ainsi  que 
les  soixante  pièces  de  canons  qui  les  dérendairnt  ;  la  même 
quantité  d'artillerie  a  été  prise  tant  snus  les  murs  de  Brëda 
que  dans  le  fort  Saiot-Andi^  (Nouveaux  applaudisse- 
ments. )  Nous  avons  fait  seize  cents  prisonniers,  sans 
compter  la  garniton  de  Grave,  qui,  avec  sou  ariillerie  for- 
midiib!e,  est  au  pouvoir  de  la  république.  (Les  applau- 
dhwments  redoublent.) 

n*après  ces  événements,  vous  par^onnerex  aux  Anglais 
de  reg^arder  nos  volontaires  comme  de  grands  terroristes... 
(On  rit  et  l'on  murmure.) 

Tàhun  :  C'est  un  calembour  à  là  Barère. 

P(u9kwr§  99(9  e  G*ést  une  carmagnole  qa'oo  a  voulu 
Ulller. 

Cabnot  :  Bt  de  ae  prohiettrei  si  jamaK*  Ils  peuvent  se 
rassurer,  de  se  mettre  dix  contre  un  et  de  bien  se  venger 
d*a\oir  eu  peur.  (On  rit.)  Maison  ne  reprochera  pas  ù  nos 
volotttaires  d'avoir  porté  la  terreur  aillein-s  que  dans  le 
camp  de  bos  ennemis  (vifii  applandif«euient!i),  car  les 
ipottlca  vienneot manger  dans  leur  camp  sans  crainte  d'étrr 
mangées  elles-mêmes.  Ils  n'en  veulent  qo*sux  royalistes; 
Us  vivent  en  frères  avec  leur  chef;  et,  lorsqu'ils  ont  vaincu. 
Ils  ne  le  chicanent  pas  sur  la  manière  dont  il  les  a  fait 
vaincre.  (  QuHques  applaudissements.) 

Voici  la  pièces  officielles* 

Le  rtprésûutmHt  eu  ftfuple  préi  les  mtnéêi  du  Nord  et  de 
Sambrcet-Meuse  d  $cs  collègues  du  comité  de  ialut 
public, 

A  fiois*1c-Duc,  le  Ô  nîvoso ,  l'an  3^  de  la 
r<'pui>lique. 

•  Lcsélcmcnts  semblaient  vouloir  borner  les  coiiqtiî-tcs 
ue  Tarméc  du  Nord.  En  vo>uiil  leurs  ouneuiis  rc*(rai)clté> 
derrière  le  Wahal  et  la  Meuse,  nos  braves  dèfinscurs  gémis- 
saient de  leur  inactivité;  ils  s'indignaient  de  ce  que  la 
nature  opposait  à  itur  courage  des  barrières  iiisurmon- 
tables;  mais  enfin,  d'accord  avec  leurs  \œiix,  la  nature 
elle-même  a  aplani  les  obstacles  qui  arrêtaient  leur.course 
victorieuse;  la  glace  dont  elle  a  couvert  les  rivières  nous  a 
dispensé  de  construire  des  ponts  pour  lesquels  nous  ne  pou- 
vions rassembler  asi>ex  de  matériaux.  Dans  la  nuit  du  6  au 
7  nivôse  nos  colonnes  se  sont  mises  en  marche. 

«  No!(  intrépides  soldats,  bravant  la  rigueur  de  la  saison, 
échauffés  par  l'amour  de  la  gloire,  onl  attaqué  Pile  de 
Bommel  et  les  lignes  de  Bréda.  Le  général  en  chef  avait 
fait  les  dispositions  les  plus  favorables;  il  a  été  parfaitement 
àecondé  par  les  généraux  qu'il  avait  chargés  de  rexéculion, 
«insi  qtit  les  généraux  Moreau  et  Sauvia.  Le  général  en 


chef  leur  doone  à  tons  de  îustes  éloges  dans  le  rapport 
qu'il  m'a  fkit  de  cette  expédition,  dout  vous  trouveret  d« 
Joint  copie.  Il  oublie  toujours  dé  parler  de  lui  {  mais  ht 
Convention  n'out)liera  pas,  sans  do«tff,  tous  les.sueoèt 
que  la  république  doit  à  son  grand  oottragc  ci  à  ses  rares 
talents. 

«Toutes  les  Iroupesont^uJeplosgraadauflcès.  Nosbatail* 
loof ,  avec  leur  intrépidité  ordinaire,  ootdbargé,  la  baloo* 
nette  en  a  vaut,  sur  les  batteries  dont  les  digucset  Ict  villages 
étainit  hérissés.  Viclorieux  sur  tous  les  points,  ils  onl  mis 
en  déroule  compli^te  renuemi,  qui»  dans  la  fuite,  nous  a 
abandonné  toute  son  artillerie. 

fl  A  Bommel ,  les  troupes  sons  les  ordreu  da  général 
Daendels,  après  l'avoir  chassé  de  tlle,  t'ont  poursuivi  jus- 
qu'au delà  du  Wabal,  se  sont  emparées  des  batteries  qui 
défendaient  la  rive  gauche  opposée,  et  ont  piis,  sans  au- 
cune pic-ce  de  canon  pour  soutenir  leur  attaque,  soixante 
boudies  ù  (eu ,  des  chevaux ,  des  bagagts,  et  six  ctents  prN 
sonniers.  Au  Langslraat,  trois  bsiaitbos,  sous  lesordr«s 
du  général  Osien  ,  se  battant  sur  la  glace  des  inondations, 
ont  emporté  les  fdits  et  rclranrliements  dt  Dovim  à  Kapel 
et  Waspik,  et  ont  pris  treitte-huit  pièces  de  canon,  desnitt* 
nilions,  des  bagages  et  quelques  prisonniers. 

•  Le  i^nnéral  Bonneau ,  forçant  les  lignes  de  Bréda,  • 
enlevé dixhu il  bouches  à  feu,  quatre  cents  prispuniers, 
un  drapeau  et  la  caisse  du  léglment.  Ce  général  Lemaire, 
qui  devait  attaquer  les  lignes  à  revers,  a  pris  deux  pièces 
de  canon,  un  drapeau,  et  fait  six  cents  prisonniers;  fandià 
que  notre  armée  chassait  devant  elle  celle  des  ennemis,  la 
ville  de  Grave  tombait  au  pouvoir  de  la  république* 

•  Je  vous  envoie  copie  de  la  capitulation,  dans  laquollo 
vous  vernx  que  la  garnison,  forte  d'ênvion  doute  à  quinat 
cent»  hommes,  s'en  va  prisonnière  en  France.  Je  n'ai  pas 
encore  Pétai  de  rariillerie  qui  se  trouve  dans  celte  piac9« 
l'une  des  plus  importantes  de  (a  Iloiljinde. 

«  L'armée,  jnjeuse  de  ses  succès,  crie  :  Vive  ta  rip^ 
Clique!  et  demande  qu'on  la  condulM  à  dé  nonvélles  vIo»' 
loires» 

«Salu Ici  fraternité.  Bsu^MAaM. 

•  P.  5.  Dans  cette  lieurense  ionmée,  sans  compter  ni 
les  prisonniers  ni  rariillerie  île  Grave,  noas  avotis  pris  en 
tout  cent  vingt  bouches  à  fen,  seite  cents  prisonniers,  ileut 
drapeaux  et  trois  cents  chevaux.  »  • 

(£.ai«lfed«ffurfn.) 
/V.  B,  Dans  la  séance  du  44»  la  Convention,  sur  le  rap- 
port de  Chénier,  au  nom  du  coroilé  d'instruction  pnbHqne« 
a  réiHirti  entre  les  gens  de  leltref(,savaniset  artistes,  tes 
300,000  lie.  qu'elle  af  uit  décrétées  en  leur  faveur. 


AVIS. 

UémoHai  Ff-ançait ,  ou  le  Kouveau  Journal  dé  Piêne 
l'Etoile. 

On  s'abonne  à  ce  journAl  à  rmiprimcric  des  cîtojenâ  Cho' 
vet,  (U  la  M.irrc  et  C.irlier,  rue  des  Piqties  (ci-dcvanl  Louis- 
le-firand). 

il  n'y  eut  jamais  tant  «l'ëvénements,  tant  de  joiimtt»  ;  cha- 
cun voudrait  reteoir  ou  estraire  ce  qu*ils  offrent  de  plus  ro« 
marquable. 

C'est  Tobjct  de  ce  lM<f morlal ,  qui ,  paraissant  par  fcuillo- 
ton,  une  fois  par  dérade,  prcaente  cet  extrait,  comme  autre- 
roi!^  le  journal  qui  parut  dans  le  XVI*  siècle,  f0«.<i  le  nom  de 
l'Etoile ,  et  peut, servir  de  tablai  les  chronologiques,  ou  par 
ordre  de  matières. 

l.rs  artides  sont  intitules,  lêghlalion,  êvénemeaU,  liltéro' 
ture .  et  chaque  article  comprend  tout  ce  qui  peut  y  avoir 
rapport. 

Le  \"  numéro  va  paraître  le  91.ntvose,  et  dater*  du  Itoi- 
voso,  correspondant  avec  le  1««  janvier  1795  (vieux  style). 

Le  prit  de  rahonn«>ment  e«t  de  SU  lir.  pour  on  an,  10  iiv. 
pour  Ail  mois,  et  8  Iiv.  pour  trois  mois,  franc  de  port,  dans 
toute  la  république. 

Paycmcnls  à  la  Insureric  nationale, 
Lr  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  ait  prenien 
mois  ;  il  sera  fait  a  tous  ceux  qui  seront  porteurs  d'inscrip- 
tions au  grand  li\rc.  Celui  pour  les  rentes  viagères  est  iê 
huit  mois  vingt  et  un  jours  ois  l'^méo  i19»(«ianaft|lo)» 


GAZETTE  NATIONALE  «»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


N*106. 


Sextidi  16  Nivosb,  Van  3®.  (Lundi  5  Janvier  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

RÉPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

De  Paris,  —  Joseph  Fauchet,  ministre  plénipotentiaire  de 
la  républiquefrançaise  près  les  Etats-Unis,  au  commis- 
saire des  relations  extérieures, 

Philadelphie,  le  3'  jour  sansculottide,  3'  annëe  de  la 
république  française,  une  et  indivisible. 

•  Ciloyeo,  je  t*ai  déjà  prévenu,  dans  une  de  mes  dépé- 
ehes.des  manœuvres  pratiquées  par  de  grands  propriétaires 
américains  pour  attirer  ici  les  Français,  et  leur  vendre,  à  un 

{>rU  quelquefois  centuple ,  des  terres  dont  Ils  ne  peuvent 
ear  assurer  la  possession,  ou  qui  sont  absolument  hors  d'é- 
tat de  fournir  à  leurs  premiers  besoins.  Je  ne  m'étendrai 
pas  sur  le  danger  de  tolérer  parmi  nous  de  pareilles  fripon- 
neries; mais  Je  croit  essentiel  de  les  rendre  publiques,  pour 
que  nos  concitoyens  soient  suffisammentavertis  des  risques 
quMls  courent. 

«  Je  t'envoie  ci-Jolnt  la  copie  d'une  lettre  que  Je  viens  de 
recevoir,  et  que  Je  te  prie  de  communiquer  au  comité  de 
salut  public,  pour  qu'il  en  fasse  l'usage  qu'il  croira  conve- 


Eiat  de  Géorgie^  comité  de  Greene. 

Greenetborourgh ,  ce  34  août  1795. 

•  Monsieur,  il  y  a  dans  ce  pays  une  foule  de  vils  spécula- 
teurs qui.arpenient  des  terres  ou  arides  et  stériles,  ou  en 
possession  oe  propriétaires  légitimes,  ou  qui  sont  hors  des 
limites  que  les  Etats-Unis  se  sont  données  par  les  derniers 
traités  avec  les  Indiens.  Ces  propriétaires  prétendus  obtien- 
nent cependant  dti  plots  et  grants,  ou  titres  attestés  par  le 
gouverneur  et  les  autres  officiers  de  l'Etat  préposés  à  cet 
effet;  mais  les  lois  de  cet  Etat  ont  pourvu  à  ce  que  àe^grants 
obtenus  en  fraude,  ou  comme  ci-devant  expliqués,  seraient 
de  nulle  valeur. 

«  Ces  imposteurs  vendent  leurs  prétendues  terres  à  des 
marchands  qui  les  revendent,  *  ce  que  J*apprends,  à  M.  Ro- 
bert Morris,  et  celui-ci  à  des  familles  françaises  qui  ont  déjà 
passé  ou  qui  ont  dessein  d'émigrer  dans  ce  pays. 

«  Voilà  le  fait.  Les  fatales  conséquences  de  ce  dédale  d'i- 
Diquilés  pour  ces  familles,  se  développent  d'elles-mêmes. 

«  Si  vous  jugez  utile  que  le  contenu  de  cette  lettre  soit 
publié  avec  mon  nom ,  en  anglais  et  en  français,  ici  et  en 
Europe,  je  n'ai  pas  la  moindre  objection  à  faire. 

«  Votre  très-obéissant  serviteur,  Joras  Fauche,  i 

Au  citoyen  J.-B.  Fauchet,  ambassadeur  français  aux 
Etats-Unis  de  f  Amérique. 

«  Pour  copie  conforme.  J.-B.  Fauchet.  t 


Extrait  tfunefeuiile  anglaise  (  le  Morning-Herald)  du 
29  novembre  1794.  ^^ 

De  Charlestown,  en  Amérique ,  le  2  octobre.  —  Un  bâti- 
ment qui  vientk  d'arriver  ici  nous  apporte  les  nouvelles  sui- 
vantes : 

Etienne  Lavaux,  gouverneur-général  par  intérim,  au  consul 
de  la  républiquefrançaise  à  Charlestown. 

Port-de>Pais,  le  9  fructidor,  l'an  3*  de  la  répu- 
blique française,  une  et  indivisible. 

V  Je  ne  saurais  tous  exprimer,  citoyen ,  la  joie  que  lious 
avons  éprouvée  à  hi  réception  de  votre  lettre  ;  les  secours 
que  vous  nous  avez  fournis  en  munitions  de  guerre  redou- 
blent, si  cela  est  possible,  et  notre  zèle  et  notre  bravoure. 
Quel  glorieux  usage  ne  ferons-nous  pas  des  quatre  mille 
livres  pesant  de  poudre  que  vous  nous  avez  envoyées  par  le 
citoyen  Car\-in  !... 

«  Le  brave  capitaine  Hervieux  nous  a  épargné  un  millier 
de  plus,  et  il  est  déterminé  à  nous  rendre  tous  les  services 
possibles. 

S*  Série.  —  Tome  X. 


«  Chaque  républicain  qui  se  rend  dans  nos  ports  produit 
sur  nous  l'effet  le  plus  encourageant 

«  Arrive  ce  qui  pourra ,  nous  sommes  résolus  de  vaincre 
ou  de  nous  ensevelir  sous  les  ruines  du  Port-de-la-Paix. 
Croyez  à  'ce  serment;  assurez  è  nos  ennemis  que  nous  le 
remplirons;  qu'il  (soit  publié,  afin  de  mortifier  davantage 
tous  cfiux  qui  haïssent  les  républicains.    . 

t  Proclamez  à  tout  le  monde  qu'il  ne  manque  rien  ni  aux 
officiers  ni  aux  soldats  que  J'ai  l'honneur  de  commander  ; 
que,  quand  même  tout  nous  manquerait,  nous  ne  péririons 
pas  sans  avoir  détruit  nos  ennemis. 

«  Je  n'ajouterai  plus  rien.  Nous  appartenons  à  la  répu- 
blique; mourir  pour  elle,  c'est  triompher  en  effet. 

t  En  nous  faisant  passer  tous  les  secours  qu'il  vous,  sera 
possible  d'envoyer,  vous  ne  pouvez  que  bien  faire. 
«  Signé  Etieeikb  Lavaux.  t 

Roger,  aide  de  camp  du  général  Lavaux,  à  Pressinet^ 
ofiicier  au  16*  régiment  d'infanterie,  député  vers  le  consul 
a  Charlestown. 

«  Mon  cher  ami ,  Je  présume  que  cette  lettre  te  trouvera 
à  Charlestown,  d'autant  plus  que  dans  ta  dernière,  datée  de 
cette  ville,  tu  nous  marquais  que,  d'après  ie  vœu  du  consul, 
tu  allais  te  rendre  à  Philadelphie,  pour  y  conférer  avec  le 
ministre  Fauchet,  ambassadeur  de  la  république ,  et  pour 
lui  faire  savoir  qu'il  reste  encore  à  SaintrDomingue  nombre 
de  républicains,  tous  dévoués  à  la  cause  généreuse  de  la  li- 
berté; tu  nous  a  aussi  marqué  que,  pour  nous  rejoindre, 
tu  t'embarquerais  à  Charlestown.  Ainsi  point  de  doute  que 
cette  lettre  ne  t'y  rencontre. 

t  Que  Je  t'apprenne  donc  que  tout  ce  qui  nooi  a  été  ex- 
pédié en  conséquence  de  la  mission  entreprise  à  cet  effet, 
que  tout,  dis-Je,  est  arrivé  à  bon  port. 

«  Le  premier  qui  parut  sur  nos  côtes  fut  le  capitaine  Her> 
vieux.  Je  ne  saurais  t'exprimer  la  Joie  avec  laquelle  nous 
avons  reçu  le  digne  républicain  Garvln  i  et  d'autres  arrivè- 
rent peu  de  jours  après.  La  manière  dont  celui-ci  nous  dé- 
livra les  dons  patriotiques  envoyés  par  nos  frères  de  Char- 
lestown excita  entre  nousdes  sensations  que  les  san»-culottes 
seuls  savent  apprécier;  et,  pour  compléter  cette  bonne 
fortune,  il  nous  arriva  en  même  temps  seize  cents  barils  de 
farine  envoyés  par  le  ministre  Fauchet. 

t  Juge  du  plaisir  et  de  la  joie  que  ressent  la  giniison, 
sans  compter  cette  ardeur  qui ,  comme  tu  sais,  est  le  pré- 
sage des  victoires  que  nous  te  promettons! 

«  Oui,  mon  brave.sans-cttlottes,  avant  que  tu  puisses  arri- 
ver, nous  aurons  déjà  détruit  un  grand  nombre  de  sateilitea 
de  la  tyrannie  ;  je  sens  à  cette  pensée  ton  impatience  d'être 
au  milieu  de  nous;  sois  assuré  que  nous  le  désirons  aussi. 

c  Nous  t'engageons  à  remercier  sincAreraent  pour  nous 
tous  les  sans-culottes  de  Charlestown;  dis-leur  qu'en  nous 
faisant  passer  des  secours  ils  servent  la  république  française.! 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Bentabotem 
SUITE   A   LA  SÉANCE  DU  13  IflYOSB. 

Le  général  en  chef  de  V  armée  du  Nord  au  repréten- 
tant  du  peuple  BeUegarde. 

Au  nuartier  général,  à  Bois-le-Duc,  le  9  nivôse,  l*an  3*  de 
de  la  republique  française,  une  et  indivisible. 

t  Le  comité  de  salut  public  avait  prescrit,  citoyen  repré- 
sentant, de  poursuivre  la  campagne  par  la  prise  de  Grave» 
celle  de  l'Ile  de  Bommel  et  le  complètement  du  blocus  de 
Bréda.  Je  te  rends  compte  que,  par  le  hasard  le  plus  singu- 
lier, le  tout  s'est  trouvé  fait  le  même  Jour;  nous  le  devons  à 
la, rigueur  de  la  saison,  d'avoir  pourvu  au  défaut  de  moyens 
de  franchir,  les  barrières  derrière  lesquelles  l'ennemi  s'était 
rcfranché,  en  glaçant  sur  beaucoup  d'étendue  les  fleuves  du 
Wahal  et  Meuse,  sur  lesquels  il  nous  eût  été  impos^iiblc  de 
jeter  des  ponis^  fautc.de  bateaux. 

•  Noua  avons  profité  du  moment  où  la  glace  a  eu  assci 

16 


tn 


consbtaiice,  pour  passer  saut  riiqae  les  troupes  ;  et  le  7  au 
matin,  malgré  an  froM  eftoasttf.  l'artiéa  a  atlac|tté  l'eBDonl 
sur  une  étcoduc  d'environ  douze  lieues,  depuis  Nimègue 
Jusqu'au  delA  de  la  rivière  de  Necker,  et  partout  elle  a  été 
f  lo4orie«se.  mIob  sa  eooHMtto. 

.«  L'aile  droite,  depuis  mmèfrue  Att  toH  ialnt-André,  seat 
bomés  à  ol»éarver  léa  Moutemeiiu  de  reonem».  tandis  que 
le  centre  se  reodail  maître  de  l'Ile  de  Bonme»  et  du  LaB{«- 
straat,  et  <!«§  la  (»auche  tordait  tes  lignes  de  Bréda  ;  le  pas- 
«affe  de  In  Meuse  derant  l'Ile  de  Bonmel  s'est  exécuté  sur 
trois  colonnes,  sous  les  ordres  du  général  Dnendels  et  du 
choyen  HocildBr.  clief  de  brigade  ;  des  d'oyens  Crass  el 
Mercier^  chefs  de  batalHon  de  la  brigade  des  Lombards  ;  le 
premier  rcrur  une  légère  blessure. 

*  Les  dis|>ositions  ont  été  si  bien  prMes  et  exécutées  que, 
malgré  les  forttildables  retranchements  dont  l'ennemi  avait 

'  hérissé  les  digues  et  les  tllhiKes.  les  troupes  ont  passé  hi 
Meuse.  s«  sont  emparées  des  difrérentes  baiterirs  de  h  place 
de  Bomroel  èl  du  fort  Balnt^-Audré  avec  la  rapidité  et  le 
courage  dool  l'arméa  •  dOBRé  umt  de  preuves  ;  et .  sans 
avoir  avec  elles  une  seule  pièce  de  canon,  elles  en  ont  en- 
leté  UB»  seiiianlalBB  à  l'tBBeBii*  des  cba^ul,  des  bagages, 
et  99ykrw  sta  ceals  priaoaiiterst  le  aoBibre  de  ces  derniers 
eût  été  beaucoup  plus  considérable,  si  les  troupes  qui  de- 
vaient faire  l'attaque  du  fort  Saint-André  eussent  pu  arriver 
A  riHNir»  pfeseHte.  L'enM»i&l  a  opère  sa  retraite  du  fort,  en 
laiasaBl  eepradem  URilé  son  artHterie. 

i  fce  gÉÎenil  Osten»  qui  avait  été  charge  de  Katlaque  de 
Langatraat,y  aparfaMement  réusal ,  quoiqu'il  B*eût  que  trois 
baiilUons,  le  !«'  et  te  9*  de  la  I70*  demi  brigade,  el  le  5*  des 
chaaaaarsApledt  Ils  ont  emporté  tes  forts  et  retranclieraents 
de  BarveiBB»  Kapel  el  Wasplofc,  avec  une  ardeur  incroyable. 
y  OBI  pria  treBla  ptêcea  de  canoo,  des  munitioBs,  des  bdgn- 
get  et  quelques  prlumBlers.  Cette  espédition  est  d'autant 
plus  brillante  qu  elle  s'est  faite  entlèrû&ent  sur  la  ghice  des 
iBBBdaHooa. 

«  Le  fjjêuénl^ MMMi«,  q«l  attaqvalt  es  ttéme  temps  les 
lignes  de  Bréda,  n'a  pas  en  Ufi  soceèê  Biolns  oomptet  ;  Il  a 
éùmé  à  reMenil  dMi'^llult  bouches  A  fou ,  quatre  ceals  prl- 
ifBien»  BU  drapeeu  el  la  calssed'uo  régiment,  avec  environ 
doB»  oenta  ehevauk. 

«  La  général  kemalre,  qui  formait  l'attaque  de  la  gauche, 
étûU  chargé  de  prsBdi^e  tes  lignes  à  revers,  en  se  portant  sur 
lee  postes  #Oudenbosk  et  de  Sevenberghen,  dont  il  s'est  em- 
parei  11  a  folt  envli^n  six  ecBls  prisonniers ,  enlevé  deux 
ptèoti  de  eenotit  ^b  drapeau,  des  bagages,  et  environ  cent 
chevaux.  Il  résulte  donc  de  cette  heureu&e  Journée  la  prise 
d'Mivlfo«.teMt  vlBgl  bouches  A  feu,  scite  cents  prisonniers, 
drttiv  drapeeua  et  trois  cents  chevaux. 

^  Cette  victoire  a  été  sulvte  de  la  prise  de  Grave,  dont  te 
gi^Béral  Seiii  a  reçu  le  même  Jour  ta  capitulation,  qui  se 
borne  aux  honneurs  de  ki  guerre  pour  ta  sortie  de  la  gami- 
SBB,  qui  %i  être  conduite  prisonnière  de  guerre  en  France. 
Il  est  A  remarquer  aussi  qucv  malgré  te  feu  terrible  qu'a  folt 
oaMe  ptaee  depuis  environ  un  mois  sur  tes  troupes  qiii  en 
formaleot  te  Moctis  et  le  bombardement ,  nous  n'a\'ons  eu 
que  trehM  heMmes  tant  tués  que  blessés. 

«  Nous  avons  trouvé  dans  le  paysde  Oommel  et  dans  celui 
de  Langstraat  beaucoup  de  ressources  en  fourrages,  dont 
nous  commencions  à  éprouver  la  pénurie,  et  nouti  voilA 
nialnienant  ftbSoltmient  maîtres  du  cours  de  la  Meuse,  dont 
In  navlyailon  est  ^indispensable  à  l'approvisionnement  de 
l'armée,  vu  l'impossibilité  de  le  continuer  par  cliarrois. 

*  Après  avoir  donné  de  justes  éloges  à  toutes  les  troupes, 
Je  ne  puis  fo'efalpécher  de  rendre  une  justice  pariiculhire 
aux  (Eénéraux  qui  les  ont  commandées }  tous  ont  coopéré  aux 
succès  par  leurs  latents  et  leur  bravoure.  Les  {;énômux 
Moreau  el  Sauvta  ont  participé  aux  dispositions  du  plan 
«[attaque,  et  ce  dernter  a  oublié,  te  Jour  de  l'affaire,  comme 
il  1  a  fait  pendant  toute  la  campagne,  qu'il  est  privé  de  l'u- 
sage dune  jambe;  il  s'esl  fait  conduire  dans  l'Ile  de  Boramel, 
cl  a  secondé  l'ardeur  ei  ta  bravoure  de  ses  frères  d'armes. 

«  Salut  et  fealemité.  Signé  Picbbcru.  > 

CapUulcUion  faiU  au  etmmandwiU  de  Grant,  pour 
fa  reddai^n  de  lu  forttre$$e,  par  (e  général  de 

•  Art,  !••.  La  garnison  aura  les  honneurs  de  la  guerre,  et 
sera  prisonnière  en  France. 

•  M.  Elle  sortira,  te  10  nivose  présent  mois,  par  la  porte 
dt  Boli-le-IHlc;  et,  après  s'élre  rangée  en  bataille  devant 


les  troupes  françaises,  elle  déposera  êes  armes  et  drapeaux, 
ni  prendra  sa  roule  sur  Anvers,  en  passant  par  Bois4eMe. 
t  m.  Les  troupes  de  la  république  française  occuperont, 
sitôt  la  capitulation  signée,  1  ouvrage  A  cornes  et  la  porte  de 
la  Meuse.  . 

•  lY.  I^s  malades  restés  A  HiÀptlal  de  Grave  seront  traités 
comme  ceux  de  l'armée  françafse,  au  compte  des  états  géné- 
raux de  Hollande  ;  11  restera  pour  les  soigner  un  ou  deux 
chirurgiens  de  chaque  corps,  suivant  te  Bomt>re  des  mala- 
des; et  lorsqu'ils  seront  guéris,  ils  se  rendront  en  France, 
sous  escorte»  au  Ueu  indiqué  pour  ki  garalsoB. 

f  V.  Il  sera  nommé  deux  commissaires  des  troopes  /raa- 
çaises  et  un  officier  d'artillerie, auxquctaoa  rtmettra  fidète- 
ment  l'état  de  l'artillerie,  munitions  de  guerre  et  magasins. 

t  YL  Laa  oflicters,  sous-ofBcfers,  soktals,  conserveront 
leurs  effets:  tes  efliclers,  leurs  chevaux  jusqu'A  Anvers,  et 
là  ils  seront  remis  dans  les  dépOts  de  ta  république  fran- 
çaise. 

«  YII.  Les  femmes  et  enfants  sont  exceptés  de  ta  capitu- 
lation, et  -retourneront  en  Hollande  soUs  la  sauvegarde  des 
Français,  qui  les  conduiront  â  Mlmegue  ;  Il  sera  accordé 
pour  elles,  leurs  entants  et  le  transport  de  teurs  bagages , 
des  voitures. 

c  YIII.  Les  bourgeois  ayant  demandé  la  conservation  de 
leurs  propriétés,  â  né  point  étk*e  inquiétés  pour  les  senti- 
ments qu  lis  ont  manifestés  avant  ta  prise  de  la  ville,  Il  a  été 
répondu  que  les  Français  se  font  un  devoir  de  respecter  les 
propriétés  et  les  opinions. 

«IX.  Le  commandant  de  ta  placeavani  demandé  note  de  ce 
que  tes  bourgeois  el  entrepreneurs  de  la  ville  ont  â  préten- 
dre pour  des  livraisons  et  autres  avances  faites  à  la  garni- 
son, a  été  répondu  que  ceta  regarAiit  ta  gouvernement  hol- 
landais. 

•  X.  Le  commandant  pourra  emporter  les  papiers  qui 
coocemeni  sa  comptabililé  envers  lee  états  t  les  ptaaa  el  ar- 
ciiivcft  de  la  vllte  seront  remta  nu  eoBraiisseire  de  ta  répiH 
blique  fraBçaise. 

t  XL  Tout  eBiployé  an  tervloe  de  ta  garotaoB^  qui  n'aura 
pas  porté  les  armes,  pourra  s'en  retourner  en  lioltande^ 

c  XIL  U  sera  envoyé  deux  of  Aciers  de  ta  gerutaon  pour 
raiitif  r  la  présente  capiittlalloB  i  s'il  avait  été  omta  quelque 
chose  auquel  l'une  ou  l'autre  des  armées  eAt  besoin  d'ex- 
plication, U  ne  sera  Jamata  au  désavantage  de  ta  république 
française. 

c  XIU.  Un  chasseur  Achevai  du  ia«  réglsKUt  (Ms)>  déserté 
pendant  le  siège  de  ta  ptaoe,  sera  rsnHe  eaire  tas  maiBs  dea 
Français. 

c  XIY.  La  présente  capiiutalinB  ae  concerne  en  rten  les 
émigrés  français  qui  peuvent  se  trouver  dans  ta  placev 

c  Fait  et  arrêté  la  présente  capilutation ,  entre  nous  sous- 
signés, au  camp  sous  Grave,  te  8  nivose,  3*  année  républi- 
caine* 

t  Signé  Vowlëliwa,  mûftfr;  f.  Vowmotx,  capitaine; 
le  général  dekriçadêt  8alm. 

«  Pour  copie  conforme.  Bbllegabob.  t 

La  Conventiou  nationale  décrète  que  Tar niée  du 
Nord  ne  cesse  de  bien  mériter  de  la  pnti-ic. 

On  demande  rimpi'ession  du  rap|)ort  de  Carnet, 
avec  les  pièces  dont  il  vient  de  doouer  lecture. 

Bentabole:  Je  demande  la  parole  à  rassemblée 

f^our  parler  contre  rimpressioodu  rapport.  (U  quitte 
e  fauteuil  et  monte  à  la  tribune.  ) 

Bentabole  :  Je  crois  qu'il  est  dé  mon  devoir  de 
m'opposer  à  cette  impression.  La  Convention  ne 
doit  point  avouer  ni  proclamer  à  la  république  des 
expressions  escobardées^  oui  ne  sont  que  le  résul- 
tat de  Topinion  d*un  individu.  La  Convention  ne  doit 
avouer  ()uc  les  grands  principes  de  la  justice  et  de 
rbumanitë.  Eh  bien,  dans  ce  rapport,  on  donne  à 
nos  soldats  une  ëpithète  affreuse^  (U  s'élève  des 
murmures  dans  rextrémité  de  la  salie.  — -  Ils  sont 
couverts  par  les  applaudissements  é%  la  plus  grande 
partie  des  membres.) 

Tallien  :  Ce  sont  des  calembours  à  la  Barère. 

Bentabole  :  Je  ne  croîs  pas  t|«ie,  dans  le  moment 
où  la  Convention  a  mis  les  vertu»  à  l'ordre  du  jour 
{quelques  voix:  La  victoire  1),  lorsque  la  Conven- 


13S 


lion  n  fait  la  révolution  du  9  thermidor  pour  anéai)- 
lir  la  terreur  que  Rotiespierre  et  ses  complices  fai- 
saient peser  sur  toute  la  république  ;  ce  n'est  pas, 
ilis-jc,(lans  ce  moment  qu*on  doit  donner,  comme  un 
litre  honorable  à  nos  soldats,  répithète  de  terroris- 
tes. (Vifs  applaudissements.)  11  existe  dans  le  rap- 
port une  phrase  plus  blâmable  encore,  (^(ouveaux 
murmures  de  rextrémité.)  C*est  donc  une  tactique 
pour  m'empécberde  parler? (P/u4i>ur# voie.  Oui  1  ) 
On  dit  dans  ce  rapport  que  nos  soldats,  après  avoir 
vaincu ,  ne  chicanent  point  leurs  chefe  sur  les  moyens 
qu*ils  ont  employés  pour  les  faire  vaincre.  Je  sou- 
tiens que  ce  principe  est  contraire  à  la  liberté,  parce 
que,  lorsque  la  nation  remporte  des  victoires  à  Tex- 
lerieur  sur  les  ennemis  de  la  république,  et  à  Fint^ 
rieur  sur  le  ciime,  ee  n'est  pas  aux  ohefs,  o'est  a  la 
nation  entière  qu'il  (iiut  attribuer  ces  succès.  (Nou- 
veaux applaudissements.) 
•  Tallien  :  C'est  un  rapport  à  la  Barère. 

Une  autre  voua  :  Oui,  c*est  une  carmagnole  \ 

DuiiEM  :  Je  demande  la  parole. 

Tallien  etGuYOMARD  :  Je  la  demande  aussi. 

Bentabolk:  Il  s'ensuivrait  donc  que  des  législa- 
teurs pourraient  dire  au  peuple  :  Ce  oV st  pas  toi  qui 
as  fait  la  révolution.  U  s'ensuivrait  que  certains 
hommes,  ayant  employé  le  crime  pour  réussir,  pour- 
raient dire  au  peuple  :  Que  t'importent  les  inoyens 
que  nous  avons  employés  pour  vaincre?  nous  ne 
t'en  devons  aucun  compte.  J'ignore  si  le  rapport  de 
Carnot  est  son  ouvrage  particulier,  ou  s*ii  a  été  ap- 
prouvé par  le  comité  de  salut  public,  mais  je  de- 
mande qu'il  ne  soit  pas  imprimé. 

Carnot  :  Le  comité  m'avait  chargé  de  faire  ce  rap- 
port ;  j'ai  eu  à  peine  quelques  instants  pour  le  i^éoi- 
ger;  j'avoue  que  je  ne  l'ai  point  communiqué  de- 
puis au  comité.  Les  phrases  dont  se  plaint  Bentabole 
pourraient,  j'en  conviens,  avoir  quelque  danger. 
J'avoue  que  les  gouvernements  doivent  repondre  de 
toutes  leurs  actions  et  des  principes  qui  les  0nt  diri- 

Fés.  J'appuie  moi-œâme  la  question  préalable  sup 
impression. 

La  question  préalable  est  adoptée.  —  La  Conven- 
tion ordonne  l'impression  des  pièces. 

Letourneub  (de  la  Manche);  Il  est  précieux  de 
faire  observer  ù  la  Convention  que  le  récit  qui  vient 
d'être  fait  par  le  comité  porte  un  coup  funeste  à  la 
malveillance  oui  ne  cesse  de  s*agitcr  pour  faire 
croire  au  peuple  que  le  gouvernement  ne  s'occupe 
point  de  ses  approvisionnements.  Il  est  bon  de* dire 
aux  citoyens  de  Paris  que,  s'ils  ont  souffert  quelques 
privations  par  la  rigueur  de  la  saisoir,  c'est  à  la  ri- 
gueur de  la  saison  nue  nous  devons  aujourd'hui  les 
triomphes  de  l'armée  du  Nord.  Il  n'est  point  de  pa- 
triote qui  ne  s'honore  (s'il  est  permis  d'employer 
une  expression  triviale)  d'avoir  soufflé  dans  ses 
doigts,  quand  il  apprendra  que  dans  le  même  temps 
ses  frères  d'armes  battaient  l'ennemi  sur  le  Wahal. 
(Ou  applaudit.) 

—  Un  membre  du  comité  de  législation  présente 
la  liste  des  citoyens  qui  doivent  composer  le  tribu- 
nal révolutionnaire. 

Treilhard  :  La  santé  du  citoyen  MouricauU,  pro- 
posé pour  présider  le  tribunal,  ne  lui  permettra  pas 
de  remplir  cette  fonction,  à  laquelle  d'ailleurs  ses 
lumières,  sa  probité  et  son  patriotisme  sont  bien  faits 
pour  l'appeler  ;  mais  il  a  une  telle  faiblesse  de  vue 
qu'il  ne  peut  travailler  à  la  lumière,  et  vous  savez 
que  les  séances  du  tribunal  sont  souvent  prolongées 
bien  avant  dans  la  nuit. 

BouKQON  (de  l'Oise)  :  On  trouverait  difficilement 


un  plus  honnête  homme ,  un  meilleur  patriote , 
un  juge  plus  intègre  ;  je  crois  que  sa  modestie  seule 
l'empêche  d'accepter  cette  fonction  importante,  mais 
on  doit  se  dévouer  pour  le  service  de  la  république. 
J'insiste  donc  pour  que  le  citoyen  llouricault  reste  à 
la  place  qui  lui  est  confiée. 

Après  une  légère  discussion,  rassemblée  passe  a 
l'ordre  du  jour,  et  la  liste  est  adoptée  ainsi  qu'il 
suit: 

-La  Convention  nationale,  sur)a  présentaUoa du 
comité  de  législation,  décrète  : 

«  Tous  les  citoyens  désignés  en  la  liste  annexée  au 
présent  décret,  pour  composer  le  tribunal  révolu- 
tionnaire, entreront  chacun  dan9  ies  fonctions  qui 
lui  sont  désignées. 

-  La  commission  des  adminiatrations  civiles,  po- 
lice et  tribunaux,  est  chargée  de  prendre  les  mesu- 
res nécessaires  pour  la  prornptê  exécution  du  présent 
décret,  qui  sera  imprimé  daqs  |e  Bulletip  de  corres- 
pondance. • 

Liste  des  ciloyem  présentés  à  la  Convention  natiç- 
nalêt  par  son  comité  de  législation,  pour  h  re- 
nouvellement des  membres  du  tribunal  révolu- 
tionnaire, en  exécution  du  décret  du  28  frimaire 
dernier.  »—  Noms  des  juges  et  furés  ;  demeures  et 
états  actuels  des  candidats. 

«  Président.  -^  MouricauU,  demeurant  à  Paris, 
commissaire  national  du  tribunal  du  troisième  ar- 
rondissement. 

•  Yice-présidentM,  ^  Llger,  président  du  tribu- 
nal criminel  du  département  du  Loiret. 

«  Prévôt,  président  du  tribunal  criminel  du  dé- 
partement à  Riom. 

•  Juges.  —  Ma:çerat,  ex-commissaire  national  du 
tribunal  du  district  de  Nontron ,  rue  de  Cléry ,  n©  1 01 . 

«  Godeau,  agent  national  de  la  commune  de  Mé- 
zières,  département  de  l'Indre. 

-Bertrand  Daubagne,  demeurant  à  Paris,  précé- 
demment juge  du  district  de  Nyons. 

«  Favard.  commissaire  national  près  le  tribunal 
du  district  d'issoire. 

«  Godard ,  administrateur  du  département  de 
Seine-et-Marne. 

«  Devilias,  président  du  tribunal  du  district  de 
Saint-Flour. 

«  Gaillard-Lécard,  président  du  tribunal  criminel 
du  déparlement  de  l'Aisne. 

-  Grand  (Raimond),  ex-président  du  tribunal  cri- 
minel, demeurant  à  Briançpn. 

«  Debregeas,  accusateur  public  près  le  tribunal 
criminel  de  la  Dordogne. 

Accusateur  public.  —  Judicis,  président  criminel 
du  département  du  Lot. 

-  Substituts  de  Vaccusafeur  public,  —  Chantricr, 
juge  du  tribunal  du  district  deBeaune, 

f  Cambon,juge  au  tribunal  du  district  de  Pont - 
sur-Rhône. 

'  «  Ardène,  défenseur  officieux,  à  Paris,  rue  de  la 
Juiverie,  no9. 

•  Greffier.  —  Paris,  actuellement  remplissant  les 
mêmes  fonctions. 

-  Jurés.  —  Bouygues  (Jean-Baptiste),  ci-devant 
avoué,  demeurant  a  Gourdon«  département  du  Lot. 

«  Pers  le  jeune,  secrétaire  du  tribunal  du  district 
deSaint-Omer. 

•  Adam  l'atné,  ex-juge  militaire  à  Metz. 

«  Ponterie-Escol,  maire  do  la  commaoe  de  Ber- 
gerac. 


124 


•  Hëlouin,  roëdecin,  juge  de  paix  du  canton  de 
Dauvon,  y  demeurant,  district  de  Vire. 

•  Dubus,  tailleur  d'habits,  à  la  Neuville-en-Hetz, 
district  de  Clermont  (Oise). 

•  Husson,  ébéniste,  juge  au  tribunal  du  district 
deBar-sur-Ornain. 

-Reichs  l'aîné,  membre  du  directoire  du  district 
de  Colmar. 

•  Brunet,  défenseur  officieux  à  Paris,  rue  de  la 
Loi,  maison  de  la  Souveraineté  nationale. 

•  Ouri,  juge  de  paix  à  Tour-la-Ville. 

•  Verdusan  (Abbadie),  habitant  à  Lourdes,  dis- 
trict du  Ga?e. 

•  Gabriel  de  Saînt-Horrent,  juge  du  tribunal  du 
district  d^  Boussac. 

•  Laporte,  juge  au  tribunal  du  district  de  Lan- 

•  Vannier,  chef  de  bureau  au  directoire  du  dis- 
trict de  Boui^-rSgalité. 

•  Lerade,  horloger  à  Compiègne. 

•  Tournier  Taîné ,  ci-devant  administrateur  du 
district  de  Murât. 

•  Bressaud,  demeurant  à  Raze,  district  de  Vesoul. 

•  Vignalft,  ci-devant  président  du  tribunal  du 
district  de  Pau. 

•  Rouit-Borel  (Bruno)»  juge  de  paix  du  canton  de 
Forcalquier. 

•  Brillât,  marchand  et  cultivateur  à  Belley. 

•  Payrat,  maire  de  Vernoux,  département  de  T Ar- 
dèche. 

•  Cadet,  défenseur  officieux  à  Charny,  district  de 
•oigny. 

•  Perrault,  notaire  à  Saint-Chamond. 

•  Rubat  fils,  membre  du  tribunal  du  district  de 
Mâcon. 

•  Tallairat,  agent  national  de  la  commune  de 
Brioude. 

«  Richard,  président  du  conseil  du  district  d*Or- 
mont. 

•  Lapeyre,  placé  à  l'administration  dû  départe- 
ment de  Vaucluse. 

•  Felorme,  commissaire  civil  de  la  section  Lepel- 
letier. 

•  Guéroult,  ancien  professeur  de  rhétorique  au 
collège  des  Grassins,  à  Paris. 

•  Lebrun,  défenseur  officieux,  demeurant  à  Vau- 
girard.  • 

—  Un  secrétaire  lit  les  lettres  suivantes. 

Lerepréê^nlant  du  peuple  J. -Marie  Calèi,  dans  le 
déparlemnu  de  la  Côle-d'Or,  à  la  Convention 
nalionaU. 

Du  8  nivôse ,  Tan  3«  <!e  U  république  une  et 
indivUible. 

c  CitoyeDi  oollègues,  ma  minsion  dans  le  départemeDt  de 
la  Côie-d*Or  finira  le  20  du  courant  ;  je  parUrai  le  31  pour 
me  rendre  dans  le  aeln  de  la  Convention. 

«  Je  laisserai  à  mon  successeur  le  département  tranquiUe, 
les  autorités  constituées  composées  de  patriotes  capables, 
humains  et  bien  intenUonoés. 

«  Sa  présence  seule  suffira  pour  contenir  les  intriganu. 
qui,  semblables  en  tout  aux  anciens  aristocrates,  disent  que 
la  contre-révolution  est  faite  parce  qu'ils  ne  sont  plus  en 
possession  de  pUler  et  d'assassiner,  et  se  flaUent  que  le  régne 
de  la  jusiice  ne  peut  pas  tenir  parce  que  la  joie  et  l'union 
du  peuple  leur  paraissent  des  insultes  à  la  liberté.  Cepen- 
dant les  bons  citoyens  savent  que  le  peuple  français  et  la 
Convention  ne  permettront  plus  que  les  assassins  tiennent 
les  rtees  du  goavemement,  et  cette  attitude  raffermit  leur 
courage. 

Signé  Gàiis ,  reprisenUaU  dm  peuple,  t 

L*insertîon  au  Bulletin  et  le  renvoi  au  comité  de 
sûreté  générale  sont  décrétés. 


Blutel,  repréêentanî  du  peuf  le  dans  les  porU  de  La 
Rochelle,  Rochefori,  Bordeaux,  Rayonne  et  ports 
adjacents,  à  la  Convention  nationale, 

Rochefort,  le  7  nÎTOSe,  Pan  S*  de  la  république 
une  et  indivisible. 

«Comme  partout,  Rochefbrt  a  en  tes  oppresseurs;  comme 
partout,  la  terreur  y  a  comprimé  les  esprits  et  arrêté  l'éner- 
gie de  ses  habitants;  l'ordre  y  renaît  enfin  ;  la  justice  re- 
prend ses  droits,  et  le  peuple  respire. 

«  Je  vous  fais  passer  un  arrêté  que  J*ai  cm  devoir  pren- 
dre relativement  au  citoyen  Guichard,  enseigne  de  vaisseau 
entretenu ,  destitué  par  ie  ministre,  sur  le  certificat  d*nn 
comité  d'épuration  créé  à  Rochefort,  qoi  décida  qu'il  était 
aristocrate,  parce  qu'il  avait  servi  soos  d'Orléuis,  sar  la 
frégate  VEmlmseaae,  en  qualité  d'aspirant  de  la  marine. 

«  Tout  le  corps  de  la  marine,  toutes  les  autorités  consti- 
tuées de  cette  partie  rendent  hommage  à  son  activité,  à  ses 
talents  et  son  zèle  ;  tous  demandent  sa  réintégration....  Les 
besoins  de  la  marine  le  réclament  aussi  ;  Je  n'ai  entendu 
aucun  fait  contre  lui  ;  sa  funille ,  qui  le  redemande  à  grands 
cris,  jouit  ici  de  l'estime  générale;  J'ai  cm  devoir  le  lui 
rendre  provisoirement ,  en  l'autorisant  à  résider  dans  Ro- 
cbefort.  J'abandonne  le  reste  i^  votre  sagesse  et  à  votre 
justice. 

<  Salut  et  fraternité.  Signé  Rloisl.  • 

«  P.  S.  On  annonce  à  l'iaitant  que  deux  des  prises  fUles 
par  le  Spartiate  sont  entrées  à  Bordeaux  ;  J*en  attends  la 
confirmation.  • 

Cette  lettre  est  renvoyée  au  comité  de  salut  public. 

—  On  admet  à  la  barre  une  députation  des  ci- 
toyens de  la  section  de  TUnité. 

L*oral€ttr:  Les  bons  citoyens  de  la  section  de 
rUnité  paraissent  de  nouveau  à  votre  barre,  avec  ce 
courage  qui  caractérise  l'homme  libre.  L*amour  de 
la  patrie,  le  salut  du  peuple,  le  respect  pour  les  lois 
et  la  Convention  nationale,  seront  toujours  le  mo- 
bile de  nos  actions.  Nous  venons  en  conséquence 
vous  soumettre  quelques  réflexions  que  Tintérét  de 
la  république  nous  suggère. 

Citoyens  représentants,  conformément  à  votre  dé- 
.  cret  du  1 1  frimaire  dernier,  la  section  de  rUnitésVst 
rendue  en  masse  à  votre  comité  de  sûreté  générale  ; 
elle  y  a  dénoncé  les  assassins  des  S  et  3  septembre, 
et  ses  dénonciations  sont  revêtues  de  signatures 
d'hommes  probes  et  dignes  de  foi  :  nous  demandons 
à  la  Convention  nationale  s'il  n*est  pas  alarmant 
pour  les  bons  citovens  de  voir  encore  autour  d*eux 
tous  ces  hommes  de  sang  jouir  de  l'impunité  et  me- 
nacer à  chaque  instant  de  faire  revivre  le  système  de 
terceitr  qui  a  plongé  la  France  dans  le  deuil.  Légis- 
lateurs, si  le  règne  Unt  désiré,  le  règne  de  la  vertu  et 
de  la  justice,  pouvait  être  illusoire  par  un  excès  d'in- 
dulgence, la  liberté,  n>n  douiez  pas,  sera  bientôt  de 
nouveau  en  péril.  Citoyens  représentants,  depuis  le 
9  thermidor,  la  république  et  la  liberté  ont  couru  de 
nouveaux  dangers,  et  les  partisans  du  terrorisme 
osent  encore  proférer  le  nom  détestable  de  roi  et  de 
royauté,  afin  d*en  venir  à  leurs  fins  :  oui,  la  conju- 
ration du  9  thrrmidor  avait  pour  but  de  rétablir  la 
royauté,  et  les  factieux  impunis  s'agitent  encore. 
Noifs  contestera-t-on  ici  le  projet  de  massacrer  aux 
prisons  à  cette^poque  ?  niera-t-on  la  conjuration  de 
la  noblesse  révolutionnaire,  les  Jacobins  d'alors  ? 
révoquera -t-on  en  doute  le  mouvemeut  des  bons 
artisans  desateliers,égarêset  séduits  pardesfactieux? 
et  viendra-ton  nous  dire  que  ce  ne  sont  pas  la  des 
manœuvres  contre  révolutionnaires,  soudoyées  par 
Pitt  et  ses  agents?  Législateurs,  vous  sauverez  la  pa- 
trie, vous  en  avez  contracté  l'engagement  solennel  ; 
vous  punirez  les  assassins  du  peuple,  les  dévasta- 
teurs et  les  fripons,  et  vous  ne  souffrirez  pas  que  les 
citoyens  paisibles  aient  à  redouter  de  nouveau  la 
persécution  et  les  poignards  des  royalistes  et  des  as- 


125 


sassins,  de  ces  monstres  qui  ne  doivent  plus  trourer 
ni  protection  ni  patrie. 

Législateurs,  un  objet  important  mérite  toute  vo- 
tre attention  :  les  derniers  événements  nous  ont  suf- 
fisamment prouvé  que  la  réélection  des  ofiiciers  et 
sous-ofQciers  de  la  garde  nationale  de  Paris  est  utile 
et  indispensable;  la  sûreté  publiaue,  le  bon  ordre  et 
la  justice  exigent  cette  mesure.  Ceux  qui  nous  com- 
mandent aujourd'hui  ne  sont  pas  directement  les 
élus  du  peuple,  parce  qu*ilsont  été  soumis  à  une 
épuration  qui  souvent  nous  ravissait  notre  vœu; 
nous  désirons  conserver  ceux  d>ntre  eux  qui  méri- 
tent notre  confiance,  et  en  éloigner  ceux  qui  Font  lé- 
gitimement perdue  depuis  longtemps. 

11  est  instant  aussi  que  vous  prononciez  sur  la  réor- 
ganisation des  autorités  constituées,  de  manière  à  en 
éloigner  les  ignorants  et  le^  fripons. 

Citoyens  représentants,  nous  vous  déclarons,  en 
présence  de  la  France  entière ,  que  jamais  nous  ne 
composerons  avec  les  principes.  Nous  vouons  à 
'  TexecratioD  publique  tous  tes  tyrans  et  toutes  les 
tyrannies  :  guerre  a  mort  aux  royalistes,  aux  assas- 
sms  et  aux  fripons ,  et  notre  dernier  vœu  sera  tou- 
jours ,  jusqu'à  la  mort ,  pour  la  républiaue  une  et 
indivisible,  et  pour  la  Convention  nationale. 

Cette  pétition  est  renvoyée  au  comité  de  législa- 
tion. 

Saint  -  MABTm ,  au  nom  du  comité  des  secours 
publics  :  Citoyens,  je  viens,  au  nom  de  votre  comité 
des  secours  publics,  soumettre  à  votre  sanction  un 
nouveau  travail  de  liquidation  des  pensions  dues  à 
un  grand  nombre  de  citoyennes  dont  les  maris  sont 
morts  au  service  de  la  patrie. 

Cette  honorable  liste  est  terminée  par  le  nom  de 
la  veuve  d'un  des  généraux  de  la  république  mort 
au  champ  de  Thonneur,  après  avoir  fixé  la  victoire 
sous  nos  drapeaux  et  vu  ruir  les  satellites  du  tyran 
d'Espagne. 

11  est  glorieux  sans  doute  pour  la  veuve  de  Dago- 
bert  de  se  voir  inscrite  parmi  les  citoyennes  qui  ont 
besoin  de  recourir  à  la  bienfaisance  nationale  pour 
trouver  des  ressources  contre  l'indigence. 

Le  témoignage  non  équivoque  du  désintéresse- 
ment du  héros  que  regrette  la  France  donne  un  nou- 
veau lustre  à  la  gloire  que  lui  ont  méritée  ses  ver- 
tus civiques  et  guerrières ,  ses  victoires  et  sa  mort  ; 
et  le  décret  oui  proclamera  cette  glorieuse  pauvreté 
sera  le  complément  des  honneurs  décernés  à  sa  mé- 
moire. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

•  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  secours  publics ,  dé- 
crète : 

•  Art.  l^r.  Les  veuves  des  citoyens  morts  en  dé- 
fendant la  patrie ,  ou  faisant  un  service  requis  et 
commandé  au  nom  de  la  république ,  dénommés  en 
rélat  annexé  au  présent  décret,  recevront,  à  titre  de 
pension  alimentaire,  la  somme  de  121,006  liv.  ils. 
9  den. ,  conformément  aux  dispositions  de  la  loi  du 
4  juin  1793  (vieux  style),  et  de  celle  du  13  prairial 
dernier;  laquelle  somme  sera  répartie  entre  elles, 
d'après  les  proportions  indiquées  aiidit  état. 

•  11.  Les  pensions  accordées  auxdites  veuves  leur 
seront  pavées ,  aux  termes  de  l'article  l«r  du  titre  11 
de  la  loi  au  14  prairial,  par  les  commissaires  distri- 
buteurs de  leurs  commuues  ou  sections  respectives, 
à  partir  de  la  date  de  la  mort  de  leurs  maris ,  sauf  à 
imputer  sur  le  montant  drsdiles  pensions  les  sommes 
susceptibles  de  retenue,  qu'elles  auront  pu  recevoir 
à  compte. 

•  111.  L'état  annexé  au  présent  d^ret  ne  sera  point 
imprimé.  • 


Ce  décret  est  adopté. 

^  Smnt-Mabtin,  au  nom  du  comité  des  secours  pn» 
blics  :  Citoyens,  par  la  loi  du  16  mai  1792,  relative 
à  la  maison  nationale  des  Invalides,  il  fut  accordé 
I  des  pensions  aux  veuves  des  militaires  admis  dans 
cette  maison  ,  ou  retirés  avec  la  pension  représen- 
tative. 

Le  maximum  de  ces  pensions  fut  fixé  pour  les 
veuves  à  100  liv.,  pour  les  enfonts  à  36  liv  ; 

Le  minimum  à  50  liv.  pour  les  veuves,  et  12  liv. 
pour  les  enfants. 
I      Mais ,  aux  termes  de  la  loi ,  la  première  ne  doit 
I  être  payée  que  •  lorsque  l'Etat  commencera  à  béné- 
ficier par  la  diminution  du  nombre  des  invalides.  » 
I      Vous  sentez,  citoyens,  que  cette  condition  rend  le 
bienfait  illusoire  ;  qu'on  ôte  à  ces  veuves  et  aux  en- 
fants tout  espoir  d'en  jouir  jamais ,  puisque ,  par  la 
circonstance  de  la  guerre  si  glorieusement  entre- 
prise et  soutenue  contre  lesennemisde  notre  liberté, 
le  nombre  des  braves  guerriers  à  qui  la  patrie  doit 
une  honorable  retraite  a  tellement  augmenté  qu'il 
s'écoulera  un  longtemps  avant  que  l'Etat  puisse  bé- 
!  néficier  par  la  diminution  de  cette  classe  de  pension- 
naires. 
j  .  Cependant  ces  citoyennes ,  pour  qui  la  vieillesse 
I  est  un  titre  de  plus  à  la  bienfaisance  nationale,  sont 
:  tombées  dans  la  plus  extrême  indigence.  En  perdant 
'<  leurs  époux,  elles  ont  perdu  tous  leurs  moyens  de 
subsistance  ;  elles  invoquent  à  grands  cris  cette  jus- 
lice,  cette  humanité,  ce  respect  pour  le  malheur, 
dont  la  Convention  nationale  se  montre  chaque  jour 
'  si  pénétrée  envers  les  infortunés,  parmi  lesquels  les 
;  familles  indigentes  des  militaires  tiennent  le  premier 

rang. 
I  Sans  doute  que  les  veuves  pour  qui  je  parle  n'in- 
spirent pas  un  intérêt  aussi  vif  que  celles  de  nos 
intrépides  défenseurs;  les  maris  qu'elles  pleurent 
n'ont  pas  été  les  soldats  de  la  patrie  ;  alors  il  n'exis- 
tait de  patrie  ni  pour  eux  ni  pour  nous;  ils  n'ont  pas 
eu  le  bonheur  de  coml)aUre  et  verser  leur  sang  pour 
la  cause  de  la  liberté  ;  ils  n'ont  servi  qu'un  roi ,  ils 
n'ont  obéi  qu'aux  ordres  d'un  maître;  mais,  en  bra- 
vant la  mort  pour  lui ,  pour  ses  caprices ,  pour  les 
fantaisies  de  ses  maîtresses  ou  de  ses  favoris,  ils 
crevaient  combattre  pour  les  intérêts  de  la  France , 
et  ils  ont,  par  leur  viileur,  soutenu  autant  qu'il  était 
en  eux  la  gloire  du  nom  français. 

Les  récompenses  que  nos  derniers  despotes  leur 
avaient  accordées  par  des  motifs  d'orgueil ,  d'ambi- 
tion et  de  tyrannie,  vous  les  avez  connrmées  et  aug- 
mentées par  un  motif  de  justice  et  de  munilicence 
nationale,  et  ce  principe  vous  dicte  d'étendre  à  leurs 
veuves  et  à  leurs  enfants  une  partie  du  bienfait. 

Les  lois  que  vous  avez  portées  en  faveur  des  fa- 
milles des  défenseurs  de  la  patrie  ne  leur  sont  pas 
applicables,  et  votre  comité  ne  vous  proposera  pas 
de  les  faire  participer  aux  mêmes  avantages  ;  leurs 
maris,  comme  je  vous  l'ai  déjà  observé ,  ne  leur  ont 
pas  transmis  d'aussi  grands  droits  à  la  bienfaisance 
publique. 

Mais  il  pense  que  ce  serait  les  traiter  avec  trop  de  ' 
parcimonie  que  de  les  réduire  à  la  pension  que  l'As- 
semblée constituante  leur  avait  assignée  par  la  loi  du 
16  mai  1791  :  il  pense  que  ,  pour  être  justes  à  leur 
égard,  le  moins  que  vous  puissiez  faire ,  c'est  d'éle- 
ver cette  pension  à  150  hv.  pour  les  veuves,  et  à 
75  liv.  pour  les  enfants  âgés  de  moins  de  douze  ans 
ou  infirmes. 

C'est  d'après  ces  vues  qu'il  m'a  chargé  de  vous 
présenter  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  sou  comité  des  secours,  relatif  aux  pen- 


m 


sîonsqae  la  loi  du  10  mai  1791  accorde  aux  yeuves 
«des  invalides  et  des  autres  militaires  retirés  a^ee  la 
pension  représentative  de  la  maison  Qationale>des 
invalides  ;  voiilanl  faire  jouir  ces  citoyeqnes  des  se- 
cours qui  leuravaient  été  promisi  et  \^  augmeuter 
décrète  ;  * 

•  Art.  I«r.  Les  yenv^  des  invalides ,  ou  de  mili- 
taires retirés  avec  la  pension  représentative  de  la 
maison  nationale  des  Invalides,  âgées  de  cinquante 
ans  au  moins,  jouiront  de  l&Q  liv.  de  pension  ait* 
mentaire. 

«11.  Lescnrantsrecevrontla  moitiéde cette  somme 
jusqu*à  rage  ^b  doute  ans  aoeomplis. 

«  Ceux  au-dessus  de  oet  âge^  qui  sont  infirmes  et 
hors  d*état  de  travailler,  en  jouiront  tant  que  durera 
leur  infirmité. 

•  III.  Lesditet  ¥eaves  et  enfiints  seront  tenus  de 
produire,  outre  les  pièces  exigées  par  la  loi  du  4  juin , 
l'acte  de  mort  du  militaire  et  sa  réception  k  la  mai- 
son nationale  des  Invalides,  on  son  brevet  de  pension 
représentative.  • 

Ce  décret  est  adopté. 

SALADiif  :  Organe  de  la  oommiision  des  Vingt-r 
et-Un ,  je  viens  rendre  compte  à  la  Convention  do 
l'état  de  ses  opérations.  Nommée  le  7  au  soir,  elle, 
s'est  assemblée  le  lendemain  ;  organisée  dès  ce  mo- 
ment, elle  a  écrit  aux  trois  comités  pour  solliciter  la 
remise  des  pièces  relatives  aux  quatre  représen- 
tants du  peuple  Collot.Billaud,  Barèreet  Vadier. 
Le  10,  la  commission  a  reçu  du  comité  de  salut  pu- 
blic une  lettre  qui  lui  annonçait  qu*il  avaitété  nommé 
des  commissaires  pour  rechercher  et  inventorier  ces 
pièces.  Le  tl|  le  12  et  le  t3 se  font  pasaéSi  et  la  oom-' 
mission  n'a  riçn  reçu. 

AndbbDumoht  :  Nommé  par  le  comité  de  salut 
public  pour  l'inventaire  dont  il  s'agit,  je  déclare  que 
déjft  ces  pièces  seraient  remises  s  il  ne  s'était  élevé 
une  question  incidente,  celle  de  savoir  si  des  arrê- 
tés secrets,  pris  par  l'ancien  gouvernement,  devaient 
en  faire  partie.  L'aftirmative  a  été  arrêtée ,  la  diffî* 
culte  est  levée.  La  commission  ne  tardera  pas  à  re- 
cevoir les  pièces.  (On  applaudit.) 

«-  On  reprend  la  suite  de  la  diseussion  sur  le  pro- 
jet de  décret  présenté  par  Johannot. 

Les  articles  suivants  sont  décrétés  sans  réclama- 
tion : 

«  Art.  XI.  Pour  rendre  promptemenl  à  l'agricul- 
ture les  biens  des  émigrés  et  des  condamnes ,  les 
mêmes  comités  présenteront  sans  délai  le  moyen  de 
régler  avec  les  parents  des  émigrés  la  portion  qui 
revient  à  la  république  dans  les  héritages.  Le  sé- 
questre mis  sur  les  biens  des  familles  sera  levé  im- 
médiatement après ,  et  elles  seront  mises  en  liberté 
s'il  n'existe  d'autres  causes  de  détention. 

•  Xll.  Tout  le  mobilier  des  émigrés  appartenant  à 
la  république  sera  vendu  sans  délai  :  le  comité  des 
(inniices  proposera  le  moyen  tle  le  réunir  pour  eu 
faire  des  ventes  publiques,  de  la  manière  la  moins 
dispendieuse  et  ta  plus  utile. 

•  XIII,  Il  sera  dressé  incessamment,  par  la  com- 
mission des  revenus  nationaux,  un  état  des  biena 

Su'il  est  utile  de  vendre  avec  célérité,  de  même  que 
es  bâtiments  et  maisons  non  loués,  qui  surchargent 
la  république  de  frais  de  garde  et  de  réparations. 

•  Le  comité  des  finances  présentera  ses  vues  sur 
les  moyens  d'en  accélérer  1  aliénation,  de  manière 
qu'elle  s'élève  à  1  milliard  dans  le  courant  de 
1  année. 

•  XIV.  Le  comité  des  finances  fera  incessamment 
un  rapport  général  sur  les  lois  portant  peine  de  dé- 
chéance envers  les  créanoierr  de  la  république,  afin 


que  la  Convention  nationale  soit  à  même  de  modifier 
celles  qui  lui  paraîtront  trop  rijgoureuses. 

-  XY.  La  commission  chargée  de  réviser  l'organi- 
sation actuelle  du  gouvernement  fera  incessam- 
ment son  rapport  sur  les  moyens  d'en  assurer  la 
marche,  de  lui  donner  toute  raclivité  et  la  force  né- 
cessaires, et  sur  les  économies  et  les  réformes  que 
l'intérêt  public  et  la  ponctualité  du  service  sollici- 
tent, soit  dans  les  commissions  administratives,  soit 
dans  les  attributions  qui  leur  sont  confiées.  • 

Lequinio  :  Tout  le  monde  sait  que  la  grande  émis- 
sion du  numéraire,  quel  qu'il  soit,  en  diminue  né- 
cessairement la  valeur,  et  que,  pour  rehausser  celte 
valeur,  il  ne  faut  que  diminuer  fa  masse  qui  est  en 
circulation  ;  vous  aurez  donc  atteint  dans  un  point 
important  le  but  que  vous  désires  si  vous  trouvez  k 
fairerentrer  au  trésor  public  une  grande  quantité 
d'assignats,  d'une  manière  très-prompte,  sans  bles- 
ser m  les  intérêts  publics,  ni  ceux  des  particuliers, 
et  sans  violer  les  aroits  de  la  justice.  Or  c'est  ce  qui 
est  très-facile  ;  vous  avez  pour  cela  quatre  mesures  » 
à  prendre  : 

10  C'est  d'accorder  une  prime  de  10  nour  100  aux 
acquéreurs  de  biens  nationaux  qui  someront  en  en- 
tier leurs  acquisitions  dans  le  courant  de  cette  an- 
née, je  veuxnire  d'ici  au  1^'  vendémiaire  prochain. 
C  e  moyen  est  sûr ,  et  le  sacrifice  que  semblera 
faire  la  nation  n'est  même  qu'apparent;  car,  sans 
cela,  les  acquéreurs  ne  paieront  qu'en  dix  années, 
aux  termes  de  la  loi  qui  leur  accorde  oe  bénéfice. 
D'ailleurs  l^s  bénéfices  immenses  que  la  nation  se 
procurera  par  la  plus-value  de  son  numéraire  l'in- 
demniseront au  centuple  de  cette  perte  ;  elle  ne  se 
nuira  donc  pas  à  elle-même»  et  elle  fera  évidemment 
le  bien  du  peuple. 

9^  11  faut  enlever  le  droit  d'enregistrement  sur  les 
cessions  des  biens  des  émigrés;  quoique  oe  droit  ne 
soit  que  de  %  pour  100,  l'expérituce  a  prouvé  qu'il 
gênait  beaucoup  de  spéculateurs,  qui  n'achetaient 
point  parce  qu*il  fallait  trouver  sur-le-champ  cette 
somme  à  débourser. 

Un  homme  trouve  une  cession  de  100,000  francs; 
par  exemple;  il  sait  qti'il  s'arrangera  de  manière  à 
se  procurer  des  ressources  pour  ses  payements,  aux 
époques  prescrites;  mais  il  lui  faut,  à  l'instant  même 
de  l'acquisition,  débourser  S,000  livres;  il  ne  les  a 
point;  il  ne  fait  pas  valoir,  et  le  défaut  de  concur- 
rence fait  donner  l'objet  à  un  prix  médiocre,  et  sou- 
vent à  vil  prix. 

Quelle  raison  d'ailleurs  y  a-t-il  de  faire  une  diffé- 
rence entre  les  biens  des  émigrés  et  ceux  des  ci-de- 
vant moines?  Les  uns  et  les  autres  ne  sont-ils  pas 
également  biens  nationaux,  et  ne  s^aperçoit-on  pas 

3ue  les  diff'érencier  c'est  jeter  du  discrédit  sur  ceux 
es  émigrés?  Pourquoi  la  nation  aurait-elle  |e  tort 
de  concourir  elle-même  avec  la  malveillance  à  dé- 
précier ainsi  sa  propre  fortune? 

30  11  faut  proroger  encore  jusqu'au  l«r  vendé- 
miaire la  faculté  accordée  par  la  loi  du  mois  d'août 
1703,  et  dont  le  délai  est  expiré  hier,  la  faculté  de 
fournir  une  moitié  d'inscription  sur  le  grand  livre, 
avec  une  moitié  d'assignats  ayant  oours,  dans  le 
payement  des  biens  nationaux  d^  quelque  espèce 
que  ce  soit,  à  condition  toutefois  de  solder  son  ac- 
quisitidn  en  entier  dans  le  courant  de  cette  année* 
Vous  accorderez  aussi  même  sur  cet  o^jet  la  remisa 
de  10  pour  100. 

Il  ne  faut  pas  craindre  que  l'emploi  des  inscrip- 
tions au  grand  livre  diminue  la  rentrée  desassignats  ; 
au  contraire,  car  cela  facilitera  les  ventes,  et  beau* 
coup  de  personnes  se  liquideront  en  entier  dans 
l'année,  qui,  sans  ceUi  w  le  feraient  qMd  dans  Tes- 
pace  de  dix  ans. 


12: 


Cette  prorogatioo  pour  reoaploi  des  iikâcripUons 
est  d'iiilleurs  ae  ju»ti<îe  rigoureuse.  En  décréUnt  la 
loi  du  mois  d'août  I79d ,  la  Couveotion  erut  que 
toutes  les  ioscriptioAS  pourraient  être  délivrées  en 
lemp»  opportun^  pour  laisser  à  eUaoun  des  eitoyeoê 
inscrits  U  faculté  de  faire  l^emploi  de  leurs  inscr^H 
lions  daus  le  délai  prescrit  ;  or  cela  n'a  pu  aroir  lieu» 
puisqu'il  est  de  lait  que  les  inscriptions  ive  sont 
ut^iuc  pas  encore  totaleraeat  délivrées. 

Les  raisons  d'équité  concourent  done  avecTinté- 
rii  public  et  l'intérêt  particulier  pour  faire  adopter 
ks  mesures  que  je  propose  pour  1  avantage  du  peu- 
ple, en  opérant,  par  la  prompte  rentrée  des  assi- 
guats,  la  baisse  inévitable  de  toutes  les  denrées. 

Les  observations  de  Lequinio  sont  renvoyées  aulc 
comités. 

—  Belfroy  propose  un  projet  de  décret  pour  qui! 
de  soit  pîus  retenu  de  cinquième  sur  les  rentes  que 
doit  la  république,  attendu  qu'un  cinquième  a  di^ 
été  retenu  lofs  de  Tlnscription  au  grand  livre. 

Cambon  :  Il  est  faux  qu'on  ait  fait  une  double  re- 
tenue sur  toutes  tes  reBtes4  Cette  matière  a  été  dis- 
cutée trois  Cois  dans  ta  Cotiveution.  Elle  pensa  ^ 
comme  le  comité  des  finances,  qu'il  fallait  faire  une 
(tistiuctioo  entre  les  rentes  qui  avaient  été  coasti^ 
tu«es  sans  reten^ie  et  celles  sur  lesquelles  une  rete- 
nue était  déjà  faite  à  l'instant  de  leur  création.  Ait 
surplus,  je  ne  m'oppose  point  à  ce  que  la  proposition 
de  Befîroy  soit  renvoyée  à  Pexameudu  comité,  qui 
n'a  jamais  voulu  faire  tort  à  personne.  . 

Le  renvoi  est  décrété. 

—  Bailleul  prononce  uo  discours  à  la  suite  du- 

3uel  il  présente  des  vues  tendant  à  l'établissement 
'une  comniissiou  uniquement  chargée  de  la  liqui- 
dation des  dettesdes  émigrés  et  condamnés» 
La  question  préalable  est  invoquée  et  adoptée. 

Cambon  :  Depuis  que  la  Convention  a  décrété 
qu'il  lui  serait  fait  un  rapport  sur  les  moyens  de  re- 
tirer des  assignats  de  la  circulation,  la  malveillance 
cherche  à  répandre  qu'il  n'y  a  d*autre  moyen  que  la 
démonétisation.  Eh  bien  »  le  demande  que  rassem- 
blée  se  prononce  et  qu'elle  déclare  qu'elle  ne  dé- 
monétisera pos  les  assigmits. 

A[)rès  quelques  déliais,  cette  pro'positioa est  dé- 
crétée. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉAI«CB  DU    14  NIVOSE. 

CHÉNtHli,  au  nom  d^  comité  d'instniction  publi- 
que :  ëitovens  représentante,  vous  avez  jeté  un  coup 
(l'œil  sur  les  stietices  et  sur  ï\ps  arts;  Vous  avez  vu 
Tn  république,  longtemps  dominée  par  d'ambitieux 
iguorunls.  tomber  peu  à  peu  dans  une  honteuse  bar- 
barie, qui  oicnLotcût ressuscité  l'ancien  despotisme, 
et  vous  avez  dit  :  Cet  opprobre  ne  subsistera  plus; 
lit  nation  française  sera  libre  et  éi^Iairée  ;  l'oligarchie 
de  rabsunnté  verra  briser  son  sceptre  sanglant;  les 
bell<»s-lettres  reprendront  leur  é«lat;  Ifes  arlsconso^ 
latcnrs  relèveront  leur  télé  chaneelattte,  car  oh  sert 
son  pays  en  l'éclairant  :  les  hommes  qui  fbnt  faire 
^n  pas  à  la  raison  publique  sont  aussi  les  défenseurs 
de  ta  patrie. 

Déjà ,  depuis  longtemps,  vous  avies  destiné  une 
somme  de  300,000  liv.  aux  hommes  laborieux  et 
sans  fortune,  qui  cultivent  ces  arts  Utiles  (Juc  Tor- 
gueil appelait  métiers;  mais  vous  avez  senti  que  les 
sciences  sublimes,  que  les  arts  fondés  sur  le  beau 
idéali  et  dont  l'objet  est  l'imitation  d'uni!  un\iiro  il'é. 


lite,  avaiesU  aussi  besoin  d'encouragement,  et  ne  de- 
vaient point  inspirer  moins  d'intérêt  aux  législateurs 
d'une  ^ande  société  civile.  Bu  conséquence,  vous 
avez  décrété, le  a?  vendémiaire  dernier, qu'une  nou* 
velle  somme  de  300,000  liv.  serait  répartie  entre  les 
gens  de  lettres  et  les  artistes  qui  méritent,  par  leura 
talents  et  la  situation  actuelle  de  leur  fortune,  l'at- 
tention généreuse  de  la  Convention  nationale.  Vous 
avez  décrété  que  votre  comité  d'instruetioa  publique 
vous  présenterait  l'état  de  ces  citoyens,  ie  viens,  en 
soir  nom ,  remplir  aujourd'hui  vos  vues  bienfai- 
santes. 
En  discutant  les  bases  de  notre  travoil,nous  avons 

Sftnsé  que  l'inégalité  d'âge,  de  talents  et  de  travaux» 
avait  uéœsaaireMent  établir  quelque  inégalité  dans 
les  récompenses.  Du  reste,  n'épousant  aucune  pas- 
sion individuelle,  nous  avons  placé  sur  la  même 
liste  les  hommes  de  mérite  que  des  que rtllcs  lilté« 
raires  avaient  longtèoips  divisés* 

Vous  entendrez  un  ^and  nontire  de  aoms  célè«* 
bres«  et  c'est  vous  offrir  une  preuve  affiigcante  du 
délaissemeat  honteux  où  les  stupèdes  oppresseurs  de 
la  république  avaient  oofidamné  tout  ee  qui  osait 
avoir  une  réputation.  Quelques  littérateur»  moins 
connus  ont  travaillé  d'UAc  oianière  moins  utile  ; 
d'autres>  jeunes  encore^  éoatefti  desespëtattccs  qiM 
le  temps  doit  réaliserv 

Parmi  ces  takuta  dé  toui  feorcs,  ybustrouverea 
les  nonM  de  trois  fegiiaes  qui  nous  ont  paru  mériter» 
d'une  manière  éclatante»  les  regards  bienvetllanta 
de  la  Conveiition  nationale.  L'une  est  la  célèbre  Dir-» 
mesnil»  cette  artiste  oetogénairt»  dont  le  patriotisme 
égale  la  réputation,  qui  a  rteuléles  bornes  dt  la  4ë^ 
clamation  tragique»  ei  dont  le  fénie,  eeotemporaiil 
de  celui  de  Voltaire,  embellissait  ses  brillants  chefii- 
d'œuvre.  La  seconde  est  la  petite-QUe  de  Pierre  Cof^ 
neille,  celle-là  même  qui,  n'ayant  d'autre  héritage 
que  le  nom  d'un  granéliomme,  alla  trouver  sur  les 
bords  du  lac  de  Qenèvev  dans  lé  maison  d'un  autre 
grand  hemme>  et  l'asile  hospiUirieeet  la  bienfeisanee 
respectueuse»  Détenue  ^uetoree  mois  sous  le  règne 
des  Vandales,  •Mem'spôinl  et  $k  p9Ut  r9p(»êer  ta 
téiê  ;  ce  sont  ses  propres  expcèssioes.  Voltaire  n'est 
ulus;  mai»  la  Convcetton  nationale  existe,  et  cette 
femme  est  la  postérité  de  l'autetvr  d' Jiefwee. 

La  demiète  esi  le  veuve  respectahle  de  Lemierre, 
cet  homme  vraiment  républicain,  qui,  sous  le  d(^s- 
potisme  de  Louis  XV ,  osa  présenter  sur  un  théâtre 
alors  asservi  le  fondateur  de  Iti  hberté  helvétique  et 
le  martyr  de  la  liberté  bataive.  Il  est  mort  pauvre  et 
consumé  de  ehegrin,  loreifm^it  vit  la  révolution  de- 
venir un  océeft  sans  ri  ves^ou  pkitdt  une  mer  de  sang. 
Nous  avons  été  persuadés  »  reptésenCants ,  que  vous 
saisiriez  a vecaviditëcette  oeoesion  détendre  un  hom* 
mage  de  reconnaissance  à  l'auteur  vertueux  de  Bar- 
nevtU  et  de  GwiUanm§  TeU.  Il  n'a  jamais  été  souillé 
par  les  bienfaits  de  la  tyrannie;  c'est  lui  qtir  vous 
recommande  sa  veuve  ;  et  la  priière  qui  monte  du 
fond  de  la  tombe  d'ua  ami  de  la  liberté  se  feit  tou- 
jours entendre  du  cœur  des  représentants  d'un  peu- 
ple libre. 

Nous  avions  d'abord  placé  sur  la  liste  que  nous 
devons  vous  présenter  le  célèbre  Thomas  Payne  ; 
déclaré  citoyen  français  par  un  décret  que  je  m'ho- 
nore d'atoir  provoqué  dans  une  péfition,  vers  la  lin 
de  la  Légtsletlvcv  il  futporbé  debuis  à  la  Convention 
pour  y  représenter  le  peuple  français.  Un  caprice 
des  tyrans  l'avait  exilé,  comme  étranger,  du  sein  de 
la  représentation  Oationale  ;  vous  avei  révoqué  ce 
décret  inhospitaliet ,  et  nous  ne  voyons  plus  en  Tho- 
mas Paytie  un  homme  de  génie  sans  fortune ,  mais 
un  collègue  chéri  de  tous  les^  amis  de  l'humanité, 
un  cosmopolite  également  persécuté  par  Pitt  et  par 


128 


Robespierre;  époque  remarquable  dans  la  vie  de  ce 
philosophe  qui  opposa  les  armes  du  sens  cpminun 
au  glaive  de  la  t^rrànoie ,  la  sainteté  des  droits  de 

I  homme  au  machiavélisme  des  politiques  d*Angle- 
terre,  et  qui,  par  deux  écrits  immortehs,  a  bien  mé- 
rité du  genre  humain,  et  consacré  la  liberté  dans  les 
deux  mondes. 

Les  derniers  conspirateurs,  hommes  sans  talents, 
mais  vains  en  proportion  de  leur  nullité ,  orateurs 
tourmentés  de  la  manie  de  Téloquence,  et  sachant  à 
peine  écrire  deux  phrases  de  suite  en  langue  fran- 
çaise, avaient  conçu  une  aversion  mortelle  contre 
les  hommes  éclairés.  Ils  accueillaient  exclusivement, 
ils  publiaient,  aux  frais  de  la  nation,  les  productions 
ignominieuses  de  quelques  écrivains  mercenaires*, 
flagorneurs  imbécilles  de  Toligarchie  que  Ton  appe- 
lait démocratie,  et  plus  plats  encore  que  leurs  pro- 
tecteurs. Dans  tous  les  temps,  les  hommes  qui  ont 
opprimé  le  peuple  ont  persécuté  la  raison  et  le  gé- 
nie. Critias  était  jaloux  de  Socrate;  Denvs  de  Syra- 
cuse, de  Platon;  Néron,  de  Lucain  rtde  Sénèque. 

N'avons-nous  pas  entendu  à  cette  tribune  Thypo- 
crite  et  insolent  dictateur  accuser  la  plupart  des 
gens  de  lettres  de  s'être  déshonorés  dans  la  révolu- 
tion? Sans  douté  ils  se  seraient  déshonorés  si,  re- 
nonçant à  toutes  les  idées  sociales,  si,  foulant 
aux  pieds  tous  les  principes  fondamentaux  de  la  po- 
litique ,  ils  n'avaient  vu  la  révolution  que  dans  un 
homme,  et  l'égalité  que  dans  la  publique  servitude. 

II  en  est,  je  Tavoùe,  mais  en  petit  nombre,  et  pres- 
que tous  sans* moyens,  il  en  est  qui  ont  embrassé 
avec  tureur  Tidole  expirante  de  la  royauté.  Ce  u*est 
pas  ceux-là  qu'il  faut  excuser  :  {lérissênt  tous  les 
traîtres  qui ,  en  corrompant  l'opinion ,  feraient  ser- 
vir leur  plume  coupable  à  rétablir  un  roi  parmi 
nous!  Mais  ne  plaçons  pas  au  rang  de  ces  esclaves 
impurs  des  littérateurs,  des  artistes  estimables,  qui, 
dans  le  silence  du  cabinet ,  accoutumés ,  pour  ainsi 
dire ,  à  converser  avec  Aristide  et  Caton  d'U  tique , 
avec  bémosthènes  et  Çicéron,  n'ont  pas  admiré  T  ho- 
micide austérité  de  Couthon,  ou  l'éloquence  meur- 
trière de  Saint-Just,  et  qui  n'ont  pu  reconnaître  le 
char  de  la  liberté  dans  ce  tombereau  sanglant  où 
Robespierre  faisait  traîner  ses  victimes.  Harcus  Bru- 
tus  n'était  pas  un  scélérat,  lorsque,  périssant  à  Piii- 
lippcs,  et  voyant  la  victoire  injuste  oes  triumvirs,  il 
doutait  de  l'existence  de  la  verta  dont  sa  vi€  entière 
offrait  le  modèle. 

En  attendant  que  la  voix  de  l'avenir  se  mêle  à  la 
vôtre  pour  venger  les  lettres  avilies,  les  arts  dégra- 
dés et  abattus,  il  vous  appartient,  représentante,  de 
leur  accorder  des  consolations  et  un  appui. 

Le  décret  dont  je  viens  solliciter  l'exécution  n'est, 
dans  la  pensée  de  votre  comité  d'instruction  publi- 
que, et  j'oserai  dire  dans  votre  pensée  même,  qu'un 
prélude  à  des  bienfaits  solides  et  durables,  qu'il  est 
t£mps  de  répandre  sur  des  hommes  dont  les  talents 
honorent  la  patrie.  Les  arts  sont  une  propriété  na  • 
tiouaie;  les  encouragements  qu'ils  réclament  sont 
une  dette  publique.  Relevez  donc,  rassemblez  leurs 
débris  :  et ,  si  un  gouvernement  envieux  leur  a  fait 
longtemps  la  guerre,  présentez-leur  le  rameau  d'o- 
livier au  nom  de  la  république  française.  Ne  laissez 
pas  plus  longtemps  les  vils  partisane  de  la  royauté 
insulter  à  leur  décadence,  et  leur  citer  avec  emphase 
les  noms  du  sanguinaire  Octave,  du  machiavëlistc 
Léon  X  et  de  l'orgueilleux  Louis  XIV.  Ces  despotes 
sans  doute  ont  voulu ,  en  protégeant  les  sciences  et 
les  arts,  se  faire  pardonner  les  uireurs  des  proscrip- 
tions, les  crimes  du  pontificat  et  les  massacres  des 
Cévennes  ;  mais  ils  n'ont  laissé  après  eux  qu*uiie  re- 
nommée flétrie  par  la  puissance  arbitraire ,  des  lau- 
riers couverts  de  sang. 


Non,  il  n'est  pas  vrai  one  les  lettres  aient  besoin 
de  la  protection  d'un  seul  homme.  Les  arts  compri- 
més par  la  tyrannie  ont  les  proportions  de  l'escfa- 
vage  :  ils  ressemblent  à  ces  chênes  rachitioues  dont 
le  feuillage  pauvre  et  lesTameaux  courbes  vers  la 
terre  repoussent  le  voyageur  fatisué  qui  cherche  un 
abri  contre  l'orage.  Voyez  à  quelle  hauteur,  encore 
inaccessible  aux  nations  modernes,  la  poésie,  l'élo- 

auence  et  tous  les  arts  d'imitation  se  sont  élevés- 
ans  les  républiques  de  la  Grèce ,  i  Corinthe ,  à  Sh 
cyone ,  à  Syracuse ,  et  surtout  dans  Athènes ,  dans 
cette  cité  classiqae  et  nourrice  des  grands  hommes, 
où  Périclès ,  sortant  de  l'atelier  de  Phidias,  courait 
entendre  les  leçons  de  Socrate  ;  où  l'orateur  Eschine, 
cité  devant  l'assemblée  du  peuple,  admirait  Démos- 
thènes  tonnant  contre  lui  ;  où  jPlaton ,  venant  d'in- 
struire ses  nombreux  élèves  dans  les  jardins  d'Aca- 
démus,  se  reridait  avec  eux  au  théàtrepour  y  décider 
entre  Euripide  et  Sophocle ,  et  décerner  le  nrix  da 
génie  :  telles  et  plus  imposantes  encore  doivent 
être  un  jour  les  destinées  de  la  république  fran- 
çaise. Productrice  d'hommes  et  de  choses,  elle  a  be- 
soin d*nne  immense  industrie.  Tous  les  beaux  arts 
lui  sont  nécessaires;  ils  occupent  le  loisir,  ils  char- 
ment les  chagrins,  ils  répandent  sur  la  vie  la  somme 
de  bonheur  dont  l'espèce  humaine  est  susceptible  ; 
et  tout  ce  oui  rend  heureux  les  hommes  réunis  en 
corps  social  fait  essentiellement  partie  du  domaine 
de  la  liberté. 

Ce  rapport  est  souvent  interrompu  par  les  plus 
vifs  applaudissements. 

{La  suite  demain.) 

N.  B.  Dans  la  séance  du  15,  la  Convention  a  pro- 
cédé à  l'appel  nominal  pour  le  renouvellement  d'une 
partie  des  membres  du  comité  de  salut  public. 

Les  membres  sortants  sont  Merlin  (de  Douai), 
Fourcroy,  Delmas. 

llsont  été  remplacés  par  Marec,  Bréard  et  Chazal. 


GRAVURE. 

Joseph  Canget  ronmistionnaire  de  Saint- Laiare,  ne  i  Sar- 
rebourg,  département  de  la  Mearlhe,  en  17S3,  peint  diaprés 
nature  par  Legrand,  et  f  rave  par  P.  Be^aBibe.  Prit  :  SO  s. 
A  Paris,  ohez  Beljambe,  nia  des  PtUl»>Av(tutiBS,  près  ceUa 
du  CoIoBtbier,  b9  S. 

Cette  mvnra  a  été  ptéMStée  k  la  Gasveatioa ,  qui  eo  a 
î  I  bonmaae. 


accepté  I  bonmage. 


LIVRES  DIVERS. 


Code  des' successions ,  on  Recueil  de  tous  les  décreU  oui 
ont  paru  jusqu*à  ce  jour  sur  les  successions,  teslaneoU,  do» 
nations,  partages,  substitutions  et  autres  actes  civils  qui  y 
ont  rapport  ;  un  volnsse  in-1 1  de  S99  pages,  avec  ubie  chro- 
nologique et  alphabétique  des  matières.  Prit  :  4  liv.,  bro- 
cbé;  et  4liT.  iS  s.,  franc  de  poK,  pour  tous  les  départements. 
Se  trouve  à  Paris,  cbes  le  citoyen  Raodoaoean,  au  dépét 
des  lois,  place  du  Carrousel. 

Cette  édition  contient  une  esplication,  en  forme  de  com« 
menuire,  des  lois  des  1 7  nivôse,  S9  et  tS  ventôse,  et  9  fruc- 
tidor de  Tan  9*  L*auteur,  le  citoyen  Verneuil,  Ta  soumise, 
avant  delà  publier,  aut  représentants  du  peuple  Cambacc- 
rès  et  Berlier,  membres  du  comité  de  législation. 


Payements  à  la  trésorerie  naHùnale. 

Le  payement  du  perpétuai  est  ouvert  poar  les  six  premiers 
mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  scroul  porteurs  d'inscrip* 
tioDS  au  grand  livre.  Cclu*  pou  les  rentes  viagères  est  de 
hait  mois  vingt  et  un  Jours  de  l'anDée  1793  (rieus  style). 


GAZETTE  NATIONALE  »„  LE  MONITEUR  UNimEL. 


N*  107. 


Septidi  17  NivosE,  l'an  3*.  {Mardi  6  Janvier  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

Varsovie  t  h  décembre,  —  Celle  ville  csl  menacée  de  la 
famino,  dernière  calamité  dont  ne  peuvent  manquer  de  se 
glorifier  les  générnux  de  CaUierine  ;  les  vif  res ,  les  denrées 
de  première  nécessité ,  y  sont  d'une  rareté  effrayante.  La 
diM.>Ue  des  Tourrages  y  est  aussi  grande  que  celle  des  sub- 
sistances. 

—  Le  prince  Repoin  vient  d'être  nommé  goufernear  gé- 
néral de  Lithuanie  et  de  Samogitie. 

On  •  établi  dans  ces  proviocea  un  gouTemement  prori- 
toire. 
Le  prince  Repnin  fera  sa  résidence  à  Grodno, 

—  On  sait  aujourd'liui  que  le  conseil  national ,  dans  une 
de  ses  dernières  séances,  avait  arrêté  qVavant  la  reddition 
de  Varsovie  l*armée  polonaise  sortirait  de  la  ville,  sous  les 
ordres  du  général  Dombrowski. 

—  Un  million  de  florins  avait  été  promis  au  corps  de 
troupes  qui  ferait  une  nouvelie  diversion  dans  la  Prusse 
méridionale, 

"^  On  sait  aussi  que  Wawriewski  sortit  de  Varsovie 
pendant  la  canonnade  de  Praga.  Il  avait  chargé  un  corps  de 
cavalerie  d'enlever  Stanislas;  mais  toutes  les  issues  du  châ- 
teau se  trouvèrent  fermées,  et  les  Russes,  gagnant  déjà 
le  rivage  de  la  Vistule,  du  o6lé  de  Varsovie,  ce  corps  se 
trouva  forcé  de  rejoindre  l'armée  polonaise,  sans  avoir  pu 
exécuter  sa  mission, 

—  La  plupart  dés  officiers  polonais,  prisonniers  des 
Prussiens,  ont  été  relâchés  sur  leur  parole. 

Le  gouvernement  prussien  paraît  adopter  un  système  de 
douceur  et  de  modéranlisme  à  regard  des  insurgés. 

— •  L'ordre  équestre  de  Courlande  a  demandé  la  convo* 
cation  des  états  de  la  province, 

ALLEMAGriE. 

Vienne^  le  6  d^eein^rt. —La eonr  de  Vienne  traite  avee 
une  rigueur  extrême  ceux  de  ses  généraux  qui  ont  été  obli- 
gés de  céder  à  la  valeur  française.  Elle  a  donné  ordre 
d'examiner  la  conduite  det  ci-devant  commandants  de 
Valenciennes  et  de  Coudé. 

Le  général  Nolitz  est  chef  de  la  commission  nommée  à 
cet  effet;  il  a  pour  assesseurs  les  généraux  Terxy  et  Ster- 
nibab. 

— On  vient  d'accorder  aux  entrepreneurs  ducanal  de  com- 
munication de  Theiss  avec  le  Danube  un  oetroiqm  doit  du- 
rer vingt-cinq  ans.  Ce  canal  portera  le  nom  de  l'empereur. 

— Les  revenus  de  l'Etat  ne  pouvant  suffire  aux  énormes 
dépenses  de  la  guerre,  il  a  été  question  de  payer  en  eou» 
pom  tous  les  fonctionnaires  publics  de  la  cour  impériale; 
mais  ce  système  n'offrant  que  des  avantages  très-bornés , 
on  désire  y  substituer  un  emprunt  pour  le  compte  des  états 
des  provinœs, 

La  convocation  des  états  de  Styriea  déjà  été  annoncée 
pour  le  16  de  ce  mois»  à  l'effet  de  délibérer  sur  cette  pro- 
position. 

Deê  froniièru  de  Servie,  30  novembre,  -»  Il  a  éclaté, 
parmi  les  hordes  de  cosaques  du  Don  et  les  différentes 
peuplades  qui  habitent  le  Caucase,  une  insurrection  con- 
tre le  gouvernement  russe.  On  assure  qu'il  y  a  parmi  les 
insurgés  des  hommes  capables  d'organiser  un  mouvement 
de  quelque  importance,  et  qu'on  a  déjà  choisi  un  chef 
pour  commander  les  troupes  qui  se  réuniront  à  Ereeroum. 

—  On  apprend  de  Constantinople  que  tons  les  pachas 

3*  Série. -^  TomeX. 


d'Asie  ont  eu  ordre  de  compléter  leurs  divisions  et  d'en 
former  de  nouvelles. 

—  Le  pacha  de  Scutari  s'est  de  nouveau  mis  en  campa- 
gne, et  occupe  plusieurs  endroits  qu'il  a  soustraits  à  la  do- . 
mination  de  la  Porte. 

PRUSSE. 

Brandebourg^  le  h  décembre.  —  La  cour  de  Berlin  a  on* 
vert  un  emprunt  iqdéfini ,  sous  la  direction  du  ministre 
Slruensée.  Le  motif  avoué  de  cet  emprunt  est  rembarras 
que  cause  dans  le  commerce  la  trop  grande  quantité  de 
petite  monnaie  en  circulation  dans  les  po&sessions  prus- 
siennes. Ou  ne  recevra  que  la  monnaie  de  cuivre.  Les  cou- 
pons, qui  porteront  intérêt  à  k  pour  100,  pourront  être  de 
25 ,  50 ,  100,  500 ,  et  1,000  écus ,  remboursables  six  mois 
après  la  paix.  Cette  mesure  a  pour  objet  de  diminuer  la 
masse  de  cette  monnaie,  dont  la  guerre  a  nécessité  des 
émissions  très-cousidérables,  ainsi  que  l'annonce  le  préam- 
bule de  l'édit. 

ANGLETERRE. 

Londres, tel  déeembre*  — Le  duc  d'York,  attendu  de- 
puis si  longtemps,  est  enfin  arrivé  le  6;  on  est  toujours 
très-partage  sur  les  motifb  de  son  retour  :1es  ministres 
s'assemblèrent  le  môme  jour  en  sa  présence  pour  s'occuper 
des  dépêches|de  l'ambassadeur  anglais  à  La  Haye  et  du  gé- 
néral Abercromby. 

—  Les  fonds  publics  viennent  d'éprouver  une  baisse  due 
au  redoublement  d'aaivilé  que  le  gouvernement  met  dans 
ses  préparatifs  militaires.  11  ne  parait  pas  qu'il  veuille  ra^ 
peler  Parmée  du  conlineiit  i)our  Texpédilion  projetée  con- 
tre les  côles  de  France;  car  aulrement  il  ne  se  serait  point 
empressé  d'y  envoyer  des  officiers  pour  remplacer  ceux  qui 
ont  élé  tués.  C*est  le  général  Abercromby  qui  aura  le  oou^ 
mandement  de  cette  armée,  le  général  Erskine^  qui  en. 
était  chargé  en  second ,  devant  revenir  incessamment  en  • 
Angleterre. 

—  Le  greffier  des  états  généraux  n'est  point  encore  parti. 
Il  parait  qu'il  a  demandé  au  nom  des  états  généraux  un  se» 
cours  pécuniaire  considérable,  ainsi  qu'un  corps  nom* 
brcux  de  troupes,  dans  un  conseil  tenu  le  4.  Le  ministère 
commence  à  mieux  sentir  la  nécessité  d'adhérer  à  ces  pro* 
positions quHl  avait  d'abord  rejetées.     ' 

—  Le  vaisseau  r^^msrica,  de  64 canons,  vient  d'entrer 
à  Porlsmouih,  chare:é  del  million  et  demi  en  espèces  : 
ainsi  toutes  les  inquiétudes  à  cet  égard  sont  dissipées. 

—  L'amiral  Waldegrave  eut  bier  un  entretien  avec  le 
commissaire  de  l'amirauté,  pour  rendre  compte  de  ses  ob- 
servations sur  la  situation  de  l'escadre  britannique  dans  la 
Méditerranée ,  d'où  il  arrive. 

—  Lord  Howe  a  donné  sa  démission  du  commandemeai 
de  la  grande  flotte ,  dont  l'amiral  Ûood  va  se  charger. 

Du  9.  — Les  ministres  affectent  de  répandre  que  les  pré* 
paralifs  militaires  qu'ils  font  sont  destinés  à  faire  prendre 
enfin  en  grand  à  TAngieterre  le  rôle  d'agresseur,  eneffee- 
tuant  une  desceule  sur  les  côtes  de  France  ;  mais  personne 
n'est  la  dupe  de  cette  forfanterie,  et  les  bons  bourgeois  de 
Londres  et  de  la  cité  de  Westminster  disent  que  M.  Pitt 
fera  beaucoup  mieux  de  réserver  ces  troupes  pour  garder 
les  côtes  de  la  Grande-Bretagne;  qu'on  ne  lui  en  demande 
pas  davantage,  et  qu'on  le  dispense  do  rôle  de  conquéraolt 
pourvu  qu'il  remplisse  celui  de  financier  économe. 

Il  est  pourtant  certain  qu'on  lève  ou  qu'on  essaie  de 
lever  vingt  régiments,  et  que  l'émigré  français  d'Hervilly» 
qui  commande  près  deSoulhampton  une  légion  de  Toulon- 
nais,  a  reçu  ordre  de  se  tenir  prêt  pour  un  embarquement  ; 
c'est  peut-être  en  Corse  qu'ob  envoie  ce  corps  remplacer 
les  troupes  anglaises  qui  périssent  de  maladie  ;  car  il  serait 
aussi  trop  absurdje  d'avoir  réellement  le  projet  de  débar- 
quer sur  les  côtes  de  France ,  quand  on  ne  peut  plus  comp- 

'  17 


130 


Crr  fvf  la  Toidée  ftf  hf  ctanH.  la  roi e ,  le  corps  d*Her- 
VfUj  A'etAbi  pas  cw^,  oamia  pcraisde  rccruier  dans 
Icfaatm.  On  T<nfg  aossi  qoeerloi  de  Omdé  doit  pas- 
aar  a  ka  G»a»de  B»€taf«e^  €l  qw  le  goofernenent  se  pro- 
pMe4'adkc«v  i—tjatfciiîfaH  de  fucrfc  venus  de  Toa- 
Im  dass  les  ports  krîUsaiqoes,  iors  de  la  reprise  de  celte 
plM«  et  d'en  dntnboer  Je  prii.  entre  ies  officiers  et  sol- 
ém%  ^m  ool  éaigré  s«r  ces  f  aisseanx. 

—  Ob  pféteod  aajoard^hui  que  le  p»rlen»t  ne  stra  pas 
frerofé  jiisqa*aa  21  janvier,  comme  le  bruit  en  avait 
cavni;  les  ministres  di  «CRI  iMwcque  ce  bruit  avait  éié  ré- 
pêttAn  par  des  malveillants.  A  la  bonne  heure  I  on  on  uura 
pb»  IM  celle  wpartaatc  sessioo^  alt^ndue  impsaiemonent 
Pjlf  Itft  Angbis  tl  par  les  élrsiigers  \  il  j  sera  question  de  la 
rtlaariii  du  cabinet  ée  Sainl-JaMes  par  rapport  à  ceux 
et  la  CMlilkm  «  ë*«D  Douf el  eflsprmnl  ^  ainsi  que  d'une 
Blipuiililiiiii  SM  la  Uxe  des  lerres,  de  la  demaiNie  de  la 
iWaeUa  oaiiomle  po«r  Tempriiac  oatert  et»  An^ldefre 
PMMla  coapèe  4e  LVaipeiciir,  tt  tni»  de  la  rélénae  parle- 

—  M.  Tkevall,  le  deraier  des  ace«s«s,  vieat  d'«0« 
aapillÉ  è  UiMlecSY  et  le  prapnélaire  d«  Northern  Star  à 


CONVENTION    NATIONALE. 

Prétidenee  de  Bcntabole, 
90m  DR  LA  SÉAKCE  DU  14  NirOSB. 

Chënier  propose  le  discret  et  la  liste  suivants  : 

«  La  CoBYCOtioD  nationale,  après  avoir  ente ndo  le 
rtMort  de  soa  comité  d'instruction  publique,  dé» 

•  Art.  l^i*.  Eb  exécatioQ  du  décret  rendu  le  27 
T^démiaire  dernier,  la  trésorerie  nationale  tiendra 
à  la  disposition  de  la  commission  executive  de  lia- 
sipictioo  pub|i<(ue  une  somme  de  aoo.ooa  livres, 
pour  être  répartie  conformément  à  Tétat  ci-joint. 

•  S,MO  livres  à  chacun  des  citoyens  : 

•  Adanson,  naturaliste  ;  Anquetil,  auteor  de  VEê^ 
eriC  de  Ia  Ug^  et  de  VEtpril  de  to  Frtmde. 

«  Bitaubé,  traducteur  d'Homère;  Bossu t,  géomè- 
tre ;  Bn^quigny ,  auteur  d'écrils  considérables  sur 
r|ysl«ire  de  France;  Bcisson»  physicien. 

•  Cousin,  géomètre;  Gorneille  d'Angely,  petite- 
fille  du  ffrand'  Corneille;  Cote,  astronome. 

•  Delille.  auteur  do  la  traductiou  eu  vers  des  Géot- 
miquu;  Delilkrde-SaUe»  auteur  de  la  Pkéi0sepkit 
Se  kl  Ikdmn^  Ddcis,  auteur  tragique;  I>umesiiil, 

icilovf une),  actrice  tragique;  Dutb«il>  traducteur 
CKscUylc.  ...  .       .      ^  .. 

•  GiùffMNK  savant  en  litteratuce  orientale  ;  Gail- 
lard,  historien  ;  Gnrnier,  historien. 

•  Mermann,  do  Strasbourg»  naturaliste. 
«  Jenunit«  astronome. 

•  Lahurpe,  littérateur  ;  I«alande,  astronome  ;  La- 

arck.  naturaliste;  l-archor,  traducteur  d'Hérodote; 
irigand;  Ubcun»  po^c  lyrique;  Unùerre  (la 
VÉii'Ve  dt^« 

«  Martuonkl»  littérateur;  Mauduiè»  g^«^; 
minium  astronome  ;  Montuclal,  auteur  de  ï  MuUnrê 

•  Oberlio,  de  Strasbourg,  bibliogiapne. 

•  hiUssot,  Ittlémleur;  Pmgré,  »«««^??)f!"«î  ™"" 
ihMt^de  Sivry,  littérateur:  Pougens,  littérateur. 

,      •  Wrhanl/noluraliste ;  Rochon,  de  In  ci-devant 
âfOldéniie  «h  a  Sciences.  j..  o/,.'.«-. 

•  Saint  Lambert,  auteur  du  Pû^0  rf"  Satsons. 

•  Tlirnin,  historien.         ^     ,.  , 

•  Volmotit  de  Bomare ,  naturaliste. 


>  2,000  livres  à  chacun  des  citoyens  : 


•  Andrieux,  littérateur. 

•  Beauchamps»  astronome;  Beaurieu,  auteur  de 
VElêve  de  la  nature;  Barthélémy,  peiutre;  Blavct, 
traducteur  de  Smith  ;  Bréa,  peintre. 

«Cailhava,  littérateur;  Cambini,  mtisicien ;  Col« 
lin-Harlevilie,  poëte  comique. 

•  Darnaud-Baculard ,  littérateur;  Domerguc, 
grammairien;  Dureau  de  la  Malle,  traducteur  de 
Tacite. 

«François  de NeuFcbâtean,  littérateur;  Foiieon, 
sculpteur;  Frizieri,  musicien. 

■*  Guéroult,  professeur  de  la  ci-^rant  Université 
de  Paris  ;  Gaillard,  poète  lyrique. 

«  Haudimont  (d'),  musicien. 

•  Lacretelte,  auteur  d'écrit»  politiques  ;  Lanf  le 
(de),  auteur  des  Voyogt»  en  Espagne  et  en  Suisse; 
Lasalbe  (Antoine),  auteur  de  ta  Bikmee  naiurtîle; 
Lavocat,  mécanicien  ;  Lé vêque,  auteur  de  VHisltnre 
de  Russie. 

«  Mazéas,  mathématicien  ;  Meatelle ,  géographe. 

•  Nivard,  peintre. 

•  Paruy,  poêle;  Pater,  b&tiograpfae;  Petletierf 
ingénieur-mécanicien;  Petiot,  auteur  d'nn  Traité 
sur  L'opinion  publique^  Peyraud-Beaussol,  littéra- 
teur; Philippon,  aiktenr  de  VEduealwtk  dupeufU; 
Poirier,  bibliographe  ;  Prudhon,  peintre. 

■  Qiieverdo,  graveur. 

•  Ramey,  sculpteur  ;  Renard,  architecte  ;  Benawt» 
peintre;  Beti(  de  la  Bretonne,  auteur  de  nombreui 
ouvrages;  Rozet,  bibliographe;  Roubaut,  auteur 
des^ynon^m^s/rovipaû;  Roussel,  médecin  et  homme 
de  lettres. 

Senne  (de)  ,  sculpteur ,  sourd  et  muet  ;  Saint- 
Ange  ,  auteur  de  la  traduction  en  vers  des  Méta- 
morphoses (f  Ovtde;  Sélis ,  prolesseur  de  la  ei-de- 
vaut  Université  de  Paris;  Suvée^  peintre. 

•  Vernct  (Carie),  peintre;  Villers (des),  de  Com- 
mune-Affranchie,  auteur  de  plusieurs  ouvrages  de 
physique. 

«  1 ,500  livres  à  chacuu  des  citoyens  : 

«Achard  (de  Marseille),  littérateur;  Albanèse, 
musicien  ;  Artaud,  Littérateur  ;  Auiissier,.dessiaateur 
à  Beuues. 

•  Bambiui,  musicien;  BeauTieu,  auteur  dé  plu- 
sieurs  ouvrages  politiques;  Brun, auteur  du  Triom- 
phe des  deux  Mondes. 

•  Croulet,  auteur  d*un  poemc  sur  la  Liberté. 

•  D'Açaiq^grammairieu;  Kkâhauicra.ses,  traduc- 
teur d'ouvrages  orientaux. 

•  Gaudin, auteur  dua  écrit  coatcc  le célibai des 
prêtres;  Gauthier,  peintre  ;  Gérard,  peintre  ;  Gctfiat,^ 
traducteur  de  plusieurs  ouvrages  anglais. 

•  Laïuontagne,  littérateur;.  Lane.u  vil  le,,  peintre; 
Lenoir  de  la  Boche,  auteur  de  plusieurs  écrits  révo* 
lutionnaiies;  Lcsueur, sculpteur;  Liotard((le  Gre- 
noble), naturaliste  ;Lucey  auteur. d'une  tcagédiede 
Mulius'Scœvoia, 

•  Mandar  (Théophile) ,  traducteur  d»  pkiaieiiffs 
ouvrages  augiaJ6  ;  I^lari«tJbe,  peintre  ;  Marti»,. sculp- 
teur; Skrciei'  (SaiulLégfi:)^1»ibltograpbe« 

•  Pages,  auteur  du  poème  de  fa  France  r^wM- 
caine. 

•  Sabh»l,  peintre. 

•  Vil  lars  (de  Grenoble) ,  natWT!Kstc;l^Her,  pcmtre. 
«  Art.  U.  Les  comités  d'instruction  publique  et  des 

finances,  réunis,  sout  chaînés  de  présenter ,.  sous 
ùtux  décades,  un  rapport  sur  les  pensions  qu'il  con- 
vient d  accorder  au«  g^na  de  leUre»  et  awL  artistes 
dont  les  talents  sont  utiles  à. la  république.  • 
Divers  membres  font  des  réclamations  en  bveur 


ISl 


de  plusieurs  sairants  et  homihes  de  lettres,  entre  au- 
Ires  pour  TiHuslre  et  respectable  auteur  des  Voya- 
ges du  jeune  Anaeharsis  en  Grèce, 

Cbênier  :  L'intention  du  comité  n'a  point  été  de 
ilonner  la  liste  des  seuls  hommes  dignes  de  l'atten- 
tion de  la  Convention  nationale,  mais  seulement  des 
hommes  de  lettres  qui,  par  leur  position,  avaient 
di^droitsplus  pressants  aux  secours  décrétés  par  la 
Convention. 

Tallien  :  Et  moi  aussi  je  présenterais  quelqxics 
observations  à  la  Convention,  si  cette  liste  devait 
être  la  seule.  Mais,  comme  le  rapporteur  l'a  dit,  je 
n'ai  vu  dans  cette  liste  que  des  noms  dont  la  position 
exigeait  une  attention  particulière.  Je  n'examinerai 
pas  si  quelques-uns  d'entre  eux  n'ont  pas  quelques 
rrproches  à  se  faire  en  politique;  ils  sont  malheu- 
reux ;  il  doit  suffire  à  fa. Convention  de  cette  consi- 
dération pour  adopter  le  projet  de  décret.  Je  demande 
qu'il  soit  mis  aux  voix.  (On  applaudit.) 

EÉAL  :  11  est  beau  de  voir  aue  le  décret  qui  vous 
est  proposé  n*a  fait  naître  cfe  réclamation  précise 
que  sous  le  rapport  qu'un  grand  nombre  d'autres 
savants  ou  artistes  n'étaient  pas  compris  dans  la  liste 
honorable  qui  vous  est  présentée.  Limité  par  la 
somme  à  distribuer,  votre  comité  d'instruction  pu- 
blique n'a  pu  vous  présenter  à  la  lois  tous  les  ciloyons 
dignes  de  cette  récompense  nationale.  11  sera  facile 
d'y  suppléer. 

Hâtez-vous  de  rendre  un  décret  aussi  honorable 
pour  la  Convention  nationale  que  pour  les  savants 
et  pour  les  artistes  qui  en  sont  l'objet.  Le  choix  fait 
par  vos  comités  ne  vous  permet  pas  de  douter  que 
les  citoyens  portés  sur  cette  liste  ne  soient  tous  aussi 
rccommandables  par  leur  civisme  que  par  leurs  ta- 
lents. J'en  juge  par  deux  citoyens  de  mon  départe- 
ment: l'un  est  Villars,  médecin  et  naturaliste  a  Gre- 
noble; l'autre  est  Liotard,  jardinier-botaniste.  Leurs 
talents  et  leurs  vertus  civiques  ont  pu  seuls  les  faire 
distinguer  dans  leur  retraite;  tous  deux  furent  les 
compagnons  de  J.-J.  Rousseau,  lorsqu'il  fut  herbo- 
riser' sur  les  Alpes.  Il  les  honora  l'un  et  l'autre  de 
son  estime  et  oe  son  amitié.  J'en  conclus  que  le 
même  esprit  a  dirigé  les  autres  choix.  Je  demande 
qu'on  mette  aux  voix  le  projet  de  décret. 

La  discussion  est  fermée  et  le  projet  de  décret  est 
adopté, 

La  Convention  ordonne  l'impression  du  rapport 
de  Chénier. 

Goujon  :  S'il  est  quelque  chose  que  les  folliculai- 
res doivent  transmettre  fidèlement,  ce  sont  les  faits 
qui  inculpent  les  représentants  du  peuple.  Je  trouve 
ici  dans  un  journal  des  détails  qui  ne  tendent  qu'à 
avilir  la  Convention  dans  plusieurs  de  ses  membres. 
Chacun  sait  que,  dans  la  séance  d'avant-hier,  Le- 
gendre  dit,  en  parlant  d'un  homme  qui  avait  été  sol- 
liciter dans  les  prisons  des  dénonciations  contre  Tal- 
licn  :  «  C'est  le  cousin  d'un  de  nos  collègues  que  je 
ne  nommerai  pas,  parce  qu'il  est  sous  le  poids  d'une 
espèce  d'accusation.  ■  Le  journaliste  a  dit  que  ce 
cousin  était  moi.  Je  ne  me  rappelle  pas  que  Legendro 
ait  dit  que  Goujon... 

Plusieurs  voix  ;  L'ordre  du  jour  ! 

La  Convention  passe  à  l'ordre  du  jour. 

Levasseur  (de  la  Sarthe)  parle  dans  le  bruit. 

Plusieurs  voix  :  Président,  maintiens  l'ordre  du 
jour;  c'est  une  tactique  pour  empêcher  qu'où  oc 
^'occupe  des  affaires  générales. 

L'ordre  du  jour  est  maintenu. 

Haehaiio  :  Citoyen t,  votre  comité  de  aflreté  gën  iv- 


raie ne  remplirait  pas  le  yctu  de  la  Convention  tkà* 
tionale,  si ,  se  bornant  au  devoir  pénible  de  la  poUeè 
et  de  la  surveillance  coercitive  contre  les  nMlteil- 
lanls  et  les  ennemis  du  repos  public,  il  seperoM^ttll 
de  condamner  ou  de  laisser  les  actiona  vertueuses 
dans  l'oubli  qui  ne  devrait  appartenir  qu'au  crioHk 
A  peine  la  malveillance  a  été  instruite  du  déeret 
qui  a  supprimé  l'agence  des  lois,  que  des  émissalrei 
]>erfides  se  sont  introduits  dans  l'atelier  nombreux 
attaché  à  cette  agence,  et,  après  les  insinuations  te 
plus  coupables,  ils  ont  cherché  à  provoquer  les  rei^ 
pectables  ouvriers  de  cet  atelier  a  un  soulèvement 
contre  la  Convention  nationale ,  en  leur  disant  : 
•  Vous  voyez,  citoyens,  ce  aue  vous  devez  attendre 
de  cette  Convention  nationale  :  au  lieu  de  s'occuper 
de  l'amélioration  du  sort  des  ouvriers,  elle  suppriiot 
la  seule  ressource  <|ui  vous  restait,  dans  le  montai 
où  le  prix  progressif  des  denrées  menace  de  les meltte 
hors  des  facultés  des  ouvriers.  • 

La  Convention  devine  la  réponse  que  ces  diml 
ouvriers  ont  faite  à  ces  perfides  émissaires .  «Eh  biea^ 
ont-ils  répondu,  si  notre  suppression  est  un  sacrifies 
poumons,  nous  nous  en  consolerons  par  l'idée  qu'ellt 
est  utile  à  la  république,  et  qu'elle  est  le  résulMt 
d'une  économie  nécessaire  pour  le  trésor  public,  et 
noys  regrettons  de  ne  pas  avoir  un  sacrifice  plus 
utile  à  faire  à  la  patrie,  parce  que  nous  sommes  as^ 
sures  qu'elle  ne  nous  abandonnera  pas,  et  que  nous 
trouverons  à  être  employés  ailleurs  pour  son  sérviee 
ou  pour  celui  de  nos  concitoyens.  • 

Citoyens,  Quoique  cette  réponse  soit  dans  la  classe 
des  devoirs  des  bons  citoyens,  et  qu*elle  n'ait  point 
étonné  votre  comité  de  sûreté  générale,  en  appre- 
nant la  source  respectable  d'où  elle  sortait,  cepen- 
dant il  a  cru  utile  de  lui  donner  la  publicité  qu'elle 
reçoit  à  cette  tribune,  et  de  vous  en  demander  ii 
mention  honorable  dans  le  Bulletin  de  la  Conveii» 
tion,  autant  pour  rendre  justice  aux  dignes  artistes 
qui  l'ont  faite  que  pour  avertir  les  malveillants  et  les 
agitateurs,  sur  lesquels  votre  comité  ne  cesse  d'avoir 
les  yeux  ouverts,  qu^ils  doivent  renoncer  à  leur  eTb- 
minel  espoir. 

L'insertion  au  Bulletin  est  décrétée. 

Lakanal  :  Je  viens  vous  parler,  au  nom  de  TOt 
comités  réunis  d'instruction  publique,  d'agricultarè 
et  des  arts,  du  patriarche  des  sciencesi  du  vénérable 
Daubenton. 

Cet  infatigable  physicien,  qui  a  formé  les  collec- 
tions immenses  du  Muséum  d'Histoire  naturelle,  ç|ui 
les  a  soignées  et  démontrées  au  public  pendant  cin* 
quante-trois  ané,  a  employé  une  partie  de  sa  fortune 
et  plusieurs  années  de  sa  vie  à  taire  croître  sur  It 
sol  de  la  France  des  laines  aussi  fines  que  celles  d*Es* 
pagne,  dont  l'importation  coûte  chaque  ann^  plu- 
sieurs millions. 

Ces  moyens  d'amélioration  sont  prouvés  et  confir- 
més par  vingt-cinq  annc'es d'expérience  ;  grand  nom- 
bre de  citoyens  ont  mis  en  pratique  avec  succès  le 
Traité  des  Moulons,  donné  par  ce  naturaliste  ce* 
lèbre. 

Cet  ouvrage  important  vient  d'être  retouché  par 
Tauteur  et  enrichi  de  nouvelles  expériences,  faites  a 
sa  bergerie  de  Monbard. 

Appauvri  par  le  bien  même  qu'il  a  fait  aux  scien* 
ces  et  aux  arts ,  réduit  par  la  révolution  à  une  fortune 
très-bornée,  Daubenton  ne  peut  pas  faire  la  dépense 
de  l'impression  de  son  ouvrage  :  cependant  l'intérêt 
de  l'agriculture  la  réclame,  et  la  justice  demande  de 
la  faire  tourner  au  profit  de  l'auteur.  Il  est  en  elfist 
digne  d'une  nation  oui  couvre  d'une  protectioo 
éclairée  les  savants  utiles  à  leur  pays  de  leur  faire 


1! 

trouver  le  prix  de  leurs  travaux  dans  leurs  travaux 
mêmes. 

Nous  vous  proposons  en  conséquence  le  projet  de 
décret  suivant: 

<  La  ConfentioD  nationale,  ont  le  rapport  de  ms  eoml- 
lé»  réaois  d*instraction  publique,  d'agriculture  et  des  arts, 

•  Décrète  que  le  TraiiéiurUêMouioni,  par  )e  citoyen 
Daubeuton ,  sera  imprimé  et  tiré  à  deux  mille  exemplai- 
res, au  profit  de  fauteur  et  aux  (rais  de  la  nation,  sur  les 
fonds  mis  à  la  disposition  de  la  commission  executive  de 
rinstruclion  publique,  qui  demeure  chargée  de  Texécution 
^u  présent  décret.  > 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  Le  médie  membre,  au  nom  du  comité  d'instruc- 
tion publique,  propose  à  la  Convention  de  décréter 
que  rindemnité  promise  aux  élèves  de  TEcole  Noi*- 
maie  leur  sera  payée  en  raison  de  la  distance  de  leur 
domicile  et  de  la  différence  de  leur  âge. 

Maubb  :  Citoyens,  nous  avons  voulu  une  éduca- 
tion publique,  pour  former  tous  les  citoyens  dans  les 
principes  purs  du  républicanisme;  nous  devons  donc 
adopter  tout  ce  qui  peut  ajouter  à  ce  louable  projet. 
Aussi  j'appuie  le  projet  de  décret  du  comité  :  cepen- 
dant je  l'invite  à  mieux  indemniser  ceux  des  élevés 
qui  se  sont  déplacés. 

Je  connais  un  citoyen  qui  a  déjà  professé  ;  ce  ci- 
toyen, pour  venir  aux  Ecoles  Normales,  a  quitté  son 
père,  mis  ses  enfants  en  pension,  a  laissé  sa  femme 
cbez  un  ami,  et  il  n'a  que  1,200  livres.  Ces  nouveaux 
écoliers  ne  sont  certainement  pas  à  assimiler  aux 
jeunes  gens  qui,  étant  sans  état,  viennent  s'instruire 
sous  des  hommes  connus  par  leur  mérite,  et  reçoi- 
vent en  même  temps  1,200  livres. 

J'appuie  le  projet  de  décret. 

Garnibr  (de  Saintes)  :  Ce  décret  sans  doute  me 
paraît  juste.  II  faut  distinguer  ceux  des  élèves  qui 
sont  proches  de  Paris  d'avec  ceux  qui  en  sont  éloi- 
gnés; car  il  est  clair  que  celui  qui  demeure  à  cin- 
quante- lieues  fera  beaucoup  moins  de  frais  pour 
venir  que  celui  qui  a  sa  résidence  à  cent;  mais  je 
n'adopte  point  la  différence  que  l'on  met  entre  les 
âges. 

En  effet,  l'élève  âgé  de  vingt-cinq  ans  ne  fera-t-il 
pas  autant  de  dépenses  que  celui  qui  aura  cinquante 
■ns?  Le  cordonnier  lui  vendra-t-il  une  paire  de  sou- 
liers moins  cher?  Si  donc  les  dépenses  sont  égales, 
les  indemnités  doivent  l'être  aussi.  Je  demande  donc 
qu  il  n'y  ait  de  distinction  que  daps  la  distance  du 
lieu. 

Mathieu  :  La  plupart  des  élèves  qui  viennent  aux 
Ecoles  Normales  ont  déjà  bien  mérité  de  la  jeunesse, 
puisqu'ils  ont  déjà  consacré  leurs  veilles  à  son  in- 
struction. Sans  doute  qu'ils  s'en  retourneront,  après 
le  cours,  former  d'autres  insliluteuis  dans  leur  pays. 

Je  demande  donc  que  les  t  ,200  livres  qui  leur  sont 
accordées  par  an  leur  soient  accordées  pour  le  temps 
que  durera  le  cours  de  l'Ecole  Normale. 

Ainsi,  si  le  cours  dure  quatre  mois  ou  six  mois, 
les  i  ,200  livres  seront  pour  ce  temps,  et  non  pour 
Vannée  entière. 

Si  le  rapporteur  adopte  mon  idée,  je  demande 
qu  elle  soit  mise  aux  voix  sur-le-champ. 

LbBapporteur  :  Je  demande  le  maintien  du  pro- 
jet de  décret,  et  le  renvoi  de  la  proposition  de  Mathieu 
au  comité  des  6nances. 

Maure  :  La  personne  que  je  connais  a  dépensé 
•00  livres  pour  venir. 

*^  :  Si  rassemblée  accordait  aux  élèves  8  livres 
par  lieue,  le  comité  aurait  de  moins  un  travail  con- 
sidérable, qui  lui  demandera  un  temps  inGni. 


Camboti  :  Examinez  déjà  à  quelle  somme  pourroot 
monter  les  frais  de  voyage,  et  Jugez,  si  vous  accor- 
dez encore  davantage,  quelles  seront  vos  dépenses. 
Je  demande  le  renvoi  au  comité  des  Gnances. 

Le  Rapportbub  :  Toutes  ces  dépenses  seraient  pri- 
ses sur  les  fonds  mis  à  la  disposition  du  comité  d  in- 
struction publique. 

Lbcomtb  :  Je  demande  le  renvoi  du  tout  au  comitd 
des  Guances. 
Cette  proposition  est  décrétée. 

MiLHAUD,  au  nom  des  comités  militaires,  de  salût 
public  et  des  Gnances  :  Les  gardes  nationales  mises 
en  réquisition  pour  la  défense  des  places,  qui  font  un 
service  extraordinaire  et  qui  remplacent  par  leur 
zèle  infatigable  des  garnisons  nomoreuses,  ont  ré- 
clamé auprès  de  la .  Convention  nationale  contre 
l'article  XXXIV  du  titre  VI  de  la  loi  du  2  thermidor, 

3ui  ne  leur  accorde  que  30  sous  pour  chaque  jour 
e  service  seulement ,  sans  distinction  de  grades 
ou  de  fonctions,  et  sans  fourniture. 

Les  autorités  constituées  des  communes  frontières 
ont  mêlé  leurs  voix  à  celle  de  leurs  concitoyens,  et 
vous  ont  adressé,  de  concert  avec  eux,  des  pétitions 
pressantes  sur  l'état  de  détresse,  et  pour  ainsi  dire  de 
misère,  où  leurs  frères  d'armes  ont  été  réduits  par  un 
service  aussi  pénible  que  dispendieux.  Les  gardes 
nationaux  de  Metz,  qui  sont  obligés  de  fournir  toutes 
les  nuits  des  hommes  à  un  poste  éloigné  d'une  lieue 
et  demie  de  ses  murs,  pour  tarder  un  établissement 
public ,  depuis  que  leur  solde  a  été  réduite  à^  30  s., 
ont  préféré  de  mettre  au  Mont-de-Piété  pour  200,000  f. 
d'effets  plutôt  que  de  manquer  au  service  que  la 
patrie  exige  d'eux. 

La  garde  nationale  de  Strasbourg,  qui  monte  denx 
jours  sur  trois,  est,  par  la  position  de  la  place,  obli- 
gée non*seulenient  a  un  service  intérieur  très-con- 
sidérable, mais  encore  elle  fournit  toutes  les  nuits 
un  bataillon  et  une  compagnie  de  canonniers  qui 
vont  bivouaquer  à  six  lieues  sur  les  bords  du  Rhin  ; 
et  les  redoutes  qu'elle  y  occupe  dans  les  postes  ex- 
térieurs n'étantqu'à  la  portée  de  la  carabine  dcl'en- 
nemi,  ses  patrouilles  et  ses  bivouacs  sont  souvent 
exposés  au  feu  des  batteries  de  la  rive  opposée  ;  et 
ces  gardes  nationaux,  qui  vraiment  sortent  hors  de 
leurs  murs  pour  garder  cette  partie  du  Rhin,  ne  re- 
çoivent que  30  sous  par  jour,  ce  qui  suffirait  à 
peine  pour  réparer  la  perte  de  leurs  habits  et  de 
leurssouliers. 

Quels  sont  les  boulevards  où  nos  armées,  quel- 
quefois trahies,  mais  jamais  vaincues,  trouvèrent 
un  asile  pour  s'y  rallier  ou  pour  en  partager  la  glo- 
rieuse défense,  lorsqu'ils  ne  furent  pas  eux-mêmes 
livrés?  quelle  main  pressa  ces  remparts  vivants  au- 
tour de  la  patrie  en  danger? 

Portez  vosreeards  au  nord, sur  Lille , Dunkcr- 
qne,  Maubeuge,  Thionvilleet  Landau,  que  l'ennemi 
tenta  vainement  de  foudroyer,  et  tant  d'autres  for- 
teresses, aux  habitants  desquelles  il  ne  manqua  que 
I  occasion  pour  développer  les  mêmes  sentiments. 
N  a-t-on  pas  vu ,  au  midi  comme  au  nord ,  à  Per- 
pignan, àMonllibre.à  Colliourc,  à  Rayonne,  comme 
a  Strasbourg ,  Sedan  et  Metz ,  les  gardes  nationales 
impatientes ,  sortir  en  masse  de  leurs  foyers  pour 
marcher  contre  l'ennemi  et  cueillir  des  lauriers 
avec  leurs  frères  d'armes  amenés  de  tous  les  dépar- 
tements; la  même  ardeur  belliqueuse,  le  même  ré- 
publicanisme enflamment  les  habitants  des  côtes  et 
des  ports  de  mer;  dans  l'édat  de  celte  gloire  im- 
mense se  perdent  et  s'effacent  les  ombres  et  les  ta- 
ches fugiUves  de  ce  tableau  :  les  triomphes  immor- 
tels des  armées  républicaines  ont  passé  sur  ces 
ombres,  et  ont  eflacé  ces  taches;  le  génie  de  la 


133 


liberté  nous  montre  ces  compagnons  de  nos  intré- 
pides frères  d*armes ,  qui ,  nés  au  milieu  des  in- 
struments de  la  guerre ,  sont  une  des  barrières 
inexpugnables  contre  lesquelles  la  rage  impuissante 
de  nos  ennemis  se  brise. 

Les  gardes  nationales  des  frontières  remplissent 
non-seulement  les  devoirs  de  soldat,  mais  encore  ils 
pratiquent  tous  ceux  du  citoyen  :  exerçant  ainsi  les 
vertus  guerrières  et  les  vertus  paisibles,  leurs  mai- 
sons sont  le  temple  de  l'hospitalité  ;  partout  le  vo- 
lontaire y  trouve  une  famille...  Et  dans  quel  temps 
ces  hommes  généreux  suftîsaient-ils  à  tant  de  sa- 
crifices publics  et  particuliers?  lorsaue  les  ateliers 
étaient  déserts ,  lorsque  la  corne  d  abondance  du 
commerce  était  desséchée ,  les  ailes  de  industrie 
coupées,  et  les  canaux  de  la  circulation  obstrués  ou 
taris...  Dans  quels  temps!...  lorsque  des  hordes  en- 
nemies semaient  autour  de  leurs  remparts  toutes  les 
horreurs  de  la  guerre ,  dévastaient  leurs  champs, 
incendiaient  leurs  propriétés,  et  étendaient  le  fléau 
de  la  disette  et  de  la  désolation  depuis  le  riche  qui 
alimentait  le  pauvre  jusqu*au  pauvre  qui  défendait 
le  riche. 

L*on  vit  alors  que  pour  faire  le  bien  il  suffit  de  le 
vouloir  fortement...  les  habitants  de  la  frontière 
ont  encore  trouvé  au  milieu  de  tant  de  débris ,  de 
tant  de  calamités,  des  dons  pour  enrichir  Tautel  de 
la  patrie. 

Représentants  du  peuple ,  voire  tour  d'être  géné- 
reux est  venii...  La  patrie  vous  charge  d'acquitter 
sa  dette  envers  ses  enfants.  Vous  sentez  que  la 
somme  modique  de  30  sous  pour  chaque  jour  de 
service  seulement ,  sans  aucune  espèce  de  fourni- 
ture ,  n*a  pu  et  ne  peut  pas  encore  ^  dans  ces  temps 
difficiles  dont  votre  sagesse  doit  faire  disparaître  les 
angoisses,  être ,  je  ne  dirai  pas  une  juste  indennnité, 
mais  une  faible  compensation  de  tant  de  sacrifices. 
La  plupart  de  ces  gardes  nationaux  sont  des  pères 
de  famille,  la  plupart  sont  des  ouvriers,  des  artisans 
arrachés  à  leurs  emplois  ;  sur  trois  jours  on  doit  con- 
sidérer comme  [)erau  te  jour  qui  se  trouve  entre  la 
fatigue  de  la  veille  et  la  fatigue  du  lendeipain  ;  et 
qui  ne  sait  que  rien  ne  peut  réparer,  pour  des  ou- 
vriers et  pour  leurs  enfants,  la  perte  occasionnée  par 
Tinterruption  fréquente  des  travaux? 

Le  salut  public,  je  le  répète ,  commande  d'encou- 
rager le  zèle  des  garder  nationales  dans  toute  re- 
tendu de  la  république,  et  surtout  aux  frontières. 

Aux  frontières  elles  sont  le  complément  et  pres- 
que toujours  le  supplément  des  troupes  de  ligne  ; 
elles  répondent  à  Ja  république  de  la  sûreté  des 
forts,  des  magasins,  des  arsenaux,  des  dépuis, 
des  manufactures  d'armes  et  de  tous  les  établisse- 
ments nationaux;  elles  sont,  pour  ainsi  dire,  le 
génie  tutélaire  des  moyens  de  délense  et  d'attaque 
contre  les  satellites  du  despotisme  :  si  elles  sommeil- 
laient, les  ennemis  de  l'extérieur  et  ceux  de  l'inté- 
rieur ,  leurs  affidés  secrets  et  leurs  prompts 
auxiliaires,  auraient  bientôt  commis  des  maux  irré- 
parables ;  vous  verriez  peut-être  s'ourdir  des  conspi- 
rations adroites ,  détériorer  les  matières  dans  vos 
magasins ,  violer  vos  dépôts ,  livrer  peut-être  vos 
forteresses,  et  incendier  nos  arsenaux. 

Eh  !  qui  peut  nous  assurer  si  ce  n'est  pas  faute  de 
surveillance  que  des  mains  perfides  ont  allumé  les 
mèches  désastreuses  qui  ont,  pour  ainsi  dire,  ouvert 
la  forteresse  importante  de  Landau  ,  cette  clef  de 
l'Allemagne ,  honorée  de  nos  brillants  succès  ? 
Voici  le  projet  de  décret  : 

■  La  Coofeotion  nalioDale,  après  avoir  entendu  le  rap* 
port  de  setcomilés  de  ulm  public  et  militaire,  décrète 
que  les  gardes  nationales  sédeotaires,  mises  en  réquisition 
par  les  représeouols  du  peuple  et  les  généraui  dans  les 


places  frontières,  pour  des  services  extrjftordinaircs,  rece- 
vront, à  compter  du  i*'  nivôse,  au  lieu  de  SO  sous,  3  liv. 
pour  chaque  jour  de  service  seulement,  sans  distinction 
de  grade. 

«  Il  n*est  dérogé  à  aucune  autre  disposition  de  la  loi  du 
t  tliermidor.  • 

Letourneur  (de  la  Manche)  :  Je  n*ai  pas  demande 
la  parole  pour  m'opposer  à  l'adoption  au  projet.  La 
loi  qu'on  vous  propose  est  fondée  sur  la  justice;  et 
c'est  parce  que  je  suis  convaincu  que  tout  citoyen 
faisant  un  service  extraordinaire  doit  être  justement 
indemnisé,  que  je  viens  vous  proposer  de  faire  cou- 
rir l'augmentation  de  solde  à  compter  du  l«r  vendé- 
miaire. Si  vous  trouvez  la  réclamation  des  gardes 
nationales  fondée,  il  est  évident  qu'elles  doivent 
Jouir  du  bénéfice  de  la  loi  à  dater  de  l'époque  où 
elles  auront  rendu  des  services  plus  pénibles  et  plus 
étendus  ;  il  y  a  plus  de  trois  mois  qu'elles  recla- 
ment ;  et  si  vous  vous  refusiez  à  donner  à  la  loi  l'ef- 
fet rétroactif  que  je  propose,  son  objet  serait  évidem- 
ment illusoire;  en  conséquence,  je  demande  que 
mon  amendement  soit  mis  aux  voix.  ^ 

DstfTZBL  :  J'appuie  cette  proposition ,  qui  est  ùt 
toute  justice. 

Le  Rapporteur  :  Le  comité  militaire  était  de  cet 
avis,  mais  le  comité  des  finances  s*y  est  opposé. 

Dentzbl  :  Eh  bien ,  envoyez  le  comité  des  finan- 
ces aux  frontières  !  (On  rit.) 

**•  :  Je  conçois  bien  que  les  gardes  nationales  de 
premières  lignes,  avant  un  service  très-actif,  méri- 
tent une  bonne  inaemnité  ;  mais  je  demande  ({u'on 
établisse  une  diflërence  entre  eux  et  ceux  qui  sont 
placés  aux  troisièmes  lignes;  car  le  service  de  ces 
derniers  est  beaucoup  plus  doux. 

Plusieurs  voix  :  Aux  voix  le  décret,  avec  l'amen- 
dement ! 

Ramel  :  Quand  le  rapporteur  est  venu  au  comité, 
nous  avons  calculé ,  et  nous  avons  vu  que  l'indem- 
nité à  dater  du  l«r  vendémiaire  monterait  à  120  mil- 
lions. Les  gardes  nationales  mises  en  réquisition  sont 
à  peu  près  au  nombre  de  cent  mille  ;  à  30  sous  par 
jour,  faites  le  calcul. 

***  :  Les  gardes  nationaux  mis  en  réquisition  font 
un  service  très-pénible  ;  je  cite  ceux  de  Strasbourg, 
qui  le  font  dans  l'intérieur  et  à  l'extérieur  ;  il  faut  les 
bien  indemniser,  autrement  ce -serait  mettre  sur  les 
citoyens  une  réauisition  qui  ferait  mourir  de  faim 
leurs  femmes  et  leurs  enfants. 

Lecomtb  :  Puisque  tous  tes  citoyens  sont  gardes 
nationales ,  parmi  ceux  qui  sont  mis  en  réquisition 
il  s'en  trouve  de  fort  riches.  Je  demande  qu'on 
distingue  ceux-ci  des  autres,  et  qu'on  s'en  rapporte 
à  cet  égard  au  conseil  d'administration  de  cnaquc 
commune. 

La  discussion  est  fermée. 

On  demande  une  distinction  entre  les  citoyens  de 
première  ligne  et  ceux  de  troisième. 

•'•  :  Citoyens,  j'observe  que  les  citoyens  des  troi- 
sièmes lignes  ont  des  postes  extérieurs  à  garder  qui 
sont  aussi  très-pénibles;  la  plupart  de  ces  citoyens 
montent  leur  garde  tous  les  troisjours;  leurs  tra- 
vaux sont  les  mêmes,  notre  justice  doit  être  égale. 

Le  projet  de  décret  est  adopté  avec  l'amendemeiil 
de  Letourneur. 

—  Dautriche,  au  nom  d'un  citoyen  de  la  commune 
de  Saint-Jean-d'Angely ,  département  de  la  Cha- 
rente-Inférieure ,  qui  ne  veut  pas  être  connu ,  fait 
hommage  à  la  Convention  :  1^  d'un  travail  sur  les 
poids  et  mesures,  plus  analytique  encore  que  celui 


1S4 


qu'il  a  dt^jà  offert ,  et  que  rassemblée  a  accepté  ; 
2«  d*un  ouvrage  et  instruction  sur  rAnuuaire  fran< 
cals,  ou  calcufdes  rapports  entre  l'ère  oouf elle  et 
rère  vulgaire,  précède  derëflexions  sur  la  chrono- 
logie dans  ses  rapports  avec  la  liberté  des  peuples; 
30  (1*un  modèle d  un  nouveau  télégraphe  à  employer 
dans  1  obscurité  de  la  nuit,  avec  une  instruction  sur 
sa  composition. 

L'assemblée  accepte  l'hommage  de  ca  citoyen,  qui 
ne  veut  pas  être  connu  ;  décrète  qu'il  en  sera  fait 
mention  honorable  an  procès-verbal ,  et  renvoie  au 
surplus  les  articles  offerts  à  son  comité  d'instruction 
publique,  pour  y  être  examinés  et  en  faire  son  rap- 
port incessamment. 

—  Le  même  membre  fait  un  rapport  au  nom  du 
comité  des  transports ,  postes  et  messageries ,  pour 
la  continuation  aun  arrêté  pris  par  ce  comité  rela- 
tivement à  un  nouTcau  (arii  pour  le  salaire  des  (ac- 
teurs des  messageries,  La  Convention  nationale  en 
décrète  l'impression. 

SAiNT-MARTm^VALOOiiB ,  80  Dom  do  comîté  des 
finances  (section  des  domaines  réunis)  :  Citoyens ,  il 
entre  dans  les  principes  de  la  Convention  de  favoriser 
les  établissements  particuliers  qui  dégagent  le  gou- 
vernement des  agences  et  régies  nationales  qui  lui 
sont  toujours  onéreuses. 

La  forerie  du  Bonchêt ,  située  dans  le  district  de 
Corbeil,  établie  aux  frais  delà  nation,  sur  un  terrain 
conlisqué  sur  Mouchy,  est  de  ce  genre. 

Les  citoyens  Compadre  et  compagnie ,  propriétai- 
res d'une  usine  placée  sous  le  même  toit  et  sur  le 
même  cours  d*eau,  désirent  en  faire  racqufsition  au 
prix  de  l'estimation  qui  en  sera  faite;  ils  se  sont 
adressés  à  vos  comités  de  salut  public  et  des  Guances. 

Leséclaireissements  fournis,  tant  par  les  corps  ad* 
ministratifs  que  par  les  dififerentes  commissions  que 
vos  comités  ont  cru  devoir  consulter,  concordent 
parfaitement  avec  le  vceu  des  pétitionnaires. 

En  effet,  il  parait  plus  avantageux  au  succès  des 
établissemenUi  en  auestion  de  les  réunir  dans  une 
seule  main  nue  de  les  laisser  divisés  et  administrés 
par  la  république. 

Les  objets  confisqués  sur  Mouchy,  situés  audit 
lieu  du  Bouchet ,  dont  les  citoyens  Compadre  dési> 
rent  se  rendre  adjudicataires ,  consistent  dans  rem- 
placement d*un  moufin ,  d'une  gninge,  d'un  petit 
logement  et  d'une  écurie  ,  renfermés  dans  une  cour 
ayant  son  issue  sur  le  chemin  et  sur  la  rivière  ;  d'un 
petit  jardin  borné  par  lecours  d'eau,  etcinquantc  ou 
soixante  arpents  cie  terre  qui  composaient  la  ferme 
du  moulin. 

Indépendamment  de  ces  objets,  il  existe  au  même 
lieu  de^  machines  en  état  de  construction ,  et  des 
matériaux  propres  à  l'établissement  d'une  forerie; 
ces  objets  doivent  faire  partie  de  l'immeuble  qu'il 
est  question  d'adjuger  à  la  compagnie  Compadre. 

Votre  comité  des  finances,  après  en  avoir  délibéré, 
m'a  chargé  de  vous  proposer  le  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  après ;)ivoir  entendu  le  rap- 
port de  ton  comité  des  finances  (section  des  domaines  réu- 
nis) sur  la  soumission  faite  par  les  citoyens  C()mj)adre  cl 
compagnie  d'acquérir  la  forerie  du  Bouchet,  appnricnant 
è  la  république,  située  dans  le  di»iriol  de  Corbeil ,  décrèlt 
ce  qui  suit  : 

«  Art.  !•'.  Il  sera  înceRsamment  procédé  à  l'estimation 
exacte  et  rigoureuse  de  la  fureric  du  Bouchet,  établie  au 
district  de  Corbeil  pour  le  compte  de  la  république,  con* 
sistant  dans  Pemplucement  d'un  moulin,  d'une  gruuge, 
â*uQ  petit  logement  et  d*uqe  écurie  i  renfermés  dans  m»e 


cour  ayant  Isfue  nr  le  dwqrin  et  sar  la  rftière  ;  d*nn  petit 
jardin  borné  par  le  conri  d*eaH  ;  et  cinquante  on  sdxaotc 
arpents  de  terre  qui  composaient  la  ferme  dn  monttn. 

€  Cette  esiiflMtion  sera  faHe  par  trois  esperts  non^iiSt 
Tun  par  la  commission  des  revenus  nationaux ,  le  second 
par  le  directoire  du  département  de  Selne-et-Olseï  cl  Jf 
troisièroe  par  le  diractoire  4a  distrfct  de  CorieH. 

t  II.  Ces  experts  opéreront  en  présence  d'un  aotre  ex- 
pert nommé  par  les  citoyens  Compadre,  qui  aura  vois  in* 
structivf  (  Us  adresseront  lent  proeès-veilMl  d*eslim8llo» 
an  comité  des  finances,  qui  en  fera  son  rapport  a  la  Con* 
ventton  nationale,  à  reflet  de  déeréter  raliénatte  si  elle 
k  juge  convenable. 

t  III.  Les  adjudicataires  paieront  le  prix  des  otjels  gai 
leur  seront  aliénés  dans  le  terme  et  de  la  manière  prci" 
crite  pour  raliénation  des  domaines  nationaux* 

•  IV.  Les  adjudicataires  seront  tenus  de  oBaintenir  réta- 
blissement déjà  commencé  au  nnoins  pendant  dix  années. 
Foute  par  les  adjudicataires  de  remplir  ces  conditions,  Uê 
serout  évincés  des  bâtiments  et  autres  propriétés  à  eux  ad» 
jugés ,  et  ne  pourront  répéter  les  payements  qq^ls  auraient 
fiiils  en  oooformité  de  rnrllcle  précédent. 

«  V.  Il  sera  également  procédé ,  par  Tentremlse  de  la 
commission  des  armes  et  poudres,  an  r^lement  et  à  IV 
purement  de  tous  comptes  relatif»  è  la  dépense  de  Téla- 
blissement  commencé,  et  ce  en  présence  d*un  expert  nommé 
par  la  compagnie  Compadre,  lequel  aura  volt  Instructive, 
pour  le  montant  de  tous  les  mémoires  dûment  réglés  être 
remboursé  ou  payé  compta nt  è  qui  de  drojt ,  ainsi  que  le 
prix  de  tous  les  matériaux  existant,  onllls  et  ustensiles  qoi 
ne  sont  pas  censés  faire  partie  da  rimmenbie. 

•  VI.  Le  présent  décret  ne  sera  point  Imprimé  ;  H  aéra 
inséré  au  Bulletin  de  corraspnodaBce',  qoi  tiemira  lieu  de 

promulgation.  I 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

Caudon,  au  nom  du  comité  des  finances  :  Des  ci- 
toyens de  la  ville  de  Berne ,  propriétaires  de  créan«- 
ces  consenties  en  leur  faveur  par  les  ci  ^devant  pré» 
vôts  des  marchands  et-échevins  de  la  ville  de  Lyon, 
vous  ont  présenté  plusieurs  pétitions  pour  obtenir 
leur  liquidation  et  leur  remboursement. 

Le  24  germinal  an  3 ,  vous  décrétâtes  que  les  ch 
toyens  remettraient  leurs  titres,  avant  la  15  lorëal 
suivant ,  au  liquidateur  de  la  trésorerie ,  pour  être 
statué  particulièrement,  après  le  rapport  des  com- 
missaires de  la  trésorerie  au  comité  des  finances,  qal 
devait  vous  en  rendre  compte. 

.La  remise  des  titres  a  été  effectuée  par  le  citoyen 
.Herrenschwand,  et  d'après  ces  titres,  et  conséquem* 
ment  au  décret,  le  liquidateur  de  la  trésorerie  a  ter- 
miné son  travail ,  duquel  il  résulte  : 

10  Que  les  créances  des  Bernois  montent  i  2  mil*» 
lions  250,000  livres; 

30  Que  sur  cette  somme  400,000  livres  sont  pré- 
sentement échues; 

9oQu*il  leur  est  dû ,  pour  intérCts  des  1  million 
850,000  livres  à  échoir,  une  somme  de  278,962  liv. 
10  sous; 

40  Qu*il  leur  est  dû  de  plus  iine  indemnité  pour 
une  somme  de  74,000  livres,  qui  leur  a  été  payée  en 
1791 ,  à  Lyon ,  en  assignats ,  quoiqu'elle  fût  stipulée 
par  les  actes  payable  à  Berne  en  numéraire  ; 

50  Que  sur  la  somme  maintenant  à  paver,  suivant 
les  stipulations  des  contrats ,  489,803  1.  û  s.  8  d« 
seraient  payables  à  Berne,  et  par  conséquent  en  nt|- 
méraire  ; 

60  Que  sur  les  1  million  850,000  liv.  restant  & 
payer  a  diverses  échéances,  1  million  400,000  liv. 
seraient  de  même,  conséquemment  aux  stipulations, 
payables  à  Berne»  mais  à  des  termes  asseï  éloignés, 


1S4 


les  payements  de  cette  nature  ne  devant  commencer 
qu'au  1er  décembre  1T98  (vfcux  styfe)  ; 

!•  Que  le  Coudé  de  procuratian  des  Bereois  ré- 
clame  l'observation  de  ces  stipulaiioi»  contenues 
dans  leurs  actes^  et  se  fonde  sur  le  décret  du  13  juin 
1793 (vieux style), article VI,  qui  porte  que  «les 
cvëaociers  qui  pourraient  être  e»  droit  d'exiger,  en 
vertu  des  clauses  de  leurs  contrats  particuliers  dans 
les  emprunts  faits  à  Gênes  et  à  Berne,  leur  paye- 
nent  eo  ncrméraire ,  on  une  fndiemnit<^  équivareiite, 
recerront  ladite  indemnité ,  même  pour  les  paye- 
ments effectués  en  assignats  au  trésor  public ,  lors- 
que tenrs  titres  auront  été  reconnus  valables  ;  • 

S«  Qu'il  invoque  aussi  Varticle  LXXIV  de  la  loi 
au.  34  août  1793  j^vieux  style),  sut  la  consolidation 
de  la  dette  publique,  qui  dit  que  «les  capitaux  et 
imé  ils  êa  emprunte  en  verts  et  strpnlés  payables  en 
pays  étranger  conlinne font  d'éïrc  payés  comme  par 
Je  pa»éÀ  kiur  époque  d'exigibilité.  » 

a  KésiiU^  dià  travail  bit  patte  liqnidafteor  de  la 
trésorerie  qu'il  est  éft  aittcitoycBS de  Berne: 

§99fi9fkfifTt9i  montant  do  capital  de  quatre 

obligations  souscrites  le  18 
mars  17^3 ,  payables^ù  Lyon 
en  monnaie  tirançaise  ; 

n^iêê  1. 1»  s.  4  tf.,  intérêts  de  cette  somme  du 
!•»  avril  IT^l  au  l«r  frimaire 
an  3,  payables  aussi  à  Lyon 
en  monnaie  française. 


r,f8d  L  13  s.  4  d.,  payables  en  assignats. 


f»|l&0,OQO  I.  montant  du  capital  de  onze 

obligations  souMïrites  à  di- 
verses époques,  payables  à 
Betae  en  numëraire; 

S6V,9r7  f.  f  »  s.  3  rf.,  rntéréts  de  cette  somme  du 
1"  avril  1 7#l  au  1«*  frimaire 
an  3,  pftf  abie»  aussi  à  Berne 
en  numéraire. 


1  ,B4tt,277  L  i&s.  3db    payaUes  en  DUfliéraira« 

Les  commissaires  de  la  trésorerie  nationale,  dans 
Imr  rapport  au  comité  des  Cnances  ,  disent  que , 
d*après  lerravaildu  liquidateur,  la  créance  des  ci- 
tovens  de  Berne,  représentés  par  le  citoyen  Herren- 
sditrand*,  est  liquîdé'e  tant  pour  son  montant  que 
punr  ses  échéances ,  d'après  des  titres  réguliers  et 
constants  sur  Ie9i]nels  il  n'y  a  rien  à  reprocher  ; 

Que  kft^^  portion»  de  ces  créances  tant  écbaes  qu'à 
échoir ,  payables  en  monnaie  Crançaisc ,  ne  présen- 
tent non  plus  aucun  motif  d'observation  ; 

Qu'il  n'en  est  pas  de  même  de  489,393  L  8  s.  a  é. 
stipulés  payables  à  Berne ,  qui  sont  présentement 
éclius^  et  dont  le  fondé  de  pouvoir  demande  le  paye- 
ment ,  soit  en  numéraire,  soit  en  papier  sur  Berne; 

Que  la  peile  qui  iiéaulterait  de  ce  mode  de  paye- 
ment serait  énorme  pour  la  république ,  puisque 
tous  les  créanciers. directs  de  la  nation  française  au- 
dessus  dé  3^,000  liv.  de  capital  sont  portés  sur  le 
grand  livre,  et  forcés  de  renoncer  au  rembourse- 
ment sur  leqnel  ife»  mamtt,  par  leurs  titres,  les  mê- 
mes droits  que  les  étrangers; 

Queies  Bernois  ne  peuvent  pas  appliquer  en  leur 
faveur  Karl.  LXTitV  de  la  loi  du  24  août  1793,  puis- 

3n^  eette-éïKniue  ils  n'étaient  pas  créanciers  directs 
c  la  république,  mats  bien  de  fa  conmiuuc  de  Lyon; 
9n«  bien  certainement  si  celte  commune  avait  encore 
à  m  dlipefitien-  son*  aetif»  son  passif  étant  à  sn 


charge ,  elle  serait  à  jpréseat  hors  d*ëlat  d'opérer 
son  remboursement  à  Berne  ; 

Qu'enfin ,  malgré  le  constant  désir  de  la  répnbli- 

âne  de  bien  traiter  ses  bons  et  anciens  alliés  les 
oisses,  ils  ne  peuvent  cependant  exiger  d'elle 
qu'elle  les  préfère  dans  les  circonstances  présentes 
aux  créanciers  nationaux,  surtout  en  éprouvant  une 
perte  aussi  considérable  ;  au  lieu  qu'en  retardant 
jttsqn'à  la  paix,  le  changement  dans  nos  opérations 
commerciales  et  étrangères  ramènerait  le  change  an 
taux  ordinaire,  et  rétanlirait  la  balance. 

Le  chargé  des  pouvoirs  des  citoyens  de  Berne  s'est 
présenté  plusieurs  fois  à  votre  comité  ;  il  s'est  fait 
appuyer  par  le  commissaire  des  relations  extérieu- 
res ;  il  a  fait  valoir  l'art.  VI  de  la  foi  du  13  juin  1793 
et  l'article  LXXIV  de  la  foi  du  24  août  1793,  que  je 
vous  ai  cité.  Il  a  observé  que  les  créances  sont  divi- 
sées et  appartiennent  à  on  très-grand  nombre  de 
cttoyens  de  tout  état;  que  des  hôpitaux  et  autres 
fondations  pour  les  pauvres ,  les  veuves ,  Içs  orphe- 
lin» y  ont  part  et  souffrent  beaucoup  do  retara  des 
trois  années  (f  intérêts  qui  leur  sont  aoes. 

Votre  comité  a  observé  au  fondé  de»  pouvoirs  des 
Bernois  que  la  loyauté  française  ne  s'écarterait  ja" 
mais  des  vrais  principes  ;  que  l'intention  de  la  Co»' 
vention  se  trouvait  couaignée  dans  le  rapport  du  34 
août  1793,  qui  fut  adopté  pour  servir  d'instruetion  » 
la  loi  sur  la  dette  consolidée.  Vous  y  avez  excepté 
de  l'inscription  sur  le  grand  livre  «les  empruftli^ 
faits  et  stipulés  pour  être  remboursés  en  paya  étra»« 
gers,  lesquels  doivent  être  payés  d'après  leacondH' 
tions  des  contrats  ;  •  vous  pronvâtes,  par  cette  ne- 
sure  ,  le  respect  que  vous  aviez  pour  toutes  les 
obligations  que  la  nation  s'était  imposées. 

Noua  lai  afoservàmes  qa'aueune  eonsrdératfon  par- 
ticulière ne  nous  ferait  écarter  de  ces  principes,  mais 
non»  ne  pu  me»  pas  nous  empêcher  de  fui  ajouter 
qns  If»  motif^expf imé»  dans  le  rap|)ort  de»  commis^ 
saires  de  la  trésorerie  nationale  étaient  les  bases  de 
In  légistation  de  l»  nation  française. 

flous  lui  observâmes  surtout  que  la  république 
française  avait  fait  déjà  un  grand  sacrifice  de  se 
charger  d'accpiitler  les  dettes  des  communes  ;  que 
cette  disposition  de  fa  loi ,  purement  libre  et  vofon- 
taire ,  assurair  aux  citoyens  bernois  fe  payement 
cFune  créance  qae  fes  circonstances  avaient  rendue 
douteuse ,  puisque  ,  d'après  les  malheurs  éprouvés 
par  ta  communed^  Lvow,  if  iftait  noroirement  connu 
qu'elle  se  trouvait  dans  l'impossibilité  d'acquitter 
les  engagements  qu'elle  avait  contractés. 

Nous  lui  témoign<1mes  le  désir  queia  Convention 
aurait  de  payer  aux  Suisses  ,  nos  alliés,  en  numé- 
raire ,  les  dettes  des  communes  qui  portaient  cette 
stipulation  expresse;  mais  one  le»  sacrificf» journa- 
liers qu'entraînent  notre  défense  et  raffermissement 
de  notre  liberté  ne  permettaient  pas  actuellement 
une  pareUte  générosité ,  puisque  le  numéraire  que 
non»  avions  passait  journellement  en  Suisse  ou  che2 
les  nations  neutres  pour  solder  les  achats  en  vivres 
et  marchandises,  que  nous  y  faisons  pour  rentreiien 
de  nos  armées. 

'  Nous  lui  dîmes  qu'à  la  paix  on  pourrait  prendre 
des  mesures  plus  généreuses  ;  enûn  nous  l'assurâmes 
qne  fa  Convention  ,  toujours  scrupuleuse  dans  l'ac- 
quit de  la  dette  nationale ,  prendrait  des  arrange- 
ments convenables  aux  deux  partis*  |. 

Le  procureur  fondé  des  Bernois,  vrai  ami  de  la  !!•  ' 
berté  et  de  l'égalité ,  pénétré  des  motifs  qui  ont 
guidé  votre  comité,  s'est  empressé  d'écrire  à  ses 
commettants  pour  obtenir  d^eux  les  pouvoirs  nécrs- 


136 


saires  pour  traiter  avec  la  nation  française  et  vaincre 
anuablement  toutes  les  difficultés. 

Le  25  brumaire  an  3 ,  il  s*est  présenté  à  la  barre, 
et  il  vous  a  dit  •  Que  ses  commettants  ayant  été 
convaincus  de  l'impossibilité  que  leur  payement  pût 
être  cflectué  dans  ce  moment  en  numéraire ,  et  des 
raisons  qui  atténuaient  la  condition  de  leurs  con- 
trats ;  que  pénétrés  d'ailleurs  d'admiration  pour  les 
efforts  que  la  nation  française  ne  cessait  de  faire 
pour  terminer  sa  glorieuse  révolution  et  pour  ac- 
quitter les  dettes  contractées  par  la  monarchie  ;  lui 
avaient  donné  les  pouvoirs  suffisants  pour  recevoir 
le  remboursement  de  leurs  créances  en  assignats, 
avec  une  indemnité  réciproquement  équitable.  • 

Votre  comité,  auquel  vous  avez  renvoyé  celte  pé- 
tition, n*a  plus  discuté  sur  les  principes  ;'  il  sait  que 
la  générosité  française  est  toujours  disposée  à  faire 
des  sacnfîces  pour  satisfaire  les  peuples  qui  ont  con- 
servé avec  la  république  leur  anciennes  liaisons 
d'amitié. 

II  a  cru  devoir  accepter  Toffre  de  payer  en  assi- 
gnats toutes  les  créances  dues  aux  Bernois  par  la 
commune  de  Lyon. 

Ainsi  les  709,166  liv.  13  s.  4  d.  payables  en  mon- 
.  naie  française ,  d'après  les  conditions  des  contrats , 
D*ont  offert  aucune  difficulté. 

Mais  pour  les  1  million  919,277  liv.  15  s.  3  d. 
payables  à  Berne  en  monnaie  suisse,  nous  avons  cru 
taire  un  acte  de  générosité  en  les  acquittant  en 
France  avec  une  indemnité  de  50  pour  100,  ainsi 
que  vous  l'avez  fixée  par  la  loi  du  8  avril  1793,  pour 
les  marchés  faits  par  le  gouvernement,  payables  en 
numéraire,  qui  ont  été  acquittés  en  assignats. 

Le  procureur  fondé  des  Bernois  n'a  fait  aucune 
difficulté  sur  cette  proposition;  il  ne  réclame  plus 
rindemnité  sur  les  74,000  liv.  payées,  en  1791,  en 
assignats  au  lieu  de  numéraire. 

11  résulte  de  ces  conditions  que  nous  acquittons 
dans  ce  moment  des  créances  dont  partie  n'est  pas 
encore  échue  ;  mais  nous  retirons  les  titres  royaux 
sur  lesquels  elles  reposent;  nous  donnons  une 
preuve  de  la  générosité  française  envers  les  Suisses 
nos  alliés ,  qui  de  leur  côte  prouvent  la  contiance 
qu'ils  ont  dans  notre  révolution  en  acceptant  en 
payement  notre  monnaie  républicaine. 

C'est  d'après  ces  bases  que  votre  comité  des  finan- 
ces m'a  chargé  de  vous  proposer  le  projet  de  décret 
suivant  : 

a  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  des  finances,  décrète  : 

«  Art.  I*'.  Les  créances  des  citoyens  du  canton  de  Berne 
sur  la  commune  de  Lyon,  qui  ont  été  liquidées  par  la  tré- 
sorerie nationale,  en  conséquence  du  décret  du  24  germi- 
nal an  2,  sont  définitivement  fixées  ù  S  millions  588,088 
livres,  y  compris  les  intérêts  liquidés  jusqu'au  1*'  Trimaire 
an  3,  suivant  l'état  qui  a  été  arrêté  au  comité  des  finances 
IsccUon  de  la  trésorerie  nationale),  qui  demeurera  anneié 
au  présent  décret. 

<>  II.  La  trésorerie  nationale  payera  en  assignats,  è  pré- 
sentation du  prévient  décret,  aux  propriétaires  desdiies 
créances,  ou  à  leur  fondé  de  pouvoir,  lesdils  3  millions 
588,083  liv.  et  les  intérêts  à  5  pour  100  avec  retenue  de- 
puis le  i*'  frimaire  an  3  ;  au  moyen  duquel  payement  la 
république  sera  libérée  pour  raison  desdites  créances.  • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  Fourcroy,  au  nom  du  comité  de  salut  public, 
fait  un  rapport  sur  les  arts  qui  ont  servi  à  la  défense 
de  la  république,  et  sur  un  nouveau  procédé  du  tan- 
nage découvert  par  le  citoyen  Armand  Séguin. 

La  Convention  en  ordonne  l'impression  et  l'ajour- 
nemenL 

(Nous  le  donnerons  dans  un  prochain  numéro.) 

I.n  séance  t'st  levée  à  quatre  heures. 


SÉANCE  DO  15  NIVOSB 


Les  membres  de  Faïence  des  lois  et  les  ouvriers 
de  leur  imprimerie  écrivent  pour  assurer  que  le  co- 
mité de  sûreté  générale  et  la  Convention  nationale 
ont  été  induits  en  erreur  quand  on  leur  a  dit  que  la 
malveillance  avait  tenté  de  fomenter  du  trouble  dan» 
les  ateliers. 

*  La  police  qui  y  règne ,  disent-ils ,  est  telle  que 
personne  ne  peut  s  y  introduire  sans  une  permission 
de  l'agence  ,  qui  n'eût  pas  manqué  de  prévenir  les 
comités  de  goliveruement  des  mouvements  qui  eus- 
sent pu  s'y  préparer.  Le  rapport  du  comité  de  sûreté 
générale  n'est  exact  que  dans  la  justice  qu'il  rend  au 
zèle  et  aux  sentiments  patriotiques  des  ouvriers.» 

Cette  lettre  est  renvoyée  au  comité  de  sûreté  gé- 
nérale, et  sera  insérée  au  Bulletin. 

—  Debourges  fait  adopter  le  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  aprb  avob  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  des  secours  publics  « 

«  Décrète  que  la  trésorerie  nationale  paiera  «  sur  le  vu 
du  présent  décret,  à  chacun  des  citoyens  Bauvel^  Beren, 
Drieuz,  Lepetit,  Grenon,  Ramfroy,  Blandin,  Prévôt, 
Louvet,  Chereau,  Duviella,  Guesnard,  Broquet,  Daymé, 
Morin,  Corbu,  Dasmées,  Haraivet,  Michelon,  Geldram, 
Leroarcliand,  Marais,  Corvik,  Buduel,  Bueffard,  Boudet 
fils,  Derennes,  Charnel,  Coupé,  le  Reguer,  Macé,  Kan« 
dam,  Petit,  Quintin,  Desjars,  Lucot,  Lafond,  Guingamp, 
Henafs,  le  Flaper,  Mariol,  Sénéchal,  le  Seigues,  Toullel, 
Gugomard,  Absolut,  Jean  Renaud,  Chenel,  Joseph  Ma* 
rais,  de  Renly,  Durand,  Thomas,  GuillebaoU,  le  Tour- 
neur, Legras,  Guenezau,  Emoust,  Janin,  Bauce,  Bi- 
nault,  le  Page  et  Troux,  tous  marins,  prévenus  dans  les 
affaires  dites  de  Toulon  et  de  Qaiberon ,  et  mis  provisoire- 
ment eu  It^rté  par  décret  du  1 0  du  présent  mois,  ta  somme 
de  200  livres,  è  titre  de  secours  provisoire,  qui  sera  im* 
pulable  sur  les  sommes  qui  pourront  leur  être  accordées» 
soit  à  Utre  de  secours  définitif,  soit  à  titre  de  traitement  ■ 

BoissY  d*Anglas,  au  nom  du  comité  de  salut  pu- 
blic :  Porcher,  représentant  du  peuple,  envoyé  dans 
les  départements  du  Loiret  et  circonvoisins,  écrit  de 
Pithivicrs ,  le  11  nivôse,  que ,  depuis  la  loi  portant 
suppression  du  maxiuium,  les  marchés  s'approvi- 
sionnent avec  plus  de  facilité  qu'auparavant,  et  que 
le  prix  des  grams  n'a  souftert  qu'une  augmentation 
peu  considernble.  «  Je  suis  sûr,  ajoute-t-il ,  que,  le 
jour  de  mon  départ  d'Orléans ,  des  denrées  et  Oiar- 
chandises ,  qu'il  était  presque  impossible  de  trouver 
auparavant,  se  crièrent  dans  les  rues  à  un  prix  in- 
férieur à  celui  où  elles  s'étaient  vendues  jusque-là  ; 
elles  furent  exposées  en  vente  au  moment  même  où 
on  se  fut  assuré  que  la  loi  du  maximum  avait  été 
rapportée.  •  (On  applaudit.) 

La  Convention  ordoDoe  Tinscnion  de  cette  an- 
nonce au  Bulletin. 

—  L'assemblée  procède  à  Tappel  nominal  pour  1c 
renouvellement  de  trois  membres  du  comité  de  salut 
public. 

Les  membres  sortant  sont  Merlin  (de  Douai),  Del- 
mas,  Fourcroy. 

Ceux  qui  les  remplacent  sont  Bréard ,  Mnrcc  cl 
Chazal.     * 

La  séance  est  levée  à  trois  heures  et  demie. 


N.  B,  Dans  la  séance  du  16,  Courtois ,  au  nom  de 
la  commission  chargée  d'examiner  les  papiers  de 
Robespierre,  a  fait  un  rapport  sur  la  conspiration  de 
ce  tyran  et  de  ses  complices.  La  Convention  en  a  or^ 
donné  l'impression ,  rajournement  et  le  reuvoi  à  la 
commission  des Vingt-etUn. 


GAZETTE  NATIONALE  ou  LE  HONITËIR  UNIVERSEL. 

(P  108.  Octidi  18  NivosB,  l'un  3^  {itérera  7  Jaivvibb  1795,  tUux  $tyU.) 


taémUi  m  m 


POLITIQUE. 


IhibllQ  »  il  Mt  tomM  d»  filutai  «otisiMl^Més  dM»  les  tHn^ 
•n  fit  demlets  jvtirs  <d«  nofVinlNt ,  «I  le  mit  â  lou Ae  en 
«NMRt  •? «e  tint  f xtrfiHHs  ffi»l«iH!».  Il  m  «bI  r«MiHê  une 
kMmlatiMi  4%n%  eettt  ti|>fta)«  I  «A  i  tté  tMuH  «  allers 
baleau  dans  un  grand  «MllM^de  htèBt  Où  TMII  a'élevatt  % 
fltoleiifs  pieds  tfaiM  les  inaiitti». 

Oe  D*eat  ffvî^  trenblaut  <fM*<Ml  att«M  dei  ndutelles  dfe 
It  «lie  BéridiOMle ,  «|ui  doU  avèff  M  fat a^ee  |Hlr  r<ran- 
San* 

«-mi  lettm  d*SlMni«uts  d«  lO  €u  ftOls  derM^,  kM>ri> 
tent  qv'liMs  flom  ftaMaudé  étàft  mtHtue  dahl  (ses  paras- 
ita ytf  ta  «ralfiie  ê»  f»itm  Mn^a^m  Hiriiites  en  «ation 
le  tont  ées  dM«s  de  M  flârWé«^  Celtft  flblte  ne  pMtvait 
wattnam  pM  dllfmt  pfui  fortgfiettj^  a«m  départ ,  et  allaA 
kvift  r«it:«e  de  «»  mettf«  m  route  stm  le  c^nroii  (qu'elle 

avait  VMtttieiil  «ftetidtti 

«<-ies  Itstei  d«  «aft  dt!  Itoyfl  (iré^tent  lé  d«tan  tles 
f/nm  Mia  t^frptlttveMMt  par  lei  An|lals  ei>ek  Vrançah 
Mma  ie«  tedfe  <!H>tH6fet«  et  de  MTeitabi^.LénSsdltat  nSem 
«Rpftt  «MMItM  j^ur  fê  cMiiiisree  britaukiique. 

/hsiidani  U  mois  ^tveiohrù. 

Par  les  Français ,  62. — Par  les  Anglais ,  8. 
Peàâani  le  moi*  de  novembre* 

Pûrl8iPraBçais««0,-*--ParieaAfi9lata%  McuMk 

iMIake  di  férvùir  des  FVançais  ^  i  tS. 

«a^Deà  lèHre^  de  New-tork  et  de  Phfladetplrie ,  dû  î*^ 
II^TèiliM,  atoniJtocéVit  ^le  TàrAk^e  destinée  à  marcher  éom 
\fé  lei  insti^fi  qui  né  Veulent  pas  se  soumettre  i  pliyer  les 
€rdlt^  httpbses  sur  hs  ligueurs  fortes  était  réunie  h  Bëd- 
Ibrtattéotoiàetifeeihent d'octobre;  le  comibandémetil  eh 
était  conllft  au  g^éml  Lee. 

WadiinttOA  aVah  l{tittté  ^i^aAeipbîe  lè  6  bctobre  pour 
(«ksser  éh  l^HilB  fes  trbdpts,  4ûi  ayaiem  imposé  f^àr  Itur 
nombre  aux  iA'stiVgèi;  car  dés  le  29  fi  était  Retourne  à 
Pbiladelpbie,  ant  la  satiaf^ction  de  aavoir  que  tés  in&ur- 

El  sN&taient  dispersés  «I  paraissaient  bessei*  dé  vovlôfr  ré- 
tth^attkottVettiéttent. 

Arife^  te  prûMart  aMifra  Tàœmai  Baréi^  Beerëtahré 
4m  éa  !km¥éié  d9'mrrrtpomtance ,  mis  en  cknte  avee  H» 
rêMbil^ca^  *edH  «t)m.y\)oAr«  ,  Th&mtLs  tlokrofk  ^ 
^nm'-'à.  »mcm^\  Jmiî  AfcAfo-,  Stèi»aré-Kidd*Jean 
TktémmH  wt  Jmm  Bttièiët,  mmhre»  de  iû  ineme  Sifeiété. 

Érûîhe  :  Atànlt  d*éè  Tenir  &  la  considération  des  lois 
qui  cdoceniehtlh  tratiîsôh.  et  des  preuves  requises  pour 
cbn'faincrè  lès  pèrsonn»  d\un  cnme  aussi  énorme,  je 
èk'Vflrorcerarde  mettre  décote  tout  cequi,  dans  le  discours 
de  mon  sarant  iet  respectable  ami»  Htw  le  procureur  général 
É^est  pojhl  ^Seniiel  à  là  ni-euve.  Je  déclare,  tant  en  mon 
ftom  )qu*eh  celui  du  mâfbeurctiK  prisonnier  qui  est  à  la 
Bai^,  que  Je  suR  MrfVitemèht  d^coi^  ^^^  ^ui  aur  les 
Méfiés  '(ni*ï)  a  tâfrs  de  la  constiiuiiôn  d^Angfeterre.  tout 
t&ffirAe  bonb^  doit  Voir  avec  satisfaction  Tbammage  que 
dè^  grands  f  ef^'ohnaçes  rendent  à  rescellence  du  «ouver- 
tement s^us  ?equ^  nôtis  avons  le  bonbeur  de  vivre» 

Qu*estce  qui  rend  notre  constilulion  si  digne  àe  ces  élo- 
ges^ fIVst'ceMs  r !iatos  parier  de  i'ttne  de  ses  parties  les 
pHA  es^^ilMfe^»  on  bduTbir  '<|q'I|  le  peuj^re  de  Taire  des 
n^  (Mr  WMttMlé)  ti'e^-tebasrnhpnllalicé  dira  lois  et 
Hi  V^tectiMin^le^  «ccttl^ebt  b  Unt cUojrért,  de  quel- 
qfw  Vaîift  Ift.  cOnTln.Myb  qn  u  %oit? 

ffob  liVlnt«Jfai'iiV^toi\  ^étttfu  \ût  \éi  calamités  qui 
Oift  «mnlk  rm^  :  '^  b*èst  nl^  la  lè  itabment  d'enlrcr 
*hi  «fe  WJrt ,  ifl  !*  *c*élrt1fic1iîrt-  m  ca'dfe?  qui  les  ont  nro- 
<Hi^  Mt  1(^  xli^MoltaYiè^  dtil  tedr  ont  âonné  tuulc  rex- 
tlMMiltnlfirës  btet  eue  ;  tbSfs  îl\x  mbHis  eires  ndùs  prou- 

otMi  VlIMMfMriRhrlM  HKMenl  OT%Ur*< 


ft€cèssflé 
Biicâiilii" 
SûVcêqUl 


3*  SéHCé  —  7am«  JIC. 


lui  est  cher,  de  sa  propriclé,  de  sa  Ibmille,  de  sa  liberté, 
âe  èa  vie.  Ceux  qui  sont  accusés  de  modérantisme^  defédé' 
tàlisme^  pu  de  toute  autre  opinion  qu'il  plait  aux  factions 
cbatigeankes  d*appelçr  crimes  contre  TElal,  sont  couvain- 
bus  par  leur  (alale  expérience  qu*élre  accusé  et  condamné 
sohl  une  seule  et  même  cbose;  Tun  suit  Tautre,  comme 
le  tonnerre  suit  iVclair;  et  tout  ce  qui  est  précieux  ^ 
rliomme  est  enveloppé  dans  cette  terrible  destruction. 

Telle  est  y  messieurs ,  la  dépbrable  situation  de  la 
France  :  aouCtrec  que  je  vous  conjure  de  préserver  notre 

Says  des  mêmes  malheurs,  et  de  ne  jamais  vous  désister 
e  Toa  généreux  eflbrls  pour  conserver  les  principes  de  no- 
ire ooustitulion  dans  toute  leur  pureté  et  leur  intégrité. 
QuedVrreura,  que  de  dangers  n'ont  pas  souvent  produits, 
stirtoul  daij^s  des  tetnps  orageux  et  dilliciies,  un  xèle  trop 
ardent,  et  trop  de  cbaleur  dans  les  esprits  1  £t  combien  de 
Ibis  alors,  par  la  haine  de  certaines  opinioas ,  n'a-l-oa 
pas  porlé  des  jugemeals  qU^une  raison  Xroide  et  sans  pas- 
sion e&t  Tait  r^'eter? 

Pour  nous  conformer  à  la  constitution  anglaise,  je  de- 
mande que  dans  le  procès  de  mon  client  vous  vous  en  te* 
ntec  ëxactemeni  et  scrupuleusement  à  U  loi.  Il  se  présente 
ici  comme  un  sujet  de  la  Grande^reiagsc  ;  il  en  réclame 
les  lois  en  sa  fisveur,  ces  lois  antiques  et  pures,  d'après  les- 
quelles je  me  propose  de  démontrer  qu'il  doitétre4écfaargé 
de  Paccusation  intentée  contre  lui.  Si  ces  lois  sont  défecr 
tueuses,  que  le  parlement  y  remédie;  mais  que  mon  client 
conserve  la  vie,  puisque  aucune  de  ces  lois  ne  le  condamne 
à  la  perdre.  Je  conjure  le  grand  Etre  qui  préside  ù  Tuniverfi 
et  dont  la  justice  et  la  miséricoi^de  éclatent  partout,  de 
TOUS  remplir  de  Tesprit  de  justice  et  de  vérité,  en  ce  mo- 
ment décisiroù,  sous  la  foi  du  serment,  vous  allez  pronon- 
cer un  jugement  solennel.  Je  Je  conjure  dVtrc  lui-même 
votre  guide  au  miiiey  de  ce  labyrinthe  ineitricable  de 
preuves  que  Tesprii  humain  peut  à  peine  suivre  et  com* 
prendre. 

Quelle^est  la  nature  de  rinfraction  qu*on  impute  à  Tae- 
cusé ?  1«  statut  de  la  25*^  année  d'Edouard  III  définit  ie 
criHM!  dcbautft  trahison  par  ces  mots  :  «  Quand  un  homme 
complote  ou  médite  la  mort  du  roi,  etc.  »  Par  cette  défini* 
tien  l'inteiHiou  élast  réputée  crime»  elle  peot-^re  déduite 
de  «impies  probabilités;  mais  elle  a  besoin  d'être  prouvée 

f»ar  des  actes  extérieurs,  et  ces  actes  extérieurs  doivent 
aire  partie  de  Vindicimenif  afin  que  Taccusé  sache  sur 
2uoi  porter  sa  défense.  Les  juges  peuvent  bien  déci- 
er  quels  doivent  être  les  actes  extérieurs  en  matière  de 
loi  ;  mais  c^est  au  jury  seul  à  déterminer  le  rapport  qu'il 
peut  y  avoir  entre  ces  actes  extérieurs  et  Tinteotion ,  et 
comment  la  preuve  de  cette  intention  en  peut-être  sévère- 
ment déduitek 

Que  les  jurés  jettent  les  yeux  sur  la  masse  énorme  de 
papiers  qui  sont  sur  le  bureau.  Où  est  celui  d'entre  eus 
qui  peut  se  flatter  d'avoir  assci  de  discernement  pour  dé* 
mêler  duos  tout  cela  la  vérital>le  intention?  Ce  ne  sonl.que 
probabilités  s\joutéesàdesprol>abililés.  Onconduit  Taccusé 
d'une  chose  à  une  autre:  du  dé^ir  d'éclairer  ses  compa** 
triotes  à  celui  de  la  réforme  des  abus ,  de  la  réforme  des 
abus  au  républicanisme,  du  républicanisme  aux  armes  et 
t  la  force;  la  force  doit  changer  la Ibrmedugouverncmenli 
ce  changement  doit  diminuer  la  dignité  du  roi,  et  tout  cela 
est  enfin  regardé  comme  un  acte  qui  prouve  un  complot 
contre  la  rie  du  roi. 

Grand  Dieu  1  est-ce  dans  une  terre  de  sûreté  et  de  jus* 
tice  que  la  vie  des  hommes  doit  être  hasardée  par  de  telles 
présomptions!  Est-ce  en  1794  qu'une  telle  procédure  a  liea 
dans  une  cour  de  justice  criminelle  I  Je  pourrais  m'arréter 
ici  et  confier  la  vie  du  prisonnier  au  bon  sens  et  à  la  con* 
science  des  jurés.  L'attention  qu'ils  m'out  donnée  jusqu*à 

Ïtrésenl  m'engagerait  à  abandonner  sa  cause  ^  leur  excel'* 
ent  jugement,  si  je  n'étais  aussi  jaloux  de  défendre  l'iibii* 
neur  de  mon  client  que  sa  vie.  * 

(  ErslLine  considère  alors  la  nature  des  actes  extérieurs 
contenus  drans  riodi^auiii»  et  «étend  beaucoup  sur  ce 
qui  doit  caractériser  un  complot  et  une  intention  d'atreMer 
à  la  vie  4a  mi*  Upaise  ensuite  eu  projets  d'obtenir  tfnf 
fâbrme  parlementaire  f  prêtés  ans  dlTerses  Soclétéi*  ) 

18 


138 


Mon  intention  et  mon  devoir  dans  le  moment  actuel, 
poursuit  Erskine»  ne  sont  pas  de  discuter  la  nécessité  de 
cette  rérorme;  mais  n'est-ce  pasen  défendant  celte  doctrine 
que  le  grand  lord  Ghatham  éleva  Pédifice  de  sa  gloire  ?  Il 
la  légua  à  son  fils,  qui  fonda  sur  les  mêmes  principes  sa 
réputtttion  et  sa  fortune.  Si  les  commissaires  chargés  delà 
poursuite  eussent  voulu  aller  cbercber  les  preuves  à  cette 
distance,  ils  eussent  trouvé  que  la  Société  de  correspon- 
dance devait  son  origine  à  Pitt  et  au  duc  de  Rickiroond, 
dont  le  plan,  pour  la  réforme  parlementaire,  consistait 
dans  les  élections  annuelles  et  les  suffrages  de  tout  le  peu- 
ple. Le  duc  de  Richmond  disait  que  si  la  représentation  du 
peuple  dans  le  parlement  n*était  point  corrigée,  les  abus 
accumulant  sur  les  abus  conduiraient  nécessairement 
ù  une  révolution.  Son  plan  fut  publié  en  4782;  il  j  propo- 
sait d'établir  des  délégués  dans  les  assemblées  du  peuple, 
pour  qu'ils  se  réunissent  en  Convention.  Les  mots  déUgués 
et  Convention  ne  sont  donc  ni  une  invention  nouvelle,  ni 
une  imitation  des  Français,  mais  une  production  naturelle 
de  notre  sol.  « 

A  qui  le  doc  de  Richmond  recommanda-t-il  ibn  plan  ? 
Ce  ne  fut  point  à  des  Sociétés  pourvues  d'une  demi-dou- 
laine  de  piques ,  mais  au  colonel  Sbarmay,  qui  était  ù  la 
tête  de  dix  mille  hommes  armés  et  équipa  militalremeni , 
aux  efforts  desquels  le  roi  doit  la  poûession  actuelle  de  la 
couronne  d'Irlande.  Ces  bomuiet  ainsi  armés  et  équipés 
tinrent  une  Convention.  Fut-ce  par  Pauloritédu  roi  ?  non  ; 
par  l'autorité  du  lord  lieutenant?  non.  Ce  fut  par  l'aulo* 
rilé  de  lettres  circulaires  ;  et  l'on  fut  si  loin  d'accuser  cette 
assemblée  de  trahison ,  que  l'on  satisfit  ft  toutes  ses  de- 
mandes. 

Pourquoi  donc  imputer  aojonrd*hQi  des  mes  criminelles 
aux  membres  de  la  Société  de  correspondance?  Pourquoi 
tnoni  rer  tant  de  crainte  des  assemblées  du  peuple  ?  Et  quand 
il  s'atsembleralt  tout  entier,  quel  danger  en  résulterait-il 
pour  la  constitution  et  pour  la  personne  du  roi?  Le  peu- 
ple chérit  la  constitution,  il  aime  la  personne  et  la  famille 
«lu  roi;  et,  malgré  les  abus  dont  ils  ont  à  gémir,  les  Anglais 
sont  prêts  à  sacrifier  leur  vie  pour  le  maintien  de  la  consti* 
lution  de  leur  pays. 

On  dit  que  les  accusés  n'avaient  pas  intention  de  s'a- 
dresser au  parlement  :  soit.  Leur  faute  se  borne  à  «voir  dit  : 
Le  peuple  a  droit  de  s'assembler  pour  le  redressement  de 
ses  grief:»;  mais,  sans  vouloir  s'adresser  au  parlement,  il 
peut  prendre  la  résolution  de  ne  point  députer  de  nouveau 
au  pariement  les  hommes  qui  l'ont  d^  trompé. 

Je  viens  maintenant  à  un  autre  chef  sur  lequel  on  a  for- 
tement apiHiyé,  savoir  :  que  l'objet  de  cet  confédérés  était 
«If  forcer  le  roi  à  leur  accorder  leur  demande.  Mais  ce 
rooven  est  aussi  fkible  que  les  autres;  car,  en  supposant 
quMIs  pussent  engager  le  parlement  à  se  prêter  à  leurs  • 
vurs,  le  roi  n'a-l-il  pat,  en  vertu  de  la  constitution,  le 
«Iroli  luronleMable  de  refuser  son  consentement  à  telle  ou 
ipWt*  ptopusltlon?  Oui,  sans  doute.  Bien  plus,  on  croyait, 
avant  Tunlon,  que  le  roi  avait  eu  le  droit  de  réformer  la 
r#l)rd«rnlillon  populaire.  Le  grand  Locke  lui-même,  dans 
H  d(^l««n«e  des  droits  du  roi  Guillaume,  soutint  cette  doc- 
Irtnr.  Mils  II  ne  s'agit  pas  de  savoir  si  le  roi  a  ce  droit  ou 
non.  Le  droit  qu'a  le  peuple  de  demander  une  réforme 
rsl  clair,  ri  le  n'ai  pas  besoin  de  vous  dire  que  le  docteur 
l^aclirvff  al  fut  rois  en  prison  pour  avoir  osé  nier  ce  droit. 
Considérons  roainienani,  messieurs,  les  preuves  qui 
ont  été  mUes  en  avant  par  la  Couronne.  La  première  pièce 
9ti  une  Adresse  de  la  bociété  de  correspondance  de  Lon* 
drrSf  nulvle  d(*s  résolutions  prises  par  cette  Société,  et 
celle  de  la  Société  eoiistliutionnelle.  J'invoque  en  faveur 
de  la  pureté  des  Intentions  de  ces  Sociétés  là  publicité 
qu*elles  ont  donnétf  &  leur  démarche.  J'observe  que  le 
plan  qui  •«  trouve  dans  l'Adresse  a  été  formé  sur  celui  du 
iM  de  niehmond. 

Avant  que  la  Convention  d'Ecosse  s^assemblftt,  on  s'é- 
llK  adressé  au  parlement  pour  obtenir  divers  changements 
iilM  la  renrésenlation  d'Ecosse,  et  cette  demande  avait  été 
ri(fttéei  alors  il  se  forma  à  Edimbourg  une  Convention 
BOMposée  de  personnes  revêtues  des  premières  places  en 
laoïii!.  Elle  comptait  parinl  ses  membres  le  lord-chef  ba- 
IM  Itr  Thomas  Dundas;  son  objet  éuit  de  demander  une 
iMfffle  dans  la  représentation,  et  tes  délibérations  furent 
NMéréei  dam  l«i  naplers  publics. 
Dam  le  court  dt  la  même  année»  ta  Contentloo  britao* 


nique  se  tint  pour  le  même  objet.  Ses  membres  pouvaient* 
ils  soupçonner  qo'Ms  n'avaient  pas  le  droit  d'agir  commt 
ils  faisaient,  lorsqu'ils  voyaient  ceux  de  la  première  Con- 
vention se  promener  dans  les  rues  d'Edimbourg  sans  être 
aucunement  inquiétés? 

La  seconde  pièce  produite  contre  Taocusé  est  une  lettre 
du  il  novembre  1792,  adressée  de  Norvrich  à  la  Société 
de  correspondance  de  Londres  et  dans  laquelle  on  trouve 
ces  mots  :  «  Ufaut  découdre  la  monarchie.  •  Mais  on  ne 
peut  croire  l'accusé  coupable  de  trabison  parce  qu'une 
lettre  semblable  a  été  envoyée  à  une  Société  à  laquelle 
il  appartenait,  s'il  n'a  jamais  agi  conformément  au  sens  de 
cette  lettre.  Pour  juger  d'ailleurs  des  sentiments  de  la  So- 
ciety, il  faut  se  reporter  à  sa  réponse. 

Quant  à  la  Convention  d'Ecosse,  je  n'en  connais  que  ce 
qu'il  a  plu  au  procureur  général  d'en  faire  connaître  ; 
mais  il  ne  m'est  aucunement  prouvé  que  tes  membres 
soient  coupables  du  crime  de  haute  trahison.  Jamais  cette 
assemblée  ne  s*est  attribué  les  fonctions  du  parlement; 
jamais  elle  n'a  fait  aucune  loi,  imposé  aucune  taxe. 

Ceux  de  ses  membres  qui  ont  été  punis  n'ont  point  été 
condamnés  comme  coupables  de  haute  trahison,  mais  seu- 
lement comme  coupables  «le  haute  inconduite;  ie  pense 
même  qu'ils  n'ont  pas  été  véritablement  convaincus,  et  je 
me  propose  de  traiter  cet  objet  dans  un  aulre  moment. 
^  Une  des  charges  portées  contre  ces  hommes  infortunés, 
c'est  d'avoir  semblé  prendre  plaisir  aux  succès  delà  France. 
Certes  beaucoup  de  peponnet  se  sont  réjouies  quand  les 
Français  ont  secoué  le  joug  ;  et  ceux  qui  pensent  qu'ils 
ont  droit  de  se  choisir  eux-mêmes  un  gouvernement  ne 
peuvent  pas  souhaiter  des  succès  à  la  ligue  formée  contre 
eux. 

Deux  charges  qui  paraissent  plut  gravet  sont  telles  det 
armes  et  celle  d'avoir  été  impliqué  dans  l'affaire  de  Watt, 
à  Edimbourg;  mais  je  remarque,  sur  la  première,  que 
toute  la  preuve  se  réduit  à  une  leHre  écrite  de  Sbeffiekl  à 
l'aocusé,  pour  lui  offrir  de»  piooes,  et  par  laquelle  on  le 
prie  de  faire  passer  une  autre  lettre  incluse  à  Norwich.  Il 
ne  parait  pas  que  Hardy  ait  communiqué  sa  lettre  à  per- 
sonne, ni  qu'il  ait  envoyé  l'autre  à  Norwich.  Quant  ù  la 
seconde,  il  est  encore  plu» atroce  de  vouloir  le  regarder 
comme  impliqué  dans  l'affaire  d'Edimbourg  par  la  seule 
raison  que  WaU,  avec  lequel  il  n'avait  jamais  eu  de  cor- 
respondance auparavant,  lui  a  écrit  ù  ce  sujet,  d*autant 
plus  que  Hardy  ne  lui  a  fait  aucune  réponse. 

Où  sont  donc  les  preuves  sur  lesquelles  vous  prononce* 
rei  que  l'accusé  est  convaincu  d'avoir  médité  la  mort  du 
roi  ?  Qu'importe  que  les  preuves  soient  admissibles,  si  elles 
ne  sont  pas  concluantes.  Une  preuve  réelle  est  fondée  sur 
les  lois  étemelles  de  la  justice  ;  die  est  déduite  des  princi- 
pes du  saint  Evangile  On  la  trouve  dans  les  ouvrages  de 
philosophie  ou  dans  les  leçons  de  l'histoire.  Recourra-t- 
on aux  procès  d'Etat  qui  ont  précédé  pour  oonf  aincre  ce 
prisonnier?  Dans  ces  procès  d'Eut  vous  trouverex  des 
exemples  d'oppression,  de  cruautés,  d'assassinats.  Plu- 
sieurs de  ces  affreux  procès  ont  été  biffés  par  les  parlements 
postérieurs  ;  en  cela  même  ils  ont  commis  une  faute  contre 
la  société;  au  lieu  de  les  effacer  des  registres,  ic  voudrais 
qu'ils  parussent  gravés  sur  les  murs  de  nos  cours  de  jus- 
tice, en  caractères  de  feu,  comme  ceux  qu'expliqua  le 
prophète  du  Seigneur  au  tyran  consterné  de  l'Orient^  afin 
de  servir  d*une  redouUble  leçon  aux  juges  et  aux  jurés, 
et  de  leur  apprendre  comment  on  a  osé  autrefois  violer  les 
lois  sacrées  de  la  justice.  Faites  voir  aux  hommes  que  la 
gloire  de  l'Angleterre  consiste  dans  ses  lois.  Montrei-leur 
que  nous  avons  id  assex  d'avantages  pour  mépriser  les 
charmes  delà  nouveauté. 

^  Le  moyen  de  faire  aimer  au  peuple  ton  gouvernement , 
c'esi  de  lui  montrer  qii*il  est  aimé  du  gouverDement.VoQt 
pouvcx  efirayer  les  esprits  par  des  punitions  ;  mais  vou4  ne 
gagnerez  jamais  les  cours  que  par  la  bonté.....  Voyei 
l'exemple  du  BrabanU  Les  habitanU  rédamaient  leurt 
droits  ;  l'empereur  fait  marcher  ses  troupes  contre  eut 
et  rétablit  le  calaae,  nab  ce  n'était  qu'un  calme  oiom«- 
tané.  A  peine  l'orage  se  fut-il  formé,  qu'on  vit  lesflatteiin 
du  pouvoir,  les  esclaves  de  la  cour,  se  dérober  au  combat 
par  la  fuite ,  le  peuple  reprendre  tes  droits,  et  les  Françait 
être  reçus,  non  conne  conquérants ,  nais  commet  libéra- 
teurs. Si  le  peuple  avait  ahné  ton  gouverneiMBt,  jamait 
les  Fraoca*s^  quoiqn'armét  andoufd'hai  de  toute  la  l»rct 


139 


des  géants  (JcrantîquUé  9  n^aoraient  pu  s^emparer  de  ce 
beau  pays;  on  les  aurait  tus»  comme  ces  mêmes  géants  * 
écrasés  et  ensevelis  sous  leurs  propres  ruines.  Nous  af  ons 
encore  une  leçon  terrible  de  ce  genre  dans  la  séparation 
de  TAmérique  perdue  pour  la  Couronne  anglaise.  Ne 
cliercbei  point  à  diviser  le  peuple;  eflorcez-voos  au  con- 
traire de  runir.  Faites  que  tous  les  individus  s*aiment  les 
uns  les  autres  :  rendez-les  heureux,  et  tous  trouverez  en 
eux  un  rempart  inexpugnable  contre  les  traîtres  de  Tinté- 
rieur  et  les  ennemis  étrangers* 

(  La  suite  incessamment,) 

CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Bintabote, 

Rapport  sur  les  arl$  qui  ont  servi  à  la  défense  de  la 
république^  et  sur  le  nouveau  procédé  de  tannage^ 
découvert  par  le  citoyen  Armand  Séguin^faità 
la  Convention  nationale,  U\i  nivôse,  au  nom  du 
comité  de  salut  public,  par  Pourcroy, 

Le  comité  de  salut  public  vient  aujourd'hui  appe- 
ler votre  atteiition  sur  une  découverte  oui  doit  con- 
tribuer à  rentretien  des  armées  de  la  republique  en 
réparant  un  besoin  que  les  circonstances  rendent  de 
plus  en  plus  pressant  ;  c'est  de  la  fabrication  descuirs 
par  un  nouveau  procédé  économique  qu*il  croit  de- 
voir vous  entretenir  eu  ce  moment. 

Oo  a  déjà  parlé  de  cette  découverte  ;  mais  son  im- 
portance pour  réconomie  tiolitique»  liée  à  beaucoup 
d'autres  objets  qui  la  touchent  d'aussi  près,  exige  de 
votre  comité  qu'il  vous  fasse  connaître  des  faits  qui 
tiennent  essentiellement  au  succès  de  notre  révolu- 
tion. 

Le  comité  a  cru  qu'il  devait  saisir  cette  occasion 
pour  tracer  à  la  Convention  nationale  une  légère 
esquisse  des  découvertes  qui  ont  si  bien  servi  la 
cause  de  la  liberté,  et  pour  taire  connaître  à  l'Europe 
combien  les  sciences  et  les  arts,  cultivés  et  perfec- 
tionnés par  un  peuple  libre,  ont  d'influencé  sur  la  sa- 
gesse et  les  succès  de  son  gouvernement. 

C'est  surtout  au  moment  où  les  législateurs  de  la 
France^  témoinsv  des  maux  dont  la  oarbarie  et  le 
vandalisme  l'avaient  menacée ,  se  sont  fortement 
prononcée  contre  ces  ennemis  du  genre  humain,  et 
ont  détruit,  par  des  institutions  faites  pour  accroître 
les  connaissances  humaines,  les  coupables  espéran- 
ces de  la  t)[rannie  ;  c'est  à  cette  époque  heureuse  de 
la  révolution ,  où  l'ignorance  et  les  vices  qu'elle 
traîne  après  elle  sont  bannis  des  places  que  les  con- 
spirateurs leur  avaient  livrées  comme  une  proie, 
nu'il  est  important  de  Caire  retentir  cette  enceinte 
les  succès  oies  arts  et  de  la  reconnaissance  que  le 
mouvement  révolutionnaire  doit  aux  hommes  qui 
ont  consacré  leurs  veilles  à  la  recherche  de  tous  les 
moyens  les  plus  propres  à  régénérer  les  bases  de 
l'économie  politique. 

H  faut  que  la  Convention  sache  que,  placé  au  mi- 
lieu des  circonstances  les  plus  difhciles,  poursuivi 
par  les  usurpateurs  des  droits  du  peuple,  proscrit  par 
la  tyrannie  qui  en  craignait  l'utile  influence,  le  ^é- 
nie  des  sciences  et  des  arts  a  été  défendu  et  cache  en 
qijelque  sorte  aux  regards  du  triumvirat,  dans  le 
sein  même  du  comité  où  il  exerçait  cruellement  son 
affreux  despotisme;  il  faut  que  la  Convention  soit 
instruite  que  c'est  en  appelant  les  hommes  les  plus 
illustres  dans  les  sciences  et  dans  les  arts  à  concou- 
rir par  des  travaux  continuels  à  la  recherche  des 
moyens  de  défense  dont  la  république  était  privée, 
que  la  partie  de  l'ancien  comité  de  salut  public  qui, 
par  ses  lumières  et  ses  vertus,  devait  être  une  des 
victimes  des  conspirateurs  qu'il  renfermait  dans  son 
sein,  est  parvenue,  par  une  sollicitude  attachée  au 
salut  de  la  tuitrie,  k  arracher  à  la  proscription  ces 


§; 


hommes  utiles,  et  à  profiter  de  leurs  lumières  pour 
le  salut  du  peuple. 

La  Convention  n'aporendra  pas  sans  un  tendre  in- 
térêt que,  pendant  la  aurée  des  trames  les  plus  atro- 
ces contre  la  représentation  nationale,  dans  les  nuits 
même  où  la  tyrannie  conspirait  contre  elle,  des  sa- 
vants et  des  artistes ,  rassemblés  peu  loin  du  foyer 
de  la  conspiration ,  puisaient  dans  leur  génie  les 
moyens  de  résister  à  ses  funestes  effets  et  de  fournir 
à  nos  défenseurs  toutes  les  ressources  que  la  tyran- 
nie, l'ignorance  et  la  faction  déprédatrice  leur  enle- 
vaient sans  cesse.  Ainsi; tandis  qu'un  épouvantable 
■système  voulait  couvrir  la  France  de  deuil  et  de 
tombeaux  ;  tandis  que  des  traîtres  travaillaient  sans 
relâche  à  ploneer  le  peuple  dans  la  barbarie  et  la 
détresse,  pour  le  forcer  de  souscrire  à  leurs  lois  in- 
sensées, le  génie  des  arts  veillait  et  opposait  des  ef- 
forts heureux  aux  torrents  dévastateurs.  C'est  de 
ce  foyer  de  lumières,  c'est  de  cette  réunion  des  pre- 
miers hommes  dans  les  sciences  exactes  que  les 
membres  purs  de  l'ancien  comité  de  salut  public  ont 
fait  sortir  les  rayons  qui  couvrent  aujourd'hui  la 
France,  et  qui  repoussent  de  toutes  parts  les  attein- 
tes de  la  barbarie. 

Des  découvertes  plusillustres  par  leur  utilité  réelle 
que  par  le  bruit  qu'elles  ont  fait  jusqu'ici  dans  le 
monae,  parce  qu'il  fallait  en  quelque  sorte,  pour  les 
utiliser,  les  soustraire  aux  yeux  des  scélérats  conspi- 
rateurs ;  des  découvertes  dont  chacune  a  contribué 
au  salut  de  la  France,  sont  sorties  de  cette  réunion. 
Votre  comité  de  salut  public  a  pensé  qu'il  fallait  en 
présenter  le  tableau  à  la  France,  pour  apprendre  à 
l'histoire  combien  notre  révolution  a  fait  faire  de 
pas  à  l'esprit  humain»  et  pour  montrer  au  peunle 
quels  avantages  il  a  retirés  et  doit  encore  retirer  aes 
lumières. 

A  l'époque  où  des  forces  considérables,  levées  sur 
tous  les  pîoints  de  la  république  française,  se  sont 
répandues  en  torrents  sur  nos  frontières,  il  fallait 
armer  tous  les  bras  et  fournir  aux  défenseurs  de  la 
patrie  les  moyens  de  terrasser  les  hordes  étrangères. 
La  série  des  trahisons  qui  s'étaient  succédé  jusque- 
là  sans  interruption  avait  vidé  nos  magasins  et  nos 
arsenaux.  On  demandait  de  toutes  parts  des  armes 
et  de  la  poudre.  Les  matières  premières  nécessaires 
à  leur  fabrication  n'existaient  pas;  le  commerce,  au- 
quel nos  ennemis  opposaient  une  barrière  presque 
insurmontable,  ne  pouvait  en  fournir.  Les  ressour- 
ces devaient  être  tirées  tout  entières  du  sol  de  la  ré- 
publique ;  peu  d'hommes  pouvaient  déterminer  et 
ce  que  le  sol  offrait  de  richesses  à  cet  égHtd,  et  com- 
ment il  fallait  les  en  tirer. 

Les  lumières  d'un  petit  nombre  deviennent  alors 
la  seule  ancre  de  salut.  Quelques  hommes  pris  dans 
la  classe  des  plus  éclairés  en  ce  genre  sont  assem- 
blés ;  on  leur  expose  le  hideux  tableau  de  la  détresse, 
on  leur  découvre  la  plaie  la  plus  horrible  qu'un  Etat 
puisse  éprouver.  Leur  courage  s'enflamme  à  l'as- 
pect du  danger  ;  leurs  lumières  se  concentrent  et 
s'accroissent  par  la  communication.  L'amour  ardent 
de  la  république  tes  élève  au-dessus  d'eux-mêmes. 
Les  moyens  d^avoirdu  fer,  du  salpêtre,  sont  tout  à 
coup  créés.  La  quantité  de  ces  matériaux,  bien  au- 
dessus  de  celle  que  l'état  ordinaire  de  ces  arts  savait 
tirer  de  notre  propre  sol,  est  calculée  et  promise. 
La  liberté  renverse  les  obstacles,  détruit  les  diflicul- 
tés  ;  en  quelquesjours  desateliers  s'élèvent  de  toutes 
parts;  tous  les  artistes  deviennent  forgerons;  des 
armes  sortent,  pour  ainsi  dire,  de  la  terre;  le  salpê- 
tre est  retiré  du  sol  qui  le  recelait  dans  tous  les  pouits 
de  la  république.  L'instruction  sur  ces  arts,  devenus 
de  première  nécessité,  se  répand  avec  une  inconce- 
vable activité,  et  les  citoyens  s'empressent  à  l'envi 
de  puiser  dans  cette  source  ouverte  à  tous  par  un 


140 


gouvernement  éclairé,  Tou3  les  souterrains  devien- 
nont  des  laboratoires  où  se  préparent  les  éléments 
(le  la  foudre.  Les  opérations  délicates  et  difficiles  des 
scicnees  qui  n*étnlent  cultivées  que  par  une  classo 
peu  nombreuse  de  citoyens  sont  converlies  en  pro- 
cédés domestiques  et  simples.  Le  mouvement  donné 
a  tontes  les  âmes  se  communique  à  tous  les  bras,  et 
la  république  est  sauvée. 

Tandis  que  les  ateliers  d'armes  situé?  dans  diffé- 
rentes parties  de  la  France  sont  mis  dans  une  «ou- 
relie  activité  et  «lugmentenl  rapidement  leurs  pro-. 
duits,  à  Paris,  et  sous  les  yejix  de  la  Convention,  des 
ateliers  nombreux  s'élèvent  dans  des  lieux  où  ré- 
fjnaient  jusque-là  le  silence  et  la  paresse.  Cent  cin- 
quante mille  fusils,  réparés  ou  fabriqués  dans  celte 
grande  commune,  arment  les  bras  de  nos  frères;  et 
si  \es  circonstances  pressantes  en  augmentent  beau- 
coup les  frais,  la  victoire  et  les  triomphes  de  la  ré- 
publique font  oublier  cette  dépense  extraordinaire. 

En  neuf  mois,  douze  millions  de  livres  de  salpiHre 
remplissent  les  magasins  de  la  république,  tandis 
qu*avant  rinstructiou  révolutionnaire,  à  peine  cha- 
que année  voyait-elle  un  million  de  ce  sel  sortir  dq 
quelques  poiiits  de  son  sol.  A  mesure  que  le  salnétra 
est  retiré  du  sol  où  la  nature  l'avait  mis  en  dépôt 
pour  servir  la  liberté,  les  ateliers  destinés  seulement 
à  purifier  la  petite  quantité  de  ce  sel  qui  avait  été 
extraite  jusque-là  des  plâtras  deviennent  beaucouu 
trop  petits  et  trop  peu  nombreux.  Le  procédé  de  rar. 
finale  adonté  jusqu'alors  exigeait  trop  de  temps,  et 
aurait  renuu  presque  inutile  Tabondante  récolte  du 
salpêtre,  si  Ton  n'avait  trouvé  une  nouvelle  méthode 
de  séparer  du  nitre  les  matières  étrangères  qui  Tal- 
tèrent  dans  le  produit  des  premières  cuites,  et  de  le 
rendre  par  là  jpropre  à  la  fabrication  de  la  poudre. 
Bientôt  un  raffinage  prompt  et  vraiment  révolution- 
naire est  dû  aux  lumières  des  savants,  et  après  de 
premiers  rjsais  heureux  on  convertit  rinulilc  bâti-i 
ment  de  la  ci-devant  église  de  Fabbayc  Saint-Ger* 
main  en  un  atelier  de  raffinage  bien  supérieur,  par 
son  étendue  et  par  U  promptitude  des  opérations 
qu'on  y  pratique,  aux  travaux  qui  avaient  été  suivis 
jusqu'à  cette  époque.  Quelques  décades  suffisent 
pourperfectionner  le  nouveau  procédé,  et  il  conduit 
a  raffiner  en  vingt-quatre  heures  plus  de  trente  miU 
llers  de  salpêtre,  et  à  le  sécher  assez  exactement 
poiir  qu'il  puisse  être  employé  à  la  préparation  de  la 
poudre. 

Les  fabriques  de  poudre  établies  sur  quelques 
points  de  la  France  ne  suffisaient  ()lus  à  cette  im- 
mense récolte  de  salpêtre.  Les  procédés  compliqués 
par  le  mécanisme  el  le  temps  ne  répondaient  plus 
aux  besoins  et  au  désir  de  combattre.  La  réunion  des 
artistes  s'occupe  alors  sans  relâche  de  perfectionner 
l'art  de  faire  la  poudre.  Quelques  légers  change- 
ments dans  les  machines,  quelques  additions  dans 
les  ateliers  de  la  régie  nationale  leur  paraissent  de.i 
moyens  trop  petits.  Il  faut  à  la  liberté  et  à  la  révolu^ 
tion  des  mécanismes  plus  simples,  des  résultats  plus 
prompts;  il  faut  trouver  des  procédés  qu'on  puisse 
sur-le-champ  mettre  en  pratique,  et  que  tous  les 
hommes  puissent  exercer.  Ce  besoin  est  aussitôt  sa- 
llsfiiît  que  senti  :  un  procédé  révolutionnaire,  propre 
à  faire  de  la  poudre  en  quelques  heures,  et  avec  des 
.  machines  simples  qu'on  trouve  partout,  est  inventé 
'.  et  exécuté  presque  en  mtlme  temps.  Une  poudrerie, 
;è  l'établissement  de  laquelle  on  ne  peut  reprocher 
'  que  trop  d'activité  et  trop  de  moyens  réunis  dans  un 
espace  resserré,  prépare,  en  quelques  décades  qui 
ont  précédé  raccidenf.  terrible  qui  l'a  détruite,  plu- 
ileiirs  millions  de  poudre  ;  et  les  moyens  qu'on  y 
a?alt  pratiqués  donnent  encore,  après  sa  destruction, 
la  ressource  incalculable  de  les  reporter  prompte- 
DMOti  sans  les  accumuler»  dans  plusieurs  établisse- 


menu  nouTo^ui^,  V(ïi^k  d«i  9fMM  w  ^^^  éHwm 
comme  ils  ont  vameti  nos  ennemii  ;  et  e'cal  nu  gëaîa 
des  science»  et  des  ar II  que  la  patrie  en  est  rade* 
vable. 

Il  n'y  avait  dans  toute  la  république  qu^une  seule 
fabrique  d'armes  blanehes,  è  Klingenthal  )  Part  d^ 
cette  fabrication  était  inconnu  dans  le  reste  de  t| 
France.  Le  comité  sentit  la  nécessité  d'établir  plu* 
sieurs  manufoctures  analogues.  La  description  de 
l'art  a  été  faite  ^vec  soin  et  publiée,  et  depuis  il  s'est 
formé  un  grand  nombre  d'ateliers  où  l'on  fabriq^iie 
aujourd'hui  la  quantité  d*armes  blanches  nécessaire 
pour  armer  les  bras  de  pos  frères. 

La  fabrication  des  armes  exigeait  impérieusement 
celle  de  l'acier.  La  France  avait  été  jnsque-là  tribu- 
taire des  u^tiQP»  voisine^  pour  U  produit  des  arfei. 
L'Angleterre  et  rAUcmagUfi  lui  en  fuurnjssaient , 
dans  les  temns  ordiaaire^«  pour  environ  i  millions 
par  an.  Nos  oesoin^et  U  différence  du  change  au- 
raient f^it  monter  cette  importation  jusqu'à  plus  de 
SOmilIjons.  Le  comité  demande  aux  sciences  de  créer 
l'art  de  l'aciérie)  les  sciences  )e  Inidonnent,  et  unç 
instruction  olaire  et  suftisammeni  détaillée,  H^pan- 
duo  avec  profusion,  bit  ëleyer  plusieurs  manufbo-^ 
lures  d'acier  dans  Isa  lieux  où  cet  art  était  inconnu. 
Quelques  ateliers aneiens  rectifient  er  perfectionnent 
leurs  procédés.  L'aciérie  devient  bientôt  indigène,  et 
cette  grande  ressource,  créée  par  l'esprit  de  la  révo- 
lution» naturalisée  dans  nos  manufactures,  restera 
comme  un  bienfait  éternel,  lorsque  les  oscillatieus 
révolutionnaires  seront  calmées.  Les  préjugés  sur  le 
charbon  ei  les  mines,  qu'on  croyait  autrefois  pen 
propres  à  la  préparation  de  Pacier,  disparaîtront  de 
tous  les  lieux  où  la  possibilité  de  celte  fabrication 
avait  été  regardée  comme  une  chimère. 

C'est  aux  savants  français,  Jiui  les  premiers  ont  dé* 
couvert  et  fait  oounattre  la  nature  de  Tacier  et  la  vé* 
ritable  théorie  de  sa  formation  «que  la  patrie  devra  la 
création  et  la  multiplication  des  ateliers  d'aciérie 
dans  la  république. 

On  ne  s  est  point  contenté  de  préparer  des  armes 
par  des  procédés  connus  et  à  Paide  des  moyens  or- 
dinaires, on  a  voulu  encore  perfectionner  ces  procé- 
dés, en  faisant  par  des  machines  les  différentes  pièces 
de  fusiU  tJn  atelier  de  perieotionnement  a  été  formé 
depuis  quelques  mois,  et  les  premiers  succès  qu'on 
a  obtenus  font  espérer  qu'on  jouira  bientôt  des  pro- 
duits de  cette  nouvelle  et  importante  application  de 
la  mécanique,  à  laquelle,  outre  la  rapidité  de  la  fa- 
brication, et  l'épargne  des  bras  et  de  la  main-d'œu«> 
vre,  on  devra  une  parlaite  identité,  et  un  rechange 
facile  dans  toutes  les  pièces  qui  composent  les  armes 
portatives. 

La  même  sollicitude  et  les  mêmes  soins  ont  fait 
créer  une  manufacture  de  carabines  et  armes  dont 
la  fabrication  était  inconnue  en  France,  et  dont  nos 
troupes  avaient  été  presque  entièrement  privées 
jusqu'ici. 

Un  métal  précieui,  qne  la  nature  n'a  pas  refusé  ft 
la  France,  mais  que  Tart,  toujours  lent  à  se  perfec- 
tionner sans  le  secours  des  sciences,  n'a  encore  re- 
tiré de  nos  mines  que  dans  une  proportion  bien 
inférieure  à  nos  besoins,  le  cuivre ,  manquait  à  la 
république,  et  le  commerce,  si  entravé  depuis  plu- 
sieurs années ,  n'en  fournissait  que  pour  une  très- 
petite  partie  de  notre  consommation.  La  fonte  de 
nos  canons,  la  construction  et  le  doublage  de  nor 
vaisseaux  en  demandaient  de  grandes  quantités.  La 
scieuee  métallurgique  a  fourni ,  comme  les  autres, 
son  tribut  à  la  patrie.  Le  métal  des  cloches,  que  la 
philosophie  et  les  lumières  ont  enlevées  à  la  supersti- 
tion, est  devenu,  par  de  nouveaux  procédés  chimi- 
ques ,  une  immense  mine  de  cuivre  i  exploiter  par 
les  mains  républicaines.  One  instnictioD  sur  ce  nou- 


m 


vel  art  a  été  publù^e  par  )ç$  SQÎqs  du  comités  4«  89-^ 
lut  public*  Des  artistes  intelligepts  oot  «$sootë  Ù 
rectitude  de  leur  pratique  aux  découverte^  répan- 
dues par  cette  Instruction,  et  plusieurs  ateliers  coa-r 
sacrés  à  ce  départ  révolutionnaire  sont  aniqurdliui 
en  pleine  activité .  dç  sorte  qu'en  laissant  qux  be- 
soins particuliers  àes  citoyens  tout  le  cuivre  que  le 
commerce  saura  tirer  de  Téltanger,  par  le  mouve- 
ment et  la  liberté  que  vous  venez  de  lui  rendra,  no^ 
ports  et  nos  arsenaux  seront  approvisionnés  par  la 
produit  de  cette  nouvelle  création. 

Ce  n*était  pas  assez^pouf  la  sollicitude  du  coniitéi 
de  multiplier  les  ateliers  où  Pon  fondait  les  canons 
de  bronze  ;  ce  n'était  point  assef  de  convertir  Jiuur 
ce  pr(^çieux  usage  le  métal  allié  qui  était  inutileuient 
suspendu  dans  les  airs,  et  d'apprendre  h  moyen 
d*en  retirer  |e  cuiyre;  il  fallait  encore  fournir  b  1  ar 
mement  des  valssepux  un  nooqbre  sufTisant  tV  pièces 
de  fonte  nécessaires  pour  assurer  nos  succf  !»  uiari- 
times,  L*art  de  couler  le^  canons  de  fer  fondu  a  éié 
rédigé  et  publié  par  les  ^oins  du  comité  ;  un  grand 
nombre  d'usines  et  de  fonderies  révolulion^iEUres 
ont  été  établies  et  mises  en  activité  par  plusieurs  rç^* 
présentants  du  peuple,  chargés  d'une  mission  parti» 
culière  pour  cet  objet.  M^lfi^ré  la  dilfioulté  des  ûir« 
constances ,  maigre  celle  oe  fournir  aux  ouvriers 
nombreux,  disséminés  dans  différents  points  de  la 
république,  et  les  subsistances  et  les  matériaux  né^ 
oessaires  à  leurs  travaux ,  tout  annonce  qu^  les 
moyens  de  ▼9incre  seront  fournis  &  nos  brqves  dé- 
fenseurs sur  les  mers,  comme  ils  Tont  été  sur  la 
terre.  {La  suUe  demain-) 

SÉANCB  DU  16  niTOSB. 

Les  sourds  et  muets  de  naissance  sont  admis  à  la 
barre. 

U  citoyen  Àlhçy^  orateur  de  la  députalion  :  Gi« 
toyens  représentants,  les  sourds  et  muets  de  nais- 
sauce  sont  à  U  barre  ;  ils  viennent  exposer  aux  pères 
de  la  patriQ  les  besoins  urgents  qu'ils  ont  de  leurs 
secours.  Dénués  de  tout,  à  cause  ne  l'excessive  mo- 
dicité de^  pensions  que  leur  accorda  1* Assemblée 
constituante,  ils  ont  obtenu  des  trois  comités  réunis 
qu'il  vous  serait  fait  un  rapport  sur  leur  déplorable 
situation.  Le  rapporteur  est  tout  prêt  depuis  un 
mois  :  nous  venons  vous  conjurer  ne  lui  accorder 
un  quart  d'heure  de  ce  temps  précieux  que  vous 
donnez  aux  affaires  publiques. 

Et  nous  aussi,  citoyens  représentants,  nous  som» 
mes  vos  enfants  ;  et  nous  aussi  nous  sommes  muU 
heureux.  Hier  encore  nous  manquions  de  pain  ;  nous 
n'en  aurons  pas  demain  si  vous  refusez  d'entendre 
In  voix  qui  dfemande  à  vous  entretenir  de  notre  in- 
fortune. 

La  Convention  accorde  la  parole  au  rapporteur. 

JouENNB,  au  nom  des  comités  d'instruction  publi- 
<]ue,  des  linaoces  et  des  secours  publics  :  L'Assem- 
blée constituante  fonda  vingt-quatre  places  gratuites 
pour  autant  de  sourds-muets  pauvres,  comme  si  le  ^ 
nombre  de  ces  inrortuiiés  était  égal  à  celui  des  pla- 
ces fondées,  ou  comme  si.  dans  un  régime  qui  com- 
mençait à  devenir  celui  de  l'égalité ,  quand  déjii  il 
n'y  avait  plus  de  privilèges,  la  mère  commune  eût 
pu  refuser  ses  secours  au  grand  nombre  de  ses  en- 
fants, et  ne  les  répandre  que  sur  une  exception.  Elle 
attacha  à  chacune  de  ces  places  une  sruime  si  exces- 
sivement modique,  qu'elle  n'eût  pt/  suffi  dans  les 
années  de  la  plus  grande  abondance. 

Cette  somme,  pour  la  nourriture  et Tjentretien, 
était  fixée  à  350  liv. 

Ces  deux- grands  torts  de  nos  prédécesseurs,  dont 
le  premier  a  été  jusqu'ici  unegriiude  injustice  eo- 


verf  les  sourds^muets  df  Idisséa  •  dont  le  second  fut 
une  grande  erreur  de  calcul  et  un  oulffig^  Eajt  % 
l'humanité,  c'est  Vous,  représentants  de  la  premiiri 
république  du  monde,  qui  éte^  appelés  a  les  réparât 
tous  les  deux;  :  le  premier,  en  n'exceptant  aUPMU  A^ 
malheureux  susceptibles  des  mêmes  secours ,  t^us 
égaux  en  pauvreté  et  en  infortunç  ;  le  seçondi  £A 
attribuant  a  chaque  place  gratuite  upç  sgmmç  %\m» 
sanlc  pour  pourvoir  à  la  pourriture  dP  çb94U«  Itt* 
^ividu  et  à  son  entretien. 

Ce  que  vos  comités  proposent  en  faveur  dçs  «ourdi 
et  muets,  votre  bienfaisance  en  9  f^it  un  heurfUIS 
essai  dans  l'institution  vraiment  républicaine  foiw 
mée  en  179!^  par  un  de  nos  collègues.  Ceux-U  WPt, 
Il  est  vrai ,  orphelins  de  |a  patrie  ;  mai?  |e«  spuroi* 
muets  çont  orpheline  aussi ,  çt  orpheline  4^  la  A4<r 
lure. 

Cette  proposition  de  vos  comités  eût  pu  alarmât 
ceux  qui,  pénétrés  du  principe  de  l'égalilfi  dis 
droits,  et  persuadés  que  |e  nombre  di^s  sourd^mnatl 
est  très-considérable,  pourraient  penser  que,  par  lâ 
décret  qui  les  admettrait  tous  aux  mémos  sacourit 
la  nation  pourrait  prendre  un  engagçm^nt  hm  êW» 
dessus  de  ses  moyens. 

Aussi  vos  trois  comités  ont  pensé  qu0,  pour  r^PK 
plir  toute  justice,  et  pour  ne  rien  exagérer*  ilsdA« 
vaient  s'eptourer  de  toutes  ses  lumières,  lia  ont  oni 
devoir  interroger  surtout  le  diffne  successeur  dî 
l'immortel  l*tpée,  le  citoyen  Sipard,  qui  devait 
avoir  sur  le  nombre  de  ces  infortunés  des  donn^ta 
plus  certaines  que  celles  de  tout  autre»  sans  cepen* 
(laut  avoir  négligé  les  renseignements  qu9  pouvaiiml 
nous  fournir  ceux  qui  se  sont  voués  avao  lui  à  et. 
çenre  pénible  d'instruction  ;  et,  d'après  les  calculs 
faits  sur  des  renseignements  acquis  pendant  dix  ans» 
vos  comités  se  sont  assurés  qu'en  retranchant  ùê 
vos  bienfaiu  toua  ceux  à  qui  leur  3ga  las  rendrait 
inutiles,  la  Convention,  en  fondant  soixante  plac^^a 
gratuites  dans  chacune  des  doux  maisons  existantes, 
l'une  à  Paris,  l'autre  i  Bordeaux,  atteindrait  ù  peu 
près  tous  les  8ourds*muets  iodigenta  oapabloa  da 
recevoir  l'instruction. 

Les  comités  voua  proposent  enaore  qua  oha<|ue 
élève  ne  passera  pas  plus  de  oioq  ans  dans  l'inatitu* 
tion  ;  que  les  plus  igés  soient  cboiais  et  préférés  à 
tous  les  autres,  en  observant  toujours  qu'il  ne  fau* 
dra  avoir  ni  plus  de  seize,  ni  moins  de  neuf  ans  ao* 
complis.  Cette  condition  doit  être  expresse  et  de  ri* 
gueur.  En  procédant  ainsi,  tous  les  oinq  ana«  cent 
vingt  élèves  prendront  la  place  des  premiers,  et  eetia 
succession  alternative  fera  jouir  tous  les  aourda- 
muets  de  la  république  du  bienfait  que  vos  comitéa 
viennent  vous  demander,  et  que  rbumanité  et  la 
justice  attendent  également  de  vous. 

L'Assemblée  constituante,  ai  prodigua  quand  il 
s'agissait  des  intérêts  et  de  la  grandeur  factice  do 
dernier  de  nos  tyrans,  et  si  parcimonieuse  quand  il 
était  question  de  la  gloire  et  du  bonheur  du  peupla 
français,  n'a  pas  été  plus  juste  à  l'égard  de  l'institu* 
leur  et  de  ses  ac^oinU;  de  l'instituteur,  de  qui  la 
nation  attend  avec  une  juste  impatience  un  grand 
ouvrage  sur  l'art  d'instruire  les  sourds-muets,  et  en 
qui  il  convenait  de  récompenser  avec  dignité  les  tra- 
vaux, les  talents  et  le  cèle  du  successeur  du  célébra 
L'Epée,  dépositaire  unique  de  cette  précieuse  mé» 
thode  qui  nous  donne  l'espérance  de  voir  se  réaliser 
un  jour  le  projet  d'une  langue  universelle,  a  la* 
quelle  plusieurs  savants  travaillent  journellement, 
et  dont  l'exécution  est  peut-être  réservée  à  celui 
qui,  seul ,  a  su  donner  à  l'homme  de  la  nature,  en 
échange  d'une  grammaire  pauvre  et  réduite  à  très- 
peu  d'éléments,  la  grammaire  philosophique  de 
l'homme  civilisé; de  Sioard  enfin,  que  la  Conven- 
tion nationale  n'a  pas  en  beaoio  ^u'on  lui  indiquât 


pour  le  placer  au  nombre  des  savants  appelés  è  Tin- 
stitution  normale  qui  doit  régénérer  sur  le  sol  fran* 
çais  les  sciences  et  les  arts  que  le  vandalisme  voulait 
en  exiler,  et  que  l'amour  seul  de  la  liberté  a  conser- 
Tés  au  milieu  de  nous. 

Vos  comités  ont  assisté  plus  d'une  fois  aux  leçons 
qui  se  donnent  dans  cette  intéressante  institution.  Ils 
vous  en  ont  toutes  les  (ois  raconte  les  merveilles; 
ils  vous  ont  dit  jusqu'à  quel  point  cet  art  d*ensei* 

Sner  exigeait  de  protondeur  dans  la  connaissance 
eslanffuesetdeleurgénie,  dans  la  métaphysique 
et  dansTart  d'analyser  toutes  les  opérations  de  Tin- 
telligence  humaine. 

Us  vous  ont  dit  que  cet  art  précieux  de  l'analyse, 
auquel  sont  dus  tous  les  succès  de  celte  école,  de- 
vrait être  celui  de  tous  les  instituteurs,  et  on  en  a 
conclu  que  les  instituteurs,  oubliant  que  leurs  élè- 
ves étaient  moins  destinés  à  être  des  savants  que  des 
ouvriers,  se  bornaient  à  n'en  faire  que  des  philoso- 
phes, et  les  âmes  les  plus  sensibles  n'ont  pu  se  ga- 
rantir de  quelque  préjugé  défavorable  contre  cette 
méthode.  On  Ta  aussitôt  soupçonnée  d'être  plutôt 
une  fondation  de  luxe  qu'un  établissement  utile,  ré- 
clamé par  l'humanité  pour  le  soulagement  de  l'in- 
fortune. On  vous  a  rappelé  à  cette  tribune,  avec  des 
intentions  dont  le  comité  est  bien  loin  de  soupçon- 
ner la  pureté,  les  bornes  dans  lesquelles  l'inventeur 
avait  circonscrit  cette  institution  ;  et ,  croyant  que 
Sicard  ne  les  avait  pas  reculées,  on  vous  a  dit  qu'il 
suffisait  de  comprendre  les  sourds-muets  dans  la 
distribution  générale  des  secours  à  domicile,  et  qu'il 
Cillait  se  contenter  de  leur  apprendre  à  lire,  à  écrire, 
et  les  droits  de  l'homme. 

Les  comités  ne  viennent  pas  vous  faire  aujour- 
d'hui une  demande  plus  étendue  :  ils  vous  proposent 
seulement  de  ne  pas  vçrser  vos  secours  isolément  et 
individuellement  sur  des  infortunés,  qu'il  faut  né- 
cessairement réunir  pour  adoucir  leur  infortune,  et 
la  faire  cesser  en  quelque  sorte.  Us  ne  veulent  d'au- 
tres sciences  pour  eux  que  celles  que  vous  ont  iiuli- 
3 nées  ceux  qui  ont  cramt  qu'on  ne  voulût  en  faire 
es  savants. 

L.es  comités  ne  vous  demandent  enfin  pour  les 
sourds- muets  que  ce  que  vous  avez  jugé  ne  pouvoir 
plus  longtemps  refuser  aux  autres  Français  :  la  lec- 
ture, l'écriture,  les  droits  de  l'homme  et  uu  métier, 
liais  cette  éducation,  toute  bornée  qu'on  la  sup- 
pose et  qu'elle  est  en  efiet ,  cette  autre  éducation 
qui  précède  celle-là,  et  que  reçoivent,  sans  frais,  et 
par  la  seule  communication,  les  autres  hommes,  les 
sourds-muets  ne  peuvent  la  recevoir  qu'à  Taide  lie 
la  métaphysique  la  plus  approfondie. 

Citoyens,  ce  n'est  pas  au  moment  où  la  plus  belle 
institution  qu'on  ait  jamais  conçue  va  donner  à 
tous  les  instituteurs  de  la  république,  pour  leur  ap- 
prendre le  grand  art  de  l'enseignement,  les  premiers 
professeurs  de  l'uniVers ,  parmi  lesquels  nous  re- 
grettons de  ne  pas  voir  L^harpe,  qu'une  institution 
que  toutes  les  contrées  du  moude  vous  envient 
trouvera  des  adversaires  parmi  les  restaurateurs  de 
tant  de  biens. 

Citoyens ,  le  soleil  de  la  liberté  est  allé  éclairer 
€H  autre  monde,  où  Thomme  avili  portait  les  lour- 
des  chaînes  de  liioauie  son  semblable.  Vos  comités 
vous  dénoncent  d'autres  diaines  ;  ils  tous  présf  n- 
tcnl  d'autres  fers  à  tinsrr«  d'autres  heureux  à  faire  ; 
ee  ne  sont  pas  des  étrangers,  ils  sont  au  milieu  de 
VMS  ;  ce  sont  les  imortunês  sourds-muets,  dt-s  Fran 
çais  comme  toqs  «  aussi  dignes  que  vous  du  bienfait 
de  Touie ,  dont  I  atisenee  ks  rend  victimes  du  pre- 
mier tyran  qni  a  intérêt  à  les  opprimer,  et  du  vo* 
leur  qui  Tcnt  s'approprier  leurs  dépouilles.  Enten- 
dez dans  ce  moment  les  vaux  réunis  des  malheureux 
de  ktirs  jows,  qui  attendent  avec  la  plus 


tendre  sollicitude  la  décret  consolateur  que  vos  eo- 
mités  sollicitent.  L'ajournement  le  plus  court  por- 
terait le  désespoir  dans  cette  institution  et  dans  les 
familles  dont  les  enfants  y  reçoivent  l'instruction. 
Dissipez  toutes  les  craintes  ;  hâtez- vous  de  pronon- 
cer  sur  le  sort  de  tant  d'infortunés,  si  dignes  de  la 
bienfaisance  nationale. 

Ah!  s'il  pouvait  encore  vous  rester  quelques  dou- 
tes sur  tous  les  avantages  d'une  institution  aussi 
précieuse ,  vos  comités  inviteraient  la  Convention 
tout  entière  de  s'y  porter.  Vous  tous,  citoyens,  ami^ 
sensibles  de  l'infortune,  vous  en  sortiriez  avec  le 
désii;  brûlant  que  j'en  ai  rapporté  moi-même ,  de 
voir  ce  chef-d'œuvre  de  l'esprit  et  du  génie  avoir 
des  modèles  partout  où  il  y  a  des  infortunés  ;  mais 
comme  vos  grands  travaux  vous  attachent  ici ,  et 
que  vous  ne  pouvez  sacrifier  a  toute  autre  occupation 
aucun  de  vos  moments ,  souffrez ,  citoyens ,  qu'eu 
preuve  de  l'utilité  de  cette  institution  je  vous  rap- 
porte deux  événements  arrivés  dans  cette  commune, 
dont  l'un  fut  eonnu,  dans  le  temps,  de  l'Europe  en- 
tière, et  qni  se  trouve  eonsigné  dans  un  papier  étran- 
ger. Je  vais  le  rapporter  tel  que  je  l'ai  lu,  avec  les 
réflexions  du  journaliste  anglais,  uans  la  traduction 

3ui  en  a  été  faite  par  l'acteur  principal ,  sourd-muet 
e  l'école  de  Paris,  Jean  Massieu ,  dont  le  nom  ira  à 
la  postérité  à  côté  de  pelui  de  son  habile  maître.  Ainsi 
s'exprime  le  journaliste  : 

•  Parmi  les  événements  intéressants  qui  caracté- 
risent le  siècle  présent,  la  déposition  de  Jean  Mas- 
sieu, âgé  de  dix-huit  ans,  sourd-muet  de  naissance, 
n'est  pas  un  des  moins  extraordinaires.  Ce  jeune 
homme,  élève  de  l'abbé  Sicard,  successeur  de  l'abbé 
de  L'Bpée  dans  l'occupation  humaine  et  singulière 
de  donner  de  l'instruction  aux  sourds-muets,  plaide 
lui-même  sa  cause  contre  un  petit  voleur,  en  pré- 
sence d'un  tribunal ,  sans  avoir  besoin  d'être*  sou- 
tenu par  un  avocat  :  il  écrit  lui-même  ce  qui  s'est 
passé,  avec  la  noble  franchise  de  l'innocence  et  l'in* 
génuité  d'un  sauvage  fortement  pénétré  de  l'idée 
des  droits  sacrés  de  la  nature,  comme  si  la  nature 
l'avait  elle-même  chargé  d'en  rappeler  le  souvenir, 
d'en  demander  le  redressement  et  d'en  poursuivre 
la  vengeance  contre  la  violence. 

•  Nous  allons  transcrire  ici  ce  monument  vrai- 
ment curieux  et  singulier  des  efforts  de  l'esprit  hu- 
main, privé  des  moyens  ordinaires  d'instruction. 

«  Jeon  Moasien,  à  son  juge  :  Monsieur,  je  suis 
sourd-muet  ;  j'étais  regardant  le  soleil  du  Saint-Sa- 
crement, dans  une  erande  rue,  avec  tous  les  autres 
sourds-muets  :  cet  nomme  m'a  tu  ;  il  a  vu  un  petit 
portefeuille  rouge  dans  la  poche  droite  de  mon 
habit;  il  s'approche  doucement  de  moi;  il  prend 
ce  portefeuille  ;  ma  hanche  m'avertit.  Je  me  tourne 
vivement  vers  cet  homme ,  qui  a  peur  ;  il  jette  le 
porteleuille  sur  la  jambe  d'un  autre  homme  qui  le 
ramasse  et  me  le  rend.  Je  prends  l'homme  voleur 
par  sa  veste,  je  le  retiens  fortement  :  il  devient  pâle, 
Dlême  et  tremblant  ;  je  fiais  signe  à  un  soldat  de  ve- 
nir ;  je  montre  le  portefeuille  au  soldat,  en  lui  fai- 
sant siene  que  cet  homme  a  volé  mon  portefeuille. 
Le  siddat  prend  Thomme  voleur  et  le  mène  ici  ;  je 
lai  suivi  :  je  vous  demande  de  nous  juger.  Je  jure 
Dieu  qu'il  m'a  volé  ce  portefeuille  *  lui  n'osera  pas 
jurer  Dieu.  Je  vous  prie  de  ne  pas  i»nluuner  de  le 
décapiter,  il  n'a  pas  tué;  mais  seulement  diles  qu'on 
le  lasse  ramer.  > 

Quoi  de  plus  sublime,  citoyens,  qne  la  simplicité 
du  récit  de  cet  hornsM  de  la'natnre ,  et  surtout  de 
cette  prière  qu'il  bit  an  juge  de  ne  pas  condamner 
le  voleur  à  la  mort,  mais  seulement  aux  galères? 
Quel  sujet  de  réiezioos  pour  H 

I      Voici  le  2 


143 


3: 


La  section  dfs  Gravilliers  adresfsa  au  citoyen  Si- 
card  une  pauvre  feinme ,  mariée  à  un  sourd-muet 
flçé  de  quarante-huit  ans.  Cette  femme,  malgré  Tha* 
bitude  qu'elle  avait  acquise  avec  son  mari  dans  la 
connaissance  de  quelques  signes,  ne  pouvait  enten- 
dre ce  que  cet  infortuné  voulait  lui  dire  depuis 
quelques  jours. 

L'instituteur  charge  son  élève  Massieu  d'interro- 
ger ce  vieux  muet ,  qui  n'avait  jamais  reçu  d'in- 
truction.  Massieu  oublie  alors  tout  ce  qu1l  savait  de 
la  grammaire  de  notre  langue,  pour  n'avoir  recours 
qu  à  celle  des  hommes  de  son  pavs.  Il  questionne  ce 
vieux  saur*drnuet,  et  le  résultat  aes  réponses  est  que 
ce  sourd-muet,  né  d'un  père  et  d'une  mère  morts  de- 
puis quelque  temps,  avait  trois  frères  et  deux  sœurs 
|ui  s'étaient  entendus  pour  soustraire  les  papiers 
e  leur  père  et  mère ,  qui  donnaient  à  ce  sourd- 
muet,  comme  aux  autres  enfants,  une  portion  dans 
les  biens  de  l'hérédité.  Le  sourd -muet  indiqua  a 
Massieu  le  lieu  de  l'enlèvement  des  papiers,  l'épo- 
que, le  nombre  des  complices,  et  la  manière  dont  il 
croyait  qu'il  fallait  agir  pour  lui  faire  restituer  sa 
portion. 

Massieu  écrivit  ensuite ,  et  mit  en  français  toute 
celte  déclaration. 

Voila,  citoyens,  de  quoi  compléter,  je  pense,  la 
preuve  que  vos  trois  comités  m'avaient  chargé  d'é- 
tablir de  l'utilité  de  cette  institution. 

Mais  dois-je  terminer  ce  rapport  sans  recomman- 
der à  la  bienfaisance  nationale  cet  élève  précieux, 
ce  Massieu  dont  les  vertus  égalent  les  talents,  et  qui, 
réduit  à  de  très-modiques  honoraires,  le  fruit  de  ses 
travaux  auprès  de  ses  camarades,  les  a  toujours  par- 
tagés  avec  une  mère  infirme  et  pauvre,  et  des  sœurs 
sourdes-muettes  comme  lui  ? 

Si  vous  ne  laissez  jamais  de  grands  talents  sans 
récompense,  vous  récompenserez  tant  de  vertus,  et 
vos  comités  vous  proposent  de  donner  une  place  de 
répétiteur  à  cet  étonnant  jeune  homme,  dont  l'exem- 
ple vit  peut  manquer  de  servir  d'aliment  à  la  nais- 
sante émulation  de  tous  les  autres.  Cet  acte  de  bien- 
faisance de  votre  part  devient  un  acte  de  justice 
dans  une  république  où  une  gloire  éclatante  et  un 
prix  toujours  relatif  accompagnent  et  les  talents  et 
les  travaux. 

Voici  le  projet  de  dâ^et  : 

•  Art.  l«r.  Les  deux  maisons  d'institution  pour 
l'instruction  des  sourds-muets ,  établies  par  les  pré- 
cédents décrets  à  Paris  et  à  Bordeaux^  sont  mainte- 
nues et  conservées. 

•  If.  Il  V  aura  dans  chacune  des  deux  maisons 
soixante  places  gratuites,  pour  autant  de  sourds- 
muets  indigents.  Elfes  seront  accordées  à  ceui[  qui, 
ayant  plus  de  neuf  ans  et  moins  de  seize,  pourront 
prouver  dans  les  formes  légales  leur  indigence  et 
l'impossibilité  de  payer  leur  pension. 

•  m.  Les  plus  âgés,  depuis  l'âge  de  neuf  ans  ac- 
complis jusqu'à  celui  de  seize,  seront  préférés. 

•  IV.  La  durée  de  leur  instruction  sera  de  cinq' 
ans  ;  chaque  élève  apprendra  un  métier  propre  à  lui 

'fournir  de  quoi  pourvoir  à  sa  subsistance  quand  il 
sera  rendu  à  sa  famille. 

•  V.  Pendant  le  temps  de  leur  séjour  dans  Téta-  , 
blissement ,  les  élèves  seront  nourris  et  entretenus  ' 
aux  frais  de  la  république.  Il  sera  payé  par  an,  pour  | 
chacun  d'eux,  la  somme  de  500  Ijvres,  pendant  les 
trois  premières  années,  celle  de  250  pendant  la  I 
quatrième,  et  rien  pour  la  cinquième. 

•  VI.  La  commission  de  secours  publics ,  sous 
l'autorisation  du  comité  des  secours ,  fournira  à 
chaque  maison  les  meubles,  linge,  nccrssain^sà  son  ; 


fographie,  demeurant  suppri- 
conjointement  chargé  a'eo 


usage,  et  les  objets  relatifs  aux  différents  métiers 
dont  les  élèves  seront  susceptibles. 

•  VII.  Le  traitement  du  chef  de  cette  institution 
sera  de  5,000  liv.;  celui  du  second  instituteur,  de 
8,000  liv.,  et  celui  de  chacun  des  deux  adjoints  sera 
de  3,500  liv.  ;  le  même  traitement  aura  lieu  pour 
le  premier  et  second  instituteur  de  la  maison  de 
Bordeaux. 

«  VllI.  Le  traitement  des  deux  répétiteurs  est  fixé, 
pour  chacun,  à  1 ,200  liv.  La  place  de  maître  d'écri- 
ture, de  calcul  et  de  géographie,  * 
mée,  ceux-ci  seront 
remplir  les  fonctions. 

•  IX.  L'un  de  ces  deux  répétiteurs  sera  dès  ce  mo 
ment  Jean  Massieu ,  sourd-muet  de  naissance. 

«  X.  Le  traitement  des  deux  surveillants  et  celui 
des  deux  maîtresses  surveillantes  sont  fixés  a  400 1. 
pour  chacun  ;  mais  celle  des  deux  surveillantes  qui , 
remplit  les  fonctions  du  maître  d'écriture ,  de  cal- 
cul et  de  géographie  auprès  des  filles  sourdes-muet- 
tes, aura  200  liv.  en  sus,  et  son  traitement  s'élèvera 
à  600  liv. 

•  Le  traitement  de  Téconome ,  qui  était  fixé  à 
1,500  liv.  avec  la  table,  sera  porté  à  3,000  liv.  sans 
la  table,  le  bois  et  la  lumière. 

«XI.  La  Convention  nationale,  pour  récompenser 
les  élèves  des  deux  sexes  qui  se  seront  distingués 
pendant  les  cinq  années  de  leur  instruction,  décrète 
qu'il  sera  donne  à  chacun  d'eux,  en  sortant  de  l'in- 
stitut, une  somme  de  300  liv.  pour  faciliter  leur  éta- 
blissement. 

«  Xlî.  Nul  ne  sera  nourri  dans  l'établissement,  ft 
l'exception  des  deux  surveillants  et  des  deux  sur- 
veillantes. Les  uns  et  les  autres  ne  pourront  jamais 
se  dispenser  de  manger  avec  les  élevés;  ils  seront 
nourris  de  la  même  manière. 

•  XIII.  Le  local  occupé  ci-devant  par  le  séminaire 
Magloire,  situé  faubourg  Jacques,  où  se  trouvent 
actuellement  les  sourds-muets,  est  définitivement 
affecté  à  cette  instruction.  • 

Ce  projet  ds  décret  est  adopté. 

—  Sur  la  proposition  de  Boissy  d*Anglas,  la  Con- 
vention nationale  décrète  que  les  districts,  qui,  eu 
exécution  de  l'article  V  de  la  loi  du  4  nivôse ,  sont 
autorisés  à  faire,  pendant  un  mois,  des  réquisitions 
pour  Papprovisionnement  des  marchés,  peuvent 
exercer  et  faire  porter  ces  réquisitions  sur  les  com- 
munes des  districts  voisins  qui ,  en  exéclition  de  la 
loi  du  18  vendémiaire,  sont  tenus  d'approvisionner 
les  marchés. 

—  Courtois,  au  nom  de  la  commission  chargée  de 
l'examen  des  papiers  de  Robespierre  et  de  ses  com- 
plices, fait  un  rapport  qui  dure  plus  de  quatre  heu- 
res. Il  a  développé  le  plan  de  ces  conspirateurs  qui 
voulaient,  disait  Saint-Just,  marcher  les  pieds  dans 
le  sang  et  dans  les  larmes. 

L'analyse  des  pièces  a  signalé  les  chefs  de  la  con- 
spiration, leurs  complices  et  leurs  agents.  Le  rap- 
porteur a  nommé  Collot,  Lebon,  Maignet  et  Barère; 
en  général,  les  membres  de  l'ancien  gouvernement. 

La  Convention  ordonne  l'impression  de  ce  rap- 
port, qui  a  été  fréquemment  interrompu  par  les  plus 
vifs  applaudissements.  Elle  décrète  le  renvoi  à  la 
commission  des  Vingt-et-Un,  et  l'envoi  aux  départe- 
ments  et  aux  armées. 

(  Nous  donnerons  cet  intéressant  rapport.) 

La  séance  est  levée  à  six  heures. 


144 


ÈÈAntt  ou  soift  iDtJ  16  itnrôSfi. 
La  Convcnliort  procMô  Û  Tappèl  hômînal  pOOf 
l'éleetion  des  membres  qui  doivent  remplAcer  au 
Mmilé  de  sdrftë  e^n<<rBl«  Bourdon  (de  1t)ise), 
MontmayâUf  Médulie  et  Mathieu.  La  majorité  des 
Mllrages  se  rdunit  eti  fbveur  d«  Claucel,  VanloA)  Ro*- 
Hrt  vi  Quftroy» 

SÉANCE  DU   17  NIVOSE. 

OossuiN^au  Yiotti  du  fcotnlté  milllMi-c:  CitoVons, 
tîepuis  loftélcdips  la  gcndatmcrie  servant  près  Ici 
tt-ibunaux  ft  à  ta  garde  des  maisons  d^iirr^^t  et  de  Jué- 
Heé  dd  département  de  t^aris  Vous  a  Tait  de  justes 
réclamations  sur  son  service  pénible,  la  mbdicité  dé 
si  iolde  et  l'irrégularité  de  son  orgnnisation^  Votre 
comité  militaire,  pénélrt  ^  cette  veHté^  vient  voih 
nroposer  d^améliorer  le  sort  d*une  troupe  qui  se 
ulslibgue  par  un  dévouement  constant  a  ses  devoirs 
ft  libc  incorruptibilité  à  toute  épreuve. 

Le  service  incalculable  qu'elle  fait  sans  interrup- 
UOft,  soit  auprès  des  tribunaux,  soit  auprès  des  mai- 
&)\Ys  de  détebtioB^soit  enfin  à  cause  dies  ttansTère- 
Ibl^iits  mullipll  js  dont  elle  est  chargée ,  et  qui  ont 
lieu  tant  à  Paris  et  ses  environs  qu*a  la  Salpetrière 
H  I  Bie^tre ,  ainsi  que  dâhs  les  diffi^rents  départe- 
lAeirts,  tae  laisse  bùcun  ijbutè  sur  Timportance  de 
ses  fonctions,  et  sur  la  héèessité  et  la  justice  quil 
yade  lui  donner  eaifl  une  ot-^nlsation  qu*elle  sol- 
Hvtie* 

Cette  forée  atmée  ne  fbHne,  à  proprement  parler, 
Ml  corjps  ni  division  :  elle  s>st  tiroûvéê ,  dans  la  loi 
ihl  U  «vrier  1V9I  (vleuir  styïe),  rtlalive  à  la  gen- 
darmerie des  départements ,  comme  une  (Sfepèce  de 
kors-d'oMvre  ;  elle  n'a  Jamais  eu  pour  sa  gestion 
aucune  base  certaine^ 

Le  comité  de  la  guerre  trouva  dâà ,  en  ITi^S,  sa 
braatlon  si  défectueuse  qu'il  crut  devoir  proposer 
alors  a  la  Convention  d'y  Opérer  au  moins  quelques 
changements.  Depuis  ce  temps,  les  besoins  du  scr- 
fKe  nédftssitant  Ukic  augnicnlalion  d*ho'mmes,  le 
iSdmité  de  salut  publicarfc^tai  en  terminai,  que  cha-  ! 
etm^  deft  qUat*ante-huit  sections  Se  Paris  nommerait 
deux  citoyens  à  remploi  dé  gendarme.  Aucune  des 
conditions  requises  par  la  loi  ne  fut  exigée  pour  lelir 
ailmission. 

On  voit,  par  le  tâbjeou  de  la  force  journalière, 
que  plus  de  la  moihe  de  ce  corps,  composé  de  deux 
eompogmes,ctîacunededeux  centquarante  hommes, 

T  *  wJT.  ''lî^nlul^'n.^'''^*'^  *^*  j^" w  ;  que  même,  pen- 
dant ^»^-*J>n8^"P»'.*rois  cent  sii  hommes,  sur 

y^»y  ■?.^!Ll!'°^-^»6^-^n ,  y  étaient  constam^ 
Miem  a8sti}euR9» 

Il  est  évident  que  le  service  dt»  ces  militaires  est 
bien  plus  pénible  que  celui  de  la  gendarmerie  ordi- 
mrc  ;  leur  traUcment.  loin  dWHre  mS^i^^^^^^ 
lui  des  autres  i  devrait  (^ire  i)l,,«  ?":»   !t  "  ;^ 

viVmVnUpff»^^^  ^''^»  «^"^  occasionne  en 

nmXl  f/I^^i^^^^^^^^^  équipement.  D'ailleurs,  la  res^ 
K  ^^tL'ni  IT  \'"'  ?r'^^  ^u^'  ^*"x.  et  dont  leurî^ 

hJ^fâr.^iir^,V'^^V?^^S  loua,  saura  apprécier 
^*  ffi-^'^*'^*'  Bfendarmèrie ,  composée  d'an- 
STîî  îiil.ïr*J-^t^''^^^  "^^i<*^»"î  partie  est  décorée 
rS«?i*S^2ISîl^**^^?^"^^  'l^'^^  ^^  nation  accorde  h 
ÏÏÎKl^flS^Ï?^  '  ^"^  leur  donnera  les  moyens 
imffmoT?      ,    '^^^s  c^  ïeurs  enfants,  par 


unf 


augmentation  de  payement ,  qui  ne  s^élè.ve  pas  dans 
ee  inomem  à  m  liv.  par  an,  sur  quoi  ils  prélèvent 
MO  liv.  pour  Trais  d'entretien. 
.  j  J,  ^  ^st  pas  moins  Vràî  que  cette  troupe  a  besoin 
|i!?î**  .Pfomptement  organisée,  à  cause  de  ses  rela- 
*««•  joumalières  avecles  autorités  constituées,  et 


delà  correspondance  qui  en  est  !a  snUe.  Composée 
de  deux  compagnies  non  casemécs,  n'ayant  ni  qttât* 
tler-rtaître,  ni  adjudant,  ni  porle-drapean,  ni  secré- 
taife,  ni  officier  de  ianié,  m  commissaire  des  guer- 
res, ni  même  de  tambour,  elle  ne  présenté  qu*un 
rtssemblemenl  d^hommes  arm^ ,  qui ,  maigre  les 
inconvénients  qui  auraient  dû  résulter  de  ce  défaut 
d'organisation ,  ont  été  très-utiles  à  la  chose  publi- 
que, et  ôUt  mérité,  dans  beaueoup  de  circoUslanceSi 
itê  éloges  de  la  Convention  nationale, 

Paris  a  clé  témoin  que,  le  9  thermidor,  leur  chef 
Alt  incarcéré  par  ordre  de  Tinrame  commune. 

Volm  comité  a  cru  que  la  force  Tirmée  destinée 
particulièrement  à  la  garde  des  tribunaux,  des  mai- 
.^ons  de  justice,  d^arrct  et  de  réclusion ,  devait  Atre 
nugmenléc ,  et  former  un  ensemble  sous  le  même 
nrarede  Service;  que  pour  cela  il  était  utile  d'in- 
corporer la  force  armée  de  Blcétre  et  tie  la  Salpê- 
irière  d<in^  le  eorps  dont  il  est  question  ;  (^ëst  un  acte 
de  justice  et  d'Intérêt  général  que  vous  feret. 

Plusieurs  autorités  constituées  en  ont  depuis  long- 
temps schli  la  nécessité  ;  le  régime  sbu^  lequel  les 
citoyens  composant  la  force  armée  de  Bicélre  et  de 
là  Snlpétrièré  servent  la  république  peut  être  consi- 
déré comme  une  véritable  monstruosité,  puisqu*a- 
l^rès  cinq  années  de  révolution  leur  existenee  est, 
Mtis  tous  les  rapports ,  la  même  que  celle  qu'ils 
avaient  il  y  a  soixante  anSi 

Ces  citoyens,  pour  la  plupart  anciens  militaires, 
sollicitent  depuis  trois  ans  une  organisation  ;  ils  se 
livrent  avec  un  tèle  infatigable  ault  fondions  péni- 
bles dont  ils  sont  chargés.  Certes  ils  ont  des  droite 
incontestables  à  la  justice  nationale  ;  il  est  avants- 
«ox  d'ailleurs  pour  la  sûreté  deS  maisons  d'arrêt  et 
de  justice  que  les  gardes  de  Bicêtres  el  de  la  Salpe- 
trière ,  qui  ne  forment  aussi  en  ce  moment  qu*Un 
riissémblement  d'hommes  armés,  soient  réunis  sous 
un  même  chef  qui  surveille  le  se?vice  et  eft  réponde 
aux  autorités  constituées. 

Votre  comité  sVst  assuré  que  le  nombre  slriétc- 
ment  nécessaire  de  citoyens  pour  t^mplir  convena- 
blement nn  service  aussi  actif,  aussi  multiplié  et 
aWsî  pl^nible  qUe  l'est  celui  de  là  gendarmerie  près 
lè%  tribunaux,  devait  être  porté  à  sept  cent  trente- 
six,  divisés  en  cinq  compagnies,  v  compris  les  offi- 
ciers et  la  garde  dont  l'utilité  de  l'incorporation 
vous  est  démontrée. 

Il  estime  autre  observation  qui  n*a  pas  échappé 
il  votre  comité  :  c'est  que  le  service  de  la  gendarme- 
rie près  les  Iribunaux  est  absolument  particulier  el 
distinct  de  celui  qui  se  fait  dans  toutes  les  autres 
troupes  de  la  république;  c'est  un  corps  isolé,  qui 
a  One  organisation  indépendante  de  celle  des  divi- 
sions de  gendarmerie ,  soit  h  pied ,  soit  à  cheval  ; 
aussi  le  mode  que  l'on  vous  propose  pour  IVIcc- 
tion  oex  places  dtins  ce  corps  seral-il  plus  ifgulier  cl 
d'une  exécution  beaucoup  pluspromptè  el  plus  facile. 
A  l'avenir,  les  citoyens  réunissant  les  conditions 
prescrites  devront,  pour  entrer  dans  ce  corps,  s'in- 
scrire à  la  commission  des  mouvements  et  organisa- 
lion  des  armées  de  terre.  Les  lois  autorisaient  le 
département  de  Paris  de  s^immiscer  dans  ces  sortes 
i\v  dominations  ;  ce  rouage  a  Souvent  été  entravé, 
et  il  a  donné  lieu  à  des  rivalités  qu'il  est  de  votre 
sagesse  de  proscrire. 

Vous  allez  donner  à  la  gendarmerie  près  les  tri- 
bunaux Une  formation  durable;  elle  sera  salariée 
convenablement  :  mais  aussi  la  république  lui  com- 
HiandiR  de  toujours  être  parfaitement  pflénétrée  de 
ses  devoirs  ;  inflexible  à  sdif  ^Oste,  fidè)e  à  son  ser- 
ment, elle  doit  demeurer  convaincue  que  l'huma- 
nité et  les  bons  procédés  envers  h»  détenus  confiés 
à  sa  surveillance  sont  une  Vertu  qui  lui  méritera 
la  voix  du  peuple.  (la  $uile  demain,) 


GAZETTE  NATIONALE  «o  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


N*  109. 


Nonidi  19  Nivosb,  Van  3«.  (Jeudi  8  Janvier  1795,  vieux  style,) 


POLITIQUE. 

ALLEiMAGISE. 

.  Vienne^  le  8  décembre,  —  La  misère  publique  est  ex« 
trème  dans  cette  capitale.  Les  Tob,  qui  en  sont  Tindice,  se 
muUiplient  d*une  manière  effrayante.  Les  prisons  se  rem- 
plissent de  maltaiteurs. 

-«  LVmperenr,  alarmé  sur  Télat  de  ses  finances,  fait 
des  réiormes  dans  les  dépenses  de  sa  maison  ;  il  a  supprimé 
une  partie  de  ses  équipages  de  chasse. 

—  Les  cinlevant  garnisons  de  Valenciennes  et  de  Gondé 
fienoeol  d*éire  équipées  à  neuf,  et  vont  être  envoyées  en 
Gallicie.  Le  gouvernement  se  dispose  à  exercer  une  sur- 
veillance armée  dans  cette  province,  parce  qu*il  y  arrive 
un  grand  nombre  de  réfugiés  polonais ,  et  qu*on  craint  d*y  | 
voir  péiiétrcr  des  corps  entiers  d*insurgés.  j 

—  La  Gonr  a  demandé  à  la  province  de  Bohème  huit  { 
cent  mille  mesores  de  grains  pour  les  armées  autri-  f 


RatUbonnê^  to  49  décembre.  —  La  diète  a  continué 
hier,  comme  on  en  était  convenu  le5«  le  recueillement 
des  votes  dans  Taffaîre  de  la  paix. 

La  cour  de  Vienne  n*a  point  encore  opiné ,  ni  dans  le 
collège  des  élei^nrs,  ni  dans  celui  des  princes. 

Le  ministre  de  Hanovre  a  déclaré  qu*il  n'approuvait 
pas  la  proposition  de  Télecteur  de  Mayence,  attendu  que, 
dans  Tétat  actuel  des  choses,  on  ne  pouvait  espérer  une 
paix  sûre  et  acceptable»  et  qui  fût  conforme  à  la  dignité 
deFEmpire. 

L'envoyé  de  Wurtemberg  a  opiné,  comme  d'autres  Ta- 
faient  déjà  fait  le  5,  pour  qu'une  dépulation  de  PEmpire 
prit  une  part  active  aux  conférences  qui  s*ouvriront  sur 
la  paix. 

Parmi  les  villes  impériales,  trente-quatre  ont  émis  leurs 
voles,  et  le  plus  grand  nombre  en  faveur  de  la  paix. 

Ifewtied^  le  15  décembre,  —  Les  alliés  sont  filer  beau- 
coup de  troupes  de  leur  grande  armée  vers  Mayence.  Les 
Français  redoublent  d'activité  dans  leurs  travaux  du  côté 
de  cette  fortercKse.  Ils  établissent  une  batterie  devant  Té- 
glise  de  Bretxenheim.  11  est  parti  dernièrement  une  canon- 
nade terrible  de  la  redoute  de  Zahibacb.  Il  y  a  eu  aussi 
de  vives  escarmouches  dans  les  environs  de  âartemberg. 

—  Le  général  prussien  Hoheolohe  s'est  rendu  récem- 
ment ù  Mayence.  Il  est  entré  en  outre  dans  cette  dernière 
place  quelques  centaines  d'hommes  du  corps  connu  sous 
le  nom  de  manteaux  rouges. 

—  Lea  républicains  ont  reçu  un  renfort  d'infanterie  et 
de  grosse  artillerie. 

—  Le  commandement  de  Mayence  vient  d'être  donné 
an  général  Karacxay,  officier  hongrois  très-sévère,  habile 
homme  dans  son  métier,  et  d'ailleurs  fort  ignorant. 

Eriati§t  (e 6  décembre.  —La  dépulation  extraordinaire 
du  cercle  de  Franconie  a  témoigné  à  l'empereur  son  ex- 
trême désir  de  voir  la  fin  d'une  guerre  ruineuse  et  meur- 
trière. Ce  cercle  est  fortemeni  appuyé  par  celui  du  Haut- 
Rhin.  Ce  dernier  a  envoyé,  le  14  novembre,  à  l'empereur 
les  représentations  les  plus  fortes  et  tes  plus  pressantes 
pour  obtenir  son  concours  eflicace  à  la  irâtification.  Ces 
deux  cercles  s'engagent  à  procurer  le  repos  à  PEmpire,  et 
de  faire  la  paix,  si  l'on  peut  obtenir  l'état  de  possession 
tel  qu'il  avait  été  établi  par  le  traité  de  Westphalie.  Ils  dé- 
clarent néanmoins  qu'ils  sont  prêts  à  faire  tous  les  sacrifi- 
ces possibles  si  Ton  était  dans  la  nécessité  de  continuer  la 
guerre.  Le  cercle  du  Haut-Rhin  a  résolu  de  faire  part  de 
ses  sentiments  au  roi  de  Prusse. 


a*5^rtr.—  ToMiX» 


CONVENTION  NATIONALE. 

Prétidetice  de  Beniabole. 

Suite  du  rapport  sur  les  arts  qui  ont  servi  à  la  dé" 
fense  de  la  république^  et  sur  le  nouveau  procédé 
de  tannage ,  découvert  par  le  citoyen  Armand 
Séguin^  fait  à  la  Convention  nationale,  leii  nt- 
vose,  au  nom  du  comité  de  salut  publie,  par 
Fourcroy, 

Les  découvertes  des  arts  ont  été  appliquées  jus- 
qu'aux plus  petits  détails,  qui,  par  les  circonstances 
et  la  pénurie  des  moyens  de  transport,  se  sont  sou- 
vent présentés  comme  des  objets  majeurs  à  la  solli- 
citude de  voire  comité. 

L'usage  si  fréquent  et  si  heureux  que  nos  braves 
canonniers  font  sans  cesse  de  leurs  pièces  détruit 
promptement  la  lumière  des  canons,  et  les  rend  ou 
dangereux  ou  presque  inutiles  pour  le  service. 

Autrefois  les  pièces  dont  la  lumière  était  évasée 
par  le  tir  fréquent  étaient  transportées  à  grands 
frais  dans  les  arsenaux,  pour  y  être  réparées;  un 
temps  précieux  et  un  charroi  coûteux  devenaient 
alors  indispensables. 

Une  pareille  mesure  ne  répondait  ni  à  la  rapidité 
de  nos  succès,  ni  à  Ténergie  de  nos  soldats.  Le  co- 
mité conçut,  demanda,  et  des  artistes  habiles  inven- 
tèrent presque  sur-le-champ  Fart  de  placer  des 
grains  de  lumière  dans  les  parcs  d'artillerie  et  au 
milieu  même  de  nos  camps,  au  moyen  de  machines 
ingénieuses  assez  simples  pour  n'exiger  qu'un  petit 
nombre  d'ouvriers  habiles  qui  peuvent  parcourir 
rapidement  tous  les  points  occupés  par  nos  armées. 

En  trouvant  cet  art  utile,  le  renouvellement  des 
lumières  des  canons  a  été  porté  tout  à  coup  à  un  tel 
point  de  perfection,  qu'il  est  permis  de  croire  qu'il 
n'y  a  plus  rien  à  y  ajouter.  Si  ces  avantages  ne  sont 
pas  aussi  bien  sentis  loin  du  lieu  des  combats,  c'est 
sur  le  champ  de  bataille  même  que  la  victoire  en  a 
dôjà  fait  connaître  tout  le  prix. 

Une  des  découvertes  qui  étonne  le  plus  par  ses  ef- 
fets, et  qui  frappe  le  plus  l'imagination  par  la  place 
qu'elle  fait  occuper  à  l'homme,  en  l'élevant  sur 
l'aile  des  vents,  la  machine  aérostatique,  qui  n'a 
valu  à  son  auteur  qu'une  décoration  devenue  ridi- 
cule depuis  vos  lois,  mais  dont  la  source  est  toujours 
respectable  à  vos  yeux,  est  devenue  pour  votre  co- 
mité un  nouvel  instVument  de  guerre  dont  les  en- 
nemis ont  reconnu  toute  la  supériorité  et  toute  l'in- 
fluence sur  les  victoires. 

La  Convention  n'apprendra  pas  avec  indifférence 
que  plusieurs  savants  ont  consacré  dix  mois  de  leurg 
veilles  pour  perfectionner  l'art  de  l'aérostation  et 
pour  le  rendre  facile  à  exercer  dans  les  camps,  dans 
les  places,  et  sur  le  théâtre  même  de  la  guerre  ; 
leurs  recherches  ont  fourni  un  nouveau  moyen  de 
produire,  à  peu  de  frais  et  avec  des  matières qti'on 
trouve  partout,  le  fluide  léger  qui  distend  les  bal- 
lons, en  quantité  sufBsante  pour  les  plus  volumineui 
des  aérostats. 

La  prévoyance  a  été  jusqu'au  point  d'employer  les 
talents  les  plus  distingués  en  mécanique,  les  con-  , 
naissances  les  plus  étendues  dans  l'art  des  tissus» 
pour  faire  fabriquer  à  Lyon  une  étoffe  de  soie  incon- 
nue jusqu'ici,  et  qui  réunit  pour  les  machines  aéro- 
statiques les  conditions  de  légèreté  et  de  solidité 
qu'on  n'aurait  pas  osé  espérer.  Plusieurs  compagnies 

19 


146 


d^aërostiers  ont  été  formëes,des  manœuvresnouvclles 
pour  le  service  régulier  de  ces  nouveaux  instruments 
de  guerre  ont  ëtë  imaginées,  et  la  république  pos- 
sède  en  ce  moment  une  nouvelle  institution  que  déjà 
trente-quatre  ascensions  ontforcé  nos  ennemis  d'ad- 
mirer, sans  qu'ils  aient  encore  pu  l'imiter.  Le  comité 
s'occupe  sans  relâche  des  mesures  nécessaires  pour 
multiplier  ces  instruments,  précurseurs  de  la  vic- 
toire, et  bientôt  toutes  nos  armées  auront  leurs  ton- 
tes,  leurs  agrès,  et  leurs  compagnies  aérostatiques, 
comme  leurs  parcs  d'artillerie.  Les  ateliers  où  Ton 
fabrique  ces  machines  sont  dans  la  plus  grande  acti- 
vité ;  de  jeunes  citoyens,  pris  parmi  les  élèves  de 
rjScole  de  Mars,  sont  instruits  aux  manœuvres  néces- 
sairespour  diriger  Taérostalion  militaire,et  tout  sera 
bientôt  disposé  pour  laire  connaître  aux  ennemis  du 
midi  comme  à  ceux  du  nord  quelle  force  la  liberté 
tire  du  génie  et  des  arts  français. 

Les  plaines  de  Pleurus,  1&  place  de  Manbeugc  ne 
seront  pas  les  seuls  points  de  la  république  où  le 
triomphe  de  la  liberté  devra  quelque  chose  aux  ob- 
iorvations  aériennes.  Ce  beau  travail,  dont  tous  les 
détails  et  les  développements  seront  consignés  dans 
on  ouvrage  particulier,  dû  aux  veilles  de  I  un  de  nus 


gène 

raie  les  immenses  recherches  d*un  des  héros  morts 
pour  la  liberté,  dont  les  grands  talents  égalaient  le 
courage,  et  dont  le  souvenir  excite  les  regrets  de 
tous  les  putriotes..Le  général  Meunier,  mort  en  dé- 
fendant Maycnce,  a  laissé  à  la  république  un  de  ces 
héritages  rares,  puisqu*îl  est  le  fruit  du  génie  et  du 
travàif.  Le  comité,  après  de  longues  recherches,  est 
parvenu  à  se  le  procurer,  et  il  en  a  recueilli  avec 
soin  toutes  les  pièces  éparses,  qui  deviendront  un  des 
matériaux  les  plus  précieux  du  travail  ()ue  je  vous 
annonce.  Ainsi  tous  les  efforts  du  génie,  tous  les 
prodoits  de  Tesprit  humain,  toutes  les  ressources 
des  sciences  et  des  arts  auront  servi  plus  que  jamais 
rhumanité,  puisque  la  défense  de  la  plus  belle  des 
causes  en  a  tiré  tantd*avanlages. 

Fnut-il  vous  parler  encore  de  l'industrieuse  ma- 
chine du  télégraphe  (1),  ce  nouveau  courrier  révo- 
lutionnaire, dont  la  découverte  a  suivi  de  prés  la 
fondation  de  la  république,  et  dont  la  corres])ou- 
dance  avec  le  théâtre  le  plus  actif  de  la  guerre  a 
servi  doublement  à  nous  apporter  les  notivelles  de 
nos  succès  et  à  transmettre  à  nos  frères,  pendant  la 
durée  même  d*une  séance  de  la  Convention,  l'ex- 
pression et  la  reconnaissance  nationale  ?  La  Conven- 
tion, en  applaudissant  à  cette  invention ,  en  a  confié 
l'utilisation  à  son  comité  ;  il  doit  vous  dire  qu'il  n'a 
rien  négligé  pour  multiplier  les  lignes  télégraphi- 
ques, que  des  mesures  sont  prises  pour  la  construc- 
tion des  lunettes  acromatiques  nécessaires  à  ces 
établissements,  et  qu'il  a  porté  ses  soins  ju^^qu'à 
faire  faire  des  expériences  suivies  sur  l'art  de  fabri- 
quer le  ftinl-glais,  espèce  de  composé  vitreux  qui 
n'a  encore  été  que  le  produit  du  hasard,  méuic  chez 
ceux  de  nos  ennemis  qui  ont  su  les  premiers  l'em- 
ployer à  la  construction  des  lunettes.  On  travaille 
sans  relAche,  par  ses  ordres,  à  ta  recherche  des 
moyens  multipliés  qui  sont  indispensables  pour  éta- 
blir les  télégraphes,  et  votre  comité  espère  que  les 
succès  qu'il  a  lieu  d'attendre  des  artistes  employés 
lui  permettront  de  répondre  à  vos  vues. 

Les  besoins  de  la  marine,  qui  doit  devenir  dans  la 
république  française  une  des  plus  formidables  de 

(I)  On  lait  quA  Im  télëgraphei  Tarent  inTentét  &  Paria  par 
Gaade  Châppe,  en  179S.  Un  décret  de  la  Conveniion  natio* 
nale.  du  16  jniUet  179S,  en  ordonna  rétablUiement  lor  le* 
priMifilii  ffMlM  dt  Pranet. 


l'Europe,  et  qui  doit  conquérir,  ponr  tous  les  peu- 
ples en  même  temps  que  pour  elle,  la  liberté  des 
mers,  n'ont  pas  moins  excité  le  zèle  du  comité,  et 
appelé  les  lumières  dont  il  s'est  entouré. 

De  grands  travaux  sont  commencés  sur  toutes  les 
matières  et  les  approvisionnements  nécessaires  à  la 
construction  et  à  l'équipement  de  nombreux  vais- 
seaux. Jusqu'ici  la  France  tirait,  à  grands  frais,  du 
nord  de  l'Europe,  les  bois,  les  chanvres  et  le  gou- 
dron, et  cependant  son  soi,  à  l'aide  d'une  nouvelle 
industrie,  offre  presque  toutes  les  ressources  néces- 
saires h  ce  genre  de  travaux.  Une  nouvelle  activité 
a  été  introduite  dans  tous  les  chantiers  de  construc- 
tion ;  des  recherches  ont  été  ordonnées  pour  substi- 
tuer différents  végétaux  et  même  des  matières  ani- 
males au  chanvre,  pour  la  fabrication  des  cordages. 
Outre  celles  que  le  comité  a  fait  faire  pour  trouver 
le  moyen  de  se  passer  de  goudron,  l'art  d'extraire 
cette  huile  en  quantité  correspondante  à  celle  de 
nos  besoins  a  été  décrit  dans  une  instruction  parti- 
culière, ainsi  que  le  sera  bientôt  celui  de  tirer  parti 
de  tous  les  produits  du  charbon  de  terre  distillé  et  do 
la  tourbe  purifiée. 

Pour  régulariser  et  édoirer  tons  les  arts  qui  con- 
tribuent à  fournir  des  moyens  de  défense  à  la  répu- 
blique, le  comité  a  organisé  dans  l'admiuistration  de 
la  commission  des  armes  une  agence  ou  plutôt  un 
conseil  des  mines,  composé  des  hommes  les  plus 
éclairés  aue  la  république  possède  dans  son  sein,  et 
qui,  par  leurs  travaux  continuels  et  par  les  lumières 
(lu'ils  répandent,  surtout  à  l'aide  des  voyages  et  de 
rinstruction,  commencent  déjù  ù  Taire  connaître  et 
les  richesses  minérales  de  notre  sol  et  les  procédés 
propres  à  nous  en^lir6  jouir  promplemciit  ;  procé- 
dés sans  lesquels  tous  les  eflbrts  que  nous  avons  ex- 
posés jusquici  deviendraient  stériles,  puisque  les 
matières  premières  sur  lesquelles  ils  sont  destinés  â 
faire  agir  notre  industrie  manqueraient  toujours. 

Je  ne  vous  parlerai  point  en  ce  moment  de  l'éta- 
blissement de  Meudon,  dont  il  vous  a  déjà  été 
rendu  un  compte  particulier.  Les  travaux  qui  s'y 
font  ne  doivent  être  connus  que  par  leurs  effets  sur 
nos  ennemis,  et  ce  seront  eux  qui  vous  en  feront 
connaître  la  réussite. 

Les  erls  de  la  guerre  ne  sont  point  les  seuls  qiti 
ont  excité  la  sollicitude  du  comité;  plusieurs  pro- 
ductions utiles  dans  les  usages  domesti(|ues,  et  qui 
contribuent  à  satisfaire  les  besoins  des  citoyens,  ont 
également  fixé  son  attention. 

L'immense  quantité  de  potasse  nécessaire  pour  la 
fabrication  du  salpêtre,  dont  la  récolte  est  devenue 
si  abondante,  a  privé  plusieurs.  mauufactures,etsur- 
tout  celles  de  verrerie,  de  savonnerie,  de  blanchi- 
ment, etc.,  de  cette  matière  dont  elles  faisaient  un 
très-grand  usage  ;  si  la  pressante  nécessite  de  pour- 
voir aux  besoins  de  nos  années  voulait  impérieuse- 
ment qu'on  ravît  aux  arts  de  l'intérieur  ce  qui  aug- 
mentait la  commodité  et  la  jouissance  des  citoyens, 
il  fallait  au  moins  empêcher  que  «;ette  privation  ne 
devînt  totale  ;  il  fallait  substituer  h  la  potasse  une 
matière  qui  pût ,  par  ses  efiets  analogues,  la  rem- 
placer dans  les  manufactures  citées. 

Le  comité  a  trouvé  dans  les  procédés  et  les  ressour- 
ces inépuisables  de  la  chimie  une  matière  propre  à 
diminuer  celle  privation  et  â  naturaliser  en  France 
des  substances  que  son  sol  semblait  lui  refuser,  et 
au'il  était  obligé  de  tirer  à  grands  frais  des  pays 
étrangers. 

Aux  moyensde  multiplier  le  salin  et  la  potasse  par 
l'incinération  des  herbes  et  plantes  inutiles,  que 
vous  avez  adoptés  par  un  décret,  le  comité  a  ajoute 
ceux  de  se  procurer  de  la  soude.  Ce  sel,  qui  sert  si . 
utilement  aux  lessives,  à  la  verrerie,  à  la  leinlurci 


147 


ot  h  une  foule  d*autres  arts  également  recommanda- 
blés,  se  retire,  dans  quelques  plages  maritimes,  de 
la  combustion  et  de  rincinération  d'une  plante  bai- 
gnée par  les  eaux  de  la  mer,  ctque  la  nature  n'a  pas 
jetée  assez  abondamment  sur  les  côtes  de  la  France; 
mais,  en  revanche,  elle  Ta  placée  comme  en  dépôt 
dans  le  sel  qui  charge  l'eau  des  mers,  et  dont  il  fait 
un  des  principes. 

L'art  chimique  n*était  encore  parvenu  que  par 
des  moyens  compliqués  et  coûteux  à  retirer  la  soude 
du  sel  marin  ;  mais  son  industrie,  lille  de  la  néces- 
sité, promettait  des  succès  inattendus  ;  il  a  suffi  de 
la  solliciter  pour  l'obtenir.  Les  chimistes  se  sont 
empressés  à  i'envi  de  déposer  leurs  connaissances  et 
leurs  procédés  particuliers  pour  la  décomposition 
du  sel  marin  et  l'extraction  de  la  soude.  Une  com- 
mission, chargée  de  les  examiner,  a  répété  toutes 
les  expériences  et  toutes  les  manipulations  généreu- 
sement offertes.  Le  rapport  en  a  été  imprimé  et  dis- 
tribué. 

Déjà  plusieurs  manufactures  consacrées  à  cette 
extraction  sont  proposées,  et  bientôt  ces  utiles  labo- 
ratoires verseront  dans  le  commerce  la  soude  qui 
doit  remplacer  les  usages  de  la  potasse,  et  dont  la  pé- 
nurie se  fait  sentir. 

Des  recherches  également  utiles  ont  été  ordonnées 
sur  la  fabrication  du  savon  ;  la  cupidité  et  la  fraude 
qui  se  sont  introduites  dans  la  préparation  cl  la 
vente  de  celte  denrée  seront  bientôt  trompées.  Une 
instruction  étendue  va  être  incessamment  publiée 
sur  cet  art  important,  et  chaque  citoyen  pourra  fa- 
cilement préparf'r  pour  ses  besoins  la  quantité  de 
savon  qui  lui  sera  nécessaire,  ou  reconnaître  au 
moins,  dans  celui  qui  est  mal  fabriqué,  les  défauts 
qu'il  étnit  jusiiu'ici  si  facile  de  lui  cacher. 

Des  objets  qui,  au  premier  coup  d'œil,  paraissent 
très-petits,  deviennent  souvent  d'une  grande  impor- 
tance pour  les  hommes  qui  s'occupent  de  tous  les 
besoins  d'un  grand  peuple;  tel  est  le  cas  d'une  dé- 
couverte légère  en  apparence,  mais  d'une  utilité  non 
moins  réel^  pour  les  arts,  dont  je  vais  vous  entre- 
tenir. On  sait  à  combien  d'usages,  auxquels  lesprt 
de  la  patrie  est  à  tous  moments  intéressé,  le  crayon 
noir,  vulgairement  nommé  mine  de  plomb,  est  con- 
sacré. La  matière  qui  le  forme  n'a  point  encore  été 
trouvée  en  France,  au  moins  dans  le  degré  de  pureté 
et  de  (inesse  qui  la  rendent  précieuse  pour  presque 
tous  les  arts.  L'importation  des  crayonsd'Angleterre 
devient  excessivement  difticile  depuis  plus  de  six 
mois,  et  d'ailleurs  il  est  beau  pour  la  république  de 
trouver  les  moyens  de  se  passer  de  ses  ennemis.  Un 
artiste,  sur  Tinvitation  du  comité,  a  imaginé  de 
composer  une  nouvelle  espèce  de  crayon  avec  le 
carbure  de  fer  de  nos  montagnes  et  quelques  maté- 
riaux communs  auxquels  il  le  mêle  après  l'avoir 
bien  broyé,  et  de  moditier  par  des  procédés  particu- 
liers ce  crayon  artificiel  dans  sa  couleur,  sa  consis- 
tance et  son  grain,  de  manière  à  le  rendre  propre  à 
tons  les  usages  possibles,  et  à  lui  donner  même  à  cet 
égard  une  supériorité  bien  prononcée  sur  le  crayon 
anglais.  Le  comité  a  cru  devoir  encourager  l'auteur 
de  celle  di'couverte,  et  le  mettre  dans  le  cas  de  for- 
mer un  établissement  assez  en  grand  pour  fournir 
promptement  a  tous  nos  besoins. 

L'exposé  de  tout  ce  qui  précède,  l'histoire  des  ef- 
forts constants  qui  ont  été  faits  depuis  dix-huit  mois 
pour  vaincre  par  les  arts  et  les  sciences  tous  les  ob- 
stacles, et  pour  repousser  tous  les  dangers  que  la 
perfidie,  Tignorance,  l'insouciance  et  les  préjugés 
avaient  accumulés  contre  le  salut  du  peuple,  ne  se- 
rait qu'un  récit  infidèle  et  stérile  pour  vous  comme 
pour  la  postérité,  si  Je  passais  sous  silence  les  en- 
traves saos  nombre,  les  difficultés  de  toute  espèce 


que  la  marche  du  gouvernement  ëpronrait  de  toiH 
tes  parts  pour  réaliser  les  espérances  données  par  le 
génie. 

Non,  la  Convention  n'a  jamais  sn  encore,  on  ne 
lui  a  jamais  assez  fortement  dit  ce  qu'a  eodté  d'in- 
croyables travaux,  de  fermeté  et  de  pénibles  efforts, 
l'exécution  de  toutes  les  mesures  nécessaires  pour 
faire  réussir  toutes  les  idées  heureuses,  toutes  les 
conceptions  grandes  dont  je  viens  de  lui  présenter  le 
tableau.  Tout  manquait  à  la  fois  :  hommes,  matières 
et  temps  ;  il  fallait  vaincre  à  chaque  pas  la  résistance 
même  de  la  nature,  l'inertie  de  la  paresse  et  de  l'in- 
souciance, les  obstacles  de  la  malveillance  ;  il  fallait 
faire  sortir  l'abondance  du  sein  de  la  détresse,  et  au 
milieu  de  mille  maux  trouver  sanscesse  le  remède 
convenable.  Il  fallait  que  le  gouvernement  s'organi- 
sât lui-même  peu  à  peu,  qu'il  formât  les  administra- 
tions et  les  agents  qui  devaient  coopérer  à  ses  tra- 
vaux ;  qu'il  essayât  leur  marche,  qu'il  revînt  sans 
cesse  sur  lui-même  pour  se  réformer,  se  régulari- 
ser, s'étendre  et  ne  s'arrêter  enfin  dans,  ses  soins 
constants  aue  lorsqu'il  aurait  obtenu  les  succès 
qu'il  cherchait.  Cette  méthode  d'organisation ,  qui 
seule  peut  faire  marcher  le  gouvernement,  et  dont 
la  régularisation  et  le  complément  ne  peuvent  s'o- 
pérer qu'à  l'aide  du  temps,  de  la  constance  et  de  la 
stabilité  dans  les  principes,  est  la  véritable  et  la 
seule  solution  du  problème  de  l'administration.  Une 
grande  puissance  avait  été  confiée  par  la  Conven- 
tion nationale  au  comité  de  salut  public.  Tonte  la 
force  du  peuple  était  dans  ses  mains,  tous  les  bons 
citovens  répondaient  sur-le-champ  à  ses  désirs  :  les 
méchants  même,  forcés  de  dissimuler,  devenaient 
utiles  à  la  chose  publique  ;  et  tandis  que  des  mon- 
stres cherchaient  àhen  abuser,  en  dirigeant  contre  le 
peuple  lui-même  la  massue  que  le  peuple  leur  avait 
cédée  pour  un  moment,  une  portion  de  ce  pouvoir 
employé  par  des  hommes  aussi  purs  qu'éclairés  a 
sauvé  la  France  en  lui  fournissant  promptement  tout 
ce  qui  l'a  conduite  à  la  victoire. 

Ne  croyez  pas,  législateurs,  que  les  fruits  de  tant 
de  travaux,  de  tant  de  veilles,  que  les  produits  de 
tant  de  découvertes  heureuses  n'aient  servi  la  ré- 
publique que  pour  sa  défense.  On  nevousa  point  dit 
encore  une  vérité  qu'il  est  temps  de  proclamer  à 
cette  tribune  :  c'est  que,  sans  l'impérieuse  nécessfté 
d'armer  les  républieains,  sans  l'indispensable  besoin 
des  hommes  éclairés  dont  le  comité  s'est  entouré, 
et  que  les  conspirateurs,  sans  les  perdre  de  vue, 
avaient  au  moins  respectés  pour  quelque  temps, 

Fiarce  qu'ils  sentaient  l'impossibilité  de  s'en  passer, 
es  sciences,  les  arts,  et  avec  eux  tonte  la  prospérité 
publique,  étaient  perdus  pour  la  France. 

L'atroce  système  des  tyrans  sanguinaires  avait 
commandé  dans  l'affreux  secret  de  leur  conscience, 
et  ordonné  à  leurs  vils  agents  répandus  partout,  la 
destruction  des  monuments  des  sciences  et  des  arts, 
l'incendie  des  bibliothèques  et  des  collections,  la 
proscription  et  le  massacre  des  savants  et  des  artis- 
tes, le  ravage  et  la  déprédation  des  manufactures  ; 
ils  avaient  porté  leurs  abominables  complots  jusque 
sur  le  plus  sacré  des  arts,  l'agriculture;  et  tandis  que, 
pour  en  anéantir  les  produits,  Saint-Just  disait  hau- 
tement qu'il  ferait  guillotiner  celui  qui  convertirait 
un  sillon  de  blé  en  une  culture  nouvelle  ;  tandis 
qu'un  tribunal  cruel,  dont  il  dirigeait  la  main  en- 
sanglantée, envoyait  au  supplice  des  hommes  qui 
avaient  établi  des  prairies  artificielles  ;  tandis  que, 
sous  le  prétexte  de  dessécher  les  marais  inutiles  et 
dangereux  que  voire  décret  avaient  proscrits,  on 
enlevait  par  des  dessèchements  précipités  le  breu- 
vage des  Destianx,  l'arrosement  aes  prairies  et  l'en- 
tretien des  canaux  utiles  au  commerce  ;  tandis  qa'oa 


148 


incarcérait  en  masse  les  laboureurs  dans  les  campa- 
gnes, les  communes  des  villes  où  les  arts,  les  lettres 
et  les  sciences  étaient  cultivées  étaient  asitées  par 
quelques  scélérats  énergumènes  oui  déentraient  et 
brûlaient  les  tableaux,  les  livres,  orisaient  les  ma- 
chines et  les  meubles  précieux,  arrachaient  et  muti- 
laient, sous  les  prétextes  les  plus  insensés,  tous  les 
chcrs-d*œuvre  des  arts,  et  faisaient  renfermer  tous 
ceux  qui  les  aimaient,  les  produisaientou  cherchaient 
à  les  soustraire  à  leur  barbarie. 

Votre  comité  d^instruction  publique,  témoin  de 
tous  ces  malheurs,  pouvait  à  peine  en  arrêter  les  fu- 
nestes progrès.  Il  faisait  avec  soin  enlever  aux  re- 
gards des  vandales  les  monuments  des  arts,  des  let- 
tres vi  des  sciences,  qu'il  réservait  pour  des  temps 
plus  heureux.  Paralysé  dans  ses  efforts,  repoussé, 
calomnié  juscjue  dans  votre  sein,  il  voulait  en  vain 
établir  renseignement  et  faire  jouir,  par  les  décrets 
qu'il  vous  proposait,  le  peuple  de  Tinstruction  qu*il 
réclamait  lui-même  en  vain.  Quelques  membres  de 
ce  comité^  appelés  par  celui  de  salut  oublie  pour 
coopérer  a  la  recherche  des  moyens  de  aéfense  dont 
je  vous  ai  tracé  l'histoire,  sentirent  bientôt  que  leur 
nouveau  travail  avait  des  rapports  immédiats  avec 
Tinstruclion  publique  ;  que  puiser  dans  les  sources 
des  sciences  et  des  arts,  pour  fournir  au  peuple  des 
armes  (}ui  lui  manquaient,  c*était  travailler  en  même 
temps  a  perfectionner  ces  instruments  de  l'esprit 
humain,  et  qu'aupeler  autour  d'eux  tous  les  hom- 
mes instruits,  c'était  les  défendre  de  la  proscription 
dont  ils  étaient  menacés,  et  préparer  en  ukèmt 
temps  des  matériaux  qui  devaient  servir  tôt  oo  tard 
à  l'instruction  des  peuples.  Fortifiés  dans  cette  î4ée 
par  ceux  des  membres  du  comité  de  salut  public  m 
étaient  chargés  de  la  guerre,  des  subsistances  et  «s 
armes,  ils  ne  virent  dans  la  nouvelle  fonctiMM'ils 
remplirent  pendant  quinze  mois  avec  tant^lmNmr» 
et  dans  les  succès  qu'ils  en  espénienl,  4}ii'4»ie  lase 
sur  laquelle  ils  pourraient  tôt  ou  tard  iHy^ntwr  d'é- 
lever un  monument  durable  pour  TwlNhiîtf*  du 
peuple. 

Celte  idée  soutint  leur covrtge^t  WM»  )»«r  ar- 
deur. C'est  pendant  leurs  veiHes  «•'^^li^w  ccst  du 
sein  de  leurs  recherches,  c'«t  4lii«^W*  tutreticns 
qu'ils  avaient  sans  cesse  avec  4«^  ^*w>t&  a  des  ar- 
tistes,  que  furent  conens  t<His  V  t«yie^  «jue  vos 
décrets  ont  sanctionnés  A^fc<^*^^«*«  <!"  ^"^  Ç^^ 
institués  les  premiers  cwirs  «Hvl4*HMiaaires  sur  les 
salpêtres,  la  poudre  el  »«  <«»^  ^"'  vous  con- 
naissez les  succès,  M  <H«  ^  ^l*'*  "^f  «no^JfJ^s  a 
P»?isieurs  autres H^stitf^<^^\^ I^IH^  ^«  '"- 
mières  que  le  netiple  fi^^i^f  V*^  ^l  \^^!'K^^ 
Mars,  ollEcole  SomM^lp^^^ 
vaux  publics  et  les  W»h<MN«^^  Sauté.  La  com- 


véritable  source 
conseils,  les  Inmi^fi^^ 
«•épand  dé|A  >dan?i  "  ' 


^  ^i|i*l|W«iiMM^  nationale,  par  les 

j«^^;^l(iii^v^4M?ouragements  qu'elle 

K^^^^M^J^^^  est  sortie  ciu  sein 

de  cette  rti^ïnk^n.V^^  *  ^^S^'f  ^T-^  ""  *'^^'*' 
^lAïtaJ"  —    ■      licile  et  SI  peu  avancée 


t  mesures  ;  travail  qui 
mment  par  votre  comité 


r  (nés,  qui  tenait  à  pres- 
humaines,  et  qui  en 
.  W  vvw^Ci^U\^ii^'ii  ti''  'T  un  seul  foyer,  est  de- 
„.^^^V<*M^*?^^  mau venu* nt  autour  duquel  Tin- 
^^'^uj^  (É^M^lMt u^  di'vnkt  vuûn  s'organiser  ;  de  ce 
mitlîv<^  ktuw^r4^  de^  scienci'sa  été  portée  dans  tous 
àm  wmknxh  ^  kur  mulUpHcité  a  répandu  l'instruction 
'   aXV'S  h'î*  classer*  ;  des  matériaux  immenses  ont 


I^IaV'^^^'*  h^^^<'  tDUlri  les  parties  de  Tinstruction 
l^îîùl^uitS  tft  ce  grand  et  beau^mouvemeuty  qui  est 


susceptible  d'une  accélération  si  rapide,  8*e8t  com< 
muniqué,  après  la  chute  des  tyrans,  avec  une  acti- 
vité telle  qu'il  nous  a  enfin  été  possible  de  jeter  les 
fondements  immortels  de  l'instruction  du  peuple 
français. 

Ainsi,  comme  dans  le  système  du  monde  tout  dé- 
pend de  la  seule  force  de  l'attraction,  dans  votre 
système  politique  tout  a  été  lié  à  une  seule  cause,  à 
la  défense  de  la  patrie.  C'est  vers  ce  point  que  tous 
les  esprits  ont  été  entraînés  depuis  deux  ans,  et 
c'est  ae  ce  point  nue  la  vie  du  corps  politique,  fondé 
sur  le  juste  emploi  des  connaissances  humaines,  a 
reçu  son  impérissable  énergie. 

Le  comité  de  salut  public  m'a  autorisé  à  vous  pré- 
senter ce  tableau  de  son  intérieur,  afin  que  vous 
connussiez  la  source  où  il  a  puisé  une  portion  glo- 
rieuse.de  ses  travaux  ;•  c'est  par  une  suite  immédiate 
des  recherches  savantes  ijm  ont  été  faites  dans  son 
sein,  que  l'art  dont  je  va»  maintenant  vous  entre- 
tenir a  été  découvert  ;  il  tient  de  près  à  un  genre  de 
connaissances  dont  Tapplication  a  tant  aidé  votre 
comité  dans  sa  marche  ;  il  dépend  des  mêmes  idées: 
il  était  appelé  par  un  même  besoin,  et  il  promet  un 
égal  succès.  {La  suite  demain.) 


SUIT!    A  LA  SBAIfCB  DU   17  NIVOSE. 

Gossnin  piésente  ensuite  on  projet  de  décret  qui 
est  ado^  en  ces  termes  : 

t  La  OMvraUoB  itttiooale«  après  avoir  entenda  le  rap- 
ptrtée  soa  coailé  militaire,  considérant  que  la  gendar* 
aMrit  près  Ici  tribunaux  et  les  maisons  de  daenlion  ne 
pc»l  safireaa  senrice  pénible  dont  elle  est  cbai^ée;  que 
b  sâfeté  publique  exige  qu*eUe  soit  augmentée  et  féorga« 
niiée  convenableasent»  décrète  : 

TiTia  !•% 

Qmtp^tiom  et  /brmafûm. 

t  Art.  !**•  La  gendarmerie  près  les  tribunaux  et  à  la 
garde  des  nuisons  de  délenlion  du  département  de  Paris 
sera  portée  à  sept  cent  trente-six  hommes ,  savoir  : 

•  Un  commandant  en  chef,  un  adjudant-major,  un 
quartier- mattre-trésorier,  cinq  capitaines,  cinq  tietueiiants 
dix  soos-lieutenaiits,  un  oflicier  de  santé ,  dt*ux  adjudants- 
sous-officiers,  cinq  maréchaux  des  logis  en  cbef,  vingt 
maréchaux  des  logis,  quatre-vingts  brigadiers,  six  cents 
gendarmes,  cinq  tambours. 

«  II.  Ce  corps  sera  divisé  en  cinq  compagnies, 

•  111.  Chaque  compagnie  sera  composée  ainsi  qu'il 
suit: 

•  Un  capitaine,  on  lieutenant,  deux  sous-lieutenants, 
un  maréchal  des  logis  en  chef,  quatre  maréchaux  des 
logis,  seize  brigadiers,  cent  vingt  gendarmes,  un  tambour. 
Total,  cent  quarante-six  hommes. 

•  IV.  La  force  armée  connue  sous  le  nom  de  garde  de 
Bîcétre  et  de  la  Sulpétrière  est  supprimée  ;  elle  sera  incor- 
porée sans  délai  dans  la  gendarmerie  près  les  tribunaux. 
Les  citoyens  qui  en  faisaient  partie  se  feront  incrire  à  la 
commission  de  Torganisalion  et  du  mouvement  des  ar- 
mées. 

«  V.  Les  sous-officiers  qui  sauront  lire  et  écrire  seront 
admis  aux  places  de  brigadiers  et  de  maréchaux  des  logis. 

«  VI.  Les  officiers  de  cette  garde  supprimée  conserve- 
ront leurs  rangs  dans  la  gendarmerie  près  les  tribunaux. 

•  VII.  Ceux  des  officiers,  sous-officiers  et  gardes  de  Bi- 
cétre  ou  gendarmes  près  les  tribunaux,  que  leurs  infirmités 
ou  leur  âge  empêcheront  de  continuer  un  service  actif  re- 
cevront leur  retraite  conformément  aux  lois.  • 

TlTBB  II. 
Adminion^  rang  et  aoaneewunt. 

•  Art  I*'.  Les  places  d'officiers  et  sous-officiers  qui  se 
trouveront  vacantes  dans  la  gendarmerie  seront  remplacées 
sur-le-champ,  et  données  de  préférence  aux  officiers  et 
sous-officiers  adjoints  des  divisions  de  gendarmerie  à  pied, 
amalgamées  par  la  loi  du  22  prairial. 


149 


«  II.  A  Ta? enir,  il  ne  fera  reçu  aacub  gendarme  près  les 
Iribunaux  qui  n*ait  fingt-cinq  ans  accomplis,  qui  n*ait  un 
certiflcal  de  civisme*  et  qui  ne  sacJie  lire  et  écrire,  qui 
o*aii  fait  un  senrice  actif  et  non  interrompu  dans  la  garde 
nationale  depuis  le  commencement  delà  révolution,  ou 
un  service  sans  reproche  dans  un  régiment  pendant  le  laps 
de  quatre  ans,  sans  qu'il  puisse  y  avoir  plus  de  trois  ans 
crintenralle  depuis  la  date  de  son  congé. 

«  Les  militaires  blessés  honorablement  à  la  guerre  ne 
lOnt  point  assujettis  aux  conditions  ci-dessus;  lisseront 
reçus  de  préférence  s'ils  sont  Jugés,  par  la  commission 
de  santé,  être  encore  en  état  de  servir.  Il  en  sera  de  même 
des  gendarmes  excédant  le  complet  des  divisions  à  pied 
amalgamées  par  la  loi  du  22  prairial. 

•  Nul  n*j  sera  admis  s'il  n*a  la  taille  de  cinq  pieds  trois 
pouces  au  moins. 

•  III.  Il  sera  ouvert  un  registre  d'inscription  à  la  com- 
mission de  Torganisaiion  et  du  mouvement  des  armées  de 
terre,  pour  tous  les  citoyens  qui,  réunissant  les  conditions 
ci-dessus  prescrites,  désireront  entrer  dans  ladite  gendar- 
merie. Les  places  de  gendarme  seront  à  la  nomination  du 
comité  de  salut  public,  sur  la  présentation  de  ladite  com- 
mission. 

t  IV.  La  gendarmerie  près  les  tribunaux  continuera  à 
rouler  sur  elle-même  pour  son  avancement.  Les  lettres  de 
passe  sont  supprimées:  il  ne  pourra  plus  en  être  délivré 
sous  aucun  prétexte,  soit  pour  passer  de  ce  corps  dans  un 
autre,  soit  pour  j  être  admis. 

•  V.  Lorsqu'il  vaquera  une  place  de  brigadier,  chaque 
gendarme  de  la  compagnie  dans  laquelle  l'emploi  sera  va- 
cant inscrira,  sur  un  billet  particulier,  signé  de  lui,  le 
nom  de  trois  de  ses  frères  d'armes  de  ladite  compagnie;  ce 
scruiin  sera  remis  cacheté  au  capitaine,  qui  en  fera  le  dé- 
pouillement en  présence  des  autres  officiers  de  la  compa- 
gnie et  du  coniicil  d'administration ,  qui  nommeront  con- 
curremment à  l'emploi  vacant  parmi  les  trois  gendarmes 
réunissant  le  plus  de  suffrages. 

«  VI.  Pour  remplir  une  place  de  maréchal  des  logis» 
tous  les  maréchaux  des  logis  du  corps  proposeront  cinq  bri- 
gadiers,  dont  les  noms  seront  remis  au  commandant,  qui, 
concurremment  avec  tous  les  officiers,  nommera  sur  cette 
liste  à  remploi  vacant. 

•  VII.  Les  places  vacantes  de  sous-lipotenants  seront 
données  aux  adjudants-sous-officiers  et  aux  maréchaux  des 
logis  par  l'ancienneté  du  grade  ou  par  le  choix  :  Tancien- 
Deté  aura  le  premier  tour. 

«  VIII.  Lorsqu*il  s'agira  de  donner,  par  le  choix,  une 
place  de  sous-lieutenant,  tous  les  maréchaux  des  logis  réu- 
nis nommeront  huit  maréchaux  des  logis  ayant  un  an 
d*exercioe  révolu  dans  ce  grade  ;  les  officiers  réduiront 
cette  liste  à  trois  «  et  le  comité  de  salut  public  eu  nom- 
mera un. 

•  IX.  Les  lieutenants  de  la  gendarmerie  près  les  tribu- 
naux et  de  la  garde  supprimée  de  Bicétre  et  de  la  Salpè- 
trière,  qui,  par  le  présent  décret,  deviendraient  sous- 
Ueutenants,  conserveront  leur  rang  et  les  appointements 
de  lieutenant. 

•  X  Les  sous-lieutenants  et  lieutenants  parviendront , 
par  leur  tour  d'andenneté,  aux  grades  de  lieutenant  et  de 
capitaine. 

•  XI.  L'adjudant-major,  pris  parmi  les  lieutenants  in- 
distinctement, sera  nommé  par  tous  les  officiers  réunis  et 
le  conseil  d'administration. 

•  XII.  La  nomination  du  quartier-maltretrésorier  se 
fera  par  le  conseil  d'administration. 

•  XIII;  Les  adjudants-sous-officiers  seront-pris  parmi  les 
maréchaux  des  logis  et  nommés  par  le  commandant,  deux 
capitaines,  trois  lieutenants,  trois  sous-lieutenants  etneui 
inaréchaul  des  logis  réunis,  tous  les  plus  anciens  de  com- 
utission,  ou  d'Age  pour  ceux  qui  auront  le  même  temps  de 
lerviee. 

•  XIV.  Toutes  ees  nominations  auront  lieu  par  la  voie 
du  scrutin,  et  à  la  majorité  absolue  des  suffrages. 

«  XV.  Il  sera  fait  autant  de  scrutins  particuliers  qu*il  y 
aura  de  candidats  à  proposer  ou  à  nommer. 

•  XVI.  Le  commandant  en  dief  de  la  gendarmerie  près 
les  tribunaux  sera  nommé  par  la  Convention  nationale , 
>nr  la  présentation  du  comité  de  salut  public 

•  XVll.  La  loi  da  %  ibcrmidori  rehitive  au  mode  de 


nomination,  est  applicable  k  la  gendarmerie  près  les  tri- 
bunaux. 

•  XVIII.  La  moitié  des  places  de  maréchaux  des  logfs 
et  brigadiers  sera  donnée»  pour  cette  première  fois  seule- 
ment, à  d'anciens  militaires,  au  choix  du  comité  de  salut 
public  ;  l'autre  moitié  sera  prise  parmi  les  brigadiers  el 
gendarmes  actuellement  en  activité  de  service  près  les  tri- 
bunaux, et  parmi  les  citoyens  composant  la  force  armcc 
pris  les  maisons  de  Bicétre  et  de  la  Salpétrière.  Ces  nomi- 
nations auront  lieu  dans  la  forme  ci-dessus  prescrite. 

•  XIX.  Le  commandant  en  chef,  l'adjudant-major,  le 
quartier-maître  auront  le  rang,  savoir  :  le  premier,  de 
chef  de  bataillon  ;.le  second,  de  capitaine  ;  et  le  troisième, 

j  de  lieutenant. 

I       «  XX.  Les  adjudants  sous-officiers  auront  le  rang  de 

*j   sous-lieutenant. 

•  XXI.  L'adjudant-major,  les  adjudants-sou;-officiers 
I  et  le  quarlier-maiire  ont  le  droit  de  prendre,  à  leur  tour , 

;  les  places  ou  grades  correspondants  qui  viendront  &  vaquer 
•   dans  les  compagnie». 

!       «  XXII.  Il  sera  attaché  à  la  gendarmerie  près  les  tribu- 
naux un  secrétaire-greffier,  &  la  nomination  du  comman- 
I  dant  en  chef. 

•  XXIII.  La  place  de  commis-greffier,  créée  par  la  loi 
du  28  juillet  4791  (vieux  style),  est  supprimée. 

f  XXIV.  L'officier  de  santé  sera  choisi  par  le  conseil 
d'administration,  sur  la  présentation  d*un  acte  d'examen 

I  et  de  capacité  signé  de  la  commission  de  santé. 

!  «  XXV.  Les  maréchaux  des  logis  en  chef  seront  pris 
parmi  les  maréchaux  des  logis,  et  nommés  par  tous  les  of- 
ficiers indistinctement.  Ils  st^ront  chargés  des  détails  du 
service  de  distribution  et  de  comptabilité  de  leurs  com- 
pagnies respectives  ;  le  plus  ancien  de  grade  fera  les  fonc« 
tioiis  de  porte-drapeau. 

•  XXVI.  Le  tambour  le  pins  ancien  de  service  aura  le  , 
grade  de  tambour-brigadier.  • 

TITRE  III. 

Ordre  intérieur* 

«  Art  !**.  Les  lettres  de  service  des  officiers,  80u«-oflD- 
ciers  el  gendarmes  seront  délivrées  par  la  commission  de 
l'organisation  et  du  mouvement  des  armées  de  terre. 

«II.  Le  commandant  en  chef  prêtera  serment,  devant  le 
comité  militaire,  de  s'employer,  suivant  la  loi,  en  bon  ré- 
publicain et  brave  militaire,  à  tout  ce  qui  peut  intéresser 
la  sûreté  et  la  tranquillité  publiques. 

«  m.  Le  plus  ancien  des  capitaines  de  la  division  le  fera 
ensuite  reconnaître  successivement  à  la  tète  des  compa-. 
gnies,  en  présence  d'un  commissaire  des  guerres. 

«  IV.  Le  commandant  recevra  le  même  serment  de  tous 
les  officiers  et  sous-officiers  de  la  division,  en  présence  et 
dans  le  lieu  des  séances  du  conseil  d'administration ,  qui 
tiendra  à  cet  effet  un  registre  particulier. 

«  V.  Le  gendarme  prêtera  le  serment  entre  les  mains  du 
commandant,  en  présence  du  capitaine  de  la  compagnie 
dont  il  devra  faire  partie  ;  il  en  sera  fait  mention  au  bas 
de  sa  commission. 

«  VI.  Toutes  les  commissions  et  prestations  de  serment 
seront  enregistrées  dans  le  secrétariat  du  corps. 

•  VII.  Le  conseil  de  discipline  sera  établi  d'aprcs  le  titre 
II  de  la  loi  du  S  pluviôse,  relative  &  l'organisation  de  la 
justice  militaire. 

«  VIII.  Le  conseil  d'administration  sera  établi  confor- 
mément aux  dispositions  de  la  loi  du  20  ventôse  dernier. 

«  iX.  Le  quartier- maître  sera  chargé  de  tous  les  détails 
de  comptabilité  et  de  distribution ,  sous  l'autorité  du  con- 
seil d'administration  et  du  commandant  en  chef,  auprj-s 
duquel  il  sera  tenu  de  résider,  ainsi  que  les  adjudants  et 
le  serrétaire-greffier. 

•  X.  Les  officiers ,  sous-officiers  et  gendarmes  conser-  . 
veroni  l'uniforme  dont  ils  ont  fait  usage  jusqu'ùn résent, 
à  l'exception  du  chapeau  bordé,  qui  sera  remplacé  par 
un  chapeau  uni ,  avec  ganses  blanches  et  houpe  tricolore. 

«  XI.  Il  sera  passé,  tous  les  deux  mois,  une  revue  du 
commissaire  des  guerres,  lequel  assistera  •« oooseil  d'ad* 
ministration  le  plus  souvent  possible. 

«  XII.  Les  officiers,  sous-officiers  et  gendarmes  seront 
tenus  de  faire  leur  service  en  personne,  soos  peine  de  des» 
titotion,  à  moins  que  des  raisons  très-légitimes ,  et  con« 


160 


sUtécs  telles  par  le  conseil  d*administratloDt  ne  les  eu 
empûclient. 

•  XIII.  Les  compagnies  alterneront  régulièrement  pour 
leur  srrfice,  le  premier  jour  de  chaque  mo*s. 

•  XIV,  Les  conseils  de  discipline  et  d*administralion 
réunis  présenteront  inces.^animent  au  comité  miliiaire, 
pour  être  approuvé  par  lui,  un  règlement  sur  Tordre  et  les 
détails  du  senricc  de  cette  gendarmerie. 

TITRE  IV. 

Solde  et  traitement, 

t  Art.  I*'.  A  compter  du  !•'  nîvose  présent  mois,  la 
solde  des  officiels,  sous-ofljcicrs  cl  gendai mes  demeurera 
fixéi!  ainsi  qiril  suit ,  savoir  : 

•  Au  commandunt  en  chef.  •  •  • 8,000  L 

«  A  cbuque  capitaine 3,600 

•  A  chaque  lieutenant 3,500 

•  A  chaque  sous-lie uteuant* 2,200 


•  A  l'adjiidnnt-inajor.  . 


8,800 


c  Au  quartier 'maître.  •  •  • 2,500 

•  Aux  adjudants-sous-oOiciers 2,000 

<  A  chaque  maréchal  des  logis. 1,600 

«  A  chaque  brigadier.  •  .  •  •  • .^    4,^00 

•  A  rhaque  gendarme  et  tambour 4,150 

«  A  ToOicicr  de  santé. 8,000 

«  Au  secrétaire-greffier. 4,500 

«  Les  Trais  de  bureau  da  commandant  en  chef  seront 
remboursés  tous  les  trois  mois  sur  les  états  certifiés,  or- 
donnances par  un  commissaire  des  guerres,  et  appuyés  de 
quiltauces  et  pièces  jiiftificatives. 

•  Ils  lie  pourront,  dans  aucun  cas,  excéder  i50  Ut.  par 
trimestre. 

•  II.  Le  casernement  (Jes  sous-officiers  et  gendarmes 
sera  fourni  en  nature,  à  proximité  des  principales  maisons 
d*arrOt,  conformément  ù  la  loi  du  12  octobre  1791  (  vieux 
style),  par  le  directoire  du  déparlement  de  Paris. 

«  III.  Les  officiers  seront  logés  dans  une  des  maisons 
nationales  adjacentes  au  Palais-de-Justice  ;  néanmoins  il  y 
aura  en  loui  temps,  à  pobte  fixe,  un  officier  de  cbaqve 
compagnie  aux  diflérenles  casernes. 

«  IV.  Les  sous-officiers  et  gendarmes  seront  habillés  et 
équqiésaux  frab  de  la  république,  pour  cette  première 
fois  seulement,  suivant  le  mode  prescrit  par  les  lois  ren- 
dues  à  cet  égard  pour  les  troupes  de  la  république. 

•  V,  LMndemnité  de  8  livres  par  mois  el  la  masse  de  82 
livres,  qui  étaient  accordées  à  chaque  sous-officier  et  gen- 
darme, pour  leur  tenir  lieu  de  casernement  el  servir  à  Ten- 
trellen  de  rhabillement,  cesseront  d*étre  payées  k  compter 
du  1*'  nivôse. 

«VI.  La  loi  du  SI  pluviôse,  relatife  au  payement  des 
secours  accorda  aux  défenseurs  de  la  patrie,  est  applica- 
ble à  la  gendarmerie  près  les  tribunaux. 

•  VII.  11  sera  fourni  deux  rations  de  fourrages  au  com- 
mandant en  chef,  et  une  ration  k  Tadjudant-major  s  la 
délivrance  n'en  sera  faite  que  pour  les  clievaux  effectifs, 
sous  les  peines  portées  par  rjfrticle  IX  du  titre  V  de  la  lot 
du  2  thermidor. 

t  VllI.  Les  différentes  lois  sur  la  gendarmerie  seront 
exécutées  dans  toutes  les  autres  dispositions  qui  n'auront 
pas  été  abrogées  ou  modifiées  par  la  présente. 

•  IX.  L'exécution  en  est  spécialement  confiée  aux  soins 
de  la  commission  de  Torganisalion  et  du  mouvement  des 
armées  de  terre.  • 

BoissY  d'Anglas,  au  nom  des  comitësde  salut  pu- 
blic, de  commerce  el  d'approvisionnements:  Vous 
uvezdc^jàsenli,  citoyens,  qu'un  des  pltisgrands  vices 
dans  notre  gouvernement  actuel  est  la  mulliplicitë 
de  ses  ressorts  et  Timmensité  des  moyens  qui  doi- 
vent m  ouërer  l'action. 

Dans  I  organisation  politique ,  en  effet ,  tout  ce 
oui  n*est  pas  nécessaire  est  désastreux;  la  résistance 
raccroU  par  le  frottement,  et  le  plus  petit  roungc 
sans  objet  ralentit  la  marche  d'une  machine  qui  tie 
saurait  être  trop  rapide.  Le  moindre  mal  est  l'ac- 
crbliMtrtfiit  d*une  dépense  qui  n*a  pas  d'utilité,  sa 
divroportion  avec  les  ressources  nationales,  et  con- 


séquemment  une  source  plus  ou  moins  éloiguëe  de 
discrédit  et  de  dénûment. 

Vous  êtes  environnés  d'abus,  et  nul  de  tous  n*en 
peut  apercevoir  l'ensemble.  Ils  se  multiplient  à  vo- 
tre insu  avec  une  rapidité  inconcevable,  et,  pendant 
qu'une  des  parties  de  l'administration  attire  vos  re- 
gards, Tautre  devient  la  conquête  de  l'ignorance  et 
de  la  eu  pin  i  té.  On  échappe  aisément ,  sans  doute,  à 
une  surveillance  qui  est  divisée,  qui  du  moins  n'a 
pas  de  centre  commun.  Mais  en  redoublant  celte 
surveillance,  mais  en  organisant  toutes  les  parties 
du  gouvernement  d'une  manière  simple  etunifocme, 
l'œil  le  moins  exercé  peut  tout  apercevoir,  la  raison 
la  moins  étendue  tout  saisir  et  tout  apprécier. 

Les  abus  sont  portés  à  un  excès  véritablement 
effrayant.  Partout  la  dilapidation  la  pluselfrénée 
menace  d'engloutir  vos  ressources;  partout  et  l'i- 
gnorance ci  la  corruption  se  disputent  vos  immenses 
richesses. 

Aucune  des  parties  de  votre  administration  ne 
correspond  avec  les  autres.  Ici  des  commissions 
agissent  tantôt  d'une  manière  indépendante,  tantôt 
sous  la  direction  d*uu  comité,  tanlôt  sous  celle  de 
plusieurs,  dont  la  compétence  à  cet  égard  n'est  pas 
même  délinitivement  réglée  :  là  des  agences  se  dis- 
putent des  attributions  qu'elles  ne  réclament  que 
pour  les  livrer  ù  l'inexpérience  inhabile  de  quelques 
jeunes  gens  sans  instruction;  ailleurs  des  bureaux 
sans  travail,  des  commis  sans  occupation;  partout 
des  salaires  sans  nécessité,  ou  quelques  employés 
sans  intelligence  ;  dix  mille  employés  peut-être 
dans  cette  seule  commune,  dont  la  fonction  la  plus 
habituelle  et  la  pllns  exactement  remplie  est  d'ob- 

,  stnier,  à  une  certaine  heure,  les  rues  d'un  de  ses 

'  quartiers,  de  porter  un  luxe  effrayant  dans  les  lieux 
publics  et  dans  les  spectacles ,  et  d*aller  applaudir 

;  au  théâtre  à  toutes  les  maximes  contre-ré volution- 

1  naires  que  le  royalisme  j  fait  débiter. 

I      Si  Pitt  a  pu  concevoir  l'idée  de  vous  faire  une 

guerre  à  mort,  c'est  quant  il  a  pu  réaliser  celle 
'établir  un  pareil  système.  Votre  danger  n'est  pas 
aux  frontières,  il  est  au  milieu  de  vous.  Vos  ennemis 
les  plus  actifs  ne  sont  pas  ces  armées  à  demi  dé- 
faites qui  fuient  devant  les  vôtres,  mais  cette  nuée 
de  vampires  qui  nous  dévorent.  C*est  en  mainte- 
nant avec  des  frais  énormes  un  gouvernement  qui 
ne  peut  marcher,  que  l'on  opérera  la  contre- ré- 
volution. De  pareils  désordres  sont  intolérables; 
leur  résultat  est  tous  les  vices;  leur  produit  infailli- 
ble serait  l'anéantissement  de  la  république;  c'est 
par  eux  que  notre  crédit  s'est  perdu,  que  nos  mœurs 
se  sont  dépravées,  que  la  franchisse  et  la  bonne  foi, 
que  les  vertus  privées  et  moiales,  que  la  frugalité, 

3ue  l'économie ,  aiie  le  sentiment  ûes  affections 
onces  ont  paru  céder  la  place  au  désir  effréné  des 
richesses,  au  besoin  du  luxe  et  des  faux  plaisirs,  à 
une  dépense  désordonnée. 

On  dira  qu*il  est  imprudent  de  dévoiler  ioutcs 
nos  plaies,  que  c'est  accroître  notre  discrédit  en 
préparant  à  nos  ennemis  des  consolations  et  des 
ressources.  On  aura  tort,  car  nos  ennemis  connais- 
sent mieux  que  nous  nos  maux;  ils  embrassent  dans 
tous  leurs  détails  les  désordres  dont  je  vous  entre- 
tiens, parce  que  ce  sont  eux  qui  les  ont  produits; 
vous  ne  leur  apprendrez  rien  à  cet  égard,  car  ils  sa- 
vent mieux  que  vous  ce  que  vous  souffrez;  et  ils  se- 
raient à  vos  pieds  pour  vous  demander  la  paix,  s'ils 
ne  comptaient  sur  les  abus  avec  lesquels  ils  espè- 
rent vous  ruiner. 

11. faut  donc  tout  dire;  car,  si  vous  voulez  guérir 
vos  maux,  il  faut  bien  otie  vous  sondiez  la  prol'un- 
deur  de  vos  blessures.  D'ailleurs ,  telle  est  votre 
puissance,  qu'un  mol  de  tous  peHl  tout  réparer  ; 


lit 


telle  est  la  confiance  qu*inspirent  des  hommes  de 
bien,  (ju'on  leurticnl  compte  des  premiers  efforts 
qtrils  lont  pour  le  produire,  et  que  tout  semble  cor- 
nejé  dûs  qu'ils  le  veulent. 

Se  croyez  pas  toutefois  que  tout  ce  que  je  vous  dis 
lu  soit  des  reproches  que  je  vous  adresse.  Non,  non, 
vous  n'éles  piont  lesautcurs  des  maux  dont  vous  gé- 
missez; vous  pouvez  les  envisager  sans  honte  ;  vous 
pouvez  en  saisir  l'ensemble  sans  aucun  remords.  Ils 
sont  lu  suite  inévitable  de  Taffreux  système  auc  vous 
avez  détruit.  Celui  qui  voulait  tout  envanir  avait 
besoin  de  vous  accabler  sous  le  poids  des  plus 
monstrueux  abus,  il  avait  besoin  de  complices  qui 
pussent  conspirer  avec  lui,  et  le  prix  de  leur  com- 
plaisance devait  être  la  ruine  du  peuple. 

Citoyens,  vous  avez  détruit  la  tyranie  au  9  ther- 
midor, délruisez-eu  toutes  les  conséquences,  il  ne 
sullit  pas  de  changer  les  bases  d'.un  mauvais  sys- 
tème, il  faut  en  changer  tous  les  résultats,  "fout  est 
donc  à  faire  encoje  dans  votre  organisation  politi- 
que; tout  est  donc  à  renouveler  dans  votre  admi- 
nistration intérieure ,  parce  qu*il  faut  que  tout  y 
corresponde  avec  les  principes  que  vous  venez  de 
consacrer,  parce  qu*il  laut  que  tout  y  soit  en  rap- 
port avec  rhumanité  et  la  justice  que  vous  avez 
réellement  rappelées  au  milieu  de  vous,  parce  qu'il 
faut  que  la  raison  seule,  que  le  respect  des  proprié- 
tés et  des  personnes,  que  Tordre  et  que  Téconomic 
s'y  fassent  reconnaître  à  chaque  pas.  Vous  avez  senti 
ce  besoin  quand  vous  avez  cnargé  une  commission 
formée  par  vos  difl'érenls  comités  d'examiner  s'il 
fallait  ou  non  des  commissions  executives.  Je  ne 
devancerai  pas  son  travail.  C'est  à  elle  qu'il  appar- 
tient déjuger  si  la  Convention  nationale  ne  doit 
pas  tout  administrer  elle-même;  s'il  faut  des  inter- 
médiaires entre  les  employés  qoi  travaillent  et  les 
comités  qui  les  duigent;  s*il  est  utile  de  laisser 
subsister  cette  double  bureaucratie  des  comités  et 
des  commissions  ;  si  ce  n'est  pas  par  un  abus  des 
mots  qu'on  parle  de  la  responsabilité  i\ts  commis- 
saires, tandis  qu'il  est  de  fait  que  les  commissaires, 
revêtus  d'une  responsabilité  illusoire,  savent  rejeter 
sur  les  comités,  en  provoquant  dans  toutes  les  cir- 
constances leurs  décisions  préalables,  jusqu'aux  plus 
petites  suites  d'une  injustice  et  d'une  erreur,  et  con- 
server pour  eux  seuls  toutes  les  jouissances  d'un 
pouvoir  qui  ne  les  soumet  à  aucun  danger. 

Ce  n'est  pas  l'objet  que  je  traite  :  je  viens,  quelle 
(jiie  soit  voir»*  detrrminalion  à  ce  sujet,  vous  pré- 
senter des  reformes  iudispensablesetquinesauraicnt 
être  trop  inslanles;  Je  viens  vous  soumettre  l'orga- 
nisation épurée  de  1  une  iks  parties  de  votre  admi- 
nistration, mais  tellement  simplifiée  que,  quel  que 
soit  le  système  que  vous  adoptiez  par  la  suite,  elle 
pourra  s  y  adapter  et  y  devenir  essentielle. 

Je  viens  vous  entretenir  en  ce  moment  de  la  com- 
mission de  commerce  et  approvisionnements  de  la 
république. 

Elle  était  créée  dans  le  même  esprit  que  celui  qui 
dirigea  toutes  les  combinaisons  des  triumvirs  que 
vous  avez  frappés;  son  objet  était  de  concentrer  dans 
une  même  main  tout  le  commerce  de  la  nation,  de 
remettre  à  quelques  individus  choisis  par  la  tyrannie 
elle-même  le  soin  de  nourrir,  à  un  taux  déterminé 
d'avance,  tous  les  citoyens  de  la  république.  Ce  plan 
n'était  que  le  premier  degré  du  système  qu'on  vou- 
lait établir. 

On  voulait  faire  de  la  France  une  corporation  de 
moines.  Le  gouvernement  aurait  tout  dirigé,  tout 
déterminé;  il  aurait  été  le  seul  commerçant, le  seul 
agriculteur,  le  seul  manufacturier;  il  aurait  fixé  tous 
les  jours  le  prix  du  travail  de  chacun,  assigné  sa 
tâche  et  son  salaire.  Aiosi,  concentrant  toutes  tes 


richesses,  dirigeant  tous  les  travaux,  il  anmit  tcna 
tout  dans  sa  main  et  exercé  une  tyrannie  absolu- 
ment inconnue  sur  la  terre.  C'était  a  ce  plan  que 
s'adaptaient  l'anéantissement  de  toutes  les  fortunes 
par  l'assassinat  de  tous  les  honimes  riches;  le  ren- 
versement de  toutes  les  villes  de  commerce,  de  tous 
les  ateliers,  de  tous  les  comptoirs;  la  destruction 
complète  de  l'industrie;  l'envahissement  de  toutes 
les  prospérités,  et  cette  disette  factice  que  vous  avez 
tant  de  peine  à  combattre  encore  aujourd'hui. 

Ce  projet,  sans  doute,  était  inexécutable;  mais  ce 
n'en  était  pas  moins  celui  de  Robespiere, à  l'ambi- 
lion  atroce  du(|uel  une  tyrannie  simple  ne  pouvait 
sullire.  La  commission  de  commerce  devait  être, 
sans  le  savoir,  l'un  de  ses  agents,  et  ce  n'était  mal* 
heureusement  pas  le  seul.  Quoi  qu'il  en  soit,  la 
suppression  du  maximum  et  des  réquisitions  forcées, 
les  abus  qui  ont  accompagné  sa  marche,  et  qui  ne 
peuvent  subsister  plus  longtemps,  vous  comman- 
dent impérieusement  d'en  simplifier  l'organisation 
et  de  lui  donner  une  direction  plus  utile.  Ce  n'est 
plus  pour  aider  à  asservir  la  France,  ce  n'est  plus 
pour  faire  un  commerce  exclusif  que  vous  la  laisse- 
rez subsister.  Vous  avez  proscrit  d'avance  un  aussi 
détestable  système,*  et  les  décrets  que  vous  avez 
rendus  depuis  quelque  jours  ont  déjà  détruit,  par  lé 
fait,  un  ordre  de  choses  aussi  absurde. 

Vous  avez  quatorze  armées  de  terre  à  alimenter, 
une  marine  à  soutenir,  Paris  et  quelques  départe- 
ments à  approvisionner,  des  troupes  à  habiller  et  à 
équiper,  des  transports  de  denrées  à  effectuer.  11 
vous  faut  donc  une  administration  active,  simple  et 
rapide,  qui  puisse  remplir  à  cet  égard  les  vues  de 
votre  gouvernemenL  Celle  qui  existe  ne  le  peut  pas, 
tant  elle  est  compliquée  et  mal  ordonnée;  elle  est 
divisée  en  huit  age4ices  dirigées  parciiiq  commissai- 
res, et  divisées  elles-mêmes  en  plus  ou  moins  de 
sections.  Il  suffît  d'en  indiquer  les  titres  pour  faire 
voir  combien  est  confuse  et  peut  méthodique  une 
pareille  subdivision  : 

L'agence  des  subsistances  générales,  subdivisée 
en  trois  sections; 

Des  subsistances  militaires,  subdivisée  en  cinq 
sections; 

Du  commerce  extérieur,  subdivisée  en  quatre 
sections; 

Des  matières  générales,  subdivisée  en  cinq  sec- 
tions; 

De  l'habillement,  équipement  et  casernement, 
subdivisée  en  six  sections; 

Du  commerce  extérieur  et  du  maximum; 

Des  subsistances  de  Paris  et  des  départements; 

De  la  comptabilité  générale. 

Chacune  de  ces  agences /orme  ^ne  espèce  de 
sous-ministère.  Elles  agissent  séparément;  des  chefs 
et  des  sous-ordres  nombreux  sont  attachés  à  cha- 
cune d'elles.  Chaque  agence  a  de  plus  des  corres- 
pondants particuliers  dans  plusieurs  points  de  la 
république;  ce  qui  non-seulement  multiplie  les  pré- 
posés, mais  encore  établit  un  conflit  qui  nuit  essen- 
tiellement au  service. 

Maintenant  que  vous  connaissez  son  organisation 
intérieure,  vous  savez  pourquoi  vous  entendez  de 
toutes  parts  des  réclamations  et  des  reproches» 
Voyez  comme  tout  est  incohérent;  voyez  combien 
il  y  a  peu  d'ensemble,  et  combien  il  doit  y  avoir  peu 
d'accord.  Une  agence  détermine  les  importations  et 
les  exportations;  une  autre  est  chargée  d'exporter, 
tandis  que  l'importation  est  l'apanage  d'une  troi- 
sième, et  que  la  circulation  intérieure  de  toutes  les 
matières  est  l'attribution  de  la  quatrième.  Une 
agence  doit  indiquer  d'où  il  faut  tirer  telle  où  telle 
chosei  URe  autre  eipiédier  les  moyens  d'échange , 


153 


celle-ci  feîre  venir  du  dehors,  cette  autre  faire  cir- 
culer \ts  matières,  tandis  que  celle-là,  subdivisée  en 
plusieurs  Varties,  répartit  les  consommations. 

Ces  détails  sont  rjstidieux  sans  doute ,  mais  je 
vous  en  épargne  beaucoup  d'autres  qui  vous  paraî- 
traient plus  révoltants.  Je  pourrais  écrire  un  vo- 
lume, SI  je  voulais  vous  montrer  les  entraves  sans 
nombre  qui,  dans  les  différents  bureaux,  s'opposent 
à  l'expédition  des  affaires.  Ces  disputes  de  compé- 
tence entre  les  diverses  agences,  entre  les  agents  et 
les  commissaires;  cet  encombrement  d'objets  en 
un  seul  point ,  et  cette  absence  absolue  d*ouvrage 
dans  plusieurs  autres.  Ces  renvois  interminables, 
et  qui  sont  tels  que,  pour  savoir  le  sort  d'une  de- 
mande, il  faut  courir  des  journées  entières  de  bu- 
reaux en  bureaux  et  de  commis  «n  commis,  sans 
atteindre  à  aucun  résultat.Toutesles  opérations  sont 
paralysées;  celles  qu'on  exécute  sont  odieuses;  ce 
n'est  que  par  des  violences  au  dedans  de  la  républi- 
que et  des  sacrifices  immenses  au  dehors  que  la 
commission  nous  a  procuré  de  peu  le  ressources  que 
nous  avons  eu.  Un  plus  long  essai  serait  une  source 
irréparable  de  ruine  et  de  calamités. 

Au  lien  de  cette  organisation  monstrueuse,  votre 
comité  vient  vous  en  présenter  une  autre  qui  sera 
plus  active  et  plus  simple,  qui  réduira  de  plusieurs 
milliers  peut-être  le  nombre  des  employés  dans  toute 
la  république,  et  qui  par  conséquent  aura  le  double 
avantage  de  coûter  infiniment  moins  et  de  produire 
un  effet  plus  sûr. 

Il  propose  une  administration  composée  de  trois 
commissaires,  chargés  de  surveiller  trois  agences, 
celles  des  subiistanccs  générales,  celle  de  l'habille- 
ment et  celle  des  achats.  Ces  commissaires  seront 
essentiellement  membres  de  l'assemblée  générale  de 
l'agence  à  laquelle  ils  seront  atlach(^;ils  assiste- 
ront aussi  aux  assemblées  des  sections  de  service, 
et  ils  rapporteront  à  leurs  assemblées  particulières 
le  résultat  du  travail  de  chaque  agence,  lisseront 
chargés  des  comptes  à  rendre  au  comité  de  salut 
public,  et  de  faire  exécuter  ses  ordres. 

L'agence  des  subsistances  générales  aura  les  dé- 
tails suivants  : 

1»  Vivres  de  terre;  2®  vivres  de  mer;  3®  vivres- 
jétapes;  i^  vivres-viandes;  5<>  fourrages;  6»  équipa- 
ges; 7»  approvisionnement  de  Paris. 

L'agence  de  l'habillement  aura  tout  ce  qui  appar- 
tient à  rhabillement,  équipement  et  casernement  des 
troupes. 

La  troisième  agence  sera  chargée  de  tous  les 
achats  à  faire  au  dehors  et  au  dedans  de  la  répu- 
blique. 

Le  nombre  des  agents  sera  proportionné  à  l'éten- 
due des  détails  attribués  à  chaque  division. 

Chaque  agence  aura  sa  comptabilité  particulière, 
disposée  de  manière  ù  pouvoir  être  réunie  sans  au- 
tre travail  qu'une  récapitulation  de  quelques  lignes, 
lui  servira  à  rappeler  le  total  des  recettes  et  des 
épenses  de  chaque  partie  du  service,  et  à  former  le 
résultat  général  des  dépenses  de  la  commission. 

Tel  est,  citoyens,  le  nouveau  plan  d'anrès  lequel 
la  commission  sera  organisée;  elle  sera  débarrassée 
des  entraves  qui  en  ont  trop  longtemps  ralenti  la 
marche.  Cette  nouvelle  administration  sera  chargée 
de  la  suite  et  de  l'exécution  de  toutes  les  opérations 
quelconques  commencées  par  l'administration  ac- 
tuelle. Il  n'y  aura  aucune  discontinuité  dans  le  ser- 
vice, et,  la  plupart  des  employés  étant  les  mêmes, 
il  n'y  aura  qu'un  changement  de  place,  et  un  ordre 
plus  régulièrement  établi. 

Je  ne  vous  tracerai  point  ici  l'Organisation  inté- 
rieure des  bureaux;  c'est  un  objet  de  gouvernement 


l 


qui  ne  mérite  pas  d'être  soumis  à  vos  délibérations. 
Boissy  d'Anglas  présente  iin  projet  de  décret»  qui 
est  adopté  ainsi  qu  il  suit. 

«  La  Conveolion  nationale,  après  avoir  eolendu  le  rap> 
port  de  ses  comités  de  oommeroe  et  de  nlut  puMic,  dé« 
crèlc  :      * 

•  Art.  !•'•  La  commission  de  commerce  et  approvl- 
sionnements  de  la  répoblique  est  supprimée. 

•  IL  II  sera  créé  une  nouvelle  commls^n»  tous  le  nom 
de  commission  des  approvisionnements. 

•  III.  Celte  commission  ser^  chargée  d*assarer  les  sub- 
sistances et  autres  fournitures  des  armées  de  terre  et  de 
mer,  ainsi  que  de  tous  les  approvisionoements  extraordi- 
naires. 

•  IV.  Elle  dirigera  les  achats  a  faire  pour  le  eompte  de 
la  nation ,  tant  dans  Tintérienr  qa*à  l'extérieur  de  la  ré- 
publique. 

«  V.  Elle  sera  composée  de  trois  oommissaires. 

•  VI.  Ces  commlssiairei  sont  les  dtoyens  Lepayen,  Mot- 
tet  et  Combes. 

«  VII.  Elle  sera  di? isée  en  trois  agences. 

«  Vin.  Le  comité  de  salut  public  sera  chargé  de  déter^ 
miner  son  organisation  intérieure,  t 

[La  suite  demain»  ) 

iV.  /?.  Dans  la  séance  da  18,  on  projet  de  décret,  pré- 
senté an  nom  du  comité  de  l^slation,  a  donné  lieu  à  une 
longue  et  vive  discussion  relativement  aux  éuiigrés;  la  Con- 
vention  s^est  fortement  prononcée  contre  eus,  et  a  décrété 
que  la  comrois$ion  des  émigrcïs  fera  imprimer  la  liste  de 
tous  ceux  qui  ont  obtenu  d*étre  rayés  de  la  liste  d^émigra- 
tion  ;  quVlle  n*admettra  aucune  réclamation  de  ceux  qui 
auront  abandonné  la  patrie. 


Tréêorerie  nationale,  —  Liquidation  de  la  dette  publique 
vtageTe% 

Les  créanciers  de  la  dette  viagère  sont  avertis  que  les 
inscriptions  des  lettres  Initiales  H,  I,  JetK  des  parties 
constituées  sur  une  seule  tète,  sans  expectative  ni  survie, 
pourront  être  retirées  primidi  procliain  21  nivôse,  au  bu- 
reau  établi  à  cet  effet ,  rue  Vivienne,  en  face  de  la  trésore- 
rie. Le  |)ayement  sera  effectué  de  suite  à  bureau  ouvert. 

Ceux  qui  viendront  retirer  les  inscriptions  auront  soin 
d*écrire,  au  dos  du  bulletin  de  remise  dont  ils  sont  por- 
teurs, une  déciiarge  conçue  en  ces  termes  : 

«  Reçu  Piiiscripiion  viagère  de  ta  somme  de  au 

nom  de 

t  A  Pans,  ce..*.....  t 


GÉOGRAPHIE.       . 

Géographie  de  la  France ,  d*«prës  la  nouvelle  division  en 
quatre-vingt-trois  dép«rlements ,  contenant  des  deuils  sur 
rorigine,  les  révolutions,  IVtat  actuel,  les  nonuaients  prë* 
GJeus  de  ranliquilë,  les  édifices  modernes,  les  productions 
de  rindustrie  de  chaque  ville,  les  ouvrages  et  le  caractère 
des  lionimts  célèbres  dans  tous  les  genres;  seconde  édition, 
volume  in-lS.  Pris  :  Sliv.  1S  s. 

A  Paris,  cliet  Laporte,  libraire,  rue  Christine,  n^  t. 

—  Allas  moderne  portatif ,  composé  de  viojgt-hoit  cartes 
sur  toutes  les  parties  du  alolie  terrestre ,  et  &  trois  cartes 
astronomiques  ;  k  Pusage  oes  collèges  et  de  toutes  les  person- 
nes qui  veulent  apprendre  ou  enseigner  la  géographie;  nou- 
velle édition,  augmentée  d*une  seconde  earte  de  France,  d'a- 
près sa  division  en  quatre-vingt*trois  départements.  Pris , 
enluminé,  10  liv.  ;  non  enluminé,  8  liv.  10  s. 

A  Paris,  chez  Laporte,  libraire,  rue  Christine,  n®  t. 

N.  B,  On  vend  séparément  la  carte  de  la  France,  d*après 
la  nouvelle  division,' avec  une  esplication.  Pris  :  i  liv.,  en- 
luminée; et  1  liv.  10  s.,  non  enluminée. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  sis  premiers 
mois  ;  il  sera  fait  à  tous  ceus  qui  seront  porteurs  d'inscrip- 
tions au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères  est  <M 
huit  mois  vingt  et  on  joen  de  PanBéa  I7e9(vie«i  styla). 


GAZETTE  NATIONALE  ou  LE  MONITEUR  IJNIVEltSEL. 


fTllO. 


Déeaii  20  Nivôse,  Fan  3®.  {Vendredi  9  Jànyieb  1795,  vieux  style). 


POLITIQUE. 

ANTILLES. 

Anîigoa ,léi%  octobre» -> Les  Français ,  i*étant embar* 
qués  le  28  septembre  lur  de  petits  bfttlmrnts,  dans  Tinten- 
tlon  d*etilever  la  Guadeloupe  aux  Anglais,  s'avancèrent 
iiMqu*att  Lémaniiii,  où  Ils  débarquèrent.  Bientôt  Ils  péné- 
trèrent dan»  rintérieur  de  lllt»  «t  s'emparèrent  de  la  b«ie 
||e  Malhatid  et  de  plusiettrs autres  lleut  importantf. 

Oef  uouTelles  ultérieures  apprennent  que  le  camp  an* 
fiais  de  la  Guadeloupe,  aut  ordres  du  féoéral  Grabam, 
a  capitulé,  et  que  oa  féoéral  et  son  armée  retourneot  eo 
Angleterre,  ni*  pouiani  plus  sertir  dans  cetief  uerre  con- 
tre la  république  française* 

—  Ou  apprend,  pur  une  Irlire  de  Port-de-Pais,  eo  date 
du  28  Mptembre,  que  te  général  français  Lavaui  sVst 
emparé  de  la  paroisse  de  Borgue,  qui  avait  été  vendue 
aui  Espagnols.  L*attaaue  et  la  défense  ont  éié  vigoureuses. 
Les  Espagnols  et  les  lécbes  émigrés  qui  les  secouraient  ont 
profité  dé  la  nuit  pour  sVmbarquer,  après  avoir  eneloué 
leurs  canons.  Il  est  resté  sur  la  place  cent  doute  hommes, 
tant  espagnols  qu'émigré*.  La  plus  grande  partie  des  mu* 
sllfonsest  tombée  aui  mains  des  républicains. 

-.  Ou  apprend  de  fieioUMare  que  lef  françaii,  après 
quinie  [ours  de  oonban  partiqii»  eut  aUaqué  cette  vUie  et 
en  ont  brûlé  une  partie. 

Trois  frégates  croisaient^  le  2éi  dans  la  baie» 

•^  Les  géiiéraui  anglais  qui  se  trouvent  à  Seiot-Do* 
mlngue  avaient  eu  ordre  d*empioyer  auprès  du  général 
françalf  Lavaux  tous  Its  moyens  de  séduction.  Le  colonel 
anglais  Wicblelock  lui  a  écrit  h  cet  eûet  une  lelire  pleine 
dTasiqeeetd'bypocrisie.  Le  général  républlcaip  a  répondu 
I  ee  vil  eorrupteur  par  Pexpressloa  des  KOtiments  les  plus 
voie  et  les  ^us  énergiques. 

ITALIE. 

Cêm»^  /e  15  décembre.  —Le  ministre  de  la  république 
française  vient  de  laire  conoailrc  ici  l'arrêté  suivant  du 
comité  de  salut  public  de  la  Convention  natiooalçieodate 
do  28  brumaire  (18  novembre ,  vieux  style)  : 

«  Le  comité  de  salut  public,  considérant  les  notes  pré- 
sentée» au  nom  do  gouvernement  génois,  et  vaulant  don- 
ner à  la  république  de  Gènes  des  preuves  nouvelles  de  l'at- 
facilement  de  la  Frauee  et  de  son  amour  pour  la  Justice, 
afréle  ec  qui  sulL 

•  Art.  1*'.  Les  propriétés  mobilières  ou  immobilières 
appartenant  è  des  Génois,  dans  l'étendue  des  pays  qui 
sont  ou  seront  conquis  par  les  armées  françaises,  ne  seront 
soumises  4  aucun  des  actes  autorisés  par  le  droit  de  la 
guerre. 

«  11.  Dans,  le  caa  auquel  des  propriétés  appartenant  è 
des  Génois,  dans  les  pays  conquis  par  les  armées  françaises, 
auraient  enduré  par  erreur  quelques  actes  légitimes  vis-à- 
vis  de«  personnes  ennemies,  les  dommages  seront  immé^ 
dbtemenl  réparés. 

«  IIL  La  preuve  de  ees  dommages  sera  faite  par  des 
experts  cliolsis  par  les  représentants  du  peuple  près  les  ar- 
asées, a  l'indemnité  réglée  dans  le  plus  bref  délai. 

«  IV.  La  pféaent  arrêté  sera  envoyé  é  l'agent  de  la  ré* 
publique  française  è  Géues ,  au  résident  de  Génef»  é  Paris, 
aux  représeeums  Au  peuple  à  Tarmée  d*Italie,  et  au 
coauulssaire  des  relations  extérieures.  » 

I-  ■      ■■   n  II   ■        ■■ ■■  I .1 ^m-am^^mmm 

CONVENTION  NATIONALE. 

Préeiiieuce  de  BcntaboU, 
Suiié  du  rapport  eur  les  arie  qui  oui  eerm  à  la  dé- 
fenee  ée  la  répuMquê^  ei  iur  U  mouveau  pr&eédé 
de  Umnag0  décùu»êri  par  U  eiioifên  Armand 
Sé(/uin^  fail  à  la  CwvenU&ntuUi&male,  le  14  ni* 
Vùêe^aunaméufoaiUiéeUsakUpubUejfarFaur'' 


Leediaussures  sont  un  objet  de  première  néces- 
l*  Série. ^Tome  Xé 


eité.  An  prix  où  «e  vendent  prefseijlement  \os  cuirs, 
Tachât  des  chaussures  de  tous  les  citoyens  de  la  ré- 
publiques en  ne  portant  qu'à  deux  p.iires  de  souliers 
la  consommation  de  chaque  individu,  forme  une  dé- 
pense annuelle  de  1  milliard.  Nos  armées  seules,  en 
supposant  qii*pn  ne  leur  fournisse  que  la  quaotitéde 
souliers  tlxée  par  la  loi ,  en  consomment  annuelle- 
ment pour  140  millions.  Les  marches  forcées  e^  la 
mauvaise  qualité  des  cuirs  élèvent  encore  cette  dé- 
pense, et  la  porte  en  ee  moment  à  plus  de  200  mil* 
iiotis. 

Pour  fournir  chaque  année  aux  chaussures  de  tous 
les  citoyens  de  la  republique,  en  ne  supposant  tou- 
jours que  deux  paires  de  soitliers  par  chaque  indi- 
vidu, il  faut  environ  quinze  cent  mille  peaux  de 
bœufs,  douze  cent  mine  peaux  de  vacl^es  et  dâ 
millions  de  peaux  de  veaux. 

Pour  chausser  annuellement  nos  armées,  en  sup^ 
posant  qu'elles  ne  consomment  que  ce  qui  est  porté 
dans  les  décrets  Jl  faut  cent  soixante-dix  mille  peaux 
de  bœufs ,  cent  mille  peaux  de  vaches  et  un  mîilioo 
de  peaux  de  veaux. 

Les  chaussures  ne  sont  pas  la  seule  dépendance 
des  euirs  :  lachamoiseric,  la  corroiri^,  rh(mgroirie, 
la  maroquinerie,  la  mégisserie,  la  parcheminerie,  la 
peausserie,  et  beaucoup  d'autres  arts  d'une  gronde 
importance,  en  dérivent  immédiatement 

Les  arts  relatifs  à  remploi  des  peaux  doivent  donc 
fixer  l'attention  des  législateurs;  comme  tous  ceux 
de  première  nécessité,  ils  concourent  très- essentiel- 
lement à  la  prospérité  de  la  république,  et  ils  peu* 
vent  nous  donner  dans  la  balance  commerciale  des 
nations  un  avantage  trè$«coDsidérah]e  sur  toutes  lêjl 
puissances  de  TEurope. 

Parmi  les  arts  encore  dans  leur  en/ance,  l'art  du 
tannage  était  un  de  ceux  dont  le  perfectionnemeot 
rapide  était  le  plus  désirable.  U  fallait  des  années  eor 
tières  pour  tanner  des  peaux  fortes ,  de  sorte  qu'on 
ne  pouvait  remplir  qu'au  bout  de  dix-huit  mois  ou 
deux  ans  les  vides  qu'on  éprouvait  dans  leuf  fabri- 
cation. 

Le  comité  de  salut  public  fît  pour  cette  améliora- 
tion si  désirable  et  si  pressante  ce  qu'il  avait  fail  pour 
les  arts  de  la  guerre.  Par  son  arrêté  du  U  brumaire 
an  2,  il  chargea  un  chimiste  célèbre  ,.Bertholet,dB 
s'occuper  du  perfectionnement  de  la  tannerie ,  et  il 
mit  des  fonds  à  sa  disposition  pour  lui  fournir  tous 
les  moyens  d'expériences  et  d'essais  en  grand  que  cet 
important  travail  exigeait.  Berlholet ,  sachant  qu  un  ' 
savant  de  sa  connaissance,  Armand  Séguin,  qui  der 
puis  plusieurs  années  s'occupait  principalement  d^ 
recherches  utiles  sur  les  arts  chimiques ,  avait  en- 
trepris des  essaiS'Suivis  sur  la  préparation  des  cuirs, 
s'intorma  du  point  où  il  était  parvenu,  et,  ayant  ap* 
pris  que  ses  expériences  étaient  assez  avancées  pour 
promettre  incessamment  des  résultats  heureux,  il 
en  fit  part  au  comité  de  salut  public,  et  l'engagea  a 
charger  Armand  Séguin  de  continuer  son  travail  et 
de  le  poursuivre  jusqu'à  sa  pcrlection.  Ce  citoyen* 
anime  par  la  conUauce  du  comité  et  par  le  désir 
d'être  utile  à  son  pays,  redoubla  d'ardeur;  il  parvint 
en  quelques  mois  à  compléter  sa  découverte.  Bien 
persuade  que  des  résultats  d*une  utilité  si  grande  nt  \ 
pouvaient  acquérir  trop  d'authenticité,  le  comité  a 
voulu  que  les  procédés  de  Séguin  fussent  répétés  sur 
une  centaine  de  peaux  devant  des  commissaires  d'un 
mifrUe  et  4* une  probité  bien  constatés.  Ces  commis- 
saires ont  suivi  les  expériences ,  et  il  est  résulté  de 
leur  rapport  qu'on  peut,  par  les  procédés  de  Séguini 

SO 


154 


tanner  en  peu  de  jours  les  peaux  les  plus  fortes,  qui 
exigeaient  ordinairement  deux  années  de  prépara- 
tion, diminuer  en  même  temps  la  main  d'œuvre  et 
les  frais  de  fabrication,  et  obtenir  des  cuirs  d'une 
qualité  supérieure  à  celle  des  cuirs  préparés  par  les 
anciennes  méthodes. 

Pour  bien  apprécier  ces  avantages,  il  ne  sera  pas 
nécessaire  de  parcourir  toutes  les  différences  qui 
existent  entre  cette  méthode  et  les  méthodes  an- 
ciennes. Cette  comparaison  sera  présentée  avec  quel- 
ques détails  dans  une  note  placée  à  la  fin  de  ce  rap- 
port (1). 

L'art  du  tannage  ancien,  qui  durait  depuis  deux 
ans  jusqu'à  trois^consistait  à  aébourrer  et  gonfler  les 
peaux  par  le  moyen  de  la  chaux,  'de  Torge  fermenté, 
ou  du  JUS  de  tan ,  à  les  enfouir  dans  des  fosses  en  les 
enveloppant  de  tan  sec  pendant  dix-huit  mois  ou 
deux  ans. 

L'art  du  tannaee  nouveau;  dû  aux  découvertes  de 
Séguin,  est  fondé  sur  une  connaissance  exacte  de  la 
nature  des  peaux  et  sur  celle  de  la  matière  tannante 
ou  du  tannin.  H  consiste  à  plonger  les  peaux  pendant 
un  ou  deux  jours  dans  une  dissolution  d'écorce  pri- 
vée de  matière  tannante,  ou  de  tannin,  et  légèrement 
acidulée  par  de  Facide  sulturique  :  la  substance  qui 
sert  de  lien  aux  poils  s'y  débrûle,  et  le  débourrement 
s'y  effectue  avec  facilite.  Les  peaux  ramollies  et  gon- 
flées dans  ce  mélanee  en  sont  retirées ,  puis  suspen- 
dues dans  des  dissolutions  plus  ou  moins  fortement 
chargées  de  matière  tannante.  En  quelques  jours,  et 
au  plus  en  quinze  pour  les  cuirs  les  plus  forts,  cette 
matière  pénètre  par  couches  successives  jusqu'au 
centre  des  peaux,  se  combine  avec  la  substance  ani- 
male, et  lui  donne,  en  la  saturant,  le  caractère  d'im- 
putrescibilité  et  de  solidité  qui  rend  la  peau  propre 
a  In  fabrication  des  souliers. 

La  méthode  de  Séguin  a  le  triple  avantage  d'un 
tannage  plus  prompt,  moins  coûteux,  et  tellement 
complet  qu'on  peut  amener  lé  cuir  au  plus  haut  de- 
gré de  la  solidité  dépendant  du  tannage;  de  là  cette 
grande  supériorité  remarquée,  par  ceux  qui  s'y  con- 
naissent, dans  les  cuirs  préparés  suivant  les  nou- 
.  veaux  procédés,  compares  aux  cuirs  préparés  dans 
quelque  pays  que  ce  soit. 

La  promptitude  de  cette  méthode  est  telle  qu'on 
peut ,  en  prenant  les  précautions  convenables ,  tan- 
ner les  peaux  de  veaux  en  deux  jours,  et  les  plus 
fortes  peaux  de  bœuls  en  dix  ou  quinze  jours. 

Cette  nouvelle  méthode  a  encore  l'avantage  de  ne 
pas  employer  d'orge,  dont  on  a  fait  jusqirici  une 
grande  consommation  dans  les  tanneries  ;  d'exiger 
peu  de  mises  de  fonds,  et  surtout  d'utiliser  d'im- 
menses forêts  dont  on  n'avait  su  jusqu'ici  retirer  au- 
cun parti,  et  dont  on  peut,  suivant  les  procédés  de 
la  nouvelle  méthode ,  exploiter  le  tan  sur  le  lieu 
même,  en  en  séparant  le  principe  propre  au  tan- 
nage, réduisant  conséquemmeut  l'écorce  à  un  très- 
faible  poids ,  et  diminuant  par  ce  moyen  les  frais  de 
transport  d'une  manière  assez  considérable  pour 
qu'il  soit  avantageux  d'exploiter  les  forêts  même  les 
moins  exploitables. 

Ces  procédés  ne  sont  pas  de  ces  idées  problémati- 

Sues  dont  les  résultats  sont  incertains;  ils  sont  fon- 
és  non-seulement  sur  la  théorie  et  les  opinions  les 
plus  saines,  mais  encore  sur  des  expériences  multi- 

S liées  et  incontestables.  C'est  un  art  aux  résultats 
uquel  on  ne  peut  se  refuser  lorsqu'on  est  de  bonne 
foi  ;  c'-est  un  art  enfin  que  les  préjugés  les  plus  en- 
racinés et  l'ignorance  la  plus  absolue  peuvent  seuls 
révoquer  en  doute. 

La  théorie  du  tannage  est  aujourd'hui  tellement 
«VtnTcic,  Ips  procédés  de  Séguin  sont  d'une  telle 

(I)  Voir  plus  loin  page  168,  daiuloK*  du  31.    . 


simpIicité,qu'on  s'étonnerait  au  premier  abord  qu'ils 
aient  été  tant  de  temps  inconnus,  si  l'on  ne  savait 
que  les  choses  les  plus  simples  sont  les  dernières 
auxquelles  les  travaux  des  hommes  arrivent  dans 
tous  les  genres. 

Catte  simplicité  est  telle  que  chaque  citoyen  pour» 
rait  faire  chez  lui  pour  sa  consommation,  plus  faci- 
lement même  qu'il  ne  fait  la  lessive,  les  cuirs  né- 
cessaires à  la  fobrication  de  ses  souliers. 

L'adoption  générale  de  la  méthode  de  Séguin  doit- 
nécessairement  amener  par  la  suite  dans  le  prix  des 
cuirs  une  baisse  très-eonsidérable.  Bn  effet,  c'asi  un 
principe  incontestable,  que  la  principale  cause  dy 
renchérissement  des  denrées  dérive  d'une  dispropor^ 
tion  entre  les  demandes  et  la  possibilité  de  fournir. 
Il  suit  de  là  que  le  moyen  le  plus  sûr  de  faire  baisser 
le  prix  des  marchandises  est  d'établir  une  grande 
concurrence,  surtout  de  faire  en  sorte  que  la  possi- 
bilité de  fabrication  surpasse  la  quantité  des  de- 
mandes. 

Il  s'ensuit  encore  que  le  peu  de  concurrence  qui 
existait  dans  la  préparation  et  la  vente  des  cuirs,  à 
raison  de  Tindispensabilité  d'une  mise  de  fonds  très- 
considérable  pour  la  formation  d'une  tannerie  >d*une 
certaine  étendue,  devait  nécessairement  produire  un 
renchérissement  très-considérable  dans  le  prix  des 
cuirs;  car  les  tanneurs  les  mieux  fournis  en  ipar- 
chandises,  en  spéculant  sur  l'instant  de  mise  en 
vente ,  et  en  ne  versant  dans  le  commerce  qu'une 
quantité  de  cuirs  inférieure  à  celle  des  demandes, 
peuvent  maîtriser  les  enchères,  et  c'est  ainsi  qu'elles 
s'élèvent  souvent  à  plus  du  double  de  leur  valeur 
réelle. 

Dans  fa  nouvelle  méthode,  au  contraire ,  la  pos- 
sibilité de  faire  la  même  quantité  de  peaux  avec  uns 
mise  de  fonds  vingt  fois  moins  considérable  multi- 
pliera la  concurrence  des  ventes;  et  dès  lors  les 
matières  fabriquées  se  trouvant  en  plus  de  mains,  et 
pouvant  même  surpasser  les  demandes,  leur  prix  di- 
minuera nécessairement,  jusqu'à  ce  qu'enfin  le  gain 
du  fabricant  tienne  moins  au  genre  de  fabrication 
qu'au  degré  d'intelligence  qu'il  y  apportera. 

Le  tannage  nouveau  peut  encore,  s'il  est^énéra- 
lement  adopté,  nous  procurer,  dans  la  balance  conoi- 
merciale  desnations ,  un  avantage  tellement  consi- 
dérable qu'il  mérite  toute  la  sollicitude  de  la  Con- 
vention. 

Supposons  que  tous  les  tanneurs  français  adop- 
tent les  nouveaux  procédés  ;  la  fabrication  des  peaux 
tannées  dans  la  république  pourra,  avec  la  même 

auantité  de  tanneries,  être  dix-huit  fois  plus  consi- 
érable  qu'elle  ne  l'a  été  jusqu'ici.  Ainsi  donc  \  en 
admettant  même  que  le  déUcit  actuel  entre  la  fabri- 
cation et  la  consommation  soit  de  moitié,  l'excédant 
de  fabrication,  dans  le  cas  prévu,  serait  encore  seize 
fois  aussi  considérable  que  la  consommation  de  toute 
la  république.  Cet  excédant  exporté  pourrait  servir 
à  acneter  non-seulement  des  peaux  étrangères , 

3u'on  tannerait  ensuite,  mais  encore  une  multitude 
'objets  de  première  nécessité,  dont  nous  manquons 
pour  nos  labriques  ou  nos  consommations. 

La  plus  douce  récompense  des  véritables  amis  des 
sciences  réside  dans  l'utilité  eénérale  qui  peut  résul- 
ter de  leurs  découvertes,  et  dans  l'opinion  favorable 
et  méritée  qu'on  conçoit  de  leurs  travaux. 

La  Convention  nationale,  en  accordant  toute  son 
estime  à  ceux  qui,  dans  le  silence  du  cabinet,  con- 
courent sans  bruit  à  la  prospérité  de  la  république, 
saura  leur  faire  oublier  les  dégoûts  de  tous  genres 
qu'on  leur  suscite  ;  elle  n'ignore  pas  qu'il  suflit 
qu'on  fasse  une  découverte  utile  pour  se  voir  assailli 
sur-le-champ  par  toutes  les  passions,  dont  l'unique 
but  est  de  faire  avorter  ses  fruits  les  pluâ  précieux. 


1&5 


L'histoire  dM  nouveaux  procédés  sur  le  tannage 
confirme  cette  vérité;  comme  toutes  les  améliorations 
qui  doivent  obtenir  la  reconnaissance  de  la  postérité, 
et  faire  époque  dans  Thistoire  des  arts ,  ils  ont  été, 
dès  leur  naissance,  repousses  par  l'envie,  régoTsme, 
ia  cupidité,  Tignorance  et  les  préjugés.  D'abord  on 
a  nie  la  possibilité  d'une  préparation  si  prompte  ; 
convaincu  par  Tévidence  même,  on  a  supposé  une 
très-mauvaise  qualité  dans  le  produit.  Bientôt  on  a 
oublié  cette  objection ,  qui  a  été  renversée  par  les 
expériences  les  plus  directes  et  les  plus  décisives; 
mais  on  a  prétendu  que  les  prix  de  main-d'œuvre  et 
de  fabrication  étaient  de  beaucoup  supérieurs  dans 
la  nouvelle  métbode  aux  prix  des  métnodes  ancien- 
nes, et  on  n'a  abandonné  cette  assertion  que  quand  il 
a  été  bien  démontré  que,  loin  d*étre  plus  coûteux,  le 
nouveau  j^enre  de  fabrication  l'est  beaucoup  moins 
que  l'ancien,  d*abord  en  ce  que  la  main  d'œuvre  est 
moins  considérable ,  en  second  lieu  parce  (]u'ou  est 
moins  de  temps  à  fabriquer ,  en  troisième  lieu  parce 
que  le  cuira  uneplusmnde  pesanteur  comparative, 
eu  quatrième  lieu  enfin  parce  qu'on  ne  perd  pas  un 
atome  du  principe  propre  au  tannage  que  contient 
le  tan  ,  taudis  qu'on  en  perdait  beaucoup  dans  les 
méthodes  anciennes.  Que  la  protection  spéciale  de 
la  Convention  lève  donc  les  doutes  de  ceux  qui  sont 
de  bonne  foi,  et  impose  silence  aux  égoïstes  qui,  cal- 
culant mal  leurs  intérêts,  désireraient  étouffer  le 
nouvel  art,  dont  ils  redoutent  les  salutaires  effets. 

La  suite  à  demain,) 


SUITE  M  LA  SÉANCE  DU  17  NIVOSB. 

Un  secr^ire  lit  les  lettres  suivantes  : 
ih$pina$iyt  représentant  du  peuple^  à  ses  coUigues. 

A  Sifoct,  diitriet  die  Brignollet,  dëpartentot  da  Yar, 
le  iiê  ftiniire,  l'ao  S*  de  la  répobliqiie. 
«  Ciloyent  cdU'gues,  vos  vertus  n'ont  jamais  brillé  d'un 
plus  bran  lustre  qu'au  moment  où  tous  avei  rappelé  près 
de  vous  vos  infortunés  eollèfues  ;  notre  profonde  innocence 
eiigeait  une  jnsUce  éclatante.  Je  tais  donc  m'associer 
bieutdt  4  fos  irataux  immortels,  consacrer  airec  tous  tous 
mes  jours  au  bonbeur  de  ma  patrie,  et  mourir,  s'U  le  faut, 
en  remplissant  ce  devoir  sacré. 

•  Salut  et  fraUmité.  Dispimasst.  b 

Les  représentants  du  peuple  pris  Varmée  et  dans  les 
départements  de  FOuest  à  la  Convention  nolio- 
naii. 

De  NtDtet,  le  it  nÎTOse,  Tas  3«  de  la 
république. 

•  Noos  nous  empressons  de  vous  faire  connaître  un 
événement  qui  caractérise  le  courage  français.  Il  vient 
d'arriver  à  rentrée  de  la  Loire  on  navire  anglais;  il  con- 
duisait eeot  quatre-vingts  de  nos  prisonniers  à  Londres;  ils 
ii*ont  pu  SttppoHer  l'idée  de  la  servitude;  ils  ont  brisé 
leurs  fers  et  en  ont  cncbalné  leurs  ennemis,  qu'ils  ont 
amenés  en  Ftrance  sur  leur  propre  vaisseau.  Celte  nouvelle 
nous  a  été  annoneée  par  le  commandant  d'armes  du  port 
de  Nantes. 

«Salut  et  fraternité.  B 

«DlLAUMAT,  RotLLB,  MoaiSSOR^  GOTAEOUI» 

Aootai  Doaaisa,  GAvaia  »  Bbiabd.  s 

Lé  représentant  du  peuple  B  ardas,  en  mistion  dam 
les  départements  delà  Charente,  du  Bee-d'Am- 
bis  et  de  la  Dordogne,  à  la  Convention  nationale. 

Bordeaos,  le  9  oivose,  Tan  S*  de  la  république 
«ne  et  indiviiible. 

•  Q«ni  est  beau  à  voir,  le  peuple  bordelais!  S'il  se  sou- 
vlcBl  de  set  maux  passés,  ce  n'est,  atojrens  collègues,  que 
poor  iMctti  s'aecroeher  an  bonbeur  qn*il  n'aUeod  que  de 


vous.  Le  «eau  de  la  confiance  est  imprimé  sur  tous  les 
visages  ;  l'amour  de  la  liberté  est  gravé  dans  tous  les  csurs; 
dans  toutes  les  Sociétés  11  n'est  qu^un  cri  :  Hors  la  Goo* 
venUon  point  de  salut  I 

«  S'il  existe  encore  dans  ceUe  commune  quelques  dl« 
vbions,  elles  sont  renfermées  dans  l'ialervalle  naturelle- 
ment assigné  entre  le  crime  et  la  vertu  ;  elles  prennent 
leur  source  dans  la  guerre  que  les  vrais  républicains  ont 
déclarée  aux  fripons.  Encore  quelques  jours,  et  farracbe» 
rai  le  masque  dont  ces  derniers  s*étaieiit  affublés. 

«  Ponr  bien  juger  ses  principes,  U  faut  le  suivre,  ce  boa 
peuple,  dans  les  assemblées  publiques  ;  pour  connaître  Tin- 
térét  qu'il  est  digne  d'inspirer,  il  fout  élre  témoin  de  sa 

KIsible  tranquillité  à  côté  de  toutes  les  privations.  Vous 
i  apprécieres  par  l'arrêté  que  les  circonstances  ont  ren- 
du nécessaire,  et  que  je  soumets  à  votre  approbaUoo. 
«  Salut  et  ftatemité.  Boroas.  • 

Le  représentant  du  peuple  dans  les  départements 
maritimes  de  la  république  au  président  de  la 
Convention  nationaie. 

Port-Ia-MoDtagae,  le  !•'  oivote,  Tan  ^  de  la 
république  française,  une  et  iodi viable.   . 

«  Citoyen  président,  Tanniversaire  de  la  reprise  de 
Toulon  a  été  célébré  hier  dans  celte  commune.  Je  n'entre- 
tiendrai point  la  Convention  des  détails  de  la  fêle  ;  quelque 
intéressants  qu'ils  aient  été  en  eux-mêmes ,  Us  ne  sont 
rien  au  prix  des  sentiments  vraiment  civiques  que  tous  les 
citoyens  ont  fait  éclater;  la  haine  pour  le  nom  anglais  se 
confond  désormais  dans  leur  ftroe  avec  l'amour  sincère  de 
la  patrie;  et,  aux  cris  mille  fois  répétés  de  vive  la  repu» 
blique!  ils  ont  juré  de  poursuivre  sans  relâche  ces  insu- 
laires, et  de  leur  arracher  l'empire  de  la  Méditerranée, 
qu'ils  ont  trop  longtemps  usurpé. 

«  Ce  serment,  citoyen  président.  Us  le  tiendront;  déjà 
tous  les  citoyens  de  celte  commune  ont  donné  des  preuves 
non  équivoques  de  leur  patriotisme.  Respectueux  envers 
la  loi  ils  ont  su  se  préserver  des  mouvements  qui  ont  agité 
leurs  voisins.  Les  travaux  maritimes  se  poussent  avec  la 
plus  grande  activité;  l'ordre  règne  dans  l'arsenal,  la  disci* 
plide  sur  Tescadre,  la  tranquillité  dans  ia  ville  :  c'est  le 
spectacle  touchant  d*uue  famille  unie  par  les  liens  de  la 
plus  douce  fraternité.  Les  haines  particulières  sont  apai- 
sées, l'esprit  de  vengeance  a  disparu ,  la  calomnie  et  l'es- 
prit de  parU  se  taisent ,  et  tout  le  monde  est  occupé  è  rè^ 
parer  par  le  travail  les  malheurs  de  l'an  pas.«é. 

•  C'est  déjà  les  avoir  réparés,  citoyen  président,  que 
d'en  manifester  un  désir  si  vif.  La  Convention  nationalea 
étendu  le  voile  de  son  indulgence  sur  les  erreurs  de  Mar- 
seille, de  Lyon  et  de  Bordeaux:  une  tache  reste  encore 
imprimée  à  celte  commune;  n'est41  pas  temps  qu'elle  soit 
effacée  ?  C'est  à  la  sagesse  de  ia  Convention  à  prononcer  s 
mais  je  ne  crains  pas  de  lui  dire  qu'aucune  commune  ne 
Ta  mieux  mérité. 

t  Salut  et  fraternité. 

•  Si$ni  JbaK-Bom  SAmr-Aaaaa.  • 

La  Convention  ordonne  l'insertion  de  ces  lettres 
au  Bulletin. 

—  Sur  le  rapport  de  Pérès,  au  nom  du  comftë  de 
législation ,  le  projet  de  décret  suivant  est  adopté  : 

•  La  Convention  naUonale,  après  avoir  entendu  son  co- 
mité de  législation  sur  la  pétition  de  Jean  Georget ,  teo« 
dant  à  l'annulation  du  jugement  révolutionnaire  du  Irl^ 
bunal  criminel  du  déparlement  de  la  Sarthe,  du  5  floréal 
dernier,  qui  condamne  Anne  Liberge,  son  épouse,  à  la 
détention  jusqu'à  la  paix,  et  ensuite  au  bannissement  à 
perpétuité  du  territoire  de  la  république,  pour  avoir  en- 
tretenu des  liaisons  et  des  correspondances  avec  des  enne* 
mis  de  la  révolution,  et  pour  avoir  aidé  le  prêtre  Uerbello 
à  obtenir  un  passeport  sons  le  faux  nom  de  Cbesnet; 

«  Considérant  que  le  pouvoir  que  le  représentant  da 
peuple  alors  en  mission  dans  le  département  de  la  Sartkt 
conféra  au  susdit  tribunal ,  par  son  arrêté  du  28  germinal, 
déjuger  révolutionnairement  ladite  Anne  Liberge ,  ne  loi 
attribue  pas  celui  d'omettre  ou  de  violer  les  formes  les 
plus  essentielles  de  la  procédure  criminelle;  que  néan- 
moins le  iugcmcnt  dont  il  s'agit  n'oflke  la  preuve  ni  qn*ll 


150 


ttt  M  dfctié  uo  Mie  d*acciu»lioa.  ni(|ii*n  aUéU  totiada 

des  témoins  à  décharge»  ni  qu^eufin  la  plus  sacrée  dea  for- 
malitéa,  celle  du  jury  de  {ugemeult  ail  été  employée  i 

«  Casse  et  amiulle  ledit  jugemenl  du  6  floréal  et  tout  ce 
QUI  s*en  est  suivi  ; 

•  Renvoie  les  pièces  concernant  ladite  Liberge  «a  co- 
mité de  sûreté  générale»  qui  demeure  autorisé  4  y  atalttor 
défiailivemeot.» 

BiNTiiBOLB  :  Je  dots  foire  parla  la  ConveDlion  d*ttD 
doute  qui  8>st  élevé  hier  dans  le  comité  de  sûreté 
générale,  et  qui  a  partagé  ses  membres. 

Lorsqu'on  décréta  Lacroix  d'arrestation ,  on  de- 
manda aussi  celle  de  Buisson,  qui  avait  imprimé  son 
ouvrage;  ce  dernier  décret  ne  fut  pas  rendu,  parce 
qu*on  observa  que  le  comité  de  sûreté  géuérale  avait 
liiiicé  contre  Buisson  un  mandat  d'amener.  De[)ui^, 
ce  msmdat  fut  levé,  et  quelques  membres  justiliêrent 
cet  avis  en  disant  que,  toutes  les  fois  qu'un  auteur 
avait  mis  son  nom  à  son  ouvraj^e,  l'imprimeur  ne 
pouvait  être  recherché.  (C'mI  ^ufie/ s'écrie- t-on.) 
Je  crois  aussi  que,  lorsqu'il  ne  s'agit  que  de  pam- 
phlets et  de  choses  indifiërentes,  la  signature  de  l'au- 
teur suffit  pour  la  garantie  de  I  imprimeur;  mais  je 
pense  qu'elle  ne  sufBt  pas  dans  la  circonstance  pré- 
sente. Une  de  nos  lois  regarde  comme  conirc-révo- 
lutionnaires  tous  ceux  qui  provoquent  directement 
ou  indirectement  rétablissement  de  la  royauté;  je 
vous  demande  si  l'imprimeur  d'un  ouvrage  royaliste 
ne  provoque  pas  indirectement  à  la  rovauté  ?  Si  l'on 
pensait  autrement,  ce  cerait  permettre  h  tous  les  im^ 
lu-imeurs  de  prêcher  la  contre-rév<nutton,  en  met- 
tant au  bas  de  l'écrit  au'ils  répandraient  un  nom  pu- 
rement imaginaire.  Je  le  crois,  tout  homme  qui 
imprime  sciemmerft  un  écrit  contre-révolutiontiaire 
est  coupable  de  contre-révolution,  et  il  n'appartient 
qu'aux  tribunaux  de  juger  son  intention  ;  omis  pro- 
visoirement il  doit  être  arrêté.  Je  demande  que  la 
Convention  se  prononce. 

Tmibaudeao  :  Il  me  semble  que,  si  vous  adoptes 
l'avis  de  Berilabole ,  vous  aurez  absolument  anéanti 
la  liberté  de  la  presse.  (Vifs  applaudissements.)  La 
signature  de  l'auteur  sulfit  pour  la  garanti'*  de  1  im- 
primeur ;  elle  indique  au  gouvertiementcelui  auquel 
il  doit  s'adresser  si  l'ouvrage  trouble  Tordre  public. 
L'imprimeur  ne  peut  juger  ni  la  pensée  ni  les  ex- 
pressions de  l'auteur;  il  u'esique  le  moyen  méca«* 
nique  à  l'aide  duauel  on  répand  les  idées.  La  propo- 
sition de  Bentabole  aurait  cette  conséquence  qu'elle 
empêcherait  qu'aucun  écrit  ne  fût  jamais  publié; 
car  l'imprimeur  dirait  :  «  Dès  que  la  signature  de 
l'auteur  ne  suffît  pas  pour  me  garantir,  et  que  le 
gouvernement  recnercne  si  scrupuleusement  tous 
ceux  qui  n'ont  participé  que  mécaniquement  à  In  pu- 
blication d'un  ouvrage,  je  ne  veux  pas  m'expoaer  à 
partager  le  sort  de  l'auteur,  s'il  s'est  trompé.  •  Je 
suis  ennemi  autant  que  personne  du  royalisme  et  de 
toute.s  les  factions  qui  voudraient  renverser  la  répu- 
blique; mais  je  tiens  sévèrement  aux  principes,  et 
je  crois  que  ce  n'est  pas  dans  un  moment  oh  les  pas- 
sions nous  pressent  que  nous  devons  adopter  des 
vues  proposées  dans  de  bonnes  intentions,  mais  qui 
anéantiraient  la  liberté  de  la  presse.  L'imprimeur 
lait  son  métier  en  prêtant  ses  presses,  et  je  délie 
qu'on  mecite  un  pays  libre  où  l'on  ait  jamais  inquiété 
celui  qui  a  publié  un  ouvrage  avec  le  nom  de  l'auteur. 
(Applaudissements.)  Je  demande  l'ordre  du  jour. 

Cette  proposition  est  décrétée  au  milieu  des  ap- 
plaudissements. 

MAiGTtET  :  La  fièvre  qui  me  tourmente  depuis  quel- 

aue  temps  m'a  empêché  d'assister  à  la  séance  d'hier, 
n  de  mes  collègues  m'a  dit  qu'un  rapporteur  avait 
rappelé  les  diatribes  lancées  contre  moi,  et  que  lej 
Uott  oonit^  avaient  été  chargés  d'exasDloer.  Bh 


bitn,  aprèideux  téanett,  ^oalla  dernièff*  M  4e 
quatorxe  heures ,  ces  comités  reeonnurent  mon  ia- 
nocence.  (Murmures.  )  J'interpelle  Pons  ei  Bootdott 
(de  l'Oise)  de  rendre  justice  à  la  vérité. 

On  demande  l'ordre  du  jour*. 

LiosNMB  :  Je  demande  U  parole;  il  bm  êtrt 
vrai. 

Pons  :  11  est  vrai  qu*après  deux  séances  «  dont  la 
dernière  a  duré  qualonte  heures,  les  trois  comiléa 
ont  été  devis  à  la  presque  unanimité  qu'il  a>  avait 
pas  lieu  à  examen  de  la  cooduile  de  Maiguet.  Comme 
dans  ce  cas  la  loi  laisse  aux  comités  laltlbertéde  taire 
ou  de  publier  leur  opinion,  il  n'est  pas  étonnant 
qu'ils  ne  vous  aient  point  parlé  de  cette  affaire. 

Lbcomtb  :  Maignet  est  accusé  des  faiu  les  pins 
graves.  On  lui  reproche  d'avoir  fait  guillotiner 
soixante-trois  personnes  qui  dormaient  lorsque  cinq 
i  six  scélérats  arrachèrent  l'arbre  de  la  liberté;  on* 
lui  reproche  de  ne  s'être  pas  contenté  de  la  mort  de 
ces  soixantMrois  innocents,  et  d'avoir  lait  brûler  la 
commune  âe  Bédouin  ;  on  lui  reproche  encore  d'à* 
voir  envoyé  à  Téchafaud  »  avec  son  père  ^  une  jeune 
iille  qui  venait  implorer  la  iustice  ne  Maignet  pour 
l'auteur  de  ses  jours.  (Cut  fauxl  s'écrie- t-on.) 
Hier  Courtois  nous  lut  die  nouvelles  pièces  trouvées 
chez  Robespierre  et  Couthon,  pièces  qui  prouvent 
que  les  taits  imputés  à  Maignet  ne  sont  malheurea* 
sèment  que  trop  vrais.  11  faut  donc  revenir  à  un  exa- 
men de  cette  affaire,  et  c'est  aveo  fondement  que  la 
Convention  l'a  renvoyée  hier... 

DunsM  :  Elle  n'a  pas  délibéré. 

Lecomtb  :  Plus  des  trois  quarts  de  l'assemblées 
voté  pour  le  renvoi  k  la  commission  des  Vingt-et- 
Uu.  Je  demande  Tordre  du  jour  motivé  sur  ce  décret. 

LBCOiNTRB  (de  Verailles)  :  On  a  décrété  hier  l'im- 
pression des  pièces  dont  la  lecture  a  révolté  le  peu- 
ple et  nous.  Je  crois  que  la  Convention  n'est  pas 
liée  par  la  déclaration  que  pourraient  faire  les  comi' 
tés  qu'il  n'y  a  pas  lieu  à  examen  de  la  conduite  de 
Maignet. 

Je  demande  qu'ils  fassent  leur  rapport  lorsque  les 
pièces  seront  imprimées,  et  la  Convention  se  ûéek* 
dera  alors. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  SI  Ton  revientsanscessc  sur 
les  mêmes  faits,  il  est  difUcile  de  savoir  où  l'on  s'ar- 
rêtera. La  mesure  forcée*  et  inutile  de  l'incendie  de 
Bédouin,  et  les  actes  contraires  à  Phamaulté  et  à  la 
justice,  commis  par  le  tribunal  d'Orange,  n*ont  pas 
paru,  à  la  majorité  de  vos  comités,  être  r.ouvrege 
l)roj)re  de  Maignet,  mais  bien  celui  de  quelques 
membres  de  l'ancien  comité  de  salut  public  qui  avait 
approuvé  et  forcé  toutes  ces  mesures. 

BicnoLx  :  Belle  exbuse! 

Bourdon  :  Quant  à  la  mort  de  la  jeune  fille,  ce 
fait  est  faux.  Cjtoyens,  vous  avez  cru  que,  dans  les 
mouvements  révolutionnaires,  il  fallait  distinguer 
ceux  qui  avaient  commandé  le  crime  de  ceux  à  qui 
l'on  avait  forcé  la  main.  Vos  comités  n*ont  vu  dans 
Maignet  qu'un  homme  qui,  a  la  vérité,  à  proposé  les 
moyens,  mais  ne  les  à  exécutés  que  sur  l'ordre  de 
quelques  membres  du  comité  qui  voulaient  des  me- 
sures extraordinaires. 

Leoendbb  :  il  faut  aborder  cette  tribune  avec  le 
sentiment  de  la  justice  et  de  l'humanité;  mais  aussi 
il  faut  se  garantir  des  passions.  Nous  avons  examiné 
l'affaire  <)ue  vous  nous  avez  renvoyée,  et  nous  avons 
souventirémi  d'horreur  au  récit  des  atrocités  qui  o^it 
été  commises.  Après  avoir  sérieusement  examiné, 
nous  avons  reconnu  ^qu'une  portion  des  membres  de 
l'ancien  comité  de  salut  public  était  seule  auteur  de 
tous  les  crimes.  Qu*on  me  démente  si  ce  que  je  dis 
est  faux.  {Piu$iiuri  voix  :  C'est  vrai  ! } 

Maignet  écrivit  au  comité  de  salut  public  que  Ter- 


1«7 


3i 


bre  de  lu  liberté  avait  été  coupé  a  Bédouin.  U  ae  rap- 
pela que  la  Vendée  avait  commenoé  ainsi;  il  crut 
nécessaire  de  faire  un  grand  exempte  pour  empêcher 
que  le  mal  ne  gagnât,  et  il  pensa  qu*il  fallait  brûler 
Bédouin.  (Violents  murmures.)  Il  envoya  les  arrêtes 
na*il  avait  ftris  au  comité  de  salut  public,  auquel  il 
disait  :  «  Si  vous  croyez  aue  les  mesures  que  je  voua 
propose  doivent  être  exécutées,  lattes  lire  à  la  Con- 
vention la  fetlre  que  je  vous  adresse  pour  elle,  et 
dunnez-moi  des  ordres.  Si  au  contraire  voua  les 
trouvez  mauvaises,  Jetez  au  feu  ma  lettre  et  mes  ar- 
rêtés.» 

On  vint  vous  lire  cette  lettre;  elle  était  conçue 
de  manière  que  vous  crûtes  que  tout  était  fait ,  que 
tout  était  consommé ,  et  vous  approuvâtes  la  con- 
duite deMaignet.  ^Nouveaux  murmures.) 

A  regard  de  la  jeune  Hlle  ,  elle  n*a  noint  été  en- 
voyée à  réchalaud,  comme  on  Ta  dit;  elle  est  encore 
eii'prlson  avec  son  père.  Vos  comités  sont  convain- 
cus que  le  décret  d'approbation  vous  avait  été  arra- 
ché ,  car  aucun  des  membres  qui  les  cofhposent  ne 
s*est  rappelé  d*avoir  entendu  lire  la  lettre;  mais  ce 
crime  est  celui  de  quelques  membres  du  comité  de 
su  tut  public. 

Merlin  (de  Douai)  :  Trois  délits  étaient  reprochés 
ù  Maignct  :  le  premier  était  la  mort  de  ta  Jeune  iille  : 
le  fait  est  fauï;  le  second  était  la  aréation  de  Tatrocc 
commission  d*Orange  :  vos  comités  ont  regardé 
cetie  création  comme  un  crime  ;  elle  eut  lieule  21 
floréal,  et  le  10,  deux  jours  auparavant,  ta  Conven- 
tion avait  décrété  la  suppression  de  tous  les  tribu- 
naux révolutionnaires  des  départements,  et  défendu 
d*en  établir  à  Tavenir  sans  un  décret  spécial.  Cepen- 
dant, Içsurlendemain,  quelques  membresde  l'ancien 
comité  de  salut  public  donnèrent  l'existence  à  cet 
affreux  tribunal.  Mais  le  crime  a  été  commis  à  Paris, 
et  Maignet  n'a  foit  qu'obéir  à  Tarrêté  du  comité.... 
{Plutiiur^voiw  :  Bt  il  a  méprisé  le  décret  de  laCon- 
venliou.)  Vos  comités  ont  pensé  que  c'étaient  les 
meneurs,  et  non  les  menés,  qu'il  fallait  frapper. 

*"  :  Ainsi  les  membres  du  comité  révolutionnaire 
de  Nantes  ne  sont  pas  coimables. 

Merlin  :  Je  ne  suis  qu'nistorien.  Le  troisième  fait 
étiiit  l'incendie  de  Bédouin.  Vos  comités  ont  consi- 
déré qu'on  ne  s'était  pas  borné  à  couper  l'arbre  de 
la  liberté  dans  cette  commune;  on  y  professait  hau- 
tement le  royalisme.... 

DuuEN  :  On  le  protège  aujourd'hui.  (Violents 
murmures.) 

Mbblin  :  Je  ne  veux  pas  dire  pour  cela  qu'il  ait 
été  juste  de  brûler  Bédouin  ;  car,  dans  mon  opinion 
et  dans  celle  des  comités,  c'est  un  crime.  Je  dis  donc 
que  le  royalisme  était  afliché  ouvertement  dans  cette 
commune.  Maignet  tut  averti  de  ce  qui  s'y  passait;  il 
réfléchit  au  parti  nu'on  avait  déjà  pris  dans  des  cir- 
constances semblables;  il  se  rappela  ce  qui  avait  été 
fait  a  Lyon  ,  à  Toulon  ;  il  crut  qu'une  pareille  me- 
sure serait  salutaire  pour  Bedouiii  :  il  rédigea  un  ar- 
rêté qui  ordonnait  que  cette  commune  serait  brû- 
lée. Avant  de  le  mettre  à  exécution ,  il  l'envoya  au 
comité  de  salut  public,  avec  deux  lettres  :  Tune 
pour  In  Convention  ;  elle  n'exprimait  pas  clairement 
si  l'arrêté  était  ou  non  exécuté;  dans  la  seconde  il 
demandait  des  ordres  au  comité  de  salut  public 
avant  de  se  porter  aux  mesures  de  rigueur  qu'il  avait 
projetées;  ainsi  le  comité  savait  qu'elles  n'étaient  pas 
exécutées.  Aucun  des  membres  des  comités  ne  s  est 
rappelé  d'avoir  entendu  lire  cette  lettre  ;  le  décret 
(l'approbation  vous  fut  surpris,et  dix-sept  jours  après 
on  brûta  Bédouin. 

RovERB  :  Je  demande  qu'on  montre  le  décret  ;  il 
n'existe  pas. 

PfiiiiiâBa  ;  U  faut  des  pièces  pour  démontrer  h 


fausseté  des  reproohea  gravei  «{u'oq  fiiit  à  Maignet  t 
ou  bien  il  faut  un  nouvel  examen  de  sa  conduite* 
Maignet  a  désobéi  au  décret  de  la  Codvention  pour 
obéir  aux  arrêtés  du  comité  de  salut  public.  11  a  eu 
l'initiative  des  mesures  atroces  prises  contre  la  com- 
mune de  Bédouin. 

BoissiBU  :  Merlin  rient  de  nous  dire  que  Maignei 
n'avait  agi  que  d'après  les  ordres  de  quelques  menw 
bres  du  comité  de  salut  public  ;  il  est  au  moins  leur 
complice. 

MoNTMAYAU  :  Non'-seulement  on  a  coupé  l'arbre 
de  la  liberté  dans  la  commune  de  Bédouin,  mais  on  j 
a  même  foulé  aux  pieds  le^  décrets  de  la  Conventions 
L'administration  de  district  avait  déjà  envoyé  ait 
commissaires  pour  rétablir  l'ordre  dans  cette  com- 
mune ,  avant  l'arrivée  du  représentant  du  peuple 
dont  vous  avez  approuvé  la  conduite. 

BovàRB  :  Il  n'y  pas  de  décreL... 

Gaston  crie. 

Maionbt  :  Le  14  floréal,  époque  à  laquelle  les  An* 
glais  occupaient  Toulon,  eties  Espagnols  bloquaient 
Perpignan ,  l'administration  du  district  m'écrivait  ! 
•  Parmi  les  communes  qui  font  l'objet  de  notre  sol- 
licitude, celle  de  Bédouin  mérite  le  premier  rang; 
l'aristocratie  et  le  brigandage  v  régnent  ;  l'arbre  de 
la  liberté  a  été  arrache ,  et  les  décrets  de  la  Conven- 
tion traînés  dans  la  boue.  •  Je  répotidais  à  la  nntioti 
du  salut  de  ce  département.  J'ai  dû  me  rappeler  oê 
qui  s'était  déjà  passé  dans  les  départements  méridio» 
naux ,  et  ne  pas  laisser  renouveler  ces  scènes  san- 
glantes dont  ma  tête  aurait  répondu.  J'ai  pesé  lé  mal 
et  le  remède  :  je  ne  me  suis  pas  dissimulé  que  la  me- 
sure était  sévère....  (PLuêiiun  voi»  :  C'est  atroce  !) . 
J'avais  écrit  deux  lettres,  l'une  au  comité ,  l'autre  a 
la  Convention;  celle-ci  fut  lue ,  et  ma  conduite  fut 
approuvée.  Le  décret  me  fut  envoyé  par  la  commis-* 
miasion  des  dépêches  ;  tous  les  Journaux  en  ont  fait 
mention ,  et  notamment  le  Journal  dêi  Déhaîi , 
n<»  605. 

BovÈRE  :  Le  décret  dont  on  parle  n'est  ni  dans  le 
feuilleton  nidans  le  Bulletin.  Le  tribunal  d'Orange 
a  fait  périr  une  foule  de  défenseurs  de  la  patrie/ 
Voici  ce  qu'écrivait  Maignet  à  cet  infâme  tribunal  : 

Avignon,  18  florëil. 

•  J'ai  instruit  la  Convention  nationale  de  l'atten- 
tat horrible  qui  a  été  commis  à  Bédouin  et  des  me- 
sures que  j'avais  prises.  La  commission  des  dépê- 
ches m'apprend  que  ma  conduite  a  été  approuvée. 
Les  obstacles  qui  arrêtaient  votre  marche  sont  le- 
vés ;  il  faut  que  vous  ressaisissiez  le  glaive  de  la  loi, 
qui  a  été  trop  longtemps  suspendu ,  et  que  Justice 
soit  faite.  Signé  Maionbt.  • 

On  demande  de  nouveau  la  lecture  des  pièces. 

Maignet  lit  d'abord  un  premier  arrêté  pris  pour  eii« 
voyer  à  Bédouin  des  forces  suflisantes  pour  saisir 
les  coupables;  il  lit  ensuite  Tarrêté  suivant  : 

LiBBRTB,  Egalité. 
kitt  tiom  du  peuple  françaU. 

«  Le  représentant  du  peuple  envoyé  dans  les  dd- 
partements  des  Bouches-du-Rhône  et  de  Vaiicluse, 
considérant  que  la  justice  ne  saurait  donner  trop 
d'éclat  à  la  venseance  nationale  dans  In  punition  du 
crime  abominaule  qui  s'est  commis  à  Bédouin;  que 
ce  n'est  qu'en  frappant  sur  le  lieu  même  où  il  a  été 
commis ,  et  au  milieu  dr  ces  contrées,  que  l'ariato* 
cratie  tourmente  dèpuissi  longtemps,  que  l'o.n  pourri 
porter  l'épouvante  dlins  l'âme  de  ceuic  qui  oseraient 
encore  méditer  de  nouveaux  attentats  ; 

•  Considérant  que  l'opiniAU'eté  que  les  individui 
saisis  comme  le  plus  fortement  prévenus  de  ce  crint 
mettent  à  n'en  pas  faire  connaître  les  principaux  au- 


158 


leurs  fait  présumer  ^e  tonte  la  commane  est  cri- 
nincllc  ;  .„ 

•  Considérant  qu'une  commune  qu*ttne  pareille 
•uspicion  poursuit  ne  saurait  exister  sur  le  sol  de  la 
liberté  ;  que  le  pays  qui  ose  s'élever  contre  la  vo- 
lonté générale  du  peuple ,  méconnaître  les  décrets 
de  la  Convention ,  fouler  aux  pieds  les  lois  que  la 
nation  s*est  faites,  renverser  le  signe  auguste  de  la 
liberté,  est  un  pays  ennemi ,  que  le  fer  et  la  flamme 
doivent  détruire; 

•  Ordonne  que  le  tribunal  criminel  du  départe- 
ment de  Vaucluse,  chargé  de  juger  révolutionnaire- 
ment  ce  crime  de  lèse  nation,  se  transportera  ilans 
le  plus  court  délai  à  Bédouin,  pour  y  instruire  la 
procédure,  et  y  faire  de  suite  exécuter  les  jugements 
qu'il  rendra  ; 

•  Ordonne  qu'aussitôt  après  Tex^ution  des  prin- 
cipaux coupables  l'agent  notifiera  à  tous  les  autres 
habitants  non  détenus  qu'ils  aient  à  évacuer  dans  les 
vingt-quatre  heures  leurs  maisons  et  en  sortir  tous 
les  meubles;  qu'après  l'expiration  du  délai  il  livrera 
la  commune  aux  flammes,  et  en  fera  ainsi  disparaître 
tous  les  bâtiments  ; 

•  Ordonne  qu'au  milieu  du  territoire  où  existe 
cette  infime  commune  il  sera  élevé  une  pyramide 
qui  indiquera  le  crime  dont  ses  babiUnts  se  rendi- 
rent coupables ,  et  la«atare  du  châtiment  qui  leur 
fut  infligé; 

•  Fait  défense  à  qui  que  ce  soit  de  construire  à  Ta- 
Tenir  sur  cette  enoemte  aucun  bâtiment,  ni  d'en  cul- 
tiver le  sol  ; 

•  Charge  l'agent  national  de  s'occuper  de  suite  de 
la  répartition  des  habiUnts  dans  les  communes  voi- 
sines reconnues  patriotes  ; 

•  Enjoint  aux  habiUntode  ne  point  abandonner 
la  demeure  qui  leur  aura  été  désignée,  à  peine  d'être 
regardés  comme  émigrés;  comme  aussi  de  se  présen- 
ter toutes  les  décades  devant  la  municipalité  desdite 
lieux,  à  peine  d  être  déclarés  et  traités  comme  sus- 
pects, et  enfermés  jusqu'à  la  paix. 

-  Le  présent  arrêté,  ensemble  les  différentes  let- 
tres de  l'agent  national  du  district  de  Carpentras  et 
du  commandant  du  4^  bataillon,  seront  imprimés, 
publiés  et  alhcliés  dans  l'étendue  des  deux  départe- 
ments, aux  frais  des  habitante  de  la  commune. 

•  Fait  à  Avignon,  le  17  floréal  de  l'an  2  de  la  répu- 
blique francise,  une  et  indivisible.  • 

Mai^net  lit  ensuite  sa  lettre  au  comité  de  salut  pu- 
blic, ainsi  conçue  : 

•  L'expédition  sur  Bédouin  est  faite,  citoyens  col- 
lègues. La  copie  de  la  lettre  de  l'agent  national,  que 
je  vous  envoie,  vous  instruira  du  succès  qu'ellea  eu; 
mais  elle  vous  apprendra  en  même  temps  que  les  in- 
dividus qui  sont  arrêtés  s'obstinent  à  garder  le  plus 
proruiul  silence,  et  que  lu  commune  enUcre  ne  craint 
pai  (le jtartager  l'inlainie  dont  ces  lorfaite  vont  facou- 
Vl!"  1 1*^  ^^  ^"'  avoisine  cette  commune  est  aussi 
détestable.  Il  n'y  a  que  de  grands  exemples  qui 
puissent  imposer  aux  scélérats  qui  habitent  ces 
contrées,  et  étouffer  ce  nouveau  germe  vendéen  qui 
îl!^"!?i  1.*^  "?"'"f«*»^i'-  J'ai  cru,  citoyens  collègues, 
qu  II  laiioit  donner  a  la  vengeance  nationale  un  grand 
caractère;  j  ai  investi  le  tribunal  criminel  dudé- 
•"■n"»*"^  du  pouvoir  révolutionnaire,  parce  que 
"  punition  ne  saurait  être  assez  prompte.  Le  20 
■•ce  mois  le  tribunal  se  transportera  dans  cette 
•ommune.  La  guillotine  sera  dressée  sur  le  lieu 
2g«  où  I  outrage  a  été  commis,  les  têtes  des  plus 
SE  f!\î7  ■""**"•••  ^'^'  ordonné  que  la  commune  en- 
Jjw  lOt  livrée  aux  flammes.  Ce  village  offre  une  po- 
fttinUpn  4ê  miUê  indMdm.  Vous  ne  sauriez  trop 

la  malveillance  dans  ces  départements, 


ùh  la  surveillance  et  la  tignenr  penyent  seules  évi- 
ter les  nouveaux  malheurs  que  le  modérantisme  al- 
lait y  faire  naître. 

•  Si  vous  trouvez  cette  nouvelle  mesure  trop  ri- 
goureuse, faites-moi  connaître  vos  intentions,  sup- 
primez ma  lettee  à  la  Conyention,  et  instruisez-moi 
au  plus  tôt  de  votre  décision  ;  mais  calculez  bien 
qu'elles  peuvent  être  les  suites  de  l'indulgence  pour 
un  délit  ^ssi  grave. 

•  P.  S.  Je  reçois  dans  ce  moment  une  lettre  de 
l'agent  national  du  district  et  du  commandant  du 
bateillon  de  l'Ardèche.  Vous  voyez  qu'ils  regardent 
la  destruction  de  Tinflme  Bédouin ,  où  il  a  déjà  été 
envoyé  cinq  commissaires,  comme  le  seul  moyen  de 
préserver  toutes  ces  contrées  des  complote  .qui  de- 
puis longtemps  y  sont  tramés.  • 

Enfin»  il  lit  celle  destinée  k  la  Convention,  que 
voici: 

•  C'est  au  moment  où  la  r^blîque  française 
porte  reSroi  sur  tous  les  trônes,  que  1  infâme  com- 
mune de  Bédouin,  plus  audacieuse  que  tous  les  des- 
potes, ose  se  soulever  contre  la  votonté  nationale, 
fouler  aux  pieds  les  décrète  de  la  Convention ,  ren- 
verser le  signe  auguste  de  notre  régénération,  l'ar- 
bre de  la  liberté. 

•  Denuis  longtemps  Bédouin  a  manifesté  u  haine 
contee  la  révolution.  Cinq  commissions  successives 

Îr  ont  été  envoyées  pour  punir  ses  crimes  ;  des  scé- 
érate  ont  été  enleva ,  mais  le  ^erme  aristocratique 
V  a  toujours  fécondé  et  produit  de  nouveaux  for- 

•  Située  au  pied  du  mont  Ventouse,  entourée  de 
collines  et  entrecoupée  de  défilés  nombreux ,  cette 
contrée  présentait  tout  ce  qu'il  fallait  pour  former 
une  nouvelle  Vendée. 

•  Il  ne  faut  pas  en  douter,  tel  éteit  le  projet,  puis- 
que les  brigands  ont,  dans  leur  coup  d'essai ,  été 
aussi  loin  que  l'ont  fait,  au  milieu  de  leurs  plus 
grands  succès ,  tous  les  scélérate  qui  les  ont  pré- 
cédés. 

•  Aussitôt  que  j'ai  appris  cet  attentet  horrible 

'  contre  la  maiesté  du  peuple,  j'y  ai  envoyé  trois  cents  . 
hommes  du  bateillon  de  l'Ardèche ,  qui  dans  toutes 
mes  opérations  civiques  m'a  si  bien  secondé.  J'ai 
fait  incarcérer  prêtres,  nobles,  parente  d'émigrés,  au- 
torités constituées. 

•  J'aimais  à  croire  que  je  pourrais  trouver  quel- 
ques individus  qui,  pénétrés  de  l'horreur  du  crime 
commis  dans  cette  commune, s'empresseraient  de 
soustraire  leurs  noms  à  l'infamie  et  m'indiqueraient 
les  coupables;  mais  un  silence  absolu  ne  me  prouve 
que  teop  qu'ils  ont  tons  participé  au  crime. 

•  Alors ,  ne  voyant  plus  aans  cette  commune 
qu'une  horde  d'ennemis,  j'ai  investi  le  tribunal  cri- 
minel du  pouvoir  révolutionnaire ,  pour  faire  tom- 
ber de  suite  les  têtes  les  plus  coupables ,'  et  j'ai 
ordonné  qu'une  foi$  ces  exécutions  laites  les  flam- 
mes fissent  disparaître  jusqu'au  nom  de  Bédouin. 

•  Périssent  ainsi  tous  ceux  qui  oseront  braver  la 
volonté  nationale  et  méditer  de  nouveaux  complote 
contre  la  liberté  française  !  • 

Maignbt  :  Vous  voyez  qu'il  y  avait  une  grande 
vengeance  nationale  à  exercer;  que  tous  les  indi- 
vidus avaient  £ardé  le  silence  sur  les  coupables. 
D'ailleurs,  ce  néteient  pas  quelques  individus  seu- 
lement :  Bédouin  entier  avait  toujours  montré  des 
sentiments  contraires  à  la  révolution  et  la  plus  forte 
répugnance  â  être  réunie  à  la  république  française. 
Si  vous  en  voulez  une  preuve,  je  vais  vous  la  don- 
ner ;  je  la  tire  de  ce  jugement.  (On  murmure.)  Je 
ne  sais  pourquoi  on  murmure:  il  ne  s'aeit  pas  de 
la  commission  d'Orange,  mais  du  tribunal  de  Vau- 


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159 


clnse ,  tnstitaë  non  par  moi ,  mais  par  le  peuple 
entier. 

Il  lit  le  eùnêidérani  d'un  jugement  comme  il. 
suit  : 

•  Considérant  que,  depuis  le  commencement  de 
la  révolution,  les  nabitant  de  Bédouin  n'ont  cessé 
de  manifester  des  sentiments  contre -révolution- 
iiaires; 

•  Que,  le  13  Juillet  1791  (vieux  style),  il  fut  déli- 
béré par  les  habitants  réunis  de  retirer  les  pouvoirs 
qu'ils  avaient  concédés  à  des  électeurs  pour  expri- 
mer leur  vœu  de  réunion  à  la  France,  et  de  décla- 
rer nul  le  vœu  qui  pourrait  déjà  avoir  été  émis  à 
cet  égani  ; 

•  Que,  dans  les  mois  de  mai  et  juin  1790  (vieux 
style),  il  se  forma,  dans  le  territoire  de  Brante,  com- 
mune à  deux  lieues  de  Bedonin ,  un  rassemblement 
(le  rebelles  aui  eurent  pour  chef  Rassy,  dit  Flassan, 
ci  devant  noble,  habitant  à  Bédouin,  et  qu'une  par- 
tie des  habitants  de  cette  commune  concoururent  à 
former  cet  attroupement  de  rcvoltt^  ; 

•  Que,  dans  le  courant  de  Tété  dernier,  quoique 
les  sectionnaires  marseillais  n'eussent  pu  pénétrer 
jusqu'à  Bédouin ,  qui  se  trouve  fixé  au  pied  du 
mont  Ventouse,  les  habitants  de  cette  commune  re- 
belle ne  laissèrent  pas  que  de  professer  les  senti- 
ments des  fédéralistes,  et  qu'on  y  vit  les  lois  violées, 
les  autorités  constituées  avilie»  et  emprisonnées  ; 

•  Qu'à  cette  époque,  et  tandis  qu'à  Carpentras  et 
autres  communes  voisines  le  peuple  ^empressait  de 
86  réunir  pour  l'acceptation  de  l'acte  constitution- 
nel, la  commune  de  Bédouin  rejeta,  le  14  juillet, 
cette  acceptation  ; 

•  Que  c'a  toujours  été  infructueusement  que  l'ad- 
ministration du  district  de  Carpentras  a  envoyé  des 
commissaires  pendant  six  mois,  soutenus  de  la  force 
armée,  pour  réduire  les  rebelles  de  cette  commune 
et  y  faire  revivre  le  règne  de  la  loi  ; 

•  Que,  dans  le  moment  que  les  armées  de  la  répu- 
blique font  mordre  la  poussière  aux  satellites  des 
tyrans  sur  tous  les  points  de  nos  frontières,  et  que 
le  gouvernement  révolutionnaire  terrasse  d'un  bras 
vigoureux  tous  les  ennemis  de  l'intérieur,  les  auto- 
rités constituées  de  Bédouin  l'infâme  osent  accorder 
une  protection  ouverte  aux  suspects  et  aux  contre- 
révolutionnaires  ;  qu'au  lieu  d'ordonner  leur  arres- 
tation, aux  ternies  de  la  loi  du  17  septembre  (vieux 
style),  elles  n'ont  pas  craint  de  faire  des  démarches 
publiques  pour  obtenir  l'élargissement  de  ceux  qui 
étaient  en  réclusion  par  la  surveillance  de  quel- 
ques autorités  étrangères  à  cette  commune  ; 

•  Que  c'est  au  milieu  des  triomphes  de  la  répu- 
blique que  la  municipalité  de  Bédouin  ose  conserver 
soigneusement  Téciissou  qui  représentait  les  armes 
du  tyran  Capet  et  les  chaperons  des  anciens  consuls, 
comme  pour  en  faire  usage  dès  le  premier  jour  de  la 
contre-révolution  ; 

•  Que,  dans  la  nuit  du  12  au  13  floréal,  des  mains 
sacrilèges  ont  osé  se  porter  sur  le  signe  auguste  de 
notre  liberté ,  et  l'ont  arraché ,  jeté  le  bonnet  qui 
le  surmontait  dans  un  puits,  et  1  arbre  le  loug  d'un 
ruisseau  ; 

•  Que,  dans  le  même  instant,  les  d<k:rets  de  la 
Convention  nationale  ont  été  détacKés  de  devant  la 
porte  de  la  maison-commune ,  foulés  aux  pieds  et 
précipités  dans  la  lK>ue,  à  une  distance  très-considé- 
rable du  lieu  d'où  ils  avaient  été  arrachés  ; 

•  Que  c'est  deux  jours  après  cet  horrible  attentat 
que  la  municipalité  ose  délibérer,  de  concert  avec 
le  comité  de  surveillance,  qu'il  n'y  a  aucun  suspect 
dans  leur  territoire ,  quoique  cette  petite  corfimune 
ait  fourni  an  delà  de  vmgt  émigrés,  a  qui  les  parents 


ont  fourni  les  moyens  de  quitter  leur  patrie  pour 
aller  se  ranger  sous  les  drapeaux  de  ses  ennemis» 
et  qu'elle  renfermât  six  prêtres  réfractaires ,  deux 
religieuses  insermentées ,  et  plusieurs  ci-devant  no- 
bles, marquis  et  barons  ^  tous  aristocrates  de  89; 
nialeré  (|u'on  y  ait  tenu  des  propos  tendant  à  réta- 
blirla  royauté  en  France,  qu  on  ait  tenté  de  s'oppo- 
ser au  recrutement,  et  qu'on  y  fit  ouvertement  l'a- 
giotage; 

'  •  Que,  dans  la  commune  de  Grillon,  éloignée  de 
demi-lieue  seulement  de  celle  de  Bédouin,  dans  la 
nuit  du  9  au  10  mars  1793  (vieux  style),  l'arbM  de 
la  liberté  avait  également  été  arraché  et  profané; 

•  Que,  dans  ta  salle  de  la  soi-disant  Société  po- 
pulaire de  Bédouin,  on  Ht  encore  des  inscriptions 
qui  retracent  le  fanatisme  le  plus  hideux,  et  les  pré- 
jugés avilis^ntsdans  lesquels  les  habitants  de  cette 
commune  ont  vécu  jusqu'à  ce  jour;     * 

«  Que,  dans  la  maison  de  la  plupart  des  accusés, 
on  a  trouvé  des  signes  contre- révolutionnaires, 
semblables  à  ceux  aue. portaient  les  rebellés  de  9ë- 
signan  et  de  Jalès,  aes  cocardes  blanches,  des  titres 
de  noblesse,  des  brevets  signés  Louû,  des  patentes 
du  pape,  des  registres  contenant  des  titres  féodaux, 
des  cachets  portant  armes ,  fleurs  de  lis,  couron- 
nes, etc.,  des  timbres  pour  imiter  ceux  de  l'ancien 
pays  de  Provence,  des  arbres  généalogiques,  des 
correspondances  criminelles  entretenues  soit  avec 
des  émigrés,  soit  avec  des  ennemis  de  l'intérieur, 
et  tout  ce  qui  peut  constater  l'aristocratie  la  plus 
I  invétérée; 

j  «  Considérant  que,  tandis  que  les  hommes  sans 
'  mœurs  et  sans  respect  pour  les  lois  ^  permettent 
des  violences  inouïes  contre  les  ignorants  et  les  fai- 
bles, les'  membres  des  autorités  constituées  étaient 
les  premiers  à  corrompre  l'esprit  public,  soit  en  pro- 
tégeant ouvertement  les  ennemis  de  la  révolution, 
soit  en  prostituant  le  nom  sacré  de  patriotes,  soit, 
en  un  mot,  en  trafiquant  de  leur  autorité  à  vil  prix, 
dans  l'intention  d*arréter  la  marche  du  gouverne- 
ment révolutionnaire  ; 

'  «  Considérant  enfin  qu'il  se  réunissait  dans  cette 
commune  ou  ses  environs  quantité  de  prêtres,  reli- 
gieuses insermentés,  et  autres  personnes  suspectes  ; 
que 'tout  annonçait  un  complot  contre-révolution- 
naire et  prêt  à  éclater;  que  ce  complot  aurait  été 
d'autant  plus  dangereux  et  difficile  qu*il  eût  été 
puissamment  secondé  par  la  situation  de  cette  com- 
mune ,  qui  se  trouve  adossée  au  mont  Ventouse^ 
montagne  énorme  et  de  difficile  accès;  qu'il  impor- 
tait en  conséquence  d^arrêter  un  déluge  de  maux 
dans  leur  source...» 

Maignet  :  Bédouin  a  toujours  été  un  refuge  |K>ur 
les  fédéralistes,  les  royalistes;  il  pouvait  devenir  le 
germe  d'une  seconde  Vendée.  En  vain  l'on  en  avait 
oté  les  eoupables  connus,  leurs  principes  étaient 
restés.  La  mesure  que  j'ai  prise  l'avait  été  pour  des 
communes  plus  considérables:  mon' devoir  était  de 
chercher  à  étouffer  en  naissant  ce  noyau  de  guerre 
civile. 

BovÈRB  :  La  commune  de  Bédouin  a  envoyé  son 
député  à  la  fédération  de  92  ;  ses  habitants  ont  prêté 
le  serment  à  la  république,  et  toutes  les  horreurs 
débitées  contre  la  totalité  de  cette  commune  vien-  ^ 
nent  d'un  scélérat  nommé  Barjavel,  qui  avait  juré 
sa  perte. 

***  :  On  a  dit  que  la  commune  de  Bédouin  était  un 
repaire  d'aristocrates  et  de  royalistes;  il  suffit  de 
connaître  la  composition  de  cette  commune  pour  se 
convaincre  du  contraire. 

Bédouin  renferme  à  peu  près  huit  à  neuf  cents  ha- 
b'^ants,  parmi  lesquels  je  défie  de  trouver  six  ci- 


160 


(oyens  qui  jouisfient  iTan  reretinile  1,000  livres;  les 
•utrf s  sont  oavriers  ou  cultivateurs  :  or  Je  vous  de- 
mande s'il  est  possible  de  représenter  cette  eom- 
BiunA  comme  devant  donner  les  mêmes  craintes  que 
Lyon  et  Toulon. 

L'arbre  de  la  liberté  a  été  arraehé,  èla  vérité; 
nais  il  est  constant  aujourd'hui  que  ce  dtMit  a  été 
^mmis  par  des  hommes  qui  se  disaient  patriotes... 
(Murmures  de  quelques  membres.) 

DuHKM  !  Dites  aussi  que  ce  sont  les  patriotes  qui 
ont  livré  Toulon.  (Quelques  applaudissements.) 

**'  :  Oui,  je  le  répète,  Ton  sait  aujourd'hui  que  ce 
délit  a  été  commis  par  des  hommes  étrangers  à  In 
eommuncdc  Bédouin,  pnr  des  hommes  qui  passaient 
pour  patriotes  parce  qu^ils  portaient  un  bonnet 
rouge,  et  qui  partout  ont  baigné  leurs  mains  dniis 
It  sang.  En  voi(à  assez.  Je  crois,  pour -venger  cette 
petite  commune  du  reproche  qui  lui  a  été  fait. 

Je  veui  croire ,  comme  Ta  dit  Maignet,  qu*il  n*a 
rien  fait  sans  rautorisation  de  Tancien  comité  de  sa- 
int public;  mais  la  vie  des  hommes  est-elle  donc  si 
peu dechose, qu'un  représentant  du  peuple  qui  n>st 

3u'à  cinq  lieues  d'une  commune  accusée  se  contente 
'f  nvoyer  des  commissaires,  et  n'aille  pas  lui-même 
a*MSurer  des  faits ,  tâcher  de  ramener  les  citoyens 
égarés,  et  faire  lojiiber  la  veneeance  des  lois  sur  les 
seuls  coupables?  (Vifsapplatiaissements.)  Non,  c'est 
sur  le  simple  rapport  de  ses  aeents  que  Maignet  écrit 
i  la  Convention  que  cette  malneureuse  coimimnerst 
totalement  en  rébellion,  et  qu'il  a  pris  contre  elle 
des  mesures  violentes.  Jamais  Maignet  ne  s'excu- 
sera ,  à  mes  yeui,  de  s'être  ainsi  conduit,  (On  ap- 
plaudit.) 

Citoyens,  an  grand  délit  national  a  été  commiiï,  il 
dnit  être  puni  ;  mais  la  dispersion  des  habitants  de 
Bédouin  demande  également  une  prompte  ven- 
geance. (On  applaudit.) 

Claczel  :  Je  suis  loin  de  croire  que  notre  collègue 
Maignet  ne  crût  avoir  des  motifs  suffisants  pour  pro- 
pos4T  les  mesures  atroces  que  rancien  comitt^  de  sa- 
lut public  a  fait  mettre  à  exécution  ;  il  est  cependant 
on  fait  que  doit  connaître  la  Convention  nationale. 
On  vous  a  représenté  Bédouin  comme  le  ren:iire  des 
aristocrates;  eh  bien,  apprenez  que  cette  petite  com- 
mune ,  composée  de  neuf  cents  habitants,  a  envoyé 
aux  frontières  deux  cent  soixante-seize  défenseurs. 
Quelle  est  la  ville  qui,  eu  égard  à  sa  population,  en 
ait  fourni  i^tant? 

DuHBM  :  C'est  la  réquisition  qui  les  a  fait  partir. 
(Murmures.) 

CicooNB  :  On  ne  peut  disconvenir  que  Maignet 
ait  eu  au  moins  Tinitiative  du  crime. 

Un  autre  membre  observe  que  des  citovens  de  la 
commune  de  Bédouin  ont  les  premiers  dénoncé  le 
délit  dont  il  s'agit  au  représentant  du  peuple;  Il  en 
tire  la  conséquence  qu'il  y  avait  des  patriotes  é  Be« 
douin  ;  et  ces  hommes  là,  dit-il,  ont  été  ruinés,  brû- 
Mi  et  vexi^  comme  les  autres. 

Clauzxl  !  Plusieurs  membres  demandent,  et  Je  me 
Joins  à  eux,  que  le  comité  des  procès- verbaux  soit 
chargé  de  vous  présenter  roriginêl  du  décret  cilé  par 
Maignet. 

Cette  dernière  proposition  est  adoptée. 

Crassous  :  On  a  demandé  le  renvoi  aux  trois  co^ 
mités  pour  faire  un  rapport  ;  J'observe  que  di^jà  ce 
renvoi  a  été  prononcé,  que  déjà  le  rapport  a  été  fait, 
et  que  vos  trois  comités  vou$  ont  déclaré  qu*il  n'y 
avait  pas  lieu  ft  examen.  Hier  on  vous  fit  un  rapport 
oontenant  des  faits  contre  Maignet;  eh  bien,  ce  rap- 
port a  été  renvoyé  à  la  commission  des  Vingtet  Uo. 
Je  demande  Tordre  du  jour  jusqu'à  ce  rapport. 

Courtois:  Je  demuide  l  produire  les  nouvellei 
(iècea  que  j'ti* 


BoCDiN  :  Appelé  à  voter  dans  les  trois  comités  sur 
la  dénonciation  fiiite  contre  notre  collègue  Maignet, 
et  moi  aussi  j*ai  déclaré  que  Je  né  pensais  pas  qu'il  y 
eût  lieu  à  examen  contre  lui,  parce  qu'it  nous  re- 
présenta un  décret  de  la  Convention  nationale  qui 
approuvait  sa  conduite.  On  •  prétendu  que  ce  décret 
irexistait  pas;  eh  bien,  qu'on  me  Justibe  de  ce  fait, 
et,  le  premier,  je  voterai  pour  le  décret  d'accusation 
contre  Maignet. 

Lbcûintbc  (de  Versailles)  ;  U  exista  ce  décret, 
mais  il  a  été  rendu  sur  on  faux  exposé. 

CocJBTOig  :  Je  demande  que  la  Convention  or* 
donne  le  dépOt  des  pièces  que  j'ai  en  ma  possession. 

Crassous  :  Si  vous  ordonnez  un  nouveau  renvoi, 
il  but  que  vous  rapportiez  le  décret  par  lequel  vous 
avez  envoyé  hier  le  discours  de  Courtois  aux  dépar- 
tements, aux  armées  et  à  U  eommistion  des  Vingt- 
ct-Un. 

MÉAUixB  :  Un  nouveau  renvoi  n*est  pas  néces* 
saire  :  la  commission  des  Vingt-et  Un  a  les  pièces; 
s*il  existe  des  faits  nouveaux,  elle  les  insérera  dans 
son  rapport.  Je  demande  donc  Tordre  du  jour. 

On  cfemaiide  le  renvoi.  1^  tumulte  règne  un  mo* 
ment  dans  Tassemblée.  Les  membres  de  Tcxtréinité 
s*agitent  et  crient  dans  le  bruit  :  •  On  veut  assassin 
ner  les  palrioteal  •  La  calme  renaft,  et,  sur  la  t)r(>po- 
sition  de  Letnurneur,  la  Convention  passe  à  Tordre 
du  jour,  moti  vésur  ceque  Guy  ton^Morveau  doit  faire 
UP  rapport  sur  Maignet. 

La  séance  est  leVee  a  six  heures. 

AT.  B.  Dans  la  séance  du  10,  la  Convention  a  dé- 
crété que  Tanniversaire  de  la  mort  du  tyran  Capet 
sera  célébré  le  21  janvier  (vieux  style),  dans  toutes 
les  communes  et  aux  armées  de  terre  et  de  mer  de  la 
république,  par  une  fête  nationale  qui  sera  renou* 
velée  chaque  année  à  la  même  époque. 

La  Convention  a  décrété  que,  le  lendemain  de  cette 
fête,  elle  entendrait  le  rapport  dont  elle  a  chargé  les 
comités  sur  la  famille  Capet. 

GRAVURES. 

V^ricain  hospitalier,  peint  par  G.  HorUad,  ft  gravé  en  ' 
couleur  par  U  ciiojrenae  Bo1l«i;  »c  vend  à  l'aria,  ebci 
Depeuille,  rue  Franciade,  aeciion  de  Boô-Cepi«il,  vfi  Si. 

Cette  estampe .  qui  fait  pendant  à  celle  de  U  Tf^iu  de» 
f^gret,  publiée  Tannée  dernière,  a  poor  épigraphe  ce  paa- 
sege  d*un  discouri  prononcé  à  la  Convention  naiiooale  par  un 
hoinine  de  eonleur,  le  16  pluviôse  de  i*«n  S  :«tes  noirt  sont 
d'im  cafaetère  doua  et  humain.  An  milieu  det  horreurs  de  la 
^erre,  ila  sont  toojoura  restda  fidèles  à.la  France  ;  j'apporte 
ici  leur  sormeat  de  wiwrû  et  de  meirir  Françaia.  Ldgialeteiira, 
reodci  ooa  frèrei  A  le iiff  dreUa  MiHreU  •  et  vea  aema  j  se- 
ront bénis.  » 

Un  vaisseau  a  fait  naofrageiur  la  côte  d'Afrique  ;  une  jeune 
femme  et  son  Jeune  mari,  uo  petit  eofalit ,  i|uelquea  autrca 
passagers  et  dent  matelots  font  jetés  sur  k  nvare;  ila  trou- 
vent dana  «ne  famille  noire  loua  les  aecoora  de  rnospitalité  ; 
les  uns  s*empressent  autour  des  deux  époui,  les  secourent  et 
les  raaauretit;'nn  autre  eppreche  d'un  bon  feu  wi  homme  de 
rdquipage,  et  lui  réchauffe  lea  pieds  f  un  troiaiène  fait  boir« 
i  un  passager  défaillafit  UM  ligueur  fpiriuieiiae ,  taudis  qv*è 
rentrée  de  le  cahute  hospitahère ,  qu'eu  aperçoit  deoa  io 
fond»  un  autre  noir  écoute  les  récits  des  dcui  matelots;  U 
foudre  éclate,  et  leç  bons  Africains  q*j  font  pas  plus  d>iteo- 
tien  que  les  malheureui  dont  ils  s^oceupent. 

Toute  cette  ai«kne  ea  pleiue  d'intérêt  et  paHiiltement 
eiéoatéet  tllu  aatialait  en  uséMe-tempa  le  ralaen,  Thumeiiité, 
le  hou  £o6t.  U  y  mu  4^mt  hêmmê  de  aodeur,  qui  lui  aert  d'é- 
pigraphe, et  qui  était  lu  vflHi  daa  htmmea  de  teuua  les  eeu^ 
leurs,  ))ourvu  qii*ilf  emaent  un  coeur  d'homoie,  ett  eocempli; 
les  nègres  sont  lihref  dupa  lei  coloniea  fraoçaisua.  La  pre* 
mière  des  deui  gravures  publiées  par  DepeuiUe  montrait  U 
udcueuté  de  lot  ailranekir,  pur  le  apeetacle  de  la  barbarie  df 

I  IfWa  Bultre*;  eelle*ei  le  prouve  encore  en  ocrant  aui  vcus 
las  nrtm  hmnitaliàfii  de  —a  paétundua  auuvgua  d'Afrique, 

I  anartit  ai  oaieniniéa  par  les  trait  ssuYagui  d*£uropa. 


GAZETTE  NATIONALE  ..  LE  MOITEUR  UNIVERSEL. 

N®  111.  Primidi  21  Niyosb,  l'an  $•.  {Samedi  10  Janvier  1795,  vieux  style,) 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

De  la  VittuU ,  U 10  dietmbrt.  —  Le  lax€  dsf  nouveaux 
maîtres  de  U  Pologne  intulte  k  la  raiière  publique.  Le 
prince  Repoin ,  gouverneur  général  de  Litkuanie  el  de 
Saroogitié,  a  obtenu  de  rimpératrice  6,000  roubles  pour 
les  seules  dépenses  de  sa  table. 

Ce  prince  russe  a  partagé  son  gouvernenent  en  quatre 
divisions»  é  chaeune  desquelles  il  préside.  La  première 
est  pour  les  affaires  criminelles;  la  seconde,  pouir  les  af- 
faires civiles  (  la  troisième,  pour  la  police;  t(  laqualrièmp, 
pour  les  alliires  économiques. 

Le  corps  de  quinie  à  seite  cents  hommes,  qnl  a*tst 
rendu  aui  Russes,  à  été  conduit  dans  Tintérieur  de  la 
Russie  pour  y  être  incorporé  individuellement  dana  Tar- 
mée  de  Catberine. 

—  Les  troupes  prussiennes  s*étendent  de  plus  en  plos 
danr  le  palatinat  de  Sandomir,  toujours  en  longeant  la  Vis- 
tule.  Los  Russes  leur  cèdent  la  place  partout  où  elles  pas' 
sent  sur  la  rive  droiie  de  ce  fleuve. 

ITALIE. 

Licourne  ,  fe  15  décembre.  L'escadre  anglaise  qoi  était 
au  golfe  de  Saint-Florent,  en  Corse,  est  sortie  pour  une 
croisière,  et  est  venue  dans  celte  plage.  Elle  est  compo- 
sée ainsi  qu^il  suit  : 

Un  vaisieau  de  100  canons  ;  troU  de  90  ;  huit  de 74 ;  nn 
de  04; 

Une  frégate  de  80,  et  det^  de  82. 

En  tout,  seiie  bAUmepts^ 

Celle  escadre  est  sois  le  commandement  dn  lice-amiral 
Houaro  ;  elle  vient  de  croiser  dans  la  merde  Provence. 

—  On  a  arrêté  à  Venise,  stir  la  demande  du  ministre  de 
la  république  française,  un  nommé  Collot,  jadis  employé 
dans  Tarmée  française  d'Italie.  Cet  homme,  chargé  de  faire 
divers  payements,  avait  pris  la  fuite ,  em^rtant  avec  Jui 
une  somme  convdérable  en  assignats» 

AffGLETERRE. 

fin  dt  U  ftoUéwre  P0nir§  Tfumm  Bardy ,  ucritaire  de 
la  Société d^$orreipmidait€e,  «us  tn  causé  av^Jérémie 
Joyce  ,  Jean  HornTooke^  Tkonuu  HoUrofi^  Jean-A. 
Boui»4y,  Utm  RiekUr,  Sleward-Kidd-Jean  TJUlwaU  et 
Jean  Baxter^  membru  de  la  fnéwu  Sodélé, 
Les  témoins  deracensé  sont  entendus.  La  plnpatt  d'en- 
tre eux  ont  été  membres  de  diverses  Sociétés.  Ils  dédareiU 
que  Tobjet  de  ces  Sociélés  était  d'obtenir  «ne  réforme  par- 
lementaivet  maif  par  des  voies  légales,  et  sans  recourir  h 
la  force. 

Le  duc  de  Richmond  parait  à  la  barre.  Il  reconnaît  sa 
lettre  au  colonel  Sharma  j,  dont  le  clerc  de  la  Chambre 
des  pairs  (ait  lecture. 

On  lit  aussi  une  protestation  signéeparles  ducs  de  Rich- 
mond, Devonshire  el  Portland,  et  qui  eul  lieu  lorsque, 
pendant  le  oaiin  de  la  guerred'Àaérique,  diverses  proposi- 
tions ayant  été  faites  à  la  Chambre  contre  le  mauvais  état 
ie  la  représenlatioa,  elles  forent  rtjetées  par  elle. 

Sheridan  est  ensuite  entendu.  Il  déclare  qu'au  mois  de 
Vars  1793  Hardy  ofirit  de  lui  remettre  tous  les  registres 
et  papiers  appartenant  à  la  Société,  et  de  loi  donner  un 
daail  exact  des  différents  lieux  oè  les  divisions  de  la  So- 
ciété élai^M  plaeées.  Il  a  entendu  dfife^ne  le  seul  nli^et  de 
Uardj  était  uae  réforaie  parlemealaire  ,  suifant  les  prin- 
cipes du  duc  de  Richmond. 

Le  comte  de  Lauderdale  croit  également  que  Taccusé 
ne  voulait  armer  k  r«bjet^u*H  avait  en  vue  ^«e  par  des 
%iies  c— atitutionnclles. 

Après  raudttiMi  des  téasoiM«  VmneaX  Gibhs  fiaide  en 
laveur  de  racc«sé. 

U  êoUiekeur  général  :  U  pnooédvffe  par  jury  est  la 
f  aiivegarde  de  U  CMWiitutM»  f  ctfe  «it  iioe  harriÀ-M  que  la 
ly rauinie  de  Gromwell  n*a  osé  franchir.  Cest  une  force  qui 

l*Sirie,^rovMX, 


a  suffi  pour  ébranler  Jacques  sur  son  trdoe.  Mais  il  est 
peut-être  utile  de  rappeler  au  jnry  qu'il  doit  surtout  se  dé- 
fendre du  prestige  de  Téloquenee,  et  ne  s'attaeher  qa*aux 
circonstances  soumises  k  son  examen,  sans  se  laisser  In- 
fluencer par  aucune  discussion  potltique.... 

Le  conseil  de  Paeeusé  parait  s*étrepltttdt  oeciipé  à  Me  ^ 
le  procès  à  M.  Plit,  au  due  de  Richmond  et  à  tons  les mfaii* 
tres,qu*àjustiricf  son  client. 

Le  système  de  trahison  dont  le  prisonnier  est  acenséest 
tel  qu'en  paraissant  vouloir  une  chose,  il  en  proposait  une 
autre  ;  il  n*est  pas  étonnant  qu'il  existe  une  contradiction 
entre  quelques-uns  de  ses  propos  et  ses  actions,  et  qu'on 
puisse  trouver  dans  les  uns  des  moyens  de  pallier  1«i  au- 
tres. C'est  par  cette  même  raison  qoetrès-peu  de  personnes 
étaient  initiées  dans  les  secrets,  et  connaissaient  le  vrai  bat 
du  rassemblement  et  des  délibérations  des  différentes  Sa-, 
ciétés,  tandis  qne  la  multitude  se  laissait  conduire  afen- 
glément  par  Timpulsion  des  cheflk  Ces  che(ii  étalent  parve- 
nus è  faire  croire  à  la  plupart  des  mensbresque  leur  unique 
but  était  de  ramener  la  Chambre  des  communes  k  ce  qa'dle 
était  avant  la  révolution.  Mais  les  setils  changements  ar- 
rivés dans  cette  Chambre  depuis  cette  époque  sont  l'acte 
qui  règle  la  durée  du  parlement  à  sept  ans,  et  d*autres  ac* 
tes  tendant  à  exclure  du  droit  de  voter,  dans  les  élections, 
toutes  personnes  sous  Tinfluence  immédiate  dq  govverQe* 
ment;  ep  sorte  qu*on  peut  assurer  qu'au  lien  dé  déchoir 
le  régime  delà  Chambre  des  communes  s'estperifectlonné. 

Ce  qui  peut  servir  k  excuser  la  grande  majorité  ne  peut 
justifier  ceux  qui  n'emploient  ces  moyens  qne  pour  la 
tromper.  Les  d^)ositions  prouvent  que,  daqs  ce  petit 
nombre,  l'accusé  estnn  de  cens  qui  sont  le  plus  impliqué^. 
On  avait  nommé  un  comité  secret;  il  fut ,  a  la  vérité,  dis- 
sous ,  mais  en  se  réservant  le  pouvoir  d*gn  ^lireun  nouveau» 
dont  le  nom  des  membres  ne  serait  pas  même  connu  du 
reste  de  la  Société.  Un  td  comité  n'a  jamais  existé ,  même 
dans  la  république  de  Venise.  Pourquoi  ne  pas  agir  onrer- 
tcment  dan^  un  gouvernement  où  toute  espèce  (f  opinion 
spéculative  est  permise,  pourvu  qn'oo  ne  la  fasse  pas  cir- 
culer d'une  manière  dangereuse?  modification  nécessaire, 
puisqa*aocun  gouvernement  ne  pourrait  résisteir  aux  ef- 
foru  coRstants  et  redoublés  qnrou  ftralt  pour  ^j^tfcr  t^H 
pinion. 

Il  est  de  ressence  de  tout  bon  gouTerpenient  qué  fptoS* 
nistration  soit  dans  les  mains  de  peu  de  personpes,  éQ 
comparaison  de  la  généralité.  Et  comment  la  soumisoon 
de  la  généralité  au  règlement  d'un  petit  nombre  pourrait- 
elle  être  assurée  sans  la  force  de  ropinion  ?  L*As#ei|il>iée 
constituante  de  France  elle-même  "n'a  pas  cru  pouvoir  per* 
mettre  indéfiniment  toute  opinion  epéeulative  sans  riestric- 
tion.  L'accusé  ne  peut  alléguer  qu^  était  trompé  ;  il  si- 
gnait toutes  ies pièces,  fit  c'est  è  kri  qne  toutes  les  lettres 
étaient  a^essées.  Rien  ne  ae  Msait  sans  tei  danste  cuaité 
secret ,  dont  toutes  les  déUMrciies  étaicaCfcu^étrtdirigées 
par  U  corrcspoodauee.  SesiiaisoM  avec  Tooke,  Maifa- 
lot  et  Skirvlug  élaieat  myslérteuscs,  et  i^  p'j  cut^uc  IHk- 
cMéHargaïuietSMrviug  qui  «usent d'abord  aouuaiiiuce 
de  rinlention  d'envoyer  des  délégués  à  la  Convenféou  d'E* 
dimlMurg, 

On  peut  apprécier  le  dauber  de  ees  fladélés  et  la  nature 
de  leurs  iitfeutioos  par  oeUc  pbrase  d*uu  des^aenB^uas  : 
•  U  faut  arracher  jusqu'aux  racines  de  la  monarchie^  paur. 
planter  la  démocratie  é  sa  place,  0  le  roquiers  les  jurés  de 
fixer  leur  atiealion  sw  les  eirconatances  de  t'Adresse  «n^ 
«oyéemr  la  floeiélécoaaiitutionttelieé  la  Conveutlaude 
FfVkce.  Ses  Membres  autt^tensentcsprliBé  leur  pensée 
sur  legouvemeaseut  que  la  Convention ,  dans  sa  répsuee, 
les  a  traités  de  généreux  répubMcaius,,.* 

(  La  séance  est  ajournée.  —  Le  leudefl^afn,  le  soMei- 
leur  général  reprend  la  parole.) 

Le  sotUciteur  général  :  Le  coBseil  de  Taccusé  n'a  ttH 
auciue  observation  sur  les  diverses  lettres  qui  out  élépro- 
dttUes,  exeeplé  sur  celles  de  Morvid»,  Ces  lettres  coulâqp- 
oenl  d'ioriocibles  prcMi^  ^fue  Jles  avpcâts  de  U  réSmoe 
étaient  cendniu  par  un  enthousiasme  dangereux  i  et 

Si 


162 


■Talent  poor  bol  un  èlablisiement  fondé  sur  ce  qu^ils  Ap- 
pellent les  droits  irréfragables  de  Thomme»  et  la  |Miix  uni- 
verselle ;  éublissement  subTertif  de  celui  sous  lequel  TAn- 
«Icterre  a  le  bonheur  de  TlTre,  et  qui  a  fait  si  longtemps 
radmiralion  et  l*enfie  du  monde;  prétendu  système  de 
Iralcrnisatloo générale,  dont  le  résultat  serait  de  nous  con- 
duire à  Tanarchie  qui  règne  actuellement  en  France. 

Dans  son  Adresse ,  la  Société  de  correspondance  de  Lon- 
dres exprime  sa  résolution  de  ne  point  cesser  ses  poursuites 
avant  d^avoir  obtenu  une  réforme  parlementaire  et  un  re- 
mède radical  aux  maux  sous  lesquels  elle  prétend  que 
r Angleterre  languit.  Mais  comment  voulait-on  arrivera  ce 
changement?  Btait-ce  en  s*adressant  an  roi?  Btaii-oe  en 
s*adressant  aux  pain?  Voulait-on  présenter  une  pétition 
aux  Communes?  Non.  Le  seul  moyen  dont  on  voulait  se 
servir  était  un  appel  nu  corps  eiilier  du  peuple.  Le  cri 
d'une  réforme  parlementaire  n'était  qu*un  préieale  pour 
couvrir  des  desseins  criminels.  Si  Ton  eût  eu  Tintenlion  de 
•^adresser  k  la  Chambre  des  communes ,  par  qui  seule  on 
ponvait  constitutionnellement  obtenir  celte  réforme ,  an- 
rait-on  parlé  avec  si  peu  de  respect  de  celle  branche  de  la 
législalnre?  Aurail-on  dit  qu'on  ne  pouvait  attendre  au- 
cune espèce  de  succès  que  des  clubs  et  des  Sociétés? 

Dans  cette  même  Adreme  II  est  question  d*exiger  un 
onmpte  des  dépenses  publiques,  et  cela  non  pour  l'aveoir, 
mais  poor  le  passé;  on  y  parie  beaucoup  en  faveur  des 
pauvres,  c'est-à-dire  qu*cn  paraissant  compatir  4  la  misère 
qu'on  attribue  4  leur  condition,  on  espérait  les  exciter  à 
quelque  soulèvement. 

J'appelle  aussi  l'attention  du  jury  sur  une  lettre  de 
Browne,  édHeur  du  Patriote^  à  Sheffield ,  et  délégué  à  la 
Convention  britannique.  Cette  lettre,  adressée  ftia  Société 
constitutionnelle,  lui  recommande  d'envoyer  dans  la  cam- 
pagne des  missionnaires  capables  d'instruire  les  fermiers, 
en  leur  présentant  sous  les  couleurs  les  plus  défavorables 
les  taxes  dont  Ils  sont  chargés,  et  capables  également  d'é- 
Ublir  entre  les  diverses  Sociélés  du  royaume  une  étroite 
union,  une  correspondance  Intime,  comme  il  en  existe  une 
entre  les  dubs  de  France,  qui  Jes  a  rendus  formidables  et 
asses  puissante  pour  élever  mi  temple  à  la  Liberté  sur  les 
ruines  du  despolismcw 

Il  est  certain  que  le  prisonnier  a  pris  une  part  aettvn 
dans  cette  affaire,  et  je  le  prouve  par  sa  lettre  dn  9  avril 
1793,  adressée  à  M.  Waughan,  dans  laquelle  il  indique 
Ic9  meilleurs  moyens  de  travailler  le  peuple;  par  celle 
adressée  k  Skirviog,  dans  laquelle  il  insinue  qu'il  serait 
agréable  à  la  Société  de  correspondance  de  Londres  que 
la  Convention  briUnnique  l'invitât  4  envoyer  des  délégués. 
L*accusé  a  grand  soin  de  recommander  à  Skirving  que 
son  nom  ne  paraisse  pas  dans  celle  affaire.  C'est  par  suite 
de  cette  lettre qo*it  arriva  é  Edimbourg  une  invitation,  et 
que  Gerald  et  tCaïKarot  furent  nommés  dèlteués  de  la  part 
de  la  Société. 

(  Le  sollicitenr  général  fait  lecture  des  instructions  don- 
nées par  ces  diverses  Sociétés  à  leurs  délégués.  ) 

Parmi  ces  résolutions,  continue-t-il ,  la  principale  était 
celle  de  procnrer  une  réforme  parlementaire  par  des 
moyens  reisoiinnbles  et  légitimes.  Mais  une  antre  établis- 
sait que ,  dans  certains  cas»  la  orinorité  devait  résister  4 
la  majorité;  que,  par  des  moyens  légitimes  et  raUonna- 
bles,  on  n*entendalt  autre  chose  que  toute  espèce  de 
moyens. 

L'opinion  de  ces  Sociélés  était  qu'une  Convention  avait 
plus  d'autorité  que  le  parlement,  comme  représentant  la 
majorité  du  peuple.  Cette  Convention  a  Imité  la  conduite 
qui  a  été  tenue  en  France.  Son  intention  était  de  s'empa- 
rer du  gouvernement  par  ta  force  des  armes,  puisqu'elle 
prenait  toutes  sortes  de  moyens  pour  engager  les  monta- 
gnards 4  se  joindre  4  elle.  Le  bill  des  droits,  qu'on  fait  va- 
loir aufoord'bni  pour  la  défense  de  l'accusé,  elle  l'appe- 
lait le  bill  des  torts,  disant  que  Taristocratie,  apr^  la 
révoluUon'de  1688,  avait  sacrifié  les  intérêts  de  la  nation 
aux  moyens  de  corruption  de  Guillaume  lU.  Elle  déclare 
qu'on  emploiera  la  résistance  si  l'acte  d'kabeas  eorpui  est 
snspendv.  Cet  acte  a  été  en  effet  suspendu,  et,  si  ces  So- 
ciélés n'avaient  été  prévenues  dans  leur  dessein,  elles  se- 
raient actuellement,  de  leur  prop^e  aveu,  en  pleine  ré- 
bellion. C*est  parce  que  la  Convention  craignait  d'être 
dispersée  qu'elle  a  nommé  un  comité  secret»  qui |  eo eu 


qu'il  f&t  découvert»  devait  choisir  nn  antre  lien  pour  se 
rassembler.  Dans  cette  nouvelle  Chambre,  dès  que  les  mem- 
bres se  seraient  trouvés  au  nombre  de  seiie,  ils  devaient 
s'appeler  Convention  de  conjoncture,  et  agir  dès  qu'ils 
auraient  été  vingt  et  un.  Pour  éviter  l'autorité  du  magis- 
trat ,  ce  comité  devait  surtout  souvent  changer  de  lieu. 

Le  folliciteur  général  revient  encore  aux  démarches  de 
la  Sodélé  de  correspondance.  Il  entre  dans  de  longs  dé- 
tails sur  les  artifices  qu'il  dit  avoir  été  employés  par  les 
clubs  pour  exciter  une  insurrection  en  Ecosse»  après  les 
jugements  de  M uir  et  de  Palmer.  Enfin  il  se  résume  en 
rappelant  de  noaveao  aux  jurés  l'importance  de  leun 
fonctions. 

Le  lord-chef  de  justice  Evre  récapitule  les  dépositions  : 
son  discours  dure  jusqu'4  huit  beures  du  soir»  la  fatigue 
l'oblige  d'en  renvoyer  la  conclusion  au  lendemain  5  no- 
vembre (15  brumaire).  Alors  il  s'adresse  de  nouveau  aux 
jurés,  dans  nn  discours  qui  dure  encore  trois  heures.  Le 
jury  se  retire  ensuite  pour  décider  la  question;  il  rentre 
après  trois  benres  de  délibération,  et  prononce  son  rerdiVt 
not  guUtff  (n'est  pas  eonpable.  )  Aussitôt  la  salle  retentit 
d*applaudisaemente;  la  foule  traîne  le  carrosse  d'Brskine» 
celui  de  Taccusé  Hardy  même,  fusque  chexeax,  aprts  en 
avoir  détela  les  chevaux. 

Le  premier  juré,  Thomas  Buck»  se  trouva  ai  ému,  en 
prononçant  le  ptrdiei  d'absolution  »  qu'il  tomba  en  défail- 
lance. 

Le  17  novembre,  l'accusé  Hortt-Tooke  a  été  mis  en  juge- 
ment. Erskine  a  été  son  défenseur.  Cette  nouvelle  instruc- 
tion n'offre  pas  moins  d'intérêt  et  a  en  la  même  issue  que 
la  première. 

Lorsque  la  nouvelle  du  jugement  de  Thomas  Hardy,  de 
Jeap  Horne  Tooke,  fut  arrivée  4  SbeftrW,  une  nombreuse 
assemblée  se  rénnit  pour  célébrer  cet  événement.  On 
donna  lecture  des  pièces  qui  l'annonçaient»  et  le  t^erdiet 
not  guiltff  fut  rép^  trois  lèia  avec  le  plus  grand  eothoa- 
siasme,  par  tous  les  aisistanla 

Les  toasu  suivants  furent  pflrtéa  au  millen  des  plus  vib 
applaudissements  : 

•  Les  jurés  indépendants  qui  ont  acquitté  Thomas  Hardy 
et  Jean  Horoe-Tooke  :  Puisse  leur  mémoire  être  sacrée  4 
la  postérité,  et  leur  conduite  inspirer  l'émulation  I 

t  MM.  Erskine  et  Gibbs  :  Puissent  leurs  talents  ne 
jamais  que  pour  défendre  la  cause  de  In  venu  I 


«  Le  roi  :  Puissent  l'intégrité  et  l'habileléêtrc  4  l'avenir 
le  caractère  dislinctlf  de  ses  ministres;  et  la  liberté,  le  pa- 
trimoine du  peuple  I 

■  Le  comte  de  Stanhope ,  l'évêque  de  Gloœsler,  le  bm- 
jor  Cartwright,  M.  Sheridan,  Sharp  et  M.  Adams  I 

•  Le  lord  maire  de  Londres  1 

«  L'union  des  sentiments  :  Puisse  la  justice  être  sa  base» 
et  le  bien  public  la  fin  4  laquelle  elle  aspire  1 

c  La  constitution  de  4688  :  Puissent  ceux  qui  veulent 
altérer  sa  pureté  ou  renverser  ses  principes  être  les  seuls 
objets  de  la  vengeance  publique  I 

•  Les  martyrs  de  la  liberté,  soit  qu'ils  languissent  en 
prison,  tombent  sur  le  champ  de  bataille  ou  périssent  sur 
l'échafaudl 

•  Koxctusko  et  les  patriotes  polonais  I 

a  Une  paix  prompte»  durable  et  universelle  I  • 


CONVENTION  NATIONALE. 

Prindencê  de  BeniaboU. 

Fin  du  raj^ort  sur  ies  aris  qui  ont  servi  à  la  dé- 
fense de  la  république,  et  sur  le  nouveau  procédé 
de  tannage,  découvert  par  le  citoyen  Armand 
Séfuin,  fait  à  la  Convention  nationale,  le  14  ni- 
vôse ,  au  nom  du  comité  de  salut  public ,  par 
Fourcroy, 

Le  comité  a  été  pendant  longtemps  dans  Tincerti- 
tude  de  savoir  s*il  était  convenable  de  publier  sur- 
le-champ  les  procédés  du  citoyen  Séguin.  La  crainte 
que  nos  ennemis  ne  profitassent  avant  nous  des 
avantages  de  cette  découverte ,  en  éUiblissant  sur- 
le-champ  un  grand  nombre  de  manufactures ,  et  ea 


Ï63 


accaparant  les  peaux  saches  qui  nous  viennent  de 
Vétranger;  l'opinion  défavorable  qu'auraient  pu  faire 
nnftre  des  essais  entrepris  avec  ignorance  ou  mal- 
adresse, et  dès  lors  infructueux;  opinion  d*autant 
plus  à  redouter  au'elle  aurait  pu  étouffer  dès  sa 
naissance  cet  art  d  une  très-grande  importance  ;  tous 
ces  motifs  avaient  déterminé  d'abord  votre  comité  à 
tenir  le  procédé  secret  et  à  faire  fabriquer  jusqu'à  la 
paix,  dans  quelques  manufactures,  toutes  les  peaux 
nécessaires  aux  chaussures  des  armées;  mais  la  di- 
sette générale  des  peaux  tannées  qu'on  éprouve  en  ce 
moment;  l'augmentation  continuellement  crois- 
sante de  la  valeur  des  cuirs,  à  raison  des  enchères  . 
qui  dérivent  d'une  mise  en  vente  moindre  que  les 
besoins  ;  le  prix  exorbitant  où  sont  maintenant  les 
souliers;  la  ruine  qu'entraîne  ce  renchérissement 
pour  les  citoyens  les  moins  aisés  ;  l'impossibilité  de 
taire  diminuer  de  longtemps  le  taux  de  cette  mar- 
chandise de  première  nécessité ,  en  continuant  de 
suivre  les  procédés  anciens,  qui  exigent  un  long 
espace  de  temps  pour  la  fabrication  ;  tous  ces  mo- 
tifs ont  détermmé  votre  comité  à  vous  proposer  de 
publier  sur-le-champ  les  procédés  du  citoyen  Séguin. 
Le  comité  pense  que ,  quelques  avantages  que  les 
nations  ennemies  retirent  de  cette  publication ,  ils 
seront  loin  d'équivaloir  à  ceux  qu'y  saura  puiser  le 
^nie  républicain ,  appelé  par  le  vœu  de  la  Conven- 
tion nationale,  et  soutenu  par  l'opinion  publique. 

^  Cette  publication  acquerra  son  plus  haut  degré 
d'avantage  si  elle  peut  ranimer  assez  l'activité  de 
nos  commerçants  pour  leur  faire  naître  l'idée  d'im- 
porter une  grande  quantité  de  peaux  sèches  de  l'é- 
tranger ;  spéculation  dont  l'efifet  serait  ë^alemeht 
avantageux  aux  particuliers  et  à  la  république,  en 

{procurant  à  ceux-ci  de  grands  profits ,  et  à  la  nation 
a  possibilité  d'an  accroissement  considérable  dans 
ses  exportations  et  dans  sa  balance  commerciale.  ^ 

Le  citoyen  Séguin  a  présenté  ses  procédés  sans 
demander  aucune  récompense ,  et  a  prié  le  comité 
d'en  faire  l'emploi  qu'il  jugerait  le  plus  avantageux 
aux  intérêts  de  la  république.  S'il  eût  suivi  une 
tout  autre  marche ,  il  aurait  pu  tirer  de  sa  décou- 
verte de  très-grands  avantages  ;  il*  aurait  pu  tenir 
ses  procédés  secrets ,' et ,  conformément  à  la  loi  du 
7  janvier  1791,  prendre  un  brevet  d'invention,  con^ 
séquemment  un  privilège  exclusif  de  fabrication; 
mais,  après  avoir  sacrihé  trois  années  entières  aux 
recherches  qu'il  s'était  proposées ,  aprèà  avoir  fait 
tous  les  frais  qu'ont  entraînés  plus  de  deux  mille 
expériences  qui,  pour  la  plupart ,  ont  présenté  des 
résultats  intéressants,  il  s'est  mis  entièrement  à  la 
discrétion  du  gouvernement. 

Le  comité  a  pensé  que,  pour  répondre  à  cette  con- 
fiance, il  était  iuste  de  lui  accorder  des  facilités  pour 
la  formation  d'un  établissement  qui ,  profitable  à 
l'inventeur ,  sera  en  même  temps  avantageux  à  la 
république  en  subvenant  aux  besoins  pressants  des 
armées  et  en  servant  de  modèle  à  tous  ceux  qui  vou- 
draient en  former  de  semblables. 

Votre  comité  ne  s'est  point  arrêté  à  l'idée  de  for- 
mer une  régie ,  parce  que  l'expérience  ne  cesse  de  le 
convaincre  que  ce  mode  d'établissement ,  presque 
toujours  onéreux  à  la  république,  ne  doit  être  admis 
que  dans  l'impossibilité  de  taire  autrement.  Une 
régie  d'ailleurs  aurait  ici  le  erand  désavantage  de 
ne  pas  inspirer  la  confiance  nécessaire  à  l'imitation. 
On  pourrait  penser  que  le  gouvernement  fait  pour 
la  fabrication  des  sacrifices  que  le  commerçant  se 
trouverait  dans  l'imposibilité  de  supporter.  La  réus- 
site d'un  établissement  particulier  rassurera,  au  con- 
traire ,  les  personnes  même  les  plus  timides. 


Décret  prononcé  dans  la  êéance  du  14  nivote. 

«  La  Convention  nationale  »  après  avoir  entendu 
son  comité'de  salut  public  ; 

«  Considérant  que  les  procédés  nouvellement  dé- 
couverts par  le  cito^^en  Armand  Séguin,  pour  le  tan- 
nage des  cuirs,  réduisent  à  un  petit  nombre  de  jours 
une  fabrication  qui  exigeait  deux  années  ; 

•  Que  ce  nouveau  genre  de  febrication  doit  être 
appuyé  de  toute  la  protection  du  souvernement, 
pour  que,  bientôt  multiplié  sur  tous  Tes  points  de  la 
république ,  il  procure  à  cet  égard  à  la  nation  fran- 
çaise un  avantage  industriel  sur  toutes  les  autres 
nations  commerçantes; 

«  Qu'il  est  surtout  intéressant  de  profiter  de  sa 
célérité  pour  subvenir  aux  besoins  des  armées  ; 

•  Que  chaque  membre  de  la  société  peut  retirer 
de  cette  découverte  un  ^rand  avantage ,  soit  en  fa- 
briquant chez  lui  les  cuirs  nécessaires  à  la  confec- 
tion de  ses  souliers,  soit  en  voyant  diminuer  le  prix 
et  accroître  la  qualité  de  cet  objet  d'habillement  de 
première  nécessité; 

«  Qu'un  établissement  formé  par  Tinventeur  pou- 
vant servir  de  modèle  à  tous  les  établissements  du 
même  genre ,  et  d*école  pour  ceux  qui  adopteraient 
ce  nouveau  mode  de  fabrication ,  offrira  par  la  voie 
simple  de  Timitation  la  certitude  d'un  succès  com- 
plet, et  détruira  d'avance  les  impressions  désavanta- 
geuses que  pourraient  faire  naître  des  tentatives  peu 
réfléchie^u  mal  dirigées  ; 

•  Décrète  ce  qui  suit  : 

«  Art.  l«r.  Les  procédés  d'Armand  Seguin ,  sur  tk 
tannage,  seront  incessamment  publiés  par  les  soins 
du  comité  de  salut  public. 

«  11.  La  propriété  nationale  connue  ■  Sèvres  sons 
le  nom  de  maison  Brancas,  et  l'Ile  qui  touche  au 
pont  de  cette  commune,  seront  vendues  sur  estima- 
tion au  citoyen  Séguin ,  à  la  charge  par  lui  d'y  éta- 
blir une  manufacture  dans  laquelle  il  puisse,  d'après 
ses  procédés ,  tanner  et  hongroyer,  pour  le  service 
des  armées ,  toutes  les  peaux  qui  lui  seront  fournies 
par  le  gouvernement. 

«  111.  La  prooriété  nationale  connue  sous  le  nom 
de  Ravannes,  oistrict  de  Nemours,  département  de 
Seine-et-Marne ,  sera  également  vendue  au  citoyen 
Séguin  ,  à  la  charge  par  lui  d'y  établir  les  usines  et 
les  magasins  nécessaires  à  l'établissement  de  tanne- 
rie formé  dans  l'Ile  de  Sèvres. 

«  IV.  Le  comité  de  salut  public  est  autorisé  à  don- 
ner au  citoyen  Séguin,  pour  la  formation  et  la  pleine 
réussite  de  cet  établissement,  toutes  les  facilités  qui 
s'accordent  avec  la  justice  et  les  intérêts  de  la  ré- 
publique, et 'à  adopter,  pour  la  fabrication  et  la 
vente ,  le  mode  d'arrangement  qu'il  jugera  le  plus 
convenable.  Les  sommes  qu'il  croira  devoir  preter 
sous  caution  au  citoyen  Séfuin  seront  prélevées  sur 
les^fonds  qui  sont  mis  à  sa  disposition. 

•  V.  Le  comité  de  salut  puolic  prendra  en  outre 
toutes  les  mesures  les  plus  propres  à  propager  et 
accélérer ,  sur  tous  les  points  de  la  répuolique ,  les 
avantages  qui  dérivent  ae  ce  nouvel  art.  En  consé- 
quence, la  manufacture  établie  à  Sèvres  sera  une 
école  dans  laquelle  le  citoyen  Séguin  sera  charge 
spécialement ,  lorsque  ses  ateliers  seront  en  pleine 
activité ,  de  montrer  gratuitement ,  ainsi  qu'il  en  a 
fait  la  proposition ,  ses  procédés  et  son  art  aux  ci- 
toyens qui  lui  seront  adressés  par  le  comité  de  salut 
public.  • 

Comparaison  abrégés  des  aneienet  méthodes  avec 
la  nouvelle. 

Tanner  une  peau,  c*esl  lui  enlever  sa  propriété 


164 


putrescible,  en  ui  conservant  cependant  un  certain 
degré  de  souplesse.  On  parvient  a  ce  double  but  en 
combinant  avec  la  peau  des  substances  oui ,  par  les 
changements  Qu'elles  occasionnent  dans  les  propor- 
tions de  sesprmcipesi  anéantissent  cette  tendauce  à 
la  putréraction. 

Les  procédés  ^elati^s  au  tannage  sont  donc  de 
deux  genres  ;  les  uns  ne  consistent  qu'à  enlever  à  la 
peau  les  matières  qui  s*opposeraient  à  sa  conserva- 
tion, ou  qui  n*ontavec  elle  qu^unefaible  adhérence: 
tels  sont  les  poils  et  les  chairs  ;  les  autres  consistent 
à  la  combiner  avec  des  substances  qui  la  rendent 
imputrescible* 

Les  opérations  du  premier  genre  constituent  le 
débourrement  et  le  nécharnement  ;  les  opérations 
du  second  genre  constituent  le  tannage  proprement 
dit. 

Le  déchamement  n'est  qu  une' opération  mécani- 
que )  le  débourrement  est  une  opération  mécanique, 
m1  8*opère  par  le  rasement,  ou  une  o|>ération  chi- 
mique ,  s'il  s*opère  soit  par  la  dissolution ,  soit  par 
la  décomposition  de  la  substance  qui  tertde  lien  aux 
poils. 

t)ans  les  méthodes  anciennes  la  dissolution  de 
cette  substance  s*opérait  au  moyen  de  la  chaux  ;  la 
décomposition  s*opérait  soit  par  la  fermentation  vi- 
neuse de  l*orge^  soit  par  la  Termentation  acéteusc 
du  tan ,  soit  enhn  par  la  fermentation  putride ,  pro- 
duite dans  les  peaux  par  leur  entassement  les  unes 
sur  les  autres  ;  de  la  étaient  nées  les  dénominations 
de  travail  à  la  chaux ,  à  torgi,  à  V échauffé ,  à  la 
jt^fée. 

Le  traysil  à  la  chaux  durait  sonrent  douze  ou 
qnlnue  moiâ;  le  travail  A  Torgéou  à  lajusée  envi- 
ron deux  mois. 

La  lenteur  de  ùtB  ofiérations ,  que  Itê  éïpérienécs 
de  Séguin  ont  prouvé  pouvoir  exister  en  tres-peu  de 
jours,  et  d'une  manière  plus  avantageuse  avec  tes 
mêmes  substaUdes,  prouve  bien  rignorancc  où  Ton 
était  alors  de  tout  ce  qui  se  passait  dans  ces  opéra- 
tions. Celles  du  tannage  proprement  dit  étaient  de 
même ,  ainsi  que  le  prouveront  les  détails  dans  les- 
quels nous  allons  entrer,  basées  sur  la  routine  la 
moins  éclairée. 

Quelle  que  fitt  la  méthode  du  débourrement,  la 
méthode  du  tannage  proprement  dit  était  la  même, 
tant  pour  les  peaux  travaillées  k  la  chaux  que  pour 
celles  préparées  soit  â  Torge,  soit  à  lajusée. 

Cette  opération  durait  oix-huit  mois  ou  deux  ans, 
souvent  m^me  trois  années,  lorsqu'on  voulait  que 
la  peau  fût  bien  tannée  jusqu*Qu  centre. 

Parmi  les  substances  qui  Jouissent  de  la  propriété 
de  tanner  les  peaux,  la  noix  de  galle,  le  sumac  et 
récorce  de  chêne  paraissent  les  plus  favorables,  du 
moins  dans  l'état  actuel  de  nos  connaissances.  Au 
centre  de  la  France ,  Técorce  de  chêne  est  préférée, 
parce  qu'elle  est  moins  chère  et  en  plus  grande  abon- 
dance. Pour  s'en  Servir  on  la  réduit  en  poudre  ;  puis, 
dans  les  méthodes  anciennes ,  on  la  met  dans  de 
ffrùndes  fosses  enfoncées  en  terre,  qu'on  remplit  par 
ùtê  couches  alternatives  de  tan  en  poudre  et  de 
pesux  débourrées. 

Le  principe  propre  au  tannage  ne  pouvant  agir 
dans  l'intérieur  de  lapeau  qu'autant  qui!  y  est  porté 
par  quelque  liquide  dans  lequel  il  ait  été  préalable- 
ment dissous,  le  tannage  n'est  pas  le  produit  de  l'ac- 
tion immédiate  du  tan  en  poudre  sur  la  peau,  niais 
ieuleinent  de  l'action  de  la  dissolution  du  principe 
propre  au  tannage  et  que  contient  Técorce.  Le  tan 
ne  louit  donc  de  la  propriété  tannante  qu'autant 
qa'il  est  mouillé  en  assez  grande  quantité  pour  ne 
pas  conserver  pour  lui  seul  toute  l'eau  qu'on  lui 
CMimunique.  Ofi  eommè  les  tanotnrs  m  mettent  en 


général  dans  leurs  fosses  qu'une  petite  portion  d'ean 
comparativement  à  celle  qui  serait  nécessaire  pour 
enlever  au  tan  tout  le  principe  propre  au  tannage 
qu'il  contient  il  en  résulte  que  te  tan  des  fosses  con- 
serve, en  en  sortant,  un  portion  de  son  principe  pro- 
pre au  tannage. 

Ce  désavantage  n'est  pas  le  seul  que  comportent 
les  méthodes  anciennes  ;  elle  ont  en  outre  celui  de 
lie  pouvoir  jamais  atteindre  une  saturation  complète 
de  tannage.  En  effet ,  la  propriété  attractive,  com- 
mune à  tous  les  corps ,  variant  dans  son  intensité 
suivant  le  degré  de  saturation,  l'eau  qui  tient  en  dis* 
solution  une  certaine  quantité  de  principe  propre 
au  tannage  n'en  cède  pas  autant  à  un  poids  donné 
de  peaux  qu'un  égal  volume  d'eau  qui  tiendrait  eu 
dissolution  une  plus  grande  quantité  de  ce  principe* 

L'eau  qui,  dans  les  méthodes  anciennes,  se  trouve 
dans  les  fosses,  ne  pouvant  donc  contenir  qu'une 
petit  portion  de  principe  propre  au  tannage  à  raison 
du  concours  d'affinité  de  l'eau  et  de  l'écorce ,  n'en 
cède  qu'une  faible  portion  à  la  peau  ;  encore  ne 

{icut-elle  la  lui  céder  que  graduellement.  De  là  cette 
enteur  dans  le  tannage  des  cuirs  préparés  suivant 
les  méthodes  anciennes,  lenteur  telle  qu'il  fallait 
deux  années  entières^  souvent  même  trois  ans  {tour 
qu'une  peau  fût  bien  tannée  jusqu'au  centre  ;  de  là 
encore  cette  imperfection  des  cuirs  préparés  par  ces 
méthodes,  imperfection  due  à  la  non-saturalion  du 
tannage,  lors  même  que  les  cuirs  étaient  tannés  jus- 
qu'au centre. 

Le  point  important  était  donc  de  rassembler,  sous 
un  petit  volume,  le  principe  propreau  tannage,  d'en 
augmenter  l'action  ,  et  de  produire  dans  le  cuir  une 
saturation  complète,  dans  un  temps  beaucoup  plus 
court  que  celui  qui  est  nécessaireau  tannage  imparfait 
opéré  dans  les  fosses  ;  mais  avant  tout  il  fallait  analy- 
ser la  peau,  analyser  le  cuir,  analyser  Técorce  do  ch'ê* 
ne;  il  fallait  isoler  les  principes  de  ces  trois  substan- 
ces, déterminer  leur  action  réciproque  les  uuessur  les 
autres,  connaître  l'influence  de  leur  combinaison  sur 
cette  action  ,  et  démêler  enfin  les  circonstances  les 
plus  favorobles  a  son  intensité. 

Séguin ,  en  suivant  cette  marche ,  a  découvert  : 
1^  que  la  peau  ,  séparée  de  la  chair  et  des  poils,  est 
une  substance  qui  peut  facilement ,  par  des  opéra- 
tions convenables,  se  transformer  en  totalité  en  ge- 
lée animale  (colle  forte)  ; 

20  Que  la  dissolution  de  cette  dernière  substance, 
mêlée  avec  de  la  dissolution  de  tan  ,  forme  sur-le- 
champ  un  composé  indissoluble  et  imputrescible  ; 

30  Que  la  dissolution  de  tan  est  composée  de  deux 
substances  très-distinctes  :  Tune  qui  précipite  la  dis- 
solution de  colle,  et  qui  est  la  véritable  matière 
tannante;  l'autre  qui  précipite  le  sulfate  de  fer  sans 
précipiter  la  dissolution  de  colle,  et  qui  n>st  propre 
qu'à  la  décombustiou  nécessaire  de  la  peau  et  de  la 
substance  qui  sert  de  lien  au  poil  ; 

4*  Que  le  tannage  n'est  point  une  simple  combi- 
naison de  la  peau  avec  le  principe  qui  précipite  la 
colle  I  mais  bien  une  combinaison  de  ce  principe 
avec  la  peau  débrûlée  par  la  substance  qui,  dans  la 
dissolution  de  tan  ,  précipite  le  sulfate  de  1er  ;  de 
sorte  que  toute  substance  propre  au  tannaee  doit 
en  même  temps  jouir  de  la  propriété  de  précipiter 
la  dissolution  ae  colle  et  de  précipiter  la  dissolution 
de  sulfate  de  fer; 

finlin,  que  le  tannage  consiste  à  ffonfler  les  peaux 
au  moyen  d*une  légère  acidité  ;  à  débrûler,  à  l'aide 
du  principe  qui,  dans  la  dissolution  de  tan,  précipite 
la  dissolution  de  sulfate  de  fer,  la  substance  ()ui  sert 
de  lien  aux  poils,  et  conséquemment  à  opérer  un 
débourrement  facile  ;  à  débrûler  de  même  la  peau  à 
l'aide  de  ce  principe;  et  à  ramener,  par  cette  de- 


165 


combustion ,  à  Tëtat  mitoyen  entre  la  peau  et  la 
colle;  ênÛH , à  là  combider,  après  cette  décpmbtis- 
tlon,  et  dans  cet  état  diiloyen,  ave6  Une  substance 
particulière  qui  se  trouve  dans  TëcorCe  de  chêne,  de 
même  aue  dans  une  infinité  d'autres  végétaux,  qui 
précipite  là  dissolution  de  colle,  et  qUi  n'est  pomt 
du  tout  ce  qu'on  a  regardé  jusqu'ici  comine  le  prin- 
cipe astringent.  ^ 

D'après  ces  découvertes,  il  ne  â*aglteait  t>tus,  pour 
opérer  un  tannage  prompt  et  complet,  que  de  rap- 
procher sous  un  petit  volume  le  principe  propfé  au 
tannage,  afiii  d'en  accroître  l'action.  Séguin  emploie 
à  cet  égard  un  procédé  d'une  simplicité  remarqua- 
ble. Il  verse  de  l'eau  sur  du  tàn  eh  poudre  dàhs  un 
apt)areil  à  peu  ptH  Semblable  â  Celui  dont  se  ser- 
vent les  salpêtriers.  Cette  eau,  éti  traversant  le  tan, 
lui  enlève  une  portion  de  son  principe  propre  au 
tannage,  et,  par  des  filtrâtidhs  successive^,  eh  dis- 
sout de  ptUfi  eh  plus  Jusqu'à  ce  qu'enfin  le  tan  tende 
plutôt  à  lut  eh  enlever  qu'à  lui  en  céder.  Séguin 
parvient  par  ce  moyen  à  amener  les  dissolutions  à 
un  tel  état  de  concentration  dU'il  peut,  en  prenant 
toutes  léS  précautions  convenables,  tanher  les  peaui 
de  veau  en  vingt -quatre  heures,  et  les  plus  fortes 
peaux  de  boeuf  en  sept  ou  huit  jours.  Ces  dissolu^ 
tions,  se  trouvant  fortement  chargées  du  principe 
propre  au  tannage,  en  cèdent  à  la  peau  autant  qu'elle 
en  peut  absorber,  de  sorte  qu'elle  peut  alors  arriver 
très-facilement  à  une  saturation  coihplète  de  ce 
principe,  et  obtenir  des  cuirs  d'une  qualité  beaucoup 
supérieure  à  celle  des  meilleurs  cuirs  des  pays  même 
les  plus  i*ehoiiihiés. 


le 


iBANCB  DU  18  NIVOSE. 

Pons  (de  Verdun)  :  Dans  ces  jours  de  crimes  qui 
plongèrent  la  France  dans  le  déuil  et  le  désespoir,  le 
département  du  Bas-Rhin  gémissait  sous  les  poi- 
gnards des  assassins  de  la  patrie.  Dumas  ordonnait 
es  massacres  à  Paris,  Schneider  les  ordonnait  à 
Strasbourg.  Là,  comme  ici,  on  faisait  périr  sans  au- 
cune distinction  Taristocrate  et  le  patriote  ;  là , 
comme  ici,  on  ne  voulait  aue  répandre  du  sang. 
Dans  ces  jours  d'horreurs,  Levrault,  imprimeur  à 
Strasbourg,  fut  obligé  de  fuir  le  territoire  de  France 
pour  échapper  aux  poursuites  de  Schneider,  de  ce 
digne  mandataire  de  Saint-Just  et  Lebas.  Il  se  retira 
à  bâle,  où  il  travailla  chez  un  imprimeur,  et  n'eut* 
d'autre  société  aue  celle  des  patriotes.  Les  corps ad- 
ministratils,  la  société  populaire  de  Strasbourg  et  le 
représentant  du  peuple  qui  y  est  en  mission  ren- 
dent les  témoignages  les  plus  avantageux  de  son  ci- 
visme. 

Le  comité  de  législation,  qui  a  examiné  toutes  les 
pièces,  m'a  charge  de  vous  proposer  de  lever  le  sé- 
questre apposé  sur  les  biens  de  Levrault,  et  de  le 
(aire  rayer  de  la  liste  des  émigrés. 

Dentzel  :  Je  demande  l'ajournement  du  projet  de 
décret  jusqu^à  ce  que  le  comité  de  législation  ait  eu 
connaissance  des  pièces  que  j^ai  entre  les  mains. 

Bentabolb  :  Je  dois  dire  que  le  citoyen  Levrault 
)*a  quitté  le  territoire  de  la  républiuue  que  nour 
ichapner  à  Schneider,  qui  voulait  le  taire  guilloti- 
ner. Je  crois  que  le  projet  de  décret  doit  être 
adopté. 

*"  :  Cette  affaire  ne  peut  être  terminée  que  d'après 
les  renseignements  que  nous  donnera  notre  collègue 
Bar,  envoyé  dans  le  département  du  Bas^Bhin.  Je 
demande  l'ajournement. 

Le  Bapporteur  :  Ces  renseignements  ont  étë 
fournis  par  les  autorités  cooitituées»  et  Levrault  a 


produit  une  attestation  de  notre  collègue  Fonssè* 
doirè. 

'*'  :  Levrault  ft*étf  soustrait  1  ses  enhemis;  noud 
l'eussions  tous  imité;  il  â  d'ailleurs  obtenu  à  Bâle 
des  certificats  dû  citoyen  Barthélémy,  ministre  de 
la  république ,  et  son  témoignage  ne  peut  pas  être 
suspect. 

DuROY  :  Je  serdi  lé  premier  à  rendre  justice  au  ci- 
toyen Levrault,  s'il  est  rtài  qu'il  ne  soit  point  émi- 
gré ;  mais  il  me  semble  biéii  singulier  que  ce  soit  à 
Bâle  qu'il  ait  été  chercher  des  certificats  de  rési- 
dence. Je  demande  l'ajournement,  afin  qu*on  puisse 
s'éclnirer  sur  cette  affaire. 

Tallibn  :  Je  demande  aussi  que  la  Convention 
soit  sévère  contre  les  émigrés,  mais  je  veux  aussi 
qu'elle  soit  juste.  Instruisons-nous,  afin  de  ne  plus 
commettre  fes  actes  arbitraires  qu'on  nous  a  tant  de 
fois  surpris.  Je  demande  aUe  le  rapporteur  soit  en- 
tendu, et  qu*it  donne  des  éclaircissements. 

Gaston:  11  est  temps  que  vous  ouvriez  les  veut 
sur  des  projets  qui  menacent  vos  jours  et  la  liberté 
du  peuple  français;  le  salut  de  mon  pays  m*a  fait 
croire  pendant  quelques  instants  que  je  devais  garder 
le  silence,  afin  de  ne  pas  iuquiéter  les  esprits  sur 
l'horrible  position  où  nous  sommes  (murmures); 
mais  je  trahirais  mes  devoirs  si  je  me  taisais  plus 
longtemps.  Comment,  oitoyens,  on  veut  faire  ren- 
trer aujourd'hui  des  hommes  qui  ont  déchiré  le 
sein  de  leur  patrie  {plmieun  voix:  Il  ne  s'agit  pas 
de  cela  !);  c|ui  l'ont  abandonnée  au  moment  où  les 
puissances  coalisées  la  bloquaient  de  toutes  parts  1 
CitoyenSi  je  vous  parle  ici  en  Brutus.  (On  rit.)  Il  n'y 
a  pas  de  quoi  rire,  car  vous  pleureres  un  jouri  Oui, 
c'est  moi  qui  le  premir  ai  provoqué  la  loi  contre  les 
émigrés,  et  j'ai  Un  frère  qui  a  eu  la  lâcheté  d'aban^ 
donner  son  pays  ;  c'est  un  monstre,  ainsi  je  ne  suis 
pas  suspect.  (On  rit  de  nouveau.)  Je  déclare  que  j'as- 
sassinerai le  premier (Des  murmures  empêchent 

Gaston  d'achever.)  La  corde  des  émigrés  est  la  plus 
délicate  que  vous  puissiez  toucher. 

Si,  sans  un  examen  sérieux^  vous  consentez  a 
rendre  à  un  émigré  les  droits  qu'il  a  perdus  par  le 
fait  même  de  son  émigration,  vous  ailes  voir  naître 
les  plus  grands  abus;  tous  les  lâches  qui  ont  aban- 
donné leur  patrie  vont  rentrer,  tous  vont  vous  rede- 
mander leurs  biens  qui  sont  l'hypothèque  des  assi- 
gnats. Ce  n'est  pas  sur  l'assertion  d'un  membre  que 
vous  devez  décider  une  pareille  ouestion.  Je  de- 
mande rajournement  et  le  renvoi.  On  examinera  si 
l'homme  dont  il  s'agit  a  été  forcé  de  s'en  aller,  et  s'il 
mérite  quelque  faveur;  naaismon  opinion  est  qu'il 
aurait  dû  mourir  au  sein  de  sa  patrie. 

'**  :  Oui,  il  aurait  dû  se  laisser  assassiner. 

Pons  (de  Verdun)  :  Il  faut  que  le  préopinant , 
dans  les  intentions  duquel  j'ai  beaucoup  de  con- 
fiance, en  ait  bien  peu  dans  le  comité  de  législation. 

Dbvillb  :  Il  n'est  pas  question  de  confianceé 

Pons  :  Si  vous  voulez  étouffer  ma  voix,  je  ne  pour- 
rai donner  d'explication  ;  laissez-moi  parler  en  hon- 
nête homme,  vous  répondrei*  Pourquoi  Dentzel,  au 
lieu  de  garder  des  pièces  dans  sa  poche,  ne  les  a-t-il 
pas  communiquées  au  comité? 

MoisB  Baylb  :  Je  suis  représentant  du  peuple  ; 
j'ai  le  droit  d'émettre  mon  opinion.  Je  demandlB  la 
parole. 

Le  Président  :  La  parole  est  au  rapporteur. 

Pons  :  Je  dois  disculper  le  comité  de  législation. 
{Plusieuti  voix:  On  ne  l'a  point  inculpé.)  Il  est  cer- 
tain que  des  réclamations  se  sont  élevées:  il  sem- 
blernit  que  ces  affaires  sont  peu  débattues  dans  le 
comité.  N'est- il  nas  déraisonnable  de  demander 
!  qu  on  vienne  lire  a  la  tribune  une  liasse  énorme  de 
1  pièces  ?  Mais  ce  ({u'oa  ue  peut  faire  dans  la  Cou  veo- 


166 


tlon,  on  lefaît  dans  le  comité.  Cest  là  qu*oii  examine 
les  pièces  ligne  à  ligne;  c*est  là  que,  lorsque  la  ius- 
tice  et  l'humanité  violées  font  entendre  leurs  récla- 
mations, ou  rédige  des  décrets  pour  vous  faire  exer- 
cer des  actes  dignes  de  vous.  (On  applaudit.)  11  y  a 
parmi  les  pièces  de  cette  affaire  un  certificat  de  dix 
iignes,  signé  de  Bar, notre  collègue,  qui  atteste,ainsi 
que  le  représentant  du  peuple  Foussedoire,  que  la 
retraite  de  Levrault  à  Bâle  n'a  été  que  l'effet  de  la 
terreur. 

Moïse  Bayle  :  Tous  les  émigrés  auront  aussi  le 
droit  de  dire  que  c'est  la  peur  qui  les  a  fait  quitter 
leur  pairie.  Je  n'irai  pas  chercher  bien  loin  mes 
preuves.  A  Tépoque  ou  l'énergie  des  représentants 
du  peuple  étoufi^  la  contre-révolution  fédéraliste 

3ui  avait  éclaté  à  Marseille,  les  principaux  chefs 
e  la  contre-révolution  et  les  plus  riches  commer- 
çants de  cette  ville  s'enfuirent  a  Gênes,  où  ils  établi- 
rent vingt-cinq  fabriques  de  savon.  Jl  est  impossible 
de  faire  une  distinction  entre  ceux  qui  ont  émigré 
par  peur,  et  ceux  qui  ont  abandonne  la  patrie  pour 
grossir  les  hordes  de  ses  ennemis,  vous  ne  pourrez 
7  songer  qu'à  la  paix.  Quoi!  L'on  vient  réclamer  une 
justice,  une  humanité  narticulière!  la  justice  et  Thu- 
manité  sont  de  sauver  le  peuple.  (On  applaudit.)  Je 
demande  Tajournement  jusqu'à  la  paix. 

Dentzel  :  Il  est  très-aisé  de  concilier  l'esprit  de  la 
Convention  ;  lorsque  je  fus  en  mission  dans  le  dé- 
partement du  Bas-Rhin,  à  la  fin  de  1702  et  au  com- 
mencement de  1 793  (vieux  style),  avec  Ruhi  et  Cou- 
turier, il  nous  vint  plusieurs  dénonciations  contre 
Levrault.  Je  voulais  m'en  expliquer  avec  le  comité 
de  législation.  Je.De  suis  pas  un  homme  de  sang,  on 
lésait  bien.  Aujourd'hui  Bentabole  et  Laurent, qui 
ne  doivent  pas  être  suspects  de  mauvaise  intention, 
viennent  de  dire  que  tous  les  laits  ont  été  portés  au 
comité  de  législation.  Ma  conscience  est  éclairée,  je 
retire  ma  motion,  et  je  vote  pour  le  projetde  décret. 
(On  applaudit.) 

***  :  Lorsque  mille  individus  ont  été  jetés  dans  les 
fers  sans  preuves ,  sans  réclamations ,  on  ne  s'est 
point  élevé  contre  les  horreurs  qui  se  commettaient  ; 
et  aujourd'hui  qu'on  vient  réclamer  pour  une  des 
victimes  de  Robespierre  et  de  ses  complices,  on  ose 
8*y  opposer!  Quel  est  donc  ce  renversement  de  tous 
Jes  principes  comme  de  tous  les  droits  ? 

BsirrABOLB  :  Levrault  était  procureur  général- 
syndic  du  département  du  Bas-Rhin ,  lorsque  les 
commissaires  de  l'Assemblée  législative  arrivèrent  à 
Strasbourg,  après  le  10  août.  Il  avait  commis  dos 
erreurs  (des  murmures  éclatent  dans  l'extrémité)  ; 
les  commissaires  le  destituèrent  ;  Je  fus  mis  à  sa 
place.  Il  resta  à  Strasbourg;  il  avait  si  peu  l'inten- 
tion d'émigrer  qu'il  se  maria  avec  une  citoyenne  de 
cette  commune  :  il  en  avait  un  enfant.  11  se  tenait 
tranquille  dans  son  domicile,  lorsque  Schneider 
i'alla  déterrer  dans  sa  retraite  :  on  sait  que  ce  scélé- 
rat faisait  guillotiner  en  une  demi-heure,  sans  forme 
de  procès  ni  de  jugement.  Levraults'estsauvéà  une 
lieue  de  la  frontière.  Un  homme  qui,  après  sa  desti- 
tution, est  resté  un  an  tranquille  à  Strasbourg,  avec 
sa  femme  et  son  enfant,  n'avait  donc  pas  intention 
d'émigrer. 

***  :  Lorsque  la  malveillance  répand  déjà  dans  les 
départements  que  les  émigrés  vont  rentrer,  et  qu'on 
capitule  pour  eux,  peut-on  ouvrir  une  plus  longue 
discussion  sur  un  projet  de  décret  qui  tend  à  la  ren- 
trée d'un  émigré? 
Je  demande  formellement  la  question  préalable. 
RuHL  :  J*ai  connu  l'individu  dont  il  s'agit.  Le- 
vrault était  attaché  à  Diétrich.  Je  ne  sais  pas  s'il  a 
commis  des  crimes  ou  des  erreurs,  parce  que,  nom- 


mé à  la  législature ,  je  l'ai  perdu  de  vue  alors.  Mais, 
avant  de  lui  permettre  de  rentrer  en  France,  il  faut 
qu'il  prouve  qu'il  n'en  est  pas  sorti  avec  des  inten- 
tions coupables. 

"*  :  11  existe  une  loi  qui  range  au  nombre  des 
émigrés  tous  ceux  qui  sont  sortis  du  territoire  de  la 
France  hors  les  cas  prévus  par  la  loi.  Tous  les  émi- 
grés qui  ne  sont  pas  des  monstres  armés  contre  la 
patrie  sont  des  lâches  qui  l'ont  abandonnée  dans  le 
danger. 

La  députa tion  du  Mont-Blanc  a  reçu  uncf  lettre  qui 
annonce  que  les  émigrés  se  flattent  de  rentrer  bien- 
tôt dans  la  république. 

Je  m'oppose  formellement  à  l'ajournement;  il  ne 
peut  y  avoir  de  doute  ;  j'appuie  la  question  préa- 
lable. 

Plusieurs  voix  :  Oui,  oui,  la  question  préalable! 

Barras:  Pour  l'honneur  de  la  Convention,  pour 
l'intérêt  du  peuple,  j4  demande  aussi  la  question 
préalable. 

La  question  préalable  est  décrétée. 

Merlin  (de  Douai):  La  Convention  nationale 
vient  de  prouver  que  ceux  même  de  ses  membres 
qui  ont  été  poussés  dani  le  cours  de  cette  discussion 
par  des  considérations  particulières,  ou  par  des  mo- 
tifs d'humanité  bien  louables,  savaient  se  réunir  à  . 
un  avis  qu'ils  combattaient,  lorsqu'ils  sont  convain- 
cus que  l'intérêt  général  y  était  attaché. 

C'est  ici  l'instant  où  l'intérêt  du  peuple  doit  l'em- 
porter sur  l'intérêt  particulier;  votre  ouvrage  reste 
impariait  si  vous  n'adoptez  pas  deux  dispositions 
que  je  vais  vous  proposer. 

Touchés  par  des  considâ'ations  qui  vous  ont  paru 
puissantes,  vous  avez  envoyé,  le  30  frimaire,  le  re- 
présentant du  peuple  Bar  dans  les  départements  du 
Haut  et  Bas-Rhm,enle  chargeant  d'examiner  les  ré- 
clamations des  citoyens  que  la  terreur  avait  forcés  à 
sexpalrier.  L'infâme  Schneider,  convaincu  d'oppres- 
sion contre  les  patriotes,  et  condamné  à  mort  par  le 
tribunal  révolutionnaire  lui-même,  les  avait  poussés 
à  cet  excès  de  désespoir.  Mais,  pour  être  iuste,  il  faut 
qu'une  mesure  prise  par  vous  concilie  lintérét  gé- 
néral et  l'intérêt  particulier  ;  si  elle  lèse  l'intérêt 
général,  elle  cesse  d'être  juste.  Aujourd'hui  on  de- 
mande pour  les  départements  du  Nord  et  du  Pas-de- 
Calais  la  même  faveur  que  celle  accordée  aux  dépar- 
tements du  Haut  et  Bas-Rhin.  Je  voulais  appuyer 
cette  réclamation  ;  mais,  éclairé  par  la  discussion, 
par  le  danger  que  je  vois  dans  l'extension  d'une  telle 
Mesure,  je  m'élève  contre  moi-même,  contre  elle, 
et  je  demande  le  rapport  du  décret  du  30  frimaire. 

Je  demande,  en  second  lieu,  que  les  accusateurs 
publics  des  tribunaux  criminels,  les  administrateurs 
et  toutes  les  autorités  constituées,  soient  chargés  de 

f poursuivre  sans  délai,  et  selon  toute  la  rigueur  de 
a  loi  du  H  frimaire,  les  émigrés  et  les  prêtres  dé- 
portés qui  sont  rentrés  sur  le  territoire  français. 

Une  partie  de  l'assemblée  se  lève  en  signe  d'adhé- 
sion, et  applaudit  vivement. 

Bentabole  :  Lorsque  j'ai  parlé  en  faveur  de  Le« 
vrault,  j'étais  fondé  sur  la  loi  du  30  frimaire,  qui 
envoyait  Bar  dans  les  départements  du  Rhin,  et  le 
chargeait  d'examiner  les  réclamations  des  citoyens 
que  la  terreur  avait  fait  expatrier;  mais  des  considé- 
rations majeures ,  et  la  voix  de  l'intérêt  généra) , 
m'ont  déterminé  :  j'ai  voté  contre  Levrault.  Je  dois 

cependant  faire  une  observation  importante 

Lorsque  les  Prussiens  eurent  envahi  les  trois 
quarts  du  département  du  Bas-Rhin,  et  que  leur  ar- 
mée était  à  une  demi-lieue  de  Strasbourg,  Saint- Just 
et  Lebas  répndaient  la  terreur  autour  de  cette  place 
dans  laquelle  ils  étaient  renfermés.  Les  habitants  des 
campagnes^  voyant  l'armée  ennemie  en  retraite,  di- 


167 


rent  :  •  Si  nous  restons,nous  serons  guillotinés.  «  Ils 
suivirent  Farmée  prussienne  et  s*expatrièrent ,  de 
peur  d'être  punis  de  renvahissement  des  ennemis. 
Trente  mille  hommes,  tous  agriculteurs,  tous  très- 
peu  éclairés,  ont  émigré  de  cette  manière.  L'agri- 
culture a  beaucoup  souffert  de  cette  défection  dans 
les  départements  du  Haut  et  Bas  Rhin.  Je  crois  que, 
si  Texamen  des  causes  de  i*émigration  peut  jamais 
être  tait,  c'est  en  faveur  de  malheureux  paysans, 
plus  égarés  par  la  terreur  que  coupables  dans  leurs 
intentions. 

***  :  J'observe  à  la  Convention  que  beaucoup  d'in- 
dividus, se  disant  cultivateurs,  mais  qui  en  effiet  n'é- 
taient Gue  des  espèces  de  riches,  ont  émigré  avant 
l'arrivée  de  Saint- Just,  et  qu'aujourd'hui  ils  récla- 
ment des  exceptions  en  leur  faveur. 

DuROT  :  J'ajoute  que  ces  émigrés  sont  précisé- 
ment ceux  qui  traitaient  avec  le  plus  de  barbarie 
nos  malheureux  volontaires  prisonniers.  On  en  a  vu 
dépouiller  des  Français,  et  les  Prussiens  eux-mêmes 
forcés  de  soustraire  les  prisonniers  à  leur  rage. 

Laurenceau  :  Je  ne  viens  passoutcnir  la  CHUse  des 
émigrés,  je  suis  leur  plus  grand  ennemi.  (Murmures 
dans  une  grande  extrémité  de  la  salle.)  Oui,  je  suis 
leur  plus  grand  ennemi,  comme  je  suis,  avant  tout, 
l'ami  de  la  justice.  Je  ne  viens  pas  non  plus  parler 
en  faveur  de  ceux  qui  ont  fui  par  un  mouvement  de 
terreur  panique  ;  je  réclame  pour  ces  victimes  de 
Bobespierre  et  des  nommes  de  sang,  pour  ces  hom- 
mes qui  ont  donné  les  plus  éclatants  témoignages 
de  leur  civisme,  et  qui  n'ont  été  persécutésque  parce 
(|ue  leurs  talents  et  leurs  vertus  portaient  ombrage 
à  nos  farouches  tyrans,  parce  qu'ils  voulaient  la  ré- 
publique, et  que'  leur  attachement  pour  elle  était 
non  sur  les  lèvres,  mais  dans  leur  cœur...  (Les 
mêmes  murmures.)  Vous  me  répondrez  ;  mais  je 
saurai  tous  confonare  par  les  actions  et  par  les  écrits 
de  ceux  dont  je  parle.  Ces  dignes  républicains  ont 
été  proscrits  et  mis  hors  la  loi  par  Couthon  seul. 
Oui,  si  Barère  est  présent,  Je  Vf  ierpelle  :  niera-t-il 
qae  la  liste  des  vingt- sept  individus  qui  furent  dé- 
clarés hors  la  loi  sur  sa  proposition  n'était  signée  que 
de  Couthon?  Comment  me  taire  lorsque  la  justice 
est  si  outrageusement  violée? 

Plusieurs  voix  :  H  ne  s'agil 
d*émigrés. 

Laurbngeau  :  Il  s*agit  de  ceux  que  la  persécution 
a  poussés  sur  une  terre  étrangère  ;  mais,  au  sur- 
plus, il  est  un  principe  inviolable,  sauvegarde  de  la 
Convention  ;  c'est  qu  un  décret  rendu  ne  peut  étrr 
révoqué  sans  un  rapport  préalable  ;  ainsi  je  demande 
le  renvoi  aux  comités.  On  dit  que  vos  assignats  per- 
dront, si  vous  ne  révoquez  pas  ce  décret;  moi,  je 
vous  dis  que  la  révolution  est  perdue  si  vous  êtes 
injustes,  et  que  la  justice  est  la  meilleure  garantie 
de  vos  assignats.  (Vifs  applaudissements.) 

Ehrmanu  :  Vous  avez  envoyé  un  représentant  du 
peuple  dans  les  départements  du  Bhin,  pour  connaî- 
tre des  causes  qui  ont  éloigné  un  grand  nombre  de 
cultivateurs  de  leurs  foyers  :  vous  apprendrez  des 
choses  monstrueuses,  dont  l'humanité  frémit  ;  je  me 
contenterai  de  vous  dire  que  l'infîhne  Schneider,  qui 
a  reçu  le  châtiment  de  ses  crimes,  se  promenait  et 
parcourait  les  villages  accompagné  de  la  guillotine. 
(Mouvements  d'horreur.)  Dans  cet  appareil  affreux 
de  ses  courses  sanglantes  il  a  guillotiné  des  munici- 
palités entières.(Nouveaux  frissonnements. )Six  mille 
individus  ont  été  ses  victimes.  (Cris  d'indignation.) 
Je  sais  ces  malheurs;  mais  ils  sont  irréparables,  et 
peut-être  en  occasionneriez-vous  de  plus  grands  si, 
pour  l'intérêt  de  quelques  individus  qui  ont  échappe 
a  ces  massacres,  vous  pouviez  vous  départir  de  la  ri- 
gueur des  lois  contre  ceux  qui  ont  abandonné  le 


('agit  pas  de  cela,  il  s'agit 


territoire  de  la  France.  On  a  dit  que  la  justice  devait 
être  écoutée  préférablement  à  tout  :  oui,  sans  doute; 
mais  où.  en  seriez-vous  si  les  émigrés  pouvaient  se 
dire  :  «  Un  jour  nous  rentrerons..»  Ne  prenez  donc 
point  de  mesure  générale;  mais  lorsque  le  vaisseau 
de  la  république  sera  dans  le  port,  c'est  alors  qu'il 
vous  sera  permis,  et  sans  danger,  de  prendre  en  con- 
sidération le  sort  de  tel  ou  tel  individu  maîtrisé  par 
les  circonstances. 

(L  extrémité  de  la  salle  s'agite  et  s'ébranle  ;  tous 
les  membres  qui  y  siègent  se  lèvent  tumultuaire- 
ment,  et,  parmi  les  crisquMIs  font  entendre,  on  dis- 
tingue ces  mots  :  «  Nous  ne  transigeons  point  sur  les 
principes,  nous  les  voulons  tout  entiers;  tout  homme 
qui  a  émigré,  soit  par  peur,  soit  par  aristocratie, 
ou  autrement,  doit  être  également  frappé  par  la 
loi.  •  ) 

Barras  :  Je  demande  que  la  Convention  ordonne 
à  la  commission  des  émigrés  de  faire  imprimer  la 
liste  de  ceux  qui  ont  été  ou  seront  rayés  du  tableau 
des  émigrés.  Il  faut  que  la  Convention  soit  complè- 
tement instruite  sur  cet  article.  Je  demande  ensuite 
que  la  Convention  se  prononce  d'une  manière  for- 
melle sur  le  fait  d'émigration,  et  qu'une  fois  pour 
toutes  nous  Otions  tout  espoir  aux  lâches  et  aux  in- 
fâmes de  rentrer  au  sein  ae  la  patrie  qu'ils  ont  dé- 
sertée. (Vifs  applaudissements  dans  toutes  les  par- 
ties de  la  salle.) 

Eh  !  comment  ces  hommes  verraient-ils  la  Con- 
vention nationale,  qui  a  abattu  les  tyrans  et  la  ty- 
rannie? Montrez  de  la  faiblesse ,  et  ces  hordes  de 
brigands  vont  chercher  à  déchirer  la  patrie.  Non, 
non,  ils  n'y  rentreront  jamais  dans  cette  patrie.  (Les 
applaudissements  éclatent,  et  toutes  les  voix  rénè- 
cesmots  :  Non,  nont)  Ce  mouvement  sublime  doit 
leur  ôter  tout  espoir. 

Je  demande  que  la  Convention  n'écoute  aucune 
réclamation  en  laveur  de  ceux  qui  auraient  une  fois 
abandonné  la  patrie,  et  la  suspension  de  l'effet  de  la 
loi  dont  la  révocation  a  été  proposée,  jusqu'à  ce  qu'il 
ait  été  fait  un  rapport  à  ce  sujet. 

Legendrb  :  J'observe  que  si  la  Convention  éprou- 
ve la  nécessité  de  rapporter  des  décrets,  c*est  qu'ils 
n'ont  point  été  discutés  comme  vous  le  faites  en  ce 
moment  ;  si  le  décret  dont  on  demande  la  révocation 
avait  été  discuté,  il  ne  serait  pas  aujourd'hui  ques- 
tion de  le  rapporter,  car  il  n'aurait  pas  été  rendu.  11 
ne  faut  pas  traiter  la  république  en  détail,  mais  en 
masse.  (Applaudissements.) 

Je  jette,  moi,  un  regard  de  pitié  sur  de  malheu- 
reuses familles  que  la  peur  a  forcées  de  fuir,  parce 
qu'elles  n'avaient  pas  le  caractère  qui  convient  à  des 
républicains,  mais  qu'importent  des  familles  particu- 
lières?  c'est  la  grande  famille  que  vous  devez  consi- 
dérer. (On  appUudit.) 

Combien  dans  votre  sein  ont  été  menacés  de  Té- 
chafaud,  ou  y  ont  été  traînés!  eh  bien»  se  sont-ils 
sauvés?  (Les  mêmes  applaudissements.) 

***  :  Ce  n'est  pas  la  même  chose  ;  notre  poste  est 
ici,  c*est  à  nous  de  défendre  les  autres;  si  la  peur  de 
ceux  qui  ont  fui  a  été  fondée,  leur  fuite  nous  accuse; 
de  quel  droit  leur  en  ferions-nous  un  reproche  ? 

Legendrb  :  Celui  oui  luit  est  un  lâche.  Ecoutez  ce 
mot  d'un  de  nos  collègues,  qui  a  été  guillotiné.  11 
avait  été  prévenu  du  sort  qui  l'attendait  ;  quelques 
jours  avant  qu'il  fût  arrêté  on  lui  conseillait  de  Uiir. 
•  Eh  quoi  !  répondit-il,  emporte-t-on  sa  patrie  sous 
la  semelle  de  ses  souliers?*  (La  salle  retentit  d'ap- 
plaudissements.) 

Plusieurs  voix  :  C'est  Danton  ! 

Legendre:  L'histoire  et  la  postérité  jugeront 
l'homme  qui  a  prononcé  ces  mots  ;  pour  nous,  il 
faut  ajourner  les  morts,  et  rendre  justice  aux  vi- 


168 


vanls.  Ccstla  grande  fiamille  qui  réclame  nos  soins; 
ne  sacriGons  pas  ses  intérêts  aui  sentiments  de  com- 
passion que  peuvent  inspirer  quelques  individus. 
Quand  la  paix  sera  feite,  alors*  si  nous  sommes  répu- 
blicains, nous  volerons  indivtduellementau  secours 
de  ceux  qui  auront  été  victimes  d'une  rigueur  né- 
cessaire; car  le  devoir  d*un  républicain  est  d*aider 
ses  semblables,  etde  porter  des  soulagements  au  sein 
deTinrortune  ;  mais  ôu'aucune  exception  ne  soit  ja- 
mais prononcée  en  ravéur  de  ceux  qui  ont  aban- 
donné le  territoire  français. 

Je  demande  que  la  Convention,  dérogeant  à  la  loi 
qui  ne  permet  pas  de  révoquer  un  décret  sans  un 


tpour  . 
faud.  (Vifs  applaudissements.) 
La  discus^on  est  fermée. 

Les  propositions  d«  Merlin  (de  Doiraî)  sont  mises 
aux  voix. 

Le  premier  article  a  pour  but  de  rapporter  le  dé- 
cret en  vertu  duquel  on  a  envoyé  un  représentant 
dans  le  département  du  Bas-Rhin  nour  recevoir  les 
réclamations  de  ceux  qui  ont  été  forcés  de  s'expa- 
trier. 

Cet  article  est  adopté. 

Le  second  arCide  propostf  est  d'enjoindre  anx  tri- 
bonaax  de  poursuivre  sans  délai  toas  les  émigrés  ou 
prêtres  déportés  rentrés  en  France. 

Le  président  le  met  aux  vi^ix. 

One  vive  agitation  sa  manifeste  dans  l'assemblée. 

Un  wMmbrè:  Je  ne  souffrirai  Jamais  une  telle  in- 
j  ustice;  c'est  égorger  la  république. 

Tallien  demande  la  parole  pour  nue  obsenratlon. 

On  demande  que  le  décret  soit  mis  aux  voix. 

Bourdon  (de  roise)  :  Je  demande  la  parole  pour 
prouver  à  la  Convention  que  le  rapport  du  décret 
du  SO  frimaire  coûtera  ta  vfie  à  plus  de  cinquante 
mille  citoyens  innocents.  (On  murmure.)  Quelque 
agitation  qui  rè^  en  oe  moment  dans  la  Conven- 
tion nationate,  je  suis  oertain  qu'il  sera  Impossible 
de  U  ftiire  dévier  des  vrais  principes  de  justice  et  de 
raison.  (Vifs  amIaiidisBements.)  On  voos  a  proposé 
«n  grand  «de  de  rignenr,  qne  1  on  a  motivé  sur  tout 


ce  que  Tintérét  public  avait  de  plus  cher  :  vous  y 
avez  applaudi, citoyens;  mais,  sans  doute,  vous  n*a- 
vex  pu  vouloir  faire  un  acte  de  barbarie,  vous  n'a- 
vez pas  voulu  que  l*homme  qui,  sur  la  foi  de  votre 
décret  du  SO  frimaire,  serait  venu  apporter  en  France 
ses  réclamations  à  votre  collègue  Bar,  devint  la  vic- 
time de  sa  sécurité,  de  sa  confiance  dans  la  loyau- 
té des  représentants  du  peuple.  Et  moi  aussi  je  pense 
ifiie,  dans  ropinion  du  législateur,  tous  les  intérêts 
particuliers  doivent  di^raltre  devant  Tintérêl  gé- 
néral de  la  république;  ma» ,  dans  cette  circonstance, 
f«ou8deviez  à  rbnnanité,  à  la  justice,  à  vous-mêmes, 
d'excepter  de  la  çcine  de  mort  prononcée  contre  les 
émigrés  oe«x  qui,  dans  les  départements  des  Haut 
et  Bas-Rhin,  rentrés  en  F^micedepuis  le  SO  frimaire, 
y  sont  veaos  pour  présenter  leurs  réclamations  au 
représenUntdu  peuple  Bar,  en  exécution  de  ce  dé- 
cret. (On  applaudit.) 

Mbruh  (de  1>ouai):  Si  fav^  été  instruit  que,  sur 
la  foi  du  décret  du  30  frimaire,  des  émigrés  ue  ce  dé- 
partement fussent  rentrés  pour  réclamer^  certes  je 
n'aurais  pas  proj^osé  une  mesure  sans  restriction  : 
j'appuiedonc  moi-même  Tamendement  de  Bourdon, 
et  je  propose  d'accorder  le  terme  de  deux  décades, 
par  exemple,  et  d'un  jour  pour  cinq  lieues  en  sus,  à 


ceux  qui  pourraient  être  rentrés  ainsii  afin  de  sortir 
du  territoire  de  la  république. 

Babaud-Pommier  demande  la  parole. 

***  :  Tous  les  émigrés  sont  également  coupables 
envers  la  république  :  qu'ils  en  soient  sortis  en 
1789,  en  90,  en  91,  en  92  ou  en  93,  les  uns  à  cause 
de  la  perte  de  leurs  privilèges  et  de  leurs  châteaux, 
les  autres  après  le  3  septembre,  d'autres  après  le  10 
août,  etc.,  la  vérité  est  que  tous  ont  servi  la  coali- 
tion de  leurs  personnes,  de  leur  crédit  et  de  leurs 
biens.  Je  demande  la  question  préalable  sur  tout 
amendement. 

Boissiiu  :  La  loi  concernant  les  émigrés  est  pré- 
cise; ainsi  les  propositions  de  Merlin  sont  inutiles. 

On  demande  le  renvoi  du  tout  aux  trois  comités. 

BouBDON  :  Vous  avez  satisfait  à  l'humanité,  à  la 
justice,  en  exceptant  de  la  rigueur  de  la  loi  les  in- 
dividus rentrés  en  France  depuis  le  décret  du  30  fri- 
maire; je  ne  vois  plus  de  difocultés.  Aux  voix,  pré- 
sident! 

Le  président  rappelle  les  propositions. 

La  Convention  dîéclare  qa'il  n'y  a  pas  lieu  à  déli* 
bérer  sur  le  reavoi. 

Tallien  quitte  sa  place,  et  ra  sTasseoir  à  eW  de 
Barras. 

Le  président  met  aux  voix  le  rapport  du  décret  du 
30  frimaire  ;  le  rapport  est  décrété  au  milieu  des 
plus  vifs  applaudissements. 

La  seconde  proposition  de  Merlin,  amendée  nar 
Bourdon,  est  aussi  décrétée  à  la  grande  majorité,  et 
aux  cris  de  vive  la  réfmbliquet 

Tallien  :  Je  demande  qu'il  ^it  (ait  «a  amende- 
ment en  faveur  des  défenseurs  de  le  république ,. 
sortis  des  limites  du  territoire  Imitais,  (On  mur- 
mure.) 

Barras  :  Je  demande  à  rétablir  ma  proposition. 

1  descend  précipitamment  de  sa  place,  et  monte  à 
la  tribune,  au  milieu  des  applaudissements  d'une 
partie  de  ressemblée.) 

Barbas  :  Ma  proposition  peut  être  erronée, Je  puis 
me  tromper,  je  m'en  aperçois  tous  les  jours;  mais 
enfin  il  ne  faut  pas  que  des  lllches  puissent  venir  me 
reprocher  que  je  veux  confondre  les  braves  défen- 
seurs de  la  patrie  avec  les  émigrés;  je  répondrai  à 
ces  impostures  en  servant  bien  mon  pays.  Void  ma 
proposition,  qu'on  y  réponde.  (On  applaudit.) 

Barras  rappelle  ses  trois  propositions. 

On  demande  l'ordre  du  jour* 

L'ordre  du  jour  est  adopté  sur  les  propositions  de 
Barras. 

On  demande  l'impressioii  des  listes  des  émigrés  et 
des  radiations. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

(La  iHfftf  dewuUn,) 

N.  B.  Dans  la  séance  du  10  nivôse,  la  Convention 
a  suspendu  l'expédition  du  décret  rendu  avant-hier 
relativement  aux  é«igrés«  jusqu'au  rapport  que  les 
comité  sont  chargés  de  prunier  sur  les  proposi- 
tions faites  par  Bourdon  (de  l'Oise)  de  distinguer  les 
époques  et  les  motifs  d*é9iigr«tkNit  et  la  qualité  des 
hommes  émigrés. 


Payem^nUàimiréê^reriê  maHonmU, 

Le  payement  da  perp^itel  crt  oovert  pour  le»  six  pre- 
mier* mois  ;  il  ten  lift  A  %on  een  qui  sntmt  porteurs  (fln- 
•cripUcHis  ra  gmaé  Mvre.  €>M  pesr  tes  rentes  viagères 
est  de  kiil  mU  nsft  si  m  Jouis  ds  l'aMiée  1T03  {vloes 
style) 


2 


GAZETTE  NATIONALE  .a  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  112.        Duodi  22  Nivosb,  l'an  t^.  (Dimanehe  11  Janyibb  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Ratisbonne^  te  ii  décembre..  —  On  a  continué,  le  19 f 
à  la  diète,  rémission  des  votes  relalifement  aux  moyens 
de  pacification. 

Dans  une  précédente  séance,  Penvoyé  électoral  deTrèfcs 
•▼ait  obserré  que  la  paix  der ait  être  sans  doute  le  vœu  de 
TEmpIre,  mais  qu'il  paraissait  impossible  d*en  espérer 
une  solide  et  bien  affermie,  tant  que  la  France  n*aurait 
pas  une  forme  degouTcrnement  hautement  avouée. 

Le  suffrage  de  Bohême  a  été  enfin  émis  le  19.  La  décla- 
ratioo  j^orie  en  substance  : 

•  Que  la  guerre  déclarée  par  TEmpire  i  la  France  s'était 
bite  avec  une  grande  variété  de  bons  et  de  mauvais  succès; 

«  Que  dans  ce  moment  de  mauvaise  fortune  tous  les 
T«nx  devaient  se  porter  naturellement  et  avec  force  vers 
la  paix  »  seul  moyen  d^arrèter  le  cours  de  tant  de  maux  ; 

«  Que  personne  ne  peut  douter  des  moyens  qui  restent 
encore  à  TEaspire  de  continuer  la  guerre,  en  supposant 
qu*une  paix  honorable  ne  puisse  se  conclure; 

•  Qoesi  9  au  reste,  dans  la  situation  actuelle  des  affaires, 
quelqu'un  indique  les  moyens  de  procurer  II  TEmpire  une 
paix  équitable  et  solide,  S.  M.  L,  en  sa  qualité  deco-Elat, 
s'empressera  de  se  con  former  au  vœu  général  ; 

I  Que,  comme  il  est  impossible  d'entrer  plus  avant  dans 
robîet  des  délibérations  actuelles,  faute  de  connaître  les 
dispositions  de  Tennemi,  S.  M.  T.  ne  croyait  rien  de  plus 
prudent  ni  de  plus  avantageux  que  de  donner  son  adhésion 
au  vote  de  Trêves  (  voyex  ci  dessus)  ; 

t  Enfin,  que  S.  M.  conjurait  ses  co-Etats  d'employer  à 
la  confection  accélérée  de  leurs  contingents  le  temps  né- 
cessaire pour  parvenir  à  la  pacification.  • 

Le  vote  de  rAutricbe,  dans  le  collège  des  princes,  a  été 
lltléralemeiit  conlomie  4  celui  de  Bohême,  avec  celte  addi- 
tion: 

t  Qu'à  la  prochaine  séance  on  pourrait  avoir  occasion 
de  faire  qadque  oaverture  propres  servir  de  supplément,  > 

▲KGLETERRE. 

Umdree^  la  9  novembre.  —  Il  y  a  aujourd'hui  des  va- 
riantes sur  la  manière  dont  le  duc  d'York  sera  employé. 
Quelques  personnes  prétendent  qu'on  le  renverra  inces- 
samment an  poste  qu'il  vient  de  quitter.  Il  a  ramené  ici  le 
général  Erskine,  et  a  laissé  le  général  Harcourt  à  la  tête 
des  Anglais  en  Hollande,  et  le  comte  de  Walmoden  4  celle 
ie»  Hanovriens. 

Quant  à  l'expédition  dont  le  comte  de  Moyra  doit  être 
chargé,  beaucoup  de  gens  soutiennent  qu'elle  ne  tardera 
pas  d'avoir  lieu.  On  se  fonde  sur  ce  qu'il  est  impossible  de 
croire  que  l'on  se  donne  tant  de  peine  et  que  Ton  fasse  tant 
de  dépenses  seulement  pour  la  forme,  ou  pour  le  petit 

Iklaisir  de  tromper  l'espion.  Au  reste,  roici  les  détails  que 
'on  donne  sur  cette  expédition  :  tous  les  oflîders,  tous  abso- 
himent,  doivent  être  rendus  le  20  décembre  k  Southampton, 
où  est  le  quartier  général  ;  on  en  prépare  de  particuliers  à 
Wigth  pour  sept  régiments,  et  cinq  mille  hommes  vont 
être  envoyés  à  Jersey.  Enfin,  la  légion  d'émigrés  deToulon, 
commandée  par  d'Ervilly,  a  ordre  de  se  tenir  prête  à 
marcher. 

^  La  rentrée  ou  la  prorogation  du  parlement  sont  en* 
core  une  chose  incertaine,  et  dont  les  bruits  varient  d'un 
instant  à  l'autre.  Dans  la  matinée  d'hier,  on  disait  posi- 
tivement quHI  serait  prorogé  au  20  janvier,  et  dans  la  soirée 
on  affirmait  qu'il  rentrerait  le  SO  décembre. 

—  Ce  qu'on  sait  d'une  manière  un  peu  plus  sûre,  c'est 
qn'il  ne  faut  pas  au  ministère  moins  de  2A  millions  de  livres 
sterling,  ou  environ  550  millions  de  livres  tournois ,  dont 
18  millions  pour  la  dépense  qu'exigent  les  afbûrea  de  la 

Z*  Série.  ^Tome  X 


coalition ,  et  6  millions  pour  celles  des  deux  Indes.  On  ima- 
gine bien  que  ce  n'est  pas  par  la  voie  des  impôts  qu'on  se 
procurera  cette  somme  énorme,  dans  un  pays  qui  en  est 
défi  surchargé.  On  aura  recours  4  un  emprunt  qui  sera 
assuré,  garanti,  consolidé,  en  un  mot  revêtu  de  toutea 
les  formes  propres  à  tranquilliser,  par  le  gouvernement.  Il 
ne  reste  plus  qu'une  petite  question  k  faire  :  c'est  de  savoir 
qui  est-ce  qui  cautionnera  le  gouvernement.  C'est  Ici  un 
peu  l'histoire  des  Indiens,  qui  ne  sont  pas  du  tout  em- 
barrassés de  vous  expliquer  comment  la  terre  est  soutenues 
ils  la  font  porter  par  quatre  éléphants,  qui  posent  eux- 
mêmes  sur  le  dos  d'une  énorme  tortue.  Mais  quand  on  leur 
demande  sur  quoi  la  tortue  est  appuyée,  ils  ne  savent  plus 
que  vous  dire.  Les  prêteurs,  si  tant  est  qu'on  en  trouve* 
n'auront  pas  même  ici  la  ressource  insuffisante  de  la  tortae. 

—  Quoiqu'on  n'ait  encore  rien  d'officiel  sur  la  reprise 
de  la  Guadeloupe  par  les  Français,  cette  nouvelle  vient  de 
tant  de  côtés  qu'on  en  a  presque  la  certitude  morale» 

ITALIE. 

Savonêt  U  8  déûembrê»  —  Des  commissaires  fhmçais  se 
répandent  pour  acheter  les  foins  qui  se  trouvent  dans  toua 
les  lieux  de  la  rivière.  Ils  en  ont  emmené  du  port  Maurice 
une  grande  quantité  provenant  des  fourrages  faits  par  eux 
près  de  Daguasco,  de  Camparato,  etc.  Ils  ont  aussi  enlevé 
sur  le  territoire  piémontais  beaucoup  d'orge,  d'avoine  et 
de  bestiaux. 

—  On  apprend  de  Gênes  que  le  patricien  Lac  GentUCt 
qui  est  absent,  vient  d'être  condamné  à  cinq  ans  d'exil. 

—  Le  consul  français  a  Gênes  a  reçu  de  Toulon  une  pro- 
clamation du  représentant  du  peuple.  Celte  proclamation, 
qu'il  a  fait  afficher  au-devant  de  son  hôtel ,  porte  :  •  Que 
comme  c'est  k  la  seule  force  navale  armée  qu'appartient 
le  droit  honorable  de  poursuivre  sur  mer  les  ennemis  de  la 
liberté,  toutes  les  lettres  de  marque  sont  retirées  aux  ar^ 
mateurs  particuliers.  Toutes  les  prises  faites  par  ceux-ci 
seront  escortées  jusqu'à  Toulon,  s 

Ptorenee,  /a  10  décembre.  —  La  cour  de  Rome  se  con- 
duit avec  tant  d'imprudence  qu'après  avoir  mécontenté 
les  cabinets  de  Vienne,  de  Suède,  et  même  ceux  de  Naples 
et  de  Florence,  die  vient  encore  de  blesser  la  cour  de 
Madrid  dans  une  circonstance  délicate.  L'archevêque  de 
Valence  était  disgracié:  le  pape  Ta,  par  un  bref,  rétabli 
dans  son  siège  et  dans  toutes  ses  dignités.  Les  partisans 
les  plus  lélés  du  Saint-Siège  renoncent  à  défendre  une 
conduite  si  opposée  aux  principes  même  de  la  politique 
ultramontaine. 

Les  livres  suivants  viennentd'ètre  mis  à  l'index  x  Le  Credo 
général  de  toutes  Us  religions ^  dédié  au  sens  commun  du 
genre  humain,  imprimé  à  Vienne;  Us  Vies  voluptueuse» 
des  capucins  et  des  religUuses,  k  Cologne  ;  de  la  Seconde 
Epoque  de  C Eglise,  k  Venise;  des  Derniers  Méconienle" 
ments,  4  Vienne;  de  la  LégUlation,  par  Fllanghieri,  à 
Naples. 

PATS-BAS. 

Bruxelles,  le  td  frimaire.  -^  Les  généraux  ennemis 
détachent  de  nouvelles  forces  des  environs  Dusseldorf^ 
pour  aller  remplacer  sur  le  bas  Rhin  le  général  Alvimj^ 
qui  doit  se  rendre  dans  la  Gueidre  hollandaise. 

Il  est  aujourd'hui  confirmé  que  le  corps  d'armée  impé- 
rial destiné  à  la  défense  de  la  Hollande  est  à  la  solde  de 
la  cour  de  Londres. 

Une  division  de  l'armée  du  Nord  vient  de  foire  un  mon* 
vement  sur  Thiel  etGorcum.  Le  prince  héréditaire  d'Orange 
est  posté  près  de  cette  dernière  place  avec  l'armée  hollan- 
daise. Il  parait  que  le  but  des  républicains  est  en  ce  mo- 
ment de  se  rendre  maîtres  de  la  haute  Meuse. 

«»  On  apprend  du  quartier  général  français  qu'à  chaque 
instant  on  y  amène  des  prisonniers  ennemis,  avec  les  ba- 
gages et  les  armes  qu'ils  abandonnent  dans  leur  fuite. 

22 


m 


fitPViUQVÈ  FRANÇAISE. 


Toulon ,  lé  6  «iteote.  —  Les  frégates  ta  Minerw, 
VArihmUi,  VÀUéiU,  là  fôwfftç/éuw,  ei  lescôrvëi- 
tf B  Cil  Brun9.  le  ir«tf<tif  «  les  Uricki  U  BfUêtds  CKff-^ 
iMMIon,  qui  aillent  parlii  pour  ûllcr  ■  Alger  viêu- 
ileu!  &tft\nf  et  ont  am^wé  ftvw  elles  vingt-einq 
prlscâ  richemenl  rhârgëei.  Le  nombre  des  prlsoti- 
olers  qu'elles  ont  fftils  se  monte  à  plus  de  six  cenU. 
Sur  une  de  ees  prises  sê  trouvaient,  comme  passa- 
gers, vingt-huit  timigrds  de  haut  parage« 

întlruclion  puhUque» 

La  leçon  publique  des  sourds-muets  de  naissance» 
qui  av&it  lieu  le  prlmldi  de  chaque  déclide«  est  ren- 
voya au  quiutidi,  pour  ne  pas  priver  ceux  qui  vou- 
dront y  assister  de  Vavaatage  de  suivre  les  cours  de 
rBeoU  Normale.  Sicabo» 

Brûlemenî  É'ûttignais. 

Le  19  aivose,  4  dix  heures  du  matia^  il  a  é\é  brûlé, 

IkûÊ  raacien  local  des  ci-devant  GapuoineS|  la  somme 
t  80  millloiis  en  assignatsi  provenant  des  éohau'^ 
S»,  lesquels  I  joints  aux  8  milliards  ftOO  millions 
^i000  liVé  dëjà  brûles,  forment  un  total  de 
S  milUards  M9  millions  ooa^ooo  lfv> 


CONVSNTIÔN  KAÏIONALB. 

Modifies  de  Éintcthùlèé 

nttn  A  LA  UkHtÈ  W  IS  NIVOtË. 

tin  SeOétllïe  donne  lectur*  de  k  lettré  suivante  : 

Blutel,  représentant  du  ptsuple  âùHê  tiipùfti  dé  La 
JlotAetff  t  AoeAf^,  Bor4etwr,  BAlfùHnfisHp^fts 
iNtf«fffii#»  à  la  Cofi^eniCofi  nûiOmûlé, 

llo«ktr«rt,  It  10  BÎTotei  i*an  Ot  dt  la  r^tibU^m 
fraaçtÎMi  iM»  «t  iudifitibl*» 

«  Chaque  jotir  nous  prouve,  citoyens  eollè^ues,  que  rien 
flepeutarrèterilMreplUité  de^Frunçalsi  ni  lês  rigueurs  de 
fi  saiioo^  fll  iMnooufttsnee  des  èlémenti  ne  peufent  »<- 
Mllf  leur  tourag«;  II»  se  montrent ,  el  tout  cède  à  leurs 

efforts;  le  peuple  partage  leurs  triomphes;  ill  redoublent 
sdaeuertlei  11  trataiileavee  plasd'ardedr  ituâodia  nouteiie 
4*unf  vletoiniott  le  reett  d'un  acte  de  justice  tient  fk^ipper 
aas  orelllek  Vous  n'en  doutes  paSi  tiioyens  eoueguest  et 
filme  k  fOui  le  répéter»  je  «ois  partout  un  neupte  ami  de 
l^vrdrei  de  la  fustice  et  de  l'humanité  i  qui  dételle  leiop* 
l^resiettrtt  qui  a  frémi  dlndlKhstlon  à  le  vue  des  aetci 
Tezatoires  et  sanguinaires  qui  désolaient  tous  les  départe* 
ments,  et  qui  ne  comprimait  «on  méconlentement  que  par 
respect  pour  la  ConTenlion  nationale,  et  par  la  conGance 
qu'il  afailqu*ellé s'empresserait  de  réprimer  de  teUetlior- 
rtorit  Que  ne  poUvei-TOus  aigoard'bui  être  témoin  de  ta 
jOiel  elle  serait  la  récompense  de  vos  travaui* 

•  )e  fous  annonce  l'entrée  daae  le  port  d'un  bri«à  an- 

S  lait  nommé  la  Suzanne ,  Tenant  de  Terre-Neuve,  chargé 
e  morue,  pHa  par  la  frégate  la  Loire» 

i  Les  trâVaiit  de  déchargement  se  lulTeat  touioUrs  aTeo 
assiduité.  Je  ne  négligerai  rien  pour  accélérer  la  circula- 
tion des  denrées  et  marchandises  qui  en  proviennent.  Je 
dompte  etpédler  demain  une  partie  de  savon  pour  t>aHs. 
i  iMut  et  fraternité.  St^né  BLttat.  • 

La  Convention  ordonne  Tinsertion  de  cette  lettre 
au  Bulletin. 

MoNrtOT,  au  nom  du  tDOmité  des  Onstiees  :  D*après 
le  dofttier  tompte  renda  nu  comité  des  finances  sur 


les  eontrtbntions  de  Is  Belgique,  Sttif  t%  millions 

77ai675ii?res« 

Il  avait  été  recouvré,  au  lO  frimaire,  25  mittions 
891,024  liv  12  s. 

11  restait  par  conséquent  à  recouvrer  42  millions 
022,250  liv.  8  s. 

Au  30  frimaire,  le  reste  à  recouvrer  se  réduit  à 
40  millions  730,087  liv.  S  s.  Il  d. 

Ainsi  la  recette  des  vingt  derniers  jours  de  fri- 
maire a  produit  t  millions  198,162  liv.  4  s*  1  d. 

Ce  qui  porte  Ir  recette  totale,  au  ao  fhmairei  à 
28  millions  43,787  liv.  18  s.  10  d. 

La  ville  d*AnverS|  qui  avait  mis  d'abord  beaucoup 
de  lenteur  à  s'acquitter,  paraît  avoir  fait  de  grands 
efforts.  Sur  10  tnflloni,  elle  avait  payé  au  80  fri- 
maire a  miHiOns  20)778  liv. 

Elle  n'émit  par  conséquent  plus  redevable  que  do 

1  million  070(226  liv* 

Bruxelles  et  Malines,  impoeéeSi  la  premièra  à 
5  millions  t 

La  deuxième  a  1  million  50|000  liv.i  ont  soldd. 

Louvaioi  aur  a  millionsi  n*a  plus  que  aO|000  llv«  à 
paver* 

Yprea ,  sur  10  milliona  ^  n*n  pas  euooN  payd 
400)000  liv. 

Qand)  Bruaes,  ostende,  Courtrsy.  Namur,  Toor- 
tiay ,  Alost  et  I^inove,  Motts,  Ath  et  Nivelles  sont  fort 
en  retard. 

Indépendamment  de  la  reeette  d-déssus,  le  payeur 
général  âVait  reÇu,  depuis  notre  entrée  en  BelgiquOi  . 
jusqu'au  30  frimaire  i 

10  Kn  recettes  extraordinaires  provenant  de  venta 
d'objets  de  toute  nalure«  tels  que  ohevauXf  ëto^, 
argenterie,  etc.,  Soisis  chea  des  émigrési  reliquata 
de  caisses  diverses,  etc.,  Une  somme  de  8  inlilionâ 
912^082  I.  1  s.  0  Um  dont  «  millions  280)240  liv.  3  s. 

7  d.  en  valeurs  métalliques,  et  i  million  670,882  liv. 
18  s.  2  d.  en  assignats  et  billOU* 

20  Les  impositions  ordinaires  de  h  Belgique,  1  mil- 
lion 516,099  liv.  10 s.  4  d., dont  55,629 l!v.  17  s.  8  d. 
en  valeurs  métalliques,  et  1  million  461,069 liv.  i2s. 
il  d.  en  assignats. 

Rétultat  gén  éral  au  30  frimaire. 

Recettes  sur  les  contributions  militaires,  en  espè- 
ces métalliques,  28  millions  43,787  livt  16  s»  7  d» 
^  Sur  les  recettes  extraordinaires,  en  espèces  métaU 
liques,  8  millions  836,840  liv.  a  a.  V  d« 

Bu  assignats,  l  million  676,^32  liv*  16  s.  2  d. 

6ur  les  impositions  ordinaires ,  en  espèces  métal' 
liqucs,o6|620iiv.  iVSiOd. 

En  assignats,  1  million  461,069  liv.  12  S.  11  d. 

Total  en  espèéés  màâlliques,  30  millions 335, 666 1. 
15  s.  10  d. 

Total  en  assignats,  8  millions  187,402 1.  Il  s.  1  d« 

Total  général,  es  usinions  473,060  Itv.  10  s.  11  d. 

•««Des  militaires  revenantda  8aint4)omingue  sont 
admis  à  la  barre. 

Vorateur  :  Vous  voyez  devant  vous  des  soldats 
rëpublioaiua,  qui  les  premiers  se  aont  offerts  ù  la 
IKitrie  pour  aller  combattre  eu  delà  des  mère  les 
ennemis  de  la  liberté  et  de  l'égalité,  avant  même 
que  la  guerre  fût  déclarée  avec  les  puissances 
étrangères.  Après  avoir  combattu  sous  un  climat 
plus  meurtrier  que  le  fer  ennemi,  et  avoir  Bouflert 
avec  patience  les  privations  de  tout  genre,  dcvaient<> 
ils  s'attendre  qu*en  rentrant  dans  leur  patrie  ils  n*9 
trouveraient  que  des  fers?  C'est  cependant  ce  que 
nous  avons  éprouvé.  Bn  arrivant  à  Brest,  nous  avons 
été  Jetés  dana  les  prisons,  où  nous  avons  langui  pen- 
dant cinq  mots  et  demi;  et  nous  ne  devons  notre 


171 


cinrgissemcnt  qu*au  décret  que  yous  ayez  reodu  en 
faveur  des  colonSt 

Convaincu  de  notre  innocence,  le  repr^^sentant 
Lrluure  nous  p  envoyés  i  Paris;  et  pleins  de  con- 
fia ncc  dans  réduite  de  la  Convention,  nous  venons 
aujourd'hui  lui  présenter  à  elle-méma  nos  justes 
réclamations.  Nous  la  prions  de  faire  eDiser  notre 
inaction,  et  de  nous  mettre  à  même  de  prouver  que 
nous  connaissons  tout  le  prix  de  la  liberté.  Nous 
demandons  aussi  la  dette  sacrée  que  la  république 
contracte  envers  tous  ceux  qui  la  défendent.  Nous 
n*avons  reçu  à  Saint-Domingue  que  de  faibles  à- 
comptes,  depuis  notre  départ  de  France ,  et  nous  ne 
rougissons  pas  de  dire  que  nous  ne  vivons  que  des 
secours  de  nos  amis.  Car,  citoyens  représentants, 
connaissez  tous  nos  malheurs.  Ballottés  par  le  aort 
et  rinfortune ,  noua  avoua  été  pris  par  dea  ooraaires 
et  conduits  aux  Bermudes,  où  noua  avons  été  dé- 
pouillés de  tout  ce  que  noua  possédions.  Il  ne  nous 
reste  donc  de  ressource  que  dans  votre  justice.  Vive 
la  république  ! 

Cette  pétitioa  est  renvoytSe  au  comité  des  secours 
publics. 

Mailrv,  au  nom  du  comité  de  législation  ;  Ci- 
toyens ,  une  question  asses  importante  vous  a  été 
soumise  par  le  tribunal  de  commerce  de  Bordeaui* 
Ils*agit  a*unjugenrient  rendu  pendant  réclipse  de 
la  gloire  révolutionnaire  de  cette  commune  ;  mois 
ce  n'est  pas  sur  un  jugement  isolé  que  votre  comité 
de  lé|[isIation  a  cru  devoir  arrêter  vos  regards,  Il  a 
pense  que,  pour  n*avoir  pas  à  prononcer  suocessi- 
Tcment  sur  une  longue  série  de  réclamations  sem- 
blables, il  fallait  examiner  la  question  par  rapport  à 
tous  les  jugements  qu'on  pourrait  supposer  avoir 
été  firappes  3e  nullité  dans  le  département  de  la  Gi- 
ronde, pour  la  même  cause  et  dans  les  mêmes  cir- 
constances. 

Par  un  décret  du  5  août  1799  vous  mîtes  hors  de 
la  loi  tous  les  membres  du  fameux  rassemblement 
formé  à  Bordeaux  sous  le  titre  de  commission  popu- 
laire de  salut  publie. 

Un  second  déeret  du  19  vendémaire  suivant  dé- 
clara nuls  tous  les  actes  publies  auxquels  avaient 
eoneouru  des  fonetionnalres  mis  hors  de  la  loi. 

Faut-il  regarder  comme  nuls  tous  les  jugements 
rendus  dans  ^intervalle  de  ces  deux  décrets,  soit 
par  le  tribunal  de  commerce,  soit  par  les  tribunaux 
de  distriet  du  département  de  Bec-q'Ambès? 

Voici  les  ftilts  que  nous  avons  recueillis  à  cet  égard  : 

L.es  corps  administratifs  de  Bordeaux  furent  le 
noyau  de  la  commission  ;  ils  y  appelèrent  toutes  las 
autorité  constituas  du  département.  Des  membres 
de  divers  tribunaux  s'y  rendirent,  mais  en  petit  nom- 
bre •  et  la  plupart  ne  brent  qu'y  paraître. 

Les  représentants  du  peuple  Tallien  et  Chaudron- 
Bousseau  furent  envoyés  dans  ce  département  pour 
y  faire  exécuter  le  décret  du  6  août.  Dans  celte  im- 
portante mission,  ils  s'attachèrent  à  distinguer  Ter- 
reur accidentelle  et  entraînée  d*avec  la  combinaison 
réfléchie  et  active.  Ils  crurent  avec  fondement  qu'il 
ne  fallait  pas  traiter  et  punir  comme  membres  de  la 
commissiou  ceux  qui,  n'y  ayant  été  appelés  qu'addi- 
tionnellement  et  parce  qu'ils  étaient  membres  de 
quelqu'une  des  autorités  constituées,  s'y  étaient  d'a- 
bord présentés  de  manière  à  ne  pouvoir  pas  être  ao- 
eiisés  d'y  avoir  joué  un  rûle  effectlt.  ils  reconnurent 
que  la  formation  et  les  actes  de  la  commission  de- 
vaient être  essentiellement  attribués  aux  membres 
.  des  corps  administratifs  dont  |ei  t^tea  tombèrent 
ensuite  sous  le  elaive  de  la  loi. 

Les  divers  tripunaux  judiciaires  et  leurs  membres 
en  général  furent  considérés  comme  ne  méritant 


nullement  d'être  inquiétés  pour  fait  d*«dIiMon , 
même  indirectCji  aux  actes  de  la  commission  dite 
populaire  ;  aussi  avaient-ils  continué  d'administrer 
la  justice  à  la  satisfaction  du  public,  depuis  la  con- 


lu  peuple 
lement  successif  nés  autorités  constituées. 

L^opinion  du  peuple  sur  la  conduite  politique  des 
tribunaux  judiciaires  était  telle  que  ceux  même  de 
leurs  membres  qui  avaient  assisté  à  quelqu'une  des 
séances  de  la  commission  prétendue  populaire  ne 
furent  ni  poursuivis  ni  cités  devant  la  commission 
militaire  établie  à  Bordeaux  pour  juger  et  punir  les 
auteurs  des  actes  libcrticides  qui  en  étaient  émanés. 

Ces  faits  vraiment  décisifs  sont  le  résultat  d'une 
déclaration  datée  du  17  frimaire  dernier,  qui  a  été 
fournie  à  votre  comité  de  législation  par  nos  collè- 
gues Tallien  et  Chaudron-Roussêau. 

Le  eomité  m'a  chargé  en  eonséqoenoi  de  vous  pré- 
senter le  projet  de  décret  suivant  s 

9  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
son  comité  de  législation  sur  un  Htèré  du  trtbunal 
de  commerce  de  Bordeaux,"et  sur  la  «leôla ration  des 
représentants  du  peuple  Tallinn  et  Chaudran-Utujs- 
seau,  décrète  que  (esloisdua  mdl  UOâ  (vimu  style) 
et  du  19  venaémiaire  suivant,  rclaLivt:^^  limt^aux 
actes  faits  par  le  rassemblement  fûrnie  4  Borijeaux, 
sous  le  nuni  de  oommission  iniptOuirû  de  statut  pu- 
blic, l'autre  aux  actes  publics  ou  privés  qu'auraient 
faits  ou  auxquels  auraient  concouru  iks  (uriaioo- 
naires  publics  ou  d'autres  citoyens  mi»  hor^  da  la 
loi,  ne  sont  point  applicables  aux  jugements  ren- 
dus, dans  l'intervalle  deoes  deux  lais«  par  leadiyw 
tribunaux  judiciairea  du  département  du  Bao-4*Am- 
bès.t 

Ce  prAJat  de  déeret  est  adopté. 

SoELLiee,  au  nom  des  comités  de  eommeroe  et  <|es 
finances  ;  Un  projet  d'une  nouvelle  organisation  des 
douanes  est  actuellement  sous  les  veux  de  votre  co- 
mité de  commerce;  plusieurs  représentants  en  mis- 
sion dans  les  ports  sont  chargés  ae  prendre  des  ren-  . 
aeignements  sur  la  situation  actuelle  des  douanes, 
et  leurs  observations  pourront  apporter  quelques 
ohangements  au  plan  que  Ton  se  propose.  D'alHeurSt 
pour  sa  parfaite  exécution,  il  sera  nécessaire,  en  re- 
formant le  cordon  sur  toutes  les  eôtesQt  frontières, 
de  ftiire  une  autre  distribution  desfbrees^de  changer 
ia  résidence  de  plusieurs  brigades  ;  et  Thlver  étant 
peu  propre  à  ces  mouvements,  ils  im  pourront  s'ef- 
fectuer qu'au  printemps.  Il  devient  néoeasaira  que 
jusqu'à  cette  époque  le  service  ne  manque  pas,  et 
d'empêcher  la  rupture  du  oordon  et  une  désorgani- 
sation totale  qui  entraînerait  les  résultats  laa  plus 
fâcheux  pour  les  intérêts  de  la  république. 

La  commission  des  revenus  nationaux  a  déjà  hit 
Qonnaître  à  votre  comité  de  commerce  l'état  mal- 
heureux des  employés  des  douanes  ;  toutes  les  let- 
tres qu'elle  reçoit  des  inspecteurs  sont  alarmantes, 
et  annoncent  que  ces  malheureux  ne  peuvent  exister 
plus  longtemps  dans  cet  état  de  misère.  Tous  implo- 
rent l'humanité  de  la  Convention  nationale,  ou  la  li- 
berté de  quitter  un  état  qui  ne  fournit  pas  à  leurs 
premiers  besoinSt 

Jusqu'à  ce  moment  les  chefs  avaient  cherché  à  ra- 
nimer le  courage  des  préposés;  mais  Tarrivée  d'une 
saison  rigoureuse  a  défruit  leurs  espérances.  La  plu- 
part manquent  de  subsistances  pour  leurs  femmes, 
leurs  enfants  ;  les  autres  ne  peuvent  se  procurer  de 

vêtements,  de  souliars,  etc. 

L'humanité  commande  aux  législateurs  de  pren- 
dre f  Q  oopsidtfratiOD  rétatmalbeureui  des  préposés* 


!72 


et  rintërét  national  exige  que  le  service  4es  douanes 
se  fasse  avec  beauconp  de  vigilance  et  de  sévérité. 

Projet  de  décret. 

•La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  ses  comités  de  Gnances  et  de  com- 
merce, voulant  procurer  aux  préposés  des  douanes 
les  moyens  de  remplir  leurs  fonctions  avec  le  zèle 
que  la  républiçiue  attend  d'eux,  et  considérant  com- 
bien leur  service  est  important  dans  les  circonstan- 
ces présentes  pour  empêcher  Texportation  des  sub- 
sistances et  matières  premières,  décrète  : 

«  Le  comité'  des  finances  est  autorisé  à  fixer  le 
traitement  des  employés  des  douanes,  pour  Tan  3« 
de  la  république,  a  compter  du  1er  nivôse,  d*après 
rétat  qu'il  s'en  fera  remettre  par  la  commission  des 
revenus  nationaux.  • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

^  Monnot,  au  nom  du  comité  des  finances,  fait 
rendre  le  décret  suivant  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
son  comité  des  finances,  décrète  : 

•  Art.  I«r.  La  trésorerie  nationale  tiendra  à  la  dis- 

Î position  du  commissaire  liquidateur  provisoire  de  la 
iste  civile  la  somme  de  600,000  livres,  pour  être 
distribuée  provisoirement  aux  gagistes,  pensionnai- 
res et  salanés  de  la  liste  civile,  pour  ce  qui  reste  dû 
des  six  mois  échus  le  il  nivôse  de  Tan  2,  et  pour  les 
six  mois édius depuis  ledit  jour  U  nivôse  au  il  mes- 
sidor de  Tan  S,  en  proportion  d'un  maximum  de 
1,000  liv.  par  an,  selon  le  mode  adopté  par  le  décret 
du  17  germinal,  et  d'après  les  liquidations  provisoi- 
res feites  en  exécution.  Le  payement  sera  fait  aux 
individus  par  la  trésorerie  nationale,  conformément 
au  décret  du  S  ventôse,  sur  les  mandats  du  commb- 
aaire  liquidateur  provisoire,  le  tout  à  imputer  sur  ce 
qui  sera  reconnu  devoir  être  accordé  en  définitif  à 
chacun  desdits  pensionnaires  et  gagistes. 

«  11.  Pour  particioer  aux  secours  décrétés  par  Tar- 
ticle  précédent,  lesoits  gagistes,  pensionnaires  et  sa- 
lariés de  ladite  liste  civile  seront  tenus  de  justifier 
d*UD  certificat  d'indigence,  dans  la  forme  prescrite 
]Mff  le  décret  du  17  germinal. 

•  lU.  A  Paris,  lesoits  certificats  d'indigence  seront 
délivrés  par  les  comités  de  bienfaisance  de  la  section 
du  domicile  du  requérant,  visés  par  le  comité  civil 
et  par  le  département ,  faisant  en  cette  partie  les 
fonctions  du  conseil  général  de  la  commune.  • 

»  Sur  le  rapport  du  même  membre,  au  nom  du 
même  comité,  la  Convention  nationale  décrète  que 
le  comité  des  finances  (section  des  assignats  et  mon- 
Daies)  est  autorisé  à  faire  préparer  et  fabriquer  des 
anignats  dans  les  coupures  les  plus  convenables 
pour  le  service  de  la  trésorerie,  et  pour  l'échange 
des  assignats  usés  par  la  circulation.  Ces  assignats 
seront  déposés  à  la  trésorerie,  et  ne  pourront  être 
mis  en  émission  que  par  un  décret  de  la  Convention 
nationale.  > 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  19  NIVOSB. 

Un  secrétaire  lit  la  lettre  suivante  : 
À  la  Conventwn  nationale. 

90  frimaire.  Tan  3«  de  la  république  âne  el 
indivisible. 

t  RepréseDUDts,  à  la  voix  des  libérateurs  du  9  thermi- 
dtr,  les  républicaîDS  entr^oufreot  leur  tombe  ;  et  moi  aussi 
je  vous  demande  que  ?ous  me  rendies  le  feu  et  Tean* 


•  fiébert  poussa  sur  mol  tous  les  bommes  de  sang  ;  Pache 
fint  me  dénoncer  ;  Haoriot  s'arma  contre  vous,  pour  me 
saisir  ;  Coulbon  décréta  qu'on  m'arrêterait  ;  Saint-Just  créa 
mes  crimes  ;  Amar  dressa  mon  acte  de  proscription;  Barère 
me  mit  hors  de  la  loi. 

«  Le  premier  qui  vous  dénonça  le  tjrrao,  les  forfaits  quMl 
avait  commis ,  les  forfaits  les  plus  grands  qu*U  Toulait  com- 
mettre, ce  fut  moi  :  me  refuseriez-vous  la  faculté  de  re- 
pousser devant  vous  les  calomnies  du  tyrau  ?  Les  formes 
qui  ont  protégé  Carrier  même,  me  les  raviriei-vous?  Non, 
non,  vous  êtes  justes,  car  vous  êtes  libres. 

t  Amar  et  Barère  sont  au  milieu  de  vous.  Réduisez-les , 
pour  la  première  fois,  à  regarder  leurs  victimes  en  ftce; 
contraignez-les  enfin  à  m'accuser  moi  présent,  iion  devant 
la  troupe  d*assassins  quMIs  appelaient  un  tribunal,  mais 
devant  des  juges,  des  juges  impartiaux,  intègres,  irrééu« 
sables,  de?ant  vous.  Qn*un  déeret  ordonne  entre  eux  et  moi 
cette  confrontation  solennelle,  et  j^aeoours. 

>  Je  ne  vous  parle  point  des  mille  périls,  des  maux  sans 
nombre  qui  m'ont  accompagné;  tant  d'autres  en  ont  en- 
duré plus  que  moil  Tantôt  au  fond  des  souterrains,  et 
tantôt  sur  d'ftpres  montagnes,  errant,  abandonné,  proscrit, 
mais  seul  dn  moins,  et  libre, fai  pu  souvent  à  haute  voix 
protester  contre  la  tyrannie,  ils  ont  soufllert  plus  que  moi, 
sans  doute,  les  dignes  envoyés  du  peuple  dont  les  uns  ont, 
pour  Tamour  de  la  liberté,  reça  des  fers,  et  les  autres, 
restés  en  présence  de  l'oppresseur,  ont,  sous  son  bras  toa- 
jonri  menaçant,  patiemment  préparé,  ^érensement 
attendu  Tinstant  de  se  relever  et  de  le  précipiter. 

•  Ce  n*est  donc  pas  de  ce  que  vous  allez  terminer  bms 
détresses  que  je  vous  remercie  :  je  vous  remercie,  avec  la 
France  entière ,  d'avoir  sauvé  la  patrie.  Trop  beareux  qt  i- 
conque  ayant  été,  comme  vous,  opprimé  pour  elle»  peut 
ressaisir  Tespoir  de  la  servir  a?ec  vous  t 

•  Signé  J.-B.  LonvBT,  Cun  des  reprémmtamtâ  du 
peuple  proicrits  en  1798.  a 

Cette  lettre  est  renvoyée  aux  trois  comités  réunis 
de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  de  législation. 

—  Lei  membres  composant  le  comité  français  à 
Philadelphie  adressent  à  la  Convention  nationale  le 
procès-verbal  de  la  fête  aue  les  républicains  des  An- 
tilles célébrèrent  le  23  thermidor,  anniversaire  du 
10  août  1792,  en  Thonneur  de  cette  mémorable  jour- 
née, et  lui  font  part  de  Texpression  de  leiurs  senti- 
ments, et  s'expriment  ainsi  : 

•  Citoyens  représentants,  tandis  que  lés  Français 
en  Europe  honorent  la  Divinité  en  combattant  les 
rois,  les  républicains  des  Antilles,  contre  qui  les 
perfides  Anglais  et  les  Espagnols  dirigent  depuis 
quatre  ans  leurs  poignards,  célèbrent  à  Philadelphie 
la  destruction  du  despotisme  ;  TEtre  suprême  ^  en- 
tendu ce  nouveau  serment  de  fidélité  et  d*unité  de  la 
république  française»  que  nous  avons  prononcé  sur 
l'autel  de  la  liberté,  en  présence  de  son  ministre. 

«  Echappés  au  fer  et  a  la  flamme,  réfugiés  dans  le 
continent  américain ,  nous  avons  vu  notre  patrie 
trahie  dans  les  deux  hémisphères  ;  nous  l'avons  vue 
dissiper  tout  à  la  fois  ses  ennemis,  frapper  les  tvrans 
de  l'Europe,  écarter  en  un  moment  tous  les  fléaux 
dont  on  voulait  l'accabler.  Les  vertus  républicaines 
et  le  courage  des  armées  françaises  vont  anéantir  la 
coalition  des  despotes;  et  la  naix  qu*ils  ont  présentée 
comme  un  obstacle  aq  honneur  du  genre  humain, 
cette  paix  que  leur  cœur  repousse  et  que  leur  fai- 
blesse invoque,  sera  leur  sentence  de  mort  :  l'instant 
de  leur  destruction  sera  celui  oi!i  la  nature  jettera 
avec  transport  le  deuil  auquel  ils  l'avaient  condam- 
née depuis  si  longtemps. 

•  Le  culte  le  plus  pur  de  la  Divinité ,  le  bonheur  du 
monde  sera  votre  ouvrage  :  les  Français  ne  l'oublie- 
ront jamais  :  partout  où  le  sort  les  placera,  ils  le  rap- 
pelleront sans  cesse  à  l'univers  étonné.  •  (On  ap-* 
plaudit.) 

La  Convention  décrète  Tinsertioa  de  cette  Adresse 
dans  le  Bulletin. 


178 


«^  Lakanal,  an  nom  du  comité  d^instruction  pu- 
blique, propose  un  projet  de  décret  qui  est  adopté  en 
ces  termes  : 

•  La  Convention  nationale ,  ouï  le  rapport  de  ses 
comités  d'instruction  publique  et  des  finances, 

«  Décrète  que,  sur  les  fonds  mis  à  la  disposition 
de  la  commission  executive  de  Tinstruction  publi- 
que, il  sera  payé  sans  retard,  à  chaque  élève  de  l'E- 
cole Normale,  une  somme  de  300  liv. 

m  Au  i«r  yentose  prochain,  il  sera  payé  à  chacun 
desdits  élèves  une  somme  de  200  liv. 

•  Au  l®r  germinal  prochain ,  pareille  somme  de 
200  liv. 

•  Au  l^f  floréal  prochain,  pareille  somme  de 
SOO  liv. 

•  Et  300  liv.  à  la  fin  du  cours  normal.  Lesdites 
sommes  formant  celle  de  1 ,200  liv.  attribuée  à  cha- 
cun des  élèves  susnommés  par  la  loi  d'organisation 
des  Ecoles  Normales.  • 

—  Le  même  membre  propose ,  et  la  Convention 
rend  le  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  ouï  le  rapport  de  son 
comité  d'instruction  publique , 

•  Nommé  le  citoyen  Laharpe  professeur  à  TEcole 
Normale  de  Paris.  • 

— *  Sur  le  rapport  de  Monnot ,  le  projet  de  décret 
suivant  est  adopté: 

•  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu 
le  comité  des  finances  sur  Pétat,  remis  par  les  com- 
missaires de  la  trésorerie,  des  recettes  et  dépenses 
foites  pendant  le  mois  de  brumaire  dernier  ; 

•  Considérant  que  la  recette  s'élevant  à  46  mil- 
lions 411,059  liv.  9  sous  5  deniers,  et  les  dépenses 
à  294  millions  SS5, 508  liv.  1  sou  2  deniers,  il  en 
résulte  un .  excédant  de  dépense  de  la  somme  de 
248  millions  474,448  liv.  11  sous  9  deniers,  au 
remplacemeol  de  laquelle  il  est  nécessaire  de  pour- 
▼oir; 

•  Décrète  que  le  contrôleur  de  la  caisse  générale 
retirera  de  U  serre  à  trois  clefs,  où  sont  déposés  les 
assignats  nouvellement  fabriqués,  ladite  somme  de 
248  millions  474,448  liv.  11  sous  9  deniers,  desti- 
née à  remplacer  l'excédant  que  les  dépenses  faites 
dans  le  courant  de  brumaire  présentent  sur  les  re- 
cettes du  même  mois,  en  remplissant  pour  cette  opé- 
ration Hs  formalités  prescrites  par  les  précédents  dé- 
crets de  remplacement  • 

—  Le  même  membre,  au  nom  du  même  comité , 
propose,  et  la  Convention  rend  le  décret  suivant  : 

•  La. Convention  nationale,  sur  la  proposition  dé 
son  comité  des  finances,  décrète  que  la  trésorerie 
nationale  ouvrira  un  crédit  de  7  millions  à  la  com- 
mission d'administrations  civiles  «  police  et  tribu- 
naux; 

•  De  180  millions  à  la  commission  d'approvision- 
nements; 

•  De  25  millions  h  la  eommission  des  secours  pu- 
blics; 

«  De  40  millions  à  la  commission  des  transports, 
postes  et  messageries  ; 

•  De  2  millions  500,000  liv.  à  la  commission  des 
revenus  nationaux  ; 

•  De  2  millions  à  la  commission  dé  l'organisation 
et  du  mouvement  des  armées  ; 

•  De  15  millions  à  la  commission  des  armes  et 
poudres  ; 

•  De  8  millions  à  la  commission  des  travaux  pu- 
blics; 

•  De  40  millions  à  la  commission  de  marine  et  des 
eolonies  ; 

•  De  500,000  livres  à  la  commission  d'agriculture. 
«Le  présent  décret  ne  sera  pas  imprime.  • 


—  Sur  le  rapport  de  Portiez,  au  nom  du  comité 
de  législation ,  le  décret  suivant  est  rendu  : 

•  La  Convention  nationale,  sur  la  présentation  de 
son  comité  de  législation ,  nomme  pour  remplir  les 
fonctions  de  président  du  tribunal  révolutionnaire, 
ù  la  place  du  citoyen  Mouricault,  nommé  par  dé- 
cret du  13  de  ce  mois,  le  citoyen  Agier,  commissaire 
national  près  le  tribunal  du  cinquième  arrondisse- 
ment de  Paris. 
I  •  La  commission  des  administrations  civiles,  po- 
;  lice  et  tribunaux ,  est  chargée  de  prendre  les  me- 
sures nécessaires  pour  la  prompte  exécution  du  pré- 
sent décret ,  qui  ne  sera  imprimé  que  dans  le  Bulle- 
tin de  correspondance.  • 

,  BoissT  b'Anglas,  an  nom  du  comité  de  salut  pu- 
blic :  La  Convention  nationale  prouve  chaque  jour 
par  ses  décrets  que  le  bonheur  du  peuple  est  l'objet 
constant  de  sa  sollicitude  ;  je  viens  appeler  son  at- 
tention sur  l'état  actuel  des  Iles  de  Rhé  et  d'Oléron. 
La  Convention  a  décrété  qu'aucun  vaisseau ,  même 
neutre ,  ne  pourrait  porter  des  vivres  d'un  port  de 
France  à  un  autre.  Dans  ce  moment ,  les  îles  d'Olé- 
ron  et  de  Rhé,  éprouvant  une  disette  de  grains,  ré- 
clament auprès  du  gouvernement.  Nous  vous  pro- 
8 osons  de  permettre  aux  vaisseaux  neutres,  sortant 
es  ports  de  France,  d'aller  mouiller  à  l'Ile  de  Rhé 
et  d'OIéron  ;  par  ce  moyen,  ces  fies  se  verront  bien- 
tôt approvisionnées. 
La  proposition  de  Boissy  est  décrétée. 

DuHBM  :  J'ai  une  proposition  à  faire,  addition* 
nelle  à  la  loi  que  vous  avez  rendue  en  faveur  du 
commerce. 

Cette  loi  porte  qu'il  sera  formé  un  tableau  des 
denrées  de  première  nécessité ,  dont  l'exportation 
est  prohibée  sous  les  peines  les  plus  sévères.  Je  de- 
mande donc  que  ce  tableau  soit  présenté  dans  le 
plus  court  délai ,  primidi ,  s'il  est  possible,  afin  que, 
pendant  l'interrègne  de  ces  deux  lois,  si  je  puis 
m'exprimer  ainsi ,  la  malveillance  n'exporte  pas  du 
territoire  de  la  république  les  objets  qui  nous  sont 
les  plus  nécessaires.  (On  applaudit.) 

GiBAUD  :  Le  comité  de  commerce  s'occupe  sans 
relâche  de  cet  objet  important;  le  rapport  sera  fait 
à  la  Convention  nationale  dans  le  courant  de  la  dé- 
cade prochaine. 

La  proposition  de  Dnhem  n'a  pas  d'autre  suite. 

—  Sur  la  proposition  de  Boissy  d'Anglas,  au  nom 
du  comité  oe  salut  public,  la  Convention  étend  au 
département  de  Seine-et-Oise  les  pouvoirs  donnés 
au  représentant  du  peuple  Lacroix  ;  pour  la  com- 
mune de  Versailles. 

Boissy  d'Anglas:  C'est  actuellement  en  mon  nom 
que  je  viens  faire  une  proposition ,  dont  je  demande 
moi-même  le  renvoi  au  comité  des  finances. 

L'augmentation  considérable  de  toutes  les  den- 
rées est  un  grand  mal ,  sans  doute  ;  mais  il  se  fait 
peu  sentir  à  l'agriculteur,  qui  vend  aujourd'hui  le 
produit  de  sa  terre  en  proportion  des  frais  de  cul- 
ture ;  au  négociant  qui  suit  le  cours  du  commerce, 
et  dont  les  bénéfices  augmentent  en  même  temps  que 
le  prix  des  objets  de  sa  spéculation  ;  au  journalier 

aui  proportionne  le  prix  de  son  travail  aux  prix  des 
enrées  :  cet  enchénssement  pèse  sur  les  salariés  et 
sur  les  rentiers  d'une  manière  effrayaute. 

Quant  aux  salariés,  la  Convention ,  ou  du  moins 
le  comité ,  s'occupe  d'un  travail  oui  augmente  le 
traitement  des  hommes  utiles ,  en  déchargeant  par 
une  compensation  juste  le  trésor  public  du  paye- 
ment des  employés  mutiles. 

Mais  il  n'en  est  pas  de  même  des  rentiers  et  créan- 
ciers de  l'Etat ,  qui  ne  voient  pas  augmenter  leur 


17* 


.  reveott  tu  même  temps  que  leur«  d^Mci  aotmen- 
tent. 

Je  demande  que  toutea  rentes  ou  créances  sur  VB- 
tat  soient  exemptes  de  retenue,  et  le  renvoi  de  cette 
proposition  au  comité  des  finances. 

DuHBM  :  Il  y  a  deux  mois  que  Csmbon  et  moi 
avons  fait  la  propoaitioD  de  Botiayt  alla  Ait  alora 
rejattfe, 

J*appuie  donc  celte  proposition ,  et  ja  deosanda 
qu'elle  ne  soit  adoptée  qu'en  hveur  dea  rentiers  et 
créanoieri  pauvres* 

Clauzal  at  Cambon  demandant  le  renvoi  pur  et 
simple  auiH>mitë  des  finanees. 

Le  renvoi  est  décrété. 

Chsxal  I  Votre  oomild  de  salut  public  me  ebarge 
de  voua  proposer  de  déerëter  que  le  représentant 
du  peuple  Klie  Laooste,  en? oyé  a  Tulles  peur  y  sur* 
veiller  la  manufaeture  d'armes,  se  rendra  sans  délai 
dana  le  sein  de  la  Convention ,  et  que  le  représen- 
tant Paganel  aa  rendra  à  sa  plaea,  revêtu  des  mêmes . 
pouvoirs. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

-«  Delmas  fait ,  au  nom  du  comité  de  salut  public, 
un  rapport  sur  Dentsel ,  dans  lequel  il  disculpe  ce 
représentant  du  peuple  des  différentes  accusations 
intentées  contre  lui. 

Le  rapporteur  rappelle,  entre  autres  faits*  qu*i 
la  veille  du  siège  de  Landau ,  Dantzcl  envoya  à  Paris 
sa  femme  et  ses  enfinnts,  et  il  fait  observer  qu*il  serait 
diifieile  de  regarder  comme  un  traître  un  bomme 
qui  avait  donné  de  tels  otages  de  fidélité  à  la  repu* 
blique. 

ilUAMN  t  J'Interpelle  le  rapporteur  de  dire  si  le 
oemité  a  ftiit  venir  les  pièces  origlnalea  qui  sont  à 
Landau. 

Non .  vous  ne  les  aves  pas,  vous  ne  voulez  pas 
les  avoir  ;  depuis  deux  ans  vous  traînes  cette  afhfrCi 
pour  déshonorer  des  généraux  qui  ont  bien  servi  la 
patrie,  C*e8t  au  commencement  d'une  séance,  quand 
il  n*y  a  encore  personne,  que  Delmas  vient  f^ire 
ce  rapport,  comme  il  est  venu  dernièrement,  à  la 
fin  d'une  séance ,  voua  proposer  la  destitution  d*un 
grand  nombre  de  bona  olBelars  qu'on  a  remplacés 
par  des  gueux  destitués.  J'aeeuae,  Je  dénonoe  DeU 
mas  pour  ce  fait.  (De  violents  murmures  éolatent 
de  toutes  parts.) 

On  demanda  qu'avant  tout  la  rapport  soit  con- 
tinué. 

Cette  proposition  est  adoptée, 

Delmas  aolièye  le  rapport,  et  propose  le  projet  de 
décret  suivant  : 

«La  Conventioii  nationale,  apria  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  de  ulut  publie,  déerète  ; 

«Art.  I«».  Il  n'y  a  pas  Heu  à  inculpation  contre  le 
représentant  du  peuple  Dentcel ,  d'après  la  conduite 

3u  il  a  tenue  à  Landau ,  soitjpour  l'organisation  du 
istriot ,  aoit  pendant  la  durée  du  blocus. 
•  II.  Le  comité  de  salut  public  est  chargé  de  pro^ 
Boncer  sur  les  réclamations  et  d'examiner  la  con- 
duite des  offloiers  suspendus  ou  inculpés  è  cause  des 
dissensions  qui  éolatèrent  dans  cette  place*  • 

,  DuaoY  ;  J'étais  présent  quand  la  décret  du  9  Juil- 
let a  été  rendu.  Je  sais  ca  qui  s*est  passé  relativement 
•a  Landau  •  ou  je  suis  entré  quelques  jours  aprèa  la 
délivrance  de  cette  plaost 

Les  passions  se  beuruient  i  d*un  oOté  on  louait  la 
représentant  ;  d'un  autre  côté  c'étaient  eaux  qui  lui 
étaient  opposés.  Je  ne  décida  Rojnt .  mais  j'observe 
que«  comme  il  y  a  au  dea  accuaationé  gravas,  comme 
oaa  prétaudu  qu*uo  gfiit  voulu  livrer  cette  plaça, 


je  croie  qu*il  EuH  porter  le  plua  grand  Jour  aur  cette 
aflbire.  Je  demanda  donc  r^ournement  et  Timprea* 
sion  du  rapport  et  des  pièces. 

**'  :  U  y  a  trop  longtemps  que  cette  affaire  dore  ; 
le  rapporteur  nous  a  présenté  des  faits;  qu'on  en 
nrésento  dd  contraires  ou  qu'on  adopta  la  projet  de 
décret. 

Denteel  et  Roamps  demandent  la  parole. 

Le  PassiDENT  :  La  parole  est  è  Dantaeli  qui  Ta 
demandée  le  premier* 

DsNTXRi«  :  Ja  la  cède  i  Ruamps. 

RuAMPS  :  Je  n'ai  pas  prétendu  inculper  Dentxel  | 
il  n'est  aucun  de  mes  collègues  que  je  ne  défendisse 
au  péril  de  ma  vie;  mais  des  calomnies  ont  aussi 
été  lancées  contre  moi  i  J'ai  done  demandé  Pimpres- 
sion  de  toutea  les  piàoes,  afin  que  l'on  pût  oonnattre 
la  vérité  et  rendre  justioe  à  qni  elle  est  due. 

DfCNTZEL  ;  Trop  longtemps  l'honnête  bommea  gémi 
sous  le  poids  du  soupçon.  J'ai  défendu  une  des  clefs 
les  plus  importantes  de  la  république;  Je  m'y  suis 
enfermé  avec  courage  ;  j'y  et  nilt  encrer  Jfrebe  cents 
bétes  à  cornes,  qui  ont  nourri  la  garnison  après  la 
levée  du  blocus;  un  décret  a  déclare  que  lesbapHants 
et  la  garnison  avaient  bien  mérité  de  la  patrie, et 
que  le  représentant  a  hit  son  devoir.  Depuis,  l'in- 
trigue, pendant  que  je  travaillais  à  mon  rapport, 
m'a  fait  jeter  dans  les  prisons  où  le  terrorisme  a  en- 
tassé tant  de  viotimes.  Je  ne  ponvals  là  me  disculper; 
la  vérité  était  aaua  les  verroui  oomme  m6l.  Vous 
m'avez  enfin  rappelé  au  sein  de  la  Convention  :  j'au- 
rais pu  me  contenter  de  eette  justioe  que  je  désirais; 
mais  mes  ennemis  n'auraient  pas  demande  d'éclairer 
œtte  aftire  ;  si  je  m'étais  tu ,  ils  auraient  gardé  le 
silence.  C'est  moi  qui  al  sollicité  le  rapport  ;  Il  est 
fait ,  il  fiiut  que  vous  prenoneiei. 

On  n'e  jamais  en  pareilles  eineonstanees  demandé 
l'impression  des  pièces;  c'est  d'ailleurs  l'intérêt  de 
la  (Convention  :  si  elle  ne  ma  erolt  pas  Justifié,  il 
Aiut  qu'elle  me  rejette  de  son  sein  ;  Il  ne  doit  y  avoir 
iel  que  dea  bommea  purs.  (Qn  applandit.)  Je  de* 
HMnde  qu'on  aille  ans  voix  sur  le  projet  de  décret, 

H  est  adopté,  et  l'impression  du  rapport  décrétée, 

PaiET  ;  Le  comité  de  salut  public  na  oaasa  de  a'oa* 
cuper  de  la  marine,  et  bientAl,  par  laa  soina  qu'il  aa 
donne,  la  mer  sera  pour  les  Français  UB  tbéàtra aussi 
glorieux  que  les  plaines  de  la  Selgique«  Les  vents 
oontralres  qui  se  sont  élevés  dernièrement  ont  un 
peu  dérangé  les  plans  qu'il  avait  concertés. 

Le  vaisHau  h  AépvSKcAt'n,  après  avptr  été  battu 

Sar  l'orage  dans  le  bassin  de  Brest,  a  été  Jeté  sur  un 
es  roobers  du  Goulet  ;  cet  événement  malhçureux 
n'a  coûté  la  yie  à  personne,  et  l'on  espère  même  sau- 
ver en  partie  ce  vaisseau.  Pour  vous  dédoinmager  de 
eette  aifllgeante  nouvelle ,  je  vais  vous  donner  con- 
naissance de  trente-neuf  prises  faites  par  les  marins 
de  la  république. 

Cotirrtfr  4u  U  niooiSt 

Pritet  faitet  par  le$  bricks  la  Liberté  et  le  Dassrd , 
mûuilîéê  au  port  de  la  Monia/ne, 

On  briok  snglsis«  chargé  de  fruiUaeea  ; 
Un  bâtiment  chargé  de  légumaa  aeoa,  pour  TRa- 
pagoa. 

Prises  faites  par  If I  cprt;e((f 4  la  Jalonasi  la  Frater- 
nité ,  et  le  euUer  la  Montagne. 


Un  navire  hollandais,  ebargé  de  seigle; 
Deux  chargés  d'atoine  ; 
Un»  galiota  prunienne,  chargée  de  seigle: 
Cinq  naviaea  prusatans,  chargés  d'avoine  t 


tu 


Un  brick  anglais»  oharg4  da  divaries  marabau- 

Pritet  initiât  au  Porl  i$  (â  Uùnlaginê. 

m  dâvire  espagnol  «  chargé  de  eicao  et  lUcre  » 
pris  par  le  lougre  U  BrilifkaU 

Priitê  faiUê  par  ta  cor««Mf  la  Nayade. 

Vn  na V  ire  hollandais,  chargé  de  planches  * 

Un  (ièm  I  chargé  de  sel ,  cuirs  en  poil ,  savon  et 

t)n  * 
Un  navire  anglais ,  chargé  de  bol»  dé  construc- 

li^n  ■ 

Un  idm^  chargé  de  laine ,  toile iit  amidon } 
Ua  navire  angiaisi  ooul^  bas  par  idem, 

Priêeê  faileë  par  la  corvêtU  le  Subtil. 

Dem  navires  anglais,  ooulés  à  fond  ; 
Un  navire  hollandais,  idem, 

Primi  faitu  par  te  «^t6ieft  la  Spartiate. 

Trois  navires  anglais,  chargés  de  sucre,  café,  co- 
ton et  indigo,  dont  un  armé  die  10  canons. 

Priée  ifilréê  A  NlU. 

Un  DAvire  chaîné  de  sucre,  cordages  et  soude. 

Barbas  :  Un  jour  mémorable  approche;  c'est  le 
ti  janvier  que  le  dernier  tyran-roi  expia  sur  iVcha- 
faud  les  crimes  dont  il  s'était  souillé.  Je  ne  me  rap- 
pelle pas  si  la  Convention  a  décrété  que  Tanniver- 
skire  dé  cette  époque  serait  célébré  dans  toute  la 
république.  (Applaudissements  réitérés.)  Bn  ce  Jour 
railégrttse  universelle  des  Français  répondra  à  une 
poignée  d»  formalistes  qui  cherchent ,  par  tous  les 
moyens  possibles,  à  troubler  Tordre  public.  Bile 
pUMVira  ^e  la  Convention  et  le  peuple  ne  eease- 
ront  de  leur  livrer  une  guerre  à  mort.  (Vift  applau* 
dissements.)  £t  moi  aussi  j'ai  aperçu  le  royalisOie 
exciter  dans  cette  assemblée  des  divisions  qui  jie 
sont  qu^àppârentes  \  car  la  Convention  est  auifnée 
du  même  esprit.  (Nouveaux  applaudissementjî  j  Ëh 
bien ,  cette  journée  leur  apnrendra  que  leur  espoir 
est  déçu  pour  jamab»  Je  demande  que  le  confite 
dlostruction  publique  soit  chargé  de  préseiïter  to 
projet  de  la  fête  que  je  propose  a  la  Convenlion  de 
faire  célébrer  le  ^1  janvier  dans  toutes  les  commu-» 
ues  de  la  république.  (Les  applaudissements  se  re- 
'  nouvellent.)  Je  cfemande  que  le  procès^verbal  de 
celle  qui  sera  célébrée  à  Paris  Soit  envoyé  aux  dé- 
partements et  aux  armées,  attn  de  détruire  les  accu- 
sations de  royaliStne  et  toutes  les  calomnies  que  Ton 
a  répandues  contre  la  représentation  nationale. 

Cette  proposition  est  décrétée  \  runanimitéi  et  au 
milieu  m  plus  vifs  applaudissements. 

DfjHBM  S  U  fiiut  que  cette  Mte  soit  aussi  eélébrée 
aux  armées  et  rolme  aux  avant*«poele8«  Il  sera  beau 
que  nos  soldats  faasent  entendre  à  eoupe  de  canon 
aux  satellites  du  staibouder  et  de  l'empereur  mi'ils 

célèbrent  la  destruction  du  royalisme  ;  il  sera  beau 
de  voir  les  bords  du  Rhin,  de  rEscaut  et  de  la  Meuse 
retentir  des  cris  de  ioie  des  républicains.  (Applau- 
dissements.) 11  sera  beau  d*apprendre  aux  satellites 
de  rSspagne  que  l'espoir  des  Bourbons  est  anéanti  ; 
il  sera  beau  de  voir  nos  bravée  marins  de  rOcéaU  et 
de  la  Méditerranée  faire  retentir  les  échos  des  mers 
de  leurs  cris  d*allégresse.  Nos  armées  n'ont  pas  be- 
soin de  règlement  ni  de  projet  pour  cela  :  c*ést  une 
fête  pour  elles,  lorsqu'elles  battent  Tennemi  { et  no- 
tre collègue  Beltegarde,  qui  est  à  côté  de  moi,  saura 
bien  célébrer  en  Hollande  la  fête  de  la  liberté  à  coupe 


de  csAOBt  Nos  volontaires  feront  cela  d'abondance 
de  C4aur. 

Pj^ÉRfis  :  Il  ne  faut  pas  que  cette  fête  soit  seule- 
ment célébrée  cette  année,  il  faut  la  perpétuer;  il 
faut  que  le  souvenir  de  la  Uiort  du  tyran  retrace  à 
nos  derniers  neveux  les  maux  de  la  tyrannie,  et 
leur  faase  détester  la  royauté.  Je  demande  que  la 
même  fête  se  répète  chaque  année.  (On  applaudiL) 

Les  propositions  de  Duhem  et  db  Pénières  sont 
adoptées* 

***  !  Je  demande  que,  le  lendemain  de  la  NtOi 
nous  entendions  le  rapport  sur  la  famille  Capet. 

Cette  dernière  proposition  est  également  adoptée 
au  milieu  des  applaudissements  et  des  cris  de  i^ee 
la  république I  vive  la  CamenHon  naUvfiHÀêl 

Là  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

sâAIfCB  DU  30  NIYOSit 

tin  des  secrétaires  donne  lecture  dé  la  lettre  iai<« 

vante  : 

Leê  repfêeeMùfMê  eu  peuple  ptèt  twmée  dee  Pyti^ 
hM-OttidentaUê  à  taContmîian  nationale. 

Pifuièrct,  U  7  oivoie,  l'an  3«  à%  U  rêpiiUiqa» 
TraoçaSse,  une  et  indivisible. 

«Dès  notre  entrée  dansFigulires^  nouarempltmes 
un  devoir  bien  cher  à  ^nos  cœurs  en  demandant  a 
chaque  général  de  division  les  traits  particuliers  de 
nos  oraves  frères  d'armes,  afin  de  les  présenter  à  la 
reconnaissance  publique.  Notre  lettre  fut  transmise 
aux  différents  chefs  de  bataillon,  qui,  de  leur  cAté,  la 
firent  connaître  eut  généreux  défenseurs  de  la  pa- 
trie qui  sont  sous  leur  commandement.  Presque 
touies  leuiv  réponses  sont  uniformes  ;  tous  à  Tenvi 
déetarent  qu'ils  n'ont  fait  que  leur  devoir  et  suivi 
l'impulsion  de  leurs  ccsuTS,  dont  le  moindre  senti- 
ment est  pour  la  patrie.  Malgré  nos  vives  instances 
pour  les  déterminer  a  citer  quelque  trait  i  ils  onl 
persisté  à  déclarer  qu'ils  avaient  rempli  leur  tâche  « 
et  que  la  délaite  des  esdaves  était  la  seule  récom» 
pense  qu'ils  ambitionnaient. Quels  hommes^ citoyens 


des  triomphes  nouveaux  et  par  les  vertus. , Voici 
néanmoins  quelques  traits  de  dévouement  et  de  cou- 
rage qui  nous  ont  été  transmis. 

•  L^idjudant  général  chef  de  brigade  Duphot, 
commandant  là  i^  demi-brigade  des  chasseurs, 
nous  rend  compte  d'un  fait  dont  il  a  été  témoin  à 
l'affaire  du  37  brumaire.  Le  citoyen  François  Mallet, 
chasseur  de  la  6*  compagnie  du  l«r  bataillon  de  U 
division  no  ;,  ét«ttt  aveo  les  tirailleurs  que  Duphot 
commandaiti  reçut  une  belle  à  la  maia  fauche,  qui 
lui  coupa  le  doigti  On  l'engagea  à  se  retirer.  -  Non , 
répondit  Malleti  mets-moi  ma  baïonnette;  il  faut 
que  ces  coquins^là  me  paient  mon  doigt.  •  Duphot 
mit  sa  baïonnette  au  bout  du  fusil*  Mallet  courut  à 
la  redoute,  et  y  monta  un  des  premiers.  Malgré  1rs 
instances  des  officiers,  il  ne  voulut  jamais  quitter  le 
combat  que  le  feu  n'eût  cessé.  C'est  Mallet  qui  tua  la 
sentinelle  au  premier  poste  qui  fut  pris. 

■Dans  la  Journée  du  t1  brumaire,  division  du  cen- 
tre, Jean -Baptiste  Portenàc,  d'indervilliers»  dépar- 
tement de  la  Meurthe,  grenadier  au  53^  régiment 
d'infanterie,  eut  la  cuisse  emportée  par  un  éclat 
d'obus  { il  ne  cessa  de  crier  :  Vive  la  république  j 
Menacé  de  tomber  dans  cet  état  au  pouvoir  de  rcn- 
nemit  il  appelle  le  citoyen  Orismont,  son  camarade 
et  lui  «Kl  ;  «Itettdi-mâ  le  dernier  service  ;  Otemof 


ne 


le  peu  de  vie  qui  me  reste  ;  j*aime  mieux  mourir  de 
ta  main  que  de  celle  de  ces  scëidrats  que  j'abhorre.* 
Son  camarade  Tembrasse  les  larmes  aux  yeux ,  se 
retire  à  quelques  pas  de  lui,  et  lui  brûle  la  cervelle. 
L'ennemi  voyait  cette  action. 

•  Dans  Paffaire  du  30  brumaire,  le  cito^renNail, 
chnsseur  de  la  compagnie  no  6,  du  1*'  bataillon  du 
Gard,  poursuivant  rennemi  qu'il  était  à  même  d'at- 
teindre, fut  blessé  à  la  jambe  ;  ses  camarades  veulent 
remporter  ;  il  s'y  reluse ,  et  ne  cesse  de  tirer  des 
coups  de  fusil  que  lorsqu'il  voit  les  Espagnols  hors 
de  portée. 

«  Rosier,  chasseur  de  la  même  compagnie,  fut  at- 
teint d'une  balle  qui  lui  traversa  les  flancs  ;  il  conti- 
nuait de  donner  des  preuves  de  la  plus  grande  bra- 
voure, lorsqu'une  seconde  balle  lui  trai*ersa  la 
jambe  :  il  fut  enlevé  du  champ  d'honneur  aux  cris 
de  vive  la  républiqtu  I  et ,  passant  devant  ses  ca- 
marades, il  excita ,  par  les  propos  les  plus  encoura- 
geants et  les  plus  civiques,  ses  frères  d'armes  au 
combat. 

•  Rochefort,  chasseur  dans  le  T  batailloD,  fut 

frièvement  blessé  sous  le  menton.  «  Courage,  dit-il 
ses  camarades;  je  suis  blessé,  mais  peu  m'importe, 
IK>urvu  que  la  victoire  soit  à  nous;  ce  n'est  pas  mou- 
rir que  de  verser  son  sang  pour  la  patrie.  • 

•  Roque,  chasseur  du  S«  bataillon  de  la  Haute- 
Garonne,  saute  le  premier  dans  la  redoute  qui  est 
en  hct  de  la  montagne  boisée,  se  contente  d'y  dés- 
armer l'officier  qui  y  commandait;  il  se  met  à  la 
poursuite  des  soldats  qui  avaient  osé  insulter,  pen- 
dant un  quart  d'heure,  les  troupes  de  la  république. 

•  Dans  la  journée  du  ao  brumaire ,  le  chef  du 
ter  bataillon  du  Tarn,  Royer,  a  donné  le  meilleur 
exemple,  et  a  bravé  tous  les  dangers  en  montant  le 
premier  aux  redoutes  d'Bspirulles,  et  presque  seul  ; 
il  a  été  dangereusement  blessé. 

•  Raptiste  Lafon,  volontaire  an  4»  bataillon  de 
Haute-Garonne,  no  3,  étant  en  tirailleur,  est  chargé 
par  trois  cavaliers  espagnols  ;  à  l'aide  d'un  petit  ro- 
cher où  il  se  retranche,  il  en  tue  deux  :  ses  camarades 
accourent  et  le  délivrent  du  troisième. 

•  Paschal ,  volontaire  au  même  bataillon,  2«  com- 

Kgnie,  chargé  par  le  commandant  de  la  cavalerie, 
ttend  de  pied  ferme ,  lui  tire  son  coup  à  dix  pas, 
le  renverse,  l'achève  avec  sa  baïonnette  et  laisse  son 
cheval  à  un  de  ses  camarades. 

«  Jean  Cadis,  caporal  au  6®  bataillon  du  Rec-d'Âm- 
bès,  8«  compagnie,  natif  de  Durs,  département  de 
Lot-et-Garonne,  ayant  une  cuisse  emportée ,  deux 
de  ses  camarades  accourent.  •  Allez  à  votre  poste, 
leur  dit-il ,  je  n'ai  pas  besoin  de  vous  ;  je  vais  mou- 
rir :  Vive  la  république  !  •  Et  il  expira. 

«  Rrillon ,  caporal  au  3*  bataillon  de  la  Drôme, 
compagnie  no  6,  natif  de  Tours,  se  sentant  blessé, 
sort  du  rang,  disant  :  «  J'en  ai  pour  mon  compte  ; 
soyez  fermes  ;  ne  bougez  pas.  Vive  la  république  !  • 
Conduit  à  l'ambulance ,  il  meurt  en  roule  ;  ses  der- 
nières paroles  sont  :  «Je  meurs  pour  ma  patrie,  je 
suis  content.* 

•  Martin  Vinay,  volontaire  au  même  bataillon, 
natif  de  Valence ,  département  de  la  Drôme,  blessé 
à  la  jambe,  et  se  voyant  sur  le  point  d'être  pris  par 
l'ennemi ,  se  donne  la  mort.  • 

Les  représentants  du  peuple  observent  qu'ils  pour- 
raient citer  beaucoup  d'autres  traits  de  ce  eenre, 
mais  que  l'armée  n'étant  qu'un  composé  de  néros, 
et  n'ayant  qu'uu  même  sentiment ,  qu'un  même  dé- 
sir, se  croit  assez  récompensée  par  la  certitude  d'a- 


voir foit  son  devoir  en  chassant  an  loin  les  ennemis 
de  la  liberté.  •  Nous  vous  l'avons  déjà  dit,  citoyens 
collègues,  disent-ils,  et  nous  le  répétons  avec  trans- 
port ,  les  soldats  républicains  qui  composent  cette 
armée  ont  l'amour  ae  la  patrie  profondément  gravé 
dans  le  cœur  ;  ils  sont  amants  jaloux  de  la  liberté  et 
de  l'égalité,  et  ils  sauront  défendre  cette  propriété 
précieuse  jusqu'à  la  dernière  goutte  de  leur  sang. 
Les  principes  d'humanité  et  de  justice  ne  sont  pas 
moiijs  ffravés  dans  leur  âme ,  et  leur  dévouement  à 
la  république  et  à  la  Convention  nationale  est  sans 
bornes."  (On applaudit.) 

La  Convention  ordonne  le  renvoi  au  comité  d'in^ 
struction  publique,  et  l'insertion  au  Ruiletin. 

DupiN ,  au  nom  du  comité  des  finances  :  De  tous 
les  comptes  de  l'arriéré  dû  à  la  nation,  il  n'y  en  a 
aucun  de  payé  ;  plusieurs  sont  vérifiés  ;  d'autres,  et 
c'est  le  plus  grand  nombre,  ont  été  présentés  au  bu- 
reau de  comptabilité. 

Comme  le  bureau  de  comptabilité  n'a  eu  que  très- 
peu  de  commis,  et  que  le  non-jugement  des  comptes 
n'est  pas  du  fait  des  comptables,  votre  comité  a  pensé 
qu'il  était  juste  de  leur  faire  toucher  les  intérêts  de 
leur  finance,  de  leurs  inscriptions  sur  le  grand  livre, 
ou  enfin  de  leurs  pensions,  lorsqu'ils  paraissent  ne 
rien  devoir,  ou  de  la  balance  faite  par  eux-mêmes 
dans  leurs  comptes,  pu  par  l'effet  de  la  vérification 
'du  bureau  de  comptabilité. 

Il  est  beaucoup  de  comptables  de  la  ci-devani 
ferme  générale  qui  ont  présenté  leurs  comptes,  et 
que  cette  compagnie  n'a  pas  voulu  examiner  ;  ces  ci- 
toyens ne  peuvent  rien  toucher,  et  sont  par  là  privés 
des  moyens  d'exister,  eux  et  leurs  familles. 

Ce  sont  ces  motifs  qui  ont  déterminé  le  comité  des 
finances  à  vous  présenter  par  mon  orgai\^  le  projet 
de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  finances,  décrète  ce  qui 
suit  : 

•  Les  certificats  à  déférer  aux  comptables,  en  exé- 
cution de  la  loi  du  23  frimaire  dernier,  et  autres  an- 
térieures, attesteront  qu'il  ne  reste  aucun  débet  en- 
vers le  trésor  public,  de  la  vérification  des  comptes 
faite  par  le  bureau  de  comptabilité ,  ou  de  balance 
iaite  par  les  comptables,  lorsque  les  éomptes,  ac- 
tions et  exercices  n'ont  pas  été  vérifiés;  et  dans  les 
deux  cas  ils  toucheront  leur  pension ,  ainsi  queles 
intérêts  de  leur  cautionnement,  jusqu'à  l'apurement 
définitil  de  leurs  comptes.  » 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

{la  nUiê  demain.) 

N,  B.  Dans  la  séance  du  21,  la  Convention  a  dé- 
crété une  exception  à  la  loi  rendue  avant-hier  sur 
les  émigrés,  en  faveur  des  ouvriers  non  ci-devant 
nobles  ou  prêtres,  travaillant  de  leurs  mains  aux 
fabriques,  aux  manufiictures  et  à  la  terre,  pourvu 
qu'ils  ne  soient  pas  sortis  depuis  le  lor  mai  1793, 
et  qu'ils  remplissent  les  formalités  que  la  loi  exige. 


LIVRES  DIVERS. 

Code  des  Juge*  de  paix,  noatelle  éditioD,  en  4  toI.  in-1§. 
Lm  deui  premiert  copticDDeiit  tous  les  décreu  des  Assem- 
blées constitoante,  législative  et  coDTentioniielle,  sur  toutes 
les  parties  cooceraftot  spécialemeot  les  juges  de  paii,  leurs 
assesseurs  et  mlBers;  le  troisième,  des  dëveloppemenU  et 
instructions;  Te  quatrième,  les  formules  el  la  table  alphabé- 
tique ;  parle  citoyen  Guichard.  Prii  :  iS  Uv. ;  et  15  liv., 
franc  de  péri.  A  Paris,  chet  Garoery,  Ubraire,  rue  Serpente, 
n*  17. 


GAZETTE  NATIONALE  oa  LE  HONITEURUNIVERSEL. 

No  113.  Tridi  28  Nivosb,  Pan  8«.  (Lundi  12  Janvier  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Katishonne,  ie  23  décembre.  —  La  diète  a  rendo  hier  un 
iOHclmsum  |>orunl  qu'il  sera  entamé  des  négociations  de 
paix,  et  que  i'empereur  sera  prié  de  vouloir  bien,  dans  cette 
occasion,  prêter  son  assistance  À  l'Empire»  de  concert  avec 
le  roi  de  Prusse. 

Des  bordi  de  FFlbe,  S8  décembre.  —  I<a  cour  de  Berlin, 
en  faisant  annoncer  aux  Etau  de  l'Empire  le  retour  de  vingt 
mille  Prussiens  sur  les  bords  do  Rhin  ,  a  saisi  habilement 
cette  occasion  pour  proposer  en  son  nom,  aux  villes  impé- 
riales, .un  emprunt  de  plusieurs  millions  de  florins,  sous  le 
prétexte  de  la  continuation  de  la  guerre.  Les  intérêts  de  cet 
emprunt  sont  &  A  pour  100.  Le  roi  se  dispose  déjà,  dit- 
on,  à  envoyer  A  cet  effet  un  agent  A  Francfort. 

On  assure  d'ailleurs  que  le  cabinet  de  Berlin  n'a  pas 
encore  perdu  tout  espoir  d'attirer  quelques  subsides  britan- 
niques. 

La  nouvelle  m  répand  même  que  la  frégate  anglaise  la 
Serine,  de  36  canons  «  a  paru  de  nouveau  A  l'embouchure 
de  TElbc,  avec  un  transport  d'argent  pour  le  roi  de  Prusse. 

—  Le  cabinet  de  Vienne  fait  de  grands  emmagasinemenis 
de  subsistances  de  toute  espèce  dans  la  Gallicie.  On  doit 
charger  ces  denrées  sur  la  Yislule,  aussitôt  que  la  naviga- 
tion n*en  sera  plus  entravée  par  les  insurgés. 

—  Le  roi  de  Prusse  va  envoyer  sur  les  bords  du  Rhin  neuf 
batteries  du  corps  de  l'artillerie  de  campagne. 

ANGLETERRE. 

Kmdtietf  ie  16  décembre»  ^  Le  12,  ie  cabinet  envoya  des 
dépêches  A  lord  Fltz-Gérald.  Bien  n'a  transpiré  de  ce  que  le 
ministère  peut  marquer  à  cet  ambassadeur  des  Gantons 
suisses.  On  n'a  pas  plus  de  connaissance  des  dépêches  du 
lord  Rochester,  gouverneur  de  Québec,  arrivées  le  U  A 
rofHce  du  secrétaire  d*Etat,  et  envoyées  sur-le-champ  A  lord 
Portland,  qui  était  A  la  campagne. 

—  Le  13 11  s'est  tenu  anssl  un  conseil  général  an  bureau 
des  affaires  étrangères,  A  l'issue  duquel  on  a  expédié  un 
messager  au  général  Harconrt ,  commandant  les  troupes 
briUmnlques  sur  le  continent. 

—  Le  même  Jour  II  s'est  tenu  aussi  un  conseil  A  l'ami- 
rauté, dans  lequel  on  a  ordonné  de  préparer  une  escadre  pour 
convoyer  les  transports  et  les  troupes  du  comte  de  Moyra  A 
leur  destination.  Le  poblic  s'obstine  encore  à  douter  de  la 
réalité  de  ce  projet  de  descente  sur  les  cCtes  de  France, 
quoique  les  papiers  ministériels  affectent  d'en  publier  les 

{>réparatlA.  Lieurs  annonces  fastueuses  A  cet  égard  ont  donné 
iev  an  rédacleor  du  Meming-CÂroniele  de  faire  une  asses 
bonne  plaisanterie. 

«  Le  vendredi,  Jour  de  Noil,  dit-Il,  lord  Moyra  dînera  A  Pa- 
ris: le  samedi  il  viendra  A  la  Convention,  et  élira  Louis  XVil 
votre  président  perpétuel;  ie  dimanche  11  assistera  au 
Te  Detm  chanté  dans  relise  Noire-Dame  :  le  lundi  il  en- 
terra en  Angleterre,  par  la  vole  du  télégraphe,  un  détail 
du  tout,  qui  sera  inséré  dans  ie  discours  que  le  roi  doit 
prononcer  le  30  aux  deux  Chambres,  A  l'ouverture  du  parle- 
ment.* 

—  Hier  les  ambassadeurs  de  l'Empire,  de  Prusse  et  de 
Hollande,  s'abouchèrent  avec  M.  Pitt,  au  bureau  du  lord 
Grenvllle. 

.—  Suivant  ée»  lettres  d'Elsenenr,  le  consul  anglais  y  re- 
çut du  capitaine  de  t Argot  un  avis,  daté  du  18  novembre, 
de  la  rade  d'Ansandal,  pour  prévenir  qu'on  avait  aperçu  la 
veille,  A  Gbristiansand,  trois  frégates  françaises,  et  ^u'on 
était  sur  qne  les  forces  de  la  république  dans  ces  parages  se 
nontaicBl  A  quinze  bâtlmenu  de  guerre,  dont  deux  de  ligne; 
en  conséquence,  ie  capimine  demande  que  si,  dans  unecon- 
joncture  aussI  alarmante,  quelque  bAtiment  britannique  de 
quelque  force  arrive  A  Elseoeor,  il  lui  soit  ordonné  de  se 
rendre  A  Akrunda,  où  i Argot  et  UMwrtUl,  deox  sloops  de 

Z*  Série.^Tomt^X. 


guerre,  avec  cinquante  vaisseaux  marchands»  sont  bloqua. 
Us  bâtiments  anglais  ne  sont  pas  plus  en  sûreté  dans  le 
Sun(}  que  dans  la  mer  du  Nord.  Le  eonsul  anglais  a  écrit  au 
capitaine  Clarke  de  ne  pas  manquer  de  lui  envoyée  les  se- 
cours dont  il  pourrait  disposer. 

—  Une  chose  qui  n'échappe  point  A  l'observation ,  c'est 
que  les  papiers  de  la  trésorerie  gourmandent  vivement  l'a- 
miral Jarvis,  surtout  depuis  qu'on  a  connaissance  des  suo- 
cès  des  Français  dans  les  Antilles,  en  un  mot,  de  la  reprise 
de  la  Guadeloupe  ;  ils  lui  reprochent  de  n'avoir  pas  su  faire 
un  usage  convenable  des  forces  navales  britanniques  aux 
lles-du-Yent. 

En  voici  le  relevé  exact,  ainsi  que  de  tontes  celles  qiU  ont 
été  envoyées  dans  les  Indes  occldenuUes,  ou  sont  prêtes  ù 
1  être. 

Sous  le  commandement  du  .vice-amiral  Jarvis,  U  Boyne^ 
98  canons:  le  Fanguard,  74;  le  Fétiran,  6-i;  U  Dictateur. 
64;  le  Woohich,  44;  le  Beaulieu^  40;  la  Terpsichore,3i;  la 
Magicienne,  32  ;  le  Folebay,  32  ;  la  Betsouree,  28  ;  le  Zèbre, 
18;  le  Bulldog,  16;  rnupeclêur,  16;  le  Berwiek,  16. 

Le  16  octobre,  Il  est  parti  pour  les  lodeA  occldcnUiles, 
sous  le  commandement  du  vice-amiral  GadwHI,  le  Majet- 
tueuxy  de  74  canons  ;  le  Thétée,  de  74;  fo  Mhne,  de  74. 

Le  26  octobre,  avec  le  général  Waughan,  sous  les  ordres 
de  ramiral  Bickerton,  ieRamilHet,  de  74  canons  :  /^Gan^^, 
de  74;  to  Montagne,  de  74  ;  la  Furie,  de  16. 

Faitteaux  ffréts  à  mettre  à  la  voile  tout  Ut  ordres  de 
f  amiral  Parker, 

Le  Raitomîahle,  de 64  canons;  le  Polgpkéme,  de  64;  /^ 
Truttg,  de  50;  la  Fortune,  de  16. 

En  outre  le  Landon,  sur  lequel  l'amiral  Golpoys  a  hissé 
ion  pavUlon,  a  reçu  l'ordre  de  se  préparer  &  partir  pour  ces 
parages. 

PATS-BAS. 

Bruxeilee,  te  15  ninose.  «-  Le  représeatant  du  peuple 
Haussmann  a  rappoité  de  Paris,  où  U  vient  de  foire  un 
voyage,  des  instructions  peu  favorables  A  oetle  ville.  Elle 
avait  été  taxée ,  peu  de  temps  après  l'entrée  des  Français, 
A  5  millions  en  numéraire.  Uu  nouvel  arrêté  des  représen- 
tants du  peuple  vient  d'Imposer  cette  ville  à  5  autres  mil- 
lions, également  en  numéraire. 

Le  magistrat  s'est  assemblé  extraordinalrement  pour  avi- 
ser aux  moyens  de  fournir  les  5  millions  demandés.  Il  doit 
se  concerter  à  ce  sujet  avec  l'administration  centrale. 


RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

Extrait  det  nouvelles  de  Brest ^  du  15  titvoie.— 
L'armée  navale,  cotnposée  de  soixante- trois  bâti- 
ments de  guerre,  a  appareillé,  le  10,  de  Brest  ;  elle 
est  composée  de  trente-cinq  vaisseaux  de  ligne,  at- 
tendu Farrivée  du  vaisseau  le  Fougueux,  venu  de 
Rochefort,  qui  remplace  le  Révuhlieain,  Le  contre- 
amiral  Vanstabel,  qui  arrive  d  Ostende,  et  qui  a  ra- 
mené le  grand  convoi  d'Amérique,  commande  une 
division.  Les  représentants  du  peuple  Faure  et  Tré- 
bouard  sont  à  bord  du  vaisseau  amiral  la  Montagne. 

—  U  est  arrivé  le  même  jour  à  Brest  un  bataillon 
de  chouans  qui  ont  mis  bas  les  armes  et  qui  vont 
être  incorporés  dans  les  régiments  de  marine  ;  la  cu- 
riosité avait  amené  beaucoup  de  monde  pour  les  voir. 

Ce  sont  des  paysans  mal  vêtus,  et  qui  n'entendent 

3ue  le  bas-breton,  mais  qui  formeront  de  bonssol- 
ats,  puisque  depuis  deux  ans  ils  ont  essuyé  toutes 
lesfati£;ue8de  la  guerre.  Us  paraissent  forts  contents 
,  du  parti  qu'ils  ont  pris,  en  conséquence  du  décret  de 

23 


178 


la  Convention  qui  les  a  rendus  au  service  de  la  pa- 
trie. 


CONVENTION  NATIONALE. 

PrésUUnee  de  Letoumeur  {de  la  Manche). 
SUITE  A  LA  SÉANCE  DU  20  NIVOSB. 

Cbeuzê-Paschal,  au  nom  du  comit<^  des  ]>ostes, 
IransDorts  et  messageries:  Citoyens,  je  viens,  au 
nom  au  comité  des  postes,  transports  et  messageries, 
vous  parler  des  messageries,  objetsi  important  pour 
les  relations  intérieures. 

Dans  le  principe,  les  messageries  n'avaient  été  in- 
stituées que  pour  le  service  des  voyageurs,  de  leurs 
effets  et  de  quelques  marchandises  d'une  erande  va- 
leur, qui  par  là  pouvaient  supporter  les  trais,  alors 
plus  considérables  par  la  voie  des  messageries  que 
par  celle  des  routiers. 

Aujourd'hui  le  prix  des  routiers  étant  infiniment 
plus  élevé  que  le  tarif  des  messageries,  celles-ci  ont 
été  transformées  en  véritables  bureaux  de  roulage, 
au  grand  détriment  du  trésor  public.  En  eiet,  le  prix 
excessif  des^avoine^,  des  foins  et  des  objets  d'entre- 
tien ayant  augmenté  considérablement,  il  n'existe 
t>lusde  proportion  entre  les  dépenses  et  les  recettes. 
Les  fepilles  de  route  présentent  chaque  semaine  des 
déficits  immenses;  ils  peuvent  encore  aller  plus  loin, 
puisque  les  aubergistes  ne  veulent  plus  tenir  les  an- 
ciens marchés.  L^gence  nous  assure  que  chaque 
cheval,  entretenu  à  son  compte,  coûte  12  et  15  liv. 
par  jour  ;  d'jun  autre  côté,  les  messageries  ont  payé 
les  chevaux  de  poste  à  raison  de  a  liv.  par  poste, 
tandis  que  le  voyageur  ne  payait  lui-même  que 
42  sous. 

Sans  doute  il  est  juste  qne  les  voyageurs  et  les  ef- 
fets supportent  tous  les  frais  du  transport.  L'intérêt 
national  ne  permet  pas  que  le  trésor  public  soit 
grevé  d'une  dépense  excessive,  et  l'ordre  qui  doit 
régner  dans  les  bnances  exige  que  les  recouvrements 
balancent  au  moins  les  dépenses.  Pour  atteindre  ce 
but,  il  devient  indispensable  d'augmenter  de  moitié 
le  prix  porté  par  le  tarit  actuel  des  messageries,  soit 
pour  les  personnes,  soit  pour  les  effets.  En  consé- 
quence, votre  comité  m'a  chargé  de  vous  présenter 
le  projet  de  décret  suivant  : 

>  La  GoDvenUoo  nationale,  après  aToir  entendu  le  rapport 
de  son  comité  des  transports,  postes  et  messageries,  décrète  : 

c  Art.  I".  A  compter  du  jour  de  la  publication  de  la  pré- 
sente loi,  ragence  des  messageries  nationales  fera  perceroir 
dans  tous  les  bureaux  une  augmentation  de  moitié,  outre  les 
prix  portés  parles  tarifs  actuels,  soit  pour  les  voyageurs, 
soit  pour  tous  auu^  objets  de  transport. 

«  U.  Le  présent  décret  ne  sera  pas  imprimé;  son  in- 
tertion  au  Bulledn  tiendra  lieu  de  publication.  » 

La  Convention  adopte  ce  projet  de  décret. 

—  Un  membre,  au  nom  des  comités  de  salut  pu- 
blic et  des  secours.  Tait  adopter  le  décret  suivant  : 

«  La  ConrenUon  nationale,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  ses  comités  de  secours  publics  et  de  salut  public,  décrète  : 

«  Art.  I".  Les  pertes  qu'ont  essuyées  les  citoyens  par  Tex. 
plosion  de  l'arsenal  de  Landau  seront  réparées  aux  frais  de 
M  république.  Les  citoyens  blessés,  et  les  pères  et  mères, 
veuves  et  enfants  de  ceux  qui  auraient  pu  ^ire  blessés,  au- 
ront droit  aux  mêmes  secours  que  les  parenu  des  défen- 
seurs de  la  patrie. 

«  II.  L'état  des  pertes  sera  constaté  par  deux  commis- 
saires nommés  par  l'administration  du  dlsU-ict  de  Landau  ; 
leurs  procès-verbaux,  visés  par  l'administration,  seront  re- 
rois aux  représenuints  du  peuple  en  mission  sur  les  lieux,  n 
rétîlera  définiUverocnt  le  monunt  des  Indemnitéh  et  en  or^ 
donnera  le  payemeaL 


<  III.  Les  secours  provisoires  seront  r^jlés  ainsi  qu'il  sait  : 

c  Les  veuves  des  citoyens  qui  ont  péri  recevront  clincune 
300  livres,  et  en  outre  100  livres  pour  chaque  enfant  <iu- 
dessous  de  douze  ans  dont  elles  sont  cbaiigées. 

«  Le  même  secqprsde  100  livres  est  accordé  pour  chaque 
en^t  au-dessus  de  douxe  ans,  s'U  est  Infirme  oa  hora  d'éuit 
de  travailler. 

K IV.  Les  enflknts orphelins  de  père  et  de  iiière,aiHlessous 
de  douze  ans,  et  ceux  au-dessus  de  cet  âge,  s'ils  sont  Infir- 
mes et  hors  d'étatde  travailler,  recevront  chacun  une  somme 
de  200  liv. 

•  V.  Les  pères  et  mères  des  citoyens  morts  de  ladite  ex- 
plosion recevront  les  secoure  qui  leur  sont  attribués  par 
rarUde  VIII  du  titre  I"  de  la  loi  du  13  prairial,  relative 
aux  secours  dus  aux  familles  des  défenseura  delà  patrie. 

«VL  Les  citoyens  blessés,  qui  sont  traités  dans  leur  domicile, 
recevront  un  secoure  qui  sera  déterminé  par  le  représen- 
tant du  peuple,  en  considération  du  plus  ou  moins  de  gra- 
vité de  leure  blessures ,  et  qui  ne  pourrai  excéder,  pour  ceux 
qui  n'ont  ni  femmes  ni  enfants  A  leur  charge,  300  Uv.,  et 
pour  ceux  qui  ont  femmes  et  enfants»  500  Uv. 

«  VU.  Les  femmes  et  les  enfants  des  citoyens  qui  sont 
traités  dans  les  maisons  d'hospices  recevront  des  secoure 
qui  seront  déterminés  par  le  représentant  do  peuple,  en 
considération  de  leure  besoins,  et  qui  ne  pourront  excéder 
300  liv.  pour  les  femmes,  et  100  liv*  pour  chaque  enfant. 

K  VIII.  Les  pères  et  mères  desdits  citoyens  blessés  et 
traités  dans  les  maisons  d'hospioas  recevront  une  année  des 
secours  qui  leur  sont  attribués  par  les  ardcles  I  et  n  du  li- 
tre m  de  la  loi  du  SI  pluviôse. 

«  IX.  Pour  obtenir  les  secoure  décrétés  par  les  articles 
précédents,  les  pères  et  mères,  veuves  et  enflants  des  ci- 
toyens qui  ont  péri,  rapporteront  un  certificat  de  leur  com- 
mune ,  qui  oonsuiera  U  mort  ou  la  disparition  desdits  ci- 
toyens A  l'époque  de  l'explosion  de  l'arsenal,  et  un  certificat 
des  officiera  de  santé  à  l'égard  des  citoyens  blessés. 

«  X.  Les  indemnités  et  secoure  décrétés  dans  les  articles 
précédents  seront  payés  8ur-le>champ  par  le  receveur  du 
district  ^e  Landau,  d'après  les  mandements  qui  seront  ex- 
pédJés  par  le  représentant  du  peuple  en  mission  sur  les 
lieux. 

«  XI.  Pour  l'exécution  de  l'article  précédent,  la  commis- 
sion des  secoure  pubUcs  fera  passer  sur-le-champ,  sur  les 
fonds  mis  A  sa  disposition ,  à  l'administration  du  district  de 
Landau,  la  somme  de  100,000  liv.,  et  successivement  toutes 
les  sommes  qui  seront  Jugées  nécessaires  d'après  les  de- 
mandes du  représentant  du  peuple,  et  les  arrêtés  qui  se- 
ront pris  sur  ses  demandes  par  le  comité  dos  secoure  pu- 
blics. . 

—  Les  élèves  de  rEcole  ?étérinairc  d'Alfort  se  pré- 
sentent à  la  barre;  ils  félicitent  la  Convention  natio- 
nale .sur  ses  traraux,  et  Fiiivitent  à  s*occaper  de 
romnisation  définitive  de  leur  Ecole,  qui  n*est  pas 
sumsamment  pourvue  d'instituteurs  et  d'ol>jets  né- 
cessaires ati  progrès  de -leurs  études. 

La  Convention  nationale  renvoie  cette  pétition  à 
ses  comités  d'agriculture  et  des  arts,  et  d'instruc- 
tion publique,  qu'elle  charge  de  faire  un  rapport 
dans  la  décade  sur  cet  objet  intéressant. 

—  Rovère  fait  rendre  le  décret  suivant  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  ses  comités  de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  de  lé- 
gislation réunis,  autorise  ces  trois  comités  à  statuer  défini- 
tivement sur  les  demandes  et  pétitions  en  indemnités,  levée 
de  séquesu^  et  des  scellés,  frais  de  gardiens  des  personnes 
et  des  sceUés  relatifs  aux  décrets  des  IS  et  37  frimaire  der- 
nier. > 

Le  présent  décret  ne  sera  pas  imprimé. 

Leê  membres  eampoêoni  le  eomeil  général  de  la 
commune  d'Auxerre  à  laX^onvenlion  nationale^ 


c  Représentants  du  peuple,  A  l'Instant  même  oft  les  nou- 
veaux membres  du  conseil  général  de  la  commune  d'Auxerre, 
réorganisé  par  Gulllemardet,  votre  digne  ooUègue,  préuiient, 
dans  les  mains  de  leurs  prédécesseure,  le  serment  de  main- 
tenir Jusqu'à  la  mort  le  gouvernement  républicain  et  démo- 
cratique, nous  apprenons  qu'un  vceu  de  monarchie  a  été 
émis,  impriflié,  et  a  chrculé  dans  cette  même  dté,  qui  a  va 


179 


•'éfaïKNiir  »  0oaTenieiiient  anti-social.  Par  un  moaTement 
slmuliané.  les  anciens  et  les  nouveaux  membres  ont  répété 
ce  seul  cri  di(pie  des  Français  :  Vivre  libre  on  mourir  !  Tous 
oot  voulu  que  ce  cri  fût  porté  jusqu'à  vous  ;  vous,  les  dépo- 
sitaires de  nos  droits  :  vous  qui.  fondateurs  de  la  républi- 
que, ne  souffrirez  pas  que  ce  monument,  destiné  à  la  po*- 
térilë,  éprouve  la  moindre  alleinlc:  vous,  enfin,  qui  «vex 
prouvé  à  l'Europe  que,  sous  quelque  forme  que  la  tyrannie 
puisse  se  présenter,  vous  sauriez  la  terrasser." 

—  Resnaud  (de  la  Haute-Loire),  se  plaint  de  ce 
que  le  décret  rendu  avant-hier,  relativement  aux 
émigrés,  n*a  point  encore  été  inséré  dans  le  feuille- 
ton, ni  dans  le  Bulletin.  Il  demande  queTun  et 
Tautre  le  contiennent  demain. 

Un  secrétaire  fait  lecture  de  la  rédaction  de  ce  dé- 
cret. 

DuHBM  :  On  a  omis  dans  cette  rédaction  deux  pro- 

5 ositions  faites  par  Barras  :  la  première  est  celle  qui 
éfendau  comité  de  législation  d*écoater  aucune  ré- 
clamation en  faveur  Ses  émigrés  ;  et  la  seconde, 
l'impression  des  noms  de  ceux  qui  ont  été  rayés  de 
la  liste  des  émigrés.  Je  demande  le  rétablissement 
de  ces  deux  dispositions,  afin  que  tous  ces  lâches 
soient  bannis  du  territoire  de  la  république.Porcher 
vous  a  dit  qM*un  grand  nombre  aémigrés  des  dis- 
tricts de  Cambrai  et  d*Ayesnes  étaient  rentrés  après 
avoir  porté  les  armes  contre  nous  pendant  deux  ans. 
Je  ne  parle  pas  des  malheureux  hommes  et  des  mal- 
heureuses femmes  que  Tennemi  a  entraînés  après  les 
avoir  rouét  de  coups  ;  je  ne  parle  que  de  ceux  qui 
l'ont  suivi  volontairement. 

Laubbncbau  !  Je  ne  veux  pas  revenir  sur  le  décret 
one  la  Convention  a  rendu,  mais  je  veux  seulement 
faire  deux  questions  importantes.  A-t  ou  entendu, 
par  ce  décret,  vouloir  faire  sortir  de  France  les  ou- 
vriers de  Lyon,  par  exemple,  que  la  Convention  a 
rappelés?  (Quelques  voix  :  Non ,  non  !— Bruit  à  une 
extrémité  de  la  salle.)  Ce  n*est  point  assez  de  cette 
négation,  il  faut  Texprimer  dans  la  loi,  sans  quoi 
vous  allez  renvoyer  une  foule  innombrable  d'^ou- 
vriers  dont  Tindustrie  accroîtra  les  richesses  de  nos 
ennemis  à  nos  propres  dépens. 

Cbassous  :  Aux  voix  la  rédaction  du  décret  ! 

Quelques  voix:  Oui,  oui  ! 

Laubbmcbau  :  Je  demande  encore  à  la  Convention 
si  elle  a  voulu  foire  sortir  de  France  cette  foule  de 
matelots  qu'elle  a  rappelés  par  un  décret  spécial,  et 
dont  notre  marine  a  grand  besoin.  (Murmures  à  une 
extrémité  de  la  salle. ^Lesage-Senault,  Moïse  Bayle 
et  quelques  autres  parlent  dans  le  bruit.) 

CBA8S0U8  :  Le  décret  est  rendu  ;  aux  voix  la  ré- 
daction! 

Laubbii CBAU  :  La  terreur  avaitforcé  un  ouvrier  de 
Lyon  de  se  réfugier  en  Suisse,  où  il  avait  établi  une 
fabrique.  Se  décidant  à  rentrer  en  France,  sur  Tin- 
vitation  de  la  Convention  nationale,  il  fut  sourd  à  la 
voix  impérieuse  de  la  nécessité  et  refusa  des  sommes 
considérables  pour  prix  de  ses  métiers,  s*il  eût  voulu 
les  vendre  aux  étrangers  ;  il  prit  la  hache,  les  dé- 
truisit, et  revint  dans  sa  patrie,  le  cœur  satisfait  d*a- 
yoir  réservé  pour  sa  patrie  seule  les  moyens  de  son 
industrie.  (Applaudissements.) 

Cbassous  :  Aux  voix  la  rédaction  du  décret  ! 

Laubcncbau  :  Je  demande  si  vous  voulez  ren- 
voyer de  pareils  hommes  ?  Je  pense  que  les  comités 
devraient  être  consultés  pour  savoir  s*il  ne  doit  pas 
être  fait  en  leur  faveur  une  exception  à  la  loi  géné- 
rale. (Applaudissements.) 

Lb  Pbbsidbnt  :  Crassous,  tu  peux  prendre  la  pa- 
role maintenant,  ton  tour  est  arrivé. 


Cbassous  :  f  ji  motion  qn*on  vient  de  faire  est 
étrangère  à  Tobiet  de  la  discussion.  Il  ne  s*agit  que 
de  savoir  si  la  rédaction  nu*on  présente  est  Texpres- 
sion  fidèle  de  ce  qui  a  été  aécrété  ;  cette  rédaction  est 
bonne,  et  je  demande  qu'elle  soit  mise  aux  voix. 

Foussedoibb:  La  Convention  doit  être  sévère 
contre  les  véritables  émigrés  ;  mais  elle  ne  peut  pas 
souffrir  qu'on  immole  une  foule  de  gens  que  la  ter- 
reur a  forcés  de  fuir.  (Violents  murmures  dans  une 
extrémité  de  la  salle.)  J'ai  acauis  la  preuve  que  sur 
quarante  mille  individus  des  départements  du  Haut 
et  Bas-Rhin  qui  ont  émigré,  il  y  en  a  à  peine  dix 
qu'on  puisse  regarder  comme  contre-révolutionnai- 
res. Il  faut  que  ceux-ci  périssent  sous  le  glaive  de 
la  loi  (applaudissements)  ;  mais  il  faut  aussi  être 
juste  envers  les  autres. 

J'ai  vu  à  Wissembourg,  à  Lauterbourg,  et  dans 
les  autres  communes  de  ces  départements,  ces  mal- 
heureux qui  avaient  émigré  ;  ils  étaient  couverts  de 
haillons,  et  ne  connaissaient  pas  même  le  mal  qu'ils 
^avaient  fait.  Les  patriotes  de  ces  contrées  me  deman- 
daient d'user  des  pouvoirs  illimités  que  la  Conven- 
tion m'avait  confiés,  pour  rendre  ces  nommes  à  leur 
charrue  et  à  leurs  ateliers.  Je  ne  voulus  pas  prendre 
cette  mesure  sur  moi  ;  mats  j'en  écrivis  au  comité, 
de  législation. 

L'amendement  fait  avant-hier  par  Bourdon  (de 
l'Oise)  ne  les  sauvera  pas,  car  ils  ne  pourront  pas 
sortir  du  territoire  de  France,  et  ils  seront  guilloti- 
nés, quoiqu'ils  ne  soient  pas  plus  coupables  que 
moi. 

DuBOY  :  J'ai  parcouru  les  districts  de  Wissem- 
bourg et  de  Haguenau,  immédiatement  après  que 
les  ennemis  eurent  été  repoussés  de  dessous  les 
murs  de  Strasbourg  ;  les  campagnes  étaient  désertes, 
vingt-cinq  mille  lâches,  (jui  avaient  été  au-devant 
de  Wurmser  et  de  Condé,  lorsque  la  trahison  leur 
eut  livré  les  lignes  de  Wissemboivg,  suivirent  les 
Prussiens,  qui  promettaient  de  revenir  sous  quatre 
ou  cinq  jours. 

Ils  avaient  tout  refusé  à  nos  défenseurs  pour  des 
assignats,  ils  donnèrent  tout  aux  Prussiens  ;  ils  eu- 
rent l'infamie  de  déshabiller  nos  volontaires,  que 
l'ennemi  avait  respectés.  Enfin  ,  la  malveillance 
était  telle  dans  ce  pays,  qu'on  fut  obligé  de  ne  pas 
laisser  une  seule  cloche  dans  les  communes  qui  bor- 
daient le  Rhin,  parce  que  les  habitants  s'en  ser- 
vaient pour  donner  des  signaux  à  nos  ennemis. 

De  quoi  est-il  question  ici  ?  De  maintenir  un  dé- 
cret sage  qui  a  déjà  revivifié...  (Quelques  applau- 
dissements.) 

***  :  Ils  ont  perdu  5  ponr  100  le  même  soir. 

DuBOY  :  Ce  décret  a  été  solennellement  rendu,  et 
il  ne  faut  pas  y  porter  atteinte  lorsqu'il  s'agit  de  U 
rédaction.  Prononçons-nous  d'une  manière  défini- 
tive, et  que  la  république  soit  bien  convaincue  que 
nous  voulons  la  sauver.  (Applaudissements.)  Rap- 
pelez-vous comment  on  abusa  de  la  loi  bienfaisante 
que  vous  rendîtes  en  faveur  des  cultivateurs,  et  sur- 
le-champ  les  comtes,  les  marquis,  les  ducs  devin- 
rent  des  laboureurs.  A  Dieu  ne  plaise  que  je  veuille 
parler  ici  contre  les  sans-culottes  ;  car  je  suis  tou- 
jours sans-culottes,  moi.  (Applaudissements.)  Ce 
n'est  pas  aux  cultivateurs,  ce  n'est  pas  aux  pauvres 
que  nous  en  voulons  ;  continuons  nos  mesures  de 
vigueur  contre  les  ennemis  de  la  patrie. 

Bellbgabdb  :  J'assure  à  la  Convention  que  tous 
les  déserteurs  et  les  espions  qui  Privent  à  l'armée  du 
Nord  nous  rapportent  que  les  émigrés  se  flattent 
d'une  rentrée  prochaine  en  France.... 
*  Plusieurs  voix:  11  y  a  quatre  ans  qu'ils  disent 
cela. 


180 


BoUBDOif  (de  1*0ise)  î  La  question  est  trop  impor- 
tante, elle  intéresse  trop  le  salut  public  el  la  vie  de 
plusieurs  milliers  d'hommes,  pour  n*élre  pasdiscu- 
te'e  avec  le  calme  de  la  justice  et  de  la  raison.  (Ap- 
plaudissements.) H  n'est  personne  dans  la  Conven- 
tion, quelle  qo  ait  été  autrefois  son  opinion ,  oui 
puisse  être  soupçonné  de  vouloir  faire  renlrer  les 
émigrés  en  France.  (Non,  nm!  s'écrient  tous  les 
membres  en  se  levant ,  cela  n*est  pat  dans  noi 
cœurs  I  )  Ni  dans  votre  sûreté.  Ce  prmcipe  une  fois 
bien  convenu,  je  ne  vois  pas  pourquoi  on  ne  ferait 
pas  une  distinction  commandée  par  la  justice  et  la 
raison.  H  ne  faut  pasconfondre  les  émigrés  partisen 
Î789,  et  à  toutes  les  grandes  époaues  de  la  révolu- 
tion, avec  ceux  qui  ont  été  forc6  par  la  terreur, 
(Vifs  applaudissements.)  Si  nous  étions  encore  sous 
le  régime  affreux  dont  nous  sommes  sortis,  je  sais 

?[ue  la  justice  ne  pourrait  pas  être  invoquée  ici.... 
Bruit  à  une  extrémité  de  la  salle.— Lesage-Senault 
et  quelques  autres  crient  dans  le  bruit.)  U  est  beau 
d'être  injurié  quand  on  plaide  la  cause  de  Thumani-* 
té.  (Vifs  applaudissements.  —  Oui,  oui!  e*esl  un 
honneur  !  8*écrie-t-on.)  Les  habitants  de  la  Vendée 
étaient  armés  contre  la  patrie,  et  vous  avez  cru  qu'à 
la  fin  de  la  révolution  il  fallait  réunir  les  membres 
ëpars  du  corps  politique.  (Vifs  applaudissements.) 
Quoi  !  Çharette  a  obtenu  Tmdulgence  nationale,  et 
de  malheureux  paysans,  égarés  par  des  prêtres  al- 
lemands, que  l'enfer  a  vomis  pour  désoler  les  dé- 
partements du  Rhin,  ne  trouveront  pas  justice  de- 
vant vous  !  (Si,  n  /  s*écrie-t-on  de  toutes  parts.) 
Nous  devons  écouter  la  voix  de  Thumanité,  mais 
nous  ne  devons  faire  que  les  exceptions  qu'elle  nous 
commande.  (Applaudissements.)  Je  pense  qu'il  faut 
charser  les  comités  de  distinguer  les  époques  et  les 
motifs  de  Témigration,  et  la  qualité  de  ceux  qui  ont 
émigré. 

Gaston  :  C'est  impossible. 

BouRBOif  (de  roisc)  :  Citoyens,  Toulez-vous  se- 
conder vos  ennemis  ;  renvoyez-leur  vos  matelots 
pour  monter  leurs  yaisseaux,  renvoyez-leur  vingt 
mille  ouvriers  dont  Tindustrie  vous  procurera  des 
objets  d'échange  pour  60  millions  par  année  ;  éta- 
blissez leurs  manufactures  aux  dépens  des  vôtres. 
(Applaudissements.)  Renvoyez  dans  une  terre  inhos- 
pitalière de  malheureux  paysans  égarés,  condam- 
nez-les à  ne  plus  trouver  d'asile,  et  vous  en  ferez  de 
nouveaux  ennemis. 

Fermons  une  triple  porte  d'airaîn  aux  véritables 
émigrés,  mais  distinguons  les  ouvriers,  les  cultiva- 
teurs, qui  Tétaient  avant  1789,  et  que  la  peur  a  fail 
fuir.  Cette  mesure  coûtera  moins  à  nos  cœurs  et  à  la 
Justice  que  l'amnistie  que  nous  avons  accordée  à 
Çharette.  Je  connais  aussi  les  considérations  politi- 
ques qui  pourraient  nous  retenir;  mais  je  sais 
qu'elles  ne  peuvent  pas  s'appliquera  de  malheureux 
ouvriers,  à  de  malheureux  paysans,  i  de  malheu- 
reux matelots  que  les  circonstances  ont  forcés  de 
fuir  le  couteau  assassin;  mais  je  sais  que  les  princi- 
pes qui  doivent  régir  une  grande  assemblée  au  com- 
mencement d'une  révolution  ne  sont  pas  les  mêmes 
que  ceux  qui  doivent  la  guider  lorsque  cette  révolu» 
tion  s'avance  majestueusement  vers  sa  fin. 

Nous  n'avons  bravé  tant  de  dangers  que  pour  le 
peuple,  et  c'est  pour  une  partie  intéressante  au  peu- 
ple que  je  réclame,  pour  une  partie  nécessaire  à  nos 
charrues,  i  nos  Taisseaux,  à  nos  manufactures.  Je 
demande  le  renvofaux  comités,  pour  examiner  s'il 
D>st  pas  nécessaire  de  fixer  le  temps  et  les  motifs  de 
l'émigration  et  la  qualité  des  émigrés.  (Applaudisse* 
ments.) 

L'assemblée  ferme  la  discussion. 


Duhem,  Crassous  et  Léonard  Bourdon  réelemeot 
une  nouvelle  lecture  de  la  rédaction  du  décret. 

On  demande  d'un  autre  côté  que  la  proposition  de 
Bourdon  (de  l'Oise)  soit  mise  aux  voix. 
Le  renvoi  est  décrété. 

Quelques  membres  réclament  avec  force  contre  le 
décret;  ils  descendent  au  bureau  pour  demander 
l'appel  nominal. 

Toute  l'assemblée  se  lève  en  réclamant  aussi  l'ap- 
pel nominal.  — 11  se  fait  un  grand  tumulte  ;  le  pré- 
sident se  couvre. 

Charlier  :  Je  demande  la  parole. 

Plutieunvoix:  Non,  non,  l'appel  nominal  !  Nous 
ne  voulons  pas  être  leurrés  davantage. 
Le  calme  renaît  ;  le  président  se  découvre. 

Charlibr  :  Si  le  calme  régnait  dans  la  délibéra^ 
ration,  on  serait  convaincu  que  nous  sommes  tous 
parfaitement  d'accord.  (JVon,  non!)  La  haine  des 
émigrés  est  très-profonde  dans  l'âme  des  patriotes  ; 
(Ottt,  ouil)\  nous  sommes  donc  tous  d'accord  que' 
tous  ceux  qui  ont  émigré  ne  l'ont  fait  qu'en  haine  de 
leur  pays.  {Ça  n'est  poa  vrai!  s*écrie-t-on.)  Que 
voulez-vous  renvoyer  au  comité?  {Les propositions 
de  Bourdon,  dit-on.)  Vous  ne  voulez  pas  y  renvoyer 
la  haine  que  vous  avez  contre  les  émigrés ?(Ru-^ 
meurs.)  Vous  ne  voulez  pas  renvoyer  la  question  de 
savoir  si  le  principe  que  vous  avez  consacré  est  bon 
ou  mauvais  ;  que  voulez-vous  donc  renvoyer?  {Les 
propositions  de  Bourdon/  s'écrie-t-on.)  une  excep- 
tion qui  est  dans  la  loi  même?(2Vofi,  non,  eUen*y  est 
pas,  dit-on.)  11  n'est  pas  un  ouvrier  utile  que  vous 
n'accueilliez  avec  empressement.  Eh  bien ,  mainte- 
nez la  rédaction  qui  est  soumise  et  renvoyez  ensuite 
aux  comités  pour  savoir  si  Ton  fera  une  exception 
pour  les  ouvriers,  les  laboureurs  et  les  matelots. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Il  faut,  jusqu'au  rapport 
que  feront  les  comités,  suspendre  l'exécution  des 
mesures  coercitives  que  vous  avez  prises;  car  il  se- 
rait fort  inutile  de  faire  une  exception  en  faveur  de 
gens  qui  seraient  gnillotinés. 

Merlin  (de  Douai)  :  L'exception  proposée  par 
Bourdon  rentre  dans  les  véritables  intentions  de  la 
loi  générale  sur  les  émigrés,  car  elle  ne  regarde  pas 
comme  tels  les  ouvriers  qui  ont  été  travailler  en 
pays  étranger.  Elle  leur  permet  d'aller  exercer  leur 
maustrie  ailleurs  que  sur  le  territoire  français  ;  il  y 
aurait  conséquemment  une  injustice  criante  à  les 
empêcher  de  rentrer.  Le  décret  rendu  avant-hier 
n'exclut  point  cette  exception.  Il  est  inutile  de  faire 
une  nouvelle  loi  pour  suspendre  l'exécution  de  celle 
d'avant-hier.  Il  sufQt  d'en  différer  l'expéditjon  jus> 
qu'au  rapport  que  les  comités  feront  demain  des 
propositions  de  Bourdon. 

La  proposition  de  Merlin  est  adoptée. 

BoissT  d'Anolas  :  Le  comité  de  salut  public  vous 
propose  d'étendre  au  département  de  la  Seine-Infé- 
rieure les  pouvoirs  que  vous  avez  délégués  au  repré- 
sentant du  peuple  Delacroix  dans  le  département  de 
Seine-et-Oise. 

MoNTMATAU  :  Je  oombato  cette  proposition.  11  p*y 
a  pas  trois  mois  que  Delacroix  est  revenu  de  mission; 
on  a  conseti  à  ce  qu'il  lui  fût  donné  des  pouvoirs 
pour  Versailles,  parce  qu'une  circonstance  étran- 
gère à  sa  mission  l'avait  forcé  d'aller  dans  cette  ville} 
mais  il  ne  faut  pas  enfi'eindre  plus  longtemps  la  loi 
qui  défend  de  confier  à  un  représentant  de  nouveaux 
pouvoirs  avattt  qu'il  n'ait  passé  trois  mois  dans  la 
Convention. 


181 


BoissT  :  Leeoiiiité..«..  (Bruit  dans  une  extrémité 
de  la  salie.) 

0ITHEM  :  On  l'envoie  là  pour  assassiner  les  pa- 
triotes de  Rouen.  (Violents  murmures.) 

***  :  Je  demande  que  Duhem  soit  rappelé  à 
Tordre. 

Plusieurs  voix  :  A  TAbbaye  ! 

Bbntabolb:  Il  est  temps  de  savoir  si  quelques 
hommes  auront  le  droit  de  troubler  eontinuellemenl  : 
les  délibérations  de  rassemblée  en  insultant  leurs 
collègues.  J'ai  entendu  très  distinctement  que  Duhem 
a  accusé  Ch.  Delacroix  d*aller  à  Rouen  pour  assassi- 
ner les  patriotes.  Je  demande  qu'il  soit  envoyé  à 
l'Abbaye. 

Duhem  :  J*ai  dit  que  tes  aristocrates  de  Rouen  ont 
assassiné  les  patriotes  de  la  Société  populaire,  et  il 
n'e^t  pas  nécessaire  de  les  aller  vexer  encore,comme 
on  Ta  fait  à  Versailles. 

BoissT  :  La  mission  que  le  comité  Vous  propose 
de  donner  à  Ch.  Delacroix  est  étrangère  à  tout  ob- 
jet de  politique;  elle  n'est  relative  qu'aux  subsis- 
tances. 

Thibadmau  :  L'oppression  de  la  Convention  date 
du  jour  où  elle  t  permis  que  l'ancien  comité  de 
salut  public  usurpât  des  pouvoirs  qui  n'apparte» 
naient  qu'à  la  Convention  elle-même.  Rien  n'est 
minutieux  en  politique,  et  la  plus  petite  chose  peut 
produire  les  plus  grands  abus.  Ne  nous  relâchons 
pas  des  principes;  le  peuple  serait  bien  malheureux 
8*il  n'y  avait  dans  le  sein  de  la  Convention  qu'un 
représentant  en  état  d'être  envoyé  en  mission  pour 
surveiller  les  subsistances.  Charles  Delacroix  usera 
dignement  de  ses  pouvoirs,  je  lésais;  mais  je  de- 
mande, pour  le  maintien  du  principe,  que  lé  comité 
de  salut  public  présente  un  autre  membre  pour  aller 
à  Rouen. 

La  proposition  de  Thibaudeau  est  adoptée. 

MoNTMATAU  :  Je  ne  dois  pas  laisser  ignorer  à  la 
Convention  que  son  décret  qui  détend  à  ses  mem- 
bres de  rester  plus  de  trois  mois  en  mission  dans  les 
départements,  et  plus  de  six  auprès  des  armées,  n'est 
pas  exécuté.  Je  demande  qu|î  la  Conventi  n  en  nuiin- 
tienne  l'exécution  sévère.* 

.   Clauzbl  :  Cela  regarde  le  comité  des  décrets. 

***  :  Je  demande  que  Ton  décrète  que  les  pou- 
voirs des  représentants  du  peuple  envoyés  en  mis- 
sion cesseront  par  le  fait  des  que  le  temps  de  leur 
mission  sera  expiré. 

Après  quelques  débats  la  Convention  renvoie  au 
comité  de  salut  public,  qui  est  chargé  de  présenter 
ime  loi  réglementaire  à  ee  sujet. 

—  Le  surplus  de  la  séance  est  employé  à  entendre 
les  pétitions  particulières;  elle  est  levée  à  quatre 
heures. 

SiAlfCB  DU  21  NIVOSE. 

Un  des  secrétaires  donne  lecture  de  la  lettre  sui- 
vante : 

Bailiy,  représentitnt  du  peuple  dans  les  départe- 
menis  du  Haut  et  du  Bas- Rhin,  Mont-Terrible^ 
Jura  et  des  Vosges  ^  à  la  Convention  nationale, 

•  Citoyens  collègues,  après  avoir  visité  avec  soin 
neuf  districts  du  département  des  Vosges,  je  m'em-  1 
presse  de  vous  rendre  compte  de  la  situation  ac-  | 
tuelle  ^e  ce  département.  Mes  premiers  regards  se  ; 
sont  porléi  sur  les  autorités  constituées  et  les  So- 
ciétés populaires. 


•  Haine  aux  intrigants,  aux  terroristes,  à  tous 
leurs  partisans,  sous  quelque  forme  qu'ils  se  mon- 
trent, de  quelque  masque  qu'ils  se  couvrent;  alla» 
cbement  inviolable  à  la  Convention  nationale  et  à 
ses  principes  :  tels  sont  les  sentiments  qui  les  ani- 
ment. 

•  Partout  j'ai  vu  le  peuple,  rempli  du  même  esprit, 
faire  éclater  librement  et  sans  contrainte  cette  joie 
et  ces  transports  qui  portent  l'empreinte  de  la  vé- 
rité et  le  caractère  de  la  recoilnaissance  :  hommes, 
femmes,  enfanUi ,  vieillards,  tous  semblent  renaître 
dans  un  sol  régénéré;  l'ordre,  la  paix  et  l'harmonie, 
la  confiance  la  plus  intime,  le  dévouement  le  plus 
sincère  y  sont  les  fruits  de  votre  courage  et  de  votre 
sage  activité. 

«C'est  surtout  dans  les  assemblées  générales  des 
citoyens  que  l'esprit  public  s'est  prononcé  avec  cette 
franchise  et  cette  énergie,  dont  j'aurai  voulu  que 
vous  eussiez  été  les  témoins.  On  veut  fortement  le 
maintien  de  la  liberté  et  raffermissement  de  la  répu- 
blique. On  ne  veut  que  le  règne  de  la  justice  et  des 
lois,  et  l'indignation  est  à  son  comble  contre  tous 
les  hommes  de  sang  qui  ont  souillé  les. beaux  jours 
de  la  révolution. 

•  La  seule  commune  de  Mirecourt ,  en  proie  i 
quelques  intriguants ,  gémissait  encore  sous  le  joug; 
le  peuple  y  était  comprimé. 

•  Le  tribunal  criminel  et  les  meneurs  de  la  So- 
ciété populaire  dominaient  encore  par  la  terreur; 
une  guillotine  en  permanence  insultait  à  vos  prin- 
cipes  L^  guillotine  a  disparu,  le  tribunal  et  la 

Société  populaire  sont  refondus;  les  intrigants  ont 
eu  la  douleur  de  se  voir  remplacés  par  des  hommes 
probes,  qu'ils  avaient  ou  supplantés  ou  persécutés. 

•  Le  peuple  est  toujours  juste  auand  il  n'est  point 
égaré;  son  assentiment  a  été  la  règle  de  mes  opéra- 
tions, comme  son  bonheur  en  était  le  but. 

•  Les  fêtes  décadaires  sont  observées  avec  sèle 
dans  ce  département;  partout  où  J'ai  pu  y  assister, 
j'y  ai  donne  l'exemple  et  le  précepte  ;  et  mes  prin- 
cipes, d^accord  avee  les  vôtres,  ont  disposé  le  peu- 

Ele  à  recevoir  avee  transport  le  décret  qui  en  doit 
xer  rorffanisation  et  jeter  les  fondements  de  la  mo- 
rale répuDlicaine. 

•  Pour  mieux  s'unir  à  vons,  le  bon  peuple  de^ 
Vosges  applaudit  à  vos  travaux  sublimes,  au  rap- 
port de  la  loi  du  maximum,  qui  va  rendre  la  vie  an 
commerce;  au  décret  d'amnistie  aui  arrache  les  ar- 
mes é  des  frères  égarés,  et  spécialement  à  celui  qui 
a  rappelé  dans  votre  sein  soixante-quinxe  de  nos 
collègues.  Courage!  vous  crie-t-il  de  toutes  parts; 
déjà  la  Francene  forme  plus  qu'une  seulefamille  dont 
vous  êtes  les  pères  et  l'appui;  continuez  vos  heureux 
travaux;  mettez  le  sceau  à  votre  gloire  en  consoli- 
dant la  liberté,  en  fondant  sur  des  bases  immuables 
le  bonheur  et  la  prospérité  de  la  république.  • 

L'insertion  au  Bulletin  est  décrétée. 

—  Un  des  secrétaires  donne  lecture  de  la  pétition 
du  citoyen  Julian  (de  Carantan),  par  laquelle  il 
expose  que,  par  plusieora  décrets  successib,  la  Con- 
vention nationale  a  ordonné  que  le  comité  de  sûreté 
générale  lui  ferait  à  jour  indiqué  le  rapport  des 
causes  de  son  arrestation,  ou  de  son  envoi  au  tribu- 
nal qui  doit  connaître  de  l'imputation  qui  lui  a  été 
faite  d'avoir  soustrait  138,000  liv.  appartenant  à  la 
république,  afin  qu'il  soit  puni  s'il  est  coupable,  ou 
recouvre  sa  liberté  s'il  est  innocent. 

Cette  pétition  est  convertie  en  motkm  par  Le- 
cointre,  et,  sur  sa  proposition,  la  Convention  natio- 
nale llécrète  que  sextidi  prochain,  pour  tout  délai, 
son  comité  de  sûreté  ffénérale  lui  fera  le  rapport  de 
l'afiair^  de  Julian  (de  Careotao)»  afin  que  ee  citoyen 


183 


recouvre  sa  liberté,  ou  soit  enfin  livré  aux  Iribu- 
oauz  auxquels  la  connaissance  de  son  affaire  appar- 
tient. 

—  Des  instructeurs  des  élèves  du  Camp  de 
Mars  présentent  une  pétition  tendant  à  obtenir  des 
secours  et  indemnités,  ou  à  être  placés  plus  conve- 
nablement. 

La  Convention  nationale  décrète  le  renvoi^  de 
leur  pétition  au  comité  de  salut  public,  afin  d'ac- 
corder la  retraite  à  ceux  qui  en  sont  susceptibles,  et 
aux  autres  le  renvoi  dans  les  différents  corps  d'où 
ils  ont  été  tirés,  avec  des  secours  et  indemnités  pro- 
portionnés à  leurs  besoins  et  aux  services  qu'ils  ont 
rendus. 

—Une  députation  de  la  section  de'Mutius-Scœvola 
est  admise  à  la  barre. 

GuUlemin,  orateur  de  cette  députation  :  Citoyens 
représentants,  la  section  de  Mutius-Scœvola  vient  en 
masse  vous  féliciter  d'avoir,  par  un  décret  solennel, 
▼engé  l'insulte  faite  par  un  esclave  à  la  république 
et  à  la  liberté  de  la  presse.  Tous  les  citoyens  qui 
composent  cette  section  ont  comme  vous  iuré  une 

guerre  à  mort  à  la  royauté;  comme  voua  ils  seront 
dèles  à  leur  serment;  comme  vous,  ils  préfèrent  la 
mort  à  la  servitude. 

Citoyens  représentants,  Fanathème  que  vous 
avez  lancé  contre  l'auteur  méprisable  d'un  ouvraee 
plus  méprisable  encore  est  une  réponse  sans  répli- 
que aux  vociférations  de  ces  individus  qui  ne  ces- 
saient de  répéter  qu'en  fermant  cet  antre  infâme,  où 
l'on  forgeait  la  foudre  qui  devait  vous  anéantir, 
vous  n'aviez  d'autre  intention  que  de  rétablir  la 
royauté.  En  vain  ces  monstres  qui ,  ivres  de  sang, 
méditaient  il  n'y  a  qu'un  instant  le  massacre  de  dix 
millions  de  Français,  pour  élever  sur  leurs  cadavres 
un  trône  à  leur  maître,  voudraient  vous  faire  croire 
que  le  royalisme  n'a  osé  lever  sa  tête  hideuse  que 
parce  que  vous  les' avez  chassés  de  leur  repaire  :  la 
France  entière  est  désabusée  sur  leur  compte.  La 

Sersécution  des  hommes  instruits  et  vertueux ,  la 
estruction  du  commerce  et  des  arts ,  ouvrage  de 
ces  patentes  exclusives,  nous  donnèrent  la  mesure 
de  leur  républicanisme.  Le  peuple  n'oubliera  jamais 
qu'ils  ont  levé  l'étendard  de-  la  révolte  contre  la 
seule  autorité  légitime,  la  représentation  nationale; 
leurs  crimes  tracés  en  letms  de  sang  sur  les  pages 
de  l'histoire  leur  mériteront  Texécration  de  la  pos- 
térité la  plus  reculée. 

Législateurs,  que  la  justice  ne  frappe  pas  seule- 
ment les  royalistes;  qu'elle  atteigne  les  agents  préva- 
ricateurs, principalement  ceux  qui,  chargés  des  ap- 
provisionnements, ont,  deconcert  avec  la  commune 
conspiratrice ,  médité  la  .contre-révolution  par  la 
disette;  qu'elle  atteignent  indistinctement  tous  lés 
dominateurs ,  tous  les  dilapidateurs  de  la  fortune 
publique  et  particulière,  tous  les  égorgeurs,  tous  les 
buveurs  de  sang ,  quel  que  soit  leur  caractère  I 
Qu'elle  flétrisse  enfin  ces  bourreaux  qui  ont  déblayé 
les  prisons  les  2  et  S  septembre  !  Rétablissez  le  dé- 
cret qui  ordonnait  de  poursuivre  les  auteurs  et  fau- 
teurs de  ces  déplorables  journées,  décret  dont  le 
rapport  est  sans  doute  l'ouvrage  de  la  (action  que 
vous  venex  d'abattre;  qu'elle  flétrisse  tous  ces  inqui- 
siteurs répandus  sur  la  surface  de  Ja  France;  que 
vos  comités  fassent  droit  aux  dénonciations  portées 
devant  eux  contre  les  anciens  comités  révolutionnai- 
res, notamment  contre  celui  de  notre  section;  que 
l'épuration  ordonnée  pour  les  autorités  constituées 
soit  appliquée  à  Tétat-maior  des  sections  de  f^aris, 
composé  par  la  faction  des  terroristes  et  des  par* 
tisans  du  contre-révoliitionnaine  Hanriot. 


Mais  il  me  semble  entendre  dtrequ^en  noasplai» 
gnant  de  l'effusion  du  sang  nous  demandons  celui 
3e  quelques  milliers  d'hommes.  Non ,  nous  ne  de- 
mandons point  que  le  sang  de  ces  criminels  souille 
le  sol  de  la  liberté.  Il  est  un  autre  supplice  à  leur 
infliger  pour  les  punir  d'avoir  fait  rétrograder  la 
révolution  :  qu'ils  soient  forcés  de  coopérer  à  son 
triomphe  en  servant  sur  nos  galères;  cesupolice  sera 
d*atttant  plus  terrible  pour  eux  que,  quand  le  vais- 
seau de  la  révolution  sera  enfin  arrivé  au  port,  ils 
vemHit  le  peuple  entier  jouir,  malgré  eux,  d'un 
bonheur  qu  eux  seuls  ne  goûtenAit  point,  et  qu'ils 
l'entendront  répéter  mille  fois,  dans  les  transports 
de  son  ivresse  et  de  sa  reconnaissance,  les  cris  qu'ils 
ne  profèrent  jamais  gue  pour  l'égarer  :  Vive  la 
république!  vive  la  Convention  nationale!  (On 
applaudit.) 

14K  Pbbsidbnt,  à  la  députation  :  Vous  venez  mê- 
ler vos  accents  républicains  à  la  voix  de  vos  repré- 
sentants, pour  jurer  une  haine  implacable  à  tous  ies 
fiiuteurs  du  royalisme:  vous  venez  partager  le  mou* 
vement  sublime  qui  entraînera  toujours  les  amis 
de  la  liberté  et  de  l'égalité  pour  foudroyer  cette  horde 
impie. 

Qu'ils  sont  coupables ,  ces  calomniateurs  qui 
osent  mettre  en  question  le  vœu  du  jaunie  fran- 
çais! Cest  un  blasphème  qui  tend  à  ravilir.  Oui , 
le  peuple  français  veut  la  republique  une  et  indivi- 
sible et  démocratique.  La  Convention  nationale, 
organe  de  sa  volonté ,  la  maintiendra  en  dépit  de 
toutes  les  factions;  et  si  quelques  audacieux  osaient 
tramer  de  nouveaux  complots,  qu'ils  sachent  que 
le  peuple  est  debout,  et  que  ses  représentants  veil- 
lent. 

Lz  Convention  nationale  apjplaudit  à  l'énergie  de 
vos  sentiments  républicains;  je  vous  invite  en  son 
nom  à  assister  à  la  séance. 

*-  On  introduit  la  section  de  la  Halle-aux-Blés. 

Real,  orateur  de  la  députation  :  Législateurs ,  la 
république  démocratique  ou  la  mort;  guerre  éter- 
nelle, guerre  à  mort  aux  royalistes!  voilà  les  cris 
qui  ont  retenti  dans  notre  salle  d'assemblée,  à  la 
lecture  du  décret  qui  ordonne  qu'une  fête  sera  célé- 
brée le  2  pluviôse,  anniversaire  du  supplice  du  der- 
nier tyran. 

Upipmes  libres ,  vous  n'aviez  pas  besoin  de  cet 
acte  pour  convaincre  la  nation  de  toute  votre.hainc 
|K>ur  la  royauté;  mais  vous  ne  vous  êtes  pas  dissi- 
mulé les  circonstances  où  vous  vous  trouvez.  Des 
bruits  ont  frappé  vos  oreilles;  des  écrits,  des  événe- 
ments ont  éveillé  votre  sollicitude,  et,  par  cette  pro- 
fession de  foi  républicaine,  vous  avez  voulu  faire 
évanouir  toutes  les  coupables  espérances. 

Par  ce  décret  vous  proclamez  oue  les  fruits  de 
rimmortelle  journée  du  9  thermioor,  n*appartien- 
dra  qu'aux  vrais,  qu'aux  sincères  patriotes.  Vous 
frappez  par  ce  décret  les  hypocrites,  les  charlatans 
de  tous  les  partis;  sous  des  masques  différents,  ils 
sont  tous  les  amis  des  rois. 

De  grands  crimes,  du  sang  versé,  du  sang  que  la 
patrie,  que  la  justice  ne  demandaient  pas,  ont  pro- 
voqué des  mesures  sévères,  et  itous  forcent  ^'in- 
strnire  un  grand  procès;  les  patriotes  ont  applaudi 
à  ces  mesures,  parce  qu*ils  y  voient  le  salut  de  la 

^^^^'  .....       , 

Mais  vous  ne  vous  êtes  pas  dissimulé  que  les  roya- 
listes ont  pu,  par  des  motifs  différents,  y  applaudir 
également.  Dans  les  hommesque  la  justice  nationale 

Soursuit,  les  royalistes  détestent  moins  les  complices 
e  Robespierre  que  les  révolutionnaires  du  14  juil- 
let 1789  et  du  10  août  août  1792.  Ce  n'est  point  la 
punition  des  délits  reprochés,  c'est  la  destniction  des 


188 


patriotes  qui  faitsonrire  les  royalistes Votre  dé- 
cret, législateurs,  fera  taire  leur  insolente  joie,  écra- 
sera leurs  libertickles  espérances. 

Ce  jour  du  2  pluviôse,  dans  Paris,  dans  toutes 
les  villes,  dans  toutes  les  campagnes,  dans  les  ar- 
mées de  terre,  sur  les  mers,  la  France  entière  se  le- 
vant jurera  sur  le  cadavre  du  dernier  tyran  la  ré- 
publique démocratique  ou  la  mort. 

Continuez,  législateurs;  n'écoutez  que  les  prin- 
cipes; ne  vous  attachez  qu*au  peuple;  écrasez  toutes 
les  factions,  éteignez,  étouffez  toutes  les  divisions. 

Nous  concevons  dans  une  grande  assemblée  la 
nécessité  d'une  salutaire  opposition;  de  cette^ppo- 
silion ,  fille  de  Tindépenaance,  et  sans  laquelle  la 
liberté  périrait  dans  Tengo  urdissement;  mais  cette 
opposition  salutaire,  nous  ne  la  reconnaissons  pas 
dans  les  convulsions  de  la  haine,  ni  dans  le  délire 
des  passions. 

Législateurs,  nous  combattons  depuis  longtemns 
pour  la  liberté,  pour  un  gouvernement.  Pour  on- 
teiîir  Tun  et  Tautre  plus  promptement ,  plus  sûre- 
ment, nous  vous  avons  rendusoepositaires  d'immen- 
ses pouvoirs.  Dans  d'autres  mains  ils  alarmeraient 
la  liberté;  dans  les  vôtres  ils  nous  en  promettent 
bientôt  toutes  les  jouissances. 

Parlez,  vous  pouvez  tout; souvenez- vous  que 
vous  avez  notre  confiance,  notre  force,  et  que  nous, 
sommes  Français*  (On  applaudit.) 

Lb  PiBSiDBNT,  à  la  députation  :  La  France  gémis- 
sait sous  le  joug  oppresseur  de  la  tyrannie  la  plus 
absolue;  le  terrorisme  couvrait  de  son  voile  funèbre 
la  plus  belle  portion  du  globe,  et  comprimait  de 
toutes  parts  les  citoyens;  la  Convention  nationale  a 
terrassé  ce  monstre,  l'innocence  et  la  probité  res- 
pirent; si  quelques  audacieux  formaient  encore  de 
sinistres  projets ,  si  le  royalisme  concevait  de 
criminelles  espérances,  il  suffirait  du  regard  d'un 
républicain  pour Jes  foudroyer. 

Citoyens,  c'est  avec  raison  que  vous  prétendez 
que,  sans  l'anion,  sans  la  fraternité,  il  ne  peut  exis- 
ter de  bonheur  public;  serrez- vous  donc  en  bons 
frères,  rappelez  vos  concitoyens,  s'il  s'en  trouve 
parmi  vous  d'égarés,  pria  voix  douce  de  la  persua- 
sion; occupez-vous,  de  concert  avec  vos  représen- 
tants, des  moyens  de  consolider  la  liberté  et  l'é- 
galité, bases  inébranlables  de  la  félicité  universelle. 

Vous  félicitez  la  Convention  sur  le  décret  qui  con- 
sacre une  fête  pour  l'anniversaire  de  l'époque  où  le 
dernier  roi  des  Français  a  expié  ses  crimes  sur  l'é- 
chafaud. 

Qu'il  est  beau,  dtoyens,  ce  spectacle  où  la  France 
se  leva  tont  entière  pour  jurer  sur  les  restes  palpi- 
tants de  ce  tyran  la  république  une,  indivisible  et 
démocratique  ! 

La  Convention  nationale  a  entendu  avec  intérêt 
l'expression  de  vos  sentiments;  elle  vous  invite  aux 
honneurs  de  la  séance. 

La  Convention  décrète  la  mention  honorable  de 
ces  deux  Adresses,  et  leur  insertion  au  Bulletin  avec 
les  réponses  du  président. 

—  Des  volontaires  nationaux  invalides  sont  admis 
à  la  barre. 

L'un  d*euœ,  partant  la  parole  :  Admirateurs  fi- 
dèles de  la  sagesse  de  vos  décrets,  pénétrés  surtout 
de  la  plus  vive  reconnaissance  pour  l'énergie  de  ceux 
oui  viennent  de  marquer  du  sceau  républicain  vos 
deux  avant-dernières  séances,  les  ennemis  déclarés 
des  tyrans,  les  antagonistes  irréconciliables  des  émi- 
grés» les  détenseurs  de  la  patrie ,  en  un  mot ,  n'ont 
point  été  maîtres  de  concentrer  dans  leurs  cœurs  la 
joie  qu'ils  ont  ressentie  en  voyant  leurs  plus  cruels 
ennemis  déçus  de  l'espoir  de  semer  leurs  maximes 


destructives  dans  la  république,  et  la  Uie  de  la  mort 
du  tyran  servira  d'avertissement  à  quiconque  ose- 
rait conserver  l'idée  de  s'en  créer  un  nouveau;  ils 
se  font  donc  d'avance  un  sujet  d'allégresse  de  se 
préparer  à  danser  encore  une  fois  à  cette  époque 
précieuse  ki  Carmagnole^  en  faisant  retentir  les 
airs  de  leurs  vœux  pour  la  république.  (On  ap- 
plaudit. ) 
La  mention  honorable  est  décrétée. 

Les  mêmes  citoyens  se  plaignent  de  ce  que  le  i^ 
dacteur  d'un  journal  du  soir,  en  rendant  compte 
d'une  pétition  qu'ils  ont  présentée  pour  être  com- 
pris dans  le  nombre  des  personnes  propres  à  rem- 
plir des  places;  a  dit  que  la  misère  et  la  mutilation 
de  leurs  membres  les  ont  forcés  de  solliciter  des  se- 
cours de  la  patrie.  -  La  misère  I  s'écrient-ils  ;  des 
Spartiates,  disons  mieux ,  des  républicains  français 
ne  la  connaissent  pas,  parce  qu'ils  savent  borner 
leurs  besoins  à  ceux  de  la  nature,  et  ne  la  doivent 
pas  connaître,  parce  ^ue  la  reconnaissance  publique 
vient  abondamment  à  leur  secours,  quand  ils  ont  so 
la  mériter  en  se  sacrifiant  pour  la  mère  commune.  • 
(On  applaudit.) 

Les  pétitionnaires  demandent  que  la  Covention' 
ordonne  l'impression  de  leur  pétition  et  de  la  ré- 
ponse du  président. 

Naurb:  J'appuiecette  demande;  mais,  quant  an 
journaliste  dénoncé,  je  crois  qu'en  recueillant  sou-, 
vent  au  milieu  du  bruit  les  paroles  d'une  assemblée 
il  est  possible  de  se  tromper  sans  mauvaise  iuteo-. 
tion. 

L'insertion  au  Bulletin  est  décrétée. 

MERLiif  (de  Douai),  au  nom  des  comités  de  salut 
public,  de  sûreté  générale  et  de  législation  :  Invaria- 
blement déterminés  à  faire  triompher  la  république, 
vous  avez  rendu,  le  18  de  ce  mois,  un  décret  qui  a 
porté  la  terreur  dans  l'âme  de  tous  les  ennemis,  en 
annonçant  à  l'univers  votre  inflexible  résolution  dç 
ne  jamais  recevoir  dans  son  sein  ni  les  traîtres  qui 
ont  été  chez  l'étranger  s'armer  contre  elle,  ni  les 
lâches  qui  ont  fui  la  terre  de  la  liberté  pour  se  sous-, 
traire  aux  orages  dont  son  berceau  est  toujours  en- 
vironné. 

Mais,  en  rendant  ce  décret,  vous  n'avez  pas  en- 
tendu que  nos  ennemis  eux-mêmes  pussent  l'em- 
ployer contre  la  prospérité  nationale,  ni  qu'ils  s'en 
lissent  un  moyen  pour  retenir  dans  leurs  ateliers  oq 
à  leurs  charrues  des  bras  que  redemandent  nos  pro- 

Sres  charrues  et  nos  propres  ateliers.  Et  la  preuve 
e  votre  intention  à  cet  égard  résulte  bien  manifes- 
tement du  parti  que  vous  avez  pris  hier,  en  mainte- 
nant votre  décret ,  de  renvoyer  à  vos  comités  de 
salut  public ,  de  sûreté  générale  et  de  législation, 
l'examen  de  l'exception  qui  vous  avait  été  proposée 
en  faveur  des  ouvriers  et  des  laboureurs. 

C'est  à  cet  examen  que  vos  comités  ont  consacré 
toute  la  nuit  dernière. 

Ils  ont  pensé  que  votre  vœu  s'était  suffisamment 
prononce  hier  sur  le  principe  dé  l'exception  dont  11 
s'açit,  pour  qu'ils  fussent  aispensés  d'en  démontrer 
la  justice,  d'en  développer  les  avantages,  et  de  dé- 
truire les  objections  que  peuvent  y  opposer,  à  la' 
première  vue,  je  ne  dirai  pas  les  sectaires  du  terro- 
risme, car  des  hommes  aussi  profondément  héls , 
aussi  universellement  méprisés  de  la  nation  entière, 
ne  méritent  pas  qu'on  s'occupe  d'eux,  maisquelques 
patriotes  de  bonne  foi ,  qui ,  toujours  prompts  i 
s'alarmer,  voient  partout  le  royalisme  levant  la  tête, 
comme  s'il  pouvait  exister  une  royauté  sans  roi; 
comme  s'il  était  possible  qu'il  s'offrît  jamais  ua 
homme  assez  téméraire  ponr  affronter,  et  assez  heu- 


t84 


HMiz  pour  esquirer  WdcI-oim]  millions  de  poi- 
gnards républicains  que  le  ^énie  de  la  liberté  tient 
pcrpétuellemeat  levés  sur  quiconaue  oserait  ceindre 
le  (liadèrae;  comme  si  runanimite  de  la  Convention 
nationale  pour  le  maintien  de  la  liberté  n'était  pas 
un  sûr  garant  de  runanimite  du  peuple  français 
contre  le  réublissement  de  la  tyranniel 

Vos  comités  ont  d'ailleurs  trouvé  dans  deux  de 
vos  décrets  précédents  une  règle  de  conduite  que 
vous  vous  étiez  en  quelque  sorte  tracée  à  vous- 
mêmes  pour  le  cas  qui  se  présente. 

Le  9S  frimaire,  vous  avez  rappelé  en  France  nna 
foule  de  mariniers,  de  matelots  et  de  novices,  oui , 
par  l'applieation  rigoureuse  de  la  loi  sur  les  emi* 
grés,  se  seraient  trouvés  à  Jamais  privés  de  la  satis- 
faction et  de  l'avantage  de  servir  leur  patrie.  Ce  que 
vous  avez  fait  à  cette  époque  pour  Taccroissement 
des  forces  de  la  marine  nationale,  pourquoi  ne  le 
feriez-vous  pas  aujourd'hui  pour  la  restauratiom  de 
DOS  fabriques  et  de  notre  agriculture? 

Quelques  Jours  auparavant,  vous  aviez,  par  un 
grand  actede  goavemement  et  d'bumanité,prononoé 
une  amnistie  en  faveur  des  malheureux  qui,  dans  la 
Vendée  et  dans  les  départements  environnants , 
avaient*  toi  armes  à  la  main,  déchiré  le  sein  de  leur 
patrie  en  combattant  contre  la  liberté;  et  vous  aviez 
même  repoussé  la  proposition  qui  vous  avait  été  faite 
de  ne  pas  étendre  jusqu'à  leurs  chefs  l'indulgence  que 
vous  leur  offriez.  Ce  que  vous  avez  foit  pour  des  re- 
belles, pourriez-vous  ne  pas  le  taire  pour  des  hom- 
mes paisibles,  et  souffririez-vous  qu'on  pût  un  jour 
vous  reprocher  de  n'avoir  moins  ménage  cenx-ci  que 
parce  qu'ils  étaient  plus  faibles  ? 

Encore  une  fois,  vos  comités  ont  pensé  que  rien 
ne  devait  ni  ne  pouvait  s'opposer  à  ce  que  vous  dé- 
crétassiez l'exception  réclamée  en  laveur  des  ou- 
vriers et  des  laboureurs. 

Mais  de  quelle  manière  devez-vous  la  décréter, 
et  quelle  latitude  devez-vous  lui  donner?  C'est  sur 

2uoi  vos  comités  ont  principalement  arrêté  leur  at- 
mtion. 

U  leur  a  paru  qu'à  la  séance  d'hier  votre  vœu 
s'était  renfermé  dans  la  classe  véritablement  et  ma- 
tériellement ouvrière  ou  agricole,  et  ils  n'ont  pas 
cru  que  les  principes  qui  doivent  constamment  di- 
riger la  politique  nationale  vous  permissent  d'aller 
plus  loin.  Un  pas  de  plus  dans  une  carrière  aussi 
êlissante  vous  entraînerait  infoilliblement  au  delà 
aes  bornes  que  vous  tenteriez  en  vain  de  vous  pres- 
crire à  vous-mêmes,  et  bientôt,  sur  ces  bornes  ren- 
versées ou  méprisées,  vous  verriez  rouler  les  chars 
triomphants  qui  ramèneraient  au  sein  de  la  France 
$t»  plus  cruels  et  ses  plus  acharnés  ennemis. 

Fixés  sur  la  qualité  des  individus  que  doit  com- 
prendre l'exception  qui  vous  est  proposée,  vos  comi- 
tés se  sont  occupés  des  moyens  propres  à  empêcher 
que  cette  qualité  ne  soit  usurpée  par  des  hommes 
qui  autrefois  cachaient  leur  nullité  sous  des  titres 
orgueilleux,  et  qui  maintenant  voudraient  cacher 
leurs  crimes  et  leur  honte  sous  des  noms  justement 
obers  à  la  société. 

Vos  comités  n'ont  pas  oublié  que  le  dernier  roi 
desFrancais  faisait  des  serrures,  etVon  pourrait  citer 
de  passaoles  tailleurs  et  d'assez  bons  cordonniers 
parmi  les  émigrés  de  la  caste  nobiliaire. 

Nous  avons  d'ailleurs  cru  devoir  circonscrire  la 
déGnition  du  mot  ouvrier  de  manière  à  la  restrein- 
dre aux  hommes  vraiment  utiles,  et  à  ne  laisser  à  cet 
égard  aucun  espoir  à  ceux  qui,  parcourant  le  monde 
sous  les  dénominations  de  perruquiers,  de  cuisi- 
niers, de  valets  de  chambre,  de  laquais,  etc.,  ne 
connaissent  point  de  patrie,  portent  partout  leur 
Humorale  oisiveté»  el  sont  partout  dangereux  par 


les  relations  qu'ils  conservent  avec  les  pays  où  ils 
ne  sont  plus. 

Du  reste,  Je  n'ai  pos  besoin  de  tous  dire  qu'en 
rappelant  dans  le  giron  de  la  république  les  ci- 
toyens sur  lesquels  s'est  portée  hier  votre  sollici- 
tude, vos  comités  ont  été  d'avis  qu'il  ne  doit  être 
donné  aucune  atteinte  aux  ventes  que  la  nation  a 
pu  faire  de  leurs  propriétés  pendant  leur  absence. 
Vous  êtes  trop  pénétrésde  l'oMigationde  respecter  les 
aliénations  faites  au  nom  du  peuple,  pour  que  vous 
puissiez  douter  un  seul  instant  que  vos  comités  ne 
prennent  constamment  cette  obligation  éternelle  et 
irréfragable  pour  la  base  de  toutes  leurs  délibéra- 
tions et  de  tous  leurs  plans. 

Voici  les  articles  que  vos  comités  m'ont  chargé 
de  vous  présenter,  et  dont  les  trois  premiers  sont 
déjà  décrétés. 

Le  rapporteur  présente  ces  articles,  dont  voici 
les  principales  dispositions: 

t  Art.  !•'.  Le  décret  du  88 fHmalfe,  qui  envoie  lenpté* 
•eauurt  Bar  dans  les  départemenu  du  Baat  et  Bae-EUa,  est 

•U.  Il  etleBjoinK««iageDtsMtlooaiix,aoai  les  peines por* 
fées  oooure  les  foncUonnaires  coopableê,  de  poursuivre  let 
émigrés,  préu^  déportés,  qui  seraient  rentres  dans  le  ter* 
ritoire  de  la  république. 

«  ÎIT.  n  est  accordé  à  ceux  qnl  teraient  renurét  par  nn 
efVet  4Dtfcipé  do  dernier  décret  un  dâal  de  denz  décades, 
et  un  jour  par  cinq  lieues,  pour  se  retirer. 

•  IV.  Ne  seront  pas  réputés  émigrés  les  ouvrlem  travaU- 
lant  de  leurs  mains  aux  fabriques,  aux  maBufiictnres  et  à  la 
terre,  leurs  femmes  et  leurs  enfanu  au-dessous  de  dix-fauit  ans, 
pourm  quib  ne  soient  sortis. qu'après  le  i**  mai  1703,  qu*Us 
renuent  avant  le  !•' germinal  procfaidn,eD  Jnstiiani,  par 
on  certiftcat  de  leurs  communes, de  la  profession  qihis 
exerçaient  avant  de  sortir  de  France  al  à  répoqoe  de  leur 
sortie.  ^^ 

«  V.  Les  propriétés  des  faidlvidos  compris  dans  l'article 
précédent  leur  seront  rendues  si  eUes  n'ont  point  été  ven- 
dues. Dans  le  ca»où  elles  l'auraient  été.  Us  ne  pourront 
troubler  les  acquéreurs,  mais  Us  recevront  des  indemnités. 

c  VI.  Les  agents  nationaux  seront  tenus  d'envoyer,  chaque 
décade,  au  comité  de  sûreté  générale,  la  liste  imprimée  de 
ceux  qui  seront  rentrés,  laqueUa  sera dboribaée aux  mea»- 
brea  de  la  Convention.  ■ 

Ces  différents  articles  sont  successivement  adop- 
tés, à  l'exception  du  IV*  auquel  plusieurs  membres 
proposent-des  amemdements. 

La  Convention  le  renvoie  aux  comités,  pour  en 
présenter  une  nouvelle  rédaction. 

(Nous  donnerons  textuellement  ce  déeret  lorsque 

la  rédaction  définitive  aura  été  adoptée.) 

(La  mite  demain.) 

JV.  B.  •—  Dans  le  séance  du  22,  la  Convention  a 
décrété  que  le  23,  tonte  affaire  cessante,  elle  s'occu- 
pera de  la  discussion  sur  les  fêtes  décadaires.  Elle  a 
ensuite  définitivement  adopté  la  rédaction  du  décret 
relatif  aux  émigrés. 


ouatuiib. 

Portrait  de  Fénelon ,  gravé  d*après  le  tableau  original  de 
Tîvien ,  ovale  de  ni  pouces  et  oeni  de  hauteur ,  qui  fera 
pendant  à  celui  de  J.-J.  Rousseau,  présentement  h  l'impres- 
stoo.  Prii  :  4  liv.  Cliez  Quenedey,  rue  Groii-des-Petiis- 
Champs,  n«>  lOetSI;  et,  aumois  depTuvIoieprochaiD,  dans 
ion  nouveau  logement,  cour  des  FontaioeSi  [palais  Egalité.   . 

Payemenii  à  la  iréêortrie  naiianaU. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  tii  premiers 
mou  ;  il  sera  (ait  à  tous  ceux  qui  aeroot  porteurs  d'ioirrip- 
tiens  au  grand  livre.  Celui  pour  learenl^  viagères  est  de 
luiit  Bieia  vingt  et  un  ienra  da  raanée  17^3  (viani  ik|f  ^' • 


POLITIQUE. 

TURQUIE. 

ConstOMlinopiêt  le  20  novembre.'-  Le  Diran  Tient  de 
charger  uo  paciia  à  deux  queues  du  commaodemeDt  et  de  la 
dircctioD  des  forteresses  uouvcllement  bâties  à  l'emlMii- 
cfattre  de  ia  mer  Noire.  Ces  forteresses  sont  pourvues  d'hom- 
mes et  d'artillerie. 

Le  nouveau  commandant  fait  ol)server  une  discipline  se- 
Tère. 

—  Le  gouvernement  a  donné,  A  titre  de  gratification,  plus 
de  30,000  piastres  à  l'ingénieur  français  qui  a  dirigé  la  con- 
struction d'un  vaisseau  de  70  canons,  dernièrement  lancé  à 
la  mer.  Une  récompense  encore  plus  considérable  lui  a  été 
promise  quand  il  aura  avancé  la  construction  d'un  vaisseau 
de  90  à  100  canons,  qui  est  déjà  sur  le  chantier. 

—  Le  ministère  ottoman  a  aussi  conçu  i'idée  vraiment 
mile  de  se  créer  une  marine  marchande. 

On  a  engagé  les  principaux  membres  de  l'Etat  et  du  mi- 
nistère à  armer  des  bâtiments  à  leur  compte ,  pour  faire  le 
commerce  de  la  mer  Blanche  et  de  la  mer  Noire.  Ces  bâti- 
ments serviront  aussi  au  transport  des  denrées  pour  la  ca- 
pitale. 

Beaucoup  de  bâtiments  francs  ont  été  achetés ,  et  l'on  en 
ooofftruit  un  grand  nombre  d'autres. 

—  Le  système  actuel  de  la  Porte  parait  être  de  sortir  d'une 
trop  longue  léthargie ,  et  de  se  faire  respecter  de  ses  enne- 
mis et  de  ses  voisins.  Le  nouveau  visir,  Izel-Méhémet,  est  re- 
mrûé  cooime  extrêmement  propre  à  confirmer  sa  cour  dans 
det  résoluttODs  si  salutaires. 

ALLEMAGNE. 

'  Flcime,  If  15  décembre-  —  Ceux  qui  se  plaisent  à  péné- 
trer dans  la  politique  astucieuse  des  cours  prétendent  que 
le  cabinet  dePétersbourg  exerce  aujourd'hui  une  gra)ide  in- 
fluence sur  celle  de  Vienne  et  sur  un  grand  nombre  de  cours 
mêlées  à  la  coalition.  On  en  juge  par  la  rapidité  avec  laquelle 
té  succèdent  les  courriers  de  Pétersbourg,  et  par  les  mouve- 
mrats  diplomatiques  qui  en  sont  la  suite. 

—  Quelques-uns  des  gazetiers  connus  pour  être  à  la  solde 
du  ministère  ont  recommencé  â  répandre  les  bruits  si  ridi- 
culement vieillis  de  la  marche  d'une  armée  russe  sur  les 
bords  du  Rhin. 

—  Les  troupes  impériales  resteront  â  Chelm  et  &  Lublin 
jusqu'au  rétablissement  de  la  tranquillité  en  Pologne,  et 
on  présume  qu'elles  se  retireront  à  celte  époque. 

On  assure  que  l'intention  des  conquérants  de  la  Pologne 
n'est  pas  de  le  traiter  en  pays  dompté,  â  cause  du  trop  grand 
nombre  de  troupes  qu'il  y  t^udrait  employer,  mais  de  lui 
donner,  par  toutes  sortes  de  voies,  une  espèce  de  gouverne- 
ment provisoire ,  aussi  conforme  qu'il  sera  possible  à  leurs 
pensées  amliitieuses. 

—  Le*  despotisme  ministériel  vient  d'ordonner  de  nom- 
breuses arrestations  en  Bohême. 

—  Quelques  familles  belges  se  sont  nouvellement  établies 
à  Pétersbourg.* 

Extrait  (tune  lettre  de  Cologne,  du  10  nipoie.— Voici  ce 
que  m'a  dit  un  homme  qui  vient  de  parcourir  les  armées 
'     ennemies  d'un  bout  à  l'autre. 

c  Les  puissances  belligérantes  sont  aux  abois.  Les  troupes 
anglaises  sont  en  exécration  partout  où  elles  ont  passé; 
ell^  sont,  quant  au  physique,  dans  le  plus  mauvais  état  pos- 
'  sible,  déguenillées ,  manquant  de  tout.  Les  Autrichiens,  les 
Hollandais  sont  dans  la  même  misère;  mais  les  Prussiens 
se  trouvent  cette  fois- ci  bien  à  leur  aise:  on  les  a  habillés  à 
neuf  tout  nouvellement,  ils  sont  bien  pourvus  de  provisions 
de  toute  espèce,  et  ne  font  rien  ;  ils  chôment.  Aussi  la  coa- 
lition se  plaint-elle  beaucoup  du  roi  de  Prusse  ;  on  l'accuse 
d*êlre  un  joueur  de  mauvaise  foi. 

«  En  générai,  il  règne  la  plus  grande  mésiofeUincnce 

3»  Série»  —  Tome  X. 


GAZETTE  NATIONALE ..  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N^  114.         Quartidi  24  NivosB,  l'an  S".  (Mardi  13  Janvier  1795,  vieux  style.) 

parmi  les  coalisés;  les  puissances  ne  sont  d'accord  sur  rien. 
Le  ininistre  anglais  sent  le  besoin  de  la  paix,  et  les  princes 
d'Allemagne  craignent  tellement  l'envaliissement  de  leur 
pays  qu'ils  souscriraient  à  toutes  les  conditions,  si  la  France 
les  menaçait  de  décréter  qu'on  fera  des  assignats  sur  leurs 
domaines,  en  cas  qu'ils  n'acceptassent  pas  ce  que  la  France 
leur  prQposeralt  d'équitable  pour  faire  la  paix. 

•  Les  Hollandais  exportent  toutes  leurs  matières  d*or  et 
d'argent;  il  est  â  crniudre  que,  si  les  Français  tardent  à  s'em- 
parer de  la  Hollande,  ils  ne  trouvent  plus  rien. 

«  Dans  U)utes  les  armées  ennemies  les  soldats  sont  mécon- 
tents de  leurs  chefs  qu'ils  accusent  tout  haut  d'ignorance 
et  de  lâcheté.  Les  chefs ,  à  leur  tour,  se  méfient  nécessaire- 
ment du  soldat.  Où  remarque  en  général  que  les  armées  al- 
lemandes n'ont  jamais  été  plus  mal  conduites  qu*â  présent  ; 
Il  n*y  a  pas  un  seul  homme  de  génie  parmi  eux;  tous  sont 
pédanu  en  tactique;  Ils  suivent  les  règles  de  Frédéric  avec 
le  même  esprit  que  des  maîtres  d'école  traduisent  Tacite.  • 

PRUSSE. 

TAom,  le  10  décembre.  —  Un  parti  d*hisurgés  a  enlevé 
les  fourrages  à  une  lieue  de  Tzemesno  ;  un  autre  s*est  emparé 
de  la  caisse  et  des  magasins  prussiens  à  Sterzelno,  et ,  fort 
de  ces  nouvelles  ressources»  s'agite  et  s*étend  dans  le  di»» 
trict  de  Nctz. 

—  Les  contrées  polonaises  nouvellement  envahies  par  les 
Russes  sont  tellement  ruinées  que  ceux-ci  désespèrent  d'y 
trouver  les  moindres  ressources  en  subsistances  ou  en  con- 
tributions ;  ils  regardent  ces  conquêtes  conmie  devant  leur 
être  très-onéreuses. 

—  On  assure  que  le  plan  du  cabinet  de  Berlin  est  de  r^ 
cuier  encore  ses  limites  du  côté  de  la  Pologne.  Les  frontières 
prussiennes,  suivant  ce  projet,  commenceraient  à  Wissogrod» 
le  long  de  la  Visiule,  jusqu'à  Zakroczim  ,  à  l'endroit  où  la 
ffarew,  réunie  au  Bug,  rejette  dans  la  Vistule;  de  là,  et  en 
remontant  la  Narew  jusqu'à  Augustes,  elles  s'étendraient 
jusqu'aux  confins  du  palatinat  de  Trocken  Lithuanie,  di 
commencent  les  frontières  de  la  Prusse  occidentale. 

Le  quartier  général  de  l'armée  prasslenne  aux  ordres  du 
général  Favrat  a  été  transporté  à  ^kierniwitzo.  Un  nsseï 
gros  détachement  s'est  avancé  le  long  de  la  Vistule  pour  oc- 
cuper le  palatinat  de  Sandomir;  un  antre  corps  hivernera 
dans  l'espace  qui  se  trouve  depuis  Drewnz  jusqu'à  Soldau. 

—  Hinjewski,  l'un  des  chefs  des  Insurgés,  a  passé  la  fron- 
tière avec  un  certain  nombre  de  ses  partisans. 

Les  corps  d'insurgés,  quand  ils  se  voient  privés  de  res- 
sources, enfouissent  leurs  armes  et  leurs  munitions  de 
guerre. 

HOLLANDE. 

la  Haye  9  le  26  décembre.  —  Le  prince  stathouder  s*est 
rendu  à  l'assemblée  des  états  généraux,  et  y  a  déclaré  :  «  Que 
le  prince  de  Hesse-Gassel ,  ci-devant  gouverneur  de  Maês- 
tricht,  lui  avait  annoncé  les  dispositions  pacifiques  de  la  ré- 
publique française  envers  la  république  hollandaise,  à  l'ex- 
ceplion  néanmoins  de  lui,  stathouder;  qu'il  avait  cra  de  son 
devoir,  sans  foire  attention  à  une  distinction  si  défavorable 
pour  lui,  de  ne  pas  négliger  les  moyens  de  procurer  la  paix 
à  sa  patrie;  qu'à  cet  effet  il  avait  chargé  MM.  Brautsen(de 
Gueidre)  et  Bepeller  (de  Dordrecht)  de  se  rendre  auprès  de 
la  Convention  nationale  de  France;  qu'il  proposait  aux  états 
généraux  de  concourir  â  cette  mesure,  s 

Les  états  généraux  ont  témoigné  leur  satisfaction  au  sta- 
thouder. Le  grand  pensionnaire  Vander-Spiegel  a  été  chargé 
de  dresser  les  instroctions  des  deux  envoyés.  Us  sont  partis 
depuis  le  18  décembre.  (  On  sait  que  ces  deux  envoyés  hol- 
landais sont  arrivés  depuis  quelques  jours  à  Paris.) 

PAYS-BAS. 

Bruxelles^  le  15  nicose.  —  Il  vient  de  se  tenir  en  Hollande 
un  grand  conseil  de  guerre ,  où  se  sont  trouvés,  avec  le  sta- 
thouder, les  principaux  chefs  des  armées  anglaise,  hollan- 
daise et  autrichienne.  Les  généraux,  après  cette  conférence 
extraordinaire,  sont  retournés  à  leur  poste. 

U 


186 


Le  bat  de  la  délibération  était  de  ooneerter  un  plan  b^ 
néral  de  défense  pour  s'opposer  aA  différents  plans  d'at- 
taque que  l'on  suppose  avoir  été  conçus  par  les  républl- 
cajns. 

—  La  garnison  de  Bréda  a  fait,  an  nombre  de  qnalone 
cents  hommes,  une  sortie  qui  a  été  sans  succès. 

—  Les  représentants  du  peuple  Tiennent  de  mettre  en  sé- 
questre, au  profit  de  la  nation  française,  les  biens  de  tontes 
les  maisons  religieuses  dont  les  chefs  sont  absents. 

—  U  division  du  général  Taponier,  qui  éuit  à  CoblenU, 
i*est  rendue  devant  Luxembourg,  pour  renforcer  Tarmée  de 
siège.  Tout  se  dispose  pour  le  bombardement.  U  arrive  tous 
les  jours  en  grande  quantité  des  grils ,  des  bombes ,  des  ca- 
nons du  plus  gros  calibre. 


CONVENTION   NATIONALE. 

Comité  de  talut  public. 

11  a  été  fait  dans  plusieurs  communes  rexpërience 
d*une  panification  composée  de  deux  tiers  de  farine 
de  froment  et  un  tiers  de  pommes  de  terre  ;  ou  |)ien 
d*uD  tiers  de  farine  de  froment,  un  tiers  de  farino 
de  seigle  et  un  tiers  de  pommes  de  terre  ;  ces  expé- 
riences ont  parfaitement  réussi  ;  il  en  est  résulté  un 
Itain  très-blanc,  fort  nourrissant,  et  qui  se  tient 
ongtemps  frais. 

Le  procédé  est  simple  et  facile  ;  on  fait  cuire  dans 
l*eau  commune  la  pomme  de  terre,  jusqu'à  ce 

?u'elle  cède  facilement  sous  le  doigt  ;  on  la  pèle,  on 
écrase,  et  on  en  forme  une  pâte  peu  liquide  eu  y 
mettant  une  petite  quantité  d  eau. 

Cette  préparation  terminée ,  on  pëtrit  séparément 
la  farine  de  froment  ou  celle  de  seigle  ;  on  joint  la 
pâte  de  pomme  de  terre  ;  on  pétrit  de  nouveau ,  et, 
lorsque  le  mélange  est  bien  opéré,  on  forme  le  pain 
à  Fordinaire  ;  en  y  ajoutant  un  peu  de  sel ,  le  pain 
prend  un  goût  plus  agréable. 

Par  cette  manipulation  on  diminuera  d'un  tiers  la 
consommation  des  grains,  et  on  aura  une  nourriture 
plus  économique. 

On  a  lait  cfu  pain  composé  de  moitié  de  farine 
d*orge  et  moitié  de  pommes  de  terre  ;  ce  pain  est 
moins  agréable  au  goût  et  un  peu  rafraîchissant. 

La  culture  de  la  pomme  de  terre  ne  saurait  être 
trop  encouragée  ;  elle  réussit  dans  tons  les  terrains, 
même  dans  les  terres  légères  et  sablonneuses  :  bien 
cultivée ,  elle  peut  donner  deux  récoltes  vers  les 
mois  de  floréral  et  brumaire  (juin  et  octobre,  vieux 
style.) 

Àrrélé  du  eonUlé  de  sûreté  générale  de  la  Conven- 
tion nationale. 

Du  10  nivoie,  Tan  8*. 
Le  comité  arrête  aue  les  représentants,  membres 
du  comité,  composant  la  section  de  police,  se  con- 
certeront avec  les  représentants  composant  le  co- 
mité des  inspecteurs  du  Palais-National ,  pour  faire 
surveiller  les  malveillants  qui  se  glissent  dans  les 
tribunes  de  la  Convention,  et  faire  arrêter  tous  ceux 
qui  tiendraient  des  propos  tendant  au  rétablisse- 
ment de  la  royauté  et  du  terrorisme. 

Signé  les  membres  du  comité. 


Extrait  du  registre  des  délibérations  du  comité 
d  instruction  publique. 

Le  18  nîTose,  Tan  5*  de  la  république  française,  nna 

et  indivisible. 

Les  artistes  du  ci-deTâDt  Théâtre-Français  expo- 


sent aa  comité  que  les  traTanx  multipliés  des  comi- 
tés chargés  de  présenter  à  la  Convention  un  rapport 
sur  Forganisation  de  ce  théâtre  ne  leur  ont  pas  per- 
mis encore  de  faire  ce  rapport,  et  qu'il  est  possible 
que,  malgré  les  dispositions  favorables  des  comités, 
on  ne  puisse  le  faire  encore  de  plusieurs  décades. 
En  cet  état ,  ils  prennent  la  liberté  de  représenter 
au  comité  que  le  plus  grand  nombre  d'entre  eux, 
n*ayant  pour  subsister  que  leurs  talents,  ayant  été 
mis  hors  d*état  de  les  ex(Tcer  pendant  près  d'une 
année ,  et  ayant  contracté  des  dettes,  éprouvent  la 
plus  grande  gêne. 

De  cet  état  de  détresse  il  résulterait  que  plu- 
sieurs, ne  pouvant  résister  plus  longtemps,  cner^ 
cheraient  à  se  placer  et  prendraient  des  engage- 
ments séparés,  ce  qui  décomposerait  leur  association 
et  détruirait  la  réunion  qui  est  nécessaire  à  l'art,  et 
que  les  comités  paraissent  vouloir  conserver.  Uo 
moyen  s'offre  en  ce  moment  qui  obvie  à  ces  incon* 
vénients. 

Les  directeurs  d'un  théâtre  leur  proposent  de  les 
employer  tous  jusqu'à  ce  qu'il  ait  été  statué  sur 
eux. 

Les  artistes  ne  prendront  que  des  engagements 
conditionnels ,  subordonnés  entièrement  au  travail 
des  comités.  Par  là  ils  auraient  les  secours  nécessai- 
res, la  réunion  serait  conservée ,  et  les  vues  des  co- 
mités ne  seraient  point  contrariées.  Ils  ont  cru  ne 
devoir  rien  conclure  sans  l'avoir  exposé  au  comité 
d'instruction  publique. 

Le  comité  arrête  la  mention  de  cette  déclaration 
au  procès-verbal. 

Pour  extrait  conforme ,  le  19  nivôse,  an  S  de  la 
république  française,  une  et  indivisible. 

Chevalier,  secrétaire  au  comité 
d'instruction  publique. 


Motion  d'ordre  sur  le  décret  qui  suspend  les  fran^ 
chises  des  ports  de  Marseille^  de  Dunkerque  et  de 
Bayonne,  prononcée  dans  la  séance  du  18  nivôse^ 
par  Poullier. 

La  Convention  nationale  a  rendu,  le  11  nivôse, 
un  décret  qui  supprime  les  franchises  de  Dunker- 
que, Marseille  etBayonne,  et  qui  ordonne  que,  trois 
jours  après  sa  publication,  les  bureaux  existants  sur 
les  limites  intérieures  seront  fermés,  cl  qu*il  en  sera 
établi  sur  les  limites  extérieures. 

Il  y  a  quelques  mois  que  ce  même  projet  de  sup- 
pression de^  franchises  vous  lut  présenté,  et  alors, 
sur  la  motion  d'un  membre,  vous  ordonnâtes  que 
vos  comités  vous  rendraient  compte  des  motifs  qui 
avaient  pu  déterminer  le  ministre  Colbert  à  établir 
les  francnises  de  Dunkerque  et  de  Marseille  «  d'exa- 
miner si  ces  motifs  sont  encore  admissibles,  et  de 
vous  dire  si  aucune  considération  politique  ne  ren- 
dait, du  moins  pour  le  moment,  la  conservation  de 
ces  franchises  utile  et  nécessaire;  et* comme  vous 
jugeâtes  qu'il  pouvait  ne  pas  s*agir  ici  uniquement 
d'une  question  commerciale,  mais  d'une  ({uestion 
encore  a  la  fois  politique  et  diplomatique,  vous  or- 
donnâtes que  votre  comité  de  salut  public  serait 
consulté. 

Cette  mesure  était  infiniment  sage,  8*il  est  vrai, 
comme  l'histoire  nous  l'apprend,  qu'Anne  d'Angle- 
terre, voulant,  en  1713,  faire  agréer  à  son  pariement 
un  traité  de  paix  qu'elle  venait  de  conclure,  lui  di- 
sait :  «  Je  ne  me  suis  pas  fait  céder  les  provinces 

•  françaises;  mais  vous  allez  enfin  être  délivrés  de 
«  toute  crainte  pour  l'avenir,  par  rapport  à  Diinker- 

•  que  ;  •  s*il  est  vrai  eDCorc  que,  dans  un  acte  du  par- 


187 


lement  d'Angleterre  dé  1730,  il  est  dit  que  rheo- 

reuse  situation  du  port  de  Dunkcrque,  «  et  les 
«  avantages  qui  lui  étaient  accordés,  avaient  détruit 
•  une  grande  partie  du  commerce  d'Angleterre ,  au 
m  point  qu'avec  juste  raison  Dunkerque  pouvait  être 
m  nommé  la  terreur  de  la  nation  anglaise.  •  Si  ces 
aveux  de  nos  ennemis  sur  Fimportance  de  Dunker- 
que, dans  son  état  de  franchise,  ne  peuvent  être  ré- 
voqués en  doute,  on  ne  saurait  être  trop  scrupuleux 
lorsqu'il  s'agit  de  supprimer  cette  franchise  ;  et,  je 
le  répète,  le  renvoi  que  vous  ordonnâtes  pour  avoir 
des  éclaircissements  était  infiniment  sage. 

11  ne  paraît  cependant  pas  que  le  rapporteur  de 
•  cette  affaire  vous  ait  donné  ces  éclaircissements.  Il 
paraît  encore  que  le  moment  de  l'ouverture  de  la 
séance  n'est  pus  celui  qui  aurait  dû  être  choisi  pour 
la  discussion  d'un  objet  si  important,  et  qui  méritait 
bien  d*étre  placé  à  un  grand  ordre  du  jour. 

Je  ne  préjuge  rien  sur  la  suppression  ou  la  con- 
servation des  rranchises  des  ports  français  ;  mais  j'in- 
siste pour  que  celte  question  soit  mûrement  exami- 
née dans  les  comités ,  et  discutée  à  la  Convention 
nationale.  J'insiste  pour  que  le  comité  de  salut  public 
actuel,  dépositaire  de  nos  relations  diplomatiques  et 
politiques,  soit  consulté;  et  si  Ton  me  disait  que 
cela  a  été  fait  avant  le  9  thermidor,  sous  le  règne  du 
triumvirat,  j'insisterais  encore,  parce  que  leur  sys- 
tème n'était  une  d'abattre,  de  détruire  et  de  mécon- 
tenter aa  dedans,  de  compromettre  les  intérêts  de 
la  nation  au  dehors,  et  de  la  rendre  odieuse  à  tous 
les  peuples  de  l'Europe.  Ce  système  d'alors  est  mal- 
heureusement trop  Dien  constaté  pour  que  la  dé- 
fiance sur  un  objet  aussi  important  ne  soit  pas  un 
devoir. 

Sans  vouloir  discuter  dans  ce  moment  l'étendue 
des  franchises,  je  ne  peux  cependant  pas  m'abstenir 
de  vous  prouver  que  le  décret  du  11  de  ce  mois,  qui 
les  supprime,  est  impolitique,  inexécutable  et  con- 
tradictoire. 

11  est  impolitiaue  en  ce  qu'il  détruit  brusquement 
un  pacte  tacite  fait  avec  nos  alliés  et  avec  les  neu- 
tres. Nous  avons  dit  à  ces  nations  :  «  Les  ports  de 
Dunkerque,  de  Marseille  et  Bayonne,  sont  des  ports 
francs.  Venez  y  trafiquer,  vendre  ou  échanger  vos 
marchandises;  faites-y  des  dépôts;  établissez-y  vos 
magasins  ;  dans  tous  les  temps  vous  en  aurez  la  li- 
bre disposition  ;  vous  les  introduirez  et  les  exporte- 
rez librement,  sans  droits  et  sans  gêne.  Dans  aucun 
temps  vous  ne  serez  exposés  aux  tracasseries  doua- 
nières. •  Et  maintenant ,  sans  les  avoir  prévenus, 
vous  dites  à  ces  alliés  et  nations  neutres  :  «  Nous 
mettons  à  notre  promesse  le  terme  de  trois  jours;  ce 
temps  expiré,  vous  serez  soumis  aux  droits  d'entrée 
et  de  sortie  établis  pour  toute  la  république  ;  vous 
serez,  comme  partout  ailleurs,  soumis  au  régime 
des  douanes.  Les  marchandises  que  vous  avez  clépo- 
sées  chez  nous  sur  la  foi  de  la  franchise  ne  sortiront 
plus  si  elles  sont  de  la  classe  de  celles  dont  l'expor- 
L'ition  est  prohibée  dans  nos  autres  ports.  Cela  peut 
contrarier  vos  vues,  vos  intérêts,  vos  engagements  : 
n'importe  ;  nous  sommes  les  maîtres  chez  nous,  et 
nous  ne  voulons  plus  vous  laisser  jouir  de  notre 
première  promesse.  •  Nul  doute  que  la  république 
est  maîtresse  de  supprimer  les  franchises  si  elle  juge 
qu'elles  ne  doivent  plus  subsister  chez  elle;  mais 
elle  ne  peut  pas  être  injuste  envers  qui  que  ce  soit  ; 
elle  ne  peut  pas  opérer  ce  changement  sans  que  les 
nations  que  nous  invitons  à  commercer  chez  nous 
en  soient  prévenues.  Quelle  idée  se  formeront  de 
nous  celles  qui,  dans  ce  moment,  ont  leurs  navires, 
c^nrffaisons  et  marchandises  en  mer,  avec  intention 
de  tes  déposer  dans  vos  ports  francs,  et  qui,  en  arri- 
vant, apprendront  que  vous  avez  très-subitement 


annulé  votre  promesse ,  et  que  vous  avez  retiré  la 
faveur  sur  laquelle  vous  les  aviez  autorisées  k 
compter? 

Une  pareille  conduite  n'est  guère  propre  à  leur 
inspirer  de  confiance  ;  et  songez  que  cette  confiance 
est  très- nécessaire  dans  un  moment  où  vous  devez 
encourager  les  importations  par  toutes  sortes  de 
moyens,  afin  de  remplacer  les  matières  premières 
qui  nous  manquent,  dans  un  moment  où  vous  rap- 
pelez les  Fran(;ais  et  les  nations  neutres  à  ces  liai- 
sons commerciales  que  l'exécrable  loi  du  maximum 
et  le  terrorisme  avaient  anéanties.  Combien  ne  de- 
vez-vous pas  craindre  que  tous  vos  efforts  pour  vi- 
vifier nos  rapports  extérieurs  ne  soient  vains,  si  les 
neutres  et  nos  alliés  doivent  craindre  de  vous  ap- 
porter les  denrées  de  première  nécessité  dont  vous 
avez  un  besoin  indispensable?  Je  ne  tracerai  pas  le 
tableau  des  horreurs  oui  seraient  la  suite  de  leur 
abandon  ;  mais  je  vous  laisse  à  réfléchir,  et  je  répète 
qu'il  est  de  la  plus  grande  impolitique  de  les  indis- 
poser inutilement.  Et  d'ailleurs  le  décret  du  11  ni- 
vôse est  inexécutable  tel  qu'il  est  rédigé  :  rien  n'y  a 
été  prévu  ;  entre  mille  choses  sur  lesquelles  il  y  au- 
rait à  statuer,  et  dont  on  n'a  pas  parlé ,  j'en  citerai 
seulement  deux  ou  trois. 

En  transportant  les  douanes  des  limites  intérieu- 
res aux  limites  extérieures ,  vous  enclavez  dans  le 
ressort  de  vos  douanes  les  franchises,  et  les  marchan- 
dises qui  s'y  trouvent  ;  ces  marchandises,  en  grande 
partie,  appartiennent  aux  neutres,  et  notamment 
aux  Américains,  qui  les  y  ont  déposées  sur  la  foi  de 
la  franchise.  Sans  blesser  les  règles  de  la  plus  stricte 
justice ,  vous  ne  pourrez  pas  vous  dispenser  de  dire 
qu'il  sera  libre  aux  propriétaires  d'exporter  ces 
marchandises  sans  droits  et  sans  gêne,  conformé- 
ment aux  conditions  qui  existaient  lorsqu'ils  ont 
fait  leur  dépôt  ;  sans  cela  vous  donneriez  un  effet  ré- 
troactif à  la  loi.  Cependant  votre  décret  n'en  parle  pas. 

Dans  les  franchises ,  et  notamment  à  Dunkerque, 
il  se  trouve  beaucoup  de  marchandises  d'origine  an- 
glaise destinées  pour  l'étranger.  Ces  marchandises 
sont  contrebande  en  France.  Si  vous  transplantez 
vos  douanes  sur-le-champ,  alors  ces  marchandises  se 
trouvent  par  le  fait  en  France  et  y  circuleront  en  con- 
travention aux  lois  ;  si ,  pour  éviter  cette  contra- 
vention, les  dépositaires  veulent  les  faire  sortir,  les 
douanes  n'en  peuvent  accorder  les  expéditions, 
parce  que  la  sortie  en  est  défendue.  Il  y  en  a  d'au- 
tres qui  sont  soumises  à  des  droits  exorbitants  ;  et 
pourrez-vous  permettre  de  percevoir  des  droits  sur 
des  marchandises  oui  ne  se  trouveront  chez  vous 
que  parce  que  vous  leur  en  avez  accordé  l'exemptiou 
et  la  francnise? 

Si  vous  entendez  que  les  marchandises  déposées 
dans  les  franchises  peuvent  librement  sortir,  alors 
votre  décret  aurait  dû  fixer  les  formalités  à  observer 
pour  constater  l'identité  de  ces  marchandises ,  pour 
qu'on  n'y  substitue  pas  celles  qui  se  trouvent  dans 
la  république,  et  qui  peuvent  refluer  vers  les  fron- 
tières, une  fois  que  les  douanes  qui  les  séparent  ù 
présent  de  l'intérieur  seront  transportées. 

Votre  décret  ne  parle  pas ,  et  vous  n'avez  pas  pu 
entendre  que  vous  abandonniez  In  fixation  de  ces 
mesures  à  l'esprit  fiscal,  souvent  arbitraire,  mais 
toujours  chicaneur,  des  douaniers;  et,  dans  ce  cas 
même,  votre  décret  aurait  au  moins  dû  les  y  au- 
toriser. 

A  Dunkerque  il  y  a  une  quantité  de  familles  nan- 
tuquoises,  vos  alliés  de  l'Amérique  septentrionale^ 
qui  sont  venues  s'y  établir  sur  les  appâts  de  lu  fran- 
chise et  de  plusieurs  autres  encouragements  que 
vous  leur  avez  accordés;  ils  s'y  appliquent  princi- 
palement à  la  pêche  de  la  baleine  et  du  cachalot  sur 


188 


les  côtes  da  Brësil  :  leurs  succès  ont  ëtë  étonnants» 
et,  sans  le  régime  oppresseur  et  destructif  de  toute 
industrie  qui  a  aussi  pesé  sur  cette  branche  intéres- 
sante, la  nation  Trançaise  n*aurait  plus  besoin  de  3e 
Sourvoir  d'huile  de  Baleine,  de  sperme  et  de  fanons, 
ans  les  pêches  étrangères.  Il  est  plus  que  proba)>1e 
que  la  suppression  de  la  franchise,  faisant  cesser 
l'avantage  qui  a  conduit  ces  Américains  industrieux, 
et  intéressants  sous  tous  les  rapports,  dans  le  port 
de  Dunkerque,  ils  abandonneront  les  armements 
auxquels  ils  s'adonnaient  de  nouveau ,  et  retourne- 
'ront,  avec  leurs  familles,  leurs  navires  et  leur  in- 
dustrie, dans  leur  heureuse  patrie  ;  et  il  aurait,  à 
ce  que  je  crois,  fallu  prendre  des  mesures  pour  les 
dissuader  de  suivre  une  résolution  si  opposée  à  nos 
intérêts. 

Sans  m' étendre  à  cet  égard  davantage,  ce  que  j'ai 
dit  sur  l'incertitude  du  sort  où  le  décret  laisse  les 
marchandises  actuellement  dans  les  franchises  et 
appartenant  à  des  neutres  suffit  pour  démontrer  que 
ce  décret,  tel  au'il  est,  est  inexécutable  ;  mais  il  est 
encore  contradictoire  en  lui-même. 

Je  le  dis  à  regret,  je  ne  vois  pas  dans  ce  décret  ce 
caractère  d'égalité,  de  cette  véritable  égalité  devant 
la  loi,  qui  est  le  principe  du  gouvernement  républi- 
cain ;  j  y  vois  au  contraire  une  prédilection  bien  ca- 
ractérisée pour  le  commerce  du  Levant  et  le  port  de 
Marseille  ;  et  cependant  je  ne  puis  me  persuader  que 
le  commerce  du  Nord  soit  moins  intéressant  pour  la 
république,  ou  que  les  habitants  de  Dunkerque  et  de 
Bayonne  aient  moins  bien  mérité  d*elle. 

Ceux  qui  connaissent  la  franchise  de  Marseille, 
qui  ressemble  assez  à  un  régime  d'entrepôt  :  son 
commerce  qui ,  en  majeure  partie,  est  celui  du  Le- 
vant ;  son  voisinage  de  Toulon,  où  vous  avez  assu- 
jetti les  navires  à  faire  quarantaine ,  sentent  facile- 
ment que  les  articles  ill  et  IV  de  votre  décret  du  11 
nivôse  maintiennent  presque  en  entier  les  avautages 
da  port  de  Marseille. 

Je  suis  loin  de  blâmer  ces  mesures  ;  mais  je  de- 
mande :  Pourquoi  ne  les  a-t-on  pas  aussi  appliquées 
au  commerce  du  Nord,  qui  est  plus  particulière* 
ment  le  partage  du  port  de  Dunkerque  ?  Certes  on 
ne  voudra  pas  soutenir  que  les  blés,  farines,  chan- 
▼res>  lins,  fers,  toiles  à  voiles,  brai,  goudron,  mâtu- 
res y  bois  de  construction ,  et  autres  produits  du 
Nord,  sont  des  articles  qui  méritent  moins  d'encou- 
ragements que  les  cotons,  les  fils  et  les  tapisseries 
de  Smyrne  ou  les  galles  d'Alep,  etc.  On  ne  me  ré- 
pondra pas  aue  c'est  justement  parce  que  nous 
avons  besoin  aes  productions  du  Nord  qu'on  na  pas 
voulu  en  accorder  Tentrcpôt  pour  en  empêcher  la 
sortie  de  la  France  ;  ce  raisonnement  serait  contraire 
aux  principes  et  désavoué  par  l'expérience.  Le  prin- 
cipe veut  qu'il  soit  accordé  la  plus  libre  circulation 
aux  marchandises  que  vous  êtes  obligés  de  tirer  de 
l'étranger.  Accordez  l'entrepôt  aux  productions  du 
Nord  ;  l'habitant  de  la  Baltique  fera  son  dépôt  chez 
vous  pour  profiter  de  votre  marché  s'il  le  trouve 
avantageux,  ou  pour  le  faire  expédier  ailleurs  s'il  y 
trouve  son  compte  :  refusez-lui  l'entrepôt, -et  consé- 

Suemment  l'alternative  de  la  vente  ou  de  la  réoxpé- 
ition  :  il  fera  son  dépôt  ailleurs  ;  et  si  alors  vous 
avez  besoin  de  sa  marchandise ,  vous  serez  heureux 
si  vous  pouvez  l'obtenir  en  l'indemnisant  des  faux 
frais  que  vous  l'avez  obligé  de  faire  ailleurs. 

Je  crois  donc,  en  me  hfsumant,  que  la  suppres- 
sion des  franchises  tient  à  l'intérêt  national  et  aux 
relations  commerciales  et  politiques  de  la  républi- 
que ;  je  le  crois  d'autant  plus  que  je  vous  ai  cité  les 
aveux  de  nos  ennemis  dans  des  temps  non  suspects; 
je  crois  encore  aue  si ,  après  une  mûre  discussion, 
vous  jugiez  que  la  suppression  doit  avoir  lieu,  vous 


pourrez  juger  qu'anx  franchises  pourront  être  sub* 
stitués  des  entrepôts  généraux  ;  et  je  crois  simple- 
ment que  le  décret  ou  11  nivôse  est  incomplet,  et 
inexécutable  sans  prêter  à  des  actes  arbitraires  et  in- 
justes. Je  demande  donc  la  suspension  de  ce  décret 
jusqu'à  ce  que  vos  comités  de  salut  public  et  de 
commerce  réunis  vous  aient  fait  un  rapport  sur  les 
franchises,  envisagées  sous  l'aspect  de  la  politique 
et  du  commerce,  et  que  ce  rapport  soit  fait  a  un  jour 
désigné  et  au  grand  ordre  du  jour. 

La  Convention  nationale  a  décrété  le  renvoi  des 
propositions  de  Poultier  aux  comités  de  salut  public 
et  de  commerce  réunis. 

SUITE  A  LA  SÉANCE  DU  21   NIVOSE. 
Présidence  de  Iletourneur  {de  la  Manche)» 

Barailon,  au  nom  du  comité  d'instruction  publi- 
que ,  présente  la  rédaction  du  décret  rendu  dans  la 
séance  d'avant-hier.  Elle  est  adoptée  en  ces  termes  : 

m  La  Convention  nationale  décrète  ce  qui  suit  : 

«  Art.  l^i*.  Conformément  au  décret  du  18  floréal, 
l'anniversaire  de  la  juste  punition  du  dernier  roi  des 
Français  sera  célébré  le  2  pluviôse  prochain,  corres- 
pondant au  21  janvier ,  par  toutes  les  communes 
de  la  république,  et  par  les  armées  de  terre  et  de 
mer. 

«  11.  La  Convention  nationale  s'en  rapporte  au 
zèle  et  au  civisme  des  agents  nationaux  près  les 
communes  pour  l'exécution  du  présent  décret. 

•  111.  Les  représentants  du  peuple  près  les  armées 
de  terre  et  de  mer  feront  célébrer  cette  fête  de  la 
manière  la  plus  convenable  aux  localités  et  la  plus 
digne  de  l'intrépidité  des  défenseurs  de  la  patrie. 

«  IV.  Le  comité  d'instruction  publique  présen- 
tera ,  sous  trois  jours ,  le  plan  de  cette  fête  pour  la 
commune  de  Paris.  • 

«  V.  Le  3  pluviôse,  les  comités  de  salut  public,  de 
sûreté  générale  et  de  législation,  feront  un  rapport 
sur  les  individus  da  la  famille  Capet  actuellement  en 
France. 

«  VI.  Le  présent  décret  et  l'extrait  du  procès-ver- 
bal de  la  séance  du  19  seront  envoyés  aux  départe- 
ments et  aux  armées. 

«  L'insertion  au  Bulletin  tiendra  lieu  de  promul- 
gation. » 

Lecointre  (de  Versailles)  :  Je  viens  vous  dénon- 
cer une  horrible  persécution  dirigée  contre  un  vieux 
patriote,  dont  le  crime  est  d'avoir,  dans  une  assem- 
blée centrale,  soutenu  avec  énergie  la  cause  delà 
justice  et  des  principes.  C'est  le  citoyen  Lalande, 
administrateur  du  département  de  la  Manche,  desti- 
tué de  ses  fonctions  par  le  représentant  du  peuple 
Lebeau,  en  mission  à  Coutances.  Je  demande  que  le 
comité  de  sûreté  générale  fasse  un  rapport  sur  les 
motifs  de  la  destitution  de  Lalande,  et  que  le  repré- 
sentant en  mission  à  Coutances  soit  tenu  d'en  faire 
part  au  même  comité. 

Lecarpentier  atteste  le  patriotisme  de  Lalande. 

La  proposition  de  Lecointre  est  décrétée. 

Maure  :  On  généralise  trop  des  dénominations 
odieuses.  On  a  sans  cesse  à  la  bouche  les  mots  d'agi- 
tateurs et  de  terroristes;  on  s'en  sert  pour  noircir 
les  meilleurs  patriotes.  Il  est  temps  que  la  vérité  re- 
paraisse et  que  la  justice  remette  chacun  à  sa  place. 

DussAULX  :  Eh  bien,  proscrivez  donc  aussi  le  mot 
de  fédéraliste ,  dont  les  factieux  des  derniers  temps 
se  sont  servis  pour  couvrir  la  France  de  deuil  et  de 
sang  et  perdre  la  chose  publique.  (On  murmure.) 

PÉNiiaiEs:Oui,ceuxqu'on  a  proscrits  sous  ce  nom 


189 


étaient  d(y  bons,  de  vrais  patriotes,  qui  s*étaient  op- 
posés ù  la  commune,  qui  avaient  voulu  s'armer  de 
la  massue  nationale  pour  terrasser  les  conspira- 
teurs. (Nouveaux  murmures,  auxquels  se  méleutdes 
applaudissements.) 

La  Convention  passe  à  Tordre  du  jour. 

—  Paganel,  au  nom  du  comité  des  finances,  pro- 
pose le  projet  de  décret  suivant  : 

•  Art.  l«r.  La  réquisition  faite  par  le  district  de 
Blamont,  en  exécution  d*un  arrêté  de  Saint-Just  et 
Lebas,  d'une  somme  de  4,500  livres  à  la  commune 
d*Avricourt,et  ûe  2,000  livres  à  celle  de  Lintrey,  est 
annulée. 

«  II.  Ce  qui  a  été  versé  par  ces  communes,  pour 

Îf  satisfaire,  dans  la  caisse  du  district,  est  imputé  sur 
enrs  contributions  foncières  et  mobilières  des  an- 
nées 1792, 1793  et  suivantes. 

•  En  conséquence,  les  percepteurs  de  ces  contri- 
butions seront  tenus  de  faire  compte  aux  contribua- 
bles des  sommes  qu'ils  ont  versées  dans  la  caisse  éta- 
blie par  la  réquisition  du  district  de  Blamont. 

•  Les  municipalités  d'Avricourt  et  de  Lintrey  sont 
autorisées  à  prendre  les  mesures  convenables  pour 
assurer  aux  contribuables  de  leurs  communes  la 
justice  due  à  leur  réclamation  sur  cet  objet. 

«  III.  Le  présent  décret  ne  sera  point  imprimé  ;  la 
commission  des  revenus  nationaux  en  fera  passer  une 
expédition  au  district  de  Blamont  et  aux  communes 
d*Avricoart  et  de  Lintrey.  • 

Plusieurs  membres  demandent  que  ce  projet  de 
décret  soit  renvoyé  au  comité,  pour  présenter  une 
mesure  générale  sur  les  taxes  révolutionnaires  qui 
ont  été  injustement  imposées. 

Brital  :  Et  moi  ie  demande  la  question  préala- 
ble. (On  applaudit.) 

Cbarlier  :  J*appuie  la  question  préalable.  En  ré- 
Tolution,  il  ne  faut  jamais  fegarder  en  arrière. 

Dbntzbl  :  Citoyens,  tous  aimez  tous  la  justice.  Il 
y  a  des  départements  qui  ont  été  imposés  à  des  taxes 
révolutionnaires;  la  ville  de  Strasbourg»  par  exem- 
ple, à  9  millions.  Les  traîtres  Saint-Just  et  Lebas  me- 
naçaient de  la  guillotine  et  y  faisaient  attacher  ceux 
qui  ne  payaient  pas  dans  les  vingt-quatre  heures  des 
sommes  bien  au-dessus  de  leur  fortune.  11  est  im- 
possible que  TOUS  adoptiez  la  question  préalable, 
vous  qui  donnez  tous  les  jours  des  preuves  de  votre 
amour  pour  la  justice.  Vous  la  devez  au  peuple; 
vous  êtes  ses  mandataires,  vous  serez  adorés  de  lui. 
(On  applaudit.)  Je  demande  le  renvoi  au  comité. 

Charlibr  :  S'il  était  question  de  maintenir  les 
taxes  révolutionnaires,  je  voterais  contre  ;  mais  un 
décret  les  a  supprimées  pour  l'avenir  et  a  maintenu 
celles  qui  avaient  été  imposées  par  le  passé.  Ce  dé- 
cret est  juste.  Ces  taxes  ont  été  imposées  sur  les  gens 
riches.  (Plusieurs  voix  :  C'est  taux!)  La  Convention 
ne  doit  pas  faire  une  réaction  qui  ne  porterait  que 
sur  le  trésor  public,  qui  vous  rorcerait  à  une  nou- 
velle émission  d'assignats.  S'il  y  a  des  citoyens  qui, 
à  raison  de  leur  fortune,  aient  des  bc^ins,  la  Con- 
vention s'empressera  de  venir  à  leur  secours.  J'insiste 
pour  la  question  préalable. 

Paoanbl  :  Vous  pourriez  l'adopter  si,  comme  Ta 
dit  Charlier,  les  taxes  n'avaient  porté  que  sur  les 
riches;  mais  le  décret  que  je  propose  ne  concerne 
({ne  deux  petites  communes  où  il  n'y  avait  pas  deux 
nches,  et  qui  ont  été  grevées  au  delà  de  leurs  facul- 
tés. Au  reste,  je  ne  demande  que  le  renvoi  au  comité. 

Bngubrrand  :  ()ue1  est  donc  la  difficulté  du  ren- 
voi ?  Est-ce  pour  favoriser  l'injustice  et  le  brigan- 
dage? (On  applaudit.)  U  s'agit  4ci  de  rinlérét  public 


beaucoup  plus  qu'on  ne  le  pense.  Qui  peut  ignorer 

auels  sont  les  auteurs  des  taxes  révolutionnaires? 
'ont-elles  pas  été  imposées  par  Saint-Just,  par  Le- 
bas, par  les  lieutenants  dcBobespierre?  (Nouveaux 
applaudissements.)  N'ont-elles  pas  été  portées  par 
eux  à  un  taux  excessii  dans  les  départements  du 
Haut  et  du  Bas-Rhin,  pour  exciter  leurs  habitants  à 
la  révolte?  D'ailleurs,  il  ne  s'agit  pas  ici  des  taxes  lé- 

Sitimement  imposées  sur  les  nches;  il  ne  s'agit  que 
e  celles  dont  on  a  cherché  à  écraser  le  malheu- 
r;eux  cultivateur.  Je  demande  le  renvoi. 

Laurbncb  :  Nous  devrions  être  bien  lassés  d'en- 
tendre toujours  prostituer  les  mots  d'intérêt  public 
et  d'amour  du  peuple,  lorsqu'on  écarte  ou  qu'on 
interrompt  sans  cesse  toutes  les  discussions  qui  ten- 
dent à  prouver  que  la  Convention  en  est  constam- 
ment animée.  (Il  s'élève  quelques  murmures.)  Si  l'on 
fait  encore  du  omit  au  lieu  de  laisser  éclairer  la  dis- 
cussion, il  faut  que  l'appel  nominal  montre  au  peu- 
ple, qui  nous  entend,  quels  sont  ceux  qui  ont  voté 
Eour  la  justice,  pour  l'humanité,  pour  la  cause  pu- 
lic...  (On  applaudit.  — Out,  oui!  l'appel  nominal! 
s'écrie-t-on  de  toutes  parts.) 

Les  pauvres  sont  une  portion  du  peuple;  mais  le 
négociant  en  est  aussi  une,  le  manufacturier  en  foit 
une  partie  intéressante.  Il  ne  Caut  pas  écraser  cette 
portion  la  plus  vivifiante  du  peuple.  Que  demande- 
t-on?  un  renvoi  au  comité  pour  examiner  auels  ont 
été  les  motifs  de  ces  taxes,  quelles  sont  celles  qu'il 
faut  maintenir,  celles  qu'il  faut  détruire. 
MoNTAUT  :  L'appel  nominal  ! 

Laurbncb  :  Pourquoi  s'opposer  à  un  examen  qui 
porterait  la  lumière  dans  cette  affaire? 

DuHEM  :  Et  moi  aussi»  j'invoque  l'appel  nominal, 
car  cette  question  est  une  des  plus  importantes  que 
nous  puissions  discuter;  et  je  soutiens  que,  la  déci- 
der de  travers,  c'est,  dans  mon  opinion,  amener  la 
contre-révolution.  (On  murmure.  —  Des  applau- 
dissements partent  d'une  extrémité  de  la  salle.)  Et 
moi  aussi  je  veux  qu'on  rende  à  chacun  ce  qui  lui 


appartient.  (On  applaudit.)  Et  moi  aussi  je  suis  l'ami 
des  principes  et  de  la  justice,  mais  je  veux  qu'ils 
soient  appliqués  au  salut  du  peuple  en  général.  L'in- 


térêt public,  le  salut  du  peuple,  ne  sont  point  de 
vains  mots,  comme  on  se  I  imagine.  La  Convention 
a  détruit  les  taxes  révolutionnaires,  mais  elle  a  dé- 
crété que  ce  qui  est  payé  est  payé  ;  tout  est  fini.  (On 
murmure.)  Actuellement  on  demande  que  les  taxes 
révolutionnaires  payées  soient  portées  pour  les  taxes 
ordinaires. 

Plusieurs  voix  :  Ce  n'est  pas  cela  ;  cela  demande 
un  examen. 

DuBBM  :  Un  législateur  démocrate  ne  doit  jamais 

Eerdre  de  vue  l'aristocratie  des  richesses,  l'honora- 
le  million.  (Nouveaux  murmures  mêlés  de  quel- 
ques applaudissements.)  H  serait  contre-révolution- 
naire d  alléger  les  riches.  Comme  je  ne  suis  point 
d'avis  de  réviser  tous  les  actes  de  la  révolution  pour 
ramener  le  peuple  à  resclavage,je  demande  la  ques- 
tion préalable  ou  l'appel  nominal. 

Erhmann  :  Une  seule  observation  prouvera  qu'on 
est  peut-être  plus  d'accord  qu'on  ne  le  pense.  Les 
départements  ne  réclament  point  contre  les  taxes 
révolutionnaires,  mais  contre  leur  inégale  réparti- 
tion, il  y  a  des  particuliers  imposés  au  delà  de  leurs 
facultés  ;  entre  autres  un  aubergiste  fut  taxé  à 
40,000  liv.  :  il  oflrit  sur  une  assiette  la  clef  de  sa 
maison  à  Saint-Just,  en  le  priant  de  se  charger  de 
ses  créances.  (On  rit.)  Il  y  a  des  riches  qui  ont  pu 
ne  pas  payer  autant  qu'ils  le  devaient,  mais  aussi  il 
est  un  village  qui  n'avait  pas  20,000  liv.  de  revenu, 


190 

et  qui  a  été  imposé  à  i5,000.  Ont,  point  de  pas  ré-     el 
trograde»  mais  justice  distributive.  Je  demande  le     jV 

■•«nvni  Sfl 


renvoi. 

Clauzel  :  Vous  avez  établi  des  taxes  dans  un 
mouvement  révolutionnaire  ;  il  faut  qu*elles  soient 
payées.  Voulez-vous  revenir  sur  vos  pas?  voulez- 
vous  ordonner  au  trésor  public  de  rendre  les  som- 
mes qui  y  ont  été  versées?  (Plusieurs  voix  :  Non  !  ) 
Eh  bien,  la  discussion  doit  être  fermée  et  le  renvoi 
décrété.  J'appuie  la  question  préalable.  . 

La  question  préalable  est  décrétée.  (On  applaudit.) 

Engubrrand  :  Je  demande  la  parole  pour  une  mo- 
tion d*ordre.  Un  décret  ordonne  aux  membres  de  la 
Convention  qui  ont  été  en  mission  de  rendre  compte 
de  leur  conduite.  Il  ne  faut  pas  que  le  soupçon  plane 
Sur  les  représentants  du  peuple  ;  mais  on  a  répandu 
que  quel(|ues-uns  avaient  perçu  arbitrairement  des 
Sommes  immenses,  dont  presque  rien  n*est  entré  au 
trésor  public. 

Pour  faire  taire  la  malveillance,  pour  mettre  en 
évidence  la  pureté  de  nos  collègues,  je  demande 
Texécution  de  votre  décret. 

.  La  Convention  décrète  que  les  députés  qui  ont 
été  en  mission  rendront  leurs  comptes,  et  les  livre- 
ront à  rimpression  dans  le  délai  de  trois  décades. 

—  Un  des  secrétaires  donne  lecture  de  la  lettre 
Suivante  : 

Jean  Debry^  représentant  du  peuple  dans  les  dé- 
parlements  de  la  Drame,  VArdèche  et  Yauclwe, 
à  la  Convention  nationale. 

Montëlimart,  le  t6  DÎvose,  l*aD  8*  àm  U  république 
frtnçaiie,  une  et  indivisible. 

•  J*ai  tardé,  titoyens  collègues,  a  vous  rendre 
compte  de  ce  que  j*avais  pu  faire  dans  les  départe- 
ments où  vous  m*avez  envoyé,  parce  que  fai  voulu 
connaître  auparavant  le  caractère  des  habitants  et 
Tesprit  qui  dominait  en  quelques  endroits,  et  no- 
tamment à  Valence.  Les  maximes  de  Payan  étouf- 
faient encoK^e  la  voix  de  la  justice;  je  n*ai  rien  né- 
gligé pour  la  faire  entendre,  pour  la  remettre  en 

S  lace,  et  lui  assurer  le  triomphe  que  les  principes 
e  la  Convention  lui  promettent;  mais  en  même 
temps  je  me  suis  gardé,  tant  que  je  Tai  pu,  d'exposer 
les  hdèles  patriotes,  et  même  ceux  (jui  avaient  pu 
se  tromper  en  voulant  servir  la  révolution,  à  la 
réaction  et  aux  vengeances.  (On  applaudit.)  Les  au- 
torités constituées  ont  contre  elles,  en  général,  le 
préjugé  d'avoir  servi  la  faction  des  triumvirs.  Je  les 
épurerai;  et  si  je  les  change,  parce  quil  est  impos- 
sible de  foire  le  bien  sans  la  confiance,  j'assurerai 
du  moins  Testime  nationale  à  ceux  qui  auraient 
combattu  avec  courage  dans  des  temps  difliciles;  je 
peux  dire  à  la  Convention  qu'il  en  est  plusieurs. 
(Mêmes  applaudissements.) 

«  L'esprit  du  peuple  est  bon,  ami  des  principeS| 
ami  de  la  Convention,  rallié  à  elle  seule,  ennemi 
prononcé  de  l'inhumanité  et  du  territorisme.  On 
veut  des  lois,  et  plus  d'idoles  :  c'est  du  moins  ce  que 
j'ai  vu  moi-même  dans  le  département  de  la  Drôme, 
et  dans  les  demandes  qui  m'ont  été  faites  d'ailleurs. 
(Applaudissements.) 

•  En  quelques  endroits,  des  hommes  qui  naguère 
se  jouaient  de  toutes  les  vertus,  des  ennemis  du  peu- 
ple, tautdt  soldats  de  Jalès,  tantôt  satellites  de  Payan 
et  de  Robespierre,  devenus  tout  à  coup  dévots,  relè- 
vent nuitamment  des  croix,  lisent  des  psaumes  aux 
vieilles  femmes  et  chantent  des  messes  de  maître 
d'école.  Je  cherche  à  les  dépister,  et,  en  attendant, 
j'ai  cru  devoir  faire  sur  le  fanatisme,  qui  si  long- 
tempi  a  souillé  ces  contrées,  notamment  l'Ardècne 


et  VauclasCy  nne  proclamation  que  Je  vous  envole  ; 
j'en  espère  le  bon  effet  d'étouffer  dans  leur  nais- 
sance ces  germes  oubliés  de  superstition. 

•  Au  reste,  tout,  en  ce  moment,  dans  ce  pays  est 
subordonné  au  besoin  des  subsistances;  J'ai  promis 
au  peuple  les  secours  de  la  Convention  ;  j'en  écris 
au  comité  de  salut  public;  son  dévouement,  sa 
patience  et  son  attachement  aux  principes  méritent 
toute  la  sollicitude  nationale.  Des  que  j'aurai  reçu 
la  détermination  du  comité  sur  cet  ob|et  et  sur  les 
détails  que  je  lui  transmets,  je  partirai  pour  le  dé- 
partement de  Vaucluse. 

«  Les  principes  sacrés  de  la  morale  et  de  l'huma- 
nité, vous  le  savez,  avaient  été  audacieusement 
foulés  aux  pieds  dans  les  contrées  oii  je  vais  me  ren- 
dre; il  m'a  paru  que  je  devais  les  revivifier.  C'est 
dans  ce  seds  qu'à  la  Société  populaire  de  Montéli- 
mart  j'ai  prononcé  le  discours  dont  l'extrait  est  ci- 
joint,  avec  l'arrêté  qui  l'accompagne;  je  souhaite 
qu'il  reste  sans  exécution  positive  ;  je  ne  souhaite 
pas  moins  qu'il  ait  votre  approbation. 

•  Salut  et  fraternité.  Jbam  Dbbry.  • 

Extrait  d'un  discours  prononcé  par  U  représen^ 
tant  du  peuple  Jean  Debry  à  la  Société  populaire 
de'Montélimart^  le  15  nivôse.  Van  ^dela  répu- 
blique française^  une  tt  indivisible» 

L'on  a  dit  que  des  cannibales  et  des  furies 

dansaient  autour  des  suppliciés  et  de  l'instrument 
du  supplice;  il  est  temps  que  la  pitié  rentre  dans 
tous  les  cœurs,  et  que  la  morale  du  peuple  soit  re- 
vivifiée. 

«  Au  nom  du  peuple  français,  f  arrêté,  pour  les 
trois  départements  qui  me  sont  confiés,  etiusqu'à 
ce  qu'une  détermination  supérieure  ait  modifie  la 
mienne  : 

«  Que,  le  Jour  malheureux  où  un  homme  sera 
condamné  à  mort,  les  boutiques,  dans  la  commune, 
à  l'instant  de  l'exécution,  seront  fermées  eu  signe  de 
deuil. 

•  Il  ne  sera  pris,  à  l'égard  du  condamné,  que  les 
précautions  de  sûreté;  tous  les  égards  de  l'humanité 
et  de  la  décence  seront  sévèrement  observés.  •  (Ap- 
plaudissements.) 

On  lit  une  proclamation  du  même  représentant 
du  peuple  contre  le  fanatisme  :  elle  est  vivement 
applaudie. 

La  Convention  décrète  la  mention  honorable  de 
ces  pièces,  et  l'insertion  au  Bulletin. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

séANCB  DU  23  NIVOSB. 

La  section  des  Lombards  est  admise  à  la  barre. 

X'oroffiir:  Représentants  du  peuple,  vous  avez 
deux  fois  renversé  la  tyrannie;  vous  avez  deux  fois 
sauvé  la  république.  Le  royalisme  a  osé  relever  un 
instant  sa  tête  hideuse  ;  vous  l'avez  abattue  en  en- 
voyant au  tribunal  révolutionnaire  l'auteur  infâme 
qui  a  eu  l'audace  de  proclamer  des  principes  abhor- 
rés. Vous  avez  ôté  à  tous  les  ennemis  du  peuple  l'es- 
poir de  réussir  jamais. 

La  section  des  Lombards  vient  encore  une  fois  ap* 
plaudirà  vos  salutaires  travaux;  elle  vient  vous 
dire  encore  qu'elle  n'aura  jamais  qu'un  seul  point 
de  ralliement,  la  Convention;  qu'avec  la  Convention 
elle  poursuivra  tous  les  ennemis  de  la  république, 
de  quelque  masaue  quils  se  couvrent;  elle  ne  souf- 
frira pas  qu'un  d'eux  attente  à  la  liberté.  La  mort  à 
quiconque  osera  porter  atteinte  à  l'arche  sacrée  de 
la  consu  tutioo  démocratique  I 


191 


Vivo  In  république  française,  une,  indivisible,  im- 
périssable et  démocratique  ! 
Mention  honorable  et  insertion  au  Bulletin. 

Lb  Président  :  La  force  du  peuple  et  le  génie  tu- 
tëlaire  de  la  France  affermiront,  n'en  doutez  pas,  le 
triomphe  de  la  vertu  sur  le  crime.  En-  vain  les  em- 
poisonneurs, les  agioteurs  et  les  infâmes  partisans 
du  royalisme  tenteraient  d'égarer  le  peuple  sur  ses 
ve'ritanles  intérêts.  Délivrés  du  joug  oppresseur  des 
tyrans  qui  se  sont  succédé  depuis  tant  de  siècles 
pour  le  malheur  de  Thumanité,  le  peuple  français 
ne  perdra  pas  le  prix  de  cinq  années  de  travaux;  il 
a  conquis  sa  liberté,  il  la  maintiendra  en  dépit  de 
toutes  les  factions.  La  Convention,  investie  de  sa 
puissance,  fera  rentrer  dans  le  néant  tous  les  enne- 
mis de  la  république. 

La  Convention  nationale  a  entendu  avec  le  plus 
vif  intérêt  l'expression  de  vos  sentiments  civiques 
et  de  votre  dévouement  pour  elle  ;  elle  y  applaudit, 
et  vous  invite  d'assister  à  sa  séance. 

—  Des  citoyens  de  la  section  du  Mont-Blanc  sont 
admis. 

L'orateur  :  Une  vaste  conspiration  se  trame.  Vo- 
tre dévouement  nous  répond  du  supplice  des  traîtres; 
la  section  du  Mont-Blanc  n'en  veille  pas  moins  : 
toutes  les  sections  du  peuple  veillent. 

.Les  destinées  de  la  républifiue  dépendent  de  la 
crise  où  nous  nous  trouvons;  il  faut  s'armer  contre 
le  patriotisme  hypocrite  qui  nous  peint  des  dangers 
pour  nous  conduire  plus  sûrement  à  notre  perte. 

Partout  le  jacobinisme  s'agite;  partout  la  calom- 
nie distile  ses  uoisons  ou  cherche  a  alarmer  le  peu- 
ple sur  les  suDsistances  que  votre  sollicitude  lui  a 
assurées.  On  lui  présente  le  royalisme,  qui  n'est 
plus  qu'un  fantôme  impuissant»  ainsi  au'un  colosse 
formidable,  ou  on  désigne  comme  royalistes  tous  les 
républicains  qui  ont  prêché  l'amour  de  la  liberté  et 
la  réunion  à  la  Convention  nationale. 

A  auoi  tendent  ces  agitations  sans  cesse  créées, 
ces  alarmes  si  adroitement  présentées?  à  nous  ra- 
mener au  règne  de  la  terreur,  à  sauver  de  grands 
coupables,  à  plonger  de  nouveau  la  France  dans  des 
flois  de  sang. 

Représentants,  le  peuple  n*a  pas  quitté  la  massue; 
il  n*a  pas  non  plus  quitté  sa  confiance;  il  se  livre  à 
vos  soins  paternels  pour  le  conduire  au  bonheur.  11 
vous  félicite  du  décret  par  lequel  vous  consacres 
l'époque  où  Capet  a  été  frappé. 

Le  jour  de  la  justice  est  venu,  le  supplice  des  per- 
fides s'apprête  ;  il  fera  renaître  l'abonaance,  le  calme 
et  la  prospérité. 

Nous  voulons  la  liberté,  Tégalité,  la  justice  ;  nous 
voulons  la  république,  une,  indivisible,  démocrati- 
que. Nous  vouons  aux  royalistes,  aux  anarchistes, 
aux  buveurs  de  sang,  une  haine  éternelle. 

Leurs  efforts  seront  inutiles  :  leurs  prétextes  d*nti- 
lité  publique  sont  connus  ;  nous  sommes  trop  grands 
pour  nous  inc^uiéter  d'un  écrit  ridicule.  Le  peuple 
qui  a  juré  de  vivre  libre  ne  peut  redouter  un  mou- 
cheron qui  veut  le  piquer;  il  le  presse  de  son  pied, 
et  ne  s'abaisse  pas  à  le  combattre. 

Ce  ne  sont  pas  les  mots  tyrannie,  despotisme,  qui 
ont  fait  les  malheurs  du  monde;  ce  sont  ces  tigres 

aui  calculent  dans  l'ombre  du  secret  les  moyens 
'asservir  leurs  compatriotes,  de  leur  arracher  leurs 
enfants,  et  de  pomper  leur  sang  après  avoir  dévoré 
leur  fortune  ;  ce  sont  ces  cannibales  qui  signent  de 
sang-lroid  l'arrêt  fatal  qui  condamne  le  juste  à  périr 
surréchafaud. 

Représentants,  il  faut  museler  l'intrigue,  il  faut 
écraser  les  serpents  qui  sifflent  et  s'enlacent  autour 


de  nous.  Ne  prenex  point  de  demi-mesures;  purgez 
toutes  les  administrations,  frappez  les  dilapidatcurs, 
les  assassins.  Enveloppez  dans  une  chaîne  mdissolu- 
ble  les  partisans,  les  appuis,  les  complices  de  la  ty- 
rannie :  il  faut  que  le  peuple  sorte  de  cette  lutte 
rayonnant  de  vertu  et  de  liberté. 

Vive  la  république!  vive  la  Convention!  Péris- 
sent les  factieux,  les  assassins,  les  tyrans  populai- 
i;es,  et  tous  les  ennemis  de  la  libertél  (Vib  applaudis- 
sements.) 

Le  Président,  è  la  députation  :  Non,  citoyens,  la 
Convention  nationale  ne  souffrira  pas  que  le  système 
atroce  de  terreur  comprime  de  nouveau  les  citoyens; 
il  faut  enfin  que  l'homme  probe  respire  sous  la  sau- 
vegarde des  fois. 

C'est  seconder  puissamment  les  efforts  de  la  Con- 
vention nationale  pour  assurer  le  bonheur  du  peu- 
ple et  le  maintien  de  ses  droits,  que  de  lui  dénoncer 
les  complots  liberticides;  elle  ne  quittera  la  massue 
dont  elle  a  écrasé  toutes  les  actions  qu'après  avoir 
foudroyé  celles  qui  pourraient  se  reproduire.  Qne 
les  bons  citoyens  veillent  et  se  tiennent  en  garde 
contre  les  suggestions  perfides  des  caméléons  qui  ne 
caressent  le  peuple  que  pour  mieux  l'étouffer.  Le  lion 
revêtu  de  la  peau  de  Tagneau  n'en  est  ({ue  plus  dan- 
gereux. Que  la  justice  et  la  vérité  soient  constam- 
ment à  Tordre  du  jour  ;  avec  ces  guides  fidèles,  la 
république  sortira  triomphante  de  tous  les  orages 
politiques. 

La  Convention  nationale  a  fondé  la  république, 
elle  la  maintiendra;  telle  est  la  volonté  du  peuple 
français.  Qu.'ils  sont  lâches  et  perfides  ceux  qui  vou- 
draient élever  un  doute  injurieux  sur  ses  intentions! 
Qu'ils  sont  insensés,  ces  nommes  pervers  qui  ten- 
tent de  porter  une  main  criminelle  sur  l'arche  sainte 
qui  a  conservé  les  droits  du  plus  grand  peuple  de 
runivers. 

L'anniversaire  du  supplice  du  dernier  roi  des 
Français  fera  pâlir  d'effroi  tous  ces  pygmées;  et  ce 
spectacle  des  républicains  jurant,  en  présence  de 
l'auteur  de  la  nature, de  mourir  mille  fois  plutôt  que 
de  rentrer  sous  le  joug  de  l'esclavage,  est  la  seule  ré- 
ponse digne  du  penpie  français. 

La  Convention  nationale  applaudit  à  votre  énergie 
et  à  votre  patriotisme  ;  je  vous  invite,  en  son  nom, 
à  assister  à  sa  séance. 

La  Convention  décrète  que  cette  Adresse  sera  in- 
sérée au  Bulletin,  avec  mention  honorable. 

Des  huées  partent  de  la  grande  tribune  à  la  gau- 
che du  présiaent. 

Pluiieun  voix  :  Cette  Adresse  est  royaliste  ;  met- 
téz-ladans  le  Bulletin.  (Murmures.) 

AifURÉ  DuMONT  :  Vous  venez  d'entendre  les  voci« 
férations  des  salariés  de  Pitt  et  de  Cobourg.  Rappe- 
lez-vous quels  étaient  les  gens  qui  composaient  les 
tribunes  des  Jacobins,  et  voyez  si  celle-ci  est  diffé- 
remment composée (Vifs  applaudissements.)  De- 
puis six  mois  ce  sont  toujours  les  mêmes  personnes 
qui  les  remplissent;  elles  sont  devenues  l'asile  de  la 
fainéantise. 

RuAMPS  :  Tu  insultes  le  peuple  ;  les  fainéants  sont 
poudrés,  les  fain'^^ants  sont  les  muscadins  ;  examine 
le  peuple  de  cette  tribune. 

ANDRé  DuMONT  :  Ce  sont  les  vrais  royalistes... 
(Ruamps  interrompt.) 

RuAMPS  :  Les  royalistes  sont  toi  et  tes  semblables. 
(Grand  bruit.) 

On  demande  que  Ruamps  soît  envoyé  à  l'Abbaye, 
pour  avoir  insulté  un  de  ses  collègues. 

Andsk  Dumomt  :  Voulez-vous  être  libres;  prenez 


192 


un  parti  décisif  :  assnrez-voas  de  ces  individus  qui 
disent  tout  haut  qu'il  faut  un  nouveau  31  mai.  (Ap- 
plaudissements.) 

RuAMPS  :  C'est  Tallien  qui  a  dit  cela  aux  Jacobins. 
(Murmures.) 

André  Dumont  :  Ordonnez  l'arrestation  de  tous 
les  prêcheurs  de  révolte  payés  par  les  royalistes.... 

Plusieurs  membres  qui  siègent  à  l'extrémité  de  la 
salle  se  lèvent  et  montrent  une  tribune  de  journa- 
listes. lU  sont  là!  disent-ils.  (On  rit.) 

André  Du  mont  :  Je  demande  que  les  comités  de 
sûreté  générale  et  des  inspecteurs  de  la  salle  pren- 
nent des  mesures  pour  s'assurer  des  individus  qui, 
dans  cette  tribune,  ont  insulté  à  la  Convention. 

Cette  proposition  est  décrétée  au  milieu  des  plus 
▼ils  applaudissements. 

—  Des  pétitionnaires  sont  admis  à  la  barre;  ils 
font  réloge  du  patriotisme  du  général  Rossignol,  mis 
en  état  d^rrestation  par  décret  de  la  Convention, 
rendu  sur  la  proposition  de  Roursault.  Les  pétition- 
naires terminent  en  demandant  le  rapport  de  ce  dé- 
cret, qu'ils  prétendent  avoir  été  enlevé  à  la  Con- 
vention. 

On  demande  le  renvoi  de  cette  pétition  au  comité 
de  sûreté  générale. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Je  m'oppose  à  ce  que  cette 
pétition  soit  renvoyée  au  comité  de  sûreté  générale 
seul  ;  je  demande  qu'elle  soit  renvoyée  aux  deux 
comités  réunis  de  salut  public  et  de  sûreté  générale. 
Cest  en  présence  de  ces  deux  comités  que  l  on  verra 
les  crimes  de  cet  homme  pour  lequel  des  citoyens, 
égarés  sans  doute,  viennent  réclamer  ici. 

Cet  homme  n'â-t-il  pas  causé  la  mort  de  Phélip- 
peaux,  qui  avait  dévoilé  les  manœuvres  perfides  des 
généraux  de  la  Vendée?  C'est  cet  homme  qui  a  fait 
couler  le  sang  de  Quarante  mille  de  ses  frères,  plus 
encore  par  malveillance  que  par  ignorance. 

La  proposition  de  Bourdon  est  décrétée. 

DoRois-DuRAis  :  11  serait  injuste  de  la  part  de  la 
Convention  nationale  de  laissser  plus  longtemps  sur 
les  habitants  du  Calvados  la  tache  ignominieuse  qui 
leur  fut  imprimée  dans  un  temps  moins  heureux. 
Rappelez-vous,  citoyens,  que,  sur  le  compte  satis- 
faisant qui  vous  fut  rendu  par  les  représentants  du 
peuple  envoyés  dans  ce  département,  vous  char- 
geâtes vos  trois  comités  de  vous  faire  un  rapport  sur 
le  décret  qui  ordonne  qu'une  colonne  serait  élevée 
dans  la  ville  de  Caeu  comme  un  monument  de  la 
part  qu'elle  avait  prise  à  la  rébellion.  Pourquoi  vos 
comités  ne  vous  ont-ils  point  fait  ce  rapport?  Pour- 
quoi éterniser  ainsi  une  peine  qu'il  est  prouvé  à  pré- 
sent n'avoir  jamais  été  méritée?  Je  demande  le  rap- 
port de  ce  décret. 

Maure  :  Ce  décret  ne  fut  point  un  acte  d'injustice, 
comme  le  prétend  le  préopinant;  ce  fut  une  marque 
d^indulgence  donnée  par  la  Convention  nationale  à 
des  citoyens  plus  faibles  que  coupables.  J'ai  cru  de- 
voir faire  cette  observation. 

Au  reste,  je  demande  la  suppression  du  décret,  et 
que  dans  trois  jours  le  rapport  des  trois  comités  vous 
soit  fait. 

Cette  proposition  est  adoptée  en  ces  termes  : 

I  La  CoDTeDUoD  nationale ,  sur  la  proposition  d'un  mem- 
bre de  rapporter  le  décret  qat  ordonnait  qu'il  serait  élevé 
une  colonne  infomante  sur  les  ruines  da  château  de  Caen , 
décrète  la  suspension  da  décret  qui  ordonnait  que  cette  co- 
lonne serait  élevée,  et  renvoie  à  ses  comités  de  salut  public, 
de  sûreté  générale  et  de  législation ,  pour  lui  ftdre  un  rap- 
lK)i'I  sur  cet  objet  dans  les  trois  jours.  • 

(la  suite  demain,) 


OlATfJRBS. 


Vue  de  VineentUê  de  la  vUie  du  Cap^  estampe  de  vingt- 
huit  pouces  sur  dii-huit,  gravée  en  couleur  par  le^ciioyen 
Cbapuy,  d*aprèsle  tableau  du  citoyen  l.-L.  Boquet;  fait  d*a> 
près  nature.  Prii  :  %A  lir.  —  A  Paris,  chez  les  citoyens  Bo- 
quet frères,  rue  Nontorgueil,  n*  119. 

—  V Africain  hospitalier,  peint  par  6.  Il orland,  et  gravé 
en  couleur  par  la  citoyenne  Rollet.  Se  vend  à  Paris ,  ches 
Deneuille ,  rue  Francîade ,  section  de  Boa-Conseil ,  n9  59. 
Prix  :  6  liv.,  en  noir;  et  IS  liv.,  en  couleur. 


LIVRBS  DIVERS. 


Histoire  d^ Angleterre ,  traduite  de  Tanglais  de  Henry ,  par 
les  citoyens  Boulard  et  Canlwel.  A  Paris,  chei  Ibradan, 
libraire,  rue  du  Gimetière-Andrénles-Arcs;  6  vol.  in-40. 
Pris  :  100  Ht. 

Cette  histoire  est  écrite  sur  un  plan  absolument  neuf. 
Hume  en  a  fait  le  plus  grand  éloge ,  et  elle  mértuit  d*étre 
traduite  en  notre  langue  ;  peut-être  fera-t-elle  une  révolu- 
tion dans  cette  partie  de  notre  littérature.  Elle  embrasse 
non-seulement  Phistoire  de  TAngleterre  proprement  dite , 
mais  encore  celle  de  l'Ecosse  et  du  pa  js  de  Galles.  On  peut 
rappeler  Thisloire  de  Teiprit  humain. 

Cnaque  volume,  ou  chaene  époque,  contient  en  autant  de 
chapitres  séparés  :  1*  l'histoire  civile  et  militaire  ;  9*  Thls- 
toire  de  la  reli^on  ;  3^  ceUe  de  la  constitution,  du  gouver- 
nement, des  lois  et  des  tribunaui;  4%  celle  des  sciences,  des 
savants  et  des  principales  maisons  destinées  ans  progrès  des 
sciences;  5*  Phistoire  des  arU  utiles  et  agréables;  6«  celle 
du  commerce ,  de  la  marine ,  des  monnaies  et  du  pris  dot 
denrées;  1^  enfin  Phistoire  des  momrs,  des  vertus,  des  vi- 
ces, des  usages  remarquables,  de  la  kngue,  du  régime  et  des 
divertissements  des  Anglais,  sous  chaque  époene. 

Le  premier  volume  contient  Phistoire  de  la  Grande-Bre- 
tagne depuis  la  première  descente  àxs  Romains,  sous  Jules- 
Gaar,  jusqu'à  Parrivéedes  Sasons,  en  Pan  449.  L'histoire 
des  druides  j  présente  une  foule  de  recherches  curieuses. 
On  j  trouve  aussi  des  détails  précieus  sur  les  imp4ts  des  Ro- 
mains, et  leur  politique  i  Pégard  de  leurs  colonies. 

Le  second  volume  présenle  ce  qui  s'est  passe  depuis  Par» 
rivée  des  Sazonsjusqu'à  la  descente  de  Guiliaume-le-Gonqué« 
rant. 

Outre  Phistoire  absolument  neuve  du  commerce ,  des  lois 
et  des  arts ,  on  y  trouve  les  usages  bisarres  et  curieui  des 
Saxons  et  des  Gallois,  les  persécutions  d'Edgar  et  de  Dunstan 
contre  les  prêtres  mariés ,  les  services  rendus  par  Alfred  à 
PAngleterre.  Des  républicains  qui  sentent  la  dignité  de 
l'homme  pourraient-ils  imaginer  qu'une  des  charges  de  la 
cour  du  pays  de  Galles  était  celle  de  porteur  les  pieds  du  roi? 
La  fonction  de  cet  officier ,  qui  méritait  mieux  le  nom  d'es- 
clave, consistait  k  se  tenir  assis  i  terre,  le  dos  tourné  au  f<*u, 
et  à  porter  sur  sa  poitrine  les  pieds  du  roi,  poiv  les  garantir 
du  froid.  - 

Les  lois  du  pays  de  Galles  permettaient  i  un  mari  de  frap- 
per sa  femme  de  trois  coups  de  bAton  sur  toute  autre  partie 
que  la  tète ,  s'il  la  surprenait  dans  son  lit  avec  une  autre 
femme ,  si  elle  !e  tirait  par  la  barbe,  ou  si  elle  lui  donnait 
des  noms  ii^urieux  ;  mais  s'il  la  battait  ou  plus  sévèrement, 
ou  pour  des  sujets  moins  graves,  il  payait  une  amende . 

La  harpe  d*un  gentilhomme  ne  pouvait  être  saisie  pour 
dette.  Noiu  accoraons  avec  plus  de  sagesse  ce  privilège  aux 
instruments  de  la  culture  de  la  terre  et  des  arts  utiles. 

Ce  second  volume  contient  une  foule  de  faiu  curieui ,  et 
jusqu'ici  peu  connus,  sur  les  mœurs  et  usages  des  anciens  ha- 
bitants de  l'Angleterre.  L'histoire  de  Hume,  quoique  excel- 
lente d'ailleurs,  passe  trop  rapidement  sur  cei  deux  premiè- 
res époques.  Nous  croyons  celle  de  Henry  indispensable  è 
ceux  qui  veulent  connaître  i  fond  Phistoire  de  l'Angleterre, 
<]ui  a  Unt  de  rapport  avec  la  nêtre.  Nous  rendrons  compte 
incessamment  des  trois  autres  volumes  de  cet  imporunt  ou- 
vrage. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 
miers mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs  d' in- 
scriptions au  i^rand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagcics  cU 
de  huit  mois  vingt  et  un  jours  de  Pannée  1793  (vieux  style). 


GAZETTE  NATIOMLE  «a  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N^  115.         Quintidi  26  Nivôse,  Van  8«.  (Mmredi  U  Janvier  1795,  vieux  ityle.) 


•      POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Extrait  dune  tettr$  de  Hambourg,  du  \*fjan9ier.  — 
L*Ant;leterre  a  toujours  beaucoup  d'argent  el  beaucoup  de 
crédit;  mais  les  hommes  lui  manquent.  ElleenToie  des  am- 
bassadeurs partout,  Jusqu'en  Ualie, 

Deux  erobaucheura  anglais  ont  été  chassés  de  Lausanne 
par  ordre  du  gouvernemeot  de  Berne. 

Vold  un  des  moyens  qu'on  emploie  >n  Angleterre  pour 
faire  des  recrues.  Ve  peuple  anislais,  en  général,  n'est  cas 
aussi  militaire  que  le  Français.  Les  Anglais  ont  la  plus 
grande  répugnance  à  s'enrôler,  et  surtout  A  passer  au  con- 
tinent, malgré  les  90  ou  40  guinées  d'engagement  qu'on 
leur  paie. 

Heureueement  ponr  le  gouTemeineni,  tout  est  vénal  en 
Angleterre,  fin  conséquence,  le  ministère  offre  un  grud 
bénéfice  à  des  maisons  de  commerce  coosidérables,pour 
qu'elles  fassent  Ijanqueroute.  U  «uffit  qu'elles  arrêtent  leurs 
payements  pendaiu  un  mois  seulement,  pour  qu'il  en  résulte 
des  contre-coups  affreux  dans  touiea  les  parties  de  l'Angle^ 
terre,  de  l'Ecosse  ei  de  l'Irlande. 

Vingt  fabriques  à  la  fols  soni  obligées  de  suspendre  leurs 
opérations,  fabriques  dont  chacune  occupe  quatre,  cinq, 
ail  A  huit  mille  bras.  La  plus  grande  partie  des  ourrlers  est 
eongédiéc,  u,  ces  malheureux,  qui  se  trouvent  dans  la  mi- 
sère, sont  forcés  d'accepter  les  ao  guinées  qu'on  \pxr  offre, 
et  de  s'engager  4  vie  dans  le  lervice  da  roi,  pour  ne  pas 
mourir  de  fiiln. 

On  a  vu  A  Londres  une  maison  de  commerce  restée  In- 
tacte depuis  trente  ans,  faire  faillite  sans  nécessité,  unique* 
ment  jMiroe  qu'elle  trouvait  mieux  son  compte  à  oette  inflase 
spéculation.  Au  bout  d'un  mois,  aprèa  que  le  gouvernement 
eut  fait  dix  A  douze  mille  hommes  de  rocnies»eUe  est  rentrée 
étams  les  aMres. 

Frantjbrt»  le  30  décembre,^  Il  est  parvenu  aui  différents 
cercles  de  l'Empire  une  circulaire  de  l'empereur,  qui  pa- 
rait peu  coïncider  avec  les  démarches  de  ces  cercles  pour 
parvenir  A  la  paix.  Celte  pièce  porte  c  que  les  princes,  di- 
recteurs des  cercles,  sont  chargés  d'employer  les  moyens 
exécutoires  contre  les  membres  qui  resteraient  en  défaut,  de 
mettre  en  saisie  leurs  possessions  et  leur  revenu  pour  autani 
qu'il  sera  nécessaire,  et  de  fournir  par  ces  movens  les  trou- 
pes que  chacun  de  ces  membres  est  tenu  de  fournir,  ou  de 
les  remplacer  par  d'autres,  afin  que  le  quintuple  contingent 
puisse  être  rendu  complet  A  l'armée  de  llSmpire,  le  !•'  fé- 
vrier prochain.  ■ 

Le  ministre  impérial  près  le  cercle  de  Frencoole  a  remis 
A  ce  cercle  un  mémoire  dans  lequel  II  se  plaint  de  l'eitrac- 
fion  du  numéraire  des  Etats  héréditaires  d  Autriche  pour  les 
pays  d'Empire.  Le  ministre  auuicbien,  après  un  grand  nom- 
bre d'observations,  finit  par  proposer  au  cercle  de  Franco- 
nle  c  de  mettre  le  plus  promptement  possible  en  réquisition 
les  subsistances  qui  doivent  être  livrées:  d'accepter  en  re- 
tour une  indemnité  dont  le  taux  serait  réglé  au  prix  moyen 
des  dix  années  précédentes,  et  dont  le  payement  se  ferait 
en  reçus  de  livraisons,  au  lieu  de  l'argent  comptant  qu'il 
est  alMolumeot  impossible  de  fournir  en  ce  moment.  • 

Le  cercle  de  Souabe  a  reçu  un  pareil  mémoire.  Ce  cercle 
avait  terminé  ses  séances  le  30  octobre;  il  avait  proposé, 
dans  ses  dernières  résolutions*  le  complètement  de  l'armée 
d'Empire  avant  le  mois  de  mars  prochain,  et  la  levée  de 
plusieurs  eorps  dans  lesquels  les  émigrés  ne  pourraient  être 
admis. 

Le  oerde  de  Franoonle  a  commencé  A  délibérer  sur  le 
mémoire  dm  ministre  impérial. 

SUISSE, 

Viàte^  te  25  décembre.  —  Bler  le  mAjor  Meyering  et 
Bl.  Schmertz,  envoyés  prussiens,  sont  revenus  de  fiadcu«  oii 

8«5ér^.  —  ToniêlL 


Us  avalent  été  trouver  le  citoyen  Barthélemyi  ambtssadeurde 
la  république  française,  dont  ils  ont  été  reçus  avec  beaucoup 
de  bienveillance.  On  attend  ici  le  citoyen  Barthélémy  lui- 
même,  et  le  comte  de  Goltz,  ci-devant  ambassadeur  de 
Prusse  A  Paris.  "^ 

—  Le  prince  de  Ifalsau-Usingen ,  qu'on  dit  iniéc«ssé  A 
s'assurer  des  bonnes  grâces  du  roi  de  Pnnie,  a  seostflt 
pour  la  somme  de  50,000  Qorins  dans  rempruntunirert,  au 
pom  de  U  cour  de  Berlin,  A  4  pour  100  d'intérêts. 

ANGLETERRE. 

Londres,  le  16  décembre.  —  Lord  Fitx-WiUlams  part  dé<* 
cidément  la  semaine  prochaine  pour  se  reudre  en  Irlande, 
où  rappellent  ses  fonctions  de  vice-roi;  ainsi  c'est  une  af- 
faire terminée,  et  les  ministres,  partagés  d'opinion  A  cet 
égard ,  sont  enfin  déeidémentd'aooord,  au  moins  sur  ce 
point. 

Le  nouvean  lord  lieutenant  aura  A  son  arrivée  le  ehagrin 
et  i'embsrras  de  trouver  une  trésorerie  bien  peu  garnie,  s'il 
est  vrai,  comme  on  le  mande  de  Dublin,  oue  les  dépenses 
faites  pour  lever  les  régimenudits  indépendants,  dont  l'ap- 
préciation n'a  pas  été-soumise  au  pariement  deçette^contrée» 
ont  laissé  la  trésorerie  sans  une  guinée. 

—  L'absence  du  chancelier  de  réc|iiquier  et  des  autres 
principaux  officiers  du  royaume,  dont  la  signature  est  né- 
cessaire pour  toute  espèce  de  payement,  est  très-favorable 
dans  la  circonstance  actuelle.  Elle  sert  de  prétexte  au  retard 
qu'éprouvent  les  créanciers  dt  l'Etat, 

-»  nu  lettres  de  Portsmoutb  disent  qu'il  a  éclaté  une  In- 
surrection A  bord  du  vaisseau  U  QnÀMmi  alla  éiait  apaiaéa 
au  départ  du  courrier. 

—  Le  9»  l'amiral  Nacbrid  a  déployé  son  pavillon  sur  le 
Mtnotaure,  vaisseau  de  If 4  canons;  on  s'accorde  ^  dire  que 
son  escadre,  composée  de  quelques  firégates ,  est  destinée  A 
entreprendre  une  nouvelle  croisière  sur  les  cêtes  de  France. 

—  Il  parait,  d'après  les  nouvelles  dé  la  Guadeloupe  du 
n  octobre,  que  les  Français  ont  profité  de  la  reddition  du 
camp  qui  éti||t  A  la  Basse-Terre,  sous  les  ordres  du  général 
Graham,  pour  presser  vivement  le  général  Prescot,  qui  s'é- 
tait retire  avec  quatre  cent  cinquante  honmies  dans  le  fort 
dominé  par  des  hauteurs,  d*où  11  pouvait  être  canonné  et 
l'aura  sûrement  été  avec  succès. 


CONVENTION  NATIQNALB. 

Préêidenec  de  UtownÊwr  (de  la  M^ekth) 

•uiTi  m  u  sAanc»  M]  22  mvosB. 

Un  secrétaire  lit  la  rédaction  du  décret  rendu  sur 
la  proposition  de  Domont. 

Ce  projet  de  décret  charee  le  comité  des  inspec- 
teurs de  la  salle  de  surveiller  certaines  personnes 
qui  paraissent  habituées  aux  tribunes  de  la  Conven- 
tion, et  qui  troublent  Tordre.... 

***  :  Cette  rédaction  est  iniuneuse  pour  la  Conven- 
tion; elle  est  injurieuse  pour  le  peuple  qui  nous  écoute 
On  dit  :  Babiiuée  aux  tribunes l  Bien  loin  d'approu- 
ver ces  mots,  je  soutiens  qu'il  est  essentiel  que  le 
peuple  prenne  l'habitude  d'y  venir.  C'est  la  une 
manœuvre  horrible  pouc  empêcher  les  citoyens  d'as- 
sister aux  discussions.  Tous  les  citoyens  ont  le  droit 
d^assister  à  nos  séances;  pourquoi  distin<^uer  ceux 
qui  y  sont  habitués  d'avec  ceux  qui  y  viennent  peu 
souvent?  C'est  une  tactique  infâme;  il  faut  le  dire, 
depuis  le  9  thermidor  on  ne  fait  que  nous  insulter. 

Je  ne  donne  pas  plus  de  développement  àimoii 
opinion,  psroe  que  Je  cro»  que  U  CooveoUoo  pense 

35 


194 


comme  moi,  el  qu'elle  rejettera  cette  rédaction  una- 
nimement. 

Chiappe  :  Je  la  croyais  arrivée,  cette  époque  heu- 
reuse où  les  tribunes  de  la  Convention  étaient  ce 
qu'elles  devaient  être;  je  croyais  que  ceux  qui  ont 
aes  sommes  immenses  les  garderaient  plutôt  que  de 
faire  encore  des  dépenses  pour  faire  avilir  la  Con- 
vention. (Applaudissements.) 

Ceux  qui  viennent  avilir  la  Convention  ne  sont  pas 
le  peuple.  Hier  j*ai  vu  de  ces  femmes  méprisables, 

2UI  viennent  ici  chaque  jour,  parler  à  Tun  des  mem- 
res  de  cette  assemblée  qui  siègent  dans  cette  extré- 
mité. Elles  lui  disaient  :  «  Eh  bien  !  avons-nous  bien 
travaillé  aujourd'hui?»  Et  ces  femmes  viennent  dans 
cette  tribune.  (Il  signale  celle  qui  est  à  l'extrémité 
ffauche  de  la  salle.)  Vous  avez ,  citoyens,  écrasé  Tin- 
fume  Robespierre,  et  je  vois  sans  cesse  renaître  sa  tac- 
tique criminelle.  (Murmures  dans  une  extrémité  de 
la  salle.  —  Applaudissements  dans  l'autre.) 

Chiappe  :  Lesage-S^nault  m'insulte,,  et  j*en  snîs 
peu  étonné  :  c'est  là  leur  manière  pour  nous  inter- 
rompre. (Mêmes  murmures  dans  une  partie  de  l'as- 
semblée.) Si  je  croyais  que  tous  les  membres  de 
cette  assemblée  pensassent  comme  moi,  je  n'appuie- 
rais  pas  ce  décret  ;  mais  que  vois-je  tous  les  jours? 
On  interrompt  les  discussions  de  la  Convention  ;  on 
ne  peut  alors  s'empêcher  de  prendre  un  parti  vio- 
lent. (Mêmes  rumeurs.)  J'observe  à  la  Convention 
que  le  mal  existe»  qu'il  faut  y  remédier. 

***  :  Bayez  :  Habitués  auxiribums. 

RicHOUx:  Il  faut  que  ces  mots  restent;  c'est  la 
vérité...  Elle  est  honorable  pour  les  citoyens  qui  en 
sont  l'objet. 

*'*  :  Il  faut  maintenir  le  respect  dû  à  la  Convention, 
empêcher  que  les  séances  ne  soient  troublées. ni  in- 
fluencées, chacun  sait  qu'il  y  a  ici  des  habitués. 

Pluiieunvoim  s  Oui,  les  journalistes! 

*'*  :  Je  parle  de  ceux  qui  viennent  ici  assister  à 
nos  séances.  Ces  habitués ,  s'ils  sont  bons  citoyens, 
ne  seront  point  fàchésd'étre  surveillât;  ils  n'auront 
aucune  crainte.  Je  demande,  de  plus-,  que  la  Con- 
vention charj^e  ses  comités  de  voir  quels  sont  leurs 
moyens  d'existence  dans  Paris.  (Murmures  et  ap- 
plaudissements.) Ces  gens  sont  souvent  payés.  Pour- 
quoi ces  murmures?  Je  n'inculpe  aucun  de  mes 
collègues.  Mais,  derrière  nous,  n*avons-nouspasdes 
malveillants  intéressés  à  troubler  nos  séances?  Le 
parti  de  l'étranger,  par  exemple,  ne  fait-il  pas  tous 
ses  cftorts  pour  nous  avilir?  Je  n'inculpe  personne , 
mais  j'inculpe  les  malveillants,  les  aristocrates. 

Quelques  voix  :  Les  royalistes! 

•*•  :  Oui ,  les  royalistes,  vous  avez  raison.  Les  mal- 
veillants  viennent  ici  pour  interrompre  nos  délibé- 
rations. Je  demande,  je  le  répète ,  que  le  comité  des 
inspecteurs  soit  chargé  de  veiller  ces  habitués  ;  s'ils 
pensent  bien ,  ils  n'ont  rien  à  craindre.  (Applaudis- 
sements.) 

***  :  Je  demande  qu'on  raie  le  mot  habilués;  on 
ne  peut  pas  en  faire  un  crime  aux  citoyens  qui  s'in- 
téressent à  la  chose  publique.  Vous  ne  voulez  atta- 
quer que  ceux  qui  manquent  de  respect  à  la  Con- 
vention ;  il  est  certaines  tribunes  que  nous  avons 
déjà  signalées  plusieurs  fois,  qui  se  taisent  quand  on 
annonce  quelques  victoires,  et  applaudissent  avec 
fracas  quand  if  y  a  de  l'agitation  dans  cette  assem- 
blée. (Applaudissementsd'une  partie  de  l'assemblée.) 
Ces  tribunes  sont  celles  des  journalistes ,  qui  sont 
souvent  remplies  d'étrangers  qui  viennent  ici  jeter 
la  division.  Si  je  n'étais  pas  législateur ,  je  viendrais 
ici  habituellement  me  pénétrer  de  vos  lois  ;  ce  ne 


sont  donc  pas  les  mauvais  citoyens  qui  sont  habilucs 
ici  ;  je  demande  donc  que  ce  mot  soit  rayé. 

Ceassous  :  Nous  travaillons  tous  pour  le  bonheur 
du  peuple  français.  Vous  délibérez  sous  ses  yeux; 
il  n  est  donc  pas  étonnant  qu'il  applaudisse  a  vos 
décrets.  Ceux  qui  déclament  aujourd'hui  contre  les 
tribunes  sont  fort  contents  d'être  applaudis  eux- 
mêmes  quand  ils  parlent.  (Murmures.)  Si  quelques 
tribunes  manquent  de  respect  à  la  Convention  »  eh 
bien,  le  président  doit  les  rappeler  à  l'ordre. 

Plusieurs  membres:  Aux  voix  la  rédaction! 

Crassous  :  Chiappe  s'est  permis,  sans  connais- 
sance de  cause,  de  traiter  de  misérables  certaines  per- 
sonnes.... 

Chiappe  :  Oui.* 

Crassous  :  L'autre  préopinant  a  insinué  qu'il  fal- 
lait connaître  quels  étaient  les  moyens  de  subsis- 
tance de  ceux  qui  viennent  ici.  On  voudrait  donc 
apparemment  que  les  riches  seuls  pussent  assister 
aux  séances ,  (  vifii  applaudissements  d'une  partie  de 
rassemblée,  yiolents  murmures  dans  l'autre),  et  ils 
voudraient  que  les  pauvres  en  fussent  exclus.  Si  ce 
décret  passait,  il  établirait  un  espîonage  au  milieu 
du  peuple ,  une  inquisition  plus  cruelle  que  celle  de 
Robespierre.  On  arrêterait,  par  exemple,  avec  le  nom 
de  terroriste  (  murmures),  un  citoven  ami  de  la  li- 
berté. Je  le  répète  :  si  quelqu'ua  oans  les  tribunes 
manque  à  la  ConvenUon,  Le  président  doit  le  rappe- 
ler à  l'ordre.  S'il  est  quelques  tribunes  qui  doivent 
être  inspectées,  ce  sont  celles  qui  sont  données  à 
certains  particuliers,  celles  des  journalistes.  11  en  est 
dans  lesquelles  on  laisse  entrer  des  hommes  qui 
viennent  journellement  avilir  la  Convention  :  ce 
sontcelles-là  qu'il  faut,surveillcr  ;  dans  les  autres,  si 
un  citoyen  se  permettait  quelque  insulte,  ceux  qui 
sont  avec  lui  sauraient  bien  vite  le  reconnaître.  Les 
journalistes,  au  contraire,  introduisent  souvent  chez 
eux  des  aristocrates 

RiCHOUX  :  Les  journalistes  si^alent  les  coquins. 

***  :  Il  ne  faut  point  de  privilèges;  toutes  les  tri- 
bunes doivent  être  également  soumises  à  la  police. 
M  n'est  pas  de  raison  pour  que  la  Convention  souffre 
plutôt  de  mauvais  citoyens  dans  une  loge  que  dans 
une  autre;  car  il  n'y  a  que  les  mauvais  citoyens  qui 
osent  l'insulter. 

Mais  je  p^nse  que  le  décret  qui  vous  a  été  présente 
ne  vaut  rien,  tel  qu'il  est  rédigé;  il  faut  supprimer 
le  mot  habilués,  el  charger  les  comités  de  surveil- 
ler également  tous  ceux  qui  viendraient  troubler 
nos  délibérations;  la  règle  doit  être  la  même  pour 
tous. 

MoNTMATAU  '.  La  rédaction  devrait  porter  que  la 
Convention  enjoint  aux  inspecteurs  ac  la  salle  de 
faire  faire  une  police  plus  exacte  dans  ses  tribunes. 

CoLOMREL  :  Il  faut  bien  que  les  tribunes  soient 
soumises  à  une  police  comme  nous.  Il  faut  employer 
des  moyens  pour  faire  respecter  la  représenlation 
d'un  grand  peuple,  du  premier  peuple  du  monde.  Je 
demande  que  l'on  supprime  le  moi  habilués  aux  iri- 
bunes  :  ces  mots  sembleraient  vouloir  empêcher  les 
citoyens  de  prendre  l'habitude  de  venir  à  nos  séan- 
ces ;  mais  que  la  Convention  charge  ses  comités  de 
prendre  des  mesures  nécessaires  pour  établir  une 
police  dans  les  tribunes,  conforme  au  respect  dû  à 
la  Convention  nationale.  (Applaudissements.) 

Macre  :  Je  demande  l'ordre  du  jour  motivé  sur  ce 
que  l'assemblée  a  le  droit  de  faire  la  police  chez  elle. 
Ceux  qui  troublent  les  séances ,  partout  où  ils  sont 
doivent  être  arrêtés,  %oit  dans  les  tribunes  publi- 
ques, soit'dans  celles  des  journalistes. 


195 


Bentabole  :  Aucun  danger,  aucune  menace  ne 
mVinpf^clicra  de  dire  la  vérité.  (Murmures  dans  une 
extrémité.)  Je  prie  In  Convention  de  vouloir  bien 
examiner  que  depuis  longtemps  on  ne  troublait  plus 
ses  séances;  il  y  a  ,  je  crois  ,  dix-huit  mois  que  cela 
n'était  arrivé.  (Bruit.)  Ce  n'est  que  depuis  quelques 
jours  que  l'on  manque  de  respect  à  la  Convention. 
(Murmures.) 

Je  me  tairais  si  je  ne  jouissais  pas  du  droit  que  le 
peuple  m*a  donné.  Si  la  Convention  ne  conserve  Tat- 
titude  fière  au'elle  a  prise  le  9  thermidor,  elle  en 
perdra  tout  le  fruit.  Elle  abandonnera  le  droit  du 
neuple  si  elle  ne  sent  la  nécessité  de  faire  taire  les 
hctions.  Qu'elle  se  revêtisse  du  caractère  qui  luiconr 
vient  ;  qu'elle  se  fesse  porter  le  respect  qui  lui  est 
dû  !  Un  préopinant  a  présenté  une  mesure  d'indul- 
gence pour  qui  insulterait  la  Convention.  Il  n*y  a 
que  ceux  qui  veulent  la  voir  outragée  qui  puissent 
être  indulgents  en  pareil  cas. 

Vous  insultez  le  peuple,  citoyens,  si  vous  permet- 
tez qu'on  vous  insulte  dans  vos  séances.  La  Conven- 
tion, la  luremière  assemblée  du  monde,  la  Conven- 
tion«  qui  fait  trembler  toutes  les  puissances  de 
rSurope  par  un  seul  décret,  se  laisserait  atteindre 
par  quelques  membres  !  Non;  elfe  ne  le  souffrira  ja- 
mais. (Applaudissements.  -^ÀTon,  non/  s'écrie- t-on 
de  toutes  parts.) 

Bentabolb  :  Passera  Tordre  du  jour  quand  il  s'a- 
git de  maintenir  le  respect  qui  vous  est  dû,  ce  serait 
vous  faire  une  injure  à  fon.^-mémes.  Depuis  Quand 
s'est- on  permis  de  vous  insulter?  depuis  que  1  on  a 
vu  que  des  membres  de  cette  assemblée  se  permet- 
taient de  traiter  lenrs  collègues  de  fripons,  de  co- 
quins ,  et  menaçaient  de  les  assassiner.  Tout  ceci 
tend  à  la  guerre  civile.  Soyez  sévères  envers  vos 
membres,  et  vous  vous  ferez  après  respecter  sans 
peine  par  les  tribunes.  Je  demande  enfin  que  la  Con- 
vention charge  ses  comités  de  prendre  des  mesures 
sévères  pour  empêcher  que  la  Convention  ne  soit 

S  lus  désormais  insultée  par  qui  que  ce  soit.  (Applau- 
issements.) 

La  discussion  est  fermée. 

Quelques  membres  demandent  que  l'on  mette  aux 
voix  la  rédaction  telle  qu'elle  a  été  d'abord  présen- 
tée ;  d'autres  demandent  la  rédaction  de  Colombel. 

Cette  dernière  est  adoptécf  comme  elle  suit  : 

c  La  CoBvenUon  aalionale  rharge  ses  comttéi  des  inftpee- 
Uun  de  la  salle  et  de  sûreté  géDérale  de  prendre  les  me- 
sures nécessaires  pour  établir  une  police  dans  les  tribunes, 
conforme  au  respect  dû  a  la  Conveniion  nationale.  > 

—  Clauzel  demande  qu'on  entende  Merlin,  chargé 
de  proposer  les  articles  de  la  loi  sur  les  émigrés,  dont 
la  rédaction  a  été  renvoyée  hier  aux  comités,  et  que 
l'assemblée  discute  ensuite  le  projet  des  fêtes  déca- 
daires. 

Chénibr  :  L'assemblée  n'aurait  pas  le  temps  de 
discuték*  ce  projet  de  décret  aujourd'hui.  Je  <]emande 
qu'il  soit  mis  demain  au  grand  ordre  du  jour. 

Clauzel  :  Je  voudrais  que  Ton  entamât  toujours 
la  discussion,  parce  que  1rs  prêtres  mettent  tous  les 
moments  à  profit  pour  égarer  le  peuple. 

BouaDON  :  Je  crois  également  qu'il  est  trop  tard  ; 
et  quoiqti'un  prêtre  qui  n*a  pas  su  faire  le  sacrifice 
de  son  amour-propre  au  bien  de  sa  patrie  fasse  ven- 
dre à  la  porte  de  la  salle  un  ouvrage  dangereux ,  je 
ne  crains  rien  du  peuple. 

Après  une  légère  discussion  ,  l'assemblée  décrète 
que  demain,  au  grand  ordre  du  jour ,  elle  discutera 
cet  objet,  et  entendra  tous  ceux  qui  ont  des  idéesà  lui 
proposer. 


—  Merlin  soumet  les  articles  de  la  loi  sur  les  émi- 
grés, dont  le  renvoi  avait  été  ordonné  pour  en  faire 
une  nouvelle  rédaction. 

Après  quelque  discussion ,  le  décret  est  rendu 
comme  il  suit  : 

«  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu  ses  co- 
mités de  salut  pubUc,  de  sûreté  générale  et  de  législation, 
décrète  : 

«  Art.  V".  Le  décret  du  28  frimaire  dernier,  qui  charge 
le  représentant  du  peuple  Bar  de  recueilUr  des  renseigne- 
ments sur  les  émigrés  des  départements  du  Haut  et  du  Bas- 
nbin,  est  rapporté. 

I U.  Il  est  enjoint  aux  accusateurs  publics  et  aux  agents 
nationaux  de  toute  la  répubUque,  sous  les  peines  portées  par 
la  loi  du  U  frimaire  de  l'an  2  contre  les  fonctionnaires  né- 
gligents ou  coupables,  de  poursuivre  et  faire  juger  sans  dé- 
lai, suivant  toute  la  rigueur  des  lois,  les  émigrés  et  prêtres 
déportés  qui  auraient  osé  rentrer  en  France. 

I  111.  n  est  néanmoins  accordé  aux  émigrés  des  départe- 
ments du  Haut  et  du  Bas-Rhin,  qui  seraient  rentrés  en  France 
par  l'effet  d'une  confiance  anticipée  dans  les  résultats  pré- 
sumés du  décret  mentionné  en  l'article  r',un  délai  de  deux 
décades,  et  d'un  jour  en  sus  par  clAq  lieues,  pour  sortir  du 
territoire  de  la  république. 

I IV.  fie  seront  pas  réputés  émigrés  les  ouvriers  et  la- 
boureurs non  ex-nobles  ou  prêtres  travaillant  habituelle- 
ment de  leurs  nains  aux  ateUers,  aux  manufectures  ou  à  la  ' 
terre,  et  vivant  de  leur  travaU  journalier,  leurs  fenunes  et 
ieurs  enfants  au-desfons  de  dix-huit  ans,  pourvu  qu'ils  ne 
Kolent  sortis  du  territoire  de  la  répubUqile  que  depuis  le 
l«r  mai  1793,  qu'ils  rentrent  en  France  avant  le  !•'  germi- 
qA|  prochain,  et  que,  dans  le  mois  suivant.  Ils  produisent 
devant  le  directoire  du  district  de  leur  dernière  résidence 
une  attestation  de  huit  témoins,  certifiée  par  le  conseil  gé- 
néral de  leur  commune  et  par  le  comité  révolutionnaire, 
constatant  la  profession  qu'ils  exerçaient  avant  leur  sortie 
de  France,  ainsi  que  l'époque  de  cette  sortie. 

K  V.  Les  qualités  requises  dans  les  témoins  pour  les  certi- 
ficats de  résidence  le  seront  également  pour  les  attestations 
mentionnées  en  l'article  précédent. 

•  VI.  Ceux  qui ,  dans  les  attestations  mentionnées  en 
l'article  IV,  auront  certifié  des  faits  faux,  seront  condamnés 
k  la  déportation  perpétuelle,  avec  confiscatlonde  leurs  biens. 

I  VU.  Les  propriétés  non  encore  vendues  de  ceux  qui 
rentreront  dans  leterritoire  de  la  république,  en  exécution 
de  l'article  IV,  leur  seront  rendues,  à  la  charge  par  eux  de 
payer  les  frais  de  séquestre,  et  d'entretenir  les  baux  qui  en 
auront  été  faits  par  la  nation  pendant  leur  absence. 

I  Quant  à  celles  de  leurs  propriétés  qui  »t  trouveront 
vendues,  le  prix  leur  en  sera  remis  à  tltn  de  secours,  et  d'a- 
près les  conditions  des  ventes,  déduction  faite  des  frais  de 
séquestre  et  de  vente. 

I  VlII.  Les  baux  d'immeubles  faits  entre  particuliers,  pen- 
dant l'absence  des  individus  qui  rentreront  au  sein  de  la  ré- 
publique, en  exécution  de  l'article  IV,  seront  maintenus. 

c  IX.  Les  agents  nationaux  des  districts  seront  tenus  d'in- 
sérer dans  les  comptes  décadaires  qu'ils  adresseront  an 
comité  de  législation  la  liste  des  certificats  qui  auront  été 
produiu  devant  les  admlnbtrations  de  district,  çn  consé- 
quence de  t'article  IV. 

«  Le  comité  de  législation  fera  imprimer  ces  listes,  et 
les  fera  disuribuer  à  tous  les  membres  de  la  Convention  nt- 
tlonale. 

I  X.  Il  ne  sera  point  dérc^  par  le  présent  décret  à  celui 
du  29  frimaire  dernier,  relatif  aux  officiers  mariniers,  ma- 

lelou  et  novices  qui  se  trouvaient  à  cette  époque  en  pays 

étranger. 

K  XL  Le  présent  décret  sera  inséré  au  Bulletin  de  corres- 
pondance, tradyiit  dans  toutes  les  langues,  et  envoyé  aux 

départemenu,  aux  armées  et  aux  agents  de  la  républiaue 

près  les  gouvernements  alliés  ou  neutres.  > 
La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉAIfCB  DU  23  NIVOSE. 

L*agent  national  du  district  de  Dieppe,  départe* 
ment  de  la  Seine-Inférieure ,  instruit  la  Convention 
nationale  que  six  gros  cultivateurs  du  canton  d'Eu, 
après  la  suppression  du  maximum,  ont  passé  Tobli* 
gation  non-seulement  de  ne  pas  augmenter  lepri< 
de  leurs  grains,  mais  de  le  diminuer. 


19e 


L'administratjoô  D'à  pas  cm  devoir  passer  sons 
silence  ce  trait  de  vrai  civisme,  et  elle  a  cru  devoir 
en  Taire  part  non-seulemerKt  à  tous  les  administrés , 
mais  encore  à  la  Convention  nationale,  pour  que  cet 
exemple  puisse  trouver  des  imitateurs. 

L'aaseailiicf  <  n'rrète  l'iosertion  au  Bulletin  de  celte 
lettre  par  extrail. 

—  Pottier  propose,  ud  projet  de  décret  qui  est 
adopte  en  ces  termes  : 

c  La  Convention  nationale,  sar  le  rapport  de  ton  contté 
de  Ic^slation,  décrète  ce  qui  suit  : 

I  Le  citoyen  Favard,  Jage  an  Iribonal  rérdatioDiiaira, 
nommé  par  décret  du  13  de  ce  moU»  y  reoupUra  les  fonc- 
tions de  Tice-président,  an  Ueu  da  dloyen  Piéfàt,  Il  tn 
remplacé  dans  les  foncUons  de  Jage  par  le  dloyen  Charles 
PissM,  juge  suppléant  an  trilmnal  dn  distrid  de  Brioode. 

«  Les  citoyens  Crochet,  adminlstratear  dn  district  de  Ca- 
lais, et  Perretoo,  Ja0e  au  tribunal  dn  distriel  de  BoorgnlB, 
département  de  l'Isère,  sont  nommés  pour  remplir  les  fooe- 
tions  de  jurés  an  tribunal  rérolutionnaire,  an  lien  des  d« 
toyens  Piers,  nreffier  dn  tribunal  du  district  deSnfait-ODier* 
et  Rubat,  cl-d(e?anl  juge  an  tribunal  dn  district  di  IttooB, 
nommés  par  décret  dn  IS  de  ee  osola. 

t  La  Convenikm  nationale  déclare  que  knominatlonlritn 
par  le  mèoM  décret  dn  duntu  Leimide»  poor  ranpUr  les 
foncUons  de  juré,  est  appUesUs  an  dtoyca  Lemde  père,  hor- 
IO0erèGompiègne. 

c  La  commiasinn  des  administratlom  dvilas,  pollen  et 
tribunaui,  est  chargée  ds  prendra  les  nMRuca  «<%yiiilrw 
pour  la  prompte  oéentioB  dn  prétest  décret,  qui  ne  sem 
imprimé  que  dans  le  Bulletin  de  oorrespondanoe.  » 

JarsPamt  iLUBis  ^  au  nom  du  comité  des  secours 
publics  :  Citoyens,  le  comité  des  secours  publics  ré- 
clame toujours  avec  confiance  TOtre  justice  en  fa- 
Tcur  de  ceux  qui  ont  versé  leur  sans  ponr  la  patrie. 
11  s^it  que  c*est  remplir  votre  vceu  Te  pins  cher  que 
de  les  faire  jouir  promptement  des  Indemnités  qui 
leur  sont  dnes  à  si  juste  titre ,  et  il  s'en  occupe  avec 
une  activité  qui  lui  donne  des  droits  à  votre  appro- 
bation. 

Vous  partageras  sans  doute  la  satisCKlioD  qiri  natt 
du  sentiment d*avoirfiiit8on  devoir,  et  qu*il  ëproure 
en  vous  annonçant  auJonrd*hni  ooe  le  travail  des 
pensions,  qui  était  encore,  il  y  a  deux  mois,  arriéré 
de  pn^s  de  trois  mille  rapports,  se  troore  maintenant 
au  courant,  et  que  vous  pouvex  désormais  pronon- 
cer sur  les  réclamations  des  militaires  infirmes  ou 
blessés,  aussitôt  qu'elles  tous  seront  présentées. 

Mais,  en  se  lirrant  an  sentiment  de  reconnaissance 
que  tous  les  amis  delà  liberté  doivent  avoir  pour 
ceux  qui  la  défendent,  votre  comité  ne  perd  point  de 
tue  que  son  premier  devoir  est  de  se  conformer  aux 
règles  que  vous  aves  établies  vous-mêmes  pour  la 
fixation  des  pensions.  Toutes  les  fois  qu'il  trouve 
dans  les  lois  uno  disposition  qui  peut  servir  de  base 
fixe  à  son  travail,  il  s'y  conforme  avec  la  plus  scru- 
pult  use  exactitude,  et,  dans  les  cas  oCfc  il  n'a  pour 
ffuide  que  sa  conscience,  il  tiche  de  condlier  l'ioté- 
rrt  public  avec  celui  qu'inspirent  naturellement  dea 
hommes  qui  ont  souffert  \)out  la  patrie.  Il  ^vite  soi- 
gneusement d'être  injuste  envers  aucun  individu  ;  il 
porte  m^mo  rattention  sur  ce  point  jusqu'à  vous  pro- 
poser des  secours  momentanés  en  ftiveur  de  ceux 
îîul.  sans  avoir  desdrolts  à  une  pension,  se  iwuvcnt 
iiouiiaut  dwiis  une  position  propre  à  exciter  de  lin- 
nU  ;  mais  il  remplit  avec  fermeté  ledevoir  rigoureux 
de  ivirler  lesiVclamatlons  qui,  quoiquesouvent  pré- 
ai»iitéiui  avec  beaucoup  tfart,  lui  paraissent  indis- 
or^tes  et  aana  fondement. 

Tel*  sont,  oiloye us,  les  principes  nul  dirigent  vo- 
trt»  oomité  des  secours  publics,  et  qu^il  a  suivis  pai^ 
tieullkrement  dani  la  projet  da  décret  que  je  voua 
prtUenltt 


Voici  le  projet  de  décret  : 

t  La  CoQvenUon  nationale,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  ion  comilé  des  secours  publics,  décrète  : 

t  krlAt,  La  U'ésorerie  nattonale  paiera.  ^  titre  de  |)en- 
slon,aosmlHttlres  Infirme»  on  blessés  dénommés  dans  les 
trois  états  anneiés  an  présent  décret,  la  tomme  de  527,7941. 
U  sous,  qui  sera  répartie  entre  eux  suivant  les  proporUons 
établies  dans  lesdits  états. 

•  11.  Sont  exceptés  des  dispositions  de  Tarticle  précédent 
ceux  desdits  mflllatres  dénommés  dans  le  premier  état,  de- 
puis et  y  compris  le  n*  SU  Jasqu*au  n*  321  Inclusivement  ; 
ito  recevrom  seulement  un  secours  une  fols  payé  à  chacun 
d'eux,  sur  la  préteataUon  d'an  extraK  du  pr&ent  décret. 

•  Pour  cet  effet,  la  trésorerie  notionale  est  autorisée  a 
foire  la  dépense  île  la  tamme  5,000  iiv.,  qui  leur  sera  dis- 
tribuée dans  les  proporUons  établies  audit  état. 

•  UL  11  n'y  a  Ueu  à  déUbérer  sur  les  demandes  ou  récla* 
maUons  descftoyens  dénommés  dans  le  premier  état,  depals 
et  y  compris  le  n*  932  Jusqu'au  n*  2.39  Inclusivement. 

«  I?.  Les  pensfOBsacoordées  par  le  présent  décret  seront 
payées  à  dater  des  époques  ci-après  déterminées .  savoir  : 

•  Pour  eeux  qui  sont  traités  d'après  les  dispositions  de 
lartiole  VH  de  In  loi  du  OJuin  1793,  à  dater  da  jour  de  leurs 
blessures: 

«  Ponr  ceux  qd  sont  traités  suivant  les  dispositions  de 
l'article  Vm  de  la  même  lot,  à  dater  du  Jour  où  Ils  auront 
cessé  de  recevoir  la  subsistance  ; 

«  Et  pour  fotis  les  antres,  à  compter  do  Jour  où  Ils  au- 
ront cessé  do  tatieher  leurs  appointementa,  et  à  la  charge 
par  tous  indisUnctement  de  rempUr  les  formaUtés  exigées 
des  autres  penstoimaircs  da  ta  répubUoue. 

<  V.  Les  étata  annexés  an  présent  d&ret  ne  seront  point 
imprimés.  ■ . 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

BsoBASséaiAUx,  au  nom  du  comité  de  législation  : 
Par  votre  décret  du  13  de  ce  mois,  vous  avez  précisé 
le  principe  si  longtemps  indécis  sur  les  pères  et 
mères  des  émigrés  ;  mais  ce  |)rincipe  exise  oes  déve- 
loppements et  un  mode  d*exécution  qui  doivent  être 
Tobjet  d'une  nouvelle  loi.  Je  sais  que  le  rapport 
qu'elle  exige  vous  sera  présenté  très-incessamment  ; 
mais,  quelle  que  soit  la  célérité  qu'on  y  apporte ,  il 
s'écoulera  encore  quelques  jours  avant  que  vous 
ayez  pris  une  détermination  aefînitive  ;  et  (Tailleurs, 
quand  vous  aurez  prononcé,  il  restera  toujours  en- 
core un  intervalle  plus  ou  moins  long  entre  la  lev^e 
du  séquestre  et  l'exécution  de  la  loi  a  laquelle  elle 
est  nécessairement  subordonnée.  Rien  n'étant  donc 
réellement  changé  pour  le  moment  à  la  position  des 
pères  et  mères  des  émigrés ,  et  leurs  besoins  deve- 
nant de  jour  en  jour  plus  urgents,  vous  jugerez  sans 
doute  au*il  n'est  pas  possible  de  différer  plus  long- 
temps de  mettre  un  terme  a  l'état  de  détresse  dans 
lequel  ils  n'ont  cessé  d'être  depuis  que  le  séquestre 
existe  sur  leurs  biens. 

C'est  donc  pour  satisfaire  a  leurs  réclamations , 
et  remplir  en  même  temps  vos  vues  de  justice  et 
d'humanité,  que  je  viens,  au  nom  des  comités  de 
législation  et  des  finances,  vous  proposer  le  décret 
suivant, comme  un  préalable  nécessaire  aux  mesures 
ultérieures  qui  doivent  résulter  du  principe  ^ur  le- 
quel vous  vous  êtes  fixés: 

I  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  ses  comités  de  iégIsiaUon  et  des  finances,  décréta  : 

•  Art.  hr.  Eq  attendant  que  le  séquestre  sur  les  biens  des 
pères  e(  mères  des  émigrés  soit  levé,  par  suite  d'exécuUon 
du  décret  du  13  nivôse  présent  mois ,  il  sera  accordé  sur 
le  produit  de  ces  biens,  auxdito  pores  et  mères,  les  secours  qui 
leur  sont  nécessaires. 

c  II.  Ces  secours  seront  fiiés  par  le  directoire  du  district, 
d'après  les  observaUons  de  la  municipalité.  Leur  quotité 
pourra  être  portée  jusqu'A  concurrence  des  deux  Uers  des 
revenus  nets  des  biens  des  pères  et  mères  des  émigrés,  ver- 
sés iusqu'à  présent  dans  les  caisses  nationales,  pourvu 
qu'elle  n'excède  pas  S,000  liv.  par  téta,  et  1,200  Uv.  pour 
chaque  enfant. 

I III.  Les  sommes  allouées  pour  lesdlts  secours  seront 
payées  par  le  receveur  des  revenus  nationaux,  sur  les  man« 


197 


diudes  directoires  dé  district,  et  Impalées  dans  les  comptes 
à  réglei  avec  les  pères  et  mèi*es  lors  de  la  levée  da  séques- 
tre mis  sur  leurs  biens.  • 
Ce  projet  de  décret  est  adopte. 

TaiBAULT,au  nom  des  comités  de  salut  public,  d6 
sAretégéAérale.de  lëgislation  etdesfinances  réunis  : 
De  toutes  les  parties  de  la  France  les  fonctionnaires 
publics  ont  élevé  la  voix;  ils  se  sont  adressés  au  oo- 
uiitë  des  tinances;  quelques-uns  se  sont  présentés  à 
cette  barre  pour  vous  demander  une  augmentation 
de  traitem(*ut.  Les  représentants  du i>euple  eux-mê- 
mes ont  démontré  Tinsuffisanoe  de  lindemoité  que. 
la  nation  leur  accorde. 

Sans  doute  que  tous  les  Téritables  Français  Se** 
raient  animés  du  désir  sii\père  de  servir  la  pairie 
sans  rétribution  si  leur  fortune  le  leur  permettait; 
mais  elle  n*est  pas  toujours  la  compagne  ndèle  du  ta* 
lent  et  de  la  vertu;  et  le  pauvre  qui  a  mérité  les  suf* 
frages  de  ses  concitoyens  est  un  homme  précieux  à 
la  société. 

Votre  comité  des  finances  a  cru  qu*il  devait  em- 
prunter les  lumières  des  membres  qui  composent 
ceux  de  législation,  de  salut  public  et  de  sûreté  gé- 
nérale. 

Je  viens  vous  apporter  le  fruit  de  leurs  réflexions; 
é\Ws  sont  fondées  sur  la  justice  et  la  vérité. 

Au  commencement  de  la  révolution ,  on  fixa  les 
indemnités  et  les  salaires  de  ceux  qui  travaillaient 
à  fonder  la  liberté  ;  vous  n'avez  pas  oubljé  que  les 
gages  d*un  homme  depuis  longtemps  inutile ,  et  qui 
enfin  conspira  contre  la  sûreté  de  TEtat  et  la  li- 
berté du  peuple  français ,  étaient  portés  à  plus  de 
30  millions,  tandis  que  le  conciliateur  des  familles, 
le  pacificateur  de  son  canton,  ne  recevait  que  600 
livres. 

^  Vous  a vex  brûlé  pour  jamais  la  liste  civile;  vous 
émargerez  provisoirement  celles  des  fondateurs  de 
la  république  et  des  fonctionnaires  ou  agents  utiles 
qulfont  mouvoir  avec  constance  et  probité  la  ma- 
chine administrative  politique  ou  judiciaire. 

.Ai  malveillance  a  calonmié  les  moyens  du  gou- 
vi-rnement  qui ,  depuis  votre  réunion,  a  tenu  tête  à 
TEurope  :  il  est  de  la  nature  de  toutes  les  révolu •* 
tions  de  briser  l'équilibre  qui  subsistait  entre  les 
empires;  heureux  quand  la  balance  de  la  Justice  ré- 
siste aux  efforts  multipliés  des  ennemis  de  l'huma- 
nité! Eh  bien ,  vous  l'avez  juré  au  peuple  français, 
cette  justice  ne  périra  qu'avec  vous;  car  c'est  par 
elle  que  vous  voulez  sauver  la  patrie. 

Grands  comme  le  peuple  que  vous  représentez, 
vous  étoufferez  avec  votre  fierté  ordinaire  et  les  sif- 
flements de  Tenvie  et  les  fureurs  de  la  royale  aris- 
tocratie ,  et  les  bourdonnements  de  ces  insectes  dé- 
boutés qui  vendent  Thonneur  qu'ils  n'ont  pas  à  la 
faction  qui  les  paie  le  plus  chèrement.  La  faiblesse 
conduit  à  la  lâcheté.  Soyez  fermes  un  jour ,  vous 
vous  épargnerez  une  année  de  troubles. 

Lorque  l'Assemblée  constituante  fixa  les  indem- 
nités des  représentants  du  peuple  et  les  traitements 
des  fonctionnaires  publics  Jes denrées  étaient  abon- 
dantes et  à  un  taux  ordinaire  ;  les  coups  funestes 
portés  au  commerce,  la  persécution  exercée  contre 
ceux  qui  s'y  livrent,  l'imprévoyance  de  l'ancien 
f^oiivrinement,  les  circonstances  actuelles,  ont  dû 
nécessairement  en  élever  le  prix.  Il  Tant  donc  que 
ceux  qui  donnent  leur  temps  tout  entier  à  la  chose 
publique. puissent  y  atteindre,  sans  les  dispenser 
néanmoins  des  sacrifices  que  tout  républicain  atta- 
ché sincèrement  au  char  de  la  liberté  doit  généreu- 
-•ement  offrir. 

La  nation  doit  indemniser  honorablement  ceux 
qui  la  servent  avec  des  intentions  pures;  mais,  pour 
▼ivifier  l'arbre  de  la  liberté ,  il  faut  émonder  les 


branches  parasites.  Vos  comités  s*oceupent  de  ce 
travail.  Voici  le  projet  de  décret  que  m'ont  chargé 
de  vous  présenter  ceux  de  législation ,  sûreté  géné- 
rale, salut  public  et  finances  : 

t  Art.  H'.  L'indemnité  des  représentants  dtt  peuple  est 
portée  ù  36  Uvres  par  jour,  à  dater  du  \f  vendémiaire  dei^* 
oler. 

t  U.  Les  foDctionnaires  publics  et  les  employés  dans  les 
administrations  recevront  une  augmeotatioD  de  traltemeol 
dont  la  fixation  sera  réglée  sur  un  rapport  qui  sera  présenté 
sous  trois  Jours  par  le  comité  des  finaoces.  • 

Ddhem:  Je  demande  la  parole. 

MoNtf  EL  :  11  me  semble  qu'aii  lieu  d'une  augmen- 
tation par  mois  il  vaudrait  mieux  donner  aux  re- 
S  résentants  du  peuple  une  somme  une  fois  payée 
e  4,000  liv.,  par  exemple  ;  au  moyen  de  cette  ré- 
tribution, les  pères  de  famille  pourraient  acquitter 
les  dettes  que  la  rigueur  des  temps  et  la  modicité  de 
leur  indemnité  les  ont  obligés  de  contracter. 

LiVASSKUR  (de  la  8art|ie)  :  J'entendrais  plus  vo» 
lontiersdans  cette  assemblée  parler  d'économie  que 
d'augmentation. 

TntJBiOT  :  C*est  détestable! 

Levassbdr  (de  la  Sarthe)  :  Je  demande  pourquoi, 
avant  de  proposer  cette  augmentation ,  les  comités 
ne  nous  présentent  pas  des  Di^jets  de  décret  pour 
diminuer  les  dépenses;  je  demande  pourquoi  on 
laisse  subsister  des  tribunaux  de  district ,  lorsqu'il 
suffirait  d'en  laisser  un  par  département.  Que  Von 
fasse  des  économies ,  et  alors  les  représentants  ver- 
ront s'ils  peuvent  penser  aune  augmentation  pour 
eux-mémes.Les  députés  seront  toujours  riches  assez 

![uand  ils  auront  toutes  les  vertus  du  républicain« 
On- applaudit  dans  quelques  tribunes  de  l'une  des 
extrémités.) 

DuosM  :  J'ai  demandé  ta  parole  pour  parler  dans 
le  même  sens  que  mon  collègue  Levasseur.  (Applau- 
dissements. )  Je  commence  a  m'apercevoir,  moi  qui 
ne  suis  qu'un  garçon ,  que  l'indemnité  devient  in- 
suffisante; mais  je  sais  qu'il  y  a  des  fonctionnaires 
publics  qui  ont  de  la  famille ,  et  qui  n*ont  pas  autant 
que  nous.  11  eût  fbllt^  commencer  par  présenter  le 
projet  de  décret  qu'on  nous  promet  sous  trois  jours; 
car,  lorsqu'il  s'agit  d'augmentation,  nous  ne  devons 
parler  de  nous  qu'en  dernier  lieu.  (Nouveaux  ap- 
plaudissements dans  la  même  partie.  )  Nous  nous 
occuperons  de  nous  quand  nous  n'aurons  plus  è 
nous  occuper  de  personne.  Je  n^ajouterai  pas  d'au- 
tres raisonnements;  le  patriotisme  en  connaîtra  trop 
bien  la  justesse  pour  que  j'aie  besoin  de  les  déve- 
lopper davantage.  Ce  sont  le  de  ces  choses  qu'on 
sent  mieux  qu'on  ne  les  peut  exprimer.  IBientOt, 
lorsque  les  sages  mesures  que  la  Convention  a  prises 
auront  reçu  toute  leur  exécution ,  nous  jouirons  de 
plus  d'aisance  ;  mais  ne  faisons  pas  croire  que  nous 
voulons  de  l'argent  ;  ne  faisons  pas  dire  que  nous 
puisons  dans  le  trésor  public;  ne  faisons  pas  dire  aux 
aristocrates,  aux  rovalistes  qui  relèvent  la  tête,  aux 
chouans  ,.aux  rebelles  de  toute  espèce ,  que  nous  ne 
pensons  qu'à  nous.  Je  sais  bien  que  la  calomnie 
pourra  empoisonner  l'opinion  que  i'émets  en  ce  mo- 
ment ;  mais  c'est  è  nous  d'écraser  la  calomnie  sous 
le  talon  en  marchant  au  but.  (Les  mêmes  applaudis- 
sements recommencent.  ) 

Pbrrin  f  des  Vosges)  :  Je  vais  vous  proposer  aussi . 

le  nouvelle  occasion  d'économie.  Levasseur  vous 


une 


a  parié  de  l'inutilité  des  tribunaux;je  vais  vous  par- 
ler de  celle  de  la  permanence  des  conseils  de  dis- 
trict :  j'en  demande  k  l'instant  la  suppression.  Vous 
ne  voulex  pas  une  réaction  funeste  ;  les  comités  ré- 
volutionnaires nouvellement  organisés  se  servent, 
pour  tourmenter  les  anciens  comités  révolution- 


198 


S 


noires,  du  pouvoir  que  vous  leur  avez  confie.  Quant 
à  l'augmentation  d*indemnité,  je  la  crois  nécessaire. 
Nous  avons  tous  la  douleur  de  savoir  qu'il  y  a  ici  un 
grand  nombre  de  pères  de  famille  c|ui  sont  dans  une 
':éne  extrême.  Je  vais  mettre  à  Taise  la  délicatesse 
c  tout  le  monde  :  fixons  une  somme  qu*il  sera  libre 
de  prendre  ou  de  ne  pas  prendre.  Nous  avons  une 
foule  de  branches  d'administration  où  nous  pouvons 
porter  la  hache  de  Téconomie  ;  nous  avons  cette 
agence  des  lois  contre  laquelle  je  ne  cesse  de  m'ële- 
ver ,  et  sur  laquelle  on  ne  nous  fait  point  de  rap- 
port. 

Brival  :  Je  ne  crains  pas  de  dire  qu*il  est  fâcheux 
pour  les  représentants  au  peuple  d*entamer  une  pa- 
reille discussion  ;  mais  il  est  vrai  de  dire  qu'il  est 
peu  de  nos  collègues  qui  ne  soient  obligés  à  de 
grands  sacrifices.  11  est  impossible  que  ceux  qui  ont 
une  femme  et  des  enfants  vivent,  à  raison  de  la  pro- 
gression du  prix  des  denrées.  Quant  à  moi ,  je  dé- 
clareque  j*ai  besoin  d'augmentation.  (On  applaudit.) 

Plusieurs  voix  :  Et  moi  aussi! 

Brival  :  11  y  a  aussi  une  observation  à  faire;  c'est 
que  les  députes  en  mission  reçoivent  12,000  liv. 

Plusieuri  v<nx  :  Ils  sont  logés  et  éclairés. 

Brival:  Ils  ont  12,000  liv.;  ils  jouissent  de  leur 
logement ,  de  lenr  ameublement  et  d'un  équipage. 
Quels  étaient  ceux  qui  dans  l'Assemblée  constituante 
s  opposaient  à  riiidemnité?  C'étaient  Maury  et  Ca- 
zalès.  (On  applaudit.) 

Bbntarolb  :  Pour  démontrer  la  nécessité  de  l'aug- 
mentation proposée,  on  n'a  qu'à  comparer  le  prix 
actuel  des  denrées  au  prix  de  1789.  Lorsqu^on  fixa 
l'indemnité  des  députés  à  18  liv.,  on  faisait  venir 
une  voiture  de  bois  pour  50  sous  ;  aujourd'hui  un 
voiturier  demande  SO  liv.  H  est  certain  qu'un  repré- 
sentant du  peuple ,  qui  est  oblijgé  *de  travailler  le 
jour  et  la  nuit,  doit  avoir  du  bois,  de  la  lumière  et 
des  aliments,  le  peuple  français,  qui  est  grand ,  qui 
est  généreux ,  ne  veut  pas  que  ses  représentants 
soient  à  la  gène  ;  il  est ,  au  contraire ,  de  sa  dignité 
qu'ils  vivent  dans  une  honnête  aisance.  S'opposer  à 
cette  augmentation,  c'est  ta voriser  plutôt  I  aristo- 
cratie que  le  patriotisme  ;  car  que  résulterait-il  si 
l'on  ne  pouvait  accepter  ces  fonctions  sans  s'appau- 
vrir? C  est  que  les  seuls  gens  riches  seraient  fonc- 
tionnaires publics,  et  que  les  braves  sans^eolottes , 
les  bons  patriotes,  ne  pourraient  remplir  aucune 
place.  Quelques-uns  de  nos  collègues  disent  qu'ils 
n'ont  pas  besoin  d'augmentation ,  qu'ils  ne  la  rece- 
vront pas;  eh  bien,  je  déclare  que  c'est  par  une 
fausse  popularité  qu'on  peut  s'opposer  au  décret. 
(11  s'élève  quelques  murmures.)  S'ils  n'ont  pas  be- 
soin de  cette  augmentation, qu'ils  la  fassent  tourner 
au  soulagement  d'estimables  pères  de  tamille.  (On 
applaudit.  )  Mais  il  faut  que  tout  le  monde  la  reçoive 
pour  n'humilier  l'amour-propre  de  personne.  (Nou- 
veaux applaudissements.) 

Au  surplus,  on  ne  prétendra  pas  que  nous  ne 
savons  pas  faire  de  sacrifices.  C'est  ici  lé  cas  de  le 
dire  ;  il  n'y  a  pas  eu  dans  le  monde  une  assemblée 
qui  en  ait  tant  fait  à  la  patrie.  Beaucoup  d'entre  nous 
ont  tout  abandonné  ;  les  uns  sont  allés  aux  frontiè- 
res; plusieurs  y  ont  été  tués,  d'autres  blessés; et 
nous  tous  nous  sommes  prêts  à  y  marcher.  (  On 
applaudit.)  11  ne  faut  donc  pas  que  l'on  interprète 
mal  une  proposition  juste  aux  yeux  du  peuple  au- 
tant que.nécessaire  pour  la  Convention. 

Dartiooytb  :  Le  peuple  entend  que  ses  représen- 
tants le  servent  bien,  mais  il  entend  aussi  qu'ils 
aient  de  quoi  vivre ,  eux  et  leur  famille.  11  faut  dire 
et  proclamer  des  vérités  utiles;  je  dois  instruire  la 


Convention  d'un  fait  que  mon  collègue  Mathieu,  s'il 
est  ici,  peut  attester  ;  voici  ce  qu'on  dit  dans  le  pu- 
blic :  •  Les  représentants  du  peuple  n'ont  que  18  liv.; 
il  est  impossible  de  vivre  à  ce  prix;  ils  vivent  cepen- 
dant ;  ils  ont  donc  des  ressources  secrètes?*  Voilà 
les  prétextes  que  l'on  fournit  à  l'aristocratfe  ;  le  dé- 
cret aue  vous  allez  rendre  était  depuis  longtemps  de- 
mandé par  l'opinion  publique. 

Lbgkicdrb  :  La  cause  des  représentants  du  peuple 
est  inséparable  de  celle  du  peuple  même.  11  veut 
une  vous  travailliez  à  son  bonheur;  vous  avez  à  cet 
egtird  donné  plus  d'une  preuve  ;  il  ne  veut  pas  que' 
ses  représentants  jouissent  de  l'abondance ,  mais 
qu'ils  aient  le  nécessaire.  Il  faut  dire  franchement 
ce  ^u'ott  pense  ;  un  repcésentant  du  peuple  qui  sait 
servir  son  pays  ne  flatte  jamais  personne.  Je  vois 
dans  la  république  trois  classes  qui  souffrent  de  la 
dureté  du  temps  :  le  rentier,  le  pensionnaire  de 
l'Etat,  et  le  fonctionnaire  public.  Un  grand  nombre 
de  nos  collègues  ont  quitté  le^ir  pays,  leur  maison, 
et  sont  ici  avec  cinq  ou  six  enfants  en  chambre  gar- 
nie. Je  le  déclare,  je  dis  à  celui  qui  s'oppose  an  dé- 
cret :  «  Tu  as  de  la  fortune,  ou  tu  attends  qiu'on  l'en 
o£Fre.  >  (On  applaudit.)  11  fiaut  bien  qu'un  député  ait 
quelque  chose  à  donner. 

Qu  une  femme  dont  le  mari  ou  les  enfentssont 
aux  frontières  vienne  vous  recommander  une  péti-. 
tion  ;  si  les  besoins  sont  pressants,  quel  est  celui  de 
vous  qui  ne  lui  ouvrira  pas  son  portefeuille?  (On 
applaudit.  )  Chacun  voudra  d'avance  alléger  un  peu 
ses  maux;  il  faut  au  moins  donner  l'assignat  de  100 
sous.  Je  ne  sais  ce  que  c'est  aue  d'avoir  le  ventre 
plein  ou  un  morceau  de  pain  dans  ma  poche  quand 
je  vois  souffrir  mon  semblable.  (  On  applaudit.  ) 
J'ai  sept  enfants  et  pas  de- fortune;  j'ar  des  amis,  il 
est  vrai;  mais  ceux  d'entre  nous  qui  sont  de  deux 
cents  lieues,  qui  ont  tout  quitté,  il  leur  faut  des 
ressources.  (  On  apnlaudit.  )  Le  peuple  ne  regarde 
pas  combien  son  législateur  gagne ,  mais  comment 
il  le  sert. 

Cambon  :  Je  ne  combattrai  pas  une  augmentation 
d'indemnité,  car  on  ne  vous  la  propose  pas.  C'est 
l'abbé  Maury,  ce  sont  la  noblesse  et  le  clergé,  qui, 
pour  éloigner  les  pauvres ,  n'ont  fait  décréter  en 
89  qu'une  indemnité  de  18  liv.  Quant  à  celle  de 
36  liv.,  il  est  aisé  de  démontrer  par  des  calculs 
qu'en  proportion  du  prix  des  denrées  elle  nexépond 
pas  à  ce  que  valaient  18  I.  en  1789;  il  faudrait  54 
ou  60  liv.  J'appuie  donc  le  projet  de  décret;  mais  je 
voudrais  qu'en  «'occupant  des  fonctionnaires  publics 
on  s'occupât  aussi  des  rentiers  et  pensionnaires  de  u 
l'Etnt,  qui  sont  les  trois  classes  souffrantes ,  surtout f 
depuis  rabolition  du  maximum.  Si  j'eusse  assisté  à 
la  délibération  de  vos  comités,  j'aurais  proposé  de 
laisser  à  18  liv.  le  traitement  des  députés ,  mais  d'y 
ajouter  une  augmentation  depuis  1798.  Mon  avis 
serait  aussi  qu'ilfût  alloué ,  à  compter. du  l«r  ven- 
démiaire, une  augmentation  du  double  en  sus  aux 
fonctionnaires  publics,  aux  pensionnaires  et  aux 
rentiers  de  la  republique. 

Plusieurs  voix:  Les  petits  rentiers  seulement! 

Cambon  :  Vous  rendez  alors  tous  les  rentiers  de 
petits  rentiers. 

Charlier  :1I  me  semble  impossible  ou'on  ne  dé- 
crète pas  l'augmentation  des  indemnité  des  repré- 
sentants, dont  il  serait  facile  de  démontrer  Ja  néces- 
sité par  le  compte  de  leurs  dépenses  ;  car  on  verrait 
que,  sans  rien  jeter  par  les  fenêtres ,  ils  dépensent 
leur  patrimoine;  mais  les  autres  augmentations  me 
•paraissent  avoir  des  inconvénients ,  et  j'aimerais 
mieux  renoncer  à  toute  espèce  d'indemnité  que  de 
compromettre  le  gage  de  la  fortune  publique.  Je  de- 


199 


mande  donc  qu*on  décrète  ce  qui  regarde  les  dépu- 
tés, et  qu'on  renvoie  le  reste  aux  comités,  pour  faire 
un  rapport. 

PÉNiÈBES  :  Je  demande  qu*on  décrète  ce  prin- 
cipe, que  les  fonctionnaires  publics  serout  augmen- 
tes. N*ayoos  pas  Pair  de  ne  nous  occuper  que  de 
nous. 

Plusieurs  voix  :  C'est  une  chose  prévue  dans  le 
décret. 

Le  projet  de  décret  présenté  par  Thibault  est 
adopte. 

Discussion  sur  Us  fêles  décadaires. 

Cbénieb  :  Depuis  que  le  comité  d'instruction  p«- 
blique  a  fait  un  rapport  sur  1rs  fêtes  décadaires, 
plusieurs  de  nos  collègues  ont  présenté  de  nouveaux 

{ilans ,  el  demandeni  en  ce  moment  la  parole  piour 
es  soumettre  à  rassemblée.  JedemandequMls  soient 
entendus;  je  demanderai  ensuite  la  parole,  soit  pour 
amalgamer  les  vues  qu'ils  proposeront  àa  plan  du 
comité,  soit  pour  laire  une  nouvelle  lecture  du  pro- 
jet que  je  vous  ai  présenté. 

EscBABSéRiAOX  Tatné  :  Citoyens ,  j*ai  besoin  de 
faire  précéder  le  projet  de  décret  que  je  vais  vous 
proposer  de  quelques  réflexions  sur  celui  du  co- 
mité. 

Vous  avez  vonlu  instituer  une  fête  civique  ;  mais 
je  ne  vois  point,  dans  le  plan  de  celle  qui  vous  est 
présentée ,  dans  les  idées  principales  qui  la  compo- 
sent et  dans  leur  exécution,  ce  caractère  attachant 
et  républicain, je  dirai  cette  espèce  de  féerie  que  Ton 
doit  trouver  dans  les  fêtes  d'un  peuple  libre,  et  que 
l'on  retrouve  dans  les  institutions  de  ce  çenre  dont 
l'antiquité  s'honore.  Sansdoute  l'instruction  doit  en 
former  les  bases ,  mais  il  faut  encore  aux  hommes 
autre  chose  que  de  Tinstruction  :  le  plaisir  est  le  be- 
soin de  leur  existence  ;  ils  ont  besoin ,  pour  ainsi 
dire ,  de  sortir  quelques  instants  des  chaînes  de  la 
société  pour  se  rapprocher  de  la  liberté  et  de  la  na- 
ture. Le  oœur  est  naturellement  avide  de  jouissan- 
ces; il  n'en  est  point  dans  les  républiques  de  plus 
pures,  jde  plus  chères,  que  celles  de  l'égalité ,  de  la 
fraternité  et  de  l'amour  de  la  patrie. 

On  courait ,  à  Sparte  et  à  Rome ,  aux  fêtes  civi- 
ques qui  retraçaient  ces  sentiments  des  Ornes  libres; 
les  anciennes  démocraties  nous  ont  laissé  de  pro-^ 
fonds  modèles  dans  ce  genre  d'instruction.  Votre  co- 
mité d'instruction  publique  n'a  point  assez  consulté 
le  génie  des  anciens  législateurs,  qui  eurent  presque 
tous  l'art  admirable  d'intéresser,  u'émouvoir  l'esprit 
des  peuples. 

Dans  le  plan  de  fête  civique  que  votre  comité  vous 

f propose,  on  ne  voit  point,  on  ne  ressent  point  assez 
'intérêt  du  plaisir ,  les  charmes  de  l'égalité  et  de 
la  fraternité  que  doivent  goûter  des  frères,  des  ci- 
toyens rassemnlés  ;  on  assiste  et  on  sort  sans  être 
ému  du  spectacle  de  la  fête  :  rien  ne  vous  y  rappelle 
fortement. 

Prenez-y  garde,  citoyens;  plus  la  superstition , 
que  vous  remplacez  par  des  fêtes  civiques,  avait  su , 
par  ses  prestiges,  s'emparer  de  l'âme  et  des  sens, 
plus  vous  devez  donnera  vos  fêtes  ces  impressions 
et  ces  vives  émotions  qui ,  en  rappelant  toute  l'é- 
nergie des  sentiments  les  plus  chers ,  achèvent  de 
détruire  les  dangereuses  illusions  du  fanatisme. 

C'est  dans  ce  moment  surtout,  où,  lorsque  nous 
venons  de  traverser  un  siècle  de  philosophie  et  de 
lumières ,  lorsque  nous  avons  ramené  l'homme  a 
la  raison  et  à  la  nature,  on  voudrait  reporter  encore 
l'esprit  humain  sous  le  joug  dos  préjugés  religieux 
du  Xle  siècle;  c'est  dans  ce  moment  où  les  élément^ 
du  fanatisme  mal  éteint  se  reproduisent  dans  quel- 


ques parties  de  la  république,  où  un  autre  fanatisme 
politique  voudrait  se  relever  encore  avec  audace,  et 
lutte  sourdement  contre  les  institutions  républicai- 
nes; c'est  alors  que  vous  devez  imprimer  par  toutes 
vos  lois  une  trempe  prononcée  aux  esprits,  aux 
mœurs  et  aux  habitudes  de  la  nation  que  vous  devez 
rappeler  sans  cesse  aux  principes  de  la  république. 
Voyez  les  anciens  législateurs  :  c'est  en  donnant  du 
caractère  a  leurs  fêtes  civiques  qu'ils  ont  attaché  la 
durée  et  l'immortalité  à  leur  ouvrage.  Voyez  quel  ' 
amour,  quel  charme  le  génie  de  Lycurgue  a'vait  im- 
primé à  ces  fêtes  données  sous  le  ciel ,  sous  les  re- 
gards de  la  loi  et  de  la  vertu ,  à  tous  les  citoyens  de 
tout  âge. et  de  tout  sexe,  à  ces  fêtes  où  ils  célé- 
braient ensemble  la  douce  égalité,  la  fraternité  et  la 
patrie  ! 

Une  bonne  institution  doit  s'emparer  du  caractère 
national  pour  le  rendre  vertueux;  il  faut  qu'une 
fête  civiaue  soit  pour  tout  citoyen  un  commence- 
ment d*éducation  nationale;  il  faut  qu'elle  lui  re- 
trace sans  cesse  ses  devoirs,  qu'il  y  trouve  ses  affec- 
tions et  ses  plaisirs,  qu'elle  lui  fasse  toujours  désirer 
le  moment  de  se  voir  réuni  à  ses  concitoyens , 
qu'elle  le  ramène  avec  un  nouveau  plaisir  sur  les 
lieux  où  il  doit  apprendre  à  les  aimer  davantage ,  à 
chérir  les  Ibis  et  sa  patrie  ;  il  fout  qu'en  pensant  à 
ces  objets  sactés  il  seqte  âti  fbnd  de  son  âme  ce 
généreux  dévouement  qui  brfUle  au  cœur^du  vrai  ci- 
toyen. 

Voilà  les  réflexions  générales  que  Je  voulais  vous 
soumettre  sur  les  fêtes  civiques  d'un  peuple  libre. 
Celle  que  vous  présente  votre  comité  ne  me  paraît 
pas  assez  profondément  républicaine,  ni  parler  assez 
aux  yeux  et  au  sentiment  :  l'ordonnance  et  l'exécu- 
tion manquent  entièrement  à  l'ensemble. 

J'aperçois  le  même  défaut  dans  les  autres  projets 
qui  vous  ont  étéprésentés  :  dans  les  uns  on  con- 
fond les  fêtes  nationales ,  qui  doivent  marquer  les 
époques  de  la  révolution  «  avec  les  fêtes  civiques 
que  vous  voulez  instituer  pour  les  décades.  On  sur- 
charge les  dernières  d'une  exécution  impossible  ; 
dans  les  autres  on  aperçoit  moins  une  fête  que 
l'exercice  des  fonctions  municipales^  Dans  d'autre^ 
plans  on  convertit  la  fête  en  une  Société  populaire 
où  l'oft  discute  tour  à  tour  à  la  tribune  ;  là  encore 
on  constitue  une  espèce  de  théocratie  ;  on  appelle 
le  fanatisme  au  milieu  des  rassemblementsfraternels 
de  citoyens;  là  bientôt  vous  auriez  un  prêtre  et  des 
autels  assis  sur  les  ruines  de  la  démocratie ,  si  vous 
aviez  l'imprudence  d'admettre  dans  vos  institutions 
civiques  les  éléments  d'aucune  superstition.  Sans 
doute,  citoyens,  la  raison  et  la  politique ,  qui  vous 
éclairent  dans  ce  moment  de  tous  les  malheurs  des 
siècles  passés,  vous  ordonnent  de  respecter. même 
l'erreur;  vous  n'avez  que  le  droit  de  l'éclairer.  Sans 
doute  vous  ne  voulez  commander  ni  à  la  pensée 
ni  au  sentiment  Les  tyrans  qui  ont  violé  le  sanc- 
tuaire sacré  des  consciences  ont  été  en  horreur  à  la 
terre. 

Vous  avez  vu  que  les  religions  ressemblaient  à 
ces  corps  élastiques  qui  se  restituaient  avec  plus  de 
force  lorsqu'ils  étaient  plus  comprimés,  que  la  per- 
sécution n'enfanta  jamais  que  des  prosélytes  et  irrita 
le  fanatisme. 

Sans  doute ,  tout  doit  parler  de  la  Divinité  dans 
l'ordre  social ,  comme  tout  en  parle  dans  la  nature. 
Quand  le  sentiment  ne  l'inspirerait  pas»  i]  faudrait 
que  la  politique  gravât  le  nom  de  l'Etre  suprême 
sur  le  front  ue  chaque  déparlement  ;  son  existence 
est  le  besoin  de  l'homme  sensible ,  de  l'infortune  et 
de  la  vertu;  mais  son  temple  doit  être  dans  le  cœur 
de  chaque  citoyen  ;  la  religion  est  l'ouvrage  des 
consciences. 


300 


Ce  n'est  point  une  religion  qne  vous  avez  à  faire 
dans  ce  moment  et  c|ue  la  république  vous  demande; 
ce  sont  des  fêtes  civiques ,  c*est  la  patrie  que  vous  ' 
avc7«  à  célébrer  ;  vous  devez  être  politiques  et  non 
tlit'ologiens.  Une  république  ne  doit  point  £tre 
ibndue  dans  les  moules  de  la  superstition.  Ce  n'est 
point  Tœuvre  de  MoTse  que  vous  avez  à  faire;  c*est 
celui  de  Lycurguei  et  ceux  des  bommes  etdea  ci* 
loyens. 

Vous  ne  devez  donc  point  vous  mêler  de  culte  et 
de  cérémonie;  laissez  à  chacun  la  liberté  de  célébrer 
la  Divinité  à  sa  manière  Lorsque  vous  aurez  fait 
des  institutions  assez  puissantes  pour  faire  aimer  la 
vertu,  assez  heureuses  pour  conduire  Tbomme  au 
bonheur  par  Tinstruction  et  les  charmes  du  plaisir, 
TOUS  aurez  rempli  votre  devoir  de  législateurs  ré« 
publicains. 

Si  j'avais  beaoin,  soua  d'autres  rapports,  de  quel- 

2ues  développements ,  Je  vous  dirais  :  vous  avez 
tabli  la  démocratie  dans  vos  lois  politiques;  mais 
vous  ne  l'avez  pas  encore  dans  l'esprit  public  et  dans 
les  mœurs  ;  vous  n'avez  fait  que  la  moitié  de  votre 
ouvrage  ;  vous  n'avez  point  jeté  les  bases  solides 
sur  lesquelles  doit  reposer  votre  constitution,  si 
vous  ne  Tentourez  des  institutions  qui  doivent  la 
rendre  inébranlable.  Les  despotes  n'ont  que  des  lois 
et  des  supplices  pour  réprimer  les  crimes;  il  ne  faut 
que  de  bonnes  institutions  dans  les  gouvernements 
libres  pour  les  prévenir  ;  c'est  par  elles  que  vous 
donnez  aux  mœurs  cette  trempérorte,  cet  esprit  d'é- 
galité dont  elles  ont  besoin  dans  un  Etat  démocra- 
tique; sans  elles  voua  n'aurez  fait  qu'une  républi- 
que, c'est-à-dire  un  Etal  politique  sans  roi  :  mais 
vous  n'aurez  point  la  démocratie.  Il  faut  que  chaque 
article,  dans  rinstitution  que  vous  allez  faire,  pré* 
sente  un  spectacle  intéressant ,  une  jouissance  pour 
l'âme ,  un  trait  de  morale ,  une  instruction ,  une 
récompense  pour  la  vertu ,  un  encouragement  i 
l'industrie ,  et  que  chaque  citoyen ,  au  sortir  de  la 
fête  civique  »  puisse  reporter  dans  le  sein  die  sa  fa- 
mille une  de  ces  impressions  profondes  qui  atta- 
chent i  la  patrie;  c'est  alors  que  vous  aurez  fait  une 
bonne  institution* 
Voici  mon  projet  de  décret: 

I  Art  P'.  Le  Jour  d«  déeadi  eit  erasaeré  partIcaUère- 
ment  M  rtpot  et  à  It  pétrie. 

•  U.  n  sert  ioatlUié  pour  oe  Jo«r  me  Mte  difIqM  dans 
toutee  lei  oommiuies  de  le  rëpablIqQe. 

•  lU.  Chtquedéoedi  la  Mte  aeni  annoocée  par  le  Son  des 
tnaUrameats guerriers, dans  les  villes:  par  la  oaiase  alUlalre 
et  le  son  des  Instruments  champêtres,  dans  les  campagnes. 

•  IV.  Tous  les  citoyens  s'assembleront  au  cbef-Ueu  de  la 
commune;  dans  les  grandes  communes,  dans  leurs  secUons 
respectives. 

t  V.  Le  lien  des  assembla  des  dtoyens  sera  toujours 
décoré  par  un  drapeau  national  et  une  table  des  Droits  de 
l'Homme  ;  Ils  pourront  auisiéire  décorés  par  les  Instniments 
des  aru  et  métiers  qui  Oeurlront  dans  les  communes. 

•  La  loi  rem<^(au  peuple  assemblé  robservation  de  l'ordre 
qui  doit  régner  dans  la  fOte  civique. 

«  VI.  L^  vieillards,  la  jeunesse  et  les  enfants  y  seront 
placés  dlmlnctement,  et  seront  les  prindpaiix  et  les  plus 
touchants  ornements  de  l'assemblée. 

t  VU.  La  féto  oommeneera  par  une  InstnicUon  sur  les  de- 
voirs de  l'homme  et  du  citoyen,  et  sur  les  éléments  de  la 
morale  républicaine  ;  l'homme  de  bien  seul  sera  choisi  pour 
faire  cette  instruction. 

•  VUl.  Un  membre  des  autorités  consUtuées  lira  les  lois 
fwirvcnucs  à  la  commune  pendant  la  décade;  au  défaut  de 
la  lo<Mure  des  lois,  U  sera  Mi  par  un  citoyen  quelque  In- 
strufiion  sur  l'agrlGulture,  ou  sur  le  genre  d'industrie  de  la 
commune. 

•  IX.  Cette  lecture  sera  suivie  par  des  hymnes  patrIoU- 
ques  dont  les  airs  et  les  paroles  rappelleront  et  Inspireront 
la  piété  filiale,  le  respect  dû  à  la  vieillesse,  les  souvenirs  des 
belles  acUons,  les  sentiments  de  la  liberté,  la  balne  des  ty- 


rans et  l'amour  de  la  patrie.  U  |  aaro  des  bymnet  pour  les 
enfants,  la  Jeunesse  et  les  vieillards;  Ils  seront  chantés  totur 
à  tour  par  les  différents  âges.  Le  comité  d'Instruction  pu- 
blique est  chargé  d'appeler  de  suite  les  hommes  de  l'art  à 
composer  cet  hymnes, 

•  X.  Au  milieu  de  ces  chants.  Usera  choisi  on  Intenrillo 
pour  donner  des  éloges  * 

f  Au  citoyen  qui,  pendant  le  cours  de  la  décade,  aura  hH 
une  belle  action  ; 
«  A  oelnl  qui  aura  ImaglBë  quelque  indastrie  nouvelle; 

•  Aux  époux  qui  auront  uni  leur  destinée  par  le  mariage; 
I  Ans  citoyens  qui  te  seront  réconciliés, 

•  XI.  Au  chant  des  hymnes  succéderont  le  son  des  IM- 
truments  guerriers  et  les  exercices  mill  m  ires;  la  danse  et 
les  Jeux  de  le  oourte  vlendroot  càsuiie  et  (ensineront  la  fête. 

c  Xll.  Dans  les  grandes  communes  ces  exercices  se  feront 
sor  les  plaees  publiques,  qui  seront  toujours  décorées»  le 
Jour  de  la  fête,  de  tous  les  attributs  républicains. 

■  Xilh  Les  citoyens  sont  invités  A  se  réunir,  toatea  les 
trois  décades,  en  banauets  civiques;  les  chansons  républi- 
caines en  animeront  la  galté.  La  loi  recommande  aux  ci- 
toyens la  frugalité  et  la  décence. 

•  il  y  aura  une  ceuMure  envers  ceux  qui  seront  remar- . 
qùés  ponr  ne  pas  assister  aux  fêtes  civiques  ;  cette  censure 
sera  exercée  par  les  vieillards  des  communes  ;  ceux  qui 
l'auront  encourue  seront  réputés  ne  pas  aimer  l'égaUté,  et 
privés  du  plaisir  d'assister  pendant  trois  mois  aux  fêtes  et 
aux  banquets  civiques. 

«  XIV.  Les  autorités  constituées  prendrpnt  des  mesurée 
de  poUce  pour  l'exécution  de  ce  deitiier  article.  > 

***:  Je  demande  que  tons  les  plans  soient  ren- 
voyés au  eomité  d'instruction  publique,  et  que  ceux 
qui  en  ont  à  présenter  se  réunissent  ce  soir  h  ce 
comité,  pour  qu1l  propose  un  projet  de  décret  dans 
la  séance  de  demain. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

»  Thibault  fait  un  rapport  sur  la  marqae  d*or,  et 
propose  une  nouvelle  organisation  d'ané  commission 
monétaire. 

La  Conventionen  ordonne  l'impression  etPajonr- 
nement. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

/V.  n.  <*-  Dans  la  séance  du  S4  nivôse,  il  s*eet  élevé  lUM 
discussion  sur  la  question  de  savoir  s|  le  décret  oui  fixe  A 
86  livres  par  Jour  le  traitsoient  des  représentants  du  peuple 
serait  ou  non  rapporté.  Ce  décret  a  été  maintenu.  * 

Cette  discussion  n  donné  lieu  à  la  dénonciation  d*un  écrit 
de  Châles,  dans  lequel  ce  député  insinue  que  la  révolution 
du  9  thermidor  n'a  profité  ou  à  i*artsiocnitie,  et  afQrme  que 
le  peuple  est  encore  indécis  sur  Toplnlon  qu'il  doit  a^ 
de  cette  Journée. 

La  Convention  a  manlfceté  la  plna  five  Indignation. 

Heritn  (de  Thlonville)a  indlooé  les  eanses  et  les  auteurs  de 
ees  agitations.  L'assemblée  a  jnré  de  périr  toot  entière  plu* 
Idt  que  de  souffrir  que  le  règne  de  Robespierre  et  de  aea 
partisans  revint  Jamais. 

«•  La  ConvenUon  a  approuvé  l'arrêté  pris  par  le  comité 
de  sûreté  géovrale.  qui  ordonne  oue  Bossignol,  ex-général, 
Pache,  ex- maire  de  Paris,  Ouucnoue,  ex-minisure  de  la 
guerre,  BouchoUe  cadet,  ex-adJolnt,  Xavier  Audouin,  ex- 
adjoini,  Italsson,  ex-commissaire  des  subsistances  et  appro- 
vlsloanements,  Clémence,  Chrétien,  Marchand,  détenus  dans 
différentes  maisons  de  Paris,  seront  transférés  au  fort  du 
château  de  Ham,  département  de  la  Somme. 


LIVRES    DIVERS. 

L'hgénieur  ripublicuin ,  ou  Eiémwts  de  forti^cationt  de 
emmpagnet  par  Jean  Briche.  8e  trouve  chesBarroisiejeaoo, 
libraire,  quai  des  Augustins,  n*  18. 

Cet  ouvrage,  dont  la  Convention  a  ordonné  la  mention  ho- 
norable, intérêt)  au  BuUetin  du  18  prairial,  est  un  résumé 
■réels  «t  dair  de  toutes  les  notions  relatives  aux  éléments  de 
la  fortifieatioo  de  eampagne. 

Il  peut  être  fort  ntile  aui  répablieelns  armés ,  auiqnels  il 
est  spécialement  destiné,  et  leur  tiendra  laciiemeot  Ùeu  de 
beaucoup  de  iraites  trop  velumintait 


G.1ZETTE  NATIOMLE  «c  LE  MONITEUR  UNIVERSEL, 

N»  116.  Sextidi  26  Nivôse,  l'an  3«.  {Jeudi  15  Janvier  1795,  vieux  style). 


AVIS    DE  L*ANCIErf  MONITEUR  AUX    SOUSCRIPTEURS. 

Les  souscripteurs  dont  Tahonnement  expire  à  la  fin  de  ni- 
Tose  sont  invites  à  le  renouveler  incessamment,  pour  ne  pas 
éprouver  d*interruption. 

La  souscription,  pour  les  départements,  est,  depuis  le  i"de 
ce  mois,  de  i02  liv.  par  ao  ,  de  54  Ht  pour  six  mois ,  et  de 
88  liv.  pour  trois  mois,  rendu  franc  de  port. 

Nous  invitons  ceui  de  nos  abonnés  du  !«'  nivôse,  qui  n*oot 
pas  envoyé  la  totalité  du  prix  de  la  souscription ,  de  vouloir 
Lien  nous  en  faire  passer  le  complément. 

Nous  n*avons  pas  de  bureau  intermédiaire ,  à  Paris ,  pour 
la  recette  des  abonnements  et  la  distribution  de  notre  feuille  ; 
les  lettres etl'argent  doivent  être  adressés,  francs,  au  citoyen 
Aubry,  directeur  du  bureau,  rue  des  Poitevins,  n«  18. 

Il  faut  avoir  soin  (attendu  le  grand  nombre  de  lettres  qui 
s'égarent)  de  charger  celles  qui  renferment  des  assignats,  et 
d*«joater  f  6  sous  pour  le  port  de  celles  qui  sont  envoyées  de 
la  Belgique  et  autres  pays  où  Ton  ne  peut  affranchir. 

L'abonnement,  pour  Paris,  sera  de  90  liv.  par  an,  de  48  liv. 
pour  six  mois,  et  de  38  liv.  pour  trois  mois. 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Balitbotine ,  le  25  décembre.  —  C'est  A  la  séance  da  22 
que  la  diète  a  rendu  le  condusum  tendant  A  demander  la 
paix  et  une  trêve  préalable.  (Voyez  N"»  113,) 

Ainsi,  des  bruits  de  paix  vont  encore  être  semés  en  France, 
sans  qu'on  puisse  leur  assigner  aucun  fondement  certain  ; 
et  peut-être  même  ces  proclamations  n*ont-clles  que  le  but 
secret  de  sonder  les  esprits,  d'amollir  le  courage  des  Fran- 
çais ,  et  de  les  empêcher  de  donner  aux  préparatifs  de  la 
la  campagne  l'activilé  convenable. 

Il  y  eut,  dit-on ,  une  grande  division  d'avis,  dans  le  col- 
lège des  électeurs ,  au  sujet  de  la  trêve  ;  mais  la  majorité 
étant  prononcée,  dans  le  collège  des  princes,  en  faveur  de  la 
trêve,  on  s'accorda,  et  le  condusum  fut  rédigé.  En  voici  les 
principales  dispositions.  —  Ce  qu'on  peut  y  remarquer  de 
plus  pêr6de  est  la  proposition  d'une  trêve  qui ,  sans  doute, 
a  poar  but  d'attendre  que  la  pacification  de  la  Pologne 
donne  aux  puissances  du  Nord  de  nouveaux  moyens  contre 
la  France. 

Il  a  été  arrêté  et  décidé: 

■  V  Qu'il  est  jugé  convenable  A  l'état  des  choses,  aux  re- 
lations de  l'empire  d*Allemagne  et  au  bien  général  que,  pen- 
dant que  l'on  contlnoera  à  faire  les  préparatifs  pour  une 
nouvelle  campagne ,  on  s'occupe  A  mettre  fin  A  une  guerre 
aussi  sanglante  que  dispendieuse ,  en  préparant  les  voles  A 
une  trêve  et  A  une  paix  prompte  et  convenable; 

c  2*  Que  l'on  croit  être  fondé  A  espérer  que  la  nation 
française  elle-même ,  pour  l'honneur  de  l'humanité  souf- 
frante, et  en  considération  de  ce  qu'elle  a  donné  elle-même 
sujet  A  c.'tte  guerre  de  l'Empire,  ainsi  que  du  but  évident 
qu'elle  a  eu  (  lequel  n'a  été,  de  la  part  de  l'Empire .  que  la 
défense  de  sa  constitution,  le  maintien  de  l'intégrité  du 
corp«  gnrmnniquc  et  le  rétablissement  de  tant  de  memlires 
de l'Ëmiùrc  dans  leurs  droits  et  possessions,  et  nullement 
de  se  mêler  dans  les  affaires  iniéricurcs  de  la  France,  ni 
aucune  vue  de  conquête),  sera  enfin  portée  elle-même,  après 
des  dévastations  qui  ont  duré  pendant  tant  d'années,  A  ter- 
miner également  celle  guerre,  à  laquelle  l'Empire  a  été  for- 
cée, au  moyen  d'une  paix  juste,  convenable  et  acceptable  ; 

s  3*  Que  cependant  il  n'en  est  pas  moins  avantageux  et 
indispensable  pour  l'empire  d'Allemagne  dé  se  tenir  prêt  A 
tout  événement  ;  et,  dans  le  cas  où.  contre  toute  attente,  tme 
destinée  insurmontable,  ou  le  refus  obstiné  de  la  France,  ou 
des  conditions  de  paix  outrées  et  inacceptables  feraient  éva- 
nouir la  possibilité  d'une  conciliation,  et  rendraient  inévi- 
table la  continuation  de  la  guerre,  d'augsientcrau  plus  tOtles 

3«  5ci-a'e.  —  Towne  X. 


moyens  de  défense  de  l'Empire,  et  en  conséquence  de  pren- 
dre promptement  toutes  les  mesures  que  les  décisions  de  Li 
diète  et  le  danger  auquel  la  patrie  se  trouve  de  plus  en  plus 
exposée,  prescrivent  pour  une  nouvelle  campagne  ; 

«  A*»  Que ,  d'après  les  considérations  préposées ,  Tempe- 
reur  sera  supplié  de  vouloir  bien  donner  une  nouvelle 
preuve  de  ses  soins  pour  l'éloignement  du  danger  le  plus 
Imminent ,  ou  pour  le  bien-être  général,  en  s'interposant 
puissamment  avec  l'activité  ultérieure  de  l'Empire,  A  l'effet 
d'opérer  la  conclusion  d'une  trêve  avec  la  France  et  d'une 
paixacceptable,  juste,  conforme  à  la  constitution  fondamen- 
tale de  l'Empire ,  et  surtout  concordant  avec  le  but  de  la 
paix  de  Westphalic ,  et  aussi  par  son  intelligence  amicale 
avec  son  auguste  allié  le  roi  de  Prusse,  de  daigner  engager 
ce  monarque,  qui ,  dés  le  commencement  de  la  guerre  ac- 
tuelle ,  a  pris  la  défense  des  Etats  de  l'Empire  lésés,  A  vou- 
loir bien .  par  continuation  de  ses  dispositions  bienveil- 
lantes, contribuer  de  tout  son  pouvoir  A  mettre  fin  à  cette 
guerre,  ainsi  qu'au  succès  des  vues  pacifiques  manifestées  A 
ce  sujet;  qu'en  conséquence  le  tout  sera  humblement  sou- 
mis A  l'empereur,  au  moyen  d'un  condusum  de  l'Empire, 
pour  qu'il  daigne  y  donner  son  approbation,  i 


ANGLETERRE. 

Londres,  le ^9  déeembre.—M.Vln^leniâe  faire  remettre 
A  la  cour  de  Danemark  une  indemnité  de  30,000  livressterling 
pour  les  quarante  navires  marchands  qui  ont  été  reconnus 
par  l'amirauté  n'être  pas  de  bonne  prise. 

—  On  a  arrêté,  dans  le  conseil  tenu  le  14,  une  nouvelle 
levée  de  quinze  mille  hommes,  tant  en  Angleterre  qu'en  Ir- 
landi!,  sans  compter  un  régiment  d'émigrés  français,  dont 
le  commandement  est  donné  A  un  certain  Lamberty. 

—  Toutes  les  feuilles  publiques  présentent  les  conditions 
du  nouvel  emprunt  de  24  millions  sterling .  qui  doit  être 
proposé  au  parlement  par  le  chancelier  de  l'échiquier.  On 
sait  de  plus  qu'il  y  en  aura  un  quart  pour  le  compte  de 
l'empereur,  si  les  Communes  consentent  de  le  garantir.  On 
donnera  aux  souscripteurs  pour  100  livres  sterling,: 

75  I.     »   s.  I  d.  dans  les  3  p.  c.  consolidés. 

25        *        f  dans  les  4  p.  c. 

6  s.    Ad.  et  1/2.     de  longues  annuités. 

20      16        8  3  p.  c.  de  Tempr.  impérial. 

1        5       »  par  forme  d'annuités  pendant 

25  ans. 

Indépendamment  des  avantages  de  l'escompte  dont  jotd- 
ront  ceux  des  prêteurs  qui  rempliront  promptement  leurs 
soumi.ssions,  les  intérêts  de  l'emprunt  impérial  doivent  com- 
mencer A  courir  à  compter  du  mois  de  mai ,  ce  qui  en  fuit 
évaluer  rintérét  A  7  et  demi  pour  cent.  Supposez  que  le 
parlement  ne  voulût  pas  ratifier  l'emprunt  impérial,  on  don- 
nerait alors  aux  souscripteurs  des  18  miUiona  »  pour  leur 
capital  de  100  livres  sterling  : 

100  I.     I  s.  f  d.  dans  les  3  p.  c.  consolidés. 

33        6      8  dans  les  A  p.  c. 

12      6  de  longues  annuités. 

D'après  ce  plan,  la  nation  épargne  sur  les  deux  emprunts 
36,000  livres  sterling,  et  gagne  sur  le  tout  un  capital  de 
784,000  livres  sterling.  Mais  elle  se  charge  de  répondra  du 
capital  de  l'emprunt  impérial,  qui  est  de  8  millions  700.000 
livres  sterling,  et  d'un  intérêt  de  450,000  livres  steriing, 
dont  elle  sera  également  responsable  si  l'empereur  ne  pale 
pas. 

Les  principaux  banquiers ,  prête-noms  du  gouvernement 
dans  cette  affaire,  sont  Boyd,  Thelusson,  Dobard,  Gold- 
smith,  etc.,  qui  ont  donné  leurs  soumissions. 

On  ajoute  que  M.  Pitt  est  dans  l'intention  de  fonder  2  mil- 
lions de  la  dette  de  la  marine,  de  liquider  5  millions  de  ses 
billets  dans  le  cours  de  l'année,  et  de  mettre  encore  en  train 
2  millions  et  demi  de  payement. 

26 


103 


Dto  31.— Hier  le  roi  a  fitt  rosvcrtwe  <hi  parieacaL  H  a 
iledheomntnîwMmi: 

I  N«  lords  et  srtttears,  aprèt  avoir  éproavé  ea  tooie  oe- 
csftkMi'  votre  déf  ooemcot  poor  Ici  faitérétt  de  mob  peuple , 
Je  troovc  «se  gmde  latiifactfcwi  à  rtcoahr  à  wm  arl»  et  à 
voire  appwi  daa*  le»  ctrooMtaacet  qni  exigeât  ledéploicflMBl 
esiier  de  votre  éaereie  eide  votre  i 


«  Malgré  les  revert  et  let  eootraiiétét  qœ  ooos  avoat 
éprouvé*  daat  la  dernière  canpaeDe.  je  conserve  la  coovic- 
f  ioo  ioUaie  que  bous  devons  poiurMihrre  vigoareofeneM  la 
tiwarre  Juste  et  aécetsaire  ota  ooos  sonnes  cagaffés. 

■  Voos  penserez  conme  mol ,  f  en  sois  certain,  que  nous 
ne  devons  attendre  que  de  notre  fermeié  et  de  noire  petié- 
vérance  le  rétablisscmcnl  de  la  naix  sor  des  bases  loUdes  et 
iionorables,  ainsi  qoe  la  garantte  et  la  lùrelé  parfiiiede  mm 
plds  cbers  inléréu. 

•  En  considérant  la  situation  de  nos  ennemis,  mm  àttêet- 
verez  sans  doute  que  les  efforu  noiqoels  ils  doivent  leurs 
ioccès ,  et  les  moyens  extraordinaires  qui  pouvaient  tenis 
soutenir  ces  efforfs ,  ont  produit  cbez  eux-mêmes  les  effett 
pernicieux  que  l'on  devait  en  attendre,  et  que  chacun  des 
événemeau  qui  se  sont  passés  dans  Pintérlenr  de  la  France 
a  moutré  la  décadence  progressive  et  rapide  de  leurs  res- 
sources, et  l'instabilité  de  chaque  partie  de  ce  système  vio- 
lent et  contre  nature,  qui  est  également  ruineux  pour  la 
France  et  Incompatible  avec  la  tranquillité  des  autres  na- 
tions. 

c  Cependant  les  états  généraux  des  Provinces-Unies,  pres- 
sés par  les  circonstances  difficiles  où  ils  se  trouvent,  se  sont 
déterminés  à  etUamer  une  négociatioo  pour  la  paix  avec  le 
parti  qui  domine  actuellement  en  France. 


t  établi ,  ancun  Etat  indépendant  ne 
peut,  dans  la  situation  actuelle  des  choses,  placer  une  con- 
fiance réelle  dans  de  telles  négociations. 

•  Quant  A  nous ,  noos  ne  pourrions  tenter  tm  semblable 
moyen  tans  sacrifier  notre  honneur  et  notre  sûreté  h  un  en- 
nemi dont  la  plus  grande  haine  est  évidemment  dirigée 
contre  ce  royaume. 

•  ÀuMi  n'ai- je  ceiié  de  prendre  les  mesnrei  les  plus  effi- 
caces pour  accroître  mes  forces,  et  je  ne  loisserai  échapper 
aucune  occasion  de  concerter  les  opérations  de  la  cam- 
pagne prochaine  avec  celles  des  puissances  de  l'Europe  qui 
sentent  comme  moi  la  nécessité  de  déployer  une  grande  vi- 
gueur et  beaucoup  d'activité.  Je  me  ronfiêeiitiëremcnt  dans 
mes  forces  et  dans  l'affection  et  l'esprit  public  de  mon 
peuple,  pour  qui  je  combats,  et  dont  la  sûreté  et  le  bonheur 
sont  l'objet  de  ma  constante  sollicitude. 

•  L'importance  locale  de  la  Corse,  et  les  efforts  énergiques 
que  ses  habitants  ont  faits  pour  secouer  le  joug  de  la  France, 
m'ont  déterminé  A  ne  point  refuser  la  protection  pour  la- 
quelle elle  combattait:  j'ai  depuis  accepté  la  couronne  et  la 
souveraineté  de  celle  Ile,  par  un  acte  dont  je  vous  ai  fait  re- 
mettre la  copie. 

•  Je  vous  apprends  aussi ,  avec  une  grande  satisfaction , 
que  j*ai  conclu  un  traité  d'amitié,  de  commerce  et  de  navi- 
gation avec  les  Etats-Unis  d*Aroérique.  Mon  but  principal  a 
été  d'écarter  par  lA,  autant  qu'il  est  post.sil)!^^,  tout  moiif  de 
jalousie  et  de  mésiniellidcncc  entre  les  deux  pays,  ci  d'anir- 
liorer  leurs  relations  commerciales.  Aussitôt  que  c(-  traité 
aura  été  ratifié,  je  vous  on  ferai  passer  uno  copie,  uiin  que 
vous  puissiez  faire  les  dispositions  nécessaires  pour  en  as- 
surer l'action  executive. 

<  C'est  encore  avec  un  plaisir  extrême  que  je  vous  annonce 
le.marlage  de  mon  fils,  le  prince  de  Galles,  avec  la  princesse 
Caroline,  fille  du  duc  de  Brunswick.  Les  témoignages  que 
vous  m*avcz  toujours  donnés  de  votre  affection  pour  ma  per- 
sonne et  pour  ma  famille  me  persuadent  que  vous  partage- 
rez les  seniimenu  que  j'éprouve  dans  une  occasion  si  inté- 
ressanlc  pour  mon  bonheur  parliculler.  et  que  vous  me 
miitrcz  h  même  de  pourvoir  à  cet  établlsserocn'  de  la  ma- 
nière la  plus  convenable  au  rang  et  à  la  dignité  de  l'hériiler 
présomptif  de  la  couronne  de  ces  royaumes. 

«  Messieurs  de  la  Chambre  des  communes ,  je  ne  doute 
point  que  les  motifs  qui  me  déterminent  A  continuer  la 
guerre  avec  vigueur  ne  vous  portent  A  pourvoir  promp- 
icmcnt  et  abondamment  aux  besoins  de  chaque  partie  du 
service  public  :  on  vous  en  soumettra  les  étals.  En  mi'me 
temps  que  Je  me  plains  de  la  néccjMtité  d'imposer  de  si  grandes 


dorges  à  nés  sijets,  c'cM  « 
d'observer  l'état  de  mttm  crédM ,  de  — tie  rn—nerrr  etée 
■os  ressovoes,  qui  est  le  résaliaft  Baiarel  des  travanx  et 
rtadostrie  so»  la  pnÊttOam  #«■  gmiumatat  libffte  cf 

régnlkr. 

«lf}lofds  cf  aeMiewt,«Bjaiaei 
dont  ce  pays  jouit  dc|mis  ai  kagM 
tans  doute  A  Caire  toos  les  clloffli  fnl  | 
bonheur  A  votre  postérité. 

«  Tespère  avec  confiaTe  qae,  ao«s  la  procectk»  de  fa 
ProvideBee,  de  même  qu'avec  votre  eonfiance  et  netre  pei^ 
sévérance,  les  principes  de  l'ordre  social,  de  la  morale  et  et 
Uk  religion  remporteront  enfin,  et  que  mon  peaple  fidèle 
trouvera  fai  récompense  de  ses  travanz  et  des  sacrifices  qn'fl 
Mi  anjoanThoi  dans  fai  jonissanoe  aolide  et  durable  de  sa 
tranquillité,  et  dans  le  salnl  de  l'Europe,  amcbée au  plus 
grand  danger  dont  elle  ait  été  seBaoée  depuis  Fétabliain- 
ment  des  sociétés  policées,  i 

Sa  Majesté  s'est  retirée  twite,  d  les  Ccwn—fi  ae  aoM 
retirées  dans  leur  chambre.  La  motion  de  l'Adresse  de  re- 
merciement a  été  faite  dans  fai  Chambre  des  pairs  par  fa 
comte  de  Cambdeo  et  appuyée  par  le  comte  de  Beslwrô^glL 

Dans  fa  Chambre  des  commmcs,  b  même  nution  a élé 
faite  par  sir  Edouard  RnaichbuD,  et  appuyée  par  M.  Caii- 
ning.  On  ne  doute  pas  que  l'Adresse  ne  passe  sans  beocoonp 
d'opposition,  et  A  une  grande  majorité,  suivant  l'usage , 
dans  les  deux  Chambres. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Leioumeur  (de  ta  Mameke). 

Décret  tuT  tes  eotUriimtiom  direeUê  de  1794  {vieum 
style),  rendu  dans-laséanee  du  23,  surtapropo-' 
tition  de  RameL 

•  La  CoDTention  nationale ,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  fijiances,  décrète  ce  qui 
suit: 

•  Art.  fer.  Les  directoires  de  district  statueront 
sur  toutes  les  demandes  en  dëffrè?ement,  décharges 
ou  réductions,  remisesou  modérations, formées  an- 
térieurement à  la  publication  de  la  présente  loi,  soit 
par  les  communes ,  soit  par  les  particuliers ,  sur  la 
contribution  foncière  des  exercices  de  1791, 1792  et 
1793,  et  ce,  nonobstant  toute  expiration  de  délai, 
nprès  s*étre  procuré  tous  les  renseignements  locaux, 
fait  faire,  s*il  y  a  lieu,  toutes  les  vérifications  qui 
pourront  assurer  la  justice  de  leurs  d^isions,  et  sans 
être  astreints  de  s*eii  tenir  aux  évaluations  faites 
dans  les  matrices  des  rôles. 

•  H.  Les  réductions  sur  l'exercice  de  1791  ne  pour- 
ront être  accordées  que  jusqu*à  concurrence  du  cin- 
quième du  revenu  net. 

«  ÎÎI.  Les  arrêtés  des  directoires  de  district  seront, 
avant  d*être  mis  à  exécution,  présentés  à  Tadminis- 
tration  du  département,  qui  pourra  les  admettre,  les 
rejeter,  ou  les  modifier,  s'il  y  a  lieu. 

•  IV.  Si  les  corps  administratifs  se  croient  dans 
rindispensable  nécessité  de  faire  procéder  à  une  vé- 
rification sommaire  par  experts ,  fes  frais  en  seront 
pris  sur  le  produit  des  sons  additionnels  du  district, 
si  la  réclamation  est  admise  en  entier  :  ils  seront 
supportés  par  les  réclamants,  si  la  demande  est  re- 
jetée ou  n'est  accueillie  qu*en  partie. 

•  V.  Le  montant  du  dégrèvement  des  charges,  ré- 
ductions, remises  ou  modérations  accordées  en  exé- 
cution du  présent  décret  sur  la  contribution  fon- 
cière de  1791,  1792, 1793,  ne  pourra  excéder,  en 
somme  totale,  dans  chaque  département,  le  produit 
des  sous  additionnels,  pour  les  fonds  de  non-valeur 
seulement,  laissés  à  la  disposition  des  corps  admi- 
nistratifs, recouvrés  sur  les  exercices  antérieurs  et 


203 


encore  disponibles,  et  la  moitië  du  principal  du  con-  ; 
tingentde  1794.  i 

•  VI.  Si  le  résultat  des  ordonnances  déjà  remises, 
joint  à  celui  des  dégrèvements  à  accorder,  excède  la 
proportion  réglée  par  l'article  précédent,  Texcëdant 
sera  ajouté  au  contingent  de  1794,  assigné  aux  com- 
munes sur  le  territoire  desquelles  le  dégrèvement 
aura  été  accordé. 

•  VII.  Les  receveurs  de  districts,  conformément  à 
riirticlc  XIV  de  U  loi  du  19  fructidor  dernier,  sont 
autorisés  :i  recevoir  pour  comptant,  et  à  envoyer  a 
la  trésorerie  nationale  les  ordonnances  de  déchar- 
ges ou  réductions ,  remises  ou  modérations ,  expé- 
diées par  les  corps  administratifs. 

«  VIII.  Les  administrations  de  département  enver- 
ront à  la  commission  des  revenus  nationaux,  au  com- 
mencement de  chaque  mois,  l'état  détaillé  et  motivé 
de  toutes  les  ordonnances  qu'ils  auront  rendties 
dans  le  cours  du  mois  précédent;  la  commission  en 
rendra  compte  successivement  au  comité  des  finan- 
ces, pour  qu'il  en  fasse  un  rapport  général. 

•  IX.  Les  directoires  de  département  feront  con- 
naître dans  leurs  comptes-rendus,  à  l'égard  de  cha- 
que dégrèvement  qu'ils  auront  accordé  i 

«  10  Quel  est  le  montant  de  Tévaluation  portée 
dans  la  matrice  du  rôle  ; 

•  20  A  quelle  somme  ils  ont  cru  devoir  la  fixer; 
«30  Quel  est  le  montant  du  dégrèvement  demandé; 
«  40  Quelle  est  la  somme  accordée  ; 

«  50  Quel  était  le  montant  des  contributions  di- 
rectes en  1789 ,  sur  les  objets  compris  dans  la  dé- 
charge. 

•  X.  La  contribution  foncière,  pour  les  huit  mois 
vingt  et  un  jours  1794  (vieux  style)  sera  perçue  sur 
les  rôles  de  1793,  à  raison  des  trois  quarts  des  cotes 
qui  y  sont  portées,  tant  en  principal  que  pour  les 
sous  additionnels  des  fonds  de  non- va  leur  el  des 
dépenses  mises  à  la  charge  des  départements  et  des 
districts  ;  le  produit  en  sera  versé  en  entier  à  la  tré- 
sorerie nationale,  conformément  à  la  loi  du  19  fruc- 
tidor dernier. 

•  XI.  La  contribution  foncière  de  1794  sera  mise 
en  recouvrement  dans  chaque  commune,  et  prélevée 
par  les  percepteurs  de  1793 ,  immédiatement  après 
la  réception  ou  présent  décret.  El)e  écherra  par  tiers 
dans  les  mois  de  pluviôse,  ventôse  et  germinal  pro- 
chain. Les  percepteurs  sont  personnellement  res 

fionsables  de  tout  ce  qui  sera  dû  le  15  floréal,  sauf 
esarticles  à  l'égard  desquels  ils  produiront  les  pièces  | 
justificatives  des  diligences  faites  en  temps  utile. 

«  XII.  Le  rôle  de  la  contribution  mobilière  pour 
les  huit  mois  vingt  et  un  jours  de  l'exercice  de  1794 
est  supprimé  en  ce  qui  concerne  le  principal  et  les 
sous  additionnels  des  fonds  de  non-valeur ,  et  des 
dépenses  mises  à  la  charge  des  corps  administratifs  ; 
il  ne  subsistera  que  pour  les  sous  additionnels  des 
dépenses  des  communes.  Au  moyen  de  cette  sup- 
pression, les  communes  ne  pourront  former  aucune 
demande  collective  en  décharge ,  sur  les  exercices 
antérieurs,  de  la  contribution  mobilière.  Les  corps 
administratifs  n'auront  à  statuer  que  sur  les  récla- 
mations individuelles ,  et  notamment  sur  celle  des 
salariés  publics. 

«  XIII.  Les  communes  fourniront  aux  trois  quarts 
des  dépenses  locales ,  mises  à  leurs  charges  pour 
1794,  au  moyen  des  sous  additionnels ,  savoir  :  au 
rôle  de  la  contribution  foncière,  pour  quatre  cin- 
quièmes; et  à  celui  de  la  contribution  mobilière 
conservée  par  l'article  précédent,  pour  le  cinquième 
restant. 


«  Tous  1o^  S0U8  additionnels  répartis  sur  la  com- 
mune  de  Paris  seront  versés  directement  au  trésor 
public. 

•  XIV  êi  dernier.  Les  débiteurs,  autorisés  par  la 
loi  du  1er  décembre  1790  à  faire  une  retenue  sur  les 
rentes  foncières  et  les  intérêts  ou  rentes  constituées, 
soit  en  argent,  soit  en  denrées,  la  feront  au  cinquième 
du  montant  desdites  rentes  ou  intérêts  pour  Tan- 
née 1794. 

•  Les  débiteurs  des  rentes  ou  pensions  viagères  la 
feront  aussi  au  cinquième,  mais  seulement  sur  le  rc; 
venu  que  le  capital,  s'il  était  connu ,  produirait  au 
denier  20  ;  et  dans  le  cas  où  le  capital  ne  sera  pas 
connu,  ils  la  feront  au  dixième  du  montant  de  In 
rente  ou  pension  viagère  ;  le  tout  sans  préjudice  des 
baux  à  rente  et  autres  contrats  faits  sous  la  condi- 
tion des  non-retenues  des  contributions.  • 


Instruction  sur  le  décret  du  23  nivôse  de  Van  Se 
concernant  les  contributions  directes  de  1794 
{vietiX  style). 

Les  contribuables  et  les  corps  administra  tifs  at- 
tendaient de  la  Convention  nationale  une  loi  qui  ré- 
duisît la  contribution  foncière  à  la  juste  proportion 
à  l'égard  des  immeubles  surcharges.  Les  représen- 
tants avaient  a  prendre  des  précautions  pour  que  le 
trésor  public  reçût  tout  ce  qui  devait  lui  revenir. 
Ces  deux  motifs  forment  la  base  du  décret  du  23  ni- 
vôse. Ils  doivent  servir  de  règle  à  son  exécution. 

On  ne  pouvait  pas  espérer  que  la  répartition  des 
contributions  directes,  laite  en  1791,  atteignît  un  tel 
deg[ré  de  perfection  que  le  contingent  en  principal, 
assigné  à  chaque  contribuable,  égalât  le  sixième  du 
revenu  net  de  ses  propriétés  foncières,  et  n*excédât 
jamais  cette  proportion. 

Quelques  particuliers  ont  pu  être  grevés  ;  les  con- 
naissances acquises  sur  le  produit  du  territoire  fran- 
çais prouvent  que  la  contribution  d'un  plus  grand 
nombre  n'a  pas  été  portée  à  ce  qu'elle  aevait  être. 
Un  roi  était  alors  à  la  t^te  du  gouvernement  ;  on 
s'est  cru  autorisé  à  faire  de  fausses  évaluations,  afin 
de  contribuer  d'autant  moins  aux  charges  dont  il 
dévorait  le  produit.  On  connaît  des  municipalités 
qui  n'ont  pas  mis  les  estimations  du  produit  net  des 
fonds  de  terre  au  dixième  de  ce  qu'il  est  effective- 
ment. Enlacés  dans  des  formalités  inextricables,  les 
corps  administratifs  n'ont  pas  cru  pouvoir  réprimer 
(le  pareilles  manœuvres.  Tout  est  chanj^é  ;  la  répu- 
blique a  succédé  à  la  monarchie.  La  vérité  doit  pren- 
dre la  place  du  mensonge  ;  les  communes  qui  ont 
fait  de  fausses  évaluations  ne  doivent  avoir  ni  la  vo- 
lonté ,  ni  l'espérance  de  profiter  plus  longtemps  de 
ce  qui  a  été  pratiqué  à  cet  égard.  Elles  rectifieront 
leurs  erreurs  en  doublant,  ou  décuplant,  s'il  le  faut, 
le  montant  de  la  matrice  du  rôle.  Si  elles  ne  se  fai- 
saient pas  justice  elles-mêmes,  les  corps  administra- 
tifs sont  autorisés  par  la  nouvelle  loi  à  la  leur  ren- 
dre :  ils  justifieront  la  confiance  placée  dans  leur 
zèle  et  dans  leurs  connaissances  locales.  Cette  tâche 
est  grande  ;  mais  elle  a  cet  avantage  qu'il  suffit  de 
vouloir  la  remplir  pour  y  réussir;  elle  ne  présente 
des  difficultés  qu'à  ceux  qui  formeraient  le  coupable 
dessein  de  se  soustraire  à  leurs  obligations. 

Les  corps  administratits  ont  à  se  prononcer  sur 
des  réclamations  individuelles  ou  sur  des  réclama- 
tions collectives  des  communes  ;  ils  s'occuperont 
seulement  de  celles  dont  la  présentation  est  anté- 
rieure à  la  publication  de  la  loi  nouvelle.  En  sU- 
tuant  sur  les  unes  et  sur  les  autres,  ils  doivent  d'à- 


204 


bord  examiner  auel  peut  être  le  véritable  produit 
net  des  immeubles  ou  du  territoire  sur  lequel  le  dé- 
grèvement est  demande.  Ils  ont  pour  cela  plusieurs 
moyens  à  leur  disposition,  sans  être  obligés  à  en  ve- 
nir à  une  vérification  par  experts.  Tels  sont  le  pro- 
duit de  Tanciennedîme,^  la  proportion  des  anciennes 
contributions  directes,  (portant  sur  les  fonds  de  terre, 
comme  la  taille  et  les  vingtièmes,  le  prix  des  baux, 
le  parallèle  d*une  commune  qui  réclame  avec  une 
autre  qui  n*a  pas  de  plainte  à  lormer. 

Exemple  :iine  commune  s*est  pourvue  en  dégrè- 
vement; elle  soutient  que  le  total  de  la  contribution 
foncière  de  1791,  fixé  a  12,000  liv.,  doit  être  réduit 
à  6,000  liv.,  parce  que  la  somme  totale  des  estima- 
tions en  produit  net  ne  se  porte  qu'à  36,000  liv. 
Pour  juger  du  mérite  de  cette  réclamation,  les  corps 
administratifs  examineront  d*abordsi  véritablement 
le  revenu  net  n>xcède  pas  36,000  liv.;  les  calculs 
suivants  les  mettront  bientôt  à  même  de  connaître  la 
vérité;  s'ils  savent  ou  s*ils  apprennent  que  la  dîme 
decettecommune,perçueà  la  cote  10,  valait  8,0001. 
en  1789,  et  que  la  dîme  n'enlevait  que  la  septième 
partie  du  produit  nef,  ou  bien  que  rancicnne  taille 
ajoutée  aux  vingtièmes  le  portait  à  15,000  liv.,  et 
n'enlevait  que  le  quart  du  revenu  net;  ou  bien  que 
tes  objets  aflormés  1,200  liv.  ne  sont  portés  que  pour 
600  liv.  dans  la  matrice  du  rôle;  ou  bien  encore 
qu'une  autre  commune,  placée  par  Topinion  publi- 
que dans  la  même  classe  que  celle  qui  réclame,  a 
porté  les  évaluations  à  60,000  liv.  ou  davantage;  ils 
en  concluront  que  l'estimation  de  36,000  liv.  est  mal 
faite,  et,  tirant  de  cet  état  de  choses  les  inductions 
(jui  en  dérivent  nécessairement,  ils  déclareront  que 
le  revenu  net  de  la  commune  réclamante  doit  être 
considéré  comme  étant  de  60,000  liv.  ;  ils  la  démet- 
tront de  sa  demande  ;  ils  ordonneront  qu'elle  paiera 
le  continrent  assigné. 

L'état  de  la  poptilation  doit  encore  fixer  l'attention 
(les  corps  administratifs.  Il  est  notoire  que  la  plupart 
des  communes  se  sont  crues  autorisées ,  par  une 
fausse  interprétation  de  la  loi ,  à  réduire  presqu'à 
rien  l'estimation  des  bâtiments ,  maisons  et  usines. 
Celles  qui,  par  le  petit  nombre  des  habitants,  ne  pré- 
sentent aucun  exemple  du  bail  à  loyer ,  ont  pu  se 
contenter  de  la  proportion  du  sol  des  bâtiments  avec 
celui  des  fonds  de  terre  de  la  meilleure  qualité  ;  mais 
celles  qui  présentaient  plusieurs  exemples  de  loca- 
tion devaient  prendre  pour  rèele  les  valeurs  locati- 
ves  elles-mêmes;  le  montant  de  la  matrice  du  rôle 
se  serait  élevé  à  une  plus  forte  somme.  Les  corps 
administratifs  feront  ce  que  les  communes  auraient 
dû  faire;  ils  emploieront  tous  les  moyens  que  les  cir- 
constances locales  leur  présenteront  ;  ils  assureront 
le  recouvrement  de  tout  ce  q^ui  peut  être  prélevé  ; 
ils  procureront  à  la  nation  entière  les  avantages  que 
lui  promet  l'exécution  de  la  loi  du  23  nivôse,  si  par- 
tout on  l'observe  avec  des  intentions  droites,  avec 
le  sentiment  du  véritable  civisme. 

La  Convention  nationale  a  le  désir  si  fortement 
prononcé  de  procurer  aux  corps  administratifs  tous 
les  renseignements  propres  à  éclairer  leur  justice, 
qu'elle  les  autorise  à  faire  procéder  à  des  vérifica- 
tion ^«  sommaires  par  experts. 

Les  temps  ni  les  circonstances  ne  permettent  pas 
qu'on  s'occupe  d'une  vérification  cadastrale;  il  suffit 
que  les  évaluations  soient  certifiées  en  masse;  il  suf- 
fit que  les  vérifications  se  fassent  de  même.  Ainsi, 
les  experts  envoyés  sur  les  lieux  pourront  se  borner 
à  rechercher  et  à  taire  la  rectification  des  moyens  de 
véritication  déjà  cités  pour  exemple. 

Les  calculs  suivis  pour  savoir  ce  qui  peut,  ce  qui 
doit  être  par  conséquent  acquitté,  feront  connaître 
ce  qu'il  y  a  lieu  à  accorder  en  décharge.  Après  avoir 


confié  aux  corps  administratifs  toute  la  latitude  des 
pouvoirs  qui  leur  étaient  nécessaires  à  cet  égard,  It 
Convention  nationale  devait  assurer  le  recouvre- 
ment de  toutes  les  sommes  à  prélever.  L'entretien  de 
la  force  publique  exigeant  des  dépenses,  les  contri- 
butions sont  une  dette  ;  le  gouvernement  a  le  droit 
d'en  exiger  le  payement. 

Les  précautions  prises  à  cet  égard  se  réduisent  à 
deux  :  ta  première  consiste  à  déclarer  que  les  dégrè« 
vements  sur  l'exercice  de  1791  ne  seront  accordés 
en  principal  que  jusqu'à  concurrence  du  cinquième 
du  revenu  net.  Une  commune  dont  les  évaluations 
exactement  faites  s'élevaient  à  60,000  liv.  avait  été 
^taxée  à  12,000  liv.  ;  elle  avait  le  droit  de  demander 
un  dégrèvement  de  2,000  liv.  sur  l'exercice  de  1791, 
parce  que  la  proportion  de  la  contribution  était  fixée 
au  sixième  du  revenu  net  ;  elle  ne  le  pourra  pas  en 
exécution  de  la  nouvelle  loi,  parce  que,  la  propor- 
tion étant  portée  au  cinquième ,  son  contingent  est 
fixéà  12,000  liv. 

II  est  décidé  par  le  second  moyen  que  la  somme 
totale  des  dégrèvements  accordés  dans  chaque  dé- 
partement sur  les  trois  exercicesantérieursne  pourra 
excéder  la  moitié  du  principal  des  contributions  de 
1794.  La  Convention  nationale  a  cru  que  le  résultat 
de  cette  proportion  fournissait  des  moyens  suffisants 
pour  réparer  les  surcharges  éprouvées;  elle  a  voulu 
assurer  la  rentrée  du  surplus.  Cette  mesure  l'a  en- 
gagée à  décider  que  les  ordonnances  en  décharge  ne 
seront  exécutées  qu'après  avoir  été  visées  par  les 
administrateurs  du  département;  ceux-ci  en  calcu- 
leront la  somme  totale  avant  de  les  faire  sortira  cet 
effet.  Le  département  dont  la  contribution  foncière, 
en  1793,  s'élevait  en  principal  à  4  millions,  n'en  im* 
posera  que  3  en  1794, à  raison  des  trois  quarts; 
mais  il  ne  pourra  disposer,  pour  les  décharges,  que 
de  1  million  500,000  liv. ,  formant  la  moitié  de  la 
contribution  de  cette  même  année.  On  les  combinera 
de  manière  à  ne  pas  excéder  cette  proportion. 

On  aurait  pu  se  borner  à  déclarer  que  le  dégrève- 
ment, pris  respectivement  à  chaque  commune,  n'au- 
rait pu  excéder  la  moitié  de  la  contribution  ne  son 
territoire. 

On  a  considéré,  d'un  côté,  que  toutes  les  commu- 
nes n'étaient  pas  en  droit  de  se  plaindre  ;  de  l'autre, 
que  certaines  avaient  été  surchargées  dans  une  telle 
proportion,  que  la  moitié  de  leur  contribution  n'au- 
rait pas  été  suffisante  pour  que  justice  leur  fût  ren- 
due. On  a  donné  une  plus  grande  latitude  aux 
moyens  remis  aux  corps  administratifs ,  en  les  lais- 
sant compter  la  moitié  des  contributions  du  dépar- 
tement. Le  même  motif  a  engagé  la  Convention  na- 
tionale à  leur  laisser  l'emploi  des  sous  additionnels 
remis  à  leur  disposition  pour  les  fonds  de  non>va- 
leur,  par  les  lois  antérieures,  et  encore  disponibles. 
Ceux  qui  n'ont  accorde  aucun  dégrèvement  trou- 
veront une  nouvelle  ressource  dans  ces  fonds  de  ré- 
serve. 

Ces  explications  s'appliquent  à  ce  qu'il  reste  à 
faire  dans  les  départements  ;  la  loi  devait  s'expliquer 
sur  les  dégrèvements  déjà  accordés  :  si  l'on  avait 
tout  validé,  la  proportion  de  la  moitié  de  la  contri- 
bution de  1794  aurait  été  excédée  dans  quelques- 
uns  des  départements;  l'égalité  aurait  été  blessée.  Il 
a  été  nécessaire  d'ordonner  que  le  surplus  sera  re- 
versé sur  les  communes  dégrevées;  cette  disposition 
oblige  les  corps  administratifs  à  revenir  sur  les  dé* 
charges  prononcées  :  si ,  additionnées  à  celles  qui 
restent  à  régler,  elles  dépassent  la  proportion  ûxétf 
alors  ils  rétracteront,  ils  modifieront  les  arrêtés  por 
tés;  ils  ordonneront  que  la  partie  retranchée  sera 
réimposée  sur  les  rôles  de  1794 ,  par  addition  au 
nouveau  contingent. 


205 


Après  avoir  ainsi  réglé  ce  qui  est  relatif  aux  dé- 
charges et  réductions,  et  pris  dans  les  articles  VIU 
et  IX  les  mesures  qui  mettront  la  Convention  natio- 
nale à  même  de  se  faire  rendre  compte  de  ce  ({ui 
aura  été  fait,  la  loi  du  23  nivôse  règle  la  proportion 
de  la  contribution  foncière  pour  1794;  les  exercices 
doivent  correspondre  avec  le  nouveau  calendrier.  On 
s>st  fixé  sur  le  temps  à  prendre  pour  cet  effet  sur 
l'année  1794  (vieux  style)  ;  c'était  huit  mois  vingt  et 
un  jours.  Cette  époque  se  rapprochant  plus  des  trois 
quarts  de  Tannée  que  d'aucune  autre  proportion ,  la 
Convention  nationale  l'a  appliquée  à  la  répartition 
des  contributions,  et  elle  a  aecidé  que  la  contribu- 
tion foncière  de  1 794  sera  perçue  sur  les  rôles  de  1 793, 
à  raison  des  trois  (]uarts  dessommes  qui  y  sont  portées. 
La  loi  contient  à  cet  égard  deux  dispositions  égale- 
ment importantes  :  l'une  décide  que  les  trois  quarts 
seront  pris  autant  sur  le  principal  de  la  contribution 
de  1793  que  sur  Jes  sous  additionnels  destinés  aux 
fonds  de  non-valeur  et  aux  dépenses  des  corps  admi- 
nistratifs ;  rentre,  que  le  prélèvement  sera  fait  sur  les 
rôles  de  1793  et  parles  mêmes  percepteurs*  Ainsi  les 
rôles  de  1793  deviennent  exécutoires  pour  1794,  par 
la  seule  disposition  de  la  loi  du  23  nivôse  ;  le  bien  du 
service,  la  célérité  du  recouvrement,  l'intérêt  de 
tons  commandent  l'exécution  de  cette  mesure. 

Les  trois  quarts  des  cotes  de  1793  doivent  être  re- 
couvrées pour  1794  en  entier  et  sans  retard.  Les 
dégrèvements  accordés  sur  les  exercices  antérieurs, 
doivent  être  pris  en  considération  par  ceux  qui  paie- 
ront les  contributions  de  1794.  L'époque  retardée  à 
laquelle  la  contribution  est  demandée,  la  nécessité  de 
mettre  les  recettes  à  jour,  l'efficacité  de  ce  moyen 
pour  diminuer  la  masse  des  assignats  en  circulation, 
l'ordre  de  la  comptabilité,  tout  se  réunit  pour  enga- 
ger les  corps  administratifs  à  ne  rien  négliger,  et 
pour  exciter  les  contribuables  a  acquitter  prompte- 
ment  ce  qu'ils  doivent.  Les  bons  citoyens  s'empres- 
seront de  tout  solder;  ceux  qui  auront  payé  plus 
qu'ils  ne  doivent  sur  les  exercices  antérieurs  rece- 
vront ensuite  chez  le  receveur  du  district  le  montant 
de  leur  dégrèvement. 

Les  dispositions  qui  viennent  d'être  expliquées 
concernent  uniquement  le  recouvrement  aes  som- 
mes qui  doivent  être  versées  au  trésor  public  comme 
provenant  de  la  contribution  foncière;  il  reste  à 
s'occuper  de  la  contribution  mobilière  et  des  dépen- 
ses locales  des  communes. 

La  contribution  mobilière  était  déjà  condamnée 
dans  l'opinion  publique  ;  injuste  dans  ses  résultats, 
elle  grevait  les  citoyens  peu  fortunés;  ceux  qu'elle 
aurait  dû  atteindre  trouvaient  le  moyen  de  s'y  sous- 
traire. 

La  Convention  nationale  l'a  supprimée  pour  1794. 
C(  ite  suppression  n'a  pas  dû  porter  sur  les  sous  qui 
étaient  additionnels  pour  les  dépenses  des  commu- 
nes, attendu  qu'il  a  été  impossible  d'y  substituer  un 
mode  qui  empêchât  de  tout  rejeter  sur  la  contribu- 
tion foncière.  Le  rôle  de  la  contribution  mobilière 
ne  subsistera  donc  plus  que  pour  les  sous  addition- 
nels destinés  aux  dépenses  locales  et  communes. 
L'article  XIII  décide  dans  quelle  proportion  le  par- 
tage des  fonds  à  prélever  pour  cet  objet  sera  fait  sur 
les  deux  rôles  :  une  commune  qui  devait  imposer 
20,000  liv.  pour  ses  dépenses  locales  de  1794  en  ré- 
partira 15,000  liv.  pour  les  trois  quarts.  Les  quatre 
cinquièmes  de  cette  somme  se  portant  à  12,000  liv. 
seront  additionnés  au  rôle  de  la  contribution  fon- 
cière ;  les  300  liv.  restant  formeront  le  rôle  de  la  con- 
tribution mobilière. 

Cette  proportion  est  ainsi  réglée  pour  1793  par 
le  décret  du  3  août  de  la  même  année,  et  cette  cir- 
constance rend  si  facile  l'opération  prescrite,  que 


quelques  communes  n*auront  qu*à  réduire  è  la  eç- 
loime  d'émargements,  pour  les  trois  quarts,  leur  rôle 
de  contribution  mobilière. 

Le  même  motif  qui  a  oiigaeé  la  Convention  natio- 
nale à  fixer  le  montant  du  dégrèvement  à  accorder 
sur  la  contribution  foncière  l'a  déterminée  encore 
à  faire  usage  de  la  suppression  de  la  contribution 
mobilière  pour  éliminer  toutes  les  réclamations  col- 
lectives des  communes  sur  les  exercices  antérieurs. 

Les  68  millions  imposés  sur  chacun  des  exercices 
de  1791  et  1792  rentreront  par  conséquent  en  entier. 
Le  produit  de  celui  de  1793  ne  peut  souffrir  aucune 
difliculté.  11  ne  pourra  être  porté  d'atteinte  à  Tinté- 
grilé  de  ces  sommes  qu'en  considération  des  sur- 
charges individuelles,  et  notamment  de  celles  qui 
seraient  retombées  sur  les  salariés  publics  et  sur  les 
pensionnaires  de  l'Etat.  La  modicité  de  leur  traite- 
ment leur  a  été  tellement  préjudiciable  que  quel- 
ques-uns ont  été  obligés  de  payer  en  contributioa 
mobilière  une  somme  supérieure  à  leur  traitement, 
tandis  que  leurs  voisins,  favorisés  d'un  revenu  bien 
supérieur,  payaient  à  peine  10  ou  1 2  livres.  Les  corps 
administratifs  répareront  ces  injustices  par  des  or- 
donnances particulières;  elles  seront  reçues  pour 
comptant. 

L'article  dernier  de  la  loi  contient  une  disposition 
si  claire  qu'il  devient  superflu,  de  lui  donner  aucun 
développement.  Cet  article,  qu'on  trouve  dans  toutes 
les  lois  antérieures,  reporte  la  retenue  sur  les  rentes 
à  la  proportion  fixée  en  1791.  Elle  a  été  plus  forte 
dans  les  deux  années  subséquentes,  puisqu'elle  était 
au  quart.  Le  décret  rendu  sur  la  retenue  qui  s'opère 
à  l'égard  de  la  dette  publique,  et  l'oblieation  de 
rendre  cette  mesure  commune,  ont  engagé  Tes  repré- 
sentants du  peuple  à  rétablir  la  proportion  du  cin- 
quième. 

La  Convention  nationale  compte  le  succès  de  la 
nouvelle  loi  dans  le  nombre  des  moyens  d'ordre 
qu'elle  va  établir  dans  la  partie  des  hnances.  Elle 
invite  tous  les  contribuables  à  la  seconder  par  leur 
zèle.  Elle  exhorte  les  corps  administratifs  à  en  feire 
autant  par  leurs  efforts.  S'ils  éprouvent  quelques 
difficultés  dans  les  opérations  qui  leur  sont  confiées, 
qu'ils  considèrent  qu'elles  sont  inséparables  des  cir- 
constances par  lesquelles  il  faut  passer  pour  se  dé- 
barrasser de  l'ancien  système  des  contributions  et 
arriver  à  un  autre  plus  conforme  aux  principes  d'un 
gouvernement  juste  et  paternel  ;  la  certitude  d'une 
situation  plus  prospère  pour  l'avenir  doit  soutenir 
leur  application  et  leur  persévérance. 

Décrei. 

«  La  Convention  nationale  décrète  que  rinstmc- 
tion  ci-dessus  sera  annexée  au  décret  de  ce  jour  sur 
les  contributions  directes  de  1794  (vieux  style),  pour 
être  exécutée  suivant  sa  forme  et  teneur.  • 

SÉANCE  DU  24  NIVOSE. 

Un  des  secrétaires  donne  lecture  de  la  lettre  sui- 
vante : 

•  Citoyens  représentants,  au  mois  de  février  1793, 
ma  santé  affaiblie  par  deux  commissions  dans  les 
départements  de  RhOne-et-Loire  et  du  Midi  me  força 
de  demander  un  congé  pour  rétablir  mes  forces  dans 
mon  pays  natal  ;  je  1  obtins  illimité,  et  je  me  retirai 
à  ma  campagne,  a  sept  lieues  de  Lyon,  où,  seul  avec 
ma  famille,  et  sans  avoir  aucunes  relations,  j'atten- 
dais avec  impatience  de  pouvoir  rejoindre  mon  poste. 

•  Les  trounles  du  département  de  Rhône-et-Loire 
étant  survenus ,  ils  provoquèrent  la  sévérité  de  la 
Convention  ;  celte  assemblée  lança  plusieurs  décrets 
contre  Lvon ,  et  étendit  ses  mesures  jusqu'à  divers 
députés  ae  ce  département  ;  je  fus  alors  décrété  d'ar- 


306 


restatipn,  ainsi  que  les  citoyens  Michel  «  Forest  et 
Psrtrin  :  ce  décret  ne  parvint  à  ma  connaissance  que 
longtemps  après.  Ma  surprise  fut  telle  que  je  pou- 
vais à  peme  y  croire.  En  effet,  retenu  à  ma  campagne 
par  une  fièvre  lente,  solitaire  et  ignoré  de  tout  le 
monde,  devais-je  être  considéré  comme  fauteur  des 
troubles  de  Lvon?  Absent  par  des  congés  plusieurs 
fois  renouvelés  rt  toujours  illimités,  on  ne  pouvait 
non  plus  m*accuser  d'avoir  déserté  mon  poste  :  quels 
étaient  donc  les  motifs  de  cette  mesure?  Je  les  ignore 
encore,  car  le  texte  du  décret  n'en  présentait  aucun. 
«  Sans  doute  il  m^eût  été  facile  ae  repousser  alors 
les  soupçons  qui  ont  pu  s'élever  contre  moi,  si  j*avais 
ru  Tavantage  d*étre  présent  au  milieu  de  vous,  de 
pouvoir  répondre  à  mon  accusateur  et  offrir  à  l'as- 
semblée Teiposé  de  ma  conduite  et  de  mes  senti- 
ments; mais  je  fus  privé  de  ce  droit,  réservé  a  tout 
accusé,  de  réclamer  justice. 

•  Les  communications  de  mon  département  avec 
Paris  étaient  interrompues,  et,  lorsque  après  le  siège 
elles  se  rétablirent,  mes  démarches  furent  inutiles, 
et  trois  mémoires  justificatifs  que  j'adressai  soit  à  la 
Convention  nationale,  soit  au  comité  de  salut  public, 
soit  à  un  de  mes  collègues,  demeurèrent  sans  réponse 
ou  furent  interceptés  par  la  méchanceté. 

•  Mais  aujourd  hui  que  la  justice  de  la  Convention 
n'étant  plus  enchaînée  par  la  terreur,  elle  s'est  em- 

Ïiressée  de  rappeler  dans  son  sein  ceux  de  mes  coi- 
ègues  nommes  dans  le  même  décret  que  moi ,  mon 
sort  doit  être  semblable  au  leur. 

«  Je  réclame  donc  l'exercice  du  droit  qui  m'a  été 
donné  par  le  choix  du  peuple,  celui  de  le  représenter 
au  milieu  de  vous;  vous  n  avez  pas  encore  prononcé 
sur  mon  sort  ;  le  dernier  décret  (lue  vous  avez  rendu 
à  l'occasion  de  plusieurs  députés  mis  hors  de  la  loi 
ou  décrétés  d'accusation  ne  me  concerne  pas,  puis- 
que je  ne  suis  pas  compris  dans  les  deux  lois  quil 
rappelle. 

•  Signé  ViTBT,  député  du  déparlemeni  de 
Rhônô'el'Loire,  • 

Cettelettreestrenvoyéeauxcomitésdesalutjpublic, 
de  législation  et  de  sûreté  générale,  pour  en  faire  un 
rapport  sous  trois  jours. 

—  Jacob  donne  lecture  des  deux  pièces  suivantes  : 

La  eiloyens  offieUri ,  êous-of/ieiêrs  et  dragons 
eomposanl  U  dépôt  du  1 1«  régiment  de  dragons , 
en  eanlonnemenl  à  la  commune  de  Tout ,  aux  of- 
ficiers municipaux  de  ladite  commune. 

Tout,  le  1S  nivôse,  Tan  S*  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

«  Citoyens,  le  manque  d'approvisionnement  en 
grains  dans  lequel  se  trouve  votre  commune,  dans 
la  saison  actuelle,  nous  étant  connu,  nous  nous 
empressons  de  vous  prier  d*offrir  à  nos  concitoyens 
le  quart  de  notre  subsistance,  pour  le  temps  que 
vous  jugerez  nécessaire  :  nous  trouverons  dans  Tac- 
ceptnlion  de  cette  offre  la  véritable  jouissance  du 
républicain,  celle  d*étre  utile  à  la  patrie.  • 

(Suivent  les  signatures.) 

Extrait  de  la  lettre  adressée  à  Jacob ,  par  le  maire 
de  Toul,  en  date  du  20  nivôse^  l'an  3  de  la  repu» 
blique^  et  dont  il  a  donné  lecture  à  la  Convention. 

•  Les  enfaits  du  collège  de  notre  commune,  émus 
des  cris  des  malheureux  qui  manquent  de  pain»  ont 
affecté  aux  pauvres  leur  coûter  de  tous  les  jours; 
voyez,  mon  cher,  comme  réducation  nationale  a  fait 
des  progrès  sur  de  jeunes  âmes  qui  savent  déjà  faire 
des  sacrifices  1  • 

L'assemblée  ordonne  l'insertion  de  cette  lettre  au 
Bulletin. 


DBBOtnioES,  an  nom  dn  eomltë  des  secours  pu- 
blics :  Citoyens,  la  Convention  nationale  s'est  occu- 
Fée  sans  relâche  à  réprimer  et  à  réparer  les  abus  de 
ancien  régime;  les  pensions  de  la  ci-devant  liste 
civile  en  présentaient  un  très-important;  beaucoup 
avaient  été  accordées  à  la  faveur,  à  la  richesse,  d'au- 
tres à  des  services  pénibles  et  à  l'indigence.  De  cette 
dernière  classe  étaient  la  plupart  des  pensions  payées 
à  des  veuves,  à  des  enfants  ou  autres  personnes,  en 
considération  des  services  de  leurs  maris ,  de  leurs 
pères,  011  d'autres  parents,  dans  la  maison  dn  ei-de- 
vant  roi. 

Par  son  décret  du  17  germinal,  la  Convention  na« 
tionalese  détermina  à  supprimer  toutes  les  pensions 
de  la  liste  civile  ;  par  le  même  décret  elle  assura  aux 
gagistes  et  à  quelques  autres  de  nouvelles  pensions 
proportionnées  à  leurs  services  personnels  et  à  l'état 
de  leurs  fortunes;  enfin,  elle  conserva  aux  indigents 
leurs  pensions  sur  les  cassettes  et  aumûnes  jusqu'au 
I  maximum  de  400  livres. 

I  Mais,  citoyens,  ce  décret  frappa  d'une  suppression 
i  entière  dés  pensions  accordées  aux  veuves,  enfants 
et  autres  parents,  pour  des  services  non  personnels 
dans  la  mnison  de  Capet.  En  général,  ces  sortes  de 
pensions  étaient  la  recompense  de  longs  services 
rendus  par  des  maris,  des  pères,  ou  par  d  autres  pa- 
rents. La  majeure  partie  de  ces  pensionnaires  est 
âgée  et  indigente  ;  il  en  est  beaucoap  dont  la  pension 
formait  toute  la  ressource,  et  que  sa  suppression,  a 
plongés  dans  la  plus  extrême  misère. 

Ces  motifs  ont  déterminé  le  commissaire  liquida- 
teur provisoire  de  la  liste  civile  à  former  desétats  de 
ces  pensions;  il  les  a  adressa  à  votre  comité  des 
finances,  qui  a  pensé  que  le  décret  du  17  germinal, 
en  supprimant  les  pensions  des  veuves  et  enfants , 
n'avait  eu  d'autre  objet  que  de  réprimer  les  abus,  et 
non  pas  de  refuser  des  secours  indispensables  à  ceux 
qui  en  ont  un  véritable  besoin.  Il  a  arrêté  de  faire 
passer  les  tableaux  de  ces  pensions  au  comité  des 
secours  publics,  pour  proposer  des  secours  en  faveur 
des  veuves  et  enfants  qui  sont  dans  l'indigence. 

Citoyens,  le  comité  des  secours  publics  a  partagé 
les  sentiments  du  comité  des  finances;  il  s'empresse 
de  vous  proposer  les  secours  nécessaires  à  des  mal- 
heureux auxquels  des  suppressions  commandées  par 
le  besoin  d'anéantir  les  abus  ont  ûté  les  ressources 
de  la  vie.  Le  décret  que  je  provoque  formera  le  com- 

Slément  de  votre  justice  relativement  aux  pensions 
ela  liste  civile.  Par  celui  du  17  terminai,  les  riches 
se  trouveront  justement  privés  de  pensions  dont  ils 
n'ont  pas  besom,  et  que  sûrement  ils  n'avaient  point 
méritées.  Par  le  décret  que  vous  allez  rendre,  les 
veuves  et  les  enfants  indigents,  dont  les  pensions 
supprimées  étaient  la  seule  ou  la  principale  res- 
source, obtiendront,  en  remplacement,  un  secours 
annuel  qui  assurera  leur  existence. 

C'est  de  ces  mesures  également  équitables  et  de 
toutes  les  antres  qui  émanent  de  votre  sagesse,  c'est 
de  leur  ensemble  que  sortiront  le  bien  général ,  le 
bonheur  individuel,  la  stabilité  de  la  république. 

Voici  le  projet  de  décret  que  votre  comité  des  se- 
cours m'a  cnargé  de  vous  présenter  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  secours  publics,  décrète  : 
«  Art.  l^f .  Les  veuves,  enfants  et  autres  dénom- 
més aux  huit  états  certifiés  par  le  commissaire  liqui- 
dateur provisoire  de  la  liste  civile,  et  annexés  au 
présent  décret,  dont  les  pensions  accordées  en  con- 
sidération des  services  de  leurs  maris,  de  leurs  pères 
ou  d'autres  parents  dans  la  maison  du  ci-devant  roi, 
ont  été  supprimées  par  le  décret  du  17  germinal, 
recevront,  sur  les  fonds  des  secours  pubhcs,  i  titre 


ao7 


de  secours  annuel,  le  montant  de  leurs  pensions  §*il 
n'excède  point  la  somme  de  400  livres;  eu  cas  d'ex- 
ccdaut  du  montant  des  pensions,  le  maximum  du 
secours  annuel  est  Gzé  à  400  liv. 

•  II.  Ce  secours  annuel  ne  sera  payé  qu'à  ceux 

3ui  rapporteront  uu  certificat  d'indigence ,  émané 
u  conseil  général  de  leur  commune ,  yisé  par  le 
district. 

-  111.  A  Paris,  les  certificats  d'indigence  seront 
délivrés  par  les  comités.de  bienfaisance  de  la  section 
du  domicile  du  rcouérant;  ils  seront  visés  par  le 
comité  civil  et  par  le  département,  faisant  en  cette 
partie  les  fonctions  de  district. 

•  IV.  Les  certificats  d'indigence  seront  renouvelés 
ù  chaque  payement. 

•  V.  Le  secours  annuel  courra  du  i^f  janvier  1793 
(vieux  style);  il  sera  fait  déduction  des  secours  pro- 
visoires qui  auront  été  reçus,  à  compter  de  ladite 
époque. 

•  VI.  Il  ne  pourra  être  reçu  qu'à  la  charge  de 
remplir  toutes  les  formalités  prescrites  par  les  pen- 
sionnaires de  la  république. 

«  VU.  Les  huit  éuts  annexés  au  présent  décret  ne 
seront  point  imprimés.  • 
Ce  projet  de  décret  est  adopte. 

—  Dautriche ,  au  nom  du  comité  des  transports, 
postes  et  messageries,  propose,  et  la  Convention 
adopte  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale  sur  le  rapport  de  son 
comité  des  transports,  postes  et  messageries; 

•  Considérant  que  les  salaires  des  facteurs  des  mes- 
sageries, fixés  par  un  tarif  qui  remonte  au  mois 
d*avril  1784,  ne  sont  pas  proportionnés  au  prix  ac- 
tuel des  denrées  de  première  nécessité,  décrète  : 

•  Art.  l«r.  Les  transports  à  domicile  des  articles 
expédiés  par  la  voie  des  messageries  seront  payés  aux 
facteurs,  dans  toute  retendue  de  la  commune  de 
Paris,  savoir  : 

•  Pour  les  articles  du  poids  de  quinze  livres  et  au- 
dessous,  10  sous  ; 

•  Pour  ceux  de  seize  à  trente  livres,  15  sous  ; 

•  Pour  ceux  de  treut  et  une  à  cinquante  livres,  11.; 

•  Pour  ceux  de  cinquante  et  une  à  soixante-quinze 
livres,  1  liv.  ft  sous; 

•  Pour  ceux  de  soixante-seize  à  cent  livres,  1  liv. 
10  sous. 

•  11  sera  ajouté  15  sous  par  cinquante  livres  pour 
les  ballots  au  dessus  de  cent  livres. 

•  11.  Les  transports  d'assignats  seront  également 
payés  aux  facteurs,  savoir  : 

•  Pour  toute  somme  2,000  livres  et  au-dessous, 
18  sous. 

■  Pour  celle  de    2,000  à 

de    6,000  à 

de  10,000  à 

de  15,000  à 

de  20,000  à 

de  50,000  à  100,000  liv.,  8  liv. 

-  Tout  transport  de  sommes  au-dessus  de  100,000 
livres  sera  payé  5  liv. 

-Mil.  La  distribution  des  articles  en  passe-debout, 
dans  les  différents  bureaux  de  l'agence,  et  dans  Ten- 
ceinte  de  la  maison  affectée  à  son  service,  sera  payée, 
savoir  : 

•  Pour  les  articles  de  50  liv.  et  au-dessous  5  sous; 

•  Pour  les  articles  de  51  liv.  et  nu-dessus,  10  sous. 

•  IV.  La  même  distribution  des  articles  en  passe* 


6,000  liv.,  15  sous. 
10,000  liv.,  1  liv. 
15,000  liv.,  1 1.5  sous. 
20,000  liv., ll.lOsous. 
50,000  liv.,  2  liv. 


debout,  des  bureaux  de  l'agence  à  eeux  des  fermiers, 
et  respectivement  des  bureaux  des  fermiers  à  ceux 
de  l'agence,  sera  payée  conformément  à  l'article  fer. 

•  V.  Les  facteurs  seront  tenus  de  se  conformerait 
tarif  ci-dessus,  sans  pouvoir  exiger  aucune  rétribu- 
tion plus  forte,  sous  quelque  prétexte  que  ce  soit. 

«  VI.  Les  facteurs  des  messageries  continueront, 
aux  termes  de  la  loi  des  23  et  24  juillet  1703  (vieux 
style),  à  être  garants  et  responsables  des  articles  qui 
leur  seront  confiés. 

«  Vil.  Le  présent  décret  sera  imprimé  et  affiché  à 
Paris  dans  tous  les  bureaux  des  messageries.  • 

GiBAUD ,  au  nom  du  comité  de  commerce  :  L'abro- 
gation de  la  loi  du  maximum,  quelque  bienfaisante 
3u*elte  soit,  entraîne  cependant  dans  son  exécution 
es  diflicultés  qu'il  est  de  la  saeesse  du  législateur  de 
faire  disparaître.  Votre  comité  de  commerce  a  reçu 
beaucoup  de  pétitions  de  la  part  de  divers  marchands, 
dont  l'objet  se  rapproche  plus  ou  moins  de  la  ques- 
tion particulière  qui  fui  agitée  dans  cette  assemblée 
nonidi  dernier,  et  dont  vous  avez  renvoyé  Texameii 
à  votre  comité. 

Vous  vous  rappelez  sans  doute  que  la  question 
générale  sur  laauelle  on  voulait  que  vous  pronon- 
çassiez était  celle  de  savoir  «  si  les  marcnandises 
vendues  avant  l'abrogation  de  la  loi  du  maximum, 
qui  n'ont  point  été  livrées,  doivent  être  payées  d'a- 
près le  prix  de  la  vente  ou  d'après  le  prix  auquel 
elles  ont  été  naturellement  portées  par  la  révocation 
de  cette  loi.  • 

Il  semble,  au  premier  aspect,  que  le  législateur 
ne  doit  point  intervenir  dans  les  transactions  parti* 
culières,  et  qu'une  fois  qu'il  a  posé  les  bases  de  ces 
transactions,  toutes  les  modifications  qui  y  sont  ap* 
portées  par  les  citoyens,  suivant  leur  intérêt  ou  leurs 
spéculations,  doivent  être  entièrement  livrées  à  la 
liberté  commerciale  que  vous  voulez  rétablir,  et 
que,  s'il  s'élève  des  difficultés  dans  leur  exécution, 
c*est  aux  tribunaux  à  prononcer. 

Ces  principes,  vrais  dans  l'état  ordinaire  delà  lé- 
gislation, doivent  nécessairement  recevoir  quel(]ue8. 
exceptions  lorsque  le  législateur  a  été  entraîne  par 
des  circonstances  impérieuses  h  promulguer  des  fois 
qui  rompent,  pour  quelques  instants,  les  rapports 
ordinaires.  Comme  ces  lois  sont  imprévues ,  et  qu'il 
peut  se  trouver  quelques  citoyens  froissés  dans  le 
choc  qui  se  fait  sentir  du  passage  de  l'état  ordinaire 
à  celui-ci,  alors  le  législateur  est  obligé,  par  cet 
esprit  de  justice  qui  est  de  son  «ssence ,  de  rendre 
ce  choc  moins  sensible  aux  citoyens,  en  adoucissant 
la  rigoureuse  application  des  principes  reçus. 

Telle  a  été  la  marche  que  votre  comité  a  cru  quo 
la  Convention  avait  suivie  lors  de  la  loi  du  29  sep- 
tembre, qui  fixait  un  prix  aux  denrées  et  marchan- 
dises ;  car,  pour  déciaer  la  question  qui  se  présente 
d'après  l'esprit  de  justice  qui  vous  détermine  tou- 
jours, votre  comité  a  dû  nécessairement  se  trans- 
porter à  l'instant  de  la  promulgation  de  cette  loi* 
Alors,  comme  à  présent,  il  s'éleva  des  réclamations 
sur  l'exécution  des  marchés  et  sur  le  prix  auquel  les 
marchandises  devaient  être  livrées;  mais  alors  ce 
furent  les  acquéreurs  qui  vinrent  vous  dire  :  Si  vous 
nous  obligez  au  maintien  des  marchés  que  nous 
avons  faits  sous  Tempire  des  lois  communes ,  vous 
opérez  notre  ruine  certaine;  nous  ne  pouvions  pas» 
dans  nos  spéculations ,  faire  entrer  le  cas  fortuit  de 
cette  loi  ;  nous  ne  pouvons  pas  non  plus  attendre  un 
temps  où  la  chance  sera  plus  favorable  :  les  ven- 
deurs seuls  sont  favorisés;  ils  ont  un  prix  fort  élevé 
d'une  denrée  qu'ils  viendront  racheter  à  un  prix 
modique. 
Vous  crûtes  devoir  prévenir  cet  inconvénient; 


SOS 


l'arlicle  XVI  de  la  loi  du  29  sfptembrf  Tut  adopté, 
et  les  ▼cndfurfi  ou  propriétaires  <iupportèrent  en 
dernier  résultat,  le  sacrifice  particulier  que  l'intérêt 
général  exigeait. 

Présontrment  ce  sont  encore  les  acquéreurs  qui , 
sur  les  difljcultés  que  font  les  vendeurs  ou  proprié- 
taires, demandent  que  vous  éliminiez  les  prétentions 
dr  ceux-ci  à  une  augmentation  de  prix  équivalente 
à  celui  auquel  les  marchandises  s'élèvent  naturelle- 
ment; ces  acquéreurs  invoquent  la  foi  des  traités,  la 
fidélité  (|ui  doit  être  maintenue  dans  les  transactions 
opérées  librement  entre  citoyens. 

Ce  langage  n*est  pas  tout  à  fait  le  même  nue  celui 

?[u  ils  tenaient  lors  de  la  loi  du  29  septembre  1793 
vieux  style),  et  votre  comité,  dont  le  devoir  est  de 
tenir  la  balance  toujours  égale  entre  les  citovens,  a 
dû  se  rappeler  les  arguments  que  faisaient  les  ac- 
quéreurs aalors,  et  qui  vous  parurent  pcremptoires, 
pour  les  appliquer,  dans  Thypothèse  actuelle,  aux 
vendeurs  ou  propriétaires  ;  sans  cela,  ce  serait  tou- 
jours la  même  classe  de  citoyens  qui  serait  chargée 
du  sacrifice  à  faire  à  la  chase  publique,  au  lieu  que 
les  acquéreurs  n*en  feraient  d  aucune  espèce;  car  si 
les  marchandises  leur  sont  livrées  au  prix  du  maxi- 
mum, Texpérience  nous  apprend  qu'ils  ne  les  ven- 
dront pas  au-dessous  du  cours  que  la  liberté  du  com- 
merce leur  donnera.  S*ils  les  paient  ce  qu'elles 
valent,  ils  les  revendront  à  ce  même  cours ,  sans 
avoir  fait  le  gain  immense  qu'ils  convoitent.  11  paraît 
donc  juste  de  les  rappeler  aux  mêmes  principes  qui 
vous  déterminèrent  lors  de  la  loi  du  mois  de  sep- 
tembre. 

Si  vous  preniez  un  autre  parti ,  ce  serait  encore 
le  propriétaire-cultivateur,  que  cette  loi  du  maxi- 
mum a  écrasé  de  tant  de  manières,  qui  ressentirait 
les  deniers  effets  de  sa  malheureuse  influence. 

Vous  ne  faites  aucun  tort  aux  acquéreurs  en  éle- 
Tant  le  prix  au  cours  pour  les  marchés  non  consom- 
més, et  vous  en  feriez  beaucoup  aux  vendeurs  par 
une  mesure  contraire;  c*est  ce  qui  a  déterminé  votre 
comité  de  commerce  dans  le  projet  de  loi  qu'il  vous 
propose. 

Le  comité  n'a  point  vu,  dans  les  marchés  qui  se 
sont  faits  sous  l'empire  de  la  loi  du  maximum, cette 
liberté  de  discussion  qui  fait  l'essence  des  transac- 
tions commerciales,  puisque  sans  délit  de  part  ou 
d'autre  il  ne  pouvait  y  avoir  de  débat  de  prix;  mais 
comme  les  réclamations  çui  se  sont  élevées  ne  peu- 
vent avoir  pour  objet  la  livraison  de  la  marchandise 
vendue,  mais  seulement  le  prix  plus  ou  moins  fort 
de  celte  marchandise ,  le  comité  a  cru  devoir  veus 
proposer  de  maintenir  les  marchés  faits,  et  d'aug- 
menter seulement  le  prix  de  la  denrée  ou  marchan- 
dise h  livrer  pour  les  marchés  qui  n*ont  point  encore 
eu  d'exécution;  du  reste,  la  loi  qu'il  vous  propose 
est  rédigée d'aprèscelledu  29 septembre  1793(vicux 
style). 

Tels  sont  les  motifs  oui  ont  déterminé  votre  co- 
mité de  commerce  et  d  approvisionnement  à  vous 
présenter  le  projet  de  décret  que  je  vous  soumets. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  de  commerce  et  d'appro- 
visionnements, décfèle  : 

«  Art.  i^f.  Tous  les  marchés  faits  pour  des  denrées 
et  marchandises  avant  l'abrogation  de  la  loi  du 
maximum  sont  maintenus. 

«  11.  Le  prix  des  denrées  ou  marchandises  vendues 
au  prix  du  maximum  dans  les  marclu^  ou  arrhe- 
mcnts  faits  entre  particuliers,  qui  n'auront  pas  été 
livrées,  expédiées  ou  mises  en  route  lors  de  la  publi- 
cation de  la  loi  qui  abroge  celle  sur  le  maximum, 
sera  élevé  au  prix  que  la  liberté  du  commerce  leur 


a  donné  et  payé  en  conséquence.  Il  sera  libre  à 
l'acquéreur  de  résilier  le  marché  :  néanmoins  il  sera 
tenu  de  faire  «*onnattre  son  intention  dans  la  décade. 

•  m.  Les  tribunaux  de  commerce  ou  de  district 
feront  constater  ces  prix  par  des  arbitres  qu'ils  pour- 
ront nommer  a  cet  effet,  pour  se  déterminer  dans 
les  questions  qu'ils  auront  a  décider  sor  l'exécution 
de  ces  marchés.  • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

LoucHBT  .  Il  y  a  environ  sept  mois  que  la  Con- 
vention a  décrété  que  les  jugements  rendus  par  les 
tribunaux  criminels  des  départements  de  TArdèche , 
de  la  Lozère  et  de  l'Aveyron ,  seraient  révisés,  jus- 
qu'à l'époque  de  l'épuration  des  autorités  consti- 
tuées. Je  demande  donc  le  rapport  de  ce  décret,  et  je 
me  fonde  sur  les  grands  principes  que  la  Convention 
a  consacrés,  que  jamais  jugemeots  rendus  parjurés 
ne  seront  révisés.  Sans  entrer  dans  de  plus  grands 
détails,  ie  demande  le  renvoi  de  ma  proposition  au 
comité  de  législation. 

CouppÉ  (des  Côtes-du-Nord)  :  Quand  il  est  de  no- 
toriété publique  que  des  innocents  ont  été  condam- 
nés aux  galères ,  que  d'autres  ont  été  mis  en  arres- 
tation par  les  jugements  les  plus  iniques,  il  est  in- 
croyable que  l'on  s'oppose  à  la  révision  de  ces  juge- 
ment^. Citoyens,  songez  que  ces  hommes-là  sont 
vivants  encore,  et  qu'ils  peuvent  encore  être  rendus 
à  la  société.  (Applaudissements.) 

*'*  :  Je  prie  la  Convention  d'observer  que  le  décret 

3 ni  a  été  rendu  sur  la  proposition  de  Clauzel  regar- 
ait seulement  les  condamnés  qui  ont  perdu  la  vie. 
BouBDON  (de  l'Oise)  :  Si  Ton  veut  décréter  en 
principe  qu'on  ne  révisera  aucun  jugement  rendu 
par  jurés,  je  demande  si  les  citoyens  mis  en  état 
d'arrestation  ne  peuvent  plus  avoir  l'espérance  de 
sortir.  La  Convention  doit  décider  cette  question. 
Plusieun  membres  :  Aux  voix  le  renvoi! 
Le  renvoi  de  la  proposition  de  Louchet  est  décrété. 
{La  suite  demain,) 

N.  B.  Dans  la  séance  du  2S ,  Boissy  d'Anglas ,  au 
nom  (les  comités  de  gouvernement,  a  dénoncé  une 
manœuvre  de  la  malveillance  qui  avait  fait  renou- 
veler les  rassemblements  aux  portes  des  boulangers, 
et  qui  répandait  déjà  que  dans  trois  jours  on  n'aurait 
plus  de  pain  dans  Pans. 

L'administration  de  police  est  venue  avertir  le  co- 
mité (le  salut  public,  qui  a  donné  ordre  d'arrêter  les 
auteurs  de  cette  intrigue. 

Boissy  a  rassuré  la  Convention  sur  les  arrivages 
des  subsistances,  qui  se  font  toujours  avec  le  même 
soin  et  la  même  activité.  Toute  la  différence  est  que 
le  gouvernement,  ne  pouvant  les  faire  venir  par  eau, 
les  fait  arriver  par  terre. 


GRAVURES. 

Lasare  reuuseiti ,  estampe  gravée  par  le  citoyen  Avril, 
diaprés  le  tableau  peint  par  J.-B.  Leaueur,  en  ISSO.  Pria  : 
a4liv. 

A  Paris,  chei  Pauteur,  me  ci-devant  Petit-Bourbon,  n«56S, 
au  coin  de  celle  Tournon. 

La  célébrité  du  peintre  et  les  talents  connus  du  citoyen 
Avril,  dont  nous  avons  déjà  quatre  esUmpcs  très-csiimées , 
nous  dispensent  de  tout  autre>  éioge.  Celle  que  nous  annon* 
çons  est  de  même  grandeur  que  les  Homces,  Coriolati,  etc. 


ERRATA. 


Dans  la  séance  du  18,  Sccllier ,  au  nom  du  comité  des  fi* 
nances  et  de  commerce,  a  fait  rendre  un  décret  relatif  au 
traitement  des  préposes  des  douanes ,  qui  autorise  le  comité 
des  finances  à  le  fiier.  11  faut  ajouter  après  les  derniers  moU  : 
«  Sauf  TapprobatioD  de  la  Convention  nationale.  ■ 


GAZETTE  NUTIONlUe  oc  LE  HOMEIJR  UNIVERSEL. 

N*  117.  Septidi  27  Nivosb,  l'an  3«.  (Vendredi  16  Janvier  1796,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

Varsovie^  le  15  décembre. ^-hes  généraux  de  Calherine 
ODt  fail  célébrer  ici  sa  fête,  le  25  du  mois  dernier,  a?ec 
une  pompe  insultante.  Le  général  Suwarow  y  a  reçu  les 
plus  vifs  témoignages  d'adulation  de  la  part  de  tous  ceux 
qui  croient  avoir  besoin  de  ses  bonnes  grâces. 

Ce  trop  fameux  exécuteur  des  ordres  de  Pétersbourg 
▼ient  de  recevoir  de  Timpératrice  de  Russie  le  titre  de  feld- 
maréchal  en  récompense  de  ses  services.  Catherine  lui  a 
envoyé  un  bâton  enrichi  de  diamants. 

On  apprend  qu'un  Te  Deum  a  été  chanté  à  Pétersboug, 
en  réjouissance  des  victoires  remportées  en  Pologne.  La 
cour  avait  fait  lire  préliminairement  un  récit  calomnieux 
de  la  révolution  de  Pologne. 

On  parle  diversement  de  la  fixation  des  limites  dans  les- 
quelles les  usurpateurs  ne  manqueront  pas  de  resserrer 
notre  malheureuse  patrie. 

On  assure  que  le  prince  Repnin  et  le  comte  de  Stackel- 
berg,  ci-devant  ambassadeur  de  Russie  en  Pologne,  doi- 
vent s*y  rendre  incessamment. 

—  Xavier  Lukowski,  chef  d*un  détachement  d*insurgés, 
vient  de  tomber  entre  les  mains  des  Prussiens. 

ALLEMAGNE. 

Oggerskeim  y  te  i**  janvier,  —  Les  Français  ont  com- 
mencé ft  démolir  le  fort  du  Rhin  et  les  flèches  de  Manheim. 
Plus  de  douze  cents  travailleurs  y  sont  occupés.  Une  des 
flèches  est  déjà  entièrement  détruite  :  on  a  eu  soin  d*en 
emporter  les  palissudes.  Ils  ont  fait  sauter  une  redoute.  Ils 
•  ont  essayé  d*amener  à  terre  la  partie  du  pont  du  Rhin  qui 
est  restée  cn^^agée  dans  les  glaces,  sur  la  rive  gauche  du 
fleuve. 

—  Le  bombardement  du  H  décembre  a  tué  quelques 
personnes,  et  en  a  blessé  un  plus  grand  nombre  dans  Man- 
heim. Quoiqu'une  grande  partie  des  bombes  ait  éclaté  en 
Pair,  beaucoup  detnaisons  ont  été  endommagées.  Le  ma- 
gistrat de  la  ville  a  ouvert  une  souscription  en  faveur  des 
habitants  peu  aisés  qui  ont  souflert  du  bombardement. 

—  Les  Français  ont  fait  filer»  dès  le  25 1  deux  colonnes 
de  troupes  sur  Mayence. 

PAYS-BAS. 

BruxeUes,  le  20  nivou.  —  Les  alliés  paraissent  disposés 
à  faire  des  efforts  pour  défendre  le  terrain  situé  entre  le 
Leck  et  le  Wahal,  afin  d'empêcher  les  Français  de  pénétrer 
dans  la  province  d*(Jtrecht.  Néanmoins  Tarmée  hollan- 
daise, aux  ordres  du  prince  d*Orange,  se  trouve  dans  une 
mauvaise  situation  derrière  Gorcum ,  depuis  que  les  Fran- 
çais sont  maîtres  de  Grave  et  du  cours  de  la  Meuse. 

—  Les  troupes  autrichiennes,  aux  ordres  du  général 
Alvinzy,  ont  dû  opérer  leur  réunion  avec  les  troupes  an- 
glaises. Le  général  autrichien  Werneck  couvrira  le  fort 
de  Schenck  avec  cinq  à  six  mille  hommes.  Ce  mou- 
vement parmi  les  Autrichiens  laisse  Wcsel  abandonné  à 
ses  propres  forces  ;  mais  il  parait  qu'une  division  prussienne, 
venue  de  la  Poméranie,  doit  les  remplacer  sur  les  bords 
du  Rhin. 

—  La  garnison  de  Bréda  est  réduite  à  ses  derniers 
moyens  de  défense. 

-—  Le  commandement  de  ce  qui  reste  de  troupes  an- 
glaises est  définitivement  donné  au  général  banovrien  Wal- 
moden* 


V  Série. -^  TomcX. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Lelourneur  {de  la  Manche). 
SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU  24  RIYOSB. 

Lefiot  demande  la  parole  pour  une  motion  d*ordre. 
Elle  lui  est  accordée. 

Lefiot  :  Au  nombre  des  décrets  qui  ont  été  ren- 
dus hier,  j'en  lis  un  qui  porte  indemnité  des  repré- 
seutants  a  36  liv.  par  jour.  Je  ne  demande  pas  le 
rapport  de  ce  décret  dans  cette  séance  ;  mais  je  jette- 
rai quelques  idées,  dont  moi-même  je  demanderai  le 
renvoi  aux  comités.  (Murmures.)  Quels  motifs  ont 
amené  ce  décret  ?  Le  renchérissement ,  la  disette... 
(Violents  murmures.).  Depuis  plusieurs  mois  Ton 
parle  au  sein  de  la  Convention... 

Lefiot  est  interrompu  par  de  violents  murmures... 
On  demande  l'ordre  du  jour. 

Lefiot  quitte  sa  place,  et  monte  à  la  tribune.  — 11 
est  applaudi  par  l'extrémité  de  la  salle  et  quelques 
tribunes. 

Lefiot  :  J'entends  dire...  (Grandbruit.)  J'entends 
dire  que  beaucoup  d'entre  nous  sont  pères  de  fa- 
mille ,  qu'ils  ont  des  enfants.  Notre  intention  est- 
elle  que  la  révolution  soit  un  patrimoine  pour  nos 
enfants?  (Murmures.  —  Non ,  noni)  Donnez  à  vos 
enfants  l'amour  du  travail ,  donnez-leur  l'exemple 
de  la  frugalité ,  ils  seront  riches.  J'entends  parler 
des  sacribces  que  quelques-uns  font  totis  les  jours. 
Le  négoce  fait  des  pertes ,  l'artiste  perd  les  fruits  de 
ses  travaux...  Citoyens ,  voyez  nos  soldats  mutilés; 
voyez-les  lorsqu'ils  vous  présentent  leurs  membres 
perdus ,  et  osez  comparer  la  perte  de  vos  fortunes  à 
ta  perte  de  leur  sang  !  (Murmures.  )  Le  décret  rendu 
hier  est  subversif  de  nos  finances;  il  doit  nécessaire- 
ment faire  baisser  les  assignats.  (Murmures.) 

De  plus,  citoyens,  n'aviez-vous  pas  décrété  qu'au- 
cune loi  n'aurait  un  eflet  rétroactif?  Eh  bien,  parle 
décret  d'hier,  vous  vous  faites  donner  votre  indem- 
nité à  dater  du  1er  vendémiaire.  (Murmures.) 

Tous  les  motifs  sont  donc  ici  réunis  pour  le  rap- 
port de  ce  décret.  11  appartient  à  celui  qui  vit  dans 
une  honorable  médiocrité...  (Violents  murmures.) 

Plusieun  membree  :  Tu  as  été  en  mission! 

Lefiot  :  Il  appartient,  dis-je,  à  un  citoyen  qui  n'a 
que  son  traitement  pour  nourrir  sa  femme  et  ses 
enfants... 

Plusieursmembres  :Ma\heureux  !  tu  les  a  chassés. 

Lefiot  :  Je  dis  qu'il  faut  donner  l'exemple  de  la 
frugalité. 

Plusieurs  membres:  Et  des  vertus,  et  de  la  mora- 
lité. 

Lefiot  :  Alors  vos  appointements  pourront  vous 
suffire. 

Dabtigoyte  :  Je  demande  à  Lefiot  où  est  sa  femme. 
(Grande  agitation  dans  l'assemblée.  —  On  demande 
l'ordre  du  jour.) 

Lefiot  :  S'il  s'agit  de  personnalités,  i'y  répondrai, 
mais  après  que  j'aurai  discuté  les  intérêts  du  peuple. 
Je  mamtiens  donc  la  proposition  que  i'ai  faite,  de 
renvoyer  aux  comités  pbur  savoir  si  le  décret  qui 
porte  l'indemnité  des  représentants  du  peuple  à 
36  liv.  par  iour  ne  doit  pas  être  rapporté.  (Violents 
murmures.) 

27 


310 


Leflot  descend  de  la  tribune. 

Lepiot  :  Mon  intention  était  de  rappeler  un  prin- 
cipe. 

••*  ;  Ta  femme  et  tes  enfants,  où  sont-ils? 

LEiriof  :  On  veut  faire  de  ceci  une  aflklré  qui 
m'est  personnelle.  Je  répondrai,  car  je  ne  craindrais 
pas  de  vivre  dans  une  maison  de  verre.  (Quelques 
applaudissements»)  Je  demande  que  les  comités 
soient  chargés  d*ezaminer  s*il  n*y  aurait  pas  lieu  à 
rapporter  le  décret  d*hier« 

Charlier  :  La  discussion  qui  vient  de  s^élever  est 
du  plus  grand  intérêt  pour  1  instruction  du  peuple. 
Ce  n*est  pas  celui  de  nos  concitoyens  au'on  vient  de 
stipuler  y  mais  celui  d'une  faction.  (Applaudisse- 
ments.} Le  peuple  toujours  juste,  le  peuple  qui 
a  suivi  tous  les  mouvements  de  la  révolution,  et  qui 
sera  libre  en  dépit  de  toutes  les  lactions  ^applaudis- 
sements), le  peuple  raisonne  ;  il  se  rappelle  que  dans 
rAssembIce  constituante  Maury  et  âazalès  furent 
ceux  qui  s'opposèrent  à  ce  qu'on  allouât  une  indem- 
nité aux  représentants  du  peuple.  (On  rit  dans'une 
tribune.  «-^  Le  président  rappelle  la  tribune 


dre.) 


I  à  Tor- 


Lc  peuple  sait  (tue  le  surhaussement  des  denrées 
exige  l'augmentation  d'indemnité  qu'il  accorde  à 
ses  représentants.  Le  peuple  se  souvient  que  Maury 
et  Gazalès  s'opposaient,  dans  TAssemblée  consti- 
tuante, à  ce  que  cette  indemnité  excédât  900  liv., 
Iiarco  Qu'ils  étaient  sûrs  par  là  d'écarter  de  l'Assem- 
)lée  législative  tous  les  hommes  probes  qui  n'a- 
vaient point  de  fortune  et  de  réserver  la  représenta- 
tion nationale  aux  seuls  riches.  De  là  la  proposition 
de  iixer  le  traitement  des  administrateurs  de  district 
à  900  liv.a  celui  des  administrateurs  de  département 
a  1,200,  fixation  qui  ne  pouvait  permettre  encore 
qu'aux  seuls  riches  de  trouver  place  dans  les  admi- 
nistrations.  On  voulait  charger  les  représentants  du* 
petipl»  d'un  travail  essentiel ,  qui  les  occupât  du 
matin  au  soir.  (On  rit  et  on  murmure  dans  la  môme 
tribune.) 

Ce  que  nous  venons  d'entendre  prouve  la  vérité 
de  ce  que  je  vous  ai  dit<  Ce  ne  sont  pas  les  intérêts 
du  peuple  qu'on  a  voulu  stipuleri  ce  sont  ceux  d'une 
intrigue  de  la  faction  qui  fait  murmurer.  (Applau- 
dissements.) Les  représentants  du  peuple  ne  dfoivent 
pas  craindre  d'entrer  avec  lui  dans  des  détails  de 
ménage;  il  n'est  pas  possible  qu'un  père  de  famille 
vive  aujourd'hui  avec  100  sous  par  jour,  et  l'on  sait 
que  les  18  liv.  qui  nous  sont  accordées  ne  valent 
pas  maintenant  plus  de  100  sous.  La  balance  du 
commerce  et  les  mesures  qu'on  a  prises  feront  bien- 
tôt diminuer  les  denrées  ;  alors  nous  serons  les  nre- 
miers  à  dire  que  notre  indemnité  est  trop  consiuéra- 
blc ,  et  à  verser  dans  le  trésor  public  les  sommes 
excéJunt  le  simple  nécessaire.  Je  demande  l'ordre  du 
jour  sur  la  proposition  de  Lefiot. 

"*  :  Je  vais  citer  un  fait  qui  vous  confirmera  ce 
qu'a  dit  Charlier,  que  ce  n'est  par  pour  le  peuple, 
mais  pour  l'intérêt  d'une  faction  qu'on  réciamei  Je 
passais  hier ,  avec  mon  collègue  Courtois,  rue  Ho- 
noré, près  les  ci-devant  Jacobins;  nous  vîmes 
Charles  Duval  parlant  à  deux  femmes.  A  peine  leur 
conversation  eut-elle  fini  que  ces  deux  femmes  se 
mirent  à  crier  hautement  contre  le  décret  que  la 
Convention  avait  rendu  le  matin. 

Duvois-CiiAMGR  :  Elles  étaient  payées  pour  cela. 

CLAt2fiL  :  Il  n^est  pas  étonnant  que  Charles  Duval 
fasses  crier.  Contre  le  décret  qui  accorde  une  juste 
indemnité  à  ses  collègues,  puisque  l'ancien  gouver- 
nement lui  payait  13,000  Hv.  pour  sa  knilU  ;  «eux 


3ui  ont  de  pareilles  ressources  peuvent  se  passer 
'une  augmentation  d'indemnité  :  mais  le  repréieiK- 
tant  qui  n*a  pas  d'intrigues  ne  peut  vivre  mainte- 
nant, ni  faire  subsister  sa  famille,  avec  100  sous  par 
jour. 

Charles  Duval  :  Ce  qtié  l'opinant  vient  de  dire 
est  hors  de  ma  mémoire. 

Bentabolb  :.  Je  désiré  ({Uè  cette  discussion  de- 
vienne utile  à  la  république:  et  elle  le  deviendra 
si  la  Convention  veut  m'entendre. 

Plusieun  voimi  Parte  ;  tu  n'as  rien  à  craindre. 

Bentabolë  :  La  motion  qui  vient  d'î^tre  faite  tout 
à  l'heure  n'est  qu'une  des  moindres  tentatives  faites 
pour  perdre  la  Convention. 

Lbfiot  :  Je  demande  la  parole. 

BEifTABOT.B  :  On  veut  d'abord  l'avilir  pour  parve- 
nir à  la  renverser.  On  conspire  contre  la  représen- 
tation nationale  et  contre  tous  les  patriotes  qui  ont 
fait  la  révolution  du  9  thermidor.  Vous  avez  exposé 
vos  têtes  pour  sauver  la  France  :  eh  bien ,  tout  est 
perdu  si  vous  ne  prévenez  les  desseins  des  conspira- 
teurs. (Applaudissements.) 

Tallibn  :  Nous  périrons  tous  plutôt  que  de  souf- 
frir que  jamais  le  terrorisme  revienne  a  l'ordre  du 
jour.  (Tous  les  membres  se  lèvent  en  répétant  le 
même  serment.) 

Bentabolb  :  On  cherche  à  égarer  le  peuple  sur  las 
intentions  de  la  Convention.  Les  plus  scélérats  des 
hommes,  ceux  qui  ne  goûtent  de  plaisir  que  dans  le 
sang  et  d^ns  le  carnage,  veulent  faire  croire  que  la 
Convention,  en  faisant  la  révolution  du  i  thermidor, 
a  voulu  faire  trioihphcr  l'aristocratie.  C'est  à  vous, 
citoyens  généreux,  hommes  probes  de  la  majorité, 
vous  qui  vous  êtes  couverts  de  gloire  en  faisant 
cette  révolution... 

Granbt  ;  Toute  la  Convention  l'a  faite  1 

Plusieurs  voix  ;  Non  ,  non  ! 

Bentabolë  :  11  est  doulouretiï  pour  mol  dé  ne 

(varier  que  de  la  majorité,  lorsque  je  voudrais  ne 
amais  voir  ici  que  l'unanimité;  mais,  je  le  dis  avec 
douleur ,  il  y  a  une  petite  minorité  qui  ne  peut  se 
consoler  d'avoir  vU  échapper  de  ses  mains  fa  puis- 
sance qu'elle  partageait  avec  la  tyrannie.  (Vifs  ap- 
plaudissements.) Si  vous  ne  soutenez  pas  aux  yeux 
du  peuple  et  de  l'Europe  entier  le  caractère  que 
vous  avéz,développé  le  9  thermidor  ;  si  vous  laissez 
triompher  l'anarchie ,  vous  mourrez  avec  la  douleur 
d'avoir  perdu  votre  pays.  Je  vous  le  dis ,  on  menace 
vos  têtes. 

RicHoux  :  11  est  beati  de  Se  défendre  contre  le 
crime. 

Bentabolb  :  On  ne  se  contente  pas  de  conspirer 
dans  l'ombre ,  on  est  assez  audacieux  depublier  ses 
projets  criminels.  Jamais  je  n*attaquerai  la  liberté 
de  la  presse;  mais  je  crois  que  vous  ne  voudrez  pas 
non  plus  c]u'elle  serve  aux  projets  du  royalisme  ou 
de  la  faction  qui  veut  détruire  la  représenUition  na- 
tionale ,  et  qui ,  n'en  doutez  pas ,  est  d'accord  avee 
les  royalistes.  (Oui,  oui/  s'écrie* t-on.)  Voici  uir 
journal  au  bas  duquel  on  trouve  ces  lettres  initia^' 
les  :  C...  R...  du  P.  {Plusieurs  voix:  C'est  Châles!) 
Je  ne  sais  pas  quel  est  l'auteur  ;  mais  voici  l'adresse 
où  se  distribue  ce  journal  :  Rue  Traverêière'Honor^^ 
n^  21^  au  reM-de-chaussée. 

Plusieurs  voiw  :  C'est  l'adresse  de  Châles. 

Bentabole  lit  un  fragment  du  journal  intitulé 
l'Ami  du  Peuple. 

1  II  fut  un  temps  où  les  répabUcalBi  avaient  âne  ma* 


311 


hièfB  de  nlionner  et  dajoger,  tnitt  iHnpIe  qne  lûre.  Telle 
cboie»  diiQienUls»  plelt  tui  arlstoorates t  doue  elle  eit 
nmufiise  t  telle  outre  leur  déplaît  ;  done  elle  est  bonne  et 
bvorable  an  peuple.  Celle  logique»  je  le  «eUi  n^eit  pai 
celle  de  T  Académie  ni  det  Uiseuri  de  livres;  mais  le  bon 
•eos  qui  éclaire  le  peuple  est  un  au»»i  grand  maître  qu*At 
rlstoteet  set  disciples.  Juges  donc  le  SI  mal  et  le  10  tber« 
midor  t?ec  le  boq  sens  du  peuple,  lit$  eri^tocrates  applau- 
dissent à  l*an  et  se  déchaînent  contre  Tautre;  roaintenaqti 
tppliquei  le  formule  triflale,  mais  juste  et  vralei  des  sans* 
euloUest  la  conséquence  est  facile  à  tirer. 

c  II  y  toujours  eu  i  et  11  y  aura  loujourt  entre  le  peuple 
et  l*aristoorptie  opposition  de  prlnolpei  et  dMntépét.  Vollit 
pourquoi  le  pauple  et  les  aristoerates  sont  difUés  d*opU 
nions  sur  eei  deui  mémorables  journées,  dont  les  résuUati 
jusqu'à  ce  jour  ont  paru  diamétralement  eontrairet.  On  ne 
doit  en  réTolution  juger  que  les  résultati.* 

BSNTABOLB  !  D'après  cela,  il  est  clair  que  Fauteur 
a  voulu  prouver  <jue  la  rdvo|ution  du  9  qe  s'est 
dite  qu'en  faveur  de  raristooratie. 

Voioi  un  autre  passage  de  cet  ëerlt  : 

•  Le  peuple  saTalt-ll,  le  14  Juillet,  qui  le  menait  et  oi^ 
on  le  menait?  Il  n*étalt,  dans  ce  premier  acte  de  la  révo- 
lution ,  que  l'instrument  aveugle  de  Pembition  et  de  la 
vengeance  des  ennemis  de  la  eour,  de  la  noblesse,  des 
parlements  et  du  clergé.  Assis  sur  ses  trophées.  Il  sentait  le 
besoin  d'être  libre;  mais,  sans  eipérienee  et  sans  guide, 
ii  était  destiné  à  ne  le  devenir  qu*aprèt  atolr  été  le  iouat 
de  toutes  les  factions,  Le  10  août ,  le  pi^uple  victorieux 
ignorait  pour  quelle  eause  11  TeneU  de  verser  son  sang,  a 

Mkblim  (de  Thionville):  Ça  n'est  pas  vrai.  Le 
10  août ,  le  peuple  ddcrëta  la  république  en  détrui- 
sant le  palais  de  ses  rois.  Il  n'eut  pas  besoin  pour 
cela  de  TAssemblëe  l^gislativo.  L'auteur  de  cette 
diatribe  ne  peut  être  qu  un  lâche  fripon. 

Marec  :  Il  n'appartient  qu'à  un  ami  du  roi  d*écrire 
de  pareilles  horreurs. 

Châles  parle  dans  le  bruit. 

Bentabole  reprend  :  «11  ne  lui  restait  pour  prix 
de  sa  conquête  que  le  choix  d'un  tyrun.  •  (Violents 
murmures.) 

BouBDON  (  de  rOisc  )  :  Tout  le  monde  sait  qno 
Châles  a  longtemps  travaillé  à  VAmi  d\i  Roi. 

Bbntabqlk  continue  ;  •  Puis3e  la  chute  de  Robes^ 
pierre  (vous  voyez  qu'il  ne  dit  pas  la  punition)  èlvd 
suivie ,  comme  le  fut  celle  de  fa  Gironde ,  d'up  rc)* 
tour  général  aux  vraij  principes ,  et  d'upç  forte  im- 
pulsion vert  la  démocratie!  Puisse  la  journée  dq 
10  thermidor,  sur  laquelle  l'opinion  du  peuple  est 
encore  indécise...  •  (L'indignation  de  l'assemblée 
empêche  Bentabole  de  continuer.) 

Bbntabolb  :  Je  crois  que  les  choses  que  J'ai  dites 
sont  assez  positives  pour  qu'on  ne  puisse  pas  douter 
qu  il  existe  un  projet  de  renverser  la  Convention, 
qui  a  fait  la  journée  du  9  thermidor.  Cet  écrit  an- 
nouée  do  plus  qu'il  éclatera  sous  peu  un  coup  terri- 
ble ,  qne  tels  oq  tels  hommes  qu^on  désigne  seront 
massacrés.  Je  demande  que  les  comités  vous  fassent 
après-demain  un  rapport  sur  la  situation  de  Paris. 
Vous  verrez  que  la  cgpspiralion  ne  doit  pas  tarder 
d'éclater. 

RicRoux  :  La  mort  des  patriotes  de  la  Convention 
est  fixée  à  la  fin  de  la  décade. 

Clauzbl  :  Je  m'oppose  au  renvoi  aux  trois  comi- 
tés. L'auteur  de  eet  écrit  est  un  ancien  chanoine, 
qui  regrette  ses  13,000  livres  de  rentes,  qui  a  long- 
temps  travaillé  à  lo  feuille  de  l'abbé  Royou.  Voil^ 
pourquoi  il  rappelle  dans  cette  feuille  qu'il  ne  res- 
tait au  peuple  que  le  choix  d'un  tyran  ;  vous  devez 
vous  (Souvenir  des  discours  incendiaires  qu'il  a  tenus 
aux  JoQobius contre  la  Convention  ;  vous  devez  vous 


souvenir  qu'il  a  demandé  la  Bonvocation  des  assem- 
blées primaires.  11  suffit  de  faire  connaître  au  peuple 
l'auteur  de  cet  écrit,  pour  qu'il  juge  ce  qu'il  en  doit 
croire.  Je  demande  l'ordre  du  jour  sur  le  renvoi. 

BE!fTABOLE  :  Lc  rcuvol  est  nécessaire ,  parce  que 
l'affaire  dont  il  s'agit  intéresse  le  salut  de  la  répu- 
blique. Je  reviens  maintenante  la  question  princi- 
pale. 

Lorsque  nous  avons  discuté  si,  ou  non,  il  était  né- 
cessaire d'augmenter  l'indemnité  des  représentants 
du  peuple,  nous  avons  parlé  franchement:  les  hom- 
mes de  probité  de  l'assemblée  (quelques  murmures; 
—  plusieurt  voix  :  Oui,  oui!)  ont  cru  qu'ils  ne  de- 
vaient pas  laisser  planer  le  soupçon  sur  leurs  têtes  : 
car. tout  le  monde  sait  qu'il  est  impossible  de  faire 
subsister  une  nombreuse  famille  avec  IB  liv.  par 
jour.  Ce  décret  fut  rendu  de  bonne  foi  ;  si  une  partie 
de  l'assemblée ,  égarée  par  les  factieux  oui  veulent 
nous  perdre,  croit  qu'il  soit  mauvais,  je  déclare  que 
le  danger  de  la  patrie  me  fera  renoncer  h  mon  in- 
demnité. Je  mangerai  ma  fortune,  8*il  le  faut  ;  malg 
ne  perpétuons  pas  plus  longtemps  cette  division  qui 
décnire  la  patrie, 

Plvuieun  voix  :  Non ,  non  ! 

Mbblin  (de  Thionville)  :  Il  existe  done  un  ays* 
tème  pour  neutraliser  le  courage  des  Français  et 

Îiour  rendre  iuutiles  les  victoires  de  nos  braves  dé- 
ènseurs.  La  situation  dans  laquelle  je  retrouve  cette 
assemblée  me  prouve  que  ce  système  est  suivi  dans 
son  sein.  C'est  lorsque  du  nord  au  midi,  de  l'orient 
à  l'occident,  nos  troupes  triomphantes  arborent  par- 
tout le  drapeau  tricolore ,  que  la  discorde  vient  bo 
réfugier  ici  au  milieu  de  la  Convention  nationale , 

3 ni  seule  doit  donner  le  mouvement  à  la  masse 
'hommes  qui  ne  savent  qu'obéir  pour  exterminer 
les  tyrans. 

Je  le  demande  :  est->OB  au  milieu  de  tant  de  vie* 
toires  que  nous  devons  nous  abandonner  a  des  que* 
relies  insignifiantes,  au  lieu  de  songer  aux  moyens 
de  briser  les  chaînes  de  tous  les  peuples,  en  prépa- 
rant une  campagne  mille  fois  plus  belle  que  celle 
qui  vient  de  se  terminer?  Vous  ne  sentez  donc  pas , 
vous  qui  entretenez  ces  misérables  divisions  dans  la 
Convention  nationale,  vous  ne  sentez  donc  pas 
combien  il  est  beau  ,  combien  11  est  glorieux  d'être 
Français?  (Vifs  applaudissements.)  Vous  ne  voulez 
pas  de  rinaemnite  qui  vous  est  accordée  ;  eh  bien  I 
je  déclare  qu'il  ne  peut  y  avoir  dans  la  république 
que  ceux  qui  ont  trempé  leurs  mains  dans  le  sang, 
ou  puisé  aans  les  trésors  du  peuple ,  qui  puissent 
s'opposer  à  ce  que  ses  représentants  soient  au  moina 
vêtus.  (Nouveaux  applaudissements*)  L^Ansleterre 
et  l'Autriche  tremblent.  Si  voussovez  être  fermes , 
si  vous  savez  commander  aux  factions,  vouscom» 
manderez  aussi  aux  tyrans  de  l'Europe  ;  vous  a.ssu*- 
rerez  encore  à  douze  cent  mille  combattants  qui 
couvrent  nos  frontières  de  nouvelles  jouissances  et 
de  nouveaux  triomphes.  (  Les  applaudissements  sa 
renouvellent.)  Mais  si  vous  épousez  d*autrcs  que- 
relles que  celle  de  l'homme  liure  contre  le  fripon, 
que  celle  de  la  vertu  contre  le  crime ,  que  celle  de 
I  ami  de  l'humanité  contre  l'égorgeur  ;  si  vous  n'a-» 
battez  d'un  seul  coup  les  restes  de  la  horde  maudite 
de  Robesnierre.M  (on  applaudit  h  plusieurs  reprises), 
c'en  est  lait  de  la  république.  Oui,  citoyens,  ce  sont 
les  restes  de  Robespierre  qui  se  mettent  ici  à  la  place 
des  puissances  étrangères.  (Vifs  applaudissements.) 
Ils  voudraient  avilir  la  Convention,  mais  ils  n'y 
réussiront  pas;  ce  n'est  pas  lorsque  tous  les  peuples 
de  l'Europe  lui  demandent  la  paix ,  ce  n'est  pas  lors  • 
qu'elle  peut  fixer  le  bonheur  du  monde,  que  trente 
misérables  parviendront...  (les plus  vib  applaudis- 


SIS 


sements  éclatent  de  toutes  parts,  et  se  prolongent 
très  longtemps) ,  que  trente  misérables  qui  cher- 
chent à  faire  regretter  un  système  maudit,  celui  de 
la  royauté,  parviendront  à  traverser  ses  desseins. 

Citoyens ,  ce  n*est  qu'ici  que  j*ai  entendu  parler 
de  royauté,  et  je  vous  déclare  qu'elle  ne  se  relèvera 
jamais.  (Vifs  api)laudissements.)  Douze  cent  mille 
Brutus  ont  le  poignard  levé  ;  mais  je  dois  désirer 
à  Topinion  du  peuple  quelques  monstres  qui  ne 
trouvent  de  bonpeur  qu  au  milieu  du  sang ,  pour 
qui  18  liv.  ne  sont  rien,  pour  qui  36  liv.  sont  encore 
moins ,  mais  pour  qui  la  rapine  est  tout.  (Vifs  af)- 
plaudissements.)  Us  voudraient  de  nouveau  couvrir 
rhorizon  de  la  France,  bientôt  heureuse,  d'un  crêpe 
funèbre,  à  l'aide  duquel  ils  cacheraient  adroitement 
la  main  qui  voudrait  ressaisir  les  moyens  qu'ils 
avaient  avant  le  9  thermidor,  et  le  poignard  avec 
lequel  ils  assassinaient  la  vertu.  (La  salle  retentit 
d'applaudissements.)  Les  troubles  qui  régnent  dans 
cette  assemblée  sont  dus  aux  continuateurs  de  Ro- 
bespierre ;  ils  sont  là.  (Merlin  désigne  une  extrémité 
de  la  salle.  —  On  applaudit  vivement.)  Vous  seriez 
tranquilles  ici   si  vous  n'aviez  pas  à  juger  trois 

grands  coupables  qui ,  au  lieu  de  travailler  à  leur 
éfense,  s'occupent  à  faire  faire  des  libelles  pour  dé- 
tourner votre  attention  de  leur  affaire  particulière  ; 
trois  hommes  pour  qui  tous  les  moyens  sont  bons, 
pourvu  qu'ils  échappent;  trois  hommes eutin  qui 
TOUS  assassineront  si  vous  n'en  faites  justice. 

Justice  !  justice  !  c'est  là  le  cri  qu'on  entend  d'un 
bout  de  la  France  à  l'autre ,  c'est  celui  de  nos  ar- 
mées. (Vifs  applaudissements.)  Le  système  de  bar- 
barie ne  peut  plus  prendre  en  France.  La  république 
ne  veut  plus  d'attentats.  (Vifs  applaudissements.) 
Elle  veut  la  punition  des  assassins  du  peuple ,  de 
ceux  qui,  de  leur  propre  aveu,  quarante  jours  après 
(]uc  Robespierre  ne  dominait  plus ,  faisaient  encore 
égorger  par  charretées,  de  ceux  qui  ont  eu  la  bar- 
barie d'appeler  ici  la  malheureuse  femme  de  Phélip 
peaux  pour  entendre  l'arrêt  de  mort  de  son  mari... 

Plusieurt  voix  :  C'est  Billaud-Varennes. 

Merlin  :  De  ceux  (]ui ,  après  que  nous  eûmes 
écrasé  Robespierre,  osèrent  encore  venir  ici  désigner 
les  coopérateurs  qu'ils  voulaient  se  donner. 

Pluiieurê  voix  :  Charles  Duval  en  était  un. 

Merlin  :  De  ceux  qui,  couverts  de  crimes  et  suant 
de  forfaits,  viennent  semer  le  trouble  dans  cette  as- 
semblée pour  empêcher  la  justice  de  les  atteindre. 
(Vils  applaudissements.)  Mais  ils  auront  beau  faire, 
elle  les  atteindra.  (Nouveaux  applaudissements.) 
Que  leurs  partisans  apprennent  que  la  postérité  ne 
sera  pas  la  première  qui  les  jugera  ;  l'opinion  de 
leurs  contemporains  est  formée  sur  leur  compte. 
Qu'ils  sachent  que ,  dans  les  départements  et  dans 
les  armées ,  leurs  noms  sont  en  exécration  ;  qu'ils 
ont  donne  d'eux-mêmes  l'opinion  qu'on  a  de  ceux 

?[ui  aidèrent  Erostrate  à  brûler  le  temple  d'Ephèse. 
Applaudissements.) 

Je  demande  que  le  décret  qui  a  été  rendu  hier  soit 
maintenu  ;  il  n'y  a  que  ceux  à  qui  leur  fortune  et 
leur  industrie  oflrent  des  ressources  qui  puissent 
s'y  opposer. 

Quant  à  moi ,  je  déclare  que  je  ne  puis  faire  sub- 
sister ma  femme  infirme  et  deux  enfants  sans  une 
augmentation  d'indemnité  que  la  hausse  des  den- 
rées rend  indispensable,' et  que  je  demanderais  à 
mon  département  le  supplément  que  la  Convention 
me  refuserait. 

Merlin  descend  de  la  tribune  au  milieu  des  plus 
vils  applaudissements. 

Merlin  (de  Douai)  :  Citoyens,  je  m'étonne  qu*une 


aussi  misérable  discussion  occupe  la  ConTentîoD  na- 
tionale pendant  un  si  long  temps,  surtout  quand  Je 
pense  que  j'ai  vu,  il  y  a  six  mois,  plusieurs  de  nos 
collègues,  membres  d'un  comité,  qui  manquaient  de 
souliers:  je  m'en  étonne,  quand  je  pense  que  l'an- 
cien tyran  dépensait  25  millions  par  année,  et  en 
donnait  huit  à  une  prostituée.  Mais  il  suffit  de  faire 
(]uelques  rapprochements  pour  se  convaincre  des 
intentions  de  ceux  qui  cherchent  en  ce  moment  à 
diviser  la  Convention  nationale  ;  c'est  ici  l'instant  de 
lever  le  voile  qui  couvre  les  secrets  du  gouverne- 
ment. Citoyens,  quel  moment  choisit-on  pour  divi- 
ser les  membres  de  cette  assemblée  ?  C'est  le  mo- 
ment où  une  opération  commencée  depuis  plusieurs 
mois,  et  qui  doit  assurer  le  bonheur  du  peuple  et 
porter  la  république  au  plus  haut  degré  de  gloire, 
est  sur  le  point  de  finir  ;  c'est  ce  moment  que  l'on 
choisit,  non  pour  ramener  la  royauté,  le  peuple  ne 
le  souffrirait  pas,  mais  pour  faire  revivre  l'anarchie* 
Ce  qui  se  passe  chaque  jour  a  été  annoncé  par  vos 
ennemis.  Un  de  nos  envoyés  auprès  d'une  puissance 
étrangère  nous  écrit  que  Pitt  et  Cobourg  mettent 
tout  en  usage  pour  rompre  l'opération  commencée  : 
c'est  surtout  la  Convention  nationale  qu'ils  veulent 
diviser.  Vous  voyez ,  citoyens ,  si  Ton  exécute  avec 
ponctualité  le  plan  de  ces  ennemis  de  la  république. 
(Vifs  applaudissements.) 

Citoyens,  il  est  un  fait  que  la  Convention  natio- 
nale doit  connaître  :  hier  deux  des  chefs  de  la  faction 
scélérate  que  nous  combattons  aujourd'hui  ont  été 
au  comité  de  sûreté  générale  dire  que  le  projet  du 
comité  de  salut  public  était  de  donner  trois  nou- 
veaux rois  à  l'Europe,  un  à  la  Hollande,  le  second 
à  la  Belgique  et  le  troisième  à  la  France.  (Violents 
murmures.) 

Plusieurs  membres  :  Nommez-les  ! 

Merlin  (de  Douai)  :  C'est  notre  collègue  Laporte 
qui  m'a  ditce  fait  ;  je  ne  me  rappelle  pas  le  nom  des 
membres  qu'il  m'a  désignés. 

Laporte  :  Sans  doute  mon  collègue  Merlin  se 
trompe  ;  je  ne  lui  ai  pas  tenu  le  propos  qu'il  me 
prête. 

Merlin  (de  Douai)  :  Tatteste  que  le  fait  dont  j'ai 

Sarlé  a  été  annoncé  dans  une  réunion  des  membres 
es  trois  comités  ;  Charlier  et  Laporte  étaient  pré- 
sents. 

DunBM:  Nommez  donc  les  hommes  que  vous  in- 
culpez! 

Merlin  (de  Douai)  :  Montaut  était  aussi  présent,  et 
a  connaissance  du  fait. 

Armand  (de  la  Meuse)  :  Hier,  étant  au  comité  de 
sûreté  générale,  Charles  Duval  vint  me  trouver  et 
me  témoignait  sa  crainte  sur  les  espérances  du  roya- 
lisme. «  Ne  vois-tu  pas ,  me  dit-il ,  où  veut  nous  me- 
ner le  comité  de  salut  public?  Washington  sur  ses 
vieux  jours  veut  être  roi  ;  on  protège  ses  espérances. 
La  Hollande  veut...  «(L'assemblée  manifeste  son  in- 
dignation par  de  violents  murmures.) 

Merlin  (de  Thionville)  :  Duval  est  un  scélérat, 
s'il  a  tenu  ce  propos. 

Armand  (de  la  Meuse)  :  Je  rapporte  les  propres 
expressions  de  Duval  ;  mais,  citoyens,  ce  serait  une 
chose  étrançe  que  de  faire  à  un  représentant  du 
peuple  un  crime  de  dire  ce  qu'il  pense.  Rencontrant 
mes  collègues  du  comité  de  salut  public,  je  leur  fis 
part  des  craintes  de  mon  collègue.  Duval  m'a  parlé 
en  politique  qui  voit  peut-être  mal  ;  mais,  je  le  ré- 
pète, on  ne  peut  lui  faire  un  crime  de  son  opinion. 

CnAZAL  :  De  quel  droit  le  crime  ose-t-il  élever 
des  soupçons  sur  la  vertu  ?  11  faut  que  le  peuple  sa« 


213 


Che  que  les  brigands  oui  l'ont  opprime  pendant  quinze 
mois  ont  refusé  des  blés  que  rAmërique  offrit  pour 
le  nourrir,  et  qu  aujourd'hui  que  nous  appelons  dans 
nos  ports  les  vaisseaux  nourriciers  de  cette  nation 
amie  et  alliée,  ils  la  calomnient,  ils  outragent  son 

fouvernement  afin  de  les  en  éloigner.  (On  applau- 
it.) 

Bentabole  :  Chaque  jour  le  journal  de  Duval 
respire  le  royalisme. 

Chables  Duval  :  Je  suis  inculpé,  je  demande  la 
permission  ()e  répondre.  Voici  le  fait  tel  qu*il  s*est 
passé  hier  :  Je  fus  au  comité  de  sûreté  générale  pour 
avoir  la  signature  d'Armand;  ce  fut  lui,  et  non  pas 
moi,  qui  parla  le  premier  de  l'envoyé  de  Hollande 
qui  est  ici  ;  je  lui  dis  qu'on  avait  de  l'inquiétude  dans 
le  public...  (Bruit.) 

BouBDON  (de  l'Oise)  :  Je  demande  la  parole  pour 
une  motion  d'ordre.  Citoyens,  il  est  certain  que  la 
motion  qui  a  été  faite  ce  matin  n'a  eu  pour  principe 
que  la  coupable  envie  d'avilir  la  représentation  na- 
tionale. (Vils  applaudissements.)  La  Convention  doit 
y  répondre  par  ces  mots  d'un  grand  homme  :  •  Il 
n'y  a  que  trois  manières  d'exister  :  salarié,  mendiant* 
ou  voleur.  •  Jamais  la  Convention  nationale  ne  rou- 
gira d'exposer  ses  besoins  aux  yeux  du  peuple,  et 
cette  discussion,  loin  de  l'avilir,  comme  l'avaient 
pensé  ceux  gui  l'ont  fait  naître,  tournera  à  sa  gloire. 
Le  peuple  dira  :  Sans  doute  nos  représentants  sont 

Eurs,  puisqu'ils  nous  demandent  de  satisfaire  leurs 
esoins.  Je  demande  l'ordre  du  jour  sur  toutes  les 
propositions  qui  ont  été  faites. 

MoNTAUT  :  Merlin  (de  Douai)  vient  de  me  nommer; 
je  déclare  que  je  n^ai  point  été  hier  au  comité  de  sû- 
reté générale.  Je  suis  allé  seulement  à  la  section  de 
police,  et  je  n'ai  parlé  ni  de  roi  ni  de  stathouder. 

L'assemblée  passe  à  l'ordre  du  jour. 

GiBOD-PouzoL  :  Je  viens,  au  nom  de  vos  trois  co- 
mités réunis,  de  salut  public,  de  sûreté  générale  et 
de  législation,  tous  présenter  le  résultat  de  leurs  ré- 
flexions sur  la  loi  du  23  vendémiaire,  relative  à  l'ad- 
mission des  suppléants  dans  le  sein  de  la  représenta- 
tion nationale. 

Dans  le  cours  des  grands  événementsde  la  révolu- 
tion, la  crainte  des  dangers  a  excité  des  méfiances 
extrêmes.  Nous  avons  été  quelquefois  entraînés  loin 
des  principes  par  le  vif  intérêt  que  nous  avons  pris 
à  la  cause  de  la  liberté.  Les  ambitieux  qui  ont  étendu 
leur  tyrannie  sur  la  France  entière  ont  profité  de  nos 
méfiances  pour  nous  diviser  et  nous  asservir.  Ils  ont 
cru  que  dans  la  subversion  générale  de  tous  les  prin- 
cipes leur  puissance  seule  resterait.  Mais  les  destinées 
de  la  république  ont  prévalu,  et  le  retour  aux  vrais 
principes  de  notre  organisation  sociale  va  devenir  le 
plus  ferme  appui  de  la  liberté  reconquise. 

Nous  avons  vu  les  suppléants  appelés  par  la  vo- 
lonté du  peuple  à  la  représentation  nationale  sou- 
mis à  une  inquisition  rigoureuse  sur  leurs  opinions 
et  sur  leur  conduite  ;  nous  avons  vu  quelques  mem- 
bres des  autorités  constituées  ou  des  comités  révo- 
lutionnaires suspendre  l'exercice  de  leurs  droits  et 
de  leurs  pouvoirs  ;  nous  avons  vu  des  suppléants  ad- 
mis dans  le  sein  de  la  Convention  soumis  a  une  épu- 
ration qui  a  laissé  pendant  quelque  temps  leur  exis- 
tence politique  flottante  et  incertaine.  11  est  arrivé 
alors  que  les  renseignements  donnés  par  quelques 
membres  d'une  administration  ou  d'un  comité  révo- 
lutionnaire ont  fait  descendre  un  suppléant,  admis 
à  la  représentation  nationale,  du  siège  éminent  où 
le  peuple  l'avait  placé. 

On  a  vu  en  d'autres  lieux  les  membres  d*un  direc- 
toire de  département  s'attribuer  le  pouvoir  d'inter- 


vertir Tordre  des  élections  du  peuple,  et  rejeter  le 
premier  suppléant  pour  admettre  le  second.  Vous 
ayez  eu  la  sagesse  d'improuver  et  d'annuler  cet  ar- 
rêté, et  de  reprimer  par  là  cette  première  usurpa- 
tion de  pouvoirs,  dont  les  conséquences  pouvaient 
être  funestes  à  l'unité  de  la  république. 

Les  principes  sont  constants.  La  république  fran- 
çaise est  une  et  indivisible  :  son  unile'et  son  indivi- 
sibilité ne  peuvent  se  soutenir  que  par  une  repré- 
sentation nationale.  Suivant  les  principes  de  ce 
fouvernement,  lé  peuple  crée  dans  sa  souveraineté 
es  représentants  qui  délibèrent  en  son  nom,  et  qui 
agissent  pour  lui;  par  là  toutes  les  parties  du  corps, 
politique  se  réunissent  en  un  faisceau.  On  voit  dans 
une  enceinte  étroite  une  grande  nation  s'assembler, 
dicter  ses  volontés,  et  en  ordonner  l'exécution.  Dans 
la  représentation  nationale  on  voit  se  déployer  la 
majesté  du  peuple  et  l'exercice  de  sa  puissance. 

Le  premier  droit,  le  premier  devoir  de  chaque  re- 
présentant est  de  s'assurer  de  la  légitimité  des  pou- 
voirs de  tous  ceux  qui  se  réunissent  à  lui  pour  exer- 
cer les  mêmes  fonctions. 

Les  suppléants  que  le  peuple  a  nommés  pour  rem- 
placer ceux  de  ses  représentants  qui  sont  morts  ou 
démissionnaires  se  présentent  avec  tous  les  pouvoirs 
dont  le  peuple  les  a  investis;  ils  ne  peuvent  donc 
être  discutés,  encore  moins  repousses,  lorsque  la 
validité  de  leur  élection  est  reconnue. 

Les  républiques  anciennes  n*ont  pas  connu  cette 
forme  de  gouvernement  ;  aussi  l'exercice  des  droits 
politiques  des  citoyens  a-t-il  été  circonscrit  dans  un 
territoire  très-resserré,  ou  dans  les  murs  d'une  seule 
ville.  Hors  de  l'enceinte  des  gouvernements  on  a 
vécu  dans  une  sujétion  insupportable,  et  dans  leur 
enceinte  l'esclavage  le  plus  aur  s'est  établi  à  cûté 
d'une  liberté  tumultueuse.  La  dignité  de  quelques 
hommes  s'est  élevée  sur  la  dégradation  du  plus 
grand  nombre.  Dans  ces  contrées,  dont  on  nous  a 
tant  vanté  la  liberté  parce  qu'on  a  vu  le  peuple  dans 
un  petit  nombre  d'habitants  privilégiés ,  le  nom  de 
liberté  n'a  pu  être  prononcé  sans  exciter  les  frémis- 
sements d'une  foule  d'esclaves  ;  on  n'a  pu  pronon- 
cer le  nom  d'égalité  sans  entendre  le  bruit  de  leurs 
chaînes,  et  la  fraternité  n'a  jamais  été  connue  dans 
des  pays  où  quelques  hommes  libres  ont  tenu  con- 
stamment sous  leur  domination  une  foule  d'hommes 
condamnés  à  la  servitude. 

Dans  le  régime  que  nous  avons  adopté  tous  les 
droits  de  chaque  citoyen  dans  toutes  les  parties  de 
la  république  sont  conservés;  tous  les  pouvoirs  sont 
réunis  dans  un  centre  commun,  et  la  liberté  publi- 

aue  s'établit  dans  une  vaste  contrée,  environnée 
'une  force  imposante  qui  la  fait  respecter  au  dedans 
et  au  dehors. 

Quand  le  peuple  a  élu  un  représentant,  quand  il 
lui  a  donné  toute  sa  confiance  et  qu'il  Ta  investi  de 
l'exercice  de  ses  pouvoirs,  il  a  jugé  son  civisme.  Ce 
jugement  ne  doit  être  soumis  à  aucune  révision, 
parce  qu'il  n'y  a  point  d'autorité  supérieure  à  celle 
du  peuple. 

Ce  principe  établi,  la  conséquence  nécessaire  qui 
en  dérive  est  que  les  suppléants  ne  doivent  être  sou- 
mis à  aucune  espèce  d'épuration.  Comment  pour- 
rait-on regarder  comme  suspect  d'incivisme  celui 
que  le  peuple  a  nommé  pour  le  représenter? 

Un  citoyen  peut-il  avoir  un  brevet  de  civisme  plus 
respectable  que  le  procès- verbal  de  son  élection  à  la 
représentation  nationale?  Lui  contester  ce  titre  et 
les  droits  de  citoyen,  c'est  attaquer  les  principes  de 
la  souveraineté  du  peuple.  Vainement  on  objecterait 
que  celui  qui  a  obtenu  la  confiance  du  peuple  à  l'é- 
poque des  élections  peut  avoir  cessé  de  ta  mériter  au 
moment  où  il  est  appelée  la  représentation  natio- 


314 


aile.  Le  peuple  i  vontu  que  lei  suppIëanU  ftissf  nt 
app<>lés  à  le  représenter  lorsque  la  mort  ou  las  dé- 
missions de  ses  représentants  laisseraient  des  places 
vacantes.  H  n'a  pas  établi  un  jury  censorial  pour 
examiner  les  pensées,  les  sentiments,  les  opinions 
des  suppléants.  Le  crime  seul  peut  les  empêcher  de 
monter  sur  le  siège  où  le  peuple  les  a  appelés. 

Vos  comités  attachés  &  ces  principes  m*ont  chargé 
de  vous  présenter  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  La  CooTeotion  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  K9  trois  coqiiiés  de  lalut  public,  de  sûreté  générale 
cl  de  jéglst^llon,  décrite  : 

•  Art,  V\  A  compter  de  la  publication  de  la  présente 
loi,  tons  les  suppléants  seront  admis  dans  la  Convention 
nationale  sur  la  simple  exbibitioD  du  procés-vcrbal  de 
leur  éleclion,  qui  en  constatera  la  validité. 

c  H.  Ceux  des  !(uppléanls  qui  n'auront  pas  été  admis  à 
leur  tour  profileront  ae  la  loi. 

c  IIL  Le  décret  do  SS  vendémiaire  de  Tan  S  de  la  repu* 
Mlf|tte  est  rapporté, 

•  IV.  Le  comité  des  décreU  est  chargé  de  présenter, 
dans  deux  jours,  la  liste  de  tous  les  suppléants  qui  sont 
appelés  ft  la  repnftsentotion  nationale,  et  de  se  conformer 
au  décret  du  16  vendémiaire,  concernant  le  mode  du  rero< 
placement. 

«  Le  présent  décret  lera  imprimé  et  inséré  au  Bulletin 
de  correspondance*  • 

Enguerrand  :  S*il  ne  s'agit  ouo  de  Timpression 
du  rapport  dos  trois  comités  après  l'adoption  du  d(^ 
cret,  je  ne  m'y  oppose  pas  ;  mais  s*il  s  agit  de  recu- 
ler d'un  moment  la  reconnaissance  du  droit  do  sou- 
veraineté du  peuple  trop  longtemps  méconnu  Je  m'y 
oppose  de  tout  mon  pouvoir.  Citoyens,  il  n*est  pas 
en  notre  pouvoir  de  retarder  l'adoption  du  projet  de 
décret,  paroa  qu'il  s*agit  de  principe.  Je  demande 
dono  qu  il  soit  mis  aux  voix. 

Crassous  ;  11  ne  f^ut  plus  adopter  de  confiance 
des  lois  par  cela  seul  qu'elles  vous  sont  présentera 
par  vos  trois  comités  de  gouvernement.  Je  demande 
que  le  rapport  et  le  projet  de  décret  soient  imprimés, 
et  que  la  uiscussion  soit  ajournée. 

**•  :  Ce  n'est  paa  parce  que  le  décret  vous  est  pré- 
senté par  les  comités  de  gouvernement  qu'il  faut 
l'adopter,  mais  parce  qii'il  consacre  des  principes 
▼rai»,  qu'il  contient  un^  déclaration  des  droits  dq 
peuple  souverain.  Je  demanda  qu*il  soit  mis  au:^ 
voix, 

LscoMTB  :  Sans  doute  il  suffit  de  la  volonté  du 
peuple  pour  revêtir  un  citoyen  de  la  puissance  re« 
présentative.  Mais  il  est  possible  que,  parmi  ceux 
désignés  par  lui  pour  le  représenter,  il  existe  des 
hommes  qui,  patriotes  d'abord,  soient  dei'cn us  des 
traîtres.  Je  voudrais  qu'au  moins  leur  conduite  pu- 
blique fOt  exaiiiinée  avant  leur  admission.  Je  de- 
mande l'imprcssiou  et  l'ajournement. 

••*  :  En  ajoutant  aux  observations  de  Lecomte, 
je  pense  qu'il  est  parmi  les  suppléants  une  classe 
d'hommes  qu'il  est  essentiel  d'exclure  nominative- 
ment ;  ce  sont  ces  honimos  qui,  dans  les  circonstan- 
cea  dlffigles  dû  s'est  trouvée  la  république,  ont  rc- 
Iqséde  venir  siéger  dans  la  Convention  nationale. 

Andrb  Dumont  :  Je  demande  l'impression  et  l'a- 
journement du  projet  de  décret»  Qu  le  décret  est 
sage,  ou  il  est  mauvais  ;  s'il  est  sage,  la  discussion, 
en  vous  éclairant,  ne  peut  qirélro  utile;  s'il  est 
mauvais,  la  disiuwion  vous  le  prouvera  mieux  en- 
core. Je  deniande  dono  l'impression  et  Tajourne-* 
ment. 

Cette  dernière  proposition  est  décrétée, 

La  séance  est  levée  à  quatre  heurea. 


SÉAIfCi  DU  83  HlVOSi. 


Boisax  D*Aiioui,  an  nom  du  comité  de  aalut  pu* 
blic  ;  Citoyens,  je  vient  encore  vous  parler  dea  aub* 
sisuqces  et  des  apprQviiionnemapta  de  Paris,  Voua 
sayex  que  c'e^t  avec  lea  «ubiistanoea  que  lea  agita*- 
teurs  ont  toujours  cherché  à  égarer  le  peuple  ;  ila 
emploient  dans  ce  moment-ci  les  mêmes  arme$  ;  et 
il  est  essentiel  de  les  combattre. 

Ce  matin,  à  neuf  heures,  les  administrateurs  des 
subsistances  sont  venus  au  eomité  de  salut  publie 
annoncer  que  dans  plusieurs  sections  il  se  formait, 
à  la  porte  des  boulangers,  des  rassemblements  où 
des  -nommes  coupables  disaient  qu'il  fallait  se  hâter 
d'avoir  du  pain,  parce  que  dans  deux  jours  op  n'en 
aurait  pas.  Ils  m  ont  ajouté  que  plusieurs  boulan* 
gers,  aussi  criminels,  cherchaient  à  accréditer  cettt 
opinion. 

Le  comité  n*était  pas  assemblé,  et  je  n*ai  pu  lui  en 
référer  ;  mais  j'ai  pris  sur  moi  d'écrire  sur-le-champ 
aux  administrateurs  de  police,  pour  leur  enjoindre, 
sous  leur  responsabilité  et  la  mienne,  de  s  assurer 
de  la  vérité  de  ces  délits,  et  d'en  faire  arrêter  les  au 
teurs. 

En  attendant  qu'ils  puissent  être  punis,  Je  dois 
dire  à  la  Convention  et  au  peuple  de  Paris  que  oea 
insinuations  de  la  malveillance  sont  dépourvues  de 
fondement  ;  que  l'état  des  magasins  de  cette  com* 
mune  est  le  même  qulil  y  a  un  mois;  que  tout  en 
qui  a  été  consommé  pendaut  ce  temps  y  a  été  jour- 
nellement n  tabli;  qu'il  n'est  pas  vrai  que  la  geléa 
ait  empêché  la  mouture  des  plés  ni  l'arrivage  des 
farines  ;  que,  d'une  part,  on  a  pris  des  mesures  suf- 
fisantes pour  continuer  l'action  des  moulins,  et  que, 
de  l'autre,  au  moment  où  la  rigueur  de  la  saison  a 
arrêté  la  navigation  des  rivières ,  lé  comité  a  doublé 
les  autres  moyens  de  transport,  et  qu^enfin,  dans  co 
moment,  la  distribution  do  la  farine  aux  boulangers 
n'a  éprouvé  aucune  diminution ,  et  est  topjpurii  en 
rapport  avec  les  besoins  deii  citoyens, 

J  ajouterai  que  le  coipité  de  salut  publie  s'occupa 
nuit  et  jour  des  moyens  d'assurer  l  approvisionne- 
ment de  Paris  et  la  libre  circulation  des  subaislanees, 

11  vous  a  proposé  hier  d'envoyer  des  représen- 
tanl«  dans  les  d^^part^ments  environnants,  utin  u  y 
neutraliser  les  coupables  efforts  de  la  malvtîillance. 
et  il  compte  sur  le  succès  de  cette  mesure, 

Il  mettra  en  usage  tous  les  autres  moyens  qui  peu- 
vent remplir  vos  intentions  paternelle^  et  lever  tous 
les  obstacles  qu'ont  pu  apporter  à  rapprovifiionne» 
ment  de  Paris  et  les  complots  d'une  municipalité 
conspiratrice,  et  Timprévoyaiicedun  gouvernement 
dont  les  chefs  ont  été  frappés  pr  la  loi. 

Je  pourrais  vous  dire  quelle  est  la  situation  au 
juste  des  magasins  à  Paris;  mais, quoiqu'elle  suit 
très-satisfaisante,  il  serait  inipoliiique  de  l'annoncer 
publiquement;  il  ne  faut  pas  iniljqqer  à  la  malveil- 
lance un  moyen  vers  lequel  elle  piiisse  diriger  ses 
efforts.  (Ou  applaudit,) 

La  Convention  nationale  décrète  l'insertion  de  ce 
rapport  au  Bulletin. 

^  Une  députa tion  de  la  section  de  Guillaume  Tell 
cât  admise  à  la  barre. 

Uoratenr  :  Pères  de  la  patrie,  la  seetlon  de  Ouiliaume 
Tel!  vient  déposer  ses  alarmes  dans  votre  sein» 

Par  votre  décret  du  48  tVlipaire,  vous  avez  demandé  des 
comptes  I  colt<;  loi  parait  être  le  signal  de  noiivellcs  mn- 
DŒuvres  de  la  part  de  ceux  dont  les  mains  n'ont  pas  éld 
pures  {  tout  semble  présager  une  agitation  prochaine  t  l.i 
sécurité,  soit  réelle,  soit  factice  de  oerlaini  bonnes,  est 
d'un  augure  sinistre  pour  les  palriolen. 

Sur  quoi  peuvent  être  fondées  desefp^a^eei  aanpobles? 


215 


NoQS  avons  cru  en  trouver  la  source  dans  rorganisalion  ac- 
tuelle des  chefs  de  la  Torce  armée.  (Oo  applaudit.) 

Qui  voyons-nous  parmi  eux?  quelquct»  iiommes  probes, 
à  la  vérité,  tuais  beaucoup  d'ageiiis  de  nos  derniers  lyrana; 
dos  membres  des  comités  révolutionnaires  comptables  et 
plus  que  Suspects  (on  applaudit  j  ;  plusieurs  de  leurs  créa- 
tures, quMls  n'ont  portées  aux  places  que  parce  qu'elles 
leur  ressemblaient. 

En  cas  de  tiouble,  sera-ce  à  ces  gens  que  vous  vous 
Sidresscrex?  Seront-ce  vos  ennemis  qui  répondront  à  la 
France  du  dépôt  sacré  que  les  départements  ont  conQé  à 
Paris,  en  nous  envoyant  leurs  députés  ?  (Nouveaux  applau- 
dissements.) 

Vous  pouvfz  être  sûrs  du  peuple  de  Paris.  (Les  applau- 
dissements redoublent. j  Mais  avct-vous  oublié  que  des 
commandants  perfides  conduisirent  leurs  sections,  le  9 
tberroidor,  au  secours  de  la  commune  rebelle?  Si  les  cbefs 
de  la  force  armée  suppriment  vos  ordres,  s'ils  ne  lesexé* 
cuteot  pas,  les  Mal  veillants  auront  le  temps  d^accompllr 
leurs  projets  patricides;  il  ne  restera  au  peuple  que  le 
désespoir.....  et  la  certitude  de  sa  venReance. 

Nous  vous  invitons  donc,  au  nom  de  la  patrie,  &  pren- 
dre cet  objet  en  grande  considération.  Les  moments  sont 
précieux,  et  vous  n*ivet  pedt-étre  point  de  temps  d  perdre 
pour  donner  à  toute  la  force  armée  de  Paris  des  chef^  di- 
gnes d»  votre  confiance  et  de  celle  du  peuple  ;  c*est  pour- 
quoi nous  vous  eu  demandons  le  plus  prompt  renouvelle* 
ment  dans  tous  les  grades. 

L'attention  des  htibiiauts  de  la  seetiob  de  Guillaume  Tell 
ne  se  borne  pas  ft  vous  proposer  cette  mesure  salutaire  ;  ils 
savent  que  les  partisans  de  la  tyrantile  ne  perdent  pas  Tes- 
poir  de  tromper  la  t)oune  fol  du  peuple,  qu'ils  lui  présen- 
tent le  régime  de  justice  que  vous  avef  établi  comme  un 
dppjé  pour  arriver  au  rétablissement  de  la  royauté. 

Que  n'étalent-ils  à  noire  dernière  sdahce  ers  calomnia- 
teurs effrontés  t  ils  seraient  morts  de  dépit  rn  nous  voyant 
nous  lever  tous  d'un  mouvement  spontané,  pour  jurt'r  de 
défendre  iusqu'ati  dernier  soupir  la  liberté  publique.  Ce 
n'était  point  un  serment  commandé,  mois  iVlan  decœurs 
vraiment  républicains.  C'est  avec  le  méUie  IransDort  que 
nous  venons  Su  milieu  des  représentants  du  peuple  vouer 
ù  l'exéeration  et  la  royauté  et  ses  vils  partisuns ,  et  les  dié* 
iateurs,  et  les  dcccmvir.s  Haine  i  balUë  éternelle  aux  tjr' 
raiis  de  toute  espèce,  et  surtout  aux  terroristesi  successeurs 
tufaMes  du  cannibale  Hobespierre.  Oui,  nous  le  jurons 
tous,  de  vivre,  de  combattre,  de  mourir,  s'il  le  faut,  pour 
le  maibticn  de  la  république  une,  indivisible  et  démocra- 
tique. (Les  applaudissements  f  prolongent  dans  toutes  les 
pa'tirs  de  la  salle.) 

Lb  PiiisiDtfiiT,  à  la  députation  t  Gitoyensi  It  Conven* 
tlou  nationale  reconnaît  toujours  dans  vos  .principes  l'éner- 
gie (lu  béros  dont  vous  portes  le  nom  i  seul  avec  son  cou* 
ra^c,  il  nt  justice  d*un  tyran,  et  délivra  son  pays  de 
l'i'^elavage.  Si  quelque  nouveau  complot  se  tramait  contre 
la  liberté  du  peuple  français,  il  n*est  pas  un  de  vous  qui 
-ne  fus  pTti  à  imiier  son  exemple.  Citoyens,  il  est  temptf 
enfin  de  s'élever  k  la  hauteur  républicaine.  En  quoi  1  nous 
aurions  combattu  pendant  clnff  années  pour  le  maintien 
de  nos  droits ,  nos  braVes  guerrier»  auraient  versé  leur 
sang  pour  exterminer  les  despotes,  et  nous  serions  effrayés 
d'un  fantôme  expirant  t  Sans  doute  il  faut  surveiller  le 
royalisme}  mais  gardes- vous  de  perdre  Jamais  de  vue  la 
victoire  du  9  tbermidor  sur  le  terrorisme  et  ses  adhérents; 
la  Convention  nationale  frappera  du  même  coup  ces  deux 
monstres  qui  tendent  au  même  but,  la  domination  et  l'es- 
clatége. 

Seéondel,  génèrent  républicainst  les  efforts  de  vos  re- 
présentants, et  bientôt  te  peuple  français,  respirant  enfin 
dafas  Utîe  atmosph^re  dégagée  des  vapeurs  du  crime  i 
jouira  du  t)onbeur  inaltérable  réservé  à  ses  hautes  desti- 
DéeSi 

Vous  demandes  l'épuration  des  chefs  de  la  force  armée. 
La  république  ne  teui  quedesser\iieurs  fidèles  et  dignes 
de  la  confiance  du  peuple.  Votre  siiilicitude  fait  l'éloge  du 
patriotisme  qui  vous  caractérise  ;  la  Convention  nationale 
prendrj  Mré  demande  en  coiisidératlon  ;  elle  applaudit  à 
vos  senilRienu  §iiH^i(|ites ,  è  voire  dévoue thenl  (lour  elle. 
J>*  )ous  invite  è  entrer  dam  son  Itiil»  iGiiie  réponse  Hi 
vivcmeut  applaudie»; 


La  Convention  nationale  décrète  la  mention  hono^bk 
de  l'Adresse,  son  insertion  au  Bulletin,  ainsi  que  de  la  ré* 
ponse  du  président. 

OLitiM-GÉiBRTB  1  Les  alarmcs  qui  nous  sont  communi- 
quées par  les  bons  citoyens  de  la  section  de  Guillaume  Tell 
sont  justes  et  raisonnables*  De  toutes  parts  on  demande  le 
renouvellement  des  autorités  constituées)  tant  (jti*ellei 
n'auront  pas  été  renouvelées  i  la  révolution  du  9  tlierinî* 
dor  ne  sera  pas  complète ,  et  les  restes  de  la  tyraunie  trou- 
bleront encore  la  D&licité  publique. 

Mais  s'il  est  nécessaire  de  renouveler  le^  autorités  cuh- 
stituées,  il  l'est  encore  davantage  de  renouveler  les  oteclcr» 
de  la  garde  nationale  de  Paris  :  car  si  les  malveillants  par* 
venaient  à  exciter  quelques  mouvements,  et  que  des  pat^ 
tisaHs  de  la  tyrannie  fussent  encore  h  la  tête  de  la  force 
armée,  ils  pourraient,  malgré  la  sollicitude  de  la  Conven- 
tion ,  malgré  les  eiïoris  du  comité  de  la  guene,  se  rendre 
plus  daiigereuk  qu'on  ne  pense.  Je  demande  donfc  que  la 
Convention  ordonne  à  son  comité  ndllltairc  d'épurer  ta 
garde  nationale  de  Paris  dans  l'espace  de  trois  jours.  (On 
applaudit.) 

Si  l^on  croit  cela  nééessaire ,  on  pourra  adjoindre  le  co- 
mité de  sûreté  fféoêràlé  h  celui  de  la  guerre.  Ce  comité 
pourra  donner  des  renseignements  qui  seront  utiles.  Jo 
demande  que,  dans  trbis  jours,  la  force  armée  de  t^atis 
soit  épurée. 

AnDRi  DuMONT  :  Je  suis  aussi  de  Pavis  du  renvoi  i  mais 
ie  ne  laisserai  pas  tomber  les  paroles  vraiment  patriotiques 
des  braves  citoyens  que  vous  voyei  à  votre  barre.  Voi|8 
avez  entendu  l'expression  des  sentiments  des  habitants  de 
Paris.  On  a  voulu  les  dénigrer  dans  les  départements,  il 
est  temps  que  le  peuple  connaisse  enfia  quels  sont  les  amia 
de  la  liberté.  (Vifs  applaudissements.^ 

Il  est  temps  qu'on  n'insulte  plUs  la  Convention;  c*est 
dans  ce  jour^  od  vous  ne  voyrx  plus  autobr  de  vous  les 
Autrichiens  qui  venaient  ici  pour  vous  avilir,  qu'il  faul 
rappeler  aux  vils  terroristes  qu'ils  ne  seront  plus  vus  que 
|)Our  tniplrer  l'horreur.  Merliii  (de  Thionville)  disait  hier 
une  grande  vérité,  que  je  répéterai  :  c>st  que  ce  sont  les 
complices  et  les  rester  de  Robespierre  qui  tout  tous  leurs 
cflbrts  pour  vous  faire  insulter.  (On  applaudit.)  Il  fatat, 
citoyens,  vous  prononcer  une  bonne  fois,  et  déclarer  une 
guerre  ^  mort  A  tous  les  buveurs  de  sang,  à  toUs  les  M* 
pons.  (On  applaudit.)  Qu'ils  aillent  portt^r  ailleurs  leur 
peste,  et  qu'ils  purgent  notre  territoire.  (On  applaudit.) 
Voulei-vous  que  le  cri  de  la  liberté  soit  le  cri  universel; 
inspirez  la  terreur  à  tous  les  scélérats,  t  toos  leé  partisans 
du  crime.  (IVouveaux  applaudissements.) 

On  a  voulu  attaquer  la  journée  du  9  thermidor*  eetui 
qui  l'a  osé  ne  peut  être  qu'un  complice  de  tlobespierre ,  et 
le  complice  de  Robespierre  ne  peut  êtt  e  que  l'ennemi  de 
son  pays  (vifs  applaudissements) ,  un  ennemi  de  Pégallté, 
qu'il  souille  par  sa  plume  Infâme.  (Les  Upplaudlssemenis 
redoubleuL) 

Que  chaque  membre  de  cette  assemblée  f^sse  le  serment 
de  poursuivre  jusqu'à  la  mort....  (Tous  les  membres  se 
lèvent  simultanément,  au  milieu  des  pins  vlf^  applaudisse- 
ments t  Les  iyratïB,  s'écrlenMls,  les  fripons  tt  les  buveurs 
dé  sang  I  ) 

Lorsque  je  serai  attaqué,  que  quelque  Hiembrem^ap- 
pellera  royaliste.  Je  ne  répondrai  pas,  mes  sentiments  sont 
connus)  mais  je  demande  que  le  président  soit  tenu  de 
l'envoyer  A  l'Abbaye.  (MUrmuresJ 

Citoyens,  on  ne  peut  appeler  un  de  ses  collègues  roya» 
liste  sans  mériter  Une  prompte  punition,  une  punillOD 
éclatante.  (Mu rmuresO 

A  coup  sûr  il  n>st  pas  be^ln  de  délibération  pdUr  »a« 

voir  le  parti  qu^on  a  i  prendre  tobtre  (ielul  qui  s'élève 

contre  la  liberté  des  opinions.  Quiconque  insulte  son  col« 

lègue  est  coupable  \  mon  Intention  est  que  la  C6nventlon 

,  maintienne  son  règlement,  et  qu'elle  ne  souffre  pas  qu*on 

;  s  en  écarte.  Pour  qu'on  noui  reftbette,  il  faul  qtie  nous 

i  nous  respaetlons  nous-mêmes,  et  II  est  essentiel  nue  les  cl** 

I  loyens  de  Paris  se  rabient  au  respeét  qui  ëK  dfi  a  la  Cou* 

\  ention« 

Je  termine  ea  demandant  nmpNtsèldii  du  discours  de§ 

citoyens  qui  sont  è  lA  blrr^  et  de  li  répunsè  dd  présidehi. 

I  lertovoidil«irMBaM#li«NirM^I«irtlim«lled1ll 


216 


de  sûreté  générale.  Je  demande  de  plus  que  le  rapport 
nous  soit  fait  dans  trois  jours.  (Applaudissements.) 

Celte  propositioo  est  décrétée. 

^  Dix  citoyeuDes,  échappées  des  massacres  de  la  Vendée, 
qui ,  apr^s  afoir  été  transférées  à  la  Conciergerie,  ont  été 
mises  en  liberté  par  ordre  du  comité  de  sûreté  générale, 
présentent  une  pétition  par  laquelle  elles  réclament  des  se- 
cours pour  se  rendre  dans  leurs  foyers* 

GoopiLLBAU  (de  Montaigu;  :  Ces  citoyennes  sont  de  la 
Vendée;  elles  ont  yu  égorger  leurs  maris,  leurs  enfanU; 
elles  ont  tout  perdu;  elles  s'étaient  réfugiées  dans  le  dé- 
partement de  la  Charente-Inférieure  ;  mais  elles  ont  élé  re- 
gardées comme  suspectes  et  envoyées  au  tribunal  révolu- 
tionnaire de  Paris.  Le  comité  de  sûreté  générale  les  a  mises 
hier  en  liberté.  ...  •   jx 

Ces  malheureuses  femmes  sont  dans  la  plus  grande  dé- 
tresse, elles  manquent  absolument  de  ressources  :  je  de- 
mande que  le  comité  des  secours  accorde  à  chacune  d*elles 
20  pisloles. 

Fatac  :  La  ConvenUon  doit  se  rappelei"  qu'elle  s'est  déjà 
troufée  dans  pareille  circonstance,  et  qu'elle  a  accordé 
200  liv.  Ainsi  il  n'y  a  pas  de  difficulté  à  en  accorder  au- 
tant à  ces  malheureuses  citoyennes. 

BocRDOii  (de  l'Oise)  :  Pour  moi ,  je  pense  que  le  renvoi 
de  celte  péUtion  au  comité  des  finances  est  indispensable. 
Je  crois  bien  que  ces  femmes  méritent  les  sommes  qu'on 
demande  pour  elles;  mais,  si  on  les  accordait  sans  exa- 
men, des  intrigants  Tiendraient  le  lendemain  réclamer  des 
secours.  Je  demande  donc  qu'on  n'accorde  désormais  rien 
sans  l'examen  du  comité  des  finances,  et  que  cette  péti- 
tion lui  soit  renvoyée. 

Le  renvoi  est  décrété. 

—  On  introduit  à  la  barre  une  dépotatioD  de  la  section 
de  Bon-Conseil* 

Voraieur  :  Représentants,  vous  avez  bien  mérité  de 
l'humanité  en  vous  prononçant  avec  énergie  contre  le 
royalisme  :  c'est  aimer  les  hommes  que  d'abhorrer  les  rois. 

Votre  élan  généreux  n'a  point  surpris  le  peuple  que 
vous  représentez  ;  il  n'a  pas  besoin  d'un  nouveau  serment 
pour  être  convaincu  de  votre  républicanisme* 

Le  spectre  hideux  de  la  royauté  a  osé  promener  son  om- 
bre jusqtt*aux  portes  du  sanctuaire  de  la  liberté;  vous  l'a- 
vez dissipé  d'un  souffle,  et  votre  œil  toujours  ouvert  l'a 
fait  rentrer  dans  la  nuit  des  tombeaux. 

Mais  ce  monstre  n'est  pas  le  seul  qui  conspire  contre  la 
république;  un  autre,  aussi  féroce,  et  peut-être  en  ce 
moment  plus  redoutable,  le  terrorisme,  agite  encore  les 
chaînes  dont  vous  Pavez  chargé  le  9  thermidor.  Ces  deux 
monstres  ont  les  mêmes  fureurs  ;  ils  se  nourrissent  des  mô- 
mes poisons;  ils  se  réjouissent  également  de  la  misère  pu- 
blique. Dans  leur  rage  aveugle,  ils  osent  calculer  sur  le 
malheur  du  peuple  pour  concevoir  la  coupable  espérance 
de  rétablir  leur  affreux  système.  Ils  vocifèrent  les  mêmes 
blasphèmes  contre  la  représentation  nationale. 

Vous  ne  souffrirez  pas  que  ces  deux  serpents  empoison- 
nent de  leur  souffle  impur  l'arbre  de  la  liberté,  qu'ils  l'em- 
pêchent de  croître  en  l'entrelaçant  de  leurs  replis  tor- 
%  tueux.  Les  deux  dragoûs  qu'Hercule  au  berceau  étouffa  de 
ses  mains  victorieuses  étaient  moins  redoutables.  Courage, 
législateurs;  vous  avez  son  courage,  vous  aurez  ses  suc- 
cès. 

Vous  avez  brisé  les  sceptres  et  les  couronnes  ;  vous  avez 

Ïfuni  les  rois,  et  vengé  la  nature  outragée  :  vous  ne  souf- 
rirez  pas  que  les  coupables  amis  de  la  royauté  renaissent 
jamais  de  leurs  cendres;  et,  malgré  les  hurlements  des 
terroristes»  vous  n'abandonnerez  pas  non  plus  l'espèce  hu- 
maine à  leurs  fureurs»  et  la  (urtune  publique  k  leurs  dila- 
pidations. 

Le  peuple  attend  de  vons  sa  liberté  et  son  bonheur;  vos 
travaux»  depuis  le  0  thermidor,  lui  sont  un  présage  assuré 
qnc  ses  espérances  ne  seront  pas  trompées. 

Déjà  vous  avez  rendu  à  leurs  fonctions  des  collègues  es- 
tlmablcf  I  Dût  concitoyens  nous  ont  chargés  de  vous  en 
•tprimcr  notre  reconnaissance.  La  Justice  et  la  liberté  ont 
iotolf  dt  BOUTCiax  difcaieiiri  i  le  pcapte  a  ?u  augmenter 


le  nombre  de  ses  amis;  les  maux  qu^ils  ont  endurés,  les 
dangers  qu'ils  ont  courus,  les  rendront  plus  sensibles  aux 
malheurs  de  leurs  frères.  Nous  avons  recueilli  avec  atten- 
drissement la  promesse  solennelle  qu'ils  ont  faite  d'oublier 
généreusement  des  injures  personnelles  po^r  ne  s'occuper 
que  du  bonheur  de  leurs  concitoyens. 

Puisse  la  Convention  nationale  ne  former  bientôt  qu^nne 
famille  réunie,  dont  tous  les  membres  s'estiment  et  se  ché- 
rissent! (^ue  de  déchirements  cette  heureuse  fraternité 
épargnerait  à  notre  mère  cohimune  I  Législateurs,  ne  souf- 
frez plus  qu'on  avilisse  le  peuple  dans  la  personne  de  ses 
représentants.  Que  chacun  de  vous  se  pénètre  de  la  dignité 
de  son  caractère,  et  ne  se  compromette  jamais  par  des  in- 
jures qui  affligent  le  peuple  et  réjouissent  vos  ennemis. 

Ne  croyez  pas  cependant  que  nous  tous  demandions 
cette  réunion  aux  dépens  de  la  justice  et  de  la  vertu.  Loin 
de  nous  ridée  de  vouloir  faire  composer  avec  le  crime; 
point  de  grâce  pour  les  grands  coupables  et  les  tyrans  t 
c'est  à  la  racine  qu'il  faut  frapper  l'arbre  du  terrorisme* 
ses  branches  tomberont  bientôt  d'elles-mêmes  en  pourri* 
ture.  (On  applaudit.) 

Lb  Pbésidbrt,  à  la  députation  :  Citoyens»  une  républi- 
que fondée  sur  les  mœurs  et  la  justice  est  impérissable 
comme  la  nature. 

C'est  en  vain  que  quelques  audacieux  portent  le  d^lre 
jusqu'à  professer  ouvertement  le  royalisme:  c'est  en  vaio- 
que  les  partisans  du  système  odieux  de  la  terreur  vou- 
draient, dans  leur  rage  insensée,  nous  arracher  le  prix  de 
la  victoire  du  9  thermidor;  la  justice  ei(  l'humanité  triom* 
pheront  de  leurs  atteintes  criminelles»  et  la  Convention 
nationale  saura  maintenir  toutes  les  vertus  à  Tordre  da 
jour,  en  dépit  des  royalistes,  des  anthropophages  et  des 
factieux. 

Citoyens,  voulez-vous  prévenir  le  retour  détente  espèce 
de  tyrannie  :  rattachez-vous  fortement  aux  principes  delà 
vérité  et  de  la  justice  étemelle;  continues  de  montrer  aux 
nations  l'exemple  des  sublimes  vertus  qui  caractérisent  les 
hommes  libres  et  déterminés  k  mourir  plutôt  que  de  ren- 
trer dans  l'esclavage. 

La  Convention  nationale  a  entenda  aTec  le  pins  vif  in* 
térêt  l'expression  de  vos  sentiments;  Je  vous  invite»  en  son. 
nom  »  k  assister  k  sa  séance» 

La  mention  honorable  et  l'insertion  au  Bulletin  sont  dé 
crétéea» 

{La  êttite  demain,) 


iV.  B,  Dans  la  séance  du  26»  Boudin  a  proposé»  par 
motion  d'ordre,  de  charger  les  trois  comités  d'examiner  s'il 
ne  serait  pas  expédient  pour  le  salut  du  peuple  de  porter 
une  loi  qui  condamne  à  l'oubli  et  à  un  silence  absolu  tous 
les  délits  politiques  relatifs  à  la  révolution»  excepté  l'émi- 
gration personnelle. 

Legendre,  après  avoir  observé  que»  si  la  Convention  ne 
rejetait  pas  sur  les  vrais  coupables  les  crimes  qui  ont  été 
commis»  elle  s'en  chargerait  elle-même ,  a  demandé  l'or- 
dre du  jour  sur  la  proposition  de  Boudin. 

La  Convention  a  passé  à  l'ordre  du  jour. 


LIVRES  DIVERS. 

Nouvelle  Grammaire  raisonnêe,  k  l'usage  des  jeunes 
personnes  ;  par  une  Société  de  gens  de  lettres  ;  le  citoyen 
G.-P.  éditeur.  Prii  :  5  liv.,  en  feuilles.  A  Paris,  chez  le  ci- 
toyen Plassan,  imprimeur-libraire,  rue  du  Cimetière-André- 
det-Arcs,  n*  10. 


Payements  à  la  trésorerie  naiianale* 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre> 
miers  mois;  il  éera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'Inscriptions  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  Tiagéres 
est  de  huit  mois  Tingt  et  un  Jours  de  Tannée  1793  (riens 
style). 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  MONITEUR  llIVERSEL. 


No  118. 


Oetidi  38  Nitose,  l'an  3».  (Samedi  17  Jantier  1795,  vieux  ttyk.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

ri«»ntff  U  20  décembre»  —  Les  bruits  annonçint  ta 
paix  on  la  CQntinuatioo  de  la  guerre  se  succèdent  ici  alter- 
iiaiivemeot.  Les  communicatioiis  diplomaiiques  entre  les 
différentes  cours  de  la  coaliiion  o'onl  jamais  paru  plus  ani- 
mées. Il  est  arrivé  un  courrier  extraordinaire,  expédié  de 
Londres  pour  la  cour  de  Vienne.  Aussitôt  après  Tarrivée 
de  ces  dépèches,  qui  paraissent  être  d*une  haute  impor- 
tance, il  s'est  tenu  une  cooCérençe  ministérielle  à  laquelle 
a*est  Irouîé  Tempereur, 

Il  a  été  envoyé  ultérieurement  un  courrier  à  Tambassa- 
deur  autricbieD  auprès  des  cantons  hekéliques* 

Le  ntuisire  prossien  Locchesini  a  reçu  de  son  côté  des 
dépêches  de  <a  cour,  et  s*est  rendu  iUimédiatemeDt  ebei 
If.  dt  Tbugnt,  Dioislre  des  affaires  étrangères. 

«-  La  diète  de  Transylvanie  a  dû  s*ouTrir  le  18.  Oo  n'a 
point  eoeore  de  nouvelles  de  ce  qui  s'y  est  passé. 

—  Il  règne  dans  les  environs  de  Semlim  et  dans  toute  la 
provinoe  uue  épidémie  très-dangereuse. 

-*-  Les  ^tats  héréditaires,  et  surtout  PAutriche  anté- 
rieure, éprouvent  une  disette  totale  de  grains.  Le  conseil 
de  régence  et  la  Chambre  de  régence  se  sont  réunis  pour 
rédiger  à  ce  sujet  une  circulaire  aux  communes  du  pays. 
Après  de  longues  délibérations,  on  s*est  arrêté  aux  dispo- 
sitions suivantes  : 

1*  Toutes  les  autorités,  dans  chaque  lieu,  devront  pren- 
dra, sous  la  plus  rigoureuse  responsabilité,  des  informa- 
tions exactes  sur  le  produit  de  la  récolte ,  et  sur  ee  qui  est 
nécessaire  pour  la  consommation. 

S*  Il  est  de  nouveau  détendu  de  vendre  des  grains  dans 
les  greniers,  maisons  ou  moulins,  sous  peine  de  confisca- 
tion t  oo  tiers  du  prix  sera  donné  au  dénonciateur  ;  en  cas 
de  récidive,  il  sera  infligé  des  peines  infamantes  et  même 
corporelles  aux  contrevenants. 

3*  Toutes  les  autorités  sont  tenues  de  surveiller  les  ac- 
capareurs qui,  dans  les  marchés,  les  granges  et  les  gre- 
niers font  de  grands  achats  de  grains,  afin  de  les  conser- 
ver pour  en  faire  monter  leprix. 

4*  Il  est  enjoint  aux  inspecteurs  des  marchés,  aussi 
longtemps  que  durera  la  cherté  actuelle,  de  veiller  à  co 
que  personne,  jusqu'à  la  moisson  prochaine,  DeUsse  des 
achats  hors  de  proportion  avec  les  besoins  de  chaque  (a- 
mille,  et  par  conséquent  dans  Pintention  de  les  faire  pas- 
ser ailleurs» 

ITALIE. 

Uvourne,  le  80  décembre,  —  Le  comte  Carleiti,  cham- 
bellan de  la  cour,  est  parti  pour  Paris,  où  il  a,  dit-on, 
une  mission  à  remplb*. 

—  On  écrit  de  Gênes  que  Nuillac ,  ci-devant  envoyé 
français  à  Gênes,  s*était  pi^^nté  chez  le  nouveau  ministre 
français  Villars.  Il  en  fut  chassé  brusquement,  quoiqu*il 
se  fût  annoncé  comme  chargé  par  la  cour  de  Naples  de 
traiter  diverses  affaires. 

Ce  NailCao,  après  avoir  terminé  sa  mission,  au  lieu  de 
retourner  ft  Paria,  était  allé  à  Toulon,  où  il  fut  un  des  né- 
gociateurs qui  livrèrent  cette  ville  aux  Anglais. 

—  L*escadre  anglaise,  après  s^être  pourvue  de  ee  qui 
lui  était  nécessaire,  t  mis,  le  11 ,  à  la  voile ,  sur  la  nou- 
velle que  la  flotte  française  était  prête  A  appareiller  de 
Toulon. 

Deux  vaisseaux  ft  deux  ponts,  arrhiéa  iiouvellcnient  de 
Saint-Florent,  le  sont  joints  à  Tescadrequi  va  directement 
à  Toulon  t  pour  observer  la  flolle  française. 

—  On  éerit  de  Naples  que  l'amiral  anglais  Groodhal  j 
est  arrivé  avec  nne  mission  secrète  auprès  de  la  oour* 

-*-  Le  cabinet  napolitain  a  chargé  ses  ministres  dans  les 
diflérentet  résidenees  de  démentir  et  de  désavouer  un  écrit 
ayant  pour  litre  :  Apologie  de  la  cour  de  tiepU*  dans  êe$ 
dtlférendê  avec  la  cour  de  Stockholm* 

9/fSérîe.^TemeX. 


REPUBLIQUE  FRAPiÇAISE. 

Toulon  i  le  18  nîrose.  —  Les  frégates  la  Minerve^  tAU 
ceêtCf  VArtémUct  la  Courageuee;  les  corvettes  (a  Bmnê 
et  la  Badine,  commandées  par  le  citoyen  Perrée,  ont 
rempli  la  mission  particulière  qui  leur  a  été  confiée.  Elles 
ont  été  à  Tunis,  où  elles  ont  laissé  le  chebec  U  Jacobin ^ 
dont  la  république  française  a  fait  présent  au  bey  de  Tu- 
nis, qui  en  a  été  très-saiisfatt.  Elles  ont  pris  une  frégate  et 
deux  corvettes  anglaises,  volées  à  Toulon,  qui  ont  été 
forcées  de  respecter  le  pavillon  tricolore.  De  lîi  elles  ont 
été  ft  Booe,  ensuite  à  Alger;  partout  elles  ont  trouvé  les 

Soissanœs  barbaresques  spécialement  attachées  6  la  repu* 
lique  française.  Biles  ont  fiiit  vingi-cinq  priseï,  dont 
plusieurs  très-riches ,  parmi  lesquelles  se  trouvent  dont 
bâtiments  espagnols  diargés  de  troupes ,  alUnt  de  Caribn* 
gène  A  Barcelone,  et  un  paquebot  anglais  renfermant 
vingt-huit  émigrés  français,  ci-devant  nobles,  prêtreSi  sor- 
tant de  Barcelone  (  car  tous  les  émigrés ,  dit-on ,  soo| 
chassés  d*£spagne^  ;  la  division  a  lait  six  cents  prison- 
niers. 

DouxG  vaisseaux  et  six  frégates  espagnoles  sont  mouniés 
dans  la  baie  de  Rosas»  L*Espagne  est  obligée  de  faire  venir 
des  troupes  jusque  des  Canaries.  PInsleurs  frégates  de  la 
division,  qui  avalent  été  séparées  le  5  uivose  par  un  très- 
grand  coup  de  vent ,  sont  rentrées  au  Port  de  la  Monta* 
gne,  A  la  vue  de  Tescadre  anglaise,  composée  de  dix-neuf 
voilea. 

—  Tnnis  est  en  ee  moment  en  guerre  contre  TripolU 

CONVENTION  NATIONALE. 

Préiidenee  de  Letournettr  {de  la  Maneke). 
SUITE  DB  LA  8SANCB  fiO  25  MITOSB. 

Beauchamp ,  au  nom  du  comité  de  légidation , 
propose  un  aécret  qui  est  adopté  eu  ces  termes: 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap» 
porl  de  son  comité  de  législation,  décrète  s 

f  Art.  I'%  Toutes  les  contestations  qui  pourront  s*éievcr 
sur  Pélat  civil  privé  des  enfants  nés  hors  mariage  aérant 
jugées  par  les  tribunaux  de  diOrict. 

c  n.  Les  tribunaux  de  di.slrict  sont  pareillement  autori- 
sés à  connaître  des  procès  actuellement  existants  sur  des 
questions  d*état ,  quand  même  il  aurait  été  nommé  des  aiv 
bitres  conformément  A  l*article  XVIII  de  la  loi  du  12  bru- 
maire an  2*. 

a  lil.  Les  jugements  rendus  fosqn'A  ce  jour  sur  des 
questions  d*état,  soii  par  des  tribunaux,  eoH  par  des  arbi- 
tres, et  qui  ne  seraient  aUaqués  que  par  voie  d*ioeomp6« 
tence,  sont  maintenus. 

«  IV.  Toutes  les  dispositions  de  la  loi  du  13  brumairo, 
qui  seraient  contraires  au  présent  décret,  sont  rapportées.  » 

Thirion,  au  nom  du  comité  d'instruction  publi- 
que :  Citoyens,  vous  avez  chargé  votre  comité  d'in- 
struction publique  de  vous  présenter  sous  troisjours 
le  mode  d  exécution,  pour  Paris,  de  la  fête  du  2  plu- 
viôse prochain. 

Nous  eussions  désiré  vous  nrésenter  un  plan  qui 
réoondlt  à  toute  la  majesté  aun  peuple  qui  donne 
la  liberté  aux  esclaves  et  la  mort  aux  tyrans. 

La  brièveté  du  délai  et  la  rigueur  de  la  saison  oui 
dû  nécessairement  apporter  &b  obstacles  diffieilee 
à  surmonter. 

Nous  avons  pensé  que  de  longues  proec^ns  se- 
raient déplacées  au  milieu  d*une  saison  rigoureuse 
et  dans  une  température  incertaine. 

De  tous  fes  lieux  propres  à  rassembler  les  ci- 
toyens, la  salle  de  la  Convention  et  ses  avenues 
échauffées  par  des  poêles  nous  ont  paru  lesplu^ 
convenables  dans  la  circonstance  présente. 

t8 


218 


Nous  n'avons  pas  cru  néanmoins  devoir  unique- 
ment circonscrire  la  félc  dans  l'enceinte  de  cette  as- 
semblée. ,        ,     . 

Une  partie,  et  cette  partie  sera  sans  doute  la  plus 
intéressante,  aura  lieu,  s'il  est  possible,  en  plein  air, 
au  milieu  de  la  masse  entière  du  peunle,  <|ui  fait 
toujours  le  plus  bel  ornement  d'une  fête  républi- 
caine. 

Cette  fête  sera  donc  divisée,  en  quelque  sorte,  en 
deux  actes. 

L'un  se  passera,  inlrà  muros,  dans  le  lieu  de  vos 
séances,  au  milieu  des  braves  défenseurs  qui  ont 
versé  leur  sang  pour  la  patrie,  an  milieu  des  dépu- 
tations  des  sections  de  Paris  et  des  fonctionnaires 
publics  que  vous  aurez  appelés  à  celte  fête,  et  de 
tous  les  citoyens  qui  occuperont  les  tribunes.  Si 
tout  le  peuple  ne  peut  y  assister,  elle  ne  sera  pas 
néanmoins  sans  fruit  pour  les  progrès  de  Tesprit 
public,  et  le  Bulletin  de  la  Convention  en  fera  con- 
naître les  principaux  traits  à  tous  les  citoyens  de  la 
république.  .  ,      . 

Des  morceaux  de  musique,  des  hymnes  a  la  Li- 
berté et  des  discours  civiques,  propres  à  embraser 
tontes  les  âmes  de  Tamour  de  la  patrie  et  à  faire  ab- 
horrer la  tyrannie,  rempliront  cette  première  partie. 

Le  seconde  s'exécutera  dans  le  jardin  du  Palais- 
National. 

Là,  réunis  à  one  plus  grande  masse  du  peuple, 
vous  imprimerez  à  la  fête  un  caractère  plus  impo- 
sant. La  musique  et  les  chants  prendront  un  ton 
Ï>lus  mâle;  des  bûchers  allumes,  dévorant  dans 
eurs  flammes  les  attributs  de  la  royauté,  de  la  féo- 
dalité et  du  fanatisme,  parleront  aux  yeux  du  peuple 
un  langage  plus  expressif  que  les  plus  éloquents 
discours  ;  ces  feux  animeront  d'ailleurs  et  égaieront 
la  fête  ;  et  nous  ne  pensons  pas  que  le  sacriflce  léger 
d*une  petite  quantité  de  bois  soit  à  regretter  dans 
cette  occasion,  puisque  c'est  uniquement  pour  le 
peuple  ;  et  ce  n  est  pas  la  première  fois  qu'on  a  vu 
dans  les  lieux  publics  des  foyers  allumes  pour  le 
peuple  pendant  des  froids  rigoureux. 

Les  feux  sont  en  quelque  sorte  l'âme  des  fêles 
d'hiver.  , 

Avec  des  feux  on  pourra  avoir  des  danses  autour 
des  foyers  ;  et  ces  danses,  des  spectateurs. 

11  sera  possible  de  joindre  à  ct\s  divertissements, 
si  le  temps  le  wrmet.  qm^lques  jeux  sceniques,  des 
évoluUous  mWiUitts,  ^  .vur^eset  des  luttes,  exé- 
cutésparlesOrpheliMww***"®-     .,^    . 

Le  fruit  du  c^mm  ♦!  df  ttoiubreux  détachements 
de  citoyens  amw*  lKMlllt^rt>ul  à  la  fête  l  appareil 
martial  qui  «.^«vwnl  4  «u  peuple  vainqueur  des 
tyrans» 

Le  Nipp^Hif^t  K^tïlû  le  projet  de  décret  sui- 

vaut  : 

t  Al  I  h*  I V*  vm^cnttnU  du  peuple ,  en  costume ,  se 
Wwi>w^Mv^\  iOil  1»«>W'«  du  malin,  dans  la  salle  de  la 

«  \\  X^^^ty^^  f^niivrira  par  des  morceaui  de  musique 
^\  iv^  U^Hl*  «IM«I*»|WW  à  Tobjet  de  la  fêle. 

•  UK  l^^  Udf^iiicurf  de  la  patrie,  qui  ont  versé  leur 
è«MU  «Imu«  ltf>  eorobats  contre  les  tyrans  coalisés,  les  ci- 
iM^Sui  «iiuipotant  les  sections  de  Paris,  et  tous  les  fonc- 
lluiiiialrefl  publlci ,  feront  invités  à  se  réunir  par  députa- 
lluii  «u  soin  de  la  représentation  nationale. 

•  IV.  La  préiident  de  la  Convention  rappellera  dans  un 
dlMOurs  laconique  les  crimes  des  rois  et  les  malheurs  des 
Muplci  qui  leiont  laissé  asservir. 

•  V.  Anldl,  la  Convention  nationale,  au  milieu  des 
«Hoveni  cl-desftUf  dénommés,  ira  se  réunir  à  la  masse  du 
ffupla  dans  le  Jardin  du  Palais-National. 

•  VL  Arrivés  devant  le  monument  consacré  à  la  mé- 
mriif «  4f  JeanJacques  Rousseau ,  il  sera  exécuté  des  mor- 
•fius  dq  moilquet  et  chanté  dei  hymnes  en  riionneur  de 


la  Liberté,  et  en  exécration  des  rois  et  de  la  lyrannSet 
d^autres  hymnes  et  des  accents  plus  doux  peindront  les 
délices  de  la  fraternité  et  le  bonbeur  d*an  peuple  qui  ne 
forme  plus  qu'une  famille,  sous  les  lois  justes  de  régalité. 

c  VII.  Au  centre  du  jardin  et  dans  là  parties  latérales, 
il  sera  élevé  des  bûchers  civiques  destinés  à  consumer  les 
attributs  de  la  royauté  avec  ceux  dû  fanatisme  et  de  la 
féodalité,  odieux  soutiens  du  trAne. 

•  VIIL  Le  président  de  la  Convention  nationale  mettra 
le  feu  au  bûcher  du  centre,  des  députations  de  la  Conven- 
tion iront  allomer  ceux  des  parties  latérales. 

«  IX.  Des  salves  d'artillerie  précéderont  et  accompagne- 
ront les  diOérents  actes  qui  composent  la  llHe,  et  lui  don- 
neront ce  caractère  martial  et  imposant  qui  convient  k  un 
peuple  triomphateur. 

c  X.  Des  jeux  soéolqaet ,  exécntés  par  les  élèves  de  la 
Patrie,  et  des  danses  autour  des  bûchers  civiques,  termi- 
neront la  ftte. 

«  XI.  Les  artistes  dramatiques  sont  invités  à  donner  le 
soir  des  pièces  de  théâtre  propres  à  compléter  Teffet  senli- 
Dcotal  de  cette  journée  mémorable. 

m  XII.  Les  comités  de  salut  public,  de  la  guerre,  des 
inspectears  de  la  salle,  et  d'instruction  publique,  sont  diar^ 
gés  de  se  consulter  pour  Texécution  dn  présent  décret  » 
diacun  en  ce  qui  le  concerne.  • 

Lecomte:  Je  ne  crois  pas  que  le  plan  proposé 
remplisse  les  intentions  delà  Convention.  Que  veut- 
on  dire  par  les  bûchers  que  Ton  propose  d'établir 
pour  consumer  aux  yeux  du  peuple  les  restes  des 
signes  de  la  féodalité  et  de  la  monarchie  ?  Ces  signes 
existent-ils  encore?  Si  cela  est,  le  gouvernement 
seul  est  coupable,  il  doit  les  anéantir  secrètement; 
mais  jamais  nous  ne  devons  offrir  aux  yeux  du  peuple 
ces  images  qu'il  déteste. 

Quant  au  costume,  je  m'honore  de  me  revêtir  des 
couleurs  nationales  ;  mais  la  fête  dont  il  s'agit  doit 
être  celle  du  peuple  :  je  veux  pouvoir  me  mêler  avec 
mes  frères,  crier  au  milieu  d'eux,  sans  être  distin- 
gué :  vive  la  république  I  Pour  cela  je  prétends  y  al- 
ler comme  je  suis  dans  ce  moment,  enveloppé  de 
mon  manteau.  (On  applaudit.) 

Barailon  présente  un  projet  de  fête  dans  l'empla- 
cement du  ci-devant  hôtel  de  Soissons  ;  il  propose  la 
réunion  de  tous  les  corps  civils  et  militaires  à  la 
Convention,  et  trace  l'ordre  d'un  cortège. 

La  lecture  de  ce  projet  ne  paraît  pas  encore  satis- 
faire rassemblée. 

Bréard  demande  un  nouveau  renvoi  aux  comités. 

Tallien  :  Tous  les  plans  qui  nous  ont  été  présen- 
tés jusqu'ici  me  paraissent  inexécutables  :  je  ne  sais 
pourouoi  on  veut  nous  ramener  a  cette  manie  ridi* 
cule  Qc  parcourir  les  rues,  et  de  se  montrer  en  pro- 
cession, surtout  dans  la  saison  rigoureuse  où  nous 
sommes.  Que  ne  propose-t-on  aussi  d'élever  des  dé- 
corations, des  statues»  de  traîner  des  chars  de  triom- 
phe?... 

Ces  vaines  cérémonies,  créées  par  Robespierre, 
pour  essayer  sa  puissance,  doivent  être  rejetées.  La 
joie,  les  cris  d'allégresse  ne  se  commandent  pas  ;  on 
ne  rit  pas  à  volonté  ;  le  peuple  ne  peut  manifester 
ses  sentiments  à  un  moment  déterminé  de  la  céré- 
monie. C'est  sur  la  place  de  la  Révolution  que  s'est 
commis  le  grand  acte  de  justice  nationale  dont  vous 
avez  voté  l'anniversaire  ;  c'est  sur  la  place  de  la  Ré- 
volution que  vous  devez  vous  réunir  avec  le  peuple. 
Vous  n'aurez  pas,  comme  l'année  passée,  l'effroya- 
ble spectacle  d'une  charretée  de  victimes  amenées 
sous  vos  yeux,  et  dont  le  sang  a  rejailli  jusque  sur 
vous....  Vous  frémîtes  ;  des  hommes  énergiques  éle- 
vèrent la  voix  ;  mais  elle  fut  étouffée  parla  tyrannie. 

-Le  jour  qui  se  prépare  ne  sera  point  souillé  ;  nous 
jurerons  aux  yeux  du  peuple,  qui  répondra  à  nos 
serments,  une  haine  éternelle  aux  partisans  des 
rois,  une  guerre  à  mort  aux  terroristes  et  aux  hom- 


219 


mps  de  sang.  (ViFs  applaudissements.)  Mais  ce  jour 
ne  doit  pas  être  inutile  à  vos  travaux  ;  je  demande 
que  voire  séance  soit  levée  à  deux  heures,  et  qu'a- 
lors, sans  costume  particulier,  vous  alliez  vous  mê- 
ler au  peuple  et  partager  Tallégresse  des  bons  ci- 
toyens. 

Bourdon:  J*appuie  la  proposition  de  Tallien. 
Nous  avons  vu  assez  de  processions  et  de  marguil- 
liers.  (On  rit.)  Rappelez-vous  cette  fête  où  le  tyran 
essayait  le  diadème  ;  il  parla  au  peuple,  et  vous  avez 
senti  quels  maux  peut  entraîner  cette  facilité  accor- 
dée à  lin  homme  dont  les  vues  seraient  ambitieuses. 
11  ne  faut  jamais  qu'un  homme  soit  placé  par  la  re- 
présentation nationale  au-dessus  de  la  représenta- 
tion elle-même.  Je  demande  que  la  proposition  de 
Tallien  soit  renvoyée  au  comité,  cour  présenter  de- 
main un  projet  de  décret  qui  y  soit  conforme. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


SÉANCE  DU  26  NIVOSE. 


On  lit  la  correspondance.  Elle  est  composée  de 
nombreuses  Adresses  de  félicitations  ;  elle  manifeste 
le  vœu  national  contre  le  terrorisme  et  Tanarchie 
sanguinaire. 

—  Talot  fait  rendre  le  décret  suivant  : 

«  La  Convenlion  nationale ,  après  avoir  entendu  le  rap* 
port  de  ses  comités  des  Gnances  et  militaire,  décrète  qu*il 
fera  payé  à  chacun  des  huit  instituteurs  des  canonniers  de 
la  garde  nationale  de  Paris  la  somme  de  2,400  liv.  par  an, 
à  compter  du  jour  de  leur  nomination. 

—  Saint-Martin  fait  rendre  le  décret  suivant: 
tLa  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  des  secours  publics  sur  les  pétitions  des 
citoyennes  Aldegonde  Marcourt,  veuve  de  Jacques  Hache, 
canonnier;  Marie  Monginot,  veuve  de  Jean  Fuchs,  cara- 
binier; Marie-Elisabeth  Champfers,  veuve  de  Pierre  De- 
rogy,  maréchal  des  logis;  Marie-Victoire  Auvray,  veuve 
de  Jean-Baptiste  Foucheron,  infirmier;  Mairone,  veuve 
d* Armand  Glay,  capitaine  des  volontaires  du  Gers,  et  la 
veuve  Hat ,  habitant  la  section  de  TObservatoire,  rne  de 
la  Bourbe,  n*  5»  dont  les  maris  sont  morts  au  service  de 
la  patrie, 

•  Décrète  que,  sur  le  vu  du  présent  décret,  la  trésorerie 
nationale  paiera  auxdites  veuves,  à  titre  de  secours  provi- 
soire, imputable  sur  les  pensions  auxquelles  elles  ont  droit, 
les  sommes  ci-après ,  savoir  : 

t  A  la  veuve  Hache,  200  liv.  ;  à  la  veuve  Fuchs,  400 
liv.  ;  à  la  veuve  Derogy,  400  liv.  ;  à  la  veuve  Foucheron  , 
SOO  liv.;  à  la  veuve  Hut,  200  liv.;  à  la  veuve  Glay, 
SOO  Jiv. 

«  Le  présent  décret  ne  sera  inséré  qu^au  Bulletin  de 
correspondance.  » 

RiCHABD,  au  nom  du  comité  de  salut  public:  La 
rigueur  de  la  saison  ne  ralentit  point  Tardeur  de 
nos  braves  soldats  ;  dévoués  sans  réserve  à  la  répu- 
blique, ils  ne  respirent  que  pour  combattre  ses  en- 
nemis, et,  jaloux  de  lui  procurer  de  nouveaux  triom- 
phes, ils  ne  calculent  ni  les  fatigues,  ni  les  priva- 
tions, ni  les  dangers;  ils  offrent  à  l'Europe  étonnée 
le  modèle  de  toutes  les  vertus  civiles  et  militaires. 

De  nouveaux  succès  ajoutent  chaque  jour  à  tant 
d*avantages  et  tant  de  gloire. 

A  Farmée  des  Pyrénées-Orientales,  nous  nous 
sommes  emparés  du  fort  de  la  Trinité,  dit  Bouton  de 
Rosas,  près  la  place  de  Rosas,  et  cette  dernière  ville 
se  trouve  plus  vivement  pressée  que  jamais.  La 
garnison  du  fort  de  ta  Trinité,  épouvantée,  a  pris  la 
fuite  pendant  la  nuit,  et  nous  a  laissé  son  artillerie 
et  plusieurs  autres  effets. 

LVscadre  espagnole  dans  le  golfe  de  Rosas,  assail- 
lie parle  mauvais  temps,  a  considérablement  souf- 


fert; beaucoup  de  bâtiments  ont  échoué,  et  la  mer 
est  couverte  de  leurs  débris. 

L'armée  du  Nord,  toujours  active,  toujours  triom- 
phante, vient  de  s'emuarer  de  la  tête  du  pont  et  du 
fort  devant  Nimègue,  a  la  suite  d'une  affaire  longue 
et  brillante  ;  elle  a  fait  à  l'ennemi  beaucoup  de  pri- 
sonniers, et  a  pris  trente  bouches  à  feu,  toutes 
de  bronze,  des  chevaux,  des  caissons,  des  bagages 
et  des  munitions  de  toute  espèce. 

De  nouveaux  détails  sur  la  mémorable  journée  da 
7  nous  apprennent  que  les  prises  que  nous  avons 
faites  en  artillerie  sont  beaucoup  plus  considérables 
encore  que  celles  qui  nous  avaient  été  annoncées. 
Indépendamment  de  cent  vingt  pièces  de  canon  pri- 
ses à  Eommel  et  sur  les  autres  points,  on  s'est  em- 
paré dans  cette  affaire  de  cent  soixante  et  onze  au- 
tres pièces,  presque  toutes  de  bronze,  et  d'une 
granae  quantité  de  poudre. 

Enfin,  nous  avons  trouvé  à  Grave  cent  soixante- 
quatre  bouches  à  feu,  dont  les  deux  tiers  en  bronze, 
quatre-vingt  milliers  de  poudre,  quatre  mille  fusils, 
cinq  cents  sabres  et  différents  objets  d'approvision- 
nements et  de  subsistances.  L'armée  du  Nord  vous 
fait  passer  dix-neuf  drapeaux  pris  dans  la  journée 
du  7  nivôse. 

Je  ne  vous  donnerai  pas  lecture  des  lettres  officiel- 
les, parce  que  les  détails  dont  je  viens  de  vous  don- 
ner connaissance  sont  accompagnés  de  vues  militai- 
res qu'il  est  important  de  ne  pas  publier. 

Nous  vous  proposons  de  faire  insérer  au  Bulletin 
ces  nouvelles.  (Ou  applaudit.) 

L'insertion  est  décrétée. 

—  Privé,  aide  de  camp  du  général  Bonnard,  est 
admis  à  la  barre.       • 

•  Citoyens  représentants,  Parmée  du  Nord  continue  de 
poursuivre  sans  relâche  les  ennemis  delà  république  ;  elle 
ne  connaît  point  d'obstacles  quand  vous  ordonnez  au  nom 
de  la  patrie,  et  elle  est  payée  de  toutes  ses  fatigues  par  la 
perspective  de  la  liberté  et  du  bonheur  de  son  pays. 

t  La  mémorable  journée  du  7  nous  a  valu  des  avanta- 
ges immenses;  nous  nous  sommes  emparés  des  positions 
qu'il  nous  importait  le  plus  d^occuper  pour  porter  les  plus 
terribles  coups  aux  armées  anglaise  et  hollandaise.  Nous 
avons  fait  un  grand  nombre  de  prisonniers,  et  Tennemi 
nous  a  laissé  plus  de  trois  cents  pièces  de  canon  et  une 
grande  quantité  de  munitions.  Enfin,  nos  braves  soldats 
ont  enlevé  dans  cette  journée  dix-neuf  drapeaux  qu*ils 
m'ont  chargé  de  vous  présenter. 

«  Citoyens  représentants,  recevez,  au  nom  de  Tarmée 
du  Nord,  ce  gage  de  son  dévouement  à  la  république,  à 
la  représentaUon  nationale.  C'est  à  votre  voix  qu'elle  a 
renversé  les  hordes  innombrables,  les  hordes  qui  mena-^ 
çaient  d'envahir  la  France  ;  tout  son  sang  apparUent  A  Ja 
patrie,  c'est  à  vous  d'en  disposer  en  son  nom. 

c  Je  vous  présente  deux  braves  soldats  qui  se  sont  par- 
ticulièrement distingués  dans  les  journées  du  7  :  Gaignard, 
brigadier  au  13*  régiment  de  dragons,  etBabo,  grenadier 
au  2*  bataillon  de  la  27*  demi-brigade  ;  ils  ont  enlevé  cha- 
cun un  drapeau  à  l'ennemi.  •  (On  applaudit) 

Le  Président,  au  militaire  :  Brave  militaire,  tti 
viens  faire  briller  dans  cette  enceinte  le  signal  heu- 
reux des  victoires  de  la  république  :  chaque  jour 
nos  braves  guerriers  acquièrent  un  nouveau  droit  à 
la  reconnaissance  nationale;  chaque  jour  transmet  à 
l'histoire  de  nouveaux  triomphes. 

Citoyen,  reporte  à  nos  frères  d'armes ,  qui  se 
dévouent  si  généreusement  pour  le  maintien  des 
droits  du  peuple,  une  tandis  qu'ils  font  mordre  la 
poussière  aux  satellites  des  despotes,  la  Convention 
nationale  maintient  de  tout  son  pouvoir  le  règne  de 
la  justice  ;  qu*elle  écrasera  conséqnemmentloutes 
les  factions  qui  pourraient  se  reproauire  pour  atten- 
ter à  la  souveraineté  du  peuple  ;  dis-leur  que  la 
Convention  nationale  s'occupe  sans  relâche  des 


22Ô 


moyens  de  leur  préparer  TëUt  de  calme  et  de  bon* 
heur  si  justemeut  mérité  par  leurs  glorieux  exploits. 

La  Convention  nationale  voit  avec  le  plus  vif  in* 
térêt  les  deux  braves  guerriers  qui  se  sont  signalés 
dans  la  journée  mémorable  que  tu  viens  d'annon- 
cer. Elle  applaudit  de  nouveau  à  Tintrépidité»  au 
patriotisme  de  nos  braves  défenseurs.  Je  voua  invite, 
en  son  nom,  à  assister  à  la  séance. 

MiLBAUD  :  Il  est  beau,  citoyens,  de  voir  à  cette 
barre  ces  généreux  défenseurs  qui  viennent  de  ren- 
dre à  la  patrie  des  services  signalés  ;  et  c'est  à  nous 
de  leur  témoigner  notre  reconnaissance. 

Nous  avons  vu  avec  satisfaction  le  président  don- 
ner le  baiser  fraternel  à  ces  trois  militaires.  Je  de- 
D)ande,  moi,  que  leurs  noms  soient  inscrits  au  pro- 
cès-verbal et  envoyés  dans  les  départements.  Vous 
avez  déjà  décrété  que  Tarmée  du  Mord  avait  bien 
mérité  de  la  patrie  ;  je  demande  que  Tarmée  des  Py- 
rénées-Orientales,  qui  a  dépucelé  le  Bouton  de 
Boscs,  ait  la  même  récompense.  (On  rit.)  Ainsi, 
quand  nos  armées  remportent  des  succès.  Ton  doit 
souffrir  avec  patience  une  disette  qui  n*est  que  factice. 

On  se  plaint  que  Ton  manque  de  pain  tandis 

âu'on  en  mange  à  3  sous  la  livre,  lorsque  dans  les 
épartements  on  le  vend  20  sous.  (Murmures.) 
Citoyens,  nos  soldats  ont  abandonné  leurs  états, 
ils  ont  abandonné  leurs  familles,  et  ils  ne  se  plai- 
gnent pas  de  ce  que  la  Convention  ne  leur  envoie 
pas  de  bois  pour  les  chauffer. 

On  dit  que  dernièrement  on  parlait  de  roi  au  Pa- 
laisRoyal;  que  m'importent  tous  ces  discours,  quand 
je  sais  que  douze  cent  mille  hommes  combattent 
pour  la  république! 

Je  me  résume  en  demandant  de  nonread  la  men* 
lion  honorable,  Tinsertion  du  rapport  au  Bulletin,- et 

3ue  le  comité  de  salut  public  soit  chargé  de  donner 
e  Tavancementaux  deux  braves  citoyens  de  Tar^ 
iDée  du  Nord. 

Ces  propositions  sont  décrétées. 

—  DuboiS'Crancé  fait  un  rapport,  au  nom  du  eomilé 
de  salut  public,  sur  la  conduite  du  ffénéral  Kellernianh. 
Il  rappelle  la  jcnimée  de  Valmy,  les  diOérents  serTioes  que 
cegéoéral  a  rendus  à  la  patrie,  et  les  calomnies  qui  en 
ftireot  ta  récompense  ;  calomnies  qui  furent  dissipées  par 
le  rapport  que  Barère  fit  sur  son  compte,  au  nom  du  co* 
mité  de  salut  public.  Depuis  11  Uït  chargé  du  commande- 
ment des  années  des  Alpes  et  d*Itaiie}  il  dirigea  le  siège 
de  Lyon ,  pendaùt  lequel  les  Pièmontais  entahlrent  le 
Mont-Blanc.  Il  rassembla  sept  mille  hommes,  purgea  le 
territoire  de  la  république,  et  repoussa  les  troupes  sardes 
bien  au  delà  de  nos  rronllères.  C*est  à  Tinstant  où  il  venait 
de  saufer  la  patrie,  que  le  comité  de  salut  public  Pa  fblt 
arrêter  et  traduire  a  Paris  au  tribunal  révolutionnaire. 

Seize  représentants  du  peuple,  appelés  en  témoignage 
devant  ce  tribunal,  rendirent  hommage  aut  vertus  et  aux 
talents  de  Kellermann,  qui  fut  acquitté.  Depuis  ce  temps 
Il  s'est  présenté  aux  comités  avec  cette  fermeté,  mais  aussi 
avee  cette  modestie  qui  conviennent  an  ? éritable  ami  de  la 
liberté.  Il  a  dit  qu*ll  était  prêt  à  serfir  la  république ,  si  la 
Convention  le  voulait,  mais  quMl  éuit  aussi  tout  prêt  à 
prendre  sa  retraite!  si  la  patrie  n'avait  plus  besoin  de  ses 
services. 

Je  déclare  ici  que  nous  avons  examiné  toutes  les  pièces 
qui  lui  sont  relatives ,  et  qu*il  n'eu  existe  aucune  à  charge 
contre  lui.  Voici  en  conséquence  le  projet  de  décret  que  le 
comité  m'a  chargé  de  vous  présenter  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  ^n  co- 
mité de  saint  public ,  décrète  ! 

i  Art.  I*'.  Le  décret  du  14  septembre  1798  (  vieux 
Style),  portant  destitution  de  général  Kellermann,  est 
rapporté. 

<  lir  Sa  solde  lui  sera  payée,  à  compter  de  Tépoque  de 
sa  destitution  jusqu'à  ce  jour ,  confurmément  aux  disposi- 
tions de  Partiole  IX  du  titre  IV  de  la  loi  du  I  thermidor. 

•  m.  Le  comité  de  salut  public  réglera  les  indemnités 
qui  lui  sont  dues  pour  les  chevaux  qui  lui  appartenaient, 


•t  qui  ont  été  employés  an  lerviea  de  la  vipnUlqiMto 

«  Le  comité  de  salut  public  est  chargé  de  reneUre  iii* 
cessamment  le  général  KcUemann  à  lartéle  d*une  des  ai^ 
mées  de  la  république,  t 

DuBOis-DuBAis:  Je  croyais  q[u*après  le  rapport  si 
avantageux  et  si  mérité  qu  on  vient  de  nous  uire  au 
nom  du  comité  de  salut  publici  on  nous  aurait  pro« 
posé  la  réint^ation  de  Kellermann  dans  ses  fonc- 
tions de  général.  Citoyens,  vous  Q*ave2  pas  oublié  U 
glorieuse  journée  de  Valmy,  dans  laquelle,  avea 
dix*sept  mille  hommes,  Kellermann  tint  en  écheo 
toute  1  armée  ennemie  ;  journée  qui,  j|*ose  le  dire,  a 
sauvé  la  républiçiue  ;  car,  si  Tennemi  eût  passé  à 
Valmy,  il  inondait  de  ses  troupes  la  France  entière* 
Vous  n'avea  pas  oublié  que  Kellermann,  avec  un 
petit  nombre  de  soldats,  recouvra  le  Mont-Blanc,  et 
repoussa  les  Pièmontais  bien  au-delà  du  point  d*où 
ils  étaient  partis  pour  envahir  nos  frontières. 

Cependant  Kellermann  était  dans  les  fors,  tandis 
que  Ronsin  et  ses  complices  jouissaient  ici  des  fa- 
veurs de  Tancien  gouvernement.  C'est  à  vous,  ci- 
toyens, qu'il  appartient  de  réparer  les  crimes  de  ce 
gouvernement  atroce  envers  le  brave  Kellermann. 
Je  demande,  non  pour  lui,  mais  pour  satisfaire  k  U 
justice,  mais  pour  l'intérêt  de  la  république,  que 
Kellermann  soit  employé.  (Applaudissements.) 

Javoques  :  J'ai  connu  Kellermann  au  siège  de 
Lyon  :  je  n'ai  vu  en  lui  qu'un  bon  patriote  et  un  gé- 
néral habile,  dont  Robespierre  était  Tennemi  le  plus 
acharné. 

***  :  Le  nom  seul  de  Kellermann  a  (ait  plus  d'une 
fols  reculer  les  Pièmontais.  11  réorganisa  l  armée  dei 
Alpes  et  d'Italie,  que  Montesquieu  avait  détruite  ;  il 
reprit  le  Mont-Blanc,  que  les  satellites  du  despote 
de  Turin  avaient  envahi ,  et  les  repoussa  A  plus  de 
sept  lieues  au  delà  de  nos  fk'ontières.  Je  demandé 
gu'il  soit  employé.  Plaise  à  Dieu  que  ce  âoît  Sur  \eê 
frontières  du  Piémont  :  mes  concitoyens  seront  bien 
assurés  de  ne  plus  Voir  envahir  leurs  foyers  par  les 
troupes  sardes! 

Dubois-Cbancb  ;  Si  le  comité  ne  vous  a  pas  pro* 

I^osé  d'employer  Kellermann, c*est  qu'il  a  voulu  que 
a  Convention  se  prononçât  sur  le  compte  de  ce  gé- 
néral, aûn  de  l'entourer  de  toute  la  confianoe  de  la 
nation. 

Le  projet  du  comité  est  adopté  arec  l'amende- 
ment de  DuboiS'Dubais. 

Pelet  :  Depuis  le  9  thermidor  tons  ne  eessea  de 
suivre  la  voie  de  la  justice.  Vous  venez  encore  de 
donner  une  preuve  de  votre  amour  pour  elle  en 
rendant  à  Kellermann  l'estime  et  les  fonctions  dont 
on  n'aurait  jamais  dû  le  priver.  Je  réclame  le  même 
acte  d'équité  pour  son  digne  émule,  pour  Miranda  ; 
ennemi  de  l'esclavage,  ami  de  la  liberté,  il  quitta  le 
Mexiaue  pour  venir  servir  en  France.  Il  fut  traduit 
au  tribunal  révolutionnaire,  qui,  après  Texamen  le 
plus  sévère  et  le  plus  détaille  de  sa  conduite,  fut 
obligé  de  l'acquitter.  Je  demande  que  Miranda  soit 
mis  en  liberté. 

Claczbl  :  Le  comité  de  sûreté  générale  avait  ar- 
rêté avant-hier,  à  l'unanimité,  la  mise  en  liberté  de 
Miranda  ;  mais,  comme  il  s'aeissait  d*un  général,  il 
a  fallu  consulter  le  comité  de  salut  public.  Ce  co- 
mité a  déclaré  n'avoir  aucuns  motifs  pour  s'opposer 
à  la  mise  en  liberté  de  Miranda,  et  ce  soir  le  co- 
mité de  sûreté  générale  délivrera  le  mandat  d'élar- 
gissement. 

PÉNiÈREs  :  Puisque  les  comités  sont  d'accord.  U 
n*Y  a  pas  de  raison  pour  que  la  Convention  ne  dé* 
crête  pas  la  mise  en  liberté. 

Clauzel  :  J'y  consens. 

La  Convention  décrète  que  Miranda  sera  mis  eo 
liberté. 


221 


Fautridel  :  La  justice  de  la  Convention  nationale 
ne  doit  pas  se  borner  à  Kellermann  et  à  Miranda  ;  je 
la  réclame  aussi  pour  le  capitaine  Lacrosse,  qui  a 
toujours  bien  fait  son  devoir,  et  oui  fut  une  des  vic- 
times de  Robespierre.  Je  demanae  que  le  comité  de 
salut  public  vous  fasse  un  rapport  sur  la  destitution 
arbitraire  qu'il  a  éprouvée. 

Bbbabd  :  11  est  inutile  de  retarder  sans  motif  la 
justice  que  la  Convention  doit  à  un  citoyen  ;  i*ai  tou- 
jours connu  le  capitaine  Lacrosse  pour  un  bon  pa- 
triote, qui  a  rendu  de  grands  services  à  la  républi- 
que. 11  fut  victime  de Tintrigue,  q^ui  ne  s*est  pas 
contentée  de  le  poursuivre,  mais  qui  a  aussi  persé- 
cuté sa  famille.  Je  demande  qu*il  soit  mis  en  liberté, 
et  que  le  comité  de  salut  public  soit  chargé  de  lui 
donner  de  remploi. 

Mabec  :  Je  confirme  ce  que  vient  de  dire  mon 
collègue  Bréard.  Indépendamment  des  services  es- 
sentiels que  le  capitaine  Lacrosse  a  rendus  dans  les 
Iles-duVent,  il  a  toujours  Justifié  la  conGance  des  pa- 
triotes par  la  conduite  la  plus  pure  et  la  plus  pronon- 
cée dans  toutes  les  circonstances  de  la  révolution. 

La  proposition  de  Bréard  est  adoptée. 

Babailon  :  Je  viens,  au  nom  de  votre  comité  dln- 
strnction  publique ,  vous  offrir  le  plan  de  la  fête  du 
2  plnviose. 

A  huit  heures  du  matin  une  décharge  générale  de 
l'artillerie  du  Pont-Neuf  annonce  la  tête,  et  aux  es- 
claves des  rois  le  sort  oui  les  attend. 

Un  rappel  général  aans  toutes  les  sections  invite 
bientôt  les  citoyens  à  se  rendre  au  lieu  qui  va  être 
indiqué. 

A  onze  heures,  réunion  de  la  Convention  au  lieu 
de  ses  séances ,  et  de  Tlnstitut  national  de  Musique. 

A  midi  précis,  celle  des  citoyens  dans  le  Jardin 
National,  auxquels  se  joint  la  Convention. 

Tous  se  rassemblent  autour  de  la  statue  de  la  Li- 
berté, placée  en  avant  du  grand  bassin. 

Le  président  de  la  Convention  prononce  un  dis- 
cours relatif  à  la  fête. 

11  déclare  ensuite,  au  nom  de  la  nation  :  «Que  le 
peuple  français  ne  subira  jamais  le  joug  d'un  roi; 
il  voue  è  l'exécration  des  siècles  les  tyrans  et  la  ty- 
rannie. • 

Une  décharge  d*artillerie,  le  roulement  des  tam- 
bours portent  jusqu'aux  nues  le  vote  de  la  cité,  et 
manifestent  sa  vengeance  contre  tous  ceux  qui  ten- 
teraient de  l'asservir. 

Une  symphonie  militaire ,  des  acclamations  de 
vive  là  république  !  vive  la  patrie!  succèdent. 

La  Convention  rentre  dans  la  salle  de  ses  séances. 
Pendant  que  les  citoyens  y  défilent,  l'Institut  de  Mu- 
sique exécute  divers  morceaux  qui  répondent  à  la 
circonstance. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

«  ArU  I*%  La  ConTeDtion  nationale,  après  avoir  eotenda 
le  rapport  à?  soncomUé  d'iostruction  publique  sur  la  fSle 
qui  sera  célébrée  le  1  pluviôse»  adopte  le  plan  qui  est  pro" 
posé. 

«  IL  Les  poètes  et  les  artistes  musiciens  sont  invités  à 
concoarir  à  la  eélébraUon  par  des  pièces  de  leur  composi- 
tion. 

<  riL  La  eommission  dMustruction  publique  est  chargée 
de  l'exécution. 

«  L'insertion  au  Bulletin  tiendra  Ileo  de  promulgation.  » 

Babailon  :  Je  dois  dire  que  les  poètes  se  sont  déjà 
empressés  de  concourir  aux  vues  de  la  Convention. 

te  projet  de  décret  est  adopté. 

Clauzel  :  Je  dois  faire  part  à  la  Convention  que 
les  terroristes  se  proposent  d'insulter  ce  soir,  nii 
théâtre,  les  bustes  de  Marat  et  Lepelletier,  afin  de 
l'attribuer  aux  patriotes  :  mais  les  hommes  de  sang 
ont  beau  faire;  ils  sont  surveillés,  ils  ne  parvien- 


dront pas  à  détruire  le  règne  de  la  justice  êti  flttri* 
buanta  ceux  qui  en  sont  les  plus  fermes  défenseurs 
les  atrocités  dont  ils  se  rendent  coupables. 

BoissiBU  :  Je  demande  la  liberté  du  culte  pour 
ces  saints-là  comme  pour  tant  d'autres. 

Boudin  :  Placé  par  le  sort  dans  la  première  com-» 
mission  des  Vingt-et^Un  ;  appelé  par  vos  suffrages 
au  comité  de  sûreté  générale;  obligé  de  discuter, 
dans  les  trois  comités  réunis ,  des  dénonciations 
renvoyées  à  leur  examen  contre  des  représentants 
du  peuple,  j'ai  eu  occasion  de  faire  des  observations 
que  je  crois  devoir  soumettre  à  votre  sagesse. 

Nous  ne  pouvons  plus  nous  dissimuler  que  nous 
n'ayons  été  constamment  le  point  de  mire  de  tous 
les  ennemis  de  la  révolution.  Nous  ne  pouvons  plus 
nous  dissimuler  que  la  seule  ressoui^ce^ui  leur  reste 
est  de  nous  entraîner  dans,  le  précipice  qu*ila  ont 
creusé  sous  leurs  oas. 

Bassembiés  en  Convention  nationale  sous  les  aus- 
pices les  plus  sinistres,  encombrés  sous  les  débris  du 
premier  trône  de  TEurope  ;  pressés  au  dehors  par 
les  innombrables  légions  des  aespotes  qui  entourent 
la  France;  déchirés  au-dedans  par  leurs  partisans  et 
leurs  émissaires,  travestis  en  patriotes  exagérés; 
proscrits,  dès  avant  notre  naissance,  dans  cette  exé- 
crable municipalité  dont  les  vues  ambitieuses  furent 
la  première  source  de  nos  malheurs,  la  postérité 
aura  peine  à  concevoir  que  nous  ayons  pu  conjurer 
tant  d'orages  et  échapper  à  tant  d'écueils. 

Trop  longtemps  nous  avons  pris  la  différence  de 
nos  opinions  pour  celle  de  nos  sentiments.  Voulant 
arriver  au  même  but,  mais  par  des  routes  différen- 
tes, nous  avons  cessé  quelquefois  de  nous  reconnaî- 
tre et  de  nous  entendre.  Aujourd'hui  même  le  sou- 
venir du  passé  Se  mêle  à  nos  discussions.  Un  de  nous 
monte-t-il  à  cette  tribune;  on  préjuge  l'opinion 
({u'il  va  émettre  par  celles  qu'il  a  émises  ou  par  les 
impressions  dont  on  le  suppose  aflecté.  On  dit  de 
Tun  :  Il  a^té  Jacobin;  de  l'autre:  11  a  voté  l'appel  au 
peuple;  on  a  été  noble,  prêtre  ou  homme  de  loi;  on 
a  approuvé  ou  désapprouvé  les  journées  des  31  mai, 
1er  et  2  juin  ;  etf  aaprès  ces  misérables  réminis- 
cences, on  apprécie  l'avis  par  la  personne  :  la  pré* 
vention  étouffe  la  vérité,  et  l'esprit  public  n'est  trop 
souvent,  pour  nous ,  que  l'esprit  de  parti.  Malheu- 
reusement notre  exemple  est  imité. 

Portez  vos  regards  au  dehors  de  cette  enceinte, 
portez-les  sur  les  départements,  qui  tous  sont  avides 
de  se  composer  sur  votre  exemple  :  je  ne  vois,  au 
milieu  des  citoyens,  que  des  germes  de  discorde 
incompatibles  avee  l'harmonie  sociale.  On  se  dési« 
gne  en  Jacobins,  en  Feuillants,  en  Cordeliers,  en 
pétitionnaires  des  vingt  mille  et  des  huit  mille,  en 
clubistes  de  la  Sainte-Chapelle,  en  fédéralistes ,  en 
membres  des  anciens  et  des  nouveaux  comités  révô* 
lutionnaires,  des  anciennes'et  des  nouvelles  autori- 
tés constituées  ;  en  Girondins,  Brissotins,  Maratistes» 
terroristes,  etc.;  et  de  ces  funestes  distinctions  nais-* 
sent  autant  de  classes  qui  se  regardent  comme  enne- 
mies, et  s'effraient  les  unes  les  autres,  éloignent  les 
citoyensde  leurs  sections,  ou  neutralisent  leur  pa- 
triotisme et  leur  énergie. 

Dans  ces  assemblées  décadaires,  qui  ne  devraient 
être  que  des  réunions  de  frères  délib(*rant  sur  la 
Commune  utilité,  a-^t-on  le  malheur  de  heurter 
quelques  intérêts  particuliers,  on  ne  vous  combat 
point  par  des  raisons,  mais  par  des  reproches  ;  le 
père  ue  famille  revient  chez  lui  douloureusement 
affecté  ;  il  est  dévoré  d'inquiétudes  sur  le  passé,  d'à* 
larmes  sur  l'avenir  ;  et  les  songes  de  la  nuit;  loin  do 
le  calmer,  n'offrent  plus  à  son  imagination  que  des 
factions  sanguinaires. 
Soyons  de  bonne  foi ,  citoyens  :  est-ce  au  milieu 


222 


d*ane  semblable  tourmente  que  nous  pourrions  réa- 
liser le  bonheur  du  peuple  français  ?  Non,  certes  ;  il 
ne  peut  y  avoir  de  félicité  publique  là  où  il  n*y  a 
point  de  sécurité  individuelle. 

Empressons-nous  donc  de  cicatriser  les  plaies  ré- 
Tolutionnaires  ;  proscrivons  du  sol  français  tous  ces 
signalements  odieux  qui  ne  sont  que  des  ralliements 
hostiles  ;  ils  nous  coûteraient  plus  de  sang  que  n'en 
ont  fait  verser  les  factions  des  Guelfes  et  des  Gibe- 
lins, de  la  Rose-Blanche  et  de  la  Rose-Rouge. 

Qu'est-ce  qu'un  législateur  révolutionnaire?  un 
homme  à  qui  une  grande  nation  a  donné  de  grands 
pouvoirs.  Il  réunit  en  lui  deux  caractères  bien  dis- 
tincts, le  citoyen  et  le  mandataire.  Sous  ces  deux 
rapports,  il  peut  méconnaître  ses  devoirs  :  s'il  se  li- 
vre aux  seuls  mouvements  de  ses  passions,  c'est 
l'individu  qui  prévarique  ;  s'il  ne  fait  qu'obéir  trop 
aveuglément  à  son  zèle,  c'est  le  mandataire  qui  s'é- 
gare. Et  ces  deux  genres  de  délits ,  l'un  civil  et  po- 
sitif, l'autre  politique  et  de  circonstance,  ne  se  res- 
semblent absolument  pas. 

De  même  qu'on  peut  se  rendre  coupable  de  meur- 
tre sans  être  criminel  d'assassinat,  on  peut  devenir 
grandement  rénréhensible  dans  l'opinion  sans  être 
punissable  par  la  loi. 

Quand  Carrier,  par  exemple,  livre  à  la  mort  des 
individus  qu'épargnaient  formellement  vos  décrets, 
c'est  la  passion  qui  le  conduit  :  Carrier  assassine. 
Quand  d'autres  n'usent  pas  avec  assez  de  mesure  des 
armes  que  vous  avez  remises  dans  leurs  mains  pour 
faire  marcher  la  révolution ,  c'est  le  zèle  qui  les 
trompe  ;  ils  tuent,  mais  n'assassinent  pas.  Le  délit 
positif  mérite  rarement  grâce;  le  délit  politique 
peut  quelquefois  avoir  son  excuse.  Ce  n'est  pas  que 
je  veuille  généralement  l'absoudre.  Qui  m'en  accu- 
serait calomnierait  ma  pensée. 

Lorsque  le  gouvernement  révolutionnaire  aura 
pris  fin  ;  lorsque  les  fonctions  de  chacun  auront  été 
clairement  circonscrites ,  il  sera  possible  alors  d'at- 
teindre de  semblables  délits  et  de  les  punir  sans 
crainte  de  tomber  dans  l'arbitraire. 

Mais,  dans  le  chaos  d'où  nous  sortons  à  peine, 
comment  pourrions- nous  distinguer  ce  qui  a  été 
véritablement  crime  de  ce  qui  n'a  été  qu'erreur  du 
moment? 

Depuis  deux  ans  nous  adorons  le  matin  ce  que 
nous  avions  brisé  la  veille  :  nous  briserons  demain 
ce  que  nous  adorons  aujourd'hui.  Combien  de  fois, 
vous  qui  nous  serrez  maintenant  dans  vos  bras, 
n*avez-vous  pas  proscrit  nos  têtes  innocentes,  mais 
que  vous  présumiez  coupables?  Qui  vous  a  dit  que, 
parmi  ceux  que  vous  poursuiviez  a  présent,  vous  ne 
retrouverez  pas  un  jour  des  frères  égarés  plutôt  que 
des  conspirateurs? 

L'ivresse  du  pouvoir  est  aussi  facile  que  redouta- 
ble ;  et  lorsque  les  événements  nous  ont  contraints 
d'investir  d'une  autorité  sans  borne  quelques-uns  de 
nos  collègues,  n'avons-nous  pas  dû  prévoir  les  abus 
de  cette  espèce  de  dictature  ? 

Le  remède,  sans  doute,  nous  a  paru  effrayant; 
mais  le  mal  nous  semblait  plus  effrayant  encore,  et 
TOUS  avez  sagement  risque  de  faire  des  blessures  à 
quelques  patriotes  pour  prévenir  la  mort  inévitable 
de  la  patrie. 

Si  nous  voulions  rechercher  nos  délits  politiques, 
quel  est  celui  d'entre  nous  qui  ne  doit  trembler  de- 
vant Tavenir? 

Elle  est  profonde,  sans  doute, la  plaie  que  nos 
dictateurs  éphémères  ont  faite  à  la  France!  Mais 
cette  plaie  n  Welle  pas  le  résultat  des  combinaisons 
perfides  de  tous  les  ennemis  de  la  liberté  et  de  l'éça- 
llté?  La  république  a-t-elle  moins  souffiert  des  aé- 
Cnirements  que  lui  ont  fait  éprouver  tant  d'hommes 


égarés,  auxquels  vous  avez  accordé  une  amnistie  si 
généreuse ,  que  de  l'abus  des  pouvoirs  confiés  à  un 
certain  nombre  de  nos  collègues?  Produit-on  la 

Quittance  de  l'or  au  prix  duquel  des  représentants 
u  peuple  ont  vendu  leur  patrie  à  Pitt  et  à  Cobourg, 
comme  on  peut  indiquer  les  portions  du  territoire 
français  où  Charette  et  les  siens  ont  porté  la  dévasta- 
tion et  la  mort? 

Pourquoi  donc  offrons-nous,  d'une  main^  à  ceux- 
ci  l'olivier  de  la  paix,  tandis  que,  de  l'autre,  nous 
préparons  des  échafauds  pour  ceux-là?  Sovons  con- 
séquents, et  n'ayons  pas  deux  poids  et  deux  me- 
sures. 

C'est  pour  être  justes  que  vous  voulez  sévir  contre 
ceux  de  vos  collègues  qui,  en  frappant  par  vos  or- 
dres les  ennemis  de  la  révolution,  ont  atteint  quel- 
ques amis  de  la  liberté  !  Pourquoi  donc  avez-vous 
manifesté  l'inébranlable  résolution  de  ne  jamais  ré- 
viser aucun  des  jugements  que  vous  leur  reprochez 
d'avoir  fait  rendre,  ni  de  restituer  aucune  des  con- 
fiscations qui  en  ont  été  la  suite?  N'est-ce  pas  encore 
parce  que  le  salut  du  peuple  ne  permet  pas  de  pren- 
dre une  autre  mesure? 

La  justice  distributive  est  pour  les  moments  de 
calme.  Les  révolutions,  qui  ne  peuvent  se  faire 
qu'au  milieu  des  décombres  et  pendant  l'absence  du 
gouvernement,  ne  reconnaissent  qu'une  grande  jus- 
tice nationale,  basée  sur  cette  loi  suprême  :  le  salut 
du  peuple.  Et  le  salut  du  peuple  aemande  que  le 
sang  cesse  de  couler  sous  le  couteau  révolution- 
naire ;  il  demande  que  l'on  substitue  les  eaux  salu- 
taires du  fleuve  d'oubli  aux  flots  ensanglantés  de  la 
Loire  ;  il  demande  que  d'une  extrémité  de  la  France 
à  l'autre  un  grand  voile  s'étende  sur  tout  le  passé, 
pour  que  notre  attention  se  poVte  sans  distraction 
sur  l'avenir.  Elevons  au  milieu  de  nous  un  autel  à 
cette  déesse  si  révérée  des  Romains,  à  la  Concorde  : 
c'est  dans  son  temple  que  le  sénat  aimait  à  se  ras- 
sembler. Consacrons -lui  cette  enceinte  où  trop 
longtemps  régna  son  ennemie,  et  jurons,  à  ses  pieds, 
d'oublier  des  délits  qu'il  faut  peut-être  moins  attri- 
buer à  l'abus  du  pouvoir  qu'à  l'excès  du  patrio- 
tisme, à  une  méchanceté  de  réflexion  qu'à  la  fatalité 
des  circonstances.  Ce  sont  ces  champions  de  la  li- 
berté que  nous  avions  précipités  au  milieu  d'une 
mêlée  d'aristocrates  et  de  patriotes.  Environnés, 
comme  Ajax,  du  plus  épais  brouillard,  pouvaient- 
ils  toujours  bien  diriger  leurs  coups?  Leurs  torts  ne 
sont -ils  pas  moins  Fouvrage  de  leur  volonté  que 
ceux  de  l'ambition  des  triumvirs  que  nous  avons 
exterminés  ? 

Je  le  répète  :  si  nous  voulions  appliquer  les  règles 
de  la  justice  distributive  aux  délits  révolutionnai- 
res, il  faudrait  frapper  du  même  coup  et  ceux  qui 
ont  provoqué  les  mesures  dont  nous  nous  plaignons, 
et  ceux  qui  les  ont  ordonnées,  et  ceux  qui  les  ont 
exécutées,  et  cenx  qui  les  ont  approuvées. 

Soyons  donc  justes,  puisque  vous  voulez  l'être. 
Soyons  inflexibles,  j'y  consens.  Faisons  le  serment 
terrible  de  ne  f»oint  nous  épargner  les  uns  les  au- 
tres, et  d'exterminer  tous  ceux  qui  auront  commis 
des  délits  politiques.  Expions  sur  nous-mêmes  les 
maux  inséparables  de  l'avènement  miraculeux  du 
règne  de  la  liberté  et  de  l'égalité.  Punissons-nous 
des  forfaits  de  tous  ses  ennemis  intérieurs  et  exté- 
rieurs  Mais  hâtons-nous  d'appeler  des  succes- 
seurs ;  car  bientôt  ces  murs,  qu  on  fatigue  tant  de 
fois  de  clameurs  aussi  insociales  qu'impoTitiques,  ne 
verront  plus  que  des  accusés,  des  accusateurs  et  des 
juges.  (Des  murmures  s'élèvent  dans  une  grande 
partie  de  l'assemblée.) 

Clauzel  :  11  est  étonnant  que  l'orateur,  qui  est 
membre  du  comité  de  sûreté  générale ,  fasse  une 


223 


motion  pareille  ;  je  déclare  que  ce  ne  sont  pas  là  les 
senliments  du  comilé. 

•'•  :  J'observe,  pour  ceux  qui  interrompent,  que 
l'opinant  n*a  parlé  qu'hypothétiquement  ;  on  Ta  mal 
entendu. 

Boudin  :  L'opinion  que  j*énonce  m*est  particu- 
lière ;  elle  est  de  moi  seul,  et  je  parle  d*après  mon 
cœur.  (Applaudissements.) 

On  aemande  que  Torateur  continue. 

Boudin  :  Bientôt  ces  murs,  au  lieu  de  répéter  des 
discussions  sages  sur  les  grands  intérêts  de  la  répu- 
blique, ne  retentiront  que  d'inculpations  dont  l'en- 
chaînement transformera  successivement  en  accueé 
chaque  membre  de  la  Convention. 

Non,  citoyens,  nous  ne  donnerons  pas  à  nos  en- 
nemis abattus  le  délicieux  spectacle  de  quelques 
nouvelles  boucheries  de  députes.  11  ne  sera  pas  vrai,, 
comme  on  s'est  plu  à  le  répéter,  qu'on  nous  mettra, 
malgré' nous,  en  coupes  réglées,  jusqu'à  ce  qu'il  ne 
reste  ici  que  la  sonnette  du  président.  (Murmures.) 
Il  ne  sera  pas  vrai,  comme  on  l'a  dit,  il  y  a  un  an, 
dans  une  Société  trop  célèbre,  que  l'épervier  qui 
fut  jeté  alors  sur  la  représentation  nationale  man- 
qua son  coup  parce  que  les  mailles  n'en  étaient  pas 
assez  serrées. 

Mais,  dit-on,  si  nous  ne  livrons  pas  au  glaive  na- 
tional ceux  qui  nous  ont  fait  gémir  sous  l'oppres- 
sion ,  ils  reprendront  des  forces ,  ils  remettront  la 
terreur  à  l'ordre  du  jour,  ils  anéantiront  la  liberté 
publique.  C'est  Ântée,  qui  combattra  tant  qu'il  ne 
sera  pas  étouffé  par  Hercule. 

Je  vous  avoue,  citoyens,  que  je  ne  partage  pas  ces 
frayeurs  pusillanimes.  Les  tyrans  détrônés  et  dé- 
florés ne  sont  plus  à  craindre,  et  la  nation  française 
est  trop  robuste  pour  avoir  rien  à  redouter  désor- 
mais de  la  folle  ambition  de  quelques  individus.  Le 
levier  d'Archimède  est  brisé.  Il  n'y  a  plus,  pour  au- 
cun d'entre  nous,  de  point  d'appui  aux  Jacobins, 
aux  Cordeliers ,  dans  des  comités  révolutionnaires, 
et  dans  un  repaire  municipal  où  se  ralliaient  des 
intrigants  de  tous  les  genres,  des  hommes  perdus 
de  tous  les  vices,  des  scélérats  capables  dç  tous  les 
crimes. 

Qui  pourrait  donc  nous  effrayer  aujourd'hui? 
Supposeriez -vous  à  ceux  que  vous  croyez  devoir 
poursuivre  une  armée  d'auxiliaires?  En  ce  cas,  pour- 
quoi attaquer  des  généraux  entourés  de  soldats  qui 
peuvent  se  croire  intéressés  à  les  défendre?  Ou  ils 
sont  dangereux ,  ou  ils  ne  le  sont  pas  ;  s'ils  ne  sont 
pas  dangereux,  livrez-les,  comme  on  vous  l'a  dit,  au 
supi)lice  de  vivre  :  que  l'opinion  leur  imprime  une 
flétrissure  plus  pénible  à  porter  que  la  mort  à  souf* 
frir  ;  s'ils  sont  dangereux ,  licenciez  donc  d'abord 
leurs  auxiliaires  par  une  amnistie.  Isolés  alors  au 
milieu  du  peuple  français,  ils  n'en  seront  pas  l'ef- 
froi. Us  s'ooserveront  d'autant  plus  que  votre  in- 
dulgence sur  le  passé  sera  la  caution  de  votre  in- 
flexibilité pour  l'avenir. 

Faites  mieux  encore ,  laissez  à  vos  successeurs  le 
soin  déjuger  les  coupables,  et  ne  vous  chargez  pas 
de  l'odieux  soupçon  d'avoir  absous  des  complices  ou 
puni  des  associés. 

Que  gagnerez -vous  à  placer  sans  cesse  devant 
leurs  veux  l'image  du  supplice?  Vous  les  rendrez 
plus  forts  pour  s'y  soustraire.  Leurs  partisans, 
tremblant  aussitôt  pour  eux-mêmes,  seront  forcés 
de  se  réunir  à  eux  et  de  leur  faire  un  rempart  de 
leurs  corps.  Vous  n'avez  pas  le  pouvoir  de  guérir 
de  la  peur  :  si  donc  vous  vous  annoncez  pour  vou- 
loir être  inexorables,  vous  devez  malgré  vous  punir 
les  mêmes  délits  des  mêmes  peines.  11  n'y  a  pas  de 
raison  pour  vous  arrêter  à  sept,  à  dix,  a  douze  in- 
dividus. 


Rien  ne  me  garantit  que  nous  ne  serons  pas  atta- 
qués en  détail ,  comme  on  le  faisait  au  temps  de 
Robespierre,  et  que  vous  n'arriverez  pas  enfin  jus- 
qu'à moi.  Je  ne  dois  donc  pas  vous  abandonner 
ceux  que  vous  regardez  comme  mes  chefs.  Dans  le 
doute ,  je  me  liguerai  avec  eux  pour  vous  opposer 
la  plus  vigoureuse  résistance  ;  et  puisque  vous  m'a- 
vez dévoué  à  la  mort,  je  vous  vendrai  chèrement 
ma  vie. 

A  votre  tour,  citoyens,  n'auriez-vous  pas  à  crain- 
dre de  confondre  aussi  des  innocents  avec  des  cou* 
pables?  Comme  ceux  qui  sont  l'objet  de  yos  recher- 
ches, vous  frapperiez  dans  l'obscurité;  et  qui  peut 
savoir  sur  qui  tomberont  vos  coups?  U  n'y  a  pas  un 
Français,  réfléchissant  sur  le  passé,  qui  ne  puisse 
trembler  de  devenir  une  des  victimes.  Mais  si,  en 
reconnaissant  la  nécessité  d'une  amnistie,  vous  l'ac- 
cordejs  sans  restriction  ;  si  vous  l'étendez  jusqu'à 
ceux  que  vous  vouliez  mettre  en  jugement,  vous 
rassurez  tous  les  partisans  que  vous  leur  supposez. 

Voilà,  citoyens,  la  seule  mesure  qui  puisse  rame- 
ner le  calme  dans  cette  assemblée,  la  sécurité  dans 
les  familles,  la  joie  dans  l'âme  de  tous  les  Français, 
et  rallier  sous  les  bannières  de  la  république  tous 
ceux  qui  pourraient  s'en  être  écartes  pendant  la 
mêlée. 

Loin  de  nous  cette  maxime  désespérante ,  qu'il 
n'est  entre  le  crime  et  la  vertu  d'autre  transaction 
que  l'échafaud.  Son  application  imprudente  et  pré- 
maturée a  peut-être  coûté  3  milliards  à  la  France, 
et  a  fait  couler  le  sang  de  deux  mille  patriotes.  J'en 
connais  une  plus  digne  des  mandataires  d'un  grand 
peuple  et  des  directeurs  de  la  plus  importante  des 
révolutions;  j'en  connais  une  plus  digne  de  vous: 
c'est  de  pardonner.  Que  la  générosité  tende  la  main 
au  repentir,  et  qu'à  la  place  de  l'instrument  de  sup- 
plice s'élève  le  symbole  de  la  fraternité. 

Je  n'excepte  de  l'amnistie  d'autre  délit  révolu- 
tionnaire que  celui  d'émieration  personnelle.  Il  ne 
mérite  aucun  pardon  l'entant  dénaturé  qui  délaisse 
barbarement  sa  mère  au  moment  où  elle  est  dans 
le  plus  grand  péril  ;  et  s'il  est  allé  provoquer  contre 
le  sein  qui  l'a  nourri  les  armes  de  l'étranger,  le 
supplice  le  plus  cruel  est  encore  au-dessous  de  son 
crime. 

Je  m'attends  bien  à  la  première  impression  que 
ces  idées  d'amnistie  générale  vont  produire  sur  des 
âmes  républicaines.  Les  uns  croiront  qu'il  est  de 
leur  devoir  de  ne  pas  user  d'indulgence  envers  des 
collègues,  parce  qu'il  ne  doit  y  avoir  rien  d'impur 
dans  la  représentation  nationale  ;  les  autres  la  re- 
pousseront, parce  qu'ils  prétendront  n'en  avoir  pas 
besoin. 

U  se  peut,  citoyens,  que  plusieurs  d'entre  nous» 
forts  de  leur  vertu  et  fiers  de  leur  conduite ,  se 
croient  en  droit  de  braver  le  hasard  des  événe- 
ments et,  si  je  puis  m'exprimer  ainsi,  de  jouer  leurs 
têtes  à  pair  ou  non.  Mais  ont-ils  celui  déjouer  aussi 
l'existence  de  leurs  commettants?  et  ne  serait-ce 
pas  la  compromettre  que  d'écarter,  par  un  rigo- 
risme indiscret ,  des  mesures  de  prudence  et  d'hu- 
manité? 

Pour  moi ,  qui  n'ai  jamais  été  altéré  du  sanç  de 
mes  semblables  ;  moi  qui  fus  toujours  prêt  à  don- 
ner le  mien  pour  établir  le  règne  de  la  liberté  et  de 
l'égalité  ;  moi ,  dont  le  cœur  a  toujours  repoussé 
avec  horreur  les  mesures  atroces,  je  m'accuse  hau- 
tement de  n'avoir  pas  su  mourir  pour  m'opposer  à 
ces  mêmes  mesures.  (  Applaudissements.  )  Je  ne 
voyais  qu'une  mort  ignomineuse  dans  une  résistance 
inutile ,  et  je  n'avais  pas  le  courage  de  marcher  à 
l'échafaud  accompagne  des  malédictions  du  peuple. 
On  avait  jusqu'à  deux  fois  arraché  à  mes  comeltanls 


S24 


la  déclaration  formelle  que  j'avais  perdu  leur  con- 
fiance; cette  dis^âce  non  méritëe  pourrait  justifier 
jusqu'à  un  certain  point  mon  silence  ;  mais  enfin 
quelques-uns  des  délits  que  vous  voulez  punir  ont 
été  commis  sous  mes  yeux,  et  J'existe 

Au  reste,  que  celui  qui,  ayant  nris  une  part  aussi 
active  que  moi  aux  événements  de  la  révolution,  se 
croit  exempt  de  toute  espèce  de  reproche  politique, 
se  lève  et  me  jette  la  première  pierre 

Je  ne  vous  propose  point,  citoyens,  de  rien  décré- 
ter en  cet  instant  ;  je  me  borne  à  demander  que  vos 
trois  comités  réunis  soient  chargés  d'examiner  s'il 
n'est  pas. expédient  pour  le  salut  du  peuple  de  ne 
pas  différer  davantage  à  porter  une  loi  d'oubli  et  de 
Bilence  absolu  sur  tous  lesdélits))olitiques  relatifs  à  la 
révolution,  excepté  celui  d^émigration  personnelle. 

L'orateur  descend  de  la  tribune  au  milieu  des  ap- 
plaudissements d'une  partie  de  l'assemblée. 

MiLHAUD  :  Je  demande  l'impression  et  Tajoume- 
ment  du  discours,  et  l'envoi  aux  comités. 

Lbobndbb  :  C'est  une  belle  chose  qu'un  beau  rêve  ! 
Serions-nous  donc  encore  sous  le  règne  du  despo- 
tisme, où  Ton  ne  proposait  d'amnistie  que  lorsqu'il 
«'agissait  de  sauver  de  grands  coupables?  (Vifs  ap- 
plaudissements.) On  n'a  jamais  parlé  de  grâce  pour 
quelques  citoyens  obscurs,  pour  ceux  qui  n'étaient 
pas  portés  aux  fonctions  publiques,  pour  ceux  qui 
n'avaient  pas  abusé  de  leurs  pouvoirs.  Pour  qui,  ci- 
toyens, vous  propose-t-on  une  amnistie  dans  ce 
moment?  pour  des  hommes  qui  ont  établi  autant 
d'échafauds  qu'il  y  a  de  communes  en  France;  pour 
des  hommes  qui  Pont  couverte  de  malheurs  publics 
et  de  malheurs  domestiques  ;  pour  des  hommes  qui, 
lorsqu'un  fils  allait  demander  Justice  pour  son  père, 
répondaient  en  faisant  égorger  ensemble  le  père  et 
le  fils.  (On  frémit  d'horreur,  et  on  applaudit  à  plu- 
sieurs reprises.)  Je  n'inculpe  pas  le  collègue  qui 
vient  de  taire  cette  proposition ,  je  connais  son  pa- 
triotisme et  son  humanité;  maisjqu'il  prenne  garde 
d'être  inhumain  malgré  lui  ;  l'humanité  porte  à  ren- 
dre justice  à  l'innocence ,  et  à  punir  ceux  qui  ont 
commandé  et  exécuté  le  crime.  (Nouveaux  applau- 
dissements.) 

Citoyens,  on  insinue  par  bonté  d'âme  que  la  jus- 
tice que  le  peuple  français  réclame  entraînera  une 
succession  de  jugements  qui  nous  frapperont  tour  à 
tour.  «Je  m'accuse  moi-même,  a  dit  l'orateur  ;  j'ai 
vu  longtemps  la  tyrannie  dicter  ses  ordres  absolus 
darfs  cette  enceinte,  et  je  ne  me  suis  pas  élevé  contre 
elle  :  or  tous  mes  collègues  qui  ont  partagé  ma  fai- 
blesse doivent  s'accuser  aussi.  •  Citoyens,  si  nous 
sommes  tous  coupables,  il  faut  faire  notre  procès  à 
tous.  (Vifs  applaudissements.) 

Lecoipitbe  (de  Versailles)  :  Oui,  je  le  demande 
aussi. 

Legrndrb  :  Je  déclare  que  je  ne  veux  pas  de  grâ- 
ce. Si  j'ai  trahi  la  nation,  si  j'ai  abandonné  ses  inté- 
rêts par  scélératesse,  je  veux  qu'elle  me  condamne. 
Le  corps  politique  était  malaue,  nous  avons  été  en- 
Tovéi  ici  pour  le  guérir;  nous  avons  créé  une  fa- 
culté de  médecins,  ou  un  comité  de  gouvernement, 
pour  nous  aider  dans  cette  cure  importante.  Eh  bien, 
qu'ont-ils  fait?  Quels  secours  ont  ils  portés  au  corps 
politique?  Ils  l'ont  uigné  aux  quatre  membres  et  a 
là  gorge  pour  le  tuer.  (  Les  applaudissements  écla- 
tent de  tootet  parts  et  se  prolongent  pendant  très- 
longtemps.) 

On  praend  que  le  nombre  des  coiipable^est  im- 
■lense  ;  on  le  compose  des  membres  des  anciens 
eomiiés  révolottonnitres,  des  Jacobins,  d'une  armée 
colin.  Oo  ne  grossit  ce  nombre  que  pour  alarmer 
votre  seostbflité  et  épouvanter  votre  justice.  Ce  ne 
softt  qu€  Us  ebeCi  que  vous  devez  poursuivre,  et  non 


pas  ceux  qu'ils  ont  trompés.  11  n'y  a  de  coupables 
que  ceux  qui  étaient  à  la  tête  du  gouvernement.  Je 
ne  les  isole  pas  de  Robespierre  ;  car  Collot,  Billaud 
et  Robespierre  sont  synonymes  pour  moi,  (ViCs  ap- 
plaudissements.) 

Que  les  chefs  soient  jngés  ;  que  les  subalternes 
soient  pardonnes,  je  le  veux  bien  ;  c'est  ainsi  qu'en 
usa  une  république  ancienne,  qui,  comme  nous, 
avait  une  représentation  nationale  au  sein  de  la- 
quelle s'élevèrent  des  tyrans. 

Non,  citoyens,  point  d'amnistie  pour  ces  hommes 
qui  avaient  fait  dTu  tribunal  politique  un  couperet 
politique  ;  pour  ces  hommes  qui  osaient  dire  qu'ils 
fie  craignaient  pas  les  reproches  de  ceux  qu  iLs  y 
envoyaient,  parce  qu'ils  étaient  sûrs  qu'il  n^en  re- 
viendrait pas  un  seul.  (  Nouveaux  applaudisse- 
ments.) Quand  plusieurs  de  nos  collègues  furent 
traduits  au  tribunal  révolutionnaire....  (U  se  lait  du 
bruit  au-dessus  de  Lesendre.)  Vos  injures  ne  me  font 
rien.  Je  démasquerai  les  fripons  tant  qu'il  y  en  aur^. 

Lorsque  plusieurs  de  nos  collègues  furent  traduits 
au  tribunal  révolutionnaire,  ils  demandèrent  qu'on 
entendît  à  leur  décharge  des  témoins  qu'ils  indiquè- 
rent- La  loi  ordonnait  à  l'accusateur  public  de  faire 
assigner  les  témoins  ;  au  lieu  de  cela  il  écrivit  au  co- 
mité de  salut  public  : 

«  Je  vous  donne  avis  que  les  accusés  demandent 
à  faire  entendre  tels  et  tels  individus ,  et  j'attends 
vos  ordres.» 

Si  le  comité  vous  eAt  lu  cette  lettre,  vous  eussiez 
passé  à  l'ordre  du  jour,  motivé  sur  ce  que  la  loi  obli- 

feait  l'accusateur  public  d'assigner  les  témoins  in- 
iques par  les  accusés  ;  mais  cette  lettre  est  restée 
dans  les  cartons,  d'où  on  Ta  retirée  depuis  pour  la 
remettre  à  la  commission  des  Vin^t-et-Un  ;  et  l'on  est 
venu  vous  dire  ici  que  les  accuses  étaient  en  rébel- 
lion, que  la  loi  était  méconnue,  que  les  juges  n'é- 
taient pas  en  sûreté,  qu'il  fallait  donner  au  tribunal 
le  pouvoir  de  mettre  les  prévenus  hors  des  débats, 
s'il  le  croyait  nécessaire.  On  vous  a  arraché  ce  dé- 
cret parce  qu'on  vous  a  trompés.  Je  vous  le  de- 
mande, citoyens,  ce  crime  est-il  à  vous?  Non  ;  il  est 
tout  entier  aux  monstres  qui  l'ont  commis,  k  ceux 
qui  sont  aujourd'hui  en  jugcmcnL  (On  applaudit 
vivement.)  Je  demande  que  la  Convention  passe 
majestueusement  à  l'ordre  du  jour  sur  la  proposition 
de  Boudin. 

L'ordre  du  jour  est  adopté  au  milieu  des  plus  vifs 
applaudissements. 
La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 

Pf,  B,  Dans  la  séance  du  27,  Ruelle,  représentant  da 
peuple  près  l*armée  de  TOuest ,  a  annoncé  que  le  décret 
d'amoisUe  produisait  les  plus  beureui  efitets.  Les  rebelles 
ont  œaté  le»  hostilités,  et  nous  ont  rendu  tout  récemment , 
et  tans  aucune  négociaUon ,  les  prisonniers  qu*lls  avaient 
faits  sur  nous  depuis  le  48  brumaire.  Les  avant-postes  ont 
fralernisé  et  crié  ensemble  vive  la  républiqati  Les  rebelles 
nous  ont  fourni,  sans  qu'on  leur  en  demandât,  des  foar* 
rages  dont  nous  manquions.  Tout  promet  enfin  que  la 
guerre  de  la  Vendée  sera  bientôt  terminée. 

Sur  la  demande  Tuile  d*accorder  aux  représentants  di 
peuple  près  Tannée  de  POuest  des  pouvoirs  illimités  pour 
terminer  cette  guerre,  la  Convention  a  passé  à  Tordre  du 
jour,  moUvé  sur  ce  que  les  représenUnts  étaient  déjà  in- 
vesUs  de  ces  pouvoirs. 

—  La  Convention  a  décrété  que  les  cartes  de  sûreté  dé« 
livrées  dans  Paria  seraient  lenonvelées  dans  le  délai  de 
deui  décades. 

—  Richard  a  donné  de  nouveaux  détails  sor  la  victoire 
remportée  par  Tarmée  du  Mord,  et  annoncée  dans  la  aéanet 
d'hier.  L'ennemi  a  été  poursuivi  au-delà  de  Thiel  et  d'Blma» 
par  la  droite  de  Tarmée  qui  avait  passé  le  Wabalea  bm 
de  ses  batteries;  et  qui  a  emporté  toutes  les  redoutes 4  la 
bafooneue.  Nous  avons  pris  soixante  pièces  de  canon. 


GAZETTE  NATIONALE  .„  LE  HOMTEUR  IIVËRSEL. 


N°  119. 


Nonidi  29  Nivôse,  Pan  3«.  (Dimanche  18  JiNViea  1795 ,  meuûo  ttyh.) 


POLITIQUE. 

ÉTATS-UNIS    d'aMÉRIQUE. 

NewfYork^U  46  nontmbre*  ^  La  vieloire  remportée  le 
20  août  sur  les  Indiens  a  eu  les  suites  beureuseï  qu*on  de* 
^ê\i  en  tiiiepdre*  Les  Yeincu»,  apr^  leur  défaite,  tinrent 
un  conseil  de  guerre  p  dans  leqiiel  le<  a^enis  unglaii  iVf- 
forc^rent  de  leur  j)ersuader  qu'jb  devaient  risquer  une 
nouvelle  action  ;  mais  les  Indiens  rejetèrent  cet  a? is  ,  çt  «e 
dispersèrent  pour  rentrer  chacun  dans  leurs  l^abilations. 
Deui  cents  d'entre  eux  avaient  péri,  toutes  leurs  forces 
consistaient  en  quioxe  cents  Indiens  et  quaire-îingts  Cana- 
diens. 

Les  provisions  des  lodlens  étaient  salées  i  elles  B*oiit  pu 
leu  r  être  fournies  que  par  les  Aqglais. 

Le  général  américain  Wayne,  epits  avoir  quitté  le  fort 
de  la  Défiance,  s'est  avancé  vers  les  villages  de  Miami.  Le 
major  anglais  ÇampMl  a  évacué  la  fort  litué  prés  de  Cala- 
pacte. 

Ou  a  appri»  ultérieurement,  par  des  avis  de  Pitubourg, 
que  les  six  nations  indienne^  avaient  iqanifesté  le  dé^lr  de 
la  paix.  L'armée  du  gérnéral  Waync  est  II  trçnte  milles  envi- 
ron de  Pitisbourg,  où  elle  est  attendue  depuis  que  Tiusur- 
reclion  çst  apaisée.  On  a  fait  prisonniers  un  grand  qpmbre 
dMnsurgés  qui  avaient  traversé  la  rivière.  Ces  cinq  mille 
qui  s'étaient  d*abord  rendus  k  Pittsbourg  ont  juré  de  ne 
pas  prendre  les  armes  contre  le  gouvernement. 

Le  général  Wayne  a  élevé  un  fort  à  peu  de  distanee  de 
celui  oeeupé  par  les  Anglais ,  près  le  lieu  où  les  cataractes 
di|  Uïêm'h  M  jettent  dans  le  lac. 

mm  La  population  de  New-York  est  augmentée  de  cinq 
mille  dnq  c^ts  personnes  depuis  1700» 

ANTILLES. 

Dti  fa  Guu4$l(mve,  ^  Le  général  Preseot  conserva  en- 
core le  fort  Mathilde  avec  un  petit  corps  de  troupçf  an- 
glaises; mais  on  a  lieu  de  croire  qu'il  ne  tardera  pas  à 
évacuer  ce  poste,  depuis  que  le  major  Graban  a  été  obligé 
de  capituler  avec  les  républicains. 

Voici  les  articles  de  la  capitulation ,  (els  qqMls  onl  été 
accordés  *  ce  général. 

Art.  I".  La  garnison  aura  les  bonnetuv  de  la  guerre^  en 
considération  de  la  bravoure  qu*elle  a  moptrée. 

c  Accordé.  • 

II.  Les  habitants  de  nie,  qui  coopèrent  avec  les  trou- 
pes britanniques ,  tant  les  blanes  que  les  hommes  de  cou- 
leur libres,  étant  tous  des  sujets  britanniques,  attendu 
qu'ils  ont  prêté  le  serment  de  fidélité  à  Sa  Majesté  le  roi  de 
la  Grande-Qretagne,  seront  considérés  et  traités  comme  tels. 

«  Inadmissible;  mais  il  sera  accordé  au  général  un  ba- 
teau couvert  qu*oo  regardera  comme  sacré-  » 

III.  Les  troupes,  ainsi  que  les  babiunts  qui  ne  f  oudrpnt 
pas  de?enir  su|eu  de  la  république  frauçaise,  seront  e»^ 
vovés  en  Angleterre  aussitôt  qu*on  pourra  se  procurer  des 
bétiments  de  transport  à  cet  effett 

•  Les  troupes  seront  envoyées  en  Angleterre  aussitôt  que 
les  irunsports  seront  prêts.  A  Tégard  des  habitants,  on  a 
répondu  dans  Tartiele  H.  • 

IV.  Les  officiers ,  ainsi  que  les  habitants  qui  se  tronteot 
dans  le  camp,  pourront  emporter  leurs  bagages. 

«  Il  sera  permis  aux  troupes  lyemporUtr  les  leum»  v 

V.  Les  malades  et  les  blessés  qu'on  m  pourra  pas  en- 
voyer sur  les  bâtiments  de  transport  seront  soignés  par 
des  cUirurgieui  briiauniquça, 

c  Accord^  t 

VI.  L*artillerie  et  les  munitions  de  toute  espèce  seront 
rendues  dans  leur  état  actuel. 

c  Accordé.  • 

VIL  Toute  difficulté  qui  pourrait  avoir  lieu  relativement 
^  l'observation  des  articles  ci-dessus  sera  terminée  à  Ta- 
miubie  entre  les  commandants  respectifs 

f  A«cordé«  > 

Siçné  Cohiu  GaAHAMy  Vicr99Hv«««fr 

ê9  SéMe.  mm  Têms  X 


POLOGNE, 

f^artovie^  le  IJ  décembre,  —  Les  généraui  et  les  agenls 
de  Catherine  gardent  le  silence  sur  le  sort  futur  de  la  Pe- 
Ipgoe  ;  ils  paraissent  aUendre  de  nouvelles  instructions  de 
lu  part  de  leur  cour;  ils  se  conientent  aujourd'hui  de  ren- 
dre des  ordonnances  de  police,  dans  lesquelles  ils  semblent 
vouloir  se  concilier  la  bienveillance  du  peuple.  Ainsi,  les 
officiers  des  gardes  de  la  couronne  et  des  gardes  à  cheval  ne 
peuvent  habiter  ailleurs  que  dans  lescaserues.  Il  a  été  re- 
commandé à  tous  ceux  qui  éprouveraient  les  moindres 
désagréments  de  la  part  des  soldats  russes  de  les  dénoncer 
aussitôt,  afin  d'obtenir  satisfaction.  • 

—  Le  corps  des  cadm  yienl  d'être  supprimé,  Cette  or- 
donnance et  plusiçurs  autres  d^eot  la  craiute  de  voir 
subsister  la  moindre  trace  de  liberté. 

Ce  corps,  dans  lequel  avait  été  autrefois  Koxciusko,  étnil 
d'ailleurs  composé  déjeunes  gens  amis  zélés  de  la  révolu- 
tion. Une  autre  ordonnanee  perte  qu*auouR  juif  ne  pourra 
désprmais  demeurer  à  Varsovie,  et  que  les  propriétaires  de 
malsons  donneront  les  noms  des  j\i\h  quSls  logent.  La 
cause  de  cette  perséeutloa  est  le  patriotisme. 

PANEMARK. 

Copenhague^  U  it  dàêêmbrt.  -^  On  apprend  de  fkoekp 
holm  que  l'amiral  général  suédois  a  donné  sa  démission. 
Le  gouvernement  suédois  n'en  persiste  pas  moins  à  mettre 
sa  marine  sur  un  pied  respectable  pour  le  printemps  pro- 
chain. L'exportation  des  grains  vient  d*étre  défeodue  9» 
$uéde  coiume  crime  de  haute  trahiWQf 

AI^GLETBRM. 

Lon4re$,  (#40  4fiembr$9  *^  Li  nouvelle  de  la  rentrée 

du  pariement ,  la  nécessité  de  faire  connaître  |e  discours 
du  roi,  avaient  détourné  l'attention  d'autres  nouvelles  an- 
térieures moins  imporlantes  ;  nous  y  revenons  aujour- 
d'hui, parée  qu'elles  ont  néanmoins  leur  degré  d'intérêt. 

—  La  place  de  président  du  conseil,  vacante  par  la  pro- 
motion du  lord  PilKwIlliam  ù  la  vice-royauté  d^rlande , 
n'est  pas  encore  remplie.  Ce  sera,  selon  toute  apparence, 
lord  Mansfleld  qui  l'occupera.  Ce  n'est  pas,  eu  reste,  lé 
seul  changement  dont  il  soit  question.  Le  comte  de  Gfaa- 
tham,  premier  lord  de  l'amirauté,  doit  résigner  sa  place  au 
comte  de  Buckingham ,  et  devenir  commissaire  de  la  ma- 
i4ne.  Lord  Hovire  se  retire  décidément,  et  a  pour  succes- 
seur l'amiral  Parler,  que  le  chevalier  |Cing  remplacera  en 
qualité  d'amiral  de  port. 

—  Les  fonds  publics,  qui  afaient  reoMSté  par  l'espé- 
rance d'une  paix  prochaine,  viennent  d'éprouver  une 
baisse  assez  considérable,  depuis  qu'on  sait  que  les  minis- 
trt  s  prouvent  qu'ils  veulent  continuer  la  guerre  en  pressant 
les  préparatifs. 

—  Çn  paquebot,  airrivé  le  0  de  le  Cuadek>npe  k  3»ilH" 
Kitts  ou  Saint-Kilda,  remi^  au  gouverneur  des  dépêches  du 
{général  Présent,  qui  lui  apprenaient  la  reddition  du  fort 
Mathilde,  dont  la  garnison  était  très-affaiblie  par  les  ma- 
ladies, au  point  que  U  ff^oolwiek  se  trouvait  rempli  de 
troupes  hors  d'état  de  servir.  Ce  paquebot,  nommé  le 
Suecétf  commandé  par  le  capitaine  John  Pecle,  avait  qulMé 
la  Basse-Terre  le  )  octobre;  il  avait  h  bord  qnarant^ijoq 
passagers,  la  plupart  émigrés  français. 

—  SMI  fuut  b'eo  rapporter  ft  des  lettres  de  la  BarbadÇi  qp 
y  est  dans  des  inquiet udex  qui  ne  sont  pas  sans  fond^ 
ment,  les  troupes  destinées  à  sa  défense  ayant  été  envoyé» 
à  la  Guadeloupe  ou  à  Saint-  Domingue. 

f^  On  a  éprouvé,  le  41  octobre,  à  Kingstan,  dans  la 
Jamaïque,  une  secousse  de  tremblement  de  terre  qui  a  été 
plus  scu:iiblc  dans  les  autres  parties  de  111e  que  dans  la 
ville  mémo. 

•—  Les  Anglais  sont  tuojeurs  tranquilles  ù  Saint-Marc. 
Depuis  la  dernjèrc  irruption  des  Français,  ce  ppsle  est  dé- 
I  feiidii  par  un  parapet  dpot  In  copstrueliou  9  donné  beat:* 
coup  de  peine  au  colonel  Bi  isbane.    . 

SI 


226 


— Lct  Eiipagnols  n*oot  fait  aucune  nouYclIe  attaque 
COUtre  les  Français  dans  le  voisinage  du  Cap.  j 

PAYS-BAS.      •  i 

Bruxelles^  le  32  nivôse.  —  L*arro6e  du  Nord  poursuit 
M  glorieuse  campagne  au  milieu  des  glaces  et  des  neiges. 
tJne  de  ses  colonnes  a  dû,  ces  jours-ci,  s*eniparer  de  Thiel. 
Les  alliés  Tuient  épouranlés.  L*armée  anglo-stuihoudé- 
riennc  va  chercher  un  asile  derrière  le  Leck.  La  division 
françuise  qui  a  passé  la  Meuse  s*avance  vers  Gorcum.  i 

Les  républicains  ont  déjà  enlevé,  le  17  et  le  1 8,  plusieurs  ' 
postes  aux  Hollandais.  1 

Le  prince  héréditaire  d'Orange,  ne  croyant  plus  son 
armée  en  sOreté  derrière  Gorcum,  a  pris  le  parti  de  rétro-  • 
grader. 

•—  Le  corps  qui  bloque  Bréda  a  pris  toutes  les  mesyres 
pfoprcs  &  réduire  incessamment  cette  forteresse.  On  a 
dressé  un  grand  nombre  de  batteries  nouvelles,  et  Parmée 
de  siège  se  prépare  à  en  Taire  le  bombardement. 


RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

Trésorerie  nationale,  —  Liquidation  de  la  dette 
publique  viagère. 

Les  cre^anciers  de  la  dette  viagère  sont  avertis  que 
les  inscriptions  de  la  lettre  iniatialc  L  et  toutes  les 
précédentes  des  parties  constituées  sur  une  seule 
tête,  sans  expectative  ni  survie,  pourront  être  reti- 
rées, dès  ce  moment,  au  bureau  établi  à  cet  ef- 
fet ,  rue  Vivienne,  eu  face  de  la  trésorerie.  Le  paye- 
ment sera  effectué  de  suite  à  bureau  ouvert. 

Ceux  qui  viendront  retirer  les  inscriptions  auront 
soin  d'écrire  au  dos  du  bulletin  de  remise  dont  ils 
sont  porteurs,  une  décharge  conçue  en  ces  termes  : 

•  Reçu  rinscription  viagère  de  la  somme  de 
au  nom  de 

•  A  Paris,  ce • 

On  prévient  le  ptiblic  que,  lorsque  la  production 
est  composée  de  parties  sur  une  tête  et  sur  deux  té- 
lés, on  ne  peut  liquider  celle  sur  une  tête  séparé- 
ment. Elles  seront  comprises  dans  la  liquidation  des 
parties  sur  deux  ou  plusieurs  totes,  dont  on  s'occupe 
avec  la  plus  grande  activité.  On  sera  averti  par  de 
nouveaux  avis  lorsque  le  payement  en  sera  ouvert. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Letourneur  {de  la  Manche), 
SÉANCE  DU  27  NIVOSE. 

On  lit  les  lettres  suivantes  : 

tes  administrateurs  du  dislricl  de  Cherbourg  à  la 
Convention  nationale. 

•Représentants,  vous  apprendrez  sans  doute  avec 

satisfaction  que  jusqu'à  ce  moment  les  cultivateurs 

ae  notre  district  n'ont  point  augmenté  le  prix  des 

grains,  malgré  la  liberté  qui  leur  est  accordée  par 

i'  ^^  ^^"^  *^s  ne  cessent  point  de  jouir. 

■Wous  vous  adressons  copie  de  la  circulaire  que 
liii?»*  \^"^"s  d'adresser  sur  cet  objet  aux  municipa- 
mes  de  notre  ressort,  et  nous  sommes  persuadés 
!jr5i\^"s  applaudirez  à  nos  principes  comme  à  la 
ooDouite  généreuse  de  nos  cultivateurs.  •  (On  ap- 
plaudit a  plusieurs  reprises.) 

«•  t^minislraleurs  du  district  de  Cherbourg  aux 
municipalités  du  ressort. 

Cherbouff ,  le  tt  nivoie,  Tan  S*  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

*  Citoyens,  la  municipalité  de  Cherbourg  vient  de 


nous  communiquer  un  procès-verbaK  duquel  il  ré- 
sulte que  plusieurs  cultivateurs  de  ce  district  n'ont 
point  voulu  proiiter  de  la  liberté,  qui  leur  est  accor- 
dée par  la  loi ,  de  vendre  leur  grain  au-dessus  du 
maximum ,  et  que,  sur  l'observation  à  eux  faite  par 
les  officiers  municipaux  ,  qu'il  leur  étaU  loisible  de 
les  vendre  à  un  prix  défendu ,  ces  cultivateurs  hou- 
oêtes  ont  déclaré  être  satisfaits  du  prix  précédem- 
ment établi. 

«  Nous  ne  pouvons  que  rendre  un  juste  tribut 
d'éloges  à  cette  conduite  vraiment  répunlicaine ,  et 
nous  sommes  persuadés  qu'un  tel  exemple  trouvera 
des  imitateurs. 

«  Les  habitants  des  campagnes  savent  combien  il 
est  difficile,  pour  la  classe  indigente  qu'ils  ont  a 
nourrir,  de  pourvoir  en  ce  moment  h  ses  plus  pres- 
sants besoins,  et  ils  n'abuseront  point  de  la  liberté 
du  commerce  pour  aggraver  son  sort.  De  leur  côté, 
les  habitants  des  grandes  communes,  qui  ne  vivent 
que  du  produit  des  sueurs  de  leurs  frères  des  cam- 
pagnes, ne  seront  point  assez  injustes  et  assez  peu 
éclairés  sur  leurs  propres  intérêts  pour  leur  refuser 
la  légitime  indemnité  de  leurs  avances  et  de  leurs 
pénibles  travaux;  c'est  par  ce  moyen  que  nous  par- 
viendrons a  éviter  le  fléau  de  la  disette  et  les  maux 
affreux  qu'il  traîne  à  sa  suite. 

•  Habitants  des  campaenes ,  hâtez-vous  de  satis- 
faire aux  réquisitions  et  d'approvisionner  nos  mar- 
chés. Soyez  exacts  à  obéir  aux  arrêtés  d'une  admi- 
nistration (}ui  vient  de  prendre  de  sages  mesures 
pour  éviter  a  cet  égard  des  reproches  fondés,  et  ré- 
parer les  erreurs  qui  auraient  pu  être  commises  à  la 
répartition  des  grains  :  soyez  justes  envers  le  peuple, 
dont  vous  êles  une  si  utile  et  si  intéressante  portion. 
Le  peuple  vous  bénira;  ses  magistrats  vous  garanti- 
ront ,  pour  vous  et  vos  propriétés,  liberté,  sûreté, 
protection,  et  vous  aurez  la  douce  satisfaction  de 
bien  mériter  de  la  chose  publique. 

•  Ollficiers  municipaux  aes  communes  où  des  mar- 
chés sont  établis,  continuez  de  faire  jouir  les  pro- 
priétaires des  grains  de  la  liberté  que  la  loi  leur  ac- 
corde ;  que  cette  liberté,  dont  tout  annonce  qu'ils 
n'abuseront  pas,  ne  soit  point  illusoire  ;  éclairez  vos 
concitoyens  sur  leurs  devoirs,  sur  leurs  véritables 
intérêts;  que  le  langage  austère  de  la  vérité  dissipe 
de  funestes  illusions,  et  nous  atteindrons  tous  le  but 
salutaire  que  nous  nous  proposons. 

•  Nous  vous  réitérons  l'invitation  pressante  de 
veiller  plus  que  jamais  h  ce  que  la  formalité  des  ac- 
quits-à-caution ,  dont  vous  devez  sentir  l'impor- 
tance, soit  observée  avec  exactitude ,  et  le  contre- 
venant puni  avec  sévérité  :  c'est  le  seul  moyen 
d'empêcher  des  soustractions  clandestines  et  peut- 
être  criminelles  des  grains  qui  doivent  alimenter  vos 
concitoyens  et  vos  frères,  ^fous  nous  reposons  donc 
avec  confiance  sur  votre  zèle,  votre  vigilance  et  votre 
fermeté.  • 

La  Convention  ordonne  l'insertion  de  ces  lettres 
dans  le  Bulletin. 

Les  commissaires  des  revenus  nationaux  au  prési- 
dent de  la  Convention  nationale. 

Paris,  S4  nivôse ,  Tan  8«  de  U  république 
française,  une  et  indivisible. 

«Citoyen  président,  les  adjudications  d'immeu- 
bles confisqués,  dont  les  notes  sommaires  nous  sont 
parvenues  dans  le  cours  de  la  troisième  déca<le  de 
frimaire,  se  sont  élevées  à  31  millions  828,099  liv. 
sur  restimation  de  11  millions  80,980  liv.,  et  ont 
excédé  cette  estimation  de  20  millions  747,119  liv. 
Ces  ventes  ont  été  prononcées  par  cent  quatre-vingts 
districts,  au  nombre  de  six  mille  cent  vingt-cinq  ar- 


257 


ticifs  ;  et  elles  portent  les  résultats  parvenus  dans 
le  cuurs  de  frimaire  à  vingt-deux  mille  cinq  cent 
vingt-se|)t  articles  d'adjudication ,  qui  ont  produit 
101  millions,  sur  une  estimation  de  36  millions, 

3u*clles  ont  excédée  de  65  millions;  enfin,  la  totalité 
esdites  ventes,  dont  la  commission  des  revenus  na- 
tionaux avait  connaissance  à  l'époque  du  30  fri- 
maire, présente  plus  de  deux  mille  cent  quatorze  ar- 
ticles d'adjudications  prononcées  par  cinq  cent  vingt 
et  un  districts ,  lesquels  ont  produit  1  milliard  135 
millions ,  et  donnent  un  excédant  de  634  millions 
sur  ces  estimations. 

«  Nous  avons  déjà  fait  connaître  à  la  Convention 
nationale  les  départements  qui  ont  donnë4es  résul- 
tats les  plus  satisfaisants;  nous  devons  ajouter  ceux 
de  fÂude ,  de  la  Côte-d'Or,  le  Doubs,  la  Moselle,  la 
Nièvre,  TOrne,  le  Puy-de-Dôme,  la  Haute-Garonne, 
Lot-et-Garonne ,  la  Manche,  la  Marne ,  la  Haute- 
Saône  et  Seine-et-Marne ,  dans  l'étendue  de  chacun 
desquels  les  ventes  se  sont  élevées  de  12  à  18  mil- 
lions. 

■  Nous  terminerons  par  annoncer  à  la  Convention 
nationale  que,  dans  tous  les  districts,  les  opérations 
relatives  aux  estimations  et  divisions  reçoivent  la 

Îdus  grande  activité,  et  çiue  leur  résultat  répond  de 
a  rapidité  des  ventes  qui  doivent  les  suivre. 
'Signé  Laumond,  Chardon  Vainbnillb. • 

Guexno  et  Guermeur,  représentants  du  peuple  pris 
les  armées  des  Côtes-de- Brest  et  de  Cherbourg,  et 
dans  les  départements  de  leurs  arrondissements ^ 
au  président  de  la  Convention  nationale. 

Vannes,  le  16  nivôse.  I*an  3'  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

'  Citoyen  président,  les  différentes  autorités  con- 
stituées séant  à  Vannes,  cheMieu  du  département 
du  Morbihan,  n'avaient  point  passé  au  creuset  de 
Tepuration  et  de  la  réorganisation  ordonnées  par 
différentes  lois,  et  notamment  parcelle  du  7  vendé- 
miaire :  nous  avons  regarde  cette  opération  comme 
une  des  plus  essentielles  qu'il  nous  importât  de  con- 
sommer, et  nous  y  avons  procède  par  un  arrêté  du 
12  de  ce  mois,  après  avoir  recueilli  par  différents 
moyens  le  vœu  du  public. 

•  L'administration  du  département,  installée  hier, 
est  venue  aujourd'hui  nous  présenter  le  procès-ver- 
bal de  son  installation  ;  nous  nous  faisons  un  plaisir 
de  te  transmettre  cet  acte  qui  contient  l'expression 
des  sentiments  patriotiques  de  ces  administrateurs, 
tous  vétérans  de  la  révolution ,  et  qui  déclarent  à  la 
Convention  nationale  et  au  peuple  français  que  l'ad- 
ministration du  département  du  Morbihan  ne  con- 
naît d'autre  couve rnenient que  celui  de  la  république 
une  et  indivisible,  d'autre  centre  de  gouvernement 
que  la  Convention  nationale,  d'autre  souverain  que 
le  peuple,  qui  seul  a  le  droit,  par  ses  représentants, 
de  faire  des  lois  obligatoires  pour  tous. 

•  Nous  avons  la  satisfaction  de  pouvoir  annoncer 
que  ces  sentiments  sont  en  général  ceux  des  ci- 
toyens de  Vannes,  et  que  tous  Tes  fonctionnaires  pu- 
blics que  nous  avons  nommés  les  partagent  :  c  est 
aussi  pour  les  affermir  et  pour  les  propager  que  nous 
avons  lixé  et  que  nous  allons  continuer  de  fixer  nos 
choix  sur  les  patriotes  les  plus  éprouvés,  en  rejetant 
le  système  d'exclusion,  qui  le  plus  souvent  ne  ser- 
vait qu'à  écarter  des  fonctions  publiaues  presque 
tous  ceux  qui  précisément  étaient  les  plus  dignes  et 
les  plus  capables  de  les  bien  remplir. 

•  Salut  et  fraternité. 

«  Signé  Guermeur  ,  GuBZNO.  • 


Le  commissaire  des  relations  extérieures  au  citoyen 
président  de  la  Convention  nationale, 

Paris,  le  96  nivôse,  Pan  Se  de  la  rëpnbliqiie 
une  et  indivisible. 

•  Citoyen  président ,  plusieurs  Français  établis 
dans  les  échelles  du  Levant  et  la  plupart  des  agents . 
de  la  république  se  réunirent  à  Constantinople  pour 
célébrer  la  fête  du  10  août  ;  animés  du  bien  public , 
et  voulant  donner  une  preuve  signalée  de  leur  ar- 
dent amour  pour  la  patrie,  ils  déposèrent  sur  son 
autel  une  somme  de  13,892  liv.  de  France  en  don 
patriotique. 

•  Le  citoyen  Descorches,  envoyé  extraordinaire  de 
la  république,  m'en  ayant  fait  parvenir  le  montant, 
je  m'empresse,  citoyen  président,  de  te  l'adresser 
au  nom  de  ces  braves  Français,  en  te  priant  d'en  in- 
former la  Convention  nationale. 

«Le  citoyen  Florenville,  négociant  à  Constanti- 
nople, envoie  aussi  une  traite  de  700  liv.  au  nom 
des  patriotes  français  qui  résident  à  Alep,  et  une  au- 
tre de  1 ,200  liv.  pour  son  compte  particulier,  égale- 
ment en  don  patnotiaue  ;  ces  deux  traites  sont  à  l'or- 
dre du  président  de  la  Conv.ention  nationale,  et  ces 
trois  offrandes  réunies  forment  la  somme  totale  de 
15,792  liv.,  dont  9,510  en  lettres  de  change,  et 
6,282  liv.  en  assignats.  Je  Joins  le  tout  ici,  avec  Té- 
tât nominatif  des  souscripteurs. 

•  La  Convention  verra  sans  doute  avec  satisfec- 
tion  que  les  Français  disséminés  dans  les  échelles  du 
Levant  sont  attachés  au  centre  du  gouvernement 
républicain.  Ils  félicitent  la  Convention  nationale  de 
ses  glorieux  travaux ,  et  la  république  de  ses  vic- 
toires, et  c'est  avec  plaisir  que  je  suis  auprf s  de  toi 
l'interprète  de  leurs  sentiments  pour  la  prospérité  de 
la  république. 

•  Salut  et  fraternité.  Miot.  • 

La  lecture  de  cette  lettre  excite  les  plus  vifs  ap- 
plaudissements. —  La  Convention  en  ordonne  l'in- 
sertion au  Bulletin. 

Bréard  :  Je  demande  que  cette  lettre  soit  ren- 
voyée au  comité  de  salut  puolic ,  oui  sera  chargé  de 
faire  savoir  aux  patriotes  français  au  Levant  que  leur 
offrande  a  été  acceptée  avec  reconnaissance,  en  leur 
envoyant  un  extrait  du  procès-verbal  de  ce  jour. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

Le  représentant  du  peuple  Bordas,  en  mission  dans 
les  départements  de  la  Charente^  du  Bec-d^Àm- 
bès  et  de  la  Dordogne,  à  la  Convention  nationale. 

Bordeaui ,  le  il  nivôse ,  Pan  S«  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

«  Ici ,  citoyens  collègues,  était  le  siège  de  grands 
fripons;  ici  plus  qu'ailleurs  l'opinion  publique  crie 
vengeance  contre  les  dilapidateurs  des  fortunes  pu- 
bliques et  particulières. 

•  La  stupeur  avait  jusqu'ici  étouffé  les  plaintes  : 
une  nouvelle  confiance  rond  aux  citoyens  leur  pre- 
mière énergie,  leur  première  dignité;  des  millions 
doivent  sortir  des  mains  souillées  de  crimes;  pour 
les  en  extraire,  il  a  fallu  une  mesure  vigoureuse.  Je 
soumets  à  la  Convention  nationale  celle  qui  m*a 
paru  la  plus  propre  à  remplir  son  objet  et  le  mien. 
Il  est  temps  de  marquer  rintervalle  qui  doit  exister 
entre  le  vrce  et  la  vertu» 

«  Salut  et  fraternité.  Bordas.  • 

A  cette  lettre  était  joint  un  arrêté  portant  création 
d'une  commission  chargée  de  faire  rentrer  dans  les  ' 
caisses  publiques  les  deniers  qui  en  ont  été  détour- 
nés par  les  malversations  de  quelques  fonction* 
naires. 


m 


MtËk  :  Il  rut  sans  douté  d'ube  irtiporUneé  ifi'* 
coDtesUbte  de  poursuivre  avpc  Utie  JUsle  sévérité 
les  dilapidateurs  de  la  fortune  publique  ,  et  de  faire 
rentrer  dans  les  caisses  nationales  les  deniers  qui  en 
ont  été  détournés  par  la  malveillance  ;  mais  rassem- 
blée ne  doit  pas  perdre  de  vue  les  maux  que  les 
comdiissions  ont  causés  dans  la  république,  et  com- 
bien il  serait  dangereux  de  laisser  aux  commissaires 
de  la  Convention  le  pouvoir  de  former  de  pareilles 
institutions  avant  que  leur  formation  oQ  que  les 
principes  sur  lesquels  elles  auraient  été  établies  aient 
clé  soumis  à  1  examen  de  vos  comités.  Je  demande 
donc  le  renvoi  de  cet  arrêté  aux  trois  comités,  pour 
en  faire  un  prompt  rapport. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

— >  Organe  des  comités  des  transports,  postes  et 
messageries ,  Brion  observe  que  les  circonstanoci  ! 
ayant  déterminé  les  comiti^  à  faire  droit  aux  récla-  j 
nations  multipliées  qui  leur  étaient  adressées  par 
radministratioA  des  postes  et  messageries ,  il  a  été 
chargé  de  présenter  le  décret  suivant  : 

•  La  Cofifentlod  nationale,  après  ayoir  entendu  ses  co* 
ahétf  des  transports,  postes  et  messageries,  décrète  : 

c  Art  1*'.  A  eompter  du  1*'  pluviôse  prochain,  les  tet- 
très  simples,  sans  enveloppe,  et  dont  le  poids  n'eicédera 
pas  (lU  <|ttart  d'once,  serout  laiées  ainsi  (tu*U  suit  : 

•  Dans  riotérieur  du  même  département,  yeompris  la 
cOiMittfiède  Paris,  Ssous  i 

•  Hors  du  dépariement,  et  jusqu'à  vingt  lieues  ioclnti* 
tement,  0  sous  t 

•  De  vingt  à  trente  lieues«  7  sous  ;  de  trente  k  quarante 
lieues,  8  sous }  de  quarante  à  cinquante  lieues,  10  sous; 
de  cinquante  à  soiiaule  lieues,  Il  sousi  de  soixante  à 
quaUe'flngts  lieues,  IS  sousi  de  qoalre-viofts  k  cent 
lieues,  IS  soUs;  décent  &  cent  vingt  lieues,  15  sous;  de 
cent  vingt  à  cent  cinquante  lieues,  16  sous  i  de  cent  cin- 
quante a  eem  qualre-fingts  lieues»  47  SoilS}  de  cent  quatre- 
vingts  et  au  delà,  48  sous. 

c  II.  La  lettre  avec  l*énveloppé,  ne  pesant  point  au  delà 
d'un  quart  d'onee,  ftera  taxée,  pour  tous  les  points  delà 
république,  un  sou  en  sus  du  port  de  la  lettre  simple. 

«Toute  lettre,  avec  ou  sans  enveloppe,  qui  paialtra  du 
poid^  de  plus  d'un  quart  d'once,  sera  pesée. 

•  lll.  Le  port  de  la  feuille  d'impression  des  joumaui, 
qui  était  fixé  à  8  deniers,  est  porté  à  i  sou;  oelui  de 
i  sou,  DOur  ceux  qui  ne  paraissent  pas  tous  tes  jours,  est 
porté  &  1  sou  6  deniers. 

«  IV.  Les- articles  du  titre  II  de  la  loi  deiiaet  là  juil- 
let 179S  (vieux  style)  siront  exécutés  en  ce  qui  n'y  est 
point  dérogé  par  la  présente.  • 

Ce  décret  est  adopté. 

Brion  propose  ensuite  d'autoriser  le  comité  des 
trflnfiport^,  postes  et  messafferies  à  régler  les  indem- 
nités réclauié(*s  par  les  iiiaiïres  des  postes,  soit  à  rai- 
son de  la  perte  deadhevaux,  soit  pour  d'antres  causes 
légitiinei. 

Cette  proj)ositlon  rit  adoptée,  avee  l'amendement 
nronusé  par  Couppé,  consistant  à  obliger  le  eomité 
a  faire  imprimer  les  arnUés  qu'il  prendra  à  ce  sujet. 

QiROD-PotJzoL,  au  nom  du  comité  de  législation  : 
Un  ji'uue  conducteur  des  charrois  de  Tarmée  du 
Bhin, prévenu  d'imprudences,  de  légères  prévarica- 
tions (fans  l'exercice  de  ses  lonctions,  qui  ont  eu  pour 
cause  une  trou  grande  soumission  aux  ordres  de  son 
chel.  Il  m  tradiiit  devant  la  commission  militaire  de 
Jtrasbniirg,  jugé  révolutionuairement,  et  condamne 
*I«peinodeinorl.  ..,     ,    ,        .,, 

l-<^ii  motif»  de  ce  jugement  terrible  n  ont  pas  été 

Rultéatlans  les  lofs,  mais  dans  un  arrêté  des  conspi- 
Menra  Salut  Jusl  et  Lcbaf.^  .      ,       ,    . 

,.  Jrnii  Daptlste  lluol,  conducteur  des  charrois  de 
rariiiée  du  Rhin .  avait  dans  sa  brigade  viiigt-sept 
Bonuica  et  quarautc-deux  chevaux  effectifs. 


riésly,  son  chef  de  rflvîMon,  lui  fit  passer  le  boti 
d'une  ration  de  subsistances  pour  un  nomme  et  un 
cheval  «  qui  devaient  lui  être  envoyés  dans  trois 
jours. 

Les  mouvements  rapides  et  imprévus  de  l'armëd 
empêchèrent  renvoi  annoncé.  Huot,  mnui  de  la  ra- 
tiou  de  subsistances  pour  Thomine  et  le  cheval  qui 
devaient  lui  être  envoyés  par  son  chef ,  soumit  set 
bons  ù  la  vérification  du  commandant  d'artillerie  dtt 
poste. 

Alors  un  eaporàl  de  la  brigade  dénonça  Huot ,  et 
le  poursuivit  avec  acharnement.  Sur  cette  dénoncia- 
tion, Huot  fut  à  l'instant  traduit  devant  la  commis- 
sion militaire  de  Strasbourg.  Les  Juges  de  cette 
commission  déclarèrent  qu'il  serait  jugé  révolution- 
nairement.  Le  jprésident  fit  lecture  de  Tarrêté  des 
conspirateurs  Saint-Just  et  Lebss,  conçu  en  eéé 
termes  : 

«  Les  agents  prévaricateurs  des  diverses  adminis- 
trations de  l'armée  du  Rhin,  et  les  agents  ou  parti-* 
sans  de  l'ennemi  seront  fusillés  en  présence  de  l'ar- 
mée. • 

Conformément  à  cet  arrêté,  la  ^ine  de  mort  fut 
prononcée  contre  Huot ,  et  l'exéctttioh  du  jugement 
ordonnée  dans  vingt-quatre  heures. 

L'heure  de  l'exécution  approchait  ;  le  jeune  con 
docteur  allait  être  livré  au  supplice.  Le  jugement 
arbitraire  et  atroce  de  la  commission  militaire  exci'* 
tait  rindignation  de  tous  les  assistants  :  ses  cama- 
rades, dans  un  mouvement  louable  dindignation 
contre  le  jugement  rendu  ,  pénétrés  du  plus  vif  in- 
térêt en  faveur  de  ce  jeune  conducteur  des  charrois, 
Tenlevèrent  brusquement  et  lui  sauvèrent  la  vie.  Sa 
tête  allait  tomber,  non  sous  le  glaive  des  lois,  mais 
sous  un  fer  assassin.  Ses  juges,  transformés  en  nro- 
scripteurs,  avaient  cherche  son  arrêt  de  mort  dans 
les  actes  tyranniques  des  conspirateurs  Saint-Just  et 
Lebas.  Il  est  vivant,  il  porte  ses  réclamations  devant 
les  représentants  d*un  peuple  juste  et  humain,  et 
vous  êtes  dans  Theureuse  position  d'exercer  un 
grand  acte  de  justice. 

Le  jugement  de  la  commission  militaire  de  Stras- 
bourg e$t  contraire  à  toutes  les  lois;  il  doit  être 
frappé  de  nullité.  Les  jugea  iniques  et  sanguinaires 
de  cette  commission  ont  méconnu  tous  les  princi- 
pes ;  ils  ont  oublié  leurs  devoirs  de  juges  et  de  ci- 
toyens; ils  sont  devenus  les  ministres  des  vengeances 
de  deux  conspirateurs  qui  ont  essayé  leur  tyrannnie 
loin  de  la  Convention ,  qui  se  sont  rendus  les  arbi- 
tres de  la  vie  des  hommes ,  et  qui  ont  eu  Tatrocité 
de  prononcer  la  même  peine  pour  tous  les  crimes. 
Les  erreurs,  les  négligences ,  les  prévarications  lé- 
gères ont  été  punies  comme  les  crimes  les  plus  gra- 
ves :  ces  tyrans  ne  connaissaient  d'autre  peine  que 
la  mort  ;  les  lois  n'étaient  rien  pour  eux  ;  leurs  juges 
ne  connaissaient  que  leurs  ordres,  et  les  têtes  par 
eux  proscrites  tombaient. 

Leur  arrêté  tyrannique  a  été  anéanti,  et  le  juge- 
ment qui  a  été  rendu  en  exécution  de  l'arrêté  doit 
être  annulé. 

C'rst  d'après  ces  considérations  que  votre  comité 
de  l^islation  m'a  chargé  de  vous  présenter  le  projet 
de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  de  législation,  décrète  l'an- 
nulation du  jugement  de  la  commission  militaire  de 
Strasbourg,  du  5  frimaire,  S«  année  de  la  républi- 
que, qui  condamne  Jean-Baptiste  Huot  à  la  peine  de 
mort  ;  décrète  que  Huot  sera  sur-le-chauip  mis  en 
liberté.  • 

Ce  décret  est  adopté» 


339 


J 


GiROD-PouzoL  :  Voiiô  ave*  fénvôyë  à  vôtre  co- 
mité de  légishlion  la  pétition  du  citoyen  Coujdti,  de 
la  commune  d^Âix,  aëparlemcnt  des  Bouches-du^ 
Piliônc. 

Ce  citoyen,  dont  le  patriotisme  et  les  lumières  sont 
attestés  par  les  autorités  Constituées  de  sa  commune 
a  été  entraîné  par  le  grand  mouvement  qui  s*estfait 
sentir  dans  les  départements  du  Midi.  Il  à  assisté  au« 
assemblées  de  section  qUi  se  sont  formées  ;  mais  il 
n'a  pris  aucune  délibération,  il  n'a  signé  aucun  acte 
réderaliste,et  cependant  il  a  été  condamné  à  la  peiné 
de  la  déportation  pendant  six  années. 

L'accusateur  public  près  le  tribtinal  criminel  des 
Bouches-du-tlhOne  a  déclaré  datis  sort  acte  d*accusa' 
tian  que  Goujon  était  un  homme  de  loi,  instruit,  ou 
à  même  de  s'instruire,  aueses  lumières  n'ont  cepen« 
dant  servi  çiu'au  parti  de  Terreur,  qu'il  a  méconnu 
la  Convention,  qu'il  est  frère  d'un  prêtre  déporté, 
"u'il  a  été  membre  du  comité  général  des  sections 

'Aix,  et  qu'il  a  autorisé  les  délibérations  qui  y  ont 
été  prises. 

Les  juges  du  tribunal  criminel  ont  entendu  Gou- 
jon, et  ont  reconnu  ^u'il  n'a  rien  signé  dans  le  co- 
mité général  dessections  d'Aix,  qu'il  n'a  même  rien 
autorisé  par  ses  délibérations,  et  cependant  iU  Font 
Condamné  à  la  déportation  pour  six  ans. 

On  ne  trouve  dans  les  lois  révolutionnaires  aucune 
disposition  qui  ait  pu  autoriser  une  peine  si  rigou- 
reuse. Les  juges  eux-mêmes  ont  été  forcés  de  recon- 
naître oue  Goujon  n*a  eu  que  des  erreursà  se  repro- 
cher* lis  ont  été  forcés  de  convenir  qu'il  n^a  rien 
signé,  rien  autorisé  par  ses  délibérations;  d'après 
cet  aveu,  qui  est  consigné  dans  les  motifs  de  leur 
jugement,  il  devait  être  acquitté,  et  cependant  il  a 
étecondamné  à  la  déportation. 

Si  Goujon  eût  été  administrateur,  s'rl  eût  autoriâé 
des  délibérations,  s*tl  les  eût  Signées,  et  qu'il  eût  en- 
suite fait  sa  rétractation,  Ses  juges  n'auraient  pu 
prononcer  la  peine  de  la  déportation.  Pourquoi  ar- 
rive-! il  que  ces  mêmes  juges,  qui  reconnaissent 
qu'il  n*a  rien  signé,  rien  autorisé  par  ses  délibéra- 
lionSf  soif  lit  si  prompts  à  le  condamner  ?  Pour()uoi 
arrivet-il  que  les  motifii  qui  auraient  dû  le  taire 
renvoyer  de  l'accusation  intentée  contre  lui  servent 
de  fondement  à  sa  condamnation  ?  Il  invoque  votre 
justice,  et  il  ne  l'invoquera  pas  en  vain.  Vous  êtes 
les  seuls  qui  puissiez  anéantir  les  ju^nnentsde  tri- 
bunaux qui  ont  ajouté  à  la  rigueur  (tes  lois  révolu- 
tionnaires. Vous  rendrez  un  père  de  famille  estima» 
ble  à  sa  femme  et  à  ses  enfants  *,  vous  conserverez 
dans  le  sein  de  la  république  un  citoyen  recomman- 
dable  par  son  patriotisme,  ses  talents  et  ses  vertus. 
Si  on  lui  reproche  quelques  moments  d'erreur,  du 
moina  on  ne  lui  impute  aucun  crime  ;  les  erreurs 
qui  lui  sont  reprochées  n'ont  pas  eu  de  suites  fu* 
nestes  à  son  pays. 

Votre  comité  de  législation  me  charge  de  vous 
présenter  le  projet  de  décret  suivant  t 

•  La  Convention  nationale  «  après  avoir  entendu  ton 
comité  de  législation,  décrète  l'annulation  du  jugement 
du  iribunal  révolutionnaire  des  Bouches- du«Rbône,  du 
46  frimaire,  de  l*an  S  de  la  république,  qui  condamne 
Goujon  à  la  dépOrtstion  pour  six  ans }  décrète  qae  Goujon 
sera  mis  en  liberté  sur^ie-ciiamp*  • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

ScBLLiBB,  au  nom  du  comité  de  commerce  :  Les 
acquits-à-caution  pour  le  transport  des  marchandi" 
ses  d'un  port  à  l'autre  de  la  république  ne  sont  déli« 
vrés  que  sous  la  soumission  cautionnée  de  rappor- 
ter, dans  un  délai  fixé,  le  certificat  d'arrivée  ae  ces 
marchandises  au  lieu  de  la  destination,  à  jpelne  d'en 
payer  la  valeur  et  d'uue  amendé  dé  600  tlV. 


Des  Citoyens  des  départements  méridionaux  né 
peuvent  rapporter  ces  certificats  pour  les  objets  ex- 
pédiés à  la  destination  de  la  Corse,  de  Toulon,  de 
Port-Vendres  et  de  Marseille:  de  la  Corse,  parce 
qu'il  n'existe  plus  de  communication  entre  cette  Ile 
et  la  France  ;  de  Toulon  et  de  Porl-Vendres,  par 
suite  de  Pinvasion  momentanée  de  ces  deux  porta; 
de  Marseille,  parce  que  les  capitaines  des  bâtiments 
arrivés  à  l'époque  des  insurrections  se  sont  hâtés  de 
débarquer  leur  chargement  et  de  repartir,  sans  s'oc- 
cuper des  formalités  qu'ils  auraient  dû  remplir. 

D'autres  citoyens  des  mêmes  départements  énrou« 
vent  également  des  difficultés  pour  le  rapport  ae  ces 
acquits  ;  les  uns  à  raison  d'une  détention  de  plu** 
sieurs  moiSj  qui  ne  leur  a  pas  permis  de  veiller  à  la 
rentrée  de  ces  expéditions;  les  autres,  par  suite  des 
troubles  qui  ont  agité  cette  portion  du  territoire  de 
la  république. 

Les  diflicultés  n'ont  pas  été  les  mêmes  dans  les 
ports  de  l'Océan  ;  mais,  dans  quelques-uns,  le  ser- 
vice à  l'entrée  n'a  pas  été  suivi  avec  assez  d'exactl« 
tude  pour  que  toutes  les  marchandises  aient  subi  à 
l'arrivée  une  vérification  sans  laquelle  le  certificat 
de  décharge  n'est  pas  délivré* 

Des  poursuites  contre  les  soumissionnaires  nui  so 
trouvent  dans  l'une  et  l'autre  de  ces  hypotnèses 
pourraient  paraître  vexatoires;  car  il  n'a  pu  dénen* 
dre  d'eux  de  remplir  leurs  engagements,  le  défaut 
de  présentation  des  marchandises  au  bureau  ayani 
toujours  été  l'effet  de  circonstances  imprévues  et 
inévitables.  Je  vous  propose  en  conséquence,  au 
nom  de  votre  comité  ae  commerce,  le  projet  de  dé* 
oret  suivant. 

Le  rapporteur  lit  un  projet  de  décret,  dont  les  ar- 
ticles sont  adoptés  en  ces  termes  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  son  eo« 
mité  de  commercé  et  d^approvlslôùoements  sur  IrSdifficuU 
lés  que  présente  le  rapport  des  acquits-S-esution  délivrés 
pour  les  transports  par  mer,  antérieurs  att  i*'  tbermidori 
décrète  ce  qui  suit  s 

•  Art.  I*'.  Les  soumissions  passées  dans  les  bureaux  dos 
douanes,  antérieurement  au  1*'  thermidor  dernier,  pour 
les  transports  d'un  port  à  un  autre  de  la  Méditerranée, 
sont  annulées. 

•  IL  La  commission  des  revenus  oationaux  est  autorisée 
à  ne  donner  aucune  suite  aux  soumissions ,  également  pas* 
sées  avant  le  1*'  thermidor,  pour  les  objets  expédiés  d'un 
port  à  un  autre  de  l^Océan,  à  la  ciiarge  par  les  soumis» 
sionnalres  de  justifier  dé  l'arrivée  desdllsobjeu  à  leur  des- 
tination ,  par  retirait  eerilâé  et  légalisé  des  livres  de  com« 
merce  de  ceux  qui  les  auront  reçus  » 

—  Creuzé  Paschal  fait  rendre  le  décret  suivant: 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  son  comité  des  postes  et  messageries,  décrète  : 

«  L*agence  des  messageries  de  répondra  d'aucuns  évé- 
nements occasionnés  par  (Orce  majeure ,  ni  des  dommai^éS 
auxquels  pourraient  donner  lieu  tous  défauts  d'emballage 
intérieur  ou  de  précaUtiobs  quelconques  qui  dépendent 
des  parUes  intéressées*  L'agence  fera  »euiement  mentioA 
dans  renregisiremeoti  ei  en  présence  des  partie»  intéres* 
sées,  de  la  forme  et  qualité  extérieures  de  remballage»  i 

RiCHABD,  au  nom  du  comité  de  salut  public  :  Ci- 
toyens, je  voUs  ai  parlé  hier  des  nouveaux  succès 
désarmée  du  Nord.  Nous  nVtionS  pas  instruits  au 
juste  des  détails.  Volcl  UUe  lettre  qui  prouve  que 
nous  ne  connaissions  qu'une  faible  partie  de  nos 
avantages. 

Les  revrésenlants  du  peuplé  ptèé  leè  ùrfnéet  du 
Nota  et  de  Sambre-ei-BÊêUêi^  au  ûomité  de  salui 
publie. 

Au  quartier  çénérsl,  k  ffimègue,  le  tS  tilvéie,  l'an  8* 
de  la  républiqut. 

«  Là  droite  de  l'ârméé  du  Nord,  oheri  collègua, 


330 


a  obtenu,  dans  les  journées  des  21  et  Î2  de  ce  mois, 
les  mêmes  succès  que  la  gauche  et  le  centre  dans 
celle  du  7.  Les  divisions  des  généraux  Moreau  et 
Macdonald  ont  passé  le  Wahal,  quoique  non  gelé, 
dans  de  simples  bateaux,  sous  le  feu  des  batteries  de 
Tennemi,  à  Nimèguc  et  à  Kokerduni.  Elles  se  sont 
emparées  de  la  rive  droite  du  fleuve,  ont  chassé  Fen- 
nemi  des  forts  Knodsenburg,  de  Stcrrechans,  des 
villages  de  Gend,  Bommel,  Uuilhuizcn,  Doornem- 
burg  et  Elsts. 

•  L'ennemi  a  opposé  dans  tous  ces  postes  la  résis- 
tance la  plus  vive:  tous  les  forts  ont  été  emportés 
avec  la  baïonnette,  malgré  le  feu  soutenu  d*une  ar- 
tillerie formidable. 

«  La  division  du  général  Moreau  a  poussé  Ten* 
nemi  au  delà  du  canal  de  Panderu,  et  a  brûlé  le 
pont  qu'il  y  avait  établi. 

«  La  gauche  de  ces  divisions,  sous  les  ordres  du 
général  Deventer,  passait  eu  même  temps  le  Wahal 
vers  le  fort  Saint- André,  chassait  Tennemi  de  Tiel, 
et  se  portait  jusqu'à  Buren,  au  delà  de  la  Ling. 

«  Les  troupes,  les  généraux  se  sont  également 
distingués  dans  ces  différentes  attaques.  Le  général 
Compère  a  eu  son  cheval  tué  sous  lui  ;  Goberch, 
aide  de  camp  du  général  Vandame,  a  été  blessé  de 
deux  coups  de  baïonnette,  et  fait  prisonnier  pen- 
dant une  demi-heure. 

«  L'ennemi,  qui  avait  un  camp  baraqué  considéra- 
ble lires  d'Elsts,  croyant  y  passtT  Tliiver,  s*étant  vu 
forcé  de  Tabandonner,  a  cru  nous  occasionner  une 
grande  perte  en  le  faisant  sauter  par  un  magasin  de 
poudre,  d*obuses  et  de  bombes  chargées,  auxquels 
il  a  mis  le  feu  par  une  traînée  de  poudre,  au  moment 
où  nos  troupes  s*en  approchaient  ;  mais,  par  un  ha- 
sard heureux,  il  n'en  a  coûté  la  vie  à  aucun  soldat  ; 
quatre  seulement  ont  été  blessés.  LVxplosion  a  été 
si  forte  qu'elle  a  été  sentie  à  dix  lieues. 

•  La  perte  de  l'ennemi  dans  ces  deux  journées  est 
considérable  :  nous  lui  avons  pris  soixante  pièces  de 
canon,  presque  toutes  en  bronze,  et  beaucoup  de 
munitions.  • 

«Salut  et  fraternité. 

•  •  Signé  .Ioubbit,  Gillbt,  Lacostb.  > 

^  Armand,  au  nom  du  comité  de  sûreté  générale, 
expose  oue  les  cartes  de  sûreté  ont  donné  lieu  à  de 
grands  anus;  qu'il  y  en  a  eu  un  grand  nombre  de 
perdues,  de  vendues  même,  et  que  les  étrangers  et 
les  intrigants  s'en  sont  emnarés;  qu'aucune  règle 
fixe  n'existe  pour  la  distrioution  de  ces  cartes; 

au'aucune  unilôrmité  ne  se  rencontre  dans  cette 
istribution  ;  que  dans  plusieurs  sections  de  Paris 
les  comités  révolutionnaires,  dans  d'autres  les  co- 
mités civils,  en  ont  été  chargés.  Il  propose  en  consé- 
3uence  un  projet  de  décret  pour  le  renouvellement 
e  ces  cartes. 

Mkrlin  (deThionville):  Je  demande  l'impression 
du  décret,  pour  qu'on  puisse  s'assurer  si  les  mesures 
de  police  qu'il  contient  ne  compriment  pas  trop  la 
liberté  individuelle. 

On  demande  d'autre  part  que  le  projet  soit  mis  ' 
aux  voix  article  par  article. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

Il  ne  s'élève  de  discussion  que  sur  la  demande 
faite  par  Bréard,que  les  étrangers,  en  recevant  leurs 
cartes,  déposent  leurs  passeports. 

André  Dumont  et  plusieurs  autres  membres  re- 
présentent combien  une  telle  disposition  entraîne- 
fait  d'inconvénients  et  d'entraves. 

Mbilin  (de  Thion  ville)  :  On  a  abusé  des  cartes  de  ' 
iflreté,  on  en  abusera  encore.  Que  le  comité  de  sfl- 


;  reté  générale  fasse  surveiller  par  des  gens  probes  les 
ennemis  du  bien  public  ;  qu'il  les  atteigne  partout 
et  les  frappe  avec  sévérité.  Ce  qu'il  faiit  pour  assu- 
rer la  liberté  et  la  tranquillité,  c'est  un  gouveroe- 
ment  (on  applaudit),  et  un  gouvernement  ferme: 
que  le  ndtre  le  soit  donc  ;  tiu'il  ne  craigne  pas  de 
frapper  les  agitateurs  et  les  intrigants  :  l'assemblée 
applaudira  à  ses  mesures,  et  le  peuple  avec  elle.  (Vifii 
applaudissements.)  Vous  créez  par  ces  cartes  de 
nouvelles  branches  de  commerce  aux  intrigants,  et 
vous  gênez  la  liberté  des  gens  probes.  Nos  armées 
pulvérisent  les  ennemis  de  l'extérieur  ;  (^ue  le  comité 
de  sûreté  générale  appesantisse  une  mam  de  fer  sur 
ceux  de  l'uitérieur  ;  au'il  ait  des  surveillants  probes, 
qui  n'aillent  pas  la  république  seulement  pour  eux, 
mais  pour  elle-même.  (Applaudissements.)  Ne  faites 
pas  croire  que  Paris  soit  un  rassemblement  de  co- 
quins; la  masse  des  patriotes  et  des  gens  honnêtes 
surpasse  de  beaucoup  celle  des  fripons,  pour  les- 
quels on  ne  devrait  se  servir  que  du  bâton.  (Vifs  ap- 
plaudissements.) Mais  laissons  une  grande  latitude 
au  commerce,  et  que  les  étrangers  soient  obligés 
seulement'de  faire  apposer  le  visa  des  sections  sur 
leurs  passeports.  (On  applaudit.) 

Cette  proposition  prévaut,  et  le  projet  de  décret» 
amendé  dans  quelques-uns  des  détails,  est  adopté 
ainsi  qu'il  suit  : 

«La  Convention  nationale,  après  avoir  entcodu  le  rap-  . 
port  de  son  comité  de  st^reté  générale ,  décrète  : 

«  Art.  I*'.  Les  cartes  de  sûreté,  de  quelque  espèce 
qtrellcs  soient,  actuellement  distribuées  dans  Paris,  se* 
ront  retirées  et  renouvelées  dans  deux  décades i  à  compter 
de  la  publication  du  présent  décret. 

•  II.  Les  comilés  civils  des  sections  seront  seuls  chargés» 
k  l'avenir,  du  renouveiiemeat  et  de  la  dislribulion  de  cet 
cartes. 

«  IIL  II  sera  ouvert ,  k  cet  effet,  dans  chaque  comité  ci- 
vil ,  deux  registres  ;  le  premier  pour  rinsrription  des  ci- 
toyens auxquels  il  sera  donné  une  carte  nouvelle  ;  le  se- 
cond pour  inscrire  les  cartes  données  en  remplacement  de 
celles  perdues,  avec  la  mention  du  nombre  de  fois  que  le 
remplacement  uura  lieu. 

c  IV.  Il  n*y  aura,  k  Tavenir,  que  deux  espèces  de  cartes 
de  sûreté.  Tune  pour  les  citoyens  domiciliés  à  Paris,  ayant 
au  moins  quatorze  ans,  et  Taulre  pour  les  externes  qui 
sont  obligés  ou  autorisés  d'y  séjourner. 

•  L'une  et  l'autre  contiendront,  sur  le  reven,  le  signa* 
lement  de  ceux  à  qui  elles  seront  données. 

«  V.  Le  renouvellement  des  cartes  de  sûreté  se  fera  dans 
chaque  section,  par  compagnie,  en  présence  du  capitaine, 
du  lieutenant,  do  &ergenl-roajor  et  d'un  autre  sergent,  les- 
quels, après  comparaison  faite  de  Tindividu  demandant 
une  carte  nouvelle  avec  le  aignatement  porté  sur  Tan* 
cienne,  certifieront  son  identité,  et  loi  feront  remettre  oa 
refuser  une  carte  nouvelle. 

•  VI.  Le  sergent-major  de  chaque  compagnie  tiendra  un 
état  ou  contrôle  des  inscriptions  de  citoyens  qui  la  com* 
posent,  conforme  au  registre  du  comité  civil, /et  il  n'ad« 
mettra  à  faire  le  service  de  garde  nationale  que  les  citoyens 
portés  sur  cet  étal  ou  contrôle. 

•  VII.  Tout  citoyen  qui ,  pour  cause  d*absence  ou  dt 
maladie,  ne  pourra  pas,  dans  le  délai  fixé  par  ceUe  loi ,  se 
présenter  pour  rendre  son  ancienne  carte  et  en  obtenir  une 
nouvelle,  sera  admis,  à  son  retour  ou  après  son  rétablis- 
sement, &  faire  constater  son  idenlilé,  comme  il  est  dit  à 
Tarticle  V  ;  et  il  lui  sera  donné  ensuite  une  carte  nou relie» 

•  VIII.  Tout  citoyen  qui  sera  arrêté  sans  êUne  porteur 
d'une  carte  de  sûreté  sera  conduit  sur-le-champ  au  comité 
civil  de  la  section  sur  laquelle  il  déclarera  faire  sa  rési« 
dence  ;  et,  après  vérification  sur  le  registre  des  inscriptions. 
Il  sera  détenu  comme  suspect,  s'il  n*est  pas  inscrit,  et  son 
nom  envoyé,  dans  le  jour,  avec  son  signalement  «  au  co* 
nitié  révolutionnaire  de  l'arrondissement,  qui  le  transmet- 
tra à  la  commission  administrative  de  police,  et  eelle-ct  an 
comité  de  sûreté  générale,  section  de  la  police. 

«  IX.  Si  le  citoyen  arrêté  sans  carte  est  inscrit  sur  le  re* 


331 


gUire  du  comité  civil ,  il  sera  retenu  jusqu'à  ce  qu*il  rc- 
|)rés(*nte  sa  carte,  ou  jusqu'à  ce  qu*il  soit  réclamé  par 
quatre  citoyens  de  sa  compagnie  ;  dans  le  cas  où  il  Taurait 
perdue,  et  sur  leur  témoignage,  il  lui  en  sera  rendu  une 
nouvelle ,  et  il  sera  inscrit  sur  le  secood  registre. 

«X.  Tout  citoyen  qui,  au  renouvelleroent  des  cartes  « 
ou  après,  sera  trouvé  porteur  d'une  carte  qui  ne  sera  pas 
à  lui,  sera  sur-ie-champ  arrêté  et  détenu  comme  suspect, 
ainsi  que  celui  qui  serait  convaincu  avoir  vendu  ou  prêté 
sa  carte. 

c  XI.  Les  externes  arrivant  à  Paris  seront  tenus  de  se 
présenter  dans  les  vingt-quatre  heures  au  comité  civil  de  la 
section  sur  laquelle  ils  seront  descendus,  lequel  sera  tenu 
de  vérifier  le  signalement  porté  sur  le  pa^ssrport,  avec 
rindividu  présent,  de  le  viser  conformément  à  la  loi,  si  le  j 
signalement  se  trouve  juste ,  et  en  outre  de  recevoir  la  dé-  ! 
claralion  de  Texlemc  du  lieu  où  il  e&t  descendu ,  du  nu- 
méro de  la  naaison,  et  de  l'arrêter  dans  le  cas  où  le  signa- 
lement se  trouverait  tuux. 

«  XII.  Les  citoyens  non  domiciliés  à  Paris,  qui  seront 
arrêtés  sans  passeport  ou  sans  carte  de  sûreté,  seront  dé- 
tenus jusqu'après  les  vérifications  prescrites  parles  articles 
VIII  et  IX,  et  soumis  à  h  mt^mc  peine. 

«  XIII.  Le  modèle  des  cartes  de  sûreté  sera  annexé  au 
présent  décret,  et  les  lois  préexistantes  à  cet  égard  seront 
exécutées  en  tout  ce  qui  n'est  pas  contraire  audit  décret,  t 

PouLTiER,  au  no.n  du  comité  dos  inspecteurs  (fu 
Palais-National  :  Depuis  longtemps  vous  vous  plai- 
gnez de  la  mauvaise  coupe  et  des  dispositions  incon- 
venantes de  TOtre  salle  ;  vous  avez  cnargë  votre  co- 
mité (les  inspecteurs  d'y  faire  les  changements  né- 
cessaires. Ils  votis  présentent,  par  mon  organe,  ces 
changements  salutaire,  avec  un  plan  figuré  du  ci- 
toyen Gisors,  qui  les  rendra  sensibles  à  tout  le 
monde,  et  en  fera  mieux  connaître  l'utilité  que  tout 
ce  que  je  pourrais  vous  dire.  Cependant  je  crois  de- 
voir entrer  dans  de  courtes  explications. 

1^  Nous  avons  resserre  la  partie  de  la  salle  desti- 
née aux  représentants,  de  manière  qu'ils  se  trouvent 
réunis  dans  une  seule  masse,  sans  aucune  désigna- 
tion de  gauche»  de  droite,  de  crête  et  de  montagne. 

2^  La  barre,  où  le  peuple  vient  communiquer  fra- 
ternellement avec  ses  délégués,  n'est  plus  enterrée 
au  bas  des  banquettes,  et  sa  voix,  étouffée  par  une 
localité  souterraine,  planera  désormais  sur  1  assem- 
blée et  lui  commandera  l'attention  qui  lui  est  due. 
Pour  cela,  nous  avons  placé  la  barre  dans  la  partie 
supérieure  de  la  salle,  et  nous  avons  ménagé  deux 
vomitoirçs  par  lesquels  les  pétitionnaires  se  rendent 
aux  lieux  destinés  aux  honneurs  de  la  séance,  sans 
communication  avec  la  partie  délibérante. 

30  Ce  que  nous  retranchons  des  extrémités  de  la 
salle  agrandira  les  tribunes  du  peuple,  et  Itii  don- 
nera quatre  cents  places  de  plus. 

40  Nous  fermons  les  tribunes  des  journalistes  qui 
absorbent,  par  leurs  cavités,  la  voix  des  orateurs,  et 
qui  empêchent  la  répercussion  des  rayons  vocaux. 
Nous  donnons  aux  journalistes  les  tribunes  décou- 
vertes, dans  lesquelles  ils  pourront  entrer  seuls,  et 
où  ils  seront  sons  lu  surveillance  générale. 

5"  La  place  la  plus  distante  de  l'orateur  sera  de 
trente-six  pieds,  au  lieu  de  soixante-douze.  Tous  les 
représentants  seront  assis,  et  seront  obligés  d'être 
assis.  Nul  ne  pourra  entrer  dans  la  salle  que  les  re- 
présentants. La  place  des  commis  est  à  leur  bureau, 
et  ils  ne  consumeront  plus  un  temps  payé  pour  le 
travail  à  venir  interrompre  vos  séances,  a  opstruer 
les  défilés,  et  augmenter  le  trouble  que  vous  voulez 
bannir. 

Les  pétitionnaires  auront  une  place  de  plus,  située 
à  chaque  extrémité  de  la  salle,  et  pratiqtiée  sous  les 
nouvelles  tribunes  populaires  ;  ils  auront  six  sorties 
différentes,  ce  qui  établira  une  circulation  aisée. 

Les  séances  de  la  Convention  ne  seront  point  in- 


terrompues par  ces  travaux  ;  ils  seront  faits  de  nuit 
et  préparés  d'avance. 

Les  frais  seront  peu  considérables  ;  nous  nous 
servirons  des  mêmes  banquettes  ;  nous  changerons 
seulement  leurs  dispositions. 

Si  la  Convention^  agrée  ces  changements,  ils  au- 
ront lieu  à  l'instant  même  ;  si  elle  croit  au  contraire 
qu'ils  doivent  être  soumis  à  son  examen,  le  plan 
(lue  nous  lui  présentons  sera  exposé  pendant  trois 
jours,  et  le  comité  ensuite  viendra  prendre  ses  or- 
dres pour  l'exécution. 

Fautridel  présente  quelques  observations  ;  il  dési- 
rerait, par  exemple,  qu'au  lieu  de  ces  banquettes 
qui  assimilent  les  représentants  du  peuple  à  deséco 
hors  de  sixième,  i)s  eussent  des  chaises  ou  des  fau- 
teuils, et,  devant  eux,  une  espèce  de  secrétaire  ou 
pupitre,  qui  les  facilitât  à  prendre  des  notes  dans  les 
discussions  importantes. 

DuHEM  :  Rien  ne  peut  influer  autant  sur  les  déli- 
bérations d'une  assemblée  que  le  local  où  elle  est 
réunie.  Il  y  a  environ  un  an  que  les  comités  d'in- 
struction, de  salut  public  et  des  inspecteurs  avaient 
été  chargés  du  même  objet  ;  cinq  plans  ont  été  pré- 
sentés ;  ils  présentaient  des  dispositions  qui  m  ont 
paru  bonnes.  Robespierre  avait  attiré  cette  affaire  à 
lui,  et  l'on  n'en  a  plus  entendu  parler  depuis.  Jede- 
mande  que  le  comité  des  inspecteurs  se  fasse  repré- 
senter ces  plans. 

PouLTiEB  :  Effectivement  un  plan  avait  été  adopté 
par  Robespierre  ;  mais  ce  plan  réduisait  les  places 
des  représentants  à  trois  cents. 

Dlhem  :  On  ne  me  combattra  pas  avec  des  épi- 
granimcs.  Je  dis  que  ces  plans  donnaient  au  lieu  de 
nos  scances  toute  l'étendue  convenable. 

PouLTiER  :  Je  n'ai  pas  voulu  inculper  ;  mais  j'af- 
firme que  le  plan  adopté  par  le  comité,  ou  au  moins 
par  Robespierre,  réduisait  les  places  des  députés  à 
trois  cents. 

Après  un  court  débat,  l'impression  et  l'ajourne- 
ment du  projet  sont  décrétés,  sur  la  demande  du 
rapporteur. 

PouLTiER  :  Il  y  a  quelques  jours  que  j'ai  réclamé,  . 
au  nom  de  la  commune  de  Dunkerque,  contre  le  dé- 
cret qui  supprime  les  franchises  de  quelques  ports. 
Plusieurs  bâtiments  qui  apportaient  des  marchandi- 
ses dans  cette  commune  sont  retournés  à  Osteudc, 
où  la  franchise  est  conservée.  Je  demande  qu'en  at-^ 
tendant  le  rapport  du  comité  de  salut  public,  le  dé- 
cret dont  je  parle  soit  suspendu  ;  cela  importe  d'au- 
tant plus,  que  le  maintien  de  cette  franchise  fait  un 
article  du  traité  de  commerce  avec  les  Etats-Unis 
d'Amérique. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  On  a  donné  au  décret  dont 
on  parle  une  mauvaise  dénomination  :  on  n'a  pas 
voulu  supprimer  les  franchises  de  telle  ou  telle  com- 
mune, mais  leur  en  accorder  à  toutes.  Les  puissan- 
ces neutres  ne  peuvent  que  gagner  à  ce  décret,  puis- 
qu'elles peuvent  porter  leurs  denrées  dans  tous  nos 
ports,  sans  crainte  d'y  trouver  aucune  entrave. 

La  Convention  passe  à  l'ordre  du  jour,  motivé  sur 
le  renvoi  déjà  fait  de  la  proposition  de  Poultier  au 
comité  de  salut  public. 

Ruelle:  J'arrive  de  farmée  de  l'Ouest,  et  je  ne 
puis  entendre  le  récit  des  victoires  remportées  par 
l'armée  du  Nord  sans  songer  à  celles  qui  auraient  été 
infailliblement  remportées  par  l'armée  de  l'Ouest,  si 
la  Convention  n*eût  enchaîné  son  courage.  Ellea  été 
entièrement  réorganisée,  la  discipline  y  est  établie, 
et  elle  présente  Fétat  le  plus  satisfaisant.  Le  décret 


332 


d*amnistie  a  été  accaeilli  arec  transport  ;  les  rebel- 
les, sans  qu'il  ait  été  conclu  aucuna  në^ociation, 
nous  ont  remis  tout  récemmept  les  prisonniers  qu'ils 
avaient  faits  sur  nous  depuis  le  |i  brumaire.  (Ap- 
p1au(lis!i<*nif  nts.)  Les  avant-postes  des  deux  armées 
uni  fraternise  et  ont  crié  ensemble  vive  la  républi- 
que! (Nouveaux  applaudissements.)  Nous  mau- 
Î [liions  de  fourrages  dans  un  de  nos  cantonnements, 
es  rebelles  nous  en  ont  fourni  sans  qu'on  leur  en  ait 
demandé.  (On  applaudit  vivement.)  Nous  avons  les 
plus  flatteuses  espérances  de  terminer  sous  jj^u  cette 
guerre. 

Noussommes  venus  ici  pour  concerter  avec  les  co- 
mités de  gouvernement  des  mesures  d'eiéeution,  et 
nous  avons  dA  lever  toutes  les  inquiétudes  que  no- 
ire présence  aurait  pu  occasionner. 

Cladzbl  :  Les  représentantsauraient  pu  employer 
plus  utilement  le  temps  ou'ils  sont  venus  passer  ici, 
s'ils  avaient  été  revêtus  de  pouvoirs  suffisants.  Il  ne 
sagit  pu  ici  d^  se  battre,  mais  de  terminer  cette 
guerre  en  engageant  lescheb  à  rentrer  dans  le  de^ 
voir.  Cette  mission  exige  des  pouvoirs  que  n*ont  pas 
lej  représentants  du  peuple  près  les  armées.  Je  de- 
mande que  ceux  qui  sont  envoyés  près  oelle  de 
rOuesi  aient  dei  pouvoirs  illimités  pour  terminer 
cette  guerre. 

A.  DUMORT  ;  Les  représentants  ont  les  pouvoirs 
q[u*pn  demande.  Je  pense  qu'il  faut  insérer  au  Bulle- 
tin les  détails  que  vous  venez  d'entendre,  afin  que 
les  fripons  sachent  que  le  poyau  sur  lequel  ils  fon- 
daient leur  espoir  pour  seconder  leurs  criminels 
desseins  se  dissipe,  et  que  la  portion  du  peuple  qui 
avait  été  égarée  reconnaît  sou  erreur. 

Bourdon  (de  TOise)  :  Nous  ne  sommes  plus  au 
temps  malheureux  où  des  représentants  du  peuple, 
pour  avoir  arraché  à  la  mort  d'infortunés  paysans, 
furent  pendant  six  mois  exposés  sur  Tifebafaud.  (Ap- 
plaudissements.) La  garantie  de  nos  frères  égares  se 
trouve  dans  les  principes  de  Justice  et  d'humanité 
dont  la  Convention  ne  se  départira  jamais. 

Ne  laissons  pas  croire  à  nos  frères  égarés  que  les 
représentants  avec  lesquels  ils  ont  eu  des  pourpar- 
lers ressemblent  à  ceux  qui  ne  leur  avaient  promis 
une  amnistie  que  pour  les  égorger  plus  aisément  ; 
ne  leur  laissons  pas  croire  que  ces  représentants 
n'ont  pas  les  pouvoirs  suffisants  pour  assurer  leur 
repos  et  leur  bonheur.  Qu'ils  viennent  avec  nous  ces 
hommes  trompés  !  Qu'ils  viennent  mêler  leurs  voix 
aux  nôtres  pour  célébrer  la  prospérité  de  la  républi- 
que 1  Si  on  ne  les  eût  pas  poussés  au  désespoir  en 
leur  manquant  defoi,  nous  aurions  encore  cinquante 
mille  citoyens  de  plus,  nous  aurions  encore  de  bons 
soldats,  qui,  avec  ceux  qui  restent,  auraient  f^iit 
sentir  à  l'ennemi  qu'ils  étaient  aussi  Français.  (On 
applaudit.)  Je  demande  l'ordre  du  jour  sur  la  mo- 
tion de  Clauzel,  en  le  motivant  sur  ce  que  les  repré- 
sentants du  peuple  ont  les  pouvoirs  qu'il  demande. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

U  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

•iANCR  DU  36  NIV08I. 

Lequinio:  Avant  de  partir  pour  la  mission  dont 
TOUS  m'avez  chargé,  je  viens  oflrir  à  la  Convention 
an  acte ù  faire,  lecpiel  sera  digne  de lajgénérosité  na- 
tionale autant  qu'il  peut  être  utile  à  la  république, 
tt  à  cinq  ou  six  cents  hommes  que  je  vous  prie  de 
rendre  h  la  liberté  ;  je  m'explique. 

A  mon  arrivée  dans  la  ville  de  La  Rochelle,  il  y  a 

Suinzif  mois,  je  trouvai  les  prisons  encombrées  par 
uit  cents  brigands  environ  ;  ils  avaient  tous  été 
pris  les  armes  à  la  main  dans  U  Vendée,  et  tous  I 


'  étaient  condamnables  à  mort,  aux  termes  de  In  loi  ; 

j  je  formai  une  commission  militaire  pour  les  juger; 

I  mais,  réfléchissant  que  les  pouvoirs  illimités  dont 

I  j'étais  revêtu  m'ai  aient  été  conférés  pour  faire  le 
bien  même  de  la  manière  la  plus  utile  a  la  républi- 
que, je  pensai  que  je  pouvais  sauver  la  vieil  cinq 
eenU  hommes,  procurer  pour  les  travaux  de  Lr Ro- 
chelle un  grand  nombre  drouvriers  dont  nous  avions 
le  plus  pressant  besoin,  et  ménager  à  la  Convention 
la  facilité  de  renvoyer  au  milieu  des  peuples  igno- 
rants et  fanatiques  de  la  Vendée  un  grand  nombre 
d'émissaires,  lesquels,  après  avoir  vécu  un  certain 
espace  ds  temps  au  milieu  des  républicains,  pour* 
raient  servir  très-utilement  eux-mêmes  à  la  conver- 
sion politique  de  leurs  compatriotes*  dans  un  temps 
où  les  circonstanees  permettraient  à  la  Convention 
de  se  livrer  à  l'indulgence  et  à  la  générosité,  qui 
concourent  puissammentavec  la  justice  à  caractéri- 
ser le  gouvernement  républicain. 

J'ordonnai  donc  à  la  con^mission  militaire  de  Ju- 
ger conformément  à  la  loi  tous  les  ci-devant  prétraa, 
ci-devant  bourgeois,  ci-devaot  nobles,  ci>lrdfvant 
maltôtiers  ou  contrebandiers,  et  les  déserteurs;  ep 
lin  mot,  tous  ceux  qui  ne  pouvaient  avoir  leur  igno- 
lance  et  le  fanatisme  aveugle  ppur  excuse,  et  Je 
prescrivis  de  ne  condamner  qu'aux  trsvau^  ds  i9 
chaîne  les  laboureurs  et  ouvriers  Quç  leur  igno- 
rance profonde  avait  livrés  à  la  s^uction  des  autres. 
Cinq  a  six  cents  de  ces  malheureux  sont*  depuis 
cette  époque,  occupés  aux  trsvaux  publici  d^  L9 
Rochelle  ;  vous  avez  déjà  rendu  la  liberté  il  des  pri- 
sonniers de  même  nature  incarcérai  au  Mans  ;  ççux- 
ci  n'étaient  pas  encore  çondamnifs*  k  la  vérité  ; 
mais  ils  étaient  également  coupabl^Si  «tcpuxdont 
je  parle  ne  peuvent  rester  d'ailleurs  sous  le  poids 
d'une  condamnation  illimitée  ;  Je  demande  donc 
leur  mise  en  liberté,  mais  je  désire  <|u'auparnvant  on 
les  retienne  encore  un  mots  au  moins,  pour  leur 
donner  de  l'instruction  en  faisant  absolument  cesser 
leurs  travaux  physiques. 
Voici  le  projet  de  décret  ; 
ff  Art,  !•%  Les  prisoonien  ftlts  |  la  Vençlèe,  qui  ont  été 
eondamnéft  ft  ta  çhatne  par  la  comniiwfon  milUçire  de  La 
Rochelle,  seront  mh  en  lltierté  dans  nn  molt. 

•  II.  Ils  cesseront  leurs  travaux  physiques  ft  Tinstant* 

•  m.  L'ogenl  national  du  district  de  La  Rodielle  est 
eliargé,  toussa  respoiisabllité expresse,  de  leur  Mre  don- 
ner «ne  iiistructkNi  qui  leyr  fiisse  aoncevoir  les  avaniag es 
du  gouvernement  républicain,  et  les  principes  de  litierié,  de 
{uslice  et  de  géoérosité  qui  le  earectérlfeot.  » 

La  Convention  nationale  renvoie  cette  proposition 
au  comité  de  législation,  qui  prendra  des  rensiMgne^ 
ments  des  représentants  sur  les  lieux,  et  lui  fera  un 
rapport,  {La  suite  demain.) 

N,  i?.  Roiss^  d'Anglas,  au  nom  du  comité  de  sa- 
lut publie,  a  fait  un  rapport  pour  rassurer  le  peuple 
sur  les  subsistances. 

La  Convention  en  a  ordonné  l'impression. 

LIVRES  DIVERS, 

OBuvrgt  d€  Grêttêt^  oouTelle  édition ,  caraet&res  Didol{ 
s  vol.  in-8* ,  ornés  de  sept  fiaures,  IS  liv.  «^  Les  mémef  » 
a  vol.  ia-8^  papier  vélin,  %i  liv,  —  a  vol.  in-4*,  papier  ar> 
dinaire,  30  jiv.  —  S  vol.  ip-4®,  papier  vélin,  48  liv, 

A  Paris,  chei  VolUnd,  quai  des  Au|U$lins,  n*  aS, 

Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  ea|  ouvert  pour  les  sli  pre- 
miers mois;  il  sera  fait  à  tous  œui  qui  aeroni  porteurs 
d'inscrlpUons  au  grand  Uvre.  Celui  pour  les  rentes  viagè*' 
res  est  de  boit  mol»  yiogt  et  uo  Jours  de  Tamiée  n^  {^ImE 
«t/le). 


GAZETTE  NATIONALE  .n  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


No  120. 


Décadi  30  Nivôse,  l'an  3«.  {Lundi  19  Janvier  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Hambourg,  le  6  Janvier,  — La  cour  de  Russie  parait 
revenir  à  un  système  polilique  plus  réservé  à  Tégard  de  la 
république  Tronçaise.  Elle  vient  d*applaudir  à  la  résolution 
prise  par  les  cabinets  de  Vienne  el  de  Berlin  di;  travailler  à 
une  pacification  avec  la  France ,  et  de  prendre  en  même 
temps  des  mesures  de  sûreté,  dans  le  cas  où  la  république 
française  refuserait  d*accordcr  la  paix  (4)* 

Les  deux  barons  de  Humbrecht  et  de  Friedemberg,  tous 
deux  Tabricanls  de  faux  assignats  français,  viennent  d'être 
condamnés  à  Pétersbourg  comme  faussaires. 

Comme  les  nobles,  dans  lu  jurisprudence  russe,  nepcu- 
fent  être  condamnés  à  la  peine  du  knout,  les  deux  cou- 
pables, en  vertu  de  ce  privilège,  ont  élé  seulement  exposés 
au  pilori,  marqués  aux  deux  bras,  et  envoyés  en  Sibérie. 

Deux  marchands  étrangei^,  intéressés  avec  eux  dans 
cette  fabrication,  ont  subi  la  peine  du  knout,  ont  eu  les 
narines  fendues,  et  ont  été  conduits  ignominieusement 
jusqu'aux  frontières. 

L'émigré  Lautrec,  connu  par  son  refus  constant  de  ser- 
vir contre  sa  patrie,  vient  de  se  donner  la  mort  dans  une 
prison  de  Berlin,  de  douleur  d'avoir  passé  pour  Taussaire. 

Des  marchands  de  Berlin  l'avaient  fait  arrêter;  parce 
qu'il  leur  avait  donné  de  faux  assignats  qu'il  avait  reçus 
d'un  agent  des  princes. 

On  a  trouvé  sur  sa  table,  après  sa  mort ,  une  lettre  dans 
laquelle  il  remercie  l'impératrice  de  la  protection  qu'elle 
lufa  accordée,  et  lui  recommande  ses  enfants* 

De  la  rive  droite  du  Mein  ,Uh  janvier,  —  Les  Prussiens, 
se  sont  chargés  de  la  défense  des  Iles  du  Rhin  près  de 
Mayence.  Il  s'est  fait  à  ce  sujet  une  convention  particulière 
entre  le  général  autrichien  de  New,  gouverneur  de  Mayence» 
et  le  général  prussien  RucheL 

Quoique  le  Rhin  soit  pris  en  plusieurs  endroits,  les  Fran- 
çais ne  paraissent  pas  disposés  à  proGter  de  la  gelée  pour 
-  passer  sur  l'autre  rive;  ils  rompent  même  les  glaces;  le 
Mein  est  entièrement  pris  du  côté  de  Koslliein  ;  le  foin  et 
l'avoine  manquent  totalement  dans  les  armées  autri- 
chiennes. 

Un  courrier  est  allé  à  Ems  porter  Tordre  au  général  qui 
y  commande  de  se  mettre  sur-le-champ  en  qarche  pour 
Mayence  avec  le  reste  de  sa  brigade ,  d*un  bataillon  d'Oli- 
vier Walfis  el  d'un  des  Croates. 

Le  général  Mêlas  a  reçu  un  ordre  semblable;  il  sera 
remplacé  par  l'aile  gauche  de  la  grande  armée. 

Le  quartier  général  prussien  a  été  transféré  de  Hoc- 
kheim  à  Dockenheim. 

PRUSSE. 

Thorn^  le  26  décembre,  —  L'état  actuel  de  la  culture 
est  vraiment  déplorable  dans  une  grande  partie  de  la  Po- 

(1)  Sans  doute  quand  U  sincëritc  de  ces  dispositions  ap- 
parentes aura  été  reconnue,  le  peuple  français  ne  repous- 
sera pas  les  propositions  qui  pourront  tendre  à  faire  cesser 
Teffusion  du  sang,  ou  à  lui  donner  plus  de  force  contre  ceui 
de  ses  ennemis  qui  s'obstineraient  à  soutenir  partiellement 
h  guerre. 

Que  les  puissances  qui  ont  de  bonne  foi  jeté  en  avant  des 
vues  pacifiques  se  convainquent  que  les  Français  désirent 
autant  la  paix,  pour  Tintcrél  de  l'humanité  et  de  leur  tran- 
•  quillilv  intérieure,  qu'ils  sont  prcK  à  continuer  avec  cou- 
rage, pour  le  maintien  de  leur  indépendance,  une  guerre 
que  ces  puissances  voudraient  ridiculement  s'opiniAtrer  à 
soutenir. 

Le  gouvernement  qui  l*a  dirigée,  celte  guerre,  avec  tant 
d^éncrgie  et  de  succès,  ne  leur  inspire-t'il  donc  pas  assez 
de  confiance  pour  traiter  de  la  paix?  Craignent-elles  que  ce 
gouvernement  soit  plus  timide  à  accepter  1rs  moyens  pro- 
pres a  rétablir  le  commerce ,  l'agriculture  et  la  prospérité 
de  sa  nation,  qu'il  ne  Ta  été  pour  soutenir  les  efforts  combi- 
nés de  leurs  armes?  Quelles  proposent  avec  franchise  des 
conditions  compatibles  avec  la  dignité  et  la  sûreté  d'un  peu- 
ple qu'elles  ont  lésé  ;  U  nation  entière  ratifiera  une  paix  que 
rintérct  mutuel  des  parties  belligérantu  réclame.  A.  M. 

S*5^n>.—  TomeX. 


lognè;  plus' de  deux  cent  mille  paysans  avaient  quitté 
leurs  champs  pour  grosssir  les  armées  pendant  la  révolu- 
tion ;  une  grande  partie  d'entre  eux  n'a  conservé  que  les 
subsistances  nécessaires  pour  eux  et  pour  leur  famille. 

Les  déserteurs  des  armées  polonaises  dispersées  se  sont 
réunis  atix  bandes  d'insurgés  répandues  dans  la  Prusse 
méridionale.  Ces  insurgés,  encore  redoutables,  surtout 
depuis  qu'ils  se  sont  ainsi  accrus .,  se  retranchent  dans  de 
profondes  forêts  ;  c'est  de  là  qu'ils  font  des  incursions  fré- 
quentes. 

On  écrit  de  Varsovie  que  la  disette  y  est  toujours  extrême. 
On  se  dispose  néanmoins,  dans  les  possessions  prussiennes* 
à  faire  conduire  dans  cette  malheureuse  ville  des  denrées 
de  toute  espèce. 

Les  Russes  ont  donné  à  Stanislas  une  garde  de  trois  régi- 
ments. 

Tous  les  généraux  et  soldats  polonais  qui  promettent  de 
renoncer  aux  principes  révolutionnaires,  et  de  ne  plus 
servir  contre  la  Russie;  ont  la  liberté  de  retourner  dans    ' 
leurs  foyers,  et  sont  même  traités  par  les  généraux  russes 
avec  une  modération  aflfectée. 

Plusieurs  républicains  vraiment  dignes  de  ce  nom  ont 
mieux  aimé  mourir  que  de  jurer  obéissance  à  la  tyrannie  ; 
il  se  sont  brCtlé  la  cervelle. 

Le  brave  WawrzewskI  s'est  refiisé  à  toute  espèce  de  ser- 
ment ;  les  Russes  l'ont  envoyé  prisonnier  à  Kiovie. 

Le  général  Dombrowski  n'a  pas  suivi  un  si  bel  exemple  t 
il  s'est  même  dégradé  jusqu'à  ne  pas  repousser  l'insultante 
bienveillance  du  Russe  Suwarow.  Ce  dernier  s'est  fait  olfrir, 
au  nom  de  la  malheureuse  ville  de  Varsovie^  une  boîte  d'or 
garnie  de  diamants*  sur  laquelle  on  lit  ces  mots  :  •  A  mon 
libérateur.  • 

Le  chancelier  Kollonlay  a  été  arrêté  en  Gallicie  avec  les 
généraux  Zajouszeck  et  Madalinski. 

Le  brave  et  infortuné  Kozciusko  n*est  plus  à  KioVie,  où 
il  était  resté  pour  la  guérison  de  ses  blessures  ;  partout  on 
se  porte  en  foule  sur  son  passage  pour  voir  cet  homme 
célèbre,  qui  va,  dit-on,  être  enfermé  à  Pétersbourg;  lei 
Russes  ne  le  font  plus  voyager  que  la  nuit.    > 

CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Letourneur  [de  la  Manche)» 
SUITE  DE  LA  SEANCE  DU  28  NIVOSE. 

Des  citoyens  d*AurilIac  sont  admis  ù  la  barre. 

L orateur  :  Citoyens  représentants,  des  hommes 
atroces  dont  Carrier  était  à  la  fois  le  protecteur  et 
rintermédiairc  auprès  de  Robespierre  et  de  ses  com- 
plices ,  de  CCS  grands  coupables  que  leurs  crimes  et 
l'opinion  publique  appellent  à  recharaud,ont  cou- 
vert le  Cantal ,  et  particulièrement  le  district  d'Âu- 
rillac,  de  désolation  et  de  désespoir. 

Trafic  de  la  liberté  individuelle,  concussion  sur 
les  riches,  oppression  sur  tous  les  citoyens ,  justice 
mise  à  Tcncan,  fabrication  de  fausses  lettres,  iucar* 
cération  des  patriotes,  assassinats  juridiques,  terro- 
risme après  le  9  thermidor,  tels  sont  les  crimes  dont 
l'accusation  pèse  sur  leurs  têtes,  crimes  dont  votre 
collègue  Musset,  délégué  dans  le  Cantal ,  a  emporte 
la  triste  conviction. 

Au  moment  où  nous  comptions  qu'enfiit  la  loi 
ferait  justice  de  nos  oppresseurs ,  quelques-uns  de 
ceux  qui  ont  été  incarcérés,  d'après  les  preuves  sur- 
venues contre  eux ,  viennent  d'être  rendus  à  la  li- 
berté, sans  jugement,  à  la  liberté  qu'ils  ont  désho- 
norée, et  qti'ils  ont  voulu  noyer  dan?  le  sang. 

Citoyens  représentants,  qu'il  ne  soit  pas  permis 
de  douter  de  la  révolution  du  9  thermidor;  que  ceux 
qui  se  sont  érigés  en  tyran?  de  leur  pays  ne  puis- 
sent plus  l'opprimer.  Le  peuple  français  ne  vous  a- 
t-il  pas  remis  sa  toute-puis^ancc  pour  exterminer 
tous  ses  ennemis? 

30 


S34 


Celui  d  Aurillac  vous  demande  aujourd'hui  une 
justice  sévère  et  impartiale ,  la  justice  des  républi- 
cains. 

Les  pièces  justificatives  de  sa  réclamation  sont 
parvenues  au  comité  de  s()reté  générale  ;  veuillez 
vous  en  faire  faire  le  rap|)nrt;  veuillez  indiquer  un 
tribunal  qui ,  à  l'abri  des  intrigues  et  de  toute  in- 
fluence, puisse  remettre  les  innocents  dans  nos  bras, 
et  punir  les  coupables.  Que  lejuur  consolateur  de 
la  justice  luise  entin  sur  le  Cantal ,  et  porte  l'espé- 
rance dans  les  Ames  trop  longtemps  abattues  par 
Toppression,  le  brigandage  et  la  terreur.  Vive  la  ré- 
publique !  vive  In  Convention  nationale. 

Le  Pbbsidbnt  ,  à  la  députation  :  Dans  les  diffé- 
rentes époques  de  la  révolution  l'iutrigue  et  la  mal- 
yeil lance  ont  cherché  à  s'emparer  des  mouvements 
les  plus  sublimes  pour  les  faire  tourner  au  proGt  da 
crime. 

Pourrait-on  s'étonner  que  le  règne  de  la  justice 
fit  ombrage  aux  méchants;  l'homme  probe,  le  vrai 
républicam,  veut  des  lois;  le  crime,  au  contraire,  ne 
trouve  de  refuge  que  dans  l'anarchie. 

Citoyens,  la  Convention  nationale,  à  qui  le  peuple 
a  confié  le  soin  de  son  bonheur ,  saura  déjouer  par 
son  énergie  tous  les  complots  liberticides;  elle  frap- 

Sera  de  la  même  main  tous  les  ennemis  du  peuple , 
e  quel(]ue  masque  qu'ils  eherchent  à  se  couvrir , 
et,  saisissant  plus  fortement  que  jamais  les  rênes 
du  gouvernement,  elle  ne  les  abandonnera  au'après 
avoir  consolidé  la  république  sur  les  bases  de  la  jus- 
tice. 

Vous  vous  nlaignez  que  quelques  hommes  per- 
vers ont  retardé  dans  votre  département  les  heu- 
reux effets  de  la  révolution  du  9  thermidor.  La 
Convention  nationale  s'empressera  de  vous  en  dé- 
dommager en  faisant  justice  de  tous  lesdilapidateurs 
Sue  vous  lui  dénoncez.  Elle  applaudit  à  l'expression 
e  vos  sentiments,  et  tous  invite  aux  honneurs  de  la 
séance. 

La  Convention  nationale  décrète  la  mention  ho- 
norable et  l'insertion  au  Bulletin  de  cette  Adresse, 
avec  la  réponse  du  président ,  et  renvoie  la  pétition 
aux  comités  de  sûreté  générale  et  de  législation. 

Musset  :  J'arrive  de  la  mission  dont  la  Conven- 
tion nationale  a  bien  voulu  me  charger.  J'ai  par- 
couru les  départements  du  Puy-de-Dôme,  du  Cantal 
et  delaCorrèze;  j*ai  malheureusement  été  arrêté 
dans  ce  dernier  département  par  une  maladie  oui 
m'a  retenu  vingt-trois  jours  au  lit,  et  m'a  empêcné 
de  me  transporter  dans  trois  de  ses  districts, ce  dont 
j*ai  été  bien  fâché. 

J'étais  instruit  des  progrès  que  faisait  le  terro- 
risme; mais  la  Convention  v  a  envoyé  un  de  mes 
collègues,  et  j'ai  été  tranquille. 

Dans  le  département  du  Puy-de-Dôme  j'ai  trouvé 
•de  plats  valets ,  de*  vils  porteurs  de  couteau  ;  mais 
le  neuple  s'est  élancé  avec  la  Convention,  et  ^ 
déclare  avec  elle  une  guerre  à  mort  à  tous  les  scé- 
lérats et  i  tous  les  hommes  de  sang.  (  Applaudisse- 
ments. ) 
'!ette  énergie  s'est  communiquée  à  tous  les  es- 

tinis ,  de  sorte  qu'il  n'est  presque  pas  cinquante 
lommrs  b  présent  qu'on  puisse  y  dire  amis  du  ter- 
rorisme. (  Nouveaux  npplaudissemeuts.) 

Du  Puy-de-Dôme  je  suis  passé  dans  le  Cantal. 
Cr%i  là  que  j'ai  vu  des  hommes  non-seulement  ter- 
roriste» et  uuveurs  de  sang,  mais  encore  voleurs; 
de»  hommes  que  j'ai  convaincus  devant  plus  de  qua- 
rante ciloveni  ;  car  c'est  devant  le  peuple  que  j'ai 
•^ouIm  toujours  agir,  je  n'ai  rien  fait  dans  mon  ca- 
liîfieL  Lomfu'on  m'a  dénoncé  ces  coquins ,  j'ai  ré- 
|N)ndu  ;  •  Ce  n'est  point  chez  moi  que  je  dois  les 
juger;  mais  en  présence  du  peuple.  •  Alors  je  les  ai 
U  devant  ce  tribunal  juste,  mais  redoutable.  Le 


peuple  les  a  accusés ,  et  le  peuple  les  a  cdnvalnciu* 
(  Les  applaudissements  redoublent.  ) 

Le  peuple  a  sommé  le  frère  d'Evrard  de  déclarer 
si  sa  femme  n'avait  point  emporté  la  somme  de 
4,000  liv.,  que  son  frère  avait  prise  à  un  citoyen. 
Celui-ci,  avec  la  franchise  d'un  vrai  républicain ,  a 
déclaré  le  fait  vrai.  Ne  soyez  pas  étonnés,  citoyens, 
si  le  coquinisme  dominait  dans  ce  département  avec 
autant  d'audace;  le  moustre  de  la  Veudée  l'avait  lui- 
même  organisé. 

Carrier  avait  fait  une  liste  de  soixante  victimes 
pour  le  tribunal  de  Paris.  11  avait  chargé  ses  agents 
d'y  faire  des  notes,  et  ces  notes  devaient  être  faites  à 
la  Carrier.  Alors  Evrard  devient  l'œil  de  cette  com- 
mission ;  il  s'associe  un  nommé  Alaric ,  ci- devant 
avocat.  Il  est  bon  d'observer  ici  que  cet  Alaric  avait 
fait  un  écrit  contre-révolutionnaire,  qui  était  tombé 
entre  les  mains  d'Evrard; celui-ci  le  prend,  fait  venir 
Alaric  et  le  lui  montre  ;  il  ajoute:  •  Ta  vie  est  entre 
mes  mains;  si  tu  fais  ce  que  je  te  dirai,  je  brûle  ta 
lettre:  si  tu  le  refuses,  alors  je  te  sacrifie.* 

Evrard  alors  lui  assigne  la  fonction  de  recevoir  les 

r^çtitionsdc  ceux  qui  viennent  solliciter  auprès  de 
ui.  Il  les  lui  renvoie  tous. 

Ces  malheureux  vont  donc  trouver  Alaric ,  ils  lui 
présentent  leurs  pétitions  :  •  C'est  de  l'argent  qu'il 
me  faut,  «  leur  répond  ce  monstre.  Ainsi,  l'homme 
de  bien,  jeté  dans  un  cachot,  ne  recouvre  sa  liberté 
que  par  la  perte  de  sa  fortune;  l'un  donne  18,000 
francs ,  l'autre  20,000;  tous  ces  faits  ont  été  prou- 
vés, et  leurs  auteurs  confondus. 

Quand  il  avait  dépouillé  ses  victimes,  il  les  con- 
duisait après  du  tribunal  de  sang.  Beaucoup  ont  été 
envoyées  à  Paris;  et  si  ces  victimes  n'ont  pas  été  en 
aussi  grand  nombre  qu'il  le  désirait ,  c'est  que  le 
9  thermidor  est  arrivé. 

A  force  de  pillage  et  de  vols,  ces  monstres  affames 
de  chair  humaine ,  et  plus  encore  de  richesses ,  ces 
monstres,  distje,  qui  n'avaient  rien  avant  l'Assem- 
blée constituante,  ont  tous  amassé  des  sommes 'im- 
menses. Evrard ,  qui  était  couvert  de  dettes  ,-était 
riche  de  plus  de  1  million. 

Beaucoup  de  coquins  ont  été  relâchésr  dans  ce 
département;  je  n'accuse  point  mes  collègues ,  ils 
ont  sans  doute  été  trompés  ;  mais  si  leur  mise  en 
liberté  a  excité  l'indignation  publique,  les  bons 
citoyens  se  sont  consolés  par  l'espoir  que  la  justice 
de  la  Convention  saura  toujours  les  atteindre  ,  rt 
qu'ils  n'échapperont  pas  aux  châtiments  qu'ils  mé- 
ritent. 

Il  ne  s*agit  point  de  faire  rétrograder  la  révolu- 
tion. Qui  sait  mieux  que  moi  (^^e  les  hommes 
exaltés  ont  fait  le  plus  de  bien  a  la  révolution? 
Aussi  je  les  ai  protégés  toujours ,  quand  ils  ont  été 
purs. 

Celui  qui  a  aimé  la  révolution  pour  elle  a  été 
mon  ami;  mais  celui  qui  n'en  profite  que  pour  piller, 
voler,  aura  toujours  en  moi  un  ennemi  implacable. 
(  Vifs  applaudissements.  ) 

Je  regrette  que  mes  forces  ne  me  permettent  pas 
d'entrer  dans  de  plus  grands  détails. 

Je  me  bornerai  à  dire  que  partout  la  Convention 
est  bénie.  Les  hommes  ennemis  de  la  révolution  du 
9  thermidor  sont  en  petit  nombre.  Partout  vos  dé- 
crets sont  exécutés,  plutôt  par  amour  que  par  crainte. 
(Applaudissements.) 

Le  peuple  a  éprouvé  des  besoins  pour  les  sub- 
sistances. Je  lui  ai  dit  que  la  Convention  s'occupait 
des  moyens  de  lui  en  procurer ,  et  il  est  resté  tran- 

Suillc.  Le  peuple,  réduit  à  une  demi-livre  de  pain, 
itavec  respect  :  Demain  nous  terminerons  la  révo- 
lution. (Vifs  applaudissements.  ) 

Je  termine  en  demandant  que  la  pétition  qui  vous 
est  ici  présentée  soit  renvoyée  aux  comités  réunis 


S35 


de  sûreté  gdnërale  et  de  législation  :  au  comité  de  ment,  a  demande  une  augmentation  de  fret  au  char< 
sûreté  générale ,  pour  qu'il  prenne  des  mesures  effi-  j  geur ,  qui  est  bien  convenu  qu'il  était  dû  ;  mais  la 
caces  contre  les  citoyens  convaincus  d'avoir  volé;  |  diflicul  lé  s'est  trouvée  dans  la  fixation  du  prix.  Le 


caces 

au  comité  de  législation,  pour  qu'il  attribue  la  con- 
naissance de  ces  délits  à  un  autre  tribunal  que  celui 
d'AuhlIac. 
Ces  propositions  sont  appuyées  et  décrétées. 
—  Un  des  secrétaires  fait  lecture  de  la  lettre  sui- 
vante : 

Les  représentante  du  peuple  près  les  armées  du 
Nord  et  de  Sambre-et- Meuse  à  ta  Convention 
nationale. 

Bruielles,  le  23  nÎTOfe,  l'an  S*  de  la  répub1i<]ue 
une  et  indivisible, 
c  Voici,  citoyensxol  lègues,  cr  que  nous  écrit  le  général 
Bastout,  ^  Saiiit-Huberi  :  •  Dans  la  nuit  du  1^  au  15  du 
courant ,  le  Teu  prit  dans  cette  tille  ;  sept  maisons  furrot 
la  proie  des  flammes,  malgré  le  tèle  et  Tacliviié  que  mil  le 
li*  bataillon  des  Vosges  à  les  arrôter  ;  car  doute  ou  quinie 
ont  été  victimes  de  leur  dévouement  en  périssant  ou  rece- 
vant des  blessures  qui  les  mettent  hors  d'état  de  continuer 
leur  service.  Ce  n'était  pas  assez  d^avoir  préservé  cette  ville 
d'un  incendie  général,  il  Taliait  encore  la  secourir  en  don- 
nant un  jour  de  paye  pour  les  malheureux  qui  ontiour- 
fert  dans  cette  occasion.  » 

«  La  Convention  nationale  applaudira  à  cette  conduite 
généreuse  et  héroïque;  roab  elle  n'en  sera  pas  étonnée  : 
partout  les  braves  défenseurs  de  la  patrie  affrontent  tous 
les  dangers,  bravent  les  chaleurs  de  Tété,  les  glaces  de 
l'hiver,  supportent  toutes  les  fatigues,  toutes  les  priva- 
tions; la  gelée  et  la  neige,  la  laim  et  la  soif,  rien  ne  peut 
ralentir  leur  ardeur.  Dans  lea  cantonnements  ils  frater- 
nisent avec  les  habitants,  partagent  leurs  subsistances  avec 
-  les  plus  nécessiteux,  et  donnent  Texemple  de  toutes  les 
vertus.  La  patrie  et  ses  triomphes  les  consolent  de  tous 
leurs  maux.  La  dernière  parole  de  ceux  qui  meurent  au 
champ  d*honneur  est  encore  pour  la  république;  mais,  à 
côté  de  ces  actes  innombrables  de  courage,  de  générosité 
et  de  dévouement  patriotique  sans  bornes  comme  sans 
exemple,  on  volt  le  contraste  affligeant  delà  conduite 
odieuse  d*un  grand  nombre  d'employés  à  radministration 
militaire. 

«  Ces  agents,  aussi  perfides  que  cruels,  s'élancent  eomme 
des  oiseaux  de  proie  sur  la  subsistance  des  braves  soldats 
delà  patrie  :  ils  trafiquent  de  leur  pain,  de  leurs  vêtements, 
les  laissent  souvent  dans  le  plus  pitoyable  abandon  quand 
ils  sont  malades,  les  repoussent  avec  insolence  quand  de 
Justes  réclamations  les  conduisent  auprès  d'eux.  En  un 
mot,  leurs  maux  ne  les  touchent,  ne  les  affectent  en  rien; 
pourvu  que  ces  monstres  puissent  satisfaire  leur  cupidité, 
vivre  dans  les  plaisirs,  dans  l'abondance,  et  s'engraisser 
aux  dépens  du  peuple,  c'est  tout  ce  qu'ils  désirent;  et, 
pour  remplir  ce  but,  ils  ne  ménagent  ni  les  habitants,  ni 
les  soldats,  lii  le  trésor  public.  Sans  la  surveillance  sévère 
et  continuelle  qui  plane  sur  eux,  on  verrait  naître  les  maux 
les  plus  affreux.  Délivrez  Tarmée  et  le  peuple  de  cette  race 
maudite,  enhardie  par  l'insuffisance  des  lois  qui  ne  peu- 
vent les  atteindre  ;  que  de  plus  sélères  les  poursuivent  dans 
leurs  astucieux  détours,  et  V9us  aurez  encore  une  fois  bien 
mérité  de  la  patrie, 
f  Salut  et  Araternité. 

f  Signé  Ha  ciMANif ,  Robxmjot  ,  Biils.  » 
GiROD ,  au  nom  du  comité  de  commerce  et  de 
législation  :  Quelque  temps  avant  les  hostilités  sur 
mer,  les  armateurs  qui  avaient  leurs  navires  à  Saint- 
Domingue  prirent  des  marchandises  à  fret  potir 
France.  Mais,  comme  tout  faisait  présumer  que  la 
paix  ne  serait  pas  conservée  longtemps,  il  fut  stipulé 
dans  les  connaissements  qu'en  cas  de  guerre  ou 
d'hostilité  le  fret,  dont  le  prix  convenu  était  de  18 
deniers,  serait  payé  au  cours  de  la  place. 

La  circonstance  prévue  est  arrivée.  La  guerre  et 
les  hostilités  ont  retardé  le  départ  des  navires.  Plu> 
sieurs  ont  été  obligés  de  relâcher  à  la  Nouvelle-An- 
gleterre, avant  de  pouvoir  se  rendre  à  Bordeaux  et 
dans  d'autres  ports  de  France. 
L'armateur ,  en  conséquence  de  son  connaisses- 


tribunal  de  commerce  de  Bordeaux,  devant  qui  plu- 
sieurs de  ces  affaires  ont  été  portées ,  avait  nommé 
neuf  négociants  pour  arbitrer  ces  prix  ,  d*après  les , 
différents  risques  et  les  divers  retardements  que  le 
cas  d'hostilité  a  pu  entraîner. 

Cette  opération  a  eu  lieu;  mais  ni  les  armateurs, 
ni  les  consignataires ,  n'ont  été  contents  de  l'arbi- 
trage, et  ont  dénié  au  tribunal  le  droit  de  pouvoir 
nommer  des  arbitres  dans  cette  circonstance. 

Lesjuçes  de  ce  tribunal,  pénétrés  de  leurs  de- 
voirs et  de  cette  vérité  si  essentielle  à  ne  pas  perdre 
de  vue  de  la  part  du  pouvoir  judiciaire ,  que  dans 
aucun  cas  il  ne  doit  suppléer  à  la  loi ,  n'ayant  pas 
vu  en  effrC  dans  celle  de  leur  établissement  qtie 
cette  faculté  leur  fût  accordée,  se  sont  adressés  a  la 
Convention.  Vous  avez  renvoyé  leur  pétition  au 
comité  de  commerce,  qui,  après  avoir  examiné 
cette  question ,  et  voyant  qu'il  s'agissait  d'un  foit 
judiciaire ,  en  a  référé  au  comité  de  législation ,  et 
c'est  au  nom  de  ces  deux  comités  que  je  vous  pré- 
sente un  projet  de  décret,  qui,  si  vous  l'adoptez , 
accélérera  beaucoup  d'affaires  de  ce  genre ,  et  rem* 
plira  les  vues  toujours  bienfaisantes  de  la  Conven- 
tion nationale. 
Voici  le  projet  de  décret  : 

t  La  Convention  nationale  «  après  avoir  entendu  set 
comités  de  législation  et  de  commerce  réunis*  décrète: 

•  Tout  tribunal  de  commerce  saisi  d'une  contestation 
en  augmentation  de  frais  est  autorisé,  toutes  les  fois  qu^il 
I  ne  se  trouvera  pas  suffisamment  éclairé,  à  nommer  d'office 
cinq  ou  scpldescoromerçantsles  plus  expérimentés  du  port 
dans  les  expéditions  maritimes,  pour  faire  arbitrer  défini*  * 
titement  et  sans  appel  ni  recours  quelconque  le  point  Utl» 
I  gieux.1 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 
GiROD ,  au  nom  du  comité  de  commerce  :  Le  dia- 
Irict  de  Couvin  faisait  partie  du  pays  de  Liège  ;  lors 
de  la  réunion  de  cet  Etat  à  la  France,  le  peuple  de 
ce  district  fut  un  de  ceux  qui  se  prononcèrent  le 
plus  fortement  pour  une  réunion  que  l'amour  pour 
la  liberté  des  citoyens  qui  le  composent,  et  sa  posi- 
tion géographique,  sollicitaient  également;  aussi, 
lors  dii  retour  momentané  du  despote  liégeois  dans 
ce  qu  il  appelle  ses  Etats ,  n'a-t-ii  pas  été  épargné 
dans  les  vengeances  tyranniques  de  ce  prêtre. 

Les  habitants  du  district  de  Couvin,!qui  fait  partie 
du  département  des  Ardennes,se  trouvent  dans  une 
position  qui  mérite  toute  l'attention  de  la  Conven- 
tion ;  ils  sont  Français ,-  administrés  et  gouvernés 
d*après  les  lois  françaises;  mais  ils  se  trouvent  placés 
au  delà  des  barrières  des  douanes ,  et  par  tos  lois 
sur  l'exportation  ils  ne  peuvent  tirer  de  France  tous 
les  objets  dont  ils  ont  besoin  ;  ils  se  trouvent  aussi 

Îdacés  en  deçà  des  barrières  que  le  gouvernement  de 
a  Belgique  a  sans  doute  cru  nécessaire  d'établir 
sur  les  frontières  de  cette  contrée,  et  hors  desquelles 
il  n'est  pas  possible  de  faire  sortir  les  denrées  et 
marchandises  sans  violer  les  arrêtés  des  représen- 
tants du  peuple  dans  la  Belgique  ;  de  sorte  que  le 
districtde  Couvin,  environné  des  barrières  de  France 
et  de  la  Belgique,  ne  peut  rien  tirer  de  celle-ci, 
parce  qu'il  est  réputé  français,  ni  de  celle-là,  parce 
qu'il  est  hors  de  ses  barrières. 

Votre  comité  a  bien  pensé  qu'il  suffisait  de  vous 
instruire  d'une  situation  aussi  critique  pour  être  sûr 
qu'il  n'appellerait  pas  en  vain  votre  sollicitude  sur 
ce  pays,  qui  ne  demande  qu'une  chose  juste,  recon- 
nue telle  par  notre  collègue  Charles  Delacroix  lors- 
qu'il y  était  en  mission  ,  et  d'une  facile  exécution  ; 
car  il  ne  s'agit  que  de  lever  le  cordon  des  douanes 
actuelles,  et  de  le  transporter  aux  confins  du  district 
4e  Couvin»  sur  les  frontières  de  la  Belgique. 


236 


Le  rapporteur  appnîc  celte  proposition  de  quel- 
ques détails  sur  les  localités. 

Le  projet  de  décret  est  adopté  ainsi  qu'il  suit  : 

•  La  Convenlion  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  de  commerce,  décrète  : 

«  Il  sera  tiré  un^  ligne  de  Maubcugc  ù  Girct,  passant 
par  Beaumont,  Vedette-Républicaine,  Fraiicbimont,  etc., 
qui  renfermera  le  district  de  Couvin,  sur  laquelle  seront 
établis  les  bureaux  des  douanes  ;  les  bureaux  établis  sur  la 
ligne  de  Maubougc  ù  Gitcl,  en  passant  par  la  Chapelle, 
Saint-Micliel ,  Roclibre,  sont  supprimés,  et  les  barrières 
sont  provisoireineut  reculées  aui  points  ci-dessus  indiquée 

c  La  commission  des  revenus  nationaux  est  chargée  de 
Texécution  du  présent  décret,  b 

Bô,  au  nom  des  coniiti*s  des  secours  publics  et  des 
finances  :  Les  hôpitaux  de  la  république  française , 
et  particulièreineut  ceux  de  Paris ,  qui  sont  plutôt 
des  monuments  d'orgueil  que  d'humanité ,  qui  flat- 
tent Tœil  par  un  extérieur  de  munificence,  lorsquMIs 
nfnigcnt  I  dîne  par  le  tableau  intérieur  d'une  morta- 
lité eiïrayaiite;  ces  hospices,  ou  plutôt  ces  lazarets, 
excitent  depuis  longtemps  la  sollicitude  de  votre  co- 
mité des  secours  piihlics. 

Tout  ce  qui  a  été  écrit  sur  cet  objet  depuis  la 
révolution,  tout  ce  qui  a  été  décrété  depuis  TAssem- 
bléc  constituante  jusqu'à  ce  jour ,  est  soumis  dans 
ce  moment  à  une  révision  que  les  événements  poli- 
ti(]|ues  commandent,  que  les  progrès  de  la  morale 
nécessitent. 

Votre  comité  vous  présentera  bientôt  la  législa- 
tion entière  des  secours  publics,  et  les  principes  qui 
dirigent  ses  travaux  tenaront  à  effacer  peu  à  peu  du 
tableau  de  la  population  française  la  classe  humi- 
liante des  indigents. 

Mais,  comme  des  abus  urgents  à  réprimer  exigent 
pour  quelques  hospices  de  Paris  des  mesurer  pro- 
visoires, qui  s'encadreront  dans  les  mesures  gé- 
nérales qui  vous  seront  soumises;  comme ,  dans  le 
ci-devant  Hôtel-Dieu  surtout ,  les  réformes  qu'on  y 
a  faites  ont  a  peine  atténué  l'action  délétère  du 
fluide  dans  lequel  sont  constamment  plongés  les 
malades;  comme  les  causées  de  ce  méphitisme  aérien 
sont  inhérentes  à  l'encombrement  des  lits  dans  les 
salles;  comme  chaque  lit,  privé  d'une  portion  suf- 
fisante d'air  vital,  incline  plutôt  le  malade  vers  la 
tombe  qu'il  ne  le  relève  vers  la  convalescence; 
comme  chaque  malheureux  qui  succombe  reproche 
à  la  nation  entière  et  sa  fausse  bienfaisance  et  la 
perte  d'un  citoyen,  votre  comité,  nourri,  pour  ainsi 
dire,  du  sentiment  pénible  des  infortunés,  le  cœur 
presque  toujours  serré  par  leur  état  de  douleur  et 
de  misère,  toujours  attentif  à  prévenir  les  cris  et  les 
besoins  de  l'humanité  souffrante ,  vous  propose  la 
suppression  de  quatre  maisons  hospitalières,  qui 
n  ont  jamais  rempli  le  but  de  leur  institution,  qui 
avaient  adopté  un  régime  purement  religieux,  uni- 
quement destiné  ;i  réchaufferie  fanatisme,  à  carac- 
tériser une  véritable  communauté  ;  qui,  au  moyen 
'W  quelques  lits  placés  dans  une  salle  à  l'entrée  de 


icntc,  couchent  molfeinent  l'oisiveté ,  et  absorbent 
an  revrnn  qui  s'élève  annuellement  dans  ces  quatre 
tnàtmun  a  phis  de  100,000  liv. 

On  trouve,  en  effet,  dans  ces  prétendus  hospices, 
w  nombre  des  employés,  ainsi  que  celui  des  reli- 
fieuses,  supérieur  au  nombre  des  malades;  on  n'y 
▼011  que  quelques  femmes  infirmes,  plutôt  protégées 
qiiimiijçrnlpfi  placées  à  vie,  et  quelques  lits  occupés 
P^rihn  ttiahdvn  payant  pension. 

•*e*  »iippresnion.H,loin  de  faire  refluer  dans  les 
wj'P  «randn  UonpivcH  de  Paris  le  peu  de  malades  qui 
Kî!  î  i*^"  ^tre  évacués,  doivent,  a  la  faveur  de 
■riin  riPMn  capitaux,  diriger  la  bienfaisance  natio- 


nale vers  de  nouve;jux  établissements  que  la  philo- 
sophie réclame,  que  l'humanité  exige  ,  et  que  la 
justice  commande^  S'il  est  besoin  encore  pendant 
(juelque  temps  d  hospices  d'humanité ,  ils  doivent 
être  simples ,  propres ,  spacieux ,  bien  aérés ,  et  ne 
contenir  qu'un  certain  nombre  de  lits  qui  soit  ton* 
jours  dans  un  rapport  physique  avec  le  volume  d'air 
nécessaire  à  la  salubrité  des  salles.  La  raison,  jus-* 
qu'ici  trop  enchaînée ,  et  une  funeste  expérience  mi- 
litent en  faveur  de  cette  nouvelle  organisation.  La 
philanthropie  fera  plus  un  iour,  elle  fera  disparaître 
ces  monuments  publics  d'humanité  pour  en  faire 
revendiquer  l'exercice  par  tous  les  citoyens  aisés  et 
vertueux. 

Votre  comité  vous  propose  donc  d'établir  à  Paris 
trois  nouveaux  hospices ,  qui  auront  sous  tous  les 
rapports  les  avantages  qu'on  peut  d^irer  dans  une 
réunion  quelconque  de  malades.  Ils  seront  placés  au 
ci-devant  hospice  Beaujon,  auc  vous  venez  de  sup- 
primer par  une  destination  plus  avantageuse  des  en- 
fants abandonnés  dont  il  était  chargé  ;  au  bâtiment 
neuf  de  l'abbaye  Antoine  «  et  à  l'hospice  Jacques, 
actuellement  existant,  mais  dont  le  service  élait  in- 
sufGsant  à  raison  de  la  modicité  de  ses  revenus.  Ce 
n'est  cependant,  à  proprement  parler,  qu'un  nouvel 
hospice  que  vous  créez  dans  le  faubourg  Antoine , 
qui  doit  vous  intéresser  non-seulement  sous  le  rap- 
port des  services  qu'il  a  rendus  a  la  révolution,  mais 
encore  sous  celui  d'une  humanité  bien  ordonnée  et 
d'une  justice  bien  légitime,  puisqu'il  renferme  trois 
maisons  hospitalières  que  nous  vous  proposons  de 
supprimer. 

Ce  faubourg  a  quelque  droit  à  un  remplacement 
qui,  en  rapprochant  la  bienfaisance  du  malheureux,  - 
en  augmente  le  prix,  eu  lui  ménageant  les  consola- 
tions que  les  liens  du  sang  et  de  ramitié  répandent 
autour  du  malade,  souvent  avec  plus  de  succès  que 
les  remèdes  les  mieux  appliqués.  Quant  à  l'hospice 
Jacques ,  il  n'est  question  que  d'une  augmentation 
de  lits  que  la  localité  favorise,  et  qui  aidera  à  retirer 
de  i'HôteUDicu  ces  lits  coupés,  ces  rangs  de  lits  en 
troisième  ligne ,  qui  ne  font  qu'aggraver  les  causes 
du  méphitisme  et  appeler  le  terme  fatal  au  milieu 
des  anxiétés,  des  cris  de  douleur  et  de  désespoir. 

Ces  établissements  se  formeront  sans  aucune  dé- 
pense pour  l'Etat;  il  en  résultera  encore  une  écono- 
mie considérable  sur  la  valeur  des  emplacements, 
puisque,  des  trois  nouveaux  hospices  d'humanité  que 
le  comité  vous  propose,  deux  existent  déjà  ,  et  le 
troisième  à  former  a  la  ci-devant  abbaye  Antoine 
n'emploiera  que  le  bâtiment  neuf,  qu'il  est  facile  de 
sé[)arer  des  autres  bâtiments  et  des  vastes  jardins 
dont  cet  enclos  est  composé ,  tandis  que  la  nation 
rentre  dans  la  propriété  disponible  de  quatre  bâti- 
ments très- vastes,  mais  qui,  par  leur  mauvaise  dis- 
tribution, ne  sont  point  propres  à  cette  nouvelle  des- 
tination, et  dont  cependant  les  deux  seuls  enclos  de 
l'hospice  Mandé  et  de  la  Roquette  sont  évalués  à  plus 
de  1  million. 

A  la  suite  de  ce  rapport,  le  décret  suivant  est 
adopte. 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap> 
port  de  ses  comités  des  secours  publics  et  des  finances 
réunis,  décrète  ce  qui  suit  : 

.  «  Art.  I*'.  Les  ci-devant  maisons  hospitalières,  sises  à 
Paris,  rue  MouflTelard ,  place  de  rindivisibililé,  rue  de  la 
Roquette,  et  dans  la  communede  Mandé,  sont  supprimées. 

«  n.  Les  ci-devant  religieuses  attachées  à  ces  diflTérentet 
maisons  recevront,  à  compter  du  jour  de  leur  suppression, 
le  traitement  fixé  par  les  décrets  do  mois  d*octobre  1790 
et  août  1792. 

«  in.  Les  infirmes  qui  occupent  des  lits  dans  les  mai- 
80DS  ci-dessus  désignées,  en  y  payant  pension ,  ont  la  fa- 
culté d'entrer,  aux  mêmes  couditioDfi  dans  un  hospice  da 
bienfaisance  naliooale» 


231 


«  IV^  Les  infirmes  et  les  indigents  traités  graluilemcnt 
/lans  les  maisons  supprimées  seront  placés  convcna- 
blLMiient,  suivant  leur  état  d*infii mité,  dans  les  hospices 
nationaux. 

«  V.  Pour  remplacer  les  hospices  supprimés  par  le  pré- 
sent décret .  et  pour  favoriser  particulièrement  Tévacua- 
tion  des  lils  encombrés  dans  le  ri-devant  Hôtel-Dieu,  il  sera 
établi  deux  nouveaux  hospices  d'humanité,  on  5  la  ci-de- 
vant maison  de  Beaujon,  Tautrc  dans  le  bâtiment  neuf  de 
Tabbayc  Antoine. 

-  VI.  Diaprés  les  localités,  Tliospice  Beaujon  contiendra 
quatre-vingts  lits;  celui  de  Tabbaye  Antoine, cent  soixante. 

«  VII.  Dans  les  mêmes  vues  de  bienfaisance,  Thospice 
Jacques,  qui  ne  contient  que  quarante  lits,  sera  porté 
à  quatre-vingts. 

•  VIH.  La  commission  des  secours  publics  se  concertera 
avec  celle  des  domaines  nationaux  pour  presser  Tinvcn- 
taire  du  mobilier  des  maisons  supprimées,  et  se  faire  re- 
mettre les  meubles  et  effets  propres  au  service  des  hospices 
d'humanité. 

•  Le  présent  décret  sera  envoyé  à  la  commission  des  se- 
cours publies  et  à  celle  des  domaines  nationaux  de  Paris.» 

BoissY  d^Anglas,  au  nom  du  comitc  de  salut  pu- 
blic :  La  malveillance,  depuis  l'époque  de  la  rdvolu- 
tion,  n'a  pas  cessé  de  répandre  des  inquiétudes  tou- 
chant les  subsistances,  et  de  provoquer  des  lois 
subversives  de  celle  branche  de  l'économie  politi- 
que. La  malveillance,  pour  affamer  plus  sûrement 
le  peuple  .(car  tel  était  son  but),  a  rendu  suspects 
fermiers,  meuniers  et  boulangers;  elle  a  prêché  le 
pillage  des  grains  et  le  meurtre  de  leurs  dépositaires. 
Qiiand  ces  sources  naturelles  de  la  subsistance  pu  • 
blique  ont  été  détournées,  on  s'est  vu  forcé  de  créer 
des  administrations  auxquelles  il  a  été  impossible 
d'élever  un  édifice  bien  ordonné  sur  les  ruines  d'un 
vaste  commerce  qui  embrassait  la  subsistance  de 
vingt-cinq  millions  d'hommes. 

lia  donc  fallu  substituer  à  la  sûreté  dans  les  mar- 
chés, à  la  libre  circulation  des  grains,  un  système 
monstrueux  de  déclarations,  de  recensements',  de  vi- 
sites domiciliaires,  de  réquisitions,  de  préhensions» 
de  maximum,  enfin  de, greniers  d'aboudance,  etc. 
Le  génie  du  commerce!  voilà  les  véritables  greniers 
de  Fabondance;  ceux  que  les  gouvernements  élè- 
vent sous  ce  nom  ne  tardent  pas  à  devenir  les  an- 
tres de  la  famine. 

Un  pareil  système  devait  nécessairement  entraîner 
dans  le  chaos  la  meunerie  et  la  boulangerie ,  deux 
arts  de  la  perfection  desquels  la  France  s'honorait. 
On  a  donc,  au  nom  de  la  liberté,  enchaîné  dans  les 
moulins  ces  cribles  divers,  ces  bluteries,  ces  instru- 
ments divers,  enfants  du  génie  des  mécaniques, 
qu'un  seul  et  même  moteur  Tait  magiquement  mou-^ 
voir,  et  qui  concouraient  simultanément  à  la  perfec- 
tion des  produits  de  mouture.  Le  meunier,  gémis- 
sant sur  l'avilissement  de  son  art;  le  meunier,  dont 
la  niain,  dont  l'œil  n'étaient  plus  exercés,  lorsque  la 
paix  serait  venue  revivifier  notre  commerce,  n'au- 
rait pu  l'alimenter  de  belles  farines  et  soutenir  la 
concurrence  avec  les  Étals-Unis. 

En  Amérique,  celle  branche  d'industrie  commer- 
ciale est  protégée  et  soumise  à  des  lois  rieourcuses, 
car  il  y  a  aussi  le  despotisme  de  la  liberté,  mais  qui 
ne  s'exerce  que  pour  organiser  et  non  pour  détruire. 
En  Amérique,  tout  ce  qui  concerne  la  mouture  est 
sévèrement  réglé:  l'échantillon  des  douves,  le  nom« 
bre  des  cercles,  celui  des  clous,  le  poids  du  tonneau, 
et  surtout  la  qualité  des  farines  ;  enfin,  on  refuse  de 
recevoir  dans  les  moulins  du  commerce  le  froment 
mêlé  seulement  de  quelques  grains  de  seigle;  tandis 
qu'en  France,  dans  ces  derniers  temps,  disons-le,  car 
le  moment  de  le  dire  est  arrivé ,  puisque  l'abus  est 
cessé,  on  moulait  le  grain  pour  la  nourriture  de 
l'homme  comme  on  moud  l'orge  pour  la  nourriture 
des  animaux  les  plus  vils.  Ne  vous  étonnez  donc 
point  si  votre  comité  de  salut  public  fixe  ud  instant 


votre  attention  sur  celte  branche  importante  de  Té- 
conomie  politique,  qui  naguère  était  abandonna 
aux  hasards  des  plus  fâcheuses  conséquences,  et 
que  vous  devez  enfin  retirer  des  mains  de  l'igno- 
rance, et  peut-être  de  la  cupidité. 

Dans  cet  état  de  choses,  le  comité  de  salut  publie 
a  interrogé  la  science  ;  il  a  voulu  fixer  définitive- 
ment l'opinion  de  la  Convention  nationale,  en  lui 
présentant  des  résultats  certains  touchant  l'addition 
du  son  dans  le  pain.  Il  a  donc  ordonné  une  suite  d'es- 
sais sur  la  moulure  et  la  panification  de  divers  grains. 
L'expérience  confirme  ce  que  la  théorie  avait  an- 
noncé :  que  la  ferine  d'un  quintalde  froment,  purgée 
de  son,  donne  autant  en  pain  que  la  farine  d'un  quiit- 
lal  du  même  froment,  avec  l'addition  décrétée  du 
son  ;  que  le  son  n*entre  dans  le  mélanee  de  la  farine 
que  |)our  nuire  à  sa  conservation,  et  dans  la  misse 
du  pain  que  pour  le  détériorer. 

En  conséquence,  le  comité  de  salut  public  a  pris 
un  arrêté  qui  fixe  invariablement,  sous  le  nom  de 
mouture  nationale ,  les  produits  de  la  nouvelle 
mouture  qu'il  a  adoptée  ;  il  est  temps  de  combler 
le  gouffre  dans  lequel  l'ignorance  avait  plongé 
les  arts,  même  ceux  de  première  nécessité.  Les  pré- 
mices provenant  de  la  moulure  nationale  ont  été 
destinées  pour  les  hospices,  de  manière  que  le  ma- 
lade, le  convalescent  et  l'infirme  fussent  les  premiers 
à  jouir  de  ce  bienfait. 

•  Déjà  le  pain  de  Paris  est  amélioré  ;  il  ne  peut  plus 
exciter  de  réclamations,,  et  la  malveillance  choisira 
d'autres  armes.  Enfin  l'économie  rurale  rendra , 
grâce  à  la  Convention,  des  sons  rendus  à  la  nour- 
riture des  bestiaux,  et  l'économie  politique  jouira 
d'une  immense  diminution  de  frais;  car  dans  ce 
genre,  ainsi  que  dans  beaucoup  d'autres,  l'économie 
marche  de  pair  avec  la  perfection. 

On  va  reporter  votre  attention  sur  le  pain  des  ar- 
mées. Si  Paris  a  sonné  les  heures  de  la  liberté,  c'est 
le  soldat  français  qui  l'a  consolidée  ;  il  veille  pour 
elle,  veillons  sur  lui,  et  n'ayons  plus  à  lui  offrir 
qu'un  pain  boii  et  salutaire. 

Un  usage  constant  établit  chez  tous  les  peuples 
une  différence  entre  le  pain  des  cités  et  celui  des 
campagnes,  et  conséquemment  du  soldat;  en  effet, 
l'habitant  des  cités  mène  une  vie  tout  à  la  fois  sé- 
dentaire et  agitée.  Le  terme  commun  de  l'existence 
est  abrégé  pour  lui;  il  lui  faut  donc  un  régime  ap- 
proprié a  sa  faiblesse,  surtout  un  pain  léger  et  de 
digestion  facile. 

L'habitant  des  campagnes  trouve  dans  le  travail 
et  le  repos  qui  le  suit  le  bienfait  de  la  santé;  les  in- 
firmités et  une  vieillesse  précoce  ne  précipitent  pas 
sa  carrière  ;  en  conséquence,  ses  forces  digeslives 
demandent  qu'il  associe  à  son  pain  une  portion  des 
issues  du  ^rain,  qui  fassent  l'office  de  lest ,  et  il  pré- 
fère ce  pain  au  pain  léger  des  cités,  qu'il  pourrait 
également  se  procurer. 

Il  en  est  du  soldat  comme  de  l'habitant  des  cam- 
pagnes ;  car^cef  ui  qui  nourrit  les  Etats  est  aussi  celui 
qui  les  défend.  11  doit  retrouver  dans  les  camps  soq 
pain  accoutumé.  La  médecine  des  armées  n'a  jamais 
réclamé  contre  la  composition  de  ce  pain  ;  elle  ré- 
clamerait au  contraire  contre  tous  changements  à 
cet  égard. 

Les  goûts  de  l'homme,  quand  ils  ne  sont  pas  per- 
vertis par  les  usages  de  la  société,  sont  le  vœu  de  la 
nature. 

La  médecine  des  armées  sollicite  pour  le  soldat 
un  pain  mieux  fabriaué  que  n'est  le  pain  actuel  de 
nos  camps,  où  l^écaille  du  son  ne  soit  pas  interposée 
dans  la  masse  panaire  qu'elle  détériore,  pain  qu'on 
accusait,  non  sans  quelque  fondement,  de  devenir  la 
cause  de  plusieurs  maladies,  et  entre  9Utres  de  Ja 
dYSScnterie. 


3S8 


Bn  conséquence,  par  mite  des  essais  qae  le  eomîlë 
de  salut  public  a  ordonnés,  et  des  rësultsts  qui  ?ien- 
.nent  de  lui  être  soumis,  il  a  arrête,  sons  le  nom  de 
mouture  militaire,  l'extraction  de  quatre-vingt  dix 
livres  au  quintal  de  froment,  et  proportionnellement 
des  autn*s  grains  :  ce  produit  donne  un  pain  savou- 
reux et  nourrissant,  trempant,  bien  bouffant  à  la 
cuisson  et  n'étant  susceptible  ni  de  fermenter,  ni 
d^oigrir,  ni  de  noircir. 

Ainsi  donc  nos  frères  d*armes,  qui  bravent  et  le 
feu  de  Tennemi  et  la  rigueur  de  la  saison,  ne  rece- 
vront plus  de  notre  reconnaissance  <iu*nn  pain  boa 
et  salutaire.  Déjà  les  ordres  du  comité  sur  l'adoption 
de  cette  mouture  ont  prévenu  le  vœu  de  la  Conven- 
tion. 

Bn&n,  et  ce  point  est  important  dans  un  moment 
où  une  économie  plus  sage,  cependant  plus  sévère, 
doit  régler  les  subsistances  de  la  république,  nous 
économisons,  ou  plutôt  nous  ajoutons  un  neuvième 
au  pain  des  armées  en  Taméliorant. 

La  superstition  cite  ses  miracles  ;  les  sciences  et 
les  arts  en  opèrent  de  plus  réels,  et  cependant  c'est 
ce  flambeau  vivifiant  des  sciences  que  nos  derniers 
conspirateurs  voulaient  éteindre,  pour  régner,  par 
la  terreur,  sur  la  stupidité. 

Après  vous  avoir  rendu  compte  des  mesures  em- 
ployées par  Tart  pour  opérer  le  meilleur  emploi 
Îiossible  de  cette  masse  de  subsistances  nécessaires  i 
à  nourriture  de  vingt-cinq  millions  d*hommes,  ik 
faut  bien  vous  dire  que  la  sollicitude  éclairée  du 
comité  de  salut  public  ne  perd  de  rue  aucun  des 
moyens  propres  à  subvenir  aux  besoins  impérieux 
de  fa  natipn.  Le  commerce  prépare  à  la  république, 
par  les  échanges  et  ^ur  les  résuHata,  les  moyens 
de  combattre,  cette  msette  iicticê  qui  semble  nous 
menacer  de  toutes  parts.  Déjà  l'abolition  du  maxi- 
mum a  rendu  à  la  consommation  du  peuple,  une 
quantité  considérable  de  denrées  de  première  né* 
cessité  enchatnées  trop  longtemps  par  la  cupidité 
malfaisante;  Tautoritedoit  en  protéger  la  circula- 
tion ;  le  gouvernement  doit  des  secours  et  des  avan- 
ces aux  communes  où  te  commerce  n'a  pas  encore  ' 
repris  son  énei^gie.  Votre  comité  de  salut  public  rem- 
plit avec  exactitude  Fun  et  l'autre  de  ces  devoirs. 

Dans  plusieurs  lieux  le  peuple  souffre  encore, 
mais  tout  annonce  la  fin  de  ses  maux  ;  et  quoiqu'il 
soit  bien  plus  difficile  de  réparer  des  maux  que  de 
les  prévenir,  quoique  le  gouvernement  actuel  ne 
se  soit  pas  dissimulé  tous  les  obstacles  entassés  au- 
devant  delui  par  l'imprévoyancedesesprédécesseurs, 
il  ne  s>n  est  pas  moins  précipité,  sans  hésitation  et 
sans  balancement,  dans  une  carrière  remplie  de 
dangers,  mais  dont  le  bonheur  public  est  le  terme. 

Quatorze  armées  et  la  commune  la  plus  peuplée 
de  r  univers  à  approvisionner,  créer  pour  ainsi  dire 
le  commerce  qui  seul  peut  alimenter  le  reste  de  la 
France,  voila  ses  devoirs  et  ses  fonctions.  C'est  au 
peuple  entier  à  juger  ses  ressources  et  les  résultats, 
et  à  calculer  les  difficultés  sans  nombre  gui. viennent 
9  chaque  instant  embarrasser  sa  marche. 

La  plus  grande  de  ces  difficultés  peut-être,  c'est 
la  malveillance  et  l'intrigue;  l'une  et  l'autre  s'agi- 
tent en  tous  sens  pour  »ire  tourner  au  profit  des 
hommes  corrompus  jusqu'aux  calamités  qu'ils  ont 
préparées;  c'est  rintrieue  et  la  malveillance  qui 
rassemblent  à  la  porte  des  boulangers  cette  foule  de 
citoyens  qu'aucun  motif  ne  peut  y  appeler,  si  ce 
n*est  une  crainte  mal  fondée.  Je  l'ai  dit  il  y  a  deux 
jours  à  cette  tribune  :  toutes  les  inquiétudes  sur  le 
pain  sont  sans  aucune  espèce  de  fondement  ;  il  n'est 
pas  vrai,  comme  on  le  répand,  qu'on  ait  diminué  la 
répartition  des  farines  faite  à  chaque  boulanger; 
<)baque  jour  la  même  quantité  se  distribue,  et,  si 
cela  était  nécessaire,  il  serait  aisé  de  l'iiccroître.  Il 


n'est  pas  vrai  qne  les  arriTages  se  fassent  moins  bien 
que  par  le  patte;  il  n'est  pas  vrai  que  les  moulins 
soient  arrêtés  par  la  ngut^ur  de  la  saison  ;  il  n'est 
pas  vrai  que  les  boulangers  aient  un  seul  Jour  man- 

3ué  de  bois  :  il  est  vrai  que  celui  remis  a  plusieurs 
'entre  eux  n*a  pu  être  toujours  d'une  aussi  bonne 
qualité,  mais  il  est  aisé  de  remédier  à  cet  inconvé* 
nient  par  les  procédés  qu'ils  emploient. 

Que  le  peuple  donc  suit  sans  inquiétude ,  qu'il 
cesse  de  manifester  des  craintes,  qu'il  cesse  d'écoa- 
ter  les  fousses  terreurs  qu'on  cherche  à  jeter  dans 
son  ftme.  Qu'il  se  conduise  comme  il  y  a  dix  Jours, 
puisque  l'état  des  subsistances  et  lenr  distribution 
sont  les  mêmes  qu'il  y  a  dix  jours  ;  qu'il  se  méfie  de 
ceux  qui  cherchent  à  l'abuser,  et  qu'il  se  persuade 
bien  que,  si  la  disette  était  possible,  elle  ne  serait 
occasionnée  que  par  la  crainte  de  la  disette;  c'est 
en  alarmant  le  peuple  sur  les  subsistances  du  len- 
demain que  l'on  double  tout  d'un  coup  ja  consom- 
mation du  iour,  et  c'est  ce  que  savent  bien  les  hom- 
mes coupables  qui  se  transportent  dans  les  groupes 
pour  y  apporter  une  inquiétude  sans  objet. 

Que  les  citoyens  veillent  donc;  que  les'comités 
civils  des  sections,  que  toutes  les  autorités  consti- 
tuées se  réunissent  pour  Réprimer  ces  agitateurs  qui 
se  tourmentent  dans  tous  les  sens  pour  faire  revivre 
un  système  qui  n'est  plus  ;  que  le  peuple  soit  calme 
et  tranquille,  et  la  patrie  sera  encore  une  fois  sau- 
vée» (On  applaudit.) 

On  demande  de  toutes  parts  l'impression  de  ee 
discours  ;  elle  est  ordonnée  par  un  décret  unanime- 
ment adopté  en  ces  termes  : 

•  La  Con?eBtion  nationale,  après  avoir  eotendn  un 
rapport  bit  an  nom  du  eomitéde  salut  public,  relatif  à  q« 
nouveau  procédé  sur  la  monture  d<i  graini  et  la  salnbrilé 
du  pain,  et  aux  manœovresdes  malveillants  qui  cberdMi 
à  répandre  des  inquiétudes  sur  l'arrivage  des  sabaistaoces 
à  Paris,  décrète  que  ce  rapport  sera  Inséré  eo  entier  au 
Bulletin  de  correspondance,  et  que  la  partie  concernant 
ipécialement  les  subsisianeet  de  Paria  sera,  en  outre,  In- 
prfanée  en  placard ,  affichée  dans  Paria,  et  nolaouBent  aux 
portes  des  boulangers,  • 

RicBABD,  au  nom  du  comité  de  salut  public  :  Ci- 
toyens, l'armée  du  Nord  n'est  arrêtée  par  ancun  ob- 
stacle dans  sa  marche  victorieuse  sur  la  Hollande. 
Elle  avait  devant  elle  une  place  importante  et  re- 

f gardée  comme  une  des  principales  clefii  de  la  Hoî- 
ande,  Heusden  ;  elle  est  au  pouvoir  de  la  républi- 
que. (Vifs  applaudissements.) 

Voici  la  lettre  ofHcielle. 

Brmellaa,  flS  Ditoae. 

«  Nous  nous  empressons,  ehera  collées,  de  vous  an- 
noncer la  prise  de  Heusden  i  les  conditions  de  la  capitula* 
lion  BODt  les  mêmes  que  celles  de  Maéstricht  :  celte  prise 
nous  facilitera  infiniment  le  surplus  de  nos  opérations. 
Nous  allons  en  avant. 

•  Signé  Baiu,  RoaasJOT  et  Alquiis.  • 

Cette  lettre  est  vivement  applaudie  :  toute  l'as- 
semblée se  lève  aux  cris  de  vive  la  républigtal 

Insertion  au  Bulletin, 

GossuiN,  au  nom  du  comité  militaire  :  Citoyens, 
c*est  en  continuant  de  fixer  vos  regards  sur  toutes 
les  parties  de  l'administration  militaire  que  le  tré- 
sor de  la  république  et  le  sort  de  ses  défenseurs  s'a- 
mélioreront. Des  réclamations  se  sont  souvent  lait 
entendre  dans  cette  enceinte  sur  le  choix  et  la  ges- 
tion des  commissaires  des  guerres.  Votre  comitemi- 
litaire,  par  son  impartialité  et  sa  sévérité  pour  les 
principes,  espère  repondre  à  votre  confiance,  et  que 
vous  accueillerez  favorablement  le  travail  relatif  à 
ces  fonctionnaires  militaires  qu'il  va  vous  soumettre. 

Une  loi  du  16  avril  1703  (vieux  style)  a  créé  trois 
cent  quatre-vingt-dix  commissaires  des  guerres; 
celle  du  24  juillet  a  augmenté  oe  nombre  de  cin*  - 
quante  sdjoints. 


Les  levées  en  masse  ayant  rendu  ce  supplément 
encore  insufGsant,  la  Convention  nationale  a  auto* 
risé  les  représentants  du  peuple  aux  armées  à  nom- 
mer provisoirement  des  commissaires  des  guerres 
pour  le  temps  de  leurs  rassemblements. 

Ces  différentes  créations  additionnelles  à  Torgani- 
sation  du  mois  d'avril  y  ont  porté  une  confusion, 
qu'il  est  du  bien  du  service  de  laire  cesser. 

Il  serait  à  désirer  que  Torganisation  des  commis- 
saires des  guerres,  qui  doit  avoir  pour  base  la  sû- 
reté du  service  et  Tintérét  du  trésor  public,  fût 
rendue  immuable  ;  mais  les  circonstances  ne  per- 
mettent pas  d'atteindre  ce  but. 

De  tout  temps  les  commissaires  des  guerres  ont 
été  chargés  des  mêmes  fonctions,  soit  qu'elles  aient 
été  affectées  au  service  d*une  place  de  garnison  ou 
d'un  corps  de  troupes  en  particulier,  soit  qu'elles 
aient  dû  être  exercées  sur  une  certaine  étendue  de 
territoire  ;  mais  ces  fonctions  se  sont  tellement  mul- 
tipliées, en  raison  du  mouvement  continuel  des  ar- 
mées de  la  république,  de  leur  force  et  de  leurs  suc- 
cès, que  dans  l'étal  des  choses  leur  service  et  celui 
des  départements  ne  peuvent  être  faits  sans  le  con- 
cours de  six  cents  commissaires  des  guerres,  et  qu'il 
devient  impossible  d'en  réduire  le  nombre  à  moins. 

L'administration  militaire  d'une  armée,  quelque 
forte  qu'elle  soit,  demande  des  vues  générales,  de 
l'ensemble  et  un  point  central  d'autorité  et  d'opéra- 
tions; c'est  pourquoi  nous  vous  proposons  d'établir 
un  commissaire  ordonnateur  en  chef  (lour  chacune 
des  onze  armées. 

La  loi  de  1791  prescrivait  des  règles  pour  l'admis- 
sion aux  places  de  commissaire  des  guerres.  Le  mode 
qui  a  été  établi  alors  aurait  produit  avec  le  temps 
une  excellente  composition  ;  des  considérations  que 
l'on  ne  conçoit  pas  l'ont  fait  rejeter,  et  ont  donné 
au  ministre  de  la  guerre  la  plus  grande  latitude  dans 
les  choix. 

Mais  la  Convention  ayant  reconnu  que  l'instruc- 
tion et  l'expérience  n'étaient  pas  moins  nécessaires 
que  le  patriotisme,  on  n'a  pas  dû  négliger  ces  grands 
moyens  de  succès. 

On  a,  en  conséquence,  partagé  l'avancement  aux 
grades  entre  un  choix  libre  et  l'ancienneté. 
.  Certes,  citoyens,  ne  nous  dissimulons  pas  que  les 
lumières  et  la  moralité  n'ont  pas  constamment  dé- 
terminé le  choix  de  ces  fonctionnaires  militaires. 
Ne  jetons  pas  de  la  défaveur  sur  des  hommes  qui 
doivent  nécessairement  être  investis  d'une  grande 
confiance  pour  opérer  le  bien  que  la  patrie  a  droit 
d'attendre  d'eux;  mais  convenons  que  si  la  plupart 
d'entre  eux  suit  directement ,  par  son  expérience  et 
son  activité  ,  la  route  qui  lui  est  tracée,  les  autres , 
beaucoup  moins  bien  partagés  en  forces  morales  que 
physiques,  paralysent  le  service  ,  et  pourraient  se 
distinguer  mieux  devant  l'ennemi,  la  baïonnette  à  la 
mnin. 

La  Convention  nationale,  justement  investie  de  la 
confiance  du  peuple ,  s'est  réservé ,  pendant  toute  la 
durée  du  gouvernement  révolutionnaire,  de  nommer 
à  la  majeure  partie  des  emplois  civils  et  militaires; 
l'intérêt  général  lui  en  a  impérieusement  fait  un 
devoir ,  et  une  longue  expérience  l'avertit  que  cette 
utile  précaution  doit  s'étendre  également  sur  ceux 
des  fonctionnaires  dont  la  réorganisation  notis  oc- 
cupe en  ce  moment. 

La  seule  gradation  qui  convient  aux  commissaires 
des  guerres  pour  leur  avancement  entre  eux  est  une 
gradation  de  capacité,  de  talent  et  d'expérience.  Il 
est  bien  évident  que  ces  qualités,  qui  dérivent  d'à-  j 
bord  de  l'éducation,  sont  encore  le  produit  de  l'exer-  j 
cice  des  fonctions  et  de  l'âge. 

Un  autre  point  également  essentiel ,  c'est  celui  de 
la  subordination  de  tous  les  employés  et  agents  queU 


conques  d'administration  des  armées  aux  commis- 
saires des  guerres. 

Il  convient  que  ces  agents  soient  entièrement  sous 
leur  main  ;  il  faut  anéantir  ces  rapports  indéterminés 
qui  donnent  lieu  aux  prétentions,  aux  conleslatious, 
aux  jalousies  et  à  tous  actes  de  contrariété.  Une  ar* 
mée  est  un  tout  composé  d'un  grand  nombre  de 
parties  ;  chacun  doit  s'y  borner  à  Ta  fonction  qui  lui 
est  essentiellement  départie  ;  c'est  d'un  centre  com- 
mun que  doivent  émaner  toutes  les  dispositions  gé- 
nérales ;  c'est  à  ce  même  centre  que  doivent  se  rap- 
porter toutes  les  opérations  partielles  et  secondaires  ; 
enfin ,  tout  doit  être  mu  par  une  impulsion  une  et 
totale. 

Les  commissaires  des  guerres  seulement  ont  une 
responsabilité  particulière  ;  ils  doivent  être  entière- 
ment indépenJants  des  chefs  militaires  dans  l'exer- 
cice de  leurs  fonctions  ;  s'ils  ôrévariqnent  «  la  peine 
,est  prononcée  dans  le  code  pénal. 

Le  rapporteur  présente  un  projet  de  décret  dont 
plusieurs  articles  sont  adoptés,  sauf  rédaction. 

Lecarpentier  observe  que  les  adjudants  générani 
ne  jouissent  que  de  12,000  liv.  d'appointement ,  et 
demande  que  celui  des  commissaires  ordonnateurs 
soit  ré^lé  sur  le  même  taux. 

Letourneur  (de  la  Manche)  quitte  le  fauteuil  ^  et 
demande  la  parole  pour  combattre  cette  proposition 
si  elle  est  appuyée. 

Sallbngbos  :  Je  l'appuie. 

Lbtoubnbur  :  Citoyens,  on  ne  peut  établir  d« 
comparaison  qu'autant  qu'il  y  a  identité  ;  il  n'est  pas 
un  membre  de  cette  assemblée  qui  n'ait  été  frappé 
dos  détails  immenses  qui  constituent  les  fonc- 
tions des  commissaires-ordonnateurs  des  guerres.' 
Tenus  à  des  tournées  presotie  continuelles,  dans  une 
snhère  d'activité  qui  embrasse  toutes  les  parties 
drune  vaste  administration  ,  ils  doivent  être  salariés 
en  raison  de  l'importance  de  leurs  services  et  des 
charges  qui  en  sont  inséparables. 

Les  adjudants  généraux  n'ont  à  remplir  que  des 
objets  de  service  très-partiels  ;  ces  places  sont  occu- 
pées la  plupart  par  de  jeunes  citoyens ,  et  leur  trai- 
tement est  suffisant.  1^  comparaison  de  Lecarpen* 
tier  porte  donc  absolument  à  faux. 

D'ailleurs ,  citoyens ,  le  comité  militaire  vous  ob- 
serve que  le  traitement  des  commissaires  n'est  point 
augmenté  par  le  projet  de  loi.  La  Convention  na- 
tionale ne  voudra  pas  sans  doute  qu'au  moment  où 
l'on  augmente  le  traitement  des  fonctionnaires  pu- 
blics celui  des  commissaires  ordonnateurs  soit  di- 
minué. 

Si  la  république  veut  être  bien  servie ,  elle  veut 
aussi  que  ceux  qui  la  servent  soient  convenablement 
traités.  Je  demande  la  question  préalable  sur  la  pro- 
position de  Lecarpentier,  et  le  maintien  de  l'article. 

La  proposition  de  Letourneur  est  adoptée. 

(Nous  donnerons  demain  le  décret  entier.) 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures. 

SEANCB  DU  29  NITOSB. 

On  lit  l'Adresse  suivante  : 

•  Le  comité  révolutionnaire  du  district  de  Lyon  s^ein- 
presse  de  Taire  connaître  les  sentiments  d'allégresse  et  de 
reconnaissance  dont  sont  pénétrés  chaque  jour  lesbabiUints 
de  Ljoa  à  la  Doaveliedes  glorieux  travaux  de  la  ConveulioD; 
il  vient  mêler  ses  cris  de  félicitations  avec  ceux  qui  reten* 
lissent  de  tous  les  points  de  la  république. 

«  La  Convention,  en  se  prononçant  fortement  contre  le 
règne  des  faciieux,  des  intrigants  «  des  terroristes  et  des 
déprédateurs  de  la  fortune  publique,  y  a  substitué  celui  de 
la  vertu  et  de  la  justice,  qu'elle  a  déclarées  ùire  les  bases 
sur  lesquelles  die  veut  fcnder  la  république. 

«  Les  décrets  en  faveur  des  villes  de  Bordeaux ,  Beau- 
vais  9  Marseille ,  Caeo,  a  celui  en  CiTeur  des  rebelles  de  la 


2i0 


Vendée,  les  décreli  qui  rappellent  les  soiiante  et  onze  dé- 
putés dans  le  sein  de  la  Convention,  celui  qui  rapporte  les 
disposilious  de  la  loi  du  27  germinal,  sont  autant  de  preq* 
ves  que  ce  n*e$t  point  en  vain  que  la  Con?ention  a  mis  la 
justice  et  la*?ertu  à  Tordre  du  jour. 

«  NVn  doutcxpas,  citoyens  représentants,  les  désor- 
dres qui  ont  eu  lieu  dans  les  différentes  villes  de  la  répu- 
blique, les  rébellions  qui  s*y  sont  manifestées,  ne  furent 
Jamais  que  Toufrage  d'une  poignée  de  factieux,  d'intri- 
gants étrangers  à  la  ville  qu^ls  désorganbaieut. 

If  Lyon,  celte  ville  si  célèbre  par  son  commerce  et  ses 
manulaclurrs,  si  importante  par  sa  situation  et  son  im- 
mense population,  fut  une  des  premières  villes  choisies  par 
Us  factieux  pour  l'entraîner  à  sa  ruine  et  k  sa  perte. 

•  En  conservant  cette  ville  vouée  à  la  destruction ,  la 
Convention  n'a  pas  encore  prononcé  sur  le  sort  de  ses  ha- 
bitants ;  ils  sont  restés  frappés  et  soumis  aux  dispositions 
pénales  du  décret  des  21  juin ,  S  et  12  juillet  1793. 

•  La  loi  du  8  germinal,  rapportant  l'article  V  de  la  loi 
du  12  juillet,  qui  suspendait  tout  payement  des  sommet 
dues  aux  habitants  de  cette  commune ,  les  i  assujettis  à 
rapporter  un  certiGcat  du  comité  révolutionnaire,  •  qu'ils 
oe  sont  pas  compris  sur  la  liste  des  rebelles  ou  qu'ils  en  ont 
été  rayés.  - 

•  Le  comité  révolutionnaire  chargé  de  délivrer  ces  cer- 
tificats est  souvent  embarrassé  sur  le  choix  des  personnes 
auxquelles  il  peut  et  doit  en  délivrer. 

■  Les  lois  de  rigueur  ont  été  appliquées  à  tous  les  ha> 
bitanli  de  la  commune,  sans  distinction  des  auteurs  et  in- 
•tigateurs  de  la  rébellion  ;  aucune  liste  des  personnes  dé- 
signées rebelles  n'a  été  faite  et  arrêtée  légalement. 

•  Ces  obstacles  à  la  délivrance  des  certificats  de  non-ré- 
bellion, les  lois  pénales  existant  encore  sur  les  habitants 
delà  Tille,  en  éloignent  les  citoyens  encore  froissés  par  le 
souvenir  du  passé;  la  terreur  r^ne  au  fond  de  leur  âme: 
ils  n'osent  sortir  des  retraites  où  ils  s'étaient  enfouis  pour 
conserver  leur  existence. 

•  Le  comité,  convaincu  que  l'intention  de  la  Convention 
est  de  rendre  au  commerce  toute  l'activité  qui  lui  est  né- 
cessaire, qu'elle  veut  rappeler  dans  le  sein  de  la  société 
tous  les  hommes  utiles  qui  ont  été  égarés  sans  avoir  eu 
rintention  d'être  coupubles,  vient  déposer  dans  le  sein  de 
la  Convention  les  obstacles  qu'il  trouve  dans  la  marche  de 
ses  opérations,  demander  le  rapport  des  décrets  des  21  juin, 
5  et  1 2  juillet.  Cet  acte  éclatant  de  la  justice  de  la  Conven- 
tion rendra  à  la  république  une  ville  importante ,  au  con- 
merce  une  de  ses  branches  les  plus  étendues,  et  à  la  société 
une  nombreuse  populaiiou.  Vive  la  république  I  » 

(Suivent  les  signatures  des  membres  du  comité  révolu- 
tionnaire. ) 

PocBOLLB  :  Je  crois  que  la  Convention  devrait 
charger  les  comités  d^examine r  s'il  n*est  pas  temps 
d*user  pour  Lyon  de  cette  indulgence  qui  lui  a  mé- 
rité tant  de  bénédictions  dans  d'autres  parties  de  la 
républioue  ;  que  les  chefs  de  la  rébellion  lyonnaise, 
que  l'intime  Précv  soit  le  seul  que  poursuive  l.i 
vengeance  nationale  ;  mais  indulgence  pour  les  mal- 
heureux qni  n'ont  été  qu'égarés;  mais  justice,  mais 
secours  pour  cette  foule  de  femmes  et  d  enfants  dont 
les  maris  et  les  pères  ont  été  frappés  du  glaive  de 
la  loi.  , 

Pendant  le  séjour  que  j*ai  fait  à  Lyon  avec  mon 
collègue  Charlier,  nous  avons  toujours  eu  le  cœur 
déchiré  par  le  spectacle  de  leur  infortune,  et  encore 
plus  par  l'impuissance  douloureuse  de  soulager  leur 
misère.  Hâtez  le  rapport  qui  doit  accorder  des  se- 
cours à  ces  malheureuses  victimes. 

Citoyens,  il  est  bon  de  vous  dire  qii^il  y  a  encore 
dans  Lyon  dos  hommes  qui  doutent  du  succès  et  de 
la  durée  de  la  révolution  du  0  thermidor  ;  des  gens 
qui  soutiennent  que  cette  ville  n'a  point  été  assez 
punie  ;  uiti  pensent  qu'il  a  Iron  peu  coulé  de  sang, 

Î|u'on  n  a  ims  encore  assez  démoli  de  maisons.  Ci- 
Ojrns,  ncljevonsde  détrôner  cette  snnguinocratie 
dégoAlunte,  qui  ne  s'nliiiiente  que  dans  les  tom- 
'  Immiux,  et  ne  m  rérrée  qu'au  milieu  des  ruines.  (On 
applaudit  vlvi'iiiait.) 


Je  demande ,  en  me  résumant ,  que  les  comités 
soient  ch^rgé^  d'examiner  si  Ton  ne  doit  pas  rap- 
porter tous  les  décrets  qui  pèsent  sur  la  commune 
de  Lyon;  si  Précy  ne  doit  pas  seul  être  poursuivi; 
i  et  enfin ,  que  le  rapport  sur  les  secours  à  accorder 
;  aux  malheureuses  victimes  de  celte  commune  soit 
;  fait  dans  le  pltis  bref  délai. 

"*  :  J'arrive  de  Lyon  ;  le  peuple  de  cette  com- 

!  mune  a  été  cina  jours  sans  pain,  et  il  n*a  pas  dit  un 

!  mot.  11  a  été  réduit  à  deux  onces  de  riz  par  jour.  Il 

I  passe,  dans  cette  saison  rigoureuse,  cinq  heures  par 

jour  à  la  porte  des  boulangers  pour  avoir  une  livre 

de  pain  noir,  qu'il  reçoit  sans  murmures.  J'appuie 

la  proposition  qui  vous  a  été  faite. 

Cbarlibb  :  Je  l'appuie  aussi.  La  patience  du  peu- 
ple de  Lyon,  les  témoignages  que  deux  représentants 
du  peuple  viennent  de  vous  rendre ,  et  juc  je  con- 
firme, doivent  déterminer  la  Convention  à  rapporter 
les  lois  qui  pèsent  sur  la  commune  de  Lyon.  Cette 
faveur  ne  doit  point  s'étendre  aux  émigrés  qui  ont 
partagé  la  rébellion  avec  l'infftme  Précy  ;  elle  doit 
être  réservée  pour  les  seuls  habitants  de  cette  com- 
mune qui  n*ont  été  qu'égarés.  Je  demande  le  renvoi 
aux  comités  des  diverses  propositions  qui  ont  été 
faites,  et  que  provisoirement  les  lois  nénales  qui 
pensent  sur  cette  commune  soient  suspenaaes. 

La  Convention  adopte  la  proposition  de  Charlier. 
(La  suite  demain.) 


iV.  B.  Bobset  a  Tait  le  rapport  de  sa  mission  dans  les  dé- 
partements de  l'Ain ,  l'Allier  Saône-et-Loire» 

Boissy  d'Anglas ,  rapporteur  do  comité  de  salut  public, 
a  nUt  décréter  une  indemnité  du  salaire  d'un  trimestre 
pour  les  employés  supprimés  de  la  corn  mission  de  commerce 
qui  ne  seront  pas  replacés  dans  d'autres  administrations* 

—  Ruelle  a  demandé  que  les  femmes  des  rebelles  de  la 
Vendée  condamnées  à  mort,  et  détenues  pour  cause  de 
grossesse ,  ainsi  que  les  rebelles  condamnés  à  la  déporta- 
tion ,  fussent  mis  en  liberté  en  vertu  de  l'amnistie.  Celte 
proposition  a  été  décrétée  ;  elle  a  été  généralisée  ensuite 
par  Bourdon  (  de  l'Oise),  d'après  les  observations  duauel 
la  Convention  a  ordonné  la  mise  en  liberté  de  i^is  les 
citoyens  détenus  en  vertu  de  jugemenU  pour  cause  de  ré- 
volution, à  l'exception  de  ceux  condamnèi  pour  des  provo- 
cations i  la  royauté  ou  pour  des  vols  et  autres  délits  posi- 
tifs spécifiés  par  le  code  pénal. 

Ce  décret  avait  été  précédé  d'un  aperçu  énergique  des 
jugements  atroces  rendus  sOus  la  tyrannie  de  Rol^s  pierre; 
Pénièrcs,  Bourdon,  Bentabole,  André  Dumont  avaient 
parlé  sur  les  crimes  sans  cesse  renaissants  de  la  faction  teiw 
rorisle,  qui  s'alimente  de  sang  humain,  même  aux  der- 
niers moments  de  son  existence.  Hier  un  citoyen  ouvrier 
du  faubourg  Antoine  a  été  assassiné  par  un  Jacobin, 
en  présence  de  la  force  armée  et  d'un  officier  public,  pour 
avoir  prêché  la  soumission  aux  décrets  de  la  Conventioo 
nationale. 

Il  sera  fait  un  rapport  sur  les  secours  dus  à  la  veuve.<^ 
L'auteur  de  cet  attentat  a  été  arrêté. 


Brûlemenl  d'assignats. 

Le  29  nivôse,  ,à  dix  heures  dû  matin ,  il  a  été  br6lé, 
dans  la  cour  du  nouveau  local  de  la  vérification  des  assi- 
gnats, la  somme  de  15  millions  en  assignats,  provenant 
des  échanges  ;  lesquels,  joints  aux  2  milliards  529  millions 
688,000  liv.  déjà  brûlés ,  forment  un  total  de  2  milliards 
544  millions  6S3,000  liv. 

Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 
miers mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscriptions  au  grand  livre  Celui  pour  les  rentes  viagères 
est  de  huit  mois  vin£[t  et  un  jours  de  l'année  1793  (vieux 

style). 


GAZETTE  NATIONALE  o»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


NO  121. 


Primidi  1er  Pluviosb,  Fan  3^.  {Mardi  20  Janyieii  1795,  vieux  ityle,) 


AVIS  DE  L'ANCIUN   MOIflTBUB. 

Le  décret  de  la  Convention  nationale  qui  fixe  à  moitié  en 
sus  lef>ort  des  journaux,  Taugmen  talion  progressive  des  ma- 
tic/es  premières,  et  surtout  au  papier,  ainsi  que  de  tout  ce 
qni  est  indispensable  pour  rcxploitation  du  Mçnileur,  qui, 
de  tous  les  journaux ,  est  le  plus  étendu ,  noua  forcent  à  un 
nouvel  encliérissement,  que  nous  prenons  rengagement  for- 
mel de  dimioiicr  aussitôt  que  les  circonstances  nous  permet- 
tront de  nous  livrer  à  cette  mesure. 

En  conséqucnre,  k  compter  de  ce  jour  1"  pluviôse,  le 
prix  de  la  souscription  du  Moniteur  est  pour  les  départe- 
ments de  30  liv.  pour  trois  mois,  de  60  liv.  pour  six  mois,  et 
de  ISO  liv.  pour  l'année  entière,  y  compris  les  jours  sans- 
culottides,  rendu  franc  de  port  dans  tonte  la  république. 

L^abonnement,  pour  Paris,  est  de  S5  liv.  pour  trois  mois, 
ttO  liv.  pour  six  mois,  et  100  liv.  pour  rannée  eolièrc,  y  tpmr 
pris  également  les  sansculottidcs. 

Nous  n'avons  pas  de  bureau  intermédiaire,  à  Paris,  pour  la 
recette  des  abonnements  :  les  lettres  et  l'argent  doiveot 
,  être  adressés,  francs  de  port,  au  citoyen  Aubry,  directeur, 
rue  des  Poitevins,  n®  18.  II  faut  avoir  soin  (attendu  le  nom- 
bre de  lettres  qui  s*cgarent)  de  charger  celles  qui  renfer- 
ment des  assignats. 

Tout  ce  oui  doit  entrer  dans  la  compeaition  du  Moniteur 
sera  adresse  aux  rédacteurs,  me  des  Poitevins,  n»  18. 

Nota.  Il  faut  avoir  soin  d^ajouter  2C  sous  aux  lettres  d*en- 
▼oi  de  la  Belgique  et  autres  pays  où  i*on  ne  peut  pas  afllVan- 
chir.  ^ 


POLITIQUE- 


ALLEMAGNE. 

Dês/roHtièrêt  de  la  GaUUU^  U  18  décembre,  —  La  ecMu* 
de  Yicune  continue  de  faire  filer  fers  les  confins  de  la  Po- 
logne une  grande  quantité  de  munitions  de  guerre  de  loule 
espèce.  La  ci-dcvanl  garnison  de  Yalencienness'y  porle  avec 
soixante  canons.  Plusieurs  des  généraux  qui  ont  com- 
battu pour  la  cause  de  la  liberté,  dans  la  révolution  polo- 
naise, se  sont  retirés  sur  les  possessions  autrichiennes.  On 
attend,  dit-on,  le  prince  Joseph  PonlatowskU 

—  Le  gouvernement  autrichien  a  expressément  réitél*é 
son  ordonnance  du  37  septembre  dernier,  qui  interdit  tout 
commerce  avec  la  France  ou  les  pays  conquis  par  ses  armes. 
Plusieurs  personnes  l'avaient  enfreinte  sous  prétexte  d'igno- 
rance. On  a  établi  un  délai  qui  s*é(eod  jusqu'à  la  fin.  de 
cette  aonéft,  passé  lequel  il  ne  pourra  plus  exister»  entre  la 
France  ou  les  pays  conquis  par  elle»  et  l'Autriche,  aucune 
relation  commerciale. 

l/A»,  le  6  janvier.'^  Aucmi  cercle  do  l'Empire  ne  délire 
plus  ardemment  la  paix  que  celui  de  Souabe.  Les  Etats 
sont  accables  par  les  frais  immenses  auxquels  ils  sont  im- 
posés pour  la  continuation  de  la  guerre.  La  caisse  du  cercle 
paie  chaque  mois  213,000  florins  pour  les  troupes  que  les 
Etats  sont  obligés  détenir  sur  pied.  Chaque  Etat  est  encore 
forcé,  indépendamment  de  celte  somme,  d'entretenir  son 
contingent  particulier.  Les  Etats  doivent, en  outre,  fournir 
leur  quote-part  des  mois  romains,  qui  doivent  être  versés 
dans  la  caisse  des  opérations  de  l'Empire. 

—  Il  a  éclaté  en  plusieurs  lieux  d'Allemagne  quelques 
mouvements  insurrectionnels. 

A  Augsbourg,  on  grand  tumulte  a  été  occasionné  par  les 
tisserands  et  leurs  compagnons ,  qui  y  sont  en  trésrgrand 
nombre.  Les  membres  du  magistrat  ont  été  insultés,  frap- 
pés. Le  directeur  du  cercle  a  envoyé  des  troupes  dans  cette 
ville  pour  y  réi{ibiir  le  calme. 

Dans  le  pays  de  Banovre,  les  milices  se  livrent  à  toutes 
iortcs  de  désordres ,  et  le  peuple  se  prononce  avec  violence 
ronire  le  service  militaire  auquel  il  est  assujetti.  La  ri^cnce 
s'(>M  efforcée  de  ranimer,  par  une  proclamation,  le  lèle  des 
habilanu. 

«•  Sci  ic,  -^Tome  .Y. 


Ici  un  grand  nombre  de  citoyens  ont  entrepris  de  s'op- 
poser à  l'enlèvement  des  canons  de  l'arsenal ,  que  le  duc  de 
Wurtemberg  Youlalt  faire  transporter  ailleurs.  L'empereur 
a  ordonné  des  perquisitions  contre  les  auteurs  de  ce  tumulte, 
et  a  défendu  qu'on  s'aaiembldt  à  l'avenir  sans  la  permission 
du  magistrat. 

A  Munich,  il  y  a  eu  im  mouvement  sérieux  parmi  les  gar- 
çons serruriers.  Les  compagnons  des  autres  corps  de  mé- 
tiers semblent  disposés  A  se  réunir  à  eux;  mais  on  a  pris  de 
promptes  mesures  pour  arrêter  cette  espèce  d'insurrection  ; 
huit  des  chefs  ont  été  arrêtés  et  enr^imentés;  tu  autre  a 
été  conduit  dans  une  maison  de  correction. 

PATS-BAS. 

Bruxelles  f  le  35  ni90ie.  —  Le  général  de  division  com- 
mandanl  en  chef  le  pays  conquis,  a  adressé  la  proclamation 
suivante  aux  babiianu  de  Bruxelles  : 

s  Des  bruits  calomnieux  ont  été  répandus  sur  la  position 
de  nos  armées  dans  la  Belgiqtie;  la  retraite  des  Français 
commence,  disait-on,  A  sWfectuer.  Et  c'est  au  moment  de 
nos  plus  heureux  succès,  que  la  malveillance  travaille  A  ac- 
créditer ces  mensonges  ! 

t  Belges,  connaisses  l'erreur  o6  veulent  vous  plonger  les 
vils  ennemis  de  notre  félicité  commune:  voyez  les  Français, 
au  milieu  dos  glaces  de  l'hiver ,  emporter  de  vive  force  des 
remparts  jt  dei  villes,  et  triompher  des  obstacles  que  leur 
opposèrent  à  la  fois  les  rigueurs  de  la  saison,  une  terre  in- 
grate et  les  satellites  des  rois. 

I  En  vain  la  malveillance  crie-t-elle  A  l'Imposture ,  A  la 
nouvelle  de  nos  conqu^es  multipliées  :  elle  est  aujourd'hui 
forcée  d'avouer  sa  perfidie,  eg  voyant  défiler  dans  l'intérieur 
de  la  France  les  prisonniers  faits  par  nous  A  Grave  et  au- 
tres places. 

«  Qu'ils  se  portent,  les  Incrédules,  sur  leur  passage,  tant  A 
Gand  qu'A  Bruxelles;  ils  les  verront  précédés  par  vingt  dra- 
peaux qui  ne  sont  encore  que  l'avant-garde  des  nouvelles 
prises  que  promet  la  prochaine  campagne  sur  les  esclaves , 
et  des  revenants  de  Bols-le-Duc,  tous  autres  que  ceux  qu'ils 
attendaient. 

c  Esl-il  une  preuve  plus  forte  de  la  réalité  de  nos  succès, 
et  un  argument  qui  combatle  plus  tietorieusementies  fSEiusses 
assertions  de  nos  ennemis? 

«  Belges,  redoutes  leurs  mancBuvves,  elles  ne  peuvent  que 
vous  être  préjudiciables;  les  Français  sont  vos  amis,  ils 
vous  apportent  la  liberté:  flxez-la  sur  votre  sol;  elle  pourra, 
comme  à  nous,  vous  coûter  quelques  sacrifices,  mais  elle 
vous  en  dédommagera  avec  usure  par  les  bienfaits  dont  elle 
est  la  source. 

«  Signé  Ferrahd. 

c  ^oar  copie  conforme. 

i  LBciAaB.» 


KÉPUBL1QUE  FRANÇAISE» 

De  Paris.  ~  Les  rigueurs  de  Thiver  ne  s'étaient 
point  fait  sentir  depuis  le  commencement  de  la  ré« 
volution.  Cette  année,  la  durée  du  froid  ajoute  en- 
core à  sa  violence.  Le  peuple,  au  milieu  des  priva- 
tions qu*entraîne  nécessairement  le  malheur  de  la 
saison,  malgré  la  cherté  où  de  mauvaises  lois  ont 
porté  les  denrées,  déploie  un  grand  caractère  de  pa- 
tience et  de  courage,  il  attend,  sans  murmurer,  le 
moment  sans  doute  prochain  où  la  sagesse  des  dé- 
crets de  la  Convention  va  ramener  l'abondance  en 
rétablissant  la  concurrence  par  la  liberté  rendue  au 
commerce,  et  par  la  sécurité  ramenée  au  sein  des 
familles  industrieuses.  Mais,  avant  que  ce  bonheur 
vienne  consoler  les  citoyens  indigents  ou  peu  fortu- 
nés, la  sévérité  de  la  nature  offre  aux  représentants 
du  peuple  une  occasion  de  prouver  à  la  classe  souf- 
frante les  sentiments  d'humanité  qui  les  animent. 
Sans  doute  il  }.a  dans  chaque  section  des  comités  de 

Si 


243 


(Il 


secours  et  de  bienfaisance  chargés  de  soulager  rin- 
fortune  ;  mais, qurloue  vigilance,  quelque  zclc  qu'ils 
puissent  apporter  dans  cet  honorable  ministère,  il 
n>a  est  pas  moins  vrai  que  de  longues  formalités 
retardent  beaucoup  les  soulagements  que  les  mal- 
heureux réclament. 

Pour(|uoi  les  représentants4il  peuple  ne  se  parta- 
geraient-ils pas  pour  un  moment  le  soin  de  porter 
la  vie  dans  les  réduits  oii  des  familles  entières 
éprouvent  les  horreurs  du  froid  et  de  la  faim  ?  Qu'on 
Juge  de  In  promptitude  des  secours  que  répandraient 
au  moins  cinq  cents  députés,  se  divisant. chacun  un 
arrondissement,  allant,  sans  être  connus,  visiter  le 
pauvre,  prenant  des  renseignements  exacts  sur  sa 
situation,  lui  donnant  de  suite  un  bon,  avec  lequel 
il  obtiendrait,  d'une  caisse  de  bienfaisance  établie 
h  cet  eflct,  de  quoi  subvenir  à  ses  premiers  be- 
soins. 

Je  ne  parle  point  des  bienfaits  jiarticuliers  que  la 
sensibilité  nourrait  suggérer  au  représentant  géné- 
reux. Quelles  bénédictions  iraient  environner  alors 
la  Convention  !  combien  cet  emploi  respectable  de 

Quelques  heures  de  la  journée,  de  quelques  fonds 
Il  trésor  public,  feraient  chérir  encore  la  liberté, 
la  réptd)lique,  et  l'assemblée  dont  Ténergie  et  la 
vertu  ont  écrasé  toutes  les  tyrannies  !  Représentants 
du  peuple,  ne  dédaignez  point  des  soins  par  lesquels 
la  rastiieiisc  générosité  des  rois  et  leur  hypocrite 
bienfaisance  clierchnient  a  écarter  loin  des' regards 
du  citoyen  le  tableau  des  misères  dont  ils  étaient 
presque  toujours  la  seule  cause. 


CONVENTION    NATIONALE. 

Préùdenee  de  Letourneur  {de  ta  Manche), 

Loi  rendue  dans  les  séances  des  26  et  28  nivôse,  sur 
Vorganisation  des  commissaires  des  guerres  et 
leurs  fonctions^  tant  aux  armées  que  dans  tes  dt- 
visions  militaires  delà  république, 

■La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  son  comité  militaire,  décrète  : 

TITRE  lor. 

Dispositions  générales. 

Section  l'e. 

institution,  réception  et  devoirs  des  commissaires 
des  guerres  ;  leurs  rapports  avec  les  commissions 
executives  elles  officiers  généraux. 

•  Art.  1er.  Tous  les  détails  de  l'adininislralion 
militaire,  tant  dans  les  places  de  gncrre  et  autres 
J{^x  de  garnison  ou  rnisenibleinent  de  troupes  que 
oans  les  camps  et  armées,  sont  confiés  à  des  commis- 
9ÊMm  des  guerres  ordonnateurs  et  ordinaires. 

•  II.  L'administration  militaire  comprenant  tous 
U9  objets  conlléj  à  ta  conduite  et  à  la  direction  des 
cooinissions  executives,  les  commissaires  des  gucr- 
J[»  seront  aux  ordres  desdiles  commissions  et  sous 
wr  surveillance  reupeclive ,  en  ce  qui  conceruc 
radoiinistration  de  chacune  d'elles. 

^  ^m»  Le  mode  d'administration  militaire  sera  uni- 
■Jjc  et  établi  Mir  les  mêmes  principes  dans  toute 
^yadue  de  la  république  et  aux  armées.  Lescom- 
mu  executives  sont  chargées  de  ramener  à  un 
système  toutes  les  opérations  administratives 


de  leur  ressort,  de  prescrire  aux  commissaires  or- 
donnateurs de  s'y  conformer  en  tout  point,  et  de  te- 
nir la  main  à  ce  que  les  commissaires  des  guerres 
s'y  conforment  également. 

•  IV.  La  responsalillité  des  commissaires  des 
guerres  et  les  intérêts  de  la  république  exigeant  que 
ces  fonctionnaires  militaires  soient  bien  inioroiés  de 
toute  rétendue  de  leurs  devoirs,  il  sera  incessam- 
ment dre^é  une  instruction  méthodique  de  l'en- 
semble de  leur  service,  pour  en  déterminer  tous  les 
détails ,  et  pour  servir  de  règle  de  conduite  aux 
commissaires  des  guerres  et  aux  différentes  admi- 
nistrations civiles  et  militaires,  avec  lesquelles,  par 
la  nature  de  leurs  fonctions,  ils  se  trouvent  avoir  des 
rapports. 

•  V.  La  commission  des  administrations  civiles, 
police  et  tribunaux,  enverra  une  collection  com- 
plète des  lois  militaires  à  chaque  commissaire  des 
guerres  nouvellement  nommé,  aussitôt  qu'il  en  au- 
ra fait  la  demande.  Elle  fera  é^^aleinent  parvenir 
aux  commissaires  des  guerres  qui  étaient  déjà  en 
fonctions  les  lois  qui  leur  manquent;  toutes  celles 
relatives  aux  troupes  de  la  république,  qui  pour- 
raient être  rendues  par  la  suite,  leur  seront  soigneu- 
sement adressées  à  l'instant  de  leur  promulgation. 

•  VI.  Avant  d'exercer  aucunes  fonctions,  les  com- 
missaires des  guerres,  ordonnateurs  et  autres,  pré- 
senteront à  l'autorité  constituée  et  principale  du 
lieu  dans  lequel  ils  doivent  résider  l'ordre  de  service 
qui  leur  aura  été  expédié  par  la  commission  de  l'or- 
ganisation et  du  mouvement  des  armées  de  terre; 
ils  en  feront  certifier  autant  de  copies  qu'il  y  aura 
d'administrations  de  dénartcment  et  de  district  dans 
la  division  militaire  à  laquelle  ils  seront  attachés  ; 
et  ces  copies,  dûment  collationnées  et  ainsi  certi- 
fiées, seront  adressées  par  eux  à  chacufie  de  ces  ad- 
ministrations. Celles  de  district  enverront  sur-le- 
champ  un  extrait  desdits  ordres  de  service  i  chacune 
des  municipalités  de  leur  arrondissement:  ces  or- 
dres de  service  ainsi  présentés  au  département,  au 
district  et  à  la  municipalité  du  lieu  de  la  résidence 
des  commissaires  des  guerres,  devront  y  être  enre- 
gistrés aussitôt,  et  mention  de  l'enregistrement  sera 
laite  sur  ledit  ordre. 

«  Vil.  Les  commissaires  ordonnateurs  et  ordi- 
naires employées  aux  armées,  sur  le  territoire  de  la 
républi{|uc,  feront  enregistrer  leurs  ordres  de  ser- 
vice à  la  municipalité  du  lieu  de  leur  principal  sé- 
jour, et  au  bureau  de  Tétat-major,  qui  sera  tenu 
d'en  transmettre  l'extrait  à  l'ordre,  aussitôt  la  com- 
munication desdils  ordres  de  service. 

•  Le  commissaire  ordonnateur  en  chef  sera  tenu 
également  de  faire  notifier  à  l'ordre  de  l'état-major 
général  le  nom  et  les  fonctions  de  chacun  des  com- 
missaires des  guerres  employés  sous  lui. 

•  Vlll.  Aussitôt  après  qu'un  commissaire  âcs 
guerres  nouvellement  pourvu  aura  fait  aux  corns 
administratifs  du  lieu  de  la  résidence  qui  lui  aura  été 
assignée  la  présentation  de  ses  ordres  de  service,  le 
commandant  militaire  en  chef  du  lieu  le  fera  recon- 
nartre  par  les  troupes  qui  y  seront  en  garnison  ;  à 
cet  effet,  elles  seront  rassemblées  avec  leurs  dra- 
peaux, étendards  et  guidons.  Le  commandant  fera 
battre  un  ban  et  porter  les  armes  ;  il  se  placera  au 
centre  avec  le  commissaire  des  guerres  nouvelle- 
ment pourvu.  Lecture  des  onlres  de  service  sera  faite 
par  le  sécrétai re-greRier  de  la  municipalité  ;  ensuite 
le  pourvif  prêtera  ce  serment  :  •  Je  jure  d'obéir  aux 

•  lois,  de  remplir  avec  assiduité,  impartialité  etdés- 

•  intéressement,  les  fonctions  qui  me  sont  confiées, 
«  et  de  maintenir  de  tout  mon  |>ouvoir  la  liberté, 
«l'égalité,  l'unité  et  l'indivisibilité  de  la  n^- 

•  blique.  • 


343 


*    Cela  fait,  je  commandaot  militaire  diraà  haute 
voix  :  •  Citoyens,  nous  reconnaissons  le  citoyen.... 

•  pour  commissaire  ord(lnnatcur,  où  commissaire 

•  dos  guerres  ;  nous  promettons,  en  bons  républi- 
«  cains  et  braves  militaires,  de  respecter  les  pouvoirs 

•  qui  lui  sont  délégués  par  la  loi.  •  Les  troupes  dé- 
fileront ensuite  devant  le  nouveau  commissaire  des 
guerres. 

«  IX.  Les  commissaires  des  guerres  sont  dans  une 
imlépciidnncc  entière  des  chefs  militaires  ;  ils  ne  sont 
susccplibies  d'aucune  peine  à  infliger  militairement, 
mais  ils  seront  traduits  devant  4es  tribunaux  mili- 
taires pour  cause  de  malversation,  et  punis  suivant 
la  rigueur  des  lois. 

«  Pourront  néanmoins  les  commissaires  des  guer- 
res être  punisdes  arrêts  par  Tautorité  de  leursordon- 
nateurs,  pour  les  cas  de  simple  négligence,  et  pour 
raison.de  quelaue  incouduite  personnelle  capable  de 
compromettre  le  service. 

«  X.  ils  sont  tenus  de  déférer,  sans  retard,  à  toute 
réquisition  écrite  qui  leur  sc^^-a  faite,  pour  objets  dé- 
pendant de  l'administration  militaire ,  par  les  ofli- 
ciers  généraux,  et,  en  leur  absence,  par  les  com- 
mandants en  chef  des  troupes  employées  dans  leur 
territoire,  sauf  la  responsabilité  desdits  officiers  gé- 
néraux ou  COU) mandants  en  chef. 

«  XL  Les  réquisitions  des  commissaires  des  guer- 
res ne  pourront  frapper  sur  les  citoyens  pris  parti- 
culièrement ;  elles  seront  adressées  aux  administra- 
tions ci  viles.qui  y  feront  droit.  Us  seront  responsables 
de  toutes  réquisitions  injustes  de  leur  part. 

•  XlLLorsqu'unesomme  aura  été indûm^ntpayée, 
ou  une  livraison  opérée  contre  les  formes  établies 
par  les  lois',  ou  sur  les  ordres  irréguliers  d*un  com- 
missaire des  guerres,  il  en  sera  fait  la  retenue  sur  ses 
appointements  jusqu'à  la  concurrence  de  la  somme 
perdue  pour  la  république,  ou  sur  les  biens  person- 
nels du  commissaire  des  guerres.  Dans  tous  les  au- 
tres cas;  tels  que  celui  de  négligence  personnelle 
dans  le  service,  incivisme  ou  improbité«  il  sera  des- 
titué ,  sans  préjudice  de  plus  forte  peine ,  s*il  y 
échet. 

«XIII.  Chaque  commissaire  des  guerres  tiendra 
un  resistre-jourual  dans  lequel  il  transcrira  la  mi- 
nute de  ses  lettres,  et  portera  des  notes  indicatives 
de  ses  procès- verbaux  et  de  chacune  de  ses  opéra- 
tions principales. 

«Indépendamment  de  ce  registre,  il  tiendra  un 
inventaire  exact  des  lois,  règlements,  instructions 
et  autres  papiers  qui  lui  seront  adressés  concernant 
ses  fonctions. 

XIV,  Il  ne  pourra  quitter  la  résidence  a  laquelle 
il  sera  attache  sans  avoir  fait  à  son  successeur  la 
remise  en  forme  de  tous  les  papiers  concernant  le 
service  de  la  place,  et  sans  avoir  un  double  de  Tiii- 
ventaire,  qu*il  gardera  par-devers  lui,  signé  de  son 
successeur,  pour  sa  décharge. 

«Dans  le  cas  d'extrême  urgence  pour  son  départ, 
il  requerra  le  juge  de  paix  et  deux  officiers  munici- 
paux de  l'endroit  d'apposer  le  scellé  sur  les  papiers 
dont  est  question,  pour  être  remis  à  sou  successeur. 
Celui-ci,  aussitôt  son  arrivée,  requerra  la  levée  de 
ce  scellé,  et  il  en  véridera  l'inventaire  en  présence 
des  mêmes  fonctionnaires  publics  ci-dessus  dénom- 
més, qui  le  signeront  avec  lui. 

•  XV .  En  cas  de  décès,  ou  lorsque,  pourtelle  cause 
que  ce  soit,  autre  que  celle  énoncée  en  Tarticle  pré- 
cédent, il  y  aura  lieu  d'apposer  les  scellés  sur  les  pa- 
piers d'un  ordonnateur  en  chef,  l'ordoinialeur  le 
plus  à  portée,  et ,  pour  tous  les  autres  commis- 
saires des  guerres,  celui  aussi,  de  quelque  grade 
(|u'il  soit,  qui  sera  le  plus  à  portée,  sera  tenu,  sur 
\  avertissement  qui  lui  en  aura  été  donné  por  l'agent 


national  du  district  ou  de  la  commune  du  lien,  de  se 
rendre  aussitôt  sur  les  lieux  pour  retirer  les  papiers 
concernant  l'administration  et  les  lois,  en  vérifier 
l'inventaire  en  présence  du  juge  de  paix  et  de  deux 
officiers  municipaux,  et  en  demeurer  dépositaire  sur 
récépissé  au  bas  du  procès-verbal  qu'il  tiendra  de 
cette  opération  ;  et  ce»^ our  remettre  lesdits  papiers 
et  lois  a  celui  qui  sera  cnargé  de  continuer  le  service. 
En  cas  d'éloignement  trop  considérable,  et  pour 
éviter  ledéplaccment  etie  transportdes  papiers,  les- 
dits papiers  seront  déposés,  sous  scellés,  à  la  muni- 
cipalite  du  lieu,  et  il  en  sera  fait  mention  au  procès- 
verbal  par  le  commissaire  des  guerres  qui  en  aura 
requis  le  dépôL  • 

'  Section  IL 

Supprettion  et  récréation  de$  e<mmis$aire$  de$ 
guerres. 

«  Art.  I^r.  Les  commissaires  des  guerres  créés  par 
les  différentes  lois  rendues  jusqu'à  ce  jour  sont  sup- 
primés ;  néanmoins  ils  continueront  leurs  fonctions 
jusqu'à  ce  que  l'organisation  prescrite  par  le  présent 
décret,  soit  effectuée. 

«  IL  H  sera  recréé  aussitôt  six  cents  commissaires 
des  guerres,  savoir  : 

•  Soixante  ordonnateurs ,  60 

•  Deux  cent  quarante  commissaires  ordinai- 
res de  première  classe ,  240 

•  Trois  cents  commissaires  ordinaires  de  se- 
conde classe,  300 

Total  600 
«  III.  Les  commissaires  des  guerres  seront  choisis 
ainsi  qu'il  suit  : 

•  10  Parmi  les  commissaires  ordonnateurs,  ordi- 
naires et  adjoints,  en  activité  de  service  à  l'époque 
de  la  loi  du  16  avril  1793  (vieux  style); 

•  20  Parmi  ceux  nommés  en  exécution  des  lois 
des  16  avril  et  24  juillet  1793,  et  ceux  nommés  par 
les  représentants  du  peuple  auprès  des  armées,  en 
vertu  de  la  loi  du  11  septembre  suivant,  exceptant 
néanmoins  de  cette  disposition  ceux  d'entre  les  com- 
missaires des  guerres  et  adjoints  qui  n'auront  pas 
produit,  avant  le  l^r  ventôse  prochain,  les  certificats 
exigés  par  la  loi  du  16  avril  1793,  et  ceux  enfin  qui 
n'auront  pas  vingt  et  un  ans  accomplis  ; 

•  30  Parmi  les  quartiers-maîtres  des  troupes  delà 
république  aérant  trois  ans  de  service  en  cette  qua- 
lité, et  parmi  les  citoyens  indistinctement  âgés  de 
vingt-cinq  ans  accomplis,  d'un  civisme,  d'une  capa- 
cité et  d'une  probité  reconnus,  ayant  servi  sans  m- 
terruption  dans  la  carde  nationale  depuis  le  com- 
mencement de  la  révolution,  ou  dans  les  armées, 
soit  dans  les  troupes,  soit  dans  les  administrations 
relatives  à  leur  service. 

•  IV.  Les  soixante  commissaires  ordonnateurs  se- 
ront, quant  à  présent,  nommés  parmi  ceux  qui 
étaient  déjà  ordonnateurs  à  l'époque  de  la  loi  du  16 
avril  1793  (vieux  style),  et  parmi  ceux  connus  ac- 
tuellement sous  la  dénomination  de  commissaires 
ordonnateurs  de  première  et  seconde  classes ,  sans 
s'^rrréter  aux  interruptions  dans  le  service.  Pour  en 
compléter  le  nombre  et  en  cas  de  vacances  seule- 
ment, ils  seront  choisis  parmi  les  commissaires  des 
guerres  de  première  classe  en  fonction ,  ayant  au 
moins  cinq  aus  de  service  en  celte  qualité,  et  trente 
ans  d'âge. 

•  V.  Les  deux  cent  quarante  commissaires  ordi-> 
naires  des  guerres  de  première  classe,  créés  par  le 
présent  d^ret,  seront  pris  parmi  les  c«niini8saires 


244 


des  guerres  de  première  classe;  et  pour  comi»]éler  ; 

'  le  nombre,  parmi  tous  les  aiilres  commissaires  des 
euerres  qui  auront  été  jugés  le  plus  dignes  d'en 
faire  parlie.  ,    .  .  ! 

«  Vf.  A  l'avenir,  il»seroDt  choisis  parmi  tous  ceux 

'  de  la  seconde  classe. 

•  Vil.  Dans  les  places  autres  que  celles  oii  r^i- 
dera  un  commissaire  ordonnateur,  et  où  les  besoins 
du  service  exigeront  la  présence  de  plusieurs  com- 
missaires des  guerres,  le  plus  ancien  de  commission 
du  mPmr  grade  dirigera  les  antres,  qui  lui  seront 
néccss.rueinenl  subordonnés  en  tout  ce  qui  concer- 
nera le  service  :  il  leur  transmettra  tous  les  êrdres 
qu'il  n  covra  dirrctemrnl  de  Tordonnateur  de  divi- 
sion, et  lui  seul  rendra  compte  de  leur  exécution  au 
commissaire  ordonnateur  de  la  division. 

-  VIII.  Les  commissaires  des  guerres  adjoints  qui, 
par  le  présent  décret,  seraient  réformés  à  défaut  de 
YS^e  requis,  et  qui  néanmoins  auraient  donné  des 
preuves  de  zèle  et  d'intelligence,  pourront  être  em- 
ployés, comme  élèves,  auprès  des  commissaires  or- 
donnateurs aux  armées,  ou  dans  les  divisions  mili- 
taires de  la  république. 

•  IX.  Ces  adJoinU  et  les  quartiers-maîtres  ayant 
trois  ans  de  service  en  cette  qualité  ne  seront  point 
assujettis,  pour  être  nommés  aux  places  de  commis- 
saires des  guerres,  à  Texamen  pre^rit  par  les  arti- 
cles XV,  XVI,  XVII,  XVin  et  XlXci-apî-ès. 

«  X.  Outre  les  conditions  prescrites  par  Tari.  111 
ci-dessus,  chaque  commissaire  des  guerres,  pour  en- 
trer en  fonctions,  est  tenu,  sous  peine  d'exclusion, 
d'envoyer  avant  le  1er  ventôse,  au  comité  de  salut 
public  et  à  la  commission  de  l'organisation  et  du 
mouvement  des  armées  de  terre,  les  renseignemenls 
les  plus  exacts,  indiquant  les  services  antérieurs  et 
postérieurs  à  l'époque  du  14  juillet  1789,  ses  noms, 
prénoms,  âge,  lieu  de  naissance  et  de  domicile  civil, 
s'il  est  célibataire  ou  marié,  le  non^re  de  ses  en- 
fants, quelle  langue  étrangère  il  sait,  la  profession 
de  ses  parents  avant  et  depuis  la  révolution,  quar\d 
et  par  qui  il  a  été  nommé  à  la  place  de  commissaire 
des  guerres. 

•  XI.  La  Convention  nationale  se  réserve  la  nomi- 
nation aux  places  de  commissaire  des  guerres,  sur 
la  présentation  du  comité  de  salut  public,  qui  fera 
toujours  imprimer  et  distribuer,  deux  jours  à  l'a- 
vance, la  liste  des  aspirants,  en  y  joignant  l'attesta- 
tion, signée  des  membres  dudit  comité,  que  tous  les 
renseignements  exigés  par  la  présente  loi  ont  été 
produits. 

•  XII.  Aussitôt  après  la  nomination  faite  des  six 
cents  commissaires  des  guerres  recréés  par  le  pré- 
sent décret,  il  sera  expédiée  chacun  d'eux,  par  la 
commission  de  l'organisation  et  du  mouvement  des 
armées  de  terre,  un  brevet  sur  lequel  seront  énoncés 
la  nature  et  la  date  de  leurs  services  militaires  ou 
d'administration  avant  et  depuis  le  14  juillet  1789 
jusqu'à  ce  jour. 

•  XIII.  Le  comité  militaire  proposera  à  la  Conven- 
tîou  nationale  d'augmenter  le  nombre  des  commis- 
saires des  guerres,  autant  qu'il  le  jugera  convenable 
aux  l)esoius  du  service  et  proportionnément  à  la 
liwrre  des  armées. 

-  XIV*  L'état  nominatif  des  commissaires  des 

Suernn ,  avec  indication  de  leur  résidence  dans  les 
irisions  militaires  ,  sera  imprimé  à  l'époque  du 
1er  germinal  au  plus  tard  ,  et  réimprimé  tous  les 
lixinois,  avec  les  changements  qui  seront  inlerve- 
Misj  ce  tableau  sera  distribué  à  tous  les  comités  de 
li  (Convention  nationale  et  à  chacune  des  commis- 
iioilf  executives  ;  il  sera  aussi  adressé  à  chaque  ad  • 
afaiiitratioM  de  département  et  de  district,  et  aux 
élStMDajors  des  aruiécs. 


•  XV.  A  l'avenir,  tout  citoyen  réunissant  les  con  ' 
ditions  prescrites  par  l'article  III,  section  11,  du  pré- 
sent 'titre,  qui  se  croira  propre  à  remplir  les  fonctions 
de  commissaire  des  guerres,  sera  tenu  de  se  présenter 
au  chel-lieu  de  la  division  militaire  de  sa  résidence, 
et  de  remettre  son  mémoire  en  demande  d'une  place 
de  commissaire  des  guerres  à  l'agent  national  de 
l'administration  principale;  celui-ci  en  informera 
l'ordonnateur  de  la  division  ,  qui  désignera  trois 
commissaires  des  guerres  pour  se  trouver,  au  jour 
et  à  l'heure  indiqués,  dans  le  lieu  des  séances  d« 
Tadmlnistration  principale;  ils  y  conféreront  publi- 
quement avec  l'aspirant,  en  présence  du  directoire, 
et,  à  défaut,  en  présence  de  la  municipalité  du  lieu, 
sur  les  principales  branches  de  l'admiiiistralion  mi- 
litaire; ils  feront  tenir  à  l'aspirant,  sans  déplacer, 
procès-verbal  en  forme  de  cette  conférence  :  ce  pro- 
cès-verbal sera  fait  en  double,  et  signé  en  consé- 
quence par  les  examinateurs  et  l'aspirant. 

«  XVI.  L'ordonnateur  de  la  dixision  sera  tenu  de 
se  trouver  à  cette  conférence,  s'il  est  sur  les  lieux; 
en  ce  cas  il  ne  sera  assisté  que  de  deux  autres  com- 
missaires des  guerres. 

•  Le  directoire  ou  la  municipalité ,  par  l'organe 
de  son  président,  pourra  aussi  faire  à  l'aspirant  telles 
ouestions  relatives  aux  fonctions  des  commissaires 
des  g[uerres  qu'il  jugera  à  [)ropos,  et  il  en  sera  fait 
mention  dans  le  procès-verbal  tenu  par  l'aspirant. 

•  XVII.  Ces  conférences  ne  pourront  avoir  lieu 
que  dans  les  trois  premiers  jours  des  mois  vendé- 
miaire, pluviôse  et  prairial. 

•  XVIIl.  Ces  procès  -  verbaux  d'examen  seront 
toujours  assez  développés  et  étendus  pour  mettre  à 
même  de  prononcer  sur  le  degré  d'intelligence  et  de 
capacité  des  aspirants. 

•  En  conséquence,  nul  autre  que  ceux  exceptés 
par  les  articles  précédents  ne  pourra  être  employé 
comme  commissaire  des  guerres,  et  reconnu  comme 
tel,  sans  avoir  rempli  ces  formalités,  et  sans  qu'il 
ait  satisfait  aux  dispositions  des  articles  111  et  X  ci- 
dessus. 

•  XIX.  Le  procès-verbal  sera  adressé,  par  l'aspi- 
rant, à  l'appui  de  sa  demande,  au  comité  de  salut  pu- 
blic et  à  la  commission  de  l'organisation  et  du  mou- 
venient  des  armées  de  terre,  pour  être  statué  ce 
qu'il  appartiendra  sur  l'admission  ou  la  non-admis- 
sion du  citoyen  qui  se  présentera.* 

Section  III. 
Fonctioni  générales  dei  commitsaires  des  guerres, 

•  ArLl^r.Les  fonctionsdes  commissaires  des  guer- 
res s'étendent  sur  toutes  les  parties  de  l'administra- 
tion militaire,  sur  tous  les  objets  qui  tiennent  à  l'é- 
conomie dans  les  dépenses  et  consommations  des 
armées,  sur  tout  ce  qui  intéresse  les  besoins  de  tout 
genre  des  défenseurs  de  la  patrie  ;  entin  sur  tout  ce 
qui  concerne  la  police  et  la  discipline  des  troupes, 
ainsi  que  celles  des  employés  attachés  aux  armées. 

•  11.  Ces  fonctions  sont  incompatibles  avec  tout 
autre  emploi  public  ;  en  conséquence,  les  commis- 
saires des  guerres  ne  pourront,  en  aucun  cas,  exer- 
cer des  fonctions  étrangères  ii  celles  d'administra- 
tion militaire  qui  leur  sont  coiiBées. 

•  111.  Les  détails  de  l'administration  militaire  dont 
sont  chargés  les  commissaires  des  guerres  sont  en 
général,  savoir  : 

Relativement  aux  troupes. 

•  Leur  organisation,  embrigadement,  incorpora- 
tion, levée  et  licenciement 


245 


•  Leur  arrivée  dans  les  places,  les  bans  à  leur  pu- 
blier,leurl<)gemerit,  solde, subsistance,  lial)il!enient, 
armement,  équipement,  enlretiru;  les  fournitures  à 
leur  luire  en  tout  genre  ;  leut  police  et  discipline 
dans  les  places,  camps  et  cantonnements  ;  leur  mou- 
vement, roule  et  embarquement  ;  les  réceptions  et 
prestations  de  serment  de  tous  les  oFTiciers  de  tous 
grades,  et  les  procès-verbaux  à  tenir  de  ces  actes. 

«  La  proclamation  des  lois  et  le  maintien  de  leur 
exécution. 

•  Les  revues,  contrôles,  états  de  situation,  de 
mouvement  et  mutation  ;  congés,  billets  d'entrée  et 
de  sortie  pour  hôpitaux;  comptabilisé  et  administra- 
tion supérieure  des  corps  ;  revues,  signalements,  re- 
montes, réformes  et  détails  relatifs  aux  chevaux. 

Rel€Uivemen$  aux  différerUet  adminiêtralUmi 
miUlairei, 

•  Vivres  et  fourrages,  espèce,  qualité,  quantité  de 
vivres  tant  ordinaires  qu'extraordinaires. 

•  Etapes  et  convois  militaires,  magasins,  établis- 
sements, inspection,  surveillance  et  police. 

•  Construction  des  fours  de  campagne,  réception, 
conservation,  avaries,  versements,  distributions  des 
denrées  en  magasins  et  procès- vecbauX  y  relatifs. 

•  Comptabilité  des  gardes-magasins  en  nature  et 
en  denrées,  tenue  et  vérification  des  registres  et  états 
de  situation. 

•  Solde  des  employés  et  dépenses  particulières  ; 
police. 

«  Inventaires  des  ustensiles  de  manateDlion  et 
fabrication. 

Habillement  et  équipement. 

«  Habillement,  grand  et  petit  équipement. 

>  Réception  des  effets,  approvisionnements,  ver- 
smienls ,  dislrihulion ,  conservation  et  procè5-ver- 
])arix  relatifs. 

^  Inspection  ,  surveillance  et  police  des  magasins 
cl  (les  employés  de  toute  espèce  ;  solde  et  salaire  des 
employés  et  ouvriers;  établissement.  Formation  et 
réparation  des  ma^nsins. 

«  Confeclioii,  re{)aration  et  entrelien  des  effets. 

•  Fournisseurs  et  fournitures. 

Campements» 

■  Effets  de  campement,  réception,  versements  et 
trans()orls,  distributions,  réparations,  entretien,  in- 
ventaires, états  et  procès- verbaux  relatifs. 

•  Comptabilité  en  euels  et  en  deniers,  tenue  des 
registres  et  étals  de  situation. 

•  Ustensiles  de  campagne. 

«  Approvisionnements  extraordinaires  et  fourni- 
tiiiTsde  campagne. 

•  Surveillance,  police  et  solde  des  employés  et  ou- 
vriers dans  les  magasins. 

Casernement,  chauffage ,  lumière  eteorpede  garde, 

•  Inspection  des  casernes  et  bâtiments  militaires 
ou  civils  propres  au  logement  des  troupes. 

•  Ameublement  et  ustensiles,  des  casernes,  pavil- 
lons et  corps  de  garde;  services  des  fournitures  eX 
lits  militaires. 

-  Magasins,  entretien,  réparations  ;  inventaires  et 
procès- verbaux  de  dégradation,  dépérissement  ou 
déficit  desdites  fournitures. 

•  iDdemnités  par  retenue  sur  la  solde  des  troupes; 


police  des  employés  pour  le  service  îles  casernes  et 
magasins  des  rournilurosde  lits  militaires. 

•  Police  dans  les  casernes  et  corps  de  garde  quant 
à  la  propreté,  salubrité  et  conservation  des  effets  et 
fournitures. 

•  Chauffage  et  lumière  dans  les  casernes  et  corps 
de  garde. 

•  Chauffage  dans  les  camps. 

Hôpitaux  iédenlairei  et  ambtdantê. 

•  Admission,  traitement,  sortie,  évacuation  et 
transports  des  malades  et  blessés. 

•  Aliments,  médicaments,  distributions,  établisse- 
ments. 

•  Réparations,  entretien,  salubrité  des  hôpitaux. 

•  Administration ,  comptabilité  et  tenue  aes  re- 
gistres. 

•  Effets  et  ustensiles  d'hôpitaux. 

«  Inventaires  et  procès-verbaux. 

•  Approvisionnements  extraordinaires. 

•  Fournitures  et  demi-fournitures. 

•  Onîciers  de  santé  et  emplovés. 

•  Effets  particuliers  des  malades. 

•  Extraits  mortuaires. 

•  Payement  de  la  solde  d*hOpital* 

•  Eaux  minérales. 

•  Traitements  extérieurs  et  particuliers. 

Charrois  réunis, 

•  Equipages  des  vivres,  de  l'ambulance  et  de  Var- 
tillerie. 

«Revues,  tant  générales  que  particulières,  des 
caissons,  chevaux,  charretiers  et  employés. 

•  Parcs  des  voitures  extraordinaires,  oagage^  des 
troupes. 

Artillerie^  génie  et  fwtification, 

•  Comptabilité  en  nature  et  en  deniers  des  arse- 
naux et  magasins. 

•  Consommation  et  remise  des  munitions  et  atti- 
rails de  guerre. 

•  Epreuves  darmes,  de  poudres,  et  procès-ver- 
baux ;  parcs  d'artillerie. 

•  Magasins ,  gardes  d'artillerie  et  gardes-maga- 
sins. 

•  Produit  des  herbages  sur  les  glacis,  et  ouvrages 
de  fortification. 

•  Marches,  adjudications,  et  arrêtés  des  toisés  dé- 
finitifs. 

«  Revues  des  officiers  et  employés  de  toute  espèce. 

•  Estimation  des  terrains  pris  à  des  particuliers 
pour  emplacement  d'ouvrages. 

•  Vente  darbres  sur  les  remparts;  vente  de  ma- 
tériauz  et  palissades. 

Service  des  places. 

•  Réception,  prestation  de  serment  et  revue  des  of- 
ficiers composant  rétat-majordes  places  et  emplovés 
des  places,  comme  consignes,  portiers  et  gardes  des 
fortifications,  etc. 

•  Police  et  administration  des  prisons  et  prison- 
niers militaires. 

•  Approvisionnement  pour  les  cas  de  siège. 

•  Conseils  de  guerre. 

Objets  généraux  et  divers, 

m  Prisonniers  de  guerre. 

«  Contributions  en  pays  ennemis. 


24G 


»  Proc^s- verbaux  de  prises  et  de  ventes. 

m  Réquisitions  aux  corps  administralils  pour  four- 
lutures  relatives  au  service  des  armées. 

«  Correspondance  avec  les  commissions  executi- 
ves, les  corps  administratifs  et  les  conseils  d'admi- 
nistration des  demi-brigades  et  autrrs. 

•  Revues  des  ëtats-majors. généraux  des  armées; 
états  de  leurs  dépenses  particulières. 

•  Décomptes,  remboursements,  indemnités  de 
toute  espèce  aux  officiers  et  aux  citoyens. 

«  Ordonnances  et  mandats  de  payement. 

•  IV.  La  levée  des  contributions  en  pays  ennemis 
se  fera  à  la  diligence  des  seuls  commissaires  des 
guerres,  conformément  à  la  Gxation  arrêtée  par  les 
représentants  du  peuple  en  mission  auprès  des  ar- 
mées et  par  le  chef  militaire. 

Section  IV. 
Àllribulions  aux  eommissaires  des  guerrei, 

•  Art.  I«r.  Le» commissaires  des  guerres  en  fonc- 
tions, aux  armées  et  dans  les  |)lace$,  seront  toujours 
considérés  comme  laisant  partie  de  l'état-major. 

«  11.  L'ordre  et  le  mot  seront  portés  tous  les  jours, 
par  un  sergent ,  au  commissaire  ordonnateur  ou  au 
commissaire  des  guerres  en  résidence  dans  une 
place  de  guerre  ou  dans  un  lieu  quelconque  de  gar- 
nison. 

«  Dans  les  places  où  il  y  aura  plusieurs  commis- 
saires des  guerres,  ils  iront  prendre  Tordre  et  le  mot 
chez  le  commissaire  ordonnateur,  et,  à  son  défaut, 
chez  le  plus  ancien  d'entre  eux. 

- 111.  Aux  armées.  Tordre  et  le  mot  leur  seront 
également  envoyés  par  les  soins  de  Tétat-major  gé- 
néral de  Tarmée,  ou  de  la  division  de  Tarméie  à  la- 
quelle ils  seront  attachés. 

.  •  IV.  Les  officiers  généraux  commandants  en  chef 
des  troupes  tiendront  la  main  à  ce  que  les  commis- 
saires des  guerres  soient  traités,  par  tous  les  indivi- 
dus des  armées  sous  leurs  ordres,  avec  les  égards 
dus  au  caractère  de  leurs  fonctions,  et  ils  feront  ré- 
primer sévèrement  quiconque  leur  manquerait  lors- 
qu'ils les  exerceront. 

•  Les  commissaires  des  guerres  ne  pourront  infli- 
ger aucune  punition  à  un  militaire  en  activité  de 
service  dans  leur  ressort,  s*il  y  est  avec  son  corps  ou 
une  troupe  dont  il  fasse  partie,  ni  aucun  officier  qui 
se  trouverait  détaché  pour  le  service  ;  mais,  dans  ce 
cas,  lorsqu'ils  auront  des  plaintes  à  porter  contre 
un  niililaire,  ils  les  adresseront  ou  remettront  à  son 
chef  immédiat,  nui  sera  tenu  de  punir  le  délinquant, 
et  sera  responsable  s'il  ne  le  punit  pas. 

•  V.  Les  commissaires  des  guerres  sont  essentiel- 
lement membres  des  conseils  de  guerre;  ils  y  occu- 
peront toujours  la  seconde  place;  mais  ils  ne  pour- 
ront y  avoir  voix  délibérative  que  sur  les  objets 
d'admmistration  militaire  qui  leur  sont  confiés.  En 
tout  temps  ils  tiendront  procès-verbal  des  délibéra- 
tions du  conseil  de  guerre. 

•  Cependant,  lorsque  les  circonstances  du  service 
ne  permettront  pas  au  commissaire  des  guerres  d*étre 
présent  aux  séances  du  conseil  de  guerre ,  et  lors- 
qu'il n'y  sera  pas  personnellement^  nécessaire ,  il 
pourra  se  dispenser  d'y  assister;  mais  ce  ne  sera  ja- 
awiis  sans  en  avoir  averti ,  par  écrit ,  l'officier  géné- 
ral, ou  celui  qui  le  remplacera  en  son  absence. 

VI.  Le  commissaire  des  guerres,  chargé  de  la  po- 
liee  d'un  corps ,  aura  rentrée  au  conseil  d'adminis- 
tration toutes  les  fois  qu'il  sera  nécessaire  pour  ar- 
Hterla  comptabilité,  ou  pour  communiquer  quel-  | 
^Wi  objets  relatilii  au  bien  du  .service.  i 

•  Il  n  y  aura  pas  voix  délibérative  ;  il  pourra  seu-  ! 
Innent  faire  les  observations  qu'il  jugera  convena- 


TITRE  IL 


Des  commissaires  ordonnateurs  ,  tant  aux  armée» 
que  dans  les  divisions  militaires» 

Section  1'«. 
Des  commissaires  ordonnateurs  en  chef  aux  armées. 

•  Art.  !«r.  H  sera  attaché  à  chaque  armée  de  la  ré- 
publique un  commissaire  ordonnateur  en  chef,  choisi 
parmi  les  soixante  ordonnateurs  créés  par  le  pré- 
sent décret.  Ce  choix  s'exercera  indistinctement, 
sans  égard  a  l'ancienneté,  et  sera  déterminé  par  la 
Convention  nationale,  sur  la  présentation  du  comité 
de  salut  public,  d'après  les  bons  témoignages  qui 
auront  été  rendus,  et  les  renseignements  acquis  sur 
les  vertus  républicaines  et  le  degré  d'expérience  et 
de  talent  de  ceux  sur  lesquels  le  choix  devra  porter. 

•  11.  Les  cooMuissaires  ordonnateurs  en  chef  aux 
armées  y  exerceront,  supérieurement  à  tous  autres 
agents  quelconques  d'administration,  les  fonctions 
administratives  militaires  qui  leur  sont  confiées  par 
les  lois. 

•  111.  Ils  correspondront  directement  avec  le  co- 
mité de  salut  public,  les  commissions  exécntlves,  et 
les  autorités  et  agents  civils  et  militaires,  pour  tous 
les  détails  relatiEs  aux  besoins  et  à  Tadminittration 
des  troupes  et  des  armées. 

•  IV.  Chaaue  commissaire  ordonnateur  en  chef 
sera  secondé  dans  ses  fonctions  par  un  ou  plusieurs 
ordonnateurs,  proportionnément  à  la  force  de  l'ar- 
mée à  laquelle  il  sera  attaché,  et  à  l'étendue  du  ter- 
ritoire qu  elle  devra  occuper. 

•  V.  L'ordonnateur  en  chef  et  les  ordonnateurs  à 
ses  ordres  seront  secondés  par  un  nombre  de  com- 
missaires des  guerres  suffisant  tant  pour  en  attacher 
un,  parmi  les  plus  anciens  de  commission,  à  chaque 
partie  principale  de  Tadministration  militaire,  que 
pour  donner  à  celui-ci  tous  les  coopérateurs  qui  lui 
seront  nécessaires  pour  tous  les  détails  de  service 
dans  les  camps  et  cantonnements. 

«  VI.  La  aircction  et  surveillance  des  établisse- 
ments militaires  fixes,  dans  les  départements,  étant 
confiée  aux  commissaires  ordonnateurs  en  résidence  - 
dans  les  divisions  militaires,  les  ordonnateurs  auprès 
des  armées  ne  pourront  intervertir  Tordre  de  service 
établi  a  cet  égard. 

•  V|l.  Cependant  les  commissaires  ordonnateurs 
en  chef  aux  armées  devant  avoir  connaissance  de 
tous  les  moyens  à  portée  d'eux  de  pourvoir  à  tous 
les  besoins  de  l'armée  à  laquelle  chacun  d'eux  sera 
attaché,  ils  pourront  requérir  les  commissaires  or- 
domiateurs  des  divisions  militaires  de  leur  donner 
à  cet  égard  tous  les  renseignements  qu'ils  croiront 
devoir  en  exiger,  et  les  commissaires  ordonnateurs 
des  divisions  militaires  correspondront  exactement 
avec  eux,  et  leur  feront  parvenir  tous  les  états  de  si- 
tuation nécessaires.  Ils  se  concerteront  pour  concou- 
rir, en  tout  ce  qui  dépendra  d'eux,  a  faciliter  les 
moyens  d'approvisionner  les  armées.  • 

Section  11. 

Commissaires  ordonnateurs  dans  Us  divisions  mi" 
litaires, 

•  Art.  I«r.  Indépendamment  des  commissaires  or- 
donnateurs employés  aux  armées,  il  en  sera  placé 
un  dans  le  chef- lieu  de  chacune  des  divisions  miU- 
taires  de  la  république. 

•  II.  Les  divisions  militaires  dont  le  territoire  sera 
d'une  étendue  trop  considérable  poui  la  surveillant 
d'un  seul  commissaire  ordonnateur  seront  subdi- 


247 


visëes  en  autant  de  principaux  arrondissements  qu*il 
sera  nécessaire ,  à  raison  de  la  distance  des  lieux  e\ 
de  l'importance  dos  établissements  militaires ,  ou  de 
la  force  des  garnisons;  et  dans  le  lieu  principal  de 
chacune  de  ces  subdivisions  il  sera  établi  un  com- 
missaire ordonnateur. 

m  III.  Ils  auront  à  leurs  ordres  un  nombre  de  com- 
missaires des  guerres  tel  qu'il  y  en  ait  un  nu  moins 
dniis  chacune  des  places  de  guerre  de  leur  division 
et  dans  tous  les  lieux  où  il  y  aura  des  rassomble- 
mciits  de  troupes  ou  des  établissements  militaires. 
A  regard  des  divisions  militaires  de  Tintérieurde  la 
république,  ils  auront  attention  de  diviser,  si  besoin 
est,  le  service  des  commissaires  par  arrondissement. 
Tous  serontsurveillés  avec  soin  dans  leurs  ronclions. 

•  IV.  Dans  les  places,  lieux  ou  arrondissements 
011  les  besoins  du  service  exigeront  la  présence  de 
plus  d'un  commissaire  des  guerres,  les  commi.ssai- 
res  ordonnateurs  leur  répartiront  les  détails  d'ad- 
ministration militaire  qui  devront  leur  être  confiés, 
et  leur  donneront  tous  les  ordres  et  toutes  les  in- 
structions nécessaires  pour  assurer  le  service  dans 
toutes  ses  parties. 

•  V.  Les  '-ommissaires  ordonnateurs  feront,  au 
moins  deux  lois  par  an,  leur  tournée  dans  les  places 
de  leur  division  et  dans  tous  les  lieux  où  se  trouve- 
ront des  établissements  militaires;  partout  ils  se  con- 
certeront avec  les  corps  administratifs  et  les  princi- 
paux employés,  sur  toutes  les  mesures  à  prendre 
pour  assurer  le  service  des  troupes,  et  pour  avisera 
tous  les  moyens  de  bon  ordre  et  d'économie;  ils  veil- 
leront avec  la  plus  scrupuleuse  attention  à  ce  que 
tous  les  employés  des  administrations  militaires  s'ac- 
quittent soigneusement  delcur  devoir  ;  ils  tiendront 
la  main  à  la  parfaite  exécution  des  lois  militaires; 
ils  se  concerteront  également  avec  les  payeurs  des 
dépenses  de  la  guerre  dans  les  divisions,  pour  ren- 
tière exécution  des  lois  et  instructions  sur  la  compta- 
bilité, tant  en  dépenses  ordinaires  qu*en  dépenses  l 
extraordinaires  ;  ils  sont  tenus  de  constater  le  résul-  | 
tat  de  leurs  tournées  par  un  compte  raisonné  et  dé- 
taillé de  la  situation  ae  chaque  partie  d'administra- 
tion dans  les  places  de  leur  arrondissement,  et  de 
l'adresser  aux  commissions  executives,  en  ce  qui 
concernera  chacune  d'elles. 

«VI.  Les  commissaires  ordonnateurs  des  divisions 
militaires  auront  attention  d'envoyer  à  chacun  des 
commissaires  des  guerres  qui  seront  destinés  à  ser- 
vir sous  leurs  ordres  l'état  de  tous  les  commissaires 
des  euerres  employés  dans  la  division  militaire  à  ïa- 
queile  ils  seront  attachés,  et  de  les  informer  réguliè- 
rement des  mutations  et  mouvements  qui  pourraient 
survenir  entre  les  commissaires  des  guerres  em- 
ployés. 

•  Cet  état  présentera  le  nom  des  commissaires  des 
guerres,  le  lieu  de  leur  résidence ,  et  les  (onctions 
principales  ou  ordinaires  dont  ils  seront  chargés. 

-  VU.  Aussitôt  après  la  réception  de  cet  état,  tout 
commissaire  des  gurres  qui  sera  maintenu  dans  ses 
fonctions  par  le  présent  décret  sera  tenu  d'en  donner 
avis  à  chacun  des  commissaires  des  guerres  em- 
ployés dans  la  mémo  division  militaire  que  lui  ;  et  à 
l'avenir  tout  commissaire  des  guerres  qui  arrivera 
dans  une  place  auras<»in  de  se  conformer  a  cet  usage. 

•  Vlll.  Les  dispositions  prescrites  dans  les  deux 
articles  précédents,  ayant  pour  objet  de  notifier  aux 
'lommissaires  des  guerres  la  présence  et  la  signa- 
ture de  chacun  d'eux  dans  leurs  arrondissements  res- 
pectifs, seront  applicables  à  toutes  les  armées  et  aux 
divisions  qui  en  dépendent. 

•  IX.  En  général,  tout  commissaire  des  guerres 
employé  dans  une  place  ou  lieu  de  garnison  quelcon- 
que, tant  au  dedans  qu'au  dehors  de  la  république, 


sera  tenu  de  notifier  sa  présence  et  sa  signature  à 
tous  les  commissaires  des  guerres  employés  dans  les 

fdaces  ou  lieux  de  garnison  les  plus  circonvoisins  du 
ieu  de  sa  résidence  ordinaire.  •  {La  êuiU  demain.) 


SUrre  Dl  LA  8ÉA9CB  DO  29  NITOSB. 

BoissBT  :  L'orage  riolent  qui ,  depuis  tant  de  mote,  groo- 
dait  sur  dos  tôtes  et  touchait  au  roomeDt  de  dous  aoeaaUr 
avec  la  liberté,  veoait  d'être  détouroé  ;  l'audacieux  qui  you- 
lail  laDcer  la  foudre  cd  avait  été  frappé  lui-même  le  9  Uier- 
midor  ;  et ,  du  trâoe  saDglaot  du  despotisme  où  il  voulait 
régoer,  il  avait  OMUté  à  Téchafaud,  quaod  vous  m'eovoyAtcs 
dnns  le  départcmeot  de  FAio,  pour  réparer  les  noaux  qu'a* 
valcDt  causés  ses  crimes. 

La  iribuDe  d*UDe  Société  jadis  célèbre,  et  qui  creusaitde- 
puis  longtemps  le  tombeau  de  la  France ,  a  retenU  souvent 
de  dénoDclaUons  contre  moi ,  et  du  fond  du  Midi  on  eut 
l'impudeur  de  m'y  accuser  d'avoir  fsit  arrêter  des  patriotes 
d'un  pays  où  je  n'avais  rien  fait  encore  et  ob  tout  est  libre. 
Hercule  aussi  fit  crier  les  brigands  et  les  despotes  dont  11 
purgea  la  terre.  Vous  aussi  vous  fûtes  dénoncés  dans  cer- 
taines Sociétés  comme  des  modérés,  des  aristocrates;  et 
déjà,  dans  leur  cerveau  robespicrrique ,  les  fripons,  les 
liommes  de  sang ,  les  terroristes  s'établissaient  vos  succes- 
seurs, et  imprimaient  vos  billets  d'enterrement. 

Il  est  de  mon  devoir  de  vous  dire  ce  que  j'ai  vu;  la  terreur 
avait  entassé  des  vicUmes,  des  dilapidations  ont  éié  commises; 
des  égarés,  des  hommes  habitués  à  l'exercice  du  pouvoir,  ont 
fait  des  crimes  :  je  les  ai  frappés  par  l'arresUUon. Votre  co- 
mité de  sûreté  générale  prendra  dans  sa  justice  les  me- 
sures qu'il  jugera  convenables  coqtre  des  individus  en  hor- 
reur A  tous  les  citoyens,  dont  les  noms  sont  exécrés ,  à  qui 
on  reproche  la  nM>rt  de  quatorse  pères  de  famUle  traduits 
des  prisons  de  Bourg  àTédiafoud  de  la  commission  tempo- 
raire de  Lyon. 

Le  voile  est  déchiré  ;  le  tableau  des  crimes  des  agents  de 
Robespierre  va  paraître;  osex  le  fixer,  et  vous  frémirei 
d'horreur. 

Dans  l'Ain,  un  agent  national  fait  attacher  un  malheureux  . 
agriculteur,  père  de  famille,  à  la  queue  de  son  cheval  et  le 
traîne  sur  la  terre  une  demi-lieuc,  lui  démet  une  épaule. 

Quel  est  ce  monstre?  Rollet,  dit  Blarat Qu'avait  fait  le 

malheureux  agricuUeur?  sonné  U  petite  cloche  pour  an- 
noncer l'arrivée  de  l'agent  national  et  rassembler  le  conseil 

de  la  commune  de  Cézériat Sonner  cctic  petite  cloche 

était  pour  Rollet,  dit  Marat,  un  signe  de  conUre-révoluUoo 
et  le  réveil  du  fanatisme. 

Le  génie,  les  lumières,  les  talents,  le  riche,  le  pauvre, 
l'ouvrier,  l'agriculteur,  la  vieillesse  et  l'enfance  gémissaient 
dans  les  cachou  ;  tout  ce  qui  n'était  pas  ami  des  domina- 
teurs éudi  fédéraliste,  et  tout  fédéraliste  était  détenu  ;  ainsi 
le  courage  et  la  vertu,  l'innocence  et  la  probité,  étaient  jetés 
dans  les  prisons,  ainsi  des  hommes,  pour  cacher  leurs  er- 
reurs à  l'époque  du  3 1  mal.  devinrent  tout  A  coup  patriotes  ex- 
clusifs, et  assassins  titrés  ils  opprimèrent  leurs  concitoyens. 

Dans  l'AUier,  un  comité  de  surveillance  de  Moulins  se 
constituait  jury  national  pour  immoler  trente-deux  per- 
sonnes ;  Il  écrivait  ainsi  à  Yerd,  l'un  de  ses  membres,  pro» 
cureur  près  de  U  commission  temporaire  A  Lyon  : 

«  Fais-les  donc  participer  A  l'honneur  de  la  fusilladedoDt 
la  conception  fait  l'éloge  de  ton  imagination  révolutlonnahne, 
si  tu  en  es  l'inventeur.  Nous  pensons  avec  toi  que  ceue  ma- 
nière de  foudroyer  les  ennemis  du  peuple  est  infiniment 
plus  digne  de  sa  toute- puissance ,  et  convient  mieux ,  pour 
venger  en  grand  sa  souveraineté  et  sa  volonté  outragées,  que 
le  jeu  mesquin  et  insuffisant  de  la  guillotine  ;  ce  dernier  In- 
strument n  est  bon  que  pour  les  temps  ordinaires  et  peut 
être  encore  employé  à  punir  les  petits  criminels  obscurs. 

•  Ne  te  jette  point  dans  le  labyrinthe  des  formes  pour  faire 
juger  nos  brigands  ;  prends  le  comitd  qui  te  les  envole 
comme  un  jury  national  qui  a,  sans  aucun  remords,  la  con* 
viciion  intime  et  morale  de  leur  scéléia.e$se  profonde. 

•  Base  donc  sur  ces  pièces  un  bon  jugement  de  condam- 
nation contre  lous  ces  coquins,  dont  les  vengeances  seraient 
terrible.*  s'ils  avaieni  un  jour .  par  une  cruelle  fatalité ,  le 
dessus  sur  nous,  ou  même  s'il  leur  était  permis  de  marcher 
d  un  pas  égal  A  nous,  qu'ils  regardent  comme  leurs  oppit^ 
seurs,  etc.  * 

AnralHNi  pu  concevoir  qn'U  existât  des  iiommes  aussi 


248 


cruels  !  Peat-^treil  e«t  des  coupables  dans  le  nombre  d'hum* 
rocs  envoyés  à  Lyon ,  mais  le  comité  n*cst-il  |>as  lui-même 
une  bande  d'assassins,  ou  pluiôl  un  limon  Impur  que  la  so- 
ciéti^  doit  repousser  de  son  sein  f 

Comment  de  sang-froid  écrire  une  pareille  lettre?  L'âme 
liounéic  et  sensible  se  soulève  contre  une  pareille  monstruo- 
sité. Je  vous  ai  donné  l'esquisse  des  horreurs  que  j'aurai  à 
vous  faire  connaître  :  je  vais  vous  mettre  sous  les  yeux  un 
plus  riant  tableau;  je  vais  vous  citer  quelques  faits  qui  ré- 
pandront le  calme  dans  vos  sens. 

Un  agriculteur,  à  Jujurieux,  dans  l'Ain,  partageait  son 
pain  avec  mol  :  la  Société  populaire  vint  m'offrlr  le  touchant 
spectacle  de  l'union  d'un  jeune  guerrier  et  d'une  jeune  fdle, 
lionuiHes  et  {Miuvres.  Cet  agriculteur  avait  donné  500  livres 
pour  la  dot  de  la  jeune  fille  et  gardait  l'anonyme:  le  prési- 
dent de  la  Société  m'annonçait  ce  don,  quand  l'épouse  du 
vieillard,  qui  était  à  mes  côtés,  se  levant,  s'écria  :  •  El  moi 
aussi  je  donne  500  francs.  •  Eh  bien;  collègues,  le  premier 
don  était  l'ouvrage  de  l'époux  ;  le  second  bienfait  celui  de 
l'épouse.  Le  secret  ne  fut  plus  gardé,  et  Je  confondis  mon 
attendrissement  avec  oelnl  de  cette  Intéressante  et  géné- 
reuse famille. 

Un  homme  riche,  âgé  de  quatre-vingt-quatre  ans,  était 
arrêté ,  dans  Sadne-«t-Lolre,  par  ordre  de  Roliespierre ,  et 
conduit  à  Paris;  les  scellés  avaient  été  mis  sur  ses  effets,  il 
n'avait  pas  le  moindre  assignat  ;  U  iTadresse  â  ses  tmis  .«..  U 
n'en  trouve  plus. 

Au  moment  où  la  prospérité  001»  fait,  les  lâcbei  qui  nous 
encensaient ,  qui  nons  flattaient,  se  font  connaître  et  nous 
abandonnent.  Il  partait  sur  la  fatale  cbarreue,  lorsqu'un 
viliugeols  se  montre,  examine  sll  n'est  vu  de  personne,  et  le 
presse  de  prendre  son  portefeuille;  le  vieillard  ému  le  refuse 
et  lui  dit  :  •  Tu  ne  me  reverras  plus;  ma  tête  peut-être  va 
tomber,  et  tes  5,000  francs  sont  perdus.  —  Je  le  savais,  re- 
prit le  villageois;  prends,  prendsi  qu'importe?  j'ai  eu  le  bon- 
heur de  gagner  cette  somme;  Je  sois  toujours  heureux 
quand  la  sueur  de  mon  front  fait  la  Jouissance  de  mon 
ccpur.  t 

Il  est  bien  d*autre8  traits  enfantés  par  ta  générosité  firaii- 
çaise  dans  ces  derniers  moments  de  la  publique  calamité  ;  ils 

Easseroaiâ  la  postérité,  et  délasseront  quelquefois  les  repu- 
licalns  du  siècle  qu*!  nnlt;  ils  détruiront  les  calomnies  des 
méchants  et  des  esclaves ,  comme  la  lumière  a  détruit  le 
despotisme  des  rois  et  le  charlatanisme  des  prOires, 

Dans  l'Ain.  l'Ailler,  et  Saône-et- Loire,  le  meilleur  esprit  rè- 
gne. Il  est  peut-être  une  ou  deux  cownunes  où  j'ai  été  trompé 
snr  la  moralité  de  plusieurs  hommes  que  J'ai  nommés  à  des 
fonctions  publiques,  mais  je  n'ai  pu  lire  dans  tous  les  cœurs. 

Ia*  pi^uple  de  l'Ain,  qu'on  a  tant  calomnié,  tant  tyrannisé, 
et  qui  ne  mérita  Jamais  de  l'être ,  ce  peuple  m'a  chargé  de 
vous  demander  justice  contre  les  scélérats  qui  l'ont  opprime; 
Je  lui  ai  déclaré,  en  votre  nom,  que  la  Convention  ne  transi- 
gerait jamais  ni  avec  le  crime,  ni  avec  la  royauté. 

J'ai  vu  A  Lyon  mon  collègue  Telller,  qui  travaille  d'une 
manière  Infatigable  à  remplir  l'Importante  mission  que 
vous  lui  aves  confiée.  La  ville  de  Lyon  commence  à  sortir 
de  Hftii  dêhris:  les  séquestres  sont  levés,  et  les  objets  de  pre- 
niièiM  nécessité  sont  rendus  ù  la  émulation.  La  confiance, 
mère  du  commerce,  renuit  de  toutes  paru.  Le  peuple  lyon- 
nais a  rf^u  vos  décrets  avec  les  transports  de  la  reconnais- 
ihiiice  :  i'anéanlissemeiii  du  maximum,  les  mesures  que  vous 
uivA  |ii  ises  |KJur  rétablir  le  crédit  public,  vous  font  partout 
procliimiM  comme  les  pères  et  lea  bienfaiteurs  de  la  patrie. 

A  (MUuin,  le  marché  qui  suivit  immédiatement  le  rapport 
ûv  l'viU'  loi  du  maximum  fut  des  plus  briilauts;  lout  y  alîon- 
dall,  e.i  le  blé,  dont  la  disette  se  faisait  sentir  peu  de  Jours 
auparavant,  y  arriva  de  toute  part,  y  diminua,  ei  il  y  en  eut 
de  reRUr.  Il  en  fut  do  même  des  autres  denrées  de  première 
nécessllé. 

Ia:  iH'Uple.  dans  les  dépnrtemcnU  que  j'ai  parcourus,  s'est 
flerenii'ni  élevé  a  la  hauteur  de  son  caractère;  son  amour 
MfUr  la  vertu  s'ejt  développé  avec  cette  énergie  que  donne 
If  rnutrî  d'avoir  été  trompe  par  le  crime  :  son  idole  est  la 
réiiuMiqiir;  Il  n'a  pour  ennemis  que  la  tyrannie  et  l'immo- 
I allié  :  nm  désir  est  l'affranchissement  du  monde,  et  son 
liai  le  lioftlNUr  de  tous  les  mortels. 

I^r  IM'iiple  entière;  Il  attend  de  la  Convcstlon  sa  félicité; 
Il  lise  noire  quelle  ne  sera  plus  déchirée  par  les  factions  ; 

ÏKt«  ■'il  141  des  traîtres  dans  son  sein ,  elle  les  vomira  loin 
HIff ,  i'i  que ,  par  mn  union ,  le  concours  des  talents  et  du 
d^lr  âa  hU'ti ,  Il  gi>uU:ra  les  fruits  d'un  (;ouveruemeut  dc- 
in/ff,! afIqiK'  ;  Il  iillend,  ce  fieuple.  d'elle  encore  qu'elle  com- 
'    I  â  la  vitiolrc,  et  dictera  oiu  despotes  le  coRtral  de 


la  gloire  française  sur  les  restes  épars  des  esclaves  vabieut. 
L'insertion  au  Bulletin  est  décjrétée. 

^  On  fait  lecture  d'une  lettre  signée  de  quatre-vingts 
prêtres  consiliutlonnelv,  détenus  depuis  huit  mois  dans  hi 
rade  d'AIx,  près  Rochefort,  et  presque  tous  malades.  Ils  sol- 
licitent la  bicnfaiance  de  la  Convention  nationale ,  la  prient 
d'avoir  égard  à  leur  triste  position ,  et  de  faire  suspendre 
leur  embarquement  dans  une  saison  aussi  rigoureuse. 

La  Convention  nationale,  sur  |a  proposition  de  Janets, 
renvoie  la  pétition  au  comité  de  sûreté  générale,  qui  est 
chargé  de  statuer  sur  leur  sort. 

Le  rêprés  niant  du  peuple  prêt  le  département  de  ta  Haute- 
Loire  à  son  coUigue  Gamier  {de  F  jubé),  memhre  du  co- 
mité  de  sûreté  générale  de  la  Convention  nniUmale. 

Le  16  nivôse,  l'an  S«  de  la  république  française, 
une  et  indivisible. 

•  Tu  trouveras  ci-jointe,  citoyen  et  cher  colIè|ue.  une 
proclamation  que  j'ai  cru  devoir  faire  aux  citoyens  du  dé- 
partement dans  lequel  je  suis  en  mission.  Je  suis  persuadé 
que  tu  y  trouveras  l'expression  des  sentiments  qui  sont  dans 
ton  cœur,  et  qui  sont  le  mien. 

•  Je  vais  faire  tout  ce  qui  dépendra  de  mol  pour  anéantir 
le  règne  de  ia  terreur  qui  a  eu  lieu  Ici  avec  l>eaucoop  d'ac- 
tivité. Une  guillotine  a  étd  permanente  pendant  huit  mois. 
Juge,  d'après  cela,  des  vexations  qui  ont  pu  y  avoir  lieu.  Je 
tâcherai  de  les  faire  oublier  par  dcr  actes  que  la  justice  na- 
tionale veut  que  l'on  exerce  aujourd'hui  en  son  nom,  et  dont 
malheureusement  on  s'etC  trop  écarté  Jusqu'à  ce  moment 

•  Salut  et  fraternité.  Signé  Pisbut.  > 

La  Convention  décrète  la  mention  boDOiablfl  de  la  lettre^ 
et  rinscrtioii  en  entier  au  Bulletin. 

{LmniUédêmttim.) 

S,  B,  Dans  la  séance  du  90 ,  la  Convention  a  accordé  des 
secours  A  la  veuve  et  aux  enfants  de  Pierre  Olivier,  assassiné 
pour  avoir  courageusement  dénoncé  les  propos  contre-ré- 
volutionnaires tenus  par  Pierre  Morin.  Celui-ci  sera  traduit 
dans  le  Jour  devant  le  tribunal  révolutionnaire  du  départe- 
ment de  Paris,  qui  le  jugera  sans  délai,  suivant  les  forinea 
adoptées  (KMur  le  tribunal  révolutionnahre. 


Ckasies,  représentant  du  peuple,  au  rédacteur  du  Moniteur* 

Le  17  nivôse. 

c  Qtoyen ,  dans  le  coD|pte  que  lu  rends  de  la  séance  da 
34  nivôse,  séance  où  le  Journal  de  CJwU  du  Peuple,  dont  Je 
suis  le  rédacteur,  a  été  dénoncé  A  la  Convention  par  mon 
collègue  Ili-niaboic,  je  trouve  cette  phr^  :  •  Châles  parle 
dans  le  tumulte,  t  II  est  fbrt  étrange  que'quelquun  ait  pu 
me  voir  ou  m'cntendre  â  la  Convention,  tandis  qu'il  est  no- 
toire que ,  depuis  plus  de  deux  mois.  Je  n'ai  pu  quitté  moo 
Ut. 

«  Je  te  prie  d'insérer  ma  réclamation  dans  ton  prochain 
Numéro,  pour  qu'on  ne  croie  pas  que  Je  suis  entièrement 
guéri  du  coup  de  canon  que  J'ai  rcçuâ  l'armée  du  Nprd,  A 
côté  de  mes  frères  les  braves  défenseurs  de  la  patrie. 

«  Salut  et  fraternité. 

•  CuiSLES ,  représentant  du  peuple.  » 


LIVRES  DIVERS. 

Kecherchet  sur  la  nature  et  les  causes  de  la  nckeste  des 
nations^  traduit  de  l'anglais,  d'Adam  Smith.  |)ar  A.  Rouclier; 
seconde  édition,  augmentée  d'une  table  alph.ihctique  très» 
ample  ;  6  vol.  in-8"  de  i350  paees,  impriméN  &ur  caractères 
de  r.icéro  Didot.  Prix  :  88  liv.,  brochés;  et  54  liv.,  franc  éa 
port  par  la  poste,  pour  les  départements. 

A  Paris,  chez  F.  Buisson,  libraire,  rue  Hautefeuille,  n.  tO. 

Cette  seconde  édiiioa  a  été  revue  et  considérablenent 
corrigée  par  Boucher  lui-même,  qui.  du  fond  delà  prison oà 
Pavaient  relégué  les  tyrans  populaires,  travaillait  à  perfec- 
tionner un  des  ouvrages  les  plus  utiles  à  la  république.  Il 
venait  de  remettre  les  di-micres  épreuves  au  citoyen  Buia« 
son,  lorsqu'il  fut  traduit  au  iribunairévolutionn^iire,  le  7  ther- 
midor ,  et  immolé  comme  tant  d*anties  victimes  d'un  peu* 
voir  despotique. 


GAZETTE  NATIONALE  o»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  122.  Duodi  2  Pluviôse,  l*an  3«.  {Mercredi  21  Janvier  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

De  Posnanie,  le  30  décembre,  —  Le  conseiller  prussien 
Bucholu,  ci-devant  ambassadeur  de  la  cour  de  Berlin  à 
Varsovie,  a  été  nommé  président  en  chef  de  foules  les  ] 
chambres  des  guerres  et  des  domaines  dans  la  Prusse  méri- 
dionale. Il  fera  sa  résidence  à  Posnau. 

Le  but  principal  de  cette  administration  doit  être  la  ges- 
tion des  biens  des  plus  riches  propriétaires  qui  ont  pris  part 
à  l'insurrection- 

On  a  déjà  commencé  des  procédures  criminelles  pour 
opérer  la  saisie  des  biens  de  plusieurs  magnats. 

—  La  division  prussienne  aux  ordres  du  général  Bru- 
neck  va  prendre  ses  quartiers  d'hiver  en  Lithuanie.  Cette 
disposition  militaire  parait  en  quelque  sorte  démentir  le 
bruit  qui  s'est  répandu  que  la  Lithuanie  devait  appartenir  à 
la  Russie.  Au  reste,  rien  n'est  encore  déterminé  sur  le  sort 
futur  de  la  Pologne. 

—  Le  prince  Repnin  avait  été  nommé  ambassadeur  de  la 
cour  de  Péiersbourg  à  Varsovie.  II  a  prié  l'impératrice  de 
l'en  dispenser. 

SUÈDE. 

Stockholm,  îe  20  décembre,  —  Le  collège  de  l'amirauté, 
qui  avait  éié  transformé  en  comptoir  général  des  troupes 
maritimes,  est  maintenant  désorganisé.  Les  affaires  qui  en 
ressoriissaient  ont  été  portées  aux  bureaux  du  grand  ami- 
ral. Ce  déparlement  parait  se  rétablir  peu  A  peu  sur  l'ancien 
pied. 

—  Le  général  Cederstroëm  Tient  d'être  nommé  comman- 
dant de  la  division  des  quatre  régiments  d'artillerie  de  la 
Suède. 

—  Les  rédacteurs  de  la  Gazette  française  dé  L^de  ont 
demandé  au  gouvernement  danois  la  permission  de  Tenir 
s*élablir  à  Altoua  ;  on  le  leur  a  permis. 

—  L'amirauté  de  Londres  a  enfin  commencé  à  prononcer 
sur  l'indemniié  due  aux  Danois  pour  les  navires  qui  leur 
ont  été  enlevés.  La  première  décision  qui  en  est  sortie  ac- 
corde une  indemnité  de  30,000  Ht.  sterling  pour  quarante 
de  ce.s  navires. 

—  l4i  cour  Tient  d'ajouter  un  supplément  au  code  des 
droits  de  péage. 

PAYS-BAS. 

Bruxef/eSt  te  27  nivôse,  —  On  continue  avec  activité  les 
coupes  commencées  dans  les  forêts  de  la  Belgique.  Le  bols 
qui  en  provient  est  transporté  en  France  pour  servir  à  la 
construction  des  vaisseaux. 

—  Les  représentants  du  peuple  viennent  de  mettre 
120,000  livres  à  la  disposition  de  la  municipalité,  pour  le 
soulagement  des  familles  les  plus  malheureuses  de  cette 
commune. 

^-  La  municipalité  de  Bruxelles  a  été  renouvelée,  pour  la 
seconde  fois,  par  ordre  des  représentants  du  peuple. 

SUISSE. 

extrait  d'une  lettre  de  Genève,  du  T- janvier.  —  Lestrlom- 
piics  de  la  ri^publique  etaa  belle  attitude  depuis  l'immoi  telle 
journée  du  9  thermidor  commencent  à  lui  être  d^une  grande 
uiiliic  diplomatique. 

~L*influence  delà  coalilion  n'est  rien  moins  qu'assurée 
en  Italie.  La  république  de  Venise,  qui  avait  (;ardé  jusqu'à 
ce  jour  la  plus  froide  neutralité,  se  dispose  i\  envoyer  un 
ambassadeur  à  Paris.  Les  ministres  anglais  et  esp^ignol  qui 
.sont  à  Venise  ont  écrit  à  ce  sujet  à  leurs  cours,  pour  de- 
mander des  instructions  sur  la  conduite  qu'ils  doivent  tenir. 


RÉPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

De  Paris,  —  Arrêté  des  représentants  du  peuple 
prés  les  Ecoles  Normales. 

Du  34  nivôse.  Pan  3*  de  la  république  française» 
une  et  indivisible. 

11  entrait  dans  les  desseins  de  la  Convention  na- 
tionale de  donner  au  peuple  français  un  système 
d'instruction  digne  de  ses  nouvelles  destinées;  mais 
les  instituteurs  et  les  professeurs  manquaient  pour 
rexécution  d*un  si  grand  dessein.  La  Convenlion  a 
voulu  former  des  instituteurs  et  des  professeurs  pour 
toute  rétendue  de  la  république. 

Tel  est  le  but  de  l'établissement  des  Ecoles  Nor- 
males. 

Dans  les  autres  écoles  on  enseigne  seulement  les 
branches  diverses  des  connaissances  humaines; 
dans  les  Ecoles  Normales,  on  professera  principale- 
ment Fart  de  les  enseigner;  on  exposera  les  con- 
naissances les  plus  utiles  dans  chaque  genre  ,  et  on 
insistera  sur  la  méthode  de  les  exposer.  C'est  là  ce 
qui  distinguera  essentiellement  les  Ecoles  Normale?}; 
c'est  là  ce  qui  remplira  le  nom  qu'on  leur  a  donné. 
On  ne  parlera  point  ici  des  professeurs  ;  ils  se- 
raient mal  choisis  si  on  avait  oesoin  d'en  parler. 
Plusieurs  sont  connus  pour  avoir  créé  ou  perfec- 
tionné les  méthodes  qui  ont  fait  faire  aux  sciences  de 
nouveaux  progrès,  ou  qui  en  ont  rendu  l'acquisition 
plus  facile.  Ce  genre  de  mérite  ,  le  plus  haut  degré 
du  talent,  était  un  mérite  nécessaire  dans  les  profes- 
seurs des  Ecoles  Normales. 

Ces  caractères ,  la  plupart  si  nouveaux ,  ne  sont 
pas  les  seuls  que  les  Ecoles  Normales  doivent  pré- 
senter. 

Dans  les  autres  écoles,  les  seuls  professeurs  par- 
lent, et  une  seule  fois  sur  chaque  partie  dune 
science. 

Dans  les  autres  écoles ,  ce  que  disent  les  profes- 
seurs ne  laisse  des  traces  que  dans  la  mémoire  des 
auditeurs,  et  les  auditeurs  peuvent  mal  entendre  et 
mal  comprendre;  leur  mémoire  peut  retenir  impar- 
faitement ,  incomplètement. 

On  a  voulu  que,  dans  les  Ecoles  Normales,  ce  qui 
n'aurait  pas  été  bien  entendu  ou  bien  retenu  en 
écoutant  les  professeurs  pût  l'être  en  les  lisant. 

On  a  voulu  que  ce  qui  n'aurait  pas  été  suffisam- 
ment éclairci  ou  compris  dans  une  première  séance 
pût  rétre  dans  une  seconde. 

On  a  voulu  que  le  professeur,  dans  chaque  genre, 
présentât  la  science  et  la  méthode ,  et  que  l'école 
tout  entière  les  discutât. 

On  a  voulu  que  l'initiative  et  la  présidence  de  la 
parole  appartinssent  aux  professeurs  exclusivement, 
et  que  le  droit  de  parler  pour  interroger  les  lumières 
des  professeurs  ou  pour  communiquer  leurs  propres 
lumtères  appartînt  à  tous  les  élèves. 

On  a  voulu  que  les  lumières  oui  seraient  appor- 
tées aux  Ncoles  Eormales ,  et  celles  qui  y  seraient 
nées,  ne  fussent  pas  renfermées  dans  leur  enceinte, 
et  que  presque  au  même  instant  elles  fusseii  répan- 
dues sur  toutes  les  autres  écoles  et  sur  toute  la 
France. 
'      Voici  les  moyens  très-simplrs  que  le  comité  d'in- 
struction publique  a  cru  devoir  prendre  pour  opérer 
tous  ces  effets. 
I      Des  sténographes,  c'est-à-dire  des  hommes  qui 
I  écrivent  aussi  vite  qu'on  parle  ,  seront  placés  dans 
^  l'enceinte  des  Ecoles  Normales,  et  tout  ce  qui  y  sera 

11 


2S0 


dit  sera  écrit  et  reeuenii  pour  être  imprimé  et  publié 
dans  un  journal. 

Dans  une  première  séance  les  professeurs  parle- 
ront seuls  ;  oans  la  séance  suivante  des  mêmes  cours 
on  traitera  les  mêmes  objets,  et  tous  les  élèves  pour- 
ront parler.  Le  journal  sténographiquc  leur  aura 
remis  sous  les  yeux ,  un  ou  deux  jours  à  Tavauce, 
ce  que  les  professeurs  auront  dit  dans  la  séance  pré- 
cédente. Tantôt  ils  interrogeront  le  professeur,  tan- 
tôt le  professeur  les  interrogera;  tantôt  il  s'établira 
des  conférences  entre  les  élèves  et  les  professeurs, 
entre  les  élèves  et  les  élèves ,  entre  les  professeurs 
et  les  professeurs. 

Par  le  concours  et  par  Tensemble  de  ces  moyens, 
avant  de  passer  d'un  objet  a  l'autre,  on  portera  tou- 
jours sur  celui  qu'on  a  déjà  vu  ce  secona  coup  d'œil 
nécessaire  pour  donner  aux  iûéeê  de  la  netteté,  de  la 
fermeté  et  de  l'étendue. 

L'enseigoemeot  ne  sera  point  le  résultat  du  tra- 
vail d*un  seul  esprit ,  mais  du  travail  et  des  efforts 
simultaoés  de  Tesprit  de  douxe  à  quinze  cents 
liommes. 

Les  sciences  s'enrichiront  è  la  fois  et  des  fruits 
préparés  et  lentement  mûris  de  la  méditation ,  et 
des  créations  soudaines  et  inattendues  de  l'impro- 
visation. 

Un  très-mnd  nombre  d'hommes  destinés  à  pro- 
fesser les  diverses  sciences  s'exerceront  à  ce  talent 
de  la  parole,  avec  lequel  seul  le  génie  et  les  lumiè- 
res des  professeurs  passent  rapidement  dans  les 
élèves. 

Le  style  a  ,  plus  que  la  parole ,  de  cette  précision 
exacte  sans  laquelle  il  n'v  a  point  de  vérité ,  et  la 
parole  a,  plus  que  le  style ,  ae  cette  chaleur  fécon- 
dante sans  laquelle  il  y  a  bien  peu  de  vérité.  L'orea* 
nisation  de  l'enseignement  dans-les  Ecoles  Normales 
fournira  peut-être  les  moyens  de  corriger  la  parole 
par  le  style  et  d'animer  le  style  par  la  parole  ;  et  ces 
deux  instruments  de  la  raison  humaine ,  employés 
tour  à  tour  et  perfectionnés  l'un  par  l'autre ,  seront 
tous  les  deux  plus  propres  à  perfectionner  la  raison 
elle-même. 

La  parole  a  dominé  chez  les  anciens;  elle  a  pro- 
duit les  beautés  et  les  égarements  de  leur  génie  :  le 
style  a  dominé  chez  les  modernes  ;  il  a  produit  la 

Euisaance  rigoureuse  de  leur  ffénie  et  sa  sécheresse, 
l'emploi  successif  de  l'un  et  rautre  sera  peut-être  le 
moyen  de  réunir  ce  qu'il  y  a  le  plus  éminemment 
utile  dans  le  eénie  des  modernes  et  ce  qu'il  y  a  eu 
de  plus  beau  dans  le  génie  des  anciens. 

Tous  les  professeurs  ont  l'habitude  de  méditer  et 
d'écrire  dans  le  silence  du  cabinet,  et  presque  tous 
parleront  pour  la  première  fois  dans  une  grande  as- 
semblée :  un  ptfeil  essai  les  aurait  trop  effrayés  s'ils 
avaient  pu  avoir  une  autre  ambition  que  celle  d'être 
tuiles. 

RèglemetU. 

Art.  I<r.  La  séance  commencera  tous  les  jours  à 
onze  heures  du  matin,  et  finira  à  une  heure  un  quart. 

II.  Les  travaux  des  Ecoles  Normales  seront  distrî- 
baés  dans  Tordre  suivant  : 

Primidi  et  iextidi  :  —  l»  Mathématiques ,  La- 
rnnge  et  La  Place ,  conjointement  ;  —  2©  Physique, 
Billy  ;—  S«  Géométrie  descriptive,  Monge. 

Ihêodi  et  êeplidi  :  -*  !<>  Histoire  naturelle ,  Dan- 
hmHlùn;  —  2®  Chimie,  Bertbolel;  —  ««  Agricul- 
tiire,  Tnouin. 

,  Tridi  et  oeaéi  :  ^  fo  Géographie ,  Buache  et 
IMclie,  conjointement;  —  2« Histoire,  Volneyj 
«n'a*  MoMle  «  Bermardin  Saint-Pierre. 


Quartidi  et  ncmidî  :  —  !<>  Grammaire ,  Sicard  - 
-^  20  Analyse  de  l'entendement.  Garât;  —  3o  Lit* 
térature,  Caharpe. 

III.  Les  quintidis,  les  professeurs  des  Ecoles  Nor- 
males réunis  auront ,  en  présence  des  élèves ,  une 
conférence  à  laquelle  seront  invités  les  savants,  et 
les  gens  de  lettres  et  les  artistes  les  plus  distingués. 

IV.  Ces  conférences  auront  principalement  pour 
objet  la  lecture  et  la  discussion  des  livres  élémen* 
taires  à  l'usage  des  écoles  primaires  de  la  répu- 
blique. 

V.  Les  Ecoles  Normales  vaqueront  les  décadis.  Les 
élèves  se  répandront  dans  les  bibliothèques,  les  ob- 
servatoires ,  les  muséum  d'histoire  naturelle  et  des 
arts,  les  conservatoires  d'arts  et  métiers,  et  dans 
tous  les  dépôts  consacrés  à  l'instruction  ;  tous  ces 
dépôts  leur  seront  ouverts  sur  le  vu  d'une  carte 
marquée  au  timbre  du  comité  d'instruction  publi- 
que, et  signée  des  deux  représentants  du  peuple 
près  les  écoles  normales. 

VI.  Les  séances  des  Ecoles  Normales  seront  alter« 
nativement  employées  au  développement  des  prin- 
cipes de  l'art  d'enseigner ,  exposes  par  les  profes- 
seurs et  à  des  conférences  sur  ces  principes  entre  les 
professeurs  et  les  élèves. 

VII.  Les  conférences  ne  pourrontjamais  s^ouvrir 

3ue  sur  des  motions  traitées  dans  la  séance  précé- 
ente. 

VII!.  Aucun  élève  ne  poura  prendre  la  parole 
s'il  ne  s'est  fait  inscrire ,  et  s'il  n'est  appelé  par  le 
professeur. 

IX.  Dans  le  cours  des  débats,  le  professeur  pourra 
ajourner  sa  réponse  à  ia  séance  suivante. 

X.  Les  leçons,  les  débats  et  les  conférences  qui 
auront  lieu  dans  les  Ecoles  Normales ,  seront  re- 
cueillis dans  un  journal  sténo^raphique;  ce  journal 
sera  distribué  aux  membres  de  la  Convention  na- 
tionale ,  aux  professeurs  et  élèves  des  Ecoles  Nor- 
males; il  sera  envoyé  aux  administrations  de  district 
de  la  république  et  à  ses  ministres,  consuls  et  agents 
en  pays  étrangers. 

Signé  Lakamal  et  Dblbtrb. 


CONVENTION   NATIONALE. 

Présidence  de  Letommeur  {de  la  Manche). 

Extrait  du  registre  des  arrêtés  du  comité  de 
législation. 

Le  comité  de  lécislation,  informé  qu'un  arrêté  pris  par  la 
ci-dcvant  muDicipalilé  de  Poris  a  défendu  de  délivrer  des 
passeports  aux  cifoyens  qui  ne  produiraient  pas  leurs  quit- 
tances de  don  paulotique  et  de  leurs  cohtribuUons; 

Considérant  que,  si  ft  la  représentaUon  naUonale  senle 
appartient  la  oonfectlon  des  lois,  elle  seule  a  aussi  le  droit 
d*en  interpréter,  dianger,  étendre  ou  modifier  les  disposi- 
tions, et  que  nulle  autre  autorité  ne  peut  s'arroger  ce  pou- 
voir, arrête  : 

Art.  1er.  Les  seules  disposKionF  des  lois  actuellement  en 
vigueur,  relaiiveoiottt  aux  passeports,  seront  exécniées. 

II.  L'arrêté  de  la  municipalité  de  j^aris,  qui  défiend  dedé- 
lirrer  des  passeports  aux  citoyens  qui  ne  JusUfieroot  pat 
du  payement  de  leurs  contributions  en  don  patriotique,  est 
annulé. 

lU.  Tous  arrêtés  semblables,  ou  qui  étabUralent  des  dis- 
positions autres  que  celles  contenues  dans  les  lois  readues 
sur  les  passeports,  sont  également  annulés. 

IV.  Le  présent  arrêté  sera  iaiéffé  aiu  ■*>"*«*^«itT  dss  Ms  al 

de  correspondance* 


351 


La  commission  des  administrations  civiles,  police  et  tri- 
bunaux, est  chargée  de  le  transmettre  aux  sections,  comités 
révolutionnaires  et  département  de  Paris. 

Signé  Merlin  (de  Douai),pre5i(toi/;IsoAiiD,PoTnEii, 
Lepin  ,  David  ,  Pons  (de  Verdun),  " 
Garrau,  EscaASsÉRiAuz,  Berlier. 


Fin  de  la  loi  rendue  dam  lei  iéanee$  du  26  et  28 
nivôse  sur  l'organisation  des  commiisaires  des 
guerres  ,  et  leurs  fonctions  tant  aux  armées  que 
dans  les  divisions  militairee  de  la  république, 

'  TITRE  m. 

Des  commissaires  des  guerres  à  la  suite  des  armées 
et  en  résidence  dans  les  divisions  militaires, 

•  Art.  I«r.  Les  commissaires  des  guerres  attaches 
ouz  armées  y  seront  uniquement  sous  les  ordres  des 
commissaires  ordonnateurs  desdrtes  armées,  tant  au 
deliors  qu*au  dedans  du  territoire  de  la  république. 

•  Ils  leur  obéiront  en  tout  ce  qui  concei*nera  le 
service ,  et  leur  rendront  compte  exactement  de 
Texécution  des  ordres  qu'ils  en  auront  reçus ,  et  de 
toutes  les  opérations  d'administration  que  Turgence 
et  des  circonstances  imprévues  les  mettraient  dans 
le  cas  de  faire  par  eux-mêmes  et  provisoirement. 

•  II.  Les  commissaires  des  guerres  en  résidence 
dans  les  divisions  seront  sous  les  ordres  des  commis- 
saires ordonnateurs  desdites  divisions ,  auxquels  ils 
rendront  également  compte  de  tous  les  détails  dont 
ils  seront  chargés. 

«  III.  Les  commissaires  des  guerres  attachés  aux 
armées  en  dedans  des  frontières  de  la  république,  et 
ceux  employés  dans  les  divisions  militaires ,  pour- 
ront se  suppléer  mutuellement  dans  les  détails  cou- 
rants de  leurs  fonctions.  Ils  devront  se  concerter  et 
se  concilier  sur  tous  les  moyens  de  pourvoir  au  ser- 
vice et  de  rassurer.  Néanmoins ,  lorsque  des  camps 
seront  établis  à  portée  des  places  de  guerre,  et  lors- 
que les  armées  se  mettront  en  mouvement ,  les 
commissaires  des  guerres  qui  seront  particulière- 
ment attachés  au  service  des  armées  suivront  exclu- 
sivement leur  destination ,  et  ceux  en  résidence  de- 
vront toujours  restera  leur  poste. 

•  IV.  Les  commissaires  des  guerres  rendront 
compte  exactement  de  tous  les  détails  de  leur  service 
aux  ordonnateurs  dans  l'arrondissement  desquels  ils 
se  trouveront  employés,  soit  dans  les  divisions  ,  soit 
dans  les  armées.  Ceux  qui ,  conformément  à  Tar- 
ticle  VII ,  section  II  du  litre  1er,  seront  employés 
près  d'un  commissaire  ancien  de  service  ou  d  un 
grade  supérieur,  lui  rendront  compte  directement, 
et  celui-ci  seul  correspondra  avec  le  commissaire 
ordonnateur ,  et  Tinformera  de  Texécution  de  tous 
les  ordres  oui  lui  auront  été  transmis  concernant  la 
place  dont  le  service  général  lui  sera  confié. 

«  V.  Dans  aucun  cas  les  commissaires  des  guerres 
qui  ne  seront  pas  seuls  dans  une  place  ne  prendront 
aucune  détermination  de  leur  propre  mouvement, 
et  ne  donneront  aucun  ordre  général  pour  quelque 
partie  de  service  que  ce  soit ,  cette  faculté  étant  ré- 
servée uniquement  à  l'ancien  des  commissaires  des 
guerres,  ou  à  celui  d*un  grade  supérieur. 

•  VI.  Aux  termes  de  l'article  XXIII  de  la  section  IV 
du  code  pénal  militaire ,  décrété  par  la  Convention 
nationale  le  12  mai  1793  (vieux  style),  il  est  défendu 
à  tout  commissaire  des  guerres  de  quitter  son  arron- 
dissement sans  en  avoir  reçu  Tordre  par  écrit  de  son 
supérieur,  et  sans  en  avoir  prévenu  le  commandant 
en  chef  des  troupes. 


»vn.  En  oonséqnenee,  tneon  oônninairè  dès 
guerres  de  résidence  ne  pourra  être  déplacé  sans  on 
ordre  de  la  commission  ae  l'organisation  des  armées 
de  terre,  visé  par  le  comité  de  salut  public,  excepté 
en  cas  d'urgence  ou  de  circonstances  extraordinai- 
res; dans  ce  cas,  le  commissaire  ordonnateur  faisant 
Sartie  d'une  armée  qui  aurait  besoin  d*un  ou  de 
eux  commissaires  des  guerres  de  plus  que  ceux 
qui  seraient  à  sa  disposition  pourra  les  demander  an 
commissaire  ordonnateur  de  la  plus  prochaine  divi- 
vision  militaire,  lequel  ne  pourra  se  refuser  à  les 
détacher  provisoirement ,  jusqu'à  ce  que ,  d'après  le 
compte  qu'il  en  rendra  sur-le-champ  à  la  commis- 
sion de  l'organisation  et  du  mouvement  des  armées 
de  terre ,  il  soit  pourvu ,  par  le  comité  de  salut  pu- 
blic, au  remplacement  des  commissaires  des  euerres 
nécessaires,  soit  pour  l'armée ,  soit  pour  la  division 
d'où  il  en  aurait  été  tiré. 

•  VIII.  Nul  ne  pourra  donner  d'ordre  .relatif  au 
mouvement  des  effets  et  denrées  des  magasins  mili- 
taires de  la  république,  ni  exiger  de  renseignements 
sur  leur  situation ,  sans  au  préalable  en  avoir  in- 
formé le  commissaire  des  guerres  qui  en  aura  la  po- 
lice, et  sans  avoir  pris  son  attache  a  cet  effet. 

•  IX.  Les  lois  sur  l'avancement  n'étant  applicables 
en  rien  aux  commissaires  des  guerres,  la  probité,  la 
vertu,  l'activité ,  l'expérience  et  le  républicanisme 
seront  désormais  les  seuls  titres  que  les  commissai- 
res des  guerres  auront  droit  d'invoquer  pour  être,  à 
Vàge  requis,  appelés  è  remplir  les  fonctions  de  com- 
missaire ordonnateur. 

«X.  Tout  militaire  qui  quittera  son  corps  pour 
prendre  une  place  de  commissaire  des  guerres  ne 
pourra  ni  conserver  son  rang  dans  son  corps ,  ni  y 
prétendre  à  aucun  avancement,  et  il  v  sera  remplacé 
sur-le-champ  ;  néanmoins  il  sera  admis  à  faire  va- 
loir ses  services  militaires  pour  sa  retraite  comme 
commissaire  des  guerres. 

TITRE  IV. 

Solde  annuelle  et  autres  traitementi  relatipÊ, 

Section  Ire. 

Fixation  de  la  iolde^ 

«  Art.  1er.  La  solde  annuelle  des  commissaires  des 
guerres ,  comprenant  les  appointements  fixes ,  le 
supplément  de  campagne ,  la  gratification  et  les 
sommes  payées  pour  rachat  de  rations  de  fourrages 
supprimées  par  la  loi  du  23  vendémiaire  an  2e  de  la 
république ,  sera  ,  pour  tout  le  temps  de  la  guerre 
seulement,  et  dans  quelque  lieu  que  les  commissai- 
res des  guerres  soient  employés,  réglée  ainsi  qu'il 
suit ,  savoir  :  —  Aux  commissaires  ordonnateurs 
employés  en  chef  aux  armées,  16,000  liv.  ;  —  Aux 
autres  commissaires  ordonnateurs  auprès  des  ar- 
mées, et  à  ceux  de  résidence  dans  les  divisions  mi- 
litaires, 12,000  liv.;  —  Aux  commissaires  des 
guerres  de  première  classe,  8,000  liv.  ;  —  Aux  com- 
missaires des  guerres  de  seconde  classe ,  6,000  liv.  • 

Nota,  Les  autres  articles  suivants  sont  relatifs 
aux  logements ,  aux  rations  de  vivres  et  de  fourra- 
ges, et  aux  frais  de  bureau  alloués  aux  commissai* 
res  des  guerres. 

SUITE  DE  LA  SEANCE  DU  29  NIVOSE. 

On  lit  la  lettre  suivante  : 

Les  représentants  du  peuple  près  les  ports  et  côtes 
de  Brest  et  de  Lorienl  à  la  Convention  nationale, 

«  Qtô^eQè  collègues,  la  commuoe  de  Brest,  qui  a  été  tant 


252 


de  fols  calomniée  parle»  hommes  qnl  vonlalent  justifier  la 
terreur  dont  elle  a  été  victime,  vient  de  donnei'  i«ne  nou- 
velle preuve  de  son  patriotisme  et  de  son  dévouement  à  la 
Convention  nationale.  Du  moment  qu'elle  a  eu  connaissance  ■ 
des  nouveaux  efforts  des  ennemis  de  la  libcrié  dans  le  per-  { 
fide  ouvrage  intitulé  leSpectateu:  français,  io\ï%  tes  citoyens 
ont  renouvelé  â  la  Société  populaire  le  serment  d'être  in- 
violablement  attachés  A  la  république  eà  A  la  Convention 
nationale,  et  d'exterminer  tous  les  partisans  de  la  royauté. 

«  Nous  leur  avons  promis  de  vous  donner  connaissance 
de  l'indignation  que  leur  a  inspirée  ce  nouveau  plége  des 
partisans  des  despotes;  nous  le  faisons  avec  d'autant  plus 
0e  plaisir  que  cette  commune  nous  parait  avoir  été  con- 
stamment attachée  aux  vrais  principes  de  la  liberté  ei  de 
réglité. 

•  Salut  et  fraternité.  Villers,  Dbsrues.  • 

Thibion  :  Je  demande  la  parole  pour  une  motion 
d'ordre. 

Tous  les  membres  de  la  Convention  ont  senti  la 
nécessité  d'établir  promptement  les  têtes  décadaires, 
et  de  substituer  à  des  usages  fanatiques  et  supersti- 
tieux des  usages  philanthropiques  et  républicains; 
car  il  ne  sulfit  pas  de  détruire,  il  faut  édiGer,  et  plan- 
ter en  quelaue  sorte  sur  les  débris  du  despotisme 
Tarbre  vivifiant  de  la  liberté.  Mais  a-t-on  pris  le 
chemin  le  plus  court  et  le  plus  sûr  pour  arriver  au 
but?  Je  n*en  crois  rien.  Beaucoup  de  membres  nous 
ont  donné  des  projets  de  décret ,  et  j'ai  remarque 
dans  chacun  de  ces  projets  un  grand  nombre  d'idées 
utiles  ;  mais,  à  mon  avis,  aucun  n'a  jusqu'ici  rempli 
totalement  l'objet  que  nous  avons  en  vue,  et  je 
doute  même  qu'en  les  fondant  tous  ensemble  on 
puisse  le  remplir  entièrement. 

Le  décret  qui  réunit  au  comité  d'instruction  pu- 
blit^ue  tous  les  auteurs  de  ces  divers  projets  n'aura 
yraisemblablement  aucun  résultat  satisfaisant  ;  car 
chacun  étant  prévenu  pour  sts  propres  idées  adop- 
tera didicilement  ce  qu'il  n*âura  pas  lui-même  ima- 
giné. 

La  nomination  d'une  commission  uniquement 
chargée  d'examiner  ces  différents  plans ,  étrangère 
au  comité  ,  surchargé  d'objets  de  détail  et  d'exécu- 
tion, et  aux  faiseurs  de  projets,  m'aurait  paru  pré- 
férable. Il  ne  s'agit  pas  seulement  de  faire  vite,  mais 
de  faire  bien.  11  me  semble  qu'on  ne  sent  pas  assez 
toute  l'importance  de  cet  objet  :  si  nous  ne  réusis- 
sons  pas  d'abord ,  il  nous  sera  impossible  de  réussir 
ensuite.  Le  peuple  aura  conçu  pour  les  innovations 
un  dégoût  qu'où  ne  pourra  plus  aisément  surmon- 
ter, et  il  retombera  peu  à  peu  dans  ses  vieilles  habi- 
tudes et  ses  vieux  préjugés.  Je  crois  que  Ton  serait 
Îtarvenu  à  des  résultats  plus  heureux  si  l'on  eût  vu 
a  chose  plus  en  grand ,  et  au'au  lieu  de  traiter  la 
question  particulière  des  fêtes  décadaires  on  eût 
traité  la  question  générale  des  institutions  politiques 
et  républicaines.  Il  ne  suflit  pas,  en  effet,  de  se  mon- 
trer républicain  un  jour  de  décade  ;  il  faut  l'être  tous 
les  jours ,  dans  toutes  les  circonstances,  dans  tous 
les  instants  de  sa  vie.  Il  faut,  en  un  mot,  que  les 
mœurs  et  tous  les  usages  du  peuple  s'accordent 
avec  les  principes  politiques  et  la  forme  du  gouver- 
nement qu'il  a  adoptés. 

Je  dirais  volontiers  que,  pour  constituer  une  ré- 
publique ,  il  faut  trois  choses  :  !<>  des  institutions  ; 
20  des  institutions  ;  3o  des  institutions.  Que  me  font 
en  effet  les  principes  que  nous  professons,  si  dans  la 
pratique  nous  sommes  sans  cesse  en  opposition  avec 
ces  principes?  N'avons-nous  pas  vu  des  factions 
abuser  tour  à  tour  des  mots  de  vertu  et  de  liberté, 
et  des  adages  les  plus  sacrés ,  pour  assouvir  leur 
vengeance  et  asservir  leurs  concitoyens?  Parlons 
moins  de  vertu  et  de  liberté ,  et  soyons  plus  libres 
et  plus  vertueux.  Nous  ne  pouvons  espérer  de  le 
devenir,  je  ne  me  lasserai  pas  de  le  dire,  que  par  des 


inslitutions.  C*est  par  elles  que  la  génération  nais- 
saute  se  fera  distinguer  de  la  nôtre,  et  que  son  âme, 
moulée,  pour  ainsi  dire,  à  la  vertu  et  aux  sentiments 
les  plus  héroïques ,  saura  faire  sans  effort  et  avec 
délices  ce  qui  nous  coûte  encore  tant  de  répugnance 
aujourd'hui. 

C'est  par  les  institutions  que  Moïse ,  Lvcurgue  et 
tous  les  grands  législateurs  ont  consolidfé  leur  ou- 
vrage ,  et  que  le  premier  a  fait ,  en  quelque  sorte , 
survivre  le  sien  à  lui-même  et  au  peuple  qu'il  avait 
institué. 

Mais  comment  donner  aux  Français  les  sublimes 
institutions  oui  doivent  éterniser  l'empire  de  la  li- 
berté avec  celui  de  leur  institution  ? 

Ce  n'est  pas ,  je  le  répète ,  en  précipitant  le  travail 
et  en  rapetissant  la  chose  ;  il  n  appartient  qu'au  gé- 
nie et  à  la  méditation  de  préparer  mûrement  un  tel 
ouvrage.  Peut-être ,  pour  être  bon  ,  faudra-t-il  qu'il 
sorte  entier  de  la  tête  d'un  seul  homme.  Et  certes 
ce  n'est  pas  à  nous,  qui  sommes  journellement  occu- 
pés des  grands  intérêts  de  la  république  et  distraits 
§ar  mille  objets  de  détail ,  qu'il  convient  de  préten- 
re  à  la  solution  de  ce  grand  problème.  Je  réitére- 
rai donc  ici  la  motion  (jue  j'ai  faite  il  y  a  deux  mois 
au  comité ,  et  qui ,  si  elle  eût  été  exécutée  comme 
elle  avait  d'abord  été  adoptée,  eût  peut-être  déjà 
aujourd'hui  produit  son  effet  :  c'était  de  nommer 
hors  du  sein  du  corps  législatif  une  commission  com- 
posée d'un  petit  nombre  d'hommes  profonds  et  expé- 
rimentés, pour  présenter  au  comité,  le  plus  lût  possi- 
ble (et  non  dans  un  délai  fixé ,  comme  si  le  génie 
travaillait  à  la  toise),  un  plan  général  d'institutions 
sociales  et  républicaines.  Les  fêtes  décadaires  y  eus- 
sent été  nécessairement  comprises,  et  auraient  eu 
une  liaison  intime ,  comme  cela  doit  être ,  avec  le 
reste  de  l'ouvrage.  En  attendant,  on  eût  pu  se  con- 
tenter du  projet  de  décret  présenté  par  le  comité , 
qui  n'était  qu'un  préliminaire  et  ne  préjugeait  rien. 
Mais  telle  est  notre  légèreté  :  emportés  par  le  zèle, 
tout  nous  paraît  facile;  nous  ne  doutons  de  rien. 
Ensuite  il  faut  revenir  sur  ses  pas  ;  malheureuse- 
ment pour  l'objet  dont  il  s'agit,  il  ne  sera  plus  temps 
si  jamais  on  s'égare. 

Nous  aurons  toujours  fait  assez  vite  si  nous  avons 
fait  assez  bien  :  qu'aurions-nous  gagné  à  tant  nous 
hâter,  s'il  faut  un  jour  recommencer  l'ouvrage  avec 
plus  de  difficultés?  La  plus  dangereuse  de  toutes  les 
erreurs  politiques  est  de  croiro  que  nous  pouvons 
tout  faire  par  nous-mêmes.  Ne  craignons  pas  de  nous 
environner  de  secours  étrangers  ;  appelons  de  toutes 
parts  autour  de  nous  les  penseurs  et  les  talents  de 
tout  genre.  Fixons ,  surtout  en  ce  moment ,  l'atten- 
tion de  tous  les  philosophes  de  la  république  sur  les 
institutions  qu'il  convient  de  donner  aux  Français 
pour  assurer  leur  liberté  et  maintenir  leur  gouver- 
nement démocratique;  tel  est  le  véritable  problème 
à  résoudre  ;  c'est  à  quoi  je  conclus  quant  a  présent. 
J'ai  dit. 

L'assemblée  ordonne  l'impression  de  cette  mo- 
tion. 

Andbé  Dumont  :  Le  24  frimairet  Tarbé,  ex-mi- 
nistre des  contributions,  demanda  le  rapport  du 
décret  rendu  contre  lui;  la  Convention  a  renvoyé 
cette  demande  à  son  comité  de  sûreté  générale.  Le 
comité,  sans  rien  préjuger,  a  cru  que,  par  respect 
pour  les  principes,  il  ne  pouvait  pas  acquiescer  à 
cette  demande,  et  (|ue  le  citoyen  Tarbé  devait  passer 
par  la  voie  ordinaire,  celle  des  tribunaux  compé- 
tents. En  conséquence  votre  comité  de  sûreté  géné- 
rale vous  propose  de  passer  à  l'ordre  du  jour  sur  la 
proposition.  —  Décrété. 

—  Les  citoyens  de  la  commuoe  de  Belay,  déparlemeiit  da 


253 


l'Ain,  demandent  la  panliion  des  scëtërats  qui,  dans  leurs 
contrées ,  ont  commandé  les  forfaits  et  les  ont  fait  froide- 
ment exécuter  ;  de  ceux  qui.  dans  les  déparlements, ont  en- 
tassé les  cadavres,  qui  s'y  sont  gorgés  de  pillage,  et  qui  s'y 
sont  érigés  en  insolents  dictateurs  «  Nous  ne  demandons 
pas  de  sang,  mais  que  les  misérables  aillent  porter  dans  une 
terre  étrangère  leur  honte  et  leurs  forfaits.  • 

Bailleul  :  Il  est  incroyable  qu'un  tribunal,  après 
avoir  déclaré  que  les  hommes  qui  composaient  le 
comité  révolutionnaire  de  Nantes  étaient  auteurs  ou 
complices  des  assassinats  qui  ont  été  commis  dans 
cette  commune,  les  ait  acquittés.  II  est  temps  que  le 
comité  de  législation  nous  fasse  un  rapport  sur  ces 
hommes  acquittés. 

Je  demande  que  le  rapport  soit  fait  incessam- 
ment. 

L'Adresse  du  département  de  TÂin  contient  en- 
core une  vue  excellente  :  elle  vous  demande  de  ne 
pas  souiller  le  sol  de  la  république  du  sang  de  ceuxr 
fà  même  qui  Font  couvert  d'é(^afauds. 

Je  pense  aussi  qu'on  doit  prendre  une  autre  me- 
sure, et  je  demande  que  les  trois  comités  examinent 
s'il  ne  serait  pas  plus  oonvenable  et  plus  digne  du 
peuple  français  de  chasser  de  son  territoire  ces  en- 
nemis de  son  bonheur. 

Les  propositions  de  Bailleul  sont  décrétées. 

^  Pons  (de  Verdun),  an  nom  du  comité  de  législation, 
fait  casser  un  Jugement  rendu  contre  les  brasseurs  de  Stras- 
bourg par  la  commission  présidée  par  Schneider;  les 
sommes  payées  en  conséquence  de  ce  jugement  seront  rcs- 
Utuées. 

—  Le  même  rapporteur  Intéresse  l'humanité  de  la  Con- 
venUon  en  faveur  de  la  veuve  Boncbamps,  condamnée  à 
mon,  le  17  germinal,  par  la  commission  populaire  du  Mans, 
comme  complice  des  brigands  de  la  Vendée,  parce  qu'elle 
fut  arrêtée  A  la  suite  de  leur  armée. 

I^a  preuve  que  celte  citoyenne  n'avait  aucune  intention 
hostile,  c'est  qu'elle  sauva  la  vie  à  six  mille  patriotes  près 
d'être  fusiUés  dans  la  commune  de  Saint-Florent. 

Après  son  jugement  elle  s'est  déclarée  enceinte;  en  con- 
séquence le  sursis  a  été  ordonné. 

Sur  ia  proposition  du  rapporteur,  l'assemblée  déclare 
comme  noo  avenu  le  Jugement  dont  il  s'agit.  ^On  applaudit.) 

Cette  proposition  est  décrétée  en  ces  termes  * 

c  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  son  comité  de  législaUon  sur  la  pétition  d'un  grand  nom- 
bre d'habitants  de  la  commune  de  Nantes  'et  de  volontaires 
nationaux  en  faveur  de  la  veuve  Bonchamps,  condamnée  A 
mort,  par  la  commission  militaire  établie  au  Mans,  le  17 
gerininal  dernier,  comme  convaincue  d'avoir  suivi  l'armée 
des  rebelles  de  la  Vendée  avec  des  intentions  hosUles,  et  A 
l'exécution  de  laquelle  II  a  été  sursis  parce  qu'elle  s'est  dé- 
clarée enceinte  :• 

t  Considérant  qu'il  est  prouvé  que  la  citoyenne  Bonchamps, 
A  la  jiuite  d'une  action,  a  sauvé  la  vie  A  un  grand  nombre  de 
patriotes; 

«  Qu'il  est  d'ailieuril  conséquent  au  décret  du  14  frimaire 
de  la  faire  Jouir  de  l'amnistie  qu'il  prononce  ; 

•  Décrète  que  le  Jugement  de  la  commission  miUtaire 
établie  «u  Mans,  le  17  germinal,  qui  condamne  ia  citoyenne 
Ronchamps  A  mort,  est  comme  non  avenu ,  et  qu'elle  sera 
mise  en  liberté  : 

c  Charge  la  commission  des  administrations  cfviles,  de 
police  et  uibunauy,  de  l'exécution  du  présent  décret.  • 

BuBLLB  :  La  Coivention  nationale  vient  de  rendre 
un  décret  fondé  sur  la  justice  et  la  bienfaisance; 
mais  elle  ne  doit  pas  borner  à  ce  nouvel  acte, 
qui  lui  est  si  familier,  ses  tendres  sollicitudes  pour 
les  grands  intérêts  qui  lui  sont  confiés.  H  y  a  sans 
doute  d'autres  victimes  de  la  tyrannie  ou  de  I  erreur, 
qui  sont  dans  le  même  cas  que  la  citoyenne  en  fa- 
veur de  laquelle  le  décret  vient  d'être  rendu. 

Je  demande  que  la  mesure  prise  à  son  é^ard  soit 
étendue  à  tous  les  individus  condamnés  ci-devant 
comme  rebelles  de  la  Vendée,  dont  les  jugements 
ne  sont  pas  exécutés ,  et  qu'en  conséquence  ils 


soient  rendus  sur-le-champ  à  la  liberté.  (On  ap* 
plaudit.) 

Garnier  (de  Saintes)  appuie  cette  proposition;  elle  est 
d<'crétée,  au  milieu  des  plus  vifs  applaudlss^nenla,  comme 
il  suit  :  ' 

•  Ia  Convention  nationale  décrète  que  les  personnes  qui 
ont  été  condamnées  A  quelque  peine  que  ce  soit,  pour  avoir 
pris  part  A  la  révolte  qui  a  éclaté  dans  les  départements 
de  l'Ouest,  des  Gôtes-de-Brest  et  de  Cherbourg,  mais  dont 
les  jugemenu  n'ont  pas  été  exécutés,  Jouiront  des  effets  do 
l'amnisiie  accordée  par  le  décret  du  12  frimaire,^  et  seront 
mises  sur-le-champ  en  liberté,  t 

—  Sur  la  proposition  d'un  membre,  l'assemblée  rend  le 
décret  suivant  : 

c  La  Convention  nationale  décrète  que  les  Jugements 
rendus  contre  les  personnes  condamnées  A  U  déportation 
en  venu  des  dispositions  de  ia  loi  du  28  mars,  qui  donnait 
HU  tribunal  révolutionnaire  le  pouvoir  de  prononcer  cette 
peine  contre  ceux  qui  se  trouveraient  convaincus  de  délits 
non  spécifiés  tels  par  les  lois,  seront  renvoyés  A  l'examen 
des  comités  de  législation  et  de  sûreté  générale,  pour  statuer 
définitivement  sur  leur  mise  en  liberté.  • 

BouBDON  (de  roise)  :  Il  est  temps  de  rendre  à  la 
liberté  une  roule  de  citoyens  opprimés  sous  le  ré- 
gime de  sang:  c'est  cette  mesure  générale  que|e 
croyais  avoir  été  décrétée.  Pendant  quinze  mois 
nous  avons  géipi  ^us  la  tyrannie  la  mieux  consti- 
tuée, la  mieux  organisée,  la  plus  épouvantable  qui 
exista  jamais;  il  faut  que  ce  qui  respire  encore,  ce 

3ue  Bobespierre  a  laissé,  ce  qui  a  échappé  à  la  raire 
es  persécuteurs,  passe  à  Tcxamèn  du  comité  de  lé- 
gislation, qui  fera  Justice,  pourvu  que  les  condam- 
nés ne  soient  coupables  ni  de  vols,  ni  de  délits  po« 
sitifs,  ni  de  tiaits  de  royalisme.  (On  applaudit.)  Sou- 
venez-vous que,  sous  le  régime  de  Bobespierre,  un 
citoyen  qui  I  eût  regardé  de  travers  eût  été  au  moins 
condamné  ù  la  déportation;  et  Bobespierre  n*avait 
pas  seul  cet  affreux  privilège;  il  n'était  pas  le  seul 
qui  exerçât  une  telle  tyrannie.  Les  représentants  du 
peuple  en  mission  étaient  soumis  à  un  espionnage 
infâme.  Dans  les  Sociétés  populaires  vraiment  sœurs 
de  celle  des  Jacobins,  on  voulait  les  forcer  à  se  faire 
membres  de  ces  corporations,  pour  qu*on  pût  les 
surveiller,  eux  qui  aevaient  eux-mêmes  surveiller 
ces  Sociétés.  La  persécution  était  bien  plus  cruelle 
contre  les  simples  particuliers:  les  fers,  la  déporta- 
tion, la  guillotine,  tout  était  employé  pour  les  faire 
Jacobins.  Je  demande  en  conséquence  que  tous  les 
jugements  iniques  de  ces  buveurs  de  sang,  qui  n'au- 
ront pas  encore  été  exécutés,  soient  revus  par  le  co- 
mité. 

La  proposition  de  Bourdon  est  décrétée,  an  mlUeii  des 
applaudissements,  en  ces  termes  : 

c  La  Convenlion  nationale  autorise  son  comité  de  législa- 
Uon A  statuer  sur  la  mise  en  liberté  de  tous  les  citoyens  qui 
ont  été  condamnés  A  la  peine  de  mort,  et  qui  ne  sont  pas 
exécutés,  et  ceux  condamnés  A  d'autres  peines  que  celle  ca- 
pitale, pourvu  que  ces  Jugements  ne  soient  rendus  ni  pour 
délits  ordinaires,  ni  pour  faits  de  royalisme.  > 

Merlin  (  de  Thionville):  Autant  la  malveillance 
s*agite  pour  ramener  le  peuple  sous  l'esclavage, 
autant  la  Convention  doit  se  montrer  bienfaisante. 
Les  ennemis  de  la  liberté  conspirent  encore  dans  les 
ténèbres,  et  leur  audace  marche  souvent  à  décou- 
vert. Vous  frémirez  en  apprenant  qu'un  patriote 
vient  d'être  assassiné  par  un  monstre  échappé  de 
l'antre  de  Cacus.  Ce  patriote  disait  :  •  Laissez  faire 
Iq  Convention;  elle  nous  mène  au  bonheur.  Vous 
vous  plaignez  d'une  disette  passagère;  rappelez -vous 

Sue,  sous  la  tyranniede Bobespierre, nousmanquions 
e  tout.Cependant,quandBobespicrredisait',à  la  tri- 
bune des  Jacobins  :  •  Il  faut  souffrir,  •  vous  soufiriez. 
Ainsi  donc ,  vous  n'osiez  murmurer  sous  le  jotjs  de 
l'esclavage,  et  vous  le  feriez  sous  le  règne  £  la 
liberté! • 


354 


Ccst  à  CCS  mots  que  ce  bon  répuhlicaiii  tombe 
poignardé  par  un  forcemé,  agent  ae  la  faction  qui 
voudrait  détruire  la  Convention  nationale  et  le  gou- 
Temement,ponrnousrameneràranarchie,auxiour8 
affreux  du  pillage  et  des  meurtres.  Ceux  qui  disent 
que  nous  n*avons  point  de  gouvernement  sont  les 
vrais  royalistes,  les  véritables  ennemis  du  peuple;  ils 
craignent  que  la  France  n*àrrive  enfin  à  la  paix.Souf- 
frons,  s*il  le  faut,  souffrons  encore  quelque  temps,  et 
nous  aurons  cette  paix  désirable.(On  applaudit. )S*il 
faut  le  dire  enfin,  le  peuple  doit  recueillir  le  fruit  de 
ses  combats,  de  ses  victoires;  et  c'est  au  moment  oii 
nous  allons  bientdt  terminer  ce  grand  ouvrage  poli- 
tique, qu*on  vient  dire  que  nous  n'avons  point  de 
gouvernement  !  Montrons  à  Funivers  que  nous  som- 
mes dignes  de  signer  d*une  main  le  traité  solennel 
qui  doit  assurer  le  bonheur  du  monde  (applaudisse- 
ments), et  d'écraser  de  Tautre  main  les  derniers  res- 
tes de  la  horde  impure  des  voleurs  et  des  assassins 
politiques.  (  Les  applaudissements  continuent.) 

Je  demande  que  le  comité  de  sûreté  générale 
yons  fiasse,  séance  tenante,  un  rapport  sor  l'assas- 
sinat du  patriote  qui  vient  d'être  victime  de  son  ré- 
publicanisme. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

• 

->»  Sur  la  propotltloB  des  conliét  de  sAreCé  générale  et  de 
•aliit  pobUe ,  Kaateniblée  cliariie  le  représentant  Beaudran 
d'aller  ▼isiler  le  départeaMot  de  la  MayeDne;  GaTalgoac  est 
envoyé  près  les  années  de  la  HoseUe  et  du  Rhin. 


Clauzbl,  an  nom  du  comité  de  sûreté  générale  : 
Citoyens,  Je  viens  rendre  compte  à  l'assemblée  des 
renseignements  que  ce  comité  a  recueillis  sur  l'as- 
sassinat dont  a  parlé  Merlin  (de  Thionville).  Le  ci- 
toyen Olivier,  défenseur  de  la  patrie,  se  trouvant 
ehec  un  vinaigrier  du  faubonrg  Antoine,  entendit  le 
nommé  Morin  déclamer  contre  la  Convention  et 
contre  le  gouvernement,  en  disant  que  les  mem- 
bres étaient  des  conspirateurs,  et  ou'il  fallait  en 
choisir  d'autres  pour  les  mettre  à  la  tête  des  affaires. 

Olivier  sortit  pour  aller  dénoncer  Morin  au  co- 
mité révolutionnaire  de  la  section  des  Quinze-Vingts. 
Il  revint  avec  un  membre  du  comité  chez  le  vinai- 
grier. Morin,  les  voyant  arriver,  tira  un  couteau  de 
sa  poche«  et  frappa  Olivier  à  la  cuisse,  près  de  l'aine. 
(Un  mouvement  d'horreur  se  manifeste  dans  l'as- 
semblée. )  Celui-ci  tomba  et  expita  peu  de  temps 
après,  sans  cfu'on  ait  pu  lui  porter  aucun  secours. 
L  assassin,  bien  loin  de  vouloir  réclamer  l'indulçence» 
eut  reffronlerie  de  cracher  sur  le  cadavre  d'Olivier, 
en  disant  qu'il  avait  bien  fait  de  le  tuer.  Cet  homme 
a  été  mis  en  état  d'arrestation,  et  il  aurait  été  tra- 
duit au  tribunal  révolutionnnire  si  ce  tribunal  eût 
été  en  activité;  mais  le  comité  doit  proposer  demain 
de  le  renvoyer  au  tribunal  criniinel  du  département 
de  Paris.  Il  doit  en  m^me  temps  proposer  des  se- 
cours pour  lafemmeet  lesenfaiilsdu  citoyen  Olivier. 

r^.i<f lifUES  :  Depuis  que  les  complices  de  Robes- 
pierre ne  peuvent  égorger  par  milliers  sur  les  places 
publiques,  la  soif  du  sang  leur  commande  des  assas- 
sinats particuliers.  En  fermant  l'antre  des  Jacobins, 
le  9  thermidor,  vous  n'avez  pris  qu'une  demi-me- 
iore:  ils  sont  encore  arini's  de  poignards.  Dans  cette 
eneehite  même ,  des  membres  n'ont-ils  pas  osé  dire 
qu*ils  assassineraient  leurs  collègues. 

Aujourd'hui  ils  ont  inventé  une  nomenclature  de 
tU)(S  nouveaux;  ils  appellent  royalistes,  modérés, 
•larmistes,  les  amis  de  la  justice  et  de  la  liberté  ;  ils 
YODiJttsqu'i  dire  que  la  Convention  veut  rétablir  la 

Sinté  :  c'est  ainsi  qu'ils  donnent  le  signal  é  Taris- 
ntto.  S'il  existe  des  royalistes,  ce  sont  ceux  qui 
leoncevoir  aux  brigands  qui  voudraient  rétablir 


la  royintë  un  espoir  eoopabfe,  en  cberehantà  lenr 
persuader  qu'ils  ont  encore  un  parti. 

11  est  temps  de  prendre  des  mesures  sévères  contre 
ces  hommes  de  sang;  il  est  temps  que  les  tribunaux 
Jugent  de  grands  coupables  :  c'est  à  ce  prix  que  nous 
assureroHs  l'ordre,  la  justice ,  la  paix  et  le  ix>nbeur 
de  tous.  (On  applaudit.) 

On  dit  que  dans  cette  assemblée  il  existe  des  par- 
tisans de  Pltt  et  de  Cobourg;  mais  ceux-là  le  sont 
qui  le  disent;  car  ce  sont  eux  qui  veulent  donner  de 
la  prépondérance  à  ces  petits  hommes,  et  qui  les 
présentent  comme  un  épouvantait.  Telle  était  la 
tactique  de  Robespierre;  examinez  de  près  ses  fidè* 
les  disciples,  et  sans  doute  vous  trouverez  que  comme 
lai  ils  ont  pris  soin  de  placer  des  fonds  sur  les  caisses 
de  Londres  pour  passer  le  reste  de  leur  vie  au  sein  de 
Taisance  et  du  bonheur,  si  Ton  pouvait  goûter  le 
bonheur  avec  des  remords. 

Je  demande  que  vous  donniez  à  la  veuve  Olivier 
un  secours  provisoîR  de  1,200  liv.  (On  applaudit.) 

Je  ne  propose  qu*une  mesure  provisoire,  et  par 
laquelle,  en  attendant  un  rapport  ultérieur,  vous 
porterez  quelques  consolations  à  cette  veuve  infbr- 
tniiée,  et  vous  lui  donnerez  un  témoignage  de  Fin- 
térét  que  la  Convention  nationale  prend  a  son  sort. 
(On  applaudit.) 

Bentabole  :  Je  crois  que  cet  événement  malheu- 
reux fournira  des  observations  utiles  i  la  chose  pu- 
blique. 

Citoyens,  je  vois  avec  peine  que  la  Convention 
nationale  n'ouvre  pas  les  yeux  sur  les  dangers  qui 
menacent  la  patrie.  Vous  venez  d'apprendre  qu'un 
patriote  a  été  assassiné  au  milieu  de  la  force  armée 
et  en  présence  d'un  ofHcier  public  :  jugez  d'après  cet 
événement  quel  est  l'audace  des  scélérats.  J*ai  de- 
mandé, il  y  a  plusieurs  jours,  qu'un  rapport  fût  fait 
sur  la  situation  actuelle  de  Paris;  ce  rapport  ne  vous 
a  point  encore  été  présenté,  et  cependant  le  comité 
de  sûreté  générale  peut  vous  dire  qu'on  a  le  projet 
de  massacrer  la  Convention.  (Quelques murmures.) 

RicHOUX  :  Puisqu'on  assassine  publiquement  un 
citoyen  qui  prend  le  parti  de  la  Convention,  il  est 
certain  qu'on  veut  l'assassiner  elle-même. 

Bbntabole  :  11  est  certain  que  des  partisans  de  la 
terreur  ont  parlé  d'assassiner  tel  représentant  do 
peuple  qui  nuit  à  leurs  projets.  Citoyens,  c'est  ao 
moment  où  la  Convention  nationale  s'occupe  de 
donner  la  paix  et  le  bonheur  à  la  France,  c'est  au 
momentob  elle  donne  de  la  stabilité  au  gouverne- 
ment, que  des  scéléralscherchent  à  rétablir  la  tyran- 
nie que  nous  avons  abattue ,  et  à  se  ressaisir  du 
pouvoir  dont  ils  ont  si  cruellement  abusé.  Que  la 
Convention  déploie  dans  celte  .circonstance  toute 
son  énergie;  qu'elle  prouve  au  peuple  qu'il  n'appar- 
tient pas  à  cinq  ou  six  mille  brigands  de  lui  taire 
prendre  une  marche  rétrograde  de  la  Justice,  et  la 
patrie  est  sauvée. 

Je  demande  que  Ton  prenne  des  mesures  contre 
les  hommes  qui  veulent  attaquer  la  Convention  na- 
tionale et  l'avilir. 

*'*:  S'il  est  des  hommes  qui  veulent  la  contre- 
révolution,  il  en  est  plus  encore  qui  veulent  la 
république,  et  qui  la  défendront  (Vils  applaudisse- 
ments de  l'assemblée  et  des  tribunes.) 

Anorê  Dumont  :  Citoyens,  l'événement  malheu- 
reux oui  donne  lieu  à  cette  discussion  a  étrange- 
ment égaré  quelques  orateurs.  Eh  quoi!  on  aperçoit 
un  plan  de  contre-révolution  parce  que  quelques  fri- 
pons veulent  rattraper  le  pouvoir  qui  leur  est  échap- 
Sé!  Eh  quoi!  parce  oue  quelques  Jacobins  mis  en 
éroute  menacent  de  s  armer  contre  vous,  vous  vous 
imaginez  avoir  quelques  dangers  ù  courir?  Au  mo- 


2«6 


luentoù  la  Convention  nationale  8*occupe  du  bon- 
heur public,  queU  sont  donc  ces  hommes  si  redou- 
tables, capables  de  la  faire  trembler?  Quelques 
lâches  poursuivis  par  Topinion  publique  I^Vifis  ap- 
plaudissements.) 

Citoyens,  les  assassins,  ainsr  que  les  tyrans,  ont 
fait  un  cours  de  lâcheté;  Robespierre  vous  en  a  fourni 
la  preuve;  n*ayez  donc  rien  à  redouter  de  ses  conti- 
nuateurs. Voulez-vous  étouffer  toute  idée  de  parti 
coulre-révolutionnaire  :  qu*il  n'en  soit  plus  ques- 
tion désormais  dans  cette  enceinte.  C*est  d'ici  que 
vous  devez  diriger  l'opinion  publique;  que  ce  soit 
vers  la  vertu  et  la  liberté.  Ne  craignez  rien,  je  le 
répêtf ,  de  ce  ramas  de  brigands  venus  à  Paris  dans 
l'espérance  d'y  ensevelir,  leurs  crimes  ou  d'en  com- 
mettre de  nouveaux;  les  Parisiens sout  là;  ils  vous 
feront  un  rempart  de  leurs  corps.  Les  départements, 
en  vomissant  les  partisans  de  Robespierre  et  de  la 
tyrannie,  ont  de.  nouveau  juré  de  vous  défendre.  Il 
est  temps,  citoyens,  de  vous  prononcer  et  de  faire 
disparaître  ces  insectes  venimeux  qui  poursuivent 
avec  tant  d'acharnement  les  hommes  de  bien.  (On 
applaudit.) 

Le  comité  de  sûreté  générale  a  tous  les  pouvoirs 
nécessaires  pour  garantir  votre  sûreté  et  poursuivre 
les  restes  impurs  de  Robespierre.  L.e  temps  n'est  pas 
éluigné  où  vous  entendrez  le  peuple  bénir  la  chute 
de  ses  oppresseurs.  11  attend  la  punilioudes  che& 
que  vous  avez  mis  en  jugement.  (On  applaudit. ) 
Ne  vous  arrêtez  donc  pas  aux  cris  ae  ces  intrigants 
échappés  des  Sociétés  populaires,  qui  n*ont  jamais 
fait  la  guerre  aux  aristocrates,  mais  aux  fortunes; 
qui  ne  voulaient  point  l'extinction  des  partis,  mais 
l'extermination  des  hommes.  (  Vifs  applaudisse- 
ments.) Ces  hommes  veulent,  par  tous  les  moyens 
possibles,  s'opposer  au  bonheur  que  vous  voulez 
assurer  au  peuolé.  Il  faut  dire  le  véritable  mot  ;  ils 
veulent  empécner  que  vous  donniez  la  paix  è  la 
France;  mais  ils  ne  réussiront  pas;  l'échafaud  est  là 
qui  les  attend,  et  les  puissances  oui  les  salarient  au- 
ront encore  tort  pour  cette  fois.  (On  applaudit.)  At« 
tachez-vous  donc  sans  relâche  aux  chefs  que  ces 
hotnmes  prétendent  sauver.  Vous  n'aurez  jamais  la 
irnuquillité  et  la  félicité  publique  si  vous  ne  satis- 
faites pas  h  la  vengeance  nationale  par  ce  grand  acte 
de  justice.  Je  demande  que  les -comités  présentent 
demain  un  autre  projet  de  décret  pour  accorder  des 
secours  à  la  veuve  du  malheureux  patriote  qui  a  été 
assassiné,  et  l'ordre  du  jour  sur  tout  le  reste. 

Legendrb:  3*appnie  la  proposition  deDumont: 
ifoccupons  pas  nos  moments  à  ces  objets  qui  n'ap- 
fiartietinent  qu'à  la  police.  Ne  donnet  aucune  im- 
portance aux  rapports  que  vous  font  les  officiers  de 
police,  ni  aux  propos  que  tiennent  quelques  bri- 
gands contre  tel  représentant  du  peuple  oui  s'est 
prononcé  avec  énergie  contre  les  scélérats.  Ici  nous 
sommes  à  notre  poste  en  présence  des  ennemis, 
comme  les  défeseurs  de  la  patrie  sont  au  leur.  Sans 
doute  l'assassinat  d'un  patriote  est  une  calamité  pu 
bli^  ;  mais  qu'a  de  commun  le  meurtre  d'un  ci- 
toyen avec  le  massacre  de  la  Convention  nationale  ? 
Qu'est  un  homme  comparé  aux  grands  intérêts  de 
la  république?  (On  applaudit.) 

Le  législateur,  puisqu'on  veut  le  rapprocher  de 
révénemeot  qui  vient  d'arriver,  doit  marcher,  au 
milieu  des  poignards,  droit  à  son  but;  il  ne  doit  rien 
regarder  de  ce  qui  Tentoure»  rien  de  ce  oui  s'efforce 
de  l'atteiadre  :  Tbommejuste,  tranquille  devant  le 
tribunal  de  sa  conscience ,  doit  abhorrer  le  crime, 
et  non  redouter  les  assassins.  Il  doit  constamment 
combattre  pour  1rs  principes;  et  s'il  tombe,  il  rend 
grâces  au  ciel,  ot  son  nom  est  placé  par  la  postérité 


au  rang  des  martyrs  de  l'humanité.  Ce  ii*est  point 
au  milieu  de  la  pins  forte  citadelle  que  la  Conven- 
tion doit  crainare  les  poignards  des  asssassins.  Si 
le  bras  d'un  scélérat  est  levé,  dix  mille  patriotes  sont 
prêts  à  frapper  le  parricide.  (Vifs  applaudissements.) 
Aucun  de  nos  collègues  ne  doit  concevoir  des 
craintes. 

Un  grand  nombre  démembrée;  Nous  ne  craignons 
rien  ! 

LBomoBB  :  Paris  renferme  plus  d'hommes  de  bien 

Î[u'il  n'y  a  de  scélérats  dans  toute  la  république. 
On  applaudit.)  Dans  plus  d'une  occasion  Paris  a 
prouvé  qu'il  Savait  conserver  le  dépôt  qui  lui  était 
conlié,  et  le  défendre  même  contre  tous  ses  ennemis» 
On  a  dit  :  La  Convention  doit  enfin  ouvrir  les 
yeux.  Vos  comités,  citoyens,  ont  les  yeux  ouverts 
sur  tout  ce  qui  vous  entoure  :  nuit  et  jour  ils  veil- 
lent pour  votre  sûreté;  il  y  a  de  bons  citoyens  qui , 
par  zèle,  secondent  notre  surveillance,  et  qui  sont 
prêts  à  vous  défendre  au  premier  danger.  Je  d^ 
mande  l'ordre  du  jour;  que  la  plus  parfaite  sécurité 
soit  dans  cette  enceinte,  et  que  la  terreur  soit  ren*: 
voyée  aux  cou  pables. 

Les  propositions  d'André  Dumont  sont  adoptées. 

BoissT  D'AdGLis,  au  nom  du  comité  de  salut  pu- 
blic: Citoyens,  vous  avez  manifesté  la  volonté  de 
porter  une  main  réformatrice  sur  toutes  les  parties 
de  l'administration  oui  vous  est  confiée;  vous  voulez 
anéantir  tous  ces  abus  accumulés  avec  tant  de  pro- 
fusion pendant  le  règne  de  vos  tyrans,  et  vous  oe* 
voulez  plus  laisser  à  vos  ennemis  l'espoir  de  triom* 
pber  de  vous  par  l'épuisement  de  yob  ressources  et 
par  le  désordre  de  vos  finances.  Déjà  d'éclatantes 
suppressions  ont  annoncé  k  l'Europe  entière  que,  si 
vous  aviez  enfin  rappelé  le  règne  sacré  de  la  justice^, 
celui  de  l'ordre  et  de  l'économie  avait  aussi  rem- 
placé cet  affreux  système  de  dilapidation  et  de  dés- 
ordre. Ce  sera  vainement  que  Pitt  aura  conçu  l'es- 
poir de  vous  attaquer  dans  votre  propre  sein,  et  de 
porter  au  milieu  de  voUs  une  aestruction  que  le 
courage  de  nos  soldats  éloigne  malgré  lui  de  nos 
frontières.  Poursuivez,  citoyens  représentants;  déjà 
la  confiance  publique  est  la  récompense  de  vos  pre- 
miers efforts*  Vos  derniers  décrets  ont  ranimé  l'es- 
pérance des  bons  citoyens,  et  les  étrangers  commen- 
cent à  compter  sur  la  loyauté  de  vos  principes,  sur 
la  fidélité  de  vos  engagements. 

H  n'était  déjà  plus  ce  temps;  tandis  que  la  terreur, 
enchaînait  les  spiéculations  de  votre  commerce,  l'a- 
vidité de  vos  agents  détournait  l'étranger  honnête 
de  l'idée  de  traiter  avec  vous,  et  vous  condamnait  à 
ces  opérations  forcées  qui  sont  la  punition  de  la  y 
mauvaise  foi  et  la  ruine  de  ceux  qui  s'y  livrent.  Pour- 
suivez ;  déià  les  places  commerçantes  de  l'Europe 
observent  rattituae  que  vous  prenez,  et  se  disposent 
h  former  avec  vous  ces  associations  commerciales 
dont  noire  prospérité  dojt  être  l'effet.  Ordre  et  su-  / 
reté  dans  l'inténeur,  justice  et  lovauté  envers  nos  / 
voisins,  voilà  les  bases  sur  lesquelles  sont  fondés  le 
système  de  notre  bonheur  et  celui  de  notre  richesse. 
Poursuivez;  les  comité  aue  vous  avez  investis  de 
votre  confiance  vous  présenteront  successivemeoi 
toutes  les  vues  qu'ils  croiront  propres  à  donner  à 
votre  dédii  toute  U  solidité  qu'il  doit  obtenir. 

Une  commision  nommée  par  vous  s'occupe  des 
moyens  de  rattacher  ensemble  les  diverses  parties 
I  de  votre  gouvernement  pour  lui  donner  plus  d'é- 
I  nergie,  et  d*en  simplifier  l'organisation  pour  lui 
donner  plus  d'uclivité,  et  bientôt  vous  ne  passerez 
pas  un  seul  jour  sans  raffermir  par  quelques  lois 
sages  les  fondements  de  notre  régénération  politique. 


256 


sans  préparer  l'anéaDtissement  de  quelques  abus. 
Mais  les  abus  ont  cela  d'affreux,  que  leur  renverse- 
ment est  souvent  la  source  d*une  foule  de  calamités 
particulières;  Thumanité  même  quelquefois  sollicite 
en  leur  faveur,  et  il  faut  que  ceux  qui  les  attaquent 
sachent,  ce  qui  est  souvent  difficile,  garantir  leur 
âme  de  cette  pitié  à  laquelle  il  est  si  doux  de  céder. 
Efforçons-nous  donc,  citoyens,  en  opérant  des  sup- 
pressions nécessaires,  d*adoucir  ce  qu'elles  peuvent 


pas  auprès  des 'âmes  sensibles  contre  Tintérét  gé- 
néral. Bendo.ns  moins  terrible,  puisque  nous  en 
avons  les  moyens,  le  passage  du  régime  dilapida- 
tcur  à  celui  de  l'ordre  et  de  féconomie. 

La  nouvelle  organisation  des  bureaux  de  la  com- 
mission des  approvisionnements  entraîne  une  ré- 
forme considéraole  d*emplovés;  mais  si  la  raison  et 
le  bien  du  service  commanaent  cette  mesure,  il  est 
digne  de  vous,  citoyens,  d*en  adoucir  Textréme  ri- 
gueur. 

Parmi  les  employés  supprimés,  il  en  est  un  grand 
nombre  qui  avaient  plus  de  zèle  que  de  calcul,  mais 
qui  ont  fait  tout  ce  qu'ils  ont  pu  pour  s'acquitter  de 
leurs  devoirs.  Plusieurs  sont  pères  de  famille  ;  pres- 
que tous,  dans  une  saison  aussi  rigoureuse,  dans  un 
moment  où  vous  allez  porter  partout  la  réforme,  vont 
se  trouver  dénués  de  tous  moyens  d'existence;  mais 
vous  être  chargea  par  le  peuple  du  saint  exercice  de 
la  bienfaisance,et  vous  viendrez  à  leur  secours;  vous 
aiderez  à  calmer  des  maux  occasionnés  par  votre  jus- 
tice. Votre  comité  vous  proposedoncd*accorderà  tous 
les  employés  supprimésun  trimestre  de  leurs  appoin- 
tements, en  observant  toutefois  de  ne  les  payer  que 
de  mois  en  mois,  et  sur  la  déclaration  de  chacun 
d'eux  portant  que,  dans  l'intervalle,  ils  n'auront  pas 
été  replacés  dans  une  autre  administration. 

Voici  le  projet  de  décret  que  je  suis  chargé  de  vous 
présenter  : 

•  La  Ck>DTeDtioo  nationale,  après  avoir  entendu  lé  rapport 
de  son  comilé  de  salut  public,  décrète  : 

—  Art.  1*'.  Les  employés  de  la  commission  de  commerce 
qui  n'aaront  pas  été  replacés  dans  la  nouvelle  commission 
recevront  leurs  appointements  jusqu'au  30  germinal  pro- 
chain. 

•  U.  A  cet  effet,  ite  seront  portés  sur  des  étau  séparés,  et 
Us  seront  )>ayés  de  mois  en  mois. 

<  111.  Us  seront  tenus  de  fournir  chaque  mois  une  décla- 
raUon  signée  d'eux,  portant  qu'Us  n'ont  obtenu  aucune  autre 
place. 

c  IV.  Ils  cesseront  d'être  payés  si,  avant  l'expirntion  du 
trimestre,  ils  sont  employés  dans  une  autre  administration. 

c  V.  La  commission  des  approvisionnements  est  chargée 
de  l'exécution  du  présent  décret  • 

Ce  décret  est  adopté. 

La  séance  est  levée  à  clnq^  heures. 

N.  6.  —  Dans  la  séance  du  1*'  pluviôse ,  la  G)nvention  a 
déclaré  que  les  effets  d'habillement,  couvertures  et  lits  en- 
gagé.* dans  les  monts-de-piété,  pour  la  somme  de  100  livres 
et  au-dessous,  seront  rendus  gratuitementaux  propriétaires, 
en  justifiant  d'un  ccrUficat  d'indigence. 

—  Champein-Aubin  a  proposé  de  supprimer  la  peine  de 
mort,  de  faire  brûler  sur-le-champ  la  gniiioUne  à  Paris,  et 
d'envoyer  des  courriers  extraordinaires  pour  détruire  toutes 
celles  qui  ont  été  établies  dans  les  départements. 

Tallien  a  démontré  que  cette  mesure  était  intempesUve, 
•t  l'assemblée  a  passé  à  l'ordre  du  jour. 

lA  chaleur  de  la  discussion  a  porté  un  membre  à  accuser 
Tallien  d'être  un  égorgeur  du  2  septembre  ;  celui-ci  l*a 
sommé  de  prouver  ce  reproche.  L'accusateur  n'a  point  ré- 
pondu. 

—  Richard,  au  nom  du  comité  de  salut  pubUct  a  donné 
Icciurc  des  lettres  suivantes  : 


Joubert  et  J^-B.  Lacoste,  rapréseniantê  du  peuple 
près  les  armées  du  Nord  ei  de  Sambre-et- Meuse ^ 
au  comité  de  salut  public, 

A  Nimègue,  le  S8  nivote,  l*an  8*  de  la  répnbltqno 
française,  une  et  ÎDdivisible. 

<  Qtoyens  collègues.  les  rigueurs  de  Thlver,  qui  sont  les 
termes  des  combats,  viennent  d'être  pour  les  troupes  de  la 
république  le  signal  de  nouvelles  victoires.  L*amour  de  la 
patrie,  qui  les  guide ,  ne  leur  laisse  point  de  repos,  et  leor 
fait  tout  entreprendre  quand  il  s'agit  de  son  salut  et  de  sa 
gloire. 

•  Des  froids  excessifs  ayant  glacé  les  fleuves  et  canaux 
qui  rendent  la  Hollande  presque  impraUcable,  elles  ont  pro- 
fité de  cette  révolution  dans  les  éléments  pour  en  tenter  la 
conquête  au  pas  de  charge;  leurs  succès  répondent  à  leur 
courage. 

•  Nous  vous  avons  fait  part  de  leurs  premiers  exploits,  du 
passage  du  Wahal,  de  la  prise  de  l'Ue  de  Bethure.  Vous 
connaissez  la  reddiUon  d  Heusden ,  avec  cent  soixante- 
quinze  pièces  de  canon,  cent  cinquante  milUers  de  poudre  ; 
nous  vous  annonçons  aujourd'hui  qu'elles  sont  au  ôéà  du 
Leck,  qu'elles  occupent  Monlfort  et  Utrecht;  tout  le  pays, 
jusqu'à  Amersfoort.  se  trouve  dans  ce  moment  évacué  et  à 
notre  disposition,  ainsi  que  les  lignes  de  la  Grepe ,  d'où  l'oo 
a  chassé  le  peu  de  troupes  qui  y  restait,  et  où  l'on  a  troavé 
environ  quatre-vingts  pièces  de  canon,  vingt  caissons  ;  et 
l'ennemi,  dans  sa  fuite  préciplu»,  a  abandonné  ses  malades 
à  Rhenem,  et  le  général  britannique  lésa  reoonunandés  à  la 
générosité  française. 

i  Nous  vous  envoyons  copie  de  la. lettre  du  général  en 
chefPichegru. 

•  Salut  et  fraternité. 

I  Signé  Bbllboabdb,  J.-B.  Lagostb,  Jodubt.  s 

Le  général  Pichegru  au  reprétenUnU  du  peuple 
J.-B.  Lacoste. 

An  quartier  général,  i  Tief,  le  17  nivôse.  Tan  3«  da 
la  république  française,  une  et  indivisible. 

•  Ne  perdez  pas  un  instant,  citoyen  représentant,  à  vous 
rendre  ici  pour  p^asser  de  suite  à  Utrecht,  que  nos  troapea 
occuperont  demain,  ainsi  que  Vianem  et  Montfort;  elles  oc- 
cuperaient Amersfoort  s'il  n'était  pas  si  éloigné,  mais  il  leur 
faut  deux  marches  pour  s'y  rendre.  Tout  ce  pays  se  trouve 
à  notre  disposiUon,  ayant  été  évacué,  ainsi  que  les  lignes 
de  la  Grepe,  d'où  l'on  a  chassé  le  peu  de  troupes  qui  y  res- 
uiit ,  et  où  l'on  a  trouvé  environ  quatre-vingts  pièces  de 
canon  ci  vingt  caissons. 

•  Demain  je  vous  en  donnerai  un  détail  plus  posiur. 

•  Salut  et  fraternité.  Le  général  PiCHBonu.i 


Journal  de  V École  Normale^  rédigé,  sur  des  notes 
sténographiques ,  par  ies  professeurs  de  cette 
école. 

L'F.cole  Normale  établie  à  Paris  va  fixer  im  mode  d'en- 
seignement uniforme  pour  toute  la  répubUque,  et  le  chofat 
des  hommes  chargés  d'y  professer  les  diverses  sciences  ré* 
pond  à  la  grandeur  du  plan. 

On  s'abonne  pour  ce  Journal,  dont  il  paraîtra  an  moins 
une  feuille  par  jour,  chez  L.  Reynier,  imprimeuMlbraire, 
rue  du  Théâtre  de  TEgalité,  n**  4.  Le  prix  de  i'abonnenseot 
est  de  50liv.  pour  cent  vingt-cinq  feuilles,  et  27  1.  10  s.  pour 
quatre-vingt-dix  feuilles.  En  ajoutant  5  1.  aux  50  I.,  ou  %  I. 
10  sous  aux  27  liv.  10  sous,  on  recevra  un  bulletin  Van- 
nonces  destiné  principalement  aux  ouvrages  nouveaux  et 
iiux  annonces  qui  peuvent  intéresser  l'instruction  publique 
et  les  arts. 


Payements  à  la  trésorerie  ncUiofuUe. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  lot  six  pra» 
micrs  mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  portcure 
d'inscriptions  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagëret 
est  de  huit  mois  vingt  et  un  jours  de  l'année  1793  (vieux 
style). 


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■  GAZETTE  NATIONALE ..  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

«•  as.  Tridi  3  Pluviôse  ,  Van  3«.  {Jeudi  22  Janvier  1795 ,  tieux  style.) 


POLITIQUE. 

TURQUIE. 

Conttantinople ,  U  20  novembre,  —  Le  noufeau  grand 
vîsir,  Izei^Mehemel,  parait  toujours  Irès-Iié  avec  te  capi- 
tau«pacba,  confideDl  et  lavori  du  Grand  Seigneur»  Ce 
dernier  a  donné  dernièrement  un  repas  au  grand  fisirt  sofi 
ami. 

Izel-Mchemel  adopte  un  système  de  conduite  dont  le  but 
est  de  ne  l'àmats  indisposer  ceux  même  dont  il  veut  dé- 
truire Tinfluence  au  Divan.  Il  y  existe  depuis  longtemps 
une  grande  diversité  d*opinions.  Le  grand  visir  cberebe 
les  moyens  les  plus  modérés,  mats  les  plus  sûrs,  pour  éloi- 
gner ceux  dont  les  systHnes  poiiii()ues  lui  paraisseiu  dan- 
gereux.  Il  arrive  souvent  que  ceux  dont  il  craint  en  ce 
sens  les  opinions  sont  élevés  ^  des  dignités  qui  exigent  leur 
présence  ailleurs*  Le  grand  douanier ,  bomme  remuant 
et  fort  ricbe*  était  un  de  ceux  dont  riafluence  était  le  plus 
à  craindre.  Le  grand  visir  vient  de  le  nommer  chiaux-ba- 
cbi,  poste  rccbcrcbé,  mais  qui  Péloigne  de  la  capitale. 

Plusieurs  persopHagcs  iuvporlants  ont  été  traités  àe 
même  cl  réduits  à  l'impuissance  d'agir  comme  oe  se  plain- 
dre. 

Le  grand  visir,  avec  sa  suite ,  a  visité  les  nonvetles^  for- 
ttrisbcs  cdnstruiics  depuis  peu  &  fembouchure  de  ja  mer 
Noire*  Ces  rorteresâes ,  garnien  de  grosse  anillerte>  dorai« 
nent  le  passage  étroit  par  lui-m^e  et  resserré  entre  des 
ccueils.  On  a  placé  des  redoutes  et  du  gros  canon  dans 
tous  les  lieux  du  voisinage  qui  pourraient  paraître  propres 
à  un  débarquement.  On  espc're  qu*au  moyen  de  ces  me- 
sures de  défense  Paccès  en  sera  très-difficile.  • 

—  Les  troupes  ottomanes  viennent  de  mettre  fin  à  une 
insurrection  qui  s*é(ait  élevée  parmi  les  habitants  du  mont 
Teropé,  ))euple  guerrier,  iimilropbe  du  territoire  deSco- 
tari  et  de  la  Dobarstie  vénitienne* 

ALLEMAGNE* 

Ttireêf  leiSfanvier*  -^  Le  tiége  de  Luenbourg  est 
poussé  avec  une  vigueur  que  ne  ralentit  point  la  rigueur 
de  la  saison*  Depuis  deux  mois,  aucune  espèce  de  denrées 
n*a  pu  péoétrer  dans  la  ville.  On  assure  que  la  sel  et  le 
bois  y  sont  déjà  extrêmement  rares* 

L^armée  française  est  baraquée  et  retranchée  dans  le» 
bois,  sur  toua  là  points,  à  une  lieue  et  demie  de  Luxem- 
.bourg. 

Les  assiégea,  ayant  eu  connaisaanee  qoe  les  iroupe»  ré- 
publicaines venaient  de  recevoir  un  nombre  considérable 
de  bœufs ,  ont  cbercbé  H  s'en  emparer.  Celte  tentative  n*a 
pas  réussi.  Les  Français  leur  ont  tué  une  trentaine  d'bom- 
mes,  et  lait  environ  autant  de  prisonniers. 

ANGLETERRE* 

Londree^  te  46  décembre,  —  Le  roi  vient  de  donner  la 
place  de  commissahne  de  ramirauté  au  lord  Spencer  ;  Hood 
a  été  nommé  amiral  de  la  division  bleue,  ainsi  que  sir  Gard* 
uer,  vice-amiral.  On  a  choisi  aussi  dans  la  rouge letdeos 
vice-amiraox  Afleck  et  Middletoo* 

'—  Le  due  de  Ricfamond,  grand  naître  de  PartilleHey  va, 
dit-on,  céder  cette  charge  éminente  au  lord  Comwalfis  ou 
au  lord  Ambersl* 

—  Il  parafe  que  ehaeim  iooge  à  tirer  parti  delà  eotn"; 
car  lord  Mansfield  vient  de  faire  donner  à  son  second  ils  la 
survivance  d'une  de§  places  lei  plus  lucratives,  celle  de 
principal  andttenr  de  la  trésorerie  d*Ecosse*  Cette  avidité 
est  vraiment  scandaleuse;  car.  «ne  pareille  place  devrail 
servir  de  récoaspcnsc  et  de  retraite  à  quelque  hoamc  de 
niéi  ile,  vieilli  dans  le  service  public,  et  noA  paa  defcnir  te 
loi  d*un  adolescent  à  peine  sorti  dii  écolei, 

Z*  Série, -^  TomeX^ 


—  S'il  faut  en  croire  des  lettres  venues  da  oaotinent,.la 
défection  la  plus  effrayante  a  lieu  dans  tous  les  corpsétran*. 
gers  à  la  solde  de  la  Grande-Bretagne,  excepté  dans  ceux 
des  émigrés  français  :  il  déserte  des  soixante  hommes  à. la 
fois  dans  plusieurs  de  ces  corps* 

—  Une  partie  de  la  flotte  de  la  Baltique  a  en  lebonhetir 
d'arriver  dans  les  ports  anglais,  quoique  non  convoyée. 
Cependant  il  y  a  encore  cinquante  voiles  à  Elseneur ,  qui 
n'attendent  qu'un  convoi  pour  partir* 

—  On  est  instruit  à  l^amlrautë  que  la  flotte  française, 
composée  de  trente  et  un  vaisseaux  de  ligne  et  de  quinze 
frégates,  est  en  croisière  entre  les  Sorlingues  et  Ouessant , 
pour  s'emparer  des  flottes  marchandes  prêles  à  mettre  à  la 
vuile,  au  nombre  de  plus  de  six  cents  bâtiments. 

—  Rien  de  moins  tranquille  que  le  nouveau  royaume 
que  Georges  llï  vient  d'acquérir?  il  est  menacé  d'une 
guerre  civile.  Les  habitants  de  la  Corse  se  plaignent  liaute- 
uicnl,  pour  la  plupart,  d'avoir  été  trompés  par  Paoli,  rela- 
tivement aux  forces  de  la  France  :  ils  ne  se  ^nt  mis  sou* 
la  protection  de  l'A  ngleterre  que  parce  qu'ils  ne  croyaient 
pas  pouvoir  se  suffire  ;  mais  le  parti  républicain,  mieux  in* 
struii,  est  devenu  si  fort  dans  llle,  qu'il' a  attaqué  Paoli  et 
les  siens  à  Ajaccio.  Paoli  a  été  obligé  de  se  concentrer  à 
Salnt-florenl,  sont  le  canon  des  vaisseaux  anglais» 


RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

ARMÉE  DE  L*0UE9T. 

Circulaire  écrite  de  Laçon^  le  11  tUvoee^  par  l'ad^ 
judant  général  Travol ,  au  général  en  chef  da 
L'armée  de  l'Oue$t  et  autres  ckef$  de  corps. 

Une  vingtaine  de  brigands  se  sont  présentés  aujourdliuf 
an  château  de  Give,  ont  communiqué  une  lettre  dont  co- 
pie est  ci-des«oos,  et  se  sont  retirés. 

Les  chasseurs  h  cheval  qui  sont  à  ce  poste  sont  allés  ft 
leur  poursuite,  et  les  ont  joints  à  la  hauteur  des  Moutierik 
Les  brigands,  voyant  que  les  répabllcainf  les  aitelgnaieDl» 
se  sont  arrêtés  en  criant  s  «  Vive  la  répabliqnel  • 

Le  chef  des  chasseurs  et  celui  des  brigands  se  sont  ap* 
proches.  La  première  parole  du  brigand  a  été  s  «  Non»  d4» 
sirons  b  paix  ;  la  guerre  n'a  que  trop  duré }  nooa  sonnies 
nréls  à  la  faire  cesser,  •  et  il  s'est  écrié  :  •  Vive  la  répi^ 
bliquel  »  Sa  Iroupe  a  répété  ce  cri,  ainsi  que  nos  républti 
cains.  11  a  traité  l'officier  des  chasseurs  de  frère,  d*ami, 
dans  l'espoir  que  sous  peu  de  jours  ih  seraient  républicaids 
comme  eux;  et,  dans  cette  espérance,  il  a  demandé  9  lot 
donner  l'accolade  fraterneHe  ;  il  lui  a  annoncé  que  iosqo^â 
nouvel  ordre  il  y  avait  suspension  drames  chez  eux*  Il  Vi 
en  outre  engagé  *  se  rendre  a  Saint- Vincent-snr-Craon , 
pour  hii  fahv  coonattre  cl  aui  sicaa  la  teoeor  de  la  procla- 
mation de  la  Conventioo  nationale. 

Je  me  transporterai  demain  audit  SahU-VinecDt,  ponr 
leur  donner  connaissance  de  la  proclamaiion»  et  tes  rasais 
rer  sur  la  crainte  qu'ils  ont  d'être  trompés. 

Signé  V  adjudant  gémérat  Taa?  0T« 
commandant  la  brigade  de  Luçan0' 

Copie  de  la  lettre  écrite  au  commandant  du  château 
au  Give ,  datée  du  camp  de  Saint-Vincent ,  le 
Zl  décembre  1791. 

Monsieur,  d'après  une  entrevue  que  le  général  en  chef 
vient  d'avoir  avec  les  représentants  du  peuple,  il  me 
défend  de  provoquer  les  républicains}  pent-étre  n'avex* 
vous  pas  connaissance  de  cet  arrangement» 

Je  vous  préviens,  monsieur,  que  nos  patrouilles  d'oln 
servation  ne  tireront  plus  sur  tes  vdirca  et  j'espère  que 
vouagarderci  la  néme  marche» 

33 


258 


Je  foni  prierai  d^obscrrer  «ax  commaDdanls  des  places 
Yoisincs  que,  leurs  i^olUats  malUaiiaot  les  babilanlsde  ma 
difitioD,  je  me  trouverai,  ft*ils  coDlinuenl,  dans  la  réccssilè 
de  les  faire  ressaisir,  ce  qui  serait  di^ag réa'blc. 

Je  fOus  Imite  cependant,  monsieui  d'entrer  le  moins 
possible  daos  le  bw^ge  ;  vous  pensez  bien  qa*un  soldat  sans 
oflîeier  peut  commettre  une  imprudence. 

Si  par  hasard  vos  patrouilles  approchaient  du  poste,  je 
vous  prie  de  les  faire  arrêter  à  une  certaine  distance  de  la 
garde  avancée. 

J'ai  rbonncnr  d'être  votre  très-humble  et  irès^Aéissant 
serviteur. 

LâMOALK,  chef  de  divUion  du  Tablter, 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Letaumeur  {de  la  Manche), 
SEAKCE  DU  30  NIVOSB. 

Villcrs  cl  Desrurs,  représciilanls  à  Bresl,  écrivent 
qu'aussitôt  que  le«  ciloy  etis  de  ce  lie  commune  ont  eu 
connaissance  des  nouveaux  efforts  des  ennemis  de 
la  liberté,  dans  le  perfide  ouvrage  intitule /<?  Spec- 
tateur Irançais ,  ils  se  sonl  réunis  à  la  Société  po- 
pulaire ,  où  ils  ont  renouvelé  le  serment  dVtrc  in- 
violablement  attachés  à  la  républi(iue  et  à  la  Con- 
vetition ,  et  d'exterminer  tous  les  partisans  de  la 
royauté. 

—  Les  citoyens  de  Dunkerque  et  ceux  de  Langres 
appellent  la  vengeance  des  lois  contre  les  terroris- 
tes, s'ils  veulent  jamais  lever  la  tête. 

—  On  lit  la  notice  d'un  très-grand  nombre  d'A- 
dresses qui  peignent  les  mêmes  sentiments. 

—  Des  citoyens  du  département  du  Jura  sont  ad- 
mis à  la  barre. 

Loraleur  :  Le  tyran  Robespierre  et  Dumas,  pre- 
mier ministre  de  ses  cruautés,  ont  expié  leurs  for- 
faits sous  le  glaive  des  lois.  Ce  triomphe  éclatant , 
qui  assure  à  jamais  notre  liberté  et  celle  de  tous  les 
peuples,  est  dû  à  vos  vertus  et  à  votre  énergie.  Mais 
vous  ignorez  sans  doute ,  courageux  représentants , 
que  nombre  de  victimes  échappées  au  poignard  de 
ces  assassins  gémissent  encore  sous  le  poids  du 
malheur;  que  plus  de  cent  chefs  de  famific  errent 
de  forêts  en  forêts,  de  cavernes  en  cavernes,  comme 
si  Tombre  de  ces  scélérats  avait  aussi  le  droit  de  les 

Soursuivre.  L'unique  cause  des  maux  du  Jura  est 
'avoir  compté  pendant  quelques  années  au  nombre 
de  ses  habitants  ce  Dumas  d'exécrable  mémoire.  La 
férocité  de  ce  monstre  lui  suggéra  de  faire  de  cette 
contrée ,  où  il  était  si  justement  détesté,  le  premier 
théâtre  de  ses  crimes. 

Après  avoir  vainement  tenté  d'armer  le  fils  contre 
le  père ,  le  frère  contre  le  frère ,  l'ami  contre  l'ami, 
furieux  du  triomphe  de  la  nature  et  de  l'humanité 
sur  ses  sanguinaires  projets,  il  vint  provoquer  con> 
tre  ce  département  la  sévérité  de  la  Convention  na- 
tionale. 

Renvoyé  nu  comité ,  il  y  trouva  le  Catilinn  fran- 

Sois  ;  ces  tigres,  bientôt  unis  par  le  crime  el  par  l'ar- 
ente  soif  du  sang ,  conjurèrent  la  perte  du  Jura  et 
de  la  république  entière. 

Le  Jura ,  tant  de  fois  honoré  de  l'approbation  des 
représentants  du  peuple,  venait  d'obtenir  encore  le 
témoignage  solennel  d'avoir  bien  mérité  de  la  pa> 
trie ,  lorsqu'il  fut  frappé  de  tous  les  éclats  de  la 
foudre  nationale. 

Un  peuple  vertueux ,  constant ,  soumis  aux  lois  ; 
un  peuple  pénétré  de  In  plus  protonde  vénération 
pour  les  décrets  de  cet  auguste  sénat,  pouvait-il 
tout  à  coup  être  soupçonné  de  devenir  rebelle?  Les 


pères  de  dotute  mille  enfants  envoyés  volontaîrc- 
ment  au  secours  de  la  patrie  pouvaient-ils  se  tour- 
ner contre  elle  ?  Non,  les  habitants  du  Jura  devaient 
tUre  au-dessus  de  tels  soupçons;  mais ,  trompi^s  et 
calomniés  tour  à  tour,  la  cnileur  de  leur  patriotisme 
Tie  fut  qu*un  motif  de  plus  pour  assurer  leur  perte. 
Déjà  la  Convention,  entraînée  par  son  propre 
mouvement ,  a  rapporté  le  décret  qui  flétrissait  le 
chef-lieu  de  ce  département;. ces  premiers  rayons 
de  votre  bienfaisance  ont  essuyé  en  partie  les  pleurs 


dont  a  été  si  longtemps  abreuvée  cette  malheuretisc 
îstnc     "     *    ■--    ^  -  *  -       '-- 
rement  la  source 


contrée  ;  mais  il  est  de  votre  justice  d'en  tarir  entiè- 


Toutes  les  communes,  tous  les  districts,  toutes  les 
autorités  constituées ,  toutes  les  familles ,  tous  les 
citoyens  individuellement  sollicitent  aujourd'hui  eu 
Viveur  des  infortunés  mis  hors  la  loi.  Pères  de  la  pa- 
trie, cédez  à  leurs  vœux  ;  comblez  vos  bienfaits,  as- 
surez notre  bouheur,  rendez  au  peuple  du  Jura  ses 
anciens  amis ,  à  la  république  entière  de  vrais  ci- 
toyens ;  rendez  a  ce  département  son  premier  lus- 
tre, vous  raffermirez  son  zèle  ;  son  cri  ae  ralliement 
sera  toujours  :  Vive  la  république  une  et  indivisi- 
ble! vivent  la  liberté  et  régalitéf  vive  la  Convention 
nationale  ! 

La  Convention  décrète  la  mention  honorable  de 
l'Adresse,  l'insertion  au  Bulletin  delà  réponse  du 
président ,  et  le  renvoi  aux  comités  de  salut  public, 
de  sûreté  générale  et  de  législation,  réunis. 

—  Une  députation  de  Nantes  succède  à  la  barre. 

V orateur  :  Nous  venons,  au  nom  des  citoyens  de 
la  commune  de  Nantes,  vous  témoigner  leurs  inquié- 
tudes sur  le  jugement  du  comité  révolutionnaire  de 
Nantes.  Ces  êtres,  auxquels  nous  ne  donnerons  pas 
le  nom  d'hommes,  ont  été  acquittés,  parce  que  leur 
intention,  a  pensé  le  jury,  n'a  pas  été  de  faire  la  con- 
tre-révolution. 

Quelques  réflexions,  citoyens  représentants,  vous 
démontreront  que  la  contre-révolution  était  faite 
s'ils  avaient  pu  continuer  leur  plan  de  massacres  et 
d'horreurs. 

La  commune  de  Nantes  s'est  armée  la  première 
pour  la  révolution,  mais  en  gardant  son  caractère  de 
Fermeté  et  de  sagesse  ;  elle  n'a  pas  versé  une  seule 
goutte  de  sang  humain ,  elle  n'a  pas  attenté  à  une 
seule  propriété.  Les  hommes  et  les  choses  ont  été 
constamment  sous  la  sauvegarde  sacrée  des  lois  et 
de  l'humanité.  Nous  défions  qu'on  cite  un  seul  fait 
qui  nous  démente.  Cette  grande  cité,  honorée  chez 
1  étranger,  recommandabïe  par  l'étendue  de  son  in- 
dustrie, par  sa  fidélité  dans  ses  engagements,  fidélité 
telle  que  jamais  les  transactfons  commerciales  ne 
furent  écrites,  et  que  jamais  elles  ne  furent  violées; 
cette  cité,  plus  près  qu'aucune  autre  des  mœurs 
antiques  et  des  vertus  privées,  qui  seules  peuvent 
fonder  une  république  et  eu  assurer  la  durée,  devait 
être  un  obstacle  à  l'établissement  du  système  conçu 
depuis  longtemps  par  les  désorganisatcurs  de  la 
France ,  et  dont  le  sombre  et  farouclie  Robespierre 
fut  un  des  chefs  les  plus  sanguinaires. 

La  perte  de  Nantes  fut  résolue  ;  mais  il  n'était  pas 
aisé  d  égarer  ce  peuple,  qu'un  instinct  de  justice  vt 
de  raison,  enraciné  depuis  tant  de  siècles  sur  son  sol, 
portait  à  repousser  toute  insinuation  i>erfide.  H  vi- 
vait heureux  et  libre,  soumis  aux  lois  et  respectant 
ses  magistrats. 

La  funeste  guerre  de  la  Vendée  fournit  un  moyen 
assuré  de  détruire  Nantes.  On  éloigna  la  jeunesse  en 
l'envoyant  aux  frontières;  on  exposa  les  pères  de 
famille  dans  des  sorties  :  une  horde  de  brigands  ra- 
massée dans  les  boues  de  la  France ,  et  honorée  du 
I  nom  de  soldats  républicains»  commondée  par  des 


259 


chefs  cssî  iissoliis  que  stupides,  livra  nos  canons, 
nos  armes»  nos  munitions  aux  rebelles.  Les  braves 
Mayençais  et  les  autres  bataillons,  méle's  avec  ces 
lâches  V1U tours,  périrent  abandonnt^s  et  accablés  par 
la  multitude. 

On  refusa  tout  accord  avec  des  hommes  simples 
et  égarés,  qui  offraient  de  se  rendre  sans  condition; 
on  vous  cacha  la  vérité ,  et  personne  n  osa  vous  la 
faire  entendre.  On.  vous  dit  à  cette  tribune  que  la 
Vendée  devait  périr ,  et  alors  d*un  mot  on  pouvait 
la  sauver. 

On  inonda  Nantes  d'une  foule  d*apôtres  de  car- 
nage ,  tous  ayant  mission  de  la  municipalité  de  Pa- 
ris, tous  préchant  publiquement  le  meurtre,  le  vol 
et  rinccndie. 

Dans  le  même  temps  on  vous  disait  froidement , 
et  avec  ironie,  qu*on  saignait  U  commerce  riche; 
et  nous  verrous  que  saigner  le  commerce  riche,  c*est 
tuer  le  peuple. 

Cequ*on  ne  pouvait  pas  dîre,  et  que  nous  vous 
dirons,  c*est  que  la  courageuse  résistance  de  Nantes, 
le  29  juin  1793  (vieux  style),  provoqua  la  colère  des 
dominateurs  qui  opprimaient  la  France.  Ils  espé- 
raient que  cette  commune  serait  prise  (et  ils  avaient 
tout  préparé  pour  cela)  ;  qu*ils  pourraient  y  entrer 
comme  a  Lyon  ,  et  assouvir  leur  exécrable  soif  de 
l'or  et  du  sang. 

Citoyens  représentants,  il  est  temps  de  venger 
rhumanitési  indignement  outragée.  Il  est  temps  de 
comprimer  nar  de  grands  exemples  tous  ceux  qui 
tenteraient  ac  dissoudre  la  république  et  de  rétablir 
la  royauté  par  l'anarchie  et  le  crime.  Après  une  lon- 
gue et  dévorante  anarchie,  les  peuples  n*ont  d'autre 
asile  que  dans  le  despotisme  d'un  seul  ;  c'est  le  port 
qui  s'offre  à  un  vaisseau  battu  par  tous  les  vents  et 
brisé  par  toutes  les  vagues.  Sans  les  proscriptions 
de  Marius  et  de  Sylla ,  sans  les  listes  sanglantes  des 
triumvirs,  Rome  n  eût  pas  courbé  sa  tête  orgueil- 
leuse sous  le  joug  des  empereurs;  elle  brillerait 
peut-être  encore  de  toutes  ses  vertus  et  de  toute  sa 
gloire. 

H  est  donc  vrai  que,  dans  la  république,  tout 
homme  qui  méprise  les  lois,  qui  insulte  les  person- 
nes, qui  viole  les  propriétés,  est  Tennemi  de  la  ré- 
publique. Le  système  aussi  féroce  qu'insensé  de  la 
destruction  du  commerce,  de  la  proscription  des 
millions  des  riches  est  le  système  de  la  destruction 
de  toute  la  France  :  le  commerçant,  le  manufactu- 
rier ne  sont  que  des  distributeurs  du  travail  du  peu- 
ple, des  chefs  d'ateliers;  ils  associent  à  leurs  travaux 
une  loule  immense  de  coopéra  leurs  qui  partagent  le 
bénéfice  de  l'entreprise  ;  ils  associent  la  répuolique 
entière  ;  la  nature  multiplie  des  hommes  partout  où 
ils  trouvent  du  travail;  et  supprimer  le  travail,  c'est 
briser  le  moule  de  la  nature. 

Dites- nous,  monstres  avides  de  sang,  quand  vous 
brisez  un  métier,  quand  vous  arrêtez  rarmement 
d'un  vaisseau  ,  quand  vous  frappez  un  père  de  fa- 
mille dans  ses  spéculations ,  quand  vous  incendiez 
les  colonies,  ne  condamnez-vous  pas  a  l'inaction,  à 
Ja  misère  et  à  la  mort,  tous  les  citoyens  que  la  na- 
ture avait  créés  pour  ces  travaux?  Partagez  même , 
si  vous  le  voulez,  entre  eux,  tout  le  fruit  de  vos  bri- 
gandages; chacun  de  ces  hommes  aux  quarante  écus 
pourra-t-il ,  avec  sa  faible  portion ,  renouer  les 
grandes  entreprises  que  vous  aurez  détruites,  et  l'é- 
traneer  prodiguera-t-il  son  crédit  et  ses  denrées  à 
des  nommes  sans  connaissances  et  sans  moyens? 
Vous  aurez  comblé  leur  misère,  et  ils  vous  immole- 
ront a  leur  juste  ressentiment. 

Citoyens  représentants ,  le  commerce  est  à  la  so- 
ciété ce  que  la  soudure  est  aux  métaux.  Sans  com- 
merce, les  individus  sont  épars»  isolés,  sans  agréga- 


tion, assiégés  par  tous  les  besoins  ;  en  un  mot,  î!  do 
peut  exister  de  société  humaine  sans  commerce  ;  la 
mer  et  les  rivières  sont  les  premiers  et  les  plus  pré- 
cieux instruments  du  commerce  ;  et  les  peuplades 
3 (l'on  dit  sauvages ,  parce  Qu'elles  n'ont  pas  notre 
egré  de  civilisation ,  s'établissent  toujours  sur  les 
côtes  ou  les  rivières,  jqui  donnent  des  moyens  plus 
prompts  de  communications  et  d'échanges. 

Avant  tout,  citoyens  représentants,  il  faut  que  les 
ministres  de  la  mort ,  qui  ont  si  longtemps  exercé 
leurs  sanglantes  fonctions  à  Nantes,  reparaissent  de- 
vant les  tribunaux. 

D'autres  que  des  Français  patriotes  pourraient 
ajouter  que  la  politique  conseille  cette  mesure ,  et 
qu'elle  consolidera  la  paix  de  la  Vendée;  mais  nous 
laissons  à  nos  ennemis  les  détours  de  la  politique,  et 
nous  n'avons  été  amenés  devant  vous  que  par  l'em- 
pire de  la  justice  ;  nous  ne  pouvons,  hélas  !  rendre  à 
ces  ombres  livides  et  sanglantes,  qui  errent  en  foule 
sur  les  rives  désolées  de  la  Loire,  la  vie  que  ces  mons- 
tres leur  ontôtée;  nous  voudrions  du  moins  leur  don- 
ner une  sépulture  honorable;  nous  voudrions  apai- 
ser les  mânes  de  vingt  mille  victimes  entassées  dans 
les  carrières  qui  touchent  nos  murs;  nous  voudrions 
sécher  les  larmes  de  tant  de  familles  au  désespoir, 
et  qui  n'ont  d'autre  refuge  que  dans  les  âmes  sensi- 
bles ;  nous  voudrions  leur  dire ,  en  pleurant  avec 
elles  :  Vos  maris ,  vos  enfants ,  vos  amis  ont  péri 
sous  le  fer  de  ces  hommes  de  sang  ;  mais  la  Conven- 
tion vous  protège ,  elle  livrera  à  la  justice  des  lois 
vos  bourreaux,  et  l'humanité  sera  vengée. 

Nous  vous  demandons,  citoyens  représentants,  au 
nom  des  citoyens  de  Nantes,  au  nom  de  la  Francr 
entière,  au  nom  de  la  nation  irritée,  en  votre  nom 
même,  que  vous  ordonniez  à  votre  comité  de  légis- 
lation de  vous  faire  un  prompt  rapport  sur  le  juge- 
ment du  comité  révolutionnaire  de  Nantes,  de  ses 
agents  et  de  ses  complices. 

Cette  pétition,  écoutée  avec  le  plus  grand  intérêt, 
est  suivie  de  vifs  applaudissements. 

L6  Pbbsidbnt,  à  la  députation  :  Ecraser  l'agricul- 
ture ,  décourager  l'ouvrier ,  ruiner  le  commerce , 
c'est  tuer  la  poule  aux  œufs  d'or. 

Le  gouvernement ,  que  dis-je  !  les  anciens  comi- 
tés,  la  dernière  tyrannie,  ignoraient  ou  voulaient 
ignorer  que  la  richesse  des  Etats  se  compose  du  bon- 
heur des  particuliers;  que  le  gouvernement  n'est  flo- 
rissant qu'autant  que  le  peuple  est  dans  l'aisance.  Le 
système  de  ces  misérables  est  totalement  changé. 
Nantes!  infortuné  Nantes!  tu  peux  encore  espérer 
des  Jours  heureux;  le  sang  des  victimes  sera  vengé; 
les  égorgeurs  seront  immolés  sur  la  tombe  des  in- 
nocents ;  et  la  Convention ,  qui  a  déjà  annoncé  ses 
intentions  en  ordonnant  l'arrestation  des  monstres 
dont  vous  avez  tant  à  vous  plaindre  ,  applaudit  à 
vos  sentiments,  partage  vos  douleurs  ;  elle  mettra  â 
réparer  les  maux  dont  on  a  abreuvé  la  patrie  autant 
de  zèle  et  d'activité  que  les  anciens  tyrans  met- 
taient de  scélératesse  et  d'ardeur  pour  inonder  la  ré- 
publique de  sang  et  de  calamités. 

Je  vous  invite  en  son.  nom  à  assister  à  la  séance. 

La  Convention  renvoie  la  pétition  des  citoyens 
de  Nantes  au  comité  de  législation ,  et  en  décrète 
l'insertion  au  Bulletin. 

Clauzel,  au  nom  du  comité  de  sûreté  générale  : 
Citoyens,  dans  la  séance  d'hier,  votre  comité  de  sû- 
reté générale  vous  rendit  compte  de  l'assassinat 
commis,  par  le  contre-révolutionnaire  Pierre  Morin, 
sur  la  personne  du  brave  défenseur  de  la  patrie, 
Etienne  Olivier ,  menuisier ,  natif  de  Courville  ,  dé- 
parlement  d'Eure-et-Loir ,  qui  se  trouvait  à  Paris 
pour  cause  de  maladie. 


360 


Von»  ordonoiltes  sur-Ie-cDamp  qu'il  ?ous  serait 
pr^scntif  aujourd'hui  un  projet  de  di'Cri't  pour  assu- 
rer la  prompU'iHinitiou  du  coupable  et  Icgindcuiuilés 
et  secours  aus  à  la  famille  du  vertueux  Olivier,  aui 
a  répandu  tout  son  sang  pour  le  maîtitien  de  la  li- 
jberté,  sans  laquelle  les  républicains  français  ne  peu- 
irenl  plus  vivre. 

L'histoire  des  révolutions  qui  se  sont  opérées  sur 
le  globe  par  les  peuples  qui  ont  voulu  secouer  le$ 
chaînes  de  la  tyrannie  et  du  despotisme  nous  ap- 
prend que  les  despotes  et  les  tyrans  se  sont  agités 
en  tous  sens;  qu'ifs  n'ont  omis  aucun. des  moyens 
pour  retenir  sous  leur  joug  ceux  qu'ils  ont  eu  l'im- 
pudeur d'appeler  leurs  sujets.  Armées,  famine,  poi- 
son ,  assassinats,  rien  ne  leur  coûte  pour  assouvir 
leur  soif  de  dominer;  et  tel  est  le  désir  de  cet  or- 
gueil qu'il  préférerait  voir  la  terre  entière  s'anéan- 
tir sous  ses  pieds  plutôt  que  de  ne  pas  y  commander 
en  maître. , 

Nous  ne  devonsdonc  pas  être  étonnés,  citoyens,  si , 
après  avoir  détruit  cette  immense  quantité  d'abus 
qui  pesaient  sur  le  peuple  français  ;  si ,  au  moment 
où  les  puissances  de  l'Europe  voient  leurs  innom- 
brables armées  défaites  ou  repoussées  bien  avant  dans 
leur  propre  territoire  par  la  valeur  signalée  de  nos 
braves defenseurs;8i, enfin, au momentoù la  France, 
naguère  esclave  des  Capet,  voit  la  plus  grande  des 
républiques  dans  l'heureuse  position  de  donner  bien- 
tôt la  paix  an  monde  ;  nous  ne  devons  pas  être  éton- 
nés,  dif-je ,  si  tous  ses  ennemis  se  déchaînent  pour 
fomenter  parmi  nous  le  plus  grand  des  fléaux,  la 
guerre  civile,  pour  reculer  ce  moment  fortuné. 

Ennemis  de  notre  patrie,  cette  dernière  et  perfide 
espérance  sera  encore  déçue  ;  il  ne  vous  restiMra  que 
la  honte  de  l'avoir  manifestée. 

Qu'attendez-vous  de  vos  noires.manœuvres,  lors« 
que  les  ouvriers,  cette  grande  et  intéressante  por» 
tion  du  peuple  français,  s'associent  à  toutes  les  au- 
tres, et  endurent  la  mort  pour  les  déconcerter  ? 

Orgueilleuse  maison  d'Autriche,  perfide  cour 
^Angleterre,  vous  avez  beau  faire  couler  votrç  or, 
vous  avez  beau  irriter  la  scélératesse  des  insensés 
complices  de  Robespierre ,  la  loi  fera  justice  des  au- 
dacieux qui  auront  usurpé  l'autorité  nationale  pour 
tyranniser,  pour  égorger  les  citoyens.  Les  armées  de 
la  république  feront  repentir  les  despotes  d'avoir  eu 
TQudace  de  vouloir  s'opposer  à  son  établissement  : 
la  Convention  nationale  répondra  à  ses  détracteurs 
en  faisant  des  lois  sages ,  conservatrices  des  person- 
nes et  des  propriétés  ,  en  assurant  le  travail  ou  la 
subsistance  aux  pauvres,  en  dictant  la  paix  aux  puis- 
sances coalisées  ;  et  le  peuple  fk*ançais  exterminera 
sans  pitié  de  sa  massue  quiconque  oserait  tenter  de 
lui  donner  des  maîtres  d*aucune  espèce. 

Je  reviens  à  l'infortuné  Etienne  Olivier,  assassiné 

Sar  l'infâme  Pierre  Mornf ,  pour  avoir  eu  le  courage 
e  dénoncer  les  propos  liberticides  que  ce  contre- 
révolutionnaire  tenait  dans  un  lieu  public. 

En  attendant  le  récit  de  cette  tragique  aventure, 
les  regards  paternels  des  représentants  du  peuple  se 
portèrent  sur  la  famille  de  Vinlrépide  Etienne  Oli- 
vier. Tous  désirèrent  qu'une  indemnité  pécuniaire 
lui  fût  de  suite  accordée;  ce  républicain  étant  volon- 
taire dans  le  8e  bataillon  de  Paris,  sa  famille  a  droit 
aussi  au  secours  que  la  loi  accorde  à  celles  des  sol- 
dats de  la  patrie.  Après  avoir  satisfait  à  ce  que  la 
reconnaissance  nationale  commande,  vous  devez 
«njoindre  aux  tribunaux  de  poursuivre  et  venger 
promptement  le  peuple  de  l'horrible  assassinat  com- 
mis ,  sur  le  défenseur  de  sa  liberté ,  par  un  monstre, 
satellite  sans  doute  de  cette  poignée  de  royalistes  et 
de  factieux,  couplices  de  la  cour  de  Londres,  si  l'on 
en  croit  Georges  lui-même  dans  son  discours  au 


parlement ,  lesquels  regrettent  le  système  de  pil- 
lage, de  terreur  et  de  sang  dont  ils  se  gorgeaient,  ei 
que  la  révolution  du  10  thermidor  a  plongés  dans 
la  fange  d'où  la  tyrannie  les  avait  fait  exhaler. 

A  la  suite  de  ce  rapport,  fréquemment  applaudi > 
Clauzel  propose  un  décret  qui  est  adopté  comme  il 
suit: 

•  La  Convention  nationalei  après  avoir  eoteodu  le  rap- 
port de  ses  comités  dcf  secoare  publics»  de  législation  et  de 
sûreté  générale,  décrète  : 

•  An.  I*'.  Il  sera  iiayé  par  la  trésorerie  nationale ,  sur 
la  présentalion  du  présent  décret,  à  la  veuve  et  cofanl»  du 
citoyen  Etienne  Olivier,  menuisier,  soldat  volontaire  du 
6*  bataillon  de  Paris,  natif  de  Courville,  département 
d'Eur-el-Loir,  assassiné  pour  avoir  courageusemeot  dét 
ooncé  les  propos  eontre-révolutionnaires  tenus  dans  un  lieu 
public  par  un  individu ,  la  somme  de  i  ,000  livres. 

fl  II;  Ladite  veuve  et  enfants  recevront  en  outre  les  se* 
cours  accordés  aux  parents  des  défenseurs  de  la  patrie. 

fl  Attendu  que  le  tribunal  révolu lionoaire  n'est  pas  ac- 
tuellement en  activité,  Pierre  Morin,  ouvrier  cartonniez 
demeurant  à  Paris,  rue  Jean-i*Rpine,  n*  6,  prévenu  d'à» 
voir  commis,  le  27  de  ce  mois,  vers  les  dix  heures  du  na^ 
tin,  avec  des  Intentions  contre-révolutionnaires,  un  assas* 
sinat  sur  la  personne  du  citoyen  Etienne  Olivier,  sera 
traduit  dans  le  jour  au  tribunal  criminel  du  départeoient 
de  Paris,  pour  y  être  jugé,  toute  aflhire  cessante»  selon  lé 
mode  établi  pour  le  tribunal  révolutionnaire. 

«  IV.  Il  sera,  dans  le  jour,  formé  par  le  présMent  do 
tribunal  criminel  du  département,  suivant  le  mode  observé 
en  ce  tribunal,  une  liste  de  onze  jurés,  pour  pnmoooer  su? 
les  faits  imputés  au  prévenu. 

•  V.  Le  présent  décret  ne  sera  publié  que  parla  voi«  da 
Bulletin  de  correspondance. 

-<^  Un  secrétaire  lit  une  pétition  des  créanciers  des 
fermiers  généraux  condamnés;  ils  demandent  que» 
pour  la  conservation  de  leurs  droits ,  la  Convention 
tasse  examiner  les  condamnations  pécuniaires  inter» 
venues  contre  eux,  condamnations  qu'ils  prétendent 
injustes  ou  exagérées,  surtout  eu  égard  aux  solidari* 
tés  qu'on  fait  valoir  contre  les  créanciers. 

Plusieurs  membres  font  diverses  observations. 
Après  une  légère  discussion ,  rassemblée  ordonne  le 
renvoi  de  la  pétition  au  comité  des  Onances ,  pour 
examiner  les  condamnations  dont  11  est  questioni 
entbndre  les  créanciers  et  faire  un  rapport 

—  Plusieurs  agriculteurs  viennent  anplaudir  an 
décret  qui  supprime  le  maximum  ;  néanmoins  ils 
n'en  vendront  pas  leurs  grains  plus  cher.  Ces  mémei 
patriotes  offrent  un  don  de  150  liv. 

L'assemblée  applaudit  à  ces  sentiments  génèrent, 
et  ordonne  l'insertion  au  Bulletin  des  noms  de  ces 
braves  citoyens. 

—  Un  grand  nombre  de  pétitionnaires  sont  enten- 
dus sur  des  objets  particuliers. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  1er  PLUVIOSE. 

Guffroy  lit  l'Adresse  suivante  : 

Le$  eitoyeni  de  la  commune  de  Cambrai,  réunie  en 
Soeiélé  populaire,  à  la  Convention  nationale. 

Cambrai,  le  SI  nivôse,  l^n  S*  de  la  république 

française,  une  etiodivitiblo. 

0  Citoyens  représentants»  en  vous  Câlicilant  sur  votit; 

décret  sublime  rendu  depuis  que  la  télé  du  tyran  Robcs« 

pierre  est  abaltue,  nous  ne  pouvons  nous  empêcher  de 

vous  faire  connaître  combien  les  amis  de  la  liberté  voient 

i   avec  peine  que  de  vils  suppôts  de  la  tyrannie,  que  des  scé« 

I  lérats  de  cette  commune,  qui,  insatiables  de  sang,  assers 

I  vissaient  le  peuple  sous  leur  Joug  deipotiqiiet  promenaient 


261 


leort  rrftords  fnsolefits  (Ion*  ccite  commané,  pendant  que 
Joseph  Lebon  y  exerçait  ses  ravage»  ;  ravagea  qui  oui  eni« 
péché  quanllié  de  boits  citoyens,  de  cultivateurs  vertueux, 
de  se  réfugier  tur  le  lerriloire  de  la  république,  pendant 
qiic  IVniiemi  en  occupait  une  partie;  ravages  qui  ont  été 
ia  cause  que  beaucoup  d'autres  eo  sont  sortis  ;  que  ces 
monstres  qui,  le  sabre  à  la  main ,  semblaient  menacer  tous 
ceux  qui  n'auraient  pas  contribué  aux  égorgemcnls  au*ils 
voulaient  fairet  jouissent,  malgré  leurs  forfaits,  de  la  li- 
berté. 

•  Nous  ne  savons  qui  a  pu  la  leur  faire  récupérer  par  des 
sollicitations  auprès  du  eomiié  de  sôreté  générale;  nous  ne 
sovons  qui  a  pu  surprendre  sa  religion  à  un  tel  point ,  car 
des  pièces  innombrables,  les  plus  oonvictives  de  leurs  atro- 
cités ,  7  sont  déposées  ;  mato  nous  pouvons  dire  avec  vérité 
que  les  partisans  seuls  da  terrorisme  sont  coupables  de  cel 
attentat  coutif^  la  libertés 

«  Nous  ne  savons  pas  non  plus  par  qaelle  fatalité  quel- 
ques unes  de  ces  sangsues  du  peuple  occupent  eo  ce  mo- 
ment 1rs  postes  les  plus  Importants  dans  la  Belgique. 

•  Plus  nous  réfléchissons,  plus  nous  voyons  avec  regret 
que  Texécutlon  des  principes  sacrés  des  droits  de  Thomme 
et  du  citoyen  soit  confiée  à  des  mains  aussi  impures. 

•  Laisserez-vons  plus  longtemps ,  pères  du  peuple,  lais- 
8erei>vous  plus  longtemps  impunis  tous  les  forfaits  commis 
par  Joseph  Lebon  et  par  ses  satellites,  ces  barbares  dont  la 
présence  seule  fait  frémir  tous  les  amis  de  Thumanité  et  de 
la  jusiire?  Non ,  fans  doute;  vous  voulez  trop  le  bonheur 
des  Français  I  pour  ne  pas  sévir  contre  ceus  qui  ont  cber- 
0)é  et  cherchent  encore  leur  perte. 

•  Puhissez  le  crime,  protégea  Tinnocence;  vous  conso- 
liderez les  bases  rondaroeutates  de  la  république  la  plus 
florissante  du  monde,  que  nous  jurons  de  maintenir  avec 
la  liberté  et  Tégalité,  qui  en  sont  les  principales.  Noos  ju- 
rons de  la  défendre  jusqu'à  la  demi&re  goutte  de  notre 
ssng,  et  de  n*avoir  pour  point  de  ralliement  que  la  Con- 
vention nationale. 

.  •  Vivent  à  jamais  la  liberté,  Tégalité,  la  vérité,  la  tn- 
ternité,  la  république  une  et  indivisible  I  PériiieDt  lesbom* 
mes  de  sang  1  Voilà  nos  vœux.  » 

{Suivent  Ui  ttgnatunê,) 

L*iDSertion  au  Bulletin  est  décrëtée. 

—  Un  secrétaire  lit  une  Adresse  aiosi  conçue  : 

£et  citoyens  de  la  commune  de  Béthune,  réunie  en 
:  Société  populaire f  à  la  Convention  nationale. 

B^tbane,  15  ni  voie. 

«  Représentants* do  peuple,  constamment  et  Invariable* 
ment  attachés  aux  principes  Immuables,  à  la  Convention 
Dationale,  nous  nous  empressons  de  couvrir  d^applaudis- 
sements  le  grand  acte  de  juslice  que  vous  avez  exercé  en 
rappelant  parmi  vous  soixante-treize  victimes  échappées  à 
la  barbarie  combinée  des  derniers  tyrans.  Nous  vous  adres- 
sons le  résumé  des  dilapidations  et  atrocités  commises  par 
les  exécuteurs  en  chef  et  subalternes  des  scélérats  Robes-, 
pierre,  Lebon  et  autres  décemvirs.  Les  folts  que  réfère  ce 
résumé  ont  été  recueillis  par  une  commission  votée  par  le 
peuple,  et  nommée  avee  son  assentiment  par  votre  collè- 
gue Berlier.  Nous  n*implorerons  pas  la  fustlee  nationale  t 
nous  savons  que,  depuis Tépoque  mémorable  et  ineffaçable 
du  9  thermidor,  elle  n'a  cessé  d*ètre  véritablement  à  Tor- 
dre du  jour*  • 

Deleclot  :  Si  Joseph  Lebon  est  innocent,  la  Con- 
venlion  nationale  doit  se  hâter  de  lui  rendre  justice, 
ri  le  rendre  à  la  liberté;  mais  si  Lebon  est  coupable 
dos  forfaits  qu'on  lui  reproche,  la  Convention  doit 
4\um  se  hâter  de  le  punir.  Je  crois,  moi,  que  Joseph 
Lebon  est  un  grand  scélérat;  il  fut  dans  son  pays 
l'horreur  de  la  nature ,  le  destructeur  de  Tespèce 
humaine  ;  les  droits  de  la  jus|ice  et  de  la  société 
exigent  une  punition  éclatante.  Je  demande  que  les 
comités  de  gouvernement  fassent  promptement  leur 
rapport  sur  Joseph  Lebon. 

Ce  n*est  pas  tout  ;  ce  proconsul  avait  autour  de 
lui  trente  sbires  employés  à  satisCaire  sa  soif  du  sang 


humain  ;  c*est  id*euz  que  je  veux  parler,  et  pour  oq 
fait  dont  j'ai  connaissance.  Le  voici  :Ces  trente  per- 
turbateurs, sortis  de  prison,  je  ne  sais  trop  par  qoF 
et  pourquoi,  retournent  chez  eux.  A  peine  arrivés  ï 
Amiens,  notamment  à  Frevent ,  ils  annoncent  que 
Joseph  Lebon  triomphe,  et  qu'il  les  suit,  et  va  punir 
ses  ennemis  de  l'avoir  dénoncé. 

La  consternation  s'empare  de  tous  les  cœurs ,  et 
depuis  ces  scélérats  ont  continué  à  perpétuer  la  ter* 
reur  dans  cette  partie  de  la  république.  Je  vois,  par 
l'Adresse  dont  Guffroy  vient  de  fieiire  lecture,  que 
ces  hommes  ont  les  plus  beaux  emplois  dans  IS' 
Belgique,  ce  qui  me  paraît  être  aussi  dangereux  que 
de  leur  laisser  la  liberté  dont  ils  ont  si  cruellement 
abusé. 

Je  demande  la  mention  honorable  et  l'insertion 
de  TAdresse  au  Bulletin  ;  que  les  comités  de  gouver- 
nement fassent ,  sous  trois  jours ,  le  rapport  sur  Jo-» 
seph  Lebon,  et  le  renvoi  de  la  pétition  au  comité  de 
sûreté  générale ,  pour  prendre  les  renseignements 
et  mesures  de  sûreté  nécessaires  à  l'égard  des  trente 
sbires  de  Joseph  Lebon. 

Ces  propositions  sont  décrétées. 

— >  Les  citoyens  de  la  section  du  Contrat-SociaU 
en  masse,  défilent  dans  le  sein  de  la  Convention  na- 
tionale. 

V orateur  (  à  la  barre)  :  Citoyens  représentants  ^ 
toujours  en  garde  contre  les  mouvements  de  l'aris- 
tocratie et  du  terrorisme,  du  royalisme  et  du  brigan- 
dage, la  section  du  Contrat-Social ,  en  masse,  vient 
vous  exprimer  ses  afarmes  et  ses  vœux  sur  la  fer^ 
mentation  qui  se  manifeste  dans  les  esprits.  D*uii 
côté,  la  représentation  nationale  troublée  dans  ses 
délibérations  et  avilie  dans  le  lieu  de  ses  séances  par 
des  cris  séditieux  ;  les  amis  de  la^  Convention  assas- 
sinés, les  patriotes  calomniés;  de  l'autre,  l'audace 
renaissante  des  brigands  contre-révoIutionnairés,* 
l'impunité  des  grands  coupables;  de  fausses  alarmes 
sur  les  subsistances ,  disséminées  avec  perfidie  ;  tclë 
sont  les  faits  qui,  dénoncés  hier  dans  le  sein  de  la 
section  du  Contrat-Social ,  ont  porté  l'indignation 
dans  rftme  de  tous  les  citoyens  qui  la  composent. 
•  Vengeance,  se  sont-ils  écriés,  vengeance  !  Qu'il 
retombe  enfin  sur  leurs  têtes,  puisqu^il  le  faut,  le 
sang  dont  les  scélérats  se  sont  abreuvés  à  longs 
traits  ;  que  la  nature  et  la  patrie  soient  vengées! 
Qu'ils  périssent  enfin  les  hommes  de  sang  et  de  ter- 
reur, puisque  la  soif  du  sang  qui  les  dévore  ne  peut 
s'éteindre  qu'avec  leur  vie;  qu'ils  périssent  tous!... 
ou  plutôt  que ,  repoussés  loin  du  sol  de  la  liberté 
qu'ils  outragent ,  ils  aillent  porter  loin  de  nous  le 
tourment  de  voir  le  bonheur  d'un  pays  trop  long*^ 
temps  souillé  pnr  leur  présence  !• 

Citoyens  représentants,  qu'attendef-vous  pont 
punir  le  crime  et  venger  la  vertu?  qu'attendez-vous 
pour  frapper  les  ennemis ,  les  affameurs  du  peuple, 
et  lui  rendre  sa  sécurité ,  inséparable  de  la  vôtre? 
Faut-il  que  ceux  qui  auraient  voulu  vous  refuser 
l'honorable  nécessaire  dû  aux  représenUints  d'un 
grand  peuple  aient  le  temps  d'épuiser  sur  vous  tons 
les  genres  d'avilissement?  Attendez-vous  que  ceux 
qui,  égarés  ou  coupables  ,  vous  outragent  dans  les 
'  tribunes,  puissent  vous  forcer  à  écouter  et  à  suivre 
leurs  vœux  criminels  et  sanguinaires,  à  la  place  de 
la  justice  et  de  la  sagesse  qui  président  à  vos  délibé^ 
rations?  Attendez- vous  que  ceux  qui  ne  peuvent 
plus  vous  égorger  en  masse  vous  assassinent  en 
détail  ?  Attendez-vous  que  les  anarchistes  et  les  bri- 

§ands  troublent  tellement  la  paix  de  l'intérieur,  qu'il 
evienne  impossible  de  la  donner  au  dehors? 
Non,  citoyens  représentants,  vous  écoulerez,  vous 
calmerez  les  inquiétudes  d'une  section  du  peuple 


262 


c|iii  confond  son  existancc  avec  la  vdtre ,  sa  gloire 
avec  celle  de  ses  représentants.  Ce  ne  sera  point  en 
vain  qu*elle  aura  dépose  dans  votre  sein  ses  alarmes 
sur  les  dangers ,  sur  les  maux  de  la  patrie.  Vous  , 
vengerez  la  dignité  du  peuple ,  outragée  par  des 
cannibales  dans  la  personne  de  ses  représentants; 
et,  réduisant  entîn  les  terroristes  et  les  buveurs  de 
sang  à  l'impuissance,  cVst-à-dire  à  Tanéantisse* 
ment,  vous  consoliderez  d'une  main  ferme  et  vigou« 
reuse  lédifice  majestueux  de  la  ré|iubliqus  fran- 
çaise, sur  les  ruines  de  toutes  les  factions  et  de  tous 
les  crimes.  Vive  la  république  f  vive  la  Convention  ! 

Le  Président,  à  la  députation  :  Citoyens,  le  peu- 
ple français  a  reconouis,  le  9  thermidor,  sa  liberté, 
.  qu'un  infâme  tyran  lui  avait  ravie.  Il  ne  perdra  pas 
le  prix  de  la  victoire  qu*il  a  remportée  sur  le  crime. 
Son  énergie ,  ses  malheurs  eu  sont  le  garant  le  plus 
sûr. 

La  Convention  nationale ,  armée  du  levier  puis- 
sant de  la  conlînnce ,  appuyée  sur  la  justice,  triom- 
'  phera  de  toutes  les  factions.  Quelques  scéiératsn*ont 
pas  perdu  l'espoir  de  rétablir  le  système  de  terreur, 
pour  couvrir  leurs  dilapidations  et  échapper  à  la 
vengeance  nationale. 

Citoyens,  le  règne  des  charlatans  est  passé ,  et  le 
peuple  ne  peut  voir  ses  vrais  amis  que  dans  ceux  qui 
16  servent  sans  le  flatter.  Les  bons  citoyens  se  ral- 
lieront constamment  aux  principes  :  surveiller  sans 
cesse  les  méchants,  protéger  les  bons,  électriser  les 
âmes  faibles,  suivre,  en  un  mot,  le  sentier  de  la  jus- 
lice  ,  telle  est  la  marche  qui  peut  seule  assurer  le 
triomphe  de  la  liberté  et  de  Tégalité. 

Vous  demandez  vengeance  des  hommes  pervers 
à  qui  vous  attribuez  les  malheurs  de  la  France  ; 
la  Convention  nationale  la  doit  au  peuple  ;  mais, 
impassible  comme  la  loi,  elle  se  montrera  digne  de 
lui  en  prouvant  à  Tunivers  qu'elle  ne  connaît  d'au- 
tre influence  que  celle  de  la  justice. 

Citoyens,  vous  venez  jurer  fidélité  aux  principes 
et  dévouement  à  la  repn^sentation  nationale  ;  elle 
croit  à  vos  serments  et  applaudit  à  votre  énergie.  Je 
vous  invite  en  son  nom  aux  honneurs  de  la  séance. 

—  Une  députation  de  la  section  des  Champs-Ely- 
sées est  admise  à  la  barre. 

L'orateur  :  Représentants,  en  vain  l'anarchie  s'a- 
gite en  tout  sens;  le  peuple,  instruit  par  une  funeste 
expérience,  sait  aujourd  hui  que  ses  véritables  amis 
sont  ceux  qui  le  servent ,  et  non  pas  ceux  qui  le 
flattent  ;  il  sait  aue  ses  véritables  amis  sont  ceux 
qui  opèrent  son  bonheur ,  et  non  pas  ceux  qui  en 
7arlent  sans  cesse  pour  le  faire  mouvoir  au  gré  de 
eurs  passions ,  et  qui  fondent  leur  tyrannie  sur  sa 
crédité. 

Tel  a  été  le  sort  de  tous  les  peuples  dans  les  révo- 
lutions, que,  séduits  parles  apparences,  ce  n'est 
qu'après  un  combat  long  et  opiniâtre  entre  le  vice 
et  la  vertu  que  cette  dernière  enfin  est  restée  vic- 
torieuse. 

Elle  touche  à  sa  fin ,  sans  doute,  cette  lutte  scan- 
daleuse qui  n'existe  encore  que  parce  que  trop  long- 
temps l'indulgence  nationale  a  retenu  le  glaive  qui 
doit  frapper  tous  les  factieux. 

L'heure  du  néant  va  sonner  pour  toutes  les  fac- 
tions :  c'est  la  justice  qui  Ta  marquée  cette  heure,  et 
si  les  factieux  y  sont  sourds ,  le  peuple  est  debout, 
il  saura  la  faire  entendre. 

Forte  de  ses  principes,  la  section  des  Champs-Ely- 
sées a  éprouve  le  besoin  de  manifester  ses  opinions 
devant  la  représentation,  nationale  :  elle  déteste 
tous  le^  jougs,  excepté  celui  de  la  loi ,  dont  elle  est 
fidèle  observatrice  ;  si  jamais  son  encens  a  brûlé 
pour  quelque  individu,  il  a  fallu  un  motif  aussi  puis- 
que le  bien  public  pour  l'y  déterminer;  jalouse 


K 


de  sa  liberté,  lesinorts  mtoe  lui  portent  ombrage, 
lorsqu'ils  ne  sont  pas  rangés  sur  la  ligue  de  l'éga- 
lité. L'adulation  est  une  bassesse  d'autant  plus  dan- 
gereuse à  ses  yeux  qu'elle  est  le  marche-pied  de 
toutes  les  tyrannies. 

Voilà  notre  réponse  à  ceux  qui  censurent  les  dé- 
marches des  sections  au  sein  de  la  Convention.  Eh  ! 
à  qui  les  sections  du  peuple  s'adresseraient-elles 
donc ,  si  elles  ne  venaient  au  centre  unique  que  le 
peuple  s'est  choisi  lui-même?  Sans  doute  que  les  dé- 
marches des  citoyens  égarés  se  rendant  aux  Jaco- 
bins leur  plaisaient  davantage  ;  mais  heureusement 
ces  temps  sont  passés. 

C'est  ici  que  la  section  des  Champs-Elvsées  (  et 
jamais  qu'ici  )  a  osé  s'élever  contre  1  anarchie ,  lors 
de  son  triomphe  momentané.  Eh  bien ,  aujourd'hui 
qu'elle  succombe  enfin  cette  anarchie ,  que  toutes 
les  autorités  sont  rappelées  à  la  source  de  leurs 
pouvoirs  par  une  main  sage  qui ,  en  les  épurant , 
renvoie  à  leurs  travaux  habituels  ceux  que  les  me- 
neurs n'en  avaient  arrachés  que  pour  les  tromper 
plus  aisément,  et  s'en  servir  comme  d'un  instrument 
propre  à  mutiler  le  peuple;  aujourd'hui  enfin  que 
tout  rentre  dans  l'ordre,  cetteméme  section  vient 
vous  dire,  avec  la  franchise  qui  convient  à  des  ré- 
publicains : 

Représentants ,  vous  avez  rempli  notre  voeu  en 
rapportant  toutes  ces  lois  destructives  de  Tordre 
social  qu'avaient  dictées  les  Vandales  et  les  canni- 
bales. ' 

Vous  avez  rempli  notre  vœu  en  adoptaqt  toutes 
les  mesures  propres  à  raviver  le  commerce,  l'indus- 
trie et  les  arts ,  qui  seuls  peuvent  rendre  la  républi- 
que florissante. 

Vous  avez  rempli  notre  vœu  en  rappelant  dans 
votre  sein  les  députés  purs  que  les  factions  eu  avaient 
éloignés. 

Enfin  ,  vous  avez  rempli  notre  vœu  en  mettant 
en  action  la  justice  et  les  vertus ,  dont  les  noms 
seuls,  restés  dans  la  bouche  de  nos  derniers  tyrans , 
leur  ont  si  puissamment  servi  pour  assassiner  le 
peuple. 

Représentants,  il  reste  encore  beaucoup  a  faire: 
hâtez  vous  d'épurer  les  officiers  de  la  force  armée; 
la  sûreté  publique  le  demande  avec  la  tête  des  grands 
coupables.  Comptez  sur  nous ,  comptez  sur  le  peu- 
ple, comme  le  peuple  compte  sur  vous;  frappez,  il  en 
est  temps. 

Le  Président,  à  cette  députation  :  Cito^ns,  jurer 
fidélité  à  la  Convention  nationale,  s*unir  a  elle,  c'est 
s'identifier  avec  le  peuple  qu'elle  représente.  Nos 
intérêts  sont  communs; que  nos  efforts  le  deviennent 
pour  assurer  le  triomphe  de  la  justice.  Citoyens,  il 
est  temps  de  calmer  les  mouvements  convulsifs  in- 
séparables de  l'état  de  révolution;  il  est  temps  aue 
la  sagesse  reprenne  son  empire;  c'est  elle  qui  aoit 
poser  la  clef  du  majestueux  édifice  élevé  pour  le 
bonheur  des  Français. 

Les  vociférations  des  soudoyés  de  Pitt,  la  tactique 
infernale  de  ses  affidés  n'ébranleront  plus  les  bons 
citoyens.  Le  système  de  ces  hommes  perfides  n'est 
pas  un  problème  ;  ils  veulent  dominer  et  nous  re- 
plonger dans  l'esclavage.  Citoyens,  le  peuple  fran- 
çais a  confié  à  ses  représentants  l'exercice  de  sa 
souveraineté.  Ce  dépôt  sacré  lui  sera  remis  pur  et 
intact;  ils  périront  tous  plutôt  que  d'y  laisser  porter 
atteinte. 

Le  peuple  veut  la  justice;  la  Convention  nationale 
la  maintiendra.  Le  peuple  demande  vengeance  des 
tyrans;  la  Convention  nationale  ne  capitulera  jamais 
avec  le  crime.  Elle  applaudit  à  votre  énergie ,  et 
vous  invite  aux  hoooeurs  de  la  séance. 


263 


La  C  >n?entioii  ordonne  Tiosertion  de  ces  Adresses 
an  Bulletin. 

—  Richard  monte  à  la  tribune  au  milieu  des  plus 
vifs  applaudissements. 

Richard  :  Rien  ne  peut  ralentir  la  marche  victo- 
rieuse de  l'armée  du  Nord.  Je  ne  saurais  dire  où  elle 
est  en  ce  moment  ;  mais  les  dernières  dépêches  que 
nous  en  avons  reçues  sont  datées  d'Utrecht.  (Les 
applaudissements  et  les  cris  de  vive  la  république  I 
empêchent  Richard  de  continuer.  — 11  lit  ensuite  1rs 
lettres  officielles.— (Voyez  le  Numéro  d'hier.) 

Champbin-Aubin  :  Je  demande  la  parole  pour  une 
motion  d'ordre. 

Citoyens ,  c'est  au  moment  où  la  vertu  triomphe 
▼entablement  et  n'est  plus  un  vain  nom;  c'est  au 
moment  où  vous  abattez  victorieusement  la  terreur 
et  la  tyrannie  ;  c'est  au  moment  enfin  où  vous  vous 
occupez  de  sonder  et  de  guérir  les  plaies  de  l'Etat  ; 
c'est  en  ce  moment,  dis-je ,  que  j'ai  cru  devoir  vous 
proposer  une  grande  et  salutaire  mesure ,  ardem- 
ment désirée  de|)uis  longtemps  par  les  plus  purs 
amis  de  l'humanité.  Je  veux  parler  de  l'abolition  de 
la  peine  de  mort. 

On  réclame  de  toutes  parts  l'ordre  du  jour. 

Plusieurs  voix  :  Le  temps  n'est  pas  encore  venu  ! 

L'ordre  du  jour  est  adopté. 

Plusieurs  membres  réclament  contre  l'ordre  du 
jour. 

Taillepeb  :  Je  demande  la  parole. 

Taillefer  :  Un  membre  a  le  droit  d'avoir  la  pa- 
role pour  une  motion  d'ordre,  et,  dès  qu'il  l'a  obte- 
nue, on  doit  l'entendre  avec  bienveillance. 

Lbcointrb  (de  Versailles)  :  Nous  ne  voulons  pas 
d'amnistie. 

Taillefer  :  Je  ne  sais  pas  ce  que  veut  dire  le 
membre  qui  a  la  parole,  car  il  ne  m'a  pas  consulté. 
Toutes  les  fois  qu'un  homme  aborde  la  tribune  pour 
faire  une  proposition  qui  est  le  vœu  éternel  de  rhu- 
manité.... 

Blad  :  H  n'v  a  point  d'humanité  à  sauver  les  scé- 
lérats. ^ 

Taillefer  :  Pourquoi  laisserait-on  subsister  la 
peine  de  mort,  puisque  tous  les  peuples  libres  l'ont 
proscrite?  Sans  rien  préjuger ,  je  demande  l'ajour- 
nement, ou  que  mon  collègue  ait  la  parole. 

Tallien  :  Je  voulais  aussi  élever  des  réclamations 
sur  la  manière  dont  l'assemblée  a  passé  à  l'ordre  du 
jour  ;  je  voulais  aussi  demander  que  la  parole  soit 
conservée  à  l'orateur.  Il  faut  entendre  toutes  les 

Sroposilions  dans  une  grande  assemblée  composée 
'hommerqui  connaissent  leurs  devoirs.  Je  me  Té- 
serve  de  répondre  n  l'orateur.  Je  l'ai  vu  dans  une 
mission  particulière;  je  le  connais;  je  sais  qu'il  est 
de  bonne  foi  ;  mais  je  sais  aussi  qu'il  est  trompe. 
Rappelez-vous  qu'on  vous  demanda  aussi  d'abolir 
la  peine  de  mort  lorsqu'il  s'agit  de  juger  le  tyran  de 
ta  France.  On  vous  fait  aujourd'hui  la  même  propo- 
sition, parce  que  vous  êtes  au  moment  de  prononcer 
sur  le  sort  d'hommes  qui  ont  répandu  à  grands  flots 
le  sang  des  Français. 

Lorsqu'on  vint  vous  demander  de  mettre  la  mort 
h  l'ordre  du  jour ,  les  hommes  qui  fout  faire  la  mo- 
tion qu'on  nous  produit  aujoura'hui  se  sont-ils  éle- 
vés contre  cette  proposition  atroce?  Non  ;  ils  ne  se 
sont  attachés  qu'à  faire  le  mal ,  qu'à  empêcher  le 
bien  de  s'opérer ,  qu'à  affliger  l'humanité  entière; 
aussi  l'humanité  entière  vient  demander  justice  de 
pareils  monstres.  (Vifs  applaudissements.)  La  France 


TOUS  a  envoyés  pour  assurer  son  bonheur,  et  vous 
mériteriez  d'être  tous  envoyés  à  ^l'échafaud  si  vous 
ne  faisiez  pas  justice  de  ceux...  (  Quelques  membres 
de  l'extrémité  de  la  salle  parlent  dans  le  bruit  ) 
Je  demande  que  la  parole  me  soit  maintenue  ;  je  la 
réclame  aussi  pour  celui  qui  vient  de  dire  que  j'étais 
un  massacreur  du  2  septembre  ;  je  l'interpelle  ici , 
devant  les  représentants  du  peuple  français,  aux- 
quels je  demande  une  justice  exemplaire.  (  Vifs  ap- 
plaudissements. ) 

Plusieurs  voix  :  A  l'Abbaye!  (On  applaudit  de 
nouveau.  ) 

Tallibn  :  Il  est  temps  enfin  de  faire  disparaître 
les  misérables  déclamations  à  l'aide  desquelles  on 
voudrait  neutraliser  le  courage  des  hommes  qui  ont 
fait  VŒU  de  démasquer  tous  les  fripons  et  les  co- 
quins. J'ai  entendu  dans  cette  nartie  de  la  salle  (en 
montrant  l'extrémité  gauche)  des  hommes  qui 
m'ont  accusé  d'être  un  massacreur  du  2  septembre. 
Eh  bien ,  j'accepte  cette  accusation  ;  venez  la  porter 
à  la  tribune,  venez  l'y  prouver. 

Barras:  Je  demande  que  tous  les  accusateurs  ail- 
lent à  la  tribune.  (Out,  oui  /  s'écrie-t-on  en  applau- 
dissant vivement.) 

Merlin  (de  Thionville):  Il  estd*un  scélérat  de  ca* 
lomnier,  et  d'un  lâche  coquin  de  ne  pas  soutenir  les 
faits  qu'il  avance.  Tallien  appelle  à  la  tribune  celui 
qui  l'a  accusé. 

Tallien  :  Puisque  celui  qui  m'a  fait  ce  reproché 
ne  se  présente  pas,  je  somme  non-seulement  ceux 
qui  l'environnent ,  ceux  qui  siègent  sur  le  même 
banc ,  dans  cette  partie  dominante  de  la  Conven- 
tion  

Plusieurs  voix  :  Dis  donc  la  partie  honteuse  ! 

Merlin  (de  Thionville  )  :  C'est  la  domination  du 
crime. 

Tallien  :  Je  somme  encore  tous  leurs  sicaires,  tous 
les  membres  des  comités  révolutionnaires,  tous 
leurs  suppôts ,  tous  les  assassins  de  profession ,  de 
porter  contre  moi  aucune  accu^tion.  Il  en  est  beau- 
coup parmi  eux  qui  ne  m'accusent  d'être  un  égor- 
geiir  du  2  septembre  que  pour  mieux  étouffei"  ma 
voix,  parce  qu'ils  savent  que  j'ai  tout  vu.  Us  savent 

3 ne  je  me  suis  servi  de  l'autorité  dont  j'étais  alors 
épositaire  pour  sauver  du  glaive  des  assassins  un 
grand  nombre  de  personnes;  ils  savent  que  moi 
seul,  au  milieu  de  la  commune,  j'usai  me  jeter  à  tra- 
vers cette  foule  sanguinaire  pour  empêcher  qu'on 
violât  les  dépôts  confiés  à  la  commune.  Je  défie  à 
qui  que  ce  soit  de  me  reprocher,  non  pas  un  crime, 
mais  la  moindre  faibles^.  J'ai  fait  mon  devoir  dans 
cette  occasion  ;  je  le  ferai  encore  en  démasquant  leis 
provocateurs  de  cette  journée  sanglante,  qui  siègent 
parmi  nous.  (  Applaudissements.  )  Je  reviens  a  la 
question,  car  les  intéri^ts  particuliers  doivent  dispa- 
raître, et  nous  ne  devons  nous  occuper  que  du 
bonheur  général.  Je  demande  que  l'on  écoute  celui 
qui  a  la  parole  ;  on  fera  ensuite  justice  de  son  opi- 
nion. 

Citoyens ,  vous. ne  voulez  pas  qu'on  vous  accuse 
d'être  anthropophages,  mais  vous  vous  souviendrez 
aussi,  comme  vous  l'a  dit  un  de  vos  orateurs,  que 
c'est  être  inhumain  que  d'avoir  de  l'humanité  pour 
des  scélérats.  (  Vifs  applaudissements.  )  Vous  vous 
souviendrez  qu'il  n'est  pas  possible  de  pardonner  à 
ceux  qui  ont  ensanglanté  le  territoire  français. 

Et  vous  qui  m'accusez,  admirez  votre  maladresse: 

elle  prouve  combien  vos  reproches  sont  calomnieux; 

si  j'étais  coupable,  comme  vous  le  dites ,  vous  ne 

1  dctiianderiez  pas  l'abolition  de  la  peine  de  mort 


764 


lors«|tii>  ma  tilt  démit  rooler  ior  rëdurand.  Il  est  ; 
U-miis  que  la  jastîce  attaque  lea  rrands  scél<^ti  : 
trop  lo!içtemps  le  jjlaÎYe  iw  la  loi  aa  frappé  que  dea 
hommes  olisciirs;  n  faut  qa*il  frappe  aussi  les  chefs 
de  la  conspiration  qui  se  trouvent  dans  le  sénat. 
Furgeons-tious  de  ces  hommes  qui  ne  veulent  qu'a- 
vilir la  Convention  aux  yeux  de  TBurope,  oui  veo- 
h* ut  tout  bouleverser,  afin  gn'k  la  faveur  du  chaos 
qui  résulterait  de  leur  projet  atroce  ils  puissent 
trouver  un  lieu  qui  les  garantît  de  la  mort  oui  les 
poursuit  ;  mais  c  est  eo  vain ,  le  crime  u'a  o  autre 
asile  sur  terre  que  le  cœur  du  méchant.  (  Vifs  ap 
plaudissements.  )  Je  demande  que  le  citoyen  qui  a 
obtenu  la  parole  soit  entendu,  atio  qu'on  ne  paisse 
pas  dire  qu'on  a  étouffé  sa  voix. 

La  Convention  décrète  que  Champein-Aubin  sera 
entendu. 

CHAMPSiif-Aimiii  :  Ce  n'ert  pas  sans  étonoemeDl 
que  J*ai  vu  la  Convention  témoigner  son  improba- 
tion  lorsque  j*ai  commencé  à  prononcer  on  discours 
qui  m'est  ptarticulier ;  Tallien  me  connaît;  et  moi 
aussi  je  Tai  connu  avant  et  depu»  b  révolution. 
Voici  comment  ie  me  suis  comporté  :  ie  ne  suis 
que  depuis  peu  de  temps  dans  rassemblée,  où  les 

nous (Phuieun  voix:  La  motion  d'ordre  !  ) 
lis  lire  ma  motion  d'ordre  ;  elle  est  le  vœu  de 
mon  cœur. 

Champein-Aubin  reprend  ;  la  louffoeur  de  aoa 
diacours  le  fait  interrompre  avant  la  un. 

Il  Ut  le  projet  de  décret  ainsi  conçu  : 

«  Art.  !•'.  La  Convention  oationale  décr&te  qoela  pehia 
de  mort  eit  aboUe  dans  toute  retendue  de  la  ftpubHqoe 
française. 

•  IL  Tontes  les  foUlolincs,  avec  lears  édwiMidf «  qui 
eiislent  dans  la  république ,  seront  déUuitet,  brisées  el 
brûlées,  au  moment  même  de  la  publication  de  la  présente 
loi,  par  les  cxéculenrs  des  jugements  criminels. 

IIL  AactiDS  membres  de»  tribonavs  crlminelf ,  tribu- 
MOI  réfoluUonoaires,  tribunaux  el  coaimiBsiona  aiililai* 
iCtt  ne  peuvent  plus  pronoDccr  des  iograMola  à  morl,  sauf 
les  eas  qui  pourront  dériver  de  à*arlide  d-après»  lia  eanli* 
Hueront  néanmoUit  de  juger  les  préveana  éaoa  lea  fanaca 
(»rdlnairea,  et  coadamoeront  aux  peines  diiiprenaier  cbaC 
'  cens  qui,  dans  l'état  actuel  dea  choaes,  auraiei»t  vnoovu 
la  peine  de  mort  ;  ils  les  feront  renferiDer  de  auilc,  jusqu'à 
ee  qo'fl  ait  été  sUtoé  ultérieurement  sur  leur  sort. 

•  IV.  Lea  oonitéa  de  aalut  publie,  de  sûreté  générale  et 
de  léaialalion,  réunis,  exantineront,  dans  le  ploa  brerdé> 
lai  t  ril  ne  convient  pas  d*excepter  du  bénéfice  de  la  pré- 
sente lof  les  émigrés  et  quciqoea  autres  grande  crbniBelsde 
tèse-nalion. 

«  V.  Lea  mêmca  trob  comltéa  sont  chargés  de  propofer 
ft  la  Convention  nationale  les  différents  genres  de  peines 
qu'il  convient  de  substituer  ft  la  peine  de  motu  Ils  les  clas- 
acronl  par  degréa  proportioonela  aux  délita. 

•  VL  La  présente  loi  aéra  publiée  ei  exécutée  dan»  Paris 
ù  l'inAtanl  mCmc;  des  cipédiiioiis  en  seront  transmiM'a  de 
auile  ft  tous  les  tribunaux  qui  se  trouvent  dans  cette  com- 
mune. Il  sera  expédié  dans  le  jour  des  courriers  extraordi- 
fiairrs  dans  tous  le»  départements,  et,  atcc  coule  la  célé- 
rité |>f>8sible,  des  ovisos  dans  toutes  les  possessions  outre- 
mer da  territoire  français,  pour  qne  la  présente  loi  j  soit 
égakaaent  exécutée  aussitôt  sa  réceplîoD. 

•  VII.  La  commission  des  administrations  civiles,  police 
et  tribunaux,  est  chargée  de  mettre  sur-le-champ  la  pré- 
sente loi  ft  exécutioD.  • 

Annale  Dumont  :  Cette  motion  n'est  appuyée  par 
personne.  Je  demande  Tordre  du  jour. 

L'asaemblée  passe  à  l'ordre  du  jour.  (  On  applau- 
dit.) 

Clauzbl  :  Je  demande  la  parole  pour  relever  une 


erreur  échappée  à  Talliea.  Il  adH  que  l'assemblée 

devait  toujours  entendre  rntièrnnrnt  ceux  qui  pre- 
naient la  parole:  ie  crois  cependant  que,  lorsque 
l'assemblée  connaît  d'avance  le  résultat  des  propo- 
sitions qui  doivent  lui  élre  faites,  elle  peut  décider 
si  elle  entendra  on  non  en  entier  le  memlwe  qui 
demande  h  parler.  Et  remarquez  qnelle  perte  de 
temps  nous  aurions  évitée  en  passant  d  abord  à 
l'ordre  du  jour  sur  la  motion  dû  préopinant  ;  elle 
n'a  servi  i  autre  chose  ou'à  empi^he r  le  comité  des 
finances  de  soumettre  i  la  Convention  le  rapport  s«r 
Taugnientation  des  fonctionnaires  publics.  (  On  ap- 
plaudit.) 

Barhas  :  Je  saisis  la  vrille  d'une  journée  célébré 
pour  tous  les  républicains,  pour  proposer!  la  Con- 
vention nn  acte  de  bienfaisance  qui  est  dans  son 
cœur ,  et  aoe  commande  fa  rigiirtir  de  la  saison 
dans  laauelle  nous  nous  trouvons.  Je  pense  ao*il  est 
digne  d  elle  de  décréter  qne  les  efll^ts  dliabillement 
que  1rs  citoyens  indigents  ont  engngés,  pour  se 
substanter  eux  et  leur  famille ,  leur  seront  rendus. 
Je  demande  que  la  république  se  charge  de  rem- 
bourser aux  administrations  des  Monts-oe-Piélé  le 
montant  des  sommes  qui  auront  été  nrëtées  sqr  les 
effets  engagés  jusqu*ft  concurrence  de  M  liv.  (  On 
applaudit.  ) 

L'assemblée  se  lève  tout  entière  pour  décréter  ie 
principe. 

Merlin  (de  Tbîonville)  :  Je  demande  que  la  somao 
soit  portée  à  100  liv.  (Vifs  applaudissements;) 

Babbas  :  Voici  la  rédaction  que  je  propose. . 
«  La  Convention  nationale  décrète  : 

•  Art  !*'•  Tous  les  ellHs  dliablUement,  eouvertofei  cl 
lils,  dépaaéa  e»  nanilsaeneDt  aux  Monta-de-riélé  cl  au- 
tres établissements  semblables,  et  sur  lesquels  II  aurait  élé 
piété  uns  somme  de  100  livres  et  au-dessous»  acranl  Ten- 
dus à  leurs  propriétaires. 

-  IL  La  république  se  charge  de  rembouricr  aux  adaiî- 
nistratîons  des  aConts-de-PiétéetautresétibhiseawnM  icw 
blablea  la  taleur  des  prêts. 

«  m.  Pour  parvenir  à  retirer  leurs  effets,  les  proprié- 
taires reconnus  indigents  n*a(irotft  d'antres  formalités  ù 
remplir  que  de  Taire  viser  leurs  reconnaissances  var  les 
BieaaUca^àcaeoautéftdcbiearaiaaacedc  leurs  scetMS  ou 
arroadisêeiiN&U  rcapcctilu  • 

Cette  rédaction  est  adoptée  au  milieu  de  plus  vifs 
applaudissements.  (la  fu^Ce  demotii.) 


If.  B.  Dans  ta  séance  du  2  pluviôse,  à  la  suite  de 
la  fdte ,  la  Convention  a  décrété  que  la  journée  du 
9  thermidor  serait  célébrée  annuellement,  dans 
toute  la  république ,  de  la  manière  la  pUis  solen- 
nelle. 


LIVRES  DIVERS. 

La  Loire  vengh,  ou  Recueil  bi&torique  des  crioiaa  de 
Carrier  et  eu  comité  rcTolutionnaire  de  NantM,  avec  les  dé- 
tails de  la  procédure  ;  première  partie,  iaS^.  Prit  :  3  liv. 
10  a.,  fraoe  de  paru  A  Paris,  cbes  Vearaat,  librairo,  cloître 
Honoré. 


Payemenii  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  da  fierpctuel  est  ouvert  pour  les  six  pro- 
miera  moia:  U  aéra  fait  A  loua  ceus  qal  seront  porteur» 
d'inacriptiona  au  grand  livre.  Celui  pour  lea  rentes  vlaeèrea 
est  de  huit  mois  vingt  et  ua  jaun  de  l'année  liaa  (v; 

style). 


GAZETTE  NATiO>mE  o,  LE  NOMTEUR  UNIVERSEL. 

N*  124.  Quartidi  4  Pluviôse,  Van  3».  (Vendredi  23  Janvier  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 


DANEMAUK. 

Copenhague ,  te  i*'/niift>r.  —  Uneilotlille  de  chaloupes 
canonnièreset(rautres  nafires  armés  est  stationnée  sur  le 
grand  lac  de  Saimen,  à  rexlrëmité  du  grand  duché  de 
Finlande.  P  a  élé  formé,  pour  le  service  de  cette  flottille , 
une  compagnie  suédoise  d*artillerie  de  marine. 

—  La  navigation  pour  les  Iodes  est  arrêtée  parla  rigueur 
de  la  ^ison.  On  a  fuit  entrer  dans  les  ports  de  Norwége 
les  bâtimeols  destinés  ù  cette  navigation. 

—On  fient  d*aprendre  la  mort  du  commandant  de  l'es* 
cadre  fraoçatse  qui  se  trouve  dans  ces  parages. 

—  Le  gouvernement  suédois  a  dû  faire  notifier  à  la  cour 
de  Rtisste  que,  la  disette  devenant  de  jour  en  jour  plus 
sensible,  il  profilerait  des  stipulations  du  dernier  traité  de 
paii  pour  tirer  de  Livonie  des  grains  qui,  «ui  iennes  de 
ee  Uraitè,  ne  devront  payer  aucun  droit. 

ALLEMAGNE. 

Vienne ^  te  80  décembre,  -*  Les  arrestations  recommen- 
cent. Une  vingtaine  de  personnes ,  dites  nobles ,  pour  le 
plupart ,.  vienaent  d*êlre  arrêtées  à  Pesth  et  à  OflSen.  Le  gou- 
vernement les  accuse  d'avoir  été  en  relations  avec  les  pri- 
sonniers d*Etat  et  avec  les  insurgés  polonais. 

—  L'archiduc  palatin  vient  d'arriver  à  Vienne.  On  y  e 
?o  aussi  arriver  dernièrement  le  ministre  plénipotentiaire 
impérial  près  la  cour  palatine,  le  même  qui,  l'an  pas^é, 
a  Âé  envoyé  par  l*empereur  à  Berlin  pour  une  mission  ex- 
traordinaire. On  le  dit  chargé  d'instructions  secrètes  de  la 
plus  haute  importance ,  relatives  à  ce  qui  sera  agité  k  la 
diète  par  les  mioistres  de  divers  membres  du  corps  ger- 
manique, ainsi  qu'à  la  proposition  faite  par  Télecteur  de 
Mayence  d*eutamer  des  négociation»  de  paix. 

ITALIE. 

Uvourne^  le  l«';<tfirier.— Il  n*est  resté  ici,  depuis  le  dé- 
part de  la  flotte  angliûse,  que  deux  frégates  et  deux  catten 
de  cette  nation.  Pendant  l'espace  de  dix  jours  que  cette 
flotte  est  resiée  dans  ce  port,  elle  s'est  abondamment  pour- 
vue de  ce  dont  elle  avait  besoin. 

—  On  assure  que  Monneur^  le  soi-disant  régent,  s'est 
établi  depuis  quelque  temps  à  Vérone,  sur  le  territoire  vé- 
nitien. 

—Il  règne  le  long  de  cette  côte  on  vent  d'une  extrême 
violence. 

Les  débris  de  bâtiments  poussés  sur  le  rivage  annoncent 
les  nombreux  accidents  auxquels  il  a  donné  lieu  dans  ces 
parages. 

—La  cour  de  Rome  s'occupe  de  mettre  en  état  de  dé- 
fense le  fort  de  Civila-Vecchia  et  d'y  placer  des  artilleurs. 

—  On  écrit  de  Naples  que  la  cour  et  le  principal  ministre 
Acton  font  leur  résidence  habituelle  à  Caserlc. 

C'est  de  là  que  se  dirige  la  levée  qui  se  fait  dans  les  Etats 
napolitains,  pour  remplacer  les  seiie  mille  hommes  qui 
doivent  se  porter  en  Lombardie. 

ANGLETERRE. 

Londreê,  le  h  janvier»  — Thelwal,  le  troisième  des  ac- 
cusés de  haute  trahison,  a  élé  acquitté  comme  Hardy  et 
Horn-Tooke.  Les  démonstrations  de  la  joie  publique  ont 
puiu  alarmer  le  ministère,  et  les  autres  détenus  ont  été 

Z*  Série.  ^  Tome  IL 


mis  en  liberté  sur-le-champ,  et  sans  aucune  Instruction  de 
la  procédure  intentée  contre  eux  ;  aussitôt  ils  ont  cité  les 
ministres  parnlevant  les  tribunaux  crimlnds,  pour  rendre 
raison  de  l'incarcération  injuste  et  illégale  dont  les  préve- 
nus ont  élé  victimes. 

—  Le  propriétaire  du  journal  Northern  Star,  traduit 
devant  le  tribunal  du  banc  du  roi  à  Dublin,  comme  libel* 
liste,  pour  avoir  publié  l'Adresse  de  la  Société  des  Irlau* 
dais,  unis  aux  volontaires  d'Irlande,  a  été  acquitté. 

— L'esprit  public  parait  faire  des  progrès  rapides.  Les 
amis  nombreux  de  la  liberté  politique  se  sont  joints  à 
ceux  de  la  liberté  civile,  pour  démontrer  combien  l'é* 
norme  inégalité  de  suffrages  dans  les  élections  était  con« 
traire  aux  droits  du  peuple ,  et  combien  elle  favorisait 
rinfluence  despotique  du  ministère.  En  conséquence ,  on 
a  imprimé  la  liste  comparative  des  cinq  comtés  les  plus  po- 
puleux de  l'Angleterre,  dans  lesquels  vingt-sept  mille  élee< 
'leurs  nomment  seulement  douxe  députés,  tandis  que  six 
bourgs  pourris ,  ou  corrompus,  ou  ministériels,  ce  qui 
est  la  même  chose ,  nomment  aussi  douie  députés  pir 
douse  électeurs. 

DiBATS  DO  PABLBMENT. 

Chambre  dee  cammmnei. 

Les  deux  Chambres  ont  voté  presque  sans  réclanaUoQ 
l'Adresse  de  remerciement  au  roi. 

— Dans  la  séance  des  Communes,  du  3,  on  lut  la  réponse 
du  roi  à  l'Adresse  présentée  la  veille,  et,  après  le  renvoi 
de  quelques  pétitions  |)articu1ières  aux  comités ,  M.  She- 
ridan  prit  la  parole  pour  prévenir  ses  col  lègues  qu'il  se  pro- 
posait de  les  occuper  incessamment  de  deux  points  de  In 
plus  grande  importance. 

•  J'examinerai,  dit-il,  si  le  peuple  britannique  doit  se 
flatter  de  jouir  encore  des  bienfaits  de  Vhabeoê  eorpuê^  ce 
palladium  de  nos  lil)eriés  civiles,  et  si  l'institution  du  jury 
doit  être  considérée,  tant  par  les  représentants  de  la  nation 
que  par  leurs  commettants,  comme  une  'institution  pié- 
cieuse,  ou  si  elle  doit  tomber  dans  un  mépris  et  un  avilie* 
sèment  qui  annonceraient  notre  dégénération  politique.  Je 
vous  préviens  en  conséquence,  messieurs,  que  lundi 
prochain  je  présenterai  ma  motion  à  ce  sujet. 

M.  Maurice  Hobinson  :  J'aurais  une  question  non  mofais 
importante  à  faire  aux  commissaires  de  l'amirauté.  Je  vou- 
drais savoir  dans  quel  état  se  trouve  noire  marine  ;  le  bruit 
que  les  Français  tieunent  actuellement  la  mer  avec  ta 
forces  supérieures  aux  nôtres  circule  asseï  généralement. 
Si  la  chose  est,  pourquoi  cette  Infériorité  déshonorante  et 
funeste?  dirais-je  aux  lords  de  l'amirauté.  Est-ce  trop  exU 
ger  d'eux  que  de  les  presser  de  prendre  des  mesures  nécesr 
saircs  pour  remonter  nos  forces  navales  à  un  point  tel  que 
la  Grande-Bretagne  puisse  raisonnablement  se  flatter  de 
n'être  pas  battue  sur  son  propre  élément?  Ne  pourrait-oo 
pas  employer  beaucoup  plus  utilement  l'argent  de  l'eni* 
prunt  qui,  doit  dit-on,  se  faire  pour  le  compte  de  TeoB* 
pereur,  à  construire  des  vaisseaux  et  à  lever  des  marina 
pour  notre  propre  compte?  Mardi  prochain  (6  janvier  )» 
je  présenterai  celte  question  à  l'examen  de  la  Chambra^ 
suivant  les  formes  parlementaires. 

Af.  Sheridan  :  J'aurais  bien  aussi  une  question  à  foire  | 
mais  l'absence  des  membres  du  conseil  général  de  ville 
m'annonce  qu'elle  serait  aussi  ioutileque  celle  que  le  préo» 
pinant  adressait  aux  lords  de  l'amirauté,  également  absentai 
mais  j'espère  que  nous  serons  plus  heureux  l'un  et  l'autre^ 
et  que  ces  messieurs  se  trouveront  à  la  séance  du  5 ,  pont 
nous  donner  quelques  explications  sur  l'acte  relatif  aui 
milices  de  Londres,  tel  qu'il  a  passé  à  la  dernière  session* 

M.  Fox  :  Je  voudrais  bien  que  les  ministres  daignassent 
nous  faire  savoir  quand  nous  pourrons  traiter  la  question 
iW  Pemprunl,  car  la  chose  vaut  la  peine  que  nous  en  soyons 
pcévenus  à  Pavance.  Cela  est  d'autant  plus  essentiel  que 
la  convocation  tardive  du  parlement  a  empêche  beaucoup 
de  membres  de  se  rendre  ici  ;  d^atttres,  qui  s'y  sont  rendai» 

34 


26< 


ont  depttl^tltlê  iMir  fmtof  ]m  o«|>oiirreiii|)tt^  dei  fone« 
lions  publiques»  les  «atres  pour  s'occuper  de  leurs  affaires 
personnellet» 

if.  Ro$€^  ruo  desoooseillert  de  la  trésorerie  t  L*époque 
Oè  l*on  agitera  la  question  de  IVmprunt  se  trouve  natu- 
tellement  déterminée  :  c^est  le  jour  ojk  l'on  viendra  tous 
•oumeltre  Paperçu  des  voies  et  moyens,  autrement  dit,  k 
fourerture  du  budget»  qui,  en  présentant  Tétat  des  dépen- 
ses, olTre  en  même  temps  les  moyens  d'j  faire  Ucc.  Au 
reste,  il  m'est  impossible  de  vourindiquer  précisément  le 
jottr,  le  chaneeNer  de  réchlmiier  n'étant  point  ici  pour  le 
BMNnent,  et  ne  m'ayatit  pas  hit  part  de  ses  intentions.  Mon 
bonorable  ami  ne  viendra  probablement  pas  ce  soir  au 
parlement  )  mais  tout  ce  que  je  puis  promit ire'en  son  nom, 
c^est  qu*avssi  bien  convaincu  qu'aucun  de  vous  de  la  né- 
tessité  d'une  mûre  délibération,  il  n'amènera  pas  la  dis» 
cession  del'eapruntsansqu'elleiltétéanBoncéeioogteiDps 
ëlifaooei 

La  Cbambre  se  Ibrme  en  comité  de  subsides, 

11.  Sheridaa  teprocbe  à  M.  Pitt  de  s'être  permis  de  s'ab- 
•coter,  ce  qui»  eo  sa  qoalité  de  chancelier  de  l'étbiquier» 
•ttnneinAvctionaaxrégleoienif  deleCbambre»  «Au  reste, 

tn'en  suit  pas  étonné,  dit-H,  je  ne  doit  pas  attendre 
loeoop  d'eiactltude  de  la  port  d'un  bonme  à  qui  la  vie* 
latjon  la  plus  ouverte  des  formes  établies  oo  coûte  rien. 
Aujourd'hui  qu'une  diKUssion  relative  aux  subsides  exige 
■a  présence,  ilne  se  trouve  pas  à  sa  place.  Remarquez, 
aKsaieurs,  quec!est  la  première  fois  qu'un  chancelier  de 
Féchiquier  a  manqué  ainsi  à  son  devoir.  • 

If.  Ilose  :  Llionorable  préopinant  a  un  peu  oublié  les 
lormet  relatives  à  la  première  discussion  du  comité  des 
«ubsMca.  te  vote  général  des  subsides  a  toujours  paru  la 
tttHe  naturelle  de  l'Adresse  au  roi.  Par  conséquent,  il 
alesl  pas  indispensable  que  le  ministre  se  trouvée  la  séance. 
J'MgaRe  l'honorable  membre  t  retrouver  dans  sa  mémoire 
4|oe  oioiHDéme  j*ai  fiiit,  il  y  a  quelques  années,  une  mo- 
tion k  cet  égard*  dans  des  circonstances  h  peu  près  pareil- 
I».  • 

if.  SkerUUm  t  Le  préopinaot  n*est  pas  heureux  dans 
f  apologie  qn'll  fhlt  de  ses  amis.  Il  a  voulu  excuser  le  cban- 
MierdePéchiquIer,  et  il  constate  le  délit  de  négligence 
Impardonnable  commis  par  lut  II  n'est  pas  vrai  que  le  vole 
des  subsides  soit  une  suite  naturelle  de  l'Adresse  an  roi  ; 
cVst  une  hérésie  politique;  car,  n'en  doutes  pus,  il  y  a 
èes  membres  qui  peuvent  bien  mettre  en  question  s'il  est 
convenable  oo  non  d'accorder  des  subsides  quelconques 
sans  en  avoir  préalablement  déterminé  l'objet;  et  bien  sû- 
roioeoft  dansée  cas,  qui  n'e&t  point  une  supposition  gra> 
fvlle,  les  ministres  doivent  se  trouver  k  la  séance  pour  ré- 
Mdre  nul  questions  qull  serait  peut-être  niéoessaire  de 
leor  Aiire. 

Quant  à  noii  j*ai  dit  et  Je  ne  crains  point  de  le  redire , 
qUf»  je  n'attendais  pas  beaucoup  d'exactitude  de  la  part 
d'on  homme  dont  les  infractions  aux  tonnes  établies  sont 
notoires,  surtout  depuis  qu'il  les  a  violées  d'une  manière 
K  Inconstitutionnelle  m  contractant  de  son  chel  nn  emprunt 
ftvant  la  convocation  du  parlement,  et  sans  être  sûr  de  l'a- 
veu de  cette  Ghambre.^D'ailleurs  le  pariement ,  jaloux  de 
fliire  respecter  la  constitution,  ne  pourra  s'cmpéclier  d'ob- 
Sefver  certaines  circonstances  propres  à  jeter  sur  laconduite 
du  ministre  une  défaveur  qu'elle  semble  mériter.  Pourquoi 
a-l-on  différé  de  nous  convoquer?  Biaît-re  pour  que  l'ad- 
ministration négociât  la  paix  on  en  fit  seulement  des  ou- 
vertures i  éttit-ce  pour  qu'elle  eût  toute  ladlité  de  faire  le 
bien  de  la  patrie?  Non ,  c'était  uniquement  pour  se  ména- 
ger le  temps  de  faire  œl  emprunt  d'une  manière  inconsti- 
tnl  tonnelle* 

;  M.  5f£eto.«  Quoi  I  Ton  attaque  te  chancelier  de  l'échiquier 
nns  justice  et  sans  mesure,  et  je  trahirais  par  mon  lâche 
silence  la  cause  de  mon  bonorable  ami,  la  cause  d'un  mi- 
nistre patriote  I  Et  en  quoi  a-t-il  blessé  les  règles  ordinai- 
les?  Il  a  fait  un  contrat  provisoire,  un  emprunt  qu'il  dé- 
liend  entièrement  de  vous  de  consentir.  Eh  liien,  si  vous 
lei  refuses  votre  sanction ,  il  n'y  a  rien  de  lait  ;  cette  me- 
sure, même  en  la  supposant  mauvaise,  est  nulle  et  comme 
ftOtt  avenue.  Il  me  semble  d'aillenrx  que  la  fixation  provl- 
aolft  des  bases  d'on  empnmt  et  on  traité  subsidiaire  ne 


dlArent  en  rleat  etctrie»  voasélea  tom  trop  nrsis  dans 
la  connaissance  des  lois  constitutionnelles  de  ce  p«ys  pour 
conte«ter  à'  Sa  Majesté  le  droit  de  oonelnre  un  traité  de 
subsides,  sauf  à  le  faire  ratifier  par  le  parlement. 

M.  Fox  relève  l'erreur  du  préopinant,  et  lui  prouve  qu*]| 
y  a  beaucoup  de  différence  entre  un  traité  de  subsides  et  un 
emprunt;  que  d'aiHeurs  il  est  inconstitutionnel  de  contrac- 
ter des  engagements  pécuniaires  sans  savoir  si  le  parlement 
volera  des  subsides  ou  non,  ei  avant  qu'il  ne  détermine 
l'état  des  forces  à  employer. 

M.  Francis  :  La  présence  des  ministres  est  d'antMit  plus 
nécessaire  qu'il  y  a  des  membres  qui,  doutant  comme 
moi  que  les  conditions  de  l'emprunt  soient  avantageuses  h 
la  nation,  seraient  bien  aises  de  demander  làdosus dea 
renseignements  ii  ceux  qui  l*oot  combiné. 

L.es  présomptions  sont  contre  cet  emprunt;  il  n'a  pas 
été  fait  ouvertement  ;  on  n'a  point  admte  à  y  souscrire  tous 
ceux  qui  se  présentaienL  Le  ministre  n'a  fait  ouvrir  aes 
portes  qu'à  un  petit  nombre  d'élus,  et  ces  bienlieurenx 
éiaieiit  de  son  choix  à  lui  seol.  Toute  cooeurrence  a  dooc 
été  écartée,  et  les  conditions  arrangées  en  cooaéqueocet 
de  manière  k  donner  des  soupçons. 

M.  Stetle  répond  que  e'eat  mal  choisir  son  lempa  pour 
soumettre  à  une  epèce  d'inquisitiott  la  conduite  do  minis- 
tre; que  quant  aux  conditions  de  l'emprunt,  l'à-propos  de 
la  discussion  se  présentera  naturellemeot  et  de  Inl-aai 
le  jour  où  il  s'agira  de  les  faire  agréer  par  la  Chambre» 


CONVENTION  NATIONALE. 

Discours  sur  les  principes  du  gouvernement  actuel , 
et  sur  les  bases  du  crédit  publie^  prononcé  par 
Boissyd^Ânglas,  représentant  du  peuple,  député 
par  le  département  de  VÂrdichet  à  la  séance  dm 
7  nivôse. 

Citoyens,  an  moment  où  toqs  allez  rendre  an 
commerce  toute  la  liberté  dont  il  doit  Jouir  ;  au  mo- 
ment où  vous  allesltti  assurer  des  avantages  qn*fl 
ne  peut  trouver  que  dans  un  gouvernement  libre, 
où  vous  allez  eiiGn  rouvrir  toutes  les  sources  de  pro- 
ductions que  de  mauvaises  lois  avaient  taries.  J'ai 
l^ensé  qu*il  importait  de  coosolider  la  confiance  na- 
tionale, en  exprimant  les  principes  qui  doivent  di- 
riger votre  administration  et  votre  gouvernement» 

Les  tyrans,  et  nar  là  j'entends  tous  ceux  qui  ont 
conçu  le  projet  d  asservir  et  dVgarer  le  peuple,  ne 
vous  pardonneront  jamais  tout  ce  que  vous  tentez 
aujourd'hui  pour  fouder  Tempirede  la  justice  el  de  la 
sagesse.  Lesuperalions  que  vous  exécutez  sont  oou- 
rageuses;  elles  respirent  le  zèle  et  renthotisiasme  du 
bien:  dans  leur  exécution,  elles  ont  besoin d*étre 
appuyées  d^uue  volonic  forte  ;  manifestez-la,  cette 
volonté  ;  au*eUe  aille  porter  Tespérance  dans  le 
cœur  des  nommes  actifs  qui  dirigent  leurs  travaux 
vers  la  prospérité  publique,  et  l'épouvante  dans  le 
cœur  des  hommes  coupables  qui  ont  osé  fonder  Tes- 

rioir  du  trouble  sur  ces  efforts  généreux  que  vous  al- 
cz  tenter. 

Il  est  temps  de  faire  connaître  au  monde  que  la 
justice  ne  le  cède  point  au  crime  en  énergie  ;  il  est 
temps  de  faire  connaître  à  la  France  tons  les  éléments 
du  bien  que  renfermait  la  journée  du  9  thermidor. 
Quand  la  république,  à  cette  époque,  a  conquis 
une  seconde  fois  la  liberté,  elle  a  dû  s'attendre  à  re- 
prendre successivement  tous  les  avantages  dont  une 
tvrannie  récente  nous  avait  privés  ;  mais  sa  situa- 
tion était  violente  ;  elle  n*étéit  plus  sous  la  domina- 
tion d*un  tyran,  mais  elle  était  encore  sotts  Tempire 
de  la  nécessité.  Là  des  ennemis  poissants  la  mena- 


387 


çaient  aa  dehors,  des  ennemis  pins  dangereux  Pef- 
frayaient  au  dedans.  Elle  a  vaincu  successivement  les 
uns  et  les  autres,  chacun  de  ses  divers  triomphes 
a  étd  répoque  d*un  retour  aux  principes  de  morale 
etdejnstice. 

Le  commerce  est  sorti  de  Tépoque  de  mort  où  il 
avait  été  plongé  ;  mais,  à  son  réveil,  il  n*a  vu  autour 
de  lui  que  des  ruines.  L  industrie  a  voulu  reprendre 
Tessor  ;  mais  ell£s*est  vue  accablée* d*entraves.  Les 
arts  et  les  sciences  ont  auiisî  été  rappelés  a  la  voix  de 
laliberté;  mais  leurspremiers  regards  se  sont  tournés 
vers  les  pertes  irréparables  dont  ils  ont  été  frappés. 

On  a  vu  qu'il  était  plus  facile  de  faire  disparaître 
un  tyran  que  d'efljcer  les  traces  de  désolation  qu1l 
a  laissées  sur  sa  route.  On  a  s<^nti  que  du  sein  de 
cette  confusion  on  ne  pouvait  arriver  que  par  des 
progrès  lents  à  un  état  calme  et  assuré.  Tous  les 
yeux  se  sont  tournés  vers  vous.  On  souffrait,  mais 
on  vous  conjurait  desuérir  lentement  la  plafe  ;  elle 
était  trop  prolonde,  elle  était  trop  acérée  pour  être 
traitée  violemment. 

Cinq  mois  d'une  sagesse  toujours  croissante,  d'une 
confiance  toujours  mieux  établie;  cinq  mois  de 
triomphes  sur  les  tyrans,  sur  les  factieux,  et  de  vie* 
toires  sur  les  mauvais  principes,  ont  dû  vous  inspi- 
rer des  penscps  plus  rapides,  vous  faire  concevoir 
des  efforts  plus  hardis.  L'abolition  déjà  décrétée  du 
maximum,  la  liberté  que  vous  allez  rendre  au  corn* 
merce,  la  sécurité  que  vous  allex  donner  à  la  pro- 
priété, les  encouragements  que  vous  allez  accorder 
a  tout  genre  dindustrie  ;  toutes  ces  mesures  enfin, 
qui  sont  aujourd'hui  l'objet  de  votre  délibération, 
annoncent  que  vous  voulez  exercer  la  toute-puis- 
sance du  bien.  Mais  ce  serait  trop  peu  que  des  dé- 
crets, si  la  confîanccn'avait  une  base  plus  profonde. 
Je  veux  dire  l'énergie  et  la  moralité  de  votre  gouver- 
nement. Tentreprends  ce  tableau  :  l'esquisse  impar- 
faite  que  je  vous  présenterai  aura  du  moins  l'effet 
d*appeler  votre  prévoyance  sur  la  carrière  que  vous 
avez  à  parcourir»  e(  sur  les  principes  qui  doivent 
vous  diriger. 

La  connance  exige  encore  une  exposition  claire 
des  bases  du  crédit  national  :  je  vais  le  soumettre  è 
la  critique  la  plus  sévère,  et  épouvanter  nos  enne- 
mis du  tableau  de  nos  ressources. 

Bnfln  la  confiance  porte  sur  les  encouragements 
particuliers  oue  doit  recevoir  l'industrie,  et  j'expo- 
serai ceux  qu  elle  réclame. 

Je  rais  parler  de  la  moralité  et  de  l'énergie  qui  • 
vont  caractériser  votre  gouvernement  ;  il  est  encore 
révolutionnaire,  et  ce  mot  exprime  une  action 
prompte  et  entraînante,  opposée  à  des  périls  immi- 
nents :  il  est  républicain,  et  ce  mot  exprime  un  ca- 
ractère de  justice  et  d'intégrité,  de  respect  pour  la 
dignité  de  1  homme,  de  culle  pour  toutes  les  vertus. 

On  a  trop  séparé  ces  deux  mots,  révolutionnaire 
et  répu&h*cain,  et  peut-être  est-ce  là  l'origine  de  nos 
plus  grands  maux.  Si  vous  entendez  par  r^oo/ufion- 
naire  ce  qui  est  prompt,  violent  et  arbitraire,  les 
gouvernements  despotiques  sont  les  plus  révolu- 
tionnaires de  tous  :  bâtez- vous  donc  d'ajouter  que  le 
gouvernement  est  républicain,  et  vous  m*offrez  une 
garantie  qu*il  sera  juste  ù  mon  égard  ;  que  ma  liberté 
civile  ne  sera  jamais  gênée  que  pour  en  assurer  un 
jour  l'exercice  le  plus  entier  ;  que  je  ne  serai  point 
avili,  ni  dépouillé,  ni  égorgé  sans  jug^ement  ;  que 
dans  les  plus  grandes  rigueurs  i*aurai  le  recours 
aux  lois  humaines  et  protectrices. 

Grâces  vous  soient  rendues,  législateurs  !  vous 
avez  délivré  ce  mot,  révolutionnaire ^  de  tout  ce 
que  la  tyrannie  et  le  crime  y  avaient  attaché  d'exé- 
crable :  il  sera  encore  l'effroi  des  factions,  mais  il 
u'efijraitfpitti  l'imioceBec  et  le  patriotisme. 


Onl»  rom  êtes  révolutionnaires ,  vous  exercei 
cette  surveillance  active  qui  empêche  les  factions  de 
se  concerter  ;  vous  veillez  pour  que  le  fanatisme  ne 
rallume  pas  encore  les  torehes  dans  quelques  con- 
trées de  la  France,  pour  qu'il  ne  mette  pas  le  poi- 
gnard à  la  main  de  paisibles  agriculteurs,  pour  qu'jl 
ne  cause  point  la  mort  de  plusieurs  milliers  de  Fran- 
çais faits  pour  s'aimer  et  s'éclairer  entre  eux  ;  vous 
veillez  pour  que  le  royalisme  ne  ranime  passes  es- 
pérances coupables,  pour  qu'il  ne  corrompe  pas, 
par  ses  poisons  cachés,  nos  vertus  les  plus  pures, 
pour  que  notre  humanité  ne  se  rapproche  pas  de  sa 
criminelle  indifférence,  pour  qu'il  n  établisse  pas  de 
signes  de  ralliement,  pour  qu'il  ne  fomente  pas  de 
sujets  de  t^oubles,  pour  qu  il  n'entretienne  point 
d'intelligences  avec  les  tyrans  du  dehors  et  d*intri- 
gues  avec  les  scélérats  de  l'intérieur.  Vous  veillez, 
oui  :  qu'on  ne  vous  accuse  pas  de  ne  pas  veiller  as- 
sez à  cet  éçard ,  jamais  votre  gouvernement  n'a 
mieux  étudié  les  espérances  oui  peuvent  rester  à 
cette  faction  perfide.  H  connaît  toutes  ses  diverses 
ramifications,  les  auxiliaires  qu'elle  emploie,  les 
voies  détournées  qu'elle  paraît  suivre  ;  partout  vo- 
tre gouvernement  l'atteindra.  11  est  important  de 
vous  faire  connaître  un  fait  à  cet  égard  :  un  bruit 
avait  couru  chez  l'étranger,  qu'une  des  conditions 
possibles  de  la  paix  pourrait  être  le  retour  des  émi- 
grés ;  votre  gouvernement  a  chargé  les  consuls  et  les 
envoyés  dnns  les  différents  Etats  neutres  de  démen- 
tir ce  bruit,  et  de  faire  connaître  à  ces  Français  par- 
ricides qu'ils  ne  trouveront  jamais  que  la  mort  sur 
ce  sol,  qu'ils  avaient  osé  vouloir  dévouer  à  la  déso- 
lation, et  vendre  à  leurs  Iftches  protecteurs. 

Vous  veillez  aussi  pour  que  la  faction  des  hommes 
de  sang  et  des  assassins  du  peuple  ne  cherche  pas 
de  nouveaux  refuges,  ne  trame  pas  de  nouveaux 
complots  ;  vous  n'avez  rien  perdu  de  cette  indigna* 
tion  généreuse  qui  poursuit  partout  le  crime.  Une 
funeste  expérience  vous  a  fait  connaître  ses  ressour- 
ces ;  vous  savez  qu'il  prélude  à  l'assassinat  par  1%^ 
calomnie  ;  vous  savez  que  la  représentation  natio- 
nale est  toujours  l'objet  de  sesfureurs,  il  essaie  de  U 
diffamer  en  attendant  le  moment  de  l'égoreer;  il 
calcule  sur  le  besoin  du  peuple  ;  il  épie  les  plaintes 
les  plus  légères,  pour  les  porter  jusqu'aux  murmu- 
res ;  il  se  répand  dans  les  ateliers  ;  il  cherche  à  y  in- 
spirer le  dégoût,  le  mécontentement,  le  trouble; 
stupide  aujourd'hui  dans  ses  calculs,  il  s'adresse  aux 
citoyens  les  plus  indigents,  tandis  que  c*est  parmi 
cette  classe  respectable  qu'existe,  sans  aucune  alté- 
ration, l'horreur  du  crime  et  l'impatience  de  voir 
son  supplice. 

C'est  peu  de  déjouer  tous  ces  complots,  vous  en 
frapperez  les  auteurs  ;  Thomicide  ne  trouvera  Jamais 
grftce  à  vos  yeux  ;  le  livre  des  lois  ne  sera  point 
souillé  par  des  mains  teintes  de  sang.  Loin  de  vont 
l'idée  de  confondre  dans  une  lonsue  et  vaste  pro- 
scription tous  ceux  qui  ont  servi  la  liberté  avec  l'ar- 
deur de  leurs  passions  même  aveugles!  loin  de  vous 
l'idée  de  satisfaire  à  des  ressentiments  particuliers  1 
mais  il  est  une  vengeance  publique  qu'on  ne  jpeut 
faire  taire  sans  rompre  la  garantie  sociale.  Celui 
qui  foule  aux  pieds  les  lois  de  la  république  ne  peut 
trouver  de  sûreté  dans  sou  sein,  celui  qui  liait  taire 
dans  son  cœur  le  cri  de  l'humanité  ne  sera  point  dé- 
fendu  au  milieu  de  nous  par  la  voix  d'une  ifausse  •! 
lâche  pitié. 

C'est  pour  surveiller  ces  ennemis  différents  que 
votre  gouvernement  est  révolutionnaire  ;  mais  il  est 
républicain ,  et  il  sait  respecter,  dans  ceux  même 

3u'il  surveille,  des  citoyens  français,  des  membres 
e  la  grande  famille,  vous  ne  souffrez  plus  que  la 
sttrveiUance  locale  soit  confiée  à  des  hommes  bien 


SCS 


(lignes  eui-m^mos  d'être  surreilléspar  leur  immo- 
ralité, par  leur  vénalité  infirme,  par  Tcxagération 
atroce  de  leurs  principes;  vous  ne  souffrez  plus  que 
des  prisons  soient  des  tombeaux  ;  que  ceux  dont  la 
présence  est  jugée  dangereuse  dans  la  société  de- 
meurent inaccessibles  aux  communications  de  leurs 
familles;  qu'ils  vivent  enfin  sans  que  la  voix  de 
leurs  femmes  et  de  leurs  enfants  leur  apprenne  de 
temps  en  temps  qu'ils  ont  encore  des  raisons  de  vi- 
vre. Vous^étes  rigoureux  dans  des  temps  difficiles, 
mais  vous  n*étes  point  barbares;  vous  ne  voulez 
point  par  le  traitement  d'une  détention  incommode, 
malsame,  jeter  au  milieu  de  la  génération  actuelle 
des  germes  de  maladie  et  de  langueur. 

Vous  surveillez,  mais  vous  ne  proscrivez  plus  ; 
vous  ne  connaissez  plus  ce  svstàme  de  castes  qui  en> 
tretient,  par  les  horreurs  même  de  ses  persécutions, 
la  vanité  et  Torgueil  de  ceux  qui  se  voient  ainsi  dis- 
tingués par  le  malheur  et  la  mort. 

Les  accusés  seront  jugés  avec  des  formes  humai- 
nes et  protectrices.  Vous  avez  donné  à  la  représen* 
tatton  nationale  une  garantie  oui  la  met  à  couvert 
des  entreprises  de  la  haine,  de  la  vengeance,  et  des 
coups  d'une  faction  vigoureuse.  Vous  accorderez  de 
même  à  tous  les  citoyens  français  une  garantie  mo- 
rale qui  leur  assure  que  leur  vie  et  leur  honueur  ne 
dépendent  plus  de  la  précipitation  d*UD  jury  sangui- 
naire. 

Citoyens,  voilà  ce  que  vous  avez  fait,  ce  qu'il  est 
dans  vos  principes  d'achever,  pour  assurer  à  la  li- 
berté civile  tout  ce  qu'elle  peut  réclamer  dans  une 
position  violente  et  agitée  de  la  république,  au  mi- 
lieu du  choc  de.  tant  de  factions  différentes,  plus  fu- 
nestes encore  lorsqu'elles  s'entendent  que  lors- 
qu'elles se  combattent  ;  voilà  ce  que  vous  avez  fait 
{>our  conserver  l'éternel  recours  des  droits  de 
'homme,  et  ne  rendre  point  ce  mot  sacré  illusoire 
dans  votre  It^gislation. 

Mais  rendre  hommage  à  la  liberté  civile  et  aux 
droits  de  l'homme  n'est  point  assez,  si  la  propriété 
n'est  consacrée,  n'est  garantie. 

Après  rinfluence  des  vertus  et  des  lumières,  ce 
que  les  derniers  tyrans  haïssaient  le  plus,  c'était 
1  existence  de  la  propriété.  S'ils  n*ont  pu  parvenir  à 
l'extirper,  c'est  que  la  nature  des  choses  s*est  con- 
stamment jouée  de  leurs  projets  extravagants.  Vain- 
cus par  une  résistance  secrète,  qui  leur  montrait 
toujours  la  propriété  déplacée  sans  jamais  la  leur 
montrer  éteinte,  ils  s'étaient  arrêtés  à  rendre  toutes 
les  grandes  propriétés  la  proie  des  brigands  qui  se 
dévouaient  à  eux.  Bientôt  leur  inquiétude  s'est  por- 
tée sur  des  propriétés  médiocres  :  chaque  proprié- 
taire leur  paraissait  un  ennemi,  s'il  n'était  de  leur 
création. 

Qu'il  en  coûte  peu  aux  tyrans  d'exécuter  tout  le 
mal  qui  est  arrêté  dans  leur  pensée  !  que  les  combi- 
naisons du  crime  sont  simples  et  puissantes  !  Ce  sys- 
tème d'attaque  contre  les  propriétaires  consista 
seulement  à  placer  leurs  personnes  et  leurs  proprié- 
tés sous  la  main  des  comités  révolutionnaires  :  tout 
fut  livré  à  l'arbitraire  le  plus  effrayant.  La  première 
liffue  qui  fut  écrite  dans  le  code  de  sang  qui  fut 
acfopté,  c'était  qu'être  riche  était  le  plus  grand  des 
crimes. 

Lejour  de  la  justice  est  venu,  les  prisons  ont  été 
visitées  :  vous  n'avez  point  proclamé,  mais  vous 
avez  prouvé  qu'à  vos  yeux  être  riche  n'était  point 
un  titre  de  proscription  ni  même  un  titre  de  sus- 
picion. Vous  avez  annoncé  votre  respect  pour  la 
propriété  :  j'en  atteste  tant  de  propriétaires  rendus 
par  vous  à  la  liberté  ;  j'en  atteste  tant  de  lois  sages 
rendues  par  vous  depuis  le  9  thermidor,  qui  ont 
soustrait  \es  propriétaires  aux  vexations  des  comités 


révolutionnaires  ;  onî,  loiile  votre  législation  depuis 
cette  époque  est  un  hommage  rendu  à  la  proprirlé; 
vous  vous  êtes  occupés  des  cré.mciers  des  émigrés, 
et  vous  leur  avez  tracé  une  marche  simple  et  cxpé- 
ditivc  ;  aujourd'hui  vous  allez  les  déclarer  créan- 
ciers de  TEtat,  et  ce  grand  acte  de  justice  est  eu 
même  temps  ce  que  la  prudence  vous  conseillerait 
de  plus  habile  pour  fonder  le  crédit  public  ;  vous 
avez  levé  plusieurs  des  entraves  qui  empêchaient  des 
citoyens  de  certifier  leur  résidence,  malgré  l'évi- 
dence de  tous  leurs  concitoyens  ;  vous  avez  sup- 
primé avec  indignation  les  taxes  révolutionnaires... 
Les  propriétés  industrielles  ont  aussi  été  l'objet  de 
vos  égards  :  ce  droit  de  réquisition,  prescrit  par 
l'implacable  nécessité,  chaque  jour  vous  l'avez  mo- 
déré et  adouci. 

Votre  dernière  loi  sur  le  maximum,  celle  dont 
vous  yous  occupez  aujourd'hui,  vont  substituer  à 
l'exercice  de  ce  aroît  oaieux  des  marchés  plus  utiles 
à  l'Etat  et  moins  désastreux  pour  les  parliculiers. 

Vos  sollicitudes  pour^  maintenir  la  propriété  et 
pour  lui  assurer  l'exercice  de  tous  ses  droits  ne  se 
borneront  pas  aux  opérations  qiit  je  viens  d'indi- 
quer. Ce  que  vous  avez  fait  n'est  qu'un  gage  de  ce 
que  vous  voulez  faire  ;  mais  telle  est  la  confiance 
qu'ont  inspirée  les  premières  opéra  lions  du  nouveau 
gouvernement,  que  déjà  le  propriétaire  se  croit  ga- 
ranti pour  l'avenir. 

C'est  mal  affermir  le  règne  de  la  propriété  que  de 
faire  une  recherche  indiscrète  et  turbulente  des  at- 
teintes qu'elle  a  pu  recevoir  ;  il  existe  une  fiction  po« 
litique  qui  environne  la  propriété  acquise  :  ceux-là 
donc  agiraient  en  sens  contraire  à  vos  intentions, 
qui  soumettraient  les  nouveaux  propriétaires  à  de^ 
alarmes  aussi  cruelles  que  celles  sous  lesquelles  les 
anciens  ont  gémi.  Vous  avez  des  fripons,  oes  dilapi- 
dateurs  à  punir  ;  mais  il  ne  faut  pas  que  cette  re- 
cherche enveloppe  aucune  classe  d'acquéreurs  )  dès 
que  vous  formez  une  classe  d'hommes  à  dépouiller, 
vous  formez  une  classe  d*liommes  à  proscrire. 

J'ai  exposé  les  principes  qui  vous  ont  dirigés  et 
qne  TOUS  voulez  suivre  à  l'égard  de  la  liberté  civile 
et  de  la  propriété  ;  j'ai  cru  ce  tableau  utile  pour 
consolider  la  confiance  nationale.  Je  passe  au  second 
objet  que  je  crois  devoir  remplir  le  même  but,  l'ex- 
position des  bases  du  crédit  national. 

L'objet  de  la  poursuite  de  tous  les  gouverneroentSi 
c'est  le  crédit;  il  est  pour  eux,  ainsi  que  pour  les 
4)articuliers,  le  gage  de  toutes  les  richesses;  la  ty- 
rannie veut  renchafner,  et  le  voit  toujours  fuir  de- 
vant elle,  le  charlatanisme  politique  le  séduit  un 
moment,  mais  en  est  bientôt  abandonné  avec  éclat  ; 
la  prodigalité  du  gouvernement  répouvante,  son 
impéritie  le  rebute,  mais  sa  sagesse ,  l'attire  et  sa 
loyauté  le  fixe. 

Le  crédit  ne  s'établit  point  sur  des  calculs  avides  : 
il  entre  plusieurs  idées  morales  dans  son  essence. 
Voyez  un  négociant  dont  les  ressources  sont  con- 
nues, mais  dont  le  caractère  inspire  quelque  dé- 
fiance, dont  les  spéculations  paraissent  vacillantes 
et  disproportionnées  à  ses  moyens  ;  il  perd  en  un 
jour  le  crédit  que  la  sagesse  de  ses  pères  lui  avait 
transmis.  Vovez  au  contraire  cet  autre  dont  les  res- 
sources sont  faibles  ou  presque  nulles,  mais  dont  les 
mœurs  sont  recommandables,  dont  les  entreprises 
sont  mesurées  et  bien  conduites  ;  le  crédit  vient  le 
chercher  et  accroître  chaque  jour  son  audace  et  ses 
moyens.  Il  en  est  ainsi  des  gouvernements  :  le  crédit 
veut  apprécier  leurs  ressources  ;  mais  ce  n'est  point 
leurs  trésors,  leurs  mines  qu'il  veut  connaître  ;  c'est 
leur  industrie  et  les  productions  qu'elle  fait  naître, 
qui  fondent  sa  confiance.  Le  crédit  ne  juge  pas  les 
gouvernements  sur  leur  magnificence,  mais  sur  leor 


269 


bonne  Toi-;  il  consulte  moins  retendue  de  ieurs  en-  ! 
treprises  que  la  sagesse  et  4'ordre  qui  les  dirigent 
{La  suite  demain.) 


iCITB  DE  LA  SÉANCe  DU    l^r  PLUVIOSE. 
Présidence  de  Letoumeur  [de  ia  Manche). 

Enlard  ,  au  nom  du  comité  des  secours  publics  : 
Citoyens,  la  loi  du  31  juillet  1791,  relative  aux  em- 
ployés des  ci-devant  fermiers  généraux  et  adminis- 
trations supprimées,  accorde  des  pensions  après  dix 
ans  de  service,  et  un  secours  une  fois  paye  à  ceux 
qui  ont  moins  de  dix  ans. 

Celle  du  24  juillet  1793,  relative  aux  préposés  de 
la  régie  des  douanes  qui  ont  été  ou  seront  suppri- 
més, leur  applique  les  dispositions  de  la  loi  du  SI 
juillet  1791 ,  mais  elle  exige  de  ces  employés,  pour 
obtenir  une  pension,  vingt  années  de  service  révo- 
liies. 

L'article  II  de  cette  même  loi  rend  commune  la  loi 
du  31  juillet  1791  aux  commis  supprimés  depuis  le 
l«r  janvier  1791 ,  dans  les  différents  départements  du 
ministère ,  à  la  charge  par  eux  de  justifier  qu'ils  ont 
au  moins  vingt  ans  de  service  dans  des  administra- 
tions civiles  ou  dans  les  armées. 

Enfin,  une  loi  du  16  nivôse  an  2 ,  concernant  b^ 
pensions  à  accorder  aux  oflLciers  militaires,  offkiers 
civils,  commis  ou  employés  supprimés  du  départe- 
ment de  la  marine,  rapporte  les  lois  précédentes  ren- 
dues à  letir  égard,  ¥t  ordonne  que  leurs  pensions  se- 
ront liquidées  d'après  les  bases  qui  sont  fixées  par 
les  lois  des  22  août  1790  et  31  juillet  1791 ,  qui,  est- 
il  dit,  leur  sont  respectivement  applicables.  L'art.  IV 
de  cette  même  loi  porte  que  ces  pensions  ne  corn» 
menceront à  courir  qu'à  dater  du  l^r  janvier  1703. 

Votre  comité  des  secours  publics,  actuellement 
chargé  de  vérifier  le  tableau  des  pensions  h  accorder 
aux  militaires  et  commis  supprimés  de  la  marine,  et 
d*on  présenter  le  résultat  à  vôtre  approbation,  ea 
examinant  les  différentes  lois  que  je  viens  de.  vous 
citer,  a  dû  naturellement  agiter  la  question  de  sa- 
voir si  les  employés  supprimés  delà  mariue,  t|ui  ont 
moins  de  vingt  ans  de  service  et  plus  de  dix,  ont 
droit  aune  pension,  comme  le  porte  la  loi  du  31  juil- 
let 1791,  qui ,  d'après  celle  du  16  nivôse  an  2 ,  leur 
est  applicable,  ou  bien  si,  en  exécution  de  l'article  M 
He  la  loi  du  24  juillet  1793,  qui  exige  vinfft  ans  de 
service  des  employés  supprimés  dans  les  oifférenls 
ministères  pour  obtenir  une  pension,  ils  doivent  en 
être  privés. 

A  cet  égard ,  votre  comité  n'a  pas  balancé  à  pen- 
ser que  la  loi  du  31  juillet  1791  avait  été  mo<liliée 
par  celle  du  24  juillet  1793 ,  qui  exige  impérieuse- 
ment vingt  ans  de  service  des  employés  supprimés 
dans  les  oifférents  ministères  pour  obtenir  une  pen- 
sion, et  que  les  commis  et  employés  supprimés  du 
département  de  la  marine,  qui  ont  moius  de  vingt 
ans  de  service,  n'avaient  pas  droit  à  des  pensions. 
Cependant,  comme  la  loi  du  16  nivôse  qu'ils  invo- 
quent, et  qui  doit  servir  de  base  à  la  liquidation  de 
leur  retraite ,  garde  le  silence  sur  celle  du  24  juil- 
let 1793, pour  ne  leur  appliquer  que  les  dispositions 
de  celle  du  31  juillet  1791,  qui  accorde  des  pensions 
après  dix  ans  de  service,  votre  comité  a  cru,  pour 
faire  cesser  tout  doute  à  cet  égard,  devoir  vous  pro- 
poser d'interpréter  la  loi  du  16  nivôse ,  en  décrétant 
que  les  dispositions  de  celle  du  24  juillet  1793,  qui 
exige  vingt  ans  de  service  pour  obtenir  une  pension, 
étaient  applicables  aux  employés  supprimés  du  mi- 


nistère de  la  marine;  mais  en  même  temps  il  a 
pensé  que  ceux  de  ces  employés  qui  étaient  exclus 
des  pensions,  parce  qu'ils  n'avaient  pas  vingt  ans  de 
service  lors  de  leur  suppression,  nedfevaient  pas  être 
privés  du  secours,  une  lois  payé,  qui  est  accordé  par 
la  loi  du  31  juillet  1791  à  ceux  qui  ont  moins  de  dix 
ans  de  service.;  et  comme  cette  dernière  loi,  pour  ce 
qui  est  relatif  aux  secours  une  fois  payés,  n  est  pas 
modifiée  par  celle  du  24  juillet  1793,  il  lui  a  paru 
juste  de  vous  proposer  d'accorder  aux  employés  sup- 
primés de  la  marine,  c|ui  ont  plus  de  dix  ans  et  moins 
jle  vingt  ans  de  service,  un  secours  une  fois  payé, 
dans  la  proportion  double  de  celle  qui  est  lixee  par 
l'art.  IX  de  la  loi  du  31  juillet  1791 ,  pour  tout  em- 
ployé supprimé  ayant  moins  de  dix  ans  de  service. 

Cette  disposition  vous  paraîtra  sans  doute  d'autant 
plus  nécessaire,  que  dans  l'état  des  choses  il  serait 
impossible  d*accorder  des  secours  à  ceux  qui  ont 
plus  de  dix  ans  et  moins  de  vingt  ans  de  service, 
parce  qu'il  n'existe  aucune  base  pour  la  fixation  de 
ce  secours,  tandis  que  les  employés  qui  ont  moins  de 
dix  ans  jouissent  au  bénéfice  de  la  loi  du  31  juil- 
let 1791 ,  qui  a  réglé  leur  indemnité.  . 

Enfin,  if  reste  a  votre  comité ,  avant  de  vous  pré- 
senter son  travail  sur  la  liquidation  des  pensions  et 
des  secours  à  accorder  aux  commis  et  emplovésde 
la  marine  supprimés,  à  vous  proposer  en  leur  laveur 
une  modification  à  la  loi  du  16  nivôse,  que  la  justice 
réclame  ;  c'est  de  rapporter  la  disposition  de  cette 
loi  qui  porte  que  leurs  pensions  ne  commencent  a 
courir  quedu  l«r  lanvier  1793;  la  plupart  de  ces  em- 
ployés ont  cessé,  dès  1792,  de  toucher  des  appointe- 
ments ou  un  traitement  de  retraite  ;  et' pendant  cet 
intervalle  leurs  besoins  ont  été  les  mêmes.  Aussi  a*t- 
il  paru  juste  de  faire  remonter  la  dette  de  leur  pen- 
sion à  répoqué  de  la  cessation  de  leurs  appointe- 
ments :  tous  les  autres  employés,  tous  les  militaires 
et  pensionnaires  de  la'  république  ont  obtenu  cette 
favMir;  et  sans  doute  vous  ne  la  refuserez  pas  à  de 
braves  marins  qni,  outre  les  dangers  ordinaires  de  la 
guerre,  ont  encore  bravé  les  éléments. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  son 
comiié  desseconn  publics,  interprétant  et  modifiant  la 
loi  du  46  nivoM?  concernant  lf*s  pensions  à  accorder  aux 
ofliciers  militaires,  officiera  d'administration,  commis  et 
employés  de  la  miirino,  supprimés,  décrite  : 

«  ArU  I*'.  Les  dispositions  de  l'article  II  de  la  loi  du  24 
juillet  i793  seront  spécialement  exécutées  en  ce  qui  con- 
cerne les  pensions  ii  accorder  aux  commis  supprimés  dans 
le  département  du  ministère  de  la  marine ,  depuis  le  i** 
janvier  1791  ;  néanmoins  ceux  des  commis  ei  employés 
supprimés  qui  auraient  plus  de  dix  ans  et  moins  de  vingt 
ans  de  senrice  recevront  un  secours  une  luis  payé  dans  li 
proportidn  double  de  celle  qui  est  fixée  par  Particle  IX  de 
la  loi  du  Si  juillet  1791  ,  pour  tout  employé  supprimé 
ayant  moins  de  dix  ans  de  service. 

•  II.  L'article  IV  de  la  loi  du  16  nivôse  est  rapporté. 
Les  pensions  déterminées  par  ladite  loi  seront  payées  à 
ceux  qui  les  auront  obtenues,  ft  compter  do  jour  où  ils 
auront  cessé  de  toucher  un  traitement  d^actlvité  ou  de  re- 
traite. » 

Ce  projet  de  déerel  est  adopté. 

—  Sur  la  proposition  d'un  membre,  au  nom  des 
cognités  de  sûreté  générale  et  militaire,  la  Conven- 
tion rend  le  décret  suivant  : 

$1". 

Nomination  de$  offidtru 

•  Art.  !•'.  Il  sera  procédé  à  la  réélection  des  oflBeiers  et 
sons-o0Îciers  de  la  garde  nationale  de  Paris,  et  ceux  ao» 
tuellemcnt  en  grade  pourrpot  être  1^1  otv  . 


370 


c  II.  En  eonséqaence,  les  gardet  nationaux  dednqne 
tedion  s^assembleront  lans  armes  décadi  prochain  »  10  de 
ce  mois ,  à  dix  lieares  du  matin,  au  lien  ordinaire  de  leur 
rtunion  ;  et  là,  tous  la  présidence  d*un  oQlciet  du  comité 
cif  il  da  la  section ,  ils  désigneront  entre  eux  un  des  plus 
jeunes  citoyens  sachant  écrire  »  pour  secrétaire  de  l'assem- 
blée générale. 

•  III,  Cliaque  compagnie  procédera  séparément  à  la  no- 
mination de  ses  officiers,  après  avoir  organisé  un  bureau 
qni  sera  composé  d*un  président,  trois  scrutateurs  et  d*on 
secrétaire.  Le  doyen  d*âge  présidera,  les  trois  plus  anciens 
après  lui  seront  scrutateurs,  et  le  plus  jeune  sachant 
écrire,  secrélaire.  « 

«  IV.  Le  bureau  ainsi  organisé,  le  président  fera  donner 
iecture  de  la  pré&ente  loi;  puis  11  annoncera  qoMI  va  être 
procédé  à  la  nomination  des  officiers  de  la  compagnie  par 
un  seul  sciutio,  et  à  la  pluralité  relative  des  snffrages ,  en 
désignant  par  une  même  liste  le  capiuine,  le  lieutenant 
el  les  deux  sous-lieutenants* 

•  V.  Nul  ne  pourra  être  élu  aux  grades  d'officier  et  de 
tergent  qu'il  ne  sache  lire  et  écrire. 

■  VI.  Chaque  citoyen  signera  son  scrutin  «  et  ceux  qui 
ne  sauront  pas  écrire  le  dicteront  à  Tun  des  scrutateurs 
qui,  mettant  en  tête  le  nom  du  votant,  inscrira  ensuite  le 
nom  de  ceux  à  qui  il  donne  son  suffrage,  le  grade  pour 
lequel  il  le  doone  ;  d  nette  liste  sera  dose  par  la  signature 
éa  scrutateur. 

<  VII.  Lorsque  tous  les  scrutins  seront  écrits,  le  prési- 
dent Fera  faire  l*appel  de  la  compagnie,  et  en  y  répondant 
chaque  citoyen  s*approcbera  du  bureau ,  et  déposera  os* 
tensiblement  son  scrutin  dans  une  urne  destinée  à  les  rc- 
cefoir. 

•  Vin.  L*appel  Uni,  le  scrutin  sera  clos,  et  personne  ne 
sera  plus  admb  à  eo  déposer  de  nouveaux,  sous  aucun 
prétexte. 

.  fl  IX.  Le  président  ouvrira  Tume  et  comptera  le  nombre 
des  scrutins,  pour  savoir  s*il  est  égal  ù  celui  des  votants. 
Dans  le  cas  contraire,  l'opération  sera  recommencée. 

fl  X.  Cette  vérification  faite,  les  scrutateurs  dépouilleront 
successivement  tous  les  scrutins,  et  ils  les  présenteront  au 
président,  qui  lira  distinctement  et  à  voix  haute  les  noms 
inscrits ,  avec  celui  du  grade  pour  lequel  chacun  sera  dé- 
signé. 

fl  XL  Le  secrétaire  recueillera  soigneusement  tous  les 
suffrages;  et  le  résultat  en  étant  connu,  le  président  pro- 
clamera chacun  descitoyens  pour  le  grade  auquel  la  plura* 
lité  relative  Taura  pori£ 

«  XII.  Le  même  mode  d'élection  sera  suivi  pour  les  cinq 
sergents,  qui  seront  nommés  par  un  seul  scrutin  de  liste 
simple ,  et  à  la  pluralité  relative  des  suffrages. 

■  XIII.  Il  sera  procédé  de  la  même  manière  à  la  nomi- 
nation de  huit  caporaux. 

•  XIV.  Le  résultat  de  ces  nominations  sera  signé  du  bn* 
reau ,  et  porté  par  quatre  commissaires  k  l'assemblée  gé- 
nérale, présidée  par  l*officier  civil ,  pour  être  réuni  aux 
nominations  des  autres  compagnies. 

«  XV.  II  sera  du  tout  rédigé  un  procès-verbal  général , 
qui  sera  déposé  au  comité  civil  de  la  section,  et  copies  eol- 
latioonées  remises  sans  délai  au  comité  militaire  a  à  l'état* 
major  provisoire.  » 

$". 

Nomination  de  Cétat-mafor. 

«  Art.  I*'.  Immédiatement  après  Torganisation  des  com- 
pagnies, tous  les  capitaines,  lieutenants,  sous-lieutenmits 
et  sergents  se  réuniront  sous  la  présidence  du  plus  Agé  des 
capitaines,  et  le  bureau  sera  organisé  ainsi  qu*il  est  pres- 
crit par  Tarlicle  III  de  la  première  section. 

•  II.  Le  président  annoncera  qu'il  Ya  être  procédé  par 
un  même  scrutin  à  la  nomination  des  deux  commandants 
et  du  portenirapeau  du  bataillon.  La  majorité  absolue  est 
prescrite  pour  les  deux  commandants,  et  il  suffit  de  la  plu- 
ralité idatif e  ponr  le  porte^lrapean* 


•  m*  Chacun  desnfieiers  etsoos-oficien  présenu  fem 
ion  scrutin ,  en  désignant  le  grade  ;  et  lorsquils  seront  fi- 
nis, les  citoyens  répondront  à  Tappel  nominal,  et  dépote- 
ront leur  scrutin  comme  hl'art.  VII  de  la  première  section. 

fl  IV.  Les  scrutins  déposés  seront  clos,  vériGés  et  dé- 
pouillés comme  à  rarticte  VIIL  Les  noms  et  la  désignation 
du  grade  seront  également  recueillis  par  le  secrétaire. 

•  V;  Le  recensement  fera  connaître  si  le  ycm  de  la  loi  est 
rempli  ;  et  si  les  candidats  ont  réuni  la  majorité  des  suf- 
flrages ,  le  président  les  proclamera  an  grnde  pour  lequel 
ils  auront  été  élus. 

.  ■  VI.  Dans  le  cas  où  ce  fosu  no  serait  pas  rainnlt ,  on 
procéderait  à  nnVcond  tour  de  scrutin  ;  et  s'il  ne  donnait 
pas  la  majorité  absolue,  on  passerait  à  un  troiaièroe,  mais 
alors  seulement  entre  les  deux  citoyens  qui,  pour  le  même 
grade,  auraient  réuni  le  plus  de  suffrages  i  et,  à  égalité 
de  voix,  le  plus  ancien  d*âge  sera  préféré. 

«  VII.  Le  président  proclamera  ceux  qui  auront  été 
élus;  le  procès-verbal  en  sera  rédigé,  dos  et  signé,  poor 
être  de  suite  déposé  comme  ci-dessus,  et  copies  ooUation- 
oées  remises  au  comité  miliuire  et  à  rétat*nia|or  général» 

fl  VIIL  Les  adjudants  généraux  et  eeux  deseellon  étant 
soldés  seront  à  la  nomination  de  la  Convention,  sur  la  pr^ 
lentution  du  comité  militaire. 

«  IX.  Les  nouvelles  compagnies  de  eanonniers,  qui  s*Ofw 
gauisent  en  vertu  du  décret  du  S5  brumaire,  ne  sont  point 
comprises  dans  la  présente  loi,  qui  sera  imprimée  et  dis« 
tribuée  à-toutes  les  compagnies  des  aecthmsi  pour  leur 
servir  de  règle  et  d'instruction.  • 

GiEOT  (  du  PuY-de-Dôme  )  :  Je  viens,  nu  nom  de 
votre  comité  de  législation,  vous  demander  le  titra 
de  citoyen  français  en  faveur  d*an  Grée  qni  a  renda 
des  services  signalés  à  la  patrie. 

Bazili  Guini,  capitaine  d'un  naVire  grée,  a  donné 
une  preuve  éclatante  de  son  attachement  à  la  nattoii 
française  et  de  son  de'vouement  à  la  cause  de  la  li- 
bert(<.  Chargé  de  dépêches  importantes  de  l'envové 
de  la  république  près  la  Porte-Oltomane,  il  a  été 
poursuivi  vivement  par  un  vaisseau  anglais,  pendant 
robscurité  d'une  nuit  d*hiver.  Un  combat  très-vif 
s'est  engngé;  la  supériorité  du  vaisseau  ennemi  ne 
laissant  au  capitaine  Bazili  aucun  espoir  de  résis- 
tance, il  s'est  précipité  dans  les  flots  après  avoir  mis 
le  feu  à  son  navire.  Les  flots  l'ont  jeté  sur  le  rivage, 
et  il  a  porté  lui-même  en  France  ses  dépêches ,  que 
les  Anglais  ont  tenté  de  lui  enlever. 

L'action  courageuse  du  capitaine  grec  a  été  pu- 
bliée, célébrée  dans  toute  la  France,  et  la  Conven- 
tion a  rendu  en  sa  faveur,  le  19  nivôse  dernier,  Tho* 
norable  décret  qui  déclare  que  Bazili  Guini  el  son 
équipage  ont  bien  mérité  de  la  république  française. 

La  Convention  a  décrété  en  même  temps  qu'il  se- 
rait remis  à  Bazili,  aui frais  delà  république,  unna- 
vire  de  la  même  valeur  que  celui  qu'il  a  perdu. 

Monté  sur  ce  vaisseau,  le  capitaine  Bazili  a  tonld 
une  nouvelle  expédition  :  il  s'est  rendu  à  Constaiiti- 
nopte  ;  il  a  fait  un  traité  avec  l'envoyé  de  la  répu- 
blique; il  s'est  obligé  de  conduire  en  France  deux 
cents  Français;  il  a  rempli  fidèlement  toutes  les  con* 
ditions  du  traité.  Les  malheureux  Français  que  le  des- 
potisme a  repoussés  ont  été  conduits  par  ses  soins 
sur  la  terre  de  la  liberté. 

A  peine  cette  expédition  a  été  terminée,  que  le  ca- 
pitaine Bazili  a  fait  une  nouvelle  entreprise;  il  a 
cherché  d'autres  Français  dans  les  contrées  avilies 
par  le  despotisme,  ponr  les  rendre  à  leurs  familles 
et  à  la  patrie  qui  leur  tend  les  bras. 

Avant  de  partir,  il  s'adresse  à  la  Convention  ;  il 
ne  lui  demande  point,  pour  prix  de  ses  services,  de 
l'or,  des  richesses;  son  âme  élevée,  son  cœur  ma- 

fnanime  aspirent  à  de  plus  belles  Jouissances  :  il  vous 
emande  le  titre  précieux  de  citoyen  français.  Celui 
qui  a  exposé  sa  vie  pour  le  service  de  la  république , 


Î7f 


Mhii  qui  a  rentfa  tant  de  Français  k  leur  patrie, 
brûle  on  désir  de  vivre  libre  et  d*avoir  lui-même 
nne  patrie. 

Je  l*ai  vn  on  instant,  ce  brave  défenseur  de  la  ré- 
publique ;  son  interprète  m'a  fait  connaître  ses  vœux 
ardents  |>our  le  titre  de  citoyen  français;  il  m*a  en- 
Mgéà  feire  on  prompt  rapport  sur  la  pétition  :  je 
lui  en  ai  fait  la  promesse.  Son  interprète  lui  a  fait 
part  de  ma  réponse  :  il  ne  put  me  parler  ;  mais  son 
ame  tout  entière  a  exprimé  ses  sentiments;  dans  les 
transports  de  sa  joie,  il  m*a  serré  les  mains;  il  m*a 
dit  loutce  que  peut  dire  le  coeur  le  plus  ardent  pour 
la  liberté. 

Bazili  est  né  dans  un  pays  qui  fut  libre.  Nous  nous 
rappelons  avec  délices  les  mémorables  actions  des 
peuples  de  la  Grèce.  Ils  se  tirent  admirer  par  leur 
amour  pour  les  arts,  pour  la  gloire  et  pour  la  liberté. 

Dans  leurs  beaux  jours  ils  détendirent  leurs  droits, 
ils  triomphèrent  de  toutes  les  forces  de  TAsie  con- 
jurée contre  eux.  Ces  peuples,  braves  et  généreux, 
furent  souvent  emportés  loin  de  la  liberté,  qui  était 
Tobjet  de  leurs  plus  chères  attections.  Ils  furent  sou- 
vent agités  par  des  hommes  perfides  et  ambitieux 
qui  devinrent  les  tvrans  de  leur  pays ,  en  se  décla- 
rant les  plus  zélés  détenseurs  de  la  république. 

Les  Français  se  sont  rendus  célèbres  par  leur 
amour  pour  la  liberté;  il  n'y  a  point  de  sacrifices 
qu'ils  ne  soient  prêts  à  faire  pour  la  conserver  ;  il  n'y 
a  point  d'obstacle  que  leur  valeur  ne  surmonte,  point 
de  danger  qui  les  arrête.  S'ils  ont  oerdu,  pendant 
une  année,  la  précieuse  conquête  de  leurs  droits, 
c'est  leur  amour  trop  ardent  pour  la  liberté  qui  en  a 
etusé  la  perte.  Dans  leur  enthousiasme,  ils  ont  élevé 
quelques  hommes  au-dessus  de  tous  les  autres  ci- 
toyens; ils  les  ont  proclamés  les  seuls  défenseurs  de 
teors  droits,  ils  les  ont  investis  d'une  immense  popu* 
larité,  et  ils  se  sont  trouvés  sous  le  joug  sans  s^en 
spefcevoir. 

Les  derniers  tyrans  ont  été  renversés  par  Fénergie 
du  peunle  et  de  ses  représentants.  Depuis  la  mémo- 
rable révolution  du  9  thermidor,  le  peuple  français, 
constamment  attaché  aux  principes  conservateurs 
de  ses  droits,  a  vu  s'affermir  la  liberté  publique.  La 
Convention,  triomphante  de  toutes  les  iactions,  a 
protégé,  conservé  les  droits  de  tous  les  citoyens:  les 
principes  de  justice,  de  liberté  et  d'humanité  qui  la 
dirigent  dnns  tous  ses  travaux  ont  donné  de  nou- 
veaux amisâ  la  république,  et  les  braves  défenseurs 
de  la  patrie  ont  aujourd'hui  la  douce  satisfaction  de 
,voir  que  la  liberté,  qu'ils  détendent  avec  tantde  cou- 
rage contre  nos  ennemis  extérieurs ,  s'est  établie 
dans  l'intérieur  par  la  sagesse  et  la  fermeté  des  re- 
présentants du  peuple. 

Tant  que  le  règne  affreux  des  triumvirs  a  duré, 
aucun  étranger  ne  vous  a  demandé  de  lui  accorder  le 
titre  de  citoven  français.  Eh  !  pourquoi  vous  l'aurait- 
on  demande  alors?  tous  les  droits  imprescriptibles 
des  hommes  semblaient  effacés,  tous  les  principes  de 
lusticc  et  d*humaoltë  étaient  méconnus  ou  violés  ; 
les  plus  douces  affections  de  la  vie  étaient  rompues, 
les  vrais  anus  de  la  liberté  vivaient  isolés  ;  les  mé- 
chants seuid  s*unissaient  et  se  concertaient  pour  le 
crime  ;  on  ne  voyait  autour  de  soi  que  des  ruines  en- 
sanglantées,etr«i  avait  en  perspective  la  plus  atroce 
des  tyrannies. 

Aujourd'hui  les  tyrans  n'existent  plus,  et  la  ty- 
rannie eti  détruite.  Le  peuple,  instmit  par  ses  mal- 
heurs, ne  se  laisse  plus  conduire  par  les  lioninies 
perfides  et  féroces  qui  veulent  l'égarer  pour  l'asser- 
vir. Le  temps  des  excès,  des  fureurs,  des  dévasta- 
tions et  du  carnage  est  passé.  Délivrés  de  la  longue 
oppression  qui  a  pesé  sur  eux,  les  citoyens  ont  ap- 


pris à  sentir  le  prix  de  leurs  droits,  ils  sauront  les  dé* 
rendre  avec  courage. 

Vainement  les  agents  de  la  tyrannie  des  triumvirs 
se  flattent  de  la  faire  revivre  ;  leur  règne  est  fini  ;  les 
âmes  ont  repris  leur  énergie  ;  il  n'est  pas  un  Fran- 
çais qui  ne  préfère  la  mort  à  la  situation  cruelle  et^ 
déchirante  dans  laquelle  il  s'est  trouvé. 

Le  capitaine  ffrec  Bazili  a  vu  renaître  avec  joie  les 
beaux  jours  de  la  liberté  française.  11  vous  demande 
le  titre  glorieux  de  citoyen  a'un  peuple  libre.  Il  a 
fait  pour  la  république  tout  ce  que  le  Français  le  plus 
ardent  pour  la  gloire  de  son  pays  aurait  pu  faire;  il 
doit  donc  s'attendre  à  recevoir  de  vous  le  titre  qu'il 
a  mérité  par  ses  services. 

Ses  fréquentes  expéditions  maritimes  ne  lui  laissent 
pas  le  tenaps  d'acquérir,  par  sa  résidence  sur  le  ter- 
ritoire de  la  republique,  le  titre  et  les  droits  de  ci- 
toyen français.  J'invoque  en  sa  faveur  les  principes 
consacrés  par  l'Asseiiiblée  législative.  Suivant  ces 

f principes,  les  hommes  qui  ont  défendu  la  liberté  par 
eurs  écrits,  et  ceux  qui  ont  défendu  la  patrie  par  des 
actions  courageuses,  sont  appelés  à  jouir  de  ce  titre 
glorieux. 

On  enviait  autrefois ,  dans  toutes  les  contrées  de 
la  terre ,  le  titre  de  citoyen  romain  ;  on  le  regardait 
comme  le  plus  précieux  de  tous;  les  rois  eux-mêmes 
inclinaient  l'orgueil  du  diadème  devant  ce  beau  ti- 
tre. Cependant,  quelle  différence  entre  les  droits 
d'un  citoyen  romain  et  ceux  d'un  citoyen  français!' 

Le  premier  ne  pouvait  point  prétendre  à  la  pléni- 
tude de  la  souv/raineté  ;  admis  au  rang  des  citoyens, 
il  n'avait  pas  la  jouissance  des  droits  qui  y  sont  at- 
tachés; il  se  trouvait  placé  entre  des  patriciens  su- 
perbes et  impérieux  ,  qui  étaient  dans  la  possession 
constante  et  exclusive  de  l'autorité  suprême,  et  de^ 
esclaves  accoutumés  à  ramper  sous  les  maîtres  les 
plus  durs. 

Parmi  nous  tous  les  droits  politiques  sont  attaché! 
au  titre  de  citoyen.  On  ne  voit  aucune Imrrière  entre 
les  différents  membres  du  corps  social.  Les  talents 
et  les  vertus  les  rendent  admissibles  à  tontes  les 
fonctions.  Il  n*en  est  aucun  qui  ne  puisse  être  élevé 
à  la  place  éminente  de  représentant  du  peuple. 

Il  existe  encore  dans  la  république  queloues  hom- 
mes qui  ne  sentent  pas  le  prix  de  leurs  (Iroits,  qui 
tiennent  à  leurs  anciennes  habitudes ,  qui  recoiveuC 
et  donnent  les  dénominations  de  l'ancien  régime  : 

f»laienons-les  de  n*étre  pas  pénétrés  de  l'amour  de 
a  liberté.  Portons  des  regards  consolants  sur  cette 
jeunesse  ardente,  impétueuse,  qui  s'est  dégagée  de 
tous  les  préjugés,  qui  s'est  formée  aux  mœurs  de  l'é- 
galité, et  qui  chérit  le  titre  et  les  droits  de  citoyens. 

Votre  comité  de  législation,  pénétré  des  principes 
qui  vous  dirigent,  m'a  chargé  de  vous  présenter  le 
projet  de  décret  suivant: 

t  La  Convention  oatiooalt •  après  avoir  entenda  le  rap- 
port de  son  coniilé  de  légldalion ,  considérant  que  les  ser* 
vices  signalés  que  le  capitaine  grec  Baxili  Guini  a  rendus 
à  la  république,  les  dangers  auxquels  n  s'est  exposé  pour 
soustraire  aux  ennemis  de  la  république  les  dépêches  im- 
portantes qui  lui  ont  été  confiées  ;  le  décret  du  17  nivosc 
dernier,  qui  a  déclaré  que  ce  capitaine  a  bien  mérité  de 
la  république  française,  ei  Texpéditlon  heureuse  qui  a  ra* 
mené  deux  eeou  Français  dans  lenr  patrie ,  décrite  que 
Baxillf  Gahii  est  citoyen  français.  • 

La  ConventioD  nationale  décrète  nopression  et  Hnser^ 
tion  au  Ballelin  du  rapport  et  du  décret. 

Ce  décret  est  adopté. 

—  Un  secrétaire  lit  l'Adresse  suivante  : 

Le$  BreêtoU  à  la  Convention  natimaU. 
•  Convention  nationatCt  les  Brestois  te  félicitent  ;  ta  as 


272 


rappelé  dans  loii  sein  de;  colKgues  qui  ireii  auraient  ja- 
mais dft  sortir  ;  tu  as  rapporté  la  loi  du  37  germinal  ;  tu  as 
décrété  une  amnistie  pour  les  rebelles  de  la  Vendée  ;  les 
Brestoiste  félicitent  1  Vive  la  république!  ralliement  à  la 
G>nrention  I  •  {Suivent  septpaget  de  signatures,) 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures. 

SÉANCE  DU  SOIR  DU  !«'  PLIIVIOSB. 

Cette  séance  était  consacrée  au  renouvellement 
du  bureau. 

Rovère  a  été  nommé  président;  les  nouveatix  se- 
crétaires sont  Mercier,  Talot  et  Bourette. 

SÉANCB  DU  2  PLUVIOSE. 
Présidence  de  Bovére, 

On  admet  à  la  barre  une  dépiitatiou  de  la  section 
de  robservaloire. 

Loraleur  :  La  section  de  TObservatoire,  fidèle 
aux  principes,  fidèle  surtout  au  serment  qu'elle  a 
renouvelé  le  9  thermidor  de  se  rallier'toujours  à  la 
représentation  nationale,  vient  aujourd'hui,  dans  ce 
moment  de  crise,  préparé  depuis  longtemps  par  la 
malveillance  et  Fimpéritie,  vous  jurer  de  ne  jamais 
souffrir  qu'on  égare  le  peuple  sur  votre  compte. 

Le  peuple  souffrr ,  citoyens;  il  souffre  cruellement, 
et  vous  ne  devez  pas  ignorer  (]ue  la  faction  crimi- 
nelle que  vous  poursuivez  si  justement  cherche  à 
profiter  de  ces  moments  fâcheux  pour  calomnier  le 
règne  de  la  justice  et  de  Tordre,  pouf  se  soustraire» 
au  moyen  d  un  mouvement  qu'elle  dirigerait  conlfe 
vous,  au  glaive  de  la  loi  qui  doit  bientôt  trancher 
leurs  têtes  criminelles  ;  pour  ramener  la  terreur,  l'a- 
narchie et  le  royalisme,  qui  eu  seraient  la  suite  in- 
faillible; pour  couvrir  encore  la  surface  delà  répu- 
blique de  bastilles  et  d'échafauds;  pour  ramener  ces 
temps  qu'ils  regrettent  si  fort,  ces  temps  de  dilapi- 
dations, de  vols  et  de  brigandages  de  toutes  espèces. 
Citoyens  représentants,  poursuivez  sans  relâche 
l'ouvrage  que  vous  avez  si  heureusement  commencé. 
Soyez^pour  foire  le  bien,  aussi  ardents,  aussi  em- 
pressés ,  aussi  actifs  que  les  fripons  et  les  coquins  le 
sont  pour  faire  le  mal  ;  faites  punir,  avec  une  sévérité 
digne  de  vous,  digne  de  la  nation  française,  ces  fu- 
ries salariées  et  mercenaires  qui  osent  chaque  jour 
venir  insultera  la  Convention  jusque  dans  son  sein, 
applaudir  aux  motions  des  continuateurs  deBobes- 
pierre,  de  ces  royalistes  déguisés  en  Jacobins,  que 
nous  promettons  de  démasquer,  de  poursuivre  et 
d'exterminer ,  ces  mégères  qui  battent  des  mainsavec 
indécence  à  toutes  les  propositions  capables  de  ra- 
mener le  trouble  et  le  désordre,  mais  que  nos  suc- 
cès Font  pâlir,  et  que  nous  avons  vues  rester  mornes 
et  silencieuses  lorsque  nos  défenseurs  viennent  à 
cette  barre  annoncer  le  désespoir  de  nos  ennemis 
abattus  et  la  marche  triomphante  de  nos  armées 
victorieuses. 

Lé^slateurs ,  il  faut  vous  répéter  hautement  une 
vérité  que  vous  n'ignorez  pas;  ce  sont  les  adminis- 
trations composées  d'ignorants ,  d*intriganls  ,  de  fri- 
pons, de  Robespierristes,  en  un  mot,  qui  ont  amené 
et  combiné  la  détresse  affreuse  où  se  trouve  aujour- 
d'hui la  ville  de  Paris.  Hâtez- vous  de  réparer,  par 
votre  sollicitude  paternelle,  1rs  effets  fâcheux  de  la 
malveillance  et  de  leur  pcrlidio.  Prenez  les  mesures 
les  plus  promptes  pour  qiio  la  pnrtic  lu  plus  inté- 
ressante ne  souffre  plus,  ou  sciiffrc  moins.  Voyez  sMI 
ne  serait  pas  possible  d'ouvrir  dans  toutes  les  sec- 
tions des  salles  publiquosoii  les  indignils  pourraient 
aller  se  chauffer  en  travaillant.  En  un  mot,  invitez 
vos  coutitos  du  gouvernement  à  prendre  tous  les 


moyens  que  leur  sagesse  leur  dictera  pour  empêcher 
le  mal,  cléjouer  les  coquins  et  soulager  les  râuvres 
qui  souffrent  continuellement,  nous  vous  le  répé- 
tons encore,  mais  qu'on  chercherait  en  vain  à  indis- 
poser contre  vous,  et  qui,  toujours  réunisavec  vous, 
sauront,  au  grand  regret  des  terï'oristes  et  des  agita- 
teurs, combattre  et  périr  s'il  le  faut  pour  la  liberté 
qu'ils  ont  conquise. 

Le  Président,  à  la  députation  :  La  1it)erté,  amante 
chérie  du  peuple  français,  a  servi  de  manteau  à  des 
scélérats  qui,  en  criant  contre  les  abus  d'autorité, 
n'ont  cessé  d'en  commettre;  qui,  en  criant  contre 
l'ancienne  aristocratie,  ont  usurpé  ses  crimes  et  cou- 
vert le  sol  de  la  liberté  d'un  crêpe  funèbre  qui  n'é- 
tait invisible  qu'à  leurs  yeux  de  sang  et  a  leurs 
cœurs  de  tigres.  Rassurez- vous,  intrépides  amis  de 
l'ordre  et  de  l'humanité,  le  règne  de  Robespierre  est 
passé,  et  bientôt  ses  complices  et  ses  continuateurs 
ne  pourront  plus  conjurer  contre  le  peuple. 

La  Convention  nationale  éprouve  toujours  un  sen- 
timent pénible  en  apprenant  qu'il  peut  exister  des 
citoyens  français  luttant  contre  le  malheur.  Elle  ap- 
portera tous  ses  soins  et  toute  sa  sollicitude  pour 
amener  le  bonheur  général  eo  venant  au  secours  des 
indigents. 

(La  $uUe  à  devuiin.) 


De  Paris,  —  Extrait  tPune  lettre  du  eHoven  EùH" 
ne  font,  volontaire  de  la  ir«  eomptigniedu  l*r  te* 
taiUon  de  laùï^  demi-brigade. 

A  Laviil,  du  95  oivose,  l*ao  S*  d«  la  r^obliqM 
française,  une  et  iodi? iiible. 

Yoiei  nn  Irait  de  bravoure  et  de  oonfiince  que  le  général 
Hnmbert  fient  de  montrer,  il  y  a  peu  de  leiiips«  do  eôté 
du  Port-Brieuc ,  où  il  comœanile. 
I       Le  chef  des  insurgés  dans  le  département  do  l|prbiliao« 
ayant  eu  connaissance  du  décret  bienfaisant  dé  la  Cooven* 
I  tion  qni  rappelle  dans  le  sein  de  la  pairie  dea  hommes  qui 
i  n*onl  élé  qu*égarés,  Gt  demander  à  ce  général  une  entre* 
I  vue,  et  lui  daigna  un  bois  pour  lieu  de  laor  coofércDoe» 
Ce  dernier  s*y  rendit  sans  aucune  escorte^  et  rencontra 
I  une  troupe  de  cinquante  bommes  ayant  à  sa  tète  le  chef 
qui  lui  avait  écrit;  cet  homme,  le  voyant  seul,  fUtétooné 
de  sa  sécurité  eè  lui  adressa  ces  paroles  :  c  Général  répu- 
blicain, la  marque  de  cooGance  que  tu  me  donnci  ai>n- 
gage  à  la  réciprocité;  dvs  ce  moment  je  renvoie  ma  iroupe 
et  te  suis  pour  conrérci  cnscrobU*  sur  les  moyens  à  prendre 
pour  ramener  la  paix  dans  ce  pays.  »  Ils  sont  tous  les  deux 
ici  et  travaillent  ensemble  depuis  deux  jours.  Ils  dolfent 
en  partir  demain  pour  se  rendre  à  Nantes. 


LIVRES   DIVERS. 

Triomphe  de  la  saine  philosophie ,  ou  la  Vraie  politàque 
,   desJemmeSt  par  la  citoyenne  Booicre. 

A  Paris,  chei  Dcbray,  libraire,  maison  de  PEgalité  ;  et  à 
rimprimcric  des  (enimes,  rue  des  Deui-Porte»-ooa-Coo«eil, 

;    n«  8. 

Ka  commission  d'instruction  publique  a  arrêté  Tenvoi  dans 
I  les  départements  de  irois  cents  exemplaires  de  cet  ouvrage, 
•  présenté  à  l.i  Con  vont  ion  nationale ,  qui  Ka  accueilli  favora- 
,   blcment  et  en  a  ordonne  la  mention  honorable. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

I  Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 

.  roier»  mois:  il  .sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  poiteurs 

I  d'inscriptions  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viai;ères 

I  est  de  huit  mois  vinj;!  ci  un  jours  de  l'année  1703  (vieux 

I  style). 


<0 

Q. 

-S 


3 
<0 


■3 


GAZETTE  NATIONALE  «»  tE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  125.        Quinddi  5  Pluviôse^  l'an  3e.  {Samedi  24  Janvier  1795,  vieux  ttyle.) 


POLITIQUE. 

ANGLETERUE. 

DEBATS  DU  PARLEMENT. 

Nous  donnons  en  entier  les  discoui-s  de  Pilt  et  de  Fox  y 
velalivemenl  à  TAdresse  au  roi  sur  la  guerre. 

Pill  ;  Ce  n'est  pas  à  ceux  qui  ont  de  tout  temps 
improuvé  la  guerre  actuelle  que  je  m'adresse  ;  c'est 
à  ceux  (jui,  après  l'avoir  conseillée,  veulent  y  re- 
noncer à  cause  des  revers  de  la  dernière  campagne. 
Ils  refusent  leur  adhésion  à  l'Adresse  au  roi ,  parce 
C|u'ils  craignent  qu'en  l'adoptant,  on  ne  s'interdise 
à  jamais  la  paix  avec  la  république  française,  lisse 
trompent;  l'Adresse  porte  seulement  que  nous  ne 
pouvons  traiter  avec  le  gouvernement  de  France, 
tel  qu'il  est,  parce  qu'il  n'a  aucune  stabilité.  Mais 
où  est  le  besoin  de  demander  la  paix?  Sommes-nous 
sans  ressources,  sans  espérances?  Sans  doute,  dans 
le  cas  d'un  épuisement,  nous  pourrions  rechercher 
la  paix  ;  mais  elle  ne  me  paraîtra  jamais  solide ,  si  la 
France  ne  redevient  monarchie,  ou  si  du  moins  son 
gouvernement  n'éprouve  quelques  changements  in- 
termédiaires. D'abord  les  membres  que  je  combats 
trouvaient  la  guerre  juste  et  nécessaire.  Leurs  dis- 
cours m'étonnent  aujourd'hui.  N'ont-ils  plus  à  re- 
douter ce  système  qui  les  épouvantait  tant  autre- 
fois, cette  cruauté,  cette  anarchie,  cette  impiété  avec 
lesquelles  est  incompatible  le  maintien  d'une  so- 
ciété policée? 

Il  a  plu  à  l'impénétrable  Providence  de  faire 
triompher  la  France  partout  où  elle  s'est  montrée. 
Ne  succombons  pas  du  moins  sans  avoir  déployé 
tous  nos  efforts.  Pour  moi ,  je  ne  veux  abandonner 
le  combat  que  quand  mon  excuse  sera  dans  l'entière 
impuissance  de  le  soutenir. 

Mon  ami,  M.  Caunin^,  a  proposé,  en  poursui- 
vant la  guerre  avec  vigueur,  de  rechercher  les 
moyens  de  faire  la  paix.  Il  croit  que  la  dernière  ré- 
volution de  France  nous  en  facilitera  les  moyens^ 
On  lui  a  déjà  répondu  que  ce  changement  n'était 
guère  que  celui  des  noms.  Ceux  (}ui  ont  renversé 
Robespierre  ont  maintenu  le  système  révolution- 
naire; il  est  vrai  qu'ils  ont  substitué  la  douceur  à  la 
cruauté  ;  cependant  leur  haine  pour  l'Angleterre  est 
toujours  la  même  ;  leurs  principes  sont  ceux  qui 
triomphaient  avant  Robespierre,  dans  le  temps  où 
on  nous  déclara  la  guerre.  C'est  toujours  la  môme 
théorie  de  liberté  et  d'égalité  mal  entendue  et  des- 
tructive de  toutordresocial.  Notre  système  politique 
est  une  éternelle  satire  contre  le  leur  ;  ils  cherchent 
moins  des  conquêtes  que  la  destruction  de  tous  les 
gouvernements;  pensez- vous  que  leurs  étonnants 
succès  aient  en  cela  réformé  les  idées? 

Croit- on  possible  de  bâtir  la  paix  sur  les  bases 
posées  ici  par  M.  Caiinin^?  Croit-on  que  le  com- 
merce reprendra  sa  liberté?  que  les  flottes,  les  ar- 
mées seront  licenciées  de  part  et  d'autre?  Croit-on 
qu'il  soit  possible  d'empêcher  une  correspondance 
coupable  entre  les  deux  pays?  Non,  la  contagion 
des  principes  français  sera  toujours  également  re- 
doutable. La  lin  des  hostilités  ne  serait  point  celle 
des  dangers  :  ils  menaceraient  et  nous  et  ceux  que 
nous  avons  le  plus  intérêt  de  défendre.  Quel  serait 
le  terme  de  ce  repos  tumultueux?  Licenciez  vos  ar- 
mées ;  comment  les  rassemblerez-vous,  si  vous  êtes 
attaqués?  Licenciez  vos  forces,  et,  affaiblis  sous  tous 
les  rapports,  vous  avez  à  combattre  un  ennemi  pour 
qui  la  paix  est  aussi  impossible  que  la  guerre  serait 

Z*  Série.  ^Tomt  X. 


difficile  pour  vous.  Et  comment  recréerez- vous  la 
coalition? 

Si  les  Français  attaquent  dans  la  suite  la  Hollande/ 
la  Prusse,  l'Autriche,  comment  déterminerez-vous 
l'Angleterre  à  rentrer  en  lice,  après  avoir  fait. le 
honteux  aveu  de  votre  infériorité  au  même  moment 
où  tant  d'alliés  vous  sixondent?  Que  sera-ce  si  je 
vous  prouve  qu'on  vous  conseille  la  lâcheté  à  une 
époque  où  vos  ennemis  touchent  à  l'épuisement? 

On  nous  a  dit  que,  si  la  guerre  cesse,  la  France 
se  donnera  un  gouvernement  plus  sage.  Est-ce  à 
nous,  sur  des  chances  aussi  incertaines,  à  nous  ex- 
poser aux  plus  grands  malheurs?  Je  ne  veux  donc 
point  de  paix  en  ce  moment ,  à  moins  que  vous  ne 
me  démontriez  que  la  France  a  plus  de  moyens  que* 
nous  de  poursuivre  longtemps  la  guerre.  Eh  !  quelle 
paix  pourrions-nous  obtenir?  Nous  sacrifierions 
notre  honneur  en  pure  perte  et  par  un  désespoir  très- 
mal  fondé.  Nous  conseillera-t-on  d'abandonner  aux 
Français  les  Pays-Bas  autrichiens  ?  non,  sans  doute. 

On  dit  que  le  vrai  motif  de  la  guerre  n'existe  plus, 
puisque  la  Hollande  négocie  avec  la  France.  Eh  bien, 
je  soutiens  que  la  Hollande  ne  peut  jouir  de  quelque 
sûreté  qu'autant  que  nous  continuerons  la  guerre. 
Que  la  paix  règne  entre  les  deux  pays  :  et  la  France 
est  sans  frein  et  sans  contre-poids.  Qui  peut  répondre 
qu'elle  consentira  à  la  paix  à  des  conditions  honora- 
bles ,  et  sans  se  prévaloir  d'une  prétendue  supério- 
rité? A-t-elle  modifié  le  décret  du  13  avril,  qui 
porte  que  les  préliminaires  de  paix  seront  l'unité  et 
l'indivisibilité  de  la  république? 

Quoi  !  après  deux  ans  de  guerre,  vous  avez  ob- 
tenu comme  indemnité  la  possession  des  colonies 
françaises;  et  vous  y  renonceriez  pour  acheter  la 
paix  !  De  telles  idées  ne  peuvent  être  adoptées  qu'au- 
tant que  l'impossibilité  de  continuer  la  guerre  aura 
été  prouvée.  Soyez  sûrs  une  le  statu  ne  serait  point 
accepté.  Est-ce  a  nous  à  aescendre  au  langage  de  la 
faiblesse  et  à  l'attitude  de  la  prière? 

Je  ne  veux  point  dissimuler  des  désastres  de  la 
dernière  campagne.  Je  ne  cacherai  pojnt  les  blessu- 
res profondes  reçues  par  les  deux  grandes  puissan- 
ces militaires  de'  l'Europe.  Mais  les  guerres  précé- 
dentes me  présentent  les  prodiges  dus  a  l'énergie  et  à 
la  pcrsévérancedu  peuple  anglais.  Ne  fant-iljuger  des 
ressources  des  puissances  belligérantes  que  par  des 
batailles  perdues  et  des  pays  envahis?  Ce  calcul  serait 
faux,  dans  cette  guerre  surtout,  et  vis  à-vis  de  nous. 

La  guerre  d'aujourd'hui  ne  dépend  que  des  finan- 
ces. Nous  avons  1  avantage  des  ressources  pécuniai- 
res et  des  acquisitions  territoriales.  La  France  a  plus 
perdu  en  territoire  et  en  numéraire  que  toutes  les 
puissances  réunies. 

J'entends  dire  que  les  ressources  de  nos  ennemis 
sont  inépuisables.  Quels  étaient  leurs  moyens  ?  les 
réquisitions,  et  la  saisie  des  propriétés.  Mais  ces 
moyens  étaient  l'ouvrage  du  despotisme  et  de  la  ter- 
reur. Ils  diminuent  donc  avec  la  terreur.  Les  dé- 
penses de  la  France,  depuis  la  révolution,  sont  de 
480  millions  sterling,  dont  320  ont  été  dévorés  par 
la  guerre.  Je  n'ai  pas  besoin  de  comparer  vos  dé- 
penses avec  ces  sommes  énormes.  Est-ce  donc  vous 
qui  serez  épuisés  les  premiers?  On  prétend  que  ce 
que  la  France  a  dépensé  ,  elle  peut  le  dépenser  en- 
core. Non,  ce  n'est  pas  dans  leurs  revenus  croissants 
!  qu'ils  ont  trouvé  ces  ressources.  C'est  dans  un  pa- 
I  picr-mounaie  multiplié  sans  mesure. 
I       La  Convention  nationale  convient  qu'elle  ne  peut 
:  en  émettre  davantage  sans  se  ruiner  entièrement , 
sans  accroître  continuellement  la  cherté  des  denrées. 

81 


JT4 


[  Depuis  1793  on  s*aperçoit  qu*!!  y  a  trop  de  pa- 
pier, qu'il  tombe  dans  un  discrédit  progressif,  que 
>  la  terreur  seule  avait  pu  lui  conserver  une  apparente 
valeur.  De  là  les  lois  sur  le  maximum,  qui  se  sont 
écroulées  avec  Robespierre  ;  de  là  les  défenses  de 
cesser  son  commerce,  d'abandonner  ses  manufactu- 
res sous  peine  de  vingt  ans  de  fers:  moyens  forcés, 
qui  ne  pouvaient  durer  à  cause  de  leur  violence 
même,  qui  avaient  besoin  d'avoir  pour  appuis  les 
guillotines  permanentes,  la  féroce  extravagance  des 
représentants  en  mission  ,  et  ces  nuées  de  comités 
révolutionnaires  qui  s'emparaient  de  tout,  et  dont 
la  solde  montait  à  26  millions  sterling. 

Dira-t-on  que,  quoique  la  terreur  soit  détruite , 
on  peut  en  maintenir  les  eftets.  Non.  La  preuve  en 
est  que  déjà  les  lois  du  maximum  sont  inexécutées, 
et  que  les  assignats  perdent  75  pour  100.  Tallien  lui- 
même  a  avoue  que  le  crédit  des  assignats  ne  pouvait 
se  soutenir  si  on  ne  diminuait  les  dépenses  et  le  nom- 
bre des  armées. 

11  est  trop  tard  pour  m*étendrc  en  ce  moment  sur 
la  réquisition  des  personnes  et  des  propriétés.  Mais 
peut-elle  continuer  sans  la  terreur?  J'ai  bien  d'au- 
tres choses  à  dire.  J*y  reviendrai  dans  une  autre 
séance. 

On  mè  dit  que ,  depuis  la  terreur  détruite ,  les 
Français  raniment  le  commerce  et  Ta^riculture.  On 
ne  guérit  pas  ainsi  en  un  jour  une  plaie  si  profonde. 
Quels  moyens  ont-ils  d'ailleurs  de  nourrir  leur  com- 
merce et  leur  agriculture?  toujours  des  assignats 
discrédités,  lis  n  est  pas  même  en  leur  pouvoir  de 
rebâtir  la  terreur  ;  il  est  bien  plus  difficile  de  la  res- 
susciter que  de  la  maintenir  quand  elle  existait. 

Soyez  persuadés  que  si  vous  donnez  la  paix  aux 
Français,  vous  leur  laissez  le  temps  de  ramasser 
leurs  ressources  et  leurs  moyens.  Si  vous  les  prçsscz 
avec  vigueur,  vous  les  forcez  de  créer  de  nouveaux 
assignats,  et  vous  achevez  leur  épuisement.  Ils  ne 

Eeuvcnt  soutenir  longtemps  des  armées  aussi  nom- 
reuses.  Quand  même  la  Hollande  ferait  la  paix  ,  et 
que  la  Prusse  ne  nous  seconrrait  que  faiblement, 
nous  pouvons  avoir  sur  le  continent  des  forces  éga- 
lement redoutables,  et  agir  avec  plus  de  succès. 

Les  autres  puissances  ont  les  yeux  fixés  sur  nous. 
Si  vous  leur  fournissez  les  moyens  de  faire  de  grands 
efforts,  vous  obligez  la  France  à  en  faire  aussi  ;  et 
elle  périt  d'inanition.  Montrez  de  Ténergie,  et  vous 
serez  secondés  par  les  puissances  d'Italie  et  par  l'Es- 
pagne ;  et  par  là  vous  atteignez  le  but  que  j'ai  déjà 
marqué  :  vous  forcez  les  Français  à  rentrer  dans  les 
bornes  de  leur  propre  territoire.  Je  conclus  à  l'a- 
doption de  l'Adresse  au  roi. 

Fox  :  FaUguét  comme  doit  Têb-e  cette  assemblée,  d*en- 
teudre  les  ministres  répéter  lou jours  les  mûmes  sopliismcs 
sur  la  guerre ,  je  croirais  manquer  à  mou  caractère  si  je 
n*énonçais  mon  opinion  sur  la  crise  alarmante  où  nous 
Doas  trouvons. 

Tai  vu  avec  plaisir,  dans  le  discours  de  quelques  opi- 
nants, que  la  raison  et  la  vérité  avaient  repris  leur  empire 
tar  plusieurs  membres  trompés,  au  commencement  de  la 
guerre,  par  les  fantômes  qu'on  leur  avait  présentés. 

Qui  n'aurait,  en  efiet,  été  révolté  des  horribles  maximes 
mises  en  avant,  cette  nuit,  par  MM.  Pittet  Dundas  ?  Fixons 
d'abord  le  vrai  point  de  la  question.  Piu  prétend  qu'adop- 
ter l'Adresse  au  roi  ce  n'est  pas  s'engager  à  ne  jamais  faire 
la  paix  avec  la  république  française. 

Je  déclare,  moi ,  que  ce  serait  s'engager,  de  la  manière 
la  plus  directe,  à  ne  faire  la  paix  que  dans  le  cas  de  la  plus 
impérieuse  nécessité. 

N'avons-nous  pas  été  asseï  longtemps  dupes  de  ce  lan- 
gage obscur  et  contradictoire?  Ah  I  nous  n'en  serions  pas 
où  nous  en  sommes  aujourd'hui  si  l'on  avait  franchement 
avoué,  il  y  a  un  un,  qu'une  fois  la  guerre  commencée  elle 
ne  pourrait  cesser  lanl  que  la  France  serait  république  1 
Mais,  pour  nous  y  enUabier,  on  nous  la  montrait  comme 
purimeoi  défensive*  Cela  est  si  vrai  qu*à  présent  plusieurs 


de  ceux  qui  l'ont  votée  assurent  qu'ils  n'ont  jamais  songé 
à  détruire  le  gouvernement  français. 

On  vous  a  dil,'  en  parlant  de  la  négodatloo  entamée  par 
la  Hollande,  que  nul  traité  solide  ne  peut  (trr  fait  avec  le 
gouveruemeot  actuel  de  France.  Cette  assertion  m'amène 
à  examiner  où  en  est  la  guerre,  où  nous  rn  sommes  noos- 
mémes.  Les  ministres  ne  veulent  pas  cacher  que  des  pla- 
ces fortes  ont  été  prises.....  Franchise  vraiment  admirable 
de  leur  part  I  Et  c'est  ainsi  qu'ils  parlent  des  triomphes 
des  Français!  N'eûi-il  pas  été  plus  noble  de  dire  :  Nos 
désastres  sont  tels  que  PEurope  moderne  n'en  a  jamais  va 
de  semblables  depuis  l'irruption  de  Goths  et  des  Vandales. 
Les  l'rançais  ont  conquis  la  Flandre,  plus  de  la  moitié 
de  la  Hollande,  toute  la  rive  gauche  du  Rhin,Mayence 
excepté;  une  partie  du  Piémont,  la  plus  grande  partie  de 
la  Catalogne,  toute  la  Navarre.  Qu'on  chercèe  une  sem- 
blable campagne  dans  les  unnales  de  l'Europe  1  Ils  ont  pris, 
dites-vous,  des  places  fortes  :  monU-ez-moi  cinq  campa- 
gnes où  tant  de  places  fortes  aient  été  emportées.  Et  qu'on 
ne  me  reproche  point  d'exagérer  ici  nos  malheurs  :  non, 
je  parle  avec  Tauslère  franchise  d'un  homme  qui  doit  lever 
le  voile  dont  est  couvert  fabime  vers  lequel  nous  a  poussés 
la  folie  sans  exemple  de  nos  ministres. 

L'exiiiousiasme  des  Français  est  sans  doute  admirable; 
mais ,  f)cnse  que,  si  notre  puys  était  envahi  par  une  armée 
française,  nou*:  aurions  fait  les  mêmes  prodiges;  etnous  ne 
les  ferons  que  lorsque  4ious  serons  serrés  de  près  comme 
ils  l'ont  été.  Car,  malgi^  toutes  les  déclamations  pom- 
peuses (Ips  ministn>s,  ils  ne  persuaderont  jamais  au  peuple 
que,  si  nous  concluons  la  paix  avec  la  France,  c'en  est  (bit 
de  notre  gouvernement,  de  nos  lois  et  de  notre  religion. 
D'autres  puissances  sont  en  paix  avec  la  France.  Le  Dane« 
mark,  la  Sui  de,  les  cantons  suis<ies  sont-ils  donc  anéantis, 
quoique  alliés  avec  elles?  et  celle  répubUque  de  Gênes, 
que  nous  avons  si  cruellement  traitée,  ne  s  applaudit-eJle 
pas  de  l'amitié  des  Français  ?  Les  Etats-Unis  d'Amérique 
ne  jouissenli.spasd'iine  brillante  prospérité,  d'une  graude 
sûreté,  quoique  leur  beau  gouvernement  soit  aussi  fondé 
sortes  droits  de  rhomnie,  et  parla  même  trés-rapproché 
de  ce  qu'on  appelle  la  peste  française?  Ces  Etats-Unis  ne 
viennent-ils  pas  de  conclure  un  traité  avec  nous?  Pourquoi 
donc  la  contagion  ne  seraii-iHe  à  craindre  que  ponrnous? 
Je  m'étonne  toujours  de  l'eniélement  de  certains  hommes 
qui  ferment  les  yeux  pour  ne  pas  voir  les  faits  qui  combat- 
lent  leurs  chimériques  théories. 

La  révolution  françiiisc  existe  depuis  1789,  et  Genève  est 
cependant  le  seul  Etat  qui  en  ait  éprouvé  une  à  peu  près 
semblable.  Comment  pourrait-elle  arriver  jusqu'à  nous? 
Nous  serail-cUe  apportée  par  quelques  missionnaires  dé- 
barqués ù  Douvres?  car,  giâces  au  ciel,  le  ministre  ne 
nous  parle  plus  de  tous  ces  complots  contre  la  constitution, 
qui  semblaient  l'efTiayer  tiint  depuis  deux  ou  trois  ans. 
Tous  ces  rêves  n'ont  pas  été  perdus  pour  lui,  puisque  avec 
quelques  bills  il  est  venu  ù  bout  de  rendre  la  monarchie 
anglaise  beaucoup  plus  absolue  qu'elle  ne  l'a  jamais  été. 

On  s'est  plaint  du  peu  do  zMe  déployé  pour  le  soutien  de 
la  guerre.  Quand  je  proposais,  il  y  a  un  an,  de  négocier 
avec  la  France,  on  ne  se  plaignait  pas  de  cette  froideii)*. 

Elle  ne  doit  pas  nous  étonner  après  le  mépris  que  les  mi- 
nistres ont  si  longtemps  professé  pour  la  France.  On  nous 
demandait  autrefois  quelles  raisons  nous  avions  de  croire 
que  les  Français  reraienl  plus  qu'ils  n'avaient  fait  dans  les 
guerres  précédentes?  Les  faits  ont  parlé.  Je  conviendrai , 
si  l'on  veut,  que  les  réquisitions,  contre  lesquelles  leroi« 
oistie  s'est  élevé,  sont  des  moyens  tyranniques.  Mais  si 
une  armée  française  était  au  milieu  de  nous,  ces  moyens 
ne  seraient-ils  pas  légitimés  pur  la  nécessité? 

Les  ministres  nous  peignent  lu  révolution  française 
comme  un  fléau ,  et  ils  nous  demandent  si  nous  voudrions 
prendre  pour  nous  un  si  mauvais  gouvernement.  Mais  le 
gouvernement  qui  pesait  sur  la  France  depuis  plusieurs 
siècles  était-il  donc  si  bon?  Le  gouvernement  de  l*russe 
est-il  une  merveille?  Approuvons-nous  les  horreurs  com- 
mises en  Pologne?  Nous  les  tolérons  néanmoins.  Je  ne 
vois  donc  pas  pourquoi  nous  nous  indignerions  conti  e  le 
mauvais  gouvernement  des  Françiiis,  s'il  est  choisi  par  eux* 

Dans  les  guerres  précédentes,  nous  avons  reçu  et  fait  des 
propositions  de  paix  :  je  n'ai  jamais  oui  dire  que  ce  fût  se 
dégrader.  Depuis  quand  uue  ouvarlurede  paix  est-elle  un 
acte  de  soumission  ?  Commencei  par  déclarer  que  vous  ne 


275 


f  oalex  porter  aucune  atteinte  au  gouvernement  actuef  de  j 
France  :  alors  nous  serons  d'accord  sur  l'Adresse  au  roi. 
Ce  serait  ôter  à  la  France  un  de  ses  plus  forts  arguments.   I 
Alors  la  Convention  ne  pourrait  plus  dire  au  peuple  :  Vous 
Toyez  que  les  puissances  étrangères  attaquent  votre  iodé- 
tendance,  et  veulent  vous  imposer  le  joug. 

11  n*est  pas  d'exemple  de  calamités  semblables  à  celles 
que  nous  avons  éprouvées.  Nous  avons  il  est  vrai ,  con- 
quis la  Martinique,  Sainte- Lucie,  une  partie  de  la  Guade- 
loupe et  la  Corse.  Mais  qu'ont  perdu  nos  alliés? Toutes 
leurs  conquêtes  en  France,  les  Pays-Bas,  la  moitié  de  la 
Hollande,  toute  la  rive  gaucbc  du  Rbin,  une  partie  du 
Piémont,  la  Catalogne  et  toute  la  Navarre.  Qu'est-il  ar- 
rivé sur  les  mers?  C^est  à  tort  que  le  roi  nous  a  annoncé. 
Tannée  dernière,  que  la  flotte  de  Toulon  élait  anéantie. 
Une  escadre  nombreuse  est  prête  à  sortir  de  ce  port. 

Dans  l'Océan  nous  avons,  il  est  vrai,  remporté  une  vie-  ^ 
toire  navale  brillante  et  immortelfe.  Mais,  si  l'on  en  croit  plu- 
sieurs rapports,  dans  cette  journée  même  la  flotte  fran- 
çaise était  supérieure  à  la  nôtre.  La  marine  française  a 
reçu  un  grand  échec,  mais  il  n'est  pas  irréparable  ;  car, 
d'après  tous  les  bruits  qui  circulent,  ils  ont  en  ce  moment 
i  Brest  une  flotte  que  nous  pouvons  à  peine  égaler.  11  faut 
donc  nous  attendre  à  une  nouvelle  résistance  en  mer.  Si 
nous  battons  l'ennemi,  il  se  relèvera  ;  si  nous  étions  battus 
par  lui,  les  conséquences  en  seraient  incalculables. 

Nous  nous  soumettrons,  dit-on,  quand  la  nécessité  par* 
lera.  Mais  alors  c^  serait  vraiment  un  opprobre.  Alors  nos 
ennemis  sauront  que  nos  moyens  sont  épuisés.  Abandon- 
nons donc  au  plus  tôt  le  projet  absurde  de  donner  un 
gouvernement  à  la  France,  et  offrons-lui  la  paix.  Nous  le 
pouvons  sans  déshonneur. 

Mais  quelles  en  seront  les  conditions  ?  s'écrient  les  mi- 
nistres. C'est  ù  eux  de  les  déterminer  et  de  suivre  les  né- 
gociations. Mais  il  faudra,  dit-on,  abandonner  les  colonies 
françaises  et  les  royalistes  qui  nous  ont  secondés.  Cet  ar- 
gument est  fort,  j*en  conviens.  Mab  ce  n'est  pas  par  mes 
conseils  qu'on  a  tendu  la  main  aux  royalistes.  La  honte  de 
cet  abandon  retombera  sur  les  ministres  seuls.  C'est  à  eux 
d'en  répondre* 

Je  viens  maintenant  à  ce  qui  concerne  nos  alliés.  Quel- 
ques membres  ont  assuré  que  nous  n'en  avions  plus,  et  on 
leur  a  demandé  le  motif  de  cette  assertion.  Ils  l'ont  puisé 
dans  le  discours  même  du  roi.  11  y  est  dit  que  la  Hollande 
négocie.  On  n'y  parle  d'aucun  traité  avec  qui  quece  sôit. 
H  parait  que  nous  ne  devons  attendre  aucun  secours  de  la 
Prusse  dans  la  campagne  prochaine,  et,  pour  remplir  ce 
déficit,  nous  serons  forcés  de  fournir  de  Targent  à  l'Au- 
triche; car  son  discrédit  est  tel  qu'elle  n'en  peut  trouver 
ailleurs. 

Pour  moi,  je  pense  que  l'Autriche  ne  nous  secondera  pas 
mieux  cette  année  que  la  Prusse  l'année  dernière.  On  me 
répond  que  la  Prusse  est  une  cour  sans  foi.  Tous  les  gou- 
feroemenls  arbitraires  se  ressemblent  à  mes  yeux.  L'Au- 
triche et  la  Prusse  m'inspirent  une  égale  défiance.  Où  sont 
les  preuves  de  la  fidélité  de  l'Autriche  à  ses  engagements? 
^  A-t-on  oublié  qu'elle  a  été  fortement  soupçonnée  de  nous 
avoir  trahi  à  Toulon  en  ne  nous  y  envoyant  pas  les  trou- 
pes promises?  On  nous  vantait  aussi,  ù  la  dernière 
session ,  la  coopération  de  la  Prusse.  Je  ne  sais  s'il  y 
a  ici  des  officiers  qui  aient  servi  dans  la  dernière  campagne; 
mais  il  est  de  fait  quMl  a  régné  toujours  entre  les  Anglais  et 
les  Autrichiens  la  plus  grande  animosilé. 

Quel  accord  y  aurait-il  donc  entre  eux?  Et  cependant 
on  va  nous  accabler  d'impôts  sous  l'étrange  prétexte  que 
les  Français  penvent  être  ruinés  les  premiers.  C'est  aussi 
l'espérance  dont  on  nous  flattait  l'année  dernière. 

On  nous  assure  que  les  ressources  de  la  France  tendent 
rapidement  vers  leur  décadence;  rapidement  n'est  pas 
exact  :  c'est-à-dire  qu'elles  peuvent  s'épuiser  dans  un  es- 
pace de  dix  ans. 

Mais  quelle  est,  en  ce  moment,  la  position  de  la  France  ? 
D'après  le  discours  de  Pitt,  on  croirait  que  Robespierre 
n'est  mort  que  la  semaine  dernière  :  il  n'est  plus  depuis 
six  mois;  et  c'est  précisément  depuis  ce  moment  que  les 
succès  des  armées  françaises  ont  été  plus  brillants  qu'ils  ne 
l'avaient  jamais  été  auparavant.  Il  n*est  donc  pas  vrai  que 
sa  chute  nous  ait  été  utile  ;  il  n'estpas  vrai  que  la  terreur 
seule  ait  produit  les  grands  nogrens  des.  Vfw^  s  ii!iSi«ot 


pas ,  an  contraire,  la  sagesse  et  la  modération  qnl  font  la 
force  des  empires  ? 

On  nous  demande  qnelle  preuve  nous  avons  que  les 
Français  soient  moins  mécontents  que  sous  Robespierre  : 
paroe  qu'il  n'y  a  plus  d'insurrection  ni  à  Bordeaux^  ni  à 
Lyon,  ni  dans  les  autres  villes,  et  parce  qu'une  amnistie 
bienfaisante  a  à  peu  près  détroit  la  rébellion  de  la  Vendée. 

On  s'est  beaucoup  étendu  sur  Tétat  des  finances  de  la 
France.  Je  demande  à  mes  advereaires  s'ils  croient  sur  leur 
honneur  que  l'Angleterre  peut  attendre  de  véritables  suc- 
cès dans  cette  guerre. 

On  dit  qu'on  n'a  pas  encore  touché  à  nos  ressources  ex- 
traordinaires ;  cependant  je  ne  trouve  pas  dans  le  discours 
du  roi,  comme  l'année  dernière,  la  promesse  qu'il  n'y  au- 
rait pas  de  nouveaux  impôts.  Oui,  il  y  en  aura  cette  année, 
et  nous  les  sentirons  bien  ;  car  déjà  le  ministre  a  fait  un 
emprunt  ;  pour  le  remplir,  il  faudra  des  sommes  énormes. 
Le  ministre  parait  très-versé  dans  les  affaires  intérieures  de 
la  France ,  mais  il  semble  ignorer  tout  le  reste. 

Durant  la  guerre  d'Amérique,  on  ne  cessait  aussi  de 
nous  entretenir  de  l'épuisement  des  ressources  pécuniaires 
de  nos  ennemis.  Leur  papier-monnaie  ne  perdait  pas  seu- 
lement alors  les  7  de  sa  valeur,  mais  bien  les  ^,;  alors 
on  eût  pu  acheter  J, 000  dollars  (valeur  d'un  écu)  en  papier 
pour  1  dollar  en  espèce. 

Les  Français  sont  bien  loin  d'un  tel  état  de  choses  ;  pour- 
quoi donc  ne  triompheraient-ils  pas  de  ces  difficultés  par 
les  mêmes  moyens  que  les  Américains  ?  Je  crois,  comme 
Pitt,  que. le  commerce  de  France  est  sur  son  déclin  ;  mais 
j'ai  mille  raisons  de  penser  que  l'agriculture  y  est  plus  en- 
couragée qu'elle  ne  l'a  jamais  été.  Si  je  me  trompe ,  qui 
m'assurera  que  le  ministre  n'est  pas  aussi  trompe,  puis- 
qu'il ne  tient  ses  détails  que  de  personnes  qu'il  paie  en 
raison  des  mensonges  qu'elles  lui  font. 

Quant  à  l'état  des  indigents  en  France,  ils  y  sont  aussi 
protégés,  nourris  avec  autant  de  soin  qu'en  Angleterre  ;  et 
très-certainement  les  pauvres  en  France  sont,  en  ce  mo- 
ment, beaucoup  mieux  traités  que  sous  l'ancien  régime. 

iNous  ne  pouvons  sortir  trop  tôt  d'une  guerre  aussi 
désastreuse  pour  nous.  Je  ne  demanderai  pas,  comme  un 
des  préopinants,  si  la  paix  peut  être  sûre  ou  non  :  en  fait 
de  garantie ,  tout  est  relatif;  nous  en  aurons  une  aussi 
forte  ici  que  celle  que  nous  eussions  pu  attendre  de  l'an- 
cien gouvernement  de  France.  Voyex  l'inconséquence  avec 
laquelle  on  raisonne  :  on  vous  a  dit  que  les  armées  fran- 
çai'^es  ne  tarderaient  pas  à  se  dissoudre,  et  ensuite  on  a 
ajouté  qu'il  serait  inipossiblt*  de  les  licencier,  même  à  la 
paix.  Je  ne<))rétends  pas  décider  si,  dans  ce  cas,  la  France 
reprendrait  le  joug  cruel  de  son  ancienne  monarchie,  ou 
le  fardeau  plus  pesant  encore  de  la  tyrannie  qu'elle  vient 
de  détruire.  Comme  philosophe,  je  dois  des  vœux  à  la 
France;  comme  politique,  ce  n'est  pas  à  moi  à  la  diriger. 

On  a  avancé  quec'est  nous  qui  avions  élevé  Robespierre  » 
et  que  c'est  nous  qui  l'avions  renversé.  Je  n'ai  là  dessus 
aucune  donnée;  mais  je  dirai  qu'en  attaquant  la  France 
nous  avions  donné  des  armes  à  ce  tyran,  et  qu'en  fuyant 
devant  les  Français  nous  avons  causé  sa  perte.  Je  soutiens 
que,  saus  peser  la  moralité  de  ceux  qui  gouvernent  aujour* 
d'hui  la  France,  nous  devons  traiter  avec  ceux  qui  sont 
dépositaires  du  pouvoir. 

On  nous  a  appris  que  le  roi  avait  accepté  la  couronne  de 
Corse.  La  doit-il  au  droit  de  conquête?  Non  :  il  ue nous 
en  eût  pas  alors  parlé.  11  a  voulu  sans  doute  répondre 
d'une  manière  louchante  à  tous  ceux  qui  ont  prétendu 
que  les  peuples  n'avaient  pas  le  droit  de  choisir  et  de  dé« 
poser  à  leur  gré  leurs  gouverneurs. 

M.Burke,  dont  on  vient  de  nous  recommander  de  lire 
les  ouvrages,  conteste  ce  droit  aux  nations.  Le  roi  Ceor-^ 
ges  l'a  doublement  démenti,  puisqu'il  a  été  destitué  par 
les  Américains  et  élu  par  les  Corses. 

M.  Elliot  annonce  que  les  Corses  se  sont  réunis  en  as< 
semblées  primaires  pour  choisir  le  roi  Georges;  et  comme 
les  Corses  étaient  sans  doute  las  du  joug  de  In  France,  Sa 
Majesté,  voulant  se  conformer  au  décret  delà  Convention 
nationale  du  19  novembre,  est  venu  an  secours  de  ces 
malheureux  opprimés.  Nous  verrons  les  avantages  que 
nous  tirerons  de  ce  suprême  honneur. 

Dn  membre  a  déclaré  que  demander  la  paix,  ce  serait  le 
Jeter  anx  pieds  de  la  Convention.  Quand  donc  la  ferei.s- 
aoos  cuti  ptli  ^  Def  ons^DOiis  ? erser  tout  notre  sang,  épni- 


Î76 


fler  tous  nos  trésors,  afin  qu^M  poisse  dire  alors  qu*il  est 
contenl  de  noscObrls?  Il  vaul  mieux  traiter  actuelleoienL 
Je  le  proposais  déjà  Tanoée  dernière  :  je  suis  loin  de  iii*cn 
repentir.  Si  notre  ministère  ne  se  croit  pas  encore  a^scx 
battu,  notre  malheureuse  patrie  a  assez  soulTert.  Faut-il, 
pour  son  bon  plaisir,  qu^ellesoit  entièrement  ruinée? 

Quelle  protection  a  obtenue  notre  coniinerce?  dans 
quelle  partie  du  globe  ramirauté  a-i-eile  déployé  quelques 
talents?  Est-ce  en  envoyant  en  Amérique  une  Torce  trop 
peu  nombreuse  pour  y  conserver  nos  conquêtes?  est-ce  en 
tenant  notre  flotte  devant  Toulon?  Mais  Tamiraulé  n*est 
pas  seule  coupable;  Pineptie  de  nos  ministres  les  rend» 
pour  la  plupart,  iodigoes  de  notre  confiauce. 

J'espère  que  le  moment  n'est  pas  loin  où  la  responsabi- 
lité cessera  d'être  un  mot  vide  de  sens.  Nous  remonterons 
alors  à  Torigine  de  la  guerre;  nous  suivrons  la  manière  dont 
elle  a  été  conduite. 

Hélas  I  notre  triste  position  ro^affecte  ;  car  je  vois  trop 
que  nous  ne  pouvons  sortir  de  cette  lulte  sans  des  pertes 
sérieuses  et  sans  une  honte  ineffaçable.  Je  déclare  que 
cette  guerre  a  pris  sa  source,  comme  celte  d'Amérique, 
dans  la  haine  du  ministère  pour  la  liberté.  Il  e5t  temps  de 
finir.  Je  m*en  tiens  aux  raisons  que  j'ai  développées,  il  y  a 
deux  ans,  contre  la  guerre. 

Le  peuple  peut  bien,  dans  cette  crise  terrible,  demander 
aux  ministres  le  sacrifice  de  leurs  intérêts  particuliers  et 
de  leurs  vues  ambitieuses. 

Je  vous  le  répète  :  dans  un  an  vous  reconnaltrex  la  vé- 
rité de  tout  ce  que  je  vous  dis  aujourd'hui.  Je  conclus  en 
demandant  qu'on  raie  de  l'Adresse  au  roi  tout  ce  qui  peut 
nous  empêcher  de  traiter  au  plus  tôt  avec  la  France. 

CONVENTION  NATIONALE. 

Suite  du  discours  sur  les  principes  du  gouverne- 
ment  actuel ,  et  sur  les  bases  du  crédit  public , 
prononcé  par  Boissy  d*Ânglas^  représentant  du 
peuple,  député  par  le  département  de  l'Ardèche , 
à  la  séance  du  7  ntvose. 

Examinons  quelles  sont  dans  notre  position  ac- 
tuelle les  bases  de  notre  crédit,  comparé  à  celui  des 
puissances  avec  lesquelles  nous  sommes  en  guerre. 
Tant  que  notre  liberté  a  paru  soumise  aux  chances 
d*mie  guerre  redoutable,  ou  aux  convulsions  des 
factions  qui  nous  déchiraient,  nous  n*avons  joui 
d'aucun  crédit;  aujourd'hui  les  nations  vaincues 
respectent  notre  indépendance  et  tremblent  pour  la 
leur;  mais  ce  n'est  pas  assez  de  leur  demander  au 
nom  de  la  victoire  ce  respect  qu'exige  une  grande 
nation  ;  il  faut  atissi  s'assurer  leur  affection.  Si  nous 
n'étions  que  des  conquérants,  la  terreur  nous  céde- 
rait des  tributs,  et  viendrait  peut-être  au-devant  de 
notre  avidité  ;  mais  la  conuance  s'éloignerait  de 
nous  en  proportion  même  de  nos  conquêtes  et  des 
ravages  qu'elles  traîneraient  après  elles.  Le  corn- 
merce  n'aurait  aucun  échange  à  nous  offrir,  et  c'est 
par  les  échanges  que  les  nations  s'enrichissent. 
Maintenons  un  caractère  de  fidélité  envers  nos  al- 
liés, de  justice  et  de  modération  envers  nos  ennemis 
mêmes,  et  chaque  jour  notre  crédit  s'établit,  et  le 
commerce  vient  apporter  des  trésors  dans  nos  ports 
et  sur  nos  frontières.  Que  sera-ce  lorsqu'une  paix 
honorable,  dont  déjà  nous  sommes  maitres  de  dicter 
les  lois,  aura  cimente  notre  liberté  et  le  repos  de 
l'Europe  ! 

Jetons  maintenant  un  coup  d'œil  sur  la  situation 
de  nos  ennemis,  relativement  au  crédit. 

Quelque  coup  qu'ait  porté  à  l'Espagne  la  suite  de 
nos  victoires  sur  elle ,  il  est  douteux  qu'elles  aient 
plus  ruiné  cette  puissance  que  la  stupide  alliance 
qu'elle  a  contractée  avec  l'Angleterre.  L'effet  de 
cette  alliance  a  été  de  la  mettre  sur-le-champ  avec 
celle-ci  dans  la  situation  servile  et  dépendante  où  le 
Portugal  est  depuis  un  siècle  vis-à-vis  de  l'Angle- 
terre :  c'est  elle  qui  a  servi  à  assurer  à  cette  inso- 
lente rivale  l'empire  de  la  Méditerranée,  jusqu'à  ce 
que  nous  l'ayons  reconquis;  elle  qui  avait  iait  des 


efforts  si  gigantesques  pour  se  ressaisir  de  Gibraltar, 
elle  a  concouru  de  toutes  ses  forces,  c'est-à-dire  par 
ses  flottes,  par  son  or  et  ses  perGdies,  a  lui  assurer 
l'île  de  Corse  ;  elle  l'a  également  appelée  dans  l'île 
de  Saint-Domingue,  afin  de  se  placer  sous  la  domi- 
nation directe  de  ces  voisins  impérieux,  afin  de  leur 
livrer  le  fruit  de  toutes  les  horreurs  qu'elle  a  susci- 
tées dans  cette  malheureuse  colonie.  Etrange  et  dé- 
plorable situation  !  La  guerre  que  cette  puissance 
soutient  avec  nous  est ,  depuis  plus  de  huit  mois , 
une  suite  de  désastres  et  de  défaites  telles  que  l'his- 
toire moderne  en  offre  peu.  Nous  occupons  une  par- 
tie très-florissante  de  son  territoire  et  l'un  de  ses 
ports  ;  nous  avons  fait  essuyer  à  son  commerce  des 
pertes  répétées.  Si ,  avant  ces  événements,  l'Espa- 
gne était  déjà  une  puissance  sans  crédit  et  véritable- 
ment pauvre  au  milieu  de  tout  sou  or,  qu'on  juge  ce 
qu'elle  doit  être  aujourd'hui. 

Qu'avons-nous  à  dire  du  Piémont?  nous  ne  comp- 
tons point  de  si  faibles  ennemis. 

Arrêtons-nous  à  la  situation  de  la  Hollande, en 
partie  subjugée  par  nos  armes,  en  partie  submergée 
par  ses  eaux  :  qu'est  devenue  cette  banque  d'Amster- 
dam ,  qui  semblait  être  l'arbitre  du  crédit  de  l'Eu- 
rope? elle  s'est  transportée  dans  labanaue  de  Lon- 
dres, ainsi  que  son  gouvernement  a  été  transporté 
dans  le  cabinet  de  Samt-James  ;  elle  éprouve  qu'une 
puissance  avilie,  esclave  au  dedans  et  au  dehors, 
survit  bientôt  à  son  industrie,  à  son  commerce,  à  son 
crédit. 

L'Autriche  succombant  sous  le  fardeau  de  trois 
campagnes,  dont  doux  ont  été  constamment  mal- 
heureuses pour  elle,  se  voit  privée  d'une  grande  par- 
tic  de  ses  revenus  par  la  perte  de  ses  Etats  occupés 
aujourd'hui  par  nos  armées;  elle  n'ose  lever  des  im- 
pôts chez  elle;  elle  sait  assez  nu'il  serait  inutile  d'y 
ouvrir  des  emprunts;  elle  cnerche  infructueuse- 
ment ,  ou  plutôt  elle  mendie  cette  ressource  auprès 
de  la  Suisse  qu'elle  avait  traitée  avec  tant  de  colère 
et  d'indignité,  auprès  de  l'Angleterre  et  sous  le  cau- 
tionnement de  son  gouvernement;  mais  la  nation 
anglaise  se  montre  moins  complaisante  que  son  gou- 
vernement ,  et  ne  fournit  rien  à  cet  emprunt. 

La  Prusse  est  déjà  déshéritée  de  ses  trésors  entas- 
sés par  Frédéric  ,  et  qu'une  folle  expédition  tentée 
sur  le  sol  de  la  liberté  a  consumés  ;  elle  est  réduite 
à  ses  ressources  annuelles,  faibles  par  elles-mêmes, 
et  encore  diminuées  par  trois  années  de  guerre  et  de 
défaites. 

Ces  deux  dernières  puissances  ont  été  tour  à  tour 
stipendiées  par  l'Angleterre,  et  lui  vendent  très-cher 
des  secours  inutiles. 

Ici  s'offre  un  vaste  objet  de  méditations.  Atixyeux 
de  républicains  qui  doivent  tous  leurs  succès  à  leur 
valeur  et  au  zèle  pour  la  patrie,  c'est  un  spectacle 
bien  ridicule  que  celui  d'une  nation  qui  croit,  avec 
son  or ,  acheter  des  armées ,  acheter  du  courage  et 
des  vertus  militaires. 

Aux  yeux  des  politiques  les  plus  sensés,  et  de  ceux 
même  de  cette  île ,  le  gouvernement  a  trahi  par  ses 
marchés  absurdes  et  onéreux  toute  son  impéritie;  il 
s'est  rendu  odieux  à  la  nation,  qui  n'aime  pas  voir 
prodiguer  son  or  pour  des  entreprises  honteuses;  il 
a,  par  ses  énormes  subsides,  beaucoup  augmenté  le 
fardeau  bientôt  intolérable  des  charges  publiques. 
A-t-il  été  plus  habile  dans  ses  entreprises  commer 
ciales  et  dans  la  conquête  tentée,  niais  non  achevée, 
des  colonies?  Il  est  vrai  qu'en  cela  du  moins  il  a 
fourni  un  aliment  à  la  cupidité;  cependant  le  com- 
merce, loin  de  s'accroître  de  ces  nouveaux  débou- 
chés, a  toujours  été  en  déclinant  en  Angleterre. 
Chaque  jour  ses  plaintes  deviennent  plus  amères;  on 
pourra  voir  combien  elles  seront  pressantes  à  la 
leotrée  du  parlement;  déjà  nous  en  ayons  un  signe 


277 

non  (fqnivoque  dans  les  règlements  faits  cette  année 
pour  arrêter  rcmigratioii  des  ouvriers  qui  partaient 
en  foule  pour  les  Etats-Unis  d'Amérique,  et  qui  ont 
mieux  aimé  braver  ces  règlements  que  la  faim.  Le 
faste  des  entreprises  de  T  Angle  terre  n'est  donc  pas 
un  signe  de  son  crédit.  Voilà  pourtant  la  puissance 
qui  seule  fournit  des  secours  à  la  coalition  aue  nous 
avons  vaincue.  Toutes  les  autres  sont  dans  rimpuis- 
sance  de  lever  des  tributs  chez  elles,  et  d'ouvrir  des 
emprunts  ailleurs. 

Le  rapporteur  des  cinq  comités  vous  a  présenté  le 
tableau  de  nos  ressources;  elles  consistent  en  15  mil- 
liards de  biens  nationaux  servant  d'hypothèque  à 
une  masse  d'assignats  en  circulation  de  6  milliards 
au  plus. 

11  résulte  de  ce  tableau  que  jusqu'à  présent  la 
conquête  de  notre  liberté,  et  tant  de  victoires  rem- 
portées sur  les  tyrans  coalisés,  ne  nous  ont  coûté 
qu'un  peu  plus  du  double  de  ce  qu'avait  coûté,  sous 
1  ancien  régime,  l'indépendance  de  l'Amérique. 

Ce  n'est  donc  point  rinsufhsancede  nos  ressources, 
la  disproportion  de  notre  papier  avec  son  hypothè- 

Sue,  de  nos  revenus  avec  nos  dépenses,  qui  peuvent 
Itérer  le  crédit  national. 

H  est  une  base  'du  crédit  que  vous  devez  établir 
d'une  main  ferme,  c'est  la  fidélité  pour  tous  les  en- 
gagements contractés  par  la  nation.  Ne  souffrez  pas 
que  l'assignat,  présenté  par  vous  comme  monnaie, 
soit  démonétise  :  une  violation  si  solennelle  de  la 
foi  publique  détruit  toute  sécurité  dans  le  commerce, 
tout  respect  pour  le  gouvernement,  toute  confiance 
en  ses  opérations.  Ne  souffrez  pas  qu'on  s'écarte  en- 
vers les  créanciers  de  l'Etat  du  premier  contrat  sti- 
pulé avec  eux,  qu'on  les  grève  de  retenues  nouvelles, 
et  qu'on  aliène  ainsi  la  foi  publique  par  des  opéra- 
tions minutieuses  et  vexatoires. 

Le  crédit  porte  sur  un  caractère  d'économie  suivi 
dans  les  opéxatioiisdu  gouvernement.  Le  rapporteur 
des  comités  vous  a  offert  à  cet  égard  des  espérances 

3u'il  dépend  de  vous  de  réaliser.  Tous  les  moyens 
'économie  sont  devenus  faciles  depuis  le  renverse- 
ment de  la  tyrannie.  Cette  tyrannie  atroce  et  san- 
guinaire a  montré  qu'elle  pouvait  surpasser  les  pro- 
digalités de  la  tyrannie  somptueuse  qui  existait  avant 
le  14  juillet  et  le  10  aoûf;  elle  avait  aussi  ses  courti- 
sans a  entretenir;  elle  avait  des  assassins  à  salarier. 
Voos  avez  été  effrayés  quand  on  vous  a  annoncé 
ce  que  coûtait  annuellement  l'entretien  des  comités 
révolutionnaires;  qu'auraitce été  si  à  ce  tableau  on 
eût  ajonté  celui  des  commissions ,  des  tribunaux 
chargés  de  répandre  le  sang  des  hommes  dans  tous 
les  coins  de  la  France;  si  on  eût  ajouté  les  frais  de 
construction  de  tant  de  bastilles,  les  frais  de  déten- 
tion de  tant  de  victimes  qui  ne  s'en  éteignaient  pas 
moins  dans  la  misère  et  le  désespoir?  Oui ,  nous 
connaîtrons  un  jour  ce  tableau  ;  nous  l'offrirons  aux 
regards  des  Français,  afin  qu'il  ajoute  encore  à  leur 
horreur  pour  les  tyrans  et  les  assassins.  Mais  ce  qu'il 
est  difficile  de  calculer,  ce  sont  les  dépenses  honteu- 
ses employées  par  les  barbares  pour  mutiler  nos 
chels-d  œuvre ,  dépenses  avec  lesquelles  la  liberté 
aurait  vu  s'élever  plusieurs  monuments  dignes  d'elle 
et  du  génie  des  arts.  Ces  sources  de  profiision  sont 
taries.  Il  vous  en  coûte  mille  fois  moins  aujourd'hui 
pour  aider  des  dons  de  la  patrie  les  artistes,  les  sa- 
vants, les  gens  de  lettre  qui  l'honorent  et  la  servent 
par  leurs  travaux,  qu'il  n'en  coûtait  à  ces  hommes 
absurdes  pour  une  fetc  grotesque ,  où  ils  élevaient 
des  monuments  vils  et  périssables  comme  eux. 

Le  crédit  porte  enfin  sur  la  foi  conservée  envers 
les  étrangers.  Le  droit  des  gens  de  l'Europe  peut 
Tarier,  peut  se  prêter  à  toute  l'atrocité  des  repré- 
sailles; le  droit  des  gens  d'une  république  doit  être 
pur  et  immuable.  Ce  que  les  étrangers  possédaient 


en  France,  ils  le  possédaient  sur  la  foi  du  gouverne* 
ment  qui  leur  avait  assuré  protection.  Cette  protec- 
tion n'a  point  dû  leur  être  retirée.  Si  nous  voulons 
que  le  commerce  vienne  avec  confiance  fréquenter 
nos  ports,  levons,  il  en  est  temps,  le  séquestre  mis 
sur  les  biens  des  étrangers.  Ici  c'est  notre  intérêt 

aui  nous  prescrit  d'être  justes.  Je  crois  inutile  de 
évelopper  davantage  les  excellentes  réflexions  que 
vous  a  présentées  à  cet  égard  le  rapporteur  de  vos 
comités.  (La  suite  demain.) 

SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU  2  PLUVIOSE. 
Frétidence  de  Rovére* 

Un  secrétaire  fait  lecture  de  la  rédaction  de  plu- 
sieurs décrets,  qui  sont  adopter. 

—  Le  comité  dos  secours  fait  adopter  plusieurs  dé- 
crets particuliers. 

—  Plusieurs  sections  demandaient  à  être  admises. 

^— Maure  obtient  la  parole  pour  une  motion  d'ordre. 

Maure  :  La  justice  et  la  oienlaisance  de  la  Con- 
vention nationale  marchent  d'un  pas  égal  avec  les 
triomphes  de  ses  armées.  Hier  une  proposition  salu- 
taire, faite  par  Barras,  a  été  unanimement  adoptée; 
mais  vous  n'avez  pas  encore  assez  fait  pour  les  mal- 
heureux. Ceux-là  ne  sont  pas  le  plus  à  plaindre,  qui 
ont  trouvé  une  ressource  dans  l'engagement  de  leurs 
effets.  Il  en  est  qui,  même  aux  dépens  des  objets  qui 
leur  étaient  nécessaires,  se  trouvent  dans  le  besoin 
le  plus  pressant.  Hier,  en  sortant  de  cette  salle,  ie 
rencontrai  un  indigent  qui  me  dit  :  •  Je  bénis  la 
Convention  du  décret  qu'elle  vient  de  rendre;  mais 
elle  n'a  pas  fait  encore  assez.  •  H  me  suggéra  l'idée 
que  je  viens  vous  soumettre.  Je  demande  en  consé- 
quence que  le  comité  des  secours  soit  char{;é  de 
prendre  les  mesures  nécessaires  pour  subvenir  aux 
besoins  des  indigents. 

Cette  proposition  est  accueillie  par  de  nombreux 
applaudissements. 

Dentzel  :  Je  demande  également  le  renvoi  ati 
comité  des  secours  de  l'examen  de  cette  question. 
N'est-il  pas  possible,  dans  la  rigueur  actuelle  de  la 
saison,  d^établir  des  chauffoirs  publics ,  où  les  indi- 
gents puissent  se  réunir  et  travailler? 

Saint-Martin  :  J'annonce  à  la  Convention  que  le 
comité  des  secours  s'est  concerté  avec  le  comité  de 
saint  public,  et  que  toutes  les  mesures  nécessaires 
sont  prises  pour  subvenir,  autant  qu'il  sera  possible, 
aux  besoins  des  nécessiteux. 

Quant  à  la  proposition  de  Dentzel,  la  Convention 
paraît  sentir  qu'elle  est  impraticable  dans  les  cir- 
constances ,  mais  les  comités  ont  ordonné  la  plus 
erande  distribution  de  bois  possible  aux  indigents. 
(On  applaudit.) 
Ces  propositions  n'ont  pas  d'autre  suite. 
—  L'Institut  national  de  Musique ,  réuni  dans  la 
salle  des  séances  de  la  Convention,  présente  un  mor- 
ceau d'une  musique  douce  et  mélocfieuse.  (Des  mur- 
mures se  font  entendre  dans  l'une  des  parties  de  la 
salle.) 

Un  membre  réclame  avec  force  la  parole.  —  Ls 
musique  cesse. 

On  demande  que  le  membre  qui  a  interrompu 
monte  à  la  tribune.  —  Il  y  paraît. 

***  :  Je  demande  si  c  est  ta  mort  du  tyran  qu'on 
célèbre  aujourd'hui,  si  c'est  en  sa  faveur  ou  contre 
lui...  {Plusieurs membres  :  A  l'Abbaye!)  Je  ne  crois 
pas  qu'aucun  de  mes  collègues  prétende  que  j'aie 
parlé  contre  lui  ou  contre  lepeuple.  J'ai  seulement 
voulu  demander  si  les  musiciens,  dans  le  morceau 
qu'ils  viennent  d'exécuter  avaient  entendu  déplorer 
la  mort  du  tyran ,  ou  bien  célébrer  l'anniversaire 
de  cette  journée.  (Quelques  applaudissements.)  Je 
demande  qu'ils  s'expliquent. 
L'Institot  répond  par  l'air  Çà  irai  et  diyers  autres 


278 


R 


aîrs  patriotiques,  qu'ils  exécutent  successivement  et 
auxquels  se  mêlent  à  chaque  instant  les  cris  :  Vive 
la  liherlélvive  la  république!  vive  la  Convention! 

Le  ciloyen  Gossec  descend  à  la  barre,  et  demande 
la  parole  pour  disculper  l'institut  uational  du  re- 
proche qui  lui  a  été  lait. 

La  parole  lui  est  accordée. 

Gossec  :  Citoyens  représentants,  est-il  possible 
qu'un  doute  aussi  injurieux  se  soit  élevé  sur  les 
intentions  des  artistes  qui  sont  réunis  dans  cette  en- 
ceinte! que  ceux  qui  ont  célébré  la  mort  du  tyran , 
on  les  accuse  de  venir  ici  le  pleurer!  On  se  livrait 
aux  douces  émotions  qu'inspire  aux  âmes  sensibles 
le  bonheur  d'être  délivrés  d'un  tyran,  et  de  ces  sons 
n\élodieux  ont  eût  passé  aux  chants  mâles  de  la  mu> 
sique  guerrière,  et  on  eût  célébré  nos  succès  en 
Hollande  et  sur  toutes  nos  frontières.  Citoyens  re- 
présentants, nous  marcherons  constamment  pour 
culbuter  les  tyrans,  et  jamais  pour  les  plaindre. 

L'assemblée  témoigne  sa  satisfÎEiction  par  de  nom- 
breux applaudissements. 

La  Convention  nationale ,  environnée  du  peuple, 
se  met  en  marche  pour  se  rendre  sur  la  place  de  la 
Révolution.  Arrivée  devant  la  statue  de  la  Liberté, 
le  président  prononce  le  discours  suivant  : 

«  Citoyens,  le  peuple  français  a  conquis  la  liberté 
ar  un  combat  opiniâtre  et  glorieux  contre  toutes 
les  forces  réunies  des  despotes  et  de  leurs  satellites, 
ignorants  ou  abusés:  il  a  usé  de  ses  droits  impre- 
scriptibles. Le  devoir  des  législateurs  est  de  nourrir 
ce  sentiment  généreux  par  des  institutions  mémora- 
tives  des  dangers  qu'il  a  courus  et  des  moyens  de 
s'en  préserver  à  l'avenir. 

«  La  cause  de  tous  nos  maux  était  dans  Toubli  des 
principes  :  les  lois  se  taisaient  devant  l'homme  puis- 
sant, ou,  pour  mieux  dire  il  n'en  existait  pas»  puis- 
que la  volonté  nationale  n'était  comptée  pour  rien. 
L'intrigue,  la  trahison,  le  pillage,  l'avilissement  de 
l'espèce  humaine  à  l'ordre  de  tous  les  jours  acqui- 
rent même  des  droits  à  la  renommée  ;  les  citoyens 
obligés  à  chercher,  dans  la  protection  insultante  de 
la  scélératesse  en  crédit,  l'appui  que  la  lui  leur  refu- 
sait, perdirent  toute  idée  de  leur  dignité;  le  crime 
puissant  élait  honoré,  la  vertu  sans  appui  méprisée. 

«  Mais  la  révolution  a  faitenGu  commencer  le  rè- 
gne des  lois  et  de  la  justice. 

•  Un  tyran  comblé  des  faveurs  d*un  peuple  cré- 
dule et  confiant  s'en  sert  pour  organiser  la  guerre 
civile,  rappeler  le  fanatisme,  amener  la  famine  et 
tous  les  fléaux  destructeurs  de  l'humanité  sur  une 
nation  qui  n'avait  eu  d'autre  tort  que  celui  de  croire 
à  ses  serments;  il  en  était  fait  de  la  liberté  ;  la  révo- 
lution n'aurait  servi  qu'à  river  nos  fers,  sans  l'éner- 
gie du  peuple  français  et  de  ses  représentants,  don- 
nant à  l'univers  étonné  un  grand  exemple  de  justice 
nationale  sur  la  personne  d^n  roi  parjure.  Le  ti  jan- 
vier rappellera  à  tous  les  hommes  investis  de  grands 
l)ouvoirs,  dépositaires  d'une  grande  confiance  ,  que 

a  loi  lesatteindra,  quelque  part  qu'ils  soient  placés, 
s'ils  en  abusent. 

«  Les  autres  époques  de  la  révolution  ont  servi  à 
proclamer  les  principes  de  liberté  et  d'égalité;  celle- 
ci  a  consacré  ceux  de  la  justice,  qui  frappe  avec  sé- 
vérité un  coupable  accoutumé  à  1  impunité. 

«  Que  l'amour  sacré  des  lois  anime  tous  les  cœurs, 
que  la  crainte  salutaire  de  la  justice  comprime  tous 
les  ambitieux  et  les  traîtres,  et  la  liberté  sera  afler- 
mie  sur  des  bases  inébranlables. 

•  En  effet,  la  liberté  ne  serait  qu'une  chimère  là  où 
un  seul  citoyen  pourrait  être  un  instant  au-dessus 
des  lois  :  l'égalité  n'existerait  pas  même  en  appa- 
rence parmi  les  citoyens;  il  n'y  aurait  plus  que  le 
niveau  de  l'esclavage;  mais  le  peuple  français  a  juré 
d'être  libre;  il  a  deckré  une  guerre  à  morU  toute 


Fa 


espèce  de  tyrannie  ;  sa  volonté  tonte-puissante  a  faf  t 
disparaître  les  fourbes  et  les  insensés  qui  ont  tenté 
de  s'y  opposer.  Le  rè^e  des  lois  et  de  la  justice 
éternisera  une  révolution  destinée  à  fonder  la  repu- 
bhque  française  et  à  faire  le  bonheur  de  l'humanité.  • 

Le  canon  se  h\l  entendre,  les  cris  éevive  la  li- 
berté!  vive  la  réptsblique  !  vive  la  Convention  na» 
Uonale!  accompagnent  les  représentants  du  peuple 
jusqu'au  lieu  de  leurs  séances. 

L'assemblée  rentre  dans  la  salle;  l'Institat  natio- 
nal de  Musique  exécute  différents  morceaux. 

Olivieb  Gérentb  :  En  ce  jour  où  le  royalisme  est 
expiré ,  le  terrorisme  doit  expirer  éealement.  (Ap- 

filaudissements.)  Depuis  le  9  thermidor  le  règne  de 
a  justice  permet  enfin  au  peuple  français  de  respi- 
rer. ^Nouveaux  applaudissements.)  Il  faut  qu'au- 
jourdhui,  en  présence  du  peuple,  la  Convention 
prononce  son  indignation  formel  le  contre  le  terro- 
risme. (Vifs  applaudissements.)  Deux  de  nos  collè- 
gues, séduits  par  leur  sensibilité,  nous  ont  proposé, 
Tun  une  amnistie,  et  l'autre  l'abolition  de  la  peine 
de  mort;  la  sensibilité  est  naturelle  à  tous  les  repré- 
sentants; mais  de  pareilles  mesures  ne  peuvent  être 
adoptées  dans  ce  moment.  11  faut  qu'ils  disparaissent 
du  globe  ceux  qui  ont  corrompu  la  morale  publique, 
érigé  l'assassinat  en  profession,  et  détruit  des  com- 
munes entières.  (Vifs  applaudissements.)  H  faut 
aussi  faire  grâce  aux  hommes  qui  n'ont  été  qu'éga- 
rés. (Nouveaux  applaudissements.)  Ils  ne  sont  que 
pluscoupableslesauteursdece  système  monstrueux, 
qui  ont  entraîné  dans  le  précipice  des  hommes  faits 
pour  concourir  au  bonheur  de  leur  patrie.  (Les  ap- 
plaudissements redoublent.)  Si  Tombre  de  Robes- 
pierre agite  encore  ses  fureurs  dans  Quelque  coin  de 
cette  enceinte  (Duhem  parle  dans  le  bruit  *,  —  on 
applaudit  vivement) ,  les  mânes  de  tant  de  victimes 
immolées  par  les  derniers  tyrans,  les  niflnes  de  nos 
vertueux  collègues  planent  sur  cette  salle.  (Les  ap- 
plaudissements se  font  entendre  de  tontes  parts.) 
Elles  nous  demandent  justice.  (Nouveaux  applau-» 
dissenients.)  Quand  les  auteurs  de  cet  affrenx  sys- 
tème auront  expié  leurs  cri  mes,  la  voix  de  la  douceur 
pourra  se  faire  entendre.  Je  demande  : 

10  Que  la  Convention  déclare,  en  présence  du 
peuple,  qu'elle  fera  justice  des  auteurs  du  terrorisme 
(applaudissements)  ; 

20  Qu'elle  porte  une  peine  contre  ceux  oui  provo- 
(pueraient  de  nouveau  le  retour  de  cet  affreux  sys- 
tème ou  celui  du  jacobinisme ,  ce  qui  est  la  même 
chose  (nouveaux  applaudissements)  ; 

30  Que  la  Convention  décrète  une  fête  pour  con- 
sacrer la  journée  du  10  thermidor.  (On  applaudit.) 

Mbrlin  (de  Thionville)  :  Je  m'oppose  aux  deux 
premières  propositions;  je  les  vois  eravées  dans  le 
cœur  de  tous  mes  collègues.  (^Applaudissements.) La 
Convention  n'a  pas  besoin  ae  déclarer  qu'elle  sera 
juste;  elle  saura  marcher  d'un  pied  ferme  dans  la 
route  Qu'elle  a  suivie  depuis  le  10  thermidor  :  elle 
saura  bientôt  satisfaire  le  peuple  et  le  rendre  heu- 
reux. (Nouveaux  applaudissements.) Un  temps  vien- 
dra où  il  faudra  aussi  être  juste  envers  les  morts,  et, 
de  la  même  main  qui  aura  cicatrisé  les  blessures  de 
l'Etat,  jeter  des  fleurs  sur  la  tombe  du  malheureux 
Phélippeaux  (applaudissements  redoublés) ,  sur  la 
tombe  de  tant  d  autres  victimes  que  l'ancien  despo- 
tisme, non  royal ,  sacrifia  à  sa  fureur  et  à  son  orgueil. 
(Nouveaux  applaudissements  )  Robespierre,  qui  ne 
voulaitpas  souffrir  que  rien  fût  égal  à  lui,  faisait  cou- 
per toutes  les  têtesquirenvironnaient,qu'ilvoyaitau 
niveau  de  la  sienne  ou  par  lesquelles  il  craignait  de 
se  voir  surpasser.  C'est  à  la  Convention  à  distinguer 
les  véritables  conspirateurs,  ceux  qui  ont  assassiné 
la  patrie,  des  hommes  qui  Ton  servie  dans  tous  les 
temps,  tomme  Phélippeaux  et  Camille  Desmoulius 


279 


(applaudissements  redoubles)  ;  comme  Camille  Des- 
moulins, qui  le  premier  arbora,  au  Palais  Ëj^alité,  la 
cocarde  tricolore  (les  applaudissements  se  renou- 
vellent); comme  Camille  Desmoulins»  qui,  conti- 
nuellement opposé  aux  apôlres  de  la  tyrannie  sous 
Capet,fut  assassiné  par  les  bourreaux  de  Bobespierre, 
pouravoir  rappelé  lesouveuirdesjoursaflreuxaerem- 
pirc  romain  que  cet  homme  atroce  ramenait  dans  sa 
patrie  ;  pour  avoir  préchéceque  la  Conventionfaitau- 
jourd'liui  ;  pouravoir  dit  ^u'ti  faUail  ouvrir  un  ^t- 
c/ieiaiixpain'oiei;  pour  a  voir  dit  qu'il  n'y  avait  point 
de  gouvernemont  sans  justice;  pour  avoir  dit  enfin 
que  le  gouvernement  révolutionnaire  était  une  ty- 
rannie organisée,  s'il  n'était  pas  fondé  sur  l'équité. 
(Les  plus  vils  applaudissementsse  font  entendre.) 

J'appuie  la  dernière  proposition  du  préopinant;  il 
fautélerniser  la  mémoire  de  la  superbe  journée  du 
9  thermidor.  {Oui ,  ouil  s'écrie-ton  de  toutes  parts.) 
Qu'il  soit  érigé  dans  cette  cité,  qui  vint  se  réunir  à  la 
Convention  au  moment  où  les  assassins  «  grâce  aux 
mesures  prises  par  l'ancien  gouvernement,  inon- 
daient déjà  le  vestibule,  de  la  faute,  oui,  de  la  faute 
des  derniers  tyrans;  qu'il  soit  érigé,  dis-je,  un  mo- 
nument qui  retrace  à  nos  derniers  neveux  sa  con- 
stante fidélité  (applaudissements);  qu'à  pareille  épo- 
que ,  chaque  année,  les  assemblées  législatives,  les 
autorités  constituées  de  cette  commune,  aillent  en- 
vironner la  colonne,  et  y  fassent  lire  à  nos  neveux 
et  nos  dangers  et  nos  triomphes ,  et  l'époque  à  la- 
quelle la  justice  est  venue  enfin  s'asseoir  à  côté  de 
la  liberté. 

Legendbb  (de  Paris^  :  La  Convention  est  trop 
grande  pour  vouloir  aonner  de  l'importance  à  un 
misérable  qu'on  voudrait  mettre  au  rang  des  tyrans 
de  l'Europe.  Robespierre  n'était  que  l'écolier  du 
crime.  Les  complices  de  ses  fori'aits  avaient  au  moins 
autant  d'expérience  que  lui  dans  l'art  des  scéléra- 
tesses; attendez,  citoyens,  que  vous  soyez  éclairés, 
pour  prononcer  sur  le  sort  de  ses  complices,  et  alors 
vous  pourrez  ordonner  une  fête,  non  pour  vous 
réjouir  de  ce  qu'ils  auront  cessé  d'être,  mais  pour 
célébrer  le  triomphe  de  la  justice. 

Tallien  :  J'appuie  l'ordre  du  jour  demandé  par 
Merlin  sur  les  deux  premières  propositions;  la  Con- 
vention n'est  pas  sourde  à  la  voix  de  la  justice,  et 
elle  saura  faire  son  devoir. 

Je  réponds  à  Legendre  que  ce  ne  sera  point  don- 
ner de  l'importance  à  Robespierre  que  de  solenniser 
la  glorieuse  journée  du  9  thermidor;  ce  n'est  pas 
seulement  la  chute  de  Robespierre  et  de  ses  com- 
plices que  nous  célébrerons;  car  il  ne  faut  pas  s'at- 
tacher aux  hommes,  et  bientôt,  je  l'espère,  on  n'en- 
tendra plus  parler  ni  de  Robespierre,  ni  de  ses 
acolytes;  mais  cette  fêle  sera  celle  du  triomphe  de  la 
justice.  Avant  cette  journée  mémorable,  elle  était 
bannie  de  la  France,  le  glaive  plairait  sur  la  tête  de 
tous  les  hommes  courageux,  la  tyrannie  proscrivait 
les  sénateurs  et  les  hommes  énergiques  qont  les  ta- 
lents et  les  vertus  pouvaient  être  un  obstacle  au 
jirojet  qu'elle  avait  d'asservir  le  peuple.  (Vifs  applau- 
dissements.) Ce  n'était  pas  seulement  les  partisans 
de  la  royauté  qu'on  égorgeait,  mais  aussi  les  meil- 
leurs républicains;  et,  si  l'on  faisait  la  récapitula- 
tion des  victimes  qui  ont  péri  sur  l'échafaucl,  on  y 
trouverait  peut-être  plus  de  citoyens  utiles  que 
d'hommes  ci-devant  privilégiés. 

Nous  nous  réunirons  tous  autour  de  la  colonne 
qu'on  élèvera  pour  célébrer  le  retour  de  la  justice, 
pour  célébrer  la  chute  de  cette  puissance  colossale 
qui  rivalisait  avec  la  Convention ,  qui  lui  dictait  des 
lois  en  organisant  des  insurrections  factices  :  je  veux 
parler  de  cette  commune  conspiratrice,  qui  semblait 
croire  que  la  Convention  nationale  n'était  piiscou)- 
posée  des  mandataires  des  quatre-vingt-six  dépar- 


tements de  la  république,  et  qu'elle  n'appartenait 
qu'à  la  commune  de  Paris.  Citoyens,  nous  avons 
reconquis  notre  indépendance;  dans  cette  journée 
célèbre  nous  avons  retrouvé  notre  liberté  d'opinion, 
et  nous  sommes  redevenus  les  représentants  au  peu- 
ple. Que  nos  successeurs  aient  toujours  sous  les  yeux 
cette  époque  fameuse,  pour  se  préserver  de  la  ty- 
rannie qui  a  pesé  sur  nous,  pour  se  préserver  de  re- 
mettre entre  les  mains  de  quelques  hommes  la  sou- 
veraineté que  le  peuple  n'a  déléguée  qu'a  l'assemblée 
entière,  pour  se  préserver  du  danger  des  popularités 
et  des  réputations  usurpées;  qu'ils  se  souviennent 
que  c'est  la  fermeté  et  la  justice  de  la  Convention 
qui  ont  réuni  autour  d'elle  des  citoyens  que  Tégare- 
ment  avait  déjà  tournés  contre  elle.  En  vain  aussi 
quelques  légataires  de  Robespierre  voudraient  alié- 
ner les  départements  des  mandataires  du  peuple,  ils 
ne  leur  repondent  que  par  les  cris  de  vive  la  répu- 
blique, vive  la  Convention  nationale!  La  Conven- 
tion saura  tenir  d'une  main  ferme  les  rênes  du  gou- 
vernement; elle  l'établira  sur  des  bases  solides,  et 
alors  chacun  de  nous ,  content  d'avoir  fait  le  bien , 
retournera  dans  ses  foyers  (vifs  applaudissements); 
car  nous  ne  voulons  pas  perpétuer  nos  pouvoirs.  Je 
demande  l'ordre  du  jour  sur  les  deux  premières 
propositions,  et  que  la  dernière  soit  adoptée. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

La  musique  exécute  l'air  Ça  irai 

L\  séance  est  levée. 

SÉANCE  DU  3  PLDVIOSB. 

Cambacêrès,  au  nom  des  comités  de  salut  public» 
de  sôrelé  générale  et  de  législation  :  Citoyens,  vos 
comités  de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  de 
législation  viennent  satisfaire  au  décret  par  lequel 
vous  leur  avez  demandé  un  rapport  sur  les  individus 
de  la  famille  Capet,  actuellement  en  France. 

Jusqu'ici  la  prudence  avait  écarté  cette  question. 
Aujourd'hui  lescirconstancessemblentexigerqu'elle 
soit  examinée,  autant  pour  tromper  des  espérances 
criminelles,  ou  pour  déjouer  des  manœuvres  perfi- 
des, que  pour  fixer  irrévocablement  Topinion  du 
peuple,  en  manifestant  les  diverses  considérations 
qui  peuvent  l'éclairer. 

Il  n'y  a  que  deux  partis  à  prendre  à  l'égard  des 
individus  dont  il  s'agit  :  ou  il  faut  les  rejeter  tous 
du  territoire  de  la  république,  ou  il  faut  les  y  retenir 
en  captivité. 

En  les  retenant,  vous  pouvez  craindre  qu'ils  ne 
soient  au  milieu  de  vous  une  source  intarissable  de 
désordres  et  d'agitations;  que  leur  présence  ne  serve 
de  prétexte  aux  malveillants  pour  calomnier  la  Con- 
vention nationale ,  et  pour  tenter,  par  des  imputa- 
tions de  royalisme,  de  diviser  le  peuple  qui  veut  la 
république  avec  ses  représentants  qui  l'ont  fondée, 
qui  l'ont  soutenue  et  qui  la  soutiendront  contre  tous 
les  efforts  des  conspirateurs.  (L'assemblée  tout  en- 
tière se  lève  spontanément,  en  s'écriant  :  Vive  la 
r^ufr/t^e/— Des  applaudissements  redoublés  écla* 
tent  de  toutes  les  parties  de  la  salle.) 

Au  contraire,  si  ces  individus  sont  bannis,  n'est-ce 
pas  mettre  entre  les  mains  de  nos  ennemis  un  dépôt 
funeste,  qui  peut  devenir  un  sujet  éternel  de  haine, 
de  vengeance  et  de  guerre?  N'est-ce  pas  donner  un 
centre  et  un  point  de  ralliement  aux  lâches  déser- 
teurs de  la  patrie?  N'est-ce  pas  leur  offrir  l'occasion 
de  renouveler  avec  plus  de  fureur  leurs  efforts  et 
leurs  tentatives  criminelles. 

Telles  sont,  citoyens,  les  idées  qui  s'offrent  d'a- 
bord à  l'esprit  de  ceux  qui  veulent  arrêter  leur  at- 
tention sur  la  question  qui  nous  occupe.  Le  premier 
devoir  de  vos  comités  était  de  vous  en  présenter  l'a- 
perçu ;  il  leur  reste  à  vous  retracer  quelques  obser- 
vations qui  ne  sont  point  étrangères  à  l'objet  de  ce 


S80 


rapport ,  puisqu'elles  ont  terri  de  point  d'appui  à 
Ta  vis  que  tos  comités  ont  cru  devoir  adopter. 

Il  ne  faut  pas  se  le  dissimuler  :  lorsqu'on  examine 
d'où  provient  cette  inquiétude ,  cette  sorte  de  mal* 
aise  août  tout  le  monde  se  plaint,  on  est  forcé  d*en 
attribuer  les  causes  à  ceux  qui  cherchent  à  persua- 
der au  peuple  que  le  gouvernement  républicain  ne 
peut  durer  longtemps. 

Que  ces  hommes  agissent  pour  établir  la  royauté 
ou  leur  pr^^prc  tyrannie  ;  qu  ils  déguisent  leurs  des- 
seins en  dénaturant  les  faits  ou  les  événements ,  ils 
veulent  tous  également  renverser  la  liberté ,  puis- 
qu'ils cherchent  à  inspirer  des  déGances ,  à  arrêter 
la  marche  de  la  Convention  nationale,  déterminée  à 
consolider  la  révolution  en  faisant  succéder  à  ses 
orages  des  jours  de  calme  et  de  prospérité. 

Que  chacun  de  nous  se  tienne  donc  en  garde  con- 
tre les  picges  qu'on  cherche  à  nous  tendre,  contre 
les  moyens  de  séduction  dont  on  nous  environne, 
et  que  la  Convention  nationale  oppose  toujours  un 
grand  caractère  aux  insinuations  qui  lui  seront  faites, 
tantôt  par  l'enthousiasme  de  la  liberté,  tantôt  par 
la  bonne  foi  abusée ,  et  le  plus  souvent  en  faisant 
naître  des  doutes  dans  les  cœurs  purs  et  dans  les 
âmes  honnêtes. 

Citoyens,  inébranlables  dans  vos  résolutions,  vous 
résisterez  à  toutes  les  suggestions;  vous  ne  sacrifie- 
rez jamais  ni  les  règles  (le  la  justice,  ni  fiiitérêtbien 
entendu  du  peuple,  à  des  applaudissements  passa- 
gers. L.e  temps  n'est  plus  où  les  circonstirices  com- 
mandaient toujours  les  décisions  :  aujourdhui  lu  ré- 
flexion doit  mûrir  toutes  nos  démarches;  tous  nos  tra- 
vaux, toutes  nos  pensées  doivent  tendre  vers  un  seul 
but:celui  d'établir  legouvernementrépublicain  parla 
pratique  des  vertus  qui  seules  peuvent  le  faire  chérir. 

Animés  de  ce  sentiment ,  forts  de  votre  exemple , 
forts  de  la  volonté  du  peuple,  vos  comités  ne  crain- 
dront point  d'énoncer  dans  cette  tribune  quelques 
opinions  utiles,  et  que  l'expérience  semble  justiner. 

Si  le  dernier  des  rois  eût  pu  voir  ses  desseins  ac- 
complis, s'il  eût  pu  porter  ses  espérances  et  sa  famille 
sur  une  terre  ennemie  au  moment  où  il  fuyait  la 
présence  de  la  liberté,  et  si  le  hasard  des  événements 
ou  le  succès  de  nos  armes  eussent  remis  dans  vos 
mains  son  fils  et  sou  héritier,  qu'auriez-vous  fait  de 
ce  rejetond'unerace  proscrite?  lauriez-vousrendu?... 
Non,  sans  doute.  {Non^nonl  s'écric-t-on  de  toutes 
parts.)  Un  ennemi  est  bien  moins  dangereux  lors- 
qu'il est  en  notre  puissance  que  lorsqu'il  passe  aux 
mains  de  ceux  qui  soutiennent  sa  cause  ou  qui  ont 
embrassé  son  parti. 

Supposons  encore  que  l'héritier  de  Capet  se  trouve 
placé  au  milieu  de  nos  ennemis  ;  bientôt  vous  appren- 
drez qu'il  est  présent  sur  tous  les  points  où  nos  lé- 
gions auront  des  ennemis  à  combattre;  Iprs  même 
qu'il  aura  cessé  d'exister,  on  l.e  retrouvera  partout, 
et  celte  chimère  servira  longtemps  à  nourrir  les  cou- 
pables espérances  des  Français  traîtres  à  leur  pays. 

On  parle  de  royalisme  :  le  royalisme  est  plutôt  le 
résultat  de  l'intérêt  que  l'opinion. 

Lu  moyen  de  le  détruire  consiste  moins  à  s'occu- 
per des  rejetons  des  rois  qu'à  fortifier  le  gouverne- 
ment qui  les  a  proscrits. 

Tout  se  réunit  donc  en  faveur  de  l'opinion  que 
vos  comités  ont  arrêté  de  vous  proposer.  Fourrez- 
vous  être  retenus  par  des  considérations  personnel- 
les? Non  :  le  courage  qui  sait  braver  tous  les  dangers 
ne  redoute  point  des  clameurs  désavouées  par  le 
suffrage  de  la  raison. 

11  ne  faut  point  d'ailleurs  s'y  méprendre  ;  la  calom- 
nie cherchera  toujours  à  vous  atteindre,  soit  que  les 
restes  des  Capet  soient  bannis,  ou  que  vous  les  gar- 
diez en  captivité  ;  on  pourra  également  dire  que  vous 
conservez  les  rejetons  des  rois  pour  relever  le  trône. 


ou  que  vous  les  livrez  tm  ennemis  pour  leur  fournir 
un  moyen  nouveau  d'attaquer  la  république. 

Suivez  donc  la  route  que  vous  prescrivent  la  sa- 
gesse et  l'énergie. 

La  sagesse  vous  ordonne  la  défiance;  Ténergle 
veut  que  vous  frappiez  tous  les  ennemis  de  la  liberté. 

Prenez-en  de  nouveau  l'engagement  avec  le  peu- 

Iile  :  vous  avez  hier  renouvelé  votre  serment  contre 
a  royauté  et  pour  la  république;  tonte  la  France 
confirmera  votre  serment  par  tes  siens.  Dites  à  vos 
concitoyens  que  la  révolution  du  9  thermidor  a  été 
foite  pour  affermir  la  république,  en  l'établissant  sur 
les  bases  immortelles  de  toutes  les  vertus. 

Que  si  des  fanatiques  et  des  scélérats,  attribuant 
la  diute  de  leurs  fers  au  triomphe  de  leurs  erreurs, 
et  non  aux  sentiments  de  la  justice  et  de  la  géiiéro- 
sité,osaient  encore  menacer  la  liberté  publique,  alors 
la  foudre  qui  écrasa  Robespierre  et  ses  complices 
tomberait  ae  vos  mains  sur  ta  tête  des  conspirateurs 
et  sauverait  encore  une  fois  la  patrie. 

Qu'on  ne  cherche  donc  plus  à  inquiéter  les  bons 
citoyens  en  leur  parlant  sans  cesse  d*un  régime 
proscrit;  que  les  malveillants  sachent  que  la  Con- 
vention a  toujours  les  yeux  ouverts  sur  eux ,  que 
lorsque  l'attention  du  peuple  est  fixée  sur  de  grands 
objets  elle  ne  permettra  pas  qu'on  la  laisse  facile- 
ment attirer  sur  d'autres,  et  ou'on  conspire  ainsi  , 
contre  la  surveillance  en  cherchant  à  la  détourner. 

Citoyens,  avec  l'énergie  du  peuple,  le  courage  de 
ses  représentants  et  les  victoires  de  nps  phalanges 
républicaines,  que  peut-il  rester  aux  royalistes,  sinon 
l'impuissance  et  le  désespoir? 

C'est  donc  sur  la  raison  autant  que  sur  l'intérêt 
public  qu'est  fondé  l'avis  de  vos  comités. 

Il  y  a  peu  de  danger  à  tenir  en  captivité  les  indi- 
vidus de  la  famille  Capet;  il  y  en  a  beaucoup  à  les 
expulser.  L'expulsion  des  tyrans  a  presque  toujours 
préparé  leur  rétablissement;  et  si  Rome  eût  retenu 
les  Tarquins,  elle  n'aurait  pas  eu  à  les  combattre. 

Représentants,  la  liberté  du  peuple  n'est  assurée 
que  pur  IVxercice  de  sa  souveraineté;  mais  là  où  la 
souveraineté  du  peuple  existe, il  n'est  plus  de  retour 
pour  la  royauté  ni  pour  aucune  autre  tyrannie.  (On 
applaudit  à  plusieurs  reprises.) 

Voici  le  projet  de  décret  : 

«  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu  ses  co- 
mités de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  de  législation, 
sur  la  proposition  de  faire  un  rapport  concernant  les  indi- 
vidus de  la  famille  Capet,  artuclicment  en  France,  passe 
à  Tordre  du  jour. 

«  La  Convention  nationale  décrète  rinsertion  de  ce  rap- 
port et  du  décret  au  Bulletin  de  correspondance.  • 

L'assemblée  adopte  à  Tunanimité  le  projet  de  décret. 

Brival  lit  un  discours  dans  lequel  il  établit  une  opinion 
tout  opposée  à  celle  des  comités  ;  il  pense  qu^après  avoir 
coupé  Parbrc  il  faut  en  extirper  les  racines,  qui  ne  peu* 
>  vent  que  porter  des  fruits  em|)oisonnés» 

Quelques  traits  de  ce  discours  donnent  lieu  à  de  vives 
réclamations» 

Brival  dit  qu*U  s'étonne  qu'au  milieu  de  tant  de  crimes 
inutiles,  commis  avant  le  9  iliermidor,  on  ait  épargné  les 
restes  d'une  race  impure.  (Il  se  lait  un  vif  soulèvement.  ) 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Il  n'y  a  pas  de  crimes  utiles. 

Les  plus  vifs  applaudissements  éclatent  de  toutes  parts. 

On  demande  que  Brival  soit  rappelé  à  Tordre. 

Brival  :  Je  m'y  rappelle  moi-même. 

Il  ajoute  que  la  guerre  de  la  Vendée  ne  s'est  faite  qu^au 
nom  de  Louis  XVII. 

Chazat.  :  Eh  bien ,  voulez- vous  qu*on  l'y  envoie 
pour  la  terminer? 

Enfin ,  Bnval  fonde  son  opinion  sur  Texerople  des  Ro- 
mains, qtii  bannirent  jusqu*au  dernier  des  parents  de  Tar^ 
(|uin.  —Cette  opinion  n'a  pas  de  suite,  et  rassemblée 
mainlicut  son  décret*  (  La  §uitê  dêmmn,  ) 


GAZETTE  NATIONALE ..  LE  HONITEUR  UNIVERSEL. 

N^  126.  Sextidi  6  Pluviôse,  l'an  3«.  (Dimanche  25  Janvieb  1795,  vieux  ilyle.) 


POLITIQUE. 

PRUSSE. 

Berlin ,  iê  3  janvier,  •—  La  coar  vient  de  publier  des 
lettre»  palentet  relatifement  à  l'insurrection  de  la  Prusse 
méridionale. 

Frédéric-Gaillaume  oommence  par  annoncer  que  la  li- 
berté va  éire  rendue  à  tous  les  prisonniers  polonais  tom* 
bés  entre  les  mains  des  Prussiens.  On  leur  donnera  des 
passeports,  après  avoir  obtenu  d^euz  Ja  promesse  de  ne 
plu»  porter  les  armes  contre  la  Prusse  ;  on  répuriira  dans 
les  armées  ceux  qui  voudront  prendre  service  ;  les  autres 
seront  renvoyés  chez  eux. 

La  cour  déclare  ensuite  qn*elle  est  affligée  de  ne  pou- 
foir  comprendre  dans  cette  amnistie  les  vassaux  et  sujets 
delà  Prusse  méridionale.  Néanmoins,  pour  concilier  la 
clémence  avec  Tétroile  justice ,  elle  ordonne  ce  qui  suit  :     | 

■  1*  Que  tout  gentilhomme  et  tout  ecclèiiastique  de  la  > 
Prusse  méridionale,  ainsi  que  tous  officiers  royaux  et  [ 
tous  fonctionnaires  dt  s  villes  qui  ont  pris  part  d*une  façon   ^ 
quelconque  à  rinsurrcclion ,  ou  se  sont  éloignés  de  la 
Prusse  méridionale  pcudunt  les  derniers  troubles,  aient  à 
se  présenter  en  personne,  ou ,  en  cas  d*empécbement  in- 
surmontable, à  s'annoncer  par  écrit,  pour  déduire  les 
motifs  qui  leur  ont  fait  prendre  part  à  Tinsurrection,  ou  à 
s'éloigner  de  la  province.  C'est  d'ici  au  i*'  janvier  1795 
que  cela  doit  se*  faire,  el  ce,  sous  peine  de  confiscalion  de 
tous  biens  et  terres,  de  même  que  la  perle  de  tout  emploi 
et  dignité. 

c  3*  Tonte  négligence  mise  ft  ce  qui  vient  d^étre  or- 
donné, et  à  le  faire  dans  le  terme  prédusif  qui  a  été  fixé, 
entraînera  aussitôt  le  séquestre  de  tous  les  biens  de  chaque 
insurgent,  el  le  procès  de  confiscation  sera  commencé  sans 
délai,  par  le  ministère  public,  par>deva^t  les  régences, 
qui  en  décideront  conformément  à  ce  que  les  lois  ont  statué 
contre  pareille  désobéissance. 

c  8*  Ceux  qui  à  bon  escient ,  et  de  propos  délit)éré,  ont 
travaillé  à  amener  Tins urreci ion ,  ou  ont  favorisé  les  enne- 
mis de  Textérieur,  ou  ont  établi  des  commissions  de  police 
et  de  guerre,  ou  en  ont  dirigé  les  séances,  ou  ont  publié 
des  universaux  et  des  mandais,  ou  ont  eiigé  des  livraisons 
d'armes,  de  fourrages  et  de  vêlements,  ou  ont  destitué  de 
nos  oiBciers,  ou  ont  désorganisé  des  villes,  enlevé  des 
caisses,  donné  des  quittances  pour  payements  faits  du  mon- 
tant des  impositions  publiques,  ou  se  sont  conduits,  de 
telle  autre  manière,  en  sujets  incontestablement  rebelles, 
seront  mis  en  état  d*arreslalion  et  traduits  aux  commissions 
parlicolièrcs  que  nous  avons  élablies  à  Breslau,  àClogau 
et4  Brieg,  lesquelles  commbsions  chargées  dMnformerde 
tous  ces  faits,  mettront  la  plus  grande  diligence  possible  à 
instruire  tous  les  procès,  à  entendre  chaque  insurgent  sur 
ses  moyens  de  défense ,  el  à  prononcer  juridiquement,  en 
exacte  conformité  avec  les  lois  criminelles  qui  sont  connues 
et  en  vigueur,  etc. 

r  Donné  ft  Beriio  »  le  10  décembre  1794. 

a  Signé  FaÉDiaio-GDiLLAUiiB.  i 

ITALIE. 

NapUs^  le  !•»  janvier.  —  Il  paraît  que  l^cscadre  an- 
glaise aux  ordres  de  l'amiral  Hoiham,  après  avoir  croisé 
quelque  temps  à  la  hauteur  des  Iles  d*Hyères,  s*est  retirée 
dans  les  ports  de  Bastia  et  de  Calvi. 

—  On  assure  qu*une  division  de  Tescadre  française  de 
Drett  doit  se  rendre  à  Toulon  pour  renforcer  la  flotte  de  la 
ftlédilerranée. 

11  est  arrivé  dans  ce  deniicr  port  un  grand  nombre  de 
bâtiments,  tous  chargés  de  blé,  venant  de  Constanlinople 
et  des  lies  de  l'Archipel. 

—  On  écrit  de  Lisbonne  que,  le  iO  novembre,  il  s'est 
manifesté  un  terrible  incendie  au  palais  de  l*Ajuda,  au- 
dessous  des  appartements  du  prince  de  Brésil.  Les  progrès 
du  feu  furent  tels  qu'en  moins  de  huit  heures  tout  le  palais 
fut  réduit  en  cendres.  On  n*a  pu  sauver  que  les  bijoux  et 

6«  Série.  —  Tome  2L 


une  partie  de  Pargenterie.  Tous  les  meubles  précieux  du 
palais  ont  été  la  proie  des  flammes.  On  évalue  à  plusieurs 
millions  la  perte  occasionnée  par  cet  accident;  quelques 
personnes  y  ont  perdu  la  vie. 

PAYS-BAS. 

Bruxelles,  te  SO  nîvose. — Pendant  que  Tannée  du  Nord 
s*avance  triomphante  dans  le  cœur  de  la  Hollande,  Tarmèe 
qui  bloque  Luxembourg  vient  d*en  commencer  le  bombar^ 
demenL  Les  assiégés,  commandés  par  le  vieux  maréchtl- 
Bender,  ont  fait  jusqu'ici  une  forte  résistance. 

—  Les  représentants  du  peuple  viennent  de  mettre  en* 
réquisition  toutes  les  forges  du  pays  de  Liège  et  du  Na- 
murois,  pour  livrer  une  énorme  quantité  de  fer  destinée 
aux  besoins  des  armées  et  de  l'intérieur  de  la  république*. 

—  On  vi.eut  de  saisir,  sur  les  bords  du  Rhin ,  des  espionp^ 
autrichiens  qui  levaienl  le  plan  des  cantonnements  fortifièa 
occupés  par  les  républicains.  On  s'attend  qu*ils  seft>nl  pu- 
nis suivant  la  rigueur  des  lois  militaires. 

— On  est  en  ce  moment  tranquille  dans  les  positions  res- 
pectives sur  les  Iwrds  du  Hbin.  Les  patrouilles ,  en  vertu 
d'une  convention  faite»  ne  se  fusillent  plus  de  l'un  à  rao- 
trebord.  ix> 


CONVENTION  NATIONALE. 

Fin  du  ditcours  tur  les  principes  (fn  gouvernement 
actuel  et  sur  les  bases  du  crédit  public,  prononcé 
par  Boissy  d'Anglas,  représentant  du  peupif^  dé» 
puté  par  le  département  de  VÀrdèche^  a  ta  séance 
du!  nivôse.  ., 

Je  viens  de  parcourir  les  bases  du  crédit  natrtmnf; 
il  me  roste  à  développer  un  troisième  mobile  de  la 
confiance  :  les  encouragements  que  vous  devez  don- 
ner à  l'industrie  et  au  commerce.  Ma  tâche  à  cet 
égard  se  trouve  beaucoup  abrégée  par  le  rapport  qui 
vous  a  été  soumis. 

Augmenter  les  productions  du  sol  et  de  rindostrie, 
voilàla  richesse  des  nations.  Les  productions  du  sof , 
outre  la  subsistance  journalière  qu'elles  procurent» 
fournissent  de  vastes  moyens  d*échaug;e  avec  les  na- 
tions étrangères,  et  des  matières  premières  aux  arts. 
Les  productions  de  l*industrie  ont  aussi  en  elles  une 
valeur  réelle;  ce  sont  elles,  à  proprement  parler, 
qui  rendent  les  nations  étrangères  véritablement 
tributaires  de  notre  industrie. 

Notre  soi,  par  sa  fécondité  et  Timmense  variété 
de  ses  ressources,  nous  assure,  par  la  surabondance 
de  quelques  productions,  de  quoi  subvenir  con- 
stamment à  celles  que  la  nature  ou  quelques  mat- 
heurs  y  ont  rendues  plus  rares.  Notre  sol  était  me-  i 
nacé  de  stérilité  par  ta  loi  du  maxinuim,  que  vous  ' 
avez  rapportée.  L^agriculture,  sur  qui  pesait  toute 
la  rigueur  de  cette  loi,  beaucoup  plus  facilement 
éludée  sur  d'autres  objets,  restait  accablée  de  la 
cherté  excessive  des  denrées  nécessaires  à  la  con- 
sommation. C'était  un  malheur  en  France  que  d'être 
condamné  à  nourrir  ses  concitoyens.  Il  fallait  tout 
l'empire  de  la  terreur  pour  contraindre  à  cette  tâche 
ceux  qu'un  dévouement  patriotique  n'y  portait  pas  ; 
aussi  la  terreur  s*appesantissait-elle  sur  la  classe 
nourricirre.  On  a  pu  voir,  après  le  9  thermidor,  ce 
que  les  mille  bastilles  de  France  contenaient  d'agri- 
culteurs ;  voilà  les  avances  que  faisait  la  tyrannie 
pour  assurer  nos  subsistances. 

Le  sol  français  va  être  rendu  par  vous  à  la  ferti- 
lité, la  charrue  à  l'honneur  et  à  la  liberté  qui  doi- 
vent récompenser  ses  travaux,  la  propriété  a  la  sé- 
curité qui  doit  encourager  ses  entreprises. 

S6 


282 


RauimczragricuUure,  vous  ranimez  lecoiumeree. 
Celle-ci  lui  confie  d(4  matî(*re8  premières  à  manu- 
fecturer  ;  elle  implore  ses  secours  pour  faciliter  ses 
échanges.  Je  ne  sais,  il  y  a  aujourd'hui  un  sentiment 
pénible  à  rappeler  I*état  de  prospmtc  qu'a  connu 
notre  commerce.  La  plus  honteuse  impéritie,  les  ri- 
gueurs les  plus  atroces  Pont  frappé  de  mort  au  mo- 
ment où  il  pouvait  seconder  les  entreprises  du  gou- 
vernement. Nous  pouvons  contempler  les  ravages 
que  nos  ennemis  ont  faits  sur  quelques  parties  de 
nos  frontières.  Notre  activité  les  a  déjà  reparés;  mais 
qui  réparera  les  ravages  que  nous  avons  exercés 
nous-niOmes  à  Nantes,  a  Lyon  ?  Il  est  deux  mots  qui 
ne  s'allieront  jamais  cnseuible;  ces  mots  sont  :  Cam" 
merce  et  terreur.  Lorsqu'on  vous  propose  le  retour 
de  celle-ci,  c'est  comme  si  Ton  vous  disait  d'anéan- 
tir à  jamais  votre  commerce. 

Ce  n'est  pas  seulement  protection  que  vous  lui 
devez,  ce  sout  des  encouragements.  Il  en  c^t  de  gé- 
néraux, et  de  ce  nombre  sont  plusieurs  des  disposi- 
tions que  vos  comités  vous  proposent,  tels  que  la 
suspension  de  l'acte  de  navigation,  tels  que  la  levée 
du  séquestre  sur  les  biens  des  étrangers,  tels  que  la 
liberté  d'exporter  Tor  et  l'argent  sous  la  condition 
d'avoir  eu  retour  des  marchaudises,  tels  que  la  levée 
ou  l'extrême  modération  des  droits  d'entrée  sur  les 
marchandises.  11  n'est  aucune  de  ces  dispositions 
qui  ne  choque  un  préjugé,  il  n'en  est  aucune  qui  ne 
soit  fondée  sur  un  principe  ;  il  fallait  notre  malheu- 
reuse expérience  pour  les  consacrer,  ce^  principes, 
et  pour  justifier  la  théorie  qui  les  présentait. 

L'acte  de  navigation  lui  seul  peut  offrir  des  avan- 
tages pour  Ta  venir,  lorsque  notre  commerce  aura 
atteint  toute  sa  splendeur.  Aujourd'hui  qu*il  s'agit 
de  le  ranimer,  il  serait  absurde  et  injuste  de  le  con- 
traindre à  fournir  une  aseurance  de  27  pour  100, 
tandis  que,  pour  un  vaisseau  neutre,  il  ne  paierait 
que  5  pour  lUO.  Vous  n'obtenez  rieu  du  commerce 
lorsque  vous  voulez  faire  violence  à  son  intérêt.  Le 
grand  art  de  l'administration  est  de  diriger  cet  inté- 
rêt vers  l'intérêt  public. 

Quant  à  la  libre  exportation  de  Tor  et  de  Tardent 
sous  la  condition  de  nous  ramener  des  marchandises, 
il  Tant  observer  que  nos  besoins  sont  impérieux  ;  que. 
le  gouvernement,  lorsqu'il  se  chargeait  lui  seul  do 
notre  approvisionnement,  avait  rccuurs  à  cette  res- 
sotirce;  ^u*à  plus  forte  raison  doit-elle  être  permise 
aux  particuliers  qui  doivent  remplir  le  même  objet. 
Il  faut  observer  surtout  que  l'argent  ne  fuit  pas  lors- 
qii'il  amène  des  marchandises,  parce  que  celles-ci  ù 
leur  tour  ramènent  lor  et  l'argent.  Leur  défaut  de 
circulation  les  rend  pour  nous  comme  s'ils  n'exis- 
taient pas.  Autrefois  il  était  plus  si\r  pour  l'avarice 
de  posséder  de  l'or  et  de  l'argent,  malgré  le  danger 
de  les  enfouir,  que  des  marchandises  qu'on  pouvait 
à  chaque  instant  enlever  pour  un  prix  niféricur;  au- 
jourd'hui il  sera  plus  avantageux  pour  le  comnter- 
cant  d'avoir  des  marchandises  qui ,  chaque  jour, 
lui  apportent  un  bénéfice,  que  de  conserver  un  or 
stérile. 

Le  commerce  a  aussi  besoin  d'encouragements 

Rarticuliers  ;  c'est  à  votre  sagesse  à  les  dispenser, 
ieu  n'exige  dans  le  gouvernement  un  discernement 
plus  sûr  et  plus  exercé  que  le  genre  d'avances  qu'on 
doit  faire  à  l'industrie,  aux  manufactures  et  au  com- 
merce. La  prodigalité  à  cet  éçard  favorise  d'un  côté 
le  charlatanisme  habile  à  séduire  par  de  grandes 
promesses,  et  de  l'autre  elle  entretient  l'inertie. 

Songez  bien  que,  dans  tout  ce  que  vous  entrepre- 
nez pour  la  restauration  du  commerce,  vous  avez  un 
auxiliaire  plus  puissant  que  vous:  le  besoin.  Stimu- 
lez son  activité,  favorisez  son  énergie  ;  voilà  tout 
votre  emploi. 


Sans  doute  nous  pouvons  placer  de  grandes  espé- 
rances dans  cet  esprit  actif  rt  ingénieux  des  Fran- 
çais. Après  les  violentes  agitations,  après  les  gran- 
des catastrophes  des  révolutions,  il  est  un  besoin 
de  produire  et  de  créer  ,  et  qui  fermente  dans  tous 
les  esprits. 

Cette  abondance  de  notre  numéraire,  que  nous 
contemplons  avec  effroi,  est  elle-même  une  source 
productive.  Lors  des  premières  émissions  d'assignats, 
un  esprit  d'activité,  de  ressources,  s'était  répandu 
dans  tous  les  esprits.  L'abondance  des  capitaux  fai- 
sait qu'on  en  cherchait  partout  un  emploi  indus- 
trieux. Jamais  on  ne  s'est  plus  occupé  qu'à  cette 
époque  d'améliorations  d'agriculture.  Ceux  même 
qui,  dans  l'aveuglement  de  leurs  opinions,  ajoutaient 
peu  de  confiance  à  ce  signe  représentatif,  s*empre$- 
saient  de  le  répandre  en  réparations,  en  exploita- 
tions, en  défricnements.  Jamais  nos  manufactures 
ne  se  trouvèrent  plus  florissantes.  Et  qu'on  ne  croie 
pas  qu'il  fût  dans  la  nature  des  choses  que  cette  acti- 
vité cessât  :  le  commerce  étranger ,-  à  qui  nous  de- 
vions, se  payait  avec  nos  marchandises  ;  mais  chaque 
jour  nous  contraaions  de  nouvelles  dettes  ;  chaauc 
jour  nous  im[)ortion$  de  nouveaux  movens  a'é- 
change Qui  donc  a  fait  cesser  cet  état  oc  prospé- 
rité r  ces  mots  :  La  terreur  à  l'ordre  du  jour. 

Mais  ce  cri  sinistre,  ce  cri  d'alarme  et  de  désola- 
tion, jeté  au  milieu  de  nous  par  nos  derniers  tvrans 
comme  le  présage  des  calamités  dont  ils  allaient 
couvrir  la  France,  ne  retentit  plus  aux  oreilles  de 
nos  concitoyens.  Vous  ne  voulez  porter  la  terreur 
que  dans  l'âme  des  ennemis  de  notre  liberté.  Vous 
vous  hâtez  de  rappeler  le  câline  et  la  confiance  au 
sein  des  enfants  de  la  patrie. 

Qu'ils  travaillent  donc  à  l'envi  à  lui  rendre  sa 
splendeur;  que  ceux  que  les  différences  d'opinion 
ont  pu  séparer  un  instant  de  la  cause  de  la  liberté 
apprennent  qu'il  est  de  leur  intérêt  le  plus  cher  de 
s  y  attacher  invariablement.  La  terreur  les  avait 
comprimés;  que  la  reconnaissance  et  le  désir  de  la 
paix  les  enchaînent  à  leur  tour.  En  prouvant  qu'ils 
sont  insensibles  à  tout  autre  sentiment  que  la  orain- 
te,  en  profitant  de  la  douceur  du  régime  actuel  pour 
conspirer  contre  lui,  ils  rendraient  nécessaire,  sinon 
le  retour  au  système  de  sang  qui  a  couvert  la  France 
de  deuil,  du  moins  à  des  mesures  plus  sévères  que 
celtes  que  vous  adoptez  aujourd'hui,  du  moins  à  une 
surveillance  pénible  pour  eux,  du  moins  à  une  dér 
fiance  qui  troublerait  le  bonheur  dont  ils  peuvent 
jouir.  Qu'ils  apprennent  que  jamais  nous  ne  nous 
départirons  des  conquêtes  de  la  liberté  ;  que  jamais 
nous  n'abandonnerons  les  principes  sur  lesquels  re- 
pose le  gouvernement  républicain.  Qu'ils  sachent 
que  la  royauté  est  pour  jamais  expulsée  du  terri- 
toire français;  (ine  jamais  ces  inégalités  monstrueu- 
ses,  ces  abus  absurdes,  ce  système  d'oppression  et 
de  folie  ne  reparaîtront  au  milieu  de  nous. 

Et  vous,  voyez  les  heureux  effets  du  système  de 
justice  que  vous  avez  adopté;  voyez  vos  ennemis, 
rassurés  et  menaçants  quand  la  tyrannie  vous  oppri- 
mait, fuir  loin  de  vos  frontières,  et  méditer  pendant 
leur  retraite  sur  les  moyens  d'obtenir  de  vous  la 
paix.  Voyez  cette  Vendée,  si  artificieusement  et  si 
horriblement  entretenue,  se  calmer  et  s'adoucir 
quand  vous  lui  offrez  la  clémence  et  la  paix.  Déjà 
Lyon  se  relève  ;  déjà  le  commerce  de  cette  ville  cé- 
lèbre paraît  prêt  à  consoler  ses  habitants  des  maux 
affreux  qu'ils  ont  soufferts.  Déjà  Nîmes  et  Marseille 
renaissent  à  leur  splendeur  passée.  Nantes  et  Bor- 
deaux reçoivent  dans  leurs  ports  les  nouveaux  tri- 
buts des  deux  mondes,  que  les  spéculations  de  Tin- 
duslrie  ne  craignent  plus  de  leur  apporter.  Déjà  des 
amants  de  la  liberté  viennent  vous  donner ,  en 


283 


djhangc  du  bonheur  que  vous  leur  offrez,  les  fruils 
précieux  de  leur  ffcnie.  Ce  que  le  despotisme  avait 
tenté  vainement  de  crder  est  produit  par  vos  seules 
promesses.  Une  manufacture  considérable  d'horlo- 
gerie s'établit  à  Besançon,  et  n*attend  plus  qu*un 
regard  de  vous  pour  rivaliser  avec  celles  de  Tétran- 

grr Achevez  votre  ouvrage,  continuez  à  être 

justes  ;  car  la  justice  doit  être  la  seule  politique  des 
nations  libres  ;  consacrez  tous  les  jours  par  quelque 
nouvel  acte  de  justice  nationale,  et  voyez  ta  pro- 
spérité publique  en  être  la  récompense.  Offrez  au 
commerce  des  facilités  et  un  appui,  et  vous  le  verrez 
dans  un  instant  centupler  les  produits  nombreux  de 
votre  sol;  offrez  aux  nations  qui  vous  entourent 
protection  et  sûreté,  et  les  hommes  riches  qui  en 
font  partie  viendront  se  naturaliser  dans  vos  campa- 
gnes et  remplacer  les  traîtres  infâmes  qui  les  ont 
abandonnées,  (^ue  leurs  gouvernements  sachent«q|ue 
vous  n*aspirez  a  les  changer  qu'en  offrant  à  tousles 
peuples  le^spectacle  du  vrai  bonheur.  Compagnons 
de  la  liberté,  faites  fleurir  les  arts,  et  tous  les  peu- 
ples du  monde  viendront  jouir  au  miheu  de  vous  de 
leurs  jouissances  et  de  leurs  prodiges;  encouragez 
l'industrie  manufacturière,  et  l'Europe  entière  vien- 
dra vous  apporter,  en  échange  de  ses  créations,  ses 
plus  précieuses  richesses. 

Vous  renaissez  à  une  nouvelle  existence.  Lé  9 
thermidor  est  vraiment  l'ère  de  notre  liberté.  Sui- 
vez la  carrière  qui  vous  est  ouverte,  embrassez  d'un 
coup  d'œil  l'espace  que  vous  avez  à  parcourir,  et 
que  [es  hantés  aestinécs  qui  sont  offertes  à  la  France 
puissent  être  enfin  votre  ouvrage. 


SUITB  A  LA  SEANCE  BU  2  PLUVIOSE. 
Prétid^nct  de  liovére. 

Un  des  secrétaires  donne  lecture  des  lettres  sui- 
vantes :  , 

Les  reprêsenlanti  du  peuple  près  lesporis  èi  côtes  de 
Brest  et  de  Loricnt  à  ta  Conveniion  nationale, 

Brest,  93  nivôse,  Pan  Zt  de  la  république  fran^gaue, 
une  et  indivisible. 

«  CitOYcus  collègues ,  nous  nous  empressons  de  vous  an- 
noncer 1  arri\ée  dans  le  port  de  Lorient  de  deux  nouvelles 
prises  :  In  Miiteri'a,6c  160  tonneaux,  ullanl  de  Malaga  d 
Slockbolro,  chargée  de  vin,  raisins,  prunes,  etc.,  et  le 
GéniCt  allant  à  Londres,  chargé  de  sucre,  café  et  colons  : 
ce  dernier  bâtiment  est  dé  200  tonneaux. 

•  La  vente  des  prises  est  commencée  ici,  conforménfieiit 
au  dterrl  du  22  rrimairc,  dont  quelque»  mal  veillants  ont 
voalo  empêcher  les  effets  en  faisant  monter  plusieui-s  objets 
à  det  prix  exorbitants;  mais  l'opinion  publique,  qui  est 
très-bonne, lésa  aussitôt  frappés.  Ils  voulaient  sans  doute 
abuser  de  la  liberté  du  commerce  pour  avoir  ensuite  eux* 
mêmes  des  motifs  de  déclamer  coiiUre  elle.  Tout  a  repris 
réquilibre  que  les  circonstances  exigent,  et  les  uiarclian- 
discs  se  vendent  à  an  prix  qui  annonce  que  la  confiance 
renaît. 

«  Nous  voDS  avons  donné  connaissance  de  rindignatioo 
des  citoyens  de  Brest  contre  les  nouveaux  efforts  des  enne- 
mis de  la  liberté  dans  Pouvrage  de  Lacroix  ;  dans  le  mo» 
ment  où  ils  doimaient  une  nouvelle  preuve  de  leur  aita* 
chemcntà  la  république,  un  nommé  Verieoil,  ci-devant 
accusateur  public  du  tribunal  révolutionnaire  de  ce  depar* 
tement,  parlait  d'un  roi  et  requérait  en  son  nom.  Nous 
l'avons  fait  arrêter,  et  m>us  le  Ictons  conduire  au  comiié  de 
sûreté  générale  aussitôt  que  l'examen  de  ses  papiers  aura 
été  fait  par  le  juge  de  paix. 

«  Ce  fait  prouve  évidemment  l'intimité  qui  régnait  entre 
les  agents  du  terrorisme  et  ceux  de  la  tyrannie,  il  le  dés- 
espoir qui  les  tourmente  de  voir  succéder  la  justice  et  Thu* 
niauilé  aux  malheurs  dont  ils  ont  inondé  la  France. 

«  Salut  et  fraternité»  Villiers,  Dssaies.  a 


Jean  Debry,  représentant  du  peuple  dans  les  dé* 
parlements  de  la  Drôme,  l'Ardecheet  Vauclusêf 
à  la  Conveniion  nationale, 

«•  Citoyens  colligues,  après  avoir  renouvelé  les  autorités 
constituées  de  Valence,  cbeMieu  du  département  de  la 
Drônie,  formé  sur  des  bases  plus  justes  sa  Société  popu> 
laire,  et  fait  arrêter  trois  intrigants,  moteurs  do  séditions, 
et  que  l'indulgence  n'avait  pu  ramener,  je  pars  de  Mon- 
télimart  pour  le  département  de  Vaucluse. 

«  Je  suis  resté  quelques  jours  dans  cette  dernière  ville  « 
placée  au  centre  des  trois  départements  où  je  suis  envoyés 
j'y  ai  reçu  tontes  les  demandes  relatives  aux  subsistances  « 
et  les  otiservations  concernant  l'esprit  public  de  ces  cou* 
trées.  Sur  le  premier  point,  j'ai  terminé  hier  une  opéra» 
tion  commerciale  importante,  el  qui  promet  incessamment 
de  fournir,4>ar  son  résultai,  à  l'approvisionnement  du  Midi. 

•  Quant  a  l'esprit  général,  il  est  bon ,  très-bon  ;  tous  les 
cœurs,  toutes  les  espérances  sont  tournés  vers  la  Conven* 
tlon  nationale  et  1rs  principes  qu'elle  professe.  L'Ardècb^ 
où  la  rigueur  de  la  saison  et  le  besoin  se  font  le  plus  ?ife- 
meut  sentir,  l'Ardècbe  en  général  ne  respire  que  pour  l« 
représetitatioo  nationale  et  la  justice.  Les  plaintes  sur  la 
pénurie  des  subsistances  n'ont  que  le  caractère  de  80iif« 
france  qni  doit  fortement  intéresser  sans  alarmer. 

I  C'est  spécialement  h  Montélimart,  département  delà 
Drôme,  que  j'ai  pn  rrconnaltre  la  véritable  énergie  palrio« 
tique;  on  n'y  trouve  qa*un  seul  parti,  celui  dé  la  républi- 
que. Le  peuple  tout  entier  y  compose  la  Société  populaife, 
et  ne  veut  y  connaUre  ni  dénonciation,  ni  vengeance,  nais 
les  Bttllclins,  les  lois,  les  séances  de  la  Convention,  tout 
ce  qui  peut  le  rallier  à  elle  et  l'éclairer  sur  ses  intérêts  et 
sur  ses  droits.  J'ai  été  témoin ,  décadi  dernier,  de  l'indW 
gnation  qu'il  manifesta  unanimement  en  apprenant  que  le 
cadavre  du  royalisme  semblait'  donner  signe  d'existence* 
Les  nglcs  décadaires,  dont  cependant  le  besoin  est  instant, 
ne  surpasseront  point  en  intérêt,  aux  yeux  d*un  ix^publi- 
cain,  une  scène  aussi  touchante.  C'est  rendre  iusticeaa 
civfsmo  des  bobUants  de  ceUe  commune,  et  tout  ù  la  fois 
les  encourager,  qu'en  faire  part  à  la  Convention  nationale* 

•  Salut  et  respect.  Signé  Jbaii  Dibby.  > 

**'  :  Pendant  que  la  Convention  s'occupe  à  retirer 
une  |)artie  des  assignats  de  la  circulation,  les  mal- 
veillants cherchent  a  abuser  de  cette  mesure  en  ré- 
pandant dans  les  campagnes  qu*on  va  retirer  tous 
les  assignats,  et  que,  si  les  citoyens  gardent  leurs 
denrées,  ils  seront  bientôt  payés  en  argent.  Ces 
bruits  faux  sont  contraires  aux  intérêts  de  la  nption, 
altèrent  le  crédit  public,  et  cx|)osent  les  villes  ù  une 
disette  factice.  Je  demande,  en  conséquence,  que 
l'on  recommande  aux  autorités  constituées  de  veil- 
ler à  l'exécution  des  lois  rendues  contre  ceux  qui 
décrient  les  assignats. 

La  Convention  passe  h  Tordre  du  jour,  motivé  sur 
l'existence  de  ces  mêmes  lois. 

—  On  lit  l'Adresse  suivante  : 

Les  eiloyeni  de  Bordeaux  à  la  Convention 
nationale, 

m  Représentants,  il  existe  donc  encore  des  apôtres  de  la 
royauté  1....  Quoi  1  on  ose  invoquer  une  constitution  per- 
fide, qui,  sous  les  apparences  de  la  liberté,  nous  eût  bien- 
tôt replongés  dans  l'esclavage  1 

•  Il  ne  connaissait  pas  le  peuple  français,  Pinfâme  auteur 
de  l'ouvrage  intitulé  :  Le  Spectateur  de  ta  France,  etc* 

«Les  citoyens  de  Bordeaux  partagent  votre  indignation, 
dignes  et  fidèles  mandataires  du  peuple;  ils  applaudissent 
au  sage  décret  que  vous  venez  de  rendre  contre  le  roya- 
liste Lacroix;  ils  déclarent  ù  tous  les  libellistes  atroces,  qui 
depuis  trop  longtemps  inrectent  l'esprit  public,  que  jamais 
ils  ne  capituleront  avec  eux,  qu'ils  veulent  vivre  el  mourir 
républicains,  et  qu'ils  auront  sans  cesse  un  poignard  à  la 
main  pour  frappei  les  rois  et  leurs  partisans,  vive  la  ré' 
publique  démocratique!  vive  ta  Convention  nationale  I 
Périssent  tous  tes  tyrans!» 

Suivent  trente-sept  pages  de  signatures. 


284 


La  Convention  onloiinc  Tinserlion  de  ces  lettres 
et  (le  cotte  Adresse  au  Bulletin. 

BoissY  d*Anglas,  au  nom  du  comité  de  salut  pu- 
blic :  Par  votre  décret  du  27  nivôse  vous  avez  dé- 
truit les  craintes  que  la  malveillance  cherchait  à  ré- 
pandre sur  Tarrivage  des  subsistances  et  sur  Tétat 
des  approvisionnements  de  cette  commune  :  il  vous 
a  suffi  de  donner  au  rapport  de  votre  comité  de  salut 
public  toute  la  publicité  nécessaire.  Les  inquiétudes 
ont  disparu,  et  les  complots  des  agitateurs  ont  en- 
core été  déjoués.  Mais  il  vous  reste  h  combattre  les 
efforts  de  TégoTsme  et  de  la  cupidité  de  certains 
cultivateurs  qui,  poussés  par  l'intérêt  le  plus  sor- 
dide et  le  plus  coupable,  ne  craignent  pas  de  se 
soustraire  ouvertement  aux  réquisitions  et  à  Tap- 
provisionnement  des  marchés  pour  organiser  une 
disette  factice  et  la  faire  tourner  à  leur  proGt. 

Ne  croyez  pas  toutefois  que  cet  abus  soit  géné- 
ral ;  ne  croyez  pas  que  Ta  varice  étende  partout  son 
influence  maligne.  Non,  non!  dans  plusieurs  con- 
trées de  la  république,  nous  en  recevons  tous  les 
jours  la  nouvelle,  un  vrai  patriotisme,  un  désinté- 
ressement sans  tache  se  montrent  avec  éclat  et  se 
réunissent  pour  venir  au  secours  de  la  patrie  en 
danger. 

Dans  plusieurs  lieux,  des  cultivateurs  se  sont  con- 
certés pour  approvisionner  les  marchés  a  un  prix 
presque  égal  a  celui  que  vous  aviez  fixé  vous-mê- 
mes avant  l'abolition  du  maximum.  Ils  ne  veulent 
pas  que  la  cupidité  s*empare  de  la  liberté  du  com- 
iDerce  que  vous  avez  décrétée,  pour  porter  à  une  va- 
leur exorbitante  les  objets  nécessaires  à  la  subsis- 
tance du  peuple.  Un  tel  exemple  sera  suivi,  n*en 
doutez  pas,  citoyens  législateurs  ;  il  le  sera  dans  ces 
campagnes  que  Vous  avez  affranchies  de  la  féodalité, 
de  rimpôt  aff'reux  de  la  dfme,  de  celui  non  moins 
affreux  de  la  gabelle,  et  des  vexations  de  toute  es- 
pèce qui,  pendant  un  si  grand  nombre  de  siècles, 
s'appesantirent  sur  elles. 

Le  désintéressement  et  la  bienfaisance  doivent 
embellir  encore  le  séjour  de  Tinnôcence  et  ne  la 
paix,  et  prêter  des  jouissances  nouvelles  à  ces  hom- 
mes dont  les  âmes  simples  et  pures  semblent  n'être 
faites  que  pour  les  affections  douces.  Non ,  sans 
doute ,  ils  ne  conspireront  pas  contre  la  patrie,  ces 
houiifies  laborieux  quiTenrichissentparleurs  sueurs; 
ils  fermeront  l'oreille  à  toutes  les  suggestions  d'un 
intérêt  sordide,  et  ils  se  persuaderont  bien  que  le 
surhaussement  trop  rapiae  des  denrées  est  un  des 
moyens  employés  par  nos  ennemis  pour  attaquer  la 
république  dans  ses  ressources  intérieures.  Et  ne 
sont-ils  pas  les  frères,  les  pères  et  les  amis  de  ces 
courageux  citoyens  qui  nortent  les  victoires  de  la 
république  jusaue  dans  aes  lieux  inaccessibles  jus- 
qu'alors à  la  valeur  des  troupes  françaises?  Seraient- 
ils  moins  dignes  que  leurs  enfants  de  consolider  la 
liberté  qu'ils  ont  si  glorieusemant  désirée?  Non, 
sans  doute  ;  et  si  nous  vous  proposons  des  lois,  ce 
n'est  que  contre  quelques  individus  coupables;  ce 
n'est  que  pour  empêcher  la  majorité  de  la  nation 
d'être  souillée  par  la  présence  des  vices  qui  contras- 
tent le  plus  avec  ses  vertus  ;  ce  n'est  que  potir  em- 
pêcher que  quelques  spéculations  particulières  osent 
s'élever  sur  les  calamités  inséparables  d'une  grande 
révolution. 

Nos  collègues  envoyés  dans  les  départements  voi- 
sins de  Paris  pour  en  assurer  les  subsistances  nous 
mandent  que,  depuis  la  publication  de  la  loi  qui  abo- 
lit le  maximum,  plusieurs  cultivateurs  ont  cessé  les 
versements  des  réquisitions  faites  sur  eux,  et  que, 
pour  rendre  nulles  toutes  les  mesures  qu'on  pourrait 
prendre  à  leur  égard,  ils  vident  leurs  greniers  en 
vendant  les  grains  eo  fraude  au  double  du  prix  cou- 


rant. Quelques-uns  d'entre  eux  ont  même  poussa 
l'impudence  jusqu'à  avouer  hautement  que  ce  qui 
les  engage  à  vendre  en  secret,  c'est  qu'ils  n'osent 
demander  sur  les  marchés  et  dans  les  magasins  de 
Paris  les  prix  exorbitants  qu'ils  obtiennent  chez  eux. 

Citoyens,  vous  ne  souffrirez  pas  plus  longtemps 
cet  abus  criminel  ;  vous  combattrez  par  de  nouvelles 
mesures  la  malveillance  et  la  cupidité  jusque  dans 
leurs  derniers  retranchements,  et,  quoi  qu'en  puis- 
sent dire  vos  ennemis,  vous  ne  serez  point  en  con- 
tradiction avec  vous  mêmes.  Vous  avez  juré  de  res- 
pecter la  propriété,  et  vousserez  fidèles  à  ce  serment. 
Mais  ce  n'est  point  la  violer  que  d'exiger  que  ceux 
qui  ont  au  delà  de  leurs  besoins  en  grains  soient  te« 
nus  d'en  verser  le  superflu  dans  la  circulation,  et  de 
partager  avec  leurs  frères  un  aliment  que  la  néces* 
site  rend  en  quelque  sorte  la  propriété  de  tous. 

Vous  ne  voudrez  pas  que  la  cupidité  puisse  spécu- 
ler sur  le  retard  des  livraisons,  et  vous  ordonnerez 
que  le  prix  des  blés  requis  soit  réelé  sur  la  valeur 
courante  à  l'époque  oi!i  ils  auront  au  être  livrés,  et 
soit  payée  à  ce  taux. 

Enfin,  sans  porter  atteinte  à  votre  loi  du  4  nivôse 
et  aux  principes  éternels  qu'elle  consacre,  vous  en 
modifierez  un  article  dont  la  trop  prompte  exécu- 
tion pourrait  entraîner  quelques  inconvénients^ 
L'espace  d'un  mois  accordé  aux  communes  pour 
pouvoir  ordonner  l'approvisionnement  des  marchés 
a  paru  généralement  trop  court,  et  votre  comité 
vous  propose  de  le  proroger  jusqu'au  !«'  germinal. 
Ce  n'est  pas  d'aujourd'hui  seulement  que  la  réquisi- 
tion a  dû  être  employée  pour  approvisionner  les 
marchés  ;  dans  les  temps  ou  la  liberté  la  plus  entière 
dirigeait  le  commerce  des  grains,  on  sentait  qu'il 
était  nécessaire  de  forcer  l'approvisionnement  des 
marches  lorsque  le  commerce  n'y  suffisait  pas.  Le 
prix  seul  demcuraitlibre,  et  les  spéculations  n'étaient 
point  gênées  ;  ainsi,  en  ravivant  le  commerce,  vous 
saurez  empêcher  que  dans  aucun  cas  la  cupidité  ja- 
mais ne  puisse  le  diriger  contre  le  bien  puolic,  qui 
doit  inspirer  toutes  vos  idées. 

Voici  le  projet  de  décret  que  je  suis  charge  de  vous 
présenter  : 

«  La  Convention  nationale ,  apr^s  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  coiuilé  de  saint  public,  décrète  : 

•  Art.  I*'.  Tout  proprIétaireoucuUivaleur  soumis  à  une 
réquisition  en  grains ,  et  qui  n*y  satisfera  pas  dans  le  délai 
de  huil  jours,  sera  arrêté  et  détenu.  Les  mundats  d'arrêt 
ne  pourront  élre  lancés  que  par  les  représenlants  du  peu- 
ple. 

«  Les  cultivateurs  ou  propriétaires  détenus  qui  satisfe- 
ront aux  réquisitions  seront  de  suite  mis  en  liberté. 

tt  II.  Indépendamment  des  peines  portées  en  l'article 
précédent,  ils  seront  soumis  à  une  amende  égale  5  la  va- 
leur des  grains  qu'ils  auront  négligé  ou  refusé  de  fournir. 

c  111.  Dans  le  cas  où  des  propriétaires  de  grains  se  pré- 
tendraient dans  IMmpossibilité  de  livrer,  IfS  représenlants 
en  mission  pourront  seuls  les  dégrever  de  leur  réquisition, 
et  dans  ce  cas  ils  ne  pourront  être  inquiétés. 

c  IV.  Le  prix  des  réquisitions  sera  réglé  sur  le  prix  cou- 
rant des  marchés  à  l'époque  où  elles  auront  dû  être  exé- 
cutées, quand  même  il  serait  plus  considérable  au  moment 
de  la  livraison. 

c  V.  Dans  les  endroits  où  il  y  a  des  marchés  ôtablis  sans 
qu'il  se  trouve  de  mercuriales,  à  défaut  d'approvisionne- 
ment desdits  marchés,  le  prix  des'grnins  fournis  sur  des 
réquisitions  sera  payé  d'après  les  mercuriales  les  plus  voi- 
sines. 

«  VL  L'article  V  de  la  loi  du  h  nivôse  est  prorogé.  Bn 
conséquence,  dans  le  cas  où  les  marchés  ne  seraient  pas 
approvisionnés,  les  districts  sont  autorisés,  jusqu'au  i*'ger« 
minai,  chacun  dans  leur  arrondissement,  &  requérir  tons 
marchands,  cullivatturs  ou  propriétaires  de  graini  ou  fii« 


285 


rines,  d*en  apporter  aux  manbés  la  quanlUê  nécessaire 
pour  leur  approvisioniicmeut.  »  , 

Ce  décret  est  adopté. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  4  PLUVIOSE. 

On  lit  la  correspondance. 
Letoubnbur  (de  la  Manche)  :  Citoyens,  si  je  viens 
appeler  votre  attention  sur  un  incident ,  c'est  bien 
moins  pour  dénoncer  un  homme  qui  cesse  d'être 
dangereux  dès  qu'il  est  connu,  ou  plutôt  démasqué, 
que  pour  détruire  l'effet  d'une  sortie  Taile  à  celle  tri- 
bune par  Laurent  Lecointre ,  avec  aussi  peu  de  sa- 
gesse que  de  réflexion  ^  contre  un  de  nos  collègues 
eu  mission  dans  le  département  de  la  Manche;  il  a 
voulu  vous  persuader  que  Leg(ft  était  mal  entouré, 
et  que  par  sa  faiblesse  il  compromettait  les  vrais 
patriotes;  il  a  avancé  qu*un  administrateur  de  ce  dé- 
partement ,  nommé  Delalande,  avait  été  arbitraire- 
ment destitué  ,  et  en  faisant  un  pompeux  étalage  du 
patriotisme  de  ce  citoyen ,  il  ne  s'est  pas  contenté 
de  crier  à  l'injustice  ;  mais  il  a ,  suivant  son  usage , 
engagé  une  guerre  polémique  avec  ceux  de  nos  col- 
lègues'qui,  mieux  mformes  que  lui  des  faits  qui 
concernent  Delalande,  ont  cru  qu'il  était  de  leur  de- 
voir d'éclairer  la  justice  du  comité  de  sûreté  gé- 
nérale. 

Citoyens ,  quel  est  donc  ce  système  qui  tend  sans 
cesse  à  avilir  les  représentants  que  vous  avez  jugés 
dignes  de  votre  confiance?  Eh  quoi  !  un  de  vos  col- 
lègues destitue  un  administrateur  poursuivi  par 
l'opinion  publique  dans  tout  ce  département,  et  Ton 
cherche  ici  à  lui  en  faire  un  crime  !  Il  écarte  des 
places  les  partisans  du  système  oppresseur ,  et  les 
terroristes  trouveraient  encore  des  défenseurs  dans 
celte  enceinte. 

Lecointre  vous  a  cité  un  acte  de  patriotisme  du 
citoyen  Delalande  lorsqu'il  était  en  mission  dans  le 
département.  Ce  citoyen,  dit-il,  a  donné  des  preuves 
de  son  dévouement  à  la  représentation  nationale  ; 
maissunit-îl  à  un  guerrier  d'être  brave  un  seul  jour? 
sufTit-il  à  un  patriote  de  se  bien  montrer  dans  une 
circonstance  de  la  révolution  pour  obtenir  un  brevet 
d'impunité  de  ses  erreurs  à  l'avenir? 

Oui,  citoyens,  je  ne  crains  pas  de  dire  à  celte  tri- 
bune que  Delalande  a  mérité  sa  destitution  ;  Lecoin- 
tre demande  des  preuves  :  nous  en  produirons  ;  qu'il 
n'imaçine  pas  que  le  silence  qu'a  cru  devoir  garder 
jusqu'ici  la  députation  soit  un  aveu  tacite  de  la  faute 
qu'il  attribue  à  notre  collègue  Legot. 

Citoyens ,  on  ne  me  verra  pas  me  livrer  ici  à  des 
personnalités,  ni  troubler  Tordre  de  vos  travaux; 
mais  le  sovpçon  plane  sur  un  de  nos  collègues  qui 
mérite  toute  notre  estime  ,  et  qui  répare ,  avec  au- 
tant d'énergie  que  de  zèle,  les  maux  que  la  tyrannie 
a  causés  dans  un  département  qui  a  aussi  des  victi- 
mes à  regretter.  Il  combat  en  ce  moment  les  chouans 
qui  désolent  encore  ces  malheureuses  contrées;  déjà 
plus  de  cinquante  sont  en  son  pouvoir;  il  a  besom 
de  la  confiance  de  ses  concitoyens  pour  opérer  le 
bien. 

J'ai  cru  qu'il  élait  de  mon  devoir  de  prendre  ici  sa 
défense,  et  de  déclarer  (]ue  les  clameurs  ne  le  feront 
jamais  dévier  des  principes.  On  demande  des  preu- 
ves :  nous  en  produirons;  et  puisque  Laurent  Le- 
cointre n'a  pas  craint  de  jeter  de  la  défaveur  sur  un 
de  ses  collègues ,  il  importe  que  Legot  soit  pleine- 
ment justifié. 

Je  demande  en  conséquence  que  le  comité  de  sû- 
reté générale,  à  qui  nous  remettrons  les  pièces,  soit 
tenu  de  faire  un  prompt  rapport  sur  cette  affaire. 

L'opinant  lil  la  pièce  suivante  : 


Exlratt  dêM  registres  des  délibérations  du  eonsefl 
général  de  la  commune  de  CoutancêS,  dut!  fri- 
maire, Van  3  de  la  république. 

Le  consi'il  général»  assemblé  en  la  maisco-commane  en 
séance  publique  ; 

Sur  la  demande  réitérée  du  citoyen  Delalande  d*aD  cer- 
tificat de  civisme  ,  le  conseil  général,  considérant  que  le 
citoyen  Delalande  a  été  accusé  dans  la  Société  populaire 
d'avoir  fait  des  listes  de  proscription  de  plusieurs  citoyens 
de  cette  commune  ;  que,  pour  réponse,  il  dit  qu*ii  en 
avait  bien  d'autres  plein  ses  poches  et  ses  tiroirs,  et  qu*H 
s'en  servirait  au  besoin  ;  considérant  que  le  civisme  qu*ii 
a  affecté  était  exclusif,  despoiisque  et  tyrannique  dans 
ses  actions  comme  dans  ses  manières  et  dans  ses  propos; 
considérant  que,  par  I*ascendant  qu*il  avait  usurpé  dam 
la  Société,  il  tenait  continuellement  la  terreur  à  Pordreda 
jour  et  comprimait  ainsi  les  meilleurs  patriotes;  qu*n  a" 
été  exclu  de  cette  Société  ;  considérant  enfin  qu*il  a  été 
condamné  à  iO  livres  dMntérét  pour  propos  calomnieux 
contre  un  citoyen,  et  qu'il  n*a  pas  appelé  du  jugement, 
refuse  le  certificat  demandé. 

A  rinstant  le  citoyen  Delalande  père  a  mis  aux  mains 
du  président  une  lettre  de  son  fils ,  datée  de  Paris,  du  9 
de  ce  mois,  aux  fins  d'avoir  le  certificat  par  lui  demandé» 
Après  la  lecture  de  ladite  lettre,  le  conseil  général  a  arrêté 
qu'elle  demeurera  déposée  au  greffe  de  la  municipalité, 
comme  pièce  probante. 

Certifié  conforme.  Signé  Dbogt,  iiurfr«; 

Lbcoutans,  secrétaire-greffier» 

Lecointre  assure  qu'il  prouvera  que  Delalande 
mérite  Testimc  des  vrais  amis  de  la  liberté. 

Le  tout  est  renvoyé  au  comité  de  sûreté  générale, 
pour  en  faire  incessamment  le  rapport. 

Merlin  (deThionville)  :  Je  demande  quelenommé 
Adam ,  de  Metz ,  qui  a  été  porté  sur  la  liste  des  jurés 
du  tribunal  révolutionnaire,  en  soit  rayé.  C'est  un 
agent  de  Robespierre ,  oui  a  encore  professé  ses 
principes  depuis  la  mort  ae  son  maître. 

La  proposition  du  remplacement  est  renvoyée  aux 
trois  comités. 

Merlin  :  Je  demande  la  parole  pour  une  motion 
d'ordre. 

Toute  la  France  déplore  la  perte  du  malheureux 
Phélippeaux  ,  et  sa  femme  gémit  dans  la  misère  :  il 
lui  reste  au  Mans  une  maison  qu'où  est  sur  le  point 
de  vendre.  Je  demande  le  renvoi  de  la  motion  que 
je  fais,  de  fournir  des  moyens  d'exister  à  la  veuve  de 
notre  infortuné  collègue. 

Lecointre  (  de  Versailles  )  :  J'appuie  le  renvoi, 
mais  je  m'oppose  à  ce  que  la  vente  de  la  maison  soit 
suspendue.  J'ai  toujours  estimé  Péhlippeaux  ;  je  l'ai 
encore  défendu  dernièrement  dans  l'acte  d'accusa- 
tion que  j'ai  dressé  contre  nos  derniers  tyrans  ;  mais 
je  ne  consentirai  jamais  à  ce  qu'on  suspende  la  vente 
des  bien  nationaux  sans  un  rapport  préalable. 

Cette  proposition  est  renvoyée  au  comité  des 
secours. 

Mussrr  :  Je  demande  que  le  tribunal  que  le  co- 
mité de  législation  chargera  de  juger  les  dilapida- 
teurs  du  département  du  Cantal  soit  autorisé  à  pro- 
noncer sur  les  délits  révolutionnaires  dont  quelques- 
uns  de  ces  hommes  pourraient  être  prévenus.  Il 
faut  que  les  amis  de  la  révolution  dut)  thermidor, 
c'est-à-dire  tous  les  amis  de  la  justice,  voient  punir 
ceux  qui  n'ont  suivi  le  char  de  la  révolution  que 
pour  s'enrichir  de  ses  dépouilles.  En  les  faisant  juger 
sur  les  lieux  ,  vous  évitez  des  frais  considérables ,  et 
vous  donnez  un  grand  exemple  à  ceux  qui  vou- 
draient les  imiter ,  en  les  faisant  punir  sous  leurs 
yeux. 

Lecointre  :  Je  ne  vois  pas  pourquoi  on  investirait 
le  tribunal  criminel  du  Cantal  du  droit  de  juger  les 


286 


contre-rëvoUitionnaifes  de  ce  département.  Je. ne 
veux  de  tyran  ni  là  ni  ici.  (On  applaudit.)  Nous 
avons  un  tribunal  révolutionnaire  institué  ici  :  qu'il 
continue  ses  fonctions. 

Citoyens,  si  vous  accordez  Vattributiou  qu*on 
TOUS  demande ,  vous  donnerez  aux  passions  des  ar- 
mes nouvelles  pour  égorger  les  hommes  contre  les- 
quels elles  seraient  irritées.  Je  le  dis  avec  peine,  mais 
depuis  trois  décades  j*ai  le  cœur  navré ,  parce  que  je 
sens  qu*on,nous  entraîne  au  delà  des  bornes.  Je  de- 
mande Tordre  du  jour. 

Mdssbt  :  J'observe  que  je  ne  demande  pas  que  ce 
soit  AU  tribunal  du  département  du  Cantal  qu'on 
attribue  le  pouvoir  de  juger  les  prévenus  du  même 
département ,  mais  au  tribunal  criminel  d'un  des 
•départements  voisins,  11  importe  de  ne  pas  traduire 
les  hommes  à  Paris  ;  car ,  dès  qu'ils  y  sont ,  on  ne 
sait  plus ,  dans  le  pays  où  les  nouvelles  ne  parvien- 
nent pas ,  ce  qu'ils  sont  devenus  ;  et  leurs  partisans 
répandent  que ,  loin  de  les  mettre  en  jugement  ici , 
on  les  accueille  avec  bienveillance ,  et  ou'on  leur 
donne  des  placer  très-avantageuses.  Il  tant  eulin 
faire  cesser  ce  prestige  et  fixer  l'opinion  des  citoyens. 

La  proposition  de  Musset  est  renvoyée  au  comité 
de  législation. 

-^  Le  président  lit  la  lettre  suivante  : 

L'accusateur  public  près  le  tribunal  criminel  du 
département  de  Paris  au  citoyen  président  de  la 
Convention  nationale, 

Paris ,  ce  4  pluviôse,  an  3*  de  la  république 
une  et  indivisible. 

*  Citoyen  prësideot,  je  f  invite  ^  (îiire  part  à  la  Conven- 
tion nationale  qu*en  exécution  de  son  décret  du  30  nivôse 
dernier  Pierre  Morin  a  été  traduit  au  tribunal  criminel 
du  département,  et  jug;é  suivant  le  mode  établi  par  lanou- 

,  velle  loi  sur  Torganisation  du  tribunal  révolutionnaire. 

•  l.e  débat  a  eu  lieu  bier,  et  Pierre  Morin  a  été  déclaré 
convaincu  d*avoir  assassiné  Etienne  Olivier  avec  des  in- 
tentions contre-révolutionnaires ,  et  après  avoir  prqiosé 
rétablis.<iement  en  France  d*un  pouvoir  attentatoire  6  la 
aouveraini'té  du  peuple. 

a  II  va  stttiir  la  peine  de  mort  que  le  tribanal  a  protioo- 
cée  contre  hiL 

■  Saint,  et  vive  la  république  I 

«  5i^iie'  Fadrb.  • 

BouiiiM>N  (de  l'Oise)  :  Puisqu'on  a  trouvé  bon  de 
faire  juger  un  homme  obscur  par  le  tribunal  crimi- 
nel du  département,  on  ne  doit  pas  hésiter,  je  pense, 
à  prendre  le  même  parti  pour  celui  qui,  plus  éclairé, 
a  voulu  empoisonner  l'esprit  public  nans  un  ou- 
vrage contre  lequel  vons  vous  êtes  si  fortement 
élevés. 

Je  demande  que  Lacroix  soit  traduit  au  tribunal 
criminel  du  département  de  Paris ,  pour  y  être  jugé 
suivant  les  formes  révolutionnaires. 

Pelet  pense  que  cette  proposition  est  contraire 
aux  principes ,  et  qu'il  importe  de  ne  pas  étendre  la 
sphère  des  tribunaux  ordinaires. 

Thuriot  et  Clauzel  réfutent  cette  opinion.  La  Con- 
vention ,  disent-ils ,  chargée  de  prescrire  des  règles 
de  jugement  aux  tribunaux ,  peut  investir  tous  les 
tribunaux  révolutionnaires  des  pouvoirs  de  juger  les 
délits  contre-révolutionnaires;  à  plus  forte  raison 
a-t-elle  le  droit  don  charger  un  de  suppléer  le  tri- 
bunal révolutionnaire  qui  n'existe  pas  encore. 

La  proposition  de  Bourdon  est  décrétée. 

PoTTiER,  au  nom  du  comité  de  législation  :  La  loi 
d'il  3  pluviôse  an  2  a  établi  des  tribunaux  militaires 
pour  ju^er  tous  les  délits  commis,  pendant  la  guerre, 
à  l'armée,  ou  dans  les  camps,  cantonnements  ou 


garnisons  qu'elle  occupe ,  par  les  individus  qui  la 
^composent,  ou  qui  y  sont  employés  ou  attachés  à  sa 
suite. 

Les  tribunaux  militaires  sont  composés  d'un  nré- 
sident ,  un  vice -président ,  un  accusatear  militaire , 
un  substitut,  un  jury  de  jugement  et  un  greffier. 

Les  fonctions  du  présioent  et  du  vice-président 
sont  de  présider  à  toute  l'instruction  ;  ils  doivent  di- 
riger les  jurés  dans  les  fonctions  oui  leur  sont  as- 
signées ,  exposer  Taffaire ,  poser  les  questions ,  et 
faire  l'application  de  la  loi  après  qu'elle  a  été  requise 
par  l'accusateur  militaire. 

Il  faut  observer  ici  que  le  président  et  le  vice- 
président  exercent  leurs  fonctions  chacun  séparé- 
ment. Ils  doivent  se  distribuer  entre  eux  le  travail , 
de  manière  que  celui  de^  deux  qui  aura  formé  le  ta-» 
bleau  des  jurés  d'une  affaire  ne  préside  pas  aux  dé- 
bats ni  au  jugement  de  la  même  affaire. 

On  voit  d*après  cela  que  leurs  foDCtions,  qui  sont 
les  mêmes  ,  ne  s'exercent  pas  en  commun  ;  je  veux 
dire  que  l'un  d'eux  seulement  assiste  au  jugement 
d'une  affaire. 

La  Convention  nationale  a  prévu  le  cas  où  Tac- 
curateur  militaire,  qui,  sur  la  déclaration  des  jurés* 
requiert  l'application  de  la  loi ,  et  le  président ,  qui 
la  ùrononcc,  ne  s'accorderaient  pas  sur  la  peineappli- 
cable  au  délit.  La  loi  veut  alors  que  le  président,  le 
vice-président  et  le  substitut  de  l'accusateur  mili- 
taire se  réunissent  de  suite  pour  délibérer  en  com- 
mua et  sans  désemparer.  Ainsi  tout  obstacle  est  levé 
à  cet  égard. 

Mais  il  en  est  uil  qui  n'a  pas  été  prévu,  et  sur  le- 
quel lesdits  tribunaux  militaires  sont  incertains, 
parce  que  la  loi  ne  leur  permet  pas  de  rien  ajouter 
a  sa  disposition,  et  que  si  la  restriction  dans  les  ter- 
mes de  la  loi  doit  être  de  droit  rigoureux ,  c'est  sur- 
tout en  matière  criminelle,  et  lorsqu'il  s'agit  de  pro- 
noncer des  peines. 

Ce  cas  est  celui  où  l'un  ,des  trois  ofGciers  qui  doi-. 
vent  se  réunir  en  exécution  de  la  loi  pour  délibère? 
est  absent  ou  malade.  J'observe  que ,  dans  le  cas  dé 
la  diversité  d'opinions  entre  l'accusateur  militaire 
et  le  président,  la  réunion  doit  se  faire  sur-le-champ. 
Si  l'un  des  trois  ne  s'y  trouve  pas,  il  n'est  plus  pos- 
sible d'opérer.  La  loi  exige  le  concours  (les  trois  ; 
restreints  à  deux ,  il  pourrait  y  avoir  partage  d'opi- 
nions; un  troisième  est  donc  absolument  nécessaire. 

Mais  la  loi  se  tait  sur  celui  qui  doit  remplacer 
l'absent  ou  le  malade.- 

Ce  cas  est  déjà  arrivé ,  et  le  silence  de  la  loi  de- 
vient d'autant  plus  lûcheux  qu'il  retarde  le  juge- 
ment des  affaires  qui ,  par  leur  nature  et  pour  la 
bonne  police  nécessaire  dans  les  armées ,  doivent 
être  jugées  avec  la  plus  grande  célérité.  « 

Le  comité  a  pensé  qu'il  était  indispensable  de 
maintenir  la  disposition  de  la  loi  qui  exige  la  réu- 
nion des  trois  officiers  dans  le  cas  prévu ,  pour  pré- 
venir les  difficultés  qui  pourraient  naître  d'un  nou- 
veau partage  d'opinions  ;  et  pour  en  assurer  l'exé- 
cution  sans  délai  et  sans  embarras,  il  a  cru  que  celui 
des  trois  qui ,  pour  des  raisons  légitimes,  ne  pour- 
rait être  appelé  sur-le-champ ,  devait  être  remplacé 
par  un  oflicier  de  police  militaire,  en  observant  ce- 
pendant que  ce  ne  soit  pas  celui  qui,  dans  le  prin- 
cipe ,  aurait  commencé  l'instruction. 

Par  cette  mesure  toute  difiiculté  disparait ,  les  in- 
certitudes des  tribunaux  s'évanouissent,  le  cours  de 
la  justice  n'est  point  suspendu,  et  la  loi  du  3  plu- 
viôse continue  d'assurer  dans  nos  armées  l'ordre  et 
la  discipline  qui  sont  le  gage  certain  de  la  victoire. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  de  législation,  décrète  oomnie  article  ad- 


38' 


dHionael  à  l'crt  V  do  lllre  Xllt  de  la  loi  du  8  phivîosc 
an  2«,  sor  réiablissemeol  dts  tribunaux  militaires: 

•  Daos  le  cas  où  Tue  des  trois  officiers  désignés  par  Tar- 
tide  V  du  titre  XIU  de  la  loi  du  8  pluviôse  an  V ,  pour 
se  réunir  et  délil>érer  en  commun,  ne  pourrait  être  ap|)eté 
pour  cause  d*ubscnce  ou  maladie  «  il  sera  remplacé  dans 
cette  fonction  par  nn  officier  de  police  militaire,  autre 
néanmoins  que  celui  qui  aura  iiit  liostructioo,  ou  un  ci* 
loyen  ayant  connaissance  des  IMs  ikiilllaires,  au  choix  des 
deux  autres.  • 

Cedécret  est  adopté. 

Thibault,  \  au  nom  du  comité  dei  finances  t  Gitojeof , 
TOUS  avex  décrété  le  23  du  mois  dernier  qu*il  serait  ac- 
cordé aux  fonctionnaires  publics  et  aux  employés  dans  les 
administrations  une  augmentation  de  traitement  qui  serait 
réglée  d'après  un  rapport  de  votre  comité  des  finances:  fe 
viens  en  son  nom  remplir  votre  désir  et  leur  attente. 

Il  est  digne  d'une  nation  généreuse,  qui  a  proclamé li^ 
ju>iioe  comme  base  principale  de  son  gouvernement ,  d'é- 
lire ses  sollicitudes  et  sa  bieuveillaoce  sur  tous  les  rei- 
torts  de  la  machine  politique,  administrative  et  judiciaire; 
mais  si  tous  ê(es  les  dispensateurs  des  bienfaits  de  la  na* 
tion ,  vous  devei  vous  placer  entre  la  libéralité  fastueuse  et 
laniesquine  économie:  l'une  est  aussi  prêimiiciable que 
l'autre  à  la  prospérité  des  empires.  Si  lu  répubtfque  appelle 
à  son  service  les  talents  et  les  vertus,  elle  doit  les  garantir 
de  la  séduction  et  de  la  misère  :  elle  doit  exiger  de  Idus 
ceux  qu'elle  a  placés  en  surveillance  et  en  activité  mi  Cvlt* 
tail  assida,  delà  probitéet  du  civisme. 

An  milieu  du  tourbillon  révolutiomiaire,  des  ignortmlA, 
des  fripons  et  des  maliutentioonés  se  sont  attachés  an  diar 
de  la  Liberté;  ils  ont  entravé  sa  course  majestueuse;  vous 
écraserex  ces  insectes  politiques;  ils  feront  place  aux  bott* 
mes  instruits,  probes  et  de  bonne  foi.  Vous  simpliieTetla 
machine  en  brisant  les  ressorts  inutiles  :  vous  supprimeres 
le  grll((Hinage  des  bureaux  ;  vous  reporteres  sur  les  rayons 
ce  que  la  circonférence  envoie  au  centre  pour  en  paralyser 
raetltité  ;  enfin  vous  rendrez  aux  citoyens  la  justice  dans 
lenr  domicile,  en  punissant  ceux  qui  la  leur  refusent. 

Vous  voulei  un  gouvernement  ;  eh  bien ,  pour  rétablir 
solide  et  durable,  il  faut  que  vous  teniez  d'une  muin  forme 
la  balance  exacte  et  rigoureuse  entre  les  recettes  et  les  dé- 
penses fixes.  Me  promettes  pas  sur  cet  objet  phis  que  vow 
ne  pouvei  tenir  un  jour. 

Quant  aux  dépenses  extraordinaires,  vos  ressources  sont 
Immenses;  vos  ennemis  serout  vaincus,  et  vous  sem  en- 
core riches. 

Il  vous  reste  de  grandes  économies  à  faire  ;  vous  charge- 
rez votre  comité  de  vous  en  présenter  le  tableau.  Portez  un 
œifïév^e  sur  toutes  les  parties  de  l'administration  ;  corri- 
ges les  abus  :  vous  bonifierez  les  recettes.  Sachez  que  les 
postes  rapportaient  jadis  au  trésor  public  12  millions  ;  au- 
jourd'hui eliesen  coûtent  8  ;  la  différence  est  de  20  millions. 

La  permanence  des  conseils  généraux  de  district  coùic 
plus  de  7  millions,  les  comités  révolutionnaires  au  moins 
12  millions.  Le  nombre  des  tribunaux  civils  peut  être  di- 
minué sans  danger.  On  dit  qu'il  faut  rapprocher  les  plai- 
deurs des  iuges,  et  moi  je  crois  qu'il  faut  les  en  éloigiier  ; 
car  on  a  remarqué  que,  dans  les  communes  dans  lesquel- 
les il  n'y  avait  ni  huissiers  ni  procureurs,  il  y  avait  infini- 
ment peu  de  procès  ;  l'expérience  et  la  bonne  foi  peuvent 
attester  cette  vérité. 

Les  travaux  publics  et  l'instruction*  sans  nuire  en  au- 
cune manière  au  progrès  des  sciences  et  des  arts  »  ouvrent 
une  grande  carrière  à  l'économie. 

En  général ,  peu  d'hommes  instruits  et  bien  payés  of- 
fienlplusdetravrail  que  la  multitude  ignorante  et  orgueil- 
leuse. Je  le  dirai  sans  crainte  :  aprùs  la  malveillance,  c'est 
l'ignorance  qui  est  notre  plus  cruel  ennemi.  Invites  tous 
les  citoyens  qui  ont  du  goùi  pour  l'agriculture,'  les  arts, 
le  commerce,  à  se  livrer  à  ces  heureuses  spéculations,  qui 
sont  la  ba<>e  de  lu  prospérité  publique  :  les  sciences  et  l'in- 
dustrie élèvent  rame,  sont  les  ennemies  de  la  tyrannie  et 
le  soutien  de  la  liberté. 

Votre  comité  efit  bien  désiré  pouvoir  vous  offrir  la  iio- 
mcnclalure  et  le  tableau  des  traitements  de  tous  les  fonr- 
tionnaires  publics  civils,  et  des  employés  de  leurs  bureaux  ; 
mais  les  lois  sont  trop éparses  ou  tusuffisanlcs,  et  beaucoup 


dechoses  ont  été  abandonnées  ft  Tarbitraire.  Par  exempfo, 
d^uis  que  les  frais  d'adminbtration  ne  sont  plus  payés 
par  les  sons  additionnels,  les  empfoyés  de  ces  administra- 
trations  ont  été  augmentés,  peut<étre  en  nombre,  mais 
bien  certainement  en  salaire.  Un  arrêté  du  comité  de  sa» 
lut  public  avait  opéré  une  légère  réduction  ;  mais  l'applica» 
tion  n'en  est  pas  connue,  parce  que  les  administrations 
intérieures  ne  sont  pas  en  compte  couranL 

Pour  remédier  à  ce  défaut  de  connaissances,  votre  co* 
mité  vous  propose  de  poser  des  bases  d'après  lesquelles 
vous  répartirez  l'indemnité  provisoire  que  vous  voulez  ac- 
corder. Il  a  pensé  que  votre  intention  était  de  donner  plus 
à  ceux  qui  ont  moins,  sans  détruire  l'échelle  de  proportion 
sur  laquelle  repose  l'émulation  que  vous  voulez.  Il  a  donc 
divisé  les  traitements  en  dix  classes,  et,  k  côté  de  cliaeune 
d'elles,  il  a  placé  les  indemnités  provisoires /qui  iront  en 
décroissant  par  fractions  décimaîes,  en  remontant  de  1% 
dixième  classe  jusqu'à  la  première  exclusivement* 

Voici  le  tableau  tel  qu'il  l'a  imaginé. 

Le  rapporteur  lit  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  lerap« 
port  de  son  comité  des  finances,  décrète  ce  qui  suit  : 

«  Art.  1*'.  Les  fonetîounaires publics  des  administrations 
civiles  et  leurs  employés  dont  les  traitements  sont  corrcspon* 
dants  au  tableau  ci-dessous  recevront  une  indemnité  provi- 
soire, calculée  d'après  la  classe  dans  laquelle  ils  se  trou- 
veront placés. 

TahUau  des  Iraiitmenti» 


Traitements  suppOiiés 
Par  mois. 


Indemnités 
Pan 


l'*  classe.  ,  .  . 
9*  classe,  •  •  • 
8"  classe.  .  •  . 
4*  classe.  .  .  • 
5^  dassc.  .  .  . 
9*  classe.  .  •  . 
7*  dhssr.  .  .  . 
8"  cfAsse.  •  •  • 
9*  élaste.  •  •  • 
10*  efosst*.  .  •  • 


1,000  1. 
800 
600 
500 
400 
300 
200 
150 
100 
•75 


•  •  •  •  Rien. 
....  80  U 
.  •  •  •  420 
....  150 
....  160 
....  150 
.  ...  120 
.  ...  105 
....  70 
....    67  I.  10  s. 


«  II,  Ceux  doM  ^s  traitements  sont  intermédiaires  aux 
difféçenlet  elassfs  recevront  une  indemnité,  calculée  sur 
la  classe  inférieure  A  leur  traitement  actuel. 

f  UU  Ceux  dont  les  traitements  sont  au  dessous  de  la 
dixième  classe  recevront  en  indemnité  une  sopime  égale  à 
leur  traitement  actuel. 

«  IV.  Les  traitements  des  fonctionnaires  publics  et  des 
employés  dans  leurs  bureaux,  ainsi  que  les  indemnités  ac- 
cordées par  le  pnteent  décret ,  seront  payés  le  dernier  jour 
de^aque  atols. 

•  V.L'iBdnnnitèneoordée  tm  vertu  du  présent  décret 
aura  lieu  àeonplerdu  !•' nivôse  dernier  ;  mais  ceux  fui 
ont  reçu  des  augmattalions  dans  les  administrations  de  dé- 
partement les  feront  entrer  en  compensation  de  la  pré- 
sente indemnité. 

a  VLLes  commissions  executives,  administrations  pu- 
bliques et  tribunaux  feront  passer,  dans  le  délai  d*un  mois, 
aux  commissaires  de  la  trésorerie  nationale ,  l'état  désap- 
pointements des  employées  dans  leurs  bureaux,  et  des  in- 
demnités accordées  en  vertu  do  présent  décret,  et  les 
commissaires  de  la  Uésoreru  nationale  présenteront,  dans 
le  mois  suivant ,  le  relevé  général  desdiU  états. 

•  VIL  Le  comité  des  finances  présentera,  dans  une  déca- 
de, des  moyens  d'économie  qui  puissent  surpasser  les  dé- 
penses résultant  du  présent  décret.  Il  est  autorisé  à  régh  r 
les  traitements  qui  n'ont  point  été  fixés  jusqu'à  ce  jour,  t 

Chariier  demande  que  l'effet  rétroactif  ait  son  effet  à 
compter  du  1*'  vendémiaire. 

Thibault  :  Dobord  le  vœu  da  comité  avait  été 
conforme  à  la  demande  de  Chariier;  mais  si  ras- 
semblée a  décrété  pour  ses  membres  raugmenlatioii 
d'indemnité  a  compter  du  !«'  vendémiaire,  c'est 
qu'ils  sont  tous  à  poste  fixe  depuis  le  mois  de  sep- 
tembre 1792.  Les  fonctionnaires  publics  ont  au  cort- 
liairc  été  changés  souvent ,  surtout  dans  ce^  dcr- 


388 


nicrs  temps  ;  it  faudrait  donc  que  l'effpt  rétroactif,  à 
compter  du  l^r  vendémiaire  n'eût  au  moins  lieu  que 
pour  ceux  qui  étaient  en  place  à  cette  époque. 

L^assemblée  adopte  le  projet  de  décret  tel  que  Thibault 
Ta  présenté. 

SALADin.aa  nom  de  la  commission  des  Vingt-et- 
Un  :  Depuis  sa  formation,  la  commission  s'est  con- 
stamment et  sans  interruption  livrée  à  Texamen  dont 
Tousravezchargée.LanaturedesfaitsetIa  multitude 
des  pièces  ne  lui  permettent  pas  encore  de  fixer 
Tépoque  où  son  travail  sera  achevé.  Elle  vient  au- 
jourd'hui ,  par  mon  organe ,  vous  soumettre  une 
difficulté  qu  a  éprouvée  la  première  commission,  oui 
«'est  élevée  dans  son  sein ,  et  qu'elle  n'a  pas  cru  de- 
voir trancher  elle-même. 

Saladin  lit  les  article  III  et  IX  de  la  loi* 

Il  continue  : 

«  Les  uns  ont  ero  qu*)!»  oe  ponvalent  se  II? rer  à  Teia- 
men  que  des  pièces  qui  leur  ont  été  ou  leur  seront  remi- 
ses parles  comités;  les  autresoot  pensé  qu'établis  par  vous 
pour  examiner  les  faits  dénoncés  ils  devaient  s*aider(le 
toutes  les  lumières  qui  pouvaient  leur  paraître  propres  à 
éclairer  leur  conscience  et  les  mettre  à  même  d*éclairer  la 
vôtres  qu*eD  un  mot  si  leur  rapport,  aux  termes  de  Parti- 
de  IX,  ne  doit  porter  que  sur  les  faits  compris  dans  la  dé* 
nonciation  ou  résultant  des  pièces  remises  par  les  trois  co- 
mités, il  ne  leur  était  pas  interdit,  quMl  était  même  de 
leur  devoir  de  s'environner  de  tous  les  genres  de  preuves , 
«oit  à  cbarge,  soit  à  décharge ,  qui  peuvent  venir  à  Tappui 
de  ces  mêmes  Taiis.  » 

Merlin  (de  Douai  )  :  Pour  bien  sentir  l'esprit  ùc 
la  loi,  il  faut  se  rappeler  la  manière  dont  elle  a  été 
faite;  ce  futMcaullequi  demanda  que  la  commis- 
sion ne  pût  pas  connaître  de  nouveaux  faits;  s^  pro- 
position fut  rejetée  d'abord;  je  la  reproduisis,  en  fai- 
sant sentirque  l'intention  de  Méaul le  était  seulement 
Sue  la  commission  ne  reçût  pas  les  pièces  tendant  à 
énoncer  des  faits  autres  que  ceux  sur  lesquels  les 
comités  auraient  déclaré  qu'il  y  avait  lieu  à  examen, 
mais  non  pas  d'empêcher  cette  commission  de  rece- 
voir, recueillir  et  rechercher  toutes  les  pièces  à 
charge  oU  à  décharge ,  propres  à  éclairer  sa  con- 
science et  à  fixer  son  opinion  sur  les  laits  dont  elle 
doit  connaître ,  et  sur  lesquels  elle  doit  faire  un 
rapport. 

Merlin  (de  Doaai)  propose,  et  rassemblée  décrète 
Tordre  du  jour*  motivé  comme  il  suit  : 

■  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  la  eom- 
Bîon  des  VIngi-et-Un  sur  la  question  de  savoir  si,  d*après 
Tartide  IX  de  la  loi  du  8  brumaire  dernier,  elle  doit  ren- 
fermer son  examen  dans  les  pi^-ces  à  elle  remises  par  les 
comités  de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  de  législa- 
tion, ou  si  elle  doit  s'environner,  tant  à  cbarge  qu'à  dé- 
charge ,  de  tous  les  genres  de  preuves  qui  peuvent  être  re- 
latifs aax  Talis  compris  dans  la  dénonciation  ou  résultant 
des  pièces  remises  par  les  trois  comités; 

fl  Passe  à  Tordre  du  jour,  motivé  sur  ce  que  Porticle  IX 
de  la  loi  du  8  bnimaire,  en  obligeant  la  commission  de 
resfreindreson  rapport  aux  faits  compris  dans  la  dénoncia- 
tion ou  résultant  derpièces  à  elle  remises  par  les  trois  co- 
mités, n*a  pas  entendu  lui  ôter  la  faculté  ni  la  dispenser 
du  devoir  de  recbereber,  recueillir  et  recevoir  tous  les  do- 
cuments qui  peuvent  servir  à  manifester  la  vérité  relative- 
ment à  ces  mêmes  faits.  • 

—  Daujon  sonmet  a  rassemblée  un  projet  de  décret  sur 
le  mode  d'envoi  des  lois;  il  sera  imprimé,  et  discuté  de- 
main. 

—  Pelet,  au  nom  du  comité  de  salut  public,  fait  un  rap- 
port sur  la  situation  des  colonies  ;  il  retrace  les  malheurs 
qui  les  ont  désolées,  et  les  fautes  nombreuses  commises 
dans  cette  partie  du  gouvernement  ;  Il  propose  divers  re- 
mèdes, et  parllcollèrement  Tenvol  de  représentants  du 
peuple  sur  les  lieux. 

Bailleul:  J*applaiidisaux  vues  des  comités,  mais 


je  les  crois  urëmaturées.  Je  pense  qu*avant  tont  il 
faut  rechercher  et  reconnaître  les  auteurs  des  désas- 
tres des  colonies,  sans  auoi  il  pourrait  arriver  qu'on 
fût  encore  trompé  par  tes  mêmes  hommes  ;  que  les 
représentants  qu'on  enverrait  seraient  entourés, 
égarés  par  eux ,  faute  de  les  connaître.  Dans  cette 
aiTaire  les  mêmes  individus.sont  accusés  et  accu- 
sateurs. 

Santhonax  et  Polverel  imputent  les  malheurs  des 
colonies  aux  colons  qui  sont  ici  ;  ces  colons  les  im- 
putent à  Polverel  et  Santhonax,  et  les  accusent  d'a- 
voir vexé ,  incarcéré  les  patriotes.  A  la  vérité ,  les 
papiers  que  la  commission  doit  examiner  sont  im- 
menses ;  mais  pourquoi  ne  pas  entendre  contradic- 
toirement  ceux  oui  s'accusent  mutuellement;  c'est 
ce  qu'ils  demandent ,  et  la  lumière  sortira  de  ces 
débats. 

Je  demande  :  P  que  d'ici  à  trois  jours  la  commis- 
sion des  colonies  entende  côntradictoiroment  San- 
thonax, Polverel  et  les  colons  ;  qu'elle  fasse  recueil 
lir,  imprimer  et  distribuer  ces  débats;  2o  que  la 
discussion  du  projet  de  Pelet  soit  ajournée  jusque-là. 
(On  applaudit.) 

Un  membre  combat  la  proposition  d'envojtr  des  rs|iré« 
sentants  dans  les  colonies. 

La  première  proposition  de  Bailleol  est  décrétée* 

On  demande  la  parole  sur  ra}oonieinent« 

Barbas  :  Je  me  suis  étonné  souvent  dn  silence 
affligeant  qu'on  a  ^ardé  sur  les  colonies,  de  l'aban- 
don où  on  les  a  laissées.  Vous  avez  de  grands  cou- 
pables à  punir.  (On  applaudit.)  Puisque  vous  venez 
de  décréter  qu'on  entendrait  contradictoirement, 
d'ici  à  trois  jours,  ceux  dont  les  aveux  pourront  faire 
connaître  les  coupables,  votis  ne  pouvez  pas  discuter 
sur-le-champ.  Moi  aussi  j'aurai  des  .vérités  à  révéler 

3uand  on  traitera  la  question  au  fond  ;  moi  aussi  je 
onnerai  des  renseignements  précis  sur  les  causes 
qui  nous  ont  fait  perdre  une  des  plus  précieuses 
portions  des  colonies.  Il  y  a  deux  ans  qu  on  voulut 
également  y  faire  passer  notre  or,  et  que  deSgens 
que  le  glaive  de  la  loi  a  frappés  depuis  voulaient  s'y 
réfugier.  Je  trouve  le  rapport  du  comité  bien  fait  ; 
mais  il  est  telle  partie  de  ce  rapport  qui  demande  de 
grands  développements. 

On  a  dit  qu'il  ne  fallait  pas  déchirer  le  voile  ;  je 
suis  d'une  opinion  contraire  :  s'il  l'eût  été  il  y  a  un 
an,  si  la  Convention  eût  été  éclairée,  nous  aurions 
évité  des  malheurs  horribles  aux  colonies.  L'atta- 
chement qu'elles  nous  ont  montré  prouve  assez  que, 
si  elles  eussent  reçu  quelque  secours  de  la  métro- 
pole ,  nous  ne  les  aurions  pas  perdues*  (Vifs  ap- 
plaudissements.) 

Barras  appuie  l'ajournemenU 

Un  membre  demande  que,  comme  la  commission  n'a  ù 
examiner  que  ce  qui  s'est  passé  dans  les  Iles-du-Vent,  cm 
n*ajourne  que  la  partie  du  rapport  qui  concerne  ces  lies, 
et  qu*on  discute  incessamment  celle  relative  à  d'autres  co- 
lonies non  moins  intéressantes,  et  qui  ont  paiement  M  . 
abandonnées. 

Ces  deux  propositions  sont  décrétées. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie* 

LIVBES  DIVEBS. 

Traité  ilimeniaire  de  Statique  k  Tusage  des  élèves  (te 
la  marine,  piir  Gaspard  Mongc;  seconde  ddilion,  in>S*.  I^rix  : 
8  liv.,  broche. 

—  L'Indicateur  des  commissions  executives,  contenant  les 
attributions  de  chaque  commission  eu  agence ,  avec  leitr 
adresse  et  les  noms  des  chefs  de  bureau;  in-lS.Prix  :  6  liv., 
brocàc. 

A  Paris,  chei  Poulin ,  imprimcui^libr.iire,  me  des  ^ères, 
n«  0;  et  Petit,  libraire,  rue  do  Bac,  n*  40»,  vis^vis  le  met* 
ché  de  BoulaiQvilliers« 


GAZETTE  NATIONS ..  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


N*  127. 


Septidi  7  Pluviôse,  Van  3*.  {Lundi  26  Janvibb  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ANTILLES. 

Du  30  octobre,— '  La  fille  de  Saint-Marc  n'est  point  eo* 
corc  tombée  entre  les  maint  des  républicains,  mais  on  sait 
qu*elle  ne  peut  plus  faire  une  longue  résistance.  Le  manque 
de  munitions  a  empêché  le  succès  des  premières  attaques. 
Ils  ont  pris  des  précautions  telles  qu'ils  doifent  se  rendre 
immanquablement  maîtres  de  la  ville.  Les  deux  lien  en 
sont  malheureusement  réduits  en  cendres.  D^s  que  les  cou- 
leurs tricolores  eurent  été  aperçues  au-dessus  delà  fille, 
le  nafire  américain  Us  Deux-Frères ,  qui  était  en  rade, 
ae  disposa  à  mettre  à  la  voile  ;  les  Anglais  tirèrent  dessus 
et  lui  firent  essuyer  deux  bordées.  Les  Américains  ont  reçu 
les  plus  mauvais  traitements  de  la  part  deceui  des  Français 
qui  se  sont  soumis  au  gouvernement  britannique. 

-*  On  prétend  qu'il  est  parti  deTerre-Neufè  une  escadre 
française  de  neuf  voiles»  pour  croiser  dans  les  parages  de 
Saudy-Hoolu 

ALLEMAGNE. 

Vienne ,  le  h  janvier,  —  Une  partie  de  l'armée  de  Galticie 
Ta  être  envoyée  sur  les  bords  du  Rhin.  Les  troupes  font  un 
,  grand  mouvement  dans  les  provinces  limitrophes  de  la  Po- 
logne. Les  roules  du  côté  de  Mislenisa  sont  couvertes  de 
transports  d'artillerie,  décaissons,  de  chariots  de  mani- 
tioos  et  de  bagages. 

—  On  assure  qu'il  a  été  convenu  entre  les  cabinets  de 
Pétersbourg  et  de  Berlin  que  les  troupes  prussiennes  éva* 
encraient  Cracovie  et  hes  palatinals  qu'elles  occupent  eo  ce 
moment.  Les  troupes  autrichiennes  doivent  incessamment 
prendre  possession  de  ces  pays. 

— -  La  cour  vient  de  publier  des  lettres  patentes  portant 
établissement  d'un  emprunt  général  dans  les  possessions 
autrichiennes,  pour  Tannée  1795.  Le  produit  de  cet  em- 
prunt sera  employé  aux  frais  de  la  guerre. 

Voici  le  préambule  de  l'édita 

f  Comme  les  circonstances  actuelles  nous  imposent  la 
nécessité  de  continuer  la  guerre  à  laquelle  nous  avons  été 
forcés  parla  nation  française,  et  que  nos  revenus  ordinaires 
ne  peuvent  suffire,  comme  chacun  en  est  convaincu,  aux 
frais  considérables  qu>xige  celte  guerre;  qu'ainsi  il  est  in- 
dispensable d'y  pourvoir  par  des  contributions  extraordi- 
naires, et  de  s'occuper  promptement  des  moyens  conve- 
nables à  cet  effet;  en  conséquence,  animés  par  le  désir 
constant  que  nous  avons  eu  d'alléger,  autant  que  les  cir- 
constances le  permettent ,  à  nos  fidèles  sujets,  le  poids  des 
impositions,  nous  avons  résolu  d'employer  cette  fois  la 
voie  la  plus  douce  d'un  emprunt  général,  pour  les  frais  de 
la  guerre,  et  de  l'établir  et  le  demander  à  nos  fidèles  Etats 
héréditaires  pour  Tannée  militaire  de  1795,  qui  va  commen- 
cer, de  manière  que,  du  moment  où  cet  emprunt  se  trou- 
vera entièrement  rempli ,  Il  sera  remis  aux  préteurs  5 
pour  100  eu  obligations  bonnes  et  valables,  t 

CoblenH^  te  6  janvier*  — -  Les  Français  ne  permettent 
plus  aux  réfugiés  des  paysconquisde  revenir  sur  cette  rive; 
le  général  Morenu  en  a  prévenu  le  général  allemand  qui 
commande  au  Thaï  ;  il  a  annoncé  qu'il  existait  de  nouveaux 
ordres  ù  ce  sujet. 

—  Les  garnisons  deMayence  et  de  Cassel  viennent  d'être 
renforcées.  Le  corps  du  général  Mêlas  en  fait  maintenant 
partie. 

—  Le  Rhin  est  gelé,  mais  les  assiégés  sont  parvenus  à 
couper  au  milieu  de  la  glace  un  canal  de  communication 
de  Cassel  à  Mayence. 

La  division  de  Tarmée  française  du  Rhin,  qui  a  con- 
tribué à  la  prise  du  fort  du  Rhin ,  est  partie  pour  aller 
renforcer  Tarmée  devant  llayence. 


—  On  écrit  de  Munich  que  l'on  commence  à  vendre  à 
l'encan  le  mobilier  de  Tex-mioistre  Bettschard,  fameux 
par  ses  exactions  et  ses  vols. 

ANGLETERRE. 

DÉBATS  DO  PAaiBMJUrr.  —  ClAinaB  DBS  COHHDlflS. 

Ab/a.  Cette  séance  est  la  suite  de  celle  commencée  dans 
le  N*  123. 

M.  Sheridan  :  C*est  au  contraire,  à  mon  avis,  le 
vrai  moment  de  discuter  la  question;  c*est  au  moins 
celui  que  je  saisirais,  si  le  ministre  qui  devrait  être 
à  la  séance  s*y  trouvait. 

La  situation  où  le  parlement  se  trouve  dans  cette 
conjoncture  est  vraiment  extraordinaire.  Il  y  a  parmi 
nous  uu  grand  nombre  de  personnes  opulentes,  et 
j*espère  qu'il  y  en  aura  toujours  dans  cette  Chambre. 
N'est-on  donc  pas  tenté  naturellement  de  croire  que 
plusieurs  de  ses  membres  ont  un  intérêt  dans  l'em- 
prunt? Et  supposons  vraie  une  chose  probable  : 
n>st-il  pas  également  évident  que  ceux-là  ne  sont 
pas  des  juees  impartiaux?  Leur  intérêt  à  eux  peut- 
être  fort  différent  de  celui  de  la  nation,  peut-être 
diamétralement  opposé,  est  que  nous  donnions  assez 
de  latitude  aux  subsides  pour  qu'ils  puissent  retirer 
de  çrands  avantages  de  leurs  engagements.  H  me 
semble  que  c'est  un  motif  assez  puissant  pour  exiger 
la  connaissance  des  conditions  de  l'emprunt  avant 
de  les  sanctionner. 

On  n'a  pas  manqué  de  nous  faire  valoir  le  droit 
de  cassation  qui  réside  dans  le  parlement.  Il  n'y  aura 
rien  de  fait,  nous  a-t-on  dit,  si  vous  ne  le  voulez 
pas;  mais  ce  droit  de  cassation  est  presque  illusoire; 
il  est  presque  tombé  en  désuétude;  c'est  presque  une 
maxime  reçue  dans  cette  Chambre  de  ne  pas  annuler 
les  engagements  contractés  par  les  ministres,  à 
moins  que  les  raisons  les  plus  pressantes  n'y  déter- 
minent. Il  faut  qu'ils  aient  fait  bien  mal  pour  qu'on 
veuille  faire  autrement,  pour  qu'on  ne  leur  épargne 
pas  la  mortification  de  revenir  sur  leurs  mesures. 

Quant  à  l'emprunt  impérial ,  je  serais  tenté,  sans 
l'aveu  du  chancelier  de  l'échiquier,  de  croire  que 
c'est  une  histoire  inventée  par  des  ennemis  des  mi- 
nistres pour  les  perdre,  et  je  trouverais  que  c'est  une 
méchanceté  inexcusable;  car  il  y  a  bien  assez  de 
fautes  réelles  à  leur  reprocher  sans  en  controuver, 
sans  les  calomnier.  En  effet,  je  ne  conçois  pas,  après 
l'expérience,  ({ue  nous  avons  payée  assez cncr,  de  la 
foi  de  nos  alliés,  qu'il  puisse  exister  iin  homme  ca- 

§able  de  se  présenter  ici  sans  masque^  et  de  préten- 
re  nous  en  imposer  d'une  manière  si  dénontée. 
Non,  un  tel  degré  de  folie  n'existe  pas. 

L'orateur  en  était  encore  à  flageller  ainsi  les  mi- 
nistres lorsque  M.  Pitt  est  entré  et  a  pris  la  parole  dès 
qu'il  a  eu  fini. 

M.  put  :  Comme  je  n'ai  pas  assisté  aux  motions 
qui  viennent  davoir  lieu,  je  ne  puis  guère  répondre 
aux  différentes  observations  que  Ton  a  pu  faire.  J'ai 
cependant  entondu  le  discours  du  préopinant  assezau 
long  pour  m'étonner  qu'il  puisse  s'élever  des  difficul- 
tés sur  une  motion  qui  a  toujours  été  regardéecomme 
une  affaire  de  fait.  J'en  suis  d'autant  plus  étonné 
que,  dans  la  dernière  séance,  on  a  pris  des  résolutions 
préliminaires  sur  la  nécessité  d'un  subside  quelcon- 
!  que.  Malgré  les  débats  qui  ont  eu  lieu  sur  l'Adresse 
'  au  roi,  et  malgré  la  différence  d'opinion  sur  la  con- 
tinuation de  la  guerre,  on  ne  niera  pas  que  l'amen- 
I  dément  proposé  par  ceux-là  même  qui  condamnaient 

Z7 


tfO 


la  guerre  n'ait  été  un  aren  direct  et  solennel  de  la 
nécessité  des  subsides  et  de  Tintention  où  ils  étaient 
de  les  fournir. 

'  Loin  de  m*attendre,  d*après  cela,  à  des  expressions 
colères  et  trancliantes,  je  ne  croyais  pas  même  qu'il 
pût  y  aToir  la  moindre  opposition  sur  la  question 
générale  des  subsides.  A  I  égard  des  engagements 
contractées  relativementà  l'emprunt,  ils  ne  peuvent 
être  et  ne  sont  que  provisoires,  jusqu'à  la  sanction 
définitive  du  parlement.  Je  dirai  aussi ,  malgré  les 
expressions  impétueuses  dont  on  s'est  servi  en  par- 
lant de  l'emprunt  impérial, je  dirai  que  je  le  regarde, 
moi,  comme  une  mesure  sage  et  politique,  et  je  se- 
rai assez  hardi  et  assez  effronté  pour  avouer,  d'après 
ma  conviction  intime,  que  l'empereur  est  déterminé 
é  poursuivre  avec  vigueur  la  campagne  prochaine, 
pourvu  que  l'Angleterre  l'aide  dans  ses  finances. 
Le  langage  péremptoire  de  l'honorable  membre  no 
mVffraiera  pas  jusqu'à  m'empécher  d*en  faire  la 
proposition;  je  la  ferai  d'autant  plus  volontiers  que 
le  succès  de  la  guerre  dépend  infiniment  de  la  coo- 
pération ferme  et  vigoureuse  de  l'empereur;  et  je  ne 
doute  pas  que  ses  intentions  ne  soient  de  la  conti- 
nuer dans  cet  esprit.  Voilà  les  motifs  sur  lesquels  il 
me  paraît  qu'il  sera  possible  de  justifier  l'emprunt. 
Quant  à  celui  nécessité  par  nos  propres  besoins, 

61e  répète,  les  articles  n'en  ont  été  conclus  que  siii* 
supposition  de  la  sanction  du  parlement.  Je  n'ai 
liit  que  suivre  dans  cette  occasion  ce  qu'on  a  tou- 
jours pratiqué  avant  moi  ;  la  seule  différence  qui 
existe  entre  ma  conduite  et  celle  de  tous  ceux  qui 
ont  occupé  la  place  de  chancelier  de  l'échiquier,  c*est 
qu'autrefois  les  engagements  provisoires  se  faisaient 
cinq  à  six  J|ours  avant  l'époque  de  la  discussion,  et 
que,  dans  les  circonstances  actuelles,  il  se  trouve 
un  intervalle  plus  considérable;  mais  le  principe  est 
toujours  le  même.  J'avoue  d'ailleurs  que  je  m*é- 
taia  flatté  de  trouver  tous  les  esprits  réunis  sur 
la  nécessité  de  cette  mesure.  Je  me  hâterai  de  vous 
soumettre,  le  plus  tôt  possible,  la  question  de  l'em- 
prunt impérial  ;  je  m  y  détermine  avec  conlîance, 
d'après  les  encouragements  que  vous  m'avez  donnés 
dans  la  dernière  session.  Il  est  possible  aussi  que, 
lors  de  la  discussion  sur  la  somme  des  subsides,  je 
propose  d'adopter  un  vote  conditionnel,  dont  l'objet 
sera  de  garantir  l'emprunt  impérial. 

M»  Fox:  Je  dois  dire,  en  réponse  à  une  assertion 
faite  par  l'honorable  préopinant,  qu'il  ne  me  paraît 
pas,  à  moi,  que  les  membres  de  ce  côté  soient  tenus 
de  voter  les  subsides  en  vertu  de  l'amendement  pro- 
posé par  eux  dans  la  dernière  séance.  Si  cet  amen- 
dement eût  été  adopté,  j'avoue  qu'alors  ils  seraient 
tenus  de  voter  des  sommes  bien  plus  immenses  que 
le  ministre  lui-même  ne  pourra  les  demander;  uu\is 
aussi  leur  destination  serait  bien  différente  :  on  les 
emploierait  à  se  procurer  les  bienfaits  de  la  paix,  au 
lieu  que  les  subsides  demandés  aujourd'hui  n'ont 
d'autre  obiet  que  la  continuation  d'une  guerre  rui- 
neuse, quon  semble  vouloir  rendre  éternelle.  Il 
n'est  pas  vrai  non  plus  que  le  chancelier  de  l'échi- 
quier se  trouve  dans  la  même  situation  que  tous  ses 
pré<lécesseurs;  il  y  a  cette  différence,  que  jamais  mi- 
nistre n'a  stipulé  les  articles  d^un  emprunt,  sans 
3 ne  le  parlement  n'eût  déterminé  au  préalable  Tétat 
es  forces  publiques.  Les  emprunts  antérieurs  n'ont 
jamais  été  plus  de  quatre  à  cinq  jours  sans  être  sou- 
mis au  parlement,  et  celui-ci  est  déjîi  passé  depuis 
cinq  semaines.  Plus  l'intervalle  est  court,  et  plus  la 
fortune  publique  y  gagne  :  l'extension  du  temps 
dans  ces  sortes  d'affaires  fait  un  objet  de  la  dernière 
conséquence. 
On  observera  sans  doute  que,  dans  les  circon- 


stances actuelles  Thonorable  ministre  s'est  départi 
de  ses  propres  principes.  Il  y  a  deux  ans,  il  fit  un 
emprunt  à  des  conditions  extravagantes,  et  il  trouva 
moyen  de  se  Uistifier  en  disant  que  les  conditions 
n'étaient  pas  a  la  vérité  des  meilleures,  mais  qu'en- 
fin l'opération  avait  été  dirigée  de  manière  à  ex- 
clure toute  espèce  d'influence.  Aujourd'hui  on  donne 
à  la  corruption  toute  latitude.  Je  ne  saurais  dire 
ce  qu'elle  opère  ;  mais  il  est  incontestable  qu'il  se 
trouve  des  membres  du  parlement  intéressés  à  l'em- 
prunt, et  que  cette  participation  d'intérêt  produit 
sur  leurs  esprits  une  influence  qui  peut  derenir  fu- 
neste à  la  chose  publique. 

Un  levain  de  corruption  se  mêlera  nécessairement 
a  tous  les  votes  qu'ils  doivent  émettre  sur  la  ques- 
tion des  subsides.  Les  formes  de  délibération  éta- 
blies dans  cette  Chambre,  et  fondées  sur  des  princi* 
pes  constitutionnels,  sont  violées  par  celte  extension 
d'influence. 

Je  m'étonne  que  mon  honorable  ami  (M.  She- 
ridan)  s'effraie  d'un  plan  quelconque  lorsqu'il  rient 
des  ministres;  leur  conduite  démontre  assez  qu'il 
n'y  a  rien  de  si  absurde  que  leur  politique  ne  l'em* 
brasse.  Le  nouveau  plan  de  garantie  relatif  à  l'em- 
prunt impérial  est  certainement  une  opération  mons- 
trueuse, mais  qui  ne  m*étonne  pas. 

Cette  garantie  ne  sera  que  conditionnelle,  nous 
dit-on  ;  mais  n'est-il  pas  évident  que  ceux  qui  se 
trouvent  intéressés  à  l'emprunt  national  ne  peuvent 
pas  se  promettre  d'en  retirer  tous  les  avantages  pos- 
sibles, à  moins  que  Temprunt  impérial  ne  soit  aussi 
accordé,  et  dès  lors  la  corruption  n'entre-t-elle  pas 
ici  par  toutes  les  avenues,  puisque  l'adoption  d  un 
|)rojet  entraîne  celle  de  l'autre? 

M.  Fox  termine  par  rèprou? pr  la  garantie  conditionaelle 
de  Temprunt  impérial  ;  il  demande  qu'on  fixe  un  jour  pour 
la  discussion  de  cei  objet ,  et  II  invite  tous  les  membres  I 
astisier  à  la  séance. 

M.  Bardon,  nouvellement  passé  dans  le  parti  deToppo* 
illion,  adhère  aux  subsides,  malgré  sa  protestation  contre 
In  guerre,  et  justifie  celle  e^tpèce  de  contradiction  en  disant 
que  la  question  n*er>t  plus  ai  l'on  fera  la  guerre  ou  la  paix, 
et  que,  la  guerre  étaul  décrèlétï,  il  ne  reste  plus  aux  vrais 
amis  de  la  patrie  que  d'aviser  aux  moyens  de  la  faire. 

If.  Thornton,  qui  est  dans  le  même  cas,  ajoute  a  la 
même  opinion  qu'il  ne  croit  pas  que  l'on  termine  la  guerre 
par  des  négocialions ,  quoique  les  ministres  doivent  en  en- 
tamer, s'ils  le  peuvent.  La  paix  pourrait  amener  en  France 
une  contre- révolution,  doni  on  ne  sera  jamais  redevable  fe 
la  force  des  armes.  Au  reste,  il  y  a  du  danger  pour  l'An- 
gleterre des  deux  côtés  ;  cependant,  l'emprunt  s'étant  fait 
d'une  manière  honorable,  il  est  d'avis  que  la  Chambre  y 
aecéde. 

L'acceptation  de  Temprunt  étant  ce  qui  intéresse  le  plus 
le  ministre,  il  est  très-content,  comme  on  l'imagine  Mn , 
du  discours  du  préopinant,  qu'il  remercie  de  sa  bonne  foi  s 
il  engage  tous  ceux  qui  ont  voté  comme  lui,  et  qui  sont 
égalemeot  obligés  comme  loi  par  leur  conscience  de  prêter 
des  forces  au  gouvernement,  à  la  prendre  pour  modèle» 
•  Je  lorai,  dil-il,  tout  ce  qui  dépendra  de  moi  pour  ame- 
ner une  discussion  particulière  sur  l'emprunt  impérial  ; 
mais  je  n'en  dissimulerai  pas  la  difficulté,  vu  la  liaison  in- 
time de  celte  question  avec  mon  tableau  général  des  voies 
et  moyens t  et  lundi  5  janvi  r  je  vous  proposerai  de  ren* 
voyer  cette  discussion  à  quinzaine.  Je  suis  sûr  que  personne 
n'aura  ft  reprocher  au  gouvernement  aucune  influence 
exercée  en  vertu  de  cet  emprunt.  Je  délie  d'avance  qu'on 
puisse  se  permettre  avec  fondement  la  moindre  assertion 
de  ce  genre. 

C'est  un  moyen  extraordinaire  d'étakUr  lui  systène  d*in« 
fluence  par  l'opération  d'un  emprunt  dont  la  valeur  dépend 
des  chances  de  la  guerre.  S'il  était  question  de  paix,  ce 
raisonnement  pourrait  avoir  quelque  force;  mais  la  paix 
ne  devrait-elle  pas  fiiire  hausser  les  fonds  publics?  Dans  les 
circonstances  aciuellcs,  je  snb  persuadé  que  les  hono- 


391 


râbles  membres  de  Kaatrecdlé  ne  disoonfieadront  pat  qne 
Temperear  ne  soit  un  allié  nécessaire;  et  je  demande, 
d*Bprèt  cela,  si  |e  derais  me  présenter  au  parlement  sans 
être  en  état  de  lui  feire  le  tableau  des  forces  qu'il  peut 
opposer  à  Pennemi.  Voilà  les  motifs  de  ma  conduite  ;  je 
suis  prêt  à  les  discuter  au  moment  convenu. 

M*  Wilberforce,  auteur  de  Tamendement  sur  l'Adresse» 
se  croit  cependant  tenu  de  voter  les  subsides* 

M*  Duncombe  est  d*un  avis  contraire* 

M.  Fox:  Je  pen^  que  Tetnpereur  ne  peut  pas  con- 
tinuer la  guerre  d'une  matiière  vigoureuse,  attendu 
3ue  les  Electeurs  demandent  la  paix  ;  je  crois  que  le 
anger  qui  menace  de  plus  près  l'Angleterre  vient 
du  peu  d'activité  qu'on  a  mis  dans  les  opérations 
navales. 

Chaque  shélling  qui  peut  être  employé  à  la  con- 
struction des  vaisseaux  de  guerre  dans  toutes  les 
parties  de  cette  île  où  il  se  trouve  des  chantiers,  est 
mal  employé  si  on  en  fait  quelque  autre  usage;  cha« 
que  inuiviàu  qu'on  peut  tirer  de  l'armée  du  conti- 
nent pour  renforcer  la  marine  est  mai  placé  s'il  reste 
sur  le  continent.  Nos  opérations  navales  doivent  ré- 
pondre à  notre  puissance. 

M.  Martin  parle  dans  le  même  sens. 

(La  suite  inceaafMMnt.) 


RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE* 

PaHs,  le  t  pluviôse,  -^  Le  baron  de  SlaSl  est  ar- 
rivé il  y  a  trois  jours  à  Paris;  le  baron  de  Goltz  ar- 
rive aujourd'hui,  et  Merlin  (de  Thionville)  est  parti 
le  même  Jour  pour  une  mission  particulière  du  côté 
du  Rhin* 

Le  général  Dnhesme,  qui  était  destiné  pour  com- 
mander le  corps  de  troupes  qui  doit  partir  incessam« 
ment  pour  Brest,  a  été  arrêté  à  Aix-la-Chapelle;  on 
attribue  son  arrestation  à  des  contributions  qu'il  a 
lui-même  imposées,  et  dont  il  n'a  rendu  aucun 
compte.  On  le  soupçonne  même  d'avoir  entretenu 
avec  Tennemi  des  correspondances,  à  cause  d'un 
grand  nombre  de  trompettes  qu'il  a  reçus  chez  lui 
pendant  son  séjour  à  Cologne.  Il  a  été  conduit  à 
Paris. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Rovère. 
géANCB  DU  ft  PLUVIOSE* 

Un  des  secrétaires  donne  lecture  des  Adresses 
suivantes  : 


ulaire 
lais. 


À  dresse  des  mem  hres  composan  (  la  Société  pop\ 
de Bapaume ^département du  Pas-de-Cala 

«  Citoyens  représentants,  les  membres  de  la  So- 
ciété populaire  de  Bapaume  vous  félicitent  sur  vos 
glorieux  travaux  depuis  le  9  thermidor.  Délivrés  du 
joug  qu'avait  appesanti  sur  nous  l'un  des  plus  fé* 
roces.. satellites  ae  Robespierre,  c'est  le  cœur  rempli 
de  reconnaissance  et  de  joie  que  nous  applaudissons 
aux  décrets  que  vous  rendez  chaque  jour  pour  con- 
solider la  liberté  et  fonder  la  république  sur  les  bases 
étemelles  de  la  justice  et  de  l'humanité. 

«  Il  nous  tarde  d'apprendre  la  mise  en  jugement  de 
Tinflme  Lebon.  Les  preuves  de  ses  crimes  ne  se- 
ront point  équiToqueSt  Nous  vous  en  parlons  avec  la 


convictioD  intioie  de  leur  atrocité.  Nous  avons  tu 
Lebon  ravager  ces  contréescomme  un  fléau  deslmo- 
teur;  ces  contrées  paisibles,  et  dont  les  habitants 
ont  depuis  l'origine  de  la  révolution  manifestié  leur 
zèle  et  leur  dévouement  pour  la  chose  publique^ 
Lebon  est  venu,  sans  nécessité,  les  comprimer  par 
la  terreur,  y  faire  couler  des  flots  de  sang,  choisir 
parmi  les  êtres  les  plusimmoraux  des satelhtescruels 
a  qui  il  confiait  ses  pouvoirs,  qui  lui  cherchaient, 
qui  lui  désignaient  des  victimes;  des  hommes  qui 
n'ont  pas  rougi  d'être  $es  pourvoyeurs  ei  d'approvi* 
sionner  sa  gunloline.  Le  sang  innocent  a  couié;  des 
actes  arbitraires  ont  été  commis;  les  propriétés  ont 
été  violées.  Lebon  a  commandé  toutes  ces  atrocités. 
Nous  demandons  justice  prompte,  au  nom  des  lois 
et  de  la  nature  outrasées. 

«  Aux  yeux  de  Lenon,  tout  était  contre-réTola* 
tionnaire;  l'homme  paisible  dans  ses  foyers,  qui , 
sans  intrigue,  sans  ambition,  suivait  les  lois  et  ne 
dénonçait  personne,  était  un  contre-révolutionnaire; 
l'homme  faible,  qui  regrettait  une  messe  et  voulait 
prier  Dieu  à  sa  manière,  était  un  contre-ré volutioo* 
naire;  mais  surtout  les  cultivateurs  aisés,  les  hom- 
mes industrieux  que  le  commerce  avait  enrichis, 
voilà  quels  étaient  les  grands  conspirateurs  dont 
Lebon  proscrivait  la  tête.  •  Comment,  s'est-il  on 
jour  écrié  dans  le  sein  de  notre  Société,  tel  est  riche; 
il  sait  lire  et  écrire,  et  n'est  pas  cent  fois  plus  pa- 
triote que  moi!  Au  magasin!  »  Et  ce  magasin  était 
la  maison  d'arrêt.  L'on  sait  aussi  ce  que  citait  qu'é* 
tre  patriote  à  la  manière  de  Lebon. 

Mais  le  véritable  contre  révolutionnaire,  c'était 
Lebon.  Un  contre-révolutionnaire  était  celui  qui. 
dans  le  sein  de  notre  Société,  parla  du  partage  égal 
des  biens  et  chercha  à  avilir  les  propriétés;  c'était 
Lebon.  Un  contre-révolutionnaire  était  celui  qui, 
à  l'occasion  de  ce  qu'on  lui  dénonça  quelques  com- 
munes de  la  campagne  dont  les  nabitants  s'habil- 
laient encore,  les  ci-devant  dimanches,  plus  propre 
ment  que  les  autres  jours,  se  leva  avec  fureur  du 
milieu  de  nous,  et  s'écria,  avec  les  gestes  d'un  héros 
de  tragédie  :  •  Oui,  je  prendrai  un  arrêté, et  si  quel- 
que commune  osait  me  résister,  je  ferais  raser  le  vil* 
lage  et  je  n'y  laisserais  pas  pierre  sur  pierre.  •  Voilà 
ce  que  nous  avons  entendu  de  In  bouche  de  Lebon. 
Un  contre-révolutionnaire  enfin  était  celui  dont 
l'affreuse  tyrannie  tendait,  auprès  d'hommes  moins 
sincèrement  amis  de  la  liberté  que  les  habitants  de 
ce  déparlement,  à  faire  haïr  la  révoluion  et  regretter 
l'esclavage. 

•  Voilà,  citoyens,  l'homme  que  nous  vous  dénon- 
çons, voilà  celui  dont  nous  attendons  le  jugement 
avec  impatience.  Que  les  complices  de  ce  tigre  soient 
punis  à  leur  tour  selon  le  degré  de  leur  perversité  ! 
qu'on  pardonne  à  ceux  qui  n'ont  été  qu'égarés  et 
qui  s'en  repentent,  mais  que  les  coupnbles  ne  puis- 
sent échapper  à  la  vengeance  nationali^!  qu'ils  |)éris- 
sciit!  que  les  moins  dangereux  soient  livrés  à  l'ou- 
bli, et  tout  le  reste  banni  de  la  république. 

«  Quand  tous  les  hommes  de  sang  auront  expié 
leurs  crimes  sur  l'échafaud  qui  les  attend,  quand 
la  justice  nationale,  en  versant  leur  sang  impur, 
aura  satisfait  aux  mânes  de  ces  milliers  de  victimes 
qu'ils  ont  égorgées ,  alors,  citoyens  représentants, 
couronnez  votre  ouvrage,  et  terminez  glorieusement 
notre  immortelle  révolution  par  un  grand  acte  de 
justice,  un  hommage  éclatant  à  l'humanité,  en  abo- 
lissant la  peine  de  mort. 

•  Que  la  nation  française  brille  autant  par  la  gran- 
deur de  son  courage  que  par  la  douceur  de  ses 
mœurs;  que  la  peine  de  mort,  inutile  pour  prévenir 
les  forfaits  ordinaires,  ne  soit  plus  réservée  qu'aux 
conspirateurs  contre  la  liberté  et  la  sûreté  de  la  ré- 


292 


publique^  non-seulément  comme  punition  (car  la 
mort  n*est  pas  la  plus  cruelle  des  peines  qu*on  puisse 
infliger  aux  coupables),  mais  parce  que  rinlerét  de 
tous  exige  que  l'homme  capable  de  trahir  sa  patrie 
ne  soit  plus  à  portée  de  lui  nuire  dans  aucune  cir- 
constance.» 

La  mention  honorable,  Finsertion  au  Bulletin  et 
le  renvoi  au  comité  de  sûreté  générale  sont  dé- 
crétés. 

les  citoyens  compoiani  la  Société  populaire  et  la 
commune  de  Otx  à  la  Convention  nationale, 

m  Citoyens  représentants,  depuis  longtemps  vous 
avez  ordonné  qu'il  serait  fait  un  rapport  sur  le  dé- 
|)artement  de  1  Ain.  Ce  rapport  attendu  avec  impa- 
tience, des  républicains  longtemps  opprimés,  et  qui, 
pour  prix  de  leur  courageuse  patience,  ne  deman- 
dent que  la  justice  la  plus  sévère  et  la  plus  impar- 
tiale, vous  le  demandent  aujourd'hui  à  grands  cris. 
Si  les  méchants,  sur  les  manœuvres  desquels  nous 
appelonsi'œil  de  la  justice  nationale,  ne  se  sont  point 
rendus  coiipables  des  mêmes  atrocités  que  l'homme- 
tigre  de  l'Ouest,  c'est  que  la  mort  de  leur  chef  a 
suspendu  l'exécution  de  leurs  complots  homicides; 
mais  leurs  vols,  leurs  actes  arbitraires  restent  pour 
les  signaler. 

«  Nons  avons  déclaré  guerre  à  mort  à  la  tyrannie; 
nous  avons  vaincu  les  ennemis  du  peuple  :  loin  de 
nous  une  fausse  pitié!  Que  celui  qui  a  rompu  les 
liens  du  contrat  social  soit  rejeté  hors  de  la  société. 

«  Nous  ne  dormirons  tranquilles  que  lorsque  vous 
aurez  Oté  aux  intrigants  toutes  les  espérances,  même 
futiles,  avec  lesquelles  leurs  amis  osent  encore  in- 
sulter an  repos  aes  citoyens. 
'  •  Justice,  représentants  ;  ordonnez  que  le  rapport 
sur  le  département  de  l*Ain  sera  fait  dans  le  plus 
court  délai,  et  nous  bénirons  encore  une  fois  les  im- 
mortels travaux  de  la  représentation  nationale.  • 

Maure  :  La  Société  populaire  d'Auxerre  invite 
la  Convention  à  faire  mettre  à  la  disposition  de  l'a- 
gence des  secours  publics  les  fonds  que  sa  justice  et 
sa  bienfaisance  ont  destinés  aux  indigents. 

Mention  honorable,  insertion  au  Bulletin. 

—  La  Société  populaire  de  Parly  témoigne  son  hor- 
reur pour  le  royalisme  et  toute  espèce  de  tyrannie; 
sa  confiance  et  son  respect  pour  la  Convention  sont 
sans  bornes. 

Mention  honorable ,  et  insertion  au  Bulletin. 

—  Une  députation  des  colons  de  Saint-Domingue 
est  admise  i  la  barre. 

L'orateur:  Citoyens  représentants,  nous  vous  re- 
mercions du  décret  que  vous  avez  rendu  hier.  Ce 
décret  qui  ordonne  la  discussion  contradictoire  entre 
nous,  Polverelet  Santhonax,  nous  fournit  enfin  les 
moyens  d'atteindre  ces  hommes  que  nous  poursui- 
vions en  vain  depuis  longtemps.  Gloire  vous  soit 
rendue  !  Vous  avez  adopté  une  mesure  qui  vous  fera 
promptemcnt  connaître  la  vérité,  que  les  coupables 
seuls  avaient  intérêt  d'écarter. 

Le  France  a  eu  ses  buveurs  de  sang;  nous  avons 
eu  les  nôtres;  tous  sont  sortis  de  la  caverne  des  Ja- 
cobins. Le  même  système  avait  par  eux  été  organisé 
dans  l'un  et  l'autre  hémisphère.  C'est  avec  Ta  ter- 
reur que  ces  patriotes  par  excellence  ont  tout  com- 
Srime  chez  nous  comme  ici.  Vous  avez  fait  justice 
es  principaux  meneurs  de  cette  association  mons- 
trueuse, et  pris  des  mesures  contre  les  autres.  En- 
Un  vous  n'avez  point  négligé  ceux  qui  se  croyaient 
hors  de  toute  atteinte  parce  que  le  théâtre  de  leurs 
crimes  s'est  trouvé  placé  à  deux  mille  lieues  de  vous, 


distance  qui ,  cependant,  forme  lin  grand  préjugé 
contre  eux;  car  deux  Jacobins,  avec  d'immenses 
pouvoirs,  à  deux  mille  lieues  d'ici,  ne  peuvent  pas 
avoir  été  modérés  dans  les  mesures  qu'ils  ont  dû 
prendre.  La  discussion  contradictoire  décrétée  entre 
eux  et  nous  va  nous  mettre  à  même  de  les  saisir 
corps  à  corps,  et  de  les  livrer  pieds  et  point  liés  a  la 
justice  nationale,  qui  appesantira  son  glaive  sur 
leurs  têtescoupablcs. 

Nous  applaudissons  d'autant  plus  à  cette  mesure 
que  nous  n'avons  cessé  de  la  demander,  que  nous 
recommandions  toujours  aux  commissaires  de  Saint- 
Domingue,  Page,Bru11ey  et  autres,  de  la  provoquer, 
et  qu'enfin,  par  son  moyen,  vous  pourrez  juger  sai- 
nement a  quelle  portion  de  colons  vous  devez  votre 
confiance. 

—  On  lit  la  lettre  suivante  : 

Rlulel.représentant  du  peuple  dans  les  ports  de  La 
Rochelle,  Rocheforl ,  Bordeaux ,  Bayonne^  el 
porli  adjacents,  à  la  Convention  nationale. 

Rochefort,  le  93  nivôse.  Tan  3*  de  U  république 
française,  une  et  indivisible. 

■  Mon  bonbeur  est  au  comble,  citoyeni  collèaues;  Je 
fais  le  bien  au  nom  de  la  Convention  nationale,  et  le  peu« 
pie  y  applaudit.  Qvi'ils  sont  coupables,  ceux  qui  feulent 
l*opprimerl  qu^ils  sont  méchants,  ceux  qui  osent  tenter  de 
le  tromper!  Je  ne  vois  en  lui  que  vertu,  amour  de  la  pairie, 
désintéressement  et  justice;  il  hait  l'intrigue,  il  déteste  la 
tyrannie,  il  saura  toujours  punir  les  intrigants  et  les  tyrans* 

•  Cn  nouveau  irait  de  désintéresscm(;nt4D*apprendrait 
encore  à  le  connaître.  Je  ne  dois  pas  vous  le  laisser  ignorer. 

m  Ayant  ordonné  la  visite  du  vaisseau  la  Coiiscteii«f,  prise 
portugaise,  pour  en  constater  Tétat,  les  quatre  drarpeti- 
tiers  qui  y  étaient  occupés  ont  trouvé  en  avant  du  navire 
un  trou  dans  le  bois,  recouvert  d'un  morceau  de  liège, 
qui  contenait  un  petit  paquet  de  pondre  d'or.  Ces  honnêtes 
ouvriers  ont  sur-le-cliamp  Tait  part  de  leur  découverte  au 
sous-che(  des  classes  de  La  Rocbelle,  qui  a  appelé  des  ei* 
perts,  lesquels,  en  présence  du  juge  de  paix,  ont  constaté 
qu*effectivement  le  paquet  trouvé  contient  de  l'or  en  poudre, 
pesant  deux  marcs  trois  onces  six  gros.  Le  sous-dief  me  Vu 
fait  passer  avec  le  procès-verbal.  J*adresse  aujourd'hui  le 
tout  à  la  Convention  nationale.  J*ai  fait  donnera  ces  braves 
citoyens  une  gratification  de  400  liv.  qu'ils  refusaient,  en  . 
disant  quMlsn^avaient  fait  que  leur  devoir. 

•  Je  viens  de  prendre  un  arrêté  que  je  crois  dicté  par  les 
circonstances,  et  dont  je  demande  Tapprobation. 

•  Cent  Iroif;  habitants  de  la  Vendée,  détenus  dans  les 
fers,  réclamaient  le  bienfait  de  Tamnislie.  J*ai  cru  qu*un 
représentant  du  peuple  en  mission ,  chargé  de  pouvoirs  de 
la  Convention  nationale,  devait  tout  Taire  pour  Pexécution 
de  ses  lois.  La  proclamation  des  représentants  auprès  de 
Tarmée  de  TOuest  a  dirigé  ma  conduite....  «  Vos  femmes, 
vos  enfants,  vos  parents  el  vos  amis,  porte  la  proclamation, 
languissaient  dans  les  cachots;  ils  sont  remis  en  liberté. 
Interrogez-les,  et  dcmandei-leur  si  ramnlsUe  que  nous 
proclamons  est  un  vain  nom.  » 

■  J'ai  consulté  les  motifs  de  leur  condamnation  ;  je  les  ai 
trouvés  dans  un  arrêté  des  représentants  du  peuple  portant 
•  que  ceux  des  rebelles  qui  ne  seraient  point  convaincus 
d*avoir  porté  les  armes  seraient  enchaînés  deux  à  deux 
comme  des  forçats,  et  mis  à  la  disposition  du  général  de  la 
douzième  divisio'n,  pour  être  employés  aux  travaux ,  etc.  » 

•  Ces  hommes  n'ont  donc  point  porté  les  armes  contre  la 
patrie;  ils  jurent  qu'ils  Paimcnt,  et  qu'ils  ont  toujours  été 
fidèles.  Comment  pourrait-on  refuser  de  leur  appliquer 
l'amnistie,  lorsqu'on  pardonne  à  ceux  qui  ont  agi,  à  ceux 
même  qui  ont  conseillé  d'agir  ?  Leur  délivrance  était  solli* 
citée  par  la  Société  populaire ,  par  toutes  les  autorités  con- 
stituées de  Rochelort.  Le  certificat  le  plus  authentique  con- 
state que,  depuis  leur  détention,  ils  se  sont  bien  comportés, 
et  qu'aucun  d'eux  n'est  inscrit  sur  le  registre  des  fautes. 
J'ai  pris  en  leur  faveur  l'arrêté  dont  je  vous  envoie  copie. 

•  J'ai  consulté  mon  cœur  et  la  justice;  j'ai  cru  suivre  le 
vœu  de  la  Convention  :  si  je  m'étais  trompé,  mon  excuse 


293 


ferait  dans  Tactlon  même.  Je  demande  Tapprobalion  de 
mon  arrêté. 

•>  Les  autorités  constituées  de  Rochcfort  sont  épurées;  je 
les  ai  installées  décadi  dernier,  aux  acclamations  du  peu- 
ple et  aux  cris  mille  fois  répétés  de  vive  la  Convention  na- 
fionûte! 

•  Le  navire  qui  porte  Thuile  et  le  savon  pour  Paris  est 
ex|)édié  depub  quelques  jours;  les  ventes  se  contiouent 
avec  le  plus  de  célérité  possible.  Vive  la  république  I 

•  Signé  Blutiu  - 

L'insertion  au  Bulletin  est  décrétée. 

—  Une  députation  des  citoyens  de  Brest  est  intro* 
duite  à  la  barre. 

Uoraleur  :  Représentents  du  peuple,  un  écri?ain 
contre-révolutionnaire  a  eu  l'audace  de  prêcher  le 
royalisme  ;  mais ,  vous  levant  tout  à  coup ,  vous  l'a- 
vez écrasé  de  votre  indignation. 

L'étincelle  électrique  a  frappé  les  citoyens  de 
Brest;  ils  ont,  comme  vous,  juré  la  mort  de  quicon- 
que tenterait  d*affaiblir  l'exécration  due  à  toute  es- 
pèce de  tyrannie.  Réunis  devant  la  maison  des  re- 
présentants Viilers  et  Desrues,  ils  ont  pris  le  ciel  à 
témoin  de  leurs  serments  ;  ils  ont  provoqué  tous  les 
fléaux  sur  les  têtes  parjures.  Un  seul  homme  à  Brest 
à  osé  en  ce  moment  proférer  l'infâme  nom  de  roi  ; 
c'est  Verteuil,rex-accusatcur  public  du  tribunal  ré- 
volutionnaire établi  dans  nos  mur»,  à  l'instar  de  ce- 
lui de  Paris. 

Que  de  cette  bouche  impure  et  encore  souillée  du 
sang  innocent  soit  sorti  un  cri  de  révolte,  nous  en 
sommes  indignés  sans  en  être  surpris  ;  il  fut  le  sub- 
stitut de  Fouquier-Tinville;  il  fut  créé  juge-bour- 
reau par  le  décret  du  22  prairial  ;  et  l'agent  du  tl'ium- 
yirat  est  trop  ennemi  de  la  république  pour  n'être 
pas  capable  oe  provoquer  la  monarchie. 

Quant  à  nous,  représentants ,  nous,  hommes  du 
14  juillet,  du  10  août,  républicains  comme  les  deux 
Brutus,  nous  ne  voulons  ni  la  dictature  de  César,  ni 
la  royauté  de  Tarquin  ;  et  nos  poignards  sont  égale- 
ment dirigés  contre  ceux  qui  tenteraient  de  succéder 
à  Capet  ou  à  Robespierre. 

Le  Président  ,  à  la  députation  :  Les  citoyens  de 
votre  commune,  versant  leur  sang  pour  attaquer  le 
tyran  au  10  août,  ont  donné  des  preuves  non  équi- 
voques de  leur  haine  pour  la  royauté  et  de  leur 
amour  pour  la  liberté.  Les  services  que  vous  aviez 
rendus  a  la  patrie  avec  les  hommes  du  14  juillet, 
avec  les  amis  de  la  liberté,  venus  des  extrémités  mé- 
ridionales, ont  été  des  motils  d^  haine  de  la  part  des 
tyrans  atroces  qui  voulaieutsuccéder  à  un  tyran-roi. 

La  vertu  énergique  était  un  crime  capital  aux  yeux 
ie  ces  féroces  ennemis  de  l'humanité.  Voyez  leur 
inarche  exécrahlement  machiavéliaue.  Paris  le  pre- 
mier a  sonné  le  tocsin  de  la  liberté  :  c'est  là  ou  ils 
établirent  le  théâtre  principal  de  leur  cannibalisme. 
Brest  a  envoyé  une  phalange  intrépide  pour  détruire 
la  royauté;  un  tribunal  carnifêre  y  est  établi.  Avi- 
gnon ,  Marseille,  Nîmes  ont  vu  périr  les  vétérans  de 
la  révolution  sous  le  couteau  assassin  des  satellites 
de  Robespierre,  des  émissaires  de  l'ancien  comité  de 
salut  public.  La  Convention,  élevée  à  la  hauteur  de 
la  liberté  :  de  la  justice  et  de  l'humanité,  poursuivra 
sans  relâche  le  royalisme,  le  terrorisme  et  tous  les 
traîtres,  sous  quelque  masque  qu'ils  puissent  être 
déguisés. 

Blad  :  Citoyens,  les  voilà  donc  connus,  cessicaires 
de  Robespierre,  ces  assassins  à  gages ,  ces  partisans 
zélés  du  terrorisme,  les  voilà  connus!  Us  voulaient 
un  roi  ;  ils  voulaient,  à  force  de  forfaits,  établir  sur 
les  ruines  de  la  république  l'infâme  royauté.  Celui 
qu'on  vous  dénonce,rexécrdile  Verteuil,digDe  ami» 


digne  collègue  des  Dumas,  des  Goffinhal ,  accuu- 
teur  public  du  tribunal  de  bourreaux  établi  à  Brest 
à  rinstar  de  celui  de  Paris,  a  osé  prononcer  l'odieux 
nom  de  roi.  Villers  et  Desrues,  nos  collègues,  vous 
Font  annoncé  avant-hier  par  une  lettre  qui  ne  laisse 
aucun  doute.  11  s>st  donc  enfin  démasqué  lui-  même, 
le  traître  ;  mais  aujourd'hui  qu'il  se  voit  conduit  de- 
vant voire  comité  de  sûreté  générale,' il  a  l'impu* 
dence  de  prétendre  aue  ce  mot  lui  est  échappé  par 
plaisanterie.  Qu'il  sacne qu'en  république,  et  surtout 
en  révolution,  ces  plaisanteries-là  s'expient  sur  l'é- 
chafaud. 

Ce  n'était  qu'une  plaisanterie  !  Que  ne  dit-il  aussi 
qu'il  voulait  éprouver  le  patriotisme  des  citoyens  de 
Brest.  Ah!  il  a  dû  le  cotmnître  à  l'indignation  civi- 
que qui  s'est  emparée  de  leurs  âmes,  lorsque  ce  cri 
contre-révolutionnaire  a  retenti  à  toutes  les  oreilles; 
il  a  dû  le  connaître  lorsqu'il  a  vu  ces  citoyens  géné- 
reux, qui  naguère  se  bornaient  à  le  mépriser  comme 
un  vil  assassm,  se  soulever,  pour  ainsi  dire,  et  de- 
mander à  grands  cris  son  juste  châtiment. 

Ce  n'était  qu'une  plaisanterie!  Et  il  attend  pour- 
la  faire  l'instant  de  son  départ,  dans  l'espoir  sans 
doute  de  se  soustraire  par  une  prompte  tuile  à  la 
vindicte  publique  :  il  se  reconnaissait  donc  cou- 
pable! 

Etait-ce  aussi  par  plaisanterie  qu*il  faisait  jour- 
nellement ruisseler  le  sang  à  Brest;  au'il  traînait 
indistinctement  à  l'échafaud  et  la  vieillesse  respec- 
table, et  rintéressante  jeunesse  à  peine  sortie  de  l'en- 
fance? Etait-ce  par  plaisanterie  que,  lorsque  Moreau^ 
général  divisionnaire,  nous  gagnait  des  batailles , 
prenait  le  fort  l'Ecluse  et  l'île  de  Cadsan  ,  il  assassi- 
nait son  vieux  père  ?  Etait-ce  par  plaisanterie  qu'il 
faisait  ranger  symétriquement  sur  l'échafaud  les  tètes 
de  ses  victimes,  qu'il  taisait  faire  en  sa  présence  des 
expériences  chirurgicales  sur  les  cadavres  des  fem- 
mes qu'il  avait  immolées  à  sa  barbare  fureur;  qu'il 
contraignait  des  enfants  à  orner  les  fêtes  publiques 
et  à  passer  à  la  tête  des  marches  triomphales  sur  une 
place  fumant  encore  du  sang  de  leurs  malheureux 
pères?  Etait-ce  par  plaisanterie  au'il  promettait  aux 
épouses  éplorées  de  leur  rendre  leurs  époux,  et  qu'il 
fixait  pour  cette  époque  tant  désirée  le  moment  ter- 
rible où  la  tête  de  ces  infortunés  tombait  sous  la  ha- 
che fatale;  qu'il  attaquait  particulièrement  les  pa- 
triotes qui  en  91  se  montrèrent  les  ennemis  déclarés 
de  la  royauté  et  refusèrent  au  14  juillet  de  prêter  le 
serment  d'usage  au  roi?  Etait-ce  par  plaisanterie 
qu'au  mépris  de  vos  décrets  il  a  égorgé,  le  24  ther- 
midor, lorsqu'il  devait  cesser  toutes  fonctions  à  la 
première  nouvelle  de  la  suspension  du  tribunal  de 
Paris?  Mais  je  ne  finirais  pas  si  je  voulais  vous  tracer 
ici  le  tableau  des  horreurs  commises  par  ce  scélérat 
et  ses  complices. 

H  fut  moine,  substitut  de  Fouquier-Tinville  «  et 
envoyé  à  Brest  immédiatement  après  la  loi  du  22 
prairial;  c'est  vous  en  dire  assez. 

Mais  pourquoi  ses  dignes  compagnons ,  ses  sa- 
tellites, les  juges  de  ce  tribunal  de  sang,  sont-ils  li- 
bres? pourquoi  leur  aspect  odieux  frappe-t-il  les  re- 
gards de  l'honnête  homme,  indiqué  de  partager  avec 
eux  les  bienfaits  de  la  liberté?  Ils  ont  aussi  commis 
des  fortaits,  leur  conduite  doit  être  examinée.  (L'as- 
semblée, à  plusieurs  reprises,  frémit  d'horreur.) 

Blad  dénonce  aussi  le  président  du  même  tribunal^ 
demande  son  arrestation  provisoire,  et  le  renvoi  de 
sa  dénonciation  au  comité  de  sûreté  générale. 

Boudin  et  Bentabole  demandent  que  ce  citoyen 
soit  envoyé  directement  au  tribunal  révolution- 
naire :  le  dernier  dit  que  déjà  le  comité  de  sûreté  gé- 
nérale a  examiné  cette  affaire,  et,  n'ayant  rien  trouvé 


S94 


qui  pûl  faire  traduire  oe  citoyen  au  tribunal  révolu- 
tionnaire, Ta  fait  mettre  en  liberté;  mais,  d'après  les 
nouvelles  dénonciations,  il  pense  qu*on  peut  ren- 
voyer au Inbunah 

Plusieurs  membres  s'opposent  fortement  à  cette 
proposition* 

Lecointbb  :  II  est  impossible  de  traduire  un  ci- 
toyen au  tribunal  révolutionnaire  avantque  les  pièces 
sur  lesquelles  la  dénonciation  est  fondée  soient  exa- 
minées. Je  demande  le  renvoi  au  comité  de  sûreté 
générale. 

Le  renvoi  est  décrété, 

—  Le  frère  du  général  Moreau  est  introduit  i  la 
barre. 

«  GitoycDf  représentants,  je  viens,  aa  nom  d'une  tkmiWe 
Infortunée,  au  nom  de  cinq  défenseurs  de  la  république  « 
au  nom  d*un  général  qui ,  depuis  le  commencement  de  la 
révolution,  a  rendu  à  son  pays  des  services  éclatants,  de- 
mander justice  et  secours.  La  mémorable  journée  du  iO 
Uiermidor,  les  travaux  bienfaisants  de  la  Convention  de- 
puis cette  glorieuse  époque,  me  garantissent  le  succès. 

«  Mon  lire,  le  père  du  général  Moreau ,  a  été  assassiné 
la  iS  thermidor  par  le  tribunal  révointionnaire  de  Brest, 
élabU  à  l*iiisiar  de  celui  de  Paris.  Il  peut  être  prouvé  par 
le  témoignage  de  toute  la  ville  de  Brest  quMI  n^a  pu  se  dé- 
fendre ,  qu'on  lui  a  porté  son  acte  d'accusation  a  neuf  heu- 
res du  soir,  la  veille  de  sa  mort ,  et  qu'a  riostanl  même  on 
le  força  d'éteindre  la  lumière  à  la  lueur  de  laquelle  il  tra- 
çait sa  justification  ;  qu'on  écarta  de  Brest  un  de  mes  frè- 
res ,  que  le  scélérat  Verteuil ,  accusateur  public  du  tribu- 
nal, envova  S  Morlaix,  sous  prétexte  d'y  chercher  des 
pièces  justificatives,  et  qu'on  consomma  pendant  son  ab- 
•eoee  le  Ibrlalt  qu'on  méditait  depuis  longtemps.  Il  est 
également  prouvé  par  un  certificat  de  la  municipalité  de 
Morlaii,  que  je  puis  offrir  iiux  regards  de  la  Convention 
nationale,  que  cette  vicUma  de  la  perfidie  des  traîtres  qui 
cherchaient  à  dégoûter  par  des  malheurs  les  défenseurs  de 
la  république,  avait  au  service  cinq  garçons;  l'un  d'eux  a 
été  successivement  chef  da  la  garde  nationale,  électeur  et 
officier  municipal;  qu'un  autre,  marin,  est  actuellement 
dans  les  prisons  d'Angleterre;  qu'un  troisième  a  eu  l'é- 
paule cassée  dans  la  guerre  de  la  Vendée  ;  qu'un  qua- 
trième est  attaché  à  Pétat-major  de  l'armée  du  Nord  ;  qu'un 
cinquième  enfin,  l*atné  de  tous,  est  le  général  Moreau, 
qui  a  commandé  pendant  quelque  temps  l'armée  du  Nord, 
qui  en  commande  encore  une  division  eonsidéruble,  et  qui 
DO  devait  pas  s'attendre  que,  le  jour  même  qu'il  ajoutait 
ans  autres  conquêtes  de  la  république  le  fort  de  TÊduse  et 
rUe  da  Gadsan,  la  téta  de  son  malheureux  père  seraU  sa* 
erifiéa  aux  calculs  de  la  vengeance  et  de  l'ambition. 

«  Maintenant,  représentants,  tous  ces  soldats  dissémi- 
nés dans  les  armée»  de  la  république  n*ont  plus  de  père, 
de  meublas,  de  propriétés.  A  leur  retour  ils  ne  trouveront 
oue  le  désespoir  et  la  misère  :  les  biens  de  leur  père  seront 
devenus  la  proie  du  spéculateur  avide;  leur  maison,  asile 
des  vertus  républicaines,  ne  leur  offrira  oue  l'image  d'un 
père  égorgé  1«...  Où  se  délasseront-ils  de  leurs  honorables 
fatigues  ?oA  suspendront-ils  les  buriers  qu'ils  auront  cueil- 
Ht  sur  les  frontières  •  Gomment  pourront-ils  contenir  leur 
juste  indignation  en  voyant  les  bourreaux  de  leur  père,  les 
sicaires  du  triumvir,  dont  l*un ,  qui  a  été  en  même  temps 
son  dénonciateur  et  son  juge,  ose  eneore  dans  oe  moment 
élever  la  voix  dans  la  Société  populaire  de  Moriaix,  et 
exerce  présentement  dans  cette  ville  les  fonctions  de  oom« 
missaire  national  près  le  tribunal  du  district;  en  les  voyant, 
dis-je,  jouir  tranquillement  de  l'existence  et  de  la  liberté, 
eux  qui  ont  si  souvent  et  si  horriblement  violé  celle  des  au* 
très,  et  de  leurs  fortunes,  qui  n'ont  eu  pour  moyen  et  pour 
bases  que  des  délations ,  des  cadavres  et  des  échafuuds  P 

«  Refirésentants,  je  connais  le  décret  qui  défend  d'e«pérer 
la  révision  des  procédures  ourdies  et  terminées  pendant 
l'affreux  système  que  vous  avei  abattu.  Je  sais,  comme 
tous  les  bons  Françab,  apprécier  les  motib  qui  ont  déter- 
miné lu  Convention  S  le  rendre,  mais  il  ne  défend  pas  de 
réclamer  justice  et  secours.  Je  demande  donc  pour  mol , 
pour  deus  sœurs  i  pour  tous  les  guerriers  de  ma  famille 


qui  na  jpenveni  pM  paraîtra  id  ai  personne.  Je  demanda 
que  la  Convention  détermine  la  nature  de  l'indemnité  que 
nous  avons  droit  da  prétendre;  je  demande  enfin,  avec 
tous  les  amis  de  la  révolution  du  0  thermidor,  que  le  glaive 
de  la  justice  nationale  soit  dirigé  promptement  sur  Ica 
membres  du  ci-devant  tribunal  révoluUonoalre  de  Brcat.» 

Blad  :  Je  dénonce  un  fait  relatif  à  Moreau  père. 
Raoul,  en  ce  moment  eommissaire  national  près  le 
district  de  Morlaix,  a  provoqué  de  la  part  de  Moreau 
le  iMiyement  de  la  dette  d'un  émigré;  il  l'a  rassuré 
même  sur  le  délit  (ju'il  Tentralnait  à  commettre  en 
lui  disant  que  la  nation  paierait,  étant  saisie  du  bien; 
qu'ainsi  il  n'y  avait  rien  i  craindre.  Moreau,  veillard 
respectable,  a  cédé;  Raoul,  nanti  des  fonds,  a  dé- 
noncé Moreau;  il  Ta  ensuite  jugé  comme  juré  du 
tribunal  révolutionnaire,  et  a  prononcé  la  peine  de 
mort.  Ainsi  ce  scélérat  a  été  a  la  fois  provocateur  du 
délit,  complice,  dénonciateur  etjuge. 

Cette  monstruosité  fait  frémir  rassemblée ,  et  elle 
décrète  le  renvoi  aux  comités  de  sûreté  générale  et 
de  législation ,  pour  examiner  la  conduite  de  Raoul, 
et  le  destituer,  s'il  y  a  lieu. 

Olivier  Gbrentb  :  Je  saisis  cette  occasion  pour 
demander  que  jamais  l'assemblée  ne  traduise  per* 
sonne  au  tribunal  révolutionnaire  sans  un  rapport 
préalable  de  son  comité  de  sûreté  générale. 

Cette  proposition,  vivement  applaudie,  eatanasi* 

tôt  décrétée. 

On  demande  ensuite  Farrestatlon  proriaolre  de  ce 
citoyen. 

***  :  Je  m'y  oppose;  c*est  un  attentat  i  la  liberté 
individuelle  :  tout  citoyen  traduit  devant  un  juge  de 
paix  est  entendu  avant  d*étre  arrêté, 

***  :  Le  comité  de  sûreté  générale  a  le  droit,  soit 
de  faire  arrêter  ce  citoyen ,  soit  de  le  faire  traduire 
devant  le  tribunal  révolutionnaire.  Je  demanda 
donc  le  renvoi  pur  et  simple  ;  il  atatuera  après. 

Charltbs:  On  vient  de  vous  dire  que,  d*après  un 
examen  du  comité  de  sûreté  générale ,  ce  citoyen  • 
été  mis  en  liberté  ;  cet  examen  a  dû  être  sévère.  Qui 
done  vous  assure  que,  dans  les  nouvelles  pièces 
qu'on  produit,  on  trouvera  plus  de  preuves  contre 
lui?  Il  tant  qu'elles  soient  examinées.  Certes  ee  n*est 
pas  sans  raison  qu'on  vient  de  vous  faire  décréter 
que  jamais  vous  ne  traduiriez  personne  au  tribunal 
révolutionnaire  sans  un  rapport  préalable  de  vos  oo* 
mités.  Nous  n'avons  pas  oublié  la  loi  du  22  prairial, 
et  l'abus  que  Robespierre  fit  de  ce  tribunal;  j'ose 
penser  même  que  cette  institution  ne  subsistera  pas 
longtemps.  Votre  justice  veut  ramener  les  citoyens 
égarés  au  giron  de  la  république  ;  que  lea  autres  ail- 
lent partager  le  malheur  et  la  honte  de  ceux  que  nos 
enfants  ont  si  glorieusement  combattue.  (Vifs  ap- 
plaudissements.) 

Charlier  demande  et  rassemblée  décrète  le  renvoi 
pur  et  simple  au  comité  de  sûreté  générale,  qui  sta* 
tuera. 

Bourdon  ,  (de  l'Oise)  :  Je  demande  la  parole  pour 
une  motion  d  ordre. 

Vous  n'avez  rien  négligé  pour  consoler  les  vic- 
times échappées  à  Taffreux  terrorisme;  il  vous  reste 
un  grand  acte  de  justice  à  faire  ;  la  rigueur  de  la  sai- 
son, ce  qu'on  doit  aux  infortunés,  vous  en  font  un 
devoir  :  c'est  de  rendre  aux  veuves  et  enfanta  des 
condamnés  les  effets  à  leur  usage,  et  aux  veuvea  et 
qui  leur  appartient  d*après  leurs  confarata  da  ma* 
riage. 

Je  demande  que  le  comité  des  domaines  soit  dikrgé 
de  Texécution  du  décret. 


19fi 


^**  :  Il  me  semble  aue,  pour  accélérer  cette  exé- 
cution, il  dut  la  confier  au  bureau  des  domaines  à 
Paris. 

Clauzbl  :  Je  demande  qu'on  étende  le  déeret  à 
coûte  la  république. 

Pbrbin  :  11  faudra  observer  que  bien  des  femmes 
ont  été  mariées  sans  contrat  de  mariage. 

Bourdon  ;  La  coutume  supplée,  en  pareil  cas,  au 
contrat  de  mariage.  Je  demande  que  le  comité  de  lé- 
gislation fasse  demain  un  rapport  sur  cet  objet. 

Ces  propositions  sont  décrétées. 

Merlin  (de  Thionville)  :  Vous  devez  attendre  le 

glus  grand  succès  de  la  belle  institution  des  Ecoles 
ormalcs;  mais  il  est  fâcheux  pour  ceux  qui  y  sont 
appelés  d*étre  obligés  d'aller  recevoir  les  leçons  des 
professeurs  à  Tune  des  extrémités  de  Paris  ,  au  Jar- 
din des  Plantes.  On  demande  400,000  livres  pour 
rendre  la  Sorbonne  propre  à  servir  à  cette  destitu- 
tion. Je  crois  qu'il  vaudrait  mieux ,  pour  épargner 
les  dépenses  ,  se  servir  d*un  local  tout  prêt  qui  se 
trouve  au  centre  de  Paris;  je  veux  parler  de  la  salle 
des  Jacobins.  (Vifs  applaudissements.)  Je  demande 
qu'elle  serve  à  cet  usage. 

Cette  proposition  est  adoptée  au  bruit  des  ap- 
plaudissements redoublés. 

MuuN  (de  Thionville)  :  Avant  de  repartir  pour  la 
mission  dont  la  Convention  m*a  chargé,  et  que  le 
comité  de  salut  public  a  abrégée  en  me  faisant  rem- 
placer par  mon  collè£ue  Ca  vaignac,  je  dois  dire  que 
i^armée  est  animée  du  meilleur  esprit,  qu'elle  est 
toute  pour  la  république  et  la  Convention.  (Vilsap- 

Ï»laudi8sement8.)  Le  système  de  justice  est  aussi  ce- 
ui  que  professe  Tarmée.  (Nouveaux  applaudisse- 
ments.)  Je  voudrais  que  tous  mes  concitoyens  fussent 
témoins  des  conversations  qui  te  tiennent  dans  les 
baraques  autour  de  Mayence  ;  aucune  plainte  n'y 
échappe,  malgré  la  rigueur  de  la  saison,  et  Ton  croi- 
rait entendreles  discussions  de  la  Convention  natio- 
nale elle-même,  taut  les  principes  de  justice  et  de 
raison  sont  à  l'ordre  du  jour  dans  ces  retraites  du  cou- 
rage républicain.  (On  applaudit  de  nouveau.)  Je  de- 
mande rinsertion  de  ces  détails  au  Bulletin. 

Cbarlibr  :  Cela  est  inutile;  ces  sentiments  sont 
ceux  de  tous  nos  défenseurs ,  et  il  n'est  pas  une  de 
nos  armées  qui  ne  Tonde  les  glaces  de  Thiver  par  la 
chaleur  de  son  patriotisme. 

Maure  :  Nos  volontaires  n*ont  pas  besoin  de  cau- 
tion ;  ce  sont  les  belles  actions  qui  les  illustrent. 

Merltn  :  Si  je  vous  avais  écrit  ce  aue  je  viens  de 
dire  ,  il  n'y  aurait  pas  eu  de  difficulté  pour  le  faire 
insérer  au  Bulletin;  pourquoi  cela  en  souffrirait-il 
davantage  parce  que  cette  déclaration  est  verbale? En 
est-elle  moinsexacte  pour  être  faite  à  la  tribune  de  la 
Convention?  (Applaudissements.) 

L'insertion  au  Bulletin  est  décrétée. 

—  Lacroix  écrit  à  la  Convention  qu'il  a  écrit  son 
ouvrage  dans  des  intentions  patriotiques,  et  demande 
qu'on  en  donne  un  exemplaire  à  chacun  des  jurés  du 
tribunal  qui  doit  le  juger. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Les  exemplaires  de  cet  ou- 
vrage infâme  sont  au  comité  de  sûreté  générale.  Ce 
comité  a  fait  son  devoir  en  faisant  arrêter  un  écrit 
dans  lequel  on  essayait,  si  la  chose  eût  été  possible, 
de  ressusciter  le  royalisme  chez  un  peuple  libre  et 
républicain  ;  il  le  fera  encore  en  fournissant  les  pièces 
nécessaires  pour  l'instruction  du  procès.  Je  demande 
le  rcuvoi  au  comité  de  sûrelé  générale. 

Le  renvoi  est  décrété. 

Fréron  :  La  Convention  nationale  a  ordonné  U 


mise  en  liberté  de  plusieurs  généraux,  et  notamment 
de  Miranda.  Par  quelle  fatalité  Servan,  enfermé  de- 
puis quinze  mois,  gémiUil  encore  dans  les  fers?  Je 
demande  qu'il  jouisse  de  la  même  faveur.  (On  ap- 
plaudit.) .   ^        »" 

Un  membre  appuie  cette  motion,  fait  l'éloge  des 
vertus  militaires  et  civiques  de  Servan,  et  demande 
pour  lui  la  liberté  provisoire. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Il  a  été  ministre. 

DuHEiM  :  Je  ne  m'oppose  pas  au  décret,  mais  j*ose 
dire  que  la  conduite  de  Servan  mérite  d'être  exami- 
née. (Murmures.)  Cependant  on  ne  peut  pas  s'oppo- 
ser à  sa  liberté,  puisque  les  aristocrates  triomphent. 

Ces  derniers  mots  excitent  des  rumeurs  violentes. 

La  Convention  décrète  la  liberté  provisoire  de 
Servan,  et  renvoie  aux  comités  de  salut  public  et 
des  finances  pour  la  reddition  de  ses  comptes. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 

SéANCB  DU  6  PLUTIOSB. 

Une  grande  agitation  se  manifeste  dans  l'assem- 
blée; tous  les  membres  se  lèvent  spontanément  en 
criant  vive  la  république! 

Lé  président  rappelle  l'assemblée  à  l'ordre. 

Bourdon  (  de  l'Oise  )  :  Il  §era  impossible  de  faire 
taire  l'assemblée  tant  qu'elle  n*aura  point  eu  les  dé- 
tails sur  la  nouvelle  qui  vient  de  se  répandre.  (Ap- 
plaudissements.) 

Le  Président  :  Je  viens  d'envoyer  an  comité  de 
salut  public. 

L'agitation  et  les  applaudissements  se  prolongent 
jusqu  à' l'arrivée  de  Carnot. 

Camot  monté  à  la  tribune. 

Carnot  :  Citoyens,  je  viens  lire  des  dépêches  que 
nous  venons  de  recevoir.  (Vifs  applaudissements.) 

Les  repréienlanit  du  peuple'jprès  les  armées  du  Nord 
et  de  Sambre-et-Meuse, 

Amterdam ,  le  •  plarloM ,  Pan  S*  de  la  répvbliqae 
frasçaÎM,  uoe  et  indivuible. 


è  Amsterdam ,  chers  cotlAjf on  (on  ap- 
plaudit pendant  longtemps^,  et  toute  la  Hollnnde  est  an 
pouvoir  de  la  répal>lique.  f  Les  applaQdiHsettients  recom- 
mencent, les  cris  de  vive  U  république .  «c  font  entendre  de 
toutes  parts,  j  Le  staikouder  fuit  avec  toute  mi  furoUle  (non* 
féaux  applaudifsemenls),  et  si  quelques  places  furtes  tien- 
oent  encore,  elles  ne  tarderont  pas  à  ouvrir  leurs  portes; 
on  nous  assure  même  que  Tordre  en  a  été  donné  par  les 
états  généraux.  (Les  applaudissements  redoublent  et  se 
prolongent  pendant  très-longtemps.)  Nous  attendons  des 
nouvelles  officielles  de  rentrée  de  nos  troupes  à  La  Haye 
pour  nous  y  transporter  et  prendre  les  mesures  provisoires 
qu*exig(>nt  les  circonstances. 

«  Les  avantages  de  cette  brillante  conquête  pour  la  ré- 
publique sont  immenses;  elle  lui  donne  des  trésors,  des 
raafasins,  des  chantiers,  des  vaisseaux,  et  surtout  dans 
les  aiïaires  politiques  et  commerciales  de  TEurope  une 
prépoudérance  dont  il  est  inspossible  de  calculer  les  elTets 
et  les  suites.  (Les  cris  de  ^ivê  U  république  I  se  renou- 
vellenl;  la  joie  est  universelle.)  Deux  d*entre  nous  vont  se 
rendre  à  Paris,  et  vous  communiqueront  verbalement  une 
foule  de  détails  qui  écliappenl  nécessairement  à  la  corres- 
pondance écrite.  (Applaudissements.)  Nous  ne  vous  par* 
Ions  |)oint  de  i*accuell  brillant  que  nous  avons  reçu  à  notre 
entrée  dans  Amsterdam  ;  nous  croyons  y  avoir  remarqué 
de  ta  franchise  et  de  la  cordialité.  (Nouveaux  applaudisse- 
menis.) 

-  Salut  et  nratemite. 

•  Signé  BBLLioAaaBi  GitLRT»  J.-D.  Licosiaet 
JotiaaBT*  • 


296 


Carnot  :  Le  comité  de  salut  pubijc  vous  propose 
de  déclarer  que  les  deux  armées  du  Nord  et  de  Sam- 
bre-et-Meuse  ne  cessent  de  bien  mériter  de  la  patrie. 
(L'assemblée  se  lève  tout  entière  pour  appuyer  ce 
projet  de  décret.) 

Blad  :  Grâce  à  la  valeur  de  nos  soldats  et  à  la  ra- 
pidité de  nos  conquêtes,  nos  armées  ont  usé  ce  glo- 
rieux protocole  qu'avait  adopté  la  Convention  pour 
les  récompenser.  Il  faut  que  la  Convention  invente 
une  dénomination  qui  puisse  leur  témoigner  toute 
notre  reconnaissance.  Je  propose  d'appeler  les  sol- 
dats de  ces  deux  armées  les  héros  du  Nord  et  de  Sam 
bre-el-Meuse. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Nos  frères  d'armes  qui  gra- 
vissent les  rochers  des  Alpes  ont  autant  de  peine  que 
ceux  qui  font  là  conquête  de  la  Hollande;  ainsi  je 
demande  qu'il  n'y  ait  pas  de  dislinclion. 

Carnot  :  Sans  doute  l'armée  Oui  a  le  plus  souffert 
est  celle  de  la  Vendée;  n'aurait-elle  pas  le  droit  d'être 
jalouse  de  cette  faveur  ?  Je  demande  que  l'assemblée 
adopte  le  projet  de  décret  que  son  comité  lui  pré- 
sente. 

Le  projet  de  décret  est  adopté  unanimement  aux 
cris  repétés  de  vive  la  république  ! 

La  séance  est  levée  à  une  heure  et  demie. 


TRIBUNAL  CBIMINEL  DE  PARIS,  DU  3  PLU\MOSE. 

Le  tribunal  y  en  vertu  de  la  loi  du  30  nivôse  et  en 
exécution  de  celle  sur  la  foruie  de  procéder  au  tri  - 
bunal  révolutionnaire,  a  instruit  aujourd'hui  le  pro- 
cès de  Pierre  Morin,  âgé  de  trente-six  ans,  né  à  Saint- 
Sauveur-de-Bonnevai,  district  de  Châteaudun,  dé- 

Sartement  d'Eure-et-Loir ,  vigneron  ,  puis  porteur 
'eau,  ensuite  cartonnier,  loge  en  chambre  garnie, 
rue  Jeane-l'Epine,  no  6,  à  Paris. 

Il  était  prévenu  d'avoir  assassiné,  avec  des  inten- 
tions contre-révolutionnaires,  Etienne  Olivier,  né  à 
Dreux,  âgé  de  trente-six  ans,  menuisier,  dérenseur 
de  la  patrie  dans  le  8^  bataillon ,  dit  de  Sainte- 
Marguerite,  résidant ,  pour  cause  de  maladie  ,  à  Pa- 
ris, ayant  sa  femme  et  deux  enfants  à  Villeneuve,  en 
Beauce. 

Le  27  nivôse,  vers  les  neuf  à  dix  heures  du  matin, 
Olivier  déjeunait  dans  un  cabaret,  rueTraversièrc, 
n«  6,  section  des  Quinze-Vingts.  Survint  Morin,qui, 
liant  conversation  avec  les  citoyens  qui  étaient  dans 
cecabaret,et  notamment  avec  Olivier,  tint  des  pro- 
pos contre-révolutionnaires,  vociféra  des  atrocités 
contre  la  Convention  nationale,  traita  decoc^uins  les 
deux  tiers  des  députés  qui  la  composent,  ainsi  que 
tous  les  membres  des  différents  comités.  Il  dit  avec 
chaleur  qu'il  n'était  plus  possible  d'y  tenir,  qu'il 
fallait  un  maître,  un  supérieur  sous  trois  mois;  que, 
tant  qu'il  n'y  en  aurait  pas ,  les  choses  n'iraient  pas 
bien  ;  qu'enbn  il  fallait  que  les  ouvriers  fussent  aug- 
mentés de  5  à  10  liv.,  et  de  to  à  15  liv. 

Olivier  ,  indigné ,  traita  Morin  de  coquin  ;  il  sortit 
du  cabaret  en  avertissant  les  citoyens  qui  y  étaient 
qu'il  allait  faire  sa  dénonciation ,  et  les  engageant  a 
ne  pas  laisser  sortir  Morin. 

11  se  rendit  au  comité  civil  de  la  section  des 
Quinze-Vingts,  qui ,  attendu  que  les  propos  qu'il  dé- 
nonçait étaient  contre-révolutionnaires,  le  renvoya 
au  comité  révolutionnaire.  Un  membre  de  ce  dernier 
comité  requit  la  garde  et  se  transporla  avec  Olivier 
dans  le  cabaret  dont  on  vient  de  parler. 

Morin  était  retourné  à  sou  travail  dans  une  mai- 
son rue  Traversière,  no  9.  Le  membre  du  comité  s'y 


transporta  avec  la  garde.  Morin  fut  reconduit,  Ters 
les  onze  heures  du  matin,  au  cabaret  susdit,  où,  en 
levant  le  tablier  d'Olivier,  il  lui  donna  un  coup  de 
couteau  dans  le  bas  ventre.  Celui-ci  tomba  à  la  ren- 
verse; sur  les  cris  qu'il  était  mort,  Morin  dit  que, 
s'il  n'était  pas  mort,  il  en  serait  lâché,  etqu'il  se  fou- 
tait d'être  guillotiné. 

Il  fut  conduit  chez,  le  commissaire  de  police,  oui 
l'interrogea  d'abord  sur  les  propos  contre-révoiu-> 
tionnaires. 

Morin  convint  que ,  sur  une  observation  d'Olivier 
que  les  vivres  étaient  bien  chers ,  lui  Morin  lui  ré- 
pondit que  les  choses  ne  pouvaient  aller  comme 
cela;  que  les  ouvriers  ne  pouvaient  pas  vivre  a 
moins  qu'on  ne  le^  augmentât  de  5  à  10  livres  et  de 
10  à  15  livres;  qu'il  y  avait  au  moins  les  deux  tiers 
de  In  Convention  qui  étaient  des  coquins,  et  qu'il  ne 
s'en  dédisait  pas.  Il  allégua  que,  s'il  avait  dit  qu'il 
fallait  chercher  quelqu'un  pour  nous  miçux  con- 
duire, il  ne  s'en  souvenait  pas.  Il  avoua  qu'il  avait 
donné  le  coup  de  couteau  à  Olivier;  il  reconnut  le 
couteau  dont  il  s'était  servi  pour  l'assassiner,  et  dit 
qu'il  l'avait  frappé  dans  l'intention  de  le  tuer  et  de 
lui  relever  les  tripes,  parce  qu'il  l'avait  fait  arrêter 
pour  les  propos  qu'il  avait  tenus. 

Plusieurs  témoins  entendus  à  Taudience  ont  répété 
et  confirmé  ces  propos  et  ces  faits. 

Trois  témoins  ont  déclaré  déplus  que  Morin,  en 
passant  auprès  du  cadavre  d'Olivier  couché  sur  an 
banc,  cracna  sur  la  figure  du  mort. 

Pendant  tout  le  cours  des  débats,  Morin  a  paru 
très-abattu  ;  il  a  répondu  qu'il  ne  se  rappelait  pas  de 


par  emportement,  etc.  11  a  déclaré  que  personne  ne 
l'avait  excité  à  commettre  ce  crime. 

Il  a  reconnu  le  couteau  fermant  avec  lequel  il  a 
homicide  Olivier. 

Morin,  convaincu  d'avoir  homicide ,  arec  prémé- 
ditation, Etienne  Olivier;  d'avoir  commis  cet  homi- 
cide après  avoir  opposé  des  violences  au  membre  du 
comité  révolutionnaire  du  huitième  arrondissement 
de  Paris,  agissant  légalement  dans  l'ordrede ses  fonc- 
tions, et  à  la  force  armée  dont  il  était  accompagné 
(lequel  membre  avait  enjoint  à  Morin  d'obéir  a  la 
loi);  d*avoir  commis  cet  assassinat  avec  des  inten- 
tions contre-révolutionnaires,  et  après  avoir  propose 
rétablissement  d'un  pouvoir  attentatoire  à  la  souve- 
raineté du  peuple,  a  été  condamné  à  la  peine  de  mort. 


LIVRES  DIVERS. 


Guerre  de  la  Vendée  et  des  Chouans,  par  Lequ 
seconde  édition  ;  in-S».  Pris  :  3  liv.,  broche;  et  3  liv.  10  s., 
avec  le  portrait  de  Tauteur. 

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toyen Fréville.  A  Paris,  chex  Gueffier  jeune,  imprimeur-li- 
braire, rue  Gtt-le-Cour,  n^  16.  Prix  :  1  liv.  10  a.;  et  S  Ut., 
franc  de  port. 


PayemenU  à  la  trésorerie  ntUionale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 
miers mois  :  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  |)orteurs 
d'ioscripUuns  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères 
est  de  huit  mois  vingt  et  un  jours  de  l'année  1793  (vieux 
style). 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  HONITÈIJR  UNIVERSEL. 

N*  128.  Octidi  8  Pluviôse,  Van  S*.  (Mardi  27  Janvier  1795,  vieux  tfyh.) 


POLITIQUE. 
ÉTATS-UNIS  D* AMÉRIQUE. 

CONGRÈS  DES  ÉTATS-tmiS. 

Séance  du  5  novenUtrê» 
(Extrait  des  gazettes  américaines.) 

La  Chambre  des  représentants  s'assemble  à  onze  heures, 
ainsi  qu'il  avaii  été  arrêté  dans  l'ajournement  de  la  Tdlle. 
Elle  reçoit  un  avis  que  le  sénat  n'est  pas  eu  nombre  suffi- 
sant pour  former  un  quorum. 

Davton  fait  la  motion  qu'il  soit  nommé  un  comité  pour 
examiner  les  affaires  qui  n'ont  point  été  terminées  pendant 
la  dernière  session,  et  en  faire  un  rapport  à  la  Chambre  ;  il 
Be  voit  pas  de  raison  pour  elle  de  perdre  du  temps  à  atten- 
dre que  le  sénat  soit  complet. 

Un  membre  s'oppose  à  la  motion  de  Dayton,  qu'il  regarde 
comme  Inconvenante. 

Dayton  somme  le  préopinant  d'établir  en  quoi  consiste 
riooonvenance  de  sa  motion.  Depuis  deux  ou  trois  semaines 
la  Chambre  des  représentants  est  complète ,  tandis  mie  le 
sénat  n'est  pas  rassemblé,  et  qu'à  proprement  parler  il 
n'existe  pas.  Le  parti  qu'il  propose  est  donc  aussi  l^al  qa'u- 
Ule. 

V orateur  pose  la  question.  Il  y  a  éealilé  de  voix  pour 
raffirmative  et  la  négative,  c'e^t-à-dire  vmgt-cinq  de  chaque 
côté.  L'orateur  informe  alors  la  Chambre  que  le  quorum  de 
aes  membres  n'est  pas  présent:  il  la  requiert  de  s'ajourner. 

L'ajournement  est  prononcé  pour  le  lendemain  a  onze 


Aux  termes  de  la  V*  section  du  V  article  de  la  constitu- 
tion fédérale ,  la  mérité  de  chaque  Chambre  constitue  un 
fuorum  pour  délibérer.  La  Chambre  actuelle  des  représen- 
tants est  composée  de  cent  cinq  membres. 

Séanu  du  6.  —  Le  sénat  s'éiant  assemblé  aujourd'hui,  le 
Donôbre  des  membres  se  trouvant  incomplet  pour  délibérer. 
Il  s'ajourne  au  lendemain. 

A  midi,  la  ClinmUre  des  représentants  s'ajourne  elle- 
méiM,  d'après  rinsuffisimce  des  membres  du  sénat. 

—  Les  troubles  qui  existaient  dans  la  Pensylvanle  occi- 
dentale sont  terminés  ;  trois  mille  hommes  de  l'armée  qui 
s'y  était  portée  sont  en  chemin  pour  revenir.    . 

ALLEMAGNE. 

Eambourgt  le  15  Janvier. -i- Des  personnes  qui  parais- 
aent  bien  Informées  croient  à  la  possibilité  d'une  paix  pro- 
chaine entre  la  république  française  et  la  Prusse. 

On  parle,  en  effet,  de  mésintelligences  et  d'altercations 
f  ives  entre  la  Prusse  et  la  Russie  ;  Guillaume  et  Catherine  se 
menacent;  ils  n'attendent  que  le  moment ,  qui  ne  peut  être 
éloigné,  de  se  déchirer  sur  le  cadavre  de  la  Pologne. 

—  On  mande  de  Bàle  que  le  citoyen  Barthélémy  y  a  loué 
une  maison  pour  six  mois  :  son  entrevue  avec  le  comte  de 
Goltz  a  été  très-gaie;  mais  il  a  régné,  ajouie-t-on,  de  la  di- 
gnité de  la  part  du  citoyen  Barthélémy,  et  beaucoup  de  mor- 
gue de  kl  part  de  l'envoyé  d'Autriche;  remarque  qui  ne  peut 
avoir  été  faite  qu^  dans  la  rue,  la  seule  place  où  le  ministre 
de  France  puisse  rencontrer  un  ministre  d'Autriche. 

—  La  fermentation  parmi  les  peuples  d'Allemagne  est  ex- 
trême, d'après  tous  les  renseignements  qui  nous  parvien- 
nent de  ce  pays.  On  y  appelle  la  paix  à  grands  cris.  Les 
princes  du  nord  de  l'Aliemagnc  suivront  l'Impulsion  que  la 
Prusse  leur  donnera.  C'est  vainement  que  la  maison  d'Au- 
triche affiche  la  prétention  de  forcer,  quand  elle  le  voudra, 
et  surtout  dans  le  cas  où  les  négociations  ne  réussiraient 
point,  la  Bavière  et  le  Souabe  d'embrasser  son  parti j  ce 
temps  n'est  pUis.  La  Souabe,  enlevée  à  l'innuence  autri^ 
chienne,  annonce  une  politique  pleine  d'humanité. 

—  On  dit,  et  ce  bruit  mérite  une  sérieuse  attention,  que 
Tempcreur  va  tirer  un  cordon  depuis  Baie  Jusqu'à  Con- 
stance, et  de  Bàle  jusqu'à  Manheim;  cela  ne  peut  demeurer 
indifférent  ni  pour  laSulsse,nl  pour  la  république  française, 
en  oe  que  l'un  et  l'autre  paya  tirent  detaubsistancea  consl- 
déraMea  de  la  Souabe. 

&«6crte   —  TcmeX 


L'empereur  veut  absolument  être  aussi  détesté  de  la  n«« 
tion  helvétique  que  de  la  nation  française;  U  loi  reete  peu  A 
faire. 

—  Le  système  des  finances  menace  ruine  chez  presque 
toutes  les  puissances  de  la  coalition  ;  l'Europe  peut  en  at- 
tendre un  grand  bouleversement.  Que  cela  devienne  favo- 
rable à  la  liberté  des  peuple!  L'Europe  devait  déjà  deux  ré* 
publiques  à  l'ambition  de  hi  maison  d'Autriche  (la  Suisse  et 
la  Hollande).  Les  mêmes  despotes  n'auront  pas  nul  à  l'éta* 
blissement  de  le  troisième,  celle  de  France,  qui  donne  un 
plus  grand  exemple  au  monde.  Voilà  quel  bien  un  si  grand 
mal  aura  pu  faire, 

—  Certains  émigré  français  tentent  les  plus  grands  ef- 
forts pour  faire  continuer  la  guerre.  Le  premier,  parmi  les 
auteurs  aristocratiques ,  est  un  certain  comte  de  Montgail- , 
lard,  sort]  de  France  depuis  le  mois  de  mal  dernier.  La  base 
des  raisonnements  de  cette  bande  d'écrivains  est  de  soute- 
nir I  que  la  France  ne  sera  en  état  de  continuer  la  guerre 
que  pendant  une  seule  campagne  ;  quil  ne  faut  pas  faire  la 
paix  avec  une  nation  qui  change  de  système  tous  les  mois  ; 
qu'on  serait  attaqué  de  nouveau  au  bout  de  deux  ans ,  i  et 
d'autres  contes  pareils.  Le  public  Ut  ces  écrits  avec  indigna- 
lion. 


REPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

De  Parié.  —  Voici  les  observations  météorologi- 
ques de  ces  derniers  jours  : 

Le  grand  froid  qui,  du  7  an  10  nivosc,  avait  di- 
minué sensiblement,  a  repris  arec  une  nouvelle 
force. 

Voici  les  degrés  observés  par  le  citoyen  Lalande  : 

Le  12,  60  ;  le  13,  ©o  ;  le  14,  Uo  ;  le  15,  8©;  le 
16,90. 

Ce  froid  est  extraordinaire,  puisqu*en  1740  il 
n*al]a  qu*à  IQo,  et  que  le  plus  grand  froid  de  Thiver, 
par  un  milieu  entre  tous,  est  de  7©  à  Paris  ;  mais  II  a 
été  jusqu'à  15o  en  170»;  13©  \  en  1776,  et  17©  en 
1788,  cest-à-dire  trois  fois  dans  un  siècle. 

Le  17,  il  n'y  avait  que  5©,  et  2®  seulement  le  18. 
On  croyait  en  être  quitte,  mais  le  19  il  y  eut  5o. 

Voici  ceux  des  jours  suivants  : 

Le20,  2o;le2t,3o;le  22,6*  J;  le  23,  6«;le2l, 
20;  le  25, 90  i;  le  26,  7oi;  le  27, 10;  le28,  lOoi; 
le  29, 100  «. 

Le  30  nivôse  et  le  l«r  pluviôse  a  lio;  le  2,  à 
110  i;  le  3,  il  était  un  peu  diminué  et  n'alla  qu'à 
9  f  ;  cela  donnait  des  espérances,  mais  le  4  pluviôse 
il  a  descendu  jusqu'à  ]6o ,  ce  qui  approche  du  plus 
grand  froid  qu'il  y  ait  cu'dans  ce  siècle-ci,  puisqu'eo 
1709  il  n'a  été  qu'à  15»  ,  et  en  1788  à  17o  i. 

On  m'a  iirêté,  ajoute  le  citoyen  Lalande,  dans  Pa- 
ris, des  prédictions  à  ce  sujet;  je  n'en  ai  fait  aucune, 
le  n'ai  pas  même  hasardé  des  conjectures.  On  sem- 
blait espérer  un  effet  de  la  nouvelle  lune  ;  j'ai  dit 
publiquement,  et  à  mes  auditeurs  au  collège  de 
France,  que  je  ne  croyais  pas  à  cet  effet  des  phases 
de  la  lune.  11  est  bien  vrai  que  la  période  de  dix-huit 
ans  a  paru  quelquelois  s'accorder  avec  les  années 
chaudes  ou  froides,  sèches  ou  humides  ;  mais  en  deçà 
des  montagnes  qui  séparent  la  France  de  l'Espagne 
et  de  l'Italie,  les  causes  locales,  les  vents,  les  neige i, 
déraneent  beaucoup  l'influence  des  causes  généra- 
les et  les  rendent  souvent  méconnaissables. 

Au  reste,  c'est  vers  le  5  janvier  qu'arrive  géném- 
lement  le  plus  çrand  Iroid  à  Paris  ;  c'est  du  25  dé- 
cembre au  5  février  que  s'étendent  les  quarante 
jours  les  plus  froids  de  Thiver  ;  ainsi  nos  espérances 
ne  peuvent  être  bien  éloignées. 

88 


S 


398 


En  lisant  les  obscrvalions  méUforologiques  prises 
à  rObservatoire  de  Paris  aux  époques  où  les  cir- 
constances 1rs  rendent  intéressantes,  nos  Icctetirs 
liront  sans  doute  avec  plaisir  celles  recueillies  à 
Francfort.  .    , 

Le  24  décembre,  le  thernriomètrc  était  a  10*  ao 
dessous  du  point  de  congélation.  . 

Le  25,  le  Froid  diminua  ;  mais  le  SI  dans  la  soirée 
la  gelée  reprit  de  nouveau  ;  et  le  1er  janvier,  le  ther- 
momètre fut  à  10<»  au-dessous  de  0. 

Le  2,  il  descendit  à  IS*;  le  3,  a  18©,  et  le  4,  à  19». 
Ce  jour  fut  celui  où  le  froid  fut  le  plus  rigoureux. 

Le  5,  le  thermomètre  remonta  à  14«. 

Hier  6,  le  temps  s'est  tellement  adouci,  que  le 
thermomètre  était  h  0®,  au  point  de  congélation. 


Cùupiels  prëseiUés  à  la  Convention  nationale 
le  2  pluviôse. 

A»  :  ÀUùHi,  enfants  de  la  patrie. 


A  pareil  jour,  le  rojralitne 
Naguère  expia  tea  fureurs  ; 
Mats  à  son  tour  le  terrorUoic 
A  fait  aussi  couler  des  pleurs,  {bis») 
La  plus  farouche  politique 
A  couvert  la  France  de  deuil  ; 
Robespierre,  dans  un  cercueil, 
PrécipiUit  la  republique, 
citoyens,  unissona  noa  efforts  ; 


Aux 


Frappons,  frappooa,  et  de  tyrans  peuplons  letsooibrea  bords! 


Tremblei,  despotes  homicides. 
Vrais  flëaus  de  rhumanitë  ! 
Tremblei,  vos  complots  parricides 
Soulèvent  un  peuple  irrité,  {bis.) 
Enfin,  le  jour  de  la  justice 
Vient  éclairer  tous  vos  forfaits  ; 
Les  dieux  vengeurs  sont  satisfait»; 
On  Inilne  le  crime  au  supplice, 
etc. 


Vérité,  sois  notre  bousaole  ; 
Par  toi  rhomme  connut  ses  droits. 
Justice,  sois  notre  symbole  ; 
Fais  ■  jamais  régner  nos  lois,  {hit») 
O  liberté  !  suu  notre  idole  ! 
Puisses-tu  voir  no»  descendant* 
Sur  la  tombe  de  nos  tyrans 
Danser  auui  la  Carmagnole  î 
Aux  armes,  etc. 

Par  le  litayett  («iLornT  Dir.Los. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présiéêncê  de  Bovére» 

Exlrail  du  rapport  fait  par  Pelel  (de  la  Lozère),  au 
nom  du  comité  de  iolut  publie^  sur  les  colonies , 
dans  la  séance  du  4  pluvtose. 

Votre  comité  vient  vous  entretenir  de  vos  colo- 
nies ;  il  vient  vous  offrir  le  résultat  de  ses  réflexions 
sur  l'état  de  notre  commerce  en  Europe  et  dans  les 
deux  Indes. 

Convaincu  que  la  vie  et  la  fortune  de  la  républî- 

3ue  une  et  indivisible  dépendent  de  l'égale  influence 
e  la  force  militaire,  de  Tagriculture  et  du  com- 
merce, sans  oppression  de  Tune  sur  aucune  des  au- 
tres, il  ne  prra  pas  un  moment  pour  renouer  ces 
forces  principales  de  la  prospérité  nationale  ;  il  ne 
dissimulera  point  à  une  nation  éprouvée  dans  la 
ytgta  par  tant  de  sacrifices  ce  que  les  despotes  s*em- 
pieaseraient  de  cacher  à  leurs  esclaves  fatigués; il 


vous  dira  que  votre  commerce  maritime  n*existe 
plus:  c'est  un  malheur  ;  mais  il  est  réparable. 

Il  ne  suffit  pas  de  rompre  ses  chaînes:  il  faut  le 
garantir  pour  l'avenir  par  Texposition  des  causes 

2 ni  Font  presque  anéanti.  Nos  ennemis  frémiront 
'apprendre  qu'elles  sont  enfin  découvertes.  Nous 
vous  dirons  que  la  cessation  du  commerce  ne  pro- 
vient pas  seulement  des  circonstances  de  la  guerre, 
mais  aussi  des  troubles  suscités  et  nourris  dans  vos 
colonies. 

On  était  parvenu  a  frapper  de  terreur  le  patrio- 
tisme, à  paralyser  Tactivilé  du  commerce,  a  ériger 
en  crime  de  hniite  trahison  rénuilation  et  l'indus- 
trie. La  lueur  d'une  pensée  civique  pouvait  allumer 
la  foudre  dans  les  mains  des  tyrans,  et  le  premier 
degré  d'une  fortune  naissante  et  pure  servit  trop 
souvent  d'échelon  pour  montera  l'échafaud. 

Pendant  ce  rogne  de  terreur  et  d'iniquités,  les  bâti- 
ments marchands  restaient  mouillés  dans  nos  ports; 
et,  lorsque  nos  corsaires  nuraieiit  dû  couvrir  les 
mers,  harceler  et  détruire  le  commerce  ennemi,  les 
pavillons  des  puissances  coalisées  couvraient  les 
océans  de  leur  ombre.  Ils  les  traversaient  comme  en 
pleine  paix,  avec  autant  d'insolence  que  de  sécurité. 

En  même  temps  les  colonies  étaient  condamnées 
à  un  abandon  total.  On  négligea  d'y  Taire  passer  Ses 
lettres  officielles  dans  des  moments  décisifs  ;  on  em- 
prisonna même  des  citoyens  venus  pour  offrir  des 
renseignements  précieux,  ou  pour  demander  des  se- 
cours ur{;enls. 

Voulait  on  livrer  vos  colonies  à  elles-mêmes  ou 
à  la  cupidité  de  vos  ennemis?  Voulait>on  réduire  au 
désespoir  leurs  forces  militaires,  en  partie  déjà  mois- 
sonnées? Voulait-on  exposer  leur  force  civile,  faute 
de  lois,  aux  aberrations  et  à  l'avilissement,  perpétner 
l'anarchie,  pour  donner,  par  la  lassitude  du  crime  et 
des  combats,  un  tyran  quelconque  à  vos  colonies^  et 
acheter  ainsi  l'odieux  pouvoir  de  régner  tranquille 
sur  la  France  d'Europe,  nu  milieu  de  ses  déserts,  de 
ses  ruines  et  de  ses  tonil)eaux  ? 

N'en  dotilez  pas,  tel  fut  le  pacte  contracté  avec  le 
machiavélisme  l)ritanni(]ue.  iHentutla  majeure  par- 
lie  de  nos  Antilles  épuisée  d'hommes,  mais  conrerte 
encore  de  richesses,  devint  la  proie  de  nos  enneâiis. 
La  prospérité  de  la  métropole,  privée  de  ses  sources 
les  plus  abondantes,  tarit  et  se  dessécha. 

Un  coup  d'œil  sur  notre  commerce  en  1787  et  en 
1789  suffira  pour  connaître  la  profondeur  de  ses 
plaies. 

En  1787,  les  Antilles  seules,  c'est-à-dire  Saint- 
Domingue,  la  Martinique,  la  Guadeloupe,  Sainfe- 
Lucie  et  Tabago,  fournirent  à  la  France  181  mil- 
lions 600,000  livres  de  productions. 

En  1780,  la  balance  générale  du  commerce,  (non 
compris  celui  d'Afrique  et  d'Amérique,  qui  donna 
240  millions)  nous  fut  favorable  de  61  millions 
500,000  livres.  L'exportation  fut  de  S3f  millions 
5000,000  liv.,  ce  qui  fait  un  mouvement  de  plus  de 
841  millions. 

Le  mouvement  général  du  commerce  présentait 
un  total  de  971  millions  500,000  liv.,  et,  les  Antilles 
entrant  pour  un  tiers  dans  ce  mouvement,  on  voit 
qu'elles  faisaient  uatiers  du  commerce  de  la  France, 
auquel  tiers  Saint-Domingue  fournissait  trois  quarts 
en  productions  coloniales. 

L'histoire  jugera  à  quel  degré  de  faiblesse  était 
tombée  l'Assemblée  conslituante,  vers  les  derniers 
temps  de  sa  session,  lorsqu'elle  céda  aux  colonies 
une  latitude  de  puissance  au  delà  de  celle  qu'elle 
avait  elle-même  exercée  sur  le  droit  civil  des  hom- 
mes C'était  bien  là  incontestablement  servir  le  vœu 
des  agitateurs,  qui,  s  appuyant  de  cette  prétendue 
constitution  colorâle,  aussi  illégale  qu^iropolitique, 


299 


allaient  tenter  de  s'affranchir  des  lois  de  la  repré^n- 
tation  nationale. 

De  là  datent  les  causes  premières  des  malheurs  des 
colonies  ;  elles  doivent  être  essentiellement  soumi- 
ses à  Taction  du  même  gouvernement,  et  elles  se 
crurent  assez  fortes  pour  tenter  Tindi^pendunce 
et  rejeter  les  lois  constitutionnelles,  sous  prétexte 
qu'elles  blessaient  les  convenances  locales. 

Votre  commission  des  colonies  est  chargée  de  vous 
développer  lu  vérité  sur  les  causes  de  tant  de  désas- 
tres, sur  les  provocations  qui  ont  figuré  sur  ce  vaste 
théâtre  d*intrigues  et  de  trahisons  ;  sur  ces  malheir- 
reuses  contrées  où  la  cupidité,  l'orgueil,  la  tyrannie 
et  la  licence  ont  voulu  dominer  tour  à  tour. 

Le  rapport  (}ue  vous  attendez  sur  cette  affaire 
fixera  votre  opinion  et  celle  de  la  France.  Nous  ne 
voulons  rien  préjuger. 

Invitez  votre  commission  de  presser  son  trarail, 
qu'elle  vous  fasse  connaître  les  bons  et  les  mauvais 
citoyens,  quels  sont  ceux  qui  ont  servi  les  patriotes 
ou  la  Grande-Bretagne,  et  coopéré  à  la  destruction 
de  vos  colonies.  Que  les  accusateurs  et  les  accusés 
soient  mis  en  présence  et  entendus  contradictoire- 
ment  ;  c'est  un  grand  moyen  pour  faire  connaître 
l'innocence. 

Il  faut  dissiper  les  soupçons  qui  planent  sur  un 
grand  nombre.  Rendez  les  innocents  à  Topinion  ;  ils 
peuvent  servir  la  patrie  par  leur  expérience  et  leurs 
talents. 

Votre  comité  n'envisagera  donc  vos  colonies  que 
sous  les  rapports  politiques  et  commerciaux  à  y  ré- 
tablir, la  nature  du  régime  provi^irc  que  vous  de- 
vez y  protéger,  et  les  moyens  à  mettre  en  action 
pour  y  maintenir,  foire  respecter  et  chérir  les  prin- 
cipes consacrés  par  la  France. 

Si  la  diversité  de  couleurs  et  l'opposition  d'inté- 
rêts ont  fait  gémir  sous  le  poids  de  l'anarchie  tous  les 
habitants  des  colonies  ;  si  ces  contrées,  jadis  floris- 
santes, sont  aujourd'hui  couvertes  de  deuil  et  de 
sang,  que  désormais,  plus  heureuses,  l'agriculture 
y  reprenne  une  nouvelle  vie  ;  que  toutes  Tes  classes 
de  citoyens  s'y  n'unissent,  et  concourent  de  concert 
à  oublier  le  passé  et  à  faire  pra^pérer  l'avenir. 

L'habitant  de  nos  coronies,  entouré  d'hommes  li^ 
bres  et  industrieux,  ressemblera  à  l'habitant  de  la 
métropole,  et  n'en  chérira  ses  lois  que  davantage. 
Nos  Antilles  deviendront  l'asile  de  toutes  les  cou- 
leurs persécutées  par  les  tyrans  du  nouveau  monde: 
la  cupidité  de  ceux-ci,  n'ayant  pour  alimenter  leurs 
possessions  que  les  hasards  du  despotisme  africain, 
recevra  de  la  main  déchaîna  de  Sies  esclaves  le 
coup  de  la  mort.  Ces  Français  se  nourriront  des  bien- 
faits de  la  mère-patrie  ;  ainsi  que  ta  liberté,  elle  ne 
cesse  de  donner  de  nombreux  enfants. 

Les  colonies  seront  sujettes,  soumises  et  non  indé- 
pendantes de  la  république  ;  elles  resteront,  comme 
vous  Tavez  déclaré,  invariablement  et indi visible- 
ment unies  à  la  France. 

Cependant  il  est  des  hommes  qui  renouvellent  le 
funeste  système  de  renoncer  à  vos  colonies,  au  droit 
inaliénable  de  la  souveraineté,  pour  laisser,  disent- 
ils,  nu  commerce  seul  le  soin  d'entretenir  les  liens 
réciproques. 

Etrange  enfantement  de  la  cupidité  et  de  l'intri- 
gne  !  Ne  serait-ce  pas  vouer  à  la  servitude  éternelle 
vos  colonies?  ne  serait-ce  pas  les  livrer  ;'i  vos  enne- 
mis? ne  serait-ce  pas  prosterner  le  commerce  de 
TEurope  au  pied  du  pavdlon  britannimie?...  Ah  !  si 
jamais  on  se  laissait  égarer  par  ce  sophisme  dange- 
reux, les  propriétaires  de  vos  îles,  trop  faibles  pour 
conserver  une  folle  indépendance,  appelleraient  dé- 
sormais sans  ménagement  d'astucieux  ennemis. 
Ceux-ci  accouraient  s'y  établir,  et,  sous  les  appa- 


rencesde  la  protection  et  d'une  blanche  philanthro*- 

rnc,  ils  enchaîneraient  toutes  les  couleurs  à  leur  pq- 
itique  mercantile  ;  ils  soumettraient  ces  îles  aux 
statuts  qu'ils  ont  déjà  portés  dans  celles  dont  ils 
sont  depuis  longtemps  possesseurs. 

Non,  citoyens,  non,  on  ne  vous  portera  point  à 
adopter  un  système  atroce,  qui  ne  provient  que  des 
ennemis  de  la  patrie  ;  un  système  impolitique,  puis- 
qu'il ne  tend  ({u'à  vous  arracher  des  mains  le  talis- 
man qui  doit  à  la  fois  rétablir  votre  commerce  ma- 
ritime et  affaiblir  celui  de  vos  ennemis. 

Rappelez-vous  ce  projet  de  congrès  colonial  établi 
à  rîle  Saint-Martin  ;  projet  imaginé  par  Barnave, 
pour  rompre  avec  plus  de  facilitéles  liens  qui  unis- 
saient les  colonies  à  la  métropole...  On  jette  au- 
jourd'hui ces  mêmes  propositions  en  avant. 

Voyons  où  tendent  ces  insinuations.  On  voudrait 
vous  faire  ouvrir  dans  vos  colonies  la  porte  aux 
émigrés  et  aux  traîtres,  les  établir  dans  leurs  posses- 
sions dans  les  Iles,  évaluées  à  2  milliards,  et  les  ren- 
dre ainsi  les  arbitres  de  votre  commerce. 

On  voudrait  y  anéantir  la  liberté,  qui  chaque  jour 
dans  cette  partie  devient  plus  terrible  à  vos  ennemis 
intérieurs  et  extérieurs. 

Je  n'examinerai  point  ici  le  décret  du  16  pluviôse; 
sans  doute  il  eût  été  plus  utile  de  le  Daire  précéder 
des  lumières  de  l'instruction  et  de  la  maturité  con- 
venable ;  il  aurait  été  possible  peut-être  d'éviter 
toute  espèce  de  commotion,  et  de  ménager  tous  les 
imérôts  politiques;  mais  il  ne  s'agit  point  aujour- 
d'hui de  discuter  un^  question  jueee  :  le  décret  est 
rendu,  il  faut  qu'il  soit  exécuté.  Un  règlement  sage 
et  assurera  les  intérêts  des  affranchis  et  les  intérêts 
des  propriétaires. 

Dans  le  moment  actuel  l'intérêt  particulier  s*a- 
gite,  mais  en  vain,  pour  vous  faire  rétrograder  vers 
ces  temps  déplorables  où  le  luxe  et  l'immoralité 
d'une  cour  corrompue  et  dévastatriceautorisaient  du 
manteau  de  la  loi  le  préjugé  barbare  qui  faisait 
d'une  race  d'hommes  une  propriété  mobilière,  un 
vil  bétail. 

Cet  intérêt  s*agite,  dans  ses  folles  espérances, 
pour  replanter  le  régime  de  la  servitude  dans  vos 
îles  lorsque  la  nation  veut  la  liberté  pour  toutes  les 
sections  de  la  souveraineté,  lorsque  la  Déclaration 
des  Droits  porte  qu'aucun  homme  ne  peut  se  vendre 
ni  être  vendu,  et  que  sa  liberté  est  une  propriété 
inaliénable. 

Ne  nous  laissons  point  endormir  par  des  insinua- 
tions étrangères.  Nous  avons  perdu  une  année  sans 
profiter  des  avantages  que  pouvait  procurer  le  dé- 
cret de  la  liberté,  son  effet  sur  nos  colonies  eût  été 
bien  grand  si  vous  Ty  aviez  envoyé  par  des  commis- 
saires pris  dads  la  représentation  nationale  ;  il  eût 
rallié  toutes  les  opinions,  il  eût  prévenu  l'embrase- 
ment de  nos  colonies;  il  eût  empêché  les  Anglais  et 
les  Espagnols  d'y  former  des  partis  ;  il  eût  empêché 
les  couleurs  de  s'égorge  les  unes  les  autres. 

Occupons-nous  donc  de  l'impérieux  devoir  de 
protéger  nos  colonies  et  de  leur  rendre  la  paix  et  le 
bonheur  ;  repoussons  avec  mépris  lessophismes,  les 
insinuations,  les  préjugés;  persuadons-nous  que 
ceux  qui  les  provoquent  en  empruntant  la  langue  et 
les  signes  de  la  confraternité  sont  de  mauvais  ci- 
toyens qui,  n'ayant  ni  le  courage  ni  la  force  de  ré- 
sister à  fa  France,  hors  de  la  France,  se  masquent  en 
caméléons  pour  tromper  ses  représentants  et  ses 
conseils. 

Rappelons-nous ,  et  que  la  postérité  s*en  sou- 
vienne toujours,  rappelons-nous  que  Robespierre 
visant  à  la  popularité  disait  à  l'Assemblée  consti- 
tuante :  •  Périssent  les  colonies  plutôt  que  de  sacri- 
fier un  principe,  -  et  que,  sous  le  règne  de  la  repu- 


200 


blique,  lorsqu'il  s'acheminait  au  pouvoir  suprême, 
il  fit  un  crime  à  la  Convention  de  l'armement  des  co- 
lonies. 

Louis  XIV  servit  Thypocrisic  de  Cromwell  ; 
Georges  111  usa  des  mêmes  moyens  envers  Robes- 
pierre. Ce  rapprochement  nous  donne  la  mesure  du 
patriotisme  de  ces  charlatans  politi(iues. 

Quand  je  me  suis  plaint  de  ce  que  nos^olonies 
fivaient  été  laissées  sans  secours,  je  n*ai  pas  voulu 
«lire  qu*il  fallût  y  envoyer  des  armées  ;  vos  îles, 
placées  pour  la  plupart  sous  une  zone  brAlante  ou  à 
de  grandes  distances  de  ta  mère>patrie,  les  unes  et 
les  autres  insalubres  par  la  chaleur  du  ciel  ou  la  pu- 
tridité  dés  marécages,  moissonneraient  bientôt  nos 
plus  fortes  phalanges. 

La  guerre  d'Amérique  nous  a  coûté  plusieurs  mil- 
liers a*hommes  dans  cette  partie  du  monde  ;  nous 
avons  perdu  huit  neuvièmes  de  ceux  que  nous  en- 
voyâmes aux  Antilles  depuis  la  révolution. 

L'Angleterre,  dans  ses  colonies,  creuse  chaque 
jour  un  lar^e  tombeau  à  ses  satellites.  Ce  goutfre 
qui  engloutit  ses  soldats  ne  se  refermera  que  lurs(iue 
la  liberté  y  précipitera  ses  oppresseurs.  Quant  à  nos 
moyens  de  défense  et  de  victoire,  ils  sont  dans  les 
millions  de  bras  que  vous  avez  déchaînés  ;  ils  repo- 
sent sur  l'arbre  de  la  liberté  qui  couvrira  vos  îlesde 
son  ombre  hospitalière;  ils  pénètrent  sous  les  pos- 
sessions de  vos  ennemis  comme  ces  feux  souterrains 
qui,  circulant  sans  bruit  sous  des  rochers  caducs, 
sous  une  terre  stérile,  en  changent  tout-à-coup  la 
forme  par  une  explosion  subite  et  terrible. 

Cette  convulsion  a  eu  lieu  dans  nos  colonies  ;  une 
lave  de  sang  a  coulé...  Que  désormais  elles  soient 
couvertes  des  plus  riches  dons  de  la  nature  et  de  la 
▼ertu.  Les  productions  coloniales,  devenues  pour 
l'Europe  des  objets  de  nécessité  première,  vont  croî- 
tre et  se  multiplier  sous  rinfluence  des  bonnes  lois. 
Réciproquement  les  productions  de  la  France,  por- 
tées dans  vos  colonies,  animeront  le  travail  et  l'in- 
dustrie des  nouveaux  libres,  pour  s'en  procurer  la 
jouissance. 

11  faut  donc  réchauffer  le  zèle  et  le  courage  des  ci- 
toyens qui  n'attendent  que  vos  regards  pour  se  dé- 
vouer aux  combats  ou  à  la  culture.  11  faut  environ- 
ner le  commerce  de  cette  confiance  que  méritent  les 
dangers  auxquels  il  8*expose,  et  de  cette  liberté  de 
conceptions  et  de  mouvements  qu'on  ne  doit  arrêter 
que  pour  les  objets  d'exportation  susceptibles  par 
leur  rareté  d*affecter  la  vie  du  gouvernement. 

Le  conseil  perfide  de  saigner  le  commerce  sera 
pesé  dans  Thistoire.  Le  tribunal  de  l'avenir  et  la 
postérité,  ce  juré  irrécusable  et  incorruptible,  pro- 
nonceront souverainement  si,  en  frappant  les  com- 
merçants, on  ne  voulut  pas  anéantfr  le  commerce. 
S'il  a  tant  souffert,  c'est  aux  représentants  de  la 
France  à  se  réunir  pour  lui  rendre  la  vie  et  la  vi- 
gueur. 

La  France  a  fait  jusqu'ici, sans  fruit,  des  dépenses 
énormes  pour  le  soutien  et  la  défense  de  ses  colo- 
nies ;  les  revenus  qui  s'y  sont  faits  ont  été  la  proie  de 
l'Espagnol  et  de  TAnglais,  l'aliment  du  commerce 
étranger  et  de  la  guerre  de  vos  ennemis...  Français, 
tous  ces  maux  ne  sont  rien  si  vous  vous  réunissez 
pour  rétablir  votre  commerce  ;  son  génie  inventif 
fut  toujours  supérieur  aux  combinaisons  mercanti- 
les des  autres  peuples. 

Assurons  donc  aux  commerçants  l'exercice  libre 
de  leurs  spéculations.  Dites-leur  :  La  saisie  réelle  ne 
prouvait  atteindre  vos  débiteurs;  vous  ne  perdrez 
rien  de  vos  anciens  capitaux;  la  république  est  juste  : 
elle  vous  en  garantit  la  reprise  sur  les  terres  ae  vos 
débiteurs,  français  ou  émigré,  républicains  ou 
royalistes*  Livrez-vous  au  penchant  des  entreprises; 


liez-les  au  grand  intérêt,  au  bonheur  de  la  patrie. 
Vous  pouvez  encore  jeter  des  regards  sur  les  colo- 
nies; la  France  vient  d'étendre  sur  elles  sa  main 
protectrice,  et  sou  génie  vous  suivra  partout.  Le 
vôtre,  longtemps  euchainé,  flctri  par  toutes  les  ty- 
rannies, planera  sur  toutes  les  mers  et  visitera  tou- 
tes les  contrées  pour  les  faire  retentir  de  la  renom- 
mée de  nos  armes  et  de  la  gloire  de  nos  triomphes. 

A  l'éeard  de  vos  possessions  et  de  votre  commerce 
de  rinae,\ous  avez  à  employer  les  mêmes  efforts 
que  pour  l'Amérique  ;  car  ce  sont  les  mêmes  fautes 

aui  vous  les  ont  fait  perdre.  11  ne  vous  reste  que  les 
es  de  France  et  de  la  Réunion,  vos  comptoirs  du 
Sénégal,  de  Corée  et  de  Juida  :  en  les  conservant, 
vous  recouvrerez  tout  ce  que  vous  avez  perdu  dans 
cette  partie  :  les  Mahrates  et  Tippoo-Sa7b  n'attendent 
que  le  moment  de  chasser  les  oppresseurs  du  riche 
pays  de  l'Arcate  ;  il  vous  sera  facile  de  réduire  con- 
sidérablement les  avantages  que  nos  ennemis  reti- 
rent de  leurs  possessions  dans  Tlnde  ;  les  deux  tiers 
des  marchanaises  qu'ils  en  importent  sont  oonsom-  , 
mées  en  France  :  et  certes  vous  pèserez  dans  votre 
sagesse  rulililé  d'en  prohiber  l'entrée  et  l'usage; 
vous  consulterez  votre  commerce  pour  anéantir  sans 
raffecter  lui-même  un  tribut  aue  la  république  paie 
a  ses  ennemis  :  vous  jugerez,  de  concert  avec  lui,  si 
cette  prohibition  n'est  pas  toute  en  faveur  des  fabri- 
ques nationales. 

De  tous  les  ennemis  de  votre  prospérité,  l'Angle- 
terre est  le  plus  dangereux.  Cette  puissance  envoie 
des  ambassadeurs  en  Chine;  elle  est  au  cap  de 
Bonne-Espérance;  elle  étend  sa  chaîne  jusque  sur 
les  îles  de  la  mer  du  Sud;  elle  va  pêcher  jusqu'à 
Nootka-Sound  ;  elle  fonde,  sans  s'en  douter,  une  re- 
traite pour  ses  tyrans  à  Botany-Bey.  Eu  Amérique, 
elle  règne  despotiquement  sur  le  golfe  du  Mexique  ; 
elle  entretient  des  soldats  sur  la  Trinité  espagnole  ; 
ses  satellites  gardent  Curaçao.  Maîtresse  du  Vent  et 
de  l'entrée  du  golfe,  elle  l'est  aussi  de  son  courant 
et  de  sa  sortie  ;  les  îles  de  Bahama  et  de  la  Provi- 
dence étant  le  saz  de  cette  grande  écluse,  malgré  la 
prohibition  du  gouvernement  espagnol,  sesna.vires 
vont  se  charger  à  Campêche  des  bois  d'acajou,  de 
i  teinture  et  de  construction  navale,  les  plus  durables 
et  les  plus  précieux  de  l'univers  ;  son  commerce  fait 
la  contrebande  de  piastres  du  Mexique.  Sa  politique 
astucieuse  a  profité  des  troul>les  des  Antilles  ;  elle 
s'est  liée  à  la  tourbe  des  traîtres  pour  nous  enlever 
nos  lles-du-Vent;  à  Terre-Neuve,  elle  s'est  emparée 
de  nos  postes  et  de  nos  pêcheries  ;  dans  le  Canada 
(cession  dont  les  effets  sont  aussi  funestes  aux  Etats- 
Unis  qu'à  nous)  le  Léopard,  fugitif  par  leseffortsdes 
Français  de  cette  contrée  comprise  entre  les  rivières 
de  Saint-John  et  de  Sainte-Marie,  guette  l'instant  de 
s'étendre  une  seconde  fois  sur  elle  pour  la  dévorer. 
En  Europe,  elle  influe  sur  la  cour  de  Saint-Pé- 
tersbourg et  détourne  à  son  avantage  le  commerce 
des  Russies;  elle  tend  des  pièges  à  la  sagesse  du  Di- 
van sur  la  foi  que  la  Porte-Ottomane  doit  à  sa  lon- 
gue et  constante  alliance  avec  la  nation  française  ; 
elle  intrigue  pour  s'emparer  exclusivement  du  com- 
merce du  Levant;  elle  obtient  un  ambassadeur  du 
Sultan  près  de  sa  cour.  Il  ne  suffit  pas  à  celte  mo- 
derne Carthage  de  regarder  avec  dédain  l'Espagne, 
du  roc  de  Gibraltar,  et  de  défendre  ou  de  permettre 
à  son  gré  l'entrée  de  la  Méditerranée  :  elle  possède 
les  îles  Baléares  ;  elle  vient  d'acheter  la  Corse  du 
traître  Paoli  ;  elle  a  insulté  la  république  de  Gênes, 
fait  tenir  au  grand  duc  de  Toscane,  par  un  agent  poli- 
tique, un  discours  qu'Annibal,  dans  ses  victoires, 
n'eût  osé  adresser  aux  derniers  des  Romains  ;  Naples 
et  Madrid  ont  été  entraînés  par  elle  dans  les  mesu- 
res les  plus  contraires  à  leur  politique;  en  Espagae 


301 


elle  gotivcrnp,  eu  Portugal  elle  commande  ;  partout 
elle  s*enrichit  ;  la  Hollande  est  sous  ses  pieds; on 
pourrail  dire  qu'elle  solde  FAIIemagne,  presque 
toute  TEurope,  contre  nous,  à  Texception  de  la 
Suède  et  du  Danemark,  qui,  connaissant  ses  ruses  et 
son  ambition,  notre  loyauté  et  leurs  vrais  intérêts, 
se  sont  montrés  inaccessibles  aux  séductions  et  aux 
menaces. 

Je  ne  parlerai  point  de  tous  les  fléaux  qu'elle  a 
conjurés  contre  la  république ,  de  ses  trahisons  in- 
fernales qui  pénétrèrent  dans  le  sud  de  la  France, 
et  de  cette  guerre  de  famille  qu'elle  a  allumée  dans 
son  sein  et  qu'elle  attise  encore.  La  nation  française 
est  indignée  de  tant  de  yîIcs  manœuvres  méditées 
de  sang-froid  dans  le  cabinet  le  plus  perfide.  Elle 
voit,  et  TEurope  devrait  s'apercevoir  qu'elle  n'est 
que  Taveugle  instrument  de  son  ambition  mercan- 
tile, et  que,  si  la  république  n'était  pas  impérissa- 
ble ,  tous  les  gouvernements  seraient  bientôt  à  la 
solde  de  la  Grande-Bretagne,  et  tous  les  peuples  tri- 
butaires de  ses  manufactures  et  de  ses  fabriques. 

Hâtons-nous  donc,  en  secondant  les  succès  de  nos 
armes  par  le  rétablissement  de  notre  commerce  et  la 
reprise  de  nos  colonies,  d'anéantir  le  dévorant  sys- 
tème de  la  monarchie  universelle.  Mais  quelle  sera 
l'autorité  que  vous  enverrez  dans  vos  colonies? 
Choisirez-vous  des  délégués  ou  dans  la  masse  natio- 
nale, ou  dans  la  Convention  ;  des  commissaires  ci- 
vil.s,  ou  des  représentants  du  peuple  ? 

Cette  question  est  extrêmement  délicate  sous  tous 
les  rapports,  et  semble  être  hérissée  de  diffi'cultés. 

En  envoyant  des  commissaires,  il  y  a  lieu  de 
craindre  que,  n'étant  pas  investis  de  l'honneur  de  la 
représentation  nationale,  l'impression  de  l'autorité 
qui  leur  serait  confiée  ne  fût  pas  assez  forte  et  assez 
profonde.  11  est  vrai  que  leur  responsabilité  serait 
plus  d'à-plomb  sur  leurs  têtes,  et  que,  choisis  sur 
l'universalité  du  peuple,  parmi  les  citoyens  qui  con- 
naissent Pesprit  de  vos  colonies  et  les  causes  qui  les 
ont  agitées,  parmi  les  citoyens  qui,  exempts  de  tout 
esprit  de  parti,  emploieraient  leurs  talents,  leur 
justice  et  leur  sensibilité  à  elfacer  les  nuances  mo- 
rales des  couleurs  physiques,  et  à  ramener  la  paix, 
runion  et  le  travail  au  nom  de  la  grande  famille  des 
Français,  les  commissaires  civils,  d'accord  et  insé- 
^arables  d'après  vos  instructions,  pourraient  suffire 
a  remplir  glorieusement  la  mission  dont  vous  les 
honoreriez. 

Vous  sentez  aussi  qu'envoyer  des  représentants 
du  peuple  dans  vos  colonies,  ce  serait  donner  à  leur 
mission  quelque  chose  d'auguste  ;  ce  serait  donner 
à  vos  colonies  l'image  de  la  république  ;  ce  serait  un 
grand  moyen  d'inspirer  à  ses  aéfenseurs  un  courage 
presque  surnaturel  pour  les  reconquérir;  mais  n'est- 
il  pas  à  craindre  d'affaiblir  votre  assemblée  en  en- 
voyant de  ses  membres  au  delà  des  mers?  n'est-il 
pas  a  craindre  qu'un  si  grand  pouvoir,  exercé  si  loin, 
ne  grandit  trop?  n*est-il  pas  à  craindre  qu'en  mnlti- 

F liant  au  delà  du  cercle  ordinaire  de  votre  territoire 
envoi  de  représentants,  ils  agissent  à  l'tle  de  France 
dans  un  sens  opposé  à  leurs  collègues  envoyés  dans 
telle  ou  telle  autre  colonie? 

Néanmoins  votre  comité  de  salut  public  s*es(  dé- 
cidé pour  l'envoi  de  représentants  dans  vos  colonies; 
il  m'a  chargé  de  vous  présebter  le  projet  de  décret 
suivant  : 

«  Art  r*.  Il  sera  nommé  par  la  Cooveotlon  nationale,  et 
A  l'appel  nominal,  trois  représentants  du  peuple  pour  lesco- 
louies  occldcnuiles,  et  trois  pour  les  colOBles  orlenuiles. 

«  U.  Les  représentants  du  peuple  se  concerteront  avec  le 
comité  de  salui  public  pour  tout  ce  qui  sera  reladf  A  leur 


lation  présesteroiit  A  la  Conv«Btion  naUônale,  cliarun  en  ee 
qui  les  concerne,  les  Instructions  A  donner  aux  représen- 
tants du  peuple.  • 

L'ajournement  de  ce  décret  est  décrété. 


•  Uh  Us  comités  di  aalat  pabllc,  de  finances  et  de  l^t- 


Ariiele  omig  dam  une  da  préeédente$  iéancH. 

Les  sections  de  l'Observatoire,  de  Marat,  de  Chal« 
lier,  du  Poiit'Neuf,  de  Mulius-Sccevola  et  de  TUnilif 
présentent  une  pétition  pour  obtenir  le  retour  des 
artistes  du  ci-devant  Théâtre-Français  dans  leur  an- 
cienne salle. 

Cette  pétition  est  renvoyée  au  comité  d'instruc» 
tion  publique. 


SÉANCE  DU  7  PLUTIOSB. 

RicHABD  :  Nos  conquêtes  se  succèdent  avec  une 
étonnante  rapidité.  Voici  la  lettre  de  nos  collègues: 

Amsterdam,  le  S  pluvioto. 

I  La  conquête  des  Proylnce»-Unies  se  fait  aussi  beumise- 
ment  qu'elle  a  été  commencée  ;  la  totalité  des  trois  pro- 
vinces de  ta  Gueldre ,  d'Utrecht  et  de  la  Hollande  est  tm 
pouvoir  de  la  république.  i«es  places  de  Gertruydemberg» 
Dordrecbt,  Gorcum  et  d'Ondeoslen  ont  capitulé  hier. 

■  Les  froids  sont  toHJours  excessifs  ;  mais  la  constance 
des  armées  est  toujours  la  même  à  suivre  leurs  rapides  con- 
quêtes. La  nuit  comme  le  Jour  eUes  bravent  les  injures  du 
temps,  font  des  marches  de  plusieurs  lieues  sur  la  glace, 
font  rouler  des  canons  et  des  caissons  sur  la  Meuse,  le 
Wahal  et  le  Leck,  et  font  servir  la  surface  de  ces  fleuves 
glacés  A  foudroyer  les  remparu  qui  devaient  les  anéantir. 
«  Signé  iês  nprétaaanU  du  peuplé 
près  C armée  du  tford,  • 

Clauzbl,  au  nom  des  comités  de  salut  public  et 
de  sftreté  générale  :  Citoyens,  il  suffit  de  dire  à  It 
Convention  nationale  que  la  tranquillité  publique 
peut  être  quelque  part  menacée  ;  il  suffit  qu'elle  ap- 
prenne au  peuple  français  que,  tandis  que  ses  ar* 
mées  volent  rapidement  de  victoire  en  victoire, 
quelques  malveillants  s'agitent  dans  telle  ou  telle 
commune,  pour  qu'à  l'instant  les  manœuvres  des 
ennemis  du  repos  soient  entièrement  déconcertées. 

Je  viens,  au  nom  de  vos  comités  de  salut  publie 
et  de  sûreté  générale,  vous  instruire  que  ceux  qui, 
depuis  le  9  thermidor,  ont  vu  s'échapper  de  leurs 
mains  l'espèce  de  suprématie  qu'ils  s'étaient  arrogée 
dans  quelques  départements  méridionaux,  regret- 
tant de  ne  pouvoir  plus  vexer,  piller  et  massacrer 
les  citoyens  de  Marseille,  osent  remuer  encore,  pour 
rétablir,  comme  s'il  était  possible,  ce  système  can- 
nibale ,  dont  l'idée  seule  fera  frAiir  df'horreur  les 
nations  les  plus  barbares. 

Ces  monstres  ne  réussiront  pas,  car  vous  avez 
juré,  citoyens,  de  vous  ensevelir  plutôt  que  de 
souffrir  que  cette  tyrannie  renaisse ,  et  la  France 
entière  a  répété  ce  serment  couservateur  de  l'espèce 
humaine. 

Mais  c'est  déjà  donner  trop  de  consistance  à  ce  tas 
d'êtresvils  et  méprisables,  dont  je  vous  entretien- 
drais moins  si  nous  ne  voulions  empêcher  qu'ils  ne 
trompent  quelques  bons  citoyens ,  s'il  n'était  dans 
nos  cœurs  de  ramener  plutOt  que  de  punir  ceux 
qu'ils  auront  pu  égarer. 

Passons  à  la  lecture  des  pièces,  afin  de  fixer  votre 
attention  sur  les  mesures  a  prendre  poar  le  main- 
tien du  bon  ordre. 

La  première  lettre  que  lit  Clauzel  est  signée  da 
représentant  du  peuple  à  Marseille.  Elle  porte  que 
le  représentant  du  peuple*C«droy  s'éUit  rendu  à 


302 


Marseille,  sur  le  bruit  qui  s*dtait  rtSpaudu  à  Aix  qu*on 
sVgorgeait  dans  cette  première  ville.  Le  représen- 
tant du  peuple  ajoute  qu*il  a  retardé  son  voyage  à 
Toulon,  a  cause  (les  inquiétudes  qui  s'étaient  mani- 
festées depuis  le  départ  de  la  garnison  de  Marseille 
pour  s*embarquer. 

Une  seconde  lettre  du  représentant  porte  que  les 
terroristes  et  les  voleurs  inspirent  la  terreur  et  l'ef- 
froi dans  la  commune  de  MarscINe.  Le  tribunal  cri- 
minel a  été  insulté  en  voulant  juger  tes  auteurs  de 
la  révolte  du  5  vendémiaire,  et  a  été  forcé, de  lever 
M  séance.  Le  représentant  du  peuple  Espert  a  eu  la 
faiblesse  de  suspendre  la  procé<l(ire,  et  même  de 
faire  mettre  en  liberté  quelques-uns  des  prévenus.' 
L'impunité  a  accru  Taudace  desiaclieux,  qui  crient 
hautement  :  Vivent  le»  Jacobins!  vive  la  Mon- 
tagne! 

Dans  leurs  orgies  ils  boivent  à  la  santé  du  mois 
prochain.  Une  proclamatioi  du  commandant  de  la 
place  a  défendu  ces  cris  séditieux,  sous  peine  d'ar- 
restation. 

Une  troisième  lettre  porte  que  les  factieux  ne  font 
plus  de  mystère  de  leurs  criminelles  espérances  ;  ils 
disent  hautement  que  ce  qu'ils  appellent  Toppres- 
sion  des  patriotes  ne  durera  pas  longtemps.  Ces 
hommes  altérés  de  sang  poussent  partout  des  cris 
de  révolte  ;  les  têtes  fermentent,  et  les  cannibales  se 
flattent  du  jouer  bientôt  à  la  boule  avec  les  télés  de 
ces  boiigres-là.  C'est  ainsi  (]u'ils  appellent  les  amis 
de  la  révolution  du  9  thermidor.  Ils  ajoutent  :  •  Jus- 
qu'ici nous  n'avons  eu  du  sang  que  jusqu'à  la  che- 
ville, nous  en  aurons  bientôt  jusqu'aux  genoux.  • 
(On  frémit  d'horreur.) 

Un  grand  nombre-de  négociants  prennent  des 

Sasseports  pour  sortir  de  Marseille.  La  chose  qui  af- 
ige  le  plus  les  hommes  probes,  c'est  de  voir  auo.  le.s 
armes  sont  entre  les  mains  de  ces  patriotes  exclu- 
sifs, qui  pourraient  profiter  du  départ  de  la  garnison 
pour  égorger  leurs  concitoyens.  Cependant  Mar- 
seille n  en  est  pas  totalement  dépourvu  ;  le  com- 
mandant de  la  place  assure  qu*il  y  a  dans  le  fort 
Jean  quatre  mille  fusils  qu'on  pourrait  distribuer, 
au  besoin ,  aux  amis  sincères  de  la  républiaue.  Ce 
serait  un  coup  de  maître,  pour  ces  hommes  réroces, 
que  d'éloigner  de  Marseille  ce  commandant,  qui  est 
un  très-brave  homme  ;  ils  ont  en  conséquence  en- 
voyé des  émissaires  à  Paris  pour  demander  que  cette 
commune  ne  soit  plus  en  état  de  siège.  «Si  ce  décret 
était  rendu,  ajoute  le  représentant  du  peuple,  la  ré- 
volte éclaterait  vingt-quatre  heures  après  dans  Mar- 
seille ,  où  l'on  a  préparé  de  longue  main  tous  les 
mouvements  qu'on  a  tâché  d'exciter  à  Paris.  > 

Clauzel  lit  enfin  une  lettre  du  comité  révolution- 
naire du  district  de  Marseille,  qui  contient  les  mêmes 
faits  et  supplie  la  Convention  de  ne  point  rapporter 
le  décret  qui  met  Marseille  en  état  de  siège. 

Clauzbl  :  Il  est  évident  que  les  terroristes ,  les 
hommes  de  sang  n'ont  pas  entièrement  renoncé 
aux  folles ,  mais  coupables  espérances  de  rétablir 
leur  affreux  système  dans  Marseille ,  cette  cité  fa- 
meuse par  son  port,  cette  cité  qui  entretiendrait  l'a- 
bondance dans  le  Midi  si  le  reste  de  ses  négociants 
osaient  se  livrer  aux  spéculations,  s'ils  étaient  as- 
surés qu'en  faisant  venir  de  l'étraneer  des  grains 
pour  alimenter  leurs  compatriotes.  Te  pillage  et  la 
ruine  ne  seraient  pas  la  récompense  de  leurs  tra- 
vaux. 

La  Convention  n'a  pas  oublié  qu'on  a  dit  à  cette 
tribune  que  les  traîtres ,  réunis  aux  ennemis  exté- 
rieurs de  la  patrie ,  comptaient  beaucoup  sur  les 
agents  qu'ils  envoyaient  à  Marseille,  à  Paris,  à 
Lyon ,  pour  faire  uans  les  Sociétés  populaires  des 
molions  extravagante^,  ultra-révolutionnaires,  ten- 


dant à  provoquer,  sous  le  masque  d'un  oatriotisme 
exclusif,  des  mesures  désorganisatrices,  aestructives 
de  tout  ordre  social  et  bien  propres  à  faire  détester 
les  Français  par  tous  les  habitants  du  globe. 

Est-ce'  que  les  esprits  un  peu  judicieux  s'y  sont 
jamais  mépris?  ne  vous  ont-ils  pas  déclaré  qu'ils  ne 
voyaient  dans  ces  prétendus  amis  du  peuple  que  ses 
oppresseurs  .et  ses  assassins,  qui  ne  le  flattaient  que 
pour  le  vendre,  a  beaux  deniers  comptants,  au  tyran 
de  l'Angleterre?  Ecoutez  la  déclaration  que  Pitta 
été  force  de  faire  au  soi-disant  parlement  britanni- 
que ,  pour  garan^r  encore  pendant  quelques  jours 
sa  tête  de  la  chute  inévitable  dont  elle  est  menacée. 

«  L'Angleterre,  dit-il,  étant  un  Etat  commer^nt, 
je  me  suis  cru  obligé  d'exterminer,  par  tous  les 
moyens  possibles,  le  commerce  des  Français,  en  se- 
mant parmi  eux  tous  les  germes  destructifs  de  sédi- 
tion, a'anarchie,  de  désordre,  de  despotisme  et  de 
famine.  Je conviensque  j'ai  été  pariaitementsecondé 
par  le  parti  qui  s'intitulait  en  France  ,  le  parti  pa- 
triolifue  par  excellence,  et  qui  a  réussi,  en  quinxe 
mois  a  peu  près,  à  tout  détruire,  à  tout  désorganiser, 
et  a  courber  sous  la  terreur  et  la  guillotine  la  plu- 
part des  hommes  dont  les  talents  et  la  moralité  pou- 
vaient contrarier  le  despotisme  de  son  tyran  délégué, 
de  Robespierre.» 

Citoyens ,  les  déclamations  sempiternelles  d'un 
membre  de  cette  assemblée  contre  lei  marchande 
et  lei  natioM  bouliguières  ;  les  soulèvements  que 
les  continuateurs  de  Robespierre  ont  tenté  dTopérer 
parmi  les  ouvriers  ;  les  alarmes  qu'ils  ont  cherché  à 
répandre  à  raison  des  subsistances  ;  le  lion  qu'on  a 
voulu  faire  élancer  sur  la  Convention  ;  la  conduite 
de  cette  tourbe  de  factieux  qui  agitaient  les  Sociétés 
jacobitcs  de  Paris ,  Dijon ,  Lyon ,  Bordeaux  et  Mar- 
seille ;  les  persécutions  exercées  sur  les  commer- 
çants; le  genre  de  monnaie  qu'on  voulait  faire 
battre  sur  la  place  de  la  Révolution  ;  le  mouvement 
de  la  guillotine,  qu'on  nous  disait  devoir  être  redou- 
blé pour  remporter  des  victoires,  assertion  infâme, 
tendant  à  soulever  la  juste  indignation  de  nos  bra- . 
ves  frères  d'armes  ;  la  destruction  des  manufactures, 
la  démolition  dos  maisons  et  les  fusillades  de  Lyon  ; 
tous  ces  faits  constants  ne  prouvent-ils  pas  sans  ré- 
plique que  l'argent  du  roi  Georges  n'a  pas  été  vai- 
nement répandu? 

Heureusement  ces  temps  d'horreur  et  de  conster- 
nation sont  enfin  loin  de  nous!  Les  Français,  vrai- 
ment libres  depuis  le  10  thermidor,  détruiront  ai- 
sément dans  l'esprit  dos  nations  l'idée  défavorable 
que  le  ministère  anglais  s'est  efforcé  de  leur  donner 
sur  notre  moralité  et  notre  gouvernement  répu- 
blicain. 

N'avons-nous  pas  déclaré  que  nous  ne  nous  im- 
miscerions jamais  dans  celui  des  autres  peuples?  La 
justice  et  la  probité  ne  sont-elles  pas  réellement  ici 
a  l'ordre  du  jour?  Ne  vous  occupez-vous  pas  sans 
cesse  à  jeter  du  baume  sur  les  plaies  inséparables 
d'une  grande  révolution?  en  aonnant  bientôt  la 
paix  au  monde,  votre  résolution  n'est  elle  pas  de  lui 
montrer  l'exemple  de  toutes  les  vertus  sociales? 
Oserait-on  vous  opposer  les  progrès  inouïs,  les  bril- 
lantes expéditions  ae  vos  armées,  pour  vous  accuser 
d'avoir  troublé  la  paix  parmi  les  puissances  voisines? 
Eh!  de  quel  droit  se  sont-elles  coalisées  pour  remet- 
tre sur  le  trône  notre  dernier  despote  ?  A  quel  pro- 
pos ont-elles  voulu  empêcher  que  vous  ne  chan- 
geassiez la  forme  de  votre  gouvernement? 

Par  quelle  insolence  le  scélérat  ministre  anglais 
a-t-il  l'impudeur  de  raconter  avec  emphase  la  part 
active  qu'il  a  prise  à  tant  de  crimes,  à  tant  d'assassi- 
nats judiciaires,  commis  dans  toute  la  France  par 
l'infâme  Robespierre  et  ses  complices?  Pères  de  la 


3ÛS 


patrie,  et  vous,  familles  ëplorées,  qui  soupirez,  qui 
gémirez  encore  longtemps  sur  la  perte  de  ceux  qui 
vous  rendirent  la  ?ie  chère,  pensez-vous  que  tant  de 
barbarie,  tant  de  perversité  doivent  rester  encore 
longtemps  impunies?  Invincibles  républicains,  sol- 
dats français,  vous  dont  les  innombrables  victoires 
paraîtront  fabuleuses  à  la  postérité,  qu'attendez- 
vous?  Encore  un  pas,  et  Cartilage  est  punie  de  n'a- 
voir pas  étouffé  le  monstre  qui  voulut  perdre,  qui . 
voulut  anéantir  votre  patrie  ! 

Je  reviens  à  mon  objet.  On  voit,  par  la  lecture 
des  pièces  venant  de  Marseille,  que  les  complices 
de  Robespierre  emploient  là,  comme  à  Paris,  les 
mêmes  moyens.  C'est  partout  la  rareté  des  subsi- 
stances qu'ils  mettent  en  avant,  tandis  qu'eux-mê- 
mes ils  ont  lait  l'impossible  pour  en  empi^cher  l'ar- 
rivage ,  taudis  que  leurs  cliers  avaient  laissé  les 
magasins  de  Paris  et  ceux  des  armées  totalement 
déftourvus,  eu  quittant  les  auciens  comités  de  gou- 
vernement. 

Ils  ont  beau  alanibiquer  leur  esprit  pour  tour- 
menter le  peuple  :  les  mesures  sont  tellement  prises 
qu'on  ne  peut  rien  ajouter  aux  soins  que  s'est  don- 
nés le  comité  de  salut  public  nctuol  pour  remédier  à 
la  malveillance  des  trois  membres  de  l'ancien,  dont 
les  intentions  perfides  et  tyrauuiques  ne  sont  plus 
un  problème. 

Vous  avez  aussi  entendu,  citoyens,  que  le  repré- 
sentant du  peuple  Mariette  se  félicite  d'avoir  pourvu 
g)ur'^uolqur  temps  aux  subsistinces  de  Marseille. 
n  doit  donc  être  tranquille  à  cet  égani  ;  mais  dans 
les  Bouchi*s-du-Rhdnc,  coumie  aux  environs  de  Pa- 
ris ^  les  ennemis  de  la  révolution  répandaient  que 
les  citoye^is  de  ces  deux  villes  s'y  enlr'é^'orgiaient. 
Certes,  au  moment  où  la  valeur  des  ai  niecs  de  U 
république  Ta  mise  dans  l'heureuse  position  de  dic- 
ter la  paix  aux  puissances  coalisées  contre  elle,  vous 
ne  devez  oas  être  étonnés  si  la  cour  de  Vienne  et 
celle  de  saint- James,  désespérées  de  n'avoir  pu 
nousfbnttre  à  l'extérieur,  désespérées  de  nos  victoi- 
res multipliées ,  emploient  leurs  dernières  ressour- 
ces pour  fomenter  les  haines,  les  vengeances  et  les 
divisions  parmi  le  peuple  français.  C'est  à  votre  con- 
stance, c'est  à  votre  fermeté  qu'il  appartient  de  lui 
faire  encore  éviter  ce  piégc.  Exercez  toute  la  lati- 
tude du  pouvoir  qu'il  vous  a  confié.  Le  jour  où  la 
Convention  prend,  d'une  main  assurée,  les  rênes  du 
gonvernement  ;  le  jour  où ,  par  un  seul  acte  de  sa 
volonté,  elle  a  le  courage  d'anéantir  les  desseins 

Ï»er6des  des  factieux,  est  un  jour  de  fête  |)our  tous 
es  bons  citoyens  ;  j*en  atteste  le  10  thermidor  et  le 
21  brumaire. 

Législateurs ,  vous  devez  prévenir,  empêcher  le 
crime  plutôt  que  le  punir. 

Prévenons  donc  les  coupables  excès  auxquels 
voudraient  se  livrer  les  terroristes,  les  buveurs  de 
sang,  les  émissaires  que  l'étranser,  que  les  compli- 
ces de  Robespierre  ontà  Marseille  ;  que  l'Anglais  ne 
puisse  plus  concevoir  l'espoir  insensé  de  voir  dans 
nos  ports  le  Léopard  remplacer  le  drapeau  tricolore. 
Parlez  :  la  très-fçraude  majorité  des  habitants  de 
Marseille  est  à  la  république  ;  mais  prononcez- vous; 
déployez  toute  l'énergie  que  le  peuple  attend  de  ses 
représentants;  que  le  terrorisme  disparaisse  du  sol 
de  la  liberté  :  que  ceux  qui  ont  menace,  insulte, 
dans  les  murs  de  Marseille,  à  la  représentation  na- 
tionale, soient  poursuivis  devant  les  tribunaux  com- 
pétents. Ua  arrêté  du  représentant  du  peuple,  cir- 
convenu sans  doute  par  des  hommes  perfides, 
soustrait  ces  prévenus  au  cours  de  la  justice  ;  que 
cet  acte  de  faiblesse  soit  sur-le-champ  annulé  :  que 
fe  représentant  soit  rappelé  dans  votre  sein ,  pour 


donner  h  vos  comités  les  renseignements  qui  lui  se- 
ront demandés. 

Les  autorités  constituées  de  Marseille  vous  expo- 
sent leurs  craintes  sur  les  inconvénients  qu'il. pour- 
rait résulter  si  sa  brave  garnison  lui  était  enlevée, 
si  on  déclarait  que  cette  place  n'est  plus  en  état  de 
siège  ;  dites  qu'un  décret  de  la  Convention  pourra 
seul  faire  cette  déclaration. 

Le  tribunal  criminel  et  l'administration  du  dépar- 
tement des  Bouches-du-RhOne  ont  été  enlevés  par  la 
force  armée  de  Marseille  à  la  commune  d'Aix,  où  la 
localité  et  les  convenances  les  avaient  fait  placer  par 
l'Assemblée  constituante.  Les  partisans  du  terro- 
risme ont  insulté  dernièrement  le  tribunal  criminel, 
l'ont  forcé  à  lever  la  séance  lorsqu'il  voulait  in- 
struire le  procès  contre  les  audacieux  qui,  le  5  ven- 
miaire  dernier,  fomentèrent  un  attroupement  et 
insultèrent  à  la  représentation  nationale. 

Faites  respecter  les  décrets  :  que  cette  administra- 
tion et  ce  tribunal  soient  rétablis  à  Aix  ;  d'ailleurs, 
Marseille  trouve  d'assez  grandes  ressources  dans  son 
commerce  et  son  heureuse  position.  Envoyez  dans 
le  département  des  Bouches-du-Rhônc  des  représen- 
tants d'un  caractère  tel  que  les  méchants  soient 
confondus  à  leur  apparition,  et  que  les  bons  citoyens 
ne  puissent  plus  mettre  en  question  si  l'heureuse 
révolution  du  9  thermidor  assure  le  fruit  de  tant  de 
peines  et  de  sacrifices  que  les  Français  font  depuis 
cinq  ans  pour  conquérir  la  liberté. 
'  Enfin ,  par  une  attitude  ferme,  et  bien  résolus  à 
maintenir  le  règne  9e  la  justice*  et  de  l'humanité, 
montrez  aux  pnissancesqui  sollicitent  votre  allianr 
ce,  qui  vous  demandent  la  paix,  quels  avantagef 
incalculables  il  y  aura  de  traiter  avec  un  grand  peu* 

r)le,  qui  n'a  plus  sur  son  territoire  que  des  hommes 
ibres,  respectant  les  lois,  les  vertus,  les  personnea 
et  les  propriétés. 

Voici  le  projet  de  décret  que  je  suis  chargé  de  voua 
présenter  : 

I  La  Convention  naUonalf ,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  ses  comités  de  salui  pubUc  et  de  sûreté  générale,  dé- 
crète : 

«  Art  1".  La  place  de  Marseille  demeurera  en  état  de  siège 
Jusqu'à  ce  qu'il  eu  soit  autrement  ordonné  par  un  décret  de 
la  Conveiuiou. 

t  II.  Le  tribunal  criminel  et  l'administraUon  du  départe- 
ment  des  Bouches-dn-Khône  seront  rétablis  ii  Aix  :  il  est  en- 
joint aux  membres  qui  les  composent  de  s'y  •'cndre  sur-le- 
cliamp,  pour  y  exercer  leurs  fonctions  et  poursuivre  tous 
ceux  qui  ont  arrêté  ou  Insulté  les  représenuints  du  peuple 
BO,  Auguis  et  Serres. 

tlll.  L'arrêté  pris  le  18  nlvose  dernier  par  le  représen- 
tant du  peuple  Espert,  pour  suspendre  l'Instruction  du  pro- 
cès contre  les  prévenus  de  l'émeute  qui  eut  lieu  &  UartelUet 
le  3  vendémiaire,  est  annulé. 

I IV.  Les  représentants  du  peuple  Escndler  et  Fspert  m 
rendront,  sons  délai,  dans  le  sein  de  la  Convention,  pour 
donner  aux  comités  les  rcn^eicne^lents  qui  leur  seront  de- 
!   mandés. 

I  c  V.  Le  représentant  du  peuple  Chambon  se  transportera 

j  dnns  les  déparlemenu  des  Bouches -du-Rhône  et  du  Var.  H 

i  c>t  investi  des  mêmes  pouvoirs  qu'ont  les  autres  représen- 

I  lanis  du  peuple  envoyés  dai^s  les  déparlements. 

I       c  VI.  Le  représenUint  du  peuple  Mariette,  en  mission  dans 
tes  port»  de  la  Méditerranée,  a,  dans  les  départements  des 
IiDUciies-ilu-niiùnc  et  du  Vnr,  les  mêmes  pouvoirs  que  les  . 
réprcscniaots  du  peuple  Ctdroy  et  Ciiambon. 

«  VII.  Ces  trois  représoninnts'sont  chargés  de  faire  exé- 
cuter le  présent  décret;  et  pour  toutes  les  autres  opéralkmii 
ils  pourront  agir  ensemble  ou  séparément.  * 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

(  La  suite  demain.) 


304 


SPECTACLES. 
THÉÂTRE-FRANÇAIS. 

Les  amb  de  l'art  et  des  talents  dramatiques,  après  mie  priva- 
iJou  d'uo  ao,  s'étakot  livres  avec  iFansport  au  plaisir  de  retrwh 
▼er  dans  leur  premier  étabHssement  des  artiale^  qui,  depuis  il 
luu(;iemps,  avaien  loëriié  leurs  suffrages  et  amusé  leurs  lo^ 
sirs.  Ils  nourrissaient  i'es|)olr  flatteur  de  revoir  briller  la  soèoe 
française  dans  tout  son  éclat .  d'y  admirer  de  nouveau  les 
cbcfs-d'œuvre  des  f^ands-maltres,  et  cet  espoir  éuit  encore 
au^àienté  par  les  représentations  successives  et  rapides  de 
Phèdre t  des  Horaces  dtMaMowtett  du  Misantkrope.elc  ; 
II»  sembUicBt,  par  une  Ivresse  bien  légitime,  vouloir  tençer 
cet  taleois  chéris  de  onze  mois  de  capihité,  de  plusieurs 
aanées  de  souffrances.  Aussi,  quelle  a  été  leur  douleur  lors- 
que de  oouveaui  dégoûts  ont  forcé  ces  artistes  à  suspendre 
une  seconde  fois  le  ouurs  des  Jouissances  du  public  !  Quelle 
a  été  leur  surprise.  J'ai  presque  dii  leur  indignation,  en  ap- 
prenant qu'ils  allaient  chercher  un  asile  ailleurs  qu'au  tem- 
ple de  Melpomène  et  de  Thalle!  Mais  ce  sentiment  pénible 
■*a  pas  du  moins  emptefaé  celui  de  hi  reconnaissance  envers 
rentrepreneur  qui  s'est  empressé  de  les  accueillir,  qui  a 
voulu,  dans  le  silence  afUtgeant  peut-être  du  ({ouvemement, 
donner  une  retraite,  offrir  l'hospilaUié  aux  plus  ancieas  fa- 
Toris  de  Part  dramatique.  Grâces  soit  donc  rendues  au  pro- 
priétaire du  théâtre  de  la  rue  Feydeau  !  Mais  l'andenne  Co- 
médie-Française est-elle  donc  pour  Jamato  exilée  du  quartier 
qui  l'a  vue  naître  ?  Ile  rentrera-t-elle  plus  dans  un  local  qui 
semblait  dereau  le  patrimoine  des  arts?  Ne  verra-t-on  pas 
ae  former  eaeore  une  Société  dont  l'établissement  actuel 
remoBie  à  Vtm  1681,  qui  depuis  oeUe  époque  n*a  pas  aoot- 
crit  un  engagement  qu'elle  n'ait  rempli  avec  exactitude,  n'a 

Cl»  reçu  un  artiste  qui  n'en  soit  sorti  avec  un  sort  booorâ- 
e,  n'a  pat  employé  yn  ouvrier  auqoel  elle  n'ait  donné  pour 
refraile  une  existence  assurée? 

Il  est  permis  sans  doute  de  la  regretter,  cette  Société  qui 
eauneieaait  dans  les  hospices  de  charité  plusieurs  liu  pour 
ceux  de  ses  ageats  malades  ou  blessés  à  son  serrice. 

i^ersoBoe  n'ignore  qu'an  grand  nombre  de  péret  de  fa» 
Milla  avaiaat  placé  des  fonds  sar  cet  étabiissemeat  ;  mais  ce 
que  peu  de  personnes  Mvent ,  et  ce  qu'il  faut  apprendre  à 
tout  le  monde ,  c'est  que  depuis  sa  création  elle  a  toujours 
MlisfolC  à  sa  dette  eaven  eux  ;  et  lorsque  le  rapport  aussi 
atroce  que  mensonger  du  3  septembre  1793  (vieux  style)  eut 
déterminé  Tarrestation  de  tous  ses  membres,  pour  la  repré- 
aeotatloo  dTime  pièce ,  dont  le  gouvernement  d'alors  avait 
entendu ,  approuvé  et  signé  tes  changements .  les  membres 
incarcérés,  dont  la  plupart  manquait  des  choses  les  plus  né- 
ceas lires  pour  adoudr  l'horreur  de  leur  détention,  ont  en- 
oaïa.  trob  BMia  après,  payé  tmr  les  Ibnds  de  réublissement 
qae  les  dettes  delà  Société. 

Tout  éialeat,  par  l'acte  de  leur  création,  aolidairemeot 
Obligés,  envers  lea  ackors  retirés,è  une  rente  riagère ,  qui 
M  pouvait  Jamais  grever  l'établissement,  puisqu'elle  était 
liypothéquée  sar  les  taleaU,  sur  le  personnel  des  sociétaires, 
oui  prélevaient  sur  leurs  bénéfices  une  portion  pour  satis- 
faire à  cette  récompense  sacrée  qu'ils  avaient  droit  d'attendre 
à  leur  tour  de  leurs  successeurs,  ils  avaient  de  plus  affecté 
à  la  garantie  de  ces  obligations  les  terrains  qu'Us  possédaient 
dans  la  me  des  Fossés-Germain,  sur  lesquels  avaient  été 
cottsfruftes  des  maisons  dont  ils  abandonnaient  la  jouis- 
sance locative  aux  entrepreneurs .  sous  la  condition  d'aug- 
■eater  de  500  livres  la  retraite  des  anciens  acteurs,  qui  n'a- 
vait été  jusqu'alors  de  1.500  livres. 

Avant  la  révolution  la  recette  du  Théâtre-Français  s'é- 
levait de  900.000  livres  à  I  million.  Elle  tomba  tout  è  coup 
è  3  et  400,000  livres.  La  Société  n'en  a  pas  moins  rempli  les 
charges  de  rétablissement  ;  elle  n'en  a  pas  moins  faii  hom- 
vofSfi  à  la  nation .  tant  en  représentations  de  bienfaisance 
qu'en  dons  patriotiques  déposi's  sur  l'autel  de  la  patrie,  d'une 
somme  de  280.000  livres  pour  laquelle  ses  membres  ont  em- 
pninté  103/)00  livres,  dont  Us  sont  encore  solidairement  dé- 
biteurs. 
•  A  l'époque  où  ito  supportaient  cette  diminution  dans  le 
produit  de  leurs  talents,  ils  ont  vu  passer  è  un  autre  théAtr« 
plusieurs  sujeu  solidaires  avec  eux  et  comme  eux. 

Bientôt  commence  et  s'aggrave  le  règne  de  la  persécu- 
tion. On  veut  réDOhiUonmer  tes  arts,  c'est  dire  qu'il  faut  em- 
prisonner les  arUstes  et  les  dévouer  à  la  mort.  Hais  l'excès 
de  la  tyrannie  en  précipite  la  chute  :  la  terreur  lait  place  è 
la  conliance  et  rentre  dans  le  cœur  des  scclérau  qui  l'a- 
vaient organisée;  un  système  de  Justice  et  d'humanité 


succède  à  ce  gouvernement  atroce  et  abiurJc;  l.i  vcrfa 
respire,  les  arts  vont  renaître.  Les  talents  des  arti-^^tes  da 
Théâtre-Français  sont  mis  en  réquisition  par  un  ù^vnt  aar 
tional,  qui  les  place  au  théâtre  de  l'Egalité  avec  d'autres  ar- 
tistes dont  l'assodatlon  leur  est  absolument  étrangère  ;  est 
agent  leur  fixe  des  appoinieaMals  provisoires  qui  ne  sont 
pu  discutés  eonindictoireiDent  avec  eux,  et  dont  ils  a'oat 
pas  encore  reçu  la  totalité. 

Pendant  cet  amaif^me  sineulier,  les  artistes  de  hi  dloyenna 
Montausier  ont  donné  soixante-diy-huit  représentations  qui 
n'ont  pas  rapporté  39,000  livres,  l/s  d-devant  comédiens 
français  ont  joué  soixaottr-douze  fois  et  ont  produit  une 
somme  de  314,000  livres,  mirlaqudle  ils  ont  seulement  tou- 
ché 56.000  livres.  Cependant  on  consumait  l'huile,  le  boiaal 
la  bougie  qu'Us  avaient  achetés  avant  leur  incarcération.  Es» 
fin  la  nécessité  les  a  contrainu  de  cesser  im  travail  dont  lia 
retiraient  si  peu  de  fruit. 

Cette  chaîne  de  malheurs  ne  les  a  pourtant  patempécfaéb 
de  s'occuper  de  leur  liquidation  :  Ils  ont  au  moins  acquit  la 
certitude,  consolante  pour  eux.  qu'aucim  de  leurs  çréaacfeia 
ne  perdra  ni  sur  ses  capitaux ,  ni  sur  ses  Intérêts ,  etqa'cn 
seuls  supporteront  la  perte  de  la  rente  viagère  qui  devait 
leur  servir  de  retraite.  I«e  faubourg  Germain  les  redeaûuMia, 
Us  regardent  ce  quartier  comme  leur  pays  natal  ;  mais  loot 
ce  qui ,  dans  les  autres  arrondissements  de  cette  grande 
dié,  alimente  les  différents  spectacles  qa'on  y  fok  renais 
manque  à  celui-d.  Il  fallait  donc  que  le  gouvernement  vlat 
au  secours  de  ces  artistes;  ils  lui  ont  présenté  leurs  rdoîa- 
mations.  Les  comltéii  d'instruction  publique  et  de^  finaatMa 
en  ont  reconnu  la  légitimité.  Us  avaient  demandé  aux  aiv 
tistes  un  éuit  des  dettes  actives  et  passives  de  leur  Société 
et  un  aperçu  de  ce  qu'il  en  coûterait  annudiement  pour  ré- 
tabUr  au  théâtre  de  l'Egalité  une  nouvdie  assodatioa  A  pes 
près  pardlle  â  celle  de  la  d-devant  Gomédie-Françalpe,  Lsa 
artistes  ne  pouvaient  douter  de  l'intérêt  que  les  coaaltés  pi^ 
nalent  à  leur  sort  :  ils  leur  ont,  deux  Jours  après,  aouarii 
un  tableau  qui  conservait  la  réunion  des  talents  da  la  8o» 
dété.  Par  ce  tableau,  ils  ont  prouvé  que  la  reoeiie  m  po«- 
vait.  â  cause  des  circonstances,  monter  à  500.000  livres.  Ib 
ont  toutefois  garanti  cette  somme  ;  et  comme  Ils  ont  es 
même  temps  démonu^  que  les  frais  étant  plus  que  tripléa» 
la  dépense  de  leur  établissement  s'élèveraient  â  800.000  li- 
vres ,  Us  ont  demandé  â  la  répubUque  un  secours  de  SS,OO0 
Uvres  par  mois,  pour  rester  au  faubourg  Germain;  Ut  t'as* 
gageaient  d'ailleurs,  dans  le  cas  où  la  recette  excéderait 
500,000  livres,  â  recevoir  d'autant  inoins  de  la  répobllque, 
avec  la  condition  que  la  saUe  serait  rétabUe  dant  lûo  pra- 
mler  état. 

Est-il  de  l'Intérêt  des  propriétaires,  des  prindpaoi  locf 
talres  et  des  marchands  du  fsubouiig  Germain,  que  le  Théâ- 
tre-Français y  revienne,  après  le  trimestre  da  son  eap^a» 
ment  avec  le  propriétaire  de  cdui  de  la  rue  Feydeaa?  Ool , 
sans  doute,  guel  est  le  propriétaire  le  plus  inléraié  A 
ce  retour  ?  n'est-ce  pas  la  république?  Eh  bien,  qu'on  99^ 
pose  une  souscription  qui  produise  les  500.000  livres  que  œ 
théâtre  demande  annucUement.  Que  la  république  dédare 
ce  dont  elle  veut  contribuer  pour  sa  part;  et  II  n'est  pat  de 
doute  que  tous  les  autres  intéressés  ne  consentent  â  eoai* 
pléter  le  reste  de  la  somme.  Mais  serait-il  de  ta  dignité  d'an 
gouvernement  qui  veut  protéger  les  arts  de  sowfirir  une  pt- 
reille  contribution?  Serait-U  même  de  la  jusUce  d'y  donner 
son  consi'ntcment,  lorsqu  il  est  évident  pour  quiconque  tall 
calculer  que,  s'il  donnait  à  des  artistes  persécutés  300,000  li- 
vres par  an ,  Il  gagnerait  au  moins  3  mlUioat  tv  tea  pro- 
priétés nationales  ? 

Qu'on  ajoute  â  cette  considération  que  ce  rdonr  readraU 
la  vie  au  commerce  de  ce  quartier,  et  l'existeBoe  à  deux 
cents  ouvriers,  pères  de  famille,  qui,  depuis  dix-huit  i 
sont  absohiment  sans  place  et  sans  ressources. 

LIVRES  DIVERS. 


iêê  de  Pans^  ou  /a  Journée  du  Dupet,  remédia  aM 
es ,  par  l'auteur  des  couplets  ;  se  vend  rhcs  M«n» 
i  du  Cimetière-Aiidrc-det-Arcs.  Prit  :  30  sans  pai9 


La  Priée  i 
deux  actes, 

dan.  rue  du ^«^.* -«..«.v-^,:,-^,^.  m.  -,  ««.  •««•  j 

Paris,  et  40  tous,  franc  de  port,  pour  les  départemeaU. 

Payementt  à  la  irésorerie  nationale. 
Le  payement  du  perpétuel  est  ouvcn  pour  les  six  i 
mois;  il  sera  fait  à  tou.s  ceux  qui  seront  iiortcurs  d'Iascrip- 
tlons  au  grand  livre.  Cdui  pour  les  nntes  vio^pèret  ett  dt 
huit  mota  vingt  et  un  Joartda  l'année  i7!KS  (vkna  tt|lt> 


GAZETTE  NATIONALE  «n  LE  MONITEUR  IIVERSEL. 

N*  129.         Nonidi  Q  Pluviôse,  l'an  3*.  {Mercredi  28  Janvier  1796 ,  tJteiw?  ifyfa.) 


POLITIQUE, 

POLOGNE. 

Varsovie f  te  80  décernée,  —  L^ambassadear  russe  Bo- 
chocsdeii  a  reçu  ordre  de  sa  cour,  le  21  de  ce  mois,  de 
iiicUie  sur-le-cbaïup  en  élat  d*arreslat!on  le  comte  Ignace 
Putocki,  le  président  de  Varsofle  Zakrewski,  le  comte 
Mostowski,  membre  du  conseil  souverain,  KIlinski,  colo- 
nel révolutionnuire,  Koponas,  ministre  des  finances,  et 
on  autre  membre  du  conseil  souverain.  Le  ministre  russe 
a  signifié  en  même  temps  que  cet  ordre  celui  de  surreiller 
avec  àllenlion  les  habitants  de  Varsovie* 

Le  même  ministre  a  remis  au  roi  Stanislas  une  lettre  de 
rimpératrice  de  Russie*  qui  finvite  à  se  rendre  à  Orodno, 
tant  pour  sa  sûreté  personnelle  que  pour  y  traiter  des 
arrangements  qui  doivent  se  Taire.  Ce  sont  les  termes  de  la 
lettre. 

Stanislas  a  répondu  que  ni  son  flge,  ni  sa  mauvaise 
santé,  ne  Tempécheraient  de  se  conformer  aux  désirs  de 
rUnpérairice. 

Le  départ  prochain  du  roi  et  les  arrestations  qui  vienneiit 
d'avoir  lieu  font  la  sensation  la  plus  vive. 

—  Les  Russes  ont  proposé  au  général  Wavrrzewski  de 
lui  rendre  son  épée.  Ce  brave  homme  Ta  refusée,  en  disant 
qu^il  nVn  avait  plus  besoin ,  puisqu'elle  ne  devait  plus 
servir  à  défendre  sa  patrie. 

—  On  assure  que  rex-chancelier  Kollontay  a  été  arrêté 
dans  les  £iats  héréditaires  d^Autricbe»  par  ordre  de  la 
oour  de  Vienne. 

Cette  ville  et  ses  environs  sont  dans  un  état  vraiment  dé- 
plorable. La  disette  s*j  fait  sentir  d'uàe  manière  effrayante  i 
on  ne  peut  plus  tirer  des  subsistances  de  la  Lithuanie  et 
de  la  Podiaquie,  provinces  regardées  comme  les  greniers 
de  la  Pologne  avant  d^avoir  été  elles-mêmes  le  théâtre  de 
la  guerre.  Le  pain  a  manqué  ici  plusieurs  jours  de  suite. 

Les  Russes  avides  osent  parler  de  nouvelles  impositions  ; 
mais  la  famine  et  la  misère  publique  leur  démontrent 
rimpossibilité  de  les  acquitter. 

—  Le  commandant  de  la  ville  a  ordonné,  le  iS,  ft  tons 
les  citoyens  qui  ont  gardé  chez  eux  des  efl'ets  déposés  ou 
vendus  par  ordre  du  tribunal  révolutionnaire,  d*en  donner 
une  désignation  au  colonel  Jakixow.  Tous  les  cerijQcats 
des  revenus  et  dons  gratuits  .versés  dans  les  caisses  publi- 
ques pendant  la  révolution  seront  remis,  par  les  caissiers 
et  employés,  à  une  commission  nommée  par  le  magistrat 
de  Varsovie  :  le  terme  est  fixé  au  18  janvier. 

—  Le  général  russe  Suwarow  vient  de  faire  publier  avec 
affectation  les  lettres  suivantes,  qu'il  a  reçues  de  Timpéra- 
Irice  de  Russie. 

Copie  d'un  rescrit  expédié  de  la  part  de  S,  Af.  Pimpéra" 
triée  de  toute»  tes  Hustiesau  comte  Atexander  Sumarow 
Rymnitzkif  en  date  de  Saint'Pétersbourg^  le  26  octo- 
bre 1794* 

■  Comte  Alcxandcr  Wazilowitz, 

■  Vos  marcher  précipitées  contre  l'ennemi  et  vos  victoires 
ri^pélécs,  remportées  sur  lui,  en  particulier  celles  du  6 
septembre,  près  de  Kroupziiza,  et  du  8,  près  de  Brezesc, 
sont  des  preuves  signalées  de  votre  zèle  constant  pour  notre 
service,  de  votre  activité,  habileté  et  bravoure.  Nous  les 
acceptons  pleinement  pour  telles,  et  vous  témoignons  par 
celle-ci  notre  reconnaiiisance  particulière,  en  signe  de 
laquelle  nous  vous  envoyons  tine  cocarde  de  chapeau  en 
brillants,  et  vous  gratifions  de  trois  pièces  de  canon,  du 
nombre  de  celles  que  vous  avez  conquises. 

t  Invoquant  au  reste  le  secours  du  Tout-Puissant  sur 
vos  entreprises  futures  utiles  à  la  patrie,  je  suis  votre  bien- 
veillante. ■  Signé  CATHBaiNB.  • 

A  ce  rescrit  était  jointe  la  oocarde  de  brillauts,  évaluée 
à  80,000  roubles. 

3*  Série,  ^TomêX. 


Copie  d'un  rescrit  écrit  de  la  main  de  5.  M»  timpirairit$ 
dé  toutes  les  Russiês  au  comte  Alexander  Suwarom 
Hymnittkif  en  date  Saint^Péterskourg ,  du  19  novem* 
^rel794. 

f  Monsieur  le  général  feld-maréchal  comte  Alexander 
Wazilowitz , 

a  Je  vous  félicite  de  toutes  vos  victoires,  ^nsl  qne 
de  la  prise  des  retranchements  de  Praga  et  de  Varsovie 
même. 

-  Restant  pour  vou8>  avec  distinction,  votre  bienveil- 
lante CATHBBIira.  » 

A  ce  rescrit  était  joint  le  bâton  de  maréchal  t  en  or« 
garni  de  pierreries,  évalué  à  60,000  roubles. 

ANOLETEHRE. 
DiiiTS  OU  PABLuiyaT,  —  ouMaaa  ms  paiis. 

Le  roi  s'étaot  retiré,  et  les  Communes  étant  rentrées 
dans  leur  chambre,  le  comte  de  Cambden  se  lève  pour 
mettre  en  motion  TAdresse  de  remerciement  de  la  Chambre 
au  roi.  Il  dit  que,  malgré  les  revers  de  la  dernière  cam* 
pagne,  PAngleterre  ne  peut,  sans  Iflcheté  et  sans  bassesse, 
songer  à  la  paix.  Ses  ressources  sont  aussi  grandes  qu*elles 
Pont  jamais  été;  son  crédit  au  dehors  et  au  dedans  est 
immense,  et  les  ressources  de  la  France  doivent  au  con* 
traire  être  épuisées  par  les^  efforts  immenses  qu'elle  a  bits* 

Lord  Besborougb  seconde  la  motion. 

Lord  Guildford:  Mon  devoir  envers  mon  pays  me  presse 
de  prendre  la  parole,  et  je  ne  puis  différer  plus  longtemps 
de  manitester  ma  surprise  de  relTronteric  avec  laquelle  les 
ministres  viennent  proposer  la  guerre  à  Touverture  du 
parlement.  Il  n*y  a  que  Tintérét  personnel  qui  puisse  les 
faire  persévérer  dans  un  système  d'ignorance,  de  mystère 
et  de  confusion  dont  PAngleterre  ne  peut  tirer  aucun  avan- 
tage. J*ai  toujours  été  contre  le  principe  de  la  guerre.  Je 
ne  crois  pas  qu'aucun  lord  puissa  lui  donner  aujourd'hui 
son  assentiment,  à  moins  qu'il  ne  soit  entraîné  par  wm 
aveugle  confiance  en  des  ministres  qui  nous  ont  précipités 
dans  la  situation  déplorable  où  nous  nous  trouvons. 

Lord  Guildford  dit  qu'il  ne  trouve  pas  un  mot  dans  l*A« 
dresse,  à  Texception  des  compliments  sur  le  mariage  dn 

λrince  de  Galles,  qui  n'appelle  fortement  l'opposition  de 
a  Chambre.  Il  ne  voit  aucune  raison  pour  continuer  la 
guerre,  encore  moins  pour  en  confier  la  conduite  à  des 
hommes  dont  les  conseils  ont  causé  les  dangers  et  les  dé- 
sastres de  l'Angleterre.  Il  prie  qu'on  se  rappelle  ce  qn*é« 
talent  ses  manuCsctures,  son  commerce,  sa  marine,  set 
finanees,  et  qu'on  les  compare  avec  sa  situation  actuelle. 
Serait-on  assez  faible  pour  se  croire  lié  par  des  traités  oné- 
reux, dans  lesquels  l'Intérêt  seul  de  l'Autriche  et  des  mU 
nistres  a  été  consulté  ?  Puisque  la  Hollande,  pour  se  sauver, 
est  obligée  de  négocier  la  paix,  malgré  la  clause  qui  unit 
inséparablement  les  puissances  coalisées,  pourquoi  li 
Grande-Bretagne  ne  participerait-elle  pas  à  ces  négocia- 
tions, ne  fût-ce  qu'afin  d'obtenir  des  conditions  plustolé* 
râbles  pour  celte  puissance,  dont  l'existence  tient  intime- 
ment à  la  sienne?  C'est  un  devoir  qui  exige  toute  espèce 
de  sacrifices,  puisque  c'est  à  la  seule  sollicitation  de  l*An« 
gleterre  que  la  Hollande  n'a  pas  joui,  comme  le  Danemark 
et  la  Suède,  du  bonheur  attaché  à  la  neutralité. 

•  Je  ne  dissimulerai  pas  cependant  qu'une  prompte  paît 
n'ait  ses  difiicultés,  et  qu'il  ne  puisse  y  avoir  des  motifs  de 
s'onposer  aux  progrès  excessifs  d'un  rival  dangereux  ;  mais 
il  fallait  conduire  la  guerre  en  homme  d'Etat,  et  non  pas 
comme  des  enfants  qui  querellent  sur  des  riens,  ou  sur 
des  objets  dont  ils  n'ont  ni  droit  ni  intérêt  de  se  mêler,  et 
encore  moins  songer  à  conquérir  la  France  on  ft  lui  dicter 
une  forme  de  gouvernement.  Je  sais  qu'on  parie  beaucoup 
du  mécontentement  actuel;  mais  nous  n'avons  sur  cela 
pour  nous  régler  que  les  assertions  vagues  d'un  ministre 
qui,  pendant  toute  la  guerre  t  a  prouvé  qu'il  était  mal 

39 


306 


Bfbmié,  et  qu*il  if  norait  ee  qui  se  passait  dans  ce  pays. 
D'ailleurs,  quelle  misérable  coosolaiioD  pour  les  Anglais 
d'apprendre  que  la  situation  de  Teoneoii  est  encore  plus 
Ocoense  I  On  dit  que  les  fictoires  des  Français  ont  coûté 
ioUnlnient*  Ne  suis-je  pas  en  droit  de  demander  si  nos  dé- 
sastres ont  coûté  moins  ?  Qu*on  réfléchbse  sur  ce  qui  s^est 
passé  depuis  la  prise  de  Valenciennes  jusqu'à  la  fin  de  la 
campagne  ;  qu'on  se  rappelle  Té? acuation  de  Toulon  et  la 
retraite  de  Landrecies,  lie  résultat  malheureux  de  Teipédi- 
tion  des  Indes  occidentales,  et  surtout  à  la  Guadeloupe» 
malgré  les  talents  et  Tactifité  des  généraux  ;  les  rassemble- 
ments inutiles  faits  à  Southampton,  toutes  nos  opérations 
maritimes,  excepté  la  fictoire  du  lootl  Howe,  et  Ton  verra 
que  tous  nos  mauvais  succès  sont  dus  à  Tignorance,  à  To- 
piiiiâtreté  et  à  la  faiblesse  des  ministres.  » 

Lord  Guildford  conclut  en  demandant  que  la  Chambre* 
en  déclarant  qu'elle  soutiendra  la  dignité  et  Tindépendance 
de  la  Couronne,  supplie  le  roi  de  saisir  la  première  occa- 
sion de  conclure  la  paix  avec  la  France,  sans  qu'aucune 
forme  particulière  de  gouvemement  en  France  puisse  y 
mettre  un  obstacle. 

Les  lords  Morton  et  Kinnoul  parlent  contre  Taoïende* 
ment  ;  lord  Derby  en  sa  ikveur. 

Lord  Spencer  fait  un  discours  très-étendu.  Il  dit  que 
les  ressources  et  les  efforts  extraordinaires  des  Français 
sont  autant  de  raisons  qui  doivent  engager  les  puissances 
à  redoubler  les  leurs.  Il  s'e\cuse  ensuite  de  n*étre  pas  en- 
core en  étal  de  donner  on  compte  satisfaisant  sur  la  marine. 
Il  n'y  a  point  de  doute  que  les  Anglais  n'aient  dans  ce 
moment  auK  Indes  occidentales  des  forces  supérieures  à 
celles  des  Français.  Quant  à  la  noUe  française  qui  croise  à 
l'entrée  de  la  Manche,  on  a  pn%  des  mesures  qui  seront, 
il  en  est  persuadé,  approuvé»  par  la  Chambre. 

Le  marquis  Townshend  et  lord  Barrington  votent  pour 
l'Adresse. 

Le  marquU  de  Lanedown  :  Je  suis  ftcfaé  d'avoir  été  bon 

Prophète;  mais  la  guerre  a  tourné  exactement  comme  je 
avais  prévu  et  comme  f  en  avais  averti.  Je  supplie  la  ma- 
jorité de  la  Chambre  de  préserver  ce  pays  de  sa  ruine.  Ou 
CM  convenu  que  les  Français  ont  eu  de  grands  avantages 
dans  cette  campagne  ;  mais  a-t-on  tout  dit  ?  Je  tiens  eu 
main  un  sommaire  authentique  de  la  dernière  campagne. 
Les  Français  ont  réussi  dans  vingt-trois  sièges;  ils  ont 
gagné  six  batailles  rangées,  pris  deux  mille  huit  cent  trois 
pièces  de  canon,  fait  prisonniers  de  guerre  soixante  mille 
hommes  des  meilleures  troupes  de  l'Europe,  et  cela  iodé* 
pendamment  de  leurs  dernières  victoires  en  Espagne ,  où 
ils  ont  pris  deux  fonderies ,  et  où  il  n'y  a  plus  qu'une  soûle 
ville  forte  qui  ne  soit  pas  en  leur  pouvoir.  S'ils  ont  été  si 
forts  et  si  terribles  quand  ils  ont  combattu  contre  tout  l'u- 
nivers, le  seront-ils  moins  quand  ils  auront  traité  avec  la 
Hollande,  qui  leur  fournira  tout  ce  qui  leur  manque; 
quand  ils  auront  dicté  des  conditions  à  l'Espagne;  quand 
Us  auront  parcouru  toute  l'Italie,  incapable  de  se  défendre 
parelle-mème;  quand  la  plupart  des Eiats  d'Allemagne  de- 
mandent et  sollicitentla  paix  ?...  Quelles  sont  les  ressources 
que  nous  aurons  à  leur  opposer?  Nous  avons  levé  cent 
mille  hommes  de  grenadiers  invalides,  des  officiers  enfants, 
et  qui,  sortis  des  Métamorphoses  d'Ovide,  sont  encore 
tout  étonnés  de  se  trouver  métamorphosés  en  capitaines, 
en  colonels.  Mais  tout  est  fondu  et  dispersé  çà  et  là. 

Quant  ù  l'argent,  certes  il  est  Irès-pIaisant  d'entendre 
parler  de  24  millions  slcriing  levés  dans  une  matinée.  Je 
n'entends  pas  déprécier  le  crédit.  Je  sais  qu'un  négociant, 
•vcc  30,000  livres  steHing  décapitai,  peut  avoir  plus  de 
crédit  qu'un  noble  qui  jouit  d'un  revenu  égal.  Il  peut  faire 
circuler  son  papier  pour  5  &  600,000  livres  sleriing.  Mais 
je  ne  comprends  pas  duvanlage  comment  cela  se  peut  faire 
dans  une  matinée.  Ces  théories  extravagantes  nous  sont 
venues  de  la  France,  mais  elles  n'ont  pu  la  sauver.  Prenons 
garde  qu'en  suivant  aveuglément  la  même  route  nous  ne 
tombions  dans  le  même  abîme. 

Les  difficultés  qu'on  oppose  h  la  paix  ne  doivent  pas 
arrêter.  La  première  :  f  Avec  qui  traiterons-nous  ?  »  est 
trop  méprisable  pour  mériter  une  réponse.  Nous  trouverons 
avec  qui  traiter  dès  que  nous  en  aurons  sincèrement  la 
tolonté.  Au  milieu  de  set  commotions  les  plus  violenteTi 


la  France  n'a  jamais  manqué  k  aucun  de  ses  engagemeott 
envers  les  puissances  étrangères. 

On  demande  ce  que  deviendront  nos  conquêtes.  Quant 
&  celles  que  nous  avons  faites  dans  les  Indes,  nous  en  avons 
perdu  une  partie,  et  la  Martinique  n'est  proimblement 
plus  dans  nos  mains.  La  Corse,  suivant  M.  Necker,  outre 
son  revenu ,  coûtait  à  la  France  250^000  ducats,  non  com- 
pris les  dépenses  militaires.  La  description  qu'en  feit 
Voiney  en  donne  encore  une  plus  mauvaise  idée  :  Volney* 
il  est  vrai ,  est  démocrate  ;  mais  un  démocrate  peut  être  oo 
homme  de  sens  et  de  probité. 

On  attache  une  idée  de  bassesse  à  demander  la  paix  ; 
mais  je  ne  vols  pas  la  néc(*ssité  de  faire  des  soumissions 
pour  la  négocier.  Cet  obstacle  ne  nous  a  point  empêchés 
de  traiter  avec  l'Amérique.  Dieu  veuille  que  nous  reve- 
nions aussi  sagement  de  nos  erreurs  envers  la  France  que 
nous  l'avons  fait  à  l'égard  de  nos  frères  américains  ! 

Lord  f^renville,  dans  un  discours  très-long,  insiste  sur 
l'épuisement  probable  dans  lequel  les  finances  et  les  forées 
de  la-^France  doivent  se  trouver.  «  La  guerre,  dit-il,  lui 
coûte  immensément  ;  pour  y  fournir,  elle  a  déjà  été  obligée 
de  créer  près  de  AOO  millions  sterling  en  assignats.  Ils  pei^ 
déni  75  pour  iOO,  et  leur  discrédit  a  porté  les  objets  de 
nécessité  à  un  prix  exorbitant,  ce  qui  a  réduit  le  peuple  à 
une  misère  extrême.  Il  est  vrai  qu'ils  ont  conquis  la  Bd- 
gique,  plusieurs  villes,  plusieurs  cantons  sur  le  Rhin  el 
quelques  parties  de  provinces  d'Espagne;  mais  il  n'est  , 
point  de  Français,  quelque  exalté  qu'il  soit*  qui  imagine 
un  moment  en  pouvoir  conserver  la  possession. 

f  D'un  autre  côté  l'Angleterre  a  pris  ou  détruit  viagt-six 
vaisseaux  de  ligne  et  plusieurs  frégates  ;  ils  n'ont  pas  un 
pouce  de  terrain  dans  les  Indes  orientales;  et  dans  celles 
occidentales,  excepté  la  Guadeloupe  qui  sera  reprise  indu* 
bilablement,  ils  ont  perdu  toutes  leun  Iles.  Leurcommecoe 
et  leurs  manufactures  sont  entièrement  minés.  Il  n'est 
aucune  de  ces  circonstances  dont  le  noble  lord  ne  doive 
être  convaincu,  s'il  s'est  donné  la  peine  de  lire  même  let 
débats  de  la  Convention.  Quoi  qu'il  en  soit,  je  ne  crois  pat 
qu'on  puisse  entrer  en  négociation  de  paix  avec  la  France, 
quelque  chose  qui  puisse  arriver,  tant  qu'elle  n'aura  pas 
un  gouvernement  établi.  Mais  je  ne  doute  ftoint  d'un  antre 
côté  que,  si  les  puissances  alliées  agissent  de  concert  et 
redoublent  d'efforts,  une  autre  campagne  ne  fasse  cesser 
la  tyrannie  qui  a  désolé  ce  malheureux  pays.  • 

Les  lords  Stanliope ,  Laudcrdale  el  Mansfield  ont  parié« 
les  deux  premiers  en  faveur  de  l'amendement,  le  dernier 
contre» 

Celle  séance  a  duré  jusqu'à  trois  heures  du  matin. 

La  Chambre  s'étant  divisée ,  il  y  a  eu  pour  Tamende- 
mentf  12  voix;  contre,  96;  et  par  procuration,  12.  Ma- 
jorité, 95. 

L'Adresse  de  remerciement  a  été  admise  ensuite  sans 
division. 

Lord  Staobope  demande  la  convocation  de  la  Chambre 
pour  le  6,  et  déclare  qu'il  mettra  en  motion  que  l'Angle- 
terre n'a  aucun  droit  de  se  mêler  de  l'inlérienr. 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Ecole  Normale. 

L'ouverture  de  l'Ecole  Normale  s'est  faite  pri- 
midi.  Le  citoyen  La  Place,  dans  son  cours  de  mathé- 
inatiq[ues,  a  eu  occasion  de  parler  d*unc  idée  bizarre 
de  Leibnitz,  qui,  dans  raritninétique  binaire  dont  il 
était  rinventeur ,  croyait  voir  la  création.  L'unile 
était  le  Dieu  créateur,  et  le  zéro  le  monde  que  Dieu 
tirait  du  néant.  Cette  faiblesse  d'esprit  dans  un  grand 
homme  rappelait  Newton  faisant  un  commentaire 
sur  l'Apocalypse. 

Le  professeur  n'a  pas  manqué  d'attribuer  ces  er- 
reurs de  Leibnitz  et  de  Newton  aux  idées  qu'ils 
avaient  reçues  dans  leur  enfance ,  et  il  a  félicité  les 
élèves  de  l'Ecole  Normale  du  bonheur  qu'ils  ont 


307 


d*étrc  appelcs  à  former,  des  inslifuteurs  qui  doivent 
donner  une  éducation  dégagée  de  tous  les  préjugés. 
Cette  réflexion  a  été  très-applaudie. 

Au  professeur  de  mathématiques  a  succédé  celui  de 
physique,  le  citoyen  Haûy .  Ce  qu'il  a  dit  sur  les  théo- 
ries en  général ,  et  la  manière  ingénieuse  dont  il  les 
a  distinguées  des  systèmes,  a  excité  de  vifs  applau- 
dissements. Il  serait  difficile  de  parfcr  de  physique 
avec  plus  de  clarté,  de  simplicité  et  d*élégance ,  que 
ne  Ta  fait  ce  savant  et  modeste  professeur. 

Dans  la  seconde  séance  de  l'Ecole  Normale,  les 
élèves  se  sont  établis,  pour  ainsi  dire,  en  assemblée 
délibérante.  11  a  été  proposé  de  voter  une  Adresse  à 
la  Convention,  pour  la  remercier  de  rétablissement 
de  TEcole  et  la  réiiciter  sur  ses  glorieux  travaux. 

Tous  les  élèves  se  sont  levés  spontanément,  et 
TAdresse  a  été  votée  à  l'unanimité.  Mais  il  s'agissait 
de  la  rédiger ,  et  alors  on  demandait  la  parole  de 
tontes  les  parties  de  Famphithéâtre.  L'ordre  ne  peut 
s'établir  dans  une  assemblée  sans  quelqu'un  qui  la 
préside.  Le  doyen  d'âge  a  été  invité  de  prenare  le 
fauteuil,  et  on  a  vu  monter  au  bureau  un  élève 
sexagénaire,  le  citoyen  Bougainville,  ancien  chef 
d'escadre  de  nos  armées  navales ,  le  même  qui  fit 
autrefois  le  tour  du  monde,  découvrit  Tlle  d'O^ 
thaîti  dans  la  mer  du  Sud ,  et  qui  Aujonrd*hni  vient 
s'asseoir,  comme  élève,  à  côté  d'hommes  qu'il  pour- 
rait instruire. 

Différentes  rédactions  furent  proposées  et  toutes 
rejetérs.  Le  vœu  des  élèves  est  tmanime,  mais  la 
manière  de  l'exprimer  difière  en  raison  de  leurs  dif- 
férents caractères. 

Le  3  pluviôse  s'est  tenue  la  seconde  leçon  de  l'E-^ 
cole  Normale.  Les  citoyens  Buache  et  Mente  lie  ont 
parlé  sur  ia  géographie;  Vol ney,  sur  l'histoire;  Ber- 
nardin Saint-Pierre ,  sur  la  morale  ;  et  Daubenton, 
sur  l'histoire  naturelle. 

Les  trois  premiers  professeurs  ont  été  écoatés 
avec  toute  l'attention  qu'inspiraient  l'intérêt  de 
leurs  sujets  et  la  célébrité  de  leurs  talents.  Mais 
c'est  surtout  lorsque  le  bon,  le  vertueux  Bernardin 
Saint-Pierre,  lorsque  le  respectable  Daubenton  se 
sont  levés  pour  monter  au  bureau  ,  c'est  alors  que 
les  applaudissements  unammes  et  longtemps  prolon- 
gés ont  retenti  dans  Tamphithéàtre.  L'oreille  ne 
pouvait  se  lasser  de  les  entendre,  ni  Toeilde  les  voir. 
Quelque  chose  de  plus  que  Tatlention  suspendait 
tous  les  esprits  :  c'était  de  l'admiration ,  de  l'atten- 
drissement même,  en  voyant,  en  écoulant  ces  véné- 
rables interprètes  de  la  morale  et  de  In  nature.  Cet 
hommage  universel  que  l'assemblée  rendait  à  ces 
deux  hommes  illustres,  aux  nmis  de  Jean-Jacques 
et  de  Buftbn,  prouvait  bien  que  les  disciples  de  l'E- 
cole Normale  savent  honorer  la  vieillesse,  les  talents 
et  les  vertus;  et  cet  hommage  faisait  presque  autant 
d'honneur  aux  disciples  qu'aux  professeurs  qui  en 
étaient  l'objet. 


CONVENTION    NATIONALE. 

Préiidence  de  Rovére, 

Rapport  fait  par  PouUier ,  dant  une  de$  $éanee$ 
préeédentei^  sur  la  conlinuation  du  canal  souter- 
rain de  Saint-Quentin. 

Si  des  hommes  nés  sous  le  règne  de  la  tyrannie 
ont  pu  concevoir  des  idées  %'astes  et  utiles,  il  était 
réservé  à  des  hommes  libres  d'oser  les  exécuter. 

Le  projet  du  canal  souterrain  de  Saint-Quentin  a 
Cambrai  devait  fonder  tout  h  la  fois  une  source  de 


richesses  incalculables  et  un  monument  digne  de 
l'admiration  publique. 

Un  premier  canal  découvert ,  construit  en  1733, 
offrait  déjà  une  navigation  précieuse  qui  commence 
à  Saint-Quentin  et  se  termine  vers  Cnauny,  par  la 
rivière  d  Oise ,  qui  communique  elle-même  à  la 
Seine;  c*est  par  cette  source  que  Paris  doit  tirer  les 
subsistances  et  les  productions  de  ce  pays  fertile ,  et 
y  faire  refluer  à  son  tour  tous  les  objets  de  son 
commerce. 

L'idée  de  prolonger  cette  navigation  jusqu'à  la 
mer  du  Nord  a  longtemps  occupé  les  esprits  ;  le 
commerce  de  la  Hollande,  de  la  Suède,  de  la  Russie, 
du  Danemark  et  de  tout  le  Nord  ;  celui  de  la  Flan- 
dre, du  Brabant  et  du  Hainaut,  4evaient  également 
fixer  l'attention  publique.  L'arrivage  des  plombs, 
des  cuivres,  des  fers,  celui  des  goudrons,  des  mâtu- 
res et  des  chanvres ,  le  transport  économiaue  et 
facile  des  charbons  de  terre,  des  marbres,  des  nuiles 
de  colza  ,des  cendres  d'engrais  ,  des  avoines,  des 
blés,  des  cuirs,  etc.,  tels  étaient  en  substance  les 
grands  avantages  qu'on  devait  retirer  du  canal  sou- 
terrain, dont  l'exécution  fut  enfin  confiée  aux  soins 
du  célèbre  Laurent  en  1768 ,  et  suspendue  en  1775. 

Les  vins,  les  huiles  de  Provence  et  tous  les  objets 
de  commerce  oui  se  transportent  de  la  ci-devant 
Bourgogne  et  ne  Paris  dans  les  pays  du  Nord  de- 
vaient également  y  arriver  par  eau  ;  enfin,  la  con- 
fection des  canaux  de  Picardie  et  de  Bourgogne 
devait,  par  une  continuité  de  navigation,  opérer  vé- 
ritablement la  jonction  des  deux  mers  par  Tinté- 
rieur. 

Le  canal  souterrain  doit  parcourir  une  étendue 
4e  sept  mille  vingt  toises ,  depuis  le  Tronquei  jus- 
qu'à Vandhuisse;  cinq  mille  toises  sont  déjà  perfo- 
rées ,  et  la  partie  confectionnée  assure  le  succès  de 
ce  superbe  ouvrage. 

L'interruption  du  canal  de  Picardie  a  coûté,  de- 

fmisia  guerre  actuelle ,  plusieurs  centaines  de  mil- 
ions  à  la  république,  pour  les  transports  par  terre , 
tandis  qu'il  n'en  eût  pas  fallu  C  pour  le  terminer. 
L'agriculture  a  été  foulée ,  les  chevaux  détruits; 
mille  maux,  en  un  mot ,  auraient  été  évités  avec  le 
secours  de  cette  navigation.  Le  prix  du  quintal,  de- 

Puis  Ostende  jusqu'à  Nantes ,  par  la  navigation  de 
intérieur  ,  s'élèverait  à  peine  à  12  livres,  aujour- 
d'hui que  tous  les  prix  sont  doublés ,  si  le  canal  de 
Saint-Quentin  était  terminé. 

On  a  cherché  à  écarter  souvent  le  plan  du  canal 
souterrain  de  Saint-Quentin ,  qui  doit  en  même 
temps  joindre  ta  Somme  à  l'Escaut  par  le  projet  d'o- 
pérer la  jonction  de  l'Oise  à  la  Sambre.  Indépen- 
damment des  avantages  supérieurs  qui  résulteraient 
du  canal  souterrain ,  on  est  fondé  à  croire  que  la 
jonction  de  la  Sambre  à  l'Oise  est  impraticable;  d'a- 
bord les  moulins  placés  sur  la  Sambre,  prise  au 
dessus  de  Landrecies  chôment  très-Âréquemment , 
Landrecies  et  quelquefois  Maubeuge  manquent  d'eau 
dans  les  temps  de  sécheresse  II  est  invraisemblable 
consétiuemment  que  les  eaux  puissent  alimenter  une 
navigation  aussi  longue. 

L'Oise,  à  son  tour,  n'est  navigable  qu'à  La  Père  par 
sa  jonction  avec  la  Serre;  si  l'on  remonte  l'Oise  jus- 
qu'à Guise  et  au-dessus,  on  y  voit  les  moulins  chô- 
mer souvent;  enfin ,  les  fréquents  débordements  dé 
la  rivière  d'Oise  rompraient  infoillibiement  les  di- 
gues qu'il  faudrait  construire. 

Après  beaucoup  de  détails  historiques  et  scienti- 
fiques, le  rapporteur  ajoute  : 

Une  dernière  observation ,  bien  essentielle ,  c'est 

I  que  l'événement  a  confirmé  le  succès ,  ainsi  qu'il 

'  résulte  de  la  vérification  faite  par  les  ingénieurs  des 

pouts  et  chaussées  en  1781|  à  l'époque  où  il  s'agis- 


308 


Sait  de  continaer  les  travaux  du  canal  souterrain. 
Les  gens  de  Kartavaient  déjà  constatdque  la  quantité 
d*eau  serait  insuffisante  si  le  canal  était  alimenté 
chaque  jours  par  huit  cents  pouces  d>au.  Eh  bien  , 
Texpérience  faite  en  1781  par  Chegy  et  de  Varennc 
constate  qa*il  était  alimenté  Journellement  par  six 
mille  pouces  d*eau. 

Maintenant  qu*il  est  reconnu  qu*aucune  raison  , 
même  plausible,  ne  peut  s'opposer  à  Texécution 
d'un  travail  qui  doit  embellir  a  jamais  Taurore  de 
la  liberté,  vivifier  le  commerce,  soulager  l'agricul- 
ture ,  féconder  le  sol  de  la  république  ,  économiser 
les  finances ,  faciliter  la  circulation  ,  assurer  en  un 
mot  l'abondance,  hâtons-nous  d^ouvrir  cette  source 
précieuse  de  richesses.  Que  le  génie  de  la  liberté 
soutienne  nos  efforts ,  et  montrons  à  nos  ennemis 
coalisés  que,  si  nous  savons  leur  porter  la  terreur  et 
la  mort,  nous  savons  aussi  assurer  la  prospérité  en 
dedans. 

En  conséquence  «  je  vous  propose  le  décret  sui- 
vant: 

•  La  Convention  nationale  décrète  que  deux  de 
ses  membres ,  accompagnés  de  deux  ingénieurs  oui 
seront  présentés,  sous  trois  jours,  par  le  comité  des 
travaux  publics ,  se  transporteront  sous  le  canal 
souterrain ,  situé  entre  Saint-Quentin  et  Cambrai, 
à  l'effet  de  constater  l'étal  dudit  canal  et  la  possibi- 
lité de  pouvoir  y  obtenir  une  navigation  sûre  et 
constante ,  et  rendront  compte  de  leurs  observa- 
tions, dans  le  plus  bref  délai,  à  la  Convention  natio- 
nale.» 

La  Convention  renvoie  cette  proposition  au  co- 
mité des  travaux  publics  pour  en  rendre  comptj 
dans  la  décade. 


Àrtich  omit  dam  la  séance  du  5  pluviôse. 

Des  citoyens  du  département  du  Puy-de-Dôme 
sont  admis  à  la  barre:  ils  demandent  le  rapport  de 
la  loi  du  17  nivôse  an  2,  qui  donne  un  effet  rétroac- 
tif aux  successions  ouvertes  depuis  le  14  juillet  1789 
(vieux  style). 

Sur  la  proposition  d'un  membre ,  la  Convention 
décrète  qu'il  n'y  a  pas  lieu  à  délibérer  sur  la  péti- 
tion de  plusieurs  citoyens  du  département  du  Puy- 
de-Dôme,  tendant  au  rapport  de  la  loi  du  17  nivôse 
an  2  de  la  république,  relative  aux  successions  ;  dé- 
crète en  outre  que  le  présent  décret  sera  inséré  au 
Bulletin  de  correspondance. 


I       SUITB  A  LA  SÉANCE  DU  7  PLUVIOSE. 

Granbt  :  Je  demande  que  le  tribunal  criminel 
poursuive  aussi  les  factieux  qui  ont  insulté  notre 
collègue  Bô ,  et  l'ont  tenu  pendant  trois  mois  dans 
les  cachots. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

On  demande  l'impression  du  rapport  et  des  pièces. 

DuuBM  :  Oui,  et  surtout  du  discours  dePitt,  car  il 
est  très-bien  rendu. 

DuMONT  :Je  m'oppose  à  l'impression  du  rapport, 

2ui  n'a  pas  été  lu  aux  deux  comités ,  quoiqu'il  ait 
té  fait  en  leur  nom.  (  On  rit  dans  une  extrémité  de 
la  salle.)  Les  bases  de  ce  rapport  ont  été  convenues 
aux  deux  comités  ;  ceci  diminuera  peut  être  la  joie 
de  ceux  qui  viennent  de  prouver  qu'ils  seraient  très- 
contents  qu'on  leur  donnât  un  petit  point  de  rallie- 
vent.  (  Applaudissements.)  Citoyens,  quelle  tacti- 


que employait- on  avant  le  9  thermidor ,  lorsqu'on 
voulait  décimer  la  Convention  ?  On  venait  nous  par* 
1er  de  Pitt  et  de  tout  ce  qui  se  passait  en  Angleterre, 
Ces  moyens  doivent  ils  être  renouvelés?  Non  ^  nous 
n'avons  pas  besoin  de  connaître  ce  que  fait  Pitt 

Sour  savoir  que  ceux  qui  ont  fait  couler  le  sangsoot 
es  monstres  dont  il  faut  purger  la  terre.  (  Applan* 
dissements.  )  Au  surplus,  il  n'y  a  que  ceux  qui  onl 
des  correspondances  directes  avec  Pitt  qui  puissent 
certifier  que  son  discours  est  ou  non  bien  rendu. 
(On  applaudit  de  nouveau.)  Citoyens,  je  vous  l'ai 
nit ,  et  l'expérience  vous  a  déjà  prouvé  qu'il  faut 
faire  une  guerre  à  mort  à  tous  les  buveurs  de  sang. 
(  Bravo  I  s'écrie-t-on  en  applaudissant^  Je  ne  lis  ja« 
mais  les  papiers  anelais ,  et  il  me  suffit  qu'il  y  ait 
dans  le  rapport  un  discours  de  Pitt ,  que  je  ne  con- 
nais pas  et  qui  est  inutile  à  la  question,  pour  que  ie 
n  en  vote  pas  l'impression.  Je  demande  que  les  pie- 
ces  soient  seulement  imprimées. 

Bentabole  :  Je  m'oppose  aussi  à  l'impression  du 
rapport,  parce  que,  comme  l'a  dit  le  préopinant,  les 
bases  ont  été  seulement  convenues  dans  \es  comités, 
parce  ou'il  contient  des  termes  que  la  Conventioa 
nationale  et  les  honnêtes  gens  ne  peuvent  tolérer*... 

DuHEM  :  Ah  !  ah  I  les  honnêtes  gens  ! 

Bentabole  :  Je  ne  sais  pourquoi  le  mot  d'honnê- 
tes gens  excite  des  murmures. 

Duhem  :  C'est  que  c*était  le  mot  de  Lafayette. 

BoissiEu:  Ceux  qui  prétendent  nu  patriotisme 
exclusif  prétendent  aussi  à  la  probité  exclusive; 
mais  Ton  sait  qu'ils  sont  l'un  et  l'autre  au  même 
degré. 

Bentabole  :  Si,  par  une  malignité  sans  exemple , 
on  empoisonne  les  meilleures  intentions,  il  ne  sera 
bientôt  plus  possible  de  parler.  Quelle  nâorale  veut- 
on  donc  professer,  si  Ion  ridiculise  les  honnêtes 
gens?  11  n'est  pas  un  seul  républicain,  depuis  le  plus 
pauvre  jusqu'au  plus  riche,  qui  ne  soit  flatté  d'être 
rangé  dans  la  classe  des  honnêtes  gens  !  (Vifs  ap- 
plaudissements.) Que  m'importe  oue  Lafayette  se 
soit  servi  du  mot  d'honnêtes  gensr  Ne  s'est-il  pas 
aussi  servi  du  mot  liberté  et  pour  cela  devons  nous 
y  renoncer?  Ce  n'est  ni  aux  hommes  ni  aux  mots 
qu'il  faut  s'attacher,  mais  aux  choses.  Il  n'y  a  que 
les  fripons  et  les  brigands  qui  ne  veulent  pas  être 
rangés  dans  la  classe  des  honuétes  gens.  (Vifsapplau- 
dissements.  ) 

Je  reviens  à  l'objet  de  la  discussion.  Je  m'oppose 
à  l'impression  du  rapport: 

10  Parce  qu'on  y  fait  jouer  un  rôle  à  Pitt  :  c'est 
ainsi  qu'avant  le  9  thermidor  on  mettait  sans  cesse 
en  avant  ce  mannequin  ;  c'était  ainsi  qu'on  qualifiait 
les  repas  fraternels  d'invention  de  Pilt ,  de  rassem- 
blements payés  par  l'étranger.  Il  est  temps  de  pro- 
scrire ce  langage,  qui  n'appartient  qu'aux  comé- 
diens et  aux  imposteurs.  (On  rit.) 

20  Parce  qu'il  y  est  parlé  d'un  acte  de  la  volonté 
de  la  Convention ,  et  que  la  Convention  n*a  d'autre 
volonté  que  celle  du  peuple  français ,  et  d'autre  but 
que  son  bonheur.  (Applaudissements.) 

AuGUis  :  Je  demande  aussi  l'impression  des  pièces; 
c'est  par  cette  impression  que  vous  jugerez  la  situa- 
tion de  Marseille,  situation  qu'on  vous  a  laissé  trop 
longtemps  ignorer. 

Citoyens,  les  administrations  de  Marseille  sont  on 
ne  peut  pas  plus  mal  composées;  les  membres  qui 
les  composent  m'ont  dit  publiquement  qu'ils  feraient 
exécuter  la  loi  tant  que  la  loi  ne  blesserait  pas  leurs 

Srincipes  ou  leur  opinion.  Celle  du  17  septembre  est 
e  leur  goAt  ;  mais  les  lois  rendues  depuis  le  9  tber- 


S09 


midor  sont  détestables  ;  la  Convention,  depuis  cette 
époque,  n'a  rien  fait  de  bon.  Voilà  cependant  les 
hommes  que  la  faiblesse  a  mis  en  liberté,  et  qui 
sont  actuellement  à  la  tête  des  révoltés. 

Citoyens,  lors(]ne  vous  envoyâtes  des  représen- 
tants cm  peuple  a  Marseille,  la  calomnie  les  précéda 
dans  cette  commune.  On  dit  qu'ils  venaient  pour 
opérer  la  contre- révolution,  et,  lorsque  le  danger 
les  força  de  demander  des  troupes  à  cheval  à  Tarmée 
d'Italie,  on  les  leur  refusa  ;  run  d*eux  fut  obfigé 
d*aller  lui-même  en  chercher. 

Citoyens,  le  système  afireux  que  je  vous  ai  dé- 
noncé il  y  a  cinq^mois  existe  encore  à  Marseille  ;  on  y 
boit  aujourd'hui,  comme  à  cette  époque,  à  la  santé 
du  mois  prochain,  et  c'est,  je  le  répète,  pour  les 
hommes  coupables  qui  sont  à  la  tête  du  mouvement 
qui  s'opère  auiourd^hui  que  Ton  implore  la  clé- 
mence de  la  Convention  nationale.  Je  le  dis  à  la 
honte  des  habitants  de  Marseille,  et  ce  fait  fera  con- 
naître les  progrès  qu'à  faits  la  terreur  dans  ce  pays  : 
les  mêmes  hommes  qui  me  dénoncèrent,  a  mon  arri- 
vée k  Marseille,  les  scélérats  qui  avaient  égorgé 
leurs  concitoyens,  sont  aujourcPhui  leurs  partisans 
et  leurs  premiers  apologistes:  ceci  vous  prouve 
combien  ron  craint  le  retour  du  règne  des  hommes 
de  sang. 

Citoyens,  c'est  de  votre  énergie  que  dépend  en  ce 
moment  le  salut  de  la  France  ;  longtemps  le  vocabu- 
laire français  fut  composé  de  mots;  qu'il  lesoit  main- 
tenant d'actions  justes  et  sévères  envers  les  monstres 
qui  ont  couvert  le  territoire  de  la  république d'écha- 
fauds  et  de  sang,  et  l'innocent  n'aura  plus  rien  à 
craindre.  Je  demande  l'impression  des  pièces  qui 
nous  ont  été  lues;  bientôt  je  vous  en  ferai  connaître 
de  nouvelles,  dont  je  demanderai  aussi  la  publicité. 

Chablieb  :  Il  faut  ramener  la  discussion  à  son 
véritable  objet.  On  a  demandé  l'impression  du  rap- 
port de  Clauzel,  quelques  membres  s'y  sont  opposés. 
Je  pense  au  contraire  que,  tant  pour  notre  instruc- 
tion que  pour  celle  du  peuple,  les  pièces  et  le  rap- 
port doivent  être  imprimés;  c'est  le  seul  moyen  de 
connaître  la  vérité. 

Citoyens,  pendant  mon  séjour  à  Lyon,  j'ai  acquis 
l'entière  conviction  que  les  factieux  avaient  des  cor- 
respondances à  Paris,  à  Lyon  et  à  Marseille.  Je  ne 
pourrais  produire  les  pièces  (]ui  prouvent  les  faits 
que  j'avance;  je  ne  les  ai  point;  peut-être  un  jour 
les  connaitrez-vous.  Ce  nue  je  puis  assurer  aujour- 
d'hui, c'est  que  le  règne  aes  terroristes,  des  buveurs 
de  sang  et  des  patriotes  aux  doigts  crochus  est  passé. 
(On  applaudit.) 

On  vous  a  parlé  de  Pitt  et  de  Cobourg  ;  tant  que 
la  Convention  maintiendra  la  justice  à  l'ordre  du 
jour,  elle  n'aura  rien  à  redouter  des  menées  de  ces 
myrmidons.  Je  demande  l'impression  des  pièces  et 
du  rapport. 

Durand-Maillanb  :  Je  demande,  par  amendement 
au  décret  qui  vient  d'être  rendu,  que  les  représen- 
tants du  peuple  soient  tenus  de  renouveler  toutes 
les  autorités  constituées  du  département  des  Bou- 
ches-du-Rhône.  Les  meiiibresqui  les  composent  ont 
tous  été  placés  par  Robespierre  ou  par  sa  faction  ; 
vous  concevez  que  ces  hommes  ne  feront  pas  eux- 
mêmes  leur  procès  en  taisant  exécuter  les  décrets 
qui  condamnent  leur  conduite  passée. 

FoussEDOiRE  :  Si  vous  ordonnez  le  renouvelle- 
ment qui  vous  est  proposé,  il  arrivera  ce  qui  a  eu 
lieu  à  Strasbourg,  c'est-à-dire  que  les  patriotes,  non 
les  terroristes,  ont  été  remplacés  par'des  royalistes. 
(Violents  murmures.)  Dans  cette  commune,  le  bou- 
levard de  la  république,  en  terrassant  le  terrorisme, 
j'ai  composé  les  administrations  depakiotes;  j'ai 


éloigné  de  ces  places  les  hommes  qui,  il  y  a  deux 
ans,  avaient  défendu  le  tyran.  Eh  bien,  citoyens, 
notre  collègue  Bailly  n'a  pas  suivi  la  marche  que  je 
m'étais  tracée;  Bailly  a  destitué  de  très-bons  patrio-. 
tes,  et  les  a  remplacés  par  des  hommes  dont  le  pa- 
triotisme est  très-suspect ,  et  notamment  par  un 
homme  qui  avait  proposé  de  ne  plus  reconnaître 
l'Assemblée  législative. 

Plusieurs  membres  :  Bailly  est  un  bon  patriote  ; 
il  n'appartient  qu'4  un  lâche  d'attaquer  les  absents. 

Gbnissibux  :  11  s'agit  de  Marseille,  et  non  de  Stras- 
bourg. 

FoussEDoiRB  :  Je  dis  que,  si  vous  ôtez  aux  repré- 
sentants du  peuple... 

On  demande  que  la  discussion  soit  fermée. 
Cette  proposition  est  adoptée. 
L'assemblée  décrète  l'impression  dès  pièces  et 
celle  du  rapport. 

•*•  :  Je  demande  que  le  décret  soit  envoyé  sur-le- 
champ  par  un  courrier  extraordinaire. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

—  Un  secrétaire  fait  la  seconde  lecture  du  projet 
de  décret  présenté  par  Clauzel. 

•••  :  Je  demande  à  faire  une  observation  sur  l'arti- 
cle IV.  Notre  collègue  Escudier  n'est  point  en  mis- 
sion dans  le  département  des  Bouches-du-Rhône;  il 
a  simplement  un  congé;  ainsi  le  décret  ne  peut  point 
le  regarder. 

Clauzel  :  Le  motif  du  rappel  d'Escudier  est  qu'il 
ne  professe  point  dans  son  département  les  princi- 
pes de  la  révolution  du  9  thermidor.  (Murmures 
dans  l'une  des  extrémités  de  la  salle.) 

Maure  :  Nous  ne  devons  professer  qu'un  principe:  ' 
c'est  celui  de  la  république. 

***  :  La  république  ne  peut  point  s'établir  sur  des 
monceaux  de  cadavres;  ainsi  celui  qui  ne  professe 
point  les  principes  d'humanité  et  de  justice  n'est 
point  l'ami  de  la  république.  (On  applaudit.) 

L'assemblée  adopte  la  rédaction  définitive  du  pro- 
jet de  décret  présenté  par  Clauzel. 

PoTTiER,  au  nom  du  comité  de  législation  :  Le 
tribunal  révolutionnaire  a  été  organise  par  le  décret 
du  8  nivôse  dernier.  Les  membres  qui  doivent  le 
composer  ont  été  nommés  par  le  décret  du  13  du 
même  mois. 

La  commission  des  administrations  a  mis  l'activité 
nécessaire  dans  l'exécution  de  ces  décrets.  Déjà  plu- 
sieurs des  juges  et  des  jurés  sont  rendus  à  leur  poste  ; 
mais  il  en  est  beaucoup  d'autres  qui  sont  en  retard, 
soit  par  l'éloignement,  soit  par  la  difficulté  de  voya- 
ger, soit  par  la  rigueur  de  la  saison. 

Des  remplacements  qui  ne  sont  pas  encore  termi- 
nés, et  qui  sont  nécessités,  soit  par  le  deeré  de  pa- 
rentéavecquelques-unsdesrepresentants  du  peuple, 
soit  par  cause  de  maladie  et  d'infirmités  graves,  éloi- 
gnent le  moment  où  tous  les  membres  pourront  être 
réunis.  Ils  laissent  encore  aujourd'hui  l'incertitude 
de  savoir  si  les  citoyens  appelés  en  remplacement  ne 
seront  pas  eux-mêmes  dans  le  cas  d'être  remplacés, 
de  sorte  qu'il  nous  est  impossible  de  prévoir  précisé- 
ment le  temps  où  la  réunion  sera  complète. 

Cependant  le  comité  est  instruit  qu'il  est  au  tri- 
bunal révolutionnaire  un  travail  considérable  qui 
se  multiplie,  une  correspondance  très-étendue  qui 
s'accumule,  et  qui  par  suite  entravera  considérable- 
ment la  marche  du  tribunal,  retardera  ses  opérations 
et  nuira  sensiblement  à  l'expédition.  ^ 

Il  est  d'ailleurs  une  multitude  de  travaux  prélimi- 
naires d'instruction  qui  doivent  précéder  l  examen 


SIO 


public  et  les  débats  de  chaque  procès;  il  en  est  d'au- 
tres relatifs  aux  actes  d'accusation  de  complicité  qui 
peuvent  avoir  été  dressés  par  Tancien  accusateur 
public.  Il  est  encore  une  quantité  d'affaires  qui  par 
leur  nature  doivent  élre  présentées  à  la  chainore  du 
conseil  pour  y  recevoir  leur  décision  :  elles  sont 
susceptibles  d'élre  traitées  avant  la  réunion  défini- 
tive de  tous  les  membres.  Il  est  d'autant  plus  inté- 
ressant de  le  Taire  que,  dans  le  nombre  des  prévenus 
traduits  au  tribunal  révolutionnaire,  il  peut'se  trou- 
ver des  hommes  innocents,  dont  il  est  dans  votre  in- 
tention sans  doute  d'accélérer  autant  qu'il  est  possi- 
ble la  mise  en  liberté. 

Vous  prévoyez,  citoyens,  que  le  comité  vous  pro- 
pose rinslallation  du  tribunal  dans  l'état  actuel,  afin 
que  les  juges  présents  puissent  entrer  en  fonctions, 
et  commencer  leur  travail  en  attendant  la  réunion 
des  autres  membres. 

Une  seule  difficulté  semble  s'opposer  à  cette  me- 
sure; c'est  la  disposition  de  l'article  XIV  du  décret 
du  8  nivôse.  Elle  porte  que  les  jugées  seront  repartis 
au  sort  dans  les  deux  sections  qui  doivent  être  for- 
mées en  exécution  de  l'article  XII. 

Le  comité  a  pensé  qu'il  convenait  de  faire  instal- 
ler provisoirement  le  tribunal,  puisque,  d'un  côté, 
répoauc  de  la  réunion  complète  cle  tous  les  membres 
est  aosolument  incert^iine,  et  qu'elle  peut,  par  le 
concours  des  circonstances,  être  encore  éloignée; 
puisque,  de  l'autre,  les  membres  présents  peuvent 
s'occuper  très-utilement,  remettre  au  courant  des 
travaux  immenses  suspendus  depuis  plus  d'un  mois. 
Un  plus  long  retard  pourrait  être  préjudiciable  en 

Saralysant  pour  longtemps  le  tribunal  ({ui  a  besoin 
'une  activité  soutenue,  et  qui  doit  aussi  être  garanti 
d'une  marche  précipitée. 

Le  comité  croit  aussi  qu'il  conviendrait  d'autori- 
ser provisoirement  les  membres  du  tribunal  à  former 
une  section  aussitôt  qu'ils  se  trouveront  réunis  en 
nombre  suffisant. 

Celte  mesure,  comme  on  le  voit,  n'est  que  provi- 
soire; elle  ne  tend  pas  à  atténuer  la  disposition  de 
l'art.  XIV,  qui  recevra  sa  pleine  exécution  lorsque 
tous  les  membres  seront  rendus  à  leur  poste. 

Elle  présente  d'autant  moins  d'inconvénients  que, 
par  l'art.  XXIX  du  décret  d'organisation,  les  accusés 
ont  la  faculté  de  récuser  un  ou  plusieurs  des  jurés. 

Voilà  les  réflexions  aue  le  comité  m'a  chargé  de 
vous  soumettre,  et  d'après  lesquelles  il  vous  propose 
le  projet  de  décret  suivant  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  son  comité  de  législation,  décrète  : 

•  Art.  l^r.  Ceux  des  juges  et  des  jurés  nommés 
par  le  décret  du  15  nivôse  et  jours  suivants  pourcom- 

f»oser  le  tribunal  révolutionnaire,  et  qui  sontactuel- 
ementà  Paris,se  réuniront  sur-le-champ  au  tribunal 
révolutionnaire,  où  ils  seront  installés  par  la  com- 
mission des  administrations  civiles,  police  et  tribu- 
naux. 

«  11.  Les  juges  présents,  en  attendant  l'arrivée  des 
autres,  se  formeront  provisoirement  en  une  section 
et  exerceront  leurs  fonctions.  • 
Ce  décret  est  adopté. 

-  Le  même  membre  fait  rendre  le  décret  sui- 
vant : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  son  comité  de  législation,  décrète  ce  qui 
suit  : 

•  Art.  !«'.  Les  directoires  de  district  seront  auto- 
risés, jusqu'à  ce  qu'il  en  ait  été  autrement  ordonné, 
à  pourvoir  provisoirement  au  remplacement  des  no- 
taires publics,  dont  il  sera,  sur  la  demande  des  con- 


seils généraux  des  communes,  reconnu  urgent  et 
nécessaire  de  remplir  les  places  vacantes. 

•  11.  Les  citoyens  appelés  à  remplir  les  places  de 
notaire  devront  être  pourvus  de  certificats  de  ci« 
visme;  ils  n'auront  besoin,  pour  entrer  en  fonctions, 
que  de  l'arrêté  du  directoire  de  district  portant  leur 
nomination  au  registre  du  district. 

•  111.  Les  citovensdéjà  pourvus  par  le  directoire 
du  district,  dans  les  formes  prescrites  par  les  articles 
précédents,  et  qui  sont  actuellement  en  exercice, 
continueront  provisoirement  leurs  fonctions.  • 

—  On  lit  une  Adresse  de  la  3«  compagnie  des  ca- 
nonniers  de  Meulan  à  l'armée,  qui  se  plaignent  de 
leur  inertie. 

Lbtournbur  (de  la  Manche)  :  Citoyens,  l'Adresse 
qui  vient  de  vous  être  lue  mérite  toute  l'attention  de 
la  Convention  nationale. 

Dans  ces  temps  malheureux  où  les  arts  étaient 
proscrits  par  l'ignorance,  et  les  talents  repoussés 
par  l'intrigue,  je  ne  me  serais  pas  étonné  des  récla- 
mations qui  vous  parviennent  en  ce  moment  ;  mais 
lorsque  la  Convention  nationale  s'est  fortement  pro- 
noncée pour  encourager  les  arts,  au  moment  où 
elle  leur  tend  une  main  protectrice,  je  suis  profon- 
dément affligé  de  voir  se  renouveler  ces  ridicules 
préventions,  ces  préventions  qui,  en  éteignant  le  feu 
du  génie,  nuisent  essentiellement  au  progrès  des 
sciences  utiles.  C'est  par  une  suite  de  cette  manie 
routinière  qui  s'élève  constamment  contre  tout  ce 

3ui  porte  le  caractère  de  la  nouveauté,  que  les  pièces 
e  16,  montées  sur  des  affûts  fardius,  construits 
dans  l'arsenal  de  Meulan,  sont  aux  arméesdans  l'io- 
aclion  la  plus  complète,  et  que  le  courage  des  bra- 
ves canonniers  attachés  à  cette  division  se  trouve 
enchaîné. 

Rien  n'a  été  négligé  pour  en  décrier  l'usage,  et  le 
faux  emploi  çu'on  en  a  fait  n'a  que  trop  bien  servi 
l'intrigue  qui  a  voulu  le  faire  rejeter. 

Vos  comités  militaire  et  de  salut  public  ont  envojë 
dans  diverses  circonstances  des  commissaires  pris 
dans  leur  sein  pour  constater  l'utilité  des  affûts  far- 
dius construits  à  Meulan  ;  ils  ont  eu  lieu  d'y-recon- 
nattre  les  avantages  qui  ont  déjà  été  consignés  dans 
un  rapport  fait  à  la  Convention  nationale,  non  pas 
',  pour  être  employés,  comme  ou  l'a  faussement  pré- 
tendu, comme  artillerie  légère,  en  bataille,  dans 
toutes  les  circonstances  ;  mais  il  en  est  beaucoup  où 
,  la  présence  des  pièces  de  16  peut  décider  le  gain 
d'une  bataille. 

Il  faut  que  la  Convention  nationale  sache  que  la 
même  intrigue  s'oppose  en  ce  moment  à  l'emploi  des 
affôts  sans  avant-train ,  qui,  en  économisant  une 
grande  quantité  de  chevaux,  ont  fait  devant  nous 
des  prodiges  (le  célérité;  il  faut  enfin  que  la  Conven- 
tion nationale  sache  que  rétablissement  de  Meulan, 
élevé  ù  grands  frais  pour  diverses  constructions,  se 
trouve  en  ce  moment  presque  entièrement  paralysé. 
Je  suis  loin  d'attribuer  ces  inconvénients  à  votre  co- 
mité de  salut  public,  qui  connaît,  je  le  sais,  tout  le 
prix  de  cet  établissement;  mais  il  doit  s'empresser 
de  les  faire  disparaître. 

Citoyens,  je  n'ai  plus  qu'un  mot  à  ajouter,  et 
c'est  pour  rendre  une  justice  éclatante  aux  canon- 
niers de  Meulan,  qui  ont  donné  des  preuves  suivies 
de  patriotisme  et  de  zèle  ;  il  n'est  pas  indifférent  que 
Ton  sache  que  ces  braves  républicains  ont.coustam- 
ment  résiste  aux  suggestions  perfides  de  la  malveil- 
lance. Hanriot  voulut  les  séduire;  dernièrement  en- 
core on  a  cherché  à  les  faire  dévier  de  leurs  devoirs; 
on  ne  les  a  vus  répondre  que  par  le  plus  profond 
mépris  pour  les  intrigants  et  un  dévouement  sans 
bornes  a  la  représentation  nationale;  ils  vous  en 


811 


donnent  aujourd'hui  une  nouYelle  assurance.  La 
Convention  nationale  saisira  sans  doute  avec  em- 
pressement cette  occasion  de  leur  témoigner  sa  sa- 
tisfaction. 

Je  demande  la  mention  honorable  de  TAdressedes 
braves  canonniers  de  Meulan,  et  le  renvoi  aux  co- 

3iîtës  de  salut  public  et  militaire,  en  les  chargeant 
e  jirendre  des  mesures  déKnitives  pour  activer  cet 
établissement,  et  employer  activement  aux  armées 
les  constructions  qui  en  émanent. 
Ces  propositions  sont  décrétées. 
La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCB  DU  8  PLUVIOSE. 

Les  élèves  de  TÉcoIe  Normale  sont  admis  à  la 
barre.    . 

L'orateur  :  Citoyens  représentants,  le  plus  beau 
jour,  le  plus  heureux  pour  les  Français,  le  plus  glo- 
rieux pour  la  représentation  nationale,  le  9  thermi- 
dor enfin,  a  vu  tomber,  avec  la  tyrannie,  le  système 
de  vandalisme  qui,  en  étouffant  la  liberté  dans  son 
berceau,  devait  paralyser  les  sciences  et  les  arts. 

Par  rénergie  de  la  Convention  nationale  et  la  sa- 
gesse de  ses  décrets,  Tignorance,  compagne  insépa- 
rable du  despotisme,  a  été  vouée  à  l'opprobre,  1  in- 
struction proposée  à  tous  les  citoyens,  des  savants 
consommes  dans  la  méditation  des  vrais  principes 
choisis  pour  les  établir  et  les  développer,  plus  d  un 
millier  d'élèves  appelés  pour  \^  recevoir  et  les  ré- 
pandre. 

Le  foyer  des  lumières  est  ici  dans  toute  sa  pureté; 
c'est  à  la  lueur  de  ce  feu  sacré  que  l'éducation  fran- 
çaise doit  s'élever  à  un  degré  qui  ne  fut  jamais  at- 
teint dans  les  plus  fameuses  républiques  de  l'uni- 
vers, et  ce  point  de  perfection  est  le  but  àts  écoles 
Normales. 

A  votre  voix,  citoyens  législateurs,  se  sont  réunis 
au  centre  commun  les  républicains  que  le  choix  de 
leurs  concitoyens  a  destinés  à  concourir  à  l'exécu- 
tion de  ce  plan  régénérateur. 

La  carrière  vient  de  leur  être  ouverte;  mais, avant 
d'y  faire  les  premiers  pas,  ils  viennent  offrir  à  la  pa- 
trie le  tribut  de  leur  zèle,  et  à  la  Convention  natio- 
nale l'hommage  de  leur  dévouement.  Puissent-ils, 
soutenus  par  la  présence  de  vos  dignes  collègues,  y 
marcher  o'un  pas  ferme  et  rapide  !  puisse  chacun 
d'eux  recueillir  un  faisceau  de  lumières  et  le  trans- 
mettre à  ses  compatriotes!  puissent-ils, par  leurs 
travaux  et  leurs  succès,  assurer  dans  toute  la  repu-  ' 
blique  le  triomphe  de  la  raison,  de  la  saine  philoso- 
phie, sur  les  rumes  des  préjugés,  du  fanatisme  et  de 
l'erreur  ! 

Grâces  vous  soient  rendues,  citoyens  législateurs  ; 
l'asile  où  naguère  le  terrorisme  et  la  tyrannie  for- 
geaient desfers,  inventaient  des  supplices  aux  talents 
et  aux  vertus,  va  devenir  le  temple  des  sciences  uti- 
les et  de  la  morale  républicaine.  Cette  inauguration 
peut-elle  se  faire  sous  des  auspices  plus  favorables 
et  dans  des  circonstances  plus  heureuses!  Elle  se 
fera  au  milieu  des  transports  d'allégresse  que  font 
naître  dans  le  cœur  de  tous  les  bons  Français  les  vic- 
toires les  plus  signalées  de  nos  armées  républi- 
caines, qui  dansoet  instant  fortuné  réparent  en  Hol- 
jlandB  par  leurs  vertus  civiques  les  outrages  faits  à 
Tégalité,  à  la  liberté,  ou  qui  par  leur  valeur  réta- 
blissent leur  règne  sur  le  sol  que  la  férocité  des  ty- 
rans les  avaient  forcées  d'abandonner  ;  elle  se  fera 
aux  cris  mille  fois  répétésde  vive  la  république  !  vive 
la  Convention  nationale  ! 

Le  Président  ;  Le  calife  Omar,  à  la  tête  de  ses 


barbares  esclaves,  détruisait  le  dépôt  le  plus  com- 
plet des  sciences  et  des  arts,  pour  établir  le  despo- 
tisme oriental  ;  Solpn  et  Lycurgue,  avant  de  donner 
à  la  Grèce  des  lois  protectrices  de  la  liberté,  allaient 
consulter  les  sages  et  les  savants  dans  les  régions  les 
plus  éloignées. 

La  liberté  est  favorisée  et  s'accroît  par  les  lumières 
et  les  connaissances;  la  tyrannie  au  contraire  re- 
pousse et  déteste  l'instruction  et  les  mœurs  pures 
qui  en  dérivent. 

Vous  êtes  appelés  par  la  confiance  de  vos  conci- 
toyens à  une  grande  mission  ,  celle  de  l'instruction 
publique  ;  que  chacun  de  vous,  citoyens,  se  pénètre 
de  ses  devoirs,  se  rappelle  la  glorieuse  journée  du  9 
thermidor,  sans  laquelle  la  republique  ne  serait  ha- 
bitée que  par  des  bourreaux  et  des  vautours. 

Que  l'amour  de  la  liberté,  de  l'égalité,  le  respect 
des  lois,  soient  écrits  en  caractères  de  feu  dans  vos 
cœurs,  puisqu'en  transmettant  les  sciences  à  vos  élè- 
ves vous  devez  leur  inspirer  la  haine  pour  la  tyran- 
nie et  les  former  aux  vertus  républicaines. 

La  Convention  décrète  la  mention  honorable  et 
l'insertion  au  Bulletin  de  l'Adresse  des  élèves  et  de 
la  réponse  du  président. 

—  Un  secrétaire  lit  la  lettre  suivante  ? 

Guezno  et  Guermeur,  représentanU  du  peuple  pris 
les  armées  des  Càtes-de-Brest  el  de  Cherbourg^ 
et  dans  les  départemenls  de  leurs  arrondsise- 
merUSf  à  la  Convention  nationale. 

A  Léiient ,  30  nifoie ,  8«  année  répablicaine. 

«  Citoyens  collègues,  vingt-deux  Français  que  la 
trahison  avait  jetés  dans  les  prisons  de  Gibraltar 
viennent  de  rompre  leurs  £ers  et  d'arriver  heureuse- 
ment en  France. 

«  Ces  intrépides  républicains  se  sont  emparés,  sous 
le  canon  d'un  vaisseau  anglais  du  premier  rang,  à  la 
nage,  et  de  nuit,  d'un  navire  ennemi  qui  les  a  trans- 
i)ortés  des  bords  de  la  Méditerranée  au  port  de  la 
Liberté. 

«  Nous  vous  adressons,  citoyens  collègues,  le  récit 
de  cet  acte  de  courage  et  de  dévouement  à  la  patrie; 
il  procure  à  la  république  sept  prisonniers  de  guerre 
anglais,  une  belle  prise,  et  une  riche  cargaison  qui 
s'est  vendue  hier  419,000  1. 

«  Salut  et  fraternité. 

«  Signé  Gubzno  et  Gucrmbur. 

— Danjou,  au  nom  des  comités  de  salut  public,  des 
transports,  postes  et  messageries,  des  décrets,  pro- 
cès-verbaux et  archives,  propose,  et  la  Convention 
adopte  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  ses  comités  de  salut  public,  des  trans- 
ports,  postes  et  messageries,  et  des  décrets,  procès- 
verbaux  et  archives,  décrète  : 

•  Art.  Icr.  L'imprimerie  établie  pour  l'expédition 
des  lois,  conformément  au  décret  du  14  trimaire 
de  l'an  2  continuera  d'être  régie  et  administrée 
.>u  nom  de  la  république ,  sous  la  dénomination 
d'/mprimerie  Nationale^  par  l'agence  de  l'envoi  des 
lois. 

•  11.  Cette  agence  ne  sera  plus  composée  que  de 
deux  membres  responsables,  nommés  par  la  Con- 
vention nationale  sur  la  représentation  du  comité 
(les  décrets,  procès -verbaux  et  archives,  et  dépen- 
dant de  la  commission  des  administrations  civiles, 
police  et  tribunaux. 

•  111.  Cette  imprimerie  sera  destinée  à  l'impres- 
sion: 


SIS 


•  10  Des  lois,  dbns  la  forme  qui  va  être  dëter* 
minée  ; 

•  2»  Des  rapports,  Adresses  et  proclamations  dont 
renvoi  aura  elé  ordonné  par  la  Convention  natio* 
uale; 

■  30  Des  arrêtés  pris  par  les  comités  pour  Tezécu- 
tion  des  lois,  et  de  la  notice  distribuée  aux  membres 
de  la  Convention,  en  exécution  de  Tartidle  XXXI  de 
la  loi  du  7  fructidor  ; 

«  40  Des  circulaires,  états  et  modèles  relatifs  à 
Texécution  des  lois  ou  des  arrêtés,  et  faits  par  ordre 
des  comités  ; 

•  &o  Des  éditions  originales  des  ouvrages  d'in- 
struction publique  adoptés  par  la  Convention  natio- 
nale; 

«  60  Et  de  tous  les  ouvrages  de  sciences  et  des  arts 
qui  seront  imprimés  par  ordre  de  la  Convention  et 
aux  frais  de  la  république. 

•  IV.  Le  comité  des  décrets,  procès- verbaux  et  ar- 
chives, sous  la  surveillance  duquel  cet  établissement 
est  mis,  fera  faire  sans  délai  un  inventaire  exact  de 
tous  les  poinçons,  matrices,  caractères,  presses  et 
autres  objets  qui  en  composent  le  fonds. 

«  V.  Les  lois  qui  sont  d*une  exécution  générale 
seront  envoyées  à  Fagence  par  le  comité  des  dé- 
crets, procès- verbaux  et  archives,  le  lendemain  du 
jour  où  leur  rédaction  déGnitive  aura  été  approuvée, 
pour  être  imprima  sur-le-champ,  dans  le  format 
qui  sera  réglé,  et  par  série  de  numéros. 

•  VI.  L'agence  fera  tirer  le  nombre  d'exemplaires 
de  chaque  Numéro  de  lois,  rapports.  Adresses  ou 
proclamations,  qui  sera  jugé  nécessaire  pour  la  dis- 
tribution aux  membres  de  la  Convention  nationale, 
et  l'envoi  direct  aux  commissions  executives,  au  tri- 
bunal de  cassation,  aux  administrations  de  départe- 
ment et  de  district,  et  aux  tribunaux  criminels  et  ci- 
vils. Elle  fournira  à  Tadministration  du  département 
de  Paris  le  nombre  d'exemplaires  nécessaire  pour 
les  autorités  constituées  et  fonctionnaires  publics  de 
fon  arrondissement. 

•  VU.  11  en  sera  adressé  deux  exemplaires  à  cha- 
cune des  autres  administrations  de  département,  et 
un  seulement  aux  tribunaux.criminels  de  départe- 
ment, aux  administrations  et  aux  tribunaux  de  dis- 
trict. 

•  Vin.  Aussitôt  la  réception  des  lois  et  autres  en- 
vois, l'administration  de  département  sera  tenue, 
sous  la  responsabilité  de  chacun  de  ses  membres,  de 

.  faire  réimprimer,  dans  le  même  format,  chaque  Nu- 
méro, en  autant  d'exemplaires  qu'il  en  sera  néces- 
saire pour  les  envois  à  faire  à  toutes  les  autorités 
constituées  de  son  arrondissement,  et  à  tous  les 
fonctionnaires  qui  y  exercent  individuellement  des 
fonctions  publiques.  Le  comité  des  décrets,  procès» 
verbaux  et  archives  en  arrêtera  l'état  par  départe- 
ment. 

•  IX.  L'administration  de  département  enverra 
sans  retard  à  chaque  district  le  nombre  d'exemplaires 
nécessaire  pour  toutes  les  autorités  constituées  et 
les  fonctionnaires  publics  désignés  de  sou  arrondis- 
sement. Les  agents  nationaux  seront  tenus  de  sur- 
veiller la  célérité  de  l'envoi  qui  leur  en  sera  fait. 

«  X.  Les  administrations  de  district  régleront  sans 
délai  les  moyens  de  concilier,  suivant  les  localités, 
Téconomie  avec  la  célérité  et  la  sûreté  de  ces  envois, 
et  proposeront  au  comité  des  transports,  postes  et 
messageries  les  mesures  de  réforme  et  de  change- 
ments convenables  dans  rétablissement  actuel  des 
piétons;  et  néanmoins  elles  suspendront  provisoi- 
rement le  service  de  ceux  des  piétons  qu'elles  juge- 
ront inutiles. 

«  XI.  Les  lois  relatives  aux  armées  de  terre  et  de 
mer,  et  qui  ne  seraient  point  obligatoires  pour  les 


autorités  civiles^  De  seront  ni  réimprimées  parles 
administrations  de  département,  ni  envoyées  dans 
les  communes  ;  l'agence  de  l'envoi  sera  tenu  de  les 
adresser  directement  aux  commissions  executives 
qu'elles  intéressent,  et  de  fournir  à  celles-ci,  sur 
leur  réquisition ,  les  exemplaires  nécessaires  ponr 
les  envois  qu'elles  auront  à  en  faire  aux  différentes 
autorités  civiles  ou  militaires  qui  devront  les  faire 
exécuter. 

>  Xll.  Les  administrations  de  district  justifieront 
à  celle  du  département,  dans  le  délai  d'une  décade 
à  dater  de  la  réception  des  lois  et  autres  envois,  de 
leur  transmission  aux  autorités  constituées  et  aux 
fonctionnaires  oublies  de  leur  arrondissement. 

>  XlII.  Les  aaministrations  de  département,  indé- 
pendamment de  l'accusé  de  réception  qu'elles  seront 
obligées  de  fournir  sur-le-champ  à  l'agence  de  l'en- 
voi des  lois,  certifieront,  dans  le  délai  de  deux  dé* 
cades,  le  comité  des  décrets,  nrocès-verbaux  et  ar- 
chives, delà  réimpression  des  lois,  rapports,Adre8ses 
et  proclamations,  de  leur  envoi  aux  aaministrations 
de  district  et  de  la  transmission  aue  celles-ci  en  an- 
ront  faite  aux  autorités  constituées  et  aux  fonction^ 
naires  publics. 

•  XIV.  La  collection  authentique  des  lois  et  autres 
envois  formera  un  dépôt  qui  ne  pourra,  sous  aucun 
prétexte,  être  tiré  des  secrétariats  des  autorités  con- 
stituées et  des  çrefTes  des  tribunaux  ;  et  lorsqu'un 
fonctionnaire  public  auquel  ils  auront  été  adressés 
sera  remplacé,  il  sera  tenu  d'en  ti'ansmettre  la  col-' 
lection  à  son  successeur. 

•  XV.  Le  comité  des  décrets,  procès-verbaux  et 
archives  est  autorisé  à  prendre  ou  a  maintenir» 
pour  l'exécution  des  dispositions  précédentes,  les 
arrêtés  convenables. 

«  XVI.  Les  dispositions  des  lois  antérieures,  aux- 
quelles il  n>st  pas  dérogé  par  le  présent  décret,  sont 
expressément  maintenues.       {La  iuile  demain*) 


LIVRES   DIVERS. 

Œuvres  eomptktts  d'Homire,  traduction  nouvelle,  avsS 
des  remarques  précédées  de  réfleiions  sur  Horoère  et  wr  la 
traduction  des  poètes,  par  Bitaubé;  imprimée  par  DiiUl 
Taloé,  et  ornée  du  portrait  d^Homère  ,  de  celui  du  tradiM» 
tcur,  et  de  deui  esUmpes  représentant  le  bouclier  d'AchiU*» 

Doute  volumes  in-18,  papier  vélin*  300  liv* 

Idem,  papier  d*Angouléme,  100  Tit. 

Edition  de  Prault,  in-8*,  gros  caractère,  S  vol.;  60  Ut. 

Idem,  papier  fin  satiné,  ISO  liv.  (H  ne  reste  de  cette  édi- 
tion que  quelques  etemplaires.) 

VOdytsée  étant  plus  récemment  imprimée ,  on  la  iëpare 
encore  en  faveur  de  ceux  qui  n'ont  eu  que  VïUade;  les  trois 
vol.  in>8®,  3S  liv.  (il  en  reste  quelques  exemplaire!  en  pa- 
pier fin.) 

Joseph^  poëmc,  par  Bitaubé,  S«  édition,  ornée  de  neuf  es- 
tampes dessinées  et  gravées  par  les  plus  habiles  artistes,  avec 
le  portrait  du  traducteur,  gravé  par  Saint-Aubin;  in|M4mfr- 
rie  de  Didot  l'alné;  papier  vélin,  in->8«;  100  liv. 

Idem,  t  vol.  in-18,  papier  vélin,  avec  les  mêmes  figures; 
100  liv. 

A  Paris,  chci  Yarrin,  libraire,  me  du  Petit^Pont,  an  ht* 
Je  celle  Jacques,  n*'  97. 

Le  citoyen  Varrin  prévient  que  cet  deux  ouvrages ,  dont 
il  est  seul  possesseur,  et  qui  réunissent  au  mérite  littéraire 
U  plus  belle  exécution  typographique,  ne  resteront  ans  prix 
actuellement  désignés  que  pendant  un  mois  pour  Paria,  «i 
deux  mois  pour  les  départements;  paasé  ce  terme  ila  s»» 
ront  doublés  et  au  delà,  si  ce  qui  lui  reste  d*exenplairea  n*est 
pas  entièrement  vendu.  (Les  prix  sont  cotés  en  isuillet;  l0t 
lirochures  et  tes  reliures  se  paieront  à  part.) 


GAZETTE  NATIOllE  »»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  130.  Décadi  10  Pluviôse,  Van  3«.  {Jeudi  29  Janvieb  1795,  vievix  ttyle.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Francfort,  te  G  janvier,  —  Les  Français  ont  mis  loulc  la 
Tire  gauche  du  l'.hin,  depuis  Mayenec  jusqu'à  Huningue, 
dans  l'état  de  lic-fekise  Je  plus  redoutable.  Une  purtie  des 
troupes  qui  étaient  au  siège  de  Maiihciro  e«l  venue  renforcer 
le  cordon  de  iroupcs  établi  lu  long  du  Rliin.  Les  républi- 
cains se  trouvent  ù  l'abri  de  toute  tentative  de  la  part  di  s 
Autrichiens,  qui,  sans  ces  précautions,  auraient  pu  traver- 
ser sans  peine  le  fleuve  pris  par  les  glaces. 

—  On  continue  avec  activité  le  siège  de  Mayencc.  Les  sol- 
dats républiciiins  désirent  terminer  leur  glorieuse  campa- 
gne par  la  prise  de  celte  place  importante. 

—  On  parle  d'une  nouvelle  promotion  parmi  lesgénéraux 
autrichiens.  Le  jeune  archiduc  Charles,  Hohenlohe  et  Cl<nir- 
fayl  doivent  être  élevés  aux  grades  de  feld-maréchaux. 
Hohenlohe  doit,  dit-oo,  se  rendre  à  l'armée  du  Rhin  avec 
le  colonel  Mack. 

—  On  apprend,  par  les  dernières  nouvelles  de  Constan- 
tlnople,  qu'il  y  a  eu  des  conférences  très-fréquentes  entre 
le  reiss-cffendi  et  rinicrnonce  impérial.  La  Porte  continue 
d'in&ister  avec  force  sur  la  reddition  des  quatre  forteresses 
enlevées  aux  Turcs  pendant  la  dernière  guerre. 

Elle  ne  dissimule  pas  que,  si  le  cabinet  de  Vienne  refuse 
d'accéder  à  ses  vœux,  il  y  a  tout  lieu  de  craindre  des  voies 
de  fait  de  la  part  des  Bosniaques^  qui  ne  veulent  entendre 
parler  d'aucune  cession. 

Bomif  le  \h  janvier.  —  La  cour  de  Munich  vient  d'établir 
une  cour  martiale  dont  les  principaux  membres  !H)nt  le  ba- 
ron de  Weichs  et  le  comte  d'Ingenheim,  pour  juger  le  géné- 
ral Lamolte,  au  sujet  de  la  retraite  des  troupes  palatines  en 
garnison  à  Dusseldorf,  lors  du  bombardement  de  cette  ville 
par  les  Français. 

Les  troupes  palatines  ont  été  remplacées  à  Dusseldorf  par 
les  troupes  auirichiennes.  Celles-ci  refusent  maintenant  de 
faire  place  aux  premières,  malgré  les  fréquentes  représen- 
tations du  général  Zedwitz.  Les  habitants  de  Diîsseldorf  pa- 
raissent d'ailleurs  peu  disposés  à  recevoir  l'ancienne  gar- 
nison. 

Les  généraux  français  ont  prolongé  jusqu'au  21  janvier 
le  terme  accordé  aux  liabitants  de  Clèves,  de  Meurs  et  de 
Gueldre ,  pour  rentrer  dans  leurs  foyers.  Les  républicains 
exercent  dans  ces  contrées  la  plus  exacte  discipline. 

ANGLETERRE. 

londret,  te  3  janvier.  —  On  trouve  dans  les  papiers  de 
l'opposition  un  fait  açsez  singulier,  s'il  est  vrai,  mais  que 
plusieurs  circonstances  peuvent  faire  regarder  comme  dou- 
teux, et  qui,  d'ailleurs,  est  démenti  formellement  dans  les 
papiers  ministériels,  qui.  de  leur  côté,  prétendent,  d'une 
manière  aussi  peu  vi-aisemblable,  que  les  membres  du  con- 
seil continuent  d'être  parfaitement  d'accord  sur  tous  les 
points  d'une  administration  devenue  bien  épineuse.  Quoi 
qu'il  en  soit,  voici  ce  fait. 

Samedi  dernier,  les  ministres  se  trouvaient  avoir  la  mi- 
norité, dans  le  conseil,  sur  trois  questions  importantes,  qu'on 
ne  fait  pourtant  pas  connaître.  On  parle,  en  outre,  d'une 
coalition  du  lord  Hawkesbury,  qui  jouit  de  la  connance  du 
roi.  avec  un  grand  magistrat  et  le  parti  du  duc  de  Portiand, 
assez  fort,  moyennant  ses  nouveaux  alliés,  pour  agir  en  op- 
position du  ministère,  ce  qui  donne  l'espérance  que  MM.  Piti, 
Dundas  et  le  lord  Chatham  ne  tanleioni  pas  à  s'en  retirer 
pour  éviter  d'en  être  renvoyés. 

—  Il  restait  encore  quelques  places  de  commissaires  de 
lamirauté  à  remplir  ;  l'amiral  Macbride  et  le  comroodorc 
Payne  y  seront  appelés. 

—  Les  fonds  publics  ont  remonté  depuis  quelques  Jours, 
d'après  les  bruits  d'une  paix  profonde  entre  la  France  et  la 
Hollande,  qui  circulent  et  s'accréditent. 

3«  Séi^c.  —  Tome  X. 


8t71TE  DES  DEBATS  DO  PA1U.£ME>T. 

Sir  W.  Milncr  déclare  qu'il  ne  saurait  voter  les  subsidts, 
attendu  que  l'objet  de  la  guerre,  d'après  l'aveu  des  minis- 
tres, est  la  «ubversion  du  gouvernement  actuel  de  France  et 
le  rétablis.sement  de  la  royauté.  Le  discours  du  roi  fait  con- 
noltre  d'ailleurs  que  les  intentions  du  ministère  sont  de  ne 
point  traiter  avec  la  république. 

M.  Pitt  répond  qu'il  n'a  jamais  voulu  dire  qu'il  ne  traite- 
rait point  avec  une  république',  parce  qu'il  pourrait  y  avoi» 
une  république  en  France  avec  laquelle  il  pe  refuserait  pas 
d'entrer  en  négociation.  Il  a  seulement  voulu  dire  qu'il  ne 
traiterait  pas  avec  la  république  actuelle  de  France,  dans  les 
circonstances  actuelles. 

M.  Fox  :  Si  j'ai  bien  compris  l'honorable  ministre,  ses  ex- 
pressions portent  qu'il  peut  arriver  dans  le  gouvernement 
actuel  de  France  des  changements  qui  justifieraient  une 
négociation  de  sa  paît,  et  que  de  plus  11  n'a  plus  aucune 
aversion  ù.  traiter  avec  une  république. 

M.  Slieridan  :  Il  est  de  la  dernière  importance  que  nous 
entendions  bien  la  déclaration  qu'on  vient  de  faire.  La  con- 
fusion vient  de  ce  qu'on  ne  met  pas  assez  d'exactitude  dans 
les  expressions  lorsqu'on  se  sert  du  mot  république,  W  ne 
f.iul  rien  moins  que  l'entendement  supérieur  de  mon  hono- 
rable ifmi  (M.  Fox)  pour  comprendre  les  déclarations  du 
ministre.  Il  a  tellement  pris  soin  d'étendre  son  explication 
dans  un  labyrinthe  de  mots  qu'il  est  devenu  obscur  préci- 
sément à  proportion  de  son  désir  de  se  rendre  clair  et  intel- 
ligible. Lorsqu'il  a  dit,  par  exemple,  qu'il  ne  traiterait  point 
avec  la  république  actuelle  de  France  dans  les  circonstan» 
ces  actuelles,  le  comprends  bien  la  première  partie  de  cette 
déclaration;  mais,  quant  in  la  seconde,  je  n'y  entends  rien. 
En  effet,  ce  n'est  pas  une  chose  si  facile  que  de  déterminei' 
ce  qu'on  entend  par  les  circonstances  actuelles  :  et  j'avoue 
franchement  que  toutes  les  fois  qu'on  se  sert  de  l'expression 
incompréhensible,  mai.<  populaire,  de  circonstances  exis^ 
tantes,  je  sifls  tout  à  fait  embarrassé  et  confondu.  On  ne 
prétend  pas  sans  doute  désigner  par  ces  mots  la  prospérité 
de  l'Angleterre  et  l'état  désastreux  de  la  France.  1^  seul 
sens  que  présentent  les  expressions  de  l'honorable  ministre»  * 
si  pourtant  il  a  voulu  dire  quelque  chose,  c'est  celui-ci  : 

<  Il  n*y  a  que  deux  hypothèses  dans  lesquelles  je  consenti- 
rais A  traiter  avec  la  France  : 

<  P  Dans  le  cas  où  je  réussirais  k  donner  à  son  gouver- 
nement actuel  une  forme  qui  me  serait  plus  convenable; 

c  2^  Dans  le  cas  où  les  événements  me  mettraient  à  la 
merci  de  la  France.  •» 

Or,  sous  tous  les  points  de  vue,  il  est  de  notre  devoir  de 
repousser  ceiie  alternative.  Quant û  moi,  je  ne  «ois  dans 
toutes  ces  piirases  qu'une  déclaration  du  ministre,  portant 
que  son  intention  est  de  rejeter  toutes  les  motions  tendant 
à  amener  la  paix  avec  la  France. 

Ou  demande,  après  tous  ces  débals,  à  aller  aux  voix  sur 
la  question  des  subsides;  ils  sont  décrétés,  et  la  séance  est 
levée. 

PAYS-BAS. 

Bruxelles,  le  Â  pluviôse.  —  Trois  militaires,  convaincus 
d'avoir  contrefait  les  signatures  des  représentants  du  peuple 
et  du  général  Picliegru,  et  de  parcourir  avec  elles  les  cam- 
pagnes pour  y  faire  de  fausse»  réquisitions,  viennent  d'être 
condamnés,  parie  tiibunal  criminel  de  cette  ville,  aux  peines 
suivantes,  savoir  : 

Lcprou,  volontaire,  convaincu  d'avoir  Imité  les  signatures 
des  n^présentants  du  peuple  et  des  généraux  ;  d'avoir  fait 
fabriquer  à  Namur  deux  cachets  faux,  et  d'avoir  fait  diffé- 
rentes réquisitions,  a  été  condamné  à  la  peine  de  mort; 

Joseph  Yernier.  caporal-fourrier,  pour  avoir  prêté  soo 
ministère  à  Leprou,  à  huit  années  de  fers; 

Joulain,  sous-lieutenant,  comme  il  n'existe  à  sa  charge 
que  de  fortes  présomptions  de  complicité,  comme  étant  de 
leur  société,  a  été  déclaré  incapable  de  ser\'ir  dans  les 
troupes  de  la  république,  et  il  sera  détenu  jusqu'à  la  paix* 

40 


314 


néPDBLIQUE  FRANÇAISE. 

ABXBB  DE  l'ouest. 

Nantes,  le  25  nivoie.—Les  rebelles  de  la  Vendée 
sont  toujuiirs  disposés  à  mettre  bas  les  armes  et  à 
rentrer  dans  le  giroii  de  la  république.  Laroberie, 
commandant  de  la  cavalerie  de  Charelte ,  adopte, 
dans  ses  lettres,  l'ère  républicaine,  parle  avec  res- 
pect de  la  Convention  nationale,  des  roprésentanls 
du  peuple,  et  substitue  partout  le  mot  citoyen  à  ce- 
lui de  monsieur. 

Les  avanl-postes  des  rebelles  et  ceux  des  républi- 
cains se  répondent  par  des  cris  :  Vive  la  république  I 
la  réunion ,  lafralemUé!  Dernièrement,  cinquante 
ciTaliers  de  Charette  et  plusieurs  centaines  de  ses 
faDta&sins,  réunis  avec  nos  braves  volontaires, 
criaient  ensemble  rire  la  république  I  Un  seul  re- 
l)elle  ayant  crié  vive  le  roi!  son  chef  le  réprimanda 
sévèrement ,  et  annonça  qu*il  en  ferait  un  exemple 
éclatant ,  s*il  ne  pensait  f|ue  la  force  de  Thabitude 
lui  avait  seule  arraché  ce  mot ,  qui  devait  désormais 
être  proscrit  :  alors  de  nouveaux  cris  de  rire  la  ré- 

fublique!  vive  la  Convention  !  se  firent  entendre,  et 
on  se  donna  le  baiser  de  fraternité.  Tout  annonce 
donc  la  tin  très- prochaine  de  la  malheureuse  guerre 
-de  la  Vendée. 

—  Le  représentant  du  peuple  Biielle  est  attendu 
«vec  impatience  dans  les  murs  de  Nantes.  Les  re- 
belles ont  une  entière  conliancc  en  lui  ;  ils  se  repo- 
seut  sur  ses  promesses  et  sur  sa  loyauté. 

VARIÉTÉS. 
Yuei  éeonomiquei  sur  les  transports  de  Vintérieur. 

Ei-t'W  powible  que  les  relais  militaires  (les  rrlals  milItalrL-s 
doivnit  cire  ëlablis  de  quaire  lii-urs  en  quatre  lieues  ;  les 
Gbfvaux  d**s  fermiers  et  cultivateurs  font  le  service;  un  re- 
laie d«*  quatre  lieues  eo  quatre  lieues  avec  des  chcTaux  frais; 
la  république  fournit  les  voitures)  ne  soient  pas  encore  or- 
eanisés?  Laissera-i-on  passer  le  moment,  pour  les  metire 
eo  mouifUDCDt,  où  la  navigation  est  arrêta,  où  les  moyens 
de  transport  font  seuls  tous  les  services,  où  les  culUvaleurs 
peuvent  donner  leurs  clievaox ,  n'étant  pas  eroptoyés  dans 
cet  instant  à  la  culture?  Jusqu'à  quand  urdera-t<on  A  for- 
mer cette  chaîne  de  voitures  de  Paris  aux  frontières,  et  des 
frontières  A  Paris  ?  Par  ce  moyen,  on  fera  parvenir  en  treize 
jours  les  approvisionnements  et  les  objets  de  commerce  à 
devv  cents  lieues,  qui  est  le  plus  grand  rayon  du  centre  de 
"Paris  aux  extrémités,  à  six  fois  moins  qu'il  n'en  coûte  ac- 
tuellement par  les  voitures  rouliéres ,  et  les  transports  se 
feront  moins  difficilement.  L*anrété  qui  établit  les  relais  mili- 
taires donne  15  sous  par  lieue  et  par  cheval,  qui  peut  me- 
ner à  soo  aise  sept  ceat  cinquante  pesut,  ne  fusant  que 
quatre  lieues  par  Jour. 

On  donne  dans  ce  moment  depuis  7  jusqu'à  12  sous  aux 
roulieis  par  quintal  et  par  lieue;  le  moyen  terme  est  9  fOUs. 
Il  en  coûtera,  a  ce  prix,  pour  transporter  quatre-vingt-six 
millions  quatre  cent  mille  livres  pesant  à  cent  lieues,  2  mil- 
lions 332,800  liv.,  et  par  les  relais  il  n'en  coulera,  pour 
porierle  même  poids  et  à  la  même  distance,  que  275,6<)0 1., 
chaigeant  au  centre  pour  les  armées  et  les  frontières,  et  aux 
frontières  chargeant  en  retour  lesobjett  de  commerce  pour 
Paris  et  l'intérieur.  Celle  opération  rendra  le  bonheur  à  la 
France  et  la  vie  aux  manufactures.  Qu'on  impose  seulement 
le  commerce  à  6  sous  par  quintal  et  par  lieue  :  ce  prix  mo- 
dique indemnisera  la  république  et  au  delà  de  ses  frais  de 
transport  et  d'approvisionnement,  et  autre»  objets.  Pour  les 
armées  et  ports  de  mer,  le  cultivateur  donnera  volontiers  set 
chevaux  toutes  les  fois  qu'ils  reviendront  coucher  chez  lui; 
dans  les  monsents  perdus,  il  a  cultiveront  ses  terres,  et  les 
fumiers  de  ses  chevaux  les  engraisseront 

ËUiblissant  sur  les  douze  routes  principales  douze  cents 
foitures  (oq  eo  trouvera  au  moins  moitié  dans  les  dépôu  et 
dans  les  villes  de  l'intérieur,  appartenant  à  la  république), 
e|  autasl  aux  tronlicrcs,  ca  nombre  sera  sofllsani  pour  ail- 


meoter  les  plus  ^tumIs  moyens  de  trsnspons  :  uent  voHarcft 
de  chaque  dépôt  do  centre,  cent  Toitures  de  cfaaqoe  dépdC 
des  frontières,  partiront  toqs  les  jours  poor  lesdoœronfflt; 
celles  des  fronUères,  arrivant  en  douze  jours  à  Paris,  repnr- 
UroBt  tout  de  suite,  et  vice  versây  pour  celle  des  frontières^ 
ce  qui  formera  les  douze  chaînes  de  voitures  qui  ranime- 
ront le  commerce  et  l'industrie. 

L'établissement  qu'on  ne  doit  cesser  d'encourager,  c'est 
la  navigation  intérieure  ;  avec  peu  de  moyens  on  peot  foire 
des  transports  énormes  ;  quaire  chevaux  remontent  on  ba- 
teau chargé  de  quatre-vingt  mille  livres  pesant.  Qu'on  creuse 
les  canaux  que  la  ConvenUon  a  décrétés,  qu'og  en  établiise 
de  nouveaux:  qu'on  y  emploie  les  soixante  mille  prisonniers 
et  déserteurs  :  en  rendra  par  là  la  France  la  nation  U  pta» 
commerçante  de  l'Europe. 


CONVENTION  NATIONALE. 

COMITÉ  DB  SALUT  PUBLIC. 

Arrêté  du  8  pluviôse,  an  3*  de  la  république  um  et 
indivisible. 

Le  comité  de  salut  public,  considérant  que  la  su|h 
pression  des  ré(|uisitioiis  illimitées,  décrétée  le  9  ni- 
vôse dernier,  s  étend  naturellement  sur  celle  qui 
avait  été  mise  sur  les  fonds  que  les  négociants  firaa- 
çais  avaient  dans  les  pays  étrangers; 

Que  rexislence  de  cette  réquisition  est  inconipt- 
tibie  avec  la  liberté  que  la  Convention  a  rendue  aa 
commerce  par  rarticlc  fV  du  décret  du  même  jour, 
puisque  les  négociants  seraient  dans  l'impossibilité 
de  faire  payer  les  marchandises  d'importation,  et  de 
disposer  du  produit  de  celles  que  la  loi  pennet  d'im- 
porter, arrête-: 

Tous  les  négociants  peuvent  disposer  des  fonds 
qu'ils  ont  dans  l'étranger,  pour  les  appliquer  na 
payement  des  denrées  et  marchandises  qu'ils  tou* 
drotit  importer  en  France ,  à  moins  que  la  commis- 
sion de  commerce  n>n  ait  déjà  ordonné  l'emploi,  en 
exécution  de  rarrélé  des  comités  de  salut  publie , 
(les  (înances  et  de  ^ûreté  générale ,  en  date  ou  •  ni- 
vôse, Tairse,  portant  mise  en  réquisition  de  Tin- 
diislrie  et  des  ressources  de  tous  les  banquiers,  ca 
pitalistes  et  agents  de  change. 

Le  présent  arrêté  sera  inséré  dans  le  Bulletin. 
Signé  les  membres  du  comité  de  salui  publie. 


SUITE  DE  LA  SÊAKCE  DU  8   PLUVIOSE. 
Présidence  de  Rovère* 

Le  tribunal  de  cassation  est  admis  à  la  barre. 

Vorateur  :  Gloire  à  la  république,  à  la  Conven- 
tion ,  à  nos  années  !  Amsterdam  est  au  pouvoir  des 
Français,  le  stathoudrr  fuit,  TAutricbe  et  la  perikie 
Albion  tremblent  ;  les  saisons  ont  conjuré  avce  nous 
pour  la  prospérité  de  nos  armes. 

Beprésenlants ,  nos  guerriers  citoyens  ont  fait 
leur  devoir;  mais  c>st  vous  qui  avez  dirigé  leur 
marche  ;  la  nation  applaudit  ù  vos  travaux  eti leurs 
victoires. 

En  terrassant  les  ennemis  extérieurs,  vous  écra* 
sez  aussi  les  monstres  oui  ne  voulaient  régner  que 
sur  des  cadavres  et  sur  aes  ruines;  attermisset  voire 
ouvrage  par  de  bonnes  lois;  frappes  toutes  les  fic- 
tions, et  vous  continuerez  de  prouver  à  TEtirope  et 
à  la  postérité  que  la  France  libre  ne  veut  connnérir 
que  pour  assurer  son  indépendance  et  son  bonheur. 

Vive  la  république  f  vive  la  Convention  nationale! 

Lb  Pbcsident  :  Citoyens ,  la  liberté  et  la  victoire 
sont  le  cri  de  ralliement  de  tous  les  bons  citoyens. 
Votre  tribunal ,  chargé  par  son  essence  du  main- 


31^ 

tien  dos  lois  rifpublicaines,  doit  sentir  plus  que  tout  \ 
autre  combien  la  journée  du  0  thermidor  a  été 
grande  et  salutaire  à  l'humanité.  La  liberté  et  l'eça- 
litë  étaient  sans  cesse  outragées  par  quelques  scélé- 
rats aui  s'étaient  arrogé  le  privilège  exclusif  de 
faire  des  lois,  de  les  interpréter  selon  leur  caprice. 
La  captivité  des  hommes  était  leur  étude ,  et  la  mort  ', 
leur  jouissance.  Tous  les  citoyens  français'et  une  ' 
partie  du  senre  humain  profiteront  des  uienfaits  de 
cette  révouition.  C'est  «n  vain  que  les  complices  et 
les  continuateurs  du  plus  lâche  et  du  plus  féroce  des 
tyl-atiâ  emploient  le  résultat  de  leurs  méditations 
barbares  et  le  fruit  de  leurs  rapines  scandaleuses 
pour  se  ressaisir  du  sceptre  de  1er  assassin  avec  le- 
<[uel  ils  tranchaient  la  vie  des  Français.  La  Conven- 
tion nationale,  le  peuple  français  maintiendront  la 
justice  à  Tordre  de  tous  les  jours  et  de  toutes  tes 
heures,  et  bientôt  ta  France  ne  connaîtra  plus  aue  la 
fraternité  et  lé  bonheur,  que  la  bravoure  des  héros 
français  et  leurs  vertus  républicaines  assurent  à 
jamais. 

La  Convention  nationale  décrète  la  mention  ho- 
norable et  rinsertion  au  Bulletin  de  l'Adresse  et  de 
la  réponse  du  président. 

^  Sallengros  fait  la  motion  d'ordre  tendant  à  Id 
prompte  exécution  du  décret  du  !•'  brumaire  der- 
nier, qui  ordonne  l'ouverture  du  canal  de  jonction 
de  la  Sambrc  à  l'Oise,  et  à  ce  que  le*comité  des  tra** 
vaux  publics  s'occupe  des  projets  rédigés,  en  lîdl 
et  1782,  par  Lafitte,  officier  du  çénie,  pour  joindre 
rOise  à  la  Meuse,  et  la  Sambre  a  l'Escaut ,  pour  en 
faire  son  rapport  à  la  Convention  nationale  le  plus 
tôt  possible,  ainsi  que  défaire  achever  de  suite  le 
canal  de  la  Sensée,  qui  communique  de  Bouchain  à 
Douai,  6*il  ne  l'est  déjà. 

La  Convention  nationale  renvoie  cette  motion 
d'ordre  au  comité  de  salut  public  et  à  celui  des  tra> 
vaux  publics  respectivement,  et  décrète  l'impres- 
sion du  discours  prononcé  par  Sallengros,  et  celle 
des  deux  précis  ou  mémoires  rédigés  par  I^alitte  à  la 
lin  de  son  manuscrit. 

—  Un  des  secrétaires  lit  la  lettre  suivante  : 

Le  général  Uoreau^  commandanî  Varmée  de  la 
Muselle ,  au  président  de  la  Convention  nalio" 
vaU. 

Au  quârtief  gênerai,  3i  Trêves,  l6  27  frltnâire,  Tan  3^  dé 
la  république  une  et  indivisible. 

■  J'ai  reçu,  citoyens  des  mains  des  auQUStes  victimes  de 
la  fureur  des  rois  ligués  contre  nôtre' liberté,  le  drapeau 
tricolore,  gage  précieux  de  la  recoodalssance  nationale  ;  je 
l'ai  présenté,  ainsi  que  nos  detil  Jeunes  héros,  A  mes  frères 
d'armes;  Ils  ont  tous  Juré  que  cette  nouvelle  oriflamme, 
désormais  à  la  tête  de  l'armée,  serait  la  terreur  de  nos  enne< 
mis*  et  l'étendard  sous  lequel  ils  marcheraient  en  conti*' 
nuant  de  bien  mériter  de  la  nation  française.  Je  seconderai 
de  tout  mon  pouvoir  les  vœux  et  ie  courage  invincible  de 
ces  ri'publicatns. 

•  Ces  deux  volontaires,  qui  ont  suivi  Jusqu'à  présent  tes 
mouvements  de  ceiie  armée,  partent  pour  retourner  à  Paris, 
et  continuer  d'y  Jouir  dé  la  Mcnfaisnnce  nsUonaie;  Ils  etn- 
iwrteui  avec  eux  l'estiitie  et  l'amitié  de  tous  leurs  camarades 
composant  l'armée  de  la  Moselle. 

•  8oIUt  et  fraternité.  Signé  MonEAU»  t 

Récit  de  Vacle  de  courage  et  de  dévouement  à  la  pa- 
irie det  vingt' deux  prisonniers  de  guerre  échap- 
pés de  la  forteresse  de  Gibraltar. 

Le  30  novembre  1Î94  (vieux  style),  à  sept  heures 
et  demie  du  soir,  étant  à  bord  d'un  ponton  qui  nous 
servait  de  prison  en  rade  à  Gibraltar,  quoiqu'étant 
bien  surveillés^  deux  de  nos  frères  furent  à  la  nage 


prendre  une  chaloupe  à  un  bâtiment  plus  propice,' 
et  l'amenèrent  aussi  à  la  nage,  n'ayant  point  de  ra- 
mes; mais  nous  en  étant  précnutionnés  do  trois, 
nous  nous  embarquâmes  au  nombre  de  vingt -deux, 
et  traversâmes  le  plus  promptemmt  que  nous  pil- 
mes,  au  milieu  d'une  quantité  de  bâtiments  de  guerre 
de  différentes  nations,  mouillés  dans  cette  rade; 
Qous  nous  en  tînmes  écartés  et  hors  de  leur  vue  jus- 
qu'à minuit  et  quart',  heure  oii  la  lune  se  coucha  ; 
aussitôt  nnus  nous  approchâmes  d'un  bâtiment 
nommé  <0  Temple,  faisant  feinte  de  passer  outre.  Cft*^ 
pendant  on  nous  héla  ;  mais  notre  seule  réponse  fut 
que  nous  étions  le  canot  de  ronde  :  on  nous  cria  de 
nous  éloigner;  mais,  au  contraire,  nous  n'en  inon^ 
tâmes  que  plus  vite  à  bord.  Nous  n'avions  pour 
toute  défense  que  des  morceaux  de  bois  arrangés  en 
forme  de  massue;  tious  étions  convenus  avant  notre 
enlreprise  de  ce  que  chacun  de  nous  devait  faire  : 
huit  des  nôtres  saisirent  les  gardes  qu'ils  trouvèrent 
suf  ce  bâtiment,  au  nombre  de  sept;  le  capitaine  eut 
le  temps  de  se  munir  d'un  mauvais  pistolet  qui  rata  ' 
sur  le  premier  qui  entra  dans  sa  chambre,  et  nous 
munes  à  la  voile,  après  avoir  coupé  le  câble,  avec  la 
plus  grande  vigilance. 

Pour  sortir  de  la  rade,  il  nous  fallut  passer  sous 
la  volée  d'un  vaisseau  anglaisde  quatre-vingts  pièces 
de  canon  et  de  deux  frégates  porttigaises  ;  mais  notis 
eûmes  le  bonheur  de  n  être  point  aperçus.  Le  3  dé- 
cembre suivant,  environ  sept  heures  du  malin,  nous 
fîmes  rencontre ,  par  le  travers  du  cap  Saint-Vin- 
cent, d'un  vaisseau,  d'une  frégate  et  d*un  aviso, 
que  nous  jugeâmes  être  espagnols  ;  nous  hissâmes 
pavillon  anglais,  et  sept  à  nuit  marins  se  déguisè- 
rent a  l'anglaise  et  nous  passâmeSé  Depuis  ce  jour 
n'avons  fait  aucune  mauvaise  rencontre. 

Noms  et  grades  de  ces  braves  républicains^  et  leurs 
grades  au  moment  où  ils  ont  été  faits  ptisonniers, 

Bernard  Dubourdieu ,  eanonnier  (de  Bayonne), 
prisonnier  le  19  octobre  179Ô,  â  Toulon. 

Pierre  Testler  (de  Porchère,  en  Saintonge)  était 
gabier  de  misaine,  à  bord  de  VImpétueux  ;  mis  en 
qualité  de  maître  d'équipage  Sur  une  prise  hollan- 
daise ,  et  repris  par  l'Anglais,  le  è6  novembre  ITuSi 
Ces  deux  républicains  ?étant  offerts,  avant  notre 
départ,  pour  conduire  le  navire,  ont  trcs-bien 
réussi,  et  notls  ne  pouvons  que  leur  donner  des 
louanges,  ayant  remarqué  en  eux  le  zèle  qu'ils 
avaient  de  nous  sauver. 

Pierre  Brizard ,  matelot  (de  Blaye,  en  Gascogne)» 
a  été  mis  sur  la  même  prise  et  repris  de  même. 

Philippe  Brivel  (de  Bayonne),  pris  comme  le  prë*' 
cèdent. 

Amant  Causeur,  matelot  (de  Brest). 
.  Joseph  Jotienne,  gabier  (de  Crandviltô ,  dét)arte- 
ment  de  la  Manche). 

Pierre  Duguny,  maître  voilier  (deââint^Mato,  dé- 
partement du  Finistère). 

Lazare  Perpan,  gabier  (de  Martigue,  département 
des  Bouches-du-Rhôue). 

Jean  Legras,  matelot  (de  Vas-la-Hougue,  dépar- 
tement de  la  Manche),  pris  au  même  lieu. 

Jean  Hervieux,  matelot  (de  Cherbourg,  départe- 
ment de  la  Manche),  pris  le  %%  avril  1704,  sur  la  Jui" 
tice,  vaisseau  marchand. 

Pierre-Nicolas  Bravel,  matelot  (d'Agdt»,  départe- 
ment de  l'Hérault),  4 

Jean  Lclbe,  matelot  (dé  Masargue,  déparlentèht 
des  Bouches-du-Rhône)  pris  sur  F  Alouette^  bâtiment 
marchand. 


31G 


Jacques  Hoiize,  calfal  (de  Saiul-Malo,  (l<'parlc- 
nitMït  du  Finistère),  pris  le  27  mai  1793,  sur  le  cor- 
saire Ouccherlon, 

Joseph  Fournicr,  aide-canonnier  (de  Saint-Tro- 
pe7,  d«»partement  du  Var),  pris  sur  la  gabare  la  Mo- 
Belle,  le  4  mai  1794. 

Simou  Férëol ,  caporal-fourrier  au  52®  re'giment 
d'infanterie  (de  Villenosse,  département  de  l'Aube), 
pris  le  17  fe'vrier  1794,  à  Saint-Florent,  en  Corse. 

Claude-ElienncBoyer,  caporal-fourrier  au  26«  ré- 
Çiment  (de  Gray,  département  de  la  Haute-Saône), 
%dem, 

Paul  Joberl,  grenadier  au  52«  régiment  d*infan- 
terie  (de  Barbantane,  département  des  Bouches-du- 
Rhône),  idem, 

François  Chevaline,  premier  canonnier  au  4»  ré- 
giment d*artilierie  (de  Geromany,  département  de 
]a  Haute^ône),  idem, 

Hyacinthe  Gallet,  canonnier(de  Franciade),  idem. 

Rémi  Roulement,  artificier  au  4^  régiment  d*iu- 
fanterie  (deSaint-Hippolyte,  départementdu  Doubs), 
pris  à  Toulon,  le  9  octobre  1793. 

Jean-Marie  Flou,  carabinier  dans  la  légion  des 
Allobroges  (de  Paris),  idem, 

Antoine  Jean,  caporal  au  l«r  bataillon  de  Vau- 
clusc  (de  Voyasse,  département  des  Bouches-du- 
Rhône),  pris  à  Toulon. 

Le  représentant  du  peuple  Drulhe^  délégué  dans  le 
département  de  l'Oise,  auprésidenl  de  la  Conven- 
tion nationale. 

•  Citoyen  président  Ja  Convention  nationale  nVn- 
tendra  point  sans  intérêt  le  récit  d*un  acte  de  désin- 
téressement et  de  générosité  dont  je  vins  d'être  le 
témoin,  et  que  je  suis  chargé  de  lui  transmettre. 

•  Les  circonstances  et  l'opinion  publique  nfont 
déterminé  à  donner  un  successeur  au  directeur  de 
)a  poste  aux  lettres  de  Compiègne.^  Le  peuple,  mé- 
content du  fils,  était  plein  de  respect  pour  sa  mère, 
et  voyait  avec  regret  qu'une  citoyenne  recomman- 
dable  par  son  âge ,  ses  vertus  et  ses  besoins,  allait 
être  privée,  par  la  destitution  de  ce  fonctionnaire, 
d'un  secours  nécessaire  à  sa  vieillesse  et  à  ses  infir- 
mités. On  désirait  le  remplacement  du  directeur, 
mais  ou  voulait  conserver  du  pain  à  la  mère;  alors 
le  citoyen  Leroux,  qui  jouit  de  restime  publique, 
et  qui  vient  de  s'en  rendre  plus  diçne,  s'est  présenté 
à  la  tribune;  il  a  offert  de  remplir  les  fonctions  de 
directeur  de  la  poste  aux  lettres,  avec  toute  l'exac- 
titude que  cette  place  exige,  et  d'en  verser  tout  le 
salaire  dans  les  mains  de  la  mère  du  citoyen  destitué. 
Cette  action  a  été  couverte  d'applaudissements.  J'ai 
accepté  son  offre,  et  je  l'ai  installé. 

«  Salut  et  fraternité.  Dbulbe.  • 

Pierret ,  représentant  du  peuple  près  le  départe- 
ment de  la  Haute-Loire,  à  la  Convention  natio- 
nale. 

•  Citoyens  collègues,  dès  les  premiers  pas  que  j'ai 
faits  dans  le  dé|iartement  de  la  Haute-Loire ,  j'ai 
aperçu  l'emprcmte  du  terrorisme,  et  plus  j'avance, 
plus  je  reconnais,  par  les  traces  de  ses  cruels  rava- 
ges, combien  il  était  temps  qu'on  v  fît  entendre  la 
voix  de  la  justice  avec  tout  l'appareil  de  la  représen- 
tation nationale;  amendes  arbitraires,  pillages, 
vcMtions,  dilapidations  des  biens  nationaux,  guillo- 
tine permanente, incendies, assassinats  publics,  tout 
a  été  commis  par  des  forcén<^  se  disant  patriotes. 
Je  me  suis  empressé,  à  mon  arrivée,  d  annoncer  les 


principes  régénérateurs  du  9  thermidor,  par  nno 
procl.imalion  qui  a  été  reçue  avec  la  reconnaissance 
qui  signale  le  passage  de  l'oppression  à  la  liberté. 

•  Quelques  jours  après,  j'ai  convoqué  une  assem- 
blée générale  de  la  commune  du  Puy,  chef-lieu  da 
déparlennnt,  et  j'y  ai  développé,  d'une  manière 
plus  étendue  et  plus  adaptée  aux  localités,  hs  vues 
de  la  Convention  pour  réparer  et  faire  oublier  les 
maux  causés  par  Talfreuse  tyrannie. 

•  Je  n'ai  point  dissimulé  aux  autorités  constituées 
et  aux  citoyens  que  leur  trop  de  faiblesse  avait  mis 
en  péril  la  chose  publique  et  naralysé  la  Conven- 
tion elle-même.  Les  vrais  patrloles  ont  entendu  ce 
langage.  Tous  ont  promis  de  ne  faire  qu'un  seul 
faisceau  autour  de  la  Convention ,  d'être  fermement 
attachés  aux  principes,  et  de  ne  pas  souffrir  qu'ils 
soient  méconnus  désormais.  Ce  serment  a  été  pro- 
noncé avec  le  plus  pur  enthousiasme. 

•  Les  terroristes ,  ceux  qui  se  jouaient  impuné- 
ment de  la  liberté  individuelle,  les  hommes  qui  voa« 
laient  la  transfusion  des  propriétés,  les  dilapidateurs 
et  les  égorgeurs  u'auront^)as  en  lieu  d'être  contents 
de  mes  tableaux.  Cette  espèce  d'hommes  a  juré  de 
ne  jamais  se  repentir,  mais  j'ai  juré  de  les  démas- 
quer et  de  les  comprimer  par  tous  les  moyens  qui 
sont  en  mou  pouvoir  ;  je  ferai  le  bien  avec  fa  même 
audace  qu'ils  ont  lait  le  mal. 

•  Ils  s'étaient  arrogé  par  leurs  excès  un  tel  empire 
sur  l'esprit  du  peuple  franc  et  facile  de  ces  contrées  » 
qu'à  peine  il  ose  croire  que  l'humanité  et  la  justice 
peuvent  s'allier  avec  le  patriotisme:  les  convulsions 
qu'ils  ont  excitées  auraient  infailliblement  amené 
un  relâchement  dangereux ,  s'ils  eussent  fait  leurs 
expériences  sur  un  corps  moins  robuste  et  moins 
sain  ;  mais  le  civisme  de  la  Haute-Loire  est  à  l'c- 
preuve  ;  c'est  à  elle  que  la  république  doit  rextioc- 
tioii  d'une  seconde  Vendée  ;  sa  conduite  dans  les 
diverses  insurrections  de  la  Lozère  et  de  Rhône-el- 
Loire  n'est  pas  assez  connue  ;  elle  est  digue  du  plus 
grand  éloge. 

•  Les  hommes  qui  l'avaient  asservie  voudraient 
bien  que  les  inconséquences  de  l'aristocratie  et  le 
délire  du  fanatisme  vinssent  à  leur  secours  p<iur  faire 
croire  que  leur  barbarie  fut  utile,  et  pour  renouve- 
ler les  prétextes  d'une  domination  absurde  et  tyran- 
nique;  mais  la  vigilance  des  bons  citoyens  suffit  poor 
des  homm?s  inipuissants  par  eux-mêmes  et  déjà 
vaincus  par  reflet  salutaire  d  une  exacte  justice  : 
\t>  fêtes  décadaires  achèveront  d  éteindre  des  pn*ju- 
gés  que  l'énergie  républicaine  peut  aisément  contenir 
dans  de  justes  bornes. 

•  Les  prisons  de  cette  commune,  que  j'ai  visitées, 
sont  dans  le  plus  pitoyable  état  :  il  est  instant  que  la 
Convention  nationale  tourne  ses  regards  sur  elles; 
j'y  ai  trouvé  des  cultivateurs  ignorants  et  chargés 
d'enfanls  qui  gémissaient  depuis  longtemps  pour 
des  fautes  légères  :  je  les  ai  sortis  de  l'oubli  crîiel 
où  ils  étaient  plongés,  et  leur  ai  rendu  la  liberté. 
J'ai  aussi  confié ,  à  des  parents  qui  m'en  répondent, 
trois  prêtres  octogénaires,  infirmes,  sourds  et  aveu- 
gles. 

•  Les  dominateurs  cherchent  peut-être  à  jeter  de 
la  défaveur  sur  ces  actes  de  l'indulgence  nationale; 
mais  aucune  sourde  menée ,  aucune  agitation  ne 
m'empêchera  d'aller  au  but.  Comme  notre  collègue 
Guyardin,  qui ,  envoyé  dans  ce  département  avant 
la  mort  du  <lernier  tyran,  fut  arrêté  dans  le  bien  que 
scm  cœtir  et  les  circonstances  exigeaient  de  lui ,  je 
ne  me  laiss<'rai  point  intimider  par  les  cris  affectés 
de  modéra niisme  et  de  royalisme  dont  la  Conven- 
tion n'est  pas  la  dupe,  et  qu'elle  sait  si  bien  réduire 
a  leur  juste  valeur;  j'appesantirai  «ne  main  de  Tir 
sur  les  méchants  de  toutes  les  castes  eu  même  temps 


317 


que  je  consolerai  les  bons  ciU)yens  par  le  rdtablissc- 
ment  de  l'ordre ,  et  aut  j'élèverai  aux  emplois  les 
hommes  probes  et  éclairés  dont  le  républicanisme 
me  sera  attesté  par  le  peuple  lui-même;  enfin  j*ai 
Tespoir  qu*en  retournant  ii  mon  poste  je  porterai  a 
ia  Convention  les  vœux  et  les  bénédictions  de  tout 
nu  département  accoutumé  à  Taimcr,  mais  dont  la 
terreur  avait  comprimé  toutes  les  âmes  et  aliéné 
tous  les  cœurs.  Vive  la  république  ! 

•  Signé  Pierpht.  • 

Le  représenlanl  du  peuple  Pierret  prés  le  déparie- 
menl  de  la  Haute-Loire  au  comité  de  sûreté  gé- 
nérale. 

Au  Puy,  le  1 5  nivôse,  Tan  3*  de  la  république  uno 
et  indivisible. 

•  Citoyens  collègues ,  vous  trouverez  ci -joint  une 
proclamation  que  j'ai  cru  devoir  faire  aux  citoyens  du 
département  dans  lequel  je  suis  en  mission.  Je  suis 
persuadé  que  vous  y  trouverez  l'expression  des  seiw 
timents  qui  sont  dans  votre  cœur  et  qui  sont  les 
miens  :  je  vais  faire  tout  ce  qui  dépendra  de  moi 
pour  anéantir  le  règne  de  la  terreur  qui  a  eu  lieu  ici 
avec  beaucoup  d'activité.  Une  guillotine  y  a  été  per- 
manente pendant  huit  mois  ;  jugez  d'après  cela  des 
vexations  qui  ont  pu  y  avoir  lieu  ;  je  tâcherai  de  les 
faire  oublier  par  (les  actes  que  la  justice  nationale 
veut  que  Ton  exerce  aujourd'hui  en  son  nom ,  et 
dont  malheureusement  ou  s'est  trop  écarté  jusqu'à 
ce  moment. 

«  Salut  et  fraternité.  Signé  Piebbbt.  • 

Proclamation  du  représentant  du  peuple  Pierret^ 
envoyé  en  mission  dans  le  département  de  la 
Haute-LoirCy  aux  citoyens  de  ce  département. 

Le  13  nivôse,  an  3«  de  la  république  française, 
une  et  indivisible. 

«  Citoyens ,  la  Convention  nationale ,  au  milieu 
des  grands  travaux  qui  l'occupent  et  qui  embrassent 
la  republique  entière,  porte  encore  sa  sollicitude  sur 
la  situation  particulière  de>  divers  départements,  et 
veut  s'assurer  que  ses  bienfaits  s'étendent  à  chacun 
des  points  du  sol  de  la  liberté. 

•  Chargé  d'être,  dans  vos  contrées,  l'organe  de  sa 
Tolonté ,  je  dois ,  en  vous  rappelant  ses  principes , 
vous  annoncer  en  son  nom  ce  que  vous  devez  atten- 
dre de  celui  qu'elle  a  choisi  pour  les  afiermir  parmi 
vous,  et  en  assurer  à  jamais  le  triomphe. 

•  Une  grande  révolution  s'est  opérée  :  les  noms  sa- 
crés de  la  justice  et  de  la  vertu  ont  été  vengés  des 
nouveaux  tyrans;  mais  la  tyrannie  n'a  pu  être  frap- 
pée du  même  coup  dans  ses  dernières  racines  ;  et 
telle  avait  été  la  nature  de  ses  ravages  qu'ils  ne 
peuvent  être  réparés  qu'avec  lenteur  et  persévé- 
rance. 

>  Puissé-je,  en  vous  quittant,  laisser  parmi  vous  le 
règne  des  lois,  l'amour  de  l'ordre,  l'union  et  la  fra- 
ternité! j'aurai  rempli  les  vues  de  la  Convention 
nationale ,  et  mes  vœux  seront  satisfaits. 

«  11  me  reste  une  invitation  particulière  à  faire  aux 
cultivateurs  et  propriétaires  de  grains  dans  les  cam- 
pagnes ;  qu'ils  se  ressouviennent  qu'ils  doivent  con- 
tribuer particulièrement  au  bonheur  de  leurs  conci- 
toyens en  approvisionnant  avec  soin  les  communes 
de  ce  département  des  grains  dont  elles  peuvent 
avoir  besoin  :  qu'ils  sachent  bien  que  la  Convention 
nationale ,  en  réJtablissant  la  libre  circulation  des 
grains,  a  compté  sur  le  zèle  des  bons  citoyens  à  ne 
pas  abuser  de  cette  liberté,  et  à  la  faire  tourner 
tout  entière  au  profit  de  la  chose  publique.  Malheur 
à  celui  qui  ne  serait  pas  animé  de  ces  principes!...» 


La  Convention  ordonne  Tinsertion  de  cette  lettm 
au  Bulletin. 

—  •  Sur  le  rapport  d'un  membre,  au  nom  du  co 
mité  des  secours  publics,  la  Convention  nationale 
décrète  que  la  trésorerie  nationale  paiera,  sur  le  vu 
du  présent  décret ,  à  la  citoyenne  Penou ,  femme 
Hy  ver ,  pour  elle  et  ses  enfants,  la  somme  de  3,000  li- 
vres à  titre  de  secours,  imputable  sur  les  arrérages 
de  la  pension  de  2,700  liv.  dont  son  mari  était 
pourvu. 

«Le  présent  décret  sera  imprimera  Bulletin  de 
correspondance.  • 

—  «Sur  la  proposition  d'un  autre  membre,  la  Con- 
vention nationale,  après  avoir  entendu  la  lecture 
d'une  lettre  du  représentant  du  peuple  Blutel,  com- 
missaire dans  les  ports  de  La  Rochelle  ,  Rochefort^ 
Bordeaux ,  Bayonne  et  ports  adjacents ,  datée  de 
Rochetort  le  23  nivôse;  copie  du  procès-verbal 
dressé  à  bord  du  navire  te  Concienso^  a  La  Rochelle; 
l'arrêté  pris  par  ledit  représentant,  décrète  que  tou- 
tes ces  pièces  seront  insérées  au  Bulletin  de  corres- 
pondance ,  et  approuve  l'arrêté  par  lui  pris  le  23  ni*^ 
vose  dernier,  dont  la  teneur  suit  : 

AU   NON  DU  PEUPLE  FRANÇAIS. 

Blutel,  représentant  du  peuple  dans  les  ports  de  La 
Rochelle,  Roche  fort,  Bordeaux,  Bayonne  et  ports 
adjacents,  atur  habitants  des  départements  de 
l'Ouest ,  connus  sous  le  nom  de  rebelles  de  la 
Vendée ,  condamnés  aux  fers  et  détenus  à  Ro- 
che fort, 

Rochcfort,  le  S3  nivôse.  Tan  Sa  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

•  Quels  effets  cruels  un  moment  d'égarement  a 
produits!  de  combien  de  maux  n'a-t-il  pas  été  la 
source  !  Jetez  un  coup  d'œil  sur  ce  qui  s'est  passé  ; 
voyez  vos  campagnes  abreuvées  de  sang,  vos  sillons 
jonchés  de  cadavres,  des  frères  se  déchirant  impi- 
toyablement ,  des  plaines  fertiles  ne  présentant  plus 
que  l'image  odieuse  de  la  stérilité,  la  disette  ou  la 
mort  s'offrant  sous  chacun  de  vos  pas;  vos  femmes, 
vos  mères ,  vos  sœurs,  vos  enfants  errant  de  cam- 
pagne en  campagne ,  sans  ab^i ,  sans  repos ,  tour- 
mentés sans  cesse  par  la  crainte  de  la  mort  qu'ils 
sont  réduits  à  invoquer,  ou  par  les  horreurs  de  la 
famine  qui  les  menace  de  toutes  parts  :  voilà  le  ta- 
bleau déchirant  de  la  position  de  votre  pays. 

■  Il  est  temps  enfin  qu'il  disparaisse  :  il  est  temps 

3ue  la  France,  victorieuse  partout,  ne  compte  plus 
'ennemis  dans  son  sein  ,  que  chaque  Français  ne 
voie  autour  de  lui  que  des  amis.  11  est  temps  que 
votre  agriculture  se  ranime,  que  vos  manufactures 
refleurissent ,  que  votre  populaftion  se  rétablisse  ;  il 
est  temps  que  votre  repentir  apprenne  à  l'Europe 
que  si  les  Français  peuvent  un  moment  être  égar&, 
la  voix  de  la  patrie  n'est  pas  pour'cela  éteiiUe  dans 
leurs  cœurs.  La  Convention  nationale ,  généreuse 
comme  la  nation  qu'elle  représente,  oublie  vos  fau- 
tes et  vous  pardonne  :  vous  êtes  libres...  Allez  dire 
à  vos  concitoyens  que  la  justice  n'est  plus  un  vain 
mot,  que  la  vertu  n'est  plus  une  chimère  ;  dites-leur 
que  ce  n'est  pas  en  vain  que  la  Convention  natio- 
nale a  proclamé  une  amnistie;  que  sa  parole  est  sa- 
crée, et  qu'elle  ne  se  joue  point  de  ses  serments; 
dites-leur  que  c'est  au  moment  où  une  armée  for- 
niidable  est  rassemblée,  où  des  troupes  aguerries  et 
disciplinées  sont  en  campagne ,  où  les  mesures  les 
plus  sûres  sont  prises ,  où  les  foudres  nationales  an- 
noncent la  vengeance  d'un  grand  peuple,  que  c'est  à 
ce  moment  qu'elle  rappelle  au  sein  de  la  patrie  des 
Français  égarés ,  qu'elle  oublie  leurs  erreurs  et 
qu'elle  pardonne.  Vous  êtes  repentants,  vos  ser- 
ments sont  sincères  ;  je  ne  vois  plus  en  vous  que  des 


318 


frères,  des  amis  de  tèr^ptibliqne,  qui  la  serviront 
avec  zèle  ;  allez  donc  par  votre  présence  convaincre 
de  la  sincérité  de  l'amnistie  ceux  qui  pourraient  en- 
core conserver  de  la  méfiance  ;  allez  dire  à  tous  vos 
concitoyens  qu'il  me  tarde  de  leur  donner,  au  nom 
du  peuple  français,  le  baiser  de  paix  et  de  fraternité 
que  je  vous  oflre  en  ce  moment. 

«  Le représcniant  du  peuple,  convaincibque c'est 
remplir  le  vœu  de  la  Convention  nationale  que  de 
presser  un  acte  de  justice  qu'.elle  a  déciété  ; 

«  Considérant  qu'il  est  bon  de  prouver  à  tous  les 
honmiesque  la  méliance  pourrait  encore  arrêter  que 
l'amnistie  promise  par  la  Convention  nationale  n'est 
point  un  vain  nom,  arrête: 

•  Les  citoyens  connus  sous  le  nom  de  brigands 
ou  rebelles  de  la  Vendée,  condamnés  aux  ierset 
détenus  an  bagne  à  Rochefort,  seront  mis  sur-le- 
champ  en  liberté. 

•  Le  prosent  arrêté  sera  imprimé,  affiché  et  envoyé 
aux  administrations  des  départements  de  la  Loire- 
Inlérieure,  de  la  Vendée,  des  Deux-Sèvres  et  de 
Maine-et-Loire ,  chargés  de  le  faire  connaître  aux 
districts  de  leurs  arrondissements.  • 

Maurk  :  Je  vous  proposais  hier,  au  nom  du  co- 
ïùjié  de  salut  public ,  d'envoyer  en  Hollande  les  re- 
présentants du  i)euple  Johannot  et  Cochon.  On  nous 
observa  que  Johuniiut  était  de  la  commission  des 
Vingt-et  Un.  Jcvous  propose,  i)our  le  rcuîplacer,lc 
cil(»yen  Ramel. 

La  Convention  décrète  que  les  représentants  du 
peuple  Hamel  et  Cochon  se  rendront  eu  Hollande. 

DuuEM  :  Je  demande  que  ces  représentants  soient, 
comme  les  autres ,  représentants  près  l'année  dn 
ISnrd. 

Plusieurs  voix  :  L'ordre  du  jour  ! 

Lesage-Senali^t  :  Je  demande  s'ils  y  vont  comme 
ambassadeurs. 

"•  :  Cette  question  prouve  combien  les  Jacobins 
sont  profonds  politiques. 

Roux-Faziixac  :  On  sent  bien  qu'un  représentant 
du  peuple  français  ne  peut  être  etivoyé  en  ambas- 
sade. Je  demande  le  manitien  du  décret. 

Le  décret  est  maintenu. 

Mareg  :  Hier  nous  vous  proposâmes  d'envoyer 
auprès  de  l'armée  d'Italie  les  représentants  du  peu- 
ple Poultier  et  Mathieu. 

DuHEM  :  Dites  donc  en  Italie.  (Murmures.) 

Marec:  Le  comité,  s*étant  aperçu  que  Mathieu 
était  sorti  depuis  moins  d'un  motô  du  comité  de 
sûreté  générale ,  m'a  chargé  de  vous  demander  si 
vous  voulez  maintenir  sa  nomination,  ou  le  faire 
remplacer  par  un  autre.  (Oui ,  oui.'  il  faut  exécuter 
le  décret.)  Je  propose,  en  conséquence,  d'envoyer  à 
sa  place  le  cito^i'eu  Beflroy. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

DuHEM  :  Lors(]u'un  renrésentant  croit  devoir  à  sa 
conscience  de  faire  des  observations ,  on  lui  coupe 
la  parole.  (Violents  murmures.  )  Je  déclare  que  ,  si 
vous  admettez  la  nomenclature  que  le  comité  vous 
propose  ,  vous  pouvez  faire  une  chose  très-dange- 
reuse. Bientôt  on  dira  aussi  ;  Il  esl  représentant  en 
Espagne ,  en  Catalogne ,  dans  la  Belgique,  etc.,  etc. 
(Murmures)  Si  je  n  ai  plu^  le  droit  de  parler,  je  me 
tais,  mais  le  peunle  le  saura. 

Bentadoi.e  :  Il  me  semble  que  ,  du  moment  où 
vous  dites  qu'un  député  esl  envoyé  en  qu.ililé  de  re- 
présentant au  peuple  en  Uollande,  il  peut  lairc  dans 
cette  contrée  tout  ce  qu'il  croira  nécessaire  au  nom 
du  peuple  français. 

Dlhem:  C'est  clair. 

Bentarole  :  Pour  éviter  rincerlitudc  que  cette  dé- 
nomination peut  ap|)orter  dans  une  mission  aussi 
importante,  et  sur  laquelle  l'Europe  a  les  yeux  fixés, 


je  voudrais  queces  représentants  fus.^ent  mis  auMig 
de  ceux  envoyés  près  l'armée  du  Nord. 

Plusieun  voix  :  L'ordre  du  joUr  ' 

L'assemblée  passe  à  l'ordre  du  jour. 
•  DuB£M  :  Je  demande  qu'on  remette  ma  proposi- 
tion aux  voix.  Je  sais  pourquoi  j'ai  fait  cette  obser- 
vation ;  on  en  sentira  plus  tard  la  ronséquence.  Sou- 
venez-vous  qi)e  le  premier  pas  de  Du  mouriez  rebelle 
fut  de  s'intituler  le  général  de  la  Belgique,  Je  ne  tli*» 
pas  cela  pour  faire  aucune  allusion  à  mes  collègues, 
mais  dans  une  républi(|ue  les  expressions  ont  plus 
d'importance  qu'on  ne  croit. 

Richard  :  Du  moment  qu'une  dénomination  peut 
porter  ombrage  à  quelqu'un,  il  ne  faut  pas  l'adopter. 
.  DuHEM  :  Nous  sommes  tous  égaux  ici  et  nous 
avons  tous  le  droit  de  p.irler. 

Gaston  :  Le  droit  de  faire  la  paix  appartient  h  la 
Convention  seule. 

Richard:  Jen'aipaseu  pourobjetd'indiquer  le  plus 
ou  moins  çrand  nond)re  de  ceux  à  qui  cette  expres- 
sion déplaît  ;  mais  tout  le  monde  doit  sentir  que, 
dans  la  position  où  nous  nous  trouvons  en  Hollande, 
nous  avons  de  grands  intérêts  à  discuter,  et  qu'il 
faut  que  les  représentants  du  peuple  qui  sont  cnar- 
gés  de*  stipuler  ne  soient  pas  contrariés  par  Ta  vis 
d'un  collègue  qui  serait  près  l'armée;  il  faut  de  To- 
nité  dans  une  pareille  négociation.  Je  demande 
(|u'on  efface  le  mot  reprétentarn  en  Hollande^  puis- 
qu'il porte  ombraie  à  quelqu'un. 

André  Dumont  :  Je  en  ^  l'observation  faite  par 
Duhem  fort  juste,  et  je  l'appuie,  non  pour  favoriser 
un  parti...  (Quelques  murmures  dans  une  extré- 
mité de  la  salle.  ) 

DuuEM  :  Je  ne  suis  d'antre  parti  que  de  celdt  de 
ma  conscience  et  des  droits  de  l'homme.  Je  demande 
la  parole  pour  répondre.  -^  Cela  finira  ,  messieurs 
les  gouvernants.  (Violents  murmures.) 

André  Dumom  :  Si  j'avais  eu  intention  d'insulter 
quelqu'un,  je  ne  serais  pas  venu  à  la  tribune  ;  mais, 
je  le  répète,  ce  n'est  pas  pour  servir  Un  parti.  [Mur- 
mures à  l'extrémité.  -^  Duhem  parle  dans  le  bruit. 
—  Il  est  applaudi  de  ceux  q4ii  I  entourent.)  Quand 
on  a  une  bonne  cause  à  défendre,  il  n*est  pas  néces- 
saire d'interrompre  celui  qui  parle;  ie  propose  de 
substituera  l'expression  contre  laquelle  on  réchilte 
celle-ci  :  repréieniant  prê$  de$  arméei  qui  fdnf  tn 
Hollande. 

Celte  proposition  esl  décrétée. 

—  Rouzel  au  nom  du  contité  de  législation ,  pré- 
sente la  rédaction  du  décret  propose  par  Bourdon 
(de  l'Oise),  pour  (aire  rendre  aux  enfônts  et  aux  veut 
ves  des  condamnés  les  effets  qui  leur  appartiennent. 

Comme  ce  projet  contient  plusieurs  articles,  OU 
en  demande  la  discussion  à  trois  jours. 

Bourdon  (de  l'Oise)  insiste  pour  que  le  premier 
article  soit  décrété  de  suite.  —  L'ajournemedtest 
décrété. 

MiuiAVD  :  si  le  sang  des  pères  a  coidésiir  Técha- 
faud  du  crime,  le  sang  des  enfants  a  souvent  coulé 
aussi  sur  les  frontières  de  la  liberté,  et  je  crois  qno 
vous  devez  mettre  une  diftérence  entre  les  Jeunes 
gens  qui  sont  restés  dans  l'inlérienr  et  ceux  qui 
ont  été  combattre  les  ennemis  de  la  patrie.  (Applau- 
dissements.)  J'ai  vu  dans  les  armées  de  la  républU 
3 ne  des  Jeunes  gens  de  Lyon  écrire  à  leurs  pères 
e  ne  point  se  laisser  égarer  par  les  scélérats  qui 
ont  amené  la  ruine  de  celte  ville.  Peu  de  temps 
après,  ils  apprirent  que  lents  pères  avaient  p^ri  sur 
l'échafaud,  et  ils  approuvèrent  la  Convention. 

Je  detnande  que  ie  comité  soit  chargé  d'examiner 
s'il  ne  serait  pas  juste  d*accorder  aux  défenseurs  de 
la  patrie  dont  les  pères  ont  été  condamnés  uue 
pension  sur  les  biens  de  leurs  parents. 


819 


Le  renvoi  estdécréU*. 

Baillell  :  La  nation  a  recueilli  les  biens  des  émi- 
grés et  des  condamnés ,  mais  leurs  créanciers  péris- 
sent de  fa^.  Ils  ne  pourront  rien  recevoir  avant 
(jnc  la  liquidation  ne  soit  terminée ,  et  celte  opéra- 
tion durera  très- longtemps.  Jedemandeque  lesco- 
mités  nous  fassent  un  rapport  sur  les  moyens  It's  plus 
prompts  de  leur  accorder  des  secours  provisoires. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Real  est  chargé  de  la  loi 
que  réclame  Bailleul  ;  la  plus  grande  partie  de  son 
travail  est  fait,  et  l'on  pourra  statuer  dans  une  demi- 
décade. 

Gaston  :  Le  projet  dont  on  nous  parle  est  intéres- 
sant sous  deux  rapports,  sous  celui  de  l'humanité 
et  de  In  fortune  publique.  CitoYeM$«  vous  ne  vous 
occupez  que  de  l'accessoire  de  la  loi  et  non  pas  du 
principal.  Eh  quoi  !  la  nation  sera  toujours  tour- 
mentée pour  savoir  qu'elle  portion  lui  appartiendra 
dans  les  biens  de  ces  scélérats  qui  ont  trahi  leur  pa- 
trie :  il  faut  en  finir.  Je  veux  bien  que  le  pauvre  et 
l'innocent  ne  soient  pas  compris  dans  la  rigueur  du 
décret,  car  vous  n'en  rendez  pas  contre  les  inno- 
cents. Mais  abordons  la  question  franchement;  je 
demande  que,  laissant  de  côté  le  projet  dont  on  vous 
parle,  vous  chargiez  le  comité  de  législatiun  de 
vous  présenter,  pour  arriver  au  même  but,  le  mode 
avec  lequel  vous  attraperez  déGnitivement  les  biens 
de  tous  ces  scélérats ,  qui  appartiennent  à  la  nation. 
Alors  tous  ces  petits  procès  cesseront  ;  alors  leurs 
mères,  leurs  frères,  leurs  soeurs,  tout  le  monde  aura 
sa  portion  ,  une  fois  pour  toutes ,  etdélinitivement. 
Voici ,  collègues ,  ce  qu'on  me  dit  de  lo-is  les  côtés; 
et ,  je  le  répète,  par  ce  moyen-là  ,  l'hypothèque  des 
assignats  sera  bien  connue  ;  et  sons  ce  rapport  il  est 
bien  intéressant  de  s'occuper  du  principal  de  la  loi 
et  non  pas  de  l'accessoire. 

•*•  :  ChazaI  a  été  chargé  par  le  comité  de  présen- 
ter le  projet  de  décret  dont  parle  Gaston ,  et  il  le 
soumettra  à  la  Convention  dans  les  premiers  jours 
de  la  décade  prochaine. 

GéNissiEUX  :  La  liquidation ,  quelque  diligence 
qu'on  y  mette  ,.sera  nécessairement  longue.  Je  crois 

au'il  faudrait  lênr  accorder  provisoirement  ce  qu'ils 
emandent,  en  exigeant  une  caution, 

Bbrlier  :  J'ai  entendu  mettre  en  doute  quelle 
portion  appartenait  à  la  nation  dans  les  biens  des 
condamnés  et  des  émigrés.  Cela  ferait  croire  qu'il 
n'y  a  rien  de  déterminé  à  cet  égard.  Citoyens,  il  n'y 
a  point  de  partage  à  faire  avec  ceux  qui  ont  trahi  la 
patrie;  (eurs  biens  appartiennent  «î'Ia  nation,  il  m'a 
semble  nécessaire  de  relever  cette  erreur. 

Garnier  (de  Saintes)  rappelle  l'état  de  la  question, 
et  demande  que  la  proposition  de  Bourdon  (de  l'Oise) 
suit  adoptée. 

Elle  est  décrétée  ainsi  qu'il  suit  : 

■  La  Convention  nationale  ,  après  avoir  entendu 
Te  rapport  de  ses  comités  de  législation  et  des  ûnaa" 
CCS ,  section  des  domaines ,  décrète  : 

•  Les  linges,  hardes,  bijoux,  meubles  et  effets 
appartenantaux  époux  sur  vivants  ou  aux  enfants  des 
condamnés, ou  à  leur  usage  j<)iirnalier,  leur  seront 
remis  sur  un  simple  état,  sans  délai  et  sans  frais  ;  et 
à  cet  effet  les  scellés  et  sé(iucstres,  s'il  y  en  a,  seront 
levés.  • 

Les  autres  propositions  sont  renvovées  aux  co- 
mités.— La  séance  est  levée  à  quatre  neurcs. 

SÉANCE  DU   9   PLUVIOSE. 

Lktourneur  (  de  la  Mancin»  ) ,  au  nom  du  comité 
militaire:  Citoyens,  la  Convention  nationale ,  en 
décrélaiit,  le  22  frimaire  dernier,  une  augn)entalion 
i\c  cent  olliciers  dans  l'arme  du  génie  ,  a  charffé  son 
comité  militaire  de  lui  présenter  des  vues  sur  l'amé- 


lioration du  service  important  dont  ces  ofRcîer» 
sont  chargés,  et  les  moyens  de  leur  procurer  un 
avancement  convenable.  Je  viens,  en  son  nom,  vous 
soumettre  le  résultat  de  ce  travail. 

Pour  remplir  les  intentions  de  la  Convention  na- 
tionale, le  comité  a  examiné  la  composition  de  ce 
corps,  les  fonctions  qu'il  rempht ,  son  mode  d'avan- 
cement, et  les  traitements  qui  lui  sont  affectés.  Il  est 
résulté  de  cet  examen  qne,  si  l'art  de  la  fortilicatiou 
n'a  pas  fait ,  depuis  Vauban  ,  tous  les  progrès  qu'on 
pouvait  en  attendre ,  si  l'on  a  souvent  méconnu  ou 
négligé  de  faire  usage  des  vastes  ressources  qne  l'on 
en  peut  tirer  ;  si  le  service  des  fortifications  a  été 
souvent  ou  mal  combine  ou  mal  rempli  ;  si ,  enfin  , 
les  dépenses  considérables  qu'entraînent  les  travaux 
extraordinaires  nécessités  par  les  circonstances  ont 
été  infructueuses  ou  démesurées  par  le  défaut  d'une 
surveillance  assez  suivie  ;  ce  mal  qui  peut ,  par  ses 
edets difficiles  à  calculer,  devenir  pour  la  nation 
un  malheur  irréparable ,  tient  essentiellement  aux 
vues  de  l'organisation  de  ce  corps. 

Des  artistes  cultivant  un  art  plus  utile  que  bril- 
lant, pesant  à  la  balance  exacte  du  raisonnement 
tout  ce  que  les  agents  de  la  tyrannie  ne  faisaient 
qu'effluerer ,  ou  décidaient  par  la  senïe  force  du 
pouvoir  et  de  Tinlrigne,  devaient  naturellement  être 
repoussés  et  dédaignés  sous  un  régime  despotique 
et  soumis  aux  préjugés.  Ce  corps,  abandonné  à  lui- 
même,  était  comprimé  dans  tous  ses  ressorts,  et  l'on 
ne  se  ressouvenait  guère  de  son  existence  que  lors 
des  revers  ou  des  besoins  pressants. 

Aujourd'hui  que  la  liberté  doit  étendre  ses  in- 
fluences fécondes  sur  tous  les  arts ,  inspirer  tous  les 
esprits  ,  échauffer  le  génie;  anjourd'hni  que  l'expé- 
rience récente  d'une  guerre  h  mort  de  la  liberté  con- 
tre le  despotisme  a  réuni  toutes  les  opinions  sur  la 
nécessité  des  fortifications  et  conséçiuemment  sur 
l'utilité  des  ingénieurs  militaires,  soit  aux  armées, 
soit  dans  les  places  et  sur  les  côtes ,  le  moment  est 
enfin  arrivé  de  débarrasser  ce  corps  des  entraves 
multipliées  qui  retardent  et  paralysent  souvent  son 
action,  c'est-à-dire  de  le  réorganiser  en  lui  rendant 
les  moyens  d'atteindre  au  but  auquel  il  est  destiné. 
Un  des  viceSqni  a  le  plus  particulièrement  frappé 
votre  comité  militaire  dans  l'organisation  de  ce 
corps ,  c'est  que  les  diverses  fonctions  n'y  sont  nas 
assez  distinctes  et  prononcées ,  et  que  les  emplois 
de  surveillance  et  adminislraiifs  ne  s'y  trouvent  pas 
en  proportion  avec  l'étendue  des  détails  importants 
qui  lui  sont  confiés. 

Le  directeur  des  fortifications  chargé  de  la  partie 
de  l'art  de  régler  les  différents  services  de  la  comp- 
tabilité ,  des  relations  avec  toutes  les  autorités ,  doit 
tout  voir  par  lui-même,  tout  diriger  ;  mais  l'éten- 
due de  ses  fonctions  le  force  à  n'en  remplir  qu'une 
partie  ou  à  s'en  rapporter,  pour  la  plupart,  à  des 
agents  inexpérimentés.  Les  inspecteurs,  ayant  la 
cinquième  partie  des  frontières, des  côtes  maritimes, 
des  îles,  à  inspecter,  ne  peuvent  qu'entrevoir  les 
objets  qni  demandent  la  plus  sérieuse  attention. 

Les  fonctions  des  autres  ingénieurs  ne  sont  pas 
fixées  et  assez  distinctes  ;  celles  surtout  qni  élahlis- 
sent  la  surveillance  ne  sont  pas  assez  multipliées 
pour  assurer  l'exactitude  du  service  et  la  bonne  exé- 
cution des  ouvrages. 

Ponr  faire  disparaître  un  inconvénient  aussi  gravc^ 
nous  vous  proposerons  l'augmentation  du  nombre 
des  emplois  de  surveillance,  en  distinguant  et  précis 
sant  lenrs  fonctions  respectives. 

Un  autre  défaut  non  moins  essentiel  tient  à  ce 
que  des  emplois  très-importants ,  sous  le  double 
rapport  de  la  sûreté  de  la  réi)ublique  et  de  l'emploi 


320 


le  plus  économique  de  sesGnancc.s,  se  trourent  sou- 
Yciit  entre  des  mains  peu  capables;  ces  emplois 
exi(;rnt  une  grande  réunion  de  lumières  appuyée 
par  Texpérience ,  une  moralité  à  toute  épreuve ,  un 
zèle  soutenu,  et  une  activ  itê  constante  :  on  ne  peut 
sans  danger  les  conticr  indifféremment  à  celui  que 
Tancienneté  y  porte ,  et  qu'elle  ne  lui  procure  sou- 
vent que  lonque  Tâge  ou  les  inlirmités  ont  glacé 
son  zèle  ,  obscurci  ses  lumières ,  amorti  ou  anéanti 
son  activité. 

Les  chefs  de  ce  corps  sont  les  pivots  sur  lesquels 
roulent  toutes  les  opérations  et  \m  service  relatif  à  la 
défense  t\ts  frontières;  c'est  également  d>ux  que 
dépend  le  bon  ou  mauvais  emploi  des  fonds  qui  y 
sont  annuellement  destinés  ;  s'ils  ne  sont  pas  environ- 
nés delà  confiance  publique,  s'ils  n'ont  pas  acquis 
dans  leur  carrière  ces  grandes  vues  militaires ,  cette 
instruction  profonde ,  cette  science  des  vrais  princi- 
pes et  de  leur  juste  application  en  même  temps  que 
cet  art  du  commandement  propre  à  exciter,  encou- 
l'agir,  juger  et  surveiller  tous  les  agents  ;  s*ils  n*ont 
plus  la  faculté  de  se  porter  à  l'instant  dans  tous  les 
lieux  où  leur  présence  est  utile ,  toute  une  frontière 
est  négligée,  abandonnée;  les  barrières  de  i*£l»t 
construites  à  grands  frais  s'ouvrent  devant  Tennemi; 
les  finances  sont  dilapidées,  un  mauvais  esprit 
gagne  les  agents  inférieurs,  et  Tart  rétrograde  ;  car 
Faulorité  placée  en  des  mains  peu  digues  de  la 
science  la  comprime  et  ôte  à  Tâge  fertile  en  concep- 
tions tout  le  ressort  dont  il  est  susceptible. 

11  résulte  de  là  que  les  emplois  d*insj)ecteurs  dans 
ce  corps  ne  doivent  jamais  être  conférés  par  droit 
seul  d'ancienneté ,  mais  que  celle-ci  doit  cependant 
concourir  dans  \eà  motifs  du  choix ,  comme  portant 
avec  elle  des  preuves  d'expérience ,  et  annonçant  la 
maturité  convenable  aux  fonctions  administratives. 

Il  faut  donc  déterminer  un  mode  d'avancement, 
tel  que  l'ancienneté  et  les  services  de  guerre  soient 
récompensés  ;  mais  que  les  fonctions  principales  ne 
soient  exercées  que  par  ceux  qui  seront  jugés  les 
plus  capables  de  les  remplir. 

Les  mesures  qui  vous  sont  présentées  nous  ont 
paru  satisfaire  à  ce  double  objet;  elles  remplissent 
aussi  celui  de  mettre  l'ingénieur  aux  armées  on 
dans  les  forteresses  à  sa  vraie  place,  par  le  rang  qu*il 
occupera  dans  l'échelle  et  la  niérarcme  militaire. 

L'ingénieur  est  en  eflet  l'âme  des  opérations  pro- 
pres de  la  défense  6u  de  Tattaque  ;  les  moyens  «|u*il 
acquiert  par  la  méditation  des  principes  théoriques 
et  pratiques  de  son  art  tendent  a  la  conservation 
des  troupes  en  même  temps  qu'ils  augmentent  puis- 
sannnent  leur  force.  Aussi,  par  la  nature  de  ses  loue- 
tions  et  son  instruction  variée  et  étendue,  il  est  tou- 
jours employé  en  chef  dans  sa  partie ,  et  se  trouve 
être  très-souvent  le  guide  et  le  conseil  dans  les 
antres.  Cependant,  après  trente  années  de  service, 
d'étude  et  d'expérience,  on  le  voit  souvent  com- 
mandé par  un  novice  de  vingt  à  vingt-cinq  ans 
d'ilge ,  revêtu  d'un  grade  supérieur  dans  une  autre 
arme;  dès  lors  ses  talents  deviennent  nuls ,  son  ac- 
tion se  paralyse ,  et  si ,  comme  cela  est  arrivé  son- 
vent,  il  surmonte  tout  sentiment  personnel,  en 
communiquant  néanmoins  le  fruit  de  ses  combinai- 
sons mûries  par  l'étude  et  l'expérience,  il  n'en  ré- 
sulte pas  moins  que  les  prétentions  vaines  et  légères 
de  l'ignorance  ne  repoussent  que  trop  souvent  les 
idées  saines  et  utiles  qui  lui  sont  offertes.  La  sûreté 
et  les  intérêts  de  la  république  sont  alors  compro- 
mis, et  l'instruction  qu'elle  procure  à  ses  agents 
reste  impuissante. 

C'est  donc  à  juste  raison,  et  c'est  pour  le  seul  in- 
térêt de  la  patrie  que  nous  vous  proposons  de  don- 
ner aux  ingénieurs  militaires  un  rang  plus  assorti  à 


leurs  fonctions  et  à  Fautorité  qu'il  couviept  de  1 
conGer,  en  raison  de  leur  instruction.  As^imiléspai 
leurs  fonctions  aux  ofliciers  de  l'état-ma^r ,  ils  doî« 
vent  l'être  aussi  pour  le  rang  qu'ils  occupent,  afin  de 
pouvoirlesexercer  dans  toute  leur  plénitude,  en  pro- 
portionnant néanmoins  les  grades  qui  doivent  leur 
être  affectés  à  la  seule  utilité  et  au  bien  du  service. 

Il  est  temps  de  réaliser  le  principe  qui  venlqoe, 
dans  la  république  les  talents,  la  capacité,  l'instruc- 
tion et  la  moralité  soient  seuls  appelés  aux  fonctions 
supérieures  et  seuls  investis  de  l'autorité  ;  et  c'est 
consiM|uemment  à  ces  principes  que  nous  vous  pro- 
poserons dans  peu  de  donner  à  récole  pratique  du 
génie  militaire  toute  la  latitude  convenable,  afîu  de 
pouvoir  tirer  de  ce  corps  des  officiers  instruits  pour 
être  employés  dans  le^  autres  armes ,  mais  surtout 
pour  le  commandement  des  places  de  guerre  ;  car 
qui  saura  mieux  connaître  les  ressources  d'une 
place,  et  qui  les  fera  mieux  valoir,  si  ce  n'est  celui 
qui  la  projette ,  la  construit ,  en  trace  Tattaqoe  et 
la  défense,  détermine  ses  besoins  et  les  divers  serW- 
ces  qui  lui  sont  relatifs? 

Citoyens,  le  projet  de  décret  qui  vous  est  présenté 
se  borne  en  ce  moment  à  établir  dans  l'arme  du  gé- 
nie, soit  aux  armées,  soit  dans  les  places,  une  pro- 
portion indispensable  entre  les  emplois  de  surveil- 
lance et  les  vastes  détails  qu'il  importe  de  suivre 
avec  la  plus  scrupuleuse  attention. 

Lorsque  les  triomphes  de  nos  armées  augmentent 
si  rapidement  le  nombre  des  places  fortes  et  reten- 
due des  frontières,  rien  n'est  plus  instant  que  de  po^ 
ter  sur  tous  les  points  cette  surveillance  active  qui, 
procurant  à  la  république  des  ouvrages  mieux  com- 
binée et  plus  utiles,  rendra  les  frontières  impénétra- 
bles à  de  nouveaux  efforts  de  la  tyrannie.  C  est  d'a- 
près ces  considérations  que  le  comité  militaire  m*a 
chargé  de  vous  proposer  le  projet  de  décret  suivant* 

Letoiiriienr  lit  un  projet  de  décret  qui  est  adopté* 
(Nous  le  donnerons  uemain.)     (La  suiu  dewuiin.) 

N.  B,  —  K  la  suite  d'une  discussion  élevée  sur  la 
motion  de  Lecointre  (de  Versailles) ,  la  Convention 
a  décrété  que  Lacroix ,  auteur  du  Spectateur  proim- 
çaiSy  serait  traduit  au  tribunal  révolutionnaire,  au 
lieu  de  l'être  au  tribunal  criminel  du  département 
de  Paris. 

—  La  Convention  a  décrété  en  outre  que  Duhem, 
qui  a  dit  que  le  royalisme  et  l'aristocratie  triom- 
phaient,  serait  envoyé  à  l'Abbaye  poiur  trois  jours* 


Au  rédacteur. 


Paris,  pluviôse.  Tan  3*  de  la  république  fraocaiae» 
uoe  et  indivisible. 

«  J'ai  lu ,  citoyen,  dans  le  Moniteur^  séance  du 
7  pluviôse,  que  j'avais  dit  :  «  Les  administrations  de 
I  Marseille  sont  on  ne  peut  plus  mal  composées  ;  • 
I  que  •  les  membres  qui  les  composent  m'ont  dit,  etc.* 
I  Le  rédacteur  s'est  trompé  ;  j'ai  dit  qu'elles  étaient 
i  on  ne  peut  plus  mal  composées  à  mon  arrivée  à 
;  Marseille ,  et  que  les  membres  qui  les  composaient 

alors  m'ont  dit,  etc. 
I       «  Je  t'exhorte  à  faire  rectifier  cette  erreur  dans  h 
Moniteur  qui  suivra  celui-ci. 

•  Salut  et  fraternité.  Auguis.  > 


Lycée  dei  Arts, 


Attendu  la  rigueur  de  la  saison  et  le  renouvelle- 
ment général  de  la  garde  nationale ,  fixé  au  décadi 
10  pluviôse  ,  la  séance  publique  du  directoire,  qui 
devait  avoir  lieu  ce  jour-là,  est  remise. 

L'Annuaire  du  Lycée  et  le  nouveau  prospectus  dcs 
çouscripuoiis  paraîtront  le  l«r  ventôse. 


GAZETTE  ITIONALE  »»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N®  131.        Primidi  11  Pluviôse  j  l'an  8».  {Vendredi  80  JAtuViBtt  1795,  ^itiix  ttyU.) 


POLITIQUE* 

ALLEMAGNE. 

//oiiav.  SO  janvieti  **  Le  comiDiiDdttnl  de  la  forteresse 
de  tlheinsield  avait  éié  condamné  à  mnrt  par  jugement 
d'un  conseil  de  guerre  tenu  à  Ziegeiiheio,  en  date  du  19 
déetmbre.  Le  landgrave  de  Uesse^Cassel  a  commué  sa 
peine  en  une  prison  perpétuelle. 

Le  commandant  en  second ,  qui  avait  été  aussi  con- 
damné à  mort  par  le  conseil  de  guerrei  a  obtenu  sa  grACe^ 
et  sera  détenu  pendant  quinte  ans. 

D^autres  officiers  ont  été  condamnés  à  cinq  et  trois  aot 
de  prison ,  et  à  d^aytres  peines. 

—  Les  Français  .se  sont  baraqués  devant  Majence: 
cette  mesure,  oéoessilée  par  la  rigueur  de  la  saison,  les  a 
forcés  de  laisser  peu  de  monde  au  village  de  Moubacb  « 
qui  auparavant  était  garni  de  troupes. 

—  Il  7  a  maintenant  à  Mayence  deux  roitle  six  cents 
hommes  du  corps  des  Séressans;  ou  en  attend  encore  six 
cents. 

ITALIE. 

Géne$^  SO  ianvier.  —  La  maisori  btientano  à  fbit  ban« 
queroute.  CSetle  maisod  a  dans  la  Hongrie  des  possession! 
considérables  que  la  éoor  de  Vienne  a  fait  s{*quéstrer, 
pour  sMndemniser  eu  partie  des  grandes  perles  que  liii 
cause  éetteiaiililè. 

—  On  assure  que  le  voyage  du  comte  Florentin  CarletU 
à  Paris  a  pour  but  de  négocier ,  de  la  part  du  grand  due 
de  Toscanet  un  aete  de  neutralité  avec  la  république  fran- 
çaise. 

—  L*atffl6e  française  d*Italie  continue  dé  se  renfbreeh 
par  des  divisions  de  celle  des  Alpes.  On  dit  qne  le  général 
Scbérer  j  est  attendo. 

—  Beaucoup  de  commissaires  français  se  répendent 
dans  les  villes  de  la  Rivière ,  pour  acheter  des  fourrages. 
Il  est  AouVeileiilent  arf  iTé  à  Port-&f  aurltié  et  fi  Saint-Rème 
deux  mille  huit  cents  Fradçais. 

-^  Un  eonf oi  anglais  est  dernièrement  arHfé  ft*Balstia. 
Quelques  bâtiments  sortis  de  Corse,  ont  annoncé  que  Ta- 
mirai  Hotham  devait  reprendre  sa  fcroisière  aux  Iles  d*Byè- 
res,  pour  observer  les  mouvements  de  Kescadre  de  Toulon, 
qui  est  sur  le  point  de  mettl^  à  la  voile. 

—  On  vaisseau  danois,  arrivé  de  IVtarseillet  où  II  a 
fendu  avantageusement  sa  cargaison  de  poisson  salé,  aap«< 
pris  quil  était  entré  eii  peu  de  joers  dans  ce  port  plus  de 
cent  bâtiments  chargés  de  grains  et  de  thrrfSi  que  tout  s'f 
était  bien  vendu,  et  comptant,  et  que  cette  aflQuenoe  de 
denrées  en  avait  fait  baisser  le  prix.    ^ 

PAYS-BAS. 

BntanUBêt  tel  pluviôse.  •—  Il  vient  d'arritef  dans  cette 
ville  un  corps  de  cavalerie  destiné  à  f  prendre  des  quar- 
tiers d*hiver.  Différents  corps  de  trout>es  ont  passé  succes- 
sivement par  ici  I  d*où  elles  se  rendent  â  Valenciennes.  On 
assure  que  de  là  elles  seront  envoyées  stir  les  eôtes  de  la 
ci-devant  Normandie. 

—  Les  trev aoi  entrepris  pour  la  réduction  de  Latem-i 
bourg  viennent  d*étre  achetés}  les  retranehifments  sont 
garnis  de  troopeset  de  batteries  ;  eette  forteresse  est  ei^ 
trémement  resserrée.  La  garnison  renouvelle  ses  serties  i 
elle  en  a  fait  une  très-vive  le  1*'  de  et  iHols  t  mais  elle 
a  été  repoussée  atee  perte. 

—  On  a  célébré  ici  «  dans  le  temple  de  la  Raison ,  sur 
^invitation  du  magistrat,  l'anniversaire  dn  tl  janvier* 


VARIÉTÉS. 

THÉÂTRE  DE  LA  RUE  FEYDEAU. 

Les  artistes  de  la  ci-devant  Comédie-Française  ont  dé<* 
bute  à  ce  théâtre  octidi  dernier*  L'empressement  de  voir 

t^  Série. -^  TomeX. 


des  talents  si  précieux,  et  de  la  |)rivalion  desquels  aucun 
àutilî  spettsele  ne  pouvëli  dédommager  les  adiateurs  de 
la  vraie  comédie,  avait  attiré  une  afltuence  considérable  dé 
spectateurs.  Oti  se  rapjlellera  toUjodrs  quMls  Ont  été  for- 
més à  Técple  de  ces  grands  maîtres  qui  ont  porté  la  glpil-e 
de  nôtre  tbéfltrë  au  tilus  haut  degrC  de  splendeur.  On  don- 
nait la  Mort  de  César  et  la  Surpriié  de  tÂmour^  La  tra- 
gédie de  Voltaire  a  été  jotiée  aveë  une  grande  supériorité. 
Larive  a  déployé  toute  l'énergie  d'ùrt  républicain  qui  con- 
spire pour  la  liberté,  l«nt  le  délire  d*un  fils  obligé  de  punir 
un  tyran  daiis  son  pèrei  Saint-Prix  a  joué  le  rôle  de  Cassius 
avec  cette  profondeur  d*un  artiste  qui  connaît  et  qui  a  mé- 
dité les  beautés  stolques  de  ce  personnage  dans  le  sublime 
Jules-Céêar  de  Shakspeare.  Tous  les  autres  rOles  ont  été 
rendus  avec  autant  de  vérité  que  de  chaleur^  par  8ainl« 
Pbal,  Naudel,  etc.  Euire  les  deux  pièces  on  a  jeté  sur  le 
théâtre  des  couplets  par  lesquels  on  félicitait  les  artistes 
fiançais  d'être  rendus  aux  plaisirs  et  à  raduiiration  du  pu- 
blic. Ces  couplets  ont  été  très-bien  chantés  par  Gavaux,  et 
accueillis  avec  enthousiasme  de  tous  les  ipefctateurs.  Cet 
enthousiasme  a  été  à  son  comble  lorsque,  dans  la  Surprise 
de  V Amour ^  on  a  vu  paraître  COtitat,  Devienne,  Mule  , 
Doiincourt,  dont  le  jeu,  au-dessus  de  tous  les  éloges,  a  été 
parfaitement  secondé  paÉ*  Caumont.  L'acquisition  de  cet 
artiste  ne  dépare  point  cette  Société,  unique  dans  son 
genre.  Tous  les  acteurs  ont  éié  rëdëniandés  à  la  fin  du  spec- 
tacle. Ceux  qui  avaient  joué  daris  la  coméd  e  ont  paru  : 
de  nouveaux  cris  redemandaient  les  acteurs  de  la  tragédie, 
t  Nous  ne  viendrions  pas  seuls  «  a  répondu  Contât,  si  oot 
camiirades  n'étaient  partis.  • 

Il  est  bon  d'ajouter  une  observation  qui  répondfa  aui 
déclamations  de  ceux  qui  prétendent  que  Ton  Ta  prêcher 
et  soutenir  le  royalisme  et  raristocratie  dans  les  spectacles. 
C'est  que,  si  les  nombreux  spectateurs  qui  assistaient  à 
eette  représentation  ont  aptilaudi  sTéc  trabstiort  ft  toutes 
les  appiléations  contre  le  règtatj  de  sang  et  de  la  terreur, 
ils  ôiit  aaauifeslé  le  même  enthousiastne  pour  les  màxitnes 
de  la  liberté}  Tborretir  de  la  tyrannie  s*est  montrée, 
tomme  celle  de  la  barbarie,  par  des  acclamations  univers 
selles,  et  par  des  cris  mille  fbis  répétés  de  ttivê  ta  républi-i 
que!  tive  la  Convention  !  Non,  jamais  lea  Parisiens,  qu'on 
veut  désunir  d*aveç  leurs  frères  qui  font  trembler  l'Europe 
par  la  continuité  de  leurs  victoires,  et  qui  préparent  à 
l'histoire  du  berceau  de  la  république  des  pages  si  glorieu- 
ses, ne  souffriront  ni  des  rois  ni  des  dominateurs. 


CONVENTION  NAtiONALE. 

Arrêté  du  eotnilé  dé  lëffiHaliàn,  dit  5  ptuvioiBy  Van 
S  de  la  république  française^  une  et  indivisible. 

m  Le  eomité  de  législation  arrête  : 

«  Art.  I*'.  Les  pétitions  présentées  pour  obtenir  des 
arrêtés  en  exécution  de  la  loi  du  i9  tiifose  dernier,  •  qui 
autorise  le  comité  de  législation  à  statuer  sur  la  mise  en 
liberté  de  tous  les  citoyens  qui  ont  été  condamnés  à  la 
peine  de  mort,  et  qui  oe  sont  pas  exécutés,  et  ceux  con- 
damnés à  d'autres  peines  que  celle  capitale,  pourvu  que 
les  jugements  ne  soient  causés  ni  pour  délits  ordinaires , 
tii  pour  fait  dé  f-oyalisme,  seront  distribuées,  et  les  rapports 
en  seront  faits  en  la  manière  ordinaire. 

n  IL  toutes  les  pièces  produites  seront  cotées  et  para- 
phée^ par  le  rapporteur,  et  mentionnées  dans  l'arrêté, 
dont  la  rédaction  Sera  toujours  conforme  au  modMe  ci* 
après.  Elles  demeureront  annexées  à  ta  minute  de  l'arrêté» 

«  III.  Les  arrêtés  seront  signés  par  neuf  membres  au 
moins;  il  ne  pourra  en  être  délivré  d'eipédilton  tftant 
qu'ils  soient  inscrits  au  ltgisti«;  il  sera  lait  Ibeutionde 
cette  inscription. 

•  lY.  LM  arrêtés  settint  envoyés  dans  lés  fingt-quatre 

heures  à  la  commission  des  administrations  civiles,  policé 

1  et  tribunaux,  qui  est  chargée  de  leur  exécution  ;  les  par<> 

41 


322 


tes  nrtèneSMCt  pcviToat  ■i'Miiini  etîf^des  apéditioH. 
•  T.  Le  jHtMMlarrtiésera  îBsért  ao  BaUetia  deosm»- 


FbtWimU  du  mrrétésm 

Le  «Mile  de  Ksid»tm .  ddibèrvit,  en  vcrto  de  b  M 
éi  Sf  ■httie,  de  Isa  S. 
Va   1*  la  pêiitioB  ftésmèt  le.^-  par.^-  fû  de- 


S*  L'eipéfitioa  e«  ferme  da  jagcaeat  icada  le—^ 
pir^...  qui  maïUaiDe  à...^ 

S*....  Toa'fs  lesdito  pièces  cotées  el  paiafhées  par^^ 
Tun  de<  amabref  da  ny^f, 

CtmsidénBL.... 

ArKie  qae  le  d..»^  dëteaa  dm  la  Biim  d*arrM 
dr.^.^  en  eiécaïkm  da  jogeaenl  de^^..^  sera  wùt  ea  li- 
bené  à  i'exhibitioB  da  preataL. 

La  cosBîeàoa  des  adaiais4ratioascinks«  poliee  tt  trî- 
taaaax,  est  ckaifée  de  reiécaliaa  da  prént  anHé. 
Sàfsé  les  avBiIrcs  da  eemùié  et  UgitUticm* 


SmV  Ji  Là  SÉâXCS  DO  9  PUTIOSE. 
Préssdeacc  de  Jttfrcre. 

LelouRiror  (df  la  Manche)  propose,  à  la  snilf  de 
son  rapf»o;t  sur  les  c^ffiders  du  ^nie,  un  projrl  de 
dêcrrt  ccofonne  aux  bases  qu'il  a  déreloppees. 

MiLBâr»  :  Le  drcrv  t  qui  Toa«  est  proposé  au  non 
du  coaite  militaire  est  d*one  haute  inportanoe  :  il 
s'açit  KÎ  de  donner  »  corps  do  renie  une  orsanisa- 
tion  pli»  utile  au  semce  niilitaire,  el  en  niéme 
lenipf  plus  aranta^use  aux  of6ciers  de  cet!e  anre, 
qui.  rrstrs  6dries  a  la  patrie  «  root  servie  arec  un 
zè>  ififatigable. 

Ce<t  aux  iDgênieiirs  Bilitairvs  que  noas  derons 
rasê^îoration  des  fortificatioDS  de  nos  places  ci  de 
Bcts  6t)nîière$;  ce  sont  eux  qui  sourent  ont  peiiec- 
tionsé  les  talents  naturels,  mais  inexpénneotcs  de 
plusieurs  de  nos  généraux  :  le  g^iiie  mhlaire  est  en 
qselque  sorte  Vàmt  des  années:  et  souvent  les  in- 
génieun  eu  cbei,  le  coapas  à  la  ma  n.  orl  d:nsé 
arec  modestie  la  marche  triomphante  des  défenseurs 
de  la  r«^t^iqiie  :  mais  c'est  dans  ce  nK^OKnt  où  les 
Yîct-^irrs  él<«noante$  et  rapides  des  rêpnbi  caias  rien* 
neet  dr  donner  oce  éleudce  immense  à  nrs  V-^'S 
de  défense  el  d'attaque:  c'est  dans  ce  ::.  ja.<ct.  da- 
je.  que  la  ConienlJ<*n  national  doit  au^nh  o!er  Its 
iik5s;«cleurs  sxreillants  et  les  cheis  d'un  corps -iuct 
fes  >err  ices  SK^i.t  p2us  que  jamas  iaiiçp'^risaUe^  ^ox 
trk  m|>b<!S  de  la  rrp4.biique.  C'est  le  salut  de  la  pa- 
trie, et  la  jnslace  que  tous  devei  aux  dfiners  de 
cette  annf  re5|fettâb!e,  qni  demandent  de  ixms  l'a- 
doption du  décret  qui  vons  est  présente.  fOn  a|^ 
plauviiL) 

J<  '5rmarde  donc  que  le  prc^t  de  dmet  pfVse jV 
par  Let%:-Qmeur  soit  ajcuiné  à  la  pins  prochaÎLe 
seïoce. 

ÎJ^  Gi««niîc«  dfctv^e  Hf Tinda fnîet de dèCRt, 

et  1  a>?«n«a.cBt  à  kait  kus. 

LclMrarvr  (de  «îa  U2i»:ke}  profcse  cnnlle  ca  astre 
dfcm  qai  ««  »^rr^  cj  cï^bmes  : 

•  Li  Cr«««s.lJM  va^xWnaV,  aftè»  irvêr  catearfa  le 
n^fort  de  <«i  csm*t  mùsÊiire,  éecrê'e  ^oe  Se»  wxxfc* 
■aôRS  et  k»  iaêemfi^  qxt  jai«.&Rca:£  f»e  uccr  rerna  m't\- 
celte  pa»  la  «amac  de  l,3■^;  li..  ae  wrcae  ;a»  ysa»  ce  se 
&àre  nftocei  da»le  «cnxe  et  li  ^tét  nCMaaic.  • 

-y  Les  idmiaîmi  u>  ii  i  da  fetrirt  de  S^rjufciui  aaw»- 
cent  qae  do  kKas  dTcm^ics  ei'imti  ift,^*>  l.t.  oat  «flê 
icndm«k.9ins^. 

~  LVgcat  aafàaaat  da  datrât  df  Pgadff .  »  p*i'».mit 

IMB»  et*  liifsi  i'csiffTo  fTt  ca<  c«  E cv  ^Ef  ce  cârtncfl: 
Kfl  ceat  #i-àct  kts,  csLmê  7âa^71}  lir.  ils.,  ctfê^ 


Tcndas  2  miliionf  S55,479  Cr.  ;  m  antra  lais, 
1,896  Iff .,  ont  été  tendes  2i,6Sl  lîv. 

—  Le  nioyea  BkMidel  (de  Bordeaux  Gût  dan  i  la  pa- 
trie, poar  aidfT  à  la  pmirplr  eoBStroction  dn  rasean  b 
RépmHitaim,  deb  «oame de iOf  lÎT. 

—  Oa  lit  lo  leities  sairaDles  :  j 

t 

Creneroif,  rrprrsnUmmi  eu  pemp^t  en  misfion  éamt 
Us  érparUmemtiée  U  Jtfenrffte  eC  de  in  jrnseflr, 
à  la  Convenfton  maiitmaîf. 

€  Glovens  collrg«r$,  le  rriT<âpJÎ  ^kyt  de  ma  nrâdnn 
daa»  1rs  d^rtemrais  delà  Moaiibeei  de  U  llaaelleéttit 
d'j  consolider  J'hrairose  rcm^mioa  da  S  thermidor,  *^ 
ea  éponal  lo  aotori'ô  ooB<3liièo,  soit  ea  prodan 
dan»  le*  Biaisotts  de  déteaîïflB  lo  principes  de  jasiee  et 
dlnoiaaifé  coo>ac*ô  par  la  Co:.ii-s!îoa  aaiioaale.  Derais 
dcai  a)OJf  f  ai  doaaê  ions  mrs  momcolf  à  ce  iiavafl.  aiasl 
qa'à  Qoeiafiaité  d'ao^redé  ai!«  rriatifc  àPodaiiitâtiatiaai, 
et  forlOBi  aox  ftatKàslaBocs.  Gfpcsdaat  il  rcrte  eacawe 
fccaocovp  à  fciie  dan*  oo  deai  départtaamts  pom*  lépaicr 
ks  lom  et  les  brroe  do  ^oaitraerneDl  à  boanel  roa«e.  La 
P'èsmoe  d'am  lepréseolant  dn  peaple  est  eacore  aécgnitc 
ki  peadaDt  qnriqae  Inop^,  el  c'eît  awc  rejni  qae  je 
tae  lois  *ufcé  de  dècosUnsfr  in  tiavaai  qae  laas  m^ncs 
ctHifiéw  L'a  mal  d'voix  mVBpèdbe  de  rcaiplir  ma  misian 
ju<<2a  à  sc«a  irraie,  parce  qu'avec  cdlc  îMÙ^positJoa  il  am 
serai:  iapo«4^ble  ùt  ia  Ci'wLiaacT  avec  irait  pnar  la  r 
pabl'qte.  Je  ^oojprêrifwd.  i«  queîe  paist  ' 
mcBl  poar  me  reatire  :;ar»  le  seia  de  la  Goa« 
na>,  afia  qoe,  si  loas  JBÇ«  à  propos  d'cniayer  àim  fia 
aa  aalre  rcpfôCBï£a\  ri-:»:aBt  de  saa  arrivée  dM  < 
pays  ne  soit  pas  ëkâpK  de  criai  de  mon  départ. 


Le  rfprrsentetti  dn  pen  We  près  1rs  nrm^m  «f 
Us  éêfmrUwÊnds  de  rOaesf .  tkarftét  In 
lonre  de  U  Lmrt^  mi  presiéeni  de  In  Cr~ 

f     II  II.  fo  4  ff^mwimt^  r«i  5-  deli 
aae  eC  ia£iTfaV)e. 


«  Pi^jdeat  coilèsuf,  je  B'eapvcsse  de  T 
OPp5o  de  teiifo  qai  b'oqI  c^é  traafaMCS  par  le 
ea  cWf  de  rarmée  de  IX>a«t  :  fe  l'mtiÊt  à  en 
aer  Ifcîare  à  la CaniealJoa  aalioaale«  qai  j  veita 
iis.'*nioa  lo  prcip^  de  Peff-rii  paMie  panmî  I» 
3*^x«s  poar  ia  éeku»  de  la  itetté  et  de  riniBlé,  rt 
loal  prâ^af?  aa  kfarrai  sarots  de  ia  c^ 
ve  lioa,  dooi  je  mVKiore  ea  |«tx«lier  dVlve 
pacr  aaemîBiea  qai  âalocsse  CansB  près  r 

«  Sa!at  (i  fiiiuailê,  llisT&r.  • 

1«  fict  de  f^  I  tdW.  le  iS  Mvase,  Tai  9»  de  U  tC- 
pdb'açae  fraSiÇHie. 

«  Clirvn  fêaêr^!,  je  r'*w%  de  pcvtcr  ramaêile  an 
tviç:rd^:  fa* aïs  ia«^  a  cet  <€irt  les  kakkams  da  Ck^ 
lMa-4^'.»Caxse:  iisa'riv^at  kicr,  fv  le  diX  beairsdn 
ma:^  Oue  pctifie  :mpe  ckc4-je,  reaaie  à  la  i 
fccmaJ.;  aa  teCai  de  tm:e  bc^mmrs^  \4as  i 
lers  II  parcêflr  d?  SkîaS-ff^ixtie^'^Vik'iBrs;  la  | 
:<e  de  feue  commsae  fat  fmoMTae  daw  .'e^pac^delia»^ 
b(«ro  :  pvcsqae  loas  le  kaiKaai  ce jôoiK  kaknek  La  pae- 
mjè?e  mrcairvqae  aivvs  iracccRif lx»f  fin:  obbcc  aicc  tant 
de  frmAtSÊtK  et  de  s^Vece,.  qae  a.  c»  H  :<w  daoi»  moÉB  1rs 
■  aiiwi  aiaat  qa^aaraa  bevpaad  ne  n£  ^9<Tçm  de  i 
itAircbe  :  iK-as  ;  iiv«ii»f$  ea«ir««  an  àc 
mal  xse et  'se  loai  àxe.  l'a  «:  eat  >"'adnji  c  de  s'î.irfii; 
m.:»  ■>•»  rrilmfi  tecn  ^  ai:era!L  àca  caanect  nmtaf  i 
a  iia'acc.  Depaîs  le  pp  '.-ê  5  jv«qa'aa  iènaea\  isas  iaa- 
caKBt  tm  armes.  •  5e  ar?»  tacs  pas,  oftrvemv  s> 

•  lo  eafitay^,  aoas  aZ^oa»  mr.m»  ta  aucr  avec  vwl  — !9 
«m»7et.rsamiisvBO%  ie  ncssssfwennpaarvnasii 
«  mzis  puvr  v««s  apfiartcr  é»  pvofas  de  paii.  et  i 

•  diaacr  x-ae  Irçoa  r£*bcsa- jr.è.  f  D  je  knr  i 
ea  C9£jer  ce  la  pvqctamatÀa  do  rvprftcaCaats  éi  | 
ffô  a»  jvmèo.  et  Vht  ra  aiisi^'  m»  nmptoàce. 

•  Ca  enfant  de  qntfTe  as»  s'oT^Kcka  de  a  mère,  qai 


323 


4tait  au  lit,  et  qui  faisait  force  Bon  Jésus!  il  lui  desserre 
les  mains,  les  baise,  et  lui  dit  :  •  Ne  crie  donc  plus,  ma- 
•  man,  ces  citoyens-là  ne  sont  pas  méchants»  La  plus 
grande  des  Biles  me  saule  au  cou  :  elle  fut  imitée  par  toute 
sa  rumille;  on  s'embrasse,  on  se  serre  comme  des  frères, 
et  on  se  promet  la  paix.  Fasse  le  Ciel  que  les  brigands  nous 
rapportent  en  rentrant  au  sein  de  leur  patrie,  qu'ils  n*au- 
raient  jamais  dû  déchirer! 

c  Nous  laissons  les  brigands  dans  Pétonnement ,  dans 
Tadmiralion  :  dans  toutes  les  métairies  où  nous  passâmes, 
mêmes  opérations;  on  ne  fit  pas  tort  d'un  seul  denier, 
et  il  ne  fut,  dans  notre  Toyage,  pas  tiré  un  coup  de  lusil.  • 

Tainlurier,  capitaine  commandant  les  chasseurs 
de  la  Côle-d'Or^  de  service  à  la  colonne  agis- 
sanle^  au  citoyen  Sirugues,  chef  d* escadron, 

Bonoes-Eaux ,  7  nivôse.  Tan  3«  de  ta  république 
française,  une  et  indivisible. 

cTu  n'ignores  point  sans  doute,  commandant,  l'avan- 
tage que  nous  venons  d'avoir  sur  les  rebelles:  ils  ont  été 
les  fidimes  de  leur  ruse*  Ce  que  tu  ignores,  et  ce  que  je 
ne  dois  point  te  taire  (dans  une  circonstance  surtout  où  la 
,  vraie  bravoure  ne  se  sépare  de  la  férocité  que  par  des  traits 
presque  imperceptibles),  c^est  raction  d'un  de  nos  chas- 
seurs, du  jeune  Delorme,  à  qui  je  faisais  faire  le  service 
de  brigadier-lourrier.  Chargeant  un  brigand  qu'il  a  désar- 
mé, et  à  qui  il  a  donné  la  vie  en  s'assurant  de  lui,  il  lui  a 
demandé,  selon  l'usage  son  portefeuille;  le  brigand  préve- 
nait déjà  la  demande.  Arrivent  d'autres  chasseurs  qui 
Teulent  tuer  le  prisonnier;  le  jeune  homme  les  rappelle 
aux  principes  et  à  cette  humanité  recommandée  à  Tégard 
de  l'homme  désarmé.  Sa  voix  n^est  point  entendue:  le  pri- 
sonnier va  être  tué.  — Alors,  changeant  la  douceur  de 
son  langage,  il  élève  son  pistolet,  et  prononce  d'une  voix 
ferme  :  •  Voilà  ce  que  je  réserve  uu  lâche  qui  attentera  à 
la  fie  d*uD  homme  dont  je  réponds,  t  —  Son  action ,  son 
geste  ont  imposé:  et  il  a  sauvé  un  malheureux  qui  peut 
lous  être  utile  sous  plus  d'un  rapport* 

■  Un  trait  qui  caractérise  plus  particulièrement  sa  con- 
duite; le  voici  : 

Le  brigand  avait  donné  son  portefeuille, Il  contenait  la 
somme  de  20  liv.  à  peu  près  ;  Delorme  le  mettait  déjà  d&ns 
sa  poche  ;  une  réflexion  l'iorrétc.  — >  «  Tiens,  voilà  ton 
porleieuille,  tu  pourras  avoir  besoin  de  ton  argent  »  Le 
brigand,  confondu  par  ce  trait  de  générosité,  reprit  te 
portefeuille;  mais  aussitôt  il  tire  sa  montre,  qu'il  invite 
son  généreux  défenseur  à  recevoir. 

«"Nous  t'attendons  ;  je  te  rendrai  d'autres  comptes. 

•  Saiat  et  fraternité.  Tainturicb.  > 

Le  général  en  chef  de  V armée  de  l Ouest  au  citoyen 
Menuau,  représentant  du  peuple. 

k  Saumur,  le  28  nivôse,  l'an  3e  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

«  Citojen,  le  chef  d'escadron  Siruguesmc  transmet  une 
lettre  queje  dois  mettre  sous  tes  yeux,  et  partoi  sous  ceux 
de  la  Convention  nationale,  puisqu'elle  contient  des 
exemples  de  valeur,  de  générosité,  de  désintéres-icment  et 
de  sensibilité ,  vertus  que  la  Convention  met  à  l'ordre  du 
jour,  et  qui  doivent  être  l'apanage  de  tout  lépublicuin. 

a  Salut  et  fraternité.  Canclaux.  « 

Les  représentents  du  peuple  Tellier  et  Richaud,  en- 
voyés dans  les  départements  de  l'Ain ^  l^ Isère, 
Rhône-et'Loire  et  Saône-et  -Loire ,  à  la  Con- 
vention nationale. 

Ljoo ,  le  3  pluviôse ,  l'an  3^  de  la  republique 
une  et  indivisible. 

«  Citoyens  collègues,  le  récit  de  nos  fêtes  civiques  ne 
présenterait  qu'un  médiocre  avantage,  s'il  n'avuit  pour 
but  que  de  satisfaire  la  curiosité  des  lecteurs  en  leur  met- 
tant sous  les  yeux  des  détails  plus  ou  moins  brillants,  plus 
ou  moins  ingénieux  ;  mais  lorsqu'on  les  envisage  suus  leur 
véritable  point  de  vue,  comme  nous  donnant  la  marche  et 
la  hauteur  de  l'esprit  public,  alors  elles  nous  présentent 
un  intérêt  véritablement  grand  et  digne  de  fixer  l'atten- 


tion et  les  moments  du  législateur.  C*est  sous  ce  dernier 
ra;^port,  citoyens  collègues,  que  nous  nous  faisons  un 
plaisir  de  vous  rendre  compte  de  la  fête  qui  a  eu  lieu  ù 
Lyon,  en  conformité  de  votre  décret,  pour  célébrer  l'an* 
jiiversaire  de  la  mort  du  tyran-roi  et  raGTermissemenl  de 
la  république  française.  La  rigueur  de  la  saison,  les  fléaux 
de  la  nulure  contre  lesquels  nous  luttons  sans  cesse,  la 
privation  de  plusieurs  objets  de  première  nécessité,  que 
les  citoyens  de  celle  commune  supportent  avec  un  courage 
et  une  patience  dignes  des  plus  grands  éloges,  n'ont  point 
empêché  l'allégresse  publique  de  se  manifester  dans  ic 
cours  do  la  ft^ie  que  vous  vous  aviez  décrétée. 

«  Les  représentants  du  peuple,  environnés  des  autorités  . 
constituées,  des  chefs  des  différents  corps  militaires  et 
d'un  grand  nombre  de  citoyens,  se  rendirent  à  la  maison- 
commune  :  là  un  peuple  immense  remplissait  la  place  de  . 
la  Liberté;  au  centre  se  trouvait  élevé,  par  les  soins  des 
magistrats  du  peuple,  un  monument  propre  à  inspirer  et 
à  nourrir  la  haine  de  la  tyrannie  et  l'amour  de  la  liberté  et 
de  la  république.  Sut;  un  théâtre  était  placée  une  espèce  de 
trône,  un  simulacre  de  roi,  couvert  de  la  peau  d'un  tigre  ; 
sur  le  devant,  la  noblesse,  sous  l'emblème  d'un  loup  dé- 
vorant, soutenait  cette  figure  ;  dans  les  griffes  de  l'animal 
on  lisait  :  droits  féodaux,  corvées,  oppression;  à  droite, 
le  clergé,  sous  la  figure  d'un  renard,  avec  ces  mots  :  dt- 
mej,  hypocrisie  ;  à  gauche,  le  fisc  et  les  fermiers  généraux, 
représentés  par  un  vautour  tenant  dans  ses  serres  les  édiis 
destructeurs  de  l'industrie  et  du  commerce,  avec  cette  in- 
scription :  traites,  aides,  gabelles,  rapines» 

•  Le  cortège,  après  avoir  fait  le  tour  de  ce  monument  « 
environne  Tarbre  de  la  liberté;  il  jure,  votre  décret  sous 
les  yeui ,  d'exterminer  quiconque  oserait  demander  des 
fers.  Des  hymnes  patriotiques,  des  chants  de  victoire  mêlés 
au  concert  des  instruments,  retentirent  dans  les  airs;  un 
dragon  allumé  part  avec  la  rapidité  de  Téclair,  et  va  frap- 
per le  tyran  sur  son  trône;  l'artifice  s'enflamme,  et  sa  tête 
vole  en  éclats  ;  le  feu  brille  de  toutes  parts;  le  trône  et  le 
tyran  qu'il  porte,  le  clergé,  la  noblesse,  les  allégories 
qui  les  environnent  ou  les  représentent,  deviennent  la 
proie  des  flammes,  au  milieu  des  cris  mille  fois  répétés  : 
vive  ta  république!  vive  ta  Convention!  mort  aux  tyrans! 
n  Les  citoyens  réunis  dans  la  grande  salle  de  la  maboa 
commune  continuent  de  manifester  leur  joie,  et  se  livreni 
à  la  danse,  au  son  des  instruments  de  musique.  Ils  se  ren- 
dent dans  les  spectacles,  qui,  ouverts  gratuitement,  of- 
fraient aux  regards  des  pièces  patriotiques  propres  à  nour- 
rir dans  les  cœurs  la  haine  des  rois  et  le  saint  amour  de  la 
patrie.  Une  illumination  simple  et  modeste  décorait  la 
maison-commune;  des  inscriptions  placées  dans  les  trans- 
parents retraçaient  aux  yeux  les  sentiments  civiques  des 
citoyens.  Au  centre  de  la  façade  de  la  maison-commune» 
on  lisait  ces  mots  f  ■  A  là  représentation  nationale,  le  peu- 
ple de  Lyon  reconnaissant.  •  Sur  les  deux  côtés  :  «Vive 

I  la  république!  périssent  les  tyrans!  •  Les  danses  se  sont 
prolongées  fort  avant  dans  la  nuit.  Rien  n'a  altéré  Tordre 

I  et  la  tranquillité;  les  cœurs  n'étaient  point  contraints.  Les 
citoyens  s'abandonnaient  à  l'ivresse  d'une  joie  pure.  Vos 
collègues  ont  partagé,  soit  dans  les  spectacles ,  soit  au  mi- 

I  lieu  des  danses  des  citoyens,  l'allégresse  de  celte  journée  ; 
ils  ont  recueilli  des  témoignages  d'attachement  et  d^  re- 
connaissance qu'il  est  de  leur  devoir  de  vous  reporter.  Il 
est  doux  pour  leur  cœur  de  vous  assurer,  citoyens  collè- 
gues, que  les  citoyens  de  Lyon  se  sont  montrés  dignes  de 
vo'.re  justice,  de  votre  humanité,  de  vos  bienfaits. 
«  Salut  et  fiaternité.        Signé  Ricbacd  et  Tbllieo.  > 

La  Convention  ordonne  Tinsertion  de  ces  lettres 
au  Bulletin  et  lenr  renvoi  aux  comités. 

Lecointre  (de  Versailles)  :  Citoyens  mes  collè- 
gues, à  la  journée  du  9  thermidor,  vous  avez  mis  la 
justice  à  Tordre  du  jour  :  depuis  ce  temps  vous  avez 
voulu  qu'aucune  espèce  de  tyrannie  ne  pût  peser  sur 
la  léle  des  citoyens. 

Par  votre  décret  du  8  brumaire  suivant  vous  avei 
assuré  et  g<irai)ti  In  représentation  nationale.  Le 
peuple  a  vu  avec  satisfaction  les  précautions  sages 
que  vous  avez  prises  pour  vous  préserver  de  Ter- 
reur, des  préjugés,  de  toutes  les  passions  qui  ayeii- 


M4 


SlentlVspnt  liumaln«  en  ne  vous  pcrmettantde  ren- 
te contre  aucun  de  vos  membres,  i|uelque  grave 
que  soit  la  dénonciation  qui  serait  faite  contre  lui, 
un  décret  sans  un  rapport  préablable  et  sans  Tavoir 
entendu. 

Le  5  de  ee  mois,  vous  avez  consacré  ce  principe, 
lorsque,  sur  les  dénonciations  les  plus  fortes  qui 
vous  ont  été  faites  d*assasslnats  judiciaires,  cruautés, 
actes  arbitraires  commis  par  une  partie  des  mem- 
bres qui  composaient  le  tribunal  révolutionnaire  de 
Bre$t,  dénonciations  appuyées  et  ailestées  par  nom- 
bre de  nos  collègues,  vous  avez  pensé  que  voulue 
deviez  pas  céder  a  l'impulsion  de  ceux  oui  voulaient 
que  ces  hommes  fussent  ftnvoyés  sur-le-champ  au 
tribunal  révolutionnaire  sans  au*il  fût  besoin  d'un 
rapport;  vous  avez  voulu,  après  une  assez  longue 
discussion,  que  les  principes  triomphassent  ;  en  con- 
séquence, vous  avez  décrété  le  renvoi  des  dénoncia- 
tions et  des  dénoncés  à  votre  comité  de  sûreté  gé- 
nérale, après  avoir  rapporté  le  décret  d*arrestation 
qu'on  vous  avait  surpris  à  celle  même  séance. 

^h  bien,  je  viens  aujourd'hui  les  invoquer  auprès 
de  vous  ces  mêmes  principes,  et  je  ne  les  invoquerai 
point  en  vain»  Un  citoyen  vous  a  été  dénoncé  a  cette 
tribune  comme  l'auteur  d'un  livre  contre- révolu- 
tionnaire, royaliste  et  des  plus  dangereux  ;  quelques 
passages  contenus  dans  le  chapitre  XXIII,  depuis  la 
page  229  jusqu'à  celle  252,  vous  ont  été  lus  :  sans 
doute  ces  passages  méritent  notre  animadversion  à 
tons;  mais,  avant  de  condamner,  je  réclame  les 
principes,  les  droits  de  l'homme,  pour  ce  citoyen  tra- 
duit, le  4  de  ce  mois,  sans  un  rapport  préalable,  au 
tribunal  criminel  du  département  de  Paris,  que  vous 
avez  investi,  sur  la  motion  de  notre  collègue  Bour- 
don (de  rOise),  du  pouvoir  de  le  juger  revotution- 
nairement,  à  Tinstar  du  scélérat  Morin,  qui,  aprè? 
les  propos  les  plus  contre-révolutionnaires  et  les 
plus  outrageants  pour  la  représentation  nationale, 
assassina  d  un  coup  de  couteau  le  patriote  Etienne 
Olivier,  le  29  nivôse  dernier,  et  poussa  ensuite  la 
lâcheté  et  la  barbarie  jusqu'à  insulter  le  cadavre  de 
sa  victime. 

Ce  crime  horrible,  matériel,  portant  avec  lui  tous 
les  caractères  qui  constituent  un  grand  scélérat  (le 
fait  et  l'intention),  a  nécessité  de  votre  par^  une 
grande  et  prompte  justice;  mais,  avant  de  prendre 
ces  dernières  mesures,  vous  avez  voulu  un  rapport 
IPOtivé  et  circonstancié,  et  c*est  sur  ce  rapport  qqe 
le  lendemain,  30  nivôse,  vous  avez  renvoyé  ce  mons- 
tre devant  le  tribunal  criminel  de  ce  département, 
que  vous  avez  investi  des  pouvoirs  pour  le  juger  ré- 
volutionnairement. 

;V1ais  ici,  citoyens  collègues,  la  dénonciation  qui 
vous  a  été  r<iite,  il  y  a  un  mois,  à  cette  tribune,  do 
pa«sages  isolés  d'un  livre  qui  contient  410  pages, 
passages  lus  rapidement,  et  sur  lesquels  peut-etrr, 
y  l'instant  où  je  vous  parle,  il  n'y  a  pas  crnquanie 
d'entre  nous  qui^ient  pu  se  procurer  la  faculté  de 
les  hre  et  méditer  à  loisir,  de  connaître  l'ensemble 
de  l'ouvrage  ;  et  cependant,  après  avoir  décrété  l'ar- 
restation de  ce  citoyen,  ce  qui  était  bien,  un  mois 
après,  sur  une  motion  incidente,  dans  un  moment 
ou  les  esprits  étaient  encore  dans  la  plus  juste  indi- 
gnation contre  le  scélérat  Morin,  vous  avez  décrété, 
sans  un  rapport  préalable,  sans  aucune  discussion, 
lorsque  personne  ne  s'attendait  à  ce  coup  de  foudre, 
vous  avez  décrété,  dis-je,  que  Lacroix,  auteur  du 
livre  intitulé  |e  Speclalêur  françaii,  serait  traduit 
sur-le-champ  au  tribunal  criminel,  que  vous  avez 
investi  du  pouvoir  de  |e  juger  révolutionnairement. 

Qiielleestdonc,citoyens  collègues,  cette  nouvelle 
jurisprudence  révolutionnaire  qui  voudrait  s'établir? 
Cettejurisprudence  ne  serait-elle  pas  une  nouvelle 


tyrannie  que  nous  élèverions  nonsmémes,  nous  qui 
avons  jure  de  n'en  souffrir  aucune?  Comment,  nous^ 
amants  passionnés  de  la  justice,  pourrions-nous 
prendre  sur  nous  la  plus  dangereuse  et  la  pluseruell« 
des  initiatives  à  i'éçard  d'hommes  dénoncés,  en  in- 
stituant à  notre  gre  des  tribunaux  aveo  une  exten- 
sion de  pouvoirs  terribles,  pour  y  traduire  sans  exan 
men  réfléchi,  sans  rapport  préalable,  sans  discussion  . 
approfondie,  des  citoyens,  parce  que  quelques  phra- 
ses isolées  d'un  de  leurs  ouvrages,  qui  nous  seraleol 
lues  rapidement,  nous  auraient  déplu? 

Citoyens,  ne  nous  le  dissimulons  pas;  un  tribun^ 
qui  reçoit  de  nous  un  mandat  aussi  terrible  qu'et- 
traordinaire  peut^il  bien  voir  autrement  daus  les 
citoyens  que  nous  lui  envoyons  que  des  hommes 
déjà  convaincus?  Ce  tribunal  osera-t-il  les  absoudre? 
s'il  le  faisait,  ne  craindrait-il  pas  d'avoir  mal  rempli 
ses  devoirs?  Eh  !  que  faisait-on  autre  chose  du  temps 
de  Robespierre?  Ne  craignez-vous  point,  si  nous 
contractions  une  ^ussi  dangereuse  habitude,  qu'elle 
ne  nous  ramène  à  ces  temps  malheureux?  Nous  con- 
vient-il bien  de  suivre  les  traces  de  ceux  que  nous 
avons  punis  et  de  ceux  qui  nous  restent  à  juger  pour 
avoir  pris  de  semblables  moyens?  6t  quel  temps 
choisissons-nous  encore?  celui  où  le  terrorisme  sV 
gite  û  Marseille  avec  une  nouvelle  fureur. 

Si  c'était  aujourd'hui,  citoyens  collègues,  le  jour 
du  rapport  qui  vous  serait  fait  de  cette  importante 
affaire,  je  vous  établirais  que  si,  d'un  côté,  nous  dA«> 
vous  empêcher  toutes  provocations  à  la  royauté, 
nous  devons  aussi ,  de  l'antre,  nous  préserver  da 
danger  d'étouffer  la  liberté  de  la  presse,  ce  qui  serait 
l'acheminement  le  plus  certain  et  le  plusprpmpt  ji 
la  tyrannie  d'où  nous  sortons. 

J'entreprendrais  de  vous  prouver  que  ce  livre  m'a 
paru  presque  partout  rempli  des  principes  d'up  ré- 
publicanisme absolu,  lorsque  seulement,  daus  |e 
chapitre  justement  censuré,  on  n'y  voit  qu'un  roya- 
lisme hypothétique,  et  par  conséquent  susceptible 
de  l'examen  le  plus  réfléchi,  avant  surtout  d'en- 
voyer un  citoyen  à  un  tribunal  auquel  il  est  donné 
une  commission  spéciale  de  le  juger  révolutîQnnai- 
remenl. 

Pénétré  des  grands  principes  que  je  vjens  de  vous 
exposer,  et  sans  qu'il  soit  besoin  de  plus  de  dévelop- 
pements, qui  appartiennent  à  ceux  d'entre  nous  qui 
sont  orateurs,  je  demande  avec  confiance  le  rap- 
port du  décret  du  4  de  ce  mois,  qui  envoie  Lacroix 
au  tribunal  criminel  du  département  pour  y  être 
jugé  révolutionnairement.  Je  demande  en  outre  que 
vos  comités  de  sûreté  générale  et  de  législation,  aux- 
quels il  sera  remis  un  exemplaire  du  livre  intitulé 
le  Speclaieur français,  soient  chargés  de  l'examiner 
et  de  vous  faire,  sous  trois  jours,  un  rapport  détaillé 
et  motivé,  avec  un  projet  de  décret,  afin  qu'après  line 
discussion  approfondie  la  Convention  nationale  pro- 
nonce en  grande  connaissance  de  cause  sur  ceUe  af- 
faire, à  laquelle  tiennent  les  plus  grandes  idées  d'un 
gouvernement  libre  et  vraiment  républicain. 

Ce  discours  est  interrompu  par  de  viiis  applaudis- 
sements et  par  quelques  murmures, 

Clauzel  :  Je  demande  l'ordre  du  jour  ;  il  ne  faut 
pas  laisser  professer  de  pareilles  hérésies. 

Plusieurs  membres  de  l'extrémité:  Cette  motion 
n'est  pas  appuyée. 

Pblet  :  Je  Tappuie ,  moi.  (On  applaudit,) 

Pelet  monte  à  la  tribune. 

PELEt  :  Je  me  suis  opposé ,  il  y  a  quelaues  jqars, 
au  décret  dont  Lecointre  vient  de  demanaer  Iç  rap- 
port. Je  suis  bien  aise  que  cette  occasion  me  four*- 
nisse  le  moyen  de  motiver  mon  opinionr  J*ûse  dire 
qu'on  vous  a  enlevé  ce  décret ,  qui  est  contraire  é 
tous  les  principes;  on  a  voulu  prohter  d'un  momeut 


325 


(Vcqthoasiasme  et  des  mouvements  généreux  qui 
sont  dans  vos  cœurs,  pour  vous  entraîner  à  une  me- 
sure injuste.  Souvenez-vous  qu'avant  le  9  thermidor 
c'était  toujours  i(vcc  dés  prétextes  frivoles  qu'on  ve- 
nait arracher  des  actes  d'oppression.  Jamais  il  n'exis- 
tera en  France  de  vraie  liberté  que  lorsque  la  liberté 
de  la  presse  sera  respectée.  (Vifs  applaudissements, 
mêlés  de  quelques  murmures  de  Textrémité.)  J'en- 
tends dire  dans  cette  partie  de  l'assemblée  que  je 
prêche  le  royalisme.  {Pluiieurs  voix:  N'écoute  pas 
cela  !)  Eh  !  croit-ou  être  encore  au  22  prairial,  quand 
Robespierre  disait  que  nous  étions  des  royalistes 
parce  que  nous  n'étions  pas  des  brigands?  (Les  ap- 
plaudissements recommencent.)  Les  royalistes  sont^ 
ceuxqui  assassinent,  qui  veulent  dominer,  qui  Ion- 
dent  leur  fortune  sur  la  fortune  publique,  ceux  enfin 
qui  regrettent  le  régime  renversé  le  9  thermidor. 
Trop  longtemps  on  a  trompé  le  peuple  par  des  dé- 
nonciations vagues ,  par  des  déclamations  insigni- 
fiantes; oq  ne  le  trompera  plus;  le  peuple  connaît 
les  intrigants  qui  voulaient  le  séduire  ,  ils  sont  dé- 
masqués. (Nouveaux  applaudissements.)  Je  reviens 
à  la  question,  Je  demande  à  mes  collègues  si  c'est 
suivre  les  principes  que  de  décréter  un  homme  d'ac- 
cusation, de  le  renvoyer  à  un  tribunal  révolution- 
naire sans  un  rapport  préalable ,  et  parce  qu'on  n 
pris  au  hasard  une  page  d'un  écrit  qu'il  a  punlié?  Je 
n'ai  pas  lu  ee  livre  (quelques  murmures);  mais  je 
réclame  pour  la  liberté  de  la  presse.  S'il  y  a  des 
hommes  qui  aient  une  conscience  plus  commode  que 
la  mienne  ,  qu'ils  votent  a  leur  manière  3  pour  moi , 
je  demande  la  suspension  du  décret  relatif  à  Lacroix. 
Je  drmqnde  que  les  comités  de  législation  et  de  sA- 
reté  générale  fassent  un  rapport.  Conservez  toujours 
les  principes,  et  jamais  le  royalisme  ne  vous  domi- 
nera. (On  applaudit.) 

PlusieUri  membrèi  de  VextrémUé  :  L'ordre  du 
jour! 

iNDRi  DuMONT  :  En  appuyant  une  partie  des  ob- 
servations de  Pelel,  je  conihals  la  motion  de  Lecoin- 
tre.  Il  a  dit  que ,  quand  la  Convention  décrétait 
quelqu'un  d'accusation  ,  elle  l'envoyait  en  quelque 
sorte  à  Téchataud.  Quelle  est  donc  cette  maxime 
abominable?  Sans  doute  la  Convention  n'aurait  pas 
dû  rendre  ce  décret  sans  examen  ;  mais  s'ensuit-il , 
de  ce  qu'elle  a  envoyé  Lacroix  au  tribunal ,  qu'il  ne 
pourra  être  acquitté?  Oui,  si  l'ouvrage  n'est  pas  une 
provocation  à  la  royauté ,  le  tribunal  s'empressera 
d'acquitter  l'accusé.  Je  ne  crois  pas  que  jamais  nous 
revoyions  les  scènes  d'horreur  auxquelles  le  9  ther- 
midor a  mis  fin.  Non ,  un  décret  d'accusation  n'est 
point  un  décret  de  mort.  Je  le  répète ,  je  suis  d'a- 
vance convaincu  que  Lacroix  sera*  acquitté  si  son 
livre  n'est  pas  condamnable.  Je  demande  le  maintien 
du  décret. 

<  )livier  Gérente  :  La  Convention  doit  se  rappeler 
qu  une  nuit  où  l'on  vint  lui  dénoncer  des  crimes 
atroces  ,  elle  était  sur  le  point ,  dans  son  enthou- 
siasme ,  de  décréter  que  leurs  auteurs  seraient  de 
suite  traduits  au  tribunal  révolutionnaire.  Je  repré- 
sentai à  la  Conve.ntion  que  ces  hommes,  quelque 
coupables  qu'ils  fussent ,  devaient  passer  par  un 
examen, «t  la  Convention  ,  fidèle  aux  principes,  dé- 
créta qu'on  ne  pourrait  envoyer  personne  au  tribu- 
nal sans  un  rapport  préalable.  Il  s'agit  ici  d'une  opi- 
nion; on  n'en  a  tu  que  des  passages  isolés.  Je  connais 
l'ouvrage ,  moi ,  je  n'en  parlerai  pas.  C'est  aux  co* 
mités  à  nous  dire  ce  qu'ils  en  pensent  ;  mais ,  pour 
l'honneur  des  principes,  Je  dfemande  un  nouveau 
rapport  des  comités. 

THURiOT  :  Si  la  loi  vent  que  jamais  la  liberté  de 
In  presse  ne  puisse  être  enchaînée  ,  la  loi  veut  aussi 
que  tout  citoyen  soit  soumis  aux  lois  de  son  pays.  Il 


y  a  des  délits  privés  et  des  délits  publics.  L'ouvrage 
qu'on  vous  a  dénoncé  h  la  tribune  est  de  cette  der* 
nière  classe.  On  a  dit  qu'il  contenait  la  preuve  ma- 
térielle d'un  rappel  a  la  royauté.  Si  ce  fait  existe  ,1| 
est  clair  que  la  peine  de  mor(  doit  être  prononcée 
contre  l'auteur. 

Est-il  quelqu'un  dans  cette  assemblée  qui  puisse 
réclamer  contre  ce  principe  ?  (^Plusieurs  voior:  Non 
non  !  )  S'il  était  permis  d'imprimer  demain  contre  la 
liberté,  vous  verriez  des  écrivains  perfides  jeter  le 
ppuple  dans  une  incertitude  dangereuse.  La  création 
du  tribunal  révolutionnaire  n*est  qu'une  exception 
à  la  loi.  La  loi  affecte  aux  tribunaux  ordinaires  la 
connaissance  des  délits  commis  dans  leur  arrondis- 
sement; or  le  délit  a  été  commis  à  Paris.  Le  tribunal 
criminel  devait  en  connaître ,  d'après  les  lois  an- 
ciennes; mais  comme  il  y  en  a  de  nouvelles ,  qui 
renvoient  la  connaissance  des  délits  révolutionnaires 
à  un  tribunal  particulier;  comme  vous  avez  dit  que 
Lacroix  y  serait  jugé,  que  son  crime  a  frappé  la  ré- 
publique entière;  comme  le  tribunal  révolutionnaire 
n'est  pas  encore  organisé,  alors  vous  avez,  non  pns 
décrété  la  traduction  de  Lacroix  au  tribunal  révolu- 
tionnaire, mais  confirmé  le  décret  qui  ordonnait 
qu'il  serait  traduit  devant  un  tribunal. 

On  a  dit  que  ce  décret  avait  été  arraché  à  la  Con- 
vention ;  eh  bien ,  quand  on  Ta  provoqué,  personne 
ne  s'est  levé  pour  aéfendre  Lacroix;  il  y  a  plus  ,  à 
l'instant  où  Duhem  lisait  les  passages  qui  vous  on( 
indiqués ,  le  comité  de  sûreté  générale  vous  a  dé- 
clare, par  l'organe  de  Laignelot,  que  cet  ouvrage 
avait  été  dénoncé  à  sa  vigilance ,  et  qu'il  en  avait 
fait  arrêter  l'auteur.  Vous  ne  pouvez  enlever  h  la  loi, 
a  la  justice,  l'homme  qui  doit  su4)ir  la  censure  lé? 
gale.  Je  ne  prononce  point  sur  Lacroix:  cequej'aî 
entendu  de  son  écrit  m'a  révolté:  mais  je  pense  que 
les  jurés  doivent  examiner  Touvrage  entre  eux  pour 
prononcer  en  connaissance  de  cause. 

Quand  il  y  aurait  vingt  décrets  portant  qu'un  tri- 
bunal jugera  une  affaire  dans  un  délai ,  je  dis  que  la 
juré  mériterait  la  peine  de  mort  s'il  n'avait  pas  le 
courage  de  prononcer  d'après  sa  conscience.  (On 
applaudiL)  Je  disque  l'accusateur  public  qui,  au 
lieu  de  rérfigfr  l'acb  d'accusation  sur  des  preuves 
matérielles ,  le  bâtirait  sur  des  idées  romanesques , 
mériterait  d'être  puni.  (Nouveaux  applaudisse-: 
ments.) 

Le  livre  de  Lacroix  a  été  dénoncé  à  toute  la  France: 
si  ce  livre  n'est  pas  royaliste,  l'innocence  de  Lacroi^ 
sera  proclamée ,  et  vous  aurez  conservé  religieuse- 
ment la  libf  rté  de  la  presse.  Je  demande  que  la  Con- 
vention maintienne  son  décret,  que  je  trouve ,  moi, 
conforme  aux  principes. 

Clauzel  :  S'il  était  possible  que  la  Convention 
nationale  accueillît  la  proposition  de  Lecointre,  elle 
assassinerait  Lacroix;  car.  si  la  Convention  ordonne 
un  nouvel  examen  :  si ,  d  après  cet  examen  ,  les  co- 
mités pensent  que  Lacroix  cloive  être  traduit  au  tri- 
bunal ,  de  quelque  sentiment  de  justice  que  le  jury 
soit  animé,  il  en  résulterait  que.  d'après  ce  nouveau 
renvoi ,  il  pourrait  penser  que  la  Convention  ne  l'a 
ordonné  que  pour  faire  prononcer  la  condamnation 
de  l'écrivain. 

Ddhïm  :  Je  ne  m'arrêterai  pas  h  U  dernière  phrasé 
de  la  dernière  défense  publiée  par  Lacroix ,  et  dans 
laquelle  il  se  plaint  amèrement  d'avoir  été  dénoncé 

fmur  avoir  publié  son  ouvrage  *  que  nos  collègues 
e  lisent,  et  ils  auront  la  raison  de  l'animosité  qu'on 
met  à  le  défendre.  On  a  dit  qu'on  ne  connaissait  pas 
l'ouvrage  ,  cependant  j'en  ai  lu  up  chapitre  entjer  ; 
si  je  n'ai  pas  achevé ,  c'est  parce  que  l'indignation 
publique  m'en  a  empêché;  et  d'ailleurs,  lorsque  J'ai 
rcmnli  le  devoir  civique  de  dénoncer  cet  ouvr^g^ , 


326 


n*ai-je  pas  entendu  crier  autour  de  moi  qu*il  fallait 
mettre  raulcur  hors  de  la  loi  ?  Quelqu'un  qui  con- 
naît Lacroix  lu'a  assuré  qu'il  otuil  d'une  grande  pu- 
sillanimité :  vous  l'avez  vu  encore  par  une  phrase 
du  chapitre  que  je  vous  lisais,  où  il  donne  à  en- 
tendre qu'il  pourrait  bien  devenir  la  victime  de  son 
opinion. 

Quelles  que  soient  les  intrigues  qu'on  fait  jouer 
autour  de  nous,  le  peuple  connaît  les  patriotes  qu'on 
s'attache  à  calomnier;  il  sait  les  distinguer  d'avec  les 
fripons  qu'on  protège  ,  d'avec  les  perturbateurs  des 
théâtres  et  du  Palais-Royal  :  c'est  l'aristocratie  et  le 
royalisme  qui  triomphent.  (Des  murinures  d'indi- 
gnation éclatent  dans  l'assemblée.) 

Deboi:rges  :  Ce  sont  lesëgorgeurs  qui  sont  à  bas; 
c'est  la  Convention  qui  triomphe. 

CuiAPP£  :  L'inipiuiité  entraîne  le  crime.  Sachez , 
citoyens ,  que  votre  justice  est  prise  pour  de  la  fai- 
blesse, et  que  cela  seul  lait  la  force  expirante  des  ter- 
roristes. Duhem  vient  d'outrager  la  Convention  na- 
tionale, en  disant  que  ce  n'est  pas  la  justice  qui 
triomphe,  mais  l'artstocratie  et  le  royalisme;  tous 
les  jours  il  se  permet  des  blasphèmes  semblables.  11 
est  temps  d'arrêter  l'audace  des  scélérats  qui  veulent 
allumer  la  guerre  civile.  La  Convention  nationale 
doit  être  en  même  temps  juste ,  conséquente  et  fer- 
me, si  elle  veut  que  le  peuple  français  ait  une  en- 
tière confiance  en  elle.  Vous  n'ignorez  pas  ce  que 
prescrit  le  règlement.  Plusieurs  autres  décrets  por- 
tent une  punition  pour  ceux  qui  insultent  la  Con- 
vention en  masse  ou  en  partie  ;  je  demande  que 
Duhem  soit  envoyé  a  l'Abbaye  par  un  décret  de  la 
Convention. 

DuuEM  :  11  est  étonnant  que ,  lorsaue  je  dis  que 
dans  les  spectacles  on  soutient  le  royalisme... 

Deboubges  :  C'est  faux  ;  c'est  le  royalisme  qu'on 
y  combat. 
;  Duhem  :  Il  est  singulier  qu*on  veuille  faire  croire 
I  que  je  confonds  la  ht'iWawle  ieunetse  de  Fréron  avec 
i  celle  qui  combat  aux  frontières.  La  nation  dorée  fait 
I   la  guerre  au  peuple  sans-culottes. 

Rewbell  et  Tallien  :  On  provoque  la  guerre  ci- 
vile! 

Tallien  s'élance  à  la  tribune. 

Plusieun  voix  :  A  l'Abbaye,  Duhem  !  à  TAbbaye! 
(Le  désordre  règne  un  moment  dans  l'assemblée. — 
I  Le  président  se  couvre  ;'le  calme  renaît.) 

Le  Pbésident  :  Pour  avoir  insulté  à  la  Conven- 
tion ,  en  disant  que  l'aristocratie  et  le  royalisme 
triomphent»  je  rappelle  Duhem  à  l'ordre.  (On  ap- 
plaudit.) 

Un  grand  nombre  de  membres  :  Cela  ne  suffit 
pas;  à  l'Abbaye!  à  l'Abbaye!  (Le  tumulte  recom- 
mence.) * 
^^^     La  Convention  décrète  que  Duhem  ira  à  l'Abbaye. 

Des  bravos,  des  cris  de  vive  la  république!  partent 
de  tous  les  coins  de  la  salle. 

BoissiEUz  :  Je  demande  que  le  décret  soit  notifié 
sur-le-champ  à  Duhem ,  et  qu'il  parte. 

Cette  proposition  est  décrétée.  (Les  applaudisse- 
ments se  renouvellent.) 

Duhem  parle  dans  le  bruit. 

Barras  :  Les  bons  citoyens  de  Paris  qui  viennent 
d'être  témoins  de  la  scène  indécente,  commandée 
dans  le  sein  de  la  Convention  par  un  de  ses  mem- 
bres; ce  peuple  qui  a  bien  jugé  toutes  les  époques 
mémorables  de  la  révolution,  ne  sera  pas  la  dupe  de 
^  quelques  intrigants  qui  veulent  ici  provoquer  la 
guerre  civile.  (Non , non!  s'écrie-t-on  en  applaudis- 
sant vivement.) 

Duhem  :  C'est  de  Fréron  dont  il  veut  parler.  (Du- 
hem est  applaudi  par  quelques  membres  qui  j'en- 
lourent.) 


Plusieurs  voix  :  Ta  place  est  l'Abbaye. 

DuuEM  :  Je  suis  prêt  à  partir  ;  voyons  votre  dé* 
cret. 

Barbas  :  Je  déclare  a  la  Convention  que  c'est  de 
Duhem  que  j'ai  voulu  parler.  (Les  plus  vifs  applau- 
dissements éclatent  de  toutes  parts.) 

Si  mes  collègues  avaient  toujours  rigoureusement 
exécuté  le  décret  qui  punit  tout  représentant  du 
peuple  qui  se  permet  la  moindre  insulte... 

Duhem  :  J'ai  parlé  contre  les  royalistes.. 

Barras  :  Si  la  Convention  avait  rigoureusement 
exécuté  ce  décret,  le  sanctuaire  des  lois  n'aurait 
point  été  profané  par  la  voix  injurieuse  de  Duhem. 
(Vifs  applaudissements.  —  Duhem  parle  dans  le 
muit.)  Nous  ferons  la  guerre  aux  royaliàtes  et  aux 
terroristes.  (Les  applaudissements  se  renouvellent.) 
La  Convention  ,  qui  a  sauvé  le  peuple,  ne  veut  que 
la  justice.  (Nouveaux  applaudissements.)  La  Con- 
vention a  été  insultée... 

Duhem  :  Ça  n'est  pas  vrai. 

Barras  :  Lorsqu'on  a  dit  que  des  royalistes  sié- 
geaient au  milieu  d'elle.... 

Quelques  voix  :  Ça  n'est  pas  vrai  ! 

Barras  :  On  a  dit'aue  le  royalisme  et  l'aristocratie 
triomphaient;  c'est  dire  clairement  que  la  Conven- 
tion est  composée  de  royalistes  et  d'aristocrates  qui 
les  protègent.  Je  demande  que  la  Convention  prouve 
qu'elle  ne  cesse  de  combattre  le  royalisme  et  l'aris- 
tocratie, en  envoyant  à  l'Abbaye  celui  qui  a  osé  prê- 
cher ici  la  guerre  civile.  (Vifs  applaudissements.) 

Plusieurs  voix  ;  C'est  décrété. 

Duhem  :  Puisque  tout  le  monde  a  le  droit  de... 

Plusieurs  voix:  Tu  n'as  pas  la  parole. 

Bouret,  secrétaire  :\o\c\  la  rédaction  du  décret: 
«Un  membre  demande  que  Duhem,  qui  vient  d'ou- 
trager le  peuple  français...  (Quelques  voix  :  Ça  n'est 
pas  vrai  !)  en  disant  que  le  royalisme  et  l'aristocratie 

triomphaient (Montaut-Maribon  :  C'est  faux!) 

soit  envoyé  à  l'Abbaye  ;  cette  proposition  est  dé- 
crétée. • 

Quelques  voix  :  Ça  n'est  pas  vrai  ! 

La  Convention  adopte  la  rédaction  du  décret.  — 
Quelques  membres  demandent  l'appel  nominal. 

Duhem  :  J'ai  la  parole. 

Rewbell  :  Je  demande  à  rétablir  les  faits. 

Duhem  :  C'est  à  moi  à  les  rétablir;  on  ne  peut  me 
refuser  la  parole. 

Plusieurs  voix  :  Silence!  à  l'Abbaye  ! 

Saladin  :  Dès  l'instant  que  le  décret  est  rendu, 
Duhem  doit  aller  à  l'Abbaye,  ou ,  s'il  reste  dans  la 
salle ,  il  doit  conserver  le  silence. 

Duhem  :  Vous  tuez  les  amis  du  peuple  pour  proté- 
ger les  royalistes» 

Rbwbell  :  On  a  parlé  du  comité  de  sûreté  géné- 
rale relativement  à  Lacroix;  je  dois  dire  que  ce  co- 
mité a  lait  son  devoir. 

Un  membre  de  la  Convention  est  venu  lui  dénon- 
cer les  passages  de  l'écrit  de  Lacroix  ;  aussitôt  le 
comité ,  jaloux  de  prouver  qu'il  s'effarouchait  de 
l'ombre  même  du  royalisme,  a  voté  à  Tunanimité  |e 
mandat  d'arrêt  :  il  n'a  pas  lu  le  livre,  parce  qu'il 
n'en  a  pas  eu  le  temps  ;  mais  il  a  lancé  le  mandat 
d'arrêt ,  parce  que  cette  mesure ,  en  mettant  le  pré- 
venu sous  la  main  de  la  justice  ;  n'empêchait  pas 
d'examiner  s'il  était  coupable.  (Applaudissements.) 
Le  mandat  d'arrêt  ne  gêne  pas  la  conscience  des  ju- 
rés ;  ils  doivent  faire  ce  qui  n'a  pas  été  possible  an 
comité ,  examiner  l'écrit  en  entier.  Si  Lacroix  est 
coupable,  il  faut  qu'il  périsse  (applaudissements); 
mais  s'il  est  innocent ,  qu'il  ne  craigne  pas  de  deve« 
nir  une  victime  du  terrorisme.  Non ,  l'aristocratie, 
le  royalisme  et  le  terrorisme  ne  reviendront  jamai 
(Nouveaux  applaudissements.) 


327 


^     Quel  csl  1c  dornier  espoir  dos  royalistes?  c'est  Ta 
\  vilisseinent  rt  la  dissolution  de  la  Convention  "" 


!  plaudisseu]ents.)Que  veulent  les  terroristes?  Les  dé- 
sirs qu'ils  expriment  dans  des  libelles  infâmes  mf  on 
ne  s'empresse  pas  de  vous  de'noncer  (applaudisse- 
ments) sont  Tavilissement  et  la  dissolutior.  de  la  Con- 
vention. (Les  applaudissements  se  renouvellent.)  Ils 
TOUS  traitent  dç  sénat  de  Coblenlz... 

Plusieurs  voix:  C'est  V Ami  du  Peuple,  l'orateur 
des  terroristes. 

Rewbell  :  Les  uns  et  les  autres  ont  le  même  but  ; 
mais  ni  l'un  ni  l'autre  ne  triompheront.  (Ou  applau- 
dit vivement.)  Soyez  fermes  ;  si  Taftaire  de  Lacroix 
n'est  pas  commencée  au  tribunal  criminel  du  dépar- 
tement, renvoyez- In  au  tribunal  révolutionnaire. 
C'estrlà  le  parti  que  vous  devez  prendre. 

Saladin  :  Le  tribunal  criminel  du  département  a 
écrit  hier  au  coniilé  <le  législation  pour  lui  soumet- 
tre une  difliculté  survenue  dans  celte  afiaire;  le  co- 
mité a  arrêté  un  projet  de  décret,  et  je  demande  que 
le  rapporteur  vous  le  présente  pour  terminer  celte 
discussion. 

Chouoiru  :  On  demande  la  parole  pour  Duhem  ; 
et,  si  l'on  ne  veut  pas  renlendre,  je  demande  a  rétre 
pour  lui. 

Legendre  (de  Paris)  :  Je  ne  viens  point  m'ëlever 
contre  le  décret  que  la  Convention  a  rendu  ;  mais  je 
•    viens  réclamer  nu  principe  qui ,  s'il  était  violé  à  l'é- 
gard d'un  individu,  pourrait  l'être  aussi  à  l'égard  de 
tons  les  autres. 

Le  règlement  de  l'assemblée  est  une  loi  pour  elle, 
et  c'est  une  vraie  calamité  publique  que  l'iurxécu- 
lion  des  lois.  Le  règlement  porte  qu'un  membre  ne 
pourra  être  envoyé  à  l'Abbaye  avant  d'avoir  été  en- 
tendu. 

Je  ne  m'élève  pas  contre  le  décret;  car  je  pense 
qu'il  faut  empêcher,  s'il  est  possible  ,  que  la  scène 
scandaleuse  qu'on  vient  de  nous  donner  se  renou- 
velle. 

Citoyens,  tant  que  l'opinion  publique  ne  pourra 
pas  croire  à  la  justice  que  le  peuple  réclame  ,  vous 
verrez  des  hommes  jeter  le  trouble  dans  cette  as- 
semblée, pour  faire  prendre  une  autre  face  au  grand 
procès  qui  est  encore  en  suspens.  (  Applaudisse- 
ments.) Dans  quel  instant  veut-on  nous  diviser? 
C'est  précisément  ctlui  où  les  défenseurs  du  peuple 
français  ouvrent  au  peuple  français  les  portes  du 
monde. 

Duhem,  nous  avons  au  comité  de  sûreté  générale 
une  lettre  signée  de  toi ,  que  nous  a  envoyée  notre 
collègue  Jean  Debry ,  et  dont  nous  n'avons  pas  voulu 
parler,  pour  ne  pas  exciter  du  trouble  ici.  Cette  let- 
tre est  adressée  a  doux  canonniers  employés  dans  le 
Midi,  auxquels  tu  faisais  passer  le  journal  rédigé  p.is 
Chasles,  et  qui  a  été  dénoncé  à  la  Convention.  (Du- 
hem interrompt.)  Ces  deux  canonniers  ont  été  inter- 
rogés. Tu  leur  disais ,  dans  ta  lettre  ,  qu'il  n'y  avait 
plus  qu'un  moment  à  attendre  pour  que  les  patriotes 
aient  le  <lessus.  Je  ne.déguise  pas  les  mots  ;  mais  on 
sait  ce  que  veut  dire  le  mol  dr  patriote  dans  ta  bou- 
che. (Applaudissements.)  Si  celte  action  n'est  poiïit 
un  crime,  c'est  au  moins  une  preuve  de  la  plus  mau- 
vaise inlenlion  ;  car  il  est  indigue  d'un  représentant 
du  peuple  de  vouloir  induire  eu  erreur  des  canon- 
Qîerssur  le  compte  de  la  Convention  nationale. 

Citoyens,  ne  vous  y  trompez  pas  ;  il  y  a  une  tacti- 
que bien  combinée  et  bien  suivie.  Je  ne  regarde  pas 
comme  coupables  ceux  de  mes  collègues  qui  sont 
opiniâtrement  restés  aux  Jacobins  jusqu'à  ce  au'ils 
aient  été  fermés;  maisje  les  regarde  comme  des  nom- 
mes entêtés  ,  à  qui  le  crime  a  organisé  le  cerveau. 
(Applaudissements  redoublas.)  Il  est  trois  scélérats, 
complices  de  Robespierre,  qu'on  ne  peut  approcher 


sans  que  la  vapenr  du  crime  ne  vous  volcanîse  la  tête. 
(Les  applaudissements  se  réitèrent  et  se  prolongenL) 
Ces  hommes ,  qui  sont  maintenant  devant  la  com- 
mission ,  font  jouer  tous  les  ressorts  possibles  pour 
forcer  la  Convention  à  leur  accoler  un  certain  nom- 
bre de  nos  collèçues  qui  n'ont  été  qu'égarés;  ils  veu- 
lent se  sauver  a  la  faveur  du  nombre,  mais  ils  en 
auront  menti  :  la  Convention  n'aura  point  de  fai- 
blesse. (Vifs  applaudissements.) 

Gay-Vebnon  :  Nous  ne  sommes  pas  induits  en  er- 
reur. 

Legendre  :  La  position  de  notre  patrie  devrait 
faire  girmer  dans  tous  les  cœurs  des  sentiments  plus 
nobles:  pour  moi,  quand  j'y  pense,  je  sens  mon  àme 
s'agrandir  (vifs  applaudissémenls);  mais  il  est  des 
honnnes  a  qui  tout  sentiment  de  grandeur  est  incon- 
nu, si  ce  n'est  celle  du  crime.  (Monveaux  applaudis- 
sements.) Ces  hommes  sont  ceux  qui  ont  amené  la 
guillotine  au  milieu  de  la  Convention  :  eh  bien  ,  at- 
telons-les à  la  guillotine  :  qu'ils  la  retirent  d'ici ,  et 
fermons  la  porle  après  eux.  (Les  applaudissemenls 
se  prolongent  pendant  très-longtemps.)  Ne  leur  com- 
parons pas  ces  patriotes  énergiques  qui  ont  rendu  de 
grands  services  à  la  patrie,  mais  qui  ensuite  ont  eu 
le  malheur  de  se  laisser  égarer. 

Il  est  des  hommes  bien  utiles  dans  les  moments 
orageux  d'une  révolution;  ce  sont  ces  esprits  exal- 
tés ,  ces  têtes  chaudes ,  ces  cœurs  brrtiants  qui  ne 
connaissent  pas  de  danger,  mais  ne  voient  que  le 
but ,  le  bonheur  de  la  patrie;  ces  hommes  sont  ex- 
cellents pour  renverser  les  trônes,  pour  détruire  tout 
ce  qui  blesse  l'égalité,  tout  ce  <|ui  choque  la  liberté. 
Mais  lorsqu'il  faut  rebâtir  sui*  les  ruines  qu'ils  ont 
amoncelées ,  ces  instruments  ne  sont  plus  de  mise  ; 
il  faut  en  suspendre  la  brûlante  activité.  Lorsqu'il 
s'agit  d'établir  un  gouvernement,  ce  ne  sont  plus 
des  têtes  eflervescentes  qu'il  faut,  ce  sont  des  U'tes 
froides  et  des  âmes  chaudes.  (Vifs  applaudisse* 
ments.) 

Il  est  possible  que  quelques  patriotes  égarés  aient 
été  incarcérés  ;  mais  au  inoins  leurs  femmes  el  leurs 
enfants  ne  craignent  point  qu'ils  soient  guillolinés 
sans  avoir  été  jugés,  sans  avoir  été  entendus,  et  aus- 
sitôt leur  entrée  dans  les  prisons.  Lorsque  la  Con- 
vention aura  prononcé  sur  le  sort  de  ceux  qui  ont 
couvert  ta  France  de  deuil,  elle  ne  tardera  sûrement 
pas  à  rendre  les  autres  à  la  liberté. 

J'invite  la  Convention  à  se  mettre  en  garde  contre 
la  tactique  qu'on  emploie.  Si  la  conduite  journalière 
de  Duhem  n'est  pas  dictée  par  des  intentions  crimi- 
nelles, si  elle  n'est  que  l'efietde  l'erreur,  elle  doit 
encore  être  réprimée.  11  ne  faut  pas  lui  laisser  per- 
dre son  pays  sans  le  vouloir  :  il  tant  punir  l'erreur, 
afin  d'empêcher  le  crime  de  venir  à  sa  suite.  Je  vote 
pour  que  Duhem  soit  envoyé  à  l'Abbaye,  mais  je 
demande  qu'auparavant  il  soit  entendu.  (Applaudis- 
sements.) 

Duhem  :  Avant  de  répondre  à  Legendre ,  je  répète 
ce  gue  j'ai  dit.  Quand  j'ai  parlé  de^  royalistes,  j'ai 
cite  les  théâtres  aristocratiques,  le  Palais-Royal  et  la  \ 
jeunesse  de  Fréron.  Certes  ce  n'est  pas  la  le  peuple  | 
français  ni  lajeuneste  des  armées.  Voilà  ce  que  j'ai 
dit,  et  les  hommes  de  bonne  foi  conviendront  que  je 
n'ai  pas  perdu  la  mémoire. 

Actuellement  on  dit  que  j'agite  les  armées,  que 
j'écris  à  des  canonniers.  Le  citoyen  à  qui  j'ai  écrit 
se  nomme  Flamand  ;  il  est  Uls  d'un  de  mes  amis  de 
Douai  ;  il  faisait  partie  de  la  garnison  de  Valencien- 
nes ,  et  il  était  d'une  compagnie  de  canonniers  qui  a 
bien  servi  pendant  le  siège.  Son  père  m'a  chargé  de 
lui  faire  passer  ce  qu'il  lui  donne  ;  je  lui  envoie  en 
même  temps  les  journaux  et  les  papiers  de  ma  dis- 
tntiution  qui  me  semblent  être  dans  le  sens  de  la 


828 


fiîvolulion.  Il  est  possible  que  je  lui  aie  (*cril  que 
les  patriotes  auraient  bieulôt  le  dessus;  ce  D*esl  pas 
là  un  crime  si  je  vois  des  patriotes  dans  ceux  qu  on 
persi^cute  solis  le  nom  de  terroristes  et  de  voleurs , 
«i  je  les  connais ,  moi ,  sous  le  titre  d'honnéles  gens, 
(On  rit.)  Il  est  peu  de  personnes  qu'on  traite  plus 
que  moi  de  terroriste.  Eh  bien  ,  je  délie  qui  que  ce 
soit  de  proUTer  que  j'aie  fait  traduire  un  seul  hom- 
me au  tribunal  révolutionnaire  dans  le  temps  que 
j'avais  le  pouvoir  en  main;  et  je  délie  aucun  de  mes 
collègues  d'avoir  lait  ce  que  j*ai  tait  sous  le  règne 
du  terrorisme ,  puisque  terrorisme  il  y  a ,  pour  pré- 
server la  ville  de  Lille  de  Tinfluence  de  Robespierre 
etdeLavalette. 

Je  suis  resté  aux  Jacobins  jusqu'à  la  fin,  parce  que 
je  n'ai  point  vu  qu  on  y  fit  le  mal ,  et  je  ne  le  crois 
pas  encore.  (Quelques  applaudissements  à  une  ex- 
trémité de  la  salle  et  dans  une  tribune.)  Je  suis  ren- 
tré, aux  Jacobins  au  commencemenl  de  frucli«lof. 
J'en  avais  été  chassé  pour  avoir  sauvé  du  tribunal 
révolutionnaire  cinq  citoyens  de  Lille  ;  mes  col  lègues 
Cambon  et  Dubois  Crancé,  qui  étaient  présents  à  la 
procédure ,  peuvent  vous  en  rendre  compte.  Je  suis 
rentré  dans  la  Société  lorsqu'on  Ta  réorganisée ,  et 
je  déclare  que  j'y  serais  encore,  si  cela  était  possible, 
parce  que ,  dans  mon  opinion,  on  n'y  a  point  fait  de 
mal.  (On  rit.) 

Je  déclare  aussi  que  j'aspire,  comme  tout  le  mon- 
de ,  après  le  jugement  de  mes  collègues  qui  sont  en 
cause.  Il  y  a  assez  longtemps  que  des  hommes  pro- 
bes, suivant  moi,  sont  sous  le  couteau  de  la  calooiuic; 
il  y  a  assez  longtemps  qu'on  les  traite  de  terroristes, 
lorsqu'ils  veulent  prendre  la  parole  pour.détVndre 
les  droits  du  peuple,  la  liberté  et  l'égalité.  (Quel- 
ques applaudissements  à  une  extrémité  de  la  salle  et 
dans  la  tribune  qui  est  au-dessus.  —  Ou  rit  dans 
toutes  les  autres  parties.)  Il  est  bien  étonnant  que  « 
pour  quelques  expressions  hasardées,  on  s'acharne 
contre  trois  hommes  probes  «  tandis  qu'on  ne  dit  rien 
à  ceux  qui  provoquent  l'assassinat. 
.  Oui ,  Fréron  a  dit  ouvertement  qu'il  fallait  tuer 
celte  partie  de  la  salle  qu'il  appelle  terroriste.  Je  ne 
l'ai  pas  dénoncé  parce  que  je  le  méprise  trop  pour 
cela.  Au  surplus,  la  Convention  n'a  pas  délibéré  sur 
le  décret  qui  me  concerne  ;  je  demande  qu'il  soit  re- 
mis aux  voix  i  et  j'y  obéirai  après,  comme  j'ai  tou- 
jours obéi  aux  lois. 

Cygoqnb  ;  Personne  n'a  réclamé  contre  le  décret  ; 
il  est  expédié ,  je  demande  qu'il  soit  exécuté.  (Ap- 
plaudissements.) 

Mathieu  :  Il  y  a  dans  la  discussion  actuelle  deux 
Questions  :  Tune  incidente ,  qui  regarde  Duheni  ; 
1  autre  principale,  qui  intéresse  la  chose  publique  ; 
c'est  à  celle-ci  que  je  m'attache.  Je  pense  que  la 
Convention  ne  doit  point  ordonner  qu'il  lui  sera  fait 
un  nouveau  rapport  sur  l'aOaire  dont  il  s'agit;  je 

Î)ense  qu'elle  ne  devait  point  la  renvoyer  ni  au  tri- 
)unal  criminel  du  département,  ni  au  tribunal  ré- 
volutionnaire, mais  a  l'accusateur  public  près  ce 
dernier  tribunal»  Je  vais  motiver  mou  opinion. 

Le  fait  qui  est  dénoncé  est  du  ressort  île  la  police; 
si  la  Convention  s'occupait  d'examiner  tous  les  écrits 
qui  peuvent  prêcher  plus  ou  moins  le  royalisme ,  il 
esl  clair  qu'elle  exercerait  les  fonctions  des  autorités 
subalternes;  qu'elle  abandonnerait  les  gronds  inté- 
rêts généraux ,  les  grands  intérêts  de  l'État,  pour 
exercer  la  surveillance  attribuée  à  la  police.  Elle  ne 
devait  pas  plus  rendre  le  décret  qu'elle  a  porté  con- 
tre Lacroix;. sa  décision  fut  dictée  par  le  patriotisme, 
rndis  n'est  pas  conforme  au  système  de  notre  législa- 
tion. Nos  lois  réservent  à  la  Convention  le  droit 
d'accuser  seulement  les  représentants  du  peuple  et 
les  géuéroux;  mais,  à  l'égard  des  simples  citoyens. 


quels  nue  soient  les  délits  dont  ils  sont  accusés,  G*est 
aux  tribunaux  à  les  poursuivre  ;  ainsi  le  décret  qUc 
la  Convention  a  rendu  ne  peut  être  considéré  que 
comme  un  simple  renvoi. 

Le  renvoi  fait  du  tribunal  criminel  du  départe- 
ment me  semble  extraordinaire  :  craignez- vous  que 
cet  homme  vous  échappe?  Le  renvoi  que  vous  avez 
lait  au  même  tribnbal  de  l'affaire  de  Pierre  Morin  de 
me  semble  pas  plus  conforme  aux  principes.  Je  ne 
crois  pas  que  vous  puissiez  faire  ainsi  des  tribunaux 
ordinaires  des  espèces  de  commissions  de  poUce  aux- 
quelles vous  renverrez  les  affaires  dont  vous  Voudrez 
vous  débarrasser.  (Applaudissements.)  Tout  ce  qui 
est  sur  la  ligne  des  autorités  constituées  doit  être 
ménagé  avec  respect  ;  né  çâtez  pas,  par  des  formes 
extraordinaires,  cette  belle  institution  des  jurée.  Que 
ceux  qui  ont  trahi  leur  pays  soient  bvrés  à  ce  tribu- 
nal terrible,  sur  le  frontispice  duquel  ils  lisent  la  loi 
exterminatrice  des  traîtres  ;  mais  aussi  que  les  juges 
soient  capables  de  connaître  des  délits  sur  lesquels 
ils  ont  à  prononcer.  Si  vous  convenez  mie  la  liberté 
de  la  presse  est  le  plus  ferme, appui  de  la  liberté , 
vous  devez  avoir  grand  soin  qu'on  ne  statue  pas  lé- 
gèrement sur  le  sort  de  ceux  qui  sont  accusés  d'en 
avoir  abusé. 

Le  délit  dont  est  accusé  Lacroix  esl  d*avoir  pro- 
voqué le  rétablissement  de  la  royauté.  Les  jures  du 
tribunal  criminel  du  département  sont  assurément 
de  bons  citoyens,  mais  ils  ne  sont  pas  choisis  da^s  U 
classe  d'hommes  capables  déjuger  un  ouvrage  com- 
me le  Spectateur,  ouvrage  qui  est  fait  avec  quelque 
talent.  Ces  citoyens  tiennent  aux  habitudes  douces 
de  la  société ,  mais  ils  n'ont  pas  l'ordre  d*idces  né- 
cessaire pour  bien  comprendre  et  pour  balancer  les 
grands  intérêts  sur  lesquels  ils  auraient  à  prononcer. 
Il  faut  que  l'opinion  de  l'accusé  soit  jugée  par  des 
hommes  dont  le  caractère  public  et  privé  les  mette 
en  état  d'apprécier  les  délits  et  les  intentions  du 

firévenu.  Il  faut,  pour  cela,  le  renvoyer  devant 
e  tribunal  révolutionnaire ,  dont  les  juges  ont  été 
choisis  parmi  des  citoyens  qui  ont  toutes  les  con- 
naissances qu'exigent  des  devoirs  aussi  pénibles  et 
aussi  délicats. 

Je  vais  plus  loin ,  et  je  dis  que  c'est  l'accusateur 
public  du  tribunal  révolutionnaire  que  vous  devez 
saisir  de  cette  affaire.  Lui  seul  peut  démêler  dans  un 
ouvrage  aussi  étendu  les  véritables  sentiments  de 
l'auteur;  lui  seul  peut  savoir,  d'après  cet  examen  , 
quelles  sont  les  conclusions  qu'il  pourra  prendre 
contre  lui.  Je  demande  donc  le  renvoi  à  l'accusateur 
public  près  le  tribunal  révolutionnaire. 

(La  suite  demain.)  , 

LIVIŒS  DIVERS. 

Histoire  abrogée  de  l'établissement  des  t'.uropêent  danà 
les  deux  liides;  ouvrage  utile  i  Téducationde  la  jeune&te; 
t  vol.  in-13,  brochet.  A  Paris,  chei  Théophile  Barroit  le 
jeune,  libraire»  quai  des  Auguslint,  tfi  18. 

—  Vocabulaire  de  nouveaux  prifltifs  français,  imités  des 
langues  latine,  italienne,  espagnole,  portugaise,  aUem^inde  et 
anglaise,  suivi  d'un  catalogue  raisonné  des  écrivains  les  pha 
célèbres  en  ces  cinq  langues ,  propre  ■  servir  d'institution 
pour  une  bibliothèque  choisie;  ouvrage  essentiel  aux  ora- 
teurs. Un  Tolume  in-S».  Prix  :  5  liv.,  et  S  liv.  16  s.  franc  da 
port,  pour  les  départements. 

A  Paris,  de  Pimprimerie  du  Cercle-Social,  d«  4,  rue  du 
Théâtre-Français;  et  chei  Deseone,  libniret  fk—  f  et  9,  Jar- 
din Egalité. 

Payements  à  la  trésorerie  nationale. 
Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  premieiy 
mbis  ;  il  sera  fait  i  tous  ceux  qui  seront  porteurs  d'inscripi 
lions  au  grand  livré.  Celui  pour  les  rentes  viagères  est  d« 
huit  mois  vingt  et  un  jours  de  l^nnée  1793  (vieux  itjle). 


GAZETTE  NATIONALE  oa  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  132.        Duodi  12  Pluviosb,  l'an  Se,  {Sanudi  31  Janvibb  1795,  vieux  ttyh.) 


POLITIQUE. 

ANGLETERKE. 

Londret,  le  ^janvier.  —  Une  chose  assez  remnrquabir, 
«tqui,  en  effet,  a  été  remarquée,  c'est  que,  lorsqu'il  a 
été  question  de  ?oter  l'Adresse  au  roi ,  aucun  des  pairs  qu 
des  membres  des  Communes  connus  sous  la  dénomination 
d'amis  du  roi  ne  se  réunirent  ni  ù  M.  Pitt  ni  au  lord  Pori- 
land  ;  d'où  l'on  conjecture  que  les  bruits  de  continua- 
tioD  de  guerre  pourraient  bien  être  faux. 

—  Le  demi*robespierrisme  de  nos  ministres,  qui  fai- 
saient faire  des  arrestations  à  tort  et  à  travers ,  a  enfin 
trouvé  une  digue  pour  le  contenir.  Partout  les  bommes 
courageux  se  prononcent  avec  vigueur  contre  les  actes  ar- 
bitraires multipliés  depuis  quelque  temps. 

1—  On  se  rappelle  l'accueil  plein  de  joie  que  les  habi- 
tants de  SbefDeld  firent  à  plusieurs  de  leurs  concitoyens 
lorsqu'ils  reparurent  dans  celte  ville ,  après  avoir  été  long- 
temps détenus  en  prison  par  le  gouvernement,  comme, 
prévenus  de  trahison.  La  même  chose  vient  d'arriver  à 
Pertb,  Walter  Miller,  de  cette  ville ,  était  demeuré  prison- 
nier pendant  huit  mois ,  sous  le  même  prétexte.  Lorsqu'on 
sot  qu'il  avait  été  mis  en  liberté  et  qu'il  s'approchait  de 
Perth,  les  habitants  sortirent  pour  aller  au-devant  de  lui 
et  lui  en  témoigner  leur  joie. 

—  A  Londres, 'ces  jours  derniers,  lord  Stanhope  a  donné 
une  fike  pour  célébrer  l'acquittement  de  M.  Joyce,  tuteur 
de  son  fils,  jugé  par  la  commission  spéciale.  Dans  une 
salle  destinée  pour  un  bal  des  lampes  formaient  cette  in- 
cription  :  Droit  des  jurés.  Plus  de  quatre  cents  personnes 
des  deux  sexes  se  sont  trouvées  à  cette  assemblée.  Lord 
Stanhope  a  foit  un  discours  analogue  à  la  circonstance» 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

De  Parîê,  —  Le  7  pluviôse,  entre  midi  et  une  heure, 
le  dégel  a  commencé  par  une  petite  pluie  douce,  qui  a 
augmenté  sensiblement  aux  approches  de  la  nuil.  La  plu- 
part des  rues ,  et  surtout  les  places  et  les  ponts,  offraient 
une  surface  polie,  un  verglas  général.  Personne  alors  n'o- 
sait sortir,  et  les  citoyens  qui  étaient  obligés  deTcgagner 
leurs  demeures  ne  pouvaient  y  parvenir  qu'après  des  chu- 
tes fréquentes  et  souvent  dangereuses  ;  quelques  person- 
nes même  ont  péri  ;  un  vieillard  s^est  tué  sur-le-champ  en 
tombant  sur  le  Pont  Neuf. 

Le  8  et  le  9,  le  temps  doux  a  continué  :  les  glaces  de  la 
Seine,  qui,  pendant  l'intervalle  des  grands  froids,  avait 
été  prise  dans  presque  toute  son  étendue,  se  sont  déta- 
chées peu  à  peu,  et  dans  la puit  du  9  au  10,  entre  onze 
heures  et  minuit  •  la  débâcle  s'est  opérée  sans  aucun 
accident  grave. 

Observalions  du  citoyen  Lalande, 

Quoique  faie  dit,dans  le  journal  du  5,que  l'influence  de  la 
lune  sur  les  changements  de  temps  n'était  pas  facile  à  dis- 
tinguer dans  le  climat  de  Paris,  je  dois  rapporter  une  ob- 
servation faite  par  un  habile  astronome  de  Moniauban, 
actuellement  à  Paris,  le  citoyen  Duc-Lachapelle;  c'est  que 
le  7,  jour  du  dégel ,  la  lune  venait  delruvcrscr  l'équateur 
pour  passer  dans  notre  hémisphère  boréal ,  et  qu'elle  était 
près  de  son  périgée.  Ces  deux  circonstances  réunies  sont 
sans  doute  les  plus  capables»  de  produire  un  cHet,  comme 
on  le  peut  voir  dans  les  Mémoires  sur  la  météorologie  que 
le  citoyen  Cotte  a  publiés  en  1788^  et  ce  Tait  mérite  i'être 
remarqué.  Le  citoyen  Lemonnicr,  qui  a  longtemps  ob- 
lervé  la  lune  et  «es  effets ,  assurait  en  Mbh  que  son  passage 
911  méridien  produisait  souvent  un  chungcmciit  de  vent, 
\^labies  de  Ualley^  p,  281.)  Lamndb. 

2^  S  crie.  -^ToiveX. 


Au  rédacteur. 

Paris,  9  pluviôse,  l'an  3*  de  la  république  fran^ 
çaise,  une  et  indivisible. 

a  Je  viens  de  lire  dans  ton  N«  127,  page  523,  un  ar- 
ticle relatif  au  général  Duhem^  que  tu  dis  avoir  été  arrêté 
à  Aix-la-Chapelle,  pour  raison  de  vol  et  de  trahison,  au 
moment  où  il  allait  prendre  le  commandement  de  l'armée 
de  Brest.  Comme  il  est  probable  que  la  faction  du  million 
doré,  actuellement  dominante,  n'a  fait  persécuter  ce  gé- 
néral sans-culottes  qu'à  cause  de  la  conformitéde  son  nom 
avec  le  mien  et  de  sa  bravoure  consignée  dans  les  bulletins 
de  la  Convention  nationale,  je  t'avertis  qu'il  n'est  ni  mon 
frère,  ni  mon  parent,  que  je  ne  l'ai  jamais  ni  vu  ni  connu* 
et  que  son  nom ,  ù  ce  que  m'ont  dit  plusieurs  de  mes  oo£ 
lègues,  s'écrit  Duhesme^^X,  non  Dukem, 

•  In' ère  cette  lettre  dans  ton  journal,  pour  rendre  hom- 
mage à  la  vérité  et  détruire  les  allusions  perfides  de  Parts* 
tocralie.  Salut. 

■  P.-J.  DuHEM,  représentant  du  peuple,  • 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Rovère, 
SUITE  DE  L\  SÉANCE  DU  9  PLUVIOSE. 

•*•  :  Président,  le  décret  contre  Duhcm  ne  peut 
pas  subsister  ;  il  est  faux  qu'il  ait  dit  que  la  CoDven-  • 
Uon  est  composée  de  royalistes.  {Oui,  oui  /  s*écrieut 
quelques  voix.) 

Clauzel  :  Il  ne  faut  pas  qu'une  partie  quelconque 
de  rassemblée  fasse  la  loi  à  l'assemblée  entière.  Pour 
terminer  cette  discussion,  je  demande  que  Ton  mette 
aux  voix  si  le  rapporteur  du  comité  de  législation 
aura  ou  n'aura  pas  la  parole. 

La  Convention  accorde  la  parole  au  rapporteur  du 
comité  de  législation. 

Fayau  :  Mais,  président,  il  semble 

Plusieurs  voix  :  A  Tordre  !  à  l'ordre  ! 

CuouDtEU  :  Je  demande  la  parole. 

*'*  :  Je  demande  que  la  séance  ne  puisse  être  levée 
qu'en  vertu  d'un  décret. 

Plusieurs  voix:  L'ordre  du  jour  ! 

La  Convention  passe  à  Tordre  du  jour. 

L'assemblée  décrète  de  nouveau  que  Pottier  sera 
entendu. 

Gay-Vernon  :  11  est  affreux  de  se  voir  privé  d'un 
colloguc  sans  avoir  pu  obtenir  la  parole  pour  le  de-    I 
fondre.  (Violents  murmures.) 

Cambon  :  Envoyez-nous  tous  à  TAbbaye!  (Ap-  ; 
platidissemcnts  de  quelques  membres  de  Textrd-  ^ 
mité.)  , 

.GAY-VEnNON  :  La  vie  n'est  rien  ;  nous  la  perdrons    1 
sans  peine.  (Out,  oui!  s'écrient  les  mêmes  membres. 
—  Grand  bruit.^ 

Choudicu  réclame  la  parole;  le  bniit  redouble;  le 
président  se  couvre  ;  le  calme  se  rétablit. 

Le  Président,  découvert  :  Citoyens,  l'assemblée 
0  décrété  que  Pottier  aurait  la  parole;  je  maintien- 
drai son  décret  au  péril  de  ma  vie.  (Vifs  applaudis- 
sements.) 

Ch.  Pottier,  au  nom  du  comité  de  législation: 
Votre  comité  vous  propose  de  rapporter  le  décret 

3ui  renvoie  au  tribunal  criminel  du  département 
c  Paris  la  connaissance  du  délit  contre-révolution- 
naire dont  est  prévenu  l'auteur  du  Spectateur  fran- 
çais. Voici  les  motifs  sur  lesquels  s'est  londé  son 
avis: 

42 


330 


10  La  seule  cause  du  renvoi  au  tribunal  crimi- 
nel  du  département  de  Paris  était  la  non-installa- 
tion du  tribunal  révolutionnaire,  motif  qui  n'existe 
plus,  puisque  par  un  décret  le  tribunal  s'est  formé 
en  sections. 

20  II  répugnerait  qu*il  existât  au  même  instant 
dans  la  même  commune  deux  tribunaux  jugeant  les 
crimes  contre-révolutionnaires  et  de  royalisme. 

30  Le  jury  du  tribunal  criminel  du  département 
est  établi  pour  juger  tous  les  délits  ordinaires,  et  n'a 
pas  été  institué  pour  les  délits  contre-révolution- 
naires; le  jury  du  tribunal  révolutionnaire  est  au 
contraire  un  jury  spécial  à  cet  égard.  En  conséquen- 
ce, il  propose  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  sur  le  rapport  de  son 
comité  de  li'gislation,  décrète  ce  qui  suit  : 

«  Toutes  les  affaires  dont  la  compétence  est  attri- 
buée au  tribunal  révolutionnaire,  et  qui,  avant  son 
installation,  auraient  été  renvoyées  au  tribunal  cri-- 
minel  du  département  de  Paris,  et  dont  cependant 
la  procédure  ne  serait  pas  commencée,  seront  jugées 
par  le  tribunal  révolutionnaire.  » 

Choudieu  :  Citoyens ,  la  difficulté  que  je  viens 
d'éprouver  pour  obtenir  la  parole,  lorsque  je  la  de- 
mandais pour  défendre  un  accusé,  me  prouve  qu'il 
est  plus  facile  d'étouffer  la  voix  d'un  représentant 
du  peuple  que  de  lui  répondre.  (Quelques  applau- 
dissements/) La  rédaction  du  décret  qui  envoie  Du- 
hem  à  TAbbaye  porte  sur  un  fait  faux  ;  Duhem  n'a 
point  dit....  (Violents  murmures.) 

Un  fnembre  :  11  appartenait  à  Tassassio  de  Phé- 
]ipi)eaux  d'employer  le  mensonge  pour  défendre 
Dunem. 

Choudieu:  La  Convention  nationale,  en  détrui- 
sant le  système  de  terreur  contre  lequel  nous  nobs 
sommes  tous  élevés,  n'a 

Plusieurs  membres  :  Tu  en  étais  le  partisan.  (Ap- 
plaudissements.) 

Choudieu  :  Je  disais  que  la  Convention,  en  détrui- 
sant le  système  de  terreur  qui  pesait  sur  toute  la 
France,  n'avait  pas  voulu  le  reporter  sur  une  partie 
des  membres  de  cette  assemblée.  Je  déclare  que  les 
murmures  pourront  étouffer  ma  voix,  mais  que  rien 
au  monde  ne  pourra  m'ôter  le  droit  d'émettre  mon 
opinion. 

Quelques  membres  de  l'extrémité  gauche  applau- 
dissent, et  se  lèvent  en  criant  qu'on  ne  pourra  étouf- 
fer leurs  voix. 

Choudieu  :  Citoyens ,  vous  ne  voulez  pas  sans 
donlr  qu'on  puisse  dire  que  la  crainte  ou  l'esprit  de 
parti  vous  aient  fiiit  prendre  telle  ou  telle  mesure,  et 
que  vous  avez  condamné  uu  de  vos  collègues  sans 
l'entendre?  (Murmures.) 

Saladin  :  Le  temps  n'est  pas  éloigné  où,  après 
avoir  lâchement  accusé  tes  collègues,  tu  les  empê- 
chais de  se  justifier  à  cette  barre,  (Vifs  applaudisse- 
ments.) 

Choudieu  :  Après  avoir  exprimé  mes  sentiments, 
je  reviens  au  sujet  de  la  discussion.  Je  soutiens  qUe 
le  décret  que  vous  avez  rendu  porte  sur  un  fait  faux 
et  calomnieux;  Duhem  n'a  point  insulté  la  Conven- 
tion nationale.  (Violents  murmures.)  Duhem  a  dit 
que  le  royalisme  et  l'aristocratie  relevaient  insolem- 
ment la  tête. 

Plusieurs  membres  :  Il  a  dit  qu'ils  triomphaient. 

Choudieu  :  Je  sais  bien  que  mes  intentions  seront 
calomniées,  mais  rien  ne  m'empêchera  de  dire  la 
vérité  ;  je  la  dirai  toujours  avec  la  franchise  d'un 
nomme  libre  et  d'un  républicain  dévoué.  (Applau- 
dissements de  quelques  membres.)  La  crainte  que 
les  pamphlets  me  calomnient  et  que  les  journaux 
dénaturent  mon  opinion  ne  m'empochera  pas  de 
parler.  (Mêmes  applaudissements.) 


Je  disais  donc  que  les  expressions  du  décret  étaient 
calomîiieuses,  et  la  Convention  nationale,  qui  ne 
tardera  pas  à  le  reconnaître,  va  s'empresser  sans 
doute  de  le  rapporter.  (Ris  et  rumeurs.^  En  second 
lieu,  le  décret  porte  simplement  que  Dunera  se  ren- 
dra à  TAbbaye  ;  mais  combien  de  temps  y  restera- 
t-il? 

Saladin  :  Nous  y  sommes  restés  treize  mois.  , 

Choudieu  :  Duhem  n'est  pas  coupable  ;  Duhem  a  j 
dit  la  vérité.  (L'extrémité  gauche  applaudit.)  J'en-  / 
tends  dire  à  mes  côtés  :  •  Et  toi  aussi  tu  iras  a  l'Ab- 
baye. •  Eh  bien,  citoyens,  je  m'honorerais  d'y  aller 
pour  avoir  émis  librement  mon  opinion.  (Nouveaux 
applaudissementsdes  mêmes  membres.)  Et  moi  aussi 
je  viens  vous  soumettre  mon  inquiétude  sur  les  pro- 
grès que  font  les  royalistes  et  les  aristocrates.  Je  ne 
puis  voir  de  sang-froid  dans  des  comités  révolution- 
naires des  hommes  de  la  Vendée,  des  hommes  qui 
viennent  vous  dire  que  le  calme  renaît  dans  cette 
partie  malheureuse  de  la  république ,  que  les  bri- 
gands déposent  leurs  armes,  tandis  que  chaque  jour 
les  brigands  assassinent  nos  braves  frères  alarmes. 
Je  soutiens  que  le  royalisme  et  l'aristocratie  relèvent 
la  tête,  que  Duhem  a  eu  raison  de  dire  ce  qu'il  a  dit; 
et,  dusse- je  être  persécuté  pour  cette  opinion,  ie 
demande  le  rapport  du  décret  qui  envoie  notre  col- 
lègue à  l'Abbaye. 

Gygognb  :  Citoyens,  en  affaiblissant  les  exprès 
sions  de  Duhem ,  le  préopinant  s'est  imaginé  qu'il 
ferait  rapporter  le  décret  juste  que  vous  veiiex  de 
rendre,  et  que  la  conduite  de  Duhem  avait  provoqué 
depuis  longtemps.  En  effet^  ne  vous  êtes-vous  pas 
aperçus  que  chaque  jour  Duhem  foit  tous  ses  efforts 
pour  Oter  à  cette  assemblée  la  dignité  et  le  calme 
-qui  lui  conviennent?  (Vifs  applaudissements.)  Ci- 
toyens ,  autrefois ,  lorsqu'on  voulait  perdre  des  dé- 
putés probes,  on  vôusaisait  :  •  Le  royalisme  triom- 
phe, ils  sont  les  chefs  des  royalistes;  •  aujourd'hui 
qu'on  veut  sauver  des  mandataires  infidèles  et  cou- 
pables, on  répète  la  même  chose  ;  mais  ie  peuple  et 
ses  représentants  connaissent  ce  petit  manég^e  ;  ils 
ne  seront  point,  dupes  de  cette  tactique  oflicieuse. 
(On  applaudit.)  Eh  quoi!  lâches,  c'est  au  moment 
où  nos  armées  victorieuses  sont  maîtresses  de  la  Hol» 
lande,  c'est  au  moment  où  nos  braves  défenseurs  ont 
combattu  et  triomphé  pour  la  république  et  la  li- 
berté ,  que  vous  osez  dire  que  le  royalisme  triom- 
phe !  Si  vous  connaissez  quelques  aristocrates  qui 
conservent  encore  de  coupables  espérances,  dési- 
gnez -  les  à  l'œil  vigilant  de  la  police ,  ils  seront 
punis^ 

Quelques  membres  de  Vexlrémité  gauche  :  Ils  s'as-    / 
semblent  tous  les  soirs  au  Palais-Royal. 

Gygogne  :  Si  vous  appelez  le  re'gime  actuel  le 
triomphe  du  royalisme  et  de  l'aristocratie ,  soyez 
francs,  dites  que  le  peuple  français  et  la  Convention 
nationale  sont  des  royalistes  et  des  aristocrates.  (Vils 
applaudissements  d'une  grande  partie  des  membres 
et  des  tribunes.)  , 

Quelques  membres  de  Vexirémiié  gauche:  Nous 
ne  disons  pas  cela. 

Cygogne  :  Le  défenseur  de  Duhem  a  dit  que  le  dé- 
cret rendu  contre  ce  député  portait  sur  des  faits  faux, 
et,  pour  prouver  la  vérité  de  son  assertion,  il  a  ré- 
pété ce  qu'avait  dit  précédemment  Duhem,  et  ce  qui 
avait  attiré  SUT  lui  I  indignation  de  l'assemblée  :  que 

le  royalisme  et  l'aristocratie  triomphaient (Les 

mêmes  interrupteurs  :  Ils  triomphent  au  Palais- 
Royal.)  Je  demande  que  la  Convention  passe  à 
l'ordre  du  jour  sur  la  demande  qui  a  été  faite  de 
rapporter  le  décret  rendu  contre  Duhem.  (On  ap- 
plaudit.) 

Andsé  Dunont  :  Citoyens,  si  quelque  chose  eat 


SSI 


fait  pour  dtonncr,  c'est  â*entendre  défendre  à  celte 
tribune  l'homme  oui  a  menti  à  sa  conscience  et  à  la 
France  entière  en  aisant  que  le  royalisme  et  Taristo- 
cralie  triomphaient. 

Quelques  membres  de  VeœtrémUé:  11  n'a  pas  dit 
cela. 

Andbé  Duhont:  Duhem  Ta  dit.  (Ovt,  oui /s'é- 
crient un  grand  nombre  de  membres. — Vifs  applau* 
dissements.)  Citoyens,  ne  laissons  point  tomber  ces 
paroles;  elles  sont  précieuses,  surtout  en  les  rap- 
prochant de  ce  que  disait  hier  le  même  homme  : 
■  P.itience,  messieurs  les  gouvernants,  votre  règne 
passera.  •  Oui ,  sans  doute ,  notre  règne  passera  ; 
nous  ne  voulons  pas  éterniser  le  pouvoir  dans  nos 
mains;  mais  avant  on  aura,  je  Tcspère,  oublié  le 
vôtre;  le  règne  ^u  crime  doit  Unir  avant  celui  de  la 
vertu.  (Vifs  applaudissements.) 

Citoyens,  on  cherche  à  avilir  la  Convention  na- 
tionale au  moment  où  elle  va  sceller  le  bonheur  du 
peuple.  N'en  doutez  pas;  Tintention  des  hommes  qui 
tiennent  cette  conduire  est  de  vous  empêcher  de 
conclure  la  paix;  ils  aperçoivent  cette  époque  si  dé- 
sirée des  Français  comme  devant  détruire  leurs  cou* 
pables  espérances  ;  ils  savent  bien  qu'une  fois  ren* 
très  dans  leurs  foyers  nos  vertueux  défenseurs  ne 
souffriront  pas  le  retour  affreux  du  système  atroce 
et  sanguinaire  que  nous  avons  détruit.  (Les  applau- 
dissements d'un  très-grand  nombre  de  membres  se 
mêlent  à  ceux  des  tribunes  et  se  prolongent.)  Les 
armées  de  la  république  n*ont  pas  triomphé  pour 
le  crime ,  elles  ont  triomphé  pour  la  liberté  et  le 
maintien  de  la  répubhque.  (Nouveaux  applaudisse- 
ments.) 

Plusieurs  membres  de  Vexlrémité  gauche  :  A  qui 
s*adresse  ce  que  tu  viens  de  dire  ? 

Andrb  Dumont  :  Aux  continuateurs  de  Robes- 
pierre ,  aux  hommes  qui  veulent  régner  sur  des 
cadavres  :  je  brave  leurs  poignards  assassins.  (  On 
applaudit.) 

Citoyens,  on  veut  avilir  la  Convention  nationale 
pour  l'empêcher  de  traiter  avec  les  gouvernements 
qui  demandent  la  paix.  Hier  on  nous  demandait  si 
nous  envoyions  un  ambassadeur  au  stathouder.  Pour 
envoyer  un  ambassadeur  au  stathouder,  il  faudrait 
être  aussi  royaliste  que  ceux  qui  nou^  accusent  de 
protéger  les  rois.  (On  applaudit.) 

Quelques  membres  de  Vexlrémité  :  Voilà  comme 
parlait  Robespierre. 

André  Dumont  :  Robespierre  et  ses  acolytes  ne 
voulaient  pas  qu'on  leur  répondît,  même  quand  ils 
accusaient  ;  vous  aurez  la  parole  après  moi.  (On  ap- 
plaudit.) 

Je  déclare  que,  si  vous  voulez  éviter  la  guerre  ci- 
vile, vous  devez  sévir  contre  ceux  qui  la  prêchent 
dans  cette  enceinte.  On  a  dit  tout  à  l'heure  que  le 
peuple  duré  faisait  la  guerre  aux  sans-culottes.  Ci- 
toyens, il  n'y  a  plus  qu'un  peuple  en  France,  celui 
qui  fait  en  ce  moment  la  guerre  aux  brigands  et  aux 
hommes  de  sang,  (Vifs  applaudissements.) 
^  Citoyens,  sachez  qu'on  organise  en  ce  moment 
l'avilissement  de  la  Convention  nationale; jusqu'à 
présent  on  n'avait  fait  que  sonder  le  terrain,  aujour- 
d'hui on  conspire  ouvertement,  on  espère  même  des 
succès.  Qu'ils  se  trompent,  les  scélérats  !  leurs  suc- 
cès.... c'est  la  mort.  (Vifs  et  nombreux  applaudisse- 
ments.) Quand  on  cnerche  à  avilir  la  Convention 
nationale,  quand  on  souffle  le  feu  de  la  guerre  civile, 
quand  un  décret  d'amnistie  est  rendu  en  faveur  des 
habitants  de  la  Vendée  qui  mettront  bas  les  armes, 
et  qu'on  vient  vous  dire  qu'ils  égorgent  nos  défen- 
seurs, n'est-ce  pas  montrer  évidemment  le  désir 
que  l'on  a  de  les  voir  reprendre  les  armes  contre  la 
lépubliquc.  {Oui^  oui /  s'écrient  un  grand  nombre 


de  membres.  —  Vifs  applaudissements.)  Je  demande 
que  le  décret  que  vous  avez  rendu  soit  maintenu,  et 
qu'on  y  ajoute  seulement  le  temps  pendant  lequel 
Duhem  restera  à  l'Abbaye.  (On  applaudit.) 

On  demande  que  la  discussion  soit  fermée* 

Cette  proposition  est  adoptée. 

Plusieurs  membres  de  l  extrémité  demandent  le 
rapport  du  décret  qui  envoie  Duhem  à  l'Abbaye. 

L  assemblée  passe  à  l'ordre  du  jour,  et  fixe  à  trois 
jours  le  terme  pendant  lequel  Duhem  restera  à  l'Ab- 
baye. (Vifs  applaudissements  d'une  grande  partie 
des  membres  et  des  tribunes.  —  Murmures  du  reste 
(le  l'assemblée.) 

Thirion  demande  la  parole.  —  Un  grand  nombre 
(les  membres'  le  rappelle  au  respect  qu'il  doit  aux 
lois  émanées  de  l'assemblée. 

Le  Président  :  J'annonce  a  la  Convention  qu'une 
dépiitation  des  patriotes  bataves  demande  à  être  ad« 
mise.  (On  applaudit.) 

Cambon  :  Nous  allons  tous  à  l'Abbaye.  {AUe%'y! 
s'écrient  un  grand  nombre  de  membres.) 

Le  tumulte  augmente  dans  la  partie  gauche  de  la 
salle  ;  le  président  es(  de  nouveau  obligé  de  se  cou- 
vrir. —  Le  calme  renaît. 

—  Des  citoyens  bataves  sont  admis  à  la  barre. 

Uoraleur  :  Dans  l'ivresse  universelle  que  font 
éprouver  les  événements  glorieux  qui  immortalisent 
à  jamais  les  armées  françaises,  les  députés  des  pa- 
triotes bataves, accompagiiésdes  infortunées  victimes 
de  la  révolution  de  1787,  s'empressent  d'apporter  à 
la  représentation  nationale  l'expression  hdèle  de 
leurs  vœux  et  de  leur  joie. 

Elles  sont  donc  enfin  réalisées  ces  promesses,  ac- 
quittées aujourd'hui  par  la  bravoure  d'un  peuple  de 
héros  :  le  stathouder  est  en  fuite,  et  l'Anglais  pâlit 
d'étonnement  et  d'épouvante. 

Elles  se  réaliseront  ces'promesses  faites  depuis  si 
longtemps  par  les  patriotes  bataves  de  se  montrer 
dignes  de  recouvrer  leur  liberté,  d'y  concourir  du 
moins  de  tout  leur  pouvoir. 

En  effet,  citoyens,  si  l'oppression  dans  laquelle  le 
peuple  hollandais  a  gémi  si  longtemps  ne  lui  a  pas 
permis  de  briser  lui-même,  et  sans  secours ,  des  ters 
rivés  par  la  force ,  tout  annonce  aujourd'hui ,  tout 
nous  permetde  vous  dire  en  son  nom  qu'il  ne  restera 
pas  en  arrière,  et  qu'il  méritera  les  bienfaits  de  la 
liberté. 

Partout  l'insurrection  éclate,  partout  le  patriote 
secoue  l'horrible  chaîne  qui  le  comprimait,  partout 
le  Français  libérateur  est  béni.  Vos  armées  marchent 
aux  acclamations  d'un  peuple  reconnaissant.  Am- 
sterdam ,  la  populeuse  Amsterdam  a  fait  retentir 
jusqu'aux  nues  le  bonheur  de  sa  délivrance;  elle  a 
invité  les  Français  à  entrer  dans  ses  murs  ;  elle  les  a 
reçus  en  amis,  en  frères. 

Citoyens  représentants,  si  ce  tableau  est  fidèle, 
s'il  n'est  que  l'exposé  des  faits,hésiterez-vousà  met- 
tre le  sceau  à  vos  dispositions  généreuses  en  remet- 
tant à  la  Hollande,  devenue  libre  par  vos  mains,  le 
prix,  l'inestimable  prix  de  l'indépendance  nationale, 
le  seul  moyen  de  rendre  cette  brillante  conquête 
réellement  utile  à  la  France  et  funeste  aux  despotes, 
dont  les  derniers  efibrts  vont  sans  doute  se  réunir 
bientôt  pour  tenter  de  vous  l'arracher? 

Pour  le  bonheur  commun  des  deux  républiques, 
pour  leur  intérêt  réciproque,  et  surtout  pour  le  main- 
lien  de  ce  que  vous  devez  attendre  de  nos  efforts,  nous 
vous  demandons,  législateurs,  nous  demandons  à  la 
représentation  nationale  de  la  France  qu'elle  daigne 
laisser  au  peuple  libre  de  nos  villes  et  de  nos  cam- 
pagnes le  choix  le  plus  prompt  de  ses  autorités  con- 
stituées. Toutes  les  régences  de  notre  pays  étaient 
composées  des  adhérents  du  stathouder,  des  amis  des 


332 


t 


Anglais» de  vos  ennemis  nalurols,  de  nos  oppres- 
seurs ;  il  est  urgent  de  les  remplacer  :  rcxislencc 
physfque  et  morale  de  nos  contrées  l'exige,  le  com- 
mande, et  tout  est  perdu  s'il  ne  s'établit  d'abord  un 
gouvernement  provisoire  qui  veille  à  la  marine,  aux 
digues,  aux  perceptions ,  au  commerce,  et  à  tout  ce 
qui  constitue  notre  pays  fertile. 

Ce  n'est  qu^ainsi,  ce  n'est  que  par  la  voie  de  ma- 
gistrats choisis  par  le  petiple  dans  des  assemblées 
provisoires,  sous  les  yeux  des  représentants  du  peu- 
île  français,  que  vous  préviendriez,  citoyens,  tous 
ies  maux  que  la  désorganisation  entraînerait,  et 
iqui,  plus  chez  nous  que  partout  ailleurs ,  seraient 
irréparables. 

A  ce  prix ,  citoyens,  tous  les  sacrifices  paraîtront 
légers  au  peuple  batave  ;  il  volera  lui-même  au-de- 
vant des  efforts  de  tout  genre  que  vous  ayez  droit 
d'exiger  de  sa  part  :  l'enthousiasme  de  Tindépen- 
dance  recouvrée  le  rendra  capable  de  tout. 

Citoyens,  le  droit  de  conquête  vient  de  vous  ac- 

3uérir  une  nation  industrieuse,  énergique,  et  digne 
e  quelques  égards  par  ses  anciens  travaux  pour  In 
liberté  ;  une  politique  bien  entendue  et  votre  équité 
feront  le  reste.  Les  Bataves  méritent  d'être  libres  : 
en  brisant  leurs  fers,  la  reconnaissance  en  crée  pour 
eux  de  bien  plus  doux  qu'ils  feront  gloire  de  mon 
trer  à  tout  l'univers.  (Vils  applaudissements.) 

Le  Pbésident,  à  la  députation  :  Citoyens  bataves, 
l'amour  de  la  liberté,  la  confiance  qu'inspire  la 
loyauté  de  la  nation  française  ont  dirigé  vos  pas  vers 
la  Convention  nationale;  vous  la  félicitez  sur  ses 
travaux  et  sur  la  gloire  des  héros  qui  terrassent  et 
dispersent  les  armées  des  despotes  coalisés. 

Cette  époque  à  jamais  mémorable  dans  les  fastes 
des  nations  doit  faire  tressaillir  tous  les  amis  de  la 
liberté.  Ils  sont  tous  frères  ;  la  nature  est  leur  mère 
commune  ;  elle  leur  a  distribué  des  druits  égaux  ;  et 
ceux  qui,  dans  votre  patrfe ,  n'ont  pas  dégénéré  de 
'  l'antique  vertu  qu'elle  s'était  acquise  autrefois,  doi- 
vent éprouver  une  sensation  bien  délicieuse  en 
voyant  flotter  dans  la  Hollande  le  signe  caractéristi- 
que de  la  liberté,  l'étendard  tricolore. 

Comptez,  citoyens  bataves,  sur  les  principes  in- 
variables oui  conduiront  désormais  la  nation  fran- 
çaise, dégagée  de  toute  tyrannie.  Si  ses  ennemis  s'en 
rapportent  a  sa  loyauté,  à  sa  générosité,  que  ne  doi- 
vent pas  espérer  ceux  qui  chérissent  la  liberté  !  Ren- 
dus bientôt  dans  votre  patrie ,  car  votre  zèle  vous 
appelle  sans  doute  auprès  des  phalanges  victorieu- 
ses, vous  verrez  par  vous-mêmes  que  la  justice,  la 
probité,  l'humanité,  le  droit  des  gens  sont  des  vertus 
et  des  devoirs  pour  le  peuple  français,  pour  ses  ar- 
mées et  pour  ses  représentants.  (Applaudissements 
unanimes  et  réitérés.) 

La  Convention  décrète  la  mention  honorable  et 
l'insertion  au  Bulletin  de  l'Adresse  des  Bataves. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 

SÉANCE  DU   10  PLUVIOSE. 

Le  Président  :  J'ai  reçu  hier,  à  la  fin  de  la  séance, 
la  lettre  suivante  : 

Duhetn  au  président  de  la  Convention  nationale. 

A  TAbbaye,  le  9  pluviôse,  i  quatre  heures  moins 
UD  quart. 

•  Citoyen  président,  en  vertu  du  décret  je  me  suis 
rendu  ft  TAbbaye*  Comme  on  ne  reçoit  plus  de  prisonniers 
dans  cette  maison  qu'on  répare,  j'y  aticnds  les  ordres  de 
la  Convention,  pour  me  rendre  dans  le  local  qu'elle  me 
désignera. 

a  Salât  républieain. 

a  Ddhev.  • 


Un  membre ,  au  nom  du  comité  de  sûreté  géné- 
rale, doune  lecture  de  l'arrêté  suivant  : 

Du  9  pluviôse,  Vm  3«  de  la  république  frao^alae, 
UDC  et  iodivitible. 

•  Lecomiié  de  sûreté  générale,  délibérant  sur  la  letin 
écrite  par  le  représentant  du  peuplé  Duhem ,  détenu  à 
TAbbaye  par  décret  de  la  Convention  nationale,  en  date 
d'aujourd'hui,  annonçant  que  celte  maison  n'est  plus  une 
maison  de  détention,  qu'il  ne  peut  y  être  écroué,  arrête 
qu'un  secrétaire  commis  du  comité  de  sQreté  générale  se 
transportera  de  suite  k  l'Abbaye,  pour  sMnrormer  et  véri« 
fier  si  la  commission  des  adroinistralions  civiles ,  police  ei 
tribunaux,  a  exécuté  les  ordres  donnés  par  le  oomilé, 
diaprés  la  lettre  communiquée  par  le  président  de  la  Goii« 
▼ention,  reçue  après  la  séance  levée,  et  s'assurer  si  le  re- 
présentant du  peuple  Duhem  est  pourvu  de  toutes  les  cho- 
ses nécessaires  pour  sa  commodité  et  sa  noarriture,  et  s'il 
désire  d'être  transféré  ailleurs. 

a  Signé  Ui  repréuntanti  du  peuple  composant  te  co- 
mité  de  tûreté  générale,  • 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  la  lec- 
ture de  la  lettre  du  représentant  du  peuple  Duhem ,  qui 
annonce  que,  s'étanl  rendu  hier  à  l'Abbaye^  on  lui  a  dé- 
claré qu'on  n'y  recevait  plus  de  prisonniers,  el  qu'il  attend 
les  ordres  de  la  Convention  pour  savoir  le  local  qu'elle 
lui  désignera ,  la  Conventiou  nationale  décrète  qu'il  se 
rendra  chez  lui,  ■ 

Foussedoire  :  Je  demande  k  faire  part  à  la  Con- 
vention d'une  dénonciation  consignée  contre  moi 
dans  un  journal  intitulé  le  Messager  du  soir.  (Quel- 
ques murmures.) 
^  TXllien  :  Je  aemande  que  la  parole  soit  mainte- 
nue à  mon  collègue.  Je  la  demanderai  ensuite  pour 
dénoncer  un  homme  qui  voudrait  amener  la  guerre 
civile.  (Applaudissements.) 

Foussedoire  continue  ;  il  lit  la  dénonciatioD  dont 
il  a  parlé,  et  dans  laquelle  on  Taccuse  d'être  un  ter- 
roriste ,  et  d'avoir  favorisé  les  hommes  de  sang  à 
Strasbourg  et  dans  le  département  du  Bas-Rhin.  11 
ajoute  :  «  Cette  dénonciation  est  de  la  fausseté  la  plus 
insigne.  Les  [premiers  mots  que  j'aie  dits  dans  Stras- 
bourg ont  été  ceux-ci  :  «  La  terreur  est  l'arme  de  la 

•  tyrannie  ;  elle  doit  cesser  de  comprimer  vos  âmes. 

•  La  Convention  et  le  comité  de  salut  public  m*onC 
«  chargé  de  vous  assurer  que  la  justice  seule  ré- 
«  gnera  désormais  parmi  vous.  •  Ma  conduite  a  tou- 
jours été  conforme  à  mes  principes  et  à  mon  lan- 
gage. Plus  de  dix  mois  avant  le  9  thermidor  j'avais 

Srofessé  les  principes  que  la  Convention  a  rappelés 
ans  cette  journée.  Aucun  patriote  n'a  à  se  plaindre 
de  moi;  je  n'ai  envoyé  personne  au  tribunal  révo- 
lutionnaire; je  n'ai  levé  aucune  taxe  de  ce  nom. 
Noiset,  Fauteur  de  cette  dénonciation,  ne  m'accuse 
une  parce  qu'il  est  le  seul  homme  du  département 
du  Bas-Bhiii  dont  je  n'aie  jamais  voulu  ordonner  la 
mise  en  liberté;  c'est  le  comité  de  sûreté  générale 
qui  a  pris  sur  lui  de  l'élargir.  Je  prends  à  témoins 
lesdéputationsdes  Vosges,  du  Haut  et  du  Bas-Rhin, 
de  la  conduite  que  j'ai  tenue  dansées  départements. 
Je  n'y  ai  fait  que  le  bien ,  et  je  défie  qu'on  dise  le 
contraire.  » 

Bentabole  :  S'il  ne  s'agissait  que  d'un  fait  relatif 
à  la  conduite  de  Foussedoire  comme  particulier,  je 
pense  qu'on  ne  devrait  pas  s'en  occuper,  el  lui  lais- 
ser le  soin  de  poursuivre  le  dénonciateur  devant  les 
tribunaux  s*il  le  jugeait  convenable  ;  mais  on  dé- 
nonce Foussedoire  comme  représentant  du  peuple  ; 
on  attaque  ses  opérations  comme  contrairesaux  prin- 
cipes  que  la  Convention  professe.  Je  soutiens  que 
Foussedoire  a  fait  son  devoir;  j'atteste  les  députés 
de  mon  département  ;  ils  diront  tous  qu'il  a  bien 
rempli  sa  mission  ;  ils  diront  tous  que,  loin  d'avoir 
favorisé  les  terroristes ,  il  les  a  destitués  et  a  mis  a 


333 


leur  place  des  hommes  qui  avaient  ét^  persécutés 
par  Saint-Just  et  Lebas.  La  ddnouciation  faite  contre 
lui  est  L*ouvraj^e  de  la  vengeance.  Lorsque  le  comité 
de  sûreté  générale  proposa  d'envoyer  le  représen- 
tant Bailly  a  Strasbourg,  ce  n'était  pas  pour  réformer 
les  opérations  de  Foussedoire,  que  le  comité  avait 
toutes  approuvées,  c'était  parce  qu'une  ville  fron- 
tière exige  toujours  une  grande  surveillance.  Bailly 
a  été  surpris  par  des  intrigants;  le  comité  lui  a  écrit 
pour  l'en  avertir. 

Comme  ces  sortes  de  dénonciations  n*ont  d'autre 
but  que  d'avilir  la  représentation  nationale  et  de 
jeter  de  la  défaveur  sur  les  membres  employés  par 
le  gouvernement  Je  demande  que  celle-ci  soit  ren- 
voyés aux  trois  comités. 

Plusieurs  voix  :  Non,  non  !  l'ordre  du  jour  ! 

Clauzbl  :  On  demande  l'ordre  du  jour.  S'il  était 
|K)ssible  que  la  Convention  s'occupât  des  dénoncia- 
tions dictées  par  la  vengeance ,  elle  verrait  bientôt 
tous  les  aristocrates  suivre  ce  plan,  et  lui  faire  per- 
dre un  temps  précieux  à  examiper  des  dénoncia- 
tions vagues.  Je  demande  l'ordre  du  jour. 

La  Convention  passe  à  l'ordre  du  jour.  (  Applau- 
dissements.) 

Tallien:  S'il  ne  s'agissait  que  de  répondre  à  une 
dénonciation  particulière  ou  de  repousser  une  in- 
dividualité ,  je  ne  serais  pas  monté  à  cette  tribune  ; 
car  on  ne  devrait  jamais  y  parler  que  de  l'intérêt 
général  :  on  devrait  oublier,  en  y  montant,  l'intérêt 
particulier. 

Tout  fonctionnaire  public  est  soumis  à  la  censure 
du  peuple;  il  ne  peut  empêcher  que  la  malignité  ne 
transforme  en  crime  lés  actions  les  plus  innocen- 
tes; mais  lorsqu'on  veut  provoquer  à  l'insurrec- 
tion ,  lorsque  dfes  hommes  veulent  avilir  la  Conven- 
tion nationale,  il  est  impossible  de  garder  le  silence. 
Je  n'attaquerai  point  la  liberté  de  la  presse  ;  mais  je 
▼eux  seulement  avertir  la  république  qu'il  est  aussi 
des  hommes  qui  s'entendent  avec  ses  ennemis  pour 
ramener  le  trouble  quand  le  calme  se  rétablit ,  qui 
cherchent  à  exciter  les  citoyens  les  uns  contre  les 
autres  et  à  détruire  la  Convention.  Ils  n'y  parvien- 
dront pas  ;  le  peuple  est  trop  grand  pour  se  prêter 
aux  passions  furieuses  de  quelques  mdividus.  Ne 
savent-ils  donc  pas,  ces  hommes  qui  crient  contre 
ceux  qui  se  rallient  au  ci-devant  Palais-Royal ,  que 
c'est  la  où  la  liberté  prit  naissance,  que  c'est  là  où, 

Sour  la  première  fois,  la  cocarde  nationale  fut  ar- 
orée ,  que  c'est  là  où  Camille  Desmoulins,  qui  fut 
assassiné  par  les  ennemis  de  la  justice,  présenta  aux 
vrais  amis  de  la  liberté  ce  signe  sacré  d'insurrection 
et  de  ralliement  ?  (Applaudissements.) 

Je  viens  vous  dénoncer,  non  pas  l'ouvrage ,  mais 
Fbomme  qui  veut  amener  la  guerre  civile  ;  c'est  le 
journal  de  Gracchus  Babœuf .  dans  leq^uel  il  dit  que 
Coblentz  a  ici  des  représentants;  qu'ils  siègent  en 
majorité  dans  le  palais  des  Tuileries  ;  que  le  peuple 
doit  s'insurger  s'il  ne  vent  pas  perdre  sa  liberté; 
qu'il  doit  tout  tenter;  que  l'insurrection  doit  éclater 
sous  peu  de  temps,  parce  que  ses  droits  ont  été 
usurpes.  Cet  homme  n'est  qu'un  mannequin  mis  en 
avant,  et  il  est  ici  un  individu  qui  lui  a  parlé ,  qui  a 
eu  l'épreuve, corrigée  de  sa  main,  d'un  ouvrage 
de  Babœuf.  Cet  individu  est  là,  il  m'entend.  Cela 
suffît. 

Piusieun  voix  :  Nomme-le  ! 
Tallien  :  C'est  Fouché.  Je  le  répète,  je  n'attaque 
point  la  liberté  de  la  presse;  personne  n'en  sera  ja- 
mais puisque  moi  le  défenseur;  mais  je  veux  ajou- 
ter aux  nombreux  tableaux  des  scélérats  qui  veulent 
à  tout  prix  exciter  la  guerre  civile  et  en  donner  le 
signal  dans  la  Convention  même.  (Applnudisse- 
uieuts.)  Je  vous  combattrai  toujours  avec  le  même 


courage;  rien  ne  m*en  imposera.  D'autres  hommes i 
me  dit-on,  ont  aussi  prêché  l'insurrection;  eh  bien , 
que  les  autres  hommes  soient  aussi  punis.  Le  peuple 
a  les  yeux  ouverts  sur  toutes  vos  manœuvres;  il 
voit  que  vous  voulez  tout  brouiller.  (  Applaudisse- 
ments. )  Il  voit  parmi  vous  beaucoup  de  gens  qui 
sont  dupes  de  quatre  ou  cinq  scélérats.  Eh  uien,  je 
vous  le  déclare  de  la  manière  la  plus  solennelle ,  la 
majorité  de  cette  assemblée  ne  souffrira  pas  que  ces 
scélérats  parviennent  à  leur  but.  (Quelques  mur- 
mures dans  une  extrémité  de  la  salle. — La  majorité 
de  la  Convention  se  lève  en  criant  :  Oui,  out/ — On 
applaudit.) 

Ne  croyez  pas  que  nous  en  soyons  eneore  au 
temps  où ,  à  l'iHde  d'une  insurrection  factice  ,  en 
traînant  quelques  canons  dans  les  rues,  on  pouvait 
venir  demander  ici  la  tête  des  représentants  du 
peuple  qui  avaient  le  mieux  servi  leur  patrie,  où  ou 
pouvait  les  égorger  encore  dans  la  personne  de  leurs 
femmes  et  de  leurs  enfants.  Non,  ce  temps  n'est  pi  us. 
(Vifs  applaudissements.)  11  est  encore  une  petite 
portion  du  peuple  à  laquelle  vous  avez  persuadé 
que  la  Convention  a  usurpé  ses  droits;  mais  n'est-ce 
pas  vous  qui  les  premiers  les  avez  usurpés  ?  n'est-ce 
pas  vous  qui  n'avez  pas  même  laissé  au  peuple  le 
aroit  de  nommer  un  commissaire  de  police?  n'est-ce 
pas  vous  qui  avez  institué  le  gouvernement  révolu 
tionnaire?  n'est-ce  pas  vous  qui  avez  mis  à  l'ordre 
du  jour  la  terreur  et  la  mort?  (  Vifs  applaudisse- 
ments. )  Et  lorsqu'on  s'occupe  de  réparer  tous  les 
maux  que  vous  avez  faits,  lorsque  nos  braves  défen- 
seurs vont  partout  planter  le  drapeau  tricolore , 
vous  calomniez  leurs  frères  et  leurs  amis  !  Je  vous 
demande  de  quoi  sont  composées  nos  braves  armées? 
N'est-ce  pas  des  frères ,  des  amis  de  cette  jeunesse 
que  vous  dites  appartenir  à  quelques  individus,  mais 
qui  n'appartient  qu'à  la  patrie? (Vifs  applaudisse- 
ments.) C'est  au  moment  où  l'esprit  public  se  mani- 
feste de  la  manière  la  plus  énergiôue  contre  les 
hommes  qui  ont  porté  la  désolation  uans  notre  pa- 
trie, c'est  lorsqu'au  règne  du  brigandage  succède  le 
règne  des  lois,  que  vous  voulez  exciter  la  guerre  ci- 
vile ;  mais  vous  ne  l'aurez  pas  !  (  Vifs  applaudi^- 
ments.  )  Rangez-vous,  vous,  vos  écrivains  et  tous  les 
gens  de  votre  suite,  rangez-vous  sous  la  même  ban- 
nière; nous,  ralliés  autour  de  cette  arche  sainte, 
réunis  à  tous  les  vrais  Français,  nous  nous  présente- 
rons à  vous,  et  d'un  seul  regard  nous  vous  anéan- 
tirons ;  car  le  regard  du  peuple  est  le  coup  de 
foudre  pour  ses  ennemis.  (  Vifs  applaudissements.  ) 
Rappelez- vous  (]uel  fut  le  sort  de  votre  patron,  de 
Robespierre  ;  hier  il  dominait  la  France,  aujour- 
d'hui il  est  abandonné  de  la  France.  Tous  les  yeux 
seront  bientôt  ouverts,  bientôt  aussi  vous  serez 
abandonnés  de  tout  le  monde;  c'est  le  sort  de  tous 
ceux  qui  ont  pactisé  avec  le  crime.  (On  applaudit.) 

Voilà  ce  que  je  voulais  dire  pour  prouver  que  les 
hommes  que  l'on  accuse  de  pusillanimité  sont  réso- 
lus de  mourir  à  leur  poste  plutôt  que  de  souffrir 
qu'il  y  ait  d'insurrection  contre  toute  autre  puis- 
sance que  celle  de  la  tyrannie. 

Dépositaires  de  la  confiance  du  peuple,  nous  sau- 
rons la  conserver  jusqu'au  moment  où  il  n'y  aura 
plus  de  dangers  pour  sa  liberté ,  où  il  pourra  jouir 
de  ses  droits.  En  vain  vous  voudriez  rejeter  sur  nous 
vos  usurpations,  vos  vols,  vos  assassinats,  vos  infa- 
mies :  on  sait  à  oui  tout  cela  doit  être  restitué.  Je 
ne  prends  pas  de  conclusion  contre  Babœuf;  le 
mépris  public  lui  appartient.  (Vifs  applaudisse- 
ments.) 

Fouché  (  de  Nantes  )  :  Un  républicain  ne  doit 
compte  de  ses  relations  qu'à  la  loi;  je  suis  prêt  à  les 
faire  connaître  quand  elle  me  l'ordonnera  :  il  n'en 


3S4 


esl  pas  une  qui  ne  m*honore.  Assez  d  autres  ont  des 
relolionsavec  la  fortune  et  le  pouvoir  ;  il  nVstpas 
encore  défendu  d'en  avoir  avec  le  malheur  op- 
primé. Oui,  j'ai  eu  des  relations  avec  Babœuf ;  et 
puisque  Tallien  vient  d'en  indiquer  une  à  la  Con- 
vention nationale,  je  dois  dire  que  Babœuf  m'a  ef- 
fectivement envoyé  une  épreuve  d'une  brochure 
contre  le  détret  qui  rappelle  soixante-treiie  de  nos 
collègues  dans  notre  sein.  Cette  brochure  n'a  pas 
clé  publiée;  c'est  vous  dire  assez  quelle  a  été  ma 
conduite  à  cet  e'gard. 

Au  reste ,  les  actions  de  toute  ma  vie  défient  les 
calomnies  de  mes  ennemis.  On  est  fort  quand  on  a 
servi  sincèrement  la  cause  du  peuple ,  et  qu'on  a  le 
courage  de  s'en  enorgueillir  devant  la  Convention 
nationale ,  en  présence  d'une  poignée  de  factieux  et 
de  dominateurs  qui ,  après  s  être  agités  pour  des 
jouissances  coupables,  veulent  aujourd'hui  nous 
agiter,  nous  diviser  pour  acquérir  l'impunité. 

—  Un  des  secrétaires  lit  la  lettre  suivante  : 

Florent  Guyot ,  repréitntant  du  peuple  en  mission 
dans  les  départements  de  la  Somme,  du  Nord  et 
du  Pas-de-Calais. 

Aniens,  le  7  pluviôse,  fan  5e  de  la  république 
une  et  indivisible. 

•  Je  ne  connais  pas  encore  asseï  la  commune  d*Amiens 
pour  décider  de  son  esprit  public;  mais  le  peuple  01*7 
parait  calme  «paisible,  K  aime  la  révolution.  Chaque  ci- 
toyen n*a  que  trois  quarterons  de  puin  par  jour,  et  per- 
sonne n'y  murmure.  Je  préfère  un  trait  de  ce  genre  à 
toutes  ces  belles  phrases  de  ces  messieurs  qui^  après  avoir 
bien  dîné,  crient  de  toute  la  force  de  Heurs  poumons  qu'il 
ne  faut  à  des  hommes  libres  que  du  pain  et  du  fer. 

«  Que  la  Convention  nationale  marche  toujours  d'un 
pas  ferme  dans  les  principes  de  la  justice,  et  qu*elle  soit 
assurée  que  tout  le  peuple  la  regardjp  comme  son  unique 
point  de  ralliement  :  c'est  Topiniou  bien  prononcée  de  tous 
les  citoyens  des  départements  où  {c  suis  en  mission. 

•  Salut  et  fraternité.  Guyot.  ■ 
Marbc,  au  nom  du  comité  de  solut  public:  Le 

général  Duhesme, employé  à  l'armée  de  Sambre-et- 
Mefise,  et  qui  s'est  conduitd'une  manière  distinguée 
dans  le  cours  de  la  campagne  dernière  ,  s'est  plaint 
au  comité  de  salut  public  de  ce  que,  dans  quelques 
journaux,  il  a  été  dit  que  ce  général  avait  été  mis 
en  état  d'arrestation.  Le  comité,  ne  pouvant  attri- 
buer cette  erreur  qu'à  la  malveillnnci»,  a  cru  devoir 
en  prévenir  le  mauvais  effet  en  annonçant  h  la  Con- 
vention nationale,  atin  que  tout  le  monde  en  fût  in- 
formé, que,  loin  d'avoir  aucun  sujet  de  plainte  con- 
tre le  général  Duhesme,  il  vient  au  contraire  de  lui 
confier  une  mission  très-importante. 

RoGBR-Ducos  :  Le  général  Duhesme  a  été  si  mal 
à  propos  inculpé,  et  s  est  au  contraire  si  courageu- 
sement conduit,  qu'il  a  sent  blessures  sur  son  corps. 
Malade  des  suites  de  ses  blessures,  il  a  réclamé,  le 
mois  de  nivôse  dernier,  un  congé  de  deux  mois  pour 
se  rétablir;  étant  à  cette  époque  en  mission  à  Valen- 
ciennes,  je  lui  ai  accordé  ce  congé. 

La  Convention  nationale  décrète  l'insertion  au 
Bulletin  de  ces  déclarations. 

TuiRiON  :  Le  citoyen  Adam  ,  nommé  juré  au  tri- 
bunal révolutionnaire  le  17  nivôse,  et  dénoncé  le  4 
pluviôse  par  Merlin  (de  Thionville)  comme  agent  de 
Robespierre,  a  été  si  peu  le  complice  de  ce  traître, 
que  le  16  thermidor  il  est  venu  ,  au  nom  de  la  com- 
mune de  Metz,  féliciter  la  Convention  nationale  sur 
la  journée  mémorable  du  10  lliorniidor,  et  que  le  3 
nivôse  dernier  il  a  été  continue  dans  ses  fonctions 
d'officiçr  de  police  à  l'armée  de  la  Moselle  par  le  ci- 
tOQ  Merlio  lui-même. 


Cependant  je  ne  m'oppose  pas  à  ce  que  le  cftoren' 
Adam  soit  remplacé  dans  les  fonctions  de  jure  du 
tribunal  révolutionnaire ,  dont  il  avait  lui-même 
sollicité  sa  démission;  mais,  pour  qu'il  ne  reste  au- 
cun nuage  sur  sa  réputation  de  probité  et  de  ci- 
visme, je  demande  que  le  comité  de  sûreté  générale 
examine  la  conduite  du  citoyen  Adam,  afin  que,  s'il 
est  un  agent  de  Robespierre ,  il  soit  puni  comme  tel , 
et  qu'au  contraire  il  conserve  l'estime  de  ses  conci- 
toyens, s'il  est  véritablement  innocent. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

— Marec,  au  nom  du  comité  de  salut  public,  pro-  - 
pose  la  rédaction  suivante  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  son  co- 
mité de  salut  public,  décrMe  que  son  décret  du  7  de  ce 
mois,  concernant  l*envol  en  mission  du  repiéscntant  du 
peuple  Letourneur  (de  la  Manche),  sera  rédigé  ainsi  qu'il 
sait: 

»  La  Convention  nationale  décrète  que  le  représentant 
du  peuple  Letourneur  (de  la  Manche)  n>mplacera,  près 
l'armée  navale  de  la  Mi^diterranée  et  près  l'armée  d'Italie, 
le  représentant  du  peuple  Jean-Bon  Saint*Andrè,  dont  la 
mission  est  terminée.  Le  représentant  Letourneur  est  \n* 
vesti  de  mêmes  pouvoirs  délégués  aux  représenUiulf  en 
mission  près  les  armées.  » 

Cette  rédaction  est  adopté. 

Jars-Panvillier,  au  nom  du  comité  des  secours 
publics:  Citoyens,  le  comité  des  secours  publics, 
toujours  soigneux  de  seconder  vos  vues  ae  bi^n-' 
faisance,  s'est  occupé  des  moyens  d'accélérer  Vexé" 
cution  de  la  loi  du  l^^r  de  ce  mois  concernant  la  re- 
mise gratuite  des  habillements,  linges,  chaussures 
et  lits  mis  en  gage  au  Mont-de-Piéle  pour  des  prêts 
de  100  liv.  et  au-dessous. 

Il  s'est  environné  de  toutes  les  lumières  qu'il  a 
jugées  propres  à  l'éclairer  sur  ce  point  important; 
mais,  à  cOté  du  bienfait  qui  doit  résulter  de  la  loi 
pour  les  véritables  indigents,  il  a  vu  des  abus  rui- 
neux dont  l'insatiable  cupidité  et  la  prodigue  incon- 
duite se  disposent  à  profiter. 

C'est  sur  ces  abus  et  sur  les  moyens  de  les  prévc» 
nir  autant  qu'il  esl  possible  que  votre  comité  a  cru 
devoir  fixer  un  instant  votre  attention. 

Il  a  pensé  qu'eu  rendant  le  décret  du  icï'dc  ce 
mois  vous  n'aviez  eu  d'autre  intention  que  celle  de 
faire  restituer  aux  indigents  des  effets  d'habille- 
ment ou  antres  objets  de  même  nature  que  des  be- 
soins pressants  leur  avaient  fait  mettre  en  gage  au 
Mont-de  Piété ,  et  dont  la  rigueur  de  la  saison  leur 
rendait  la  privation  extrêmement  dure  et  presque 
iiisiipporlable. 

Mais  certainement  vous  n'avez  pas  eu  le  dessein 
défavoriser  la  cupidité  d'une  foule  d'usuriers  avides 
qui,  spéculant  sur  la  misère  des  infortunés,  font  un 
trafic  odieux  des  reconnaiss.mces  du  Mont-de-Piété. 
Vous  n'avez  pas  entendu  donner  des  facilités  aux 
personnes  dont  l'inconduite  les  réduit  sans  cesse  aux 
expédients;  qui,  sans  être  véritablement  indigentes, 
sont  presque  toujours  pressées  par  le  besoin  ,  et  qui 
ne  veulent  chercher  d'autre  moyen  d'y  satisfaire 
que  celui  d'enf^ager  une  partie  de  leurs  effets  poui 
retirer  ceux  qui  leur  sont  le  plus  nécessaires  dans  II. 
moment  présent. 

Vous  n'avez  même  pas  voulu  faire  remettre  gra- 
tuilenient  à  chaque  individu  indigent  qui  aurait 
plusieurs  reconnaissances  du  Mont-de- Piété  tous  ses 
effets  servant  de  nantissement  pour  une  somme  au- 
dessous  (le  100  livres, encore  que  chaque  reconnais* 
sance  ne  s'élevût  pas  à  cette  somme. 

Ce  n'est  pas  quand  les  circonstances  vous  font  ua 
devoir  de  ménager  les  fonds  du  trésor  ptddic ,  ce 
n'est  pas  quand  vous  êtes  forcés  d'être  économes 


335 


envers  ceux  des  indigents  qui  n*ont  pas  même  la 
triste  ressource  de  pouvoir  mettre  des  effets  en  gage 
pour  subvenir  à  leurs  besoins  pressants ,  que  vous 
pouvez  gratifier  les  autres  de  la  remise  de  tous  les 
objets  qui  pourraient  leur  donner  de  Taisance.  Les 
principes  de  l'égalité  que  vous  professez  ne  vous  le 
permettent  pas. 

Tels  sont  pourtant  les  abus  qui  résulteraient  de 
l'exécution  ae  la  loi  dans  toute  retendue  de  son 
sens  littéral  ;  car  il  est  constant  qu'il  y  a  un  grand 
nombre  de  reconnaissances  du  Mont-de-Piété  entre 
les  mains  des  agioteurs ,  et  il  est  aisé  de  sentir  que 
]a  plupart  de  ces  reconnaissances  sont  de  la  valeur 
de  celles  qui  doivent  être  retirées  gratuitement, 
parce  qu'en  général  ce  sont  les  malheureux  qui  en 
ont  de  cette  nature,  et  que  les  circonstances  forcent 
souvent  à  s'en  défaire  pour  obtenir  un  secours  ur  - 
geut  et  usuraire  de  ces  infimes  agioteurs,  toujours 
au  guet  de  leurs  besoins  pour  en  tirer  parti.  Or  qui 
peut  douter  que  ces  hommes  avides  ne  soient  les 
premiers  à  faire  présenter  les  reconnaissances  dont 
ils  sont  porteurs  pour  s'emparer  gratuitement  des 
dépouilles  des  indigents? 

Il  en  sera  de  même  de  ces  personnes  sans  ordre  et 
sans  conduite,  qui  ne  connaissent  point  le  travail  et 
n'ont  de  goût  que  pour  la  débauche. 

L'honorable  indigence  elle-même,  celle  qui  prend 
sa  source  dans  le  malheur  et  dans  la  fatalité  des  cir- 
constances, pressée  par  le  besoin,  sera  tentée  d'abu- 
ser de  votre  bienfaisante  loi,  soiten  faisant  présenter 
au  visa  différentes  reconnaissances  dont  les  valeurs 
réunies  excéderont  celle  fixée  par  la  loi ,  soit  en  se 
prêtant  à  des  manœuvres  de  cette  espèce;  heureux  . 
encore  si  la  faute  ne  favorisait  que  de  véritables  né- 
cessiteux ! 

Mais,  dans  tous  les  cas,  il  est  de  notre  devoir  de 
chercher  à  prévenir  les  abus  ;  les  moyens  en  sont 
extrêmement  difficiles;  nous  n'en  avons  même  pas 
trouvé  qui  nous  aient  paru  certains.  La  cause  de 
cette  difnculté  se  trouve  dans  la  nature  des  recon- 
naissances du  Mont-de-Piété,  qui  ne  sont  réellement 
que  des  effets  au  porteur,  de  sorte  qu'il  est  impos- 
sible de  savoir  certainement  quel  est  le  véritable 
propriétaire. 

Nous  avons  cru  cependant  pouvoir  remplir  jus- 
qu'à un  certain  point  le  but  que  nous  avons  en  vue 
en  vous  proposant  de  régler  la  conduite  que  les  co- 
mités de  bienfaisance  et  les  conseils  généraux  des 
communes  ont  à  tenir  dans  l'exéxsution  de  la  loi  du 
1er  pluviôse,  de  confier  à  leur  justice,  à  leur  patrio- 
tisme et  à  leur  humanité  le  soin  de  faire  qu'elle  ne 
soit  profitable  qu'au  véritable  indigent,  de  déclarer 
formellement  que  votre  intention  n'est  pas  que  ce- 
lui-ci même  obtienne  dans  cette  circonstance  la  re- 
mise d'une  valeur  plus  considérable  que  celle  que 
vous  avez  fixée,  enfin  de  déterminer  provisoirement 
la  somme  que  vous  avez  consacrée  à  cet  acte  de 
bienfaisance  dans  chaque  arrondissement  de  la  ré- 
publique, afin  que  les  membres  des  comités  de  bien- 
faisance et  des  conseils  généraux  des  communes, 
sachant  bien  que  votre  intention  n'est  pas  d'accor- 
der un  secours  illimité ,  trouvent  un  puissant  motif 
de  circonspection,  pour  la  délivrance  de  leur  visa, 
dans  la  certitude  que  tous  ceux  qu'ils  accorderaient 
avec  trop  de  facilite  tourneraient  au  détriment  des 
véritables  indigents. 

Au  reste,  citoyens,  que  la  fixation  que  nous  vous 
proposons  n'alarme  pas  l'intérêt  que  vous  prenez 
aux  malheureux.  Ceux  que  vous  voulez  secourir 
par  le  moyen  dont  il  s'agit  ne  forment  pas  le  plus 
grand  nombre;  nous  vous  l'avons  déià  dit,  il  en 
existe  beaucoup  qui  n'ont  pns  même  la  triste  res- 
source de  pouvoir  engager  leurs  effets ,  et  qui  n'en 


ont  que  plus  dé  droits  h  votr<?  sollicitude.  Les  sec- 
tions des  faubourgs  Antoine  et  Marceau,  qui  sont  les 
plus  nombreuses  en  indigents,  contiennent  très-peu 
d'engagistes  au  Mont-de-Piété  ;  on  en  trouve  beau- 
coup plus  dans  les  sections  du  centre ,  et  la  somme 
que  nous  vous  proposons  de  fixer  suffira  pour  sou- 
lager au  moins  les  plus  nécessiteux,  soit  à  Paris,  soit 
dans  les  communes  des  départements. 

Pour  prévenir  d'ailleurs  toutes  les  injustices, 
pour  donner  aux  indigents  la  certitude  qu'ils  ne  se- 
ront point  victimes  de  l'erreur  ou  de  la  prévention, 
pour  vous  assurer  que  vos  intentions  bienfaisantes 
seront  exactement  remplies,  votre  comité  vous  pro- 
pose de  l'autoriser  à  prononcer  sur  les  difficultés  et 
les  réclamations  qui  pourraient  s'élever  concernant 
l'exécution  de  la  loi.  Fidèle  à  son  devoir  envers  le 
peuple  et  envers  l'humanité ,  il  s'efforcera  de  justi- 
fier la  confiance  que  vous  lui  avez  accordée. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu.  le  rap- 
port de  son  comité  des  secours  publics  sur  les  difficultés 
qui  se  présentent  pour  Texécution  de  la  loi  du  1*'  plu- 
viôse présent  mois,  concernant  la  remise  gratuite  des  effets 
d'habillement  déposés  en  nantissement  au  Mont-de-Piété, 
charge  ledit  comité  de  lui  présenter,  dans  un  court  délai , 
ses  vues  sur  les  moyens  de  remplacer  la  bienfaisance  de 
ladite  loi  par  un  genre  de  secours  utile,  et  dont  Tappiica- 
tion  puisse  être  faite  à  tous  les  indigents  de  la  république 
indistinctement. 

«  IL  La  Convention  décrète  qu'à  compter  de  ce  jour  il 
ne  sera  plus  donné  d*effet  à  la  loi  du  1*'  pluviôse  de  Tan  S, 
concernani  la  remise  gratuite  des  effets  déposés  au  Mont* 
de-Piété.  > 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  Des  artistes  sont  admis  à  la  barre. 

L'orateur  de  la  dépulation  :  La  France  allait  être 
ramenée  aux  siècles  de  barbarie;  des  vandales  ré* 
pandusdans  toutes  les  contrées  de  la  république  la 
traitaient  en  pays  de  conquête ,  et  ces  monuments , 
ces  chefs-d'œuvre  qui  répandaient  sa  gloire  dans  les 
quatre  parties  du  monde,  étaient  dégradés,  mutilés, 
anéantis  ;  mais  les  mandataires  d'un  peuple  qui  a 
juré  J'étre  libre  ont  terrassé  les  brigands  ,  qui  n'ont 
laissé  que  l'opprobre  de  leurs  noms  et  l'exécratioa 
de  leur  mémoire. 

Pour  réparer  les  maux  du  vandalisme ,  citoyens 
représentants ,  vous  vous  êtes  environnés  de  toutes 
les  lumières;  vous  avez  fait  un  appel  à  ceux  dont  le 
génie  et  les  talents  peuvent  rendre  à  la  patrie  trop 
longtemps  opprimée  et  son  éclat  et  sa  splendeur. 

A  votre  voix  toute-puissante,  les  artistes  repren- 
dront leurs  travaux.  Le  feu  sacré  de- la  liberté  qui 
brûle  leurs  âmes ,  ce  feu  régénérateur  qui  enfante 
des  prodiges ,  va  faire  éclore  des  nK>numents  qui 
passeront  notre  gloire  à  la  postérité  la  plus  reculée. 

Mais,  citoyens  représentants,  il  est  une  classe  res- 
pectable sur  laquelle  votre  comité  d'instruction  pu- 
blique n'a  pas  encore  porté  votre  attention  ;  c  est 
celle  des  sculpteurs  en  bâtiments.  Les  oscillations 
politiques,  et  plus  encore  l'affreuse  oligarchie  de 
Robespierre,  leur  ont  fait  perdre  leur  état  ;  la  plu- 
part sont  pères  de  famille.  Ils  ont  fait  à  la  patrie 
tous  les  sacrifices  qui  étaient  en  leur  pouvou*  ;  ils 
sont  hors  d'état  d'alimenter  leur  existence  ;  leurs 
enfants  servent  dans  les  camps  de  l'honneur;  dans 
leurs  mains  courageuses,  le  sabre,  le  fusil  ont 
remplacé  le  ciseau, et  le  vil  esclave  a  mordu  la  pous- 
sière. 

Citoyens  représentants,  leurs  pères,  leurs  frères, 
leurs  amis  attendent  de  vous  les  moyens  de  rendre 
ces  artistes  à  leurs  ateliers  déserts;  des  monuments 
commencés  attendent  vos  ordres  et  leurs  mains  pour 
augmenter  la  gloire  de  la  république  ;  ne  permettez 


336 


pas  que  les  enfants  des  arts  restent  plas  longtemps 
ilans  une  molle  oisiveté,  et  que  l'étranger  nous  re- 
proche une  indifférence  coupable. 

Nous  demandons  que  votre  comité  dlnstraction 
publique  soit  chargé  de  vous  Taire  un  prompt  rap- 
port sur  les  travaux  qui  sont  dans  le  cas  d*occuper 
sur-le-champ  un  grand  nombre  d'artistes,  ainsi 
qu'une  grande  Quantité  d'individus ,  ce  qui  emné- 
cherait  la  perte  aun  art  auquel  Tarchitecture  doit 
une  partie  de  sa  gloire,  et  qui,  Taute  d'élèves ,  serait 
bientôt  perdu  pour  la  France. 

Cette  pétition  est  renvoyée  au  comité  d'instruction 
publique. 

La  Convention  entend  plusieurs  pétitions  parti- 
culières. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  11  PLUVI0S6. 

Un  des  secrétaires  fait  lecture  de  la  lettre  sui- 
vante : 

LeUre  du  représeniani  du  peuple  Neveu,  près  les 
armées  de  la  Moselle  et  du  Rkin^àla  Convention 
nationale. 

A  Trêves,  le  S  pluvioie,  an  3*  de  la  république 
fraoçaiae,  une  et  indivisible. 

m  L^armée  devant  Luxembourg,  citoyens  eollègiics, 
bloque  C4*tle  place,  et  c*est  en  se  dbposanl  à  s'en  emparer 
qu'elle  a  célébré  raooiversairc  du  jour  mémorable  où  la 
liberté  a  repris  tous  ses  droits,  du  four  où  la  tfile  du  tyran- 
roi  esi  tombée  sous  le  glaive  de  la  loi,  do  jour  enfin  qui  a 
assuré  à  jamais  le  bonbcur  du  peuple  français. 

•  J'ai  Tait  une  proclamation  à  Parmée,  qui  a  été  mise  à 
Tordre  général  et  distribuée  à  toutes  les  tronpes,  dans 
laquelle  je  leur  al  retracé  cette  fameuse  époque  et  les  vic- 
toires successives  remportées  depuis  sur  renneroi.  Bientôt, 
leur  ai-je  dit,  Luxembourg  tombera  sous  vos  coups,  et  fout 
ce  territoire,  jusqu'aux  bords  du  Rhin ,  sera  purgé  de  ces 
vampires  qui  rinfestaient  et  écrasaient  le  peuple. 

«  Les  cris  de  vive  la  républUiuê!  mille  Toit  répétés  ont 
été  entendus  a  Luiembourg,  et  Tennemi  aura  senti  de 
nouveau  qu^une  armée  qui  a  maniresté  ses  sentiments  d*an 
ton  si  énergique  et  si  bien  prononcé  ne  peut  qu*étre  victo- 
rieuse. 

«  J^ai  fait  distribuer  ce  jour-là  une  double  ration  de 
viande  et  d'eau-de-vie  ù  toute  Tarmée»  et  j'espère  que 
vous  ne  désapprouvcrci  pas  celte  mesure. 

«  Salut  et  et  fraternité.  Navao.  • 

La  Convention  nationale  décrète  l'insertion  an 
Bulletin  de  cette  lettre.  {la  suite  demain,) 


Bâle«  le  5  pluviôse. 

L^ambassadcnr  de  la  république  française  ayant  fait  no- 
tifier, il  y  a  quelques  jours,  par  le  secrétaire  de  l'ambas- 
sade, son  arrivée  en  ceUe  ville,  a  aussitôt  été  visité  par  les 
che&  de  TElat  de  Baie.  Le  conseil  secret  des  Treize,  après 
avoir  fait  demander  audience  dans  la  forme  usitée,  s*cst 
rendu  aufourd'bui  en  corps  et  en  gran'de  cérémonie  ft 
rbôlel  de  Pambassade,  où  le  chancelier  Ochs  a  prononcé, 
au  nom  deTEtat  de  Bâie,  un  discours  plein  de  cordialité 
et  de  sensibilité  pour  complimenter  Tambassadeur.  Le 
citoyen  Barthélémy  a  répondu  ft  Texpression  de  ces  senii- 
ments  de  manière  à  cimenter  par  un  épanchcment  réci- 
proque, tel  qu*il  doit  exister  entre  deux  nations  libres  et 
indépendantes,  les  doux  liens  de  la  fraternité  et  du  bon 
voisinage  qui  assurent  à  jamais  l'union  et  la  prospérité  des 
deux  républiques. 

L'Etat  de  Baie,  qui ,  dans  les  temps  les  plus  difficiles  de 
In  révolution,  sVst  toujours  distingué  par  son  attachement 
inviolable  aux  véritables  principes  de  la  neutralité,  a  cru 


devoir  donner  en  cette  occasion  à  la  natton  française  i 
nouvelle  preuve  de  son  dévouement  confédéral,  en  rendant 
ù  son  représentant  les  mêmes  honneurs  et  en  snivani  la 
même  étiquette  observée  dans  tmu  les  temps  ciivcn  les 
ambassadeurs  de  France. 


MUSIQUE. 

Uomancei  kitioriquet,  par  L.-F.  lauffrot,  musique  de 
Uéhul. 

Ce  recueil  sera  comp<Mé  de  vingt  romances,  dont  une  pa- 
raîtra tous  les  vingt  jours.  La  musique  et  raccompagneiuent 
de  clavecin  seront  du  citoyen  Méhul  ;  raccompagaencnt  de 
harpe  sera  du  ciiojen  Cousineau  fils. 

Le  pris  de  la  souscription  est  de  30  liv.  pour  Paris,  et  de 
S5  liv.  pour  lei  départemenU.  Le  bureau  est  cbes  Cooanieaa 
père  et  fils,  luthiers,  rue  de  Thionvîlle,  n*  1840. 


LIVRES  DIVERS. 

Collection  du  Moniteur,  depuis  son  origine,  le  S4  ùér 
bre  1789,  jusqu*au  l*'  vendémiaire  de  la  3«  année  républi- 
caine; 10  volumes,  relies  en  carton.  Prix  :  B,000  Uv.  A  F»- 
ris,  an  bureau  du  Journal  militaire,  rue  de  la  Loi,  s**  754. 

Lessii  premiers  volumes ,  juaqu^au  Si  septembre  1793* 
époque  de  U  première  séance  de  rassemblée  convcntâoo* 
nclle,S,O0Oliv. 

^  Système  universel  et  complet  de  sténographie»  ou  liv 
nière  abrégée  d*ëerire,  applicable  •  tous  les  idiomes  et  fon- 
dée sur  des  principes  si  simples  ci  si  faciles  à  saisir  qu*on 
peut  connaître  en  un  jour  les  éléments  de  cet  art,  et  se 
.  mettre  en  état  dam  très-peu  de  temps  de  suivre  la  parole 
d*uo  orateur  ;  inventé  par  Samuel  Tajlor,  professeur  de  «ré- 
nographie  «  Osford  et  dans  les  universités  d*Ecoase  et  d'Ir- 
lande, et  adapté  i  la  langue  française  par  Théodore-Pierre 
,  Bcrtin ,  traducteur  des  Satires  d'Young  et  autres  ouvrages 
anglais  ;  seconde  édition,  revue  et  augmentée  de  vingt-quatre 
planches,  dont  Tune  présente  un  indei  à'adversaiio  ou  de 
répertoire  littéraire  plus  avantageux  que  celui  de  Locke, 
avec  lequel  il  est  comparé.  Prix  :  8  liv. 

A  Paris ,  de  Pimprimerie  de  Didot.  8e  trouve  cbes  TaiH 
teur,  rue  de  la  Sonnerie,  au  coin  du  quai  de  la  Mégisserie. 

—  La  République  française  en  quatre-vingt-huit  départe- 
ments, avec  quatre-vingt-huit  cartes  enluminées;  1  vol.  iii-8«, 
broehé  en  cartan.  Prix  :  i6  liv.  10  s.  ;  3«  édition,  corrigée  cl 
augmentée. 

—  Les  crimes  des  empereurs  turcs  ^  avec  nn  rapproche- 
ment historique  entre  Mahomet  et  Robespierre  ;  1  vol.  gros 
in-8°  de  640  pages,  avec  gravures.  Prix  :  8  liv.,  broché,  et 
1 0  liv..  franc  de  port.  A  Paris,  au  bureau  des  HévoluUons  de 
PcriSt  rue  des  Marais,  faubourg  Germain,  n»  SO. 

tiota.  Le  même  libraire  prévient  qu*il  publiera  un  autre 
ouvrage  contenant  les  crimes  des  rois  d'Angleterre,  ceux  des 
rois  d'Espagne  et  des  empereurs  ou  ciars  des  Russies ,  jus* 
qucs  et  compris  Catherine,  la  ctarine  actuelle. 


Brûlement  d'auignats. 

Le  9  pluTiose,  à  dii  benret  du  matin  »  il  a  été  br&lét 
dans  la  cour  du  nouveau  local  de  la  vérification  des  assi- 
gnais, la  somme  de  10  millions  en  assignats,  provenant  cicf 
échanges,  lesquels,  joints  aux  S  milliards  bhh  millions 
683,000  liv.  déjà  brûlés,  forment  un  total  de  S  milliards 
554  millsons  683,000  liv. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  aix  pre- 
miers mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  {lorlears  d'io* 
scriptlons  au  grand  livre.  Celui  pour  les  renies  Tlai^es 
est  de  huit  mois  vioct  et  un  jours  de  l'aiiuce  1793  (vieux 
style). 


GAZETTE  NATIONALE  ..  LE  lONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  133.  Tridi  13  Pluviôse,  Van  3«.  {Dimanehe  1*^  PivBiBB  1796,  vieux  $tyU.) 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

f^artovie,  le  SianviVr,  —Quelques  journaux  ont  publié 
les  lellres  que  rimpératrice  a  écriii  s  à  ses  généraui,  à  Toc- 
casion  de  leurs  victoires,  en  leur  envoyaiil  des  bâtons  de 
maréchaux  ou  des  couronnes  enrichies  de  diamants. 

En  voici  une  que  lui  écrivit  Stanislas,  immédiatement 
•près  la  prise  de  Varsovie,  qui  montre  en  quel  état  le  des- 
potisme de  Catherine,  les  efforts  qu'ont  faits  les  Polonais 
poursV  soustraire,  et  enfin  ces  mêmes  victoires,  pajfées 
■vec  tant  d*éclat,  ont  réduit  ce  malheureux  pays. 
«  Madame  ma  sœur, 

•  Le  sort  de  la  Pologne  est  entre  vos  mains  :  votre  puis- 
sance et  votre  sagesse  eu  décideront.  Quel  que  soit  cejui  que 
TOUS  destiniez  ji  ma  personne,  il  ne  m'est  pas  permis,  tant 
que  je  pourrai  parler,  de  négliger  mes  devoirs  envers  ma 
nation ,  en  invoquant  pour  elle  la  générosité  de  Votre  Ma- 
Jetl*  Impériale. 

-  Le  militaire  polonais  est  détruit  ;  cependant  la  nation 
existe  encore  ;  mais  elle  cessera  bicnlôt  d'exister  aussi  si 
fos  ordres  et  voire  grandeur  d'âme  ne  viennent  à  son  se- 
eours.  Le  tumulte  des  armes  a  empêché  les  semailles  dam 
une  graude  partie  du  pays;  le  labourage  est  devenu  im« 
possible  purtout  où  le  bétail  a  été  enlevé  ;  les  paysaus,  dont 
les  granges  sont  vides,  dont  les  cabanes  sont  brûlées  ou 
rendue»  inhabitables,  ont  Toi  par  milliers  en  terre  étran- 
gère. Beaucoup  de  seigneurs  terriers  eo  ont  fait  de  okême 
par  les  mêmes  raisons. 

«  La  Pologne  commence  déjà  k  ressembler  à  on  désert. 
'La  famine  est  presque  immanquable  pour  l'année  pro- 
chaine, surtout  si  d'autres  voisins  continueni  &  enlever  nos 
habitants,  notre  bétail,  et  d'occuper  notre  territoire. 

•  11  parait  réservé  à  celle  dont  les  armes  seules  ont  tout 
soumis  de  prescrire  des  bornes  à  tout  autre,  lorsqu'elle 
aura  prononcé  l'usage  qu'elle  voudra  faire  de  ses  victoires. 
Je  ne  présume  pas  de  les  prévoir  ;  mais  je  crois  certain  que 
ce  qui  \oussera  le  plus  véritablement  glorieux,  ce  qui 
rendra  trois  millions  d'hommes  le  moins  malheureux,  aura 
toujours  le  plus  de  droit  à  vos  déterminations. 

«  Puissies-vous ,  Madame,  agréer  ce  que  fotre  graiid 
caractère  me  donne  la  confiance  de  vous  présenler.  Pui»- 
siez-vous  agréer  en  même  temps  l'expression  des  senti- 
ments  dans  lesquels  je  suis...  i 

ALLEMAGNE. 

Hamboura^  U  Sjafivîer,  — Le  jour  où  rimpératrice  a 
fait  chanter  un  TeDeum  pour  la  reddition  de  Varsovie,  on 
a  lu  par  son  ordre  un  Mémoire  horriblement  calomnieux 
sur  la  révolution  de  Pologne.  (C'est  celui  dont  nous  avons 
parlé  dans  le  n*  ii7.)  Voici  le  passage  le  plus  curieux  de 
ce  Mémoire  : 

«  Le  17  avril  sera  un  jour  à  jamais  remarquable.  Ce 
jour,  les  Polonafs  rompirent  les  liens  de  fraternité  qui  dé- 
laient à  jamais  les  lier  aux  Russes.  Tous,  depuis  le  pre- 
mier jusqu'au  dernier,  prirent  part  à  ce  crime ,  où  le  droit 
des  gens  fut  si  inhumainement  trahi  ;  la  maison  même  de 
notre  ambassadeur  ne  fut  pas  respectée  ;  notre  résident  et 
les  personnes  attachées  à  la  légation  furent  arrêtés,  les  ar- 
chives ministérielles  enlevées;  tout  ce  qui  se  trouvait  dans 
cette  maison  fut  pillé,  et  les  employés  précipités  dans  les 
prisons.  Au  milieu  de  celle  anarchie,  on  commença  à  prê- 
cher les  principes  dangereux  et  subversifs  de  toute  espèce 
d'ordre  public.  Une  Société  populaire  fut  créée  au  milieu 
de  Varsovie,  et  un  gouvernement  analogue  à  celui  de  la 
France  organisé.  Les  punitions  les  plus  graves  furent  pro- 
noncées et  exécutées  contre  les  personnes  les  plus  impor- 
tantes de  la  république,  tant  du  clergé  que  de  la  noblesse. 

«  Dieu  ne  voulut  pas  que  les  Polonais,  dans  leur  rage, 
pussent  cueillir  les  fruits  de  leur  perversité.  Les  troupes 
nissct  sorties  de  Varsovie  se  réunirent  avec  celles  qui  SQ 

Z*  Série. -^TamâXm 


trouvaient  dans  les  environs  de  cette  capitale,  et  formèrent 
une  force  qui  résista  aux  efforts  multipliés  de  ces  traîtres. 
Pendant  ce  temps,  ceux-ci  employèrent  tous  les  moyens 
pour  allumer  l'insurrection  dans  toutes  les  villes  et  dans 
toutes  les  provinces  ;  et,  quoique  la  prudence  et  le  courage 
dçs  généraux  russes  soient  pai\enus  à  en  arrêter  les  effets 
dans  la  plupart  des  lieux,  néanmoins  dans  quelques-uns, 
et  particulièrement  â  Wilna,  nos  troupes  furent  beaucoup 
exposées  et  aux  surprises  et  aux  trahi^ns. 
•  >  Des  mesures  furent  prises  pour  assurer  nos  frontières 
et  mettre  fin  à  un  incendie  aussi  dangereux  dans  notre  voi- 
sinage. Les  diversions  que  les  Polonais  cherchèrent  à  hire 
dans  nos  contrées  épuisèrent  leurs  forces.  Ils  furent  succes- 
sivement battus  dans  plusieurs  lieux.  Ils  perdirent,  dans 
ce^  différentes  affaires,  une  partie  de  leur  artillerie,  de 
leurs  magasins,  et  d'autres  objets  indispensables  à  la  guerre. 
Dans  ces  circonstances ,  étant  tranquille  sur  les  disposi- 
tions de  nos  Toisins,  une  partie  des  forces  postées  jusquV 
lors  sur  nos  frontières  furent  détachées  sous  les  ordres  dts 
généraux  Romansow  et  Suwarow,  qui  marchèrent  de  deux 
points  différents  pour  rétablir  l'ordre  et  la  tranquillité, 
pendant  que,  d'un  autre  côté,  depuis  la  retraite  des  Prus* 
siens,  une  troisième  armée,  sous  les  ordres  du  général 
Fersen,  attaqua  Kosciusko  le  10  octobre.  Ce  chef  fut  fait 
prisonnier,  et  celte  circonstance  facilita  beaucoup  les  opé- 
rations des  deux  autres  généraux.  Le  général  Suwarow, 
profilant  de  celte  circonstance,  fit  sa  jonction  avec  le  corps 
▼enant  des  parties  septentrionales  de  la  Pologne,  et  mar- 
cha droit  sur  la  capitale.  Il  attaqua  Praga,  qui  était 
pourvu  d'une  nombreuse  artillerie  et  d'une  forte  année. 
Praga ,  obligé  de  céder  au  courage  de  nos  armées,  fut  pr» 
d*assaut.  La  terreur  qui  en  résulta  lacilita  la  reddition  de 
Varsovie. 

c  De  cette  manière,  la  révolution  de  Pologne  se  trouve 
maintenant  éteinte,  et  les  projets  sinistres  des  traîtres  cou* 
tre  notre  puissance  et  la  tranquillité  intérieure  entièrement 
arrêtés.  Nous  reconnaissons  dans  cette  circonstance  la 
bonté  divine,  qui  n'a  cessé  de  protéger  Routes  nos  entre- 
prises  pendant  un  règne  de  trente-trois  ans«  > 

Francfort,  le  10  janvier,  —  On  dit  que  les  troupes  prus* 
siennes  sont  résolues  à  se  tenir  simplement  sur  la  défen- 
sîvcv  Ce  propos  est  conforme  aux  vues ,  qu'on  ne  révoque 
plus  en  doute,  du  cabinet  de  Berlin,  dirigé  vers  la  paix. 
Le  premier  signe  de  cette  disposition  s'est,  comme  on  sait, 
manifesté  dans  la  diète  de  Ratisbonne,  où,  parmi  les  vo- 
tants sur  la  proposition  de  l'électeur  de  Mayence,  l'élec- 
teur de  Brandebourg  s'est  particulièrement  fait  remar- 
quer. 

C'est  Topinion  générale  que  trois  membres  du  corps 
germanique,  les  électeurs  de  Mayence,  de  brandebourg 
et  de  Bafière,  agissent  plutôt  de  concert  entre  eux  que 
d'aceord  avec  l'empereur. 

—  On  raconte  un  fait  qui  fait  admirer  les  principes  des 
républicains  français.  II  était  convenu,  lors  de  l'évacua- 
tion du  fort  du  Rhin,  que  les  objets  dont  le  transport  n'au* 
rait  point  été  effectué  le  25  décembre  à  midi  appartien- 
draient de  droit  â  la  république.  L'embarras  étant  extrême 
pour  échapper  au  terme  de  rigueur,  les  républicains,  loin 
d'en  profiter,  ont  aidé  eux-mêmes  ft  emballer  les  effets  oie* 
nacés  par  l'heure  fatale. 

PRUSSE. 

Berlin t  U  8  Janvier,'-^ la  ville  de  Senezice,  dans  la 
Prusse  méridionale,  va  être  transformée  en  place  de  guerref 
et  si  l'on  suit  le  plan  adopté,  on  en  fera  une  forteresse  im- 
portante. 

—  Le  général  prussien  Brupeck,  avec  le  corps  qu'il 
commande,  est  maintenant  en  Lithuaniei  son  quartier 
général  est  à  Wirballen. 

—  U  n'y  a  plus  de  troupes  prussiennes  à Sandomhr.  Quel- 
ques bataillons  sont  restés  à  Cracovie»  sont  les  ordrà  du 
général  de  Ruiz. 

—  On  vient  d'apprendre  par  un  courrier  de  Pétersbourg 
que  le  général  Kozciusko  j  est  «rriTéf  qu'il  est  guéri  de 

a 


us 

iciiilcwutii,tt<pi'«gittwtigtrte^^efcigy^<pg  f  temps  Tarn  forc^  de  se  retirer  dans  qvifiqiifs  port 
leqoitte  poiiit«  irak  coB|»fiiie  qoi  loi  M>ii  permife.  de  la  Corse,  ou  plutôt  à  Li?ouriie  ,  où  Foo  assure 

—  FrédéH&Gollitsiiic  firat  &t  domcr  aodinice  aa  ni» 
nHtre  de  So^de  et  au  cbarfé  d*aftairrs  d^Aogleierre.  Le 
deroier  ne  doit  Mf  dcmeorer  longleropt  dan^  celle  rési- 


qu*elle  est  actoeflemefit. 
—  On  mande  de  Brest,  en  date  do  S  phiTiose,  que 

-^-,  -  "  ,  ;    :.  .  ,    i  le  conroi  de  Cherbourg  rient  d'arriver  dans  ce  port 

dence,  tueodu  Ttnlfée^proAjilne  de  iord  Sprticer,  œî-  1  ^^^  „„€  quantité  immense  d*approfisionnements 


oiftlre  brlitnoiqoe  aoprte  de  eetle  coar.  On  jage  par  les 
phlparatif»  qui  te  fbol  id  que  lord  Spencer  doit  déplojrer 
an  grand  lésle» 

—  ÏA%  noaTeaoT  tribonaiix  loat  déjà  iosUllé^  dans  la 
PntMe  méridionale.  On  n*jr  foil  plus  que  de  pcliu  déta- 
ebrmenis  d*iiisurgés.  Les  troupes  prussiennes  destinées  à 
les  ponrsairrp  sont  entrées  en  quartiers  dliifer.  Leur 
quartier  général  sera  dé6nitifement  transféré  à  Pomao. 

ANGLETERRE. 

Londrti,  le  9  Janvier. — Lord  Staobope  prononça,  le  6, 
ft  la  Chambre  des  pairs,  on  long  discours,  dont  ia  eooelii- 
iion  élail  qu*on  déclarât  qu'on  ne  floil  pas  te  mêler  do 
gotivcmemtnt  inléricvr  de  la  France,  et  qn*on  ne  s'en  niè- 
Itra  pas.  Gt  discours,  aouvent  inlerrompo  par  des  éclats 
de  rire,  n*eot  pas  de  suite,  la  BMtioo  n'ajanlétéaceondée 


Le  marqnla  de  Lansdown  déclara  qu'il  était  persuadé 
des  bonnes  Inleollons  du  noMe  motionnaire;  il  coonaîssaK 
M  vertu  et  son  bonneur  ;  mab  II  ne  pouvait  approuver  sa 
BOCkNi.  c  Cependant,  eomme  je  désire  la  paii,ajouta-t-il, 
iVapère  que  quelque  noMe  lord  en  fera  une  sur  ce  sujet.  • 

Le  lord  Mansleld  dédara  qu'il  était  inutile  de  discuter 
si  Ton  peut  se  mêler  du  gouvernement  d'un  pajs  qui  fait 
proUaaion  de  vouloir  détruire  celui  de  tous  les  autres;  il 
fojait  deni  partben  France  x  des  ennemis,  et  des  amis 
qoi  demandent  que  nous  les  aidions  à  réUblir  l'ancien 
goovcmement.  La  justice  et  llniérét  exigent  qu'on  les  se- 
coore,  •  Je  désire  en  général ,  dil-il ,  une  monarcbie,  sans 
mnn^iélar  daa  ■odiScatlOni  qui  peuvent  y  convenir.  • 


RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

Paris ,  le  11  pluviôse.  —  Le  comte  Carletti,  Tos- 
can, vient  d'arriver  ici  en  qualité  d'envoyé  du  grand 
duc  de  Toscane.  Cet  estimable  patriote  est  connu 
dans  toute  TEurope  par  la  fermeté  de  son  attache- 
ment à  la  France;  c  est  le  même  qui ,  pour  ses  opi- 
nionsnolitiques,  eut  une  affaire  extraordinaire  avec 
Wyouham,  ministre  d'Angleterre  à  Florence;  il  la 
termina,  comme  on  sait,  avec  autant  d'honneur  que 
de  courage.  Nous  en  avons  rendu  compte  dans  notre 
feuille,  NO  7. 

Nous  nous  faisons  un  plaisir  et  un  devoir  d'ajou- 
ter que  nos  concitoyens  ont  trouvé  constamment  en 
lui  un  défenseur  et  un  ami.  Sa  maison  fut  toujours 
l'asile  des  patriotes  français,  et,  lorsqu'ils  furent 
obligés  de  quitter  Florence  par  une  suite  des  me- 
naces insolentes  du  lord  Hervey,  il  s'empressa  de 
venir  à  leur  secours  de  la  manière  la  plus  franche  et 
la  plus  délicate. 

La  nomination  de  Carletti  est  aussi  honorable  pour 
le  grand  duc  que  pour  Carletti  lui-même;  elle  est 
à  la  fois  une  sorte  de  réparation  faite  à  la  nation 
française,  et  une  réponse  aux  insultantes  bravades 
du  ministre  anglais. 

—  On  écrit  de  Marseille  qu'il  vient  d*entrer  dans 
•epon  un  convoi  de  dix-huit  bMimenls  génois  ou 
grecs,  dont  la  cargaison  consiste  en  blé,  riz,  morue, 
mne  et  autres  marchandises.  Nice  est  l'entrepôt  gé- 
néral des  grains  qui  arrivent  de  Gênes  et  de  Bar- 
birie:  Il  y  a  dans  ce  moment  d'immenses  magasins 
remplis  que  Ton  fait  refluer  sur  toutes  les  commu- 
Ms  de  la  côte* 

«>  Oo  mêiide  de  Toulon  que  la  mauvaise  saison 
retardera  vraisemblablement  de  quelques  jours  le 
Jépînde  reseadre.  Depuis  près  d  un  mois  l'esca- 
immmimii  ■*•  pto  raptru;  en  croit  que  le  mauvais 


de  toute  espèce  pour  les  arsenaux  et  les  chantiers. 
Le  nombre  des  bâtiments  est  si  considérable  que, 
malgré  l'absence  de  notre  armée  navale,  le  port  est 
rempli. 

EsUrait  d'une  leUre  de  Bayonnê,  eu  15  iitooat.<* 
Des  lettres  de  Philadelphie,  en  date  do  29  octobre, 
annoncent  que  les  républicans  français  de  Saint-Do- 
mingue se  sont  emparés  de  Léogane  et  de  Saint-Marc, 
d'où  ils  ont  chasse  les  Anglais,  après  leur  avoir  &it 
un  grand  nombre  de  prisonniers.  On  espère  que 
sous  peu  de  temps  toute  la  partie  française  de  Saint- 
Domingue  rentrera  sous  les  lois  de  la  république. 

Nantes^  le  9  phcvtoae.  «-  La  négociation  avec 
Charette  est  très-avancée;  il  a  promis  fonnellement 
de  mettre  1km  les  armes;  mais  il  a  demandé  quelque 
temps  pour  décider  les  autres  chefs  des  rebelles, 
qui  refusent  de  pro6ter  du  bienfait  de  l'amnistie.  Il 
parait  que  la  division  règne  parmi  eux.  Le  parti  de 
Charette  est  le  plus  nombreux  et  le  plus  fort,  et  l'os 
a  lieu  de  croire  qu'il  forcera  les  autres  chefe à  recon- 
naître la  république  française.  Ainsi  tout  semble 
nous  promettre  bientôt  une  pacification;  cependant 
le  général  Canclaux  prend  ses  mesures  pour  agir, 
dans  le  cas  où  les  propositions  de  paix  et  de  paraon 
seraient  rejetées,  et  pour  combattre  avec  vigueur  les 
rebelles.  » 


VARIÉTÉS. 

Un  article  du  traité  de  paix  avec  Fempire 
germanique. 

Il  me  semble  oue,  pour  un  peuple  libre,  sous  un 
gouvernement  adniocraiique,  nous  ne  nous  occu- 
pons pas  assez  de  nos  relations  extérieures;  nos  pa- 
piers publics  devraient  un  peu  plus  souvent  nous 
présenter  de  ces  conceptions  diplomatiques  qui  quel- 
quefois ne  sont  oue  les  rêves  d'hommes  ue  bien, 
mais  dans  lesquelles  on  trouve  toujours  quelques 
vues  utiles;  et  d'ailleurs  le  temps  est  venu  ou  il  est 
permis  de  croire,  sans  passer  pour  fou,  que  quel- 
ques-uns de  ces  rêves  acquerront  de  la  réalité. 

C'est  par  retour  sur  moi -même  que  je  demande 
indulgence  pour  les  rêve^  politiques.  Je  m'occupe 
quelquefois  de  calculs  diplomatiques,  de  l'influence 
qu'ils  peuvent  avoir  sur  le  bonheur  futur  de  ma 
patrie  :  en  voici  un  que  je  vous  prie  de  soumettre  à- 
vos  lecteurs. 

Sans  vouloir  pénétrer  les  secrets  du  gouverne* 
ment,  puisqu'il  est  nécessaire  qu'il  y  ait  encore  des 
secrets,  je  pense  qu'il  est  de  l'intérêt  de  la  républi- 
que française,  lorsqu'elle  jugera  à  propos  de  faire 
la  paix ,  de  ne  faire  que  des  traités  séparés.  Elle  doit 
combattre  les  tyrans  coalisés ,  pour  les  détruire  en- 
semble; mais  s  ils  lui  présentent  l'olivier  tel  qu'il  lui 
convient  de  l'accepter,  me  tromperais-je  en  formant 
le  vœu  qulls  ne  soient  écoutés  qu'isolés  les  uns  des 
autres  ? 

L'empire  germanique  doit  être  poor  nons  séparé 
de  la  maison  d'Autriche.  Cet  empire,  composé  de 
différents  États,  a  été  entraîné  dans  la  gnerre  contre 
la  France  plutôt  par  Tinfluence  des  ^ndes  puis- 
ansces  que  par  nn  sentiment  d'inimitié  :  lenr  con- 
tingent fourni  avec  lenteur  et  imparfeîtement  le 
prouve  assex.  La  république  française  doit  maintenir 


8M 


rindëpendance  de  ces  petits  âtats.  J*en  excepte  les 
Etats  ecclésiastiques,  qui,  d*après  mes  combinaisons 
politiques,  doivent  disparaître  du  cercle  des  Etats 
d*Allcmagne.  Je  dis  donc  que  la  France  doit  main- 
tenir l'iuaépendànce  des  petits  Etats  qui  composent 
Tempire  germanique  des  deux  grandes  puissances 
qui  les  pressent,  et  qui  tôt  ou  tard  les  envahiraient. 
'  Plusieurs  de  ces  Etats  ne  peuvent  avoir  perdu  de 
▼ue  qu'ils  ne  doivent  leur  existence  au'à  l'ancien 
royaume  de  France;  et  si  Frëdéric-Guillaume  a  ou- 
blié le  beau  rôle  que  son  oncle  a  joué  lors  de  la 
'  li^uegermaniaue  contre  l'envahissante  maison  d'Au- 
triche, la  répuDlique  fVançaise  doit  remplir  ce  rôle 
avec  bien  plusd'eincac)té;caron  ne  pourra  la  soup- 
çonner d'avoir  en  vue  quelque  agrandissement 
particulier,  ni  aucun  traité  de  famille. 

C'est  donc  d'après  cet  aperçu  que  je  propose  un 
article  à  insérer  dans  le  traité  à  (aire  avec  les  cer- 
cles de  la  Germanie  :  la  politique,  l'humanité  et  la 
philosophie  applaudiront  sans  doute  à  un  accord 
qui  ne  se  rencontre  pas  toujours  dans  les  traités  des 
nations. 

L'Angleterre,  soit  par  politique,  soit  par  impuis- 
Mnce,  emploie  le  moms  possible  ses  sujets  dans  les 
guerres,  et  surtout  dans  celles  de  terre.  Ce  gouver- 
nement maintient  sa  prépondérance  en  conservant 
ses  sujets  pour  activer  un  commerce  immense,  qui 
lui  acquiert  l'or  dont  il  paie  le  sang  et  la  liberté 
des  peuples.  C'est  avec  sesguinées  qu'il  va  puiser 
en  Allemagne  les  hordes  qu'il  lance  contre  rinoépen- 
danee  des  nations. 

Tarissons  pour  l'Angleterre  cette  source  féconde 
d'hommes;  réduisons-la  à  ses  propres  forces.  Il  faut 
que  les  sujets  de  Georges,  puisqu'ils  veulent  bien 
1  être,  combattent  eux-mêmes  pour  ce  glorieux  ti- 
tre; et  alors  nous  verrons  si  les  livres  sterling  sup* 
pléerontà  la  valeur  française,  si  la  banque  anglaise 
résistera  aux  baïonnettes  républicaines,  enfin  si  huit 
millions  d'hommes  qui  combattent  pour  conserver 
leurs  fers  ne  disparaltrontpas  devant  le  pas  de  charge 
de  vingt-cinq  millions  qui  veulent  les  briser  pour  le 
bonheur  du  monde. 

Voici  doue  l'article  que  je  propose  pour  faire 
partie  du  traité»  lorsque  le  temps  sera  venu  de  le 
conclure  : 

•  Aucun  des  princes  composant  l'empire  d'Allema- 
gne, électeur,  margrave,  landgraye,  etc.,  enfin, 
quel  que  soit  son  titre  pour  entrer  dans  les  différents 
collèges  qui  composent  la  diète  de  cet  empire,  ne 
pourra  vendre,  céder,  ni  mettre  è  la  solde  de  l'An- 
gleterre, soit  directement,  soit  indirectement,  pour 
aucune  partie  du  monde,  les  hommesqui,sous  quel- 
que dénomination  que  ce  soit,  vivent  sous  son  gou- 
vernement.* 

L'humanité  burinera  cet  article  dans  les  fastes  de 
l'histoire,  et  c'est  ainsi  que  la  nation  française  pu- 
bliera dans  l'univers  le  prospectus  de  son  l)onheur. 

Si  cet  article  suffit  à  la  gloire  et  à  l'intérêt  de  la 
France,  il  ne  suffit  pas  à  la  haine  que  le  gouverne- 
ment anglnis  s'est  justement  acquise  de  la  part  des 
vrais  républicains.  11  n'est  aucun  coin  du  globe  où 
les  motifs  n'en  soient  tracés.  C'est  cette  pnissnnce 
qui  a  ravivé  la  coalition  des  esclaves  contre  la  li- 
berté: c'est  elle  qui  a  employé  toute  sa  politique  è 
soutenir  des  alliances  qui  allaientse  dissoudre;  c'est 
elle  qui  a  alimenté  les  armées  coalisées;  c'est  elle 
enfin  qui  les  a  prises  à  sa  solde,  et  qui  a  trouvé, 
dans  ces  rois  qui  se  targuent  avec  orgueil  de  leur 
prétendue  dignité,  des  mendiants  qui  ont  tendu  la 
main  pour  recevoir  le  prix  du  sang  français  qu'ils 
répandraient. 

C'est  donc  vers  l'Angleterre  que  nos  vues  doivent 
se  porter.  Point  de  paix  avec  elle  sans  un  dédomma- 


gement des  maux  qn^elIe  i  voalii  iioa8faire,et  on 
n'obtiendra  ce  dédommagement  qu'en  l'y  contrai- 
gnantpar  la  force  des  armes;  par  elle,  la  nation  bri- 
tannique, éclairéesur  l'envahissement  touiourscrois- 
sant  oe  ses  droits  par  le  pouvoir  exécutif,  lui  ôtera 
les  n)oyens  de  corruption  avec  lesquels  elle  est  en- 
traînée à  l'esclavage.  Celte  secousse  arrivera  bien- 
tôt ,  où  le  fier  Breton,  qui  se  vantait  naguère  d'être 
le  plus  noble  peuple  ae  l'univers  «  en  sera  le  plus 
vil. 

Mais  il  faut  que  nous  aidions  à  l'accélération  de 
cet  instant  en  tarissant  une  des  sources  où  Geor- 

fes  puise  ses  moyens  de  corruption  :  je  veux  parler 
e  l'électorat  d'Hanovre.  Il  ne  faut  pas  que  cet  élec- 
torat  soit  compris  dans  le  traité  à  taire  avec  l'Alle- 
magne; il  faut  qu'il  contribue  aux  moyens  de  vaincre 
le  léopard  brilanique;  il  faut  par  ce  traité  réserver 
■  le  droit  de  passage  à  nos  phalanges  victorieuses, 
I  pour  aller  s'emparer  de  cet  héritage  du  chef  de  la 
maison  de  Brunswick,  qui,  dépouillé  de  cette  res- 
I  source,  privé  de  la  faculté  de  tirer  des  stipendiaires 
'  d'Allemagne ,  amènera  bientôt  le  cabinet  de  Saint- 
James  à  fléchir  devant  le  génie  républicain. 

GinAVD^député  de  ta  Charente-Inférieure, 


SPECTACLES. 

THÉÂTRE  DE  LA  RÉPUBLIQUE. 

On  pourrait  assurer  qu'il  y  a  eu  de  la  prévention  contre 
la  Bayadére^  comédie  en  cinq  actes  et  en  vers,  que  l'on 
savait  être  l'ouvrage  de  l'uctrice  qui  y  jouait  le  principal 
Tôle.  A  peine  la  pièce  a-t-elle  pu  Être  entendue.  C'est  que 
le  public  rassemblé  pardonne  difficilement  des  prétentions 
qu^on  lui  laisse  voir  trop  à  découvert  :  les  hommes  n'ad- 
mirent qu'à  leur  corps  défendant.  Voltaire  disait  de  Pa- 
mour-propre  t  «  Il  est  comme  Tlnstrument  de  la  généra- 
tion i  Il  est  néoestaire,  il  fait  plaisir,  et  il  ftiut  le  cacher.  • 

Ce  r61e  de  la  bayadère  (on  sait  que  ce  nom  est  celui  des 
danseuses  ou  courtisanes  dans  Tlnde)  semlylait  n'avoir  été 
créé  que  poor  faire  valoir  Piiolrice  qui  devait  le  remplir. 
Non-seulement  la  bayadère  est  l>elle,  spirituelle,  et  pétrie 
de  toutes  les  grftoes  et  de  tous  les  talents,  mais  elle  est 
bonne,  mais  elle  est  sensible,  mais  elle  est,  malgré  son 
état,  fière,  cb&ste  et  vertueuse.  Obi  c'en  est  trop  aussi 
que  de  vouloir  réunir  toutes  les  espèces  de  gloire ,  même 
lorsqu'on  y  a  des  droits.  Voilà,  nous  n'en  doutons  pas,  et 
tous  les  spectateurs  ont  pu  le  luger  coinme  nous,  ce  oui  • 
le  plus  nui  au  succès  de  Tactrice-auteur  de  la  Bayadère, 

L'ouvrage  en  lui-même  n'a  que  trop  bien  servi  la  malice 
de  ceux  qui  voulaient  sa  cbute;  ce  n'était  guère  qu*un  tissa 
de  faits  romanesques  et  invraisemblables,  qui  même  n*é- 
taient  pas  asses  clairement  établis  ;  les  mots  indiens  de  ba^ 
nian,  de  nabab,  de  roubat  étaient  employés  souvent  sang 
être  jamais  expliqués,  en  sorte  que  beaucoup  de  specta* 
teurs  ne  sataient  pas  quels  personnages  ils  iroyaient  agir. 
Un  officier  français,  lebéros  de  la  pièce,  se  trouvait  à  Su* 
rate  sans  qu'il  fût  dit  comment  ni  pourquoi  il  y  était.  L'au- 
teur aurait  dû  penser  que  les  spectateurs  ne  sont  pas  obli- 
gés  d'être  au  courant  des  alTaires  de  l'Inde,  et  encore 
moins  des  fletions  sur  lesquellei  ii  fondait  son  drame. 

Ce  n'est  pas  que  cet  ouvrage,  quoique  faible  et  informe, 
n'annonce  de  l'imagination,  delà  sensibilité,  rt  même  du 
talent  pour  écrire  ;  d'ailleurs  l'auteur  de  la  Belle  Fermière 
en  a  fuit  preuve,  Oo  peut  lui  promettre  des  succès  lors- 
qu'elle se  rapprochera  du  précepte  qui  Yeut  que  les  Actions, 
pour  faire  plaisir,  ne  s'éloignent  point  de  la  vérité»  et  sur- 
tout lorsqu'elle  évitera  de  paraître,  en  composant  lei  piè- 
ces» n'avoir  été  occupée  que  d'elle-mêmet 


S40 


CONVENTION  NATIONALE. 

Prétideneé  éê  Renéru 


Nota.  En  imprimant,  dans  le  Numéro  dliier,  le 
décret  qui  rapporte  celui  du  1er  pluviôse,  relatif  à  la 
restitution  des  effets  engagés  au  Mont-de-Piété , 
nons  avons  omis  de  placer  la  discussion  qui  l'a  pré- 
cédé; la  voici  : 

Le  comité  des  secours  présente  le  mode  d'exécu- 
tion du  décret  rendu  en  faveur  des  indigents  qui  ont 
des  effets  au  Moot-de-Piété. 

On  fait  différentes  propositions. 

Denrille  propose  de  renvoyer  le  projet  de  décret 
au  comité,  pour  qu'il  présente  un  autre  mode  de 
secours.  11  préférerait  aux  mesures  proposées  des 
secours  pécuniaires  à  domicile,  avec  lesquels  ces 
indigents  pourraient  retirer  leurs  effets.  Il  s*appuie 
de  l'abus  aue  l'on  fait  du  décret  que  la  Convention  a 
rendu,  et  dont  les  personnes  qui  ne  sont  pas  indi- 
gentes profitent  comme  les  antres. 

Dbleclot  :  Il  n'est  pas  inutile  de  dire  que ,  lors- 
que le  comité  des  secours  publics  a  travaillé  le  pro- 
jet de  décret  qui  lui  a  été  renvoyé,  il  a  fait  venir  les 
présidents  des  quarante-huit  comités  de  bienfai- 
sance. 

Un  de  ces  présidents  a  rapporté  qu'un  indigent 
était  venu  avec  six  billets  du  Mont-de-Piété.  Der- 
rière lui  était  un  particulier  propriétaire  de  la  moitié; 
l'indigent  en  est  convenu. 

Ci  toy en^,  une  distribution  semblable  a  été  ordonnée 
en  1789;  elle  a  coûté  4  millions  :  si  vous  ne  prenez 
des  mesures  convenables,  celle-ci  pourra  coûter  plus 
de  30  millions  à  la  république. 

Chaelier  :  La  Convention  a  voulu  distribuer  des 
secours,  et  non  favoriser  l'agiotage  et  la  paresse. 
Avec  le  décret  qu'elle  a  rendu  on  joue  à  la  hausse  et 
à  la  baisse;  les  bons  avec  lesquels  on  va  aux  comi- 
tés» les  filles,  les  joueurs»  après  avoir  retiré  leurs 
effets,  vont  les  remettre  dans  d'autres  mains  pour 
satisfaire  leur  cupidité. 

C'est  un  vice  du  gouvernement;  quand  il  veut 
venir  au  secours  des  indigents,  les  riches  en  pro- 
fitent. 

J'appuie  la  proposition  faite  par  Deville. 

Maure  demande  qne  le  projet  de  décret  s'étende 
à  tous  les  indigents  ae  la  republique. 

Lb  Bapportkub  :  Le  comité  a  bien  senti  les  diffi- 
cultés qu'il  y  avait  dans  l'exécution  du  décret  de  la 
convention,  Il  n'a  pas  voulu  le  rapport  de  ce  décret, 
mais  il  a  voulu  diminuer  les  dinicultés.  Non-seule- 
ment il  s'est  occupé  des  individus  qui  ont  mis  eu 
gage  des  effets  au  Mont-de-Piété ,  mais  encore  de 
ceux  qui  n'ontpas  même  eu  cette  dernière  ressource  ; 
car  ceux-là  aussi  méritent  des  secours.  Je  ne  m'op- 
pose pas  au  renvoi,  et  ie  ne  demande  pas  mieux  que 
le  comité  soit  chargé  oe  suppléer  au  décret  par  des 
mesures  plus  efficaces. 

Le  renvoi  est  décrété. 

Plusieurs  membres  demandent  le  rapport  du  dé- 
cret du  l«r  pluviôse  de  l'an  3,  relatif  aussi  aux  indi- 
gents qui  ont  mis  des  effets  an  Mont-de-Piété. 

Ce  décret  estrapporté. 


SUrre   0B  LA  SBARCB  DU  11  PLUTIOSB. 

On  lit  la  correspondance. 

—  Boiss^r  d'Anglas,  membre  du  comité  de  salut 
public ,  obtient  la  parole  pour  une  motion  d'ordre. 

BoissT  :  J'ai  retracé,  dans  un  premier  discours, 
les  principes  de  justice  et  de  loyauté  sur  lesquels 
repose  aujourd'hui  le  gouvernement  de  la  France  : 


j'ai  fait  voir  comment  ce  gouvernement,  tout  à  la  fois 
républicain  et  révolutionnaire,  venait  de  jeter  au 
milieu  de  vous  les  fondements  d'un  véritable  crédit 
public,  et  de  créer,  en  présence  de  l'Europe  entière, 
une  puissance  en  quelque  aorte  nouvelle. 

J'aifaif  voir  comment  le  peunle  français,  sortant 
tout  à  coup  du  sommeil  de  rcsclavage,  avait  repris 
sa  place  parmi  les  nations,  du  nombre  desquelles  on 
voulait  1  efbcer;  commencé  de  réparer  sesimmenses 
pertes,  et  préparé  tous  les  germes  de  sa  prospérité 
future. 

Maintenant  je  vais  porter  mes  regards  snr  la  si* 
tuation  extérieure  de  ce  vaste  empire,  sur  ses  rela- 
tions avec  les  autres  peuples,  et  sur  les  intérêts  de 
ceux-ci  par  rapport  à  lui.  Je  dirai  comment  de  l'éta- 
blissement de  sa  liberté  doit  nécessairement  résulter 
le  bonheur  du  monde,  et  la  paix  de  l'univers  de 
celle  que  vous  allez  négocier  avec  vos  voisins* 

J'avertirai  la  plupart  de  ceux  qui  nous  font  la 
guerre  des  dangers  devant  lesquels  ils  se  précipitent 
en  se  déclarant  contre  nous,  et  qui  sont  leU  q^ue  leurs 
succès  même,  s'ils  étaient  possibles,  ne  fieraient  que 
les  rendre  plus  pressants.  Je  repousserai  les  calom- 
nies atroces  de  ces  orateurs  stipendiés  ^r  les  tyrans, 
qui,  ne  pouvant  plus  espérer  de  nous  asservir  par  les 
armes,  veulent  nous  susciter  encore  autant  d  enne- 
qu'il  y  a  de  gouvernements  en  Europe,  et  nous  en- 
lever ce  crédit  national  qui  résulte,  pour  un  grand 
peuple,  de  son  respect  pour  les  autres  nations  et  de 
sa  morale  publique. 

Il  est  temps  que  les  formules  d'une  politique  an- 
cienne et  mal  avisée  fassent  place  aux  expressions 
franches  et  loyales  d'un  homme  libre  ;  il  est  temps 
que  la  vérité  reprenne,  à  la  tribune  des  législateurs, 
l'influence  qu'elle  n'y  devait  jamais  perdre.  Le  lan- 
gage que  je  tiendrai  contrastera  d'une  manière  re- 
marquable avec  les  paroles  insidieuses  dont  reten- 
tissent en  ce  moment  les  séances  de  cette#autre 
assemblée  soi-disant  représentative ,  qui ,  dans  ses 
débats  mensongers,  dans  ses  fanfaronnades  chevale- 
resques, dans  ses  Adresses,  adulatrices ,  nie  vos 
succès,  méconnaît  vos  victoires,  outrage  vos  prin- 
cipes, et  ose  menacer  encore  une  liberté  aue  trois 
années  d'attaques  infructueuses  auraient  dû  la  forcer 
à  respecter  enfin. 

Lorsque  les  passions  les  plus  exaspérées  forgent 
partout  des  armes  pour  nous  diviser,  nous  détruire 
ou  nous  enchaîner,  animés  par  des  passions  plus 
nobles,  enflammés  par  l'amour  de  la  liberté  et  oe  la 
patrie,  nous  devons  opposer  la  justice  imperturbable 
a  leur  fougue  violente,  et  la  constance  lîépubiicaine 
à  leur  impétuosité  téméraire. 

Presque  tous  les  trônes  de  la  terre  se  sont  ébranlés 
pour  se  précipiter  sur  nous;  leurs  ministres  se  sont 
ligués;  leurs  armées  se  sont  agglomérées;  leurs  fou- 
dres  se  sont  allumées  pour  détruire  notre  liberté 
naissante  ;  mais  leurs  cohortes  dévastatrices ,  ren- 
versées par  nos  bataillons  patriotes,  se  sont  dissipées 
comme  ces  nuages  épais  qui  semblent  annoncer  l'o- 
rage, et  qu'un  vent  salutaire  disi)erse  et  anéanlit. 

Tant  que  nous  n'avons  eu  à  combattre  que  1« 
haine  des  rois  coalisés  et  la  furie  de  leurs  soldats,  la 
valeur  bouillante  des  Français,  leur  courage  inépui- 
sable, les  sacrifices  constants  de  tous  les  citoyens 
ont  suffi  pour  prouver  à  l'univers  combien  nous 
sommes  dignes  de  la  liberté,  et  combien  est  chimé- 
rique l'espoir  de  ceux  qui  veulent  la  détruire.  Mais 
aujourd'hui,  citoyens,  que  nos  triompher  ont  porté 
l'épouvante  dans  le  sein  des  pays  qui  prétendaient 
donner  des  fers  à  la  France,  nous  avons  un  autre 
genre  d'attaque  à  soutenir,  d'autres  efforts  à  repous 
ser.  On  ne  peut  vaincre  les  Français,  on  cherche  k 
les  calomnier. 


841 


Toas  les  peuples  du  inonde  admirent  notre  cou- 
rage ;  tous  gémissent  de  voir  répandre  leur  sang  et 
ëpuiser  leurs  trésors  pour  arracher  notre  liberté  ;  on 
veut  nous  détruire  dans  leur  opinion,  et  rejeter  sur 
nous  seuls  les  calamités  sans  nombre  que  verse  sur 
eux  cette  longue  et  terrible  guerre.  Nous  n*avons 
pointa  redouter  la  fureur  des  rois  coalisés  ni  les  ef- 
forts de  leurs  soldats  ;  mais  nous  respecterons  tou- 
jours Topioion  des  peuples,  queU  que  soient  leurs 
fouverneroents,  leur  force,  leur  faiblesse,  leur  bon- 
eur  ou  leur  infortune. 

Nous  ne  chercherons  point,  comme  on  nous  en  a 
souvent  accusés,  à  trouoler  leur  organisation  inté- 
rieure, à  leur  faire  adopter  nos  lois  ;  mais  nous  ne 
souffrirons  pas  qu*on  empoisonné  à  leurs  youx  nos 
principes,  qu'on  uous  enlève  leur  estime,  et  que  les 
auteurs  ambitieux  d'une  guerre  funeste  rejettent  sur 
nous  les  tristes  fruits  de  leur  vanité  et  les  crimes  de 
leur  ambition. 

L'humanité  gémit  et  souffre  depuis  trois  années; 
depuis  trois  années  TEurope  est  inondée  de  sang,  les 
peuples  sont  accablés  d'impôts  ;  le  désir  insensé  de 
partager  ou  d'asservir  la  France  est  évidemment  la 
cause  ou  le  prétexte  de  tous  ces  malheurs  ;  et  lors- 
qu'une partie  de  nos  ennemis,  découragée  par  dos 
succès  ou  éclairée  par  l'expérience,  parait  vouloir 
laisser  respirer  la  terre  ;  lorsque  des  peuples  indi- 
gnés des  maux  terribles  dont  on  les  accable  semblent 
commander  partout,  à  leurs  gouvernements,  de 
mettre  un  terme  aux  horreurs  ae  la  guerre,  quel- 
ques politiques  cruels  et  artificieux  veulent  leur 
persuader  que  nous  seuls  nous  sommes  insensibles  à 
ces  cris  de  l'humanité  souffrante,  que  nous  seuls 
nous  sommes  avfdesde  leur  sang,  qu'aucune  paix 
n'est  ni  sûre  ni  honorable  avec  nous,  que  la  conti- 
nuation de  la  guerre  est  avantageuse  pour  eux,  et 
qu'enfin,  ce  qui  est  absurdement  contradictoire,  no- 
tre orgueil  et  nôtre  ambition  sont,  d'une  part,  trop 
redoutables  pour  qu'on  traite  avec  nous,  et  que,  de 
l'autre,  nos  efforts  nous  ont  trop  épuisés  pour  qu'on 
ne  puisse  pas  espérer,  en  uous  combattant,  des  suc- 
cès certains. 

Nous  devons,  citoyens,  par  respect  pour  l'huma- 
nité, relever  ces  contradictions,  répondre  à  ces  ca- 
lomnies, présenter  la  lumière  à  tous  les  yeux,  et  le- 
ver le  masque  de  ces  machiavéliques  gouvernements 
lui,  se  jouant  du  sang  des  hommes  et  de  la  fortune 
les  peuples,  veulent  arriver  à  une  grandeur  colos- 
sale sur  la  ruine  des  principales  puissances  de  l'Eu- 
rope. 

iNous  devons  convaincre  tous  les  hommes  ver- 
tueux que  nous  détestons  la  guerre  sans  la  craindre; 
que  nous  sommes  toujours  prêts  à  en  faire  cesser  les 
horreurs,  lorsau'on  nous  présentera  une  paix  con- 
forme à  notre  aignité  et  propre  à  garantir  notre  sû- 
reté. Nous  devons  en  même  temps  avertir  tous  les 
peuples  que,  prêts  à  négocier  avec  franchise,  nous 
ne  souffrirons  pas  que  l'on  paralyse  nos  armes,  que 
l'on  suspende  nos  triomphes  par  des  négociations 
fausses  ou  insignifiantes. 

Nos  armées,  qui  bravent  les  saisons,  maîtrisent  les 
éléments,  et  tournent  à  leur  avantage  tous  les  ob- 
stacles que  la  nature  et  l'art  semblaient  leur  oppo- 
ser ;  nos  armées  qui,  s'élançant  sur  les  inondations 
glacées  de  la  Hollande,  ^n  ont  achevé  la  conquête 
en  moins  de  temps  qu'il  n'en  fallait  autrefois  pour  y 
voyager,  se  chargeront  de  démontrer  à  nos  ennemis 
que, loin  d'être  épuisés  par  trois  années  de  guerre, 
nous  n'avons  fait  qu'accroître  nos*  ressources,  et 
ajouter  l'expérience  des  chefs,  la  discipline  des  sol- 
dats, à  cette  artleur  républicaine  qui  n'a  jamais 
cessé  d'embraser  leurs  âmes.  Mais  nous  devons  sur- 
tout prouver  à  l'univers  que  l'ambition  du  gouver- 


d( 


nement  anglais,  l'intérêt  de  la  maison  d'Autriche  et 
l'orgueil  de  la  Russie  sont  les  seules  causes  des  mal- 
heurs du  monde. 

Puissancesde  l'Europe,  ouvrez  les  ^euz  !  Contem- 
plez vos  véritables  dangers  ;  connaissez  enfin  vos 
véritables  ennemis  ;  considérez  avec  effroi  l'abîme 
dans  lequel  ils  vous  entraînent,  tantôt  en  faisant  de 
la  France  un  épouvantail  qui  vous  trouble,  tantôt 
en  vous  la  présentant  comme  une  proie  facile  à  par- 
tager. Peuples  souffrants,  monarques  trompés,  répu- 
bliques enviées,  suivez  avec  moi  les  cours  de 
Vienne,  de  Pétersbourg,  et  surtout  de  Londres,  dans 
le  dédale  ténébreux  de  leur  politique  astucieuse  ;  le 
flambeau  de  l'évidence  va  vous  conduire,  et  vous 
verrez  ensuite  quels  sont  les  projets  que  vous  devez 
craindre,  les  ennemis  que  vous  devez  combattre,  les 
amis  que  vous.devez  embrasser. 

La  politique  du  cabinet  de  Vienne  est  depnis 
longtemps  dévoilée;  constants  dans  leurs  ambitieux 
projets,  les  princes  se  succèdent  depuis  plusieurs 
siècles  sur  ce  trône  en  conservant  toujours  le  même 
esprit,  en  suivant  sans  cesse  le  même  système.  Le 
but  est  toujours  invariable,  mais  les  moyens  d'v  at- 
teindre varient  continuellement.  La  maison  o' Au- 
triche a  su  employer  tour  à  tour,  pour  s'agrandir, 
les  traités,  les  ruptures,  les  mariages,  les  intrigues 
et  les  armes. 

Avant  que  la  Russie  se  fût  civilisée  et  que  la  Prusse 
fût  devenue  une  puissance,  la  France,  la  Turquie  et 
la  Suède  servaient  seuls  de  digue  |K)ur  protéger 
l'Empire  contre  les  empereurs.  Depuis  que  les  ri- 
vaux de  la  cour  de  Vienne  ont  augmenté  en  nombre 
et  en  forces,  elle  a  su  négocier  si  adroitement  qu'elle 
a  manqué,  par  artifice,  briser  les  contre-poids  qui 
balançaient  sa  puissance.  Elle  a  su  affaiblir  les  Turcs 
en  les  sacrifiant  aux  Russes  ;  elle  a  tellement  séduit 
la  France,  que  la  Prusse  s'est  vue  au  moment  d'une 
entière  destruction,  malgré  le  génie  de  Frédéric  et  la 
discipline  de  ses  soldats. 

Deux  fois  depuis  cette  époque  elle  a  été  sur  le 
point  d'envahir  la  Bavière,  d'abord  par  la  voie  des 
armes,  et  dernièrement  par  un  échange  ;  enfin, 
voyant  que,  malgré  ses  liens  avec  la  France,  les 
Français  n'avaient  pas  secondé  ses  vues,  elle  a 
voulu  détruire  perfiaement  son  alliée;  et,  profitant 
des  secousses  de  notre  révolution,  elle  a  favorisé  nos 
ennemis  intérieurs,  tramé  des  complots  au  sein  de 
notre  gouvernement,  et  a  ligué  contre  nous  toute 
l'Europe,. sous  le  prétexte  fastueux  de  soutenir  la 
querelle  des  rois,  mais  dans  le  dessein  réel  de  nous 
arracher  l'Alsace,  la  Lorraine  et  une  partie  de  la 
Flandre,  et  de  se  débarrasser  à  jamais  de  la  surveil- 
lance d'un  peuple  dont  l'éclat  excita  toujours  son 
envie,  et  dont  la  force  réprima  toujours  son  au- 
dace. L'événement  a  trompé  son  attente  :  elle  a 
déjà  perdu  les  Pays-Bas  ;  ses  places,  ses  canons,  ses 
trésors,  ses  armées  ont  disparu  devant  les  nôtres,  la 
réputation  de  ses  généraux  s'est  évanouie,  et  tout 
annonce  que  le  jour  de  la  justice  est  enfin  arrivé 

Eour  elle.  Elle  n'oflre  plus  que  le  spectacle  de  l'am- 
ition  trompée  et  de  la  colère  impuissante.  Elle 
craint  la  paix,  mais  elle  ne  peut  continuer  la  guerre; 
et  il  n'est  aucune  puissance  de  l'Europe  qui  ne  voie 
que  sa  politique  serait  d'engager  toutes  les  autres  à 
se  ruiner,  à  se  battre  pour  elle,  et  à  lui  rendre  ce 
qu'elle  a  perdu. 

La  Prusse  doit  savoir  à  présent  de  quel  côté  était 
l'artifice,  de  quel  côté  était  la  sincérité.  Tout  doit 
faire  regretter  à  Frédéric-Guillaume  d'avoir  écouté 
les  conseils  de  son  ennemi  naturel  plutôt  que  les 
envoyés  pacifiques  d'une  nation  libre,  qui  lui  mon- 
traient la  vérité  et  lui  offraient  une  amitié  utile  ; 
d'avoir  été  la  dupe  de  quelques  intrigants  couronnés. 


sa 


de  quelqaef  n^ocîttenrt  adroits,  qui  Tont  entratDé 
dans  la  seule  route  qui  pouvait  le  perdre.  L'Espagne, 
FEmpire,  la  Sardaigne  doivent  éprouver  les  inf  mes 
regrets.  Ces  puissances  doivent  voir  en  frémissant 
iWine  dans  leçiuel  on  a  voulu  les  plonger.  Elles 
n*oiit  que  la  triste  perspective,  ou  de  partager  le 
sort  de  la  Hollande,  ou  de  s'anéantir  sous  le  joug  des 
deux  cours  qui  les  ont  séduites.  Ah!  ce  qu'il  faut 
surtout,  pour  Tintérét  de  l'Europe,  montrer  à  ces 
puissances  trompées,  c'est  le  danger  dont  elles  sont 
menacées  par  deux  colosses  qu'elfes  soutiennent,  et 
qui  finiraient  par  les  subjuguer  si  notre  dévouement, 
nos  sacrifices  et  notre  courage  ne  parvenaient  à  les 
arrêter  dans  leur  marche.  L'Angleterre  et  la  Russie, 
voilà  les  deux  ennemis  au'il  faut  dénoncer  â  l'uni- 
vers  ;  voilà  les  tyrans  qu  il  fout  dénoncer  au  monde; 
voilà  les  torrents  dévastateurs  dont  il  faut  arrêter 
l'irruption.  Plus  adroites,  mieux  placées,  moins 
malheureuses  que  l'Autriche,  elles  ont  seules  jus- 
qu'à présent  profité  des  malheurs  universels  et  des 
erreurs  de  la  coalition. 

Sortez  de  votre  sommeil.  Etats  de  TEmpire,  roi 
de  Prusse,  et  vous  toutes  puissances  maritimes! 
Vos  flottes,  vos -forces,  vos  cultivateurs,  vos  finan- 
ces, votre  sang,  on  vous  fait  tout  sacrifier  pour  don- 
ner à  la  Russie  l'empire  de  la  terre,  et  celui  des  mers 
à  l'orgueilleuse  Albion.  Oubliez- vous  que  les  habi- 
tants du  Nord  détruisirent  l'empire  romain,  plus 
uni,  plus  roUoutahle  que  vous?  Faut-il  rappeler 
à  votre  mémoire  ces  irruptions  des  Goths  et  des 
Vandales,  inondant  l'Europe  entière  pour  en  dé- 
truire tous  les  principes?  Faut-il  vous  rappeler 
que,  depuis  soixante  ans,  la  Russie,  civilisant  gros- 
sièrement ses  peuples  barbares,  conservant  une 
force  sauvage,  même  en  s'enrichissant  des  arts  et  de 
la  tactique  moderne,  a  déjà  humilié  tes  Chinois  et 
fondé  des  colonies  sur  la  côte  d'Amérique;  qu'elle 
a  franchi  le  Caucase,  soumis  la  Géorgie,  imposé  des 
lois  à  une  partie  de  la  Perse,  subjugué  les  Cosaques, 
détruit  les  Tartares,  conquis  la  Crimée,  partagé  la 
Pologne,  épouvanté  l'empire  ottoman,  soulevé  la 
Grèce  et  menacé  Constantinople  ? 

Faut-il  rouvrir  des  plaies  encore  saignantes,  et 
vous  retracer  ces  bataillons  nombreux  entrant  dans 
Berlin  même  et,  sans  le  caprice  imprévu  de  Pierre  III, 
anéantissant  jusqu'au  nom  de  la  puissance  prus- 
sienne ?  Ne  voyez-vous  pas  que  l'ambitieuse  Cathe- 
rine, en  donnant  de  vaines  promesses  aux  émigrés, 
en  enflammant  le  courroux  àt$  princes  d'Allemagne 
contre  la  liberté  française,  a  su  enchaîner  ses  rivaux 
à  une  guerre  qui  les  épuise,  pour  s'emparer  de  la 
Pologne,  et  s'ouvrir  par  là  les  portes  de  la  Ger- 
manie? 

Je  sais  qu'on  peut  dire  avec  fondement  que  l'em- 
pire russe  est  un  colosse  aux  pieds  d'argile  ;  que  la 
corruption  y  a  précédé  la  maturité  ;  que  l'esclavage 
qui  y  existe  6tt  toute  solidité  à  sa  force,  toute 
énergie  à  ses  ressorts;  qu'il  est  immense,  mais  en 
partie  désert  ;  fastueux,  mais  pauvre  ;  qu'il  est  déjà 
trop  vaste  pour  être  gouverné  ;  qu'en  s'élendant  il 
avance  sa  dissolution,  et  que  chaque  conquête  qu'il 
fait  est  un  pas  de  plus  vers  sa  ruine.  Je  conviens  de 
ces  vérités;  mais  ce  géant,  avant  de  périr,  vous  écra- 
sera :  c'est  sur  vos  ruines  qu'il  doit  tomber  ;  il  ne  se 
liemembrera  qu'après  vous  avoir  ravagés,  dispersés, 
anéantis.  Danois,  Suédois,  Allemands,  Prussiens, 
Ottomans,  songez-y  ;  le  temps  vole,  la  foudre  gron- 
de; Vienne  vous  trahit;  le  torrent  moscovite  s'a- 
moncelle ;  Attila  s'avance  une  seconde  fois,  et  vous 
êtes  perdus  si  vous  ne  vous  réunissez  à  temps  pour 
arrêter  ce  fléau  dévastateur. 

On  vous  fait  craindre  la  France.  Quelle  étrange 
erreur  1 8i  ootre  gouvernement  est  sage  et  fondé  sur 


principes,  pourquoi  nous  fenvier  ?  81,  mt 
-e,  il  est  aussi  désastreux  qu'on  vous  le  ail. 


de  vrais 
sa  nature, 

pourquoi  redouter  un  peuple  qui  porterait  dans  son 
sein  une  source  de  faiblesse  ou  d'agitation  qui  Tem* 
pêherait  de  s'occuper  de  vous?  La  constance  de  nos 
efforts,  la  durée  de  nos  sacrifices,  la  permanence  de 
nos  victoires  ne  démontrent-elles  pas  d'avance  U 
stabilité  des  traités  qu'on  ferait  avec  nous,  et  les 
changements  de  système  d'une  grande  nation  ne 
sont-ils  pas  nécessairement  plus  rares  que  les  chan* 
gements  et  les  caprices  des  ministres,  des  maîtresses 
et  des  favoris?  Ah!  nos  intérêts  sont  communs. 
Qu'importe  que  nous  vous  ayons  devancés  dans  la 
carrière  de  la  liberté  !  qu'importent  notre  constitu- 
tion et  nos  lois,  nos  principes  et  nos  opinions  !  La 
|M>litique  vous  commande  de  vous  réunir  à  nous,  el 
de  marcher  d'un  pas  éeal  contre  les  ennemis  qai 
nous  menacent.  Lorsqiron  vous  crie  qu  il  n'est  ni 
sûr  ni  honorable  de  traiter  avec  nous,  traduisez  ce 
langage  dans  son  vrai  sens,  et  comprenez  que  l'Ail- 
tricne  vous  dit  :  •  Battez- vous  pour  une  je  reprenne 
mes  provinces  ;  >  et  apprenez  que  1  Angleterre  ne 
vous  presse  de  nous  combattre  que  dans  l'espoir  que 
vous  nous  empêcherez  de  nous  opposer  à  ses  con- 
quêtes maritimes.  Enfin,  écoutez  la  Russie  ;  voici  ses 
propres  paroles  :  «  Combattez,  épuisez- vous  ;  verses 
tout  votre  sang  et  tous  vos  trésors,  pour  que  Je 
puisse  sans  obstacle  quitter  mes  déserts  et  verser  ma 
population  guerrière  sur  votre  fertile  territoire...  • 
0  vous,  politiques  de  l'Europe,  qui  vous  vantiez 
d'une  si  haute  sagesse,  d'une  pénétration  si  profon- 
de, comment  est-il  possible  que  vous  n'ayez  pas  en- 
core levé  le  voile  qui  couvrait  à  vos  yeux  les  vues 
machiavéliques  du  gouvernement  anglais!  comment 
ne  voyez- vous  pas  à  quel  point  il  vous  abuse,  et 
combien  il  se  joue  de  tout  ce  au'il  dit  respecter  !  Ce 
gouvernement  nous  accuse  o^immoralité  ;  etiors* 
qu'on  a  voulu  réprimer  par  la  neutralité  armée  le 
brigandage  exerce  sur  le  commerce  des  neutres»  seul 
de  tous  les  gouvernements  civilisés  il  s'y  est  opposé 
sans  pudeur!  Il  nous  accuse  d'avoir  rompu  la  paix  el 
d'avoir  violé  le  droit  des  gens,  et  il  a  insulté  notre 
ambassadeur!  Il  fait  profession  de  haTr  le  papisme 
intolérant,  et  il  prend  les  armes  pour  défencfre  les 
superstitionsde  Rome  !  Il  prétend  chérir  la  liberté,  et 
il  est  lié  avec  les  oppresseurs  de  la  Pologne  !  U  nous 
reproche  des  cruautés  dont  nous  exécrons,  dont 
nous  punissons  les  auteurs,  et  il  a  rempli  l'Asie  de 
pillage  et  de  cadavres,  et  il  a  stipendié  aes  sauvages 
pour  asservir  les  Américains ,  et  il  a  acheté  a  un 
prince  allemand  des  hommes,  en  fixant  d'avance  le 

Srixde  chaque  blessure,  de  chaque  mutilation,  en 
xant,  en  un  mot,  le  tarif  de  chaque  goutte  de  sang 
de  ces  malheureux  esclaves  !  II  nous  taxe  d'ambition, 
et  il  veut  follement  s'emparer  de  toutes  les  colonies! 
Il  ose  dire  que  nous  faisions  la  guerre  sans  humanité, 
et  il  a  voulu  se  venger  de  ses  revers  en  exposant 
vingt-quatre  millions  d'hommes  à  une  famine  dont 
le  sort  et  notre  valeur  nous  ont  garantis  !  Il  crie  par- 
tout que  nous  voulons  attaquer  l'indépendance  des 
autres  peuples,  et  il  a  voulu  contraindre  Gênes,  Ve- 
nise, la  Suède  et  le  Danemark  à  renoncer  au  droit  le 
plus  respectable  et  le  plus  sacré,  celui  de  rester  neu- 
tres au  milieu  des  horreurs  de  la  guerre!  Il  ose  enfin 
déclarer  qu'il  n'est  pas  sûr  de  traiter  avec  nous,  lui 
qui,  lié  avec  la  Russie,  a  excité  les  Turcs  à  lui  faire  la 
guerre  et  qui  les  a  abandonnés,  lui  qui  a  encouragé 
les  Polonais  à  faire  leur  révolution,  et  qui  les  a  lais- 


secourue,  s'est  borné  à  affaiblir  le  récit  de  ses  per- 
tes ;  lui  enfin  qui,  après  avoir  séduit  les  malheu- 


S48 


retix  habitants  de  la  Vendée  et  de  Toulon,  a  joui 
tranquillement  da  spectacle  de  leur  ruine. 

Qu'attendpz-vous ,  Espagnols  incertains?  Si  le 
sort  trompait  notre  courage  ;  si,  persistant  dans  vo- 
tre inconcevable  coalition,  tous  paralysies  nos  ef- 
forts contre  votre  ennemie  implacable,  et  aue,  s'af- 
fermissant  dans  nos  colonies,  elle  détruisît  raliment 
de  notre  marine,  ne  la  voyex-vous  pas  déjà  s'empa- 
rant  de  vos  galions,  exploitant  vos  mines,  vous  ar- 
rachant l'empire  du  Mexique,  celui  du  Pérou,  Porto- 
Rico,  Cuba  ;  vous  chassant  de  toutes  les  mers,  et  du 
haut  des  murs  de  Gibraltar,  insultant  à  vos  mal- 
heurs et  Jouissant  de  votre  misère?  Bn  1790,  nVt- 
elle  pas  déjà  levé  le  glaive  sur  vous  parce  qu'elle 
vous  croyait  hors  d'état  de  vous  défenore  ?  N  est-ce 
pis  nous  qui  l'avons  détournée  au  moment  où, 
comptant  sur  nos  troubles,  elle  croyait  vous  frapper 
impunément?  Ses  attentats  sur  la  Corse  ne  vousan- 
noncent-ils  pas  qu'elle  veut  nous  expulser  de  la  Mé- 
diterranée comme  elle  aspire  à  vous  chasser  de  l'O- 
céan? 

Réveil  lez- vous  donc  au  cri  de  la  vérité  ;  appréciez 
à  leur  juste  valeur  les  calomnies  répandues  contre 
nous  ;  ne  voyez  dans  les  discours  dont  retentit  le 

Ï parlement  de  Londres  que  la  peur  de  la  paix,  que  le 
angage  de  l'ambition  démasquée,  et  laissez-nous 
nous  charger  du  soin  de  notre  vengeance  et  de  no- 
tre sûreté.  Non-seulement  il  est  sur,  il  est  honora- 
ble de  traiter  avec  nous,  mais  cette  mesure  devient 
indispensable  à  votre  salut.  Nous  vous  en  avons  fait 
connaître  la  nécessité,  apprenez-en  les  moyens; 
nous  sommes  trop  grands,  trop  forts  pour  avoir  rien 
à  déguiser. 

Nos  dangers  passés,  la  nécessité  d'en  rendre  le  re- 
tour impossible,  l'exemple  de  la  ligue  menaçante 
qui  voulut  nous  envahir  et  oui  a  porté  un  moment 
la  désolation  dans  le  cœur  de  la  France,  le  devoir 
d'indemniser  nos  concitoyens  de  leurs  sacrifices,  le 
désir  sincère  de  rendre  la  paix  solide  et  durable, 
nous  obligent  à  ^tendre  nos  frontières,  à  nous  don- 
ner de  grands  fleuves,  des  montagnes  et  l'Océan 
pour  limites,  et  à  nous  garantir  ainsi  d'avance,  et 
pour  une  longue  suite  de  siècles,  de  tout  envahisse- 
ment et  de  toute  attaque.  A  ce  prix  les  puissances  de 
l'Europe  peuvent  compter  sur  une  paix  inviolable 
et  sur  des  allies  courageux,  qui  sauront  bien  les  dé- 
gager du  poids  de  ces  deux  colosses  téméraires  qui 
veulent,  dans  leur  coupable  délire, s'arroger  tout  à 
la  rois  l'empire  de  ta  terre  et  des  mers. 

Telles  sont,  citoyens,  les  grandes  vérités  que  tout 
nous  commande  aujourd'hui  de  développer  aux 
yeux  de  l'Europe. 

En  vain  voudrait-on  égarer  les  peuples  en  lenr  di- 
sant que,  notrç  gouvernement  n'étant  que  provi- 
soire, aucun  lien,  aucun  traité  ne  peuvent  avoir  de 
garantie.  Notre  gouvernement  est  le  plénipoten- 
tiaire nommé  parla  totalité  du  peuple  français  pour 
terminer  en  son  nom  la  révolution  et  la  guerre  ;  et 
je  doute  qu'on  ait  jamais  vu  d'ambassadeur  revêtu 
d'un  plus  ample  pouvoir  et  d'un  plus  aUguste  carac- 
tère. 

Qu'importent  les  combinaisons  dont  se  forment 
les  gouvernements,  lorsque  l'on  traite  avec  les  peu- 
ples à  qui  ces  gouvern^^ments  appartiennent!  Elle 
sera  bien  plus  solide,  cette  paix  que  vous  demande- 
rez bientôt,  lorsqu'elle  vous  sera  donnée  par  l'assen- 
timent du  peuple  entier.  Notre  gouvernement,  c'est 
la  volonté  de  la  nation  ;  nos  formes,  c'est  la  justice  -, 
nos  principes,  c'est  l'humanité;  votre  garantie,  c'est 
la  lovante  et  le  courage  d'une  nation  qui  a  voulu 
être  libre. 

Appréciex  notre  gouvernement  actuel  par  le  spec- 
tacle qu'il  offre  au  moode;  il  a  réprimé  les  troubles 


intérieurs,  anéanti  les  factions  rebelles,  brisé  les  ' 
échafauds,  ouvert  les  prisons,  vengé  le  sang  inno- 
cent, voué  a  la  mort  et  à  l'infamie  les  ministres  de  la 
terreur  ;  il  a  rendu  la  liberté  au  commerce,  la  tran- 

Suillité  à  l'agriculture;  il  a  mis  à  l'ordre  du  jour, 
ans  l'intérieur,  la  justice,  et  sur  les  frontières  la   ' 
victoire. 

Ah  !  tous  les  peuples  éclairés  écouteront,  avec  le 
sourire  du  mépris  et  de  la  pitié,  les  politiques  absur- 
des ou  perfides  qui  mettent  en  doute  si  la  nation  qui 
sait  vamçre  a  le  pouvoir  de  négocier,  qui  os^nt  en- 
core soutenir  que  la  paix  est  impossibljc  au  moment 
où  tout  démontre  que  l'obstination  est  insensée  et  la 
résistance  vaine. 

Adoptez,  citoyens,  les  idées  que  je  viens  de  tracer; 
parles  avec  cette  noble  franchise  qui  convient  à  la 
majesté  du  peuple  français,  et  vous  verrez  bientôt 
les  subtibilités  diplomatiquesde  vos  ennemis  confon- 
dues par  la  sagesse  de  vos  conseils,  comme  vous 
avez  vu  leur  témérité  punie  par  le  courage  de  vos 
guerriers. 

(Ce  discours  a  été  entendu  dans  le  silence  et  avee 
le  plus  vif  intérêt  ;  l'orateur  en  le  terminant  est  cou- 
vert par  les  applaudissements  unanimes  et  prolon- 
gés de  la  Convention  et  des  tribunes.) 

Lauibnt  :  Le  discours  une  vous  venez  d'entendre 
est  plein  de  sagesse;  je  aemande  qu'il  soit  traduit 
dans  toutes  les  Tangues,  et  qu'il  soit  regardé  comme 
la  déclaration  du  peuple  français. 

***  :  Je  demande  en  outre  renvoi  de  ce  discours  à 
toutes  les  municipalités,  avec  ordre  de  le  lire  aux  as- 
semblées du  peuple. 

Gaston  :  Nous  avions  tous  applaudi  aux  principes 
contenus  dans  le  discours  de  Boissy.  J'avoue  qu  en 
mon  particulier  ce  discours  m'a  fait  un  grand  plai- 
sir ;  mais  dans  la  rédaction  d*un  ouvrage  de  cette  im^s 
portance,  dans  cette  espèce  de  manifestation  de  vos 
principes,  il  n'est  pas  un  mot,  pas  une  syllabe  qui 
ne  doive  être  pesée  et  mûrement  examinée.  Je  de- 
mande donc  que  ce  discours  soit  d'abord  distribué 
aux  membres  de  la  Convention,  et  qu'il  en  soit  fait 
une  seconde  lecture  avant  que  vous  en  ordonniez 
l'envoi. 

Bourdon  :  J'ai  demandé  la  parole  pour  applaudir 
a  l'énergie  de  mon  collègue,  qui  a  eu  le  courage  de 
venir^  au  milieu  de  la  prospérité  de.nos  armes  et  de 
la  régénération  intérieure ,  poser  les  colonnes  de 
l'Bercuie  français,  en  annonçant  que  nous  n'avons 
combattu  que  pour  notre  liberté,  que  nous  nous 
renfermerons  dans  les  limites  que  la  nature  a  posées 
et  au  delà  desquelles  tous  les  peuples  seront  nos 
amis.  (On  applaudit.)  L.es  peuples  verront  ce  que 
c'est  que  d'avoir  à  faire  à  une  nation  généreuse,  qui, 
par  ses  victoires,  va  ranimer  la  liberté  dans  ce  pays 
où  de  pauvres  pécheurs  oiit  autrefois  su  la  planter. 
Nous  ne  nous  mêlerons  pas  de  leur  gouvernement  ; 
que  personne  ne  s'immisce  dans  le  nôtre.  (Vife  ap- 
plaudissements.) 

Les  puissances  de  l'Europe  reconnaîtront  enfin  la 
politique  de  la  perfide  Angleterre,  qui,  pour  régner 
en  dominatrice  sur  les  mers  et  s'emparer  de  tout  le 
commerce,  n'a  jamais  cessé  de  jeter'la  division  sur 
le  continent.  (Applaudissements.)  Mais  enfin,  lors- 

3 ne  cette  dernière  même  nous  fera  des  propositions 
ignés  de  nous,  eh  bien,  nous  les  entendrons  et  nous 
verrons  à  les  accepter.  (Mêmes  applaudissements.) 

Je  demande  aussi  l'impression  du  discours  et  l'a- 
journement du  décret  d'envoi,  afin  qu'après  une  dis- 
cussion l'assemblée  proclame  soleonellemeot  quels 
sont  ses  principes. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

—  Les  citoyens  de  la  section  du  Temple  défilent 
dans  le  sein  de  la  Convention  nationale. 


344 


Uorateur,  à  la  barre:  Citoyens  représentants, 
vous  avez  plus  d'un  exemple  que  les  factions  enne- 
mies de  la  justice  et  de  rhumanitë  s*agitent  en  tout 
sens:  les  royalistes  et  les  terroristes  se  réunissent 
pour  ramener  le  désordre  et  Tanarchie.  Ceux-là 
cherchent  à  faire  regretter  le  régime  proscrit  le 
10  noût,  et  ceux-crcalomnient  et  font  même  insulter 
la  représentation  nationale  :  tous,  également  san- 
guinairest  soufflent  le  feu  de  la  discorde  et  de  la 
guerre  civile.  L'impunité  des  grands  coupables  les 
enhardit,  et  ils  osent  espérer  de  se  baigner  de  nou- 
veau dans  le  sang  des  Français.  Cette  audace  se 
manifeste  dans  toute  la  république,  et  Ton  voit  par- 
tout, à  la  tête  de  ces  agitateurs,  les  membres  des 
comités  révolutionnaires,  agents  et  protégés  Je  ces 
hommes  de  sang  qui  ont  d&olé  la  France  jusqu'au 
9  thermidor. 

La  section  du  Temple,  après  avoir  examiné  les 
Texations  et  les  actes  arbitraires  exercés  pw  les 
membres  du  ci-devant  comité  révolutionnaire  sur 
les  citoyens  de  cette  section,  ayant  acquis  la  preuve, 
par  leur  conduite  avant  et  depuis  le  9  thermidor, 

3u'ils  sont  les  plus  chauds  partisans  du  désordre  et 
u  terrorisme,  a  pris,  dans  son  assemblée  générale 
du  30  nivôse,  un  arrêté  par  lequel  elle  déclare  que 
tous  les  membres  du  ci-devant  comité  révolution- 
naire de  la  section  du  Temple  se  sont  rendus  coupa- 
bles d'abus  de  pouvoirs  dans  leurs  fonctions  ;  en 
conséquence,  les  dénonce  au  peuple  français  et  à  la 
Convention  nationale,  dont  elle  invoque  la  justice  ; 
que  cet  arrêté  sera  porté  par  la  masse  entière  de  la 
section  à  la  Convention  nationale,  et,  par  des  com- 
missaires, aux  autorités  constituées  et  aux  quarante- 
sept  autres  sections,  et  que  les  noms  des  douze  mem- 
bres du  comité  révolutionnaire  seront  inscrits  à  la 
suite  de  cet  arrêté  ainsi  que  celui  du  nommé  Figuet, 
ci-devant  administrateur  de  police  à  la  commune,  et 
à  présent  inspecteur  des  casernes,  comme  moteur  et 
complice  de  leurs  vexations. 

Citoyens  représentants,  vous  dénoncer  les  enne- 
mis de  l'égalité,  de  la  justice  et  de  l'humanité,  vous 
faire  connaître  les  véritables  conspirateurs,  les  dé- 
masquer aux  yeux  de  la  France  entière,  c'est  sans 
doute  servir  la  liberté  que  nous  avons  tous  jurée. 

Les  citoyens  de  la  section  du  Temple  seront  6dèles 
à  leur  serment.  Ils  abhorrent  la  tyrannie,  n'iniporte 
le  masque  dont  elle  se  couvre.  Que  les  royanstes, 
les  terroristes  et  tous  les  hommes  de  sang  soient  li- 
vrés aux  tribunaux  ;  qu'ils  reçoivent,  s'ils  sont  cou- 
Îiables,  la  punition  due  aux  forfaits  dont  la  France 
es  accuse  ;  que  cet  acte  de  justice  apaise  les  mânes 
des  milliers  de  victimes  (qu'ils  ont  immolées  à  leurs 
projets  liberticides,  et  relevé  le  courage  des  hommes 
timides  qui  craignent  encore  le  règne  des  bourreaux. 

Législateurs,  frappez  ces  tigres  qui  se  flattent  en- 
core de  conduire  au  supplice  le  représentant  fidèle 
et  le  citoyen  paisible. 

Que  les  partisans  de  Robespierre  disparaissent  de 
toutes  les  places  et  même  du  sol  de  la  liberté!  Que 
le  lion  ne  se  réveille  que  pour  être  mis  à  mort  !  Dé- 
jouez les  complots  de  tous  les  tyrans  et  tyranneaux  ; 
accélérez  Tépurement  des  autorités  constituées  ;  dé« 
créiez  que  tous  les  fonctionnaires  publics  destitués 
depuis  le  9  thermidor  seront  tenus  de  déclarer  les 
lieux  de  leur  résidence  actuelle,  dans  les  départe- 
ments, aux  comités  révolutionnaires  de  leur  arron- 
dissement, et  à  Paris,  au  comité  de  sûreté  générale, 
section  de  la  police. 

Ces  hommes,  qui  conspirent  dans  l'intérieur  con- 
tre la  liberté,  ne  sont  pas  moins  dangereux  que  les 
despotes  coalisés.  Les  armées  républicaines  font 
trembler  les  uns  ;  anéantissez  lesautres,  et  le  peuple 
français,  qui  veut  la  liberté  tout  entière,  chantera  ses 


doubles  victoires,  et  ratera  sans  cesse  :  Vive  la 
républiauel  vive  la  Convention  nationale  !  (On  ap- 
plaudit.) 

.  Lb  Président,  à  la  députation  :  Les  pervers  qui 
dominaient  avant  le  9  thermidor  se  nourrissent  au- 
jourd'hui de  malheurs  et  de  calamités.  Les  succès 
inouïs  de  nos  armées,  l'arrivage  des  subsistances  à 
Paris,  les  secours  accordés  aux  indigents,  la  sollici- 
tude constante  de  la  Convention  nationale  pour 
maintenir  la  justice  et  l'humanité  à  l'ordre  du  jour, 
sont  des  tourments  pour  ceux  qui  ne  connaissent 
d'autre  jouissance  que  les  larmes  et  la  mort.  Votre 
sollicitude  est  patriotique  et  louable;  mais  la  Con- 
vention et  le  peuple  français  ont  juré  d'exterminer 
tous  les  royalistes,  les  terroristes,  tous  les  égor- 
geurs  ;  leurs  serments  ne  seront  pas  vains,  et  tous 
les  bons  Français  verront  triompher  la  liberté,  l'é- 
galité, et  toutes  les  vertus  civiques. 

{La  euiie  demain.) 

Arrêté  du  comité  des  finances  de  là  Convention  no- 
tionale.  —  Du  S  pluviôse. 

Le  comité  des  finances,  considérant  que  la  rentrée 
des  contributions  mobilières  des  exercices  de  1791 
et  1792,  et  du  droit  de  patente  pour  ces  mêmes  an- 
nées, n'a  pas  eu  à  Paris  tout  l'effet  que  la  Convention 
nationale  devait  s'en  promettre,  et  désirant  mettre 
fin  à  ce  recouvrement,  arrête  : 

1®  Les  cartes  de  sûreté  ne  devront  être  délivrées 
qu'aux  citoyens  qui  justifieront  par  quittance  avoir 
acquitté  leurs  contributions  mobilières  des  années 
1791  et  1792. 

20  II  en  sera  usé  de  même  pour  tous  ceux  qui,  par 
leur  état,  étaient  pendant  ces  années  assujettis  au 
droit  de  patente. 

30  Ne  seront  point  assujettis  à  cette  justification 
les  enfants  en  puissance  de  père  et  mère,  et  logeant 
chez  eux,  qui  n'ont  point  atteint  l'âge  de  vingt  ans, 
à  moins  qu'ils  ne  soient  reconnus  exercer  un  état 
ou  profession  dont  ils  retireraient  un  lucre  quel- 
conque. 

40  Ne  seront  point  assujettis  à  cette  justification 
ceux  qui,  par  leur  détresse  causée  par  leur  àfe 
avancé,  leurs  charges  de  famille  ou  leurs  infirmit£, 
sont  hors  d*état  de  supporter  aucune  contribution; 
niais  ils  devront  justifier  d'un  certificat  de  non-impo- 
sition, s'ils  ne  sont  pas  portés  aux  rûles,  ou  d  un 
certificat  de  décharge,  s'ils  sont  portés  aux  rôles. 

50  Ne  seront  point  assujettis  à  cette  justification 
ceux  qui  ne  sont  à  Paris  que  depuis  six  mois,  et  qui 
n'y  ont  point  de  domicile  fixe,  et  qui  justifient  de 
leur  passeport. 

60  Le  présent  arrêté  sera  inséré  au  Bulletin  de  la 
Convention  nationale,  et  extrait  sera  envoyé  aux 
quarante-huit  comités  civils  de  la  commune  de 
Paris. 

Signé  les  membres  du  comité  des  finances. 


LIVRES  DIVERS. 

Matmel  étEpicÙte  et  Tableau  de  Cébh,  en  grec,  aveet 
traduction  française ,  précédée  d*un  discours  contre  la  1 
raie  de  Zenon  et  contre  le  suicide,  avec  des  idées  de  morale; 

Rir  Lefèvre-ViUebrune ,  bibliothécaire  de  la  Bibliothèque 
ationale  ;  S  vol.  petit  format. 

A  Paris,  chez  Gail  Talué  ,  place  Cambrai ,  et  Pigorreau , 
cour  de  U  Convention,  et  rue  de  Rohan,  n«  83. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  sii  premiert 
mois  ;  il  sera  fait  i  tous  ceux  qui  seront  porteurs  a*inscrip- 
tiens  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères  est  de 
huit  mois  vingt  et  un  jonrtde  TanDée  1793  (vieus  style). 


GAZETTE  NATIONALE  .n  LE  HONITEII  UNIVERSEL. 

N*  134^        Quartidi  U  Pluviôse,  Fan  S«.  {Lundi  2  F^tbibr  1795,  vieuœ  êtyh.) 


POLITIQUE. 

TURQUIE. 

ConstantinopUf  le i*^  décembre, -^te  difao  «'occupe 
sans  relâche  de  tout  ce  qui  regarde  la  sûreté  extérieure  de 
Templre  ottoman.  Ses  soins  se  partagent  entre  la  marine  et 
les  armées  de  terre.  Les  fortifications  de  Bendersontache- 
Tées»  à  la  réserve  d*un  glacis  auquel  travaillent  iournelle- 
ment  plus  de  mille  oavrier9.^L*ariillerie  nécessaire  y  sera 
envoyée ,  et  la  place  ne  lardera  pas  à  être  pourvue  de  ton- 
tes sortes  de  munitions  de  guerre  et  é^  bouche.  Le  fort 
d*Ackierman  sera  augmenté  de  trois  bastions.  On  s'oc- 
cupe de  perCKtionner  les  ouTrages  d*IsmaSlow  ;  il  y  a  dans 
cette  place  une  immense  quantité  de  bouches  à  feu.  Lea 
batteries  qui  défendent  rentrée  du  canal  ont  été  p<N-técf 
f  08qtt*à  trois  cents  pièces  de  canon.  On  va  fortifier  aussi 
les  bouches  du  Danube,  et  une  nouvelle  forteresse  va  être 
construite  à  Bargas,  sur  la  mer  Noire,  au  fond  du  golfe 
de  ce  oom« 

Ledif  an  a  pris  toutes  les  mesures  néoesiaires  pour  faire 
bâtir  de  nouveaux  moulina  à  poudre  et  une  nouvelle  fon- 
derie. On  fait  aussi  des  casernes  pour  loger  les  troupes  qui 
vont  être  disciplinées  à  la  manière  européenne.  Les  janis- 
saires paraissent  plus  disposés  à  se  soumettre  aux  nouvel- 
les lois  réglemeotaires,  et  même  au  changement  de  costume. 

POLOGNE. 

fbtovte,  U  8itffi»lèr.— îî  règne  dans  celte  fille  une 
fermentation  sourde.  Les  auteurs  de  la  révolution,  arrêtés 
par  ordre  de  Catherine,  ont  encore  beaucoup  de  partisans 
et  d'amis  coorageux  parmi  le  peuple.  Ignace  Potocki  sur- 
tout «vaK  aequis  par  son  humanité  de  grands  droiu  à  la 
reconnaissance  publique.  Le  despotisme  de  Catherine  irrite 
les  Polonais  sans  les  abattre.  On  entend  dire  fr^uemment, 
malgré  la  présence  des  Russes,  que  •  la  révolution  n'est 
pas  ef^:Qre  finie.  •  L^ordre  intimé  au'  roi  de  se  rendre  à 
Grodbo,  les. arrestations  faites  au  mépris  de  l'amnistie 
solennellement  promulguée,  et  la  misère  publique»  voilà 
les  causes  d^un  mécontement  déjà  manifeste. 

Les  agentsde  Catherine,  dans  la  crainte  où  ils  sont  d'un 
mouvement,  tâchent  de  l'éloigner  et  de  distraire  le  peu- 
ple ;  ils  se  sont  occupés  défaire  baisser lepris  des  vivres  et 
ont  rouvert  les  spectacles. 

Le  général  russe  Bu5choerden,  gouverneur  de  la  ville, 
a  fait  publier  et  imprimer  une  proclamation  par  laquelle 
il  prétend  rassurer  les  citoyens  à  l'égard  de  l'arrestation 
des  personnes  les  plus  attachées  à  la  révolution,  et  publie 
à  cet  effet  que  ces  arrestations  n'ont  pour  objet  que  d'obte- 
nir des  déclaration^. 

ALLEMAGNE. 

Vienne ,  le  iO  janvier.  —  Le  baron  de  Lehrbach,  notre 
ministre  et  notre  entremetteur  à  la  cour  de  Munich,  a  passé 
quelques  joun^  ici.  Son  voyage  a  eu  pour  objet  le  mariage 
projeté  du  vieil  électeur  palatin  avec  une  princesse  autri- 
chienne. On  pense  que  la  cérémonie  se  fera  k  Insprucà  : 
événement  tout  à  Oiit  indigne  d'être  remarqué,  sans  l'in- 
fluence qu'il  peut  avoir  sur  le  sort  de  plusieurs  millions 
d'hommes. 

^U  politique  autrichienne  paraît  n'être  pas  étrangère 
anx  projets  de  ses  alliés  sur  le  nouveau  démembrement  de 
la  Pologne.  On  assure  qu'elle  est  disposée  à  taire  valoir  ce 
qu'elle  appelle  ses  droits  sur  les  palalinals  de  Cbelm,  de 
Lublin ,  de  Saodomir  et  de  Cracovie. 

-*La  cour  vient  de  détedre  les  mascarades  en  Hongrie, 
à  cause  du  grand  nombre  deméconlenU  qui  s'y  trouvenU 

—  La  police  a  fait  ici  des  visites  domiciliaires,  afin  de 
constater  le  nombre  des  «traofws  ct  4»  luMUmU  en  élal 
depoftericsaraws» 

g«5¥nc— TtaaXi 


VARIÉTÉS. 

Neutralité  de  Suéde. 

a  Le  peuple  français  ne  s'immisce  pas  dansleseonstituUollS 
ni  les  formes  des  gouvernements  despuissancesélrangèreSit 

Ce  principe  de  notre  liberté  permet  d'ouvrir  le  sanctuaire 
du  républicanisme  des  Français  aux  ambassadeurs  des  rois. 
Où  trouveraient-ils  des  preuves  plus  éclatantes  de  l'instabi- 
lité des  trônes  et  des  droits  des  peuples  ? 

Le  jeune  roi  de  Suède  a  refusé  d'adhérer  à  la  coalition 
des  tyrans  ;  les  Suédois  ont  depuis  la  guerre  exprimé  des 
VŒUX  pour  notre  liberté.  Lorsque  le  ministre  de  la  cour  de 
Suède  aura  été  admis  parla  Convention  nationale,  le  pa- 
villon de  Suède,  reconnu  ami  du  nôtre,  doit  être  placé  au 
temple  où  a  été  proclamé  l'acte  de  navigation,  celte  base 
inébranlable  de  l'égalité,  de  la  souveraiueté  des  nations  et 
de  la  liberté,  des  mers. 

Les  navigateurs  suédois  apprendront  avec  plaisir  que 
les  Français  et  les  Suédois  peuvent  seuls,  à  l'exclusion  ab- 
solue de  tous  intermédiaires,  importer  en  France  les  den- 
rées et  les  productions  de  la  Suède,  dont  le  pavillon  ne. 
restera  pas  impunément  offensé  par  nos  ennemis  s'ils  ne 
restituent  pas  toute  propriété  française  nationale  ou  parti- 
culière, saisie  par  eux,  quoique  confiée  à  la  neuiraliléct 
à  la  (dite  Indépendante  de  cette  puissance.      Duchuu 


ODE 

6DB  LA  PRISE  DE  LA  HOLLANDB, 

Orrtm  a  la  Cohvestiou  pis  C.-J.  Taovvl^ 

L'un  des  ridaeteurt  du  Moniteor* 

Qu'ai-je  entendu  !  le  puis-je  croire  f 
Quels  sont  ces  miracles  nouveaux  t 
Quel  est  ce  théâtre  de  gloire 
Qui  t^ouvre  i  nés  brillants  hères? 
Muse  ,  il  est  temps ,  prenons  ma  lyte. 
Et ,  dans  an  sublime  délire , 
Chaotoos  des  esploits  si  hardis; 
Et  que  •  sur  les  cordes  glacées. 
Le  feu  brûlant  de  mes  pensées 
Ranime  mes  doigts  engourdis. 

Oh  !  que  J*admîre  le  courage 
De  nos  rapides  conquérants  f 
Comme  ils  ont  réparé  Toutrage 
Dont  nous  couvraient  nos  vifs  tyrans! 
Dira-t-on  encore  à  la  France 
Que  c*est  le  fer  de  la  vengeaoee 
Qui  préparait  de  si  beaux  faits? 
L'innocence  n'est  plus  flétrie  : 
Depuis  ce  temps ,  6  ma  patrie  t    * 
Tu  comptes  tes  plus  grands  succès! 

D*nn  joug  honteui  timide  esclave. 
De  sa  vertu  dégénéré , 
Le  descendant  du  fier  Batave , 
De  mers ,  de  fleuves  entouré , 
Croyait  avec  cette  barrière 
Borner  la  superbe  carrière 
De  nos  soldats  républicains  : 
Sous  ce  rempart  de  la  faiblesse 
Il  osait ,  dans  sa  folle  ivresse , 
Défier  nos  heureui  destins.... 

Orgueil  fatal!  vaine  insolence! 
La  nature  s*arme  avec  nous; 
Dans  les  airs  Taquilon  s*élaiicc  , 
Ardent ,  enflammé  de  courroui  ; 
Des  eaux  Timmobile  surface 
Tout  k  coup  s*épaissit  en  ^lace, 
Du  triomphe  illustre  sentier! 
Bt  dans  cetu  immeeae  étendue 
Le  gloire  semble  descendue, 
Ceâpagne  de  cha^e  guerrier. 

14 


346 


Foyei ,  Bcreettaircs  coliartes  ; 
L*or  ne  dUooe  point  la  Taleor; 
Cité  marchaniie,  oum  tes  p<»rtcs  , 
Do  peuple  libre  est  ton  vainqueur. 
8i  Ponde ,  pins  officieuse , 
Bompit  la  marche  ambitieuse 
D'un  usurpateur  de  nos  droits  ; 
Vois- tu  comme  elle  est  impuissante 
Devant  la  verta  triomphante 
Qoi  dompte  et  fait  trembler  les  rois  ! 

Ainsi  nous  rendrons  k  la  terrt 
Et  le  repos  et  le  bonheur  ! 
Ainsi  du  démon  de  la  guerre 
Nous  enchaînerons  la  fureur. 
O  douce  Paix  !  vierge  timide , 
Reviens  I  que  Polivier  te  guide 
Dans  les  bras  de  la  Liberté  ! 
Reviens ,  bienfaisante  immortelle  ; 
Entends  la  France  qui  t*appelle 
'  Au  secours  de  Phumanité  ! 


CONVENTION   NATIONALE. 

Extrait  du  registre  des  arrêtée  du  comité  de  talui 
public  de  la  Convention  national^.  —  Pu  9  plu- 
tfiote, 

•  Sur  le  rapport  fait  aux  comités  de  salut  public  el 
de  sûre t(^  générale  que ,  dans  les  coupes  de  bois  ex- 
traordinaires faites  dans  les  environs  de  Paris,  il 
existe  sept  mille  huit  cent  soixante-douze  voies  de 
bois  propre  aux  boulangers  ; 

•  Les  comités  arrêtent  : 

«  Art.  lor.  La  commission  de  commerce  cl  appro- 
visionnements tiendra  ces  bois  à  la  disposition  de 
celle  des  transports. 

•  11.  La  commission  des  transports  est  chargée  de 
les  enlever  et  les  conduire  aux  boulangers  de  Paris, 
en  se  conformant  aux  mesures  ordonnées  par  l'ar- 
rêté du  7  de  ce  mois. 

•  111.  Les  boulangers  pourront  obtenir  jusqu'à 
trois  voies  de  bois  à  la  foii,  de  la  longueur  de  vingt- 
sept  à  trente  pouces,  et  de  qualité  propre  à  leur 
nsage. 

•  IV.  La  voie  de  bois  ne  sera  payée  que  22  livres 
10  sous,  tant  pour  prix  principal ,  cordage ,  charge- 
ment ,  transport ,  que  déchargement. 

«  V.  Dans  le  cas  où  la  commission  des  transports 
n'aurait  pas  suffisamment  de  voilures,  elle  pourra 
en  traiter  de  gré  à  gré  jusqu'au  prix  de  3  liv.  10  sous 
par  voie  et  par  lieue  de  deux  mille  cinq  cents  toises. 

«  VI.  Toutes  les  dispositions  de  l'arrêté  du  7  de 
ce  mois  sont  communes  au  service  des  bois  desti- 
nés aux  boulangers,  en  ce  qui  n'y  est  pas  dérogé  par 
le  présent. 
•  Signé  les  membres  des  comités  de  salut  public 
et  de  sûreté  générale.  • 


SUITE  DE  LA  SEANCE  DU  11   PLUVIOSE. 
Présidence  de  Bovère. 

Sur  le  rapport  de  Monnot ,  les  décrets  suivants 
sont  rendus. 

Articles  additionnels  à  la  loi  du  17  germinal,  re- 
lative aux  titulaires  d'oMces,  gagistes  el  pen- 
sionnaires de  la  liste  civile, 

m  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  finances ,  décrète  : 
•Art.  !«'•  Les  pourvus  de  charges  et  offices  dans 


la  maison  du  ci-devant  roi,  qui  ne  seront  point  admb 
à  la  liquidation,  d'aprfes  le  décret  du  1 7  germinal  der- 
nier, peuvent  prétendre  aux  mêmes  peusions  et  aux 
mêmes  secours  que  les  pensionnaires  et  les  gagistes, 
et  sous  les  mêmes  conditions. 

•  11.  Ceux  qui,  faute  d'avoir  atteint  l'âge  de  cin- 
quante ans  ou  d'avoir  cinq  années  de  service ,  ne 
peuvent  pas  prétendre  aux  pensions ,  recevront  une 
année  entière  de  leur  traitement  sur  un  maximum 
de  1,000  liv.,  sans  qu'il  soit  fait  déduction  des  som- 
mes provisoires  qui  leur  ont  été  payées  ou  qu'ils 
ont  aroit  de  réclamer,  en  vertu  du  décret ,  pour  les 
six  premiers  mois  de  1793  (vieux  style). 

•  111.  Les  gagistes  et  pensionnaires  dont  les  traite- 
ments ne  s'élèvent  pas  au-dessus  de  400  livres  ob- 
tiendront une  pension  égale  à  celle  de  leur  traite* 
ment. 

•  IV.  Cette  somme  de  400  livres  servira  de  mini- 
mum pour  toutes  les  pensions  qui  ont  pour  base  un 
traitement  au-dessus  de  400  liv.,  et  dont  la  liquida- 
tion ,  d*après  les  dispositions  du  décret  du  17  ger- 
minal ,  ne  s'élèverait  pas  à  ladite  somme. 

•  V.  Ces  pensionnaires  et  gagistes  dont  les  traite- 
ments d'activité  ne  consistaient,  en  plus  grande 
partie,  qu'en  attributions  en  nature ,  et  qui  ne  peu- 
vent pas  être  liquidés  sur  les  bases  du  décret  du  17 

Ferminal ,  conserveront  à  titre  de  pensions,  s'ils  ont 
âge  et  le  temps  de  service  requis,  le  montant  de 
leurs  anciennes  pensions  ou  de  leurs  traitements, 
lorsoue  les  uns  et  les  autres  n'excéderont  pas 
400  livres. 

•  S'il  l'excèdent ,  le  montant  des  anciennes  pen- 
sions servira  de  base  pour  liquider  les  nouvelles  « 
dans  les  proportions  du  décret  du  17  germinal. 

•  VI.  Les  sexagénaires  pourront  cumuler  500  liv. 
de  fortune  personnelle  ou  de  pension  sur  le  tr^or 

Sublic  avec  le  maximum  de  1,000  liv,  de  pension, 
écrété  par  la  loi  du  17  germinal. 

•  Vil.  Les  pensionnaires  et  gagistes  liquidés  d'a- 
près les  dispositions  de  la  loi  nu  17  germinal  et  du 
présent  décret  pourront  cumuler  jusqu'à  concur- 
rence de  1,000  livres,  les  pensions  qui  leur  seront 
accordées  avec  celles  dont  ils  jouissent  pour  service 
étranger  à  la  maison  du  ci-devant  roi  et  de  sa  fa- 
mille. Si  ces  pensions  réunies  excèdent  la  somme  de 
1,000  liv.,  elles  seront  réduites  à  cette  somme ,  et 
seront  comprises  dans  un  seul  article ,  pour  former 
une  seule  piension.  Ceux  qui  en  possèdent  plusieurs, 
hors  le  cas  de  cette  exception ,  seront  tenus  d'op- 
ter dans  l'espace  de  deux  mois  à  compter  de  la  pu- 
blication du  présent  décret. 

•  Vlll.  Il  ne  sera  rien  innové  à  l'art.  IV  du  titre  11 
du  décret  du  17  germinal ,  concernant  les  pension- 
naires sur  les  cassettes,  aumônes  et  domaines,  qui , 
en  cumulant  plusieurs  petites  pensions ,  ne  pour- 
ront excéder  le  maximum  de  400  liv. 

«  IX.  Les  personnes  qui ,  en  s'acquittent  de  leur 
service ,  auront  été  estropiées  de  manière  à  ne  plus 
pouvoir  remplir  leurs  fonctions,  seront  considérées 
comme  ayant  acquis  le  temps  de  Tâee  nécessaire 
pour  obtenir  une  pension.  Celles  dont  ïesdits  gagis- 
tes et  pensionnaires  jouissaient  seront  liquidées  sur 
les  mêmes  principes  que  tous  ceux  qui  ont  droit  d'en 
prétendre,  et  les  art.  III  et  IV  ci-dessus  leur  seront 
applicables.  Leur  état  de  maladie  et  d'infirmité  sera 
constaté  par  le  certificat  d'un  officier  de  santé ,  dû- 
ment légalisé  par  un  acte  de  notoriété  émané  du 
conseil  général  de  la  communene  du  lieu. 

•  X.  Les  nourrices  des  enfants  de  Louis  Capet , 
déjà  portées  sur  les  états  de  la  liste  civile ,  seront 
liquidées  d'après  les  principes  du  décret  du  17  ger- 
minal ,  quoiqu'elles  n'aient  pas  rempli  les  cinq  an- 
nées de  service  et  qu'elles  n'aient  pas  l'âge  requis 


847 


par  ladite  loi.  Celles  qui  n*avaient  pas  de  traitement 
fixe  seront  liquidées  sur  le  montant  net  de  leurs 
brevets  de  pension. 

•  XI.  Les  pensionnaires  et  gagistes  liquidés  en 
exécution  de  la  loi  du  17  gcrntinalet  du  présent  dé- 
cret toucheront  à  la  trésorerie  nationale,  sur  le  cer- 
titicat  de  liquidation  du  commissaire  liquidateur  de 
la  liste  civile ,  les  pensions  et  secours  accordés  à 
compter  du  l«r  janvier  1793  (vieux  style),  sauf  ce 
qu'ils  ont  reçu  par  imputation  sur  lesdites  pensions 
et  secours.  Ils  toucheront  pareillement,  sur  le  cer- 
tificat dudit  commissaire  liquidateur,  ce  qui  peut 
leur  être  dû  d'arriéré  depuis  le  l«r  juillet  1790  jus- 

3it*au  10  août  1792,  ainsi  que  la  portion  d'indemnité 
u  11  août  de  la  même  année  au  l«r  janvier  suivant, 
décrétée  par  la  loi  du  17  mars  1793. 

«  XII.  Les  héritiers  et  ayants  cause  des  gagistes  des 
pensionnaires  décédés  seront  pareillement  payés, 
sur  le  certih'cat  du  commissaire  liquidateur,  aes  dé- 
comptes de  ce  qui  pouvait  être  dû  auxdits  gagistes  et 
pensionnaires  au  jour  de  leur  décès. 

•  XUI.  Le  liquidateur  de  la  liste  civile  présentera, 
avant  le  1er  messidor  prochain,  un  état  de  l'arriéré 
dû  aux  gagistes  et  pensionnaires  qui,  d'après  les 
bases  du  décret  du  17  germinal ,  ne  peuvent  pas  pré- 
tendre aux  pensions  et  secours  décrétés;  et,  pour 
cet  effet ,  lesdits  gagistes  et  pensionnaires  seront  te- 
nus de  déposer  au  bureau  de  la  liquidation  de  la 
liste  civile  ,  avant  le  l«r  prairial ,  le  certificat  de  ré- 
sidence prescrit  par  la  loi  da  6  germinal ,  à  peine  de 
déchéance.  • 

Autre  décret.  ^  «  La  Convention  nationale,  après 
avoir  entendu  le  rapport  de  sou  comité  des  finances, 
décrète  gue  les  dispositions  de  l'article  IV  du  décret 
du  36  frimaire  dernier,  relatives  aux  ci-devant 
payeurs  des  rentes,  sont  applicables  à  tous  les  comp- 
tables ;  ils  pourront  en  conséc^uence  se  libérer  en- 
vers leurs  créanciers  ayant  privilège  ou  hypothèque 
spéciale  sur  leurs  finances,  aux  charges  e^conditions 
prescrites  par  ledit  article.  • 

Ch.  Pottibb,  au  nom  du  comité  de  législation  : 
Vous  avez  chargé,  par  votre  décret  du  4  de  ce  mois, 
le  comité  de  législation  d'examiner  la  question  de 
savoir  si ,  en  prononçant  les  mises  en  liberté  confor- 
mément aux  décrets  du  29  nivôse  dernier,  il  fera 
droit  sur  les  réclamationsdes  intéressés  concernant 
les  amendes  et  la  confiscation  des  biens  non  vendus 
ou  du  prix  de  ceux  qui  ont  été  aliénés,  ensemble  sur 
les  séquestres  encore  existants,  pour  en  faire  son 
rapport. 

Je  viens,  au  nom  de  ce  comité ,  satisfaire  à  ce  dé- 
cret. 

Vous  avez  donné,  par  vos  décrets  du  29  nivôse, 
au  comité  de  législation,  une  attribution  fort  éten- 
due, et  dont  il  a  senti  toute  l'importance. 

Par  le  premier  vous  l'avez  autorisé  à  statuer  sur 
la  mise  en  liberté  de  tous  les  citoyens  qui  ont  été 
condamnés  à  la  peine  de  mort,  et  qui  ne  sont  pas 
tiécuiés  ;  de  tous  ceux  condamnés  à  d'autres  peines 
que  celle  capitale ,  pourvu  aue  les  jugements  ne 
soient  lancés  ni  pour  délits  oraiuaires,  ni  pour  fait  de 
royalisme. 

Par  le  second  vous  avez  renvoyé  à  l'examen  des 
comités  de  législation  et  de  sûreté  générale  les  ju- 

{ céments  rendus  contre  les  personnes  condamnées  à 
a  déportation  ,  en  vertu  des  dispositions  de  l'art.  III 
du  titre  11  de  la  loi  du  10  mars  1793,  qui  donnait  au 
tribunal  révolutionnaire  le  pouvoir  de  prononcer 
cette  peine  contre  ceux  ^ui  se  trouveraient  couvain 
eus  de  délits  non  spécifies  tels  par  les  lois;  vous  avez 
autorisé  vos  comités  à  statuer  définitivement  sur  leur 
mise  en  liberté. 


Il  importe  de  faire  connaître  que  ces  actes,  tout  à 
la  fois  de  justice  et  de  bienfaisance,  ne  doivent  pro- 
fiter qu'aux  hommes  égarés,  qu'à  ceux  qui  ont  été 
victimes  de  la  tyrannie  ou  de  condamnations  arbi- 
traires, qu'à  ceux  contre  lesquels  on  s'est  permis  de 
violer  toutes  les  formes  ou  de  n'en  observer  aucune  : 
mais  que  ceux-là  ne  doivent  rien  en  attendre  qui 
sont  reconnus  réellement  coupables,  qui  ne  subis- 
sent que  des  peines  justement  méritées.  11  importe 
^u'on  sache  que  les  décrets  du  29  nivôse  n'appellent 
à  jouir  de  la  faculté  qu'ils  ouvrent,  ni  les^lapida- 
teurs  de  la  fortune,  punlique,  ni  les  agents  infidèles, 
ni  les  fonctionnaires  coupables,  ni  ceux  qui  ont 
porté  des  atteintes  criminelles  au  crédit  public. 

Ceux-là  ne  peuvent  se  dire  opprimés,  et  ce  n'est 
qu'à  ceux  qui  ont  eémi  sous  l'oppression  que  vous 
avez  voulu  offrir  des  consolations  et  des  ressources. 

En  donnant  au  comité  la  faculté  de  briser  leurs 
fers,  de  leur  ouvrir  les  portes  des  maisons  d'arrêt , 
de  ne  pas  les  éloigner  du  sein  de  leur  patrie,  de  les 
rendre  à  leurs  familles,  à  la  société,  vous  avez  fait 
pour  eux  ce  qu'ils  avaient  droit  d'attendre  de  vous  : 
vous  leur  rendez  le  bien  le  plus  précieux ,  vous  les 
rétablissez  dans  des  droits  qu'il  n'avaient  pas  mérité 
de  perdre  :  le  reste  n'est  que  secondaire. 

Cependant  vous  ne  voulez  pas  être  justes  avea 
restriction  ;  vous  ne  voulez  pat  çiue,  rendus  à  la  li- 
berté, ces  citoyens  aient  encore  à  gémir  sur  la  perte 
de  biens  dont  ils  auraient  été  injustement  dépouil- 
lés; vous  ûfi  voulez  pas  leur  enlever  les  fruits  de 
leurs  épargnes  et  de  leur  économie. 

La  nation  a  mis  à  sa  disposition  les  biens  des 
conspirateurs,  parce  qu'ils  doivent  être  la  juste  in- 
demnité des  maux  qu'ils  ont  faits  à  leur  pays,  de  la 
guerre  dispendieuse  dans  laquelle  ils  l'ont  plongé  ; 
mais  elle  respecte  le  droit  de  propriété  pour  tous  les 
citoyens  ;  elle  en  assure  la  garantie  à  cnacun  d'eux, 
et  cette  garantie  est  sacrée. 

Les  réclamations  des  citoyens  condamnés  relati- 
vement à  leurs  biens  ne  peuvent  avoir  que  deux  ob- 
{'ets  :  les  amendes  prononcées,  et  la  confiscation  des 
>iens,  qui  est  précédée  du  séquestre. 

Le  comité  croit  qu'il'ne  doit  être  autorisé  à  sta- 
tuer que  sur  les  condamnations  d'amendes  qui  n'au- 
raient pas  été  payées  ;  les  autres  se  trouvent  liées 
filus  particulièrement  avec  la  comptabilité ,  et  par 
à ,  entraînant  avec  elles  un  examen  d'une  autre  na- 
ture, ne  feraient  qu'entraver  sa  marche  en  multi- 
pliant son  travail;  elles  ne  sont  pas  d'ailleurs  de  sa 
compétence. 

Quant  aux  confiscations,  si  la  remise  en  était  pro- 
noncée d'après  une  disposition  qui  remettrait  la 
peine  qui  l'aurait  fait  encourir,  elle  ne  pourrait  l'ê- 
tre que  sous  certaines  conditions. 

Dans  le  cas  où  tout  ou  partie  des  biens  aurait  été 
vendu ,  il  est  indispensable  de  maintenir  les  acqué- 
reurs de  la  nation  dans  une  propriété  tranquille  et 
hors  de  toute  atteinte.  On  sent  combien  cela  tient 
essentiellement  et  à  la  loi  et  au  crédit  public.  Les 
propriétaires  exerceraient  leurs  droits  pour  le  re- 
couvrement du  prix  d'après  les  conditions  des  ventes. 

Cette  proposition  n'est  pas  nouvelle  ;  elle  est  tirée 
littéralement  d'un  de  vos  décrets,  celui  du  25  bru 
maire.  Vous  avez  voulu  que  les  prévenus  d'émigra- 
tion pour  n'avoir  pas  rempli  dans  le  temps  les  Tor- 
malitéi  nécessaires ,  et  n'avoir  pas  justifié  de  leur 
résidence  aux  directoires  de  district  de  la  situation 
de  leurs  biens,  ne  pussent  pas  se  remettre  en  posses- 
sion de  ceux  qui  auraient  été  vendus.  Vous  leur 
avez  réservé  un  droit  pour  le  recouvrement  du  prix. 

Nous  vous  proposons  d'adopter  le  même  plan 
pour  ceux  des  condamnés  que  vous  rendrez  à  la 
société ,  et  dont  les  biens  auraient  été  vendus. 


^8 


II  t>eot  trrhrer  eoeore  que,  dans  quelques  circon- 
sUDces,  par  suite  des  jugements  de  condamnation , 
les  corps  administratiu  eussent  fait  procéder  à  quel- 
ques baux  des  biens  des  condamnés.  Les  fermiers 
les  ont  pris  à  ferme  sous  la  foi  publique  :  il  importe 
qu*elle  ne  soit  pas  trompée. 

Je  n*ai  plus  qu*une  observation  à  faire  sur  le  pro- 
jet de  décret  que  le  comité  a  arrêté.  Il  a  pensé  qu'il 
était  nécessaire  d'annoncer,  par  un  article  particu- 
lier, que  les  décrets  du  29  nivôse  ne  peuvent  rece- 
voir aucune  application ,  ni  aux  émigrés  et  à  leurs 
complices,  ni  aux  ecclésiastiques  qui ,  par  leur  dés- 
obéissance aux  lois,  ont  encouru  la  peine  de  la  dé- 
portation. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

c  La  Conveotion  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  100  comité  de  législaiion ,  décrète  : 

«  Art.  I*'.  Le  comité  de  législation ,  aaqqel  let  décrets 
da  20  Divose  ont  attribué,  soit  particulièrement,  soit  con- 
curremroeol  avec  le  comité  de  sûreté  générale,  Texomen 
des  jugements  non  exécutés,  rendus  pour  délits  non  ordi- 
naires, ni  pour  cause  de  royalisme  ;  de  ceux  portant  peine 
de  la  déportalion,  en  conséquence  de  rarticie  111  du  li- 
tre II  de  la  loi  du  10  mars  1793,  et  la  mise  en  liberté  des 
iodividuK  condamnés,  pourra  statuer  sur  les  réclamations 
qui  auront  pour  objet  la  confiscation  et  le  séquestre  des 
biens,  qui  auraient  été  la  suite  de  ces  {ugements. 

«  II.  Le  comité  ne  pourra  statuer  que  tur  les  amendes 
qui  n*aaront  pas  été  payées. 

«  III.  Le  séquestre  et  la  cooBscation  des  biens  pourront 
être  levés;  les  individus  mis  en  liberté  y  seront  réintégrés, 
à  là  charge  d*acquitter  les  frais  des  icelléi,  garde,  séques- 
tre, régie  et  administraUon. 

«  IV.  Les  baux  à  ferme  qui  pourraient  avoir  été  faits  au 
nom  de  la  nation  par  les  corps  administfatils  ne  pourront 
être  résiliés  que  conformément  aux  dispositions  de  Tartide 
XV  do  titre  II  de  la  loi  du  5  novembre  1790. 

«  V.  Dans  le  cas  où  les  biens  auraient  été  vendus,  les 
acquéreurs  y  seront  maintenus,  sauf  les  droitsdesci.de- 
vant  propriétaires  au  recouvrement  du  prix,  d'après  les 
eonditions  des  ventes.  Il  y  sera  statué  définitivement  par 
le  comité  des  finances. 

«  VI.  La  même  disposition  aura  lieu  relativement  aux 
biens  des  perMnnes  détenues  comme  suspeaet,  et  qui  de* 
puis  ont  été  mises  en  liberté. 

«  VII.  Il  n*est  pas  dérogé  par  le  présent  décret  aux  lofs 
relaUres  aux  émigrés  et  &  leurs  complices,  ni  aux  ecclésias- 
tiques qui  ont  encouru  la  peine  de  la  déportation.  • 

Ce  décret  est  adopté. 

—  Monnot  fait  rendre  le  décret  suivant  : 

m  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  son 
comité  des  finances  sur  Pétat  remis,  par  les  commissaires 
de  la  trésorerie,  des  recettes  et  dépeuses  faites  pendant  le 
mois  de  frimaire  dernier  ;  ^ 

•  Considérant  que ,  la  recette  s*élevant  à  49  millions 
7S4,096  i.  8  s.  9  d. ,  et  la  dépense  à  S68  millions  503,571 1. 
9  s.  2  d.,  il  en  résulte  un  excédant  de  dépense  de  218  mil- 
lions 779,475  liv.  5  d.,  au  remplacement  de  laquelle  il 
est  nécessaire  de  pourvoir; 

•  Décrète  que  le  contrôleur  de  la  caisse  générale  re- 
tirera de  la  serre  à  trois  clefs,  où  sont  déposés  les  assi- 
gnats nouvellement  fabriqués,  la  somme  de  218  millions 
779,475  1. 5  d.  desUoée  à  remplacer  Texcédant  que  let  dé- 
penses faites  dans  le  courant  de  frimaire  présentent  sur 
les  recettes  du  même  mois,  en  remplissant,  pour  cette 
opération,  les  formalités  prescrites  par  les  précédents  dé- 
crets de  remplacement.  • 

—  Les  citoyens  de  la  section  Lepelletier  défilent 
dans  le  sein  de  la  Convention  nationale. 

Voraleur^  à  la  barre  :  Représentants  du  peuple, 
la  section  Lepelletier  vient  en  masse  vous  présenter 
le  vœu  librement  émis  et  ënergiquement  prononcé 
de  tous  les  citoyens  qui  la  composent. 

Trop  lon^mps  das  hommei  antore  dégouttants 


du  sang  des  victimes  qu'ils  avaient  forgées  la 
veille  sont  venus  jusque  dans  le  sein  de  la  repréten- 
tation  nationale  (lésigner  celles  qu*ils  devaient  im- 
moler le  lendemain  ;  aujourd'hui  ces  monstres  fuient 
tous  les  regards  ;  Tinnocence  ne  verse  plus  que  des 
larmes  de  joie,  et  votre  justice  ne  nous  laissera  bien- 
tôt plus  à  parler  que  de  notre  reconnaissance. 

Mais,  citoyens  représentants,  ce  n*est  pas  assez 
pour  uous  de  vous  féliciter  de  ce  que  vous  avez  fait; 
nous  vous  apportons  encore  nos  sollicitudes  et  nos 
vœux  sur  ce  qui  vous  reste  à  faire. 

Nous  ne  mettons  nulle  différence  entre  le  léopard 
britannique  et  le  lion  des  Jacobins  (de  vifs  applau- 
dissements s'élèvent  dans  l'assemblée  et  dans  les  tri- 
bunes); ils  ont  le  même  instinct,  celui  de  la  domi- 
nation ,  le  même  goût,  celui  du  sang.  Acharna  tous 
les  deux  à  la  perte  des  Français,  le  premier  a  choisi 
sa  proie  sur  les  frontières,  le  second  l'a  dévorée  dans 
l'intérieur.  Aujourd'hui  cependant  leur  sort  diffère; 
la  valeur  de  nos  troupes,  constante  à  poursuivre  le 
léopard ,  vint  de  lui  porter  un  coup  mortel  en  Hol- 
lande ;  le  lion ,  libre  et  tranquille,  dénombre  encore 
les  victimes  qui  lui  restent  à  immoler. 

Eh  quoi!  représentants  du  peuple ,  en  franchis- 
sant les  Alpes ,  les  Pyrénées,  le  mont  Cenis  et  le 
mont  Bernard  pour  atteindre  les  tyrans,  nos  soldais 
auraient-ils  donné  un  inutile  exemple  ?  Non  ;  vous 
gravirez  aussi  la  cime  de  cette  montagne  devenue  le 
refuge  du  crime ,  et  vous  précipiterez  de  ce  dernier 
asile  ces  atroces  triumvirs»  restes  impurs  des  bour- 
reaux de  la  France. 

Les  délenseurs  de  la  patrie  composent-ils  avec 
Tennemi  ?...  Nou.  Dès  qu  il  est  reconnu,  Tatteindre, 
le  combattre  et  le  vaincre  est  pour  eux  le  fruit  du 
même  effort ,  et  c*est  ainsi  qu*enfin  ils  imposent  la 
paix  à  Textérieur. 

Législateurs,  assurez  la  paix  de  Tinténeur;  con- 
solidez la  république,  cimentez  le  bonheur  de  tous, 
en  précipitant  les  dépopulateurs  de  la  France  dans 
Tabime  qti'ils  osent  creuser  encore  pour  engloutir 
la  représentation  nationale  et  le  peuple. 

Qu'ils  ne  pensent  pas,  les  malheureux,  que  leur 
audacieuse  férocité  nous  intimide  !  Non  ,  le  jour  où 
nous  avons  aperçu  leurs  criminels  efforts  eût  été  le 
dernier  jour  pour  eux,  si ,  enchaînés  par  notre  res- 
pect et  notre  confiance ,  nous  ne  comptions  sur  yo- 
tre  prompte  justice.  Oui^  c'est  le  peuple  entier  qui 
vods  la  demande. 

En  vain  ces  hommes,  aussi  astucieux  que.férooes, 
essaient  ils  de  nous  présenter  comme  quelques  pé- 
titionnaires égarés,  passionnés,  sans  prévoyance 
commesans  mandat,  qui  prennent  leur  vœu  ou  leurs 
intrigues  pour  la  volonté  des  citoyens. 

Nous,  égarés!  Ah  1  certes,  nous  le  serions  si  nous 
doutions  un  instant  de  leur  caractère  et  de  leurs  in- 
tentions. 

En  effet ,  la  tyrannie  a  existé  ;  ils  n'osent  le  nier, 
les  traîtres  !  Mais  comment ,  par  qui  et  pour  qui  a*t« 
elle  été  organisée  ?  Comment?  en  décimant  la  repré- 
sentation nationale,  en  comprimant  la  vertu  dans 
rame  de  chacun  de  ses  membres,  en  profitant  de 
celte  terreur  pour  mettre  partout  à  Tordre  du  jour 
la  désolation  et  la  mort.  Par  qui?  par  cet  actroce 
sextemvirat  qui  avait  centralisé  dans  ses  mains  toute 
l'action  et  la  force  du  gouvernement ,  qui  pouvait 
faire  tout  le  bien  et  qui  a  souffert  et  commandé  tout  le 
mal.  Pour  qui  ?  Celte  exécrable  t)rrannie  pouvait-elle 
servir  à  d'autres  qu'à  ceux  qui  seuls  avaient  en 
main  les  moyens  de  l'exercer,  et  qui,  fidèles  au  pro- 
jet qu'ils  ont  formé  de  vous  avilir,  voudraient  en«> 
core  rejeter  sur  vous  des  crimes  qu'ils  ont  seuls  con- 
çus, exécutés  et  mis  à  profit  ? 

Ah  !  si  ces  crimes  ne  sont  pas  assez  prooTés,  nous 


849 


Irons  dans  les  fiossés  où  ils  ont  entasse  lenrs  Ticti- 
mes  ;  nous  irons  en  arracher  nos  pères ,  nos  frères , 
nos  enfants,  nos  femmes,  nos  amis  ;  et  leurs  cadavres 
seront  des  témoins  accusateurs  que  leurs  bourreaux 
De  pourront  récuser. 

Nous  avons  juré  haine  éternelle  aux  partisans  des 
rois;  nous  prononçons  aujourd'hui  le  même  ser- 
ment contre  quicopque  aspire  à  la  tyrannie.  Ainsi, 
guerre  au  royalisme  ;  mais  aussi  guerre  à  tous  les 
Jacobins  t  assassins  et  terroristes!  Nous  vouons  à 
I  exécration  publique  les  principes  des  uns  et  des 
autres,  puisque,  sous  des  noms  différents,  ils  ten- 
dent au  même  but  :  le  rétablissement  de  la  tyrannie. 

Après  cette  déclaration  solennelle  de  nos  senti- 
ments, nous  demandons  justice  prompte  contre  les 
assassins  du  peuple.  Que  votre  comité  de  sûreté  gé- 
nérale surveille  avec  la  plus  grande  sévérité  les 
émissaires  jacobins  qui  se  rendent  à  Paris  tous  les 
jours,  et  obtiennent  par  surprise  des  permissions  d'y 
séjourner. 

Que  les  partisans  déclarés  de  Robespierre  ,  de  ses 
semblables,  ne  soient  plus  vomis  parmi  nous;  car 
ils  empruntent  sans  doute  des  nomspourétre  mis  en 
liberté,  et  on  les  voit  tous  les  jours  insulter  avec  au- 
dace i  la  justice  nationale,  en  disant  que  la  guillo- 
tine reviendra  bientôt.  Non,  vous  Tavez  juré  avec 
le  peuple  entier,  le  règne  de  la  terreur  est  passé. 

^  Vive  la  république  française  une  et  indivisible  ! 
Tive  la  Convention  nationale!  (On  applaudit.) 

Lb  Pbésident  :  Citoyens,  la  France,  sous  le  des- 
potisme des  rois  ,  n'oflrait  que  des  courtisans  et  des 
esclaves;  on  ne  voyait,  sous  la  tyrannie  de  Robes- 
pierre, que  des  bourreaux  et  des  victimes.  La  Con- 
vention, justement  indignée  des  outrages  faits  à  la 
liberté  et  à  Tégalité  qu'elle  avait  consohdées  en  dé- 
crétant la  république,  a  fait  justice,  le  10  thermidor, 
d'une  partie  des  cannibales  qui  ont  souillé  la  plus 
belle  des  révolutions. 

Vous  demandez  justice  des  complices ,  des  conti- 
nuateurs des  assassins  du  peuple.  Ses  représentants, 
investis  par  la  nation  des  pouvoirs  qu'elle  ne  peut 
exercer  elle-même,  connaissent  l'étendue  de  leurs 
devoirs^  ils  sauront  distinguer  Terreur  d'avec  le 
crime;  ils  ne  transigeront  jamais  avec  lui;  ils  le 

Eoursuivront  avec  la  même  ardeur,  avec  le  courage 
éroïque  qui  caractérise  les  armées  triomphantes  de 
la  république. 

La  délaite  des  ennemis  extérieurs,  la  punition  des 

frands  coupables  de  fintérieur  assurera  à  jamais  le 
onheur  de  la  nation.  C'est  notre  vœu,  c'est  celui  de 
tous  les  vrais  amis  de  la  liberté  et  de  la  justice. 

La  Convention  décrète  la  mention  honorable  et 
l'insertion  de  cette  Adresse  au  Bulletin. 
La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 

SBANCB  DO  13  PLUVIOSB. 

On  lit  la  correspondance. 

Les  administrateurs  du  district  de  Clermont  écri- 
vent à  la  Convention  qu'ils  se  sont  transportés  dans 
la  maison  qui  appartenait  au  traître  Coutnon  ;  ils  ont 
fouillé  dans  ses  papiers,  et  y  ont  trouvé  un  arrêté 
du  comité  de  salut  public,  qu'ils  joignent  à  leur 
lettre. 

<>t  arrêté,  signé  Couthon,  Barère,  Billaud-Va- 
reiines,  Collot  d'Herhois,  Robespierre,  Saint-Just, 
met  en  état  d'arrestation  les  représentants  du  peuple 
Dubois-Crancé  et  Gauthier,  et  ordonne  l'apposition 
des  scellés  sur  leurs  papiers. 

Renvoyé  à  la  commission  des  Vingt-et-Un. 

—  Un  noréuire  lit  la  lettre  suivante  : 


Les  rêpréienianii  du  pêufUjpriê  Uip&rti  et  eôUi  i$ 
Breii  et  de  Lorient,  à  ta  (jonveniionnationale, 

Brest,  le  4  piaf  ioie,  l*an  S^  do  la  république 
fraoçaUe,  une  et  indiviiible. 

•  Citoyens  collègues,  vous  apprendrez  sûrement 
avec  intérêt  que  les  citoyens  du  département  du  Fi- 
nistère, qui  ont  été  tant  de  fois  calomniés  devant 
vous  et  si  souvent  tourmentés  par  les  partisans  de 
la  dernière  tyrannie  que  vous  avez  détruite,  ne  ces- 
sent de  donner  la  preuve  du  patriotisme  le  plus  pur 
et  le  plus  ardent.  La  commune  de  Brest  surtout, 
dont  on  avait  voulu  faire  soupçonner  la  6dclité  pour 
avoir  le  droit d*y  être  impunément  cruel,  oublie  tous 
les  malheurs  dont  elle  a  été  victime,  pour  ne  s'oc- 
cuper que  de  l'intérêt  général  de  La  république.  11 
n'est  point  de  privation  qu'elle  ne  s'impose  dans  cette 
saison  rigoureuse  pour  fournir  aux  besoins  des  dé- 
fenseurs de  la  patrie.  Elle  avait  devancé  la  fête  du  2 
pluviôse,  en  jurant,  il  y  a  déjà  quelque  temps,  d'ex- 
terminer quiconque  oserait  attenter  aux  droits  du 
peuple;  elle  a  renouvelé  ce  serment  le  iour  indiaué 
par  la  loi ,  avec  l'énergie  qu'inspire  la  haine  la  plus 
implacable  pour  tous  les  despotes. 

•  La  Société  populaire,  rendue  aujourd'hui  aux 
vrais  principes,  après  avoir  été  dominée  par  les  par- 
tisans de  la  tyrannie  ,  indignée  de  l'espoir  qui  paratt 
encore  les  auimer  et  de  leurs  efforts  pour  reprendre 
leur  empire,  applaudit  k  l'énergie  avec  laq^ielle  vous 
les  réduisez  au  néant  dès  qu'ils  osent  paraître.  Tous 
les  citoyens  qui  la  composent  ont  protesté  de  plutôt 
mourir  que  de  retomber  sous  leur  joug. 

•  Il  nous  serait  impossible,  citoyens  collègues,  de 
vous  donner  le  détail  des  prises  que  font  en  ce  mo- 
ment les  vaisseaux  de  la  république;  nous  vous  di- 
rons seulement  qu'il  n'en  entre  pas  un  seul  qui  n'en 
conduise  plusieurs  toujours  chargés  d'approvisioa- 
nements  i^nportants. 

•  Salut  et  fraternité. 

•  Signé  Villbbs  et  Desbues.  • 

Insertion  an  Bulletin. 

GuiUemardii,  représentani  du  peuple  délégué  dam 
les  départements  de  Seine-et-Marne,  de  l'Yonne 
et  de  la  Nièvre,  à  ses  collègues  membres  du  co- 
mité  de  sûreté  générale  de  la  Convention  natio- 
nale. 

hasy ,  le  S7  nivôse ,  Tan  f*  de  U  rdpubliqttt 
françaiie,  une  et  indÎTitible. 

«  Je  viens  de  parcourir  une  partie  du  départe» 
ment  de  Seine-et-Marue,  celui  ae  l'Yonne,  et  les 
districts  de  Cône  et  de  Clamecy ,  dans  celui  de  la 
Nièvre. 

•  Toutes  les  administrations  et  les  principales  au- 
torités  constituées  du  département  ae  l'Yonne  sont 
organisées;  dans  celui  de  Seine-et-Marne,  il  reste 
quelques  remplacements  à  faire  dans  les  districts  de 
Meaux,  Rosoy  et  Provins;  J'attends  des  renseigne- 
ments à  cet  égard  ;  dès  que  je  les  aurai  reçus,  je  ter- 
minerai cette  opération.  Dans  le  département  de  la 
Nièvre,  j'ai  aussi  organisé  les  districts  de  Cône  et  de 
Clamecy.  J'achèverai  probablement  ma  mission  dans 
ce  département. 

•  Je  me  suis  particulièrement  attaché  à  diriger  l'es- 

f»rit  public  vers  les  principes  de  justice  qui  animent 
a  Convention  nationale.  J'ai  rappelé  les  Sociétés  por 
{)ulairesau  vrai  but  de  leur  institution  ;j'en  ai  écarté 
e  petit  nombre  d'intrigants  qui  les  dominaient;  j'y 
ai  appelé  la  masse  des  bons  citoyens ,  et  j'ai  pensir 
que,  plus  ces  Sociétés  se  grossiraient  du  nombre  dea 
nommes  instruits  qui  aiment  la  cbose  publique , 


S50 


moins  il  serait  facile  aux  meneurs  et  aux  mauvais  ci- 
toyens de  les  influencer. 

•  11  existe  en  ce  moment  deux  classes  d'hommes 
qui  excitent  des  mouvements  dangereux  :  la  pre- 
mière ise  compose  de  quelques  anciens  aristocrates, 
qui,  sans  aimer  davantage  la  république,  voudraient 
profiter  des  circonstancespour  exercer  une  influence 
pernicieuse;  dans  la  seconde  on  distingue  les  parti- 
sans de  la  terreur,  qui  regrettent  le  régime  tyran- 
nique  ,  Tanarchie  ou  le  char  qu'ils  appelaient  révo- 
lutionnaire, parce  qu'en  ébranlant  la  tyrannie  on  les 
écrase  sous  l  échafaudage  de  leurs  crimes. 

-  Si  Ton  en  croit  les  premiers ,  il  faut  céder  à  leur 
haine  pour  proscrire  indistinctement  des  patriotes 
de  bonne  foi  qui  n'ont  commis  d'autre  faute  que  d'a- 
voir mis  trop  de  chaleur  dans  leur  conduite;  si  l'on 
en  croit  les  seconds,  le  patriotisme  est  opprimé, 
l'aristocratie  triomphe,  et  la  patrie  est  en  danger, 
parce  que  h  justice  exige  des  comptes  qu'ils  ne  peu- 
vent rendre  à  leurs  concitoyens  sans  avoir  à  rougir 
de  leur  ineptie  ou  de  leur  mauvaise  foi.  Il  est,  dans 
cette  dernière  classe,  des  hommes  plus  coupables 
encore,  qui  osent  se  dire  persécutés  parce  que  l'opi- 
nion publique  les  a  accusés  des  délits  les  plus 
graves,  et  parce  qu'ils  sont  menacés  de  la  sévérité  de 
la  justice. 

«  Ce  sont  ces  mêmes  hommesqui  secouent  les  bran- 
dons de  la  discorde  dans  leur  pays,  et  qui  mettent 
les  citoyens  aux  prises  avec  leurs  passions.  Ils  exci- 
tent le  fanatisme  dans  les  campagnes,  ils  favorisent 
les  inquiétudes  du  peuple  sur  ks  subsistances,  ils 
sèment  Tincertilude  et  jettent  la  défaveur  sur  toutes 
les  opérations  du  gouvernement  :  les  uns  et  les  au- 
tres tendent  à  accréditer  et  à  rétablir  le  régime  qui 
convient  à  leurs  vues  arbitraires  ;  mais  les  uns  et  les 
autres  seront  écrasés  sous  le  poids  de  leurs  forfaits. 

■  J'ai  trouvé,  dans  les  départements  de  Seine-et- 
Marne  et  de  l'Yonne  ,  quelques  partisans  du  terro- 
risme ;  mais  ils  sont  en  petit  nombre  et  sont  muets, 
parce  que  ceux  qui  leur  donnaient  le  ton  sont  eux- 
mêmes  réduits  au  silence.  Il  y  existe  aussi  des  hom- 
mes qui  croient  à  Tinjustice  parce  que  Ton  a  pensé 
que  Ton  pourrait  trouver  dans  la  république  des  ci- 
toyens aussi  patriotes  qu'eux  sans  être  aussi  bouil- 
lants. J'ai  pardonné  à  1  erreur  ainsi  qu'aux  mouve- 
ments  de  l'amour-propre,  et  j'ai  pris  des  mesures 
pour  arrêter  les  prétentions  de  l'orgueil  et  de  l'am- 
bition. 

«  Si  la  tyrannie  a  exercé  peu  d'influence  dans  ces 
deux  départements  il  n'en  est  pas  de  même  dans  ce- 
lui de  la  Nièvre.  C'est  là  que  l'on  peut  apprendre  à 
exécrer  la  mémoire  des  derniers  conspirateurs  que 
nous  avons  terrassés  ;  c'est  là  que  l'humanité  gémira 
longtemps  sur  les  malheurs  qu'ils  y  ont  appelés; 
c'est  de  là  que  de  nombreuses  victimes  ont  été  en- 
tassées dans  des  bastilles  révolutionnaires;  c'est  de 
là  que  de  bons  citoyens,  noircis  par  la  calomnie,  ont 
été  conduits  à  l'échataud;  c'est  là  qu'on  a  organisé 
le  pillage  sous  le  nom  de  taxe  révolutionnaire  ;  c'est 
là  enfin  que  la  désolation  et  le  deuil  ont  été  portés 
dans  presque  toutes  les  familles.  Dans  ces  malheu- 
reuses contrées,  il  n'est  pas  un  citoyen  qui  n'ait  à 
regretter  un  parent,  un  ami  ;  il  n'est  pas  un  ami  de 
la  liberté  et  de  la  justice  qui  n'ait  éprouvé  quelque 
genre  de  vexation. 

•  Les  noms  des  plusgrands  hommes  de  l'antiquité 
Y  ont  été  souillés  par  des  hommes  de  sang  et  de  pil 
lage.  De  nouveaux  Brutus,  desCassius,  desBias,  des 
Diogène,  des  Torqualus  ont  paru  sur  la  scène ,  non 
pour  rappeler  les  vertus  de  leurs  patrons,  mais  pour 
déshonorer  la  révolution.  Ces  patriotes  de  nom  se 
disent  persécutés  parce  que  l'on  se  permet  d'exami- 
ner leur  conduite  révolutionnaire  ;  ils  crient  à  l'in- 


justice, parce  nue,  légitimement  accusés  de  dilapi* 
dations,  de  vols ,  de  prévarications ,  de  projets  de 
meurtre,  d'avilissement  de  la  représentation  natio- 
nale, on  les  traduit  par-devant  les  tribunaux. 

•  J'ai  chargé  les  justices  de  paix  de  Clamecy  et  de 
Cône  d'informer  sur  les  dénonciations  graves  qui 
m'ont  été  faites  contre  plusieurs  de  ces  citoyens;  il 
doit  m'être  rendu  ,  sous  peu ,  un  compte  sommaire 
du  résultat  de  ces  procédures;  et  lorsque  la  nature 
des  délits  sera  constatée,  je  suivrai  la  marche  qui 
m'est  indiquée  par  les  lois,  soit  pour  les  renvoyer 
aux  tribunaux  criminels  ordinaires,  soit  pour  les 
traduire  i)ar-devant  le  tribunal  révolutionnaire.  En 
un  mot ,  ils  obtiendront  ce  qu'ils  ont  si  souvent  re- 
fusé à  leurs  concitoyens  :  justice  complète.     . 

•  Ne  pensez  pas  que  les  vexations  et  les  tortures 
aient  été  réservées  aux  citoyens  d'une  fortune  au- 
dessus  du  médiocre,  ainsi  qu'à  ceux  qui  avaient  un 
certain  de^ré  d'instruction;  les  cultivateurs,  les  ar- 
tisans, le  vieillard  sur  le  bord  de  la  tombe,  les  fem- 
mes, les  enfants,  tous  ont  été  enveloppés  dans  la 
même  proscription. 

«  Le  deuil  et  la  consternation  couvraient  encore 
le  pays  lorsque  je  suis  arrivé;  cependant  la  masse  da 
peuple  avait  repris  son  énergie,  et  il  ne  m'a  pas  été 
difficile  d'y  ramener  la  confiance,  en  y  rappelant  les 

Erincipes  d'humanité  et  de  justice  qui  en  avaient  été 
annis. 

•  Les  oppresseurs  ne  voyaient  dans  leurs  conci- 
toyens que  des  conspirateurs  ou  des  contre-révoln- 
tionnaires  ;  et  moi  je  n'ai  trouvé,  en  les  exceptant, 
que  des  amis  de  la  liberté,  des  hommes  reconnais- 
sants, qui  donneraient  leur  sang  pour  la  république, 
et  qui,  soumis  aux  lois,  sont  entièrement  dévoués  à 
la  Convention  nationale. 

•  Je  pars  pour  Nevers,  où  je  fixerai  ma  résidence  ; 
je  nn'y  occuperai  de  l'organisation  complète  des  au- 
torités constituées  des  trois  départements  où  je  suis 
en  mission.  Je  ne  négligerai  rien  pour  y  activer  la 
marche  du  gouvernement.  Je  rappellerai  aux  fonc- 
tionnaires publics  rétendue  de  leurs  devoirs,  et  je 
leur  donnerai  la  pensée  de  leurs  propres  forces  ;  car 
la  présence  perpétuelle  des  représentants  du  peuple 
leur  a  fait  oublier  l'exercice  de  leurs  fonctions.  Je 
veux  que  tout  se  dirige  d'après  l'impulsion  que  donne 
la  Convention  nationale,  que  le  règne  des  lois  s'é- 
tablisse ,  et  que  l'on  fasse  aimer  la  liberté.  Je  diri- 
gerai tous  mes  efforts  vers  ce  but  salutaire;  et  si  je 
ne  peux  faire  autant  de  bien  que  je  le  désire,  l'on  me 
tiendra  compte  au  moins  de  ma  bonne  volonté. 

•  Salut  et  fraternité.        Signé  Guillemardbt.  • 

Cette  lettre  est  fréquemment  interrompue  par  dejt 
applaudissements;  la  Convention  eu  ordonne  l'im- 
pression au  Bulletin. 

—  Un  secrétaire  lit  l'extrait  suivant  : 

•  Pères  de  la  pairie,  la  révolutiOD  du  40  thermidor  a 
Tait  cesser  le  plus  exécrable  des  règnes,  et  nous  a  réiolégrés 
dans  la  plénitude  de  nos  droiU. 

•  Avant  cette  époque,  les  comités  de  gouvernement, 
usurpateurs  de  la  souveraineté  nationale,  décimaient  les 
Français  avec  Paudace  le  plus  despotique;  les  lois  se  tai- 
saient devant  eux.  Aujourd*hul  les  citoyens,  rassurés  par 
la  vertu  de  ceux  qui  gouvernent,  doivent,  à  leur  tour, 
élever  leur  voix  contre  les  anciens  comités,  ef  reverser  la 
terreur  dans  Pâme  de  ces  tyrans. 

«  Les  habitants  de  Foix  attendront  néanmoins  avec 
calme  le  résultat  de  Texamen  dont  vous  avez  diargé  votre 
commission  des  Vingt-et-Un  ;  mais  tel  que  ce  résultat  puisse 
être,  iU  vous  diront  la  vérité  entière  sur  Tun  des  quatre 
prévenus  Vadicr  ;  ils  vous  diront  qu'il  s*esl  montré  l'ennemi 
le  plus  acharné  de  son  déparlement;  que,  pour  assouvir 
des  passions  particulières,  il  s*est  fait  un  système  d'y  jeter 
la  consternation;  ils  vous  diront  qu'U  le  cakunnia  de  la 


3S1 


manière  la  pins  atroce  lorsqu^an  mois  de  septembre  1798 
il  fil  éclope  de  son  cerveau  machiavélique  une  seconde 
.  Vendée  rebelle  à  vos  décrets,  paisqu*alors  même,  sur  la 
aimple  invitation  du  général  Dagobert,  TAriége  tout  en- 
tier marchait  contre  les  hordes  espagnoles  qui  le  menaçaient 
d*one  irruption  ;  il  vous  diront  qu*il  u^avait  fabriqué  celte 
noire  imposture  que  pour  livrer  notre  malheureux  pays 
à  tous  les  attentats  de  Toppression,  à  toutes  les  horreurs 
de  Tanarchie,  par  des  commissaires  civils,  ses  agents  im- 
médiats, terroristes  effrénés ,  proconsuls  suivis  d*un  appa- 
rcil  scandaleux  ;  ils  vous  diront  enfin  que  partout  autour 
d*cux  le  sang  innocent  crie  et  fatigue  douloureusement 
leurs  cœurs. 

t  Est-ce  Vadier  qui  l*a  fait  verser  ?  Nous  ne  Taffirmons 
pas,  mais  c'est  uniquement  par  respect  pour  votre  décision  ; 
car,  citoyens  représentants,  il  n'est  que  cette  considération 
puissante  qui  soit  en  état  de  commander  ù  nos  consciences, 
au  fond  desquelles  Vadier  est  convaincu,  par  un  ensemble 
de  preuves  irrésistibles ,  de  s*étre  sacrifié  nombre  d'indi- 
vidus^ et  surtout  pour  avoir  lutté  contre  les  ministres  de 
ses  vengeances,  contre  les  propagateurs  du  terrorisme  et 
les  émissaires  des  buveurs  de  sang. 

t  Pour  vous,  citoyens  représentants,  couronnez  votre 
gloire  en  couronnant  les  vœux  du  peuple;  confondez  les 
machinations  d'une  secte  sacrilège,  et  redonnez  au  gou- 
vernement un  jus!e  ressort,  aux  lois  toute  leur  vigueur 
lalutaire,  à  toutes  les  passions  désorganisa trices  un  mors 
d*airain.  ■ 

La  Convention  nationale  décrète  Fenvoi  de  cette 
Adresse  à  la  commission  des  Yingt-et-Un. 

Bourdon  (de  rOise)  :  Citoyens,  rassemblée  a 
voulu  que  le  comité  d'agriculture  prît  tous  les 
moyens  utiles  pour  multiplier  Tespèce  des  chevaux 
dans  la  république.  Le  comité  s'occupe  avec  soin  de 
ce  travail  ;  mais  les  comités  de  transports ,  de  salut 

Sublic  et  de  la  guerre,  croient  aussi  devoir  se  mêler 
ans  cette  beso|gne.  Le  comité  d'agriculture  est  donc 
convenu  de  pner  la  Convention  de  s'expliquer  sur 
cet  article.  11  a  envoyé  dans  la  Belgique  des  agents; 
les  comités  de  transports  et  de  la  guerre  en  ont  en- 
voyé aussi,  de  sorte  que  les  uns  se  croisent  avec  les 
autres.  Le  projet  de  décret  serait  donc  de  déclarer, 
suivant  l'institution  primitive,  que  le  comité  d'agri- 
culture sera  seul  chargé  de  propager  les  espèces  des 
différents  animaux  sur  la  surface  ae  la  république. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

—  Les  citoyens  de  la  section  de  Brutus  en  masse 
défilent  dans  le  sein  de  la  Convention  nationale. 

Vorateur,  à  la  barre  :  Beprésentants  du  peuple, 
la  section  de  Brutus,  vivement  affectée  des  malheurs 

3ui  menacent  encore  la  liberté  publique,  se  présente 
ans  votre  sein  ;  elle  s'y  rend  en  masse  pour  répon- 
dre d'avance  au  reproche  d'intrigue  que  les  terro- 
ristes pourraient  accréditer.  Nous  venons  vous  dire 
des  vérités  utiles  ;  nous  venons  fixer  toute  votre  at- 
tention sur  les  attentats  qu'on  médite  contre  le  salut 
de  la  patrie. 

La  révolution  immortelle  du  9  thermidor  arracha 
la  France  au  système  de  terreur  et  de  sang  ;  elle  dé- 
livra la  république  de  ces  monstres  qui,  ayant  sans 
cesse  les  mots  de  vertu,  de  justice  a  la  bouche,  ne 
s'en  servaient  que  pour  mieux  assassjner  leurs  sem- 
blables. 

Mais  le  crime,  qui  n'avait  été  qu'étonné  et  non 
abattu,  pouvait- il  voir  avec  indifférence  le  triomphe 
de  la  vertu?  Non.  11  importe  de  dire  à  la  Convention 
nationale  que  les  terroristes  méditent  le  massacre 
des  patriotes  vertueux,  des  véritables  amis  de  l'or- 
dre social  ;  on  veut  paralyser  la  marche  bienfaisante 
de  la  révolution  du  9  thermidor ,  ou  plutiH  on  veut 
nous  replonger  dans  le  système  de  terreur  et  de  sang; 
on  veut  nous  précipiter  de  nouveau  dans  Tablme  af- 
fréta: dont  nous  sommes  sortis  le  9  thermidor;  on 


veut  rétablir  les  bastilles;  on  vent  redresser  les 
ëchafauds  ;  on  en  veut  surtout  à  ces  hommes  coura- 

feux  qui,  sur  tous  les  points  de  la  république,  ont 
levé  des  premiers  le  poignard  des  hommes  libres. 
Mais  vous  ne  réussirez  pas,  vils  sp^ulateurs  de 
chair  humaines,  champions  infâmes  d  une  cause  plus 
infâme  encore  :  non,  vous  aurez  la  douleur  d'avoir 
inutilement  provoqué  le  déchirementdu  corps  social! 
Vous  voulez  la  terreur,  nous  voulons  la  justice;  vous 
aimez  l'anarchie,  nous  établirons  l'ordre;  vous  dési- 
rez le  sang,  vous  aurez  la  mort. 

Oui,  nous  le  disons  à  la  Convention  nationale,  il 
existe  dans  son  sein  des  hommes  qui  cherchent  à  or- 
ganiser des  mouvements  séditieux.  (  Des  applaudis- 
sements s'élèvent  dans  les  tribunes.  —  Plusieurs 
membres  interrompent  l'orateur  et  l'interpellent  de 
nommer  ceux  qu'il  dénonce.  )  Les  intrigants  et  les 
ambitieux  espèrent,  par  ces  menées  coupables ,  res- 
saisir plus  facilement  les  rênes  d'un  gouvernement 
tyrannique  qui  s'est  écroulé  dans  la  nuit  du  9  ther- 
midor. 

ViLLETARD  :  Sa  US  doute  des  citoyens  ont  le  droit 
de  dénoncer  à  la  république  ceux  qui  veulent  trou- 
bler l'ordre;  mais  il  ne  faut  point  généraliser  une  ac- 
cusation sans  nommer  personne,  et  répandre  sur  la 
Convention  des  inculpations  graves.  Ceux  qui  ont 
dit  à  cette  barre  qu'il  existait  au  sein  de  la  Conven- 
tion des  ennemis  de  l'ordre  ne  les  ont  pas  nommés... 

On  demande  la  mention  honorable. 

PéNiÈRBS  :  11  appartient  à  une  section  qui  porte 
le  nom  d'un  grana  homme  de  dire  ici  des  vérités  (]ui 
sont  dans  le  cœur  de  tous  les  Timis  de  la  vérité. 
Quoi  !  il  n'appartiendrait  pas  à  des  hommes  qui  dé- 
libèrent sur  les  grands  intérêts  de  la  patrie  de  dire 
ce  qu'ils  pensent  de  leurs  représentants!  ne  sont-cc 
pas  eux  qui  nous  ont  délégués  ?  Nous  ne  sommes  plus 
au  teipps  de  Robespierre,  et  l'on  peut  parler  sans 
crainte.  (Applaudissements.) 

Quand  il  existe  ici  des  hommes  qui  ont  provoqué 
la  guerre  civile  aux  Jacobins,  lorsqu'on  a  vu  même 
ces  hommes  menacer  dans  cette  enceinte  d'assassi- 
ner leurs  collègues,  il  ne  serait  pas  permis  de  dire  la 
vérité!  (On  applaudit.) 

Le  peuple  a  le  droit  de  dire  son  avis  sur  l'état  des 
choses  et  sur  les  personnes.  Je  demande  l'insertion 
en  entier  au  Bulletin  de  cette  Adresse,  et  la  mention 
honorable.  (Applaudissements.) 

Levassbur  (de  la  Sarthe)  :  Non,  la  tranquillité  pu- 
blique ne  sera  pas  troublée;  non,  la  guerre  civile  ne 
naîtra  pas.  Le  peuple  jouira  des  avantages  de  la 
constitution  de  93.  Nous  ne  changerons  pas  la  ter- 
reur de  place,  nous  l'anéantirons.  Robespierre  n'a 
été  dangereux  pour  la  liberté  que  parce  (|u'il  n'a  pas 
été  arrêté  dès  le  commencement.  Instruits  par  l'ex- 
périence, si  quelque  tyran  voulait  s'élever  encore, 
nous  ne  parlerions  pas  du  poignard  de  Brutus,  nous 
frapperions  comme  lui.  Je  vois  d'ici  le  poignard 
placé  sur  la  table  des  Déclarations  des  Droits  de 
l'Homme  ;  il  m'indique  mon  devoir  et  je  le  rempli- 
rai. Malheur  à  tous  les  successeurs  de  Robespierre  ! 
(On  applaudit). 

L'orateur  de  la  êeetion,  continuant  :Les  intri- 
gants et  les  ambitieux  espèrent,  par  ces  menées  cou- 
pables, ressaisir  plus  facilement  les  rênes  d'un  gou- 
vernement tyrannique  qui  s'est  écroulé  dans  la  nuit 
du  9  thermiaor  ;  mais  la  Convention  nationale ,  qui 
étonne  tous  les  peuples  et  frappe  tous  les  rois,  pour- 
rait-elle fléchir  devant  une  poienée  de  factieux  ?  Les 
clameurs  impuissantes  de  quelques  terroristes  em- 
busqués dans  les  tribunes  pourraient-elles  imposer 
à  la  représentation  d'un  grand  peuple?  Eh!  qu'im-' 


S5S 


porte  le  sifflement  de  craelquet  terpetits  qui  veuleut 
inoculer  leur  poison  destructeur  dâus  les  Teines  de 

reiat!* 

Législateurs,  soyex  inaccessibles  aux  considéra- 
tions humaines;  marchez  d*un  pas  ferme  dans  le 
sentier  de  la  justice  et  de  Thumanité:  prenez  Tatti- 
tude  imposante  qui  convient  aux  représentants  d*une 
grande  nation;  vengez  Thumanitë  et  la  nature  en- 
tière si  longtemps  et  si  cruellement  outragées  par 
les  meneurs  des  anciens  comités  de  gouvernement  ; 
vengez  le  peuple  français  des  atteintes  journalières 
portées  à  Texercice  de  ses  droits;  les  mânes  des  vic- 
times immolées  à  la  rage  des  passions  crient  ven- 
Sfauce....  les  ombres  du  vertueux  Phélippeaux  et 
u  sensible  Camille  planent  sur  vos  têtes ,  et  sem- 
blent vous  dire  :  •  Représentants»  frappez  les  grands 
coupables  auteurs  de  tant  de  crimes;  Robespierre 
n'est  plus,  mais  ses  restes  impurs  s*agitent  encore.  • 

Que  la  justice  atteigne  enlin  ces  hommes  qui  ont 
plongé  dans  le  deuil  toutes  les  familles  de  la  répu- 
blique, ces  hommes  pour  qui  le  crime  est  un  besoin, 
l'anarchie  et  la  euerre  civile  un  bonheur;  ils  servent 
de  point  de  ralliement  à  tous  les  conspirateurs;  ils 
se  trouvent  h  la  tête  d'une  minorité  furieuse  d'avoir 
vu  échapper  de  ses  mains  la  puissance  et  la  tyrannie; 
ils  sont  les  chefs  de  ceux  qui ,  dans  cette  enceinte, 
ont  menacé  d'assassiner  les  représentants. 

En  vain  nous  dira-t-on  qu'il  fallait  établir  le  sys- 
thnc  de  terreur  pour  comprimer  la  malveillance  et 
rx)mmander  la  victoire.  N'est-ce  pas  au  régime  de  la 
justice  qu'est  dû  l'aftèrmissement  des  principes? 
n'est-ce  pas  lui  qui  a  éleclrisé  nos  armées  et  planté 
l'étendard  tricolore  sur  les  murs  d'Amsterdam  ?  n'est- 
ce  pas  lui  qui  a  enchaîné  la  victoire  sur  tous  les 
points  de  la  république?  (On  applaudit.) 

Vive  la  républiaue  une  et  indivisible  I  vive  la  Con- 
vention nationale! 

Lr  Présidrnt  :  Citoyens,  le  crime,  couvert  du 
manteau  de  la  vertu ,  peut  tromper  quelque  temps  un 
peuple  franc  et  géut*reux;  la  tyrannie,  aidée  des  ca- 
chots et  des  instruments  de  mort,  peut  contenir  l'é- 
lan sublime  de  la  liberté;  mais  la  journée  du  9  ther 
midor  a  prouvé  que  cet  abus  de  choses  ne  pouvait 
durer. 

Vous  dénoncez  ces  hommes  qui ,  après  avoir  fait 
verser,  fait  couler  le  sang  et  les  larmes  sur  le  sol  de 
la  république,  voudraient  encore  y  organiser  la 


guerre  civile.  L'opinion  publique  et  la  justice  oppo- 
seront nue  digue  insurmontable  aux  complots  des 
pervers;  leurs  crimes  n'échapperont  pas  au  glaive 
vengeur  des  lois.  Les  représentants  du  peuple  sau- 
ront aussi  mourir  pour  le  maintien  de  la  justice  et  de 
la  liberté. 

La  Convention  nationale  vous  invite  è  assbter  à 
sa  séance. 

On  demande  de  toutes  parts  la  mention  honorable 
de  cette  Adresse  et  l'insertion  au  Bulletin. 
Ces  propositions  sont  décrétées. 

Crassous  :  Je  demande  aussi  l'insertion  du  dis- 
cours de  Pénièrcs;  il  contient  les  vrais  principes; 
car  il  ne  faut  pas  qu'on  fasse  seulement  des  compli- 
ments à  la  Convention. 

AnniiÉ  DuMONT  :  Je  m*y  oppose.  Pénières  a  pro- 
noncé une  sorte  d'hérésie  politique  (on  rit  à  Texlré- 
mlté),  en  disant  que  les  sections  avaient  le  droit  de 
censurer  la  Convention.  On  ne  demande  Timpression 
Ût  quelques  mots  échappés  à  un  député  que  parce 
que  ces  mots  peuvent  occasionner  du  désordre.  On 
n'emploie  pas  seulement  l'ironie  contre  1» patrie, 
Mto  on  emploie  le  poignard.  Je  demande  Tordre  du 


La  Convention  patte  è  l'ordre  dn  Jonr. 

RiCHABD  :  Plusieurs  représentants  dn  peuple  qui 
ont  été  inculpés  sont  venus  demander  au  comité  de 
salut  public  les  actes  du  gouvernement  dont  ils  ont 
besoin  pour  se  JustiGer.  Le  comité,  ne  consultant  que 
son  désir  de  fournir  à  ses  collègues  des  moyens  de 
justification,  ne  trouvait  pas  d'abord  d*inconvénient 
à  les  leur  donner;  mais  ensuite  nous  avons  pensé 
que  ces  actes  n'étaient  au  comité  qu'à  titre  de  aépôt; 
que,  si  quelques-uns  de  ces  actes  pouvaient  être 
communiqués  sans  danger, il  n'en  était  pas  de  même 
de  beaucoup  d  autres.  Nous  avons  pensé  encore  qoe 
ce  serait  peut-être  alimenter  les  dissensions,  ott  en 
fournir  de  nouveaux  moyens. 

Il  est  un  cas  où  la  communication  desaetesqnî  ne 
doivent  pas  être  tenus  secrets  ne  pourrait  pas  être 
refusée  :  c'est  celui  d'une  attaque  judiciaire;  mais 
comme  cette  circonstance  ne  se  présente  pas ,  le  co- 
mité m'a  chargé  de  vous  en  réft^rer. 

La  Convention  passe  à  l'ordre  du  jour. 

C.-J.Trouvé,run  des  rédacteurs  du  Jlfom7^r,fait 
hommage  d'une  ode  sur  la  conquête  i\t  la  Hollande. 

La  Convention  agrée  i'hommage,  en  ordonne  men- 
tion honorable,  et  renvoie  l'ouvrage  au  comité  d*in* 
struction  publique. 

{La  tuile  à  demain.) 

N.  B.  Dans  la  séance  du  13,  on  a  donné  lectnrt 
de  la  lettre  suivante  : 

Les  représentants  dupeupleprèt  les  arméee  du  Iforê^ 
de  Sambre-et-Meute^  à  la  Convention  nalionaiê» 

A  La  Haye,  le  9  pluWoae,  Pan  Sa  de  la  répnbB^M 
française,  une  et  indWisible. 

e  Les  places  de  Williamstadt ,  Bréda ,  GorctiiD  et  Bcrp» 
op-Zoom ,  la  flotte  bollandaise  retenue  par  les  glaces  dans 
le  Texel,  les  ports  de  Briel  et  de  Helvoétsluys  sont  an  pou- 
voir de  la  république*  Nous  devons  la  prise  df  ce  dernier 
port  au  général  Bonneau. 

a  ioUruit  que  six  cents  de  nos  frères  y  étaient  prisonnieii 
et  que  huit  cents  Anglais  s*y  étalent  retirés  pour  s'omhar* 
quer,  il  a  fait  part  au  commandant  de  ce  port^Sloury, 
qu^il  connaissait  pour  patriote,  de  s^emparer  de  ce  porti 
ce  dernier  a  armé  secrètement  nos  frères  d'armes,  qui,  à 
leur  tour,  ont  fait  les  Anglais  prisonniers. 

t  Nous  faisons  partir  pour  Paris,  comme  prisonniers  de 
guerre,  les  princes  de  Salm-Salm  et  de  Holienlohe,  qni 
ont  été  arrêtés  sur  les  glaces  avec  un  aide^de-camp  dn  gé- 
néral Clairliiyl  ;  ces  prisonniers  avaient  offert  une  somme 
très-considérable  au  capitaine  <)'un  ?  aisseau  américain  et 
d'un  vaisseau  danois,  pour  les  passer  en  Angleterre;  ces 
deux  braves  gens  ont  réîpondu  que,  n*étant  point  en  guerre 
avec  la  France,  ils  ne  feraient  rien  contre  ses  intérêts, 
qu'ils  observeraient  exactement  la  neutralité,  et  quils 
seraient  toujours  fidèles  à  Tamitié  qui  unissait  ces  deux 
nations  à  la  Tiôtre.  Tonché^  de  ce  trait  de  désintéressement 
et  de  bonne  amitié,  nous  en  témoignons  notre  reconnais- 
sance aux  ministres  des  Etals-Unis  et  du  Danemark» 

K  Signé,  fKicinn,  Alqotsi,  RoiBajOTt 

BlLLEGABDB,  CtC*  • 

Les  applaudissements  et  les  cris  de  vive  la  répu- 
blique! qui  avaient  fréquemment  interrompu  la  lec- 
ture de  cette  lettre,  ont  d<^terminé  la  Convention  à 
la  faire  lire  une  seconde  fois. 

Cette  nouvelle  lecture  a  été  terminée  par  de  nou- 
veaux applaudissements  et  des  acclamations  de  joie 
universelle. 


Payemenff  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  aii  pro« 
niera  mois  ;  il  aéra  fait  à  tous  ceux  qui  aeroot  porteurs  a  in* 
scriptions  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères  eal 
de  huit  noif  vingt  et  un  jouri  de  raonée  17M  (viens  styU). 


GAZETTE  NATIONALE  .»  LE  MONITEUR  lilVERSEL. 


NO  iU. 


Quiniidi  15  Pluviôse,  Fan  8«.  (Mardi  3  Fbvbibr  1795,  vieux  ttyh.) 


POLITIQUE. 

DANEMARK. 

Copenhague^  h  \2  janvier.  —  Le  eouTernemeot  danois 
Tient  de  mériter,  par  un  nouvel  acte  de  justice,  l'estime  des 
hommes  libres  et  delà  postérité.  Il  a  publié  un  édit  en  vertu 
duquel  tous  les  paysans  danois  de  Norwégc  et  de  Julland 
doivent  être  affranchis  de  toute  servitude  pour  la  première 
année  du  dix-neuvième  siècle. 

—  La  cour  de  Stockholm  vient  de  soumettre  à  de  grandes 
restriciions  lu  facullé  de  distiller  Teau-de-vie. 

—  Il  est  passé  par  le  Sund,  pendant  le  cours  de  l'année 
dernière,  10,511  navires;  sur  ce  nombre,  il  y  a  eu  3.457 
bâtiments  anglais.  2,475  suédois,  1,657  danois,  1,019  hol- 
landais, 415  prussiens.  408  courlandnis,  287  de  Roslock, 
176  de  Brème,  167  de  Dantzig,  105  de  Lubeck,  85  hambour- 
geois,  34  russes,  32  portugais  et  14  espagnols. 

ITALIE. 

Saoonêi  iê  \b  janvier.  —  Les  Français  sont  descendus  vers 
la  mer ,  parce  que  l'abondance  des  neiges  tombées  des 
monlagnes  gênait  le  transport  de  leurs  provisions  ordinaires 
'  à  Bardineua. 

—  Le  général  piémontaia  Cervoni  est  parti  de  Loano  avec 
plusieurs  bataillons. 

—  Le  nouveau  général  en  chef  de  l'armée  française  d*I- 
laiie.  Schércr,  a  exposé  aux  représcntanu  du  peuple  qu'il 
était  nécessaire  de  réorganiser  l'armée,  et  qu'il  avait  besoin 
de  pleins  pouvoirs  pour  cette  opération. 

Les  représentants  ont  accédé  à  la  demande  du  général,  et 
Toa  ta  dispoie  à  la  réorganbatlon. 

ANGLETERRE. 

lAmdreSf  1$  9jaMier.  —  L'opposition,  depuis  la  rentrée 
du  parlement,  parait  s'être  accrue  d'une  vingtaine  de 
membres.  On  a  observé,  comme  une  chose  qui  n'était  point 
indifférente,  que  la  proposition  de  l'amendement  de  l'A- 
dresse à  voter  an  roi  n'avait  point  été  faite  par  un  chef  de 
parti  de  l'opposition ,  mais  au  contraire  par  un  membre 
(M.  Wilberforce)  qtii  votait  ordinairement  avec  les  mi- 
nistres. 

Les  papiers  de  la  trésorerie,  habitués  jusqu'à  ce  jour  à 
dire  que  l'Angleterre  ne  devait  point  tonger  à  la  paix  tant 
que  la  monarchie  ne  serait  point  rétablie  en  France,  veu- 
lent bien  aujourd'hui  commencer  à  croire  que  cette  condi- 
tion n'est  pas  rigoureusement  essentielle.  L'un  d'eux,  le 
True  Briion ,  parait  moins  courroucé  contre  les  Français 
que  par  le  passé  ;  il  va  même  jusqu'à  permettre  au  gouver- 
nement britannique  d'entendre  des  propositions,  si  la  France 
veut  lui  en  faire,  soit  directement ,  soit  à  l'aide  d'une  puis- 
sance Intermédiaire. 

—  Chacune  des  séances  du  parlement  a  présenté  des  dé- 
bats de  la  plus  grande  importance.  M.  Sheiidan,  qui  avait 
notiGé  le  2  aux  Communes  que  son  intention  était  de  pro- 
poser, le  8,  la  révocation  de  l'acte  qui  suspend  celui  d'ha- 
beat  corputt  a  rempli  son  engagement  au  jour  indiqué. 
Après  un  discours  plein  de  force ,  relatif  aux  emprisunoe- 
ments  des  individus  accusés  d'avoir  conspiré  contre  le  gou- 
vernement, mais  acquittés  depuis  par  des  jugements  con- 
formes aux  lois  du  pays,  il  fit  la  motion  «  qu'il  fût  présenté 
un  bill  pour  révoquer  l'acte  de  la  dernière  session  qui  sus- 
pend celui  de  Vhabeat  corpus.  «  Il  y  eut  à  ce  sujet  des 
débats  fort  vifs  et  prolongés  iusqu'au  milieu  de  la  nuit. 

Le  parti  ministériel  refusa  de  consentir  à  la  motion,  qui 
fut  rejetéc  à  la  pluralité  de  cent  quatre-vingt-cinq  voix  contre 
quarante  et  une. 

La  délibération  de  forme  qui  était  le  2  à  l'ordre  du  jour, 
pour  accorder  un  subside,  ayant  été  entamée  par  les  Com- 
munes formées  en  comité,  donna  lieu  à  M  Sheridan  et  à 
M.  Fox  de  faire  une  forte  censure  de  la  conduite  des  mi- 
nistres. 

Ils  s'élevèrent  surtout  contre  l'emprunt  impérial  et  le 
marciié  conclu  par  le  chancelier  de  l'échiquier,  avec  les 
maisons  de  banque,  pour  les  «ommes  affectées  au  service  de 
l'année  prochaine.  M.  Ptu  dli  qa'U  avait  dû  anticiper  le 

8*  Série, -^  Tome  X. 


I  marché,  et  prétendit  pouvoir  se  justifier  an  moyen  des  cir- 
constances. Sor  sa  proposition,  il  fut  résolu  de  reprendre 
de  nouveau  cette  question  le  19  de  oe  mois.  Jour  auquel  il 
espérait  que  la  plupart  des  membres  absents  se  trouveraient 
à  la  séance.  Enfin  le  comité  résohit  qu'il  serait  accordé  on 
subside,  et  le  lendemain  le  rapport  du  comité  passa  dans  la 
Chambre. 

Le  jour  ob  lord  Stanhope  eut  un  si  mauvais  succès  dans 
la  Chambre  des  pairs .  lord  Lansdowne  déclara  qu'il  était 
persuadé  des  bonnes  intentions  du  motionnaire,  mais  qu'il 
ne  pouvait  approuver  sa  motion,  qu'il  espérait  qu'un  autre 
membre  en  ferait  "une  sur  ce  sujet.  Le  duc  de  Bedford  an- 
nonça que,  dans  quinxe  jours,  il  remplirait  ce  soin,  et  ferait 
une  motion  tendant  à  procurer  la  palià  des  conditions  ho- 
norables. 

—  Le  procès  de  Hastings  va  se  continuer. 

—  On  mande  de  Plymouth  que  tous  les  vaisseaux  de 
guerre  qui  sont  dans  ce  port  et  prêts  à  mettre  en  mer.  ainsi 
que  l'escadre  portugaise,  composée  de  cinq  vaisseaux  de 
ligne,  d'une  fn%ate  et  deux  corvettes,  ont  reçu  l'ordre  d'al- 
ler le  plus  tôt  possible  en  grande  rade,  pour  y  attendre  l'ar- 
rivée de  l'escadre  attendue  de  Portsmouth  à  chaque  instant. 
Toute  la  flotte  mettra  ensuite  à  la  voile  sous  le  commande- 
ment de  lord  Howe,  et  prendra  sous  son  escorte  celle  des 
Iodes  orientales;  elle  doit  être  composée  de  trente-six  à  qua- 
rante vaisseaux  de  ligne,  outre  les  frégates  et  corvettes.  La 
force  de  cet  armement  ne  rassure  pas  entièrement  Id  ;  on 
craint  que  les  Français  ne  tentent  d'intercepter  ce  riche 
convoi. 

HOLLANDE. 

La  révolution  s'est  faite,  à  Harlem  et  dans  les  prindpalet 
villes  de  Hollande,  paisiblement  et  sans  effusion  de  sang. 
Voici  des  détails  curieux  sur  la  manière  dont  elle  s'est  opé- 
rée à  Amsterdam. 

Extrait  dune  lettre  dtAmiterdoM,  du  \^  janvier,  —  Hier 
la  nouvelle  arriva  ici  que  i'avant-garde  des  Français,  s'étant 
approchée  du  faubourg  dIJtrecht  qui  se  trouve  dehors  la 
porte  dite  de  Toltteoget  avait  été  complimentée  par  une  dé- 
putation  de  la  régence,  composée  de  trois  membres  et  d'un 
secrétaire ,  qu'elle  était  ensuite  entrée  dans  la  ville.  Peu 
après  on  reçut  l'aris  que  le  général  Daendels  t'y  était  joint 
avec  une  deuxième  colonne. 

Dans  notre  ville,  une  foule  Immense  était  rassemblée  de- 
vant et  dans  l'hôtel  des  Armes  d'Emden.  f^  nouvelle  de  la 
délivrance  d'Utrecht  y  fut  reçue  aux  applaudissements  uni- 
versels, cl  tout  le  monde  témoigna  le  désir  ardent  de  briser 
ses  fers,  malgré  les  efforts  de  la  régence  et  la  garnison  très- 
nombreuse. 

En  conséquence,  ce  matin  18,  avant  dix  henres,  le  peuple 
se  mil  en  mouvement  :  le  rendez-vous  était  devant  et  dans 
l'hôtel  des  Armes  d'Emden;  on  y  distribua  ouvertement  la 
cocarde  nationale.  Les  esprits  étaient  très-échauffés;  ceux 
qui  cherchèrent  à  modérer  celte  ardeur  ne  furent  pas  écoutés. 

En  ce  moment,  toutes  les  Sociétés  populaires  sont  réin- 
stallées et  asscmblé&f  en  grand  nombre.  Le  citoyen  Crayen- 
hoff,  adjudant  général  du  général  Daendels,  est  entré  dans 
la  ville,  et  s'est  rendu  chez  le  comte  Golofkin,  gonvernear 
de  la  ville. 

Du  19.  —  Après  le  dépari  de  ma  lettre  d'hier  soir,  la  fbnle 
s'est  considérablement  accrue  dans  tous  les  clubs,  et  no- 
tamment dans  celui  où  se  trouvent  nos  principaux  négo- 
ciants, connu  sous  le  nom  de  Doctrine^  et  qui  était  égale- 
ment supprimé  par  un  édit  du  mob  d'octobre  dernier.  On 
y  a  fait  rapport  à  la  bourgeoisie  de  ce  qui  s'est  passé  avec  le 
citoyen  Crayenhoff  ;  sa  proposition  a  été  que  la  régence  se 
démettrait  elle-même  de  ses  charges,  faute  de  quoi  le  peuple 
la  déclarerai   déchue. 

Il  était  ajourné  jusqu'à  neuf  heures  da  loir  pour  savoir 
la  réponse  du  magistrat  stathoudérien.  Le  peuple  applau- 
dit beaucoup  à  ce  rapport  ;  il  s'est  tenu  assemblé  toute  la 
nuit.  Ce  malin,  de  très-bonne  heure,  il  s'est  rendu  sur  le 
Dam  ;  les  applaudissements  et  les  cris  étvive  ia  république: 
étaient  universels. 

A  huit  heures  du  matin,  toutes  les  cloches  ont  commencé 
à  carillonner  et  ont  fait  entendre  des  airs  patriotiques.  Deux 
drapeaux  irlcolores  ont  été  arborés  à  la  maison-commaiie* 


•<4 


ttt  troopti  •tofhwidlftenpi  qol  eoqipoiaiit  ta  sanilMa  ont 
reçu  orHrr  AH  hier  soir  de  norilr  de  la  ville. 

1^  ({finirai  Oulorkiii  a  éiv  foroé  de  dooocr  M  démluion*   , 
Lf  rltoyf  n  Cmyeiilioff  eut  commandrin*  de  la  ville  A  onze 
lirurm  du  malin  l'nrUre  de  la  lib<T(é,  surmonté  d'un  cba- 
poau,  a  éié  piouië  sur  la  Dam. 

La  mnitlsiniiura  actuelle  et  la  chambre  dci  bourgmestres 
ont  (S\é  dcclur<k*s  dëthues  dr  leurs  fonctions  par  la  bour- 
(Ifoisle.  «t  l'oo  a  nommé  une  ré{s«uco  provisoire  de  celle 
vlilf,  romposée  de  vinnt  membres. 

Us  ont  pris  ^éonce  4  la  nialson-commune.dana  la  chambre  ; 
du  rmisfll  ^t^nt^nil:  Icn  (?iio>pn.H  Drcndcr,  Brandis  et  Tado-  ; 
ni»n  ont  été  nomuuts  srcréuîirvs  do  la  ville.  Oiie  commis-  { 
aiou  est  ('liar(|t':e  d'iir({uuis«*r  la  nouvelle  rqjcnce  municipolet  i 
aln»l  que  le  conseil  du  guerre  de  lu  bour^colKie  de  ta  ville,     j 

U  llbrutrit  Verlem  et  un  nuire  palriuie,  détenus  dans  une  | 
mals<m  de  force,  en  ont  élé  arrachés  par  le  peuple.  Yisscher, 
ancien  couseilleri  pensionnaire  de  la  ville,  aln»i  que  se^s  cinq 
oollé(|Uoii  dél4'nus  dans  une  autre  maison  de  force,  ont  élé 
ëflalemenl  mis  en  liberté  par  leurs  concitoyens,  et  conduits 
4aus  dos  voitures  al  en  grande  solennité  à  Tbâiel  de  ville. 


RÉPUBLIQUE  FnANÇAISE. 

De  Parii.  —  L*arr^t(<  du  comité  des  finances,  du 
8  pliivlow,  qui  ordonne  qu'il  ne  sera  délivré  dans 
Paris  dr  caries  de  sûrctt*  qu'aux  citoyens  oui  jusli- 
fleronl  du  nayementdc  leur  contribution  (voyez  le 
MoniUur  tlu  12  pluvios<')^  faisait  deuiaiider  à  qui  le 
lisait  si  l*un  voulait  réUblir  k  systètue  deacouiraiu- 
le»  par  corps. 

Il  e.Hl  tWidenl  que  ce  doit  être  la  Teffet  de  cet  ar- 
r<Mè;e«r  tout  citoyen  qui  n'aura  pas  paye  ses  impo- 
sitions n'aura  pas  de  carte,  et  tout  citoyen  qui  n'aura 

pa«  de  oiirti^  sera ,  aux  ternies  de  la  loi  du ,  ar- 

rJ^lët^t  détenu  comme  suspect.  Il  ne  pourra  recou- 
vrer su  hberl^  qu'au  moment  où  il  justifiera  de  sa 
enrie,  et  il  ne  pourra  l'obtenir  qu'autant  qu'il  aura 
myé  ses  contributions.  Or,  puisque  c'est  le  défaut 
<le  carte  qui  l'aura  Tait  mettre  en  prison  et  qui  l'y 
retiendra,  puisque  c'est  |)()ur  n'avoir  pas  paye  ses 
[niposilious  qit'il  en  aura  été'  privé,  il  est  clair  qu'on 
le  forcera  par  corps  à  acquitter  celte  dette. 

Ou  repondra  que  l'arrêté  contient  les  exceptions 
aii'il  a  paru  juste  de  faire,  et  que  celui-là  ne  peut 
Itre  qu'un  mauvais  citoyen  qui  ne  s'empresse  pas 
de  payer  ses  impositions.  Celle  assertion  est  fausse. 
Les  contributions  ont  éié  si  mai  as>iscs  qu'il  nVst 
presque  personne,  surtout  dans  la  classe  de  celbs 
qui  vivent  de  leur  travail,  qui  n'ait  été  coté  à  des 
lommes  exorbitantes  et  obligé  de  réclamer.  Ces  ré- 
clamations ont  nécessairement  suspendu  les  paye- 
ments. 

D'un  antre  côté,  le  temps  a  été  si  dur  depuis  deux 
innées,  les  denrées  ont  tellement  augmenté  de  prix, 
qu'il  a  été  impossible  à  beaucoup  de  citoyens  de 

Srdlcver  sur  leur  salaire  ce  qu'il  failail  pour  payer 
es  coutributions ,  quand  ils  n'avaient  pas  môme 
assez  pour  procurer  à  leur  famille  le  strict  néces- 
ijiire. 

D'9illeurs,en  supposant  nu'aucun  motif  ne  justilie 
!•  retard  de  payement,  il  n  y  aurait  point  encore  de 
raison  d'y  contraindre  par  corps;  il  est  d'autres 
VoIeH  qu'on  peut  employer.  On  peut  bien  priver  des 
avantages  et  des  garanties  de  Tordre  social  rbomme 
qui  n'en  acquitte  pas  les  charges,  mais  on  ne  peut 
lias  lui  ravir  aa  liberté  ;  elle  lui  appartient  de  droit 
naturel. 

Que  gngnera-t-on  i  emprisonner  ainsi  ?  Espère- 
l^oil  accélérer  la  rentrée  des  impositions?  Non,  car 
tituinme  qui  n'aura  pas  pu  payer  étant  libre  le  pour- 
It  encore  moins  étant  en  prison;  cependant  l'on 
Mirt  privéïGontre  toute  raison, contre  tous  les  prin- 
^jîm%  CMtra  toutes  les  toia,  un  eitoyea  ck  u  UbuU^ 


une  famille  de  son  ehef  et  de  son  protectenr,  et  la 

république  d'un  homme  utile, 
nous  n'étendrons  pas  davantage  ces  réflexions, 

3uoi(|u'elles  soient  susceptibles  de  bien  plus  grands 
éveloppemeuts.  Nous  nous  contenterons  d'ajouter 
qu'il  y  a  environ  vingt  jours  que  le  comité  de  lé- 
gislation cassa  un  arrêté  de  la  municipalité  de  Paris 
qui  ôtait  à  ceux  qui  n'avaient  pas  payé  leurs  contri- 
butions la  faculté  de  vovager  dans  la  république, 
et  qu'aujourd'hui,  pour  te  même  fait,  le  comité  des 
finances ,  dont  nous  sommes  loin  d'accnser  les  in- 
tentions, ôte  la  faculté  de  voyager  même  dans  Paris. 
La  loi  a  déterminé  les  moyens  qui  doivent  être 
employés  pour  assurer  le  recouvrement  des  taxes.  Il 
y  a  d'ailleurs  une  foule  de  demandes  en  décharge, 
sur  lesquelles  il  n'a  pas  été  encore  prononcé.  Beau 
coup  de  citoyens  se  sont  trouvés  dans  l'impossibilité 
pby.sique  d'acquitter  ces  taxes,  ayant  été  détenus  et 
ayant  eu  leurs  biens  séquestrés  par  suite  de  la  der- 
nière tyrannie  ;  ce  qu'ils  pouvaient  avoir,  ils  l'ont 
consoumié  pour  se  procurer  leur  subsistance  dans 
les  prisons  où  ils  ont  gémi.  Beaucoup,  à  raison  de 
leur  captivité,  ont  perdu,  du  moins  pour  longtemps, 
les  moye4is  d'exercer  leur  industrie  et  leurs  talents; 
ils  peuvent  à  peine  se  procurer  les  moyens  de  vivre. 
Parce  qu'ils  ont  été  victimes,  d'après  l'arrêté  qui  les 
privede  carte  de  sûreté,  ils  peuvent  être  assimîlésaux 
gens  suspects  *,du  moins  il  ne  leur  sera  point  permis 
dViitrer  à  leurs  sections.  Il  y  aura  donc  des  citoyens 
à  carte  et  des  citoyens  sans  carte.  I^cs  premiers  joui- 
ront pleinement  de  l'exercice  de  leurs  droits;  les 
autres  eu  seront  privés.  Ainsi  la  distinction  entre  les 
citoyens  actifs  et  les  citoyens  passifs  va  reparaître 
sous  une  autre  dénominalion.  Ënlin,  l'arrête  du  co- 
mité (les  iinanees  dclruil  TelTet  (^ue  la  loi  sur  le  re- 
nouvellement des  cartes  de  sûreté  avait  en  vue  :  elle 
voulait  signaler  riiomme  suspect,  celui  qui  vient 
ici  servir  une  faction  ;  or,  maintenant,  d'après  l'ar» 
rêté,  quand  on  arrêtera  un  individu  «ans  carte,  com- 
ment serait -il  possible  de  reconnaUre  si  c'est  un 
homme  de  celle  clas<e,  ou  simplement  nn  citoyen 
qui  n'a  pu  payer  ses  impositions. 

A  ces  ri'liexions,  particulièrement  relatif  es  à  l'ar- 
rêté dont  nous  avons  établi  les  vices  et  les  inconvé- 
nients, nous  pouvons  ajouter  une  considération 
plus  générale  :  si  les  comités  sont  chargés  de  pren- 
dre des  arrêtés  pour  presser  rexéculion  des  lois,  fa- 
ciliter la  marche  (lu  gouvernement,  sVnsuit  il  qu'ils 
puissent  aiouter  des  uisposilions  à  une  loi  portée  par 
la  Convention  et  délibérée  solennellement?  S'ils 
croient  qu'une  loi  a  besoin  de  dispositions  supplé- 
mentaires, ne  leur  convieulil  pas  de  s'adiesser  à  la 
Convention,  qui  doit  seule  prononcer?  Tous  les  ci- 
toyens ont  juré  la  république  ;  tous  respectent  les 
lois  émanées  du  corps  représentatif  de  la  nalion  en- 
tière; mais  qui  p(Mirrait  respecter  cette  jurispru- 
dence intermotliaire  des  connlés,  qui  contrarierait 
les  dispositions  mêmes  des  lois?  L'unité  du  gouver- 
nement peut-elle  se  concilier  avec  ces  actes  divers 
ou  contradictoires  des  autoritéis  snlxilternes?  Com- 
ment la  tyrannie  des  décemvirs  s'est -elle  établie, 
organisée,  maintenue,  si  ce  n'est  par  l'ascendant 
qu'a  donné  à  certains  comités  uue  usurj^ation  sem- 
blable, et  d'abord  peu  apparente  «des  droits  de  la 
législation  publique? 


Ecole  Normale. 

Dans  une  des  dernières  séancps ,  Bernardin  de  Satnt- 
Plcrre.  ce  respcciable  vidllard  qui  fut  Tami  de  Jean-Jac- 
ques, adresaa  aux  éléve.<i  un  peUt  discours  où  II  leur  rcudail 
oomple  des  raisons  qui  robligeaieoi  de  différer  de  trois  mola 
le  eemn  àê  nonk  deot  U  «i  ctaamé.  «  Je  e'ai  poiol»  A- 


•56 


salt-IU  Tart  d«  parier  qoand  ]•  «"il  ifett  I  dire,  t  Ce  fer- 
tucax  professeur  a  demandé  cinq  mois  pour  composer  ses 
leçons  de  morale ,  et  il  n'y  a  que  deux  mois  qu  11  &  occupe 
de  ce  travail  qui  doit  influer  sur  le  bonheur  de  la  gènc^raiion 
naissante.  D'ailleurs,  comme  It  l'a  t)scrvé  lui-m(^me.  le 
cours  de  morale  duil  être  le  complt^meni  de  toutes  les  leçons 
qu'.'ioront  reçue»  les  élèves  de  l'Ecol    Normale. 

L'octogénaire  Daui)ent()n.  le  collaborattur  et  l'ami  de 
ButYon,  a  donné  ensuite  la  première  leçon  d'histoire  natu- 
relle .  et  11  s'est  félicité  de  retrouver  encore  asset  de  forces, 
à  la  fin  de  sa  longue  rurrière,  pour  contribuer  aux  succès 
d*une.  école  qui  duil  ré|Mmdre  dan»  toute  la  république  le 
bl<*nfait  de  l'instruction. 

Dans  la  séance  de  sexiidi,  le  citoyen  Sicard,  professeur  de 
(grammaire  et  insiiiuleur  des  sourds  et  muets,  a  amené  avec 
lui  cinq  de  ses  rlëvcs 

11  leur  a  fait  répéter  nnc  partie  de  leurs  exercice.%  et  dé- 
mtiotréà  toute  l'éroie  jusqu'à  quel  point  son  Inieltigeneeet 
•es  soins  ont  corrigé  les  mépri>es  de  la  nniure  Le  premier 
élève  qu'il  a  pré^enié  est  un  jeune  sourd  et  muet  qui  sert  au- 
jourd'hui d'in>tiiuirur  aux  comp;ignons  de  son  infortune. 
La  Convention  vénal l  de  lui  accorder  1,200  liv.  d'appoinie- 
mculs.  Le  citoven  Sicard  s'était  chargé  de  lui  annoncer  cette 
nouvelle:  et  cet  intéressant  jeune  homme,  en  l'apprenant, 
avait  levé  les  yeux  vers  le  ciel,  et  «lit  in  son  bienfaiteur,  dans 
Je  langaire  de»  signes  :  >  Rntln ,  je  pourrai  donc  donner  du 
pain  à  ma  mère!  *  Ce  récit,  fait  par  le  citoyen  Sicard  avec 
i'arcent  de  la  Kensibililé,  devait  attendrir  tous  les  élèves  de 
rCcole  iNurmale;  et  en  effet  des  larmes  coulaient  de  tous  les 
yeux  Le  cito>en  Sirard  réservait  un  phénomène  à  l'admi- 
ration des  élèves  ;  c'est  un  enfant  d'environ  quatorze  ans, 
dont  la  surdité  est  telle  qu'il  n'entend  p;)s  le  bruit  d'un  ca- 
iQon  tiré  à  côté  de  lui.  Hon  insiiiuteur  est  parvenu  ft  le  faire 
parler,  et,  A  des  si{pies  convenus  entre  eux .  l'enfant  a  pro- 
noncé ces  mots  distinctement  :  «  Donjour,  Sicard,  comment 
te  porte.s-tu?  *  Ce  miracle,  dont  le  citoyen  2>icard  a  ex|iliqué 
les  procédés,  a  excité  l'enthousiasme,  ei  les  applaudisse- 
ments prolongés  des  auditeurs  ont  dû  être  pour  cet  habile 
professeur  une  des  plus  douces  récompenses  de  ses  succès, 
après  le  bonheur  d'avoir  créé  la  parole  dans  un  être  à  qui 
la  nature  l'avait  refusée. 

(Tiré  de  la  Feuille  de  la  Bépublique,) 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Rovére, 
8UITB  A  LA  SÉANCE  DU  12  PLUVIOSE. 

La  section  de  Paris  dite  de  Guillaume-Tell  est  ad* 
mise,  à  la  barre;  un  citoyen  porte  la  parole  et  lit 
Tarrélé  suivant: 

Extrait  du  proeêt-verhal  de  la  téanee  du  \Q  plu- 
viôse ,  an  3  de  la  république  française ,  une  et 
indivisible» 

L*assemblée  générale  de  la  section  de  Guillaume* 
TelU  instruite,  par  les  déclarations  miiltii)liées  des 
citoyens  qui  la  contposetit,  que  des  canninales  tout 
dégouttants  de  sang  ne  cessent  de  conspirer  avec 
fureur  contre  la  liberté ,  la  siVeté  du  peuple  qu'ils 
ont  si  longtemps  assassiné;  qu'ils  osent  calomnier 
jusqu'à  la  Convention  nationale  elle-même,  dont  la 
justtce  comprime  leur  scélératesse  ;  qu'ils  assiègent 
di!  toutes  parts  les  autorités  constituées,  et  obtien- 
nent même  des  pluces,  contre  le  vœu  général  de 
leurs  concitoyens  et  contre  les  intentions  bien  pro- 
noncées de  la  représentation  nationale,  dont,  sans 
doute,  ils  surprennent  la  religion,  arrête  : 

1«  Que  les  membres  qui  composaient  son  ancien 

comité  révolutionnaire,  et  les  hommes  turbulents 

et  factieux  qui  ont  professé  leurs  principes  et  servi 

^    les  atrocités  dont  ils  se  sont  rendus  coupables,  ont 

perdu  sa  confiance; 

2»  One  le  voeu  de  la  section  est  que,  tant  dans  son 
arrondissement  que  dans  celui  des  autres  sections  de 
Paris,  auoMB  mambre d«a  MicieDi comiM  rëyoiu- 


tlonnafres  ne  puisse  rem|>Iir  aucune  Ibnctton  civile 

ou  militaire,  ni  leurs  partisans; 

80  Que  la  Convention  nationale  sera  invitée,  de 
la  manière  la  plus  pressante,  à  terminer  le  plus  tôt 
possible  l'épuration  des  autorités  constituées  et  de 
toiites  les  administrations,  eu  ayant  égard  au  vœu 
de  la  section  ; 

4«  Qu'il  lui  sera  représenté  que,  dans  le  renou- 
vellement des  corps  Judiciaires,  la  religion  du  cor 
mité  de  législation  a  été  sur|irise,  et  qu'un  ancien 
membre  du  comité  révolutionnaire  de  la  section  a 
été  promu  à  la  place  d'assesseur  du  juge  de  paix; 

&«  Que,  nonobstant  ces  mesures  essentielles  qui 
ne  sont  qnede  simple  précautions,  de  prudence  et  de 
police  intérieure,  il  est  urgent  que  le  gloiva  de  la 
loi  ne  reste  pas  trop  longtemps  suspendu  sur  la  lêle 
des  grands  coupables  qui  ont  rempli  la  France  de 
sang  et  de  deuil ,  et  sur  celles  de  leurs  iurâmes 
agents  ; 

60  Qtie  le  vœu  de  la  section  exprimé  dans  le  pré* 
sent  arrêté  sera  porté  par  utte  dt'putation  à  la  Con- 
vention nationale ,  et  communiqué  au  quarante- 
sept  autres  sections  de  Paris,  avec  invitation  d*y 
adhérer. 

Le  Présioent  :  Citoyens,  les  fourbes  et  les  scélé- 
rats qtii  tyrannisaient  la  France  avant  le  9  thermi- 
dor jttgenlent  les  hommes  d*aprës  eux-mêmes;  ils 
voyaient  iiea  crimes  dans  toutes  les  aolions,  des  eri- 
mitiels  dans  tous  ceux  qui  n'étaient  pas  leurs  com* 
plices. 

L'homme  probe  et  vertueux  cherche  Tinnocenoe 
parlotit,  et  ne  punit  même  le  coupable  qu*avec  re- 
gret. Plus  les  fonctions  sont  pénibles  à  remplir,  |ilui 
les  représentants  du  peuple  se  pénétreront  de  Tim* 
porlance  de  leur  mission  ;  ils  ne  verront  que  la  Jus» 
tice  qui  veille  sans  cesse  avec  eux. 

Les  hommes  dui  ont  conspiré  contre  la  patrie  en 
versant  le  sang  (lu  peuple  ne  jouiront  pas  iongtempi 
du  triomphe  é|)hémère  de  leur  impunité;  les  mânes 
de  tant  de  victimes  seront  apaisés,  la  tyrannie  et  leÉ 
tyrans  disparaîtront  pour  toujours  du  Soi  de  ia  li« 
berté.  (Applaudissements.)  , 

La  Convention  nationale  tous  invite  à  assister  è 
sa  séance. 

'PouLTiBn,  au  nom  du  comité  d'inspection  :  Con- 
formément h  votre  décret  du  27  nivôse,  le  plan  indi- 
cateur des  changements  à  faire  dans  la  salle  de  vos 
séances  a  été  exposé  pendant  trois  jours  et  plus  au 
snlon  de  la  Liberté,  afin  que  chacun  pût  en  exami- 
ner les  détails  el  vous  faire  part  de  ses  observations. 
D'après  les  témoignages  que  nous  avons  recueilliSi 
il  parait  qu'il  a  obtenu  l'assentiment  général,  non  à 
cause  de  sa  perfection,  mais  parce  qu*il  est  le  plus 
expédient,  le  moins  dispendieux,  et  que  la  capacité 
dans  laquelle  nous  somtnes  circonscrits  ne  comporte 
point  de  meilleures  dispositions. 

S'il  n'avait  pas  été  instant  de  remédier  sans  délai 
à  la  gêne  que  vous  éprouvez  en  délibérant  dans  una 
salle  divisée  comme  en  deux  chambres,  où  ceux  qui 
siègent  d'un  côté  souvent  ne  peuvent  entendre  ca 
qui  se  dit  de  Tautre,  où  les  membres  d'une  même 
assemblée,  placés  çà  et  là  dans  une  longue  enceintCf 
à  diverses  distances,  n'offrent  pas  ce  bel  ensemble» 
cette  unité  précieuse,  si  nécessaire  lorsqu'il  s'agit 
de  fonder,  p.ir  des  lois  saçes,  la  liberté  d'une  grande 
nation  ;  si,  dis -je,  vous  n  aviez  demandé  un  prompt 
remède  à  ces  inconvénients  trop  longtemps  suppor- 
tés, nous  vous  eussions  oflért  un  plan  plus  régulier 
et  plus  digne  de  la  majesté  du  peuple  que  vous  re- 
présentez, mais  son  exécution  ei^t  demandé  un  ter- 
me trop  long ,  un  déplacement  iiupolitique»  cl  une 
jouissance  extrêmement  éloignée. 


»56 


Lorsqu'une  paix  glorieuse ,  le  signal  du  bonheur 
public,  aura  couronné  vos  pénibles  travaux,  le^  arts, 
anéantis  par  la  terreur,  s'éveilleront  à  votre  voix 
protectrice,  et  suspendront  à  Tolivier  pacificateur 
des  plans  mûrement  médités,  parmi  lesquels  vous 
ferez  un  choix;  et  alors  nous  verrons  s^cicver  un 
monument  aussi  solide  que  la  liberté  dont  il  sera  le 
temple,  et  durable  comme  les  lois  qui  y  seront  dis- 
cutées. En  attendant  celle  époqiie  heureuse,  nous 
vous  proposons  quelques  arrangements  domesti- 
ques ,  indispensables  pour  la  commodité  de  vos  dé- 
libérations. 

Le  projet  de  décret  présenté  par  Poultierest  adopté 
en  ces  termes  : 

t  La  Conven  Uon  décrète  : 

c  Art*  I*'.  1^  plan  des  chaDgements  à  faire  dans  la  saUe 
des  »éances  de  la  Convention,  présenté  par  le  comité  des 
inspecteurs  du  Palais-National  le  27  nivôse,  exposé  ensuite 
dans  le  salon  de  la  Liberté  pendant  trois  jours,  sera  exécuté 
sans  délai. 

«  Il  Les  inspecteurs  du  Palais-National  sont  char(;és  de 
Texécution,  et  soot  autorisés  à  employer  tous  les  moyens  de 
la  iiàter. 

c  UI.  Pendant  le  temps  des  séances  les  travaux  seront 
suspendus.  • 

Rapport  $ur  la  sUuaiion  dei  arméei. 

Dubois  Cbancé  ,  au  nom  des  comités  militaire  et 
de  salut  public  :  Citoyens,  vous  avez  entretenu,  la 
campagne  dernière,  près  de  onze  cent  mille  hommes 
sous  les  armes. 

A  Texceplion  de  quelques  puissances  qui  sont 
restées  neutres,  on  a  vu  la  France  d*un  côté,  et  l'Eu- 
rope entière  de  l'autre ,  et  cependant  les  armées  de 
la  république  ont  été  partout  victorieuses! 

Des*  succès  décisifs  sans  doute  et  plus  glorieux  en- 
core vont  assurer  la  liberté  et  la  tranquillilé  du 
peuple  français  dans  la  campagne  prochaine. 

L  an  dernier,  quelques  balaillons  épars,  formés  à 
la  hâte  aux  Pyrénées,  opposaient  une  faible  résis- 
tance aux  Espagnols  qui  cependant  n'avaient  pris 
Collioure  une  par  trahison  ;  aujourd'hui ,  sur  toute 
la  chaîne  de  ces  montagnes,  deux  armées  formida- 
bles, après  avoir  battu  vingt  fois  les  Espagnols,  leur 
avoir  pris  tous  leurs  approvisionnements,  leurs  teti- 
tes  et  leurs  canons»  commandent  à  la  Biscaye  et  à  la 
Catalogne. 

Vainqueurs  à  la  fois  des  Anglais  dans  Toulon,  des 
rebelles  à  Lyon  et  des  Piémontais  aux  frontières, 
Tarmée  d'Italie  et  celle  des  Alpes  menacent  égale- 
ment Turin.  Au  nord  il  ne  s'agit  plus  de  reprendre 
Yalenciennes  et  Condé,  de  former  un  camp  inter- 
médiaire entre  ces  frontières  envahies  et  Paris  ;  les 
Pays-Bas ,  la  Hollande  sont  à  nous,  et  le  cours  du 
Rhin  nous  sert  de  barrière. 

A  l'ouest,  l'espérance  de  la  fraternité  renaît; quel- 
ques hordes  deorigands  soudoyés  par  l'Angleterre 
résistent  encore  ;  mais  vos  décrets  bienfaisants,  qui 
rappellent  les  hommes  égarés  au  sein  de  la  grande 
famille,  vont  bientôt  laisser  à  trois  armées  que  vous 
entretenez  sur  ces  côtes  la  faculté  de  se  retourner 
avec  fierté  contre  cette  Albion ,  dont  le  gouverne- 
ment mérite  bien  d'être  puni  de  tous  les  maux  que 
son  atroce  politique  a' versés  sur  les  quatre  parties 
du  monde.  Enfin ,  pour  n'être  pas  taxé  d'exagération 
dans  ce  rapide  exposé ,  je  répéterai  dans  le  sénat 
français  ce  qu*un  lord  disait,  il  y  a  peu  de  jours,  au 
parlement  d  Angleterre  :  -  Aux  Alpes  du  Sàint-Ber- 
nard,  au  col  de  tende,  aux  Pyrénées,  les  Piémontais 
forcés  dans  tons  leurs  retranchements,  deux  armées 
espagnoles  anéanties;  au  nord,  vingt-trois  sièges, 
six  batailles  rangées  gagnées  comoletement;  &ia 


mille  huit  cent  trois  pièces  de  canon  enlevées  à  Ten- 
nemi  ;  soixante  mille  prisonniers,  plus  de  deux  cents 
villes  soumises,  tel  est  le  fruit  de  cette  immortelle 
campagne.  • 

Telle  est  la  situation  réelle  dans  laquelle  se  trouve 
aujourd'hui  la  république  française,  situation  qui 
lui  permet  d'enti  evoir  raiirore  'd'un  jour  calme  cl 
serein  avec  autant  de  délices  que  les  républicains 
ont  mis  d*intrépidité  à  braver  les  orages  ue  la  révo- 
lution. 

Mais  l'objet  de  ce  rapport  étant  spécialement  de 
fixer  votre  attention  sur  le  matériel  des  armées,  je 
me  bornerai  en  ce  moment  à  vous  en  présenter  le 
tableau. 

.  La  république  entretient,  indépendamment  d'une 
marine  nombreuse  et  qui  s'accroît  chaque  jour,  plus 
de  douze  cents  bataillons,  cinq  cents  escadrons  et 
soixante  mille  hommes  d'artillerie. 

Jamais  l'Europe  n'a  vu  un  si  étonnant  spectacle, 
et  la  postérité  ne  le  croira  pas  sans  peine  ;  cependant 
le  ministère  anglais  feint  de  nous  croire  épuisés, 
nous  qui,  après  avoir  vaincu  tous  les  obstacles, 
avons  sous  la  main  les  trésorsde  l'Espagne, de  l'Italie, 
et  les  immenses  ressources  de  la  Hollande.  Epuisés! 
nous  qui  pouvons  entrer  au  printemps  en  Allema* 
gne  et  aller  chercher  à  Londres  même  raison  de  tant 
ainjures. 

Ce  ministère  ose  accuser  le  peuple  français  d'im- 
moralité, lui  qui  accueille  nos  émigrés  et  partage 
tous  leurs  crimes,  lui  qui  sème  l'or  et  la  corruption 
parmi  nous,  lui  qui  flatte  et  trahit  ses  alliés  pour 
s'emparer  de  leurs  dépouilles. 

N'en  doutez  pas,  citoyens,  si,  au  milieu  de  tant  de 
succès,  si  avec  des  moyens  aussi  imposants  que  ceux 
que  vous  avez  développés ,  les  ennemis  du  peuple 
français  n*ont  pns  tous  demandé  la  paix,  c*est  qu'ils 
comptent  moins  sur  leurs  armées  que  sur  leurs 
agents  secrets;  c'est  qu'ils  espèrent  toujours  nous 
diviser  pour  nous  entre-déchirer;  et  voilà  la  moralité 
des  rois! 

Ah  !  sans  doute ,  la  malveillance  bourdonne  en- 
core autour  de  celte  enceinte  ;  Tà-plomb  que  vous 
avez  pris  effraie  le  crime  ;  on  n'ose  pas  révoquer  en 
doute  les  succès  des  armées,  mais  on  prolonge  le^ 
inquiétudes  du  peuple  sur  votre  union ,  sur  vos 
moyens,  et  jusque  sur  vos  intentions. 

C'est  donc  ici  qu*est  le  foyer  de  la  guerre  la  plus 
dangereuse  ;  mais  votre  sagesse  saura  l'éteindre. 
Quant  à  nos  armées,  vos  deux  comités  de  salut  pu- 
blic et  militaire  réunis  ne  vous  dissimuleront  pas 
qu'il  y  existe  plusieurs  abus  qu'il  est  pressant  de 
réformer  avant  de  commencer  une  nouvelle  cam- 
pagne. 

La  malveillance  de  beaucoup  d'anciens  militaires 
qui  ont  trahi  la  république,  l'accroissement  rapide 
qu'il  a  fallu  donner  à  nos  moyens  de  défense  ont  en- 
traîné dans  un  système  d'arbitraire,  pour  la  distri- 
bution des  emplois,  qu'il  est  temps  de  modifier. 

Vous  avez  voulu  que  le  mérite  fût  i^écompensé,  et 
là  il  n'y  a  point  d'arbitraire  ;  c'est  un  principe  de 
justice  rigoureuse  ;  mais  Tintrigue  s'est  quelquefois 
emparée  du  domaine  de  la  vertu;  il  est  résulté  de 
la  nécessité  de  pourvoir  à  la  fois  à  beaucoup  d'em- 
plois, que  l'on  s'est  rendu  trop  facile  en  faveur  de 
plusieurs  de  ceux  qui  les  sollicitaient,  et  qui,  quel- 
que zèle  qu'ils  apportent  à  leur  métier,  n'ont  ni  Tex- 
périence ,  ni  les  talents  qui  garantissent  les  succès. 

D'ailleurs  on  n'a  pas  toujours  consulté  la  loi  ;  on 
a  de  beaucoup  excédé  le  nombre  d'individus  qu'elle 
a  fixé  pour  chaque  grade  ;  on  a  vu  à  la  fois  le  comité 
de  salut  public,  les  représentants  du  peuple  aux  ar- 
mées, le  ministre  et  les  généraux  nommer  chacun 
de  leur  côté  à  un  même  emploi  *  auiourd'hui  tous 


S67 


les  hommes  remplaces,  soit  pour  cause  d*absence 
l(^gitime,  soit  pour  cause  de  destitution  sans  motif, 
viennent  réclamer  leur  réinlégratiou;de  sorte  qu'en 
accordant  à  chacun  ce  qu'il  pourrait  avoir  droit  de 
demander,  vous  auriez  en  officiers  de  tous  grades, 
depuis  les  généraux  jusqu'au  rang  de  capitaine,  de 
quoi  tripler  le  nombre  des  officiers  déterminés  par 
la  loi.  Cette  espèce  d'anarchie  ne  peut  durer  plus 
longtemps  sans  préjudicier  à  la  fois  aux  intérêts  de 
ceux  qui  ont  droit  a  des  avancements  à  raison  de 
leurs  services  réels,  et  aux  intérêts  de  la  république, 
qui  solde  à  cher  prix  tant  d'hommes  inutiles. 

Pour  sortir  de  ce  labyrinthe,  vos  comités  ont 
pensé  qu'il  fallait  rappeler  toutes  les  armées  à  l'or- 
ganisation simple  et  uniforme  de  la  loi  du  21  fé- 
vrier 1793;  que  c'était  conformément  à  cette  loi 
que  votre  comité  de  salut  public  devait  vous  pré- 
senter incessamment  le  tableau  nominatif  de  tous 
les  officiers  qui,  à  l'ouverture  du  printemps,  com- 
poseront les  états- majors,  et  que  tous  ceux  qui  ne 
recevraient  pas  votre  approbation  seraient  tenus  de 
reprendre  celui  des  grades  inférieurs  dans  lequel  ils 
auraient  été  au  moins  six  mois  en  exercice.  Je  ne 
parle  pas  des  exceptions  à  faire  en  faveur  de  ceux 
qui  auront  à  se  prévaloir  de  quelque  action  bril- 
lante à  la  guerre  ;  vous  ne  doutez  pas  que  dans  le 
tableau  qui  vous  sera  présenté  ceux-ci  auront  la  pré- 
férence. Mais,  eu  attendant  ce  tableau  qui  exige  des 
recherches  et  des  méditations  froides  et  impartiales, 
vos  comités  vous  proposent  de  décréter  dès  aujour- 
d'hui que  ni  les  généraux,  ni  les  représentants  du 
peuple  aux  armées  ne  pourront  nommer  à  aucun 
emploi  vacant,  mai»  seulement  proposer  au  comité 
de  salut  public  les  individus  qui  leur  paraîtront 
mériter  d'être  compris  dans  les  nominations  que  la 
Convention  nationale  s'est  réservées. 

Une  seule  réflexion  suffira  pour  garantir  Tëquité 
de  cette  mesure  ;  tous  les  emplois  quelconques  ap- 
partiennent, toit  à  l'ancienneté  de  service,  soit  au 
choix  des  volontaires,  soit  au  choix  de  la  Conven- 
tion :  donc  toute  nomination  étrangère  à  ces  trois 
moyens  indiqués  par  la  loi,  même  provisoire,  est 
illégale,  contraire  aux  intérêts  de  l'armée,  et  rui- 
neuse pour  la  république. 

Mul  doute  que,  si  un  représentant  du  peuple  croit 
devoir  suspendre  un  officier  général  de  ses  fonctions, 
il  le  fera  suppléer  par  un  autre  du  même  grade,  ou 
par  un  officier  d'un  grade  immédiatement  inférieur 
qui  aura  mérité  sa  confiance  ;  mais  ce  n'est  pas  là 
une  nomination,  ce  n'est  qu'une  opération  néces- 
saire pour  ne  pas  interrompre  le  service,  semblable 
à  ce  qui  se  passe  tous  les  jours  lorsqu'un  lieutenant 
supplée  à  l'absence  du  capitaine  de  sa  compagnie. 

L'ordre  et  l'harmonie,  qui  coordonnent  tout  sans 
froisser  les  principes  ni  les  intérêts  de  personne,  ne 
convenaient  pas  au  système  d'oppression  qui  avait 
besoin  de  placer  partout  des  satellites  dévoués  et 
prêts  à  tout  entreprendre  pour  obéir  à  leur  bienfai- 
teur :  tel  était  le  système  du  gouvernement  exécra- 
ble que  vous  avez  anéanti  le  9  thermidor.  Aussi 
avait-on  fait  rendre  un  décret  qui  autorisait  le  gou- 
vernement à  choisir  des  officiers  supérieurs  dans 
tous  les  grades  sans  distinction.  11  en  est  résulté  du 
bien  et  du  mal.  Ce  système  a  purgé  la  république  de 
toute  la  horde  aristocratique  ;  et  si  vous  avez  eu  à 

fmnir  des  intrigants  tels  que  les  Ronsin,  les  Hanriot, 
es  Boulanger,  vous  avez  aussi  beaucoup  de  géné- 
raux qui  ont  constamment  mené  nos  frères  d'armes 
à  la  victoire,  en  remplacement  des  Custine,  des  Bi- 
ron,  des  Montesçiuiou,  qui  trahissaient  la  patrie. 
Mais,  aujourd'hui  que  les  mêmes  motifs  ne  subsis- 
tent plus,  vous  trouverez  sans  doute  qu'il  serait  in- 
juste d'anéantir  l'émulation  des  volontaires  en  oer- 


mettant  qu*nn  individu  se  dispensât  de  passer  par 
tous  les  grades  intermédiaires,  à  moins  ue  certains 
cas  particuliers  que  la  Convention  jugera  dignes 
d'une  haute  récompense,  et  qui  seront  applaudis  de 
toute  l'armée. 

Pour  mieux  faire  sentir  cette  vérité,  je  répéterai 
encore  que,  puisque  la  loi  a  fixé  trois  modes  (l'avan- 
cement, le  premier  par  ancienneté  de  service,  le  se- 
cond au  choix  du  corps,  de  grade  en  grade,  et  sans 
fiouvoir  les  intervertir,  et  le  troisième  au  choix  de 
a  Convention,  il  serait  inconvenant  que  le  comité 
chargé  de  vous  présenter  les^nominationsque,  pour 
l'intérêt  même  de  l'armée ,  vous  avez  cru  devoir 
vous  réserver,  s'écartât  des  principes  auxquels  sont 
rigoureusement  astreintes  toutes  les  autres  nomina- 
tions; d'ailleurs,  choisir  un  lieutenant  pour  en  faire 
un  chef  de  brigade,  c'est  supposer  que,  dans  toutes 
les  classes  intermédiaires  entre  ces  deux  grades,  il 
ne  se  trouve  pas  un  individu  digne  de  cet  emploi  ; 
c'est  détruire  les  bases  de  l'égalité,  c'est  anéantir 
l'émulation  ;  c'était  enfin  replacer  les  fondements  de 
l'ancien  régime,  oh  l'on  voyait  quelques  êtres  pri- 
vilégiés, méprisant  les  gracies  subalternes,  devenir 
officiers  généraux  sans  avoir  fait  autre  chose  pour 
l'obtenir  qu'une  cour  servile  au  tyran. 

Je  dois  encore  fixer  votre  attention  sur  deux  an- 
tres abus.  Au  commencement  de  la  révolution,  l'as- 
semblée des  représentants  du  peuple  a  cru  devoir 
réparer  les  torts  de  l'aristocratie  envers  les  anciens 
militaires,  en  décrétant  que  les  emplois  appartenant 
à  l'ancienneté  seraient  donnés  a  l'ancienneté  de 
service  et  non  de  grade  ;  il  en  est  résulté  que  beau- 
coup de  militaires  ont  passé  du  grade  de  caporal  à  la 
tête  des  corps  avec  une  rapidité  qui  ne  leur  a  pas 
permis  d'acquérir  les  connaissances  nécessaires  pour 
des  fonctions  aussi  importantes; d'ailleurs  il  n'existe 
plus  maintenant  de  ces  anciens  militaires  dans  les 
grades  inférieurs  ;  il  n'existe  plus  de  caste  privilé- 

fiée.  Donc  cette  loi  est  maintenant  sans  obiet  utile  ; 
onc  il  est  temps  de  changer  un  ordre  de  choses  qui 
ne  peut  plus  être  que  préjudiciable  aux  succès  des 
armées,  en  remettant  à  l'ancienneté  de  grade  ce  qui 
était  attribué  à  l'ancienneté  de  service. 

Enfin  le  service  de  l'état-major  étant  le  plus  doux» 
le  plus  agréable,  celui  qui,  rapprochant  le  plus  un 
individu  des  généraux  et  des  représentants  du  peu- 
ple, le  met  à  portée  d'obtenir  avec  plus  de  facilité  un 
emploi  supérieur,  c'est  à  ()ui,  dans  les  armées ,  sera 
adjointe  1  état-major  ou  aide  de  camp,  pour  devenir 
promptement  adjudant  général ,  et  passer  ensuite 
au  grade  de  général  de  origade  ou  même  de  divi- 
sion ;  de  sorte  qu'il  y  a  dans  les  armées  tel  officier 
chareé  de  commander  dix  ou  douze  mille  hommes, 
et  même  plus,  c^ui  n'a  jamais  fait  manœuvrer  un  pe- 
loton d'infanterie  ou  une  compagnie  de  cavalerie. 

Vos  états- majors  sont  même  en  partie  composés 
de  jeunes  gens  de  la  première  réquisition,  qui,  au 
lieu  d'obéir  à  la  loi  générale  qui  assignait  leur  place 
parmi  les  volontaires ,  ont  obtenu  d'emblée  la  fa- 
veur d'être  adjoints,  et  ont  profité  d'un  arrêté  de  l'an- 
cien comité  de  salut  public,qui  accordait  200  liv.  par 
mois  de  traitement  à  tous  les  adjoints  qui  n'appar- 
tiendraient à  aucun  corps,  et  ce  en  violation  formelle 
de  la  loi  du  21  février  1793. 

Vos  comités  ont  considéré  cette  violation  de  la  loi 
comme  une  injustice  faite  à  toute  l'armée  ;  ils  vous 
proposent  de  couper  la  racine  d'un  abus  qui  est  la 
source  de  mille  autres  plus  importants,  en  ren- 
voyant comme  volontaires  dans  les  bataillons  tous 
les  adjoints  et  aides  de  camp  qui  n'appartiennent  à 
aucun  corps.  Quant  à  ceux  qui,  conformément  à  la 
loi,  ont  été  choisis  dans  les  différents  grades  en  ac- 
tivité daûs  l'armée ,  oomme  souvent  ces  officiers 


168 


n*ont  point  exercé,  les  fonctions  relatives  i  leon 

f;rade9,  il  est  indispensable,  lortau^ils  seront  dans 
c  cas  de  monter  d*uu  degré,  de  les  taire  rentrer  dans 
la  ligne,  afin  que,  joignant  la  pratique  à  la  théorie, 
ils  s'habituent  à  manier  des  hommes,  ils  sachent 
faire  manœuvrer  un  bataillon  avant  de  commander. 

Cest  ainsi  que,  faisant  circuler  les  individus,  vous 
vous  assurerez  de  leur  instruction,  vous  rendrez  à 
rélat  militaire  tous  ses  droits,  vous  ranimerez  Té- 
mutation  dans  toute  Tarmée,  en  opérant  laruinede 
cette  espèce  de  privilège  par  lequel,  de  même  que 
sous  l'ancien  régime,  nos  états-majors  s^ëtaient  at- 
tribué presque  exclusivement  les  emplois  supé- 
rieurs. 

Je  vais  maintenant  vous  parler  de  la  police,  de 
rinslruciion  et  de  l'administration.  Toutes  ces  par- 
ties sont  négligée  s  pour  trois  causes. 

La  première  est  le  mouvement  perpétuel  des  ar- 
mées; la  seconde,  le  défaut  de  connaissances  des 
personnes  auxquelles  ces  détails  sont  confiés;  la 
troisième  entin,  la  multiplicité  des  corps  indépen- 
dants l*un  de  Taulre,  et  dont  forganisation  se  res- 
sent encore  de  la  rapidité  avec  laquelle  il  a  fallu  les 
mettre  sur  pied.  Vous  avez  des  représentants  du 
peuple  aux  armées;  mais  ils  sont  surchargés  de  trop 
de  travaux  pour  descendre  dans  tous  les  rlelaiis  qu'il 
serait  nécessaire  d'approfondir  et  s'assurer  que  cha- 
cun dans  sa  partie  remplit  exactement  les  fonctions 
qui  lui  sont  confiées. 

Il  se  fait  aux  armées,  il  ne  faut  pas  se  le  dissimu- 
ler, d'énormes  dilapidations.  Lorsqu'on  a  ronlu  opé- 
rer l'embrigadement,  on  n'a  trouvé  presque  aucun 
compte  de  bataillon  en  règle,  point  de  registre,  point 
d*état  de  revue ,  d'énormes  receltes  et  d'énormes 
déiicits.  Voilà  ce  que  Ton  a  vu,  sans  pouvoir  attein- 
dre les  coupables,  à  cause  de  Texlréme  confusion 
ou  plutôt  de  l'absence  absolue  de  toute  comptabi- 
lité :  en  voici  les  motifs. 

10  La  loi  du  29  octobre  171H)  (vienx  style),  sur 
Tavancement  aux  différents  grades  militaires,  por- 
tait, article  II  : 

•  L.e8  quartiers-mattres  suivront  leur  avancement 
dans  les  différents  grades,  pour  le  grade  seulement, 
ne  pouvant  jamais  être  titulaires,  ni  avoir  de  com- 
mandement, mais  jouissant  en  gratification  et  par 
supplément  d'appointcment  de  ceux  attribués  aux 
différents  grades  où  les  portera  leur  ancienneté.  • 

Cette  disposition  de  la  loi  du  29  octobre  1790  avait 

Eour  objet  la  stabilité  des  quartiers-maîtres  et  ta 
onne  administration  des  corps  ;  cependant  les  quar- 
tiers-mattres réclamèrent  contre  la  privation  de  com- 
mandement qui  tfuir  était  imposée,  et  l'Assemblée 
législative,  te  3  août  1792  (vieux  style),  rendit  un 
déret  qui  s*exprime  ainsi  : 

•  Les  quartiers-maîtres,  trésoriers,  de  toutes  les 
armes  qui  composent  l'armée,  pourront  prendre  à 
leur  tour,  dans  leurs  corps  respectifs,  les  Compa- 
gnies qui  viendront  à  vaquer.  > 

Le  plus  grand  désordre  est  résulté  de  cette  me- 
sure; presque  tous  les  quartiers-maîtres  de  l'armée 
lurent  renouvelés  depuis  cette  époque,  même  plu- 
sieurs lois  dans  beaucoup  de  corps.  Dans  une  très- 
grande  partir  il  n'existe  plus  de  tenue  de  contrôle, 
par  conséquent  point  de  moyen  pour  établir  les  re- 
vues, et,  pour  tout  dire  enfin ,  plus  de  comptabilité. 

20  Vous  venez  d'organiser  les  commissaires  des 
guerres  ;  et,  en  croyant  les  augmenter,  vous  les  avez 
réduits  à  six  cenU;  je  dis  réduits,  car  l'état  effectif 
de  ceux  qui  existent  aux  armées  excède  onze  cents, 
non  compris  les  adioints;  et,  malgré  cette  quantité 
d'administrateurs,  il  y  a  tel  bataillon  qui  n'a  pas  passé 
deux  revues  depuis  st  ciëatioo. 


On  a  aeensé  eetix  qui  étaient  en  place  sons  Tan- 
clen  régime  de  malveillance,  et  ceux  d'à  présent  sont 
taxés  (i  ignorance.  Ces  inculpations  ne  sont  pas  sans 
fondement;  mais  la  Convention  nationale  est  trop 
juste  pour  rejeter  sur  le  corps  entier  les  vices  de 
quelques  individus  ;  ces  administrateurs  sont  néces- 
saires; il  y  existe  des  hommes  estimables;  et  votre 
comité  s'occupera,  dans  l'épuration  qu'il  est  chargé 
d'en  faire,  de  les  mettre  h  même  de  conserver  l'estime 
et  la  conliance  sans  lesquelles  ils  ne  peuvent  opérer 
aucun  bien. 

Slais,  quelque  probe,  quelque  intelligent  que  soit 
un  commissaire  des  guerres,  ses  opérations  sont 
trop  variées,  trop  multipliées,  pour  qu'il  puisse 
exactement  surveiller  une  foule  de  détails  ruineux 
pour  la  république  :  une  seule  réOexiou  va  vous 
en  convaincre. 

Sous  l'ancien  ro^i^e,  en  pleine  paix,  on  entrete- 
nait quatre  cent  cinquante  mille  hommes  de  trou- 
pes, et  il  y  avait  deux  cent  vingt  commissaires  des 
guerres  chargés  de  surveiller  une  administration  qui 
d'ailleurs  était  parfaitement  organisée.  Donc,  en  ad- 
I  mettant  toutes  ch(«ses  égales,  iT faudrait  aujourd'hui 
plus  de  douze  cents  commissaires  des  guerres  pour 
atteindre  au  ro^me  but. 

Mais  ce  but  ne  serait  pas  encore  rempli,  car  oa 
ne  peut  établir  de  parité  entre  l'administration 
de  douze  cents  nouveaux  corps  et  cette  organisa» 
tion  si  claire,  si  scrupuleuse,  qu'une  longue  expé- 
rience avait  fondée  dans  les  anciens  régiments. 

Je  l'ai  dit  à  vos  comités  :  le  seul  moyen  d'extirper 
jusqu'à  la  racine  des  abus,  d'eunnécher  que  nos  ar^^ 
mées  n'absorbent  un  tiers  de  subsistances  de  trop, 
et  de  procurer  en^méme  temps  à  nos  volontaires  tous 
leurs  besoins,  c'est  de  suivre  pied  à  pied  les  admi- 
nistrations des  corps  pour  y  rétablir,  y  maintenir  un 
ordre  clair  et  précis  de  comptabilité; c'est  d'avoir 
un  surveillant  stationné  près  de  chaque  demi-brl» 

§adc,  de  manière  qu'il  ne  s'y  fasse  aucune  opération 
e  comptabilité  que  sous  sa  signature  et  sa  respon« 
sabilité.  J'ai  proposé  que  ces  surveillants  ne  fussent 
considérés  que  comme  adjoints  aux  commissaires 
des  guerres,  alin  de  les  soumettre  à  une  exacte  sub* 
ordination  envers  ces  commissaires;  d'ailleurs, 
l'espoir  de  devenir  commissaire  des  guerres  à  lene 
tour  aurait  formé  une  excellente  école  de  ces  ad- 
joints, et  leur  aurait  donné  de  grands  motifs  d'ému* 
lation,  en  même  temps  que  c'eût  été  une  économie 
assez  importante  pour  la  république. 

Votre  comité  de  salut  public  avait  adopté  ces  prin- 
cipes; mais  votre  comité  militaire  a  cru  que  cette 
organisation  préjudicierait  à  la  loi  nouvellement 
rendue  sur  les  commissaires  des  guerres,  et  il  s>st 
réservé  de  vous  proposer  une  addition  a  cette  loi, 
s'il  le  jugeait  nécessaire.  Je  souhaite  me  tromper, 
mais  je  crains  qu'une  funeste  expérience  ne  justifie 
les  motifs  qui  m'avaient  déterminé.  Je  crains  que  la 
nécessité  des  circonstances  n'oblige  pendant  la  cam- 
pagne à  une  création  plus  considérable  que  celle  que 
j'avais  proposée  ,  sans  qu'il  en  résulte  aucune  amé- 
lioration sensible  dans  1  administration  des  armées. 

Qu  au  m*oins  le  passé  nous  garantisse  de  l'avenir. 
Je  vous  l'ai  dit,  il  y  a  deux  ans  :  si  vous  eussiez  fait 
embrigader  les  corps,  vous  auriez  épargné  â  la  ré- 
publique 200  millions  par  an;  et,  ce  qui  est  encore 
plus  essentiel  que  l'argent,  vous  auriez  maintenu  la 
moralité  dans  tous  les  individus  qui  composent  les 
troupes,  dont  la  masse,  toujours  bonne,  ne  peut  ja- 
mais être  que  victime  de  l'ignorance  ou  de  l'intrigue. 

Cumulons  tous  les  moyens  de  surveillance,  n'é- 
pargnons rien  sur  cet  ob^et  ;  c'est  là  où  nous  trouve- 
rons ia  véritable  économie. 


ut 


Voici  le  réf  uttat  des  opinions  de  vos  comités  k  ce 

sujet;  ils  eut  pense  qu'il  était  indispensable  : 

!•  D'ordonner  rembrigadenient  complet  des  ar- 
mées dans  le  plus  court  <klai,  en  faisant  disparaître 
de  la  loi  du  12  auAt  tout  ce  qui  peut  nuire  à  l'accë* 
Jération  de  ce  travail; 

20  De  ramener  les  quartiers-mattres  à  la  loi  du 
29  octobre  1790; 

3«  D'attacher,  après  Tembrigadement  fait,  un  ad- 

Îoiul  aux  commissaires  des  guerres  à  chaque  demi- 
)rignde ,  qui  serait  spécialement  et  uniquement 
chargé  de  surveiller  tous  les  détails  de  police  et 
d'administration  qui  concerneront  cette  demi-bri- 
gade, et  sous  les  urdres  du  commissaire  des  guer- 
res de  la  division.  Ces  adjoints  seraient  choisis  parmi 
les  commissaires  des  guerres  et  parmi  les  adjoints 
à  l'etat-m.ijor  qui  se  trouvent  en  supplément  au 
nombre  déterminé  par  la  loi,  avec  un  traitement  de 
9,600  liv.  par  an;  ils  auraient  changé  de  demi«bri« 
gade  toutes  les  fois  que  le  commissaire  ordonna- 
teur l'aurait  ordonné,  et  ils  auraient  des  droits  k 
devenir  eux-mêmes  commissaires  des  guerres,  à  rai- 
son de  leur  zèle  et  de  leur  intelligence,  après  deux 
ans  d'exercice  dans  cette  espèce  d'apprentissage; 
mais  votre  coniilé  militaire  s'est  réservé  de  vous 
proposer  à  ce  sujet  de  nouvelles  vues  ; 

4«  De  créer  des  inspecteurs  généraux  près  les  ar- 
mées pour  surveiller  Içs  dépAts  d'infanterie  et  de  ca- 
valerie et  les  garnisons  ;  vérifier  la  situation  des  ma- 
gasins, des  hôpitaux,  raction  des  charrois  et  trans- 
ports militaires,  et  remlre  compte,  chaque  décade, 
de  tous  ces  objets  au  comité  de  salut  public  ; 

5^  Charger,  soit  les  généraux  d'armée,  soit  ces 
mêmes  inspecteurs,  sur  leur  responsabilité,  de  pren- 
dre connaissance  exacte  de  rinstrnclion  et  de  la 
moralité  de  tous  les  odiciers  des  diflërents  corps,  en 
décrétant  que  tout  ofïicier  qui,  d'après  les  notes  qui 
auront  été  remises  au  comité  de  salut  public,  ne  sera 
pas  reconnu  assez  instruit  pour  la  place  qu*il  oc- 
cupe, sera  tenu  de  redescendre  au  grade  pour  le- 
quel il  aura  été  jugé  avoir  des  connaissances  suffi- 
santes. 

LMntention  de  la  Convention  doit  se  manifester 
ouverlemeiit  ;  elle  doit  déclarer  qu'elle  ne  veut  con- 
tier  le  sort  de  nos  braves  frères  d'armes  qu'à  des 
hommes  capables  de  les  commander,  d'utiliser  leur 
courage  sans  les  compromettre  ;  mais  en  même 
temps,  fixant  au  l^r  germmal  Tépoque  où  les  exa* 
nions  commenceront,  elle  doime  aux  olticiers  qui  en 
auraient  besoin  le  temps  de  s'instruire.  C'est  ainsi 
que  tous  les  principes  seront  maintenus,  tous  les 
interdis  ménagés. 

Ces  nuiyens  simples  fiorteront  la  lumière  dans  le 
liii'yrinlhe  des  dilapidalioiis;  et  votre  comité  de  sa- 
liil  public,  placé  au  centre  de  toutes  les  instructions 
nécessaires,  corrigera  facilement  les  abus  qui  dévo- 
rent les  fonds  de  la  république,  en  laissant  souvent 
manquer  nos  braves  volontaires  du  nécessaire. 

Voici  en  conséquence  le  projet  de  décret  : 

«  La  Convention  nationale,  considérant  la  néces- 
sité^ de  proliter  des  moments  qui  précèilenl  le  prin- 
temps pour  ramener  à  une  organisation  uniforme  les 
tr()Uj)es  de  la  république;  considérant  que  ce  prin- 
cipe est  le  seul  <jui  assure  des  moyens  puissants 
pour  maintenir  1  égalité  des  droits  entre  les  mili- 
taires,et  cette  noble  émulation  qui  concourt  si  con- 
stamment, et  avec  énergie,  aux  succès  des  armées  ; 
considérant  que  la  discipline,  l'inslruction,  l'esprit 
d'ordri»  et  d'économie  sont  les  éléments  qui  consti- 
tuent le  bien-être  du  soldat,  sa  sûreté,  ses  succès  ; 
qui  assurent  le  produit  des  victoires,  garantissent 
des  défaites,  et  peuvent  seuls  coosolideria  tranquil- 


lité et  la  gloire  de  la  république  française ,  dé- 
crète, etc.  • 

(Les  articles  de  ce  projet  de  décret  étant  suffisam- 
ment indiqués  et  développés  dans  le  rapport,  nous 
ne  les  donnerons  que  lorsqu'ils  seront  soumis  à  la 
délibération.) 

La  Convention  décrète  rimpression  et  Tajournc- 
ment  de  ce  projet. 

Lacombr-Saint-Michel  :  Nos  ennemis  comptent 
plus  sur  nos  divisions  que  sur  leurs  propres  forces. 
Investissez  votre  comité  de  salut  public  d'une  grande 
confiance,  sans  quoi  toutes  ses  opérations  seront  en- 
travées. On  n'est  jamais  plus  près  des  revers  qu'au 
moment  où  l'on  triomphe. 

S'il  arrivait  quelque  malheur  dans  nos  armées, 
on  crierait  à  la  trahison,  et  l'on  ferait  peut-être  des 
victimes  des  représentants  du  peuple  près  les  ar-> 
mées,  et  des  généraux  qui  ne  cessent  d'écrire  sur 
leurs  besoins,  tandis  que  ce  malheur  serait  le  fruit 
de  l'imprévoyance.  Les  représentants  auraient  à  se 
reprocher  de  vous  avoir  caché  des  vices  faciles  à 
réparer,  aue  vous  ignorez,  et  qu'il  faut  dire,  pour  / 
réveiller  f'attention  générale. 

Nous  ne  sommmes  plus  au  temps  oft  l'ignorance 
ambitieuse  vous  disait  qu'il  ne  fallait  à  des  troupes 
républicaines  ni  tactique,  ni  discipline  pour  vaincre. 
L'expérience  de  nos  dernières  campagnes  a  prouvé 
le  contraire.  Partout  les  citoyens  sont  également 
braves;  mais,  avec  des  moyens  éeaux,  des  chefîi 
habiles  commandent  la  victoire.  Elle  est  le  résultat 
du  courage,  de  l'ordre  ctâe  la  combinaison. 

On  a  fait  des  dépenses  énormes  et  inutiles  :  on  ar 
employé  plusieurs  millions  à  fabriquer  des  afïïlts^ 
cardier.  L'artillerie  des  bataillons  est  trop  nom- 
breuse. On  a  détruit  la  meilleure  mannfacture  d'ar- 
mes de  la  république,  celle  de  Maubeuge  :  on  a  fait 
venir,  h  grands  frais,  des  ouvriers  à  Paris,  et  1*00 
n'a  pas  rougi  de  vous  dire  qu'il  s*y  fabriqL'ait  mille 
fusils  par  jour.  On  a  supprimé  la  compagnie  d'ou- 
vriers militaires,  et  cela  sous  le  prétexte  de  les  rem- 
placer par  des  artistes;  on  n>n  a  pas  trouvé,  et  il  a 
fhlhi  les  conserver  malgré  le  décret. 

Un  .ministre  désorganisatenr  a  éloigné  de  leurs 
travaux  les  officiers  d'artillerie.  On  a  éloigné  des. 
places  ceux  qui  avaient  deji  connaissances  théori- 
ques; et  une  commission,  créée  d'abord  poin-  pro- 
curer des  fusils,  s'est  emparée  successivement  de 
tout  le  matériel  de  rartillerie,  sans  s'embarrasser 
si  elle  pouvait  remplacer  les  établissements  aux- 
quels elle  se  substituait. 

Lacombe-Saint-Michel  termine  en  demandant  : 

10  Qu'on  rétablisse  les  compagnies  d'ouvriers 
militaires  au  nombre  de  douze,  et  qu'on  les  réu- 
nisse au  corps  d'artillerie,  ainsi  que  l'artillerie  à 
cheval; 

2^  Que  le  nombre  des  inspecteurs  d'artillerie  soit, 
de  dix- huit,  porté  à  vingt,  savoir  :  huit  généraux  de 
division,  et  douze  de  brigade  ; 

^^  Que  la  totalité  de  rartillerie  soit  portée  à  qua- 
rante-deux mille  homuiej  ; 

40  Que  les  grades  et  professeurs  d'artillerie  re- 
çoivent une  augmentation  de  traitement ,  basée  sur 
la  loi  du  3  pluviôse; 

.    50  EnQn^  que  l'on  réduise  l'artillerie  des  batail- 
lons. 

Ce  projet  est  renvoyé  au  comité  de  SilQt  public, 
qui  fera  un  rapport  dans  la  décade. 

—  Sur  la  motion  de  Creuzé-Latouche,  la  Conven 
tion  décrète  qu'il  y  aura  à  l'Ecole  Normale  un  pro- 
fesseur d'économie  politique. 


S60 


Tallibn  :  Je  demande  qu'on  examine  s'il  est  utile 
qu'il  y  ait  deux  représentants  du  peuple  près  l'Ecole 
Normale,  et  si  le  comité  d'instruction  publique  ne 
devrait  pas  exercer  la  surveillance  qui  leur  est  at- 
tribuée. La  représentation  nationale  doit  faire  des 
lois,  et  c'est  aux  commissions  à  les  exécuter. 

Massieu  :  Je  déclare  que  les  représentants  nom- 
mes près  l'Ecole  Normale  sont  chargés  de  surveil- 
ler l'instruction,  afin  qu'il  ne  s'y  dise  cl  ne  s'y  passe 
rien  que  de  conforme  aux  principes  républicains,  el 
que  le  comité  ne  pourrait  exercer  celte  surveillance 
que  par  deux  commissaires  pris  dans  son  sein,  ce 
qui  reviendrait  au  même. 

RicBOUX  :  II  est  de  l'intérêt  de  la  représentation 
national»*  d'éloigner  le  moins  possible  de  son  sein 
les  men^bres  qui  la  composent.  Je  demande  que  Ga- 
rât, proicdseur  et  membre  de  la  commission  de  l'in- 
struction publique,  soit  chargé  de  cette  surveillance. 

La  Convention  passe  à  l'ordre  du  jour. 

DuHONT,  au  nom  du  comité  de  salut  public  :  Le 
.  comité  de  salut  public  avait  déjà  fait  un  rapport  et 
présenté  un  projet  de  loi  sur  la  nécessité  de  réorga- 
niser la  commission  de  santé.  Il  avait  senti  d'avance 
combien  ce  travail  était  intéressant  et  difficile,  sur- 
tout lorsqu'il  faut  choisir,  pour  former  une  pareille 
institution,  des  hommes  réunissant  à  l'art  de  guérir 
et  à  la  connaissance  du  service  des  hôpitaux  un  ci- 
visme reconnu. 

Il  avait  cru  d'abord  que  la  désignation  de  commis- 
sion de  sanléf  donnée  à  cette  institution,  devenait 
abusive  par  le  rapprochement  qu'elle  aurait,  quant 
à  son  administration,  avec  les  autres  commissions 
executives,  rapprochement  qui  établit  souvent  des 
rivalités,  et  finit  par  nuire  à  la  chose  publique  :  dans 
le  fait,  la  commission  de  santé  ne  devant  s'occuper 
aue  de  l'art  de  guérir,  il  serait  abusil  de  lui  donner 
a  autre  qualification  que  celle  de  conseil  de  santé, 
qui  répondra  au  bien  et  aux  avantages  que  la  Con- 
vention a  droit  d'attendre  d'un  pareil  établissement. 

Le  conseil  de  santé  avait  déjà  existé,  avec  cette 
dénomination,  sous  la  surveillance  du  conseil  exé- 
cutif. 

Avant  l'organisation  des  commissions  executives, 
le  décret  du  3  yentose  établit  la  commission  de 
santé,  et  elle  fut  par  suite  subordonnée  à  la  com- 
mission des  secours,  pour  les  objets  matériels  et 
pour  tout  ce  qui  n'a  point  de  rapport  avec  l'art  de 
guérir. 

Depuis  l'organisation  des  commissions  executives, 
la  commission  de  santé  s'est  quelquefois  trouvée  en- 
travée par  la  nécessité  des  intermédiaires,  qui  occa- 
sionnèrent la  confusion  du  service,  et  souvent  par 
l'idée  qu'elle  s'était  faite  de  son  institution ,  et  la 
crainte  d'outre-passer  le  point  de  contact  qui  existe 
entre  elle  et  les  autres  commissions. 

Chargée  du  personnel  des  officiers  de  santé,  dans 
tout  ce  qui  a  rapport  au  service  sur  terre  et  sur 
mer,  elle  a  dû  correspondre  avec  celui  de  salut  pu- 
blic, chargé  de  la  surveillance  executive  dans  toutes 
ces  parties;  mais  elle  n'a  pu  s'immiscer  dans  la  par- 
tie administrative,  dont  la  surveillance  est  attribuée 
aux  deux  commissions  avec  lesquelles  elle  corres- 
pond plus  particulièrement. 

L'intérêt  de  la  république,  et  non  pas  celui  des 
individus,  a  déterminé  le  comité  de  salut  public 
dans  le  choix  qu'il  a  fait. 

Tel  officier  de  santé  aurait  pu,  comme  ceux  qu'il 
propose,  remplir  avec  distinction  une  place  a  la 
commission  ;  mais  il  est  auprès  des  armées  des  pos- 
tes intéressants  qui  n'exigent  pas  inoins  de  connais- 
sances et  de  civisme,  et  où  la  vigueur  de  l'âge  est 


une  qualité  désirable  dans  ceox  qui  se  destinent  à 

l'art  de  guérir. 

Il  a  cru  qu'en  plaçant  les  hommes  là  où  ils  pou- 
vaient être  le  plus  utiles,  il  seconderait  les  inten- 
tions de  la  Convention. 

Le  comité,  en  se  renfermant  dans  ces  principes, 
a  cru  que  les  membres  qui  composent  dans  ce  mo- 
ment cette  commission,  et  qui  ne  feraient  point  par- 
tie du  conseil  de  santé,  pourraient  être  placés  avan- 
tageusement dans  la  partie  active  du  service,  et  que 
les  places  du  conseil  oe  santé,  ne  devant  être  confie^ 
qu'a  des  hommes  qui  joignent  à  des  talents  connus 
les  avantages  d'une  longue  expérience,  il  fallait  les 
choisir  proportionnellement  aux  fonctions  attribuées 
à  chacune  des  trois  parties  de  l'art  de  guérir,  et  le 
composer  d'officiers  de  santé  de  terre  et  de  mer. 

Le  comité  a  pensé  que  ce  conseil  devait  être  su- 
bordonné à  un  des  comités  de  gouvernement,  quant 
au  personnel  et  pour  tous  les  objets  urgents,  dès 
qu'il  ne  peut  être  à  la  fois  sous  la  surveillance  de  la 
commission  des  secours  et  de  celle  de  la  marine,  avec 
lesquelles  il  correspond  plus  particulièrement  pour 
cette  partie  du  service  ;  il  restera  néanmoins  sub- 
ordonné, quant  au  matériel  de  ses  bureaux,  à  la 
cominission  des  secours. 

Cette  organisation  ne  pouvant  plus  souffrir  de 
lenteur,  le  comité  a  dû  nécessairement  la  remettre 
sous  les  yeux  de  la  Convention,  pour  éviter  que  les 
travaux  ne  s'accumulassent  et  que  le  service  n'en 
souffrît. 

Voici  le  projet  de  décret  que  le  comité  de  salut 
public  m'a  chargé  de  vous  présenter. 

Le  rapportt*ur  lit  son  projet  de  décret ,  qui  est 
adopte  en  ces  termes  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  de  salut  public*  décrète  : 

■  Art.  I".  La  commissioD  de  santé  portera  à  l'avenir  le 
noiD  de  conseil  desanlé.  G;  coiiMil  cofnnmnlqaeni  direcle- 
meot  avec  le  comité  de  salul  public,  pour  loat  ce  qui  coo- 
ceme  la  oominalion  et  la  xurveillnnce  des  officiers  de  saoté. 

«  Il  correspondra  avec  la  commiKsIoo  des  teooun  poblin 
pour  tout  ce  qui  est  relatif  au  matériel  et  à  radmloistralion 
du  service  des  hôpitaux  des  armées  de  terre,  el  avec  la 
commission  de  la  marine  pour  ce  qui  concerne  radmlnlilFB- 
tlon  et  le  matériel  du  service  de  santé  de  Tannée  navale. 

«Il  exercera  d'ailleurs  les  fondions  qui  sont  «ttrlboées  à 
la  commission  de  santé  par  la  loi  du  6  ventôse. 

•  IL  Le  conseil  de  santé  sera  composé  de  qnliiie  aMB- 
bres:  cinq  médecins,  cinq  chirurgiens  et  cinq  pharmaciens, 
et  deux  secrétaires. 

«  IIL  Les  citoyens  Costes,  Lepr^,  Lorenti,  Sabalhier 
(de  Brest),  Beçu,  médecins: 

•  Hearteloop,  VUlars,  Groffier,  Sauoerotte,  Euffio,  cbl- 
mrgiens; 

•  Bayea,  Parmentier,  Hogo,  Pelletier,  Broocntari,  phar- 
maciens, 

I  Sont  nommés  membres  du  conseil  de  santé. 

«  Les  citoyens  Biron  et  Vergés  fils  sont  nommés  secré- 
taires. 

>  IV.  Le  comité  de  salut  public  pourvoira  au  replace- 
ment de  ceux  des  membres  de  la  commission  de  santé  qui 
ne  se  trouvent  point  faire  parUe  du  conseil  de  santé.  • 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 

N,  B.  Dans  la  séance  du  14,  la  Convention  a  dé- 
crété que  les  lois  el  arrêtés  de  ses  comités  et  des  re- 
présentants du  peuple,  contenant  des  dispositions 
pénales  contre  la  commune  de  Lyon,  demeureront 
sans  exécution. 

Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  sis  premiers 
mois;  il  sera  fnit  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs  d'insrrrp- 
lionsau  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères  csl  de 
huit  mois  vingt  et  un  jours  de  Tannée  1795  (vieux  stjrle). 


GAZEÏÏE  NATIONJILG  o.  LE  HONITEIIR  (ilVERSEL. 

N^  186.  Sextidi  16  Plutiosb,  tan  8«.  (Mercredi  4  Pévbibe  1795,  vieux  ityk.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Vienne,  le  19  Janvier,  —  Le gouferncmcnl éprouTC  Jcs 
inquiétudes  les  pini  fWes  par  rapport  au  mécontentement 
(les  peuples  et  aux  insurrections  qui  peuvent  se  déclarer. 
Il  a  commencé  par  feindre  ces  sollidiudes-poliliiiues,  il 
les  ressent  réellemenl  aujourd'hui,  il  se  plaint,  dans  une 
proclauiatio»  récente,  de  complots  et  de  macliinaiions  qui 
le  forceroul  ù  renoncer,  dil-il ,  à  ses  principes  de  itléioenoe. 

On  fditeniendre  que  la  dernière  conspiration  découverte 
eo  Hongrie  est  plus  éteudue  qu'un  ne  Tavaii  ciu  d'abord. 
Il  7  a  parmi  les  personne»  arrêtées  des  individus  de  toutes 
les  classes,  et  même  des  personnes  attachées  au  gouvcroe- 
ment. 

—  Il  tient  d'arriver  W  an  noiitcl  «mbassadeiir  portu- 
gais. On  y  attend  M.  de  Golowkin,  qui  doit  M  rendre  I 
Berlin,  en  qualité  d'amtesiodeur  de  ftassie. 

^  La  cour  reçoit  avec  le  plus  grand  déplaisir  les  n«ii» 
velles  des  cours  neutres  du  Nord.  £lle  ne  peut  plus  douter 
que  Tuniou  du  Dunemark  et  de  la  Suède  ne  soit  intime 
et  ne  demeure  •t.ible,  depuis  que  cet  cours,  dirigées  par 
un  même  esprit»  ont  entièremeut  déjoué  les  maucaufrita  de 
Jà  Russie. 

8U18SE. 

Date,  le  h  pluviôse,  —  Le  plénipotentiaire  français  a 
hier  échangé  ses  pouvoirs  contre  ceux  du  plénipotentiaire 
prussien ,  comte  de  Golii.  C*est  aujourd'hui  que  doivent 
s'ouvrir  les  conférences. 

Extrait  d'une leiire  de  Berne,  du  iOnivoie,  —  La  con« 
tradiciiOB  trop  fmppante  entre  le  foil  rappelé,  page  (Ml, 
dans  récrit  intitulé  :  Héponiê  dn  wiembreê  du  ameienêw 
mitée  d  e  salut  publie  et  de  iûrete  générale^  et  la  vérité  bis» 
torique,  détruit  nécessairemenl  TappUcatioD  erronét  qui 
y  est  tirée ,  en  ot  termea  s 

f  La  Suisse  fut  forcée  de  faire  périr  une  partie  de  n  po- 
pulation pour  être  libre  ;  Pos^uaire  est  on  monument  fu- 
nèbre qui  Atteste  à  tous  les  voyageurs  les  maui  de  rbumt- 
nité,' inséparable^  dfs  révolutions.  • 

Il  est  de  l'authenticité  la  plus  universelle  et  la  plus  recu- 
lée que  l'ossuaire  de  Moral  n'est  rempli  que  d'ossements 
de  l'armée  défaite  devant  celte  ville,  sous  Charles-le  Hardi, 
dont  l'entêtement  à  poursuivre  une  guerre  injuste  fit  dire 
k  Louis  XI  :  «  Je  suis  f^ché  que  mon  cousin  n'ait  pas  su  à 
quelle  nation  il  avait  d  faire  (1).  » 

Celte  eorrection,  fndiflérente  au  motif  principal  de  l'é- 
crit qui  7  donne  lieu ,  ne  Test  pas  autant  à  la  gloire  de  la 
révolution  suisse ,  qui ,  n'ayant  ieint  son  territoire  que  do 
sang  de  set  oppresseurs  eilérieurs,  ne  concourt  pas  au  but 
de  celle  citation. 

HOLLANDE. 

Extrait  des  tionretlei  de  La  Haye^dttiÔ  janvkr,'^ 
Ce  soir,  a  huit  benn^,  l'assemblée  deséfnt^  généraui  et  des 
élal^  de  Hollande  a  été  convoquée  extraordinairemenl  ;  le 
slatlioiider  y  n  paru ,  et  d'une  vois  tremblante,  qtii  annnn« 
çait  assez  le  désespoir  de  son  âme  bourrelée,  il  a  demandé 
la  démission  de  toutes  les  charges  de  ses  deoi  Gis ,  dont 
Tun  était  commandant  en  chef  de  l'armée  slathoudérienne, 
et  l'autre  général  de  cavalerie. 

Du  17.  —  Ce  matin,  &  neuf  heures,  nous  avons  vu  de 
nouveau  la  consternation  générale  des  adhérents  du  prince 
d'Orange.  Sa  femme,  reffroi  de  la  Hollande  et  le  bourreau 
femelle  des  patriotes,  s'est  eniuie  avec  beaucoup  d'igno- 
minie, emportant  avec  elle  l'exécration  générale. 

Elle  s'est  rendue  en  voiture  à  bcbvieningne  (village  de 
pécheurs,  à  une  lieue  de  La  Haye,  sur  les  bords  de  la  mer 

(1)  Cette  bataille  de  If  «rat  Ait  g»gi»ée  par  les  SoiMOS,  le 
M  juin  1 476,  sur  Charies-la-TéoMiro,  éaù  daBaurgogne. 

3«  SétHe,  —  Tome  X» 


du  Nord)  ;  elle  était  accompagnée  de  Pépouse  du  Ois  airté 
du  slalhouder,  uouveliemeut  accouchée,  emmeuant  ton 
enfant. 

Elles  ont  dû  s*embarquer  dans  nn  bâtiment  pécheur  di 
Schweningue,  dans  le  dessein  de  se  sauver  en  Angleterre* 
On  assure  qu'à  certaine  distance  on  vaisaean  de  guenfe  lia 
attend. 

A  une  heureaprèf*midi,  le  bùtiment  pécheur  était  d^à 
hors  de  vue. 


Du  même  jour. -^  Le  stafhonder  a  assisté,  ft  dit  I 
A  l'assemblée  des  éiala  générani,  et  à  onie  heures  à  celle 
de^  états  de  Hollande;  Il  a'cht  démis,  dans  ces  deua  aa> 
semblées,  de  toutes  ses cbirRCs  civileaet  militaires 

Après  quoi,  le  collège  des  conseillers  députés  de  la  Hol- 
lande a  repris  le  commandement  de  la  garnison  de  celte 
résidence,  et  a  donné  les  ordres  nécessaires  pour  la  coo« 
servation  du  bon  ordre. 

A  trois  heures  de  l'après-midi  le  slathonder  est  parti  potir 
Schweningue,  dans  le  même  dessein  de  se  sauver  en  An» 
gleterre. 

A  quatre  heures  et  demie ,  tous  les  collèges  de  gotffer* 
nement  se  sont  rassemblés  de  nouveau ,  jusqu'à  neufliea* 
res  du  soir. 

Il  vient  d*étre  arrêté  par  Ica  états  da  Hollande  d^éerira  à 
tous  les  conmandanu  militaires  de  m  pins  faire  ancuoe 
résistance  aux  troupes  françaises. 

Les  mêmes  états  viennent  de  nommer  deui  députés, 
BoeUelaer  de  Kyfhoek  et  Gaikoen ,  pour  aller  à  WoMier  . 
porter  aux  Français  la  capitulation  signéepour  la  provinca  ' 
de  Hollande;  elle  contient  la  promesse  de  sûreté  des  per» 
sonnes  et  des  propriétés,  ainsi  que  la  liberté  des  cultes. 

Du  19.  — *  Les  étais  de  Hollande  oui  été  assemblés  ce 
jour  ;  n)ais  Ton  s'attend  é  les  voir  rappelés  aujourd'hui 
par  les  villes  respectives  où  la  révololioo  t'est  opérée  aveo 
calme  et  majesté. 


CONVENTION  NATIONALE. 

PréêUêneedfiRowére, 
SÉARCB  DU   13  PLUVIOSB. 

Mercier  lit  uo  procès-rerbal  ;  tout  à  coap  cette 
lecture  est  interrompue  par  les  applaudissements  de 
quelques  tribunes ,  occasionnés  par  la  rentrée  de 
Duhrm  dans  le  sein  de  la  Coii?eation  ;la  lecture  du 
procès-verbal  continue. 

—  Gouly  demande  qne  la  Convention  entemle 
demain  le  rappiort  sur  les  colonies  orientales. 

Celle  proposition  est  déeri^tée. 

—  Lclouriieur  (de  la  Manche)  soumet  à  rassem- 
blée le  projet  de  décret  sur  rorganisalion  de  Tarme 
du  génie.  Le  projet  de  décret  porte  que  les  jeunes 
gens,  en  eiilraril  en  fonctions,  auront  le  gr.idc  de 
sous-lieutenant.  Chariier  veut  qn*ou  ne  leur  accorde 
de  grade  qu*après  un  service  actif.  Le  rapporteur 
répond  que  dans  ce  cas  le  sort  des  militaires  du  gé- 
nie sérail  pire  que  celui  des  autres  défenseiM*s  de  la 
patrie,  puisqu'après  cinq  ans  de  travaux  ils  n'au- 
raient aucun  grade. 

Duroy  est  de  ravis  de  Charlîer.  Il  dit  qtte  tes 
messieurs  du  génie...  (Des  murmures  interrompent 
l'orateur.  ) 

DOROT  :  Les  citoyens  du  génie  ne  doivent  pas  être 
gradés  avant  un  service,  et  néanmoins,  vu  leurs 
études  antérieures,  il  est  bon  de  leur  allouer  la  paye 
de  sous-lieuteiiant. 

L'assemblée ,  après  quelqnes  antres  débats ,  ren- 
voie de  nouveau  le  projet  de  décret  présenté  par 
Letouroeur  au  comité  militaire* 

49 


M2 


éf»  HfeU  rt  n^vblrt  affdfUiuttt  ans  lésines  rt 
€«6»l«  été  tùÊÔêmtdk;  il  est  »lrifi«^  zimt  qa'il 
I0ît; 

•  4rt.  ^.  T«of  t^qoflrtm  oo  le^ll^  mm  mt  les 
biem,  neoliW  oa  hnflieal>fes«  afpnUiani  par  b 
fo««  la  eiMiUioieMi  tUtnto «  par  cooCrat  ou  a  tout  au- 
tre titrr,  aos  i^poox  fonrivasla  c«  aus  entanU  des 
cofidaflif)^,  seront  leréf  sam  délai,  aOo  que  les  pro- 
pri^fres  en  jooHseot  librement,  a  noms  que  les- 
Ats  scellé*  ou  sé<|ue«tres  n*aieot  été  mis  pour  cause 
persofinelle  aoidils  propriétaires. 

•  IL  b'il  a  Hé  rendu  quelqu'un  desdils  biens  on 
efcfs  mentionnés  i  Tarticle  précédent ,  le  oris  en 
sera  rembouraé  ans  propriétaires  sur  le  pied  et  ans 
conditions  des  rentes. 

•  IIL  U%  linges,  bardes ,  bijoux  et  efets  apparte- 
nant ans  époux  surrirants  ou  enfants ,  ou  a  leur 
nm%e  journalier,  leur  feront  lanisés  ou  remis  sur  un 
simple  état,  et  ceux  d^absolue  nécessité ,  dépendant 
de  la  succession,  et  notamment  les  comestibles, 
pour  le  prix  en  être  imputé  sur  les  droiU  des  surri- 
? ants  ou  sur  les  secours  à  leur  accord'-r.  • 

l/ansemblée  renvoie  k  Tesamen  du  comité  une 
additi^m  â  cet  article ,  p^irtant  que  les  objets  à  la 
conrenance  des  surrirants  leur  seront  déli? rés  d*a- 
pr^n  IV^limation  qui  en  sera  laite. 

•  IV.  H*i\  wfi  troiire  des  logements  libres  dans  les- 
dites  successions,  il  en  sera  laissé  ou  accordé  jus- 
qu'à la  liquidation,  et  à  la  conrenance  desdits 
surrirants  ou  enfants,  arbitrés  par  les  corps  admi- 
nistrât! rs.« 

Duroy  demande  qu'on  fixe  le  délai  au  delà  duquel 
le  logement  leur  Mra  accordé. 

Un  autre  membre  demande  que  le  rapport  des 
comités  sur  la  liquidatian  loit  fait  dans  trois  jours, 
psrce  que  la  lenteur  qu'on  y  met  retient  une  infinité 
ne  familles  dan«  la  plus  srande  misère. 

MiiLin  (  de  Douai  )  :  Le  mode  de  liquidation  ne 
peut  pss  s  établir  «ur  un  simple  aperçu  ;  il  y  a  une 
infinité  de  dinicultés  à  raincre;  cependant  il  y  a  un 
trarail  des  deux  comités  tout  prêt  :  je  demande  qu*ils 
soient  entendus  primidi. 

BouaDON  (de  l'Oise)  :  La  liquidation  dont  il  s'agit 
en  ce  moment  n'est  susceptible  d'aucune  dirijcultt*, 
parce  qu'elle  est  réglée  par  les  contrats  de  mariage, 
statuts,  ou  par  la  coutume;  il  ne  s'agit  que  de  char- 

{[er  une  outoriti!  de  rendre  aux  époux  ou  aux  rn- 
ants  ce  qui  leur  appartient,  mais  il  est  instant  de 
chasser  une  foule  de  gardiens  de  scellés,  car  gar- 
diens ou  fripons,  c'est  la  même  chose.  (Vifs  applau- 
dissements.^ 

l/osscinblée  adopte  l'article ,  et  ordonne  quepri- 
niiili  il  sera  fait  un  rapport  pour  liquider  ce  qui  est 
dû  aux  veuves  et  enfants. 

•  V.  Ces  efl(*ts  dotoux,  ceux  dépendant  des  com- 
munautés de  biens  auxquelles  les  survivants  ou  en- 
fants n'auront  pas  renoncé ,  leur  seront  laissés  ou 
remis  en  iouissancc,  s'ils  les  réclament,  ù  la  charge 
d'en  rendre  compte  lors  des  partages  ou  liquida- 
tions, comme  aussi  d'entretenir  provisoirement  les 
boux  ^  s'il  y  en  a  ;  les  scellés  et  séquestres ,  s'il  en  a 
été  mis,  seront  levés.  • 

Meaulle  demande  que  les  objets  ne  soient  remis 
aux  survivants  que  sous  caution  ,  et  après  un  in- 
ventairo  pour  la  conservation  des  droits  des  créan- 
ciers. 

DiîNRM  :  J'appuie  de  tout  mon  cœur  l'amendement 
de  Méaullf  ;  et,  qiioiqu  ou  vous  ai  dit  qu'il  était  in- 
Mant  do  lever  les  scellés,  porce  que  tous  1rs  gar- 
diens étaient  des  fripons,  moi  qui  crois  qu*i|  y  a  des 
fetives  gens  partout,  même  parmi  lc8procureur8(on 


f  ritcBSCIo«na«tf«rsIoardoa).je< 

4  aatm  ne  soit  pas  pins  *^^lée  par  les  i 
condamnés  que  par  les  gardie»,  ce  qui  arrireraic  m 
roQs  nVsigiei  m  înTcntaîr?  ni  cantîoB  ;  ib  em  tici 

4  reroot  bien»  et  vous  ne  rîsqnez  rîen  de  b  décrète?. 

iUn  membre  obsenre  que  la  cautîoa  est  lutfc'^. 
parce  que  b  portkw  qui  appartient  aux  soiiiCjn^ 
répond  suflbamaent. 
TiCMOT  :  Des  efets  UM>bihers  peurent  Ite  c»- 
I  lerés  :  je  demande  que  Farticle  soît  renroyé  au  es- 
nrilé,  parce  qo'îl  conviendrait  peut-être  micnx.  pocr 
ériler  les  dilapidations  et  reiller  aux  intérêts  4e 
I  tous,  de  bire  procéder  le  plus  lot  possitdeà  b  rente 
du  flîobilier. 

Après  quelques  nouveaux  deliats,  Fartiele  V  est 
renroyé  au  comité  ;  l'assemblée  maintient  les  arti* 
des  «Kcrétés ,  et  renvoie  le  reste  du  projet  au  en- 
mité. 

— Giraud  reproduit  et  soumet  à  b  déISiératiou 
un  projet  de  décret  présenté  dans  une  des  précéden- 
tes séances  par  Scellier,  an  nom  du  comité  de  eooa- 
merce. 

Ce  décret  est  adopté  en  ces  termes  : 

•  La  Convention  nationale ,  après  a? oir  cnlcnda  son  cn- 
miie  de  commerce  et  approf  i«iofiiienMnts  sur  les  nojcas  i 
d'eiéculion  de  Taiiicle  V  de  b  loi  du  9  BivtMe  dernier,  re» 
latifaiii  marrhandites  qui  devront  joair  d*aBe  mocféra- 
tioo  de  droils  à  rentrée ,  et  à  celles  dont  U  sortie  conti- 
noera  protlioirement  d*ètre  déleodoe ,  déorHe  ee  qui 
sait: 

•  Art.  I«^  Les  marchandises  comprises  dans  Télal  an* 
nexé  ao  préieni  décret,  foot  le  n*  I*'  ne  paieront  provisoi* 
renient  les  droits  d*entrée  qne  sur  le  tant  fixé  par  ledit 
eut. 

•  II.  Le  droit  de  marque ,  perça  par  addition  ans  droits 
d*entrée  sur  les  flèrs  et  aciers  venant  de  Tétranser,  est  sup- 
primé. 

•  III.  La  perception  do  droit  additionel  de  SO  p.  100, 
llié  sur  les  productions  do  Levant  par  la  loi  da  S9  juillet 
I79i  ff  est  suspendue. 

-  IV.  Les  marcliandises  dont  rentrée  n*est  pas  défendue 
poorronl  être  importées  par  touS  les  bureaux  maritines , 
et  encore  par  tous  les  bureaux  de  terre  placés  sur  les  gran- 
des routes. 

«  Aucune  ne  sera  sujette  ft  la  représentation  do  certifi- 
cat prescrit  par  la  loi  du  1*'  mars  1793. 

•  V.  La  prohibition  a  la  sortie  est  restreinte  aux  objets 
compris  dans  Tétat  n*  II. 

•  Les  vins  exportés  par  les  frontières  de  terre  paieront 
5  sou«  par  pinte. 

•  VI.  Toutes  denrées  ou  marchandises  faisant  route 
dans  les  deux  lieues  frontières  de  l*étranger,  sans  acqait- 
à-caution,  seront  confisquées. 

•  Vil.  Les  acquits-ft-cautlon ,  poor  les  marchandises  en- 
têtées dans  retendue  desdiies  deux  lieues,  devront  être 
pris  arant  l'enlèvement»  et  au  plus  prochain  bunau  de 
douane»  ft  moins  quMI  ne  soit  âotgné  de  plus  de  demi- 
lieue  de  la  commune  où  se  fait  le  chargement,  auquel  cas 
racquit-ft-caution  sera  dèlifré  par  deux  des  officiers  mu- 
nicipaux de  ladite  commune ,  et  portera  Pobligation  de 
présenter  la  marchandise  à  un  bureau  de  douane,  s*il  s^cn 
trouve  sur  la  route  du  lieu  de  la  destination. 

f  Vlll.  Les  marcha iidiH*s enlevées  dans  rintéricur  de  la 
république,  à  la  destination  desdites  deux  lieues ,  devront 
être  présentées  au  premier  bureau  de  douane  de  leur 
route,  où  il  sera  délivré  an  acquit-à-cauiion.  Ces  acquit.*, 
qui  seront  sur  papier  timbré,  devront  être  revùtus  de  cer- 
tificats de  décharge  par  les  préposés  des  douanes,  dans  les 
lieux  où  il  y  aura  un  bureau ,  et,  dans  les  autres  commu- 
nes, par  les  oflkiers  municipaux. 

•  IX.  Les  peines  portées  par  les  lois  contre  ceux  qui  ex- 
portent des  marchandises  prohibées  continueront  d*avo'>r 
leur  exécution. 

«  X.  Il  n^est  rien  changé  par  le  présent  décret  à  la  loi  da 
4  nivôse,  relative  aux  grains,  ni  à  celle  du  S  avril  1795t 
oonoarnaut  les  matières  propres  à  la  fabrication  du  papier. 


3         S- 


3         ^ 


*  1: 

■c      a 


36S 


•  Xî.  Il  est  expressément  enjoint  nux  commandants  mi* 
lUaîret  d'employer  tous  les  moyens  qui  sont  rn  leur  pou- 
voir pour  assurer  Texécution  du  piéicnl  décrrl,  soit  en 
plaçant  dans  les  postes  qui  leur  seront  indiqués  par  les 
corps  administratifs  le  nombre  d'hommes  nécessaire  à  em- 
pêcher les  exportations  défendues,  soit  en  faisant  prêter 
uiaiu-furte  aux  préposés  des  douanes,  lorsqu'ils  eu  seront 
par  eux  légalement  requis,  et  au  moment  même  de  la  ré- 
quisition. 

t  XII.  Les  décrets  et  arrêtés  contraires  aux  dispositions 
du  présent  décret  sont  rapportés. 

■  XIII.  Les  dispositions  contenues  au  présent  décret 
n*auronl  leur  effet  que  pendant  le  terme  de  six  mois ,  à 
compter  de  sa  publication. 

Noi. 

Etal  dê$  denrées  et  marchandises  sur  lesquelles  les 
droits  d^entrée  sont  réduils^  par  le  décret  de  ce 
jour^  et  quotité  des  droits  qui  seront  dus. 

Objets  qui  paieront  te  dixième  des  droits  actuels* 

Orge  perlé  ou  mondé. 

Avoine  en  gruau. 

Légumes  secs. 

Vermicelle  et  toutes  autres  pâtes. 

Poissons  frais,  sec  ,  salé,  fumé  on  mariné,  coquillage. 

Fruits,  fromages,  huile  d'olive,  cacao,  miel,  bière. 

Cire  jaune  non  ouvrée,  baleiuesen  fanons  et  blanc  de 
baleine. 

Ecaille  de  tortue,  ivoire ,  soie*grége ,  fleuret,  'filoselle 
crue  et  bourre  de  soie  cardée,  poil  ou  soie  de  porc  ou  de 
sanglier. 

Graines  grasses. 

Aigre  de  vitriol,  eau-forte,  salpêtre,  couperose,  vitriol, 
garance  sèche,  indigo,  soufre  en  canon,  tartre  de  vin, 
crème  de  tartre,  sucre,  café. 

Argent  vif,  huile  de  graine,  de  noix,  de  poisson ,  goni* 
mes  et  résines  à  Tusage  des  teintures  et  fabriques. 

Agrès  et  apparaux  de  navires,  ancres,  cordages,  papier 
blanc,  papier  brouillard ,  carton  enfeuilles,  toiles  à  voiles 
grosses. 

Oèjets  qui  paieront  te  cinquième  des  droits   actuels 
d'entrée. 

Sucre,  café ,  charbon  de  terre  importé  par  mer. 

Soies  en  trumes,  poil  organsin  et  à  coudre,  et  soies 
teintes. 

Brai  et  goudron,  plomb  et  étain  non  ouvré. 

Acier  non  ouvré,  acier  fondu,  fer  en  barre,  ferblanc, 
fer  noir,  fer  en  tôle. 

Cuivre  en  planches  et  fond  plat,  laiton  ou  enivre  jaune, 
battu  ou  laminé,  laiton  filé  ou  fil  de  laiton  noir,  fil  de  fer. 

Faux ,  faucilles  et  limes. 

Chandelles  de  suif. 

Plumes  à  écrire. 

Objets  qui  paieront  la  moitié  du  droit  d'entrée  du  tarif. 

Aluo, 

Draps  compris  dans  le  tarif  sous  la  dénomination  de 
draps  communs. 
Bonneterie  et  couvertures  de  laine. 

Droits  fixes. 

Toiles  de  chanvre  ou  lin ,  excepté  celles  à  foileif  le 
quintal ,  2  liv.  10  sons. 

Non. 

Etat  des  denréeê  et  marchandises  dont  la  sorHe 
restera  provisoirement  prohibée. 

Grains,  farines,  pommes  de  terre,  marrons,  châtaignes» 
pois,  haricots,  lentilles  et  autres  légumes  verts  et  secs. 

Viande,  poisson,  beurre,  miel,  fromage,  cacao,  ver« 
micelle  et  autres  comestibles  t  à  l'exception  des  fruits. 

Socreetcaft, 


Bestiaux  et  fouirages,  chevaux,  mules  et  mulets ,  annes 
et  munitions  de  guerre,  brai,  goudron,  cftbles ,* corda- 
ges, toiles  à  voile  et  autres  munitions  navales» 

Dois,  charbons,  cendres  et  autres  matières  servant  à 
l'engrais  des  lenes. 

Matières  servant  à  la  fabrication  du  papier  et  de  la  collet 
papier  blanc  et  gris,  cartons  et  groisil. 

Métiers  pour  les  fabriques. 

Chanvres,  lins,  laines,  cotons  et  soies,  même  filés. 

Lièges  non  ouvrés,  peaux  et  cuirs  secs,  eir  poil  et  en 
vert  ;  peaux  et  poils  en  masse  et  non  filés,  de  castor  et  de 
loutre,  de  lièvre  et  de  lapin  ;  poil  de  chèvre,  de  chevreau 
non  filé,  poil  de  chien  filé. 

Cire,  suif,  chandelle,  graisse,  huile  de  graine  et  de 
poisson,  et  graines  grasses. 

Alun,  couperose,  vitriol,  indigo,  soufre,  sumac,  gom* 
mes  et  résines. 

Fer,  laiton,  plomb,  étain ,  tôle  et  ferblanc 

Acier  et  cuivre  non  compris  dans  la  classe  de  la  merce- 
rie ou  de  la  quincaillerie. 

Bonneterie  de  laine,  à  Texception  des  casquets. 

Chapeaux  d*bommes,  d'une  valeur  inférieure  à  18  li- 
vres pièce. 

Cuirs  et  peaux  de  toutes  sortes ,  à  Teiceplion  des  gants 
fins,  des  pelleteries  ouvrées  ou  apprêtées,  et  des  peaux 
passées  en  blanc  ou  mégie. 

Futailles. 

Laignelot  :  Je  viens,  au  nom  du  comité  de  sûreté 
générale,  vous  rendre  compte  de  ce  qui  s*est  passé 
hier  nu  spectacle  de  la  rue  Feydeuu.  (11  se  fait  ub 
grand  silence.  ) 

Une  foule  de  jeunes  gens,  égarés  probablement 
par  des  gens  (]ui  ne  peuvent  être  que  des  royalistes 
ou  des  terroristes  (on  rit  à  l'extrémité  gauche),  ont 
abattu  le  buste  de  Marat.  Le  coniité  de  sAreté  géné- 
rale, qui  a  les  mêmes  principes  que  la  Convention , 
a  vu  dans  Marat  un  représentant  du  peuple  dont  la 
mémoire  a  été  solennisée,  et  par  conséquent  un  at- 
tentat contre  la  nation.  (On  applaudit  a  Textrémité 
gauche.  —On  murmure  dans  le  surplus  de  la  salle.) 
Le  comité  a  vu  dans  cet  acte  une  espèce  d'avilisse- 
ment  de  la  Xlonvention.  (Mêmes  mouvements.)  Jus- 

3u*à  ce  que  le  temps  ait  prononcé  sur  Marat ,  le 
écret  doit  être  respecté.  (Applaudissements.) 

Des  jeunes  gens  sont  venus  se  présenter  au  co- 
mité de  sûreté  générale,  section  de  la  police;  ils  ont 
désavoué  cet  acte  en  disant  que  c'était  l'ouvrage  de 
quelques  malveillants,  et  que,  pour  eux,  ils  respec- 
teraient toujours  le  décret  de  la  Convention.  (  Ap- 
platidissements.  ) 

Le  comité  de  sûreté  générale  a  pris  des  mesures 
pour  rétablir  le  calme;  l'image  sera  redressée  ,  et 
l'on  est  à  la  poursuite  des  conseillers  perfides,  de 
ceux  qui  se  cachent  derrière  le  voile.  (  Applaudisse- 
ments. )  Le  comité ,  fidèle  aux  vrais  principes,  n'a 
pas  renversé  les  Jacobins  pour  voir  s'élever  l'anar- 
chie à  côté. 

Laurence:  La  Convention,  toute  puissante  qu'elle 
est  par  le  pouvoir  qu'elle  a  reçu  de  la  nation ,  est, 
dans  un  moment  de  révolution ,  ce  qu'est  un  vais- 
seau battu  par  la  tempête ,  entraîné  par  l'orage.  Si 
vous  ne  vous  hâtez  de  jeter  l'ancre ,  vos  ouvrages 
seront  brisés  et  détruits.  Laissez  l'opinion  publique 
juger  des  hommes  que,  dans  un  moment  d'enthou- 
siasme, on  a  crus  grands.  (  Vifs  applaudissements.  ) 
La  démarche  du  comité  de  sûreté  générale  est  digne 
d'un  comité  de  gouvernement;  il  y  avait  un  décret , 
il  devait  le  faire  respecter.  Vous  savez  apprécier 
cette  démarche,  et  je  me  tais. 

Goujon  :  Lorsqu'un  comité  de  gouvernement 
nous  rend  compte  des  mesures  qu'il  a  prises  pour 

assurer  le  triomphe  des  principes (Murmures.) 

Quant  à  moi ,  qui  ai  toujours  été  de  nonne  foi  a 
toutes  les  époques  de  la  révolution  ,  qui  ai  pu  être 
trompé,  mais  qui  ai  toujours  aimé  la  justice;  qui , 


S64 


|M>ur  voter  le  PaDthéoD,n*at  consulté  que  Tcnthou- 
tiasme  du  peuple...  (Applaudissements  (lans  l'extré- 
mité gauche.— On  murmure  dans  les  autres  parties 
delà  salle.) 

CouPPé  (des  Cûtesdu-Nord)  :  Mirabeau  avait  aussi 
été  mis  au  Panthéon,  et  il  en  est  sorti. 

Goujon  :  Le  temps  viendra  où  l'on  appréciera  les 
hommes  qui  ont  paru  dans  la  révolution.  (  Vifs  ap- 
plaudissements.) Lepelletier  assnssiné  par  un  garde 
du  tvran.Marat  assassiné  par  une  lutratique,  seront 

inges  avec  ceux  qui,  ayant  toujours  de  grands  mots 
lia  bouche,  n'ont  eu  pour  la  chose  publique  que 
des  cœurs  froids.  (  Murmures.  —  Applaudissements 
à  rcxtrcmilé  gauche.  ) 
Plusieurs  voix  :  L'ordre  diï  jour  ! 

La  Convention  passe  à  Tordre  du  Jour.  (  On  ap- 
plaudit.) 

—  Uo  secrétaire  lit  les  lettres  suivantes  : 

Le  représentanl  du  peuple  Porcher ,  envoyé  dans 
les  dépariemenls  du  Loiret^  Loir-et-Cher  et 
d^ Indre-et-Loire^  à  la  Convention  nationale. 

Orléaot,  le  11  pluviôse,  Tan  3a  de  la  république 
fraoçaiie,  une  et  indi?iiible. 

•  Citoyens  collègues,  les  malheurs  inouïs  qu'ont 
produits ,  à  différentes  époques ,  les  débâcles  de  la 
Loire ,  après  une  congélation  moins  forte  oue  celle 
qui  a  eu  lieu  cette  année ,  avaient  inspiré  de  justes 
craintes  aux  autorités  constituées  et  aux  habitants 
de  cette  commune. 

«  Ces  craintes  n'avaient  point  été  stériles;  elles 
avaient  déterminé  à  faire  usage  des  lumières  des 
sens  de  Tart  et  de  tous  les  résultats  de  l'expérience. 
Déjà  les  mesures  les  plus  nropres  à  prévenir  le  mal 
ou  à  empêcher  les  suites  ae  celui  qu'on  n'aurait  pu 
éviter  avaient  été  prises ,  et ,  dans  cette  position, 
nous  attendions ,  non  sans  quelques  inquiétudes, 
cet  événement,  presque  toujours  plus  ou  moins  fu- 
neste. 

•  Un  courrier ,  arrivé  à  sept  heures  du  matin  ,  a 
annoncé  que  la  débâcle  des  glaces  s'était  faite ,  la 
veille,  à  cmq  heures  et  demie  du  soir,  sous  le  pont 
de  Gien,  sans  l'avoir  endommagé. 

•  Dè.s  que  je  fus  instruit  de  cette  nouvelle  par  Tin- 
génieur  en  chef  de  ce  département,  je  me  rendis  sur 
celui  de  cette  commune,  où  je  l'ai  vue  arriver  à  neuf 
heures  vingt  minutes;  la  rupture  et  Técoulenient 
des  glaces  n'ont  produit  aucun  dommage  notable  ; 
la  crue  même  des  eaux  ne  s*est  élevée  qu'insensible- 
ment, et  ne  semble  présager  aucun  danger  pour  les 
ouvrages  des  levées  et  pour  les  propriétés  riveraines; 
quelques  bateaux  vides  seulement  ont  été  entraînés 
par  la  force  du  courant. 

•  Tout  m'annonce  enfin  que  cette  crise ,  qui  se 
présentait  avec  les  signes  les  plus  alarmants,  n'aura 
rien  d'extrêmement  lacheux. 

«  Persuadé  du  plaisir  que  je  vous  ferai  Je  mehflte 
de  vous  annoncer  cette  bonne  nouvelle;  car,  malgré 
les  vociférations  du  brigandage  et  du  crime,  je  suis 
convaincu  ,  avec  l'immense  majorité  des  Français, 
que  vous  voulez  ardemment  le  bonheur  du  peuple , 
et  que  ce  dernier  ne  peut  avoir  pour  ennemis,  au 
milieu  de  vous  ,  que  ceux  qui  chercheraient  encore 
à  avilir  la  Convention  nationale,  et  à  substituer  des 
mesures  atroces  aux  principes  de  justice  et  de  vertu 
que  vous  professes,  et  qu'il  est  si  doux  de  proclamer 
en  votre  nom. 

•  Salut  et  fraternité.  PoncHBB.  • 

La  Convention  décrète  l'insertion  de  cette  Adressa 
dansleBuUetio. 


OuiUemardet,  représentant  du  peuple  détenue  dans 
les  départements  de  Seine-et-Marne,  de  V  Yonne 
et  de  la  Nièvre ,  à  la  Convention  nationale. 

Ne  vert,  9  pluvioae,  l*an  S*  de  le  répnbliqna 
fraoçaiae,  uoe  et  indiviaible. 

•  Citoyens  collègues ,  déjà  j'ai  rempli  auprès  de 
vos  comités  l'obligation  qui  m  est  imposée  de  les  in- 
struire de  mes  opérations;  mais  le  vous  dois  un 
compte  sommaire  de  la  situation  des  départements 
où  je  suis  en  mission.  Comme  le  bien  que  j'ai  pu  y 
faire  est  votre  ouvrage ,  il  vous  sera  agréable  do 
reposer  votre  attention  sur  celte  idée  consolante, 
que  partout  rhornine  juste  respire  ,  et  que  le  mé- 
chant seul  est  poursuivi  par  l'opinion  piiblioue. 

•  Comme  sur  les  autres  points  de  la  république, 
il  s'est  trouvé,  dans  les  départements  de  Seine-et- 
Marne  et  de  l'Yonne,  quelques-uns  de  ces  hommes 
qui  ont  déshonoré  la  révolution  par  leur  présence  , 
et  qui  ont  pré^nté  la  liberté  sous  des  formes  hideu- 
ses, pour  la  faire  haïr;  le  terrorisme  y  comptait  en- 
core plusieurs  sectateurs,  et  plusieurs  Sociétés  po- 
pulaires étaient  influencées  nar  des  intrigants  au 
désespoir  de  la  décadence  de  leur  règne. 

•  Il  ne  m'a  pas  été  dinicile  de  raviver  l'esprit  public 
dans  ces  départements;  tout  y  respire  pour  la  liberté: 
les  hommes  égarés  y  sont  rappelés  dans  le  bon  che- 
min ;  les  charlatans  et  les  êtres  immoraux  ,  qui  j 
sont  en  petit  nombre,  sont  livrés  à  leurs  remords,  au 
mépris  et  à  l'indignation  générale. 

•  Le  département  de  la  Nièvre  ne  se  présente  pas 
sous  un  point  de  vue  si  satisfaisant,  La  natrie  de 
Chaumettea  vu  nalire  plus  d'un  monstre  tel  que  lui. 
Ces  malheurenses  contrées  auront  longtemps  à  gé- 
mir sur  les  fléaux  qui  les  ont  désolées;  c'est  là  qnc 
le  terrorisme  a  déployé  toute  sa  tvrannie  :  rien  n'a 
échappé  à  ses  fureurs;  l'homme  riche  comme  le  pau- 
vre, la  vieillesse  et  l'enfance,  l'innocence  et  la  vertu, 
tout  a  été  persécuté. 

•  De  p.'iisibles  citoyens  ont  trouvé  la  mort  dans 
les  cachots,  d'autres  sur  Téchafaud.  De  nombreuses 
victimes  ont  élée  ntasséesdans  de  nouvelles  bastilles, 
et  devaient  être  fusillées  par  arrêté  de  ces  comités 
soi-disant  révolutionnaires  ;  la  représentation  na- 
tionale a  été  avilie ,  IfS  autorités  constituées  et  les 
lois  méprisées,  l'humanité  outragée,  l'assassinat 
commandé  au  nom  de  la  loi ,  et  le  brigandage  le 
plus  effréné  a  été  organisé  sous  la  forme  de  taxe  ré«< 
volutionnaire. 

«  Les  principaux  chefs  on  les  prévenus  de  tant 
d'horreurs  sont  devant  la  justice,  et  l'humanité  ne 
tardera  pas  à  être  vengée. 

•  Leurs  amis  secrets  crieront  probablement  à  IMn- 
justice;  ils  ajouteront  même  que  l'aristocratie  triom- 
nhe,  et  que  le  patriotisme  est  opprimé  :  plus  d'une 
rois  ces  clameurs  ont  frappé  vos  oreilles,  et  vnus  sa- 
vez les  apprécier. 

•  Je  vous  avoue  qu'effectivement  j'ai  brwé  tous 
les  verroiix  des  cachots,  que  j*ai  cru  devoir  pardon- 
ner à  plusieurs  citoyens  égarés  par  de  vieux  préju- 
gés, et  qui,  par  faiblesse  «le  caractère,  avaient  com- 
misdes  tantes  en  révolution  :  mais  vous  pouvez  être 
assurés  de  leur  repentir  et  de  leur  attachement  aux 
principes  de  la  Convention. 

•  La  bienfaisance  nationale  et  le  sentiment  de  la 
reconnaissance  auront  bientôt  plus  fait  d'amis  à  la 
ré|)iiblique  que  la  terreur  ne  lui  avait  fait  d'ennemis. 
Toutes  les  âmes  qui  avaient  été  refroidies  par  la 
servitude  et  l'oppression  sont  réchauffées  par  le 
sentiment  de  leur  énergie  et  l'amour  pur  de  la  pa- 
trie. 

•  Malgré  les  clamenrs  de  la  nalTeillance,  je  n« 
cesserai  de  diriger  ma  conduite  sur  les -principes  qne 


3«6 


TOUS  aveis  proclamés,  et  je  continuerai  à  faire  autant 
d*effort$  pour  faire  aimer  la  révolution  que  d'autres 
en  ont  fait  pour  la  faire  détester. 

•  La  révolution  du  9  thermidor  a  ddchiré  une 
partie  do  crêpe  funèbre  qui  couvrait  le  déparlement 
de  la  Nièvre  :  aidé  de  la  masse  des  républicains  qui 
le  composentvil  ne  me  sera  p»s  diftîciled*en  arra- 
cher les  derniers  lambeaux.  Déjà  j'ui  donné  au  peu- 
ple des'  magistrats  lignes  de  lui  :  ils  s'occuperont, 
avec  moi,  de  Tbonorable  mission  d'essuyer  les  larmes 
des  innocentes  victimes  de  la  tyrannie,  et  de  secou- 
rir les  malheureux.  Vous  ordonnerez  à  vos  comités 
de  me  prêter  leur  appui,  et  bientôt  je  n'aurai  plus 
que  des  images  riantes  à  vous  mettre  sous  les  yeux. 

•  Semblables  aux  voyageurs  qui,  dans  le  calme, 
raconteut  avee  satisfaction  les  dangers  qu'ils  ont 
éprouvés  pendant  la  tempête,  en  contemplant  les 
écueiis  que  vous  avez  évités,  et  les  malheurs  passés 
qui  ont  désolé  votre  patrie,  vous  jouirez  de  sou  bon- 
heur, qui  sera  votre  ouvrage. 

«  GuiLLBMABDET ,  re^étcntani  du  peuple,  » 

Insertion  au  Bulletin. 

— -  Auguis  lit  la  lettre  des  représeutants  du  peuple 
près  les  armées  de  Sambre-et- Meuse  à  la  Convention 
nationale.  (Voyez  le  n»  133.) 

Babailon  :  Je  viens,  au  nom  de  votre  comité 
d'instruction  publique ,  vous  faire  part  d'objets  qui 
intéressent  renseiguement. 

Le  silence  de  la  Toi  du  14  frimaire,  sur  les  jardins 
des  plantes  qui  se  trouvent  dans  les  communes  de 
Strasbourg  et  de  Montpellier,  ont  donné  lieu  à  di- 
verses interprétations  et  à  des  incertitudes  qui  de* 
viendraient  préjudiciables  si  vous  ne  vous  hâtiez  de 
les  faire  cesser. 

Parmi  les  autorités  constituées,  les  unes  ont  cra 

3UC  le  jardin  des  plantes  était  inséparable  des  Ecoles 
e  Santé;  les  autres  se  sont  persuadé  tout  le  con- 
traire. Les  individus  ont,  de  leur  côté,  partagé  l'une 
ou  l'autre  opinion. 

Remarquiez  cependant  que,  dans  l'ancien  système, 
ces  jardins  étaient  une  dépendance  des  universités 
de  médecine,  et  qu'il  serait  im()ossible  aujourd'hui 
de  les  distraire  des  nouvelles  écoles  sans  ôter  aux 
éittes  de  la  patrie  un  grand  moyen  d'instruction. 

C'est  pour  obvier  à  tous  les  inconvénients,  et  faire 
cesser  toutes  les  incertitudes,  que  le  comité  d'in- 
struction publique  vous  propose,  par  mon  organe, 
le  projet  ae  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  son  comité  d'instruction  publique,  dé- 
crète ce  qui  suit  : 

«Art.  i«r.  Les  jardins  des  plantes  qui  sont  dans 
les  communes  de  Montpellier  et  de  Strasbourg  sont 
de  la  dépendance  et  tout  partie  des  Ecoles  de  Santé 
établies  dans  ces  communes  par  la  loi  du  14  frimaire. 

•  11.  Ils  sont  destinés  à  l'instruction  des  élèves, 
sous  l'inspection  générale  des  membres  du  Musée, 
et  sous  la  surveillance  spéciale  du  directeur  et  des 
professeurs  de  botanique  et  de  matière  médicale  de 
i'iia(|ue  école. 

«  L'insertion  au  Bulletin  tiendra  lieu  de  promul- 
gation. • 

Ce  décret  est  adopté. 

DunAND-MAiLLANB  :  Jc  demande  la  parole  pour 
une  motion  d'ordre. 

Dans  la  séance  du  7  de  ce  mois,  la  Convention 
nationale  a  rendu  un  décret  concernant  les  départe- 
ments des  Boiiches-du-Rliône.  Ce  décret  était  néces- 
saire; il  était  urgent  pour  lever  les  obstacles  qu'ap- 
portait l'ancien  et  mauvais  esprit  des  terroristes  aux 
progrès  de  l'esprit  nouveau  et  salutaire  du  0  ther- 
midor; mais  il  s'est  glissé  daoi  ce  décret  une  dispo- 


sition qui  ne  peut  subsister  ou  s'exécuter  sans  les 
plus  grands  inconvénients,  je  dirai  même  sans  les 
plus  grands  malheurs:  je  veux  parler  de  l'amende* 
ment  proposé  parGranet,  mon  co-<Iépnté,  et  adopté 
beaucoup  trop  légèrement  par  la  Convention. 

Sans  (foute  que  la  Convention  se  doit  h  elle-mc^nns 
et  doit  à  la  souveraineté  du  peuple  de  venger  les 
outrages  qu'on  lui  lait  dans  la  personne  de  ses  repn*- 
sentants;  et  c'est  par  son  zèle  même  à  remplir  ce 
devoir,  qu'elle  a  rendu  le  mauvais  décret  oont  je 
parle;  mais  elle  Ta  poussé  trop  loin  en  l'appliquant 
indistinctement  aux  trois  représentants  BO,  Angnts 
et  Serres. 

Cbassous  :  Je  demande  que  Durand-Maillanesoît 
envpyé  à  l'Abbaye. 

Durand-Maillanb  :  Le  premier  a  été  insulté,  mal- 
traité, et  certainement  ces  outrages  devaient  être 
vengés;  mais  ils  le  sont,  et  l'ont  été  d'une  manière 
qui  ne  laisse  peut-être  que  le  regret  qu'ils  aient  été 
VIsngés  par  trop  de  sang;  car  on  sait  comme  le  sang 
a  coulé  à  Marseille,  à  Orange  et  à  Nîmes  :  on  ne  peut 
donc  pas  supposer  que  la  justice  rigoureuse  qui  s'est 
exercée  à  Marseille  après  sa  réduction,  sous  le  géné- 
ral Cartaux,  ait  épargné  les  auteurs  et  les  chefs  d'un 
pareil  attentat;  il  n'y  aurait  donc  plus  aujourd'hui 
a  frapper,  pour  ce  crime,  ou  que  des  innocents,  ou 
que  des  hommes  égarés. 

J'observe  à  la  Convention  qu'il  y  a  entre  les  In- 
sultes faites  à  Bô,  et  les  insultes  faites  à  Auguis  et 
Serres,  des  différences  qui  ne  nous  permettent  pas 
de  les  conlondre. 

L'insulte  ou  les  mauvais  traitements  faits  à  Bô, 
notre  collègue,  datent  de  près  de  deux  ans;  et,  par 
cela  seul,  on  devrait  onbiier  l'injure  plutôt  que  d'en 
renouveler  l'éclat  sans  nécessité  :  il  s'ensuit  du 
moins  par  ces  considérations  que  Thonneur  de  la 
représentation  nationale  se'tronve,  à  cet  égard, 
pleinement  à  couvert,  tandis  que  l'insulte,  bien  plus 
grave  ,  faite  à  nos  deux  collègues  Auguis  et  Serres, 
est  encore  tout  entière  à  réparer. 

Remarquez,  citoyens,  que  les  auteurs  de  celle-ci 
sont  tous  connus,  aussi  bien  que  leurs  complices, 
ou  faciles  à  trouver;  que  l'injure  est  toute  fraîche, 
et  que  de  son  impunité  peut  s'ensuivre  la  ruine 
même  de  la  république;  ce  qui  n'a  rien  d'exaeéré  on 
d'imaginaire  pour  qui,  comme  moi,  connaît Tesprit 
de  ce  pays  :  au  lieu  qu'en  mettant  aujourd'hui  dans 
Marseille  la  vengeance  de  celle  qui  fut  faite  à  Bô,  il 
y  a  deux  ans,  en  information  et  en  jugement,  c'est 
y  mettre  Talarme  et  le  feu  ;  c'est  troubler,  désespérer 
tout  le  Midi  ;  car  le  même  décret,  dans  son  exécution, 
donnerait  lieu  à  une  telle  opposition  dans  les  me- 
sures, que  ce  serait  comme  mettre  aux  mains  les 
deux  partis;  car,  il  faut  le  dire  franchement,  le  parti 
rebelle,  le  parti  coupable  envers  Auguis  et  Serres, 
tient  à  un  système  dont  les  partisans  ne  sont  pas 
tous  à  Marseille;  ils  sont  peut-être  dans  la  Conven- 
tion, je  veux  l'ignorer;  ce  que  je  sais  et  ce  que  je 
dirai,  c'est  oue,  dans  nos  contrées,  tout  ce  qu'il  y  a 
de  pins  vil  dans  la  société ,  tous  les  gens  à  bonnet 
rouge,  dont  Robespierre  avait  voulu  taire  ses  janis-' 
saires,  et  qui  sont  gorgés  dans  ce  moment  du  bien 
de  la  nation  même,  crient  encore  dans  nos  contrées, 
d'une  voix  toujours  effrayante  :  Vive  la  Monta- 
gne! viveni  les  Jacobins!  et  quelquefois  :  À  bas  la 
Convention!  Fut-il  jamais  un  fédéralisme  plus  cri- 
minel, plus  dangereux  dans  ces  circonstances?  et 
pourrait- on  lui  comparer  celui  qui  a  servi  à  tant  de 
persécutions  et  de  vengeances?  Il  est  tel,  citoyens 
mes  collègues,  que  la  Convention  lui  doit  toute  sa 
sollicitude  pour  le  salut  de  la  patrie;  car  si  une  si 
coupable  audace  n'est  pas  réprimée  dans  un  pays  où 
l'ofl.n'a  Jusqu'ici  oonAU  et  suivi  proprement  que 


36G 


l'enseigne  de  la  licence,  tout  est  perdu  dans  mon 
pays,  même  dans  toute  la  république.  Je  ne  pous- 
serai pas  plus  loin  mes  réflexions;  elles  sufliseut,  je 
pense,  pour  justifier  la  motion  que  je  fais  de  révo- 
quer ou  rapporter  la  partie  du  décret  rendu  le  7  de 
ce  mois,  concernant  rmformation  à  rendre  sur  l'in- 
jure faite,  il  y  a  deux  ans,  à  notre  collègue  Bô. 
Grankt  :  Je  demande  Tordre  du  jour  sur  la  pro- 

Ï position  de  Maillane,  et  je  m*appuie  sur  la  justice  de 
a  Convention.  Le  grand  moyen  de  rétablir  l'ordre 
dans  le  Midi  est  de  punir  tous  les  coupables.  J*ai 
demandé  que  ceux  c^ui  avaient  insulté  le  représen- 
tant Bô  fussent  juges.  Que  risquez- vous  de  pour- 
suivre tous  ceux  qui  ont  troublé  la  tranquillité  pu- 
blique? On  dit  qu'il  n'en  est  plus,  tant  mieux;  on 
dit  qu'ils  ont  été  punis;  moi  je  dis  non  :  ceux  qui 
ont  été  punis  sont  ceux  qui  ont  marché  au  nombre 
de  six  mille  contre  le  Convenlioii. 

Durand-Maillane  insiste  pour  qu'on  distingue  ce 
qui  s'est  passé,  il  y  a  deux  ans,  à  Marseille,  d'avec 
ce  qui  s'est  passé  depuis  peu. 

Moïse  Baylb  :  J'ajouterai  à  ce  que  dit  Granetque 
la  loi  est  égale  pour  tous,  soit  qu'elle  punisse  ou 
ou'elle  récompense.  La  Convention  a  été  outragée 
dans  la  personne  de  Bô  et  celle  d'Antiboul ,  qui  ont 
été  jetés  dans  des  cachots.  Durand-Maillane  a  dit 
que  les  auteurs  de  ces  outrages  ont  été  punis;  je  dis 
aussi  que  non;  plusieurs  ont  été  punis,  mais  beau- 
coup d'autres  sont  émigrés. 

Plusieurs  voix  :  Eh  bien,  oo  ne  peut  pas  les  juger. 

Moïse  Baylb  :  J'observe  que,  dans  les  letti^s  qui 
m'ont  été  communiquées,  on  se  plaint  de  ce  que 
beaucoup  de  ces  émigrés  sont  rentrés.  Le  nommé 
Linsian,  le  secrétaire  de  la  commission,  se  promène 
tranquillement  dans  Marseille. 

Delacroix  :  Le  décret  dont  on  demande  le  rap- 
port tend  à  faire  juger  vingt  mille  individus,  à  qui 
on  peut  dire  qu'on  a  pardonné  pendant  deux  ans.  Je 
ne  vois  dans  les  récriminations  que  l'on  fait  que  Ten- 
vie  de  répandre  le  sang.  (Applaudissements.) 

Olivier  Gérente  :  La  Convention  crut  rendre  un 
décret  sage  en  ordonnant  que  les  auteurs  des  trou- 
bles survenus  à  Marseille  seraient  poursuivis  devant 
le  tribunal  criminel  séant  n  Aix;  en  bien,  citoyens, 
on  s'est  servi  précisément  des  moyens  que  vous 
aviez  pris  d'éteindre  un  incendie  pour  en  rallumer 
un  autre  et  faire  couler  le  sang  dans  les  départe- 
ments méridionaux. 

Bô  a  été  insulté  à  Marseille;  mais  la  vengeance 
nationale  n'a-t-elle  pas  assez  pesé  sur  cette  partie 
de  la  France?  Si  Bô  était  ici,  il  dirait  que  l'injure 
(|u'il  a  reçue  n'a  été  que  trop  vengée  par  les  tribunaux 
infâmes  que  Robespierre  avait  créés  dans  le  Midi. 

Le  tribunal  d'Orange  ne  s'est  pas  contenté  de  £aiire 
périr  ceux  qui  avaient  insulté  notre  collègue;  mais 
li  a  enveloppé  dans  la  même  proscription  les  hom- 
mes qui  avaient  refusé  de  témoigner  contre  eux. 

La  vengeance  serat-elle  donc  éternelle?  Après 
deux  ans  de  punition,  après  que  le  sang  a  coulé 
pendant  deux  ans,  ne  doit-on  pas  être  satisfait?  Si 
vous  laissez  subsister  le  décret  rendu  sur  la  propo- 
sition de  Granet,  vous  allez  encore  ensanglanter 
cette  terre;  vous  allez  en  faire  fuir  le  commerce. 

Bô  :  Je  ne  parlerai  pas  de  la  manière  dont  j'ai  été 
arrêté.. Je  l'ai  été  sur  la  route  de  Toulon,  et  de  là  on 
me  conduisit  à  Marseille. 

La  commune  me  reçut  d'abord  comme  un  homme 
à  qui  Ton  n'a  rien  à  reprocher;  mais,  lorsque  je  dis 
que  j'étais  représentant  du  peuple,  on  me  déclara 
qu'on  ne  reconnaissait  plus  la  représentation  natio- 
nale. 

Je  fus  logé  dans  nne  chambre  de  la  commune,  oii 
j'étais  plus  mai  que  dans  un  cachot.  La  municipalité 


vint  me  dire  que  le  peuple  de  Marseille  dérirait  avoir 
des  renseignements  sur  ce  qui  se  passait  à  Paris.  H 
répondis  que  je  ne  dirais  rien  avant  que  d'avoir  ?i| 
mon  collègue  Antiboul.  Antiboul  fut  entendu  sépa- 
rément, et  le  lendemain  je  parus,  non  devant  le  tri- 
bunal criminel  mais  devant  les  autorités  constituées^ 
qu'accompagnait  un  peuple  immense. 

J'ai  vu  à  Marseille  des  hommes  durs,  mais  j'y  ai 
vu  aussi  des  hommes  honnêtes.  Lorque  je  tombai 
malade ,  je  demandai  à  aller  à  l'hôpital  avec  mes 
frères,  ou  bien  que  l'on  me  mît  dans  un  cachot  pour 
me  garantir  des  chaleurs  de  la  saison;  on  ne  se  ren« 
dit  point  à  mes  demandes. 

Quant  à  ceux  qui  m'ont  outragé,  je  ne  les  connais 

Jias;  je  sais  seulement  ^ue  ce  furent  principalement 
les  membres  du  comité  de  surveillance  et  quelques 
ofliciers  municipaux. 

Lorsque  la  peur  se  mit  dans  Marseille,  l'armée  de 
Cartaux  en  était  encore  à  trois  lieues  ;  le  concierge 
vint  me  dire  que  je  pouvais  sortir;  la  sentinelle 
même  me  rendit  ses  armes.  Cartaux  entra  dans  la 
ville  vers  six  heures;  je  ne  m'occupai  plus  que  de 
pourvoir  aux  subsistances  de  l'armée,  et  déjà  les 

Krincipaux  coupables,  qu'on  assura  être  des  mem- 
re  de  TAssemblée  constituante  et  le  président  da 
tribunal  populaire,  étaient  évadés.  J'ignore  si  l'on  a 
jugé  tous  les  coupables ,  mais  je  sais  que  ceux  qui 
sont  restés  dans  Marsei  lie  on t  été  jugés  ;  si  ceux  qui  se 
sont  évadés  rentrent  dans  ce  moment,  ils  doivent 
rêtre  comme  émigrés.  Quant  à  moi ,  je  demanderais 
que  les  comités  de  salut  public  et  de  sûreté  générale 
prissent  des  mesures  pour  concilier  tous  les  partis 
et  pour  tout  pacifier.  (Applaudissements.) 

Serres  :  A  Dieu  ne  plaise  que  je  vienne  rallumer 
des  haines!  L'imagination  la  plus  fertilement  atroce 
aurait  beau  s'évertuer,  elle  n'inventera  jamais  des 
scélératesses  semblables  à  celles  qui  se  sont  passées 
dans  le  département  des  Bouches-du-Rbône;  ces 
excès  font  frémir  la  nature.  Le  5  vendémiaire,  plus 
de  cinq  cents  hommes  armés  se  réunirent  autour  de 
mon  collègue  Auguis  et  moi ,  et,  en  criant:  Vivent 
les  Jacobins!  vive  la  Montagne!  tentèrent  d'assas- 
siner la  représentation  nationale.  Mon  collègue  Au- 
guis fut  maltraité  pur  des  hommes  qui  lui  mirent  le 
poing  sous  la  gorge,  et  qui  ne  déguisaient  pas  leur 
véritable  intention.  Ceux  qui  m'entouraient  jouaient 
un  autre  rôle;  ils  médisaient  :  •  Représentant,  soyez 
tranquille,  la  représentation  nationale  sera  respec- 
tée. •  En  même  temps  qu'ils  assuraient  la  représen- 
tation du  respect  qui  lui  est  dû,  ces  mêmes  hommes 
me  sommèrent  impérieusement  de  rendre  la  liberté 
aux  prétendus  patriotes  que  j'avais  fait  arrêter. 

Quand  je  sommai,  au  nom  de  la  loi,  l'attroupe- 
ment de  se  dissoudre,  il  le  fit,  parce  que  la  plupart 
des  hommes  qui  le  composaient  étaient  dirij^és  par 
la  crainte  que  leur  inspiraientlesscélératsqui  pèsent 
sur  Marseille.  Ces  hommes  de  bonne  foi^  mais  pusil- 
lanimes, disaient  :  Si  les  scélérats  triomphent,  ils 
nous  aurons  vus,  et  ils  croiront  que  nous  étions  là 
pour  eux  ;  si,  au  contraire,  le  parti  delà  justice  et  du 
peuple  remporte  la  victoire,  nous  persuaderons  aux 
représentants  du  peuple  que  notre  intention  était 
de  les  defiiidrc.  Parmi  les  soixante-treize  personnes 
arrêtées,  il  n'y  a,  je  lésais,  que  quatre  ou  cinq  cou- 
pables, et  bientôt  la  justice  nationale  va  les  attein- 
dre; mais  le  grand  criminel  qui  a  insulté  d'une 
manière  si  atroce  notre  collègue  Augiûf  reste  encore 
impuni. 

Granet  (de  Marseille)  :  11  a  été  gnillotinë* 

AuGUis  :  C'est  faux  ;  il  jouit  de  sa  liberté. 

Serres  :  Jamais  je  ne  ferai  de  motion  qui  puisse 
faire  répandre  une  seule  goutte  de  sang;  malheu- 
reusement il  en  a  trop  coulé. 


367 


le  le  r<<pMe,  parmi  les  soixante-treize  citoyens  qui 
ont  été  arrêtés,  quatre  ou  cinq  me  paraissent  cou- 
pables; je  ne  demande  pas  leur  mort,  mnis  il  ne  Ta  ut 
pas  qu*iis  insaltent  journellement  la  représentation 
nationale;  mon  opinion  serait  que,  parmi  ces 
soixante-treize  personnes,  on  rendît  sur-le-champ 
la  liberté  à  celles  qui  ne  sont  qu*éfi;arées. 

Trop  longtemps  on  a  donné  de  Timportance  à 
Marseille;  Marseille  nVn  mérite  aucune.  On  vous  a 
représenté  la  population  de  cette  commune  comme 
devant  donner  de  grandes  craintes.  Citoyens,  le 
peuple  de  Marseille  est  comme  partout  ailleurs,  es- 
sentiellement bon  (vifs  applaudissements);  mais  il 
existe  dans  celte  commune,  composée  de  cent  vingt 
mille  âmes,  deux  mille  hommes,  tous  plus  atroces 
que  ne  l'était  Kobespierre,  et  dont  les  moyensd'exis- 
tence  sont  inconnus. 

Citoyens,  il  est  un  fait  que  U  Convention  doit 
connaître  :  quelques  jours  avant  notre  départ  de 
Marseille, Irois  citoyens  ont  été  assassinés  dans  leurs 
basses-cours,  parce  qu'un  arrête  des  factieux  portait 
peine  de  mort  contre  les  citoyens  trouvés  ayant  de^ 
armes  sans  être  munis  d'une  carte  de  rnhiement. 
Aussitôt  après  ce  malheureux  événement,  nousarrêl 
tâmes  qu'il  n'y  aurait  plus  de  distinction  entre  le^  | 
hommes  armés  et  non  armés;  ()uc  la  garde  natio.   | 
nalc  de  Marseille  serait  dissoute  et  de  suite  réorga.  ' 
nisée;  que  chaque  citoyen,  âgé  de  seize  ans,  serai| 
tenu  de  faire  personnellement  son  service  ;  par  ce 
moyen,  il  était  facile  de  connaître  et  de  démasquer 
les  traîtres.  Je  conclus  en  demandant  le  rapport  de 
Tamendement  adopté  sur  la  proposition  de  Granet, 
et  je  présente  pour  considération  de  ce  rapport  que,  j 
sil'amendementdeGranetestmaintenu,  vous  verrez 
les  négociants  fuir  de  Marseille,  et  votre  commerce 
sera  perdu. 

Plusieurs  membrei  :  C'est  ce  qu*on  veut. 

On  demande  le  rapport  de  l'amendement  de  Gra- 
net. 

•*•  :  Je  ne  parlerai  que  de  la  nécessité  de  rapporter 
Tamendement  de  Granet.  I 

Citoyens,  depuis  le  9  lhermidor,vous  avez  proscrit  i 
la  terreur  qui  pesait  sur  toutes  les  parties  de  la  ré- 
publique; si  vous  adoptez  l'amendement  de  Granet, 
TOUS  la  faites  renaître  à  Marseille.  Tous  ceux  qui  ont 
insulté  la  représentation  dans  la  personne  de  Bô  ont 
été  punis 

GiANET  :  C'est  faux. 

***  :  Granet  est  plus  que  tout  autre  en  état  de 
prouver  ce  que  j'ai  dit,  car  un  ami  oflicieux  lui  en- 
voyait chaque  décade  la  liste  des  personnes  guillo- 
tinées dans  la  décade  précédente  :  vous  ne  voulez  pas 
^  sans  doute  punir  les  citoyens  qui  n'ont  été  qu'égarés. 
Je  demande  le  rapport  de  l'amendement. 

Merli?!  (de  Douai^  :  Je  ne  parlerai  point  sur  les 
faits,  je  les  ignore;  j  appuierai  seulement  les  princi- 
pes établis  par  Durand-Maillane. 

Depuis  l'insulte  qui  a  été  faite  à  Marseille  au  re- 
présentant Bô ,  une  procédure  a  dû  être  instruite 
contre  tous  les  accusés,  soit  présents,  soit  contu- 
maces. Si  cette  procédure  existe,  il  n'y  a  plus  rien  à 
faire  ;  un  jugement  a  dû  être  prononcé,  il  ne  reste 
plus  qu'à  l'exécuter;  si,  au  contraire,  cette  marche 
n'a  pas  été  suivie,  et  s'il  n'existe  pas  de  procédure 
contre  les  accusés  contumaces,  que  voulez-vous 
faire  maintenant?  Bô  a  été  arrêté,  il  y  a  deux  ans,  à  i 
Marseille;  Prieur  et  Romme  l'ont  été  à  Caon;  vou- 
lez-vous envoyer  aujourd'hui  dans  ces  villes  des 
commissaires  inquisiteurs  qui  recherchent  si  réelle- 
ment tous  les  coupables  ont  été  jugés  ou  punis?  Je 
ne  le  crois  pas;  car  ce  serait  reporter  la  terreur  dans 
ces  contrées;  car  il  faudrait  aussi  rechercher  les  au- 
teurs de  l'arrêté  pris  dans  le  département  de  la  Loire- 


Inférieure  contre  Quillet  et  moi.  Je  crois  que  Tin- 
tention  de  la  Convention  est  de  jeter  un  voile  sur  ce 

3ui  s'est  passé  en  93.  Je  demande  que  la  proposition 
e  Durand-Maillane  soit  adoptée. 

Auguis  donne  de  nouveaux  détails  sur  ce  qui  s'est 
passé  à  Marseille  pendant  son  séjour  dans  cette  com- 
mune. La  calomnie  l'avait  précédé;  on  savait  qu'il 
voulait  la  justice,  et  les  hommes  qui  dominaient  Mar- 
seille ne  voulaient  que  du  sang;  il  voulait  le  règne 
des  lois;  ces  mêmes  dominateurscelui  de  l'anarchie  ; 
il  devait  donc  être  proscrit.  Des  hommes  armés  sont 
venus  au-devant  de  lui  et  de  son  collègue  Serres,  et 
leur  ont  déclaré  qu'ils  ne  feraient  que  ce  qui  leur 
serait  agréable.  On  a  voulu  forcer  les  représentants 
du  peuple  à  détruire  Aix  ;  leur  fermeté  a  imposé  aux 
factieux  ;  cnGn  on  a  tenté  de  les  assassiner. 

L'assemblée  ferme  la  discussion,  et  rapporte  Ta- 
mendenient  adopté  sur  la  proposition  de  Granet. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  14  PLinriOSB. 

Lecointrc  (de  Versailles)  obtient  la  parole,  pour 
une  motion  d^ordre. 

Lecointre  :  Citoyens ,  je  viens  vous  demander 
l'exécution  de  votre  décret  du  25  brumaire.  Différer 
plus  longtemps  de  le  faire,  c'est  exposer  la  républi- 
que à  de  nouveaux  troubles;  il  est  ainsi  conçu  : 

•  Les  presbytères  et  paroisses  situés  dans  les  com- 
munes qui  auront  renoncé  au  culte  public,  oy  leur 
produit,  seront  destinés  pour  subvenir  au  soulage- 
ment de  l'humanité  souffrante  et  à  l'instruction  pu- 
blique; charge  ses  comités  des  finances,  d'fnslruc- 
tion  publique  et  des  secours,  de  se  réunir  pour 
présenter  un  projet  de  loi  qui  règle  l'exécution  du 
présent  décret.  ■ 

Des  arrêtés  provisoires  de  quelques  districts  ont 
pris  des  mesures  pour  disposer  pendant  un  an  des 
presbytères  et  jardins  en  dépendant,  et  en  appliquer 
le  produit  au  soulagement  des  indigents  dans  les 
communes. 

Le  comité  des  finances  de  la  Convention  a  pris,  le 
3  fructidor  dernier,  l'arrêté  suivant  : 

•  Les  communes  qui  ont  encore  un  culte  public 
doivent  entretenir  les  presbytères  dont  elles  ont 
l'usage,  et  celles  qui  ont  renoncé  au  culte  public 
sont  propriétaires  de  leurs  presbytères  pour  leurs 
établissements.  • 

D'après  cette  décision,  les  communes  se  sont  em- 
pressées de  faire  acte  de  propriétaires  et  de  disposer 
de  leurs  presbytères. 

Mais  les  agents  nationaux  de  l'enregistrement,  ne 
voyant  dans  la  loi  du  25  brumaire,  et  dans  l'arrêté 
du  comité  des  finances  du  3  fructidor,  que  des  dis- 
positions relatives  aux  presbytères,  ont  prétendu 
que  les  jardins  et  terrains  dépendant  des  maisons 
presbytérales  n'étaient  pas  compris  dans  l'abandon 
des  presbytères  fait  en  faveur  des  communes,  et  ont 
ordonné  à  leurs  préposés  de  poursuivre  la  location 
de  ces  jardins  ou  terrains  par-devant  les  directoires 
de  districts  de  leurs  arrondissements. 

Cet  ordre  de  régie  va  donner  lieu  à  une  foule  de 
éclamations  qu'il  faut  prévenir ,  ainsi  qu'à  des  in- 
convénients d  une  conséquence  infiniment  plus  ma- 
jeure. 

Je  ne  vous  parlerai  point  ici  du  dépérissement  de 
ces  bâtiments;  je  ne  dirai  pas  que  presque  toutes 
ces  églises  inhabitées  sont  en  proie  aux  dilapidations  ; 
les  plombs,  les  tuiles,  les  bois  sont  chaque  jour 
enlevés;  aucunes  réparations  ne  sont  faites  aux  bâ- 
timents de  cette  nature  ^  ni  ù  ceux  mêmes  qui  sont 


Ï68 


occupes.  Un  plus  haut  iot^rél  m'anime,  celui  de  la 
tranquillité  générale. 

La  Convention  a. décrété  la  liberté  des  cultes,  et 
celte  librrlé  dans  les  opinions  religieuses  Tait  partie 
de  la  Déclaration  des  Droits  de  l'Homme;  mais  les 
législateurs  ont  eu  la  sagesse  d*y  mettre  pour  cor- 
rectif que  l'exercice  des  cultes  et  la  manifestation 
des  opmions  ne  troubleraient  point  Tordre  public. 

Une  expérience  de  seize  siècles  a  prouvé  que  les 
ministres  du  culte  catholique  sont  les  plus  uitolé- 
rants  de  tous  les  hommes;  qu'en  substituant  les 
dogmes  d'une  théologie  révoltante  et  barbare  à  la 
sagesse  et  à  l'urbanité  de  leur  fondateur,  à  cette 
morale  pure  et  sublime  contenue  dans  son  Evangile, 
ils  ont  représenté  la  Divinité  comme  un  tyran  im- 
placable, dont  eux  seuls  pouvaient  apaiser  la  colère 
par  des  sacrilices  et  des  expiations  qui  ne  pouvaient 
se  payer  trop  cher;  telle  est  la  source  des  richesses 
immenses  qu'ils  avaient  accumulées. 

Avec  celte  maxime  atroce  (que  hors  l'Eglise  il  n'y 
a  point  de  salul),  et  se  déclarant  composer  seuls  ce 
qu'ils  appelaient  TEglise  où  se  trouvait  exclusive- 
ment le  salut ,  ils  se  sont  arrogé  le  droit  d'extirper 
par  le  fer  et  le  feu  toutes  les  églises  rivales  qualiiiées 
d'hérésiarques. 

Ce  <|u*étaient  les  ministres  du  culte  catholique  il 
y  a  seize  siècles,  ils  le  sont  encore;  usurpateurs  des 
titres  honoritiques,  ils  s'étaient  mis  a  la  tête  de  la 
nation  sous  la  désignation  du  premier  ordre  de  TEtat  ; 
forcés  d'abdiquer  ce  titre  fastueux  et  de  prendre 
celui  de  citoyen,  très-peu  d'entre  eux  ont  fait  cette 
abdication  de  bonne  foi. 

Les  moins  dangereux  sont  ceux  des  fanatiques  qui 
ont  obéi  à  la  loi  de  la  déportation  et  se  sont  expa- 
triés; dans  le  nombre  de  ceux  qui  se  sont  décorés 
des  livrées  du  patriotisme  la  foule  des  scélérats  est 
presque  incalculable;  de  tous  les  ennemis  de  la  pa- 
trie, aucuns  ne  se  sont  souillés  d'autant  de  crimes 
que  les  prétendus  déserteurs  des  autels.  N'en  douiez 
pas,  citovens;'semblablesau  loup  ravisseur  qui  rôde 
autour  aun  troupeau ,  cherchant  la  brebis  au'il 

Î courra  dévorer,  ces  hommes  ambitieux  calculent 
es  instants  favorables  où,  par  la  perte  de  la  liberté 
dont  ils  sont  les  plus  grands  ennemis,  ils  pourront 
se  ressaisir  des  biens  et  des  honneurs  que  l'opinion 
publique,  autant  que  les  besoins  de  la  patrie,  leur 
ont  arrachés. 

Le  trAne  et  l'encensoir,  longtemps  divisés  entre 
eux  pour  le  partage  des  dépouilles  des  citoyens,  fu- 
rent toujours  unis  pour  river  les  chaînes  du  despo- 
tisme civil  et  religieux.  Ces  deux  freins  puissants. 
Suidés  par  des  mains  babilej,  laissant  les  peuples 
ans  la  plus  grande  ignorance,  assuraient  a  leurs 
oppresseurs  la  perpétuité  de  leur  empire.  Les  philo- 
sophes seuls  leur  paraissaient  à  craindre;  ceux  qui 
eurent  le  courage  d'éclairer  leurs  frères,  Gassendi, 
Galilée,  Descartes,  Timmortel  Jean-Jacques  et  une 
foule  d'autres,  furent  les  objets  dévoués  à  la  haine 
la  plus  implacable  et  à  la  persécution  la  plus  tyran- 
nique. 

Les  ministres  du  culte  catholique  ont  toujours  le 
même  esprit  de  corps;  constitutionnels  ou  non',  ils 
sont  les  plus  redouti  blés  ennemis  de  la  liberté  ou  de 
l'égalité;  ils  n'attendent  que  Tinstunt  favorable  de 
rétablir  leur  empire  ;  leur  permettre  Texercice  public 
de  leur  culte,  g  est  s'exposer  à  faire  revivre,  a  pro- 
pager dans  les  départements  de  Tinlérieur  les  hor- 
reurs delà  Vendée,  horreurs  occasionnées  principa- 
lement parle  fanatisme  et  l'aveuglement  des  peuples 
victimes  de  la  jonglerie  de  leurs  prêtres. 

Or,  laisser  subsister  les  églises,  les  abandonner  à 
la  disposition  des  comoMiues,  c'est  laisser  des  espé- 
rances au  fanatisme. 


11  faut  que  les  ministres  des  cultes  ne  comptent 
désormais,  pour  acquérir  du  crédit  sur  l'esprit  d^ 
peuples,  que  sur  leurs  talents  et  leurs  vertus. 

Laisser  aux  communes  qui  n'ont  pas  renoncé  au 
culte  leurs  églises  et  leurs  presbytères,  c'est  blesser 
la  justice  et  Pégalité  ;  c'est  laiss<T  à  une  partie  de  la 
nalion  ce  quiiippartienl  à  tous.  Si  le  culte  catho- 
lique  conserve  des  propriétés,  il  faut  en  accorder 
aux  protestants,  aux  calvinistes  ou  luthériens,  aux 
mahométans ,  aux  Juifs,  et  enfin  à  tous  les  citoyens 
qui  différent  d'opinions  religieuses  avec  les  catho- 
liques. 

Les  lois  de  la  justice,  celles  de  l'égalité  el  le  bien 
de  la  république,  sa  tranquillité  présente  et  future 
exigent  impérativement  la  vente  de  tout  ce  qui  a 
servi  ou  pu  servir  à  l'exercice  du  culte,  sauf  aux  ci- 
toyens entre  eux  à  acquérir  ce  qui  leur  sera  utile 
pour  leurs  établissements  civils  et  religieux,  sans 
qu'aucun  culte  puisse  prétendre  à  avoir  des  loge- 
ments, des  biens,  aux  dépens  de  la  natiyn,  ou  des 
particuliers  qui  ne  voudront  pas  coopérer  à  l'achat 
et  entretien  de  ces  bâtiments,  pour  un  culte  quel' 
conque. 

Lecointre  termine  par  an  projet  de  décret  qai  est 
adopté  en  ces  termes  : 

•  Sur  la  proposition  d'un  membre,  la  Conven- 
tion nationale  (lécrète  que,  conformément  au  décret 
du  25  brumaire  de  l'an  2e,  les  comités  des  finances, 
d'instruction  et  des  secours,  réunis,  lui  présenteront 
dans  le  courant  de  la  décade  prochaine,  sans  plus 
long  délai,  un  projet  de  loi  qui  fixe  déterminément 
le  mode  à  suivre  dans  la  vente  des  éjglises,.  presby- 
tères, jardins  et  terrains  en  dépenoant,  ann  que, 
daus  toute  l'étendue  de  la  république,  ces  ventes 
soient  effectuées  dans  trois  mois  du  jour  de  la  pubU- 
cation  du  décret  à  intervenir. 

(  La  iuUe  à  dimah^*) 


N.  B.  Dans  la  séance  du  1&,  laConveolîonaoasié 
l'arrêté  du  comité  des  finances,  du  8  pluviôse,  et 
chargé  ce  comité  de  lui  présenter  un  autre  mode  de 
faire  rentrer  les  contributions  dans  Paris. 

—  Elle  a  procédé  à  l'appel  nominal  pour  le  renoa- 
▼ellement  par  quart  des  membres  du  comité  de  safat 
public;  les  nouveaux  élus  sont  Merlin  (de  Douai), 
Pourcroy,  Lacombe-Saint-Michel,  if  la  place  de  Bi- 
chard,  Prieur  (de  la  Marne)  et  Guytou-Morveau. 


LIVRES    DIVERS. 

Blénuurei^htloiophiquet  du  citoyen  H«ariMi,aa 

bre  du  Poini  cenUral  des  science» .  arU  et  inéiieH,  ou  l*oii 
trouve  Torigine  des  S)  Iphes,  des  Gnomes,  des  Nymphe»  ;  la 
création  des  mousses,  le  développement  des  germes  Tcgé- 
tAUi,  la  possibilité  et  l'eststence  des  Charmes,  leur  nature 
dëvoilëe;  principes  généraus  de  physique  et  de  métaphysi- 
que; Dieu,  le  Monde  ;  des  Erreurs,  de  la  Vérité,  quelques 
Hisiwres,  des  Vers  ,  des  Bêtises,  du  Sublime,  des  Folies,  du 
Sens  commun,  de  U  Philosophie  et  beaucoup  dTamour.  Pris  : 
t  liv.  10s.,  pour  Paris ,  et  3  li?.  pour  les  déparieneotf , 
franc  de  port,  par  la  poste. 

A  Paris,  ches  TAuteur,  rue  des  Petites- Ecuries,  a*  SQ« 


Payement  à  la  trésorerie  nationaU. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  sis  pre- 
miers mois  ;  il  sera  (ait  à  tous  oeui  qui  seront  porteurs  d*iD* 
soripiions  an  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères  eal 
de  huit  meit  ving l  et  un  jeun  de  Tanaée  i7aa(TÎew  •tjrla> 


GAZETTE  NATIONALE  o»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  137.  Septidi  17  Pluviôse,  l'an  8«.   {Jeudi  5  Février  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

AISGLETEUUE. 

DÉBATS  DU  PAnLCMENT 

.    Chambre  des  pairs.  —  Séance  du  G  janvier, 

Diffc'reuis  comptes  soDt  présenlés  par  les  commissiiires 
des  douanes  et  pur  un  ageni  de  in  trésorerie,  qui  les  dépo- 
sent sur  le  burt'nu.  Le  ^raiid  ciiancelier  et  lo»  pairs  s'as- 
seyent. Alors  lord  Stinliope  prend  la  parole ,  pour  faire  la 
inoliou  qu'il  a  annoncée.  Il  réclame  une  aUeniion  propor- 
tionnée à  son  importance;  et  comme  ses  adversaires  ont 
puisé  leurs  pi  incipaux  motifs ,  pour  continuer  la  guerre 
contre  la  Frnnce,  dans  le  tableau  infidèle  qu'il  leur  a  plu 
de  tracer  de  ses  linances,  il  se  propose  de  le  rectifier  et  de 
foire  coniiaiirc  à  la  Chambre  leur  véritable  siiuaiion. 

(  Quand  j'accorderais,  dit  Toraieur,  à  ceux  qui  veulent 
continuer  la  guerre,  que  nos  intérêts  le  demandent ,  et  que 
DOS  forces  nous  le  permettent,  il  resuirait  à  examiner  si  la 
justice  le  permet  légalement;  car  c'est  elle  qu'il  faut  suivre 
avant  tout,  et  je  rejetterai  constamment  toute  politique  dans 
laquelle  on  ne  la  prendra  pas  pour  base  :  or  qui  osera 
prétendre  que  la  Grande-Bretagne  ait  le  droit  de  s'immis- 
cer dnuN  le  gouvernement  de  la  France,  q«i,  quoi  qu'on  en 
ait  pu  dire,  n'a  jamais  paru  vouloir  se  mêler  du  nôtre  ?  * 

Ici  lord  Stanfiope  prouve  son  assertion  par  une  note  de 
M.  Cliauvelln  au  lord  Grcnvillc,  et  par  les  articles  18  et  39 
de  la  constitution  française,  qui  tracent  aux  ministres  de  la 
république  la  conduite  qu'ils  doivent  tenir  avec  l'éi ranger. 
Il  en  prend  occasion  d'ajouter  que  tromper  la  nation  pour 
la  jeter  dans  la  guerre  est  le  système  auquel  le  ministère 
s'est  constamment  attaché.  -  Ils  ont  commencé  par  peindre 
les  troupes  françaises  comme  un  ramas  de  soldats  indisci- 
plinés, et  n'ont  pas  manqué  de  présenter  les  troupes  qu'oD 
leur  opposait  comme  les  meilleures  et  les  plus  courageuses 
de  l'Europe. 

«  Ix'S  combats,  les  batailles  rangées  et  les  sièges,  où  les 
Français  ont  vaincu  les  bandes  mercenaires  et  les  troupeaux 
d'esclaves  envoyés  cnnireeux,  ont  assez  démenti  celte  double 
imposture.  On  sait  aujourd'hui,  malgré  les  ministre»,  que  la 
république  français»;,  que  je  n'affecierai  point  d'appeler 
royaume,  quoique  mon  oreille  soit  si  souvent  frappée  de  ce 
nom  devenu  odieux  à  ses  habitants,  a  les  meilleures  troupes 
et  les  plus  nombreuses  de  l'Europe.  Elle  compte  douze  cent 
mille  héros  ;  car  c'est  le  nom  que  méritent  ces  braves  dé- 
fenseurs de  la  patrie,  dont  la  discipline  est  aussi  admirable 
que  la  valeur. 

K  La  seconde  idée  qu'ont  eue  réellement  les  ministres, 
quoiquHIs  aient  rougi  d*en  convenir,  c'est  le  projet  aussi 
atroce  qu'insensé  d*affamcr  la  France.  Ce  système,  de  ré- 
duire aux  horreurs  de  la  disette  trente  millions  d'hommes, 
est  aujourd'hui  démontré  impraticable,  et  il  ne  reste  à  ceux 
qui  Tout  conçu  que  la  honte  d  une  pareille  monstruosité. 

a  Les  Français  ont  pris  possession  du  Palatinat  eidu  Bra- 
bani ,  deux  des  plus  fertiles  contrées  de  l'Europe  ;  et  cela 
immédiatement  après  la  moisson,  de  sorte  qu'il  n'y  a  pour 
eux  aucun  danger  de  disette.  Us  sont  maintenant  occupés 
du  sublime  projei  d'établir  un  canal  entre  le  Palaiinat  et  le 
nord  de  la  France,  au  moyen  ducfuel  les  denrées  d'un  pays 
pourront  être  amenées  dans  l'auire.  Les  deux  i'iécs  des  mi- 
nistres, mises  en  avant  pour  tromper  le  peuple,  ont  été 
démontrées  absolument  fausses.  Ce  qu'on  dit  de  leurs  finan- 
ces, de  l'épuisement  entier  de  leurs  ressources,  ne  l'est  pas 
moins.  Au  moyen  des  confiscations  sur  le  roi,  la  noblesse  et 
le  clergé ,  la  Convention  s'est  procuré  plus  de  400  millions 
sterling,  et  m.iintendni  elle  a  entre  les  mains  le  tiers  des 
propriétés  terriloriu les  de  France.  Ainsi,  en  supposant  vrai 
loui  ce  qu'avcnccnt  les  minisires  sur  ses  dépenses,  ses  res- 
sources n'en  sont  |kis  moins  inépuisables.  Ce  qui  a  été  dit 
(le  la  bJiissc  dos  assignats,  loin  d'être  une  preuve  du  manque 
de  crédit,  est  une  circon.stancc  tout  en  faveur  de  la  Conven- 
tion. Elle  a  à  .«^n  di.*posiiion  d'immenses  propriétés  qui  peu- 
vent lui  procurer  les  moyens  de  les  racheter  à  des  termes 
avanta:;<>ux  ;  elle  a  eu  la  politique  de  ne  point  dépouiller  les 
contrê(  .s  qui  ont  été  conquises.  A  la  vérité,  on  leur  a  pris 
leurs  espères  m.ds  on  leur  a  donné  en  place  des  assignats. 
«  Dr  i'(  tt(;  m.inièrc,  ces  contrées  sont  forcées  d'avoir  un  in- 
térêt commuu  avec  la  république  française,  et  de  soutcuir 

n«  Sérif.-^  Tome  X, 


son  gouvernement  actuel.  Les  succès  des  Français  sont  at- 
tribués au  hasard  ;  mais,  en  considérant  ce  qui  vient  d'être 
dit,  et  beaucoup  d'autres  exemples  dune  politique  habile, 
on  ne  peut  s'empêcher  de  les  regarder  comme  des  preuves 
de  la  sagesse  de  leurs  gouvernants.  Le  papier  américain  a 
tombé  bien  plu»  bas  que  celui  de  France  dans  aucune  épo- 
que; mais  il  n'en  a  pas  moins  seni  au  congrès,  i 

Enfin,  lord  Stanhope  regarde  comme  étal>ii  que  l'état  ac- 
tuel des  finances  de  la  France  est  très-florissant  ;  que  cette 
contrée  a  d'ailleurs  d'immenses  ressources,  et  s'avance  vers 
une  prospérité  dont  il  n'y  a  pas  d  exemple.  Les  principes 
qui  ont  été  suivis  dans  cette  guerre,  comme  dans  celle  d'A- 
mérique, lui  semblent  également  inhumains  et  impoliliques. 
On  dem.mdc  ce  que  l'Angleterre  a  perdu?  Elle  a  perdu  la 
Hollande,  les  Pays-Bas  autrichiens ,  et ,  ce  qui  est  encore 
iwur  (Ile  d'une  plus  grande  conséquence,  son  titre  d'amie 
de  la  paix,  sa  réputation  d'attachement  à  la  cause  de  la  ii- 
berté  générale.  Peut-être  sera-t- elle  forcée  de  continuer  la 
guerre  avec  la  France,  quand  cette  contrée  sera  en  posses- 
sion des  flottes  hollandaise  et  espagnole.  Dans  cette  circon- 
stance, on  demande  avec  qui  l'Angleierre  peut  traiter?  1^ 
réponse  est  toute  simple  :  avec  ceux  avec  qui  elle  est  main- 
tenant en  guerre,  et  qui,  dans  le  cours  du  ceue  guerre,  ont 
déployé  une  énergie  et  une  vertu  républicaines.  Après  s'être 
résumé,  lord  Stanhope  propose  à  la  Chambre  la  résolution 
suivante  :  i 

«  L'Angleterre  ne  doit  point  se  mêler  et  de  foit  ne  se  mé» 
lera  point  des  affaires  intérieures  de  la  France,  et  elle  troa?e 
convenable  de  le  déclarer  expressément.  » 

La  résolution  proposée  par  lord  Stanhope  est  vivement 
combattue  par  les  lords  Carliste.  Abingdon  et  Auckland, 
qui  prétendent  que  l'on  ne  Siiùrait  comparer  cette  guerre 
avec  celle  de  la  métropole  contre  ses  colonies,  et  opposent 
aux  citations  du  préopinant  la  déciaraiion  du  19  novembre 
et  les  hostilités  qui  l'ont  suivie  ;  ils  en  concluent  qu'il  faut 
ajourner  la  motion. 

Lord  Mansfield  pérore  longuement  en  foveur  de  l'opinion 
des  ministres;  ii  trouve  leur  justification  dans  les  ouvrages 
qu'il  a  lus  sur  les  lois  des  nations,  qui  doivent  se  rénnlr 
contre  celle  dont  le  trop  grand  accroissement  peut  menacer 
leur  si}irelé.  Or  telle  est  la  position  de  la  France  vl.s-à-via 
de  l'Angleterre  ;  et  comment  peut-on  hésiter  à  reconnaître 
ii  cette  dernière  le  droit  de  modifier  le  gouvernement  de 
l'autre,  quand  il  n'est  que  trop  évident  qu'elle  menace  le 
sien?  Je  vois  un  homme  armé  d'un  poignard;  non-seulement 
il  le  tourne  contre  moi,  mais  il  s'écrie  qu'il  veut  m'en  per- 
cer. Je  saisis  le  bras  de  ce  furieux,  je  le  désarme,  et  l'on 
m'en  ferait  un  crime!  Il  faudrait  être  bien  partial,  bien  in- 
juste de  m'Interdiro  ainsi  de  pourvoir  à  ma  sûreté. 

D'ailleurs,  l'opinant  voit  deux  partis  en  France,  l'un  pour 
l'Angleterre,  l'autre  contre.  Par  conséquent,  l'Angleterre 
doit  prêter  assistance  à  ceux  qui  veulent  se  mettre  à  couvert 
sous  l'ancien  gouvernement,  revêtu  des  formes  monarchi- 
ques. C'est  un  droit  pour  elle  aussi  bien  qu'un  devoir,  car  on 
a  le  droit  de  faire  tout  ce  qu'on  doit  faire.  De  plus,  cet  acte 
est  louable  en  lui-même.  La  France  y  trouvera  la  tranquil- 
lité intérieure,  et  l'Europe  la  paix.  Cependant  il  ne  se  charge 
pas  de  détcrminei  de  quelle  manière  il  faudra  restreindre 
ou  tempérer  la  monarchie,  dont  le  rétablissement  lui  parait 
si  désirable;  il  ajoute  que  donner  le  nom  de  république  à 
la  France,  c'est  calomnier  les  autres  pays  qui  le  portent; 
que,  quand  elle  le  mériterait,  les  Anglais,  qui  sont  intervenus 
dans  les  affaires  de  Hollande  en  1787,  peuvent  bien  inter- 
venir dans  les  siennes;  que,  s'ils  parvenaient  à  rétablir  la 
monarchie  en  France,  ils  en  recueilleraient  des  louanges. 
Enfin,  le  savant  dissertateur  compare  les  raisonnements  de 
son  adversaire  sur  les  finances  de  ce  pays  à  ce  que  Dryden 
fait  dire  à  un  amant  dans  une  de  ses  comédies  :  «  Ha  bles- 
sure devient  moindre  à  mesure  qu*elle  s'agrandit,  i 

Lord  l^nsdown  déclare  qu'une  paix  honorable  doit  faire 
l'objet  des  vœux  de  chaque  nation  ;  mais,  quelque  persuade 
qu'il  soit  des  bonnes  intentions  du  noble  lord,  dont  au  reste 
il  connaît  la  vertu  et  l'honneur,  il  ne  peut  approuver  entiè- 
rement sa  motion,  qu'il  espère  néanmoins  voir  reproduire 
avec  les  changements  nécessaires  par  quelque  autre  de  ses 
collègues. 

Lord  Stanhope  essaie  de  dissiper  les  objections  élevées 
contre  la  résolution  qu'il  a  proposée. 

47 


870 


La  Chambre  va  aux  Tohc  tnr  la  qneattoB  de  l»oiinie- 
meni,  que  tiû  siaffrofleA  décident  contre  1  seul  opposant. 

SUISSE. 

Discours  adressé  ou  citoyen  Barthélémy  par  M.  Ochs, 
chancelier  de  CEtat  de  tiàle,  le  22  janvier. 

Votre  Excellence ,  il  faut  une  Suisse  à  la  France,  et  une 
France  à  la  Suisse.  Cesl  ainsi  que  s*est  énoncé  envers  nous 
un  des  représentants  de  llilustrc  république  française ,  et 
c'est  A  ce  principe,  marqué  au  coin  d'une  solide  |)olitique, 
que  les  deux  nations  ont  dû  dès  longtemps  une  grande  par- 
tie de  leurs  succès  et  de  leur  prospérilé.  Il-est  en  effet  per- 
mis de  supposer  que,  sans  la  confédéralion  tielvéllque,  les 
débris  des  anciens  royaumes  de  Lorraine .  de  Bourgogne  et 
d'Arles,  n'eussent  point  été  réunis  a  la  domination  française; 
et  il  est  difficile  de  croire  que,  sans  la  puissante  diversion  et 
l'Intervention  déridée  de  la  France,  on  ne  fût  pas  enfin  par- 
venu à  étouffer  la  liberté  helvétique  dans  son  adolescence . 
ou  A  faire  rétrograder  les  destinées  de  nctre  existence  po- 
litique. 

dépendant  jamais  peut-être  la  vérité  de  ce  principe  salu- 
taire ne  se  manifesta  avec  plus  d'évidence  que  dans  le  cours 
des  événements  mémorables  dont  nous  sommes,  depuis 
plusieurs  années,  les  paisibles  spectateurs.  Mais  c'est  à  l'his- 
toire qu'il  appartient  de  révéler  un  jour  à  l'impariialc  posté- 
rité les  rapports  réciproques  de  cause  et  d'effet  qui  subsistè- 
rent entre  ces  événements,  notre  neutralité  et  notre  conser- 
fition.  On  admirera  peut-être  un  jour  ce  sentiment  dejustice 
naturelle ,  qui ,  nous  faisant  abhorrer  toute  influence  étrau- 
gère  dans  le  choix  des  modifications  de  nos  formes  de  gou- 
vernement, nous  Interdisait  par  lA  même  de  nous  ériger  en 
juges  du  mode  d'administration  publique  de  tout  Etat  quel- 
conque. Nos  pères  n*ont  censuré  ni  les  grands  feudaiaires 
de  l'empire  germanique  d'avoir  ravalé  la  puissance  impé- 
riale, ni  l'autorité  royale  en  France  d'y  avoir  comprimé  les 
grands  feudaiaires.  Ils  ont  vu  .successivement  les  (uis  gciic- 
rnox  représenter  la  nation  française ,  Richelieu  et  Mazarin 
ae  saisir  du  pouvoir  absolu  ,  Louis  XIV  déployer  à  lui  seul 
la  puissance  entière  de  la  nation,  et  les  parlementa  prétendcc 
partager,  au  nom  du  neuple,  l'autorité  publique.  Mais  jamais 
on  ne  les  entendit,  (Tune  voix  téméraire,  s'arroger  le  droit 
de  rappeler  le  gouvernement  français  à  telle  ou  telle  période 
de  son  histoire.  Leur  vœu  fut  le  bonheur  de  la  France,  leur 
espoir  son  unité,  et  leur  appui  l'intégrité  de  son  territoire. 

Cependant,  quel  que  fût  toujours  le  penchant  des  Suisses 
A  marcher  sur  les  traces  des  fondateurs  et  coosenateurs  de 
leur  liberté,  il  faut  en  convenir,  plus  d'une  fois  on  a  craint, 
dans  ces  temps  de  passions  exaltées,  de  les  voir  s'écarter 
d'une  route  aussi  sûre  ;  et  s'ils  ont  échappé  à  ce  funeste 
danger,  l'opinion  publique,  quoique  vacillante  et  divisée 
sur  tant  de  points ,  se  réunit  pour  en  attribuer  l'honneur  A 
Votre  Excellence  et  aux  fidèles  et  zélés  compagnons  de  ses 
loiporlants  travaux. 

AlHer  l'aménité  de  caractère,  la  franchise  de  la  probité 
et  la  modestie  du  vrai  mérite  A  la  fermeté  de  l'iiomme  pu- 
blic, jaloux  de  la  dignité  de  sa  place  et  de  l'honneur  de  sa 
patrie  ;  concilier  une  sage  temporisation  avec  l'active  rapi- 
dité des 'événements,  et  les  égards  dus  à  nos  rapports  multi- 
pliés avec  les  droits  d'un  peuple  régénéré,  qui  sent  plus  que 
Jamais  ce  que  vaut  son  alliance  ;  prévenir  les  insinuations 
perfides  ou  exagérées,  soit  de  la  malveillance  et  de  l'intri- 
gue,solt  d'un  patriotisme  aveugle  ou  inconsidéré;  adoucir, 
par  l'espoir  des  dédommagements  que  promet  la  justice 
confédérale,  le  sentiment  des  sacrifices  de  tout  genre  contre 
lesquels  des  traités  publics  ou  des  actes  authentiques  sem- 
blaient devoir  prémunir  :  tel  est  l'art  sublime  que  Votre 
Excellence  a  déployé  dans  son  ministère,  pour  maintenir 
la  paix  ,  lever  tous  les  obstacles ,  calmer  les  ressentiments, 
rehausser  les  espérances  et  serrer  de  plus  près  les  magis- 
trats purs  et  sans  tache  autour  d'un  seul  point  de  rallie- 
ment, la  scrupuleuse  observation  d'une  franche  neutralité. 

Heureux  de  devenir  les  témoins  habituels  de  vertus  aussi 
chères  A  tous  les  cœurs,  le  conseil  secret  de  la  ville  et  canton 
de  BAle,  nu  nom  de  nos  seigneurs  bourgmestre  et  conseil 
de  cette  république,  a  l'honneur  de  prier  Voire  Excellence 
de  vouloir  bien  agréer  favorablement  les  assurances  du 
respectueux  dévouement  et  de  l'empressement  bien  vif  à 
prévenir  ses  désirs,  dont  chacun  de  nous  est  sincèrement 
animé.  1^  séjour  de  Votre  Excellence  en  notre  ville  annonce 
une  confiance  dont  nous  sentons  tout  le  prix.  Ce  fut  sous 
les  murs  de  Bdle  que  se  formèrent,  il  y  a  trois  cent  cinquante 
ans,  les  pri  micrs  nœuds  qui  unirent  nos  destinées  à  celles 
dn  k  France,  et  c'est  daiMi  Icf  muipa  de  BAlo  qu'en  ce  mo- 


ment, pow  fa  première  folt,  les  deux  répnhUquea  s'aban- 
donnent aolenneilen>ent  aux  épanrhements  d'une  douce 
fraternité.  S'il  est  permis  d'ajouter  foi  aux  rapports  conso- 
lants de  l'incertaine  renommée ,  un  autre  rapprochement 
des  anciens  temps  et  des  nôtres  se  présente  A  tous  les  es- 
prits. Ce  fut  aussi  dans  les  murs  de  BAle  que  se  conclut  cette 
paix  célèbre,  qui  termina  la  dernière  lutte  sanglante  qu'eu- 
rent à  soutenir  les  Suisses  pour  la  cause  sacra  de  leur  in- 
dépendance. Puisse  une  paix  de  ce  genre  ajouter  bientôt  A 
la  gloire  de  voire  patrie  !  Par  une  fatalité  qui  confond 
la  raison  humaine,  il  fallut  toujours  que  la  guerre  fon- 
dât la  lit>erté*  mais  c'est  la  paix  qui  la  consolide  par  le 
vrai  développement  de  son  énergie  :  c'est  la  paix  qui  l'en- 
noblit p:ir  l'exercice  des  vertus;  c'est  la  paix  qui  rembcllil 
par  le  charme  de  tous  les  arts,  et  qui  la  fait  adorer  des  Ames 
sensibles  ei  généreuses,  (^u'il  est  beau  de  présenter  l'olivier 
de  la  paix  quand  on  a  le  front  ceint  des  lauriers  de  la  vic- 
toire! La  modération  dans  le  vainqueur  enchaîne  la  fortune 
A  son  char,  et  la  force  de  l'ennemi  est  moins  redoutable  que 
le  désespoir'du  vaincu.  Mais  l'importance  d'aussi  grands 
intérêts  nous  entraîne  au  delA  des  bornes  de  notre  mission. 
Qu'il  nous  soit  encore  permis  de  demander  A  Votre  Excel- 
lence la  précieuse  continuation  de  ses  bontés  et  de  sa  bien- 
veillance, ainsi  que  sa  puissante  intervention  dans  toutes  les 
ix'clamations  fondées  que  cet  Etat  ou  ses  concitoyens  pour- 
raient être  dans  le  cas  d'adresser  aux  autorités  suprêmes 
de  l'illustre  république  française. 

Réj^ome  du  citoyen  Barthélémy  au  conseil  êeertt  de  CEtat 
deBàle. 

Magnifiques  Seigneurs,  je  reçois  avec  d'autant  pins  de 
reconnaissance  et  de  sensibilité  l'expression  dee  sentiments 
que  vous  vouiez  bien  m'accorder,  <|ue  j'ai  déjA  l'habitude 
de  voire  bienveillante  amitié  à  mon  égard,  de  même  que  je 
me  flatte  que  vous  avez  celle  de  mon  désir  de  vous  ser\'ir, 
et  de  ma  consk-mie  soiiiriiude  pour  vos  intérêts.  Elle  va  être 
encore  plus  animée.  Magnifiques  Sdgneurs,  par  le  séjour 
que  je  viens  faire  dans  votre  ville..  Plus  je  suis  rapproché  de 
vous,  plus  je  chercherai  A  attirer  sur  votre  Etat  lea  regards 
de  la  république  française. 

Depuis  que  j'habite  dans  votre  patrie,  des  circonstances 
singulièrement  difficiles  ont  circonvenu  le  louable  corps 
helvétique;  mais  la  profonde  sagesse  qui  a  caractérisé  tous 
ses  pas  lui  a  fait  surmonU'r  jusqu'ici  ces  mêmes  difficultés, 
et  certainement  en  persévérant  dans  ses  principes  il  conti- 
nuera à  jouir  du  calme  de  la  paix  jusqu'à  l'époque  heureuse 
qui  devra  la  rendre  A  l'univers  ;  et  il  y  arrivera  avec  les  bé- 
nédictions de  re«timable  peuple  qu'il  régit,  avec  la  confiance 
et  la  juste  considération  de  la  nation  française  et  de  toute 
l'Europe,  et  avec  la  certitude  que  la  postérité  admirera  la 
conduite  qu'il  a  tenue  dans  ces  temps  critiques,  où  tant  de 
moyens  ont  été  rois  en  ceuvre  pour  faire  sortir  les  Cantons 
des  maximes  dont  ils  ont  hérité  de  leurs  ancêtres,  et  dont 
la  sagesse  est  confirmée  par  l'expérience  des  siècles. 

Votre  Etat  aura  d'autant  plus  de  droits  A  pariager  ce 
triompiie  qu'il  a  non-seulement  partagé  avec  sea  coalliés 
tous  les  dangers  de  ré|>oque  présente,  mais  a  encore 
été  exposé  a  des  inquiétudes  particulières.  11  doit  être 
bien  sûr  d'avoir  acquis  avec  eux  des  litres  ineffaçables 
A  la  continuation  de  l'amitié  de  la  n'puldique  française.  Je 
m'estime  irèvheureux ,  Magnifiques  Seigneurs,  d'en  être 
dans  ce  moment-ci  l'organe  auprès  de  vous,  et  de  pouvoir 
transmettre  au  comité  de  salut  public  de  la  Convention  na- 
tionale les  expressions  de  votre  dévouement  conféiléral  et 
les  vfpux  que  vous  formez  pour  la  prospérité  du  peuple 
français,  qui  sera  toujours  votre  plus  fidèle  allié. 


RÉPUBLIQUE    FRANÇAISE. 

Paris,  le  16  pluviôse,  —  Avant-hier,  au  Théâtre 
de  la  rue  Fcydaii,  avant  l'ouverture  de  la  scène,  les 
citoyens  qtii  s*y  Irouvairnt  en  foule,  attirés  par  \\ 
représentation  de  Phèdre,  ont  crié  pendant  quelques 
minutes  :  A  bas  Matai  I  (Son  buste,  déjà  renverse 
la  veille,  avait  été  remis  en  place.)  Un  spectateur, 
placé  dans  le  balcon  voisin  un  biisîe,  a  escalade  la 
logea  laquelle  il  était  adossé,  et  l'a  précipité  de  la 
console  qui  lui  servait  de  piédestal,  aux  applaudis- 
sements universels.  Le  buste  de  J.-J.  Rousseau  a  été 
demandé  à  grands  cris,  aussitôt  après  la  chute  du 
premier.  Il  es^  l'instant  mis  à  la  place  que  l'on  ve- 


871 


naît  de  rendre  vacante,  et  accueilli  par  de  vïh  ap- 
plaudissements. Le  môme  citoyen  qui  avait  renversé 
Marat ,  ayant  demandé  à  lire  quelques  vers  im- 
promptu qui  venaient  de  lui  être  communiqués,  a 
récité  le  quatrain  suivant  : 

Des  lauriers  de  Marat  il  n*ett  point  une  feuille 
'         Qui  ne  retrace  uo  crime  à  Tœil  épouvante; 

Mais  ceux  que  le  sensible  e(  bon  Rousseau  recueille 
Lui  sont  dui  par  la  France  et  par  rhumanilë. 

On  a  crié  bis!  et  le  quatrain  a  vie  répété,  aux  ac- 
clamations unanimes  dos  spectateurs. 
*  Le  même  jour,  \o  buste  de  Marat  a  été  également 
renversé  au  Théâtre  de  ta  République  et  à  celui  de 
M'^ntangier. 

Une  scène  avait  lieu  presque  en  même  temps  dans 
la  rue  Montmartre.  Des  enfants  ont  promené  ce  buste 
en  l'accablant  de  reproches;  ils  Pont  ensuite  jeté 
dans  régoût,  en  lui  criant  :  •  Marat,  voilà  ton  Pan- 
théon! •  Les  citoyens  du  Faubourg  étaient  rassem- 
blés en  foule,  ot  consacraient  par  leurs  applaudisse- 
ments cette  exécution  burlesque  du  iugement  de 
flétrissure  depuis  longtemps  porté  par  la  raison  pu- 
blique. 

Depuis  ce  temps,  les  vers  suivants  circulent  dans 
Paris  :  c  est  la  nouvelle  épitaphe  de  Marat. 
Appiïx  de  {^assassin,  opprobre  de  la  France, 
J*ai  plongé  le  poirnnrd  au  lein  de  Tinnocence  ; 
Par  les  plus  grands  forfaits  je  me  suis  fait  un  nom. 
Païaant,  les  Jacobins  m'ont  mis  au  Panthéon. 

De  lendemain  15,  refGgie  du  même  personnage  a 
été  trouvée  pendue  à  la  porte  d'un  drojguiste,  ancien 
meneur  de  l'un  de  ces  comités  révolutionnaires  dont 
Marat  avait  été  le  premier  membre  et  le  premier 
instituteur. 

On  se  rappelle  en  effet  ce  fameux  comité  de  la 
commune  de  Paris,  qui  organisa,  dirigea  et  solda 
les  massacres  du  2  septembre;  Marat  en  rtait  le  pré- 
sident. Nous  ne  ferons  point  ici  l'horrible  histoire 
de  ce  comité.  La  pièce  suivante  prouve  que  les  mas* 
sacres  qui  avaient  commencé  dans  Paris  devaient, 
par  les  ordres  du  même  comité,  se  faire  successive* 
ment  dans  toutes  les  parties  de  la  France.  On  sait 
quel  est  le  résultat  que  Ton  attendait  de  la  terreur 
générale  que  ces  scènes  de  carnage  étaient  destinées 
a  imprimer.  Cette  pièce  a  été  rédigée  par  Marat,  et 
elle  est  signée  de  lui. 
Eœirail  de  (a  lettre  écrite^  le  3  septembre^  par  le 

comité  de  surveilianee  de  la  commune  de  Parii^ 

à  tous  leê  départements  de  la  république, 

•  La  commune  de  Paris  se  hâte  d'informer  ses  frères 
de  tous  les  départements  qu'une  partie  des  conspi- 
rateurs féroces,  détenus  dans  les  prisons,  a  été  mis 
à  mort  par  le  peuple,  actes  de  justice  qui  lui  ont 
paru  indispensables  pour  retenir  par  la  terreur  ces 
légions  de  traîtres  cachés  dans  ses  murs,  au  moment 
où  il  allait  marcher  à  l'ennemi;  et  sans  doute  la  na- 
tion entière,  après  la  longue  suite  de  trahisons  qui 
l'ont  conduite  sur  les  bords  de  l'abîme,  s'empressera 
d'adopter  ce  moyen,  si  nécessaire  au  salul  public. 

•  Signé  les  administrateurs  du  comité  de 
salut  public  et  les  administrateurs-adjoints 
réunis,  constitués  par  la  commune  et  séant 
à  la  mairie. 

•  A  Paris,  ce  3  septembre  1792,  • 

(Suivent  les  signatures,  parmi  lesquelles  on  dis* 
tingue  celle  de  Marat,  l'ami  du  peuple.) 

Cette  lettre  fut  envoyée  dans  tous  les  départe- 
ments sous  le  contre*seing  du  ministre  de  la  Jus- 
tice; elle  provo(]ua  le  massacre  des  prisonniers  à 
Lyon ,  et  celui  des  prisonniers  d'Orléans  à  Ver- 
tailles,  etc. 


Cette  lettre  suffirait  sans  doute  pour  faire  foutr  à 
Texécration  du  peuple  son  hypocrite  et  féroce  au- 
teur ;  mais  il  est  utile  encore  de  se  rappeler  qu*à  ta 
même  époque  Marat  publiait,  dans  trois  Numéros 
consécutifs  de  son  journal,  •  qu'il  fallait  un  dicta- 
teur, qu'il  consentait  à  l'être,  qu'on  pourrait  même 
lui  attacher  un  boulet  aux  pieds  pour  garantir  sa 
bonne  conduite;  mais  que,  tel  mode  que  Ton  nrtt, 
le  peuple  ne  pourrait  être  sauvé  que  uuand  on  char- 
gerait momentanément  un  homme  de  tout  le  pou- 
voir du  gouvernement,  qu'on  Tautoriserail  à  faire 
amener  devant  lui  tous  les  conspirateurs,  et  à  faire 
tomber  leurs  têtes  sans  jugement»  • 

On  saitencore  que  dans  le  même  temps  il  s'écriait, 
sur  le  perron  de  la  commune,  et  qu'il  imprimait 
dans  ses  feuilles:   •  Donnez-moi  trois  cent  mille 

létes,  et  je  réponds  que  la  patrie  sera  sauvée 

Commencez  par  pendre  à  leurs  portes  les  boulan^ 

gcrs,  les  épiciers,  tous  les  marchands •  Mais  que 

nous  sert  d'exalter  l'opinion,  quand  déjà  le  jugement 
de  la  postérité  est  porté  ? 

De  toutes  les  parties  de  la  république  la  même 
voix  s'est  élevée;  les  bustes  que  les  factions  avaient 
élevés  sur  les  places  publiques  et  dans  les  enceintes 
des  spectacles  ont  été  brisés.  A  Lyon,  ceux  de  Chal- 
lier  et  de  Marat  ont  en  même  temps  disparu.  Ua 
égorçeur  posthume  s'en  plaignit  au  représentant  du 
peuple  ;  celui-ci,  instruit  que  c'était  le  directeur  du 
spectacle  qui  avait  fait  enlever  ces  bustes,  répondit 
gaiement  a  l'égorgeur:  «Je  crois  que  ces  bustes 
n*ont  pas  renouvelé  leur  abonnement.  » 

Les  scènes  dont  nous  venons  de  parler»  ces  mou- 
vements vengeurs  de  l'opinion  publique  font  naître 
une  première  réflexion.  Le  buste  de  Marat  a  été  flé- 
tri, renversé,  le  soir  et  le  lendemain  du  jour  où  des 
actes  semblables  avaient  été  dénoncés  à  la  Conven- 
tion nationale  par  le  comité  de  sûreté  générale.  Le 
rapporteur  avait  attribué  ces  faits  à  la  malveillance. 
11  les  avait  représentés  comme  un  attentat  au  dt^et 

3ui  a  translate  les  cendres  de  Marat  au  Panthéon,  li 
emeure  des  demi-dieux. 

S'il  n'est  pas  permis  de  douter  de  la  sincérité  des 
applaudissements  donnés  à  une  assertion  aussi 
étrange,  il  faut  croire  qu'ils  ont  été  l'effet  de  la  pre- 
mière illusion  du  sophisme  :  en  effet,  existe-t-il 
quelane  décret  portant  que  le  buste  de  Marat  sera 
place  dans  les  spectacles,  (lu'il  y  sera  respecté?  Mais, 
dit-on,  un  arrêté  du  comité  de  sûreté  générale  l'a 
ordonné.  Nous  répondrons  encore  :  eh  !  de  quel  droit 
un  comité  prescrit-il  un  culte  pliblic,  que  la  Con- 
vention elle  même  ne  pourrait  créer?  L'adoration  . 
d'un  homme  quelconque  peut- elle  être  commandée 
par  une  loi  ?  l'idolâtrie  des  bustes,  le  respect  scrvilc 
d(^  images  n'ont  Jamais  été  l'effet  que  d'une  légis- 
lation tyrannique  ou  de  l'enthousiasme  inconsidéré 
dels  sectes  ;  voudrait  -  on ,  en  consacrant  ce  joug 
honteux  de  la  pensée,  perpétuer  l'avilissement  & 
l'espèce  humaine? 

A-t-on  plus  de  droit  d'exposer  l'image  d'un  hom- 
me à  la  vénération  publique  dans  l'enceinte  d'un 
spectacle  que  dans  toutes  les  autres  Sociétés  particu- 
lières, dans  l'intérieur  des  habitations  des  citoyens? 
S'il  en  était  ainsi,  bienlôl  une  loi  pourrait  nous  for- 
cée de  consacrer  les  bourreaux  de  l'humanitécomme 
les  dieux  pénates  de  nos  familles  ;  et  l'épouse  dc 
Tune  des  victimes  de  la  rage  homicide  du  premier 
de  nos  tyrans  populaires  pourrait  être  contrainte  à 
lui  élever  un  sanctuaire  domestique  au  milieu  des 
pleurs  de  ses  enfants. 

Ou  s'est  plaint  de  malveillants  ;  mais  quelque  mo- 
nument public  a  t-il  donc  été  dégradé?  L'asile  du 
crime  a-t-il  été  violé  dans  ce  superbe  édifice  souillé 
nar  des  cendres  ensanglantées?  Non. La  tranquillité 


372 


.uea-t-elle  été  troublée?  Moins  encore:  la  vo-v 
lonlé  (iu  peuple  s*estmoritrde  unanime.  No  craignons 
donc  point  de  troubles,  et  ne  lés  annonçons  pas.  Es- 
pérons plutôt  ^ue  ce  nouvel  échec  donné  aux  parti- 
sans du  terrorisme  et  de  la  sanguinocralie  affer- 
mira la  tranquillité  intérieure  ;  et  croyons  que  cette 
manifestation  éclatante  de  Topinion  nationale  ne 
contribuera  {)as  peu  au  succès  de  la  paix,  que  Tarn- 
bitieuse  Férocité  ae  nos  anciens  dominateurs  eût  éloi- 
gnée à  jamais. 

CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Rovére, 
SUITE  A  LA  SÉANCE  DU   14  PLUVIOSE. 

L'assemblée  renvoie  à  sou  comité  des  finances  la 
proposition  de  Léonard  Bourdon ,  tendant  à  faire 
payer  sans  délai  aux  ex-professeurs  de  TUniversité 
de  Paris  les  traitements  que  la  loi  leur  accorde.  Cette 

f proposition  est  étendue  a  tous  les  ex-professeurs  de 
a  république. 

—  On  ht  la  correspondance.  —  Elle  contient  des 
expressions  de  plus  en  plus  énergiques  contre  les 
fauteurs  du  régime  dictatorial  qui  a  pesé  sur  la 
France. 

—  Un  secrétaire  lit  les  lettres  suivantes  : 

Pelletier,  représentant  du  peuple,  en  mission  dans 
les  départements  du  Doubs,  du  Jura,  à  la  Con- 
vention nationale. 

A  PonUrlier,  le  7  pluviôse,  Tan  3'  de  la  rëpubli({ue 
française,  une  et  indivisible. 

«Je  vous  adresse  copie  d'un  arnUé  que  je  viens 
de  prendre  en  faveur  d  un  commissaire  des  guerres 
de  la  60  division  militaire ,  employé  à  Poutarlier. 
C'est  le  citoyen  Quirot  :  ce  fonctionnaire  estimable 
réunit  toutes  les  qualités  et  les  talents  motivés  dans 
mon  arrêté.  Ce  serait  faire  le  plus  grand  tort  à  la 
chose  publique  que,  parce  qu*iln*a  pas  encore  tout- 
à-fait  vingt-cinq  ans,  il  fût  supprimé  par  la  loi 
du  24  uivose  dernier.  Faites-le  comprencire  sur  l'é- 
tat des  commissaires  des  guerres  recréés  :  je  vous 
jure  que  c'est  un  beau  cadeau  que  je  fais  à  la  répu- 
Dlique.  Il  serait  à  désirer  que  tous  les  fonctionnaires 
lui  ressemblassent.  Je  suis  si  convaincu  de  sa  saga- 
cité, que  je  viens,  par  un  arrêté  particulier,  de  le 
charger  encore  de  la  surveillance  la  plus  suivie  sur 
les  anus  qui  pourraient  se  propager  sur  la  fron- 
tière. 

•  Salut  cl  fraternité.  Signé  Pelletier.  • 
La  Convention  renvoie  cette  lettre  au  comité  de 

'  salut  public. 

Lequinio,  représentant,  à  la  Convention  nationale. 

Joinvillc,  le  U  phiviosc,  l'an  3*.    * 

•  Je  ne  puis,  citoyens  collègues,  omettre  de  vous 
faire  part  de  la  nécessité  urgente  d'orgaiiiser  les  fê- 
tes nationales;  c'est  le  vcpu  général  el  pressant  de 
tous  les  lieux  que  j'ai  parcourus,  et  j'ai  eu  occasion 
d'observer  combien  cela  est  intéressant  à  l'ordre  gé- 
néral, et  à  la  formation  de  l'esprit  public  dans  les 
campagnes.  La  malveillance  et  l'intrigue  s'agitent 
de  tous  côtés  pour  ressusciter  toutes  les  puissances 
du  fanatisme,  afin  d'exciter  le  desordre  partout  :  les 

Krédicants  se  targuent  des  principes  sacrés  de  la  li- 
crté  des  opinions  religieuses  pour  séduire  les 
hommes  simples  ,  et  les  contraindre ,  en  quelque 
sorte,  à  pratiquer  les  leurs,  et  h  réédifier  les  autels 
de  la  superstition.  Le  peuple,  bon  partout,  mais  à  l'i- 
gnorance duquel  il  n'est  point  encore  apporté  de  re- 
mède, se  laisse  agiter,  el  serait  entraîne  à  des  dés- 
ordres, si  la  vigilance  de  la  police  ne  se  déployait 
avec  activité  contre  les  scélérats  qui  veulent  de  nou- 


veau secouer  la  torche  du  fanatisme  sur  la  tête  de 
leurs  concitoyens.  Deux  de  ces  coquins ,  hommes 
sans  mœurs  et  sans  probité,  tels  que  sont  toujours 
ceux  qui  veulent  tromper  les  autres,  et  qui  parlent 
vertu  en  prêchant  le  crime,  viennent  d'être  arrêtés 
dans  le  district  de  Dreux*,  conformément  à  l'arrêté 
du  comité  de  sûreté  générale,  et  conformément  aux 
lois  de  la  justice  et  de  la  raison.  La  tolérance  et  la 
raison  vont  ensemble,  et  des  répubHcains  sont  né- 
cessairement tolérants  à  l'égard  de  leurs  frères  fai- 
bles ou  égarés;  mais  les  scélérats,  ambitieux  et  in- 
trigants, qui  ne  cherchent  qu'a  abuser  de  la  faiblesse 
et  de  l'ignorance  de  leurs  concitoyens,  pour  se  faire 
un  parti  en  les  égarant,  méritent  toute  Tanimadver- 
sion  des  hommes  vertueux,  et  il  est  du  bien  public 
qu'ils  soient  sévèrement  punis.  Au  reste,  ce  ne  serait 
encore  là  qu'un  palliatif;  il  faut  un  remède  qui  fasse 
une  cure  radicale  :  il  n'est  oue  dans  l'instruction 
publique,  el  les  fêtes  décaoaircs  en  offrent  une 
brancne  d'autant  plus  importante  que  Tinslruclion 
s'y  prendra  sous  la  forme  du  plaisir.  Ne  perdez  pas 
un  moment  pour  les  organiser  :  le  peuple  sait  que  la 
Convention  nationale  ve^t  son  bonheur,  et  recevra 
avec  empressement  toutes  les  institutions  qui  pour- 
ront en  émaner. 

•  Salut  et  fraternité.  Signé  Lequinio.  • 
Renvoyé  au  comité  d'instruction  publique. 

CoREN-FusTiER,  au  uom  du  comité  des  finances: 
Le  succès  de  la  révolution  est  absolument  subor- 
donné k  l'économie  la  plus  sévère  dans  la  partie  fi- 
nancière, et  à  la  plus  stricte  rigueur  dans  l'admi- 
nistration et  dans  l'emploi  des  domaines  nationaux; 
votre  comité  voit  cependant  avec  douleur  que  ces 
deux  bases  fondamentales  de  votre  gouvernement 
ne  cessent  d'éprouver  les  plus  rudes  atteintes  ;  cha- 
que jour,  on  vient  solliciter  ici  des  décrets  en  émis- 
sion de  fonds,  et  en  concession  des  domaines  natio- 
naux, sans  avoir  fait  examiner  si  ces  émissions  ou 
concessions  peuvent  se  concilier  avec  les  intérêts  de 
la  chose  publique  ;  les  décrets  sont  presque  toujours 
rendus  dans  les  premiers  moments  de  vos  séances; 
les  membres  de  votre  comité  sont  occupés  à  ces  épo- 
ques à  discuter  les  intérêts  qui  leur  sont  confiés;  ils 
ne  sont  pas  à  portée  d'instruire  la  Convention  des 
circonstances  qui  sont  très-souvent  de  nature  à  faire 
rejeter  ces  demandes  subversives  de  votre  système 
bienfaisant;  en  un  mot,  ils  se  voient  presque  tous 
les  jours  réduits  à  la  triste  nécessité  de  se  conformer 
a  des  décrets  dont  ils  ne  peuvent  se  dissimuler  les 
conséquences  les  plus  funestes.  Ces  considérations 
viennent  détre  soumises  à  la  délibération  de  votre 
comité  des  finances,  section  des  domaines,  el  il  a  cru 
remplir  le  plus  sacré  deses  devoirs  en  me  chargeant 
de  vous  proposer  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
sop  comité  des  finances,  sections  des  domaines,  dé- 
crète ce  qui  suit  : 

«  Aucune  émission  des  fonds  en  argent,  en  assi- 
gnats, aucune  concession  en  domaines  ou  bâtiments 
nationaux  ne  pourront  être  décrétées  qu'en  vertu 
d'une  loi  préexistante,  ou  sans  avoir  préalablement 
délibéré  avec  le  comité  des  finances.  • 

Ce  décret  est  adopté. 

—  Une  députation  de  la  commune  de  Lyon  est  ad- 
mise à  la  barre. 

Voraleur  :  La  commune  de  Lyon  nous  a  députés 
près  de  vous  pour  vous  présenter  l'expression  de 
ses  sentiments  el  de  son  inviolable  attachement  à  la 
république  et  à  la  représentation  nationale  :  recevez- 
en  le  plus  parfait  hommage. 

Grâces  vous  soient  rendues  sur  la  guerre  à  mort 
que,  depuis  le  9  thermidor,  vous  avez  déclarée  aux 


373 


assassins  et  aux  vdiours;  continuez  dVn  purger  le 
sol  (le  1.)  liberté,  et  vous  aurez  assuré  son  triomphe. 
Noiisjotonsun  voile  funèbre  sur  les  alri)cités  inouïes 
dont  nos  malheureuses  contrées  furent  si  longtemps 
le  théâtre,  sur  cette  foule  de  citoyens  pour  qui  un 
raitîneqient  de  barbarie  centupla  les  horreurs  de  la 
mort,  en  les  massacrant  en  détail  sous  la  mitraille 
du  canon,  et  en  faisant  ensuite  précipiter  dans  les 
eaux  du  Rhône  leurs  cadavres  encore  palpitants.  De 
semblables  tableaux  déchireraient  vos  entraides  pa- 
ternelles; nous  vous  en  épargnerons  les  détails. 

Environnés  de  désastres  et  de  ruines,  les  habitants 
de  Lyon  n'ont  plus  de  fortune  à  vous  offrir;  mais  ils 
vous  offrent  leurs  corps  pour  en  faire  un  rempart  à  la 
Convention  nationale,  et  leur  industrie  pour  contri- 
buer à  ramener  Tabondance  dans  la  république  par 
les  moyens  d'échange  qu'elle  peut  faire  renaître. 

Déjà  vous  avez  jeté  un  regard  de  bienfaisance  sur 
notre  malheureuse  commune,  en  suspendant  IVifet 
des  décrets  qui  pesaient  sur  ses  habitants;  veuillez 
en  ordonner  le  rapport;  révolutionnez  le  bien  avec 
vos  vertus,  de  même  qu'avec  ses  crimes  le  Catilina 
moderne  révolutionne  le  mal  ;  alors  nos  infortunés 
citoyens  pourront  se  livrer  à  leur  industrie,  et  réta- 
blir leur  manufacture  anéanties.  (On  applaudit.) 
Vive  la  république!  vive  la  Convention  ! 

LePbésident:  La  Convention  nationale  éprouve 
toujours  un  sentiment  pénible  lorsqu'elle  entend  re- 
tentir les  voûtes  du  temple  de  la  Justice  et  de  la  Li- 
berté des  horreurs  commises  dans  votre  commune, 
au  nom  de  ces  divinités  chéries  des  Français. 

Les  représentants  du  peuple,  jaloux  de  rétablir  le 
commerce  et  l'industrie  que  la  barbarie  et  la  sordide 
cupidité  avaient  anéantis  dans  des  flots  de  san^  et 
dans  les  décombres  des  fabriques  et  des  magasins, 
objets  de  la  jalousie  des  perfides  An^lais,'emploie- 
ront  les  moyens  puissants  que  la  nation  a  mis  dans 
leurs  mains  pour  venir  au  secours  des  opprimés,  et 
pour  punir  des  scélérats  ([ui  ont  couvert  la  France 
et  la  commune  de  Lyon  de  cadavres  et  de  ruines. 

La  Convention  décrète  la  mention  honorable  de 
la  pétition. 

Reverchon  demande  que  le  rapporteur,  qui  a  un 
travail  prêt,  soit  entendu. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

IzoARD,  au  nom  des  comités  de  sûreté  générale  et 
de  législation  :  Représentants  du  peuple, Te  calme  et 
Tespoir  succèdent  enfin  à  l'agitation  qui  fatigua  trop 
longtemps  quelques  sections  du  peuple  français.  De 
terribles  et  mémorables  épreuves  ont  appris  aux  en- 
nemis de  la  liberté  que  c'est  en  vain  qu'ils  tenteront 
de  détruire  son  empire,  et  à  ses  amis,  qu'il  est  plus 
facile  de  la  désirer  que  de  connaître  les  vrais  moyens 
d*en  jouir.  Eclairés  par  leur  propre  expérience,  la 
nation  et  ses  représentants  marchent  depuis  plusieurs 
mois  d'un  pas  plus  rapide  et  plus  ferme  vers  l'éta- 
blissement de  la  répubhque.  L'autorité  nationale  est 
partout  reconnue  et  respectée  ;  l'identité  des  senti- 
ments ciface  la  diversité  des  opinions;  la  justice  rè- 
gne, et  la  terreur  est  anéantie.  L'humanité  et  la  phi- 
losophie se  débarrassent  chaque  jour  des  entraves  de 
la  barbarie  et  de  l'ignorance  :  aussi  l'amour  des  lois 
de  la  république  a-t-il  pris  la  place  de  la  haine  con- 
tre le  gouvernement  oppresseur  oui  la  faisait  détes- 
ter. Un  esprit  vraiment  national  s'accroît  chaque 
jour  dans  une  progression  désespérante  pour  les  ty- 
rans coalisés  et  pour  les  séditieux  qui  cherchent  des 
sectateurs.  Le  peuple  par  son  opinion,  la  Convention 
par  ses  décrets,  les  armées  par  leurs  victoires,  tous 
consolident  ce  faisceau  desprit  national,  de  sagesse 
et  de  force,  dont  l'indissoluoilité  doit  garantir  celle 
de  la  république. 

Vos  comités  de  sûreté  géi  craie  et  de  législation 


viennent  vous  proposer  une  foi  qui  doit  contribuer 
à  resserrer  ce  faisceau,  qui  rattachera  fortement  à  la 
cause  de  la  liberté,  à  la  gloire  de  la  France,  et  à  la 
Convention,  un  grand  nombre  de  citoyens  utiles, 
(h  commerçants  industrieux,  d'ouvriers  vertueux  et 
h;i  biles. 

Vous  avez  renvoyé  à  ces  deux  comités  la  pétition 
d'une  députation  de  la  commune  et  celle  du  co- 
mité révolutionnaire  de  Lyon,  ainsi  que  la  propo- 
sition qui  vous  a  été  faite  de  rapporter  les  décrets 
contenant  les  dispositions  pénales  qui  pèsent  encore 
sur  cette  ville  ou  sur  ses  habitants. 

Déjà,  le  16  vendémiaire,  vous  avez  rendu  à  Lyon 
le  nom  célèbre  sous  lequel  cette  ville  est  connue 
dans  toutes  les  parties  du  monde,  et  vous  avez  rap- 
porté la  loi  qui  ordonnait  Télévation  d'une  colonne, 
monument  de  sa  rébellion  punie;  cependant  presque 
toutes  les  lois  que  la  rébellion  avait  déterminées 
subsistent  :  quelques-unes  sont  susceptibles  d'une 
suite  d'exécution  ;  d'autres  le  sont  d  extension  et 
d'arbitraire  dans  leur  application;  toutes  avaient  un 
objet  particulier  qui  a  été  rempli  :  celles  C[ui  con- 
tiennent les  mesures  à  prendre  pour  le  maintien  de 
l'autorité  nationale,  sont  évidemment  inutiles,  au- 
jourd'hui que  l'autorité  nationale  a  son  libre  et  en- 
tier exercice  ;  celles  qui  sont  la  suite  de  ces  mesures, 
comme  la  disposition  sur  la  séquestration  des  biens 
de  plusieurs  citoyrns  non  poursuivis  comme  rebel- 
les, sur  les  formalités  auxquelles  les  Lyonnais  sont 
soumis  pour  toucher  les  fonds  que  leurs  débiteurs 
ont  été  tenus  de  déposer,  et  les  autres,  qui  étaient 
une  conséquence  des  moyens  pris  pour  faire  cesser 
la  rébellion,  pourraient-elles  encore  être  appliauées 
comme  elles  l'auraient  été  au  moment  où  la  torce 
est  restée  à  la  loi  ? 

Citoyens,  vos  comités  n'ont  vu  dans  ces  lois, 
comme  vous  n'avez  vu,  il  y  a  plusieurs  mois,  dans 
celles  relatives  à  Bordeaux,  (|ue  des  dispositions  au- 
jourd'hui inutiles  au  maintien  de  l'autorité  natio- 
nîile;  dangereuses  en  ce  qu'elles  pourraient  devenir 
une  arme  dans  les  mains  d'une  faction  ;  onéreuses  à 
la  commune  de  Lyon,  dont  elles  paralysent  le  com- 
merce ;  injustes  envers  un  grand  nombre  de  ses  ha- 
bitants, qui  seraient  gênés  pour  une  rébellion  qui 
ne  serait  pas  la  leur,  dont  les  chefs  ont  été  punis, 
et  (|ui  a  déjà  fait  verser  tant  de  sang  français;  enfin 
nuisibles  à  la  république,  dont  l'intérêt  exige  que 
Lyon  reprenne  promptement  l'état  florissant  auquel 
sa  position,  sa  population,  ses  richesses  et  l'établis- 
sement de  la  liberté  française  l'ont  destiné. 

Citoyens,  en  consentant,  il  y  a  cjuatre  mois,  a  dé- 
clarer que  l'état  de  rébellion  avait  cessé,  vous  avez 
déclaré  rapporter  les  lois  propres  à  réprimer  la  ré- 
bellion; et  lorsQue  vous  avez  voulu  que  la  colonne 
infamante  ne  fut  pas  élevée,  vous  avez  manifesté 
l'intention  de  déclarer  que  la  rébellion  est  assez  pu- 
nie; car  vous  n'auriez  pas  voulu  élever,  en  quelque 
sorte,  une  colonne  morale  par  des  recherches  per- 
pétuelles sur  ces  événements.  Le  temps  (jui  s'est 
écoulé  depuis  n*a  pas  dû  changer  ces  dispositions. 

Vous  avez  entendu  les  députés  de  cette  commune 
vous  dire  que,  si  quelque  chose  s'oppose  à  ce  que 
son  commerce  soit  incessamment  reporté  au  degré 
de  prospérité  qu'il  doit  avoir,  c'est  l'existence  des 
décrets  qui  frappent  la  commune  entière  et  les  ci- 
toyens d  un  signe  de  réprobation,  et  qui  les  sépa- 
rent encore  des  autres  Français.  Vous  avez  entendu 
vos  commissaires  dans  cette  ville  vous  rendre  les 
meilleurs  témoignages  des  vertus  républicaines  de 
ses  habitants;  et  les  dei^nières  nouvelles  que  vous 
en  avez  reçues  vous  ont  appris  comment  ils  ont  cé- 
lébré l'anniversaire  du  supplice  du  dernier  roi  des 
Français. 


S74 


Ainsi  LyoD,  en  devenant  une  des  rilles  les  plus 
commerçantes  du  monde,  donnera,  avec  l'exemple 
de  l'industrie,  du  travail  et  de  Tactivité,  celui  de  la 
haine  des  rois  et  de  la  tyrannie,  de  la  patience  et  des 
vertus  civiques. 

Citoyens,  Lyon  eut  à  souffrir  à  toutes  les  époques 
de  la  révolution.  Sa  prospérité  excitait  la  haine  de 
rÂngleterrc  ;  les  richesses  de  ses  habitants  furent 
un  appât;  l.i  punition  des  rebelles  fut  une  occasion. 
Les  brigands  ne  la  négligèrent  ps,  et  après  que  cette 
ville  fut  ramener  à  Tunité  nationale,  au  lieu  de  ré- 
parer ses  malheurs  et  de  n'expier  que  ses  fautes, 
Lyon  éprouva  de  nouveaux  maux  que  sa  situation 
particulière  rendit  plus  violents  et  plus  douloureux 
qu*ils  ne  le  furent  pour  les  autres  patriotes  de  la  ré- 
publique. 

Ainsi,  tour  à  tour  victime  des  manœuvres  de  Té- 
tranger,  de  l'ambition  des  Capet  émigrés,  proscrits, 
de  l'audace  des  séditieux,  du  brigandase  des  fripons, 
de  la  cruauté  des  anthropophages,  de  rnypocrisie  des 
prêtres,  de  l'orgueil  des  aristocrates,  des  fureurs  des 
Vandales ,  la  deuxième  cité  de  la  république  fut  prête 
à  succomber  entièrement,  et  la  France  se  vit  sur  le 
point  d'être  privée  d'une  des  sources  les  plus  fécon- 
des de  sa  prospérité,  et  d'un  de  ses  plus  glorieux  or- 
nements. 

Mais,  citoyens,  à  ces  époques  malheureuses  de  la 
révolution  a  succédé  ennn  celle  où  l'exercice  plein 
et  entier  de  l'autorité  de  la  nation,  par  ses  représen- 
tants, donne  à  la  France  le  juste  espoir  de  fleurir 
bientôt  sous  l'empire  des  lois  républicaines,  et  où 
la  vigueur  et  la  fermeté  du  gouvernement  ne  laisse- 
ront plus  égarer,  au  gré  des  rojfalistes  et  des  factieux, 
aucune  section  du  peuple  ;  et  si  tous  les  mouvements 
et  tous  les  systèmes  ont  singulièrement  porté  sur  la 
ville  de  Lyon,  la  révolution  du  9  thermidor  doit  aussi 
la  faire  jouir  des  bienfaits  particuliers. 

Parmi  ces  bienfaits,  représentants  du  peuple,  un 
des  plus  grands  pour  les  Lyonnais,  c'est  de  donner 
à  leur  inaustrie  un  libre  cours,  en  eflaçant  la  tache 
qui  obscurcit  pour  eux  le  titre  de  citoyen  français, 
en  terrassant  la  source  de  nouvelles  divisions,  en 
arrachant  le  germe  des  craintes  particulières  et  de 
la  terreur  générale,  en  ôtant  aux  fripons  l'occasion 
de  les  voler;  entin,  en  leur  rendant,  vis-à-vis  des 
autres  villes  commerçantes  de  la  république  et  du 
monde  entier,  le  crédit  bien  justement  acquis  par 
leur  fidélité,  leur  habileté  et  leur  sagesse  dans  le 
commerce,  et  qu'ils  recevront  à  l'instant  où  vous 
aurez  rapporté  des  décrets  dont  l'existence  frappe, 
pour  ainsi  dire,  de  mainmorte,  leurs  capitaux,  en 
même  temps  qu'elle  étouffe  les  conceptions  de  leur 
esprit. 

Ce  bienfait  en  sera  un  aussi  pour  les  autres  villes 
commerçantes  de  la  république  et  pour  les  départe- 
ments oui  environnent  Lyon  ;  il  s'étendra  jusqu'aux 
places  ae  commerce  étrangères;  et  ce  n'est  pas  un 
moyen  indigne  de  vous,  pour  faire  connaître  dans 
toutes  les  parties  de  la  terre  l'heureux  changement 
arrivé  dans  la  situation  de  la  république  française, 

3ue  de  renouer  les  fils  innombrables  qui  répon- 
ent  de  tous  les  pays  civilisés  à  la  ville  la  plus  com- 
merçante. 

Ainsi,  si  Tinterruption  de  ses  correspondances  a 
appris  à  nos  ennemis,  jaloux  du  succès  de  leurs  per* 
fides  manœuvres,  la  rébellion,  le  siège  et  la  destruc- 
tion d'une  partie  d'une  de  nos  plus  belles  cités,  leur 
renouvellement  les  consternera  en  leur  apprenant 
le  triomphe  de  la  république  et  de  la  justice  sur  les 
rebelles  et  sur  les  dévastateurs,  et  encouragera  nos 
alliés  et  les  neutres,  en  ne  leur  laissant  aucun  doute 
sur  la  volonté  actuelle  et  unanime  de  la  nation,  et 
sur  le^  bons  effets  de  nos  nrincipes. 


Que  Lyon  reprenne  son  antique  Splendeur,  «| 
qu^  s'embellisse  encore  de  tous  les  avantages  que 
la  liberté  lui  assure;  que  ses  nombreux  habitants 
redoublent  d'activité  et  d'industrie  pour  la  gloire  et 
la  prospérité  nationale,  et  pour  faire  perdre  jusqu'au 
souvenir  de  ses  torts  et  de  ses  malheurs. 

Que  l'Angleterre  frémisse  en  apprenant  que  le 
travail  et  le  commerce  sont  appelés  avec  franchise 
à  cimenter  l'affermissement  de  la  république  ;  qu'elle 
désespère  de  voir  nos  grandes  cités  ruinées  et  anéan- 
ties par  l'effet  de  sa  tache  perfidie;  (qu'elle  redoute 
les  fabricants,  les  ouvriers,  les  négociants  de  Lyon, 
de  Paris,  de  Bordeaux,  de  Marseille,  de  Rouen,  de 
Nantes,  et  de  tant  d'autres  ateliers  bientôt  ranimés 
de  l'activité  et  du  génie  français,  comme  ses  soldats 
ont  craint  le  fer  républicain  dans  la  Belgique  et  dans 
ta  Hollande;  qu'elle  soit  détrompée  sur  le  fol  espoir 
de  sa  jalousie.  Non,  tout  n'est  pas  détruit  en  France, 
et  une  prompte  restauration  va  donner  un  bel  exem- 
ple de  ce  que  peut  l'industrie  française,  animée  par 
l'esprit  républicain,  et  soutenue  par  un  gouverne- 
nement  juste. 

Les  comités  au  nom  desquels  je  parle  n*ont  pas 
douté,  citoyens,  que  tel  serait  Vetfel  dû  rapport  des 
décrets  rendus  contre  Lyon.  Le  peuple  français  est 
prêt,  toujours  ardent  pour  la  liberté,  courageux, 
sensible  et  industrieux,  il  aura  bientôt  recouvert 
par  des  monuments  de  félicité  et  de  liberté  publi- 
que les  plaies  du  royalisme,  de  la  féodalité  et^du 
vandalisme.  C'est  à  nous,  ses  représentants,  à  qui 
appartiennent  le  devoir  et  la  gloire  de  le  diriger 
dans  la  plus  belle  partie  de  la  carrière  au'il  a  encore 
à  parcourir  :  recueillons  les  restes  précieux  échap- 
pés à  la  dévastation  ;  rattachons  par  l'excellence  dies 
principes  du  gouvernement,  et  par  une  marche  ferme 
et  assurée,  les  parties  séparées  par  l'anarchie;  ral- 
lions, par  la  force  de  la  vérité,  les  esprits  divisés  par 
le  mouvement  de  la  révolution  et  par  les  habitudes 
monarchiques;  réprimons  avec  une  juste  et  fermé 
sévérité  les  intrigants  et  les  séditieux  de  toute  es- 
pèce; ne  détruisons  jamais;  créons  quand  nous  le 
pouvons;  conservons  toujours,  mais  surtout  appro- 
prions les  hommes  et  les  choses  au  gouvernement 
républicain. 

Le  rapporteur  lit  un  projet  de  décret  qui  est  adopté 
en  ces  termes  : 

>  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  ses  comités  de  sûreté  générale  et  de  lé- 
gislation, décrète  ce  qui  suit  : 

■  Art.  I«r.  Les  lois  rendues  les  12  et  23  Juillet, 
18  août  (relatives  à  Tarreslalion  des  marchandises 
expédiées  pour  Lyon),  l«r  octobre  1793 (vieux  style), 
28  vendémiaire,  12  brumaire,  8  et  21  germinal  de 
l'an  3  ;  les  dispositions  de  l'article  1«'  du  décret  du 
21  juin,  Il  du  décret  du  3  juillet,  III  du  décret  (\u. 
21  vendémiaire,  H  et  III  du  décret  du  12  ventôse, 
lesdites  lois  relatives  h  la  rébellion  de  Lyon,  cesse- 
ront d'avoir  leur  exécution» 

«  II.  Les  arrêtés  pris  par  les  comités  de  salut  pu- 
blic et  de  sûreté  générale,  ceux  pris  par  les  repré- 
sentants du  peuple  à  Lyon,  où  dans  les  départements 
environnants  et  près  I  armée  des  Alpes,  contenant 
des  dispositions  pénales  contre  la  commune  de  Lyon, 
ses  habitants  ou  autres  accusés  de  complicité  pour 
les  faits  qui  avaient  motivé  les  décrets  énoncés  en 
l'article  !«',  cesseront  de  même  d'avoir  leur  exé- 
cution. 

«  III.  Tous  les  détenteurs  de  fonds  déposés  en  exé- 
cution des  lois  des  8  et  SI  germinal  de  l'an  2  seront 
tenus  de  les  délivrer  de  suite,  sans  formalités  et  sans 
retenue,  à  la  représentation  de  leur  récépissé. 

•  IV.  Tous  scellés  et  séquestres  mis  en  exécution 
des  décreU  rapportés  aux  articles  !•'  et  II  seront 


S75 


levés,  à  charge,  par  ceux  dont  ils  frappaient  les  biens, 
d'en  payer  tous  les  frais,  de  ne  pouvoir  résilier  les 
baux  qui  auraient  été  passés  c|u*en  la  Torine  de  Tar- 
ticle  XV  du  titre  II  ae  la  loi  du  5  novembre  1790 
(vieux  style). 

«  V.  Nul  citoyen  ne  pourra  être  recherché  pour 
les  faits  qui  ont  motivé  les  lois  et  arrêtés  compris  aux 
articles  1*^'  et  II.  Les  dispositions  de  la  présente  loi 
ne  s*appliquenl  point  à  Précy,  qui  en  est  expressé- 
ment excepté.  • 

—  Clauzel  donne  lecture  d'une  lettre  de  Pérès, 
représentant  du  peuple  près  les  armées  du  Nord  et 
de  Sambre-et-Meuse ,  dans  laquelle,  après  avoir 
rendu  compte  du  bon  esprit  qui  règne  à  Valencien- 
nés,  il  s'exprime  ainsi  : 

«  Je  terminerai  par  vous  rapporter  une  partie  de 
la  conversation  que  j*ai  eue  avec  le  plénipotentiaire 
de  La  Haye,  que  yai  vu  à  son  passage  ici,  et  qui 
vous  porte  Theureuse  nouvelle  que  nos  troupes  oc- 
cupent toute  ta  Hollande,  et  que  ses  habitants  ne 
sont  plus  que  nos  amis  et  nos  frères.  Il  m'a  dit  :  «  Je 

•  vais  à  Paris  avec  les  pouvoirs  les  plus  illimités,  et 
«  traiter  «vec  la  nation  française  :  je  remplis  cette 

•  mission  avec  plaisir,  parce  que  vous  avez  un  gou- 

•  vernement  depuis  la  chute  de  Robespierre;  mais, 

•  s*il  vivait  encore^  je  vous  avoue  que  je  ne  l'aurais 
«  pas  acceptée.  • 

•  Quelles  sources  de  réflexions  dans  ce  peu  de 
mois!  Qu'ils  répondent  les  terroristes!  Sont-ce  leurs 
principes  de  sang,  ou  bien  est-ce  la  justice  de  la  Con 
vçntion  qui  fait  trembler  les  puissances  coalisées?» 

La  Convention  décrète  l'insertion  au  Bulletin  de 
cette  lettre,  et  le  renvoi  au  comité  d'instruction  pu- 
blique et  des  secours  publics. 

PoTTic;»  :  Je  viens  vous  présenter  les  réclamations 
d'une  iamille  infortunée,  qui  gémit  sous  le  poids 
d'une  atrocité  monstrueuse.  Les  faits  ont  déjà  reçu 
une  $orte  de  publicité  ;  je  n'aurai  besoin  que  de 
vous  les  rappeler.  Je  veux  parler  de  la  famille  Loi- 
zerolles. 

Loizerolles  père,  son  épouse  et  son  fils,  étaient  dé- 
tenus dans  la  maison  d'arrêt  dite  Lazare. 

Loizerolles  HIs,  âgé  de  vingt-deux  ans,  fut  com- 
pris dans  une  liste  de  prévenus  de  conspiration  dans 
riiitérieur  de  la  maison  d'arrêt.  Il  se  trouva  au  nom- 
bre de  ceux  contre  lesquels  il  lut  porté,  le  6  ther- 
midor, un  acte  d'accusation,,  et  qui,  par  suite,  de- 
vaient être  traduits  au  tribunal  révolutionnaire. 

On  assure  que  lorsqu'on  alla  le  chercher  à  la  mai- 
son d'arrêt  pour  le  traduire  avec  ses  coaccusés  à  la 
Conciergerie,  Loizerolles  père,  qui  en  lut  instruit, 
trompa  1  œil  et  la  vigilance  de  ceux  qui  étaient  char- 
gés de  cette  opération.  II  se  substitua  à  son  HIs. 

Loizerolles  père»  traduit  le  lendemain  8  thermidor 
au  tribuual,  y  fu^  compris  dans  la  liste  des  condam- 
nés à  mort,  et  exécuté  le  même  ^ur. 

La  veuve  Loizerolles  et  son  tils  ont  depuis  été  mis 
en  liberté.  Ils  ont  réclamé  l'un  et  l'autre  contre  l'il- 
légalité commise  dans  la  condamnation  de  Loizerol- 
les père;  ils  vous  demandent  de  nç  pas^  aggraver 
leur  peiue  par  la  confiscation  des  biens  dépendant 
de  sa  succession. 

Le  comité  a  examiné  cette  demande  avec  la  plus 
sérif^use  attention.  Des  copies  ofticielles  et  figurée3 
de  la  procédure  ont  été  mises  sous  ses  yeux. 

Il  a  vu  d'abord  que  l'acte  d'accusation  du  6  ther- 
midor a  été  dirigé  contre  Loizerolles  fils.  On  y  lit  : 
François  Simon  LoizeroUei  fils,  dgé  de  S2  ans» 
Cette  dénomination  existe  encore  sur  la  minute,  et 
n'a  éprouvé  aucun  changement,  aucune  altération. 
Il  en  résulte  que  c'est  Loizerolles  fils  qui  était  ac- 
cusé et  qui  devait  être  mis  en  jugement. 

En  second  lieu,  dans  l'acte  contenant  la  déclara- 


tion des  jurés,  on  remaraue  à  l'article  V  les  mêmes 
dénominations  que  dans  l'acte  d'accusation  :  Fran- 
çois-Simon Loixerolles  fUs,  dgé  de  22  ans;  on  a  ef- 
facé le  mot  François  pour  y  substituer  le  mot  Je(in  ; 
le  mot  fils  s'y  trouve  également  rayé,  et  remplacé 
par  celui  père;  et  les  chiffres  22  sont  surchargés  de 
ceux  61  ;  on  y  a  ajouté  ces  mots  :  ancien  lieutenant 
général  du  régiment  de  t Arsenal,  ex-noble. 

Loizerolles  père  avait  été  lieutenant  général  dq 
bailliage  de  l'Arsenal. 

Cette  déclaration,  lorsqu'il  la  fit,  fut  sans  doute 
mal  entendue,  et  par  suite  mal  rendue. 

En  troisième  lieu,  dans  l'expédition  figurée  du  ju- 
gement, on  voit,  dans  la  récapitulation  des  noms 
portés  en  l'acte  d'accusation,  celui  de  Jean- Simon 
Loizerolles  père ;ensi\\le,  dans  la  transcription  de 
l'acte  d'accusation,  en  tête  de  ce  jugement,  on  lit  à 
l'article  V  :  François -Simon  Loixerolles  fils,  dgé  de 
22  ans;  on  y  a  seulement  effacé  le  mot  François  pour 
Y  substituer  celui  de  Jean,  Les  autres  expressions 
ae  LoixeroHes  fils,  dgé  de  il  ans,  y  sont  restées  en 
entier.  Dans  le  restant  de  l'acte,  on  y  trouve  la  dé- 
nomination de  Jean-Simon  Loixerolles, 

Voilà  ce  qui  résulte  de  l'examen  des  pièces. 

Le  comité  a  dû  ne  consulter  que  les  principes. 

Nul  ne  pourra  être  traduit  au  tribunal  sans  an 
acte  d'accusation. 

Il  n'y  a  point  de  jugement  légal  là  où  il  n'y  a  point 
d'acte  d'accusation. 

La  confiscation  ne  peut  être  que  la  suite  d'une 
condamnation  légale;  par  conséquent,  où  il  n'y  a 
point  de  condamnation  légale,  il  ne  peut  y  avoir  de 
confiscation. 

Ici,  c'est  Loizerolles  fils  qui  avait  été  accusé,  c'est 
Loizerolles  père  qui  a  été  mis  en  jugement  et  con- 
damné; l'illégalité  de  la  condamnation  est  palpable. 

J'en  ai  dit  assez  sans  doute  pour  motiver  l'avis  dii 
comité.  Voici  le  projet  de  décret  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  de  législation  sur  la  péti- 
tion ae  la  citoyenne  Marteau,  veuve  Loizerolles,  et 
du  citoyen  François  Loizerolles  fils,  renvoyée  par 
la  commission  des  revenus  nationaux,  tendant  à  ob- 
tenir la  mainlevée  pure  et  simple  des  scellés  posés 
après  l'exécution  de  Jean-Louis  Loizerolles  père  ; 

•  Considérant  que  l'accusation  du  6  thermidor  est 
portée  contre  François  Loizerolles  fils,  âgé  de  22 
ans;  que  dans  la  déclaration  des  jurés  se  trou- 
vent les  mêmes  dénominations;  qu'on  y  a  substitué 
les  mots  Jf an  au  lieu  de  François;  père^  au  lieu 
de  fils;  et  surchargé  les  deux  chiffres  22,  poiu* 
mettre  les  chiffres  61  ;  qu'on  y  a  ajouléces  mois  : 
Ancien  lieutenant  général  du  régiment  de  l'Arse- 
nal; 

■  Considérant  que,  dans  la  transcription  de  l'acte 
d'accusation,  en  tête  du  jugement  du  8  thermidor, 
on  y  trouve  seulement  le  o^ot  Jean,  substitué  à  ce- 
lui François;  qu'on  y  a  laissé  les  mots  fils,  dgé 
de  22  ans;  qu'ensuite ,  dans  le  vu  des  pièces  et 
dans  la  prononciation  du  jugement,  se  trouvent  les 
mots  Jean-Simon  Loizerolles; 

•  Considérant  que  l'acte  d'accusation  a  été  porté 
contre  Loixerolles  fils,  alors  détenu  dans  la  maison 
d'arrêt  dite  Lazare  ,  et  depuis  mis  en  liberté  ;  qu'il 
n\  a  aucun  acte  d*accusation  porté  contre  Loizc- 
rollçs  père  ;  qu'il  ne  pouvait  par  conséquent  être 
mis  en  jugement  ;  qu'il  n'a  été  compris  sur  la  liste 
des  condamnés  que  par  une  substitution  de  nom 
infiniment  coupable ,  et  qui  fait  disparaître  à  son 
égard  toiUe  apparence  de  lormes  légales,  décrète  ce 
quiswil; 

•  Le  jugement  du  tribunal  révolutionnaire,  du  8 
thermidor,  est  réputé  non  avenu  contre  Jean-Si- 


S76 


mon  Loizerollcs  ;  il  n*y  a  lieu  à  la  coniîscatiôn  des 
biens  dépendant  de  sa  succession  ;  les  scellés  et  sé- 
questres qui  pourraient  avoir  été  mis  seront  levés 
sur-le-champ  partout  où  besoin  sera. 

•Le  présent  décret  ne  sera  pas  imprimé  ;  il  en  sera 
envoyé  un  exemplaire  manuscrit  à  la  commission 
des  revenus  nationaux.»  —  Ce  décret  est  adopté. 

—  Guyton  présente  à  rassemblée  l'état  des  arse- 
naux de  la  république,  il  propose,  et  rassemblée 
décrète  : 

10  Que  le  jury  des  armes  et  inventions  de  guerre, 
établi  près  la  manufacture  de  fusils  de  Paris,  cessera 
toutes  fonctions  le  20  du  présent  mois  ; 

20  Que  le  représentant  du  peuple  Riveri  se  rendra 
près  la  fonderie  de  Creuzel ,  département  de  Seine- 
ct-Oise. 

(Nous donnerons,  dans  un  prochain  numéro,  le 
rapport  et  le  décret.) 

—  Un  membre  propose  un  projet  de  décret  relatif 
à  l'organisation  des  pompiers. 

L'assemblée  en  ordonne  l'impression,  et  ajourne 
la  discussion. 
La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 

SÉANCE  DU   15  PLUVIOSE. 

Les  citoyens  de  Landau  écrivent  : 

•  Nous  vous  remercions  d'avoir  envoyé  au  milieu 
de  nous  un  représentant  du  peuple  qui,  par  les  con- 
solations toncnantes  qu  il  répand  parmi  les  familles 
aflQigées,  et  l'activité  qu'il  met  dans  l'exécution  des 
mesures  que  vous  avez  décrétées,  seconde  vos  inten- 
tions paternelles  avec  toute  Ténergie  désirable. 

«  Un  autre  motif  excite  notre  reconnaissance: 
c'est  le  décret  que  vous  venez  de  porter  à  l'égard  du 
citoyen  Dantzel.  Nous  regardons  comme  un  jour 
heureux  celui  où  le  voile  de  l'intrigue  et  de  la  ca- 
lomnie a  été  déchiré,  et  où  il  a  été  rendu  hommage 
au  civisme  et  à  la  conduite  ferme  et  courageuse  de 
ce  représentant.  • 

Ces  citoyens  terminent  par  inviter  l'assemblée  à 
sévir  contre  les  hommes  qui  cherchent  à  avilir  la  re- 
présentation, et  à  frapper  du  glaive  de  la  loi  les  au- 
teurs du  système  de  la  terreur. 

Mention  honorable,  insertion  au  Bulletin. 

—  Les  citoyens  de  Passy-lès-Paris  applaudissent 
aux  succès  de  nos  armées  dans  la  Hollande!  Ils  s'ex- 
priment ainsi  : 

•  Mille  actions  de  grâces  soient  rendues ,  nous 
sommes-nous  écriés,  a  ces  généreux  républicains 
qu'aucun  obstacle  n'arrête  dans  leur  marche  vic- 
torieuse !  mille  actions  de  grâces  soient  rendues 
aux  sages  législateurs  qui,  par  des  dispositions  sa- 
vantes, ont  préparé  leurs  triomphes. 

«  Représentants,  l'armée  du  Nord  et  de  Sambre- 
et  Meuse  vient  de  confirmer  de  nouveau  cette  vérité, 
(lue  rien  ne  peut  résister  à  des  soldats  enflammés  de 
1  amour  de  la  liberté. 

•  Les  Bataves  ont  été  invincibles  et  ont  soutenu 
longtemps  avec  avantage  les  efforts  d'un  grand  em- 
pire ,  quand  ils  se  sont  levés  contre  le  despotisme  ; 
ils  ont  été  vaincus  lorsqu'ils  ont  été  courbés  sous 
le  joug  du  stathoudcr,  et  conquis  par  les  défenseurs 
de  la  liberté  lorsqu'ils  ont  été  coalisés  avec  les  tyrans. 

•  Puisse  ce  jgrand  exemple  présager  la  destinée 
d'une  nation  rivale  et  perfide,  autrefois  libre,  et  ac- 
tuellement dominée  par  une  cour  corrompue  !  Puis- 
se-t  il,  apprendre  à  l'univers  le  prix  de  la  liberté.  • 

—  Génissieux  fait  lecture  d'une  pétition  de  deux 

Prisonniers  de  guerre  qui  ont  été  pris  sur  un  navire 
ollandais  ;  ces  deux  citoyens  déclarent  qu'ils  sont, 
l'un  Danois,  et  l'autre  Suédois,  et  qu'ils  n'étaient  sur 
le  navire  hollandais  que  comme  passagers  ;  ils  ré- 
clament leur  liberté  en  qualité  de  neutres. 


Renvoyé  au  comité  de  salut  public  pour  constater 
le  fait  et  faire  droit  à  leur  pétition. 

—  Le  comité  des  finances  propose  d'étendre  aux 
ecclésiastiques  émigrés  les  dispositions  qui  annu- 
lent les  titres  cléricaux  faits  en  faveur  des  prêtres 
déportes. 

Génissieux  s'y  oppose.  Il  établit  qu'il  y  a  une  énor- 
me différence  entre  les  uns  et  les  autres;  que  le 
motif  qui  a  décidé  à  laisser  ces  titres  aux  familles 
des  prêtres  déportés  est  la  médiocrité  de  leur  for- 
tune ;  mais  que  les  émigrés  sont  de  familles  riches 
et  ci-devant  privilégiées.  Il  demande  la  question 
préalable. 

DuROY  :  Je  crois  au  contraire  que  ces  titres  cléri-  . 
eaux  n'étaient  qu'un  objet  de  faste  pour  les  ecclé- 
siastiques, et  que  la  pension  n'en  était  jamais  payée  ; 
que  ce  serait  une  injustice  de  la  faire  payer  au  trésor 
public  par  ceux  qui  les  ont  souscrits  par  charité. 

Le  projet  du  comité  est  adopté  avec  l'amende- 
ment, proposé  par  Musset,  d'en  restreindre  les  dispo- 
sitions aux  titres  patrimoniaux.  (La  suite  demain,) 

N.  B,  —  Dans  la  séance  du  lô^  la  Convention  a 
discuté  la  question  de  savoir  si  l'on  enverrait  des 
représentants  du  peuple  dans  les  colonies.  On  a  ren- 
voyé n  un  nouvel  examen  des  comités. 

—  Le  comité  de  sûreté  générale  a  donné  des  dé- 
tails sur  la  situation  de  Marseille;  les  hommes  de 
sang  ne  s'en  sont  pas  tenus  aux  cris  de  vive  là  Mon- 
tagnel  vivenl  les  Jacobins I  merde  pour  la  Conven- 
tion et  ceux  gui  la  soutiennent!  Ils  ont  assassiné  un 
canonnier  du  bataillon  des  Gravilliers,  et  cinq  de 
ses  camarades  qui  voulaient  leur  imposer  silence 
ont  été  blessés.  Ils  ont  assassiné,  par  derrière,  au 
détour  d'une  rue,  un  sergent  du  même  bataillon. 
Tout  faisait  croire  que  l'on  voulait  absolument  exci- 
ter un  mouvement  général  dans  Marseille,  car  le 
représentant  du  peuple  Salicetti  avait  ordonné  que 
le  bataillon  des  Gravilliers ,  dont  l'esprit  est  ex- 
cellent, serait  remplacé  à  Marseille  par  un  bataillon 
de  cette  commune,  qui  lient  à  Toulon  la  conduite 
la  plus  indécente.  Les  mesures  prises  par  les  ri^pré- 
senlatits  du  peuple  Mariette  et  Cadroy  ont  détourné 
les  malheurs  dont  cette  ville  était  menacée. 

La  Convention  a  approuvé  la  conduite  de  la  gar- 
nison, et  applaudi  au  rappel  que  le  comité  de  sûreté 
générale  a  fait  du  représentant  Salicetti. 

^tt  rédacteur, 

Paris,  le  19  pluriose. 

Citoyen,  je  réclame  contre  la  manière  dont  tu  as 
rendu  une  partie  de  mon  opinion,  dans  la  séance 
du  9  de  ce  mois. 

En  lisant  l'avant-dernier  alinéa  de  cette  opinion , 
15e  colonne  du  Numéro  131  (primidi  11  pluviôse), 
on  pourrait  croire  que  j'ai  préjugé  l'affaire  des 
trois  représentants  dénoncés.  La  vérité  est  que  je 
me  suis  borné  à  dire  ^ue  j'aspirais ,  comme  tout 
le  monde,  après  leur  jugement,  afin  que,  cette 
aOaire  finie,  ceux  de  mes  collègues  et  moi,  dont 
on  veut  étouffer  tous  les  jours  la  voix ,  paralyser 
l'énergie,  flétrir  l'intacte  probité,  en  nous  objectant 
sans  cesse  que  nous  sommes  des  terroristes,  des 
mannequins,  des  agents,  des  lieutenants  de  ces  an- 
ciens membres  du  gouvernement  ;  afin  ,  dis-ie ,  que 
nous  puissions  enfin  jouir  de  la  liberté  entière  des 
opinions  pour  défendre  les  droits  du  peuple,  la  li- 
berté et  l'égalité.  Voilà  ma  véritable  idée,  et  je 
répète  qu'aucune  puissance  sur  la  terre  ne  pourra, 
dans  aucun  cas,  m'empêcher  de  voter  selon  ma 
conscience  et  mes  principes. 

J'attends  de  ton  impartialité  que  tu  inséreras  ma 
réclamalioii  dans  ton  journal. 

Vive  la  république  démocratique  !  ?.-J.  Duuem. 


GAZETTE  NATIONALE  oa  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

No  138.  Octidi  18  Pluyiosb,  Van  8«.  (Vendredi  6  Février  1796,  vieuoi  style.) 


POLITIQUE. 

ANGLETERRE. 

DÉBATS  DO   PARLBIiniT. 

Chambre  des  Communes,  —  Séance  du  Sjanvien 

Le  subside  payé  au  roi  de  Prusse  a  fait  fe  premier  objet 
des  dèbaK  M.  Jekyll  a  «ommé  le  chancelier  de  Téchiquier 
de  déclarer  combien  il  avait  remis  au  roi  de  Prusse  sur 
les  2  millions  et  demi  sterling  que  la  Grande-Bretagne  et 
les  états  généraui  s'étaient  engagés  de  payer.  1  million 
S00,000  livres,  a  répoudu  M.  Pilt;et  le  dernier  payeiœnt 
est  de  septembre  dernier.   ^ 

Alors  M.  Jekyll  a  demandé  communicalion  de  Tétat  des 
troupes  employées  pour  le  service  de  T Angleterre,  motion 
à  laquelle  M.  Piti  s*esl  opposé,  sous  piéieite  que  le  compte 
officiel  vDç  lui  eo  avait  pus  encore  été  remis* 

M.  Fox  a  eu  occasion  d'intervenir  dans  ce  court  débat; 
il  a  soutenu  et  démontré  au  ministre  que  ces  troupes 
avaient  coûté  une  fois  plus  que  celles  qu'on  avait  précé- 
demment employées.  Le  ministre,  vivement  pressé  par  son 
adversaire,  s*en  est  tiré  en  rejetant  sur  des  circonstances 
particulières  le  mauvais  succès  de  ces  taupes,  qu'il  a  pré- 
tendu avoir  été  pourlaut  très-utiles  à  la  cause  générale,  et 
même  au  point  qu'il  n'avait  qu'à  s'applaudir  de  ce  truite. 
Une  majorité  de  87  voix  sur  1^3  votants  a  rejeté  la  mo- 
tion de  M.  Jekyll. 

M.  Sheridan  prend  la  parole,  et  déclare  que  la  suspen- 
sion de  Chabeoâ  corpus,  ce  palladium  de  la  liberté  civile, 
et  la  continuation  de  la  guerre  ont  une  liaison  plus  étroite 
<|u'll  ne  le  parait  à  l'obserrateur  superficiel.  Les  ministres, 
dans  leur  projet  de  continuer  la  guerre,  afin  d'accroître 
leurs  prérogatives,  ont  établi  la  nétes|îté  de  la  faire  sur  la 
situation  intérieure  et  les  dispositions  particulières  du  peu- 
ple, qu'ils  ont  calomnié.  Que  faire  pour  n'être  point  la 
dupe  de  leur  argumentation  captieuse?  Il  faut,  dans  la 
crise  présente,  examiner  si  le  cœur  des  Anglais  e&t  fidèle 
ou  non,  et  si  ceux  qui  d'abord  avaient  été  soupçonnés  des 
crimes  les  plus  atroces  se  trouvent  entièrement  discnlpt^ 
11  setrouveen  même  temps  rigoureusement  démontré  qu'un 
attachement  et  un  respect  inébranlables  pour  le  roi  et  la 
cobslllution  font  la  base  du  caractère  national  ;  que  ce 
n'est  donc  qu'un  prétexte  dont  on  se  couvre,  puisqu'on 
répète  qu'il  faut  empêcher  les  principes  français  de  conti- 
nuer à  pervertir  l'Angleterre. 

«  Je  combats  aujourd'hui,  ajoute  Torateur,  un 
honorable  membre  (M.  Dundas),  qui,  prévenant  la 
discussion,  a  déjà  fait  sa  profession  de  foi  sur  l'acte 
de  suspension  :  il  croit  que  les  circonstances  exigent 
de  la  renouveler.  Si  l'on  m'objecte  que  nous  avons 
encore  un  mois  avant  que  celte  suspension  expire, 
et  que  par  conséquent  je  dois  attendre  pour  en  par- 
ler, je  répondrai,  comme  le  père  d'un  honorable 
membre  (M.  Pitt)  :  •  La  tyrannie  ne  devant  pas  durer 

•  quarante  jours,  ne  doit  pas  durer  même  une  heure; 

•  et  j'ajouterai  que  sa  douceur  apparente  ne  la  rend 

•  pas  plus  tolérable.  » 

•  L'acte  &haheas  corpus  est  la  sauvegarde  de  no- 
tre liberté.  Non-seulement  je  demande  qu*on  en  ré- 
voque la  suspension,  mais  je  pose  en  principe  qu'il 
ne  doit  jamais  être  suspendu.  11  a  fallu  employer, 
dans  le  préambule  du  bill  attentatoire  à  cet  acte, 
le  prétexte  d'une  conspiration  existante.  Mais  ces 
jconspirations  n'ont  jamais  paru  que  des  inventions 
ministérielles  aux  membres  de  ce  côté  de  la  Cham- 
bre, et  le  jugement  du  jury  a  prouvé  qu'ils  ne  s'é- 
taient pas  trompés.  Je  saisis  celte  occasion  pour 
avertir  charitablement  quelques  membres  oui  se 
£ont  permis  d'attaquer  ce  jugement,  que  la  loi  du 

»•  Série.  —  TomêX. 


pays  ne  permet  pas  de  le  faire  impunément,  et  qu'il 
existe  un  exemple ,  qui  doit  leur  servir  de  leçon, 
d*un  habile  magistrat  arrêté  pour  avoir  parlé  sans 
respect  du  procès  par  jury.  Ou  a  prétendu  que  le 
jugement  a'un  jury  n'était  pas  une  preuve  d  inno- 
cence, et  qu*il  servait  seulement  à  empêcher  qu*OQ 
ne  fut  poursuivi  de  nouveau  pour  le  même  crime. 
C'est  ignorance  ou  mauvaise  foi;  car  les  lois  de  l'An- 
gleterre ne  connaissent  pas  de  milieu  entre  le  crime 
et  l'innocence;  et  les  parHsans  de  cette  opinion  allé- 
gueraient en  Tain  la  déclaration  du  grand  jury,  puis- 
qu'elle n'est  pas  fondée  sur  des  preuves  contradictoi- 
res, et  qu'il  n*en  résultequ'une  présomption  motivée 
sur  des  dires  vagues. 

«  Un  honorable  membre  (M.  Wyndham),  ayant 
jeté  le  gant,  il  trouvera  bon  que  je  le  ramasse  ;  et  je 
lui  adresse  le  même  reproche  qu'il  a  fait  à  mon  ho- 
norable ami  (M.  Fox).  J&  l'excuserai  pourtant,  d'o- 
près  le  voisinage  dans  lequel  il  se  trouve  :  il  paraît 
que  le  manque  de  mémoire  est  une  maladie  qui  se 
gagne. . 

Ici  Torateur  fait  allusion  à  ce  qui  se  passa  lors  de  rin- 
terrogatoire  de  Uome-Tooke,  où  M.  Pitt,  paraissant  comme 
témoin,  et  Interpellé  par  l'accusé  sur  un  fait  nécessaire- 
ment de  sa  connaissance,  répondit  qu'il  ne  s*en  souvenait 
pas. 

M.  Sheridan  entre  ensuite  dans  le  détail  des  procédures. 
Il  soutient  qu'ell<?s  ne  prouvaient  pas  même  une  sédition 
notoire,  comme  on  le  supposait,  et  qu'on  ne  peut  repro- 
cher que  quelques  expressions  dangereuses,  enthousiastes, 
folles  on  extravagantes,  relativement  aux  fraternisations 
et  Conventions. 

•  Depuis  le  30  novembre  1702,  le^  ministres  ne  se 
sont  occupés  qu'à  fabriquer  des  complots,  qu'a  mon- 
trer partout  des  conspirations. 

«  Le  parlement  a  été  conroqué  subitement;  les 
milices  ont  été  assemblées.  Uu  certain  noble  duc 
effraye  s'est  hâté  de  se  fortifier  dans  la  Tour.  Pour 
donner  plus  de  crédit  à  la  chose,  les  voilures  publi- 
ques ne  partaient  plus.  En  venant  en  ville,  on  re- 
gardait hors  de  sa  chaise  pour  s'assurer  si  Londres 
n'était  pas  en  flammes.  On  faisait  venir  des  troupes 
de  tous  côtés  pour  défendre  la  capitale;  des  espions 
furent  mis  en  campagne.  Les  gazettes  furent  rem- 
plies de  paragraphes  alarmants  et  incendiaires.  Quel- 
ques personnes  furent  accusées  d'avoir  empoisonné 
la  nouvelle  rivière,  et  mes  amis  me  crurent  en  dan- 
ger pour  avoir  parlé  avec  peu  d'égards  de  quelques 
grands  personnages. 

•  Dans  la  vue  de  faire  cesser  ces  alarmes,  je  pro- 
posai un  comité  d'informations;  ma  motion  fut  re- 
jetée. Cependant  on  établit  un  comité  secret  pour 
suivre  la  piste  des  traîtres.  Dès  lors  on  ne  parlait 
plus  que  de  ce  respectable  comité.  C'était  présomp- 
tion que  de  bhlmer  aucun  des  actes  de  cette  assem- 
blée, impartiale  sans  doute,  puisqu'elle  avait  été 
choisie  au  scrutin;  et  cependant,  avant  l'élection, 
j'avais  donné  la  liste  des  noms  de  ce  comité  impar- 
tial. A  peine  se  croyait-on  en  sûreté  dans  la  Chambre 
des  communes.  Les  re|)résentations  de  piques,  de 
crochets  et  d'autres  armes  épouvantables  par  leui 
forme  et  leur  dimension,  servirent  à  jeter  i'alarmr 
dans  les  nobles  cœurs  des  lords. 

SêgttiiiS  irritant  animas  demissa  per  auras. 
Quant  quœ  siint  ocuhs  subjecta  fidelibus, 

•  Enfin  arriva  cette  fameuse  soirée  oJ!i ,  sans  dé- 
libération, la  Chambre  se  divisa  dix-sept  fois,  et  où 

I  je  me  rappelle  avec  plaisir  avoii  {toujours  été  dans 

48 


378 


la  minorité.  C'est  ainsi  qu'on  parvint  h  obtenir  cette 
suspension  de  Vhabeas  corjput,  qu'un  de  nos  auteurs 
compare  à  la  nomination  d*un  dictateur  h  Rome, 
réservée  pour  le  casd*une  extrême  nécessité.  • 

M.  Sheridan  reparle  encore  de  ces  procédures,  et  s'at- 
tache à  démcMitrer  que  les  conspirations  contre  lesquelles 
ces  persécutions  trop  réelles  avaient  été  dirigées  étaient 
absoloment  imaginaires.  Il  regrette  que  la  patrie  continue 
d*étre  la  dupe  et  la  victime  d*un  ministre  roide  et  altier* 
qui  n'a  jamais  mis  le  pied  dans  aucune  autre  assemblée 
que  celle  de  la  Chambre  de.;  communes,  et  qui ,  par  con- 
séquent, n*a  point  appris  à  connaftre  les  hommes  hors  de 
la  représentation  et  livrés  à  eux-mêmes.  Enfin,  il  termine 
son  discours  en  demandant  pourquoi  les  gens  qui  répètent 
sans  cesse  la  guerre  î  la  guetire!  ne  Tont  rien  pour  la  sou- 
tenir; pourquoi  Phonorable  membre  M.  Wyndham  ne  fait 
pas  qu  généreux  abandon  de  ses. appointements,  et  refuse 
de  s'en  tenir  à  son  immense  revenu ,  bien  suffisant  néan- 
moins pour  vivre;  pourquoi  son  honorable  ami  (M.  Pitt) 
ne  donne  pas  le  produit  de  sa  place  de  gardien  des  cinq 
ports  ;  pourquoi  un  autre  ami  de  ces  messieurs  et  de  la  ^ 
guerre  ne  Tait  pas  le  sacrifice  ^es  honoraires  d'une  de  ses  * 
trois  places;  pourquoi  son  cousin,  qui  offrait  autrefob, 
dans  un  beau  mouvement  d'abnégation,  de  se  réduire  au 
oiveau  des  autres  receveurs  de  la  trésorerie,  accumulait 
sur  sa  tète,  comme  un  autre  Atlas,  15  ù  16,000  livres  ster- 
ling. Il  conclut  en  priant  la  Chambre  de  lui  permettre  de 
présenter  un  bill  pour  la  révocation  de  celui  qui ,  dans  la 
dernière  session ,  a  suspendu  l'acte  tfhabeas  eorjms, 
M.  Wyndbam  se  lève  pour  combattre  la  motion  de 

*  M.  Sheridan  ;  il  déclare  qu'il  se  lait  gloire  d'être  très-cri- 
minel dans  le  secs  que  le  prèopinant  donne  à  ce  mot  ; 
qu'au  surplus  les  menaces  d'aucun  homme  ne  seront  ja- 
mais capables  de  le  détourner  de  son  devoir.  Il  se. plaint 
du  sens  forcé  et  des  tournures  malignes  qu'on  donne  à  ses 
expressions,  et  en  prend  occasion  d'observer  que,  pour 
allècer  de  lui  l'esprit  du  peuple,  on  lui  a  attribué  un  pro- 
pos qu'il  n'a  jamais  tenu  {Périise  le  commerce!),  et  qu*on 
trouve  cependant  dans  des  lettres  dernièrement  imprimées 
(du  lord  Lauderdale).  Il  assure  avoir  toujours  été  contre 
la  réforme  parlementaire,  jusqu'à  refuser  d'être  représen- 
tant de  Westminster,  parce  qu'on  y  était  favorable  à  ce  sys- 
tème de  réforme.  Il  espère  que  ceux  qui  se  livrent  à  ces 
insinuations  artificieuses  n'en  veulent  pas  les  conséquen- 
ces; mais  il  croit  devoir  remarquer  que  Foolon  a  été  mas- 
sacré parce  qu'on  lui  imputait  d*avoir  dit  que  le  peuple 
mangerait  du  foin. 

M.  Wyndham  passe  à  la  question  en  elle-même.  Il  estime 
qu'un  délit  capital  peut  être  prouvé  à  un  certain  degré, 
quoique  insuffisant  pour  opérer  dans  l'âme  des  jurés  une 
conviction  telle  qu'elle  les  détermine  à  prononcer  de  ma- 
nière à  faire  appliquer  la  peine  de  mort  par  les  f  uges  ;  en 
sorte  qu'il  est  dis  cas  où  l^on  acquitte  le  coupable,  quoi- 
que sentant  par  instinct  qu'il  l'est. 

•  On  demande  où  est  la  conspiration,  comme  si 
un  poignard  dans  la  main  était  nécessaire  pour  la 
constater;  comme  s'il  ne  pouvait  y  en  avoir  d'autres 

3 ne  celle  littéralement  spécifiée  par   l'acte  d'E- 
ouard  111.  Le  langage  des  partisans  de  ce  système 
ne  prouve  que  trop  son  existence. 

•  Nous  savons  tous  que  l>i  danger  consiste  à  cm- 
poisonner  l'esprit  public,  ii  exciter  des  mécontente- 
inents,  à  proliter  de  ceux  que  font  naître  des  mo* 
mcnts  de  détresse ,  inévitables  dans  toute  société;  à 
s*eflbrcer  de  persuader  au  peuple  que  tout  gouver- 
nement est  une  usurpation  de  ses  droits. 

«  L'honorable  membre  a  dit  qu'il  n'y  avait  aucune 
affinité  entre  Tétat  de  l'Angleterre  et  celui  de  la 
France;  et  de  là  ce  paradoxe,  que  l'ancienne  monar- 
chie était  la  cause  de  tant  d'atrocités  qui  viennent 
de  déshonorer  l'humanité.  Mais,  si  cela  est,  pour- 
quoi n'onl-elles  pas  commencé  avec  la  révolution, 
lorsque  rcnthousiasmc  d'une  nouvelle  émancipation 
était  à  son  comble?  Elles  ont  au  contraire  commencé 
dans  un  temps  où  la  mémoire  de  TaocieD  gouverne- 


ment étail  effacée,  et  n*ont  Tait  qirallcr  en  croissant 
comme  un  cône  renversé.  • 

M.  Hardingc  déclare  que  c'est  lui  qui  a  dit  :  Périsse  tio- 
tre  commerce,  et  vi»e  notre  comiitution !  mais  W  \\nc  la 
Cbanibre  de  se  ressouvenir  que  ces  paroles  n'ont  été  dites 
que  dans  la  suppo:»ilion  que  l'un  d'eux  dût  être  sucrifié. 

Le  major  Maitland  ,  lord^Titehfields  et  M.  Fox  parlent 
chacun  un  moment;  mais  ce  qu'ils  disent  est  plus  relatif  & 
la  réforme  parlementaire  qu'à  la  question, 

M.  Erskine  soutient  la  motion  dans  un  discours  très- 
élendu ,  tendant  à  prouver  qu'il  n'existait  pas  de  conspira- 
tion, et  que,  par  conséquent,  si  les  ministres  vouluient  re- 
nouveler la  suspension  de  Vhabeas  corpus,  ils  devaient 
faire  voir  la  nécessitj^  de  cette  mesure  par  de  nouveaux 
moyens. 

M.  Adair,  sergent  ès-lois ,  prétend  que  les  membres  de 
Popposition  décèlent  leurs  vues  cachées  en  affectant  décrier 
contre  la  suspension  de  l'acte  (Vhabeas  corpus ,  qui  n'a  pas 
à  beaucoup  près  la  latitude  qu'ils  voudraient  faire  enten- 
dre, puisqu'il  demeure  dans  toute  sa  force  pour  tous  les 
autres  crimes  que  celui  de  haute  trahison.  Il  examine  s'il 
y  a  lieu  à  retirer  les  pouvoir»  confiés  par  le  parlement  au 
pouvoir  exécutif;  et  le  jugement  d'absolution  porté  par  les 
jurés  étant  le  seul  motif  sur  lequel  on  ait  appuyé  la  mo- 
tion, il  croit  devoir  supposer  qu'il  y  en  a  d'autres. 

•  Ce  serait  ignorer  absolument  les  lois  criminelles 
d'Angleterre  et  la  pratique  des  tribunaux ,  que  de 
prétendre  qu'un  homme  acquitté  est  nécessairement 
mnocent.  Oui,  sans  doute,  il  l'est  aux  yeux  de  la  loi, 
qui  lui  garantit  sa  vie  et  ses  biens, et  qui  défend  qti*il 
soit  de  nouveau  mis  en  cause  pour  le  même  fait; 
mais  ne  sait-on  pas  que  c'est  un  principe  d'huma- 
nité que,  dans  le  doute,  le  prévenu  doit  être  absous; 
et  ce  principe  n'agit  jamais  plus  fortement  sur  la 
conscience  des  jurés  que  quand  il  s'agit  de  la  vie 
d'un  homme.  C'est  en  effet  un  motif  très-puissant 

Sour  eux,  quoiqu'ils  ne  doivent  pas  toujours  y  céder, 
e  se  livrer  à  la  pilié.Qnand  la  loi  déclare  qti'il  vaut 
mieux  que  vin^t  coupables  échappent  que  de  s'ex- 
poser à  faire  périr  un  iimocent ,  elle  dit  une  chose 
également  fondée  en  justice  et  en  miséricorde;  mais 
elle  montre  en  même  temps  comment  il  est  possible 
d'échapper  à  la  punition  sans  prétendre  à  rhonneur 
d'être  innocent.  Si  l'avis  du  jury  eût  été  fondé  sur 
la  non-existence  de  la  conspiration,  il  n'aurait  pas 
attendu  aue  le  conseil  de  la  couronne  entamât  l'ex- 
position acs  preuves  personnelles  contre  l'accusé;  il 
l'eût  prévenu  en  lui  disant  :  Ne  nous  donnez  pas  une 
preuve  inutile,  nous  avonsla  conviction  qu'il  n'existe 
point  de  délit.  D'ailleurs,  en  bonne  foi,  s'il  ne  restait 
point  au  jury  le  plus  léger  doute  sur  l'innocence 
des  accusés,  serait-il  donc  resté  trois  heures  à  ce 
décider  dans  le  procès  de  Hardy,  et  deux  dans  celui 
deThelwall?» 

M.  Adiiir  retrace  ensuite  ce  qui  s'est  passé  dans  les  dif- 
férentes Sociétés.  Il  dit  qu'elles  ont  suivi  les  mêmes  prin- 
cipes qui  ont  renversé  une  grande  monarchie.  Il  veut  voir 
ces  Sociétés  se  dissoudre  avant  de  consentir  à  la  révocation 
d'un  bill  qu'un  danger  qui  subsiste  encore  a  nécessité. 

M.  Fox  réplique  et  soutient  que  le  fugemenl  par  jury  a 
détniit  toute  idée  de  conspiration,  puisqu'il  a  acquitté  ceu< 
qu'on  en  supposait  les  clieli.  Il  accuse  les  ministres  d'être 
les  auteurs  de  toutes  les  alarmes  répandues  en  Angleterre. 
Il  leur  recommande  de  ne  point  détruireson  gouvernement 
par  un  système  de  crainte  et  de  terreur,  de  rendre  au  peu- 
ple ses  droits,  et  de  lui  procurer  la  paix,  ce  qui  est  le 
moyen  le  plus  sûr  de  conserver  la  constitution. 

Plusieurs  membres  parlent  encore  pour  ou  contre  la  mo- 
tion. La  Chambre  se  divise  ;  il  y  a  : 

Pour  lu  motion 41  votants. 

Contre •    ...    185 


Majorité 


144 


S79 


HOLLANDE. 


Ltifdû^  le  iOjcntier,  —  Le  dru;:cou  tricolore  flotte  luV 
nos  remparts  et  sur  la  tou:  de  U  iua:son*eommune,  et  dans 
rinslaiil  même  le  coosei<  provisoire,  nommé  par  le  peuple 
aiuèsTinsurrectloo,  vieut  de  Taire  publiei  la  proclamation 
suivante  : 

«  Le  conseil  provisoire,  élu  par  la  commune  de  Leyde 
pour  gérer  les  affaires  pendant  Tespace  d*uu  mois ,  consi- 
dérant que  quelques  habitants  de  cette  ville,  par  un  scru- 
pule de  conscience,  pourraient  délirer  d*étre  libres  d'un 
serment  qu'on  a  exigé  d'eux  d'une  manière  lyrannique  et 
illégale,  eu  4788,  et  que  d'autres  pourraient  supposer  en- 
core quelque  force  à  cet  engagement  en  faveur  des  états 
illégitimes  et  intrus,  et  de  la  maison  stalhoudériennc,  mai* 
sou  qui  de  tout  temps  a  causé  la  ruine  de  notre  patrie,  a 
cru  devoir  sati^laire  aux  désirs  de  ces  citoyens,  et  leur  ôier 
toute  inquiétude  à  cet  égard.  En  conséquence,  il  déclare, 
au  nom  de  la  commune  de  Leyde,  que  la  forme  de  gou- 
vernement illégale,  introduite  ou  plul6t  affermie  par  Tin- 
TQsion  prussienne  de  1787,  doit  être  considérée  comme 
sans  effet  et  de  nulle  valeur,  que  tons  habitants  qui  ont 
prêté  le  serment,  dans  quelque  qualité  que  ce  puisse  élre, 
en  sont  relevés  par  la  présente,  etcC 

«  Fait  à  Leyde,  ce  20  janvier  1795. 

(Suivent  les  signatures  de  dix-sept  membres ,  les  trois 
autres,  Hahn,  Blauvv  et  Van  Leyvœld,  étant  absents  pour 
la  cause  de  la  patrie.) 

m  Était  signé  C.  di  Picbbb«  ieerétaire»  • 

Utrecht^  le  20  /anvter.  —  Voici  les  détails  de  rentrée 
des  Français  dans  nos  murs  :  un  officier  français,  accom^ 
pagué  d'uu  trompette  «  arriva  aux  avant-postes  de  celte 
ville  ;  il  était  porteur  d'une  lettre  pour  le  général  anglais. 
En  approchant,  il  vit  un  soldat  hollandais  en  faction,  qui 
voulait  s'enfuir  :  l'officier  l'appelle,  et  lui  dit  de  le  con- 
duire chei  le  commandant  de  la  place,  ils  trouvèrent  la 
porte  de  cette  ville  ouverte,  les  soldats  anglais  s'élant  sau- 
vés du  côté  de  Woerden.  Aussitôt  que  le  peuple  vit  I'oH- 
cier,  le  trompette  et  la  cocarde  tricolore  dont  ils  étaient 
décorés,  il  8*écria  :  •  Voilà  enfin  nos  libérateurs  I  vive  la 
république  française  qui  nous  délivre  de  nos  tyrans  1  •  Ils 
furent  (êtes  et  conduits  en  triomphe  par  la  ville,  aux  ac- 
clamations du  peuple.  Le  commandant  s'était  sauvé  à  tou- 
tes jambes. 

L'avant-garde  de  Parmée  française,  qui  était  encore 
loin,  fut  avertie,  et  arriva  quelques  heures  après  :  elle 
reçut  sur  sou  passage  les  bénédictions  d'un  peuple,  heu- 
reux eniin  après  sepi  ans  de  souffrances  et  d'oppression. 
Dès  le  lendemain ,  cette  nouvelle  s'élant  répandue  dans  le 
pays,  un  grand  nombre  de  voitures  et  de  personnes  à  che- 
val sont  accourus  de  divers  endroits,  et  notamment  de  la 
ville  d'Amsterdam,  qui  est  à  huit  lieues  d*Utrecht,  pour 
venir  au-devant  des  Français,  et  pour  voir  une  armée  de 
héros. 

Dordreeht^  le  11  janvier,  ^^ La  rigueur  de  la  sai- 
son ayant  au  deli  de  toute  attente  secondé  les  vues  du  peu- 
ple libérateur,  les  patriotes  ont  partout  redemandé  ou  pris 
les  armes.  Les  aristocrates  consternés  ont  été  ou  se  sont 
démis  de  leurs  places.  De  meilleurs  citoyens  les  ont  rem- 
placés provisoirement.  Presque  dans  toutes  les  villes  de  la 
Hollande  la  révolution  s'est  effectuée  le  même  jour. 

Le  \  9  janvier  sera  pour  la  plupart  une  époque  distinguée 
dans  les  annales;  et  ce  qui  vous  fera  sans  doute  le  plus 
grand  plaisir,  c'est  que  partout  les  patriotes  montrent  par 
leur  conduite  qu'ils  ne  veulent  se  souiller  d'aucun  des  cri- 
mes qu'ils  ont  blftmés  dans  leurs  adversaires.  Nulles  ven- 
geances arbitraires  et  personnelles,  quoique,  sur  des  faux 
bruits  de  paix,  une  heure  avant  l'entrée  des  Français,  la 
faction  Orange  arborât  de  nouveaux  rubans  et  menaçât  les 
patriotes  de  cette  ville  du  pillage.  Le  citoyen  Kramer  avait 
été,  l'année  dernitre,  arrêté  par  les  ordres  du  grand 
bailli  Van-den-Brandelaer  (l'un  des  plus  misérables  tyran- 
neaux de  l'ancien  régime),  et,  après  plusieurs  mois  de  dé- 
tention ,  condamné  â  ce  qu*on  appelle  un  bannissement 
politique.  Rentré  dans  ses  loyers,  Kramer  est  allé  voir 
rex-bailli,  qui  tremblait  â  son  appioclie  •  U  Ta  rassuré  sur 


ses  intentions,  et  lui  a  même  proposé  de  lui  servir  desaa* 
vcgarde. 

Un  :omité  secret,  qui  avait  existé  depuis  bien  du  tempa 
dans  cette  ville,  est  allé  au-devant  des  Français,  qui  avaient 
refusé  de  traiter  avec  des  commissaires  politiques  de  Tan- 
cienne  régence. 

Ce  comité  a  travaillé  nuit  et  jour  pour  le  maintien  de 
Tordre,  jusqu*â  ce  que,  le  23,  il  ait  été  nommé  une  mu- 
nicipalité provisoire  de  douze  personnes  qui  sont  d*abord 
entrées  en  fonctions.  L*ancienne  magistrature  a  été  décla* 
rée  déchue.  On  a  planté  Tarbre  de  la  liberté  avec  une  joie 
Traie  et  décente,  et  il  y  a  eu,  la  nuit  dernière,  bal  au 
Doele. 

Nous  sommes  contents  des  Français  autant  qu*ils  doivent 
l'être  de  nous.  Ils  se  conduisent  généralement  au  mieux, 
et  la  liberté  et  l'indépendance  du  i)euple  batave  semblent 
devoir  être  sous  leurs  auspices  à  Tabri  de  toute  atteinte. 
Combien ,  à  ce  titre,  ils  seront  en  bénédiction  à  tous  les 
patriotes  1 

PAYS-BAS. 

Bruxelltit  le  il  pluviote,  —  On  a  trouvé  à  La  Haye  une 
superbe  fonderie  avec  tout  son  attirail;  à  Delft,  un  im« 
menK*  arsenal,  l'un  des  mieux  fournis  de  PBurope;  à  Rot* 
terdam ,  de  vastes  chantiers  prêts  à  recevoir  des  vaisseaux 
de  guerre  en  construction,  et  les  magasins  de  l'amirauté; 
à  Dordrecht ,  six  cent  trente-deux  pièces  de  canon ,  la  plu- 
part en  bronze,  dix  mille  fusils  presque  tous  neufs ,  et  des 
magasins  de  vivres  et  munitions  de  guerre  pour  une  ar> 
mée  de  trente  mille  hommes.  On  a  saisi  dans  différents 
ports  un  grand  nombre  de  bâtiments  marchands  et  autres, 
chargés  d'effets  précieux  appartenant  à  des  stathoudériehs 
émigrés.  Il  s'est  trouvé  dans  beaucoup  de  villes  une  grande 
quantité  d'armes  de  tout  genre  et  des  magasins  énormes 
de  vivres  que  la  prévoyance  hollandaise  réserve  pour  les 
temps  de  disette. 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Paris,  le  17  pltuiote.  —  Nous  sommes  informés 
de  bonne  part  que  l'insurrection  continue  à  se  pro- 
pager dans  tout  le  territoire  des  sept  Proîinces- 
Uiiies:  les  Français,  à  tur  et  au  mesure  qii*ils  ayao- 
centdansle  pays,  trouvent  partout  les  bourgeoisies 
debout  et  organisées  en  gardes  nationales,  les  ré- 
gences aristocratiqneschassées,  les  chefs  mis  en  état 
d'arrestation,  et  d'excellents  patriotes  choisis  par  le 
peuple,  pour  remplacer  les  stathoudëriens:  nous  at- 
lenuonsincessamment  des  de'tails  plus  positifs. Nous 
savons  seulement  que  Paulus,  auteur  de  plusieurs 
ouvrages  précieux  sur  le  droit  public,  qui  a  eu  le 
courage  ae  publier  en  Hollande  même,  sous  son 
nom,  il  y  a  deux  ans,  un  Trailé  tur  les  Droils  de 
VHomme,  vient  d*étre  élu  grand  pensionnaire  des 
états  régénérés  de  Hollande. 

Ce  citoyen  avait  déjà  été  au  timon  du  gouverne- 
ment en  qualité  de  premier  ministre  de  la  marine 
hollandaise;  mais  sa  franchise  et  son  amour  pour  la 
liberté  ayant  déplu  au  stathouder,  et  surtout  a  sa 
femme,  il  fut  renvoyé  après  la  révolution  de  1787, 
maleré  le  besoin  qu  on  avait  de  ses  talents.  Animé 
du  aésir  de  voir  sa  patrie  libre,  il  vint  en  France  en 
1783,  et  un  des  crimes  de  Tancien  gouvernement 
français  fut  d'avoir  négligé  les  ouvertures  intéres- 
ressantes  que  Paulus  s  empressa  de  lui  donner. 

Il  fut  convaincu  dès  lors  de  la  nullité  du  cabinet 
de  Versailles,  qui  ne  savait  plus  reprendre  en  Eu- 
rope ce  caractère  de  grandeur  qui  convenait  à  la 
première  nation  de  l'univers.  Il  prévovait  que,  sans 
une  révolution  totale  dans  la  forme  du  gouverne- 
ment, le  peuple  français  allait  être  exposé  à  la  plus 
grande  humiliation  au  dehors  et  aux  maux  les  plus 
effrayants  au  dedans;  en  un  mot  il  jugea  que  la  ma- 
chine était  entièrement  pourrie. 

11  y  rendit  à  Brest,  ann  de  voir  les  chantiers  de 


880 


la  marine  française.  L*œil  perçant  du  connaisseur  | 
y  découvrit,  malgré  les  dilapiilations  les  plus  im    > 
pudentes,  des  ressources  immenses  pour  créer  un 
lour  une  puissance  maritime  capable  de  faire  trem- 
bler TAngleterre. 

Dès  lors  ce  patriotes  estimable  ne  désespéra  plus 
de  la  chose  publique  en  France,  ni  d*une  délivrance 
future  de  la  Hollande;  il  s'en  expliqua  ainsi  à  ses 
amis,  et  spécialement  au  rédacteur  de  celte  note. 

Il  retourna  à  Rotterdam,  où  il  vécut  depuis  en 
philosophe,  éloigné  des  affaires  publiques  jusqu'à 
ce  moment  où  sa  pairie  rappelle  à  des  (onctions  im- 
portantes, digues  de  ses  talents  et  de  ses  vastes  con- 
naissances. 

Les  républicains  français,  qui  connaissent  l'ab- 
surdité (Je  la  forme  du  gouvernement  connu  sous  le 
nom  d'états  généraux  et  d'élats  de  Hollande  ,  s'é- 
tonneront peut-élrc  que  lesBataves  n'aient  pas  dé- 
truit ce  gouvernement  monstrueux  dès  le  premier 
moment  de  leur  révolution,  et  que  les  patriotes 
éclairés,  tels  que  Paulus  entre  autres,  aient  accepté 
des  places  qui  tiennent  à  cette  forme  justement  dé- 
testée. Mais  nous  les  prions  de  considérer  qu'il  fal- 
lait courir  au  plus  pressé,  sous  peine  de  voir  naître 
la  hideuse  anarchie,  qu'il  fallait  pourvoir  au  licen- 
ciement et  au  désarmement  de  trente  à  trente-cinq 
mille  hommes  de  troupes  slathoudériennes,  répan- 
dues çà  et  là  par  tout  le  pays;  et  enfin  qu'il  fallait  une 
surveillance  active  et  immédiate  de  toutes  les  caisses 
publiques,  de  tout  ce  qui  tient  au  commerce,  à  la 
navigation,  aux  digues,  et  à  l'existence  même  de 
ce  pays  factice. 

Au  reste,  nul  doute  que  l'intention  de  tons  les 
meuibres  du  gouvernement  régénéré  en  Hollande 
ne  soit  de  convoquer  au  plus  tôt  le  peuple  bataveen 
assemblées  primaires,  a(m  qu'il  choisisse  ses  repré- 
sentants à  une  Convention  nationale;  la  nation  Hol- 
landaise donnera  ainsi  une  preuve  incontestable  de 
l'identité  de  ses  principes  avec  ceux  de  la  république 
française. 

Nota,  Nous  recevons  à  l'instant,  par  une  voie 
sûre,  les  nouvelles  suivantes: 

«  La  Haye,  le  17  nivose.—Les  membres  des  nou- 
veaux états  de  Hollande  étant  assemblés  à  ThOtel 
dit  Beerre-Logemenl,  la  bourgoiesie  de  La  Haye  est 
entrée  pour  les  complimenter. 

«Le  citoyen  Pierre  Paulus  a  été  élu  président; 
deux  secrétaires,  savoir,  Delange  et  Sports,  ont  été 
nommés. 

•  L'ancien  secrétaire  Royer  a  été  mandé;  on  lui  a 
ordonné  de  former  ou  convoquer  l'assemblée,  sans 
y  appeler  la  soi-disant  noblesse  ni  l'ancien  grand 
pensionnaire. 

«  On  a  été  en  corps  à  l'assemblée  des  états,  où  ils 
ont  été  reçus  par  le  secrétaire  Royer. 

■  Ils  se  sont  qualifiés  représentants  provisoires  du 
peuple  de  Hollande;  ils  ont  décrété  la  souveraineté 
du  peuple  et  h  s  droits  de  l'homme ,  ils  ont  aboli  le 
stalnoudérat  avec  toutes  ses  dépendances;  le  serment 
sur  l'ancienne  constitution  a  été  supprimé.  I 

•  Les  Chambres  des  comptes  et  autres  sontdissou- 
tes,  et  ont  été  remplacées  par  les  comités  de  salut 
public,  militaire  et  des  finances,  lesquels  ont  été 
organisés  sur-le-champ. 

•  Les  députés  aux  étals  généraux  ont  été  rappe- 
lés. 11  a  été  arrêté  la  liberté  de  la  chasse  sur  le  ter- 
ritoire propre. 

•  Ils  ont  donné  connaissance  du  tout  aux  re- 
présentants du  peuple  français,  qui  en  ont  été  satis- 
faits. 

•  Pour  copie  et  extrait  conforme. 

•  Signé  LBGLBac,  adjudant  général.  • 


Le  ministre  de  la  république  de  Genève  prêt  la  ré- 
publique française  au  citoyen  Boissy,  représen- 
tant du  peuple  français  et  membre  du  eomUé  de 
salut  public  de  la  Convention. 

Paru,  9  nnoM. 
Citoyen  représentant,  dans  votre  rapport  à  la 
Convention  nationale,  relatif  aux  ateliers  d'horlo- 
gerie ouverts  à  Besançon,  séance  du  5  nivôse,  vous 
avez  dit  (  extrait  du  Moniteur  du  8  nivôse,  page 
62): 

•  La  manufacture  de  Femey  fut  florissante  tant 
que  Voltaire  put  intéresser  l'Europe  entière  à  ses 
succès;  elle  cessa  d'être  avec  lui;  mais,  en  1793, 
des  artistes  et  des  négociants  en  horlogerie,  persé- 
cutés dans  les  manufactures  étrangères,  parce  qu'ils 
unissaient  leurs  vœux  aux  nôtres  pour  les  succès  de 
la  liberté,  quittèrent  Genève,  Neuchàlel  et  Londres, 
et  se  retirèrent  à  Besançon.  • 

Le  gouvernement  de  Genève  m'a  chargé  de  vous 
exprimer,  citoyen,  combien  il  a  été  affecté  de  cette 
accusation  dans  la  bouche  d'un  homme  dont  la  con- 
fiance qu'il  inspire  est  en  proportion  de  l'estime  dont 
il  jouit  et  qu'il  mérite  à  tant  de  titres.  Il  n'a  pu  pen- 
ser que  vous  eussiez  volontairement  uni  la  républi- 
que de  Genève  aux  autres  pays  que  vous  avez  cru 
pouvoir  accuser  de  persécution  contre  les  amis  de  la 
révolution  française. 

Genève  a  prouvé  de  trop  de  manières  et  depuis 
trop  longtemps  son  amour  de  la  liberté,  pour  pou- 
voirjamais  être  accusée  d'en  persécuter  les  amis; 
et  s'il  est  surtout  une  époque  où  une  semblable  ac- 
cusation ne  puisse  pas  frapper  sur  elle,  sans  doute 
c'est  l'année  1793. 

Alors  le  peuple  souverain  de  Genève  avait  ren- 
versé son  ancienne  aristocratie,  si  longtemps  pro- 
tégée contre  lui  par  le  despotisme  français  ;  alors 
l'égalité  avait  été  proclamée  à  Genève;  alors  Genève 
avait  une  constitution  purement  démocratique. 

Si  les  considérations  de  rintérét  particulier  d'une 
nation  pouvaient  être  mises  à  côté  de  la  puissance  de 
ses  principes,  vous  sentez  que  l'intérêt  de  Genève  lui 
aurait  constamment  défendu  de  persécuter  ses  ar- 
tistes et  de  les  forcera  s'éloigner  d'elle. 

Je  vous  prie,  citoyen  représentant,  de  m€  faire 
une  réponse,  et  de  me  permettre  de  la  rendre  publi- 
que a  la  suite  de  ma  lettre. 

Signé  Reybaz. 

Le  représentant  Boissy  au  citoyen  Reybax  ^ 
ministre  de  la  république  de  Genève. 

Le  gouvernement  de  la  république  de  Genève, 
citoyen,  m'a  rendu  justice  quand  il  a  pensé  que  ce 
n'était  pas  volontairement  que  j'avais  lait  porler  snr 
Genève  une  inculpation  que  je  suis  bien  convaincu 

Qu'elle  ne  mérite  pas,  du  moins  quant  à  l'époque 
ont  j'ai  parlé,  l'année  1793. 

Je  savais  que  l'ancienne  aristocratie  genevoise 
traitait  mal  les  amis  de  la  liberté;  je  ne  pouvais  ou- 
blier surtout  que  le  patriote  Auzière,  maintenant 
l'un  des  coopérateurs  de  la  manufacture  de  Besan- 
çon, avait  été  exilé  de  sa  patrie,  il  y  a  plusieurs  an- 
nées, et  réduit  à  recevoir  un  asile  de  la  bienlaisance 
de  Voltaire.  Ce  souvenir,  qui  s'est  trouvé  séparé 
dans  ma  pensée  du  souvenir  de  votre  révolution, 
m*a  fait  unir  dans  mon  rapport  Genève  à  Neuchâtel 
et  à  Londres.  Le  reproche  tait  à  Genève  comme  aux 
deux  autres  gouvernements  dont  je  parle  était  donc 
juste,  l'époque  seule  ne  Tétait  pas;  il  n'y  a  donc  eu 
de  ma  partau'une  inadvertance,  mais  cette  Inadver 
tance  peut  donner  lieu  à  une  erreur  que  je  m'em- 
presse de  prévenir. 

Je  déclare  avec  plaisir  que  ce  nVst  pas  de  Genève 


381 


libre,  de  Genève  régénérée,  que  j'aî  voulu  parler, 
mais  seulement  de  ses  anciens  oppresseurs.  Vous 
pouvez,  citoyen,  donner  à  ma  lettre  toute  la  pu- 
blicité que  vous  jugerez  convenable. 
Salut  et  fraternité.  Signé  hoissY. 

ARMÉE  DU  NORD. 

Copie  de  la  lettre  du  général  Daendels. 

Les  représentants  du  peuple  français  attendent  de 
la  part  du  peuple  batave  qu'il  se  remettra  lui-même 
en  liberlé.  Ils  ne  veulent  pas  le  conquérir,  ni  le  ftir- 
cerà  recevoir  malgré  lui  des  assignats,  maiss*Sllier 
avec  lui  comme  un  peuple  libre.  Que  les  villes  de 
Dordrecbt ,  Harlem ,  Leyde ,  Amsterdam  ,  que  toute 
la  Hollande  fasse  donc  la  révolution  ,  et  envoie  des 
députés  aux  représentants  du  peuple  français  qui  se 
trouvent  à  Bois-le-Duc,  pour  les  en  informer. 
Le  général  de  diviiion  Dabndbls. 


THÉÂTRE  DE  LA  RÉPUBLIQUE. 

Une  suite  de  Pygmalion^  scène  lyrique  de  J.-J.  Bous* 
seau.  Tient  d*ôtre  donnée  ù  ce  théâtre  sous  le  nom  de  (7a- 
lathie,  mélodrame. 

La  statue  de  P>grnalion,  devenue  sa  femme,  pleure  la 
mort  de  cet  époux  cliéri  :  il  irélaii  parti  que  pour  un  voyage; 
mais  on  a  rapporté  une  urue  qui  renierme  ses  cendres,  et 
un  billet  par  lequel  il  dit  pour  jamais  adieu  à  sa  cbère 
Galaibëe,  et  lui  recommande  de  regarder  souvent  son  der- 
nier ouvrage  ;  ce  dernier  ouvrage  n*est  autre  chose  que 
Pjrgmalion  lui-même,  qui  s*est  rois  à  la  place  d*une  lUilue 
d'Apollon. 

Un  homme  bien  Trisé,  avec  une  ceinture  et  un  manteau 
pourpres,  une  lyre  d*or  à  la  main,  les  bras  et  les  jambes 
nus,  ne  ressemble  gut  re  ù  une  statue  ;  cependant  Galatbée 
s*7  est  méprise.  Ce  qui  est  moins  concevable  encore ,  c'est 
qu'elle  ne  reconnaisse  pa^  son  époux,  et  qu*à  peine  elle 
s*aperçoit  que  PApollon  lui  ressemble.  Mais  ce  qui  devient 
bien  plus  bizarre,  c*est  quand  Pygmalion  quitte  son  atti- 
tude et  son  rôle  de  statue  pour  se  jeter  aux  pieds  de  Gala* 
Ihée;  celle-ci  lui  soutient  d'abord  quMl  n^est  pas  Py{;ma* 
lion,  quMl  est  un  dieu  qui  a  pris  cet'e  forme  pour  la  se* 
duire;  enfm  elle  veut  bien  le  reconnaître,  et  même  lui 
pardonner  la  ruse  dont  il  s'est  servi  pour  éprouver,  dit-il i 
le  cœur  de  son  épouse. 

Ces  deux  scènes  sont  une  pft1econtr*épreuve  de  la  scène 
brûlante  de  Rousseau,  dont  elles  ofRent  de  fréquentes  ré- 
miniscences. On  a  applaudi  quelques  traits  heureux  fort 
bien  rendus  par  Tactrice. 

La  musique  de  Brun  a  paru  agréable  et  analogue  aux 
différentes  intentions  qu'elle  exprime. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Préiidenee  de  Bovére, 
SUITE  DB  LA  SÉANCE  DU  15  PLUVIOSE. 

Depuis  deux  jours  on  voyait  exposé ,  dans  le  lieu 
dc$  séances  de  la  Convention  ,  un  grand  tnbleau  du 
citoyen  Renaud,  représentant  la  devise  des  Français  ; 
h  liberté  ou  la  mort!  On  voit  au  milieu  du  tableau 
le  Génie  français,  ayant  à  sa  droite  la  Liberté  et  à  sa 
Çauche  l'image  de  la  Mort.  Le  Génie  semble  indiquer 
a  tous  les  Français  la  route  qu'il  doivent  tenir  pour 
défendre  la  Liberté ,  même  au  péril  de  leur  vie. 

Sergent  présente  à  la  Convention  l'ouvrage  de  Re- 
naud. 

Sebqent  :  Longtemps  la  médiocrité  du  talent  a 
amoncelé  ici  ses  oroductions,  peintures,  sculptures 
et  gravures:  la  plupart  annonçaient  a  votre  narre, 
en  vous  ofl'raut  leurs  ouvrages',  le  dépérissement  to- 


tal des  arts  qui  ont  toujours  illustré  la  nation  fran- 
çaise. 

Au-dessous  des  deux  chefs-d'œuvre  dus  au  pinceau 
de  David  on  suspendait  des  morceaux  qui  eussent 
fait  croire  que  nous  avions  rétrogradé  de  quelques 
siècles. 

Rassurez-vous,  citoyens;  les  arts  ne  sont  pas  ban- 
nis du  territoire  de  la  république.  Le  morceau  que 
vous  avei  aujourd'hui  sous  les  yeux  vous  en  offre  la 
preuve. 

Ce  tableau  appartient  à  la  république  ;  il  a  été  payé 
par  elle.  C'est  le  produit  d'un  prix  flatteur  pour  l'ar- 
tiste, puisqu'il  Ta  mérité  par  les  talents  qui  honore- 
ront l'école  française,  et  que  c'est  la  nation  qui  le  lui 
a  décerné. 

11  y  a  du  mérite  à  avoir  conçu  l'exécution  de  la 
devise  des  républicains  français,  la  liberté  ou  la 
morti  Le  Génie  de  la  France  indiquant  à  tous  les  ci- 
toyens ce  qu'ils  doivent  chérir,  ce  qu'ils  doivent  dé- 
fendre ;  la  Liberté,  TEgalité,  assises  sur  un  trône  que 
souilla  si  longtemps  le  despotisme  ;  de  l'autre <;ôlc , 
la  Mort  qui  a  plané  sur  toutes  les  têtes  pendant  si 
longtemps  :  non  cette  mort  qui  a  plongé  dans  le  deuil 
une  partie  de  la  France,  non  cette  mort  aue  de  nou- 
veaux tyrans  faisaient  préparer  par  des  bourreaux; 
mais  la  mort  héroïque  que  voient  avec  courage  nos 
braves  défenseurs  par  delà  les  frontières  de  la  répu- 
blique ;  enfin ,  cette  Mort  qui  rassemble  les  couron- 
nes civiques,  pour  les  enlacer  aux  eyprès. 

Voilà  celle  que  l'artiste  a  su  présenter  aux  Fran- 
çais. Citoyens,  ce  tableau  mérite ,  et  par  bonne  in- 
tention ,  et  par  bonne  exécution ,  d'orner  un  de  nos 
monuments  publics  :  et  quel  est  celui  auquel  il  sem- 
blera plutôt  destiné ,  si  ce  n'est  celui  où  nous  avons 
juré  de  maintenir  la  liberté  chère  au  peuple ,  ou  de 
mourir?  En  conséquence,  je  vous  propose  de  ren- 
voyer le  tableau  de  Renaud  à  l'examen  du  comité 
d'instruction  publique,  pour  décider  s'il  mérite  d'à* 
tre  placé  dans  le  lieu  de  vos  séances. 

La  Convention  renvoie  au  jury  des  arts,  pour  exa« 
miner  le  tableau  de  Renaud ,  et  faire  son  rapport 
pour  savoir  s'il  méritera  d'être  placé  dans  le  lieu  des 
séances  de  la  Convention  ou  dans  un  autre  monu- 
ment public. 

—  Julien  Dubois  fait  rendre  les  décrets  suivants  : 
•  Sur  le  rapport  du  comité  des  finances,  section 

des  domaines  et  contributions,  la  Convention  natio- 
nale décrète  que  les  scellés  réapposés,  en  exécution 
du  décret  du  19  thermidor,  sur  les  papiers  de  la  com- 
pagnie Musson  et  Despagnac  ,  seront  levés  à  la  dili- 
gence du  bureau  du  domaine  national  du  départe- 
ment de  Paris ,  qui  suivra ,  à  Fégard  des  biens  de 
Despagnac,  les  mêmes  opérations  qui  lui  sont  con- 
fiées relativement  aux  biens  confisqués ,  et  fera  re- 
mettre à  la  trésorerie  nationale,  en  exécution  du 
décret  du  21  floréal  dernier,  tous  les  registres,  litres 
ou  papiers  relatifs  au  compte  qui  était  dû  par  ladite 
compagnie. 

«  Le  présent  décret  ne  sera^pas  imprimé,  mais  se- 
ra envoyé  manuscrit  h  la  commission  des  revenus 
nationaux ,  pour  le  faire  exécuter  dans  le  plus  bref 
délai.  • 

—  La  Convention  nationale,  ouï  le  rapport  de  son 
comité  des  finances ,  décrète  que  l'article  addition- 
nel de  la  loi  du  22  ventôse  an  2^  est  applicable  aux 
ecclésiastiques  émigrés  et  qu'il  n'y  a  que  les  titres 
cléricaux  patrimoniaux  qui  doivent  tourner  au  bé- 
néfice des  familles. 

Jars-Panvilliers,  au  nom  du  comité  des  secours 
publics  : 

Citoyens,  vous  avez  chargé  votre  comité  des  se- 
cours publics  de  vous  faire  un  rapport  sur  la  propo- 


382 


silion  d'accorder  des  secours  à  la  veuve  du  représen- 
tant du  peuple  Phclippeaux. 

Cette  veuve  et  son  fils  manquent  des  objets  les 
plus  nécessaires  à  la  vie.  L  mémoire  de  Phélippeaux 
est  jugée  dans  Tesprit  de  chacun  de  nous  :  la  posté- 
rité prononcera. 

Votre  comité  des  secours  publics  vous  propose  le 
projet  de  décret  suivant  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  son  comité  des  secours  publics ,  décrète- 
que,  sur  le  vu  du  présent  décret,  la  trésorerie  natio- 
nale paiera  à  la  veuve  du  représentant  du  peuple 
Phélippeaux  la  somme  de  3,000  liv.,  à  titre  de  se- 
cours provisoire.  » 

Ce  décret  est  adopté. 

—  On  lit  les  lettres  suivantes  : 

Ouesno  et  Guermeur,  reprèseulanU  du  peuple  prêt 
les  armées  des  Côtes-de- Brest  et  de  Cherbourg, 
dans  les  départements  adjacents  de  leurs  arron- 
dissements, au  président  de  la  Convention  na- 
tionale. 

m  Citoyen  président,  nous  venons  d'adresser  à  nos 
collègues,  membres  du  comité  de  salut  public ,  une 
analyse  de  nos  opérations  dans  Timportante  com- 
mune de  Lorient,  et  nous  leur  avons  rendu  le  témoi- 
§nage  que  nous  devions  au  civisme  et  a  u  dévouement 
es  habitants  de  cette  commune,  dont  les  partisans 
du  terrorisme  osèrent  vouloir  ternir  la  réputation 
pour  se  créer  des  occasions  ou  plutôt  des  prétextes 
d*opprimer  les  patriotes  les  plus  probes  et  les  plus 
prononcés.  Les  collègues  qui  nous  ont  précédés  à 
Lorient  ne  nous  y  avaient  presque  rien  laissé  à  faire 
pour  le  rétablissement  de  la  liberté  des  individus  et 
l'organisation  des  autorités  constituées. 
*  "Nous  y  avons  trouvé  les  nouveaux  magistrats  du 
peuple  y  jouissant  de  la  confiance  générale ,  et  ils 
nous  en  ont  paru  dignes;  nous  y  avons  trouvé  les 
habitants  eux-mêmes  pénétrés  des  meilleurs  prin- 
cipes, et  nous  nous  sommes  convaincus ,  dans  une 
séance  publique  du  conseil  général  de  la  commune , 
et  dans  la  réunion  fraternelle  des  citoyens,  de  leur 
amour  et  de  leur  affection  pour  la  Convention,  de  la 
haine  qu'ils  ont  vouée  à  tous  les  tyrans,  de  leur  sou- 
mission la  plus  entière  aux  lois;  en  un  mot,  de  l'u- 
nion et  de  la  concorde  si  nécessaires  entre  des  hom- 
mes qui,  sentant  le  prix  de  la  liberté  et  de  Tégalité , 
sont  aussi  accoutumés  à  combattre  pour  leur  défense 
[u'à  donner  des  exemples  journaliers  des  vertus  ou 
[es  sacrifices  qui  peuvent  faire  chérir  la  révolution , 
consoler  les  malheureux,  et  assurer  le  bonheur  pu- 
blic. Voilà,  citoyen  président ,  ce  que  nous  avions  h 
dire  à  la  Convention  nationale,  pour  venger  encore 
une  fois  Lorient  des  impostures  a  Tappui  desquelles 
on  y  a  aussi  vexé,  opprimé  et  incarcéré  des  patriotes, 
au  nom  même  de  ce  patriotisme  dont  les  auteurs  de 
tant  de  maux  ne  savaient  seulement  pas  conserver 
les  apparences. 

•  Salut  et  fraternité!       Gubbmeur,  Gueznc* 

Les  membres  de  V administration  générale  de  Var- 
rondissement  de  la  Flandre  orientale,  séant  à 
Gaud,  à  la  Convention  nationale. 

m  Législateurs,  au  milieu  des  voix  réunies  qui  ne 
cessent  d'exprimer  la  satisfaction  générale  que  pro- 
duit votre  inviolable  attachement  aux  principes  de 
liberté ,  d'égalité ,  de  justice  et  de  probité ,  les  admi- 
nistrateurs de  la  Flandre  orientale  vous  adressent 
rhommage  de  leur  dévouement  et  du  vit  empresse- 
ment qu'ils  ont  de  voir  opérer  la  réunion  de  cette 


3; 


intéressante  partie  de  la  Belgique  à  la  république 
française. 

•  t'est  par  l'émission  de  ce  vœu  qu'ils  croient 
pouvoir  acquitter  envers  cette  nation  êénércuse  les 
droits  honorables  et  sacrés  qu'elle  a  à  Ta  reconnais- 
sance d'un  peuple  rendu  libre  par  ses  efforts,  et  qui 
mérite  sans  doute  de  partager  les  hautes  destinées 
de  ses  libérateurs. 

•  Oui ,  législateurs ,  les  habitants  de  cette  belle 
contrée  sont  dignes  de  la  qualité  de  citoyen  fran- 
çais ;  l'amour  de  la  patrie ,  ce  feu  sacré  qui  brûle 
dans  vos  cœurs,  échauffe  aussi  leurs  âmes  et  les  em 
brase. 

•  Francs  dans  leur  caractère ,  énergiaues  dans 
leurs  sentiments,  ils  font  chaque  jour  éclater  leui 
joie  au  récit  des  nouveaux  triomphes  oui ,  dans  la 
saison  la  nlus  rigoureuse ,  procurent  à  la  France  la 
conquête  ae  toute  la  Hollande. 

•  Un  grand  nombre  de  leurs  compatriotes  ont 
d'ailleurs  donné  depuis  longtemps  des  preuves  de 
leur  attachement  à  la  républinue  ;  ils  ont  dans  les 
armées  versé  leur  sang  pour  la  liberté  :  c'est  parce 
qu'ils  connaissent  le  prix  d'une  aussi  belle  cause  , 
qu'ils  abhorrent  toute  espèce  de  tyrannie Ils  dé- 
clarent qu'en  les  aff^ranchissaut  du  despotisme ,  on 
leur  a  rendu  une  patrie  qu'ils  pourront  désormais 
chérir,  et  qu'ils  trouvent,  en  descendant  dans  leurs 
cœurs ,  toutes  les  lois  que  vous  avez  proclamées  ; 
voilà  leur  idole  et  leur  guide. 

«  Ils  seraient  au  comble  de  leurs  vœux,  si  ces  lois 
salutaires,  et  qui  malheureusement  sont  encore  étran- 
gères, étaient  exécutées  dans  la  Belgique 

•  Pourrait-on,  législateurs,  leur  refuser  l'avantage 
de  partager  la  guerre  et  la  prospérité  qu'elles  assu- 
rent à  jamais  aux  Français?  (On  applaudit.) 

«  Vive  la  république ,  vive  la  Convention  natio- 
nale !  > 

La  Convention  nationale  décrète  la  mention  ho- 
norable et  l'insertion  de  cette  Adresse  au  Bulletin. 

RouzEL  :  Le  comité  des  finances  a  vu  dans  les  pa- 
piers publics  ,  et  notamment  dans  le  Moniteur  et  le 
Courrier  républicain,  la  censure  d'un  de  ses  arrêtés. 
Le  comité  des  finances  m'a  chargé  de  faire  ici  ses  re- 
merciements aux  censeurs,  et  de  publier  que  toutes 
les  fois  que  de  bons  citoyens  lui  indiqueront  les  er- 
reurs qu'il  pourrait  avoir  commises,  il  se  fera  un  de- 
voir de  les  reconnaître  loyalement,  de  les  réparer  de 
bonne  grâce,  et  de  remercier  ceux  qui  les  lui  auront 
fait  apercevoir.  Citoyens,  voilà  encore  un  des  nom- 
breux avantages  de  la  liberté  de  la  presse  ;  elle  cen- 
sure  les  actes  publics,  elle  fait  connaître  les  erreurs, 
elle  en  arrête  les  mauvais  effets,  et  empêche  qu'elle 
ne  dégénère  en  actes  tyranniques. 

Vous  avez  déjà  senti  la  nécessité  de  faire  rentrer 
les  contributions  dans  Paris ,  et,  par  votre  décret  du 
24  nivôse,  vous  avez  ordonné  qu'il  serait  dressé  dans 
chaque  section  une  liste  de  ceux  qui  ne  les  auraient 
pas  payées.  Malgré  cette  mesure,  maleré  les  invita- 
tions au'on  a  faites  pour  opérer  le  prochain  acquitte-* 
ment  ne  cette  dette,  les  commissaires  de  la  perception 
né  se  sont  pas  aperçus  qu'elle  augmentât  beaucoup. 
Ils  ont  cru  aue  ron  devait  saisir  l'occasion  du  renou- 
vellement des  cartes  civiques  pour  faire  rentrer  les 
contributions ,  et  qu'on  n'en  devait  accorder  qu'à 
ceux  qui  les  auraient  payées.  Ils  ont  renvoyé  au  co- 
mité des  finances  un  projet  d'arrêté  contenant  ces 
dispositions ,  et  c'est  par  erreur  qu'on  a  inscrit  sur 
ce  projet  l'adoption  du  comité  des  finances,  dont  la 
véritable  intention  était  de  le  soumettre  à  la  Con- 
vention. Je  vais  vous  le  lire,  et  vous  verrez  que 
les  exceptions  qu'il  contient  préviennent  les  incon- 
vénients auxquels  on  prétendit  qu'il  pourrait  donner 
lien. 


383 


Rouzcl  lit  cet  arrêt. 

Thuriot  :  Je  demande  la  cassation  de  cet  arrêté. 
Il  peut  contenir  des  dispositions  utiles ,  mais  le  co- 
mité des  finances  n'a  jpas  le  droit  de  faire  des  lois  ;  il 
n*a  pas  le  droit  d*empiéter  sur  les  pouvoirs  qui  sont 
délégués  aux  autres  comités.  S'il  s'arroge  les  fonc- 
tions du  comité  de  sûreté  générale,  il  n'y  a  pas  de 
raison  pour  qu'il  ne  s'arroge  pas  celles  du  comité  de 
salut  public.  11  n'y  a  qu'une  loi  qui  puisse  faire  re- 
fuser une  carte  civique  à  un  citoyen  ,  et  le  comité 
des  finances  ne  doit  pas  établir  des  castes  entre  les 
Français.  Il  n'a  pas  le  droit  de  juger  l'état  civil , 
et  la  loi  seule  peut  obliger  un  citoyen  à  faire  telle 
ou  telle  chose  sous  peine  de  privations  des  droits 
civils. 

RouzBL  :  Le  comité  des  finances  a  les  mêmes  prin- 
cipes que  Thuriot  ;  il  a  rapporté  l'arrêté  au'il  avait 
pris  par  erreur  ;  ainsi  il  n'y  a  pas  lieu  de  le  casser. 
Dans  ce  moment  il  vous  le  soumet  pour  que  vous 
l'approuviez  ou  que  vous  le  rejetiez.  Si  vous  jugez 
à  propos  qu'il  l'examine  de  nouveau ,  je  ne  m'y  op- 
pose pas. 

Thubiot  :  J'insiste  pour  la  cassation  et  le  renvoi 
au  comité.  Le  premier  a  été  publié  dans  Paris,  et  par 
la  voie  des  journaux;  l'arrêté  révocatoire  n'est  pas 
connu  ,  la  cassation  est  donc  nécessaire. 

BoGER-Ducos  :  Je  m'oppose  au  renvoi.  C'est  une 
mauvaise  mesure ,  une  mesure  dangereuse  que  de 
subordonner  la  délivrance  des  cartes  civiques  au 
payement  des  contributions;  c'est  évidemment  don- 
ner aux  riches  seuls  les  moyens  de  les  obtenir.  Il  est 
vrai  que  le  projet  présenté  par  Rouzel  contient  des 
exceptions  en  faveur  des  indigents  ;  mais  il  faudra 
que  leur  indigence  soit  prouvée;  et  que  de  formali- 
tés ne  faudra-t-il  pas  remplir?  En  attendant  tout 
'  cela,  les  citoyens  seront  privés  de  leurs  cartes  et  des 
moyens  de  faire  leurs  affaires.  Une  grande  quantité 
negagneque  ce  qu'il  faut  pour  vivre;  comment  vou- 
lez-vous qu'ils  trouvent  tout  de  suite  One  somme 
considérable  pour  payer  leurs  contributions  et  ob- 
tenir leurs  cartes?  Les  dispositions  de  cet  arrêté  pè- 
sent donc  véritablement  sur  les  sans-culottes.  Je 
crois  en  avoir  assez  dit  pour  prouver  combien  cet 
arrêté  est  injuste.  Qu'on  nous  propose  un  mode  de 
faire  rentrer  les  contributions,  qui  soit  étranger  a 
la  délivrance  des  cartes  civiques,  et  je  serai  le  pre- 
mier à  l'adopter.  Je  demande  l'ordre  du  jour  sur  le 
renvoi. 

Engubbrand  :  Je  demande  le  renvoi  au  comité. 
Tout  bon  citoyen  doit  payer  ses  contributions.  Il  n'y 
a  que  les  aristocrates  et  les  royalistes  qui  puissent 
refuser  de  contribuer  aux  dépenses  qu'exige  le  salut 
de  la  patrie.  N'ont-ils  pas  eu  le  temps  de  payer  de- 
puis 1791? 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Le  comité  des  finances  con- 
vient qu'il  a  eu  tort  ile  prendre  un  arrêté  qui  touche 
aux  fortunes  et  à  l'état  des  citoyens;  eh  bien ,  annu- 
lons cet  arrêté,  et  chargeons  le  comité,  qui  a  de 
bonnes  intentions ,  de  nous  proposer  un  mode  de 
faire  rentrer  l'impôt. 

La  proposition  de  Bourdon  (de  l'Oise)  est  dé- 
crétée. 

•—  Sur  la  proposition  de  Lecointre,  la  Convention 
nationale  décrète  le  renvoi  de  la  nétition  du  citoyen 
Alagallon  aux  comités  de  salut  puolic  et  des  finances 

réunis,  à  l'effet  de  proposer,  s'il  y  a  lieu  ,  un  projet 
de  décret  qui  règle  provisoirement ,  et  pour  seule- 
ment le  temps  de  l'excessive  cherté  des  denrées  de 
f crémière  nécessité,  un  mode  d'augmentation  sur 
es  pensions  des  militaires  retirés  du  service,  et  que 
cette  augmentation  porte  également  sur  les  pères  et 

sur  les  mères  des  défenseurs  de  la  patrie  qui  seraient 

iudigentsi 


—  Laumont,  au  nom*  du  comité  de  sûreté  géué 
raie ,  fait  un  rapport  sur  le  citoyen  Lalandc,  admi- 
nistrateur du  Pas-de-Calais,  destitué  de  ses  fonctions* 
Ce  rapport  tend  à  maintenir  cette  disposition. 

Lecointre  (de  Versailles)  la  combat.  Il  atteste  la 
probité  et  le  civisme  de  Lalande,  et  lit  quelques  piè- 
ces en  sa  faveur.  Il  assure  que  le  rapporteur  a  omis 
celles  qui  étaient  à  la  décharge  de  ce  citoyen.  Il  de- 
mande l'impression  et  l'ajournement. 

Bentarole  :  Je  crois  devoir  d'autant  plus  appuyer 
cette  proposition  qu'on  a  cherché  depuis  quelques 
jours  à  donner  un  sens  favorable  au  mot  modéré, 
(On  applaudit.) 

Je  n'entends  pas  par  modéré  ceux  qui  ont  de  la 
modération  ,  mais  les  ennemis  de  la  révolution  oui 
veulent  aujourd'hui  en  recueillir  les  lauriers.  (Vib 
applaudissements  dans  le  haut  de  la  salle.) 

Je  pense  que,  si  les  représentants  dans  les  dépar* 
tements  ont  destitué  bien  des  gens  qui  le  méritaient, 
ils  ont  aussi  parfois  été  circonvenus  et  ont  destitué 
des  patriotes  qu'ils  ont  remplacés  par  d'anciens  roya- 
listes. (Nouveaux  applaudissements.) 

Bewrell  :  Je  ne  chercherai  pas  à  allumer  des  hai- 
nes par  des  disputes  ^de  mots  :  le  plus  cruel  abus 
qu'on  puisse  faire  des  mots,  c'est  d'ériger  des  crimes 
en  vertust  (Vifs  applaudissements.)  Il  faut  avoir  le 
cœur  chaud  et  plein  de  l'amour  du  bien  public ,  et 
la  tête  froide  et  modérée.  (Mêmes  applaudissement^.) 
Il  faut  la  justice,  et  tout  ce  qui  est  en  deçà  ou  au  delà 
est  mauvais.  J'appuie,  au  reste,  rajourncment,  afin 
^ue  les  laits  soient  éclaircis  ;  que  justice  soit  rendue 
à  Lalandc  s'il  est  innocent ,  et  qu'il  soit  destitué 
s'il  a  été  terroriste.  (On  applaudit.) 

Celte  proposition  est  décrétée. 

—  L'assemblée  passe  à  l'appel  nominal  pour  le  re- 
nouvellement de  trois  membres  du  comité  de  salut 
public. 

Les  trois  membres  qui  sortent  de  ce  comité  sont 
Richard ,  Guyton-Morveau  et  Prieur  (de  la  Marne)  ; 
ceux  que  le  résultat  de  l'appel  nominal  donne  pour 
les  remplacer  sont  Merlin  (de  Douai),  Fourcroy,  La- 
conibe  (du  Tarn). 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 

SÉANCE  DU  SOIR  DU  15  PLUVIOSE. 

Cette  séance  était  consacrée  au  renouvellemeut  de 
quatre  membres  du  comité  de  sûreté  générale. 

L'assemblée  a  nommé ,  pour  remplacer  ceux  oui 
sortent.  Bourdon  (de  l'Oise),  Auguis,  Perrin  (aes 
Vosges)  et  Mathieu. 

L'appel  nominal  a  donné  lieu  à  quelques  troubles; 
on  murmurait  dans  le  haut  de  la  salle,  à  mesure  que 
dans  une  autre  partie  on  nommait  les  députés  qu  on 
portait  au  comité  de  sûreté  générale. 

Legendre  (de  Paris)  :  Il  ne  fau{  pas  seulement  re- 
nouveler quatre  membres,  niais  le  comité  de  sûreté 
générale  en  entier,  pour  satisfaire  ceux  qui  murmu- 
rent, et  à  qui  le  comité  actuel  déplaît ,  parce  que 
non-seulement  il  fait  peu  dresser  de  guillotines,  mais 
qu'il  en  a  beaucoup  fait  abattre  ;  on  voudrait  guillo- 
tiner, guillotiner  encore,  et  toujours  guillotiner. 
Pour  moi ,  je  proteste  que ,  tant  que  je  respirerai,  je 
défendrai  l'innocence  et  la  justice,  et  poursuivrai  le 
crime  et  les  hommes  de  sang.  (De  Tifs  appbudisse- 

I  ments  éclatent  de  toutes  parts.) 

I  Quelques  membres  se  précipitent  vers  la  place  où 
siège  Legendre. — Le  trouble  augmente  ;  le  président 
se  couvre. — Le  calme  renaît  enfin  ;  l'appel  nominal 
continue ,  et  les  quatre  membres  que  nous  avons 

'  nommés  sont  proclamés. 


384 


L«i  nomination  de  Bourdon  excite  particulièrement 
des  applaudissements  universels. 

SÉANCB  DU  16  PLUVIOSE. 

On  lit  la  correspondance.  Elle  est  composée  de 
nombreuses  Adresses  de  fëlicitation. 
—  Un  secrétaire  lit  la  lettre  suivante  : 

Le  représentant  du  peuple  dam  les  porte  et  près 
Varmée  navale  de  la  Méditerranée  au  citoyen 
président  de  la  Convention  nationale. 

Port-U-Montagne,  !•  30  ni  vote,  Tan  ^  de  la 
république  française,  une  et  indivisible. 

«  Citoyen  président,  je  m'empresse  de  te  remettre  ci- 
Joint  la  lettre  des  citoyens  qui  composent  la  compagnie  de 
la  gendarmerie  maritime  de  ce  port ,  ainsi  que  la  somme 
de  323  lîT.  qu*ils  m'ont  prié  de  Faire  passer  à  la  Conven- 
tion nationale ,  poar  contribuer  à  la  construction  du  vais« 
•eau  le  Vengeur, 

a  Salut  et  fraternité. 

•  5f^n^  Jbaii-Boii  SAUiT-AinMift.  » 

l^s  citoyens  composant  la  compagnie  de  gendar- 
merie nationale  maritime  au  Port  de  la  Monta- 
gne au  citoyen  Jean- Bon  Saint-André^  représen- 
tant du  peuple  dans  les  départements  maritimes 
4ê  la  république. 

«Au  Port^la-Moniagne,  le  §6  niTose,  fan  S*  de 
la  république  française,  une  et  indivisible. 

f  Citoyen  représentant,  quand  tons  les  membres  de  la 
grande  famille  s'empressent  de  témoigner  par  des  offrandes 
patriotiques  leur  attachement  pour  la  république  et  le  dé- 
sir de  la  voir  triompher  de  ses  vils  ennemis,  les  gendarmes 
maritimes  au  Port  de  la  Montagne  ont  dit  :  Et  nous  aussi 
nous  contribuerons  de  tous  nos  moyens  pour  foudroyer 
ces  orgueilleux,  perfides  et  lâches  Anglais.  Nous  te  remel- 
lODs,  citoyen  représentant,  une  somme  de  3S3  liv.,  mon- 
tant d'une  souscription  aussitôt  remplie  qu'ouverte  pour 
contribuer  au  remplacement  de  Timmorlel  faisseau  le 
Vengeur;  nous  t'invitons  à  la  faire  passer  à  la  Convention 
nationale*  Sois  auprès  d'elle  l'organe  de  notre  reconnais- 
sance pour  ses  sublimes  travaux;  engage-la  de  notre  part 
à  rester  à  son  poste  jusqu'à  ce  que  notre  liberté  soit  parfai- 
tement consolidée,  et  assure  la  que  nous  voulons  la  répu- 
blique démocratique,  une  et  indivisible. 

•  Respect  à  la  repréaenlalion  nationale,  salut  et  frater- 
nité à  ses  membres.  *  [Suivent  tes  signatures.) 

Mention  honorable ,  insertion  au  Bulletin. 

Mbblino  :  Je  viens,  au  nom  de  votre  comité ,  sol- 
liciter votre  bienfaisance  en  faveur  des  aveugles  de- 
meurant dans  la  maison  des  Quinze-Vingts,  et  vous 
proposer  une  légère  augmentation  au  traitement 
dont  ils  jouissent. 

Votre  comité  a  cru  avec  raison  que,  pour  bannir 
la  dissension  de  cet  asile ,  il  fallait  d^abord  établir 
une  égalité  absolue  dans  le  prêt  que  les  aveugles  y 
reçoivent. 

Les  circonstances  pénibles  dans  lesquelles  nous 
nous  trouvons  pèsent  bien  plus  durement  sur  la 
classe  des  hommes  qui ,  privés  de  tous  les  moyens 
industriels,  n'ont  de  ressources  aue  dans  les  secours 
qui  leur  sont  accordés.  C'est  à  la  générosité  natio- 
nale de  prévenir  leurs  besoins  :  ne  pouvant  rien  par 
eux-mêmes,  les  législateurs,  justes  et  bienfaisants, 
s'empresseront,  dans  tous  les  temps,  d'adoucir  leurs 
maux ,  et  surtout  de  les  mettre  à  même  de  moins 
sentir  la  progression  des  denrées  et  la  cherté  exces- 
sive des  choses  indispensables  à  la  vie. 

Bn  conséquence,  votre  comité  des  secours  publics 
vous  propose  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  son  comité  des  secours  publics  sur  la  pé- 
tition des  aveugles  de  l'hospice  des  Quinze- Vingts, 
considérmi  que  rinégalité  des  traitements  dont  ils 


jouissent  a  été  souvent  la  cause  de  troubles  et  de  ja- 
lousies ;  considérant  pareillement  auc ,  vu  la  cherté 
des  denrées,. ils  sont  insufiisants,  aécrète  ; 

«  Art.  l«r.  A  compter  du  l«r  nivôse  an  3,  et  pro- 
visoirement, les  membres  aveugles  de  Thospicedes 
Suinze-Vingts,  dont  le  traitement  jourualierne  8*é- 
ve  point  a  40  sous  par  ménage,  recevront  une 
augmentation  de  5  sous  par  jour. 

«  11.  A  compter  de  la  même  époque ,  les  veufîs  ou 
veuves  d'aveugles  recevront  un  secours  de  15  sous 
l)ar  jour  ;  celui  des  enfants  au-dessous  de  douze  ans 
sera  de  5  sous. 

•  m.  Les  membres  aveugles  de  Vhospice,  résidant 
dans  les  départements,  jouiront ,  a  compter  de  la 
même  époque  ,  du  même  traitement  et  dans  les  mê- 
mes proportions  que  ceux  résidant  dans  Paris  ou 
dans  renclos. 

•  IV.  La  commission  des  secours  publics  recher- 
chera avec  soin  ceux  qui,  par  leurs  facultés  person- 
nelles, sont  au-dessus  des  besoins,  veillera  à  ce  qu'ils 
soient  écartés  des  distributions ,  et  en  fera  dresser 
un  état  séparé  ,  pour  être  ensuite  soumis  au  comité 
des  secours  publics,  qui  tera  statuer  ce  qu'il  appar- 
tiendra. 

«  V.  Le  présent  décret  ne  sera  imprimé  qu*au  Bul- 
letin de  correspondance.  •   < 
Ce  décret  est  adopté. 
—  Un  secrétaire  lit  la  pièce  suivante  : 

Les  membres  composant  la  Société  populaire  été 
Troyes  à  la  Convention  n€Uionale. 

Troyet,  le  IS  pluviôse,  an  S«  de  la  rcpubliqM 
française,  une  et  tndiTisible. 

•  Citoyens  représentants,  l'orage  qui  a  éclaté  5ur  Car- 
rier grossit  sur  la  tête  de  ses  imitateurs;  ainsi  le  veut  la 
justice  nationale.  Pour  en  accélérer  les  effets,  nous  vous 
envoyons  copie  d'un  acte  populicide  du  tyran  qui,  sans 
|K>rter  de  diadème,  n'en  vint  pas  moins  appesantir  un 
sceptre  de  fer  sur  nos  concitoyens.  Il  s'agit  d'un  nommé 
Rousselin ,  qni  vous  a  déjà  été  dénoncé  par  une  section  de 
notre  commune.  L'acte  ci-joint,  postérieur  de  trois  jours 
à  son  arrivée  à  Troyes,  donnera  un  aperçu  du  succt'S  de 
sa  mission  dévastatrice.  Liseï,  législateurs,  et  transmcUes 
votre  indignation  à  la  France  entière,  car  Ja  publicité  est 
la  sauvegarde  du  peuple. 

>  Sal  ut  et  f raterni  lé.  t  [Suivent  tes  signatures.) 

Copie  d'un  ordre  de  Rouuelin ,  commissaire  eivU 
national  dan$  la  commune  éle  Troyes^  du  38  bru- 
maire, 2«  année  républicaine, 

•  Le  citoyen  Sevestre,  accusateur  publie,  voudra  bien 
sur-le-champ  faire  dresser  une  guillotine  sur  la  place  ci- 
devant  Saint-Pierre,  dite  de  la  Liberté,  et  me  dénoncer 
aussitôt,  cl  à  son  tribunal  criminel  provisoirement,  le 
premier  cbe(  d'atlroupemenb  funaU'qucs»  sous  prétexte  de 
subsistances  et  autres  choses,  pour  être  sur-le-champ  jugé 
prévotalement  en  premier  et  dernier  ressort* 

«  Signé  A.  Rousselin  ,  commissaire  national  ei»iL  » 

•  Pour  copie  conforme,  délivrée  par  moi,  dit  Sevestre, 
accusateur  public  près  le  tribunal  crinriinel  du  département 
de  l'Aube,  à  l'agent  national  prés  le  district  de  Troyes,  ce 
9  pluviôse,  l'an  S  de  la  république  française,  une  et  indi- 
visible. Signé  Sbvbstrb.  » 

La  Convention  nationale  renvoie  cette  Adresse  et 
Tarrélé  au  comité  de  sûreté  générale. 

{La  suite  demain.) 

N.  B.  —La  Convention  a  ouvert,  dans  la  séance 
du  17»  la  discussion  sur  les  moyens  proposés  par  le 
comité  des  finances ,  de  retirer  une  partie  des  assi- 
gnats de  la  circulation. 

Cette  discussion  a  porté  principalement  sur  le 
projet  d*une  loterie  nationale  du  fonds  de  4  mil- 
liards. Elle  sera  continuée  daas  les  prochaines 
séances. 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  139.  Nonidi  19  Pluviôse,  Van  3^*  {Samedi  7  Février  1795 ,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Bruchtal ,  le  th  janvier,  —  La  plupart  des  approvision* 
neurs  de  Tarmée  autricbienDe  viennent  d*ètre  mis  en  juge- 
ment. On  les  accuse  d'avoir  volé  plus  de  150,000  florins. 

—  On  vient  de  transHërer  dans  celle  ville  le  quartier 
général  du  corps  de  Condé,  qui  était  resté  jusqu^à  ce  jour 
à  Ellingen.  Les  habitants  se  sont  opposés  vivement  à  ren- 
trée de  ces  troupes  abhorrées.  Il  y  a  eu  des  voies  de  fait  de 
part  et  d*autre.  Le  général  de  Saxe-Teschen  s*esl  rendu 
ici  pour  rétablir  le- calme. 

—  Le  quartier  général  de  Clairrayt  est  toujours  à  Mut- 
heim.  Le  général  La  Tour  continue  d*occuper  Dunestlicr. 

—  Les  troupes  autrichiennes,  qui  étaient  en  quartier 
dans  le  pajs  de  Berg,  se  sont  mises  de  toutes  parts  en 
mouvement  pour  se  porter  vers  la  rive  du  Rhin  ;  celles  qui 
se  trouvent  dans  les  environs  d*Ehrenbrei tstein  doivent  aussi 
descendre  le  Rhin,  pour  faire  place,  dit-on«  aux  troupes 
prussiennes. 

Les  nouvelles  de  Hollande  paraissent  avoir  le  plus  influé 
sur  ces  dispositions. 

— Du  côté  de  Manbei|D ,  on  a  profité  de  la  gelée  du  Rhin 
pour  mettre  la  rive  en  état  de  défense.  Les  Français,  de 
leur  côté,  ont  transporté  leur  quartier  général  d*Ogger- 
sbeim  &  Alzy.  lis  ont  en  ce  moment  des  forces  considérables 
aux  environs  de  Spire. 

—  Lfs  Français  doivent  faire  sauter  le  fort  do  RhinfOn 
craignait  à  Manhcim  que  Pexplosion  n*y  causât  du  dom- 
mage. Le  général  français  a  fuit  prévenir  les  habitants 
qu*il  n*y  avait  aucun  danger  ù  craindre  pour  la  ville. 

Le  A»  00  fil  sauter  quelques  fourneaux;  il  parait  que 
Topération  se  fera  partiellement. 

HOLLANDE. 

Extrait  d'une  lettre  de  La  Haye,  du  25  janvier,  — 
Quand  on  apprit  ici  la  prise  d*Araslerdam  par  lesFrunçab, 
tout  espoir  de  défendre  la  Hollande  s'évanouit,  et  chacun 
attendait  la  suite  de  ce  grand  événement  avec  les  senti- 
nents  divers  qu'inspirait  chaque  partir  Les  patriotes  mon« 
traient  la  joie  la  plus  vive;  les  stalbuudériens  paraissaient 
mornes  et  consternés. 

Les  hauts  personnages  de  la  faction  d*Orange  n*étaient 
occupés  que  des  moyens  de  mettre  à  Tabri  leur  penonne 
et  leur  fortune.  Les  uns  se  sauvaient  à  Hambourg,  d'au- 
tres à  Londres,  d'autres  en  Amérique;  la  mer  était  cou- 
verte de  paquebots  encombrés  et  de  barques  fugitives. 

Les  Français  victorieux  ont  comblé  les  vœux  et  les  plus 
douces  espérances  des  amis  de  la  liberté.  Ils  ont  déclaré 
partout,  au  nom  de  leur  gouvernement,  qu'ils  entraient 
non  pas  en  conquérants,  mais  en  amis;  qu'ils  res()ecte- 
raient  la  liberté  et  les  propriétés  des  citoyens  ;  qu'ils  avaient 
droit  d'attendre  des  secours  et  qu'ils  en  demanderaient, 
mais  (fue  ces  secours  seraient  convenus,  réglés  à  l'amiable, 
et  de  manière  à  n'opprimer  personne;  qu'ils  laisseraient 
BU  peuple  la  faculté  de  rélormer  son  gouvernement  comme 
il  le  jugerait  convenable  ;  qu'ils  ne  favoriseraient  aucun 
parti  au  préjudice  de  l'autre;  enfin,  que  l'intention  du 
gouvernement  français  était  de  conserver  &  la  Hollande  son 
commerce  et  son  indépendance. 

L'entrée  des  Français  dans  cette  ville  a  été  un  véritable 
Jour  de  triomphe. 

Le  représentant  du  peuple,  qui  est  logé  au  palais  ci- 
devant  stathoudérien,  a  renouvelé  l'assurance  des  bonnes 
dispositions  de  la  nation  française.  Plusieurs  ministres 
étrangers  sont  venus  le  féliciter  sur  les  succès  miraculeux 
des  armes  de  la  république;  le  ton  de  quelques-uns  d'entre 
eux  était  très-embarrassé.  La  visite  du  ministre  de  Portugal 
a  été  surtout  remarquable  ;  il  a  déclaré  que  ses  félicita- 
tions étaient  d'autant  plus  sincères  que  sa  cour  n'était 
entrée  dans  la  coalition  que  malgré  elle  et  entraînée  par 
l*ascendant  de  l'Angleterre.  Le  ministre  de  Russie  ne  s'est 
montré  que  pour  demander  un  passeport,  qu'il  a  obtenu 
SOr-leK:hamp  ;  il  est  parti  le  lendemain. 

On  convient  unanimement  que  la  conduite  des  libéra- 
teurs de  la  Hollande  est  aussi  sage  en  politique  qu'elle  est 
bumaioe  et  généreuse. 

b*  Séiie,  —  7t>mc  .Y. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidenee  de  Rovére» 
SUITE  DE  LA  SEANCE  DU   16  PLUVIOSE. 

Les  hommes  noirs  et  de  couleur  des  colonies  fraii^ 
çaises  sont  admis  à  la  barre. 

L'orateur:  Citoyens  représentants,  le  jour  oii 
vous  avez  dit  à  l'univers  :  •  Les  droits  de  l'homme 
sont  sacres,  sa  personne  est  inaliénable,  •  vous  avez 
immortalisé  la  révolution  française. 

Le  16  pluviôse,  jour  où,  sur  les  bases  impérissa- 
bles de  la  constitution,  vous  avez  reconnu  que  les 
hommes  qu'une  force  tyrannique  avait  faits  esclaves 
étaient  libres,  vous  avez  mérité  le  vrai  triomphe  de 
rhumanité. 

L'innocence  opprimée  sous  la  verge  des  buveurs 
du  san^  des  noirs  est  vengée  par  votre  décret.  H  a 
rendu  a  ses  droits  naturels  plus  d'un  million  d'indi- 
vidus: ce  jour  fut  bien  glorieux  pour  la  république* 
puisque  ses  ennemis  en  ont  rugi  de  douleur;  ce 
jour  ht  la  joie  des  âmes  vertueuses  et  le  désespoir 
des  terroristes,  de  tous  ces  vampires  des  colonies 
qui,  dans  des  vases  précieux,  buvaient  le  sang  afri- 
cain transformé  en  liqueurs  spi  ri  tueuses  ;  ces  li- 
queurs désormais  seront  produites  par  des  mains  li- 
bres. 

Le  nouveau  peuple  des  colonies  a  déjà  fait  sentir 
aux  ennemis  de  la  république,  par  la  reprise  de  plu- 
sieurs places,  ce  que  peuvent  les  enfants  de  la  li- 
berté :  c'est  Hercule  dans  le  berceau,  écrasant  les 
serpents  jetés  pour  le  dévorer. 

Nous  venons,  citoyens  représentants,  célébrer  vo- 
tre constitution  et  Tairniversaire  du  décretdu  16  plu- 
viôse de  l'an  dernier;  nous  venons,  au  nom  de  tout 
le  peuple  des  colonies  françaises,  jurer,  dans  le  sanc- 
tuaire-de  la  liberté,  de  vivre  libres  ou  de  mourir  ; 
de  vivre  libres  pour  la  prospérité  et  la  splendeur  de 
la  république,  et  de  mourir  pour  le  maintien  de  sa 
sainte  constitution. 

Citoyens  représentants,  permettez-nous  de  vous 
rappeler  dans  ce  jour  que,  dans  les  parties  de  vos 
colonies  où  l'Anglais ,  l'Espngnol  ont  été  appelés 
par  les  colons,  nos  frères  sont  encore  courbés  sous 
le  poids  des  chaînes  matérielles  de  l'esclavage  :  dou- 
nez-nous  des  armes,  des  munitions;  nos  bras  sau- 
roiit  bien  les  délivrer  de  leurs  tyrans ,  et  chasser 
ceux-ci  du  sol  de  la  république.  Nos  anciens  bour- 
reaux ont  veillé  pour  retarder  l'envoi  des  secours 
nécessaires  dans  les  colonies:  ces  secours  si  atten- 
dus, si  utiles  pour  les  intérêts  de  la  république,  ne 
sont  pas  partis,  sous  le  prétexte  d'une  discussion 
contradictoire  entre  les  commissaires  civils  et  les 
colons.  Quel  rapport  peut-il  y  avoir  entre  les  des- 
tructeurs et  les  amis  de  la  liberté  ?  Quel  rapproche- 
ment peut-il  jamais  y  avoir  entre  les  tyrans  colo- 
niaux et  les  hommes  qui,  depuis  deux  siècles,  ea 
étaient  opprimés? 

Vive  la  liberté!  vive  la  Convention  nationale  1 
vive  la  république  française,  une  et  indivisible  ! 

Cette  pétition  est  vivement  applaudie  :  l'assemblée 
en  décrète  la  mention  honorable  et  l'insertion  aa 
Bulletin. 

Crassous  :  Je  demande  le  renvoi  au  comité  de  sA- 
lut  public  de  la  partie  de  la  pétition  où  ces  citoyens 
demandent  d'aller  combattre  les  Anglais  qui  occu-. 
peut  une  partie  de  nos  colonies.  Ils  viennent,  vous 
ont-ils  dit,  célébrer  l'anniversaire  du  jour  où  vous 
leur  avez  donné  la  liberté.  Armez  leurs  bras,  ils 
iront  la  donner  à  leurs  frères,  que  les  Anglais  tien- 
nent encore  dans  l'esclavage. 

4Ù 


m 


—  Met  soumrl  à  la  discussion  le  projet  de  décret 
relatif  à  IVnvoi  des  représentants  au  peuple  dana 
les  colonies  situées  au  delà  du  Cap  de  Bonne-Espé- 
rance. 

GouLY  :  Citoyens,  le  comitë  de  salut  publio,  dans 
son  rapport  géne'ral  sur  les  diverses  parties  de  la  ré- 
publique française  en  Asie,  en  Afrique  et  dans  le 
Nouveau-Monde,  vous  a  démontré  combien  il  est  es- 
sentiel et  urgent  de  s'occuper  des  moyens  d'y  réta- 
blir Tordre  et  rharmonie,  d'y  consolider  la  paix,  et 
de  les  attacher  plus  que  jamais  à  la  mère-patrie.  Il 
vous  a  proposé,  en  conséquence,  d'envoyer  dans  ces 
précieuses  et  trop  malheureuses  contrées  des  repré- 
sentants du  peuple. 

Si  cette  mesure  salutaire ,  demandée  et  sollicitée 
vivement  par  ladéputation  de  rile-de-France  depuis 
vendémiaire  an  2,  a  paru  au  gouvernement  actuel 
la  seule  efficace  pour  le  maintien  des  intérêts  de  la 
France  et  pour  la  prospérité  de  son  commerce;  si 
cette  mesure,  dis-je,  est  commandée  impérieuse- 
ment pour  les  Antilles,  par  les  maux  et  les  désastres 
inouïs  qu'elle.s  ont  éprouvés,  elle  Test  bien  davan-. 
tage  pour  les  îles  de  France,  de  la  Réunion  et  autres 
adjacentes,  par  les  circonstances  particulières  où 
elles  se  trouvent  aujourd'hui.  Cette  mesure  enfin  est 
la  seule  qui  puisse  les  sauver;  c'est  ce  que  je  vais 
faire  en  sorte  de  vous  prouver.  La  prudence  et  la  po- 
litique m'empêcheront  d'entrer  dans  de  grands  déve- 
loppements à  cette  tribune,  attendu  que  je  n  ai  rien 
laissé  à  désirer  au  comité  de  salut  public  à  cet  égartl. 

Citoyens,  chaque  pas  de  nos  armées  de  terre,  vous 
le  savez,  a  été  marqué  par  une  victoire  ;  notre  répu- 
blique naissante  a  triomphé  de  la  réputation  des  gé- 
néraux les  plus  fameux,  derexpérieiicesi  vantée  des 
légions  du  Nord,  de  ces  tactiques  savantes  créées  par 
le  génie  de  Frédéric,  et  de  toutes  les  periidies  de  la 
vieille  politique  européenne.  Nous  avons  montré  le 
même  courage  sur  les  mers  ;  mais  nous  ne  pouvions 
obtenir  les  mêmes  succès:  les  causes  en  sont  trop 
multipliées  et  trop  évidentes  pour  qu'on  les  indt- 
<juc  ici.  L'empire  des  mers  est  donc  resté  au  plus  per- 
iide  de  tous  les  peuples  ;  un  jour  viendra,  et  ce  jour 
n'est  pas  éloigné,  où  le  plus  brave  et  le  plus  géné- 
reux y  reprendra  tous  ses  droits. 

Loin  de  nous  une  vaine  pusillanimité  qui  pous  fe- 
rait déguiser  nos  maux  à  cet  égard  ;  nous  semble - 
rions,  en  les  cachant,  douter  de  l'énergie  nationale. 

Ne  craignons  donc  pas  de  les  découvrir,  puisque 
nous  sommes  sûrs  de  les  réparer.  Osons  le  dire  fran- 
chement, nos  possessions  aAsie  ont  été  la  proie  de 
l'Angleterre. 

Nous  ne  pouvons  pas,  sans  doute,  tenter  en  ce 
moment  les  efforts  nécessaires  pour  les  reprendre  ; 
une  telle  proposition  serait  prématurée  et  impru- 
dente. Le  génie  de  la  liberté  doit  se  composer  d'au- 
dace et  de  sagesse:  il  se  compromet  quand  il  ose 
trop  à  la  fois,  et  quand  il  n'ose  pas  assez. 

Nous  devons  maintenant  porter  nos  regards  plus 
près  de  nous;  la  France  a  perdu  la  Méditerranée  par 
trahison  et  incapacité,  elle  doit  la  reconquérir;  il 
faut  recréer  notre  marine,  rouvrir  au  commerce  du 
Levant  des  sources  d'opulence  trop  longtemps  ob- 
struées, assurer  l'approvisionnement  du  Midi,  et 
établir  une  commuDication  facile  avec  Conslanti- 
nople. 

Dans  l'Océan,  nous  n'avons  pas  un  moindre  be- 
soin de  protéger  notre  commerce,  de  contenir,  de 
réprimer  même  la  tyrannie  anglaise,  et  de  secourir 
^  nos  colonies  des  deux  mondes. 

Voilà  011  se  bornent  nos  vœux  les  plus  puissants  ; 
mais  ce  n'est  pas  où  doivent  se  borner  nos  espé- 
rances. 

Nous  avons  jusqu'ici  plus  accru  noire  gloire  que 
nos  richesses  :  la  politique  avare  ûê  l'Angleterre  a 


fait  un  calcul  tout  différent  :  elle  perd  sa  renomm^^e, 
mais  elle  s'enrichit  ;  et  son  or  la  console  de  son  dés- 
honneur. On  s'est  plu  trop  souvent  à  la  montrer 
dans  un  état  d'épuisement  et  de  langueur. 

Ceux  qui  nous  ont  fait  ce  tableau  n  ont-ils  pas  dû 
craindre  d'entretenir  une  dangereuse  sécurité  parmi 
nous,  en  diminuant  à  nos  yeux  la  puissance  effec- 
tive de  nos  ennemis  naturels  ?  Ignoraient-ils  que  ces 
insulaires  bretons  ont  des  ressources  inépuisables 
dans  leurs  possessions  des  Indes  orientales  ;  que  les 
subsides  qu'ils  tirent  de  ces  immenses  possessions 
sont  si  considérables  que  la  Compagnie  anglaise 
destinée  à  les  recevoir  ne  suffit  pas  pour  les  impor- 
ter en  Angleterre,  et  que  la  plupart  des  autres  Com- 
pagnies ou  particuliers  qui  font  ce  commerce  pren* 
nent  à  Londres  des  lettres  de  chauffe  sur  l'Inde  ? 

C'est  une  chose  digne  d'attention,  et  attestée 
par  les  monuments  les  plus  anciens  de  l'histoire, 
(lue  les  peuples  (^ui  ont  tour  à  tour  dominé  dans 
I  Indostan  ont. été  les  plus  opulents  de  l'univers. 
Cette  terre  antique  et  féconde  renouvelle  a  chaque 
instant  ses  trésors,  et  le  temps  ne  l'a  point  encore 
usée  sous  les  révolutions  de  la  nature  et  sous  celles 
des  empires.  C'est  l'Asie  qui  nourrit  l'orgueil  et  l'o- 
puleiu  odes  tyrans  des  mers;  il  faut  donc  les  atta- 
quer tôt  ou  tarridansce  centre  de  leurs  richesses  vé- 
ritables et  de  leur  puissance  maritime. 

Point  de  paix  avec  l'Angleterre  que  nous  n'ayons 
d^ruit  la  suprématie  qu'elle  affecte  sur  les  mers;  ce 
vœu  estceliii  de  tout  bon  Français;  mais  il  ne  peut 
se  réaliser  quo  sur  les  débris  du*  commerce  d'Albion 
dans  les  Indes:  c'est  là  qu'il  faut  la  frapper;  ou, 
toujours  prompte  à  réparer  ses  blessures,  elle  trou- 
vera dans  (le  nouvelles  richesses  les  moyens  de  nous 
diviser,  de  faire  encore  des  parjures,  et  d'acheter  des 
ennemis  contre  la  république. 

L'indignation  que  le  despotisme  anglais  inspire  à 
tous  b's  princes  indiens,  1  ancienne  et  juste  animo- 
sité  de  Tippoo-Siiltan,  que  l'imuéritie  de  l'ancien 
gouvernement  a  trop  peu  secomlé  ;  en  un  mot,  les 
cruautés  commises  par  les  ministres  de  Georges 
dans  ces  belles  contrées,  tout  nous  assure  contre 
l'Angleterre  des  alliés  ardents  et  fidèles  ;  et  l'huma- 
nité, qui,  des  bords  du  Coiomandel  et  du  Malabar,  a 
fait  entendre  vainement  sa  voix  contre  les  crimes 
d'Hastings  et  de  ses  complices,  attend  que  nous  lui 
portions  à  la  fois  des  consolations  et  des  vengeances. 

Nous  laissons  ces  grandes  vues  à  votre  comité  di-  . 
plomatique,  et  nous  nous  empressons  de  répondre 
a  une  objection  souvent  répétée. 

Convient-il  à  la  nation  irançaise  d'avoir  des  pos- 
sessions en  Asie? 

.Non,  sans  doute,  si  les  Anglais  pouvaient  en  être  à 
jamais  expulsés,  si  le  commerce  y  était  libre  pour 
nous  comme  pour  les  autres  nations  européennes  ; 
mais  tant  au'un  peuple  ennemi  et  ambitieux  en  est 
le  maître  ansolu,  tant  qu'il  y  trouve  des  moyens  in- 
calculables de  richesses  et  de  domination,  notre  in- 
térêt nous  commande  impérieusement  de  parta*2:rr 
ses  propriétés,  et  de  ne  pas  devenir,  par  une  fausse 
politique,  les  tributaires  de  notre  plus  féroce  et  plus 
puissantennemi. 

On  a  cité  souvent,  en  parlant  de  nos  rapports 
avec  l'Angleterre,  l'exemple  de  Cartha^e  et  de  Rome; 
ces  rapprochements  ofirent  quelquefois  des  raison- 
nements plus  brillants  que  solides.  La  différence  des 
temps,  des  lieux,  des  mœurs,  permet  rarement  que 
la  politique  des  siècles  anciens  éclaire  celle  des  siè- 
cles moclernes. 

Cependant,  puisqu'on  a  voulu  établir  ce  parallèle, 
nous  dirons  qu'il  s'adapte  nalurcllement  aux  vues 
qui  viennent  d'être  développées.  Tant  que  les  Ro- 
mains n  eurent  à  combattre  autour  d'eux  que  des 
ennemis  belliqueux  et  pauvres,  ils  n'employèrent 


387 

que  le  Fer  et  le  courage  ;  mais  dès  quits  furent  obIi« 
grsde  lutter  contre  l'opulence  de  Carlhage,  ils  cher- 
chèrent à  s'emparer  aussi  des  sources  de  leurs  ri- 
chesses pour  créer  des  flottes,  les  entretenir  et  les 
renouveler  ;  ils  suivirent  absolument  le  plan  que 
nous  traçons;  ils  attaquèrent  leur  rivale  dans  ses 
colonies  les  plus  florissantes;  ils  frappèrent  son 
commerce  dans  les  Espagnes,  et  dès  lors  Carthage 
appauvrie  succomba  sous  Tascendant  de  Rome  et  re- 
çut les  lois  que  lui  imposa  la  victoire. 

Nous  ne  proposons  pas,  sans  doute,  en  cet  instant, 
de  précipiter  l'exécution  de  ce  projet,  mais  de  prépa- 
rer les  moyens  qui  doivent  en  assurer  le  succès. 

U  en  est  un  qui  nous  reste  encore,  et  que  la  sa- 
gesse de  la  Convention  nationale  ne  doit  pas  laisser 
échapper.  L'Inde  n'est  pas  absolument  perdue  pour 
la  république  tant  qu'elle  restera  en  possession  des 
Hes  de  France  et  de  la  Réunion  ;  c'est  le  Gibraltar  de 
l'Asie,  c'est  une  clef  précieuse  a  conserver,  et  toute 
notre  politique  doit  se  borner  aujourd'hui  à  la  rete- 
nir dans  nos  mains.  Les  Anglais  en  connaissent  bien 
Timportance  et  en  convoitent  depuis  longtemps  la 
coiiquête,  conquête  qu'ils  cherchent  plus  que  jamais 
à  efit'ctuer. 

Représentants  français,  diverses  circonstances  doi- 
vent  flxer  v^tre  attention  sur  la  situation  politique 
et  topographique  de  ces  îles  et  des  adjacentes.  Le 
décret  du  16  pluviôse  dernier  sur  la  liberté  des  nè- 
gres a  pu  armer  des  intérêts  rivaux,  fomenter  quel- 
ques mécontentements,  exciter  des  troubles,  et  don- 
ner des  espérances  aux  complots  toujours  renais- 
sants de  l'aristocratie  et  de  l'Angleterre  qui  est  là  en 
force  pour  les  favoriser,  guettant  le  moment  propice 
d'envahir  ces  colonies,  de  faire  égorger  tous  les  pa- 
triotes qui,  depuis  la  révolution,  les  combattent,  dé- 
jouent leurs  projets  liberlicidcs  et  ruinent  leur  com-» 
merce  dans  ces  contrées,  ainsi  que  celui  de  la  Hol- 
lande. Les  Anglais,  égorgeant  et  faisant  égorger  tous 
les  colons  de  cette  île  restés  imperturbablement 
fidèles  a  la  cause  du  peuple  depuis  la  révolution, 
s'empareront  plus  faciieinent  de  leurs  propriétés.  ' 
C'est  de  cette  manière  qu'ils  en  ont  agi  à  Saint-Do- 
mingue et  aux  autres  Antilles  ;  l'on  ne  doit  pas  espé- 
rer qu'ils  réservent  un  meilleur  sort  aux  zélateurs  de 
la  lioertë  a  i'Ile-de-Francc,  dont  ils  ont  tant  à  se 
plaindre. 

Les  premiers  dangers  de  ce  décret,  qui  n'a  ëtë 
connu  au  plus  tôt  qu'à  la  fin  de  juillet  ou  au  plus 
tard  en  septembre  dernier,  sont  sans  doute  passés  ; 
mais  hâtons-nous  d'en  prévenir  de  nouveaux.  Plus 
ces  colonies  sont  importantes  dans  votre  système 
politique,  plhs  votre  surveillance  doit  être  active  : 
envoyons-y  donc  des  forces  morales  et  physiques 
pour  les  conserver. 

11  faut  y  ranimer  le  courage  des  patriotes,  et  les 
garantir  de  toute  attaque  a  l'extérieur  et  de  la 
guerre  civile  dans  l'Intérieur.  Quelques  représen- 
tants du  peuple  maintiendront  Tesprit  public,  com- 
primeront les  ennemis  de  tous  genres,  et  régleront, 
d'après  les  principes  républicains,  toutes  les  parties 
de  l'administration,  jusqu'à  ce  que  la  Convention 
nationale  ait  statué  sur  le  mode  organique  qui  con- 
vient aux  colonies  ;  enfin  ils  seront  la  force  morale 
de  laquelle  l'intérêt  national  doit  tout  attendre,  et 
sans  laquelle  vous  vous  exposez  à  tout  perdre.  Leur 
présence  seule,  je  ne  crains  pas  de  l'assurer,  peut 
rétablir  le  calme  dans  les  esprits  justement  alarmés 
et  agités,  et  vous  donnerez  dans  ces  contrées  loin- 
taines, nous  le  répétons,  cette  force  morale  qui  vous 
y  est  si  nécessaire,  puisqu'il  ne  vous  y  est  pas  per- 
mis en  ce  moment  d'y  faire.parvenir  une  force  pny- 
sique  telle  qu'il  la  faudrait  pour  n'avoir  rien  à  re- 
douter et  pouvoir  tout  entreprendre.  Des  représen- 
tsgits  du  peuple,  en  y  assurant  le  bonheur  et  la 


paix  intérieure,  vous  assureront  eti  même  temps  dd 
l'alliance  et  des  secours  de  toute  espèce  de  votre 
ancien  allié  Tippoo-Sultan,  et  des  autres  puissances 
asiatiques  (^u'il  est  de  l'intérêt  de  la  république  de 
s'attacher  ;  ils  garantiront  les  îles  de  France  et  delà 
Réunion  d'une  invasion  ou  d'un  bouleversement  gé* 
néral. 

Si  l'on  néglige  quelques-unes  de  ces  mesures, 
vous  sacriflez  deux  superbes  colonies;  vous  livret 
aux  Anglais  une  quantité  inappréciable  de  maticret 
premières  propres  à  alimenter  nos  manufactures  et 
à  raviver  le  commerce  national  ;  vous  leur  aBan- 
donnez  nos  frégates,  nos  corsaires  et  nos  navires 
marchands  actuellement  dans  ces  parages;  vous 
leur  restituez  cent  prises  tant  hollandaises  qu'an- 
glaises qu'ont  faites  nos  braves  frères  de  l'Ile-de- 
France  ;  enfin,  vous  leur  assurez  l'empire  des  merl 
au  delà  du  cap  de  Bonne-Espérance,  et  prolongez  la 
guerre  de  la  tvrannie  contre  la  liberté. 

Les  plans  généraux  ne  doivent  pojnt  empêcher  un* 
grande  nation  d'en  exécuter  de  particuliers,  de  se 
faire  aimer  et  respecter  d  un  pôle  à  l'autre;  mais  un 
des  plus  urgents  est  de  sauver  l'Ile-de-France.  Les 
Anglais,  qui,  comme  nous  l'avons  dit,  ont  envahi 
tous  nos  établissements  dans  l'Inde,  la  convoitent  et 
la  guettent  de  près.  Cette  nation  cupide,  qui  retire 
actuellement,  chaque  année,  au  moins  360  millions 
de  liv.  de  ces  riches  contrées,  et  qui  servent  à  nous 
faire  la  guerre  en  Europe,  veut  encore  augmenter 
son  revenu  et  sa  puissance  par  la  conquête  de  l'Ile- 
de-France  et  des  possessions  hollandaises.  Il  ne  nous 
reste  que  l'Ile-de-France  dans  les  mers  d'Asie;  si 
nous  perdons  celte  colonie  importante,  nous  perdons 
en  même  temps  l'île  de  la  Réunion  et  Madagascar. 
Cette  dernière,  qui  a  huit  cents  lieues,  peut  réunir  le 
commerce  du  coton,  du  café,  du  sucre,  de  l'indigo, 
des  soieries,  des  épiceries,  et  fournir  des  ateliers  de 
construction,  car  tous  les  bois  et  les  matériaux  y 
abondent;  enfin,  si  nous  perdons  l'Ile-de-France, 
raugmeiitatioii  des  richesses  de  nos  ennemis  est  in- 
calculable, et  nous  sommes  à  jamais  bannis,  exilés, 
déportés,  chassés  de  l'Asie. 

De  rile-de-France  nous  commandons  tons  leS 
comptoirs ,  pour  ainsi  dire ,  des  Européens  dans 
l'indostân  ;  de  ce  point  nous  sommes  à  portée  de  re- 
prendre un  jour,  avec  facilité,  nos  établissements^ 
ceux  des  Hollandais,  et  de  chasser  honteusement  des 
uns  et  des  autres  les  Anglais  qui  les  occupent.  Sans 
ce  point  nous  pourrions  le  tenter  infructueusement^ 
car  il  est  on  ne  peut  plus  difficile  de  partir  de  l'Eu- 
rope pour  aller  faire  des  conquêtes  à  cinq  mille 
lieues,  lorsque  l'on  n'est  pas  assuré  d'une  retraite  oii 
l'on  puisse  se  réparer  en  hommes  et  en  choses.  Ré- 
présentants du  peuple  français,  ces  réflexions  méri- 
tent la  plus  sérieuse  considération  :  que  Ton  sauve 
rilc-de-France,  il  n'y  a  pas  de  temps  a  perdre;  mais 
pour  la  sauver,  nous  ne  cesserons  de  le  dire,  il  faut 
y  envoyer  promptement  des  représentants  du  peuple 
probes,  conciliants,  instruits,  fermes,  intègres,  et 
n'ayant  aucune  liaisons,  soit  de  famille,  soit  d'inté- 
rêt, dans  ces  contrées. 

Gouly  conclut  à  l'adoption  du  projet  de  décret. 

Brunel  :  11  est  donc  arrivé  ce  jour  mémorable  oà 
les  salutaires  efiets  de  la  justice  et  de  la  bienfaisance 
nationale  vont  s'étendre  sur  l'autre  hémisphère. 
Trop  longtemps  l'intrigue,  la  malveillance,  l'incu- 
rie criminelle  des  derniers  tyrans  ont  écarté  la  sol- 
licitude de  la  Convention  de  ces  contrées  lointaines, 
dignes  du  plus  tendre  intérêt. 

Les  îles  de  France  et  de  la  Réunion,  dont  le  génie 
actif  et  laborieux  des  habitants  n'est  pas  moinS; 
connu  que  leur  bravoure  et  leur  attachement  à  la^ 
mère-patrie,  se  sont  heureusement  préservées  de  ces 
troubles  cruels,  deceâ  déchirements  affreux  qui  ont 


388 


a; 


dévasté  nos  autres  colonies  ;  situées  dans  un  des 
plus  beaux  climats  du  globe,  à  Fouverlure  de  l'o- 
céan Indien,  ces  îles  ont  toujours  été  considérées 
avec  raison  comme  Tunique  boulevard  de  l'Asie; 
aussi  l'ennemi  naturel  de  la  France  en  a-t-ii  cou- 
Toi  té  sans  cesse  la  possession. 

En  eflfel,  cilovens,  sans  ces  colonies  importantes, 
il  n'y  a  plus  de  (rein  à  opposer  aux  projets  d'usurpa- 
tion et  de  tyrannie  de  cette  puissance  colossale  ;  les 
peuples  inaigènes  seront  les  victimes  de  son  iiisatia- 
Ble  cupidité,  et  elle  ne  conservera  dans  le  vaste  con- 
tinent oriental  les  autres  nations  européennes,  oui 
s'y  trouvent  disséminées  sans  force,  que  comme  des 
agents  et  des  courtiers  dont  elle  tournera  le  crédit  et 
les  services  à  son  profit. 

La  république,  au  contraire,  en  protégeant  ces 
fies,  est  assurée,  non-seulement  de  recouvrer  plus 
facilement  nos  possessions  dans  Tlnde  et  de  les  aug- 
menter suivant  notre  convenance,  mais  encore  de 
contrarier  les  vues  ambitieuses  du  gouvernement 
britannique,  et  de  porter  le  plus  grand  coup  à  sou 
commerce  exclusif. 

D'après  ces  notions  succinctes,  il  est  incontestable 
u'on  ne  peut  trop  se  presser  de  venir  au  secours  des 
îles  de  France  et  de  la  Réunion,  cl  que,  pour  y  par- 
venir plus  efficacement,  il  convient  d'y  déployer  la 
grandeur  de  la  représentation  nationale  ;  mais  je 
dois,  à  l'appui  de  mon  opinion,  présenter  quelques 
réflexions  que  je  crois  importantes  au  bien  public. 

Je  pense  d'abord  qu'un  seul  représentant  doit  suf- 
fire ;  il  serait  peut-être  dangereux  d'en  envoyer 
deux  et  même  trois  ;  et  si  la  Convention  en  ordonne 
autrement,  elle  devra  leur  prescrire  de  prendre 
leurs  arrêtés  en  commun,  et  de  ne  pas  se  séparer,  à 
moins  que  ce  ne  soit  pour  l'exécution  de^  lois  et  de 
leurs  décisions  dans  la  même  île  ;  sinon,  celui  qui 
serait  à  l'île  de  la  Réunion  venant  ii  opérer  différem- 
ment de  celui  qui  resterait  à  l'Ile-de-France,  cette 
variété  occasionnerait  des  divisions  et  des  désordres 
affligeants  pour  les  habitants  des  deux  colonies, 
dont  la  fraternité  et  les  besoins  réciproques  deman- 
dent une  législation  uniforme  et  des  rapprochements 
non  interrompus. 

La  mission  du  représentant  devrait  être  fixée  à 
deux  ans  de  séjour;  il  serait  même  invité  de*  revenir 
plus  tôt  si  ses  opérations  étaient  terminées;  mais 
comme  il  pourrait  arriver  qu'un  homme  revêtu 
d'un  caractère  éminent  et  investi  d'une  grande  au- 
torité se  livrât  a  des  actes  arbitraires,  précurseurs  de 
la  tyrannie,  il  serait  à  propos,  ce  me  semble,  de  ne 
pas  lui  conférer  des  pouvoirs  illimités.  La  liberté 

Sent  être  aisément  compromise  lorsqu'elle  dépend 
es  erreurs,  des  caprices,  ou  de  la  versatilité  d'un 
seul  homme,  éloigné  de  quatre  mille  cinq  cents 
lieues  du  pouvoir  suprême,  dont  l'exercice  passager 
lui  est  confié.  II  serait  donc  de  la  prévoyance  du  co 
mité  de  gouvernement  de  lui  assigner  \es  bornes 
positives  des  pouvoirs  qu'il  aurait  à  exercer,  et  sur- 
tout de  lui  donner  des  instructions  particulières  sur 
le  mode  d'exécution  de  la  loi  du  16  pluviôse  an  2^, 
afin  d'éviter  des  froissements  et  des  commotions 
que  l'homme  le  plus  sage  ne  peut  éviter  qu'en  se 
rappelant  sans  cesse  le  plan  de  conduite  politique 
qui  lui  est  tracé. 

La  Convention  nationale,  invariable  dans  la  sa- 
gesse de  ses  principes,  n'appellera  sans  doute  à  ces 
Tonctions  honorables  et  pénibles  aucun  de  ses  mem- 
bres qui,  par  des  liens  du  sang  ou  de  l'amitié  et  par 
des  intérêts  personnels,  aurait  conservé  dans  ces 
îles  des  relations  et  des  habitudes;  car  il  ne  suffit 
as  au  législateur  d'être  impartial,  incorruptible  ;  il 
loit  aussi  écarter  tout  soupçon,  et  ne  donner  aucun 
accès  à  la  défiance  et  à  la  calomnie. 
Au  reste  il  y  a  d'autres  détails  dans  lesquels  il  fau<» 


S; 


drait  se  jeter,  soit  que  la  Convention  adoptât  dan% 
les  parages  de  l'Inde  un  projet  offensif  ou  défensif  ; 
mais  ces  détails  étant  du  ressort  du  gouvernement, 
la  saine  politique  ne  permet  pas  de  les  manifester  à 
cette  tribune. 

Ainsi,  en  me  renfermant  étroitement  dans  l'opi- 
nion que  je  viens  d'émettre,  je  propose  de  décréter 
ce  qui  suit  : 

•  La  Convenlion  nationale ,  après  avoir  entendu  foni 
comité  de  salut  public,  décrète: 

•  Art.  i*'.  il  sera  envoyé  aui  lies  de  France,  de  la  Réa« 
nion,  et  autres  adjacentes,  un  représentant  du  peuple 
investi  des  pouvoirs  qui  lui  seront  désignés  par  le  comité 
de  gouvcrnemenL 

•  II.  Sa  mission  durera  deux  ans  dans  ces  colonies,  passé 
lequel  temps,  et  même  plus  tôt,  si  ses  opérations  sont  ter- 
minées, il  sera  tenu  de  se  rendre  dans  le  sein  du  corps 
législatif  pour  y  rendre  compte  de  sa  mission.  » 

DuBOUCHET  :  Je  m'oppose  à  l'envoi  de  représen- 
tants dans  les  colonies  ;  voici  sur  quoi  je  me  fonde  : 
si  vous  envoyez  des  représentants  clans  les  colonies, 
ou  vous  leur  donnerez  des  forces  suttîsantes  pour 
les  faire  respecter,  et  alors  vous  dégarnirez  votre 
marine  de  ces  forces  dont  vous  avez  besoin  pour  des 
expéditions  importantes  ;  dans  le  cas  contraire,  vous 
les  exposez  à  ce  que  leur  caractère  soit  compromis. 
Quel  uiconvénient  n'y  aurait-il  pas  d'ailleui^  d'en- 
voyer des  représentants  à  de  telles  distances?  Quel 
est  celui  d'entre  nous  qui  voudrait  se  charger  d'une 
mission  si  dilticile?  Ne  serait-ce  pas  s'exposera  une 
foule  de  dénonciations  ?  (On  murmure.)  Ne  craignez- 
vous  pas  d'ailleurs  i'abus  de  pouvoirs?  Ne  craignez- 
vous  pas  qu'à  deux  mille  lieues  de  vous  on  n'abuse 
de  ces  pouvoirs  qui  seront  nécessairement  illimités, 
et  qu'on  n'exercera  pas  sous  votre  surveillance  ? 

Je  reconnais  combien  le  commerce  de  Vlnde  est 
important  ;  mais  dans  ce  moment  je  pense  qu'il  faut 
diriger  toutes  nos  forces  navales  contre  l'orgueilleuse 
Angleterre;  Carthage  pensait  ainsi.  S'il  n'y  avait 
pas  eu  de  faction  dans  le  sénat  de  Carthage,  Hannon 
serait  parti  deux  mois  plus  tôt,  et  Rome  n'existerait 
peut-être  plus. 

Dnboucnet  conclut  à  la  question  préalable. 

Bentabole  :  Je  combat«  aussi  le  projet  de  décret. 
Les  représentants  du  peuple  qui  composent  la  Con- 
vention n'auront  plus  de  pouvoirs  dès  que  sa  session 
sera  terminée.  Or,  comme  on  ne  peut  pas  prévoir 
quand  ce  moment  arrivera,  il  résulte  que  la  Con- 
vention nationale  ne  peut  pas  envoyer  à  une  dis- 
tance très-éluignée  des  représentants  revêtus  de 
pouvoirs  pour  un  espace  de  temps  indéterminé.  De 
plus,  nous  ne  pourrions  envoyer  dans  les  colonies 
que  des  hommes  d'une  constitution  robuste,  qui 
n'auraient  pas  d'intérêt  particulier  dans  les  colonies 
et  qui  seraient  connus  par  la  fermeté  de  leurcarac- 
tère  ;  mais  je  dois  vous  observer  que  lions  avons  be- 
soin ici  de  pareils  hommes  pour  consolider  la  liberté. 

Pelet:  J'avoue  que  ces  difficultés  n'ont  pas 
échappé  au  comité.  Je  demande  que  l'on  présente 
un  projet  qni  produise  les  mêmes  efièts  que  le  sien, 
si  celui  ci  n'était  pas  adopté. 

Crassous  :  Je  crois  qu'il  serait  dangereux  d'en- 
voyer des  représentants  dans  les  colonies.  Rappe- 
lez-vous les  abus  qui  ont  résulté,  pour  la  liberté  des 
habitants,  de  l'envoi  des  petits  tyrans  à  qui  le  des- 
potisme remettait  le  soin  de  défendre  les  colonies. 
La  loi  du  16  pluviôse  a  porté  le  coup  le  plus  mortel 
à  l'Angleterre.  Elle  pénétrera  dans  leurs  colonies; 
leurs  esclaves  voudront  être  libres  et  Français.  (On 
applaudit.) 

Quand,  à  la  Guyane,  le  décret  du  16  a  été  connu, 
la  réunion  la  plus  belle  s'est  faite;  les  esclaves  et 
leurs  précédents  maîtres,  dont  ils  sont  devenus  les 
métavers,  travaillent  ensemble  ;  chacun  a  sa  part  de 
bénénce.  (On  applaudit.) 


389 


Depuis  qu'elle  a  étë  publiée  dans  la  Guadeloupe, 
nous  avons  vu  les  noirs  se  rallier  aux  patriotes  pour 
en  expulser  les  Anglais  et  les  émigrés.  Dans  la  Mar- 
tinique, les  Anglais,  craignant  dW  voir  pénétrer  les 
Erincipes  de  la  liberté,  avaient  ordlouné  qu'on  en  em- 
arauat  les  esclaves  pour  TAngleterre. 

En  bien,  a  peine  le  vaisseau  fut-il  en  mér  que  ces 
braves  gens,  excités  par  Tamour  de  la  liberté,  for- 
cèrent le  capitaine  à  les  reporter  dans  la  Martinique, 
où  ils  se  sont  armés  en  faveur  des  patriotes. 

Je  soutiens  qu'il  est  dangereux  d'envoyer  des  com- 
missaires civils*  Je  conclus  à  la  question  préalable. 

Charlibr  :  Dans  une  république  démocratique 
représentative ,  le  peuple  peut  retirer  ses  pouvoirs 
quand  il  le  juge  nécessaire.  Â  peine  la  Convention 
aurait-elle  envoyé  des  représentants  dans  les  colo- 
nies qu*il  serait  possible  que  la  Convention  elle-même 
crût  devoir  terminer  sa  session.  Or  les  représantants 
qu'elle  aurait  envoyés  n'auraient  donc  plus  de  pou- 
voirs à  cette. époque.  Âinci  ce  moyen  est  illusoire. 
D'ailleurs  un  représentant  dans  les  colonies,  que  se- 
rait-ce autre  chose  qu'un  proconsul, un  vice-roi  ?  Or, 
quMmporte  le  nom  quand  la  chose  est  la  même  ? 

Sebres  :  Il  faut  distinguer  les  Antilles  et  les  co- 
lonies situées  au  delà  du  cap  de  Bonne-Espérance  ; 
ce  n'est  (|ue  dans  ces  dernières  qu'il  s'agit  d'envoyer 
des  représentants.  Les  colonies  de  Ifh  de  France  et 
de  la  Réunion  sont  généralement  peuplées  de  ma- 
rins et  d'ouvriers,  classes  intéressantes,  mais  peu 
riches,  et  qui  seuls  éprouveraient  des  pertes  immen- 
ses si  le  décret  du  16  pluviôse  y  était  exécuté.  Il  faut 
donc  y  envoyer  un  fonctionnaire  qui  ait  tous  les 
pouvoirs  nécessaires  pour  les  indemniser;  qu'il  soit 
représentant  du  peuple  ou  simple  commissaire  civil, 
peu  importe.  Cependant  j'observe  qu'il  faudrait  don- 
ner des  instructions  immensesà  un  commissaire  civil, 
au  lieu  que  les  pouvoirs  du  représentant  du  peuple 
lui  suffiraient  seuls  pour  faire  tout  le  bien  néces- 
saire, il  faudrait  seulement  que  le  représentant  du 
peuple  fût  choisi  parmi  ceux  qui  n'ont  aucun  inté- 
rêt individuel  à  la  chose.  Alors  l'amitié  renaîtrait 
entre  les  blancs  et  les  hommes  de  couleur ,  les  lois 
seraient  exécutées  avec  plaisir  ;  et  bientôt ,  réunis 
contre  Tennemi  commun ,  vous  n'auriez  plus  rien  à 
craindre  de  ses  entreprises.  Mais,  je  le  répète,  il  fau- 
drait que  ce  fût  un  représentant  du  peuple  ,  et  un 
représentant  du  peuple  qui  y  arrivâtsans  prévention. 

GouLY  :  Je  suis  du  même  avis  ;  il  sullit  de  con- 
naître la  position  topographique  des  îles  de  France 
et  de  la  Réunion  pour  sentir  tous  les  avantages  de 
cette  position  pour  la  république.  Ceux  que  vous  en- 
verrez là  seront  revêtus  du  pouvoir  suprême.  (Mur- 
mures.) Or,  ù  quatre  mille  lieues  de  la  Convention, 
ne  pourront-ils  pas  en  abuser ,  comme  on  l'a  fait  à 
Saint-Domingue?  Si  cela  arrive ,  citoyens ,  n'en  ré- 
pondrez-vous  pas  au  peuple  que  vous  représentez? 

BouBDON  (de  l'Oise):  Les  fautes  sont  personnelles, 
comme  la  responsabilité. 

GouLY  :  C'est  donc  un  commissaire  conciliateur, 
et  non  un  chef  militaire ,  qu'il  faut  envoyer  aux  îles 
de  France  et  de  la  Réunion,  si  vous  voulez  conserver 
ce  Gibraltar  de  l'Asie;  autrement,  citoyens,  vous 
vous  exposeriez  à  vous  faire  chasser  des  Indes.  (Mur- 
mures.) Vous  me  direz  qne  vous  vous  ferez  rendre 
vos  colonies  ;  mais  vous  rendra-t-on  soixante  mille 
Français  qui  auront  été  égorgée?  leur  sang  pourra- 
t-il  se  payer  jamais? 

Pautri'zfx  :  Si  je  n'eusse  pas  fortement  senti  com- 
bien il  est  iinpolitique ,  dans  cet  instant,  de  traiter  à 
cette  tribune  tout  ce  qui  est  relatif  aux  colonies  ;  si 
je  n'eusse  pas  cru  que  ce  fût  emboucher  k  Paris  une 
trompette  qui  dût  retentir  à  Londres  ,  et  avertir  nos 
ennemis  de  veiller  sur  leurs  possessions  d'outre-mer, 
j'aurais  entretenu  la   Couventioa   nationale  des 


moyens  de  faire  la  conquête  du  Nouyeau-Monde* 
J'avais  pensé  au  contraire  qu'il  fallait ,  quant  au 
nasse,  laisser  la  commission  des  colonies  déorouiller 
les  fils  de  la  trame  odieuse  et  perfide  qui  a  fait  dç 
l'Archipel  une  seconde  Vendée  ;  j'ai  cru  que ,  quant 
au  présent,  la  Convention  nationale  devait  laisser, 
son  comité  de  salut  public  prendre  toutes  les  mesu- 
res qui  lui  paraîtraient  convenables  pour  faire  re- 
naître l'ordre  et  l'activité  dans  des  îles  éloignées 
de  dix-huit  cents  lieues  du  centre  de  la  république, 
sauf  au  comité  de  rendre  compte  à  la  Convention  na- 
tionale des  moyens  qu'il  aura  employés,  lorsqu'ils 
seront  exécutés. 

Cependant,  on  propose  d'envoyer  des  représen- 
tants du  peuple  dans  ces  malheureuses  contrées; 
trouvera-t  on  dans  la  représentation  nationale  ac- 
tuelle des  délégués  qui  connaissent  les  replis  tor- 
tueux de  la  tyrannie  et  de  l'égoïsme  dans  nos  colo- 
nies? Enverra-t-on  des...  Mais  non ,  laissons  plutôt 
les  colonies  entre  les  mains  de  ceux  qui  en  font  ac- 
tuellement la  conquête. 

Envoyer  des  représentants  au  delà  des  mers!  Qui 
ne  sait  les  maux  que  quelques-uns  de  ces  envoyés 
ont  faits ,  pour  ainsi  dire ,  sous  les  yeux  de  la  Con- 
vention? Elle  a  pu  remplacer  sur-le-champ  un  mau- 
vais choix;  le  pourrait-elle  à  d'immenses  dislances? 
Quelle  sera  leur  resnonsabililé?  Parlera-t-on  de 
Carrier  mort  sous  la  nache  de  la  loi?  mais  cet  acte 
nécessaire  n'est-il  pas  un  malheur?  Porter  partout, 
étendre  à  tout  et  sur  tout  la  représentation  nationale,, 
n'est-ce  pas  un  moyen  lent  et  sûr  de  la  compromet- 
tre et  de  sourdement  l'avilir?  Si  ces  représentants 
sont  ignorants,  car  on  peut  l'être  sans  honte  sur  les 
colonies,  s'ils  sont  mus  par  des  préjugés  ou  des  vues 
secrètes,  ne  feront-ils  pas  des  maux  cent  fois  plus 
incurables  que  ceux  causés  par  des  commissaires 
qui,  en  leur  supposant  les  mêmes  vices,  n'auraient 
pas  un  titre  imposant  et  redoutable  pour  les  consa- 
crer ?  Que  ces  commissaires  agissent  mal  ;  le  décret 
d'accusation  n'affectera  que  leurs  personnes  ;  l'opi- 
nion restera  pour  la  Convention,  eux  seuls  en  seront 
flétris  :  rappelez  des  représentants  ;  le  corps  législa- 
tif,  la  France  sont  en  deuil. 

Si  l'on  ôte  de  la  Convention  nationale  la  plupart 
de  ses  hommes  de  talents ,  si  on  les  écarte  tous  du 
laboratoire  essentiel ,  si  les  représentants  du  peuple 
occupent  toutes  les  agences ,  sont  chargés  de  toutes 
les  missions,  remplissent  toutes  les  ambassades,  qui 
veillera  au  dedans  à  la  confection  des  lois?  Pour 
sauver  les  colonies  on  exposera  la  mère-patrie.  On 
ne  considérera  plus  la  séance  de  la  Convention  na- 
tionale que  comme  une  filière  pour  parvenir  à  tous 
les  emplois;  on  préférera  l'exécution  arbitraire  des 
décrets  à  l'honneur  utile  de  contribuer  à  les  rendre.^ 
La  république  périra  ou  se  dénaturera  ;  car  les  assem-r 
blées  primaires  seront  agitées  à  chaque  rénovation  de 
législature  par  les  intrigants  et  les  ambitieux  de  toute 
espèce  qui  considéreront  l'assemblée  nationalecomme 
le  marche-pied  de  la  puissance  et  des  richesses. 

J'invoque  la  question  préalable  sur  tout  ce  qui  a 
été  proposé. 

Je  demande  le  renvoi  au  comité  de  salut  public 
de  toutes  les  mesures  à  prendre  dans  ce  moment 
pour  les  colonies. 

Pelet  :  Je  vais  repondre  aux  différentes  objections 
qui  ont  été  faites.  Bentabolc  a  cru  qu'on  serait  très- 
embarrassé  pour  trouver  des  représentantsdu  peuple 
qui  voulussent  passer  les  mers.  Je  lui  réponds  que 
nous  ne  devons  pas  calculer  les  dangers,  mais  seu- 
lement écouter  la  voix  du  devoir. 

Charlier  a  dit  que  ce  seraient  des  vice-rois  qu'on 
enverrait  dans  les  colonies.  Mais  ne  sont-ce  pas  des 
vice-rois  que  vous  envoyez  aussi  dans  les  départe- 
ment^? (Murmures.)  Plus  les  possessions  sontéloi* 


390 


Sëes'du  centre  du  fçouvernement ,  plus  il  faut  c[ue 
;  ressorts  du  gouvernement  y  aient  de  force.  Ainsi 
il  faudra  donner  aux  représentants  du  peuple  que 
vous  enverrez  dans  les  colonies  des  pouvoirs  illimi- 
tés. Cressons  a  dit  que  l'envoi  de  représentants  du 
peuple  était  inutile,  que  la  force  militaire  était  tout 
ce  qui  pouvait  convenir  aux  colonies.  Je  crois,  moi, 
que  rien  nVst  moins  convenable  à  leur  régime  que 
la  force  militaire.  C'était  là  le  gouvernement  qu'elles 
avaient  avant  la  révolution,  et  vous  savez  combien 
il  était  détestable*  Je  crois  au  contraire  que  rien  ne 
leur  convient  mieux  que  le  régime  paternel  que  la 
Convention  veut  leur  donner. 

Pautrizel  a  dit  qu'un  projet  semblable  avait  déjà 
été  présenté  par  la  faction  d'Orléans.  Je  suis  à  la 
Convention  depuis  le  commencement  de  la  session, 
et  je  ne  me  rappelle  pas  d'avoir  vu  présenter  ce 
projet.  Dans  tous  les  cas,  celui  que  nous  vous  pré* 
sentons  a  un  effet  diamétralement  contraire;  car  il 
tend  a  arracher  à  nos  ennemis  les  colonies  que  la 
faction  d'Orléans  leur  a  livrées.  Rappelez-vous  ,  ci- 
toyens, que  l'on  a  déjà  envoyé  des  commissaires  ci- 
vils dans  les  colonies  orientales  et  occidentales.  Ces 
commissaires  ont  été  remplacés  par  d'autres,  et  tout 
cela  n'a  abouti  qu'à  faire  brûler  et  ruiner  les  colo- 
nies. Je  sais  que ,  dans  l'expédition  qu'on  vous  pro- 
pose, tous  les  dangers  seraient  pour  les  représen- 
tants du  peuple  ;  car  peulêtre  ne  pourraient-ils  pas 
être  accompagnés  de  forces  maritimcsconsidérables; 
mais  c'est  encore  là  un  nouveau  stimulant  pour  des 
représentants  du  peuple  ;  car  si ,  en  exposant  leur 
tête,  ils  peuvent  conserver  celles  d'un  grand  nombre 
de  citoyens  qu'il  faudrait  envoyer  d'Europe  en  Asie, 
je  suis  persuadé  qu'ils  ne  balanceraient  pas.  Je  le 
répèle ,  citoyens,  le  meilleur  moyen  de  conserver 
nos  colonies ,  de  ranimer  le  commerce ,  de  ramener 
l'abondance,  est  d'y  envoyer  deux  représentants  du 
peuple.  Nous  avons  à  craindre,  en  envoyant  des 
commissairescivils,  qu'avec  les  meilleures  intentions 
du  monde  ils  ne  soient  la  cause  de  beaucoup  de 
roaux.  On  sait  ce  qui  c'est  passé  aux  Antilles,  et  nos 
frères  d'Asie,  iustement  ou  injustement  prévenus 
contre  le  nom  de  commissaire  civil,  pourraient  bien 
ne  pas  leur  permettre  de  faire  tout  le  bien  qu'il  serait 
dans  leurs  Intentions  défaire.  Citoyens, noussommes 
ici  pour  nous  exposer  à  tous  les  dangers.  LorS(^ue  bien- 
tôt nous  remettrons  nos  pouvoirs  à  une  législature, 
le  peuple  ne  nous  demandera  pas  si  nous  sommes 
toujours  restés  dans  cette  assemblée,  mais  il  nous 
demandera  si  nous  avons  toujours  garanti  et  con- 
servé SCS  possessions.  Cette  matière  est  très-délicate  ; 
et,  puisque  l'on  décrie  le  plan  du  comité,  je  voudrais 
au  moins  que  l'on  en  présentât  un  autre. 
•  Pautrizel  :  Je  m'engage  à  soumettre,  sous  quinze 
jours ,  au  comité  de  salut  public ,  un  plan  qui  nous 
rendra  nos  colonies  ctenlèveracellesde  l'Angleterre. 
.  Crassous  :  On  fonde  le  projet  de  décret  sur  l'im- 
portance des  colonies  ,  et  j'ai  déjà  démontré  que 
cette  importance  n'était  pas  une  raison  pour  y  en- 
voyer des  représentants  plutôt  que  des  commissaires 
civils.  Serres  a  dit  que,  si  ce  n'étaient  point  des  rc- 
présentanlsqui  allassent  à  l'Ile-de-France,  lespnlrio- 
les  seuls  seraient  victimes  dans  cette  possession  fran- 

Saise,  parce  qu'elle  est  habitée  en  grande  partie  par 
es  ouvriers  et  des  militaires  retira,  à  qui  le  décret 
du  16  pluviôse  a  fait  perdre  toutes  leurs  propriétés. 
On  ne  peut  pas  professer  une  opinion  plus  con- 
traire à  la  Déclaration  des  Droits.  On  a  ajouté  qu'un 
représentant  était  nécessaire,  parce  qu'il  indemnisera 
ces  hommes  en  leur  concédant  des  terres;  mais  je 
réponds  qu'un  commissaire  civil  peut  le  faire  aussi 
bien  qu'un  représentant;  un  commissaire  civil 
aliénera  aussi  bien  qu'un  représentant  les  biens  na- 
tionaux que  la  république  possède  dans  ces  tlesi 


Quant  à  la  défense  des  colonies,  c*est  sur  lé  poti- 
voir  militaire  qu'il  faut  s'en  reposer;  quant  a  leur 
législation,  c'est  ici  qu'elle  doit  être  faite.  Envoyé» 
là  des  hommes  capables  de  diriger  la  force  militaire; 
un  bon  ingénieur,  un  bon  artilleur,  voilà  les  pou- 
voirs militaires  dont  j'ai  entendu  parler  :  donnez  à 
un  autre  agent  l'administration  civile;  c'est  par 
cette  division  que  vous  empêcherez  le  despotisme  de 
renaître  dans  ces  possessions  de  la  république. 

On  sent  si  bien  l'inconvénient  de  donner  des  pou- 
voirs illimités  aux  représentants  du  peuple  ciu'on  les 
limite  en  leur  donnant  des  instructions;  en  bien, 
pourquoi  voulez-vous,  puisque  ces  pouvoirs  seront 
limités,  les  donner  à  des  représentants  du  peuptc 
plutôt  qu'à  d'autres  agents?  Quelle  serait  la  situation 
(le  la  France  si  l'on  ne  pouvait  trouver  que  dans  la 
Convention  des  hommes  capables  d'exécuter  les  in- 
structions des  comités  !  Plus  les  diflicultés  sont  mul- 
tipliées ,  plus  il  faut  agrandir  le  cercle  dans  lequel 
l'on  doit  choisir  les  hommes  (]ui  seront  chargés  de 
les  lever.  Je  demande  la  question  préalable. 

Amar  :  On  a  dit  que  les  commissaires  civils  en- 
voyés dans  les  colonies  ont  été  la  cause  des  désor- 
dres qui  y  sont  arrivés  ;  je  crois  que  c'est  une  erreur. 
Les  commissaires  ont  pu  avoir  de  bonnes  comme  de 
mauvaises  intentions,  prendre  de  bonnes  ou  de  mau- 
vaises mesures  ;  mais  je  crois  que  les  maux  des  co- 
lonies datent  de  plus  loin  ;  je  crois  qu'il  faut  les  at- 
tribuer à  la  législation  versatile  qu'elles  ont  eue  sous 
l'Assemblée  législative.  Celle-ci  a  été  trompée  par 
les  seuls  hommes  qui  connussent  les  colonies,  et  oui 
étaient  vendus  à  l'Angleterre.  Les  pouvoirs  qui  lu- 
rent donnés  aux  commissaires  civils  n'étaient  qu'un 
amas  incohérent  de  lois  contradictoires  qui  favori- 
saient tous  les  partis ,  et  qui ,  après  avoir  en  appa- 
rence résolu  une  question  ,  donnaient  naissance  à 
une  inlinilé  d'autres  débats.  Tantôt  on  a  dit  :  Les 
hommes  de  couleur  auront  les  mêmes  droits  que 
les  blancs  ;  tantôt  on  a  restreint  celte  décision  ,  en  - 
suite  on  l'a  étendue.  Voilà  la  source  des  malheurs 
qui  ont  désolé  les  colonies.  Depuis,  la  Convention, 
mieux  instruite  et  amie  de  l'égalité,  a  donné  la  li- 
berté aux  noirs.  Vous  aviez  alors  la  guerre  avec 
l'Angleterre,  guerre  sur  laquelle  Brissot  a  influé. 
(Murmures.)  L'Angleterre,  avec  des  forces  supérieu- 
res aux  vôtres ,  s'est  emparée  de  vos  colonies.  Il  mc 
semble  cjue  vous  n'avez  maintenant  que  deux  cho- 
ses à  faire  :  la  première  est  une  législation  appro- 
priée aux  hommes  de  toutes  les  couleurs  ,  et  en.'suitc 
créer  une  force  capable  de  comprimer  l'Angleterre, 
Peu  importe  que  vous  envoyiez  dans  les  colonies 
un  représentant  ou  un  commissaire  civil  ;  si  vous 
lui  donnez  des  pouvoirs  limités ,  et  je  pense  que 
vous  ne  pouvez  pas  vous  en  dispenser,  vous  le  ré- 
duisez à  être  un  commissaire  civil.  Maintenant,  je 
vous  le  répète,  il  faut  comprimer  les  infâmes  Anglais, 
et  faire  des  lois  justes  et  humaines. 

Plusieurs  voix  :  11  commence  à  en  reconnaître  la 
nécessité. 

Delecloy  :  J'ai  entendu  l'un  de  nos  collègues 
dire  qu'il  ne  pouvait  pas  développer  ici  toutes  les 
raisons  qui  militent  en  faveur  de  l'envoi  des  repré- 
sentants ,  pnrce  qu'elles  sont  du  ressort  de  la  diplo- 
matie. Je  crois  qu'il  serait  important  que  lescomilés 
de  gouvernement  reprissent  celte  discussion,  qu'ils 
entendissent  ceux  de  nos  collègues  qui  auront  des 
observations  à  faire. 

Cambon  :  L'exercice  de  la  représentation  natio- 
nale n'appartient  qu'à  l'ensemble  des  représenUints 
du  peuple.  Si  vous  envoyez  des  représentants  dans 
les  colonies,  il  y  a  à  craindre  l'abus  des  pouvoirs; 
si  ceux  que  vous  leur  donnez  sont  limités,  cène 
sont  plus  que  des  commissaires  nationaux ,  qui 
n*auront  pas  la  force  morale  qui  se  tire  de  la  grande 


891 


autorité  dont  ils  seraient  revêtus:  des  pouvoirs  illi- 
mités;  dès  lors  il  ne  faut  pas  vous  restreindre  à  les 

E rendre  parmi  nous,  parce  que  vous  trouverez  pro- 
ablemenl  hors  de  la  Convention  des  gens  plus  in- 
'  «truHs  et  pi  us  propres  à  établir  ie  régime  des  colonies. 

La  Convention  ajourne  la  discussion  ft  cinq  jours  ; 
pen4>nt  ce  temps  les  comités  du  gouvernement  se  réuni- 
ront de  nouveau,  et  recevront  les  renseignements  qui  leur 
■  leronl  donnés  sur  Tobjet  de  cette  discussion. 

GuvraoT,  au  nom  du  comité  de  sftrcté  générale  :  Ci- 
toyens,  je  viens ,  au  nom  du  comité  de  sûreté  générale, 
vous  rendre  eompte  de  la  situaUon  où  était  Marseille  le  8 
de  ce  mois. 

Le  calme  appelle  le  calme,  et  la  fermeté  seule  peut  neu- 
traliser les  efforts  des  agitateurs.  Vous  savez,  par  le  der- 
nier rapport  que  vous  a  fait  le  comité  de  sûreté  générale 
et  par  la  notoriété,  quMI  existe  des  points  de  contact  entre 
tous  les  ennemis  de  la  nation  qui  surgissent  à  Marseille  et 
ceux  qui  s*agitent  à  Paris  et  ailleurs. 
'Lorsque  la  Convention  nationale  a  brisé  le  grand  res- 
sort de  la  machine  oppressive  qui  a  rempli  la  république' 
de  crimes  et  de  désolation ,  nous  avons  dû  compter  sur 
quelques  commotions  partielles  ;  mais  nous  avons  rendu 
impossible  Tenireprise  d'une  commotion  générale. 

Bientôt  les  administrations,  replacées  dans  l'ordre  que 
la  hiérarchie  politique  leur  a  assigné,  vont  reprendre  la 
part  acUve  qu'elles  doivent  avoir  au  réiablisst  ment  de  la 
félicité  du  peuple  français;  et,  malgré  les  tiraillements 
inséparables  encore  de  la  fin  d*une  révolution  aussi  grande, 
nous  ferons  sentir  aux  turbulents  de  Tintérieur,  comme 
aux  ennemis  de  l'extérieur,  que  nous  avons  un  gouverne- 
ment capal)le  de  diriger  imperturbablement  vers  Tuoilé 
tous  les  mouvements  poliUqucs. 

Cen*est  point  par  des  clameurs  et  des  agitations  qu*on 
apaise  des  chmeurs  et  des  agitations,  ni  que  l'on  fait  ces- 
ser une  effervescence  indiscrète  ou  coupable.  Le  gouver* 
nement  démocratique  n'est  pas  un  pouvoir  exterminateur 
qui  agit  au  gré  d'une  fougue  irrénéchie,  à  la  plus  légère 
ébullition.  liC  gouvernement  que  nous  voulons  consolider 
ne  se  meut  pas;  il  feit  tout  mouvoir;  il  agit,  comme  la 
Ptovideuce,  |)ar  les  causes  secondaires,  par  les  adminis- 
trations disséminées  sagement  partout  où  il  y  a  des  hom- 
mes paisibles  à  rendre  heureux,  partout  où  il  y  a  des 
bommes  inquiets,  tracassiers  ou  coupables,  à  comprimer 
et  à  réprimer. 

.  Lu  Convention  nationale,  en  qui  réside  exclusivement 
Teiercice  du  pouvoir  du  peuple,  doit  faire  connaître  à  tous 
les  Français  que,  si  l'ignorance  et  le  crime  ont  fait  une 
coalition,  elle  est,  elle,  à  la  tète  de  la  coalition  de  tous  les 
talents  et  de  toutes  les  vertus. 

C'est  pour  cela ,  c'est  pour  toucher  ce  but ,  qu'elle  doK 
dispenser  de  celle  tribune  l(>  blâme  ou  son  approbaUon  à 
ses  commissaires,  aux  administrations,  aux  citoyens. 

Représentants  du  peuple,  c'est  pour  vous  mettre  à  por- 
tée de  f»»iri'  un  de  ces  acies  de  justice  que  je  vais  vous  don- 
ner la  lecture  de  la  correspondance  du  comité  de  surveil- 
lance de  Marseille,  et  de  celle  de  nos  collègues  qui  y  sont 
en  mission^  sur  l'état  de  l'intéressante  Marseille. 

Les  membres  du  comité  révolulionnaire  du  dislrict 
de  Marseille, 
Marseille,  le  8  pluviôse,  l'an  Se  de  la  republique 
française,  une  et  indivisible. 

c  Citoyens  représentants,  le  cnmiié  de  surveillance  vous 
n  fuit  passer,  la  décade  dernière,  le  détail  de  i'cspril  pu* 
blic  qui  régnait  dans  notre  commune,  qui  certainement 
n'était  pas  satisfaisant  pour  les  bons  républicains;  celui 
d'aujourd'hui  est  encore  plus  aflligeant.  Le  premier  ne 
contenait  que  des  cris  séditieux,  celui  d'aujourd'hui  con- 
tient des  voies  de  fait;  nous  allons  vous  en  faire  le  dé- 
tail. 

•  Les  terroristes,  les  hommes  de  sang  en  sont  venas  aux 
prises  avec  quelques  militaires  de  la  garnison  qui  est  dans 
cette  commune,  et  principalement  avec  ceux  du  bataillon 
des  GravUliers.  Tellement  la  crise  a  éié  forte  qu'il  y  a  eu 
trois  militaires  blessés  cl  un  mort.  Nous  vous  ferons  ob- 
server quMl  n'y  a  eu  aucun  mal  dvi  côté  des  agresseurs,  car 
ils  lèsent  attaqués  en  traîtres.  L'affaire  s'e&t  passée  dans 
qn  cabarel|  |ç  (o^r  4q  Taniuïenkaire  4«  U  mort  du  tyrau 
Gapeti 


«Tous  les  jours  co  sont  de  nouvelles  rixes t  ralin  les 
scélérats  s'agitent  en  tous  sens,  regrettent  le  système  de 
Robespierre.  Us  font  courir  des  pétitions  dans  les  arron- 
dissemenb  des  sections  pour  capter  les  signatures.  Cet 
pétitions  doivent  vous  être  présentées  au  premier  jour; 
elles  tendent  k  dire  que  les  patriotes  purs  sont  incarcérés, 
principalement  les  %ingt-huitqui  ont  été  traduits  à  l'aria 
par  arrêté  des  représentants  du  peuple  Auguis  et  Serres, 
^  et  autres  qui  se  sont  soustraits  à  des  mandats  d'arrêt  Bb 
I  bien,  savei-vous  qui  sont  ces  hommes  que  l'on  répute 
,  comme  patriotes  ?  Ce  sont  les  fripons,  dilapidateurs  et 
voleurs  de  réquisitions,  qui  ont  égaré  le  peuple  jusqu^à  ee 
f  jour  sur  ses  vrais  intérêts,  et  qui  l'ont  irrité  contre  l'au- 
torité légitime  toutes  les  fois  que  la  Convention  a  adopté 
un  système  qui  ne  leur  convenait  pas.  Partie  des  signa* 
taires  n'ont  signé  que  forcément ,  parce  que  le  système  de 
terreur  comprime  encore  la  majeure  partie  des  habitants, 
et  nous  sommes  toujours  exposés  à  une  nouvelle  crise , 
malgré  notre  surveillance. 

«  Il  ne  faut  pas  vons  dissimuler  que  les  agitatetrrs  de 
Marseille  correspondent  avec  ceux  de  Paris,  et  que  lear 
but  est  de  perdre,  s'ils  le  peuvent,  encore  une  fois  le  Midi, 
f  L'an  passé,  c'étaient  les  fédéralistes  qui  nous  avaient 
mis  à  deux  doigts  de  notre  perte  {  et  celle-ci,  ce  sont  les 
prétendus  patriotes,  qui  se  disent  Montagnards  et  Jacobins, 
qui  tendent  à  la  causer  ;  enfm ,  ce  sont  deux  classes  qui 
nous  tourmentent,  que  la  Convention,  aveosa  massue,  ne 
tardera  pas  d^abattre, 

«  Piusieurii  individus  dont  le  civisme  n^est  pas  des  plus 
purs  partent  journellement  de  cette  commune  pour  se 
rendre  à  Paris;  il  en  est  principalement  parti  deux  ces 
jours  derniers  qui  sont  porteurs  des  pétitions  précitées  : 
Geruyet  s'est  soustrait  à  un  mandat  d'amener  du  comité. 
Nous  vous  invitons  ài  faire  surveiller  tous  ces  voyageurs; 
car  nous  présumons  qu'ils  ont  pour  but  de  porter  de  grands 
maux  à  la  république. 

«  Les  membres  du  comité  de  surveillance. 

%  Signé  H.  Harnacd,  Biain,  Josrpr  TaissèRB,  V; 
Cbaix  ,  P.  Blanc,  Bbnoit  Bbrtb,  J.  Bbadssbt, 
Andhé  Catot,  Jbromb  Vincent,   C.-Il.  Roc- 
MIS  1-. 

•  P,  S,  Les  représentants  du  peuple  veillent  Ijour  punir 
le  crime  cl  prévenir  les  plus  grands  accidents  ;  mais  il  est 
essentiel  que  les  scélérats  de  notre  commune  ne  soient  pas 
appuyés  par  une  correspondance  active  avec  les  scélérats 
de  Paris.  > 

Extrait  d'une  lettre  du  représentant  J.  Mariette^ 
délégué  par  la  Convention  nationale  dans  les 
ports  de  la  Mcdilerrannée,  à  ses  collègues  Rovèrê 
et  Durand' M aillane. 

Marseille,  le  8  pluviôse,  l'an  3«  de  fa  république. 

•  Je  profite,  mes  chers  collègues,  de  l'occasion  d*UQ 
courrier  que  l'agence  du  commerce  de  Marseille  envoie  an 

I  comité  de  salut  public  pour  vous  mettre  au  courant  de  ce 
'  qui  se  passe  dans  celte  partie  intéressante  de  la  républi* 
que.  Je  vous  marquais,  dans  ma  dernière  dépêche,  que 
j*étais  seul  à  Marseille  au  moment  où  je  vous  écrivais  | 
Cadroy  parcourait  les  communes  et  les  districts  des  Uox^ 
chcs-du-Rhône,  où  il  s'est  fait  généralement  craindre  dea 
coquins,  aimer  et  estimer  des  bons  citoyens  :  Espert  était 
à  Toulon,  où  il  a  passé  quatre  ù  cinq  jours.  A  son  retour^ 
des  mouvements  que  je  voyais  méditer  depuis  longtemps 
dans  l'ombre  et  dans  les  ténèbres  ont  comnoencéà  éclater* 
Tous  les  séditieux  qui,  le  9  vendémiare,  avaient  assiégé  la 
maison  de  nos  collègues  Auguis  et  Serres,  étaient  Utkrea 
depuis  quelques  jours  ;  tous  n'étaient  pas  également  cou^ 
pables  ;  dans  le  nombre,  il  s'en  trouvait  même  quelques- 
'  uns  dignes  d'indulgence;  mais  Espert  avait  tout  relâché» 
'  Il  parait  dans  la  bande  une  vingtaine  de  chefs  qu'il  étai^ 
de  la  dernière  imprudence  de  remettre  dans  la  société  » 
surtout  après  la  scène  scandaleuse  du  tribunal  criminel 
dont  je  vous  ai  rendu  compte,  et  qu'Espert,  par  une  mo\i* 
lesse  inconcevable,  avait  laissée  impunie. 
I  •  Ces  hommes  infiniment  dangereux,  cl  que  rien  n*ei( 
capable  de  corriger,  se  croyant  soutenus,  et  peut-être  avee 
quelque  raison,  ont  mis  en  œuvre  leurs  moyens  ordinaires 
pour  répandre  de  nouveau  la  terreur  dans  le  pays,  et  se 
ressaisir  par  là  de  l'autorité  qu'ils  voient  en  frémissant 
I  passer  dans  «loutres  mains.  Ils  ont  oommencé  par  des  n^ 


392 


lemblements  nocturnes  ;  maïs  blenldt  apr^s,  {étant  enliè« 
renient  le  masque»  ils  se  sont  réunis  en  plein  jour  dans  les 
rues,  dans  lescarés,  dans  les  places  publiques,  en  proférant 
les  cris  de  ralliement  .*  vive  la  Montagne!  vivent  les  Jaeo' 
tinsé'el  des  furies  qui  pullulent  ici  comme  à  Paris  répé- 
taient en  chorus  r  vive  la  Montagne I  merde  pour  la  Con" 
vention  et  pour  ceux  qui  la  soutiennent  !  Les  braves  volon- 
taires qui  composent  la  garnison  n*ont'pu  entendre  ces 
horreurs  sans  indignation  ;  ne  consultant  que  leur  zèle,  et 
sans  faire  attention  à  leur  petit  nomb^»  quelques  canon- 
niers  du  bataillon  des  Gravilliers  ont  voulu,  dans  ui^ ca- 
baret, imposer  silence  auisédiiieux  et  les  arréler;  ceux- 
ci  se  sont  mis  en  défense ,  ont  tué  un  canonnier  et  blessé 
assex  grièvement  cinq  de  ses  camarades.  Enhardis  par  ce 
premier  succès,  ils  ont  deux  jours  après  consommé  un 
nouveau  crime,  et  ils  ont  encore  choisi  leurs  victimes  dans 
le  bataillon  des  Gravilliers.  Au  détour  d*une  rue,  un  ser- 
gent-major de  cet  excellent  bataillon  a  été  percé,  par  der- 
rière, d'un  coup  de  sabre,  et  frappé  par  devantd*uncoup 
de  poignard.  Ces  atrocités,  qui  se  multipliaient  coup  sur 
coup,  et  sur  lesquelles  on  affectait  de  lermer  les  yeux,  ont 
aingulièrement  indisposé  la  garnison,  qui,  dans  le  premier 
transport  de  son  indignation,  voulait  se  lever  tout  entière, 
et  exterminer  jusqu'au  dernier  de  ces  misérables.  Heu- 
reusement les  cbe&  sont  aimés  et  respectés  du  soldat ,  et 
méritent  .de  l'être.   ' 

■  Nous  avons  concerté  ensemble  les  mesures  pour  arrê- 
ter cette  fougue,  malheureusement  trop  légitime;  et, 
grâces  à  rintelligence  et  à  Tactivité  du  brave  commandant 
de  la  place  et  des  autres  chefs  de  la  force  armée,  il  n'y  a 
pas  eu  le  plus  léger  désordre. 

«  Je  m'applaudissais  de  cet  heureux  succès,  lorsque,  le 
lendemain,  la  municipalité  et  le  commandant  de  la  place 
vinrent  me  prévenir  que  le  bataillon  des  Gravilliers  avait 
reçu  Tordre  de  partir,  et  qu'il  devait  être  remplacé  par  un 
bataillon  de  Marseille,  qui  se  comporte,  dit-on,  de  la  ma- 
nière la  plus  iudécente  à  Toulon.  Alors  il  me  fut  claire- 
ment démontré  qu'on  voulait  opérer  un  mouvement  dans 
Marseille,  que  Teffet  de  ce  mouvement  serait  de  rappeler 
le  règne  de  la  terreur  et  du  crime  dans  cette  malheureuse 
commune.  N'ayautpas  de  pouvoirs  ^ufiisants  pour  m'oppo- 
ser  aux  mesures  de  mon  collègue  Espert,  et  ne  voulant  pas 
ilonner  lé  scandale  public  de  la  scission  entre  deux  repré- 
sentants du  peuple,  j'ai  pris  le  seul  parti  qui  me  parût 
convenable  dans  les  circonstances  critiques  où  je  me  trou- 
vais. 

f  J*ai  dépêché  un  courrier  à  Cadroy ,  avec  invitution  de 
se  rendre  sur-le-champ  à  Marseille.  Cadroy  est  accouru, 
et  sa  présence  a  tout  changé.  Nous  nous  sommes  présen- 
tés ensemble  k  la  comédie  et  à  la  Société  populaire,  où 
nous  avons,  par  des  discours  fermes  et  énergiques,  relevé 
le  courage  abattu  des  bons  citoyens,  et  fait  rentrer  la 
terreur  dans  Tàme  des  méchants.  Plusieurs  de  ceux  qui 
avaient  été  si  imprudemment  élargis  sont  réintégrés  dans 
les  prisons;  on  est  à  la  poursuite  des  autres,  et  nous  espé- 
rons que,  s*ils  échappent,  au  moins  ils  seront  réduits  à 
porter  ailleurs  leurs  sinistres  projets  et  leur  désespoir. 

«  Le  bataillon  de  Gravilliers  restera ,  et  la  garnison  sera 
augmentée  de  celui  de  Loir-et-Cher;  avec  ce  renfort,  nous 
nous  flattons,  et  nous  pouvons  même  assurer  que  la  tran- 
quillité publique  ne  sera  pas  troublée  à  Marseille..... 

•  Ayez,  mes  cbers  collègues,  les  yeu\  perpéiuellemenl 
fixés  sur  le  Midi,  et  spécialement  sur  Marseille;  c'est  la 
seconde  commune  de  la  république  par  son  importance  et 
sa  position  ;  c'est  le  point  d'observation  pour  tous  les  fac- 
tieux; ce  doit  être  aussi  celui  de  tous  les  patriotes  pour 
déjouer  les  complots  des  ennemis  de  notre  liberté,  assurer 
la  tranquillité  de  MarseilK  et  du  Midi. 

t  Je  vous  fais  passer  deux  exemplaires  d*une  proclama- 
tion que  le  commandant  de  la  place  vient  de  publier  ;  elle 
a  produit  un  très-bon  effet,  en  faisant  trembler  les  sédi- 
tieux. Ce  commandant  est  un  fort  brave  homme;  mais  il 
sera  la  victime  d'une  intrigue  dont  je  suis  averti  :  comme 
•a  présence  gêne  ici,  Salicelti  a  dû  lui  faire  intimer  l'ordre 
de  se  rendre  à  l'armée  d'Italie  ;  c'est  encore  Salicetti  qui 
nous  envoyait  le  bataillon  de  Marseille  à  la  place  de  celui 
des  Gravilliers.  S'il  n'y  a  pas  de  dessein  dans  tout  cela ,  il 
faut  avouer  qu'un  représentant  du  peuple  est  bien  facile  ik 
surprendre. 

•  Salut  et  fratcrnrtc.  J»  MAaiisTTB.  » 


Grillon,  adjudant  général,  chef  de  brigade,  com^ 
mandant  temporaire  de  la  place  de  Marseille  est 
étal  de  siège,  à  ses  conciloyens. 

•  Les  lois,  le  bien  public,  la  responsabilité  qui  pèse  sur 
ma  tète,  dans  mes  fonctions,  m'ont  prescrit  de  détendre 
tous  cris  de  ralliement  autres  que  ceux  de  l'égalité  |  la  II» 
berté,  la  république,  la  Convention  nationale. 

«  Des  séditieux,  des  contre^volulionnaires,  des  assas- 
sins même  méprisent  les  ordres  que  je  ne  pouvais  me  dis- 
penser de  donner  sans  être  coupable ,  osent  se  promettre 
l'impunité,  parce  qu'ils  prennent  l'indulg^ce  pour  un 
pardon. 

«  La  clémence  et  l'humanité  ont  leur  terme;  ceux  qui 
en  abusent  n'en  sont  que  plus  criminels  :  ils  méritent  toute 
Tanimadversion  des  hommes  qui  aiment  leur  patrie,  et  la 
loi  est  toujours  prête  à  les  atteindre. 

•  Je  vous  préviens  encore  une  fois ,  citoyens ,  que  rien 
ne  sera  négligé  pour  arrêter  ceux  qui  se  permettront  des 
cris  séditieux,  ou  qui  formeront  des  attroupements,  et 
que  leur  punition  sera  d'autant  plus  méritée  qu'elle  de* 
vient  de  la  plus  indispensable  nécessité  pour  faire  goûter 
enfin  les  douceurs  de  la  confiance ,  de  l'amitié  et  de  la  fra- 
ternité, que  la  terreur  et  le  crime  ont  éloignées  depuis  si 
longtemps  de  cette  cité,  et  que  mes  frères  d'armes  et  moi 
y  ramènerons  à  quelque  prix  que  ce  soit  :  nous  l'avons  juré 
à  la  république,  et  nous  lui  tiendrons  parole. 

«  Les  gardes  nationales  qui  ne  partageront  pas  avec  lèle 
nos  travaux  ne  peuvent  être  regardés  que  comme  des  Uk- 
ches  ou  des  ennemis  de  leur  pays. 

•  Marseille,  le  7  pluviôse,  Tau  3%  etc. 

f  Signé  GaiLLOV. 

c  Vu  et  approuvé  par  nous,  représéntauts  du  peuple. 

«  Signé  Caorot,  J.  MiaimB,  J.  Espibt.  » 

Copie  de  la  lettre  du  général  divisionnaire  Ville- 
malet ,  commandant  la  2«  division  de  la  Côte^ 
aux  citoyens  membres  composant  le  comité  de 
salut  public  de  la  Convention  nationale. 

Marseille,  le  8  pluviôse ,  l'an  S*  de  la  rëpubliqoo 
une  et  indivisible. 

•  Je  profite,  citoyens  représentants,  du  courrier  que  vos 
collègues  expédient  pour  Paris  pour  vous  assurer  que  la 
tranquillité  commence  à  renaître  dans  Marseille;  il  y  a  eu 
hier  quatre  de  ses  agitateurs  qui  ont  été  arrêtés.  Ilss*étaient 
réunis  quarante-deux  dans  une  campagne  ft  une  demi-lieue 
d'ici  :  on  n'a  pu  prendre  que  ces  quatre  ;  leurs  espions  les 
ont  avertis  à  temps  :  c'est  ce  qui  fait  que  nous  n'avons  pu 
les  envelopper  tous.  Les  différents  rapports  qui  me  sont 
faits  m'annoncent  la  tranquillité,  que  l'opinion  publique 
confirme. 

«  Salut  et  fraternité.  Signé  Villimalit.  » 

Ce  rapport  et  les  pièces  excitent  tour  à  tour  les  plus  vifii 
applaudissements  pour  les  traits  de  courage  et  d'amour 
qu'ils  renferment,  et  de  fortes  marques  d'indignation  pour 
les  perfides  agitateurs  du  Midi. 

Plusieurs  voix:  Rappelez  Salicetti. 

Gdffbot  :  Le  comité  a  pris  les  mesures  nécessaires 
pour  le  rappel  de  Salicetti  dans  le  sein  de  la  Convention. 
Je  propos,  au  nom  du  comité,  l'approbation  delà  con* 
duite  des  représentants  du  peuple  Mariette  et  Cadroy» 
ainsi  que  celle  du  commandant  de  la  garnison. 

Ces  propositions  sont  décrétées. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures. 


iV.  D,  La  séance  du  18  a  été  remplie  presque  en  entier 
par  une  discussion  qui  s'est  élevée  sur  la  question  de  sa* 
voir  si  les  membres  de  l'ancien  comité  révolutionnaire 
d'Aurillac,  dénoncés  par  leurs  communes  pour  faits  de 
concussions ,  de  vexations,  de  trafic  de  la  liberté  des  ci- 
toyens, etc.,  seraient  traduits  au  tribunal  révolu! ioonaire, 
s'ils  resteraient  sous  la  juridiction  du  tribunal  criminel  du 
département  du  Cantal,  ou  si  cette  affaire  serait  évoquée  à 
un  tribunal  voisin,  auprès  duquel  on  ne  peut  craindre 
l'influence  des  passions  locales.  — >  Cette  dernière  propo« 
sition  a  prévai^u. 


GAZETTE  NATIONALE  «u  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

No  140.  Décadi  20  Pluviôse,  tan  8«.  (Dimanche  8  Février  1795,  vieux  style.) 


POLITJQUE. 
HOLLAISDE. 

tnOCLAMATlOlf  DBS  RBPRiSBlItAKTS  DO  PEOTLB  FRAHÇA». 

Le*  représeatanu  du  peuple  français  envoyés  qux  arvt^s 
du  Nord  et  de  Sambre-et-Meun- 

La  tyrannie,  conjurée  conlre  la  liberté  des  penplei,  ii0Of 
déclara  la  guerre  et  entreprit  4e  nouv  opprimer, 

Un  ftathQuder  revéche  ^'étalt  rendu  votre  maître  âp  fym 
Térnement.  Il  entra  dans  la  coalition  perpicteuae  4s$  tyrank 
et  forma  avec  eux  la  résolution  Insensée  de  siibjuçper  un 
grand  peuple. 

Votre  sang,  vos  trésors  fdrcnt  prodigués  ft  celte  entre» 
prise  criminelle. 

Le  sort  des  armes  a  répondu  à  la  Jusdce  de  notre  caustf 
e(  nos  armées  vlctorieoses  sooi  entrées  sur  votre  territoire. 

BaUves!  nous  sommes  bien  loin  4^  penser  qu^  vous  étioi 
complices  de  cette  eotreprise  biKriUie-  Nos  eonepun  i^ 
aussi  les  vôtres. 

Le  sang  des  fondateurs  de  la  république  des  Province 
Unies  coulé  encore  dans  vos  veines,  et  au  mi{leu  des  Imi'- 
reurs  de  la  guerre  nous  ne  cessions  pas  de  vous  considérer 
comme  nos  amis  et  alliés. 

C'est  sur  ce  pied-là  que  nous  soif  mas  actuellement  a|i 
milieu  de  vous.  Nous  n'apportons  point  la  inrr^us,  mai'  la 
confiance. 

Il  n'y  a  que  peu  d'années  qu'un  conquérant  hautain  TOfis 
prescrivait  des  lots:  nous  vous  rendons  la  liberté. 

Noos  ne  venons  pas  chez  vous  pour  vous  imposer  un 
Joug;  la  nation  française  respectera  vo|re  ipdcpçndaiipè.  "* 

Les  armées  de  la  république  française  eserceront  fa  plus 
sévère  discipline.  Toute  iusolence,  toute  extravagance  contre 
lés  habitants  seront  punies  sévèrement. 

La  siiireté  des  personnes  et  des  biens  ^T^  niA|Q(efi|ip. 

L'exercice  libre  de  ia  religion  ne  sera  point  ifoul^lé,  . 

Les  lois,  coutumes  et  usages  seront  çpcpre  maiptepm. 

Le  peuple  batave,  faisant  usage  dé  sa  souveraineté,  pourra 
seul  altérer  ou  sméUorer  la  constiuition  de  so'^  gdnVernè-' 
ment. 

A  Amsterdam,  le  t"  pluviôse,  Tfn  8*  de  ia  xépubliqae 
française,  une  et  indivisible  (20  janvier  1795,  vieux  style^ 
Etait  signé  à  l'originai  :  Gilubt,  BBLLeesimB, 
UcosTB,  ippaxAT,  PQikTiu  (de  l'Oise); 

Bruxeêhe*  le  \h  phpioise.  —  Us  Fcanç^  ont  tpnvé  en 
Hollande  Uouse  chsiloupes  canonnières  «ur  la  l|crve,  por<^ 
tant  chacune  unç  nièce  ^jo  l^  Çiu  ^  ^.  tU.  Oft  pri«,  en  outre, 
deux  belles  fn^a\ç^  ancbiscs. .  çharflccs  an  rbura  et  d'an- 
tres liqueurs  t  avec  deux  bricks  de  Ui  iné)^e,'oaifori  àrinés 
et  équipés.  • . .  i       v 

On  a  découvert  è  Dordrecht  une  grande  quantité  d'objets 
préden^,  tels  que  calices,  cnceneôirst  M^H1tîes^>eië.,ià|lpàr- 
teMQtadx  moiomk  delà  Belgique  Us  vont  éiha  transportés 
en  France.  ••  ' 

—  Le  généca).  BonPfia»  <^  antf^  Ip  Rr^njfpr  A  IaM^H^ 
avec  cinquante  huju^r4^  11  y  C|a|1  suivi  ()'^yn^corj[)S  nombreux 
commapdé  par  riipf|eflr.4.    '      -  •  "•       *'''.*'' 

—  Aussitôt  ^pr^ TéfgaUtsàiloil  des  nobVéadx' états,  la 
bourgeoisie  de  baflaye,  {féttëriifemeH  i  èbii  n  hfi^râran^ieté, 
a  été  desarmée.  1^  garnison  hollandalsl*;  H^fé^  ttféW'prété. 
serment  aux  nouf^eanB  états  provisoires,  a>( remmenée  a 
faire  le  servic^.4oiyqini|j|^nljiv.ec  les  troMjfes  fraiKttis<iS. 

: : ■    ■  , .-.- — L^-J — -^liii:. 

Présidence  de  Rovérê,  :    '   ^ 

Bapp^t  sur,  UfMojl/ieju^a. prendre  jpour  retirer  des 
<»<*{PîU*<fr<|fi,  Ifr  .%^tj'Àfiçn,  êï  ifurîq  création^ 
d'une  lb|erî^,  flrejfn(f,^jirT^mfep»  ^  au  nom  dv^ 
comité  defJîfi^cei^aan'flCaséà^^  d^  %piw)iM9^, 

Citoyens,  les  armes  de  la  reptii)liqur  lilrtnipiietit; 
le  courage. drSt  grTi(*rPiiit  di»I(»*iî#tir*  tk»  Tt^rtlflé  a 
fait  iuir  le&  saJHHtcffiIrs  df^potes^cdslliscs;  Ife  U'ètfit» 

»•  SiAt,  -^  'Vomi  ^.'  '      ''  ■   "  1 


d^  pjusijeurs  tyranscl^ancellc;  l'Europe  soupire  après 
la  paix  qM.e  la  France  voudra  dicter.  Eqcore  quelques 
^ffçf  IS ,  ^l  npus  4jt^jpdrûqs  |e  but  que  nous  nous 
SOtnn^es  proposé.  C!^t  nous  qui  devons  seconder* le 
riéyoï^proent  de  no;?  frères  d'fthnes,  eh  metjLantdafis 
nû$  Qpérutioi^  Tense/bWe  ej  la  prudence  qui  doivert 
en  aççiirer  le  swpw.  •     -     =•, 

Les  efforts  magnajgijipies  qtie  la  nation  française  a 
ftilf  nojur  rentrei:  dans  ses  droitç  n'auraiefil  pa&pu 
être  dévclopné§  et  e^céçutés  si  nous  n'avions  pas  «a 
fes  moyens  (Tacquitler  le3  dépenses  qu'Us  ont  oécei*' 
i\\f}^  ■    •♦.   : 

.  Çrlçes  soieni  rendues  à  l'Assemblée  constituante, 
gui  le^  a  préparé^  en  créant  les  assignats.  Cette 
mpi?t?j^ie  t,errUpriale  a  rendu  de  grands  services  à  fa 
f éyoïupon  ,  en  paeltanl  en  circulation'  la  vaieurdct 
domaines  nationaux,  en  nous  fournissant  les  moy«tiè 
deiiourrir,  d'équiper  ei  entretenir  des  ai^niées  de 
doùzç  Cent  mille  hommes.tje  créer  des  flottes,  de  le»* 
siver  les  terres  pour  en  extraire  le  salpêtre,  defabri-» 
qiièr  des  aiincfî;  enfin,  de  procut^r  du  travail  à  tous 
les  citoyens,  ^es  ju^emnités  aux  familles  des  défen-r 
séur3  de  la  palrij!,  ejt  des  secours  aux  indigents;  eHe 
nous  fournira  9it§sf ,  n'en  doutez  pas ,  les  moyeiis 
de  raviver  le  commerce ,  de  faire  fleurir  les  arts^ 
d'ouvrir  des  canaux  et  des  routes^,  de  dessécher  l«$ 
iparais,  et  d'clever^dcs  .monuments  dignes  de  ta  i-é- 
piibliçyie  française. 

péja,  (}épuis  l'introduction  des  assignats  jusqu'au 
çoinp^encemcnt  de  1793,1a  richesse  territoriale  avaij 
augmenté  en  franco  d'une  manière  satisfaisante { 
paftpuf  on  s>ccupait  des  améliorations ,  des  défri- 
cbetnentsel  des  /constructions  j  les  ateliers  efles 
n^ahiitaçtuçes  étaient  en  grande  actitité.  La  loi  du 
iijaxipiiim,/e§  mesures  rovolullonn.-Mresel  lejnt)m> 
brè  des  oras  qui  sont  e-niployés  pour  la  défenseicom- 
il^l^peogtsiASpenducct  heureu;t  effet  ;*mai8iiloPsqne 
k^J^'^Pn^  seront  rassurés i  ou  ^  la  pais,  l'industrie 
nationale  prendra  un  nouvel  essor.  •    i      :    »   -j  .u 

Une  opinion  trop  général  entent  répandue,  et  qui 
a  pu  séduire  desbôinities  de  boiirte'foi,  altribne  ex- 
clusivement la  cherté  et  ia  ruretéides  detirées-ét 
marchaiidises  A  la  musse*  des 'assignats  ei)  circnlarr 
tion;  on  s'est  fondé  sur  ce  qnr  les  productions  de  la 
France  ne  s'élevaient  qu'a  2  miliiôrdsi  tondis  que 
nous  avons  6  milliards  d'assignats  en  circulation. 
D'après  ces  bases  on  a  établi  que  leboiThetir  (lu  peu- 
ple dépendait  du  retiremejit  des  assignats.  Les  enne- 
mis de  l'égalité  et  de  la  libert>é  ,  qui  n'ont  d'autre 
l^ut  que  i\i\  nous  mettre  dans  rimpossibilrté  de  coh- 
Ûnuer  la  guerre,  se  sont  emparés  de  cette  idée  pour 
di^eréditer notre  aaonnaieterntorialiv    »- 

Il  est  de  notre  devoir  de  détruire  les  prévenllqiliJ 
qui  pttribuen^  exclnsi veinent  toutes  les  difficultés 
que  nous  éprouvons  à  la  masse  des  assignats  eji  pir- 
Gulation.    .....  ■  \  '  . 

Nous  conviendrons  que  Vexcessïvc  émission  des 
assignats  a  contribué  à  la  hailjssê  (fajis  le.pijxaea 
denrées  et  marchandises;  mais  la  principale  caus(^ 
de  l'augmentation  qu'elles  ont  éprouveeprovtent  dit 
noml^re  d^is  bras. utiles  qui  sont  employés  aux  ai*-: 
mées ,  et  qjui  foiit  un  vide  aux  besoins  de  l'ai^ricuf- 
tur^e  et  des  ateliers  ;  elle  provient  de  la  ràretiTtfl^ 
bestiaux  «t  des  mo Itères  ;  elle  provient  cnHii  de  la 
cofisemimatton  excessive  que  la  gi^ejTC  nécessite,  ' 
'  Quel  est  r^iomme  de  bonne  foic^i  ne» conviendra 
pas.ijup  le  pw  lie  la  main  d'oeuvre* «doit  être  plus 
cjMff  .lorsque  le  cinquième  delà  prtpuliation  îïclivë 
csLoccupé  pour  la  défx^nse  Commune?  Ter^onne  i\c 
pourra  disconvcntr  que  là  todsobimation  dèsdiaps, 

60 


394 


des  souliers,  du  fer ,  des  chevaux,  des  vivres,  etc., 
ne  soit  plus  que  doublée  par  les  dépenses  au'entraî- 
nent  les  armées.  S'il  fallait  prouver  que  la  France 
n'est  pas  le  seul  pays  où  la  cherté  et  la  rareté  des 
denrées  se  fait  sentir,  nous  ne  vous  citerions  pas 
l'Espagne  ,  le  Piémont  ou  l'Allemagne  ;  mais  nous 
prouverions  que  le  prix  du  blé,  de  la  viande ,  des 
chevaux,  a  augmenté  d'une  manière  alarmante  dans 
les  piiys  neutres  qui  n'ont  pas  pris  part  à  la  guerre , 
qui  n'ont  pas  des  assignats  en  circulation ,  et  où  les 
transactions  se  font  contre  du  numéraire. 

Les  dépenses  en  productions  territoriales  qui  se 
font  dans  ce  moment  en  Europe  sont  telles  qu'elles 
ne  pourraient  pas  être  continuées  sur  le  mt^me  pied 
pendant  dix  années  sans  courir  le  risque  d'un  épui- 
sement presque  total;  elles  sont  telles  que  dans  ce 
moment  l'Europe  met  à  contribution  les  productions 
de  toutes  les  autres  partiesduglobe,  et  particulière- 
ment celles  des  terres  nouvellement  défrichées  dans 
l'Amériaue  septentrionale. 

Ainsi  la  découverte  du  Nouveau-Monde,  qui  d'a- 
bord avait  servi  à  rendre  esclave  une  partie  des 
hommes,  sert  en  partie,  par  les  productions  que 
nous  en  lirons,  à  la  défense  de  notre  liberté,  et  pro- 
curera peut-être  à  l'Europe  entière  les  moyens  et 
l'exemple  de  rentrer  dans  ses  droits;  mais  les  den- 
rées que  nous  en  tirons  sont  nécessairement  à  un 
prix  plus  haut,  et  relatif  aux  frais  des  transports 
qu'elles  occasionnent. 

Les  bons  citoyens  doivent  donc  se  pénétrer  que 
les  privations  qu'ils  éprouvent  sont  le  résultat  des 
machinations  suscitées  par  les  tyrans  et  provoquées 
primitivement  par  les  émigrés;  ils  doivent  se  péné- 
trer qu'elles  sont  nécessaires  au  triomphe  de  l'éga- 
lité et  de  la  liberté  :  l'homme  vraiment  patriote  les 
supporte  avec  résignation,  par  l'horreur  qu'il  a  de 
la  tyrannie;  il  les  compare  toujours  avec  les  fati- 

fues  qu'éprouvent  les  courageux  soldats  qui  com- 
attent  pour  la  défense  commune. 
En  vain  les  ennemis  de  la  chose  publique  von- 
draient-ils  nous  alarmer  sur  la  situation  de  nos 
finances;  jamais,  non  jamais,  aucune  nation  n'a  eu 
autant  de  ressources  que  nous  en  avons;  jamais  aussi 
aucune  nation  n'a  eu  autant  d'ennemis  puissants 
réunis  à  combattre  ;  jamais  la  nation  française  n'a 
développé  de  si  grands  moyens  et  à  moins  de 
frais  (1). 

'  Les  puissances  coalisées  avaient  cru  nous  asservir 
en  nous  occasionnant  des  dépenses  que  nous  ne 
pourrions  pas  acquitter  ;  mais  notre  monnaie  terri- 
toriale a  fourni  seule  et  fournira  à  tous  nos  besoins  : 
elle  est  garantie  par  une  valeur  réelle  que  personne 
ne  peut  lui  enlever,  tant  que  la  «^publique  existera; 
ainsi,  l'hypothèque  étant  réelle ,  si  l'émission  de  la 
monnaie  va  en  augmentant,  la  valeur  de  l'hypothè- 
que croît  en  proportion. 
On  demandera  peut-être  encore  que  nous  pré- 
Ci  )  Les  sommes  payées  depu'u  le  1  "juillet  1790  montent  à 
9  milliards  BOO  millions  de  liv.«  parmi  lesquelles  se  trouve 
i  milliard  de  liv.,  remboursement  de  la  dette  ancienne;  ainsi 
les  dépenses  sont  de  S  milliards  SOC  millions  de  liv.  Les  dé- 
penses annuelles  et  ordinaires  de  la  monarchie,  en  temps  de 
paii,  montaient  à  708  millions ,  y  compris  la  dlme  ;  ainsi  la 
monarchie  aur^iit  dépensé  dans  quatre  ans  et  demi  3  milliards 
150  millions  deliv.  en  écus.  s'il  n'y  avait  pas  eu  de  frais  ei- 
traordinaires  :  donc  la  révolution  et  la  guerre  ont  coûté 
5  milliards  550  millions  de  liv.  en  sus  des  dépenses  ordinaU 
ret.  La  guerre  d^Aménque  a  coûté  I  milliard  500  millions 
de  liv.  en  écus.  Qu'on  calcule  la  diflcrence  résulunt  du 
change  sur  les  0  milliards  500  millions  de  liv.  qui  ont  été 
payéa  en  assignats  ;  qu'on  compare  surtout  les  efforts  que  la 
guerre  actuelle  et  la  révolution  ont  nécessités  avec  ceus  que 
«.eus  que  la  France  fit  pour  la  guerre  d'Amérique,  Ton  preo- 
Ura  une  idée  juste  de  la  «Icpensc  réelle  de  la  révolution. 

A.  AI. 


sentions  Tétat  et  la  valeur  des  domaines  nationanx; 
déjà  le  citoyen  Johannot  a  établi ,  dans  le  rapport 
qu'il  a  fait  au  nom  des  cinq  comités  réunis,  qu*en 
vendant  les  domaines  nationaux  à  raison  du  denier 
40  de  leur  produit  annuel,  leur  valeur  serait  de  15 
milliards  ;  cette  estimation  est  donc  relative  au  prix 
des  ventes,  qui  varie  à  chaque  instant ,  puisque  les 
terres  qui  se  vendaient  en  1789  à  raison  du  denier 
30  se  sont  vendues ,  avant  la  suppression  de  la  loi 
du  maximum,  à  raison  du  denier  50,  60  et  70.  Au- 
jourd'hui que  cette  loi  désastreuse  est  supprimée , 
leur  valeur  doit  croître  en  proportion  de  la  liberté 
que  vous  avez  rendue  de  pouvoir  disposer  sans  en- 
trave des  fruits  de  la  propriété. 

D'après  les  principes  que  nous  avons  établis ,  il 
paraîtrait  que  nous  ne  oevrions  pas  nous  occuper 
de  la  masse  des  assignats  qui  sont  en  circulation  , 
puisque  tout  suivrait  le  niveau.  Les  Etats-Unis  de 
l'Amérique,  qui  les  premiers  ont  nroclamé  les  Droits 
de  l'Homme ,  avaient  créé  des  billets  au  porteur, 
payables  en  numéraire  ,  qui  n'étaient  garantis  que 
par  des  terres  incultes  dans  un  pays  peu  habité  ;  ces 
Lillets  leur  ont  cependant  servi  à  terminer  leur  ré- 
volution; et  lorsque  leur  gouvernement  a  été  établi, 
la  prospérité  et  l'aisance  ont  couronné  les  efforts 
qu'ils  avaient  faits  pour  l'obtenir. 

Quelle  différence  à  son  avantage  n'a  pas  notre 
monnaie  territoriale ,  puisque  nos  assignats  sont  des 
mandats  payables  en  terres  fertiles  dans  un  pays 
tres-habité!  Quel  gage  plus  rassurant  pourrait-on  se 
procurer  si  nous  consolidons  notre  gouvernement 
républicain  !  Quel  état  de  splendeur  la  nation  fran- 
çaise ne  doit-elle  pas  obtenir  lorsqu'elle  aura  triom- 
phé de  tous  ses  ennemis  ! 

Cependant  votre  sollicitude  pour  le  bonheur  de 
tous  a  exigé  que  votre  comité  des  Onances  vous 
présentât  les  moyens  de  retirer  de  la  circulation 
une  grande  partie  des  assignats;  votre  justice  a  cru 
qu'il  était  nécessaire  de  décréter  que  vous  n'adopte- 
riez aucun  moyen  qui  pourrait  porter  atteinte  a  la 
propriété. 

Votre  comité  s'est  occupé  de  ce  travail ,  qui  exi- 
geait la  méditation  la  plus  approfondie  sur  les  rap- 
Ports  les  plus  intéressants  et  les  plus  délicats  de 
ordre  social;  dans  un  moment  où  les  besoins  de  la 
république  exigent  que  nous  émettions  chaque  jour 
une  certaine  quantité  d'assignats,  il  aurait  été  peut- 
être  utile  qu'on  ne  parlât  pas  du  retirement;  il  était 
au  moins  difficile  de  déterminer  des  moyens  justes 
pour  en  diminuer  la  masse  :  vous  l'avez  exigé,  et 
nous  n'avons  rien  négligé  pour  l'obtenir. 

Le  moyen  qui  se  présente  d'abord  à  l'esprit  est  la 
démonétisation  forcée  ;  mais,  en  attaquant  le  signe 
monétaire,  quelle  confiance  aurait-on  pu  avoir  dans 
de  nouvelles  émissions  !  Vous  auriez  discrédité  vous- 
mêmes  votre  monnaie  territoriale,  et  vous  vous  se- 
riez peut-être  mis  dans  l'impossibilité  de  continuer 
la  guerre  :  aussi  votre  sagesse  vous  a-t-elle  fait  re- 
jeter cette  mesure. 

Nous  aurions  pu  avoir  recours  à  un  impôt  ex- 
traordinaire dont  le  produit  aurait  servi  à  diminuer 
la  masse  des  assignats  en  circulation;  tout  le  monde 
conviendra  avec  nous  que ,  dans  les  principes  de  la 
justice  rigoureuse,  lorsque  la  défense  commune  né- 
cessite des  dépenses  extraordinaires ,  la  société  a  le 
droit  d'exiger  des  personnes  qui  ont  des  propriétés 
le  sacrifice  d'une  partie  de  leur  produit  pour  subve- 
nir aux  besoins  de  l'Etat  :  cet  impôt  aurait  été  même 
facile  à  acquitter  par  la  multiplicité  du  signe  qui  est 
en  circulaUon,  et  par  le  haut  prix  auquel  se  vendent 
les  denrées  et  marchandises. 

Les  circonstances  ne  nous  ont  pas  permis  de  nous 
occuper  de  cette  ressource  si  juste;  la  loi  du  maxi- 
mum ayant  occasionné  des  pertes  si  considérables  à 


395 


ragrîculturc é! au  commerce,  il  aurait  dté  dange- 
reux, dans  le  moment  où  vous  vous  occupez  de  faire 
prospe'rer  ces  deux  branches  si  essentielles  de  l'éco- 
nomie politique ,  de  demander  aux  agriculteurs  et 
commerçants  de  nouveaux  sacrifices  qui  auraient  pu 
leur  enlever  les  ressources  qui  leur  restaient  pour 
répondre  à  vos  vues. 

En  août  1793,  au  moment  où  vous  vous  occupiez 
de  retirer  des  assignats  de  la  circulation,  vous  n'eû- 
tes pas  recours  à  un  impôt  extraordinaire  ;  mais 
vous  voulûtes  en  retirer  1  milliard  ,  sur  les  3  mil- 
liards 600  millions  oui  étaient  en  circulation  ;  pour 
y  parvenir,  vous  créâtes  un  emprunt  forcé  qui  n'a- 
vait d'autre  objet  que  d'établir  par  une  répartition 
proportionnelle  un  échange  d'assignats  contre  un 
effet  admissible,  deux  ans  après  la  paix,  en  payement 
des  domaines  nationaux  qui  seraient  à  vendre  à 
celte  époque,  sans  allouer  aucun  intérêt;  mais,  pour 
adoucir  la  rigueur  de  cet  échange,  vous  ouvrîtes  un 
emprunt  yolontaire,  en  accordant  un  intérêt  de  5 
cour  100  avec  retenue  ;  ainsi  les  citoyens  pouvaient 
éviter  l'emprunt  forcé  et  seconder  vos  vues  sans 
faire  d'autre  sacrifice  que  de  placer  une  partie  de 
leurs  capitaux  d'une  manière  avantageuse. 

Ce  décret  produisit  d'abord  les  heureux  effets 
que  vous  en  attendiez  ;  le  cours  des  changes  s'anié- 
liora;  Taffluence  des  prêteurs  fut  considérable;  cha- 
que jour  on  annulait  4  à  5  millions  du  produit  de 
cette  recette  extraordinaire;  le  succès  était  tel  que 
nous  espérions  qu'il  écarterait  de  notre  législation 
la  loi  désastreuse  du  maximum. 

Vlalheureusement  des  intrigants  et  des  hommes 
trompés  provoquèrent  cette  loi,  qu'on  vous  présente 
comme  le  palladium  de  la  liberté  et  le  salut  du  peu- 
ple. Dès  qu'elle  fut  décrétée,  le  produit  de  l'emprunt 
volontaire  fut  moindre;  l'emprunt  forcé,  qui  portait 

Particulièrement  sur  les  bénéfices  commerciaux  de 
année,  n*eut  plus  de  base.  Dans  le  même  temps  on 
établit  des  taxes  révolutionnaires  ;  l'armée  révolu- 
tionnaire porta  partout  la  terreur;  enfin  les  troubles 
intérieurs ,  tout  paru  se  réunir  pour  paralyser  le 
produit  des  emprunts  volontaire  et  forcé,  qui  aurait 
dû  être  de  1  milliard  ,  et  qui  montera  aux  environs 
de  180  à  200  millions. 

Aujourd'hui  la  mesure  que  vous  adoptâtes  en  1793 
serait  insuffisante ,  puisque  la  masse  des  assignats 
en  circulation,  qui  était  (le  3  milliards  600  millions, 
est  de  6  milliards  500  millions  ;  elle  ne  serait  d'ail- 
leurs d'aucun  produit,  puisque  les  bénéfices  com- 
merciaux sur  lesquels  elle  portait  particulièrement 
ont  été  nuls  pour  l'an  2,  par  l'effet  de  la  loi  du  maxi- 
mum ;  c'est  ainsi  qu'une  dérogation  aux  principes 
entraîne  de  funestes  effets,  même  lorsqu'on  l'a  aban- 
donnée. 

Votre  comité  des  finances  se  trouvant  limité,  par 
une  suite  de  circonstances,  dans  le  choix  des  mesu- 
res à  prendre  pour  retirer  les  assignats  de  la  circu- 
lation, a  pensé  qu'il  devait  vous  présenter  une  réu- 
nion de  moyens  libres  et  volontaires ,  combinés  de 
manière  à  s'entr'aider  l'un  l'autre  et  à  se  servir  de 
garantie  contre  le  défaut  de  réussite  de  l'un  d'eux. 

Je  vais  vous  exposer  le  cadre  du  travail  qu'il  a 
cru  devoir  vous  soumettre ,  afin  que  vous  puissiez 
juger  de  son  ensemble. 

l<>  Il  vous  propose  de  créer  une  loterie  pour  reti- 
rer 4  milliards. 

Cette  loterie  est  combinée  de  manière  qu'elle  ne 
présente  aucune  perte  à  ceux  qui  s'y  intéresseront; 
ils  auront  l'expectative  de  divers  lots,  et  la  certi- 
tude de  retirer,  en  un  bon  au  porteur,  la  mise  qu'ils 
auront  faite  en  assignats  ;  la  nation  fait  quelque  sacri- 
fice; mais,pour  engager  les  porteurs  d'assignats  à  les 
échanger  contre  un  etlèt  qui  n'aura  plus  cours  forcé 
de  monnaie  y  il  faut  leur  offrir  quelque  avantage. 


20  Votre  comité  a  pensé  qu'il  fallait  engager  les 
acquéreurs  des  domaines  nationaux  à  solder  par  an- 
ticipation les  termes  non  échus ,  tant  en  admettant 
pour  une  partie  du  payement  les  inscriptions  sur  le 
grand  livre  de  la  dette  consolidée  qu'en  accordant 
une  prime  à  ceux  qui  se  libéreront  en  entier  avec 
des  assignats. 

Il  reste  dû ,  sur  les  ventes  déjà  faites,  un  capital 
d'environ  1  milliard  600  millionsdeliv.;  on  peut  es- 
pérer que  cette  mesure  fera  rentrer,  dans  le  cours 
de  cette  année,  en  assignats,  800  millions. 

30  Votre  comité  a  arrêté  un  projet  de  décret  pour 
accélérer  la  vente  du  mobilieraes  émigrés,  conaam- 
nés  ou  d('portés;  ces  richesses  qui,  à  Paris,  dépéris- 
rent  enfouies  dans  des  hôtels ,  coûtent  des  frais  de 
loyer,  d'entretien  et  de  garde;  en  les  vendant 
promptement,  elles  pourront  faire  rentrer  en  assi- 
gnats 200  millions. 

40  Votre  comité  a  arrêté  de  vous  proposer  de  fixer 
à  un  quart  de  la  valeur  des  ventes  te  premier  paye^ 
ment  des  domaines  nationaux  à  vendre  ,  sans  rien 
changer  aux  autres  termes.  Cette  mesure  préviendra 
les  abus  qui  vous  ont  été  dénoncés  :  des  intrigants 
se  rendent  adjudicataires  à  tout  prix;  devenus  pro- 
priétaires, ils  vendent  en  détail  les  arbres  et  les 
matériaux:  au  second  payement,  la  nation  est  obli- 
gée de  revendre  à  la  folle  enchère,  en  supportant  la 
perte  c^ue  les  détériorations  occasionnent.  Il  est 
donc  nécessaire  que  vous  mettiez  à  couvert  les  inté^ 
rets  de  la  république  :  vous  accélérerez  en  même 
temps  la  rentrée  des  assignats. 

50  Le  décret  que  vous  avez  rendu  pour  autoriser 
les  transactions  amiables  pour  les  aflraires  de  com- 
merce des  émigrés,  déportés  ou  condamnés,  doit 
produire  cette  année,  en  assignats,  une  rentrée  qu'on 
peut  évaluer  à  iOO  millions. 

60  Vos  comités  de  législation  et  des  finances  oitt 
arrêté  de  vous  proposer  le  mode  c|ui  doit  régler 
avec  les  parents  des  émigrés  la  portion  qui  revient 
à  la  nation  dans  les  héritages;  cette  mesure ,  en  ac- 
célérant le  payement  de  ce  qui  est  dû  à  la  républi- 
que, doit  faire  rentrer  en  assignats  500  millions. 

Tous  ces  moyens  réunis  offrent  un  ensemble  qui, 
s'ils  ont  le  succès  que  nous  en  espérons,  présentent 
une  rentrée  prochaine  de  6  milliards.  Nous  n'avons 
rien  négligé  pour  en  accélérer  l'exécution  :  tous  les 
rapports  et  les  projets  de  décret  qu'ils  nécessitent 
sont  prêts. 

Notre  travail  n'a  eu  d'autre  but  que  de  répondre 
au  désir  que  vo.us  avez  souvent  manifesté  de  retirer 
des  assignats  de  la  circulation  :  vous  examinerez 
d'abord  s'il  est  nécessaire  de  prendre  des  mesures 
pour  hâter  ce  retirement. 

Votre  comité  a  pensé  qu'il  ne  fallait  pas  tout  sa- 
crifier aux  besoins  du  moment;  nous  avons  donc 
combiné  les  mesures  que  nous  vous  proposons  de 
manière  qu'en  retirant  une  masse  d'assignats  les 
rentrées  successives  ne  fussent  pas  arrêtées  ;  ainsi, 
si  les  besoins  du  gouvernement  exigent  de  nou- 
velles émissions,  nous  avons  ménagé  à  l'avance-des 
moyens  toujours  actifs  pour  en  perpétuer  le  retire- 
ment. 

Les  mesures  que  nous  vous  proposons  reposent 
absolument  sur  la  confiance  ;  aussi  leur  succès  est- 
il  étroitement  lié  avec  ceux  d'un  gouvernement  ré- 
publicain qui  soit  juste  et  ferme  envers  tous,  qui 
protège  également  les  personnes  et  les  propriétés. 

Plan  d'une  loterie  pour  retirer  de  la  cireulalion 
4  milliards  en  assignais. 

Parmi  les  moyens  que  votre  comité  des  finances 
a  cru  devoir  vous  proposer  pour  retirer  des  assignats 
de  la  circulation  ,  se  trouve  la  création  d'une  lote- 
rie qui  peut  en  faire  rentrer  jusqu'à  concurrence  de 


396 


4  miliiard3  :  je  sois  chargé  «U  tous  présenter  ce 
prpjet. 

Cette  loterie  ne  présente  aucuqe  perte  pour  Ceqz 
qui  s'y  intéresseront  :  ils  auront  Texpectative  de 
fUVfrs  IptSi  et  particulièrement  de  500,000  livres; 
la  chance  la  plus  favorable  sera  de  retirer  la  mise 
de  fonds  en  un  bon  au  porteur  qui  portera  3  pour 
iob  d'intérêt  annuel,  et  qui  servira,  à  la  volonté  du 
propriétaire  ; 

10  Au  payement  des  domaines  nationaux  qui  sont 
à  vendre ,  en  fournissant  eo  même  temps  pareille 
^mroeen  assignats; 

.  2^  Au  placement  du  capital  et  intérêts  acquis  en 
inscription  sur  le  grand  livre  de  la  dette  consolidée, 
À  raison  du  denier  20; 

af>  Au  placement  du  capital  et  intérêts  acquis  tm 
inscriptions  sur  le  grand  livre  de  la  dette  viagère, 
pour  rintérêt  viager  ÙKé  d*après  Tftge  du  préteur  à 
l*q)oque  du  placement. 

Ceux  qui  s'intéresseront  à  la  loterie  pour  cinq 
billets  auront  un  bénéOce  assuré;  ceux  qui  $*y  inté- 
resseront pour  dix  billets  en  auront  un  plus  fort  : 
ainsi  de  suite  ^  suivant  le  nombre  de  billets  qu'on 
prendra* 

La  loterie  que  nous  vous  proposons  ne  laissera 
donc  après  elle  ni  désespoir  ni  regret ,  quoique  le 
«ort  y  soit  appelé  pour  distribuer  le  gain  :  elle  ne 
Ressemble  en  rien  a  ces  jeux  qui ,  sous  Tappât  d'un 

Pain  énorme  ou  d'une  fausse  lueur ,  soutiraient  à 
honnête  artisan  le  produit  d'un  travail  qui  aurait 
dû  donner  Taisance  a  ses  enfants. 

La  nation  fait  un  sacrifice  d'une  somme  qui  est 
divisée  en  primes  que  le  hasard  distribue»  Si  vous 
voulez  accélérer  le  retirement  des  assignats ,  il  faut 
que  vous  employiez  des  moyens  coercitifs  ou  forcés, 
et  vous  les  avez  justement  écartés ,  ou  il  faut  offrir 
âes  avantages  à  ceux  qui  porteront  volontairement 
leurs  assignats;  car  toute  la  science  de  la  finance  con- 
siste à  présenter  ces  moyens  sous  diverses  formes. 
Ainsi,  ou  employez  des  moyens  forcés,  ou  offrez  des 
avantages,  ou  renoncez  à  retirer  des  assignats  de  la 
circulation,  et  attendez  qu'ils  rentrent  par  le  paye- 
ment de  domaines  nationaux. 

Les  moyens  d'une  grande  nation  doivent  être 
▼astes  et  simples;  une  loterie  pour  i  milliards  aurait 
quelque  chose  de  gi^aritesauesi  la  clarté  et  la  sim- 
plicité de  son  mécanisme  n  en  rendaient  l'exécution 
facile,  et  n'en  faisaient  apercevoir  d'un  coup  d'œil 
toutes  les  combinaisons,  en  rassurant  les  personnes 
les  moins  éclairées  sur  l'exactitude  de  ses  résultats; 
c'est  ce  que  nous  avons  cherché  à  obtenir. 

La  loterie  sera  composée  de  auatre  millions  de  bil- 
lets de  1,000  livres,  ce  qui  produirait  4  milliards. 

Ils  seront  divisés  en  quatre  séries  composées  d'un 
million  de  billets,  numérotés  depuis  un  jusqu'à  un 
million,  en  distinguant  la  série  àiaquelle  ils  appar- 
tiendront. 

Pour  faciliter  à  tous  les  citoyens  les  moyens  de 
concourir  au  retirement  des  assignats  et  de  profiter 
des  avantages  que  présente  la  loterie,  le  dixième  des 
billets  dans  chaque  série  sera  divisé  en  coupons  de 
100  livres  chaque. 

La  vente  des  billets  et  des  coupons  sera  faite  dans 
tous  les  districts,  et  au  lieu  de  la  résidence  de  l'am- 
bassadeur de  la  république  en  Suisse.  Le  payeur  qui 
est  établi  auprès  de  cet  ambassadeur  nous  fournitles 
moyens  de  donner  cette  marque  d'attachement  à  nos 
fidèles  alliés  les  Suisses,  (]ui,  recevant  les  assignats 
en  échange  des  marchandises  qu'ils  nous  fournissent, 
pourront  trouver  un  nouveau  placement  avantageux 
de  leurs  capitaux. 

Le  comité  des  finances  sera  chargé  d'arrêter  tou- 
tes les  mesures  d'exécution. 

Nous  espérons  que  les  bureaux  de  l'agence  de 


l'enregistrement  qui  sont  établis  dans  presque  tous 
les  cantons  de  la  république  nous  procureront  les 
moyens  de  faire  venare  ces  billets  presque  à  la  porte, 
de  tous  les  citoyens. 

Les  assignats  qui  rentreront  du  produit  des  billets 
seront  annulés  et  envoyés  à  la  trésorerie  nationale 
comme  ceux  provenant  de  la  vente  des  doo^iues 
nationaux,  pour  être  brûlés. 

Quatre  mois  après  l'ouverture  de  la  loterie ,  le 
tirage  en  sera  fait  à  une  séance  de  la  Convention  : 
nous  avons  cru  devoir  lui  donner  cette  solennité 
afin  que  personne  ne  pût  avoir  aucun  doute  sur  la 
fidélité  de  l'opération;  d'ailleurs,  cette  loterie  peut 
être  considérée  comme  une  vente  anticipée  des  do- 
maines nationaux,  et  sous  ce  point  de  vue  elle  nfé- 
rite  la  surveillance  des  représentants  du  peuple. 

Le  tirage  sera  très-simple, il  pourra  être  terminé 
dans  cinq  minutes  ;  pour  obtenir  cette  célérité  et 
l'exactitude  que  mérite  cette  opération,  il  faut  com- 
poser un  seul  numéro  par  la  combinaison  de  six  ti- 
raçes  :  ainsi  ceux  qui  tireront  les  numéros  n'en  con- 
naîtront le  résultat  qu'après  que  les  six  tirages 
seront  finis,  ce  qui  doit  rassurer  sur  la  fidélité  de 
l'opération. 

Pour  l'exécuter,  on  mettra  dans  une  urne  dix 
boules  d'égale  grosseur ,  sur  lesquelles  seront  in- 
scrits les  numéros  0,  1,  2,  3,  4,  5,  6,  7,  8,  0; 
après  les  avoir  mêlées ,  on  en  sortira  une  :  le  pnési- 
dent  proclamera  le  numéro  sorti,  et  remettra  la 
boule  aux  secrétaires ,  qui  la  transcriront. 

La  boule  sortie  sera  remise  dans  l'urne  ;  la  pre- 
mière opération  sera  répétée  quatre  fois  pour  obte- 
nir cinq  numéros ,  qui  seront  transcrits  sur  une 
même  ligne  à  la  suite  l'un  de  l'autre ,  suivant  leur 
ordre  de  sortie. 

Ces  opérations  terminées,  on  mettra  dans  une 
autre  urne  dix  boules  d'égale  grosseur,  portant  les 
numéros  1,  2,  3,  4,  5,  6,  7,  8,  0,  10;  après  les 
avoir  mêlées ,  on  en  sortira  une  :  le  président  pro- 
clamera le  numéro,  et  remettra  la  boule  aux  secré- 
taires ,  qui ,  si  c'est  une  unité ,  la  transcriront  à  la 
suite  des  cinq  autres  numéros  sortis. 

Ainsi,  si  les  cinq  premiers  tirages  fournissent  cinq 
zéros  et  le  sixième  no  1,  il  en  résulterait  000001— 
no  un. 

Si  les  cinq  premiers  tirages  fournissent  cinq  fois 
no  2  et  le  sixième  n^  3,  il  en  résulterait  222223  ;  — 
no  deux  cent  vingt-deux  mille  deux  cent  vingt-trois. 

Si  le  premier  tirage  fournit  zéro,  le  second  n«  1, 
le  troisième  n®  0 ,  le  quatrième  zéro,  le  cinquième 
no  1 ,  et  le  sixième  no  0,  il  en  résulterait  019019  ;  — 
n^  dix-neuf  mille  dix-neuf. 

Si  le  numéro  10  sort  au  sixième  tirage ,  les  secré- 
taires transcriront  la  figure  1  sous  le  cinquième 
chiffre,  et  la  figure  0  à  la  suite  en  dehors  ;  ils  addi- 
tionneront. 

Ainsi ,  si  les  cinq  premiers  tiraees  fournissent 
cinq  fois  no  8,  et  le  sixième  no  lo,  il  en  résulterait 
33333 
10 


333340 


no  trois  cent  trente -trois  mille  trois  cent  qua- 
rante. 

Si  le  premier  tirage  fournit  no  3,  le  second  n^  7, 
le  troisième  no  4,  le  quatrième  no  8,  le  cinquième 
zérO|  le  sixième  n^  10,  il  en  résulterait.  •      37480 

10 

874810 


no  trois  cent  soixante -quatorie  mille  huit  cent 
dix. 
Par  ce  moyen  y  le  million  des  numéros  qui  oon- 


897 


courent  âtt  tirage  de  ta  loterie  peuvent  être  compo- 
sés sans  aucun  avantage ,  tous  ayant  les  mêmes 
chances  à  coi^rlr. 

Les  secrétaires  remettront  au  président  le  numéro 
qu'ils  auront  composé  par  le  résultat  des  opéra- 
tions que  nous  avons  détaillées  :  le  président  le 
proclamera;  il  en  sera  fait  mention  dans  le  procès- 
verbal;  il  sera  imprimé  dans  les  Bulletins  de  corres- 
paddance  et  des  lois,  ce  qui  servira  de  liste. 

Le  numéro  composé  qui  sortira  réglera  le  sort 
des  quatre  millions  de  billets.  Tout  le  monde  pourra 
reconnaître  et  calculer  par  les  Bulletins  la  somme 
qui  lui  reviendra  sur  les  quatre  millions  de  lots  sui- 
vante. 

4  lots  de  500,000  liv.  2,000,000  liv. 

36    de  250,000  .  .     9,000,000 

360    de  100,000  .  .    36,000,000 

3,600    de  20,000  .  .    72,000,000 

36,000    de   2,000  .  .    72,000,000 

360,000     de   1,500  .  .   540,000,000 

400,000     de   1,150  .  .   460,000,000 

3,200,000    de   1,000  •  .  3,200,000,000 

4,000,000  lots.  4,391,000,000  liv. 

Ainsi,  la  nation  aurait  reçu  4  milliards,  et  en  rem- 
bourserait 4  milliards  391  millions,  ce  qui  fait  un 
sacrifice  à  raisonde9  i!'.  pour  100, ou  391  millions, 
qui  forment  Texcédant  des  mises. 

Les  lots  seront  distribués  de  la  manière  suivante  : 

Ceux  de  500,000  livres  appartiendront,  dans  les 
quatre  séries  d'un  million,  aux  numéros  sortis; 
amsi,  si  le  numéro  19019  sortait,  les  quatre  numé- 
ros 190|9  qui  se  trouvent  dans  les  quatre  séries  au- 
raient les  lots  de  500,000  liv. 

Les  lots  de  250,000  livres  appartiendront  aux 
porteurs  des  numéros  distant  de  cent  mille  en  cept 
mille,  en  partant  du  numéro  qui  suivra  celui  sorti  ; 
en  supposant  que  ce  soit  le  numéro  19019,  les  nu- 
méro$  U0019,  219019,  et  ainsi  de  suite  de  cent 
mille  en  cent  mille  dans  les  qqatre  séries,  auraient 
droit  aux  lots  de  250,000  liv. 

Les  lots  de  100,000  livres  apnartiendront  aux  por- 
teurs des  numéros  distants  de  aix  mille  en  dix  mille, 
toujours  en  partant  du  numéro  qui  suivra  celui 
sorti  ;  en  supposant  que  ce  soit  le  numéro  19019,  les 
numéros  20019,  39019,  et  ainsi  de  suite,  de  dix 
mille  en  dix  millî?»  auraient  droit  aux  lots  de  100,000 
livres. 

Les  lots  de  20,000  livres  appartiendront,  d*après 
les  mêmes  bases,  aux  porteurs  des  numéros  distants 
de  Inille  en  mille;  en  supposant  que  le  numéro 
19019  sorte,  les  numéros  20019,  21019,  et  ainsi  de 
suite,  de  mille  en  mille ,  auraient  droit  aux  lots  de 
20,000  livres. 

Les  lots  de  2,000  livres  appartiendront,  d'après 
les  mêmes  bases,  aux  porteurs  des  numéros  distants 
de  centaine  en  centaine  ;  en  supposant  que  le  nu- 
méro 19019  sorte,  les  numéros  19119,  19219,  et 
ainsi  de  suite,  de  centaine  eu  centaine,  auraient 
droit  aux  lots  de  2,000  livres. 

Les  lots  de  1,500  livres  appartiendront,  d'après 
les  mêmes  bases,aux  numéros  ae  dixaine  en dixame  ; 
en  supposant  que  le  numéro  19019  sorte,  les  nu- 
méros 19029,  19039,  et  ainsi  de  suite  de  dixaine 
en  dixaine,  auraient  droit  aux  lots  de  1,500  livres. 

Les  lots  de  1,150  livres  appartiendront,  d'après 
les  mêmes  bases,  aux  numéros  de  cinq  en  cinq  ;  tou- 
'oursdansla  supposition  que  le  numéro  19019  sorte, 
les  numérosl9024, 19034,  etainsi  de  suitededixaine 
en  dixaine,  auraient  droit  aux  lots  de  1 ,150  livres. 
Les  lots  de  1,000  livres^appartiendraient  à  tous 
les  autres  numéros. 

Ceux  qui  auront  eu  des  lots  supérieurs  ne  partici- 
peront pas  aux  lots  inférieurs,  nucun  numéro  ne  de- 


i 


vaut  avoir  deux  lots;  cependant  ceux  qui  auront 
les  lots  supérieurs  seront  comptés  pour  régler  le 
sort  des  autres. 

Cette  exception  est  cause  que  les  lots  qui  doivent 
être  distribués  de  cinq  en  cinq  paraissent  l'être  de 
dixaine  en  dixaine,  puisque  nous  ne  citons  dans 
l'exemple  que  les  numéros  19024,  19034  ,  etc.  ; 
mais  on  observera  que  les  numéros  19020,  19039 
ont  participé  aux  lots  de  1,500  livres. 

11  résulte  de  ces  diverses  combinaisons  que  le  nu- 
méro qui  sera  composé  par  le  tirage  règle  le  sort 
de  tous  les  intéressés,  et  que  tout  le  monde  peut 
s'assurer  un  bénéfice  certain  en  prenant  un  nombre* 
de  billets. 

Ainsi,  celui  qiii  prendra  un  coupon  de  100  livres 
aura  la  certitude  de  recevoir  un  bon  de  100  livres, 
et  l'expectative  de  pouvoir  bénéficier  jusqu'à  49,900 
livres  en  sus  pour  le  dixième  d'un  lot. 

Celui  qui  prendra  un  billet  de  1,000  livres  aura  la 
certitude  de  recevoir  un  bon  de  1,000  livres,  et  l'ex- 
pectative de  divers  lots  qui  pourront  lui  procurer 
un  bénéfice  depuis  850  livres  jusqu'à  499,000  livres 
en  sus. 

Avec  1,000  liv.  on  pourra  prendre  dix  coupons  de 
100  liv.  ;  on  aura  la  certitude  de  retirer  1,065  liv. 
mais  on  n'aura  l'expectative  que  d'un  bénéfice  de 
49,950  liv.  en  sus. 

Celui  qui  prendra  cinq  numéros  d'une  même  série 
paiera  5,000  livres  ;  il  aura  la  certitude  de  gagner 
4  lots  de  1,000  1.  .  .  .    4,0001. 
Ilot  de  1,150      .  .  .    1,150 

5,150  I. 

Bénéfice  certain  de  150  liv.,  et  l'expectative  des 
lots  supérieurs  qui  augmenteraient  le  bénéfice  jus- 
qu'à 498,850  liv.  en  sus. 

Celui  qui  prendra  dix  numéros  d'une  même  série 
paiera  10,000  liv.  ;  il  aura  la  certitude  de  gagner 

8  lots  de 1,0001 8,0001. 

1  lot  de 1,150 1,150 

1  lot  de 1,500 1,500 

10  lots  10,650  1. 

Bénéfice  certain  650  liv. ,  avec  Texpectntive  des 
lots  supérieurs  qui  peuvent  l'augmenter  jusuu  à 
496,150  liv. 

Celui  qui  prendra  cent  numéros  d'une  même  sé- 
rie paiera  100,000  livres  ;  il  sera  certain  d'avoir 

80  lots  de 1,000  1 80,0001. 

10  luts  de.  ...  :    1,150 11,500 

9  lots  de 1,500 13,500 

1  lot  de 2,000 2,000 

100  lots  107,0001. 

Bénéfice  certain  7,000  livres,  avec  l'expectative 
des  lots  supérieurs  qui  peuvent  l'augmenter  jusqu'à 
498,000  liv.;  ainsi  de  suite. 

Ces  diverses  combinaisons  fourniront  à  ceux  qoi 
voudront  faire  des  placements  les  moyens  de  les 
faire  avec  une  prime  certaine  ;  il  suffira  de  prendre 
des  numéros  qui  se  suivent  ;  ceux  qui  voudront  cou« 
rir  la  chance  de  plusieurs  lots  pourront  aussi  satis- 
faire leurs  désirs  en  prenant  ddi  numéros  dans  di* 
verses  séries. 

La  nation  ne  court  presque  point  de  risques  çn  ti-* 
rant  la  loterie,  quand  bien  même  elle  ne  serait  pas 
remplie,  puisque  la  répartition  des  lots  se  fera  d'une 
manière  relative;  ainsi,  en  supposant  qu'il  n'y  eût 
qu'un  million  de  billets  placés,  la  république  reste* 
rait  propriétaire  des  trois  autres  sériesd'un  million  ; 
elle  n'accorderait  alors  que  97  millions  750,0001.  de 
prime  pour  1  milliard  qui  serait  rentré  en  assignats. 

Le  payement  des  lots  remplacera  la  mise  des  fonds; 


398 


il  serait  fait  avec  des  bons  au  porteur,  produisant 
un  intérêt  annuel, lequel  accroîtra  le  capital  jusqu'à 
leur  emploi. 

Cet  intérêt  commencera  le  jour  du  tirage  de  la  lo- 
terie. 

Les  bons  pourront  être  employés,  à  la  volonté  du 
propriétaire: 

10  En  payement  des  domaines  nationaux  à  ven- 
dre, en  fournissant  en  même  temps  pareille  somme 
en  assignats  ; 

20  En  inscriptions  sur  les  grands  livres  de  la  dette 
consolidée  ou  viagère. 

Votre  comité  a  cru  devoir  réunir  tous  les  avan- 
tages compatibles  avec  l'intérêt  de  la  république, 
afin  de  satislaire,  autant  que  possible,  à  toutes  les 
•convenances  particulières. 

L'intérêt  de  3  pour  100  donne  au  propriétaire 
d*un  bon  le  temps  de  chercher  à  l'employer  à  son 
gré:  en  attendant,  son  capital  s'accroît  en  ses 
mains. 

Cet  intérêt  monterait  à  13t  millions  730,000  liv. 

Î)Our  les  4  milliards  qui  auraient  été  fournis  et  pour 
es  primes  allouées,  ce  qui  fait  3  zh  pour  100  par  an 
sur  la  somme  feçue;  mais  il  ne  sera  pas  payé  en  as- 
signats. 

Les  personnes  qui  préféreront  des  domaines  na- 
tionaux pourront  acheter  ceux  qui  leur  convien- 
dront le  mieux.  Nous  avons  préféré  accorder  cette 
liberté  indéfinie  au  projet  de  désigner  pour  lot  telle 
ou  telle  maison  ou  propriété,  dont  on  avait  donné 
d'abord  l'idée,  parce  qu'elle  nous  a  paru  assurer  un 
plus  grand  succès  à  1  opération  ;  d'ailleurs,  la  dési- 
gnation et  l'estimation  des  propriétés  qui  auraient 
dû  servir  de  lots  auraient  entraîné  des  longueurs  in- 
finies ;  plusieurs  citoyens  auraient  pu  craindre  que 
ces  propriétés,  éloignées  de  leurs  loyers,  ne  leur  fus- 
sent onéreuses,  et  ils  ne  se  seraient  pas  intéressés  à 
la  loterie. 

Nous  vous  devons  aussi  quelques  observations  sur 
l'obligation  aue  nous  croyons  devoir  imposer  de 
fournir,  lors  au  payement  des  domaines  nationaux 
avec  des  bons,  une  pareille  somme  en  assignats. 

La  répubjique  est  dans  une  position  qui  nécessite 
la  continuation  des  grandes  mesures  qu'elle  a  dé- 
ployées contre  les  tyrans  coalisés;  il  faut  pourvoir 
aux  dépenses  qu'elles  occasionnent  :  de  nouvelles 
émissions  d'assignats  seront  nécessaires,  et  se  font 
journellement;  il  faut  donc  conserver  des  moyens 
toujours  actifs  pour  les  retirer  de  la  circulation. 

Le  moyen  que  nous  vous  proposons  pour  remé- 
dier a  cet  inconvénient  est  une  nouvelle  mesure, 
presque  aussi  efficace  que  la  loterie,  pour  faire  ren- 
trer des  assignats;  car,  en  supposant  que  tous  les 
bons  soient  employés  en  acquisitions  des  domaines 
nationaux,  il  rentrerait  nécessairement  4  autres  mil- 
liards en  assignats. 

Cette  condition  est  onéreuse,  mais  elle  est  com- 
pensée par  la  prime  que  la  nation  sacrifie,  par  les 
avantages  que  présentent  les  chances,  par  l'intérêt 
alloué  aux  bons  au  porteur,  toutes  ces  conditions 
étant  liées  ensemble. 

Vous  observerez  d'ailleurs  que,  s'il  est  nécessaire 
de  retirer  des  assignats  de  la  circulation,  il  n'est  pas 
moins  important  de  ménager  le  gage  :  c'est  ce  qui 
nous  a  déterminés  à  combiner  la  marche  des  ventes 
avec  prévoyance,  de  crainte  que  des  spéculations 
sur  les  bons  au  porteur  ne  donnassent  lieu  à  des  alié- 
nations trop  précipitées. 

Un  citoyen  qui  a  200  livres  en  assignats  pourra 
prendre  un  coupon  de  100  livres;  il  a  l'expectative 
de  se  procurer  jusqu'à  50,000  livres  en  bons  au  por- 
teur ;  et  dans  la  position  la  moins  heureuse,  il  en  re- 
cevra toujours  un  de  100  livres,  qui,  avec  les  100 
livres  en  assignats  qui  lui  restent,  servira  pour  le 


premier  payement  d'un  domaine .  national  vendu 
800  livres. 

D'un  autre  côté,  la  concurrence  qui  doit  résulter 
aux  ventes  par  l'admission  des  bons  doit  favoriser 
les  intérêts  ac  la  république. 

Nous  avons  cru  devoir  vous  proposer  de  faire  re- 
cevoir les  bons  en  payement  des  maisons  qui  sont 
situées  dans  les  villes  dont  la  pppulation  est  au-des- 
sus de  trente  mille  âmes,  sans  fournir  des  assignats. 

Cette  exception  est  nécessaire  pour  faciliter  aux 
personnes  qui  auraient  gngné  un  lot  de  forte  somme, 
et  qui  n'auraient  pas  des  assignats,  les  moyens  de 
placer  les  bons  qu'ils  recevront  en  payement;  elle 
est  avantageuse  à  la  république,  en  ce  qu'elle  accé- 
lérera la  vente  des  propriétés  qui  pourraient  dépérir 
entre  ses  mains,  et  qui  lui  sont  onéreuses  par  la  mau- 
vaise administration  des  agents  qu'elle  est  dans  la 
nécessité  d'employer. 

Leplacementen  inscriptions  sur  le  grand  livre  de 
la  dette  consolidée  offre  une  ressource  avantageuse 
aux  propriétaires  des  bons  au  porteur,  puisqu'aii 
lieu  d'un  intérêt  annuel  à  3  pour  100  ils  en  auront 
un  de  5  pour  100,  sujet  à  la  retenue  ;  mais  alors  ils 
renoncent  à  la  faculté  illimitée  d'employer  leur 
bons  en  payement  des  domaines  :  ils  acquièrent  le 
droit  à  un  payement  annuel,  transmissible  à  vo- 
lonté. 

Si  tous  les  bons  étaient  placés  en  inscriptions  sur 
le  grand  livre  de  la  dette  consolidée,  l'opération  que 
nous  vous  proposons  se  bornerait  à  un  emprunt  de 
4  milliards,  auquel  vous  accorderiez  391  millions  de 
primes,  et  qui  nécessiterait  des  inscriptions  pour 
21 8 millions  650,000  livres,  lesauelles,  en  supposant 
que  la  retenue  fût  du  cinquième,  ou  44  millions 
662,500  hvres,  nécessiteraient  un  payement  annuel 
de  173  million.<:  987,500  livres,  ou  *4  iV-pour  100 
sur  les  4  milliards  reçus;  mais  alors  le  gage  des 
assignats  serait  libéré  des  4  milliards. 

Votre  comité  a  pensé  que  vous  deviez  peu  crain- 
dre ce  placement  total  en  inscriptions  sur  le  grand 
livre  de  la  dette  consolidée;  il  a  pensé  qu'on  pou- 
vait l'évaluer  au  plus  à  une  somme  égale  des  in- 
scriptions qui  pourront  être  données  en  payement 
des  domaines  nationaux;  ainsi,  la  dette  consolidée 
et  le  gage  des  assignats  n'éprouveraient  aucun  chan- 
gement. 

Le  placement  des  bons  au  porteur  en  inscriptions 
sur  le  grand  livre  de  la  dette  viagère  offre  aux  vieiU 
lards  ou  personnes  peu  fortunées  les  moyens  d'amé- 
liorer leur  existence  en  aliénant  leurs  capitaux; 
mais  ne  croyez  pas  aue  nous  vous  proposions  de 
faire  revivre  les  opérations  genevoises  que  vous 
avez  si  iustement  réformées. 

Le  placement  ne  pourra  se  faire  que  sur  la  tête 
même  du  propriétaire  ;  le  payement  annuel  sera  in- 
saisissable :  l'intérêt  viager  est  calculé  de  manière 
que,  d'après  l'ordre  de  mortalité  humaine,  il  est  équi- 
valent à  un  intérêt  perpétuel  de  3  pour  100,  ce  qui 
met  les  intérêts  de  la  nation  à  l'abri  de  toutes  les 
combinaisons  des  spéculateurs,  puisqu'il  sera  fixé 
d'après  l'âge  des  prêteurs. 

Ainsi,  celui  qui  placera  en  viager  hasardera  une 
partie  de  son  capital  pour  avoir  la  chance  d'en  re- 
tirer un  plus  fort  ;  mais  il  est  au  moins  certain  que, 
d'après  son  âge  et  d'après  l'ordre  de  mortalité  hu- 
maine, la  nation  lui  accorde  un  intérêt  viager  équi- 
valent à  un  intérêt  perpétuel  à  raison  de  3  pour  100, 
et  le  remboursement  de  son  capital  dans  un  temps 
relatif  à  son  âge*actuel  ;  ainsi,  le  vieillard  et  l'en- 
fant peuvent  placer  en  viager  d'une  manière  égale- 
ment juste. 

En  admettant  des  prknes  par  une  loterie,  vous 
faites  un  sacrifice;  mais  c'est  le  seul  moyen  que  votre 
comité  a  reconnu  propre  à  assurer  le  succès.  Les  as- 


399 


signais  sont  aujourd'hui  divises  dans  un  grand  nom- 
bre de  mains  ;  chaque  citoyen  en  a  une  petite  partie  : 
Tespoir  des  chances  offre  des  placements  avantageux 
à  ceux  qui  n'ont  qu'une  modiaue  somme. 

Plusieurs  de  mes  collègues  du  comité  des  finances 
cl  de  législation  vous  présenteront  les  divers  projets 
de  décrets  qui  ont  été  arrêtés  ;  je  n'ai  été  chargé  de 
vous  proposer  que  celui  relatif  à  la  loterie. 

SÉANCE  DU  SOIR  DU  16  PLUVIOSE. 

Cette  séance  est  consacrée  an  renonvellement  du  bureau; 
Barras  a  été  élu  président. 
Les  nouveaux  secrétaires  sont  Ysabeau,  Bien,  Laurens. 

SÉANCE  DU  17  PLUVIOSE. 
Présidence  de  Barras* 

f^n  \\i  la  correspondance.  ' 

Un  secréuilre  lit  les  lettres  suivantes. 

Brus,  représentant  du  peuple  en  mission  près  les  armées 
du  Nord  et  de  Sambre-et- Meuse ,  à  la  Convention  natio^ 
nale. 

Bruxelles,  le  19  pluviôse,  t'an  5«  de  la  république 
française,  une  el  indivisible. 

t  Citoyens  collègues,  si,  mai{;ré  vos  efforts  et  les  nôtres, 
les  défenseurs  de  la  patrie  manquent  souvent  du  nécessaire, 
il  est  bien  consolant  pour  eux  de  trouver  quelquefois  dans 
un  climat  étranger  les  ressources  que  procurent  l'amitié  et 
tous  les  sentimeuts  qu'inspirent  leurs  propres  vertus. 

«  La  lettre  ci-jointe  vous  apprendra  d'une  manière  tou- 
chante les  procédés  généreux  d'une  commune  du  pays  de 
Juliers  envers  les  troupes  qu'elle  a  eues  en  cantonnement. 
J'ai  écrit  à  cette  commune  pour  la  féliciter  sur  cet  exemple 
de  civisme;  mais  ce  n'est  pas  assez. 

«  La  reconnaissance  qui  a  dicté  la  lettre  que  Je  vous  trans- 
mets honore  égalemenl  et  ceux  qui  l'expriment  et  ceux  qui 
l'ont  méritée»  et  à  ce  doublç  titre  j'en  réclame  i'inserUon  au 
Bulletin. 

«  Salut  et  fraternité.  «  Baiès,  « 

Copie  de  la  lettre  du  citoyen  Prévost ,  commandant  le  eai^ 
tonnement  de  la  59*  demi-brigade,  3*  bataillon. 
Durwist,  pays  de  Juliers,  le  98  nivôse.  Tan  3*. 

•  Citoyen  représentant.  Je  croirais  manquer  à  mon  de- 
voir et  à  l'honneur  si  je  gardais  sous  silence  le  trait  suivant 
de  civisme  de  la  commune  de  Durwist ,  dans  laquelle  nous 
étions  cantonnés. 

<  Fâchés  de  notre  départ ,  et  désolés  de  voir  les  volon- 
taires manquant  de  souliers,  ils  se  sont  assemblés,  et  ont 
6\é  les  leurs  de  leurs  pieds,  pour  les  donner  à  beaucoup 
d'hommes  qui  se  trouvaient  dans  l'impossibilité  de  marcher 
sans  cela.  * 

«  Ce  trait  nous  a  cependant  encore  moins  touchés  que  la 
peine  que  nous  avons  vue  peinte  sur  leur  front  à  notre  dé- 
part, et  de  ne  pouvoir  faire  davantage  pour  nous. 

c  Prévost.  • 

Mention  honorable,  insertion  au  Bulletin. 

Espert,  représentant  du  peuple  en  mission  dans  les  dépar^ 
tcmenls  du  Far  et  des  BoucAes-du-Rhône. 

6  pluviôse,  Tan  3*  de  la  république  française,  une 
et  indivisible. 

«  Je  crois  devoir  mettre  sous  les  yeux  de  la  Convention 
des  pièces  relatives  aux  mouvements  que  des  malinteniion- 
nés  ont  cherché  à  provoquer  dans  celte  ville;  elle  doit  être 
en  garde  contre  les  divers  rapports  qui  «lui  seront  faits,  et 
être  bien  convaincue  que  l'amour  de  la  république  entre 
pour  bien  peu  de  chose  dans  les  querelles  qui  agitent  les 
terroristes,  les  royalistes  et  les  aristocrates  qui,  sous  le  nom 
de  terroristes,  voudraient  anéantir  tous  les  patriotes  qui 
ont  été  forcés  de  déployer  à  diverses  époques  une  énergie 
un  peu  outrée  peut-être  pour  les  contenir. 

«La  tranquillité  règne,  autant 'qu'il  est  possible  dans 
une  ville  où  la  population  s'est  accrue  de  quinze  à  vingt 
mille  âmes  dans  l'espace  de  deux  mois,  et  j'espère  qu'elle  ne 
sera  pas  troublée  tant  que  les  autorités  constituées  se  ren- 
fermeront dans  les  bornes  des  foncUonsqui  leur  seront  con- 
fiées. IMes  pouvoirs  finissent  le  29  de  ce  mois;  il  est  néces- 
saire que  mon  successeur  arrive  le  30.  i 

Suivent  les  pièces,  qui  sont  renvoyées  au  comité  de  sû- 
reté ^jéndralc,  ainsi  que  la  ictirc. 


Granet  en  demande  Tinsertlon  au  Bulletin.  —  Sa  motion 
n'est  pas  appuyée. 

Jean  Debry,  représentant  du  peuple  dans  les  départements 
de  la  Drame,  de  FArdeche  et  Vaucluse,  à  la  Convention 
nationale. 

Carpentras,  le  5  pluviôse,  l'an  3*  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

■  Citoyens  collègues,  J'ai  vu  trois  des  quatre  districts  du 
département  de  Vaucluse,  Avignon,  Orange  et  Carpeniras. 
Je  vois  me  rendre  dans  l' Ardèche,  où  je  n'ai  pas  encore  été, 
et  où  j'apprends  que  la  présence  d'un  représentant  est  né- 
cessaire. Il  entre  dans  mon  plan  d'aller  porter  moi-même 
des  secours  et  des  consolations  dans  les  communes  les  plus 
maltraitées  du  département  de  Vaucluse  ;  mais  la  rigueur 
extraordinaire  de  la  saison  s'oppose  à  ce  que  ce  projet 
s'exécute  en  cet  instant.  L'on  tremble  encore  ici ,  et  il  est 
difficile  de  ne  pas  rencontrer  à  chaque  pas  des  gens  qui 
pleurent  ;  les  souvenirs  récents  des  forfaits  dont  le  pays  a  été 
couvert  ne  permettent  qu'à  peine  de  croire  au  retour  de  la 
justice;  on  semble  craindre  d'être  remarqué  par  les  scélérats 
si  l'on  montre  de  la  vertu  et  de  l'énergie. 

c  On  vous  en  impose  si  Ton  vous  dit  que  les  satellites  des 
triumvirs  n'ont  porté  dans  Vaucluse  leurs  coups  que  sur  les 
aristocrates.  Quels  aristocrates!  Soixante  femmes  de  Caromb, 
à  peine  vêtues,  pauvres.et  portant  les  empreintes  d'un  travail 
journalier  et  pénible,  sont  venues  me  demander  des  secours; 
leurs  maris  avaient  été  exécutés  par  le  tribunal  d'Orange. 
Dans  cette  classe  de  citoyens  on  ne  peut  qu'être  égaré  ;  et 
alors,  pourquoi  ceux-ci  ne  sont-ils  pas  nés  dans  la  Vendée? 
On  leur  aurait  pardonné. 

c  J'ai  vu  des  habitants  de  Bédouin;  Je  n'ajouterai  rien  à  ce 
que  vous  savez  de  cette  malheureuse  commune  ;  Je  fais  par- 
tir Legoi,  président  de  la  commission  municipale,  avec  les 
pièces.  Ce  que  je  peux  vous  dire,  c'est  que  partout  où  j'ai 
passé  il  n'y  a  eu  qu'une  seule  voix,  celle  de  Texécration  pour 
les  assassinats  d'Orange,  et  de  la  plus  profonde  douleur  sur 
l'incendie  de  Bédouin.  J'ai  porté  secours  à  une  vieille  pau- 
vre femme  qui  a  cinq  enfants  à  l'armée,  et  qui  s*est  cassé  le 
bras  en  tombant  lorsqu'elle  vit  fusiller  son  mari;  cet  exem- 
ple n'est  pas  le  seul  de  ce  genre. 

«  L'extrême  rigueur  de  la  saison  m'a  porté  à  remettre 
quelques  secours  aux  administrations  pour  aider  les  plus 
nécessiteux.  Le  peuple  est  bon  ;  mais  il  ne  faut  pas  l'aban- 
donner aux  insinuations  perfides  que  ses  besoins  pourraient 
suggérer  à  la  malveillance,  et  j'ai  cru  devoir  diriger  con- 
stamment son  espoir  comme  sa  reconnaissance  vers  la  Con- 
vention. C'est  dans  cette  vue  que.  dans  les  trois  chefs-lieux 
de  département  où  la  population  plus  nombreuse  offre  le 
spectacle  d'une  misère  plus  profonde,  j'ai  remis  à  la  caisse 
de  bienfaisance  un^ somme  de  2,000  livres;  j'en  ai  fait  au- 
tant pour  les  districts  d'Apt  et  de  Carpentras ,  et  600  livres 
à  Orange.  Je  désire  que  ces  m&sures  aient  l'approbation  de 
la  ConventlQU  ;  j'en  ai  tiré  un  succès  réel  pour  lui  attacher 
l'indigent  et  l'ouvrier  sans  travail;  et  quoiqu'on  république 
il  faille  user  d'une  économie  sévère,  je  n'ai  pas  pensé  que, 
vu  son  emploi,  une  pareille  somme  fût  mal  placée. 

•  Je  m'occupe  sans  relâche  des  subsistances ,  et  j'ai  l'es- 
poir que ,  si  la  saison  s'adoucit  et  facilite  les  arrivages,  les 
départements  méridionaux  seront  complètement  approvi- 
sionnés ;  l'essentiel  est  de  rendre  la  vie  au  commerce  ;  la  Con- 
vention ne  peut  trop  s'en  occuper:  on  l'avait  tué  tout  à  fait. 

c  Comme  la  difficulté  des  subsistances,  le  froid  et  l'espèce 
d'expiation  opérée  par  une  détention  plus  ou  moins  longue 
m'ont  fait  prononcer  la  mise  en  liberté  de  plusieurs  détenus; 
j'ai  pris,  notammenta  l'égard  de  ceux  que  le  fanatisme  pour- 
rait rendre  dangereux, des  précautions  telles  qu'au  moindre 
mouvement  la  sévérité  nationale  pourra  les  atteindre. 

c  Ce  département  de  Vaucluse  a  été  tellement  agité  par 
la  réaction  de  toutes  les  haines  qu'il  est  très-facile  d'y  être 
trompé,  malgré  les  meilleures  intentions;  les  gardes  natio- 
nales, les  Sociétés  populaires,  les  municipalités,  et  mémo 
la  force  publique  soldée ,  ont,  pour  la  plupart ,  des  préven- 
tions et  des  ressentiments.  J'ai  formé  à  Avignon  une  com- 
mission d'instruction  et  de  réforme  pour  opérer  à  cet  égard 
sur  un  plan  que  je  lui  ai  tracé.  SI  les  effeu  répondent  à 
mon  attente ,  je  rendrai  cet  établissement  momentané  com- 
mun aux  autres  districts. 

«  Enfin  la  Convention  peut  être  assurée  que  Je  ne  négli- 
gerai rien,  et  que  j'emploierai  tout  ce  que  Je  pourrai  réunir 
de  forces  pour  assurer  au  peupiede  ces  contrées,  malgré 
les  malveillants  de  toute  espèce  et  de  toute  robe,  paix,  Jus- 
tice et  t)onlicur. 

c  Salut  et  respect.  J.  DEonr. 


400 

t  p.  5.  Vous  «TMt  ficcordé  des  secours  a  la  comninBe  de 
Bédouin  ;  ses  Jittbiiants  ont  présumé,  et  j'ai  dA  penser  »▼«; 
eux  ,  que  cet  acie  de  la  justice  de  la  Convention  les  autori- 
sait à  être  réintégrés  dans  le  rang  des  communes  de  la  ré- 
publique. J'y  a!  donc  établi  provisoirement  une  municipalité 
cl  une  justice  de  paix  :  j'attendrai  un  décret  de  la  Conven- 
ttop  pour  slauier  définitivement  à  cet  égard,  le  vois  que, 
parmi  les  consolations  à  donner  an  reste  de  sa  population, 
les  habitaou  compteront  l'acte  législatif  qui  leur  rendra 
rexisieace  civlk  qu'ils  n'ont  point  eooore. 

t  Signé  1.  Debrt.,v 
La  lecture  de  ce  rédt  a  été  plusieurs  fols  interrompue 
par  des  cris  d'indignadon.  —  Les  dernUres  expressions  de 
la  lettre  obtiennent  des  applaudissements  universels. 

RovÈas  :  le  demande  l'insertio»  de  cette  lettre  an  Bal« 
IfiUn,  et  l'appix»balioa  des  mesures  prises  par  ce  représe»- 
tMi  en  faveur  d^  babltanUi  de  BédMiia. 

Olivier  Gérente  el  ptasieurs  autres  membres  demandesl 
a«e  la  commuoe  de  Bédouin  sojt  rétablie  par  décret. 

OsnizEL  :  Jean  Debnr  demande  que  la  Convention  con-  i 
firme  son  arrêté  sur  la  commune  de  Bédouin  ;  il  faut  qu'elle  ! 
commence  par  rapporter  son  décret  sur  peue  ville  malheu-  i 
FeMse.  ! 

AniHiB  DuMOM-  :  le  demande  l'impression  de  la  leUre  de 
notre  collègue  lean  Debry,  afin  qu'on  sache  que  les  buveurs 
de  sang  ne  l'agilent  pas  seulement  dans  Paris,  et  qu'il  est 
temps  qu'ils  perdent  leur  espoir.  La  Convention  doit  se 
rappeler  qu'on  a  dit  que  Je  lion  dormait  ;  il  faut  qu'elle  ne 
le  laisse  réveiller  que  pour  rétoùffer. 

Les  troubles  de  Paris  viennent,  n'en  doute*  pas,  de  la  part 
des  lacobins.  Il  faut  ouvrir  les  yeux ,  car  les  bons  citoyens 
n'agitent  jamais;  si  quelque  chose  leur  déplaît,  ils  récla- 
ment aux  autorités  supérieures.  Il  suffit  de  montrer  Ici  le 
piège  pour  qu'ils  l'évitent  désormais.  Il  faut  que  la  Conven- 
tion se  prononce  bien  fortement  :  on  veut  parvenir  à  la  faire 
détester,  tandis  que,  depuis  le  9  thermidor,  elle  s'est  fait 
chérir  constamment  ;  mais  on  ne  réussira  pas.  Avec  la  jus- 
tice ,  avec  la  venu ,  la  Convention  triomphera  toujours.  81 
quelques  citoyens  se  sont  laissé  égarer  par  des  menées  per- 
fides, ils  reconnaîtront  bientôt  leur  erreur,  et  se  tourneront 
contre  ceux  qui  ont  voulu  les  égarer.  (  Applaudissements.) 
le  demande  Tinsertion  de  cette  lettre  au  Bulletin.  Quant  au 
rétablissement  de  la  commune  de  Bédouin ,  par  le  décret 
qui  lui  accorde  des  secours  elle  a  été  rétablie. 

I#coMTB  :  le  me  permets  une  observation,  lean  Debry 
a  fait  du  bien  aux  malheureux  de  ceiie  commune  ;  mais 
j'entends  parler  de  600  livres  pour  chacun  d'eux  ;  cette  par- 
cimonie est  indigne  de  la  Conventiun.  U  ne  faut  point  ae 
prodigalité,  mais  il  faui  de  la  grandeui*;  Il  faut  que  ces  mal- 
heureux trouvent  dans  rhumaniié  de  laConvcDtkMi  de  quoi 
fournir  à  leur  besoin. 

Jars-Pa^viujem  :  l'applaudis  aoi  principea  de  notre 
collègue,  mais  11  faut  savoir  même  régulariser  p»  élans  de 
générosité,  le  demande  le  renvoi  an  comité  des  secours  po- 
blics»  chargé  de  la  distribution  des  secours,  pour  savoir 
ceux  qui  doivent  être  accoffdés  À  ocs  malheureux. 
Le  renvoi  est  décrété. 
—  Un  secrétaire  IM  bi  lettre  suivante  : 

Les  odministraLmri  dm  étUtîHcjL  dâ  Mofftmmt  à  h  Comimk* 

A  Bfayenae,  fo  tf  pluviôse,  Tan  3*  de  la  içépulUique 
une  e(  mdivfsible, 

t  Citoyens  représeacaot»,  les  succès  ropides  et  constants 
qu-out  eus  toutes  vos  mesures  depuis  le  9»  thermidor,  les 
.Nuccès  couronnés  par  In  cqnquéie  d'Amsterdam  et  de  toute 
la  Hollondo ,  attestent  de  la  manière  la  plus  éclatante  qu'il 
n'est  rien  où  ne  puisse  atteindre  un  gouvernement  fonder 
sur  la  justice  et  suc  la  veviu^ 

•  Nous. voua  enwiyons  un- exemplhlne  que  nous  venons  de 
trouver  de  la  circulaire  écrite  le  I*'.  pluviôse,  2*  année,  par- 
l'accusateur  publié  pràs.Ui  commission  militaire  et  révolu- 
tionnaire de  ce  département.  Cette  oommission  était  créée 
uniquement  contra  les  brigands  que  l'armée  de  la  Vendée 
laissa  dans  ce  paya  lors  de  son  passage.  Vous  verrez  ùvcc 
horrctfr,  dans  celte  lettre,  et  l'extoiisloii  qu'elle  doqnalt  ù 
ses  pouvoirs^  et  l'impudence  auxioe  avec  laquelle  elle  re- 
quérait des  victimes.  Elle  somme  chaque  comité  de  sur- 
veillance et  chaque  municipalité dudépariement  de  lui  four- 
nir des  accusés  et  des  témoins,  à  peine  d'incarcération  > 
c'cst-à-dire  à  peine  de  mort,  puisqu'alors  on  ne  sortait  de 
prison  que  pour  aller  A  l'échafaud. 


-  Nous  ne  verrons  plus  de  semblables  horrcoi»  ;  la  pre- 
mière des  nations  ne  courbera  plus,  devant  des  scélérau  et 
des  factieux ,  un  front  que  la  Tictoire  ceUil  chaque  jour  «• 
nouveaux  lauriers. 

•  Salut  el  fraternité.  ■  .      ,      ^       v 

{Suivent  les  signaiurêi.) 

VQceutateur  pMU  près  ta  eommisHom  militaire  et  rév^ 
tutionnairê  du  départemeut  de  la  Mafmmê  aux  mmiet» 
pahtét  et  comités  de  surveitlance ,  dans  toute  retendue 
du  département, 

LsVaU  !•'  pluviôse.  Tan  t*  de  la  répd^llqae. 
c  Qtoycns,  ils  sont  passés  ces  temps  de  modération  et 
d'insouciance  où  vous  Isissfttes  les  ennemis  de  la  patrie 
tranquillement  vaguer  sur  le  sol  de  la  liberté.  L'instant  de 
la  justice  nationale  est  à  Tordre  du  jour  pour  faire  tomber 
la  hache  de  la  loi  sur  la  tête  du  traître  et  du  parjure. 

«  Rangez  dans  celte  classe  les  toléranu»  les  fanfUqoas, 
les  fédéralistes,  les  royalistes  et  autres  aristocrates  que  la 
loi  met  hors  du  sein  de  la  république. 

«  Sur  ce  fondé,  et  en  vertu  des  pouvoirs  tpil  ne  sont  dé- 
légués ,  Je  vous  diclare  que  pas  une  commune  n'entste  qui 
ne  contienne  de  ces  monstres.  Toute  municipalité  ou  <«mlié 
de  surveillance  qui  ne  fera  pas  traduire  à  la  maison  d'arnftt 
Je  son  district  des  accusés,  et  qui  ne  ferait  pas  entendre 
c'ontre  chacun  au  moins  deux  témoins  de  leurs  dires  ou  se- 
lions,  sera  réputé  les  receler  et  les  favoriser,  ei  pour  ce  fait 
I  st  trouvera,  à  ma  diligence,  de  jour  ou  de  nuit»  incaroéni* 
âur  mon  réquisitoire.  (Un  mouvement  d'horreur  et  d'Iudi*' 
i    j;n.iiioD  se  manifeste  dans  louie  l'assemblée.) 
I       c  Purgeons,  républicains,  et  n'épargnons  rien  :  le  salut  de 
,  la  pairie  l'exige  impérieusement;  voire  propntUberté  TOQt 

en  fait  un  devoir. 
i  «  Vous  consignerez  la  présente  sur  ?  os  n^stres,  et  vom 
in  accuserez  le  récépissé  au  district  de  votre  arrondisse» 
ment  ;  et  nous,  nous  promènerons  la  guillotine  révolution- 
oaire  sur  les  lieux  où  votre  vigilauce  aura  traduit  des  ooii* 
pables. 
c  Salut  et  fraternité. 

t  Signé  VoLÉLER,  accusateur  puhtie.t 

L'assenblée  frémit  à  la  lecture  de  cette  lettre;  elle  la  rsB- 
▼oie  au  comité  de  sûreté  générale. 

Lecomti  :  Qu'est  devenu  cet  homme?  S'il  n'est  pas  ar- 
rêté, je  demande  qu'il  le  soit.  (ApplaudissementsO 

***  :  Non-seulement  cet  homme,  mais  encore  tous  ses  col- 
lègues dans  la  commission  militaire ,  9onten  éut  d'arrest»* 
tlon  (Applaudissements.)  On  a  beaucoup  parlé  ici  désdépaf^ 
tements  où  la  terreur  a  régné;  je  puis  assurer  que  l|u|ie 
pan  elle  n'a  régné  avec  autant  d'arrogance  que  dans  ci^ul 
de  Mayenne.  C'est  là  surtout  qu'on  a  perséculé  ceux  qui  ogt 
été  soupçonnés  d'avoir  orls  part  à  la  mefure  adoptée  pêr 
différents  départements  de  venir  à  Çaris  assurer  la  trauqtri^ 
Ulé  de  la  Convention  nationale  ;  ceux  qui  oui  penaé  çoifipe 
cela  dans  le  temps  étalent  des  homines  orobes ,  qui  ficB* 
salent  qu'il  fallait  assurer  la  tran<iulllité  de  leurs  repr^senkr 
tanis.  Eh  bien ,  citoyens ,  c'est  pourtant  là  le  prétexte  qui  a 
fait  vexer,  persécuter,  incarcérer,  condamner  à  mort  un 
nombre  considdral>ie  de  citoycuade  ce  déportWMnl.  Cassen 
vain  que  les  représentants  du  peuple  qui  y  ont  été  envoyés 
ont  Toulu  ari^ter  ce  fléau  dévastateur  :  ils  oôt  été  dénoncés; 
moi-même  je  l'ai  été  quatre  fois  par  ces  hommes  dont  les  , 
derniers  fQrfaiu  vieppcnide  v^ius.iodigiiev  attasfcjustemcnu 
Voici  une  nouvelle  désobéissance  auxaffféléi  émanés  de  vos 
commissaires. 

D'Autichamp  avait  été  pris.  Il  devait  être  envoyé  A  Paris» 
l'ordre  en  avait  été  donné*  eh  bien,  on  le  gi^Uotlna  là-bas» 
et  bien  plus,  on  mit  sa  tête  dans  de  l'esprit  dé.vhi»  et  elle  Tut 
exposée  sur  la  porte  de  sa  maison.  (Moùvc^ment  d'horreur) 
Tous  ces  coquins  seront  jugés  comme  ils  i^  méritent  le.de- 
mande  FInsertion  au  Bulletin  de  la  lettre  oui  rient  d'être 
lue,  comme  une  preuve  de  l'approbation  de  la  Convention*: 
c'est  ainsi  que  vous  encouragerez  les  hoonèlei gens  Avoirs 
dénoncer  avec  courage  les  coquins,  les.scélérats  quLles  o^t 
I  si  iongieuips  opprimés  ou  assassinés.  (.Ol|.appHiudi|  pen- 
dant longtemps.) 

Thibault  :  Ce  sont  là  les  çatriou^s  oppifniâli  :  ce  sont  dJiBi, 
voleurs,  des  dilapidateurs  de  la  fortune  publlUpe.. 
L'insertion  de  la  lettre  au  Bulletin  est  décrétée* 

{la  suite  demaim) 

—  N.  a  Dans  la  séance  du  t9»  la  discussion  a  contint^ 
sur  les  moyens  les  plus  propres  A  retirer  les  assignats  de  la 
circulation. 


GAZETTE  NATIONALE  oo  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


N«141. 


Primidi  21  Pluviôse,  Fan  3«.  (lundi  9  FévniER  1796,  vieux  styU.) 


POLITIQUE. 

ITALIE. 

CéneSf  le  Ik  Janvier,  —  Le  reprcientant  da  peuple  qui 
Be  trouve  à  Nice  vient  d*enjoindre  aux  généraux,  de  la 
part  du  gouvernement  Tranç^i^,  de  réparer  les  dommages 
qui  auront  pu  élre  commis  sur  le  territoire  génois,  de  res- 
litueraui  propriétaires  les  terres  qui  leur  ont  été  enlevées, 
el  surtout  de  ne  se  mêler  en  rien  des  affaires  du  pays. 

Le  ministre  fra^nçais  a  été  chaigé  de  faire  part  de  ces  dis- 
positions au  gouvernement  génois,  et  de  lui  annoncer  que 
leci-dfvanl  ministre  à  GCnes  avait  à  rendre  auprès  du  co- 
mité de  salut  public  un  compte  sévère  de  sa  conduite  pen- 
dant sa  mission. 

Le  citoyeo  Villars  aanssi  annoncé  que  Buonaroti,  oom« 
mandant  de  Loano,  serait  puni  pour  avoir  osé  confisquer 
le  fief  du  marquis  de  Palestrino,  pilier  son  cbAteau  et  lui 
écrire  en  termes  injurieux.  Le  lief  a  déjft  été  restitué. 

—  Le  général  Labarpe,  Suisse  réfugié,  a  reçu  ordre  du 
représentant  du  peuple  de  se  rendre  à  Toulon  avec  six  ba- 
taillons, qui  doivent  être  embarqués  sur  Tescadre.  Il  com- 
mandera en  chef  les  troupes  de  débarqaemeuU  Ses  talents 
sont  estimés. 

—  Les  alliés  font  fortifier  la  ville  de  Mantoue. 

—  Le  pape  fait  mettre  en  état  de  défense  la  viUe  et  le 
port  de  Givita-Vecchia. 

-*  Il  vient  d*étre  ouvert  à  Milan  an  emprunt  de  3  mil- 
lions.  L'intérêt  est  à  4  i|2pouri00. 

La  taille  générale  pour  1795,  dans  le  Milanais,  a  été 
augmentée  de  12  deniers  par  écu  ;  mais  le  haus.«ement  de 
cette  taxe  est  une  sorte  d'emprunt  forcé.  Ces  diverses  som- 
mes, suivant  la  promesse  du  gouvernement,  seront  rem- 
boursées aux  propriétaires  au  bout  de  cinq  ans.  On  a  eu  be- 
soin de  toutes  ces  mesures  fiscales  pour  faire  face  aux 
éuormes  dépenses  de  la  guerre* 

—  La  Hotte  anglaise,  aux  ordres  de  l'amiral  Hotbam ,  a 
dû  se  mettre  de  nouveau  en  croisière. 

—  M.  Boccardo,  chargé  d'affaires  de  notre  république 
k  Paris,  tient  d'écrire  la  lettre  suivante  : 

■  Le  commissaire  des  relations  extérieures  m'a  fait  re- 
mettre un  arrêté  des  trois  comités  de  salut  public,  des  fi- 
nances et  du  commerce,  sur  la  navigation  des  puissances 
neutres ,  qui  est  ainsi  conçu  : 

f  Art.  1*'.  Les  bâtiments  neutres  pourront  entrer  et  sor- 
tir librement,  et  sans  aucun  obstacle  ni  retardement,  des 
ports  de  France,  et  sans  pouvoir  être  forcés  à  vendre  leur 
chargement 

«  11.  Si  les  bâtimenis  neutres  jugent  à  propos  de  vendre 
leur  cargaison  au  gouvernement,  le  prix  leuren  sera  payé 
de  la  mànièredont  on  sera  convenu. 

«  IlLLes  flottes  françaises  respecteront  et  feront  respec- 
ter, en  ce  qui  les  concerne,  les  droits  des  nations  et  les  dis- 
positions des  traités,  aux  termes  du  décret  de  la  Conven- 
tion nationale  du  25  juillet  1793. 

«  IV.  Les  bâtiments  neutres  ne  pourront  être  écartés  de 
leur  ronte.  Il  ne  pourra  non  plus  être  pris  sur  Irur  bord 
ni  capitaines ,  ni  marins,  ni  passagers,  ni  ceux  des  mili- 
taires actuellement  au  service  des  puissances  ennemies,  ni 
les  marchandises  et  effets  qui  pourraient  s'y  trouver  leur 
appartenir. 

tV.  Sont  exceptées  des  dispositions  du  précédent  article: 
i*  les  marchandises  des  ennemis,  jusqu'à  ce  que  ces  puissan- 
ces aient  déclaré  que  les  marchandises  chargéessur  des  t>âti- 
ments  neutres  ne  pourront  être  prises;  2*  les  marchandises 
neutres,  diteide  cootrebande,c'est-A-d  ire  les  armes,  les  mu- 
nitions de  guerre  de  toute  espèce ,  chevaux  et  leurs  équipa- 
ges ,  et  les  effets  de  toute  espèce  ,  destinés  pour  les  places 
assiégées,  bloquées  ou  investies. 

t  VI.  Les  marchandises  ennemies,  prfses  sur  des  bâti- 
ments neutres,  seront  déchargées  sur-le-champ  dans  les 
ports  de  France. 

l*  Séries -^TomX. 


m  VU.  Le  droit  de  fret  sera  payé  suivant  les  dispositions 
de  la  police  de  chargement. 

•  VIII.  Après  le  déchargement,  le  capitaine  neutre  aura 
le  droit  de  partir. 

«  IX.  Celles  des  marchandises  prises  comme  ennemies, 
qui  seront  reconnues  appartenir  à  des  neutres,  et  par  con- 
séquent déclarées  n'être  pas  de  bonbe  prise,  seront  ren- 
dues en  nature  aux  propriétaires,  s'il  ne  leur  plaît  pas  de 
les  vendre. 

«  X.  Le  commissaire  de  la  marine  présentera  l'état  des 
sujets  des  puissances  ennemîps  pris  à  bord  des  b&liments 
neutresy  pour  laire  droit  à  leur  réclamation.  » 

HOLLAI^DE. 

jinuterdam,  le  if  pluviôse.  —  Il  existait  depuis  un  an 
dans  celte  ville  un  comité  révolutionnaire  secret.  Le  19 
janvier,  avant  l'entrée  des  Français,  ce  comité  déclara  son 
existence,  et  son  président  prononça  un  discours  an  ma- 
gistrat. Voici  cette  pièce,  où  sont  énoncés  les  principes  de 
modération  et  de  sagesse  qui  animent  les  patriotes  hol- 
landais. 

•  Citoyens,  le  comité  révolutionnaire,  représentant 
momentanément  la  bourgeoisie  entière  de  cette  ville,  pa- 
rait en  cette  qualité  devant  les  magistrats  d'Amsterdam. 

•  Il  déclare  que  le  moment  désiré  depuis  si  longtemps 
vient  de  naître,  où  les  citoyens  bataves  vont  reprendre 
leurs  droits  inaliénables,  dont  on  les  a  privés  d'une  ma- 
nière si  outrageante.  C'est  donc  dans  ce  momi'nt  que  le 
gouvernement  actuel  doit  finii\  et  que  le  comité  révolu- 
tionnaire, agissant  d'après  la  volonté  connue  de  la  bonne 
bourgeoisie ,  doit  être  chargé  momentanément  de  la  direc- 
tion des  affaires  publiques ,  jusqu'à  Tinstant  où  un  autre 
ordre  de  choses  et  une  nouvelle  régence  puissent  être  orga- 
nisés par  la  volonté  du  peuple. 

t  Toutes  les  opérations  du  comité  jusqu'à  ce  jour,  l'or- 
dre public  non  interrompu ,  la  sûreté  individuelle  des  per* 
sonnes  le  passage  presque  imperceptible  de  l'état  d'op- 
pression, sous  lequel  gémissait  celle  ville,  à  la  jouissance 
plénièrede  la  liberté  ;  tout,  en  un  mot,  doit  vous  convain- 
cre que  le  comité  n'est  dirigé  que  par  les  principes  qui  ca- 
ractérisent tout  bon  citoyen  i  xélé  pour  le  bonheur  de  ses 
semblables. 

«  En  conséquence,  le  comité,  parlant  au  nom  et  par 
ordre  signé  de  la  commune  d'Amsterdam,  vous  déclare 
que  vos  fonctions  respectives  de  magistrats  et  de  juges,  et 
autres  tfuelconques,  sont  finies,  et  que. dès  ce  moment 
vous  rentrei  dans  la  classe  de  simples  particuliers. 

«  En  conséquence  le  comité  vous  déclare  incompétents 
d'exercer  le  moindre  acte  d'autorité ,  el  vous  rend  respon- 
sables de  la  non-obéissance  à  cet  ordre  du  peuple  souverain. 
Le  comité  exige  en  dernier  lieu  de  vous  de  lever  sur-le- 
champ  votre  séance  et  de  retourner  chez  vous  sans  aucun 
caractère  public;  vous  jouirez,  tant  pour  vos  personnes  * 
que  pour  vos  propriétés,  de  cette  sCtrcté  entière,  à  laquelle 
tout  citoyen  paisible  a  droit  de  prétendre.  C'est  ainsi  que 
nous  prouverons  à  l'Europe  entière,  d'une  manière  à  faire 
rougir  les  ennemis  de  la  liberté,  s'ils  étaient  susceptibles 
de  quelque  sentinf^nt  de  pudeur,  la  différence  énorme 
d'une  révolution  faite  en  faveur  du  despotisme,  et  pour 
opprimer  la  liberté  batave,  d'avec  celle  qui  rend  la  liberté 
à  un  peuple  généreux  qui  bannit  à  jamais  l'oppression  du 
soi  batave.  t 


RÉPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Extraie  d'une  leltre  éerile  de  Nice.-—  -Depuis  la 
marche  rapide  de  nos  armées  dans  les  pays  ennemis, 
l'effroi  qui  poursuit  aa  loin  ces  grands  généraux  eti* 
traîne  avec  eux  toute  leur  suite.  Dans  le  nombre  des 
moyens  que  la  coalition  employait  si  loyalement 
pournous  asservir,  un  des  plus  utiles  à  ses  projets 
était  sans  doute  la  fabrication  de  faux  assiguats* 

61 


402 


Celte  ressource  est  encore  anéantie  pour  elle  :  les 
dignes  coopéraleurs  d'un  si  noble  système,  ne  sa- 
chant plus  011  reposer  leurs  têtes,  sont  allés  sans 
doute  solliciter  d*autres  emplois,  et  de  longtemps,  je 
pense,  ne  trouveront  à  faire  usage  de  leur  infernale 
activité.  .  -,     » 

«  Tu  sais  combien  nous  étions  occupés ,  pendant 
ton  séjour  ici,  à  l'examen  des  assignats  qui  nous 
pleuvaientde  l'étranger,  et  combien  il  s'en  trouvait 
de  faux ,  heureusement  assez  faciles  à  distinguer 
pour  être  frappés  de  nullité  avant  d'avoir  eu  d'autre 
cours.  Eh  bien,  je  n'en  vois  plus  paraître.  Grâces  à 
nos  succès,.et ,  il  faut  en  convenir,  grâces  aussi  à  la 
loyauté  de  quelques  gouvernements  que  je  puis  ci- 
ter, nous  sommes  encore  débarrassés  de  ce  fléau. 
Celui  de  la  Toscane,  par  exemple,  a  mis  dans  la 
poursuite  de  ces  infâmes  destructeurs  du  crédit  des 
nations  une  activité  dont  il  a  droit  de  s'honorer, 
surtout  dans  la  position  où  la  conduite  insolente  du 
général  anglais  l'avait  placé  :  j'ai  été ,  à  Livourne, 
témoin  de  recherches  et  de  poursuites  dirigées  contre 
des  gens  suspectés  de  fabrication.  J'y  ai  vu  établir 
une  surveillance  telle  que  tous  les  commerçants  de 
ce  port  s'empressent  d'aller  dénoncer  spontanément 
les  assignats  qui  leur  sont  présentés,  et  ceux  de  qui 
ils  les  tiennent.  > 


VARIÉTÉS. 

Je  viens  de  rencontrer  chez  les  marchands  de  Donveau« 
lés  une  brochure  intitulée  Journal  de  C Opposition  (1),  par 
P.-F.  Béai,  n»  1  ;  je  l'ai  achetée.  Je  ne  l'ai  pas  encore  lue  ; 
mais  d'avance  je  la  recommande  aux  amis  de  ia  liberté. 
On  va  me  demander  pourquoi  ce  beau  zèle,  pourquoi  je 
cautionne  en  aveugle  un  écrit  sur  le  nom  de  Técrivain  ;  si 
je  connais  d'autres  ouvrages  du  même  auteur  ;  si  je  con- 
nais inUmement  sa  personne;  si  j'ai  des  raisons  bien  par- 
ticulières de  Taffectionner.  Rien  de  tout  cela.  Je  ne  con* 
nais  de  lui  qu'un  beau  trait,  et  le  voici  : 

Le  31  mai  1793,  il  était  substitut  du  procureur  de  ta 
commune.  Ce  jour,  la  commune  prit  un  arrêté  qui  char- 
geait  Hanriot  d*arracher  de  vive  (orce,  du  sein  de  ia  Con- 
vention ,  les  vingtet  un  membres  que  la  proscription  avait 
dévoués  à  la  mort ,  je  crois  même  de  dissoudre  la  Con- 
vention. 

Béai  seul  refusa  de  signer  et  d'approuver  cet  arrêté. 
Hanriot  n*en  investit  pas  moins  la  Convention  ;  il  se  dispo- 
sait à  exécuter  la  délibération  ,  lorsque  les  citoyens  de  Pa- 
ris ,  alarmés  podr  la  représenta ti(»n  nationale,  se  rassem- 
blèrent et  cernèrent  le  rassemblement  même,  sans  savoir,  à 
la  vérité,  ce  qu*il  fallait  faire,  sans  être  conduits  par  aucun 
guide,  éclairés  par  aucune  lumière. 

Cependant  Barère,  inquiet  à  la  tribune  de  la  Conven- 
tion «  ou  feignant  de  Têlre,  proposa  à  rassemblée  la  fa- 
.  meuse  promenade ,  qui  devait  constater,  selon  lui,  ia  par- 
faite liberté  dont  jouissaient  les  représentants  du  peuple. 
La  Conventionsorl;  les  bataillons  de  Hanriots'entr'ouvrent, 
malgré  lui,  pour  la  laisser  passer;  à  ce  moment,  des  émis- 
saires de  la  commune  viennent  lui  rapporter  que  tout  est 
perdu;  que  rassemblée  a  franchi IVnceinte que  formaient 
autour  d'elle  les  patriotes  de  Hanriot,  que  par  ce  moyen 
elle  se  trouve  réunie  aux  Parisiens  accourus  pour  sa  dé- 
fense-, et  qu'ainsi  on  va  se  saisir  de  Hanriot  et  de  ses  prin- 
cipaux adhérents.  Grand  eU'roi  dans  la  commune  ;  grande 
consternation.  Rpal  prend  alors  la  parole. 

•  Citoyens ,  dit-il  à  ses  collègues,  il  est  très-probable 
que  votre  repentir  trop  tardif  vous  sera  inutile,  et  qu'une 
rétractation  de  vos  ordres  sera  superflue.  Cependant  l'or- 

(1)  Pris  :  25  sous,  broché;  et  30 sous,  franc  de  port,  par 
la  poste,  pour  les  départements.  A  Paris,  chez  Buisson,  li- 
braire, rue  Uautefeuille,  n^  30.  Oa  affranchit  les  lettres  et 
le  montant. 

L'auteur  ne  prend  pas  l'engagement  de  donner  ce  journal 
par  abonnement  :  en  conséquence ,  il  ne  sera  pas  livré  par 
abonnement.  On  sera  libre  d'acquérir  les  numéros  quand  ils 
paraltroDU  A.  M. 


dre  donné  à  Hanriot  m^Inspîre  une  telle  horrenr»  lapins 
foible  possibilité  d'an  attentat  commis  sur  la  représenta- 
tion nationale  m'épouvante  tellement,  quejen*hésitepoint 
à  partager  vos  périls,  si  vous  voulez  faire  cesser  absolo» 
ment  ceux  de  l'assemblée.  Je  vais  signer  votre  délibéra* 
tion ,  si  vous  voulex  la  révoquer  ;  je  consens  à  périr  afce 
vous,  si  vous  défendez  à  Hanriot  de  faire  périr  personne.  • 

La  peur,  qui  bouche  l'esprit  aux  lâches,  leur  ouvre  les 
oreilles  :  Béai  est  écouté ,  applaudi  ;  il  signe  l'arrêté  crimi- 
nel ,  et  l'ordre  de  ne  point  l'exécuter  est  expédié  à  HanrioL 

Je  tiens  ce  beau  trait  d* Achille  Duchatelet,  ce  guerrier 
citoyen ,  et  homme  d'esprit ,  qui ,  blessé  par  le  feu  autri- 
chien en  défendant  la  liberté  de  son  pays ,  jeté  ensuite 
dans  un  cachot  avec  tant  d'autres  victimes,  lassé  enCn  par 
la  tyrannie  qui  n'avait  pu  vaincre  son  courage,  s'est  donné 
la  morU 

Trésorerie  nationale.  —  Liquidation  de  la  dette  publique 
viagère» 

Les  créanciers  de  la  dette  viagère  sont  avertit  que  les 
inscriptions  des  lettres  initiales  Q  et  R  des  parties  con- 
stituées sur  une  seule  tète,  sans  expectative  ni  survie, 
pourront  être  retirées  primidi  prochain  21  nivôse,  au  ba- 
reau  établi  à  cet  effet,  rue  Vivienne,  en  face  de  ia  trésore- 
rie. Le  payement  sera  effectué  de  suite  à  bureau  ouvert. 

Ceux  qui  viendront  retirer  les  inscriptions  auront  soin 
d'écrire,  au  dos  du  bulletin  de  remise  dont  ils  sont  por- 
teurs, une  décharge  conçue  en  ces  termes  : 

«  Reçu  l'inscription  viagère  de  la  somme  de  au 

nom  de 

«  A  Paris,  ce*. »••».•  s 

On  prévient  le  public  que,  lorsque  la  production  est 
composée  de  parties  sur  une  tête  et  sur  deux  têtes,  on  ne 
peut  liquider  celle  sur  une  tête  séparément.  Elles  seront 
comprises  dans  la  liquidation  des  parties  sur  deux  ou  plu- 
sieurs lêles,  dont  on  s'occupe  avec  la  plus  grande  activité. 
On  sera  averti  par  de  nouveaux  avis,  lorsque  le  payement 
en  sera  ouvert* 


Brûlement  d'assignats. 

Le 49  pluviôse ,  à  dix  heures  du  matin,  il  a  été  brûlé 
dans  la  cour  du  nouveau  local  de  la  vériHcation  des  assi- 
gnats, la  somme  de  14  millions  en  assignats,  provenant 
des  échanges,  lesquels,  joints  au  2  milliards  554  millions 
683  mille  liv.  déjà  brûlés,  forment  un  total  de  2  milliards 
568  millions  683,000  liv. 


CONVENTION   NATIONALE. 

Présidence  de  Barras, 
SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU   17  PLUVIOSE. 

Gossuin,  au  nôln  du  comité  militaire,  demande 
que  la  Convention  ordonne  l'impression  cl'tme  in- 
struction devant  servir  de  lèglcmentsur  les  commis- 
saires des  guerres. 

L'impression  et  la  distribution  sont  décrétées. 

—  Eschassdriaux  Taîné  lit  une  opinion  sur  les 
fêtes  décadaires,  à  la  suite  de  laquelle  il  propose  un 
projet  de  décret  dont  la  Convention  ordonne  l'im- 
pression, ainsi  que  celle  du  discours. 

—  Une  (léputalion  de  la  commune  de  Franciade, 
I  admise  à  la  barre,  présente  à  la  Convention  le  ta- 
bleau affligeant  des  désastres  que  le  débordement  de 
la  Seine  a  causés  sur  son  territoire ,  et  sollicite  des 
secours  en  faveur  des  citoyens  que  ce  débordement 
a  ruinés. 

Cette  pétition  est  renvoyée  au  comité  des  secours 
publics. 

—  La  discussion  s*ouvre  sur  le  mode  à  adopter 


403 


pour  retirer  de  la  circulation  plusieurs  milliards 
aassignats. 

Thibault  (du  Cantal)  prononce  un  discours  sur  cet 
objet.  Il  commence  par  déclarer  qu'il  n'attaque  point 
la  proposition  dline  loterie,  qu'il  a  votée  avec  ses 
collègues  dans  le  comité  des  finances.  Il  propose  en- 
suite là  création  d'une  tontine  dont  voici  le  plan  : 

Cette  tontine  nationale,  dont  chaque  action  serait 
de  1,000  liv.,  divisible  néanmoins  en  moitiés  ou  en 
cinquièmes,  serait  divisée  en  seize  classes;  la  pre- 
mière serait  composée  des  enfants ,  depuis  la  nais- 
sance iusq^u'à  l'âge  de  cinq  ans  ;  la  seconde,  de  ceux 
âgés  depuis  cinq  ans  jusqu'à  dix,  et  ainsi  successive- 
ment de  cinq  en  cinq  ans,  jusqu'à  soixante-quitize 
ans,  et  au-dessus. 

Chaque  classe  serait  composée  d*un  nombre  de  di- 
Tîsions  indéterminé,  et  chaque  division  de  quatre 
mille  actions  numérotées  depuis  1  jusqu'à  4,000. 

L*intérét  primitif  dans  les  quatre  premières  classes 
serait  de  25  liv.  par  action  ;  celui  des  c|uatre  sui- 
vantes, de  30  liv.;  celui  des  actions  depuis  quarante 
ans  jusqu'à  soixante ,  de  35  liv.;  celui  des  actions  de 
soixante  à  soixante-dix  ans,  de  40  liv.;  et  celui  des 
deuxdernièresclasseSfdesoixantedixansjusqu'àqua- 
tre-vingtsetaudcssus,de  45  liv.  de  rente  par  action. 

La  moitié  des  extinctions  de  ces  rentes  tournerait 
au  protitdela  nation,  et  l'autre  serait  partagée  entre 
les  actionnaires  de  la  même  division.  Dès  la  mort  du 
dernier  actionnaire,  la  nation  serait  seule  héritière. 

Indépendamment  des  accroissements  considéra- 
bles dont  les  actions  de  cette  tontine  seraient  suscep- 
tibles,et  qui  suffiraient  pour  lui  assurer  le  plusgrand 
succès,  elles  participeraient  encore  à  un  tirage  de 
primes  dont  le  montant  serait  de  800  millions;  et 
pour  que  chaque  classe  et  chaque  division  partici- 
passent également  aux  primes,  au  lieu  de  les  confon- 
dre dans  un  seul  et  même  tirage,  chaque  division 
aurait  son  tirage  particulier ,  qui  serait  oe  huit  cents 
primes,  formant  ensemble  une  somme  de  800,000  I. 
distribuée  ainsi  qu'il  suit  : 

Diiiributian  des  primes  dans  chaque  division* 


1 

1 
1 
1 
1 
1 
i 
1 
1 
1 
1 
1 

4 

12 

40 

80 

100 

160 

891 


de 

de 

de 

de 

de 

de 

de 

de 

de 

de 

de 

de 

de  3,000  1. 

de  1,500 

de  1,000 

de     600 

de     500 

de     400 

de     300 


1  au  dernier  n^  de 


150,000  liv. 
100,000 
50,000 
40,000 
30,000 
20,000 
15,000 
20,000 
10,000 

8,000 

6,000 

5,000 
12,000 
18,000 
40,000 
48,000 
50,000 
64,000 
117,300 

4,700 


Total.  800,000  liv. 

Si  la  tontine  s'élevait  à  4  milliards,  elle  se  trouve- 
rait composée  de  mille  divisions,  qui.  Tune  dans 
l'autre  ,  feraient  62  1;2  par  classe;  ainsi ,  en  multi- 
pliant le  tableau  précédent  par  mille,  on  obtiendrait 
un  résultat  de  huit  cent  millions  de  primes,  qui,  pou- 
vant entrer  elles-mêmes  dans  la  tontine,  et  recevant 
les  intérêts  ou  les  reutesi  calculés  suivant  les  diffé- 


rentes classes  dans  lesquelles  elles  seraient  placées, 
offriraient  un  résultat  de  dépenses  de  23  millions 
500,000  liv.  qui,  ajoutée  aux  32  millions  500,000  I. 

3ue  contenait  la  rente  de  4  milliards  d'actiouS| 
onnerait  une  dépense  de  151  millions. 
L'intérêt  des  actions  n'est,  à  la  vérité,  quelle  4 
pour  100  au  plus;  mais  c'est  bien  moins  cet  intérêt 
que  l'on  doit  compter  que  l'espérance  certaine  d'une  , 
augmentation  progressive,  d'après  les  probabilités 
de  la  vie,  qui  pourrait,  dans  les  quatre  premières 
classes,  donner  à  une  action  de  100  liv.  jusqu'à 
50,000  livres  de  rente,  et  dans  les  deux  dernières  jus- 
qu'à 90,000. 

L'avantage  de  cette  tontine  serait  d'anéantir  réel- 
lement pour  4  milliards  d'assignats,  d'offrir  aux  ac-» 
tionnaires  un  intérêt  toujours  croissant,  et  au  trésor 
public  le  partage  dans  cet  accroissement. 

Pour  assurer  une  hypothèque  certaine  aux  action*  « 
naires,  on  vendrait  à  rente  une  portion  des  domaines 
nationaux  à  5  pour  100  du  prix  de  l'adjudication, 
lesquelles  rentesseraient  payées  une  année  d'avance; 
on  ajouterait,  aux  précautions  déjà  prises  pour  em- 
pêcher la  dégradation  de  ces  biens,  toutes  celles  qui 
seraient  nécessaires. 

Outre  l'intérêt  croissant  pour  les  actionnaires,  ils 
ont  les  chances  des  huit  cent  primes  sur  quatre  mille 
actions,  ce  qui  fait  une  prime  sur  cinq. 

Thibault  lait  observer  que  la  loterie  présentée  par 
le  comité  a  un  inconvénient  majeur,  qui  ne  se  trouve 
pas  dans  la  tontine:  c'est  que  des  actions  converties 
en  efiets  au  porteur,  si  elles  ne  sont  pas  inscrites  au 
livre  de  la  dette  consolidée  ,  ou  en  perpétuel  ou  en 
viager,  le  lendemain  du  tirage ,  seront  jetées  sur  la 
place,  et  ouvriront  les  portes  à  un  agiotage  qui  leur 
donnera  peut-être  un  plus  grand  discrédit  aue  celui 
qu'ont  éprouvé  les  inscriptions  ;  elles  ne  diminue- 
raient point  la  masse  du  papier  en  circulation,  puis- 
que dans  cette  hypothèse  ce  papier  n'aurait  fait  que 
changer  de  figure,  et  que  l'intérêt  même  que  porte- 
raient ces  effets  tournerait  à  leur  désavantage  ,  sans 
profiter  au  reste  des  assignats  en  émission,  et  que  le 
trésor  public  serait  grevé  des  173  millions  987,500  1. 
d'intérêt  annuel  accordé  aux  bilfets  inscrits  sur  le 
livre  de  la  dette  consolidée. 

La  tontine,  au  contraire,  ne  coûterait  que  150  mil- 
lions d'intérêt  annuel,  qui  diminuerait  chaque  jour 
au  profit  de  la  nation,  et  finirait  par  laisser  l'hypo- 
thèque intacte. 

Pour  mettre  cette  tontine  à  portée  de  tous  les  ci- 
toyens, les  receveurs  de  district,  ou  même  ceux  du 
droit  d'enregistrement ,  recevraient  le  montant  des 
actions,  et  délivreraient  à  chaque  actionnaire  son 
contrat  de  rente,  laquelle  rente  lui  serait  payée  avec 
les  accroissements  par  les  mêmes  receveurs,  sans  dé- 
placement et  sans  frai^. 

Les  primes  seraient  également  payées  par  les  rece- 
veurs de  district  ou  droit  d'enregistrement ,  en  re- 
connaissances de  finances  qui  pourraient  être  con- 
verties en  actions  additionnelles  dans  toutes  les 
divisions  de  la  classe  dans  laquelle  le  porteur  se  trou- 
verait placé  par  son  âge,  ou  admissibles  en  payement 
de  domaines  nationaux,  en  y  ajoutait  moitié  en  as- 
signats. 

Le  tirage  des  primes  serait  simple;  une  roue  ferait 
mouvoir  quatre  mille  numéros  représentant  les  qua- 
tre mille  actions  dont  chaque  division  est  composée; 
et  une  seconde,  les  huit  cents  primes  attachées  à 
chacune  des  divisions.  On  n'aurait  pas  besoin  d'at- 
tendre que  la  tontine  fût  complète;  aès  qu'il  y  aurai! 
vingt-cinq  ou  trente  divisions  de  remplies,  on  ferai! 
un  tirage  qui  réglerait  leur  sort. 

Si  on  admettait  les  étrangers  à  participer  au  biei^- 
fait  de  cette  tontine,  ils  y  feraient  bien  vile  passer 


404 


Te 


leurs  assignat^!,  et  ensuite  leur  numéraire,  oui,  dans 
Tétat  actuel  de  nos  changes,  se  trouverait  place  à  10 

Sour  100  dans  le^  premières  classes,  et  jusqir*à  12 
ans  les  dernières.  Les  Français  eux-mêmes  échan- 
geraient leur  numéraire  contre  des  assignats,  pour 
te  procurer  un  avantage  aussi  réel.  L'effet  de  cet 
^cha'nge,  ferait  nécessairement  hausser  le  change  et 
i>aisser  le  prix  du  marc  d'argent. 

Je  ne  doute  pas  que  tous  ceux  oui  sont  embarras- 
ses d'assignats,  ou  qui  ont  fait  cles  économies,  ne 
s'empressent  de  les  placer  dans  la  tontine.  Quel  est 
l'homme  d'un  certain  âge  qui  ne  désire  pas  se  pré- 
parer desjouissances  pour  la  vieillesse  et  la  caducité? 
Quel  est  le  ))ère  de  famille  qui,  s'il  le  peut,  ne  pla- 
cera pas  au  moins  une  action  sur  la  tête  de  ses  en- 
fants? Quel  est  l'ouvrier  qui  ne  cherchera  pas  à  éco- 
nomiser son  temps  et  sa  bourse  pour  se  faire  une 
rente  qui  s'accroîtra  chaque  jour  sans  rien  prendre 
sur  le  fruit  de  son  travail?  Il  se  livrera  moins  aux 
dépenses  inutiles;  la  consommation  diminuera,  et 
par  conséquent  le  prix  des  denrées. 

Vernier(du  Jura)  prononce  une  opinion  dévelop- 
pée pour  appuyer  le  projet  du  comité  des  finances. 
Convient-il  de  retirer  les  assignats  en  circulation? 
Pour  y  parvenir  faut-il  faire  des  sacrifices?  Les 
moyens  que  propose  le  comité  sont-ils  propres  à  at- 
teindre ce  but?  L'orateur  soutient  l'aflirmative.  On 
ne  doit  pas  craindre  de  retirer  les  assignats,  puisque 
leur  hypothèque  est  au  moins  de  15  milliards.  En 
finance,  la  crainte  du  mal  produit  un  très-grand  mal. 
Or  l'on  sait  que  le  mal  d'opinion,  sur  les  assignats, 
«st  porté  à  son  comble.  On  dit  communément  qu'il  y 
à  10  milliards  d'assignats  en  émission  ,  tandis  qu'il 
n'y  «n  a  que  0  milliards.  Il  est  donc  infiniment  ur- 
gent d'accélérer  la  rentrée  de  cette  nionnaie;  tous 
les  moyens  proposés  par  le  comité  lui  paraissent 
propres  à  cet  effet.  Il  y  ajoute  les  suivants  :  Faire  re- 
naître la  confiance,  assurer  la  marche  du  gouverne- 
ment, organiser  la  constitution  sur  les  bases  de  L'é- 
galité et  d'une  sage  liberté  (cette  partie  du  discours 
excite  de  vifs  applaudissements);  convaincre  l'Eu- 
rope que  la  France  a  autant  sa  gloire  à  cœur  que  sa 
liberté,  et  qu'elle  est  décidée  à  mettre  tout  en  œuvre 

λour  tranquilliser  le  porteur  d'assignats,  même  en 
es  hypothéquant  sur  toutes  les  propriétés  indivi- 
duelles. 

.  L'assemblée  tout  entière  se  lèye,  et  applaudit  à 
trois  diverses  reprises. 

DussAULX  :  Citoyens,  rendons  grâce  à  la  Provi- 
dence qui  a  dérobe  ce  digne  représentant  au  fer  des 
assassins. 

La  Convention  ordonne  l'impression  des  opinions 
de  Thibault  et  de  Vernier. 

PÉPIN,  au  nom  du  comité  de  législation  :  Depuis 
longtemps  on  soupirait  après  un  mode  simple  et  fra- 
ternel déterminer  lescontestations;lesabusde  l'an- 
cien ordre  judiciaire  en  faisaient  sentir  la  nécessité. 

L'Assemblée  constituante,  en  invitant  en  quelque 
sorte  les  citoyens  à  soumettre  leurs  discussions  h  des 
arbitres,  a  posé  les  premières  bases  d'un  ordre  judi- 
ciaire convenable  à  un  peuple  de  frères  :  vous  avez 
été  plus  loin;  vous  avez  exigé  que  les  affaires  dont  la 
discussion  pouvait  diviser  ceux  aUe  les  liens  du  sang, 
les  sentiments  de  la  nature,  les  liaisons  du  voisinage 
et  autres  motifs,  semblent  devoir  unir  plus  particu- 
lièrement, ne  pussent  être  terminées  que  par  des  ar- 
bitres; et»  lorsque  les  citoyens  auront  choisi  des 
Iuf^es  vraiment  dignes  de  leur  confiance,  on  sera 
nentôt  convaincu  que,  de  tous  les  moyens  de  termi- 
ner les  contestations  ,  le  plus  simple,  le  plus  favo- 
rable à  la  paix,  à  la  tranquillité,  c'est  l'arbitrage; 
mais  il  faut  dégager  cet  arbitrage  de  tous  lesembar-* 


ras  qu*il  peut  éprouver,  aussitôt  qu*i1s  sont  contras. 

Plusieurs  pétitions,  renvoyées  par  la  Convention 
à  son  comité  de  législation ,  en  ont  indiqué  un  qu'il 
a  cru  pressant  de  faire  disparaître. 

L'article  Xlll  de  la  loi  du  24  âoAt  1700  (vieni 
style)  avait  bien  prévu  le  cas  où,  deux  arbitres  n*ë« 
tant  pas  d'accord  sur  le  fond  de  la  contestation,  ils 
seraient  obligés  d'appeler  un  tiers  {)our  parvenir,  par 
une  majorité  d'avis,  à  une  décision;  il  défère  le  choix 
de  ce  tiers  aux  arbitres  eux-mêmes  ;  mais  la  loi  n'a* 
vait  pas  prévu  que  les  arbitres  pourraient  aussi  ne 
pas  s'accorder  sur  le  choix  d'un  tiers,  que  chacun  ^ 
d'eux  en  nommerait  un  à  son  gré,  et  que  par  là  la 
contestation  ne  pourrait  plus  se  terminer. 

Le  cas  est  arrivé,  il  est  arrivé  fréquemment,  et  UQ 
grand  nombre  d'affaires  restent  indécises  contre  le 
but  le  plus  direct  de  l'arbitrage,  qui  est  la  prompto 
décision. 

C'est  pour  faire  cesser  cet  obstacle  que  votre  co- 
mité de  législation  m'a  chargé  de  vous  proposer  le 
décret  suivant: 

«  La  Convention  nationalei  après  avoir  entenda  le  rsp* 

r)rt  de  son  comité  de  législation  sur  la  queiUon  de  savoir 
qui  appartient  la  connaissance  des  conlestatioos  des  ar« 
bitres  d'un  tribunal  de  famille  sur  la  nomination  d^uQ 
tiers-arbitre,  dont  le  choix  leur  est  dévolu  parTarU  XIII 
de  la  loi  du  2Aaoat  1790  (vieux  style)  ; 

c  Considérant  que  la  loi  précitée  n*a  pas  prévu  le  cas 
proposé,  qui  peut  se  renouveler  souvent;  qu'il  devieul 
pressant  d'ajouter  à  ses  dispositions  et  d^accélérer  le  cours 
de  la  jusiice,  en  prévenant  de  longues  discussions,  décrète; 

•  Art*  I*'.  Lorsque  les  arbitres  composant  un  tribunal 
de  famille  ne  s'accorderont  pas  sur  la  nominatioo  d^n 
tiers-arbitre,  dans  le  cas  où  il  serait  nécessaire,  ils  invite^ 
ront  les  parties  h  se  concerter  sur  ce  choix  t  et  ai  cette  IbtU 
tation  ne  produit  pas  son  effet,  ils  les  renverront  devant  le 
président  du  tribunal  du  district. 

c  n.  Le  président  du  tribunal  «  dans  le  cas  où  les  par* 
lies  ne  s'accorderaient  pas  devant  lui ,  choisira  le  tiera-ar* 
bitre  sur  les  listes  qu'elles  lui  présenteront,  après  cepen* 
dant  qu'elles  auront  chacune  récusé  deux  des  citoyeui 
compris  dans  ces  listes ,  si  elles  veulent  user  de  ce  droit. 

«  III.  Le  présent  décret  sera  inscrit  au  Bulletin  de  cor- 
respondance. • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

Danjou,  au  nom  du  comité  des  décrets:  Le  co- 
mité, citoyens,  avait  arrêté  la  nomination  des  ci- 
toyens Dumont  et  Grandville,  membres  actuels  de 
l'agence  de  l'envoi  des  lois,  pour  composer  la  nou- 
velle agence.  Le  citoyen  Grandvil|e  a  fait  nar;i^enir  au 
comité  une  lettre  par  laquelle  il  l'invite  a  agréer  sa 
démission,  trouvant,  dit-il,  des  moyens  d'existence 
dans  des  travaux  particuliers;  en  conséquence,  le 
comité  vous  propose  de  décréter  que  les  citoyens 
Dumont  et  Chaube  composeront  l'agence  de  l'envoi 
des  lois,  en  exécution  du  décret  du  8  de  ci)  mois.  • 

Cette  proposition  est  adoptée. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  18  PLUVIOSB. 

Les  entrepreneurs,  architectes  et  ouvriers  du  cî- 
devant  Thédtre  National ,  rue  de  la  Loi,  sont  admis 
à  la  barre  et  présentent  une  pétition  par  laquelle  ils 
demandent  le  rapport  du  décret  qui  accorde  un  sur- 
sis à  Neuville  et  à  la  Montansier  aux  poursuites  de 
leurs  créanciers,  et  que  le  rapport  des  comités  de  fi- 
nances et  d'instruction  publique,  sur  les  mesures  à 
prendre  pour  parvenir  ou  à  la  remise  du  théâtre  où 
est  l'Opéra  à  Neuville  et  à  la  Montansier,  et  aux  en- 
trepreneurs, à  l'architecte  et  autres  intéressés,  ou  au 
payement  des  créances  privilégiées  de  ces  derniers, 
soitfaitdans  un  bret délai. 

Sur  la  motion  d'un  membre ,  la  pétition  est  ren- 


405 


yoyéeaax  deux  comités  susdits,  et  h  Convention  na- 
tionale discrète  que  le  rapporteur  des  deux  comités, 
toutes  affaires  cessantes,  sera  entendu  primidi  pro- 
chain, 21  de  ce  mois,  à  une  heure  précise. 

— Un  membre,  au  nom  du  comité  des  secours  pu- 
blics, propose,  et  la  Convention  adopte  le  projet  de 
décret  suivant:* 

t  Lq  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  des  secours  publics,  décKlc  : 

•ArU  !•».  Les  veuves,  enfanis  et  autres  dénommés  aux 
états  certifiés  par  le  commissuire  liquidateur  provisoire  de 
)i  lifte  civile,  et  annexés  au  présent  décret,  dont  les  pen-  ' 
sions  accordées  en  considération  de  s  services  de  leurs  maris,   | 
de  leurs  pères  ou  d'autres  parents  dans  la  maison  du  ci-  ' 
devaut  roi,  ont  été  supprimées  par  le  décet  du  17  germi- 
nal, jecevroot,  sur  le  fonds  des  secours  publics,  les  mô- 
mes secours  annuels  accordés  par  le  décret  du  SA  nivôse  ; 
deroien  | 

c  II.  Ils  seront  tenus  de  remplir  tontes  les  conditions  et 
formalités  prescrites  par  le  décret  du  24  nivosc.  | 

«  III.  Les  trois  états  annexés  au  présent  décret  ne  se- 
ront point  imprimés.  » 

—  Pons (de  Verdun)  propose, et  la  Convention 
adopte  le  projet  de  décret  suivant  :  | 

«  La  Convention  nationale  décrète  qne  son  comité  de 
législation  est  autorisé  à  accorder  une  prorogation  du  dé- 
lai fixé  par  Tart.  XXXI  du  titre  III  de  la  loi  du  25  bru- 
maire an  a*  aux  personnes  qui  justifieraient  de  Timpossi* 
bilité  où  elles  sont  de  produire  dans  ledit  délai,  à  Pappui 
de  leur  réclamaUon,  les  certificats  de  résidence  exigés  par 
Jaloi.  . 

PoNS  (de  Verdun),  au  nom  du  comité  de  législa- 
tion :  Plusieurs  représentants  en  mission  dans  les 
départements  ont  jugé  diversement  des  cas  qui  ne 
sont  pas  prévus  par  Ta  loi  du  28  mars.  Les  uns  ont 
ordonné  que  des  citoyens  qui  s'étaient  soustraits  à 
des  mandats  d'arrêt  seraient  inscrits  sur  la  liste  des 
émigrés  ;  d'autres  au  contraire  ont  fait  rayer  de  des* 
sus  cette  liste  des  citoyens  nui  n'avaient  pas  rempli 
les  lomiaiités  prescrites  par  les  lois. 

Les  autorites  constituées  se  trouvent  embarras- 
sées dans  Tapplicatiou  des  arrêtés  des  représentants. 
Le  comité  vous  propose  eu  conséquence  de  décréter 
que  les  inscriptions  et  radiations  sur  la  liste  des  émi- 
grés seront  soumises  à  Texamen  du  comité  de  légis- 
lation, pour  être  infirmées  par  lui  ou  conûrmées. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

DuHEM  :  Je  m*oppose  au  maintien  de  ce  décret  ;  il 
y  a  une  loi  qui  défend  aux  émigrés  de  rentrer  sur  le 
territoire  de  la  république;  j'en  demande  l'exécu- 
tion. Je  pense  que,  lorsque  la  loi  a  prononcé,  un 
renvoi  à  un  comité  est  inutile. 

Pons  (de  Verdun)  :  J^observe  à  Duhem  qu'il  a  mal 
entendu,  qu  il  ne  s'agit  pas  de  personnes  qui  au- 
raient quitté  le  territoire  de  la  république,  mais  de 
citoyens  nui  n'en  sont  jamais  sortis,  et  qui  cepen- 
dant ont  été  portés  sur  la  liste  des  émigrés. 

La  Convention  maintient  son  décret  comme  il 
suit  : 

t  La  Convention  naUonale,  sur  le  rapport  de  son  co- 
mité de  législation ,  décrète  : 

•  Que  les  inscriptions  sur  les  listes  d*émigrés,  et  les  ra- 
diations desdites  listes  fuites  en  vertu  d'arrêtés  d*un  repré- 
sentant du  peuple  en  mission  dans  les  départements,  se- 
ront soumises  à  Pexamen  du  comité  de  législation,  pour 
être  confirmées  ou  Infirmées,  conformément  à  la  loi  du 
ta  brumaire.  •  | 

—  Izoard  propose,  et  rassemblée  décrète  ce  qui 
•nit  :  I 

•  La  Convention  nationale,  oui  le  rapport  de  son  comité 
de  législation,  décrète  que  les  vingt-sept  citoyens  du  dé- 
partement des  Àrdennes,  traduits  au  confite  de  sûreté  gé*  ' 
uérale  par  un  arrêté  du  représentant  du  peuple  Le? asseur  1 


(delà  SarUie),eontti6 prévenus I  les  uns  de manosovres 
pratiquées  en  1791 ,  pour  se  faire  adjuger  les  biens  natio* 
naui  au-dessous  de  leur  valeur;  les  autres  d'avoir  préva- 
riqué  comme  juges,  en  civilisant  rafl'aire;  les  autres  enfin, 
de  s'être  rendus  coupables  de  fait  et  de  propos  inciviques, 
et  qui ,  depuis,  ont  obtenu  leur  mise  en  liberttS  sont  ren« 
voyés  au  tribunal  criminel  du  département  des  Ardennes, 
séant  à  ^félièrcs,  pour  y  être  jugés  sur  les  procédures  in- 
struites et  les  pièces  existantes  contre  eux,  de  la  manière 
ordinaire.  • 

—  Izoard,  au  nom  du  comité  dé  législation,  pro-. 
pose ,  et  la  Convention  adopte  le  projet  de  décret 
suivant  : 

«  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu  le  rap« 
port  de  son  comité  de  législation  sur  le  renvoi  fait  à  ce  co- 
mité, le  A  pluviôse  dernier,  delà  proposition  faite d^autorl- 
ser  le  tribunal  qui  sera  chargé  de  iuger  lesdilanidateursda 
département  du  Cantal  à  prononcer  sur  les  délits  contre- 
révolutionnaires  dont  quelques-uns  de  ces  hommes  pour- 
raient être  prévenus,  et  sur  Karrété  pris  par  les  comités  de 
sûreté  générale  et  de  législation,  en  suite  du  renvoi  ft  eux 
fait  parle  décret  du  96  nivôse,  arrêté  qui  ordonne  le  renvoi 
de  la  dénonciation  de  ladite  commune  d*Aurillac  au  tribu- 
nal criminel  du  département  du  Puy-de-Dôme,  décrète  ce 
qui  suit  i 

a  L'arrêté  pris  par  les  comités  de  sûreté  générale  et  de 
législation,  en  vertu  du  décret  du  23  nivôse  dernier,  par 
lequel  ils  renvoient  les  citoyens  dénoncés  par  la  commune 
d'Âurillac,  comme  concussionnaires  etdilapidateurs,  par^ 
devant  le  tribunal  criminel  du  département  du  Puy-de- 
Ddme ,  est  approuvé. 

«  Sur  la  proposition  renvoyée  I  le  4  pluviôse  présent 
mois,  au  comité  de  léglstation,  la  Convention,  considé- 
rant que  les  délits  portée  en  la  dénonciation  de  la  coiiimune 
d*AurllIac  sont  de  la  compétence  des  tribunaux  criminels 
ordinaires,  passe  ft  Tordre  du  jour. 

•  Le  présent  décret  sera  Inséré  an  BulleUa  de  correi* 
pondance*  • 

Lbcointre  (de  Versaillc)  :  Je  demande  qu'on  sup- 
prime le  mot  contre-révolutionnaire,  parce  que  les 
tribunaux  criminels  ne  peuvent  connaître  que  des 
crimes  ordinaires.  Sans  cela,  ce  serait  instituer  une 
nouvelle  boucherie  dans  chaque  département  :  il 
suffit  qti'il  y  ait  un  tribunal  révolutionnaire  à  Paris, 

DuuEM  :  J'appuie  la  proposition  de  Lecointre.  Si 
nous  avons  enlevé  au  tribunal  criminel  du  départe- 
ment de  Paris  la  connaissance  de  l'affaire  de  Lacroix, 
qui  lui  avait  d'abord  été  attribuée,  parce  qu'elle 
était  contre-révolutionnaire,  c'est  une  raison  de  pins 
pour  ne  pas  porter  une  affaire  de  la  inéuie  nature 
devant  un  tribunal  criminel  ordinaire.  Qu'on  ne 
vienne  pas  parler  des  dépenses  qu'on  veut  éviter;  la 
justice  et  l'exécution  des  lois  doivent  passer  avant 
tout.  Je  demande  que  les  accusés  soient  traduits  de* 
vant  le  tribunal  révolutionnaire. 

Le  Rapporteur  :  Si  vous  renvoyé»  à  ce  tribunal 
tous  les  délits  de  cette  nature  qui  ont  été  commis 
dans  la  république,  il  sera  bientôt  surchargé.  Les 
crimes  qu'on  reproche  aux  accusés  sont  d'avoir  tra- 
fiqué de  la  liberté  individuelle,  d'avoir  exercé  des 
concussions  sur  leurs  concitoyens,  de  les  avoir  op- 
primés, d'avoir  fabriqué  de  fausses  lettres,  etc. 

Lecointre  et  Duoem  :  Ce  sont  là  des  délits  contre- 
révolutionnaires. 

Le  Rapporteur  :  L'intention  des  accusés  a  été 
simplement  de  piller,  de  voler,  d'accumiiler  des  ri* 
chesses,  et  voilà  tout. 

MiLHAUD  :  Si  les  crimes  qu'on  leur  reproche  ne 
sont  pas  contre -révolutionnaires,  ils  en  ont  tout 
l'odieux ,  car  ce  sont  des  vols  publics.  Mais  prene.'f 
ffarde,  citoyens,  que  les  royalistes  et  les  (ripons  se 
donnent  la  main  pour  opérer  la  contre-révolution  : 
il  faut  sévir  contre  les  uns  et  contre  les  autres. 


406 


11  est  possible  cependant  qne  des  hommes  pro- 
bes'soient  accusés  avec  des  hommes  profondément 
immoraux;  j*atleste  que  les  témoins  dans  celfe  af- 
faire sont  des  riches ,  des  aristocrates  et  des  contre- 
révolutionnaires.  (Murmures.U'ajoute  que  l'ancien 
r>résidf»nt  du  tribunal  est  un  ties  accusés,  et  que  cc- 
ui  qui  Va  remplacé  était  détenu.  Au  surplus,  qu'on 
punisse  les  fripons  et  les  contre-révolutionnaires,  et 
la  république  est  sauvée. 

Thuriot  :  Si  Taffaire  est  contre-révolutionnaire, 
c'est  au  comité  de  sûreté  générale  à  faire  traduire  les 
accusés  devant  le  tribunal  que  la  loi  a  désigné  pour 
juger  les  conlrc-révolutionnaires.  Si  l'affaire  n'est 
pas  (le  cette  nature,  elle  doit  être  portée  devant  le 
tribunal  ordinaire;  il  n'est  pas  besoin  d'un  décret 
particulier  pour  cela.  Je  demande  le  renvoi  au  co- 
mité de  sûreté  générale. 

Bailleul  :  Rappelez-vous  ce  qui  arriva  dans  Taf- 
faire  du  comité  révolutionnaire  de  Nantes  :  des  as- 
sassins ,  des  égorgeurs ,  des  voleurs  publics  ont  été 
acquittés,  parce  qu'ils  n'avaient  pas  commis  ces  cri- 
mes dans  des  intentions  contre-révolutionnaires  ;  el 
le  lendemain  ils  eurent  Teffronterie  d'aller  au  Pa- 
lais Royal  dîner  à  50  livres  par  télé.  Si  vous  faites 
traduire  ceux  dont  il  s'agit  devant  le  tribunal  révo- 
lutionnaire ,  ils  seront  acquittés  de  même ,  parce 
qu'ils  n'auront  pas  eu  des  intentions  contre-révolu- 
tionnaires. 

Musset  :  Voici  de  quels  crimes  sont  accusés  les 
hommes  qui  nous  occupent  dans  cet  instant.  Evrard 
était  à  la  tête  du  comité  révolutionnaire  d*Aurillac, 
et  Evrard ,  en  cinq  ou  six  mois ,  a  amassé  5  ou 
600,000  livres.  Les  accusés  ont  été  convaincus  par 
tous  les  citoyens  d'Aurillac,  que  j'avais  convoqués, 
que  j'avais  rassemblés  autour  de  moi,  des  exactions 
les  plus  révoltantes  ;  l'un  redemandait  15,000  liv., 
l'autre  20,000  liv.,  celui-ci  22,000  liv.,  etc.,  qu'ils 
avaient  données  pour  acheter  leur  liberté.  Aussi 
Evrard,  qui  était  noyé  de  dettes  sous  l'Assemblée 
constituante,  a-t-il  maintenant  le  mobilier  le  plus 
riche  ;  aussi  Evrard  a-t-il  acquis  des  propriétés.  Lui 
et  ses  complices  voyaient-ils  quelque  chose  qui  leur 
convenait ,  ils  savaient  bien  se  le  procurer.  «  Tu  as, 
disait  l'un  d'eux  à  un  père  de  famille,  un  beau  jar^ 
din  ;  cède-le-moi  ;  il  me  convient  pour  m'arrondir.  > 
Le  malheureux,  sachant  qu'un  refus  pouvait  le  plon- 
ger dans  un  cachot  ou  le  conduire  à  la  mort,  cédait 
son  jardin  :  c'est  ainsi  qu'agissaient  tous  ces  hom- 
mes; ils  ne  commettaient  pas  ces  crimes  avec  des 
intentions  contre-révolutionnaires,  mais  seulement 
pour  s'enrichir  en  pillant  les  autres. 

Je  croyais  que,  par  délicatesse,  Milhaud  aurait  dû 
se  taire  dans  cette  affaire.  (Murmures.)  Je  dois  tout 
dire.  Le  frère  de  notre  collègue  Milhaud,  capitaine 
de  gendarmerie  à  Aurillac,  a  été  accusé  devant  moi, 
mais  non  convaincu  des  déhts  qui  lui  étaient  impu- 
tés. 11  a  été  accusé  d'avoir  reçu  quelques  petits  ca- 
deaux ;  mais  il  a  eu  la  délicatesse  de  les  rendre.  (On 
rit.) 

Milhaud  :  Si  mon  frère  est  coui)ab]e,  je  demande 
qu'il  soit  puni  encore  plus  sévèrement  que  les 
autres. 

Mussst  :  Je  le  répète,  ces  délits  ne  sont  pas  con- 
tre-révolutionnaires. Je  demande  que  le  décret  soit 
adopté,  en  retranchant  ces  mots  :  «  Nonobstant  la 
qualification  de  conlre-révoluliohnaire,  • 

On  me  reproche  d'avoir  nommé  à  un  emploi  pu- 
blic un  homme  oui  avait  été  détenu;  mais,  si  cet 
homme  ne  devait  l'oppression  sous  laquelle  il  a  gé- 
mi qu'à  son  énergie,  qu'à  ses  lumières,  qu'à  son 
amour  pour  la  liberté,  était-ce  une  raison  pour  dé- 
tourner de  lui  le  choix  du  représentant  du  peuple? 
(Applaudissements.) 


CHOimiEn  :  Je  demande  qu'ayant  de  faire  traduire 
devant  un  tribunal  des  hommes  accusés,  on  entende 
la  lecture  des  pièces. 

Rbwbell  :  Si  l'on  avait  cité  la  loi  d'organisation 
du  tribunal  révolutionnaire,  on  aurait  vu  que  les 
délits  dont  il  s*agit  ici  ne  sont  pas  de  la  compétence 
du  tribunal  du  22  prairial;  mais  la  France  ne  veut 
plus  d'assassins.  (Vifs  applaudissements.)  Je  de- 
mande que  le  projet  soit  adopté. 

Milhaud  :  Je  dois  dire  que  mon  collègue  Musset 
a  rempli  sa  mission  dans  le  Cantal  d'une  manière 
digne  d'éloges  ;  il  n'a  été  guidé  que  par  Thumanité 
et  Injustice.  (Vifs applaudissements.) 

Quand  j'ai  dit  que  le  nouveau  président  du  tribu-- 
nal  avait  été  incarcéré,  je  n'ai  pas  prétendu  jeter  sur 
lui  aucune  défaveur;  j*ai  seulement  rapporté  un  fait. 
(Applaudissements.) 

Thuriot  :  Je  demande  la  parole  pour  une  motion 
d'ordre. 

Je  ne  parlerai  pas  des  hommes ,  mais  des  princi- 
pe*. Il  serait  à  souhaiter  que  tous  les  citoyens  fus- 
sent assez  généreux  pour  ensevelir  dans  l'oubli 
toutes  les  haines  et  les  vengeances  particulières.  Si 
vous  adoptez  le  projet  du  comité,  vous  allez  bientôt 
voir  que  tou5  les  tribunaux  seront  insuffisants  pour 
les  affaires  qui  seront  portées  devant  eux.  Cependant 
tous  les  crimes  doivent  être  punis;  mais,  avant 
d'envoyer  un  accusé  devant  un  tribunal,  il  faut  pré- 
ciser la  nature  des  délits  qu'on  lui  impute.  Je  de- 
mande l'ajournement  à  demain. 

Merlin  (de  Douai^  :  Thuriot  avait  annoncé  qu'il 
parlerait  en  faveur  aes  principes,  et  il  les  a  complè- 
tement méconnus^  H  ne  s'agit  pas  de  juger  les  ci- 
toyens d'Aurillac;  vous  n'êtes  ni  juges,  ni  jurés; 
vous  n'avez  à  décider  ici  qu'une  question  de  com- 
pétence. Les  délits  imputés  sont-ils  contre-révolu- 
tionnaires, ou  sont-ils  ordinaires?  La  lecture  du 
Code  pénal  suffit  pour  prouver  que  ces  délits  y  ont 
été  prévus.  La  question  est  décidée  par  ce  raisonne- 
ment. Je  demande  l'adoption  du  projet  de  décret. 

La  discussion  est  levée,  et  la  Convention  main- 
tient le  décret  précédemment  adopté. 

La  séance  est  fermée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  19  PLUVIOSE. 

Un  secrétaire  donne  lecture  des  lettres  suivantes: 

Blulel^  représentant  du  peuple  dans  les  ports  de  La 
Rochelle ^Roche fort ^  Bordeaux^  Rayonne  et  ports 
adjacents ,  à  la  Convention  nationale. 

Bordeaux,  le  13  pluviôse.  Tan  3*  delarépubli^e 
française,  une  et  indivisible. 

•  J*apprends  à  l'instant,  citoyens  collègues,  et  ie 
vous  annonce  avec  plaisir  l'entrée  à  La  Rochelle  cfu 
navire  anglais  le  Duc  de  Leeds.de  Liverpool,  ve- 
nant de  la  Grenade,  chargé  de  sucre ,  café ,  cotons, 
cuirs  tannés  et  bois  de  Campêche ,  et  armé  de 
14  canons,  pris  parla  corvette  le  Spartiate^  par 
les  300  de  longitude  et  les  45o  de  latitude.  Je  con- 
nais<:ais  cette  prise  depuis  longtemps,  en  ayant  été 
avisé  par  le  capitaine  même  de  la  corvette  le  Spar- 
tiate, entré  à  Rochefort,  et  aue  j'envoyai,  dans  le 
temps,  à  Paris  porter  lesdépécnes  dont  il  était  char- 
gé. Je  commençais  à  craindre  que  quelque  événe- 
ment fâcheux  ne  privât  la  république  des  objets 
précieux  que  contient  cette  riche  cargaison  :  mes 
craintes  sont  dissipées  par  la  nouvelle  que  je  vous 
transmets.  Malheureusement  l'équipage  a  souf- 
fert ;  les  braves  marins  qui  le  composent  ont  man- 
qué de  subsistances  et  éprouvé  les  suites  funestes  de 
la  rigueur  de  la  saison.  Je  me  flatte  que  les  habi- 


407 


Unis  de  La  Rochelle  les  auront  reçus  en  bons  frères, 
etjeur  auront  fait  oublier  une  partie  de  leurs  maux, 
quoiqu*ils  se  trouvent  eux-mêmes  dans  la  situation 
la  plus  cruelle,  et  entourés  de  glaces  et  de  neiges. 

m  La  communication  avec  Bordeaux,  entravée  de- 
puis quinze  jours,  n*est  rétablie  que  d'hier.  La  po- 
sition de  cette  commune  était  des  plus  alarmantes, 
vu  sa  situation  et  l'habitude  où  elle  est  d'être  ap- 
provisionnée par  rivière.  Le  peuple,  réduit  à  sept 
onces  de  pain  par  jour,  souffre  ses  maux  sans  se 
plaindre  :  il  a  éprouvé  déjà  la  même  privation  ;  et  le 
pain  au^on  lui  offrait  alors  était,  chaque  jour,  ar- 
rosé au  sang  de  ses  frères  :  aujourd'hui ,  le  cœur 
plus  content  par  le  retour  de  la  justice,  il  attend  de 
la  Convention  rallé^ement  de  ses  peines,  se  repose 
sur  sa  sagesse,  et  crie,  avec  ses  représentants  qu'il 
chérit  :  Vive  la  république  I 

«  Signé  Bi.utel.  • 

Cette  lettre  est  renvoyée  au  comité  de  salut  pu- 
blic. 

Les  représentants  du  peuple  près  l'armée  des  Py- 
rénées-Occidentales ^  et  pour  inspecter  les  ports  de 
la  république,  au  président  de  la  Convention 
nationale, 

A  SaÎDt-Sébastien,  le  2  pluviôse.  Tan  S*  de  la  repu-  | 
blique  française,  une  et  indivisible. 

«Nous  t'annonçons, citoyen  président, que  Tan- 
nivêrsaire  de  la  mort  du  dernier  tyran  a  été  célébré 
aujourd'hui  par  l'armée  ;  les  crisde  vtve  ta  répu- 
blique! mort  aux  tyrans!  ont  retenti  de  toutes  parts; 
l'artillerie  a  annoncé  la  solennité  de  la  fête  ;  les 
vaisseaux  qui  étaient  dans  le  port  ont  fait  flotter  le 
pavillon  tricolore  ;  leur  artillerie  a  répondu  à  celle 
de  la  citadelle  et  de  la  place. 

•  Salut  et  fraternité. 

•  Signé  Nion,  Delcber,  M.-â.  Baudot.  • 

Le  représentant  du  peuple  Treilhard,  délégué  dans 
le  département  du  Bec-d'Àmbês,  à  la  Convention 
nationale. 

Blaye,  le  7  pluviôse,  Tan  3*  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

«  Citoyens  collègues,  je  viens  de  jouir  d'une  des 
plus  douces  satisfactions  que  puisse  éprouver  un  ré- 

Eublicain.  L'équipage  d'un  navire  échoué  sur  un 
anc  au  pied  de  l'île  du  Pâté,  environ  à  demi-lieue 
de  Blaye,  a  été  sauvé  par  les  efforts  des  braves  ma- 
rins qui  se  trouvent  dans  ce  port.  Ce  navire  était 
crevé;  il  portait  douze  à  quinze  pieds  d'eau  dans  la 
cale;  il  avait  donné  tous  les  signaux  d'alarme  et  de 
détresse  ;  m^is  les  glaces  énormes  qui  couvrent  la 
rivière,  et  qui  s*étaient  amoncelées  autour  de  ce  bâ- 
timent, semblaient  interdire  toute  possibilité  d'y 
porter  secours  ;  les  glaces  du  rivage  mettaient  même 
un  obstacle  presque  invincible  aux  embarcations  ; 
elles  avaient  été  mutilement  tentées  hier  et  avant- 
hier, 

•  Enfin  aujourd'hui ,  à  huit  heures  du  matin,  les 
capitaine,  lieutenant  et  pilote,  accompagnés  de  neuf 
autres  marins  du>  port,  se  sont  embarqués  sous  mes 
yeux  dans  le  bateau  de  la  douane,  armés  de  haches 
et  de  gaffes  pour  couper  et  détourner  les  glaces. 
Presque  dans  le  même  instant  quatre  capitaines  des 
bâtiments  du  cabotage  qui  sont  dans  le  port  se  sont 
aussi  embarqués  dans  un  autre  canot  ;  ils  sont  par- 
tis avec  un  courage  intrépide,  et,  comme  les  pre- 
miers, ils  ont  fait  tous  leurs  efforts  pour  parveufr 
au  bâtiment.  Les  courants  du  flot  et  les  glaces  les 
ont  forcés  a  gagner  le  rivage,  aune  lieue  de  Blaye, 
au-dessus  du  navire  échoué ,  pu  Usent  attendu  la 


mer  descendante  pour  tenter  une  nouvelle  expédi- 
tion. 

«Cependant  un  troisième  canot  de  quatre  capi- 
taines et  de  deux  matelots  est  parti  environ  demi- 
heure  après  les  autres,  à  mer  étale;  il  a  franchi 
heureusement  toutes  les  glaces,  est  parvenu  à  bord 
du  bâtiment,  et  bientôt,  aux  acclamations  d'un  peu- 
ple immense,  il  ramena  cinq  personnes  de  l'équi-^ 
page. 

«  Il  a  été  bien  doux  pour  moi  de  donner  à  ces  bra- 
ves marins  l'accolade  fraternelle,  au  moment  où  ils 
ont  touché  la  terre.  Voici  leurs  noms  : 

«Jacques  Lcbot,  capitaine  du  chasse-marée  Jo- 
sephd'Arson  ;  Guillaume  Lepaves,  du  même  ;  René 
Letaillard,  du  Morbihan;  Julien  Legouonec,  capi- 
taine du  chasse-marée  Marie- Louise,  At  la  com- 
mune du  Baillard  ;  Joseph  Lequin,  matelot,  du  Mor- 
bihan ;  Julien  Lecor,  matelot,  du  Morbihan. 

•  Il  était  environ  dix  heures  quand  ils  sont  arri- 
vés ;  el  comme  ils  avaient  encore  laissé  treize  per- 
sonnes à  bord,  ils  ne  respiraient  qu'après  l'instant 
favorable  qui  leur  permettrait  de  tenter  un  second 
voyage  :  ce  ne  pouvait  être  que  vers  trois  ou  quatre 
heures.  J'ai  fait  servir,  dans  l'intervalle,  un  dîner 
républicain  ;  les  matelots  sauvés,  leurs  libérateurs 
et  moi,  avons  pris  ce  repas  civique  avec  la  joie  et 
répanchement  qu'on  éprouve  naturellement  en  pa- 
reille occasion. 

«Nos  marins,  impatients  de  tenter  une  seconde 
embarcation ,  nous  ont  bientôt  quittés  :  ils  dispo- 
saient tout  pour  leur  départ,  lorsque  les  marins  des 
deux  premiers  canots,  que  la  force  des  flqts  et  des 
glaces  avait  jetés  sur  le  rivage,  ont  fait  une  nouvelle 
tentative.  Ils  avaient  vu  de  loin  le  succès  de  leurs 
camarades;  enflammés  de  la  plus  noble  des  émula- 
tions, ils  ont  tout  bravé  pour  sauver  aussi  auelques- 
uns  de  leurs  frères  :  ils  touchent  enfin  le  bâtiment 
échoué,  et  reçoivent  sur  leur  bord  tout  le  reste  de 
l'équipage.  L'air  retentit  aussitôt  de  nouvelles  ac- 
clamations :  je  donne  l'accolade  fraternelle  à  tous 
ces  braves  gens. 

'  «  Voici  les  noms  de  ceux  qui  étaient  dans  le  canot 
de  la  douane  : 

«  Duvergu,  capitaine  du  port  ;  Jenty,  lieutenant; 
Eynard,  pilote,  de  Blaye;  Lalaste  fils,  Bassier  fils, 
Constant  Drageur,  Dr'ouin ,  Fonteneau ,  Delorier, 
tous  patrons; Simon  Tendeau,  matelot  breton;  Jean- 
Jacques  Marin,  Viaud,  Maçon. 

«  Voici  les  noms  des  marins  du  second  canot  : 

«  Prat,  capitaine  du  brigantin  l'Union;  Jacques 
•Pradigon ,  capitaine  du  sloop  les  Deux-  Sœurs; 
Michel  Jacauin,  capitaine  du  sloop  les  Deux-Frères; 
Vincent  Pelé,  matelot  du  brigantin  VUnion. 

«  Vous  jugez  bien  que  je  n'ai  pas  eu  pour  eux 
moins  d'attention  que  pour  les  marins  du  canot  qui, 
le  premier,  a  porte  du  secours  au  bâtiment  échoué. 
Il  serait  inutile  de  vous  peindre  l'allégresse  publi- 
que ;  mais  ce  que  je  ne  dois  pas  vous  laisser  ignorer, 
c'est,  d'un  côté,  Tempressement  des  citoyens  de  la 
commune  pour  recevoir  et  pour  soulager  l'équipage 
sauve,  et,  ne  l'autre,  la  modestie  des  libérateurs,  qui 
semblent  ne  pas  même  se  douter  qu'ils  ont  bien  fait. 
«  Nous  avons,  disent-ils, cempli  notre  devoir  envers 
«nosfrères,commeils  l'auraient  rempli  à  notre  égard 
«  en  pareille  occasion.  > 

«  Salut  et  fraternité.'^  Treilhard. 

•P.  5.  Je  vous  envoie  le  procès-verbal  des  offlciers 
du  port.  • 

La  Convention  nationale  décrète  la  mention  ho- 
norable et  l'insertion  au  procès-verbal  et  au  Bulletin 
des  noms  de  ces  braves  marins. 


408 


LequiniOf  représentant  à  ta  Ctmvention  naiionale. 

Chartres,  le  17  pluviôse,  Tao  3e  de  la  république. 

■  Citoyens  collègues,  violation  du  secret  des  fa- 
milles, inexactitude  dans  la  remise  des  lettres,  sou- 
vent leur  suppression  totale,  et  larcin  des  assignats, 
même  pour  des  sommes  considérables,  voilà  les 
plaintes  que  je  reçois  partout  contre  le  régime  des 
'  postes.  Le  plus  affligeant  encore,  c'est  que  ceux  qui 
en  souffrent  le  plus  habituellement  sont  nos  frères 
des  armées  qui  versent  leur  sang  pour  la  pairie  sur 
les  frontières  :  le  coquinisme  en  prive  un  très-grand 
nombre  des  légers  secours  que  leur  envoient  leurs 
parents. 

"  Les  administrateurs  sont-ils  eux-mêmes  coupa- 
bles de  ces  délits,  ou  ne  le  sont-ils  que  du  choix 
uionstrueusi'ment  vicieux  de  plusieurs  de  leurs  com- 
mis ?  Vous  ne  serez  pas  du  moins  surpris  de  ces  hor- 
reurs ,  quand  vous  saurez  que ,  dans  1rs  bureaux 
d'administration ,  il  existe  encore  des  hommes  de 
rapine  et  de  sang,  qui,  joignant  aUx  autres  vices  la 
plus  basse  lâcheté,  ne  se  sont  fourrés  là  que  pour  se 
soustraire  à  la  réquisition  en  même  temps  qu'à 
Tiiidignation  de  leurs  concitoyens;  de  ce  nonibre 
est  le  nommé  Ratlier,  contre  lequel  je  vous  envoie 
les  dénonciations  les  plus  formelles,  signées  des 
membres  des  différentes  administrations  de  Char- 
tres. Purgez  la  poste  de  pareils  hommes,  ou  n'espé- 
rez pas  de  réformer  les  abus. 

•  Salut  et  fraternité.  Signé  Lequinio. 

■  P.  5.  A  l'appui  de  ma  lettre,  je  joins  :  l®  la  dé- 
nonciation dont  je  viens  de  parler  ;  2o  une  réclama- 
tion du  commissaire  des  guerres,  qui  expose  les 
nombreux  larcins  faits  aux  défenseurs  de  la  patrie  ; 
3<>  une  pétition  qu'il  m'a  adressée  à  cet  effet;  4o  un 
procès-verbal  de  déposition  de  plusieurs  parents  de 
ces  défenseurs  ;  5o  enlin  une  Adresse  des  ofliciers 
municipaux  de  Chartres  a  ce  sujet  à  la  Convention 
nationale.» 

Cette  lettre  est  renvoyée  aux  comités  des  trans- 
ports, postes  et  messageries,  et  de  sûreté  générale. 

Lakanal,  au  nom  du  comité  d'instruction  pnbli- 
cTue  et  des  finances  :  Citoyens,  les  professeurs  de 
1  Ecole  Normale  se  réunissent  deux  fois  par  décade 
pour  se  concerter  sur  le  mode  uniforme  dans  Part 
d'enseigner,  et  sur  tous  les  objets  qui  intéressent  les 
progrès  de  l'établissement.  Parmi  ces  objets ,  il  en 
est  un  qui  a  fixé  la  sollicitude  de  votre  comité  d'in- 
struction publique.  Quelque  njélhodiques  que 
soient  les  professeurs,  les  élèves  de  l'Ecole  Normale 
sont  arrêtés  par  les  termes  techniques  dont  se  com- 
'posent  les  nouvelles  langues  adoptées  depuis  quch- 

Suc  temps  dans  certaines  sciences,  telle  que  la 
umie. 

11  est  donc  nécessaire  de  distribuer  aux  élèves  de 
nouvelles  nomenclatures  ;  il  importe  aussi  de  mettre 
à  leur  disposition  quelques  ouvrages  usuels,  tels 
que  la  Loyt9u^deCondillac,dont  la  méditation  doit 
servir  puissamment  à  l'intelligence  des  leçons  du 
professeur  de  l'analyse  de  l'entendement,  je  'dirai 
même  à  celle  du  professeur  de  mathématiques,  car 
le  septième  chapitre  répand  les  plus  vives  lumières 
sur  la  marche  de  l  cspritdans  la  formation  des  équa- 
tions ,  dans  la  traduction  eji  langue  algébrique  :  les 
lettres  d'EuIer,  où  ce  grand  homme  semble  se  jouer 
des  plus  grandes  difficultés,  et  rend  populaires  les 
vérités  les  plus  relevées;  en  un  mot,  les  ouvrages 
qui  présentent  éminemment  des  vérités  utiles  avec 
méthode  et  clarté. 

Citoyens ,  vous  le  savez ,  l'Ecole  Normale  prend, 
de  jour  en  jour,  un  grand  caractère  qui  fait  conce- 
voir aux  amis  aes  lettres  et  de  la  liberté  les  plus 
grandes  espérances.  Le  mérite  supérieur  des  profes- 


seurs et  le  civisme  des  élèves  forment  le  nlus  beau 
spectacle  que  l'on  puisse  offrir  à  la  raison  nuraaine. 
Vous  ne  voulez  pas  arrêter  la  marche  de  cette  grande 
institution  par  une  économie  déplacée  ;  c'est  dans 
ces  principes  que  vos  comités  d'instruction  publique 
et  aes  finances  m'ont  chargé  de  vous  proposer  le 
projet  de  décret  suivant  : 

<  La  ConventioD  nationale,  oui  le  rapbrt  de  ses  comités 
d'instructioD  publique  el  des  finances,  décrète  ce  qui  suit  : 
«  Le  comilé  d^insiruction  est  autorisé  à  laire  payer,  sur 
les  fonds  mis  à  la  disposition  de  la  commission  etécative 
fusqo*à  concurrence  de  30,000  li?.,  pour  la  dislribuiion 
des  ouvrages  qu*il  jugera  utile  defuire  délivrer  aux  élèves 
de  TEcole  Normale.  • 
Ce  projet  de  décret  est  adopté. 
Laranal,  au  nom  du  comité  d'instruction  pub1i« 
que  :  Citoyens,  vous  avez  décrété  qu'il  serait  ouvert, 
à  l'Ecole  Normale,  un  cours  d'économie  politique. 
Le  comité  d'instruction  a  discuté  les  titres  civiques 
et  littéraires  des  publicistes  appelés  à  cette  place  im- 
portante par  l'opinion  publique  ;  nous  avons  pensé 
que  le  professeur  d'économie  politique,  chargé  de 
chercher  et  d'indiquer  les  sources  de  la  nros^rité 
de  la  grande  famille,  devait  unir  les  lumières  à  l'a- 
mour de  la  république.  Nous  vous  proposons  le  pro- 
jet de  décret  suivant: 

(f  La  Convention  nationale,  oui  le  rapport  de  soo  èomîté 
dMnstrucUoo  publique,  nomme  lé  citoyen  Vandermondo 
professeur  d'économie  politique  à  TËcoie Monnaie,  a 
Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

{La  iuUe  demain,) 
N.  B.  Dans  la  séance  du  20  pluviôse,  le  comité 
de  sûreté  générale  a  donné  connaissance  de  l'état 
actuel  de  Paris.  Ces  jours  derniers,  des  troubles  ont 
eu  lieu  dans  les  spectacles  ;  mais  ils  ont  été  plutôt 
le  fruit  des  mouvements  inconsidérés  de  quelques 
jeunes  gens  que  de  mauvaises  intentions  ;  trois  ou 
quatre  ont  été  arrêtés,  les  autres  ont  été  rendus  à  la  : 
liberté  ;  d'un  autre  côté ,  dans  les  places  publiques, 
des  furies  de  guillotine  redemandaient  le  règne  de  ■. 
la  terreur  :  des  hommes,  des  femmes  même  outra-  \ 
geaient  l'humanité  et  la  morale  par  leurs  espéran- 
ces ;  ils  provoquaient  la  guerre  civile  et  la  dissolu- 
tion de  la  Convention ,  qu'ils  appelaient  sénat  de 
Coblentz  ;  ils  disaient  que  le  rappel  des  soixante- 
treize  représentants  dans  le  sein  de  la  Convention 
était  la  cause  de  la  contre-révolution  ;  ils  les  enve- 
loppaient, avec  trente  autres  représentants  du  peu- 
ple, dans  un  massacre  que  ces  monstres  nommaient 
une  épuration  :  on  avait  agité  les  habitants  des  fau- 
bourgs pour  les  porter  à  un  mouvement. 

Le  comité  de  sûreté  générale,  considérant  ou'au* 
cun  décret  n'ordonnait  de  placer  le  buste  de  marat 
dans  les  spectacles,  a  ordonné  de  l'ôter  dans  ceux 
où  il  restait,  afin  que  ce  ne  fût  plus  un  prétexte  de 
trouble  ;  il  a  fait  fermer  provisoirement  deux  clubs 

f|ui  se  tenaient  dans  le  faubourg  Marceau  et  dans  le 
aubourg  Antoine,  que  les  ennemis  de  la'Chose  pu- 
blique voulaient  transformer  en  comité  de  la  révolte 
ân'ils  préparaient;  enfin,  le  comité  a  fait  arrêter 
abœuf,  qui  ne  cessait  de  prêcher  la  guerre  civile,  et 
nui  a  offert  30,000  livres  au  gendarme  chargé  de 
1  arrêter,  pour  qu'il  lui  permît  de  se  sauver  ;  celui- 
ci  ne  lui  a  répondu  que  par  le  silence  du  mépris. 

La  Convention  a  approuvé  la  conduite  du  comité 
de  sûreté  générale,  et  ordonné  qu'il  sera  U\t  men- 
tion honorable  de  la  conduite  du  gendarme. 

Elle  a  en  outre  décrété  que  les  honneurs  du  Pan- 
théon ne  seraient  désormais  décernés  à  aucun  indi- 
vidu, et  son  buste  placé  dans  la  salle  de  la  Conven- 
tion ou  dans  tes  lieux  publics,  que  dix  ans  après  sa 
mort  :  tous  décrets  contraires  sont  rapportés^ 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  HONITËUR  UNIVERSEL. 

le  142.  Duodi  22  Pluviôse,  l'an  3«.  {Mardi  10  Février  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

COLONIES   FRANÇAISES. 

BxirttU  d'une  lettre  (C André  Higaud,  ei'devant  général 
du  département  du  Sud  de  Saint-Domingue  ^  écrite  des 
Cayesj  en  date  dn  10  vendémiaire ,  l'an  3*  de  la  répU" 
blique  f  rançaiie,  une  et  indivisible f  àPolverel,  ci'devant 
eommissaire  civiU 

«  La  province  da  Sud  est  tranquille  et  dans  un  état  de 
défense  respectable;  je  défle  les  ennemis  d*y  ?cnir,  du 
moins  sans  abreuver  la  terre  de  leur  sang.  Le  irayail  va 
bien  ;  vos  prurlainalioiis  sur  le  travail  de  la  culture  ont  tout 
l'eflel  que  vous  en  attendiez.  Les  Américains  et  les  Danois 
fréquentent  nos  poris.  Nous  somm.  s  approvisionnés;  nous 
les  payons  bien ,  ils  sont  contents.  Nos  aristocrates  sont 
revenus  de  leurs  erreurs,  ou  du  moins  ils  le  disent.  Je  fais 
mon  possible  pour  les  ramener  à  la  bonne  religion,  à  celle 
que  vous  m'avez  bien  fait  connaître,  mais  que  j*aime  natu- 
rdlement,  de  la  liberté  et  de  Tégallté,  d'être  invlolable- 
ment  attaché  à  la  république  française,  une  et  indivisible. 

Extrait  d^une  autre  lettre^  écrite  par  P.  Bayonne^  ci* 
devant  capitaine  de  navire  le  MomuSi  de  Bordeaux ^ 
arrivaHt  de  C  Amérique, 

Lorient,  10  pluviôse. 

«  Les  nouvelles  des  Cayes  étaient  du  15  octobre  (  vieux 
style).  Les  noirs  travaillaient  bien;  les  provisions  étaient 
abondantes;  la  farine  ne  valait  qur  8  à  9  gourdes  le  baril. 
Le  magasin  de  la  république  était  très-bien  muni.  Il  y  avait 
à  celte  époque  seize  navires  américains  et  six  danois  sur 
rade,  qui  ont  apporté  quantité  de  comestibles,  même  du 
vin  de  Bordeaux.  Le  sucre  brut  valait  40  à  45  livres  le 
qoimal  ;  le  café ,  13  à  14  sous  la  livre.  Les  Africains,  trou- 
vant avec  plus  de  facilité  le  débouché  de  leur  part  de  re- 
venu ,  et  jouissant  de  la  liberté  «  travaillaient  avec  plus  de 
courage  et  de  zèle.  Le  général  Rigaud  était  en  pos^ssion 
de  Léogane,  et  se  proposait  de  murcber  sur  le  Petit-Répu- 
blicain, qui  est  cerné  depuis  longtemps  par  les  noirs. 

«  Il  n*y  a  pas  de  doute  qu'avant  peu  les  républicains,  à 
Saint-Domingue,  fiuissent  par  en  chasser  les  ennemis  ;  ils 
sont  aux  portes  des  villes,  et  si  quelques  vaisseaux  assez 
mal  armés,  qui  sont  embossés,  ne  les  gênaient,  ibseraieul 
bien  vile  en  possession  de  toute  la  colonie.  Ils  se  battent 
avec  beaucoup  plus  d*inlrépidiié  depuis  qu*iis  ont  appris 
leur  liberté  décrétée  par  la  Convention,  et  en  sentent 
le  prix.  Ils  sont  maîtres  des  frontières  espagnoles  ;  rien  ne 
les  empêche  d'aller  en  avant.  Toussaint  firéda  a  pris 
Saint-Michel,  Saint-Raphaël  et  autres;  la  nouvelle  était 
certaine.  L*armée  de  Jean-François  avait  Idcilité  cette  con- 
quête aux  républicains,  et  s'était  réunie.  C'est  l'eflet  de  la 
liberté  qui  leur  a  fait  abandonner  le  parti  espagnol.  Il  ne 
sera  pas  difficile,  j'espère,  de  les  chasser  de  Saint-Doipin- 
gue;  les  voici  enfin  pris  à  leur  propre  piège.  On  croit  beau- 
coup que  le  général  Larcam  va  attaquer  le  fort  Dauphin  ; 
il  y  a  cependant  deux  vaisseaux,  dont  il  y  a  un  épidémie, 
embossés  sur  la  ville. 

■  J'espère,  en  dépit  des  ennemis  de  la  liberté,  que  Saint- 
Domingue  deviendra  un  jour  plus  productif  et  plus  florissant 
qu'il  n'a  jamais  été,  qu'il  y  aura  de  meilleures  mœurs,  et 
plus  d'amour  de  la  patrie.  > 

ALLEMAGNE. 

De  V armée  devant  Mayenee,  le  7  pluviôse,  —  La  gar« 
oison  de  Mayence  est  maintenant  de  vingt-deux  mille 
hommes,  en  y  comprenant  celle  de  Cassel.  La  gelée  a 
rendu  jusqu'ici  très-difficile  la  communication  entre  ces 
deux  places. 

Les  alliés  occupent,  en  avant  de  cette  place,  des  positions 
assez  étendues  et  garnies  de  retranchements.  L*armée  ré- 
publicaine forme  un  croissant  parfait  devant  celte  place. 
Les  Français  ont  achevé  presque  toutes  les  lignes,  les  batte- 
ries et  autres  ouvrages  uécessaires»  tant  pour  l«  sûreté  de 

3*  Série.   —  Tome  X% 


leurs  postes  que  pour  effectuer  les  approches  de  la  place. 

On  détache  des  troupes  des  environs  de  Manheim ,  pour 
augmenter  sans  cesse  Tarmée  de  .«iége  devant  Mayence.  Il 
en  vient  aussi  de  l'armée  de  la  Moselle. 

La  proximité  des  positions  de  l'armée  française  et  de 
celles  des  coalisés  fait  qu'il  s'engage  des  combats  conti- 
nuels qui  sont  sanglants  et  opiniâtres.  On  assure  qu'il  se 
prépare  uue  grande  opération  contre  Mayence. 

ESPAGNE. 

Madrid^  le  \(i  décembre»  —  La  nouvelle  des  dernières 
défaites  de  nos  armées  a  porté  la  terreur  et  le  désespoir 
dans  celte  capitale.  Nulle  part  la  paix  n*a  éié  si  désirée  ; 
néanmoins  lu  cour  songe  encore  à  faire  de  nouvelles  levées. 
Elle  a  publié  dernièrement  un  éilit  à  ce  sujet. 

Les  énormes  dépenses  delà  guerre  augmentent  de  foar 
en  jour.  Le  ministère ,  pour  y  faire  face,  a  mis  en  circula* 
tlon  des  papiers  royaux. 

Le  conseil  a  fait  publier  par  trois  commissaires,  dans 
la  province  de  Biscaye,  un  décret  qui  enjoint  à  tous  les 
habitants  de  déposer  les  armes  de  toute  espèce  qui  sont  en 
leur  possession. 

Cette  mesure  annonce  le  dénûment  de  moyens  défienslfe 
où  se  trouve  le  gouvernement  espagnol,  quoiqu^ll  fasse 
annoncer  que  ces  armes  sont  destinées  à  être  distribuées 
aux  Catalans,  qui  ont  oûert  une  levée  de  cent  cinquante 
mille  hommes,  pourvu  que  le  gouvernement  les  armât. 

—  Le  général  Colomera  vient  d*être  éle? é  an  grade  de 
capitaine  généraL 

Le  général  Verutia  a  dû  partir,  le  7t  de  Barcelonet 
pour  se  rendre  au  camp  de  Gironne. 

—  La  forteresse  de  Rosas  est  défendue  par  une  flottille 
de  chalou|H?s  canonnières  aux  ordres  de  l'amiral  Gravlna. 
On  assure  qu'elles  ont  démonté  plusieurs  batteries  fran- 
çaises. 

La  floiie  espagnole,  dans  le  cas  d'ane  eapitulatkm ,  doit 
se  retirer  à  M  a  bon. 

—  Les  Catalans  viennent  d'ériger,  de  leur  propre  anto- 
rite,  plusieurs  comités.  Quoiqu'ils  aient  informé  la  cour 
de  cette  démarche,  on  la  regarde  comme  un  attentat  au 
pouvoir  royal. 

ANGLETERRE. 

Londres^  le  9 janvier.  —  Le  Moming-Chronicle  répète 
encore  que  l'amiral  Howe  va  quitter  le  commandement  de 
la  flotte,  et  qu'il  sera  remplacé  par  lord  BridporL  Mais  il 
aioule  celle  fois-ci  que  ce  qui  a  déterminé  l'amiral  est 
rimpos^ibilité  de  remplir  sa  place  avec  honneur,  vu  l'état 
de  délabrement  vraiment  scandaleux  où  l'on  a  laissé  la 
marine. 

—  Le  silence  des  ministres  sur  ce  qui  regarde  la  Hol- 
lande n'a  point  échappé  au  public.  Il  en  conclut,  et  avec 
assez  de  justice,  que  les  choses  vont  au  plus  mal.  On  avait 
annoncé  que  les  alliés  devaient  tenter  une  attaque;  mais, 
comme  il  y  a  plus  de  huit  jours  que  l'époque  à  laquelle 
on  (lisait  qu'elle  aurait  lieu  est  passée,  ei  que  les  ministres 
ne  disent  rien  de  son  issue,  qu'ils  doivent  savoir  bonne  ou 
mauvaise,  ou  présume  que  les  alliés  n'ont  pas  osé  tenter 
celle  attaque,  et  que  les  Français  doivent  être  maîtres  de 
la  Hollande,  puisqu'il  n'y  avait  que  le  gain  d^ooe  bataille 
qui  pûl  la  sauver. 

Une  circonstance  confirme  cette  crainte;  c*est  que,  cet 
jours  passés,  la  Tamise  a  éié  prise  aux  environs  de  Wbite- 
hall,  quoique  la  marée  y  soit  très-forte,  événement  qui 
n'avait  point  eu  lieu  depuis  1786.  On  se  dit  ici  qu'en  ce 
cas- là  les  inondations  n'ont  pas  pu  arrêter  les  Français  dans 
leur  marche  victorieuse,  et  qu'aujourd'hui  les  dix-sept 
Provinces-Unies  pourraient  bien  être  une  province,  ou , 
pour  mieux  dire ,  un  déparlement  de  la  France.  Au  reste , 
l'orgueil  miuistériel  commence  à  baisser  de  ton  à  l'égard 
des  Français. 

—  On  assure  que  le  cabinet  a  désapprouva  la  noie  que 
sir  Richard  Worsiey  a  présentée  au  gouvfcrntnicn  vénitien» 
à  l'occasion  de  la  réception  d'un  nouveau  ministre  de  la 

ht 


410 


république  françaiset  CI  lai  a  ordonné  de  reUmrner  à 
Venise» 

Il  T  a  bien  forée  de  se  conduire  ainsi  pour  ne  pas  rendre 
la  paix  impoiisible,  car  il  règne  nne  grande  misère,  elc 

^  On  ttftndt  de  Norwicli  que  là  tâte  des  pau^n^s  y  t 
Ké  poriéê  è  la  nomme  énorme  de  19  90ns  6  d.  pour  livre. 
f^rUMl  le  prit  ép%  thoses  tiéoe»»alres  à  la  ?le  est  e xeessir. 

Les  feuilles  de  ropposUtoit  eonliennent  des  récits  d*ttc(es 
de  MentuiBanop  qw  plusieurs  personnages  célèbres,  entre 
anim  le  dne  de  Bedforiit  exercent  entera  les  pauvres  ba- 
bilalitft  des  tampagnvi.  Dant  plusieurs  lieux  ils  distribuent 
des  vivres  ou  du  iharbon,  ou  se  cotisent  pour  aciider  du 
blé  et  le  revfndre  ensuite  aux  indigents  ù  la  moitié  du  prix. 
On  voil  dans  quelques  COYîités  des  Termirrs  se  réunir  pour 
le  même  objet  (  iU  envoient,  aui  marché^  des  villes  oiil  le 
pain  manqae*  de»  grains  à  0  shelU  le  boisseau,  taudis 
qu*il  eu  coûte iS*U. 

^  Il  restait  encore  à  juger  quatre  prisouniers  aœutés 
4e  baute  Irabiion,  Le  procureur  général  a  déclaré  qii*il 
s'avait  aucuoe  cbarge  à  produire  contre  eux;  ils  ont  été 
acquittés  et  mis  en  liberté.  Ainsi,  il. ne  te  trouve  plus 
maintenant  dans  les  prisons  aucune  personne  arrêtée  de* 
puis  la  susptasioa  de  Vkaàemê  eerj^us^  et  prévenue  d'avoir 
Toalu  ren?  eraer  la  ooustitution  britannique.  Mais  Lemaitre 
ci  Higgias  u^out  point  encore  été  reiacliés  «  ils  viennent,  au 
contraire,  d'être  transférés  à  Newgiite.  On  ne  les  accuse 

Ks  d*avoir  vo«lu  asMssiner  le  roi»  Il  a  été  prouvé  que 
itoirc  de  la  (lècbe  empoisonnée  n'était  qu^uo  conte.  On 
Ignors  quel  prétette  les  ministres  pourront  donni'r  de  lo 
continuation  de  leur  emprisonnement  Pour  le  véritable 
BOli^i  il  n'est  pas  dittcÛe  è  trouver  <  c'est  que  ces  deux 
partknlicniaont  «omraa  pour  être  ée$  arembres  irès-ar- 
dents  des  nouvelles  Sociétés  constitutionnelles  eu  de  cor- 


—  Il  y  eu  à  diasgoasil  j  n  quelques  seasainesi  mi  aeu* 
letecMBt  assea  sérieux  dans  un  régiment  de  femeièlm^  dont' 
lord  Bieadalbene  est  colonel.  Quelques  soldaU  de  ce  H^* 
■ont  avaient  été  mis  en  pricon  i  leurs  oaaMradcs  usèrent 
de  violence  pour  les  en  retirer.  Une  partie  du  peuple  se 
jctfnit  ciut  celdaU^  «  alors  rinsumectfon  devint  telle 
qo*on  crut  devoir  appeler  les  troupes  qui  étalent  dans  les 
cnviroosk  Un  régiment  de  dragons  et  cinq  compagnies  de 
fwmdHêi  usarobèrent  d*Kdimboorg  è  cet  eiet  avec  tieuc 
pièces  de  uanen»  et  parvinrent  à  rétablir  lu  trauquillitéb 

Un  événement  d'un  genre  à  peu  près  semblable  vient 
d*arriver  à  Bath.  Le  65*  régiment  passait  par  celle  ville. 
Le  magistrat  ayant  laH  ttmdutre^  prison  un  soldai  qui 
avait  commis  quelques  désordres,  ses  caeiarades  déda- 
rèrent  qu^ils  ne  continueraient  pas  leur  route  sans  lui.  Le 
Biaf  istrat  se  déckla  alors  k  rendre  Je  prisonnier. 

—  Les  vents  contraires  ont  forcé  l'escadre  qui  devait 
aner  diercber  la  fille  aînée  du  duc  de  BrunswiclL ,  future 
épouse  du  prince  de  Galles,  de  reutrer  é  Sbeemess;  on  ne 
sait  pas  trop  si  les  conjouclures  présentes  ne  feront  point 
dUMÎrcr  ce  mariage. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Préêidêtteê  de  Barras* 

Èofport  sur  le$  félf  décadaires^  fait  par  lEichai- 
êériauœ  le  jeune  y  au  nom  du  comité  ainsUruclion 
fuMifme^  dans  éa  séance  du  17  pluviôse. 

Citoyens^  oi^ane  du  comité  d'instruction  publi- 
que «t  de  la  oemmission  qtie  vous  ave^  cliargée  de 
V0US  pr^enter  ub  travail  sur  les  fêtes  décadaires,  je 
▼iens  vo«s  «Dnineltre  un  projet  eue  la  politique 
tt)us  commande ,  et  que  la  r^pulHique  attend  de 
Vous  depuis  longtemps  :  le  peuple  soupira  après  fres 
fêtes  nationales  avicc  la  même  aitleur  qu'il  b  reçu  la 
constitution  qut  vous  Itri  avet  donnée. 

Lorsque»  h  rél^uMique  tt^omphante  marche  tous 
lesjoursà  la  gloire, ù  rafîeraiisscrociit  des  principes 
et  à  laprospéritc  nationale,  vous  devez «ciicver  vo- 
U*e  ouvi^e  e4i  fotiânNl  les  iustUutions  qui  la  reii«- 
dront  à  jamais  durable.  Vous  n'auriez  point  fini  la 


révolution ,  si  vous  laissiez  à  vos  successeurs  à  i 
dre  un  de  ses  premiers  bienfaits. 

Les  lois  politiques  fondent  la  liberté  :  ce  sont  les 
institutions  c^ui  leur  impriment  la  durée  et  la  véné- 
ration des  siècles  ;  ce  sont  elles  qui  créent  la  morale 
du  peuple  et  qui  forment  le  caractère  national  ;  ce 
sont  elles  qui  donnent  au  çénie,  aux  moeurs  d'un 
grand  peuple,  la  même  teinte  pour  n'en  former 
qu'un  seul  élément.  Elles  sont  le  rempart  de  la  li* 
bcrté  ;  on  ne  gagne  rien  avec  des  batailles  sur  une 
nation  qui  a  un  caractère  énergique  et  des  vertus. 
Les  tyrans  qui  ont  voulu  conquérir  un  peuple  libre 
ont  commencé  par  corrompre  ou  lui  arracher  ses 
institutions* 

Les  nations  qui  ont  eu  quelque  éclat  sur  la  terre 
soiil  celles  qui  se  sont  attachées  é  créer  des  hommes 
et  des  citoyens  :  on  ne  compte  que  des  infortunés 
et  des  victimes  parmi  celltô  qui  n*ont  point  eu  de 
patrie. 

Le  philosophe  qui  descend  des  siècles  où  fleuri- 
rent les  institutions  immortelles  qui  firent  la  force 
et  le  bonheur  de  la  Grèce  ne  marche  plus  qu'à  tra- 
vers les  tombeaux  où  le  fanatisme  et  la  tyraimic  ont 
précipité  le«  générations.  Depuis  ces  jours  de  gloire» 
oLi  vingt  peuples  assemblés  ci^lébraient  la  victoire, 
les  \'«rtus  et  la  patrie,  le  monde  n'oIRre  point  de 
spectacle  qui  enchante  les  regards  et  console  le 
cœur  de  l'homme  sensible. 

La  tyrannie  et  la  superstition  ont  désolé  la  terre  : 
vous  1  avez  vengée  de  Tune,  lé^slateurs,  vous  de- 
vez la  soulager  des  maux  de  Pautre  ;  vous  deveS 
éclairer  ses  erreurs. 

^  C'est  dans  ce  moment  que  votre  mission  s^agran* 
dit  et  prend  un  caractère  plus  touchant  ;  jusqu'ici 
vous  avei  eu  à  lutter  péniblemeat  contre  tous  In 
genres  d'obstacles  qui  peuveats'o()poser  è  la  fonda- 
tion d'une  grande  république  :  d  vt)us  est  doux  « 
dans  rinstitution  mic  vous  allez  fonder»  d'avoir  à 
.parler  au  coeur  et  a  U  r^ii^on  de  chaque  citoyen. 

Vous  ne  voulez  point  ressemblera  ces  lég:tskteurs 
qui  furent  prendre  dans  le  ciel  la  puissance  quils 
exercèrent  sur  des  peuples  trompés  ou  ^uits;  c'est 
au  sentiment  que  vous  voulez  confier  famour  et 
Tautorilé  de  vos  lois. 

Tel  est  le  but  que  nous  avons  tâché  d'atteindre 
dans  l'iustitution  que  nous  allons  vous  proposer* 
Le  chef'd'(Buvi>e  de  la  législation  est  peut-dire  de 
rapprocher  l'homme  de  ia  nature,  pour  le  rendre 
rertueu^c  d  heureux  ^.  nous  avons  pris  dans  ses  af- 
fections étemelles,  dans  les  vérités  simples  et  tes  hi- 
bittides  de  la  nature,  les  bases  de  la  fSie  civique  que 
Vous  allez  créer. 

fiépandre  parmi  le  peuple  les  éléments  de  la  mo- 
rale républicaine,  Tenllamnier  par  le  récit  et  les  sou- 
venirs des  belles  actions,  lui  mspircr  Pamour  des 
lois,  lui  retracer  sans  cesse  ses  droits  et  ses  besoins, 
produire  en  lui  Ténergie  des  passions  généretises» 
lui  in^^rimer  de  ^r«ndes  pens<^  de  la  lilterté,  l'at- 
taclier  à  la  patrie  par  tout  ce  que  peut  avoir  l'itt*** 
structioii  de  plus  touchant ,  et  le  plaisir  de  plus  in» 
nocent  :  voilà  le  plan  de  TinsUtutionquc  aousavoat 
tracé. 

Chaque  fétc  civique  offrira  une  vertu,  un  bienfait 
4c  la  Miiu  re>  de  Di  sodété>  o«  de  l«  rëfolirtmi  à  ce- 
fébiierv 

Trop  tenstemns  l'esprit  humain  s  été  ^réet  ofy» 
scurei  par  des  idées  métaphysiques  qn^il  D*a  iamais 
pu  comprendre  ;  il  est  temps  de  soumettre  à  la  rai- 
son de  rhomme,  les  idées  simples  et  les  biens  réels 
qui  font  le  bonheur  de  la  société. 

Les  premiers  de  tous  les  législateurs  du  monde^ 
vous  «lies  mettre  devant  lui  la  morale  publiaue  en 
actipn ,  et  consacrer  les  hommages  d'un  grand  peu- 


411 


p!e  aux  vi'rtus  sociales  et  aaz  droits  les  plus  sacrés 
du  genre  humain. 

Sur  les  ruines  do  toutes  les  erreurs,  vous  allez 
rôiabllr  le  cours  des  vertus  et  de  la  nature. 

Jusqu'ici  le  despotisme  avait  isolé  les  hommes 
pour  les  mieux  asservir;  la  superstition,  pour  mieux 
les  séduire  :  partout  leurs  passions  étaient  enchaî- 
nées nu  corrun)pues  ;  il  avait  fallu  les  dégrader  pour 
en  faire  des  esclaves. 

La  liberté,  pour  leur  apprendre  leurs  droits,  veut 

Î)ftrler  aux  hounues  rassemblés  ;  elle  veut,  pour  en 
aire  des  citoyens,  des  exercices,  des  jeux ,  des  spec- 
tacles. Ost  en  vivant  eontinuellement  ensemble, 
que  les  peuples  s'éclairent  et  prennent  des  habitudes 
chéries,  des  attachements  invincibles  qui  les  unis- 
■  sent  à  jamais  à  la  patrie  :  des  peuples  accoutumés  à 
vivre  ensemble  volent  tous  au  premier  signal  lors- 
qu'un danger  menace  la  républic(ue. 

Le  but  politique  de  votre  insUtution  est  done  de 
rassembler  souvent  les  citoyens  ;  mais  les  réunions 
d*un  peuple  libre  doivent  offrir  aux  yedx  ce  que  la 
patrie  a  de  plus  touchant  et  de  plus  cher.  Nous 
avons  pensé  que  la  vieillesse  et  les  différents  âges 
de  la  vie,  les  enfants  qui  sont  Tespérance  de  TEtat , 
placés  sous  les  regaros  des  cilovens,  doivent  faire 
un  des  principaux  ornements  des  (êtes  civiques.  Quel 
spectacle  attendrissant  n*ottraieut  pas  les  fêtes  de 
Sparte,  où  les  vieillards  et  la  jeunesse  venaient  tour 
à  tour,  en  chantant,  célébrer  les  belles  actions  de 
leurs  ancêtres,  et  jurer  de  les  surpasser  en  bravoure 
et  en  vertu  ;  ces  fêtes  où  les  mères  venaient ,  avec 
des  larmes  de  joie ,  vouer  leurs  enfants  à  la  repu- 
bliq^ue  î  Près  de  trois  mille  ans  sont  écoulés,  et  les 
institutions  de  Lycurgne  retentissent  encore  avec 
honneur  jusqu'à  nous. 

S'il  est  quelque  chose  de  respectable  chez  les 
hommes  libres,  c'est  la  vieillesse.  Nous  avons  fait 
descendre  toute  la  vénération  qui  lui  est  due  sur  cet 
âge ,  sur  ces  têtes  blanchies  par  les  ans,  et  qui  ont 
traversé  avec  courage  les  infortunes  de  la  vie.  C'est 
aux  patriarches  des  générations  à  présider  les  repré- 
sentations de  la  vertu,  et  les  dernières  scènes  cle  la 
vie  humaine  ;  le  respect  pour  la  vieillesse  a  toujours 
suivi  la  liberté  et  les  mœurs  :  malheur  aux  peuples 
chez  qui  la  vieillesse  commence  à  n'être  plus  res- 
pectée ;  ils  sont  près  de  la  servitude  :  c'est  dans  les 
mains  des  vieillards  que  nous  avons  mis  les  récom- 
penses à  décerner  aux  belles  actions  ;  leur  bouche 
prononcera  aussi  dans  les  fêtes  l'éloge  de  la  verttk 

.Nous  avons  fait  aussi ,  de  la  musique  et  des  chants, 
un  des  charmes  de  notre  institution  ;  uous  y  avons 
appelé  cet  art  dont  les  anciens  avaient,  pour  ainsi 
dire,  formé  un  des  éléments  de  leurs  constitutions  ; 
cet  art  qui  savait  inspirer  toutes  les  passions,  en- 
flammait tour  à  tour  le  courage  des  guerriers,  exci- 
tait le  cœur  à  la  pitié  et  à  la  tendresse,  et  auquel 
les  peuples  libres  durent  peut-être  une  partie  de 
leur  gloire  :  nous  nous  sommes  rappelé  que  ce  fu- 
rent les  sons  de  l'harmonie  qui  arrachèrent  le  sau- 
vage de  ces  forêts  qu'il  ensanglantait  par  ses  com- 
bats, et  que  les  premiers  législateurs  s  eu  servirent 
-  pour  appeler  les  nommes  eu  société ,  et  pour  donner 
plus  de  charme  à  leurs  lois.  Pourquoi  ne  produirait- 
il  pas  le  même  effet  sur  les  passions,  dans  les  fêtes 
civiques?  avec  quel  plaisir  n'entendons-nous  pas 
tous  les  jours  ces  airs  devenus  nationaux ,  qui  nous 
retracent  la  valeur  de  nos  soldats  et  la  gloire  de  nos 
armes!  Les  chants  et  la  musique  amollissent  l'âme 
des  courtisans;  ils  élèvent  l'âme  des  guerriers  et  des 
nations  libres. 

Les  lois  commandent  l'obéissance  aux  citoyens; 
Tinstruction  ptfrle  à  leur  esprit  et  à  leur  cœur  :U 
faut  aussi  que, dans  un  pays  libre,  la  puissance  des 


signet  Inspira  toz  citoyens  Pameur  de  la  patrie. 

Tandis  que  les  chants  des  hymnes  patriotiques  ré« 
veilleront  dans  leur  âme  la  puissance  des  sentiments 
républicains,  les  attributs  et  les  inscriptions  dont 
nous  décorerons  nos  fêtes  civiques  seront  aussi , 
pour  tous  les  citoyens,  une  instruction  profonde  : 
o'est  surtout  dans  les  emblèmes  des  arts  et  métiers 
qui  nourrissent  la  patrie,  dans  ceux  des  armes  qui 
la  détendent,  que  nous  devons  nous  attacher  à 
prendre  ces  décorations  patriotiques  :  qu'elles  soient 
seules  un  spectacle  touchant  pour  le  peuple  ! 

Le  jour  où  des  hommes  libres  se  reunissent  pour 
goAter  ensemble  les  plaisirs  de  la  fraternité  et  de 
régalilé  doit  être  aussi  consacré  i  l'action ,  à  l'allé- 
grense  publique  et  aux  exercices;  ce  sont  les  exer- 
cices qui  donnent  à  l'âme  un  corps  infatigable ,  l'ha- 
bitude et  le  mépris  des  dangers,  oui  donnent  ao 
citoyen  les  premiers  éléments  de  cette  ardeur  bouil- 
lante ,  impétueuse ,  qu'il  va  déployer  un  jour  dans 
les  combats.  Rappelons-nous  nue  ce  sont  eux  qui 
formèrent  les  grands  hommes  de  Pantiquité  :  o^esf 
des  champs  de  Mars ,  où  elle  vivait  dans  des  exer- 
cices continuels,  que  s'élançait  cette  jeunesse  ro- 
maine ,  pour  aller  à  travers  aes  pays  affreux .  com- 
battre les  peuples  a|;uerr|s  du  Rhin  et  du  Danube. 
Les  exercices  militaires  doivent  être  principalement 
l'objet  de  nos  fêtes  civiques,  parce  qu'ils  servent  i 
la  défense  de  la  patrie ,  et  qu'ils  doivent  être  la  pre- 
mièi*e  institution  d'un  peuple  qui  veut  conserver  sa 
liberté.  La  course ,  la  lutte  et  les  danses,  et  tous  les 
exercices  que  peut  inspirer  la  gatté  d'un  jour  où  les 
citoyens  sont  rassemblés,  doivent  être  abandonnés  à 
leur  choix  ou  à  leur  goût. 

L'idée  des  bançiuets  civiques  a  réuni  trop  de  chafw 
mes,  et  a  produit  trop  d*heureux  effets  dans  l'anti- 
quité ,  pour  n'être  pas  venue  se  fondre  dans  nos 
têtes.  Il  n*est  point  d'institution  qui  fasse  naitre  et 
développe  davantage  les  sentiments  d'amitié  et  d'al- 
légresse, qui  resserre  plus  les  liens  de  la  sociabilité 
parmi  les  citoyens.  Les  banquets  civiques  sont  Isa 
enfants  de  l'hospitalité ,  qui  a  étë  la  vertu  des  peu» 
pies  qui  ont  le  plus  honoré  la  terre.  Pourquoi  ne 
viendraient-ils  pas,  à  certaines  époques,  réjouir  nos 
fêtes  civiques? 

Ah  !  c'est  dans  ces  banquets  que  la  citoyen ,  assis 
avec  ses  frères,  goûte, -en  chantant  sa  patrie,  les 
vrais  plaisirs  de  la  fraternité  et  de  l'égalité,  et  qu'an 
milieu  des  transports  d'une  joie  pure,  il  charme  un 
instant  le  songe  rapide  de  la  vie.  Quel  plus  heureui 
moment,  pour  célébrer  ces  banquets,  que  l'époque 
où  le  retour  de  chaque  saison  ramène  à  l'homme  les 
nouveau^  bienfaits  de  la  nature  !  Si  on  pouvait  faire 
un  souhait  à  cette  tribune ,  c'est  que  la  Cpnventioa 
elle-même,  ou  les  législatures ,  donnassent ,  à  cette 
époque ,  l'exemple  d'un  banquet  Iraternel  à  toute  la 
république.  Quel  beau  jour  que  celui  où  les  législa- 
teurs de  la  France,  travaillant  ensemble  au  bonheur 
de  leur  pays,  viendraient  jurer  entre  eux,  devant  le 
peuple ,  une  union  solennelle  1  Le&  Romains  avaient 
élevé  un  temple  à  la  Concorde  :  le  voilà  le  temple 
impérissable  qu'il  faudrait  élever  parmi  nous.  Oh! 
combien  l'exécutiou  de  cette  idée  touchante  eût  em- 

Kéchf  ou  éteint  de  haines,  de  divisions  et  de  mal- 
eurs  !  Si  cette  pensée  pouvait  présenter  des  obsta- 
cles à  quelques  esprits,  qu'ils  sachent  qu'il  y  a  du 
courage  et  une  douce  satisiaction  à  tenter  le  bien. 

Tels  sont  à  peu  près  les  éléments  que  nous  avons 
fait  entrer  dans  le  plan  de  la  fête  civique  qui  va  votis 
être  proposé  ;  c'est  au  grand  jour  que  l'âme  s'épan- 
che souvent  davantage,  et  que  ses  jouissances  de- 
viennent plus  pures.  Les  fêtes  civiques  aiment  à  être 
célébrées,  autant  qu'il  est  possible,  en  plein  air.  La 
présence  de  la  nature,  le  cercle  vaste  d  un  bel  bori- 


412 


zoD,  inspirent  nias  de  gaîtë,  et  donnent  plus  de  ma- 
jesté aux  grandes  assemblées.  L'intérieur  obscur  de 
nos  temples,  la  forme  de  leur  architecture,  rappel- 
lent trop  encore  la  terreur  et  les  sombres  idipres- 
sions  des  idées  religieuses,  pour  y  concentrer  tou- 
jours les  citoyens.  Que  les  temples  soient  seulement 
consacrés  à  Tinstruction ,  durant  les  saisons  rigou- 
reuses. 

C'est  devant  son  magnifique  ouvrage  au'il  faut  cé- 
lébrer l'Etre  suprême  ;  il  sera  invoqué  aans  nos  fê- 
tes, non  plus  comme  autrefois  par  l'orgueil  et  l'am- 
bition qui  ont  trompé  les  mortels,  mais  par  des 
hymnes  et  des  chants  que  lui  adresseront  la  liberté, 
l'innocence  et  la  vertu.  C'est  là  le  culte  pur,  di^ne 
de  lui  et  de  1  homme  libre.  Ost  dans  les  fêtes  civi- 
ques que  les  hommes  de  tous  les  cultes  viendront  se 
réunir  pour  le  célébrer  ;  c*est  là  qu'ils  viendront  en- 
tendre la  douce  morale  de  la  patrie ,  et  oublier  bien- 
tôt les  illusions  dangereuses  par  lesquelles  le  fana- 
tisme avait  surpris  la  crédulité  trompée. 

Enfin  ,  dans  un  plan  d*une  exécution  facile  pour 
t;outes  les  communes  de  la  république,  nous  avons 
tâché  de  réunir  tous  les  genres  d'intérêt  qui  peuvent 
porter  le  citoyen  à  la  vertu  et  à  chérir  son  pays.  Le 
génie,  le  talent,  sont  appelés  à  embellir  nos  fêtes; 
ce  sera  au  temps  à  les  perfectionner  et  à  les  faire  ai- 
mer toujours  davantage.  Puissent  les  Français  em- 
brasser avec  amour  une  institution  qui  doit  les  ren- 
dre heureux  !  puisse-t-elle,  en  apprenant  aux  citoyens 
les  devoirs  et  les  vertus  les  plus  utiles  à  la  société, 
achever  de  détruire  dans  les  esprits  encore  asservis 
leurs  antiques  erreurs!  puisse-t-elle  faire  le  bonheur 
de  la  génération  qui  s'élève  et  de  ceux  qui  vien- 
dront après  nous  ;  ce  sera  la  plus  douce  récompense 
des  travaux  de  la  Convention  ! 

Eschassériaux  présente  un  projet  de  décret. 

Yoici  le  tableau  des  objele  de  chaque  fêle. 

A  la  Nature;  à  l'Amour;  à  la  Reproduction  des 
êtres;  à  la  Tendresse  paternelle;  à  la  Piété  filiale; 
à  l'Amitié;  à  la  Reconnaissance;  à  la  Vérité;  à  la 
Raison  ;  au  Génie  ;  à  la  Force  ;  au  Courage  ;  à  la  So- 
ciété; aux  Lois  ;  à  la  Justice  ;  aux  Arts  et  aux  Scien- 
ces; à  l'Instruction  ;  au  Travail  ;  à  l'Agriculture  ;  à 
riodustrie  ;  à  la  bonne  Foi  ;  à  l'Union  ;  aux  Devoirs 
de  l'homme  et  du  citoyen  ;aux  Vertus  sociales;  au 
Bonheur  commun;  à  la  Destruction  de  la  tyrannie; 
aux  Droits  de  l'homme  ;  à  la  Souveraineté  du  peuple; 
à  la  République;  à  la  Constitution  ;  à  la  Haine  des 
tyrans;  à  l'Amour  de  la  liberté;  à  l'Egalité ,  la  Fra- 
ternité; à  la  Patrie;  à  la  Gloire  nationale;  à  l'Cdu- 
eation  publique;  à  la  Régénération  du  peu  pie  français. 

La  Convention  ordonne  l'impression  du  rapport  <;t 
da  projet  de  décret. 


SUITE  A  LA  SEANCE  DU  19  PLUVIOSE. 

POTTIEB,  au  nom  des  comités  de  législatiot  et  mi- 
litaire :  La  loi  du  10  juillet  1791  vent  que  les  ap- 
pointements des  militaires  ne  puissent  être  saisis  que 
pour  ce  qui  en  excédera  600  livres.  Pour  juger  du 
mérite  et  de  l'effet  de  celte  disposition ,  il  faut  se  re- 
porter à  l'époque  à  laquelle  la  loi  a  été  rendue,  et 
aux  circonstances  qui  existaient  alors. 

La  révolution  était  commencée  ;  mais  la  France 
était  en  paix  avec  les  puissances  voisines.  L'état  mi- 
litaire subsistait;  mais  les  troupes  beaucoup  moins 
nombreuses  étaient  dans  leurs  garnisons;  elles  n'é- 
taient  pas  exposées  comme  aujourd'hui  à  des  dépla- 
cements journaliers,  à  une  activité  soutenue ,  à  de^ 
marches  contineHes ,  et  par  conséquent  à  des  dé- 
penses aussi  considérables. 


Les  dépenses,  je  ne  dirai  pas  seulement  d'agré- 
ment,  mais  de  strict  nécessnu'c,  ont  d'ailleurs  ex- 
cessivement augmenté  depuis  1791. 

Je  viens,  au  nom  des  comités  de  législation  et  mi- 
litaire, vous  proposer  de  modifier  cette  loi ,  qui  ne 
peut  plus  subsister  aujourd'hui  sans  de  très-graves 
inconvénients. 

Lorsau'on  vous  proposa ,  au  mois  de  messidor,  de 
suspendre  l'effet  de  toutes  créances  en  actions  civiles 
contre  les  défenseurs  de  la  patrie,  vous  jugeâtes, 
après  une  discussion  sage  et  profonde ,  qu'une  telle 
loi  aurait  été  subversive  de  tout  ordre  social ,  con- 
traire au  gouvernement  démocratique,  dangereuse 
par  ses  conséquences,  et  funeste  au  plus  grand  nom- 
bre; vous  rejetâtes  celte  proposition. 

Mais  il  est  possible  de  concilier  les  deux  idées.  Il 
faut  que  les  militaires  ne  se  fassent  pas  un  titre  de 
leur  état  pour  retarder  l'exécution  de  leurs  engage- 
ments; il  faut  que  leurs  créanciers  légitimes  puis- 
sent exercer  les  droits  que  la  loi  leur  ouvre  ;  mais  il 
faut  aussi  qne  celui  qui  se  sacrifie  tout  entier  à  la  dé- 
fense de  la  patrie  trouvje,  dans  le  prix  de  ses  efforts, 
les  moyens  de  satisfaire  à  ses  besoins;  il  faut  qu'il 
puisse  être,  jusqu'à  un  certain  point ,  à  couvert  de  la 
cupidité  de  certains  créanciers.  En  un  mot ,  il  ne  faut 
pas  q^ue  la  subsistance  d'un  général  habile ,  d'un 
tacticien  précieux,  d'un  militaire  intelligent  et 
brave ,  puisse  dépendre  des  poursuites  plus  ou  moins 
actives  d'un  créancier  rigoureux  ou  trop  avide. 

On  a  pu  croire,  en  1791,  qu'en  temps  de  paix  les 
appointements  des  officiers  pouvaient  être  réduits  à 
50  livres  par  mois,  par  l'effet  des  poursuites  des 
créanciers  ;  mais  aujourd'hui  il  faut  en  Juger  autre- 
ment. L'intérêt  de  la  chose  publique  exige  impérieu- 
sement une  mesure  plus  étendue  ;  et  devant  ce  grand 
intérêt  doit  céder  celui  des  créanciers.  Il  est  dans 
votre  intention ,  il  doit  être  dans  celle  de  tout  bon 
Français  d'assurer  aux  défenseurs  de  la  patrie  ce  que 
leurs  besoins  exigent.  L'excédant  seul  peut  devenir 
le  gage  de  leurs  créanciers. 

Les  comités  ont  pensé  qu'ils  devaient  vous  propo- 
ser d'affranchir  les  militaires  de  la  ligueur  de  la  loi 
de  1791,  et  de  restreindre  la  faculté  de  saisir  les  ap- 
pointements à  une  somme  beaucoup  moindre. 

Ils  ont  adopté  pour  base  la  disposition  d'un  de  vos 
décrets ,  celui  du  2  thermidor,  relatif  à  In  solde  des 
militaires  :  il  y  est  dit ,  dans  les  articles  XXII,  XXllI 
et  XXIV,  qu'eu  cas  de  dégradation  ou  dégâts  dans 
le|  bâtiments,  ameublements  et  fournitures  destinés 
au  logement  des  troupes,  la  retenue  ne  pourra  ja- 
mais excéder  le  cinquième  du  payement  à  faire  aux 
militaires  qui  y  auraient  participé. 

Le  rapporteur  conclut  par  un  projet  de  décret  qui 
est  adopté  en  ces  termes  : 

«  La  Convention  nationole,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  ses  comités  de  législalioo  et  militaire,  décrète  et 
qui  soit  : 

«  La  iréKorerie  nationale  est  autorisée  à  faire  payer  aux 
officiers  des  troupes,  aux  commissaires  des  guerres,  et  tous 
autres  employés  dans  les  armées  ou  à  la  suile,  grevés  d'op- 
positions par  leurs  créanciers,  les  quatre  cinquièmes  de 
leurs  appointements;  le  cinquième  restant  sera  réservé, 
aux  créanciers,  qui  pourront  d*ailleurs  exercer  leurs  droits  ' 
sur  les  autres  biens  de  leurs  débiteurs,  i 

Abmand,  au  nom  du  comité  de  sûreté  générale  : 
Tout  n'a  pas  été  prévu  dans  le  décret  qui  ordonne 
aue  les  cartes  de  sûreté  seront  renouvelées  à  Paris , 
dans  l'espace  de  deux  décades  :  plusieurs  de  ces  car- 
tes, qui  avaient  appartenu  à  des  condamnés  ou  à  des 
personnes  mortes,  ont  été  vendues  ;  d'autres  ont  pris 
des  passeports  dans  leurs  sections,  et  ont  prêté  leurs 
cartes,  i  la  faveur  de  ce  double  emploi.  Pour  faire  ces- 
ser cesabus,  le  comité  vous  propose  le  décret snivant: 


D'APRÈS    WATTIER. 


Tjp.  llfir.  IMiiB. 


BéimprtsMou  de  l'.lmrign  Uoniletir.  —  T.  \Xlll,  pagt  41  i. 


La  Di'esse  de  la  Liberté. 


41S 


«  Art.  I*'.  Toat  citoyen  qui  fiendra  faire  à  Tofficier  de 
police  la  déclaration  d'un  décédé  sera  tenu  de  remeltrvla 
carie  du  mort,  qui  seia  poitèe  au  comité  civil. 

•  II.  Les  administrateurs  de  polie  et  concier^  des 
maisons  d*arrCl,  et  les  préposés  aux  hôpitaux  seront  tenus 
de  se  Taire  remettre  les  caries  des  ciîojrens  qui  y  entreroot, 
el  de  les  faire  passer  aux  comités  cirii     esprctifs. 

•  III.  Les  citoyens  ne  pourron  ol>teiiir  des  passeports 
pour  sortir  de  Paris  qu'après  avoir  dépose  leur  carte ,  qui 
leur  sera  remise  à  leur  retour. 

«  IV.  Tout  citoyen  qui  quittera  sa  section  pour  entrer 
dans  une  autre  sera  lenu  de  (aire  rayer  son  nom  de  dessus 
la  liste  de  sa  compagnie,  de  déposer  sa  carte;  il  lui  en  sera 
donné  récépissé  par  le  comité  civil,  pour  quMl  puisse  en 
obtenir  une  noufelle  dans  une  autre  section,  t 

Ce  décret  est  adopté. 

Un  membre  demande  qu^il  soit  porté  ooe  peine  contre 
es  contrevenants  à  la  présente  loi. 

Cette  dernière  proposition  est  renvoyée  au  comité. 

— Thil>ault  se  présente,  au  nom  du  comité  des  finances, 
pour  soumettre  ù  la  discussion  un  projet  de  décret  sur  la 
marque  d*or  et  d'argent  ;  il  repousse  d'at)ord  une  assertion 
consignée  dans  une  brochure  où  Ton  combat  son  projet  de 
décret  L*auteur,  dit- il,  y  a  avancé  qu*à  la  foire  de  Beau* 
caire  on  avait  vendu  beaucoup  de  cuivre  pour  de  Tor  : 
ce  fait  est  faux. 

Le  comité  avait  été  instruit  qu*nne  foule  d'étrangers  de- 
vait s*y  rendre  pour  tmmper  les  négociants  honnêtes  ;  il  y 
a  envoyé  des  commissaires  pour  vérifier  le  litre  de  Tor  et 
de  l'argent  rois  en  vente,  et  par  cette  mesure  il  a  fait 
écbouer  le  projet  des  fripons. 

Thibault  lit  ensuite  le  projet  de  décret. 

Montmayau  annonce  qu'il  a  des  réflexions  k  présenter, 
qa*il  n*u  pas  son  travail  ;  il  demande  que  la  discussion  soit 
ajournée  à  trois  jours. 

Cet  ajouniement  est  décrété. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SilNCB  DD  20   PLUflOSI. 

On  fait  lecture  de  plusieurs  Adresses  :  tontes  respirent 
une  haine  égale  pour  le  royalisme,  le  terrorisme ,  el  pour 
toute  espèce  de  tyrannie.  Les  citoyens  des  Sociétés  popu- 
laires qui  les  écrivent  applaudissent  aux  travaux  de  la 
Convention  depuis  le  9  iherii)idor,  et  l'invitent  k  anéantir 
pour  jamais  le  reste  de  la  faction  de  Robespierre. 

Ces  Adresses  seront  insérées  au  Bulletin. 
'  L'agent  national  du  district  de  Montfort,  déparlement 
de  Seine-et-Oise,  écrit  que ,  pendant  les  mois  de  vcndé- 
Biaire,  brumaire,  frimaire  et  nivôse,  des  biens  d'émigrés, 
estimé^  466,000  livres,  ont  été  vendus  383,000;  et  d'au- 
tres, évalués  à  400,000  ont  monté  à  600,000  livres. 

—  Un  secrétaire  fait  lecture  d'one  lettre  de  Parés ,  re- 
présentant du  peuple  près  les  armées  du  Nord  et  de  Sam- 
bre-et-Meuse. 

«  Envoyé  dans  ces  contrées,  dit*il,  pour  y  connaître 
Tesprit  public,  les  renseignements  que  j'ai  pris  m'ont  donné 
}»  résultats  les  plus  satisfaisants.  Le  royalisme  et  la  su- 
perstition n'occupent  que  quelques  têtes  ;  c'est  par  i*ln« 
struction  qu'on  peut  les  guérir,  je  ne  la  négligerai  point. 

•  Ici  on  déteste  le  sang'et  la  terreur;  la  tùlt  du  3  plu- 
viôse a  éié  cék^brée  avec  gatté,  et  surtout  avec  cette  fran- 
^  cbise  qui  caractérise  les  républicains. 

«  Un  autre  fuit  vous  fera  connaître  le  bon  esprit  et  les 
•entiroentsdesciioyens;  un  instituteur  élève  ici  dans  les 
principes  républicains  quatre-vingts  jeunes  gens  sans  rien 
exiger,  le  le  recommande  à  la  générosité  nationale.  > 

La  Convention  décrète  la  mention  honorable  de  cette 
lettre,  et  la  renvoie  au  comité  des  secours  et  d'instruction 
pour  récompenser  ce  généreux  instituteur. 

—  Poitier,  au  nom  du  comité  de  législation,  fait  on 
rapport  sur  les  moyens  de  mettre  le  tribunal  révolution- 
naire en  activité  de  service,  en  attendant  l'arrivée  de  tous 
les  membres  qui  doivent  en  composer  les  diverses  sections. 

Pour  remplir  cet  objet ,  il  fait  rendre  le  décret  suivant  : 
«  Le  président  du  tribunal  révolutionnaire  est  autorisé 
nrovisoirement,  en  attendant  qae  les  trente  jurés  de  ce  tri- 
kmal  soient  rendus  à  'eur  poste,  à  faire  tirer  au  sort  onxe 
Jurés,  sur  le  nombre  de  ceux  qui  sont  à  Paris,  pour  que 
chaque  procès  qui  sera  mis  à  la  dlicoiskMi ,  en  présence  de 


I  accusateur  pobKc,  ou  de  Tun  de  les  substituts,  H  d*ni 
commissaire  de  la  section  à  laquelle  le  procès  est  assignét 
puisse  être  suivi.  • 

—  La  famille  do  citoyen  Cablel,  administrateur  des 
subsistances  et  qui  a  péri  par  ordre  de  la  commission  r^ 
volutionnaire  de  Strasbourg,  expose  que  le  chef  de  celte 
famille  n'a  péri  par  ordre  de  Sainl-Just  que  parce  qu'il  lui 
reiusa  une  carpe  qu'il  avait  achetée,  et  que  Saini-Jusi 
voulait  faire  servir  sur  sa  table.  Cette  famille  dem^mde  que 
des  actions  qui  avaient  été  placées  sur  la  tète  de  ses  enfants 
par  Cahlet ,  pendant  sa  vie,  et  qu*on  fait  diificulté  de  leur 
payer,  soient  remises. 

MiLHAUD  :  La  pi^tition  qui  vous  est  pr^ntée  est 
très-intéressante  :  les  trois  enfants  de  Cablet  com- 
battent sous  les  drapeaux  de  la  républinue  ;  des  ad- 
niiuistrations  ont  prétendu  que  les  actions  placées 
sur  leurs  têtes  devaient  revenir  a  la  nation,  après  la 
mort  du  |ȏre  ;  je  ne  le  pense  pas  :  je  demande  le 
renvoi  de  cette  pétition  au  comité  de  l^islatioOt 
pour  vous  en  faire  un  prompt  rapport. 

Le  renvoi  est  décrété. 

—  Plusieurs  citoyens,  possesseurs  de  terrains  réunis  p« 
décret  au  Muséum  d'Histoire  naturelle,  viennent  récla 


contre  un  arrêté  du  bureau  des  domaines  nationaux  du 
département  de  Paris,  qui,  s*il  était  suivi,  priverait  les 
citoyens  de  retirer  de  leurs  possessions  leur  juste  valeur» 
Ils  demandent  que  l'estimation  soit  laite  par  des  experts, 
comme  dans  les  ventes  à  l'amiable,  qui  auront  égard  a« 
prix  auquel  ont  été  aliénés  des  terrains  voisins  et  sea* 
blables. 

***  :  Je  demande  que  la  pétition  soit  renvoyée  aa 
comité  des  finances  ;  je  ne  crois  pas  que  la  Conven- 
tion veuille  violer  les  Droits  de  I  Homme,  qui  por- 
tent que  nu!  ne  peut  iHre  dépouillé  de  ses  propnétéf 
sans  son  consentement,  et  sans  une  juste  indem- 
nité. 

Je  demande  que  le  comité  fasse  faire  les  estima- 
tions du  consentement  des  propriétaires,  qu*il  en 
fasse  ensuite  un  rapport  pour  que  la  Convention 
connaisse  le  montant  du  terrain  à  acheter,  et  qu*elle 
puisse  faire  exécuter  son  décret,  si  les  sommes  ne 
lui  paraissent  pas  exorbitantes.  —  Décrété. 

—  Milhaud,  ort^nne  du  comité  militaire,  fait  un  rapport 
sur  les  indemnités  dues  au  général  Meyere,  qui  fut  desti* 
tué  de  son  grade  de  chet  descadron  par  l'effet  de  l'erreur 
sans  doute.  Ce  brave  militaire  s'est  toujours  distingué  par 
des  actions  d'éclat.  Au  passage  de  TEscaut ,  Me>ere ,  à  la 
tête  d'un  seul  bataillon  des  Alpes,  se  bvltil  pendant  um 
journée  entière  contre  dix  mille  Autrichiens,  en  tua  quinaa 
cents,  en  blessa  un  grand  nombre,  et  en  fit  plusieurs  autres 
prisonniers,  et,  pur  la  sagesse  de  ses  manœuvres,  il  sauva 
une  de  nos  colonnes  qui  allait  êtrecou|)ée. 

Le  comité  de  salut  public,  après  avoir  examiné  la  con- 
duite de  Meyere,  lui  a  rendu  la  liberté  el  son  grade  mili- 
taire. 

Le  comité  propote  de  lui  Ihlre  payer  son  traitement  Jos- 
qu'i  ce  jour. 

CeUe  proposition  est  décrétée. 

—  La  citoyenne  Lepelletier,  qui  a  eu  une  jambe  empor* 
tée  d'un  coup  de  canon,  au  moment  où  elle  portait  des  se* 
cours  à  nos  blessés,  auxavant-posti^  réclame  des  secours. 
Bourdon  (6e  l'Oise  )  demande  que  cette  citoyenne  soit 
traitée  comme  les  militaires  lilessés  au  service  de  la  patricb 

Celte  proposition  est  décrétée. 

-»  Les  rentiers  de  Paris  présentent  une  pétition  sur  Icv 
situation. 

m  Nous  venons,  disent-ils,  déposer  dans  votre  sein  no- 
tre peine  et  notre  misère;  c'est  à  vous  qu'il  appartient 
d'alléger  nos  maux.  Nous  ne  doutons  pas  de  vos  efforts 
pour  rendre  à  la  vie  des  citoyens  qui  ont  fait  avec  couraga 
tous  les  sacrifices  que  la  révolution  a  demandés.  • 

Ces  citoyens  terminent  par  demander  :  i^  la  suppression 
de  la  retenue  du  cinquième  sur  leurs  renies;  S*  le  rapport 
du  décret  qui  supprime  la  réversibilité. 

Cambon  :  Je  crois  devoir  annoncer  qu*avant  la  fin 
de  la  décade,  et  avant  le  payement  qui  s'ouvrira  la 


414 


décade  prochaine,  le  comité  des  fioances  vous  pré* 
seotera  uo  rapport  nou-seulement  sur  la  réclama- 
tiuD  que  vous  venez  d*entendre ,  mais  encore  sur 
plusieurs  autres  qui  ont  été  faites  à  votre  comité  ; 
je  suis  chargé  de  ce  travail,  je  vous  soumettrai  tou- 
tes les  observations. 

Celte  pétition  est  renvoyée  au  eomité. 

—  Les  administrateurs  du  district  de  Bapanme  font 
eonnattre  la  conduite  généreuse  des  liabilants  de  ces  con* 
trée3,  qui,  loin  de  profiter  de  la  lil>rrté  que  la  loi  leur  laisse 
d'âitgmenler  les  grains,  continuent  de  les  délivrer  au  prix 
du  maximum. 

->  On  lit  les  lettres  soiventes  t 

Turreau^  repré$enianl  du  veuplê  pris  la  armées 
d'Italie  et  des  Alpes^  à  ta  Convention  nationale, 

fiioe,  le  1 1  pluvioM,  Tan  8*  de  la  république 
françAÎte,  une  et  indivitible, 

«  La  rlffueor  delà  saison ,  citoyens  collègues,  a  doublé 
la  lenteur  des  communications.  Voire  décrei  sur^annive^ 
saire  delamoridu  tyran  n'est  parvenu  à  l'armée  que  quel- 
fttcs  jours  après  le  31  janvier.  Celle  heureuse  éfftoque  de  la 
cbiite  de  la  tyrannie,  toujours  présente  à  Tesprit  des  répu« 
bUcains  qui  combattent  pour  la  liberté,  nVn  a  pas  moins 
été  célébrée  d'une  manière  digne  d*eui  et  du  peuple  fran- 
çais. 

«  L'armée,  dans  tous  les  eaotonnements ,  à  tons  les 
•vanl-postes  >  juré,  sur  ses  armes  victorieuses,  d'eiécrer 
à  Jamais  les  rois  et  leur  mémoire,  et  de  ?erser  tout  son 
saug ,  s'il  le  fallait,  pour  le  maintien  de  la  république  une 
et  indivisible. 

•  Voire  organe  auprès  d'elle,  j'ai  partagé  ses  serment», 
el  )'ai  assuré  les  braves  soldats  qui  la  composent  que  rien 

ne  pouvait  égaler  leur  constance  bérolque  à  supporter  les 
fttiigues  de  la  guerre  de  la  liberté,  leur  intrépidité  è  com- 
battre ses  ennemis,  que  la  profonde  exécration  de  la 
Convention  nationale  pour  les  rois  et  la  royauté. 

«  Saurais  désiré  rassembler  l'armée  sur  un  même  point, 
et  lui  faire  entendre  en  même  temps  les  paroles  que  f*al 
em  devoir  lui  adresser.  Les  localités  et  la  conservation 
èes  postes  s'y  opposent  ;  mais  je  les  ai  transmises  danstoOs 
les  cantonnements  el  tous  les  avant-postes.  Elles  y  ont  été 
entendues  et  répondues  avec  le  même  enthousiasme  que 
par  le  reste  de  Tarmée. 

«  Un  cri  général  s*est  élevé  sur  tout  le  territoire  occupé 
par  elle  :  c  Périssent  les  tyrans  et  leur  mémoire  1  vive  à 
famais  la  république  une  et  indivisible  1  •  Le  canon  a  ré« 
pété  jusqu'aux  oreilles  du  despote  sarde  les  sermeotsetles 
f0oz  des  républicains. 

•  Salut  et  fhtlernité.  ToaasAV.  » 

L0  général  en  chef  de  Varmée  des  Pyrénées-Oo* 

cidentales  au  président  de  la  Convention  natiO' 
nale. 

Au  quartier-gënëral  de  Chauvin-Dragon,  le  6  pluviôse, 
VàQ  3'  de  la  république  française,  une  et  indivisible. 

«  Citoyen  président,  l'anniversaire  de  la  mort  du  der* 
nier  roi  des  Français ,  de  Capet,  a  été  célébré»  le  %  plu- 
viôse, dans  toute  Tamiée  des  Pyrénées*Oociden  taies. 

«  Là  nous  avons  voué  à  l'exécration  de  la  pohtérité  ré- 
publicaine le  tyran  ;  là  nous  avons  tous  juré  par  les  mânes 
des  hommes  du  10  août,  par  les  mânes  de  ceux  moissonnés 
dans  celle  guerre  de  la  liberté  contre  la  tyrannie,  de  ne 
reconnaître  jamais  ni  roi,  ui  royauté, et,  nouveaux  Brutus, 
de  plonger  un  fer  vengeur  dans  le  sein  de  quiconque  ose- 
rait aspirer  au  gouvernement  d'un  seul. 

•  Le  représentant  du  peuple  Baudot,  qui  a  présidé  la 
ftle  à  Tolosa,  vous  rendra  compte,  sans  doute,  que  Tar- 
raée  des  Pyrénées-Occidentales  est  toujours  digne  delà  ré* 
publique,  par  son  opinion  fortement  prononcée  pour  son 
horreur  invincible  contre  les  rois  et  la  royauté. 

t  Salut  et  iiQtemité.  Moncbt.  i 

—Une  députatlon  des  citoyens  de  la  commune  de  Chà- 

tewi-Renard»  réunis  en  Société  populaire,  est  admise  à  la 

barre. 
VoraUur  :  Citoyens  représentants,  nous  venons. 


au  nom  de  la  commune  de  Château-Renard,  réunie 
en  Société  populaire,  vous  témoigner  toutes  ses  fc- 
licitations  sur  les  mesures  que  vous  avez  prises  pour 
maintenir  les  droits  du  peuple,  l'unité  et  l'indivisi- 
bilité de  la  républiaue. 

Vous  avez  déjoue  les  complots  des  tyrans  et  des 
traîtres;  vous  avez  pénétré  jusqu'au  fond  du  repaire 
de  ces  monstres  affamés  de  sang  et  de  carnage;  vous 
avez  fermé  les  portes  de  Tantre  exécrable  oes  Jaco- 
bins ;  vous  avez  anéanti  le  système  de  terreur  et  de 
sanguinocratie  qui ,  pendant  trop  longtemps  a  fait 
de  la  republique  un  vaste  el  affreux  cimetière  ;  mais 
vous  n'êtes  pas  à  la  tin  de  vos  travaux.  Ce  n'est  pas 
assez  d'avoir  abattu  une  des  têtes  de  Thydre  :  il  fout, 
à  l'exemple  d'Hercule,  les  abattre  toutes;  il  faut 
emp^her  que  ses  membres,  que  sa  queue  surtout, 
semi)lable  à  celle  des  vers  et  des  serpents  venimeux, 
ne  puisse  jamais  se  renouer  en  se  rapprochant. 

Le  peuple  de  Montargis,  de  Château-Renard  et  de 
toutes  les  communes  voisines,  depuis  prè^  de  six 
mois,  demande  inutilement  justice  des  infâmes  Bes- 
soii  père  et  tils,  des  Bedu,  des  Guillemard,  des  Cha* 
banal,  Thivot,  Guerre  et  autres,  et,  avec  toutes  les 
communes  de  la  république,  de  tous  tes  anthropo- 
phages qui  ont  si  longtemps  et  si  cruellement  désolé 
son  territoire.  Je  suis  porteur  des  dénonciations 
faites  contre  eux  par  la  commune  entière,  et  dont 
les  faits  universellement  reconnus,  recueillis  dans 
des  informations  faites  par  le  directoire  du  district 
de  Montargis,  attestent  la  sanguinocratie  la  plus 
révoltiiule  et  l'esprit  de  contre-révolution  le  plus 
caractérisé. 

La  commune  les  accuse  d'avoir  été  les  principaux 
agents  du  système  de  terreur  et  de  dépopulation  ; 
d'avoir  imposé  des  taxes  arbitraires  sur  les  citoyens 
qu'ils  voulaient  persécuter,  et  qu'ils  ont  consom- 
mées  en  orgies  et  à  payer  leurs  espions  ;  d'avoir,  à 
Faide  de  la  plus  horrible  inquisition,  fabriqué  des 
crimes  aux  bons  citoyens,  tantôt  sur  les  dénoncia- 
tions les  plus  calomnieuses,  arrachées  aux  faibles 
par  la  terreur  et  à  prix  d'argent  ;  d'avoir  violé  les 
droits  les  plus  sacrés  de  la  nature;  d'avoir  empêché 
les  ciloyens  opprimés  de  porter  leurs  plaintes  à  la 
Convention,  en  leur  arrachant  les  mémoires  qu'ils 
portaient,  et  en  les  faisant  arrêter  avec  les  menaces 
et  les  traitements  les  plus  tyraniiiques;  d'avoir  fait 
incarcérer  arbitrairement  les  eitoyens  dont  ils  pou- 
vaient craindre  les  regards  et  Ténergie  ;  d'avoir  fait 
riiillotiner  le  citoyen  Pougerol,  dont  le  crime  était 
d'être  riche  et  d^employer  tous  les  ans  une  partie 
de  son  revenu  à  vêtir  et  alimenter  les  indigenls  de 
la  commune. 

Législateurs, frappez,  punissez  les  coupables;  sur- 
tout point  d'amnistie  pour  eux  :  la  paix  est  inipos* 
sible  entre  les  loups  et  les  brebis.  (Vifs  applaudis- 
sements.) 

Législateurs,  le  peuple  ne  veut  que  la  justice  et 
les  lois  ;  plus  de  ces  grands  mots  qui  n'ont  servi 
qu'a  le  tromper  ;  plus  de  ces  expressions  cruelles  et 
terribles  dont  le  crime  a  trop  longtemps  épouvanté 
la  terre.  (Mêmes  applaudissements.)  Marchez  è  pas 
de  géants  vers  vos  hautes  destinées  ;  consommez  vos 
illustres  travaux,  et  comptez  sur  le  respect,  la  son- 
mission  et  l'entier  dévouement  du  peuple  de  notre 
commune. 

Le  Présidbiit,  è  la  députatlon  :  Citoyens,  vous 
venez  donner  à  la  Convention  nationale  une  nou- 
velle preuve  de  votre  attachement  à  la  république, 
de  votre  horreur  pour  la  royauté  et  pour  les  enne- 
mis du  peuple.'  Les  ennemis  du  peuple  sont  ceux  qui 
le  flattent  pour  l'asservir  ;  ceux  qui  cherchent  à  ré- 
tablir la  tyrannie  ;  ceux  qui  attentent  è  la  liberté  de 
fa  presse;  ceut  qui  ont  toé  ou  voudraient  tuerie 


411 


ccmoierce  ;  ceux  qui  Jetamt  TëpouvanU  et  la  mort 
dans  les  familles,  qui  d4Epouinaieot  la  tendre  et 
vf'rtueuse  épouse,  la  pudique  et  iatéressante  fille, 
sous  les  yeux  màne  du  mari  et  du  respectable  vieil- 
lard à  qui  ellrs  devaient  le  lour;  ce  sont  ceux  enfin 
qui  ont  couvert  la  France  d  un  crêpe  lunèbre.  Soyez 
calmes,  citoyens  ;  la  Convention  nationale,  investie 
des  pouvoirs  du  peuple,  saura  punir  ses  oppresseurs 
et  ses  bourreaux.  £lle  vous  invite  à  assister  à  sa 
séance. 
La  pélkion  a  été  renvoyée  an  oonité  de  lOreté  généralcw 

La  Convention  en  décrète  le  mention  honorable  et  nn« 
sertiou  au  Bulletin. 

Matbibo,  a»  nom  du  comité  de  sûreté  générale  : 
Citoyens,  depuis  quelques  jours  la  tranquillité  pu- 
blique était  menacée,  les  amis  de  la  liberté  inquiets, 
et  les  partisans  du  régime  odieux  et  funeste  de  la 
terreur  décelaient  de  coupables  espérances.  Cette 
situation  ne  pouvait  manquer  de  provoquer  l'active 
sollicitude  du  gouvernement,  et  particulièrement  du 
comité  de  sûreté  générale. 

Ce  comiié  croit  devoir  aujourd'hui,  par  mon  or- 
gane, vous  rendre  compte  de  quelques  mesures  qu'il 
a  prises  oour  le  maintien  d»  Tordre,  sans  lequel  il 
B*est  m  liberté,  ni  lois. 

Ce  n*est  pas  lorsque  la  Convention ,  jalouse  de 
ooBserver  éins  toute  son  intégrité  la  liberté  de  la 
presse  et  le  droit  de  ()étition,  se  montre  disposée  à 
accueillir  les  réclamations  et  lesd(Mnandes  qui  por- 
tent Tempreinte  de  la  justice  et  le  sceau  respectable 
de  rutilitë  générale;  ce  nVstpas  lorsqu'elle  prouve, 
par  les  lois  et  les  actes  qui  émanent  de  son  autorité, 
combien  elle  désire  et  veut  fix(T  la  tranauillité  pu- 
blique par  les  mesures  de  sa^sse  et  ahumaoitë 
dont  la  volonté  du  peuple  lui  fait  un  devoir,  qu'elle 
•  doit  voir  indiWremment  des  mouvements  partiels 
et  inconsidérés  de  la  part  de  quelques  individus,  des 
mouvements  et  des  tentatives  coupables  de  la  part 
de  quelques  autres  :  réprimer  les  écarts  de  cenxb, 
les  mameuvres  et  les  complots  sinistres  de  ceux-ci, 
tel  était  le  devoir  de  votre  oomitéjde  sûreté  générale; 
il  a  su  le  remplir. 

Je  ne  vous  entretiendrai  pas  de  la  conduite  qn'ont 
tenue  plusieurs  jetines  gens  au  spectacle  <le  î'Ambi- 
ga-Comiq^ie  ;  il  me  suflira  de  vous  dire  que  votre 
comité  a  trouvé  plii:>  de  légèreté  que  de  mauvaises 
intentions  dans  la  conduite  de  la  plupart  d'entre 
eux.  Deux  on  trois,  ayant  agi  d'une  manière  répré- 
liemable,  ont  été  arrêtés  ;  les  autres ,  rendus  à  la  li- 
berté, ont  reen  raverlissemerit  tTen  vmnix  user,  de 
la  respecter  dan?  les  représentations  dramatiques, 
sauf  l'exercice  «lu  droit  que  tout  spectateur  acquiert 
en  payant  son  billet  d'entrée  au  spectacle. 

Qes  mouvemeuls  plus  dangereux  ont  fixé  Tatteu- 
tion  de  votre  comité  .  et  pruvoqnf  de  plus  sévères 
mesurfç.  Des  hemuies  pervers  ont  cherché  à  égarer 
«tes  hommes  fwibles  on  crédules  ;  dans  les  idaces  pu- 
bliques on  «sait  regretter  la  tyrannie  et  redemander 
lu  *p«^eur;  4ans  les  Sociétés  populaires,  dans  des 
rassemblrmenls  secrets  (mats  dont  auc^iu  nt  l'était 
pour  r«ul  vigilant  de  la  police), des  hommes,  des 
femmes  même  calomniaient  la  justice,  insultaient 
par  leurs  vœux  à  l'humanité,  outrageaient  la  liberté 
et  la  morale  par  leurs  espérances,  et  appelaieut  par 
leurs  discours  la  guerre  civile  et  la  dissolution  de 
la  représentation  nationale.  Les  propos  les  plus  se* 
ditieux  trouvaient  des  échos,  et  la  rébellion  avait 
sa  trompette.  La  Convention  était,  disait»on,  le^- 
|Mt  deCoblentz,  et  la  contre-révolution  votre  systè* 
■ne.  La  rentrée,  dans  votre  sein ,  de  vos  collègues, 
dont  le  rappel  a  été  diclé  et  consacré  par  la  justice, 
était  présentée  tomme  IVbauche  de  cette  contre- 


révolution  ;  les  envelopper,  avec  trente  autres  répr^ 
sentants,  dans  un  massacre  général  que  ces  monstres 
appelaient  épuration ,  éuit  un  des  attentats  qu'ils 
IN-ojetaient.  » 

Le  doute  serait-il  permis  sur  l'existence  de  ces 
projets  sinistres,  lorsqu'un  des  interprètes  de  cette 
poignée  de  factieux  proclamait  hautement  la  rébel- 
lion dans  une  feuille  que  les  hommes  du  parti  distri- 
buaient gratuitement,  et  qu'ils  affectaient  de  lire 
dans  quelques  tribunes  populaires?  C'est  ainsi  que 
l'on  cherchait  à  égarer  uiéme  les  feubourgs  de  Paris; 
on  eût  voulu  faire  servir  les  mains  qui  ont  abattu  la 
Bastille  à  relever  les  échafaudsde  la  terreur. 

Ces  complots  devaient  échouer  :  l'espoir  des  per- 
vers a  été  encore  une  fois  trompé  ;  les  citoyens 
des  faubourgs  ont  su  reconnaître  et  distinguer  les 
étrangers  et  les  inconnus  qui  se  confondaient  parmi 
eux  pour  les  porter  à  des  excès. 

Le  piMipIc  a  su  cueillir  en  plus  d'une  eireonstancft 
les  lauriers  de  la  victoire  ;  il  sait  aussi  cueillir  les 
fruits  de  la  sagesse  et  de  l'expérience. 

La  manière  dont  l'opinion  publique  s'est  pronon- 
cée sur  Mnral,  dans  (juclques  spectacle ,  lui  était 
présentée  comme  un  crime  :  on  proposait  de  venger 
sa  mémoire  ;  son  buste  fut  porté  en  triomphe,  ou  en 
sig/ie  d'alarme,  par  quelques  membres  d'une  Société 
populaire  au  faubourg  Antoine.  Frappé  de  déchéance 
sur  les  théâtres,  ce  buste  retrouvait  une  couronna, 
dans  un  club  :  là  on  accusait  la  dictature  encore 
subsistante  de  son  tombeau,  et  le  despotisme  encore 
vivant  de  sa  mémoire  ;  ailleurs  on  invoquait  son 
nom  on  implorait  son  image  :  les  uns  regardaient 
comme  un  emprunt  forcé  sur  l'admiration  publique 
le  décret  qui  place  les  restes  de  cet  homme  au  Pan- 
théon ;  les  autres  regardaient  votre  décret  comme 
un  acte  de  justice  en  Êiveor  d*uu  martyr  de  la  li- 
berté. 

Au  milieu  de  tontes  ces  divisions  et  de  ces  inquié- 
tantes discordes,  votre  comité  de  sûreté  générale  n*a 
vu  que  votre  décret,  qui  place  Marat  au  Panthéon  ; 
mais,  ne  connaissant  aucune  loi  qui  ordonne  d'ex- 
poser son  effigie  dans  les  spectacles,  il  a  donné  Tor- 
dpc  de  déplacer  ce  buste,  sujet  de  division  et  de  trou- 
bles, des  théStres  ofi  il  était  encore,  et  d'effectuer  ce 
déplacement  avant  les  heures  de  représentation  et  la 
réunion  des  spectateurs. 

Un  trait  de  lumière  a  éclairé  votre  comité  :  âts 
hommes  trop  connus  dans  la  révolution  par  leurs 
excès  ont,  uans  unr  prison,  promené  le  buste  de 
Marat,  avec  imprécation  contre  le  gouvernement, 
contre  les  autorités  constituées  et  les  vrais  républi- 
cains, amis  de  la  justice  et  des  lois.  Ce  fait,  rappro- 
ché de  celui  d'un  rassemblement  qui  a  eu  lieu  ces 
jours-ci,  où  des  hommes  se  sont  montrés  armés  de 
poignards  conspirateurs,  et  n'ont  point  dissimulé 
rusa^e  qu'ils  voulaient  eu  fhire,  en  aésignant  même 
les  victimes  Qu'ils  voulaient  frapper  dans  votre  sein, 
ont  provoque,  de  la  part  de  votre  comité,  quelques 
mesures  oue  vous  jugerez  sans  doute  propres  à  rap- 
peler Tordre  et  la  tranquillité  publiuue. 

Un  nommé  Baboeuf,  violateur  des  lois  et  faussaire 
jusque  sous  le  nom  de  Gracchiis  qu'il  usurpe,  est 
arrêté;  il  est  maintenant  dans  l'impuissance  d'ap- 

Seler  les  citoyens  à  la  révolte,  comme  il  ne  cessait 
c  le  faire  depuis  un  mois.  Vous  ne  serez  point 
étonnés  lorsque  je  vous  dirai  que  cet  homme  a  voulu 
corrompre  le  gendarme  qui  la  arrêté,  et  lui  a  pro- 
posé 30,000  livres  et  une  sauvegarde  pour  prix  de 
sa  liberté  :  vous  ne  serez  point  étonnes  non  plus 
Itïrsqur  je  vous  dirai  que  le  gendarme,  nomme  La- 
bre, compagnie  d'Armet,  a  opposé  le  silence  du 
mépris  à  celte  coupable  proposition.  Le  club  de 
Lajouski ,  faubourg  Marceau ,  celui  des  Quinze- 


41C 


Vingts,  faubourg  Antoine,  sont  fermés  provisoire- 
meut ,  et  la  ?oix  des  amis'de  la  patrie  et  ae  la  liberté 
se  fera  désormais  entendre  avec  fruit  dans  les  assem- 
blées générales  de  sections,  chaque  décadi,  sans  que 
les  heureux  fruits  de  leurs  «aees  délibérations  puis- 
sent être  altérés  par  de  coupables  déclamations  dans 
deux  Sociétés  populaires  où  la  voix  des  bons  citoyens 
ne  pouvait  plus  être  écoutée. 

Telle  a  été  la  conduite  de  votre  comité  de  sûreté 
générale.  Il  est  persuadé,  avec  vous,  que  la  terreur 
est  subversive  de  tout  gouvernement  ;  que  la  justice 
et  la  conKance  peuvent  seules  consolider  la  liberté 
et  Tegalilé,  bases  de  notre  république.  Trop  long- 
temps le  génie  de  la  haine  a  plané  sur  la  France,  et 
versé  sur  la  république  les  plus  funestes  calamités. 
Les  comités,  de  concert  avec  la  représentation  na- 
tionale, ne  cessent  de  prendre  les  mesures  les  plus 
efficaces  pour  foire  succéder  à  ce  règne  affreux  le 
règne  de  la  justice  et  de  Thumanité. 

Ce  rapport  a  souvent  été  interrompu  par  les  plus  vifs 
•pplaudissemenis. 
On  en  demande  Tinsertion  au  Bulletin. 
***  :  Et  Tapprobation  de  la  conduite  du  comité. 

Plusieurs  voix  :  La  mention  honorable  de  la  con- 
duite du  gendarme. 

Toutes  ces  propositions  sont  décrétées.  (On  applaudit 
de  nouveau.) 

André  Dumont  :  Il  est  enfin  arrivé  le  moment  où 
la  vérité  tout  entière  doit  dissiper  les  derniers  nua- 
ges de  la  fourberie  et  de  l'imposture  !  il  est  arrivé  le 
moment  où  la  vertu  doit  faire  disparaître  le  crime  ! 
L'heureuse  révolution  du. 9  thermidor  a  dilaté  tous 
les  cœurs,  elle  les  a  tous  attachés  au  gouvernement 
républicain  ;  ce  serait  en  vain  qu'on  chrrchrrait  à 
élever  un  doute  à  cet  égard.  Le  règne  de  l'équité, 
celui  de  Thunianité,  la  pratique  des  vertus,  le  res- 
pect des  personnes  et  des  propriétés  ont  succédé  à 
cette  odieuse  tyrannie,  à  ce  régime  exécrable  du 
jacobinisme ,  à  cette  soif  inaltérable  de  sang  et  de 
rapines;  un  aussi  heureux  changement  a  relevé 
l'espérance ,  a  ranimé  le  courage  de  tous  les  Fran- 
çais. Ils  ne  sont  plus  ces  temps  affreux  où  la  pensée 
ne  pouvait  être  exprimée  dans  le  sein  même  des  fa- 
milles! ils  ne  sont  plus  ces  temps  où  faire  le  bien 
était  un  crime  !  ils  ne  sont  plus  enfin  ces  temps  où 
l'audace  de  la  scélératesse  imposait  à  l'homme  de 
bien,  et  l'envoyait  k  réchafaua  !  Vous  avez  renversé 
la  tyrannie  ;  mais  avez-vous  abattu  tous  les  tyrans  ? 
Ayons  le  courage  de  le  dire,  il  en  existe  encore,  et 
leurs  nouveaux  efforts  appellent  la  vengeance  na- 
tionale. Ne  vous  y  trompez  pas.  citoyens,  la  mal- 
veillance s'agite  ;  de  nouveaux  complots  s'ourdis- 
sent; on  veut  ramener  le  régime  atroce  du  sang; 
montrons  donc  cette  énergique  et  invariable  réso- 
lution d'abattre  tous  les  buveurs  de  sang  ;  anéantis- 
/  sons  cette  abominable  conspiration,  et  ne  laissons 
,  plus  un  seul  Français  douter  de  notre  volonté.  Qu'é- 
;  taient  les  Jacobins  le  9  thermidor?  des  révoltés.  Que 
■  sont-ils  aujourd'hui  ?  des  provocateurs  à  la  révolte. 
Que  font-ils?  ils  trament  contre  la  liberté  ;  ils  or- 
ganisent des  assassinats ,  ils  jurent  notre  perte  et 
menacent  de  leur  vengeance. 

Depuis  trop  longtemps  leurs  manœuvres  sont 
connues; depuis  trop  longtemps  leur  audace  indigne 
les  bons  citoyens;  il  faut  enfin  se  prononcer.  Il  ^ut 
faire  rentrer  dans  la  poussière  cette  horde  de  bri- 
gands. Qu'avons-nous  à  craindre?  le  poignard  sur 
lequel  on  a  juré  notre  mort?  Eh  bien,  bravons  cette 
arme  du  crime  et  opposons-y  celle  du  bon  citoyen, 
le  courage  de  la  vertu.  Qu  avons-nous  à  craindre 
d'ailleurs,  quand  tous  les  bons  citoyens  sont  atta- 


chés à  la  cause  qae  nous  défendons,  quand  tons  les 
bons  citoyens  sentent  une  indignation  profonde 
contre  ces  ennemis  de  la  justice  â  ces  partisans  de 
la  tyrannie?  Prononçons-nous,  et  de  toutes  les  par- 
ties de  la  France  nous  entendrons  répéter  le  serment 
sacré  de  respecter  les  lois  et  d'en  défendre  les  orga- 
nes. Partout  les  ennemis  de  la  justice  et  les  bour- 
reaux de  l'humanité  veulent  diviser  et  secouer  la 
torche  ensanglantée  d'une  guerre  civile.  Nous  pou- 
vons l'éteindre  d*un  mot  :  il  faut  le  prononcer.  Ne 
laissons  pas  plus  longtemps  impunis  ces  buveurs  de 
sang,  ces  partisans  de  rapine  ;  ils  fondent  leur  espoir 
sur  des  ombres  de  morts  ;  de  bons  citoyens  se  lais- 
sent égarer  et  poursuivent  un  ennemi  impuissant, 
au  lieu  de  surveiller  leurs  persécuteurs  et  leurs  as- 
sassins. Faisons  disparaître  ces  ombres  inutiles; 
laissons  à  la  postérité  à  les  juger,  et  montrons-nous 
digues  de  la  cause  que  nous  avons  à  défendre  et  du 
peuple  que  nous  repré-sentons,  en  frappant  tous  les 
ennemis  de  la  patrie,  en  cimentant  une  paix  hono- 
rable à  la  nation  et  en  assurant  la  félicité  publique  ; 
c'est  alors  c^u'à  la  place  d'un  caveau  sinistre  nous 
|K)urrons  faire  élever  un  autel  à  la  Liberté,  a  la  Jus- 
tice et  à  l'Humanité. 

Je  ne  crois  pas  pouvoir  trouver  une  occasion  plus 
favorable  de  vous  présenter,  au  nom  des  trois  co- 
mités de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  de  lé- 
gislation, le  projet  de  décret  suivant,  qu'ils  ont  ar- 
rêté dans  leur  avant-dernière  réunion  : 

«  La  Convention  nationale,  sur  la  proposition  de  ses 
comités  de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  de  législation, 
décrète  ce  qui  suit  : 

-  Les  honneurs  du  Panthéon  ne  pourront  être  décernés 
à  aucun  cUoyen ,  et  son  buste  placé  dans  la  Convention 
oalionale  et  les  lieux  publics,  que  dix  ans  après  sa  mort. 

•  Tout  décret  dont  les  dispositions  aéraient  contraires  ^ 
est  rapporté.  • 

Cbassous  :  Le  rapport  qui  vient  de  vous  être  fait 
me  paraissant  calqué  sur  les  principes  inaltérables 
de  la  justice,  je  m'attendais  qu*il  serait  suivi  d'un 
projet  de  décret  appuyé  aussi  sur  la  justice.  Je  n'ai 
point  entendu  dans  ce  rapport  rien  qui  fût  analogue 
au  décret;  mais  j'y  ai  entendu  des  déclamations 
contre  les  terroristes,  les  buveurs  de  sane  qui  me- 
nacent la  Convention.  Loin  de  moi  l'idée  de  détour- 
ner la  justice  de  dessus  la  tête  de  ceux  qui  ont  pro- 
voqué la  dissolution  de  la  Convention  et  l'assassinat 
de  quelques-uns  de  ses  membres;  mais  je  demande 

aue,  coniormément  aux  principes  contenus  dans  ce 
iscours,  la  Convention  charge  ses  comités  de  faire 
justice  de  ceux  sur  qui  |>èsent  les  paroles  d'André 
Dumont.  (ViCs  applaudissements.)  Afin  aii'on  dis- 
tingue bien  à  quelle  époque,  à  quelle  période  ont 
commencé  les  troubles  qui  ont  motivé  le  rapport, 
ne  conlondons  pas  ceux  qui  ont  fait  des  provoca- 
tions continuelles ,  ne  confondons  pas  ceux  qui  ont 
attaqué,  avec  ceux  qui  n'ont  fait  que  leur  répondre. 
(Applaudissements  à  l'extrémité  gauche.)  Je  de- 
mande que  le  comité  de  sûreté  générale  poursuive 
les  coupables.  (  Applaudissements.) 

{La  suile  demain.) 

N.  B.  Dans  la  séance  du  21,  un  grand  nombre  de  sections 
ont  été  admises  à  déGler  dans  le  sein  de  rassemblée.  Tou- 
tes venaient  féliciter  la  Convention  sur  le  décret  qui,  ont- 
elles  dit,  épure  le  Panthéon  français,  laisse  au  temps  le 
soia  d*apprécier  les  renommées,  et  ne  permet  plus  les 
grands  hommes  provisoires.  Toutes  ont  demandé  un  prompt 
jugement  des  quatre  membres  de  la  Convention  d^^nt  la. 
conduite  est  en  ce  moment  examinée.  Le  président  de  la 
commission  est  venu  annoncer  que  le  rapport  serait  piét 
pour  les  premiers  jours  de  la  décade  pit^chaincb 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  143.  Tridi  23  Pluviôse,  l'an  3«.  {Mercredi  11  FivRiBR  1795,  vieux  êtyle.) 


AVIS   DB  L*AlfCIBN  MOIfITEDB  AUX    90USCR1PTEUE8. 

Le  prii  de  U  souscriptioD  «a  Moniteur  »  pour  Ici  départe- 
ments, ëlant,  depuis  le  l"*  pluviôse,  de  30  liv.  pour  trois  mois, 
de  60  liv.  pour  six  mois,  et  de  ISO  liv.  pour  I  année  entière, 
j  compris  les  jours  sansculottides,  rendu  franc  de  port  dans 
toute  la  république,  nous  invitons  nos  souscripteurs  du  1*'  de 
ce  mois,  qui  ne  se  sont  pas  conformés  à  cet  avis,  de  vouloir 
bien  nous  faire  parvenir  le  complément  de  la  souscription;  au- 
trement nous  serons  forcés  de  régler  Renvoi  de  notre  jour* 
nal  sur  la  proportion  des  somme»  que  oous  aurons  remues. 

Noos  Q*avoos  paa  de  bureau  iotermédiaire ,  a  Paria,  pour 
It  recette  des  abonnemenU  :  Ici  lettres  et  l'argent  doivent 
être  adresses,  francs  de  port,  au  citoyen  Aubry,  directeur  du 
bureau,  rue  des  Poitevins,  n»  18.  11  faut  avoir  soin  (attendu 
le  nombre  de  lettres  qui  s'égarent)  de  charger  celles  qui 
renfemient  des  assignats. 

U  faut  aussi  ajouter  S8  sont  aux  lettres  d*envoi  de  la  Bel- 
gique et  antres  paja  oà  ron  ne  peut  pas  affranchir. 

L'abonnement,  pour  Paris,  est  de  n  liv.  pour  trois  mois, 
50  liv.  pour  six  mois,  et  100  liv.  pour  Tannée  entière,  j  eom* 
pria  également  les  sansculotlidet 

Tout  ce  oui  deit  entrer  dans  la  eompeaitioa  du  JfonifiMr 
aara  «dresse  aux  rédacteurs,  rue  des  FtiteviiM,  a»  18. 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

GroènOt  h  6  janvier.  —  Le  roi  de  Pologne  est  attaidn 
ici  au  premier  Jour.  Le  public  a  élé  instruit  que  SlaBialas 
s'était  déterminé  à  ce  voyage,  d'après  une  lettre  que  le  baron 
de  Asch  et  le  général  Boihoérden  lui  ont  remise  de  la  part 
de  l'impératrice. 

Voici  quelques  panicnlarités  qu'on  débite  A  ce  8a|et. 

Stanislas,  depuis  la  reddition  de  Varsovie,  avait  écrit  dcv 
fbis  &  rimpératrice  sans  en  obtenlrde  répunse.  (Nousavons 
inséré  celte  tclire  dan»  leN*  133.) 

Un  jour,  le  baron  de  Ascb  lui  fit  la  proposition  verbale 
d'aller  à  Grudno,  taut  pour  mi  sùrelé  personnelle  que  (lour 
y  faire  des  arrîiugtmi'iiis  que  l'état  des  cboses  avait  rendus 
nécessaires:  il  lui  fU  obsener  que  ie  silence  de  l'impératriee 
sur  les  lettres  qu'il  lui  avait  écrites  prouvait  quelle  était  In- 
disposée contre  lui,  et  que,  pour  retrouver  les  bonnes  grâces 
de  S.  M.  !..  lui,  iKiron  de  Asch,  ne  voyait  rien  de  plus  coii- 
venableque  de  se  rendre  à  Grodno. 

Stanislas,  njonte-t-on,  peu  porté  &  flaire  ce  Toyage,  cher- 
cha des  moyens  de  l'éluder  ;  il  représenta  au  baron  roâse 
que  son  départ  pouvait  occasionner  des  troubles  à  Varsovit, 
et  qu'au  surplus  il  manquait  absolument  d'argent  pour  taf- 
fire  aux  frais  d'un  pareil  déplacement.  Le  baron  répliqua 
que  le  maréchal  Suwarow  avait  ordre  de  remettre  aiL  roi 
autant  d'argent  qu'il  lai  en  faudrait.  On  prétend  que  cette 
réponse,  qu'il  est  facile  d'Interpréter,  a  décidé  Stanislas. 

—  La  cour  de  Pétcrsbourg  garait  avoir  l'Intention  de 
renvoyer  dans  leurs  premières  positions  les  divers  corps 
d'armée  qui  atalent  été  tirés  des  bords  du  Dniester  et  des 
tronllères  de  la  Finlande  pour  oi)érer  la  réduction  de  la  Po- 
logne. On  a  observé  que  les  Russes  sous  les  ordres  du  géné- 
ral Suwarow,  qui  étaient  auparavant  sur  les  fruuiièrcs  de 
l'empiie  ottoman,  ne  se  sont  avancés  sur  la  Pologne  qu'à 
l'époque  où  la  Russie  crut  n'avoir  plus  rien  à  craindre  de 
Ut  part  des  Turcs.  Maintenant  le  cabinet  de  Pétersbourg , 
croyant  avoir  quelques  raisons  de  redouter  les  Ottomans, 
s'empresse  de  replacer  ses  troupes  dans  les  lieux  les  plus 
exposés. 

Les  Russes  sont  gënéralemeDt  en  horreur  dans  totite  la 
Pologne. 

ANGLETERRE.- 

londniy  h  9  Janvier,  —  On  «'occupe  boaecoup  de  pres- 
ser kt  répun&loM  A  liiM  à  techefieUB  de  Sehit-JaiiKS, 

3*  Série,  —  Tamê  Xm 


pour  y  célébrer  le  mariage  du  prince  de  Galles.  Ces!  l'ar* 
chevéque  de  Cantorbéry  qui  lui  donnera  la  bénédiction 
nuptiale. 

I<e  poëte  lauréat  M.  Pye  a  inséré,  dans  l'ode  qu'il  est  ob- 
lif;é  de  publier  cliaque  année,  au  jour  de  l'an ,  d'après  le 
devoir  de  sa  charge  de  poète  de  la  cour,  aux  appointements 
d'une  centaine  de  guioées  et  de  quelques  pièces  de  vin ,  des 
vœux  ardents  au  Ciel  et  à  la  Mer  pour  l'heureuse  arrivée  de 
la  princesse  Caroline  de  Brunswick;  il  souhaite  aussi  que 
dans  la  couronne  de  myrte  et  de  laurier  qui  ceindra  son 
front  il  se  trouve  une  branche  d'olivier. 

Le  poète  serait-il  aussi  l'interprète  des  vœui  de  la  coorf 

—  La  disette  est  telle  à  Londres  et  dans  plusieurs  par- 
ties de  l'Angleterre,  que  le  chaidron  (pesure  de  irenlc-six 
boisseaux)  de  charbon,  qui  valait  19  shcllings,  se  vend  Jus- 
qu'il 80  dans  plusieurs  comtés;  les  fermiers  se  coalisent 
pour  envoyer  aux  marchés  des  ville»,  où  le  pain  manque, 
du  grain  au  prix  raisonnable  de  9  shellings,  tandis  qu'il  eo 
coûte  13  et  U. 

HOLLANDE. 

Amiterdam,  UiOfunpier.—  F/es  auttyrités  constituées  de 
cette  ville  sont  entièrement  organisées,  il  y  a  un  comité  ré- 
volutionnaire, un  comité  de  police  générale,  un  comité  de 
Jttdicature,  un  comité  de  commerce  et  de  navigation,  et  uo 
comité  de  finances. 

—  Les  représentants  du  peuple  Lacoste  et  Portiez  (de 
l'Oise)  se  sont  rendus,  le  24,  à  Harlecn;  lis  y  ont  été  reçus 
par  les  nouvelles  autorités  constituées,  au  milieu  des  ap- 
plaudissements et  des  démonstrations  de  la  Joie  la  pliu 
vive. 

^  On  vient  de  trouver  la  pièce  suivante  dans  le  registre 
secret  des  délibérations  de  Leurs  Hautes  Ihitssanoes;  on  y 
reconnaît  toute  la  perfidie  stathoudérienne. 

Dimanche^  \%  janvier  1795. •  «  Rapport  a  été  fnlt  A  fat- 
sembléc  par  1131.  Van  Grotenrey  et  autres  commissaires  de 
LL.  HH.  PP.  pour  les  affaires  militaires,  qui  ont  été  char- 
gés par  délibération  de  ce  jour  d'examiner  une  lettre  de 
Son  AKesse,  en  date  d'aujourd'hui,  de  La  Haye,  et  de  la  te- 
neur suivante  :  •  <^ne  les  circonstances  dans  lesquelles  la 
«  république  se  trouve,  circonstances  qui  font  pressentir  A 
t  8oD  Altesse  le  sort  qui  lui  est  réservé,  au  cas  que  rennemi 
«  pénètre  plus  avant  ;  et  ne  voulant  pas  être  un  obstacle  A 
«  l«i  paix,  dont  les  bons  habitants  ont  un  si  grand  besoin,  elle 
I  s'est  décidée  à  quitter,  pour  un  certain  temp»,  le  pays,  avec 
c  toute  sa  famille,  espérant  que  LL  HH.  PP  ne  dé«approii- 
c  vcront  point  cette  démarche.  S.  A  prie  l'Ktre  suprême  de 
■  répandre  ses  plus  précieuses  bénédictions  sur  la  patrie , 
•  Jadis  si  heureuse,  et  de  lui  rendre  son  antique  splendeur; 
«  elle  proteste  d'avoir  employé  tous  ses  moyens  |)our  la  bien 
«  servir,  et  de  son  désespoir  de  ne  pouvoir  plus  contribuer 
t  à  sa  défense  ;  enfin ,  si  lea  circonstances  permettent  un 
c  Jour  qu'elle  puisse  être  utile  à  sa  patrie,  qu'elle  cliéril  plus 
«  que  chose  au  monde,  LL.  HH.  PP.  la  trouveront  toujours 

I  disposée  d'y  contribuer  de  tout  son  pouvoir.  S.  A.  a  dé- 
f  cidé  que  ses  deux  fils ,  à  qui  elle  a  accordé  la  démission 
f  du  commandement  des  troupes  de  l'Etat,  partiront  avec 
t  elle,  ce  dont  S.  A.  a  cru  devoir  donner  connaissance  A 
«  LL.  un.  PP.  > 

I  Sur  quoi  ayant  élé  délibéré,  et,  eu  égard  aux  circon- 
stances actuelles,  qui  exigent  quelques  mesures  provisoires, 
qui  ne  peuvent  être  prises  suivant  le  mode  constitutionnel 
des  délibérations,  a  été  trouvé  bon  de  déclarer  préalable- 
ment que  tout  ce  qui  sera  décidé  dans  ce  moment  et  dans 
la  suite  ne  pourra  porter  aucun  préjudice,  pour  l'avenir,  A 
quoi  ce  soit. 

«  Ensuite  a  été  délibéré  d'écrire  aux  chefs  des  troupes , 
ainsi  qu'aux  gouverneurs,  commandants  des  villes  et  for* 
teresses  de  l'Etat .  pour  leur  donner  communication ,  que 
S  A.  le  prince  d'Orange  et  de  Nassau  ne  s'est  alxsenté  du 
territoire  de  la  république  que  pour  quelque  temps  ;  et  que 
ses  deux  fils,  les  princes  d'Orange,  avalent  obtenu  leur  dé^ 
mission  du  commandement  de  l'armée;  qu'en  conséquence, 

II  est  ordonné  à  tous  les  chefs  militaires  quelconques  d'en« 
Toyer  proviioii  emeot,  au  coueil  d'£iai  de  l'Union,  tous  les     • 

63 


418 


rapports  militaires  et  autres»  qui  ont  étdcijvoyés  jusqu'ici  au 
susdit  prince,  en  s»  qualité  de  capitaine  {^rnérai  de  i'Unioo. 

«  A  été  arrêté  en  outre  qu'ii  f^rn  écrii  ei  ordonné  au  se- 
eréuire  privé  de  S.  A  ,  du  Larrc) ,  d'envoyer  sans  aucun 
délai  au  conseil  d'Etnt  tous  les  rapports  militaires  qui  pour- 
raient étro- parvenus  à  l'adresse  du  prince*  ou  autres Ictires 
quelconques  qu'il  pourra  présumer  contenir  des  détails 
militaires. 

•  Copie  de  la  présente  délibération  sera  envoyée  au  con- 
tell  d'Btal,  pour  se  régler  en  conséquence.  > 

Etats  généraux  régénérés  des  Provinces- Unies. 

SÉàNCB  DO  87  JABVIEB. 

■  Décrété  qu'il  sera  nommé  des  commissaires  chargés  de 
visiter  l't'tat  des  di;;ues»  qui  ont  beaucoup  souffert  par  le 
précédent  {][ou> ornement,  et  de  mettre  à  ce  sujet  en  réqui- 
sition toutes  les  personnes  et  ciioses  qui  seront  jugées  né- 
cessaires ;  que  les  contril)utions  actuellement  sul>sislantes 
continueront  à  être  perçues  sur  le  même  pied,  et  par  ie^ 
mêmes  personnes  ;  que  des  avisos  seront  envoyés  ani  colo. 
nies  de  l'Etat  dans  les  deux  Indes,  pour  y  porter  la  nou- 
velle de  la  révolution  ;  qu'il  sera  écrit  aux  consuls  dans  la 
Méditerranée  et  la  Baltique,  afin  d'en  avertir  les  bâtiments 
hollandais  qui  s'y  trouvent,  pour  se  mettre  en  garde  contre 
toute  surprise;  qu'il  sera  ordonné  aux  commandants  de  tous 
les  vaisseaux  de  guerre  de  l'Etat  de  ne  plus  obéir  à  aucun  or- 
dre du  ci-devant  amiral  générai,  et  de  retourner  le  plus  tôt 
possible  dans  les  poris  de  la  république  française,  qui  sera  le 
plus  à  leur  portée,  tandis  que  les  vaisseaux  de  guerre  qui  se 
'  trouvent  dans  les  deux  Indes  doivent  y  rester  pour  la  dé- 
fense des  colonies  Jusqu'À  nouvel  ordre;  qu'un  bâtiment 
parlementaire  sera  envoyé  sans  délai  en  Angleterre,  afin 
d'ordonner  aux  commandants  des  vaisseaux  de  l'Etal ,  de 
la  Compagnie  des  Indes,  et  d'autres  bâtiments  marchands, 
qui  s'y  trouvent,  de  retourner  â  l'Instant  dans  les  ports  de 
la  Hollande,  et  de  les  réclamer  au  cas  que  quelques  obsta- 
cles les  en  empêchent,  comme  le  bruit  court  déjà  qu'un 
embargo  général  a  été  mis  sur  tous  les  vaisseaux  hollandais, 
dans  les  ports  respectifs  de  la  Grande-Bretagne  :  enfin  de 
prendre  des  arrangements  pour  la  libre  navigation  des  pa- 
quebots, t 

Dans  cette  même  séance,  les  représentants  do  peuple  de 
Bollande  ont  décrété  de  rétablir  la  correspondance  ordi- 
naire avec  la  France,  Interrompue  depuis  la  guerre,  ainsi 
que  celle  avec  la  Belgique  et  le  pays  de  Liège:  et  le  comité 
de  salut  public  a  été  autorisé  d'tip|)êier  auprès  de  lui,  d'Am- 
sterdam et  d'ailleurs,  des  personnes  versées  dans  les  affaires 
de  banque,  de  finances,  et  connaissant  les  ressources  qu'offre 
le  pays  pour  les  objets  de  nécessité,  afin  d'alimenter  les  ar> 
mées  françaises  d  une  manière  convenable,  et  de  régler  les 
aM>yens  de  circulation  et  la  valeur  des  assignats  d'après  celle 
des  espèces  courantes. 

Enfin ,  l'assemblée  a  nommé  députés  de  la  province  de 
Hollande  aux  états  généraux,  tant  que  l'ancienne  forme  de 
l'ancien  gouvernement  subsistera,  les  citoyens  Hnhn.  Lest- 
wenon  et  J.-A.  Lonq.  Il  a  été  aussi  arrêté  que  Leurs  Hûu(es 
Puissances  seraient  invitées  à  envoyer  immédiatement  un 
courrier  à  Paris,  pour  rappeler  les  députés  Brantzen  et  Re- 
pelaer,  avec  injonction  de  cesser  toute  négociation. 


REPUBLIQUE    FIIANÇAISE. 

Paris,  le  22  pluviôse,  —  Le  rapport  fait  avant- 
hier  ù  la  Convention,  an  nom  du  comité  de  sûreté 
générale,  a  tait  connaître  la  situation  ^icluelle  de 
cette  ville,  centre  des  intrigues  et  des  factions  „ 
comme  elle  est  le  foyer  de  Tesprit  public.  On  a  pu 
douter  pendant  quelqjue  temps  de  l'énergie  du  peu- 
pie  de  Paris  et  de  son  amour  éclairé  pour  la  liberté  ; 
c'est  lorsqu'il  s'est  laissé  se'duire  par  les  impostures 
et  les  intrigues  les  plus  viles,  et  gouverner  par  la 
scélératesse  la  plus  stnpide  et  la  plus  abjecte.  On  au- 
rait de  la  peine,  en  effet,  à  concevoir  le  profond  avi- 
lissement oii  Tavoicnt  réduit  les  tyrans  du  31  mai, 
et  dans  lequel  il  avait  entraîné  avec  lui  la  France  en- 
Uèrci  si  Ton  De  se  rappelait  arec  quel  art  perfide  ces 


mêmes  tyrans  ont  su,  après  avoir  terrorisé  la  Con- 
vention elle-même  par  réclat  d'une  insurrection 
factice  et  apparente,  isoler  les  citoyens,  en  leur 
Otant  tout  point  de  ralliement  et  tout  moyen  légal  de 
résistance.  Mais  une  seconde  révolution  s'est  opé- 
rée :  le  crime  a  été  poursuivi  et  frappé  dans  ses  re- 
paires. Avec  quelle  joie  la  première  impulsion  don- 
née par  la  Convention  nationale  a  été  reçue  par  les 
habitants  de  cette  immense  cité  !  Quel  concert  una- 
nime d'acclamations  s'est  fait  entendre,  lorsque  les 
représentants  du  peuple,  en  proclamant  la  dernière 
heure  des  tyrans,  parurent  pour  diriger  les  coups  des 
citoyens!  Le  même  esprit  ptiblic,  dont  l'essor  terrible 
a  abattu  les  triumvirs  et  la  municipalité  rebelle, 
subsiste  encore  dans  Paris.  L'indignation  publique, 
qui  avait  si  fortement,  si  spontanément  éclaté  con- 
tre trois  des  principaux  chefs  de  la  tyrannie,  en 
poursuit  aujourd'hui  avec  la  même  force  tous  les 
complices. 

Une  égale  énergie  de  sentiments  repousse  tout  es- 
poir de  la  royaaté:  l'amour  de  la  république  se 
montre  avec  d'autant  plus  d'éclat  et  d'authenticité 
Que  la  liberté  illimitée  des  opinions  ne  permet  plus 
.de  douter  de  la  sincérité  du  vœu  public. 
'  Le  renchérissement  progressif  des  denrées  est  en- 
core un  motif  de  mécontentement  ;  il  sert  de  pré- 
texte aux  provocateurs  de  la  sédition;  mais  qui  ne 
sait  que  celte  cherté,  loin  de  devoir  faire  regretter  le 
régime  de  terreur  et  de  sang  auquel  elle  a  survécu, 
en  est  le  résultat  immédiat?  La  partie  laborieuse  du 
peuple,celle  qui  vit  du  produit  desonindustrieet  des 
ressourcesducommerce,oubliera-teIle  jamais  que  la 
rareté  et  la  cherté  de  tous  les  objeUde  consommation 
sont  l'effet  des  entraves  que  l'ancien  gouvernement 
avait  mises  dans  l'exercice  de  toutes  les  facultés  in- 
dustrielles, et  de  la  persécution  qu'il  dirigeait  contre 
tous  les  possesseurs  de  capitaux?  Ces  vériti^  sont 
généralement  senties,  ou  ne  peuvent  tarder  à  l'être. 

La  situation  de  Paris  n'est  donc  nullement  alar- 
mante, si  l'on  compare  la  nullité  des  moyens  d'un 
petit  nombre  d'agitateurs  à  la  force  irrésistible  de 
riuimense  majorité  des  bons  citoyens  ralliés  à  la 
Convention  nationale. 

On  a  remarqué,  il  est  vrai,  qu'avant-hiei;  les  as- 
semblées de  quelques  sections  ont  été  orageuses. 
Partout  on  s'occupait  d'abntlre  le  buste  de  1  apôtre 
du  terrorisme,  qui  blessait  la  vue  de  tous  les  amis 
de  la  justice  et  de  l'humanité. 

Quelques  sectateurs  fanatiques  ou  criminels  ont 
élevé  la  voix,  et  serré  pendant  f|uelque  temps  l'image 
chancelante  de  leur  patron.  Mais  bientôt  les  débats 
se  sont  calmés  par  la  nouvelle  du  décret  de  la  Con- 
vention qui  l'excluait  du  Panthéon  et  de  tous  les 
lieux  publics. 

Dans  toutes  les  sections  le  décret  a  été  exécuté, 
malgré  les  clameurs  et  les  rugissements  de  la  faction 
expirante. 

Ce  décret  a  produit  dans  Paris  la  plus  grande 
comme  la  plus  douce  sensation.  11  a  soulagé  le  cœur 
des  bons  citoyens  qui  gémissaient  de  rencçiitrer  dans 
tous  les  lieux  publics  le  buste  de  celui  qui  demniida 
trois  cent  mille  têtes,  et  de  voir  ses  rest(»s  au  Pan- 
théon entre  les  mausolées  de  Voltaire,  qui  ne  cessa 
de  prêcher  la  tolérance,  et  de  Rousseau,  cet  ardent 
ami  de  l'humanité.  Dès  hier  on  commença  à  abattre 
la  pagode  élevée  à  ce  mauvais  génie  sur  la  place  du 
Carrousel,  en  face  du  palais  où  siège  la  représenta- 
tion nationale.  Une  foule  de  citoyens  environne  les 
ouvriers,  et  s'empresse  de  les  aider  dans  ce  travail. 
Avant-hier,  dans  la  matinée,  malgré  les  efforts  de 

auelques  terroristes,  le  buste  avait  été  renversé  à  la 
aile.  Un  boucher  le  couvrit  d'abord  de  sang  pour 
montrer  Marat  avec  Tattribut  qui  lui  convenait. 


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a. 


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419 


LasKtk>ndellantacliaii|^deiioa;el1erepreiid  ' 
celui  de  section  du  Théâtre- Français.  | 

U  est  Ik^au  de  Toir  aujourd'hui  cette  mâle  énergie 
d'un  peuple  éclairé  pr  Texpérif  nce  des  résolutions 
dÎTf rses  qui  se  sont  succédé  sous  ses  yeux  avec  une 
aussi  étonnante  rapidité,  d'un  peuplé  qui  ne  ren- 
ferme pas  une  iamiile,  pas  un  individu  qui  ne  soit 
iiislniit,par  l'expériencede  ses  mal  heurs,  des  moyens 
de  les  prévenir,  et  dont  tous  les  citoyens  ont  appris 
à  chérir  la  rraie  liberté,  et  à  en  connaître  les  princi- 
pes/par  les  larmes  mêmes  que  leur  a  fait  répandre  le 
joug  d'une  tyrannie  dans  laquelle  la  licence  ne  [>eut 
manquer  de' dégénérer.  L^  liberté  est  irrévocable- 
ment  affermie,  puisqu'elle  a  pour  base  les  lumières 
publiques,  et  qu'il  n*est  pas  dans  Tordre  possible 
des  choses  que  les  horreurs  qui  ont  momentanément 
ensanglanté  son  image  se  répètent  deux  fois  sous 
les  yeux  d'une  même  génération. 

Quelques  mouvements  continuent  à  avoir  lieu 
dans  les  spectacles. 

Le  18,  il  y  a  eu  du  bruit  au  théîltro  d'Audinot.  La 
salle  se  trouva  bientAt  cernée  et  investie  de  citoyens 
armés  ;  on  fit  sortir,  l'un  après  l'autre,  les  citoyens 
qui  s*y  trouvaient,  en  leurdemandantleurcarte.On 
en  arrêta  une  quarantnine,  qui  depuis  ont  été  retâ- 
chés. Ce  qui  a  donnr  lieu  à  cette  opération  est  une 
Îièce  intitulée 7f  Concert  de  la  rue  Feydeau,  ou  la 
'olie  du  Jour,  Dans  celte  pièce  ou  critique,  à  ce 
qu'il  paraît,  la  mise  et  la  tournure  des  jeunes  gens 
qui  fréquentent  ce  spectacle.  Les  jeunes  gens  ont 
voulu  en  empêcher  la  représentation,  et  le  tumulte 
qui  en  est  résulté  a  motivé  les  mesures  du  comité  de 
sûreté  générale. 

Voila  en  gros  ce  qui  se  dit  dans  Paris  ;  mais , 
comme  chacun  conte  ordinairement  une  affaire  sui- 
vant l'intérêt  qu'il  y  prend,  nous  n*avons  encore 
rien  de  bien  positif  à  cet  égard.  Nous  craignons  bien 
cependant  de  trouver  partout  de  ranimosité  et  des 
torts. 

On  avait  essayé,  il  y  a  quelque  temps,  de  tourner 
en  ridicule  la  iil)erté  de  la  presse,  dans  une  pièce 
jouée  sur  le  même  théiltre,  et  intitulée  Monsieur 
Pamphleton,  Monsieur  Pamphleton  était  tombé  tout 
à  plat  ;  il  fallait  aussi  laisser  tomber  la  Folie  du 
Jour  ou  le  Concert  de  la  rue  Feydeau.  Il  ne  faut 
pas  que  nos  jeunes  gens  soient  plus  chatouilleux 
que  nos  ci-devant  marquis.  Le  ridicule  tance  dans 
une  pièce  ne  peut  pas  offenser  ceux  qui  ne  Tout 
^  pas  encouru,  et  les  autres  manquent  d'adresse  s'ils 
indiquent  les  originaux  qu'on  a  voulu  jouer. 

Mais,  disent  certaines  personnes,  cette  pièce  est 
pleine  de  personnalités  contre  tel  ou  tel  patriote,  et 
l'on  veut  donner  le  change  à  Topinion  et  égarer  les 
citoyens.  A  cela  nous  répondrons  que,  dans  une  ré- 
publi(|iie  surtout,  il  ne  faut  pas  prendre  les  intérêts 
(Je  quelcjues  personnes  avec  une  chaleur  dont  il 
puisse  résulter  du  désordre.  Cette  pièce  blesse  les 
lois,  ou  n'est  que  ridicule.  Dans  le  premier  cas,  c'est 
au  gouvernement  à  prendre  des  mesures;  dans  le 
second,  elle  ne  mérite  pas  l'attention  des  bons  pa- 
triotes. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Barras» 
SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU  20  PLUVIOSE. 

André  Dcmont  :  J'appuie  la  proposition  de  Cras- 
sous  ;  et  sans  doute,  si  le  comité  de  sûreté  générale 
avait  tu  toutes  tes  pièces  qu'il  a,  on  n'aurait  pas  ose 
parler  ainsi.  (Murmures  à  Textrémitc  gauche.  — 


Ruarops  parle  dans  le  bmîl.)  Je  n*aî  pas  feit  de  rap< 
p|ort  au  nom  des  comités  ;  j*ai  dit  mon  opiuion  par* 
ticulière,  et  j*ai  ajouté  que  je  ne  trouvais  pas  de  mo« 
ment  plus  bvorable  pour  soumettre  à  la  tonventiott 
le  décret  dont  j'avais  été  chargé  par  les  trois  comî» 
tés.  Eh  !  que  m'importent  que  quelques  jeunes  gens 
aient  causé  du  trouble  dans  les  spectacles!  Au  moins 
ils  n'ont  pas  levé  le  poignard  sur  les  représentants 
du  peuple  ;  au  moins  ils  n'ont  pas  promis  de  récooK 
|iense  à  ceux  qui  assassineraient  le  plus  vite  (mur- 
mures  à  Textrémité  gauche  )  ;  ils  n  ont  pas  mis  en 
avant  des  hommes  qui  offrent  30,000  liv.  pour  qu'on 
leur  permette  de  sesauver.(  Applaudissements.)  On 
a  demandé  la  punition  des  coupables  ;  et  moi  aussi 
je  demande  que  le  comité  de  sûreté  générale  les 
poursuive  et  lesfassepunir  tous«(Applaudis$ements«) 

Rovàts:  J*appuie  aussi  la  proposition  de  Cras- 
sous,  et  je  demande  en  conséquence  que  Mathieu 
lise  toutes  les  pièces  qui  ont  motivé  son  rapport. 
(Applaudissements.) 

Quelques  voixàVextrémitégauekf:  C*est  inittile! 

Dubbm:  C'est  aussi  pour  invoquer  l'application  la 
plus  stricte  et  la  plus  exacte  de  la  justice  que  j'ai  de- 
mandé ta  parole,  et  jamais  les  âm«s  des  principes  et 
de  la  D(^;laration  des  Droits  n'ont  craint  la  vérité. 
(Quelques  applaudissements  à  l'extrémité  gauche  et 
dans  la  tribune  au-dessus.)  Je  crois  que  le  tem|>sde9 
romans  politiques  est  passé  ;  je  crois  (j[ue  c'est  sur 
les  pièces  que  la  Convention  doit  se  dtHïider.  On  est 
venu  vous  dénoncer  une  conspiration;  il  est  possi- 
ble qu'elle  ait  existé  ;  je  sais  que  le  comité  a  de  bon- 
nes intentions;  mais  a-t-il  examiné  les  choses  sous 
tous  les  rapports,  a-t-on  remonté  à  la  source  des 
mouvements?  Non,  on  en  a  excusé  les  véritables 
provocateurs.  (Quelques  applaudissements  li  l'ex- 
trémité gauche  et  dans  la  tribune  au-dessus.)  Je  ne 
urends  ici  le  parti  de  personne,  et,  dussé-je  encore 
être  opprimé,  comme  on  a  voulu  le  faire  il  y  a  un 
an ,  je  n'en  dirai  pas  moins  ce  que  je  pense.  Je  dis, 
moi,  que  le  premier  provocateur  à  l'assassinat  est 
celui  qui  a  osé  dire  que  la  Déclaration  des  Droits  était 
une  pancarte  barbouillée  pur  Robespierre.  (Applau- 
dissementsà  l'extrémité  gauche  et  dans  la  trioune  au- 
dessus.)  Je  ne  connais  pas  plus  Babœuf  que  Fréron  ; 
je  lis  quelquefois  leurs  feuilles  pour  savoir  quels 
sont  les  agresseurs  et  les  attaqués,  et  je  dis  qu'il 
faut  punir  celui  qui  manque,  et  ne  pas  l'incarcérer 
arbitrairement.  (On  rit.)  Je  défie  ceux  nui  m'inter- 
rompent de  prouver  que  je  sois  attaquable  pour  une 
seule  mesure  arbitraire.  Puisqu'on  parle  de  justice, 
il  ne  faut  pas  employer  les  moyens  de  la  terreur.  Je 
vous  dennande  si  ce  n'est  pas  provoquer  publique- 
ment à  l'assassinat  des  patriotes  que  de  dire  que  la 
Déclaration  des  Droits  est  une  pancarte  barbouillée. 
Lorsqu'il  y  a  provocation,  il  y  a  réaction  ;  et  sou- 
vent la  malveillance  se  trouve  des  deux  côtés,  et  un 
gouvernement  juste  aurait  pesé  sur  les  deux.  {Plu- 
sieurs  voix  :  On  l'a  fait  !  )  On  ne  l'a  pas  lait  ;  et  jus- 
qu'à ce  mie  le  Palais  Royal  m'ait  assassiné,  je  par- 
lerai ici  (on  rit)  ;  et  si  le  comité  a  des  pièces,  j'en  ai 
aussi,  moi,  qui  prouveront  qu'on  est  venu  pour 
nous  assassiner,  il  y  a  cinq  jours,  sur  la  IMontaf^ne. 
(On  rit.)  On  parle  ae  liberté  de  la  presse  et  de  la  jus- 
tice, et  cependant  on  les  viole.  Un  libelliste  attaque 
la  Déclaration  des  Droits;  un  autre  écrivain  lui  ré- 
pond: ou  protège  le  libelliste,  et  l'on  arrête  celui 
qui  lui  répond.  (  Applaudissements  à  rextréniité 
gauche  et  dans  la  tribune  au-dessus.)  Voulez-vous 
être  justes,  laissez  à  tout  le  monde  la  liberté  de  par- 
ler, excepté  aux  méchants.  (On  rit.)  Ainsi,  bien  loin 
d'avoir  remonté  aux  sources  du  mal.  on  l'a  favorisé 
lorsqu'on  a  soutenu  les  coupe-jarrets  sortis  des  mai- 


420 


SOI»  d*arrét,  ou  eccotinis  des  armées  où  ils  n*ont 
pas  eu  le  courage  de  rester,  et  qui  s'inliluleiil:  Jeu- 
nesse françaUe.  On  vient  vous  proposer  ici  tout  ce 
3ue  ces  messieurs  ont  demande  ;  voilà  la  conduite 
e  ceux  qui  nous  gouvernent. 
Plusieurs  voix  :  A  Tordre  ! 
DUBEM  :  Ce  que  j'ai  dit  est  vrai,  puisque  les  évé- 
nements le  prouvent;  et  lorsqu'une  partie  de  ci- 
toyens veut  remuer  contre  ce  mouvement  qui  existe 
depuis  trois  décades,  et  lorsqu'hier  soir  on  deman- 
dait encore  cj^uatre  tt'tes  au  calé  de  Chartres,  on 
vient  dire,  que  c't'st  nous  qui  attaquons.  (On  rit.)  Je 
conclus  à  l'application  exacte  et  impartiale  de  la  jus- 
tice ,  et  j'ose  dire  que  je  ne  la  crains  pas,  malgré  les 
huées  de  quel(|ues  hommes  ;  je  ne  crains  pas  l'armée 
organisée  au  Palais-Royal  (on  rit);  je  ne  crains  pas 
la  faction  d'Orléans  qui  se  ressuscite.  (On  rit.)   . 

Plusieurs  voix:  D'Orléans  était  de  la  Montagne. 

DuHBM  :  Comme  il  est  évident  qu'on  ne  s'est  point 
assez  appesanti  dans  le  rapport  sur  les  véritables 
agresseurs,  je  demande  que  la  conduite  des  agres- 
seurs soit  examinée;  car,  puisqu'on  a  violé  les  prin- 
cipes vis-à-vis  l'un,  il  Taut  les  violer  visàvis  de 
l'autre.  (On  rit.) 

Legendrb  :  Je  suis  loin  de  croire  qu'on  ait  voulu 
appliquer  le  rapport  à  aucun  de  nos  collègues,  et 
nous  avons  l'expérience  que,  toutes  les  lois  que  les 
passions  prennent  la  place  de  la  vérité,  la  raison  ne 
peut  faire  entendre  sa  voix.  Je  ne  connais  pas  de 
conspirateurs  dans  l'assemblée,  depuis  que  ceux  que 
j'ai  accusés  sont  devant  la  commission. 

DuBEM  :  Et  les  quarante  misérables  de  M.  Meriin? 

Legendrr:  Je  n'énonce  point  ici  l'opinion  de 
Merlin,  mais  la  mienne.  De  quoi  s'agit-il?  d'une  poi- 

fiée  d'hommes,  qui,  dans  le  principe,  ont  été  utiles 
la  révolution,  mais  qui  depuis  se  sont  retirés  aux 
Jacobins  pour  mettre  la  main  sur  ceux  que  leur  dé- 
signait Robespierre.  Ces  hommes  ont  cru  que  les 
mouvements  de  la  révolution  devaient  se  perpétuer. 
Ils  ne  veulent  pas  croire  que,  lorsqu'un  républicain 
a  vengé  ses  droits  attaques,  il  doit  rentrer  dans  son 
atelier  et  reprendre  son  occupation.  Ils  veulent  cou- 
rir dans  les  rues,  balafrés  de  moustaches  et  armés  du 
sabre  de  Charlemagne.  Ils  jurent  sur  les  poignards 
d^assassiner  la  Convention  nationale.  Citoyens,  nous 
sommes  beaucoup  trop  légers  dans  nos  épithètes  ; 
dès  qu'un  de  nos  collègues  ne  pense  pas  comme 
nous,  c'est  un  conspirateur  ou  un  royaliste.  Tant 

3ue  les  passions  exaspéreront  ici,  les  malveillants 
e  l'intérieur  en  profileront  pour  entretenir  des 
troubles.  (On  applaudit.)  Le  comité  de  sûreté  géné- 
rale a  été  oblige  de  faire  fermer  deux  clubs  dans  les- 
quels on  organisait  l'insurrection  qui  devait  avoir 
heu  sous  peu. 

Duhem  :  Pourquoi  n'avez- vous  pas  fermé  le  café 
de  Chartres  ?  (On  rit.) 
Legendre  :  Nous  n'avons  fermé  aucun  café. 
Bourdon  :  Pas  même  le  café  Payen. 

Legendre  :  On  a  demandé  la  lecture  des  pièces. 
J*observe  que  les  mesures  que  nous  avons  prises 
sont  en  partie  exécutées,  qu'on  est  en  train  d'exécu- 
ter les  autres,  et  que  la  lecture  des  pièces  ne  servi- 
rait à  autre  chose  qu'à  prévenir  lesindividus  qu'elles 
regardent  des  mesures  au'on  prend  contre  eux. 

Je  demande  donc  l'orure  du  jour. 

Charlier  demande  que,  sous  trois  jours,  le  comité 
de  sûreté  générale  lasse  un  rapport  sur  les  coupables 
qu'il  n*a  fait  qu'indiquer. 

Goujon  :  Je  ne  m*y  oppose  pas. 


Plusieurs  membres  :  A  la  tribune  ! 

Goujon  (à  la  tribune)  :  Je  ne  m'oppose  pas  I  «le 
qu'un  prompt  rapport  soit  fait  sur  la  conspiration 
qu'on  dit  exister.  Je  désire  connaître  les  coupables, 
je  veux  qu'ils  soient  frappés  par  la  loi.  (On  applau- 
dit.) Déjà  plusieurs  de  mes  collègues  vous  ont  fait 
part  de  leurs  craintes;  je  viens  aussi  vous  ouvrir 
mon  cœur.  Je  ne  connais  qu'un  point  de  ralliement 
pour  tous  les  amis  de  la  liberté  et  de  l'égalité,  pour 
tous  les  vrais  républicains  :  la  constitution  démocra- 
tique jurée  par  le  peuple  français.  (Vifs  applaudisse- 
ments. )  Cette  constitution  et  la  Déclaration  des 
Droits  de  l'Homme,  opposées  avec  tant  de  succès  aux 
tyrans  armés  contre  notre  liberté  et  contrtî  notre  in- 
dépendance, sont  deux  dépôts  que  le  peuple  français 
a  confiés  à  la  Convention  nationale.  (On  applau(lit.) 
C*est  pour  cette  Déclaration  des  Droits  et  pour  cette 
constitution  démocratique  que  le  peuple  français  est 
armé.  S'il  a  consenti  à  l'organisation  d'un  gouver- 
nement qui  n'est  pas  celui  de  la  constitution,  c'était 
pour  réprimer,  par  des  mesures  promptes,  tous  les 
ennemis  de  la  république.  Mais,  citoyens,  cette  con- 
stitution existe;  le  peuple  et  la  Convention  nationale 
sont  levés  pour  la  maintenir. 

Plusieurs  membres:  Vous  l'avez  violée,  cette 
constitution. 

Blad  :  Qui  est-ce  qui  la  renferme  dans  cette  boîte? 

?|ui  est-ce  qui  l'a  couverte  d'un  voile  ?  C'est  vous! 
On  applaudit.) 

Tallien  :  Je  demande  la  parole,  pour  prouver 
que  nous  sommes  tous  d'accord,  et  pour  vous  mon- 
trer combien  est  perfide  ce  que  dit  Goujon.  (On  ap- 
plaudit.) 

Goujon  :  Je  ne  croyais  pas  devoir  mériter  ces  in- 
terruptions; je  me  suis  constamment  soumis  aux 
lois  de  mon  pays...  {Et  aux  volontés  de  Robespierre! 
s'écrient  plusieurs  membres.)  Quand  les  invectives 
auront  cessé,  je  continuerai  mon  opinion.  Je  déclare 
que  rien  ne  pourra  arracher  ce  qui  est  au  fond  de 
mon  cœur  ;  on  peut  tomber  sons  les  poignards  des... 
(Grand  bruit.)  J'appelle  aussi  la  peine  sur  la  tête  de 

i  tous  les  coupables;  je  ne  crains  point  la  lumière  ; 

'  j'ai  toujours  vécu  seul  avec  ma  conscience,  éloigné 
des  intrigues  et  des  intrigants.  Ce  qui  m'alarme 
dans  ce  moment-ci,  c'est  que,  dans  un  écrit  q^ui  n'a 
point  été  réprimé  et  qui  circule  dans  le  public,  on 
dit  positivement  que  la  Déclaration  des  Droits  et  la 
constitution  ne  sont  que  des  pancartes  barbouillées. 
(Murmures.) 

Je  demande  que  la  Convention  nationale,  qui  est 
pleine  de  l'amour  que  le  peuple  lui  a  commandé 
pour  la  démocratie,  pleine  ue  respect  pour  la  consti- 
tution, et  qui  n'attend  que  le  moment  où  les  tyrans, 
forcés  de  reconnaître  la  république,  mettront  bas  les 
armes  pour  rendre  au  peuple  l'exercice  de  ses  droits, 
charge  ses  comités  de  salut  public,  de  sûreté  géné- 
rale et  de  législation,  de  prendre  des  mesures  con- 
tre ceux  ({ui  attaqueront  les  Droits  de  l'Homme  et  la 
constitution. 

Tallien  :  Citoyens,  il  est  important,  après  la  dis- 
cussion qui  vient  d'avoir  lieu,  de  relever  l'épisode 
qui  a  été  débité  à  cette  tribune.  On  ne  peut  pas  se 
dissimuler  qu'un  des  grands  moyens  Qu'emploient 
les  ennemis  de  la  liberté  pour  exciter  le  trouble  et 
la  guerre  civile  est  de  répandre  avec  une  affectation 
prétendue  patriotique  qu'on  veut  violer  la  consti- 
tution ;  eh  bien ,  il  faut  répondre  aux  cris  de  ces 
hommes  qui  se  prennent  tout  à  coup  d'un  violent 
amour  pour  cette  constitution  qu'ils  ont  eux-mêmes 
enterrée... 

Chazal  :  Qu'ils  ont  couverte  â*une  montagne  de 
cadavres.  (Vifs  applaudissements.) 


49t 


Tallieh  :  Foqr  cette  constUntion  qui ,  dans  un 
moment  de  crise ,  servit  de  point  de  ralliement  aux 
Français,  et  que  des  ambitieux  suspendirent  depuis, 
pour  y  substituer  rinlAme  gouvernement  révolu- 
tionnaire. (Vifs  applaudissements.)  Il  fau(  répondre 
à  ces  hommes  que  la  Convention  nationale  a  gravé 
dans  le  cœur  les  principes  consacrés  dans  la  Décla- 
ration des  Droits.  (Oui ,  oui!  s*à;rieiit  un  grand 
nombre  de  membres  en  se  levant.]  Par  cette  réponse, 
citoyens,  vousôtez  aux  assassins  au  peuple  le  moyen 
de  corrompre  les  gens  faibles  et  crédules.  Que  les 
brigands  cessent  d  espérer  !  le  règne  des  charlatans 
et  des  buveurs  de  sang  est  passe.  (Vifs  applaudis- 
sements.) Je  provoquerai  ensuite  la  punition  de 
rhomme  qui  a  porté  atteinte  aux  principes  de  la  li- 
berté... (WttEM  :  C'est  Fréron.)  Mais  en  même  temps, 
citoyens,  je  vous  engagerai  à  n'être  point  les  dupes 
de  ces  hommes  qui  ont  enseveli  la  constitution ,  cl 
qui  feignent  en  ce  moment  de  la  chérir  ;  il  faut  dire 
au  peuple  que  s*il  n*a  pas  encore  joui  des  bientaits 
de  cette  constitution  ,  il  doit  s'en  prendre  aux  liom- 
mesqui  ont  commandé  les  assassinats  de  tout  genre, 
et  qui  veuleut  en  ce  moment  tout  anéantir,  parce 
qu'ils  espèrent  se  sauver  à  la  faveur  du  désordre. 

Il  est  une  autre  partie  de  Topinion  qui  vient  d'être 
émise  qu*il  importe  de  relever  ;  je  vais  le  faire  sans 
aigreur. 

Les  tjrans  de  FEurope  se  sont  armés  contre  la  li- 
berté ou  peuple  français  :  on  dit  qu  ils  ne  veulent 
pas  reconnaître  la  constitution  qu'il  s'est  donnée  et 
les  droits  sacrés  des  hommes,  qu'il  a  consacrés; 
mais  tous  les  jours  ne  les  reconnaissent-ils  pas  par 
la  force  des  baïonnettes? Qu'importe  qu'ils  refusent 
de  reconnaître  tel  ou  tel  article  des  Droits  ou  de  no- 
tre constitution?  nous  n'avons  pas  encore  posé  les 
armes.  (Vifs  applaudissements.)  Nous  avons  juré  de 
ne  poser  les  armes  que  quand  notre  indépendance 
sera  reconnue  ;  d'ailleurs,  ce  ne  seront  point  les  ty- 
rans qui  nous  accorderont  la  paix;  ce  sera  nous  qui 
leur  imposerons  les  conditions  auxquelles  nous  con- 
sentirons à  ne  plus  les  combattre.  (On  applaudit.) 

De  cette  tribune  nous  ferons  encore  trembler  la 
coalition  ;  de  cette  tribune,  nous  porterons  la  terreur 
sur  les  bords  de  la  Tamise  et  dans  le  cœur  de  Pitt  et 
de  Georges. 

Bientôt  la  Convention  nationale  s'occupera  de 
donner  à  la  France,  non  un  gouvernement  provi- 
soire, mais  un  gouvernement  stable  et  vigoureux. 
Il  faudra  alors  que  chacun  de  nous  mette  la  main 
a  l'œuvre  et  médite  dans  le  silence  du  cabinet  les 
moyens  de  donner  le  mouvement  à  la  machine  poli- 
tique. 

Eu  attendant  cette  époque,  qui  ne  peut  pas  être 
éloignée,  maintenons  la  tranquillité  publique;  que 
le  coupable  porte  sa  tête  sur  Téchafaud,  et  que 
l'homme,  qui  n'est  qu'égaré,  reçoive  de  nous  des 
conseils  qui  le  prémunissent  contre  les  insinuations 
des  méchants. 

Je  demande  que  le  comité  de  sûreté  générale  fnsse 
incessamment  un  rapport  sur  la  conspiration  qu'il 
vous  a  dénoncée. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

Goujon  rappelle  sa  proposition. 

Roux  (de  la  Haute-Marne)  :  Citoyens,  si  après 
avoir  juré  la  constitution  démocratique,  si  après 
avoir  terrassé  les  despotes  coalisés  contre  elle,  nons 
étions  réduits  à  avoir  besoin  d'un  décret  pour  faire 
croire  à  nos  serments,  il  faudrait  douter  de  la  chose 
publique.  (Vils  applaudissements.) 


tenoe  de  la  Déclaration  des  Droits  et  de  la  eonstita- 

tion. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

De  l'agitation  se  manifeste  dans  Tane  des  extré- 
mités de  la  salle. 

Duhcm  réclame  la  parole.  —  L'assemblée  fa  lui 
refuse. 

DuHEM  :  Eh  bien ,  je  demande  que  Bourdon  (de 
l'Oise)  vienne  avec  moi  au  comité  pour  prouver  son 
infâme  calomnie. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


Je  demande  l'exécution  de  nos  serments,  et  que 
assemblée  passe  à  l'ordre  do  jour  motivé  sur  Texis- 


SÉANCE  DU  20  PLUYIOSB. 

Un  moment  avant  l'ouverture  de  la  séance ,  on 
enlève  les  bustes  de  Marat,  de  Lepelletier,  de  Beau- 
vais  et  de  Dampierre  ,  ainsi  que  les  deux  tableaux , 
de  la  composition  de  David,  représentant  Lepelletier 
et  Marat.  Le  buste  de  Brutus  reste  seul  sur  le  pié* 
destal  qui  supportait  l'image  du  patron  des  buveurs 
de  sang.  Quelques  femmes,  habituées  de  l'une  des 
tribunes ,  tâchent  en  vain  de  troubler  par  leurs  vo- 
ciférations cette  exécution  du  décret  d'hier;  leurs 
cris  de  fureur  sont  étouffés  par  les  acclamatious  uni- 
verselles: Vive  la  république  I  A  boê  Uilwriee  d§ 
guiUoline  I 

Duhem  entre  dans  la  salle;  il  paraît  vivement 
ému. 

La  séance  s'ouvre.  Un  secrétaire  lit  la  correspon- 
dance. 

DcJBEM ,  interrompant  le  lecteur  :  Je  demande  la 
parole  pour  une  motion  d'ordre.  Je  viens  vous  dé- 
noncer une  grande  conspiration,  dont  les  chefs,  dit- 
on  ,  sont  dans  cette  assemblée.  Il  y  a  quatre  jours , 
disait  hier  Bourdon  (de  l'Oise),  on  s'assembla  au  café 
Payen  ;  on  y  jura  sur  des  glaives  et  des  poignards 
la  destruction  de  la  Convention  ;  plus  de  qu.irante 
conjurés  signèrent  cet  affreux  serinent,  déposé  entre 
les  mains  de  leur  chef;  et  ce  chef,  il  assure  que  c'est 
moi ,  et  que  les  preuves  en  sont  au  comité  dfc  sûreté 
générale. 

Il  faut  donc  que  la  Convention  nationale  se  fasse 
rendre  compte  de  cette  nouvelle  atrocité ,  et  empê- 
che que  le  crime  et  la  calomnie  ne  fassent  des  pro- 
grès. Vous  êtes  justes  ;  je  demande,  au  nom  de  la 
Déclaration  des  Droits,  que  le  comité  de  sûreté  gé- 
nérale vous  rende  compte ,  séance  tenante  ,  de  cette 
dénonciation ,  et  je  me  réserve  la  parole  pour  con- 
fondre les  infâmes  déserteurs  de  la  cause  démocra- 
tique. (Vifs  applaudissements  des  femmes  qui  occu- 
pent le  devant  des  tribunes  dans  la  partie  de  la  salle 
où  siège  Duhem.) 

Levassbur  (de  la  Sarthe)  :  J'appuie  la  proposition 
de  Duhem.  Dunem  réclame  justice  d'après  les  Droits 
de  l'Homme,  on  ne  peut  la  lui  refuser.  C'est  en  vain 
qu'on  entreprendrait  d'attaquer  la  Déclaration  de 
nos  Droits;  ne  fussions-nous  ici  que  vingt,  nous 
combattrons  pour  la  défendre.  (Nouveaux  applau- 
dissements de  la  part  des  mêmes  femmes.) 

Plusieurs  membres  font  observer  que  l'assemblée 
n'est  pas  assez  nombreuse  pour  faire  droit  sur  une 
réclamation  aussi  importante. 

Devars  :  J'ai  un  fait  particulier  à  énoncer  contre 
Duhem  ,  et  qui  prouve  qu'il  n'est  pas  étranger  au 
complot  dénonce  hier  par  le  comité  de  sflreté  géné- 
rale. (De  nombreux  applaudissements  se  font  enten- 
dre de  toutes  les  parties  de  la  salle.)~Ruamps  dési- 
gne du  geste  une  loge  de  journalistes  où  les  plus  vîlil 
applaudissements  se  sont  fait  entendre. 


422 


BUAMPS  :  Pr&ident ,  fais  taire  ces  coquins-là  qoi 
nous  insultent,  ou  j*cn  fais  justice. 

(Riiampsselève  et  s^avance  vers  la  tribune  qu*il  a 
désignée,  en  menaçant  de  sa  canne.  Il  est  retenu  par 
Duhcin.) 

BiON  :  Ce  nVst  pas  au  commencement  d*une  séance, 
au  moment  où  un  petit  nombre  de  membres  s*y  trouve 
à  peine  rassemblé ,  qu'un  membre  de  celte  assem- 
blée doir  proposer  sa  justification.  Si  Duhem  a  été 
calomnié,  s'il  est  innocent, comme  il  le  dit,  il  ne  doit 
pas  craindre  de  reproduire  sn  motion  lorsque  la  Con- 
vention sera  plus  nombreuse.  Je  demande  donc  que 
Dnhem  reproduise  sa  motion  à  deux  heures.  (Ap- 
plaudissements.) 

TiiURiOT  :  La  Convention  ne  doit  écouter  ici  aue 
son  amour  pour  la  tranquillisé,  et  ce  sentiment  uoi^ 
la  tenir  en  ^arde  rontre  Ips  motions  que  Ton  vient 
lui  faire.  Duheni  se  plaint  d*avoir  été  calomnié  au- 

Ïirès  du  comité  de  sfirrté  générale,  c'est  donc  devant 
ui  qu'il  doit  produire  sa  justification  ;  et,  s'il  n'en 
obtient  pas  toute  la  satisfaction  qu'il  se  croit  en  droit 
dVn  attendre,  qu'il  s'adresse  alors  directement  à  la 
Convention. 

Des  deux  côtés  je  vois  en  ce  moment  des  mouve- 
ments qui  me  paraissent  également  dangf'reux.  Tel 
qui  s'annonce  pour  un  ami  des  soi-disant  patriotes 
persécutés,  est  un  scélérat  qui  guette  le  moment  de 
mettre  le  feu  à  la  mèche  ;  et  tel  qui  veut  venger  la 
république  des  attentats  dont  on  se  plaint,  est  encore 
un  scélérat  qui  veut  tout  troubler  pour  détruire  la 
liberté.  11  n'y  a  de  vrais  amis  de  la  liberté  que  ceux 
qui  ne  veulent  aucun  mouvement,  que  ceux  qui  veu- 
lent maintenir  le  calme. 

Commandez  à  vos  comités  de  gouvernement  d*ar- 
réter  quiconque  cherche  à  déterminer  un  mouve- 
ment, quelque  hnbit  qu'il  porte,  de  quelque  masque 
qu'il  se  couvre.  Tel  homme  fut  en  1789  un  aristo- 
crate forcené;  tel  autre  a  changé  à  tontes  les  épo- 
ques; et  tous  aujourd'hui,  devenus  patriotes  outrés, 
veulent  profiter  des  nombreux  avantages  que  nous 
assure  la  valeur  de  nos  armées ,  pour  s'assurer  des 
places  à  la  faveur  des  mouvements  qu'ils  tentent 
d'exciter. 

Je  demanderais  à  la  Convention ,  pour  mettre  fin 
à  toutes  ces  divisions,  qu'elle  n'entende  à  la  barre 
aucune  proposition  qui  puisse  avoir  pour  objet  de 
perpétuer  des  dissensions  qui  peuvent  perdre  la 
patrie ,  aucune  proposition  qui  puisse  déterminer  le 
triomphe  d'aucun  des  partis  qui  s'annoncent  en  ce 
moment. 

Le  salut  de  la  Convention,  le  salut  de  la  patrie  est 
là  (en  désignant  la  tribune);  il  faut  que  nous  don- 
nions à  la  France  l'exemple  de  l'union  la  plus  par- 
^  faite.  Ce  n>st  pas  trop  demander  au  patriote  que  de 
lui  demander  de  sacrifier  sa  haine  au  bonheur  pu- 
blic. Tout  homme  qui  conserve  l'espoir  d'exercer  des 
vengeances  n'est  pas  un  patriote.  Marchons  au  même 
but  dans  une  union  parfaite;  sacrifions  nos  haines 
au  salut  de  la  patrie.  Quand  la  révolution  sera  ter- 
minée ,  il  sera  temps  alors  d'examiner  qui  l'on  doit 
récompenser  ou  punir,  qui  a  bien  servi  le  peuple  ou 
qui  ne  fut  qu'un  coupable. 

Je  demande  donc  que  l'assemblée  passe  à  l'ordre 
du  jour  sur  les  propositions  de  Duhem ,  sauf  à  lui  à 
faire  entendre  sa  réclamation  devant  le  comité  de  sû- 
reté générale ,  auprès  duquel  il  a  été  calomnié. 

Cette  proposition  est  mise  aux  voix  et  décrétée 
tans  opposition ,  dans  les  termes  suivants  : 

«  La  CoQvenUon  naUonale  pnsse  à  l'ordre  du  jour  sur  la 
propcMlUoD  de  Duhem,  moUvé  sur  ci;  qu'il  peut  d'abord  dé- 
clarer les  faits  au  Gomilé  de  sûreté  générale,  sauf  à  lui  A 
iCadratiar  à  la  GoBVenttoo,  iTU  B'oblieBt  pu  JuHice.  > 


Jars-Panyillibb  ,  au  nom  dn  comité  des  secours 
publics  :  Citoyens,  vous  parler  des  défenseurs  de  la 
patrie,  c'est  être  sûr  de  vous  intéresser  ;  c'est  pour 
quatre  cents  dVntre  eux,  c'est  pour  des  hommes  gé- 
néreux qui  ont  scellé  de  leur  sang  les  fondements  de 
la  liberté  que  je  viens  vous  demander  des  récom- 
penses ;  non  que  je  prétende  que  vous  puissiez  ac- 
quitter par  là  de  si  grands  sacrifices  ;  le  sang  que 
I  on  verse  pour  la  patrie  ne  peut  être  payé ,  je  le 
sais.  Mais  la  patrie  doit  au  moins  venir  au  secours 
de  ceux  que  les  événements  de  la  guerre  ont  mis 
hors  d'état  de  continuer  à  la  servir.  C'est  d'après  ce 
principe ,  et  en  conformité  des  bases  que  vous  avez 
établies,  que  je  vous  propose  le  projet  de  décret  sui- 
vant : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entaidtf  le  rapport 
de  son  comité  des  secours  pubUcs,  décrète  : 

I  Art.  1"^.  La  trésorerie  nationale  paiera,  à  titre  de  pen- 
sion, aui  militaires  infirmes  ou  blessés  dénommés  dans 
les  deux  ét<iis  annexés  au  présent  décret,  la  somme  de 
370,639  liv.  13  sous  8  den.,qui  sera  répartie  entre  eux  dans 
les  proportions  établies  auxdits  étais. 

«  il.  Les  pensions  accordées  par  l'article  précédent  se- 
ront payées  A  dater  des  époques  ci-après  déterminées ,  sa- 
voir: pour  tous  les  militaires  qui  sont  traités  conformément 
aux  dispositions  de  l'article  VU  de  la  loi  du  6  juin  1793.  à 
dater  du  Jour  de  leurs  blessures  :  pour  ceux  qui  sont  traités 
conformément  A  l'article  Vlll  de  la  même  toi,  à  dater  ilu 
Jour  où  ils  auront  cesse  de  recevoir  la  subsisumce  ;  et  pour 
tou>  les  autres,  A  compter  du  Jour  où  ils  auront  cessé  de 
toucher  leurs  appointements. 

>  lit.  Il  sera  ralt  déduction  aux  pensionnaires  des  secourt 
provisoires  qu'ils  auront  reçus,  et  ils  seront  tenus  d'ailleurs 
de  remplir  toutes  les  formalités  exigées  des  autres  pension- 
naires de  la  république. 

«  IV.  U  n'y  a  lieu  A  délibérer  sur  les  demandes  ou  récla- 
mations des  citoyens  dénommés  dans  le  premier  état,  depuis 
le  n'  117  Jusqu'au  n*  124  inclusivement. 

«  V.  Les  état!  annexés  au  préseni  décret  ne  seront  point 
imprimés.  « 

Ce  décret  est  adopté. 

—  Le  président  annonce  que  les  citoyens  de  diffé- 
rentes sections  de  Paris  demandent  à  présenter  des 
Adresses  à  la  Convention. 

—  La  section  du  Mont-Blanc  est  la  première  ad- 
mise. Les  citoyens  qui  la  composent  dénient  dans  la 
salle. 

L*un  d'eux  porte  laparole  :  Citoyens  législateurs, 
des  hommes  perfides,  a  qui  le  trouble  est  nf»cessaire, 
dos  scélérats  qui  ne  vivent  que  de  sang,  des  mons- 
tres enfin  qui  servaient  Robespierre,  et  qui  regrettetit 
la  terreur,  viennent  encore  d\ngiter  les  torches  de  la 
guerre  civile. 

Législateurs ,  notre  union  fait  notre  force ,  votre 
énergie  assurera  notre  union  ;  que  la  justice  ne  soit 

Kas  un  vain  nom ,  comme  la  vertu  l'était  sous  Ro- 
espierre. 

Jtigex,  jtigez  vos  collègues  accusés,  vengez  promp- 
tement  le  peuple  s*ils  sont  coupables. 

Purgez  cette  commune  des  brigands  qui  ont  oppri- 
mé les  départements ,  et  qui  se  cachent  parmi  nous 
pour  vous  assassiner.  Décrétez  que  tous  les  agents 
subalternes  de  la  tyrannie  seront  exclus  de  toutes  les 
places  jusqu'A  la  paix. 

Armez  les  bras  des  patriotes  qui  se  dévouent  pour 
la  défense  des  principes ,  et  ne  laissez  pas  le  fer  pa- 
tricide  dans  la  main  des  terroristes. 

Défendez  le,s  rassemblements  dangereux,  les  clubs 
politiques  des  cafés,  et  décrétez  une  censtire  contre 
ceux  qui  ne  se  présentent  jamais  dans  les  assemblées 
du  peuple. 

Nr  quittez  jamais  Tattitude  imposante  que  vous 
avez  prise  ;  partout  vous  entendrez  les  cris  de  la  re- 
connaissance pour  les  d^rels  que  vous  avez  rendus 


43S 


hier.  Ils  sont  le  désespoir  de  tous  les  ennemis  de  la 
liberté,  ils  sont  le  gage  de  la  félicité  du  peuple.  (On 
applaudit.) 

Lb  Président  :  Citoyens ,  les  idoles  d*un  peuple 
libre  sonda  Liberté ,  TEgalité ,  la  Justice  :  voilà  le 
culte  du  républicain  ;  ceux  qui ,  dans  Paris ,  récla< 
ment  qu*il  soit  élevé  des  autels  à  d'autres  divinités 
sont  de  perfides  camr^icons,  qui,  à  quelque  prix  que 
ce  soit,  veulent  troubler  la  tranquillité  publiijue;  ils 
veulent  la  guerre  civile  ;  ils  veulent  par  des  divisions 
intérieures  atténuer  nos  victoires  ;  ils  veulent  justi- 
fier 1rs  ridicules  reproches  que  l'étranger  fait  au 
gouvernement  de  France  ;  ils  veulent  enhn  le  retour 
e  leur  affreux  système,  parce  qu'ils  savent  que,  du 
règne  de  la  terreur  et  du  crime  à  celui  d*un  roi  il 
n*est  qu'un  pas;  muis  leurs  complots  affreux  seront 
déjoues,  mais  le  peuple  sera  tranquille,  il  sera  sourd 
à  la  voix  de  ces  monstres  que  le  néant  reclame ,  et 

3ui ,  voyant  l'abime  ouvert  sous  leurs  pas ,  vou- 
raient  y  entraîner  leur  patrie  qu'ils  ont  inondée  de 
sang.  Ecartez  toute  inquiétude,  ralliez-vous  toujours 
à  la  voix  de  la  Convention;  ellejustiliera  la  confiance 
des  bons  citoyens,  elle  les  voit  avec  émotion  entrer 
dans  son  sein. 

,Cette  Adresse  a  été  renvoyée  au  comité  de  législa- 
tion et  de  sûreté  générale. 

—  Les  citoyens  de  la  section  des  Amis  de  la  Patrie 
défilent  ensuite  : 

Vorateur,  à  la  barre  :  Représentants  du  peuple , 
les  conspirateurs  s'agitent  de  toutes  les  parties  de  la 
république  ;  ils  cherchent  k  allumer  le  flambeau  de 
la  guerre  civile.  Les  Jacobins,  cette  horde  impie  en- 
fantée par  le  crime ,  entretiennent  encore  des  intel- 
ligences coupables. 

Nous  ne  pouvons  plus  souffrir  cette  lutte  infâme 
entre  le  crime  et  la  vertu  :  nous  venons  vous  deman- 
der vengeance  de  la  mort  de  nos  frères  du  bataillon 
des  Gravilliers,  assassines  par  eux  à  Marseille.  Cet 
attentat  n'est  qu'un  essai  de  ce  qu'ils  voudraient  exé- 
cuter à  Paris. 

Pour  travailler  efGcacement  au  bonheur  du  peuple 
et  assurer  sa  tranquillité,  faites  procéder  au  renou- 
vellement des  hommes  ineptes  ou  inmiornux  cpii  oc- 
,cnpent  des  places  civiles  dans  toute  la  république  ; 
Qu'ils  soient  remplacés  par  des  patriotes  purs  et 
éclairés,  dont  le  zèle  et  les  travaux  réparent  et  cica- 
trisent les  plaies  (\uq  les  vampires  et  l'affreux  van- 
dalisme ont  faites  a  la  patrie. 

Surveillez  ceux  d'entre  vous  qui  prêchent  sourde- 
ment le  jacobinisme  ;  ils  ne  sont  plus  les  vrais  repré- 
sentants du  peuple,  du  moment  qu'ils  veulent  en  être 
les  assassins,  en  faisant  renaître  ce  système  de  terreur 
que  vous  avez  proscrit,  et  qui  ne  reviendra,  nous 
vous  le  jurons ,  qu'après  qu'ils  auront  marché  sur 
DOS  corps  ensanglantés. 

Quant  à  nous,  nous  avons  signalé  dans  notre  sec- 
tion les  continuateurs  de  Robespierre;  ils  se  sont 
trouvés  parmi  les  membres  de  l'ancien  comité  révo- 
lutionnaire ;  leurs  crimes  ont  été  dévoilés  en  assem- 
blée générale  ;  le  récit  nous  en  fait  horreur;  nous 
avons  arrêté  qu'ils  avaient  perdu  notre  confiance , 
et  ne  pourraient  occuper  aucune  place  dans  notre 
section.  Déjà  les  trois  comités  de  gouvernement 
ont  reçu  des  exemplaires  du  tableau  de  leurs  for- 
faits. 

Ce  n'est  pas  leur  mort  que  nous  demandons ,  elle 
serait  trop  douce  pour  des  êtres  aussi  criminels;  mais, 
lorsqu'ils  seront  convaincus  aux  yeux  i\tt  la  loi,  que 
le  cachet  dont  ils  se  servaient  pour  sceller  leurs  for- 
faits soit  empreint  sur  chacune  de  leur  joue,  alin  que, 
livrés  continuellement  à  Topprobre,  ils  traînent  une 


vie  déchirée  par  le  remords,  et  qu'à  leur  heure  der- 
nière nos  enfants  disent  encore:  Voilà  les  assassins 
de  DOS  pères!.... 

Lb  Pebsidbnt  :  CitoyeDS ,  la  révolution  n'est  pas 
faite  pour  le  crime;  elle  frappera  sans  distinction'tous 
ces  êtres  immoraux  qui  ne  vivaient  que  de  rapines, 
tous  ces  hommes  affamés  d'or,  de  sang  et  de  domi- 
nation ,  qui  ne  regardaient  leur  pays  que  comme  un 
domaine  qui  devait  les  enrichir,  et  les  citoyens 
comme  des  esclaves  auxquels  ils  voulaient  comman- 
der. La  Convention  sera  inexorable  envers  les  mé- 
chants. Reposez-vous  avec  confiance  sur  sa  vigilance 
et  sur  sa  fermeté  ;  elle  saura  punir  ceux  (|ui  trouble- 
ront l'ordre  public  :  elle  reçoit  avec  satisfaction  les 
témoignages  de  votre  attachement,  et  vous  invite  à 
assister  à  la  séance. 

Lbgbndrb  :  Je  demande  la  parole  pour  une  motion 
d'ordre.  Je  désire  que  le  président  ae  la  Convention 
interpelle  le  président  de  la  commission  des  Vinji^ 
et-Un ,  pour  savoir  quand  son  rapport  pourra  &t 
faiL 

L'opinion  publique  est  encore  vacillante;  mais, 
quand  le  terme  sera  tifé,  les  citoyens  attendront  dans 
le  silence  et  avec  respect  le  rapport  et  le  prononcé 
de  la  Convention.  Après  la  décision  de  cette  grande 
affaire,  vous  ouvrirez  les  prisons,  vous  enverrez  de- 
vant les  tribunaux  révolutionnaires,  correctionnels 
et  de  police,  les  individus  justiciables  de  ces  tribu- 
naux; les  dénominations  de  Jacobins,  de  terroristes, 
de  buveurs  de  sang  disparaîtront,  et  chaque  citoyen^ 
serrant  la  main  de  son  frère ,  unira  ses  efforts  aux 
siens  pour  l'affermissement  de  la  république.  (On  aj^ 
plaudit.) 

La  proposition  de  Legendre  est  décrétée. 

—  Une  députation  de  la  commune  de  Bercy  est 
admise  à  la  barre.  Elle  expose  que  son  territoire  ne 
produit  point  de  blé ,  que  jusqu'à  présent  elle  a  reçu 
dans  les  approvisionnements  faits  pour  Paris  une 
part  à  laquelle  elle  pense  avoir  d'autant  plus  droit 
qu'il  n*y  u  pas  longtemps  qu'elle  est  séparée  du  fau- 
bourg Antoine.  Elle  demande  que  la  même  faveur 
lui  soit  continuée.  Elle  n'a  pas  d'autre  moyen  d'ali« 
menter  ses  habitants,  qui  sont  au  nombre  de  plus  de 
deux  mille. 

On  demande,  et  la  Convention  décrète  le  renvoi 
de  cette  pétition  au  comité  de  salut  public. 

BoissT  d'Anglas  :  Au  moment  où  la  malveillance 
s'agite  et  met  en  usage  toutes  ses  ressources ,  vous 
ne  serez  pas  étonnés  d'apprendre  qu'elle  n*a  surtout 
rien  négligé  pour  alarmer  sur  les  subsistances  ;  car 
ce  moyen  est  celui  qui ,  dans  tous  les  temps,  a  été 
employé  avec  le  plus  de  succès  pour  occasionner  des 
troubles  et  créer  une  disette  factice  en  en  faisant 
craindre  une  réelle. 

A  Luzarches,  deux  particuliers  inconnus  se  sont 
présentés  et  ont  dit  aux  citoyens  :  •  Vous  allez  man- 
quer de  pain  ,  il  faut  ^ous  révolter;  »  et,  comme  ils 
ont  vu  qu'on  se  disposait  à  les  faire  arrêter,  ils  ont 
pris  la  fuite. 

A  Corbeil ,  il  s'est  présenté  un  rassemblement  de 
dix-huit  cents  hommes,  qui  criaient  :  •  Donnez-nous 
du  pain  ,  ou  nous  pillerons  les  magasins!  •  Les  ad- 
ministrateurs du  dictrict  leur  ont  répondu  :  «  Nous 
ne  sommes  que  dépositaires,  nous  ne  pouvons  point 
disposer  de  ce  qui  est  dans  les  magasins;  mais  que 
ceux  qui  appartiennent  à  des  communes  qui  sont 
réellement  dans  le  besoin  s'inscrivent,  et  nous  Tcrons 
connaître  leur  situation  an  comité  de  salut  public.» 
Deux  cents  seulement  ont  donné  leurs  noms,  le  reste 
a  disparu. 

A  Soissons  et  ailleurs,  de  pareils  mouvements  ont 


4S4 


eu  lieu  ;  on  s'est  porté  sur  les  approvisionnements 
destinés  à  Paris  ;  on  a  répandu  (iu*il  y  avait  dans  cette 
commune  des  magasins  remplis  de  blé  où  on  le  lais- 
sait pourrir,  et  on  a  excité  au  pillage  Vous  avez  été 
témoins  de  ce  qui  s'est  nasse  à  Pans  :  par  conlradic- 
tion  avec  les  bruits  qu  on  faisait  courir  ailleurs,  on 
avait  semé  le  bruit  que  les  approvisionnements  man- 
quaient. Quel  était  le  but  de  ces  insinuations?  De 
porter  la  foule  chez  les  boulangers  ,  d'inspirer  aux 
citoyens  ta  pensée  de  s'approvisionner  d'une  quantité 
de  pain  qui  excéderait  leurs  besoins  journaliers,  et 
d'amener  ainsi  au  moins  l'apparence  de  la  disette , 
parce  que  chacun  n'aurait  pas  trouvé  à  s'approvi- 
sionner ainsi.  Les  rassemblements  au'on  désirait  ont 
eu  lieu ,  en  effet  ;  mais  on  a  bientôt  reconnu  qu'ils 
étaient  sans  effet,  et  Paris  n'a  pas  manqué. 

D'un  autre  côté,  on  débitait  dans  les  campagnes 
que  les  magasins  de  Paris  étaient  tellement  approvi- 
Moonés  <}u  on  y  laissait  pourrir  les  subsistances. 
Dans  Paris  on  débitait  des  propos  extrêmement  cou- 
pables, dont  l'objet  était  ae  provoquer  des  mouve* 
ments  pour  armer  les  citoyens  les  uns  contre  les  au- 
tres. Le  comité  est  instruit  que ,  dans  le  Nord ,  les 
Anglais  achètent  i  tout  prix  dès  grains  destinés  pour 
la  république.  Dans  un  écrit  attribué  à  un  membre 
de  la  Convention ,  on  a  dit  qu'on  a  récolté  en  France 
du  grain  pour  trois  années ,  et  que  c'est  l'impéritie 
du  gouvernement  qui  amène  la  disette.  Tout  cela 
eolncide  ensemble  ;  nous  sommes ,  il  est  vrai ,  dans 
un  moment  pénible  ;  nous  sommes  arrivés  après  un 
gouvernement  désastreux  ;  je  n'inculpe  point  1^ 
membres  qui  m'ont  précède  dans  la  partie  dont  le 
comité  de  salut  public  m'a  chargé;  mais  je  puis  dire 

Sue  tels  sont  nos  efforts ,  que  je  ne  doute  pas  que , 
ans  un  mois  ou  six  semaines,  toute  la  France  n'en 
ressente  les  heureux  effets.  L'abolition  du  maximum 
rouvre  déjà  vos  ports  au  génie  du  commerce  ;  je  dois 
donner  connaissance  à  1  assemblée  d'une  lettre  de 
^  Marseille,  le  9  pluviôse,  et  qui  contient  une  annonce 
'  très-satisfaisante  à  cet  égard. 

Boissy  lit  la  lettre  suivante  : 

t  Gitoyens  représeitanti,  Je  m'empresse  de  toasaononeer 
rheareuse  aniTte  dans  œ  port  du  briganUB  tÀmitU, 
eapilaiBe  Piicolas  Dodsro,  cbaroé  de  six  mille  qalotaux  de 
blé  pour  mon  compte  ;  la  Conserve,  commundéc  par  le  ca- 
pitaine Raffets,  m'en  apporte  quatre  mille  quintaux  ;  elle  a 
élélalsBéepr^d'icl. 

c  Voilà,  dioyeas  représentants,  les  premiers  effets  de 
l'eDCOuragement  que  la  ConvenUon  naUonale  a  accordé  au  ' 
commerce;  Ils  ne  seront  pas  sans  suite,  car  j'ai  pris  des 
mesures  pour  atUrer  dans  la  répuk>lique  une  forte  partie  de 
grains,  et  j>  réussirai. 

•  Je  vous  prie,  citoyens  représentants ,  d'être  persuadés 
da  mon  aèie  et  de  mon  dévouement  pour  la  chose  pubUqae. 
«  Si^é  Joseph  Patam.  « 

BoissT  :  Le  négociant  dont  il  s'affit  n'a  fait  ^ue  son 
devoir,  sans  doute ,  mais  il  doit  être  honoré  et  en- 
couragé. Je  demande  l'insertion  de  celte  hcttre  au 
Bulletin,  et  le  renvoi  de  la  pétition  de  la  commune 
de  Bercy  au  comité  de  salut  public. 

Ces  deux  propositions  sont  décrétées. 

Saladin  ,  au  nom  de  la  commission  des  Vîngt-et- 
Un  :  La  commission  des  Vingt-et-Un  m'a  chargé  de 
satisfaire  au  décret  rendu  dans  cette  séance.  Si  nous 
n'avions  écouté  que  le  désir  de  remplir  l'attente  de 
la  Convention  nationale  et  du  peuple,  et  de  nous  ac- 
quitter d'une  tâche  pénible,  nous  aurions  déjà  fait  le 
rapport  dont  nous  sommes  chargés.  Mais  la  nature  des 
faits,  le  uombre  des  pièces,  qui  toutes  ont  été  lues, 
les  formalités  salutaires,  prescrites  par  la  loi  du  8 
brumaire,  formalités  auxquelles  nous  nous  sommes 
scrupuleusement  attachés ,  ont  ralenti  la  marche  de 
la  commission. 


Déjà  la  commission  a  entendu  dans  trois  séances 
nos  quatre  collègues  prévenus.  11  nous  reste  à  exé- 
cuter une  formalité  ordonnée  par  la  loi  du  8  bru- 
maire, la  remise  des  copies  coilaliouné4:s  des  pièces, 
copies  que  les  prévenus  regardent  comme  nécessaires  * 
à  leur  défense.  Cette  remise  sera  faite  demain. 

Nous  entendrons  encore  nos  collègues,  et  la  com- 
mission croit  pouvoir  prendre  rengagement  de  faire 
le  rapport  dans  le  commencement  de  la  décade  pro- 
chaine. (On  applaudit.) 

PÉNièRBS  :  Il  ne  faut  |>as  que  ceux  qui  nous  accu- 
sent de  presser  la  marche  de  la  Justice  nationale 
puissent  se  prévaloir  du  vœu  que  vient  d'exprimer  à 
votre  barre  une  foule  immense  de  citoyens.  Sans 
doute  il  est  permis  au  peuple  de  demander  justice  de 
ses  tyrans  et  de  leurs  complices.  Mais  on  ne  peut  tirer 
parti  du  décret  rendu  dans  cette  séance,  à  l'égard  de 
la  commission  des  Vingt-et-Un  ,  pour  calomnier  la 
Convention.  N'avoiis-nous  pas  épuisé  toutes  les  for- 
mes qui  peuvent  rassurer  Vinnocent  et  lui  faciliter 
les  moyens  de  sa  justification?  Nous  leur  dirions,  à 
ceux  qui  nous  accuseraient  :  «  Vous ,  qui ,  dans  les 
temps  désastreux  de  votre  tyra unique  puissance , 
traîniez  vos  collègues  à  Téchafaud  sans  les  entendre, 
avez-vous  observé  une  seule  de  ces  formes  salutai- 
res? •  (On  applaudit  à  plusieurs  reprises.) 

(L#iiMled#mam.) 


s.  B.  Dans  la  séance  du  22  plurfose.  le  comité  de  salut 
public  a  présenté  à  la  raUficalion  de  la  Gonveniion  le  (ralté  de 
paix  conclu,  le  SI  de  ce  mois,  avec  le  ministre  plénipotentiaire 
du  grand  duc  de  Toscane.  Ce  traité  porte  que  le  grsnddue 
renonce  à  l'acrossion  qu'U  avait  donnée  A  la  coaliUon  ar<» 
mée  contre  la  république;  en  conséquenee,  la  paix,  l'amitié 
et  la  bonne  Inielllgence  régneroni  désormais  entre  les  deux 
nations,  1^  neuirnllté  sera  rétablie  sur  le  pied  où  elle  était 
avant  le  10  octobre  1793.  Le  traité  n'aura  d'effet  qu'aprà» 
la  ratificaUon  de  la  Convention. 

l/C  rapnorleur  a  ajouté  que  le  grand-duc  s'était  engagé  à 
restituer  à  ses  frais  les  grains  que  les  Anglais  nous  ont  enle- 
vés dans  le  port  de  Livourne,  lors  de  la  rupture. 

La  Convention  a  ordonné  l'Impression  du  rapport  et  du 
traité,  et  a  ajourné  la  discussion  à  quinUdi. 

-^  La  Convention  a  autorisé  le  comité  de  salut  public  h 
choisir,  pour  une  mission  parUculi'tre  dont  il  rendra  compte 
sous  peu,  un  représentant  du  peuple  r^vtmu  de  mission  de- 
nuls  moins  de  trois  mois. 


De  Paris. 

Les  ooiivelles  suivantes  nous  ont  été  donnés  par  une  main 
sûre. 

I  Le  stathouder,  ftiyant  avec  sa  famille,  s*est  fait  annon- 
cer A  la  cour  britannique.  Le  ministère,  craignant  une  In- 
Sm'rerUoD,  a'a  pas  voulu  lui  accorder  l'hospitalité  dans  le 
palaisde  Saint- James  ;  on  lui  a  donné ,  pour  loi  et  sa  femilie , 
le  château  de  Kew,  A  cinq  milles  de  Londres-  \jà  fuite  do  la 
famille  stalboudcrienne  a  été  connue  dans  Londres,  cl  a 
excité  uue  grande  fermentation  dans  les  esprits.  Pilt,  com- 
primé par  le  parti  de  l'opposition,  a  offert  sa  diimission  :  on 
a  voulu  confier  a  Fox  et  à  Portiand  le  ministère  :  ils  ont  re- 
fusé l'un  et  l'autre  de  remplir  une  place  aussi  délicate  dans 
les  eonjonctures  présentes.  • 


Payemenlê  à  la  Irésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  oavert  pour  les  six  pre- 
miers mois;  il  sera  fait  A  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscripUons  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères 
est  de  hait  moia  vingt  et  ua  Jours  de  l'anDée  1793  (vieux 
style). 


GAZETTE  NATIONALE  ».  LE  HONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  144.  Quartidi  24  Pluviôse,  l'an  3e.  {Jeudi  12  Pévuie»  1795,  tieux  style.) 


POUTIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Vienne f  le  ÎO  janvier,  ^L^l  Porte-Ottomane  avait  fait 
savoir,  il  y  a  quelque  temps,  à  notre  cour,  que  les  Bosnia- 
ques s'opposaient  de  plus  en  plus  au  démembrement  de 
leur  territoire,  et  &  la  cession,  stipulée  par  le  traité  de 
Sehislowe,  des  forteresses  de  Novi,  Dubitza,  Gradiska,  etc. 
En  conséquence,  le  reiss-effendi  a  demandé  la  restitution 
très-procbaine  de  ces  places,  et  a  proposé  à  la  cour  de 
Vienne  un  équivalent  à  son  choix. 

Le  cabinet  de  Vienne  a  répondu  à  la  proposition  faite 
par  la  Porte  :  «  Qu'aucun  équivalent  ne  pouvait  lui  conve- 
nir, à  moins  que  Belgrade  n*y  fût  compris  ;  qu*ainsl  la 
seule  alternative  proposable  serait,  ou  que  la  Porte  forçât 
les  Bosniaques  de  se  soumettre  aux  stipulations  du  traité, 
ou  quelle  abandonnât,  comme  équivalent  définitif  à  la 
cour  de  Vienne ,  les  forteresses  laissées  entre  ses  mains 
comme  équivalent  provisoire.  • 

SUISSE. 

BâU,  le  12  pluviôse.  —  Les  cantons  helvétiques  ne  né- 
gligent aucune  occasion  de  prouver  à  la  république  fran- 
çaise le  désir  de  resserrer  tons  les  liens  qui  les  unissent  à 
elle.  Ils  viennent  d'ordonner  aux  émigrés  français,  sans 
distinction  d'âge,  d'état,  ni  de  sexe, de  sortir  du  territoire 
de  la  république  avant  le  i*'  avril  prochain. 

Cette  mesure  parait  avoir  été  déterminée  par  un  arrêté 
du  comité  de  salut  public  de  la  Convention  nationale  de 
France,  dont  le  citoyen  Barthélémy  a  donné  connaissance 
aux  cantons. 

—  On  vient  de  défendre  la  circulation  d'un  ouvrage  de 
â*Erlack,  tendante  prouver  que  la  coalition  a  le  plus  grand 
intérêt  à  continuer  la  guerre  contre  la  France. 

—  Deux  officiers  anglais  faisaient  des  recrues  à  Lan- 
tanne;  la  régence  de  Berne  les  en  a  chassés.  Elle  a  traduit 
devant  les  tribunaux  un  Bernois  qui  avait  fabriqué  pour 
1K),000  livres  de  faux  assignais.  ' 

—Quelques  communes  du  comté  de  Togenbourg  se  sont 
insurgèet  contre  Tabbé  de  Saint-Gall.  Ce  dernier  a  de- 
mandé l'a&siitance  des  cantons  de  Zurich ,  de  Eterue  et  de 
Glaritx.  Des  paysans  de  Sargans  et  de  Bagats  ont  égale- 
ment attaqué  le  monastère  dePfeffers.  Leur  but  était,  dit* 
OD,  d'enfermer  les  moines  dans  leur  église,  et  là  de  leur 
demander  Texemplion  de  la  dime  et  des  autres  droits  féo- 
daux. Le  bailli  de  Sargans  a  envoyé  du  secours  aux  reli* 
gieox.  Quelques  paysans  ont  été  arrêtés;  le  reste  s*est  dis- 
persé. 

—  Bâle  est  devenu  un  des  entrepôts  de  commerce  les 
plus  considérables  de  l'Europe,  depuis  que  les  marchan- 
dises qui  passaient  le  Rbin  traversent  celte  ville.  Cet  ac- 
croissemeni  de  commerce  a  accéléré  la  mesure  hostile  dont 
la  cour  de  Vienne  menaçait  depuis  longtemps,  et  qui  con- 
siste ù  former  un  cordon  de  Irouprs  pour  empêcher  l'ex- 
portution  des  denrées  de  la  Souabe  en  Suisse. 

Le  canton  de  Bâle  a  vu  avec  beaucoup  de  mécontente- 
ment ce  procédé  autrichien.  Il  a  envoyé  à  Ulm,  à  Munich 
et  à  Vienne,  le  sénateur  Mecbeig,  pour  réclamer  contre 
une  telle  rigueur. 

HOLLANDE. 

Leyde^  le  ti  janvier.  —  Le  conseil  proTÎsoire,  considé- 
rant la  condnite  pleine  d'énergie  et  de  ^age*ise  tenue  dans 
ces  moments  difficiles  par  le^ habitants  de  cette  ville;  con- 
sidérant que  le  mointien  du  repos  public  est  un  de  ses  plus 
saints  devoirs,  ainsi  que  celui  des  principes  étemels  de  li- 
berté et  d'égalité,  déclare  que  la  comnooe  a  bien  mérité 
de  la  patrie. 

Ferspone  M  pourra  «iklM  te  Mh»  il  «  «Ararsep 


^effets,  sans  un  passeport  du  conseil,  sous  peine  de  voir  let 
biens  mis  en  séquestre. 

Le  conseil  prend  tous  les  habitants  qui  obéiront  à  cet 
ordre ,  quelle  que  puisse  être  leur  façon  de  penser,  sous  la 
protection  de  la  loi. 

Tous  les  habitants  s*abstlendront  de  toute  expression 
injurieuse  ou  qui  indiquerait  des  ressentiments  particu- 
liers. 

Personne  ne  pourra  se  déshonorer  en  portant  la  li?rée 
de  l'esclavage ,  c'est-à-dire  le  ruban  ou  la  cocarde  d*0* 
range,  sous  peine  d'être  détenu  comme  suspect. 

Toutes  les  séances  du  conseil  provisoire  se  tiendront  en 
présence  du  peuple  :  nulle  délibération  ne  sera.valable  qne 
celle  prise  à  huis  ouverts. 

Abolition  de  l'impôt  sur  le  pain ,  qui  existe  depuis  4791* 

Une  distribution  extraordinaire  de  tourbe  è  tous  les  ci« 
toyens  indigents,  sans  distinction  de  culte  ou  d'opinion 
politique. 

Une  collecte  générale,  indiquée  pour  le  28,  par  toute  la 
ville,  pour  soulager  plus  efficacement  les  pauvres. 

Comité  de  bienfaisance  créé  à  cet  effet. 

—  Avant-hier,  27,  le  général  Daendels  a  passé  par  ici  ; 
il  a  été  reçu  avec  la  plus  grande  cordialité  par  le  conseil 
provisoire;  il  est  parti  pour  La  Haye. 


RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

Àngere,  le  il  pluvioee.  —  Nous  touchons  au  mo« 
ment  de  jouir  des  effets  salutaires  de  raïunistic  que 
la  clémence  de  la  Convention  nationale.!  nccordëe 
aux  habitants  de  la  Vendée,  que  le  fanatisnie  a  trop 
longtemps  égarés.  Bientôt  cette  contrée,  jadis  si  flo- 
rissante et  si  fertile,  sera  rendue  à  la  république. 

Le  départ  des  représentants  du  peuple  pour  Mache- 
coul  augmente  encore  les  espérances  que  nous  avions 
déjà  conçuesen  apprenant  que Charette,  qui  a  le  plus 
d'ascendant  sur  les  rebelles,  et  à  qui  ceux-ci  sont  le 
plus  attachés,  a  manifesté  les  meilleures  intentions, 
et'que  Stofflet,  le  plus  opposé  à  toute  réconciliation, 
vient  de  demander  une  entrevue  avec  les  représen- 
tants, sur  le  pont  de  Vihiers. 

Cette  entrevue  a  eu  lieu  hier,  non  avec  les  repré- 
sentants ,  mais  avec  deux  commissaires  par  eux 
choisis. 

Parie,  le  22  pluffiote.  —  On  a  arrêté  la  ci-devant 
marquise  de  Mont-Tendre.  On  parle  beaucoup  de 
cette  arrestation,  depuis  que  VOraleur  du  Peuple  a 
fait  connaître  les  liaisons  de  cette  femme  avec  le  dé- 
puté Fayau. 

On  a  vu  hier  au  matin  quelques  Jacobins  qui 
ont  eu  Paudace  de  promener  triomphalement  le 
buste  de  Maratdans  quel(|ues  rues  du  faubourg  An- 
toine. La  pliipart  ont»été  arrêtés ,  moins  pour  ce 
fait  que  comme  prévenus  d*intrigues  séditieuses. 

Déclaration  envoyée  au  comité  de  sûreté  générale. 

La  curiosité  nous  attirait  au  spectacle  d*Audinot; 
sous  le  règne  de  la  liberté,  nous  croyions  pouvoir 
nous  livrer  à  d'innocents  plaisirs;  nous  nous  plaçons 
au  parterre;  des  murmures  se  font  entendre  lors^ 
qu*on  lève  la  toile  pour  donner  la  pièce  intitulée 
le  Concert  de  la  rue  Feydeau,  Tous  les  citoyens  qui 
composaient  les  baignoires,  premières,  secondes  et 
troisièmes  loges,  paraissaient  étonnés  de  voir  qu'on 
persistât  à  donner  une  pièce  improuvée  la  veille,  et 
dont  le  but  était  de  diviser  les  citoyens. 

Le  prétendu  muscadin  de  cette  pièce  est  un  jeune 
homme  aristocrate,  employé  dans  les  bureaux  des 

64 


42G 


hupitauz  militaires;  il  tourne  en  ridicule  les  fau-  1 
bourgs  et  parle  avec  emphase  du  ci-devant  Palais- 
Royal,  de  sorte  que  Ton  ne  peut  apercevoir  dans  le 
rôle  de  ce  personnage  que  l'intention  de  rendre 
odieuse  la  jeunesse  parisienne,  en  la  colomniant. 
Le  patriotisme  des  jeunes  gens,  leur  union  de  cœur 
avec  tous  leurs  frères,  tous  leurs  amis ,  tous  leurs 

Îiarents  des  faubourgs,  leur  commandaient  d'arrêter 
a  représentation  d*une  pièce  aussi  dangereuse;  les 
sifflets  ont  fait  justice  des  débuts  ;  un  cri  unanime 
s*est  fait  entendre  :  f  Vive  la  Convention  nationale! 
Tîve  la  république!  vivent  nos  frères  des  faubourgs! 
vivent  tous  les  patriotes  !  à  bas  les  Jacobins  !  • 

Du  haut  de  la  salle  partent  des  cris  d'opposition  : 
«  A  bas  le  parterre  !  >  On  regarde,  on  aperçoit  des 
furies  de  guillotine  et  quatre  ou  cinq  brigands  qui 
s^igitaient.  L'indignation  se  fait  entendre  générale- 
ment. On  s'élance  sur  le  théâtre  pour  voir  ceux  qui 
osaient  encore  insulter  à  la  représentation  nationale 
et  à  ses  défenseurs.  L'officier  de  police  se  présente 
sur  la  scène,  comme  organe  de  la  loi.  On  Técoute 
avec  la  plus  respectueuse  attention;  il  fit  une  sim- 
ple déclaration  de  non-improbation  U\e  la  pièce)  par 
le  comité  de  sûreté  générale.  Le  public,  juge-né  des 
ouvrages  dramatiques,  ne  voit  en  cela  rien  qui 
Tempechc  de  désapprouver  une  pièce  immorale  et 
dangereuse  par  les  caractères  qui  s'y  trouvent;  le 
vœu  général  est  reconnu;  la  pièce  n'a  pas  lieu 

On  dit  que  le  spectacle  est  cerné;  le  plus  religieux 
silence  est  observé  pendant  la  dernière  pièce.  On 
sort,  on  examine  les  cartes;  on  arrête  arbitrairement 
tes  citoyens  munis  de  leurs  papiers,  et  renvoyés  par 
rofficior  de  police.  Un  coup  de  pistolet  est  tiré  sur 
eux,  il  fait  long  teu;  on  lève  le  sabre  sur  plusieurs, 
on  lis  conduit  au  corps  de  garde.  Le  long  du  che- 
min ils  continuent  de  crier  :  •  Vive,  la  républi- 
que !  vive  la  Convention  nationale  !  à  bas  les  Jaco- 
bins !  »  Les  mêmes  furies  apostées  criaient  à  ces 
mots  :  «A  la  guillotine  !  à  la  guillotine  !  • 

Il  est  à  remarquer,  et  cette  réflexion  doit  effrayer 
les  conspirateurs,  que  les  faubourgs,  armés  pour 
nous  arrêter,  ont  eu  pour  nous  les  plus  grands 
égards;  les  officiers  de  police  se  sont  fort  bien  compor- 
tés, excepté  deux  ou  trois.  On  nous  conduisit  de  là 

au  comité  révolutionnaire  du arrondissement, 

section  des  Grayilliers.  Là  Léonard  Bourdon  excitait 
les  citoyens  contre  nous,  cherchait  à  les  tromper 
sur  nos  intentions,  et  jouait  (quoiqu'il  ne  soit  pas 
chargé  de  cette  mission)  le  rôle  de  Dumas  au  tribu- 
nal de  sang.  Les  citoyens  de  j^arde  restaient  muets, 
et  les  commissaires  révolutionnaires  employaient 
toujours  les  formes  les  plus  honnêtes.  Enfin ,  pour 
l'ensemble  et  la  conduite  de  ces  arrestations  illé- 
gales sous  tous  les  rapports,  la  tyrannie  ne  s'exerça 
jamais  avec  tant  d'impudence.  Ceux  qui  criaient: 
«  A  bas  la  Convention  !  •  ne  furent  pas  arrêtés,  tan- 
dis que  des  citoyens  tranquilles,  restés  chez  Nicolet, 
où  il  ne  s'était  fait  aucun  bruit,  étaient  arbitraire- 
ment arrêtés  sous  prétexte  qu'ils  étaient  des  musca- 
dins; dan^  ce  nombre  étaient  de  braves  garçons  ser- 
ruriers, et  de  braves  sans  -  culottes  q^li  avaient 
fraternisé  avec  nous.  On  a  voulu  par  là  attiédir  notre 
énergie  :  elle  doublera.  Les  partisans  et  les  appuis  de 
la  tyrannie  seront  renverses;  les  égorgeiirs  et  les 
assassins  seront  punis  de  mort.  Vive  la  république! 
vive  la  Convention  nationale!  à  bas  les  Jacobins! 
{Suit  un  grand  nombre  de  signatures,) 

Le  comité  révolutionnaire  de  la  section  des  Gra- 
villiers  n'a  pas  survécu  longtemps  à  cette  brillante 
expédition;  les  membres  ^ui  le  composent  ont  été 
arrêtés  par  ordre  du  comité  de  sûreté  générale. 


Arrêté  du  cimite  de  sûreté  généraU^ 
du  M  pluviôse. 


Le  comité  de  sûreté  générale ,  itiformé  que  des  malvetl- 
laïUs  se  rendent  à  Paris  de  plusieurs  dcparteroent^  de  la  ré- 
publique, et  viennent,  au  milieu  de  la  nombreuse  popula* 
iion  de  cette  commune,  chercher  un  asile  contre  l'opinion 
publique  qui  les  accuse; 

Arrête  que  tout  individu,  pour  obtenir  du  comité  de 
sûreté  générale  une  permission  de  séjour  à  Paris,  sera  tenu 
de  se  présenter  avec  un  bon  citoyen,  qui  attestera  son 
amour  pour  les  lois  et  la  tranquillité  publique. 

Signé  tes  membres  du  comité  de  sûreté  générale» 


Arrêté  du  comité  de  salut  publie. 

Le  comité  de  salut  public  arrête  : 

Que,  la  libre  circulation  des  grains  et  des  fiirioes  étant 
prescrite  par  la  loi ,  il  est  enjoint  à  toutes  les  autorités  con- 
stituées de  favoriser  cette  circulation. 

En  conséquence,  les  autorités  constituées  et  leurs  agents 
nationaux ,  dabs  le  ressort  desquels  il  aura  été  acheté  des 
grains  et  fkrines,  ou  sur  le  territoire  desquels  lesdiis  grains 
devront  passer,  sont  tenus  d*en  protéger  Penlèvement  et  la 
circulation  par  tous  les  moyens  que  la  loi  met  dans  leurs 
mains,  et  sont  individuellement  et  collectivement  respon- 
sables des  entraves  qui  pourraient  y  être  apportées  de  quel- 
que manière  que  ce  soit. 

Le  présent  arrCié  sera  inséré  au  BuUctin. 

Signé  (es  membres  du  comUé  de  snlut  publie» 


Autre  arrêté. 


Le  comité  de  salat  public,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  la  quatrième  commission,  arrête  : 

Art.  I*'.  Dans  tous  les  lii^ux  où  les  besoins  du  service 
auront  nécessité  la  formation  de  magasins  de  subsistances 
ou  de  fourrages,  et  où  il  ne  résiderait  pas  de  commissaires 
des  guerres  pour  en  taire  la  police,  viser  et  arrêter  les 
pièces  de  dépenses,  les  municipalités  de  cbaque  lien  seront 
tenues  de  remplir  ces  fonctions. 

n.  Blle^  feront,  en  conséquence ,  toutes  les  fois  qu Viles 
en  seront  requises  par  les  préposés  auxdits  magasins,  tou- 
tes reconnaissances,  et  dresseront  tous  procès-verbaux  que 
nécessitera  leur  service. 

IIL  Et  pour  que  le  visa  et  Tarrêté  des  dépenses  soient 
toujours  assurés,  lésdites  municipalités  nommeront  deux 
de  leurs  membres  pour  remplir  ces  (onctions,  et  arrêter  et 
viser  exactement,  tous  les  mois,  toutes  les  pièces  de  dé- 
penses ,  tant  en  deniers  qu'en  matières,  faites  dans  les  éta- 
blissements respectifs. 

IV.  Le  présent  arrêté  sera  Inséré  au  Bulletin  et  U*ansmis 
h  la  quatrième  commission,  pour  être  notifié  par  elle  aux 
diCTérentes  agences  et  aux  préposés  qu'il  concerne. 

Signé  tes  membres  du  comité  de  salut  publie. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Barras, 
SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU  21  PLUVIOSE. 

Les  citoyens  de  la  section  de  la  Fontaine  de  Gre- 
nelle détilent  dans  la  salle. 

L'orateur  :  Législateurs,  guerre  aux  terroristes, 
aux  fripons,  aux  anarchistes,  aux  partisans  de  la 
royauté  !  tel  est  le  cri  de  ralliement  des  citoyens  de 
la  section  de  la  Fontaine  de  Grenelle. 

Vous  avez  rayé  des  annales  de  la  France  Tapo- 
théosed*un  homme  déjà  jugé  par  la  postérité;  son 
buste  était  partout,  parce  que  partout  les  buveurs 
de  sang  avaient  planté  leur  pavillon.  Et  qu*ils  ne 
Q0U8  disent  pas  qu*iU  ont  été  maîtrisés  par  les  cir- 


427 


coDsUnces!  Les  circonstances!  ils  les  faisaient  naître 
à  leur  gré;  ils  gouvernaient  tout ,  ils  embrassaient 
tout,  ils  avaient  tout  enchaîné;  la  vie,  Thonneur,  les 
biens  des  citoyens,  tout  était  sous  leurs  mains  fé- 
roces; ils  maUrisaient  à  leur  gré  les  mouvements  et 
l'inaction  d'une  poignée  d'intrigants. 

Montagne  !  Montagne  !  tu  n  es  plus  cette  Monta- 
gne fameuse,  des  rochers  de  laquelle  on  devait  tirer 
les  tables  de  la  loi  :  ta  crête  n*est  plus  que  le  cratère 
horrible  d'un  volcan,  dont  le  sein  a  vomi  cette  lave 
dévorante  de  fléaux  et  de  crimes  qui  s'est  répandue 
sur  tous  les  points  de  la  France  dévastée.  Que  la 
foudre  n'en  sorte  plus  que  pour  écraser  ces  vils  in- 
trigants qui  croient  encore  à  l'impunité  de  leurs  for- 
faits; nous  la  conjurons  sur  ces  vautours  qui  ne 
peuvent  se  désaltérer  que  dans  le  sang.  Leurs  chefs 
sont  au  milieu  de  vous,  législateurs;  vous  les  avez 
dénoncés  au  peuple,  qui  ne  craint  pas  plus  ces  lions 
et  ces  mitrailleurs  que  ces  batteurs  de  monnaie  a  la 
place  de  la  Révolution;  il  attend  votre  décision  avec 
confiance,  parce  qu'il  compte  sur  votre  justice,  quel- 
que lente  qu'elle  paraisse  ;  législateurs,  il  n'est  au- 
cune transaction  avec  le  crime.  (Vifs  applaudisse- 
ments.) 

Mous  vous  demandons  :  lo  vengeance  de  ces  grands  | 
coupables;  2»  punition  des  égorgeurs  du  2  septem- 
bre; 30  enfin,  le  réarmement  des  bons  citoyens  qui 
ne  réclament  leurs  armes  que  pour  maintenir  la  | 
justice  et  défendre  la  Convention  nationale  contre 
les  entreprises  des  factieux  et  de  leurs  suppôts.  (Les 
applaudissements  continuent.) 

Nous  vous  déclarons  que  les  membres  de  notre 
comité  révolutionnaire,  reconnus  formellement 
coupables  d'abus  de  pouvoirs,  de  concussions  et  de 
férocité,  ont  perdu  notre  confiance,  et  que  nous  les 
jugeons  indignes  d'occuper  aucunes  places  publi- 
ques, civiles  et  militaires. 

Lb  Prssidbnt:  Bannissez,  braves  républicains, 
vos  alarmes  et  vos  inquiétudes.  La  Convention,  qui 
a  fondé  ta  république,  saura  la  mamtenir;  elle  s'oc- 
cupe sans  relâche  à  réparer  les  maux  incalculables 
de  Tancicn  système;  elle  s'occupe  des  besoms  et  du 
bonheur  du  peuple.  Comptez  sur  sa  prudence,  sur 
sa  fermeté  et  sur  sa  justice,  comme  elle  compte  sur 
votre  obéissance ,  votre  respect  pour  les  lois,  et 
votre  amour  pour  la  liberté.  Elle  applaudit  à  vos 
sentiments  civiques,  et  vous  invite  aux  honneurs  de 
la  séance. 

Nota.  L'importance  des  matières  nous  oblige  à 
renvoyer  à  demain  les  autres  pétitions. 
La  séance  est  levée  à  quatra  heures. 

SÉANCE  nu  22   PLUVIOSE. 

Bailleul  :  Depuis  plusieurs  jours  j'avais  été  pré- 
venu des  projets  sinistres  qui  vous  furent  dénoncés 
avant -hier  par  votre  comité  de  sûreté  (;énérale. 
Ignorant  les  mesures  qu'il  avait  prises  et  l'intention 
ou  il  était  de  vous  en  faire  part,  j'étais  venu  à  l'as- 
semblée avec  la  résolution  de  déclarer  ce  que  j'avais 
entendu  et  de  demander  si  des  projets  dont  on  m'a- 
vait signalé  quelques  détails  n'étaient  que  des  chi- 
mères. 

Ce  que  je  me  proposais  a  cet  égard  est  devenu 
inutile  ;  mais  je  crois  à  la  nécessité  de  quelques  ob- 
servations que  je  devais  y  ajouter. 
^  Certes ,  dans  le  moment  actuel ,  toute  espèce  de 
mouvement,  quel  qu'en  soit  le  motif,  ne  peut  être 
que  dangereux  ;  mais  il  me  semble  qu'il  faut  être 
bien  aveuglé  pour  mettre  en  parallèle  l'agitation  dé 
quelques  citoyens  inquiets  sur  le  sort  de  la  liberté, 
sur  leur  sûreté  personnelle  »  et  il  y  •  plus  que  de  la 


cruauté  à  blâmer  ces  inquiétudes  après  les  désastres 
que  nous  avons  éprouvés,  et  une  conspiration  ourdie 
par  des  scélérats  qui  prétendent  assurer  l'impunité 
(le  leurs  crimes  par  de  nouveaux  forfaits. 

Je  veux  examiner  ce  qui  a  pu  ainsi  les  enhardir 
par  quelle  fatalité  l'on  n'a  arrêté  l'exécution  de 
leurs  complots  qu'au  moment  où  ils  allaient  être 
exécutés,  qu'au  moment  où,  dans  de  féroces  embras- 
sements,  ils  s'étaient  déjà  félicités  du  succès;  mais 
avant  je  dois  m'arréter  à  des  bruits  qu'on  a  répan- 
dus ,  à  des  défiances  que  l'on  a  cherché  à  insinuer 
relativement  aux  soixante  et  onze  députés  désignés 
aux  poignards  de  la  conspiration. 

C'est  une  chose  qui  ^tonnera  peut-être ,  si  Ton 
rapproche  la  stupide  grossièreté  de  la  plupart  des 
conspirateurs  de  l'habilelé  de  leur  marche,  lisent 
d'abord  calculé  d'une  manière  qui  leur  a  trop  réussi 
les  avantages  de  ^ens  sans  pudeur,  sans  morale,  qui 
ne  connaissent  m  patrie,  ni  lois,  dont  la  bouche  ne 
s'ouvre  que  pour  la  calomnie,  et  qui  ne  savent  user 
de  leurs  mains  que  pour  le  vol  et  l'assassinat ,  sur 
des  hommes  accoutumés  à  respecter  l'ordre  public , 
les  droits  de  leurs  semblables,  et  à  obéir  au  premier 
signal  que  donnent  les  magistrats ,  au  nom  des  lois 
qu'ils  sont  chargés  de  faire  exécuter. 

L'un  des  moyens  au'ils  avaient  préparés  pour  ar-  " 
river  à  leurs  fins,  c'était  de  diviser  dans  la  Conven* 
tion  cette  imposante  majorité,  composée  de  la  pres- 
que totalité  de  ses  membres.  Depuis  quelque  temps 
on  afiecte  de  prêter  aux  soixante  et  onze  de  vos  col- 
lègues qui  ont  été  incarcérés  des  intentions  perfides, 
des  projets  concentrés  de  vengeance,  qu'ils  savent 
dissimuler  jusqu'au  moment  où  ils  seront  assurés 
du  succès  de  leur  exécution.  L'aurais-je  jamais  pu 
croire,  si  je  ne  l'avais  entendu  de  mes  propres  oreil-  . 
les?  «Si  vous  parvenez  à  être  placés  dans  ce  gou- 
vernement ,  me  disait-on,  vous  planterez  une  guil- 
lotine au  milieu  de  la  salle.  -^  Ah!  m'écriai-je, 
quatorze  mois  de  prison  sous  le  couteau  des  tyrans 
sont  mille  fois  moins  cruels  qu'un  pareil  soupçon  !  • 
Je  répondis  en  même  temps  avec  force  et  avec  l'ac- 
cent de  la  bonne  foi.  0  inconcevable  effet  d'une  pré- 
vention si  absurde!  plutôt  que  de  céder  à  mes  rai- 
sons ,  on  ajouta  que  je  n'étais  pas  dans  le  secret.  Je 
cite  ce  propos ,  parce  qu'il  marque  dans  le  grand 
nombre  de  ceux  à  peu  près  semblables  que  j'ai  en- 
tendus. 

Nous,  des  intentions  perfides!  y  croirez-vousplus 
longtemps,  collègues  ?  Rigoureusement  parlant,  je 
ne  puis  répondre  que  de  moi;  mais  je  crois  avoir  vu 
daus  le  cœur  de  mes  anciens  compagnons  d'infor- 
tune; j'ai  observé  le  calme  de  leur  âme ,  attribut 
consolateur  de  l'innocence  opprimée,  et  cette  habi- 
tude précieuse  ne  s'allie  point  avec  le  sentiment  de 
la  vengeance;  j'ai  vu  en  eux  un  ardent  amour  de  la 

λatrie  et  de  la  liberté;  je  les  ai  vus  quelquefois  bénir 
eur  destinée ,  qui  les  avait  exclus  du  sein  de  la  re- 
présentation nationale  dans  un  temps  où  il  ne  lui 
restait  aucun  pouvoir  pour  faire  le  bien  ,  dans  un 
temps  où  il  n'y  avait  plus  ni  liberté  ni  patrie  ;  je  les 
ai  entendus  exprimer  le  sentiment  de  leur  recon- 
naissance pour  les  hommes  courageux  qui  donnèrent 
à  la  révolution  du  9  thermidor  une  direction  si  utile 
et  si  heureuse;  mais  jamais  je  n'ai  vu  s'échapper  de 
leurs  bouches  un  mot ,  un  seul  mot  qui  annonçât 
que  le  ressentiment  était  au  fond  de  leurs  cœurs. 

f^on,  collègues,  les  sentiments  qu'exprima  en  no- 
tre nom  le  respectable  dussaulx  n'étaient  point  l'effet, 
d'un  langage  nypocrite.  Rappelez- vous  donc  la  con- 
duite que  nous  avons  tenue  depuis  que  nous  sommes 
rentrés  dans  cette  enceinte;  et  si  vous  n'êtes  pas  les 
plus  injustes  des  hommes,  vous  conviendrez  qu'elle 
a  été  parfaitement  convenable  à  notre  aituation  ;  et 


438 


cette  expérience  mdrite  bien  de  faire  autunt  d'im*  ; 
pression  sur  vous  que  des  suppositions  inventées  i 
par  des  méchants  qui  ont  besoin  de  nous  désunir.      | 

J*ai  insisté  sur  ces  imputations  injustes  qui  nous  | 
sont  faites,  parce  qu'elles  ne  peuvent  durer  plus  i 
longtemps  sans  produire  un  grand  mal ,  parce  que  I 
nous  avons  besoin  d'union,  de  conliance,  parce  que  I 
le  salut  de  la  patrie  et  de  la  liberté  y  sont  attachés,     j 

Pour  moi,  je  ne  hais  personne  au  monde,  pas 
même  ceux  qui  m'ont  fait  le  plus  de  mal,  et  je.  porte 
dans  mon  cœur  tous  ceux  de  mes  collègue  dont  les 
efforts,  les  veilles  et  le  courage,  concourent  chaque 
jour  au  bien  public. 

Je  passe  maintenant  à  la  question  que  j'ii  proposée 
dans  le  commencement  de  ce  discours. 

Une  conspiration  a  été  sur  le  point  d'éclater;  elle 
n*8vait  rien  moins  pour  objet  que  le  massacre  de 
cent  membres  de  celte  assemblée  et  le  rétablisse- 
ment des  échafauds  que  vous  avez  brisés. 

t^  Deviez  vous  cramdre  un  pareil  attentat? 

20  Les  précautions  que  prend  la  police  suffisent- 
elles  pour  vous  rassurer  sur  l'avenir? 

De  grands  maux  ont  dévoré  la  France.  Le  9  ther- 
midor en  arrêta  les  effets  qui,  par  plus  de  régularité, 
allaient  devenir  encore  plus  désastreux.  Vous  or- 
donnâtes un  rapport  sur  la  situation  politique  de 
l'Etal;  mais  vous  étiez  encore  trop  voisms  de  la  ty- 
rannie pour  pouvoir  compter  sur  la  vérité  tout  en- 
tière. On  dissimula  la  plupart  des  causes,  et  Ton  se 
garda  bien  surtout  d'en  déterminer  le  caractère  ;  ce- 
pendant ,  puisque  le  mal  avait  existé ,  il  avait  des 
auteurs;  puisque  le  mal  avait  été  grand,  il  fallait  de 
grandes  mesures;  il  les  fallait  générales, promptes, 
sévères,  et  l'on  n'en  proposa  que  d'insignifiantes; 
car  quelques  mesures  relatives  au  commerce,  très- 
bonnes  en  elles-mêmes,  ne  signifiaient  rien  quant^nx 
entreprises  des  furieux  répandus  sur  toute  la  surface 
de  la  république. 

Si,  par  supposition ,  la  cause  des  malheurs  publics 
eût  été  dans  le  gouvernement;  si,  en  recherchant 
comment  le  gouvernement  avait  pu  les  produire,  on 
avait  trouvé  que  c'était  parce  qu'au  moyen  de  me- 
sures progressivement  effrayantes  ilétait  parvenu  à 
usurper  tous  les  pouvoirs ,  à  frapper  de  terreur  la 
représentation  nationale  et  tous  les  citoyens  capa- 
bles de  quelque  énergie ,  c'aurait  été  une  consé- 
quence nécessaire  de  déclarer  qu'il  y  avait  eu  tyran- 
nie dans  le  gouvernement. 

La  conséquence  de  cette  déclaration  aurait  été 
u'il  fallait  purger  le  sol  de  la  liberté  de  la  présence 
es  tyrans;  c'aurait  été,  dans  la  supposition  que  j'ai 
faite,  le  seul  moyen  de  prévenir  de  nouveaux  mal- 
heurs. 

Si  j'applique  cette  supposition  à  notre  situation 
politique,  je  vois  que  le  premier  pas  n'a  pas  encore 
été  fait  ;  cependant ,  collègues ,  prenez  y  garde  : 
vous  avez  été  investis  de  tous  les  pouvoirs  ;  il  est 
donc  du  plus  grand  intérêt  pour  vous  que  vous  dé- 
montriez aux  yeux  de  la  nation  française  l'oppres- 
sion sous  laquelle  vous  avez  vécu,  ou  bien  vous  ne 
pourriez  vous  justifier  d'être  au  moin«  coupables  de 
n'avoir  pas  empêché  de  naître  les  maux  qu'elle  a 
soufferts. 

En  second  lieu ,  vous  n'êtes  pas  les  maîtres  d'a- 
venturer le  sort  de  la  liberté ,  de  la  livrer  à  la  lutte 
des  tyrans  qui  voudraient,  au  prix  de  sa  ruine,  con- 
quérir leur  impunité.  Cependant  si  la  tyrannie  avait 
été  dans  le  gouvernement,  ceux  qui  le  composaient 
à  cette  époque  seraient  libres,  ils  viendraient  au  sé~ 
nat,  ils  y  marqueraient  du  doigt  leurs  victimes,  leurs 
agents  seraient  encore  partout  ;  et  vous  pourriez 

comi '        

qu 


l 


mipter  sur  quelque  sécurité  !  et  vous  pourriez  croire 
u'ils  abandonneraient  ainsi  les  moyens  qu'ils  att< 


raient  de  recouvrer  lenr  puissance!  et  voua  pense- 
riez que  leurs  agents ,  chargés  des  mêmes  crimes, 
tourmentés  des  mêmes  remords ,  poursuivis  des 
mêmes  frayeurs,  ne  se  rallieraient  pas  autour  d'eux, 
ne  s'agiteraient  pas  en  tous  sens  pour  détruire  et  la 
iustice  qui  les  menacerait  et  les  hommes  probes  dont 
le  devoir  serait  de  les  anéantir  ! 

Je  sais  que  quatre  des  anciens  membres  des  comi- 
tés de  gouvernement  sont  dénoncés. 

Mais,  dans  la  supposition  qu'il  y  ait  eu  tyrannie 
dans  le  gouvernement,  cette  marche  était-elle  salu- 
taire? était-ce  celle  qu'indiquait  la  prudence ,  que 
commandait  le  ^lut  public?  En  admettant  qu  ils 
soient  coupables ,  êtes-vous  bien  sûrs  qu'ils  soient 
les  seuls  auteurs  de~  vos  maux  ?  ne  craignez-vous 
rien  de  ceux  qu'ils  laisseront  après  eux?  Btd'ailleurs 
sur  quoi  sont-ils  accusés  ?  sur  quelques  faits  qui  leur 
sont  personnels.  La  nation  trouve-t-elle  dans  une 
pareille  instruction  les  lumières  qu'elle  a  droit  d'at- 
tendre de  vous  ?  et  vous-mêmes  y  trouverez-vous 
cette  pleine  justification  dont  vous  avez  besoin  vis- 
à-vis  d'elle,  cette  justification  qui  vous  est  si  facile  et 
qui  augmenterait  à  un  si  haut  degré  la  confiance 
que  vous  acquérez  chaque  jour  davantage  ? 

Si  ces  hommes,  traanits  devant  les  tribunaux, 
accusaient  la  Convention  elle-même,  s'ils  osaient 
avancer  qu'elle  sanctionna  leurs  mesures  au  moins 
par  son  silence ,  où  est  le  défenseur  officieux  qui 
aémontrera  par  quels  mensonges  on  vous  surprenait . 
des  décretsd'approbation,  par  quelle  force  étrangère 
à  la  Convention ,  par  quelles  mesures  terribles  on 
vous  força  au  silence  jusqu'au  moment  enfin  où,  la 
somme  des  maux  ayant  ouvert  les  yeux,  il  vous  fut 
permis  de  vous  livrer  à  votre  indignation  pour  le 
crime  et  de  vous  abandonner  à  l'élan  de  votre  amour 
pour  le  bien  ? 

Ce  n'est  pas  tout  :  je  suppose  ces  hommes  une 
fois  traduits  devant  les  tribunaux  ;  accusés  sur  des 
faits  personnels,  particuliers,  circonscrits  même 
dans  la  dénonciation  faite  contre  eux,  les  preuves 
peuvent  paraître  insuffisantes  à  des  juges  qui  n'ont 
pas  la  faculté  de  sortir  des  bornes  de  racte  d'accu- 
sation ;  si  cependant  il  y  avait  eu  réellement  tyran- 
nie, usurpation  dans  le  gouvernement,  ces  hommes 
qui  en  ont  été  membres ,  rentreraient  donc  triom- 
phants au  sein  de  la  représentation  nationale;  pou- 
vez-vous  calculer  les  nouveaux  malheurs  dont  la  pa- 
trie serait  menacée? 

Tant  qu'on  aura  pas  examiné  la  véritable  source 
des  malheurs  publics,  on  ne  peut  pas  dire  qu'elle 
n'a  point  été  dans  le  gouvernement ,  et  dès  lors  les 
inconvénients  que  je  trouve  dans  les  mesures  que 
l'on  a  adoptées  en  prouvent  l'insuffisance. 

En  politique ,  une  inconséquence  peut  avoir  les 
suites  les  plus  funestes.  Il  faut  faire  une  grande  dis- 
tfnction  entre  les  crimes  du  gouvernement  et  les 
crimes  qui  se  commettent  dans  le  gouvernement  : 
ceux-ci  appartiennent  aux  individus  qui  le  compo- 
sent. Il  faut  des  actes  d'accusation  et  une  instruction 
selon  les  règles  de  l'ordre  judiciaire,  parce  que  des 
individus,  quoique  membres  du  gouvernement,  ont 
pu  être  coupables,  et  le  gouvernement  intact  et  sans 
reproche;  mais  si  les  crimes  sont  ceux  du  gouverne- 
ment lui-même ,  dans  ce  cas  la  nation  a  été  néces- 
sairement attaquée  dans  ses  droits.  Ce  n'est  plus 
par  des  formes  ordinaires  qu'il  faut  les  poursuivre  ; 
ou  bien  l'intérêt  national  peut  encore  être  compro- 
mis par  les  moyens  même  employés  pour  sa  conser- 
vation. 

.  D'après  ce  que  je  viens  d'établir,  il  fallait  donc 
examiner  avant  tout  s'il  y  avait  eu  tyrannie  ;  il  fal- 
lait des  mesures  promptes  ,  générales ,  et  prises  une 
fois  pour  toutes  ;  des  mesures  qui  enveloppassent 


4S9 


d*an  seul  coup  Tes  tyrans  et  ceux  de  leurs  ageoU 
dont  les  intentions  pouvaient  se  mesurer  sur  la  na* 
tnre  de  leurs  actions  et  sur  le  degré  connu  de  leur 
intelligence  :  de  cette  manière  vous  préveniez  de 
nouveaux  complots ,  et  vous  assuriez  la  tranquillité 
publique  ;  autrement  ils  étaient  intaillibles,  et  vous 
pouvez  être  certains  d*en  voir  renaître  de  sembla- 
bles tant  que  la  liberté  publique  ne  sera  pas  garan- 
tie par  des  mesures  vigoureuses.  A  la  suite  de  ces 
mesures ,  il  (allait  une  amnistie  pour  les  hommes 
égarés  ;  car  c*est  par  des  fanatiques  que  les  scélérats 
commettent  les  plus  grands  crimes,  et  il  y  a  des  fiti- 
uaiiques  en  politique  comme  en  religion. 

On  n*a  pas  assez  généralement  reconnu  la  néoes-r 
'site  de  constater  quelle  a  été, pendant  le  temps  de  la 
tyrannie,  la  situation  de  la  Convention  nationale;' 
ensuite  on  a  trop  parlé  des  vengeances  nationales. 
Par  là  ou  a  effrayé  des  hommes  qui  haïssent  le  crime, 
mais  qui,  voyant  bien  des  coupables,  ne  voudraient 
point  verser  tant  de  sang.  Des  vengeances  nationa- 
les !  la  nation  a  besoin  aêtre  libre  ,  heureuse;  elle 
ne  peut  avoir  besoin  de  vengeances.  Si  ce  sentiment 
vil  n*entra  jamais  dans  l'âme  d'un  homme  qui  pense 
bien,  peut-on  le  supposer  nécessaire  dans  les  inten- 
tions aun  çrand  peuple  ?  Le  salut  de  la  patrie ,  col- 
lègues ,  voilà  le  principe  de  toutes  les  mesures  que 
vous  devez  prendre.  Mais  ces  mesures,  il  les  faut 
promptes.  Vous  avez  aussi  des  Autrichiens  et  des 
Anglais  à  combattre,  ils  nous  attaquent  de  front;  un 
instant  de  faiblesse  ou  d'imprévoyance,  et  vous  êtes 
perdus.  Vous  pourriez  sacrifier  votre  existence, 
mais  vous  ne  pouvez  sacritier  la  patrie.  Eclairez 
proroptement  les  hommes  égarés,  ramenez  tous  les 
Français  qui  n'ont  point  reçu  l'or  de  la  corruption, 
ramenez-les  aux  principes  qui  peuvent  les  sauver 
des  maux  qu'eux-mêmes  ils  se  préparent  !  Comment 
ne  songent-ils jpas  à  la  situation  affreuse  où  ils  se 
trouveraient,  si,  par  des  mouvements  coupables,  ils 
interrompaient  un  instant  les  efforts  continuels  du 
gouvernement  pour  les  approvisionner?  O  comble 
de  malheurs!  o  joie  de  nos  ennemis!  Mais  ils  ne 
l'auront  pas  ;  et  vos  derniers  décréta  feront  frémir 
la  cour  de  Londres. 

Citoyens,  placés  dans  une  situation  aussi  extraor- 
dinaire que  pénible  ,  dans  une  situation  d'où  il  faut 
pourtant  sortir,  et  bientôt,  ce  n'est  point  par  des 
moyens  ordinaires  que  vous  y  parviendrez*;  ce  sont 
des  problèmes  toul  nouveaux  que  doivent  résoudre 
la  sagesse  et  le  courage. 

Ce  n'est  pas  aue  je  veuille  qu'on  interrompe  le 
procès  commencé  ;  quelle  qu'en  soit  l'issue ,  la  me- 
sure que  je  propose  n'en  est  pas  moins  indispensable. 
Je  propose  à  la  Convention  nationale  de  décréter  : 
f  La  Convention  nationale  charge  ses  trois  comités  réu- 
nis de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  de  législation, 
de  faire,  dans  le  plus  bref  délai  «  un  rapport  sur  la  ques- 
tion de  safoir  s'il  y  a  eu,  oui  ou  non,  tyrannie  dans  le 
goufernement  avant  le  9  thermidor,  et  de  lui  présenter  les 
mesures  propres  à  assurer  la  tranquillité  publique  et  à 
prévenir  de  nouvelles  entreprises.  » 

Le  discours  de  Bailleul  a  été  fréquemment  inter- 
rompu par  des  applaudissements.  —On  en  demande 
l'impression. 

Bentabolb  :  Jamais  il  n*a  existé  peut-être  de  mo- 
ment où  les  représentants  du  peuple  aient  eu  plus 
besoin  de  s'entendre.  Comme  le  préopinant ,  je  dé- 
sire que  l'union  règne  entre  nous;  mais  j'aurais 
voulu  que  ,  pour  l'entretenir,  il  présentât  un  projet 
de  décret  plus  clair.  Quand  nous  avons  fait  la  révo- 
lution du  9  thermidor,  au  moment  où  nous  n'avions 
plus  que  quelmies  heures  à  vivre...  (Des  ris  ironi- 
ques partent  ae  la  tribune  au-dessus  de  l'extrémité 
gauche.) 


CuAZAL  :  Président,  je  demande  que  tu  donnes  des 
ordres  pour  qu'à  l'instant  les  femmes  qui  viennent 
d'insulter  la  Convention  par  leurs  ris  soient  arrê- 
tées. (Des  applaudissements  se  font  entendre  de  tous 
les  côtés.) 

PÉifiÈRBS  :  Je  demande  que  les  bons  citoyens  de 
la  tribune  soient  invités  à  désigner  celles  qui  se  sont 
permis  cette  insulte. 

Lb  PrIsident  :  J'invite  les  bons  citoyens  qui  n'ont 
pas  partagé  cette  injure  à  désigner  celles  qui  l'ont 
commise,  pour  qu'elles  soient  arrêtées.  (Applaudis- 
sements très-nombreux.) 

Les  citoyens  de  la  tribune  et  des  tribunes  voisinas 
indiquent  une  femme  qu'ils  font  arrêter  aussitôt* 
—  Les  plus  vifs  applaudissements  éclatent  de  toutes 
parts. 

Bbntabolb  :  Dans  ce  moment ,  qui  fut  en  méma 
temps  si  dangereux  et  si  heureux  pour  la  liberté,  la 
Convention  n'a  pas  examiné  s'il  y  avait  une  Mon- 
tagne ou  un  Marais;  elle  s'est  levée  tout  entière ,  et 
cette  réunion  a  chassé  toutes  les  divisions  qui  exis- 
taient ,  et  qui  étaient  peut-être  aussi  bien  l'ouvrage 
de  la  révolution  que  de  la  scélératesse  de  quelques 
factieux.  A-t-on  envie  de  les  ressusciter?  (Non! 
s'écrie-t-on.)  Eh  bien ,  qu'on  soit  de  bonne  foi  : 
qu'on  ne  permette  pas  qu'aucune  section  du  peuple 
puisse  entretenir  les  partis  et  la  division  dans  la 
Convention  nationale  ;  qu'on  ne  souft're  pas  qu'on 
vienne  nous  proposer  des  listes  de  proscription  en 
nous  parlant  de  justice. 

On  vous  a  déjà  demandé  le  désarmement  de  tous 
les  Jacobins  de  la  république  ;  je  sais  que,  s'il  y  a  eu 
des  coupables  parmi  eux ,  il  y  a  eu  aussi  de  bons 
patriotes  qui  ont  été  égarés.  Il  ne  faut  mettre  d'au- 
tre distinction  entre  les  citoyens  que  celle  qui  ca- 
ractérise les  bons  et  les  méchants.  S'il  y  a  des  con- 
spirateurs qui  veuillent  s'élever  contre  le  système 
de  justice  que  la  Convention  a  établi ,  çiui  veuillent 
enchaîner  ou  commander  ses  délibérations ,  il  faut 
les  punir  ;  mais  il  ne  faut  pas  envelopper  dans  une 
mesure  générale  de  proscription  des  nommes  qui  ne 
sont  pas  tous  également  coupables. 

Annoncez  à  tous  ceux  qui  ne  veulent  pas  la  con- 
stitution démocratique ,  (|ue  leurs  espérances  seront 
déçues.  {Oui ,  ouil  s'écrient  tous  les  membres  en  se 
levant.)  Je  ne  crois  pas  qu'il  faille  adopter  la  propo- 
sition cIu*préopinant ,  de  déclarer  que  l'ancien  gou- 
vernement a  exercé  la  tyrannie  ;  cette  déclaration 
me  semblerait  subversive  de  la  révolution  et  de  U 
constitution. 

Plusieurê  voix  :  Ce  n'est  pas  appuyé. 

Bentabolb  :  Je  demande  l'ordre  du  jour.  ^ 

La  Convention  passe  à  l'ordre  du  jour. 

Richard  :  Lorsque  j'étais  au  comité  de  salut  pu- 
blic, j'avais  entrepris  l  affaire  dont  je  vais  vous  ren- 
dre compte,  et,  quoique  je  n'en  fasse  plus  partie,  les 
membres  qui  composent  ce  comité  m'ont  charge 
1  d'en  faire  le  rapport. 

Citoyens ,  vous  avez  dit  à  toute  l'Europe ,  en  par- 
lant des  bruit  de  paix,  et  en  annonçant  vos  disposi- 
tions sur  cet  objet ,  que  vous  auriez  surtout  égard  à 
la  situation  des  gouvernements  que  la  crainte  et  la 
violence  ont  contraints  de  marcher  à  la  suite  des 
chefs  de  la  coalition. 

Parmi  ceux  qui  se  trouvent  dans  ce  cas ,  tous  de- 
vez particulièrement  distinguer  la  Toscane. 

Cet  Etat,  au  milieu  des  convulsions  politiques  que. 
la  révolution  française  a  oecasionnées ,  a  conservé 

Îiendant  longtemps  la  marche  que  lui  prescrivaient 
edroit-des  gens  et  ses  véritables  intérêts.  Il  lui  im- 
portait de  ne  pas  s*exposer  à  devenir  la  proie  de 


4S0 


1*11  ne  des  grandes  puissances ,  prêtes  à  sVntre-cho- 
qiier  autour  de  lui  ;  et  pour  atteindre  ce  but ,  il  de- 
vait se  garder  de  prendre  aucune  paft  active  aux 
grands  événements  qui  se  préparaient. 

Cet  utile  système  semblait  facile  à  suivre  pour  ce 
gouvernement.  Il  est  destint  par  sa  nature  et  sa  po- 
sition à  ne  prendre  aucune  part  aux  querelles  de  ses 
voisins,  et  jusqu'à  ce  moment  TEurope  entière  s'é- 
tait accoutumée  à  respecter  sa  tranquillité. 

Mais  la  haine  de  la  révolution  française  avait  dé- 
rangé tous  les  calculs  politiques ,  et  l'Angleterre , 
pivot  de  toute  la  coalition  ,  dirigeant  vers  ses  vues 
ambitieuses  celte  espèce  de  délire  universel,  ne  met- 
tait point  de  bornes  à  son  arrogance  et  à  ses  préten- 
tions. Usurpatrice  de  l'empire  des  mers,  elle  voulut 
commander  à  tous  les  gouvernements  les  sentiments 
qui  l'animaient ,  et  elle  leur  défendit  d'être  indiffé- 
rents dans  cette  grande  cause.  Elle  essaya  les  voies 
de  la  persuasion  vis-à-vis  de  ceux  qui  pouvaient  ne 
pas  se  rendre  a  ses  ordres,  et  elle  employa  des  esca- 
dres et  des  menaces  contre  ceux  dont  elle  connais- 
sait l'infériorité.  Ses.  ambassadeurs  échouèrent  au- 
près des  cabinets  de  Suède  et  de  Danemark ,  et  ses 
amiraux  réussirent  devant  les  ports  de  Naplejs  et  de 
Livburne. 

Ce  fut  le  8  octobre  1793  que  lord  Hervey,  au  nom 
du  roi  d'Angleterre,  signifia  au  grand  duc,  à  la  suite 
d'une  déclaration  injurieuse,  qu  il  lui  donnait  douze 
heures  pour  se  décider  contre  la  république  fran- 
çaise. 

Le  même  jour ,  le  grand  duc  satisfit  à  cette  som- 
"  noation  imperative,  à  laquelle  il  ne  pouvait  opposer 
qu'une  résistance  insuffisante  :  les  agents  de  la  ré- 
publique française  reçurent  ordre  de  quitter  le 
territoire,  et  toute  communication  officielle  fut 
rompue. 

Le  gouvernement  toscan  ne  tarda  pas  à  sentir 
aue  l'état  dans  lequel  il  se  trouvait  n'était  pas  son 
état  naturel  ;  il  aspira  dès  lors  à  établir  sa  neutra- 
lité avec  la  république. 

Il  commença,  dès  la  même  année  1703,  k  manifes- 
ter cette  disposition  vis-à-vis  ceux  de  nos  agents 
qui  étaient  restés  dans  ce  pays ,  et  depuis  il  a  fait 
plusieurs  démarches  ouvertes  pour  y  parvenir  ;  en- 
fin ,  il  vient  d'envoyer  à  Paris,  pour  traiter  directe- 
ment avec  le  comité  de  s^lut  public,  M.  Carletti, 
homme  connu  dans  toute  l'Europe  par  les  services 
nombreux  qu'il  a  rendus  eu  Italie  aux  républicains 
français  persécutés. 

Plusieurs  considérations  majeures  ont  déterminé 
votre  comité  de  salut  public  à  écouter  l'envoyé  de 
Toscane,  et  à  conclure  avec  lui  un  traité  que  je  suis 
chargé  de  présenter  à  votre  ratification. 

D'abord  ,  il  lui  a  paru  qu*il  était  dans  vos  princi- 

Ees  et  dans  votre  intention  d'accueillir  avec  une 
ienveillance  particulière,  parmi  les  gouvernements 
qui  vous  demanderont  la  paix ,  ceux  qui  justifieront 
qu'ils  n'ont  été  que  malgré  eux  en  état  de  guerre 
avec  vous. 

La  Toscane  a  reconnu  la  première  la  république 
française ,  peu  de  temps  après  le  10  août  :  elle  a 
maintenu  sa  neutralité  tant  qu'il  a  été  en  son  pou- 
voir de  le  faire.  Le  grand  duc  même ,  après  racte 
du  8  octobre  1793,  n'a  pas  cessé  d'avoir  pour  les 
Français  établis  sur  son  territoire  tous  les  égards 
reçus  entre  les  gouvernements  amis.  Jamais  ils  n'ont 
été  persécutés  ni  pour  leurs  opinions ,  ni  à  raison 
des  événements  qui  ont  caractérisé  les  différentes 
époques  de  la  révolution.  Ils  ont  touché  leurs  reve- 
nus comme  auparavant ,  et  les  tribunaux  du  pays 
ont  continué  de  leur  être  ouverts. 

Une  quantité  considérable  de  grains  nous  avait 
été  enlevée  à  Uvourne  par  les  Anglais;  le  grand 


duc  Tient  de  les  restituer  tout  récemment  à  sesfrais. 
Ils  doivent  être  dans  ce  moment  rendus  dans  nos 
ports  de  la  Méditerranée. 

En  accédant  à  la  demande  du  gouvernement  de 
Toscane ,  vous  confirmerez  par  le  fiait  les  grands 
principes  que  vous  avez  proclamés ,  comme  devant 
servir  de  base  à  vos  transactions  dinlomatiques,  et 
vous  fiorcerez  vos'  détracteurs  de  renore  hommage  à 
votre  loyauté  et  à  votre  justice. 

D'un  autre  cOté ,-  l'état  de  guerre  avec  la  Toscane 
ne  peut,  sous  aucun  point  de  vue ,  être  utile  à  nos 
intérêts ,  et  sa  neutralité  nous  présente  des  avanta- 
ges réels ,  principalement  sous  les  rapports  du  com- 
merce. Vous  les  sentirez  aisément ,  vous  qui  savez 
mieux  que  personne  combien  il  importe  â*  la  prospé- 
rité nationale  d*étendre  nos  relations  dans  ce  genre. 

C'est  au  milieu  des  triomphes  multipliés  qui  ont 
signalé  cette  campagne  qu'il  est  beau  de  vous  voir 
conclure  de  pareils  traités.  Vous  avez  étonné  l'Eu- 
rope par  vos  succès  militaires  ;  vous  ne  Tétonnerez 
pas  moins  par  la  manière  dont  vous  saurez  user  de 
la  victoire.  Vous  serez  laciles  sans  faiblesse  envers 
les  gouvernements  que  la  force  d'une  impulsion 
presaue  générale,  à  laquelle  ils  n'étaient  point  en 
état  ae  résister ,  a  entraînés  dans  la  ligue  qui  s'est 
formée  contre  vous;  mais  vous  serez  fermes  sans 
cesser  d'être  accessibles  vis-à-vis  des  grandes  puis- 
sances qui  ont  provoqué  l'Europe  entière  à  la  des- 
truction de  la  France,  et  qui,  pour  satisfaire  leur 
vanité  et  leur  ambition,  ont  fait  couler  tant  de  flots 
de  sang  depuis  trois  ans.  Vous  abaisserez  surtout 
l'Angleterre  dont  la  rage  meurtrière  s'est  particu- 
lièrement signalée ,  et  vous  n'oublierez  jamais  que 
vous  devez  venger  sur  elle  avec  éclat  l'humanité  et 
Injustice  qu'elle  a  tant  de  fois  outragées. 

Voici  la  teneur  du  traité  : 

«  Entre  les  représentants  du  peuple  français  composant 
le  comité  de  salut  public,  chargé,  par  le  décret  de  la  Con- 
vention nationale  du  7  fructidor  dernier ,  de  la  directioD 
des  relations  eitérieures,  soussignés: 

«  El  M.  François,  comte  de  Carletti,  envoyé  eitraordi- 
naire  du  grand  duc  de  Toscane ,  chargé  de  ses  pleins  pou- 
voirs, donnés  k  Florence  les  h  novembre  et  18  décembre 
1794 «  qui  demeureront  annexés  à  la  minute  des  présentes, 
également  soussigné; 

M  II  a  été  convenu  et  arrêté  ce  qui  suit  : 

«  Art.  I*'.  Le  grand  duc  de  Toscane  révoque  tout  acte 
d*adhésion ,  consentement  ou  accession  à  la  coalition  ar- 
mée contre  la  république  française. 

•  II.  En  conséquence,  il  y  aura  paix,  amitié  et  bonne 
intelligenoe  entre  ta  r^ubUque  française  et  le  grand  duc 
de  Toscane. 

•  m.  La  neutralité  de  la  Toscane  est  rétabUe  sur  le 
pied  où  elle  était  avant  le  8  octobre  1798. 

«  IV.  Le  présent  traité  n*aura  son  efiet  qu*après  avoir 
été  raUGé  par  la  Convention  nationale. 

«  Fait  à  Paris,  au  Palais-Naiional ,  le  vingt  et  un  plu- 
viôse de  l'an  troisième  de  la  république  française  une  et  in- 
divisible  (neuf  février  mil  sept  cent  quatre-vingt-quinie  , 
ère  vulgaire),  s 

RicBARD  :  Le  comité  vous  propose  le  projet  de 
décret  suivant  : 

f  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  de  salut  public  décrète  qu'elle  ratifie 
le  traité  de  paix  passé  le  21  pluviôse,  présent  mois,  entre 
le  corolle  de  salut  public  et  le  ministre  plénipotentiaire  du 
grand  duc  de  Toscane.  • 

DuBOY  :  Je  demande  la  lecture  des  pouvoirs  don- 
nés par  le  grand  duc  de  Toscane  à  M.  Carletti. 

Thibauubau  ;  Une  des  opérations  les  plus  essen- 
tielles qui  restent  à  faire  a  la  Convention ,  c'est  la 
paix  que  toute  li  république  désire  »  la  paix  qui  as- 


481 


surera  sa  prospérité.  Plus  cette  opération  est  impor- 
tante ,  plus  nous  "levons  la  faire  avec  calme  et  sa- 
gesse. Je  ne  souttrirai  jamais, pour  ma  part,  que 
vous  ratifiiez  le  premier  traité  qui  soit  fait  avec  une 
des  puissances  belligérantes ,  sans  qu'il  ait  été  im- 

Ï>rimé,  sans  qu'il  ait  été  inâité.  Je  demande  donc 
'impression» 

Thibault  :  Je  voulais  aussi  demander  l'impres- 
sion, et  je  vais  ajouter  un  fait.  C'est  que  le  gouver- 
nement toscan,  lors  même  qn*il  était  lié  avec  nos 
ennemis ,  s'est  conduit  avec  la  France  avec  la  plus 
grande  justice.  (Bruit  à  l'extrémité  gauche.)  Il  a 
poursuivi  avec  la  dernière  rigueur  les  fabricateurs 
de  faux  assignats ,  refugie's  ae  Suisse  et  de  Gênes , 
et  les  a  fait  traduire  devant  les  tribunaux.  Il  est  bon 
que  ce  fait  so(t  connu,  afin  que  les  autres  puissances, 
imitant  cet  exemple,  rendent  à  nos  assignats  toute 
leur  valeur. 

Richard  donne  lecture  des  pouvoirs  de  M.  Carletti. 

Traduelion  des  pouvoirs  donnés  par  le  arand  duc 
de  Toscane  à  m.  Carletti^  son  envoyé  à  Paris. 

•  Son  Altesse  royale  le  sérénissime  archiduc,  grand  duc 
de  Toscane,  considérant  combien  il  pourrait  être  utile  au 
succî'S  d'une  négociation  commencée  depuis  si  longtemps 
avec  la  république  française  d'envoyer  à  Paris  une  personne 
qui  jouisse  de  la  confiance  des  deux  gouvernements,  et  qui 
réunisse  le  caractère ,  les  sentiments  et  les  talents  nécessai- 
res pour  arriver  au  but  proposé,  vient  de  destiner  son  cham- 
bellao  et  chevalier  de  Tordre  insigne  de  Saint-Etienne, 
François-Xavier  Carletti ,  à  se  rendre  à  Paris  aussitôt  qu*il 
aura  reço  le  passeport  nécessaire  pour  entrer  en  France, 
et  le  charge  d*tigir  auprès  du  comité  de  salut  public  pour 
confirpier  de  vive  voix  et  par  écrit  tout  ce  qui  se  trouve 
conti'nu  dans  les  mémoires  signés  par  son  secrétaire  du 
conseil  d^Etat  et  des  finances,  Neri  Corsini,  spécialement 
autorisé  par  lui  à  cet  effet ,  lesquels  mémoires  ont  été  déjà 
communiqués  au  même  comité  par  le  moyen  de  Cacault, 
agent  de  la  république  françuise  en  Italie,  dans  la  vue  de 
faire  agréer  lanetitralité  que  la  Toscaneevt  prête  à  publier 
à  la  face  de  toute  PEurope  ;  de  stipuler  la  restitution , 
aoit  en  argent,  soit  en  nature,  des  grains  enlevés  par  les 
Anglais  à  Livoume,  et  de  renouveler  Tassurance  la  plus 
solennelle  de  la  constante  amitié  que  le  gouvernement  de 
Toscane  a  toujours  eue  et  aura  toujours  pour  la  républi- 
que française. 

•  Donné  à  Florence ,  le  h  novembre  1794* 

«  6/^/ie  Fbrdiiiaiid. 

•  Niai  (k»8i]fi.\  uerittirt.  » 

Ttoàuelion  d'une  ampliaiion  des  pouvoirs  donnés 
par  le  grand  duc  de  Toscane  à  If.  Carletti^  son 
envoyé  à  Paris, 

m  Son  Atesse  royale  le  sérénissime  archiduc,  grand  duc 
de  Toscane  ,  n*ayant  rien  de  plus  à  cœur  que  de  voir  ré- 
tablie, dans  les  formes  diplomatiques  qui  sont  d^usage, 
sa  correspondance  avec  la  république  française,  en  ajou- 
tant à  la  déclaration  faite  par  lui,  dans  son  proprio  motu, 
le  4  novembre  dernier,  nomme  son  cbambellan  et  cheva- 
lier de  Tordre  de  Saint-Etienne,  le  comte  François-Xavier 
Carletti,  pour  son  envoyé  extraordinaire  auprès  du  gou- 
vernement delà  république  française,  et  Tautorisc,  s'il  en 
obtient  le  pouvoir,  k  résider  à  Paris  revcHu  de  ce  caractère, 
autant  que  la  mission  dont  il  a  été  chargé  dans  le  susdit 
motn  proprio  le  rendra  nécessaire,  lui  donnant  ù  cet  effet 
Ica  plus  amples  pouvoirs  pour  traiter  toute  affaire  relative 
ù  la  Toscane ,  et  spécialement  pour  la  restitution  et  envoi 
dans  le  port  nommé  de  la  Montagne  des  grains  enlevés  par 
les  Anglais  iï  Livourne,  ainsi  que  pour  le  rétablissemeiU 
de  la  neutralité  qu'il  s'agit  de  renouveler  ù  toujours  entre 
les  deux  gouvernements»  de  la  manière  la  plus  convenable 


à  la  république  françaite,  Mut   eopandantblesser  les  droét 
des  puissances  belligéranteB* 

«  Donné  à  Florence,  le  ao  décembre  1794» 

•  51^11^  FaaDni  AKD» 

«  Niai  Coasmi,  » 

Lacombe  (du  Tarn)  :  Les  ftistes  de  l'histoire  ra- 
conteront avec  étonnement  les  victoires  qui  ont  im- 
mortalisé cette  campagne  ;  ils  ne  diront  pas  avec 
moins  d*étonnement  que  vous  commencez  à  donner 
la  paix  aux  gouvernements  faible;s  ;  mais  je  crois 
qu'il  y  aurait  du  danger  à  ouvrir  dans  une  grande 
assemblée  comme  celle-ci ,  une  discussion  qtii  peut 
compromettre  beaucoup  d'intérêts. 'Si  vous  mettez 
dans  une  si  grande  évidence  les  propositions  des 
puissances  qu)  vous  demandent  la  paix ,  et  il  y  en  a 
beaucoup  qui  sont  actuellement  en  négociation , 
elles  cramdront  la  publicité.  D'ailleurs  les  grandes 
puissances,  qui  savent  que  la  paix  creuse  leur  tom- 
beau ,  feront  tout  pour  empêcher  qu*elle  ne  se  con- 
clue avec  les  petites  puissances. 

Si  la  France  avait  eu  des  revers,  je  dirais  qu'il  ne 
faut  pas  de  paix  ;  mais ,  puisque  nous  avons  des  vic- 
toires, puisque  nous  commandons  à  l'Europe,  il  n'y 
a  pas  de  danger  à  raccorder  «  surtout  à  la  Toscane, 
qui  n'a  été  forcée  de  prendre  part  à  la  coalition  qu'à 
cause  de  sa  faiblesse.  La  Toscane  est  Tentrepôt  des 
grains  qui  arrivent  des  échelles  du  Levant;  la  paix 
avec  cette  puissance  nous  rendra  Tabondance. 

Chazal  :  Je  demande  la  parole  pour  appuyer  l'a- 
journement. 

Marbc  :  Et  moi  aussi. 

On  demande  l'impression  et  rajoumement  du 
rapport  et  du  projet  de  décret. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

Plusieurs  membres  observent  qu*ils  n'ont  point 
entendu  ce  que  le  président  a  mis  aux  voix. 

BouanoN  (de  TOise):  Il  est  impossible  que  la 
Convention  nationale  puisse  fermer  la  discussion 
après  un  discours  tel  que  celui  qui  vient  d*être  pro- 
noncé à  cette  tribune.  Je  demande  la  parole. 

Mabec  :  Je  demande  la  parole  pour  un  fait. 

Le  Président  :  La  parole  est  à  Bourdon  (de 
l'Oise). 

Bourdon,  (de  TOise)  :  Je  demande  la  parole  pour 
répondre  à  ce  que  vient  de  dire  avec  imprudence,  et 
surtout  contre  la.  vérité ,  notre  collègue  Lacombe- 
Saint-Michel.  Je  suis  loin  de  suspecter  ses  intentions, 
mais  il  faut  relever  ce  qu*il  a  dit.  Eh  quoi  !  dans  un 
moment  où  nous  faisons  trembler  toute  TEurope  ; 
dans  un  moment  oii  le  gouvernement  s'occupe  de 
faire  circuler  les  subsistances  dans  l'intérieur  de  la 
république,  on  vient  vous  peindre  comme  ayant  soif 
de  la  paix.  (On  applaudit.)  Sans  doute ,  il  n*est  pas 
un  de  nous  qui  ne  voie  dans  une  paix  prochaine  et 
honorable  un  terme  à  ses  fatigues;  mais  que  les 
puissances  ennemies  ne  calculent  pas  sur  Tépuise- 
ment  de  la  France  !  la  république  est  inépuisable. 
(On  applaudit.) 

Qu^est  devenu  le  projet  de  Pitt ,  de  bloquer  la 
France  pour  Taffamer?  L'abondance  est  entrée  dans 
nos  ports  du  fond  de  l'Amérique  et  des  extrémités 
du  Nord.  Je  n'inculpe  pas  les  intentions  de  notre  col- 
lègue Lacombe ,  mais  je  lui  ferai  remarquer  que, 
sanss'en  apercevoir,  l'opinion  quMI  vient dVmeltrc 
ressemble  aux  discours  débités  dans  le  parlement 
d'Angleterre  par  les  ennemis  les  plus  archarnés  de 
la  France.  Nos  ennemis ,  dit-on ,  veulent  nous  épui- 
ser ;  nous  verrons  s'ils  réussiront ,  et  qui ,  d*eui  ou 


4t3 


de  nous ,  posera  le  premier  les  armes.  (Vi£i  applau- 
dissements.) 

Si  personne  n'eût  réclamé  Tajournement,  la  Con* 
vention  aurait  pu  sur-le-champ  ratifier  le  projet  de 
paix  que  lui  a  soumis  son  comité  de  salut  public  ; 
mais  il  sulÎQt  qu'il  y  ait  un  seul  opposant  pour  que 
l'ajournement  soit  prononcé.  J'appuie  donc  la  de- 
mande qui  a  été  faite  à  cet  ég:ard ,  et  je  finirai  par 
une  observation  :  c'est  que  nous  ne  devons  jamais 
oublier  que  le  droit  de  faire  la  paix  appartient  à  la 
représentation  nationale  tout  entière ,  en  vain  voua 
diriez  que  la  France  est  une  république  représenta- 
tive, si  tous  les  représentants  du  peuple  n'avaient 
pas  le  droit  d'examiner  un  projet  de  paix  qui  leur 
serait  présenté  par  un  comité.  (On  applaudit.) 

BoissT  d'Atiglas  :  J'annonce  à  l'assemblée  que 
les  grains  arrivent  de  ce  moment  dans  les  ports  de 
la  republique,  d'une  manière  heureuse  et  abondante. 

BouEDON  (de  roise)  :  Peut-on  manauer  de  sub- 
sistances quand  on  est  à  Amsterdam  ?  (Vifis  applau- 
dissements.) 

BoissT  :  Je  vous  ai  fait  connaître  hier  les  premiers 
effets  de  la  loi  de  l'abolition  du  maximum  ;  je  vous 
ai  dit  que  le  commerce  approvisionnait  le  midi  de  la 
France;  le  comité  de  salut  public  a  reçu  aujour- 
d'hui la  nouvelle  de  l'entrée  à  Marseille  ae  plusieurs 
bâtiments  chargés  de  blé.  11  en  arrive  des  pays 
d'où  jusqu'à  présent  nous  n'en  avions  pas  tiré.  Le 

fouvernement  a  pris  des  mesures  qui  doivent  pro- 
uire  les  plus  prompts  et  les  plus  heureux  effets.  Le 
Nord  ,  le  Midi ,  l'Asie,  l'Afrique  et  l'Amérique  sont 
en  ce  moment  tributaires  de  vos  besoins.  Il  n'est 
donc  pas  vrai  de  dire  que  l'épuisement  doit  nous 
forcer  à  la  paix.  Oui ,  nous  voulons  la  paix ,  mais 
glorieuse  et  digne  d'une  nation  qui  a  su  combattre 
pendant  trois  ans  entiers  contre  tous  les  despotes  de 
l'Europe  ligués  pour  renverser  sa  liberté.  Il  faut  que 
cette  paix  soit  non-seulement  pour  la  république 
française,  mais  pour  le  monde  entier,  et  quelle  soit 
la  base  de  l'alliance  de  tous  les  peuples;  la  nation 
française  aura  toujours  assez  d'énergie  pour  établir 
def  limites  telles  aue  nos  voisins  ne  puissent  jamais 
les  franchir.  (Applaudissements.) 

Thibâudbau  :  Je  ne  crois  pas  aue  cette  matière 
puisse  Êitiguer  la  Convention  ;  aiscutons-la  donc 
entièrement.  Vous  avez  dit  que  vous  ferez  une  paix 

Sloriense  avec  FEurop^e;;  mais  toutes  les  puissances 
'Burope  s'attendent  à  faire  la  paix  avec  la  Conven- 
tion ,  et  non  pas  avec  une  partie  ;  et  la  Convention 
ne  peut  se  démettre  du  plus  beau  de  ses  droits.  Met- 
tons donc  aux  voix  l'impression  et  l'ajournement, 
pour  que  tout  le  monde  soit  d'accord.  (Applaudis- 
sements.) 

CAMBACÉiis  :  Si  l'ajouroement  et  l'impression 
avaient  besoin  d'être  appuyés ,  le  résultat  de  la  dis* 
cussion  en  ferait  voir  ae  plus  en  plus  la  nécessité.  Il 
vient  d'apprendre  à  l'Europe  que  si  la  France  a  pris 
les  armes  pour  maintenir  sa  liberté  et  ses  droits, 
elle  les  déposera  aussitôt  qu'elle  sera  bien  convain- 
cue que  ses  ennemis  les  reconnaissent,  et  qu'ils  sau- 
ront respecter  le  gouvernement  républicain  qu'elle 
a  établi  chez  elle.  Il  n'y  a  rien  dans  cette  conduite 
qui  puisse  alarmer  ou  embarrasser  la  diplomatie. 

Ici  le  comité  de  salut  public  s'eit  conformé  aux 
dispositions  du  décret  du  7  fructidor,  qui  lui  confie 
l'exercice  des  relations  extérieures ,  en  écoutant  les 
propositions  de  paix  du  duc  de  Toscane,  et  celles 
que  pourront  lui  faire  les  autres  puissances  coali- 
sées, qui  savent  bien  qu'à  la  fin  elles  seront  obligées 
de  reconnaître  la  puissance  du  peuple  français.  (Ap- 
plaudisaemeott.) 


Le  comité  sera  en  garde  contre  les  manœuvres 
d'une  politique  audacieuse ,  qui  tendrait  à  raleutir 
l'activité  de  nos  délibérations  et  enchaînerait  Téner- 

§ie  de  nos  phalanges  républicaines.  Vous  venez 
'entendre,  par  l'organe  de  notre  collègue  Boissy 
d' Angles,  que  chaquejour  les  subsistances  arrivent 
en  abondance  par  refret  des  mesures  prises ,  et  vous 
devez  espérer  qu'à  cet  égard  la  sollicitude  de  votre 
comité  de  salut  public  ne  sera  point  trompée.  Leur 
arrivée  est  bien  capable  de  détruire  le  système  de 
disette  factice ,  et  celui  du  blocus  imaginé  par  le 
gouvernement  britannique.  Toutes  nos  opérations, 
sont  mûries  avec  sagesse,  et  nous  appellerons  tou- 
jours sur  nos  projets  de  décret  la  discussion  de  la 
Convention  nationale,  qui  les  ratifiera  si  elle  les 
trouve  conformes  à  ses  vues  ;  nous  faisons  plus , 
nous  demandons  que  ceux  de  nos  collègues  qui  ont 
des  renseignements  utiles  à  nous  donner,  soit  sur  la 
politique,  soit  sur  le  commerce  (applaudissements), 
nous  les  communiquent  avec  cette  franchisse  frater- 
nelle qui  vaut  bien  la  politique  des  cours.  (Nouveaux 
applaudissements.  ) 

Notre  collègue  Lacombe  avait  cru  qu'un  mouve* 
ment  spontané  vous  ferait  acquiescer  au  projet  de 
décret  présenté  par  votre  comité  ;  eh  bien,  le  comité 
de  salut  public  lui-même  vous  demande  l'impres- 
sion et  l'ajournement ,  il  vous  les  demande  par  mon 
organe.  11  voudrait  que  des  quatre  coins  de  l'Eu- 
rope on  pût  entendre  la  séance  d'aujourd'hui,  dans 
laquelle  on  a  vu  tous  les  membres  de  la  Convention 
ne  faire  qu'un  vœu,  celui  d'une  naix  glorieuse.  (Les 
applaudissements  redoublent.)  Ce  sont  là  ces  élans 
qu  il  faut  recueillir,  pour  qu  on  sache  partout  que 
nous  ne  voulons  tous  que  la  liberté ,  I  égalité ,  la 
république  et  le  bonheur  du  peuple.  (Les  applau- 
dissements se  prolongent.) 

La  Convention  décrète  l'impression  et  l'ajourne- 
ment de  la  discussion  à  quiutiai. 

{La  suite  demain.) 

N.  B.  —  La  séance  du  23  a  été  consacrée  à  la  dis* 
cussion  d'objets  particuliers. 


GRAVURES. 

Portrait  de  J.»J,  Housseau,  ottle  de  sii  pouces  et  demi 
de  hauteur,  pour  ftire  pendant  k  celui  de  Penelon,  annoncé 
dernièrement.  Prix  :  4  liv. 

A  P«ri«,  ohti  QueMd«7,  rua  Croii-des-Petits-Champs, 
Q«i  10  et  SI  ;  et  bientôt  cour  dea  Fontaines,  Palais-EgaKté. 

L'artbte  ne  pouvait  faire  un  rapprochement  pluf  judicioui, 
et  réunir  deui  hommes  plus  dignes  de  sa  trouver  ensemble. 
Fënelon,  par  sa  philanthropie,  sa  candeur  et  sa  bienfaisance, 
honora  le  siècle  de  la  superstition;  au  centre  du  plus  rîgou. 
reus  despotisme  il  voulait  du  moins  que  les  rois  devinssent 
bommM,  et  U  eut  le  covage  de  leur  tracer  leurs  devoirs. 
J.-J.  Roussean  rappela  aux  peuples  leurs  droiu  trop  long- 
temps oubliés  ;  TOttgeur  éloquent  de  la  vertu  et  de  la  raison 
ootragées,  il  mériu,  par  la  pureté  de  sa  morale  et  de  ses 
principes ,  le  titre  précieux  d*amî  de  l'humanité.  On  peut 
achever  le  parallèle  entre  ces  deux  homoses  si  Justement  ce- 
lèbres,  on  ^ouUnt  que  Uns  deux  forent  victimes  des  perse- 
ctttioDS  de  Tenvie  et  des  prêtres. 


PayemenU  à  la  Miorerie  nalionaU. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  sii  pre« 
miers  mois;  il  sera  feit  A  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'InecripUoDS  au  grand  livre.  Gelai  pour  les  rentes  viagères 
est  de  huit  mois  Tingtet  <w  Jours  de  l'anoéa  1193  (vicas 
suie). 


GAZETTE  NATIONALE  .a  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N**  145.        Quintidi  25  Ploviose,  l'an  3«.  (Vendredi  13  Févbieb  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

Vartovie^  le  b  janvier,  ~  Cest  après-demain  que  Sta- 
nislas doit  partir  pour  se  rendre  ù  Grodno.  11  sera  accom- 
pagné dans  son  voyage  du  prince  Joseph  Poniatowski ,  son 
neveu,  du  cotute  Kiski,  grand  écuyer,  el  du  lieuienanl 
général  Gotiencki  ;  il  a  congédié  la  plus  grande  partie  de 
sa  muiM>n,  et  a  engagé  ses  sœurs,  les  comtesses  Zumoiska 
et  Branicka,  à  se  rendre  à  Vienne.  On  infère  de  celte  cir- 
oonslance  qu*il  ne  retiendra  pas  à  Varsofie  ;  du  moins  on 
ne  compte  plus  Vy  revoir. 

—  11  paratt  certain  quMl  se  tiendra  à  Grodno  un  con- 
grès, où  se  trouveront  des  ministres  de  plusieurs  puissan- 
ces. Cest  là  qu'il  sera  décidé  (lu  sort  de  la  malheureuse 
Pologne 

Les  agents  de  Catherine  se  hâtent  pro? isoirement  d'cn- 
Tahir  ce  qui  est  à  leur  convenance,  et  d*assurer  leurs 
usurpations -par  la  terrenr.  Ils  ont  établi  une  commission 
à  Ktovie  pour  juger  tous  ceux  qui  ont  pris  part  à  Pinsur- 
redion. 

—  Le  Russe  Repnin,  nommé  gouverneur  de  Lithuanie, 
a  sommé  les  habitants  de  celle  province  de  prêter  serment 
de  fidélité  à  Tinipéralrice. 

•^  La  disette  et  la  famine  étendent  leurs  ravages.  L*ef- 
froi  s^augmente  par  Pidée  que,  dans  plusieurs  cantons* 
les  semailles  n*ont  pu  se  faire  celte  année,  un  grand  nom- 
bre de  villages  ayaut  été  détruits. 

~  On  assure  que  le  brave  Madalinski  est  tombé  entre 
les  mains  du  Prussien  Favrat,  et  a  été  conduit  à  la  forte- 
resse de  Breslau. 

Du  13.  —  Stanislas  est  parti  le  7  pour  Grodno.  Il  était 
malade;  il  donnait  le  spectacle  d*un  prisonnier  qu*on 
transfère.  Sa  garde  ou  plutôt  son  escorte,  était  de  cent 
vingt  dragons  russes,  aux  ordres  du  général  Tormansow. 
lia  emmené  deux  aides  de  camp,  deux  chambellans,  et 
quelques  secrétaires.  Le  prince  Joseph  Poniatowski  reste 
4  Varsovie. 

Le  roi  avec  sa  suite  a  passé  deux  jours  à  Bialistock.  Il 
y  a  été  reçu  par  le  général  Bonnichoven.  Les  Russes  lui 
ont  prodigué  les  compliments  les  plus  amers. 

Les  gardes  à  pied  et  à  cheval  sont  supprimés,  (  11  est  à 
remarquer  que  ces  gardes  sont  ceux  du  roi.)  Leur  paye 
cesse  dès  le  15  de  ce  mois.  Catherine  permet  aux  officiers 
de  prendre  du  service  dans  ses  armées,  et  accorde  des  gra- 
tifications à  ceux  qui  n'ont  montré  aucun  amour  de  la  li- 
berté. 

—  Le  général  Kozciusko  et  ses  deux  aides  de  camp  ont 
été  conduits  de  Pétersbourg  dans  la  forteresse  russe  de 
Schlusselbourg. 

ALLEMAGffE. 

Mulheim,  le  ZO  Janvier,  ^  Les  Etats  d'Empire  mettent 
à  remplir  leurs  coutingenls  une  lenteur  qui  se  retrouvedans 
les  opérations  de  la  diète  elle-même.  La  diète  va  s'occuper 
de  prendre  en  considération  l'article  du  dernier  décret  de 
la  commission  impériale  contre  les  Etats  qui  se  trouvent  en 
retard.  L'électeur  de  Mayence  a  dû  remettre  un  plan  sur 
les  dilTérenls  points  qui  formeront  l'objet  des  délibérations. 

—  Les  Français  continuent  de  fuire  sauter  partiellement 
le  fort  du  Rhin  devant  Manheim.  L'explosion  est  peu  sen- 
sible. 

—  Le  commandant  autrichien  de  la  forteresse  de  Luxem- 
bourg a  fait  demander  au  général  de  l'armée  française  de 
la  Moselle  un  sauf-conduit  pour  faire  transporter  sur 
Taulre  rive  du  Rhin  six  cents  malades.  Le  sauf-conduit  a 
été  refusé. 

—  La  rigueur  du  froid  a  suspendu  les  travaux  des  assié- 
geants; mais  ils  se  trouvent  assex  près  delà  place  pour  la 
bombarder  avec  les  mortiers  à  la  Gomer,  qui  portent  ù 
quinze  cents  toises. 


HOLLANDE. 

Ulrecht ,  le  a  pluviôse,  —  Les  Hessois  et  nne  partie 
des  troupes  anglaises  se  sont  repliés  en  désordre  sur  Zut- 
phen.  Plusieurs  corps  hessois  en  sont  déjà  partis  pour  De- 
vcnter.  Les  Français  se  disposent  à  les  y  poursuivre  s  Ils 
marchent  aussi  sur  Apeldoom  et  sur  Harderwick. 

—  Il  se  trouve  encore  à  peu  près  cinq  à  six  milfe  alliés 
entre  Arnheim  el  Zutpben.  Cette  dernière  viile  se  trouTe 
dans  une  situation  déploruble^  ses  habitants  sont  réduits  à 
la  plus  cruelle  diselle.  l^s  vivres,  le  bois,  les  fourrages  y 
manquent. 

Les  habitants  des  campagnes ,  plus  malheureux  encore, 
sont  livrés  aux  pillages  et  aux  excès  de  tout  genre  que  com- 
mettent les  Anglais. 

—  Il  y  a  encore  à  Zwob  quatorzet:ents  malades  an- 
glais. Le  général  britannique  doit  avoir  une  conférence 
avec  Alvinzy  et  Walmodcn ,  au  sujet  de  sa  retraite  néce»- 
saire.  Il  parait  qu'il  va  se  replier  le  plus  promptement  pof- 
sible  par  Kampen  et  Zwob. 

—  Les  Français  doivent  avoir  atteint  leurs  ennemis  à 
Harderwich. 

—  On  écrit  de  Schiedam  que  la  révolution  antistathoa* 
dérienne  s'y  est  faite  avec  calme,  sagesse  et  unanimité. 
Le  comité  révolutionnaire  a  donné  la  première  im- 
pulsion ;  ensuite  on  a  nommé  vingt -deux  régents  provisoi- 
res, qui  ont  prêté  le  serment  suivant  à  la  maison-oom» 
mune,  entre  les  mains  du  comité  réTolutionnaire  : 

•  Nous  promettons  et  jurons  que  nous  nous  comporta 
rons  en  hommes  d'honneur  dans  le  poste  qui  vient  de 
nous  être  confié;  que,  renonçant  à  tout  intérêt  personnel 
et  illégitime,  nous  maintiendrons  les  droits  et  soignerons 
les  intérêts  des  habitants  de  celte  ville  avec  ce  courage  et 
cette  dignité  qui  conviennent  à  des  représentants  d*UQ 
peuple  libre  ;  que  nous  veillerons  au  maintien  du  boQ 
ordre  et  de  la  tranquillité  publique  ;  que  nous  prot^rons 
les  personnes  et  les  propriétés  contre  tout  attentat,  vio- 
lence ou  vengeance  personnelle  ;  que  nous  récompenserons 
les  bons  et  ferons  punir  les  méchants,  conformément  ani 
lois;  et  que  nous  ne  prendrons  jamais  aucune  résolutioa 
et  n'en  ferons  exécuter  aucune  qui  ne  tende  à  assurer  te 
salut  du  peuple  et  à  augmenter  le  bonheur  général,  i 

Aussitôt  après,  le  comité  révolutionnaire  déclara  ses 
fonciicms  terminées  et  prononça  sa  dissolution,  ayant  ob« 
tenu  le  but  salutaire  qu'il  s'était  proposé. 

La  régence  provisoire  entra  en  fonction.  Le  drapeau  n- 
tional  fut  placé  au  haut  de  la  tour,  au  son  de  toutes  tei 
cloches  et  aux  acclamations  unanimes. 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Paris,  le  22  pluviôse.  —  Dans  la  plupart  des  sec- 
tions, on  a  nommé  des  commissaires  pour  recueillir 
tous  les  faits  relatifs  à  la  conduite  des  comités  rë¥0^ 
lutionnuires  avant  le  9  thermidor,  en  faire  ensuite 
le  rapport  aux  assemblées  générales,  qui  renverront 
le  tout  au  gouvernement. 

Si  cette  opération  est  bien  faite,  elle  ne  peut  qu'ê- 
tre extrêmement  précieuse  pour  l'instruction  da 
peuple  et  Tintérêt  de  l'histoire. 

—  Aujourd'hui  on  vend  dans  les  rues  de  Paris 
les  Crimes  de  Jean-Paul  Marat;  les  marchands  de 
cette  brochure  ont  établi  leur  comptoir  sur  la  place 
du  Carrousel,  dans  le  lieu  m^me  ou  s'élevait  le  mo- 
nument en  rhonneur  de  VÂmi  du  Peuple, 

—  On  a  afGché  aujourd'hui  dans  Paris  Une 
Adresse  aux  seclions  et  à  la  Jeunesse  parisienne, 
pour  les  inviter  à  demander  à  la  Convention  la  fin 
des  angoisses  révolutionnaires  et  là  punition  (tes 

S6 


4t4 


brigands  qui  ont,  depuis  cinq  ans,  coarert  la  France 
de  sang  et  de  carnage. 

Dans  cette  pièce ,  pleine  de  feu  et  d*ënergie ,  le 
portrait  de  quelques-uns  de  nos  précédents  meneurs 
est  tracé  avec  beaucoup  de  ressemblance. 

—  On  a  publié  à  Versailles  un  arrêté  pris  par  le 
représentant  Lacroix ,  par  lequel  il  (ordonne  a  tous 
ceux  des  ex-moines  ,  non  mariés  ,  ou  n*ayant  pas 
charge  de  pères ,  mères  ou  parents  pauvres  ou  in- 
firmes, ou  n^ayant  pas  adopté  un  enfant  pauvre  ,  de 
quitter  leur  domicile,  pour  aller  se  fixer  dans  le  chef- 
lieu  du  district. 

Il  serait  difficile  de  citer  un  exemple  plus  terrible 
de  l'autorité  arbitraire  ;  jamais  le  législateur  même 
ne  confondit  le  coupable  avec  rinnocent,  et  le  salut 
de  la  patrie,  évidemment  compromis  dans  un  dépar- 
tement, pourrait  seul  autoriser  la  proscription  ou  le 
déplacement  d'une  classe  entière  d  hommes,  par  une 
loi  positive. 

Dans  tous  les  autres  cas,  la  loi  seule  doit  désigner 
les  coupables;  et  le  bon  citoyen ,  fort  de  son  inno- 
cence, quel  que  soit  son  état  ou  sa  profession ,  doit 
vivre  paisiblement  à  Tabri  de  la  constitution  qu'il  a 
jurée. 

D'ailleurs,  en  persécutant  ainsi  des  hommes  en 
masse ,  par  cela  seul  qu'ils  appartiennent  à  une 
classe  j  on  fait  revivre  cette  distinction  révoltante 

âui  existait  autrefois  parmi  nous  et  que  nous* avons 
étruite. 

Il  ne  doit  plus  exister  dans  la  société  ni  prêtres , 
ni  nobles;  nous  ne  reconnaissons  que  des  citoyens. 
Ceux  d'entre  ces  ci-devant  prêtres  ou  nobles ,  qui 
prévariquent  doivent  être  punis  ;  mais  il  serait  ri- 
aicule,  il  serait  injuste,  il  serait  absurde  de  confon- 
dre l'homme  de  bien  avec  le  scélérat,  par  cela  seul 
qu'ils  ont  porté  le  même  habit. 

11  n*y  a  qu'un  tyran  qui  pourrait  punir  tous  les 
apothicaires  d'un  Etat,  parce  que  l'un  ou  plusieurs 
d  entre  eux  auraient  empoisonné  leurs  malades. 

-^  L'arrêté  du  comité  de  sûreté  générale,  relatif 
aux  voyageurs  arrivant  à  Paris ,  excite  également 
les  inquiétudes  des  patriotes  amis  des  principes ,  en 
même  temps  qu'il  provoque  le  mécontentement  des 
nombreux  citoyens  qui  en  sont  l'objet. 

Cet  arrêté  porte  que  tout  individu  arrivant  à  Pa- 
ria aéra  tenu ,  pour  obtenir  une  permission  de  sé- 
jour, de  se  présenter  au  comité  avec  un  bon  citoyen, 
qui  attestera  son  amour  pour  les  lois  et  la  tranquil- 
lité publique. 

Au  milieu  des  nombreuses  occupations  dont  les 
comités  de  gouvernement  se  trouvent  chargés ,  on 
ne  doit  point  s'étonner  si  l'on  trouve  quelques  er- 
reurs dans  des  opérations  aussi  rapides,  aussi  multi- 
pliées. Nous  avons  cru  en  apercevoir  une  dans  l'ar- 
rêté que  nous  citons ,  et  nous  allons  hasarder  à  cet 
égara  quelques  observations. 

Bn  lisant  cet  ordre,  on  croirait  d'abord  qu'il 
existe  un  décret  antérieur  qui  oblige  les  voyageurs, 
les  commerçants  d'obtenir  une  permission  de  sé- 
journer dans  Paris.  En  effet ,  l'autorité  d'une  loi 
solennelle  pourrait  seule ,  dans  des  circonstances 
difficiles,  légitimer  cette  suspension  des  droits  des 
citovent ,  cette  atteinte  portée  à  la  liberté  indivi- 
duelle, cette  gêne  imposée  aux  relations  coinmer- 
eiaies.  Mais  fou  te  rappelle  bientôt  que  cette  dis- 
position ,  loin  d'être  prescrite  par  aucune  loi ,  est 
formellement  contraire  à  celle  du  13  nivosc  relative, 
aux  cartes  de  sûreté.  Celle-ci  porte  que  les  voya- 

Senrs  déposeront  leurs  passeports  dans  un  comité 
e  section  «  et  qu'on  leur  délivrera  une  carte  en 
échange.  Cette  carte,  qui  autorise  leur  séjour  dans 


Paris ,  ne  pent  pas  plus  leur  toe  refusée  qn*aux  ci- 
toyens domiciliés. 

D'après  cet  ordre  de  choses ,  n'est-il  pas  évident 
que  la  Convention  n'a  pas  voulu  interaire  auï  ci- 
toyens des  différentes  parties  de  la  république  le 
droit  de  séjourner  dans  la  ville  où  leurs  relations 
peuvent  les  appeler?  L'arrêté,  au  contraire,  suppose 
la  suspension  de  ce  droit  ;  car  les  permissions  qu'il 
se  réserve  la  faculté  d'accorder  ne  peuvent  être  que 
des  exceptions  à  une  prohibition  générale  dont  elles 
supposent  l'existence. 

Il  est  d'ailleurs  facile  de  sentir  quelle  gêne  impose 
au  voyageur  la  nécessité  de  trouver,  à  l'instant 
même  de  son  arrivée,  un  citoyen  connu  par  le  comité 
de  sûreté  générale  qui  puisse  attester  sa  bonne  con- 
duite. De  quel  poids  seront  ces  certificats  de  civisme 
négociés  entre  deux  individus  ^ui  ne  se  connattront 
que  d'un  jour,  ou  du  moins  qui  n'auront  jamais  co- 
habité dans  la  même  ville  ? 

La  loi  qui  établit  les  passeports,  cette  loi  dont  les 
formalités  n'ont  paru  applicables  qu*à  des  temps  de 
troubles ,  n'a  pas  la  même  rigueur,  le  même  arbi* 
traire  que  cet  arrêté;  car  elle  porte  que  les  passeports 
ne  pourront  être  refusés.  Un  décret  postérieur  a 
même  annulé  un  arrêté  de  la  municipalité  de  Paris, 

3ui  tendait  à  donner  aux  comités  des  sections  le 
roit  d'en  suspendre  la  délivrance. 
Est-ce  dans  un  moment  où  il  est  si  important  de 
faciliter  les  communications  du  commerce  et  de  le 
dégager  de  toutes  les  entraves,  qu'il  est  utile  d'éta- 
bbr  un  régime  prohibitif  même  sur  la  circulation 
des  personnes?  Peut-on  douter  que  ces  violations  de 
la  liberté  individuelle  ne  soient  toujours  plus  vexa- 
toires  pour  les  bons  citoyens  qu'effrayantes  pour  les 
malveillants?  Ceux-ci  ne  parviennent-ils  pas  tou- 
jours à  se  soustraire  à  ces  formalités  dont  ils  laissent 
peser  exclusivement  le  joug  sur  les  citoyens  honnê- 
tes et  paisibles? 

La  tranquillité  publique  peut  être  assurée  pat  une 
police  sévère,  non  par  des  moyens  généraux  et 
vexatoires  :  faites  aimer  aux  citoyens  la  liberté  par 
sa  jouissance;  qu'ils  en  connaissent  le  prix  en  goû- 
tant tous  ses  bienfaits;  attachez-les  au  régime  de  jus- 
tice que  vous  vouiez  établir,  en  suivant  rigoureu- 
sement les  principes  :  son  règne  sera  imperturbable 
quand  il  sera  cimenté  par  le  bonheur  public.  Ce  qui 
constitue  une  bonne  police ,  c'est  une  surveillance 
active  plutôt  que  la  multitude  des  règlements  ;  en 
un  mot ,  il  est  aussi  dangereux  de  trop  gouverner 
que  de  ne  gouverner  pas  assez  ;  l'un  et  l'autre  amè- 
nent ou  le  despotisme  ou  la  licence. 

CONVENTION   NATIONALE. 

Présidence  de  Barras* 
SUITE  DE  LA  SEANCE  DU  23  PLUVIOSE. 

La  section  de  la  Fraternité  est  admise  à  la  barre. 

L'orateur^  entouré  d'une  foule  considérable  de 
citoyens  :  Législateurs,  le  buste  de  Marat ,  ce  prô- 
neur  de  la  dictature,  l'idole  des  terroristes ,  le  dieu 
des  Jacobins  défunts,  blessait  la  vue  des  vrais  répu- 
blicains ,  des  amis  de  l'ordre ,  de  la  justice  et  des 
lois.  La  section  de  la  Fraternité,  débarrassée  enfin 
de  toute  espèce  d'influence,  grâce  à  la  précieuse  ré- 
volution du  9  thermidor ,  a  prononcé  librement  son 
opinion;  elle  n'a  vu  dans  le  prétendu  Ami  du  peuple 

Sue  l'évangéliste  de  l'anarcnie,  l'apOtredu  pillage  et 
u  meurtre,  le  principal  provocateur  des  journéesdes 
2  et  8  septembre, journées  horribles,  qui  terniraient 
la  gloire  de  la  plus  étonnante  des  révolutions,  si  leurs 
auteurs  et  acteurs  pouvaient  rester  impunis,  et  d'un 
consentementunanime, au  milieudes  démonstrations 


4S6 


fj 


d«1a  plus  viTeaI1ëere8$e,te  buste  deMarataëtëenlevë 
et  brisé.  Le  lieu  de  nos  séances  ne  sera  plus  souillé 
par  la  présence  d*un  monstre  sanguinaire  que  npus 
vouons  à  Texécration  des  siècles  futurs.  Le  buste  de 
Cballier ,  cet  oppresseur  de  nos  frères  de  Lyon ,  a 
éprouvé  le  même  sort.  L'orateur  de  la  vertu,  J.-J. 
Rousseau ,  et  intéressant  Franklin ,  ces  vrais  amis 
de  la  liberté,  ont  déjA  pris  leurs  places,  et  les  leçons 
sublimes  de  ces  bienfaiteurs  dertiumanité  serviront 
de  base  à  toutes  nos  délibérations. 

Représentants  du  peuple,  la  section  de  la  Frater- 
nité ne  poursuit  pas  la  mémoire  des  bommes  de 
sang  dont  la  république  est  délivrée,  pour  voir  avec 
indifférence  ceux  qui  font  versé  avec  délices,  ceux 
qui  conspirent  encore  contre  le  peuple  et  ses  plus 
bdèles  représentants,  siéger  plus  longtemps  parmi 
vous.  Attendez-vous  que  de  nouveaux  excès  aug- 
mentent la  masse  de  leurs  forfaits?  Vingt-quatre 
millions  d'hommes  vous  demandent  justice;  que  les 
grands  coupables  disparaissent  au  plus  tôt  du^ol  de 
a  liberté ,  et  la  France  entière ,  dans  les  transports 
de  sa  juste  reconnaissance,  criera  d*un  concert  una- 
nime :  Vive  la  république  !  vive  la  Convention  na- 
tionale. (On  applaudit.) 

Le  Président  :  Citoyens,  la  Convention  a  cru  de- 
voir, dans  sa  sagesse,  décréter  que  les  cendres 
d*aucun  individu  n*obtiendraient  les  honneurs  du 
Panthéon  que  dix  ans  après  sa  mort.  La  postérité 
impartiale  prononcera  sur  les  grands  hommes  qui 
auront  bien  mérité  de  la  patrie.  De  quel  œil  peut- 
elle  donc  voir  qu'au  méprisdc  son  décret  des  bustes 
sont  processionnellement  portés  par  la  malveillance, 
et  non  par  des  républicains  qui,  comme  vous,  n'a- 
dorent que  Dieu  et  la  Liberté?  De  quels  regrets  ne 
seront-ils  pas  pénétrés ,  lorsqu'ils  sauront  que  ceux 
qui  leur  conseillent  des  démarches  indécentes  et  ir- 
respectueuses envers  l'autorité  nationale  sont  les  mê- 
mes qui  organisent  des  comités  d'assassinats.  Soyez 
calmes, citoyens,  la  Convention  veille  au  salut  du 

Î>euple  ;  elle  saura  le  garantir  ;  elle  voit  avec  intérêt 
e  témoignage  de  la  section  de  la  Fraternité.  (Nou- 
veaux applaudissements.  ) 

^  La  section  de  la  Butte  des  M onlins  est  admise  par 
dépotatioD» 

Z'orafeur  :  Citoyens  législateurs,  des  scélérats 
frétaient  emparés  df'un  mort,  ils  l'avaient  déifié,  lui 
avaient  dressé  des  autels;  ils  le  portaient  procession- 
nellement dans  les  rues ,  brûlaient  de  l'encens  et 
chantaient  des  hymnes  a  sa  gloire;  c'est  ainsi  qu'au 
nom  de  la  liberté,  et  pour  le  plus  grand  bien  du 
peuple ,  ils  fanatisaient  les  citoyens ,  volcanisaient 
les  têtes,  inoculaient  le  crime  et  diressaient  des  écha- 
fauds  ;  despotisant  l'opinion  ,  ils  ont  même  anticipé 
sur  les  droits  de  la  postérité,  comme  si  ce  n'était  pas 
au  creuset  épura toire  du  temps  qu'il  fallût  éprouver 
les  vertus  ;  votre  décret  d'hier  a  confirmé  un  prin- 
cipe sagement  établi. 

Ce  décret  a  été  aussitôt  exécuté  que  connu,  aux 
cris  de  vive  la  république  I  vive  la  Convention  na- 
tionale I 

Citoyens  représentants,  jetez  un  moment  uu 

coup  d'œil  sur  les  citoyens  de  Paris;  vous  les  verrez 
la  plupart  arbitrairement  dé^rmés;  et  par  qui  l'ont- 
ils  été?  par  cette  faction  liberticide  qui  avait  à  sa 
disposition  les  comités  révolutionnaires  ;  tons  ceux 
qui  les  composaient  sont  armés  la  plupart  de  nos 
propres  dépouilles ,  et  par  eux  ont  été  également 
armés  les  citoyens  qu'ils  avaient  momentanément 
égarés.  Qu'ils  ne  comptent  pas  sur  l'assistance  de 
ces  derniers  ;  le  voile  est  déchiré  :  ordonnez  donc 
que  les  armes  seront  remises  à  ceux  à  qui  elles  ont 


été  ainsi  enlevées  :  notre  désarmement  fait  encore 
leur  espoir;  ôtez-leur  cette  dernière  ressource. 

— >  La  section  de  Piques  parait  ensuite  :  elle  applaudit 
BU  décret  d*bier,  qui  dépanthéonise  Marnt  Elle  demande 
répurallou  des  administrations  ;  elle  propose  d'interdire, 
dans  la  Convention  nationale»  tous  les  signes  d'approba- 
lion  et  dMmprobatioD* 

•  Apparlient-il,  dit  l'orateur,  à  quelques  femmes  qui 
ont  toujours  vu  couler  le  sang  avec  des  transports  de  joie 
et  de  fureur,  de  venir  troubler  vos  travaux  et  de  mépriser 
vos  décrets,  parce  quMls  respirent  la  vertu  et  rhumanité?» 
(On  applaudit.) 

—  La  section  de  Bonne-Nouvelle  est  admise* 

L'orateur:  Citoyens  représentants,  les  complices 
de  Robespierre  espèrent  en  vain  de  renouer  la  trame 
que  vous  avez  brisée  ;  en  vain  ils  s'eflTorcent  de  re- 
forger cette  chaîne  de  crimes  qui  s'étendait  sur  la 
république  entière ,  et  dont  les  anciens  comités  ré- 
volutionnaires formaient  autant  d'anneaux* 

Nous  vous  apportons  l'arrêté  qui  a  été  pris  una- 
nimement par  la  section  contre  son  ancien  comité 
révolutionnaire;  l'esprit  de  vengeance  et  de  parti  d'à 
point  souillé  cet  acte  de  justice.  Ceux  des  membres 
de  ce  comité  qui  lui  ont  paru  faibles  ou  égarés  ont 
trouvé  facilement  grâce  devant  leurs  concitoyens,  et 
leurs  noms  ne  se  trouveront  pas  dans  l'arrêté  que 
nous  présentons. 

Quant  aux  autres,  ils  sont  vraiment  coupables  : 
ce  sont  des  fonctionnaires  prévaricateurs,  compli- 
ces ,  agents  des  Hébert  et  de  Robespierre,  partisans 
acharnés  du  pillage,  du  meurtre  et  de  l'anarchie; 
nous  vous  les  dénonçons  solennellement ,  nous  les 
dénonçons  à  tous  les  Français  amis  des  mœurs  fdai 
lois  et'de  l'humanité. 

Les  preuves  de  leurs  délits  sont  entre  vos  maint  « 
ainsi  que  les  noms  de  leurs  complices  et  adhérents. 
Nous  demandons ,  citoyens  représentants,  que  ces 
hommes  impurs  soient  frappes  de  la  dégradation 
civique;  que,  bannis  à  jamais  du  sein  de  la  républi- 
que ,  qui  les  désavoue  pour  ses  enfants ,  ils  aillent 
porter  sur  une  terre  étrangère  le  poisou  de  leurs 
mœurs  et  la  rage  impuissante  du  crime  qai  les  dé- 
vore. 

Il  en  est  temps,  citoyens  représentants,  saisissez  la 
massue  nationale  ;  écrasez  les  restes  trop  puissants 
de  cette  faction  impie. 

11  y  a  six  mois  que  le  tyran  a  péri  sur  l'échafand* 
et  ses  premiers  visirs,  ses  intimes  confidents,  les  hé- 
ritiers présomptifs  de  la  dictature,  respirent  encore. 
Frappez  donc  les  chefs,  les  premiers  moteurs  »  les 

(grands  instruments  de  la  conspiration.  L'intérêt  de 
a  république ,  celui  de  la  justice ,  les  dangers  de  la 
patrie,  vos  propres  dangers,  le  vœu  unanime,  le  cri 
de  toute  la  France  vous  en  pressent  et  vous  en  con- 
jurent. N'ajournez  point  de  si  grands  intérêts,  ci- 
toyens représentants:  on  n'ajourne  point  le  salut  de 
la  patrie.  (On  applaudit.) 

Nous  applaudissons  à  votre  décret  d'hier  ;  il  raf- 
fermit le  Panthéon.  En  mettant  les  vertus  humaines 
à  répreuve  du  temps,  vous  empêchez  les  méprises 
de  l'opiniop ,  vous  empêchez  surtout  l'usurpation 
scandaleuse  des  honneurs  publics,  et  vous  nous  pré- 
servez des  grands  hommes  provisoires.  (Vifs  applau- 
dissements. ) 

—  Un  membre  du  comité  des  secours  fait  rendre 
le  décret  suivant: 

f  La  CoDvention  nationale,  après  avoir  entendu  ses  eo* 
mités  des  secoars  publics  et  des  finances  réunis,  décrète  i 

f  Art.  !•'•  Il  sera  mis  par  la  trésorerie  nationale,  à  la 
disposition  de  la  commission  des  secours  publics,  la  somme 
de  iO  mlUioos,  pour  être  iDoenanneot  répartie ,  à  titre 
de  secours»  entre  tous  les  districu  de  li  république  dans 


436 


I  praporfloM  et  tiiivvnt  le  «taie  mode  que  les 
f  ô  milliOM  6^  domés  pour  rexéeutiOD  des  lois  des  28 
tt  29  joiD  4793  (Tieox  fijle). 

•  IL  La  Moitié  de  cHie  soBine  sera  distribuée  aox  lo- 
^eaU  qui,  à  raison  de  leor  ige  ou  de  leurs  infimiités, 
sont  hors  d'étal  de  gaipMT  leor  TÎe  par  le  travail;  Taotre 
flM»itié  sera  emplojée  i  la  réparatioa  des  routes  de  la  ré- 
publique, et,  à  elles n*eD  ont  pas  besoin,  à  d'autres  Ira- 
faux  utiles. 

•  III.  Les  directoires  de  district  aTiserootsans  délai  aux 
noyeoN  d'oufrir  daos  Téieodue  de  leurs  territoires  res|)ec- 
tils  des  tra?aux  de  la  nature  sus-énoocée ,  où  seront  ad- 
mis les  indigents  valides ,  sur  les  certificats  des  municipa- 
lités, visés  par  les  districts. 

•  IV.  Ih  feront  commencer  immédiatement  les  travaux 
4«*ib  auront  jugés  les  plus  confenables,  à  la  charge  par 
eux  d^envoyer  surle^bamp  4  la  commission  des  secours 
le»  délibérations  mothées  quMls  auront  prises  à  ce  sujet. 

f  V.  Les  travaux  dont  l'éUblissemeot  aura  été  arrêté 
par  le  directoire  de  district  seront  exécutés  sous  la  direc* 
non  des  municipalités. 

•  VI.  Si  la  même  entreprise  devait  s^étendre  sur  le  ter- 
ritoire de  deux  ou  plusieurs  communes,  ces  communes 
aVntendront  pour  son  établissement  et  sa  direction, et, 
en  cas  de  dificulté,  die  sera  levée  par  le  directoire  du 
district. 

•  VIL  Le  salaire  des  indigenU  employés  aux  travaux  de 
secours  sera  fiié  aux  trois  quarU  du  prix  moyen  de  la 
journée  de  travail  déterminée  pour  le  canton  (loi  du 
24  vendémiaire  de  Tan  2 ,  litre  I",  arUcleXIII). 

-  VIII.  Lesdistrictsqui  ont  participé  aui  secoure  accor- 
dés par  la  loi  du  22  floréal  ne  recevront,  sur  les  5  millions 
affectés  aux  secours  gratuits,  que  la  somme  qui  pourrait 
manquer  pour  compléter  leur  contingenL 

•  IX.  Les  administrations  de  districts  et  conseils  géné- 
raux de  communes  seront  personnellement  et  solidaire- 
ment responsables  des  retards  qui  pourraient  être  apportés 
dans  Texécution  du  présent  décret  :  il  est  enjoint  aux 
agents  généraux  près  les  districts  et  communes  d*y  tenir  la 
main. 

•  X.  Les  administrations  de  district,  dans  les  deux  mois 
de  la  réception  des  fonds  dont  Tenvoi  leur  aura  été  fait, 
rendront  compte  à  la  commission  des  secours  de  leur  dis- 
tribution et  emploi. 

•  XL  Le  présent  décret  sera  inséré  au  Bulletin  i  Tinser* 
tion  tiendra  lieu  de  publication,  s 

—  Ud  lecrétaire  lit  la  lettre  suivante  : 

Jjeê  administrateurs  révolutionnaires  du  district 
à  la  Convention  nationale, 

Amiens,  le  18  pluviôse,  Vàn  3'  de  la  république 
française,  une  et  indivikible. 

•  Rcpré'cntanls  du  peuple  français,  la  coramnne  de 
Plixeeourt,  cbef-lieu  du  canton  de  notre  disirici,  vient 
d*être  en  proie  à  deoi  fléaui  redoutables.  One  inondation 
causée  par  le  dégel,  et  un  alTreux  incendie,  y  ont  en  même 
temps  exercé  leurs  terribles  ravages  :  on  el^t  dit  que  tous 
les  éléments  étaient  à  la  fois  conjurés  contre  les  infortunés 
habitants  de  ce  pays. 

•  En  moins  de  deux  heures,  la  flamme,  poussée  par  un 
?ent  furieux,  réduit  vingt  maisons  en  cendres;  des  flots 
d*eao  viennent  battre  les  murs  de  ces  habitations  embra- 
sées. Tout  secours  devient  impossible;  Tespoir  de  sauver 
au  moins  les  outils  de  son  travail  est  ôté  au  malheureux 
cultivateur:  tout  est  détroit  partout  où  la  flamme  dévasta- 
trice a  passé.  Le  sol  peu  productif  du  pays  prive  les  ci- 
toyens de  la  commune  que  le  feu  a  épargnés  de  la  douce 
satisfaction  de  secourir  leurs  frères. 

•  La  Convention  nationale  seule  peut,  par  un  décret 
salutaire ,  éloigner  le  désespoir  du  sem  de  Tindigence. 

•  C'est  au  nom  de  la  vieillesse  et  du  malheur,  si  chers 
aux  cmurs  vertueux,  que  nous  la  conjurons  d'accorder  à 
vingt  chefs  de  famille  réduits  à  la  plus  elTroyable  misère 
les  secours  provisoires  que  leur  position  déchirante  leur  a 
trop  bien  mérités,  et  que  rhumanité  et  la  justice  sollicitent 
en  leur  faveur. 

«  La  voie  ordinaire  dci  secours  devient  trop  lente  dans 
ce  pressant  besoin» 


c  La  commune  de  FTixecourt  étant  on  ïïev  et  \ 
des  troupes,  rintérét  national  même  exige  to  plas| 
recomtruction  des  bâtiments  incendiés. 

•  Le  proc^- verbal  d*rstimatioo  des  pertes,  qm  i 
à  83, 150  liv.,  et  que  nous  joignons  à  cette  lettre,  servira 
de  base  aux  secours  qu'il  est  urgent  d'accorder  d*abord. 

•  Le  laborieux  cultivateur  arraché  à  la  misère  et  ao  dés- 
espoir, le  père  de  famille  rassuré  sur  les  sabsistaoces  de 
ses  enfants  chéris,  vont  trouver  dans  la  bienûûsaiiee  aa- 
tionale  de  nouvelles  forces  pour  s'écrier  avec  tout  la 
Français:  Vive  la  république  1  vive  la  ConventioD  nali»- 
nalel*^ 

Cette  lettre  est  renvoyée  au  comité  des  secours,  pour 
foire  promptement  un  rapport  sur  les  secours  à  acoorder  à 
ces  cultivateurs. 

—Un  secrétaire  lit  TAdresse  suivante  : 

Le  comité  révolutionnaire  du  district  de  Maneilte 
à  ta  Convention  nationale. 

•  Représentants,  de  nouvelles  plaintes  sur  la  prétendue 
persécution  des  patriotes  vont  bientôt  retentir  dans  le  sein 
delà  Convention. 

«  Des  Adresses  mystérieusement  colportées  dans  tous  les 
tripots  de  Marseille,  et  couvertes  de  signatures  extorquées 
ou  équivoques,  vous  seront  lues  dans  un  moment  qu'oo 
a  cru  favorable. 

«  Placés  au  poste  de  surveillance,  nous  devons  vont 
édairer  sur  cette  manœuvre  de  Thypocrisie  on  du  crime. 

•  Le  parti  des  hommes  de  sang  avait  pris  on  moment  de 
consistance;  des  cris  séditieux  se  faisaiententeadre;  quel* 
ques  moyens  de  répression  oot  été  développés:  secondés 
par  les  efforts  de  la  brave  garnison ,  une  police  vigoureuse 
a  été  déployée;  mais  tout  s'est  borné  k  des  mesures  de 
surveillance  et  ft  l'emprisonnement  de  quelques  scéléraia, 
prévenus  d'avoir  assassiné  quatre  hommes  do  bataillon  des 
Gravilliers,  parce  qu'ils  n'ont  voulu  reconnaître  dans  la 
Convention  d'autre  parti  que  celui  de  la  Convention. 

•  Cependant  ce  bataillon  avait  reçu  ordre  de  sortir  de  la 
ville;  la  phalange  marseillaise,  partie  de  Toulon,  devait  le 
remplacer....  Les  Marseillais  armés  au  milieu  de  Marseille 

en  agitation  1 Celte  mesure  nous  fit  frissonner;  noos 

parlâmes  le  langage  d'hommes  libres  et  chargea  en  partie 
de  la  tranquillité  de  Marseille  ;  l'ordre  de  mardm  lat  ré- 
voqué. 

•  Représentants,  nous  ne  nvons  point  eneore  si  le  ha- 
sard seul  a  pu  rassembler  sur  un  point  do  Midi  tons  les 
éléments  de  la  combustion,  ou  si  quelques  affreux  com- 
plots étaient  ourdis  ;  nous  ne  serons  que  narrateurs. 

•  Le  là  de  ce  mois  était  désigné  pour  être  le  jour  fatal; 
toutes  les  autorités  constituées  devaient  subir  la  peine  dn 
réverbère,  et  les  citoyens  élargis  devaient  être  sabrés  chei 
eux  ou  dans  lesrue<;  des  émi^snires  répandus  dans  les  ate- 
liers avaient  déjà  excité  les  onvrirrs  sur  la  cherté  des  den- 
rées, par  la  perfide  comparaison  de  leur  prix  sous  les  an- 
ciennes administrations  et  sous  les  nouvelles  :  tous  les 
moyens  paraissaient  pris;  mais  il  faut  encore  une  fois  que 
l«  s  ôgorgeurs  se  passent  de  sang  et  de  cadavres.  S*ils  vous 
portent  leurs  plaintes,  croyes  que  c'est  le  cri  du  tigre  qui 
regrette  sa  proie. 

a  Mais  de  quoi  se  plaignent-ils,  ces  hommes  trop  hono* 
rés  de  ce  nom ,  puisqu'ils  respirent  et  qu'ils  sont  libres  ?Si 
Ton  peut  nous  reprocher  quelque  chose,  c'est  le  système 
d'indulgence  qui  a  été  suivi  à  leur  égard. 

•  Voulei-vous ,  représentants,  connaître  les  vrais  moti6 
de  leurs  plaintes:  c'est  que  la  partie  saine  de  la  nation ,  les 
citoyens  paisibles  qui  veulent  vivre  à  l'abri  des  lois  du 
fruit  de  leur  travail ,  en  bénissant  la  Convention,  ne  sont 
pas  d'humeur  à  se  laisser  égorger  ou  pressurer,  au  nom  de 
la  patrie,  et  par  des  hommes  qui  se  disent  exclusivement 
patriotes.  Ne  voyex-vous  pas  qu'ils  tremblent  que  les  ci* 
toyens  arrachés  de  leurs  mains  et  rendus  à  la  liberté  n'é- 
clairent la  justice  sur  la  spoliation  de  leurs  maisons  et  ce 
trafic  qui  a  été  fait  des  actes  d'autorité?  «Il  n'y  a  que  les 
morts  qui  ne  reviennent  plus,  »  ont-ils  répété  en  édH>,  et 
toutes  les  dispositions  devaient  être  prises  pour  imposer  no 
silence  éternel  aux  plaintes  indiscrètes. 

•  Représentants,  ce  n'est  plus  le  moment  des  demi-me- 
wrcst  Terrasses  œs  hommes^  afin  que  la  juitioe  mit  k 


4S7 


ordre  da  jour  comme  Yoas  TaTei  décrété.  L'infamie  et  le 
ciime  sont  une  écutuc  que  la  république  doit  vomir  de  90D 
sein.  QuVnt  de  commun  ces  êtres  immoraux  avec  le  goa- 
vcrnemcni  des  hommes  vertueux?  Quel  esi  le  citoyen  joui§- 
snnt  de  son  bon  sens  et  de  sa  pleine  liberté  qui  n*eût 
ardemment  embras<é  la  république  ,  si  les  hommes  de  ra- 
pine et  de  sang  ne  s'étaient  efforcés  d'en  flaire  la  plus  vile 
des  prostituées  et  la  plus  horrible  desEuménides? 

f  Représentants ,  vous  avez  promis  le  bonheur  au  peu- 
ple français;  il  est  temps  de  remplir  ce  saint  engagement; 
une  poignée  de  factieux  ne  doit  pas  vous  coûter  ù  réduire 
plus  que  les  tyrans  de  l'Europe.  Profitez  de  ce  moment 
vraiment  précieux  ;  il  est  peut-être  le  seul  qui  vous  reste 
pour  opérer  lo  bien  :  l'opinion  publique  vous  entoure  ;  le 
peuple  souverain  vous  a  remis  sa  massue  ;  ne  délibérez 
plus,  mais  frappez. 

«  Périssent  les  tyrans,  les  traîtres,  les  égorgeurs,  les 
royalistes  et  tous  les  ennemb  du  peuple  I  (Vifs  applaudisse- 
ments) 

•  Vive  la  république  une  et  indivisible  et  démocratique, 
et  vive  la  Convention  I  • 

La  Convention  ordonne  la  mention  honorable  de  cette 
Adresse,  l'insertion  au  Bulletin  et  le  renvoi  au  comité  de 
sûreté  générale. 

—  La  section  du  Théâtre-Français  défile  dans  le  sein  de 
la  Convention* 

L orateur,  à  la  barre  :  Les  citoyens  de  la  41  ^  sec- 
tion, pénétrés,  avec  la  Convention,  du  principe  de 
ne  prendre  le  nom  d'aucun  homme  avant  l'cpoqne 
où  l'opinion  publique  peut  s'être  irrévocablement 
prononcée,  tous  annonce  qu'à  la  plus  parfaite  una- 
nimité elle  a  quitté  le  nom  de  Marat,  mis  hors  de 
son  enceinte  tout  ce  qui  le  rappelait  aux  yeux,  et  re- 
pris le  titre  de  section  du  Théâtre- Français. 

Elle  vient  vous  présenter  la  veuve  Yvon  et  son 
fils.  Le  citoyen  Yvon,  courrier  du  comité  de  salut 

S ublic,  patriote  reconnu,  par  tous  ses  concitoyens, 
e  la  probité  la  plus  intacte,  fut  dénoncé  pour  avoir 
arracné  l'arbre  de  la  liberté  planté  devant  la  poste 
aux  chevaux,  à  laquelle  il  était  attaché  depuis  dix 
ans.  Les  pièces  irrécusables  que  nous  joignons  à  no- 
tre pétition  prou  vent  que  le  citoyen  Yvon  fut  chargé, 
avec  plusieursdesescamarades,  de  substituer  à  un 
arbre  mort  un  arbre  vivant  ;  que  cette  opération 
s'est  faite  avec  décence,  et  après  en  avoir  prévenu 
le  comité  révolutionnaire  de  la  section,  que  l'arbre 
mort  a  été  porté  en  pompe,  et  déposé  à  la  commis- 
sion des  salpêtres.  Cependant  le  malheureux  Yvon 
fut  arrêté  le  22  prairial,  condamné  et  éçorgé  le  29 
messidor  dernier.  Il  laisse  dans  l'indigence  une 
femme  et  une  famille  intéressante  qui  ne  devaient 
leur  subsistance  qu'à  son  travail.  Nous  demandons 
à  la  Convention  qu'elle  veuille  bien  s'intéresser  au 
sort  de  cette  veuve  infortunée,  et  ordonner  la  levée 
des  scellés  mis  sur  ses  effets.  Nous  demandons  que 
les  pièces  relatives  au  citoyen  Yvon  soient  ren- 
voyées au  comité  de  sûreté  générale  ;  il  y  trouvera 
les  noms  des  dénonciateurs  de  ce  citoyen,  qui  n'eut 
d'autre  crime  aux  yeux  de  ces  monstres  qu'un  pa- 
triotisme aussi  ardent  qu'éclairé. 

Législateurs,  peut-on  intéresser  votre  humanité 
en  faveur  d'une  malheureuse  victime  du  terrorisme 
sans  se  sentir  agité  de  la  plus  vive  indignation  con- 
tre les  créateurs  de  ce  système  atroce,  qui  devait 
faire  de  la  France  un  gouffre  où  la  liberté,  les  arts, 
le  commerce  et  tontes  les  vertus  devaient  à  jamais 
flfengloutir?  Non!  la  section  entière  s'est  demandé 

auelle  puissance  au-dessus  de  la  justice,  au-dessus 
e  l'opinion  prononcée  du  peuple,  semble  arrêter 
l'activité  des  lois  contre  les  hommes  de  sang,  dont 
quelques-uns  en  prison  se  repaissent  du  souvenir  des 
crimes  qu'ils  ont  commis,  se  consolent  peut-être  par 
l'espoir  d'en  commettre  déplus  grands.  lA  plupart, 
circulant  encore  dans  la  société,  déguisant  la  rage 


qui  les  anime,  sa  rallient  aux  royalistes,  et  font 
cause  commune  avec  eux  pour  le  rétablissement  de 
la  tyrannie. 

La  section  tout  entière  s'est  demandée  pourqnoi 
la  commission  des  Vingt-et-Un  différait  tant  un  rap- 
port que  la  France  attend  avec  l'impatience  la  moins 
équivoque,  et  dont  l'opinion  publique  a  déjà  pro- 
noncé le  résultat.  Nous  ne  doutons  pas  que  fa  com- 
mission ne  soit  embarrassée  de  choisir,  entre  tous  les 
forfaits  qui  ont  été  commis,  quels  sont  ceux  qui  mé- 
ritent d'être  cités  par  leur  énormité.  Mais  si  un  scé- 
lérat était  traduit  devant  les  tribunaux  pour  vingt 
assassinats  prouvés,  chercherait-on  lequel  mérite  la 
mort?  on  les  lui  reprocherait  tous.  Nous  reprochons 
aux  créateurs  du  terrorisme  cent  mille  assassinats 
commis  avec  le  poignard  d'une  furie  que,  dans  le 
code  barbare  du  22  prairial,  ils  qualifiaient  du  nom 
de  loi. 

Nous  avons  encore  un  objet  à  présenter  à  votre 
sollicitude.  Lorsque  nous  avons  repris  le  titre  de 
section  du  Théâtre-Français,  nous  avons  fait  un  ap- 
pel aux  artistes  de  ce  théâtre;  nous  espérons  que  la 
Convention  voudra  bien  lesrappelerà  leur  ancienne 
existence.  L'intérêt  du  commerce  du  faubourg  Ger- 
main, la  valeur  des  domaines  nationaux  de  ce  quar- 
tier, font  assez  sentir  l'importance  de  cette  mesure, 
pour  que  nous  nous  permettions  de  la  développer. 

Cette  pétition  est  souvent  et  vivement  applaudie. 

Pbnières  :  Il  est  temps  de  mettre  sous  les  yeuz^u 
peuple  le  tableau  sanglant  des  crimes  de  ses  domi- 
nateurs ;  que  le  roi  des  Jacobins  et  ses  ministres  dis- 
paraissent! (Vifs  applaudissements.) 

Je  demande  le  renvoi  de  la  pétition  au  comité  des 
secours  pour  ce  qui  concerne  la  veuve  Yvon,  et  au 
comité  de  sûreté  générale  quant  aux  dénonciateurs 
de  ce  citoyen. 

***  :  Je  demande  le  renvoi  au  comité  d'instruction 
publique  de  la  demande  relative  au  Théâtre -Fran- 
çais. Il  est  temps  que  les  vrais  talents  prennent  la 
place  des  farceurs  de  Nicolet.  (Vifs  applaudisse* 
ments.) 

Toutes  ces  propositions  sont  décrétées. 
'    —  La  section  des  Gardes-Françaises  défile  ensuite. 

L orateur  :  Citoyens  représentants,  que  n'avez- 
vous  pu  être  témoins  de  ce  mouvement  spontané 
d'indignation  et  d'horreur,  au  moment  où  la  section 
des  Gardes-Françaises  apprenait  les  complots  des 
infômes  continuateurs  de  Robespierre  contre  les 
soixante-treize  députés  dont  vous  avez  couronné  la 
constance  et  les  vertus  en  les  rappelant  dans  votre 
sein ,  contre  une  partie  précieuse  de  la  représenta- 
tion nationale  ?  Vous  eussiez  vu  l'assemblée,  qui  dé* 
jà  venait  de  se  purifier  du  buste  de  Marat,  se  lever 
tout  entière  par  un  élan  sublime,  et,  après  avoir 
iuré  unanimement  de  faire  un  rempart  de  son  corps 
a  la  représentation  nationale,  demander,  au  milieu 
des  cns  mille  fois  répétés  de  vive  ta  répubtique  ! 
vive  la  Convenlton/ demander,  dis-je,  la  prompte 

fiunition  des  grands  coupables.  Nous  vous  le  disions 
e  2  pluviôse,  nous  ne  pouvons  que  vous  le  répéter  : 
tant  d'impunité  enhardit  les  factieux  ;  frappez  sans 
pitié  le  crime  qui  ose  s'asseoir  dans  votre  enceinte  ; 
ils  ne  sont  plus  les  représentants  du  peuple  ceux  qui 
osent  tenter  d'en  être  les  assassins.  (Vifs  applaudis- 
sements.) 

Ne  souffrez  pas  que  les  cannibales  ressaisissent 
une  portion  d'autorité,  dont  au  premier  signal  ils  ne 
manqueraient  pas  de  faire  le  plus  cruel  usa^e  :  tout 
ce  qui  a  été  l'agent,  même  passif,  du  crime  doit 
être  suspect  à  la  vertu. 

Que  leurs  chefs  tombent  sous  le  glaive  de  la  loi! 
Chaque  jour  de  leur  existence  est  un  malheur  pour 


4t6 


leur  poys.  Bappelez-roiis  let  foifuts  dont  ils  se  9ont 
couverts,  tous  ceux  qu*i1s  auraient  commis  s^ilseus- 
sent'ëtë  les  plus  forts.  Rappelez-vous  la  froide  atro- 
cité  avec  laquelle  ils  ont  mesuré  Tespace  immense 
des  carrières  de  Charenton  ;  que  votre  sévérité  les 
retienne  enfin  ;  que  par  vos  ordres  ils  soient  désar- 
més ;  qu'avec  eux  le  soit  encore  tout  ce  qui  appar- 
tient à  cette  secte  impure  qu'on  ne  peut  plus  nom- 
mer sans  rougir  ;  que  ces  méçères  vendues  au  parti 
de  l'étranger,  que  ces  restes  impurs  des  sales  plai- 
sirs des  Jacobins  du  9  thermidor,  ces  marâtres  qui 
osent  troubler  vos  délibérations  par  des  signes  d'ap- 
probation etd'improbation,  soient  enfin  réduites  au 
silence  et  chassées  de  ces  places  qu'elles  ont  si  long- 
temps souillées;  que  la  vertu  seule  occupe  les  places, 
que  la  vertu  seule  soit  honorée,  etc.  (On  applaudit.) 
La  fèaoce  est  levée  à  quatre  heures. 

SBANCB  DU  23  PLUVIOSE. 

On  lit  la  correspoodance. 

—  LecninUre  (de  Versailles)  obtient  la  parole  poar  une 
nctfon  d'ordre* 

Lecointbb  :  Citoyens,  la  conquête  de  la  Hollande 
me  fournit  l'occasion  de  monter  à  cette  tribune  pour 
vous  parler  commerce,  et  vous  démontrer  les  en- 
traves que  vous  lui  feriez  éprouver  s'il  devait  en 
être  de  la  Hollande  comme  de  la  Belgique,  et  de  tous 
les  pays  que  nous  avons  conquis  jusqu'ici. 

Vous  avez  reconnu,  mais  trop  tard,  le  préjudice 
que  portait  au  commerce,  aux  manufactures,  à  la 
chose  publique,  l'établissement  de  ces  grandes  ad- 
ministrations ,  de  ces  commissions  de  commerce , 
d'approvisionnements,  qu'on  aurait  mieux  fait  de 
nommer  commissions  d'anéantissement  de  toutes  les 
ressources  physiques  et  industrielles  d'un  Etat,  par 
la  composition  des  chefs  inexperts  et  à  gros  appoin- 
tements, d'une  nuée  d'aeents  vexateurs  et  fléaux  des 
campagnes, et  d'un  peuple  de  commis  de  réquisition, 

E lacés  par  l'intrigue,  par  la  faveur,  pour  aflamer, 
ien  loin  d'alimenter  la  république. 
Ces  établissements,  le  maximum,  les  réquisitions 
avaient  tellement  paralysé  les  affaires  que,  si  vous 
n'aviez  supprimé  l'un  et  l'autre,  vous  auriez  vu  en 
peu  de  temps  vos  commissions  épuiser  le  trésor  pu- 
blic, la  France  manquer  de  tout,  et  les  manufactures 
absolument  anéanties. 

Voulez- vous,  citoyens,  relever  le  crédit  de  vos 
assignats,  faire  diminuer  avant  trois  mois  toutes  les 
marchandises  de  30.  40,  50  nour  100:  donnez  au 
commerce  toute  la  liberté  qu'il  doit  avoir  ;  que  cette 
liberté  ne  soit  pas  un  vain  nom  ;  que  les  représen- 
tants du  peuple  en  mission  ne  prennent  des  arrêtés 
que  pour  le  protéger  ;  et  pour  éviter  toute  surprise, 
qu'ils  repoussent  toutes  suggestions,  tous  moyens 
qui  leur  seraient  proposés  tendant  a  en  entraver  la 
marche,  sous  le  spécieux  prétexte  d'un  plus  grand 
bien.  Cassez,  anéantissez  a  jamais  ces  administra- 
tions mercantiles  qui  tuent  le  commerce  en  disant 
qu'elles  alimentent  la  république.  Que  ces  états- 
majors  commerciaux  disparaissent  ;  autrement  tout 
serait  perdu,  si  vous  continuiez  de  livrer  le  com- 
merce a  la  cupidité  d'hommes  voraces,  dont  l'insta- 
bilité dans  lesplaces  semble  les  inviter  à  n'envisaeer 
Qu'eux  seuls  dans  le  cours  rapide  d'une  commission 
aont  ils  sentent  eux-mêmes  1  insuffisance  et  le  dan- 
ger qu'il  y  aurait  à  la  laisser  subsister  plus  long- 
temps. 

En  supprimant  ces  administrations  commerciales, 
▼rais  vampires  dans  un  Etat,  ôtez  les  entraves  qu'é- 
prouvent les  négociants  à  la  délivrance  des  passe- 
ports pour  les  pays  conquis  ;  que  le  conrité  de  salut 
public,  que  laa  représentants  du  peuple  en  mission 


ne  sment  plus  chargés  de  ee  sofn,  d^n  dëlafl  trop 
minutieux  pour  les  charges  du  gouvernement.  Ren- 
dez aux  municipalités,  aux  comités  civils  des  sec- 
tions des  grandes  communes,  ce  droit  qui  leur 
appartient  :  les  intrigants  y  sont  plus  facilement  re- 
connus; le  commerçant  probe,  au  contraire,  ne 
craint  point  de  s'y  présenter. 

Mais,  auprès  de  vos  comités,  les  aftires  dont  ils 
sont  surchargés  arrêtent  la  célérité  dans  l'expédi- 
tion ;  l'homme  honnête,  bal  lotte  parles  commis,  fuit 
un  pays  qui  n'est  pas  fait  pour  lui;  l'intrigant  sou- 
ple, et  qui  essaie  de  tous  les  moyens  de  réussir, 
trouve  à  la  fin  le  moment  qu'il  attend  pour  se  dé- 
dommagei  avec  usure  des  premiers  déjgoûts  dont  il 
a  été  abreuvé,  et  des  sacrifices  qu'il  a  raits  pour  ve- 
nir à  son  bot. 

Que  le  négociant  arrivé  dans  les  pays  conquis 
n'ait  jamais  besoin  de  l'autorisation  aes  représen- 
tants en  mission,  pour  l'achat  ou  la  sortie  des  mar- 
chandises qu'il  aura  achetées  et  destinées  pour  la 
France. 

Que  le  cabotage  soit  encouragé  ;  qu'il  se  fasse  sur 
nos  bâtiments  le  plus  possible  ;  oue  les  chambres 
d'assurance  soient  invitées  à  se  former;  que  les 
traites  sur  l'étranger,  arrachées  à  leurs  propriétaires 

fiar  cet  arrêté  injuste  autant  qu'impolitique,  pris  par 
es  anciens  comités  de  salut  public,  sûreté  générale 
et  finances,  et  commission  de  commerce,  soient  res- 
tituées.à  qui  de  droit;  ou,  si  quelques-unes  ont  été 
payées,  qu'une  juste  indemnité  soit  remise  à  leurs  lé- 
gitimes possesseurs. 
Cet  arrêté  a  tué  tout  notre  crédit  chez  l'étranger, 

3 ni,  ayant  regardé  comme  la  violation  de  tous  les 
roits  la  violence  avec  laquelle  on  a  extorqué,  par 
la  prison,  les  vexations  de  tous  genres  et  quelaue- 
fois  la  mort,  les  sommes  dues  a  d'honnêtes  négo- 
ciants, a  refusé  avec  raison  de  les  payer.  De  là  les 
précautions  qu'il  a  prises  pour  se  faire  payer  d'a- 
vance et  en  lingots  tout  ce  qu'il  devait  fournir. 

Le  style  que  la  commission  emplopit  dans  les 
lettres-circulaires  adressées  aux  négociants  et  ban- 
quiers porte  l'empreinte  de  la  tyrannie  la  plus  ca- 
ractérisée. 

La  eommiision  des  iubêistaneei  et  approniêionnê» 
menu  de  la  république  au  citoyen 

A  Paris,  fe...  de  Tan  3'  de  le  république 
une  et  indivisible. 

f  II  importe,  citoyen,  aux  besoins  de  la  république  que, 
coofonnément  à  Tarrêtédes  comités  des  fiuauces,  desft« 
relé  générale  et  de  salut  public,  réunis  le  7  du  courant,  et 
d*après  celui  de  la  commission  de  ce  jour,  lu  donnes  i  la 
commission,  dans  le  plos  court  délai,  Tétat  exact  des 
fonds  que  tu  as  libres  en  marchandises,  leUres  de  change 
ou  créances,  dans  deux  jours;  lesdiies  lettres  de  change  au 
trésor  public,  qui  t*en  donnera  reconnaissance,  pour, 
après  Tacquitteroent,  t'en  remettre  la  valeur  en  assignats, 
au  cours  qui  sera  fixé  au  pair.  Nous  aUendons  de  toi  frao- 
chise  et  célérité  ;  tout  relard  ou  fraude  serait  dénoncé  avee 
sévérité. 

«  Nous  t*annonçons  que  le  gouvernement  prendra  tous 
les  moyens  possibles  pour  acquitterau  ^ir  les  créances  lé» 
gitimes  que  la  république  ou  les  citoyens  peuvent  avoir  en 
pays  étrangers,  autres  que  ceux  avec  lesquels  la  républi- 
que est  en  guerre.  En  conséquence ,  il  est  expressément 
défendu  de  ne  plus  prendre  de  papier  sur  Tétraoger,  sans 
avoir  justifié  à  la  commission  de  remploi  de  ces  fonds, 
•  Signé  Raisson  ,  pr indent  de  la  comwUïïUnu  t 

Que  la  perte  sur  les  marchandises,  que  la  mal- 
veillance a  fait  éprouver  aux  négociants,  par  le  pil* 
lage,  dans  les  grandes  communes,  en  février  1798 
(vieux  style),  soitréparée  d'après  l'état  et  les  procès- 
verbaux  en  forme,  qui  ont  été  dressés  dans  le  temps, 
et  qui  seront  vérifia. 


4M 


Que  des  eneonragements  soient  lecordës  ani  ci- 
toyens qui  feront  venir,  sûr  nos  bâtiments,  des  sa- 
laisons, des  riz,  des  farines  et  des  grains  pris  chez 
1*^tranger;qne  le  commerçant  soit  encouragé  au- 
trement que  par  des  paroles. 

Que  le  gouvernement,  fidèle  à  ses  engagements, 
ne  retarde  jamais  d'un  instant  ses  payements  à  l'é- 
gard du  négociant  français  ou  étranger,  alors  vous 
verrez  Fabondance  renaître  ;  mais  si,  comme  on  en 
a  usé  dans  la  Belgique  et  pays  conquis,  on  établit  le 
fatal  maximum  dans  la  Hollande  ;  si  tout  commer- 
çant français  bien  famé  ne  peut  obtenir  de  passeports 
sans  avoir  essuyé  toutes  les  chicanes  et  les  retarde- 
roents  possibles;  si,  arrivé  dans  ce  pays,  il  ne  peut 
y  voyager  librement,  y  acheter  ce  dont  il  a  besoin, 
ou  qu'après  avoir  acheté,  une  autorité  quelconque 
frappe  de  réquisition,  de  maximuna  ce  qu'il  a  acheté, 
s'il  éprouve  des  dilhcultés  pour  la  sortie  du  pays  et 
l'introduction  en  France  (quoiqu'il  paie  les  droits), 
c'en  est  fait,  nous  ne  tireron»  aucun  avantage  géné- 
ral de  la  Hollande  ;  seulement  quelques  particuliers 
favorisés,  quelques  intrigants  toujours  soudoyés,  et 
toujours  soudoyant,  déprédateurs  nés  de  toute  for- 
tune publique,  s'enrichiront  seuls  avec  la  certitude 
de  l'impunité  ;  car,  et  ici  je  ne  puis  m'empêcher  de 
vous  le  répéter,  malgré  les  lois  existantes,  vous 
n'exigez  aucun  compte  de  la  fortune  des  adminis- 
trateurs ou  employés  qui  ont  géré  pour  la  républi- 
que, pas  même  lorsqu'ils  sont  démissionnaires,  sus- 
pendus ou  destitués. 

Que  résulte-t-il  de  cette  insouciance?  qu'après  six 
mois  ou  un  an  au  plus  d'exercice,  chaque  directeur, 
chaque  chef,  chaque  employé  d'une  grande  adminis- 
tration est  content  d'un  changement  que  souvent 
lui-même  provoque  ou  fait  nattre  ,  parce  qu'il 
échappe  par  là  à  l'œil  vigilant  d'un  gouvernement 
bien  organisé,  et  s'en  va,  loin  du  pays  où  il  a  fait 
fortune,  jouir  en  paix  du  fruit  de  ses  rapines. 

Donnons  nous-mêmes  à  ces  administrateurs,  à 
ces  employés,  à  ces  agents  qui  manient  la  fortune 
publique,donnons-leur,  citoyens  collègues,  Texem- 
pie,  en  donnant  l'état  de  nos  fortunes;  les  décrets 
nous  en  font  à  nous-mêmes  la  loi  ;  l'honneur  nous  le 
commande,  et  le  peuple  français  l'attend  de  nous. 

En  vous  demandant  ainsi  la  suppression  de  tant 
d'administrations  et  commissions  ,  j'entends  déjà 
qu'on  me  dit  :  Qui  pourvoira  nos  armées?  Je  ré- 
ponds :  Qui  ?  des  fournisseurs  auxquels  vous  adju- 
gerez des  entreprises  pour  leur  compte,  sur  adjudi- 
cation proclamée,  publique  et  au  rabais;  des 
entrepreneurs  nue  vous  ne  recevrez  qu'autant  qu'ils 

i'oniront  d'une  bonne  réputation,  et  que  leur  solva- 
)ililé,  autant  queleur  intelligence,  assurera  la  réus- 
site de  vos  fournitures  et  de  leurs  entreprises;  ce 
moyen,  celui  de  tous  les  peuples,  de  tous  les  eonver- 
nements  bien  réglés ,  vous  débarrassera  de  cette 
nuée  d'administrateurs,  directeurs,  chefs  et  commis 
de  bureaux,  qui,  n'ayant  aucun  intérêt  personnel 
ou  direct  à  la  chose  publique,  s'embarrassent  peu 
de  sa  réussite.  Et  qu'on  ne  me  dise  pas  qu'il  en  coû- 
tera plus  de  cette  manière  qu'autrement  ;  non,  ci- 
toyens, et  il  faut  vous  le  dire  avec  franchise,  et  ce 
que  je  vais  dire  s'applique  et  se  pratique  dans  tous 
les  gouvernements. 

Les  négociants  ont  appris,  dans  tous  les  pays  du 
monde  connus,  à  ne  jamais  traiter  avec  aucun  gou- 
vernement qu'avec  les  plus  grandes  précautions  ;  si 
quelquefois  ils  se  sont  engagés  à  le  faire,  c'est  tou- 
jours avec  des  conditions  si  onéreuses,  que  tout 
gouvernement  bien  réglé  préfère  de  traiter  lui- 
même  par  la  voie  d'entreprise  à  forfait,  parce  que  par 
cetengagcmcnt, lorsqu'il  est  synallagmatique, toutes 
les  parties  sont  intéressées  à  son  exécution,  au  lieu 


t 


que  tonte  antre  voie  laisse  toujours  à  la  partie  hl* 
ble  (le  fournisseur)  le  droit  de  se  plaindre  du  gou- 
vernement ;  et  la  vraisemblance  est  qu'il  le  fait  avec 
justice,  parce  qu'il  est  si  commun  de  voir  ceux  qui 
ont  le  pouvoir  en  abuser,  qu'on  dit  toujours  qu'ils  ont 
bu  dans  la  coupe  empoisonnée,  parce  qu'ils  sont 
maîtres,  quand  il  n'y  a  pas  avec  eux  de  conditions 
écrites,  de  conditions  nettes;  que  le  marchand  est 
leur  dupe,  parce  qu'alors  les  formes  lentes,  difficiles, 
rebutantes  qu'ils  exigent  avant  le  payement,  les  chi- 
canes que  leurs  agents  leur  font  éprouver  dans  la 
réception  des  marchandises,  la  dureté  avec  laquelle 
ces  mêmes  agents  reçoivent  ces  négociants,  les  dé- 
goûtent tellement,  quand  il  n'y  a  pas  de  marché 
écrit,  avec  des  échantillons  reçus,  que  le  commer- 
çant se  trouve  réduit,  ou  à  ne  point  traiter,  ou,  s*il 
est  forcé  de  le  faire,  il  quitte  les  affaires  s'il  est  probe, 
plutôt  que  se  soumettre  à  tant  d'avanies ,  l'abus  da 
pouvoir  pouvant  le  précipiter  dans  une  ruine  en* 
tière,  à  moins  qu'il  ne  consente  à  prendre  pour 
croupiers,  pour  adjoints  ou  associés,  les  agents  sub- 
alternes des  administrations.  Et  n'est-ce  pas  ce  que  . 
nous  voyons  chaque  jour,  lorsqu'aujourd'hui  c'est  un 
garçon  perruquier,  un  domestique,  une  femme  de 
spectacle,  qui  vendent  les  fers,  les  acien,  les  toiles, 
les  draps,  les  cuirs  que  le  gouvernement  a  mis  en 
réquisition  pour  les  besoins  présumés,  et  qu'il  n*a 
payés  qu'au  maximum,  lorsque  tous  ses  agents  sub* 
alternes  inconnus,  devenus  propriétaires  de  mar- 
chandises qu'ils  ne  connaissent  pas  même,  vendent 
au  double  de  leur  valeur,  huit  jours  après  livraison|| 
les  marchandises  de  réquisition  que  le  fabricant  où 
négociant  de  chez  qui  elles  ont  été  enlevées,  à  la 
douleur  de  voir  revendre  sous  ses  yeux?  Le  mono- 
pole a  été  si  général  et  si  public,  que  le  droit  de 
mettre  en  réquisition  des  marchandises  de  telle  ou 
telle  fabrique  se  vendait,  il  y  a  six  mois,  presque  pu- 
bliquement au  Palais-Eçalité  ;  l'abus  en  était  si 
grand,  que  ce  droit  se  rétrocédait  à  dès  conditions 
plus  ou  moins  favorables ,  selon  la  faculté  et  le  be- 
soin plus  ou  moins  grand  des  acquéreurs. 

Ces  faits  trop  connus ,  trop  souvent  pratiqués 
dans  tous  les  gouvernements,  ont  toujours  empêché 

aue  les  négociants  ne  traitassent  avec  aucun  agent 
'une  autorité  telle  qu'elle  soit. 

Aujourd'hui  que  je  vous  parle  ,  des  négociants 
m'ont  chargé  d'un  mémoire  contre  celle  odieuse 
vexation  des  réquisitions,  malgré  tous  les  décrets  ré- 
cents que  vous  avez  rendus  pour  arrêter  ces  brigan- 
dages. 

Quelle  différence,  au  contraire,  lorsque  le  négo- 
ciant traite  avec  un  autre  négociant!  En  deux  mots, 
c'est  une  affaire  faite  ou  manquée;  point  d'intermé- 
diaire, point  d'embarras  sur  la  nature  et  les  formes 
des  payements;  tout  se  passe  de  gré  à  gré,  parce 
qu'aucun  des  deux  n'ayant  de  pouvoir  sur  l'autre, 
chacun  s'estime  heureux  de  ses  liaisons  et  de  ses  re- 
lations réciproques:  aussi,  depuis  quatre  mois  que  le 
commerce  a  un  peu  plus  de  liberté ,  voyons-nous 
déjà  des  négociants  vendre  du  riz  à  25  sous  à  meil- 
leur compte  que  la  commission  ;  je  puis  citer  en 
preuve  la  convention  faite  a  25  sous  la  livre  de  riz, 
il  y  a  un  mois,  au  citoyen  Bastide,  pour  la  commune 
de  Nancy,  lorsque  la  commission  entend  en  être 
payée  depuis  plus  de  six  mois,  à  raison  de  50  sous; 
ainsi  des  autres  objets. 

Sou  venons- nous,  citoyens  collègues,  que,  pour 
avoir  l'abondance,  il  faut  que'jamais  le  gouverne- 
ment ne  se  mêle  du  commerce  directement  ou  indi- 
rectement, qu'il  punisse  sévèrement  ceux  de  ses 
agenb  qui  se  permettraient  de  l'entraver  ;  qu'il  ac- 
cueille les  étrangers  qui  lui  apportent  des  marchan- 
dises ;  qu'il  soit  scupuleusement  fidèle  aux  enga  - 


440 


gements  ;  c*est  par  là  qu*U  fera  naître  Tbeureuse 
concurrence  et  le  désir  de  nous  fournir  des  marchan- 
disesque  chacun  craint  d'apporter,  par  les  vexations 
tyranniquesque  beaucoup  ont  éprouvées,  soit  étran- 
gers ou  Français,  (^ue  la  trésorerie  nationale  ne  soit 
plus  autorisée  à  faire  passer  nos  lingots  chez  l'étran- 
ger pour  nos  relations  commerciales  ;  que  ces  lingots 
soient  convertis  en  monnaie  républicaine  ;  que  les 
citoyens,  que  l'étranger  apprennent  à  la  connaître 
cette  monnaie  qui  fait  le  desespoir  des  rois  coalisés. 
N'est-il  pas  honteux  que  presque  aucun  citoyen  ne 
commerce  en  écus  républicains!  Citoyens!  c'est  par 
le  signe  monétaire  qu'on  familiarise,  qu'on  attache 
le  citoyen  au  gouvernement;  et  comme. si  nos  an- 
ciens gouvernants  eussent  craint  de  propager  notre 
monnaie  républicaine  chez  l'étranger  ou  chez  les 
citoyens,  on  a  cessé  d'en  fabriquer,  et  on  paie  en 
liniçôts. 

Si  vous  ne  prenez  pas  ces  sages  mesures  dans  la 
Hollande,  vous  pouvez  avoir  pour  le  moment  une 
partie  des  richesses  commerciales  qui  seront  encore 
dilapidées  par  vos  agents;  mais  je  vous  prédis  que 
déjà  le  bâtiment  hollandais,  chargé  des  marchan- 
dises pour  son  pays,  fuira  loin  d'une  contrée  où  la 
loi  du  maximum,  des  réquisitions,  des  enlèvements 
forcés  des  marchandises  aura  lieu  ;  et  dans  six  mois 
ce  pays  si  riche,  dépourvu,  n'oflrira  plus  à  vos  yeux 
et  à  vos  besoins  que  le  regret  de  n'avoir  pas  su  pro^ 
fiter  de  tant  d'avantages  justement  acquis  parla  bra- 
voure de  vos  troupes,  et  perdus  à  jamais  par  Timpé- 
ritie,  la  malveillance  et  l'esprit  de  rapine  de  vos 
«gents  civils. 

Pour  parvenir  au  but  désiré  de  rétablir  la  con« 
fiance  et  le  commerce,  et  encourager  les  négociants 
qui  voudraient  traGquer  dans  la  Hollande  et  autres 

Eays  conquis,  je  soumets  à  vos  comités  de  salut  pu- 
lie,  de  commerce  et  des  finances,  rcuuis,  le  projet 
de  décret  suivant: 

«  La  Conveotion  nationale  décrète  : 

«  4*  Tout  négociant  qui  voudra  commercer  dans  la  Hol- 
lande et  autres  pays  conquis  sera  libre  de  le  faire,  etn*auia 
besoin  que  d'un  passeport  de  la  commune  du  lieu  de  son 
domicile ,  au  mo>en  duquel  il  ne  pourra  être  inquiété 
dans  ses  achats,  par  aucune  aulorité  constituée,  non  plus 
que  par  les  représentants  du  peuple  en  mission. 

•  2*  Tout  arrêté,  soit  des  comités  de  gouvernement, 
soit  des  représentants  du  peuple  en  mission  ,  qui  ten- 
drait à  resteindre  Tenlière  liberté  que  la  Convention  na- 
tionale entend  être  accordée  au  commerce  dausTiiitérieur 
de  la  république  ou  dans  les  pays  conquis,  est  rapporté. 

«  3*  Les  directeurs,  commis  ou  eroployèiaux  douanes 
ou  sur  les  ports  (les  droits  des  marchandises  acquittés) 
n*apporteront  aucun  retard  à  la  libre  entrée  des  man  liun- 
disis  en  France,  à  peine,  pour  la  première  fois,  d'une 
amende  qui  ne  pourra  être  moins  de  4,000  liv»,  et  qui  ne 
pourra  eicéder  6,000  liv»;  de  destitution  en  cas  deré- 
ridive. 

«  4*  Les  juges  de  paix  de  commune  et  les  autorités  con- 
stituées, les  représentants  do  peupleen  mission  sont  tenus 
de  prononcer,  dans  les  viugi-quatrc  heures,  sur  tous  dif- 
férends de  commerce  qui  surviendraient  entre  négociants 
pour  achats,  au  M>rtir  de  marcbandises  des  pays  conquis 
pour  entrer  en  France. 

■  5*  Le  maximum  sur  toute  espèce  de  marchandise  ou 
denrée  est  levé  dans  tous  les  pays  conquis  par  les  armées 
françaises  ;  les  réquisitions  qui  sont  faites  pour  le  compte 
des  armées  de  la  république  seront  exécutées  ;  et  sMI  n'y 
a  pas  démarché  sinifile  par  écrit,  elles  seront  payées  an 
prix  du  cours  lors  de  la  livraison;  les  agenb  justifieront  de 
remploi,  pour  les  armées,  des  marchandises  ainsi  requises. 

•  6*  Il  ne  pourra  se  faire  aucune  nouvelle  réquisition; 
mais  les  agents  et  fournisseurs  pour  les  approvisionnements 
des  armées  feront  librement  leurs  achats^  et  de  gréi  gré 
avec  les  propriétaires,  jusqu'à  ce  qu'il  ait  été  statué  sur  le 
sort  de  la  commissioo  de  commerce. 


c  7*  Les  comitéi  4e  lalot  publie»  4t  la  guerre  et  des 
charrois  militaires,  sont  chargés  de  mettre  en  adjudicatioo 
publique  et  au  rabais  toutes  les  fournitures  des  années. 

•  8*  Tout  citoyen  connu  sera  reçu  à  œs  adjudications  | 
8^1  obtient  une  partie  de  fourniture ,  il  sera  tenu  de  justi- 
fier d'une  solvabilité  qui  puisse  faire  présumer  au  gouvei^ 
nement  qu*il  remplira  son  engagement  ;  il  fouraim  en  ou- 
tre une  caution  solvable  et  connue. 

•  9*  Aussitôt  que  les  adjudications  des  foumitores  pour 
les  armées  seront  adjugées,  la  commission  decommerae 
etapprovisionnemenis  sera  supprimée  ;  les  administrateurs, 
les  chefs  de  bureaux,  les  préposés  aux  achats  de  commis- 
sion rendront  aussitôt  le  compte  de  leur  gestion  ;  ils  y 
joindront  celui  de  la  fortune  qu'ils  avaient  en  entrant  dans 
cette  partie  d'administration ,  et  celui  de  celle  qui  leur 
reste. 

•  40*  Le  cabotage  est  parfaitement  libre  :  tout  proprié- 
taire de  bâtiments  français  peut  se  livrer  in  ce  commerce.  Il 
naviguera  sans  empêchement  d'un  porta  l'autre,  en  ol>* 
servant,  au  départ  et  à  l'entrée  dans  un  port  ou  rade,  de 
se  conformer  aux  lois  du  pays. 

«14*  Les  chambres  d'assurance  sont  invitéesàie  former, 
et  à  assurer  par  leur  crédit ,  moyens  et  correspondance , 
tout  chargement  non  prohibé  par  les  lois  d'un  port  à  l*ao- 
tre  ou  chez  les  nations  neutres. 

•  42*  L'arrêté  du ,  qui  a  ordonné  aux  propriétaires 

hi  remise  de  leurs  effets  sur  l'étranger  à  la  trésorerie ,  est 
annulé;  les  effets  qui  n'auraient  pas  été  envoyés  seront 
rendus  aux  propriétaires;  ceux  qui  le  seraient,  et  dont  la 
valeur  n'aurait  pas  été  payée ,  seront  remboursés  sur-le- 
champ,  ou  à  leur  échéance,  si  elle  n'est  pas  encore  arrivée. 

•  45*  Les  communes  dans  lesquelles  sont  arrivés  des 
pillages  chei  les  marchands ,  et  dont  il  iun  été  dans  le 
temps  dressé  des  procès-verbaux  en  bonne  forme,  les  en* 
verront  au  comité  de  commerce  de  la  Convention  natio* 
nale,  qui,  sur  le  rapport  qui  leur  en  sera  fait,  statuera  sur 
le  mode  d'indemnité  à  accorder  aux  conmerçhnls  qu'une 
réputation  de  probité  1 1  de  délicatesse  soutenue  dans  leurs 
affaires,  jointe  à  la  médiocrité  de  leur  fortune,  mettrait 
dans  le  cas  de  recevoir  une  juste  indemnité  de  la  perle 
qu'ils  ont  éprouvée. 

§44*  Chaque  commune,  dans  toute  la  république ,  avi* 
aéra,  par  elle-même  et  avec  ses  ressources,  à  pourvoir  à 
ses  subsistances.  Le  gouvernement  n'entend  en  aucune 
façon  s'immiscer  dans  aucune  opération  de  commerce, 
mais  seulement  donner  force  à  Texécutioii  des  lois,  et  de 
celles  qu'une  bonne  police  exige  dans  les  grandes  com* 
ilounes  pour  le  maintien  du  prix  des  denrées  de  premièi« 
nécessité  à  un  prix  qui  ne  soit  ni  excessif,  ni  arbitraire» 
comparé  à  la  journée  de  travail.  • 

(  La  êuite  dewMm,  ) 

yV.  B.  Dans  ta  séance  du  34  ,  la  Convention  a  repris  la 
discussion  sur  la  question  de  savoir  s'il  serait  aivoyé  des 
représentants  du  peuple  dans  les  colonies;  elle  sera  déci- 
dée demain  ,  à  deux  heures,  par  ap|)ei  nominal. 

Le  comité  de  saint  public  a  annoncé  la  prise  de  la  place 
de  Rosas  par  l'armée  des  Pyrénées-Orientales,  et  la  ren- 
trée de  notre  armée  navale  de  TOcéan ,  après  trente-qua- 
tre jours  de  croisière,  et  après  avoir  pris  soixante-dix  bâti- 
ments ennemis  et  doute  à  quinte  cents  matelots.  Trois  de 
nos  vaisseaux,  déjà  vieux ,  n'ont  pu  résister  au  gros  temps, 
et  ont  coulé  bas  ;  on  a  sauvé  l'équipage  et  tout  ce  qui  était 
fransportable.  Cette  perte  sera  bientôt  réparée  par  les  nom- 
breux vaisseaux  qui  sont  en  construction.  Trois  autres  ont 
été  endommagés;  deux  sont  déjà  en  sûreté  «  et  le  troiâème 
est  environné  de  tous  les  secours  possibles. 

Aux  prises  faites  par  notre  armée  les  autres  vaisseaux  de 
la  république  en  ont  ajouté  d'autres.  Le  total  de  celles 
que  nous  avons  faites,  depuis  le  il  nivôse,  est  de  cent 
vingt-huitl 

Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 
miers mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscriptions  au  (jraiid  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères 
est  de  huit  mois  vingt  et  uu  jours  de  l'année  1793  (vieux 
style). 


GAZETTE  NATIOMLE  oo  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

« 

N*  146.         Sextidi  ^6  Pluviôse,  fan  3e.  {Samedi  14  Févbieb  1795,  vieux  style). 


POLITIQUE. 

TURQUIE. 

ConiianiinopUf  le  15  décembre.  —  La  nouvelle  des 
raccès  prodigieux  de  la  république  française  a  augmenté 
ostensibleineDt  la  considération  dont  jouissent  ses  agents 
auprès  de  la  cour  ottomane. 

—  Les  ministres  de  la  coalition  se  sont  plaints  au  divan 
de  la  visite  que  des  frégates  françaises,  placées  à  rentrée 
des  Dardanelles,  font  des  bâtiments  qu'elles  jugent  suspects. 
Ils  n*ont  obtenu  du  divan  aucune  réponse. 

—  La  Porte  a  mis  sous  sa  protection  spéciale  les  agents 
polonais  envoyés  à  Constantinople  pendant  la  dernière  ré- 
volution. Elle  a  été  inrormée  que  les  ministres  de  la  coali- 
tion se  disposent  à  les  persécuter. 

—  Le  divan  est  décidé  à  mettre  sur  pied  une  armée  con- 
sidérable  et  abondamment  pourvue demunilions  deguerre; 
elle  sera  commandée  par  un  séraskier  ou  général  en  chef, 
et  s*assemblera  près  d*IsmaIlow.  Cette  place  est  devenue, 
par  1rs  Tortifications  qui  viennent  d*y  être  ajoutées,  une 
des  plus  fortes  de  Tempire  turc.  Oo  y  a  envoyé  de  nom- 
iM-euses  divisions  d*artilleurs« 

—  Les  agents  des  cours  coalisées  s'occupent  entre  eux 
h  pénétrer  les  sentimenu  et  les  projets  de  la  Porte. 

ALLEMAGNE. 

Heidelberçt  le  ZO  Janvier.  —  Le  quartier  général  de 
Tannée  autrichienne  doit  être  rétabli  dans  cette  ville.  On 
dit  que  Tannée  sera  disposée  en  grand  ordre  de  bataille. 
Le  corps  de  Coudé  y  sera  employé  au  centre.  Le  général 
Mêlas  est  fixé  à  Dourladij  et  aura  sous  ses  ordres  le  gé^ 
néral  niaior  Cobourg. 

—  L*arcbiduc  Charles  est  parti  pour  se  rendre  à  Vienne. 

—  Le  général  Clairfay  t  a  transféré  son  quartier  général 
à  Merheim.  Le  général  Kray,  qui  commande  les  avaol- 
postes,  est  àMulheim,  avec  environ  deux  mille  hommes. 

Toute  la  rive  droite  du  Rhin,  depuis  Limbourg  sur  la 
Lahn  jusqu'à  Ousseldorf,  où  se  trouvent  les  Autrichiens, 
éprouve  la  détresse  la  plus  affreuse.  Les  habitants,  ruinés, 
accablés  de  misère,  se  retirent  dans  rintérieur  derAllc- 
magne. 

— >  On  annonce  que  Tarmée  prussienne,  aux  ordres  du 
général  MoIiendorlT,  s'est  repliée  sur  Francfort,  laissant 
aux  Autrichiens  le  soin  de  dérendre  Mayence.  Il  est  arrivé 
à  ces  derniers  un  renfort  de  dix  mille  hommes,  venant  de 
la  Gallicie,  de  la  Bohème  et  de  l'Autriche. 

—  La  cour  de  Vienne  tire  des  États  héréditaires  un  gtand 
nombre  de  recrues,  de  chevaux  de  remonte  et  de  muni- 
tions de  guerre.  11  parait  qu'elle  enverra  sur  les  bords  du 
Rhin  les  troupes  qui  viennent  de  servir  en  Pologne  sous 
les  ordres  du  général  d'Hamoucourt. 

ITALIE. 

Génet^  te  i*'  fifvrier,  —  L'escadre  anglaise  aux  ordres 
de  l'amiral  Hotham  a  repris  sa  croisière.  Elle  a  rencontré 
dernièrement  trois  frégates  françaises  venant  de  Tunis  avec 
un  convoi  de  bâtiments  de  conmierce.  Les  Anglais  ont  fait 
force  de  voiles  pour  leur  donner  la  chasse;  mais,  étant 
sous  le  vent,  ils  n'ont  pu  les  joindre. 

»  On  assure  que  le  général  autrichien  de  Wins  doit 
quitter  Vienne  pour  reprendre  eu  Italie  le  commandement 
de  trente  mille  hommes. 

Les  Piémontais  ont  formé  des  cordons  de  milices  dans 
les  lieux  les  plus  exposés.  Il  y  a  douze  mille  hommes  à  Ceva 
et  dans  les  environs  ;  huit  mille  sont  répartis  du  cdté  de 
Mondovi.  Il  y  a  en  outre  des  Croates  et  des  Piémontais  à 
Coriemiglia* 

HOLLANDE. 

Extrait  d'une  lettre  particulière  d'Utrecht^  du  2B  jan- 
vier. — >  •  Le  26  de  ce  mois  «  les  citoyens  de  cette  ville,  lé- 
galement assemblés,  ont  déclaré  les  anciens  magistrats 
déchus  de  leurs  lonctions,  et  nommé  une  nouvelle  muni- 

•  Série. -^  Tome^, 


cipalité.  Le  citoyen  Renesse  a  été  nommé  maire,  et  trente- 
neuf  autres  membres  composeront  le  conseil  municipal. 

1  Cette  réforme  a  préparé  les  voies  pour  opérer  une  ré- 
volution dans  la  constitution  absurde  des  états  de  celte 
province. 

•  On  sait  que,  par  une  bizarrerie  ridicule,  les  trois  or- 
dres, clergé,  noblesse  et  tiers-état,  y  étaient  représentés. 

•  Le  clergé  était  composé  des  titulaires  de  prébendes  ca- 
nonicales,  qui  étaient  attachées  à  cinq  chapitres,  dontlet 
noms  et  les  revenus  étaient  conservés. 

«  Aujourd'hui  le  peuple  de  la  province  a  envoyé  des 
commissaires  à  l'assemblée  de  ces  états,  et  a  déclaré,  d'a- 
près les  principes  de  l'égalité,  ne  plus  reconnaître  ni  dis- 
tinction d'ordres,  ni  collèges  privilégiés.  En  conséquence, 
il  a  aboli  la  représentation  du  premier  et  du  second  ordre 
des  états,  et  les  seuls  députés  des  villes ,  ainsi  que  ceux  du 
plat  pays,  composeront  dorénavant  les  états,  de  cette  pro- 
vince. Les  anciens  membres  ont  quitté  la  salle  sans  la 
moindre  opposition;  ils  ont  remis  aux  nouveaux  députés 
les  registres,  papiers  et  documents  qui  demandent  une 
prompte  exécution.  Le  tout  s'est  passé  sans  le  moindre  dés- 
ordre; les  nouveaux  représentants  de  cette  province  ont 
continué  immédiatement  leurs  délibérations.  • 

Extrait  des  nouvelles  de  La  Haye ,  du  81  janvier.  —  Il 
a  été  arrêté  dans  la  première  séance  des  représentants  du 
peuple  de  Hollande  qu'on  voterait  par  tète.  On  décréta  en- 
suite que  dorénavant  chacun  aui^it  le  droit  de  chasse  sur 
ses  propres  terres,  et  la  pèche  dans  les  eaux  dépendant 
de  son  domaine. 

-^Plusieurs  députés  d'autres  Tilles  ont  comparu  à  l'as- 
semblée des  représentants  dès  la  seconde  et  troisième 
séance,  et  ils  ont  été  admis  après  la  vérification  de  leura 
pouvoirs. 

~  On  a  lu  un  mémoire  détaillé,  rédigé  en  français  par 
les  citoyens  Lestcvenon  et  Van  Leyden,  contenant  les  mo- 
tifs qui  ont  engagé  les  Bataves  à  se  constituer  de  la  manière 
qu'ils  l'ont  fuit,  et  propre  i  éclairer  les  représentants  du 
peuple  français  sur  les  principes  et  les  vues  politiques  de 
notre  assemblée  représentative. 

—  Le  même  jour  î9,  il  a  été  décrété  d'ôter  au  grand 
pensionnaire  Van  der  Spiegel  toutes  ses  charges,  et  nom- 
mément celle  de  garde  des  sceaux  »  sens  convenir  de  la  lé- 
galité de  sa  nomination. 

A  cet  effet ,  des  commissaires  ont  été  nommés  pour  reoe- 
voir  les  sceaux ,  les  chartes  et  les  registres. 

—  Les  députés  de  cette  province  à  l'assemblée  des  états 
généraux  ont  été  déclarés  non  tenus  à  l'instruction  de  1669, 
et  autorisés  à  concourir  aux  résolutions,  dans  les  affaires 
pressantes,  à  la  majorité  des  suffrages. 

—  Les  quatre  premiers  membres  du  comité  de  salut  pu- 
blic ont  été  autorisés  &  assister  &  l'assemblée  des  états  gé- 
néraux. 

—  La  publication  solennelle  de  !a  constitution  provi- 
soire de  Hollande  doit  se  faire  incessamment.  Les  armes 
du  ci-devant  stathouder  vont  être  ôtées  partout,  et  fa  fa- 
meuse porte  par  laquelle  lui  seul  avait  droit  de  passer  va 
être  ouverte  pour  tout  le  monde. 

—  Dorénavant  les  comités  s'assembleront  malin  et  soir, 
et  l'assemblée  des  représentants  s'ouvrira  k  deux  heures 
après  midi. 

—  Le  comité  militaire  s'occupe  sans  relâche  à  réprimer 
les  excès  des  troupes  stathoudériennes ,  ainsi  que  de  leur 
nouvelle  organisation  et  recomposition. 

—  Le  magistrat  de  La  Haye  a  été  autorisé  à  faire  dés* 
armer,  dans  les  vingt-quatre  heures,  ceux  qui  sont  connus 
dans  la  garde  bourgeoise  comme  ayant  commis  des  excès 
depuis  la  révolution  de  1787,  pour  prouver  leur  attache- 
ment au  ci-devant  tyran. 

-.-  L'avocat  G.  Van  der  Meerss  a  été  nommé  procureor 
général  de  la  cour  de  justice  à  la  place  de  Vosmar. 

—  Les  états  généraux  des  Provinces-Unies  ont  arrêté* 
dès  le  27  janvier,  la  proclamation  suivante  «  qui  vient  d*è- 
tre  rendue  publique  : 

f  Les  représentants  du  peuple  français ,  qui  se  trouvent 


66 


442 


en  ce  moment  d«Qf  cê  pijff ,  nous  ayant  communiqué  qu*!! 
serait  néoesialre  de  pourvoir  sur-ie^ehamp  lui  besoins  ur> 
gents  des  armées  françaises,  el  ayant  demandé  en  consé- 
quence la  lournJture  dU  objets  suivants  s 
«  Deui  cent  mille  quintaux  de  froment; 

•  Cinq  millions  de  boues  de  foin  de  quioie  UTrPtl 

•  Deux  cent  mille  boilei  de  paille  de  di»  livrosi 

%  Ciuq  millions  mesures  d*fvoiiH)  de  di«  livras  i  le  tout 
poids  de  marc, 

«  Cent  cinquante  mille  paires  de  souliers; 
«  Viugt  mille  nairei  de  bottes i 
«  Vingt  mille  babiu  et  vestes  de  drapt 
%  Quarante  mille  culoties  tricoUées  ; 

•  lient  cinquante  mille  panUloosdfltoUei 

•  Deux  cent  mille  cbemiies  i 

•  Cinquante  nulle  chapeauxt 

•  Le  tout  à  fournir  à  Doii«le^DuGt  k  Tbiel  ei  à  Ntm{«iie, 
tu  trois  livraisons,  dans  Tespace  d*uo  moisi 

•  Et t  en  outre,  douie  mille  Inbu(s  dans  Tcspaoe  de  deux 


•  Que  ces  représeut^nls»  au  lieu  de  fuira  fournir  eux- 
méme»  ces  différeois  o^jeU  par  des  réquisitions  et  des  ap- 
préhensions usitées  dans  Ivs  pa)M  conquis»  voulant  traiter 
cette  république  d'une  manière  diffét  enu  et  lui  donner  des 
preuves  des  disposiiions  de  la  nation  françaiK  à  considé- 
rer les  Provinces-Unies  comme  une  alliée  future  de  la  ré- 
publique française,  ils  invitant  eO  eunséquenée  les  étals 
généraux  de  pourvoir  par  eux«inémes  ^  ces  besoins»  en 
ajoutant  que  le  pajemeiit  de  ces  objets  se  fera  craprès  des 
arrangemciiis  ultérieurs  qu*on  prendra  avec  le  gouverne- 
ment national; 

•  Nous  avons  cm  que  le  moyen  le  plus  prompt,  le  plus 
sûr  et  le  moins  onéreux  pour  sali^^faire  &  ces  demandes  se- 
rait de  fdlre  une  adjudication  publique ,  au  rahals^  de  ces 
différentes  fournitures,  et  que  les  deniers  nécessaires  se- 
raient niumis  par  les  provinces  respectives, 

1  Nous  ne  doutons  pas  de  la  bonne  disposition  des  habi- 
tants pour  mettre  les  magistrats  provincinux  à  mCme  de 
fournir  les  sommes  nécessaires  pour  le  pavement  Immédiat 
de  ces  objets,  tout  retard  pouvant  être  d  une  couséquence 
très-fâcheuse. 

■  Nous  croyons  qu*ll  sera  nécessaire  que  tous  ceux  qui 
possèdent  ces  différents  objets  susnommés,  en  tout  ou  en 
partie,  s'empressent  de  les  fournir  au  prix  qui  sera  dxé  par 
dis  experts,  entre  les  mains  de  ceux  qui  seront  chargés  de 
celte  opération,  comme  aus$i  de  prêter  toute  assistance 
pour  que  le  transport  de  ces  effets  et  dcurée9^se  ftsse  vers 
les  endroits  indiqués  ci-dessus,  etc«  • 

PAÏS-fiAS. 

Bruxetteii  te  àl  pluviôse.  -^Brlcf,  rcpr^entonl  du 
people  près  les  armées  do  Nord  et  de  Sambre-rt-Mru^e , 
Tient  d'adresser  la  lettre  suivante  à  son  collègue  Merlin 
(de  Douai),  &  Paris. 

•  II  nous  manquait  la  Zélande,  mon  cher  amii  pour 
avoir  la  totalité  des  sept  Provinces-Unies.  Je  viens  de  re- 
c.voir  la  nouvelle  oQicielle  que  nos  troupes  en  ont  pris 
P'issession  aujourd'hui,  et  ^uVlles  sont  entrées  à  Middel- 
bjurg  et  k  Flessingua.  Ainsi  voil4  tous  nos  désirs  remplit. 

c  BaiBZ«  9 
Pour  copie  conforme  :  Maatift  ld$  Douai), 

Du  18.  — L*armée  de  Sambre-et-Mcuse,  commandée 
par  le  général  Jourdan,  s'e^  mise  en  mouvement,  sans 
uue  Ton  puisse  deviner  au  juste  ses  desseins  ;  dviin  le  quar- 
tier général  a  quitté  Maëstricht  pour  élre  transféré  à  Cre- 
velt.Tousles  cantonnements  qui  garnissent  la  rive  du  Rhin, 
à  droite  et  ù  gauche  de  Cologne,  viennent  d*étre  renforces 
considérablement ,  ce  qui  annonce,  ou  que  Ton  se  tient  en 
mesure  contre  Pennemi.  ou  bien,  ce  qui  est  plus  croya- 
ble, que  des  forces  considérables  passeront  le  Rhin ,  aOn 
d*alier  prendre  Rlayénce  par  derrière  el  de  compléter  le 
blocus  de  ce  boulevard  de  rfimpire.  Par  cette  manceuvre 
brillante ,  la  Jonction  de  l*armée  de  Sambre-et-Meuse  avec 
celle  du  Rhin,  en  s*effectuant,  déconcerterait  les  projets 
4e  la  coalition. 

tes  représentants  do  penpVe  ont  prifi  nn  an  été,  qui  porte 
que  chaque  jour  un  courrier  sera  eipédié  d'Ici  pour  lu  Ho  1 


lande ,  et  sera  chargé  du  scnioe  de  Tareiée  et  des  partico» 

liers. 

•^  Le  géjiéral  français  qui  commandele  blocus  de  Luxem- 
bourg a  envoyé  au  commandant  autrichien  une  sommation 
portant  en  substance  :  •  Que  des  vues  d'bumanilé  renga- 
geaient à  lui  proposer  de  remettre  la  place,  puisqu'il  ne 
pouvait  espérer  de  secours  ;  que  par  ce  moven  on  éviterait 
l'fffusioD  du  sang  et  la  deilruotioo  de  la  demeure  des  ha- 
bitants. • 

Le  commandant  ootrlehim  a  répond»  avee  beatwoup  de 
politciso,  mais  négativeeseet. 


VARUTÉ9. 
jPtnasicet* 

La  pOMiîon  acluellc  de  nos  affairca  en  Anancei  est  la 
même  que  celle  où  nous  étions  aux  époques  des  58  mei 
1793  (vieux  style),  28  prairial  et  8  thermidor  de  Taunée 
seconde  pour  notre  liberté. 

Nous  avons,  par  l'énergie  de  la  Convention  nationale 
trop  longtemps  opprimée ,  recouvré  enûn  notre  libettéà 
l'époque  du  9  thermidor,  mais  nous  n'en  jouirons  vérita- 
blement que  lorsque  nous  pourrons  nous  appliquer  la  réa- 
lité d'une  pensée  sublime  renfermée  dans  «o  veit  d*un 
grand  poète  philosophe  : 

Cens  qoi  fans  des  tMttrMX  toal  les  vrala  ooBqnértntt. 

L'hypothèque  de  nos  a^^lgnats  est  certaine;  elle  est  as- 
sise sur  des  propriétés  d'une  valeur  réelle  et  indubitable; 
elle  est  cautionnée  par  la  loyauté  et  la  probité  du  peuple 
français,  par  l'intérêt  de  chaque  citoyen* 

En  nuances,  il  fbut  peu  parler,  peu  écrire,  mais  calcu- 
ler et  prouver;  et  jusqu'à  ce  Jour  on  a  absolument  fait  le 
contraire. 

At(*c  des  mots  vides  de  sens,  on  a  t né  lei  finances  et  dé- 
truit les  opérations  les  plus  utiles  à  la  chose  publique,  sous 
prétexte  qu'elles  pouvaient  favoriser  l'agiotage;  de  là  sont 
résultés  des  ptans  nouveaux  et  des  élabllssemenls  qui  ont 
détruit  la  confiance  publique,  enlevé  aux  négociants  la 
caution  active  de  leurs  spéculations  ;  de  là,  la  Suppression 
des  lettres  de  change,  1  âme  et  la  force  des  rapports,  des 
relations  commerciales  ;  de  là  est  résulté,  enfin,  une  stag- 
nation générale  dans  le  commerce, 
.  Il  fhnt  sortir  de  cet  état  d'esclavage,  non  par  des  opéra- 
tions d!aglotagc  que  des  plans  nouveaux  paraîtraient  appe- 
ler, mais  par  des  calculs  sérieusement  combinés  et  dingi's 
froidement  par  des  hommes  qui  soient  les  vrais  amis  el  les 
économes  du  bonheur  public. 

Le  comité  des  finances  de  la  Convention  nationale  est 
rempli  de  bonnes  intentions  ;  mais,  nécessairement  dis- 
trait par  des  occupations  Importjintes,  il  ne  peut  avoir  as- 
sn  de  temps  pour  embrasser  à  lui  seul  un  système  général 
d^amélloration  de  nos  finances. 

Trois  moyens  doivent  conduire  à  ce  but  i 

Le  premier,  l'établissement  d'un  gouvernement  cerf aiUf 
dont  toutes  les  brabrhes  soient  essentiellement  liées  au 
|}onluur  et  à  la  fortune  publique 

Le  second,  de  donner  ù  nos  finances  des  bases  fixe*;, 
tellement  ordonnées,  qn*il  ne  se  ftisse  lamaK  de  froisse- 
ment entre  les  finances  générâtes  de  le  ftpotflique  et  Celtes 
des  citoyens  qui  en  font  la  fbrce. 

La  troisième  enfin  apnelle  des  éot)nomtn  qnl  ne  Mlent 
Jamais  parcimonieuses;  il  appelle  aussi  IVtamen  le  plus 
prompt  et  le  plus  rigoureni  des  recettes  et  des  dépenses 
dans  tons  les  genres  ;  Il  faut  tnieer  eoire  ces  objets  une  li- 
gne de  démarra  lion. 

Il  paraîtrait  important  que  la  Contenlfun  nattonale  or- 
donnât la  formation  de  deux  csommfssions  composées  des 
hommes  les  plus  Instmlts  dans  les  prfndprs  de  réconorrh» 
polltlque.L'onedece9cmnfirisslon8recbercheraitle.<mote:is 
propres  à  consolider  les  llnances  ;  raufre  constaterait  les 
recettes  et  les  dépenses,  et  déterminerait  un  ordie  de  tra- 
vail simple,  naturel  et  économique» 

Chaque  commission  présenterait  le  résultat  de  son  tra- 
vail eu  cemllé  des  Inanees  *  la  dIscustiOA  aVu  ferait  en 
présence  de  tons  les  membres  réonis  des  denieommisolens 
respeeiites  i  lee  détela  leftleM  eueieBeM  reciieilliii  es- 


IIS 


fin,  te  comUé  des  floonees  présentéi^U  h  U  dticlisslou  de 
la  Convention  nationale  un  rapport  général  e(  détaillé,  dV 
prés  lequel  elle  ordonnerait  définitiveiuent  les  mesures  qui 
Inf  paroUral^nt  lêS  plus  propres  ft  fixer  la  eonûance  publl* 
que,  MM  laquelle  11  n'est  point  d*opéralions  duralier'. 

Signé  RoDtssABT, 


REPUBLIQUE   FRANÇAlSt. 
Comité  de  êalut  publie. 

Le  ôomîtë  de  salut  public,  considérant  que  la  fa- 
rine d*orge  et  de  scourgeon  s'amalgame  partaitemcht 
avec  celle  de  froment  arrâte  : 

Art.  1er.  Les  or^cs  et  scpurgeons  loni  mie  en  ré* 

3uisition  puur  la  Jabrioation  du  pain*  par  le  moyen 
e  rumalgamè  aveo  le  froment* 
H.  En  conséquence,  il  est  défendu  à  tout  braeieur 
de  faire  entrer  dans  la  fabrication  de  la  bière  les  or* 
gcs  et  scourgeons  propres  ù  la  fubrioation  du  tinini 

Jlh  Les  brasseurs  ne  pourront  faire  entrer  dans 
la  Âibricatiou  de  la  bière  que  les  orgea  el  icour* 
(^eons  qui  seront  constatés  i  par  un  procès-verbitl 
dressé  par  deux  coniiniii^aires  de  la  municipalité  du 
lieu  de  la  situation  de  leurs  braeeeriei)  ne  pouvoir 
servir  à  la  fabrication  du  pain*         ^ 

IV.  Les  contrevenants  aux  dispositions  ci-dessus 
seront  poursuivis,  conformément  aux  lois  portée! 
contre  ceux  qui  détruisent  les  grains  et  denrées  pro- 
pres à  la  nourriture  de  l'homnie. 

Le  présent  arrêté  sera  inséré  au  Bulletins  des  lois 
et  de  correspondance. 

Signé  lit  ihembree  du  eomiié  de  talui  publie. 


CONVENTION  NATIONàLB. 

Pritidcncê  de  Barra». 
^tJlTC  Dfi  LA  S^ANCe  DU  23  PtUVIOSfi. 

Plusieurs  mnnbres  demandent  l'ordre  du  Jour, 
attendu  que  des  lois  existent  déjà  siir  ces  différents 
objets. 

JoHANNOT  :  J*appule  c^'tte  proposition.  Là  Con* 
vention  s*est  prononcée  hiiutement  pour  Iti  réoctivitH 
du  commerce,  et  toute  In  Fronce  a  applaudi  A  ce  dé* 
oret  :  déjà  la  commission  de  comme*rée  f  st  suppH^ 
mée;  elle  n'est  plus  qu'une  commiMinn  d'AppfOVl^ 
sionnements  pour  nos  armées.  Bientôt  elle  rendh'i 
compte  à  ta  Convention  de  l'état  de  ses  emmagasiné- 
ments,des  réquisitions  qu'elle  a  rbites*  et  l'on  ren- 
dra à  la  olreulation  tout  ce  qui  ne  Seffi  pas  d'Utte  In- 
dispensable nécessité. 

Lecointre  vous  a  dit  que  le  gouTêrnêmént  aVâH 
mia  en  réquisition  le  papier  sur  Tétranginr.  Le  faU 
est  vrai  ;  mais  J'observe  qu'un  arrêté  pria  par  le 
comité  de  salut  public  «  il  y  a  quiflse  jours,  a  remis 
ce  papier  à  la  disposition  drs  propriétalfen.  LéCOlt^ 
tre  a  dit  encore  que  le  gouvernement  ffllsAlt  passer 
des  lingots  d'or  et  d'argent  à  l'étranger;  cela  m 
encore  vrai;  mais  toujours  Ils  ont  été  le  prU  du  gmln 
ou  des  denrées  de  première  Décesalté  que  nous 
avons  achetés  d'eux. 

Cambon  :  J'atteste  le  fait. 
PiLÊT  ;  Je  demande  la  parole  pour  \Xti  fcll.  Le- 
cointre  vous  a  demandé  avec  justice  fabro^atton  du 
maximum  établi  dans  les  payrconouil  :  je  déelan^ 
que  son  vœu  a  été  prévenu,  k  t'égaru  tféB  passeports 
qu'il  réclame  en  faveur  des  négociants  oué  les  affai- 
res de  leur  commerce  apptiieni  en  Hollande,  J'ob- 


serve â  la  Convention  qtt*it  e^  parvenu  au  éomité 
de  salut  public  plus  de  cinquante  mille  demandes  i 
ce  sujet  ;  mais  le  comité,  uistrult  nnr  l'expérience, 
et  craignant  de  voir  arriver  en  Hollande  ce  qui  était 
arrivé  dans  la  Belgique,  c*est»à  dire  qu'une  foule 
d'intrigants ,  d*agioteurs  n'y  courussent  pour  s'y 
nirichir  et  la  ruiner  sans  aucun  profit  pour  la  répu- 
blique, le  comité  s'y  est  refusé»  (On  applaudit.) 

A  chaque  instanti  au  reste,  citoyens,  nous  attcn* 
dons  ici  Pun  des  représentants  du  peuple  envoyés  en 
mission  en  Hollande.  Ils  nous  ont  promis  de  nous 
donner  des  renseignements  détaillés  à  ce  sujet.  Jus- 
inic-là,  citoyens,  le  comité  s'est  déterminé  à  suspen- 
dre la  délivrance  d'aucun  nasseport. 

La  Convention  passe  à  1  ordre  du  jour  sur  la  pro* 
l>osition  de  l«ecointre. 

Danjûu  ,  au  nom  du  comité  des  décrets  ^  archives 
etprocês-vcibaux  :  Lors  de  la  discussion  qu  entraîna, 
le  ti  de  ce  mois,  le  projet  de  vos  comités  de  salut 
public,  des  transport,  postes  e(  mes&ogeries,  et  des 
décrets,  procès-verbaux  el  archives, sur  la  réimpres- 
sion et  l'envoi  des  lois,  on  fit  la  proposition  de  sup- 
primer du  cahier  des  lois  le  collatiouné  qui  se  met  â 
la  suite  de  chaque  décret,  et  de  le  remplacer  par  UQ 
certificat  de  l'agence  responsable. 

Le  motif  de  celte  proposition  fut  réconoinie  évi- 
dente qui  se  trouve  à  su|)primer  la  répétition  do 
formules,  souvent  aussi  étendues  et  quelquefois 
même  plus  longues  que  le  texte  de  ta  loi  même. 

Quelque  louable  que  soit  cette  vue  coonomiauCi 
Il  ne  faut  pas  y  sacrifier  des  convcuanccs  d'nn 
ordre  supérieur»  et  peut-être  plus  intéressantes  en- 
core nar  la  suite  qu  elles  Ut  peuvent  le  paraître  au» 
jourcrhui. 

On  ne  peut  se  dissimuler  que  la  suppression  ou 
rabrcviauon  de  la  formule  du  collatiouné ,  répétéo 
Il  chaque  décret,  ne  permette  d'Insérer  au  cahier 
une  ou  deux  lois  de  plus,  et  il  faudrait,  dans  le  sens 
de  la  propositiou .  que  le  certifié  de  Tageuce  fût 
unique  a  la  fin  de  la  réunion  de  plusieurs  lois;  mais 
si  cet  ov;mtage  n'est  acheté  qu'aux  dépens  d*ua 
caractère  d'aïuhenticité  de  moins  dans  la  loi ,  si  ta 
confiance  qui  en  fait  la  force  se  trouve  indirecte- 
ment ébranlée,  à  coup  sûr  ce  moyen  n*est  pas  préfé- 
rable. , 

De  tout  temps  on  a  reconnu  la  nécessité  de  con- 
server intact  le  texte  de  la  loi  et  de  Teuvelopper  du 
plus  grand  nombre  possible  de  signes  d'authenti- 
cité. ,     .       , 

Quand  le  pouvoir  executif  était  dans  les  mains  du 
tyran,  un  décret  lui  prescrivit  de  faire  insérer  dans 
le  cadre  des  formules  qui  caractérisaient  l'exercicii 
de  son  pouvoir  le  texte  du  dëcretî  sans  y  rienoharw 
ger. 

Ce  n'était^  pas  encore  assez;  un  décret  de  ta  Con- 
vention nationale  du  %  février  1703  (vieux  st)[le) 
porte  que  les  signatures  des  président  ut  secrétaires 
de  la  Convention  nationale  seront  mentionnées  dans 
les  expéditions  de^  décrets,  dont  le  conseil  exécutif 
provisoire  est  chargé  dé  faire  l'envoi  aux  corps  ad- 
minislratifs  et  judiciaires  et  autres  autorités  oonsti- 
tuées,  et  que  ces  signa turei  seront  rapportées  dans 
les  imprimés  des  décrétai 

L'article  lY  du  décret  du  14  frimaire  avait  impli- 
citement couOrhië  celte  disposition. 

H  faudrait  donc  des  nlisons  pressantes  pour  Ta*- 
nJantIr.  fit  est-ce  alors  que  la  Convention  nalionalo 
s'est  déclarée  le  centre  unique  de  Timpuision  du 
gouvernement  \  lorsqu'elle  je  fait  exercer  par  des 
comités  qui  ^ont  une  partie  intégrante  d'elle-mâme; 
est^e  au  moment  ou  le  {Peuple  ne  connaît, pour 
\  ainsi  dire  ,  que  son  autorité  &upréitie ,  qu'il  serait 
I  convenable  de  supprimer  une  formule  nécessaire 


444 


jans  tous  les  temps,  qui  garantit  au  peuple  Tau- 
tfaenticité  de  la  loi  qu'on  lui  présente ,  qui  lui 
4onne  un  témoignage  de  plus  de  sa  fidélité,  une 
preuve  en  quelque  sorte  palpable  qu  elle  est  direc- 
tement émanée  de  ses  représentants?  En  annonçant 
que  la  suppression  de  cette  formule  pourrait  avoir 
ae  grands  inconvénients ,  votre  comité  ne  soutient 
pas  qu*il  faille  la  répéter  à  chaque  décret. 

Il  lui  a  paru  suffisant  de  ne  rappliquer  qu*une 
fois  à  la  réunion  des  lois  qui  formeront  un  cahier 
d'impression.  II  en  fut  ainsi  usé  dans  le  temps  popr 
des  oécrets  de  réunion. 

Ainsi  les  lois  susceptibles  d'impression  ne  seront 
plus  délivrées  en  feuilles  détachées  par  le  comité 
des  décrets,  à  Tagence de  renvoi  des  lois,  mais  trans- 
crites successivement.  Cette  réunion  de  lois,  visées 
par  l'inspecteur,  collationnées  par  les  président  et 
secrétaires  de  la  Convention  nationale,  leurs  signa- 
tures spécialement  rappelées  dans  Timpression,  se- 
ront suivies  de  la  formule,  certifié  conforme,  attes- 
tée par  les  deux  membres  de  Tagence;  par  là 
Tautnenticité  de  la  loi  se  trouvera  conciliée  avec 
réconomie  désirable. 

D*après  ces  considérations,  le  comité  croit  devoir 
TOUS  proposer  le  projet  de  décret  suivant. 

1^  rapporteur  lit  un  projet  de  décret,  portant  que 
désormais  la  formule  du  collationné  des  président 
et  secrétaires  de  la  Convention  ne  sera  imprimée 
qu'une  fois  dans  chaque  cahier  des  lois,  et  qu'elle 
sera  mise  à  la  fin  de  tous  les  déct-cts  qui  compose- 
ront un  même  Bulletin. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

—  Laurence,  secrétaire,  donne  lecture  de  la  lettre 
d*un  membre  qui  demande  un  congé  pour  cause  de 
maladie. 

Lbgbndbb  (de  Paris)  :  J'invite  la  Convention  à  ne 
pas  accorder  facilement  des  congés  à  ses  membres, 
dans  un  moment  surtout  où  il  s  agit  de  se  pronon- 
cer sur  une  affaire  très-importante. 

Citoyens,  je  vois  avec  peine  que  plusieurs  de  nos 
collègues  qui  sont  en  mission  prétextent  des  mala- 
dies pour  ne  pas  revenir,  comme  plusieurs  de  ceux 
qui  sont  dans  le  sein  de  la  Convention  prétextent  le 
même  motif  pour  s'éloigner. 

Je  sais  que  plusieurs  des  membresde  cette  assem- 
blée, par  modestie,  cherchent  à  s'envelopper  d'ob- 
scurité, et  craiçnent  de  figurer  dans  la  grande  af- 
faire qui  se  prépare  ;  mais,  citoyens,  la  modestie, 
3ui  est  une  vertu  dans  les  circonstances  ordinaires, 
evient  un  crime  dans  les  moments  où  il  faut  une 
grande  énergie. 

Laubbncb:  Je  suis  de  l'avis  de  Legendre;  mais 
j'atteste  que  le  représentant  qui  demande  un  congé 
est  effectivement  malade  depuis  plus  de  six  mois. 

Le  congé  est  accordé. 

—  Le  comité  des  secours  publics  propose  plu- 
sieurs projets  de  décret.  Ils  sont  adoptés. 

»  On  lit  la  lettre  suivante: 

Legot^  rtpréientant  du  peuple^  envoyé  dam  le  dé- 
partement de  la  Manche^  à  la  Convention  natio- 
nale, 

Avnnehet,  le  9  plmrioM ,  Tan  3*  de  la  république 
francise,  une  et  iodiTuible. 

•  J'ai  TU,  par  les  journaux,  qu'il  avait  été  fait  un 
rapport  sur  la  destitution  que  j'avais  faite  de  Lalan- 
de,  Robin,  administrateurs,  et  Nicole,  secrétaire  gé- 
néral du  département  de  la  Manche.  On  donne  de 
l'éclat  à  cette  affaire:  je  crois  de  mon  honneur,  je 
crois  de  l'intérêt  de  la  patrie,  de  dire  mon  opinion  à 
la  Convention  nationale,  au  peuple  entier  que  j'ai 
l'honneur  de  représenter. 

•  Lorsque  je  suis  arrivé  dans  le  département  de  la 


Manche,  je  l'ai  trouvé  sous  le  Joug  de  la  terreur.  La» 

fiartisans  de  Robespierre  y  dominaient,  et  tenaient 
eurs  concitoyens  anus  le  plus  affreux  esclavage  ; 
tout  le  monde  y  était  dans  la  stupeur  et  la  plus  pro- 
fonde consternation  :  on  doit  sentir  que  je  ne  parle 
que  des  républicains  ;  l'opinion  des  autres  n'entrait 
pour  rien  dans  mes  calculs. 

•  Les  trois  hommes  que  le  cri  universel  m'a  dé- 
noncés ont  été  Lalande,  Robin  et  Nicole.  Ils  étaient 
d'ailleurs  absolument  ineptes  à  remplir  leurs  fonc- 
tions *  je  les  ai  destitués. 

•  Mes  collègues  Bollet  et  Bouret  avaient  eu  d'eux 
la  même  opinion  :  que  l'on  envoie  à  ma  place  tout 
autre  de  nos  collègues,'  il  en  jugera  de  même. 

•  La  réclamation  de  Irlande  et  joints  n'a  eu  d'au- 
tre mérite  une  d'avoir  été  faite  par  notre  collègue 
Lecointre  (ae  Versailles). 

«  Le  Convention,  bien  convaincue, que, bien  loin 
de  protéger  les  scélérats,  les  tyrans,  les  vils  suppôts 
de  Robespierre,  il  était  leur  cruel  ennemi,  a  pa 
croire  que  je  m'étais  laissé  mal  entourer,  et  par  con- 
séquent tromper. 

«Non,  citoyens  collègues:  i'ai  reconnu,  dès  ks 
premiers  moments  qui  ont  suivi  la  journée  du  9  ther- 
midor, les  dangers  d'une  réaction;  j'ai  cru  qu'il 
était  du  devoir  des  vrais  amis  de  la  patrie  de  prendre 
garde  que,  sous  prétexte  de  terrorisme,  d-  robes- 
pierrisme,  etc.,  on  ne  sacrifiât  ces  patriotes  chauds 
et  énergiques  qui  ont  fait  et  consolideront  la  révo- 
lution. 

«  J'ai  aussi  pris  toutes  les  précautions  que  la  pru- 
dence me  suggérait,  et  j'ai  jugé  que  douze  on  quinze 
scélérats  avaient  corrompu  un  département  des  plus 
intéressants  pour  la  république  ;  que,  mis  en  avant, 
et  protégés  par  quelques  hommes  puissants  dans  la 
grande  commune  où  siègent  les  représentants  du 
peuple,  ils  annonçaient  publiquement  que  dans  peu 
le  règne  de  l'injustice,  du  despotisme  et  de  la 
cruauté,  allait  reprendre  plus  de  vigueur  que 
jamais* 

•  J'ai  cru  devoir  leur  dter  l'influence  que  leur 
donnait  l'autorité  de  la  loi ,  bien  sûr  que,  réduits  à 
4eurs  simples  forces  morales,  ils  ne  seraient  aucu- 
nement dangereux.  Je  n'en  ai  fait  arrêter  aucun  :  j'ai 
voulu  empêcher  le  mal ,  mais  je  n'ai  pas  voulu  en 
faire. 

•  J'ai  voulu  faire  aimer  la  Convention  :  j'ai  l'a- 
mour-propre  de  croire  que  j'y  ai  réussi  ;  mais  si  la 
Convention  venait  à  détruire  mon  ouvrage,  je  n'y 
puis  plus  faire  le  bien  :  elle  plonge  d'ailleurs  dans  le 
deuil  une  population  de  cinq  cent  mille  âmes  ;  elle  Ote 
aux  amis  de  la  patrie,  tourmentés  par  la  pénurie  des 
subsistances,  pillés,  égorgés  et  dévastés  par  les 
chouans,  jusqu'à  la  consolation  de  l'espérance. 

•  Je  demande  donc  justice  à  mes  collègues,  plus 
pour  les  bons  citoyens  de  ce  département  que  pour 
moi ,  je  demande  d'être  entendu.  Je  demande  qu'il 
me  soit  permis  de  me  rendre  dans  le  sein  de  la  Con- 
vention ,  pour  rendre  compte  de  ma  conduite  ;  mais 
comme  je  trahirais  mes  devoirs  en  quittant  ce  dépar- 
tement, sans  V  être  remplacé,  vu  la  malheureuse 
circonstance  die  la  pénurie  des  subsistances  et  des 
ravages  des  chouans,  je  demande  mon  remplace- 
ment sur-le-champ,  et  surséance  de  la  discussion 
jusqu'à  ce  que  j'aie  été  entendu. 

•  Salut  et  fraternité.  LiooT.  • 

Le  rapporteur  se  présente  à  la  tribune  pour  faire 
le  rapport  sur  Lalande. 

LBcoirrrRB  :  Je  demande  rajoumement  jusqu'à 
sextidi ,  pour  que  les  pièces  à  d&harge  puissent  être 
imprimées. 

Bentabolb  :  J'appuie  l'ajournement;  il  est  d*au- 


445 


tant  plus  nëcessaire,  qu^il  faut  que  rassemblée  ap- 
porte une  grande  attention  aux  destitutions  faites 
dans  les  départements;  j'ai  une  lettre  en  main ,  qui 
prouve  qu*on  a  mis  à  la  tête  d'un  département  un 
nomme  qui  a  protesté  contre  le  10  août. 

Thibaudeau  :  Je  crois  que  beaucoup  de  discus- 
sions trop  prolongées  ont  pour  cause  la  versatilité 
de  certains  hommes  qui  paraissent  d'abord  attachés 
aux  principes  de  justice  que  l'assemblée  suit  depuis 
le  9  thermidor  ;  je  me  réjouis,  au  reste,  de  voir  ré- 
clamer aujourd'hui  avec  tant  de  force,  en  faveur  des 
fonctionnaires  destitués,  les  mêmes  hommes  qui  au- 
trefois en  encombraient  les  prisons.  (Applaudisse- 
ments.) 

L'exemple  de  ce  qui  s'est  passé  dans  mon  dépar- 
tement, où  l'on  n'a  mcarcére  que  sept  à  huit  hom- 
mes qui  méritaient  beaucoup  mieux  que  cela,  et 
qui  même  ont  été  relâchés,  démontre  combien  on 
abuse  la  Convention  quand  on  lui  parle  de  l'oppres- 
sion des  patriotes  :  les  patriotes  opprimés  sont  ceux 
qui  ont  trempé  leurs  mains  dans  le  sang  et  dans  la 
Doue.  (Vifs  applaudissements.) 

D'ailleurs,  de  quoi  s'a^it-il?  C'est  pour  garder 
une  place,  qu'il  a  remplie  deux  ans,  que  Lalande 
insiste  si  fort;  c'est  le  fait  d*un  ambitieux  ;  l'homme 
modeste  quitte  tes  fonctions  publiques  sans  regret, 
comme  il  les  accepte  sans  les  briguer.  (On  applau- 
dit.) 

Laubencb  :  J'atteste  aussi  que  Lalande  est  un  ter- 
roriste. 

Thidaudeau  :  Je  conclus  à  ce  que  le  rappoK  soit 
fait. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

Après  avoir  annoncé  que  dans  le  département  de 
la  Manche  on  colporte,  même  dans  les  campagnes, 
une  Adresse  en  faveur^e  Lalande,  en  abusant,  pour 
la  faire  sigher,  de  la  terreur  qu'il  inspire  encore,  le 
rapporteur  commence  la  lecture  des  pièces  ;  on  ne 
les  laisse  pas  même  lire  toutes,  et  la  destitution  de 
Lalande  est  conOrmée. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  24  PLUVIOSE. 

On  lit  la  correspondance. 

Faure  :  Citoyens,  depuis  une  année  je  dois  à  la 
Convention  nationale  le  compte  d'une  mission  dont 
elle  m'avait  chargé  ;  je  lui  dois  le  tableau  des  hor- 
reurs qui  se  commettaient  impunément  dans  une 
commfune  célèbre  de  la  république,  horreurs  que 
j'ai  en  vain  tenté  de  réprimer,  horreurs  dont  je  n'ai 
même  pu  vous  instruire  ;  le  récit  seul  à  cette  tribune 
aurait  pu  devenir  fatal ,  tant  alors  était  grande  la 
tyrannie. 

Se  taire  aujourd'hui  serait  un  crime  ;  le  courage 
de  la  vertu  vous  a  fait  triompher  de  l'audace  du 
crime.  Rappelées  dans  cette  enceinte  et  répandues 
par  vous  sur  la  France  entière,  la  justice  et  l'huma- 
nité s'élancent  du  berceau  de  la  république ,  pour 
consolider  à  la  fois  sa  gloire  et  sa  durée.  Ils  ne  re- 
viendront plus  ces  jours  de  désolation  ,  de  deuil  et 
de  désespoir,  où  tout  était  crime  excepté  le  crime, 
qui  avait  emprunté  le  langage  de  la  vertu. 

Mais  il  importe  à  la  Convention  nationale,  au 
peuple  français,  à  la  tranquillité  des  bons  citoyens, 
il  importe  à  la  sûreté  publique  de  signaler  les  êtres 
immoraux  qui  ont  outragé  la  patrie  ;  il  importe  de 
faire  la  liste  de  tous  les  crimes  de  ces  hommes  dissé- 
minés sur  le  territoire  français,  pour  y  établir  et  en- 
raciner la  barbarie,  le  despotisme  et  la  férocité.  Il 
faut  rendre  durable  le  souvenir  de  leurs  atrocités, 
la  haine  implacable  qu'ils  inspirent ,  et  le  sentiment 
de  notre  force  pour  les  terrasser,  s'ils  osaient  repa- 
raître. 


Ah  !  sans  doute ,  citoyens,  il  existe  une  gradation 
entre  les  coupables;  tant  d'instruments  du  crime  ne 
peuvent  être  également  criminels;  il  en  est  même 
d'innocents,  et  qui,  constamment  patriotes,  blâmè- 
rent les  excès  qu'ils  commettaient  eux-mêmes;  et 
s'il  en  est  qui  se  trouvent  froissés  dans  le  passage 
glorieux  du  crime  à  la  vertu ,  s'ils  sont  confondus 
un  instant  avec  les  grands  coupables  qui  les  entraî- 
nèrent ,  qu'ils  sachent  souffrir  pour  la  patrie  qui , 
loin  de  vouloir  les  perdre,  compte  encore  user  de 
leur  zèle  et  de  leur  courage. 

Il  est  aussi  des  hommes  qui,  abusant  de  tout, 
même  de  la  vertu,  voudraient  se  servir  de  la  révo- 
lution du  9  thermidor  comme  d'une  arme  meur- 
trière, et,  se  disant  persécutés,  devenir  persécuteurs 
à  leur  tour.  La  justice  et  les  principes  repoussent 
également  ce  système.  Que  ceux  qui  n'ont  éprouvé 
que  de  justes  châtiments  ne  viennent  pas  détourner 
votre  attention ,  votre  affection  de  la  pente  natu- 
relle et  douce  qui  l'entraîne  à  réparer  les  maux  de  la 
vertu  malheureuse  et  de  l'innocence  opprimées. 
Telle  est,  citoyens,  la  profession  de  foi  sur  mes 
principes,  dont  j'ai  cru  devoir  faire  précéder  le  récit 
des  détails  que  je  vais  vous  communiquer. 

Envoyé  à  Nancy,  en  vendémiaire  de  l'an  2,  j'ai  vu 
de  près  et  dans  un  grand  théâtre,  des  personnages 
fameux  dans  le  système  des  conspirations  que  vous 
avez  anéanties.  Sans  calculer  le  danger,  entraîné 
par  les  sentiments  de  justice  qui  toujours  m'animè- 
rent ,  j'eus  le  courage  de  les  frapper  au  milieu  de 
leur  clique  vile  et  insofente ,  et  dans  les  jours  de 
leur  gloire  scandaleuse  ;  mais  mon  courage  fut  inu- 
tile et  pensa  me  devenir  funeste. 

Un  plan  de  dévastation  couvrait  toute  la  surface 
de  la  république  ;  Paris  était  le  centre  où  tout  s'our- 
dissait. Là  ,  des  chefs  adroits ,  sous  prétexte  de  tra- 
vailler pour  la  liberté,  tramaient  leurs  complots 
dans  le  mystère  :  ils  avaient  entre  eux  des  vues 
différentes,  mais  toutes  tendaient  à  la  servitude. 
Pour  y  parvenir,  il  fallait  anéantir  les  talents ,  le 
commerce,  la  morale  publique;  il  fallait  que  les  ra- 
vages de  la  destruction  fissent  leurs  progrès  dans  les 
communes  les  plus  populeuses ,  il  fallait  dresser  des 
échafaiids  pour  y  immoler  pêle-mêle ,  avec  les  en- 
nemis de  la  révolution ,  tout  citoyen  éclairé,  probe 
et  vertueux ,  que  l'on  soupçonnait  pouvoir  contra- 
rier leurs  projets  criminels. 

On  avait  en  conséquence  des  agents  dans  ces  com- 
munes, qui  répondaient  très-bien^aux  vœux  de  leurs 
commettants.  Eh  !  choisis  par  le  crime  et  pour  le 
crime,  pouvaient-ils  être  des  hommes  vertueux  ! 

Ces  agents  pouvaient  tout  tenter  impunément. 
Les  meneurs  de  deux  Sociétés  fameuses ,  les  chefs 
d'un  tribunal  souverain,  le  triumvirat  dictatorial  à 
la  tête  du  gouvernement ,  tous  étaient  leurs  com- 
mettants et  leurs  protecteurs;  et  le  citoyen  assez 
courageux  pour  tenter  de  les  démasauer,  était ,  sur 
leur  simple  dénonciation ,  livré  à  l'écnafaud. 

Une  agence  de  ces  factions  était  établie  à  Nancy 
lorsque  j'y  parus  en  vendémiaire  de  Tan  2«  ;  elle 
parvint  parfaitement  à  comprimer  la  vertu  par  la 
terreur,  à  former  un  triumvirat  subalterne,  à  orga- 
niser l'anarchie,  et  à  dominer  vingt-huit  mille  ha- 
bitants, dont  la  voix  fut  constamment  étouffée. 

A  la  tête,  et  comme  le  chef,  paraissait  Marat- 
Mauger,  prêchant  la  vertu  avec  le  ton  de  la  fureur 
et  l'audace  du  crime;  il  avait  forcé  l'opinion  publi- 
que à  lui  décerner  la  couronne,  lorsqu'il  ne  méri- 
tait que  i'échafaud  ;  son  buste,  placé  a  côté  de  celui 
de  Marat  dans  la  salle  des  séances  de  la  Société  po- 
pulaire, attestait  à  la  fois  son  arrogance  et  son  pou- 
voir ;  envoyé  par  le  gouvernement  pour  vivifier  Tes- 
prit  public ,  il  subjugua  les  opinions  et  les  hommes. 


446 


et,  (tei*  de  éê  sn^c^^,  Il  né  ^âr^a  pas  de  mesure  *,  la 
turpitude  ëtalt  son  élëmenl ,  le  crime  devint  sa  res- 
source :  il  vendit  l'impunité  aux  scélérats,  pt  mit 
ûux  fers  l'innocence  qui  refusa  il'acheler  sa  grOce. 

Ce  dictateur  osa  se  créer  un  conseil ,  de  l'avis  du- 
quel il  disait  se  mouvoir;  dans  cette  cour  crapu- 
leuse et  dëliontée,  Tintrigue ,  la  débauche  et  le  pil- 
lage conspirèrent  contre  la  morale  et  la  fortune 
pimllque  et  privée. 

Son  conseil  était  formé  d*un  Philip,  homme 
atroce,  et  qui ,  né  pour  le  crime,  ne  saurait  trahir 
son  inslincl  féroce; 

Un  Fcbvé  qui ,  plus  rusé  et  avec  des  dehors  sé- 
duisants, n'en  était  que  plus  dangereux;  il  était  ù 
la  fois  président  du  tribunal  criminel,  notable  de  la 
commune,  membre  de  la  cour  souveraine  de  Mausçer. 

Un  Glassan-Brice,  célibataire  immoral,  aussi  faux 
patriote  que  mauvais  comédien,  et  revêtu  du  triple 
pouvoir  de  maire^  de  membre  du  comité  de  surveil- 
lance et  du  conseil  suprême  de  Manger.  Tels  étaient 
les  premiers  acolytes  et  principaux  complices  de  cet 
agent  contre-révolutionnaire. 

C'est  dans  la  Société  populaire  que  ce  Manger 
avait  fondé  sa  puissance  ;  c'est  là  que  ce  factieux 
hardi  établissait  l'anarchie  et  assurait  sa  dictature  ; 
il  avait  f^iit  admettre  aux  délibérations  les  individus 
de  tout  Age  et  de  tout  sexe  qui  assistaient  aux  tri- 
bunes ou  qui  remplissaient  fa  salle;  des  vociféra- 
tions tenaient  lieu  de  discussions,  et  les  acclamations 
de  quelques  personnes  à  gage,  ou  séduites,  prépa- 
raient les  résulats. 

Lh,  les  citoyens  étaient  désignés  et  proscrits;  la, 
on  arrêtait  la  mort  des  uns  et  la  déportation  des  au- 
tres :  les  juifs  étaient  proscrits  en  masse  :  là;  on 
arrêtait  les  actes  arbitraires  ;  et  Manger,  à  la  tête  de 
son  conseil ,  s'en  établissait  le  receveur  et  le  distri- 
buteur, Sans  tenir  de  registre  de  recette  ni  de  dé- 
pense ;  là ,  on  proposait  tantôt  de  faire  sauter  la 
maison  d'arrêt  avec  un  baril  de  poudre,  et  taniOt 
de  transférer  les  détenus  et  de  les  égorger  en 
route;  là  enfin  ,  déiibéralt-on  une  pétition  aux  au- 
torités constituées  :  ce  n'était  plus  une  pétition , 
mais  un  arrêté,  mais  un  ordre  à  intimer.  Peuple, 
disait-on  ,'tu  es  souverain;  lève-toi,  cours,  exprime 
ta  volonté,  menace ,  tonne,  et  renverse  tout  ce  qui 
oserait  la  combattre.  C'est  ainsi  que  les  factieux  op- 
posaient  une  portion  du  peuple  au  peuple  même , 
détruisaient  l'organisation  sociale  et  établissaient  la 
plus  affreuse  anarchie. 

A  la  voix  de  Mrtuger.  les  lois  se  taisaient;  les  au- 
torités constituées  avilies,  menacées,  étaient  sans 
force  :  tous  les  bons  citoyens  étaient  dans  l'alarme  ; 
sa  maison,  imprégnée  de  la  vapeur  de  ses  crimes , 
ne  cessa  pas  un  instant  d'être  le  théâtre  de  rinfaraic 
et  de  la  débauche.  Souvent .  au  milieu  de  la  nuit ,  il 
faisait  tirer  de  la  maison  d'arrêt,  et  traduire  chez 
Iu1,sesm:ilheureuses  vtctimes,etlà, étendu dansson 
lit,  son  poignard  sous  le  chevet ,  une  femme  débou- 
tée h  ses  crftés ,  le  verre  et  les  bouteilles  sur  la  table 
de  nuit,  décoré  d'un  ruban  tricolore  et  d*une  mé- 
daille de  juge,  pour  accabler  de  sa  puissance,  il  met- 
tait à  prix  la  liberté  et  la  vie. 

Le  conseil  secret  de  ses  volontés,  nommé  comité 
des  Sans-Culottes,  et  qui  aurait  bien  mieux  été  dé- 
nommé comité  des  intrigants,  des  anarchistes,  des 
dilapidateurs  et  des  fripons,  était  composé  de  douze 
individus,  presque  tons  revêtus  de  fonctions  publi- 

Îues  ;  la  suprême  puissance  résidait  dans  ce  comité, 
ous  les  actes  émanés  de  cette  Autorité  usurpatrico 
furent  arbitraires. 

C'est  dans  le  domicile  de  Mauger  quMl  tenait  ses 
séances;  c'est  là  que  ce  dictateur  prononçait  ses  ar- 
rêts; c'est  de  là  qu'il  frappait  et  absolvait  suivant 


les  sacrifices  pécuntaires;  ses  ordrel  étaient  dotinél 
dans  le  style  des  tvrans;  il  en  existe  ainsi  conçus  ; 
■  Marat-Mauger,  ae  l'avis  de  son  conseil^  enjoint  au 
prdien  de  la  maison  d'arrêt  de de  mettre  en  li- 
berté, etc.  ■ 

Si  de  la  Société  populaire  et  du  conseil  secret  de 
Mauger  nous  tournons  nos  regards  pour  les  fixer  sur 
quelques  membres  des  autorités  constituées,  nous 
retrouverons  les  mêmes  nrincipes  prêches  par  les 
mêmes  hommes.  Glassau-Brice  était  maire  ;  Glassan- 
Brice,  transplanté  des  tréteaux  de  Paris  à  Nancy; 
ses  liaisons  furent  intimesavec  Marat-Mauger, Pebvc, 
Philip,  Arsant  et  toute  sa  clique  de  fripons.  D'insi- 
pide comédien ,  il  devint  insolent  magistrat  ;  n'étant 
point  étranger  à  tout  ce  qui  était  vil  et  bas,  il  fuf  le 
complaisant,  l'ami,  le  compajg;non  et  le  complice  de 
Mauger  et  de  ses  sicaires.  Cest  ce  maire,  révolu- 
tionnaire par  excellence ,  qui ,  avilissant  son  carac- 
tère pour  augmenter  sa  popularité,  un  jour  de  fête 
Sublique,  adressant  la  parole  au  peuple  dans  la  salle 
e  la  Société  populaire,  s'écria  :  •  Peuple,  veux  tu 
que  je  garde  mon  écharpe  à  la  cérémonie  ou  que  je 
la  quitte?  Tu  es  souverain  :  parle,  et  j'obéirai.  •  En- 
fin ,  en  prédicateur  débouté  de  tous  les  principes  ré- 
voltants de  la  conspiration  d'Hébert ,  Ronsin ,  Chau- 
mette  et  complices,  il  publiait  avec  arrogance  son 
immoralité  et  son  athéisme. 

Non  moins  infâme  que  Mauger  et  Brtce,  Philip,  le 
sans-culottes  Philip,  dont  l'orîgine  est  inconnue  à 
Nancy,  était  venu  de  Strasbourg  à  Nancy  y  occuper 
la  place  de  garde-magasin,  et  se  réunir  à  la  tourbe 
des  intrigants.  Il  était  parfaitement  imbu  de  leurs 

Èrincipes  et  les  professait  à  merveille  :  il  égalait 
langer  en  despotisme,  et  l'aurait  surpassé  eu 
cruauté. 

Dans  une  assemblée  généralcel  nombreuse,  tenue 
dans  le  local  qui  était  encore  église  cathédrale ,  et 
avant  toute  renonciation  au  culte,  Philip,  sans  crain- 
dre d'offenser  un  peuple  qui  pouvait  ne  pas  être  en- 
core entièrement  dépouillé  des  vieux  prcjugés,  s'é- 
crie, en  se  tournant  vers  le  tabernacle  :  •  Que  l'on 
f)renne  les  ordures  qui  sont  dans  cette  botte,  et  qu'on 
es  jette  à  la  rue  sur  le  fumier  !  • 

Ce  même  Philip,  à  la  cérémonie  du  premier  dé- 
cadi qui  fut  célébré  à  Nancy,  poussa  l'oubli  de  la  lot 
au  point  d'ordonner  et  de  présider,  au  nom  de  la  So- 
ciété populaire,  au  nom  du  peuple  souverain,  di<* 
sait-il ,  l'entière  cérémonie,  sans  s'apercevoir  des 
I  autorités  constituées  ni  du  représeutunt  du  peuple 

qui  y  assistaient. 
1      Dans  l'administration  du  district,  on  y  trouvait 
un  Jeannet,  procureur-syndic,  membre  du  comité 
de  surveillance,  et  partisan  de  la  horde  maugerenne  ; 
i      Dans  les  fonctions  judiciaires,  Pebvé  l'ahjc,  prési- 
;  dent  du  tribunal  criminel ,  notable  de  la  communo 
;  et  membre  du  conseil  de  Mauger.  11  se  croyait  au- 
dessus  de  tout. 

-  Je  plane,  disait-il  un  jour  à  la  Société  populaire, 
je  plane  sur  toutes  les  autorités  constituées;  per- 
sonne n'a  le  droit  de  m'attaquer.  • 

Suivaient  après  ,  et  comme  des  manœuvres,  Ar- 
sant, le  farouche  Arsant,  rival  d'Hébert,  qui,  comme 
lui,  proposa  et  lit  arrêter  qu'on  voilerait  ïfs  Droits 
de  l'Homme  lorsqu'un  patriote  de  sa  trempe  serait 
opprimé  ; 

Gastaldi  le  féroce,  qui  ,^  prêchant  d'eXemple,  de- 
manda à  la  Société  populaire  que  chaque  membre  y 
parÂt  armé  d'un  poignard  ; 

Giverné,  directeur  de  la  poste,  et  autres  êtres 
me'prisables.^ 

Cette  faction  scélérate  avait  dos  agents  dans  les 
districts  oCi  ils  pouvaient  trouver  des  hommes  dignes 
d'eux. 


441 

À  Marsal ,  c*ëlait  un  nommé  Dumout ,  nommé 
membre  du  comité  de  surveillancQ  por  Mouger,  usur- 
pateur de  la  souveraineté  du  peuple,  oppelc  par  ce 
dernier  le  seul  patriote  de  Marsal  ;  et  cependant  ce 
patriote  exclusif  tenait  à  Marsal  la  même  conduite 
que  son  maître  à  Nancy. 

A  Dieuze ,  c'était  l'ex-chevalier  Durozct ,  favori 
des  ancieua  minialres ,  qui  était  a  Paris  au  10  août , 
et  qui ,  après  la  défaite  du  tyran ,  ayant  changé  ses 
habits  de  soie  en  un  modeste  pantalon  ,  devint  un 
ultra^révolulionnaire  par  excellence;  un  Gunln,  cx- 
législateurroyaliste,eldevenuterroristc,opprcsseur, 

Îiersécuteur  cics  bons  citoyens  et  protecteur  des  scé- 
érats. 

Que  de  réOexîons  do  pareilles  métamorphoses  qe 
nous  donncut-cllcs  pas  à  faire  ! 

A  Saiut'Avold,  c'élpit  Uarouard  d*Aurinvitle, 
maire,  qui  quitta  son  poste  à  rapproche  de  Tennemi; 
un  Vatremet,  associé  de  Témigré  d'Espagnnc,  procu- 
reur-syndic de  la  commune,  qui,  chargé  dn  Tappro- 
visionnement ,  faisait  iKtrter  de  bons  grains  a  son 
moulin ,  d*où  il  sortait  ensuite  un  mélange  de  mau- 
vaises farines.  Là,  même  vie  crapuleuse,  même* 
abus  d'autorité ,  même  persécution  ,  mêmes  injus- 
tices. 

A  Sarreguemines^  c'était  Botitey,  Commorelle  et 
;)utres. 

Tels  étaient  les  régulateurs  de  Topinion  publique, 
et  ù  qui  tous  étaient  torcés  d'obéir;  les  lois  «ans  force, 
les  autorités  constituées  avilies  et  sous  le  joug  de  la 
trrreur.  les  fonctionnaires  publics  impuissants  ù 
faire  le  bien ,  la  confusion  à  la  place  de  l'ordre,  des 
intérêts  privés  remplaçant  Tintérêt  du  peuple  ou- 
tragé, méconnu  ;  les  hommes  sans  mœurs  et  sans 
nnjour  de  Icnr  pays,  gouvernant,  tyrannisant  comme 
dos  vampires,  se  repaissant  de  richesses,  et  comme 
des  tigres  alU'rés  du  sang  de  leurs  concitoyens;  la 
fortune  publique  dilapidée,  celle  des  particuliers 
soumise  ù  des  lajies  arbitraires;  taxes  de  dons  dits 
volontaires,  taxes  de  la  Sociélc  populaire,  taxes 
do  Manger,  tnxe  de  5  millious  dis  représentants 
Saint'Justet  Lebas.  Soufirir  sans  oser  se  plaindre, 
craindre  et  prévoir  de  plus  grands  maux  sans  o^poir 
de  les  éviter,  voilii  quelle  était  alors  la  situation  de 
Nancy. 

Tontétnit  préparé  pour  le  crime,  organisé  pour 
la  dévuslatiou  ,  disposé  pour  le  meurtre,  Tincendle 
et  le  pillage,  lorsque  je  me  mis  en  devoir  d'arrdltr 
le  complément  du  mal. 

La  commune  de  Nancy  n'était  pas  dans  celle  con- 
trée la  seule,  à  la  même  époque,  livrée  i\  la  désola- 
lion. 

Les  vexations,  le  massacre  et  les  taxes  révolu- 
tionnaires étaient  aussi  à  Tordre  du  jour  ù  Stras- 
bourg. Je  ne  puis  Ici  taire  un  fait  qui  excitera  votre 
indignation. 

Maino,  le  re<tpectabl6  Malno,  dont  les  cheveux 
avaient  blanchi  sous  le  poids  d'un  commerce  probe 
et  heureux,  imposé  à  aoo,000  livres,  n*ayant  pu  en 
compter  sur-le-champ  que  80,000,  fut  saisi ,  con- 
duit sur  l'échafaud,  et  attaché  pendant  deux  heures 
â  une  des  branches  de  la  guillotine,  et  de  là  mis  en 
arrestation  jusqu'à  l'entier  payement. 

Dans  la  Société  populaire  on  a  voté  et  forcé  des 
citoyens  des  tribunes,  de  tout  âge  et  de  tout  sexe, 
sous  peine  d'être  déclarés  suspects  et  traités  comme 
tels,  de  voter  la  mort  de  toos  les  détenus  en  masse, 
sans  autre  forme  de  jugement. 

il  y  avait  encore  a  8trasbourg,  sous  le  nom  de 
Propagande,  une  réunion  considérable  de  citoyens 
rnvoycs  de  divers  points  de  la  république,  qui  for- 
maient une  école  normale  de  contre-révolution. 

Cette  école,  plaaaat  aur  toutes  Us  autorités  coa* 


stituées,  aurait  bientôt  rivalisé  la  Convention  na- 
tionale :  aussi  la  consternation  fut  telle,  dans  le  dé- 
partement du  Bas-Bhin ,  que  la  moitié  des  habitants 
avaient  déserté  leurs  foyers.  Cette  Société  a  été  dis- 
soute. 

Faure,  après  avoir  parlé  des  dénonciations  por< 
tées  contre  lui  par  des  intrigants  et  des  factieux,  de- 
mande que  sa  conduite  soit  examinée. 

L'assemblée  ordonne  Timpressiou  de  son  rapport. 

àUnEû,  au  nom  du  comité  de  salut  public  :  Ci^ 
toyens,  des  motifs  d'un  intérêt  majeur  avaient  dé- 
terminé votre  comité  de  salut  publie  à  ordonner  la 
sortie  de  votre  armée  navale  de  l  Océan.  Cette  ar- 
mée, partie  de  Brest  le  10  nivôse  dernier,  vient  d'y 
rentrer  le  1 4  du  présent  mois,  après  une  croisière 
de  trente-quatre  jours. 

Cette  croisière  a  été  marquée  par  des  succès  et 
des  avaries.  D'un  cOté ,  nous  avoua  réduit  à  l'im" 
puissance  et  retenu  oisive  dans  ses  ports  oellc  grande 
armée  de  Tamiral  Howe,  sur  laquelle  lu  coalition 
fondait  tant  et  de  si  chimériques  espérances;  nous 
ayons  également  arnUé  le  départ  de  toutes  les  divi- 
sions destinées  par  Tamiraulé  de  Londres  à  escorter 
les  forces  et  les  munitions  qu'elle  se  proposait  d'en- 
voyer tant  dans  le  continent  d'Europe  qu'aux  An- 
tilles ;  nous  avons  aussi  continué  à  mettre  à  contri- 
bution le  commerce  maritime  de  nos  ennemis,  en 
faisant  de  nombreuses  prises  dans  toute  l'étendue 
de  la  croisière.  Quelques-uns  de  nos  vaisseaux,  les 
frégates  et  les  corvettes  se  sont  emparés  d'environ 
soixante-dix  bâtiments,  montés  de  douze  à  quinze 
cents  prisonniers. 

Enlin,  nous  avons  plus  fait  :  la  France,  en  dé- 
ployant s.ir  l'Océan  une  armée  navale  de  trente- 
quatre  vaisseaux  de  ligne,  au  fort  de  l'hiver,  et 
après  les  événements  de  l'été  dernier,  a  prouvé 
qu'elle  est  toujours  en  mesure  de  balancer  la  puis- 
sance maritime  de  l'Angleterre;  que  ses  ressources 
à  cet  égard  sont  aussi  inépuisables  que  celles  qu'elle 
déploie  avec  tant  de  gloire  dans  le  recrutement  et 
l'entretien  de  ses  invincibles  armées  de  terre,  et  que 
bientôt  l'orgueil  britannique  devra  s'humilier  de- 
vant le  pavillon  tricolore,  comme  il  s'abaisse  depuis 
si  longtemps  devant  le  drapeau  qui  mène  à  des  vic- 
toires toujours  nouvelles  les  braves  enfants  de  la  li- 
berté. 

P'un  autre  côté,  comme  je  l'ai  annoncé,  notre 
armée  navale  a  éprouve  des  avaries.  Les  lettres  de 
nos  collègues  à  Brest,  et  du  général  de  cette  armée, 
nous  apprennent  que,  dans  la  nuit  da  10  au  11  de 
ce  mois,  trois  vaisseaux ,  dont  on  a  sauvé  tous  les 
équipages  et  les  objets  d'un  transport  facile,  ont 
coulé  en  pleine  mer.  Ces  vaisseaux  sonile  Scipion  , 
le  Superbe  el  le  Neuf-Thermidor;  Ils  étaient  vieux 
et  hors  d'état  de  faire  désormais  une  seconde  cam- 
pagne sans  être  totalement  refondus  :  cette  perte 
sera  très-facilement  réparée.  Les  nombreux  vais- 
seaux que  nous  avons  en  ce  moment  sur  les  chan- 
tiers de  tous  nos  ports  auront  bientôt  fait  oublier  la 
privation  de  trois  carcasses  nui  n'ont  pu  résister  aux 
temps  affreux  qui  ont  régne  pendant  toute  la  croi- 
sière ,  et  qui  ont  participé  de  l'hiver  extraordinaire 
qui  s'est  fiait  sentir  dans  toute  l'Europe. 

Trois  autres  vaisseaux  de  l'armée  ont  essuyé  des 
avaries  r  ce  sont  le  Téméraire,  forcé  d'entrer  a  Port- 
Malo;  le  Fougueux^  relâché  à  l'Ile  de  Croix,  nrès 
Lorient,  et  Je  Neptune^  échoué  sur  les  vases,  aans 
l'anse  de  Pcrros.  Les  dommages  que  ces  vaisseaux 
ont  soufferts  seront  aisément  réparés  :  les  deux  pre- 
miers sont  déjà  en  sûreté  ;  le  troisième  est  en  ce  mo- 
ment entoure  de  tous  les  secours  qui  peuvent  faire 
espérer  sou  prompt  sauvetage.  La  perte  se  réduit 
dune  à  trois  vaisseaux  usés,  cassés,  qui  auraient  pu 


U8 


résister  à  des  temps  ordinaires,  mais  qui ,  assaillis 
tout  à  coup  par  une  tourmente  qui  s*est  prolongée 
pendant  presque  toute  la  croisière ,  ont  succombé 
sous  les  coups  des  vents  et  des  flots  conjurés. 

Quoi  qu*il  en  soit,  cette  croisière,  outre  le  but 
militaire  et  politique  quelle  a  rempli ,  a  été  pour 
nos  marins  un  cours  d'instruclion  navale  tel  que 
toutes  les  leçons  de  la  plus  sublime  théorie,  et  le  si- 
mulacre des  manœuvres  les  plus  habiles  n*auraient 
pu  y  suppléer.  Le  général  nous  mande  que ,  •  si  la 
république  a  perdu  quelques  vaisseaux,  elle  a,  d*un 
autre  côté ,  acquis  un  grand  nombre  de  marins;  car 
jamais  campagne  ne  fut  plus  propre  à  instruire  des 
officiers,  à  former  des  matelots,  et  à  amariner  les 
réquisitions.  • 

Cette  vérité  sera  sentie  de  tous  les  marins,  de  tous 
les  esprits  accoutumés  à  réfléchir.  Il  vous  reste  main- 
tenant ,  citoyens,  a  prendre  une  mesure  digne  de 
vous,  diçne  de  la  nation  que  vous  représentez. 

Voici  le  projet  de  décret  que  je  suis  chargé  de  met- 
tre sous  vos  yeux  : 
'  «  La  Convention  nationale  décrète  : 

•  Le  comité  de  salut  public  est  chargé  de  réparer 
promutement  les  pertes  essuyées  par  Tarmée  navale, 
et  de  lui  donner  tout  le  degré  d'accroissement  et  de 
splendeur  digne  de  la  puissance  de  la  nation.  • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

Mareg  :  Je  dois  ajouter,  citoyens,  qu'indépen- 
damment des  prises  faites  par  Tarmée  navale  de  TO- 
céan,  il  en  a  était  fait  d*autres,  tant  par  les  divisions 
de  frégates  détachées  dans  la  Méditerranée  que 

fiar  d'autres  divisions  croisant  dans  la  Manche  et 
•Océan. 

L'état  général  de  toutes  ces  prises  réunies  com- 
mence à  la  date  du  11  nivôse  dernier  ;  il  s'élève  jus- 
qu'à ce  jour  à  cent  vingt-huit  prises,  dont  cent-neuf 
sont  entrées  dans  nos  ports,  et  dix-neuf  ont  été  cou- 
lées et  brûlées. 

Presque  toutes  ces  prises  sont  chargées  de  denrées 
et  de  marchandises  ;  quelques-unes  sont  chargées  de 
munitions  navales. 

L'une  est  un  bâtiment  de  guerre  anglais,  la  fré- 
gate f«  Dapkné,  de  30  pièces  de  canon,  entrée  a  Lo- 
rient. 

Je  demande  rinserlion  de  cet  état  au  Bulletin. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

Cambacérks,  au  nom  du  comité  de  salut  public: 
Citoyens,  le  rapport  qui  vient  d'être  fait  a  appris  à 
la  Convention  nationale  que  les  éléments  avaient 
contrarie  et  arrêté  un  projet  dont  l'exécution  avait 
eie  conbee,  en  votre  nom,  au  courage  des  armées 
navales  de  la  république.  Je  viens,  de  la  part  du  co- 
rnue de  salut  public,  confirmer  un  événement  dont 
la  nouvelle  s'est  déjà  répandue  dans  cette  enceinte. 
Cl  annoncer  que  nos  frères  d'armes,  triomphant  tou- 
jours de  nos  ennemis,  viennent,  malgré  l'intempérie 
de  la  saison  et  la  réunion  des  éléments  conjures, 
d  ajouter  à  leurs  succès.  La  place  importante  de  Ro- 
•asest  au  pouvoir  de  la  France. 

C  est  sans  doute  donner  un  beau  spectacle  à  l'Eu- 
jop^»  et  uo  grand  encouragement  pour  ceux  d'en- 
tre vous  à  qui  vous  avez  confié  la  direction  d'une 
grande  partie  de  l'administration  publique,  que  de 
^^\^  A  ''^P'^'^nl^nl*  du  peuple  français  occu|>és  à 
entendre  le  récit  des  triomphes  de  nos  soldats  répu- 
Dueains,  presqu*au  moment  où  ils  ont  à  arrêter  leur 
Mention  sur  les  premières  vues  de  pacification  que 
le  comité  de  salut  public  leur  a  soumises. 


Lis  représentants  du  j>eupU  près  V armée  éU$  Pyré- 
nées-Orientales  à  leurs  eoUègues^  membres  du 
comité  de  salui  public. 

RosM ,  le  15  pluviôse ,  Tan  8«  d«  la  républîqiM 
françaUe,  une  et  indÎTinbl*. 

fl  Nottt  Toai  avioDs  promis,  citoyens  oollèguet,  d'entrer 
dans  Rosas  par  la  porte  ou  par  la  brèche  :  les  Espagools 
n*ont  pas  foulu  attendre  cette  dernière  extrémité,  ils  se 
sont  rendus  à  discrétion  aujourd'hui.  L'armée  des  Pyré- 
nées-Orientales peut  dire  que  dans  le  siège  elle  a  vainca 
tous  les  éléments  conjurés  contre  elle.  Dans  le  principe,  il 
a  fallu  pratiquer  des  chemins  dans  des  montagnes  considé- 
rées jusqu*alors  inaccessibles  :  nos  braves  Itères  d*armes 
ont  travaillé  avec  un  xèle  Infatigable;  ils  ont  eax-mêmes 
traîné  Tartillerie,  les  mortiers,  les  munitions,  et  enfin  tous 
les  mobiles  de  guerre.  Ce  préalable  était  néceasaire  pour 
nous  rendre  maUres  du  fort  du  Bouton,  et  oonteDlr  les 
forces  navales  que  l'ennemi  avait  dans  la  baie  de  Rosas.  Le 
Bouton  pris,  b  première  parallèle  fut  bientôt  ouverte  de* 
vant  la  place  de  Rosas;  mais  les  pluies  abondantes  et  la 
neige  remplirent  la  tranchée  d'eau ,  et  vingt-trois  jours  s'é- 
coulèrent sans  qu'on  pût  songer  à  reprendre  les  travaui. 
L'impossibiliié  d'ouvrir  la  seconde  Urancbèe  détermina  un 
nouveau  plan  d'atUique,  qui  n'était  pas  dans  les  règles  de 
l'art,  mais  qui  était  dans  les  bonnes  règles ^puisqu'U  nous 
conduisait  à  battre  en  brèche.  Un  montîcale  offrait  on  ter- 
rain favorable;  l'ordre  fut  donné,  et,  dans  la  nuit  du  10 
au  il ,  une  batterie  de  dix-huit  pièces  de  S4  fut  oomroen* 
cée  et  achevée.  Le  13  au  matin  on  commença  à  battre  en 
brèche,  et  à  peine  les  premières  pierres  étaient-elles  tom« 
bées  que  les  volontaires  demandaient  à  monter.  Le  feu  a 
été  terrible  pendant  deui  jours;  déjà  le  mur  était  très-en« 
dommagé,  et  la  garnison,  sentant  qu'elle  aurait  fait  une 
vaine  résistance,  a  profilé  de  la  nuit  pour  s'embarquer  en 
grande  partie.  Cinq  cent  quarante  booMnes  qui  restaient 
dans  la  place  se  sont  rendus  ce  matin  à  discrétion;  ils  sont 
prisonniers  de  guerre. 

t  C'est  sur  les  remparts  de  Rosas,  el  en  présence  de 
l'escadre  espagnole,  qui  a  la  prudence  de  se  tenir  hors  de 
portée,  que  nous  allons  célébrer  la  fête  de  rannifersaire  de 
la  juste  punition  du  dernier  Capel. 

t  Nous  ne  devons  pas  laisser  ignorer  à  la  Convention 
nationale  qu'outre  les  travaux  extraordinaires  d*on  siège 
aus5i  pénible,  nos  frèri'S  d^armes  ont  eu  à  souffrir  la  ploie, 
la  neige,  la  gelée,  et  que  rien  n'a  po  ralentir  ni  leor  xèle 
ni  leur  courage  ;  les  généraux,  les  officiers  d'artillerie  et  de 
génie,  tous  enfin  ont  rempU  leur  tâche  avec  one  activité 
infatigable. 

t  La  Convention  nationale,  toojoors  juste,  décrétera 
encore,  et  ce  ne  sera  pas  la  dernière  fois,  que  Tannée  des 
Pyrénées-Orientales  ne  cesse  de  bien  mériter  de  la  patrie* 

fl  Salut  et  fraternité. 

•  Signé  Dblbext,  Goopillsao  (de  Fonlenay). 

CimAcéais.:  Vous  prévenes,  citoyens,  la  proposition 
que  j'ai  à  vous  faire  au  nom  du  comité  de  salot  public ,  et 
dont  nos  collègues  près  l'armée  des  Pyrénées-Orientales 
vous  ont  offert  l'initiative. 

Voici  le  projet  de  décret  qoe  je  sob  chargé  de  vous  pro- 
poser : 

«  La  Convention  nationale  déclare  qoe  Pâmée  des  Py- 
rénées-Orientales ne  cesse  de  bieo  niériier  de  la  patrie  ; 

t  Décrète  en  outre  que  les  lettres  des  représentants  do 
peuple  près  l'armée  d«  Pyrénées-Orientales,  et  du  géné- 
ral en  cbef  de  la  même  armée,  seront  insérées  ao  BuUe-> 
tin.  • 

Ce  décret  est  adopté  ao  milieu  des  applaudissements. 
(  La  suite  demain,  ) 

AT.  B.  —  Dans  la  séance  do  S8,  la  Convention  a  con- 
firmé le  traité  de  paix  avec  le  grand  doc  de  Toscane. 


ERRATA. 

CVst  sor  la  foi  d^on  foumal  qoi  noos  a  indotts  < 
qoe  noos  avons  annoncé ,  dans  le  numéro  d'hier,  Tarrcs* 
tation  du  comité  dvil  de  la  sectioo  des  Gravillkn» 


GAZEÏÏE  NATIONALE  ».  LE  MONITEUR  UNIVERSEL.  ' 

N'  147.  Septidi  27  Pluviôse,  l'an  3*.  (Dimanche  15  Pbvbibb  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Hambourg^  te  H  février. —  Dinliig  a  perdu  depuis  deux 
ans  (JiX'iieurdescsplus  gros  navires  marchauds,  el  la  plu- 
part sont  tombés  entre  les  mains  des  Français. 

—  La  roircde  Leipzig,  dite  du  nouvel  an,  n*apasélë 
meilleure  que  ceHe  dr  Saint-Michel.  Il  s'y  est  trouve  quel- 
ques juifs  polonais,  qui ,  faute  de  crédit,  ont  payé  comp» 
tant.  La  |)lus  grande  stagoatlon  a  régné  dans  les  affaires 
commerciales. 

HOLLANDE. 

Extrait  4Pune  lettre  (T Amsterdam ,  du  5  /îfvWer.— La 
commune  provisoire  de  cette  ville  Tient  d'annoncer  par 
une  proclamation  Theurcux  résultat  des  premières  séances 
de  rassemblée  des  étals  généraux  régénérés. 

Une  collecte  qui  vient  d*étre  faite  ici  pour  les  citoyens 
indigents  a  produit  une  somme  de  56,000  florins. 

Les  représentants  provisoires  ont  ordonné  ft  tons  les 
foDctionniiires  publics  de  rester  à  leur  poste,  et  aux  absents 
de  rentrer  avant  un  mois,  sous  peine  de  séquestration  de 
kurs  biens. 

Des  bandes  fbgitives  d'Anglais  désolent  encore  une  par- 
tie de  la  Gueidre  et  de  TOver-Yssel.  Les  Français  vont  se 
mettre  à  la  chasse  de  ces  brigands. 

Des  émigrés  français^  se  disant  volontaires,  ont  commis 
des  excès  à  Nordston  et  à  Schiplinden.Oo  est  à  leur  pour- 
suite. 

L'illustre  patriote  Pierre  Paul  us  est  élu  grand  pension- 
naire. 

Le  générai  de  dhiêion  Mickaud  au  général  Ferrand* 
Ao  quiriicr  général  de  Berekcns,  le  17  ploviote. 

fl  Je  t'apprends,  mon  ami,  qu'en  conséquence  désor- 
dres do  général  Picbegni,  j'ai  sommé,  le  10,  les  comman* 
dants  des  forces  de  terre  et  de  mer  de  la  Zélande  de  rece- 
voir les  troupes  françaises. 

-  Les  glaces  dont  TEi^caut  était  couvert  ces  fours  der- 
niers ont  retardé  les  négociaiions,  et  mon  aide  de  camp 
Communeaux,  chargé  des  sommations,  après  avoir  couru 
les  plus  grands  dangers  dans  la  traversée,  a  été  retenu  pen- 
dant quatre  jours  à  Flessingue. 

tEnfin  ralTaire  est  terminée, et  j'occnperai  demain  Fles- 
singue el  Middelbourg. 

•  Signé  ytxcukVh* 

•  Pour  copie  conforme: 

«  L* adjudant  général  Leclbbb.  » 


EËPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Déparlement  du  Finistère.  —  Extrait  d*une  lettre 
de  Brest,  du  15  pluviôse. 

Dans  la  nuit  du  13  au  14  et  dans  la  matinée  du 
14,  rarmée  navale  est  rentrée.  Les  fatigues  qu'elle 
a  essuyées  pendant  sa  croisière  lui  ont  occasionné  des 
avaries  fàcneuses;  plusieurs  de  nos  vaisseaux» étant 
fort  vieux  n'ont  pu  résistera  la  mer,  toujours  grosse 
dans  celle  saison ,  et  à  des  coups  de  vent  terribles  ciui 
les  oilt  déliés.  Du  nombre  de  ces  vieux  bâtiments 
étaient  le  Scipion,  de  84,  le  Suverhe,  de  74  et  le 
Jacobin,  ou  le  Neuf-Thermidor,  de  86.  Les  terribles 
coups  de  vent  qui  ont  assailli  Tarniéc,  le  9  et  le  1 1  ,ont 
fait  couler  bas  ces  trois  vaisseaux,  à  cent  cinquante 
lieues  au  large.  L'équipage  du  Scipiou  a  été  sauvé, 
à  r^xceplion  de  vingt  et  un  hommes.  Le  Snperbeji  ^ 
sombré  après  avoir  été  abandonné  par  toutson  équi- 


gra 

son  gaillard  d*arrière,  ont  taé  beaucoup  de  monde, 
b*  Série,  —  TomeJL 


et  de  là  se  sont  abattus  sur  les  chaloupes  et  canots 
occupés  à  recueillir  les  hommes,  de  sorte  qu'il  y  a 
péri  beaucoup  de  monde. 

Pendant  cette  sortie,  notre  armée  a  amarinë  cent 
prises  et  une  frégate  de  36.  Les  prises  arrivent  de 
temps  à  autre  ;  mais  on  craint  que  le  terrible  coup 
de  vent  d*avant-hier  ne  nuise  à  la  rentrée  du  reste. 

Le  Majestueux,  de  120,  fait  jouer,  même  en  rade, 
six  pompes,  et  va  travailler  à  étancher  une  grande 
voie  d'eau  qu'il  a  depuis  plusieurs  jours. 

La  division  de  neuf  vaisseaux,  qui  avait  pris  des 
vivres  pour  six  mois,  vient  de  recevoir  ordre  de 
mettre  à  la  voile  sous  trois  jours. 

Département  du  Morbihan.  —  Extrait  d'une  lettre 
^  de  Lorient,  du  16  pluviôse. 

Nous  touchons  au  terme  de  la  guerre  de  la  Vendée, 

fuerre  qu'il  faut  considérer  sous  deux  rapports: 
'abord  la  grande  armée  qui  se  bat  en  règle,  et  avec 
laquelle  les  pourparlers  de  pacification  sont  fort 
avancés;  ensuite  viennent  les  chouans,  qui  ne  sont 
autre  chose  oue  des  brigands  formés  en  troupes  dé- 
tachées, qui  fuient  quand  ils  ne  se  sentent  pas  supé- 
rieurs en  force  et  en  nombre.  Ils  tuent  sur  toutes  les 
routes  et  vont  piller  dans  les  habitations  isolées. 

S  Quoiqu'ils  soient  revêtus  des  signes  de  la  royauté  et 
u  fanatisme,  touslesgouvcrnements  leur  sont  égaux 
pourvu  qu'ils  puissent  piller.  Cependant  il  paraît 
qu'ils  commencent  à  s'adoucir.  Les  mesures  qu'on 
prend  contre  eux  les  rendent  plus  craintifs,  et  leurs 
chefs  s'abouchent  journellement  avec  les  nôtres; 
d'ailleurs  Tamnistie  qu'on  leur  a  accordée  va  expi- 
rer le  20  de  ce  mois. 

Cette  ville  est  environnée  de  détachements  de  ces 
chouans,  qui  s'avancent  quelquefois  jusqu'à  Carhaix, 
mais  ils  sont  de  jour  en  jour  en  plus  petit  nombre  ; 
c'est  encore  trop  pour  les  voyageurs  et  les  voitures 
qu'ils  attaquent.  Au  reste,  l'esprit  public  dans  cette 
ville  est  parlaitement  bon.  Autant  les  têtes  étaient 
courbées  sous  le  joug  de  la  terreur,  autant  les  prin- 
cipes de  justice,  de  liberté  et  de  venté  triomphent 
aujourd'hui  de  toute  pnrt.  Nous  devons  cet  heureux 
changement  à  l'abolition  du  terrorisme,  opérée  par  la 
sagesse  et  l'expérience  de  la  Convention,  à  laquelle 
tous  les  vœux  se  sont  enfin  réunis 


Parii^  le  25  pluviose.-^On  mande  de  Bâie  que  le 
baron  de  Goltx  y  est  tombé  assez  sérieusement  ma- 
lade pour  qu'on  craigne  que  cet  accident  ne  ralen- 
tisse les  progrès  de  sa  négociation.  Quelques  per- 
sonnes prétendent  que  ce  qui  a  retardé  encore  le 
mouvement  de  cette  grande  affaire,  c'est  que  ce  mi« 
nistre  n'est  pas  muni  de  pouvoirs  assez  étendus  pour 
trailer  de  la  paix  sur  les  bases  que  veut  établir  le 
gouvernement  français. 

Des  nouvelles  ultérieures  annoncent  que  le  baron 
de  Goltz  est  mort  à  Bâle,  dans  la  nuit  du  17  au  18 
pluviôse.  C'est  sans  doute  un  nouveau  crime  de  la 
n^aison  d'Autriche. 

—  On  a  publié  ce  matin  dans  toutes  les  rues  de 
Paris  un  arrêté  du  comité  de  salut  public,  qui  or- 
donne aux  propriétaires  et  principaux  locataires  des 
maisons  de  dresser  l'état  des  personnes  qui  logent 
chez  eux,  et  de  le  porter  au  comité  civil  de  la  sec- 
tion. Cette  mesure  a  pour  objet,  d'une  part,  de  con- 
naître tous  ceux  qui  habitent  cette  capitale,  dont  la 
Sopulation  peut  si  singulièrement  influer  dans  les 
ivers  événements  qui,  depuis  six  ans,  se  succèdent 
à  rapidement  les  uns  aux  autres  ;  de  l'autre,  d'éviter 

67 


450 


la  trop  grande  consommation  de  paiu,  que  font  inu- 
tilement plusieurs  citoyens  qui  cèdent  leur  superflu 
aux  habitants  de  la  campagne. 

^Des  lettres  de  Bordeaux,  publiées  dans  plu- 
sieurs journaux,  contiennent  des  plaintes  très-gra- 
Tes  suHa  conduite  tenue  dans  cette  ville  par  le  re- 
prcfspntant  du  peuple  Bordas,  avant  l'arrivée  de 
Treilhard.  On  Taccuse  d'avoir  parlé  au  club  dans  un 
sens  peu  conforme  aux  principes  de  la  justice  et  de 
la  modération,  d'avoir  fait  Incarcérer  une  partie  des 
TÎeux  patriotes,  d*avoir  protégé  le  club  et  favorisé, 
par  rétablissement  d'une  commission  iuridique,  les 
aristocrates  qui  s'en  étaient  rendus  les  meneurs. 
(Car  on  donne  maintenant  ce  nom  à  tous  ces  pa- 
triotes exclusifs  qui,  par  leur  manie  farouche  de 
dominer,  leur  ambition  sordide  et  leurs  crimes, 
étaient  devenus  une  puissance  réelle  dans  l'Etat, 
une  caste  distincte  de  la  masse  du  peuple,  et  qui, 
pendant  longtemps,  ont  constitué  la  seule  aristo- 
cratie proprement  dite  qui  existât  en  France.) 

On  reproche  surtout  a  Bordas  d'avoir  avili  sa  mis- 
sion par  l'empreinte  de  l'esprit  de  parti,  en  se  per- 
mettant publiquement  des  déclamations  contre  la 
conduite  pleine  de  sagesse,  en  même  temps  que 
de  fermeté,  tenue  par  ses  prédécesseurs  Tallien  et 
Tsabeau,  en  provoquant  des  dénonciations  contre 
eux. 

Nous  ne  savons  pas  si  ces  imputations,  quoiqu'el- 
les paraissent  l'effet  d'un  mécontentement  général 
qui  s'est  manifesté  à  Bordeaux,  ne  sont  pas  elles- 
mêmes  l'effet  de  la  passion  on  d'une  prévention  mal 
fondée.  Elles  portent  sur  des  faits  positifs  ;  mais  elles 
peuvent  être  exagérées.  Il  paraît  toutefois  que  celui 
qui  en  est  l'objet  a  reconnu  une  partie  des  torts 
qu'on  lui  reproche,  puisqu'il  s'occupe  à  les  réparer. 

Après  avoir  signé  avec  ses  nouveaux  collègues  la 
suspension  du  club,  émule  des  Jacobins,  il  a  lui- 
même  révoqué  l'arrêté  qiril  avait  pris  pour  rétablis- 
sement de  la  commission  judiciaire. 

Au  surplus,  c*est  un  des  plus  grands  dangers  de 
tout  pouvoir  personnel  que  d'attirer  à  soi  les  presti- 
ges de  l'erreur  et  les  séductions  de  l'intrigue,  comme 
e  plus  grand  abus  des  pouvoirs  illimités,  dont  on  a 
fait  depuis  deux  ans  une  si  terrible  profusion,  est 
d'être  devenus  personnels,  temporairement  monar- 
chiques, enGn  d'avoir  été  confiés  à  des  individus 
isolés,  sans  expérience,  quelquefois  même  sans  in- 
struction, agissant  toujours  sans  frein  et  au  gré  de 
leurs  caprices  et  de  leurs  passions. 

Les  mêmes  représentants,  réunis,  ont  arrêté  qu'ils 
feraient  choix  d'un  noyau  de  vingt-quatre  membres, 
qui  serait  chargé  de  procéder  à  la  formation  d'une 
nouvelle  Société. 

Nous  ignorons  si,  dans  l'état  actuel  de  la  fermen- 
tation des  esprits,  l'établissement  d'un  nouveau  club 
à  Bordeaux  était  plus  nécessaire  ou  moins  dangereux 
çu'à  Paris.  Ce  que  l'on  aura  sans  doute  plus  de  peine 
a  concevoir,  c'est  l'étrange  abus  des  principes  que 
ramène  cetarrêté.  On  a  pendant  longtemps  confondu 
les  Sociétés  populaires  libres,  publiques  et  commu- 
nes à  tous  les  citoyens,  avec  les  associcitions  parti  > 
culières  composées  d'un  petit  nombre  d'hommes 
choisis  exclusivement  à  tous  les  autres  pour  influen- 
cer, sinon  diriger,  Tadministration  publique,  et 
séparés  de  la  masse  du  peuple  par  un  régime  parti- 
culier qui  les  rend  souvent  les  instcuments  des  fac- 
tions plutôt  que  les  organes  de  l'opinion  nationale. 

Le  fouvernement  doit  sans  doute,  et  c'est  alors 
qu*il  s  approche  de  la  démocratie,  rechercher  tous 
les  moyens  de  consulter  l'opinion  des  gouvernés  et 
de  les  associer  à  ses  opérations;  il  doit  partager  le 

Seuple  en  assemblées  délibérantes  pour  l'acceptation 
es  lois  ou  pour  l'administration  particulière  de  chi- 


fi 


que  commune,  et  en  assemblées  populaires  pour 
l'exercice  du  droit  de  pétition  et  de  surveillance.  11 
doit  reconnaître  et  respecter  ces  asseqibiées  :  elles 
sont  le  peuple;  leur  existence  se  lie  essentiellement 
à  celle  de  toute  constitution  libre. 

Mais  appartient-il  bien  au  gouvernement  de  se 
rendre  instituteur  et  directeur  de  clubs,  de  donner 
une  existence  légale  à  des  associations  privées,  d'en 
choisir  les  membres?  Ces  agrégations  ne  se  com- 
posent alors  que  d'hommes  ayant  une  même  opi- 
nion, appartenant  à  un  même  parti;  elles  reçoivent 
d'un  instituteur  capricieux  ou  sectaire  loriflamme 
qui  sera  brisé  demain;  elles  sont  un  foyer  d'intri- 

Sues,  d'agitations  et  de  troubles;  et,  en  usurpant  le 
roit  d'exprimer,  et  plus  souvent  de  former  ou  d'al- 
térer l'opinion  publique,  elles  sont  les  causes  de 
cette  versatilité  d'opinions  et  de  sentiments  qui  fait 
aujourd'hui,  de  l'histoire  de  notre  révolution,  un 
tableau  où  la  confusion  de  toutes  les  couleurs  ne 
laisse  apercevoir  que  des  traits  défigurés  et  destinés 
à  l'oubli. 

Nous  avons  vu  souvent  des  commissaires  afipelés 
à  rendre  compte  de  leur  mission  s'appuyer  unique- 
ment du  témoignage  de  quelques-uns  de  ces  clubs 
au*ils  avaient  eux-mêmes  institués,  organisés,  dont 
lis  avaient  élu  ou  fait  choisir  les  menibres,  et  dont 
ils  s'étaient  assuré  U  faveur  et  l'opinion  par  des  épu- 
rations. Pouvait-oo  se  jouer  plus  étrangement  de  la 
foi  publique? 

A-t-on  jamais  aussi  poussé  plus  loin  l'oubli  des 
droits  du  peuple  que  lorsque,  redoutant,  pour  ainsi 
dire,  de  le  voir  s'assembler  etcomprimant  sa  pen- 
sée, ont  lui  a  désigné  d'onice  les  organes  de  son  vœu 
présumé  ;  lorsque  l'on  a  décoré  de  son  nom  respec- 
table des  réunions  partielles,  usurpatrices  de  ses 
droits;  lorsqii'enlin  ses  représentants  n'ont  plus 
voulu  reconnaître  de  surveillance  légale  que  celle 
d'un  petit  nombre  d'hommes  qui  l'exerçaient  comme 
par  métier,  et  par  l'expectative  des  emplois  publics 
dont  ils  s'étaient  fait  un  patrimoine? 

Dans  beaucoup  de  communes  les  anciennes  So- 
ciétés prétendues  populaires  ont  disparu;  qu'en 
r^ulte-t-il?  C'est  qu'aujourd'hui  les  communes  en- 
tières s'assemblent  périodiquement;  elles  lisent  les 
lois;  elles  adressent  à  la  Convention  leurs  vœux, 
leurs  félicitations;  elles  discutent  paisiblement  leurs 
intérêts,  s'instruisent  plutôt  que  de  délibérer.  Ces 
Sociétés  vraiment  populaires  valent  bien  celles  qui 
en  prenaient  le  nom. 

11  a  clé  une  époque  où  chaque  représentant  arri- 
vant dans  un  département  semblait  y  apporter  l'am- 
bition exclusive  d'y  faire  sa  révolution  ;  alors  ils 
étaient  forcés  d'y  développer  les  plus  grands  pou- 
voirs ;  celui  de  l'opinion,  au  moins  factice  et  appa- 
rente, leur  était  aussi  nécessaire  que  les  coups  de 
l'autorité.  Chacun  avait  besoin  d'instituer  ses  Socié- 
tés populaires,  sa  commission  révolutionnaire,  son 
armcç  même,  ses  agents  publics  et  secrets  :  vils 
moyens  que  les  plus  grands  dangers  publics  pour- 
raient seuls  excuser,  non  légitimer. 

Aujourd  hui  que  la  justice  et  les  principes  doivent 
remplacer  I  irréflexion.  les  caprices  et  l'arbitraire, 
la  Convention  nationale  sentira  sans  doute  qu'elle 
n  a  pas  le  droit,  moins  encore  le  devoir  et  la  néces- 
sité de  composer  ou  de  faire  composer  à  leur  gro, 
par  ses  agents,  des  Sociétés  particulières  qui,  par  ce 
mode  d'institution,  acquièrent  un  caractère  privi- 
légié oui  les  rattache  au  gouvernement  pour  les  sc*- 
fiarer  des  citoyens,  et  en  Tait  des  corporations  dont 
a  liberté  ombrageuse  a  acquis  le  droit  de  se  défier. 

Si  l'on  continuait  à  reconnaître  avec  cette  espèce 
d'authenticité  toutes  les  réunions  partielles  qui  for- 
méat  des  scission  dans  le  peuple,  il  iaudrait  en  ve- 


451 


nir  à  attribuer  une  existence  lëgale  même  au  groupe 
qu'un  orateur  séditieux  rassemble  sur  la  place  pu- 
bViqnt  ;  et  la  tribune  mobile  du  premier  charlatan 
deviendrait  le  siège  de  là  souveraineté  nationale. 


COMITE  DE  SALUT  PUBLIC. 

Arrêté  du  eomilé  de  salui  publie,  du  24  ptuvto^f» 
l*an  3?  de  la  république  française. 

Le  comité  de  salut  public  arréle  : 
An.  I*'.  La  commission  des  relàlions  extérieures  est  au- 
torisée à  délivrer  des  passeports  pour  la  Hollande  aux  ci- 
toyens qui  sont  dans  les  cas  prévus  par  la  loi  du  7  décem- 
bre 1792,  el  qui  auront  rempli  les  formalités  qu*elle prescrit 
II.  Ces  passeports  n*auroni  d'effet  qu^après  avoir  été  vi- 
sés par  le  comité  de  salul  public 

m.  Le  présent  arrêté  sera  inséré  au  Bulletin  decorret- 
poudaoce. 

Le$  membret  du  cûmité  de  êaUt  publie  ; 
5i^fi^CAiiBAciaks,  Pilrt,  Boisst,  J.-P.  Ciaxal,  Mii- 
UM  (  de  Douai  ),  J.-P.  Lacohbi  (du  Tarn  )«  GAa- 
MOT,  Dubois-Crancé. 

Autre  arrêté  du  comité  de  saM  publie,  du  25 
pluviôse. 

Le  comité  de  salut  public,  considérant  qu*il  importe 
d'assurer  rexécution  de  la  loi  dn  S*  jour  des  saosculottl- 
des,  arrête: 

Art.  I*%  Tous  les  militaires  qui  se  rendront  à  Paris  se- 
ront tenus,  dans  les  vingt-quatre  heures  à  dater  du  jour  de 
leur  arrivée,  de  présenter  au  comité  de  salut  public,  sec- 
tion de  la  guerre  ,  leurs  passeports  ou  congés,  pour  être 
vérifiés  et  consentis;  faute  de  cette  Tormalité,  lesdils  pas- 
seports ou  congés  ne  seront  pas  valables  «  et  ceux  qui  en 
seront  porteurs  seront  traités  suivant  lu  rigueur  de  la  loi. 

IL  Tous  les  militaires  actuellement  à  Paris  sont  assujet- 
tis a  la  même  formalité  dans  les  trois  jours  qui  suivront  la 
publication  du  présent  arrêté  par  la  voie  du  Bulletin  de 
correspondance. 

Signé  les  membres  du  eomilé  de  salut  publie* 

VARIÉTÉS. 
Kotiee  sur  la  vie  de  Sieyés^  membre  de  la  première  Assem- 
blée nationale  et  de  la  Convention,  écrite  à  Paris,  en 
messidor,  2*  année  de  Tère  républicaine.  Prix  :  30  anus, 
et  40  sous  fi  auc  de  port. 

En  Suisse;  et  se  trouve  à  Paris  chex  Maradao,  libraire, 
me  du  Cimetière- André-des-Arcs,  n*  9. 

L*avant-propos  de  cet  écrit,  qui  parait  depuis  quelques 
jours,  laissé  croire  quMl  est  fait  par  Sieyès  loi-même,  et  il 
o*e8t  pus  difficile  de  se  le  persuader  :  on  j  retrouve  le 
style  serré,  les  pensées  profondes  de  Tauteur  de  Qu^est^ee 
que  le  iiers^tat 

Dans  ce  tableau  rapide  des  événements  et  des  hommes, 
depuis  la  révolution,  il  répond,  non-seulement  à  ceux  qui, 
par  haine ,  par  envie ,  par  esprit  de  parti ,  se  sont  attachés 
à  décrier  ses  princi|)es  politiques,  à  ceux  qui  Tout  représenté 
comme  mêlé  aux  intrigues  révolutionnaires,  mais  encore 
à  ceux  qui ,  sans  vouloir  le  calomnier,  et  interprétant  mal 
son  silence  nécessaire ,  ont  cru  pouvoir  accuser  son  carac* 
tère  de  misanthropie  condamnable. 

Ce  réveil  d*un  publiciste  dont  les  opinions  n*a valent  rien 
de  compatible  ni  avec  le  machiavélisme  des  castes  privilé- 
giées, ni  avec  les  moyens  désastreux  des  révolutionnaires 
outrés,  est  d'un  présage  favorable  à  l'opinion  publique. 

Cet  exposé  de  la  vie  de  Sieyès  ne  renferme  pas  seulement 
des  explications  individuelles  et  des  notions  historiques 
curieuses  ;  on  y  trouvera ,  sur  ce  que  nous  étions  il  y  a  peu 
de  temps  et  sur  ce  que  nous  devons  être,  des  idées  fortes, 
des  traits  de  lumière  capables  d'éloigner  les  inquiétudes  des 
amis  de  Tordre  social,  et  de  ranimer  les  espérances  de 
ceux  qui  ont  toujours  chéri  la  liberté  et  Tégalité. 

Quelques-uns  peut-être  lui  reprocheront  de  Tâprelé  et 
quelques  nuances  d'orgueil  ;  mais  il  appartient  à  l'homme 
calomnié,  qui,  ouvrier  dans  la  révolution,  a  vu  briser  suc- 
ccssiYcment  tons  le»  instmmenu  de  la  raison  sodalci  qui 


a  vu  de  près  Timprobité  des  uns,  les  passions  et  Pimpérilte 
de  beaucoup  d'autres ,  de  laisser  échapper  quelques  mots 
d'indignation  et  d'amertume. 

On  en  voit  même  quelques  traiu  danseette  phrase,  qui 
parait  indiquer  le  philosophe  de  Genève. 

•  Hélas  1  un  écrivain  justement  célèbre,  qui  serait  mort 
de  douleur  s'il  avait  connu  ses  disciples,  un  philosophe 
aussi  parfait  de  sentiment  que  faible  de  vues,  n'a-t-il  pas, 
dans  ses  pages  éloquentes,  riches  en  détails  accessoires, 
pauvres  au  fond,  confondu  lui-même  les  principes  de  Part 
social  avec  les  commencements  de  la  société  humaine? 
Que  dire  si  Ton  voyait ,  dans  nn  aotv  genre  de  méca- 
nique,  entreprendre  le  radoub  ou  la  construction  d'un 
vaisseau  avec  la  seule  théorie,  avec  les  seules  ressources 
des  sauvages  dans  la  construction  de  leurs  pirogues  ?  » 

Certes,  lors  même  que  Rousseau  n'aurait  pas  publié  ses 
méditations  sous  le  nom  de  Contrat  soeiat,  qui  n'indique 
en  effet  qu'un  traité  sur  les  principes  élémentaires  et  les 
premières  bases  de  l'ordre  social ,  son  livre  sur  le  gouver- 
neinent  de  Pologne  prouverait  qu'il  savait,  comme  politU 
que,  indiquer  les  ressources  propres  à  un  gouvernement 
usé,  comme  il  savait  aussi,  en  philosophe,  remonter  aux 
grandes  vérités  qui  constituent  les  droits  des  peuples;  tâche 
d'autant  plus  précieuse  que  ceux-ci,  par  leur  insouciance, 
et  les  gouvernements,  par  leurs  usurpations,  n'ont  toujours 
été  que  trop  disposés  à  les  oublier. 

L'auteur  de  la  notice,  après  avoir  tracé  Thistorique déa 
premières  années  et  des  études  de  Sieyès ,  parle  ainsi  de 
ses  dispositions  intellectuelles  et  de  ses  occupations  philo- 
sophiques. Ce  tableau ,  qui  est  en  même  temps  celui  de 
son  caraaère,  donne  la  raison  du  silence  qu'on  lui  repro- 
chait d'avoir  gardé  si  longtemps. 

«  La  qualité  dominante  de  son  esprit  est  la  passion  du 
vrai,  dont  la  recherche  l'absorbe  presque  involontairement  : 
il  n'est  point  content,  s'il  lient  un  sujet,  qu'il  ne  Tait  ap- 
profondi ,  analysé  dans  toutes  ses  parties,  et  ne  Tait  en- 
suite reconstruit  dan«^  tout  son  ensemble;  mais,  le  besoin 
de  savoir  une  fois  satisfait,  il  reste  avec  ses  notes  et  ses 
tableaux  analytiques,  qui  ne  peuvent  être  que  pour  lui.  La 
mise  au  net,  le  remplissage  des  vides  lui  sont  insupporta- 
bles; il  a  déjà  passé  à  d'autres  méditations.  S*il  s'est  permis 
quelques  inBdélités  à  cette  sorte  de  paresse,  ce  n'a  été 
qu'entraîné  par  le  sentiment  d'un  grand  intéK't  public,  et 
dans  des  moments  où  il  avait  l'espoir  probable  d'être  utile.» 

Abordant  ensuite  l'état  funeste  de  terreur  et  d'abus  de 
toute  autorité,  cette  lacune  de  la  justice  et  de  la  raison  pu- 
blique, Tauteur  s'exprime  ainsi  : 

«  L'homme  pur,  l'homme  b  principes,  l'ami  sincère  de 
sa  patrie,  surtout  si  son  nom  avait  le  malheur  d'être  connu 
dans  la  révolution ,  n'était  pas  seulement  étranger,  il  était 
ennemi;  sa  personne  appartenait  à  la  rage  de  toutes  les 
factions  :  elles  le  veillaient  le  noircissaieni,  le  déchiraient 
a  l'envi ,  et  rien  n'était  examiné  tout  était  reçu,  et  parais- 
sait bon  à  la  défiance  avide  de  mal  penser,  à  l'ignorance  la 
plus  ombrageuse  qui  ait  existé  ^ur  le  globe.  L'ame  navrée 
renfermait  avec  douleurrinévitable  pensée  que  c'était  mal- 
heureusement la  le  caractère  dominant  même  de  la  pin- 
part  des  hommes  de  bonne  foi...  Telle  était  déjà  Tactiflté 
de  la  désorganisation  générale^  qu'elle  avait  passé  jusque 
dans  les  têtes...  Vainement  auriei-vous  cherché  un  point 
fixe  dans  l'opinion  publique;  l'opinion  publique  était  dans 
le  silence.  « 

Voici  comme  l 'auteur  peint  les  drconslances  qui  préeè- 
dèrent  et  qui  suivirent  sa  nomination  à  la  Convention. 

Il  avait  été  voir  un  de  ses  amis  dans  une  campagne  éloi- 
guée  de  plus  de  soixante  lieues.  Il  y  était  lorsqu'il  apprit  la 
journée  dn  10  août.  Ce  grand  événement  ne  l'élonna  point; 
on  devait  s'y  attendre.  Il  écrivit  à  Paris  :  •  Si  l'insurree- 

•  tion  du  14  juillet  a  été  la  révolution  des  Français,  celle  du 

•  10  août  sera  appelée  la  révolution  des  patriotes.  Mais, 

•  ajoutait-il ,  le  corps  législatif  s'en  est-il  emparé  ?  et  va-t- 
«  Il  la  diriger  sans  partage  en  attendant  la  nouvelle  Con- 
«  vention?» 

fl  Les  événements  de  la  fin  d*ao(kt  et  dn  commencement 
de  septembre  prouvèrent  que  le  corps  législatif  avait  fai- 
bU.  11  n'osa  saisir  les  rênes  dn  gouvernement.  Les  nouvel- 
les journées  furent  indignes  de  celle  du  10  aoûL 

•  11  apprend  qu'il  vient  d'être  nommé  député  à  la  Con- 
vention par  trois  départemental  II  se  met  en  route  et  arrire 


at 


I  Parii  et  ft  la  CdoveoUon  !•  même  Joar,  le  tl  septembre. 

«  Aux  objets,  aux  figures  qui  de  toutes  parts  étonnent 
ses  regards,  aux  discours  qui  frappent  son  oreille ,  il  pou- 
fait  sans  délire  se  croire  traosponé  par  une  puissance  ma- 
gique dans  un  pays  inconnu.  Il  est  étranger  à  tout  ce  qu'il 
reucofilret  aux  hommes  accrédités  surtout, dont  sa  malheu- 
reuse étoile  semble  vouloir  lui  laire  une  loi  de  se  rapprocher. 

II  s*arrâlc,  il  observe;  il  pressent  Tenireprise  formée  par 
eux  de  maîtriser  et  de  perdre  la  Coof  eniion  que  ces  hom- 
mes avilissaient  déj&  par  leur  présence. 

fl  II  est  étranger  aux  Jacobins»  aux  ministres,  au  foyer 
infernal  des  bureaux  de  la  guerre,  et  fc  cette  commune  mu- 
nicipale (i)  où  les  événements  de  septembre  avalent  trans- 
porté toute  la  iorce  réelle,  où  les  idées  les  plus  incohé- 
rentes qui  aient  deshonoré  le  cerveau  humain  passaient 
pour  un  système  de  démocratie  digne  du  peuple  français  ; 
où  les  formes  sales,  les  moeurs  abjectes,  le  langage  cor- 
rompu» les  appétits  brutaux,  sortis  des  cloaques  les  plus 
impurs,  étaient  regardés  comme  le  signe  d*un  patriotisme 
ardent,  comme  la  seule  preuve  d*uD  amour  sincère  de  Té- 
galité,..  Malheur  à  celui  qui  prétait  Toreille  aux  conversa- 
tions, aux  groupes,  aux  divers  oraleursl  il  sentait  rabat- 
tement du  désespoir  descendre  dans  toutes  les  facultés  de 
iOD  ame  en  entendant  Tinfame  prostitution  qui  se  faisait 
des  termea  les  plus  chers  ao  cœur  français....  Ils  avaient 
Tair  de  8*étre  proposé  ce  terrible  problème  :  Comment  faire 
la  contre-révolution  avec  les  mots  liberté,  égalité?  et  de 
•*ètre  répondu:  Corrompons  la  langue;  que  l'égalité  ne 
ioit  plus  Tégalité  des  droits  et  la  garantie  sociale  d*uo  bien- 
être  général,  maisTégalité  renversée  des  droits,  etTéga- 
Uié  de  misère... 

•  Juste  ciel  1  et  quiconque  témoignait  du  mépris  pour 
Cti  daugereuses  extravagances  se  rendait  suspect  ;  il  n*élait 
pas  fc  la  hauteur  1  Que  de  maux  sont  sortis  de  Pabus  que 
ees  misérables  ont  fait  des  mots  révolution,  révolutionnaires! 
Entendre  par  là  une  mutation  politique,  un  changement 
de  constitution  ou  de  gouvernement,  et  les  avantages  sue- 
eessifsd'une  bonne  législation,  c'était  vouloir  se  rapprocher 
des  traîtres  qui  avalent  prêté  le  serment  du  Jeu  de  Paume 
et  miné  la  royautéen  1789,  des  modérés  qui  avaient  faincu 
le  tyran  et  proclamé  la  république  en  1792. 

«  Une  véritable  révolution ,  comme  eux  youlalent  la 
faire,  devait  être  un  bouleversement  général,  et  la  ruine 
complète  de  tous  les  rapports  qui  lient  les  hommes  et  les 
choses  dans  Tordre  civil  et  dans  l'ordre  économique  ;  cela 
s^appelait  la  régénération  complète  d*un  peuple  corrompu 
par  Taristocratie  des  lumières ,  du  commerce  et  des  ri- 
chesses... 

•  Si  rhistoire  nous  apprend  que  les  crises  politiques  en- 
traînent toujours  trop  de  désastres,  malgré  tous  les  soins 
possibles  et  de  quelques  précautions  qu^on  s'arme  pour  les 
prévenir,  les  adoucir,  les  réparer,  ils  en  concluaient,  eux, 
qu*il  ne  fallait  ni  soins,  ni  précautions;  que  les  maux  par- 
ticuliers et  publics  sont  Tesssence  d*une  révolution...  » 

Si  Ton  voulait  citer  tout  ce  qui ,  dans  celte  brochure 
très-peu  volumineuse,  est  susceptible  de  plaire  fc  la  curio- 
aité ,  quant  aux  faits  et  fc  la  manière  dont  Tauteur  les  voit, 
tout  ce  qui  peut  intéresser  Tesprit  et  le  vrai  patrioti5me 
par  la  rectitude  de  ses  vues,  cette  analyse  excéderait  les 
bornes  de  notre  feuillet  nous  la  terminerons  en  citant  les 
réflexions  suivantes  t 

•  L'influence  de  la  raison  est  un  phénomène  que  peu 
d'hommek  savent  apprécier.  Nous  avons  été  forcés  d*en 
faire  la  remarque,  surtout  au  commencement  de  la  rcWo- 
lution ,  où  cette  influence  s'est  puissamment  exercée  sur 
les  aO'aires  publiques.  Nous  avons  vu  les  gens  du  monde, 
étonnés  de  ses  effets,  les  attribuer,  et  ne  pouvoir  faire  au- 
trement que  de  les  attribuer  fc  Tintrigue;  d'autres  pensées 
étant  étrangères  fc  leur  conception,  comme  il  le  serait  fc 
leur  volonté  de  se  déterminer  sans  un  intérêt  personnel. 

t  La  raison,  qui  est  la  morale  de  la  tète,  comme  la 
justice  est  lu  morale  du  cœur,  sont  pour  eux  des  couleurs 
pour  des  aveugles.  L'amour  de  rhumanilé,  le  désir  de  la 
perfection  sociale,  l'attachement  passioné  d'un  esprit  droit 
fc  de  si  grands  objets  passent  leur  portée  morale  ;  ils  ne 
peuvent  y  croire.  Ils  ne  soupçonnent  même  pas  que  l'art 
aocial  puisse  réellement  occuper  et  enthousiasmer  lesartis- 

(i)  Ce  tt*éuit  plus  celle  du  10  août.  Remarque  essentielle. 
{Hou  de  Vauteur.)  A.  M. 


tet  phfloaophef ,  eomme  Tattraft  de  la  petonire,  le  goût  dé 
la  belle  architecture,  la  recherche  d'une  belle  harmonie 
a*emparent  du  musicien,  du  peintre  et  dé  Tarcliitecte. 
Mais  ils  croient  fc  l'ambition,  fc  ta  vanité,  toujours  fc  dea 
motifs  immoraux  pour  toutes  les  actions  de  la  vie...  Or, 
des  hommes  qui  prennent  ainsi  les  limites  de  leur  individu 
pour  celles  de  la  nature  humaine  n'ont  pas  dû  davantage 
concevoir  la  retraite  certaine,  la  vie  contemplative  et  vo- 
lontairement obscure  de  celui  qui,  après  avoir  eu  degranda 
succès  de  raison ,  se  réfugie  dans  le  silence  quand  ce  n'est 
plus  elle  qu'on  peutécouter....  • 

Ginguené,  adjoint  à  la  commission  de  Vinsiruetion 
publique,  à  Clémenl-de-Ris^  adjoint  de  la  même 
commission, 

Paris,  S5  pluviôse,  Tan  5^  de  la  république 

française. 

fl  Je  lis  dans  le  Perlet  d'aujourd'hui  votre  lettre  fc  la 

Convention  nationale ,  et  un  article  du  journaliste  sur 

cette  lettre.  Je  vous  prie  de  vous  expliquer  clairement  n 

'  publiquement  vous-même  sur  ce  que  vous  entendex  par 

l'intrigue  qui  s'est  agitée  autour  de  vous. 
I       fl  Vous  voodrex  bien  exiger  du  jeune  homme  qui/édige 
ce  journal  qu'il  s'explique  aussi  sur  cctle  intrigue  dont 
i   vous  étiez  le  surveillant;  comme  il  tient  tout  de  vous,  il 
n'a  rien  fc  vous  refuser. 

«  Toutes  ces  étranges  suppositions  tombant  en  général 

sur  la  commission  dont  je  suis  membre,  j'ai  droit  de  V'Us 

demander  ces  explications  ;  je  parlerai  fc  mon  tour;  c'est 

moi  que  j'amour  de  la  paix  et  le  bien  du  service  public  ont 

'   forcé  au  silence  :  je  le  romprai.  GiNceiNâ.  • 

CONVENTION   NATIONALE. 

PréMidenee  de  Barres. 
SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU  24  PLUVIOSE. 

Boissy  d'Anglas  fait  lecture  d'une  lettre  de  la  mu- 
nicipalité de  Dunkerque,  qui  porte  ce  qui  suit  : 

•  Nous  nous  faisons  un  devoir  de  vous  remettre 
sous  les  yeux  un  acte  de  générosité  de  nos  frères 
d'armes  du  9^  bataillon  des  sapeurs,  en  garnison 
dans  notre  commune. 

«  Le  conseil  général ,  touché  de  la  misère  à  laquelle 
allait  être  exposée  une  classe  nombreuse  de  citoyens 
que  la  saison  rigoureuse  et  le  froid  excessif  avait 
mise  dans  l'inaction  la  plus  complète,  se  détermina 
à  faire  une  collecte  pour  subvenir  aux  besoins  pres- 
sants de  nos  trères  dans  Tindigence  ;  nos  concitoyens 
s'empressèrent  de  venir  à  leur  secours.  Bu  deux 
jours,  une  somme  de  60,000  liv.  fut  recueillie,  et  le 
sort  des  indigents  reçut  le  plus  prompt  adoucisse- 
ment. 
I  •  Au  milieu  de  ce  dévouement  général ,  les  braves 
sapeurs  n'ont  pas  voulu  rester  les  témoins  tran- 
quilles de  Temprcssement  des  habitants  de  notre 
commune  à  exercer  les  devoirs  que  l'humabilé  pres- 
crit ;  nous  les  avons  vus ,  avec  autant  de  sensibilité 
que  vous  en  éprouverez  à  l'apprendre,  venir  dépo- 
ser 1,262  livres  5  sous,  résultat  d'une  journée  de 
leur  solde. 

•En  vous  inslruisanl'tf'une  pareille  conduite, c'est 
vous  présenter  la  récompense  de  vos  travaux,  qui 
ne  tendent  qu'à  prouver  que  la  liberté  est  la  mère 
de  toutes  les  vertus. 

•  Nous  vous  faisons  part  atissi  que  le  consul  des 
Etats-Unis  de  l'Amérique,  tant  en  son  nom  qu'en 
celui  des  Américains  résidant  en  notre  commune,  a 
fait  un  don  s'élevant  à  2,000  livres.  • 

L'assemblée  applaudit,  et  ordonne  Tinsertion  au 
Bulletin  de  cette  Adresse. 

—  Les  citoyens  de  Bar-sur-Ornain  invitent  la 
Convention  à  frapper  sans  pitié  et  sans  délai  les 
che£5  de  la  faction  des  terroristes;  ils  ajoutent  : 


45S 


•Lëgislatenrs,  Toas  pouTez  tout,  et  si  vons  négli- 
gez de  prendre  les  mesures  propres  à  sauver  le  peu- 
ple, craignez  qu*un  jour  on  ne  vous  demande  compte 
du  bien  que  vous  aurez  neglic'ë  de  faire.  • 
^  —  Des  citoyens,  membres  oe  la  Société  populaire 
de  Thouars,  instruisent  la  Convention  nationale 
au'ils  ont  déposé  sur  l'autel  de  la  patrie  une  somme 
ae  2,500  livres,  pour  aider  à  la  construction  d*un 
vaisseau. 

—  Les  membres  de  la  Société  populaire  de  Va- 
lenciennes , département  du  Nord,  annoncent  à  la 
Convention  le  don  civique  d*une  lampe, de  sa  chaîne 
et  sa  couronne,  le  tout  d^argent,  appartenant  au  ci- 
devant  corps  des  chapelier,  de  cette  commune.  La 
Société  qui  a  reçu  cette  offrande  pour  la  faire  passer 
au  trésor  public  a  délibéré  que  la  couronne  serait 
à  l'instant  foulée  aux  pieds,  ce  qui  a  été  fait  sur-le- 
champ. 

—  Les  citoyens  composant  la  Société  populaire  de 
Toulouse,  après  avoir  félicité  la  Convention  sur  son 
courage  et  ses  succès  immortels  contre  les  ennemis 
de  la  liberté  publique,  s'expriment  en  ces  termes  : 
«Nous  reconnaissons  tous  que  la  masse  entière  du 
peuple  français  est  le  seul  souverain  légitime,  que 
la  Convention  est  le  centre  unique  de  sa  puissance. 
Périsse  à  jamais  toute  Société,  tout  mortel  téméraire 
qui  oserait  porter  ses  regards  au-dessus  de  la  repré- 
sentation nationale  1  Plus  de  roi,  plus  de  tyran  d'au- 
fune  espèce!  Nous  voulons  la  lioerté,  Tegalitédes 
droits,  rhumanité,  la  justice,  et  par  elle  la  républi- 
que une  et  indivisible. 

«  Nous  jurons  de  nous  unir,  pour  terrasser  la  li- 
cence, pour  servir  de  rempart  à  la  Convention  pour 
garantir,  au  péril  de  nos  vies,  le  règne  des  lois  et  de 
iVqnité. . 

CoBBN-FusTiER,  au  uom  du  comité  des  finances  : 
La  loi  du  3  septembre  1793,  relative  à  l'emprunt 
forcé,  attribua  à  la  municipalité  de  Paris  les  con- 
testations qui  pourraient  en  résulter  en  première 
instance  pour  Paris,  sauf  le  recours  au  départemenL 

Les  fonctions  de  cette  municipalité  ayant  été  sus- 
pendues, la  loi  du  26  vendémiaire  dernier  transmit 
Tattribution  au  comité  contentieux. 

Depuis,  et  par  la  loi  du  23  frimaire  suivant,  la 
commission  des  contributions  directes  de  la  com- 
mune de  Paris  a  été  chargée  de  connaître  de  toutes 
les  contestations  confiées  au  comité  contentieux. 
.  Ces  lois  ne  renferment  aucune  disposition  sur  la 
contribution  extraordinaire  de  guerre ,  de  manière 
que  les  contestations  qui  en  résultent  sont  paraly- 
sées, et  cet  inconvénient  a  excité  la  sollicitude  du 
département. 

Votre  comité  des  finances ,  section  des  contribu- 
tions, en  a  été  instruit;  il  a  combiné  les  moyens 
propres  à  réparer  l'omission  ;  il  a  considéré  que  ces 
sortes  de  contestations  font  suite  à  celles  relatives  à 
l'emprunt  forcé,  et  qu'elles  doivent  être  comprises 
dans  le  même  cadre  ;  en  un  mot,  qu'elles  doivent 
c[re  attribuées  à  la  commission  des  contributions 
directes  de  Paris.  Je  viens,  en  conséquence,  vous 
proposer  .au  nom  du  même  comité,  le  projet  de  dé- 
cret suivant  : 

•  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu 
1c  rapport  de  son  comité  des  finances,  section  des 
contributions,  décrète  ce  qui  suit  : 

«  La  connaissance  des  contestations  relatives  à  la 
contribution  extraordinaire  de  guerre,  pour  le  dé- 
partement de  Paris,  est  attribuée  à  la  commission 
des  contributions  directes  de  la  même  commune, 
ét.'iblie  par  la  loi  du  23  frimaire  dernier,  pour  pro- 
céder en  conformité  des  dispositions  de  la  même 
loi.  - 

Ce  décret  est  adopté. 


—  Clauzel  lit  une  lettre  du  repr^^ntaotdu  peu* 
pie  près  les  armées  du  Nord  et  de  Sambre-et-Meuse* 
datée  de  Valenciennes. 

11  y  est  dit  que  les  Hollandais  plantent  partout  des 
arbres  de  la  lioerté,  et  se  donnent  en  se  rencontrant 
le  baiser  fraternel  Ils  poursuivent  les  Anglais  à 
coups  de  canon ,  et  veulent  les  faire  boire  dans  le 
Zuyderzée. 

Le  représentant  fait  part  ensuite  d'une  conversa- 
tion qu*il  a  eue  avec  les  princes  de  Salm-Salm  et 
de  Hotienlohe,  prisonniers  de  guerre,  qui  se  rendent 
actuellement  à  Paris.  Ces  deux  individus  reconnais- 
sent enfin  qu'ils  ont  été  trompés  sur  le  compte  des 
Franiçais  par  les  émigrés. 

Renvoyé  au  comité  de  salut  public. 

—  La  Société  populaire  d'Bvreux  fait  hommage 
des  principes  de  républicanisme  qu'elle  professe,  et 
de  son  horreur  pour  le  terrorisme. 

RiCHOux  :  Il  faut  rendre  justice  au  patriotisme  de 
cette  Société,  qui  a  eu  l'honneur  d'être  rayée  de  la 
liste  de  correspondance  par  les  Jacobins. 

—  Le  représentant  du  peuple  Jean  Debry  adresse 
à  la  Convention  la  proclamation  suivante,  aux  ci- 
toyens des  départements  de  la  Drôme ,  de  Vaucluse 
et  de  TArdèche. 

•  En  nous  formant  en  Société,  nous  avons  stipulé 
anathème  aux  tyrans  de  toute  espèce  et  de  toute 
robe  ;  mais  nous  n'avons  pas  voulu  que,  sous  des 
titres  quelconques,  on  substituât  aux  préjugés  an- 
ciens des  préjugés  nouveaux  et  non  moins  horribles* 
Nous  avons  proscrit  les  ordres  arbitraires,  pour  nous 
soumettre  aux  lois;  nous  avons  chassé  et  puni  les 
rois  et  les  triumvirs,  pour  ne  reconnaître  que  la 
représentation  nationale ,  organe  de  la  volonté  du 
peuple  dont  elle  émane. 

• Citoyens,  le  blé  ne  croît  pas  dans  le  sane, 

l'industrie  ne  germe  point  sur  des  cadavres,  et  Ta 
paix  de  la  guillotine  n  est  autre  chose  que  le  silence 
et  le  néant  du  tombeau.  La  liberté  n'est  point  la  li- 
cence, l'égalité  n'est  point  la  destruction  :  c'est  par 
des  triomphes  que  nous  avons  assuré  notre  considé- 
ration au  dehors,  c'est  par  l'équité  que  nous  fonde- 
rons notre  félicité  au  dedans  :  tôt  ou  tard  l'injustice 
retombe  sur  la  tête  de  celui  qui  la  commeL 

• Entendez  ces  hommes  de  sang  exagérer  Tes 

besoins  amenés  par  Tintempérie  de  la  saison,  s*at- 
tendrir  hypocritement  sur  les  maux  qu'ils  ont  prépa- 
rés, et  sur  les  plaies  que  la  Convention  est  occupée 
à  fermer.  Ne  s'emble-t-il  nas  qu'ils  aient  les  élé- 
ments à  leur  disposition?  Oîi  est  le  bien  qu'ils  ont 
fait,  et  quel  est  celui  qu'ils  pourraient  taire  ?  Ils  ont 
égaré  quelques  malheureux  dont  ils  se  sont  fait  des 
satellites  ;  ils  ont  vécu  dans  l'abondance  en  feignant 
de  pleurer  la  misère  du  peuple  ;  ils  ont  proscrit  le 

§rand  nombre,  et  n'ont  laisse  d'autre  espoir  à  l'in- 
igent,  qu'ils  calomniaient  en  ce  point,  que  de  par^ 
tager  des  dépouilles. 

•  plutôt  souffrir  et  périr,  mais  périr  libre  et  a  la 
face  du  ciel,  que  de  retourner  dans  l'antre  épouvan- 
table qu'ils  jonchaient  de  sang  et  de  corps  morts,  et 
où  la  stupeur  ne  laissait  apercevoir  de  vivant  que 
des  bourreaux  et  des  victimes! 

«  Enfants  de  la  patrie,  généreux  frères  d'armes, 

fières,  mères,  épouses,  souffrirez- vous  que  la  révo- 
ution  rétrograde? Chacun  ici- peut  donner  le  signa!, 
et  dire  non  :  la  république  ne  deviendra  point  un 
amas  de  décombres  et  de  ruines  ;  les  rois,  nos  enne- 
mis, ne  souriront  point  avec  dédain  aux  mots  de  li* 
berté  et  d'égalité ,  les  vues  bienfaisantes  de  la  Con- 
vention ne  seront  point  sans  effet  ;  les  mesures  prises 
par  le  gouvernement  pour  assurer  la  subsistance 
du  peuple  et  des  armées,  pour  aider  l'indigent 
dans  son  travail»  ne  seront  point  trompées  ;  nos 


AU 


triomphes  ne  s*efraceront  point  ;  nous  voulons  être 
heureux,  c'est-à-dire  être  libres  ou  mourir.  Nous  ne 
re verrons  plus  ces  scènes  atroces  et  calamiteuses 

3ui  se  sont  passées  sous  nos  yeux  ;  nous  n*enten- 
rons  plus  les  cris  de  rage  des  Furies  dansant  autour 
de  rinstrument  du  supplice;  nous  ne  pleurerons 
plus  en  secret  Tabsence  des  vertus  sociales  et  des 
jouissances  domestiques;  nous  n'aurons  point  de 
guerres  civiles;  nous  ne  reverrons  plus  avec  effroi, 
ni  ces  horreurs,  ni,  au  milieu  d'elles,  le  royahsme, 
Taristocratie,  le  fanatisme  levant  leurs  têtes  hideu- 
ses, et  attendant,  au  sortir  des  bras  des  ëgorgeurs, 
la  nation  sanglante  et  déchirée  pour  Tencnaîner  de 
nouveau.  Non  !  Robespierre  tout  entier  entrera  dans 
la  tombe. 

•  Magistrats,  s'il  se  fait  des  rassemblements,  ne 
craignez  pas  d'y  porter  les  yeux.  Quel  est  donc  l'im- 

Eudence  de  sept  a  huit  individus  qui,  ayant  bu  toute 
onte^ne  pouvant  plus  reculer,  se  disent  les  pa- 
triotes par  excellence  ;  qui  se  plaignent  de  Toppres- 
sion  parce  qu'on  réorime  la  licence,  le  pillage  et  le 
vol  ;  qui  regrettent  le  temps  où  ils  faisaient  contri- 
buer leurs  communes  ;  qui  marchent  armés  comme 
dans  un  pays  ennemi  ;  qui  menacent  les  autorités; 

aui  correspondent  entre  eux  ;  qui  forment  au  milieu 
u  peuple  un  peuple  affreux  et  séparé  ;  qui  boivent 
à  la  santé  du  mois  quand  leur  dernière  heure  sonne, 
et  qui  font  des  libations  sur  le  cercueil  des  trium- 
virs? Ils  osent  calomnier  la  Convention  !  l^norcnt- 
ils  que  c'est  d'elle  qu'est  sorti  le  21  janvier,  jour 
fatal  h  la  royauté  plus  encore  qu'aux  rois  nos  enne- 
mis? Ignorent-ils  qu'elle  est  fille  du  peuple,  cette 
Convention ,  et  qu'après  avoir  assuré  son  bonheur 
le  prix  le  plus  doux  de  ses  travaux  sera  de  rentrer 
dans  le  sein  de  ce  peuple  qui  l'a  envoyée?  Oui,  c'est 
lui  tout  entier  que  la  Convention  défend,  quand  elle 
veut  lui  conserver  son  bien  le  plus  précieux,  sa  mo- 
rale, son  cœur  et  ses  vertus.  Brigands,  vous  seuls 
pouvez  parler  de  royauté ,  vous  seuls  pouvez  vou- 
loir un  roi  !  Vous  l'avez  voulu,  vous  eu  aviez  un  ; 
c'était  Robespierre,  et  il  vous  en  faudrait  un  autre, 
pour  Que  sa  tyrannie  reconnaissante  prononçât  l'im- 
punité de  vos  crimes.  Ah  !  la  chose  publique  serait 
sauvée  si  les  gens  de  bien  trop  faibles,  si  les  vrais 
républicains  trop  confiants  mettaient,  pour  établir 
le  règne  de  la  vertu,  la  mc'me  activité  que  les  scélé- 
rats mettent  encore  pour  le  détruire. 

•  Citoyens  de  la  Drflme ,  de  Vauclusc  et  de  TAr- 
dèche ,  tendons  les  bras  au  natriote  égaré  qui  re- 
connaît son  erreur  ;  mais  anatnèine  aux  hommes  de 
sang!  J'en  dépose  la  promesse  sollennelle  au  milieu 
de  vous  :  puisse-t-elle  enflammer  votre  courage, 
réunir  vos  esprits,  faire  disparaître  les  aniinosités 
particulières  que  l'on  décore  du  nom  d'intérêt  pu- 
blic, et  produire  enfin,  sous  le  drapeau  de  la  loi, 
cette  grande  insurrection  morale ,  ce  concert  una- 
nime de  volontés  qui,  criant  liberté,  égalité,  justice 
et  bonheur,  sans  restriction,  sans  vengeance,  avec 
le  seul  nom  du  9  thermidor,  anéantira  les  espéran- 
ces atroces  des  cannibales  excités  ou  payés  par  nos 
ennemis  pour  se  partager  les  lambeaux  de  la  répu- 
blique. 

•  Fait  à  Montélimart,  le  10  pluviôse. 

•  Lt  rtpréê0nlant  du  peuple  Jean  Dbbbt.  • 

ANDi^  DuMONT  :  Le  crime  veille  tandis  que  les 
bons  citoyen»  se  reposent  trop  souvent  pleins  de 
eonllnnrf*  dans  la  bonté  de  leur  cause.  Pour  exciter 
lifiir  vigilane**,  je  propose  que  la  proclamation  de 
J«tri  Dfhry  Sfiit  affichée  en  placard  dans  toute  la 
république  et  envoyée  à  toutes  les  autorites  con* 

l>tt«  proposition  est  décrétée. 


»  Apres  avoir  entendu  Rouzet,  organe  des  corai- 
tés  des  finances  et  des  domaines.  Ta  Convention 
annule  les  poursuites  tendant  à  faire  rentrer  dans  le 
trésor  public  Tarriéré  dû  par  quarante  communes 
du  district  de  Montdidier  sur  leurs  contributions  de 
1789.  Cet  arriéré  leur  estaccordé  à  titre  d*indcmnitc, 

{)our  réparer  les  pertes  qu*elles  ont  éprouvées  dans 
e  mois  de  juillet  1788. 

—  Le  représentant  du  peuple  Porcher,  envoyé 
dans  les  départements  du  Loiret,  L.oir-et-Cher,  etc., 
écrit  à  la  Convention  nationale  : 

•  Ceux  qui  ont  étudié  la  cause  de  nos  malheurs, 
de  l'oppression  dans  laquelle  nous  avons  si  long- 
temps gémi ,  et  de  Taveuglement  funeste  où  c^ 
conspirateurs  adroits  avaient  plongé  une  partie  du 
peuple,  expliqueront  sans  doute  à  la  postérité  leurs 
vues  et  leurs  desseins  perfides. 

•  Je  vous  fais  passer  deux  pièces  qui  prouveront 
jusqu'à  quel  excès  les  plus  vils  des  humains  se 
jouaient ,  dans  ces  temps  désastreux,  de  leurs  con- 
citoyens. 

•  Vous  y  verrez  un  membre  du  comité  révolution- 
naire de  Saumur  ordonner  à  un  nommé  Simon,  qui 
conduisait  mille  prisonniers-ù  Orléans,  de  faire  fu- 
siller tous  ceux  qui  ne  pourraient  soutenir  les  fati- 

fucs  de  la  marche.  Vous  y  verrez  ce  Simon  exécuter 
e  sang-froid  cet  ordre  barbare,  en  sorte  qu'il  n'ar- 
riva à  Orléans  que  deux  cent  un  prisonniers.  On 
qualifiait  ces  malheureux  de  brigands,  et  cependant 
ce  n'étaient  pour  la  plupart  que  des  femmes,  des 
enfants  et  des  vieillards.  Vous  ne  laisserez  pas  ces 
forfaits  impunis,  et  Simon  sera  sans  doute  hvré  au 
tribunal  révolutionnaire. 

«  Cet  homme  sans  pudeur  osa  me  demander  de 
l'argent  depuis  son  action  barbare.  Je  lui  ai  répondu 
par  un  mandat  d'arrêt,  etc.  • 

Insertion  au  Bulletin ,  et  renvoi  au  comité  de 
sûreté  générale. 

—  Le  représentant  Bailly  écrit  de  Strasbourg  : 

•  Vous  connaissez  tous  les  maux  qui  ont  pesé  sur 
la  commune  de  Strasbourg.  Vols,  pillages,  incarcé- 
rations, taxes,  assassinats,  telle  est  l'esquisse  de  ses 
malheurs. 

«  Pour  perdre  cette  commune,  on  voulait  la  ré- 
duire au  désespoir;  mais  son  attachement  n*en  a  été 
que  plus  fort  à  la  liberté.  On  osa  proposer  d*épurer 
la  population  de  Strasbourg ,  et  de  la  réduire  à  U 
moitié.  Dans  la  Société  populaire  on  osa  dire  qu'il, 
fallait  exterminer  eu  masse  les  détenus.  Déjà  se  pré- 
paraient à  cet  effet  les  bateaux  à  soupape;  et  si  le 
Rhin  ne  partagea  point  les  horreurs  de  la  Loire,  c'est 
qu'il  y  manquait  un  Carrier.  J'ai  épuré  cette*$ociété 
populaire,  contre  laquelle  s'élevait  justement  l'indi- 
gnation publique,  parce  qu'elle  obéit  constamment 
aux  impulsions  du  féroce  Schneider. 

«J'ai  chassé  des  fonctions  publiques  les  suppôts 
de  Robespierre  ;  et  ce  sont  ces  hommes-là  qui  disent 
que  la  chose  publique  est  perdue,  parce  que  le  scep- 
tre de  la  tyrannie  est  arnché  de  leurs  mains.  Si  l'on 
continue  de  calomnier  la  commune  de  Strasbourg, 
je  vous  prie  d'attendre  mon  retour  ;  alors  je  pren- 
drai la  diefense  de  cette  intéressante  partie  de  la  ré- 
publique, qui  a  donné  nouvellement  encore  une 
grande  preuve  de  son  amour  pour  la  liberté,  en  cé- 
lébrant avec  transport  l'anniversaire  de  la  mort  du 
tyran  Capet.  En  attendant,  je  continuerai  de  com- 
battre les  hommes  de  sang ,  et  j'espère  que  le  mois 
prochain  verra  leur  ruine  entière.  • 

Insertion  au  Bulletin,  et  renvoi  au  comité  de 
sûreté  générale. 

—  L  assemblée  passe  à  la  discussion  sur  le  projet 
des  comités  relativement  à  Fenvoi  de  représentants 
du  peuple  dans  les  colonies. 


455 


B.  GouLY,  députe  de  Tlle  de  France  :  Citoyens  Je 
n'entreprendrai  pas  de  répondre  à  tout  ce  qui  vous 
a  été  dit  à  cette  tribune  d'étranger  à  la  question  qui 
doit  occuper  et  qui  occupe  la  Convention  nationale 
en  ce  moment;  je  rappellerai  quelques  faits,  et  je  ne 
serai  pas  long. 

Je  ne  puis  concevoir  d*où  provient  cette  opposi- 
tion ,  cette  aversion  outrée  de  quelq^ues  hommes 
pour  la  mesure  proposée  par  vos  trois  comités  de 
gouvernement,  pour  la  seconde  fois,  comme  la  seule 
salutaire ,  la  seule  efficace  pour  sauver  les  colonies 
d'une  entière  destruction  et  les  rattacher  plus  par- 
ticulièrement à  la  France,  notamment  celles  d'O- 
rient, qu'un  préopinant  m'a  paru  ne  connaître  nul- 
lement. Je  ne  puis  lire  dans  les  cœurs,  mais  il  ne 
peut  y  avoir  que  des  coupables  qui  ont  dévasté  et 
fait  dévaster  les  Antilles,  et  leurs  complices ,  qui 
puissent  craindre  et  repousser  ainsi  quils  le  font  la 
surveillance  directe  et  immédiate  de  la  représenta- 
tion nationale. 

11  est  bien  étonnant  que  ce  soient  les  représen- 
tants du  peuple  d'un  pays  resté  imperturbablement 
fidèle  à  la  republique,  n'ayant  éprouvé  aucun  dé- 
sastre et  ayant  même  dompté  les  Anglais,  qui  de- 
mandent à  grands  cris  et  réclament  cette  mesure  de 
salut  public,  cette  surveillance  enfin,  tandis  nue  les 
envoyés  des  colonies  dévastées,  incendiées»  dépeu- 

{>lées ,  et  en  partie  au  pouvoir  de  nos  ennemis  à 
'instant  où  nous  en  parlons ,  sont  ceux  qui  n'en 
veulent  point,  et  qui  cherchent,  au  contraire,  à  éga- 
rer la  Convention  sur  les  véritables  intérêts  de  la 
mère-patrie,  en  parlant  beaucoup  du  décret  du  16 
pluviôse,  que  personne  n'a  attaqué  et  n'attaque. 
Certes,  il  est  bien  plus  commode  pour  de  tels  hom- 
mes, et  plus  avantageux,  de  présenter  eux-mêmes 
des  agents  secondaires  au  comité  de  salut  public, 
en  lui  exaltant  le  civisme  et  les  talents  de  ceux  qui 
leur  sont  dévoués,  pour  les  faire  envoyer  en  chef 
dans  les  colonies,  de  manière  que,  par  crainte,  fai- 
blesse ou  complicité,  ces  hommes  envoient  des  nou- 
velles oITicielles  à  leur  gré  ;de  manière  aussi  que  le 
peuple  français  et  la  Convention  soient  entretenus 
dans  le  doute  et  dans  l'erreur  sur  les  auteurs  des 
maux  affreux  (|u'ont  e'prouvés  les  Indes  occidenta- 
les. C'est  ainsi  que,  jiis({u*à  ce  jour,  ont  été  faites  ù 
Paris  les  nouvelles  oFlicielles  de  ces  précieuses  con- 
trées. Béflcchissez  bien  à  cette  observation,  citoyens, 
et  remarauez  la  tactique  dont  on  se  sert  toutes  les 
fois  que  I  on  veut  vous  éclairer  sur  les  colonies.  Je 
vais  vous  répéter  la  question  importante  sur  laquelle 
nous  délibérons,  et  la  rappeler  ;  car  l'on  vous  en  a 
distraits  bien  adroitement. 

Votre  gouvernement ,  qu'insidieusement  on  a 
voulu  taxer  de  négligence,  n'a  pas  attendu  la  pro- 
vocation qui  lui  est  faite  aujourd'hui  par  ceux  qui 
jadis  flagornaient  l'ancien,  et  surtout  Barère,  chargé 
de  la  marine  et  des  colonies,  pour  arnHer  les 
moyens  de  secourir  les  colonies  en  général  ;  il  s>n 
est  occupé  dès  frimaire  dernier,  et  a  cru  que  le  seul 
moyen  ae  rendre  ces  secours  profitables  à  la  répu- 
blique ,  et  de  conserver  les  hommes  et  la  chose, 
était  d*y  envoyer  des  représentants  du  peuple,  ainsi 
que  vous  en  agissez  et  en  avez  agi  pour  les  départe- 
ments dans  des  temps  de  trouble  et  d'anarchie.  Il 
est  malheureux,  sans  doute,  qu'en  en  ayant  senti  la 
nécessité  indispensable  il  n'ait  pu  s'en  servir  sans 
consulter  l'assemblée  ;  il  n'a  pas  voulu  s'écarter  de 
ce  second  devoir  après  avoir  rempli  le  premier  dont 
je  viens  de  vous  parler  ;  il  s'est  donc  présenté  à  votre 
tribune,  vous  a  fait  un  rapport  très-détaillé  sur  les 
diverses  parties  de  la  république  en  Asie,  en  Afrique 
et  en  Amériaue,  et  a  conclu  par  l'envoi  de  six  re- 
présentants au  peuple  dans  les  colonies.  L'ajourne- 


ment da  projet  de  décret  jusqu*au  rapport  de  la 
commission  des  colonies  vous  fut  demandé  ;  comme 
ce  rapport  ne  peut  regarder  et  ne  regarde  effective- 
ment que  les  Antilles,  Saint-Domingue  principale- 
ment, je  demandai  la  division  de  la  proposition 
Suant  à  ce  qui  concernait  les  îles  de  France  et  de  la 
éunion,  et  un  jour  fixe  pour  la  discussion  de  l'en- 
voi seulement  des  représentants  du  peuple  dans  ces 
fies.  Vous  décrétâtes  mes  demandes,  et,  le  jour  fixé 
venu,  la  discussion  fut  ouverte.  On  confondit,  ainsi 
qu  on  l'a  fait  aujourd'hui,  toutes  les  colonies,  quoi- 
qu'il n  y  ait  aucune  similitude  entre  la  situation 
morale,  physique,  politique  et  topographique  de 
celles  d'Occident  et  de  celles  d'Orient.  La  discussion 
fut  longue,  suivie  et  lumineuse,  et  son  résultat  fut 
le  renvoi,  pour  être  examiné  de  nouveau,  aux  trois 
comités  de  gouvernement,  de  tout  ce  qui  avait  été 
dit  pour  et  contre  la  mesure  proposée  et  demandée 
par  le  comité  de  salut  public,  ahn  d'être  examinée 
qe  nouveau.  En  conséquence,  ce  qui  ne  peut  se  dire 
a  cette  tribune  sur  de  pareilles  matières,  notam- 
ment sur  les  îles  de  France  et  de  la  Réunion,  fut  dit 
et  démontré  aux  trois  comités,  qui,  convaincus  des 
raisons  impérieuses  qui  ne  permettent  plus  de  diffé- 
rer d'employer  cette  mesure,  ont  arrête  à  la  presque 
unanimité  de  vous  en  réitérer  la  demande.  Le  gou- 
vernement a  donc  fait  son  devoir,  et  l'on  ne  vous 
oppose  rien  de  solide  pour  faire  rejeter  le  projet  de 
décret  qu'il  vous  présente  ;  l'on  s'appuie  seulement 
sur  ce  qu'il  fallait  un  nouveau  rapport  bien  circon- 
stancié ,  comme  s'il  était  possible  d'imaginer  qu'il 
violerait  à  cet  égard  ses  devoirs  en  découvrant  les 
grands  motifs  de  sûreté  et  de  politique  qui  ont  dé- 
terminé les  trois  comités  réunis,  motifs  qui  ont  été 
discutés  depuis  fructidor  dernier;  et  reconnus  com- 
me les  seules  convenables  pour  accroître  la  prospé- 
rité et  la  sloire  de  la  république  française,  en  même 
temps  qu  elle  doit  anéantir  les  espérances  de  nos 
ennemis  naturels  et  des  intrigants  qui  comptent 
faire  leur  patrimoine  des  débris  de  Saint-Domingue* 
sous  ta  protection  de  ceux  qui  ont  égorgé  et  égor- 
gent toute  la  race  blanche. 

Un  préopinant  s'est  beaucoup  étendu  sur  les  in- 
convénients qu'il  y  a  de  revêtir  d'un  grand  pouvoir 
des  hommes  dans  une  distance  si  éloignée  ;  il  vous  a 
fait  rénumération  outrée  de  ces  inconvénients,  eu 
égard  seulement  aux  représentants ,  et  a  fini  par 
proposer  l'ordre  du  jour  sur  le  projet  adopté  par  les 
trois  comités,  et  l'envoi  de  commissaires  civils  dans 
les  colonies  ;  par  là  il  est  donc  convenu  qu'il  fallait 
une  autorité  civile  dansées  contrées  éloignées,  tant 
pour  diriger  les  secours  que  votre  gouvernement  y 
a  envoyés  ou  a  arrêté  d'y  envoyer  que  pour  y  réta- 
blir l'ordre,  la  paix,  le  bonheur,  et  les  rattacher 
plus  que  jamais  à  la  mère-patrie.  Ces  inconvénients, 
sur  lesquels  on  s'est  répandu  avec  affectation  pour 
les  représentants  du  peuple,  ne  sont-ils  pas  les 
mêmes  pour  toute  autorité  civile  qui  sera  revêtue  du 
pouvoir  supérieur  dans  les  colonies,  puisqu'elle 
commandera  tout?  Quelque  parti  que  prenne  la 
Convention ,  la  surveillance  ne  sera-t-elle  pas  en- 
tourée des  mêmes  difficultés ,  puisque  le  pouvoir 
exerçant  sera  dans  le  même  éloignement?  N  abiise- 
t  on  pas  de  tout,  partout  où  il  se  trouve  des  pervers 
et  des  intrigants  employés  en  chef?  Voyez  et  exa- 
minez les  résultats  de  l'envoi  des  commissaires  ci- 
vils dans  toutes  vos  colonies ,  à  Saint-Domingue 
surtout;  cette  mesure  est  usée,  je  dis  plus,  mépri- 
sée ;  vous  devez  donc  en  employer  une  nouvelle  ; 
celle  des  représentants  du  peuple  vous  laisse  au 
moins  Tespérance  du  mieux;  et  si,  faute  de  la  mettre 
en  usage,  et  surtout  vous  ayant  été  présentée  deux 
fois  par  vos  comités  de  gouvernement ,  il  arrivait 


45« 


que  la  France  perdit  encore  sei  colonies  d^Orient,  ce 
Gibraltar  de  TAste,  le  peuple  n*anrait-il  pas  le  droit 
de  vous  en  accuser,  de  vous  en  rendre  responsables? 

N'oubliez  pas,  législateurs,  que  celles-ci  ont  tou- 
jours été  et  quVltes  sont  convoitées  par  l'Angleterre 
depuis  longues  années,  et  qu*enes  sont  la  terreur, 
de  sts  armées  en  Asie,  comme  la  destruction  de  son 
commerce. 

Oui,  je  ne  cesserai  de  le  répéter,  les  Français  sont 
à  jamais  déportés  des  Indes  orientales  si  la  républi- 
que perd  les  ties  de  France  et  de  la  Réunion.  11  faut, 
f^our  les  conserver  telles  qu*elles  se  sont  montrées 
usqu'à  ce  jour,  y  envoyer  absolument  des  représen- 
tants du  peuple  :  le  salut  des  gens  de  couleur,  puis- 
qu'on me  force  de  le  dire  ,  y  est  attaché  ;  ils  sont, 
dans  ces  tIes,  les  plus  faibles  ;  ils  sont  divisés  entre 
eux  ;  ils  sortent  de  diverses  nations  qui  s*abhorrent, 
et  qui  préfèrent  les  blancs  à  Tune  de  ces  nations  de 
leur  couleur. 

Si  les  blancs  aristocrates  se  joignaient  aux  per6- 
des  Anglais,  la  guerre  civile  s^  allumerait,  et  ces 
colonies  se  détruiraient  par  elles-mêmes,  ainsi  qu'il 
est  arrivé  à  Saint-Domingue.  Les  Anglais  ne  de- 
mandent pas  mieux,  parce  qu'ils  s'en  empareront 
plus  facilement,  et  qu'ils  se  borneront  à  en  faire 
une  place  de  guerre^  un  dépôt  enGn.  Il  faut  donc  y 
faire  passer  (^  hommes  d'un  grand  caractère,  et 
ayant  une  grande  force  morale ,  puisque  vous  ne 
pouvez  y  envoyer  une  force  physique  capable  de 
tout  comprimer  et  de  vous  faire  obéir  à  réquisition. 

11  y  a  plus  ;  si  l'on  ne  montre  un  grand  intérêt 

I)our  ces  deux  colonies  restées  invanablemcnt  fidè- 
es  à  la  république,  et  si  on  les  heurte  avec  violence 
dans  quelques  préjugés,  si  Ton  voulait  liaire  adopter 

Sar  la  force  ce  qui  ne  peut  être  aue  la  suite  et  1  effet 
e  la  persuasion  ,  il  est  à  craindre  qu'elles  se  refu- 
sent à  Texéculion  du  décret  du  16  pluviôse ,  sans 
mode  d'exécution,  et  qu'on  les  réduise  au  désespoir; 
au  lieu  qu'à  la  vue  de  la  représentation  nationale, 
conciliatrice  et  protectrice,  les  préjugés,  l'intérêt 
personnel  se  tairont,  et  l'amour  de  la  patrie,  la 
raison  remporteront  un  triomphe  éclatant. ,  Ci- 
toyens, tout  est  en  perdition  aux  Antilles,  et  tout  est 
intact  aux  îles  de  France,  de  la  Réunion  et  îles  ad- 
jacentes; ce  sont  des  considérations  majeures  et 
uniques  que  doit  peser  dans  sa  sagesse  la  Conven- 
tion nationale. 

L'on  vous  a  parlé  ensuite  des  pouvoirs  illimités 
que  doivent  avoir  les  représentants,  des  dangers  de 
les  leur  accorder,  et  Ton  a  cherché  à  vous  faire  voir 
que,  s'ils  n'étaient  pas  revêtus  de  pouvoirs  illimités, 
ils  n'étaient  plus  que  des  commissaires  civils.  Ceci 
est  un  paradoxe,  parce  que  la  réussite  de  leur  mis- 
sion consiste  pour  le  moins  autant  dans  leur  carac- 
tère de  représentant,  caractère  qui  leur  donne  une 
force  morale  nécessaire  et  incalculable,  que  dans 
les  pouvoirs  dont  vous  les  revêtirez.  Ne  craienez 
pas,  au  reste ,  que  des  Français  abandonnés  de  la 
métropole  depuis  quatre  ans,  qui  ont  su  résister  aux 
insinuations  de  l'aristocratie  et  du  royalisme,  aux 
)erlidies  de  l'Angleterre,  et  qui  ont  toujours  battu 
es  Anglais,  qui  les  attendent  en  ce  moment  de  pied 
ferme,  et  qui  se  sont  fortement  prononcés  pour  la 
république,  puissent  jamais  souffrir  que  Ton  usur- 
pât, sous  leurs  yeux  et  dans  leurs  murs,  la  souve- 
raineté nationale ,  ou  une  l'on  voulût ,  même  un 
instant,  en  abuser  au  détriment  des  intérêts  de  la 
France,  pour  le  soutien  desquels  ils  n'ont  cessé  d'at- 
taquer et  de  vaincre. 

L'expérience  prouve  ce  que  j'avance,  et,  pour  me 
combattre.  Ton  n*a  fait  jusqu  ici  que  des  supposi- 
tions. L'on  vous  a  dit  encore  que  les  erreurs,  à  quatre 
mille  cinq  cents  lieues,  étaient  irréparables. 


k 


Eh  bien,  les  erreart  des  comnissiires  dTfls,  eo 
supposant  toutefois  qu'ils  n'y  commettent  qae  des 
erreurs,  seront -elles  moins  irréparables  a  cette 
grande  distance  de  la  Convention  nationale  qae 
celles  que  vous  craignez  des  représentants  du  pea- 

{de  ?  Je  ne  le  pense  pas  :  il  y  a  au  contraire  contre 
es  premiers  plus  d'une  chance  qui  reste  aux  der- 
niers pour  réparer  ces  erreurs;  les  premiers  ne 
peuvent  qu'exécuter  littéralement  les  ordres  donnés 
pour  ce  qui  a  été  prévu ,  et  rien  prendre  sur  eux 
pour  ce  qui  ne  l'a  pas  été  ;  ils  ne  peuvent  donc  rieo 
taire  pour  le  peuple  en  finances,  encore  moins  en 
législation  parce  que  vous  ne  pouvez  leur  en  délé» 
guer  l'initiative  Dans  ces  deux  parties,  tos  collè- 
gues peuvent  l'avoir  Les  commissaires  civils  ne 
peuvent  non  plus  faire  usage  de  la  voie  de  la  réqui- 
sition pour  former  des  armées,  raviver  notre  com- 
merce, etc.  :  cette  voie  n'est  permise  qu'au  comité 
de  salut  public  et  aux  représentants  du  peuple.  Le 
comité  de  salut  public,  ne  connaissant  pas  les  res* 
sources  locales,  ne  peut  exercer  d'aussi  loin  cette 
réquisition  ;  il  faut  donc  que  ce  soit  sur  les  lieux 
que  l'on  détermine  si  l'on  doit  oser  de  cette  luesare 
ou  non,  et  ce  ne  peut  être  que  des  représentants  du 
peuple  qui  doivent  prendre  cette  détermination  el 
juger  cette  question.  Enfin,  un  représentant  du  peii-^ 
pie,  par  cela  même  qu'il  est  représentant  du  peuple* 
a  de  plus  grands  devoirs  à  remplir,  et  il  est  plus  la- 
loux  de  les  bien  remplir  ;  il  est  (Taillears  plus  en 
évidence,  conséquemment  pins  circonspect;  no 
commissaire  civil ,  qui  ne  pourra  rectifier  des  dé- 
marches désastreuses,  s'enfuit  et  sacrifie  les  intérêts 
de  sa  patrie  à  sa  conservation  et  à  son  amour-propre. 
D'où  je  conclus  qu'une  autorité  civile  étant  inito- 
pensable  dans  les  colonies  françaises  pour  y  diriger 
et  surveiller  l'emploi  des  secours  que  l'on  destine  à 
ces  contrées  éloignées  afin  de  les  rendre  profitables 
à  la  république  française,  par  la  conservation  des 
hommes  et  de  la  chose  ;  que  les  inconvénients  pré- 
sentés à  la  Convention  nationale  pour  l'autorité  ci- 
vile qui  commandera  tout  en  chei  dans  ces  colonies 
étant  les  mêmes  pour  les  commissaires  civils,  et  je 
soutiens  encore  pires  que  pour  les  représentants  an 
peuple  ;  que  les  premiers,  en  cas  d'erreurs,  ne  pou- 
vant point  réparer  leurs  fautes  aussi  facilement  que 
les  derniers,  qui  emportent  avec  eux  et  un  carac- 
tère et  une  force  morale  qu'aucun  décret  ne  peut 
donner  à  des  commissaires  civils,  il  serait  impoliti- 
que de  ne  pa.«  y  envoyer  des  représenlauts  du  peu- 
ple ;  c*est  pourquoi  je  demande  que  Ton  mette  ans 
voix  le  projet  de  décret  présenté  par  les  trois  comi- 
tés de  gouvernement.  (La  êuili  demain.) 


LIVRES  DIVERS. 

Pihces  juttificativet  de  la  dénomciation  eontrt  Vùdim  , 
contenant  la  réfutatioo  de  U  réponse  de  celai-ci  •  Lecoiolre 
et  à  Darmaing  ;  par  J.'-B.  Daroiaiog.  A  Paris,  ches  tous  les 
marchands  de  nouveautés. 

îiota.  Toutes  ces  pièces  ont  M  eitraitas  dn  freffe  du  tri* 
bunal  réTolutionnaire ,  en  verta  d*uo  arréié  des  trois  coini« 
tés  réunis. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  paycineiit  do  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 
miers mois  ;  il  sera  fnit  A  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
dlnscriptioDS  au  grand  livre.  Celai  pour  les  renies  viagères 
est  de  hait  mois  vingt  et  ua  lours  de  TaMée  1793  (vieux 
style). 


GAZETTE  NATIONALE  »»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  148.  Octidi  28  Pluviôse,  l'an  3«.  (Lundi  16  Févbieb  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE, 

ALLEMAGNE. 

Vienne ,  le  25  foncier,  —  La  découverte  de  la  dernière 
coDspiratioD ,  car  la  cour  prétend  en  avoir  découvert  une 
nouvelle,  a  provoqué  un  édit  impérial  qui  vient  de  paraître, 
concernant  les  crimes  de  haute  trahison. 

«  Quiconque  mettra  en  danger  la  sûreté  personnelle  de 
rempereur  et  la  tranquillité  publique,  soit  par  des  machi- 
nations secrètes .  soit  par  des  voies  de  fait,  sera  condamné 
ik  être  pendu ,  quand  même  le  projet  n'aurait  pas  été  suivi 
de  l'eiécution. 

c  Celui  qui  prendra  une  part  éloif^ée  à  un  complot  de  ce 
genre,  celui  qui  méchamment  en  dérobera  la  connaissance 
aa  gouvernement,  sera  enfermé  pour  le  reste  de  ses  jours. 

«  Les  auteurs  d'écrits  incendiaires  ou  tendant  à  exciter 
le  mécontentement  seront  punis  de  cinq  ans  de  prison. 

t  Les  complices  qui  se  rendront  dénonciateurs  obtiendront 
leur  gdce.  * 

Otnabruckt  ie  éfévrier,^le  lazaretb  de'rtrmëe  anglaise 
▼a  être  transporté  ici.  Les  gros  bagages  des  Hanovnens  sont 
en  route  pour  se  rendre  dan>  cette  ville. 

—  La  nouvelle  des  triomphes  de  la  république  française 
a  arrêté  au  milieu  de  son  voyage  la  future  princesse  de 
Galles,  qui  se  rendait  en  Hollande  pour  s'embarquer.  Elle 
est  revenue  à  Osnabruck. 

—  On  s'attend  que  les  Français  passeront  l'Yssel,  dans 
rintention  de  poursuivre  l'armée  alliée.  Celle-ci  ne  parait 
point  rassurée ,  puisqu'elle  a  déjà  fait  transporter  sur  les 
derrières  ses  magasins  et  ses  équipages. 

1^  terreur  s'étend  jusqu'à  Munster,  où  l'électeur,  dans 
ridée  qu'on  ne  pourra  point  arrêter  les  soldats  républicains, 
a  prévenu  les  étrangers  de  se  retirer,  et,  pour  donner  Texem- 
ple,  a  fait  emballer  ses  meubles. 

—  Les  Hanovriens.  dans  les  dernières  affaires  sur  le 
Leck ,  ont  perdu  deux  cents  hommes  du  seul  régiment  des 
gardes.  Ils  ont  eu  seize  cents  hommes  faits  prisonniers,  outre 
les  tués.  Le  corps  des  émigrés  de  Brechainviile  a  perdu  plus 
de  trois  cents  hommes.  La  perte  des  Anglais  est  énorme. 

—  Les  alliés  ont  évacué  tous  les  magasins  qu'ils  avaient 
àDoësbourg. 

Des  bords  du  Mein,  le  ^février.  —  Le  dégel  qui  est  sur- 
venu tout  à  coup  a  rompu  les  glaces  du  Mein.  Les  eaux  de  ce 
fleuve,  arrêtées  par  te  Rhin,  ont  couvert  plusieurs  lieues 
d'étendue  dans  le  pays  de  Darmstadt,  et  se  sont  portées,  du 
côté  de  Mayeoce,  jusiqu'à  la  Favorite. 

—  On  forge  à  Mayence  des  armes  pour  la  défense  de  la 
place.  Les  chasseurs  des  environs  ont  été  mandés  à  Mayence, 
et  y  sont  entrés  au  nombre  de  deux  cents.  Ils  occupent  les 
postes  de  garde  dans  les  vignes. 

On  assure  qu'il  y  a  dans  la  place  trente-trois  mille  hom- 
mes, dont  les  deux  tiers  sont  des  troupes  autrichiennes,  et  le 
reste  des  troupes  de  l'Empire.  Il  ne  s'y  trouve  pas  un  seul 
Prussien. 

L'électeur  de  Mayence  a  fait  frapper  une  médaille  de  mé- 
rite pour  les  militaires  qui  se  distingueront. 

ITALIE. 

Hapfês,  le  20  janvier,  —  On  écrit  de  Lisbonne  que  le  co- 
lonel H umphries,  ministre  américain  auprès  de  la  cour  de 
Portugal,  l'a  quittée  sans  congé  ;  on  n'en  dit  pas  la  raison. 

—  Il  règne  depuis  quelque  temps  un  vent  affreux  sur 
cette  côte.  La  mer  apporte  des  débris,  indices  de  grands 

désastres. 

—  La  cour  de  Naples  vient  de  publier  un  édit  pour  ren- 
dre la  liberté  au  commerce  des  grains  qui  servent  à  l'appio- 
vlsionncmcnt  de  cette  ville.  Il  sera  permis  à  tout  particulier 
d*y  introduire  des  grains  et  des  farines,  de  les  vendre  de  gré 
à  gré;  de  fabriquer,  loit  dam  la  ville,  soit  à  l'cxléiieur, 

fl«  Série,  —  Tome  X 


toute  espèce  de  pains, et  d'établir  des  foors,  bottlango- 
rles,  etc. 
Ces  mesures  ont  été  commandées  par  Textrème  diaell0« 


RIÊPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Parti ,  ie  27  pluviôse,—  Des  lettres  d'Angleterre ,  i 
par  la^yole  d'Amsterdam  r  portent  que  les  Communes  ont 
refusé^ieur  approbation  à  l'emprunt  des  25  millions  sterling 
pour  le  compte  de  l'empereur.  Ceux  qui  connaissent  la  si- 
tuation du  mini.sièrc  anglais  savent  qu'il  ne  peut  se  main- 
tenir une  fois  qu'il  a  la  minorité  dans  la  Chambre  des  com- 
munes, et  ils  en  infèrent  qu'il  ne  serait  pas  étonnant  que 
Pitl  eût  donné  sa  démission. 

—  Il  parait  que  le  stathouder  et  sa  famille  sont  arrivés  à 
Kiew  le  20  janvier ,  et  que  le  29  Fembargo  dont  on  a  parlé 
n'avait  pas  été  encore  mis  sur  les  navires  hollandais  qui  se 
trouvent  dans  les  ports  d'Angleterre,  d'où  on  peut  eonclure 
que  celte  mesure  n'a  pas  été  adoptée,  d'auUint  que  SOD 
succès  dépendait  entièrement  de  sa  célérité. 


SPECTACLES. 

THÉÂTRE  DE  LA  RUE  FEYDEAU. 

La  pièce  intitulée  Sophrow/me,  donnée  demlèremait  à  ce 
théâtre,  n'a  eu  qu'un  très-médiocre  succès. 

Sophronyme  est  un  Grec  qui  a  été  autrefois  afAranchi , 
son  maître  n'ayant  pas  jugé  qu'un  homme  put  jamais  être  la 
propriété  d'un  autre.  Il  a  fait  depuis  une  fortune  considé- 
rable, et  revient  dans  sa  patrie  dans  ie  dessein  de  la  partager 
avec  celui  A  qui  II  doit  is^  liberté.  II  ne  trouve  que  son  fils , 
miné  par  la  mort  de  son  père,  qui  avait  perdu  tous  set 
Mens. 

Sophronyme  place  une  bourse  sur  un  autel  pour  la  Mre 
trouver  par  le  jeune  Evandre  ;  mais  celui-ci,  loin  de  la  gar- 
der, quoiqu'il  en  ait  le  plus  grand  besoin  pour  obtenir  la 
main  de  sa  maîtresse,  s'en  sert  pour  acquitter  une  dette  de 
son  père,  et  empêcher  un  de  ses  créanciers  d'être  lui-même 
chargé  de  fers.  Sophronyme,  qui  entend  tout,  admire,  et  fait 
la  fortune  de  tout  ie  monde. 

On  a  trouvé  ces  moyens  un  peu  usés,  et  surtout  le  comique 
que  l'auteur  a  voulu  y  mettre  excessivement  commun.  Il  con- 
siste dans  le  caractère  d'une  vieille  esclave  bavarde,  qui  ne 
sert  en  rien  à  l'action.  On  a  reproché  aussi  quelques  ex- 
pressions de  mauvais  goût,  et  l'on  a  d'autant  plus  lieu  de  s'en 
étonner  que  la  pièce  est  d'un  auteur  distingué  par  l'élégance 
de  son  style  :  c'est  le  citoyen  Dumoustier 

La  musique  est  du  citoyen  Gavaux.  On  a  vu  avec  regret 
que  ce  compositeur ,  dont  les  premières  productions  sont 
remplies  de  grâce  et  d*un  chant  agréable ,  parait  vouloir 
quitier  cette  route  de  fleurs  pour  s'égarer  dans  les  sentiers 
tortueux  des  combinaisons  musicales.  Il  mérite  qu'dn  lui 
conseille  d'abandonner  ce  système  dramatique  si  vicieux, 
qui  sera  bientôt  abandonné  par  ceux  même  qui  ont  cherché 
à  le  mettre  à  la  mode. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Préiidence  de  Barrau 
SUITE  bE  LA  SÉANCE  DU   24  PLUVIOSE. 

DuPAY  :  J'observe  à  la  Coiivenlion  qtie,  depuis 
plus  d'un  an,  les  députes  de  Saint-Domingue  n*ont 
cessé  de  solliciter  en  vain  les  secours  qui  auraient 
sauvé  cette  colonie.  Barère,  alors  membre  du  comité 
de  salut  public,  (fui  était  chargé  de  la  partie  des  co- 
lonies, m*a  répète  plusieurs  fois  que  souvent  il  avail 

68 


U8 


voulu  en  parler,  en  fal^nt  sentir  la  nécessité  de  8*en 
occuper  et  de  porter  quelque  remède  à  leurs  maux, 
et  d'y  Taire  exécuter  vos  lois;  que  Robespierre  s*y 
était  toujours  opposa  fortement  et  avec  numeur; 
qu'il  ne  le  voulait  pas.  Ceci  explique  mes  soupçons, 
que  j*ai  communiquffs  à  beaucoup  de  bons  esprits  de 
cette  assemblée  ,  que  cet  usurpateur  de  la  souverai 
neté  du  peuple  voulait  mettre  nos  colonies  en  gage 
ou  en  séquestre  entre  les  nittins  des  Anglais,  ou  plu- 
tôt les  leur  céder,  comme  y  paraissant  lorcé,  alin  de 
les  rendre  plus  traitables  pour  reconnaître  ,  non  pas 
la  république  ,  mais  sa  propre  dominalion  ;  et  celte 
nation  avide  ^  pour  de  l'argent  ou  des  barric)ues  de 
sucre,  aurait  même  reconnu  ,  s'il  Teùt  exigé,  (lue 
Robespierre  était  un  grand  homme  ,  rempli  de  mo- 
destie, d*humanité  et  de  vertu. 

Vous  voyez  par  ce  que  je  vous  expose  une  nou- 
velle preuve  qu*on  voulait  absolument  perdre  et 
anéantir  à  jamais  notre  commerce.  Il  est  temps  enfin 
de  porter  remède  à  nos  maux,  et  que  la  réalité 
prenne  pour  nos  colonies  la  place  de  l'espérance. 

On  a  divisé  mal  à  propos  la  question  des  secours 
1  envoyer  à  nos  colonies ,  c'est-a-dire  qu'on  a  laissé 
de  côté  les  secours  à  porter  aux  colonies  occidentales, 
pour  ne  s'occuper  que  des  colonies  orientales.  Et 
pourquoi  cette  aifférence?  Ce  conseil  n'est  certaine- 
ment pas  ami  de  la  France  et  de  ses  véritables  inté- 
rêts. Pourquoi  cette  préférence  pour  les  unes,  et 
cette  négligence  pour  les  autres?  Est-ce  par  leur 
itnportance  qu'on  doit  se  décider  ?  Alors  nous  de- 
vrions nous  occuper  d'abord  des  colonies  occidenta- 
les; car  elles  ont  fourni  en  1789,  d'après  des  relevés 
exacts,  pour  201  millions  600,000  livres  de  produc- 
tions ,  dans  lesquelles  Saint-Domingue  est  pour  les 
trois  quarts. 

Ceux  qui  ont  écrit  avec  le  plus  de  connaissances 
et  de  vérité  sur  les  productions  de  la  France,  les  ont 
portées  à  2  milliards  400  millions  ponr  chaque 
année. 

Si  en  1780  les  quatre-vingt-trois  départements  re- 
cueillaient pour  2  milliards  400  millions  de  produc- 
tions territoriales,  ce  sont  29  millions  pour  chaque 
département. 

Le  sol  des  Antilles  produit  donc  presque  autant 
i|ue  sept  départements,  car  7  fois  29  font  203,  et,  il 
faut  le  répéter,  les  Antilles  ont  produit,  en  1789, 
201  millions  600,000  livres. 

Le  commerce  de  l'Inde,  au  contraire,  n'a  jamais 
été  avantageux  à  la  France ,  et  a  toujours  beaucoup 
coûté  au  gouvernement  ;  car  on  sait  qu'on  venait 
aans  cesse  au  secours  de  la  Compagnie.  Malgré  tout 
ces  sacrificei»,  il  n'était  que  d'un  dixième  de  celui  des 
Antilles;  et,  en  1788,  les  importations  ne  se  sont 
pas  élevées  tout  à  fait  à  20  millions,  sur  lesquels  il  y 
avait  pour  15  millions  de  marchandises,  soit  de  la 
Chine ,  de  Coromandel ,  du  Bengale  ou  de  Malabar; 
l'île  de  la  Réunion  n'y  était  que  pour  environ  4  à 
ft  millions  de  café.  D'ailleurs  on  sait  que  tout  te 
commerce  de  l'Inde  ne  se  fait  que  tout  en  numéraire 
métallique,  et  est  destructif  de  nos  manufactures 
nationales. 

Je  ne  prétends  pas  dire  cependant  que  File  de 
France  soit  inutile ,  et  qu'on  ne  doive  lui  envoyer 
aucun  secours  :  je  dis  seulement  qu'elle  est  nulle 
par  ses  productions  territoriales.  Elle  ne  fournit  que 
des  subsistances  pour  sa  garnison  et  l'administra tion , 
qui  font  vivre  ses  habitants  dans  l'aisance.  Il  y  a,  je 
crois,  cependant  une  ou  deux  sucreries.  C'est  avec 
le  gouvernement  que  se  fait  le  commerce  le  plus 
fort  et  le  plus  avantageux,  et  les  besoins  de  1  ad- 
ministration absorbeut  bien  au  delà  des  productions 
du  sol. 

Mon  collègue  Barrait  avec  qui  j'en  ai  conféré, 


pourrait  vous  donner  des  renseignements  h  cet  égard, 
et  il  vous  dirait  que  l'île  de  France,  d'environ  dix 
lieues  d'étendue,  n'est  qu'une  place  d'armes,  un 
arsenal  et  magasin  militaire,  un  entrepôt ,  néces- 
saire <]uand  ou  veut  porter  la  guerre  dans  l'Inde,  et 
nécessaire  aussi  comme  relâche  pour  nos  vaisseaux. 

Voilà  l'état  et  l'avantage  de  nos  possessions  occi- 
dentales ou  orientales. 

Secourons-les  en  même  temps,  à  la  bonne  henre, 
et  chacune  suivant  leurs  besoins  et  leur  importance* 

Il  eût  été ,  sans  doute  ,  plus  sage  et  plus  politique 
de  ne  pas  porter  la  question  dont  il  s'agit  à  la  discus- 
sion de  la  Convention.  C'est  annoncer,  un  peu  tard, 
à  TAugleterre ,  que  nous  nous  occupons  de  nos  co- 
lonies si  longtemps  abandonnées;  car,  il  ne  faut  pas 
nous  le  dissimuler,  il  est  des  hommes  intéressé  à 
surprendre  le  secret  de  nos  opérations  pour  les  en- 
traver. D  ailleurs  n'est-ce  pas  dire  aux  Anglais  et 
aux  Espagnols  :  Nous  allons  vous  attaquer  sur  tel 
point,  de  telle  manière,  avec  telles  forcer,  tels 
moyens?  Il  y  a  quatre  ans  que  cette  tactique  est 
employée  avec  succès  par  les  colons,  qui  voient  en- 
fin échapper  à  leur  cupidité  leurs  propriétés  d'hom- 
mes. Eu  étendant  votre  sollicitude  sur  ces  impor- 
tantes possessions  de  l;i  republique  ,  quand  vous  y 
avez  planté  l'arbre  de  la  liberté,  et  quand  vous  vou- 
lez Tv  faire  prospérer,  ne  voyez- vous  pas  qu'il  doit 
étoufler  les  ronces  du  despotisme  anglais?  Les  deux 
hémisphères  doivent  un  jour  bénir  les  glorieux  tra- 
vaux que  vous  consacrez  au  soulagement  de  l'hu- 
manité et  à  Taçrandissement  du  commerce  français. 

Votre  comité  de  salut  public  vous  a  rendu  compte, 
dans  la  séance  du  4  de  ce  mois,  par  l'organe  de  Pe- 
let,  que  l'on  avait  emprisonné,  à  leur  arrivée  à 
Paris,  des  hommes  chargés  de  vous  donner  des  ren- 
seignements précieux  sur  vos  colonies.  Eh  bien  , 
quels  sont  ceux  qui  ont  provoqué  ces  arrestations, 
qui  ont  mis  obstacle  à  ce  que  vous  lussiez  instruits  ? 
C'est  là  ce  qui  a  donné  lieu  à  la  prise  des  lles-du- 
Vcnt  par  les  Anglais.  Voilà  ce  que  vous  devez  savoir 
et  ce  uu'il  vous  importe  de  connaître.  — *  (L'arrivée 
de  la  Surveillante.) 

Si  je  jette  mes  regards  en  arrière  sur  ce  qui  s'est 
pas.^ ,  pour  ce  qui  concerne  les  colonies ,  soit  dans 
TAsseniblée  constituante,  lé<;islative  et  dans  la  Con- 
vention, j'y  VOIS  et  je  rencontre  partout  qu'elles  ont 
coustanimenl  trouve  une  oppo.sition  criminelle  dans 
l'exécution  des  lois  qui  devaient  régir  les  colonies. 

A  chaque  pas  que  je  lais ,  je  vois  Ita  colons ,  pour 
garantir  IVsciavage  des  noirs  et  leur  tyrannie  ,  pré- 
tendre vouloir  s'iiftranchir  de  la  suprématie  de  la 
Convention ,  et  obtenir  une  puissance  législative 
pour  régler  leur  régime  intérieur,  comme  s'il  pou- 
vait y  avoir  deux  corps  législatifs  dans  un  Etat. 

Si  je  vais  plus  loin,  je  vois  que  la  proscription  co- 
loniale a  atteint  des  députés  qui  ont  osé  lutter  et 
contrarier  les  principes  de  ces  colons,  qui  se  sont 
crus  assez  forts  pour  arracher  les  colonies  à  la  répu- 
blique et  former  un  corps  de  nation.  Voilà  ce  que 
j  ai  d  abord  à  examiner  :  la  commission  des  colonies 
ira  plus  loin. 

Que  veulent-ils  encore  dans  ce  moment?  empê- 
cher que  vous  ne  portiez  aucun  secours  aux  colo% 
nies,  afin  que  les  Anglais  puissent  plus  facilement 
profiter  du  déchirement  et  de  la  désorganisation 
pour  s'en  rendre  maîtres  ,  et  maintenir  l'esclavage 
par  la  force,  et  dans  leurs  colonies  et  dans  les  nôtres. 

On  vous  propose  publiipiement  aujourd'hui  des 
représentants  du  peuple  ;  je  pense  qu'on  vous  pro- 
pose une  mauvaise  mesure.  Quand  vous  choisiriez 
ces  représentants  parmi  nos  collègues  les  plus  in- 
struits sur  l'aftaire  des  colonie,  comnienl  pourront- 
ito  pénétrer  dans  le  labyrinthe  de  Tintiigue  et  des 


4M 


tntëréts  divers  qui  les  ont  bouleversëes?  S'ils  sont 
obligés  de  s>ntourer  de  citoyens  qui  connaissent  les 
localités ,  ils  n'agissent  alors  que  par  une  impulsion 
étrangère;  et  ces  citoyens,  sans  caractère  et  sans 
responsabilité  ,  peuvent  plus  impunément  les  trom- 
per. C'est  la  représeutalioD  nationale  que  Ton  at- 
taque. 

Je  passe  sur  ces  inconvénients,  qui  sont  le  partage 
des  hommes  obligés  de  donner  leur  confiance.  II 
faut  que  les  représentants  soient  investis  de  pou- 
voirs illimités  et  de  la  force  nécessaire  pour  les  lairc 
respecter.  En  leur  donnant  des  pouvoirs  trop  éten- 
dus, ou  m^me  circonscrits  ,  rappelez-vous  que  Ton 
ne  boit  jamais  à  la  coupe  du  pouvoir  sans  s*enivrer. 
La  soii  du  pouvoir  est  comme  celle  de  l'hydropisie; 
et  si  malheureusement  vous  avez  eu  à  réprimer  et  a 
punir  des  abus  de  pouvoir  dans  des  départements  et 
sous  votre  surveillance ,  comment  les  réprimerez- 
vous  à  une  distance  aussi  éloignée?  La  représenta- 
tion nationale  est  encore  alors  attaquée. 

Vous  avez  tellement  pressenti  ces  difficultés^  et 
TOUS  avez  te.llenient  voulu  prévenir  les  maux  qui 
en  sont  résultés,  que  vous  avez  sagement  décrété 
qu'aucun  représentant  du  peuple  ne  serait  plus  de 
trois  mois  en  mission.  Ferez-vous  donc  encore  line 
exception  particulière  en  faveur  des  représentants 
que  vous  enverrez  aux  colonies?  Car  vous  ne  pour- 
rez pas  les  rappeler  tous  les  trois  mois.  Pouvez- vous 
d'ailleurs  savoir  à  quel  terme  finira  votre  session? 
'  Vous  seriez  remplaces,  et  vous  auriez  encore  quatre 
mois  après  des  représentants  qui  agiraient  en  votre 
nom.  N'auriez-vous  pas  alors  à  cramdre  Tinfluence 
qu'ils  auraient  pu  y  acquérir?  Ils  peuvent  aussi  par 
erreur ,  ou  croyant  mieux  voir  que  nous  le  système 
colonial,  ne  pas  considérer  les  colonies  sous  le  point 
de  vue  que  nous  les  considérons,  et  porter  ainsi,  en 
législateurs,  des  atteintes  ou  quelques  modifications 
à  vos  principes.  Ce  serait  alors  provoquer  une  se- 
cousse dont  le  commerce  et  les  intérêts  de  la  répu- 
blique ressentiraient  plus  vivement  les  effets:  les 
suites  en  sont  incalculables.  D'un  autre  côté  ,  l'in- 
fluence des  représentants  qui  ont  voté  la  liberté  des 
noirs,  et  des  hommes  de  couleur  qui  forment  les  neuf 
dixièmes  de  lii  population,  y- serait  trop  à  craindre. 

Nous  n'avons  aucun  de  ces  dangers  à  prévenir  en 
y  envoyant  des  agents  civils;  le  but  que  vous  vous 
proposez  doit  se  borner ,  non  pas  à  y  envoyer  des 
législateurs  ,  car  c'est  ici ,  c'est  dans  le  sein  de  la 
Convention  que  se  feront  les  lois  pour  les  colonies, 
mais  des  fonctionnaires  publics  chargés  de  mesures 
purement  executives.  Ils  ne  peuvent  être  revêtus 
que  de  pouvoirs  relatifs  à  leur  mission;  ils  seront 
tenus  de  suivre  et  de  faire  exécuter  vos  lois ,  et  de  se 
conformer  littéralement  aux  instructions  qui  leur 
seront  fournies  par  les  comités  de  gouvernement  : 
s'ils  s*en  écartent,vous  les  rappelez,  et  ils  sont  punis. 

La  colonie  de  Saint-Domingue,  abandonnéeàelle- 
même  depuis  deux  ans ,  à  sa  propre  force ,  par  la  li- 
berté des  noirs ,  est  dans  une  telle  position  que  la 
première  mesure  à  mettre  en  exécution  est  de  con- 
duire sagement  cette  force  pour  ^n  chasser  les  Espa- 
gnols et  les  Anglais ,  de  rendre  à  la  culture  les  bras 
que  les  circonstances  en  ont  éloignés,  et  d'organiser 
cette  colonie  par  les  mêmes  lois  que  les  départe- 
ments de  la  république.  Il  faut  y  rappeler  la  paix  et 
l'union  ,  et ,  s'il  est  possible ,  étouffer  dans  le  cœur 
des  hommes  dont  vous  avez  brisé  les  chaînes  les 
justes  ressentiments  qu'ils  auraient  pu  conserver 
contre  leurs  anciens  tyrans.  Mais  ce  qui  est  bien  plus 
difficile,  c'est  de  faire  oublier  à  ceux-ci  qu'autrefois 
ils  commandaient  en  maîtres ,  et  qu'aujourd'hui  ils 
doivent  être  les  é^aux  des  hommctt  qu'ils  trai- 
taient comme  des  animaux. 


Si  cette  égalité  nous  a  environnés  d*ennemff ,  a 
armé  toutes  les  haines,  tous  lesdespotes  contre  nous, 
à  quel  degré  cette  haine  n'a-t-elle  pas  été  portée 
chez  les  colons,  plus  corrompus  par  les  préjugés  de 
Penfance  ,  par  le  stimulant  ue  l'intérêt  particulier, 
et  plus  man|ués  encore  par  les  signes  extérieurs  de 
la  peau? 

C'est  au  temps  et  à  la  saeesse  Ûes  ans  et  des  an- 
tres ,  et  par  nos  lois ,  à  efl^cer  des  traits  consacrés 
fiar  la  tyrannie  et  par  les  malheurs  du  temps  sous 
equel  (|ous  vivons.  Que  les  colons  qui  n*ont  point 
émigré  sachent  faire  à  la  patrie  le  sacrifice  d'un  in- 
térêt et  d'un  préjugé  barbare  et  révoltant.  S'il  est  trop 
pénible  pour  eux  de  ne  plus  acheter  ces  hommes  ; 
s'il  est  trop  pénible  pour  eux  de  payer  les  bras  qui 
travaillaient  et  fécondaient  leurs  terres  de  leurs 
sueurs;  s'il  est'trop  pénible  pour  eux  de  traiter  les 
cultivateurs  en  frères,  leurs  propriétés  en  seront- 
elles  moins  cultivées  sous  la  surveillance  d'un  agent 
qu'ils  y  placeront?  Le  commerce  en  sera-t-il  moins 
brillanti^  Loin  de  là ,  il  en  acquerra  une  nouvelle 
vie.  Comment  n'arriverait-il  pas  à  ce  degré  de  splen- 
deur? Les  neuf  dixièmes  de  la  population  étant  es- 
claves ne  pouvaient  rien  posséder  ;  le  châtiment 
seul  était  le  partage  de  ces  infortunés. 

Cette  population  ,  qui  recevra  le  fruit  de  son  tra- 
vail, se  vêtira,  s'entretiendra,  se  nourrira,  consom- 
mera vos  étoffes,  vos  toiles,  vos  cuirs,  vos  chapeaux, 
vos  liqueurs,  vos  vins ,  et  enfin  tous  les  objets  dont 
le  commerce  de  France  fournit  en  abondance.  Autre- 
fois ces  hommes  étaient  privés  de  tout  :  et  Ton  vous 
annonce  que  votre  commerce  se  ressentira  de  la  li- 
berté que  vous  avez  donnée  aux  noirs!  Quels  sont 
les  hommes  assez  audacieux  pour  renouveler  encore 
ces  ridicules  et  grossières  démonstrations?  Quoi  I  le 
commerce  a  acquis  deux  millions  d'hommes  culti- 
vateurs et  consommateurs,  et  le  commerce,  jiar 
celte  conqu/^te ,  perdrait  l'existence  qu'il  avait  au- 
paravant? Ce  n'est  pas  à  vous ,  les  régénérateurs, 
tes  fondateurs  d'une  grande  république ,  que  Ton 
en  imposera  aussi  grossièrement.  Qui  sait  encore 
jusqu'à  quel  point  lesprit  de  la  liberté  portera  les 
progrès  des  nouveaux  enfants  de  la  république  dans 
cet  autre  hémisphère? 

Dirigés  par  des  hommes  en  oui  ils  auront  con- 
fiance, le  commerce  de  France  et  la  culture  des  colo- 
nies en  retireront  des  avantages  d'autant  plus  grands 
Sue  l'humanité  n'aura  pas  a  en  souffrir;  elle  vous 
evra  ce  nouveau  bienfait. 

Nous  n  avez  pas  à  consulter ,  dans  cette  circon- 
stance, les  hommes  dont  les  principes  de  liberté  et 
d'égalité  blessent  les  intérêts  et  Vamour-propre, 
mais  bien  le  grand  intérêt  national,  qui  vous  com- 
mande de  sonder  les  plaies  fuites  au  commerce  de  la 
république  par  les  déchirements  de  vos  colonies. 

Vods  devez  donc  vous  empresser  d'y  faire  péné- 
trer les  secours  que  vous  devez  leur  porter,  et  les 
hommes,  vos  missionnaires,  chargés  de  les  diriger. 

J'ai  démontré  que  politiquement  et  sagemeni  vous 
ne  pouviez  y  envoyer  des  représentants  du  peuple  ; 
je  vais  vous  prouver  que  les  principes  s'y  opposent 
également. 

Nous  devons  distinguer  les  objets  de  législation  et 
d'exécution  :  l'un  et  l'autre  doivent  être  parfaite- 
ment distincts. 

C'est  une  erreur  trop  souvent  répétée  que  le  pou- 
voir exécutif  était  le  balancier  du  pouvoir  législatif; 
celui-ci  est  un ,  unique  et  souverain  ;  il  s'applicpie  à 
faire  les  lois,  et  il  a  l'inspection  immédiate  sur  i'exé' 
cution.  Le  pouvoir  exécutif  n  est  donc  que  la  consé- 
quence du  pouvoir  législatif:  l'un  est  le  créateur  de 
la  loi ,  l'autre  l'iastrumcnt  dirigé  par  elle  et  pour 
elle. 


460 


Si  la  force  des  circonstances  nous  a  obligés  de 
nous  écarter  de  ce  principe  conservateur,  et  le  ré- 
gulateur des  gouvernements ,  la  justice  nous  rame- 
nant à  de  plus  heureuses  circonstances,  il  est  de 
DOtre  devoir  de  nous  fixer  sur  ce  point  solide  ,  cfde 
'  renoncer,  lorsqu'il  n'^  a  pas  urgence ,  à  faire  des 
membres  de  la  législation  autant  de  membres  exé- 
catifs  et  administratifs.  A  la  trop  grande  centralisa- 
tion des  pouvoirs  commence  le  despotisme  :  il  faut, 
autant  que  Ton  peut,  réunir  les  intérêts  ;  mais  il  im- 
porte surtout  de  distinguer  les  pouvoirs. 

L'autorité  civile  que  vous  avez  à  placer  aux  colo- 
nies relève  purement  et  simplement  de  fonctions 
executives.  Les  commissaires  de  la  guerre  et  de  la 
marine  ont  des  ordres  fréquents  à  donner  aux  colo- 
nies; ils  les  adressent  à  l'autorité  supérieure  des 
lieux,  qui  est  tenu  d*y  déterer  :  lés  adresseront- ils 
aux  membres  de  la  Convention  nationale,  auxquels 
ils  sont  subordonnés  ? 

Vous  devez  faire  exécuter  vos  lois  aux  colonies; 
l'objet  de  la  mission  se  borne  là.  Si  un  législateur 
est  dépositaire  des  moyens  d'exécution ,  il  compro- 
met son  caractère  s'il  n'est  pas  obéi ,  et  il  viole  lui- 
même  tous  les  principes.  Dépose-t-il  le  caractère 
dont  il  est  revêtu  pour  le  placer  en  d'autres  mains; 
il  doit  être  le  témoin  du  dépôt  qu'il  transmet. 

Vous  n'êtes  pas  obligés  de  traiter  avec  vos  colo- 
nies de  souveraineté  à  souveraineté  ;  ces  temps  sont 
passés  :  elles  forment  une  partie  intégrante  de  la 
république  une  et  indivisible.  Nos  lois  n'y  recevront 
dâormais  aucune  opposition,  puisqu'elles  sont  en 
faveur  du  peuple  qui  les  consent  par  l'organe  des 
représentants  des  colonies  admis  dans  votre  sein.  Ce 
n'est  pas  seulementunecasteprivilégiée  représentée; 
ce  sont  toutes  les  parties  d'un  peuple  qui  vous  com- 
ble de  bénédictions,  et  qui  vivrait  dans  les  fers, 
l'opprobre  et  la  misère,  si  vous  n'en  étiez  les  protec- 
teurs et  les  pères.  Il  vous  tend  les  bras  pour  que 
vous  le  souteniez  dans  ses  moments  d'enfance  ;  il 
attend  vos  secours,  et  vous  ne  les  lui  refuserez  pas. 

Mettons  fin ,  il  en  est  temps ,  à  tous  les  troubles 
qui  ont  désolé  ces  malheureuses  contrées.  Choisis- 
sons, pour  y  envoyer,  ou  plutôt  que  votre  comité 
choisisse  lui-même ,  si  cela  est  nécessaire  pour  le 
secret  de  vos  opérations,  parmi  le&  meilleurs  patrio- 
tes, des  hommes  éclairés,  sages,  doux  et  humains, 
mais  fermes ,  vertueux ,  car  ils  seront  justes.  Resser- 
rons les  liens  d'indivisibilité  des  colonies  à  la  mère- 
patrie  ;  assurons  les  propriétés  et  les  créances  des 
commerçants  d'Europe  par  l'application  de  toutes 
les  lois  françaises,  et  surtout  cle  la  saisie  réeMe, 
comme  dans'  la  partie  du  territoire  français  d'Eu- 
rope. Portons  à  nos  colonies  la  paix  et  l'instruction, 
éteignons  le  flambeau  de  la  discorde ,  et  fermons  les 

f»laies  profondes  qu'ont  faites  à  la  patrie  l'orgueil , 
'intérêt,  Tamour-propre,  en  un  mol  toutes  les  pas- 
sions déchaînées  ;  rallions  tous  les  citoyens,  expul- 
sons promptement  Espagnols  et  Anglais  qui  sourient 
à  nos  malheurs ,  et  qui  de  plus  en  profitent.  Dé- 
jouons leur  politique  perfide ,  reviviûons  nos  cultu- 
res, et  donnons  leur  une  nouvelle  valeur. 

Par  là  la  Convention  acquerra  un  nouveau  droit 
à  la  reconnaissance  nationale  ;  par  là  vous  recevrez 
les  bénédictions  du  pe-jple  en  assurant  le  bonheur 
et  la  prospérité  de  la  république. 

Je  conclus  à  ce  qu'il  soit  passé  à  l'ordre  du  jour 
sur  le  projet  qui  vous  est  préseiité. 

Crassous  reproduit  les  réflexloos  qu'il  a  déjà  présentées, 
tendant  à  ce  que  les  commissaires  soient  pris  hors  du  sein 
de  la  ConventioK. 

PÉNiÈnss  :  Il  est  bien  temps  d'examiner  si  la  Convention 
a  le  droit  d'accorder  à  quelques-uns  de  ses  membres  des 
pouvoirs  absolus,  qui  ne  sont  auuv  chose  que  la  dictature. 


Il  tsi  temps  de  dire  que  le  représentant  du  peapleest,  mon 
un  homme  quelconque,  mais  la  Convention  elle-méoie.  Je  ne 
veux  donc  pas  que  vous  envoyiez  à  quatre  mille  Ueoes  quel- 
ques citoyens  avec  des  pouvoirs  illimités. 

J'espère  que  bientôt  vous  mettrez  la  coostitotion  en  vi- 
gueur, et  alors,  du  moins,  il  n'y  aura  plus  de  représentants 
avec  des  pouvoirs  illimités  ;  car  c'est  alors  seulement  que 
nous  jouirons  vraiment  de  la  lit)erlé.Or,  comment  retlrerei- 
vous  ceux  que  vous  aurez  donnés  à  des  boounes  envoyés  si 
loin  ?  Je  demande  donc  l'ordre  du  Jour.  (On  applaudit.) 

Cambon  s'élève  aussi  contre  l'absurdité  de  oetle  dlclatnre 
confiée  à  quelques  hommes.  U  leur  est  impossn>le  de  résister 
à  l'ivresse  du  pouvoir,  et  c  est  ainsi  que  plusieurs  d'entre 
eux  ont  commis  tant  d'excès  11  demande  qu'on  se  conieiife 
d'envoyer  des  commissaires  civils,  pris  hors  da  sein  de  la 
Convention. 

Pbl£t  :  Je  conviens  de  la  vérité  des  principes  aivanoés 
par  les  préopinants,  mais  pourquoi  ne  les  met-on  en  avant 
que  lorsqu'il  s'agit  des  colonies?  Pourquoi  les  mêmes  boia- 
mes  qui  envoient  tons  les  jours  des  représentants  dans  les 
départements,  où  Ils  sont  moins  nécessaires,  ne  s'élèvent-ils 
qœ  contre  ceux  qui  doivent  aller  aux  colonies?  Veat<on 
dire  aussi  comme  Robespierre  :  Périssent  les  colonies  plu- 
tôt qa'nn  principe  !  Il  n'y  a  que  des  représenuinu  qui  puis- 
sent sauver  les  colonies ,  parce  qu'eux  senls .  dans  des  pays 
si  éloignés,  pourront  prendre  les  mesures  qui  leur  seront 
dicjées  par  les  circonstances.  Comment  pourrions-nous  leor 
donner  des  instructions  suffisantes  pour  des  pays  dont  nous 
connaissons  fort  mal  la  situaUon  et  les  t>esoins  actuels,  et 
pour  des  circonstances  qu'il  est  impossible  de  prévoir?  Je 
demande  doue  que ,  pour  sauver  nos  colonies,  vous  y  en- 
voyiez des  représentants. 

La  discussion  est  fermée. 

Le  projet  de  décret  poar  l'envoi  des  représentants  do 
peuple  dans  les  colonies  est  mis  en  délibération  par  assis  et 
levé.  Le  résultat  de  la  dcUbéraUon  reste  dooleax. 


La  Convention  décrète  que  le  projet  sera  mis  i 
voix  par  appel  nominal. 

—  Auguis,  organe  du  comité  de  sûreté  générale,  commu- 
nique plusieurs  lettres  des  représentants  Treilbard,  Bordas 
et  Blutel ,  en  mission  dans  les  départements  du  Bec^'Am- 
bès,etc. 

Bordas  et  Treilhard,  représenlanlt  du  peupU  en 
misiion  dans  le  département  du  Bee-d^Ambês^à 
leurs  collègues  membres  du  comité  de  sûreté  gé^ 
nérale. 

Bordeaui.  le  14  pluviôse.  Pan  3«  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

c  Citoyens  collègues ,  nous  vous  adressons  un  arrêté  que 
nous  avoo^  cru  d«-vufr  prrndie  hier  pour  suspendre  les 
séancfs  de  la  Scriéii^  popul.iire  de  cette  commune,  et  par 
leque  nous  avons  orJciiné  qu'il  serau  incessamment  formé 
un  noyau  de  ving'  quatre  membres  qui  procéderaient  A  la 
formation  d  une  nouvr!*e  Société. 

t  Les  moûts  qui  nouxoni  déicrminés  sont  exprimés  dans 
le  préambule.  L'exé/j.^on  de  notre  an  été,  portant  mandat 
d'arrêt  contre  quelqu'-s  citj)ens  de  Bordeaux,  a  fourni  aux 
malveillants  des  préu-xtes  pour  agiter  les  esprits.  D'abord 
on  leur  a  peint  ce  mandat  comme  un  acte  de  persécuUon 
contre  Lamarquc  fils  et  Boisset,  qui  l'un  et  l'autre  avaient  un 
grand  crédit  dans  la  Société  ;  on  a  supposé  qu'ils  étnicnt 
arrêtés  sans  motifs,  parce  qu'on  ne  connaissait  |)as  ceux  qui 
nous  ont  déterminés;  de  là  on  a  tiré  la  conséquence  que  la 
calomnie  s'était  acharnée  sur  leurs  personnes.  On  s'est  en- 
suite livré  aux  conjectures  sur  les  prétendus  calomniateurs, 
et  le  résultat  de  toutes  ces  divagations  a  été  qu'on  enver- 
rait A  la  ConvenUon  une  députation  pour  dénoncer  plusieurs 
de  ses  membres. 

t  Nous  n'avons  vu  dans  celte  marche  que  la  suite  d'un 
plan  formé  pour  diffamer  la  représentation  nationale,  plan 
qui  se  développe  sur  plusieurs  points  de  la  république,  dont 
Pexisience  à  Bordeaux  était  démontrée  par  les  sentiments 
et  les  liaisons  connue»  des  meneurs  de  la  Société,  et  que  des 
intrigants  vont  successivement  propager  dans  les  Sociétés 
populaires.  La  tribune  de  celle  de  Bordeaux  avait  surtout 
retenti  hier  des  réclamations  deBabise.  qui,  après  s'être  fait 
chasser  de  la  Société  de  Rochefort  comme  un  des  agents  de 
Robespierre,  éutit  accouru  A  Bordeaux  pour  y  pr^^arer 


46( 


•Qssl  l'oppresstoD.  NousTaTOOs  feit  mettre  co  éiatd'arrc*- 
taiioo»  atin  qu'il  ne  tentât  point  d'aller  ^rer  d'autres  com- 
munes. 

<  Nous  sommes  très-convafncus  que  notre  arrêté  ramè- 
nera la  confiance,  la  paix  et  la  liberté,  dans  une  Société 
dont  les  membres  sont  bons  en  général ,  et  que  la  crainte 
seule  empêchait  de  développer  leurs  sentiments. 

•  Au  reste ,  nous  avons  cru ,  dans  une  occasion  de  cette 
importance,  devoir  nous  entourer  des  lumières  de  nos  col- 
lègues Blutel ,  Chaudron-Rousseau  et  Colombel,  qui  sont  à 
Bordeaux  dans  ce  moment  :  et .  après  une  mûre  discussion, 
Doure  résolulioD  a  été  unanime. 

«Comptez,  citoyens  collègues,  que  nous  poursuivrons 
Mns  relâche  ceux  qui  veulent  troubler  la  tranquillité  pu- 
blique, et  que  nous  ne  capitulerons  Jamais  avec  les  voleurs 
et  les  assassins. 


t  Salut  et  fraternité. 


■  Tbeilbabp,  Bordas.  « 


Lti  rejprésentants  du  peuple  Bordas  et  Treilhard^ 
en  mission  dans  les  déparlements  du  Bec-d'Am- 
bès,  à  leurs  collègues  membres  du  comilé  de  sû- 
reté générale. 

Bordeaux,  le  17  pluviôse.  Tas  S« de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

t  Qtoyens  collègues,  quelques  ennemis  de  la  tranquillité 
publique  ont  essayé ,  dans  cette  commune,  de  iroubicr  l'or- 
dre qui  y  règne ,  et  dont  la  presque  totaiiuS  des  citoyens  se 
félicite  ;  ils  n'ont  pas  réussi. 

•  Avant-hier,  à  la  comédie,  un  léger  mouvement  se  mani- 
festa; une  ou  deux  personnes  crièrent  :  A  bas  le  bonnet 
rouge!  dans  on  moment  où  l'un  des  acteurs,  remplissant  le 
rôle  de  la  pièce ,  en  présentait  un  A  un  antre  acteur;  cela 
n'a  pas  eu  d'autre  suite. 

c  Aujourd'hui,  entre  les  deux  pièces,  quelques  personnes 
ont  voulu  forcer,  par  leurs  cris,  les  femmes  qui  étaient  dans 
les  loges  de  quitter  des  panaches  blancs  qu'elles  avaient  sur 
leurs  létes  :  le  tumulte  a  été  considérable.  Nous  nous  étions 
rendus  à  la  comédie  ;  un  officier  municipal  est  venu  nous 
demander  ce  qu'il  convenait  de  faire  ;  nous  lui  avons  ré- 
pondu de  faire  lever  la  toile  et  commencer  la  pièce ,  per- 
suadés que  le  bruit  cesserait  à  l'apparition  des  acteurs. 

<  Quelques  moments  après ,  nous  avons  été  fort  étonnés 
d'entendre  un  officier  municipal,  autre  que  celui  à  qui 
nous  avions  parlé,  qui,  adressant  la  parole  à  l'assemblée,  a 
invité  les  femmes  à  quitter  leurs  bonnets. 

t  Nous  avons  cru  devoir  réprlmerce  premier  acte  de  fai- 
blesse, qui  aurait  pu  être  suivi  de  plusieurs  autres,  et,  après 
avoir  lu  au  peuple  la  loi  du  8  brumaire  de  l'an  2  de  la  ré- 
publique ,  qui  permet  à  chacun  de  se  vêtir  comme  bon  lui 
semblera,  et  ordonne  que  ceux  qui  voudraient  contraindre  les 
citoyens  et  citoyennes  à  se  vélir  d'une  manière  particulière 
seront  poursuivis  comme  perturbateurs  du  repos  publie, 
nous  avons  sur-le-champ  ordonné  que  les  auteurs  du  tu- 
multe fussent  arrêtés  dans  la  salle  même,  et  nous  avons  cru 
devoir  aussi  dans  le  moment  nous  assurer  de  la  personne 
de  l'officier  municipal  qui  avait  adressé  Tinviiation  donc 
nous  venons  de  vous  rendre  compte. 

«  Des  applaudissements ,  des  cris  de  vive  la  réphhU^et 
nous  ont  confirmés  dans  l'opinion  que  nous  avons  touiours 
eue  qu'Ici,  comme  partout  ailleurs,  le  peuple  était  ami  de 
l'ordre,  qu'il  désirait  la  tranquillité,  et  que  c'était  là  son 
premier  vœu. 

c  On  nous  a  assurés  depuis  que  ceux  qui  «avalent  crié  à 
bas  le  bonnet  rouge.'  é\a\cDi\c*  mêmes  que  ceux  qui,  hier, 
criaient  à  bas  les  panaches  blancs! 

«  Cest  ce  que  nous  ne  manquerons  pas  de  vérifier. 

c  Citoyens  collègues,  les  agitateurs  seront  comprimés, 
nous  vous  en  répondons. 

c  Liberté,  égalité,  république  une  et  indivisible,  paix  in- 
térieure, respect  à  la  représentation  nationale,  soumission  à 
la  loi,  ou  la  mort,  voilA  wtre  devise. 
•  Salut  et  fraternité. 

c  Tbbiluaiud»  Boiuiab.  • 

La  Convention  approuve  la  conduite  de  ces  représentants, 
et  ordonne  que  leur  lettre  sera  Imprimée  au  Bulletin. 
La  séance  est  levée  A  quatre  bearet. 


SEANCE  DD  S5  PLOYUMI. 

Un  secrétaire  donne  lecture  d'une  lettre  du  représentant 
du  peuple  Menuau,  en  mission  dans  la  Vendée,  qui  annonce 
de  nouveaux  sucrés  de  l'amnistie,  et  le  retour,  sous  les  b^nw 
nières  de  la  république,  d'un  chef  de  révoltés,  nommé  Chi- 
rac ,  qui  fait  passer  au  département  de  la  Lnnère,  où  il  était 
domicilié,  les  plus  touchantes  assurances  de  son  repentir,  et 
de  l'engagement  qu*il  prend  de  servir  avec  fidélité  la  rc|)U- 
bUque  française,  sa  patrie. 

Sur  l'observatiou/de  plusieurs  membres,  qu'il  peut  y  avoir 
du  danger  A  faire  connaître  les  nouvelles  de  la  Vendée ,  et 
que  l'on  peut  contrarier,  par  cette  publicité,  les  mesures 
adoptées  par  les  représentants  du  peuple  actuellement  sur 
les  lieux,  cette  lettre  est  renvoyée  au  comité  de  salut  public, 
et  la  lecture  des  letures  Jointes  à  celles  de  Menuau  a  été  in- 
terrompue. 

—  Les  ingénieurs  des  ponts  et  chaussées  sont  admis  A  la 
barre,  et  présentent  une  pétition  tendante  obtenir  une  aug- 
mentation d'appointements ,  eu  égard  à  la  cherté  des  sub- 
sistances et  à  ce  qu'ils  sont  forcés  de  vivre  moitié  de  l'an- 
née en  route.  , 

Sur  la  proposition  de  Cbénier,  la  Convention  nationale 
décrète  le  renvoi  de  la  pétition  aux  comités  des  travaux  pu- 
blics et  des  finances  réunis,  les  charge  de  lui  fsire,  primidi 
prochain,  pour  tout  délai,  vu  rimportancede  Tobjet,  le  rap- 
port sur  les  réclamations  dcsdiis  ingénieurs,  qu'il  convieilt 
de  mettre  dans  la  plus  prompte  activité. 

—  Des  députés  extraordinaires  de  la  commune  de  Brest 
viennent  demander  le  prompt  jugement  des  marins  détenus 
pour  raffaire  du  vaisseau  le  Révolutionnaire  et  celle  du 
23  prairial. 

Sur  la  proposition  d*un  membre,  la  Convention  nationale 
décrète  que  la  comité  de  salut  public  fera  demain ,  26  plu- 
viôse ,  un  ref»port  sur  la  prompte  création  d'une  cour  mar- 
tiale maritime ,  chargée  de  Juger  les  marins  accusés  dans 
l'affaire  du  23  prairial  et  celle  du  vaisseau  le  Bévohition» 
noire. 

—  Anguis,  au  nom  du  comité  de  sûreté  générale,  propose 
le  décret  suivant,  qui  est  adopté  : 

c  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  son  co» 
Bité  de  sûreté  générale, 

«  DécrèUî  que  l'article  IV  de  la  loi  du  27  nivosé  sur  le  re- 
nonvelleroent  des  cartes  de  sùraté  est  rapporté,  et  qu'il  sera 
remplacé  par  celui-ci  : 

•  Art.  iV.  A  l'avenir  II  y  aura  trois  espèces  de  cartes  de 
sûreté,  mais  de  couleurs  différentes  :  l'une  blanche,  pour  les 
citoyens  domiciliés  à  Paris,  qui  ont  atteint  l'âge  de  vingt  et 
un  ans  et  au-dessus .  l'autre  rouge,  pour  les  citoyens  domi- 
ciliés à  Paris,  ayant  au  moins  quatorze  ans;  et  la  troisième 
bleue,  pour  les  externes  qui  sont  obligés  ou  autorisés  d'y 
séjourner. 

«  L'une  et  Tautra  de  ces  trois  cartes  contiendront,  d'un 
côté ,  le  numéro .  le  folio  de  fenregistrement ,  l'indication 
de  la  commune  de  Paris,  les  prénoms,  noms ,  lieu  de  nais- 
sance, de  district,  de  départensent.  l'âge,  la  uille,  la  de- 
meure, ré|M>que  de  la  résidence  à  Paris,  le  nom  de  Ui  sec- 
lion  et  le  numéro  de  la  compagnie;  et  de  l'autre  côté,  le 
signalement  et  la  slgnauire  de  ceux  A  qui  elles  seront  dé- 
livrées. \ 

—  Merlin  (Je  Douai),  au  nom  du  comité  de  salut  public, 
p«ivalt  à  la  tribune  et  fait  une  se«:onde  lecture  du  traité  de 
paix  avec  le  grand  dur  de  Toscane  11  le  soumet,  au  nom  du 
comité  de  salut  public,  à  la  ratification  de  l'assemblée. 

La  discussion  s'ouvre. 

RouzBT  :  Nous  voulons  tous  une  paix  honorable 
et  glorieuse,  et  telle  qu*il  nous  convient  de  l'attendre 
lorsqu'elle  nous  est  demandée  par  des  ennemis  voi- 
sins. Mais  plus  une  telle  question  est  importante, 
plus  elle  doit  appeler  votre  attention.  Nous  ne  som- 
mes plus  au  temps  où  ud  comité  usurpateur  venait 
nous  commander  de  convertir  ses  caprices  en  lois. 
(Vifs  applaudissements.) 

Votre  comité  de  salut  public  actuel  est  digne  de 
toute  votre  confiance;  mais  il  me  paraît  qu*en  vous 

{présentant  un  traité  bon  en  lui-même  il  n*a  pas  suivi 
es  formes  les  plus  analogues  aux  principes.  Vous 


46» 


n'avez  jamais  pu  avoir  llntention  de  confier  à  qui 
que  ce  soit  le  droit  de  faire  la  paix  ou  de  déclarer  la 
guerre. 

Vous  n*avez  laisse  en  cela  à  votre  comité  que  la 
partie  executive;  et  cependant,  d'après  les  termes 
dans  lesquels  est  conçue  sa  rédaction,  vous  semble- 
riez  ne  faire  que  consentir  à  ce  que  votre  comité 
aurait  déjà  conclu  par  lui-même;  c'est  à  vous  seuls 
a  conclure  les  traites.  Ne  nous  écartons  pas  de  cette 
marche,  elle  est  digne  de  la  Convention;  elle  nous 
honorera  aux  yeux  de  TEurope;  elle  prouvera  que 
nous  ne  voulons  avoir  pour  ennemis  que  ceux  de 
rhumanité  et  de  la  justice. 

Je  demande  que  le  comité,  au  lieu  de  nous  de- 
mander la  ratification  d'un  traité  conclu,  nous  pro- 
pose le  projet  d'un  traité  que  nous  puissions  adop- 
ter ou  rejeter.  Je  demande  en  outre  que,  dans  toutes 
les  questions  relatives  aux  traités  à  conclure,  l'appel 
nominal  ait  lieu,  pour  donner  k  nos  décisions  plus  de 
solennité.  • 

L'orateur  préseote  nue  noQvelle  formole  de  rédaction 
conforme  aux  principes  qu'n  a  développés,  et  il  conclut  & 
TadopUon  da  unité  avec  la  Toscaoe,  rédigé  suivant  cette 
formule. 

JoHANNOT  :  Les  annales  de  l'Europe  ont  montré 
souvent  des  rois  qui ,  à  la  suite  de  guerres  injustes, 
ne  demandaient  la  paix  (qu'après  des  défaites,  et  ne 
posaient  les  armes  que  lorsqu'ils  étaient  contraints 
de  les  quitter.  11  est  temps  oue  l'Europe  donne  un 
autre  spectacle  :  c'est  celui  d  un  grand  peuple  qui, 
après  avoir  vaillamment  défendu  sa  liberté  contre  la 
ligne  des  rois,  ne  se  refuse  point  à  la  paix  au  milieu 
des  triomphes  les  plus  mémorables,  et  se  modère 
dans  ses  succès  lorsque  tant  de  causes  pourraient  en 
faire  excuser  l'ivresse. 

Le  moment  où  l'une  des  puissances  coalisées  se 
détache  de  la  plus  impolitique  association  va  mani- 
fester au  monde  entier  les  principes  magnanimes 
qui  dirigent  notre  politique.  Que  tous  les  peuples 
sachent  que,  si  nous  avons  fait  la  guerre,  ce  n'était 
point  par  l'ambition  des  conquêtes,  mais  parce  que 
la  dignité  de  la  nation  outragée  la  forçait  à  la  ven- 
geance ;  qu'ils  sachent  que,  si  elle  fait  la  paix,  ce 
n'est  point  parce  qu'elle  est  faible,  mais  parce  qu'elle 
est  animée  des  sentiments  de  la  justice  et  de  l'hu- 
manité. 

Au  reste,  la  France  ne  peut  vouloir  qu*une  paix 
glorieuse  et  durable;  tant  de  sang,  de  trésors  et  de 
gloire  n'auront  pas  été  prodigués  en  vain. 

La  guerre  a  entraîné  des  fléaux  inévitables,  mais 
elle  n'a  point  épuisé  qos  ressources.  Les  bris  de  nos 
ennemis  sont  fatigués,  ceux  des  républicains  repren- 
nent dans  chaque  victoire  une  force  nouve'ie.  Dos 
mesures  grandes  et  efficaces  ont  assuré  nos  ci)(iro- 
visionnemenls;  elles  doivent  calmer  toutes  les  in- 
quiétudes au  dedans,  et  mettre  un  terme  aux  der- 
nières espérances  des  monarques  armés  contre  nous. 
Leurs  blessures  sont  plus  profondes  que  les  nôtres, 
et  nulle  gloire  ne  peut  les  consoler. 

La  France  a  donc  acquis  le  droit  d'en'.cndre  par- 
ler lie  paix.  Vaincue,  elle  ne  l'aurait  pas  acceplée; 
victorieuse,  elle  l'accorde  avec  enipresseuif  nt. 

La  Toscane,  qui  nous  la  demande,  n  est  entrée 
qu'à  reçret  dans  la  coalition.  Il  est  glorieux  pour 
elle  de  donner  la  première  un  exemple  fait  pour  être 
imité.  Noire  conduite  loyale  répondra  à  la  sienne  ; 
elle  verra  que  les  peuples  libres  sont  les  meilleurs 
amis,  comme  les  ennemis  les  plus  terribles.  (On  ap- 
plaudit.) 

Ce  n'est  point  à  la  grandeur  du  territoire  ni  à  la 
masse  de  la  population  qu'il  faut  mesurer  Tiinpor- 
lance  de  ses  alliés;  c'est  a  leur  bonne  loi.  D'ailleurs, 
la  politique  traD(aise  ne  peut  être  indifférente  à  de 


nonvelles  relations  avee  f Italie,  et  k  ronrertore 
d'un  port  ami  sur  la  Méditerranée.  Une  contrée  oui 
possède  depuis  tant  de  siècles  les  chefs  d'œuvre  aes 
arts  devait  être  unie  avec  le  peuple  français,  qui 
donne  aux  arts  un  nouvel  essor  en  leur  rendant  la 
liberté. 

Notre  courag«  a  feit  trembler  nos  adversaires; 
notre  équité  nous  assurera  des  alliés.  Ceux  qui  ont 
su  vaincre  avec  tant  d'énergie  sauront  négocier 
avec  celte  sagesse  qui  concilie  l'amitié  de  tous  les 
gouvernements  justes  et  repousse  les  calomnies  de 
tous  les  tyrans. 

Je  demande  l'adoption  du  projet  de  décret  présenté 
par  le  comité  de  salut  public. 

L'opinion  de  Johannotest  vivement  applaudie. 

Olivier  Gérente  annonce  qu'il  se  propose  de  traiter  troii 

questions  : 

La  (pierre  a-t-elle  été  juste  ? 

La  France  doit-elle  réclamer  des  iDdemnltést 

Doit-eile  écouler  des  proposUions  de  paix  parliellet? 

Déjà  l'oraieur  avait  al>ordé  la  première  question  :  Il  rap- 
pelait le  droit  qu'ont  tous  les  peuples  de  se  donner  un  {;oii- 
vernemeni:  il  prouvait  que  nous  n'avons  pris  les  armes  que 
pour  la  défense  de  ce  droit  sacré,  et  que  le  plus  beau  jour 
pour  nous  scm  celui  où,  les  déposant,  et  suspendant  nos  vic- 
toires, nous  |M>urrons  ne  voir  que  des  frères  dans  les  peu- 
ples qui  nous  avoisinent 

(  On  interrompt  l'orateur;  on  lui  représente  qu'U  sort  de 
la  question,  et  que  les  vérités  générales  qu'U  se  propose 
d'établir  sont  reconnues,  et  qu'il  ne  s'agit  que  d'en  faira 
l'application  au  iraiié  soumise  la  discussion.) 

BoissY  n  Anglas  :  Je  demande  la  narole  pour  une 
motion  d'ordre.  On  confond  deux  cnoses  qu'on  de- 
vrait distinguer  :  la  manière  dont  nous  nous  y  pren- 
drons, soit  pour  négocier,  soit  pour  ratilier  les  ré- 
sultats des  négociations  En  ce  moment,  il  n'y  a 
qu  une  seule  chose  a  examiner*  le  traité  avec  la  Tos* 
cane  conv4ent-il  ou  ne  convient-il  pas  à  la  Conven- 
tion ?  Quant  aux  vues  générales ^ur  la  manière  dont 
on  devra  traiter  par  la  suite,  sur  les  pouvoirs  de  vos 
comités,  sur  la  lixatian  de  *  époque  à  laquelle  la 
Convention  interviendra  dans  les  négociations,  ren- 
voyé? ces  qufstîons  a  I  examen  de  votre  comité,  cl 
chargez  le  de  vous  présenter  un  rapport  à  ce  sujet. 
Mais,  pu.squ  en  ne  présente  pas  d'objection  contre  le 
traite  en  lui-même,  ralibez-le  dès  aujourd'hui. 

Merlin  (de  Douai):  Ce  n'est  pas  sans  y  avoir  mû- 
rement rérlc^chi  que  le  comité  vous  a  présenté  le 
projet  de  décret  dont  il  s'agit  dans  cet  instant;  d'a- 
près la  constitution,  l'initiative  sur  la  déclaration  de 
guerre  a|)partient  au  corps  législatif;  mais,  pour  la 
paix,  comme  il  faut  nécessairement  des  négociaiioii! 
préalables,  la  constitution  a  seulement  soumis  les 
traites  de  paix  à  la  ratification  du  corps  législatif;  ce 
sont  les  ternies  formels  de  l'article  LXX.  Le  comité  a 
pensé  qu'en  le  chargeant  des  relations  extérieures 
vous  1  aviez  mis  à  la  place  du  conseil  exécutif. 

Cbarlier  :  Le  comité  de  salut  public  ne  peut  pas 
éli^e  assuiiiiéau  conseil  exécutif;  la  Convention  ello- 
meme  n  est  point  une  législature  qui  lient  son  exis- 
tence de  la  coiishtution  ;  elle  est  investie  de  pou- 
voirs illimités  et  de  la  souveraineté  du  peuple  qui 
lui  a  été  transmise  instantanément.  Le  comité  de 
salut  public  est  une  émanation  d'elle. 

'RoGER-Oucos:  Je  suis  de  l'a  vis  du  décret.  La  con- 
stitution exige  seulement  la  ratification  du  corps  lé- 
gislatit  sur  les  traite^»  conclus  par  le  conseil  exécutif; 
pourquoi  cxigerail-on  davantage  a  l'égard  de  ceux 
qui  sont  conclus  par  le  comité  de  salut  public,  qui , 
comme  vient  rie  le  prouver  Charlier,  est  plus  que  le 
conseil  exécutil,  e&t  une  partie  de  la  Convention.  Je 


46S 


lemande  que  le  traité  soit  ratifié  an  nom  dn  peuple 
lançais.... • 

DuLAURB  :  Pou?ons-nou8  le  ratifier  au  nom  du 
f  iiple  turc? 

RoGEB-Docos  :  Il  est  bien  étonnant  qu'on  parle 
d'iiidetnnitë  avec  une  petite  nation  comme  la  Tos- 
cane. (Violents  oiurinures.)  L*Etat  de  Toscane  ne 
vaut  pas  deux  de  vos  déparlements.  (Les  murmures 
redoublent*) 

Clauzel  :  Il  n*est  ni  dans  les  principes  ni  dans  les 
intentions  d*un  peuple  libre  de  mépriser  ou  dln- 
sulter  aucune  puissance,  quelle  que  soit  sa  Torce  ou 
sa  faiblesse.  Je  demande  que  Roger-Ducos  soit  rap- 
pelé a  Tordre.  (Applaudissements.) 

Le  président  le  rappelle  à  Tordre. 

Cambacébès  :  Je  ne  parlerai  point  sur  les  arti- 
cles du  traité  soumis  à  votre  approbation ;J*ouvrirai 
seulement  mon  avis  sur  la  question  de  forme  qui 
nous  occupe. 

A  mon  sens,  ce  n'est  ni  dans  les  dispositions  de 
Tacte  constitutionnel,  ni  dans  les  distinctions  éta- 
blies chez  quelques  nations  entre  le  pouvoir  légis- 
latif et  le  pouvoir  exécutif,  que  nous  devons  cher- 
cher le  principe  de  la  décision;  il  faut  le  trouver  dans 
l'intérêt  bien  entendu  du  peuple  français  qui  nous 
considère,  qui  scrute  nos  pensées,  qui' pèse  nos  ac-  ' 
tions,  et  qui  rendra  toujours  justice  a  ceux  qui  n'au- 
ront point  trompé  son  attente. 

Ladiflicultéqui  s'est  élevée  n'a  rien  qui  m*étonne: 
dès  que  i*ai  été  placé  au  comité  de  salut  public,  j*ai 
senti  le  besoin  d'une  explication  de  votre  part  sur 
l'étendue  des  pouvoirs  attribués  è  ce  comité  dans 
Fexercice  de  la  direction  des  relations  extérieures; 
mais  cette  opinion  individuelle  n'ayant  point  été 
appuyée,  j'ai  dû  m'en  rapporter  au  vœu  de  mes  col- 
lègues, au  silence  même  de  la  Convention,  et  à  quel- 
ques considérations  importantes  que  j'aurai  l'occa- 
sion de  rappeler  dans  la  suite  de  ce  discours. 

Il  faut  donc  aujourd'hui  aborder  franchement  la 
difficulté;  il  faut  voir  si  la  conduite  du  comité  a  été 
l'effet  de  l'erreur  ou  d'une  entreprise  sur  des  pou- 
voirs qui  ne  lui  étaient  pas  délégués.  Pour  atteindre 
ce  but,  considérons  la  question  sous  les  trois  points 
de  vue  qu'elle  présente  : 

Le  comité  de  saint  public  a-t-i!  dû  signer  les  ar- 
ticles de  paix  arrêtés  avec  le  gouvernement  de  Tos- 
cane? 

En  signant  ce  traité,  a-t-iJ  compromis  les  intérêts 
de  la  nation. 

Dans  le  cas  où  la  Convention  décréterait  une  au- 
tre forme  pour  la  signature  des  traités,  n'esl-il  pas 
indispensable  de  conlirmer  les  articles  qui  vous  sont 
présentés,  s'ils  ne  paraissent  d'ailleurs  susceptibles 
d'aucune  difficulté? 

Je  reprends.  Toute  négociation  exige,  de  la  part 
de  ceux  nui  ta  dirigent,  unité  dans  les  conceptions, 
célérité  dans  l'exécution  et  secret.  Le  comité  a  dû 
s'assurer  de  ce  triple  avantage.  Il  a  d'abord  reconnu 
que  vos  principes  sur  des  propositions  de  paix  n'é- 
taient point  équivoques.  La  Convention  s'est  si  sou- 
vent prononcée  à  cet  égard,  et  surtout  lors  du  rap- 
port de  Meriin  (de  Douai),  qu'il  eût  été  inutile  de 
vous  consulter  sur  le  point  de  savoir  s'il  fallait  en- 
tendre les  propositions  qui  pouvaient  nous  être  faites 
par  les  puissances  coalisées  lorsque  ces  propositions 
n'auraient  rien  de  contraire  à  la  liberté,  à  la  dignité 
du  peuple  françaiset  au  gouvernement  qu'il  a  choisi. 
11  y  avait  donc  unité  dans  les  conceptions  quant  au 
projet  de  paix. 

Relativement  aux  moyens  de  célérité  et  au  secret, 
nous  avons  cru  reconnaître  qu'en  nous  chargeaat de 


diri^r  les  relations  extérieures  rotre  sagesse  toos 
avait  ùk\i  apercevoir  que  ce  n'était  pas  au  moment 
où  il  fallait  discuter  des  intérêts  dépeuple  à  peuple, 
et  se  dégager  de  tous  les  embarras  de  la  diplomatie, 
qu'il  devait  s'ouvrir  une  discussion  publique.  Péné- 
tres du  sentiment  de  nos  devoirs,  nous  n'avons  pas 
ignoré  que  notre  ministère  se  réduisait  à  agir  en 
votre  nom,  que  notre  conduite  devait  nécessaire- 
ment vous  être  soumise,  et  que,  lorsque  le  résultat 
de  nos  opérations  vous  serait  présenté,  vous  répa- 
reriez facilement  les  erreurs  de  notre  inexpérience. 
L'idée  prédominante  en  nous  était  de  prouver  que 
la  répuolique  française  ne  fermait  point  l'oreille  aux 
propositions  raisonnables  qui  lui  étaient  faites,  et 
qu'il  n'y  avait  point  de  variation  de  sa  part  dans 
les  principes  solennellement  proclamés  à  cette  tri- 
bune. 

Le  comité  a  dû  par  consé(incnt  entendre  le  plé- 
nipotentiaire du  gouvernement  de  Toscane,  et  si- 
gner avec  lui  un  traité  qui  allait  devenir  un  mo- 
nument authentique  de  notre  franchise  et  de  notre 
loyauté. 

En  signant  ce  traité,  le  comité  n*a  point  compro- 
mis les  intérêts  de  la  nation.  Si,  après  avoir  entendu 
les  propositions  qui  lui  ont  été  ou  qui  lui  seront 
faites,  il  venait  vous  dire:  Telle  puissance  veut  faire 
la  paix  et  à  telles  conditions;  voici  les  raisons  pour 
et  contre;  commençons  une  discussion,  ainsi  qu'il 
est  en  usage  dans  les  questions  purement  législa* 
À\\ès;  qu'en  résulterait-il?  Aussitôt  nous  écarterions 
et  les  négociations  et  les  négociateurs;  car  à  Tin 
stant  où  la  discussion  s'ouvrirait  sur  des  prélimi- 
naires, sur  des  articles  de  pacification,  la  masse  de 
la  coalition  regarderait  la  puissance  qui  se  serait 
rapprochée  de  vous  comme  son  ennemie,  et  les 
coalisés  se  réuniraient  pour  l'opprimer.  (  Vifs  ap^ 
plaudissements.) 

Le  comité  a  donc  pensé  qu'il  n'excédait  point  ses 
pouvoirs  lorsque  l'avantage  du  peuple  le  portait  à 
stipuler  un  traité  qui  devint  être  soumis  à  votre  ra- 
tification. H  a  reconnu  que  ces  avantages  seraient 
perdus  si,  au  lieu  de  liera  la  France  les  autres  gou- 
vernements,on  les  repoussait  par  la  perspective d  une 
discussion  publique,  dangereuse  pour  eux  seuls  et 
inutile  pour  nous. 

Jugez  actuellement,  citoyens,  si,  en  signant  le 
traité  dont  il  s'agit,  nous  avons  commis  quelques 
erreurs  ou  quelques  fautes,  je  n'ajoute  pasquelques 

délits {Nont  no»  /  s'écrient  tous  les  meml)res.) 

Les  membres  du  comité  de  salut  public  se  croient 
exempts  d'un  tel  soupçon.  (Vifs  applaudissements.) 
Voyez,  je  le  répèle,  s  il  y  a  erreur  ou  faute;  redres- 
sez-nous à  l'instant,  car  les  traités  que  nous  con- 
cluons ne  sont  que  des  projets  jusqu'au  moment  où 
vous  les  avez  coiitirinés  au  nom  du  peuple  français, 
qui  vous  a  rendus  dépositaires  de  son  autorité,  ne  sa 
volonté  et  de  ses  affections.  (  Vifs  applaudisse- 
ments.) 

Passons  an  second  point  de  vue  sous  lequel  j*aî 
considéré  cette  affaire.  Sans  doute  la  doctrine  que  je 
viens  d'énoncer  peut-être  victorieusement  rélutde  ; 
sans  doute  la  Convention  {leut  adopter,  pour  la  ré- 
daction et  la  signature  des  traités  de  paix  ou  d'al- 
liance, d'autres  formes  que  celles  qui  viennent  d'ê- 
tre suivies.  Qu'on  présente  un  mode  qui  réunisse 
moins  d'inconvénients  et  plus  de  simplicité,  et  je 
l'adopte  avec  empressement;  mais  je  dois  vous  faire 
remarquer/ citoyens,  que,  si  vous  trouvez  le  traité 
juste  au  fond,  et  seulement  irrégulier  dans  la  forme, 
vous  justifiez  les  calomnies  que  l'on  s'efforce  de  ré- 
pandre contre  vous;  vous  remontez  un  ressort  déjà 
Brisé,  et  vous  ouvrez  une  route  sûre  pour  prolonger 
!  la  guerre,  malgré  le  désir  que  la  plupart  des  nations 


'4M 


weaUBfokêebinU  ^m  trce  wnh.  Ne  vom  le 
niez  poiot;  les  a|^ts  des  prîoeîpaDX  cheii  de 
b  eosIMâoa  rëpsudeot  paitoot  qo'oo  ae  oeat  point 
tntUtêftt  U  France  «  pree  qo'elle  sa  point  de 
coorerneaeBt  Oo  se  garde  bîea  de  dire  que  U 
Cofif  eotion  elle  -  même  at  le  goa? emesent ,  et 


aoVIle  at  dbposée  â  enteadre  tous  ceox  qui  iTa- 
iieuenmi  à  die;  on  dit  aa  eoatraire  qoe«  paraifsant 
en  apparence  dtsoo§éê  à  consentir  à  la  paix ,  tous 
êtes  résolos  â  l'éloigner. 

On  dit  i  ceox  qoe  la  natore  et  la  raison  doirent 
rendre  oosanrisoo  nos  alliés:  Vous  tous  rappro- 
chez sans  olijet  d*ane  nation  qui  aura  l'air  de  tous 
tendre  la  main  pour  fous  repousser  ensuite,  et  tous 
rendre  le  jouet  de  reorope;  restez  encore  quelque 
temps  en  état  de  guerre;  réut  actuel  de  cette  nation 
ne  peut  pas  durer;  dt%  déchirements  intérieurs  amè- 
neront on  changemetit,  et,  lorsque  ces  changements 
ieroitf  efectués,  fous  obtiendrez  af ec  certitude  les 
eonditioBS  qui  tous  font  désirer  de  fous  allier  avec 
die.  On  dit  aux  puissances  faibles  :  fie  tous  pressez 
Ms  de  demander  la  paix  à  la  France.  Ceux  qui  ont 
laotorité  dans  ce  pays  tous  abandonneront  après 
Toos  afoir  expiés  à  Thomiliation  d'avoir  rendu 
pobliqoes  tos  oires  et  f  os  résolutions.  Ainsi  une 
politlqoe  astocieose  profitera  d'une  vaine  dispute  de 
forme  pour  fortifier  (a  coalition ,  dont  vous  ne  devez 
point  redouter  les  efforts,  mais  dont  vous  ne  devez 
pas  laiiier  échapper  l'occasion  de  détruire  la  chaîne. 
Prenez  garde,  atoyens,  que,  parmi  les  puissances 
qui  TOOS  combattent,  il  en  est  qui  veulent  vous  blo- 
quer et  miner  votre  commerce.  Le  comité  de  salut 
public  ne  croira  être  à  la  hauteur  de  la  mission 
que  TOUS  lui  avez  confiée  que  lorsqu'il  vous  aura 
présenté  les  moyens  de  vous  débloquer  et  de  restau- 
rer le  commerce.  (  Vils  applaudissements.) 

Les  hommes  qui  réfléchissent,  voyant  la  ConTen- 
tion  ajourner  ou  rejeter  le  rapport  qui  lui  a  été  fait, 
ae  diront  :  Le  gouvernement  de  Toscane  s*est  adres- 
fé,  pour  rétablir  sa  neutralité,  à  ceux  oue  la  loi  du 
pays  lui  désignait  ;  après  une  mûre  délibération  le 
traité  a  été  arrêté,  sauf  la  ratification  de  la  représen- 
tation nationale.  Une  discussion  s'est  élevée  sur  la 
nécessité  de  méditer  les  articles  de  ce  traité  avant 
de  le  confirmer;  jusque-là  personne  n'a  reproché  au 
comité  d'avoir  excédé  ses  pouvoirs  ou  suivi  une 
marche  irrégulière;  mais  au  moment  où  il  s'agit  de 
terminer,  des  débats  s'élèvent,  et  il  en  résulte  que  le 
comité  de  gouvernement  s'est  égaré  sur  ses  attribu- 
tions, et  que  la  Convention  nationale  ne  s'est  point 
occupée  de  le  faire  rentrer  dans  les  bornes  qu'elle  a 
mises  à  son  autorité. 

J'en  ai  dit  assez,  citoyens Il  ne  me  convient 

i)as  d'énoncer  les  idées  que  ces  réflexions  peuvent 
aire  naître.  Quand  les  intérêts  du  peuple  ne  sont  pas 
lésés,  abiurons  toute  pensée  de  rivalité  de  pouvoirs, 
d'abus  d'autorité.*  Le  pouvoir  est  ici,  il  n'est  qu'ici; 
toute  autorité  vient  du  peuple,  elle  ne  peut  être 
exercée  qu'en  son  nom.  (Vifs  applaudissements.) 
lldtons-nousdoncde  faire  cesser  une  discussion  sans 
objet  comme  sans  utilité. 

Un  de  nos  collègues  a  proposé  de  dire  :  •  La  Con- 
vention accepte;  •  maison  n  accepte  que  ce  que  l'on 
donne,  et  aucune  puissance  ne  peut  donner  la  paix 
aux  Français.  (Vifs  applaudissements.)  Un  autre  au- 
rait désiré  oue  le  traité  ne  fût  point  signé  sans  un 
rapport  préalable;  mais  alors  il  eût  fallu  discuter  ici 
avec  le  plénipotentiaire  de  Toscane ,  'et  décréter 
pour  un  tiers.  Il  me  semble  que  vous  ne  devez  voir 
que  l'influence  d'un  refus,  et  qu'il  s'agit  uniquement 
(rnpposer  le  sceau  de  votre  autorité  aux  articles 

3 ne  nous  avons  arrêtés;  tout  le  reste  est  une  dispute 
e  mots. 


le  deaandeqo^oo  forte  parla  i 
toutes  les  notions  qoi  ont  été 
séance,  que  le  décret  préKnIé  par  IccoHié  4e  silot 
poblic  soit  BIS  â  rinstant  aox  Toix,  ea  aiovtaot  le 
mot  eon/bweao  HMit  rmiife,  et  qo*OB  ovrre  iarr»> 
sanment  la  dîscosioa  sar  Tétcsdae  des  fomwim% 

Îoe  la  Coorentioo  a  entendu  attritoer  aa  eoaiilé 
e  salut  poblic  poor  U  direction  des  relatioas  cxté> 
rieures. 
Cette  opMoa  iiifiniife.  irrailrparlcapif  Hbap» 

Oa  àrm-mét  qae  b  dbc—ioa  tofcieriée- 

Le  profei  de  àétmta  rela.Bit  «nvoii,  cftaiapiéâ 
Tmmmimiié,  amwÊlBmàa  cmét  wi9€ltm  iépMlil§m.  Bût 
la  CoiKtmtioml 

U prôkSest.  en  proMnçaalle déad, énoMe  qnH a éli 
rends  à  VunumimâU. 

GAtBA!i^ocLO!i  :  Jc  demande  qoe  Ton  llte  ces 
mots:  à  rummniwttU,  Toos  les  décrets  de  la  Convea- 
tion  ont  la  même  force  ;  mettre  oae  formole  parti- 
colière  dans  l'un  serait  en  quelque  sorte  aliiblir  les 
autres. 

La  luppuaioa  en  décréléc. 

Mbbun  (  de  Douai  )  :  Je  rais  dire  la  seeoade  lec- 
ture du  décret,aGn  qu'il  soit  expédié  sor-le-duaip. 

GoDJON  :*Je  demande  qu'on  exprime  dans  la  ré- 
daction l'idée  de  Cambacérès,  qoe  ce  n'est  qo*on 
projet  de  traité.  (Murmures.) 

On  obMnre  que  cène  proposilioa  D'est  pat  appnyée. 

La  rédaction  est  adoptée  comoM  elle  sait  : 

t  Traité.  —  EaU%  les  représentants  dn  penpie  français 
composant  le  comité  de  saint  poblic,  chargés,  par  le  décret 
de  Id  Convention  nationale  do  7  fniclidor  denier,  de  la  di- 
recUon  des  relations  extérieores,  sonssignés; 

«  El  E.-M.-François  comte  de  CarietU ,  cavnïé  cxiraor- 
dlaire  do  grand  duc  de  Toscane,  chargé  de  tes  pleins  pou- 
voirs, donnés  à  Florence  les  4  noTeml>re  et  13  décembre  1 79 1, 
qoi  demeoreroot  annexés  à  la  mfarate  des  prétentes;  égale- 
BMOt  soossigné  ; 

c  U  a  été  convenu  et  arrêté  ce  qoi  soit  : 

c  Art.  1".  Le  grand  doc  de  Toccane  révoqoe  loni  acte 
d'adbésion,  consentement  oo  accession  &  la  ooâlilioo  armée 
contre  la  république  française. 

c  En  conséquence,  il  y  aura  paix,  amitié  et  bonne  Inleill- 
gence  entre  la  république  française  et  le  grand  doc  de  Tos- 
cane. 

•  II.  La  neutralité  de  la  Toscane  est  r6labllesor  le  pied 
où  elle  était  avant  le  8  octobre  1793. 

<  III.  Le  présent  traité  n'aura  son  effet  qu'après  avoir  été 
ratifié  par  la  Convention  nationale. 

•  Fait  à  Paris,  au  Palais  National,  le  SI  pluviôse  de  Pan  3* 
de  la  république  française,  une  et  indivisible  (9  février  1795, 
ère  vulgaire),  t 

«  La  ConvenUon  nationale,  après  avoir  entcndo  le  rap- 
port de  son  comité  de  salut  public,  décrète  qu'elle  confirme 
et  ratitie  le  traité  de  paix  conclu  le  21  ploviose,  présent  mois, 
entre  le  comité  de  salut  public  et  le  ministre  plénipoten- 
tiaire du  grand  duc  de  Toscane.  • 

—  Le  président  demande  si  l'assemblée  leat  passer  à 
rappel  nominal  sur  la  question  de  savoir  si  l'on  enverra  des 
représentants  dans  les  colonies. 

Un  membre  demande  que  l'on  décide  auparavant  la  ques- 
tion de  savoir  si  les  pouvoirs  seront  Ullinités.  Le  ttwt  est 
ajourné  à  demain. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


iV.  B.  Dans  la  séance  do  S6  ploviose.  Il  a  été  décrété,  à 
une  majorité  de  304  voix  contre  178,  qu'il  serait  envoyé 
trois  représentants  du  peuple  dans  les  colonies  orientales, 
et  trois  dans  les  colonies  occidentales. 

Le  décret  entier  a  été  adopté  dans  la  séance  do  37.  Il  porto 

3UC  ces  commissaires  n'aoront  que  des  pouvoirs  limités  par 
es  instruclions;  qu'ils  ne  pourront  être  eholsis  ni  parmi 
les  colons,  ni  parmi  les  membres  ayant  quelque  intérêt  di- 
rect ou  indirect  dans  les  colonies. 

—  Il  a  été  décrété  que  trois  séances  par  décade  seraient 
consacrées  à  la  discussion  du  projet  de  décret  du  comité 
des  finances  sur  les  moyens  de  retirer  des  assignau  de  la 
drcolatlon. 


GAZETTE  NATIONALE ..  LE  MONITEUR  IIVERSEL. 

N*  149.  Nonidi  29  Pluviôse,  Van  8*.  (Mardi  17  Févribb  1795,  vieux  style.) 


POLlTIQUEc 

POLOGNE. 

fn/not  le  r'^'aiiot>r.  —  I^s  agents  de  Catherine  vienncDt 
d'arrncher  aux  fiabitants  de  cette  ville  un  sennent  de  fidé- 
lité à  l'impératrice. 

—  Une  fétc  a  eu  lien,  si  l'on  peut  appeler  ainsi  une  céré- 
monie ima(^néc,  dirigée,  exécutée  par  les  Russes  eux-mêmes. 
On  en  jugera  par  l'inscription  suivante,  qui  a  été  placée  à 
rhôlel-de-ville,  et  dans  laquelle  on  ne  peut  méconnaître  le 
style  des  esclaves  de  Gatlierine  : 

t  Tu  mesures  de  ton  sceptre  une  immense  étendue  de 
«  pays;  mais  ta  honte  s'étend  plus  loin  encore;  elle  fait  le 
«  bonheur  de  Wiina,  qui  te  jure  dans  sa  reconnaissance  une 
«  fidélité  étemelle.  > 

Il  s'est  trouvé  à  Wilna  un  homme  de  lettres  assex  lâche 
pour  chanter  en  vers  l'asservissement  de  son  pays. 

—  Le  prince  Repnin  a  publié  une  proclamation,  en  qua- 
lité de  gouverneur  de  Lithuanie.  Il  y  manif^te  sans  retenue 
les  principes  et  l'ambition  de  la  cour  de  Russie.  En  voici 
t'extrait. 

<  Les  ennemis  intérieurs  du  grand  duché  de  Lithuanie 
ay|int  élé  battus  de  toulcôlé  et  absolument  défaits  par  les 
armées  invincibles  que  S.  M.  I.  de  toutes  les  Russies  avait 
confiées  à  mon  commandement  en  chef,  ce  pays  se  trouve, 
par  la  protection  de  S.  JM.  1.,  à  l'abri  de  l'effroi  et  du  boule- 
versement qui  y  avaient  été  répandus  par  des  hommes  deve- 
nus traîtres  à  la  patrie.  Ceux-ci  y  avaient  détruit  toutes  les 
ordonnances  par  leurs  comportements  licencieux;  ils  y 
avaient  anéanti  toutes  les  lois  politiques  et  civiles  par  l'usur- 
pation du  pouvoir  suprême;  ils  s'y  étaient  livrés  à  une  ty- 
rannique  fureur,  pour  faire  couler  le  sang  de  leurs  conci-. 
toyens  et  les  dépouiller  de  leurs  biens;  Ils  y  avaient  employé 
les  menaces,  les  vexations,  les  cruautés,  les  peines  les  plus 
terribles  et  les  plus  contraires  aux  lois  connues,  pour  forcer 
les  hommes  pieux  et  amis  de  la  paix  à  se  joindre  à  eux. 

c  Comme  ces  citoyens  perfides  et  dénaturés ,  après  avoir 
fait  disparaître  de  leur  patrie  le  repos  et  la  sûreté ,  et  après 
y  avoir  déployé  les  cruautés  de  la  violence,  osèrent  encore 
prendre  les  armes  contre  les  troupes  russes,  violant  ainsi 
avec  audace  et  les  traités  et  les  droits  des  naiions,  S.  M.  I, 
se  vit  obligée,  malgré  elle,  de  tirer  aussi  i*épée  pour  assurer 
les  limites  de  l'empire  russe,  et  arrêter  le  cours  de  la  sédi- 
tion chez  ses  voisins. 

c  Les  troupes  impériales,  par  leurs  efforts,  par  les  fati- 
gues auxquelles  elles  se  sont  soumises,  et  par  la  valeur  qui 
leur  est  propre,  ont  pleinement  rempli  leur  obJeL 

«  Citoyens  qui  êtes  aujourd'hui  sous  l'égide  de  cette  in- 
vincible armée,  vous  n'êtes  plus  tourmentés  par  les  terreurs 
du  bouleversement  qui ,  dans  ce  malheureux  pays,  vous  of- 
frait à  chaque  instant  de  nouvelles  oppressions,  une  licence 
plus  effrénée ,  un  désordre  à  la  suite  duquel  marchent  tou- 
jours la  destruction ,  la  violence  et  la  mort.  Votre  propriété 
y  était  à  la  merci  des  brigands  et  des  perturbateurs  du  repos 
public;  un  esprit  de  vertige  s*y  éuiit  généralement  emparé 
de  tous  les  ordres  de  i*£tat;  l'activité  politique  n'y  suivait 
plus  aucune  règle  dans  sa  marche  désordonnée. 

«  Comme,  avec  l'assistance  de  Dieu,  ce  mal  a  été  étouffé, 
il  m'est  expressément  enjoint  d'employer  tous  les  moyens 
de  rétablir  l'ordre,  de  procurer  obéissance  à  l'autorité  lé- 
gale qui  va  prendre  son  assiette  et  sa  forme,  et  d'assurer  le 
repos  des  personnes  et  des  choses  par  une  sévère  et  impar- 
tiale administration  de  la  Justice  ;  il  en  résultera  que  la  tran- 
quillité sera  rendue  aux  pays  dont  les  armes  victorieuses  de 
l'impératrice  ont  pris  possession  ;  que  la  sûreté  des  frontières 
de  l'empire  russe  ne  sera  plus  précaire  ;  que  les  révoltes 
n'auront  plus  lieu,  et  que  l'armée  pourra  en  toute  assurance 
prendre  ses  quartiers  d'hiver,  i 

Apn"s  ce  préambule,  le  gouverneur  général  déclare  : 

1*  Que  l'impératrice  accorde  une  amnislic  à  tous  ceux 
des  habitants  du  duché  qui  déposeront  leurs  armes  et  retour- 
neront ù  leur  domicile  ; 

2"  y  ne  non-seulement  la  liberté  la  plus  étendue  de  l'exer- 
cice de  la  religion  est  accordée,  nuUs  que  les  i!>*ioées  russes 

9*  Séné. -^  Tome  Xt 


ont  ordre  de  la  protéger  par  tous  les  moyens  à  leur  dispo- 
sition, ainsi  que  la  sûreté  des  personnes  et  celle  des  pro- 
priétés ; 

3*  Que  le  but  de  rimpératrice  n'est  point  de  s'emparer 
des  forces  et  des  richesses  qui  peuvent  se  trouver  dans  cette 
contrée,  en  compensation  de  celles  qu'elle  a  sacrifiées,  mais 
que  son  désir  est  de  faire  le  bonheur  des  bons  citoyens  et  ac- 
célérer la  punition  des  méchants. 

4*  Par  une  suite  du  rétablissement  de  la  tranquillité,  un 
serment  général  est  exigé. 

S*'  Les  prêtres  seront  les  premiers  à  donner  l'exemple  â 
cet  égard. 

6*  La  liberté  du  commerce  et  délie  de  profession  est  re- 
connue et  assurée. 

7'  Il  est  enjoint  à  tous  les  habitants  de  veiller  à  la  tran- 
quillité publique. 

S**"  Toute  correspondance  illicite  est  interdite. 

9*  Le  gouvernement  s'engage  à  faire  observer  la  plus  rt- 
gonreuse  discipline  aux  troupes. 

10*  Ceux  qui  ont  perçu  des  taxes  pendant  la  révolution 
seront  tenus  d'en  rendre  compte. 

1 1*  Protection  entière  envers  et  contre  tous  est  accorda 
à  tout  le  pays  actuellement  possédé  par  l'impératrice. 

12*  Enfin  il  est  enjoint  à  toutes  les  églises  d'adresser  des 
vœux  sincères  à  Dieu  et  la  sainte  Vierge,  pour  la  délivrance 
heureuse  du  grand  duché  de  Lithuanie  de  l'anarchie  et  de 
tous  les  malheurs  qui  l'ont  accablé. 

ALLEMAGNE. 

Ratisbonne,  le  6  janvier,  —  L'électeur  de  Hayence  Yleat 
de  répondre  aux  objections  faites  par  le  ministre  électoral 
de  Hanovre  contre  ses  propositions  pacifiques.  L'électeur 
reconnaît  qu*il  n'a  jamais  eu  l'intention  de  tracer  une  r^le 
de  conduite  à  ceux  des  co-Etats  qui,  comme  puissances,  se 
trouvent  impliqués  dans  la  guerre;  mais  il  affirme  que,  le 
but  où  doit  tendre  l'Empire  et  ses  Intérêts  différant  entière- 
ment et  de  leurs  intérêts  et  de  leur  but  particuliers,  le  parti 
que  ces  co-Etats  peuvent  prendre,  à  titre  d'ennemis  per- 
sonnels de  la  France,  ne  doit  influer  en  rien  sur  le  parti  que 
se  propose'  le  corps  germanique,  d'établir  U»  bases  de  la 
pacification. 

La  double  question  delà  pacification  proposée  et  des  ar* 
memcnts  ultérieurs  à  effectuer  embarrasse  en  ce  moment 
la  diète,  et  rencontre  tous  les  jours  de  nouvelles  difficultés. 
Le  résultat  n'en  peut  être  que  lent. 

—  Le  directoire  des  cercles  a  demandé  un  arrêté  eonfoi^ 
mémentau  décret  antique  de  l'empereur,  du  9  octobre  1784, 
concernant  la  prestation  effective  de  l'arriéré  de  la  caisse 
de  la  guerre,  et  à  un  autre  décret  de  ratification  du  6  no- 
vembre, relatif  à  la  guerre  d'Empire  en  général,  mais  par- 
ticulièrement à  l'augmentation  de  l'armement  au  quintuple. 

Le  ministre  de  Bavière,  sur  ce  dernier  point,  s'est  déclaré, 
opposant,  et  a  dit  formellement  que  sa  cour,  ayant  rempli 
toutes  ses  obligations,  ne  devait  et  ne  pouvait  faire  plus. 

Plusieurs  autres  ministres  ont  demandé  qu'il  fût  fait  nue 
analyse  des  divers  avis  des  cercles  au  sujet  du  quintuple, 
pour  que  chaque  ministre  consultât  sa  cour  avant  d'émettre 
un  suffrage. 

La  proposition  a  été  adoptée,  et  le  terme,  pour  y  satis- 
faire, a  été  fixé  à  deux  mois. 

Hambourg t  le  25  janvier.  —  Le  bureau  des  postes  hollan- 
daises établi  en  cette  ville  vient  de  confirmer  la  prise  glo- 
rieuse d'Amsterdam ,  qui  avait  déjà  été  annoncée  par  des 
estafettes  de  Zwoll,  de  Bingcn  et  de  brème.  Ce  grand  évé- 
nement ne  retardera  pas  d'un  seul  jour  le  cours  des  affaires 
commerciales.  La  poste  hollando-hambourgeolse  continuera 
de  passer  librement,  et  un  courrier  sera  expédié  ce  soir 
comme  à  l'ordinaire. 

—  Les  maisons  de  commerce  de  cette  ville  ont  reçu  de  la 
maison  Hopc,  d'Amsterdam,  connue  par  son  dévouement  au 
stathoudcr,  l'avis  suivant  : 

t  MM.  Hope  et  compagnie,  d'Amsterdam ,  se  trouvani 
dans  le  cas  de  quitter  cette  ville,  prient  leurs  correspon- 
dants de  suspendre  toutes  les  opérations,  transiictions,  et  ei; 

59 


4C6 


particulier  toofes  les  remîtes  à  foire  à  leur  maiion  à  Am- 
sterdam, et  de  8*eotendre  préalablemeot  pour  I'ud  ou  l'autre 
de  ces  objets,  et  pour  tous  en  général,  avec  leur  maison 
établie  ù  Londres  sous  la  même  raison,  Hope  et  compagnie.t 


RÉPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Parts,  le  28  pluviôse.  —  Villate,  ex-jur<?  du  tri- 
bunal révolutionnaire,  a  donné  une  suite  aux  éclair- 
ètssements  qu'il  avait  déjà  ]ïubliés  prccéclcnimenl 
sur  les  intrigues  de  la  tyrannie  flécruivirale;  celle 
suite  est  intitulée  les  Mystères  de  la  mère  de  Dieu 
dévoilés. 

On  y  voit  que  In  prétendue  mère  de  Dieu  se  nom- 
mait Catherine  Théol\  et  nonCatlierine  Tkéos,  nom 
que  Barère  lui  avait  donné  à  cause  de  sa  signitication 
mystérieuse. 

Celte  mère  Théot,  grande ,  sèche ,  presque  dia- 
phane, comme  la  sybille  de  Cumos,  devait,  selon 
Barère,  enfanter  le  verbe,  le  sage,  qui  est  le  centre 
où  le  ciel  et  la  terre  doivent  aboutir. 

On  lit  dans  celte  brochure  que  Robespierre  rece- 
vait chei  lui  le  fameux  dom  Gerle,  et  qu*il  lui  avait 
donné  une  attestation  de  civisme. 

Villate  fait  voir  comment  le  chef  des  dëcemvirs 
avait  posé  les  bases  de  sa  puissance  dans  le  vaste 
empire  des  opinions  religieuses,  et  conserve  dans 
aon  cœur  Tespoir  de  créer  une  autorité  pontificale , 
ou  même  de  se  faire  adorer  conmie  Dieu,  s*il  eût 
trouvé  dans  la  flexibilité  des  esprits  assez  de  facilité 
pour  réussir  dans  ses  vues  ambitieuses. 

On  se  rappelle  à  quel  joug  honteux  étaient  asser- 
vis sous  le  décemvirat  tous  les  écrivains,  nous  ne 
disons  pas  politiques,  il  n*en  existait  plus,  mais  même 
les  auteurs  des  productions  littéraires. 

Jamais  la  censure  royale  n*a  éfçalé  le  despotisme 
de  Tancienne  commission  dite  d'instruction  publi- 
que, à  laquelle  toutes  les  pièces  de  théâtre  étaient 
soumises;  le  stupide  orgueil  de  messieurs  de  la  po- 
lice municipale ,  à  la  révision  desquels  elles  étaient 
également  portées;  enfin  le  ridicule  autant  quebar- 
fcSre  établissement  de  la  commission  littéraire  révo- 
lutionnaire, qui  avait  été  formée  dans  les  bureaux  du 
comité  de  salut  public. 

Que  de  regrets  et  de  souvenirs  douloureux  ces 
époques  rappellent  !  Alors  le  génie,  s*il  n*était  im- 
molé, restait  enseveli,  ou  ne  pouvait  se  produire 
qu*après  avoir  payé  son  tribut  à  la  tyrannie  qui  l'en- 
chaînait. Tous  les  ouvrages  de  ce  temps  se  ressentent 
de  cette  mortelle  influence;  il  n'en  est  presque  au- 
cun qui  ne  soit  à  refaire. 

Un  arrêté  de  l'ancien  comité  avait  même  ordonné 

au'aucune  pièce  de  vers,  aucun  couplet  jeté  sur  le 
léfttre,  ne  pourrait  être  lu  qu'aprè.s  Tapprobation 
de  l'officier  de  police.  (Une  excellente  ode,  faite  le 
jour  de  la  bataille  de  Fleurus,  ne  put  être  communi- 
quée au  public  qui  la  réclamait,  parce  que  le  com- 
missaire de  ce  jour  ne  savait  pas  lire.) 

Cette  censure  et  ces  entraves  imposées  aux  élans 
même  de  la  gaîté  française  viennent  d'être  abolies 
par  un  arrêté  du  comité  de  sûreté  générale;  elles 
sont  remplacées  par  un  règlement  sur  lequel  il  est 
inutile  de  développer  les  réflexions  que  la  simple 
lecture  de  l'arrête  va  provoquer. 

Arrêté  du  comité  de  iûreté  générale  du  24  pluviôse. 

Le  comité  ayant  considéré  qu'il  serait  possible 
qu'a  la  faveur  de  certains  écrits  impromptus ,  jetés 
sur  les  lhc<^lres,dans  les  entr'actes  des  pièces  annon- 
cées sur  les  affiches  des  spectacles,  la  malveillance 
cherchât  à  propager  des  maximes  dangereuses  ou 


tendant  à  tronbler  la  tranquillité  publique,  et  ne 
voulant  pas  déroger  aux  principes  consacrés  de  la 
liberté  de  penser  et  d'écrire,  arrête  que,  pour  les 
concilier  tous,  et  afin  que  la  responsabilité  ne  soit 
pas  illusoire,  l'auteur  de  ces  écrits,  en  vers  on  en 
prose,  sera  tenu  de  les  lire  lui-même  sur  les  théâtres, 
ou  d'être  présent  à  côté  de  l'acteur  qui  les  lira  ou  les 
chantera. 


Etal  des  prises  faites  par  les  bdtimènit  de  la  répu- 
blique française  sur  le  commerce  maritime  de  ses 
ennemis^  depuis  le  11  nivôse. 

Prises  entrées  à  Brest, 

La  frégate  la  Tamise  a  pris  la  Cérès,  bâtiment 
anglais  de  118  tonneaux,  chargé  de  cuirs  et  salai- 
sons. 

La  corvette  la  Bergère^  le  Batterwoeh^  anglais, 
de  300  tonneaux  et  de  16  canons,  chargé  de  sucre, 
café,  coton  et  cochenille. 

V Impatient  Ja  Au^^t>.  anglais,  de  250  tonneaux, 
chargé  de  chaux ,  chaudières,  feuillards  et  autres 
marchandise»,  armé  de  2  canons. 

Le  Dragon,  cutter,  la  Cérês,  anglais,  de  120  ton* 
neaux,  chargé  de  sel. 

Prises  entrées  au  Porl-de-la-Montagne.    * 

La  Liberté  et  le  Hasard,  bricks,  ont  pris  un  bricl 
anglais,  chargé  de  fruits  secs  et  légumes  secs  pour 
l'Espagne. 

La  Minerve  et  VÀlceste,  vingt-cinq  bâtiments 
anglais  et  espagnols,  citiq  cent  cinquante  prison- 
niers. Ces  bâtiments  étaient  chargés  de  poisson  salé, 
.morue,  blé,  farine,  légumes  secs,  huile  d'olive  et 
caisses  de  vitres. 

Prise  entrée  au  port  du  Passage, 

Le  Brillant,  lougre,  a  pris  un  bâtiment  espagnol 
chargé  de  cacao  et  de  sucre. 

Prises  entrées  à  Àgde. 

La  Batftn^, corvette,  le  Neptune,  anglais»  de 
200  tonneaux,  chargé  de  poissous  secs. 

Prise  entrée  à  Roche  fort, 

L'Eipton,  bâtiment  anglais,  chargé  de  morue 
sèche. 

-  Prises  entrées  à  Lorient, 

Enlevé  dans  la  rade  de  Gibraltar,  par  vingt-deux 
prisoiiniersfrançais,  un  bâtiment  anglais  de  120  ton- 
neaux, chargé  oe  vin  de  Malaga  et  fruits  secs. 

Le  Robuste,  navire  espagnol,  chargé  de  citrons 
et  oranges. 

Prise  entrée  au  Havre. 

La  Mouche,  navire  suédois,  chargé  de  bois  de 
construction. 

Prises  entrées  à  Port-Malo. 

Le  Berceau,  la  Diana,  anglais,  de  200  tonneaux, 
chargé  de  sucre,  café,  rhum,  coton,  laine  et  bois 
rouge. 

Le  Dragon,  un  navire  hollandais  chargé  de  câbles 
et  autres  cordages. 

VAlerU,  deux  navires  chargés  de  blë. 

Prises  entrées  à  La  Rockette. 
Le  Spartiate,  U  Duc  de  Leeds^  anglais,  de  14  ca- 


4«7 


nons,  charge  de  sucre,  café,  coton,  cuirs  et  bois  de 
Cu  m  pèche. 

Le  Las-CoiOM^  le  Saint-Joteph^  espagnol,  chargé 
de  cent  cinquante  balles  de  laine. 

Priées  enlréeê  à  Quimper. 

L'Eugénie,  un  brick  espagnol  de  120  tonneaux , 
chargé  d'oranges  et  citrons. 

La  frégate  la  Tribune,  une  frégate  anglaise  de 
80  canons  ;  un  brick  an^ais  ;  diverses  marchandises, 
une  galiote  hollandaise  chargée  de  seigle. 

Par  la  division  des  corvettes  la  Jalouse,  la  Fra- 
temiléti  le  cutter  la  Montagne  ;  une  galiote  hollan- 
daise, chargée  d'avoine;  une  galiote,  idem;  une 
galiote  prussienne,  chargée  de  seigle  ;  une  galiote 
idem,  avoine;  deux  galiotes,  idem:  une  galiote, 
idem;  une  galiote,  idem. 

Total  des  bâtiments  :  cinquante-cinq  prises  faites 
par  l'armée  navale  de  l'Océan. 

La  Surveillante  a  pris  le  Mentor^  anglais,  de 
10  canons,  chargé  de  neurcents  tonneaux  ahuile de 
baleine  ;  coulé  un  brick  portugais ,  le  Diligent , 
chargé  de  sel,  et  un  brick  anglais.  If  Diiso,  ayant 
cent  cinquante  trois  personnes. 

Un  bâtiment  anglais  de  180  tonneaux,  chargé  de 
▼in,  bois  de  Brésil,  fruits  secs  et  oranges,  pris  par 
la  Tamise, 

Le  Dauphin,  bâtiment  anglais  de  150  tonneaux, 
armé  de  6  canons,  chargé  d*eau-de-vie,  esprit  d'eau- 
de-vie,  pris  par  la  frégate  la  Courageuse. 

Le  Prince  d'Orange,  bâtiment  anglais,  chargé 
d'oranges,  pris  par  idem, 

Lefuan,  bâtiment  anglais,  chargé  d*oranges,  pris 
par  idem. 

BdUmenti  eoulés  ou  brûlés  par  cette  dernière. 

Le  Eoopt  chargé  de  soude  ; 
.   Le  Frère  Pool,  chargé  de  fruits  secs  ; 

Le  William,  chargé  de  fruits; 

Le  Signid,  charge  de  soude. 

Les  Quatre- Frères,  bâtiment  anglais  de  150  ton- 
neaux ,  chargé  d*oranges  et  citrons ,  pris  par  la 
Danaé. 

Le  Riehest,  bâtiment  anglais  de  80  tonneaux , 
chargé  de  charbon  de  terre,  huile  de  vitriol,  de 
couperose  et  de  sel  ammoniaque,  coulé  ou  brûlé  par 
cette  dernière. 

Le  William,  chargé  de  liège. 

La  Young-Johanna^  de  400  tonneaux,  chargée  de 
sel. 

L*iiutie,  bâtiment  anglais  de  80  tonneaux,  chargé 
de  vin  d'Espagne,  pris  par  l* Insurgente, 

Un  bâtiment  anglais  de  212  tonneaux,  armé  de 
10  canons,  chargé  de  draps  et  marchandises  propres 
à  la  traite,  pris  par  idem. 

Le  Monument^  bâtiment  anglais  de  210  tonneaux, 
chargé  de  sucre,  café  et  indigo,  pris  par  idem. 

Coulée  ou  brûlés  par  cette  dernière. 

Un  navire  hollandais  de  850  tonneaux,  chargé  de 
sel. 

LeGood'Intend,  bâtimentanglaisde  55  tonneaux, 
chargé  de  soude,  pris  par  le  vaisseau  le  Zélé, 

L'Apollon,  bâtiment  anglais  de  250  tonneaux, 
charge  d'huile  et  différentes  marchandises,  pris  par 
la  Fraternité. 

La  Cousine^  de  Londres,  bâtiment  anglaii  de  180 
tonneaux,  chargé  de  vin,  coton  et  iiége,  pris  par  le 
vaisseau  le  Gasparin. 

La  Charlotte,  bâtiment  anglais  de  180  tonneaux, 
chargé  de  sel,  viu  et  oranges,  pris  par  le  Scipion. 


Le  William,  de  Londres,  bâtiment  anglais  de  200 
tonneaux, chargé  de  sucre,  café,  colon  etrhum,  pris 
par  idem. 

Un  bâtiment  anglais  de  600  tonneaux,  armé  de 
84  canons,  chargé  Je  mâtures,  pris  par /a  Résolue. 

Un  idem  de  150  tonneaux ,  chargé  de  diverses 
marchandises,  cuivre  pour  doublage,  plomb,  etc., 
pris  par  idem. 

Un  idem  de  250  tonneaux,  chargé  de  quatre  cents 
pipes  d'eau-de-vie,  par  la  Néréide. 

Un  tdem,portant  cent  trente  prisonniers,chargé  de 
troupes  du  régiment  de  Loyol-Clare,  pris  par  la  cor- 
vette la  Légère, 

Un  idem,  armé  de  12  canons,  chargé  de  soude  et 
eau-de-vie,  pris  par  idem. 

Le  Sech,  bâtiment  anglais,  chargé  de  vin ,  cotOD 
et  indigo,  pris  par  idem. 

Navires  coulés  ou  brûlés  par  cette  dernière. 

Un  brick  anglais,  allant  d'Alicante  à  Londres, 
chargé  de  soude,  eau  de- vie,  et  ayant  sept  passa- 
gers. 

Un  bateau  anglais,  chargé  de  fruits  secs,  pris  par 
l'Alalante. 

La  corvette  VUnité^  sur  son  lest. 

Coulés  ou  brûlés  par  cette  dernière. 

Deux  navires  anglais,  chargés  de  diverses  mar- 
chandises. 

Un  bâtiment  anglais,  VUnion. 

Le  Phanin,  bâtiment  anglais  de  150  tonneaux, 
charge  de  vin  et  colon;  pris  par  la  Méduse, 

La  Daphné,  corvette  anglaise,  armée  de  20canon8 
de  9  et  10  caronnadeb  de  18,  prise  par  idem, 

La  Vénus,  bâtiment  anglais  de  130  tonneaux, 
chargé  de  vin,  pris  ptir  idem. 

Un  bâtiment  à  trois  mâts,  anglais,  de  300  ton- 
neaux, richement  chargé,  pris  par  la  République* 
Française. 

Un  idem,  portant  seize  prisonniers,  chargé  de 
sept  cent  quatre-vingt-dix  pipes  de  vin  de  Porto, 
pris  par  idem. 

La  Lady  Moera,  bâtiment  anglais,  armé  de  16 
canons,  chargé  de  fruits,  pris  par  idem. 

Un  idem,  armé  de  18  canons,  chargé  de  trois  Mftt 
cinquante  et  une  balles  de  coton,  pris  par  idms. 

Coulés  ou  brûlés  par  celle  dernière. 

La  Reine 'Charlotte. 

Une  goélette  anglaise, chargée  de  vin  de  Porto. 

Un  sloop  anglais  chargé  de  diverses  marchandises. 
.  La  Susanna-Cornelia  bâtiment  hollandais  do 
290  tonneaux,  chargé  de  sel  pris  par  l'Embuscade, 

Un  idem  de  700  tonneaux,  chargé  de  poudre,  câ- 
bles, cordages,  ancres  et  autres  aiverses  marchan- 
dises sèches. 

Un  brick  hollandais  pris  par  la  Méduse. 

Un  bâtiment  hollanuais  de  500  tonneaux,  charg[é 
d'huile,  savon,  raisins  et  autres  marchandises,  pna 
pditVAlalante,  corvette. 

Coulés  bas  par  celle  dernière. 

Un  brick  anglais,  chargé  de  vieux  linge. 

Un  bâtiment  espagnol, chargé  de  laine. 

Deux  bâtiments  hollandais,  d'environ  400  ton- 
neaux chacun,  armés  d'un  canon  de  14  et  un  de  6, 
portant  soixante  prisonniers,  richement  chargés 
pour  Surinam,  pris  par  la  Révublique-Française. 

JUn  bâtiment  américain,  tes  Amis,  de  200  ton- 
neaux, chargé  de  viande  salée,  pris  par  la  Tamise. 

Le  Winlforlushy  bâtiment  suédois,  entré  à  Bi  est. 


468 


de  700  tonneaux,  chargé  de  planches,  poutres,  mâ- 
tures et  fers  en  barre,  pris  par  la  Méduse. 

Un  bâtiment  idem  de  200  tonneaux,  entré  à  Brest, 
chargé  de  bois  de  construction,  pris  par  ta  Néréide. 

Un  bâtiment tcftfin  de  300  tonneaux,  chargéde  laine 
de  Séeovie,  pris  par  la  République-iFrançaise. 

Un  Drick  taem, chargé  de  laine,  pris  par  VAlalanle. 

Un  navire  portugais,  chargé  de  bœufs  et  beurre, 
pris  par  idem. 

Un  idem^  le  Raguse,  de  200  tonneaux,  charge  de 
coton  et  fruits,  pris  par  la  Républicaine' Française, 

Un  idem,  la  Henriette ,  pris  par  la  Tribune , 
chargé  de  terre  à  détacher. 

La  Colombine,  de  200  tonneaux,  chargé  de  vin  et 
coton,  pris  par /a  Tamise. 

L'Hirondelle,  de  80  tonneaux,  chargée  d*huile  et 
morue,  pris  par  la  Tamise. 

La  Branche-d'Olivier^de  200  tonneaux,  chargée 
de  soude  et  cau-de>vie,  pris  par  idem. 

Deux  bâtiments  chargés  de  raisins  secs,  pris  par 
l'Unité.  . 

Un  coulé  par  idem. 

Un  brick  chargé  d'huile  de  morue,  pris  par  {e  Po- 
pilUm. 

Trois  bâtiments  ennemis ,  chargés  de  diverses 
marchandises,  pris  par  la  Bayonnaise. 

Deux  idem,  chargés  de  diverses  marchandises, 
pris  par  la  Fraternité. 

Récapitulation. 

Prises  faites  par  divers  bâtiments.' 55 

Par  l'armée  navale  de  rOcéan 54 

Brûlés 19 

Total  général 128 

VARIÉTÉS. 

Paris,  le  98  pluviôse. 

c  Errant  depuis  le  31  mai .  Je  trouve  à  mon  retour  mes 
propriétés  Httéraires,  à  peu  près  les  seules  -que  jt>  possë- 
dMte*  envahies  par  des  hommes  qui  devaient  au  moins 
queloue  respect  au  malheur.  Je  me  borne  à  déclarer  que  les 
prét^dues  nouvelles  édiUons  de  Faublas,  annoncées  depuis 
quelque  temps,  sont  des  contrefaçons. 

•  Au  reste,  je  me  fais  libraire  au  palais  Egalité.  Ma  bou- 
tique est  dans  la  galerie  neuve,  n»  24.  derrière  le  Théâtre 
de  la  République.  On  y  trouvera  mes  différents  ouvrages  et 
quelques  nouveautés.        Signé  Jean-Baptiste  Louvet.  > 

Au  rédacteur. 

Paris,  ce  96  pluviôse,  an  S*. 

tLa  lecture  de  votre  feuille,  qui  ne  cesse  ide  m'inspirer 
lepluftvif  intérêt,  fit  naUre  hier  en  moi  quelques  réflexions  : 
c'est  à  l'occasion  de  l'opinion  de  Yernier  (du  Jura)  sur  le 
projet  du  comité  des  finances,  tendant  à  retirer  de  la  circu- 
lation partie  des  assignats. 

c  Suivant  ce  que  vousen  rapportez,  n*  141,  p.  404,  !'* co- 
lonne, Yernier  a  dû  poser  pour  maxime  qu'en  finance  la 
crainte  du  mal  produit  un  trt^s-grand  mai.  Il  a  dû  dire  de 
plus  qu'il  n'y  a  que  6  roillards  d'assignats  en  émission,  et 
que  leur  hypolbèque  est  au  moins  de  15  milliards.  Enfin,  il 
a  dû  terminer  par  une  espèce  de  déclaration,  au  nom  de  la 
France  entière,  contenant  qu'elle  est  décidée  à  mettre  tout 
en  œuvre  pour  tranquilliser  le  porteur  d'assignats,  même  en 
les  hypothéquant  sur  toutes  les  propriétés  individuelles. 

■  Si,  comme  je  n'en  puis  douter,  citoyen  .  d'après  votre 
exactitude  connue ,  telle  a  été  l'opinion  de  Yernier,  il  me 
semble  qu'elle  présente  une  contradiction  frappante,  et 
qu'il  a  lui-même  enfreint  sa  maxime,  en  Inspirant,  en  finance, 
la  crainte  d'un  mal,  qui  nécessairement  doit  produire  un 
trè»-0rand  mal. 

c  En  effet,  s'H  est  vrai  qu'il  n'y  ait  que  pour  6  milliards 
d'assignats  émis,  et  que  leur  hypothèque  soit  de  15  mil- 
liards, ne  suffisait-il  pas,  pour  convaincre  l'Europe  et  tran- 
quIHlser  le  porteur  d'assignats,  de  proclamer  senleroea^ 
cette  Térité?  Mais,  après  l'avoir  énoncée,  n'est-ce  pas 


tôt  l'affaiblir,  n'est-ce  pas  faire  douter  de  sa  sincérité, 
n'est-ce  pas  en  détruire  absolument  l'effet,  n'est-ce  pas 
éveiller  jusqu'au  suprême  degré  la  crainte  du  mal.  que  de 
venir  en  même  temps  proposer,  comme  motif  de  confiance, 
uu  moyen  aussi  violent  que  celui  d'attenter  à  la  propriété 
individuelle? 

c  Que  Yernier  se  soit  trompé,  rien  en  cela  d'étonnant,  et 
cette  erreur  ne  peut  et  ne  doit  lui  faire  aucun  tort,  parce 
que  sans  doute  elle  a  pour  base  des  intentions  pures  et  esti- 
mables. 

«  Mais  que.  sur  cette  proposition,  l'assemblée  se  soit  levée 
tout  entière,  et  qu'elle  y  ait  applaudi  à  trois  diverses  reprises, 
▼ollà  ce  qui  doit  étonner  l'Europe  et  alarmer  la  France. 

«Déjà  plus  d'une  fois  la  Convention  s'est,  même  par  vertu, 
livrée  à  l'enthousiasme;  elle  en  a  senti  les  pernicieux  effets, 
et  elle  avait  promis  de  s'en  garantir  ;  rappelons-lui  souvent 
cette  promesse;  elle  tient,  plus  qu'on  ne  pense  peut-être,  au 
bonheur  de  tous. 

c  Le  succès  soudain  de  la  proposition  de  Yernier  est  un 
nouvel  exemple  des  dangers  de  l'enthousiasme  :  car,  si  mal- 
heureusement elle  était  admise,  elle  entraînerait  :  P  la  ban- 
queroute partielle  ;  2o  une  baisse  considérable  dans  la  vente 
des  biens  nationaux,  et  conséquemment  le  discrédit  des  as- 
signats eux-mêmes;  3*  la  guerre  civile. 

•  Je  dis  que  cette  opinion  entraînerait  une  banqueroute 
partielle,  et  voici  comme  je  le  prouve. 

K  Lorsque  les  assignats  ont  été  émis,  ils  ont  été  présentés 
et  ils  ont  été  acceptés  en  payement,  sous  la  forme  d'effets 
au  porteur  qui  devaient  être  soldés  en  domaines  nationaux. 
Ainsi,  pour  remplir  parfaitement  ses  engagements  et  ne  pas 
tromper  la  confiance  du  porteur,  il  faut  de  toute  nécessité 
que  la  nation  solde  en  domaines  nationaux  ;  car  si.  d'après 
le  système  de  Yernier,  vous  admettiez  pour  supplément  de 
confiance  l'hypothèque  des  propriétés  Individuelles,  il  s'en- 
suivrait qu'un  propriétaire  de  biens-fonds,  porteur  d'assi- 
gnats, deviendrait  en  même  temps  son  propre  créancier; 
qu'en  dernière  analyse  il  serait  tenu  de  se  rembourser  sur 
lui-même  de  la  portion  d'assignau  qui  ne  lui  auraient  pas 
été  payés  en  domaines  nationaux,  et  que  conséquemment  on 
lui  ferait  banqueroute  de  la  portion  qu'il  lui  foudrail  con- 
fondre en  sa  personne. 

<  Je  dis  de  plus  que  la  proposition  de  Yernier  tend  à  faire 
baisser  la  vente  des  domaines  nationaux,  et  conséquemment 
à  discréditer  les  assignats  :  voici  encore  comme  je  l'étabUs. 

c  SI  les  domaines  nationaux  sont  présentés  comme  in- 
suffisants pour  assurer  le  sort  des  assignats,  et  qu'il  faille 
y  subjoindre  l'hypothèque  des  propriétés  individuelles ,  il 
s'ensuivra  que  le  domaine  national  vendu,  et  entrant  dans 
la  classe  des  propriétés  particulières .  deviendra  passible , 
comme  tout  autre  bien-fonds,  de  l'hypothèque  des  assignats, 
et  que  conséquemment  l'homme  qui,  le  mois  dernier,  aurait 
acquis  pour  100,000  iiv.  un  bien  national,  parce  qull  le  re- 
gardait alors  comme  libre,  exempt  de  toute  hypothèque,  et 
la  meilleure  de  toutes  les  propriétés,  ne  voudra  plus  au* 
jourd'hui  en  donner  a  beaucoup  près  le  même  prix,  par  la 
raison  que  ce  bien  ne  lui  offrira  qu'une  propriété  purement 
précaire,  puisqu'elle  sera  grevée  d'une  hypothèque  d'autant 
plus  désastreuse  que  le  montant  en  est  indéfini,  et  pourrait 
en  dernière  analyse  absorber,  et  au  delà,  la  valeur  de  son 
fonds. 

•  Je  crois  donc  avoir  raison  de  conclure  que  ce  système, 
en  faisant  vendre  à  vil  prix  les  domaines  nationaux,  anéan- 
tirait aussitôt  un  des  véhicules  les  plus  puissants  de  nos 
uriomphes  militaires,  et  par  une  suite  nécessaire  entraine* 
rait  le  discrédit  des  assignats. 

I  Enfin  j'envisage  encore  dans  radmlsslon  de  ce  système 
rincon  vénient  affreux  d'une  guerre  dvile,  et  voici  également 
comme  je  le  prouve. 

c  SI  on  hypothèque  les  propriétés  particulières  au  paye- 
ment des  assignats,  il  s'ensuivra  que  de  ce  moroent-ià  même 
la  nation  se  trouvera  divisée  en  classes  d'hommes  d'intérêts 
tr^-opposés,  savoir  :  une  de  capitalistes,  qui  viendront  à 
grands  cris  demander  leur  argent ,  et  l'autre  de  proprié- 
taires de  biens-fonds  qu'il  faudra  dépouiller  pour  satisfaire 
les  première.  Or,  comme  ces  deux  classes  seront  mues  par 
des  intérêts  opposés  et  très-majeure.  Il  s'établira  nécessai- 
rement entre  elles  une  lutte  violente,  qui  évidemment  ne 
pourra  se  terminer  que  par  le  triomphe  d'un  des  deux  partis 
et  l'anéantissement  de  l'autre.  Je  crois  donc  qu'un  pareil 
résolut  peut  d'avance,  et  à  Juste  titre,  être  regardé  comme 
«ne  guerre  civile. 

c  PnRRB-HBimi  LEFàvRE,  cultivateur  dans  le 
département  de  CEure.  a 


469 


CONVENTION  NATIONALE. 

l'résifience  de  Dan-as, 
SÉANCE  DU  26  PLUVIOSE. 

On  lit  la  correspondance. 

GossuiN ,  au  nom  du  comité  militaire  :  Citoyens, 
votre  comité  militaire  reçoit  journellement  de  nou- 
velles réclamations  de  tous  les  points  de  la  républi^ 
que  sur  la  modicité  du  traitement  de  la  gendarmerie 
nationale  à  cheval.  Les  représentants  du  peuple  en 
mission  dans  les  départements  et  les  différentes  au- 
torités constituées  provoquent  à  cet  égard  toute  vo- 
tre sollicitude. 

Le  renchérissement  des  denrées,  vêtements  et  ef- 
fets d*équipement ,  a  obligé  plusieurs  gendarmes 
à  demander  leur  démission,  par  Timpossibilité  ou 
ils  sont  de  se  procurer  à  leurs  frais  le  strict  néces- 
saire. 

Vous  sentez ,  citoyens ,  Turgence  du  remède,  et 
vous  Vous  empresserez  de  rétablir  sur  un  pied  res- 

Eeclable  Tune  des  parties  essentielles  de  la  lorce  pu- 
lique  intérieure. 

La  solde  du  gendarme,  dans  le  rayon  de  cinq  lieues 
de  Paris,  est  de  3  liv.  15  sous  10  den.  par  jour,  et, 
hors  du  rayon ,  de  3  liv.  7  sous  4  den.  D'après  les 
états  exacts  mis  sous  les  yeux  de  votre  comité ,  il  est 
démontré  que ,  dans  le  dtfpartement  de  TAIIier,  par 
exemple ,  la  nourriture  du  cheval  coûte ,  par  jour, 
au  gendarme,  3  liv.  1  sou  5  den.;  dans  celui  de 
Seine-et-Oise,  3  liv.  15  sous  ;  dans  celui  de  Loir-et- 
Cher,  4  liv.  15  sous;  et  que,  dans  les  départements 
les  plus  abondants  en  fourrages,  la  ration  coûte  plus 
de  40  sous. 

Le  comité  de  salut  public,  par  un  arrêté  do  24 
messidor  dernier,  avait  tâché  de  parer  à  cet  incon- 
vénient en  accordant  aux  gendarmes  des  rations  de 
fourrages  sur  le  pied  de  1  liv.  5  sous  par  jour  dans  les 
départements,  et  de  2  liv.  2  sous  dans  Paris;  mais  il 
n'existe  pas  partout  des  magasins  militaires  ou  na* 
tionaux ,  et  la  majeure  partie  des  brigades  de  gen- 
darmerie n*ont  pu  profiter  de  cet  avantage. 

Il  est  évident  que  la  solde  du  eendarme  est  pres- 
que absorbée  en  acquisition  de  fourrages ,  et  que , 
pour  subvenir  à  sa  nourriture,  son  entretien,  son 
habillement  et  à  l'équipement  de  son  cheval,  objets 
également  dispendieux  dans  le  moment  actuel ,  il 
reste  à  plusieurs  d'entre  eux  tout  au  plus  34  I.  10  s. 
par  année. 

Ces  résultats  ne  prouvent  que  trop,  citoyens,  que 
le  gendarme  qui  se  trouve  dans  l'impossibilité  de 
faire  des  avances  est  forcé  de  négliger  son  service , 
par  le  défaut  de  choses  indispensables  à  son  étaL 

Cependant  jamais  peut-être  le  service  de  la  gen- 
darmerie ne  fut  plus  utile.  La  conservation  des  pro- 
priétés nationales  et  particulières,  la  police  des 
routes  et  des  marchés,  la  sûreté  des  citoyens,  la 
destination  desconvoismilitaires,la  libre  circulation 
des  subsistances,  les  fréquents  passages  de  troupes, 
la  marche  des  militaires  isolés,  tout  exige  que  la 
gendarmerie  redouble  d'activité  pour  assurer  une 
police  exacte. 

Si  les  défenseurs  de  la  patrie  ont  à  combattre  et  à 
repousser  l'ennemi  extérieur,  c'est  a  la  gendarmerie 
nationale  qu'est  confié  le  soin  de  contenir  celui  de 
l'intérieur  :  son  devoir  lui  impose  de  faire  cesser  par- 
tout la  malveillance  ;  et  cette  tâche ,  pour  celui  qui 
aime  vraiment  son  pays,  est  agréable  à  remplir. 

Ce  corps  fournit  aussi  son  contingent  aux  armées  : 
sa  dissémination  sur  toute  la  surface  de  la  France 
exige,  pour  son  organisation  immuable,  l'examen  le 
plus  approfondi.  En  attendant  l'achèvement  de  ce 
travail ,  nous  vous  proposons  de  corriger  quelques 
abus  que  l'expérience  nous  a  dévoilés. 


Votre  comité  a  vonla  prévenir  les  funestes  effets 
d'un  total  abandon  du  service.  11  a  pensé  »  après  en 
avoir  conféré  avec  le  comité  des  finances,  qu'il  était 
urgent  de  recourir  à  votre  justice  pour  accorder  i 
ces  militaires  une  indemnité  qui  a  été  calculée  de 
manière  à  établir  une  uniformité  exacte  dans  la  por- 
tion du  traitement  des  hommes  du  même  grade , 
essentiellement  applicable  à  leur  nourriture  et  en- 
tretien ;  la  gendarmerie  parisienne  recevra  aussi  une 
portion  d'augmentation  effective.  Si  elle  est  moin- 
dre ,  elle  ne  sera  point  fondée  à  s'en  plaindre ,  parce 
qu'elle  a  la  certitude  de  recevoir  toujours  les  four- 
rages en  nature,  et  qu'elle  pourra  entièrement  ap- 
pliquer à  sa  nourriture  et  à  son  entretien  une  portion 
de  solde,  sur  laquelle  les  gendarmes  des  autres  dé- 
partements seront  souvent  dans  le  cas  de  prendre 
pour  compléter  l'acquittement  de  leurs  fourrages. 

Enfin ,  citoyens ,  les  gendarmes  ont  fait  des  frais 
pour  se  monter,  s'équiper  et  s'habiller.  La  loi  da 
2  thermidor  leur  supprime  l'étape ,  lorsqu'ils  sont 
en  route.  Leur  misère  est  si  grande  que  oeaucoup 
d'entre  eux  ont  été  obligés  de  vendre  leurs  chevaux; 
vous  devez  leur  éviter  la  dure  nécessité  d'aliéner 
ainsi  leurs  propriétés,  ou  de  cesser  leurs  fonctions» 
Ceux  d'entre  eux  attachés  à  la  police  des  armées  re- 
çoivent leurs  vivres  en  nature;  suppléez  à  cette 
ressource  en  faveur  des  autres  par  une  indemnité 
provisoire. 

Le  rapportenr  Ut  on  projet  de  décret  qui  est  adopté  en 
ces  termes  : 

«  La  CoDveotion  naUonale,  après  avoir  entendo  le  nip« 
port  de  ses  comités  militaire  et  des  finances,  décrète  : 

t  Art.  Itr.  lodépendammentdu  traitement  fixé  par  les  pré* 
cédentes  lois,  il  sera  provisoirement  accordé,  chaque  nôols, 
à  compter  du  l*r  ventôse,  aux  vingt-huit  premières  divisions 
de  la  gendarmerie  nationale  ftilsant  le  service  de  l'intérieur, 
et  à  la  vingt-neuvième  division  employée  alla  force  publique 
de  Paris,  une  indemnité  dans  la  proportion  ci-après  déter* 
minée ,  savoir  :  au  chef  d'escadron ,  80  Hv.;  au  caplUiiM, 
75  liv.;  au  Ueutenant,  70  liv.;  au  maréchal  des  logis,  60 Uv.; 
au  brigadier,  55  liv.;  au  gendarme,  50  liv. 

•  A  chacun  des  grades  établis  dans  la  vingt-neuvième 
difision.  savoir':  au  quartier-maître,  65  Uv.;  A  l'adjudant 
sous-officier,  60  liv.;  au  trompette-major,  60  Uv.;  au  maré- 
chal-expert, 60  iiv.;  au  trompette,  50  Uv. 

c  11.  Les  sous-ofOciers  et  gendarmes  des  brigades  établlee 
dans  les  dix  lieues  des  quartiers  généraux  des  armées  coe* 
tinueront  de  recevoir  les  fourrages  de  la  république  sur  le 
pied  de  25  sous  par  jour,  et  il  leur  sera  fait  déduction  de 
20  liv.  par  mois  sur  l'Indemnité  déterminée  ci-dessus. 

c  m.  Pareille  déduction  de  20  liv.  par  mois  sera  faite  aux 
sous-officiers  et  gendarmes  faisant  le  service  <ians  l'intérieur 
de  Paris;  Ils  continueront  de  recevoir  des  rations  de  four» 
rages  sous  la  retenue  de  2  Uv.  2  sous  par  Jour. 

<  IV.  L'arrêté  du  comité  de  salut  public,  du  24  messidor 
dernier,  concernant  les  fburrages  accordés  des  nagasles 
de  la  république  aux  brigades  âes  départements,'  doneurert 
sans  effet,  à  compter  du  !•'  ventôse  prochain. 

t  V.  La  masse  de  72  livres,  établie  par  la  loi  do  16  fé- 
vrier 1791  (vieux  style)  pour  rhabillement,  remonte  et  éqni* 
pementde  chaque  sous-officier  et  gendarme,  sera  provi- 
soirement portée  A  120  livres  par  année  ;  50  livres  seront 
applicables  A  la  rénovation  et  entretien  de  l'habillement  et 
équipement  de  l'homme,  et  90  liv.  A  la  remonte,  A  l'entretien 
et  rénovation  des  objeu  d'équipensent  do  cheval,  do  four- 
rage, pansements  et  médicaments. 

c  Les  conseils  d'administration  veilleront,  sons  leur  ret- 
ponsabllitë  personnelle,  A  ce  que  cette  disposition  soit  pone- 
tnellement  exécutée. 

c  VI.  La  gratification  annuelle  de  1,500  Uv.,  mise,  par  la 
loi  du  16  février  1791,  A  la  disposition  de  chaque  directoire 
de  département,  pour  être  distribuée  à  ceux  des  officiers  et 
gendarmes  qui  se  sont  signalés,  est  supprimée.  Ils  partici- 
peront aux  récompenses  que  la  Convention  s'est  réserfé 
d'accorder  par  l'article  XV  du  titre  VUl  du  décret  du  21  fé- 
vrier 1793  (vieux  style). 

c  vil.  Les  conseils  d'administration  de  gendarmerie  sont 
tenus  de  rendra  leure  comptes  d'ici  ao  V  floréal  prochain. 
Ils  seroot  ezamiuét,  vérifiés  et  apurés,  ao  Ueo  des  séances 


4T0 


da  dircetoire  d«  di^partenaol,  en  pr4fenet  de  trolt  ifendar- 
net  les  plas  ancleos  fie  commlisfoD,  rétidant  jur  lei  lieui, 
|Mir  les  adminlsirateurs  diulli  directoire,  et  par  le  commis- 
ialre  ordonnateur  de  la  division  miliiaire,  ou  par  un  com- 
missaire des  ffuerres  par  lui  délé(;ué.  sur  leur  responsabilité 
respective  et  solidaire. 

■  VIII.  Les  comptes  ne  seront  plus  soamis  à  la  révision 
des  directoires  du  département;  ils  seront  adressés  par  les 
orJonnaU*urs  à  la  commission  des  armées,  qui  les  surveil- 
lera, et  donnera  les  ordres  nécessaires  pour  rentier  acqult- 
t(»roent  des  comptabien.  et  pour  le  versement  en  leur  caisse 
des  sommes  dont  Ils  seront  en  avance. 

•  IX.  Les  chefs  d*escadron  et  les  plus  anciens  capitaines» 
ou  ceux  oui  doivent  les  remplacer  en  cas  d'absence,  prési- 
deront, chacun  dans  le  département  de  leur  résidence,  les 
conseils  d'adminisiralion  de  gendarmerie  qui  s'y  trouvent 
établis. 

I  X.  Les  conseils  d'administration  sont  tenus  de  s'assem- 
bler au  moins  une  fois  par  mois,  sur  la  convocation  qui  en 
sera  faite  par  les  officiers  chargés  de  les  présider. 

■  XI.  Jusqu'à  ce  qu'il  en  soit  autrement  ordonné,  Tavan- 
oainent,  dans  la  gendarmerie  nationale,  ne  roulera  plus 
•or  le  corps  entier,  mal»  seulement  entre  les  officiers  et  sous- 
Offlders  et  gendarmes  de  chacune  des  divisions. 

c  XII.  Les  places  vacantes  de  gendarmes  seront  données 

ftar  les  directoires  de  déparicmcut  aux  citoyens  réunissant 
es  conditions  prescrites  par  les  lois;  ils  seront,  à  cet  effet» 
examines  par  un  commissaires  des  guerres,  en  présence  de 
deux  membres  du  conseil  d'admlni»lration.  Ils  produiront* 
avant  leur  admission,  l'attestation  qu'ils  ont  les  qualités  ml- 
llcalres  et  propres  au  service  de  la  république. 

•  XIII.  Les  autres  places  vacantes  seront  données  aux 
grades  Immédiatement  Inférieurs ,  savoir  :  un  tiers  &  l'an- 
elennelé  de  service  en  ce  dernier  grade;  le  second  tiers  par 
le  choix  des  officiers  ou  sous-officIcrs  du  grade  Immédiate- 
ment supérieur,  dans  la  forme  qui  sera  Incessamment  dé- 
terminée par  une  Instruction  des  comités  de  salut  public  et 
militaire  réunis;  et  le  troisième  par  le  choix  de  la  Conven- 
tion nationale,  à  l*égard  des  officiers,  et  du  comité  de  salut 
public,  pour  les  sous-officlers.  • 

'  —  Une  dëputalion  de  la  commune  de  Moulins , 
département  de  TAIIier,  vient  demander  Justice  à  la 
Convention  nationale  des  attentats  commis  dans  cette 
partie  de  la  république  pur  des  agents  de  In  tyrannie. 

•  De  tous  les  comités  révolutionnaires,  disent  les  pé- 
titionnaires, qui  ont  été  répandus  comme  autant  de 
fléaux  sur  le  territoire  frauçiiis,  aucun  n*a  rempli 
d'une  manière  plus  atroce  les  intentions  de  ses  san- 

fiuinairi^s  iiisliluteurs  que  le  comité  de  Moulins  et  ce- 
ui  de  Cussel  ;  aucun  crime  ne  lour  a  été  étrnngor, 
et  ils  ont  dépassé  la  mesure  de  ceux  qui  étaient  con- 
nus avant  leur  aRVeuse  domination.» 

l^  pétilioiiiiairea  déposent  les  pt^ces  à  Tappul  de 
leur  dénonciation. 

BoiHaRT  :  Il  est  un  délit  abominable  dont  il  faut 
sévèrrmeiit  rechercher  Pauleur  ;  il  faut  savoir  si  les 
hommes  qu'on  vient  de  dénoncer  en  sont  coupables. 
Le  comité  (le  sûreté  générale  avait  donné  Tordre  de 
mettre  en  liberté  deux  citoyens  de  Moulins  :  Tordre 
a  été  Koiistrait  par  des  mains  perfides ,  et  les  deux 
virtimes  ont  étt)  guillotinées....  (L'assemblée  frémit 
d'horreur.) 

BoiHsel  termine  par  demander  le  renvoi  des  pièces 
au  comité  (le  sûreté  générale. 

FonRSTiRK  :  Je  me  déclare  le  défenseur  du  comité 
révoliitioniinire  de  Cussct.  Ce  comité  n*a  fait  qu'exé- 
cuter les  lois  rendues  contre  les  personnes  suspectes, 
et  se  fût  rendu  coupable  s*il  eût  tenu  une  autre  con- 
duite. J'accuse  les  pétitionnaires  d'avoir  été  dans 
leurs  départements  les  soutiens  de  l'aristocratie  rt  du 
royalisme,  et  d'avoir  favorisé  les  prêtres  réfractaires. 
(Murmures.) 

Quant  aux  deux  individus  dont  parle  Boisset, 
j'observe  que  ce  n'est  pas  la  première  fois  que  des 

nersounes  guillotinées  ont  été  mises  en  liberté 

D'ailleurs,  un  de  ces  individus  était  en  chemin  d'é- 
nugratioiUf»  (LeapUit  violents  murmures  empê- 


chent Forestier  de  continuer.  H  descend  de  la  tri- 
bune.) 

Un  membre  de  la  dépulation  de  VAUier  :  Les  pé- 
titionnaires qui  viennent  de  se  présenter  peuvent 
répondre  .lux  inculpations  de  Topinant  par  quarante 
années  de  vertu  et  l'estime  générale  de  leurs  conci* 
toyens.  (Vifs  applaudissements.) 

PÊKifiRBs  :  Il  doit  paraître  étonnant  qne  Ton 
veuille  user  de  récrimination  lorsqu'il  s'agit  seule- 
ment de  discuter  les  délits  les  plus  graves.  Je  de- 
mande le  renvoi  de  la  dénonciation  au  comité  de  sû- 
reté générale  ;  il  faut  enfin  examiner  la  conduite  de 
ces  hommes  couverts  d'opprobres,  gorgés  de  sang  et 
de  pillage,  qui  voulaient  établir,  sur  les  débris  de  la 
république ,  le  trône  de  Maximilien  Robespierre  ;  il 
faut  enhn  punir  les  chefs  de  la  tyrannie  et  les  infl 
mes  agents  qu'elle  employait.  Ce  sont  là  les  vérita> 
blés  complices  de  Pllt  et  de  la  coalition  ;  ce  sont  eux 
qui  viennent  d'ajouter  pne  nouvelle  page  à  Thistoire 
ne  leurs  crimes;  ce  sont  eux  qui  viennent  de  faire 
périr  à  Bftle  M.  de  Goitz,  ministre  prussien ,  dont  ils 
redoutaient  les  intentions  pacifiques.  Il  faut  que  la 
Convention  prenne  des  mesures  sévères  contre  les 
hommes  qui  n'affluent  à  Paris  que  pour  se  soustraire 
à  Tindignation  publique  dont  la  voix  éclate  contre 
eux  dans  leurs  départements.  Je  demande  c[ue  tous 
les  fonctionnaires  démissionnaires,  ou  destitués  de- 
puis le  9  thermidor,  soient  tenus  de  sortir  de  Paris 
et  de  retourner  dans  leurs  municipalités  respectives^ 
sous  la  surveillance  des  autorités  constituées. 

Cette  proposition  excite  des  murmures. 

Bourdon  (de  TOise)  *  Je  m'oppose  à  cette  propo- 
sition ;  pour  maintenir  la  révolution  du  9  thermiclor, 
je  ne  connais  qu'un  moyen  sûr:  c'est  d*éviter  avec 
soin  d'employer  les  mesures  violentes  et  proscriptives 

2ue  la  tyrannie  employait  avant  cette  immortelle 
poque...  (Vifs  applaudissements.) 

Gardons-nous  d  adopter  ces  systèmes  de  proscrip- 
tion générale  et  indéfinie  qui  enveloppent  toujours 
des  innocents  et  souvent  laissent  échapper  les  cou- 
pables. 

La  Convention  peut  s>n  rapporter  à  la  police  qui 
s'exerce  au  comité  de  sûreté  générale  avec  toute 
l'activité  possible.  Le  comité  est  très-avare  d'arresta- 
tions (nouveaux  applaudissements);  mais  avec  une 
surveillance  très-active  il  est  parvenu  à  maintenir 
la  tranquillité. 

Je  demande  Tordre  du  Jour  sur  la  proposition  de 
Pénières. 

L'opinion  de  Bourdon  est  vivement  appuyée. 

On  demande  de  toutes  parts  Tordre  du  jour  sur  la 
proposition  de  Pénières. 

Un  membre  observe  qu'elle  n'est  pas  appuyée. 

La  Convention  passe  à  Tordre  du  jour  a  Tuuani- 
mité. 

Un  membre  demande  la  mention  honorable  de  T  A- 
dresse  présentée,  son  insertion  au  Bulletin  et  le  ren- 
voi au  comité  de  sûreté  générale. 

Forestier  :  Le  renvoi  pur  et  simple. 

Lbgendre  :  Cette  Adresse  est  une  véritable  dénon- 
ciation ;  il  faut  simplement  la  renvoyer  à  votre  co- 
mité de  sûreté  générale;  vous  ne  pouvez  en  ordon- 
ner la  mention  honorable  qu'après  le  rapport  qui 
vous  en  sera  fait ,  autrement  ce  serait  préjuger  la 
question.  D'ailleurs,  voyez  l'inconvénient  :  si  vous 
ordonnez  la  mention  de  cette  dénonciation,  vous  ne 
pouvez  vous  dispenser  d'ordonner  la  mention  hono- 
rable de  toutes,  et  bientôt  vous  pourrez  mentionner 
honorablement  deux  Adresses  contraires  en  fait.  Je 
m'oppose  donc  à  la  proposition  qui  vous  est  faite  ;  je 
demande  le  renvoi  pur  et  simple  de  la  pétition  au 
comité  de  sûreté  générale,  et  les  honneurs  de  la 
séance  pour  les  pétitionnaires.  • 


4T1 


Cette  proposition  est  adoptée. 
GouLY  ;  Je  demande  que ,  conformément  an  dé- 
cret d'hier,  rassemblée  passe  à  l'appel  nominal  sur 
la  question  de  savoirsi  on  enverra  ou  non  des  repré- 
sentants du  peuple  dans  les  colonies.  Cette  question 
a  déjà  été  agitée  depuis  plusieurs  jours;  et  votre  co- 
mité de  gouvernement  vous  dira  au*eUe  a  déjà  duré 
trop  longtemps  pour  le  bonhe^ur  au  peuple* 

Pelbt  :  Hier  plusieurs  membres  observèrent  qu'a- 
vant de  décider  si  on  enverrait  des  représentants  du 
peuple  il  fallait  établir  la  nature  des  pouvoirs  qui 
(enr  seraient  donnés,'que  sans  cela  il  leur  serait  ini* 
possible  de  voter.  Je  demande  que  cette  question  soit 
soumise  à  la  discussion,  alors  je  demanderai  la  parole 
pour  jeter  quelque  jour  sur  cette  question. 

DuFAY  :  J'observe  d'abord  que  le  projet  de  décret 
porte  six  représentants  du  peuple  :  trois  pour  les  co- 
lonies occidentales,  et  trois  pour  les  colonies  orien- 
tales ;  mais  cette  proportion  n'est  pas  bien  calculée, 
car  nous  n'avons  aux  Indes  orientales  que  Tile  de 
France  et  celle  de  la  Réunion  ,  et  je  conviens  que  ce 
n'est  pas  trop  de  trois  représentants  ;  mais  aux  colo- 
nies occidentales  nous  avons  Tabago ,  Cavenne , 
Sainte-Lucie,  la  Martinique,  la  Guadeloupe  et  fies  dé- 
pendantes, pour  lesquelles  il  laudrail  bien  au  moins 
trois  représentants,  et  il  en  laudrail  bien  autant  au 
moins  pour  Saint-Domingue ,  qui  a  près  de  deux 
cents  lieues  d'étendue  de  côtes  françaises. 

Il  taudrait  donc  tirer  de  la  Convention  neuf  mem- 
bres au  moins. 

Je  prie  la  Convention  de  peser  cette  observation. 

11  est  divers  dangers  qui  menacent  nos  colonies. 
La  prudence  ne  me  permet  pas  de  m'expliquer  pu- 
bliquement sur  tous,  mais  il  en  est  sur  lesquels  je 
puis  et  je  dois  fixer  votre  attention. 

Craignons,  dans  nos  colonies,  l'introduction  des 
émigrés  (jui,  renégats  de  leur  patrie,  ne  doivent  pas 
trouver  un  seul  sentier  puur  rentrer  au  soin  de  la  fa* 
mille  qu'ils  voudraient  inmioler.  Craignons  de  les 
voir. tous  afQuer,  accourir  de  tous  les  pays,  se  réu- 
nir aux  Etals-Unis,  pour  (le  là  passer  à  Saint-Domin- 
gue. S'il  existait  un  coin  du  territoire  français  où  ils 
pussent  se  dérober  à  l'exécntion  et  au  çlaive  des  lois, 
ils  viendraient  ainsi  mipoisonner  la  republique,  et, 
par  cette  porte ,  la  drpouiller  de  tous  les  biens  na- 
tionaux qui  sont  le  gage  de  la  guerre  que  nous  avons 
à  soutenir. 

D'ailleurs ,  nous  ne  voulons  point  de  cette  peste 
dans  notre  département,  et  c'est  à  la  Convention  à 
lions  préserver  de  ce  fléau. 

Votre  comité  de  salut  public  doit ,  à  cet  égard , 
prendre  les  précautions  les  plus  rigoureuses;  ceci 
est  une  mesure  d'exécution  et  de  gouvernement. 

Je  suis  convaincu  que  nous  voulons  tous  et  cher 
chons  des  moyens  de  salut  pour  nos  précieuses  pos- 
sessions orientales  et  occidentales. 

Je  ne  demande  qu'une  explication,  mais  je  la  de- 
mande précise,  et  ensuite  j'appuie  moi-même  le  pro- 
jet de  décret,  et  je  vote  pour  les  représentants  du 
peuple ,  mais  pourvu  que  le  seul  moyen  de  sauver 
les  colonies  ne  soit  point  négligé ,  c'est-à-dire  qu'il 
s)it,  par  un  décret,  expressément,  explicitement 
prescrit  à  ces  représentants,  à  cause  de  la  distance 
de  deux  mille  ou  quatre  mille  lieues,  de  ne  pas  dé- 
rober, sous  quelque  prétexte  une  ce  soit ,  aux  lois 
de  la  Convention,  à  l'unité,  à  I  indivisibilité,  et  sur- 
tout aux  bases  fondamentales  de  la  république,  la  li- 
berté et  l'égalité. 

Ppxet  :  Celte  explication  est  inutile;  il  ne  peut 
enirer  dans  aucune  tête  l'idée  monstrueuse  que  des 
représentants  puissent  cliangrr  les  lois  de  la  nation. 
D  iiilleurs,  les  instructions  uui  leur  seront  données 


Kr  le  comité  seront  lues  à  la  GonventioD ,  qui  en 
p;cra  les  principes. 

DoPAT  :  Citoyens,  songez  donc  qu*on  a  inoculé 
dans  ce  pays  les  idées  d'indépendance  ;  et  si  des  re- 
présentants, avec  des  pouvoirs  illimités,  sont  circon- 
venus par  divers  partis,  dans  diverses  colonies,  cha- 
cune délier  sera  gouvernée  par  des  lois  diverses; 
alors,  s'il  n'y  a  plus  unité  de  législation,  que  devien- 
dra l'indivisibilité  de  la  république? 

Lantbenas  :  Je  demande  qu'avant  l'appel  nomi- 
nal l'assemblée  déclare  expressément  que  les  repré- 
sentants qui  seront  envoyés  aux  colonies  ne  pour- 
ront ni  changer  ni  modifier  la  loi  du  16  pluviôse. 

Cette  proposition  est  appuyée  par  Bourdon  (de 
rOise). 

Un  membre  demande  que  ceux  qu'on  enverra  ne 
puissent  avoir  aucun  intérêt  direct  dans  les  colo- 
nies. 

DuHBii  :  D'amendement  en  amendement,  on  a  sin- 
gulièrement préjugé  la  question  d'envoi  des  repré- 
sentants. Je  demande  qu'on  passe  immédiatement  à 
l'appel  nominal  sur  la  simple  question  de  savoir  si 
on  en  enverra,  oui  ou  non.  Quant  à  moi ,  je  déclare 
que  je  ne  suis  pas  d'avis  qu'il  en  soit  envoyé. 

Après  quelques  débats,  l'assemblée  adopte  un  au- 
tre ordre  de  délibération,  et  décrète  : 

c  Art.  f*'.  Conformément  aux  instructions  qui  seront 
données  aux  commissaires  envoyés  par  la  Convention  na- 
tionale dans  les  colonies,  ces  commissaires  ne  pourront  s'é- 
carter en  rien  des  principes  dont  il  résulte  que  les  colonies 
font  partie inuSgrante de  la  république  française,  une,  iodivi- 
sible  et  démocratique. 

•  U.  Ils  ne  pourront  rien  changer  relaUvement  A  l'état 
des  personnes  fixé  par  la  loi  du  16  pluviôse,  sur  les  colo- 
nies. 

I III.  Les  commissaires  ne  pourront  être  pris  ni  parmi  les 
colons ,  ni  parmi  ceux  qui  ont  des  intéréu  directs  ou  in- 
directs dans  les  colonies,  i 

Clauzel:  Ces  préliminaires  une  fois  adoptés,  il 
estprot)able  que  la  grande  majorité  des  opinions  se 
sera  ralliée  au  projet  du  comité  ;  ainsi ,  pour  épar* 
gner  nn  temps  précieux  et  sauver  les  longueurs  d'un 
appel  nominal ,  je  demande  que  le  projet  soit  de 
nouveau  mis  aux  voix  par  assis  et  levé. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

Le  projet  de  décret  est  mis  en  délibération.  —  Le 
président  prononce  qu'il  est  adopté.  —  Des  réclama- 
tions s'élèvent.  On  demande  l'appel  nominal.  Cin- 
quante membres  s'inscrivent  pour  l'obtenir. 

L'appel  se  commence. 

Le  nombre  des  votants  était  de  482;  304  ont  dit 
oui,  178  ont  dit  non. 

En  conséquence ,  les  commissaires  uni  seront  en- 
vovés  dans  les  colonies  seront  choisis  dans  le  sein  de 
la  Convention. 

La  Sjéance  est  levée  à  cinq  heures. 

S£ANCB  DU  17  PLUYIOSB* 

On  lit  les  lettres  suivantes  : 

Gaudin ,  reprëêentant  eu  peuple  pris  Varméê  de 
l'Ouest ,  au  présidenl  de  la  Convention  nalio- 
nale. 

Aux  Sables,  le  19  pluviôse.  Pan  8*  de  la  république 
fraoçabe,  une  et  indivisible. 

I  Otoyen  président,  huit  marins  français  sont  arrivés  hier 
au  port  des  Sabiesd'Oionne.  lis  éialent  en  prison  à  Kin- 
sell,  en  Irlande,  lorsque  la  iiaine  de  l'esclavage  leur  a  fait 
briser  leurs  fers  et  enlever  un  petit  sloop  qu'ils  ont  conduit 
ici. 

«  Rien  n*égale  les  dangers  et  les  souffrances  qu'ont  en* 
duré»  œi  braves  gens  dans  la  traversée  qu'ils  ont  faiie* 


475 


amendant  dix  Joart  Ht  n'oDt  véca  qae  de  poraiBes  de  lerres 
cuiies  deus  l'eau  de  mer»  D^ayant  pat  même  d'eau  douce  pour 
\)olre.  Ils  ont  essuyé  une  tempête,  et  ce  n'est  que  par  une 
tspèce  de  prodige  qu'ils  ont  abordé  les  côtes  de  France. 
Mais  de  quoi  ne  sont  pas  capables  des  hommes  animés  par 
S'amour  de  la  liberté!  Ils  sont  dans  leur  patrie,  ils  sont  sur 
un  sol  libre,  ils  sont  heureux.   • 

i  Ua  Irlandais,  d'après  leur  déposiUon,  sont  las  de  la  ty- 
rannie. Us  soupirent  après  la  liberté  et  l'arrivée  des  Fran- 
çais ,  ne  veulent  fournir  ni  matelots  ni  soldats  an  tyran 
Georges,  ei  les  ont  aides  eux-mêmes  à  briser  leurs  fers. 

c  Je  crois  que  la  Convention  nationale  sera  sensible  au 
trait  de  courage  que  viennent  encore  de  faire  des  républi- 
cains français,  et  je  te  prie  de  le  lui  faire  connaître. 

I  Salut  et  fraternité.  Gaijdiii.  • 

La  Convention  discrète  la  mention  honorable  au 
procès- vcrbiii  et  au  Bulletin  du  trait  de  courage  de 
ces  braves  rëpublicauis. 

Beckêf ,  représentant  du  peuple  en  itiûfton  à 
Landau ,  à  la  Convention  nationale. 

Laodao,  le  19  pluviôse.  Tan  3«  de  U  république  i 
française,  une  et  indivisible. 

«  Citoyens  collègues,  je  tous  fais  passer  une  pe- 
tite caisse  d*argenteric  dont  Tctat  est  ci  joint,  qui 
ni*a  été  apportée  hier  par  l'adjudant  général  Lacroix, 
division  de  Courtat ,  armée  du  Rhin.  Les  volontaires 
du  2«  bataillon  du  Rhône  ayant  sounçonné  que  celte 
argenterie  avait  été  prise  à  Lyon ,  lors  du  siège  de 
cette  ville ,  par  un  homme  qtii  Tavait  déposée  chez 
la  femme  du  cordonnier  du  oataillon,  ont  dénoncé 
ce  fait.  Le  possesseur  s'est  très-mal  défendu,  ce  qui 
a  conOrmé  ces  volontaires  dans  leur  soupçon.  Cette 
conduite  est  digne  d'éloge  ;  elle  prouve  que  nos  bra- 
res  défenseurs  connaissent  aussi  bien  les  principes 
de  vertu ,  de  morale  et  de  probité ,  qu*ils  savent  se 
battre.  Je  demande,  pour  ce  bataillon,  une  mention 
honorable  au  procès- verbal. 

•  Les  effets  de  l'explosion  de  Tarsenal  ont  été  plus 
terribles  à  regard  de  nos  malheureux  frères  de  Lan- 
dau, dont  plusieurs  maisons  ont  été  renversées  et 
beaucoup  endommagées ,  qu'aux  fortifications  de  ce 
boulevard  de  la  république. 

•  La  brèche  occasionnée  par  le  saut  de  la  poterne 
155  n'est  point  aussi  considérable  que  l'on  se  l'était 
imaginé. 

•  routes  les  précautions  sont  prises  en  cas  d*évé- 
nement,  et  elle  est  fermée  par  trois  portes  solides, 
et  en  avant  par  de  bonnes  palissades,  outre  les  piè- 
ces de  canon  en  face  et  en  flanc,  qui  balaieraient 
tout  ce  qui  s'en  approcherait. 

•  Tous  les  matériaux  sont  sur  place,  en  atten- 
dant que  la  saison  permette  les  ouvrages  en  maçon- 
nerie. 

•  H  m'est  bien  doux  d'être  l'organe  de  la  Conven- 
tion près  de  ces  malheureuses  victimes,  et  le  distri- 
buteur de  la  bienfaisance  nationale  dans  le  sein  de 
ces  familles  infortunées. 

•  Aucune  plainte  ne  s'échappe  de  la  bouche  de  nos 
frères  ;  ils  ont  oublie  toutes  les  horreurs  du  long 
bombardement  qu'ils  ont  éprouvé,  ainsi  que  ce  se- 
cond malheur  tout  récent  ;  ils  en  font  le  sacrifice  à 
la  patrie.  La  patience  vraiment  héroïque  avec  la- 
quelle ils  viennent  de  supporter  toute  la  rigueur  de 
la  saison  (  la  grande  majorité  des  croisées  de  leurs 
maisons  ayant  été  brisées  sont  couvertes  en  papier  ) 
caractérisée^»  habitants  tant  calomniés;  elle  offre  la 
meilleure  réponse  à  leurs  calomniateurs. 

•  Vous  jugerez,  citoyens,  d'après  ce  détail,  que 
Tesprit  général  est  bon  dans  cette  commune  ;  que 
l'union  est  parfaite  avec  nos  braves  défenseurs  coni- 
i)os;int  la  garnison.  Tous  ensemble  nous  avons  cé- 
lébré dernièrement ,  avec  toute  la  pompe  possible 
et  l'énergie  républicaine,  l'anniversaire  de  la  mort 
du  tyrau-roi;  tous  les  cceurs,  toutes  lese8|>érancea 


se  sont  tournés  vers  la  Ctmtentloli  naHonale  et  les 
principes  de  justice,  de  vertu  et  d'humanité  qu*elle 
professe. 

•  Différents  discours  ont  été  prononcés  ;  tous  res- 
piraient Tamour  de  la  patrie,  pleine  confiance  en  la 
représentation  nationale  et  la  consolidation  de  la  ré- 
volution du  9  thermidor. 

•  L'objet  des  subsistances  a  fait,  pendant  quelques 
jours,  toute  ma  sollicitude.  La  pénurie,  surtout  en 
fourrages  et  avoines,  se  faisait  sentir;  j'ai  pris  des 
mesures  que  les  circonstances  impérieuses  m'ont 
dictées,  et  les  agents  du  comité  de  salut  public  sont 
venus  corroborer  mes  es])érances;  aussi  il  arrive 
depuis  deux  jours,  dans  celle  place  importante,  des 
fourrages  qui  en  assureront  le  service,  ainsi  que  ce- 
lui de  notre  armée. 

•  Salut  et  fraternité.  Jeseph  Becreb.  • 
Le  citoyen  Lacroix,  adjudant  général ,  a  déposé 

entre  les  mains  du  représentant  du  peuple  Becker 
vingt-six  marcs  six  onces  neuf  gros  d'argenterie,  et 
une  épaulette  en  or. 

La  Convention  nationale  discrète  la  mention  hono- 
rable, au  procès-verbal  et  au  Bulletin,  de  la  conduite 
du  bataillon,  et  renvoie  la  lettre  au  comité  de  salut 
public.  (La  suite  demain,) 

N.  B.  —  Dans  la  séance  du  28 ,  la  Convention  a 
appris  que  la  Zëlande  avait  capitulé ,  et  que  nos 
troupes  occupaient  les  provinces  d'OverYssel  et  de 
Groningue.  Nous  sommes  en  possession  des  immen- 
ses magasitis  des  Anglais. 

Les  termes  de  la  capitulation  de  la  Zélande  n'ont 
pas  paru  convenables  aux  intérêts  et  à  la  gloire  du 
peuple  français.  Plusieurs  membres  ont  parlé.  La 
Convention  a  ordonné  l'impression  des  pièces  et  le 
renvoi  au  comité  de  salut  public,  où  chaque  membre 
ira  prendre  des  renseignements. 


Journal  d'Agriculture  et  des  Arts^  o\x  Journal  d'A- 
griculture^ par  le  citoyen  Cointereaux,  professeur 
d'à rclii lecture  rurale. 

Ce  journal,  déjà  connu  avantageusement,  est  éga- 
lement utile  à  tout  propriétaire,  fonctionnaire  pu- 
blic, manufacturier,  architecte,  ingénieur,  artiste 
quelconque  ;  ils  trouveront  dans  cet  ouvrage  les  in- 
truclions  les  plus  intéressantes  et  les  tableaux  figu- 
rés d'inventions  précieuses,  principalement  pour 
conserver  et  améliorer  les  denrées,  ainsi  que  pour 
cultiver  et  bâtir  avec  économie. 

L'anlrur,  maljgré  la  cherté  en  tout  genre,  n'a  point 
augmenté  le  prix  ;  il  est  toujours  de  15  livres  pour 
S6  feuilles  in-4o,  petit  caractère,  à  deux  colonnes, 
et  de  15  sous  pour  chaque  planche  eravée  ;  mais  les 
gravures  que  l'auteur  va  être  obligéde  faire  enlumi- 
ner se  paieront  davantage. 

Ceux  qui  souscriront  doivent  envoyer  40  livres  à 
l'auteur,  savoir  :  20  livres  pour  tout  ce  qui  a  été  im- 
primé, y  compris  treize  planches;  les  autres  20  liv. 
sont  une  avance  pour  la  suite  de  ce  jourual,  dont 
l'envoi  du  texte  et  des  planches  va  se  faire  sans  in- 
lerruption. 

Nota.  Le  n»  8,  concernant  les  planches  et  les 
toits  incombustibles,  paraîtra  incessamment.  Ce  nu- 
méro, le  pins  essentiel,  ne  se  vendra  point  séparé- 
ment. 

Tout  souscripteur  doit  envoyer,  dans  une  lettre 
chargée  à  la  poste,  son  adresse  bien  écrite,  avec  40 1. 
en  assignats ,  au  citoyen  Cointereaux ,  professeur 
d'architecture  rurale,  rue  du  Faubourg- Honoré, 
n*  108,  en  face  de  la  grande  rue  Verte  ;  aussitôt  il 
recevra ,  franc  de  port,  tout  ce  qui  est  déjà  grave  et 
tmi^rimé. 


GAZETTE  NATIONALE  m  LE  HTEUR  UNIVERSEL. 

N^  150.      Décadi  80  Pldviosb,  Fan  S*.  {Meteredi  18  Févbise  1795,  vieux  $tyl$.) 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

Grodno.  U  95 i«nn«r.  ^  Il  est  probabte  que  riDlfioUon 
de  Calbcrine  est  de  rayer  de  la  liste  de»  puisMoces  poli- 
tiques la  trop  malbeurcuse  Pologne.  A  peine  SLaoislas 
était-il  hors  des^  murs  de  Varsovie,  que  sa  garde  fut  lia'Q- 
ciée  par  ordre  de  Pimpératrlce ,  et  qu*on  uoilfia  aux  mi- 
nistres ri*Angleterre,  de  Hollande,  de  Suède,  au  nonce  du 
pape,  etc.,  que  leur  mission  était  Onie  en  Pologne,  et 
qu'ils  ne  devaient  pas  iD^me  accompagner  le  roi  ft  Grodno. 

De  là  on  conjecture  que  Stanislas  est  peut-être  destiné 
à  Taire  un  plus  long  foyage,  loit  I  Pétersboorg,  soit  à 
Moscou. 

—  Les  Prussiens  ont  Mi  prisonnier  te  «laraile  Mien^ 
jewskif  Tuo  dfia  chefs  de  rinsurrection* 

ALLEMAGNE. 

Vienne^  U  80  Janvier,  —  La  cour  songe  &  de  nouveatu 
moyens  de  recompléter  ses  troupes  délabrées.  Elle  a  re- 
cours à  un  recrutement  rigoureux  dans  tous  les  pays  béré- 
dilaires.  La  seule  Tille  de  Vienne,  dont  la  population  est 
de  cent  cinquante  mille  habitants,  doit  firariiir  sept  mille 
hommes. 

•—  Les  feuilles  aulrtehlcnnct  sont  nmpHct  depuis  quel- 
que temps  de  fables  et  de  contes  absurdes  au  sujet  de  la 
grande  conspiralloo  noarellemcnt  découTerte  en  Hongrie^ 
iaquelie.  dit-on  t  atail  pour  bat  de  tirer  de  priaon  les  cri- 
minois  d*£tat»  ci  dt  rewrerscr  le  goaHroement  monar- 
cbique. 

^  Le  colonel  Hebenitrelt^  natif  do  Prague,  teé4e  qua- 
rante-netif  ans,  est  celui  qui  a  montré  le  plot  de  courage 
parmi  quatre  personnes  condamnées  à  mort  comme  au« 
tcurs  de  ravant-demière conspiration  découverte.  Après  la 
lecture  de  son  arrêt  il  dit  au  {uge  :  •  N*avei-vous  rien  de 
plus  h  me  dire>  —  Non.  —  Eb  bien,  adieu  donc;  le  m'en 
?ais.  •  Ramené  dans  sa  prison,  on  lui  demanda  s  il  dési- 
rait s^cntretenir  avec  un  prêtre.  «  Ouf,  répondit-il,  pourvu 
qu'il  tache  jouer  an  échecs  ou  qo*il  trouve  quelque  Qojen 
di  ■i*a0Uicr.  » 

ESPAGNE, 

Barcdone»  U  m  Janvier,  —  La  terreur  règne  dans  cette 
capitale  de  la  Catalogne.  Le  magistrat  s'efforce  de  rassem- 
bler des  provisions  et  de  prendre  toutes  les  mesures  né- 
cessaires pour  la  défense  de  la  ville.  Les  alcades  des  villa- 
ges sont  mandés  et  arrivent  en  foule  pour  concerter  les 
moyens  d*une  levée  générale. 

On  assure  que  la  province  offrira  h  la  cour  une  levée 
d*hommei»  mais  stipulant  des  conditions  peu  propres  à 
iatisfiiire  le  despotisme  et  la  morgue  miniftérielle. 

La  proftoco  eiige  f  que  les  troupes  espagnoles  ne 
mclleot  pas  te  pied  sur  son  territoire,  à  IVxceptton  des 
corpa  catatens  déjà  tevés  et  dei  géoéraus  qui  y  comman- 
dent! 

•  Qu*elle  seule  ait  le  droit  de  nommer  les  officiers  supé- 
rieurs et  subalternes  de  cette  armée  ; 

«  Que  la  cour  ne  sa  mêle  ni  de  Tarmement,  ni  des  sub- 
sistances, t 

On  doute  que  le  roi  accepte  ces  offres  &  de  pareilles 
conditions.  Le  miniM^TC  ne  manquera  pas  de  représenter 
les  disposilious  des  Catalans  comme  un  attentat  manifeste 
h  la  prérogative  royale;  d'ailleurs,  la  suprématie  castil- 
lane ne  ae  disaimote  pas  que  les  Catalans  conservent  de 
grande  iMfCDln  et  de  profonds  reseentimcnlt. 

HOLLANDE. 

Amsttrdam^  U  8  fitnrkr,'  «»  Lei  administrations  de 

celte  grande  ville  sont  entièrement  organisées»  et,  au  mi- 
lieu des  mouvements  révolutionnaires,  la  paix  publique, 
le  bon  ordre,  le  libre  exercice  des  cultes  n'ont  pas  étO  un 
•  instant  troublés  ;  circonstances  aussi  honorables  pour  les 
Hollandais  que  pbur  leurs  I  ibérateurs. 
On  a  affiché  en  gros  caractères,  aux  portes  de  tontes  lea 

r  5arfe.—  Tame;C. 


églises  du  culte  chrétien  de  toute  communtoot  rinsoriptioo 
suivante  eo  langues  hollandaise  et  franfaisn  t 
Id  l*on  adore  DSeu  t 

Gtoyes  «  qui  qw  to  sois»  ne  trouble  point  ce  euUe»  . 
Signé  C.-W.  Wiscna,  maire. 

N.  /?.  Le  citoyen  Wiseher  avait  été  pensionnaire  de  la 
ville  avant  les  usurpations  slatboudérienoes  de  1787.  C'est 
lui  qui  a  présenté  Téuergique  et  célèbre  pétition  faite  au 
nom  de  la  ville  d'Amsterdam  contre  l'admission  des  trou- 
pes anglaises  et  te  grande  inondation  ;  démarche  pour  la- 
quelle le  patriote  Wiacher  a  subi  une  longue  déteutten»  et 
qui  n'a  cessé  qu*à  l'entrée  des  Français. 

CONVENTION  NATIONALE, 

Rayporl  l'ail,  an  tlom  de  la  ùtmmnssion  ehargéê  de 
Vexatnen  du  papiers  lumoéê  ekgs  Robespierre 
et  ses  complices^  par  E,-B.  Coarlois,  dépuié  du 
déparlemêni  de  i'ÀMèe,  dans  la  séanee  du  16  nt- 
vose,  an  Z  de  la  république  fremçaisê  une  e$  indi- 
visible. 

Citoyens,  les  l^lateurs  qui,  dans  les  siècles  pas- 
ses, ont  jeté  les  fondements  des  républiques  et  qui 
en  ont  voulu  voir  la  durée,  au  lieu  de  travailler  à 
miner  ces  fondements ,  les  ont  consolides  chaîne 
jour.  Les  fondements  des  républinue s  sont  les  prin- 
cipes; la  vertu  en  est  le  ciment,  la  vertu  qui  n'est 
que  les  principes  mis  en  pratique.  Que  dire  de  cet 
architecte  qui,  après  avoir  posé  son  édifice,  fait  agir 
la  hache  pour  en  saper  tout  h  coup  les  bases?  Espère- 
t-il  que,  ces  bases  enlevées,  l'édifice  se  soutiendra, 
ou  veut-il,  comme  l'amant  de  Dalila,  s'ensevelir 
sous  ses  décombres  ?  Le  législateur  qui  a  posé  Tédi- 
fiée  social  sur  les  principes,  et  qui  ruine  cette  base» 
ressemble  à  cet  artiste.  C'est  le  mépris  des  principes 
qni  a  perdu  les  anciens  Etats  de  la  Grèce,  et  qui  a 
vendu  à  Philippe  les  clefs  de  la  soprrbe  Athènes. 
Sylla  compta  sur  leur  onbli  en  forgeant  des  fers  aux 
Romains.  La  constitution  de  Rome,  déversée  de  son 
antique  base,  roula  dans  des  ruisseaux  sanglants,  et 
le  Romain  ne  sut  bientôt  plus  lire  dans  ses  feuil- 
lets que  son  sang  avait  souillés  ;  il  ne  reconnut  plus 
des  caractères  que  son  sang  avait  effacés.  Sylla  se 
rcnentil  :  il  brisa  de  ses  mains  le  joug  qu*il  s*étaitpla 
à  lorger;  il  voulut  essayer  si  les  Romains  nepour- 
rnient  pas  ressaisir  encore  leur  antique  vertu.  Vains 
efforts  !  «  On  ne  fait  point  (dit  Rousseau)  des  pas  ré- 
trogrades vers  le  bien.  •  Sylla  avait  cru  retrouver  des 
hommes,  il  ne  retrouva  aue  (les  esclaves;  le  Romain 
qui  commandait  au  monae  ne  sut  plus  qu'obéir  â  un 
tyran  :  l'honneur  de  l'univers  en  devint  la  honte,  et 
Rome  se  vit  à  jamais  la  proie  des  nombreux  ambi- 
tieux qui  naquirent  des  cendres  du  despotisme  de 
Sylla. 

Que  de  maux  produits  par  le  seul  oubli  des  prin- 
cipes ! 

La  république  française,  plus  heureuse  que  la  ré- 
publique romaine,  eut  son  Sylla  sans  perdre  la  li- 
berté. Ce  qui  la  sauva,  c'est  que  Brutus  fut  en  France 
le  contemporain  de  Sylla  :  à  Rome,  il  ne  parut  qu'un 
demi-si^cle  après  lui.  Ce  fut  ce  qui  perdit  les  Ro- 
mains. Qui  faillit  aussi  de  nous  perdre?  je  le  répète, 
l'oubli  des  principes.  Celui  qui  établit  que  les  prin- 
cipes n'étaient  iavorables  qu'à  rarislocratie  fut  le 
premier  ennemi  de  notre  liberté.  Robespierre  jeta  l(^ 
premier  les  semences  de  cette  affreuse  doctrine,  qui 
ne  furent  que  trop  avidement  recueillies  par  si .; 
nombreux  sectaires.  La  raison  universelle,  non  cilli- 

60 


474 


du  Pnissîen  Cloots,  mais  celle  qui  a  créé  le  mouve- 
ment et  qui  entrelient  rharmonie  des  mondes,  fut 
obligée  de  se  soumettre  à  la  raison  d'un  parti.  Le 
principe,  soutenu  des  seules  armes  de  la  vérité,  fut 
abattu  sous  le  poignard  à  deux  tranchants  du  so- 
phisme. Tout  fut  changé,  la  chose  et  le  nom.  Une  ré- 
volution qu*on  avait  cru  le  passage  plus  ou  moins 
JTaduel  du  mal  au  bien  ne  tut  plus  qu'un  eotip  de 
oudn.  L'égalité,  fille  de  la  nature,  et,  dans  l'état  so- 
cial, fille  de  la  loi,  ne  fut  plus  qu'un  fatal  niveau 
qu'on  promenait  sur  les  têtes,  et  pareil  à  peu  près  à 
celui  de  ce  tyran  qui  étendait  sur  son  lit  de  cinq 
pieds  tous  les  voyageurs  et  les  faisait  réduire  à  la 
mesure  de  ce  lit.  On  prit  la  vertu  pour  le  crime,  et  le 
crime  pour  la  vertu.  On  n*admit  plus  une  foi  privée, 
on  n'admit  plus  qu'une  foi  publique  qui  n'était  plus 
qu'une  publique  mauvaise  roi.  On  n'était  point  hon- 
nête homme  pour  payer  ses  dettes,  si  Ton  n'était  au 
moins  membre  d'une  Société  populaire  :  celui  qui 
s'était  enrichi  aux  dépens  de  sef  créanciers  et  de  la 
patrie  n'avaitqu*à  se  faire  Jacobin  pour  être  l'homme 
probe  par  excellence. 

Ce  n'était  plus  à  la  friponnerie,  c'était  à  la  probité 
qu'on  cherchait  un  correctif.  On  dilala  également  le 
ressort  de  la  sensibilité.  Les  larmes  versées  sur  la 
tombe  d'un  frère,  ou  d'un  père,  ou  d*un  ami,  étaient 
on  vol  fait  à  la  cité  ;  la  douleur  ne  devait  point  ainsi 
se  resserrer,  se  claquemurer  dans  ses  foyers  ;  c'était 
un  crime  que  de  s'attendrir  en  détail  ;  et  ne  pas  pleu- 
rer généralement,  c'était  conspirer.  On  avait  oublié 
que  le  bonheur  publia  ne  se  compose  que  des  élé- 
ments du  bonheur  individuel,  et  l'on  tuait  le  bon- 
heur individuel  pour  créer  le  bonheur  public; c'est- 
à-dire  que ,  pour  rendre  les  hommes  heureux  en 
général,  on  les  accoutumait  en  particulier  à  être 
malheureux  ;  comme  pour  leur  apprendre  à  deve- 
nir libres  collectivement,  séparément, on  les  ployait 
à  l'esclavage.  Un  étourdi  de  vingt-six  ans  (Samt- 
Just),  à  peme  échappé  de  la  poussière  de  1  école, 
tout  gonflé  de  sa  petite  érudition,  avait  lu,  dans  un 
grand  homme  qu  il  n'entendait  point,  qu'un  peuple 
s'était  laissé  corrompre  par  le  luxe,  enfant  des  arts 
et  du  commerce  :  il  avait  lu  encore  qu'un  autre  grand 
homme,  qu'il  entendait  un  peu  moins  sans  doute, 
avait,  dans  l'enceinte  de  quelques  milliers  de  stades, 
formé  un  peuple  de  braves  ;  et  tout  de  suite  notre 
maladroit  copiste  de  l'antiquité,  sans  examen  des  lo- 
calités, des  mœurs  et  de  la  population, appliauant  ce 
3ui  était  inapplicable,  nous  venait  dire  ici,  d'un  ton 
e  suffisance  qui  n'eût  élé  que  comiaue  s'il  n'eût 
point  été  atroce  :  •  Ce  n'est  pas  le  bonheur  de  Per- 
sépolis,  c'est  celui  de  Sparte  que  nous  vous  avons 
promis.  • 

Une  maxime  de  Rousseau,  trop  dédaignée  jusqu'à 
ce  jour,  c'est  qu'il  ne  faut  pas,  si  l'on  veut  fonder 
une  république,  commencer  par  la  remplir  de  mé- 
contents. Qu'eût  dit  le  philosophe  de  Genève,  d'en 
voir  une  qu'on  avait  remplie  de  victimes!  Robes- 
pierre et  ses  partisans  ont  professé  d'autres  principes 
que  Rousseau,  et  tous  ont  été  conséquents.  Rousseau 
voulait  que  les  hommes  aimassent  la  liberté;  il  la 
leur  fallait  donc  rendre  aimable:  Robespierre  vou- 
lait ramener  les  hommes  à  la  tyrannie  ;  il  devait,  en 
conséquence,  leur  rendre  la  liberté  odieuse. 

La  terreur,  l'arme  vulgaire  des  tyrans,  fut  maniée 
assez  adroitement  par  Robespierre.  L'homme  est  ne 
timide  et  peureux  :  son  courage  n'est  presque  jamais 
dans  lui,  il  est  presque  toujours  dans  ceux  qui  l'en- 
tourent, comme  ceux  qui  l'entourent  n'en  ont  eux- 
mêmes  que  dans  leur  confiance  en  un  appui  qui  de- 
vient alors  réciproque.  On  communique  la  peur 
aussi  aisément  qu'où  communique  le  courage.  Le 
Roldat  qui,  ferme  des  soutiens  qu'il  sait  à  ses  côtés, 


fond  dans  la  mêlée  le  premier,  y  précipite  tous  les 
autres,  comme  le  premier  qui,  au  fort  du  combat,  se 
débande,  entraîne  quelquefois  tout  un  régiment 
dans  sa  fuite.  Tels  sont  les  effets  de  la  peur.  L'empire 
romain,  sous  le  règne  de  Pulchérie,  fuit  devant 
quelques  hordes  de  barbares  accourus  de  Tautre 
rive  du  Danube;  et,  comme  Robespierre  de  nos 
jours,  n'a-t-on  pas  vu  jadis  une  bête  fauve  glacer 
d*épouvante  tout  le  Gévaudan  !  Voulez-vous  rendre 
l'homme  plus  peureux  encore;  faites  qu'il  soit  plus 
seul  au  milieu  de  ses  semblables  aue  dans  un  désert; 
faites  que  les  liens  de  la  société  n  existent  plus  pour 
unir  les  hommes,  mais  pour  les  blesser;  rompez  le 
commerce  des  opinions,  en  créant  des  opinions  dan- 
gereuses ou  criminelles;  fixez  une  espèce  de  maxi- 
mum à  la  pensée:  peuplez  ensuite  les  familles  de  dé- 
lateurs ;  qu'un  père  en  rencontre  un  dans  son  fils, 
un  fils  dans  son  père  ;  combinez  votre,  ordre  social 
de  telle  manière  qu'un  citoyen  soit  pliîs  en  sûreté  à 
côté  d*un  loup  dans  les  forêts,  qu'à  côté  de  son  sem- 
blable dans  les  villes  ;  vous  aurez  établi  ainsi,  peu  à 
peu,votre  règne  par  la  terreur:  il  ne  sera  pasdnrable; 
mais  enfin  vous  vouliez  régner,  et  vous  aurez  régné. 

J*ai  entendu  plus  de  mille  fois  des  patriotes,  gé- 
missant de  la  tyrannie  de  Robespierre,  faire  cette  ré- 
flexion : 

•  Quoi  I  nos  soldais  ont  conquis  la  Belf^iqae  ;  ils  mettent 
en  déroule  toute  i*Euro|)e  armée  contre  eux  ;  ils  en  ont 
ohasaé  les  cohortes  au  delà  du  Rhin ,  et  une  cinquantaine 
debrigaiids,  daas;rin(érteur»  terrifient  des  millions  «rhom- 
mes  !  Quelle  diiléreoce  entre  un  fïuDçais  et  uo  Fran- 
çab!  * 

Ce  rapprochement  était  vicieux  ;  on  eût  pu  y  ré- 
pondre ainsi  : 

t  Vingt  brigands  se  sont  attroupés  au  coin  d'un  bois  pour 
dévaliser  les  voyageurs:  quairecenisdc  ces  derniers  passent 
tour  à  tour,  par  compagnie  de  trois  ou  de  six;  ils  sont  tous 
dévalisés  Pun  après  Taulre  ;  ils  étaient  pourtant  quatre 
cents  contre  vingt.  • 

Législateurs,  c'est  l'indolence,  ce  vice  qui  perdit 
Athènes,  qui  a  fait  tomber  nos  destinées  dans  les 
mains  de  ces  hommes  coupables  qui  voulaient  voir 
transpirer  le  corps  politique  jusqu  à  ce  qu'il  fût  de- 
venu une  squelette,  et  qui  se  sont  en  conséc|uence 
permis  sur  lui  des  essais  que  n'eût  point  ose  risquer, 
sur  le  corps  de  son  semblable,  le  charlatan  le  plus 
éhonté.  Ces  hommes,  qui  n'avaient  enchaîné  la  li- 
berté de  la  presse,  la  seule  propre  à  corriger  les  vi- 
ces du  gouvernement  représentatif,  que  parce  qu'ils 
savaient  que  cette  libertédonnerait  l'evei)  sur  les  cri- 
mes des  gouvernants,  et  qu'ils  étaient  trop  décidés  à 
en  commettre  ;  ces  hommes  qui,  au  sortir  de  leurs 
criminelles  orgies,  ivres  de  vin  et  de  sang,  venaient 
souvent,  à  raided'un  sophisme  ou  d'un  jeu  de  mots, 
surprendre  à  Thumanité  trompée  des  législateurs 
ces  décrets  nationicides,  par  qui,  comme  de  Tétiii- 
celle  électrique,  des  milliers  d'innocents  frappés 
tombaient  tous  à  la  fois,  à  la  même  heure,  d'une  ex- 
trémité à  Tautre  de  la  république  ;  ces  hommes  enfin 
qui,  pour  nous  amener  au  bonheur  de  Sparte,  vou- 
laient anéantir  douze  ou  quinze  millions  de  François, 
et  espéraient  bien,  après  cette  transpiration  révolu- 
tionnaire, nous  distribuer  à  chacun  une  charrue  et 
quelques  landes  à  défricher,  pour  nous  sauver  des 
dangers  du  bonheur  de  Persépolis. 

La  loi  a  terrassé  le  tyran  et  quelques-uns  de  ses 
complices  ;  et  ce  n'est  point  pour  troubler  la  paix  de 
leurs  tombeaux,  cette  paix  que  l'insatiable  ambition 
ne  permet  point  de  goûter  aux  cœurs  que  ses  feux 
dévorent  ;  ce  n'est  point  pour  remuer  leurs  cendres, 
fétides  que,  soumis  à  vos  ordres,  je*viens  vous  ap- 
porter le  tribut  demes  veilles  et  le  résultat  de  mes 
travaux. 


475 


En  formant  une  commission  pour  la  recherche  et 
Texnmen  des  papiers  des  conspirateurs  ;  en  ordon- 
nant le  rapport  dont  cette  commission  m'a  chargé, 
la  Convention  nationale  n'a  voulu  que  montrer  au 
peuple,  de  qui  elle  tient  ses  pouvoirs,  combien  elle  a 
été  lidèle  à  en  faire  usage  pour  frapper  les  usurpa- 
teurs sacrilèges  de  sa  souveraineté ,  lors  même 
qu'elle  n'avait  pu  soulever  que  le  coin  du  voile  qui 
couvrait  les  preuves  multipliées  de  leurs  crimes. 

Elle  a  vouJu  Qu'on  ne  connût  tous  lesdegrés  qu'a- 
vait franchis  Robespierre  pour  s'élever  à  la  tyrannie 
que  pour  en  fermer  le  passage  à  tout  autre  ambi- 
tieux ;  qu'on  ne  découvrît  les  plans  de  la  conspira- 
tion et  tous  ses  fils  secrets,  si  longtemps  cachés  sous 
le  voile  d*une  hypocrite  duplicité,  aue  pour  guérir  le 
Français  de  sa  confiance  aveugle,  ae  son  irrésistible 
penchant  à  Tidolàtrie. 

La  Convention  a  voulu  que  tes  amis  de  la  liberté 
et  que  les  peuples  à  venir  puisassent  de  fortes  leçons 
dans  ces  tableaux  trop  fidèles  où  les  conspirateurs  se 
sont  peints  eux-mêmes;  et,  sans  chercher  de  nou 
veaux  coupables,  elle  a  voulu  encore  s'assurer  si  les 
traîtres  n'ont  point  laissé  des  confidents  de  leurs  se* 
crets,  des  héritiers  de  leur  hypocrisie  et  de  leurs  som- 
bres fureurs.  Le  but, en  un  mot,  de  la  Convention  est 
uniquemntque  la^ie  de  Robespierre,  écrite  [mur  ainsi 
dire,  de  sa  propre  main,  puisqu'elle  est  le  résultat  dé 
ses  propres  papiers  et  de  ceux  de  ses  agents  ou  de  ses 
complices,  apprenne  à  l'univers,  étonné  de  la  gran* 
deur  de  ses  succès  bien  plus  que  de  la  rapidité  de  sa 
chute,  si  ce  monstre  fut  d'une  autre  espèce  que  les 
autres  tyrans,  et  si  après  lui  il  a  laissé  de  sa  race. 

C'est  a  cet  unique  but  que  doit  tendre  ce  rapport  : 
Famour  de  mon  pays,  de  sa  liberté,  de  son  bonheur, 
m'a  soutenu  dans  mon  travail,  et  la  vérité  a  si  fidèle- 
ment conduit  ma  plume  que,  si  l'histoire,  dans  quel- 
ques siècles,  désire  retracer  cette  époque  de  notre 
révolution,  je  veux  qu'elle  n'ait  qu'à  signer  ce  dis- 
cours. 

Tous  les  philosophes  de  l'antiquité  ont  regardé  un 
tyran  comme  une  sorte  de  monstre  à  part  ;  ils  le 
placent  hors  de  la  loi  de  nature:  ils  nient  que  les 
tyrans  fassent  partie  de  la  république,  car  toot  ci- 
toyen est  soumis  à  l'obéissance  dans  le  temps  même 
qu'il  semble  n'être  établi  que  pour  commander , 
puisqu'il  ne  commande  en  effet  qu'en  vertu  des  lois 
auxquelles  il  obéit  lui-même.  Dans  l'action  du  com- 
mandement il  est  magistrat  ;  il  est  citoyen  dans  celle 
de  l'obéissance;  et  il  n'est  ni  l'un  ni  l'autre  s'il  ne 
veut  que  commander,  puisqu'il  ne  commande  c{u'au- 
tant  qu'il  est  citoyen,  et  qu'il  cesse  d'être  citoyen 
dès  qu'il  refuse  d'obéir.  Il  n  est  donc  plus  dans  la  ré- 
publique qu'un  ennemi  public,  contre  qui  tout  ci- 
toyen est  soldat,  et  qu'il  a  le  droit  de  tuer  sans  le 
concours  et  sans  l'^iveu  de  la  loi,  puisque,  cette  loi 
n'étant  la  sauvegarde  qne  de  ceux  qui  s'v  soumet- 
tent, il  s'est,  en  la  bravant,  rendu  indigne  d'être  pro- 
tégé par  elle.  Le  tyran  en  s'armant  contre  tout  le 
monae,  arme  tout  le  monde  contre  lui,  et  le  fer  dont 
la  justice  n'ose  pas  menacer  sa  tête  peut,  sur  la 
place  publique,  être  plongé  dans  son  cœur  par  une 
main  généreuse. 

Ce  sont  de  telles  vérités  qu'il  fellait,  depuis  un 
an,  faire  retentir  à  cette  tribune:  elles  eussent 
tombé  terribles  et  menaçantes  dans  l'âme  timide  de 
Robespierre.  Le  tyran  qui  tremble  est  au-dessous 
d'un  esclave  ;  la  peur  nous  eût  sauvés  des  effets  de 
la  tyrannie.  Loin  de  cela,  il  semble  qu'on  ait  pris  à 
tâclîe  d'élever  un  trône  à  celui  (]ui  ne  voulait  que 
briller  à  la  tribune.  Des  agrégations  coupables  lui 
firent  respirer,  de  toutes  les  parties  de  la  France, 
l'encens  criminel  qu'elles  brûlèrent  en  son  honneur; 
c'était  à  qui  enivrerait  l'idole,  trop  ùible  pour  résis- 


ter aux  vapeurs  empoisonnées;  on  se  disputait, 
dans  les  Sociétés  dites  popuLnires,  l'honneur  ou  l'af- 
front, pour  mieux  dire,  de  s'agenouiller  devant  ce 
nouveau  Dagon,  et  des  milliers  de  fanatiques  irréli- 
gieux ne  semblaient  avoir  chassé  de  leurs  temples, 
les  dieux  qu'ils  adoraient  depuis  tant  de  siècles,  que 
pour  se  prosterner  devant  leur  nouveau  dieu  Maxi- 
milien. 

Il  faut  parcourir  ses  papiers  pour  s'en  convaincre. 
Ici  c'est  une  Société  qui  n'ose  point  vous  offrir  le 
tribut  de  ses  idées  sans  le  soumettre  à  votre  tyran* 
Là  c'en  est  une  autre  qui  a  pris,  pour  mot  d'ordre 
le  nom  de  Robespierre,  comme  Joseph  Lebon  le  mot 
pillage. 

Là  encore  ce  sont  les  membres  d'une  autre  So- 
ciété qui  bénissent  l'Eternel  de  ce  qu'il  a  pris  sous  sa 
sauvegarde  des  jours  précieux. 

Ailleurs  ce  sont  des  Sociétés  populaires  de  sec- 
tions, qui  envoient  savoir  des  nouvelles  de  Robes- 
pierre malade,  des  nouvelles  même  de  Gouthon. 

Ailleurs  c*est  une  Société-mère  qui  le  conjure  de 
joindre  à  ses  efforts  le  tribut  de  ses  rares  talents, 
pour  consolider  le  grand  ceuvre  de  la  régénération 
française. 

Partout  même  prostitution  d'encens,  de  vœux  et 
d'hommages  ;  partout  on  verserait  son  sang  pour 
sauver  ses  jours. 

Qu'importe  la  Convention  !  qu'importe  la  répu- 
blique !  Uve  Robespierrel  voilà  le  vœu  général  des 
Sociétés  populaires. 

Du  sein  de  ces  hommages  collectifs  s'élève  encore 
le  nuage  formé  par  la  vapeur  de  l'encens  des  parti- 
culiers. 

Ici  c'est  •  l'incorruptible  Robespierre  qui  couvre 
le  berceau  de  la  république  de  l'égide  de  son  élo- 
quence. • 

Là,  •  le  vertueux  Robespierre  •  est  surnommé 
•  le  ferme  appui  et  la  colonne  inébranlable  de  la  ré- 
publique.» 

Ailleurs  •  on  n'a  fait  connaissance  qu'avec  ses  ta- 
lents, on  vent  la  faire  avec  ses  vertus.  • 

Ailleurs  encore,  on  s'extasie  sur  les  écrits  qui  lui 
ont  fait  l'inappréciable  réputation  d'un  vrai  citoyen 
français,  qui  réunit  en  lui  •  et  l'énergie  d'un  ancien 
Spartiate  et  d'un  Romain  des  premiers  temps  de  la 
republique,  et  l'éloquence  d'un  Athénien  ;  •  enfin 
(ce  qne  vous  ne  croirez  pas,  citoyens),  «  d'homme 
éminemment  sensible,  humain  et'bienfaisant.  • 

Vient  après  un  original,  qualifié  par  lui-même* 
feune  homme  de  quatre-vingt-sept  ans,  oui  regarde 
Robespierre  «comme  le  Messie  annonce  par  l'Etre 
éternel  pour  réformer  tonte  chose.  • 

Puis  an  autre,  digne  d'être  accolé  à  ce  dernier» 
appelle  Robespierre  son  apôtre;  il  se  réjouit  •  d'a- 
voir par  le  physique  une  ressemblance  avec  le  bien- 
faiteur de  la  patrie."  Il  imiterait  volontiers  ce  courti- 
san, qui  s'était  fait  crever  un  œil  parce  queson  enà- 
pereur  était  borgne. 

Puis  deux  autres,  qui  baptisent  leurs  deux  enfants 
du  nom  sacré  de  ïincorruptihle  Robespierre. 

Un  maire  de  Vermanson  veut  ensuite  que  Robes- 
pierre soit  regardé ,  dans  les  siècles  des  siècles , 
comme  la  pierre  angulaire  de  l'édifice  constitu- 
tionnel. 

Un  auteur  de  journal,  en  écrivant  à  Robespierre 
qu'il  appelle  son  cher),  «qu'il  voudrait  le  voir  pour 
lui  apprendre  ce  que  peut-être  il  ne  sait  pas,  •  nous 
apprend  à  nous  que  •  les  plus  beaux  ouvrages  de 
son  cher  Robespierre,  dont  U  propage  les  lumières 
avec  plaisir,  sont,  en  entier,  dans  ses  journaux,  et 
que  son  nom  est  répété  mille  fols  dans  ses  treize  vo- 
lumes révolutionnaires.  •  Etait-ce  pour  consacrer 
l'immortalité  du  héros  ou  celle  du  panégyriste? 


lu 


47C 


Un  agent  national  nous  apprend,  â  son  tour,  que 
c'est  «l'Etre  suprême,  donl  Robespierre  a  prouvé 
l'existence,  qui  (par  reconiiaissîmcc  sans  doute) 
veille  sur  ses  jours,  et  que  la  république  est  sauvée.» 

Un  fanatique  d'Amiens  veut  voir,  à  toute  force,  le 
grand  homme:  «il  veut  rassasier  ses  yeux  et  son 
cœur  de  ses  traits,  et,  Tûme  ëlectrisee  par  toutes  les 
vertus  républicaines,  rapporter  chez  lui  de  ce  feu 
dont  le  grand  homme  embrase  tous  les  bons  répu- 
blicains: ses  écrits  le  respirent,  il  s'en  nourrit;» 
mais  ce  n'est  pas  assez  pour  lui,  •  il  veut  le  contem- 
pler en  face.  • 

Un  président  et  un  secrétaire  d'un  comité  de  sur- 
veillance adresse  nt  des  plaiules  contre  un  représen- 
tant du  peuple,  à  Robespierre,  signalé  par  eux  •  le 
^nie  incorruptible  qui  voit  tout,  prévoit  tout,  dé- 
,oue  tout,  quun  ne  peut  tromper  ni  séduire.»  Si 
,  ustice  ne  leur  est  pas  rendue,  ils  voleront,  fdisent- 
'  Is),  à  la  Convention,  où  Robespierre  les  •  écoutera 
et  jugera.» 

Un  autre  président  de  Société  populaire,  dans  un 
discours  dont  l'impression  et  l'envoi  furent  votés, 
sans  doute  unanimement,  se  livre, en  parlant  des  as- 
sassinats de  Collot  et  de  Robespierre,  à  ce  beau  mou- . 
'vement  d'éloquence  : 

•Qui  l'a  sauvé?  qui  a  sauvé  encore  Robespierre,  le 
faisceau  de  toutes  les  vertus  qu'ils  adorent  et  qu'ils 
propagent  avec  courage?  l'Etre  suprême.  D*un  au- 
tre côté,  il  (rÊtrç  suprême)  protège  visiblement  la 
république,  et  il'  a  voulu,  dans  cette  occasion,  lui 
épargner  d'éternels  regrets.  » 

Une  commune,  enfin,  a  chanté  pour  Robespierre 
un  Te  Deumy  terminé  par  les  cris  de  vive  /fo6ef- 
pierre!  vive  la  république  ! 

Puis  vous  lisez  ces  flagorneries  niaises  dans  une 
lettre  du  conspirateur  Saint- Just  à  Robespierre, 
longtemps  avant  qu'ils  fussent  réunis  à  la  Conven- 
tion. 

«  Vous  qui  soutenez  la  patrie  chancelante  contre 
le  torrent  du  despotisme  et  de  rinlrip:«e;  vous  que 

i'e  ne  connais  que,  comme  Dieu,  par  des  merveilles.*, 
e  ne  vous  connais  pas,  mais  vous  êtes  un  grand 
homme,  » 

Ah  !  c'est  ici  qu'on  peut  le  dire:  si  la  peste  avait 
des  emplois  et  aes  trésors  à  distribuer,  elle  aurait 
aussi  ses  courtisans  comme  Robespierre. 

Tant  d'encens  brûlé  ne  rassasiait  pas  encore  l'a- 
vide ambition  du  tyran  ;  il  lui  fallait  une  couronne, 
et  l'on  a  vu  un  flatteur  assez  lâche  pour  la  lui  offrir. 
•  Béni  soit  Robespierre  (lui  criait  ce  misérable)  béni 
soit  le  digne  imitateur  de  Brutus!  la  couronne,  le 
triomphe  vous  sont  dus,  ils  vous  seront  déférés,  en 
attendant  que  l'encens  civique  fume  devant  l'autel 
que  nous  vous  élèverons  et  que  la  postérité  révé- 
rera tant  que  les  hommes  connaîtront  le  prix  de  la 
liberté.» 

Quel  délire  !  quelle  amalgame  d*idées  hétérogè- 
ues  !  Une  couronne  à  côté  de  l'encens  civique!  une 
couronne  consacrée  par  des  hommes  qui  connaîtront 
le  prix  de  la  liberté  ! 

Ne  serait-on  pas  tenté,  après  avoir  parcouru  cette 
correspondance  d'esclaves,  de  croire  au  système  de 
la  reproduction  des  mêmes  êtres,  à  certaines  pério- 
des de  siècles,  tant  célébré  par  l'imagination  des 
anciens  !  Et  quelle  différence  entre  tous  ces  plats  va- 
lets de  la  tyrannie,  ces  fondateurs  d'autels,  ces  dis- 
tributeurs de  couronnes,  et  ce  vil  Anicius  qui  pro- 
posait, chez  les  Romains, d'ériger  un  tecnple  au  dieu 
Héron  I 

Arrêtons-nous,  citoyens;  c'est  trop  fatiguer  nos 
t^rdf  de  ces  coupables  adulations,  fruits  de  la  bas- 
Ksse  etdu  crime.  Envisageonsde  nouveau  celui  qui 
en  fut  l'objet. 


Robespierre  a-t-il  élevé  tout  seul  cê  colosse  de 

puissance?  Cette  conjuration  de  plus  d'une  ann^  ^ 
est-elle  l'ouvrage  du  seul  génie  de  Robespierre? 
Non,  citoyens ,  la  fortune  de  Robespierre  ne  fut 
qu'une  fortune  d'emprunt  ;  il  futd'abnrd,  ledirai- 
je,  l'homme  de  paille,  le  fermier  judiciaire  de  ta 
conspiration  :  mais  après  il  voulut  évincer  ceux  qui 
l'avaient  mis  en  jouissance,  et  cultiver  pour  son 
propre  compte.  C'est  là  ce  qui  amena  le  procès  du 
9  thermidor.  {La  êuUe  demain,) 

smiB  A  LA  sikfiat  nu  27  pluviôse. 

Présidence  de  Barraêm 

Dblamarbb  y  au  nom  du  comité  des  finances  :  Ci- 
toyens, par  le  décret  du  23  messidor  dernier,  en  dé- 
clarant dettes  nationales  les  créances  passives  des 
hôpitaux,  maisons  de  secours,  hospices,  bureaux 
des  pauvres  et  autres  établissements  de  bienfaisance, 
vous  avez  prescrit  le  mode  de  liquidation  de  ces 
dettes,  les  formes  à  remplir  par  les  créanciers,  en 
fixant  au  l«r  nivôse  le  délai  pour  le  dépôt  des  titres 
et  des  pièces. 

Par  un  autre  décret  du  21  frimaire,  la  délivrance 
des  certificats  exigés  par  rarticleXVllI  du  dck^retdu 
23  messidor,  qui  devait  se  donner  par  la  municipa- 
lité de  Paris,  sujette  au  visa  du  département,  pour 
les  créanciers  des  hôpitaux  de  son  arrondissement, 
fut  attribuée  à  la  commission  des  secours  publics, 
chargée  de  l'administration  immédiate  de  ces  hôpi- 
taux, et  ces  certificats  ont  été  affranchis,  par  ce  dé- 
cret, de  la  formalité  du  visa  d'aucun  corps  admi- 
nistratif à  laquelle  ils  étaient  précédemment  sujets. 

Enfin,  le  délai  fixé  au  !«'  nivôse,  pour  le  dépôt 
des  titres,  fut  prorogé  au  l«r  ventôse. 

D'après  le  rapport  que  la  commission  des  secours 
vient  de  fair«  à  votre  comité,  et  après  avoir  entendu 
le  directeur  général  de  liquidation,  il  s'est  convaincu 
qu'avec  la  meilleure  volonté  possible  beaucoup  de 
créanciers  de  ces  établissements  se  trouvaient,  par 
la  force  des  circonstances  même,  dans  rimpossibitité 
d'effectuer  avant  le  Hr  ventôse  la  production  à  la- 
quelle ils  sont  assujettis. 

Par  exemple,  les  changements  opérés  pour  Paris 
dans  la  forme  des  certificats  exigés,  et  les  retards  in- 
séparables que  ce  changement  a  apportés  a  l'expédi- 
tion des  affaires,  sollicitent  de  votre  justice  une  nou- 
velle prorogation. 

Votre  comité  s'est  d'autant  plus  déterminé  à  vous 
la  proposer  que,  d'après  les  renseignements  qu'il 
s'est  procurés,  il  résulte  que  la  déchéance  frapperait 
la  classe  la  plus  intéressante  de  ces  créanciers,  les 
pensionnaires  et  les  entrepreneurs;  les  premiers, 
par  les  services  ou'ils  ont  rendus  à  ces  établisse- 
ments; les  secouas,  par  les  avances  considérables, 
qu'ils  ont  faites,  et  qui  ont  puissamment  concouru  à 
conserver  les  propriétés  de  ces  mêmes  hospices,  au- 
jourd'hui devenus  propriété  nationale. 

La  presque  totalité  des  pensionnaires  n'ont  pour 
titre  que  des  délibérations  prises  en  leur  faveur,  et 
transcrites  sur  des  registres;  et  les  dépositaires  de 
ces  registres  n'ont  pu  délivrer  jusqu'à  ce  jour  la  to- 
talité des  extraits  qui  leur  sont  demandés. 


tiei 

moires  ( 

treprises,  notamment  dans  les  grandes  villes  où  ces 
établissements  étaient  beaucoup  plus  multipliés. 
D'un  autre  côté,  la  quantité  des  mémoires  qui  ont 
été  soumis  a  été  tellement  considérable  que  les  ar- 
chitectes nommés  pour  les  régies  n*ont  pu  terminer 
leurs  opérations. 
On  ne  peut  pas  wt  diasimuler  qu'une  partie  de  ces 


47T 


(liHicuU^s,  qui  wê  présentent  sous  nos  yeui  à  Pins, 
se  rencontre  dans  toute  retendue  de  la  république^ 
1)11  d'ailleurs  les  lois  que  vous  rendez  choque  jour 
sont  connues  beaucoup  plus  tard,  à  raison  du  plus 
ou  moins  d*éloignemcnt  du  lieu  de  vos  séances. 

D'après  ces  motifs,  votre  comité  m*a  chargé  de 
vous  soumettre  le  projet  de  décret  suivant  : 

fl  La  Convention  naliooalei  après  avoir  entendu  lerap^ 
port  de  son  comité  det  finances; 

«  Considérant  rimpossibililé  où  s*est  trouvée  la  classe 
la  plus  inléressante  des  créanciers  des  hôpitaui,  maisons 
de  secours,  bureaux  des  pauvres  et  autres  éiabllssements 
de  bienraissance,  de  produire  leurs  titres  de  créance  dans 
les  délais  fixés  par  les  décrets  des  23  messidor  et  2i  fri- 
maire derniers,  à  raison  des  Tormalités  nécessaires,  pro- 
roge jasqu*au  i*'  floréal  prochain  le  délai  qui  avaiCété 
fixé  au  1*'  ventôse,  pour  le  dépôt  desdits  titres. 

«Ceux  qui,  à  cette  dernière  époque,  ne  l'auraient  pas 
effectué^  sont,  dès  à  présent^  déchus  de  leurs  droits.  • 
Ce  décret  est  adopté. 

Bourdon  (de  roise)  :  Nous  avons  vaincu  nos  en- 
nemis du  dehors,  et  comprimé  ceux  du  dedans. 
Tous  les  bons  citoyens  se  sont  ralliés  ati  gouverne-^ 
ment.  H  nous  reste  à  faire  une  chose  essentielle,  et 
qui  est  la  seule  urgente,  c'est  Tordre  dans  les  finan- 
ces. On  vons  a  dit  plusieurs  fois  nue  les  créanciers 
de  la  république  étaient  payés  à  bureau  ouvert,  il 
est  fort  aisé  de  payer  ainsi,  lorsqu'on  ne  liquide  que 
sept  à  huit  personnes  par  jour.  Cependant  les  ren- 
tiers et  les  propriétaires  même  qui  ont  afl^rmé  leurs 
biens  è  prix  d^argent  il  y  a  trots  ans,  snnt  tons  rui- 
nés par  la  trop  grande  quantité  d'assignats.  Le  co- 
mité de  sûreté  générale  sait  qu'il  y  a  dans  Paris  une 
fourmillière  de  coquins  qui  se  répandent  chef  les 
marchands  et  achètent  un  tiers  au-dessus  de  la  va- 
leur ;  qui  calomnient  la  liberté  lorsque  leurs  spécn- 
Intions  sont  froissées  ;  qui  discréditent  nos  assignats 
et  servent  à  merveille  nos  ennemis,  qui  n'ont  d'au- 
tre ressource  que  de  nous  attaqtier  par  nos  finances. 
C'est  cet  agiotage  infernal  qu'il  faut  proscrire  ;  c'est 
colle  horde  qui  nous  reste  à  écraser.  Nous  n'avons 
plus  qu'à  assurer  l'ordre  dans  l'intérieur,  et  cet  or- 
dre dépend  seulement  de  la  bonne  administration 
des  finances.  Je  demande  que  trois  jours  par  décade 
Soient  consacrés  aux  discussions  sur  cette  partie. 
(Applaudissements.) 

Vemier  rend  compte  des  travaux  auxquels  se  livre  le  co- 
mité des  finances  pour  faire  payer  avec  promptitude  les 
créances  de  TEtat,  et  pour  assurer  le  crédit  de  la  monnaie 
répiiblicBine.  Il  propose  de  décréter  la  permanence  du  co- 
mité des  finances  jusqu'à  ce  que  la  Conveution  ait  pris 
toutes  les  grandes  mesures  qui  doivent  fortifier  le  crédit 
publie. 

Cambon  :  Comment  a-t-on  pu  dire  que  l'on  ne 
liquidait  par  jour  que  sept  à  huit  personnes? 
Bourdon  :  Je  le  prouverai. 
Cambon  :  Eh  bien  ,  c|ue  Bourdon  prenne  rengage- 
ment  de  venir  ce  soir  au  comité ,  et  je  montrerai 
que  chaque  décade  on  liquide  quatre  a  cinq  mille 
persf)nues.  Je  porte  ma  léte  sur  l'échafaud  si  ce  fait 
n'est  pas  :  que  Bourdon  en  fasse  autant  1  (  Eclats  de 
rire.  ) 

Bourdon  :  Si  on  liquidait  avec  cette  rapidité , 
tous  les  porteurs  de  créances  auraient  leurs  inscrip* 
lions. 

Cambon  :  On  liquidait  trois  mille  personnes  par 
décade  ;  et  comme  on  ne  liquide  que  depuis  huit 
mois,  il  doit  y  avoir  environ  cinquante-deux  mille 
personnes  liquidées  :  à  la  vérité,  il  y  a  soixante- 
quinze  mille  individus  qui  ont  fait  des  demandes 
d'inscriptions,  mais  il  n'est  pas  si  facile  qu'on  ima- 
gine de  mettre  toute  la  célérité  qu'on  désirerait  11 
n'y  a  rien  de  si  aisé  que  de  jeter  de  la  défiance  par 
des  motioua  d'ordre.  (Murmurek) 


Quant  aux  dépenses,  qui  les  t  décrétées?!  qui 
faut-il  imputer  la  loi  du  maximum,  les  comités  ré- 
volutionnaires, les  40  sous  aux  sections,  les  pensions 
k  des  femmes  qui  ne  tiennent  en  aucune  manière  aux 
défenseurs  de  la  patrie?  Quels  sont  ceux  qui,  au 
contraire,  n'ont  cessé  de  vouloir  de  l'économie ,  de 
l'ensemble ,  de  Tordre? 

Bbntabolb  :  Ce  qui  m'engage  à  prendre  la  parole, 
c'est  qu'on  a  fait  sentir  la  nécessité  de  donner  à  nos 
Gnances  le  degré  de  confiance  dont  elles  sont  sus« 
ceptibles;  eh  bien,  je  soutiens  que  jamais  elles  n'in- 
spireront de  confiance  tant  que  l'ordre  ne  régnera 
pas  dans  la  république,  tant  que  des  partis  se  dispu- 
teront, tant  que  le  parti  de  l'opposition  aura  des  es* 
pérances  un  jour,  qu'il  les  perdra  ie  lendemain  et 
les  rattrappera  le  surlendemain.  C'est  pour  cela  que 
je  vous  dénonce  une  feuille  de  Fréron,  dans  laquelle 
on  attaque  la  constitution,  dans  laquelle  on  a  cher- 
ché à  enlever  à  cet  ouvrage,  qui  a  coûté  tant  de 
peine...  (on  rit^  à  cet  ouvrage  qui  appartient  à  douze 
cent  mille  solaat^i;  qui  versent  leur  sang  pour  la  pa* 

trie On  la  présente  comme  la  production  de 

quelques  scélérats.  N'est-ce  pas  le  moyen  le  plus 
perfide  qu'on  puisse  employer  pour  l'avilir?  Que 
chacun  de  nous  se  prononce  pour  le  maintien  dé 
cette  constitution!  (Otttf,  oui!  s'écrient  tous  les. 
membres  en  se  levant.  )  Il  y  aurait  de  la  folie  à 
vouloir  qu'un  eouvernement  libre ,  qui  -est  établi 
dans  un  temps  de  révolution,  puisse  arriver  du  pre« 
mier  pas  au  point  de  perfection.  Renfermez-vous 
dans  le  mode  de  révision  établi  par  la  constitution , 
et  vous  n'éprouverez  aucune  secousse,  et  vous  ne 
ferez  triompner  aucun  parti.  (Nous  ne  voulons  qne 
celui  de  la  justice  et  de  la  liberté  !  s'écrient  un  grand 
nombre  de  membres.  )  Ne  vous  laissez  influencer 
par  personne.  Je  demande  que  tous  mes  collègues, 
sentant  la  nécessité  de  rassurer  tous  les  esprits ,  ne 
souffrent  pas  qu'on  porte  atteinte  au  pacte  social 
qui  appartient  a  toute  la  nation. 

Tbibaodbau  :  11  n'y  a  pas  de  plus  funestes  défen- 
seurs de  la  constitution  que  ceux  qui  vont  puiser 
dans  les  Journaux  la  base  de  leurs  opinions.  (Ap- 
plaudissements. )  Je  me  croirais  Indigne  d  être 
législateur  si  je  suivais  cette  conduite.  Il  y  a  long- 
temps qu'on  suppose  que  la  constitution  aémocrà-^ 
tique  est  attaquée  par  un  parti  puissant.  Je  ne  doute 
pas  qu'il  n'y  ait  en  France  quelques  ennemis  de  la 
démocratie,  mais  je  crois  que  le  plus  mauvais  moyen 
de  la  défendre  est  de  supposer  tous  les  jours  qu  on 
l'attaque.  Qu'importe  à  la  nation  que  quelques 
iournalistes  disent  leur  opinion  sur  la  manière  dont 
la  constitution  est  rédigée  ?  Moi  je  vais  plus  loin,  et 
je  dis  que,  s'il  y  avait  dans  la  constitution  un  article 
qui  ne  me  convînt  pas ,  j'aurais  le  droit ,  en  m'j 
soumettant,  d'écrire  contre.  (Applaudissements  réi« 
térés.)  Je  déclare  que,  si  ce  droit  n'existait  pas,^ 
il  n'y  aurait  pas  en  France  plus  de  liberté  qu'eot 
Russie. 

11  est  quelques  hommes  corrompus  qui ,  à  l'aide 
des  calomnies  qu*ils  propagent ,  cherchent  à  faire 
croire  que  le  règne  de  la  justice  n'est  qu'une  chi- 
mère ,  et  que  le  régime  des  prisons  va  reparaître, 
(vifs  applaudissements)  ;  mais  la  Convention  saura 
tous  les  terrasser.  (Oui,  oui  !  s'écrient  tous  les  mem- 
bres.) Pour  moi,  je  ne  vois  pas  d'ennemi  plus  dan- 
gereux pour  la  république  que  celui  qui  s'oppose  au 
retour  de  l'ordre  et  du  règne  des  lois.  (Applaudis- 
sements. ) 

Lbgenorb:  C'est  parce  qu*il  fant  prononcer  sur 
les  chefs  que  les  autres  brigands  se  montrent  en-; 
core.  (Applaudissements.) 

Thibacdbau  :  Comment  voulez-TOUS  que  ceux 
qni  I  pendant  dix-huit  mois,  n'ont  reçu  qne  de  bri- 


478 


gandage  et  de  désordre,  puissent  consentir  au  retour 
de  la  justice?  (Vife  applaudissements.  )  Pour  moi  «je 
le  déclare,  il  n*y  aura  jamais  de  transaction  entre 
certains  hommes  et  moi;  une  barrière  éternelle  nous 
sépare. 

Le  temps  du  charlatanisme  est  passé  ;  disons  done 
firanchement  qu*il  n'y  aura  point  de  stabilité  dans 
nos  finances  tant  cjue  le  gouvernement  n'inspirera 
point  assez  de  conbance,  et  le  nôtre  u*a  point  assez 
de  force. 

11  faut,  si  vous  voulez  éviter  une  réaction  funeste, 
il  faut  examiner  la  loi  du  17  septembre  et  toutes  les 
lois  révolutionnaires,  qui  ne  sont  que  des  lois  arbi- 
traires. (On  applaudit.  )  C*est  le  seul  moyen  de  ra- 
mener la  paix ,  de  faire  cesser  toutes  ces  dénomi- 
nations de  Jacobins ,  de  modérés ,  de  Feuillants,  de 
Maratistrs  ;  car  il  fut  un  temps  où  il  n*y  avait  que 
de  ces  espèces  d*hommes,  et  où  l'on. ne  trouvait  pas 
un  seul  citoyen.  (Vifs  applaudissements.) 

J'invite  la  Convention  â  activer  les  travaux  de 
cette  commission ,  nommée  depuis  deux  mois,  qui 
ne  s'assemblepas ,  et  qui ,  par  ses  retards,  compro- 
met le  salut  de  la  république.  Cette  commission  a 
déjà  fait  des  travaux  préparatoires;  je  demande 
qu'elle  nous  fasse  un  rapport  dons  une  décade. 

Andbb  Dumont:  Citoyens,  craignons  de  nous 
laisser  endormir;  l'ennemi  veille  sans  cesse.  Ou 
vent  encore  renouveler  le  règne  du  brigandage.  On 
parle  de  parti  ;  mais  »  ù  les  plus  perfides  et  les  plus 
fourbes  des  hommes  !  où  donc  vovez-vous  des  par- 
tis? Vous  voyez  la  masse  contre  les  conspirateurs. 
Croyez-vous  que  ceux  qui  vous  parlent  avec  tant 
•d'inquiétude  die  la  constitution  veuillent  la  consti- 
tution? Non;  s'ils  ont  rimpudence  de  n^paudre  ici 
leurs  fausses  alarmes ,  c'est  qu'ils  cherchent  à  faire 
croire  que  ceux  qui  ont  fait  la  révolution  du  9  ther- 
midor ne  veulent  pas  la  constitution  républicaine. 
Lisez  les  folliculaires,  les  Babœuf,  les  journaux  uni- 
versels et  des  hommes  libres,  vous  y  verrez  la  con* 
tre-révolution  à  chaque  page.  (On  applaudit.) 

AiiDoi;!?!  :  Tu  ne  les  vaudras  jamais  ! 

André  Dumont  :  C'est  le  crime  oui  veut  se  rele- 
ver ;  mais  ses  efforts  seront  vains,  la  vertu  est  plus 
forte.  (  Nouveaux  applaudissements.  )  C'est  (tarce 
qu'on  veut  sauver  de  grands  coupables  ;  oui ,  tran* 
chons  le  mot,  c'est  parce  que  l'on  conserve  cet  es- 
poir,  que  nous  voyous  toutes  ces  agitations.  Mais 
vous  aurez  beau  faire;  ni  vos  cris,  ni  vos  menaces , 
ne  viendront  à  bout  de  changer  l'opinion  publique. 
Elle  est  invariable;  on  respecte  aujourd'hui  les  per- 
sonnes et  les  propriétés.  (Les applaudissements  re- 
doublent et  se  prolongent.)  Citoyens,  levons  tous 
les  doutes  sur  l'intention  d'attaquer  la  constitution. 
Savez-vous  qui  sont  ceux  qui  affectent  ces  doutes, 
qui  tiennent  ce  langage  astucieux?  Ce  sont  ceux  qui 
ne  veulent  pas  de  paix,  ^ui  veulent  que  nous  soyons 
toujours  dans  les  agitations.  La  Convention  ne  doit 

{dus  souffrir  qu'on  garde  encore  l'idée  de  ramener 
e  règne  du  sang  et  des  rapines.  (  Nouveaux  applau- 
dissements. )  La  constitution  a  étéiuréepar  vous, 
elle  a  été  acceptée  par  le  peuple,  il  n'est  pas  plus 
dans  votre  intention  que  dans  votre  pouvoir  d*y  rien 
changer.  (L'assemblée  se  lève  simultanément  en  si- 
gne d'adhésion.  )  Encore  une  fois,  cette  tactique  n'a 
pour  but  que  de  vous  empêcher  de  faire  la  paix. 
Prononcez-vous  sans  retour ,  et  frappez  les  grands 
eoupables.  (On  applaudit  à  plusieurs  reprises.) 

Lbqbndrb  (de  Paris  )  :  Plus  d'une  fois  je  me  suis 
présenté  à  celte  tribune  avec  res|>oir  d'éclairer  sur 
leurs  chimériques  entreprises  et  de  ramener  à  la 
raison  et  ù  la  justice  des  hommes  nui  ont  voulu 
rainement  rétablir  dans  les  Jacobins  resprit  de  ter- 
reur. Eh  bieU|Ce  qu*oa  D'à  pu  taire  auK  Jacobins,  on 


veut  le  faire  ici.  (Vifs  et  longs  applaudissements.) 
Toutes  les  fois  qu'il  a  été  question  de  prononcer 
sur  de  grands  scélérats,  les  Fieutenants  de  ces  chefs 
ont  toujours  vociféré.  (  On  applaudit.  )  On  parle  do 
la  constitution.  Eh  !  qui  est-ce  qui  veut  attaquer  la 
constitution?  Vains  prétextes!  Non ,  nous  le  jurons 
tous  par  les  veuves  dont  vos  chefe  ont  peuplé  la 
France,  nous  le  jurons  par  l'énergie  de  la  vertu  ;  et 
s'il  était  possible  que  l'indignation  se  refroidit  dans 
nos  cœurs ,  nous  irions  sur  les  tombeaux  de  vos 
nombreuses  victimes  en  exhumer  de  nouveaux  sen- 
timents; non,  nous  ne  voulons  plus  laisser  égorger. 
(  Applaudissements  réitérés.  )  Vous  poursuivrez  les 
hommes  de  sang;  la  terreur  a  change  de  main.  Vous 
ne  voulez  pas  laisser  triompher  le  crime,  on  attaque 
la  constitution. 

Benlabole  s'agite  et  veut  parler  dans  le  tumulte.  (De 
nombreux  murmures  couvrent  sa  voix.) 

Legendbe  :  Tant  que  vous  n'aurez  pas  prononcé 
sur  les  chefs,  car  je  ne  veux  rien  préjuger,  quoique 
leur  scélératesse  soit  jugée  dans  l'esprit  de  tous  les 
hommes  de  bien;  tant  une  vous  n'aurez  pas,  dis-je , 
prononcé  sur  les  cheiis,  leurs  lieutenants  s'agiteront, 
et  vous  n'aurez  point  de  calme. 

Bbntabolb  :  Est-ce  à  moi  que  cela  s'adresse? 

Plmiiurs  voix  :  Oui ,  oui  ! 

Legbnjdbb  :  Oui ,  je  le  répète ,  Us  se  trompent  ; 
jamais^  jamais  l'esprit  de  terreur,  jamais  le  règne  de 
sang  ne  prévaudra.  Allez  prendre  des  bains  de  sang 
chez  les  cannibales;  la  Convention  nationale  de 
France  a  décidé  que  vous  n'égorgerez  plus  personne. 
(On  applaudit  à  plusieurs  reprises.)  LaConvention« 
qui  marche  toujours  avec  et  pour  le  peuple  ,  fera 
rentrer  dans  le  néant  tous  ces  nommes  qui  devraient 
pleurer  sur  les  victimes  qu'il»  ont  faites.  (  On  ap- 
plaudit. )  S'il  était  possible,  ce  que  je  ne  croirai  ja- 
mais, que  cet  esprit  abominable  pût  reprendre  en- 
core dans  la  Convention 

Un  grand  nombre  de  voix  :  Non  ,  non ,  jamais  ! 
(On  applaudit.) 

Gaston  descend  de  reitrémilc  et  court  à  la  tribune. 

Plusieurs  voix  :  A  bas,  à  bas  !  la  parole  est  à  Le- 
gendre. 

Après  quelaucs  Instants  d'agitation  le  calme  se  rétablit* 

Legendre  :  Quels  sont  les  hommes  qui ,  après  le 
9  thermidor  «  ont  voulu  rétablir  aux  Jacobins  le 
système  de  terreur  ?  Je  vous  le  demande,  ne  sont-ils 
pas  ici  ?  (Vifs  applaudissements.)  Ne  font>ils  pas  tou- 
jours des  motions  incidentes  pour  arrêter  la  marche 
des  aflàires ,  pour  forcer  le  peuple  à  s'agiter,  pour 
faire  calomnier  et  avilir  la  Convention  ?  Toutes  les 
torches  de  discorde  qu'on  allumait  aux  Jacobins  ne 
sont-elles  pas  tous  les  jours  secouées  ici,  dans  cette 
partie  de  la  salle?  (  Il  désigne  l'extrémité.  Des  ap- 
plaudissements unanimes  partent  de  tous  les  côtés.) 
Je  ne  m'adresse  à  personne  en  particulier  ;  je  parle 
à  ceux  qui  ne  veulent  pas  pardonner  à  la  Conven- 
tion dVivoir  fermé  les  Jacobins.  (Le&  applaudisse- 
ments recommencent.^  Je  prie  la  Convention  de  se 
mettre  en  garde  contre  les  motions  insidieuses,  jetées 
en  avant  pour  faire  croire  qu'elle  veut  attaquer  la 
constitution. 

Je  demande  donc  l'ordre  du  jour.  (On  applaudit.) 

Gaston  :  Citoyens,  en  semant  le  trouble  dans 
cette  assemblée,  qui  doit  faire  à  jamais  l'admiration 
des  peuples,  c'est  servir  l'aristocratie.  On  prête  a 
plusieurs  députés  l'affreux  projet  de  vouloir  assassi- 
ner leurs  collègues;  on  m'a  rangé  parmi  cette  bande 
d'assassins.  Eh  bien,  citoyens,  je  déclare  qu'au  lieu 
de  porter  une  main  parricide  sur  la  représentation 
nationale ,  je  ferais  un  rempart  à  Fréron  lui-même, 
qui  m'a  accusé ,  si  quelques  scélérats  voulaient  at- 
tenter à  ses  jours.  (On  applaudit.) 


479 


Je  ne  trouve  rien  de  plus  atroce  que  de  semer  la  , 
division  dans  cette  assemblée.  Il  n'y  a  ici  qu'un 
parti ,  c'est  celui  de  la  justice.  Notre  devoir  est  de  , 
nous  serrer  les  uns  contre  les  autres  pour  résister 
nux  meneurs  vendus  à  l'aristocratie ,  et  qui  veulent 
nous  plonger  dans  l'avilissement.  Pour  moi,  j'abjure 
toute  haine  avec  mes  collègues;  nous  devons  tous 
en  faire  autant,  car  autrement  nous  verrions  bientôt 
la  guerre  civile  inonder  nos  campagnes  du  sang 
français.  (On  applaudit.) 

Une  Société  célèbre {Un  membre  :  Par  ses 

crimes!) Une  société  célèbre,  qui  a  rendu  de  grands 
services  à  la  liberté ,  a  été  fermée.  Il  s'y  était  intro- 
duit des  scélérats  qui  influençaient  singulièrement 
l'opinion  publique.  Je  dois  dire  ici  la  vérité  :  cjcst 
que  cette  Société,  surtout  avant  le  9  thermidor,  ri' 
valtsait  avec  la  représentation  nationale.... 

BouBDON  (  de  l'Oise  )  :  Elle  faisait  plus  »  elle  la 
guillotinait.  . 

Gaston  :  La  Convention  a  bien  fait  de  dissoudre 
celte  Société  ;  elle  a  par  cet  acte  prouvé  à  l'Europe 
qu'elle  seule  tenait  les  rênes  du  gouvernement,  et 
qu'aucune  puissance  ne  pouvait  impunément  s'éle- 
ver au  niveau  de  la  représentation  nationale.  (  On 
applaudit.  )  Les  véritables  Jacobins ,  la  majorité  des 
Jacobins ,  composée  des  députes  et  des  citoyens  de 
Paris  épurés  depuis  le  9  thermidor ,  ont  applaudi  à 
œtte  mesure;  ils  n'ont  jamais  cherché  à  faire  une 
réaction.  (Quelques  applaudissements.)  S'il  est  vrai 
que  la  majorité  de  cette  Société  était  pure,  pourquoi 
attirer  sur  la  totalité  de  ses  membres  les  poignards 
et  la  calomnie.  Laissons  les  qualifications  injurieuses 
de  terroristes  et  de  buveurs  de  sang,  et  ne  nous  at- 
tachons qu'à  punir  les  seuls  criminels;  qu'on  ne 
vienne  pas,  comme  l'a  fait  Lcgendre ,  faire  des  dé- 
nonciations vagues  contre  des  représentants  purs... 

On  demande  l'ordre  du  jour. 

BouROON  (de  l'Oise)  :  Il  est  temps  de  mettre  fin  à 
une  dispute  jetée  imprudemment  dans  cette  assem- 
blée. Personne  ne  vent  ici  porter  atteinte  h  la  liberté 
et  à  régalité;  sortons  des  Jacobins  et  occupons-nous 
des  finances.  Je  demande  l'ordre  du  jour  sur  la  pro- 
position de  Bcntabole. 

La  Convention  passe  à  Tordre  du  jour  sur  la  proposition 
de  Bentabole,  etdécrèle  que  trois  jours  par  décade  elle 
a^occupera  des  finances. 

Crassous  demande  que  Ton  mette  aux  foix  la  proposi- 
tion de  Thibaudeau. 

La  propoâiiion  de  Tbibaudeau  est  adoptée. 

Dubois  :  La  confiance  publique  repose  sur  deux 
bases,  la  justice  et  la  bonne  foi.  Nous  ne  serions  pas 
justes  si  chaque  citoyen  n'avait  un  droit  égal  d'ac- 
quérir sous  la  sauvegarde  des  lois,  de  vivre  paisible, 
et  de  se  livrer  à  des  spéculations  qui ,  pour  paraître 
quelquefois  dictées  par  l'intérêt  particulier ,  n'en 
tournent  pas  moins  en  dernier  résultat  à  l'avantage 
général.  La  bonne  foi  dans  les  engagements  n'existe 

r>lus  si  une  nation  veut  se  prévaloir  de  sa  force  légis- 
alive  pour  imposer  à  ses  créanciers  telles  condi- 
tions qu'il  lui  piaft ,  et  des  conditions  inégales.  On  a 
cru  faire  une  économie  de  15  millions  par  an  en  ne 
liquidant  pas  une  certaine  classe  d'hommes,  et  les 
créances  de  telle  ou  telle  étendue  au  dessus  de  telle 
ou  telle  somme.  Eh  bien  !  on  a  fait  rien  autre  chose, 
au  lieu  d'économie,  qu'une  augmentation  réelle  en 
dépense  de  500  millions.  Si  vous  laissez  subsister 
ces  distinctions  parmi  les  citoyens,  vous  ébranlez  les 
principes,  et  il  n'y  a  plus  rien  de  fixe  dans  votre  sys- 
tème ;  Ions  les  engagements  exigibles  doivent  être 
acquittés  également  et  sans  exception. 

Vous  avez  une  infinité  de  lois  qui  contiennent  des 
disposi  lions  bien  contraires  à  ces  principes.  Je  mets 
de  ce  nombre  celle  qui  exige  un  certificat  de  civisme 


pour  l'exécution  d'un  titre  qu'un  particulier  peut 
avoir  contre  la  nation.  Je  dis  que,  quand  il  s'agit  de 
payer  ce  que  vous  devez,  vous  n'avez  droit  d'exiger 
d'autres  formalités  que  celles  qui  sont  nécessaires 
pour  constater  l'autnenticité  de  ces  créances;  que 
teriez-vous  d*un  particulier  qui ,  appelé  devant  la 
justice  par  ses  créanciers,  dirait  :  •  Je  paie  cefui  à  qui 
je  dois  100  écus;  mais  je  me  crois  dispensé  de  payer 
celui  à  qui  je  dois  10,000  liv.  Je  consens  aussi  à  payer 
celui  qui  me  justifiera  qu'il  a  une  famille  nombreuse; 
mais  je  ne  paierai  point  le  célibataire.  Des  préten- 
tions si  étranges  seraient  évidemment  réprouvées 
par  les  tribunaux;  eh  bien ,  pensez-vous  qu  une  na- 
tion ne  soit  pas  tenue  à  l'observation  aussi  exacte  de 
ses  engagements  qu'un  particulier?  pensez-vous 
qu'elle  puisse  les  violer,  si  ce  n'est  par  le  plus  odieux 
abus  de  la  force  !  (On  applaudit.) 

Je  demande  que  le  comité  des  finances  révise 
toutes  les  lois  qui  ont  prescritdes  formalités,  excep- 
tions ou  délais  pour  les  liquidations,  et  le  payement 
des  créances  légitimes  des  particuliers  sur  la  répu- 
blique, et  qu'il  vous  fasse  un  rapport  sur  la  suppres- 
sion de  toutes  distinctions  entre  les  personnes,  ainsi 
que  des  formalités  qui  ne  seront  pas  jugées  néces- 
saires pour  constater  la  légitimité  des  créances. 

Cambon  !  J'observe  que  jamais  on  n'a  exigé  de 
certificats  de  civisme  des  créanciers.  Quant  aux  dé- 
lais dont  on  se  plaint ,  ils  étaient  nécessaires  pour 
connaître  la  dette  publique. 

JoHANNOT  :  Je  demande  l'ordre  du  jour  sur  ces 
diverses  propositions,  motivé  sur  ce  que  les  comités 
sont  chargés  d'adoucir  la  rigueur  de  certaines  dé- 
chéances. 

La  CoofentH»  passe  à  l'ordre  du  jour. 

—  Gouly  demande  que  Pappcl  nominal ,  pour  renvoi 
des  représentants  aux  colonies ,  soit  fité  à  demain  ;  K 
l'assemblée  décrète  que  les  comités  présenteront  une  liste 
de  candidats,  et  que  l'appel  ooroinal  aura  lieu  ensuite. 

Gouly  demande  ù  donner  à  la  ConvenUon  des  nouTelies 
particulières  et  satisfaisantes  de  la  situation  des  colonies 
orientales^ 

L'assemblée  n'entend  point  la  lecture  de  ces  lettres»  at- 
tendu qu'elles  ne  sont  point  oOicielles. 

-^  La  Convention  afourne  &  demain  son  projet  de  décret 
sur  la  comptabilité,  ayant  pour  objet  de  Taire  rentrer  an 
irétOT  public  p*us  de  100  millions. 

«*-  La  discussion  sur  l'organisation  de  l*armée  est  aussi 
ajournée  à  demain» 

—  Dubois  Crancé  M  nommer  &  cent  cinq  enplofo  ?«• 
cants  dans  les  armées. 

La  léanoe  est  levée  à  quatre  heureit 

8éA5Ct  nu   28  PLVVIOSI. 

Btaintft  9  au  nom  du  comité  des  finances  :  Citoyens^ 
pour  fuire  cesser  les  plaintes  cicvérs  sur  la  liquidation  de 
la  dette  nationale  et  des  inscnpiions  au  grand  livre,  le 
comité  des  finances,  section  de  la  trésorerie,  m*a  chargé 
de  vous  rendre  compte  du  progrès  de  cette  opération ,  et 
d'annoncer  ce  qui  a  été  f4ii  jvsqu'an  18  pluviôse  courant. 

La  secliou  de  la  trésorerie  surveille  très-attentivement 
cet  objet.  Les  préposés  à  rinscription  lui  présentent  deux 
espèces  de  comptes,  savoir  :  Tun  a  la  fin  de  cbaqne  décade, 
Taulre  du  travail  à  faire  ainsi  que  du  travail  dut  cbaque 
jour. 

Celui  de  cbaqne  jour  présente  l'état  de  situation  de  la 
veille  et  les  opérations  de  la  journée.  Il  en  résulte  que, 
jusqu'au  28  pluviôse,  le  nombre  des  bulletins  remis  pour 
la  dette  consolidée  est  de  quatre-vingt  mille  quarante* 
deux;  le  lendemain  24  •  il  en  fut  remis  deux  cent  douie; 
le  total  des  bulletins,  à  la  fin  de  ladite  journée,  fut  de 
quatnvvingt  mille  deux-cent  quatre^ingtquatone;  quant 
au  montant  de  la  dette  consolidée»  il  t'élère  à  59  millions 
655,102  liv.  9  8.  i  dcn. 

Ou  couvient  que  la  liquidation,  surtout  à  Tég.nl  du 
viager ,  a  éprouvé  des  lenteurs;  nais  elles  étaient  iofépa» 


480 


Met  d'unt  réftMrme  qvl  préMiiUit  un  immeo^  ehaos.  Ce 
seul  viager,  jusquest  et  eoinprift  la  secoode  décade,  pr^ 
tentait  soiianfe-cinq  mille  quatrehfingtHlix-buit  liasses, 
qui  compurluieiit  cent  soixaute^ix  mille  cinq  cent  vinst« 
sept  contrats.  Le  comité  s'occupera  ft  accélérer ,  et  il  y 
donnera  tons  ^es  soins« 

Quant  à  l*administration  générale  de  la  trésorerie,  la 
arelion  a  pensé  que,  pour  écarter  toutes  idées  de  suspicion, 
c'était  aux  membres  du  comité  qui  doit  vou5  faire  un  rap« 
port  relativement  aux  finances  è  vous  rendre  compte  des 
modes  d^adininistration  ;  mais  o»  peut  annoncer  d^avance 
qu'à  regard  de  la  manutention  tout  est  dans  le  plus  grand 
ordre  ;  on  peut  se  tranquilliser  sur  les  formes  adoptées  i 
c'eat  du  fond  des  claoses  qu'il  faut  s*occttper  ;  mais  beureu* 
semeoi  cet  important  otyet  fixe  aiijourd'bui  votre  atteo- 
lion.  On  doit  considérer  qo*il  est  des  moycus  qui  sont  in- 
dépeodauu  du  travail  et  do  lèle  de  vos  comités  :  ceci 
donne  lieu  à  une  observation  générale  et  utile. 
.  Il  existe  sans  doute  des  abus  ;  on  est  redevable  aux  re- 
présentants du  peuple  et  à  tous  les  citoyens  qui  les  dénon- 
cent; mais  on  doit  avoir  attention  de  ne  pas  h\n  des  dé- 
nonciations indiscrètes  et  qui  puisse  préjudicier  à  la  cbose 
publique.  La  prudence  exigerait  que  Ton  vérifiât  te  fbit 
d*abord  aux  comités  que  cela  pourrait  concerner  ;  qu'on 
se  fit  rendre  compte  des  moli£i|  et  ai,  après  cet  précau- 
tions, on  n'éuit  pas  apaisé,  la  dénondatioo  des  abus  en 
acquerrait  plus  de  poids,  et  n*en  serait  que  mieux  écoutée. 

La  Convention  ordonne  Tinsertion  de  ce  rapport  au 
Bulletin. 

—  Boissy  d^Angîas^  an  nom  du  comité  de  salut  pvblle, 
donne  lecture  de  la  lettre  suivante  : 

Uscitoifnê  iê  Corbtil^  membres  de  la  Société  poj^uMre, 
à  la  CoHoention  nationaU,^ 

fl  Gitoyena  représentants ,  il  est  vrai  qu'il  y  a  en  an 
grand  rassemblement  à  Corbeil,  à  roccasion  du  marcbé;  il 
est  encore  vrai  qu'un  incoonu«  qui  s'était  glissé  dans  la 
foule,  a  voulu  exciter  le  peuple  ù  se  porter  sur  les  maga- 
ains  de  attl>sistances  de  Paris  ;  mais  le  pruple  en  masse  a 
repoussé  avec  indignation  celle  exécrable  proposition* 

•  Nous  voos  protestons  que  les  citoyens  de  la  commune 
de  Corbeil  n'ont  pris  aucune  part  à  ce  rassemblement  : 
pous  vous  jurons  que  nous  ne  souOTrirons  pas  qu'il  soit 
porté  aucune  atteinte  aux  subsistances  de  nos  frères  de 
Paris* 

c  Les  magasins  de  Corbeil  ont  été  atUqués  en  170S  par 
un  rassemblement  armé  de  citoyens  égarés;  les  babitants 
de  Corbeil  se  sont  levés  en  masse  pour  déiendre  et  protéger 
les  subsistances  de  Paris.  Notre  dévoaemeiH  est  et  sera 
loi^jours  le  même  i  nous  oouvriront  de  nos  corps ,  s'il  le 
fliut,  les  magasins,  et  l'on  n'y  parviendra  qu'aprèa  avoir 
musé  sur  nos  cadavres^  ....,.* 

«  Recevez  notre  serment,  rendei»le  public  «  afin  de  dé- 
truire les  espérances  des  roalvcillaots.  • 

Prlbt,  au  nom  du  comité  de  salut  public*  Voici  des 
lettres  que  le  comité  m'a  chargé  de  vous  lire  ;  elles  annon- 
ccut  la  continuité  de  nos  succès  dans  la  Hollande. 

Les  rqrréuniantt  du  peuple  pré$  U$  armées  eu  Nord  et 
de  Sambre-et'Mcute  à  leun  eolléfue$  du  comité  d$ 
êalut  public. 

«  Depuis  la  lettre  que  nous  voos  avona  adressée  le  S  de 
re  mois,  chers  collè({ues,  les  mouvements  politiques  et  ré- 
volutionnaires que  l'invasion  de  la  Hollande  a  occaseonnés 
ont  pris  une  consistance  tous  les  jours  plus  solide  et  plus 
importante  :  ils  semblaient  d'abtH-d  se  borner  é  une  régé- 
nération municipale;  mais  ils  se  sont  successivement  éten* 
dus  jusqu'aux  états  particuliers  des  provinces  «  et  ceux  de 
Hollande  sont  aujourd'hui  recompoiiéa*  Les  hommes  que 
le  des|)Olisme  prussien  y  avait  établis  contre  la  volonté  na* 
tionale  et  par  la  force  des  armes  sont  rappelés  et  rempla- 
cés par  des  palriotet  énergiqnea  et  prudents  ;  aucune  vio- 
lence, aucun  tumulte  n'accompagnent  ce  changement,  et 
la  divenOté  d'opinions  ne  se  manifeste  que  par  la  confiance 
accordée  ou  retirée  aux  différenU  fonctionnaires  publica, 

-  La  régénération  du  oorps  des  étata  de  Hoilaude  est  de 
la  plus  grande  importance  :  cette  province,  la  plus  consi- 
dérable de  toutes  ;celles qni  forment  l'Union,  puisqu'elle 
aeule  équivaut  aut  da«i  tkn  daa  PravîMHpUuics,  a  ima 


influence  pro|)orUonDée  dans  les  aOTah-es politiques  de  cette 
république  ;  presque  tous  les  ports  en  dépendent  «  et  sa  dé- 
termination dans  la  révolution  actuelle  entraîne  nécessai- 
rement celle  de  ces  autres  provinces  indéuendanles. 

«  Aujourd'hui  de  nouveanx  députés  de  cette  province 
font  leur  entrée  atu  états  géuéraux  :  ainsi,  ce  corps  sera,' 
sous  peu  de  jours,  entièrement  ou  du  moins  en  grande 

ertie  renouvelé ,  et  la  république  française  pourra  jeter 
I  premiers  fondements  d'une  union  solide  et  Inaltérable 
avec  la  nation  hollandaise. 

•  Les  hommes  qui  composent  lea  nouvelles  antorTiés 
étaient,  pour  la  plupart,  en  place  avant  l'invasion  des 
Prussiens,  et  ils  n'ont  fiiit  que  rentrer  dans  des  fonctions 
qui  leur  avaient  été  déléguées  suivant  l'ordre  légal  de  leur 
constitution  :  ils  ont  tous  les  caractères  de  légitimité  qui 
«panquenl  aux  créatures  de  la  Prusse  et  du  statliouder. 

à  Cette  assemblée  est  présidée  par  le  citoyen  Pierre  Pan- 
lus,  ancien  ministre  de  la  marine,  chaud  patriote ,  deati- 
tué  lors  de  l'invasion  des  Prussiens,  et  qui  réunit  à  une 
connaissance  pratique  des  ressources  maritimes  de  son 

Says  l'habitude  des  relations  politiques  avec  les  pulssanoea 
e  l'Europe. 

«  Ses  collaborateurs,  comme  loi  très-exercés  aux  gran- 
des affaires ,  nous  paraissent  également  capables  de  tra- 
vailler avec  frnit  à  unir  les  intérêts  des  deux  peuples,  et  à 
•aeonder  puissamment  les  eflforta  communs  que  nous  de- 
vons tenter  contre  l'Angleterre. 

fl  Leur  intention  est  de  mettre  de  côté  tontes  questions 
qui  tendraient  à  altérer  leuroonstitution  présente  (^auf  le 
atathoudérat  qu'ils  rejettent)  jusqu'à  ce  quedestemj)s  plus 
tranquilles  permettent  au  peuple  balave  de  fixer  son  at^eo* 
tlon  sur  cette  malien,  et  de  faire  les  réfonnea  qui  loi  pa- 
raîtront convenables. 

«  Les  pouvoirs  accordés  aux  députés  envoyés  ft  Paris 
pour  négocier  un  arrangement  vont  disparaître  avec  le  ré- 
gime de  1787 1  et  bientôt  ils  seront  auprès  de  vous  sans  ca- 
nctcrab 

fl  Noos  voos  annonçona  eneora  que  nous  avons  fliit  aux 
états  généraux  «ne  demande  proviaoira  en  grains ,  fourra- 
gea, paille,  habits,  souliera,  etc.,  pour  étra  versés  sur  les 
points  de  Nimègue,  Tiel  et  Bois-le-Duc,  et  servir  aux  be- 
soina  des  armées  du  Nord  et  de  Sambre-el-Meuse. 

•  D'immenses  magasins  appartenant  aux  Anglais  sont  à 
notre  disposition.  On  va  s'occuper  à  en  dresser  des  inven- 
taires. Nous  croyons  que  ces  magasins  seront  utilement 
consacrés  à  l'approvisionnement  des  places  fortes  que  nous 
occupions,  et  qui  sont  toutes  plus  ou  moins  dépourvues. 

«  ILes  Danois  et  les  Américains  nous  ont  donné  une 

preuve  de  leur  exactitude  à  conserver  la  neutralité  en  refti- 

santdc  passer  à  lord  de  leurs  navires,  do  côté  du  Texel, 

des  émigrés  français  qui  fuyaient  l'approche  de  nos  troupes* 

«  Signé  ALQUiaa ,  DaLLECàBoa,  Joudp.rt  ,  J.-B. 

Lacostb,  Paécina,  Haussmarn  ^  Rocsbjot.  a 

{La  tuite  demain*)' 


N.  B.  Dans  la  séance  du  SO  pluviôse,  Charlier  a'«t 
plaint  de  ce  qn'on  n'avait  point  imprimé,  à  la  suite  du  rap- 
port sur  les  pièces  trouvées  cbes  Robespierre,  la  dénoncia- 
tion qui  avait  été  faite  à  ce  conspirateur  contre  les  mem- 
bres du  comité  de  l'examen  des  marchés ,  parce  qu'ils 
poursuivaient  des  fripons  qui  lui  étaient  dévoués.  Il  a  de- 
mandé que  toutes  les  pièces  trouvées  sous  les  scellés  des 
triumvirs  et  de  leurs  complices  fussent  Imprimées. 

Cette  proposition  a  donné  lieu  à  une  discnsftion  qui  a 
tenu  toute  la  séance,  et  à  la  suite  de  laquelle  la  Convon- 
tlon  a  décrété  que  toutes  lea  lettres  des  représentants  du 
peuple,  et  les  pièces  y  relatives,  qui  avaient  Hé  trouvées 
tons  ces  scellés,  seraient  imprimées. 


Payemend  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  do  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  première 
mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs  d'inscrip* 
doos  au  grand  livre.  Celui  pour  le»  rentes  viagères  est  da 
iMiU  mois  vingt  et  uj  jfmn  de  l'année  1793  (vieux  atyl^ 


GAZETTE  NATIONALE  oc  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N**  161.  Primidi  1er  Ventôse,  l'an  8«.  {Jeudi  19  Févribr  1795,  rietwc  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

thuseldorf^  U 1*'  février,  —  La  garnison  de  celte  ville 
Ifient  (te  recevoir  un  renfort.  On  a  marqué  des  logcmeuls 
pour  un  grand  nombre  de  nouvelles  troupes. 

Les  sentinelles  respectives  sont  posées  à  quarante  pus 
les  unes  des  autres. 

*-  Depuis  l*invQ8ion  totale  de  11  Hollande  et  l'expolslon 
des  alliés,  le  quartier  général  d*Aivinu  a  été  transporté  de 
Seveoaêr  à  Hérensberg. 

—  On  a  emmené  beaucoup  de  bagages  «  dVtiUerle  et 
dVOets  de  ciimpemeut  du  c6ié  de  Boslem*  Les  niagasins 
de  DoêsiMurg  y  seront  aussi  transportés* 

—  Le  général  Davidovicb  s*esi  mis  en  marche  pour  aller 
camper  au  poste  de  Pandern  avec  cinq  mille  bommes. 

—  Le  quartier  général  de  Ciairrayt  a  quilté  MulUeim 
pour  s*élablir  à  Mecrlieini. 

—  Les  régiments  wallons  ont  eu  ordre  de  quitter  leur^ 
quartiers  d'hiver  et  de  se  rapprocher  du  Bhln. 

—  Les  républicains  ont,  sur  toute  la  rive  du  fleuve, 
cék'bré,  par  de  longues  décharges  d*artilleriei  Fanniver- 
saire  du  21  janvier. 

—  L*arnée  anghiise»  après  sa  dérouta,  •  laissé  quel- 
que temps  son  quartier  général  à  Deventer. 

—  L'armée  autrichienne  s'étend  le  long  de  ITssel  jus- 
qu'à Doësbourg.  Le  général  Sporeck  commande  la  brigade 
de  Taile  droite  ;  la  brigade  du  générai  Welseli  s'étend 
jusqu'à  Pandern;  le  général  Finck  couvre  avec  une  furie 
division  les  postes  depuis  Pandern  jusqu'à  Lobilb.  Le 
pays  qui  se  trouve  entre  Spick  et  Emmerick  est  occupé  par 
les  troupes  aux  ordres  du  général  Borros. 

—  Les'Anglais  emportent  une  telle  réputation,  que  les 
habitants  des  lieui  où  ils  paasenl  alarment  pour  piïveoir 
les  pillages  et  les  meurtres. 

HOLLANDE. 

Extrait  aune  lettre  de  ha  Haye,  du  10  février,  — 
8  Nos  représentants  redoublent  chaque  four  de  Éèlé  et 
dVfforts  pour  sauver  la  chose  publique.  Affaires  militaires, 
mesures  de  finances,  de  sûreté  générale,  rien  en  un  mot 
n'esi  oublié  pour  réparer  les  maux  effrayants  dont  l'admis 
nistration  précédente,  qui  veillait  mieux  aux  intérêts  de 
l'Angleterre  qu'à  ceux  de  la  Hollande,  a  accablé  la  patrie. 

c  L*épuisemt'nt  des  denrées  de  toute  espèce,  causé  par 
le  séjour  des  armées  coalisées  sur  notre  territoire  a  obligé 
les  représentants  de  Hollande  à  proposer  aux  états  géné- 
raux de  suspendre  provisoirement  toute  peiception  de 
droits  sur  les  farines,  froment  et  autres  grains  importés 
de  l'étranger,  ainsi  que  sur  le  gros  et  menu  bétaiL 

8  Ils  ont  aussi  demandé  aux  ci-devant  états  généraux 
que  le  conseil  d'Etat  de  TtJnion  fût  tenu  de  donner  un 
état  fidèle  de  la  situation  des  caisses  de  TUnion  et  de  la 
généralité,  ainsi  qu'une  liste  détaillée  des  vaisseaux  de 
guerre  en  état  de  servir  et  qui  pourront  mettre  en  mer  au 
printemps  prochain. 

•  Ils  demandent  encore  un  compte  exact  des  faisseaux 
ou  Irégatcs  à  qui  il  a  été  ordonné  de  mettre  à  la  voile  pour 
escorter  le  staihouder,  sa  femme  et  ses  enfants,  lors  de 
leur  fuite  précipitée  en  Angleterre. 

«  L'amiral  Van  KinsbergeU,  connu  par  son  attachement 
au  parti  du  siathouder,  vient  de  donner  sa  démission  ;  sa 
demander  été  ajournée. 

«  L'assemblée  des  représentants  provisoires  se  renforce 
et  augmente  totis  les  jours.  Toutes  les  villes,  ancienne* 
tnent  connues  sous  le  nom  de  votantes,  et  qni  étaient  au 
nombre  de  dix-huit,  y  ont  envoyé  leurs  députés^  ù  Teicep* 
tion  de  la  petite  ville  de  firielle. 

•  Plusieurs  cantons  du  plat  pays,  qui  n'a  jamab  été 
représenté  à  i*asscmblée  des  états,  viennent  d'y  envoyer 
des  députés,  qui  ont  pris  séance  aux  acclamations  uuiver- 
selles,  ce  qui  prouve  que  Partstocralie  ancienne  des  villes 
0  fait  |>lace  à  des  principes  plus  sages  et  plus  équitables 

•  De  ce  nombre  sont  les  quartiers  si  riches  et  si  |)eoplés 
de  la  Hollande  septentrionale  qui  bordent  la  rivière  le 
Zuuu ,  connus  sous  le  nom  d*Ost*ZianeD  et  Wcst^ZaanfU. 

Z*  Série.  ^  TpmeX. 


m  La  Haye,  qui,  contenant  plus  de  quarante  mille  âmes, 
n^avait  pas  la  moindre  influence  dans  l'assemblée  des  états, 
a  également  envoyé  à  celte  assemblée  régénérée  quatre 
députés,  à  la  tête  desquels  est  le  brave  Van  Eck,  beau- 
frère  de  Paulus. 

t  II  a  été  décrété  de  faire  imprimer  Tétat  de^  caisses 
publiques  de  la  Hollande  et  du  pays  de  la  généralité,  ainsi 
que  l'emploi  que  l'administration  précédente  en  a  fait. 

«  Le  comité  (liollandsis)  de  salut  publie  vient  d'Inviter, 
par  une  circulaire  envoyée  à  toutes  lai  communes  de  Hol- 
lande, tous  les  bons  citoyens  à  donner  une  ou  plusieurs 
cbcmises,  afin  d'accélérer  la  livraison  des  deux  oentmiUo 
demandées  pour  le  service  des  armées  françaises» 

•  Dans  plusieurs  endroits  des  Sociétés  de  citoyenne!  IC 
sont  spontanément  formées  pour  y  travailler* 

-  Les  chargés  d'affaires  de  la  Hussie  et  de  la  t'russOf 
Novekoffet  Bielefeld ,  ainsi  que  le  citoyen  John  Adams, 
ministre  plénipotentiaire  des  BlatS^Unis,  ont  tenu  des 
conférences  avec  le  citoyen  Paulus,  président  de  Ta 
blée  des  représentants  provisoires  de  Hollande.  • 


CONVENTION    NATIONALE. 

Suile  du  rapport  fait,  au  nom  de  la  commieiioh 
ekargêe  de  Veœamen  de$  papien  troutéê  chet 
Robeipierre  et  sescùmpUcee,  par  K.-H.  Courtoîe, 
député  du  déparlement  de  VAubei  dan$  la  séance 
du  10  nivoée,  an  S  de  la  république  frànpaisei 
une  et  indivisible. 

Trois  traits  bien  distincts  ressorteni  ie»  papien 
de  la  conspiration  :  ^ 

Crimes  de  Robespierre  ; 

Crimes  des  meneurs  des  comités  de  goorenic- 
ment; 

Crimes  des  agents  des  comités  et  des  agents  de  B/y- 
bespierrc. 

Rol)espierre  établit  la  tyrannie  pour  lui-même;  il 
veut  Texercer  sous  un  titre  qu'il  se  choisira^ 

Les  meneurs  des  comités  favorisent  la  tyrannie  de 
Robespierre,  parce  qu*elle  fonde  la  leur;  ce  n'est jms 
pour  1  exercer  isolément  ,^  ni  au  même  titre  que  Ro- 
bespierre; c^estpour  réaliser  leur  chimère,  qui  était 
le  nivellement,  la  sanscuLttisation  générale,  par 
Textinction  des  richesses  et  la  ruine  du  commerce. 
'  Je  ne  dresse  ici  Tacte  d'accusation  de  personne^  Je 
dois  nn  compte  et  je  le  rends. 

Ainsi  :  crimes  des  gouvernants; 

Infortune  et  misère  des  gouverna. 

Preuve  de  la  double  conspiration  ;  ^ 

Elles  résultent  tant  des  propres  écrits  des  oonipî- 
ra leurs  que  de  ceux  de  leurs  agents. 

Moyens  de  succès  communs,  directs  ou  éloignés. 

Moyens  de  succès  directs  :  Tordre  donné ,  et  exé- 
cuté en  partie,  dVxtcrminer  les  artistes  ,  les  riches, 
les  hommes  éclairés ,  tout  ce  qui  portait  le  titre  de 
négociant.  On  appelait  leurs  propriétés  propriétés 
du  peuple ,  on  disait  que  le  négociantisme,  (mot 
créé  pour  créer  un  ''rime)  était  pire  que  le  roy^ 
lisme,  etc. 

Moyens  éloignés  :  tous  moyens  de  désorganisa* 
tion;  maximum,  réquisitions,  plaintes  d'accapare- 
ments ;  promenades  d*armées  révolutionnaires  et  de 
Suillotines  ;  gouffre  asphaltite  de  la  Vendée,  rouvert 
es  qu'il  menaçait  de  se  refermer  ;  organisation  d'in- 
discipline dans  les  armées,  prouvée^  entre  autres* 
par  une  lettre  de  Tex-ministre  Boucbote  à  Robes- 
pierre ,  dans  laquelle  il  avoue ,  comme  chargé  par 
les  comités  de  1  envoi  des  Journaux,  avoir  fait  pas- 
ser dans  les  armées  la  (euifle  du  Père  Duchesne^  le 
Journal  det  hommes  libres ^  le  Journaluniversel^eic* 

61 


482 


•  Le  but  de  cet  enrot,  dit-il ,  ëtait  dVmpêcher  les 
soldats  de  s>ngouer  des  généraux.  • 

Cést-à-dire,  pour  parler  sans  parabole,  que  le  but 
était  de  les  felever  du  serment  d'obéissance. 

La  lettre  de  Bouchote  est  soutenue  ,  en  effet,  par 
Tarrété  du  comité  de  salut  public,  relatif  à  ces  jour- 
naux, dont  renvoi  est  conOé  aux  commissaires  des 
administrations  civiles,  de  police  et  des  tribunaux  ; 
les  dépenses  prises  sur  les  fonds  de  la  commission  ; 
le  papier  fourni  par  celle  du  commerce,  et  le  paye- 
ment fait  d'avance,  en  partie,  le  primidi  de  cnaque 
décade»  par  la  trésorerie  nationale. 

Le  plan  et  les  moyens  de  la  double  conspiratioo 
sont  les  mêmes;  le  but  est  différent. 

Forme  de  décemvirat  à  établir  d'un  côté  ; 

Forme  de  royalisme  de  l'autre. 

L'intelligence  n'a  cessé  entre  les  deux  partis,  pour 
rexécution  des  moyens,  qu'au  moment  ou  ils  se  sont 
vus  dupes  l'un  de  l'autre,  à  l'approche  du  but. 

Plan  des  déeemvirê. 

Se  créer  une  puissance  collective,  et,  pour  colorer 
aux  yeux  du  peuple  cet  envahissement  de  sa  souve- 
raineté, feindre  de  ne  s'en  emparer  que  pour  lui  ;  ca- 
resser  les  sans-culottes,  et,  pour  proscrire  la  richesse 
qui  est  un  obstacle  au  nivellement,  proclamer  que  le 
riche  est  l'ennemi  né  du  sans-culottes;  promener 
sur  toutes  les  télés  le  niveau  d'une  égalité  de  pau- 
vreté; le  commerce,  dans  l'intérieur,  devant  néces- 
siter à  l'extérieur  des  relations  qui  seraient  fatales  à 
ce  plan  nouveau  de  gouvernement,  anéantir  le  com- 
merce. 

Mais  vingt-cinq  millions  d'hommes  à  nourrir  sur 
ce  continent,  sans  la  ressource  des  étrangers!  im- 
possible. Que  faire  donc?  ce  qu'on  proposait  de  faire 
des  livres. 

•  S'il  n'y  avait  pas  sur  la  terre  des  époques  répé- 
tées de  grands  incendies,  elle  ne  serait  bientôt  plus, 
disait-on,  qu'un  monde  de  papier  (1^.  •  Empêcher 
que  la  France  ne  devienne  un  monde  d'hommes;  ou- 
vrir, en  conséquence,  pour  la  sauver  de  ce  danser, 
si  ce  n*est  les  cataractes  du  ciel,  au  moinscellt  s  de  la 
terre,  ou  faire  pleuvoir  un  déluge  de  feu  sur  ceux 
qui  auraient  échappé  aux  inondations  des  soupapes. 

Tel  fut  le  système  de  ruine  universelle  imaginé 
pour  couvrir  la  France  des  ossements  d'une  moitié 
peut-être  de  ses  habitants. 

Je  n'ai  rien  dit  là  que  de  trop  réel,  citoyens  ;  et  la 
lecture  que  je  vous  ferai  bientôt  de  quelques  pièces 
importantes,  vous  en  offrira  la  preuve. 

11  est  des  crimes  qui  sont  communs  aux  membres 
des  comités  et  communs  à  Robespierre  ;  crimes  dont 
nous  renvoyons  les  détails  à  l'article  de  leurs  agents. 

Telle  est,d'un  côté,  l'organisation  de  l'espionnage 
exercé  sur  les  citoyens,  surtout  sur  les  députés.  Les 
preuves  sont  dans  les  rapports  de  nombreux  agents 
de  surveillance,  qui  poursuivaient  les  représentants 
du  peuple  jusque  dans  les  lieux  les  pfus  secrets. 
Leurs  habitudes,  l'heure  de  leur  travail,  de  leurs  re- 
)as,  leurs  marches,  leurs  sociétés,  leurs  paroles, 
eur  silence,  leurs  gestes,  tout  est  observé,  retenu, 
annoté  par  la  meute  exploratrice,  fidèle  à  rendre 
compte  de  ses  courses  quotidiennes  à  ceux  qui  la 
lancent. 

D'un  autre  côté,  l'emploi  scrupuleux  des  mesures 
désorganisa  triées  suggérées  par  la  perfidie  et  la  scé- 
lératesse des  agents  ;  l'accueil  fait  aux  dénonciations 
contre  la  vertu,  le  talent  et  la  probité;  et  le  mépris, 
«u  contraire,  des  conseils  ssiges,  des  vues  utiles  à  la 
patrie,  et  des  dénonciations  contre  les  excès ,  l'op- 
pression et  le  crime. 

L'homme  ignorant ,  l'homme  corrompu ,  élevé 
aux  places;  rhomme  probe,  l'homme  instruit,  ou  re- 

(I)  Eipressiou  de  Barère,  citée  par  Vilate.  A.  U. 


le 


poussé  comme  dangereux,  ou,  comme  contre-ré vo» 
tutionnaire,  conduit  au  supplice  :  les  notes  tracées 
par  Robespierre/approuvces  et  suivies  par  les  comi- 
tés, en  sont  la  double  preuve;  ces  notes  où  le  tyran 
inventoriait  les  hommes  (1);  les  Dumas,  les  Fleu- 
riot,  les  Payan,  les  Coftînhal,  les  Nicolas  y  sont  dési- 
gnés sous  les  titres  de  bons  patriotes ,  patriotes  pro» 
noneés^  chauds  patriotes,  patriotes  ayant  de,  la  télé 
et  du  cœur.  Ceux  qui  sont  notés  comme  ennemis  pu- 
blics  sont  tous  ceux  qui  précisément,  et  de  concert 
avec  les  vrais  patriotes  d'aujourd'hui,  les  sincères 
amis  de  l'humanité,  travaillent  au  rétablissement  de 
la  république,  et  versent  le  baume  des  consolations 
et  de  l'espoir  sur  les  plaies  de  la  patrie  et  dans  les 
cœurs  malades  et  déchirés  de  leurs  frères. 

En  cent  endroits  de  la  correspondance,  des  avis 
utiles  qu'on  eût  dû  suivre;  en  cent  autres,  des  con- 
seils de  verser  le  sang,  qu'on  a  trop  suivis. 

L'espionnage  a  fait  toute  la  force  de  Robespierre  et 
des  comités,  puisqu'il  mettait  dans  leurs  mains  i<s 
secrets  des  citoyens  ;  en  cela  il  servit  aussi  à  alimen- 
ter leurs  fureurs  par  la  connaissance  qu'il  donnait 
à  Robespierre  des  projets  vrais  ou  supposés  de  ceux 
qui  méditaient  sa  perte,  par  celle  au  il  donnait  aux 
comités  du  mécontentement  général. 

C'est  à  l'aide  de  cet  espionnage,  exercé  jusque  dans 
les  prisons,  qu'ils  ont  organisera  terreur  ;  et  ils  cou- 
raient ,  nppuyés  sur  cette  Gorgone,  vers  ce  fantôme 
de  nivellement  dont  nous  avons  parlé. 

La  confusion  des  idées,  plus  dangereuse  sansdoute 
que  la  confusion  des  langues,  fut  introduite.  Des 
représentants,  plus  dignes  de  figurer  dans  rancienne 
Babel  que  dans  le  sénat  français,  prêchèrent  la  dé- 
fiance contre  les  hommes  éclairés,  et  appelèrent  ceux 
3ui  faisaient  profession  de  lumières  l'espèce  la  plus 
angereuse  de  la  république  (2).  En  vain  les  bonsci- 
toyens  réclamaient;  en  vain  ils  écrivaient  que  •  Né- 
ron ,  Tibère  ,  Caligula  ,  Auguste ,  Antoine  ,  Lépide , 
n'avaient  jamais,  dans  leurs  fureurs,  imagine  rien 
de  si  hon'ible  que  ce  qui  se  passait.  •  En  vain  de- 
mandaient-ils «  si  l'on  était  frappé  de  vertige,  ou  si 
l'on  voulait  aller  à  la  contre-révolution  par  les  ex- 
cès.» Inutiles,  infructueuses  réclamationsauxquelles 
on  ne  répondait  qu'en  redoublant  d'excès  encore  ! 

Nos  tyrans,  par  une  longue  habitude  de  cruauté, 
s''étaient  depuis  longtemps  formé  un  calus  sur  le 
cœur.  On  les  avait  vus  autrefois,  en  outrageant  la 
justice  et  l'humanité,  sauver  les  dehors.  Ils  voulaient 
bien  n'avoir  pas  la  réalité  des  vertus,  mais  ils  en  af- 
fectaient l'apparence  ;  et,  il  faut  le  dire,  cette  dissi- 
simulation  était  au  moins  un  tribut  qu'ils  leur 
payaient  publiquement;  le  soin  de  cacher  ses  vices 
prouve  encore  chez  l'homme  quelque  estime  pour 
ses  semblables  :  mais  bientôt,  plus  de  frein  qui  les 
arrête;  il  leur  faut  du  saujg,  et  ils  repoussent  une 
sorte  de  respect  humain  qui  voudrait  encore  arrêter 
leurs  bras  prêts  à  le  verser. 

C'est  ici  l'époque  de  la  construction  de  ces  bas- 
tilles sans  nombre  qui,  pendant  si  longtemps,  ont 
attristé  les  yeux  des  vrais  amis  de  la  liberté  ;  de  ces 
bastillesen  quoi  s'étaient  transformées  nos  pjus  belles 
maisons  d'éducation  (3),  et  que  Ton  avait  osé  placer 
jusque  sous  les  murs  même  du  Panthéon.  C'est  l'é- 
poque de  ces  barbaries  de  toute  espèce ,  inventées 
pour  tourmenter  encore  les  infortunés  amoncelés 
dans  ces  horribles  demeures  ;  barbaries  que  l'atro- 

(1)  Expression  de  Robespierre,  tirée  d*aD  agenda  ou  li- 
vret sur  lequel  il  jetait  ses  pensées.  A.  M. 
(S)  Expressions  de  Robespierre  dans  son  catéchism«. 

(3)  Les  ci-derant  collèges  des  Qualre-Nations,  do  Plessi^ 

de  Mootaigu.  Il  est  bon  d*obsenrer  que,  même  depuis  la 

9  thermidor,  on  a  continue  les  travaux  commences  dans  quel* 

i   ques-unosde  ces  prisons.  Espcrail-on  rétablir  le  régime  bar- 

I   barc  que  l'on  venait  d*abolir  en  frappant  le  tyran?  A,  M. 


483 


cite  de  nos  tyrans ,  trop  bien  secondés  par  leurs  mi- 
nistres servi  les,  étendait  jusqu'à  nos  collègues,  dont 
ils  rtMgnaicutdc  méconnaître  le  caractère  pour  mieux 
ravilir(l). 

Eli  !  se  bornaient-ils  à  créer  des  cachots  dans  leur 
toute-puissance? se  contentaient-ils  d'y  plonger  leurs 
victimes  et  de  les  y  abreuver  d'humiliations  et  de 
tourments?  Non,  citoyens  ;  habiles  à  rafUner  la  ter- 
reur, ils  se  faisaient  un  jeu  de  présenter  sans  cesse 
a  leurs  captifs  Tépée  de  Dainoclès ,  qu'ils  n'aperce- 
vaient cas  suspendue  sur  leur  propre  tête,  ils  ai- 
maient à  leur  faire  éprouver  les  préludes  des  sup- 
plices, à  leur  faire  entendre  le  bruit  du  char  de  la 
mort,  que  ces  malheureux  appelaient  la  bière  des  vi- 
vants; à  leur  montrer  la  guillotine,  comme  l'unique 
porte  de  leur  prisons;  et,  comme  terme  de  leur  cap- 
tivité, la  mort,  dont  ils  se  plaisaient  à  leur  faire 
souffrir  la  longue  a(;onie. 

Enfin,  ils  exécutaient  ce  qu'ils  leur  faisaient  crain- 
dre; ils  la  leur  donnaient,  la  mort,  et  par  elle  ils 
jetaient  l'épouvante  dans  toute  la  république. 

Il  vous  en  souvient,  citoyens,  et  longtemps  votre 
mémoire  tardera  ce  douloureux  sbuvenir;  il  vous 
souvient  de  ces  jours  d'horreur  où  non-seulement 
la  haine  et  la  vengeance  désignaient  les  victimes, 
mais  où  se  réalisait ,  sous  nos  yeux,  ce  que  nous 
avions  peine  à  croire  des  tyrans  de  l'ancienne  Rome, 
quoique  attesté  par  Suétone  (2)  ;  où  périssaient  des 
milliers  de  citoyens ,  d'après  des  listes  émargées 
en  caractères  hiéroglyphiques ,  par  le  chef  des  ty- 
rnns,  ou  signées  par  ses  complices,  et  confiées  à  ses 
trop  fidèles  bourreaux  dont  ils  avaient  composé  leur 
tribunal  révolutionnaire,  et  au  milieu  desquels  «ils 
marcheraient  volontiers,  comme  le  disait  SaintJust, 
les  pieds  dans  le  sang  et  dans  les  larmes  {3),  •  Vous 
les  av.ez  vues  ces  charrettes  encombrées  a  nommes, 
de  femmes  de  tout  âge,  qui ,  sans  s'être  jamais  con- 
nus, même  de  nom,  étaient  condamnés  et  périssaient 
ensemble.  Vous  avez  vu  conduire  au  même  écha- 
faud,  le  même  jour,  et  la  vieillesse  privée  des  sens 
qui  lui  eussent  été  nécessaires  pour  être  coupable , 
et  la  jeunesse  incapable  encore  de  l'être. 

Hommes  sensibles,  on  vous  traitait  d'aptloyeiir^, 
quand  les  derniers  cris  de  tant  de  mourants,  quand 
les  dernières  plaintes  de  l'innocence  égorgée  avec  le 
crime  appelaient  vos  soupirs!  Non,  les  tyrans  ne 
vous  permettaient  pas  même  de  rougir  pour  eux  :  la 
moinare  émotion  que  vous  eût  causée  ce  carnage 
journalier  eût  été  le  signal  de  votre  proscription  ; 
votre  sensibilité  eût  été  transformée  en  modéran- 
tisme^  et  votre  perte  eût  été  jurée  :  oui,  elle  eût  été 
jurée  ;  l'homme  sensible  est  un  monstre  aux  yeux  de 
l'homme  barbare  :  sa  présence  est  un  reproche  vi- 
vant; son  existence  lui  devient  inutile,  puisqu'il 
n'en  peut  faire  un  complice;  sous  le  régime  du  sang, 
il  doit  donc  être  frappé  de  la  mort  (4).  • 

(<)  Les  administratears  de  police  de  la  commune  conspi- 
ratrice ont  transféré  quelques-uns  des  députés  détenus,  d*une 
prison  i  Tautre,  en  plein  jour,  dans  des  chariots  découTerts. 
On  les  traitait  dans  ces  prisons  avec  mépris  et  férocité.  Qutl- 
nue^uns  des  geôliers  ont  été  jusqu^à  les  menacer  de  coups 
Je  nerf  de  boeuf.  J'en  «ppeUe,  sur  ces  faits,  a  leur  propre 
témoignage.  A.  M. 

[%)  DecimA  quoque  die  numtrum  puniendorum  ex  custo^ 
dià  suscribetu,  rationem  se  purgare  dicebat.  (Suétone ,  Vie 
de  Caliguia.) 

«  De  dix  en  dix  jours ,  il  signait  les  s«ptences  de  mort 
contre  tous  ceux  qui  étaient  dctenus  dans  les  prisons  :  c*é- 
tait  ce  qu'il  appelait  purger  son  livre  de  compte,  >    A.  M. 

(3)  Espression  de  Saint-Just,  écrite  de  sa  maio,  dans  une 
Dote  sur  papier  volant,  trouvée  ches  lui.  A.  M. 

(4)  Quand  les  tvrans  ne  frappaient  point  de  nort,  ils 
Bvikient  recours  \  la  déportation.  \\%  la  faisaient  prononcer 
par  les  commissions  populaires  qn*ib  avaient  organisées,  corn* 
posées  d*lioiiiiDef  affidlés.  lise»  t^prfUvaicDt  tot  jugenenu, 


Mais,  comme  si  la  faux  de  la  guillotine  eût  été 
trop  lente  à  moissonner  df  s  existences  regardées  par 
les  niveleurs  comme  une  superfluité  sur  Te  sol  de  la 
république,  il  semble  qu'ils  aient  voulu  mettre  en 
réquisition  tous  les  fléaux  ;  et  ils  ont  organisé  la  &• 
mine  comme  un  des  fruits  de  la  terreur. 

Dans  un  moment  pressant  de  disette ,  des  négo- 
ciants américains  proposent  au  comité  de  salut  pu- 
blic cent  mille  barils  de  farine  contenant  dix-buit 
millions  de  livres.  Les  conditions  sont  simples  : 

•  Ils  se  chargent  de  l'achat;. 

«  Ils  fréteront  des  navires  neutres; 

•  lis  ne  demandent  aucune  somme  d'avance,  • 
Citoyens,  le  croirez-vous?  ces  propositions  furent 

rejetées  (1)! 

C'était  peu  de  détruire  et  les  arts,  et  l'industrie,  et 
le  commerce,  pour  rendre  au  néant  ce  qu'on  appe- 
lait un  superflu  depopulalion;i\  fallait  colorer,  aux 
yeux  du  peuple,  les  exécutions  sanguinaires.  L'inno- 
cence qu'on  assassinaitlui  futdonc  présentée  comme 
l'unique  cause  de  ses  maux,  et  l'aiguillon  du  besoin, 
qu'on  avait  créé  à  plaisir,  vint  justifier  le  prétexte. 

Dans  les  accès  de  cette  fièvre  morbilique  se  déclara 
l'éruption  soudaine  des  taxateurs  révolutionnaires, 
patentés  par  nos  inamovibles  pour  ruiner  les  fermiers 
et  affamer  la  république  ;  de  ces  vampires  qui,  cou- 
rant dans  les  marchés,  achetaient  à  vil  prix  les  den- 
rées pour  les  revendre  ensuite  à  ceux  qui  les  voulaient 
payer  au-dessus  du  maximum  ;  de  toutes  ces  com- 
missions enfin,  éparpillées  sur  le  sol  français,  comme 
autant,sijepuisledire,decavernesàlaGil-Blas,pour 
dépouiller  et  mettre  à  nu  ses  habitants,  et  qui  inti- 
maient à  une  malheureuse  veuve  l'ordre  atroce  de 
verser,  dans  trois  heures,  une  somme  de  3,000  livres 
sous  peine  d'être  traitée  révolutionnairement. 

Cette  époque  de  la  confusion  des  idées  fut,  comme 
vous  Icvoyez,  celle  de  ta  confusion  des  sentiments. 
Voilà  l'un  des  plus  grands  crimes  des  tyrans,  c'est 
d'avoir  corrompu  la  morale  publique.  Eh  !  dans  quel 
temps,  en  effet,  la  liberté  d'un  peuple  est-elle  plus 
exposée  qu'à  l'époque  où ,  pour  parvenir  aux  em- 
plois et  aux  honneurs,  il  faut,  si  1  on  n'est  pas  cor- 
rompu, avoir  soin  de  le  paraître;  où  Ton  accorde  à 
l'audace  sans  talents  des  primes  qne  n'obtient  pas  le 
mérite  timide  ;  où  il  est  honteux ,  en  quelque  sorte* 
«t  presque  toujours  dangereux  d'avoir  des  vertus; 
dans  un  temps  où  la  pudeur  du  langage,  comme  celle 
de  l'âme,  est  impunément  violée  ;  où  l'on  fait  parade 
d'une  nudité  dégoûtante  d'expressions;  où  un  con- 
spirateur, appelé  le  régénérateur  de  V  Alsace  parce 
qu'ils  la  plonge  dans  un  bain  de  sang ,  est  (dit-on) 
un  maUre  bougre ,  •  dont  les  arrêtés  seront  un  des 
plus  beaux  monuments  historiques  de  la  révolu- 
tion; •  où  les  biens  des  guillotinés  ne  s'appellent 
plus  biens  nationaux,  mais  planche  aux  assignats^ 
comme  l'exécuteur  des  jugements  criminels  est  de- 
venu le  grand  monayeur  de  la  république;  dans  uo 
temps  enfin  où  il  est  des  artistes  assex  dégradés  pour 
buriner  sur  l'agate  le  signe  du  supplice,  trop  multi- 
plié dans  nos  places ,  et  des  yeux  assez  féroces  pour 

qu*ils  signaient  eosoita,  m  varietur,  •!  toxqiielt  ils  appo- 
saient le  seean  du  gouvernement.  A.  M. 

(1)  Le  fait  suivant ,  dont  j*ai  été  tdamiD ,  est  une  oonveUe 
preuve  i  ajouter  i  celle  citée  dans  ce  rapport.  Le  citoyen 
Sainte-James,  fils  de  Tancien  trésorier  de  la  marine,  se  pré- 
senta un  matin  ches  moi,  accompagné  d*un  négociant  amëri- 
4*ain  qui  désirait,  disait-il,  fournir  des  grains  I  la  républi- 
que. J'en  parlai  i  quelques  membres  du  comité  de  salut 
publie,  et  le  jour  même  j'y  introduisis  le  uérociant,  qui  fit 
des  offres  i  peu  près  semblables  i  celles  de  vrëgorie  et  Le> 
vinghton  ;  on  lui  dit  de  repasser  pour  savoir  la  décision  da 
comité.  11  s*y  présenta  quelques  jours  après,  et  fut  payé  da 
cette  réponse  évasive  :  «  Le  comité  ne  peut  accepter  voe 
offres;  il  est  décidé  à  ne  traiter  <|u*avec  le  gouvernement  dcf 
Euii-Uais.  •  A.  M. 


484 


M  pTaire  à  contempler  à  toule  heure  la  reproductioQ 
de  ce  signe  sous  Tempreinte  du  cachet  (l).  Tel  est 
le  sommaire  des  crimes  commis  en  communauté  par 
nos  tyrans  :  Tanalyse  des  pièces  vous  fera  connaître 
,ce  qui  appartient,  en  particulier,  à  chacun  d*un. 
'  Avant  de  passer  à  Texamen  du  plan  de  la  conspi- 
ration de  Robespierre,  je  crois  ,  citoyens,  qu'il  ne 
serait  pas  inutile  d'esquisser  quelques  traits  du  ca- 
ractère moral  et  politique  de  cet  homme  dont  la 
fortune,  après  un  siècle  de  philosophie.,  après  Vol- 
taire et  Rousseau ,  et  tous  ces  anges  précurseurs  de 
la  lumière,  doitparaltre  un  phénomène,  et  doit  con- 
fondre toutesles  idées  de  l'observateur.  Mais  Fétude 
du  monde  nous  apprend  qu*il  est  des  hommes  comme 
de  certaines  opinions.  Celui  qui  marque  le  plus  n*est 
pas  toujours  le  plus  méritant,  comme  Tidce  la  plus 
raisonnable  le  cède  souvent  à  la  plus  absurde. 

Qui  s*étonnera  encore  de  la  fortune  de  Robes- 
pierre, quand  il  la  rapprochera  de  celle  du  Père  Du- 
chesne^  et  de  tant  d'autres  qui  ne  valent  pas  mieux 
que  ce  dernier,  et  qui  ont  fait  trembler,  pendant  une 
année,  tout  ce  qu'il  y  a  d'hommes  respectables, 
d*hommes  à  talents,  d'hommes  vertueux  dans  ce 
pays!  Le  parti  des  Manichéens  ne  fut  puissant  que 
parce  qu'il  était  bien  ridicule.  Une  troupe  d'ignorants 
sbires  ne  ht-elle  pas  demander  pardon  au  célèbre 
Galilée?  Et  quelle  différence  entre  l'apocalyptique 
Jurieu,  qui  nt  périr  de  faim  l'immortel  Bayle,  et 
TapoNcalyptique  Saint-Just  guillotinant  le  pauvre 
Camille  !  lleureusement  le  temps  remet  à  leur  place 
tous  les  petits  hommes;  il  a  flétri  les  Jurieu  et  les 
sbires,  qui  nous  seraient  même  inconnus,  s'il  n'a* 
vait  pas  existé  de  Bayle  et  de  Galilée. 

C'est  de  l'égoîsme  que  Salluste  fait  nattre  la  soif  de 
la  domination.  Cette  soif  n'est  pas,  dans  son  origine, 
celle  du  rang  suprême  (  tout  est  graduel  dans 
rbomme);  elle  est  quelquefois  l'effet  d'un  mouve> 
ment  louable,  plus  souvent  celui  de  l'envie  :  elle  na- 
quit de  ce  vice  chez  Robespierre. 

Maximilien  fut  au  collège  ce  qu'il  fut  depuis  a  la 
Convention.  Enfant,  il  voulait  maîtriser  des  enfants; 
homme,  il  voulut  asservir  des  hommes.  Il  ne  vit  ja- 
mais, en  aucun  temps,  ses  semblables  dans  ses  ri- 
vaux ;  il  n'y  vit  que  des  ennemis  :  son  âme  étroite 
ne  sentit  point  les  élans  d'une  émulation  généreuse^ 
Tenvie  la  corroda  de  ses  feux  empoisonnés.  Un 
homme  grand  eût  chéri,  eût  esthné  le  rival  qui  l'ef- 
façait ;  pour  l'atteindre,  il  eût  doublé  le  pas  dans  la 
carrière ,  et  se  serait  consolé  par  l'admiration  de 
l'insuffisance  de  ses  efforts  :  aux  yeux  de  Maximilien , 
le  plus  impardonnable  des  crimes  était  d'être  au- 
dessus  de  lui.  Son  âme  ne  s'enflammait  point  devant 
le  génie,  elle  s'indignait  de  son  existence  ;  aussi 
Maximilien  n'a-t-il  laissé  vivre  ses  rivaux  que  tant 
qu'il  n'eut  point  la  puissance  de  les  tuer.  11  eûtcom- 
pose  avec  tous  ceux  qui  n'auraient  manqué  que  de 
patriotisme ,  jamais  avec  ceux  qui  eussent  manqué 
de  respect  à  son  talent.  Le  choix  qu'il  ht  de  Lava- 
lette  et  de  tant  d'autres  contre-révolutionnaires  en 
est  la  preuve.  Que  lui  faisait  qu'on  ignor.it  les  pre- 
miers devoirs  du  citoyen,  pourvu  qu'on  sût  par  cœur 
ses  oraisons  et  ses  rapports!  Que  lui  faisait,  pourvu 
que  l'on  se  montrât  son  admirateur,  qu'on  fut  l'en- 
nerni  de  la  patrie!  Il  eût  même  pardonné  qu'on  le 
haït  à  qui  eût  encensé  ses  talents  :  car  l'expérience 
nous  apprendqu'on  pardonne  la  haine,et  quel'on  ne 
pardonne  pas  le  mépris.  Le  gjrandprétre  Anitus  ne 
la  fût  point  ven^é  de  l'inimitié  de  Socrate  :  il  sut 
que  Socrate  le  méprisait,  il  lui  fit  boire  la  ciguë. 

Je  ne  dirai  pas  que  ce  fut  l'amour  de  la  gloire  qui 

(I)  Gâteau ,  Tauteur  de  plusieurs  leUres  i  Robespierre , 
avait  pour  cachet  une  guillotit^e ,  dont  Tempreinte  est  en« 
core  sur  la  cire  qui  scellait  une  de  ses  letUres.  Ce  Gateav 
^lait  employé  dans  les  tubsiitaocea  militaires.         A.  M. 


enflamma  Bobespîcnre,  car  cette  gloire  ne  fait  son* 
tir  son  aiguillon  qu'aux  grandes  âmes.  C'était  une 
anxiété,  un  désir  vague,  inquiet,  maisavide.de  do- 
mination et  de  renommée,  qui  le  dévorait.  S'il  a  dé- 
siré le  rang  suprême,  ce  ne  lut  pas  précisément  pour 
l'exercer  ;  il  se  serait  contenté,  je  crois,  du  titre  de 
premier  orateur,  s'il  n'avait  pas  eu,  sur  la  fin  de  sa 
vie  ,  besoin  de  la  puissance  a'un  roi  pour  échapper 
au  châtiment  des  crimes  qu'il  avait  commis  pour 
usurper  le  premier  titre.  Comparable  à  Sylla  par  ses 
cruautés,  bien  au-dessous  de  Sylla  par  son  génie,  il 
crut  se  perdre  en  suivant  la  route  qui  avait  sauvé  ce 
modèle  des  proscripteurs  ,  et  voulut  faire  au  salut 
de  ses  jours  le  sacrifice  de  sa  gloire.  Il  fut  trompé 
doublement; car  il  immola  sa  gloire  sans  sauver  ses 
jours.  Ce  fut  donc  par  peur  qu'il  eut  une  intempé* 
rance  d'ambition,  qui  finit  par  l'étouffer. 

Si  Robespierre  fût  né  avec  du  génie,  peut-être  vi- 
vrait-il encore.  Content  d'avoir  cru  faire  renaître 
chez  les  Français  l'éloquence  athénienne,  d'être  de- 
venu le  rival  de  Démosthènes  et  d'Eschiue ,  peut- 
être  ne  fût-il  pas  devenu  celui  de  Marius  et  de  Sylla. 
11  se  fit  tyran  par  impuissance  d'être  autre  chose. 
N'ayant  pu  disputer  de  talents  avec  les  premiers 
hommes  de  l'Assemblée  constituante,  et  voulant  à 
toute  force  être  remarqué,  il  se  distingua  d'eux  par 
la  singularité ,  ressource  ordinaire  des  charlatans 
de  tous  les  siècles.  11  affecta  le  stoïcisme,  et  se  lit  ré- 
publicain sous  la  monarchie,  comme  il  devint  depuis 
monarchiste  sous  le  gouvernement  républicain.  Sans 
doute  il  fit  quelques  dupes  (car  qui  n'en  fait  pas  !  )  ; 
Diogène  aussi  fit  des  dupes,  et  certes  Robespierre  ne 
valait  pas  le  cynique  de  Sinope,  qui  fit  envier  sa  mi* 
sère  au  conquérant  de  l'Asie. 

Quoique  nous  ayons  cité  Sylla  a  côté  de  Robes- 
pierre ,  cet  enfant  de  la  terreur  plus  que  celui  de  la 
fortune,  nous  sommes  loin  de  les  placer  tous  les  deux 
sur  la  même  ligne.  Robespierre  n  eut  ni  les  qualités» 
ni  la  politique ,  ni  la  générosité  de  Sylla  ;  car  celui- 
ci,  à  qui  tout  était  permis  par  le  droit  de  la  guerre, 
chercha  moins  à  assurer  sa  puissance  par  la  mort  de 
ses  ennemis  qu'à  leur  faire  oublier  ses  crimes  en  les 
comblant  de  bienfaits.  Robespierre  aurait  évoqué  des 
tombeaux  les  ombres  de  ses  ennemis  pour  les  guil* 
lotiner  encore. 

11  ne  fut  ni  Cromwell,  ni  César,  ni  Catilina  ;  car 
tout  son  corps  frémissait  à  la  vue  d'une  arme  nue  : 
il  crut  pouvoir  cependant  lutter,  comme  eux,contre 
un  erand  peuple,  et,  qui  plus  est,  en  triompher  : 
voulant  imiter  trois  grands  hommes,  il  n'imita  réel- 
lement que  ce  ridicule  insecte  qui,  voyant  un  oiseau 
emporter,  dans  son  vol,  des  toiles  d'araignée ,  crut 
pouvoir  faire  comme  lui,  et  se  laissa  prendre  dans 
les  réseaux. 

Quelques  hommes  superficiels,  ou  peureux,  ont 
pris  l'insolence  de  Robespierre  pour  du  courage;  ils 
n'ont  pas  voulu  voir,  au  contraire,  qu'il  n'était  que 
lâche,  puisqu'il  était  insolent. 

Ceux  qui  lui  ont  refusé  le  génie  lui  ont  accordé 
la  facilité  du  talent;  il  n'avait  ni  l'un  ni  l'autre.  Il 
suffit  de  parcourir  ses  écrits,  charge  de  doubles  et 
triples  ratures,  pour  se  convaincre  à  quel  point  ses 
conceptions  étaient  pénibles,  laborieuses  et  tardives, 
quoique  son  élocution  fût  lâche  et  diffuse. 

11  se  disait  philosophe,  Robespierre  :  hélas!  il  l'é- 
tait sans  doute  comme  ce  Constantin  qui  se  le  disait 
aussi.  Robespierre  se  fût  teint  comme  lui,  sans  scru« 
pule,  du  sang  de  ses  proches,  puisqu'il  avait  déjà 
menacé  de  sa  furenr  une  de  ses  sœurs,  qui  n'avait 
pas,  disait  Robespierre  jeune,  •  une  goutte  de  sang 
qui  ressemblât  au  sang  de  ses  frères,  >  et  contre  la- 
quelle, à  l'entendre,  il  fallait  prendre  un  parii  dé' 
cidé;  et  peut-être,  après  tant  de  forfaits,  le  patron  de 
l'Eternel  aurait-il  fini,  comme  Constantin,  par  affir- 


485 


iher  aa  peuple  mie  Dfen  Itil  âTâtt  envoyé  le  ïabarum 
dans  les  nuées.  Il  était  philosophe  encore  à  la  ma- 
nière de  ce  Louis,  dit  le  Juste  ;  car  il  avait  teint, 
comme  lui,  ses  mains  du  sang  de  plusieurs  Marillac 
et  de  plusieurs  de  Thou. 

Sans  tomber  dans  la  fureur  des  parallèles,  ie  ne 
sais  qu'un  certain  Domitius,  dont  parle  Salluste, 
qui  offre  quelques  traits  de  ressemblance  avec  Ro- 
bespierre, qui,  comme  chef  de  parti,  ne  ressemble 
bien  qu*à  lui-même.  Le  voici  en  trois  mots  : 

-  Domitius,  dit  Salluste,  n^a  pas  un  seul  de  ses 
membres  qui  n*ait  pris  part  à  quelque  crime  ou  à 
quelque  action  honteuse.  Sa  langue  est  consacrée  au 
mensonge,  ses  mains  à  l'assassinat,  ses  pieds  à  la 
fuite.  • 

Ce  que  possédait  éminemment  Robespierre,  c*est 
une  imperturbabilitë  d*envie  et  de  haine,  et  une 
trop  constante  activité.  Cette  dernière  vertu,  qui 
eût  pu  être  un  bienfait  pour  le  peuple,  si  Robes- 
pierre avait  été  pur,  fut  pour  le  peuple  un  malheur 
de  plus  dans  Robespierre  tyran.  La  paresse  engour* 
dit,  corrompt  et  tue  un  peuple  libre;  elle  endort 
dans  son  esclavage  le  peuple  qui  ne  Test  pas,  et 
Tempéche  de  se  réveiller  pour  briser  ses  fers;  mais 
combien  un  peuple  esclave  doit  bénir  cette  paresse 
dans  la  personne  de  son  tyran  1  combien,  chaque 
jour,  elle  sauve  de  victimes  !  Cette  paresse  a  peut- 
être,  depuis  le  commencement  du  monde,  sauvé  les 
dix-neuf  vingtièmes  du  genre  humain:  le  sommeil 
de  Néron  était  un  bienfait  pour  Rome.  Eh!  qu'était 
pour  les  Français  le  sommeil  de  Robespierre!  0  peu- 
ples qui  baissez  devant  la  tyrannie  un  cou  docile, 
ne  formez  point  de  vœux  pour  que  le  remords  la  ré- 
veille :  priez  tes  dieux,  au  contraire,  que  vos  tyraus 
dorment  toujours. 

C*est  un  des  préceptes  de  Machiavel,  bien  recom* 
mandé  aux  tyraus  de  tous  les  sièclesj  •  de  ne  souf- 
frir auprès  (reux  aucun  homme  vertueux,  aucune 
personne  éclairée.  •  Néron,  qui  D*avait  pu  lire  Ma- 
chiavel, mais  qui  tenait  cette  leçon  de  sa  propre  fé- 
rocité, redoutait  plus  le  seul  Thraseas  que  tous  les 
sénateurs  ensemble.  Robespierre  se  montra  aussi 
ombrageux  que  Néron  devant  le  mérite  :  il  le  crai- 
gnait comme  un  ennemi,  et  le  haïssait  comme  un 
rival  :  aussi  le  poursiiivait-il  à  ces  deux  titres.  Les 
pages  sanglantes  de  son  infernal  catéchisme  sont 
remplies  de  ses  proscriptions  portées  contre  la  vertu, 
la  richesse  et  le  génie.  Les  écrivains  surtout,  insti- 
tués délateurs  de  la  tyrannie,  sont  ceux  sur  lesquels 
il  se  déchaîne  avec  plus  d'acharnement. 

•  Quels  sont  nos  ennemis?  dit-il  ;  les  riches  et  les 
écrivains  mercenaires. 

■  Comment  ferez- vous  taire  les  écrivains?  com- 
ment les  allacherez-vous  à  la  cause  du  peuple?  11$ 
iont  à  ceux  qui  les  paient.  Or.  les  seuls  nommes  ca- 
pables de  les  payer  sont  les  riches,  ennemie  naturels 
de  la  justice  et  de  légalité. 

•  Que  conclure  de  cela?  continue- t-il  :  qu'il  faut 
proscrire  les  écrivains  comme  les  plus  dangereux 
ennemis  de  la  patrie.  • 

Robespierre,  comme  vous  le  voyez,  citoyens,  n'ad- 
met que  la  vertu  qui  rapporte. 

Orgueilleux  et  vindicatif,  jamais  il  ne  pardonna 
rien  de  tout  ce  qui  pouvait  tenir  à  l'amour-propre. 
Tous  les  anteurs  qui  avaient  eu  le  courage  ue  le  si- 
gnaler, ceux  même  qui  avaient  été  accuses  ou  soup- 
çonnés d'avoir  pensé  à  lui,  devinrent  les  objets  ae 
ses  vengeances. 

C'est  pour  les  atteindre  plus  sûrement  qu'il  fit 
porter  une  peine  de  mort  contre  tous  les  auteurs 
d'écrits  insiaieux,  bien  sûr  d'envelopper  par  ce  mot, 
dans  une  proscription  générale,  tous  les  hommes  à 
talents,  toutes  les  réputations  dont  l'éclat  blessait 
les  yeux  de  cet  oiseau  de  ténèbres.-  L'ezHxmsul  Ci- 


céron  venait  de  publier  un  écrit  qui  déplut  au  dio» 
tateur  César.  Que  fit  César?  il  réfuta  l'ouvrage,  qui 
ne  reçut  pas  moins,  malgré  la  réfutation,  T'hom- 
mage  et  la  sanction  des  siècles;  mais  la  postérité 
sait  au  moins  quelque  gré  au  tout-puissant  César 
de  n'avoir  point  persécuté  le  panégyriste  de  Caton, 
Il  faut  convenir  que  César,  quoiaue  le  plus  ambi- 
tieux des  hommes,  avait  dans  l'ame  une  élévation 
qui  l'écartait  de  la  route  vulgaire  des  tyrans.  Il  fit 
mieux,  sans  doute,  de  composer  un  mauvais  ou- 
vrage que  de  faire  une  mauvaise  action.  Le  crimo 
eût  demeuré  dans  la  mémoire,  et  la  réfutation  fut 
oubliée.  Maximilien,  qui  n'était  point  César,  n'a  pas 
dû  voir  comme  lui  ;  lui  et  ses  collaborateurs  ont 
trouvé  plus  simple  de  se  débarrasser  d'un  auteur 
que  de  fui  répondre,  par  la  raison  qu'il  est  plus  fa- 
cile de  tuer  un  homme  que  de  tuer  fa  vérité. 

Qui  croirait  qu'un  des  projets  de  Robespierre  fut 
d'abolir  les  spectacles  !  Il  ne  pardonnait  pas  qu'on 
eût  osé  le  traduire  sur  la  scène,  bien  diftérent  de  So* 
crate,[qui  lut  un  jour  surpris,  au  parterre  d'Athènes, 
applaudissant  aux  traits  qu'Aristophane  lançait  sur 
lui. 

Ne  pouvant,  à  l'exemple  desBeaumont,  des  Griscl 
et  des  Chaumelx,  excommunier  les  petits-tilsde  Ros- 
cius  (1),  il  les  fit  jeter  dans  les  fers.  Les  noms  do 
quelques-uns  furent  inscrits  sur  les  listes  de  Coffin- 
hal  et  de  Fouquier.  N'osant  en  un  seul  jour  fermer 
tous  les  spectacles,  il  résolut  de  les  prendre  par  fa- 
mine. Lui  et  l'ancien  comité  interdirent  a  cet  effet 
toutes  les  pièces  qui  pouvaient  prêter  à  des  allu- 
sions; et  ces  misérables  trouvant  dans  des  portraits 
de  scélérats,  morts  depuis  quatre  mille  ans,  des  res- 
semblances avec  eux-mêmes,  proscrivaient  les  chefs* 
d'œuvre  des  grands  maîtres  qu'un  demi-siècle  ou 
un  siècle  d'applaudissements  et  de  succès  avait  en 
vain  mis  sous  sa  sauvegarde. 

L'ambitieux  Maximilien,  qui,  sans  force  pour  ar- 
river, courait  à  tous  les  genres  de  succès,  et  préten- 
dait diriger  vers  lui,  comme  vers  le  centre  de  la 
gloire,  tous  les  yeux  étonnés  et  éblouis,  regardait 
les  spectacles  comme  des  moyens  de  diversion  à 
l'admiration  ou'il  voulait  commander,  et  les  applau- 
dissements à  oe  beaux  vers  comme  un  vol  fait  à  ses 
harangues.  On  a  vu  des  papes  et  des  cardinaux  res- 
susciter en  Italie  l'art  d'Euripide  et  de  Sophocle  :  des 
Français,  qui  se  dirent  républicains,  le  proscrivi- 
rent; et  Robespierre,  qui  ne  pouvait  être  le  rival  des 
poètes,  se  fit,  en  les  persécutant,  le  rival  de  P.  Qucs- 
nel  et  de  Tévêque  de  Fréjus. 

.  On  a  fait  l'honneur  de  dire  à  Robespierre  qu'il  ai- 
mait les  arts.  S'il  avait  pu  les  cultiver  seul,  il  les  eût 
aimés,  je  crois.  Il  eût  aimé  les  arts  peut-être  sans  les 
artistes,  comme  ie  sultan  qui  jouit  et  qui  ne  veut  pas 
qu'on  jouisse  autour  de  lui.  Il  se  dépitait  contre 
toute  espèce  de  célébrité  qui  ne  lui  était  pas  person- 
nelle. 

Les  persécuteurs,  sous  un  masque  différent,  ont 
été  les  mêmes  dans  tous  les  siècles  ;  et  depuis  Tin- 
fortuné  professeur  Ramus,  égorgé  par  des  profes- 
seurs envieux  de  ses  talents,  jusqu'au  représentant 
du  peuple  Camille,  égorgé  pour  avoir  commenté 
Tacite,  un  mot  de  ralliement  a  toujours  été  le  pré- 
texte et  l'excuse  des  persécutions. 

Les  écrivains  furent  traités,  par  les  diacres  de 
Beaumont,  de  déistes  et  d'athées,  de  contre-révolu- 
tionnaires et  de  modérés  par  les  diacres  de  Robes- 
pierre. Rapprochez  les  époques,  et  vous  verrez  que 
ce  sont  les  mêmes  esprits  qui  ont  condamnés  Sidney 
etPhélinneaux. 

C'est  rBvangile  à  la  main  que  la  secte  des  papistes 
égorgea  les  protestants  du  XVII^  siècle,  comme  la 

(1)  Roscias  (Quintus),  Gaulois  «rorieine,  célèbre  acteur  à 
Ronei  mourut  vert  Fan  6i  avant  l.*Ç. 


486 


secte  de  Robespierre  massacra  de  nos  jours  les  pa* 
triotes,  en  proclamant  les  droits  de  Thomme. 

Il  en  est  des  dogmes  politiques  comme  des  dog- 
mes religieux.  Il  n*est  qu'un  persécuteur  qui  em- 
ploie la  force  pour  faire  croire  à  ses  dogmes.  Ce  qui 
s'inspire  ne  peut  pénétrer  que  librement  dans  une 
ftme  ;  la  conviction  se  communique  comme  le  sen- 
timent. Un  Indien  persécutant  un  Indien  qui  renie 
les  transfigurations  de  Wishnou  ressemble  à  Couthou 
guillotinant  l'audacieux  qui  osait  douter  de  l'incor- 
ruptibilité de  Maximilien.  Le  Dominicain  couvert  du 
froc,  et  ruébertiste  du  bonnet  rouge,  ont  eu  tou- 
jours la  même  marche.  Le  forcez- le$  d^enirer  fut 
leur  devise. 

Eh!  qu'importe  que  le  levier  qui  pousse  l'huma- 
nité repose  au  ciel  ou  sur  la  terre  ;  qu'importe  que 
les  mains  coupables  qui  meuvent  ce  levier,  et  qui, 
au  lieu  de  s'en  servir  pour  lancer  les  hommes  dans 
les  sentiers  du  bonheur,  s'en  servent  pour  les  pré- 
cipiter dans  la  mort;  qu'importe,  dis-je,  que  ces 
mains  se  cachent  derrière  un  voile  religieux  ou  der- 
rière un  voile  politique;  qu'importe  que  le  sang  ait 
été  versé  par  la  secte  des  niveleursou  par  celle  des 
croisés  de  Louis  IX,  qu'il  ait  arrosé  les  pavés  de  Lon- 
dres ou  la  verdure  des  Cévennes  !  Tout  système,  ou 
religieux  ou  politique,  ne  saurait-il  être  un  système 
humain! 

Ceux  qui  ont  voulu  donner  des  lois  aux  hommes, 
a  l'exception  du  Chinois  Confucius,  du  Nazaréen  Jé- 
sus et  de  quelques  autres,  ont  tous  été  persécuteurs. 
N'est-il  contre  les  torts  d'autrui  d'autre  force  que 
des  poignards  et  des  supplices?  La  raison  n'est-elle 
plus  une  puissance,  ou  faut-il  devenir  furieux  pour 
être  plus  raisonnable  ?  Eh  !  d'ailleurs,  au'elle  est 
fragile  et  accidentelle  cette  raison  !  Celle  d'un  siècle 
fut-elle  celle  du  siècle  passé  ou  sera-t-elle  celte  du 
suivant?  Les  Juifs  eurent  raison,  du  temps  de  Pos- 
sidonius  et  de  Julien  ;  sous  Tibère  et  sous  Constan* 
tin  ils  eurent  tort.  (La  tuile  demain.) 

SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU  28  PLUVIOSE. 
Présidence  de  Barras, 
On  lit  la  lettre  suivante  : 
Extrait  d'une  lettre  du  représentant  du  peuple  Cas- 
sâmes ,  prés  les  armées  d^ Italie  et  de*  Alpes ^  au 
comité  de  salut  publie, 

Grenoble,  le  16  pluviôse,  Tan  Se  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 
8  Je  ne  vous  ai  pas  écrit  depuis  la  suppression  du  maxi- 
mum, au  sujet  de  ceUe  loi  bienfaisante  ;  c'est  parce  que  je 
voulais  en  connaUre  le  résultat,  et  je  puis  vous  apprendre, 
avec  la  plus  gnnùe  satisraction ,  que  la  disette  dont  nous 
semblions  être  menacés  n'élail  que  Taclice;  car  dès  que  le 
commerce  a  été  rendu  libre,  les  marcbés  ont  presque  par- 
tout été  approvisionnés,  et  continuent  à  Tétre  malgré  les 
mauvais  temps,  et  même  en  telle  abondance  que  déjù 
plusieurs  fois  »  après  le  marché  fini,  il  est  resté  du  blé  à 
vendre.  CASSANiàs.  » 

Pelet  :  Voici  une  lettre  des  représentants  à  l'ar- 
mée du  Nord. 

Les  représentants  du  peuple  Cochon  et  Ramel,  fti- 
voyés  prés  V armée  du  Nord  en  Hollande,  à  leurs 
collègues  y  membres  du  comité  de  salut  public. 

A  La  Haye,  le  19  pluviôse,  Pan  3«  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 
•  Nous  ne  sommes  arrivés  ici,  citoyens  collègues,  que 
le  49,  à  trois  heures  du  soir;  la  difficulté  des  chemins ,  no- 
tre détour  à  Bréda  pour  revenir  au  Moerdick ,  que  nous 
avons  passé  au  milieu  des  glaçons,  avait  retardé  la  rapi« 
dite  de  notre  marche.  Réunis  avec  nos  collègues,  nous 
avons  appris  les  détails  de  leur  entrée  dans  la  Hollande  ; 
ils  comptaient,  et  nous  pens&mes  comme  eux ,  que  les  états 
généraux  régénérés  seraient  assemblés  en  majorité  le  S  j  ; 
nous  noui  déterminâmes  ^l  retarder  joiqn'â  ce  mojftenl  le 


départ  do  courrier  que  nous  étions  dans  Tintention  de 
vous  expédier;  nous  désirions  de  pouvoir  vous  transmeUre 
en  même  temps  les  nouvelles  que  nous  espérions  recevoir 
à  la  même  époque  de  la  Zélande.  Celles-ci  nous  sont  par- 
venues :  les  accidents  qui  avaient  prolongé  notre  voyage 
ont  empêché  la  réunion  de  la  majorité  des  états  généraux; 
elle  existera  cependant  aujourd'hui.  Nous  allions  vous  faire 
part  de  toutes  ces  circonstances  au  moment  même  où  nous 
recevons  votre  courrier  du  iS  ;  vous  les  trouverei  rappor- 
tées dans  notre  dépêche  officielle. 

«  Nous  faisons  parvenir  à  M.  Adams  la  lettre  qne  le  mi* 
nistre  des  Etats-Unis  nous  a  remise. 

•  Salut  républicain. 

•  Signé  D.-V.  Rambl,  Chailbs  Cochon.  • 

Les  représentants  du  peuple  près  les  armées  du 
Nord  et  de  Sambre-et-Meuse  à  leurs  collègues 
du  comité  de  salut  public. 

A  La  Haye,  le  33  pluviôse,  Tan  3s  de  la  république 
une  et  indivisible. 

•  Nous  vous  adressons,  chers  collègues ,  la  capitulatioa 
de  la  Zélande  ;  celte  riche  province  s*est  rendue  sur  une 
simple  soiumation  ,  et  d'après  la  connaissance  que  les  ci* 
toyens  ont  eue  de  la  conduite  généreuse  des  Français  dans 
la  Hollande,  et  de  nos  principes  manifestés  dans  notre 
proclamation. 

•  La  reddition  de  la  Zélande  et  de  tous  ses  ports  complète 
l'invasion  des  Provinces-Unies;  car  TOver-Yssel  et  le  pays 
de  Groningue  sont,  depuis  quelques  jours  y  occupés  en 
grande  partie  par  nos  troupes. 

«  La  conquête  de  la  Zélande  est  d'autant  plus  précieuse 
que,  par  sa  situation,  la  difficulté  d'y  pénétrer  et  les  sc« 
cours  qu'elle  aurait  pu  tirer  de  l'Angleterre,  il  lui  aurait 
été  facile  de  faire  une  longue  résistance. 

«  Ce  n'est  qu'avec  la  plus  grande  peine,  et  au  milieu 
des  plus  grands>  dangers,  que  les  officiers  chargés  de  por- 
ter les  sommations  sont  parvenus  à  y  pénétrer  à  travers  les 
glaces.  La  difficulté  des  communications  a  été  telle  que 
le  général  n'a  reçu  qu'hier  au  soir  la  capitulaUon ,  quoi* 
que  depuis  plusieurs  {oars  on  y  eût  envoyé  des  officiers  en 
parlementaires. 

«  Salut  et  fraternité* 

«  Signé  Billbgabdi,  Faicnn,  Pobtiei,  Robbbiot, 
Cbaalis^  Cocbor,  Alquieb,  D.-V.  Rambl. • 

Capitulation  de  la  Zélande^  datée  du  3  février^  et 
signée  par  les  députés  de  ce  pays  et  par  le  géné- 
ral Michaud. 

m  ArL  I".  Le  libre  exercice  de  la  religion  dominante. 
—  Accordé  pour  tous  les  cultes. 
«  II.  Maintien  de  la  forme  du  gouvernement  établL  — 

—  Répondu  que  l'on  doit  s'en  référer  &  la  proclamation 
des  représentants. 

•  III.  Sûreté  des  individus,  quelles  qu'aient  été  leurs 
opinions,  et  conservation  des  propriétés  appartenant, 
soit  à  l'Etat,  soit  aux  individus.  —  Référé  à  la  proclama- 
tion. 

c  IV.  La  faculté  aux  personnes  qui  ont  quitté  le  Brabant 
pour  venir  en  Hollande  de  rentrer  en  possession  de  leurs 
propriétés.  Retraite  sûre  aux  émigrés  de  la  France.  —  Ré- 
féré à  la  proclamation,  et  non  compris  les  émigrés  français, 
avec  et  pour  lesquels  la  république  n'entendra  jamais  ù 
aucun  accommodement. 

t  V.  Qu'il  n'y  ait  pomt  de  garnisons  françaises  en  Zé- 
lande, ou  qu'elles  soient  très-peu  nombreuses,  à  raison  de 
la  cherté  des  vivres.  —  Répondu  qu'on  n'enverra  que  les 
troupes  nécessaires  pour  le  senrioe  de  la  police,  et  pour  la 
garde  des  vaisseaux  et  de  l'Ile  de  Walcheren. 

•  VI.  Point  de  cours  forcé  aux  assignats,  point  de  réqui« 
sillons  sur  les  biens  ou  les  individus.  —  Accordé;  référé  à 
la  proclamation. 

•  VII.  Si  des  villes  ou  des  pays  de  la  Zélande  avaient 
fait  des  capitulations  particulières  moins  favorables  que  la 
présente  ,  elles  seront  comprises  dans  celle-ci,  et  cette  ca- 
pitulation s'accrottra  aussi  des  faveurs  plus  grandes  qui 
auraient  été  accordées  en  particulier  à  ces  villes  ou  pays* 

—  Accordé. 

<  VIII.  Les  articles  de  la  présente  capitulation  qui  pré* 
lenteraientt  par  rexpres^ioni  un  aens  obscur  ou  equi^o- 


487 


qoe,  seront  interprétés  cl  exécutés  à  ravanlagc  de  la  pro- 
Tkice  de  Zélande.  —  Accordé.  •  ^       „ 

A  celle  capitulation  se  trouve  jointe  une  copie  de  celle 
des  Taisseaux  de  guerre  et  frégates;  les  équipages  s'enga- 
gent à  ne  plus  porter  les  arme»  contre  la  république  fran- 
çaise ,  à  ne  commettre  aucune  dégradation  dans  les  f  ais- 
seau i,  et  à  ne  sortir  des  ports  qu'arec  le  consentement  du 
général  en  chef  de  Tannée  française;  des  canonnicrs 
français  occuperont  les  forts  et  batteries  qui  défendent  les 
ports* 

Une  clause  de  cette  capitulation,  datée  du  25  janvier, 
porte  qu'elle  sera  communiquée  à  l'amiral  hollandais 
Kinsbergen. 

Plusieurs  articles  de  celte  capitulation  excitent  des  ru- 
meurs. —  Duroy  demande  la  parole* 

Pbrbin  (des  Vosges)  :  Je  demande  que  ceux  qui 
ont  des  observations  à  faire  aillent  les  porter  au  co- 
mité de  salut  public. 

BoissY  :  C'est  aussi  ce  que  je  voulais  demander. 
L'objet  qui  nous  occupe  est  de  la  plus  haute  impor- 
tance. H  n'y  a  aucun  de  nous  qui  n'ait  le  droit  d'exa- 
miner quelle  est  notre  situation  en  Hollande,  mais 
i^  n*est  personne  aussi  qui  ne  sente  que  tout  ce  qu*on 
dira  ici  retentira  dans  toute  la  Hollande  ;  il  est  donc 
important  de  ne  laisser  rien  échapper,  de  ne  se  per- 
mettre aucune  discussion  (murmures  à  l'extrémité 
gauche),  dont  la  malveillance,  qui  vous  épie,  puisse 
abuser.  Je  sais  que  cela  n'est  dans  Tinlention  de 
personne;  mais,  dans  la  chaleur  de  la  discussion, 
il  est  aisé  de  laisser  échapper  une  expression..... 
(Murmures  à  Texlrémité  gauche.)  Je  demande  Tim- 
pression  des  pièces,  Tajournement  de  la  discussion, 
et  j'invite  chacun  de  mes  collègues  à  venir  au  co- 
mité de  salut  public  demander  tous  les  renseigne- 
ments qu'ils  croiront  nécessaires.  (Murmures  à  Pex- 
trémité  gauche.) 
Plusieun  membre$  :  Aux  voix,  aux  voix  1 
Duroy  :  Je  demande  la  parole. 
Plusieurs  membres  :  Aux  voix  ! 
Duroy  :  Au  nom  du  peuple  français,  je  demande 
la  parole.  (Quelques  applaudissements.) 

"'•  :  Le  peuple  français  n'est  pas  en  loi,  mais  dans 
la  majorité  de  la  Convention. 

Cygogne  :  Je  demande  la  parole  pour  une  motion 
d'ordre. 

Duroy  :  Je  ferai  en  sorte,  dans  l'affaire  importante 
qui  nous  occupe,  de  mettre  en  pratique  la  leçon  qui 
vient  d'être  donnée  à  rassemblée  par  te  préopinant. 
(Murmures.)  Cependant  je  trouve  étrange  qu  un  re- 

f présentant  du  peuple  français  ne  puisse  pas  parler 
ibrement  dans  cette  enceinte,  lorsque  nos  frères 
font  ronfler  le  canon  dans  les  marais  de  la  Hollande. 
Il  est  dans  nos  principes  de  faire  la  guerre  aux  ty- 
rans et  d'accorder  la  paix  aux  peuples  ;  mais  ces 
principes  sont  subordonnés  aux  intérêts  bien  en- 
tendus du  peuple  français  et  de  ceux  chez  lesquels 
nous  entrons.  Lorsque  nous  avons  créé  le  comité  de 
salut  public,  nous  n'avons  pas  entendu  nous  dessai- 
sir des  pouvoirs  que  la  nation  nous  a  conflits.  Le  co- 
mité est  chargé  de  la  direction  des  relatious,  mais 
c'est  à  la  Convention  à  prendre  les  déterminations. 
J'appuie  la  proposition  d'imprimer  les  lettres  et  les 
capitulations,  et  le  demande  que  chacun  de  nous 
puisse  aller  chercher  au  comité  de  salut  public  les 
renseignements  qu'il  croira  nécessaires.  Il  est  cer- 
tain que,  dans  la  chaleur  du  discours,  quelqu'un  de 
nous  aurait  pu  émettre  une  opinion  qui  ne  fOt  pas 
conforme  à  la  politique  ;  mais,  dès  que  cette  opinion 
ne  serait  pasaaoptée  par  la  Convention,  elle  ne  pro- 
duirait aucun  mal,  et  il  y  en  aurait  beaucoup  si  nos 
opinions  étaient  comprimées. 

'**  :  Je  demande  si  les  représentants  du  peuple  ont 
approuvé  cette  capitulation. 

Pelet  :  Le  comilé  vous  a  fait  lire  toutes  les  pièces 


qui  nous  ont  été  envoyées  par  nos  collègues  :  H  n*y 
est  point  parlé  de  leur  approbation. 

Montaut-Marioon  :  Mais  le  comilé  de  salut  pu- 
blic a  dû  donner  des  instructions...  (Violents  mur- 
mures.) 

Mathieu  :  Je  ne  doute  pas  que  le  comité  de  salut 
public  n'ait  pressenti  les  intentions  de  la  Conven- 
tion, et  qu'il  n'ait  pris  des  mesures  pour  tirer  de  nos 
victoires  le  parti  le  plus  avantageux,  en  même  temps 
que  pour  établir  la  gloire  et  la  splendeur  de  nos  ar- 
mées. 

Le  plus  impérieux  des  sentiments  que  j'éprouve 
dans  ce  moment  est  celui  de  la  gloire  et  de  la  dignité 
nationale.  (Applaudissements.)  Et  j'ai  vu,  à  la  lec- 
ture des  pièces,  que  les  intérêts  de  cette  gloire,  pour 
laquelle  le  peuple  français  a  fait  tant  de  sacrifices, 
pour  laquelle  nos  frères  versent  leur  sang,  n'ont 
pas  été  suffisamment  ménagés.  Je  ne  préjuge  rien 
sur  la  conduite  qui  a  été  tenue  par  nos  généraux» 
parce  que  les  localités  et  les  circonstances  comman- 
dent les  modifications  qu'il  n'est  pas  possible  de 
prévoir.  J'avoue  cependant  que,  lorsque  nous  en- 
trions chez  un  peuple  qui  se  dit  ami  de  la  liberté 
et  de  l'égalité,  il  était  peut-être  naturel  d'attendre 
qu'on  oublierait  un  instant  ses  droits  pour  ne  se 
souvenir  que  de  l'amitié.  (Applaudissements.) 

A  nos  guerriers  appartient  le  soin  de  la  victoire  ; 
à  la  Convention  appartient  celui  de  déterminer  ce 
qui  convient  aux  intérêts  du  vainqueur  et  aux  inté- 
rêts des  peuples  amis  de  la  liberté. 

Vous  avez  dû  remarquer  que  l'on  n'a  pas  encore 
bien  déterminé  sur  quel  pied  nous  sommes  entrés 
en  Hollande.  Je  ne  crois  pas  m'écarter  des  règles  de 
ta  circonspection  en  disant  qu'en  entrant  dans  les 
Provinces- Unies  nous  devions  nous  emparer  de 
tous  les  établissements  publics  ;  tout  ce  qui  compo- 
sait le  domaine  du  gouvernement  appartenait  au 
vainqueur.  (Applaudissements.)  Le  mobilier  des 
élabhssemenls  publics,  si  l'on  peut  s'exprimer  ainsi, 
lui  appartenait.  Le  sens  qu'on  doit  attacher  à  cet 
article  des  capitulations ,  qui  porte  que  la  sûreté  des 
personnes  et  des  propriétés  sont  garanties,  s'appli- 
que aux  propriétés  particulières,  car  nous  ne  de- 
vons pas  voir  d'ennemi  là  où  nous  ne  vo^f onspas  un 
homme  armé;  mais  cet  article  n'est  point  dfu  tout 
relatif  aux  propriétés  du  gouvernement.  (On  applau- 
dit.) Je  n'attribue  ce  détaut  de  mesure  qu'aux  sen- 
timents de  fraternité  qui  animent  nos  guerriers ,  et 
dont  les  représentants  du  peuple  ont  trop  écouté  les 
conseils. 

Les  sacrifices  innombrables  de  tous  les  Français, 
tant  de  sang  versé,  nos  obligations,  tout  nous  fait 
un  devoir  de  ne  pas  laisser  dilapider  les  fruits  de  la 
victoire.  (Applaudissements.)  Lorsque,  luttant  dans 
l'intérieur  contre  toutes  les  espèces  de  besoins,  le 
peuple  présente  une  tranquillité  imposante,  la  Con- 
vention doit  employer  tous  ses  efforts  pour  le  faire 
profiter  de  la  victoire.  Les  sentiments  de  la  Conven- 
tion sont  tels  que  le  peuple  batave  ne  doit  conce- 
voir aucune  inquiétude.  (Applaudissements.)  Nous 
ne  voulons  pas  que  ses  vieux  ennemis  opposent  des 
obstacles  à  sa  régénération.  Nous  voulons  que  l'é- 
pée  française  assure  sa  liberté  et  la  nôtre.  Qu'il  ne 
s'étonne  point  de  notre  sévérité;  la  sévérité  a  quel- 
que chose  de  mâle  et  de  rassurant  Mais  il  faut  que 
nous  sachions  si  les  Hollandais  seront  vraiment  nos 
alliés,  que  nous  sachions  s'ils  ont  voulu  figurer  une 
capitulation  bu  une  neutralité.  (ApplaudisseinenU.) 
La  Hollande  ne  peut  parfaitement  secouer  le  sta- 
thoudérat  qu'en  ruinant,  qu'en  brisant  tous  les  res- 
sorts de  l'Angleterre,  qu'en  renversant  tous  les 
agents  qu'elle  a  encore  dans  la  Hollande.  Eh  bien, 
c>st  à  Amsterdam,  à  La  Haye  qu'il  faut  que  nous 
commencions  à  détruire  Londres.  C'est  à  la  sagesse 


488 


des  comités  à  préparer  la  route,  c'est  à  la  Conveu- 
lion  à  prendre  des  mesures  justes  et  politiques.  Con- 
sultons le  caractère  batave  ;  ne  froijisons  qui  que  ce 
soit;  mais  que  les  intérêts  et  la  gloire  de  la  nation 
soient  conservés.  (Applaudissements.) 

La  Convention  décrète  Fimpression  des  pièces  et 
le  renvoi  au  comité  de  salut  public,  où  chaque  mem- 
bre ira  prendre  des  renseignements. 

—  On  lit  la  lettre  suivante  : 

Le 9  citoyens  d'Avignon  réunis  dans  la  salle  de  la 
Société  populaire  des  Amis  de  la  Convention,  séant 
à  Avignon,  à  la  Convention  nationale, 

«  Citoyens  représentants  le  tyran  qui  opprimait  la 
France  s*étail  fait  un  jeu  barbare  de  dénaturer  tous  les 
principes,  de  changer  les  vertus  en  crimes  et  les  crimes 
en  vertus;  et  tandis  que  ses sateliitest  par  ses  ordres,  dis- 
tribuaient arbitrairement  les  supplices  et  la  mort  dans 
toute  rétendue  de  la  république,  il  avilissait  les  bonneun 
du  Panthéon  en  y  accordant  une  place  à  des  hommes  qui 
n'étaient  rien  moins  que  des  héros. 

«  C*est  ainsi  que  Robespierre,  dans  son  rapport  sur  TB- 
tre  suprême*  proposa  à  la  vénéraUoii  des  Français  le  jeune 
Viala.  L^uction  par  laquelle  il  foulut  rendre  célèbre  ce 
jeune  étourdi  est  fondée  sur  la  fable  la  plus  ridicule.  Il  est 
faui  que  le  jeune  Viala  ait  fait  la  moindre  tentative  poor 
couper  la  traille  de  la  Durance.  H  est  vrai  que  les  Marseil- 
lais passèrent  cette  rivière,  et  qu^ils  vinrent  mettre  Avi- 
gnon à  feu  et  à  sang.  Ce  ne  sont  que  les  représentants  du 
peuple  qui  sauvèrent  le  Midi  :  Thonneur  de  la  république 
et  le  prix  qu'elle  doit  attacher  à  celle  gloire  8ut>lime  com- 
mandent de  solliciter  auprès  de  vous  le  rapport  du  décret 
qui  place  dans  je  Panlheoii  la  mémuire  d'un  enfant  qui  ne 
méritait  rien.  Nos  braves  guerriers  ont  fait,  dans  tous  les 
points  de  la  frontière ,  des  actes  si  brillants  de  valeur  que , 
sans  recourir  ^  des  mensonges  absurdes,  vous  aurei  à  ré- 
compenser une  fbole  de  héros  dont  le  Cromwell  français 
étouilait  les  actions  glorieuses.  • 

{Suit  une  page  de  signatures,) 

Mention  honorable,  insertion  au  Bulletin  et  ren- 
voi au  comité  d^inslructiou  publique. 

—  Mounot  fait  rendre  le  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  co- 
mité des  finances  sur  Pétai,  rerois  par  les  commissaires  de 
la  trésorerie  nationale ,  des  recettes  et  dépenses  faites  pen- 
dant le  mois  de  nivôse  dernier  ; 

Considérant  que,  la  recette  sVlevant  à  57  millions 
468,738  I.  10  s.  8  deo.,  et  les  dépenses  à  Mè  millions 
87â,A09  i.  16  s.  11  d.,  il  en  résulte  un  excédant  de  dé- 
'pense  de  371  millions  205,676  1.  6  s.  3  d.,  au  remplace- 
ment duquel  il  est  nécessaire  de  pourvoir  { 

«  Décrète  que  le  contrôleur  de  la  caisse  générale  retirera 
de  la  caisse  à  trois  clefs,  où  sont  déposés  les  assignab 
nouvellement  fabriqués,  ladite  somme  de  371  millions 
305,676  liv.  6  s.  8  d.,  partie  en  assignats  de  750  livres, 
fabriqués  en  vertu  du  décret  du  18  nivôse  dernier,  partie 
en  assignats  de  plus  petites  coupures,  pour  remplacer  Tez- 
cédant  que  les  dépenses  faiu*s  dans  le  courant  de  nivôse 
présentent  sur  les  recettes  du  même  mois,  en  remplissant, 
pour  cette  opération ,  les  formalités  prescrites  par  les  pré- 
cédenU  décrets  de  remplacemenU  ■ 

—  Giraud  propose  un  décret  qui  est  adopté  en  ces 
termes  : 

•  La  Convention  tiitionale,  sur  la  proposition  de  son 
comité  de  commerce,  suspend  Texécution  de  Pariicle  XLIII 
du  titre  XIII  de  la  loi  du  IS  août  1791,  relatif  à  la  plan- 
tation des  poteaux  indicatifs  du  territoire  des  dent  lieues 
limitrophes  de  Télranger,  sauf  à  la  partie  qui  prétendrait 
qu'une  saisie  a  été  faite  hors  de  ce  territoire  à  demamicri 
comme  avant  ladite  loi»  le  toisé,  aua  frais  de  qui  il  apparu 
tiendra. 

La  commission  des  revenus  natioaaoi  est  ctiargée  de 
l'exécution  du  présent  décret,  • 

—  Les  citoyens  de  Strasbourg,  dans  une  Adresse, 
félicitent  ia  Conveotioa  sur  son  oourage  et  aea  soins 


pour  assurer  le  bonheur  du  peuple  français  aepub 
le  9  thermidor  ;  ils  rappellent  les  temps  de  tyran- 
nie où  Saint- Just  et  Leuas  exerçaient  chez  eux  des 
vengeances  et  des  vexations.  «  La  chute  du  trône 
des  Jacobins,  ajoutent-ils,  nous  présaçe  un  sort  plus 
henreux.  Vive  la  république  !  vive  Ta  Convention 
nationale  !  • 

La  mention  honorable  et  Tinsertion  au  Bulletin 
de  cette  Adresse  sont  décrétées. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


De  Paris.  —  Parmi  les  pièces  imprimées  à  ta  suite  du 
rapport  de  Courtois,  oo  a  remarqué  une  lettre  écrite, 
quinte  jo«n  après  les  évéoements  du  81  mai,  par  Tan  des 
rédacteurs  de  ce  journal  (1).  La  première  phrase  annoooe 
qu*elle  fut  écrite  le  lendemain  du  jour  où  Robespierre 
avait  fait  à  la  Convention  la  motion  de  supprimer  tous  les 
journaux  (motion  applaudie  et  renvoyée  à  l*examen  du 
comité  de  salut  public),  et  où  il  en  avait  dénoncé  plusieurs 
aux  Jacobins,  notamment  te  Moniteur.  Plusieurs  écrivains 
périodiques  venaient  d*étre  incarcérés  et  même  massacrés; 
ceux  dont  on  redoutait  le  plus  le  crédit  et  Pinfluenee 
étaient  le  plus  menacés.  Le  Moniteur  éuit  alors  arrèlè  à 
la  poste  par  ordre  de  ia  municipalité,  dont  Robespierre 
dirigeait  les  opérations.  Les  collaîiorateurs  de  ceUe  leuillc 
avaient  été  obligés,  peu  de  temps  avant,  de  rester  pendant 
huit  jours  et  huit  nuits  rassemblés  en  armes,  dans  le  lieu 
où  se  faisait  leur  travail.  Enfin,  depuis  cette  époque,  te 
Moniteur  n*a  cessé  dVtre  attaqué  aux  Jacobins  par  le  parti 
robespierriste. 

Le  début  de  place  ne  nous  permet  pas  de  présenter  ici 
les  observations  que  le  souvenir  de  ces  circonstances  mal- 
heureuses suggéreront  à  tous  les  hommes  impartiaux  :  il 
nous  suffit  de  dire  que  cette  lettre,  écrite  pour  déloorner 
les  poursuites  de  Robespierre,  fut  an  moyeu  inspiré  par  la 
terreur  pour  tromper  la  crédnliié  connue  de  cet  ambitieux, 
alors  revêtu  de  la  toute  -  puissance  de  Topinion;  car  les 
faits  qui  y  sont  énoncés  sont  tous,  sans  exception,  absolu- 
mi>ut  faux;  pur  exemple,  il  y  est  dit  que  raccusaiion  de 
Louvet contre  Robespierre  n^a  été  mise  quepar  extrait  dans 
le  Moniteur.  Il  est  facile  de  vérifier  que  ce  disooura  s*y 
trouve,  au  contraire,  en  entier,  dans  la  feuille  du  81  w> 
tobre  1792 ,  où  il  occupe  six  colonnes. 

On  peut  également  se  convaincre  que,  dans  aucune  cff* 
constance,  ce  journal  ne  s*esi  départi  de  t'imparlialité  qui 

fiiit  son  caractère. 


Trésorerie  nationale.  -^  Liquidation  de  la  deUê 
publique  viagère. 

Les  créanciers  de  la  dette  vta^^re  sont  avertis  que 
les  inscriptions  des  lettres  initiales  S,  T,  V,  des 
parties  constituées  sur  une  seule  tête,  sans  expec-> 
tntive  ni  survie,  pourront  être  retirées  aujoura  hui 
1er  ventôse  et  le  5  du  même  mois  ;  la  délivrance  des 
mêmes  inscriptions  se  fera  à  toutes  lettres,  au  bu- 
reau établi  à  cet  effet ,  rue  Vivienne,  en  face  de  la 
trésorerie.  Le  payement  sera  effectué  de  suite  à  bu- 
reau ouvert. 

Ceux  qui  viendront  retirer  les  inscriptions  auront 
soin  d*écrire  au  dos  du  bulletin  de  remise  dont  ils 
sont  porteurs  une  décharge  conçue  en  ces  termes  i 

•  Reçu  rinscriptioo  viagère  de  la  somme  de 
au  nom  de 


•  A  Paris,  ce.< 


(I)  Ceti  par  erreur  que  quel^uis  persennM  ont  pu  aitrU 
huer  cette  lettre  au  citoyen  Ginguené  :  l*ënergie  éclairée 
de  ce  littérateur  l'a  placé  dans  U  claue  peu  nombreuse  dc« 
hommes  qui  ont  eu  le  courage  de  braver  iotu  tes  dangers 
pour  lutter  contre  le  parti  doniinaut ,  et  peu  sVn  est  falla 
qtt*il  a*en  ait  été  vietimé.  A.  M. 


GAZETTE  NATIONALE  oo  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N®  152.         Duodi  2  Ventosb,  l'an  3e.  {Vendredi  20  Févbibr  1795,  vieux  êtyle.) 


CONVENTION  NATIONALE. 

Suite  du  rapport  fait^  au  nom  de  la  commission 
chargée  de  lexamen  des  papiers  trouvés  chez  Ro- 
bespierre et  ses  complices,  par  E,-B.  Courtois, 
député  du  département  de  l*Aube,  dans  la  séance 
du  16  nivôse,  anSdela  république  française, une, 
et  indivisible. 

Le  plan  de  la  conspiration  décemvirale  et  celui 
de  la  conspiration  de  Robespierre  se  vont  tracer  in- 
sensiblement, et  comme d*eux-mémes,  parPanalyse 
des  pièces  dont  vous  allez  prendre  connaissance. 
Mais  il  faut  se  faire  encore  un  plan  de  marche  et 
saisir  le  til  d'Ariadnc,  pour  ne  point  s*égarer  et  pour 
ne  pas  glisser  surtout  dans  les  sentiers  teints  de  sang 
de  ce  dédale. 

Il  est  peu  de  Français,  je  pense,  qui  doutent  que 
Robespierre  aspirât  au  pouvoir  suprême  et  le  voulût 
concentrer  dans  sa  personne. 

Pour  re'ussir,  il  fallait  : 

10  Enchaîner  le  peuple  ; 

30  Détruire  la  Convention  ; 

30  Se  créer  un  gouvernement. 

1^  Pour  enchaîner  le  peuple,  il  fallait,  en  feignant 
de  ridôlâtrer  soi-même,  s  en  rendre  fidole;  faire 
taire,  par  la  terreur  ou  par  les  supplices,  ceux  qui 
auraient  pu  Téclairer  sur  les  dangers  aue  courait  sa 
liberté;  il  fallait  détruire  ses  moyens  d'instruction, 
ramener  à  une  confiance  exclusive,  au  besoin,  au 
désir  môme  d'être  gouverné  par  lui. 

^o  Pour  détruire  la  Convention,  il  fallait  la  dé- 
pouiller peu  à  peu  de  ses  pouvoirs,  se  mettre  ensuite 
à  sa  place  pour  la  dissoudre. 

30  Pour  se  créer  un  gouvernement,  il  fallait  se 
donner  un  soutien,  des  magistrats  et  des  soldats. 

De  là  Torigine  du  gouvernement  militaire  ;  de  là 
le  changement  projeté  des  noms  des  villages  et  des 
villes  d^Âlsace,  de  leur  donner  les  noms  des  soldats 
de  Tarmée;  «car  (disait  Saint-Just)  on  ne  peut  gou- 
verner sans  amis  (1).  • 

Toutes  les  parties  étaient  tellement  combinées, 
qu'il  dut  avoir  certainement  l'espoir  de  réussir. 

Moyens  pour  enchaîner  le  peuple. 

Toujours  parler  de  soi-même,  en  flagornant  le 
]>euple,  en  sansculollisant  tout,  aux  dépens  même 
du  bien  public  ;  en  excluant  les  hommes  instruits  et 
ceux  qui  possédaient  quelques  biens,  de  toutes  les 
places,  pour  les  donner  à  des  hommes-  sans  talents 
et  sans  ressources,  mais  choisis  de  manière  à  ce  que 
le  peuple  crût  que  c'était  lui-même  que  Ton  choi- 
sissait, qu'on  n'était  occupé  que  de  lui. 

Moyens  pour  écarter  ceux  qui  auraient  pu  éclairer 
le  peuple. 

Jeter  dans  les  fers  les  talents,  l'esprit,  la  vertu,  la 
science  et  les  richesses;  imprimer  la  terreur  à  tous, 
au  point  que  ceux  qui  n'étaient  point  incarcérés 
n'osassent  parler,  de  peur  de  l'être  :  et  pour  impri- 
mer celle  terreur,  faire  sortir  de  terre  des  guillo- 
tines, semer  partout  des  tribunaux  à  la  Fouquier,à 
In  Dumas  ,  enchaîner  la  plume  des  journalistes  con- 
traires à  ses  vues;  payer  des  deniers  publics  les 
journaux  par  lui  commandés;  envoyer  des  commis- 
saires particuliers  ;  se  former,  au  moyen  des  Socié- 
tés populaires,  dirigées  par  une  seule  au'il  désignait, 
des  agents,  des  amis,  des  moules  à  places,  etc.;  en 

,^)Ce  projet  se  trouve  trace  de  la  maio de Saint-Jiut  dans 
sespapiera.  A.  M. 


un  mot,  organiser  contre  les  villes  trop  puissantes, 
pour  neutraliser  leur  influence,  un  système  appelé 
de  vive  force  (1),  qui  finissait  par  les  détruire  ;  rui- 
ner le  commerce,  pour  s.'en  rendre  maître  ;  anéantir 
les  arts,  en  haine  des  artistes,  pour  créer  un  simu- 
lacre d'égalité,  afin  de  distribuer  ensuite  des  secours 
ou  des  places,  sans  distinction,  puisque,  n'existant 
plus  de  mérite  transcendant,  Taroitraire  même  n'eût 
pu  faire  que  le  choix  de  l'ignorance. 

Séduire  les  âmes  faibles  et  vertueuses  par  quel- 
ques décrets  complaisants,  tel  que  celui  sur  1  Etre 
suprême  et  l'immortalité  de  l'âme  ;  enfin,  tout  étant 
détruit ,  et  la  confiance  publique  ayant  préparé , 
pour  lui-même,  une  révolution  favorable,  paraître 
^tout  à  coup  comme  le  rayon  vivifiant  après  l'orage, 
comme  la  Divinité  bienfaisante  qui  descend  pour 
sauver  le  monde  près  de  sa  perte. 

Moyens  employés  pour  détruire  la  Convention. 

Investir  deux  comités  de  tous  les  pouvoirs  qui 
n'appartenaient  qu'à  l'assemblée  des  représentants; 
se  choisir  parmi  ces  pouvoirs,  pour  les  exercer,  ceux 
qui  lui  plaisaient  le  plus  ;  circonvenir  de  tant  d'er- 
reurs, de  tant  de  rapports  mensongers,  de  tant  de 
faux  principes  adroitement  sophistiques,  les  repré- 
sentants du  peuple,  qu'ils  fissent,  sans  s'en  douter, 
ce  que  voulaient  les  comités,  ou  même  ce  qu'ils 
étaient  censés  vouloir,  dès  que  le  tyrani  parlait  en 
leur  nom  ;  jeter  dans  les  fers ,  ou  sur  l'échafaud, 
ceux  q^ui  avaient  des  yeux  et  des  moyens,  et  dont  on 
avait  a  craindre  l'énergie  et  les  lumières  ;  les  faire 
traduire  à  son  tribunal,  sans  les  entendre,  et  leur 
fermer  encore  la  bouche  sous  le  glaive,  par  des  for- 
mes tyranniques;  rendre  odieuse  la  Convention  na- 
tionale et  préparer  contre  elle  l'insurrection.  C'est 
ainsi  que  Robespierre  en  voulait  venir  à  la  destruc- 
tion de  cette  assemblée. 

Moyens  employés  pour  se  créer  un  gouvernement  « 
des  magistrats  et  des  soldats. 
Robespierre  connaissait  toute  l'ambition  des  mem- 
bres placés  à  la  tête  de  la  commune  de  Paris.  Lié 
avec  Payan,  homme  perfide,  scélérat  plus  profond, 
plus  dangereux  peut-être  que  tui-même,il  suivit  plus 
d'une  fois  les  conseils  de  ce  conspirateur.  Maximi- 
lien  avait  su  tirer,  contre  la  Convention,  un  parti 
utile  des  essais  de  cette  ambition  municipale.  Il  s'en 
fît  adroitement  un  moyen  d'élévation.  La  commune, 
composée  d'hommes  tarés,  de  fripons,  de  contre-ré- 
volutionnaires échappés  au  glaive  de  la  loi,  des 
Fleuriot,  des  Payan  et  autres,  presque  tous  créatures 
de  Robespierre,  presque  tous  nommés  par  lui  ;  cette 
commune,  dis-je,  aspirait  à  la  domination  sur  la  ré- 
publique. La  commune  tient  sous  ses  ordres  la  force 
armée  :  il  s'en  servira  d'autant  plus  sûrement  qu'il 
a  sauvé  de  l'échafaud  le  chef  de  cette  force  ar-r 
mée  (2). 

Ce  sénat  de  sans-culottes  ,  sans  moralité ,  sanf 
principes,  servira  à  Robespierre  pour  remplacer  la 
Convention  que  celui-ci  assiégera  par  la  force  ;  il  la 
décimera  par  un  comité  d'exécution,  et  enfin  il  ré- 

,  gnera. 

Ainsi  s'explique  un  passage  de  la  main  de  Maxi- 

'  milieu  sur  runitc  d'action  dans  le  gouvernement, 

(1)  Ce  système  est  indique  dans  une  lettre  de  CouthoD. 
(9)  On  se  rappelle  que,  dans  TaOTnire  d'Hébert,  Hanriotfat 
gravement  inculpé,  et  que  Robespierre  et  ses  complices  em- 
pêchèrent qu'il  ne  portât,  avec  ses  coaccusés,  la  peine  duo 
I   tt  ses  crimes.  A .  M. 

02 


490 


principe  expliqué  par  sa  conduite,  mieux  que  par  ses 
rtcrits.  .  ^^ 

Ce  seul  écrit  donl  nous  parlons  suffit  pour  prou- 
ter  que  Robespierre  aspirait  au  gouvernement  d  un 

wul.  ,         /^    .     •.  ix 

.  11  faut  une  TDionté  u5b  (écrivail-il.)-  •  . 

Qui  peut  douter  qu'il  la  voulait  faire  émaner  do 
|H)Uvoir  d'un  seul  homme,  lui  qui  créait  des  factions 
unaginaires  pour  fatiguer  les  Français  de  l'autorité 
de  plusieurs  «Sans  doute  le  despotisme  monarchique, 
contre  lequel  il  criait  sans  cesse,  pour  ramener  sans 
cesse  le  peuple  à  y  penser,  fut  à  ses  yeux  le  gouver- 
nement par  excellence;  car  il  trouvait  qu  il  n  y  a  pas 
de  division  de  volonté  où  un  seul  veut;  qu  il  ne 
peut  exister  de  faction  où  un  seul  a  tout  le  pouvoir. 
Aussi,  pour  ratUcher  le  Français  à  cette  volonté 
VNB,  avait-il  commencé  par  insmuer  avec  art  le  be- 
soin d'unecentraliténationicide,  resserrée  dans  l  en 
ceinte  d*un  comité  de  douze  membres.  Qu  on  s^ 
rappelle  comme  il  sut  isoler  bientôt  de  la  Conven- 
tion ce  comité  ;  comme  après  il  espéra,  en  neutrali- 
sant ou  en  homicidanl  les  membres  du  eouveme- 
ment,  établir  sa  domination  sur  les  débris  de  la 
puissance  décemvirale,  dont  il  n'avait  agrandi  Tau- 
torité  que  pour  la  ravir  à  la  Convention,  parce  qu  il 
crut  qu'il  tirerait  un  meilleur  parti  de  douze  mem- 
bres que  de  sept  cents  ;  comme  les  décemvirs,  aussi 
bons  calculateurs  que  lui,  et  par  un  même  échange 
de  bienveillance,  le  laissèrent  dans  les  mêmes  vues 
s'étouffer  d'une  redondance  de  pouvoirs.  Eh  I  qui 
doutera  de  l'existence  de  cette  conspiration,  dans 
laquelle  ont  trempé  les  membres  du  comité,  quel- 
ques uns  sans  le  savoir  et  sans  le  vouloir,  ou  subju- 
gués ptr  Tascendant  et  l'audace  de  leurs  collègues, 
mais  les  autres  par  ambition,  dans  l'espoir  de  tripler 
ou  de  quintupler  leur  puissance,  en  réduisant  peu  à 
peu  le  nombre  des  gouvernants ,  quand  on  se  rap- 
pellera qu'après  la  mort  d'Hérault  ils  ne  se  présen- 
tèrent point  pour  demander  son  remplacement,  s'en- 
richissant  ainsi  sans  pudeur  d'un  douzième  d'autorité 
qui  leur  faisait  espérer  de  nouveaux  héritages  de 
ceux  qu'ils  assassineraient  encore! 

On  va  se  convaincre,  par  quelques  traits  du  fameux 
catéchisme  de  Robespierre,  qu  il  n'espéra  pouvoir 
arriver  au  sommet  de  ce  gouvernement  un  qu'à  tra- 
Yers  les  brouillards  et  le  chaos  de  l'anarchie. 

•  Les  danger»  de  l'intérieur  (dit-il)  viennent  des 
bonrgeois.  Pour  convaincre  les  bourgeois,  il  faut 
rallier  le  peuple.  • 

Voilà  le  projet  de  nivellement  indiqué. 

•  11  faut  que  l'insurrection  continue qu'elle 

s'étende  de  proche  en  proche  sur  le  même  plan  ; 
que  les  sans-culottes  soient  payés  et  restent  dans  les 
villes.  • 

Voilà  le  projet  d'anarchie. 

•  Il  faut  leur  procurer  des 
éclairer,  ■ 

Quelle  alliance  disparate  dans  ces  deux  mots! 
comme  si  l'on  pouvait  allumer  la  colère  au  flambeau 
de  la  raison  ! 

«  Il  faut  exalter  l'enthousiasme  républicain  par 
tous  les  moyens  possibles.  • 

Par  les  crimes  sans  doute  ?  Il  l'a  prouvé. 

•  Il  faut  que  la  Convention  se  serve  du  peuple.  • 
Ainsi,  ce  factieux  réduit  le  peuple  au  rôle  d'un  vil 

instrument! 

Il  n'est  qu'une  réponse  à  faire  aux  incrédules  qui 
aficctent  des  doutes  encore  sur  l'existence  de  la  con- 
spiration du  9  thermidor;  c'est  de  les  renvoyer  à  la 
lecture  des  pièces  qui  suivent  : 

Lettre  dBgron^  aide  de  eamp^  à  Hantiot. 

•  Mon  général»  vu  le  rapport  qui  vient  de  m^etre  fait. 


r  procurer  des  armes,  les  eolérer^  les 


je  crois  que  tons  feriei  bien  de  monter  I  dieval  et  de  voua 
montrer  dans  Paris.  » 

Ordre  du  général  Hanriot^  du  9  thermidor. 

fl  Le  conseil  général  de  la  coaimune  vient  d'arrêter, 
citoyen ,  que  le  commandant  général  de  la  force  année 
dirigera  le  peuple  contre  les  conspirateurs  qui  oppriment 
les  patriotes,  et  délivrera  la  Convention  de  l'oppression 
des  conlre-révolulionnaires.  Tu  apporteras  tous  tes  soins 
pour  meUre  à  exécution  ledit  arrêté.  —  Signé  le  général 
Hariiot.  —  Il  7  aura  en  conséquence  une  réserve  de 
deux  cents  hommes  prêts  à  marcher  aux  ordres  des  magis* 
trats  du  peuple,  t 

Au  dos:  «  Etat-major.  A  Tadindam fènéral^  la 6*  lé- 
gion ,  cour  Saint-Blarlio*  - 

Autre  pièce.  Réunion  des  conspirateurs  à  la  com- 
mune de  Paris. 

Commune  de  Paris.  —  Département  de  poUee. 

•  Couthon ,  tous  les  patriotes  sont  proscrits  ;  le  peuple 
tont  entier  est  levé  ;  ce  serait  le  trahir  que  de  ne  pas  te 
rendre  avec  nous  à  la  commune,  où  nous  sommes  acluel- 
lemeot. 

Signé  RoaispiatiB  atné,  RoBtsrtaïaa  jeunCf 
Saiht-Jost. 

Commune  de  Paris,  —  Agent  national. 

•  Le  comité  d'exécution,  nommé  par  le  conseil»  a  besoin 
de  tes  conseils;  viciis-y  sur-le-champ. 

«  Membres  du  comité  d'exécution  :  Chàtelêt,  Coffinbal, 
Lerebours,  Grenard,  Legrand,  Desboisseaux,  Arthur» 
Payan ,  Louvet. 

Signé  Patak  ;  U  maire  de  Paris,  LiscoT-FLBoaiOT  ; 
Mobkhb,  iubsiUut.  • 
Robespierre  avait  regardé  la  commune  de  Paris 
comme  un  instrument  propre  à  ses  desseins. 

il  fallait  donc  consacrer  le  pouvoir  de  la  com- 
mune sur  l'autorité  départementale.  11  paraît  que  la 
commune  vous  devait,  citoyens,  présenter  une  pé- 
tition tendant  à  la  suppression  du  département, 
comme  autorité  rivale,  et  vous  proposer  de  nommer 
le  département,  commission  des  contributions  pu- 
bliques. 

Robespierre  a  rédiçé  de  sa  main  même  ce  projet 
d'arrêté,  qui  prouve  le  dévouement  réciproque  des 
municipaux  et  du  tyran. 

Il  n'est  qu'une  réponse  à  faire  à  d'autres  incré- 
dules qui  n'osent  croire  encore  au  projet  de  conspi- 
ration de  Robespierre.  Pour  les  Sauver  aes  tourments 
du  doute  et  mettre  à  Taise  leur  conscience,  Robes- 
pierre a  pris  soin  lui-même  de  tracer  le  plan  de  sa 
conspiration. 

10  (dit-il)  Avoir  de  Targent; 

^o  Une  Adresse  aux  départements; 

30  Des  CQurriers  près  nos  commissaires  aux  ar- 
mées; 

40  Une  fédération  de  la  commune  de  Paris  avec 
Marseille  ; 

Ce  projet  anarchique  a  été  réchauffé^  depuis  sa 
mort,  par  les  meneurs  des  Sociétés  populaires  ; 

5®  Changements  de  ministres  et  de  la  poste  ; 

60  Suppression  des  papiers  contre  -  révolution- 
naires; 

ToAimer  les  sans-culottes  et  les  salarier  ; 

80  Faire  suspendre  les  travaux  jusqu'à  ce  que  la 
patrie  soit  sauvée; 

C'est-à-dire  jusqu'au  règiie  de  Robespierre,  fermer 
les  canaux  vivifiants  deFindiiStrie,  du  commerce, 
des  subsistances,  et  faire  des  Français  un  peuple  de 
loups,  qui  s'entre-dévorent  pour  vivre: 

••  Entin,  changer  le  local (1). 

(i  )  C'est  Traiiemblablement  pour  chercher  ce  local ,  que 
rinnmbe  Couthon,  accompagné  de  Lebas  et  monté  aurson  Bu- 
cëphale,  parcourut,  dix  jours  avant  le  9  thermidor,  la  com- 
nune  de  Versailles,  principalement  le  ci-de?ant  cfaAiean  ci 
•es  dépcttdaiicea.  A«  M* 


491 


Ce  dernier  mot  est  la  preuve  dn  projet  de  dissou- 
dre la  Convention.  Il  coïncide  partaitement  avec 
Taveu  fait  par  Eiie  Lacoste  à  cette  tribune,  le  jour 
même  ou  le  lendemain  de  la  chute  du  tyran  ;  que, 
six  mois  auparavant,  Robespierre  avait  proposé  aux 
deux  comités  réunis ,  la  suspension  des  séances  de 
rassemblée;  aveu  qui  n'aura  pas  frappé  sans  doute 
votre  esprit  sans  y  laisser  Tmtime  conviction  de 
l'intelligence  entre  Robespierre  et  les  autres  mem- 
bres du  gouvernement,  puisqu'il  n'est  que  l'intérêt 
commun  qui  les  unissait  pour  le  crime  qui  ait  pu 
alors  les  empêcher  de  dénoncer  le  criminel. 

Ce  dernier  mot  prouve  encore  que  Robespierre, 
QUI  craignait  l'œil  d'Argus  des  Parisiens,  après  avoir 
épuisé,  pour  perdre  cet  imposant  sénat  de  sept  cents 
patriotes  qui  le  gênait,  les  ressources  de  la  calom- 
nie  et  de  l'avilissement,  crut  qu'il  ne  pouvait  mieux 
faire,  pour  s'en  rendre  maître,  que  de  l'entraîner 
bors  de  Paris. 

Un  des  grands  moyens  de  dissoudre  la  Convention 
était  d'avilir  ses  membres  ;  c'est  un  de  ceux  aussi 
dont  il  fit  le  plus  d'usage,  et  son  ftme  l'embrassait 
d'autant  plus  avidement  qu'elle  lui  faisait  éprouver, 
dans  le  bonheur  de  se  défaire  d'un  ennemi  au'il  re* 
doutait,  le  plaisir  si  doux  aux  petites  âmes  aoutra- 
ger  encore  ses  victimes. 

Tous  les  misérables  ({u'il  employait,  et  gui  con* 
naissaient  son  faible,  avaient  la  charge  de  lui  fournir 
sur  ses  collègues  des  notes,  qui  devinrent  plus  d'une 
fois  dans  ses  mains  des  notes  de  proscription.  Il 
éprouvait  une  sorte  de  volupté  à  recopier  de  sa  pro- 
pre main  quelques-unes  de  ces  notes  dénoncia- 
trices, qu'il  jetait,  comme  un  poignard,  dans  une 
Société  trop  mmeuse,  presque  toute  composée  de  ses 
sicaires. 

Nous  ne  nous  égarerons  pas  dans  ces  détails  inu- 
tiles de  notes  et  de  souvenirs  qu'on  pourra  consul- 
ter :  il  nods  suffira  de  dire  que  partout  c'est  la  haine, 
c'est  l'envie  qui  s'attache  au  mérite  ou  au  patrio- 
tisme, comme  la  rouille  à  l'acier  pour  le  détruire. 
Nous  ne  pouvons  cependant  nous  empêcher  d'ob- 
server que,  dans  ces  nouvelles  tablettes  de  Sylla,  un 
des  grieEi  répétés  avec  le  plus  d'afiectation  contre  tes 
représentants  qu'il  veut  perdre,  c'est  de  ce  qu'ils 
n'ont  pas  montré  une  foi  aveugle  dans  l'infaillibilité 
du  comité  de  salut  public.  Partout  on  lit  : 

«  Il  cabale  pour  armer  la  Convention  contre  le 
comité;  •  ou  •  il  n'aime  pas  le  comité;  «ou  «il  s'est 
coalisé  pour  renverser  le  comité.  • 

Nous  ne  pouvons  nous  empêcher  encore ,  pour 
faire  remarquer  les  petits  ressorts  de  la  haine  d'un 
petit  homme,  de  vous  lire  quelques  phrases  de  ces 
notes  curieuses  ;  nous  reviendrons  après  au  plan 
d'attaque  dirigé  contre  la  représentation  nationale 
qu'il  voulut  concentrer  dans  l'enceinte  du  sénat  des 
undécemvirs,  espérant,  comme  nous  l'avons  observé 
plus  haqt,  qu'il  briserait  plus  aisément  onze  puis- 
sances que  sept  cents.  Vous  trouverez  ces  preuves 
dans  un  rapport  sur  la  prétendue  faction  Fabre; 
rapport  qu'il  n'a  pas  osé  prononcer. 

Voici,  avant,  quelques  traits  curieux  de  sa  haine. 

Ici  il  s'exprime  en  ces  termes  sur  un  député  (et 
qui  ne  voit  pas  le  bout  d'oreille?) 

•  Il  a  déclamé,  dit-il,  contre  le  décret  snr  le  tri- 
bunal révolutionnaire....  Il  a  été  le  plus  fougueux 
défenseur  du  système  d'athéisme  ;  il  n'a  cessé  de 
faire  du  décret  qui  proclame  l'existence  de  l'Etre  su- 
prême un  moyen  de  susciter,  dans  la  Montagne,  des 
ennemis  au  gouvernement,  et  il  y  a  réussi.  Le  jour 
de  la  fête  à  I  Etre  suprême,  il  s'est  permis  sur  ce  su- 
et  les  plus  grossiers  sarcasmes  et  les  déclamations 
[es  plus  indécentes.  Il  faisait  remarquer  avec  mé- 
chanceté,  aux  mambres  de  la  Conveotiop,  les  mar« 


{; 


ques  d'intérêt  que  le  public  donnait  ail  prudent* 
pour  •tii*er  contre  lui  des  inductions  atroces,  dans  le 
sens  des  ennemis  de  la  république.  • 

Digne,  en  conséquence,  de  la  guillotine. 

Là,  dans  un  autre  député,  il  voit  un  complice 
d'Hébert  et  de  Cloots,  et  il  fait  à  cette  occasiou  un 
aveu  qu'il  n'est  pas  inutile  de  recueillir  :  c'est  que 
le  comité  de  salut  public  faisait  la  censure  des  ou* 
vrages  de  théâtre,  et  arrêtait  ceux  qui  n'étaient  pas 
à  V  ordre  du  jour  ;  et  l'on  sait  ce  que  c'était  que  l'or- 
dre du  jour  dans  ces  heureux  temps.  Ce  fait,  qui  n*a 
pas  besoin  d'antre  preuve  que  la  notoriété  publi- 
que, l'incarcération  et  le  supplice  des  écrivains  qui 
n'avaient  pu  deviner,  deux  ans  avant,  ce  que  serait, 
deux  ans  après.  Tordre  du  jour,  est  confirmé  par 
une  lettre  de  l'agent  national  Payan  à  Robespierre, 
dans  laquelle  il  est  dit  que  le  comité  de  salut  pa- 
blic,  qui  est  aussi  pour  Payan,  comme  on  le  verra, 
la  perfection  des  comités,  ne  doit  pas  laisser  repré- 
senter la  tragédie  de  Timoiéon;  et  en  effet  TimoUon 
ne  fut  pas  représenté. 

Nous  ne  pouvons  passer  sous  silence  ce  trait  non- 
veau  de  petitesse. 

Robespierre,  parlant  d'un  de  ses  collègues,  s'ex- 
prime ainsi  : 

«  A  la  Convention,  il  fut  un  des  premiers  qui  in- 
troduisirent l'usage  de  l'avilir  par  (les  formes  iiidé- 
centes,  comme  d'y  parler  le  chapeau  sur  la  tête.  • 

Il  en  est  mille  autres  encore  qui  ne  prouvent 
rien,  sinon  que  la  malignité  écoute  tout  et  se  noor^ 
rit  de  tout. 

11  en  est  d'autres  plus  intéressants  et  plus  sérieux, 
qui  attestent  ce  qui  n'est  ici  qu'indiqué  :  le  complot 
attentatoire  à  la  représentation  nationale,  le  dessein 
fortement  conçu  de  décimer  ses  membres. 

Noies  extraites  d*un  cahier  de  Robespierre* 

«  Tenir  Tarmée  révolutionnaire  prête,  en  rappe- 
ler les  détachements  à  Paris  pour  déjouer  la  conspi- 
ration.* 

Ailleurs  :  «  Demander  aue  Thomas  Payne  soit  dé- 
crété d'accusation,  pour  tes  intérêts  de  l'Amérique 
autant  que  de  la  France.  » 

Pourquoi  Thomas  Payne  plutôt  que  d'au  très?  C*e8t 
qu'il  avait  travaillé  à  fonder  la  liberté  dans  les  deux 
mondes. 

Ailleurs  :  «  Poursuivre  les  députés,  chefs  de  con- 
spiration, les  atteindre  à  quelque  prix  que  ce  soit.  » 

Ailleurs:  «  Punir  les  conspirateurs surtout  les 

députés.  • 

Cette  doctrine  destructive  de  l'autorité  nationale, 
répandue  partout,  multipliait  partout  sa  rongeante 
ivraie. 

Partout  le  projet  de  miner  le  pouvoir  représen- 
tatif; partout  celui  de  créer  le  décemvirat  des  eo- 
mités. 

Un  partisan  de  la  tyrannie,  dans  une  lettre  écrite 
au  tyran,  où  il  flagorne  et  le  tyran  et  les  comités, 
«  trouve  très-étonnant  qu'un  membre  de  la  Con- 
vention, qui  n'est  ni  du  comité  de  salut  public,  ni  du 
comité  de  sûreté  générale,  ait  osé,  sans  avoir  préa* 
lablement  consulté  ces  deux  comités,  et  sans  leur 
permission,  proposer  une  mesure  qu'il  n'apparte- 
nait, dit-il,  qu'à  ces  comités  de  proposer.  • 

{La  suite  dewïain.) 

SÉANCE  DU  29  PLUVIOSE. 
Présidence  de  Barras^ 
Santerre,  brasseur,  fait  passer  à  la  Conveotion  nationale 
des  observations  qu'il  croit  utiles  aux  armées;  cesob8er<» 
VDtioDs  sont  relatives  au  projet  de  décret  présenté  à  la  di»i 
cussion  par  Dubois-Craucé ,  dont  U  appuie  las  priocipales 
dbpoflmons* 


492 


LHMemblée  en  ordonne  le  renToi  an  comité  de  salut  pu- 
blic. 

—  Un  secrétaire  donne  lecture  d*une  lettre  de  François 
f^eufcbâteau ,  fuge  de  paix  du  canton  de  Viclicray,et 
nommé  membre  du  tribunal  de  cassation,  du  20  plu?iose 
dernier,  qui,  après  avoir  remercié  la  Convention  du  té- 
moignage de  confiance  dont  elle  a  bien  voulu  Tbonorer  le 
14  nivôse ,  expose  le  mauvais  état  de  sa  santé ,  qui  Pempé» 
cbe  de  se  rendre  à  son  nouveau  poste,  et  il  offre  à  la  Con- 
vention le  tribut  de  ses  idées  sur  des  objets  qui  intéressent 
la  république.  Les  voici  : 

François  Neafchâleau^  à  la  Convention 
nationale, 

t  Citoyens  représentants,  recevez  mes  réflexions  sur 
rappel  nominal  des  3  et  4  frimaire  dernier. 

m  Ce  sont  des  morceaux  précieux  que  ces  appels ,  où 
Ton  imprime  les  motifs  de  ceux  qui  les  donnent,  et  qui, 
dans  quelques  lignes,  souvent  dans  quelques  mots,  livrent 
leur  physionomie  et  dévoilent  leur  conscience. 

c  II  y  a  une  chose  que  les  législateurs  ne  doivent  jamais 
oublier  ;  chacun  de  leurs  procès*verbaux  est  un  feuillet  de 
notre  histoire,  et  la  postérité  qui  lira  celle  histoire  s'a- 
f  ance  tous  les  jours. 

c  Je  crois qiTelle  relèvera ,  dans  Tappel  nominal,  des  8 
el  h  frimaire  dernier,  une  omission  importante ,  qui  doit 
peiner  les  patriotes  et  qui  doit  être  réparée. 

«  On  a  dû  faire  cet  appel  sur  la  liste  la  plus  complète 
des  membres  existants  de  la  Convention  nationale. 

fl  Pourquoi  donc  n*y  trouve-t-on  pas,  pour  les  départe- 
ments de  l'Aisne,  delà  Dordogne,  de  la  Haute-Loire,  du 
Pny-de-DAme  et  de  la  Marne ,  les  noms  des  citoyens  Qui- 
nette,  Lamarque,  Camus,  Bancal  etDrouet? 

«  Leurs  places  ne  sont  point  vacantes.  Certes  elles  sont 
oceu|>ées  d'une  manière  glorieuse  ;  et  c'est  un  saailége  de 
rayer  du  tableau  des  noms  qui  lui  font  tant  d'honneur. 

•  On  me  dira  peut-être  qu'il  était  inutile  d'appeler  ces 
représentants,  par  la  certitude  cruelle  qu'ils  ne  pouvaient 
refendre. 

•  Cependant  on  a  proclamé  les  noms  des  députés  atisents 
par  congé  ou  par  mission,  ou  par  d'autres  motifs,  et  qui 
ne  pouvaient  pas  répondre  davantage.  On  ne  devait  pas 
les  omettre,  puisque  la  liste  porte  sur  l'assemblée  entière. 
On  devait  donc  aussi  faire  entendre  les  noms  de  ces  cinq 
illustres  captifs. 

«  Je  ne  sais  si  je  me  trompe  ;  mais  il  me  semble  que  ces 
noms,  rappelés  dans  leur  ordre,  pourraient  être  suivis 
^Tnn  silence  religieux,  et  que  les  idées  accessoires  que  ré- 
veillerait ce  silence  ne  pourraient  obtenir  sur  les  délibé- 
rations qu'une  influence  salutaire. 

«  Enfin,  ces  noms  nous  sont  sacrés  ;  ils  appartiennent  à 
la  liste  de  la  Convention  ;  un  décret  solennel  doit  les  y  ré- 
tablir, et  je  m'applaudirai  d'y  avoir  fait  songer. 

«  Salut  el  fraternité.         François  Nbufchatbau.  > 

La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  cette 
lettre,  passe  à  Tordre  du  jour,  moiivé  sur  ce  qu*aucun 
décret  n'ordonnant  que  ces  noms  seraient  rayés,  ils  n'ont 
pas  dCl  être  ôtés  des  listes  ni  omis  dans  les  appels. 

BoissiEn,  au  nom  des  comités  de  marine,  colonies 
et  des  finances:  Citoyens,  vous  avez  déclaré  que 
votre  intention  est  de  donnera  la  marine,  et  surtout 
aux  forces  navales  de  la  république,  toute  Téncrgie, 
toute  l'activité  et  toute  retendue  dont  est  suscep- 
tible cette  intéressante  portion  de  la  puissance  na- 
tionale. 

Je  viens,  au  nom  de  vos  comités  de  marine,  des 
colonies  et  des  finances,  vous  proposer  une  mesure 
qui  doit  préparer  et  assurer  Texccution  des  vastes 
projets  que  le  gouvernement  a  certainement  conçus 
et  adoptes  pour  la  prompte  restauration  de  nos  vais- 
seaux, et  pour  de  nouvelles  et  promptes  construc- 
tions de  bâtiments  de  mer  de  toute  nature.  Cette 
mesure,  commandée  par  la  justice  et  parla  nécessité 
de  rétribuer  également  ceux  qui,  sur  mer  comme 
sur  terre,  dans  les  arsenaux  de  la  guerre  comme 
dans  ceux  de  la  marine,  consacrent  tous  leurs  mo- 
nrents  à  vous  procurer  les  moyens  tf  être  partout 


victorieux,  consiste  à  fixer,  d'après  les  bases  que 
vous  avez  adoptées  dans  toutes  les  parties  du  gou- 
vernement, les  traitements  pécuniaires  des  officiers 
militaires  et  civils,  des  ouvriers  et  de  tous  les  em- 
ployés aux  mouvements  et  aux  travaux  dans  les 
postes  militaires  de  la  république. 

Vous  ne  serez  point  étonnés  d'apprendre  que  d'in- 
stantes réclamations  s*élèvent  de  toutes  parts ,  et 
depuis  longtemps ,  sur  la  modicité,  disons  mieux, 
sur  rinsuffisance  de  traitement  des  individus  de  tous 
grades  et  de  toutes  classes,  employés  dans  la  ma- 
rine. 


mer 


Je  ne  parle  pas  ici  de  la  paye  allouée  aux  gens  de 
er  lorsqu'ils  sont  à  bord  des  vaisseaux  de  la  répu- 


blique. Successivement  accrue,  elle  peut  suffire  à 
des  républicains  qui  ne  calculent  pas  leurs  intérêts 
pécuniaires  lorsqu'il  s*adt  de  combattre  pour  la 
cause  delà  liberté  et  de  l'égalité  ;  les  fournitures  en 
nature  qui  leur  sont  faites  à  nord  des  vaisseaux,  ren- 
dent moins  fréquentes  et  moins  onéreuses,  les  occa- 
sions de  s'apercevoir  du  prix  excessif  auquel  sont 
montés  les  objets  de  première  nécessité. 

Mais  les  officiers  militaires  et  civils,  et  les  em- 
ployés et  ouvriers,  dont  les  uns  sont  fréquemment 
et  les  autres  constamment  dans  les  ports,  ne  peu- 
vent plus  vous  taire  que  la  rétribution  que  la  répu- 
blique accorde  à  leurs  travaux  n*est  plus  en  propor- 
tion avec  les  dépenses  indispensables  auxquelles  ils 
sont  obligés. 

Les  traitements  des  officiers  militaires  et  civils  de 
la  marine,fixés  par  l'Assemblée  constituante,au  com- 
mencement de  Vannée  1791,  sur  des  bases  arrêtées 
même  dès  l'année  1790,  et  qui  furent  dès  lors  re- 
connues inférieures  à  celles  adoptées  pour  le  traite  - 
ment  des  mêmes  officiers  dans  le  service  de  terre, 
n'ont  reçu  aucune  espèce  d'augmentation. 

Vous  avez,  à  différentes  époques,  jugé  convenable 
d'accroître  la  paye  des  officiers  et  des  a'dministra- 
I  teurs  de  l'armée  de  terre  ;  votre  décret  du  2  thermi- 
dor dernier  a  consacré  vos  principes  à  ceté^ard.  Par 
3uelle  fatalité  les  officiers  et  les  administrateurs 
e  la  marine ,  plus  faiblement  payés  d'abord  que 
leurs  collègues,  à  grade  correspondant  dans  le  dé- 
partement de  la  guerre,  n'ont-ils  pu  obtenir,  dans 
aucune  circonstance,  de  partager  les  heureux  effets 
de  l'attention  que  vous  avez  donnée  à  la  position  de 
ces  derniers? 

Toutes  les  considérations  militaient  cependant  en 
faveur  des  marins;  nous  vous  épargnerons  le  détail 
de  toutes  celles  qu'ils  ont  exposées  à  vos  comités,  et 
qui  ont  été  unanimement  jugées  déterminantes.  Il 
nous  suffira  de  vous  dire  qu'elles  établissent  évi- 
demment que  les  officiers  militaires  et  civils  de  la 
marine ,  qui  en  1790  avaient  été  rétribués  à  peu 
près  comme  les  officiers  de  terre  du  grade  corrcs- 

(tondant ,  ne  reçoivent  plus  maintenant  qu'environ 
a  moitié  de  ce  qui  est  accordé  par  les  lois  çctuelles 
à  ces  derniers. 

Quant  aux  ouvriers  de  tout  état  et  de  tout  gr;ide, 
et  aux  individus  employés  aux  travaux  et  aux  autres 
mouvements  dans  les  ports  de  la  république,  nous 
devons  vous  dire  que  vous  êtes  les  premiers  repré- 
sentants de  la  nation  qui  vous  soyez  occupés  de  ces 
utiles  et  respectables  citoyens,  sous  le  rapport  de 
leur  organisation  et  de  la  fixation  de  leur  paye;  vous 
déterminâtes  l'une  et  l'autre  par  votre  décret  du  25 
janvier  1793  (vieux  style). 

Accoutumés  à  la  parcimonie  de  l'ancien  gouver« 
nement,  les  ouvriers  des  ports  reçurent  avec  recon- 
naissance une  loi  qui  leur  permettait  alors  de  (sub- 
sister, en  vivant  néanmoins  avec  économie  et 
frugalité.  11  faut  observer  qu'à  cette  époque  la  moi- 
tié de  leur  paye  s'elTectuait  en  numéraire,  et  leur 


498 


procurait  quelanes  factlit<$s  dont  ils  ne  jonirent  pas 
longtemps.  La  loi  du  8  avril  1793  (vieux  style)  sup- 
prima ce  mode  de  payement,  et  dédommagea  taibie- 
ment  les  ouvriers  des  avantages  qu'ils  y  trouvaient 
en  leur  accordant  le  quart  en  sus  de  la  totalité  de 
leur  paye ,  en  indemnité  du  numéraire  qu'ils  rece- 
vaient. 

Veuilles  considérer,  citoyens,  que  les  ouvriers  des 
ports  sont  contraints,  par  la  loi  sur  les  classes  de  la 
marine,  à  exercer  leur  industrie  loin  de  leurs  foyers, 
souvent  à  soixante,  quatre-vingts  ou  cent  lieues  de 
leur  domicile  habituel,  et  d'abandonner  pendant  ce 
temps-là  leurs  femmes  et  leurs  enfants,  auxmiels  il 
leur  est  impossible  de  faire  passer  le  moinare  se- 
cours; car,  quelque  bons  époux  et  bons  pères  que 
soient  ces  estimables  citoyens,  quelles  épargnes 

Îœuventils  faire  sur  une  paye  aussi  modique  que  la 
eur? 

La  paye  la  plus  générale  accordée  aux  individus 
employés  aux  travaux  et  aux  mouvements  dans  les 

Sorts  s  élève  à  peine,  y  compris  le  quart  en  sus  pro- 
uit  par  la  loi  du  8  avril  1793,  à  environ  46  ou  50 
sous  par  jour  de  travail,  et  il  en  est  un  grand  nom- 
bre dont  la  paye  ne  s'élève  qu'à  15,  20  et  25  sous. 

Vos  comités  de  marine,  des  colonies  et  des  finan- 
ces, ont  dû  croire  qu*un  des  moyens  de  parvenir  au 
but  que  vous  vous  êtes  propose,  était  d'établir  vos 
forces  navales  sur  un  pied  respectable,  et  qui  pût 
forcer  vos  ennemis  à  vous  proposer  cette  paix  que 
TOUS  n'accorderez  qu'honorable  pour  vous,  et  qfue 
lorsqu'elle  assurera  sur  une  base  inébranlable  le 
bonheur  du  peuple  et  l'indépendance  de  la  républi- 
que française. 

Âu  surplus,  les  mesures  que  nous  vous  proposons 
ne  sont  que  provisoires  et  en  attendant  que  vous 
fassiez  jouir  la  marine  des  bienfaits  d'une  législation 
complète,  qui  se  prépare  par  des  travaux  assidus. 

Boissier  propose,  à  la  suite  de  son  rapport,  un 
projet  de  décret  qui  est  adopté  en  ces  termes  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  ut  comités  de  marine  et  colonies,  et  des  finances, 
décrète: 

'  «  ArL  I*'.  Provisoirement,  et  jusqu'à  ce  qu'il  ait  été 
statué  sur  Torganisation  de  la  marine,  les  appointements, 
soldes  ou  payes  des  officiers  militaires  et  civils,  des  maî- 
tres,  entretenus ,  ouvriers,  journaliers,  marins  et  autres 
employés  de  la  marine ,  sous  les  dénominations  ci-après, 
sont  fixés  aiusi  qu'il  suit  : 

«  IL  Les  capitaines  de  vaisseaux  auront,  par  mois,  sa- 
voir :  ceux  de  la  première  classe,  550  liv.  ;  ceux  de  la 
deuxième,  450  liv.  ;  ceux  de  la  troisième,  850  liv. 

•  Les  lieutenants  de  vaisseau  auront,  par  mois:  ceux 
de  la  première  classe,  800  liv.  ;  ceux  de  la  deuxième, 
S75  liv.  ;  de  la  troisième,  250  liv. 

•  Les  enseignes  de  vaisseau  entretenus,  et  ceux  des  en- 
seignes non  entretenus  qui  sontappelésau  service,  auront 
par  mois  175  liv. 

«  III.  Les  aspirants  de  la  marine  qui  sont  à  leur  troi- 
sième année  d'entretien  aoront,  par  mois,  75  liv.  ;  ceux 
qui  sont  à  la  deuxième,  60  liv.  ;  ceux  qui  sont  à  la  pre- 
mière, 45  liv. 

«  lY.  La  loi  du  4  pluviôse  courant,  relative  aux  indem- 
nités à  accorder  aux  fonctionnaires  publics  civils,  sera 
commune  aux  employés  civils  entretenus,  de  tous  grades, 
aux  ingénieurs I  constructeurs,  aux  officiers  employés  aux 
mouvements  des  ports,  et  aux  maîtres  d'arts,  d'ouvrages, 
de  manœuvres,  de  canonnage,  etc.,  entretenus ,  et  aux 
instituteurs  sédentaires  entretenus,  employés  dans  les  ports 
de  la  marine  de  la  république. 

t  V.  Les  gardiens  entretenus  et  ceux  des  marins,  ete. , 
employés  aux  travaux  et  mouvements  ïans  les  ports  et  ar- 
senaux de  la  marine  de  la  république,  dont  la  solde  ou  la 
paye  sont  fixées  et  payées  par  mois,  reeevront,  en  sus  du 
traitement  qui  leur  est  assigné  par  les  lois  des  25  janvier 
et  8  avril  i798|  une  augmentadoD.de  paje  fixe»  savoir  % 


fl  Ceux  qui ,  par  la  loi  du  Î5  Janvier  I7M  (vletix  style}« 
avaient  40  liv.  par  mois  et  au-dessus,  la  somme  de  86  liv* 
par  mois. 

•  Ceux  qui ,  par  la  même  loi,  avaient  une  paye  ou  ime 
solde  inférieure,  celle  de  24  liv.  par  mois. 

«  VI.  Les  arUstes,  maUres  ou  entretenus,  conlre-mal- 
tres,  aides,  ouvriers,  journaliers,  marins,  et  tous  autres 
employés  aux  travaux  et  aux  mouvements  dans  les  ports, 
chantiers  et  ateliers  de  la  marine  de  la  république,  dont  la 
solde  ou  la  paye  sont  réglées  par  jour,  recevront  aussi  par 
jour,  en  sus  de  ce  qui  leur  est  assigné  par  les  lois  des 
25  janvier  et  8  avril  1793,  une  augmentation  de  paye  fixe, 
savoir  : 

•  Ceux  qui,  par  la  loi  du  25  janvier  179S  (vieux style j, 
avaient  1  liv.  dO  sous  par  jour  et  ao-dessos,  la  somme  de 
i  liv.  iO  sous  par  jour. 

•  Ceux  qui,  par  la  même  loi  t  avaient  de  20  à  29  loiig 
par  jour,  celle  de  20  sous. 

«  Ceux  qui,  par  la  même  loi,  avaient  de  12  à  19  soQspv 
jour,  celle  de  dO  sous. 

•  Ceux  enfin  qui,  par  la  même  loi,  avalent  une  pajre 
inférieure,  celle  de  5  sous  par  jour. 

•  Vil.  Au  moyen  des  dispositions  ci-dessus,  qui  seront 
exécutées  à  compter  du  1*'  nivôse  dernier,  les  arrêtés  des 
comités  ou  des  représentants  du  peuple  en  mission  dans  les 
ports  ou  près  des  armées  navales,  relatifs  à  des  augmen» 
talions  de  paye,  demeureront  sans  effet,  à  compter  dn 
même  jour  !•'  nivôse. 

«  VIII.  Il  n'est  rien  changé  par  le  présent  décret  aux  mw 
rétés  des  comités  ou  des  représentants  du  peuple  en  mis- 
sion ,  relatifs  à  la  matière  de  diverses  fonctions  dans  les 
ports  et  arsenaux  de  la  marine  de  la  république,  et  aux 
trailemenU,  soldes  ou  payes  attribués  aux  individus  qnl 
ont  élé  choisis  pour  les  exercer. 

•  IX.  La  présente  loi  n'est  point  applicable  aux  appotn» 
temeots,  soldes  ou  payes  particulières  au  service  ik  la  mer, 
ou  qui  sont  payés  seulement,  lorsque  les  individus  aax* 
quels  ils  sont  atuibués  sont  à  bord  des  bâtiments  de  la  ré* 
publique,  i 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

— Sur  le  rapport  de  Saint-Martin,  la  Convention  rétablit 
dans  la  jouissance  d'une  pension  de  900  I.  un  octogénaire 
infirme,  décliu  pour  n'avoir  pu  exécuter  ni  même  connai* 
u>e,  pendant  nue  maladie  quil  a  faite,  la  loi  du  ISiep* 
tembre  1791. 

— Lacombe-Saint-Michel,  au  nom  du  comité  de  salut  pu- 
blic, fait  un  rapport  par  lequel  il  expose  qu'il  a  paru  plut 
avantageux  au  comité  de  mettre  les  charrois  en  entreprise 
ou  en  régie  intéressée  que  de  les  laisser  en  administration  : 
4*  pour  épargner  les  dépenses  et  ménager  la  consomma* 
tion  des  chevaux  ;  2*  parce  qu'il  est  reconnu  que  l'intérêt 
particulier  arrive  toujours  mieux  au  but  que  des  agents 
particuliers  de  la  république,  déjik  trop  mulUpliés,  dont 
l'insouciance  égale  souvent  l'ignorance. 

Lacombe  propose  ensuite  à  la  Convention  d^apnrouver 
les  vues  présentées  par  le  eomité ,  et  de  le  charger  de  pren- 
dre les  mesures  ultérieures  nécessaires  pour  améliorer  le 
service  des  charrois. 

CoupPB  (des  Côtes-du-Nord)  :  Je  désirerais  one, 
préalablement  à  toute  approbation,  les  marchés  his- 
sent imprimés  et  distribues  aux  membres  de  la  Con- 
vention ;  autrement  nous  approuverions,  nous  rati- 
fierions ce  que  nous  ne  connaissons  pas. 

Cambon  :  J*appuie  fortement  cette  proposition. 
Nommé  commissaire  parle  comité,des  finances,  nour 
assistera  la  délibération  du  comité  de  salut punlic, 
je  connais  les  marchés  :  les  bases  en  sont  bonnes, 
utiles  ;  mais  il  faut  qu'elles  vous  soient  connues  : 
c*est  une  affaire  de  300  à  360  millions  par  an  ;  c*est 
pour  cela  qu'il  ne  faut  pas  prononcer  sans  être  bien 
mstruit. 

La  Convention  ordonne  l'impression  des  marchés  et  Ta* 
{ournement  du  projet  de  décret 

Chablibb  :  Je  demande  la  parole  pour  one  moUon 
d*ordre.  Hier  on  a  distribué  le  rapport  sur  laconju-. 
Mtion  de  Robespierre.  A  la  suite  de  ce  rapport  ne 


4M 


trouvent  plusieurs  pièces  saisies  chez  Robespierre.  \ 
Parmi  ces  pièces  j'ai  inutilement  cherché  une  dé- 
nonciation qui  a  été  faite  è  ce  conspirateur  contre 
les  représentants  composant  la  commission  de  l'exa- 
men des  marchés.  Ces  représentants  fidèles  n'étaient 
accusés  auprès  de  Robespierre  que  parce  qu'ils  s'é- 
taient déclarés  contre  les  fripons  dfe  toute  espèce. 
Le  soupçon  ne  doit  pas  planer  plus  longtemps  sur  la 
tête  de  Plusieurs  membres  de  cette  assemblée;  puis- 
que la  aénonciatioD  a  été  faite,  je  demande  qu'elle 
soit  imprimée. 

FoussEDOiRB  :  Je  m'étonne  aussi  que  dans  la  cor* 
re$pondance  on  n'ait  mis  un  grand  nombre  de  noms 
que  par  lettres  initiales  :  de  là  naissent  une  foule  d'in- 
terprétations et  d'imputations  calomnieuses;  je  de- 
mande que  les  noms  soient  imprimés  en  entier. 

Montmajfau  demande  rimpresiioo  sénérale  de  toutes  les 
pièces  trouvée  sous  les  scellés. 

Un  membre  :  Nous  ne  devons  pas  suivre  la  mar- 
che que  tenait  Robespierre,  c'est-à-dire  ne  présen- 
ter les  choses  que  sous  le  point  de  vue  le  plus  con- 
forme à  tel  ou  tel  intérêt  particulier.  11  semble  qu'on 
a  fait  un  triage  de  ces  pièces,  ot  qu'on  n'a  fait  impri- 
ner  que  celles  qui  étaient  peu  la vorables  au  parti  de 
Robespierre... 

De  violents  murmures  interrompent.  On  demande 
que  l'opinant  soit  rappelé  à  Tordre. 

Le  même  membre  :  Je  n'entends  parler  ici  que  des 
pièces  qui  ont  été  omises,  et  qui  eussent  été  favora- 
bles à  beaucoup  de  personnes  qu'on  calomnie  au- 
jourd'hui. 

Clauzel  combat  la  proposition  de  Montmayau,  en 
fuiMiut  observer  le  volume  immense  des  pièces  qu'il 
Csiudra  livrer  à  l'impression. 

Vbriiibb  :  Ceux  qui  ont  été  accusés  par  Robes- 
pierre n'ont  pas  besoin  d'impression  des  pièces  ;  car 
jamais  la  Convention  n'accusera  un  de  ses  membres 
polir  avoir  été  dénoncé  par  Robespierre. 

Talon  :  Il  est  douloureux  qu'un  tyran  qui  a  couvert 
la  France  de  deuil  pendant  sa  vie  occupe  encore, 
après  sa  mort,  de  son  odieuse  mémoire,  des  légis- 
lateurs qui  ne  sont  assemblés  que  pour  le  bonheur 
du  peuple  ;  l'amour-propreseul  peut  demander  l'im- 
pression de  dénonciations  vagues,  insensées,  calom- 
nieuses et  qui  n'ont  aucun  rapport  avec  l'intérêt 
public.  Je  demande  l'ordre  du  jour  sur  la  proposi- 
tion de  Charlier. 

Charlier  insiste. 

Blad  :  Je  demande  aussi  l'impression  de  la  liste 
des  gens  de  tête  et  de  cœur. 

Cambon  :  Je  demande  l'impression  de  la  dénon- 
ciation faite  contre  la  commission  de  l'examen  des 
marchés;  on  a  demandé  la  tête  de  Dornier  pendant 
dix  mois,  aux  Jacobins  et  aux  Cordeliers,  parce  qu'il 
était  chargé  d'un  rapport  qui  devait  jeter  le  plus 
erand  jour  sur  la  conduite  de  beaucoup  de  fripons. 
11  fut,  dis-je,  longtemps  menacé,  mais  ne  voulut  ja- 
mais se  désister  du  rapport.  L'impression  de  la  dé- 
nonciation peut  nous  faire  acauérir  des  notions  pré- 
cieuses, nous  donner  le  fil  de  oeaucoup  d'intrigues, 
et  nous  indiquer  l'emploi  de  l'argent  employé  à  payer 
certains  mouvements. 

Un  grand  nombre  de  voix  :  Le  31  mai. 

Laubencb  :  On  veut  une  seconde  fois  ouvrir  la 
boite  de  Pandore  ;  tous  les  moyens  de  discusssion  et 
de  discorde  vont  renattre  de  cette  impression.  S'il  y  a 
des  membres  inculpés,  qu'ils  prennent  communica- 
tion des  pièces,  et  qu'ils  fassent  connaître  leur  jus- 
tification. Je  demande  Tordre  du  jour. 

Rewbell  :  Doit-on  ou  ne  doit-on  pas  imprimer 
les  pièces?  Si  j'avais  été  le  valet  ou  le  correspondant 
de  Robespierre,  je  demanderais  une  impression  to- 
tale :  car  ce  serait  le  moyen  de  ne  laisser  rien  voir 


et  de  noyer  dans  nn  filtras  illisible  les  pièces  capa- 
bles de  me  compromettre.  D'ailleurs,  lorsquun 
membre  se  croira  lésé,  il  pourra  demander  l'impres- 
sion d'une  pièce.  Je  demande  le  renvoi  aux  comités 
des  finances  et  de  législation  de  l'examen  des  pièces 
qu'ils  jugeront  nécessaire  d'imprimer. 

Legenubb  :  Jamais  je  n'ai  éerit  à  Robespierre  : 
placé  près  de  lui,  je  le  connaissais  trop  bien  pour 
entretenir  avec  ce  conspirateur  une  correspondance; 
mais,  loin  de  cette  assemblée,  le  fond  dfe  son  âme 
n*était  pas  connu  ;  il  a  été  une  époque  où  il  était  gé- 
néralement regardé  comme  le  patriote  par  excel- 
lence. Qu*arrivera-t-il  si  toute  la  correspondance 
est  imprimée?  on  oubliera  les  circonstances  dans 
lesquelles  nous  nous  trouvions.  On  s'élèvera  dans 
les  départements  contre  tous  ceux  qui  auront  écrit, 
et  une  lettre  deviendra  un  titre  de  proscription. 

Charlier  insiste  de  nouveau  et  lit  la  rédacUon  de  sa  pro- 
position. On  insiste  pour  imprimer  une  table  analytique 
et  on  extrait  de  toutes  les  pièces. 

Une  partie  de  Tassemblée  se  lève  en  criant  :  Aux  voix! 
La  première  épreuve  parait  douteuse. 

Après  nne  vive  agitation ,  la  Convention  passe  à  Tordre 
du  jour  sur  la  proposition  de  Charlier. 

Les  cris  de  Tappel  nominal  retentissent  dans  Textrémitè 
de  la  salle  :  une  cinquantaine  de  membres  descendent  au 
bureau  du  président ,  et  signent  la  demande  de  Tappel  no- 
minal. 

Clauiel  s*élance  à  la  tribune. 

Clauzel:  11  est  temps  enfin  quels  France  con- 
naisse quels  sont  ceux  qui  entravent  perpétuelle- 
ment les  travaux  et  la  marche  de  la  Convention  na- 
tionale. 11  n'est  pas  possible  que  de  semblables 
objets  éloignent  plus  longtemps  de  la  discussion  les 

frands  intérêts  qui  doivent  nous  occuper.  Aujour- 
*hui  on  devrait  discuter  les  moyens  de  restaurer 
les  finances.  Nous  sommes  dans  un  moment  où  il 
s'agit  de  donner  enfin  la  paix  à  notre  pays;  et  sans 
cesse  les  prétextes  les  plus  insidieux  jettent  le  trouble 
dans  cette  enceinte.  Puisqu'on  veut  un  appel  nomi- 
nal, j'en  demande  l'impression  et  l'envoi  aux  dé- 
partements. 

Les  membres  réelamant  Tappel  nominal  applaudissent 
vivement  et  le  demandent  de  nouveau. 

Merlin  et  Cbaxal  demandent  la  parole, 

Pelet  :  Il  est  odieux  que  les  intérêts  particuliers 
occupent  des  moments  que  réclament  les  intérêts 
de  la  république.  Vous  êtes  enfin  sur  le  point  de  re- 
cueillir les  fruits  de  cinq  années  de  travaux 

Les  membres  placés  à  Texbteilé  éclatent  en  mnr- 
miires. 

Une  voix:  Ils  ne  veulent  point  la  paix...  lia  veu- 
lent !a  guerre  civile... 

Clauzel  :  Ils  veulent  encore  opprimer. 

Pelet  demande  Tordre  du  jour. 

***  :  Au  nom  de  la  constitution,  je  réclame  Tap- 
pel nominal;  je  le  ràslame  en  outre  au  nom  du  rè- 
glement. 

Merlin  obtient  la  parole  après  la  très-vive  opposition 
d'an  p*artie  de  Tassemblée. 

MEBLiif  :  La  proposition,  quant  au  fond,  ne  me 

f tarait  pas  assez  étendue;  si  vous  n'imprimez  qu'une 
iste  et  des  extraits,  vous  mettez  les  bons  citoyens 
sous  le  couteau  des  coquins;  n'imprimez  rien  ou 
donnez  les  pièces  entières;  qu'on  ne  paisse  pas  ar- 
bitrairement les  interpréter. 

Quant  à  Tappel  nominal ,  il  y  a  deux  choses  à 
considérer,  votre  règlement  et  la  constitution;  le  rè- 

flement  dit  qu'on  consultera  d'abord  s'il  y  a  du 
oute,  et  que,  s'il  y  a  du  doute,  on  ira  à  Tappel  no- 
minal. Permettez  ici  un  rapprochement.  En  1780» 
qui  demandait  sans  cesse  Tappel  nominal?  Maury  el 


495 


Cùtulh.  (y\îs  applaudissements.)  Ainsi,  ils  parve- 
naient à  entraver  toutes  les  opérations  de  rassem- 
blée constituante  I  ainsi  nous  voyons  aujourd'hui 
une  séance  perdue.  Je  viens  à  la  constitution;  il 
faut  enfin  parler  franchement:  je  vous  interpelle  ici, 
vous  qui  demandez  la  constitution,  la  voulez-vous? 
(Vifs  applaudissements.) 

DuHBM  :  L*avez-vous  invoquée  pour  feife  la  paix 
avec  la  Toscane? 

Merlin  :  Je  sais  bien  que  la  paix  avec  la  Toscane 
et  avec  les  autres  puissances  fait  beaucoup  de  mal  à 
Duhem.  (Nouveaux  applaudissements.)  H  faut  enGn 
tout  dire. 

Un  grand  nombre  de  wdx  :  Oui,  oui  ! 

Merlin  :  Oui.  Je  n'inculpe  pas  Duhem  ;  mais  il  est 
le  jouet  d'une  faction  britannique  qui  le  tourmente 
nuit  et  jour.  Vous  savez  avec  quel  acharnement  la 
Prusse  et  l'Autriche  s*agitent  pour  vous  empêcher 
de  conclure  une  paix  partielle;  on  veuf  vous  forcer 
a  ne  la  faire  qu'avec  la  coalition.  Eh  bien,  il  y  a  trois 
ou  quatre  mois,  Duhem  est  venu  au  comité  de  salut 
public  déposer  une  déclaration  signée  de  lui  et  d*un 
de  ses  collègues. 

Cette  déclaration  portait  «  qu*il  était  de  l'intérêt 
national  de  ne  point  conclure  une  paix  partielle; 
qu'il  ne  fallait  penser  qu*à  une  paix  générale  ;  que 
toute  proposition  contraire  était  suggérée  par  nos 
ennemis.  » 

Je  ne  pus  dissimuler  mon  étonnement,  et  le  co- 
mité, auquel  je  m'empressai  de  communiquer  la 
pièce,  partagea  ce  sentiment.  Je  mis  cette  déclaration 
dans  une  chemise  particulière,  et  dans  un  carton 
contenant  les  pièces  relatives  aux  projets  de  paix 
avec  l'Angleterre.  Depuis,  cette  pièce  ne  s'est  pas 
retrouvée  ;  on  ne  l'a  pas  détournée,  sans  doute  ;  mais 
elle  s'est  égarée.  Au  reste,  ce  n'était  point  une  pro- 
testation, c  était  une  opinion  de  Duhem,  etje  ne  parle 
de  ce  fait  que  pour  prouver  que  depuis  ce  moment 
Duhem  est  le  jouet  d'une  faction  anglaise. 

Quant  à  la  constitution,  je  le  répète,  vous  ne  pou- 
vez en  diviser  l'exécution  ;  il  faut  qu'elle  règne  tout 
entière,  ou  qu'on  cesse  de  réclamer  un  de  sts  arti- 
cles. Qu'on  réponde  d'une  manière  précise.  Voulez- 
vous  la  constitution? 

Un  grand  nombre  de  membres  se  lèvent.  De  nombreux 
applaudissements  se  Tont  entendre.  Ou  distingue  plusieurs 
voix  s'écriaot  i  A  bas  le  gouverniwunt  révolutionnaire!  à 
bai  le  provisoire!..**  Five  la  eonêtitutiou  dmoeraliquel 

Le  président  accorde  la  parole  à  Duhem. 

Duhem  :  Je  dois  répondre  aux  faits  avancés  par 
Merlin  fde  Douai).  Oui,  j'ai  déposé  au  comité  de  sa- 
lut public  une  déclaration  signée  de  Lesage-Senault 
et  de  moi  ;  nous  avons  cru  remplir  un  devoir  de  pru- 
dence et  de  patriotisme.  Si  nous  avons  commis  une 
erreur,  je  ne  sais  de  quel  droit  une  erreur  est  ici 
convertie  en  crime  par  un' membre  du  gouverne- 
ment. Je  ne  sais  quelle  est  la  malice  de  ceux  qui 
gouvernent;  à  peine  leur  a-t-on  confié  les  rênes  de 
f  Etal,  qu'ils  s'érigent  en  despotes  et  prétendent  as- 
servir les  opinions  de  leurs  collègues.  Quant  à  moi, 
la  prévention  est  vaine;  elle  ne  m'atteindra  jamais, 
et  mon  opinion  sera  toujours  indépendante. 

J'ai  donc  déposé  an  comité  une  opinion  dont  je 
confiais  la  discussion  à  sa  sagesse.  Le  bruit  a  couru 
qu'on  avait  signé  une  protestation  contre  toute  es- 
pèce de  paix;  Thibault ,  un  jour ,  m'en  parla  au  co- 
mité, et  tinit  lui-même  par  hausser  les  épaules.  Cette 
imputation  semble  être  renouvelée  aujourd'hui ,  et 
d'une  manière  d'autant  plus  perfide  qu  elle  érige  en 
protestation  une  simple  opinion. 

Quoi  qu'il  en  soit,  j'aime  mieux  être  le  jouet  que 
rinstrament  d'ane  faction;  les  véritables  instruments 


de  la  faction  anglaise  sont  ceux  qui  prétendent  que 
j*en  suis  le  jouet. 

ViLLETAED  :  Le  bot  de  la  proposition  est  de  con- 
naître enfin  quels  sont  les  amis  et  les  ennemis  de 
Robespierre.  On  fait  depuis  longtemps  de  ce  mot  un 
masque  qu'on  applique  à  tous  les  visages.  Il  faut  en- 
fin qu'il  ne  soit  appliqué  <^u'à  ceux  pour  qui  il  est 
fait.  (IjCS  membres  placés  a  l'extrémité  applaudis- 
sent  vivement.)  Le  peuple  est  indécis  ;  il  n'aimait  pas 
Robespierre,  et  veut  connaître  les  amis  de  cet  usur- 
pakur.Le  moyen  de  les  connaître  est  de  publier  sa 
correspondance. 

Phùieure  voix  :  Ceux  qui  lui  parlaient  tons  les 
jours,  et  qui  conspiraient  avec  lui,  ne  lui  écrivaient 
pas. 

ViLLBTiiBD  :  il  est  très-important  que  la  vérité 
soit  connue.  Je  demande  l'appel  nominal,  et  on  me 
fera  plaisir  d'envoyer  mon  vœu  aux  armées  et  aux 
départements.  (Applaudissements  dans  une  extré- 
mité de  la  salle.) 

André  Dumont  :  Je  ne  suis  pas  du  nombre  de  ceux 
qui  regardent  cette  séance  comme  perdue  ;  on  de- 
mande les  pièces  qui  ont  été  trouvées  chez  Robes- 
pierres  ;  on  sait  bien  au'on  n'y  trouvera  pas  les  con- 
ciliabules, les  complots  clandestins  aes  amis  de 
Robespierre,  ni  les  pièces  qu'on  a  eu  bien  soin  de 
retirer  lorsqu'on  ne  pouvait  pas  régner  avec  lui  et 
qu'on  résolut  sa  perte.  Il  est  plus  simple  d'aller  con* 
sulter  une  pièce,  lorsqu'elle  sera  nécessaire  à  la  dé- 
fense d'un  représentant;  alors  on  ne  justifiera  pas  le 
désordre  dans  les  départements,  alors  on  n'organi- 
sera pas  la  guerre  civile  qu'on  veut...  (Très-vifs  ap- 
plaudissements.) 

Défiez  vous  du  piège  qu'on  .vons  tend  ;  on  vous  a 
dit,  et  je  le  répète,  Maury  et  Cazalès  ont  des  repré- 
sentants parmi  nous;  ils  veulent  assassiner  une  foule 
de  patriotes  égarés  par  eux,  qui  ont  écrit  à  Robes- 
pierre dans  te  temps  de  sa  popularité.  Ils  savent  bien 
queceini  qui  faisait  tomber  les  têtes  dans  les  dépar- 
tements avait  reçu  de  Robespierre  des  instructions 
verbales;  ils  savent  bien  que  celui,  au  contraire, 
qui  craignait  son  supplice,  celui  de  son  père,  de  sa 
femme  ou  de  son  fils,  écrivait  du  fond  de  son  cachot 
à  l'ordonnateur  en  chef  du  massacre.  On  ne  dira  pas 
que  je  lui  ai  écrit... 

Pluêieure  voix  à  Vextrémité  :  Tes  lettres  à  Ro- 
bespierre sont  insérées  au  Bulletin... 

Dumont  (aux  interrupteurs)  :  Ces  lettres  prou- 
vent votre  mfamie;  elles  prouvent  que  j'abhorrais 
votre  règne,  et  que  vous  ne  parviendrez  à  ta  domi- 
nation ou'après  avoir  passé  sur  mon  cadavre...  (Vils 
applaudissements.) 

Au  surplus,  citoyens,  on  ne  fascinera  plus  vos 
yeux;  voici  le  système  d'avilissement  de  la  Conven- 
tion nationale,  voici  les  tentatives  de  contre-révolu- 
?ion,  voici  les  conjurations  de  vos  ennemis:  ils  veu- 
lent du  trouble  au  moment  où  vous  avez  besoin  de 
calme,  et  ce  trouble  ils  vous  l'attribueront.  Je  vou- 
drais que  la  France  «ntière  pût  être  témoin  des  ef- 
forts qu'ils  font  pour  sauver  leurs  chefs;  démasqués* 
Voulez-vous  les  juger?  envoyez-les  dans  leurs  dé- 
partements, vous  aurez  la  mesure  de  leurs  crimes; 
ils  n'oseront  plus  s'y  présenter.  (Nouveaux  applau- 
dissements.) 

On  demande  l'impression  des  pièces  ;  et  moi  je 
demande  la  publication  de  celles  qui  ont  fiiit  périr 
Phélippeaux.  (Vi£s  applaudissements.) 

Jugez  ceux  qui  demande  aujourd'hui  la  constitu- 
tion ;  ils  la  détestent  dans  le  cœur.  Ce  sont  eux  qui» 
même  après  le  10  thermidor,  invoquaient  sans  cesse 
le  £[ouvernement  révolutionnaire,  et  accusaient  les 
amis  de  la  constilutioa  démocratique. 


496 


Au  surplus,  ne  nous  abusons  pas;  ne  voyons  ici 
que  les  derniers  mouvements  des  complices  du  tyran, 
qui  s*agitent  encore.  (Vifis  applaudissements.)  Bons 
citoyens,  c'est  à  vous  que  je  m'adresse,  levez-vous, 
resserrez- vous  dans  cet  instant  critique  ;  soyez  par- 
tout présents  et  armés  contre  le  crime  ;  luttez  contre 
lui  dans  vos  sections;  enchaînez  sa  rage  exnirante, 
et  secondez  de  vos  efforts  patriotiques  ceux  ae  Tim- 
.posante  majorité  de  cette  assemblée. 

Je  demande  une  nouvelle  épreuve,  et  je  ne  doute 
pas  qu'elle  ne  soit  favorable  aux  amis  de  la  liberté. 

Dumont  descend  de  la  tribune  au  milieu  des  applaudis- 
lements.  (La  $uit0  demain,) 

iV.  B.  —  Dans  la  séance  du  !•'  ventôse,  la  Convention  a 
supprimé  la  permanence  des  conseils  généraux  des  districts, 
et  les  comités  réTolutionnairet  dans  les  communes  au-des-^ 
sous  de  cinquante  mille  âmes.  Elle  a  réduit  à  cinq  le  nom- 
bre des  administrateurs  de  départements,  et  chargé  le  co- 
mité des  finances»  de  concert  avec  les  autres  comités,  de 
fixer  le  nombre  et  le  traitement  des  employés  danrles  di- 
verses adminbtraUons. 

—  L'assemblée  coloniale  des  lies  de  France  et  de  la  Réu- 
nion a  écrit  à  la  Convention  pour  lui  renouveler  rattache- 
ment et  la  Édélité  de  ces  colonies  à  la  France;  loi  dénoncer 
la  négligence  ou  Timpéritie  des  agents  exécutifs  qui  non- 
seulement  les  ont  privées  des  moyens  de  ruiner  le  com- 
merce de  PAngleterre  aux  Indes,  mais  encore  les  ont  mises 
en  danger  de  tomber  entre  les  mains  de  ces  unncmis  éter- 
neto  du  nom  français.  Deux  fois  ils  se  sont  présentés  avec 
des  forces  considérables  devant  nos  possessions  en  Asie,  et 
deux  fois  ifs  ont  été  honteusement  repoussés. 


Parti,  Ui^  ventote.  r- Une  note  insérée  dans  leN*  d'au- 
jourd'hui annonce  que,  «  parmi  les  pièces  imprimées  à  la 
suite  du  rapport  de  Courtois,  on  a  remarqué  une  lettre 
écrite»  quinie  jours  après  les  événements  du  M  mai,  par 
l'un  des  rédacteurs  de  ce  journal.  » 

Si  l'auteur  de  la  lettre  ainsi  que  de  la  note  s'est  appuyé 
du  titre  de  rédacteur  en  chef  de  Tarticle  Convention  nn- 
iionale  du  Moniteur,  pour  écrire  a  Robespierre,  les  ré- 
dacteurs soussignés,  chargés  de  la  même  partie,  doivent  à 
la  vérité,  à  leurs  concitoyens,  ils  se  doivent  à  eux-mêmes 
de  déclarer  qu'ils  n'ont  eu  part  ni  à  cette  leUre,  ni  à  cette 
note.  Ils  n'en  ont  pas  même  eu  connaissance.  Tous  les  faits 
contenus  dans  la  lettre  sont  faux,  absolument  faux.  La  preuve 
de  l'exactitude  et  de  l'impartialité  des  rédacteurs  existe  dans 
leurs  notes  et  leur  rédaction  déposées  au  bureau  de  ce 
journal  ;  on  peut,  pour  se  convaincre  de  sa  fidélité,  com- 
parer U  Moniteur  avec  toutes  les  autres  feuilles  du  temps. 

Deux  des  rédacteurs  soussignés,  les  citoyens  Jourdan  et 
Guillois ,  ne  sont  attachés  au  Moniteur  que  depuis  le  mois 
de  frucUdor  dernier. 

Signé  Trouve,  Bocllând,  M.-F.  Gdulois,  Ami 

JoUBItAN. 


Avit  du  propriétaire  «ia Jtfoniteur. 

Je  n*ai  pu  lire  sans  nne  sensible-  peine  la  leUre  du  ci-- 
toyen  G....  è  Robespierre,  imprimée  à  la  suite  du  rapport 
de  Courtois.  Différents  journaux  en  ont  déjà  parlé.  Je  ne 
chercherai  point  à  aggraver  sur  l'auteur  le  poids  de  la  cen- 
sure publique,  etfe  ne  joindrai  point  mes  reproches  a  ceux 
qui  s'élèvent  contre  lui  de  toutes  parts  et  à  ceux  qu'il  doit 
se  faire  lui-même.  Mais  cette  lettre  m'intéresse  personnel- 
lement; elle  compromet  mon  caractère,  elle  blesse  mon 
iniérit  comme  propriétaire  du  Moniteur  :  je  dois  prévenir 
les  impressions  défavorables  qu'elle  pourrait  laisser. 

Le  48  juin ,  jour  de  la  date  de  la  lettre  du  citoyen  G..., 
j'étais  associé  avec  mon  beau  père  dans  la  propriété  du 
Moniteur;  ni  lui  ni  moi  ne  nous  sommes  jamais  mêlés  de 
la  rédaction  de  ce  journal  ;  et  nous  avions  chargé  alors  de 
l'article  Convention  uaiionaU  le  citoyen  G«..|  qui  le  rédi* 


geatt  tir  sa  responsabiiité.  Ifons  lui  avions  simplcmeoc 
recommandé  expressément,  comme  à  tous  ses  collabora- 
tenrs,  la  plus  grande  exactitude  et  la  plus  grande  impar« 
tialité.  Nos  principes  comme  notre  intérêt  nous  en  Iklsaient 
une  loi. 

Quant  à  la  lettre  que  la  frayeur  le  détermina  à  écrire  à 
Robespierre ,  nous  n'en  avons  eu  aucune  communication  » 
ni  avant  ni  après  celte  époque.  Il  était  sans  doute  excusa* 
ble  d'avoir  peur,  dans  un  moment  où  toute  la  France,  la 
Convention  elle-même,  était  courbée  sous  un  joug  de  fer  ; 
mais  il  n'est  jamais  excusable  de  trahir  la  vérité»  même 
pour  tromper  le  tyran  qu'on  flatte. 

Le  citoyen  G....  affirme  qu'il  n'a  donné  qu'un  court 
extrait  de  la  première  accusation  de  Louvet  contre  Robes- 
pierre; celte  assertion  est  absolument  fausse,  comme  le 
citoyen  G«...  en  est  convenu  lui-même  dans  l'avi»  qu'il  a 
inséré  dans  le  Moniteur  d'aujourd'hui  ;  on  peut  s'en  con- 
vaincre en  relisant  la  feuille  du  31  octobre  1792;  ce  qu'il 
a  aioulé  dans  sa  lettre,  sur  la  manière  dont  il  rédigeait 
d'autres  discours,  est  également  contraire  k  la  vérité.  Il 
affirme  que  Rabaut  n'a  été  attaché  au  Moniteur  que  pen- 
dant trois  semaines;  c'est  encore  une  fausseté  gratuite, 
ainsi  que  lorsqu'il  dit  :  •  Nous  avons  exclu  du  Moniteur 
Rabaut  et  un  nommé  His.  •  Ces  denx  citoyens  s'éuienl 
retirés,  il  y  avait  plus  de  six  mois»  et  le  citoyen  G....  n'a- 
vait aucun  droit  de  les  exclure. 

Quant  à  la  tache  de  partialité  que  la  lettre  du  citoyen  G... 
tend  k  imprimer  sur  la  rédaction  du  Moniteur^  nous  nous 
contenterons  de  renvoyer  nos  lecteurs  à  la  lecture  du  Mo- 
niteur  lui-même,  que  l'on  pourra  comparer  dans  tous  les 
temps  avec  tout  autre  journal. 

Je  termine  en  déclarant  que  le  citoyen  G....  n'est  plus 
atUché  à  la  rédaction  du  Moniteur.  H.  Agassi. 


OBAVDBBfi.. 

Le  Triomphe  de  la  Raison  et  de  U  Vérité,  ettamp€  de 
vingt-deux  pouces  de  haut  sur  teiie  de  large,  préieotee  k  la 
Convention  nationale,  le  16  vendémiaire.  Prix  :  It  liv. 

La  Philosophie,  sous  la  figure  de  J.-J.  Rousseau,  découvre 
à  l'Univers  la  Raiion  et  la  Vérité,  voilées  par  rBrresr  et  le 
Mensonge. 

A  Paris,  chex  Ddorme,  marchand  d'esumpes,  quai  de 
Gèvret,  n*  19. 


LIVRES   DIVERS. 


Le  citoyen  Poinçot,  libraire,  rue  Hautefeuille,  n«  S6,  avertit 
qu'il  vient  de  faire  paraître  le  3S<  volume  des  CEuvresdeJ,^. 
Rousseau ,  édition  io-8<' ,  ornée  de  gravures,  caractères  de 
Didot  Palnë.  Chaque  volume  sera  délivré  aui  souscripteurs  à 
8  liv.  10  s.,  et  celui  des  Romances,  pris  doublé,  comme  il  en 
a 'donné  avis  il  y  a  deux  mois.  Passé  le  15  ventôse,  ceux  qui 
auront  négligé  de  retirer  paieront  les  volumes  iO  liv. ,  et 
seront  réputés  avoir  abandonné  leur  souscription.  Hais  ee 
terme  de  rigueur  sera  prolongé,  pour  les  départemenU,  jus- 
qu'au i**"  germinal  prochain,  époque  k  laquelle  le  citoyen 
Poinçot  fera  paraître  la  dernière  livraison,  composée  de  sis 
volumes  et  un  de  Romances. 

—  Anthologie  patriotique,  on  Recueil  de  chantons,  hym* 
nés,  etc. ,  et  un  calendrier  comparatif,  pour  Tan  5*  républi- 
cain ;  in-18.  Prix  :  9  liv.,  broché. 

A  Paris,  chex  Ponlin,  imprimcur-libranre,  me  des  Pires,  Ou 

—Fie  et  mort  républicaine  du  petit  Emilien,  parle  ci- 
toyen Fréville.  A  Paris,  chex  Gueffier  jeune,  imprimeur-li- 
braire, rue  G!t-le-Cœnr,  n*  16.  Prix  :  1  liv.  10  s.;  et  9  liv., 
franc  de  port. 


Payemenii  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  poujr  les  six  pre- 
miers mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscriptions  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères 
est  de  huit  mois  vingt  et  un  Jours  de  l'année  1793  (vieux 
styie). 


GAZETTE  NATIOMLE  »»  LE  MONITEUR  (IIVERSEL. 

N*  153.  Tridi  3  Ventosb»  l'an  3«.  (Samedi  21  FévBiBR  1795,  inmx  êtyU.) 


,  POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Dé  Ratiibonne,  U  li  février,  —  La  dictature  de  la  diète 
•  reçu  ,  le  24  janvier,  un  mémoire  présenté  au  nom  do 
prince-évêque  de  Spire.  Ce  mémoire  est  relatif  aux  loge- 
ments de  guerre  qui  ont  été  accordés  au  corps  dit  des  émi- 
grés de  Condé. 

On  y  représente  : 

i^  Que  le  corps  de  Condé,  re^  Tolontairement  dans 
Brucbsala  oe  lait  point  partie  intégrante  de  l*armée  de 
TEmpire  ; 

S*  Que  ce  corps  est  d'nne  indisdpline  extrémei 

8*  Que,  provoquant,  allumant  la  haine  de  renneml 
plus  qu*aucnnc  autre  circonstance  ne  pourrait  le  faire,  il 
eipc  e  k  un  grand  péril  le  peu  de  territoire  qui  reste  df 
Tévéché  de  Spire. 

ANGLETERRE. 

DÉBATS   DU   PAaLlIlBNT» 

ChamSre  de$  Communtê.  —    Séance  du  7  fanvUr* 

Sur  les  motions  de  Lambton  et  du  colonel  Maitland,  il 
est  ordonné  que  les  états  des  troupes  étrangères  à  la  solde 
de  TAnglelerre,  ainsi  que  ceux  des  tués  ou  des  prisonniers, 
tant  desdites  troupes  que  de  Tarmée  anglaise,  seront  mis 
sur  le  bureau. 

M.  Ji'kill  dit  que,  quand  il  a  demandé  Pétat  des  troupes 
employées  par  le  roi  de  Prusse ,  on  lui  a  répondu  qu'on 
n'avait  reçu  aucun  rapport  oflBciel.  Il  s*est  assuré  depuis 
qu*on  avait  envoyé  un  commissaire  sur  le  continent.  Il  ne 
conçoit  pas  comment  ce  commissaire  n'aurait  point  envoyé 
d'élats.  D^ailleurs  il  voudrait  savoir  comment  on  a  été  In- 
struit des  grands  avantages  que  les  puissances  combinées 
avaient  tirés  de  l'armée  du  roi  de  Prusse,  si  ce  n*esl  parle 
commissaire,  et  quelle  difficulté  il  y  a  ik  en  rendre  compte. 

M.  Pitt  répond  qu'il  nVst  point  impossible  d'expliquer 
les  services  que  les  troupes  prtissiennes  ont  rendus.  Si  Tho» 
norable  membre  veut  connaître  leurs  opérations  actuelles, 
il  lui  dira  que  ces  troupes  ne  sont  point  employées  du  tout, 
mais  qu'elles  sont  sur  les  frontières  de  France. 

M.  Jekill  demande  s'il  y  a  un  commissaire  ou  non. 

M.  Pitt  répond  qu'il  n'y  a  pas  eu  de  commissaire,  mais 
qu'un  noble  lord  y  a  été  charge  de  la  correspondance. 

M.  Jekill  propose  que  le  montant  des  troupes  prussiennes 
employées  en  conséquence  du  traité  soit  communiqué  à 
la  Chambre  dans  toute  l'étendue  que  les  informations 
pourront  permettre. 

La  motion  est  rejetée. 

M.  Sheridan  trouve  fort  extraordinaire  le  refus  des  mi- 
nistres. Il  croit  quelc  roi  de  Prusse  n*a  rempli  aucun  des 
articles  du  traité.  En  conséquence  il  annonce  qu'il  fera 
une  motion  pour  obtenir  la  correspondance  du  lord  Btal- 
mcsbury. 

L* orateur  remarque  que  cette  motion,  étant  de  même  na- 
ture que  celle  qui  vient  d'être  rejetée,  doit  être  remise  à 
un  autre  jour. 

Comxii  des  iubsideu 

La  Chambre  s'étant  formée  en  comité  des  subsides,  on 
propose  d'accorder  à  Sa  Majesté  cent  mille  matelots,  com- 
pris quinze  mille  soldats  de  marine,pourle  service  de  1795. 

M.  Robinson  se  plaint  du  mauvais  état  de  la  marine; 
que  les  vaisseaux  ne  sont  pas  aussi  lx)ns  voiliers  que  ceux 
de  l'ennemi;  qu'ils  sont  entre  eux  de  vitesse  iuégale  zce 
qui  est  cause  que  des  officiers  ont  été  traduits  au  conseil 
de  guerre. 
•  Le  capitaine  Berliley  convient  que  tous  les  vaisseaux  ne 
sont  pas  également  bons  voiliers;  mais  il  maintient  que  la 
flotte  anglaise,  prise  en  général,  marche  aussi  bien  que  la 
flotte  française;  que  d'allleurselle  n'a  jamaismieux  marché 
que  dans  ce  moment-ci  ;  que  de  pareilles  questions  ne  de- 
vraient pas  ôtre  disculées  en  temps  de  guerre.  Il  avoue 
que  les  vaisseaux  pourraient  être  meilleurs  voiliers,  si  leur 
construction  était  surveillée  par  des  liomme»  sif  ants ,  ei  si 

Z*  Série, -^TomX. 


on  proposait  des  récompenses  pour  les  meilleurs  plans^  I 
croit  ceux  des  Français  supérieurs  ;  mais  les  Anglais  ont  de 
meilleures  têtes,  de  meilleurs  bras,  et  leurs  vaisseaux  sont 
plus  forts.  Il  pense  que,  si  Ton  adoptait  son  idée ,  l'Angle- 
terre aurait  les  meilleurs  vaisseaux  du  monde.  Il  saisit 
celte  occasion  de  justifier  le  lord  qui  présidait  dernièrement 
â  l'amirauté.  Il  attribue  la  quantité  des  prises  à  ce  que  les 
navires  n'attendent  pas  les  convois,  et  oe  dernier  mal  à  la 
hauteur  excessive  des  assurances,  qui  fait  que  les  proprié- 
taires ne  s'inquiètent  plos  si  leurs  bâtiments  seront  pris 
ou  non. 

L*amiral  Gardner  observe  que  les  lords  del'amiraaté 
n'ont  rien  ,k  dire  relativement  i  la  construction  des  vais- 
seaux, qui  est  du  département  des  inspecteurs  de  la  ma* 
rine«  11  croit  les  vaisseaux  des  Français  décidément  meil*' 
leurs  voiliers  que  ceux  des  Anglais.  Il  remarque  néaâfltfoitis'^ 
que,  depuis  quarante  ans,  la  constraetion  rebt perfection- 
née, parce  qu'on  a  tâché  d*imiter  celle  de  l'ennemi,  d'i« 
près  les  vaisseaux  qu'on  lui  a  pris. 

M.  Fox  se  plaint  de  ce  qu'on  n'a  pas  augmenté  la  ma-, 
rine  militaire  en  proportion  de  ce  que  le  commerce  s'est 
accru  ;  et  après  plusienre  observations  sur  les  négligences 
qu'il  reproche  à  Tamirauté,  Il  conclut  en  désirant  qu'il 
soit  pris  des  informations  à  ce  sujet. 

M.  Dundas  examine  l'état  de  la  marine  depuis  trois  ans. 
Il  dit  qu'au  moment  de  la  rupture,  on  n'avait  que  seiie 
mille  matelots,  et  qu'aujourd'hui  il  y  en  a  quatre-vingt- 
dix  mille  ;  que  cette  augmentation  était  uue  preuve  de 
l'activité  qu'avait  mise  l'amirauté,  d'autant  qu'il  était  plus 
difficile  de  trouver  des  matelots,  tant  parce  que,  l'ennemi 
ayant  négligé  son  commerce,  il  n'y  avait  plus  de  prises, 
que  parce  que  les  négociants  avaient  considérablement 
augmente  les  salaires  qu'ils  donnaient  aux  leurs.  Il  ob- 
serve que  la  supériorité  de  l'ennemi  dans  la  construction 
provenait  et  de  l'idée  que  les  marins  conservaient  que  leurs 
anciens  vaisseaux  étaient  très  bons  pour  battre  les  Français, 
et  de  l'éloignement  que  la  nation  a  pour  toute  innovation. 
Il  convient  que  l'ennemi  a  dit  des  efforts  étonnants  ponr  - 
élever  sa  marine,  et  se  réjouit  de  voir  qu'on  se  propose 
d'en  faire  autant  en  Angleterre  en  votant  unanimement 
l'augmentation  demandée. 

M.  Sheridan  trouve  que  le  gouvernement  ferait  bien  de 
faire  plus  d'attention  à  ces  innovations  qui  ont  été  sî  utiles 
aux  Français  ;  il  dit  que,  si  ce  défaut  de  prises  offre  moins 
d'attraits  aux  matelots,  il  doit  être  plus  aisé,  d'un  autre 
côté,  de  trouver  des  hommes,  parce  que  la  nation  n'a  point 
de  corsaires. 

M.  Brandiing  ayant  observé  qu'une  escadre  française 
était,  depuis  trois  ou  quatre  mois,  dans  les  mère  du  Nord, 
l'amiral  Gardner  répond  que  l'amirauté  y  a  envoyé  l'ami- 
ral Hardy,  et  depuis  quatre  autres  vaisseaux,  poiirs'o^ 
poser  aux  desseins  de  fennemi. 

Plusieurs  membres  parlent  encore  sur  la  question.  Le 
colonel  Tarieton  dit,  entre  autres,  qu'il  n'est  résulté  pour 
l'Angleterre  aucun  avantage  réel  de  la  dernière  victoire 
navale.  La  conquête  de  la  Corse,  selon  lui ,  se  réduit  éga- 
lement à  rien.  Il  parle  des  grands  efforts  que  font  actuel- 
lement les  Français  pour  accroître  leur  marine. 

L'amiral  Gardner  avance  que,  dans  le  coure  de  Tannée 
1794,  l'amirauté  a  accordé  cent  huit  convois ,  et  qu'il  y  a 
eu  cent  quarante  vaisseaux  employés  à  ce  service,  outre 
quinze  vaisseaux  et  bâtiments  destinés  exclusivement  à 
protéger  le  commerce  des  côtes. 

La  motion  est  mise  aux  voix  et  adoptée.  Il  est  ordonné 
que  le  rapport  en  sera  fait  le  lendemain. 

Foiei  et  moyen  e» 
La  Chambre  se  forme  en  comité  des  voies  et  moyens.  La 
taxe  ordinaire  des  terres,  celle  sur  la  drèche,  la  bière ,  le 
cidre,  passent,  et  il  est  an  été  que  la  Chambre  se  reformcrt 
en  un  comité  semblable ,  le  vendredi  suivant. 

HOLLANDE. 
àmt$rdamt  le  12  p(tti;toi«,  -*«•  Les  représentanU  dSU 

63 


498 


provtsIonMti  de  la  ville  d'Amsterdam  ont  senti  la  nécessité 
de  constater  Tëtat  de  la  Banque  (1);  ils  en  ont  publié  le 
résultat  par  la  proclamation  suivante  : 

Ubertét  Egalité  9  Fraternités 
•  Lea  représentants  provisionnels  du  peuple  d'Amster- 
dam, ayant  considéré  qu'il  est  de  la  dernière  importance 
pour  la  Bourse  de  cette  ville  que  le  public  soit  informé  de 
Tétatde  la  banque  dite /a  6an^(/e (fe  ffAan^tf,  etqu'il  nesoit 
porté  au  crédit  de  cette  banque  aucune  atteinte  ni  diminu- 
tion par  des  opinions  erronées,  par  des  menées  sourdes, 
ou  par  les  premières  iropres«ions  fausses  que  des  bruits  ré- 
pandus à  cet  égard  pourraient  y  faire,  ont  trouvé  bon  et 
résolu  de  notiûer  par  la  présente  qu'en  conséquence  des 
rapports  faits  à  ce  sujet  par  le  comité  de  commerce  et  de 
narine,  préposé  par  les  représenianis  provisionnels  à 
l'examen  de  ladite  banque,  il  a  paru  en  substance  que,  si 

(i)  Cette  banque  fut  établie,  eo  IG09,  sons  la  garantie  de 
It  Tille.  A  cette  époque,  lorsqu^un  marchand  étranger  venait 
k  Amsterdam  pour  y  faire  des  achats ,  dès  qu'il  recevait  la 
facture  des  articles  qu'il  avait  choisis  et  arrêtés,  il  contrac- 
tait Tobligation  d'en  payer  une  partie  eo  monnaie  du  pays, 
et  il  était  tenu  d^effectuer  ce  payement  lors  de  la  livraison 
des  marchandises.  Pour  s*acquitter  envers  le  vendeur,  il  faU 
lait  donc  que  l'acheteur  se  procurât  Tespèce  de  monnaie 
«vec  laquelle  seule  il  pouvait  se  libérer.  On  doit  faire  atten- 
tion qu'il  ne  pouvait  obtenir  de  monnaie  courante  que  par 
réchange ,  et  qu'il  était  obligé  de  faire  un  sacrifice  pour 
cet  effet.  Le  prix  de  réclt^nge  n*élait  pas  fixé;  le  sa- 
crifice variait  en  raison  du  plus  ou  du  moins  d'argent  en 
circulation  :  il  en  résultait  une  incertitude  dans  le  prix  des 
marchandises;  et  celle  incertitude  agissait  contre  le  com- 
merce, en  Gomprimaii  Tactivité,  et  faisait  restreindre  les  spé- 
culations. Pour  remédier  à  ce  mal  en  prévenant  la  difficulté 
qu'éprouvaient  les  négociants  pour  l'acquittement  de  4eurs 
obligations,  un  règlement  ouvrit  à  tout  le  monde  la  faculté 
de  porter  k  la  banque  toute  la  monnaie  qu'on  pouvait  avoir, 
de  quelque  espèce  qu'elle  fût,  dont  elle  s'obligeait,  sous  le 
cautionnement  de  la  ville  et  moyennant  un  léger  sacrifice , 
de  payer  la  valeur  en  telle  espèce  qu'il  conviendrait  aux  pro- 
priétaires de  monnaies  déposées.  Il  était  encore  statué  par 
ce  règlement  que  l'on  pourrait  aussi  disposer,  par  la  voie  de 
lettres  de  change,  et^uand  on  le  jugerait  à  propos,  des  som- 
nes  qui  avaient  été  déposées  ;  et  qu'aucun  dépôt,  pour  quel- 
que cause  que  ce  fût,  ne  serait  sujet  à  arrêt.  Cette  dernière 
danse  renfermait  l'obligation  et  la  soumission  de  la  banque 
de  ne  remettre  le  dépôt  qu'à  celui  qui  l'aurait  confié,  et  de 
le  tenir  perpétuellement  à  sa  disposition. 

Tout  négociant  ou  particulier  a  donc  la  faculté  de  déposer 
son  argent,  et  il  lui  est  ouvert  sur-le-champ  un  compte  qui 
le  constitue  créancier  de  la  somme  qu'i^  y  a  versée.  Celui  qui 
a  un  compte  ouvert  en  banque ,  et  qui  veut  faire  un  paye- 
ment ,  ne  fait  autre  chose  que  de  fournir  un  mandat  sur  la 
banque,  qui  s'acquitte  soit  en  argent  effectif,  ce  qui  est  rare, 
toit  en  écriture.  De  quelque  manière  que  la  banque  se  li- 
quide, elle  porte  toujours  au  passif  du  compte  du  mandant  le 
montant  de  la  somme  payée  à  son  acquit;  en  sorte  que  de 
créancier  il  devient  débiteur,  et  vice  vtrtâ.  Si  celui  en  fa- 
veur de  qui  la  remise  de  la  créance  a  été  faite  reçoit  en 
écriture,  il  est  colloque  créancier  sur  les  livres  de  la  banque. 
Un  autre  article  du  règlement  veut  que  tout  marchand  ou 

Sarticulier  qui  demande  qu'il  lui  soit  ouvert  un  compte  en 
anque  paie  une  fois  seulement  la  somme  de  10  florins  dans  le 
moment  où  il  dépose  la  somme  pour  laquelle  on  le  constitue 
créancier  de  la  banque. 

Le  règlement  porte  qu'il  ne  pourra  être  fait  aucun  paye- 
oient  valide  qui  ne  soit  fait  en  banque;  cependant  cette  dis- 
position n'est  pas  rigoureusement  exécutée.  Il  arriva  tous  les 
jours  quM  s'opère  des  payements  en  argent  effectif  hors  de 
la  banque. 

Comme  la  banque ,  en  recevant  les  monnaies  de  tous  les 
pays,  ne  les  considère  que  comme  simples  marchandises,  il  s'en- 
suit que  l'or  et  l'argent  monnayés  n*y  peuvent  être  reçusqu'en 
raison  de  leur  valeur  réelle,  et  cette  valeur  ne  peut  être  ainsi 
couchée  sur  les  registres  qu'après  que  l'essayeur  Ta  exacte- 
ment déterminée.  De  là  la  dénomination  d'argent  de  banque, 
et  la  différence  qui  se  trouve  entre  l'argent  de  banque  et 
l'argent  courant. 

Dne  autre  disposition  du  règlement  dit  que  la  banque,  pour 
_  satisfaire  à  toutes  les  demandes  qui  pourraient  lui  être  faites, 
•e  pourvoira  de  toutes  les  espèces  de  monnaies,  et  en  déli- 
vrera aux  personnes  qui  en  auront  besoin,  moyennant  un  lé- 
ger bcaéfice.  A.  M, 


les  informations  données  parles  comniissairesde  la  banque 
au  comité  de  sa  réquisition,  et  la  balance  dressée  derniè- 
rement, se  trouvent  d'accord,  ce  qui  sera  ulléricurement 
examiné  en  détail,  il  n'existera  pas  alors  ûe  déficit  dans 
ladite  banque ,  mais  que  les  parties  aclives  ou  passives  se 
balanceront  exactement ,  excepté  qu'an  lieu  d'espèces  on 
a  accepté  de  temps  en  temps  dans  ladite  banque,  en  gage 
de  sommes  notables  qui  ont  été  levées  successivement  de- 
puis un  demi*siècle ,  une  quantité  très-remarquable  d'ob- 
ligations ,  savoir  : 

•  Soixante-seixe  obligations  à  la  charge  de  la  Compagnie 
des  Indes,  à  la  chambre  d'Amsterdam,  sous  la  garantie 
des  états,  de  cette  province,  chacune  de  100,000  florins 
de  banque,  à  S  pour  IQO  d'intérêt;  plus  une-paretllc  de 
50,000  florins  de  banque,  sur  lesquelles  il  serait  dû,  sui- 
vant les  informations  desdits  commissaires,  une  somme  de 
359,000  florins  de  banque  d'intérêts  :  pour  leïqueiles  obli- 
gations la  trésorerie  de  cette  ville  rst  débitée  sur  la  ba* 
lance  susdite  de  6  millions  27S,000  florins  de  banque  ; 

•  De  plus,  cinquante  obligations,  chacune  de  34,000 
florins,  ù  la  charge  de  la  province  de  la  Hollande  et  de 
West-Frise,  appartenant  k  la  chambre  d'emprunt  de  cette 
ville,  sur  lesquelles,  selon  les  informations  des  commis- 
saires, la  banque  a  avancé ,  conformément  à  la  susdite  ba- 
lance, la  somme  de  838,857  florins  de  banque,  sur  laquelle 
il  serait  dû  30,000  florins  d'intérêts; 

«  Qu'en  outre  la  chambre  d'emprunt  doit  encore  à  la 
l>anque,  suivant  les  mômes  informations,  une  sonmie  de 
1  million  715,000  florins; 

•  Que  du  reste ,  si  tout  est  trouvé  conforme  aux  susdites 
informations,  et  l'argent  de  caisse  étant  réduit  en  argent 
de  banque,  la  trésorerie  de  cette  ville  devrait  encore  ù  la 
banque  de  change  ce  dont  elle  est  resiée  sa  débitrice  lors 
de  la  fermeture  précédente,  savoir  : 

«  Une  somme  de 38,358  fl.    S  s»        d* 

«Et  ce  qu'elle  lui  devait  à  la 
fermeture  actuelle.    •    •    •    •  125,314         0         8 


«  Ainsi  ensemble.    •    •    •    •  163,672  fl.    8  s.    8  d. 

«  Enfin  qu'il  est  dû  par  la  ville 
à  ladite  banque ,  la  somiine  de    •    227,264  fl.  3  s.  8  d. 
pour  laquelle  il  a  existé  des  obligations  qui,  au  dire  des 
commissaires,  auraient  été  brûlées,  mais  dont  la  ville  a 
néanmoins  payé  annuellement  des  intérêts  ù  la  banque; 

<c  Qu'il  est  cependant  notoire  que  la  ville  est  responsable 
de  cet  objet,  ainsi  que  du  tout,  devant  être  considérée  k 
cet  égard  non  -  seulement  comme  garant,  mais  outre  cela 
très-expressément  comme  débitrice  delà  banqueen  général; 

•  Que  du  reste  dans  ladite  banque  se  trouvent,  entre 
autres  en  nature,  toutes  les  espèces  courantes  sur  ré^pis- 
ses  ;  d'après  la  liste  qui  en  a  été  dressée  et  fournie  au  co- 
milé  de  commerce  et  de  marine ,  par  les  commissaires  de 
la  banque,  etqueconséquemment  toolcsces  espèces  pour- 
ront toujours  être  retirées  par  les  porteurs  de  récépissés, 
contre  restitution  d'iccux ,  quand  bon  leur  semblera  ; 

«  Enfin  qu'il  a  été  pris  par  lesdits  représentants  provi- 
sionnels, non-seulement  les  mesures  requises  et  les  plus 
efficaces  pour  que  dorénavant  il  ne  soit  plus  levé  ni  déli- 
vré de  ladite  banque,  contre  la  nature  de  son  institution 
primitive,  aucunes  espèces  quelconques,  de  l'autorité 
de  qui  que  ce  soit,  ni  par  emprunt,  ni  d'aucune  autre 
manière  illégitime;  mais  aussi,  pour  que  les  obligations 
données  en  gage  à  la  banque  comme  dessus- soient  conver- 
ties en  espèces  aussitôt  qu'il  sera  possible,  et  qu'en  gêné* 
rai  la  ville,  comme  débitrice  de  la  banque,  bonifie  aussi 
promptement  que  faire  se  pourra,  rn  espèces,  ce  qu'elle 
se  trouvera  devoir  par  solde  à  ladite  banque;  que  lesdits 
représentants  provisionnels  déclan>nt  qu'en  conséquence 
il  ne  pourra  plus  y  avoir  alors  de  déficit,  de  quelque  na- 
ture que  ce  soit ,  et  qu'ils  prendront,  sans  tarder,  en  con* 
sidéraiion  sérieuse,  et  feront  mettre  en  exécution  immé- 
diate les  moyens  de  parvenir  k  celle  fin. 

•  Les  représentants  provisionnels  déclarent  néanmoins 
que  cette  notification  se  fait  uniquement  pour  maintenir 
comme  il  faut  le  crédit  de  la  banque  de  cette  ville,  et  pour 
tranquilliser  entièrement  la  partie  commerçante  des  habi- 
tants de  cette  ville,  ainsi  que  tous  les  étrangers;  mais  nulle- 
ment pour  être  censés  par  là  approuver  ni  homologuer  Tu* 
sage  qui  pourrait  8*être  fait  du  dépôt  dans  la  banque  de 
cette  ville  ^  et  moins  encore  pour  décharger  par  la  pré« 


499 


sente  ceux  qui  pourraient  être  responsables  à  ce  sujet. 
«  Arrêté  et  publié  le  5  février  1795,  la  I'*  année  de  la 
liberté  balave. 

f  Par  ordre  desdits  représentauCs. 
•  Sigué  G.  BniNDBB;  A.  Bbamdis,  tecrétaire*  t 


REPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

Paris,  le  icf  ventôse.—  On  rapporte  que  le  cabi- 
net de  Saint-James  a  formellement  désapprouvé  la 
démarche  faite  par  son  ministre  à  Venise,  pour  em- 

Ï lécher  l'admission  du  citoyen  Lallemant,  envoyé  de 
a  république  française ,  et  surtout  les  expressions 
dont  il  s'était  servi  dans  la  note  qu'il  avait  présentée 
à  ce  sujet.  Ce  qu'il  y  a  de  certain  ,  c'est  que  ce  mi- 
nistre vient  de  donner  sa  démission. 

Le  gouvernement  vénitien  témoigne  en  toute  oc- 
casion les  plus  grands 'égards  au  citoyen  Lallemant. 

L'usage  esta  Venise  de  réserver ,' dans  les  diffé- 
rents théâtres,  des  loges  pour  les  ministres  des  puis- 
sances étrangères;  mais  il  y  en  a  de  particulières  et 
de  distinguées  pour  les  ambassadeurs.  Le  gouver- 
nement vient  d  ordonner  que  l'une  d'elles  serait  af- 
fectée au  citoyen  Lallemant,  quoiqu^il  n'ait  d'autre 
titre  que  celui  d'envoyé. 

CONVENTION   NATIONALE. 

Présidence  de  Barras, 
SUITB  DE  LA  SÉANCB  DU  29  PLUVIOSB. 

Cboudieu  :  Les  bons  citoyens  doivent  s'affliger 
des  injures ,  des  déclamations  oui  viennent  d'être 
proférées  à  cette  tribune.  Je  ne  aemanderai  pas  que 
ceux  oui  se  sont  oubliés  à  ce  point  soient  rappelés 
à  l'orore. 

RiCHOUX  :  L'ombre  de  PRélippeaux  est  à  côiëde 
toi....  prends  garde.... 

Cboudieu  :  Je  ne  demanderai  pas  non  pins  que  la 
Convention  sévisse  contre  ceux  qui  m'injurient,  car 
je  dépeuplerais  cette  assemblée  ;  mais  je  demanderai 
que  ceux  qui  ont  tant  de  courage  à  accuser  dans  la 
foule  se  lèvent,  montent  à  cette  tribune,  et  parlent 
publiquement  contre  moi. 

Je  répondrai  d'abord  à  Merlin  qu*il  se  trompe 
s'il  croit  enchaîner  notre  énergie  par  des  menaces, 
par  des  déclamations,  par  des  rapprochements  inju- 
rieux. Ce  ne  sont  pas  les  Maury,  les  Cazalès  qui  ré- 
clamaient les  appels  nominaux;  nous  les  réclamions 
avec  courage  dans  l'affaire  de  Lafayette ,  et  alors 
encore  tious  étions  de  la  minorité  ;  nous  les  récla- 
mions encore  dans  l'affaire  du  dernier  roi,  qui  a 
trouvé  dans  cette  enceinte  de  si  nombreux  défen- 
seurs. 

Les  hommes  qu'on  accuse  d'être  les  complices  de 
Robespierre  demandent  aujourd'hui  l'impression  de 
sa  correspondance.  Par  (|uelle  fatalité  nos  accusa- 
teurs refusent-ils  la  lumière?  pourquoi  ne  veulent- 
ils  pas  trouver  dans  cette  correspondance  de  nou- 
velles preuves  de  notre  complicité  avec  ce  tyran? 

Trop  longtemps  le  peuple  a  été  égaré ,  trop  long- 
temps il  a  méconnu  ses  amis  vérilaoles.  Ses  enne- 
mis sont  ceux  qui  le  flattent  aujourd'hui,  après  avoir 
abandonné  sa  cause ,  qui  ont  ehangé  de  conduite 
comme  de  langage.  Parmi  les  déclamateurs  qui  as- 
siègent  cette  tribune,  parmi  les, amis  nouveaux  de 
'  rhnmanité,  il  en  est  qui,  sous  la  domination  de  Ro- 
bespierre ,  ont  pris  aussi  des  mesures  extraordinai- 
res. Il  m'appartient  de  faire  cette  assertion;  pendant 
deux  années  chargé  de  missions  importantes,  placé 
près  d'armées  importantes,  j'appelle  ici  mes  accusa- 
teurs, et  leur  demande  moi-même  des  preuves  gpn^ 
tre  moi.  J'ai  lieu  d*étre  étonné  qu'on  ait  osé  ba- 


lancer ràutorité  de  la  Convention  par  celle  du 
règlement.  Ce  n'est  pas,  à  la  vérité,  la  première  at-^ 
taquc  que  l'on  a  faite  à  cette  constitution  ;  mais  je 
soutiens  que,  sans  la  renverser,  l'assemblée  ne  peut 
pas  refuser  l'appel  nominal  que  notis  demandons. 
Je  demande  de  nouveau  l'impression  des  pièces; 
on  verra  quels  sont  ceux  qui  écrivaient  a  Robes- 
pierre.... 

SALiiDiN  :  Ils  étaient  en  prison  ou  au  pied  de  l'é- 
chafaud.... 

Cboudieu  :  Cette  impression  fera  connaître  une 
partialité  révoltante,  une  contradiction  manifeste 
avec  les  principes  de  justice  que  l'on  proclame.  On 
verra  (|u  on  a  choisi  toutes  les  pièces  qui  pouvaient 
satisfaire  des  vengeances  particulières,  pour  refu- 
ser ensuite  la  puolicité  des  autres.  Mon  vœu  a  cet 
égard  étant  bien  établi ,  je  termine  par  porter  un 
nouveau  défi  à  mes  accusateurs  de  paraître  à  cette 
tribune. 

Cboudieu  est  couvert  d*applaudissements  par  les 
membres  placés  à  l'extrémité. 

On  réclame  de  nouveau  l'appel  nominal. 

AifDBB  DuiiONT  :  Je  ne  cesserai  de  répéter  ce  que 
je  regarde  comme  le  témoignage  lé  plus  honorable 
pour  moi.  Je  défie  qu'on  puissa  me  prouver  que 
j'aie  fait  verser  une  goutte  de  sang.  Le  préopinant 
vient  de  me  désigner  ;  je  lui  réponds  par  ce  aéfi,  et 
je  le  somme  d'en  prouver  autant (Très-vifs  ap- 
plaudissements. )  Quant  aux  lettres  dont  il  s'agit, 
je  prends  l'engagement  de  faire  ilhprimer ,  traduire 
dans  tontes  les  langues ,  envoyer  à  toute  l'Europe, 
et  cela  à  mes  frais,  les  lettres  que  j'ai  écrites  à  Ro- 
bespierre. A  la  vérité ,  je  ne  me  chargerai  pas  de 
faire  imprimer  les  détails  de  toutes  les  manœuvres , 
de  tous  les  complots,  de  tous  les  actes  qu'on  peut 
reprocher  à  celui  qui  vient  de  parler....  (  Vifs  ap- 

Slaudissements.)  Au  surplus ,  nous  avons  un  moyen 
'imposer  silence  aux  calomniateurs  et  d'éviter  les 
troubles  qu'ils  demandent.  Que  la  conduite  des  re- 
présentants seuls  soit  mise  au  grand  jour  ;  je  de* 
mande  que  toutes  les  lettres  des  représentants  du 
peuple  à  Robespierre,  et  toutes  les  pièces  qui  y  sont 
relatives ,  soient  imprimées  ;  je  demande  que  la  pu- 
blication se  borne  à  cela. 

L'assemblée  se  lève  tout  entière  et  adopte  la  pro- 
position de  Dumont. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Dans  la  nomination  des  co- 
mités il  existe  un  abus  qu'il  est  important  de  re- 
dresser. Lorsqu'un  membre  nommé  au  scrutin  ne 
peut  accepter,  soit  pour  cause  de  maladie,  soit  parce 
qu'il  revient  de  mission,  soit  pour  tout  autre  motif, 
on  appelle  à  sa  place  au  comité  celui  qui  a  réuni 
après  lui  le  plus  de  voix;  de  cette  manière  souvent 
l'nomme  nommé  par  la  très-petite  minorité  se 
trouve  membre  d'un  comité,  contre  le  vœu  bien 
prononcé  de  la  majorité.  Je  demande  que  les  comités 
présentent  demain  la  liste  des  membres  qui  sont 
entrés  comme  suppléants  de  la  manière  que  je  viens 
d'indiquer ,  afin  qu'on  procède  de  suite  à  de  nou- 
veaux choix. 

Plusieurs  membres  placés  à  l'extrémité  de  la  salle 
réclament  contre  cette  proposition. 

Bentabole  :  J'observe  a  Bourdon  (|ue  la  mesure 
proposée  serait  d'une  difficile  exécution  ;  d'ailleurs 
elle  est  insultante  a  la  représentation  nationale,  en 
ce  qu'elle  suppose  que  la  Convention  renferme  dans 
son  sein  des  membres  indignes  de  siéger  dans  ses 
comités. 

BoissY  d'Anglas  :  Il  ne  faut  pas  un  grand  effbri 
de  raisonnement  pour  prouver  que  la  proposition 
de  Bourdon  doit  être  adoptée.  Je  l'appuie  par  un 
exemple  :  sept  cents  membres  votent  pour  que  tel 
représentant  soit  nommé  à  un  comité  «  quaraiile 


500 


K 


membres  volent  pour  un  autre;  si  celui  qui  a  eu  sept 
cents  voix  ne  peut  pas  acceplw,  il  est  remplacé  par 
celui  aiv  en  a  eu  quarante.  Voilà  donc  quarante  voix 
enchaînant  la  majorité,  la  presque  unanimité  de  la 
Convention  nationale.  Ceci  s'applique  à  tous  les  co- 
uiités  comme  à  ceux  de  gouvernement ,  car  tous  les 
comités,  dans  la  partie  qui  leur  est  confiée,  sont  co- 
mités de  gouvernement.  Je  cite  un  autre  exemple  : 
Carrier  était  entré  au  comité  de  législation  par  suite 
de  l'abus  dénoncé  par  Bourdon.  Je  demande  donc 
que  sa  proposition  soit  adoptée. 

Bourdon  ,  en  rétablissant  sa  proposition ,  fait  ob- 
server que  souvent  trois  ou  quatre  voix  ont  ainsi 
pn  porter  un  membre  au  comité. 

GÉNissiEUx:  J*ai  été  nommé  suppléant  à  un  co- 
mité; j*eu  deviens  membre,  parce  que  celui  qui  a  été 
élu  avant  moi  ne  peut  accepter;  j  appuie  la  propo- 
sition de  Bout'don,  en  convenant  que,  pour  être 
membre  d'un  comité,  il  faut  réunir  les  voix  de  la 
majorité.  (On  applaudit.) 

Thuriot  et  AlbitteinToquent  à  cet  égard  les  rè- 
glements de  l'assemblée  qui  se  sont  succédé  et  l'u- 
sage qui  s'était  -établi  dans  son  sein  ;  ils  réclament 
le  renvoi  de  la  proj)osition  au  comité  de  législation, 
pour  en  faire  un  prompt  rapport. 

Après  une  discussion  assez  vive  et  deux  épreuves 
douteuses,  le  renvoi  au  comité  est  décrété. 

Piette  demande  la  parole  pour  une  motion  d'ordre. 

PiETTB  :  Citoyefis ,  la  Convention  nationale,  sur 
un  rapport  fait  au  nom  du  comité  de  législation  ,  a 
décrète,  le  18  de  ce  mois, que  les  vinet-sept  citoyens 
du  département  des  Ardennes ,  traduits  au  comité 
de  sûreté  générale  par  un  arrêté  du  représentant  du 
)euple  Levasseur  (de  la  Sarthe  V  comme  prévenus, 
es  uns  de  manœuvres  pratiquées  en  1791  pour  se 
faire  adjuger  les  biens  nationaux  au  dessous  de  leur 
valeur,  les  autres  d'avoir  prévariqué  comme  juo^es. 
en  civilisant  l'affaire,  les  autres  enliii  de  s'être  rendus 
coupables  de  faits  et  de  propos  inciviques  ,  et  qui , 
depuis,  ont  obtenu  leur  mise  en  liberté,  sont  ren- 
voyés au  tribunal  criminel  du  département  des  Ar- 
dennes ,  séant  à  Mézières,  pour  y  être  jugés  sur  les 
procédures  instruites  et  les  pièces  existantes  contre 
enx,  de  la  manière  ordinaire. 

Vingt-sept  citoyens  ont  été  envoyés  ici  pour  l'a- 
liment  de  la  guillotine  de  la  tyrannie  ;  ils  ne  sont 
absolument  pour  rien  dans  cette  affaire  ;  ils  ne  con- 
naissent même  pas  ceux  qui  y  sont  mêlés,  qui  n'ont 
jamais  acquis  pour  un  denier  de  bien  national,  parce 
qu'ils  n'en  ont  pas  la  faculté. 

Ce  décret  que  vous  avez  adopté  avec  d'autant 
plus  de  conOance  qu'il  ne  paraissait  être  question 

2ue  d'un  renvoi  devant  un  tribunal ,  ne  peut  pas 
tre  maintenu,  exécuté  au  moitis  pour  la  partie  de 
ses  dispositions  qui  concernent  les*  ju^es  et  les  ci- 
toyens,  autres  que  ceux  prévenus  d'agiotage,  sans 
rehausser  les  actions  des  complices  de  la  tyrannie , 
sans  reporter  la  terreur  et  le  désespoir  dans  toutes 
les  âmes,  sans  fouler  aux  pieds  vos  propres  principes 
et  la  loi. 

Trois  juges  du  tribunal  d'Attigny,  contre  lesquels 
des  animosités  personnelles  se  sont  exercées  et 
qu'elles  poursuivent  encore  aujourd'hui,  soni  accu- 
sés d'avoir  prévariqué  comme  juges  en  civilisant 
l'affaire  de  l'agiotage  :  ce  sont  les  termes  du  décret. 
Eh  bien,  citoyens,  ces  juges,  les  hommes  les  plus 
probes,  les  meilleurs  citoyens,  qui  avaient  com- 
mencé par  décréter  d'ajournement  personnel  et  d'as- 
signer pour  être  ouïs  l'oncle  et  le  beau-frère  de 
deux  de  leurs  collègues  et  quinze  autres  individus 
inculpés,  ce  qui  ne  permet  pas  le  moindre  soupçon 
de  séduetioD  sans  aoute  «  ont  i^rfaitement  rempli 


leur  devoir  dans  la  circonstance,  et  c'est  la  loi  h  la 
main  que  je  vais  vous  le  prouver. 

Cette  loi  est  celle  du  3  juillet  1791,  qui  ne  donne 
ouverture  qu'à  indemnité  envers  la  nation  pour  tous 
cas  résultants  d'agiotage  dans  la  vente  des  biens  na- 
tionaux. 

Une  autre  loi  encore  rendue  à  ce  sujet  est  celle 
du  19  de  ce  mois,  relative  à  l'organisation  d'une 
police  municipale  et  correctionnelle  ,  qui ,  article 
XXVI!,  titre  H,  détermine  cette  indemnité. 

Que  devaient  faire  alors  les  trois  juges  qui  com- 
posaient le  tribunal?  Devaient-ils  régler  l'affaire  à 
l'extraordinaire  ou  la  civiliser?  Ils  devaient  ren- 
voyer les  parties  à  l'audience  ordinaire,  pour  y  être 
statué  sur  les  dommages  et  intérêts,  et  c'est  ce  qu'ils 
ont  fait. 

Si  au  moins  il  se  trouvait  un  seul  mot ,  le  plus 
léger  indice,  dans  la  procédure,  qui  pût  les  faire  sus- 
pecter; mais  non,  citoyens,  vous  n'y  verrez  que  des 
actes  qui  attestent  leur  loyauté. 

Et  quand,  ce  qui  n'est  pas,  ces  juges  se  seraient 
trompés,  dans  quelles  annales ,  dans  quel  gouverne- 
ment a-t-on  jamais  vu  rendre  des  juges  garants  de 
leurs  décisions?  Quet  homme  à  ce  prix  voudrait-on 
trouver  pour  remplir  des  fonctions  aussi  pénibles 
que  ruineuses? Quel  est  enfin  le  citoyen  vertueux 
qui  ne  préférerait  la  nullité  la  plus  absolue  à  un 
genre  d'emploi  dans  lequel  l'erreur  même  serait  con- 
sidérée comme  un  crime? 

Vous-mêmes ,  législateurs,  pourriez-vous  préten- 
dre ne  jamais  vous  tromper? 

Sous  tous  les  aspects  il  y  aurait  donc  injustice, 
inconséquence,  tyraimie,  si  vous  ne  réformiez  pas 
la  disposition  du  décret  du  18  de  ce  mois,  relative 
aux  juges  dont  je  vous  parle. 

C'est  avec  autant  dj  fondement,  citoyens,  avec 
autant  de  justice,  quejedemamle  la  même  réforma- 
tion en  faveur  des  citoyens  autres  que  ceux  compris 
dans  l'affaire  de  l'agiotage. 

De  quoi  étaient  prévenus,  de  quoi  accusait-on  ces 
citoyens,  dont  les  loups  qui  dévoraient  la  France 
avaient  aussi  peuplé  leurs  repaires?  On  les  accusait 
de  faits  et  de  propos  inciviques. 

Quels  étaient  leurs  juges  naturels?  Le  comité  de 
sûreté  générale. 

Eh  bien,  citoyens,  le  comité  de  sûreté  générale, 
tous  nos  collègues  qui  le  composent,  revêtus  à  si 
juste  titre  de  votre  confiance,  ont  prononcé,  après 
le  plus  mûr  examen,  sur  le  sort  de  ces  infortunés; 
tous  ont  été  acquittés,  renvoyés  dans  le  sein  de  leurs 
familles,  où  ils  vous  bénissaient,  lorsque  votre  dé- 
cret est  venu  replacer  sur  leurs  demeures  paisibles 
le  voile  funèbre  qui  y  avait  été  tendu  si  longtemps. 

Je  demande  donc  que  votre  décret  du  Ib  de  ce 
mois  soit  réformé  de  manière  que  les  prévenus  d'a- 
eiotage  soient  seuls  renvoyés  à  un  tribunal  pour  y 
être  jugés. 

Mais,  comme  vous  ne  devez  rien  prononcer  de  dé- 
finitif dans  la  circonstance  sans  un  rapport  de  votre 
comité  de  législation,  je  demande,  si  la  Convention 
n'était  pas  assez  instruite,  que  ma  proposition  lui 
soit  renvoyée,  et  cependant  que  l'exécution  de  votre 
décret  soit  suspendue  relativement  aux  juges  du  tri- 
bunal d'Attigny  qu'il  inculpe,  et  aux  citoyens  qui, 
faisant  partie  des  vingt-sept  envoyés  ici  pour  la 
mort,  ne  sont  pas  compris  dans  l'affaire  de  l'agiotage 
en  question. 

•  La  Convention  rapporte  son  décret  du  18  de  ce  mois» 
en  ce  qu*il  renvoie  :  4®  les  juges  du  iribunal  d'AUigny 
eomme  prévenus  d'avoir  prévariqué  en  civilisant  Paffjire 
de  Tagiotage  dont  il  s^agit;  et  2«  les  citoyens  qui,  n'ayant 
aucune  relation  avec  la  mCme  affaire,  étaient  prévenus  de 
faits  et  de  propos  inciviqiies  »  et  qui  ont  été  mil  en  lllierté 


oOl 


par  le  comltA  de  sftrelé  fénérale  ;  le  snrplut  seulement  du 
même  décret,  reUiUf  aux  citoyens  prévenus  d^agiotage,  de- 
vant recevoir  son  exécultoo*  > 

—  Le  citoyen  Gaillau,  armurier  de  Montauban,  est 
admis  à  la  barre  :  il  fait  hommage  d'un  fusil  qu*îl  a 
fabriqué;  cette  arme,  dans  laquelle  il  n*entre  point 
du  tout  de  bois,  dit  l'inventeur,  est  plus  solide,  plus 
simple,  et  coûte  moins  d'entretien  que  les  fusils  or- 
dinaires. 

La  Convention  accepte  l'hommage,  ordonne  qu'il 
en  sera  fait  mention  honorable  et  insertion  au  Bul- 
letin, et  renvoie  le  fusil  à  l'examen  des  comités  mi- 
litaire et  de  salut  public. 

La  séance  est  levée  à  six  heures. 

SEANCE  DU  30  PLUVIOSE, 

Après  la  lecture  de  la  correspondance,  la  barre 
s^ouvrc  aux  pétitionnaires. 

—  Un  citoyen  est  introduit  et  présente  une  récla- 
mation contre  l'effet  rétroactif  donné  à  la  loi  du  17 
nivôse  de  l'an  2«  sur  les  successions  ;  il  expose  que 
cette  loi,  qu*il  dit  blesser  la  constitution  et  la  Décla-^ 
ration  des  Droits,  a  fait  naître  une  foule  de  procès. 
Il  termine  par  demander  que  toutes  procéaures  à 
cet  égard  soient  suspendues. 

Laurent  :  Je  demande  que  cette  pétition  soit  ren- 
voyée au  comité  de  législation,  en  le  chargeant  de 
faire  un  rapport  sur  la  partie  de  cette  loi  qui,  par 
son  effet  rétroactif,  brise  les  contrats  les  plus  sacrés. 

GéNissiEux  :  J'ai  été  le  premier  i  m'opposer  à  la 
loi  lorsqu'elle  fut  discutée;  mais,  puisauelle  a  été 
rendue,  je  crois  que  la  Convention  doit  ta  faire  exé* 
enter,  parce  que  sa  révocation  entraînerait  un  trop 
grand  nombre  d'inconvénients. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Le  décret  qu*on  vient  atta- 
quer dans  votre  sein  est  un  des  plus  beaux  que  vous 
ayez  pu  rendre  ;  il  a  consacré^  l'égalité  des  partages, 
à  l'instant  où  le  peuple  recouvra  ses  droits.  De  telles 
pétitions  ne  peuvent  être  dictées  que  par  la  malveil- 
lance, Pavarice  ou  la  haine  de  l'égalité,  et  ne  ser- 
vent qu'à  faire  faire  à  l'esprit  de  liberté  un  pas  ré- 
trograde. Je  demande  la  question  préalable  sur  la 
pétition.  (On  applaudit.) 

Laurent  :  Je  puis  assurer  la  Convention  que  cette 
loi  ti'a  pas  été  exécutée  encore  dans  un  grand  nom- 
bre de  départements. 

MoNTMAYAU  :  J'appuie  la  question  préalable  pro- 
posée par  mon  collègue  Bourdon.  Si  l'on  ne  peut 
établir  IVgalité  entre  les  frères,  comment  peut-on 
espérer  de  l'établir  jamais  entre  les  citoyens? 

Bourdon  :  Ce  que  vient  de  dire  Montmayau  mé- 
rite d'autant  plus  de  décider  l'opinion  de  l'assemblée, 
que  cette  loi  lui  fait  perdre  50,000  écus.  (On  ap- 
plaudit.) 

La  Convention  adopte  la  question  préalable  sur 
la  pétition. 

—  Une  députa tion  de  la  section  de  Bon-Conseil  est 
admise  à  la  barre. 

L'orateur  de  celle  dépulalion  :  Citoyens  repré- 
sentants, la  section  de  Bon-Conseil  a  frémi  d'hor- 
reur au  récit  des  nouveaux  complots  des  monstres 
qui  ont  voulu  assassiner  une  partie  de  la  Convention. 

Tous  les  citoyens  se  sont  levés  et  ont  juré,  sur  les 
Droits  de  THomme,  d'exterminer  les  vils  assassins 
qui  otit  juré  sur  des  poignards  d'égorger  le  peuple 
et  ses  plus  fidèles  représentants.  Le  désir  de  ména- 
ger un  temps  précieux  a  seul  empêché  que  les  ci- 
toyens de  la  section  de  Bon-Conseil  ne  vinssent  en 
masse  faire  retentir  le  temple  de  la  Liberté  de  leurs 
serments. 

Législateurs,  ils  nous  ont  chargés  d'être  leurs  or- 
ganes, et  c'est  en  leur  nom  que  nous  jurons  ici  d'é- 
tablir un  mur  d'airain  entre  les  partisans  de  la  ter- 


reur et  les  amis  de  la  justice ,  entre  les  brigands  et 
les  hommes  probes ,  entre  les  valets  de  la  tvrannie 
et  les  amis  de  la  liberté,  entre  les  bourreaux  ae  rhu-* 
manité  et  leurs  innocentes  victimes;  en  un  mot, 
entre  les  Jacobins  du  0  thermidor  et  les  honnêtes 
gens. 

Nous  nous  empressons  aussi  de  remplir  une  mis- 
sion qui  n'est  pas  moins  chère  à  nos  cœurs  :  nos 
braves  frères  d'armes  s6  signalent  chaque  jour  par 
des  prodiges  de  valeur  qui  surpassent  ce  que  l'anli- 
quité  nous  rapporte  des  temps  héroïques.  Si  la  pos- 
térité se  refuse  à  croire  les  atrocités  commises  sous 
la  tyrannie  de  nos  décemvirs,  nos  derniers  neveux 
regarderont  aussi  les  hauts  faits  des  fondateurs  de  la 
liberté  comme  des  merveilles  au-dessus  de  l'huma- 
nité. 

Le  crime  veflle,  mais  la  justice  est  debout;  Her^ 
cule  ne  craint  pas  les  lions. 

Les  vils  agents  des  décemvirs  prêchent  la  guerre 
civile,  tiennent  des  conciliabules,  proscrivent  vos 
têtes;  mais  le  peuple  sera  plus  fort  qu'eux;  la  jus- 
tice est  pour  vous,  l'horreur  est  pour  les  buveurs  de 
sang. 

Leur  dieu  a  été  traîné  dans  la  boue;  qu'ils  aillent 
s'y  vautrer  avec  lui. 

Grâces  vous  soient  rendues,  représentants,  d'a- 
voir devancé  la  postérité  en  chassant  du  lieu  de  vos 
séances  et  du  temple  des  grands  hommes  l'ignoUé 
effigie  de  l'homme  cruel  mis  au  rang  des  dieux. 

Mais  ce  n'est  pas  assez  de  briser  les  autels  de  la  di- 
vinité des  égorgeurs  et  des  fripons.  Qu'une  police 
active  et  sévère  effraie  le  crime  et  assure  aux  bons 
citoyens  paix,  sûreté  et  tranquillité;  ordonnez  que 
chaque  citoyen  rendra  coiQpte  de  ses  moyens  d'exisr 
tence  ;  condamnez  à  des  travaux  publics  ceux  qui 
n'en  auraientd'autresque  leurs  intrigues  révolution- 
naires ;  que  ces  conciliabules  secrets,  ces  assemblées 
clandestines  des  hommes  de  sang,  soient  surveillés; 
fixez  vos  regards  sur  les  anciens  membres  des  co- 
mités révolutionnaires.  Nos  concitoyens,  dans  leur 
indignation,  ont  déclaré  qu'ils  avaient  perdu  leur 
confiance  et  nous  ont  chargés  de  demander  à  la  Con* 
vention  nationale  la  démission  de  plusieurs  d'entro 
eux,  qui,  dans  la  dernière  élection,  ont  été  nomm^ 
officiers  ou  sous-officiers  de  la  garde  nationale,  et 
que  leurs  compagnies  soient  autorisées  à  les  rem- 
placer. 

.  Cette  pétition  est  souvent  interrompue  par  les 
plus  vifs  applaudissements* 

Le  Président,  à  la  députation  :  Ce  n'est  plus  au- 
jourd'hui un  problème  :  le  voile  est  déchiré  ;  il  est 
démontré  à  tous  les  bons  esprits  que  l'étranger,  dé- 
sespéré de  ne  pouvoir  nous  vaincre  par  la  force, 
cherche  à  nous  diviser  et  à  exciter  des  troubles  dans 
l'intérieur,  et  surtout  dans  cette  commune.  C'était 
d*abord  sur  la  pénurie  des  subsistances  que  nos  en- 
nemis avaient  fondé  leur  espoir  ;  mais  rinfatigable 
activité  du  gouvernement,  les  ressources  que  nous 
offriront  bientôt  nos  conquêtes,  et  la  patience  inal- 
térable du  peuple,  ont  fait  échouer  ce  premier  com- 
plot. 

Maintenant  c'est  par  l'assassinat  et  la  gnerre  ci- 
vile qu'ils  espèrent  détruire  les  plus  zélés  défenseurs 
de  la  liberté  ;  c'est  par  la  calomnie  qu'ils  espèrent  ré- 
veiller toutes  les  passions  et  distraire  la  Conventiou 
des  importants  travaux  dont  elle  s'occupe. 

Vous  venez  de  jurer  fidélité  à  la  république  et  at- 
tachement à  la  Convention  ;  elle  sait,  et  toute  la 
France  saura,  que  ces  sentiments  sont  gravés  dans 
vos  cœurs,  que  vous  vous  êtes  touiours  ralliés  à  la 
représentation  nationale,  aux  lois,  a  tous  les  magis- 
trats qui  en  sont  les  organes,  et  à  tous  les  bons  ci- 
toyens qui  les  exécuteot. 


503 


La  Convention  nationale,  le  seul  centre  et  le  seul 

f^ointde  ralliement  des  amis  de  la  patrie,  investie  de 
a  puissance  du  peuple,  dirigera  la  révolution  vers 
un  but  salutaire,  la  liberté,  l'égalité  et  le  bonheur 
public.  Elle  se  fera  rendre  compte  de  votre  pétition, 
et  vous  invite  à  sa  séance. 

Cette  Adresse  est  renvoyée  au  comité  de  sûreté 
générale. 

—  On  introduit  une  dëputation  des  ci-devant  Co- 
médiens Français. 

Saint-Prix^  orateur  de  la  députation  :  Citoyens 
représentants,  si  pour  la  première  fois  le^  Comé- 
diens Français  cèdent  à  la  nécessité  de  vous  faire 
entendre  de  justes  réclamations,  ce  n'est  pas  pour 
eux  qu^ils  élèvent  la  voix  dans  cette  enceinte  ;  si 
leur  courage  n'a  pas  ployé  sous  leurs  souffrances 
personnelles,  il  ne  tient  pas  a  l'aspect  des  maux  que 
leur  infortune  a  causés. 

Echappés  entin  des  prisons  où  ils  gémissaient  de- 
puis un  ao,  les  Comédiens  Français  espéraient  de  re- 
connaître le  bienfait  de  leur  liberté  individuelle  par 
leur  zèle  à  proclamer  les  principes  de  la  liberté  pu- 
blique ;  ils  payaient  encore  en  espoir  une  double 
dette,  en  rendant  à  leurs  pensionnaires  et  à  leurs 
créanciers  ce  qu'ils  leur  devaient.  Qui  donc  a  rendu 
chimériques  ces  projets  d'un  devoir  sacré? 

Nous  n'accusons  personne  ;  mais,  à  peine  rendus 
i  la  liberté,  on  nous  met  en  réquisition,  on  met  un 
tarif  à  l'exercice  de  notre  art  ;  nous  semons  pour  nos 
créanciers,  et  nos  créanciers  ne  recueillent  rien,  et 
BOUS  n'emportons,  nous,  après  ïÀtn  des  peines, 

3u*un  quart  du  produit  de  nos  recettes,  qn'un  quart 
e  ce  qui  nous  appartient  ;  nous  n'emportons  enfla 
que  l'inutilité  de  nos  effoi;ts. 

C*était  donc  peu  d'avoir  vu  crouler  on  établisse- 
ment dont  la  création  remonte  à  plus  d'un  siècle, 
qui,  depuis  cinq  ans,  malgré  les  pertes  causées  par 
la  dépopulation  du  quartier,  malgré  l'acharnement 
de  ses  persécuteurs,  remplissait  avec  honneur  ses 
eo^affements,  alimentait  deux  cents  familles,  assu- 
rait I  existence  à  tousses  ouvriers,  et  une  retraite  à 
tous  ses  artistes;  qui,  sur  la  liste  de  ceux  auxquels 
il  payait  une  rente-viagère  de  2,000  liv.  affectée  sur 
leurs  propriétés,  et  sur  les  talents  des  acteurs  en 
exercice,  comptait  les  noms  célèbres  des  Duménil, 
des  Clairon,  des  Dangeville,  des  Bellecour,  des  Pré- 
ville, etc.  ;  un  génie  qui  veut  la  uerte  de  cette  Socié- 
té, la  forée  encore  à  se  dissouore,  en  dévorant  la 
substance  qui  dut  faire  son  aliment  et  celui  des  ïa^ 
fortunés  qui  l'entourent. 

'  Créanciers,  ouvriers,  artistes  retirés,  tous  sont 
enveloppés  dans  sa  ruine. 

Propriétés  dramatiques,  mobilier,^  magasins,  mar* 
chandises,  usufruit  de  la  salle,  traités  de  toute  es- 
pèce, recettes  de  plus  d'une  année,  les  Comédiens 
Français  ont  tout  perdu  ;  et  cependant,  au  milieu  de 
tant  de  ruines,  bien  qu'ilssoient  les  seuls  qui  n'aient 
reçu  du  gouvernement  aucun  secours,  quoique  leur 
emplacement  dans  un  quartier  presque  désert  leur 
fit  plus  qu'à  d'autres  un  besoin  d'en  recevoir,  ils  ont, 
dans  l'espace  de  quatre  années,  fait  hominnee  à  la 
nation  de  285,000  liv.  de  secours  publics  et  de  dons 
patriotiques. 

Votre  main,  législateurs,  a  déjà  cicatrisé  bien  des 
plaies,  étendez-la  sur  ceux  qui  ont  partagé  notre  in- 
nocence, et  faites  qu'ils  ne  partagent  pas  plus  long- 
temps notre  infortune. 

C  est  moins  encore  aux  amis  des  arts  qu*aux  amis 
de  l'humanité  que  nous  nous  adressons  ici  ;  c'est 
moins  pour  nous  que  pour  les  objets  de  notre  recon- 
naissance que  nous  vous  demandons,  non  des  se- 
cours, mais  les  fruits  entiers  de  nos  travaux,  mais 
notre  propriété ,  garantie  par  la  Déclaration  des 


Droits,  mais  le  gage  de  nos  créanciers,  et  le  patri- 
moine de  deux  cents  l'amilles  qui  attendent  de  leurs 
représentants  cet  acte  de  justice. 

Nous  demandons,  en  tiiiissant,  le  renvoi  de  notre 
pétition  à  vos  comités  d'instruction  publique  et  des 
nuances,  et  le  plus  prompt  rapport  sur  l'objet  de  nos 
réclamations.  (On  applaudit.) 

LBPaÉsmBNT,  à  la  députation  :  Citoyens,  la  ^cne 
française,  ainsi  que  toute  la  France,  s'est  vue  long- 
temps couverte  d'un  voile  fîinèbre  ;  les  Vandales 
auxquels  tout  genre  de  talents  faisait  ombrage,  qui 
voulaient  nous  ramener  au  despotisme  par  l'anéan- 
tissement de  tous  les  arts,  n'avaient  pas  oublié  de 
porter  leurs  regards  destructeurs  vers  le  Théâtre 
Français.  Ne  pouvant,  dans  leur  rage  impuissante» 
soustraire  à  l'admiration  des  hommes,  les  produc- 
tions immortelles  de  Corneille,  de  Bacine  et  de  Mo- 
lière, ils  voulaient  au  moins  enchaîner  les  talents  des 
artistes  célèbres  qui  les  représentaient  journelle- 
ment sur  la  scène.  Mais,  citovens,  ces  jours  de  deuil 
et  de  calamité  sont  passés  :  le  gouvernement  répu- 
blicain protégera  tous  les  arts  et  les  artistes;  à  ce  ti- 
tre, vous  avez  des  droits  incontestables  à  sa  sollici- 
tude. La  Convention  s'epipressera  de  se  faire  rendre 
compte  de  votre  pétition,  elle  vous  admet  avec 
plaisir  dans  son  sein.  (On  applaudit.) 

Les  artistes  français  entrent  dans  la  salle  an  mi- 
lieu des  applaudissements. 

BoissBT  :  11  est  temps  que  les  vrais  talents  repren- 
nent partout  la  place  qui  leur  a  été  enlevée  par  le 
charlatanisme  ;  il  est  temps  que  les  Comédiens  Fran* 
çais  soient  enfin  rendus  à  un  emplacement  où  ils  ont 
Tait  la  gloire  de  notre  théâtre.  (On  applaudit.)  Je  de- 
mande que  la  pétition  qui  vient  de  vous  être  présen- 
tée soit  envoyée  aux  comités  d'instruction  publique 
et  des  finances,  pour  en  faire  leur  rapport  sous  trois 
jours. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

—  Les  régisseurs  des  charrois  présentent  une  pé- 
tition par  laquelle  ils  offrent  de  faire  le  service  des 
armées  à  20  sous  par  tête  de  cheval  au-dessous  du 
prix  ordinaire^ 

Lkcointrb  (de  Versailles)  :  J'appuie  cette  pétition 
dont  je  demande  le  renvoi  au  comitéde  salut  public. 
J'ajoute  une  observation  oui  me  paraît  essentielle: 
la  Convention  a  ordonne  hier  l'impression  d'un 
marché  passé  par  le  comité  de  salut  public,  relati- 
vement aux  charrois.  11  me  semble  que  celte  impres» 
sion  peut  être  dangereuse,  en  ce  qu'elle  ferait  con- 
naître à  nos  ennemis  nos  besoins  et  nbs  ressources. 
Je  demande  la  suspension  de  cette  mesure  jusqu'au 
rapport  qui  doit  être  fait  après-demain  sur  le  même 
objet. 

La  pétition  est  renvoyée  au  comité  de  salut  pu- 
blic, ainsi  que  l'observation  de  Lecointre. 

Lecointbe  :  Je  prends  encore  la  parole  pour  dé- 
noncer les  agents  de  la  commission  de  commerce, 
qui  ont  acheté  desdraps  à  4  liv.  l'aune,  et  les  ont  re- 
vendus 14  liv.  Plusieurs  manufactures  sont  entière- 
ment ruinées  par  cet  agiotage  infâme.  Je  demande 
que  le  comité  de  salut  puolic  rende  un  compte 
exact  de  toutes  les  marchandises  mises  eu  réquisi- 
tion par  la  commission  du  commerce,  afin  de  con- 
naître ceux  qui  ont  abusé  de  ces  réquisitions  pour 
s*enrichir  aux  déj[>ensdu  peuple. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

GouLY  :  On  vous  a  distribué  hier  la  liste  des  can- 
didats proposés  pour  aller,  en  qualité  de  représen- 
tants, dans  les  colonies.  Je  pense  que  Tefficacité  de 
cette  mesure  dépend  de  sa  promptitude.  Je  demande 
donc  que  la  Convention  nationale  procède  à  l'appel 
nominal  pour  savoir  quels  seront  les  représentants 
envoyés  aux  colonies  orientales* 


503 


La  Convention  fixe  à  demain  cet  appel  nominal. 

—  Une  députation  des  ëlères  de  rEcole  Normale 
présente  une  pétition  par  laquelle  ils  réclament 
pour  leurs  frais  de  voyace  des  indemnités  propor- 
tionnées à  la  longueur  ue  la  route  qu*ils  ont  été 
obligés  de  tiaire  pour  se  rendre  à  Paris. 

Cette  pétition  est  renvoyée  aux  comités  d*instruc- 
tion  publique  et  des  finances. 

—  Les  élèves  de  l'Ecole  de  Santé  sollicitent,  dans 
one  pétition  qu'ils  présentent  à  la  barre,  Tétablisse- 
mentd*un  journal  démocratique  qui  ferait  participer 
tous  les  citoyens  aux  leçons  aes  savants  professeurs 
de  cette  Ecole. 

La  Convention  renvoie  cette  pétition  au  comité 
d*instruction  publique. 

—  Le  reste  de  la  séance  est  consacré  à  entendre 
des  pétitions  particulières  qui  sont  renvoyées  aux 
divers  comités  qu'elles  concernent. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SEANCE  DU   l^r  VENTOSE. 

Un  des  secrétaires  donne  lecture  des  lettres  sui- 
vantes: 

Les  repréêentarUs  du  peuple  près  les  armées  du 
Nord  et  de  Sambre-et- Meuse  à  la  Convention 
nationale, 

Bruielles,  le  t7  plavioce,  l'aa  3«  de  la  république 
française. 

•  Citoyens  collègues,  l'administration  centrale  de 
la  Belgique  nous  prie  de  vous  transmettre  une 
Adressa*  où  elle  manifeste  le  vœu  le  plus  formel  et  le 
plus  précis  pour  la  réunion  prochaine  de  ce  pays  k 
la  républiaue  française.  Elle  observe  qu'en  l'énon- 
çant elle  n  est  que  l'organe  de  la  majeure  partie  des 
administrés,  oui  brûlent  de  porter  le  beau  nom  de 
Français  et  d'être  associés  à  la  gloire  dont  il  réveille 
l'idée. 

•  Nous  recevons  au  même  instant  une  Adresse  de 
la  commune  de  Mons,  que  nous  vous  faisons  passer 
tfussi.  Elle  est  rédigée  dans  le  même  esprit.  Toutes 
les  communes  de  la  Belgique  nous  témoignent  la 
même  impatience  à  cet  égard;  toutes  désirent  ar* 
demment  oue  vous  fassiez  cesser  l'état  d'incertitude 
dans  laquelle  flotte  leur  existence  civile  et  politique 
depuis  que,  pour  la  seconde  fois,  nous  les  avons  ar- 
rachées au  jou^  de  la  tyrannie. 

«Nous  vous  invitons,  citoyens  collègues,  à  peser 
leur  demande  dans  votre  sagesse,  et  à  prononcer 
une  réunion  que  nous  leur  avons  promise  en  votre 
nom,  et  dont  nous  les  jugeons  dignes  de  recevoir  le 
bienfait. 

«Salut  et  fraternité. 

«  Signé  Pérès  et  Haussmann.  • 

Les  membres  composant  l'administration  centrale 
de  la  Belgique  à  la  Convention  nationale. 

«  Législateurs,  appelés  par  l'autorité  de  vos  col- 
lègues, dans  des  circonstances  difficiles,  aux  fonc- 
tions importantes  et  délicates  de  l'administration  de 
la  Belgique,  nousavonsdûavoirdeux  points  de  vue, 
la  gloire,  la  prospérité  de  la  république,  et  le  bon- 
heur des  habitants  de  ces  provinces  :  tel  est  le  vœu 
des  Belges  qui  siègent  parmi  nous,  tel  est  celui  des 
Français  qui  partagent  nos  travaux  :  la  confiance  pu- 
bli(]ue  se  repose  sur  nous ,  et  elle  ne  sera  point 
trompée. 

Depuis  longtemps  la  partie  saine  et  éclairée  du 


deux  ans,  à  cette  demande»  nourrit  dans  le  cœur  des 


Belges  Tespoir  de  voir  luire  pour  eux  ce  jour  heu- 
reux où  ils  pourront  se  dire,  avec  un  saint  enthou- 
siasme: Nous  sommes  Français! 

«Déjà  vos  collègues,  par  leurs  proclamations, 
ont  livré  au  mépris  qu'ils  méritent  divers  agents  dé- 
noncés par  l'opinion  publique,  des  agents  dont  la 
suffisance  et  la  conduite  arbitraire  contrastent  si  sin- 
gulièrement avec  les  mœurs  républicaines:  ces  mê- 
mes proclamations  contiennent  la  promesse  d'assu- 
rer aux  Belges  la  subsistance  et  tout  ce  qui  est  né- 
cessaire à  la  conservation  de  leurs  ateliers,  leurs 
fabriques  et  leurs  manufoctures  ;  elles  ont  fait  cesser 
en  partie  le  fléau  des  réquisitions  et  des  entraves  mi- 
ses au  commerce. 

•  Hâtez-vous,  législateurs,  d'achever  notre  régé- 
nération ;  le  Belge  a  assez  souffert,  assez  longtemps  il 
a  végété  avec  une  demi-liberté  ;  il  est  temps  qu'u  la 
recouvre  tout  entière  et  qu'il  reprenne  son  ancien 
poste  dans  les  Gaules. 

«  Prononcez  la  réunion,  et  vous  détruirez  par  là 
les  ramifications  que  des  factions  liberticides  ont 
jusi]ue  dans  la  Belgique,  vous  ferez  taire  les  calom- 
niateurs qui  insinuent  à  un  peuple  bon  et  indus- 
trieux qu'on  n'exige  de  lui  des  sacriNces  que  pour  le 
replonger  dans  l'esclavage;  vous  déjouerez  les  espé- 
rances de  ceux  qui  voudraient  substituer  au  règne 
de  la  vertu,  de  la  justice  et  des  lois,  un  système  de 
terreur  justement  abhorré. 

«Si  les  Belges  ont  pu  Quelquefois  se  laisser  égarer 
par  des  hypocrites,  ils  n  en  méritent  pas  moins  vo- 
tre estime;  car  quel  est  le  peuple  dont  des  ambitieux 
ou  des  tartufies  ne  soient  pas  parvenus,  de  temps  à 
autre  ,  à  paralyser  Ténergie  I  C'est  à  vous,  législa- 
teurs, qu'il  était  réservé  de  poser  les  bases  indes- 
tructibles d'une  république  où  l'amour  des  principes 
fût  le  seul  guide  des  citoyens. 

•Rappelez-vous  cependant  que  les  Belges,  dénu^ 
de  tous  moyens,  et  forts  de  leur  seul  courage,  chas- 
saient leur  despote  lorsque  la  France  gémissait  en- 
core sous  le  sien.  Lorsque  la  Batavie  recevait  des 
fers  d'une  femme  ambitieuse,  le  Belge  n'a-t-il  pas 
sonné  le  premier  coup  de  la  glorieuse  révolution 
que  vous  achevez;  n'est-ce  pas  lui  qui  a  donné, en 
t787,  la  première  commotion  au  conducteur,  dont 
les  étincelles  ont  électrisé  vin^t-cinq  millions  d'hom- 
mes qui  jouissent  aujourd'hui  de  la  liberté?  Trente 
bataillons  belges  et  liégeois  n'ont-ils  pas  partagé  les 
périls  des  héros  de  la  republique  ? 

«  Non,  législateurs,  vous  ne  souffrirez  pas  <^ue  ce 
peuple  soit  plus  longtemps  sans  existence  civile , 
vous  ne  souffrirez  pas  que  nous  soyons  encore  un 
objet  de  trafic  pour  les  tyrans  de  Londres,  de  Vienne 
et  de  Berlin.  Le  peuple  français  ne  veut  pas  faire  des 
esclaves  ;  ce  peuple  guerrier,  <]ui  mérite  l'admira- 
tion de  l'univers,  est  fait  pour  aimer  le  Belge  et  fra- 
terniser avec  lui. 

m  Pourquoi  différeriez- vous  de  proclamer  la  réu- 
nion ?  C'est  alors  que  le  peuple  de  ces  contrées  verra 
cicatriser  ses  plaies,  c'est  alorsque  ses  nombreux  sa- 
crifices lui  paraîtront  légers,  parce  qu'il  sera  sAr 
d*en  recueillir  le  fruit. 

«Hâtez*vous  donc,  législateurs;  que  nos  habi- 
tants aillent  apprendre  à  votre  aéropage  la  haine  des 
tyrans  et  l'amour  de  la  vertu  !Que  notre  jeunesse, 
nourrie  dans  les  principes  républicains,  s'accoutume 
de  bonne  heure  à  combattre  pour  la  cause  de  la  li- 
berté et  de  l'égalité. 

«  Le  VŒU  des  hommes  de  bien  est  de  voir  nos  des- 
tinées unies  à  celles  du  peuple  français;  voilà  notre 
plus  belle  espérance,  voilà  l'unique  salut  de  la  Bel- 
gique. Vive  la  Convention  !  vive  la  république! 

«  Fait  à  Bruxelles  dans  la  séance  ou  38  pluviôse, 
se  année  républicaine.  • 


504 


La  mention  honorable  et  Tinsertion  au  Bulletin 
sont  décrétées. 

—  Le  représentant  du  peuple  Espert  écrit  de  Mar- 
seille :  «  J*ai  lu  le  rapport  fait  au  nom  des  deux  co- 
roitds.  Rassurez-vous,  citoyens  collègues,  le  rappor- 
teur n*a  dit  que  des  mensonges.  Je  n'ai  persécuté  que 
les  ennemis  de  la  chose  publique  ;  et  Mariette,  dont 
on  vous  a  parlé,  n'est  pas  un  nomme  dangereux.  Je 
me  fais  honneur  de  protéger  les  hommes  qui  ontfait 
le  10  août  et  renversé  le  tyran.  Marseille  ne  sera 
troublée  que  quand  on  le  voudra,  et,  quoi  qu'on  en 
dise,  je  n'imiterai  jamais  ceux  de  mes  collègues  qui 
font  colporter  des  Adresses  en  faveur  des  trtfîtres 
qui  ont  livré  Toulon.  Au  reste,  j'en  appelle  à  la  Con- 
vention: elle  méjugera...*  (vifs applaudissements 
de  l'extrémité.) 

On  demande  Tinsertion  au  Bulletin.  (Il  s*élève  de 
toutes  parts  de  violents  murmures.) 

Cygognb  :  Insérer  au  Bulletin  une  lettre  particu- 
lière, qui  ne  fait  que  démentir  un  rapporteur  des 
deux  comités,  sansapporter  une  seule  preuve,  ce  se- 
rait lui  donner  un  caractère  d'authenticité  qu*elle  ne 
doit  pas  avoir.  Je  demande  l'ordre  du  jour. 

Rovèrb:  Voici  deux  lettres  qui  vont  répondre  à 
Bspert  et  détruire  son  assertion  mensongère» 

li  lit  les  deux  lettres  suivantes: 

Cadroy  à  iùn  collègue  et  ami  Rovère. 

Maneille,  le  18  pluviôse.  Tao  S*  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

•  La  loi  du  7  de  ce  mois  est  arrivée  hier  à  midi. 
Dans  la  nuit,  les  meneurs  de  l'émeute  du  tempsd'Au- 

fuis  et  Serres,  qui,  après  avoir  été  mis  en  liberté,  ont 
guré  dans  les  mouvements  qui  ont  eu  lieu  ces  jours 
derniers,  sont  rentrés  dans  les  prisons.  Ce  matin  la 
loi  a  été  lue  et  enregistrée  au  département,  et  bien- 
tôt je  t'annoncerai  son  exécution.  Je  te  peindrais  dif- 
ficilement la  joie  pure  et  radieuse  des  vrais  citoyens; 
la  séréuité  orne  les  visages  ;  les  places  publiques  ne 
sont  plus  désertes;  on  s^embrasse  comme  après  un 
danger  commun  ;  les  méchants  sont  comprimés  et 
surveillés;  le  commerce  est  constant  et  actif;  les 
Génois  tirent  des  traites  sur  les  négociants  français. 
Tout  est  beau  ;  tout  reprend  depuis  auinse  jours;  on 
entend  partout  ce  cri  sublime:  •Vive  la  Conven- 
tion I  à  bas  les  Jacobins  !  à  bas  la  Montagne  !  •  Elle 
est  tombée  cette  fameuse  tribune  placée  audacieuse- 
ment  sur  un  roc,  dans  la  salle  des  séances  de  la  So- 
ciété de  Marseille  ;  avec  elle  s'est  brisé  son  bas-re- 
lief et  les  emblèmes  de  la  barbarie  :  les  tigres,  les 
loups,  les  léopards,  les  ours  et  les  lions  qui  pavoi- 
saient les  galeries  ont  disparu:  la  cérémonie  s'est 
faite  avec  calme  ;  les  bustes  de  Marat  et  Lepelletier 
ont  été  conservés  religieusement  et  replacés  plus 
honorablement  et  plus  décemment:  les  royalistes, 
j'espère,  ne  riront  que  du  bout  des  lèvres,  et  je  leur 
ai  annoncé  que  la  révolution  n'était  pas  faite  pour 
eux.  Tous  leurs  mouvements  sont  épiés,  et  le  peuple 
de  Marseille  a  juré  de  les  comprimer  tous. 

•  J'espère  que  la  loi  du  7  de  ce  mois  n'est  pas  une 
prorogation  pour  ma  mission,  et  tu  me  procureras, 
sans  doute,  la  facilité  de  me  retirer  après  les  trois 
mois. 

•  Pinatel,  appelé  au  comité  des  colonies,  te  dira 
quel  est  aujourd'hui  Télat  de  cette  ville:  je  te  le  re- 
commande ;  il  r.érite  toute  ta  protection  par  son 
honnêteté,  par  sa  probité,  par  ses  connaissances  et 
par  son  civisme. 

•  Salut  et  fraternité.  CAnROX .  • 


Leê  repréientanti  an  peuple^  envoyée  dans  lee  dé* 

Îarlemenle  du  Var  eî  dee  Bouehei-du- Rhône,  à 
iovère, 

Ali,  le  IS  oWose,  Pao  S*  de  la  république 
nue  et  indivisible. 

■  J^écris  par  ee  courrier  au  comité  de  $alut  public  ;  fe 
lui  parle  de  Teolèvement  de  la  moilié  des  matelots  génois, 
exécuté  secrètement,  et  sans  que  i^en  aie  élé  prévenu,  par 
Tordre  de  Salicetti  et  Jean-Bon  Saint-André.  Je  n*ai  pas  pu 
l'empêcher,  puisque  f^en  ignorais  les  motifs,  que  je  ne  l'ai 
BU  que  tard ,  et  que  ^ignorais  si  le  gouvernement  Pavait 
ordonné.  Je  dois  te  dire  seulement  que  {'ai  vu  avec  peine 
l'arrivage  des  subsistances  suspendu  et  arrêté  par  cette  dé- 
marche, qui  m*a  paru  fort  peu  du  goût  du  consul  génois; 
quoi  qu'il  en  soit,  je  réponds  de  Marseille  tant  que  les  sub- 
sistances ne  manqueront  pas,  et  je  déclare  que  rien  ne 
m*arrétera  lorsque  je  procurerai  du  pain  au  peuple.  La 
Montagne  est  tombée,  les  Jacobins  ne  sont  plof ,  les  ci- 
toyens honnêtes  reprennent  leur  énergie,  les  commerçants 
essaient  leur  industrie;  j^emploie  tout  pour  le  bien  public; 
mais  évite  de  ton  côté  toutes  les  entraves  qu'on  pourra 
mettre  à  nos  opérations. 

c  On  encourage  les  malveillants,  on  alarme  les  citoyens 
paisibles,  on  veut  changer  la  garnison  de  Marseille  ;  il  sem- 
ble qu'à  quelque  dislance  on  entend  gronder  des  orages 
qiii,rormépardcs  mains  puissantes,  paraissent  menacer  la  - 
tranquillité  publique;  mais  j'en  vois  les  éléments,  et,  mal- 
gré leur  toute-puissance,  je  les  braverai ,  et  ie  sauverai  le 
Midi,  avec  le  secours  des  collègues  que  la  Convention  m*a 
associés. 

•  Le  département  et  le  tribiraal  criminel  sont  installés  à 
Ait.  Marseille  est  tranquille,  Aix  se  r^oit,  et  tous  remer- 
cient la  Gonventfon. 

t  Porte  les  regards  deseonitès  ntr  Toulon  t  c*est  là  que 
se  sont  réfugiés  les  oontre-révorotionnaires  que  nous  avons 
citasses  de  Marseille;  nous  les  attaquerons;  mais,  pour 
les  vaincre,  il  faut  que  le  gonveriiement  nous  laisse  le  soin 
et  le  droit  exclusif  de  disposer  des  moyens,  et  qu^aucnoe 
puissance  égale  ne  puisse  détruire  par  la  oonirariélé  le  ioe> 
oès  de  nos  efforts. 

i  Je  te  prie  de  ne  pas  oublier  que  le  SO  de  oe  mois  ma 
mission  sera  finie. 

•  Salut  et  fîratemitô.  Signé  Cadiot.  • 

Les  lettres  de  Cadroy  sont  renvoyées  au  comité  de 
aflreté  générale.  (La  suile  demain,) 


N,  B.  Dans  la  séance  du  2  ventôse  la  Convention 
a  entendu  plusieurs  sections  de  Paris,  qui  sont  ve- 
nues la  féliciter  sur  l'énergie  de  ses  derniers^ictes. 

—  Sur  la  proposition  de  celle  de  la  Halle- aux- 
Blés,  elle  a  ordonné  la  destruction  du  monument 
élevé  devant  les  Invalides,  représentant  le  peuple 
français  qui  terrasse  le  Fédéralisme.  Les  autres  mo- 
numents du  même  genre  qui  peuvent  exister  dans  la 
république  seront  également  détruits. 

—  Carnot  a  fait  un  rapport  sur  la  Hollande.  Il  en 
résulte  que  ce  pays  est  occupé  par  cent  vingt  mille 
hommes  des  troupes  de  la  républif^ue,  que  toutes  les 
places  fortes  sont  en  leur  pouvoir,  et  que  les  assi- 
gnats sont  reçus  par  les  Bataves. 


Payement»  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 
miers mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscripUons  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  vlagè- 

;  res  est  de  huit  mois  vingt  et  no  jours  de  Taonée  1703  (vicax 

I  aiirle). 


GAZETTE  NATIONALE  «»  LE  MONITEUR  UNIVËIISËL. 

N"*  154.        Quartidi  4  Ventôse,  Van  3«.   {Dimanche  22  Févbieii  1795,  viiux  ttyU.) 


POLITIQUE. 

HOLLANDE. 

La  U*tyô ,  /«  4  9  févrltr,  «•  iM  reprMntanis  protlMtrei 
ficitnciit  d'annuler  uvec  solennité  les  xontcnccit  proriditfldi'i 
conlre  les  patriolci  cWpui»  U  réToldtion  flolboluUrlefine 
de  1*387;  une  proclanialioD  rappelU  cous  U'anirt  «iift  (|ui 
se  »oiit  eipatriés» 

—  Les  habilanls  de  La  Haye»  tille  où  tant  de  défOue« 
menl  a  si  longtemps  éclalé  pour  le  siallioiideri  Ketgot  as- 
semblés  d*unc  manière  lé;;aley  f  l  ont  dépo^  leurs  anciens 
ma^^lslrats ,  à  rcxccption  cl*un  sent,  Van-der-GoeSf  tonnu 
par  son  patriolisme.  Ils  onl  organisé  une  munîcipuliie, 
ainsi  fiti*utt(f  chambré  Judlcfalre  qal  sera  eom(tûsée  des 
plus  babilei  jur)scfmstiKc§. 

^  On  apprend  de  CK-tes  ((de  Taf ;in(-(fardè  aut  dfdrcs 
du  général  Lefeb? re  a  cbas«tâ  les  aftlés  des  bonis  de  fYsset. 

•—On  a  fbnné  des  corps  dVuvriors  pour  les  irnvaux  qui 
tont  ^ire  eommenc^  sur  les  bords  du  Rhin .  de  lu  Roêr  et 
à  Maastricht.  Ces  ouvriers  rcccTroot  la  sausistancé  ttiifl- 
taire, 

—  Les  troapcK  des  aHfés  ont  évacué  &  ta  bâic  té  maga- 
sin irtfpériai  de  Ltiilbotirg,  (5(otlt  tra&sporté  plds  loin  les 
bugages  mllUatres. 

^  Les  avant-poste»  frao^ab  a6  lont  éttrèmeMefll  H^ 
proches  df  WimiU 

ZwoU,  U  ^5  p(ni*loie.  ^  A  pdflé  Its  trodpcâ  attftalsW 
#nrent«f Iles  évacué  célte  vîflf»  <|ti*atfl«>(d(  les  patriotn  Sé 
•mit  ntfx^f  MX  pfoelaiBé  la  liberté,  et  la  férc^ltitlmi  a  été 
Itiite*  On  a  panoot  aitoré  la  rocardu  trlaolorif,  l/anciMntf 
régence  a  été  cassée  ;  une  régence  nouvelle  a  été  étabtiff  0t 
«lacs  toua  laa  ^narlter»  de  la  ville  s  éclaté  la  Joio  poMt^tie. 
*-*  La  vtlli  ««  D0âiboiirg  est  »tt  ^f éir  M  i^f  affala* 
«^Lés  réMbfteairis  ot\i  entojré  ttft  déiacheiiicni  &  tt* 
tenter  et  I»  Zntphéii ,  tif  k»  étaetiéM  par  1»  alliés  en  pleiM 
déftfttlt^ 

'-  A  Deteffter,  le^  Anglaif  tM  hAfé  jtt^qa'atti  flietiMes 
dans  Ira  téfffplei  et  ebez  fea  parliétiliefa» 

A  Ko^ngt,  tci  bd((^  féroêes  Ont  mfe  te  ftn  &  fa  maison 
d'un  citoyen <  et  avaient  poassé  la  cruabté  jcisqd^à  efttdti' 
tet  fa  tnaisoni  pour  que  personne  ne  p6t  échapper, 

•^  La  tille  de  Csmpeii  a  changé  sa  régence  et  arboré  f^ô* 
tendard  éê  la  liberté* 


IlÉPUBLlgLË  FllAxIfÇAWÊ. 
rr.iD(JNAL  ctâniMt  ttf6\Ayî\oni^k%vM» 

Du  29  plêiifioH,  -^  A  Pou  Vertu  re  de  raadience»  le  prè* 
stdcnt  a  rappelé  à  Tauditoire  que  le  sllerfee  le  plus  absolu 
doit  être  observé  dans  la  ^alie. 

On  a  donné  lecture  de  Pacte  d*accnsat»on  contre  fran* 
çols  Guilbori,  âgé  de  trente-six  an^,  né  &  (îacé,  départe- 
ment de  rorne,  garçon  scincr-boûrreller,  dotnicllié  a  l'an* 
tin ,  près  Paris. 

Cet  acte  a  été  dressé  par  Fouquier-Tinville,  et  àféùn* 
Tttltiré  par  Dnw*s  él#'#f  ce  fftrt  a  OMrgé  fe  Irth^Mf  â  Mettre 
Gniib.rt  en  j«genfeni«  H féMtie #e «it  acte  f^ OurlUert, 
le  1 5  bromairo  Pan  Y#  avait  «HisTasé  autonr  êë  lui  if»  grand 
nombre  de  ciloyer»^^  rue  &m  Faoboarg-Denr»^  avaqœlf^ 
du  toi)  animé  é*onénergiiméne«  il  t^oafl  !«#  disoovra  le» 
plus  lunatiques;  qu^iï  subit  interrogatoire ^  ofr  il  soulina 
iiauiemenl  IVsprit  de  ianatisme  qu'il  avait  manllireié  de- 
vant le  peuple}  qu^f  dit  entre  autres  cftoses  qu'il  pariail 
de  mcu,  quMI  Croyait  qn^l  rr^  avait  pas  dé  inal;  qu'a» 
péril  de  la  vîcy  et  tant  qael'ame  toi  tfyiUitH  dârfs  fe  fèftCre» 
il  reconntritraft  cette  lot-Hi,  dftf-il  aller  k  la  gnilltffirte;  qui! 
fut  troffvé  s«tf  lévî  tWie  fetrIFIc  f>é  éfart  le  pssfnifre  ii,  ri  iitt 
petit  foltimo  poriaaft  sftftroffs  de  la  cbapelle  dtfCaiTa)re,(Hi 

S*  Série   —  Tome  X» 


Christ  soUs  son  gilet  «  qae  le  commissaire  regarda  eotnmc 
un  signe  dt  ralliement  des  brigands  de  la  Vendëif»  etin- 
forme  a  celui  qui  lui  avait  été  envoyé  comme  vbjet  de  con> 
froDlalioii  ;  qu'il  répondit  qu'il  était  libre  de  le  porter,  qu'il 
y  avait  des  hypocrites  partout;  que  le  commissaire  remar- 
qua sur  son  bras  druit  un  cruciiix  et  un  cœur  de  Jésus, 
imprimés  sur  la  peau  avec  de  la  poudre  à  canon  et  du  ver- 
millon I  que  le  prévenu  répondit  que  cVtait  le  signe  re- 
marquable de  son  divin  Rol|  que,  le  commissaire  lui  ayant 
demandé  qui  lui  avait  apprit  la  discours  éloquent  qu'il 
avait  débité  sur  la  sainte  Vierge ,  sur  les  saints  et  les  roliy 
il  dit  I  «  Les  nations  contre  les  nations,  les  royaumes  oon^ 
tre  les  royaumes  se  divi««ronl  i  que  la  téie  sera  cassée  à 
plusieurs  rois,  et  qu*il  le  tenait  bon  pour  Tavolr  dU|  que 
c'était  pour  son  iniérôl  particulier  qu^il  avait  prêché  dana 
le  faubourg  Denis,  et  celui  des  personnes  qui^  comme  lui, 
toufaieut  la  gfuire  de  Dieu,  s 

Le  substitut  de  Paecusateur  public,  attendu  la  loi  du  13 
frimaire  et  cette  du  99  pluviôse  concernant  ta  Vendée,  s'est 
départi  du  second  cher  d^accusatlon ,  qui  même  ne  serait 
pas  prouvé;  et  peut-on  être  regardé  comme  contre-révofi>> 
tionnaire  pour  avoir  rédté  quelques  prières  J^ 

Tout  le  inonde  sait  que  les  soldats,  dans  leur  caserne, 
impriutalent  tfesorMtf  des  cceurs  sur  leur  peau.  Le  petit 
Christ  est  parfaitement  semblable  à  tous  les  Christs  que  lea 
catholiques  portaient  autrefois*  Des  hommes  de  mauvaise 
foi  voyaient  parioni  des  signet  de  rallieroeni.  One  foule 
d^inturionés  uni  élé  uondamnès  a  Mori  par  le  Iribiiinil  de 
titfbespierre  pour  avoir  adressé  en  commun  quelques  prie» 
res  &  rÉtcraeL  (la  régime  affroui  est  passé»  la  justico 
règne. 

L*accUS^  a  déét>Té  qU*il  n*avait  {amais  eu  Pintenlion  do 
faire  fe  mal,  quMl  u^avatt  Jamais  eu  en  vue  que  la  gloire 
de  Dieu  et  le  Bonheur  de  tout  le  monde,  et  If  a  ensuite  ré- 
cité quelques  fragmeMt  des  psauutes  de  David. 

Le  f ribfinai,  tu  la  déelaratlod  dujurt  portant  quil  n'est 
pas  constant  iHt*^\  a  été  préehé,  rtfe  du  f^aubourg-Derds, 
une  morale  fanatique  et  emitrerétotutionùaire,  a  acquitid 
et  mil  M»  Abarté  fUtt^^  Onilbert. 

^  Laeoste-Lagérfe.  égë  de  étante  ans,  né  et  demeu- 
rant h  Salift«féfi«''fieflrae,  district  dé  Monttgifre,  cultiva- 
teuff  prêt enu  de  propos  eonf  rct^orlutfminalres,  avait  pru 
an  tribunal  le  It  tcAdémiaire;  malSi  attendu  (|Uedes  htm» 
mes  probes  f  pour  rendre  hommage  a  la  Justice  i  n'avalettt 
pas  été  assigné*,  ee  proées  lui  suspendu.  AUlourd'huI  plié* 
sieurs  témoins  onl  rendu  un  témoîgn<fge  éclatsiit  à  l'bori-* 
tiéletéf  I  l'hHmanilé  et  à  la  probité  de  l'accusé,  qui  avall 
élé  dénoncé  par  dos  individus  qui  ataiebt  an  avec  lui  daf 
querellas  d^iutéréts* 

Vu  lu  déelaratioft  du  (ury  pèrtaUt  qu'il  n'est  pas  eofistaul 
quHl  a  été  tenu  h  9ainl-'Félii-nelbac  des  propos  tendant  U 
ravîlissement  de  la  rpfrrésentalion  nationalCf  des  aulorités 
constituées,  ef  au  rétablissement  de  la  royauté/  le  tribunal 
a  acquitté  et  ibis  en  fibertc^  Martial  Lacoste- Lagérie. 

Du  2  psnf  f;s«.  — '  iacq«les-Vf  nceni  Làfroii,  né  a  Paris  # 
âgé  de  cinquante  et  un  ans,  homme  de  toi^  ancien  prcH 
fesseur  de  droit  pubfic  au  Lycée,  membre  du  iribunat  do 
C6Acilia(ioir,  domicilié  é  Versailles,  a  paru  au  tribunal, 
(Nous  donueronâ  les  détails  de  fa  procédure/) 

Voici  le  Jugemont  qui  est  intervenu  t 

t  Vu  lu  déclarulim)  du  jury  p<m»tt%  qif  11  fTesf  pU*^  êott" 
starrf  que  roUvfagé  Ifrt'itirlé  (b  SprifatêUt  ftanftih  -pen- 
dant U  gouvêrntnHnt  révoinlionntnre  teUde  a  provoquer 
le  FéiablisatB^eut  de  la  royauté  et  la  diSselulioii  de  la  repr^< 
sent a^ion  national  #  le  tribunal  a  acquitté  et  mis  On  liberté 
iUcqùés-tincenC  Làcroif.  s 

Ce  jugement,  rendu  à  Punanimité,  a  été  aoovért  d'ap- 
plaudissements ;  une  foule  immense  de  eilayens^que  la  cé- 
lébrée dônbéé  ff  dette  aflairé  avait  ailirét  â  la  séance,  s'est 
fftfrféé  ttÉt  le  ffas5*g5é  du  citoyen  Lacroix.  Tottsse  sont  em- 
pressé»  de  h  félrciref ,  ef  il  a  été  rcconduii  cfiez  fui  uu  brui'. 
deisécétatturtiotis  unt^erseffet. 

6( 


506 


CONVENTION  NATIONALE. 

Suite  du  rapport  fait^  au  nom  de  la  commission 
chargée  de  Vexamen  des  papiers  trouvés  chez 
Robespierre  et  ses  complices ,  par  E.-B,  Cour- 
tois, député  du  département  de  VAuhe,  dans  la 
séance  du  16  nivôse,  an  3  de  la  république  fran- 
çaise, une  et  indivisible. 

Extrait  du  rapport  de  la  faction  Fabre. 

Haine  de  Robespierre  pour  la  Convention;  dé- 
vouement de  Robespierre  au  comité. 

Il  dénonce  dans  ce  rapport  deux  factions,  celle  des 
indulgents  et  celle  des  Ûébertisles.  •  Leur  patrio- 
tisme, dit-il,  se  renferme  dans  la  sphère  des  intérêts 
de  la  secte  ;  il  n'a  rien  de  commun  avec  la  vertu  pu- 
blique. 11  ressemble  à  la  haine ,  à  la  vengeance,  à 
l'intrigue,  à  l'ambition.  ■ 

Ne  dirait-on  pas  que  Robespierre  s*est  plu  à  nous 
donner  ici  quelques  traits  du  sien.  Mais  je  me  trompe; 
son  patriotisme  ne  se  renfermait  pas  même  dans  la 
sphère  d'une  secte  :  les  ambitieux  n'ont  point  de 
secte.  Son  patriotisme  était  encore  moins  universel; 
il  n'était  que  de  la  personnalité. 

•  Un  système  d'attaque  (c'est  Robespierre  qui 
parle  )  se  développe  contre  le  comité  de  salut  pu- 
blic. » 

Observoz-le  bien,  citoyens:  toujours  le  comité  de 
salut  public  mis  en  avant.  Une  lettre  de  Payan  vous 
oflrira  bientôt  le  développement  des  preuves  qui 
s'accumulent  dans  ce  rapport.  Robespierre  est  en 
quelque  sorte  ici  le  disciple  de  l'agent  national. 

•  Un  système  d'attaque  donc  se  développa  contre 
le  comité  de  salut  public  dès  le  moment  uu  il  com- 
mença à  montrer  un  grand  caractère,  vraiment  in- 
quiétant pour  lesennemisdc  la  patrie.  • 

Telle  était  l'adresse  des  tacticiens  qu'ils  cherchè- 
rent à  poser  comme  principe  que,  n'être  point  l'ami 
du  comité,  c'était  n'être  point  l'ami  de  la  patrie. 
Vous  reconnaissez  ici  la  marche  trop  ordinaire  i\cs 
tyrans  et  de  tous  les  usurpateurs.  Sylla  et  Mnrius  eu- 
rent grand  soin,  avant  leurs  copistes  du  XVlIh  siè- 
cle, de  faire  germer  cette  doctrine.  Pompée,  qui  ne 
lutta  avec  César  <]ue  pour  savoir  lequel  de^  deux 
donnerait  des  fers  a  Rome,  déclara  ennemis  de  la  pa- 
trie tous  ceux  qui  ne  suivraient  point  ses  drapeaux, 
cl  fit  publier  contre  eux  une  loi  de  mort.  César,  le 
moins  odieux  des  tyrans,  porta  aussitôt  une  loi  con- 
traire; il  laissa  la  liberté.  Robespierre  et  ses  adjoints 
eurent  grand  soin  de  surpasser  dans  leurs  fureurs 
Pompée,  Mariuset  Sylla.  On  sent  bien  que,  s'ils  eus- 
sent voulu  imiter  César,  ce  n'aurait  été  ni  dans  son 
génie,  ni  dans  sa  bravoure,  ni  dans  sa  générosité. 

«  La  coalition,  continue  Robespierre,  était  déjà  si 
forte  que  le  comité  de  salut  public  était  déjà  ébranlé 
dans  l'opinion  d'une  partie  de  la  Convention  natio- 
nale. On  avait  déjà  fait  passer  en  principe  qu'il  était 
responsable  de  tous  les  événements  qui  pourraient 
arriver,  c'est-à-dire  des  torts  de  la  fortune.  ■ 

Manière  sûre,  d'après  ce  raisonnement,  de  le  sous- 
traire à  toute  espèce  de  responsabilité,  et  de  garan- 
tir sa  puissance  dans  le  naufrage  même  de  la  patrie. 

C'est  ainsi  aue  Maximilien  s'était  établi  le  défen- 
seur oflicicux  du  comité,  qui, à  çon  tour,  par  l'organe 
de  Barère,  devenait  le  défenseur  de  Maximilien.  C'é- 
tait un  échange  édifiant  d'éloges  et  de  bienveillance 
entre  les  visirs  et  le  sultan. 

Continuons. 

«  Au  moment  de  la  plus  grande  tourmente  du  gou- 
vernement naissant,  on  en  provoqua  brusquement 
le  renouvellement,  motivé  par  des  diatribes  violentes 
contre  ses  membres  ;  mais  cette  hostilité  subite  cho- 
quait trop  évidemment  l'opinion  publique,  et  letlé- 


cret  qui  changeait  Texislence  du  comité  fut  rapporté 
le  lendemain.  » 

Observez,  citoyens,  que  ce  décret  ne  fut  rapporté 
que  sur  la  motion  d'un  seul  membre.  Voilà  ce  qu'il 
appelle  l'opinion  publique. 

Observez  encore  que  Robespierre,  qui  doit  nous 
parler  de  deux  factions,  a  déjà  noirci  plusieurs  pages 
sans  nous  parler  d'autre  chose  que  du  comité  ae  sa- 
lut public,  que  de  la  chçville  ouvrière  de  son  dicta- 
toriat. 

Nous  devons  confesser  ici,  pour  l'honneur  de  notre 
collègue  Dubois-Crancé,  qu'il  est  signalé  par  Robes- 
pierre comme  un  des  meneurs  qui  voulaient  le  re- 
nouvellement. Indeirœ, 

•  Si  tout  cela  eût  réussi,  le  gouvernement  républi- 
cain ,  ajoute  le  tyran ,  était  accablé  sous  le  poids  de 
la  calomnie.  • 

Comme  si  le  gouvernement  républicain  tenait  a 
une  corporation  pire  que  celle  du  Saint-OiTice  ! 

•  Alors  les  ennemis  de  la  révolution  aumient  pro- 
scrit à  leur  gré  les  défenseurs  de  la  liberté,  qu'ils 
avaient  renfermés  dans  le  comité  de  s;dut  public 
comme  dans  un  défilé,  pour  les  immoler.  Le  sort  de 
la  liberté  retombait  entre  les  mains  des  fripons  et 
des  traîtres,  et  la  Convention  perdait  la  confiance  pu- 
blique, et  la  cause  de  la  tyrannie  triomphait.  » 

Vous  voyez,  citoyens ,  aue  hors  de  1  enceinte  du 
comité  il  n'existait  plus  d  amis  de  la  révolution,  il 
n'existait  que  des  fripons  et  des  traîtres.  Vous  voyez 
que  le  sort  de  la  liberté  était  attaché  aux  seuls 
membres  de  ce  comité  (fait  confirmé  par  l'expé- 
rience), de  ce  comité  qui  a  cru  développer  aux  yeux 
de  l'univers  le  ^and  art  des  gouvernements  quand 
il  ne  développait  que  la  science  et  le  raffinement  des 
bourreaux. 

Robespierre  reproche  ensuite  avec  arrogance  aux 
représentants  du  peuple  de  ne  s'être  occupés  qu'à 
venger  les  querelles  acs  commis  et  celles  de  Phélin- 
peaux.  Il  pousse  l'insolence  jusqu'à  placer,  en  quel- 
que sorte  ,  au-dessus  de  la  Convention  ,  qu'il  traite 
avec  mépris,  les  commis  de  monseigneur  Bouchote, 
et  monseigneur  Bouchote.  son  correspondant. 

Ce  discours,  qu'il  faunrait  rapporter  phrase  à 
phrase,  donne  la  clef  des  accusations  portées  contre 
des  membres  de  cette  assemblée,  traînés  ù  l'échafaud 
parce  qu'ils  refusèrent  de  ployer  le  genou  devant  les 
despotes  plus  qu'orientaux  des  comités  de  gouverne- 
ment, etdevant  l'aga  Bouchote  et  ses  janissaires. 

D'autres  membres  devaient  être  encore  enveloppés 
dans  la  même  proscription  ;  il  en  nomme  six.  Il  en 
est  un  septième  dont  il  a  laissé  le  nom  en  blanc  :  la 
main  du  lâche  n'a  pas  osé  le  tracer. 

Il  déclame,  en  outre,  contre  ceux  nui  ont  renversé 
le  culte ,  contre  ceux  qui  ont  empêché  de  «  dire  la 
messe  »  ou  -d'aller  l'entendre.  • 
.   (Ce  sont  ces  expressions  fidèlement  rapportées.) 

Aussi  n'a-t-il  fait  guillotiner  Gobel  que  parce  que, 
pressé  par  la  terreur  que  lui  inspiraient  les  Héber- 
tistes,  Gobel  vint  vous  déclarer  qu'il  ne  voulait  plus 
la  dire. 

Robespierre  parle  beaucoup  des  trames  contre-ré- 
volutionnaires de  Fabre  et  autres.  On  est  étonné  que  ^ 
tous  ces  complots  ,  que  son  œil  microscopique  voit 
gros  comme  des  montagnes,  se  réduisent  toujours  à 
celui-ci,  «  de  n'avoir  pas  cru  même  à  l'humanité  de 
son  comité  chéri.  • 

Il  a  fait  à  Fabre  un  crime  de  sa  dénonciation  con- 
tre Vincent,  Mazuel  et  Ronsin,  les  valets  et  amis  de 
Bouchote  ;  mais  ce  n'est  point  par  zèle  pour  ces  in- 
dividus nommément.  Robespierre,  toujours  em- 
pressé à  élever  jusqu'aux  cieux  le  comité  de  salut 
public,  le  marche-pied  de  son  trône,  et  à  ne  laisser 
prévaloir  aucun  obstacle  contre  lui,  dit  «que  le  but 


507 


des  attaques  de  Fabre  n*est  point  ici  un  commis  de 
Bouchote  ,  mais  un  général  de  l'armée  révolution- 
naire ;  c'est  contre  le  gouvernement  qu'il  les  dirige, 
ces  attaques;  c*est  le  comité  de  salut  public,  le  mi- 
nistre de  la  guerre  et  tous  les  agents  riclèlcs,qu*il  veut 
atteindre.  • 

Ainsi  le  patriotisme  ne  pouvait  attaquer  le  bri- 
gandage parce  que  son  élévation  était  l'ouvrage  du 
comité.  Il  suffisait  d'être  un  agent  du  comité  de  sa- 
lut public  pour  être  en  toute  impunité  contre-révo- 
lutionnaire; et  tout  gouverné  était  digne  de  mort , 
qui  dénonçait  aux  gouvernants  les  erreurs  qu'ils 
avaient  commises.  11  est  clair,  d'après  cela  ,  que  les 
crimes  des  agents  du  gouvernement  étaientlescrimes 
du  gouvernement  lui-uirme,  puisque  celui-ci  faisait 
taire  par  la  mort  ceux  qui  les  lui  dénonçaient,  regar 
dant  avec  juste  raison  ces  dénonciations  comme  des 
reproches  faits  à  lui-même  ,  puisqu'en  effet  ses  em- 
ployés n'avaient  agi  que  par  ses  ordres. 

Ce  qui  vient  encore  à  1  appui  de  ce  raisonnement, 
ce  sont  quelques  passages  sur  Phélippeaux,  victime 
pure,  immolée  sur  la  place  de  la  Révolution  pour 
s'être  offerte  en  holocauste  à  Tamour-propre  des 
Tentâtes  du  comité,  qui  ne  devaient  point  avoir  tort, 
attendu  que  les  divinités  ont  toujours  raison;  et 
comme  les  horreurs  commises  l'avaient  été  par  les 
objets  du  choix  de  ces  demi-dieux,  et  qu'alors  le  re- 
proche eu  retombait  naturellement  sur  ceux  qui 
avaient  choisi,  on  aima  mieux  guillotiner  un  inno- 
cent que  de  se  compromettre  en  confessant  qu'on 
s'était  trompé. 

Westermann  est  accusé  aussi  par  Robespierre  d'ê- 
tre venu  à  Paris  pour  cabalcr  contre  le  gouverne- 
ment  Voila  la  cause  de  son  supplice. 

Il  y  eut  encore,  contre  ce  général,  un  autre  mo- 
tif de  vengeance  assez  expliqué  par  un  mouvement 
d'humeur  que  Robespierre  laisse  échapper  contre  la 
Convention  ,  qui  avait  osé  «  défendre  au  comité  de 
salut  public  d'attenter  à  la  liberté  de  Westermann, 
destitué  par  le  comité  de  salut  public.  • 

Il  est  clair  que  le  malheureux  Westermann  n'a  été 
sacrifié  que  parce  qu'étant  devenu  l'objet  des  pour- 
suites du  comité  il  avait  trouvé  un  défenseur  dans  la 
Convention  ;  il  est  évident  que  le  comité  a  saisi  avi- 
dement cette  occasi4)ri  d'infliger  à  la  représentation 
nationale  une  correction  fraternelle,  pour  l'avertir 
de  ne  pas  s'oublier  à  ce  point  une  autre  fois. 

Il  est  dans  ce  rapport  un  aveu  fait  par  Robespierre, 
aveu  que  je  me  garderai  bien  de  laisser  échapper. 

Vous  faisiez  des  décrets,  citoyens;  eh  bien,  votre 
comité  de  gouvernement  en  méprisait  l'exécution 
dès  que  cette  exécution  n'était  point  profitable  à 
l'agrandissement  de  sa  puissance  et  de  ses  vues  am- 
bitieuses, ou  qu'elle  opposait  des  digues  à  son  des- 
potisme toujours  prêt  a  se  déborder. 

Sur  la  motion  de  Bourdon  (de  l'Oise),  un  décret 
fut  rendu  par  vous,  portant  que,  «  jusqu'à  nouvel 
ordre,  les  comités  de  gouvernement  ne  pourraient 
tirer  aucuns  fonds  du  trésor  public  sans  un  décret 
préalable  de  la  Convention.  » 

Eh  bien,  Robespierre  avoue,dans  un  discours  qu'ii 
devait  lire  à  cette  tribune,  que  votre  décret  n'a  ja- 
mais été  exécuté.  Pourquoi?  personne  ici  ne  s'en 
doute  (et  c'est  la  conséquence  de  l'aveu  de  Robes- 
pierre déduite  par  lui-même)  :  c'est  que  votre  co- 
mité, plus  prudent  que  vous,  citoyens,  a  senti  que, 
du  moment  où  il  ne  pourrait  plus,  à  son  aise  et  à 
toute  heure,  puiser  sans  compter  dans  la  bourse  na- 
tionale, c'en  serait  fait  delà  république.  C'est  donc 
pour  le  plus  sûr  avantage  de  fa  république  que  le 
comité  a  dilapidé  ses  trésors  que  vous  vouliez  con- 
server. Vous  nous  perdiez  par  des  projets  d'écono- 
mie ;  le  comité  nous  a  ruinés  tous  pour  nous  sauver. 


Dans  ce  développement  de  batteries  contre-révo- 
lutionnaires ,  deux  traits  surtout  ont  dû  vous  frap- 
per  :  ici,  c'est  Robespierre  et  les  décemvirs  qui  son- 
nent d'accord  et  vont  ensemble  le  pas  de  charge  pour 
perdre  la  Convention  ;  même  tactique,  même  em- 
ploi de  mesures ,  même  conduite;  là,  c'est  une  trace 
moins  prononcée ,  mais  bien  visible ,  du  dessein 
formé  par  Robespierre  de  concentrer  tons  les  pou- 
voirs dans  son  comité  de  salut  public,  et  d'amener 
peu  à  peu  la  chute  du  comité  de  sûreté  générale,  sur 
les  droits  duquel  les  usurpateurs  de  l'autre  empié- 
taient tous  les  jours.  11  espérait,comme  nous  l'avons 
dit  plus  haut ,  avoir  bon  marché  ensuite  du  comité 
de  salut  public,  quand  il  n'aurait  en  face,  dans  l'a- 
rène, que  ce  rival  à  quelques  têtes.  Ainsi  Robespierre 
méditait  trois  coups,  et  en  portait  deux;  il  frappait 
la  Convention  par  le  comité  de  salut  public,  et  le  co- 
mité de  sûreté  générale  par  son  affectation  à  ne  par- 
ler que  du  comité  de  salut  public,  à  l'exalter,  et  à 
faire  passer,  comme  autorité  de  droit ,  son  usurpa- 
tion d'autorité.  Le  troisième  coup  était  la  ruine  de 
ceux  qui  auraient  collaboré  avec  lui  pour  la  ruine 
des  autres. 

On  supposera  peut-être  à  Maximilien,  d'après  ces 
développements,  une  profondeur  de  vues  qu'il  n'eut 
jamais.  Nous  avons  avancé,  citoyens ,  que  presque 
tout  était  d'emprunt  chez  Robespierre  ;  nous  allons 
vous  le  prouver.  Robespierre  n'eut  que  l'esprit  du 
crime:  pour  conspirer,  il  faut  en  avoir  le  génie.  Ses 
papiers  fourmillent  de  conseils  souvent  sages,  d'avis 
quelquelois  excellents  qu'on  lui  adresse  (il  faisait 
peu  de  cas  de  ceux-ci); d'autres  fois,  de  plans  de  con- 
tre-révolution bien  traces  (c'étaient-là  ses  papiers 
d'élite). 

Parmi  ces  plans,  il  en  est  un  de  Payan ,  dont  Ro- 
bespierre s'est  fait  un  texte  de  conduite ,  et  qui  lui  a 
servi  de  boussole  dans  sa  marche. 

En  voici  quel(|ues  passages. 

11  s'agit  de  l'affaire  de  Catherine  Théos. 

11  s'offre  ici  une  remarque  au  sujet  de  cette  femme, 
qui  ne  s'appelait  point  Théot^  mais  Théot. 

.Tel  était  l'empressement  de  nos  jongleurs  à  s'em- 
parer de  tout  ce  qui  pouvait,  ou  distraire,  ou  occu- 
per, ou  égarer  l'opinion  publique!  On  métamor- 
phosa le  nom  insignifiant  de  Théol  en  celui  de  Théos, 
qui  signitie  divinité ,  pour  attacher  à  ce  nom  plus 
d'importance,  quelque  chosede  mysti(iue,  et  entou- 
rer cette  aflaire  d'un  certain  prestige  religieux. 

Je  passe  aux  leçons  de  Payan. 

Il  invite  d'abord  Robespierre  à  faire  faire  «  un  rap- 
port imposant  par  le  comité  de  salut  public,  pour  dé- 
truire celui  du  comité  de  sûreté  générale  ;  un  rap- 
port, dit-il,  philosophique,  présentant  le  tableau  ra- 
pide de  toutes  les  factions,  et  les  anéantissant  toutes 
au  même  instant.  • 

Le  même  génie  semble  inspirer  tous  ces  hommes 
qui  cherchent  et  veulent  faire  voir  partout  des  con- 
spirations. 

•  Le  comité  de  sûreté  générale,  dit  Payan,  n'a  fait 
cette  dénonciation  ^ue  dans  un  mouvement  de  jalou- 
sie contre  le  comité  de  salut  public,  et  pour  se  ven- 
ger de  ce  qu'il  n'avait  pas  dénoncé  le  premier  le 
conspirateur  Hébert  ;  mais  il  a  fait  un  rapport  sec  et 
maigre,  au  lieu  de  chercher  à  convaincre  la  Francis 

3ue  cette  conspiration  est  née  des  factions  réunies 
u  royalisme  et  de  l'étranger.  > 
Toujours  même  fureur  et  même  rage.  Une  vieille 
folle  s'enferme  dans  son  grenier,  où  elle  s'amuse  à 
distribuer  à  quelques  fous  des  bons  de  béatiGcation 
pour  l'autre  monde  :  c'est  une  double,  une  triple 
conspiration  des  factions  réunies.  Ces  scélérats  se 

f)laisent  à  élargir  sans  cesse  l'épervier,  pour  y  rca- 
èrmcr  plus  de  victimes. 


508 


l 


Pâvan,  en  rehaussant  le  comité  de  salut  public 
aux  iépem  du  couiltë  de  sûreté  générale,  va  jusqu*à 
dire  •  qu*ll  vaudrait  mieux  au*n  y  eût  dans  ce  co- 
mité des  hommes  avec  des  talents  médiocres,  qui  se 
lai^iseraient  conduire  par  le  gouvernement,  que  des 
hommes  de  génie.  Dans  ce  cas,  tout  irait  bieui  et 
Tunité  d'action  sauverait  la  patrie.  « 

Voilii  cette  unité  tantprêctiée  là-haut  par  Robes- 
pierre, qui  se  représente  ici.  On  la  déguise  sous  le 
titre  d*unitéd*acUon  ;  mais  la  suite  va  prouver  qu*elle 
n*est  que  Tunité  de  pouvoir  ou  le  despotisme. 

En  effet  :  «  Payan  suppose,  dans  le  système  éta- 
bli dos  deux  comités,  deux  centres  de  gouverne- 
ment, et  un  frottement  continuel  de  l'un  aeux  con- 
tre le  centre  le  plus  utile,  le  mieux  dessiné ,  le  mieux 
marqué;  mais  un  comité  plus  nuisible  encore,  c*est 
celui  qui  n'a  ni  le  génie  de  créer,  ni  la  modestie  de 
se  laisser  diriger,  ■ 

Vous  devez  apercevoir  dans  celte  identité  de  pré- 
ceptes que  Tunité  d'action  dont  il  est  ici  parlé  n*est 
autre  que  Tunilé  de  puissance  et  de  volonté  ;  car  Tu  - 
nité  d'action  proprement  dite  existe  dans  Thypothèse 
de  deux  comités  égaux  en  pouvoirs ,  dont  la  natnre 
est  seulement  démarquée  par  Tautorité  nationale. 
Or  Payan,  l'agent  de  Robespierre,  ne  se  soucie  point 
d'une  unité  née  d'uneforce  partagée,  puisqu'il  anéan- 
tit celle  du  comité  de  sûreté  générale,  et  qu'il  veut 
faire  de  ses  membres  des  commis  du  comité  de  goo- 
Ternement. 

Mais  voici  une  proposition  bien  machiavélique, 
ui  seule  suffît  pourjoterdela  lumière  dans  le  chaos 
le  toutes  ces  conspirations. 

■  Serait-il  inconséquent,  continue  Payan,  de  pré- 
senter vaguement  à  ses  amis  des  réflexions  sur  ces 
objets,  et  de  leur  faire  sentir  que  le  comité  de  salut 
public  San  verait  la  chose  publique  (ces  derniers  mois 
sont  interrompus  par  des  points)  quoique  l'autre  soit 
utile.  • 

Pavan  a  eu  soin  de  souligner  soii  utile ,  pour  mon- 
trer a  Robespierre  que  ce  qu'il  dirait  n'est  point  ce 
an'il  penserait  ;  et,  en  effet,  il  a  établi  plus  haut  qu'il 
était  nuisible. 

•  Ainsi ,  dit-il ,  d'amis  en  amis ,  chacun  présente 
les  mêmes  réflexions;  bientôt  il  croit  qu'il  lésa  faites 
le  premier;  il  s'y  attache,  II  les  défend,  et  l'opinion 
publique  se  forme  et  se  compose.  • 

•Payan  prend  ici  pour  l'opinion  publique  l'opinion 
d'un  parti  qui  suit  toutes  ces  cascades,  qui  monte 
Ions  ces  é(  bêlons,  jusqu'à  ce  qu'elle  soit  à  la  hauteur 
d'élever  la  voix  pour  couvrir  l'opinion  publique. 

Il  trace  ensuite  un  plan  de  rapport  à  présenter 
sur  celte  aff'aire  de  Théos. 

•  Il  faut,  s'écrie-t-il,  favoriser  surtout  l'opinion 
éclairée  du  peuple,  qui  prend  la  Mère-Dieu  pour  une 
folle;  frapper  néanmoins  les  auteurs,  les  impri- 
meurs, les  journalistes,  qui  ont  proflté  de  cette  cir- 
constance pour  délîgnrer  la  fétç  a  TÉlre  suprême. 

«  Il  faut  punir  aussi  quelques  défenseurs  officieux, 
Chauveau-Laffarde,parexemple;aUaqner  tous  ceux 
qui  ont  essayé  de  pervertir  la  morale  publique,  ren- 
verser enfin  Bourdon  et  ses  complices.  Le  rapport  de 
•Vadier  a  été  inspiré  par  des  hommes  qui  voulaient 
faire  oublier  ces  derniers.  Eh  bien,  qu^ils  revivent 
uninstantpourpérJrensuiteavecces  journalistes  qui 
lont  eu  la  lâcheté  ou  la  malveillance  cje  ne  rien  dire  de 
a  fameuse  séance  concernant  le  tribunal  révolu- 
tionnaire; qu'ils  soient  punis  avec  ces  journalistes 
qui  craignent,  en  combattant  les  membresde  la  Con- 
vention ,  de  paraître  attaquer  la  représentation  na- 
tionale. 

•  Apprenez  à  tous  les  citoyens  de  la  France  qu'une 
mort  mfâme  attend  tons  ceux  qui  s'opposeront  au 
gouvernement. 


f  •  Qu'ils  tremblent  !  Que  les  suggéreursde  rapport 
I  fassent  des  réflexions  salutaires,  et  que  le  comité  de 
salut  public  acquière»  s'il  est  possible,  et  plusde  con- 
fiance, et  plus  d'importance,  est  plus  d'autorité; 
qu'il  emploie  toute  la  masse  du  pouvoir  qu'on  lui 
contie  au  salut  de  U  république, 

•  Augmentons,  augmentons  cetta  masse,  pour 
qu'elle  écrase  plus  facilement  les  conspirateurs  : 
toute  l'autorité  que  nous  gardons  est  iuutile  â  la  pa- 
trie; qu'elle  aille  se  vivifier,  s'utiliser  au  centre  du 
gouvernement, 

•  Vous  ne  pouvez  pas  choisir  de  moment  plus  fa- 
vorable pour  frapper  tous  les  conspirateurs  ;  on  sait 
que  toutes  nos  victoires  sont  la  fruit  de  vos  tra- 
vaux. •  Quelle  impudence  ! 

•  Elles  imposent  silence  aux  malveillants.  Mais 
voulez-vous  atterrer  en  même  temps  et  ces  derniers 
et  les  députés  :  remportez  de  grandes  victoires  dans 
l'intérieur;  faites  un  rapport  qui  frappe  à  la  fois 
toutes  les  conspirations;  Jécréteaides  mesures  salu- 
taires pour  les  journaux.  Que  les  fonctionnaires  pu- 
blics, puisqu'ils  sont  les  ministres  de  la  morale, 
soient  diriges  par  vous  ;  qu'ils  servent  à  centraliser, 
à  uniformer  l'opinion  publique,c'esl-à*dire  le  gouver- 
nement moral,  tandis  que  vous  n'avez  centralisé  que 
le  gouvernement  physique,  le  gouvernement  ma- 
tériel. 

«  Si  l'on  éprouvait  des  revers,  toujours  possibles, 

3 uoique  inattendus,  ou  si  les  malveillants  ne  bour- 
onnaient  plus,  ils  ne  seraient  pas  jugés  aussi  sévè- 
rement par  le  peuple  que  par  vous. 

•  Faites,  je  vous  le  répète,  un  rapport  vaste,  qui 
embrasse  tous  les  conspirateurs ,  qui  montre  toutes 
les  conspirations  réunies  en  une  seule;  que  l'on  y 
voie  desFayétistes,  des  royalistes ,  des  fédéralistes, 
des  Uéberlistes,  des  Dantonistes ,  et  des  Bourdon,  • 
.Toute  la  France,  sans  doute  l 

«  Travaillez  en  grand Plusieurs  morceaux  de 

cette  lettre  (ajoutel'auteur)  pourraient  compromet- 
tre ma  tranquillité  personnelle;  je  vous  prie  de  la 
brûler.  • 

Ces  idées  étaient  trop  celles  de  Robespierre  pour 
qu'il  les  livrât  aux  flammes. 

{Ld  iuile  à  demain.) 

80ITE  A  LA  SéAIVCB  DU   !«'  VENTOSE. 
Préeidence  de  Batrau 

Une  leltre  de  Cborles  Delacroix,  représrnlant  do  peuple 
en  inisfioii  dans  le  déporlvroi'iilde  Seine-et-OÎM,  annonce 
à  la  Conveniion  qu'il  met  sons  ses  yeux  un  arrêté  qa^il 
avait  déjà  communiqué  aux  comités  de  sûreté  fén^rale  et 
de  législulion ,  relativement  aux  ci-duTant  prêires  et  reli- 
gieux ;  ce  qui  Ty  d<iicrmine,  ce  sont  le5  réclamalions  que 
cet  arrêté  excite,  au  moins  dans  les  Journaux.  Il  annonce 
que  les  dispositions  de  cet  arrêté  ne  fraiment  que  sur  les 
égoïstes  qui  ne  sont  point  attachés  &  la  société  par  les  doux 
liens  que  prépare  la  nu  turc,  et  qui  s'obstinent  à  rester  dans 
les  lieux  où  ils  t-xerçaieiit  ce  qu'Us  ap|)el&ient  leur  mlnis- 
t^re ,  dans  Pespérance  d'y  reprendre  bientôt  Tempire  de 
Topinion,  dont  ils  ont  si  longtemps  nbusé.  Il  déelare  qu^il 
avait  pris  les  mêmes  mesures  dans  le  département  des  Ar- 
dennes  et  de  la  Meuse,  qu'elles  s'y  exécutent  encore. 

Il  annonce  ensuite  que  Ict  troubles  que  la  malveillance 
voulait  exciter  pour  les  subsistances,  dans  le  département 
de  Seine-et-Oise,  sont  toialement  calmés. 

Il  termine  par  (bire  observer  &  la  Convention  que  Patla- 
que  ne  se  borne  pas  à  son  arrêté  ;  qu'elle  porte  sur  les  me* 
sures  qu'elle  a  prises  pour  substituer  le  culte  de  la  nature 
a  la  superstition,  et  qu'elle  ne  perde  pas  de  vue  que  les 
malveillants  ont  toujours  cherché  à  faire  du  département 
de  8elne-et«0ise  le  premier  foyer  de  tous  les  troubles.  •  Ils 
oonptalent,  ajotite*t-il,  sur  deux  moyens  t  les  subsistances 
tt  If  fanatisme.  Je  les  ai  barrés  sur  l'une  et  Tautro  route  i 
ils  ont  dû  m'attaquer.  » 


•509 


Celte  lettre  est  rcnroyée  aux  comilés  de  lûreté  Cén6« 
rtk  et  de  législaiion. 

Thibault,  au  nom  du  coniitc  des  finances  :  Votis 
avfs  ordonne  à  votre  comité  des  tiiiances  de  vous 
présenter  des  projets  d'économie  ;  ce  travail  est  im- 
mense si  vous  voulez  porter  un  œil  sévère  sur  toutes 
les  parties  de  Tadministration, corriger  tous  les  abus 
que  le  gouvernement  provisoire  a  entraînés  à  sa 
suite,  et  établir  enlin  la  balance  entre  les  recettes  et 
les  dépenses  lixes,  seul  moyen  de  créer  la  confiance 
et  de  la  maintenir. 

Rien  ne  doit  coûtera  un  peuple  qui  veut  la  liberté, 
et  celui  qui  verse  son  sang  pour  la  défendre  ne 
comiitepas  lessacritices  pécuniaires.  Assez  longtemps 
ou  a  dit  qu  on  voulait  renverser  son  temple;  procla- 
mons  aujourd'hui,  à  la  face  de  l'Europe,  qu'il  est 
indestructible  comme  le  peuple  qui  Ta  bâti.  Ne  don- 
nons plus  à  nos  ennemis  le  spectacle  amusant  de 
nos  divisions  intestines;  que  la  douce  umitié  succède 
à  la  haine;  n'ayons  plus  d'autre  passion  que  celle 
du  bien  public,  mais  punissons  sans  faiblesse  les 
conspirateurs  et  les  grands  coupables;  laissons  là 
toutes  les  dénominutionsodieuscs  autant  qu'absurdes 
qui  divisent  des  hommes  qiii  marchent  au  même  but, 
et  qui  n'ont  fait  que  s'égarer  un  instant  dans  les 
sentiers  difliciles  qui  mcnint  à  la  liberté  et  à  l'éga- 
lité. N'oublions  pas  le  trait  frappant  de  ce  général 
d'armée  qui,  persuadant  à  ses  soldats  fugitils  qu  ils 
ne  s'étaient  retirés  du  combat  que  pour  se  rallier 
cootre  Tenaemi,  lit  sonner  la  charge  et  reonporta 
une  vietoire  signalée. 

Disons  à  tous  les  Français  :  Vos  représentants 
TOUS  appellent  en  ce  jour  k  l'union  et  à  la  fraternité. 
Ralliez-vous  sous  les  étendards  de  la  justice  et  de 
l'humanité;  que  les  vertus  vous  servent  de  bouclier 
contre  vos  ennemis,  et  vous  serez  invincibles. 

Us  ne  sont  plus  ces  jours  de  deuil  où  l'innocence 
épouvantée,  couverte  d'un  voile  funèbre,  n'osait  oas 
faire  entendre  les  timides  accents  de  sa  voix  plam- 
Uve,  La  vertu  peut  se  montrer  depuis  que  la  vérité 

Îieut se  faire  entendre;  l'erreur  Q*est  pas  un  crime  : 
ni  seul  doit  se  cacher,  se  taire  et  être  puni.  S'il  est 
des  hommes  inquiets,  turbulents,  qu'une  police  sé- 
vère les  surveille,  les  coMticnne  et  les  mette  hors 
d'état  de  nuire,  et  bientôt  nous  aurons  la  paix  inté- 
rieure; nous  ne  voulons  pas  augmenter  le  nombre 
des  coupables,  nous  qui  ne  voulons  faire  que  des 
heureux.  Voilà  la  morale  d'un  bon  gouvernement  : 
elle  est  dans  vos  cœurs;  qu'elle  serve  de  modèle  à 
tous  les  peuples;  ils  rougiront  d'être  esclaves. 

La  première  économie  que  je  vous  propose,  c*eat 
celle  du  temps  ;  sa  perte  est  irréparable  ;  son  bon 
emploi  est  un  trésor  précieux.  Déjà  vous  avez  abrégé 
la  carrière  politique  que  vous  avez  à  parcourir,  et 
un  travail  immense  vous  reste  encore  à  faire.  Avant 
de  tirer  de  celte  arche  sacrée  le  contrat  social  des 
Français  que  vous  y  avez  déposé  il  y  a  plus  de  dix- 
huit  mois,  parcourez-en  toutes  les  pages;  c'est  un 
corps  inanimé  auquel  vous  voulez  donner  la  vie  : 
établissez  d'avance  le  système  organiçiue  de  votre 
gouvernement  déiiiiitif;  fixez  les  limites  de  votre 
tcri-iloire,  et  qu'elles  soient  Us  colonnes  d*Ucr- 
cule. 

Une  méditation  profonde  doit  présider  à  la  créa- 
tion (les  institutions  qui  vous  manquent;  celles  qui 
existent  ont  besoin  d'être  perfectionnées  :  elles  ont 
une  comnlexion  faible;  donnez-leur  le  mouvement 
et  la  stabilité;  elles  deviendront  plus  robustes,  et 
alors  vous  pourrez  rejeter  sur  elles  une  portion  du 
travail  qui  entrave  votre  marche.  Faites  des  lois 
claires  et  en  petit  nombre,  et  aue  les  autorités  que 
vous  constituez  les  fassent  exécuter.  Tous  les  ci- 
loyefis  doivent  trouver  la  justice  chez  eux;  inves- 


tissez do  votre  confiance,  convree  de  votre  ^de 
cetix  qui  seront  établis  pour  la  rendre. 
Il  vous  feut  en  administration  comme  en  juris* 

ftrudenoe  un  tribunal  supérieur,  qui  prononce  quê 
a  loi  et  les  formes  protectrices  de  la  liberté,  de 
l'honneur  et  de  la  propriété  des  citoyens,  n'ont  pas 
été  violées,  et  vous,  vous  punirez  lalorfailure.  Sur- 
tout n'employez  que  des  hommes  prol)e6  et  éclairés. 
Trop  longtemps  l'ignorance  et  l'improbité  ontëtendu 
leur  bras  de  fer  sur  nos  concitoyens;  le  peuple  a  fait 
une  fatale  expérience;  il  sera  désormais  clairvoyant 
dans  ses  choix. 

Je  réponds  à  nos  ennemis  qui  disent  que  nous 
n'avons  pas  de  j^ouvcrnement  :  Nous  représentons 
le  peuple  français;  il  nous  a  confié  le  pouvoir  de 
faire  la  guerre'  aux  tyrans  et  d'»  «donner  la  paix  au 
monde;  que  demandez-vous  de  plus? 

La  loi  du  4  pluviôse  a  soulevé  un  coin  du  voile 
qui  cache  les  dépenses  publiques.  Que  le  trésor  na- 
tional puisse  les  payer,  cela  no  fait  aucun  doute  ; 
mais  devons-nous  continuer  à  les  ordonnancer  tou- 
tes? voilà  la  question. 

Il  existe  un  frottement,  dans  les  rouages  du  gou- 
vernement actuel,  qui  ne  vient  que  de  la  multitiulo 
des  ressorts  qu'on  emploie  pour  le  faire  mouvoir. 
Supprimez  une  partie  de  ces  rcssnrts,et  la  machine  se 
simplifiera. 

Il  est  une  infinité  d'établissements  dont  la  néces- 
sité ne  se  fait  plus  sentir;  ces  établissements  occu- 
pent beaucoup  de  bras  inutiles;  rendez-les  à  l'agri- 
culture, auxartsetàrindustrie,  qui  vous  les  deman- 
dent à  grands  cris. 

Depuis  trois  ans  on  a  trouvé  des  milliers  de  ci- 
toyeni  qui  sont  venus  offrir  leurs  services  et  deman- 
der des  places;  on  en  a  créé  pour  eux;  aujourd'hui 
ils  les  regardent  comme  un  potrimoino  assuré. 

Reuvoie-t-on  un  employé  inutile*  ignorant  ou 
paresseux;  on  crie  à  l'injustice.  Sans  doute  que 
celui  qui  perd  son  état  peut  se  plaindre;  mais  le 
peuple,  qui  paie,  ne  veut  pas  de  dépenses  inutiles. 
Toutes  les  professions  doivent  concourir  à  la  pro- 
spc'ritéde  la  nation.  Quiconque  abandonne  celle  qui 
le  mettait  à  l'abri  des  nesoins  pour  se  renfermer  dans 
un  bureau,  par  oisiveté,  par  orgueil,  ou  par  intérêt, 

f)eut  retourner  à  ses  travaux  sans  danger  pour  sa 
ortune  et  pour  la  chose  publique.  L'égalité  ne  met 
aucune  distinction  entre  ceux  qui  exercent  des  pro- 
fessions ou  se  livrent  à  des  spéculations  utiles;  elle 
les  hoDûre  toutes.  Chaque  citoyen  doit  à  la  société 
le  tribut  de  sea  talents  et  de  ses  lumières;  mais  il 
est  facile  de  démontrer  que  celui  qui  a  quitté  son 
état  pour  entrer  dans  un  bureau  no  paie  point  ce 
tribut,  puisqu'il  fait  un  métier  qu'il  ne  sait  pas  et 
qu'il  oublie  celui  qu'il  savait,  et  que  parla  il  con- 
court, sans  s'en  apercevoir,  au  renchérissement  des 
denrées,  marchandises  et  main  d'œuvre,  qui  ne  peut 
diminuer  que  par  la  concurrence. 

Quant  aux  jeunes  gens  qui  n'avaient  pas  atteint 
l'âge  de  la  réquisitionne  pense  que  c'est  un  grand 
service  à  leur  rendre  que  de  les  mettre  dans  Te  cas 
de  prendre  un  état  libre,  analogue  à  leur  goût,  et 
qui  donne  l'essor  à  leur  imagination  et  à  1  activité 
qui  est  l'attribut  de  leur  âge;  ils  vieilliraient  dans 
une  indolence  funeste  à  leur  tempérament  et  à  la 
société. 

Les  hommes  d*un  certain  âge,  qui  depuis  long- 
temps ont  la  teinture  des  affaires,  tes  défenseurs  de 
la  patrie  que  leurs  blessures  n*empêchent  pas  d'é- 
crire, méritent  de  grandes  considérations;  ils  auront 
la  préférence;  quelques  pensionnaires  de  l'Etat, 
instruits,  patriotes  et  probes,  pourront  être  em- 
ployés utilement  et  avec  économie. 

Ceux  qui  éprouveront  une  réforme  indispcMeUe, 


510 


d'après  riuutilité  reconnue  de  leurs  emplois,  pour- 
raient-ils se  plaindre,  tandis  qu'ils  savent  que  les 
fonctionnaires  publics,  d'après  les  bases  de  la  consti- 
tution, ne  remplissent  que  des  fonctions  temporaires? 

La  nation  veut  payer  honorablement  ceux  qu'elle 
emploie,  mais  elle  veut  qu'ils  lui  donnent  tout  leur 
temps;  elle  veut.qu'ils aient  des  lumières  analogues 
au  travail  qu'elle  leur  conlie  :  elle  gémit  des  rtffor- 
uics  qu'elle  est  obligtfe  d'opérer;  ceux  que  vous 
chargerez  d'exécuter  vos  ordres  se  conduiront  avec 
la  prudence  et  l'humanité  que  les  circonstances 
exigent. 

11  est  des  suppressions  qui  sont  réclamées  de  toutes 
parts;  le  comité  des  finances  en  a  conféré  avec  celui 
de  sûreté  générale,  et  il  a  été  convenu  de  vous 
proposer  celle  de  la  permanence  des  conseils  géné- 
raux de  district,  la  diminution  du  nombre  des  mem- 
bres des  directoires  de  département  et  dos  comités 
révolutionnaires. 

LVxéculion  de  la  loi  du  4  pluviôse  a  souffert  quel- 
ques diflicultés,  parce  qu'elle  n'a  pas  paru  assez 
claire  et  assez  étendue;  vous  pouvez  remédier  à  cet 
inconvénient  en  manifestant  votre  volonté  et  en 
chargeant  votre  comité  de  l'exécuter.  Le  moyen 
qu'il  vous  propose  est  simple  :  c'est  de  l'autoriser  à 
régler  provisoirement  les  traitements  de  tous  les 
fonctionnaires  publies  civils,  et  des  coinm;S  et  em- 
ployés dans  leurs  bureaux,  d'une  manière  uniforme 
et  convenable;  de  diviser  les  derniers  par  classes  et 
d'en  réduire  le  nombre  au  strict  nécessaire.  Il  est  des 
administrations  qui  ont  avoué  qu'avec  peu  d'hom- 
mes intelligents  et  laborieux  elles  doubleraieutleur 
travail. 

Les  commis  des  bureaux,  avec  des  occupations 

Îtarlaitement  égales,  ont  des  traitements  inégaux  : 
a  justice  commande  l'uniformité.  Le  projet  de  dé- 
cret suivant  va  parer  à  ces  inconvénients. 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  ses  comités  de  sûreté  générale  et  des  finances  »  dé- 
crète : 

M  Art.  I*'.  La  permanence  des  conseils  généraux  des 
'  districts  est  supprimée. 

«  IL  Le  nombre  des  administrateurs  de  département  est 
provi>oirement  réduit  à  cinq.  Celte  réduction  s*opérera 
par  la  voie  du  scrutin,  entre  eux. 

«  III.  A  compter  du  i*'  germinal  prochain,  les  comités 
révolutionnaires  établis  dans  les  chefs-lieux  de  district 
et  les  communes  dont  la  population  est  au-dessous  de  cin- 
quante mille  âmes  sont  supprimés. 

«  IV.  Les  comités  de  la  Convention  8*enlendront  avec 
celui  des  finances  pour  régler  provisoirement  d*une  ma- 
uiëre  uuilorme  et  convenable  les  traUemenle  des  commis 
ou  employés  dans  les  commissions  executives,  agences, 
admiui!»lration»  publiques  et  tribunaux  ;  ils  détermineront 
le  nombre  desdits  employés  ou  commis  par  chaque  établis- 
semcitl  public  dont  la  surveillance  respective  leur  est  con- 
fiée. Ils  appliqueront  ensuite  la  loi  du  4  pluviôse  à  chacun 
d*eux,  et  prononceront  sur  toutes  les  réclamations  relati- 
ves à  celte  loi. 

•  V.  Les  arrêtés  des  comités  relatifs  aux  dispositions  de 
Tarlicle  précédent  seront  publiés  par  la  voie  du  Bulletin  de 
correspondance,  et  seront  mis  à  exécutiou  à  dater  du  1*' 
germinal  prochain. 

«  VI.  Le  comité  des  finances  tiendra  un  registre  sur  le- 
quel sera  inscrit  le  nombre  des  fonctionnaires  publics  ci- 
vils, des  commis  ou  employés  dans  leurs  bureaux  ;  à  cet 
effet ,  les  receveurs  de  district  et  les  commissaires  de  la 
trésorerie  nationale,  chacun  pour  ce  qui  le  concerne,  eu- 
enverront  dans  le  plus  bref  délai,  au  comité  des  finances , 
les  étals  des  payements  qui  auront  été  faits  aux  ToncUon- 
naires  publics,  commis  ou  employés  dans  leurs  bureaux , 
avec  désignation  du  nombre  et  des  appointements.  Le  co- 
mité est  chargé  en  outre  de  se  procurer  tous  les  renseigne- 
ments nécessaires  pour  connaître  le  montant  des  Irais  d^ad* 
miuistration.  • 

Après  quelques  débats  t  ce  projet  de  décret  est  adopté. 


^  On  demande  que  la  Convention  procède  à  Tappel 
nominal  pour  Tcuvoi  des  rcpréseuluuls  du  peuple  dans  les 
culouies. 

Le  PnÉsiDEXT  :  Plusieurs  sections  se  présentent 
pour  déliler  dans  la  Convention,  et  lui  expriuier  leur 
vœu.  J'attends  les  ordres  de  l'assemblée. 

La  Convention  ordonne  leur  admission. 

—  Les  citoycus  de  la  section  de  la  Fidélité  sont  intro* 
duits. 

L'orateur^  à  la  barre:  Représentants,  nous  venons  en 
masse  vous  porter  le  vœu  de  la  section  de  la  Fidélité;  il 
vous  prouvera  qu'elle  est  et  veut  toujours  être  digne  de  ce 
nom. 

Le  peuple  français  vous  contemple  ;  les  yeux  fixés  sur 
vous,  ilcbl  prêt  à  terrasser  les  ennemis  deTintérieur  qui 
s'uttucheni  ù  vos  pas.  Le  moment  indiqué  par  votre  com- 
mission des  Viugt-ct-Un  pour  faire  son  rupport  sur  les  an- 
ciens membres  des  comités  de  gouveriicuicnl  c>{  attendu 
avec  inipuliencc;  non  pas  cette  impatience  mt'urlriîre  qui 
brise  les  formes  de  la  sévère  justice,  mais  cette  impatience 
vertueuse  qui  veut  purger  la  république  de  ceux  qui  Tout 
si  cruellement  désolée. 

Les  accusés  ne  doivent  plus  craindre  d*aborder  le  tem- 
ple de  la  justice;  iiiuocents,  ils  sont  sûrs  de  trouver  des 
appuis;  coupables,  ils  y  rencontreront  des  juges  inexora- 
bles. Des  juges  qu'a  formés  la  révolution  du  9  iheruîidor 
ne  sont  pas  des  bourreaux.  (On  applaudit.) 

—  La  section  du  Muséum  succède. 

Vorateuv  de  ladéputaiion  :  Citoyens  représentants,  la 
section  du  Muséum,  affranchie  enfin  du  joug  des  terroris- 
tes et  des  intrigants,  vient  consucrer  aux  fidèles  représen- 
tants du  peuple  les  premiers  et  tardifs  moments  de  sa  vraie 
liberté. 

Elle  vient  appeler  votre  attention  sur  les  insouciants ,  et 
réclamer  toute  votre  sévérité  contre  les  buveurs  de  sang  et 
les  terroristes  de  U)ute  la  république»  et  spécialement  de 
la  section  du  Muséum. 

Vos  concitoyens  ne  vous  féliciteront  pas  sur  vos  glorieux 
travaux;  vou<  avez  fait  votre  devoir,  ils  feront  le  leur. 

Mort  aux  buveurs  de  sang  et  aux  royalistes  !  guerre  aux 
terroristes  ei  aux  intrigants  1  paix  aux  citoyens  vertueux  I 
respect  et  obéissance  pour  les  lois,  amour  inviolable  pour 
la  patrie,  pour  la  justice  et  la  Convention  1  telle  sera  tou- 
jours la  devise ,  tels  sont  les  seutimcuts  et  le  vœu  des  ci- 
toyens de  la  section  du  Muséum. 

Cette  Adresse  est  vivement  applaudie. 

—  Les  citoyens  de  la  section  des  Tuilleries  défilent  daus 
le  sein  de  la  Convention  nationale. 

Uorafeur^  à  la  barre  :  Représentants  do  peuple,  un 
homme  justement  exécré  des  républicains,  Papôtre  du  bri- 
gandage et  de  Tassassinut,  ne  souille  plus  l'asile  des  grands 
hommes.  La  section  des  Tuileries,  libre  enfin  dans  ses  dé- 
libérations, vient  applaudir  à  ce  décret  consolant  pour  les 
amis  de  la  justice  et  de  Thuroanilé;  elle  vient  en  même 
temps  exciter  votre  sollicitude  et  fixer  vos  regards  sur  ce 
qui  se  passe  autour  de  vous.  N'en  doutez  pas  représea- 
tauts,  on  conspire  contre  la  représentation  naliouale  ;  des 
hommes  que  leurs  crimes  ont  bannis  de  leurs  départe- 
ments s'agitent  eu  tout  sens  pour  allumer  la  guerre  civile  : 
ils  veulent  associer  à  leurs  projets  de  vengeance  des  hom- 
mes purs,  mais  égarés.  Trop  de  sang  a  coulé.  La  liberté, 
Tégalité,  une  constitution  démocratique,  une  paix  glo- 
rieuse avec  les  tyrans  vaincus,  telles  sont  les  espérances 
des  vrais  amis  de  la  patrie.  Législateurs,  on  vous  parle 
sans  cesse  de  royalistes  ;  on  veut  diviser  votre  attention  ; 
mais  fiez-vous  aux  républicains  du  soin  de  faire  resper^er 
la  république.  La  liberté  nous  coûte  assez  cher  pour  la  dé- 
fendre jusqu*à  la  mort. 

Pour  vous,  représentants,  poursuivez  avec  courage  la 
carrière  glorieuse  où  vous  êtes  entrés.  Prononcez-vous  avec 
force:  que  des  mesures  énergiques  ôtent  tout  espoir  aux 
ennemis  de  la  patrie,  quels  qu'ils  soient.  HMez-vousdc 
frapper  ces  grands  coupables ,  déjà  jugés  par  PEurope  en- 
tière; épurez  les  autorités  constituées;  pardonnez  à  Ter- 
reur, soyez  inébranlables  pour  le  crime,  et  la  patrie  sera 
sauvée.  (Les  applaudissements réit^ éclgteut  de  li>utes 
paru.) 


M( 


•—On  introduit  succcÀsIvemenl  les  sections  Poissou- 
pK-re,  de  la  République  et  des  Cliamps-Elysérs 

Toutes  expriment,  dans  des  Aa-csses  éucri^ique»,  les 
mêmes lônioigujgcs de  reconnaissance  pour  'aConvenlion, 
de  dc\ouemcni  à  ses  dêcrçls,  de  baine  pour  le  rt'gne  du 
crime,  du  sang  et  de  la  terreur;  toutes  répMentle  serment 
de  se  rallier  sans  cesse  autour  de  la  rcpi  ésenlation  natio- 
nale, déverser  tout  leur  sang  pour  la  défendre  contre  les 
scélérats  qui  conspirent  contjeelle;  toutesdemandcnt  que 
la  commission  des  Vingt-et-Un  fa^se  prompleinent  son  ' 
rapport  ;  toutes  enfin  engagent  les  bons  citoyens  ù  se  ren* 
dre  assidûment  à  leurs  sectioni  pour  y  déjouer  toujours 
rintrigue  et  la  maWeillance. 

Le  président  répond  à  ces  différeotcs  députations,  et 
applaudit,  au  nom  de  la 'Convention,  aux  Tues  intéres- 
santes et  aux  preuves  d*attacbement  qu*ellcs  viennent  d*of- 
frir  à  sa  barre. 

On  demande  que  toutes  ces  Adresses  soient  insérées 
dans  le  Bulletin. 

DuHEM  :  Dans  le  nombre  des  Adresses  qui  vien- 
nent de  vous  être  pre'scntées,  et  dont  vous  avez  or- 
donné rinsertion  au  Bulletin,  il  en  est  une  qui  est 
contraire  à  tous  les  principes.  11  est  dit  dans  cette 
Adresseque  tous  les  citoyens  d'une  section  ont  déli- 
béré de  priver  de  leurs  droits  politiques  les  anciens 
membres  des  comités  révolutionnaires  cl  autres  in- 
dividus. Eh  bien,  citoyens,  c^est  une  violation  mani- 
feste de  la  loi  ;  un  citoyen  ne  peut  être  privé  de  ses 
droits  que  par  un  décret.  (Murmures.) 

Bourdon  (de  TOise)  :  Duhcm  a  altéré  la  vérité  en 
citant  l'arrêté  d'une  section  qui  probablemeut  n'est 
pas  de  son  opinion.  (Vils  applaudissements.) 

DuHEM  :  Je  demande  une  nouvelle  lecture  de  cet 
arrêté. 

Bourdon  (de  roisc)  :  La  section  dont  on  a  cherché 
ù  empoisonner  les  intentions  est  venue  vous  conlier 
ses  alarmes  siîr  ce  que,  dans  Paris,  les  buveurs  de 
sang  et  les  fripons  relèvent  une  tête  insolente.  Eh 
quoi!  citoyens,  souffrirez-vous  que,  six  mois  après 
le  retour  de  la  justice,  des  scélérats  venus  de  toutes 
les  parties  de  la  république  empêchent  les  bons  ci- 
toyens de  délibérer  paisiblement  dans  leurs  sections  ? 
S  On  applaudit.^  Hier  encore,  dans  plusieurs  sections, 
es  membres  aes  anciens  comités  révolutionnaires, 
réunis  à  des  jurés  de  l'infôme  tribunal  de  Robes- 
pierre,ont  maltraité  les  patriotes,  renversé  le  bureau 
et  méconnu  la  loi.  (Mouvement  d'indignation.)  N'en 
doutez  pas,  citoyens,  la  liberté  serait  perdue  si  l'on 
pouvait  une  fois  empêcher  le  peuple  devenir  dénon- 
cer à  ses  représentants  les  nommes  qui,  pendant 
dix-huit  mois,  ont  abusédes  pouvoirs  qui  leur  étaient 
coniiés,  et  qui  veulent  les  ressaisir  en  ce  moment  ù 
quelque  prix  que  ce  soit.  H"  est  vrai  qu'autrefois  les 
sections  (le  Paris  ne  venaient  pas  réclamer  contre  le 
mode  de  délibération  qu'on  avait  établi  parmi  elles; 
mais  savcz-vous  pourquoi,  citoyens?  parce  que,  lors- 
qu'un homme  courageux  élevait  la  voix  dans  les  as- 
semblées du  peuple,  il  était  incarcéré  sur-le-champ, 
et  ses  amis  n  osaient  venir  réclamer  en  sa  faveur,  de 
crainte  d'éprouver  le  même  sort.  (Vifs  applaudisse- 
ments.) Je  demande  que  l'Adresse  de  la  section  des 
Tuileries,  à  laquelle  doivent  se  rallier  tons  les  vrais 
patriotes,  soit  insérée  au  Bulletin. 

André  Dumont  :  Il  nVst  que  trop  vrai  que  la  mal- 
veillance et  le  crime  s'agitent;  je  tiens  une  lettre  de 
Boulogne,  on  les  bons  citovens  ont  été  obligés  de 
recourir  à  la  force  pour  se  délivrer  de  l'oppression 
où  les  tenaient  les  Jacobins,  qui  avaient  juré  d'exter- 
miner tous  ceux  qui  n'étaient  pas  de  leur  parti,  qui 
ont  osé  dire  que  l'assemblée  allait  enfin  ramener  In 
justice  anéantie  au  10  thermidor.  (Il  s'élève  un  mou- 
vement d'indignation.)  II  n'y  a  pas  encore  dix  jours 
que,  dans  la  section  des  Tuileries,  les  Jacobins,  au 


mépris  de  vos  décrets,  voulaient  comprimer  l'opi- 
nion publique;  et  vous  empêcheriez  ces  citoyens 
lie  se  JiJivtci  de  ce  joug  odieux!  et  vous  les  empê- 
cheriez de  vous  faire  respecter,  vous  et  vos  décrets! 

Une  voix  :  Ce  n'est  pas  l'assemblée  ! 

Une  autre  voix  :  C'est  Duhem. 

André  Dumont  :  Cette  section  déclare  qu'elle  sera 
ferme;  Cbus  les  Français  le  seront.  (On  applaudit.) 
Les  égorgeurs  ne  seront  plus  rien  dans  la  républi- 
que. (Vifê applaudissements.)  Ils  ne  seront  plus  rien 
ces  hommes  qui  ne  cessent  de  jeter  en  avant  des 
motions  insidieuses.  Le  peuple  veut  b  république, 
mais  il  la  veut  avec  la  justice;  il  ne  veut  pas  une 
république  où  l'on  assure  l'impunité  aux  coupables, 
où  quatre  individus  tyrannisent  des  milliers  de  ci- 
toyens. ^Vifs  applaudissements.)  Nous  n'avons  pas 
renversé  le  tvran  pour  lui  en  voir  succéder  d'autres; 
le  temps  des  nommes  de  sang  et  de  rapine  est  passé. 
(On  applaudit  à  plusieurs  reprises.) 

Dumont  :  L'assemblée  veut-elle  qu*on  lise  les 
lettres? 

Un  grand  nombre  de  voix  :  Oui,  oui  ! 

Il  Ht  les  lettres,  qui  portent  qu*à  Boulogne  les  citoyens 
ont  été  obligés  de  se  réunir  pour  demunrk'r  le  désarme- 
ment des  partisans  de  la  terreur,  qui,  en  plein  jour,  sor- 
taient avec  des  sabres  ôt  des  fusils,  menaçaient  d'exter- 
miner les  patriotes,  et  euti aient  chez  les  citoyens,  les 
menaçant  aussi  de  les  assassiner  s*ils  ne  se  rangeaient  pas 
de  leur  parti. 

Dumont  :  Je  ne  puis  lire  les  procès  verbaux, 
parce  nn'ils  contiennent  les  noms  des  individus  qu'il 
serait  dangereux  de  f.iire  connaître;  plusieurs  sont 
à  Paris,  et  la  plupart,  sans  état  et  sans  propriété,  ne 
tiennent  à  rien  qu'aux  crimes  qu'ils  ont  commis,  et 
qu'ils  voudraient  bien  commettre  encore.  (Les  ap- 
plaudissements recommencent  et  se  prolongent.) 

Serhes  :  Je  profite  de  cet  instant  pour  épancher 
mon  âme.  Je  dis  à  Dubem,  de  qui  je  suis  loin  de 
soupçonner  les  intentions,  que  tous  les  scélérats,  les 
coupé-jarrets  et  les  voleurs  de  la  république  se  ral- 
lient à  ses  déclamations,  c'est  une  vérité  dont  tout 
homme  qui  aime  son  pays  est  convaincu.  (On  ap- 
plaudit.) J'appuie  les  propositions  d'André  Dumont. 

Le  renvoi  au  comité  de  sûreté  générale  des  lettres  lues 
par  Dumont  est  décrété,  ainsi  que  Tinserlion  des  Ailrcs- 
ses  au  Bulletin. 

—  Gouly  donne  lecture  de  l'Adresse  suivante  : 

V assemblée  coloniale  de  IHle  de  la  Réunion  aux 
représentants  du  peuple  français. 

Ce  28  bramaire ,  an  3«  de  la  république  française, 
une  et  indivisible. 

«  Anîmé»  par  le  tendre  intérêt  qui  nous  attache  h  la 
mère-patrie,  nous  venons,  ou  nom  de  la  colonie  de  l*ilc 
de  la  Réunion,  vous  présenter  nos  félicilalions  sur  les 
heureux  succès  (les  armées  de  la  république  et  sur  Taiiitude 
majestueuse  que  lui  ont  Tait  prendre  vos  mesures  vigou- 
reuses. Lorsque  la  nouvelle  d'événements  aussi  consolants 
pour  des  vrais  Français  est  parvenue  jusqu'à  nous,  nos 
cœurs,  embrasés  du  saint  amour  de  la  patrie,  ont  tressailli 
d*une  joie  pure,  et  nous  nous  sommes  sentis  roriifiés  dans 
la  courageuse  résolution  de  déiendre  jusqu'à  la  mort  cette 
partie  du  territoire  de  la  république  que  nous  habitons. 

•  Le  spectacle  de  la  France  entière  levée  pour  combat- 
tre les  despotes  conjurés  contre  la  liberté  a  frappé  nos 
Ames  d*admiration.  Assaillie  de  toutes  paris  par  le&sateN 
litesde  ces  tyrans,  celte  fière  nation  saura  sans  douie  ré- 
primer leurs  fureurs.  Le  courage  héroïquetle  ses  nombreui 
enlanis,  et  la  brûlante  énergie  qui  les  meut,  nous  garan- 
tissent leurs  victoires.  Oui,  nous  n*en  douions  point,  la 
France  terrassera  ses  ennemis,  etla  liberté  s'élèveiatrioiu- 
pbante  sur  les  débris  des  trônes  de  l'Europe, 


512 


•Nous  avons  également  admiré  la  oonduUe  fraimcnt  ré- 
publicaine que  TOUS  a?et  tenue  dans  ces  moments  orageux 
qui  menaçaient  la  patrie.  Tandis  que,  d*un  cdté«  votre 
énergique  activité  trmail  la  moitié  des  Français  et  les  pous- 
sait à  la  victoire,  de  Ttutre  votre  justice  sévère  frappait 
sans  ménagement  tous  les  conspirateurs  et  les  traîtres  ;  et, 
par  de  sublimes  décrets,  Vous  détruisiez  Tanarcliie,  et  or- 
ganisiez, pour  ainsi  dire,  le  mouvement  révolutionnaire 
dans  lequel  la  France  est  entraînée  depuis  olncf  ans.  Vous 
n'avez  pas  craint  d^arrachcr  dd  votre  propre  sein ,  pour  les 
livrer  au  glaive  natioual*  des  scélérats  audacieux  qui,  sous 
un  masque  perfide,  séduisaient  les  bons  citoyens  pour 
mieux  assurer  les  effets  de  leurs  infâmes  complots»  Toutes 
ces  idoles  éphémères  sont  venues  se  briser  devant  la  majesté 
éternelle  du  peuple,  de  ce  inruple  sage  et  grand,  nui  a  vu 
lans  8*émouvoir  disparaître  tour  &  tour  les  factions  di- 
terses  qui  semblaient  arrêter  ses  pas  vers  la  liberté. 

•  Etranger  ft  tous  les  partis,  et  plein  du  sentiment  inti- 
me de  sa  force,  il  n'aperçoit  que  le  corps  auguste  de  ses 
mandataires  I  et  là  repose  toute  sa  conflance. 

t  Cette  confiance  sans  bornes  dam  votre  sagesse  pré- 
voyante,  ce  dévouement  t  la  eauae  nationale  et  aux  prin- 
cipes qui  ont  fait  la  révolution,  celte  fldélité  intiolable  ù 
la  république ,  voilà  les  sentiments  qui  animent  le  peuple 
de  celle  colonie;  et  l*assembtée  coloniale  s'est  con- 
atamment  attacbée  à  les  maintenir  dans  toute  leur  pureté. 
Quelques  individus  égarés  avaient  tenté  d»  pervertir  IVs- 
prit  public  I  ils  avaient  pu  y  être  encouragés  par  la  pré- 
sence de  Tirol,  commissaire  eivlf,  et  de  Dnpiessis,  gou- 
Tci-neur }  mais  les  folles  espérances  qu'ils  avaient  pu  con- 
cevoir furent  bientôt  détruites  pur  l'arrivée  à  nie  de  France 
de  la  corvette  le  Coureur^  qui  fil  connaître  la  situation 
imposante  dans  laquelle  se  trouvai!  la  république  vis-ù- 
tis  SCS  enneroiSé  A  cette  époque ,  Malarlic»  gouverneur  gé- 
Itérai,  donna  Tordre,  qui  fut  exécuté,  d'arrêter  et  con- 
duire à  nie  de  France  Duptessis,  ainsi  que  deui  oÛiciers 
des  volontaires  ci-devant  de  Bourbon  s  Tirol  fut  également 
irrété  et  transporté  à  111e  de  France. 

•  L^assembiée  coloniale,  renouvelée  en  prairial  dernier, 
Jngca  qu'elle  devait  achever  d*étoaffer  les  germes  d'arjMo- 
eratie  qu'on  avait  cherché  li  développer  dans  la  colonie. 
Après  avoir  créé  dans  son  sein  un  comité  de  surveillance 
et  de  sClrcté  publique,  autorisé  par  la  loi  qui  déclare  le 
gouTernement  révolulionnaira  jusqu'à  la  paix,  elle  crut 
de  son  devoir  de  contenir,  par  des  mesures  répressives  de 
lûreté,  quelques  hommes  dont  la  conduite  incivique  scan- 
dalisait les  bons  citoyens.  Elle  arrêta  aussi  de  vous  dénon- 
cer Tirol  etDuplessls,  et  ces  dénonciations  vous  sont  adrcs* 
iéei  ei'toiat  avee  lex  diverses  pièces  à  Tappal. 

t  Tons  ont  appelé  ta  rengeance  nationale  sur  fet  coupa- 
bles et  ont  redout)lé  de  zèle  et  d'activité  pour  le  maintien 
de  la  Iranqoillilé  publique f  qui  n'a  pas  été  un  instant 
troublée.  Nous  nous  plaisons  à  le  répéter,  la  masse  des  ci- 
toyens de  la  Réunion  est  poret  ils  sont  simples  et  sans  in- 
struction, et  par  Il  faoilet  à  tromper  I  asals  Ils  n'Ont  jamais 
varié  dans  leurs  sentiments  d'amour  et  de  fidélité  pour  la 
ftatrle;  Ils  le  prouvent  par  leur  empressement  &  déposer 
sur  raulel  de  la  patrie,  d'après  tVlemplé  et  sur  l'invita 
lion  de  l'assemblée  eoloftiale^  del  offrandes  en  deitrées  on 
en  argent)  ils  le  prouve»!  encore  par  le  lèle  avee  lequel  « 
depuis  sept  mois,  Ils  se  soni  portés  à  favoriser  de  tOffs  leur» 
OMyens  le»  travaux  Jugé*  nècessairct  pour  la  défense  de  la 
colonie* 

é  On  a  élevé  dei  f etraneliemeitts  ;  des  batteries  mena-* 
gantes  s'étaMiifefii  OU  se  réparent,  et  nous  somme»  tons , 
en  vrais  républleain»,  déterminés  à  combattre  Jusqu'à  la 
mort  les  esclavef  des  lyraits  qui  tenteraient  de  nous  t%%tu 
firà  leurs  ttaitrea.  Nous  devons  à  cette  oecesion  d(4  élo^ 
ge»  mérités  au  conseil  de  défeffse  établi  dans  la  eolonlei 
dont  la  conduite  active  i  Heettéoup  eotttrlbdé  I  la  mettre 
ea  état  de  défeMeifl  aéfé  seeondéitee  tête  par  les  agents 
deli  républiques 

•  Le  Mifrfstre  Dtibertclé,  ptrf  le  éorvette  U  Cùuriut^ 
tous  ivtlt  imibtieé  des  seeottn  proehafiis.  élans  doute 
les  eircotfslanees  orageuses  dans  lesquelles  s^est  troutée  fa 
France  en  ont  retardé  renvoi  :  mais  nous  ne  pontons  dou- 
ter de  votfttaieflUoo  Medproooocéé  de  protéger  ces  tttiles 
Golonici» 


t  Que  de  reconnaissance  ne  vous  devons-nous  point 
pour  ces  marques  de  votre  attentive  bienveillance  I 

«  Llle  de  France  vous  aura  rendu  compte,  sans  doute, 
du  combat  glorieux  que  les  deux  soûles  frégates  qui  exis- 
tent dans  son  port,  avec  la  corvette  le  Couveur,  ont  livré, 
le  4*'  brumaire,  à  deux  vaisseaux  de  guerre  anglais,  qui 
ont  été  forcés,  après  une  action  très-meurtrière  «d'aban- 
donner la  croisière  qu*lls  avaient  établie  près  nos  lies. 

•  Nous  avons  infiniment  à  regretter  de  n'avoir  pu  parla* 
gcr  les  périls  et  la  gloire  de  nos  frères  i  au  moins  nous 
avons  secondé  de  tous  nos  moyens  les  armements  qui  ont 
été  faits  contre  les  ennemis  de  la  patrie ,  dont  le  commerce 
dans  cette  partie  du  monde  a  éprouvé  par  nos  corsaires  des 
pertes  considérables,  s 

Cette  Adressées!  souvetit  interrompue  par  Icspltts 
vifs  applaudissemenla. 

Sur  la  proposition  de  Gouly,  le  décret  suifàtit  est 
rendu  : 

i  La  Convention  nationale  «  après  avoir  entendu  la  lec- 
ture des  Adresses  des  habitants  des  tirs  de  France  et  de  la 
Réunion,  qui  donnent  les  déUlls  du  combat  livré  par  tkm 
frégates  cl  une  corvette,  à  deux  vaisseaux  de  ligne  anglais , 
le  !•'  brumaire  présente  année ,  décrète  i 

«  Art*  I«'.  Les  habitants  des  Iles  de  France  et  de  la  Héu- 
Dion ,  ainsi  que  les  équipages  drs  deoi  frégates  et  corvrtf e 
qui  ont  battu  et  fait  fuir  deux  valsseaui  anglais,  ont  bien 
mérité  de  la  patrie^ 

•  IL  La  Convention  nationale  décrète»  en  outre,  la 
mention  honortible  de  la  conduite  qu'ont  lenue  dansées 
Iles  les  assemblées  coloniales,  les  autorités  constituées  et 
les  Sociàés  populaires  dei'Uii  la  révolutiou ,  Tini^ertion  au 
Bulletl.ri,  et  qu'expédition  du  présent  décret  sera  adi-eoée 
à  ces  colonies  en  témoignage  de  satisfaction.  • 

La  séance  est  letée  à  quatre  heures. 


Né  Dé  -«  Dans  la  séance  dti  S  fentose*  la  Convenllofi  a 
chargé  le  comité  de  sûreté  générale  de  surveiller  les  agio- 
teurs qui  se  rassemblent  au  Palais- Egaillé  t  elle  a  renvoyé 
à  son  esamen  la  proposition  de  rouvrir  la  Bourse. 

•-'Elle  a  décrété  que  l'eiereloi  d'aucun  eulie  M  pou- 
vait être  troublé,  que  la  république  n*en  salariait  aucun  ; 
que  toutes  cérémonie»  religieuses,  tous  costumes  et  babils 
religieux  étaient  deft'ndus  hors  l'encrinte  choisie  pour  son 
exercice;  qu'aucune  commune  ou  section  de  commune  ne 
pouvait  louer  de  local ,  et  qu^il  ne  pouvait  être  lait  de  do- 
tation perpétuel  ou  viagère,  ni  imposé  de  Uxe  pour  cette 
cause. 


AVid. 

Le  dépositaire  de  ta  section  des  litres  jUdieiaires  ^  la  ré- 
publique, fur^risé  par  VêfrêU  du  comité  dea  décrets,  pro- 
e*l-verbaui  et  archivés ,  de  U  CoflVchtion  nationale,  du 
•0  plHViese  dernier,  I  faire  rentrer  étuis  les  dép^t*  des  an 
eiens  iribnuacit  soppriMés  les  iroduHreft*  qnl  m  &ni  été  t}- 
ré«#,  iaviie  les  elleyem  qui  n'eut  «neue  dreit  de  lei  reienir 
a  les  rétablir  dsM  o«a  difrére»ts  dépéls^  lesquels  serent  tm- 
ierts,  jusqu'au  t"  vendémiaire  de  Vân  4,  depuis  Aeuf  heures 
du  mscio  jilsqu'i  trots  heerea  après-midi,  savoir  s 

Les  primidia,duedts,  tridia  et  qUartldwieeUs  du  endeveat 
pffrfénfértt  ; 
Leaquintidiset  seitlifiS,  eéfit  dû  ci-devanl  Cliitefet; 
Le  septMi,  eeuf  de  la  el^detant  eem-  des  Aides  ; 
L'ecsidi,  ee«s  de  I»  ei^eveet  êhniÊOÊf*  des  téûifièsi 
Et  le  aienkU,  eeuaduet-devant  grand  éouseil. 


Pa^êmenu  à  la  îréêùtnrU  nationnU» 

té  pSfémeAt  du  perpétuel  est  ouvert  pour  tes  sis  pee» 
Éiitn  fiiidrs  ;  il  sera  fait  I  toes  oeux  qui  seront  porteurs  d'i»' 
scriptions  an  grand  livre.  Celai  peur  les  rtoles  v'iegèrea  eat 
de  huit  mois  vingt  et  un  jours  de  rauoée  1793  ^vieux  style). 


GAZETTE  NATIONALE  o„  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

^•  155.  Quintidi  5  Ventôse,  Van  3e.  {Lundi  23  Février  1795,  vitux  ityU.) 


POLITIQUE; 

RÉPUBLIQUE   DES   PROVINCES-UNIES. 

Extrait  tCune  lettre  d'Amsterdam,  du  12  février,  — 
Les  anciens  magistrats  de  celle  ville  ont  été  mis  en  état 
d*arieslation,  comme  on  avait  fait  à  Leyde;  mesure  de 
prudence  qu'exigent  les  intérêts  de  la  liberté  publique.... 
Tous  les  députés  stalhoudérieus  ont  été  rappelés  des  étals 
généraux ,  où  désormais  les  patriotes  pourront  voter  libre- 
ment et  former  une  majorité  constante. 

Le  premier  commis  des  états  généraux,  Van-Lelyveld, 
est  arrêté;  on  Taccuse  d'avoir  entretenu  ane  correspon- 
dance en  chiffres  avec  les  ennemis  de  la  patrie. 

La  ville  de  Leyde  a  rendu  hommage  à  ce  principe,  que 
la  publicité  est  la  sauvegarde  du  peuple;  elle  a  résolu 
d'ouvrir  au  public  le  lieu  de  ses  séances.  Son  exemple  ne 
peut  tarder  à  être  suivi  généralement.  Déjà  les  représen- 
tants provisionnels  d'Amsterdam  ont  permis  à  des  journa- 
listes d'assister  à  leufs  assemblées  et  de  publier  les  détails 
des  séances. 

La  Haye,  («12  février,  —  Les  représentants  provisoires 
viennent  de  Taire  publier  la  proclamation  suivante»  rela- 
tivement ù  la  circulation  des  assignats. 

LICBRTB,  ÉGALITÉ,  FjÎATBRIflTÉ. 

t  Les  représentants  provisoires  du  peuple  hollandais 
ayant  pris  en  considération  que  toute  l'armée  de  la  répu- 
fraiiraisc  reçoit  sa  solde  en  assignats,  cl  que  par  consé- 
quent il  est  inévitable  que  les  individus  qui  la  composent 
paient  leurs  nécessités  autrement  qu'en  assignats  ; 

I  Et  voulant  prévenir  les  suites  Tûch^uscs  que  produi- 
rait sûrement  pour  les  bons  habitants  de  cette  province  !a 
circulation  des  assignats;  ainsi,  voulant  que  dans  toute  la 
province  on  ait  lu  même  manière  d'agir  à  cet  égard,  dé- 
crétons provisoirement  comme  il  est  arrangé  ci-d^sous  : 

«  Art.  I*'.  Que  tous  les  boutiquiers  en  détail  et  affaires 
de  la  dernière  nécessité,  sous  lariuellc  dénomination  se- 
ront compris  snluire,  réparailun  et  autres ,  seront  tenus  de 
vendre  et  recevoir  en  payement  des  assignats  aux  cours  de 
9  sous  par  livre,  seulement  des  militaires  français  ou  em- 
ployés appartenant  ù  ladite  armée; 

«  Et  afin  de  prévenir  que  les  boutiquiers  n'agisfent  de 
mauvaise  toi,  en  déclarant  des  sommes  d'assignats  plus 
fortes  qu'il  n'est  probable  qu'ils  aient  reçu  d'après  la  dis- 
position (le  leurs  boutiques,  suivant  les  décisions  ci-devant 
et  ci-après  mentionnées,  seront  aussi  tenus  de  déclarer  jour 
nellemenl  la  quantité  par  eux  reçue  à  la  muoicipalitéou  à 
ceux  par  ellecommis,  lesquels  en  formeront  des  listes,  et  les 
boutiquierssusdits  délivreront  de  semaine  àaulre  ceux  qu'ils 
auront  reçus  de  cette  manière  aux  municipalités  ou  commis 
susnommés,  les((ueis  les  échangeront  au  cours  susdit  de 
9  sous  pour  de  l'argent  ou  récépissé  de  la  municipalité, 
lesquels  devront  être  reçus  d'un  chacun  pour  la  valeur  en- 
tière ;  et  seront  les  boutiquiers,  lesquels  auront  fraudé  dans 
leurs  dépositions,  comme  aussi  ceux  qui  refuseraient, 
doiincraii-ni  ou  recevraient  lesdils  récépissés  au-dessous  de 
li'ur  valeur,  non-seulement  punis  de  l'amende  du  triple  de 
la  valeur  qu'ils  auront  déclarée  de  plus  en  assignats,  ou  ré- 
cépissés cunliairement  donnés  en  reçus,  mais  aussi,  selon 
IVxigcnce  des  cas,  seront  punis  au  corps,  et  même  de 
moii. 

•  11.  Il  ne  sera  permis  à  aucun  boutiquier  de  vendre  û 
un  soldai  ou  employé  de  l'armée  française  à  la  fois  pour 
plus  de  la  somme  de  10  livres,  cl  pas  autrement  que  sur 
un  ordre  pur  écrit  de  son  oflicicr,  lesquels  ordres  et  assi- 
gnats y  joints  devront  èlie  remisa  la  municipalité  ou  com- 
mis par  elle  nommés.  Il  sera  permis  aux  boutiquiers  de 
vendre  pour  une  somme  plus  considérable  à  la  fois  à  un 
ollicicr  et  bien  scion  son  rang,  cependant  pareillement 
muni  d'un  ordre  par  écrit  de  son  chef,  selon  arrangement 
arrtlé  par  les  représentants  de  la  république  française, 
lesquels  feront  savoir  par  une  déclaration  énergique,  aux 
soldats  de  la  république  Trançaise,  de  se  conformer  audit 

Z^Scne.'-Tome  Xt 


arrangement,  et  de  ne  pas  donner  eo  payement  d'autres 
assignats  que  ceux  qu'ils  auront  reçus  pour  leur  solde. 
En  attendant,  il  sera  permis  au  soldat  français  de  faire 
une  petite  dépense  dans  un  cabaret,  moyennant  qu'elle  ne 
supasse  point  les  2  livres,  laquelle  dépense  il  ne  devra 
pas  payer  avec  un  assignat  de  plus  grande  valeur  que  sod 
écol  monte,  sans  avoir  besoin  d'une  permission  par  écrit; 
et  seront  aussi  les  cabaretiers  et  aubergistes  déchargés  de 
l'obligation  de  fournir  des  ordres  par  écrit,  mais  aussi, 
en  contre,  seront  punis  plus  sévèrement  en  cas  de  fraude. 

«  Et  comme  nous  n'avons  en  vue  dans  ces  arrangements 
que  de  procurer  aux  personnes  appartenant  à  l'armée 
française  les  moyens  de  se  procurer  les  petites  nécessités, 
lesquelles  leurs  sont  indispensables,  nous  défendons  pour 
cet  effet,  bien  expressément,  de  donner  cours  d'aucune 
autre  manière  aux  assignats  français,  ni  d'en  donner  ni 
recevoir  en  payement  pour  des  marchés  faits  avant  la  date 
des  présentes,  ne  devant  |)oint  faire  de  marché  ni  contrat 
avec  les  habitants  de  cette  province,  ni  avec  les  étrangers, 
qu'en  monnaie  sonnante. 

«  Et  seront  regardés  comme  lraUres>à  la  patrie  ceux  qui 
contreviendront  ù  la  présente,  et  punis  suivant  l'exigence 
des  cas,  et  même  de  mort. 

a  Comme  nous  défendons  aussi  bien  expressément  et 
sous  peine  de  mort  tous  transports  hors  du  pays  de  toutes 
espèces,  modèles  de  monnaie,  or,  argent  en  lingot  ou 
autre  matière  ;  seulement  seront  dispensés  de  cette  défense 
les  marchands  uégociant  sur  la  mer  Baltique  ou  autres 
places  où  ils  sont  accoutumés  de  faire  leurs  payements  en 
espèces  cependant  pas  autrement  que  sous  ces  conditions: 
ib  seront  tenus  de  faire  la  déclaration  de  cette  exportation 
à  leurs  municipalités,  et  de  fournir  caution  du  triple  de 
la  valeur  de  l'exportation,  et  sons  leur  responsabilité,  dé 
l'entrée  dans  ce  pays  des  marchandises  achetées  de  cette 
manière;  comme  aussi  seront  exemptées  de  celte  défense 
les  personnes  voyageant,  moyennant  qu'il  soit  Gxé  par  la 
rounicipulilé  de  leur  demeure  ui)e  somme  raisonnable 
qu'ils  pourraient  prendre  avec  eux  et  en  donner  connais- 
sance à  la  municipalité  de  la  frontière;  et  à  l'égard |lcs 
étrangers,  ils  seront  obligés ,  à  leur  départ,  de  faire  con- 
naître &  la  municipalité  de  la  frontière  qu'ils  n'emportent 
pas  une  plus  forte  somme  qu*ii  ne  leur  est  nécessaire  pour 
leur  voyage. 

«  Voulant  et  ordonnant  bien  expressément  qu'un  cbacnn 
se  conforme  à  la  présente,  sous  peine  des  punitions  y 
énoncées. 

«  Fait  à  La  Haye,  sous  le  petit  sceau  du  pays,  ce  2  fé- 
vrier, l'an  1*'  de  la  liberté  balave. 

«  Signé  P.  Paolus,  Vt. 

«  Par  ordonnance  des  représentants  provisoires  du  peu- 
ple hollandais. 

«  Signé  C.-J.  db  Lance  van  Wyngaaodbn.  • 


CONVENTION    NATIONALE. 

Suite  du  rapport  fait,  au  nom  de  la  commission 
chargée  de  l''examen  des  papiers  trouvés  chez 
Robespierre  et  ses  complices,  par  f'^.-B.  Cour* 
lois,  député  du  déparlement  de  VAuhe,  dans  la 
séance  du  16  nivôse,  an  3  de  la  république  fran- 
çaise, une  et  indivisible. 

Je  crois  que  ce  long  trxle  n'a  pas  besoin  de  coiti- 
mentaire,  et  que  nous  avons  jusqu'ici  donné  assez 
d'alirnent  à  tous  ces  incrédules  de  commande,  qui 
feignent  de  douter  encore  qu'il  ait  existé  une  con- 
spiration contre  la  représentation  nationale,  conspi- 
ration ourdie  par  Robespierre,  et  secondée  par  les 
membres  du  gouvernement,  qui  ne  s'en  sont  retirés 

uc  lorsqu'ils  ont  aperçu  un  but  qui  n'était  pas  celui 

le  leur  ambition. 
Ce  que  nous  avons  dit  à  cet  égard  stifTit  sans 

C.3 


a: 


614 


doute  pour  qu*on  n'exige  pas  de  nous  une  analyse 
de  nouvelles  pièces,  qui  ne  sont  qu'une  répétition  de 
celles-ci. 

Le  but  du  conspirateur  découvert,  il  faut  l'étudier 
dans  SCS  moyens  d'y  atteindre  et  dans  ses  agents, 
tous  empressés  à  lui  fournir  ces  moyens. 

Moyens  personnels  de  Robespierre  presque  nuls  ; 
moyens  à  lui  tournis  par  ses  agents,  trop  multipliés, 
trop  longuement  préparés.  U  faut  frapper  ;  en  ma- 
tière de  conspiration,  il  ne  faut  pas  délibérer  pour 
réussir.  Robespierre  parla  ;  il  devait  agir.  Ses  dis- 
cours, ceux  d'un  misérable  cul><le-jatte  à  qui  la  na- 
ture avait  prescrit  de  végéter  sur  une  chaise  ou 
dans  un  lit;  quelques  mouvements  d'amour-propre 
que  le  tyran  n'avait  nu  dissimuler  ,  tout  vint 
éveiller  à  la  fois  la  jalousie  de  ses  collègues  du 
comité,  qui,  de  soutiens  Qu'ils  étaient  d'une  puis- 
sance commune  à  tous,  uevinrrnt  ennemis  d'une 
puissance  qui  n'était  plus  que  personnelle  à  Robes* 
pierre. 

Ce  qui  acheva  de  le  perdre,  ce  fnt  la  terreur  qu'il 
avait  portée  dans  les  âmes  et  qui  retomba  dans  la 
Sienne  ;  juste  châtiment  des  tyrans  !  Son  caractère 
s'assombrissait  davantage  ;  ses' yeux  petits  et  ternes 
se  rougirent  de  taches  sanglantes.  Son  teint  se  mé- 
langea de  la  livçur  de  l'envieux  et  de  la  pûleur  du 
criminel. 

L'assassin  de  la  patrie  ne  rêva  plus  qu'assassinats; 
son  sommeil  était  celui  de  Néron  ;  son  réveil  é^ait 
encore  celui  dr  Néron  ;  il  n'eut  pas  assez  des  douze 
palais  de  Cromweli  pour  échapper  à  lui*mrme,à 
cette  furie  invisible  qui  le  poursuivait  sans  relâche, 
et  qui  soussch  /ouets  sanglants  faisait  tournoyer  son 
cœur  féroce.  Ceux  qui  l'approchaient,  les  lettres 
qu'il  recevait,  tout  redoublait  son  épouvante. 

Une  jeune  fille  veut-elle  voir  ce  guc  cVst  qu'un 
tyran  ;  c'est  pour  l'assassiner  !  On  fait  tremper  dans 
ce  complot  imoginaire  tonte  la  famille  infortunée  de 
Cécile;  on  égorge  Jusqu'à  son  vieux  père,  pour  le 
punir  des  mouvements  curieux  de  sa  iille.  C'est  peu  : 
soixante  innocents,  enchaînés  depuis  six  mois  dans 
les  cachots ,  sont  désignés  comme  complices  d'une 
jeune  Gllc  qu'ils  n'ont  jamais  vue,  comme  complici's 
d'un  assassinat  tenté,  dit-on,  dej)uis  huit  jours.  Le 
complaisant  comité  les  revêt  du  linceul  pourpre  des 
assassins  ;  leur  sang  jaillit  sur  la  terre,  et  la  tombe 
avide  les  dévore  ! 

Que  d'hommes  immolés  à  la  conservation  d'une 
béte  féroce  ! 

C'est  peu  :  de  toutes  les  parties  de  la  république, 
des  affiliations  populaires,  des  magistrats  lâches  et 
coupables  accablent  de  félicitations  et  d'hommages 
ce  monstre  conservé.  Quelle  bassesse!  Pour  la  garde 
du  Néron  français,  ils  proposent  un  corps  de  licteurs 
qu'il  relusc  avec  la  même  bonne  foi  que  jadis  César 
repoussa  l'oftre  intempestive  d'une  couronne.  Ils  lui 
voteraient  volontiers  des  prières  dans  les  temples, 
s'ils  croyaient  encore  à  Dieu. 

O  vous  1  représentanl»  fidèles  dont  le  sein  a  été 
frappe  depuis  du  poignard  des  égorgeurs,  vous  n'a- 
vez pas  reçu,  comme  lui ,  en  tribut,  les  flétrissants 
hommages  de  ta  Iflchetë  et  du  crime  !  Que  vous  de- 
vez être  fiers  de  l'honneur  de  ce  silence  ! 

Toutefois,  l'oreille  sourde  au  chant  uniforme  de 
ce$  chœurs  de  courtisans,  au  sein  de  ce  bruyant  cor- 
tège eflravé  de  sa  solitude,  ne  trouvant  pas  dans  ses 
pensées,  dans  les  avis  qu'il  recevait  et  dans  l'image 
de  l'avenir  la  face  riante  de  ^$  flatteurs  ;  ne  voyant 
plus  autour  de  lui  que  ùcê  morts  et  des  mourants  ; 
dans  ce  concert  de  félicitations  n'entendant  que  le 
cri  des  victimes,  que  la  voix  souterraine  des  tom- 
beaux qui  l'appelait,  et  croyant  sentir  déjà,  comme 
le  taureau  qui  va  tomber  a  l'autel,  Is  coup  de  la 


hache  qui  l'attend,  Robespierre  ne  respire  plus,  ne 
s'agite  plus  que  pour  repousser  ce  coup  ;  furieux,  il 
erre,  ainsi  qu'une  bacchante  frappée  du  tyrse,au  sein 
des  complices  de  ses  crimes  ;  il  les  empoisonne  de 
SCS  fureurs.  «  On  veut  m'assassiner  !  s'écrie-t-il  ; 
j'épuiserai  la  coupe  de  Socrote  ;  j'abandonne  mes 

i'ours......  •  Et  cet  abandon  de  la  vie  n*est,  dans  la 
)ouche  du  lâche,  qu'un  regret  de  la  quitter.  Il  n'est 
plus  ce  temps  où,  tournant  un  œil  enflammé  sur 
l'audacieux  collègue  qui  osait  provoquer  la  discus- 
sion d'un  projet  de  décret  de  son  comité ,  Robes- 
pierre semblait  dire  :  Vois-tu  dans  ce  regard  l'épëe 
de  GaTnas  (1)  qui  va  te  percer  le  sein  !  Non,  ta  menace 
de  Robespierre  n'est  aujourd'hui  qu'un  cri  de  grftce; 
ses  mouvements  sont  les  frisions  de  l'agonie  ;  il  est 
pâle  déjà  de  sa  mort  future.  Des  caractères  terribles, 
tracés  par  des  mains  courageuses,  s'oflrent  partout 
à  ses  regards  ;  à  table,  pendant  le  sommeil,  a  la  tri- 
bune, ces  mains  invisibles  écrivent  sur  la  muraille 
la  condamnation  du  tyran  ;  il  ne  peutieuilleter  sta 
papiers  sans  les  y  rencontrer  encore. 

•  Tu  tends  à  la  dictature  (  lui  écrit  oelui-ci  ) ,  tu 
veux  tuer  la  liberté....  Tu  as  fait  périr  les  plus  fer- 
mes soutiens  de  la  république...  Tremble  I  tremblez 
tous!  nouveaux  décemvirs  ;  des  vengeurs  de  la  pa- 
trie sont  prêts  à  faire  couler  votre  sang.  Environne- 
loi  de  gardes,  de  noirs,  d'esclaves;  je  serai  parmi 
eux ,  n'en  doute  point.  Malheureux ,  tu  déclames 
contre  les  tyrans,  et  lu  veux  nous  livrer  à  eux  !  La 
cour  a  vendu  notre  sang,  notre  or,  nos  villes,  nos 

f provinces  :  tu  leur  promets  de  nous  faire  égorger 
es  uns  après  les  autres.  Quoi  !  réduire  la  France  à 
deux  millions  d'hommes  I  et  c*est  trop  encore,  as-tu 
dit!» 

Eh  bien ,  voyez-vous  encore  ici  ces  proiets  de  ni- 
vellement dont  on  n'a  que  trop  fait,  dans  la  France, 
le  fatal  essai. 

•  Enviroiine-lol  de  noirs 

Un  de  ces  noirs  était  Nicolas,  membres  du  comité 
de  surveillance  du  département  de  Paris  (2>. 

De  toutes  parts  mille  troits  aigus  lances  par  la 
vertu  et  le  courage  blessaient  ft  mort  le  cœur  du 
traître. 

•  Tu  es  encore!  tigre  couvert  du  plus  pur  san^  de 
la  France  (  lui  écrit-on  )  ;  bourreau  de  ton  pays!..... 
Tu  es  encore!  Ecoute,  lis  Tarrct  de  ton  châtiment. 
J'ai  attendu,  j'attends  encore  que  le  peuple  affamé 
sonne  l'heure  de  too  trépas  ;  que,  juste,  il  te  traîne 
eu  supplice.....  Si  mon  es()oir  était  vain ,  s'il  était 
différé,  écoute,  lis:  cette  main  qui  trace  ta  sentencci 
cette  main  que  tes  yeux  égarés  cherchent  à  décou- 
vrit ,  cette  main  qui  presse  la  tienne  arec  horreur, 
percera  ton  cœur  inhumain.....  Tous  les  jours  je 
suis  avec  toi  ;  le  te  vois  tous  les  Jours  ;  à  toute  heure 
mon  bras  levé  cherche  ta  poitrine.,..  0  le  plus  scé- 
lérat des  hommes!  vis  encore  quelques  jours  pour 
penser  à  moi,  dors  pour  rêver  de  moi  ;  que  mon  sou* 
venir  et  ta  frayeur  soient  le  premier  appareil  de  ton 
supplice  !....  Adieu  ;  ce  jour  méroet  eu  te  regardaat» 
je  vais  jouir  de  ta  terreur.  • 

Si  ce  sont  la  les  roses  que  doivent  cueillir  les  ty- 
rans ,  qui  peut  encore  songer  à  l'être? 

(I)  Gifloai,  (i^énérfl  roth  aawrvlce  df  Tempereur  Arca- 
diui.  Voyez  V H fstoire  au  BaS'Smpirfi.  A.  M. 

(9)  Robespierre  avait  coutome  de  m  faSra  escorter.  Dam 
letpapiert  relatifa  h  la  eensplration  du  9  ihrnnidol',  et  qui 
sont  au  tribunal  rëvotutioiioaire,  en  trouve  des  dënonciatlont 
contre  divers  partieuliert  etii  eeofiposaient  d*habltude  eette 
•aeorte  ;  tais  aoni  Garoier,  DelattOf  y,  Didier,  Girard,  Châlo» 
lel  et  Micolaf . 

Une  partie  de  Pescorte  ae  tdparait  de  Rebeioierrt ,  alUII 
fHvrir  M  porte  avec  ewpreiaemeai,  et  ittandait  m  tnltfaa 
qui  99  prcMnuii  tetgoun  tvee  «ne  fraadf  inpertanee. 

A»  Ht 


515 


Le  sa^e  Socrate  eut  donc  bien  raison  de  le  dire  : 
•Que,  SI  Ton  pouvait  péuclre r  dans  le  fond  de  Tâme 
d*un  tyran ,  on  y  verrait  mille  trnils  empoisonnés 
qui  la  déchirent  :  que  la  cruauté,  la  débauche,  Fin- 
justice  font  sur  Nme  ce  que  les  fouets  font  sur  le 
corps.  * 

Ces  menaces,  et  beaucoup  d*autres  qui  eussent  dû 
faire  germer  dans  Tâme  de  Robespierre  les  semences 
salutaires  du  repentir,  n'ir^^^^^I^PP^rent  que  lescn 
(imcnt  de  lar  peur,  plus  impérieux  dans  cette  âme 
que  Tamour  mémedela  tyrannie  Trop  faible  devant 
un  colosse  de  puissance  dont  il  voulait  simposer 
tout  le  poids  en  écartant  les  étais  ambitieux  qui  le 
soutenaient  avec  lui ,  dès  qu'il  l'envisagea  seul,  il 
nûlit  en  le  regardant.  Il  ne  mesura  plus  sa  gloire  sur 
l'élévation  de  ce  colosse;  il  ne  mesura  que  la  hau» 
tcur  de  sa  chute,  et  abandonna  avec  lâcheté  un  ou- 
vrage qu'il  avait  entrepris  sans  furce. 

Un  plan  de  fuite  fut  arrêté  entre  Robespierre  et 
un  de  ses  aftidés,  caché  sous  le  voile  de  Taunnyme. 
Robespierre  avait,  dans  tous  les  temps,  entretenu,  à 
ce  qu'il  paraît,  des  correspondances  avec  des  agents 
de  difTérents  pays;  les  correspondances  et  le  fait 
de  la  fuite  sont  confirmés  au  moins  par  quelques 
lettres,  entre  antres  par  une  datée  de  Londres,  à 
peu  près  insignKîante,  sans  date  de  lieu  ni  d'époque, 
mais  à  lui  adressée  quelque  temps  après  la  fôte  à 
l'Elernel.  Cette  lettre  est  écrite  sur  le  ton  d'une 
réponse. 

On  le  prie  d'être  tranquille  sur  les  objets  que  son 
adresse  a  su  faire  parvenir  depuis  le  commencement 
de  ses  craintes. 

•  A  présent,  vous  allex  employer  (lui  dit-on)  toute 
la  vigilance  qu'exige  la  nécessité  de  fuir  un  tnéâtre 
où  vous  devez  bientôt  paraître  et  disparaître  pour  la 
dernière  fois.  Il  est  inutile  de  vous  rapncler  toutes 
les  raisons  qui  vous  exposent  ;  car  ce  dernier  pas, 

3 ni  vient  de  vous  mettre  sur  le  sopha  de  la  prési- 
ence,  vous  rapproche  de  l'échafaud,  où  vous  ver« 
riez  cette  canaille  qui  vous  cracherait  au  visage, 
conime  elle  a  fait  à  ceux  que  vous  avez  jugés.  Ega- 
lité, dit  d'Orléans,  vous  en  fournit  Texemple.  Ainsi, 
puisque  vous  êtes  parvenu  à  vous  former  ici  un  tré- 
sor suffisant  pour  exister  longtemps ,  ainsi  aue  les 
porsonnes  pour  qui  j'en  ai  reçu  de  vous,  je  vais 
vous  attendre  avec  grande  impatience  pour  rire  avec 
vous  du  rûle  que  vous  avez  joué  dans  le  trouble 
d'une  nation  aussi  crédule  qu*a  vide  de  nouveautés... 
Prenez  votre  parti  d*après  nos  arrangements.  • 

Voilà  l'incorruptible,  le  désintéressé  l^aximilienl 
voilà  ces  hommes  à  qui  il  ne  fallait  pour  vivre  que 
quelques  onces  d'une  substance  nourricière  !  Peuple, 
tu  les  connais  enfin  ! 

Ce  n'est  point  une  digression,  citoyens,  que  ce 
tableau  des  angoisses  du  tyran.  Vous  venez  d'assister 
aux  oombats,  aux  hésitations  de  cette  âme  sans  res- 
sort,audacieu8eloindesdBngers,devanteux molle  et 
chancelante,  qui  dans  le  crime  même  n'eut  person- 
nellement que  la  puissance  du  désir,  jamais  celle  de 
l'exécution,  puisqu'elle  ne  put  en  effet  qu'autant  de 
temps  que  lui  dura  l'assistance  de  quelques  bras 
complaisants,  et  que,  réduite  à  sa  seule  force,  elle 
ploya  sous  le  fardeau  du  pouvoir. 

Nous  avions  done  raison  de  le  dire  :  moyens  per* 
sonnels  de  Robespierre  presque  nuls. 

Voyons  au  moins  quel  usage  il  lit  de  ceux  de  ses 
ngcMils. 

De  ces  agents,  vous  en  distinguerez  deux  sortes  : 
les  uns  meneurs,  les  autres  menés ,  c'est-à-dire  ty- 
rans en  première,  deuxième,  troisième  et  centième 
ligue. 

Tyrans  de  or^mière  Iisn«  ;  tes  comités  de  gouver- 
nement» 


Tyrant  de  seconde  ligne  :  les  tribunaux  révo- 
lutionnaires, que  Payan  appelait  tribunaux  poli- 
tiques; 

Tyrans  dé  troisième  et  autres  lignes  :  des  corps 
administratifs  et  autres  autorités  constituées;  des 
commissaires  aux  accaparements  ;  des  commissaires- 
à  la  vente  des  biens  nationaux  et  d-émigrés;  des 
trèS'Saisissants  commissaires  aux  saisies  des  meu- 
bles; les  taxateurs,  les  comités  révolutionnaires,  les 
armées  révolutionnaires ,  les  Sociétés  et  commis- 
sions populaires.  {La  suite  demain.) 


SÉJiNCB  DU  soin  DU   1^^  VENTOSB. 

Présidence  de  Barras» 

La  Convention  procède  à  l'appel  nominal  pour  le  renou* 
vdleiueiil  du  bureau.  La  majorité  des  tuITroges  doniu'  1» 
présidence  à  Bourdon  (de  TOise).  Les  nouveaux  secré- 
luircssont  Dupuis  (de  Sdne-cl*Oisc  ),  lUbaut-Pomler  et 
PémarUo. 

SIÉANCE  DU  2  VENTOSE.  ^ 

Présidente  de  Bourdon  {de  COise)» 

On  admet  à  la  barre  une  dôputation  des  citoyens  de 
couleur» 

Vorateur  de  cette  députation  i  Habitanls  des  colonies, 
amis  sincères  de  la  révolution  el  de  ses  principes  rég^né* 
ratcurs>  nous  venons  vous  remercier  de  votre  décret  du 
26  pluviôse. 

Eu  décréiaut  Penvol  des  représentants  du  peuple  dans 
les  colonies,  en  leur  prescrivant  de  ne  rlcii  changer  à  la 
loi  du  26  pluviôse,  vous  avez  Tait  tout  ce  que  la  sagesse  et 
la  justice  exigenieut  pour  sauver  et  vous  attacher  à  jamais 
CCS  mOines  colonies  ;  elles  vont  devenir  une  stource  plus  fé* 
condc  de  richesses  travaillées  par  des  mains  libres.  La 
liberté,  eo  détruisani  pour  toujours  len  espérances  coupa* 
blés  des  grands  planteurs,  a  éteint  des  Hanimes  qui  dévo* 
raient  vos  Iles,  et  a  dissipé  la  guerre  civile  que  rinlérët  y 
avait  allumée. 

Nous  pouvons  tous  assurer  que  plus  les  mesures  qae 
vous  prendrez  pour  consolider  la  liberté  et  l'égalité  dans 
les  colonies  seront  prononcées,  et  plus  vous  vous  les  at- 
tacherez par  les  liens  les  plus  forts,  l'iolérél  et  la  rccon- 
naissance. 

S*il  nous  restait  quelque  chose  &  désirer  après  tous  Ici 
bienfaits  que  nous  avons  reçus  de  vos  sages  lois,  ce  serait 
de  voir  dans  nos  contrées  éloignées  ceux  du  vous  qui  se 
sont  plus  particulièrement  occupés  de  la  réclamation  de 
nos  droits,  afln  que  la  mission  dont  ils  seront  chargés  pro« 
duisU  les  plus  heureux  eOets* 

Pour  nous,  toujours  dévoués  à  la  constitution,  h  ses 
principes,  ù  la  république  une  et  indivisible,  et  ù  la  rc« 
présenlaiîon  nationale ,  nous  IVaochirons  aussi  les  mers  i 
nous  irons  dans  les  colonies  avec  les  représentants  que  vous 
y  enverrez;  ils  seront  pour  nous  le  ûà\M  le  plus  sucré; 
qii^ils  comptent  sur  nous,  ils  nous  trouveront  toujours 
prOts  a  sacrifler  nos  vies  el  nos  fortunes  pour  soutenir  tes 
principes,  la  constitution,  les  Intérêts  de  la  république  et 
la  sûreté  de  la  représentation  uaUonale.  (On  applaudit.) 
Le  président  témoigne,  dans  sa  réponse  à  la  députation, 
la  saUsfaction  de  rassemblée,  a  La  ConvenUon,  njoute-t-ll, 
est  persuadée  que  le  où  il  existe  des  distinctions  entre  les 
hommes,  il  n*y  a  point  de  liberté;  en  vous  restituant  vos 
droits,  elle  s^est  élevée  à  la  hauteur  des  principesi  elle 
voit  en  vous  des  frères  qui  réuniront  leurs  enbrtsaux  siens, 
pour  fonder  ensemble  la  liberté  dons  les  deux  mondes.  » 
^Oo  applaudit.) 

L^assemblée  décrète  Tinscrtlon  de  rAdresseel  de  la  ré* 
ponse  dans  le  Bulletin. 

Clauzbl  :  Cent  quatre-vingts  membres  de  cette 
assemblée  sont  portés  sur  la  liste  des  candidats; 
mais  beaucoup  d'entre  eux  ne  Sont  point  en  état  de 
faire  le  voyage  des  colonies;  par  exemple,  moi,  mes 
iniirmités  m'empêcheraient  d'accepter  cette  hono- 
rable mission.  Je  désirerais  donc  que  les  comités 


51G 


des  décrets  cl  colonies  présen lassent. un  mode  pour 
éviter  la  perte  de  temps  que  pourrait  entraîner  le 
refus  des  députes  qui,  étant  nommés,  seraient  inca- 
pables de  satisfaire  au  vœu  de  rassemblée. 

DuFAY  :  Je  saisis  celte  occasion  pour  observer  à 
la  Convention  que  Saint-Domingue  a  le  plus  grand 
besoin  de  prompts  secours,  et  qu'un  des  plus  effi- 
caces qu'on  puisse  lui  porter  est  la  présence  des 
représentants  du  peuple ,  qui  seront  l'image  de  la 
Convention ,  et  seront  reçus  comme  des  dieux  tu- 
télaires. 

Saint-Domingue  est  sans  autorité  depuis  un  an, 
entièrement  abandonné  à  lui-même,  et  n'a  été  pré- 
servé d'une  invasion  générale,  cl  m^me  d'une  des- 
truction universelle,  que  par  le  génie  de  la  liberté 
uni  au  génie  de  la  France. 

Dans  cet  état  d'abandon,  sans  munitions,  sans 
nrmes  que  des  piques  ou  des  restes  de  baïonnettes, 
les  nouveaux  aflranchis  ont  même  fait  des  conquêtes 
sur  les  Espagnols  ;  et  les  Anglais  ,  sur  une  étendue 
de  deux  cents  lieues  de  cotes  françaises,  ne  sont  plus 
que  dans  deux  ou  trois  points,  où  ils  sont  cernés  de 
tous  les  côtés.  Jugez  ce  que  feront  les  nouveaux  af- 
franchis sous  les  yeux  et  à  la  voix  des  l'cpréseulanls 
du  peuple  français. 

»  Je  prie  donc  la  Convention  de  fixer  le  jour  où 
elle  nommera  trois  représentants  pour  Saint-Do- 
mingue. 

Celte  proposition  est  appuyée. 

•"  :  Il  est  un  moyen  qui  me  paraît  tout  simple  :  il 
ne  faut  que  prendre  la  liste  des  candidats  qui  nous 
a  été  distribuée.  Chaque  membre,  appelé  à  son  tour, 
répondra  s'il  est,  oui  ou  non,  dans  l'intention  d'aller 
aux  colonies. 

Blad  :  Mais  cette  prétendue  liste  de  candidats 
n'en  est  réellement  pas  une.  Une  liste  de  candidats 
est  composée  des  noms  des  membres  qui,  se  croyant 
propres  à  telle  ou  telle  mission,  vont  s'inscrire  eux- 
mêmes  pour  se  proposer  à  la  remplir.  Ici  c'est  autre 
chose.  Ce  sont  des  étrangers  cjui  indiquent  les  in- 
dividus qu'ils  croient  propres  a  la  mission  dans  les 
colonies. 

Je  demande  que  chaque  député  ait  la  liberté  de  se 
faire  inscrire,  et  que,  lorsque  cette  liste  sera  faite, 
on  procède  à  1  appel  nominal. 

Thijriot  :  La  modestie  empêchera  beaucoup  de 
membres  de  suivre  cette  marche,  et  de  la  sorte  des 
personnes  pleines  de  mérite  et  de  talents  pourraient 
n'être  pas  employées.  Je  demande  que  les  membres 
portés  sur  la  liste  des  candidats  se  transportent  au 
comité  des  inspecteurs  ;  ceux  qui  ne  voudront  pas 
partir  se  feront  rayer,  les  autres  se  feront  inscrire 
sur  une  liste. 

Pelet  :  Je  pense  que,  sans  égard  à  la  liste  des  can- 
didats imprimée  et  distribuée,  l'assemblée  doit  choi- 
sir indistinctement  parmi  tous  ses  membres  ;  comme 
la  mission  est  périlleuse,  ce  sera  une  raison  pour 
ne  point  refuser.  Je  demande  donc  que  l'appel  no- 
minal se  fasse  de  suite,  et  que  celui  qui  aura  réuni 
la  majorité  des  suffrages  se  soumette  au  vœu  de 
rassemblée. 

Enguebrand  :  On  a  perdu  de  vue,  dans  la  discus- 
sion, un  principe  :  c'est  qu'un  député  ne  s'appartient 
pas;  il  appartient  à  la  république.  Il  faut  que  le  choix 
de  l'assemblée  se  porte  sur  qui  lui  semblera  le  plus 
propre  à  remplir  son  vœu ,  et  il  n'est  pas  de  danger 
qui  puisse  faire  refuser. 

Blad  :  Si  vous  envoyez  dans  les  colonies  quel- 

3u'un  qui  ait  une  faible  santé,  et  qu'il  succombe 
ans  la  traversée ,  votre  intention  ne  sera  pas  rem- 
plie. 

GouLY  :  Je  ne  sais  pourquoi  on  met  toujours  des 
entraves  aux  mesures  relatives  aux  colonies.  Je  de- 


mande que  Von  passe  de  suite  à  l'appel  nominal,  et 
ceux  qui  ne  croiront  pas  pouvoir  remplir  cette  mis- 
sion, au  fur  cl  à  mesure  qu'ils  seront  appelés,  pour- 
ront dire  :  «  Je  ne  puis  pas  y  aller  ;  ■  et  cela  snllira. 

Legendre  :  Quand  l'assemblée  a  ordonné  une 
liste  de  candidats,  j'ai  cru  que  cette  liste  compren- 
drait le  nom  de  ceux-là  seuls  qui  se  feraient  inscri- 
re^  et  je  ne  croyais  pas  qu'on  ferait  une  liste  sans 
consulter  personne.  Aucun  député  ne  craint  le  dan- 
ger (  on  applaudit  )  ;  je  demande  donc  qu'il  soit  fait 
une  nouvelle  liste  de  candidats,  sur  laquelle  ceux 
qui  désireront  partir  se  feront  inscrire;  cette  liste 
sera  soumise  demain  à  la  Convention.  L'app(>l  no- 
minal se  fera  ,  et  rien  n'empêchera  que  le  ciioix  de 
la  Convention  ne  porte  sur  les  membres  qui  ne  se- 
ront pas  inscrits. 

La  proposition  de  Legendre  csl  décrétée. 

-^  Les  membres  de  Plnstitut  national  de  Musique  sont 
admis  ù  la  barre. 

Vurateur  de  la  députation  :  Tous  lc>  arts  doivent  em- 
bellir les  fêtes  publiques,  mais  la  musique  seule  les  anime; 
sa  puissance  est  éguicmcnt  attestée  et  |)ar  l'emploi  quVu 
fircnl  leh  légiNlalcurs  anliques,  et  par  les  services  qu'elle 
a  rendus  pendant  la  rù^olution  française. 

La  suppression  des  écoles  de  -musique  al  tachées  aux 
principales  églises  a  laissé,  depuis  cinq  ans,  cet  art 
sans  enseignement  public.  Pressés  par  le  besoin,  déjà 
plusieurs  artistes  de  mérite  Pont  abandonné:  Us  féttsna- 
lioiiales  seront  désormais  privées  de  ses  charmes,  et  la 
chute  des  théâtres  est  inévitable,  si  votre  sagesse  ne  vient 
au  secours  de  cette  art  cousolateur,pour  lequel  rien  encore 
n'a  été  fait. 

Le  21  brumaire  an  2,  la  Convention  décréta  le  priocipc 
de  rétablissement  d'un  Institut  national  de  Musique  dans 
la  commune  de  Paris;  et,  par  le  même  décret,  son  co- 
mité d'instruction  publique  fut  chargé  de  lui  présenter  le 
mode  d'organisation  de  cet  établissement.  Depuis  seize 
mois  les  travaux  de  la  Convention  n'ont  pas  permis  qu'elle 
s'occupât  de  cet  objet. 

Les  artistes  ont  souffert  de  ce  retard,  mais  ils  n*ont  pas 
élé  moins  actifs  ni  moins  zélés  à  soutenir  de  tous  lears 
moyens  cet  art  abandonné  à  leurs  soins.  Les  élèves  qu'ils 
ont  formés  depuis  1789,  pour  les  armées  de  la  république, 
pour  l'Ecole  de  Mars  et  l'exécution  des  fêtes  publiques, 
sont  la  preuve  de  leur  amour  pour  la  liberté. 

Ce  li'est  point  leur  intérêt  particulier  qui  les  a  dirigés; 
ce  n'est  pas  lui  qui  les  porte  à  appeler  votre  attention  sur 
cette  fraction  nécessaire  de  l'instruction  publique;  ils  ne 
voient  que  l'intérêt  national  ;  ils  ne  désirent  que  la  con- 
servation et  la  propagation  de  leur  irl. 

Ils  demandent  :  1*  que  la  Convention  se  fasse  faire  le 
rapport  sur  l'organisation  de  Tlnstilut  national  de  Musique 
décrété  le  21  brumaire  an  2  ;  2"  qu'elle  renvoie  à  son  co- 
mité d'instruction  publique  l'examen  de  cette  question  : 
«  Convient-il  de  former  de  pareils  établissements  dans  les 
grandes  communes  de  la  république?  >  (On  applaudit.) 

Sur  la  proposition  de  Chénier,  cette  pétition  est  renvoyée 
au  comité  d'instruction  publique  pour  faire,  dans  la  dé- 
cade, un  rapport  définitif  sur  l'Institut  national  de  Musi- 
que. 

—  On  introduit  la  sectioi)  du  Bonnet-Rouge, 

Vorateurf  à  la  bnrre  :  Une  secte  qui  voulait  précipiter 
tout ,  parce  qu'elle  voulait  tout  perdre,  avait  fait  décerner 
les  honneurs  du  Panthéon  à  certains  personnages,  sans 
prendre  l'ordre  de  la  seule  autorité  supérieure  à  celle  de 
la  représentation  nationale,  c'est-à-dire  sans  atU'ndrc 
l'aveu  de  la  postérité.  Votre  décret  du  20  pluviôse  rappelle 
ce  honteux  enthousiasme  aux  formes  que  vous  aviez  d'a- 
bord établies. 

La  section  du  Bonnet-Rouge  a,  le  20  pluviôse,  brisé, 
pulvérisé  cette  image  sur  laquelle  les  terroristes  avaient 
les  regards  Gxés,  en  même  temps  quMIs  tenaient  la  hache 
levée  sur  !a  tête  des  citoyens. 

Elle  vous  félicite  encore  d'avoir  tout  récemment  décrété 
le  dernier  délai,  où  la  commission  des  Vingt-et-Un  doit  vous 
faire  son  rapport  contre  ces  cbefi  d'un  gouvernement  qui 


617 


tccabla  notre  pttrte  de  pins  de  maux,  en  quinte  mois,  t 
que  tous  les  lyrans  du  genre  Iiumnin  ne  lui  en  firent  souF» 
frir  en  quinie  siècles.  (On  applaudit  à  plusieurs  reprises.) 

—  La  section  de  la  Halle- au-Blé  est  admise  à  la 
barre. 

VorateuT  de  la  députation  :  Législateurs,  la  France  a 
été  couTerte  de  sang,  parce  que  les  principes  ont  été  fou- 
lés aux  pieds.  La  paix  et  la  tranquillité  reviendront  quand 
le  règne  des  principes  sera  assuré  sur  des  bases  inébranla- 
blés. 

Une  loi  conforme  aux  principes,  une  loi  qui  tuait  les  pas- 
sions, u*ouTrail  les  portes  du  Panlbéon  que  dix  ans  après 
la  mort  :  cette  loi  Tut  violée;  elle  le  fut  depuis  le  40  ther- 
midor; vous  venex  de  lui  rendre  sa  force  et  son  influence; 
Marat  n>st  plus (ou  du  moins  ne  doit  plus  être  au  Pan- 
théon); vous  avez  par  ce  décret  rendu  à  la  révolution  sa 
moralité.  (On  applaudit.^ 

Des  criailleries  se  sont  fait  entendre,  ne  les  écoulez  pas  ; 
les  hommes  qui  prêchaient  la  terreur  aux  Jacobins,  qui  la 
prêchaient  depuis  le  10  thermidor,  ont  dû  murmurer,  mais 
toute  la  France  vous  applaudit;  toute  la  France  vous  dit 
qu*il  Taut  mettre  enfin  ces  hommes  farouches  dans  Timpos- 
sibilité  de  nuire;  que  tous  ces  hommes,  que  les  membres 
des  comités  révolutionnaires  qui  ont  Tait  tant  de  mal,  que 
les  officiers  de  la  garde  nationale,  que  les  employés  dans 
les  diverses  administrations  de  la  réjpubliquc,  qui  ont  se- 
condé toutes  les  mesures  des  comités,  ne  puissent ,  jusqu'à 
la  paix,  reparaître  dans  aucun  emploi.  Atroces  ou  imbé- 
ciles, qu'ils  soient  punis  ou  condamnés  à  Tinaction.  Ils 
remplissent  encore  les  administrations  ;  ils  ont  acheté  leurs 
emplois  avec  du  sang,  destituez-les;  mettez  à  leurs  places 
àes  malheureux  qu'ils  ont  rendus  orphelins.  (Nouveaux  ap- 
plaudissements.) 

Plusieurs  de  ces  misérables,  lancés  dans  les  grandes  ad- 
minisirations,  ont  fait  des  fortunes  insolentes;  ils  prê- 
chaient, ils  prêchent  encore  le  sansculotlisme  sous  des 
lambris  dorés,  et  la  sobriété  de  Caton  en  quittant  la  table 
de  LucuUus.  (Les  applaudissements  recommencent.)  Faites 
rendre  gorge  à  ces  sangsues  qui  tuaient  pour  donner  des 
terres  à  la  république,  et  qui  volaient  la  république  pour 
acheter  les  terres.  (On  applaudit  à  plusieurs  reprises.^ 

Ces  prêtres  de  la  terreur  voudraient  aujourd'hui  inspi- 
rer de  la  pitié  ;  ils  voudraient  faire  croire  qu'ils  sont  ces 
vieux  patriotes  qui  ont  combattu  toutes  les  tyrannies  :  pa- 
triotes d'industrie,  révolutionnaires  du  2  septembre  (vifs 
applaudissements),  ils  ont  dbassé,  ils  ont  assassiné  par  der- 
rière ces  vétérans  révolutionnaires;  ils  ont  leur  costume, 
il  est  vrai,  mais  c'est  parce  qu'ils  ont  dépouillé  les  morts. 
Les  francs  patriotes  voulaient  détruire  la  tyrannie,  lessy- 
cophantes  que  nous  poursuivons  veulent  tout  détruire  ; 
paralysez-les  en  établissant  un  gouvernement. 

Assez  longtemps  cette  assemblée  a  reçu  du  dehors  les 
impulsions  qui  l'ont  fait  agir  :  libre  maintenant,  abandon- 
née à  la  grandeur  de  ses  destinées,  qu'elle  trouve  dans  son 
énergie,  et  qu'elle  communique  à  un  gouvernement  forte- 
ment organisé  le  mouvement  qui  sauvera  la  patrie.  (On 
applaudit.) 

Donnez  cette  impulsion,  législateurs,  mais  donnez-là 
seuls  (on  applaudit);  vous  n'avez  pas  fermé  les  Jacobins 
pour  ouvrir  mille  jacobinières.  (Nouveaux  applaudisse- 
ments.) Imposez  silence  ti  ces  Jacobins  du  10  thermidor^ 
qui  révolutionnent  6  leur  manière,  et  qui,  dans  les  spec- 
tacles et  les  lieux  publics,  parlent  au  nom  de  la  jeunesse 
française,  comme  ils  parlaient  au  nom  du  peuple  français. 
Pour  centraliser  le  gouvernement,  centralisez  vos  déli- 
bérutions  ;  que  tous  les  partis  disparaissent  devant  l'amour 
de  la  patrie  ;  qu'à  son  feu  brûlant  tous  les  Intérêts  particu- 
liers 5e  fondent  et  présentent  la  masse  indivisible,  impo- 
sante de  l'intérêt  général,  qui  écrasera  tous  nos  ennemis. 
Faites  disparaître  tous  ces  monuments  qui  rappellent  vos 
anciennes  divisions;  que  celte  Montagne,  élevée  en  face 
des  Invalides,  qui  a  enfanté  tant  de  Montagnes;  que  ces 
joncs  qui  dé>honorent  sa  base,  que  les  reptiles  qu'on  y  voit, 
et  qui  rappeileiild'odieusesdénominations;  quccette figure 
que  Icgèantécrase,  ligure  allégorique  et  chimériquecomme 
le  fantôme  dont  elle  est  Temblème,  disparaissent,  et  ne  rap- 
pellent plus  de  douloureux  souvenirs.  (Les  applaudisse^ 
menu  redoublent  et  se  prolongent.) 


Que  tons  les  bons  citoyens  se  réunissent  dans  nos  sec- 
tions ;  qu'on  voie  enfin  dans  l'intérieur  cet  ensemble  qui 
rend  nos  armes  triomphantes,  et  nous  aurons  le  bonheur. 

Vive  la  république  démocratique,  une  et  indivisible! 
vive  la  Convention  1 

PÉNiÈBES  :  Enfin  l'opinion  publique  faitjustice  des 
infâmes  qui  ont  voulu  renverser  la  statue  de  la  Li> 
berté  pour  élever  à  la  place  le  trône  de  Robespierre! 
Des  remords  éternels,  s'ils  sont  encore  susceptibles 
dVn  éprouver,  vont  leur  montrer  sans  cesse  l'in- 
strument de  la  mort  présenta  leurs  yeux.  Le  monu-  ' 
ment  dont  on  vous  a  parlé  n*a  été  élevé  que  pour 
avilir  la  Convention  nationale.  Il  porte  un  géant,  ce 
géant  est  Robespierre.  On  l'a  armé  d'une  massue  ; 
on  s'est  trompé,  c'est  une  guillotine  qu'il  fallait  lui 
taire  tenir.  (On  applaudit.)  11  faut  que  ce  monument 
soit  détruit;  je  convertis  en  motion  la  demande 
contenue  dans  1* Adresse. 

Gaston  :  Le  plus  grand  malheur  qui  puisse  aflliger 
la  république,  c'est  d'aigrir  tous  les  cœurs  et  tous 
les  esprits.  Voulez-vous  les  réunir  tous;  ne  détrui- 
sez pas  un  monument  qu'une  grande  portion  du  peu- 
f)le,  j'ose  dire  même  la  majorité,  a  élevé.  (De  vio- 
ents  murmures  éclatent  de  toutes  parts.  —  Un  cri 
général  se  fait  entendre  :  Cesl  faux!)  Par  respect 
pour  le  peuple  français,  ne  donnez  pas  aux  aristo- 
crates le  spectacle  de  sa  destruction.  (  Nouveaux 
murmures.)  C'est  pour  prévenir  des  suites  fâcheu- 
ses... (On  rit.)  Vous  insulterez  vos  commettants, 
vous  insulterez  le  peuple  toutes  les  fois  que  vous 

détruirez  les  images  qui  le  représentent 

Plusieurs  voix  :  Ce  n'est  pas  l'image  du  peuple» 
c'est  celle  du  tyran  qui  a  mutilé  la  Convention. 

Gaston:  A  la  bonne  heure  que  le  fédéralisme 
n'existe  plus;  mais  malheureusement  il  a  existé. 
(Cest  fauxl  s'écrient  un  grand  nombre  de  mem- 
bres.) 

iMAmiEU  :  Lorsque,  dans  les  guerres  civiles  qui 
ont  déchiré  la  réptiblique  romaine,  un  parti,  même 
celui  qui  servait  la  patrie,  remportait  une  victoire 
sur  le  parti  contraire,  c'était  un  principe,  dans  cette 
république  sage,  de  ne  point  décerner  les  honneurs 
du  triomphe  au  vainqueur.  Si  la  Convention  eût 
toujours  été  mieux  dirigée,  si  elle  n'eût  pas  été  do- 
minée seulement  par  une  portion  de  ses  membres, 
si  la  concorde  eût  régné  parmi  eux ,  je  doute  qu'elle 
eût  ordonné  l'érection  de  ce  monument,  qui  devait 
être  une  source  éternelle  de  discorde. 

On  a  dit  qu'il  ne  fallait  pas  le  détruire,  parce  (ju'il 
était  le  symoole  du  peuple,  oui,  j'y  reconnaîtrais  le 
symbole  du  peuple,  si  je  n'y  voyais  un  objet  de  dis- 
corde, si  je  n'y  voyais  une  Montagne.  Qu'est-ce 
qu'une  montacne,  si  ce  n'est  une  protestation  éter- 
nelle contre  légalité?  Des  applaudissements  par- 
tent de  tous  les  côtés  et  se  renouvellent  plusieurs 
fois.)  Dans  une  révolution,  tous  les  citoyens  ne  s'em- 
barquent pas  sur  le  même  vaisseau;  mais  ceux  qui 
prennent  une  route  séparée  de  la  majorité  doivent 
s'attendre  à  être  abandonnés.  Quel  bonheur  pou- 
vons-nous espérer,  lorsque  des  représentants  du 
Ïieuple  donnent  eux-mêmes  l'exemple  des  divisions? 
Vifs  applaudissements.^ 

Je  porte  le  plus  grana  attachement  à  la  représen- 
tation nationale  ;  mais  je  ne  peux  me  défendre  d'un 
mouvement  de  haine  involontaire  contre  ceux  de 
ses  membres  qui  voudraient  se  ménager  une  destinée 
différente  de  celle  de  la  majorité.  (On  applaudit  à 
plusieurs  reprises.)  Qu'ils  viennent  se  confondre 
dans  les  rangs  avec  nous,  qu'il  n'y  ait  plus  qu'une 
Convention  nationale,  et  non  pas  deux  Conventions 
nationales  sous  des  noms  de  factions.  (Nouveaux 
applaudissements.)  Serrons-nous  autour  de  l'autel 
de  la  pairie;  c'est  le  seul  moyen  de  sauver  la  repu- 


518 


blique;  car  les  dissensiont  qui  éclatent  ici  se  répè- 
teut  dans  toute  la  France,  partout  on  se  sépare,  par- 
tout on  se  groupe,  comme  on  le  fait  dans  le  sein  de 
la  Conveniion  nationale.  (L^es  applaudissements  re- 
commencent.) 

Citoyens,  qu'il  me  soit  permis  de  dii'e  un  mot  qui 
fut  pour  moi  un  trait  de  lumière  sur  la  révolution. 
Je  sortais  un  jour  de  cette  enceinte,  affligé  de  la 
scène  désolante  que  la  discorde  venait  d'y  comman* 
der  encore  une  fuis:  je  rencontrai  un  étranger  que 
j*al  toujours  regarde  comme  un  homme  sase  ;  yé- 
panchai  dans  son  cœur  les  chagrins  dont  le  mien 
était  navré.  Il  me  répondit:  •  Ne  cherchez  point  à 
remédier  à  la  désunion,  ne  mettez  pas  le  doigt  enlre 
Tarbie  et  Técorce.  •  Si,  à  cette  époque,  j'avais  con- 
seillé, j*a  vais  demandé  des  rapprocbeoeuts,  je  u*au- 
rais  pas  été  écouté;  je  me  suis  tu* 

Mais  aujourd'hui  que  nous  sommes  éclairés  par 
rexpcrieiice,  uuissuiis-nous  pour  rendre  à  la  France 
tout  son  lustre,  pour  la  mener  au  bonheur,  pour  la 
combler  de  félicité.  (Vils  applaudissements.)  Qu'il 
u*y  ait  plus  deux  intérêts  dans  l'assemblée;  (^ue  cha- 
cun de  nous  voie  un  collègue  dans  un  représentant 
du  peuple. 

Je  demande  la  destruction  du  monument  dont  il 
a  été  parlé;  et  pour  que  mes  réflexions  produisent 
quelque  utilité ,  pour  qu*il  soit  possible  de  ramener 
la  concorde  et  l'union  dans  le  sein  de  cette  assem- 
blée, je  demande  que  Ton  renvoie  au  comité  des 
inspecteurs  ta  proposition,  déjà  laite  par  notre  col- 
lègue Lanthenas, de  changer  les  dispositions  de  cette 
salle,  qui  peuvent  entretenir  la  division.  (On  ap- 
plaudit.) 

Ricuoux  (de  l'Eure)  :  Je  demande  que  l'on  pro- 
scrive également  tous  les  monuments  semblables  à 
celui  des  Invalides,  qui  ont  été  élevés  dans  toute  la 
république. 

Les  propositions  de  Mithien  et  de  Richoos  sont  adop« 
tées  au  milieu  des  acclamaliobs  univertellet» 
.  Careiot,  au  nom  du  comité  de  salut  public  :  Ci* 
tovens,  je  viens  remplir,  au  nom  de  votre  comité  do 
salut  public,  l'obligation  que  vous  lui  avez  imposée 
de  vous  faire  un  rapport  sur  notre  situation  dans  les 
Provinces- Unies. 

11  a  paru  à  des  membres  de  cette  assemblée ,  que 
le  comité  de  salut  public  et  les  représentants  du 
peuple  près  les  armées  qui  sont  en  Hollande  n'a- 
vaient pas  tiré  d'une  aussi  brillante  expédition  tout 
l'avantage  qu'elle  semblait  promettre ,  que  notre 
état  politique  y  était  mat  assuré,  etqu'entin  les  me^- 
sures  prises  dans  ce  pays  étaient  telles,  que  les  vain- 
queurs semblaient  en  quelque  sorte  y  recevoir  la 
loi  des  vaincus. 

11  faut  réduire  ces  craintes  i  leur  juste  valeur; 
c'est  par  la  lecture  des  pièces  que  vous  nous  jugerez 
les  uns  et  les  autres  ;  nous  ne  nous  dissimulons  pas 
qu'il  existe  peut-être  quelques  inconvénients  a  pu- 
l)lier  plusieurs  des  détails  que  ces  pièces  renferment; 
mais  notre  devoir  est  de  ne  pas  laisser  propager  des 
soupçons  qu'on  se  plaît  à  accréditer,  et  un  devoir 
encore  plus  sacré  pour  nous  est  d'obéir  à  vos  ordres. 

Je  dirai  quelle  est  la  série  des  événements  qui 
nous  ont  amenés  à  l'état  des  choses  où  nous  nous 
trouvons  en  Hollande  ;  j'examinerai  si  cet  état  de 
choses  est  aussi  peu  avantageux  qu'on  a  pu  le  pen- 
ser, etj'exposerai  l'aperçu  des  moyens  qui  ont  paru 
à  votre  comité  les  plus  propres  à  nous  replacer  dans 
la  véritable  position  où  nous  devons  nous  trouvera 
regard  des  Provinces* Unies. 

La  Hollande  et  l'Angleterre  sont  néesrivales  Tune 
de  l'autre;  la  politique  vraie  et  naturelle  de  la  Hol- 
lande eût  été  de  s'attacher  dès  le  principe  à  la 
Praoceipour  trouver  en  elle  un  appui;  la  reconnais» 


sance  lui  en  faisait  un  devoir,  puisque  celle-ci  l'a* 
vait  puissamment  aidée  à  établir  son  indépendance 
et  à  défendre  tts  possessions.  Cependant  on  a  vu  de 
tout  temps  le  contraire.  La  Hollande  s'est  jetée  en- 
tre les  bras  des  Anglais,  ceux-ci  l'ont  amenée  insen- 
siblement à  se  reposer  pour  eux  seuls  de  sa  propre 
défense.  Pour  pnx  de  cette  contlance,  l'Angleterre  a 
fait  de  la  Hollande  une  de  ses  provinces;  et  telle  a 
été  la  politique  de  ces  insulaires,  telles  ont  été  les 
mesures  préparées  par  eux,  que,  soit  que  la  Hollande 
dût  quelque  jour  être  cnvubie  par  les  Français,  soit 
qu'elle  dût  leur  échapper,  l'Angleterre  seule  devait 
proOterdes  chances;  uans  ce  dernier  cas,  en  conso- 
lidant sa  dQmination  dans  le  continent  desProvin- 
ces-Unies  par  wè  forces  auxiliaires  envoyées  sous  le 
prétexte  de  les  défendre,  dans  le  premier,  par  la  dé- 
vastation de  ces  mêmes  provinces,  au  moment  où  ses 
troupes  se  trouveraient  forcées  d'évacuer  CCS  provin- 
ces, et  par  la  saisie  de  leurs  possessions  coloniales. 

L'Angleterre  tient  encore  le  même  plan  à  l'égard 
du  Portugal  :  elle  le  suivra  partout  où  elle  pourra 
appliquer  sa  politique  captieuse  et  machiavélique. 

Cependant  il  resta  toujours  en  Hollande  une  masse 
de  patriotes  qui  ne  cessèrent  de  gémir  sur  1  op- 

f>ression  de  leur  pays,  et  ne  perdirent  jamais 
'espoir  de  le  rendre  à  la  liberté.  £n  1787  ils  tirent 
un  généreux  effort  pour  secouer  le  joug  stathou- 
dérien;  ils  comptaient  sur  la  protection  de  la  France, 
dont  le  gouvernement  d'alors,  lâche  et  fourbe,  avait 
promis  des  secours  qu'il  ne  donna  point.  Les  troupes 
prussiennes  marchèrent  en  Hollande,  secondées  par 
les  états  généraux  qui  leur  ûrent  ouvrir  les  portes 
de  toutesles  forteresses;  ces  troupes  arrivèrent  sans 
aucun  obstacle  à  Amsterdam;  lestathouder  fut  ré- 
tabli, les  patriotes  furent  plus  que  jamais  opprimés; 
ils  furent  désarmés,  exclus  de  tous  les  emplois, 
poursuivis,  et  beaucoup  d'entre  eux  se  réfugièrent 
en  France  pour  éviter  la  persécution;  ils  y  continue* 
rent  à  nourrir  l'espoir  de  rentrer  un  jour  en  hom- 
mes libres  dans  leurs  foyers* 

Cet  espoir  prit  plus  de  consistance  à  Tépoqnede 
notre  révolution  et  surtout  à  la  déclaration  de  guerre 
entre  la  France  et  le  gouvernement  stathoudérien; 
il  dût  s'évanouir  presque  totalement  à  la  retraite  de 
Dumouriez;  il  fallait,  pour  le  réaliser,  toute  l'énergie 
des  républicains  élecirisés  par  le  génie  de  la  gloire, 
conduit  par  des  généraux  udèles,  habiles  et  secon- 
dés en  quelque  sorte  par  les  éléments  eux-mêmes* 

Lorsqu'enlin  nos  progrès  en  Hollande  commen- 
cèrent à  devenir  inquiétants  pour  les  stathoudé* 
riens,  et  surtout  nuaiid  noa  troupes  arrivèrent  sur 
les  bords  du  Wanal ,  le  parti  contraire  travailla  à 
s'organiser;  quelques  hommes  courageux  préjentè- 
renl  une  Adresse  énergique  au  magistrat  a'Amster- 
Ham;  mais  celui-ci,  comprimé  par  les  Anglais  et 
rassuré  par  les  obstacles  qui  nous  séparaient  encore 
de  cette  capitale,  obstacles  contre  lesquels  était  déjà 
venue  se  briser  la  fierté  de  Louis  XIV,  usa  de  la  plus 
injuste  violence  envers  les  pétitionnaires,  les  fit  in- 
carcérer, et  l'on  continua  a  se  prononcer  presque 
partout  de  la  manière  la  plus  outrageante  envers  la 
nation  française. 

En  méme'temps  on  maniait  les  ressorts  d'une  po- 
litique perfide,  on  affectait  de  paralyser  le  courage 
de  nos  aéfenseurs,  on  s'efforçait  de  répandre  le  bruit 
que  la  paix  allait  se  conclure,  qu'il  existait  déjà  une 
suspension  d'armes;  mais  l'ellet  fut  contraire  a  l'at- 
tente de  la  malveillance;  on  redoubla  de  vigilance 
dans  nos  armées  on  surprit  les  ennemis ,  et  en  un 
même  jour  on  leur  enleva  l'Ile  de  Bommel,  Ueiis- 
den.  Grave,  et  ils  furent  complètement  défaiu  soua 
les  murs  de  Bréda. 

Ce  fut  alors  que  les  statiioiidériefls  eommençèrenl 


(19 


è  trembler,  Ut  d^péchireoides  uégocialeurs  à  Paris, 
pour  détourner  le  coup  qui  les  menaçait;  mais,  loiD 
de  ralentir  ooa  mouvements,  nous  envoyâmes  sur- 
le-champ  un  courrier  à  nos  collègues,  près  les  ar'- 
mées  du  riord  et  de  Sambre-et-Meusc,  pour  les  in- 
viter à  pousser  les  opérations  avec  plus  de  vigueur 
âue  Jamais.  Peu  de  jours  après,  noua  leur  ëerivlmea 
B  noQvaau  en  ces  termes  : 

(Ici  le  rapporteur  fait  lecture  d'une  lettre  pres- 
sante du  eomité  de  salut  publie  aux  représentants 
du  peuple  près  Tarmée  du  Nord,  pour  lui  faire  pas- 
ser le  Wahal  et  le  Leck.} 

Ces  ordres  lurent  exécutes  rapidement  et  avec  le 
succès  qui  est  le  prix  ordinaire  de  raetivitë  et  du 
courage;  Tarmée  passa  sur  les  glaces  du  Wahal  et 
S'empara  d'Utrecht. 

Les  inondations  étaient  aolidea  ;  l'Anglais  avait 
fui  par  rOver-Yssel;  aucun  obstacle  ne  pouvait  plus 
arrêter  la  marche  de  nos  armées  triomphantes;  rin- 
surrection  éclatait  de  toutes  parts;  Amsterdam  ou- 
vrit ses  portes,  et  nos  collègues  y  entrèrent  le  2  plu  • 
viose,  à  la  tête  des  colonnes  françaises. 

•  Les  avantages  de  cette  brillante  conquête,  nous 
dirent-ils,  en  nous  annonçant  cette  expéaition,  sont 
immenses  pour  la  répnbliaue;  elle  lui  donne  des 
trésors,  des  magasins,  des  chantiers,  des  vaisseaux, 
et  surtout  dans  les  affaires  politiques  et  commercia- 
les de  TEurope  une  prépondérance  dont  il  est  im- 
possible de  calculer  les  effets  et  les  suites;  mais  elle 
deviendrait  un  don  funeste  de  la  victoire,  si,  éblouie 
par  tant  de  gloire,  la  république  française  prétendait 
disposer  en  mattre  des  dei^tinées  de  ce  peuple,  ou 
bien  si ,  cédant  aux  propositions  captieuses  que  des 
négociateurs  adroits  ne  manqueront  pas  de  lui  faire 
pour  conserver  une  lorme  de  gouvernement  que  le 
despotisme  créa  il  y  a  quelques  années,  elle  trans- 
igeait avec  les  sta(houdérietis,ses  ennemis  naturels, 
ainfli  que  de  la  liberté  des  B;itaves.  • 

Ces  principes  étaient  conlormes  à  ceux  que  nous 
leur  avions  manitestés  nous-mêmes,  et  que  vous 
aviez  consacrés  par  votre  décret  du  f  février  1793, 
portant  déclaration  de  guerre  contre  le  stathouder 
nominativement. 

.Nous  dûmes  distinguer  la  masse  du  peuple  batave, 
qtii  ne  peut  vouloir  que  la  liberté,  du  parti  stathoudé- 
rien ,  qui  ne  peut  vouloir  que  le  despotisme.  Nous  dû- 
mes regarder  le  peuple  comme  notre  allié,  et  le  gou- 
vernement comme  notre  ennemi;  mais  c'est  celui-ci 
qui  possédait  tout,  qui  avait  tout  sous  la  main,  pla- 
ces fortes,  arsenaux,  marine,  établissements  publies. 
Toutes  ees  choses  sont  donc  de  droit  an  vainqueur 
ou  doivent  lui  revenir;  les  seules  propriétés  parti- 
culières ont  dû  demeurer  sacrées  pour  nous,  et  le 
sont  en  effet. 

Nos  collègues,  entratnés  par  le  sentiment  d'une 

Séiiéro'^ité  expansive,  non-seulement  annoncèrent 
ans  leur  proclamation  ce  respect  religieux  pour  les 
propriétés  mdivlduelles,  déclarèrent  qu'ils  entraient 
comme  amis  et  alliés  du  peuple  batave  et  comme 
venant  combattre  avec  eux  le  parti  stathoudérien  ; 
mais  ils  ajoutèrent  k  cette  proclamation  une  phrase 
nu*on  a  pu  mal  interpréter  :  «Le  peuple  batave,  est* 
il  dit,  usant  de  sa  souveraineté*  pourra  seul  ehsu'- 
ger  ou  nKKliiier  la  forme  de  son  gouvernement.  • 

Certes  il  est  bien  dans  nos  principes  de  ne  >oint 
nous  immiscer  dans  le  gouvernement  des  autres  ns- 
tions;  mais  dans  le  peuple  batave  les  Anglais  sont- 
ils  compris?  sommes-nous  entrés  en  Hollande,  a 
travers  des  périls  sans  nombre  pour  consolider  un 
gouvernement  qui  combattait  pour  renverser  le  nô- 
tre? sommes-nous  venus  appoanlir  le  joug  du  vrai 
peuple  batavci  ouïe  délivrai  de  la  lyiai«nie  statbou- 
déneuiie? 


Ces  qucfilicas  sans  doute  expliquent  sufBsaroment 
la  pensée  de  nos  collègues;  ce  n'est  ni  aux  ennemis 
déclarés  de  la  république  française  qu'ils  ont  donné 
le  nom  respectacle  de  peuple  natave,  ni  a  quelques 
intrigants  qui ,  se  disant  patriotes  par  excellence* 
pourraient  ne  vouloir  l'expulsion  de  leurs  ennemis 
particuliers  que  pour  dominer  à  leur  pièce. 

Rien  ne  nous  lie  donc  à  eet  égard  que  le  droit  de 
la  nature, celui  qu'a  tout  individu,  tout  peupla,  de 
rester  libre  lorsqu'il  n'attaque  point  la  liberté  des 
autres,  et  tel  doit  être  celui  de  la  nation  batave,  af- 
franchie de  itê  oppresseurs. 

Aussi  cet  espnt  de  justice,  qui  constitue  la  véri* 
table  dignité  iTune  erande  nation,  valut-il  en  un 
moment  i  nos  coliques  des  conquêtes  que  deux 
années  de  guerre  et  le  aaerifice  de  plusieurs  milliers 
de  défenseurs  eussent  à  peine  pu  équivaloir.  Berg* 
op-Zoom,  qui  en  1747  nouscoûli  dix  mille  hommes; 
Gertruydemberg,  qui  arrêta  Louis  XIV  au  milieu  da 
iei$  victoires,  Williainstad»  qui  fut  le  terme  de  nos 
propres  succès  en  179S,  Goreum ,  qui  est  la  clef  des 
grandes  inondations;  Fleaaingue.  l'une  des  trois 
placesque  Charles  V  conseilla  à  Philippe  11  de  con*» 
server  avec  soin,  Midlebourg,quia  aoutenu  unsi^e 
d'un  an  ;  lèis  trois  provinces  d  outre-Rhin,  la  Prise, 
rOver- Yssel  et  Groningue  ;  les  deux  Oottes  enfin 
du  Texel  et  de  la  Zélande  sa  sont  rendues  ssns 
aucune  résistanoe.  Bhl  qui  sait,  su  eontraire,  k 
parti  qu'elles  auraient  pris,  si,  au  lieu  de  la  frater- 
nité, on  se  fût  fsit  précéder  par  Te flVni?  qui  nous  dit 
que  les  vaiaaeaux  n'eussent  pas  cinglé,  au  moina  en 
partie,  vers  les  ports  d'Angleterre?  Qni  nous  dit 
que  tant  de  forteresses  du  premier  ordre,  qui  nous 
ont  ouvert  leurs  portes,  n'eussent  pas  fait  uneré* 
sistance obstinée?  Ne  noua  pressons  paa  de  condam* 
ner  des  mesures  dont  rexperienee  démontrera  peut^ 
être  bientôt  la  sagesse. 

La  capitulation  de  lu  Zélande  ne  paraît  pas ,  à  la 
vérité,  porter  l'empreinte  du  caractère  national  :  nmia 

par- 
!  nos 
depuis; 
maisli  faut  de  plus  apprécier  les  difficultés,  les 
longueurs  et  les  pertes  au'aurait  entraînées  l'attaqua 
par  la  force  de  ce  pays  apra  et  malaain;  il  faut  aussi 
considérer  son  importance  et  le  besoin  que  nous 
avions  de  l'occuper  promptement  ;  ce  pays  factice 
est  composéd*ilesqui  forment  l'embouchure  des  trois 
fleuves  et  oui  le  rendent  maître  de  leur  navigation; 
il  eat  défendu  par  beaucoup  de  places  fortes,  et  peut 
être  liicilement  secouru.  Il  (allait  des  moyens  msri- 
times  et  de  lon^s  préparstifs  pour  l'attaquer  de  vivo 
force  avec  certitude  de  succès,  et  si  l'ennemi  se  fût 
obstiné  à  se  détendre  dans  ces  Iles  qui  furent  le  ber- 
ceau de  la  liberté  des  Datavea,  le  lieu  où  ils  se  réfu- 
gièrent lorsqu'ils  conçurent  le  projetde  se  soustraira 
a  la  tyrannie  espagnoles  si,  dis-je,  l'ennemi  crai« 
gnant  une  oppression  nouvelle,  se  fût  déterminé  à 
s'y  détendre  a  toute  extrémité,  cette  expédition  ne 
se  fût  certainement  pas  faite  dans  le  cours  de  cette 
campagne  et  sans  une  grande  elf  usion  de  sans. 

Au  surplus,  citoyens,  nous  attendons  à  cet  égard 
des  renseignements  ultérieurs,  et  c'est  lors  du  traité 

§énéral,  ou  du  parti  définitif  qui  sera  pris  i  l'égard 
es  sept  Provinces- Unies,  qu'on  rétablira,  relative- 
ment à  cliaeuna  d'elles,  les  vrais  rspports  qu'elle 
devra  conserver  avec  nous,  et  les  résultats  seront 
toujours  ce  qu'ils  doivent  être. 

C  en  est  assez  pour  vous  mettre  I  portée  d*sppré« 
cier  ta  conduite  de  nos  collègues  en  Hollande;  ils 
ontliesoin  d'une  grande  confiance,  et  nous  ne  pou- 
vons oublier  que  c'est  à  leur  courage,  a  leurs  travaux 
infatigables,  que  l'armée  doit  cette  énergie,  ^'^ 


vente,  porter  i  empreinte  au  caractère  national  :  n 
d'abord  cette  capitulation,  lorsqu'elle  nous  est  ( 
venue,  n'était  pas  revêtue  de  I  approbation  de 
collèguca,  et  nou/i  ignorona  si  elle  l'a  eue  dep 


520 


discipline  qui  fixe  la  victoire  et  énnrgne  le  sang. 

'Quant  aux  mesures  du  comité  de  salut  public, 
elles  peuvent  être  jugées  par  sa  correspondance,  il 
me  suffira  de  vous  lire  quelques-unes  de  ses  lettres 
à  nos  collègues,  pour  vous  faire  connaître  l'esprit  qui 
Ta  toujours  dirigé. 

(Ici  le  rapporteur  fait  lecture  de  plusieurs  lettres 
qui  prouvent  la  sollicitude  du  comité  sur  la  Hollande, 
amsi  que  Taotivité  et  la  fermeté  de  ses  mesures.) 

Outre  ces  lettres  et  plusieurs  autres  dictées  dans 
le  même  esprit,  nous  avons  donné  des  instructions 
verbales  à  nos  collègues  Cochon  et  Ramel  ;  et  lors- 
que Richard  est  sorti  du  comité,  nous  l'avons  en- 
voyé, en  vertu  de  l'autorisation  que  nous  avions 
reçue  de  vous,  comme  ayant  participé  à  toutes  nos 
délibérations,  et  connaissant  parfaitement  toutes 
les  vues  du  comité,  oinsi  que  l'armée  dont  il  a  eu 
si  longtemps  la  snrveillance  qu'il  a  exercée  avec 
succès. 

Au  reste ,  citoyens ,  notre  situation  en  Hollande 
n'est  pas  telle  que  la  malveillance  voudrait  le  per- 
saader;  et  il  ne  serait  pas  facile  de  prouver  qu'on 
ctlt  pu  tirer  un  beaucoup  meilleur  parti  des  circon- 
stances. On  ne  voitpasque  des  moyens  violents,  qne 
beaucoup  de  sang  répandu  nous  eussent  plus  promp- 
tement  fait  prendre  pied  dans  touties  les  forteresses 
des  sept  provinces.  On  ne  voil  pas  non  plus  que  les 
•nbsistancos du  pays  nous  aient  échappé,  qu*aucun 
vaisseau  ait  fui  à  notre  arrivée,'qQeh?s  Anglais  aient 
conservé  aucune  influence.  Notis  vayons  au  con- 
traire que  la  révolution  s'opère  sans  ;<ecousse,  que 
les  autorités  se  régénèrent,  qne  les  agents  ^tathou- 
dériens  sont  ou  arrêtés  ou  ^disparns,  que  1^  mesures 
sévères  sont  prises  par  nos  collègues  pour  l'emploi 
des  assignats,  que  le  noyau  de  la  coalition  est  brisé, 
que  la  France  est  débloquée^  qoie  rïot/^  avons  ac- 
quis la  navigation  de  trois  graifds  fleuve,  qu'une 
vaste  province  est  enlevée  au  patrimoine  des  An- 
glais,  que  leurs  principales  communications  avec  le 
continent  sont  coupées,  qu'une  marine  importante 
est  à  notre  disposition,  que  des  ports  qui  servaient 
d'asile  à  leurs corsnires  sont  ceux  où  se  prénarcront 
désormais  les  armements  qui  serviront  à  les  atta- 
quer eux-mêmes  dans  leurs  propres  foyers  et  à  rui- 
ner leur  commerce  dans  le  Nord. 

Mais  pour  cela,  citoyens,  il  faut  savoir  ne  pas  abu- 
ser, il  faut  que  les  Bataves  et  nous  gagnions  égale^ 
ment  à  leur  révolution,  et  que  nos  avantages  ne 
soient  point  éphémères.  Les  mesures  provisoires  que 
votre  comité  a  cru  devoir  prendre  sont:  l®.  (Ici  la 
lecture  est  interrompue  sur  l'observation  faite  qu'il 
pourrait  être  dangereux  de  publier  les  mesures  du 
gouvernement.) 

Carnot  propose  à  la  Convention  de  confirmer  Te  choU 
fail  par  le  comité  de  salut  public  da  rrprcscnlant  du  peu- 
ple Richard,  pour  se  rendre  en  Hollande.  Il  annonce  que 
ce  représenlaot  est  déjà  au  lieu  de  sa  mission. 

L*assemblée  confirme  ce  choix* 

—  Sur  le  rapiiort  du  m(^me  membre,  la  Conrenlinn  dé- 
crète que  les  représentants  Paganel  etTopsenI,  Noël  Pointe 
et  Pauls,  se  rendront  dans  divers  déparlemenls,  ri  que  le 
citoyen  Dupiu,  adjoint  à  la  commission  dos  travaux  pu- 
blics, rentrera  dans  le  corps  du  génie,  au  m^uie  grade  qu'il 
avait  précôdcmmcul. 

—  Les  sections  du  Temple,  de  THomme-Armé,  du  fau- 
bourg Montmartre,  du  Finistère,  défilent  surcessircment 
dans  la  salle,  et  présentent  à  la  barre  des  Adi esses  où  res- 
pirent l'énergie  républicaine,  le  respect  aux  lois,  le  dé- 
vouement à  la  Convention ,  la  haine  de  la  lyranuie  cl  du 
crime,  et  Pamour  de  la  justice  ut  de  rhumanité. 

Ces  Adirtses  sont  accueillies  avec  le  plus  vif  enthou- 
siasme ;  leur  issertion  au  Bulletin  est  décrétée* 


—  Sur  le  rapport  de  Debourges,  le  décret  soitant  est 
rendu  : 

.  c  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  comité  des  secours  publics  sur  1  Vrélé  du  re- 
présentant du  peuple  Jean-Bon  Saint-André,  du  duodi 
des  sansculoitidcs,  et  sur  celui  du  représentant  du  peuple 
Nion ,  du  13  pluviôse  dernier,  qui  ont  ordonné  de  Taire 
payer  aux  Tamillcs  des  ouvriers  et  matelots,  employés  dans 
•  les  ports  de  la  république,  les  mêmes  secours  et  indcreni- 
tés  qu'aux  Tamilles  des  marins  et  ouvriers  navigant  en  ac- 
tivité de  service  sur  les  vaisseaux  ou  bàUments  de  PÉtit , 
décrète  ce  qui  suit  : 

c  Art.  I*'.  Il  ne  sera  p|oint  donné  de  suite  à  Pexécution 
des  deux  arrêtés  du  duodi  des  sansculoltides  et  du  13  plu- 
viôse dernier. 

«  IL  L'insertion  du  présent  décret  au  Bulletin  de  cor- 
respondance lui  tiendra  lieu  de  pubUcalioo.  t 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


N,  B,  Dans  la  séance  dti  4»  la  Convention  a  appris, 
par  une  lettre  de  Jean  Debry,  représentant  du  peuple  dans 
le  département  de  Vaucluse,  que  des  terroristes  armés  et 
déguisés  avaient  tenté  de  Passassiner,  et  avaient  tué  an 
étranger,  inspecta ble  par  ses  mœurs  et  sa  probité,  fait 
iriller  les  pieds  de  sa  mère,  et  f^npé  à  grands  coups  sur  le 
ventre  de  sa  femme  qui  était  enceinte.  Ces  brigands  ne  ces- 
sent d'insulter  la  Convention  et  de  dire  que;  pour  rame- 
ner IHibODdance,  Il  fatit  ègoiji^f  les  tleillsnh  et  Its  cu- 
fants»  •  ■     "  ".     ■ 

La  Conveniibn  a  ch^rg^  le  tribuinial  «rinviiiel  du  dépgir- 
tement  de  Vauctusédc  iei'j;i9Mrsuii(rieréjM)lMlionDa4rcmi^U 

—  Elle  a  procédé  à  l'appel  nominal  pour  l*ëleeiiqn  4e 
trois  représeiiiantadu  fKOpleqnr  inont  à  Suiiit-Domingue. 
Ceux  qui  sont  nomaéssoitt  Bourdon  (de  l'Oise),  Vardoo, 
et  Giraud  (de  la  Charenle*lnfi6rïfureOi 

Ceux^ui  ont  été  noQjmès  dfâns'lià'&éançç;  du  3  ait  soir, 
pour  les  Iodes*Orient^les^>on}^ 'Barras,' Armand  (de .fa 
Meuse^,  etLetburneur(de|faVt8gQch'e'].'   ''  , 


.»  :.i  tÉl.;'iri.ii  ' 


.■■■■-■ -3    M|.      -.-i     .'■       •  •   1      i        .  •      » 

LlvœS'DWÉBS:  '   '  ' 

.-..11.         •.  ■      »    ' 

C&de  de  l'arUtragê,  un  pMit¥sl«ilneiflM9.  Pm  r  t  liv;  10 1., 
franc  de  port.  8e  trouve  à  Pvris,  ehei .  Auliertin ,  imfMri- 
neur ,  uour  do  Palsia-deJustiee ,  n»  91  ;  et  RondMnestl , 
au  d«p6t  d«t  lois,  place  de  ia  RéasiOD,  ci-dereat  du  Cir- 

rou»e] . 

Cet  ouvraf^e  contient  le  texte  et  rexplioetion  de  looi-lct 
décrets  relatiCi  :  l<»  à  Tarbitrage  voloauire  ;  a«  à  celui  de 
famille  ;  Z^  à  l'arbitrage  forcé  d'après  Icâ  lois  sur  Ifi  sucaoes- 
sions;  40  ^  quelques  autres  arbitrages  égalemeot  forcés  :  il 
est  du  Vautcur  de  la  loi  du  17  nivôse  sur  les  succesMiMis»  ov* 
vragc  qui  se  trouve  au  même  dép6t. 

'*—  Traité  des  opérations  det^ckirurgiet  par  Bwtfândi,  tra- 
duit de  riialien  par  Sollier  de  la  Komiilais-,  BOtfvelk  édi» 
tion;  in-8o,  fig.,  broché.  Prix  :  6  liv.  10  s.  A  Paris,  cbcx 
Théophile  Barrois  le  jeune,  libraire,   quai  des  Augusiins, 

Q«I8. 

•^Codedes  successions,  donations ,  substîtM lions ,  tcsramènts 
et  partages ,  avec  une  introduction  des  tableaux  géiu'ato^U 
ques  et  une  table  alphabétique  des  oiafièref  ;  par  Te  citoyen 
A.-C.  Guichard ,  avantageusement  connu  par  ses  rodes  des 
juges  de  paix,  du  tribunal  de  famine,  police,  etc.,  etc.,  dont 
il  va  paraître  de  nouvelles  éditions. 

A  i*aris,  chei  Gamery,  rue  Serpente,  n«  IT.  Prix  :  3  liv. 
iO  aoos,  et  4  Ht.  10  sotis  franc  de  port,  par  la  poste. 


Payements  à  /a  trésorerie  tialionale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  premiers 
mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  poricurs  d'ii?sr:np- 
lionsau  grand  livre  Cefui  pour  les  renies  vi.igcrcs  est  do 
huit  mois  vingt  et  un  jours  de  Tannée  1795  (vieus  style). 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


«•  166. 


Sêœtidi  6  Ventosb,  Van  3«.  (Mardi  24  Février  1795,  vieux  ityle,) 


POLITIQUE- 

^         TURQUIE. 

ComêiMiimùj^^  le  15  décembre,  —  Le  ministre  de 
Russie  a  e« ,  le  8  de  ce  mois,  une  conférence  avec  le  reiss- 
effendi.  On  sa? ait  d*aTance  qu'il  devait  y  être  traité  de  dif- 
férends déjà  connus  entre  la  Russie  et  la  Porte,  et  pour 
lesquels  des  entretiens  ministériels  avaient  déjà  liréTaiten- 
lion  du  Divan  sur  Taslucieuse  habileté  du  cabinet  de  Pélers- 
bourg.  Le  Russe,  en  renouvelant  ses  plaintes,  a  demandé 
la  réparation  trop  négligée  des  dommages  causés  aux 
négociants  de  sa  nation  par  la  conGscalion  de  quelques 
marchandises,  à  Tépoque  dé* la  déclaration  de  la  guerre. 
Il  prétendit  que  Tindemnité  deTait  être  fixée  à  1  million  et 
demi  de  piastres. 

Mais  cet  objet  et  d*autres  également  rebattus  n'étaient 
pas  la  véritable  intention  du  ministre  de  Russie.  Il  tourna 
Tentrelien  sur  les  affaires  de  Pologne.  Déclarer  au  reus« 
effendi  que  Catherine  avait  lieu  d'espérer  une  neutralité 
constante  de  la  part  du  Sultan,  qui  ne  favoriserait  en  au- 
cune manière  les  mécontents  de  ce  pays,  c'était  voukûr 
exciter  par  la  surprise  à  une  réponse  trop  vive  peut-être  et 
dépourvue  de  solidité.  Le  reiss-effendi  répondit,  au  con- 
traire, avec  toute  convenance  sur  la  neutralité  actuelle, 
de  même  que  sur  l'intention  ferme  où  était  le  Grand  Sei- 
gneur d*ol)tenir  de  Catherine  II  la  fin  des  massacres  qui 
déshonorent  l'espèce  humaine.  Il  parla  très-pcrtinemmeal 
de  la  constitution  libre  du  8  mai  1791 ,  et  finit  par  déclarer 
à  son  tour  que  le  désir  de  la  Porte  était  de  recevoir,  de  la 
part  de  Catherine,  sur  ce  sujet  important,  une  réponse 
prompte  et  catégorique. 

Ceci  donna  lieu  à  une  autre  conférence,  le  même  Jour, 
avec  le  ministre  de  Prusse,  à  l'issue  de  laquelle  ce  dernier 
a  expédié  un  courrier  à  Berlin. 

La  dignité  des  intentions  que  manifeste  le  Grand  Sei- 
gneur est  encore  soutenue  par  Pactivitê  des  préparatifs 
'  militaires.  Toutes  les  forteresses  de  l'empire  sont  dans  le 
meilleur  état,  pourvues  d'artillerie,  de  munitions  de  guerre. 
Les  arsenaux,  les  chantiers  sont  remplis  de  travailleurs. 
C'est  un  Français  qui  dirige  les  travaux  du  canal  ;  c'est  un 
ingénieur  français  qui  est  chef  des  constructions  navales, 
et  qui  fait  construire  en  ce  moment  un  vaisseau  à  trois 
ponts  ;  c'est  sous  l'inspection  d'ofliciers  français  que  s'exerce 
un  nouveau  corps  de  canonniers.  Il  semble  que  la  renom- 
méi*  de  la  valeur  française  ail  triomphé  de  l'espèce  d'éloi- 
gnement  qu'avaient  les  Turcs  pour  de  nouvelles  méthodes 
d'instruction  et  pour  des  exercices  d'un  nouveau  genre. 

La  Porte  montre  aussi ,  par  des  attentions  marquées, 
son  attachement  pour  une  nation  qu'elle  estime  brave,  et 
qu'elle  aime  comme  amie  fidUe.  Elle  a  déclaré  valables  des 
prises  faites  dans  ses  parages  par  des  frégates  françaises. 

—  Le  fameux  Achmet,  pacha  révolté  de  Scutari,  fier 
des  avantages  qu'il  a  remportés  sur  quelques  généraux  de 
la  Porte ,  recommence  à  désoler  l'Albanie.  On  marche  à 
lui  :  le  Divan  a  nommé  pour  cette  expédition  le  begler- 
bejf  de  Roumélie,  homme  de  guerre  connu  par  ses  talents. 

PAYS-BAS. 

Les  habitants  d'Anvers,  voyant  enfin  arriver  le  terme 
des  anciennes  querelles  sur  la  liberté  de  l'Escaut,  se  flattent 
de  rendre  bientôt  à  leur  commerce  une  partie  de  sa  splen- 
deur, jadis  si  célèbre.  Quelques  négociants  ont  déjà  formé 
une  Société  nouvelle,  dans  la  vue  de  relever,  par  l'exemple 
de  leurs  premiers  efforts^  tout  l'honneur  de  la  Belgique 
commerçante. 

—  Les  représentants  du  peuple  français,  jaloux  de 
maintenir  parmi  les  défenseurs  de  la  liberté  une  discipline 
sévère,  et  qui  soit  conforme  à  la  dignité  de  leur  situation, 
viennent  de  prendre  l'arrêté  suivant: 

Arrêté  des  reprinnianU  du  peuple  françaii, 

•  Voulant  maintenir  parmi  les  troupes  de  la  république 

•  celte  discipline  exacte  qui  fait  leur  force  et  leur  gloire,  et 

donner  aux  généraux  les  moyens  de  réprimer  les  excès 

auxquels  se  sont  livrés  quelques  individus  indignes  du  nom 

français»  de  défendre  la  cause  sacrée  de  la  liberté,  et  sou- 

8«5^n>.  —  T9m$X. 


doyés  par  nos  ennemis  ;  voulant  encore  garantir  aui  babi« 
lantsdes  Provinces-Unies  la  tranquillité  et  lasftreté  dont 
ils  doivent  jouir  avec  Tarmée  victorieuse  d'une  naiion  qui 
a  l'uré  d'être  libre  et  juste,. *les  représentants  auprès  dça 
armées  du  Nord  et  de  Sambre-et-Meuse  arrêtent  ce  oui 
suit: 

•  Art.  I*'.  Tout  militaire  et  tout  individu  à  la  suite  de 
l'armée,  qui  se  livrera  au  pillage,  sera  puni  de  mort. 

c  II.  Tout  oOicier  et  sous-ufficier  qui  sera  convaincu 
d'avoir  eu  connaissance  de  ces  délits,  et  qui  n'aura  pria 
aucun  des  moyens  que  les  lois  mettent  à  sa  disposition  pour 
les  réprimer,  faire  saisir  et  punir  les  coupables,  sera  dé- 
gradé. 

•  III.  Les  généraux  de  division  ou  «ux  qui  commandent 
à  leur  place  sont,  en  conséquence,  autorisés  à  nommer 
des  commissions,  qui  jugeront,  dans  les  vingt-quatre 
heures,  les  délits  de  ce.genre  qui  pourraient  être  commis 
sur  le  territoire  occupé  par  les  troupes  à  leurs  ordres. 

■  IV.  Ces  commissions  seront  composées  de  neuf  mili- 
taires^ savoir  :  trois  offlkieri,  deux  sous-ofBciert  et  quatre 
soldats. 

c  V.  Ces  commissions  ne  pourront  prononcer  la  peine  de 
mort  qu'à  la  majorité  des  deux  tiers  de  leurs  membres. 

■  VI.  Les  commissions  ne  pourront  jamais  connaître  que 
d'une  seule  affaire,  et  seront  dissoules  après  le  jugement. 

m  VII.  Le  présent  arrêté  sera  transmis  par  le  général  en 
chef  à  tous  ses  généraux  de  division,  mis  à  l'ordre,  im- 
primé en  français  et  en  hollandais,  distribué  à  tous  les  cliefii 
de  corps ,  et  alBché  partout  où  besoin  sera* 

«  51911^  GlI.L8T«  BeLLIOAaOI,  JODBIRf»  J«»B.  La« 

cosTi,  PoaTixx  (derOise).» 


RÉPUBLIQUE   FRANÇAISE. 
TRIBUNAL  CRIMINEL  RBVOLUTIONNAIRB. 

Du  8  ren/o<e.  «Marie -Thérèse  Maréchal,  Agée  de 
trente-huit  ans,  née  à  Hébervilliers,  district  de  Blamonl, 
département  de  la  Meurthe,  femme  de' Charles  Jacquel , 
manufacturier  de  faïence  ; 

Convaincue  :  1*  d'avoir  pratiqué,  avec  des  intentions 
contre-révolutionnaires,  des  manœuvres  et  intelligences 
avec  les  ennemis  de  l'Etat,  tendant  è  détruire  la  fortune 
publique  par  un  commerce  de  faux  assignats  ; 

2*  D'avoir  contribué  sciemmenl  à  l'introduction  de  ces 
faux  assignats  sur  le  territoire  français,  a  été  condamnée 
à  la  |)eine  de  mort.  v^ 

Du  4.  —  Jean-Baptiste  Caxin ,  n^  à  Paris,  ex-pâtisiier- 
cufsinier,  ex-inspecteur  des  travajDX  publics,  a  paru  eu 
tribunal.  Il  était  accusé  d'avoir  provoqué  formellement  le 
rétablissement  de  la  royauté.  C'est  dans  cette  cause  surtout 
que  la  nécessité  de  la  question  intentionnelle  est  évidente. 

Caxin,  incarcéré  pour  avoir  exprimé  quelques  vérités 
hardies,  oublié  dans  sa  prison,  avait  demandé  plusieurs 
fois  à  être  interrogé.  Fatigué  de  ses  fers,  impatienté  da 
silence  que  l'on  gardait  à  son  égard ,  il  s'adresse  de  non* 
veau  à  l'administration  de  police,  le  17  nivôse  de  l'an  2, 
et  ensuite  au  conseil  général  de  la  commune,  le  24  du 
même  mois  en  ces  termes  :  «  Je  sais  bien  un  moyen  de  vous 
faire  répondre.  La  loi  punit  de  mort  quiconque  a  provotqué 
le  rétablissement  de  la  royauté  en  France  :  eh  bien,  je  vous 
déclare  que  Je  demande  un  rot,  que  fe  veux  un  roi^  et  fe 
crie  vive  le  roi!  Aux  Galbanons,  l'an  2  de  la  république 
une  et  indivisible.  • 

La  déclaration  du  jury  porte  qu*il  est  constant  que  les 
deux  lettres  provoquent  le  rétablissement  de  la  royauté, 
que  Caxin  est  convaincu  de  les  avoir  écrites,  mais  sans  in- 
tentions contre-révolutionnaires. 

Cazin  a  été  acquitté  et  mis  en  liberté.  Cet  acte  de  iustice 
rappelle  l'horrible  barbarie  qui  proQta  du  désespoir  de 
rinfortunée  Lavergne  pour  la  faire  conduire  à  l'échafaud , 
parce  qu'en  voyant  condamner  son  époux  à  la  mort,  et 
voulant  l'accompagner  au  supplice,  elle  s'écria»  dansuD 
généreux  délire  :  Vive  le  roi!  je  veux  un  r<ril 

66 


a 


633 


CONVENTION   NATIONALE. 

Suite  du  rapport  fait,  ,au  nom  de  la  commission 
chargée  de  Vexamen  des  papiers  trouves  chez 
Màèespi€rre 9t seseomplicet,  par  £.- H.  Courtois, 
4éputé  du  département  de  VAube,  dans  la  séance 
If  II  16  ni^ose  y  an  3  de  la  république  française , 
une  et  indivisible, 

I  Le  plan  de  contrc-révoliition  olait  combind  ainsi  : 
!  11  faut  que  les  fils  de  la  Irauie  (s'étaient  dit  les 
adroits  Sinous  des  comités  de  gouvernement)  pas- 
lent  presque  tous  par  les  mains  de  Robespierre;  que 
cette  main  soit  »  en  quelque  sorte  «  le  métier  sur  le- 
quel ces  (ils  reposent.  Faisons  si  bien  que  ,  lorsque 
BOUS  donnerons  le  mouvement  au  mécanisme ,  la 
machine  qui  le  recevra  croie  et  paraisse  l'imprimer» 
Le  raisonnement  était  sain  :  si  la  trame  réussissait, 
rinstru ment  était  brisé  bientôt  par  les  comités  vain- 
queurs; si  elle  échouait,  par  la  Convention,  qui 
n'aurait  vu  que  rinstrument  sans  deviner  les  doigts 
qui  se  cachaient  sous  la  texture  de  la  toile. 

Robespierre,  de  son  côté,  parcequ'il  tenait  les  fils» 
croyait  en  être  Tordonnatcur. 

Embarras  étrange,  qu'il  faille  SoQrent  établir  la 
puissance  de  son  rival  pour  fonder  la  sienne!  Tel 
Mi  celui  du  comité  qui  tend  au  décem virât ,  et  du 
tyran  aui  marche  à  la  dictature.  L*un  est  Tinstru*^ 
ment  de  Tautre,  qui  sera  le  sien  à  son  tour  :  c'est 
une  communauté  de  bons  ofQces ,  ou ,  pour  mieux 
éire,  (le  tromperies  ;  c*est  un  prêt  de  part  et  d'autre 
usuraire,  dont  la  patrie  a  fourni  les  fonds. 
Accoutumons  te  Français  (se  disait  Robespierre)  h 
'  n^obéir  plus  qu'à  douze' hommes  :  il  sera  plus  rap- 

f>roché  de  Tobéissauce  à  un  seul  ;  et  il  s'établissait 
e  chevalier  de  ces  douze. 

Revêtons  (se  disait  d'autre  part  le  comité)  un 
seul  homme  de  la  conliance  publique  :  il  sera  plus 
facile  après  de  Ten  dépouiller  que  sept  cents  ;  et  les 
organes  du  comité  venaient  ici  rompre  des  lances 
pour  ce  seul  hopime. 

Le  plan  ainsi  conçu  ,  on  vit ,  de  Tanlre  du  comité 
de  salut  public,  avec  non  moins  de  fracas  et  de  furie 
que  les  vents  des  cavernes  éoliennes,  fondre  tout 
a  coup  des  bataillons  d'Asmodées,  qui  soufflèrent 
Sur  le  sol  français  la  désolation  et  l'aridité.  Les  voila 
partis  ces  apôtres  du  crime,  ces  missionnaires  de  la 
OAortl  Ils  ne  rentreront  plus ,  citoyens ,  dans  le  re- 
paire qui  les  vomit,  que  lorsque  leurs  mains  san- 
glantes et  leurs  yeux  etincelants  de  la  joie  des  tigres 
gofgés  de  carnage  annonceront  que  la  patrie  est  au 
fomoeau  ;  ils  ti*y  rentreront  plus  que  quand  ils  se- 
ront bien  dignes  d'y  rentrer. 

Quel  nouveau  trait  de  douleur  va  s'enfoncer  dans 
vos  âmes,  ô  mes  collègues!  Il  va  les  déchirer  comme 
il  a  déchiré  la  mienDe.  Vérité!  j'ai  promis d*étre  ton 
organe;  je  le  serai,  dnssé-Je  être  ton  martyr. 

Ce  n'est  point  à  des  mains  vulgaires  crue  vos  ty- 
rans ont  confié  la  conduite  de  leur  plan  dévastateur. 
srn\s  emploient ,  pour  exécuter,  de  mercenaires  in- 
struments, ils  ont  créé  des  chefs  pour  ordonner  ;  s'il 
est  des  démolisseurs  et  des  assassins,  il  est  aussi  des 
régisseurs  d'assassinats  et  de  ruines.  Faut-il  le  dire  ! 
0  nonle!  citoyrens,  ils  ont  siégé,  ces  derniers,  ils 
siègent  encore  a  culé de  vous!  Vos  tyrans,  pour  vous 
mieux  avilir,  les  ont  cherchés  dans  votre  sein.  Ils 
leur  ont  partagé  les  rôles  ;  et  ceux-ci  se  sont,  à  leur 
tour,  partagé  le  massacre  et  la  dévastation  des  di- 
verses contrées  de  la  France.  Leurs  pouvoirs  sont 
illimiléa  comme  leur  rage;  la  toute -puissance  les 
entoure,  afin  qu'aucun  obstacle  ne  les  arrête. 

Carrier  va  dans  la  Vendée  ;  Joseph  Lebon  a  le 
département  du  Pas-de-Calais  pour  partage  ;  Mai- 
«nel  estesvoyé  sur  les  terres  que  baignent  les  eaux 
du  Rhône  et  qu*arrosent  évites  de  Vaucluse  ;  Collot, 


poussé  par  des  souvenirs  amers,  vole  dans  le  dépar- 
tement de  Rhône-et*Loire  ;  et  j'ai  entre  les  mains 
les  preuves  les  plus  évidentes  du  désir  qu'avait 
Couthon  d'aller  essayt^rdans  le  département  du  Var 
ce  qu'il  appelait  le  système  de  vive  force,  d'aller, 
en  un  mol ,  brûler  Toulon. 

Ce  simple  énoncé  du  nom  de  quelques-uns  des 
acteurs  vous  ra^)pelle  d'avance  les  scènes  sanglantes 
où  ils  ont  figure. 

Au  nom  de  Carrier ,  la  carte  fumante  de  la  Ven- 
dée sVst  déroulée  tout  entière  sous  vos  yeux.  Des 
milliers  de  salamandres,  au  milieu  de  la  fournaise 
vendéenne ,  attisent  de  leurs  mains  l'incendie  de  la 
république.  Vous  entendes  les  pétillements  de  la 
flamme  qui  dévore  et  les  manufactures ,  et  les  ha- 
meaux ,  et  les  villes,  et  les  hommes  ;  les  débris  des 
châteaux  se  mêlent  aux  débris  des  chaumières  :  triste 
et  déplorable  égalité  qui  n'existe  aue  dans  des  rui- 
nes. Je  vois  i  a  la  luteur  de  1> tnbrasemeht ,  ceux 
même  qui  t'ont  allumé ,  à  travers  les  aires  enflam- 
mées des  maisons  croulantes ,  fondre ,  ainsi  que  des 
oiseaux  de  proie,  sur  les  richesses  auVIles  recèlent. 
L'asile  du  patriotisme  n'est  pas  même  respecté ,  et 
Ton  précipite  dans  le  gouffre  dévorant  et  le  brigand 
pris  les  ariues  à  la  mam ,  et  celui  qui  les  dépose  i  et 
l'on  fusille,  sans  distinction,  l'ennemi  public  et  l'ami 
qui  a  conduit  nos  soldats  à  la  victoire  ;  oui  leur  a 
procuré ,  par  des  iodications  sdres ,  des  subsistancei 
nécessaires  :  on  semble  montrer  même  plus  d'é* 
gards  pour  un  rebelle  que  pour  ce  dernier. 

Elles  s'emplissent  sous  vos  yeux,  elles  s'encom- 
brent de  vieillards,  de  jeunes  gens,  de  femmes,  d'en- 
fants, ces  exécrables  gabares;  et  Carrier,  nouvel 
Anicf  t ,  va  noyer  sa  patrie  comme  Nérou  noya  sa 
mère(l). 

C'est  peu  pour  lui  d'imiter  ce  vil  empereur  dans 
ses  cruautés  ;  il  surpasse  eneore  sa  rage  lubrique. 
Néron,  dans  un  œil  brûlant  de  flarame§  incestueuses, 
parcourt  les  beautés  livides  du  corps  de  sa  mère 
égorgée  ;  Carrier,  de  ses  yeux  lascifs  et  sanglants, 
dévore  la  nudité  de  ses  victimes  qu'il  ose  accoupler 
dans  la  mort ,  voulant  sans  doute  faire  une  double 
insulte  à  la  natnre ,  à  qui ,  dans  le  spectacle  de  la 
destruction,  il  semble  offrir  celui  de  la  reproduction 
des  êtres. 

Je  ne  détaillerai  point,  citoyens,  ces  horreurs 
trop  connues  aujourd'hui ,  vengées  «î  la  flu  par  la 
loi,  qui  a  frappé  de  sou  glaive  la  tête  coupable  qui 
les  avait  amçues  ;  hoi*reurs  dont  Julien  fils,  comme 
vpusieverrrz  bientôt,  instruisait  son  ami  Rol)es- 
pierre;  horreurs  dénoncées  aussi  par  beaucoup 
d'honnêtes  citoyens,  par  Lequinio,  notre  collègue, 
à  votre  ancien  comité  de  gouvernement  ;  mais  r|ue 
ceux  oui  les  commandaient ,  qui  les  approuvai«Mit 
au  moins,  se  gardaient  bien  de  vous  dévoiler,  parce 
qu'elles  entraient  dans  ces  plans  que  Dupuis  vous 
a  prouvé  avoir  été  tracés  par  le  digne  ministre  des 
tyrans,  Collorédo;  horreurs  enfin  qui  fireul  tres- 

(I)  Aioti  ft'eiprine  Tan'ie  i«r  ••  fûtÎKl  de  NénMi  :  06m* 
lit  ùtgenium  Anitetut  libtrtut.,*  Ergo  uéti/rm  posse  conrpo* 
ni  doctU  cujus  pars,  ipso  in  mmri  per  mrtem  sohita,  rZ/tin» 
dtret  ignuram...^.  »  L'affrancln  Anicel  propre  une  de  s«« 
inventions...  ;  il  dënuMitre  qu'oa  peni  c^ns(ruif  e  un  vxis^vrau 
dont  une  p;)rtic  s'entr'ouvrant  par  art .  fasse  tontlx-r  Agrip- 
pine  à  l'insu  d«iis  les  fl«U...».  »  Tacitb,  ÀHual. ,  liù,  XiV, 
vum,  S. 

Il  ii*est  pas  jusqu*aui  rttsonrces  cl^Anicct,  pour  colorer  son 
d'ime,  que  n^ait  employées  Carrier.  Il  peignit  à  la  Conven- 
tion la  noyade  des  prétref  comme  un  de  ces  événements  trop 
frcqucnls  sur  les  mtrs;  et  Anicet  disert  ^  Néron  :  «  Nihil 
tam  çapax jortuilorum  quhm  mare,  et  ù  naujmgio  iMer^ 
cepia  sit,  quem  adtb  imqttum ,  ut  iceieri  atUignei  qmod 
vente  etjluoius  detiqueritu  !»  Rien  de  plut  fécond  en  •€••- 
dents  que  la  mer;  u  Timpérairice  y  faisait  naufrage,  qui  ••• 
rtit  assez  injo>te  pour  aUribucr  à  un  parricide  la  faete  dft, 
eaoi  et  des  vents!  »  Taute,  lùid.  A.'  M. 


5S3 


saillir  Vâme  sensible  et  vorlurusc  de  Phélippeauz, 
dont  la  voix  ne  fut  dloulFi^e  (^m»  parce  que,  trop  vé-  ' 
riilitiiie,  elle  avait  proclame  déjà  quelques  secrets  i 
du  cabinet  des  puissances.  1 

Je  ne  vous  entraînerai  avec  moi  dans  les  gouffres 
vendéens  que  pour  vous  prouver  ,  par  des  nièces, 
qu'on  u*a  pas  voulu  les  fermer,  et  que  ce  ctiancre 
politique  est  encore  un  des  fruits  amers  de  Tesprit  : 
de  nivellement. 

Partout  s*offre  cette  preuve  dans  la  correspondance 
qui  intéresse  la  Vendée. 

On  y  lit  :  •  Que  les  gros  dpauletiers  sont  les  cau- 
ses de  sept  déroutes  dans  Tespace  d'un  mois;  qu'ils 
font  les  muscadins;  qu*on  a  trompé  la  Convention 

3uand  on  a  dit  que  la  Vendée  était  finie;  qu*il  y  a 
es  hommes  qui  font  commerce  de  cette  guerre.  • 
On  y  a  dénoncé  des  Vols,  des  pillages  commis  par 
les  troupes  elles-mêmes;  «  des  soldats  qui  se  sont 
portés  dans  des  hôpitaqx  pour  y  égoreer  les  blessés 
dans  leurs  lits ,  des  généraux  qui  ne  font  rien...  Le 
trop  fréquent  usage  de  la  torche,  au  lieu  de  la 
baïonnette  ;  •  on  s'y  plaint  d'avoir  vu  brCder  des 
grains  qu'on  pouvait  enlever.  On  veut  y  faire  ger- 
mer le  matérialisme  ,  afin  de  pousser  au  désespoir 
des  gens  simples  et  des  cœurs  purs,  qui  aimeront 
mieux  courir  aux  armes  que  d'avouer  qu'ils  sont 
l'ouvrage  du  hasard. 

On  y  voit  que  la  plupart  des  paysans,  des  femmes, 
et  enfants  ne  sont  entrés  dans  l'armée  des  brigands 
que  par  la  peur  qu'on  leur  a  fait  des  troupes  de  la 
république  qu'on  leur  disait  n'éparguer  ni  le  sexe, 
ni  l'âge. 

Et  de  peur  de  la  mettre  à  fin  ,  cette  guerre ,  on 
veut ,  d'après  Barère  qui  a  dit  :  ■  organisons  la  ter- 
reur, •  répéter  les  exemples  terribles  sur  ces  scélé- 
rats; et  cependant  on  n'a  pas  d'armes. 

Ici  un  représentant  attribue  les  désastres  de  la 
Vendée  <à  Timpéritiedes  généraux...*  Il  croit  Ros- 
signol un  mauvais  général;  il  croit  que  le  comité  de 
salut  public  se  laisse  tromper  quand  il  s'agit  de 
nommer  aux  places.  Il  dit  «qu'il  a  fait  auprès  du 
comité  tout  ce  qu'il  fallait  pour  qu*oa  remédiât  au 
mal.  > 

Là  c'est  le  malheureux  Westermann,  dont  on  fait 
réloge  dans  plusieurs  lettres,  qui  annonce  a  Robes- 
pierre la  déroute  complète  de  Mie.«>kowsky.  Il  avait 
prédit  que  nous  serions  battus.  «  On  a  heurté ,  dit- 
il,  l'opinion  publique  par  la  nomination  de  Bossi- 
fnol,  entouré  de  gens  qui  le  trompent,  pour  le  per- 
re  par  ses  sottises  ,  ou  qui .  n*en  sachant  pas  plus 
que  lui ,  commandent  à  sa  place.  • 

II  ivpète  ce  qu'il  a  dit  dans  une  autre  lettre,  «que 
cette  guerre  est  guerre  d'intrigue  ;  qu'il  n*y  a  pas  un 
moment.^  perdre.» 

«En  vérité,  dit- il,  si  l'on  était  de  bonne  foi,  il  est 
impossible  que  cette  guerre  dure  longtemps.  C'est  à 
vous  à  profiter  des  avis  sincères  que  je  vous  donne.  ■ 

Dans  une  autre  il  annonce  à  Robespierre  la  ré- 
trograd.ition,  sans  attaque,  de  l'armée  jusqu'à  Fon- 
lenay-le-Peuple. 

•  Le  soldat  est  désolé,  dit-il,  le  peuple  déconcerté; 
plus  de  la  moitié  déserte...  Je  ne  sais  ce  que  tout 
cela  veut  dire  ;  mais  j'en  suis  désolé  moi-même.  > 

Ailleurs,  on  lit  ces  mots  dans  une  lettre  de  Sandos 
à  Robespierre  : 

«  J'ai  vu  avec  douleur  qu'on  s'occupait  peu  de 
marcher  sur  les  rebelles ,  et  que  les  ressorts  de  la 
machine  étaient  entièrement  rouilles  par  la  mésin- 
telligence qui  règne  entre  les  officiers  généraux.  • 

Partout,  citoyens,  même  tactique  :  ou  indolence 
dans  l'usage  des  moyens  de  giiérison ,  ou  emploi  de 
remèdes  violents  ;  toujours  môaies  soins  d'élargir  la 
plaie. 

Un  agent  de  Bobeipicm  cl  da  «onilé  émmt  t  ta 


22  octobre,  que  la  Vendée  n'était  plus;  et  voielee 
qu'on  écrivait  le  30  ventôse,  c'est-à-dire  quatre  mois 
après  :  •  Les  supplices  de  Vincent  et  de  Rousin  feront 
pins  que  les  armées.  J'ai  gémi  en  secret  sur  Taveu- 
glement  du  comité  de  salut  public  ;  j'espère  qu'enfin 
n  va  faire  cesser  les  espérances  du  Morbihan,  en  dé- 
truisant le  chancre  politique  qui  dévore  journelle- 
ment tant  d'hommes.  Ton  âme  sensible  (  c'est  à 
Robespierre  qu'on  écrit  )  frémirait  d'horreur  au  ré- 
cit des  mesures  exécutées  dans  les  cantons  paisibles 
des  départements  insurgés...  Tout,  tout,  sans  excep- 
tion, est  incendié,  massacré,  dévasté  ;  des  villes,  des 
bourgs  ,  des  villages  habités  par  des  patriotes  ont 
disparu  ;  et  le  fer  a  achevé  ce  que  la  flamme  épar» 
gnait.  C'est  ainsi  qu'on  a  ressuscité  la  Vendée.  Elle 
était  finie  par  la  prise  de  Noirmoutiers*  mais  Rousin 
et  Vincent  ne  le  voulaient  pas.  • 

Et  c'est  à  ces  scélérats  qu'on  a  immolé  Phélip«- 
peauxqui  le  Voulait! 

•  Il  ne  tient  qu'au  comité  de  salut  public  ,  conti* 
nue  l'auteur  de  la  lettre,  de  terminer  cette  affreuse 
guerre:  qu'il  reprenne  ses  premiers  plans ,  et  qu'il 
mette  fin  aux  meurtres  et  aux  incendies.  • 

Hélas  !  à  l'exemple  de  Vincent  et  de  Ronsin  ,  le 
comité  ne  le  voulut  ps, 

La  lettre  finit  ainsi  : 

■  A  côté  de  plusieurs  erreurs  dans  le  rapport  de 
Phélippeaux  sur  la  Vendée,  sont  de  grandes  vérités, 
dont  quelques-unes  sont  justifiées  par  les  derniers 
événements.  • 
^  A  côté  de  ces  patriotes  qui  versent  des  larmes  sin- 
cères sur  le  sort  de  cette  belle  partie  de  la  républi- 
que, livrée  aux  flammes,  on  rencontre  de  ces  géniei 
malfaisants,  de  ces  émanations  à  la  Carrier ,  qui  ne 
peuvent  vivre  qu'en  s'enivrant  de  sang  humain. 

De  ce  nombre  s'offre  à  nous  un  nommé  Cousin, 
grand  exterminateur  de  ehouam ,  à  ce  qu'il  dit ,  qui 
pousse  des  cris  de  joie  vers  Robespierre ,  à  la  vue  du 
sang  impur  «des  prêtres  et  des  aristocrates,  qui 
abreuve,  dit-il ,  les  sillons  dans  les  campagnes ,  et 
ruisselle  à  grands  flots  sur  les  échafauds,  dans  les 
cités.  — Juge,  s'écrie -t-il,  quel  spectacle  pour  un 
républicain  animé  du  feu  le  plus  sacré  et  du  plus 
pur  amour  de  la  liberté  !  ■ 

11  est  malheureux  que  le  pur  amour  du  républi- 
cain Cousin  ne  soit  que  par  intérêt;  car  il  finit  par 
demander  à  Robespierre  une  place ,  et  lui  déclare  , 
pour  le  décider  en  sa  faveur,  que  toutes  les  places, 
dans  sa  commune ,  ne  sont  occupées  que  par  des 
prêtres  qui,  •  par  cela  même,  dit- il,  qu'ils  sont  prê- 
tres, sont  et  ne  peuvent  être  que  plus  ou  moins  scé- 
lérats. •  •  (La  suite  demain,  ) 


SÉANCE  DU  S  VENTOSB. 
Présidence  de  Bourdon  {de  VOi$e)^ 

Le  citoyen  Mercier,  de  Compiègne ,  fait  hommage 
à  la  Convention  d'un  ouvrage  intitulé  :  Gérard  de 
VoUen^  nouvelle  historique  en  sept  livres  (1). 

La  Convention  agrée  l'hommage ,  en  ordonne 
mention  honorable,  et  renvoie  l'ouvrage  au  comité 
d'instruction  publique. 

BoissY  d'Anglas,  au  nom  des  comités  de  salut 
public ,  de  sûreté  générale  et  de  législation  réunis  : 
Les  phalanges  de  la  liberté  ont  dispersé  celles  de  la 
tyrannie ,  reculé  de  tous  les  eôtés  les  limites  de  no- 
tre territoire  ;  elles  ont  du  Nord  au  Midi ,  des  Alpes 
I  au  Texel,  des  Pyrénées  jusques  au  Rhin,  fait  briller  à 
'  l'œil  de  nos  ennemis  l'éclat  des  couleurs  républicai- 
nes :  et  vous,  dignes  de  la  gloire  d'une  grande  na« 
tion  dont  vous  préparez  les  destinées ,  vous  avei , 

(l)Cet  ouTTUfre  te  vend  h  Paris,  ches  Louis,  libraire,  rac 
Mvtria ,  b«  19.  Frii  :  •  liv.  10 1. ,  br«ofaé ,  et  s  liv. .  fran'* 
Itftrl*  A*  M. 


534 


sans  fierté  coromesans faiblesse,  sans  tiinidit(^  comme 
sans  orgueil ,  proclamé  d'avance  vos  résolutions  et 
vot-principes ,  assigné  des  bornes  à  nos  conquêtes ,  | 
au  milieu  même  des  victoires,  indiqué  les  limites  | 
que  le  peuple  français  ne  veut  point  franchir,  et  dit 
aui  conorles  des  rois ,  comme  l'Eternel  aux  flots  de 
la  mer  :  Vous  pouvez  venir  jusque  sur  ces  rives,  mais 
vous  ne  les  passerez  point. 

C'est  au  milieu  de  tous  ces  triomphes  que  vos  trois 
comités  réunis  de  salut  public,  de  sûreté  générale  et 
de  législation,  viennent  arrêter  vos  regards  sur  quel- 
ques maux  intérieurs  que  votre  sagesse  doit  à  la  Tois 
connaître  et  guérir  ;  c'est  en  interrompant  le  récit 
de  tant  de  succès  qu'ils  viennent  vous  avertir  des 
blessures  qu  on  cherche  a  vous  faire ,  et  appeler 
votre  attention  sur  un  des  objets  les  plus  importants 
de  la  législation  politique.  Ce  n'est  pas  en  détour- 
nant les  yeux  des  écueils  qui  tous  environnent  que 
TOUS  apprendrez  à  les  éviter.  Votre  tribune  est  celle 
de  la  vérité  ,  comme  elle  est  celle  de  la  justice  :  la 
vérité  doit  doitc  s'y  foire  entendre  ,  la  justice  y  pro- 
clamer ses  principes.  On  a  répété  trop  longtemps 
qu'il  était  des  choses  qu'il  ne  fallait  jamais  dire;  c'é- 
tait le  lancageque  la  flatterie  osaitadresser  à  l'oreille 
des  rois;  c  est  avec  ces  ménagements  coupables  qu'on 
a  laissé  s'organiser  tous  les  genres  de  tyrannie ,  et 

Sue  vous  avez  vu  notre  territoire  inondé  de  sang  et 
alarmes.  Ah!- n'écoutez  plus  les  conseils  de  cette 
politique  timide  qui,  au  lieu  de  guérir  les  maux,  les 
déguise;  qui ,  au  lieu  de  sonder  les  plaies  du  gou- 
vernement, s'attache  à  en  dérober  la  vue.  Il  feut  tout 
vous  dire ,  parce  que  vous  pouvez  tout  réparer  ;  il 
faut  tout  vous  apprendre ,  f^rte  quo  vous  pouvez 
d'un  mot  anéantir  pour  jamais  tout  tê  qui  9*oppose 
i  l'afiiermissement  ne  vos  lois. 

Vous  avez  gémi  trop  longtemps  des  maux  afteiii 
de  la  Vendée,  vous  avez  vu  réorganiser  cette  guerre 
Iwrrible  que  l'impéritie  du  gouvernement  a  laissé 
se  développer  et  s'étendre,  et  où  tous  les  criifies  ont 
produit  toutes  les  calamiti's.  1^  fanatisme  en  fut  le 
mobile,  les  opinions  religieuses  l'occasion  et  le  pré- 
texte ;  on  égara  les  hommes  pour  les  perdre ,  on  les 
persécuta  pour  les  rendre  cruels  et  féroces,  et  dans 
k  moment  où  je  vous  parle  les  mêmes  moyens  con- 
spirent encore  pour  empêcher  l'efTet  bienfaisant  des 
mesures  pleines  d'humanité  que  vous  avez  prises 
envers  les  rebelles  :  ce  n'est  |)as  tout  ;  et  la  Vendée 
D'est  pas  le  seul  lieu  de  l'empire  sur  lequel  le  fana- 
tisme ose  agiter  ses  torches.  On  veut ,  soyez-en  bien 
sûrs,  exciter  partout  la  guerre  civile,  on  veut  armer 
les  citoyens  contre  les  citoyens,  et  les  Français  con- 
tre les  Français,  et  condamner  une  partie  de  la 
France  i  être  la  victime  des  erreurs  ou  du  ressenti- 
ment de  l'autre.  Tel  est  le  plan  infernal  combiné  par 
la  cour  de  Londres ,  que ,  s'il-  était  exécuté ,  la  répu- 
blique victorieuse  au-dehors ,  couverte  aux  yeux 
des  siècles  futurs  d'une  gloire  impérissable ,  se  dé- 
chirerait de  ses  propres  mains ,  et  verrait  ses  lam- 
beaux sanglants  devenir  la  proie  de  ses  ennemis. 

Aux  directions  politiques ,  aux  agitations  nées  de 
la  lutte  incompréhensible  qui  subsiste  encore  entre 
les  vrais  républicains  et  les  restes  déshonorés  de  la 
faction  des  buveurs  de  sang,  on  veut  joindre  des 
déchirements  dont  la  religion  serait  le  prétexte  :  on 
fait  cette  injure  au  dix-huitième  siècle ,  de  croire 
qu'il  puisse  être  encore  souillé  par  une  guerre  de 
religion;  on  compte  assez  sur  l'instabilité  de  la  rai- 
son humaine  pour  espérer  que  les  hommes  <]ui  se 
sont  armés  avec  tant  de  courage  pour  le  maintien 
de  leurs  droits  sacrés ,  consentiront  à  se  battre  pour 
des  chimères. 

Mais,  quoi  qu'il  en  soit ,  les  lettres  de  vos  collè- 
gues en  mission  dans  les  départements,  les  mesures 
que  plusieurs  d*entre  eux  sont  forcés  de  prendre ,  et 


qui  ne  coïncident  point  les  unes  avec  les  autres, 
créent  une  diversité  fuueste  sur  un  des  objets  les 
plus  importants  de  votre  législation  politique,  l^es 
dénonciations  qui  nous  parviennent ,  les  réclama- 
tions qui  nous  sont  adressées,  les  avis  que  nous  re- 
cevons, et  non  moins  que  tout  cela,  sans  doute, 
l'obligation  où  vous  rtes  de  déclarer  enfin  tous  vos 
principes ,  ont  forcé  vos  comités  réunis  de  vous  en- 
tretenir de  la  police  des  cultes.  A  ces  mots  le  légis- 
lateur doit  s'élever  à  toute  la  hauteur  de  la  philoso- 
phie; il  doit  contempler  avec  calme  les  asitations 
aui  sont  nées  des  opinions  religieuses  et  leur  in- 
uence  terrible  sur  le  sort  de  l'espèce  humaine.  Il 
doit  apprécier  avec  sagesse  ces  exaltations  de  l'esprit 
qui,  pendant  un  si  grand  nombre  de  siècles,  ont  été 
les  puissances  du  monde  ;  il  doit  discerner  ce  qui 
tend  à  les  aigrir^  à  les  rendre  plus  sombres ,  plus 
funestes  à  la  société ,  de  ce  qui  peut  les  calmer,  les 
modifier,  les  éteindre  même,  ou  les  fondre  dans  des 
sentiments  plus  doux. 

Il  ne  s^agit  point  toutefois  d'examiner  s'il  faut  une 
religion  aux  hommes  ;  si,  lorsqu'ils  peuvent  s'éclai- 
rer des  lumières  de  la  raison  et  s'attacher  les  uns 
aux  autres  par  les  seuls  liens  de  l'intérêt  commun, 
par  les  seuls  principes  de  l'organisation  sociale,  par 
ce  sentiment  îm^érioux  qui  les  porte  à  se  rappro- 
cher et  â  se  chérir,  il  faut  créer  pour  eux  des  illu- 
sions ,  ou  laisser  des  opinions  erronées  devenir  la 
règle  de  leur  conduite  et  le  principe  de  leurs  rap- 
ports. 

C'est  au  temps  et  k  rezpérience  i  vous  instruire 
sur  ce  point;  c'est  t  ta  philosophie  à  éclairer  l'espèce 
humaine  et  î  bannir  éc  dessus  ta  terre  les  longues 
erreurs  quî  Tout  dom  in^c . 

Ah  !  s'il  faut  une  religion  aux  hommes,  si  la  source 
de  leurs  devoirs  doit  se  trouver  pour  eux  dans  des 
opinions  surnatnrell^s,  si  fes  iTreum  rf'ligieusesoat 
été  pour  rhumanite  le  faijdi'ntejit  de  quelque  avan- 
tage, il  m'est  impossible,  en  portinti  mes  regards 
sur  la  longue  suite  dfs  slècU^/ï  i^as^és,  de  ne  pas  être 
douloureusement  ému  à  l'aspect  des  maux  affreux 
dont  la  religion  a  été  la  source  ou  le  prétexte. 

La  religion  a  vendu  bien  cher  aux  hommes  les 
consolations  qu'ils  en  ont  reçues  ;  je  ne  viens  |)oînt 
voos  présenter  le  récit  affreux  de  tous  les  crimes 
dont  elle  a  été  environnée;  il  serait  aisé  de  vous 
émouvoir  par  des  peintures  plus  ou  moins  touchan» 
tes,  par  des  tableaux  plus  ou  moins  lugubres;  mais  je 
veux  parler  à  votre  raison  ,  et  non  pas  à  votre  sen- 
sibilité. Dans  une  discussion  de  cette  importance, 
je  dois  éloigner  de  vous  jusqu'aux  séductions  du 
sentiment,  et  me  refuser  des  succès  feciles.  Je  ne 
découvrirai  donc  point  à  vos  yeux  ces  tables  de  sang 
où  sont  écrites  par  la  main  de  l'implacable  histoire, 
les  persécutions  des  empereurs ,  les  massacres  de  la 
Saint-Barihélemy,  les  horreurs  des  Ceveiiues  et  tous 
les  fléaux  de  la  Vendée.  Je  ne  vous  montrerai  pas 
même  la  religion ,  devenant  entre  les  mains  des 
tyransun  instrument  servile par  sa  nature,  nuxilinirc 
du  despotisme  par  son  essence,  et  traitant  partout , 
avec  les  despotes,  de  la  liberté  du  sente  humain, 
attaquant  le  pouvoir  civil  quand  il  osait  vouloir 
s'affranchir  de  ses  liens,  mais  lui  rendant  son  in- 
fluence toutes  les  fois  qu'elle  pouvait  espérer  de 
s'agrandir  avec  lui;  intolérante  et  dominatrice» 
s'associant  aux  crimes  des  rois ,  pour  les  autoriser 
aux  yeux  des  peuples  ;  s'associant  à  la  longue  fai- 
blesse des  peuples,  pour  la  translormer  en  une  sorte 
de  vertu  ;  elle  avait  abruti  l'espèce  humaine  ,  jus- 

Su'au  point  de  lui  faire  adorer  les  chaînes  mêmes 
ont  elle  l'accablait  :  une  morale  bienfaisante  et 
douce  enveloppait  quelquefois  l'absurdité  de  ses 
dogmes  et  l'atrocité  de  ses  combinaisons  ;  un  éclat 
imposant  et  séducteur  se  mélaît  A  la  puMHié  de  ses 


525 


T 


pratiques;  des  abstioences,  commandées  par  elle, 
piquaient  Tamour- propre  des  consciences,  et  des 
illusions  quelquefois  touchantes  offraient  des  ali- 
ments ù  la  ^nsibilitë ,  désespérances  au  malheur. 
Vous  êtes  parvenus  à  rendre  étrangère  au  gou- 
vernement une  puissance  longtemps  sa  rivale;  et 
pondant  que  la  philosophie  la  présentait  aux  yeux 
lies  hommes  dépouillée  de  ce  qui  devait  séduire  en 
elle ,  vous  Tavez  expulsée  à  jamais  de  votre  organi- 
sation politique.  Ce  triomphe  est  de  tous  ceux  que 
vous  avez  remportés  celui  qui  consolide  le  mieux  la 
démocratie  que  vous  avez  jurée;  mais  son  culte  a 
encore  des  sectaires,  mais  ses  dogmes  ne  sont  pas 
étrangers  à  la  crédulité  de  tous  les  esprits;  la  bar- 
barie de  quelques  idiomes  qui  maintiennent  igno- 
rance dans  Quelques  contrées  de  la  république ,  les 
charmesde  l^abitiide  que  quelques  âmes  paresseuses 
ont  tant  de  peine  à  secouer ,  I  influence  toujours  si 
puissante  des  premières  impressions  de  Tàme,  qui  se 
réfléchissent  avec  tant  de  force  sur  tout  le  reste  de 
la  vie,  et,  plus  que  tout ,  une  persécution  funeste , 
dirigée  par  des  hommes  féroces  contre  des  hommes 
égarés,  ont  paru  ranimer  en  plusieurs  lieux  U  fer- 
veur d*un  culte  qui  s*éteint,  d*un  culte  qui  n'a  pu  se 
soutenir  contre  la  raison  ,  quand  celle-ci  était  per- 
sécutée ,  et  qui  succombera  sous  ses  efforts ,  quand 
elle  sera  secondée  et  dirigée  j)ar  le  gouvernemeot 
lui-même.  Mais  il  est  une  vérité  incontestable,  ga- 
rantie par  L'expérience  des  siècles,  une  vérité  qu  on 
ne  peut  trop  répéter  aux  dépositaires  de  Tautorité 

Eublioue,  et  qui  doit  être  dans  ce  moment  même  la 
ase  de  vos  déterminations  :  c*est  qu'il  D*y  a  que  la 
raison  seule  qui  puisse  triompher  de  Terreur,  c'c^t 
que  Tenthousiasme  religieux  est  toujours  exagéré  à 
aspect  des  échal'aiuls  et  des  bûchers,  et  que,  dans 
ce  siècle  de  lumières,  ce  n'est  qu'eu  éclairant  les 
hommes  qu'on  peut  les  ramener  aux  vrais  principes 
dn  bonheur  et  oe  la  vertu. 

L'Assemblée  constituante,  qui  a  eu  la  gloire  d'in- 
voquer la  première  les  droits  inaltérables  du  peuple* 
et  de  les  (féclarer  aux  ^lespotes  ;  rAssemblée  consti- 
tuante, dont  la  postér'i|é  n'absoudra  peut-être  pas 
toutes  les  fautes,  mais  dont  elle  admirera  souvent  la 
sagesse  et  le  génie,  eut  sur  plusieurs  points  impor- 
tants le  tort  crauguror  trop  peu  des  forces  que  l'es- 
prit humain  avait  acquises.  L'instant  éuit  arrivé 
pour  elle  d'affranchir  le  corps  politique  de  l'in- 
fluence de  la  religion  ;  elle  devait  décréter  que  cha- 
que citoyen  pourrait  se  livrer  aux  pratiques  que  de- 
mande le  culte  qu'il  professe,  mais  que  TEtat  n'en 
supporterait  point  les  frais,  que  les  cultes  n'auraient 
entre  eux  aucune  sorte  de  préférence,  qu'ils  u'ob- 
tiendraiont  aucune  publicité,  et  qu'aucun  monument 
public  ne  pourrait  en  consacrer  les  actes.  La  raison 
lui  dictait  cette  conduite,  la  uolilique  la  lui  com- 
mandait impérieusement,  et  le  désir  de  consolider 
son  propre  ouvragé  lui  en  faisait  une  loi  formelle. 
Au  lieu  de  détruire,  elle  voulut  créer  ;  organiser,  au 
lieu  d'abolir.  Elle  ordonna  pour  la  religion  un  éta- 
blissement pompeux  et  dispendieux ,  presque  aussi 
vaste  que  celui  qu'elle  avait  détruit.  Elle  établit  une 
hiérarchie  religieuse  tellement  combinée,  que  la 
ferveur  de  certains  sectaires  crut  v  voir  le  retour  de 
l'Eglise  primitive.  Au  culte  qu'elle  rétablissait  sur 
des  éléments  nouveaux,  mais  non  moins  dangereux 
que  les  précédents,  elle  joignit  le  plus  pana  fléau 
qui  puisse  accompagner  une  religion  itiïe  laissa  se 
former  un  schisme,  et  elle  ne  sut  jamais  le  réprimer. 
Je  ne  ferai  point  l'énumération  des  maux  oui  sont 
nés  de  cette  conduite  ;  je  ne  parlerai  pas  de  cette 
lutte  interminable  entre  les  prêtres  constitutionnels 
et  ceux  qu'on  appelait  réfractaires,  où  se  manifestait 
à  la  fois  l'esprit  de  domination  qui  persécute  et  la 
faiblesse  qui  conspire;  de  ces  discussions  journalières 


entre  les  partisans  des  uns  et  les  sectateurs  des  au- 
tres; de  ces  arrêtés  des  départements  tantôt  philoso- 
phiques et  modérés,  tantôt  despotiques  et  barbares, 
presque  toujours  impolitiques,  véritables  actes  de 
législation,  qui  sous  les  yeux  du  gouvernement 
formaient  un  fédéralisme  réel  ;  mais  je  dirai  que  ce 
qui  avait  été  élevé  par  la  faiblesse  et  l'imprévoyance 
tut  renversé  presque  aussitôt  par  la  démence  et  la 
fureur.  Cet  établissement  sacerdotal,  qui  devait  ex- 
pirer sous  les  coups  d'un  gouvernement  sage  et 
ferme,  fut  abattu  avec  le  scandale  d*une  orgie,  avex 
les  fureurs  du  fanatisme  kii-méme.  Les  Chaumette , 
les  Hébert  dirigèrent  cette  révolution  suivant  les 
principes  de  leur  âme  abjecte  et  féroce.  Ils  voulurent 
s'emparer  de  ses  résultats  pour  renverser  notre  li- 
berté ;  ils  voulurent ,  en  l'exagérant,  armer  contre 
vous  Iç  fanatisme  et  l'esprit  de  parti.  L'incrédulité 
des  brigands  tourmenteà  plaisir  la  crédulité  paisible; 
des  femmes ,  des  enrants,  des  vieillards,  des  milliers 
d'agriculteurs  utiles  furent  entassés  dans  des  cachots 
pour  avoir  entendu  furtivement  quelques  messes, 
ou  dit  leurs  péchés  à  l'oreille  de  quelque  prêtre.  L'a- 
sile domestique  fut  partout  viole  ;  les  images  véné- 
rées par  la  foi  trompée,  mais  innocente ,  Hireiit  dé- 
chirées; de  ridicules  cérémonies  furent  imaginées 
|M)ur  remplacer  les solennitésdevenues d'autant  plus 
chères  qu'elles  étaient  plus  sévèrement  proscrites* 
C'est  ainsi  que  le  brigandage  déshonora  une  révo- 
lution qui  appartenait  a  la  pliilosophie  et  à  la  saine 
Politique;  c'est  ainsi  que  U  France  régénérée  donna 
afiireux  spectacle  d'une  persécution  religieuse,  el 
qu'une  légiaUtion  qui  ne  devait  tendre  au'à  former 
un  peuple  de  frères  fut  souillée  par  desédiafauds  et 
des  lettres  de  eacheL 

Que  subsiste-t-il  aujourd'hui  du  régime  inventé 
par  Hébert?  quels  principes  a-t-on  suivis  pour  ar- 
rêter cette  intolérance  farouche  et  effrénée  ?  qu'a- 
tron  fait,  d'un  autre  c^té  ^  pour  prévenir  la  réaction 
dangereuse  d'un  zèle  devenu  plus  fer\'ent  par  la 
per^cution  ? 

Citoyens ,  vous  avex  déjà  pris  une  mesure  digne 
du  siècle  où  nous  vivons  et  du  gouvernement  que 
nous  avons  adiopté  ;  vous  avez  organisé  l'instruction 
publique ,  et  c'est  l'instruction  qui  peut  seule,  en 
développant  la  raison  ,  renverser  les  préjugés  et  les 
erreurs.  Vous  avez  appelé  la  morale  dans  votre  gou-  . 
vernement,  et  c'est  la  morale  du  gouvenieinent  qui 
confond  le  mieux  la  superstition  des  particuliers. 
L'homme  veut  des  illusions  et  des  chimères  sous  un 
gouvernement  oppressif  qui  afflige  à  chaque  instant 
sa  pensée  ;  il  a  besoin  de  chercher  loin  de  lui  des 
consolations  ^)u'il  ne  peut  trouver  dans  ce  qui  l'en- 
toure ;  il  lui  faut  une  autorité  suprême  au-dessus  de 
l'autorité  qui  le  blesse.  11  serait  le  plus  malheureux 
des  êtres  si,  lorsqu'il  est  opprimé  sur  la  terre,  il  n'es- 
pérait un  vengeur  dans  le  ciel,  et  ce  sentiment  est 
le  créateur  de  toutes  les  idées  religieuses.  Il  n'v  a 
que  l'homme  vraiment  libre  qui  jouisse  de  l'inaé- 
pendance  et  de  la  plénitude  de  sa  raison.  Le  secret 
du  gouvernement  en  matière  de  religion  est  peut- 
être  dans  ces  mots  :  Voulez- vous  détruire  le  fana- 
tisme et  la  superstition  :  offrez  aux  hommes  des  lu- 
mières. Voulez-vous  les  disposer  a  recevoir  des 
lumières  :  sachez  les  rendre  heureux  et  libres. 

Citoyens,  le  culte  a  été  banni  du  gouvernement, 
il  n'y  rentrera  plus.  Vos  maximes  doivent  être  à  son 
égard  celles  d  une  tolérance  éclairée ,  mais  d'une 
indépendance  parfaite.  C'est  une  bonne  police  que 
vous  devez  exercer ,  parce  que  c'est  la  lil)erté  tout 
entière  que  vous  devez  établir,  et  qu'elle  n'est  fondée 
que  sur  le  maintien  de  l'ordre  public.  Il  n'est  au- 
cune société  dans  l'Etat  qui  ne  doive  être  soumise  a 
la  police.  Quand  des  hommes  se  rassemblent  pour 
!  discuter  dà  opinioiis  politiques,  la  police  les  pro- 


528 


iégt  ;  mais  elle  veille  à  ce  qu'aucun  cri  séditieux  ue 
s'élève  du  sein  de  leurs  assemblées,  à  ce  qu'elles  ne 
déviennent  point  un  rassemblement  de  conjurés;  à 
ce  que,  sous  préteite  de  discuter  les  lois  el  la  con- 
duite du  gouvernement,  elles  ne  cherchent  point 
à  y  porter  atteinte,  à  en  arrêter  la  marche,  à  en  at- 
taquer les  principes.  La  police  veille  en  outre  à  ce 
que  ces  réunions  d'hommes  ne  forment  point  entre 
elles  une  subordination  politique,  i|  ce  qu'elles  ne 
s'aident  point  réciproquement  de  leurs  moyens  pour 
former  des  coalitions  et  des  ligues. 

Vous  leur  refusez  tout  ce  qui  tiendrait  à  une  exis- 
tence politique  ,  tout  ce  qui  leur  donnerait  li  puis- 
sance monstrueuse  des  corporations.  Ainsi  elles  ne 
s'empareront  d'aucun  établi?vsement  public  pour 
s'y  rassembler  et  y  délibérer;  elles  ne  pourront 
porter  dans  iiucun  monument  public,  dans  aucun 
lieu  public  ,  les  ornements  particuliers  qui  leur  sont 
cbers  ;  elles  ne  paraîtront  point  dans  les  fêtes  ;  elles 
n'assisteront  point  aux  cérémonies;  elles  n'en  diri- 
geront point  la  marche  ;  elles  n'en  détermineront 
point  l'ordonnance.  Enfin  partout  où  elles  pourraient 
méditer  une  usurpation,  elles  rencontreront  la  po- 
lice qui  saura  les  contenir.  C'est  ainsi  que  la  liberté 
particuIi^re  s'exerce  sans  troubler  l'ordre  public, 
que  les  droits  des  citoyens  sont  reconnus,  et  que  la 
liberté  de  tous  est  jgarantie. 

Pourquoi  ne  suivriez-vous  pas,  à  l'égard  des 
cultes,  quels  qu'ils  soient,  cette  marche  simple  et 
facile ,  cette  législation  naturelle  que  vous  avez 
adoptée  à  l'égard  des  Sociétés  qui  ont  pour  objet  la 
discussion  des  intérêts  publics.  Je  sais  bien  que  les 
dernières  méritent  intiniineot  plus  la  faveur  et  l'en- 
couragement du  gouvernement,  parce  qu'elles  peu- 
vent l'éclairer  et  le  surveiller  lui-même ,  parce 
qu'elles  peuvent  servir  un  jour  à  développeir  les 
affections  civique^  et  morales,  établir  entre  les  ci- 
toyens un  commerce  de  bienveillance  et  re.sserrer 
de  plus  en  plus  les  liens  qui  doivent  les  rattacher 
à  la  patrie^ 

Mais  enfin  les  pratiques  rcl if  ieuses  peuvent  s'exer- 
cer aussi;  elles  ne  sont  pas  des  délits  envers  la  so- 
ciété. L'empire  de  l'opinion  est  assez  vaste  pour  que 
chacun  puisse  y  habiter  en  paix.  Le  cœur  de  l'homme 
est  un  asile  sacré,  où  l'œil  du  gouvernement  ne  doit 
point  descendre.  D'ailleurs  il  estdémontré,  par  l'ex- 
périence de  tous  les  temps,  que  l'attrait  des  pra- 
tiques religieuses  pour  les  âmes  faibles,  s'accroît 
Par  les  soins  que  l'on  peut  mettre  à  les  interdire, 
roscrivez-les  dans  les  maisons ,  elles  s'exerceront 
malgré  vous  dans  les  réduits  les  plus  ténébreux  ; 
anéantissez  les  oratoires,  et  vous  verrez  se  creuser 
les  catacombes. 

Surveillez  donc  ce  que  vous  ne  pouvez  empêcher; 
régularisez  ce  que  vous  ne  pouvez  défendre.  C'est 
dans  les  lieux  sombres  et  déserts,  où  les  hommes  re- 
ligieux se  retirent  pour  éviter  la  persécution,  qu'ils 
ouvrent  leur  âme  à  ces  affections  lugubres  qui  la 
plongent  dans  une  habitude  de  démence  et  de  féro- 
cité (lu'on  appelle  fanatisme.  Tous  les  sentiments 
dont  la  source  est  dans  les  cœurs  ont  besoin  de  s'ac- 
croîlre.  Il  faut  des  martyrs  à  la  religion,  comme  il 
faut  des  obstacles  à  l'amour.  Le  prêtre  qui  s'expose 
à  (1rs  périls  pour  exercer  son  ministère  recueille  le 
prix  lie  son  courage.  Il  parait,  aux  yeux  de  la  cré- 
dulité qui  le  chérit,  un  être  préservé  par  Dieu  même. 
Gardez-vous  bien  de  faire  pratiquer  avec  enthou- 
siasme dans  des  souterrains  ce  qui  se  pratiquerait 
avec  indifférence,  avec  ennui  même, dans  une  mai- 
son pt'ivife.  Que  toutes  les  cérémonies  soient  assez 
libres  pour  qu'on  n'y  attache  plus  aucun  prix,  pour 
que  votre  police  surtout  en  puisse  surveiller  sans 
cesse  les  mouvements  et  les  excès.  Que  rien  de  ce 
qui  constitue  la  hiérarchie  saccrdulalc  ne  purssc  re- 


naître au  milieu  de  tous  ,  sous  quelque  forme  qut 
ce  soit.  Mettez  au  rang  des  délits  publics  tout  ce  qui 
tendrait  à  rétablir  ces  corporations  religieuses  que 
vous  avez  sagement  détruites  ;  qu'il  n'j  ait  aucun 
prêtre  avoué  parmi  vous,  aucun  édifice  destiné  au, 
culte,  aucun  temple,  aucune  dotation,  aucun  revenu 
public;  en  un  mot,  en  respectant  toutes  les  opinions, 
neIaissezrenaîtreaucuncsecte.Lescultes,quelsqu*ils 
soient,  n'auront  de  vous  aucune  préfërence;vous  n'a- 
dopterez point  celui-ci  pour  persécuter  celui-là, et,  ne 
considérant  la  religiou  que  comme  une  opinion  pri- 
vée, vous  ignorerez  sts  dogmes,  vous  regarderez 
en  pitié  ses  erreurs,  mais  vous  laisserez  à  chaque 
citoyen  la  faculté  de  se  livrer  à  son  gré  aux  pra- 
tiques de  celle  qu'il  aura  choisie.  Vous  ne  souffrirez 
pas  qu'aucune  d'elles  veuille  porter  atteinte  à  la 
propriété  nationale,  ou  se  glisser  dans  la  société 
pour  y  usurper  un  rang  quelconque ,  ou  appeler 
les  regards  du  peuple  sur  sts  cérémonies  et  sur  ses 
fétesé 

Les  édifices  publics,  les  monuments  sont  les  do- 
maines de  l'Etat;  ils  ne  sont  pas  plus  la  propriété 
d'une  agrégation  particulière  que  celle  d'un  seul 
homme.  Vous  ne  souffrirez  pas  qu'ils  soient  le  théâ- 
tre d'aucun  acte  religieux.  Ils  ne  peuvent  être 
prêtés  à  auciHie  secte,  car  si  vous  en  admettiez  une 
seule,  il  faudrait  le^  admettre  toutes,  et  il  en  résul- 
terait une  préférence  ou  une  lutte  dont  vous  devez 
prévoir  les  dangers.  Vous  ne  souffrirez  pas  davan- 
tage que  vos  routes,  vos  places  publiques  soient 
embarrassées  par  des  processions  ou  par  des  pompes 
funèbres.  Les  mêmes  inconvénients  en  résulteraient, 
et  il  est  d'une  bonne  police  d'éviter  les  rassem- 
blements qui  peuvent  égarer  les  hommes  en  alimen» 
tant  le  fanatisme. 

Votre  police  doit  s'étendre  sur  la  morale  qui  sera 
répandue  dans  les  assemblées  destinées  aux  céré- 
monies d'un  culte  particulier;  cette  morale  ne  doit 
jamais  être  en  opposition  avec  les  lois  de  l'Etat, 
avec  les  principes  au  gouvernement  :  tout  doit  ten- 
dre au  même  butdans  une  république  bien  organisée, 
et  il  ne  faut  pas  que  rien  au  monde  puisse  conspirer 
eontre  elle.  Les  cris  séditieux  seront  punis,  soit 
qu'ils  s'échappent  de  la  bouche  des  prêtres,  des  sec- 
taires, des  fanatiques,  soient  qu'ils  soient  le  cri 
des  factieux  que  vous  avez  vaincus. 

Citoyens,  sentons  l'avantage  de  notre  position, 
qui  nous  permet  d'appliquer  ainsi  les  principes  de 
la  philosophie  â  un  système  de  gouvernement  re- 
gardé, il  y  a  quelques  années,  comme  une  spécula- 
tion impossible  à  réaliser. 

La  théorie  que  je  viens  d'exposer  est  simple,  elle 
peutencore  se  simplifier;  elle  repose  sur  deux  bases 
inébranlables,  la  police  publique  et  l'instruction. 
Vous  avez  fondé  l'une  et  l'autre ,  et  vous  allez  pro- 
fiter des  avantages  immenses  qui  doivent  en  ré- 
sulter. 

Vous  aurez  un  gouvernemement  ferme,  et  il  im- 
posera silence  au  fanatisme;  vous  aurez  une  instruc- 
tion universelle,  elle  fera  succéder  la  raison  à  la 
superstition  et  à  l'erreur. 

C'est  par  l'instruction  queseront  guéries  toutes  les 
maladies  de  l'esprit  humain  ,  c'est  elle  qui  anéantira 
toutes  les  sectes,  tous  les  préjugés,  oui  saura  resti- 
tuer à  la  morale  celte  force  et  cet  éclat  qu'elle  ne 
doit  tirer  que  de  la  raison  et  du  sentiment. 

Emparez-vous  de  son  influence,  dirigez-la  vers  lo 
perfectionnement  de  l'espèce  humaine,  établissez 
les  principes  sur  lesquels  la  police  publique  doit 
s'exercera  l'égard  des  pratiques  religieuses, et  vous 
aurez  rempli  votre  tâche ,  et  vous  aurez  anéanti  le 
fanatisme,  sans  que  rexéculion  de  vos  lois  puisse 
CI  {^ter  \\n  seul  regret  à  la  sensibilité  de  vos  âmes. 

Ainsi  vous  préviendrez  par  votre  prudence  les 


.    «7 

mâtix  ftlfrent  du  Tanatismc»,  vous  arracherez  à  la 
malveitlance  un  de  ses  plus  terribles  movens ,  vous  ! 
compatirez  aux  erreurs  inséparables  ae  Phuma-  j 
Dite ,  aux  faiblesse  de  quelques  âmes  incertaines  et  j 
timides ,  sans  qu'il  puisse  en  résulter  aucun  danger^  ; 
pour  votre  organisation  sociale;  ainsi  vous  con-  ; 
sommerez  avec  certitude  la  révolution  commcn**  ; 
cée  par  la  philosophie  ;  ainsi  vous  dirigerez ,  et  - 
sans  aucune  secousse  violente,  les  hommes  que  vous  j 
ëtea  appelés  à  gouverner,  dans  le  sentier  de  la  rai«  : 
son.  Oc  sera  par  l'influence  et  par  faction  de  celle-  ; 
ci  que  vous  anéantirez  toutes  les  erreurs  ;  et ,  sem-  ' 
blables  à  la  nature,  qui  ne  compte  pas  avec  le  temos,  ' 
mai!«  qui  mûrit  avec  lenteur  et  persévérance  les  j 
trésors  dotit  elle  doit  enrichir  le  monde,  vous  pré-  ; 
parerez  constamment ,  et  par  la  sagesse  oe  vos  lois,  j 
le  seul  règne  de  la  philosophie,  le  seurempire  de  la  | 
morale.  j 

Bientôt  on  ne  connaîtra  que  pour  les  mépriser,  ; 
CCS  dogn^es  absurdes,  enfants  de  t*errcur  et  de  la  : 
cr;iintc  ,  dontrinfluence  sur  Teapèce  humaine  a  éié  ! 
si  constamment  nuisible.  Bientôt  les  hommes  ne  se-  ! 
ront  guidés  que  par  le  seul  attrait  de  la  vérité;  ils 
seront  bons, parce  qu'ils  Seront  faeureaif,  et  heureux 
parce  quMIs  seront  libres» 

Bientôt  la  religion  dtt  Socrate^  de  Marc»Aurèlê  et 
de  Cicéron  sera  la  religion  du  monde,  et  Tons  aurez 
la  gloire  d'avoir  en  h  cet  égard  rinf tiative  de  la  SU' 
gesse.  Vos  fêtes  nationales ,  vos  Instructions  répu- 
blicaines sauront  tfmt)ellir  et  mettre  en  action  les 


doulc  il  faudrait  imprimer  le  rapport  et  ajourner  la  dit- 
cossion,  afin  qu^on  pût  avoir  le  temps  df*  méditer  ;  mais  le 
comité  ne  propoie  ici  que  de  »imples  moyens  dViéculion. 
(Applaudissements.|La  déclarulion  des  Droits  etlaconsti* 
tulion  ont  établi  ta  liberté  des  cultes;  files  ont  dit  que  nul 
ne  pouvait  £lrc  Iroublé  pour  ses  opinions  religieuses,  c^esl 
donc  une  loi  organique  de  la  consUtuiion  qu'où  nous  pro- 
pose aujourd'hui.  ^  Applaudissements.)  Il  sérail  peut-être 
bon  de  rappeler  dans  le  considéranldc  celte  loi  les  articles 
de  la  Déclaration  des  Droits  et  delà  consiitulion  qui  éia« 
blisseut  le  principe  auquel  elle  sert  de  développement. 

Vous  avez  déjà  décrété,  le  2  des  sansculottidrs,  qu'au- 
cun culte  ne  serait  salarié;  il  serait  bon  de  rappeler  oussi 
cette  loi^  car  les  prêtres  n*oublient  jamais  de  demander  de 
Pargenl.  (On  riu  )  Je  demaude  qua  la  projet  Mit  mis  aux 
voix  article  par  article. 

Laportb  :  Je  crois  que  si  rajourneroent  n'était  pas  conrt, 
il  pourrait  produire  on  très»  nauf  ah  eOiel.  Lorsque  Téiais 
nembro  du  comliéde  surfis  généralei  je  me  riippellr  qtié 
chaque  jour  nous  recevions  des  Ktircs  de  toutes  les  ndmi* 
iiiiirtilons  de  la  rèf aMIquei  Iftfl  nous  faisaienl  part  de 
rembarrai  où  cllet  se  trouvaient  relativcmcni  aux  cultes, 
et  nous  demandaient -quelle  conduilr  HIes  devaient  tenir. 
11  ne  faut  pas  plus  longtemps  laisser  ro|>tnlon  publique  in- 
ecrtaiiie;  il  faut  donner  k  eeuxqui  sont  cbnrf^es  dVxercer 
la  police  Une  bonne  loi  qui  leur  serve  de  boUtsuK' ,  qui 
leur  faelUtt  les  moyens  de  réprimer  les  écarts  de  ceux  <|ui 
ne  soht  pus  éclairés,  el d'eapétber  qu'aoeun  culte  dViD' 
pièle  sur  un  autre»  Je  demande  4ii*il  soii  fait  une  iccdikIo 
leclure  du  projet  de  décret. 

Cambok:  Je  craina  d'avoir  été  ma!  Compris,  laftialslt 
n'est  eniré  dans  ma  pensée  de  (bire  rapporter  la  toi  du  2« 


prcceptcs  sacrés  de  cette  morale  que  vous  voulez  i  jour  des  sansculottKles»  qui  «ccorde  des  secours  an  ex 

graver  dans  te  cœur  des  hommes.  Mais  plus  cette  prêtres:  elle  intéresse  trop  la  tianquillit4 publique}  et  Kmv 

rrligioti  poiiliqtie  doit  être  bienfaisante  et  douce,  !  âueje  t*ai  rapi>el4e,  oVtaitMuleineHt  poar  i|v'on  ne  lui 

plus  vous  devez  éviter  de  la  souiller  d'avance  par  des  1  oonnût  pas  une  fausse  interprétation*  le  désirerais  qu'a- 


persécutions  et  |)ar  des  injustices 

Ecoutez  la  vuix  de  la  raison  :  elle  vous  dira  quf 
c*est  au  le nipssrul,  à  raccroiseetnent  des  lumièrcsi 
aux  progrès  de  Tespril  humain,  que  vous  dévec  lali* 
ser  le  som  d'anéantir  toutes  les  erreiif»,  ÔK  respeo* 
ter  votre  sublime  ouvrage,  et  d'emener  Tesp^e 
humaine  à  ce  perrécliounement  prépard  par  vos  in* 
stilulions  mémos. 

Ce  rapport  est  fréquemment  interrompu  par  les  plus 
vils  applaudissements. 

BoisBj  lit  un  projet  de  déereu 

PAattaes  !  Il  nVst  personite  de  mms  ^vA  ne  sente  l*lm- 
porlance  de  ce  projet  de  décret.  Tout  le  monde  a  réflécbt 
sur  cette  matière,  tout  le  monde  sait  qu*bn  ne  peut  près* 
dire  à  Tbomme  l'objet  de  son  (mfie;  celui-ci  adorera  le  so- 
leil,  cet  ui<ei  la  lune,  un  autre  un  otf^on  ,*  chacun  a  le 
droit  de  choisir  l'objet  de  sa  vénération.  Ainsi  il  suffira  de 
mettre  le  projet  de  décret  aux  voix  article  par  article,  et 
je  suis  pennadé  qu'H  n*y  aura  que  Irès-peo  de  dllHCultéS. 

CuBNiiR  :  Il  m'a  paru  que  tous  les  articles  de^ce  projet 
étaient  conformes  aux  principes,  et  je  suis  persuadé  que  j« 
serai  de  Pavis  des  comités.  Mais  je  ^ense  que  sur  une  ma* 
tiire  p.ireille  il  ne  faut  pas  donner  lieU  aux  malveillants  de 
calomnier  lu  Convetrtkm ,  en  décrétant  frtr  enthonsta^me. 
Je  diMnandc  Tajournement,  persuadé  ^ue  je  suis  que  dans 
la  lutte,  s'il  s'en  engaf^e  une,  les  principes  de  la  philoso- 
phie l'(*mponenMt  sor  les  prefui^éSi  Mais  tt  fié  fbul  pis 
qu'on  puisse  dire  q«e  voos  avet  fmné  la  bonche  à  ceux 
(jui,  dans  la  Convention ,  ont  en  une  opinion  contraire  a 
cille  des  comités.  Sonnet  que,  lors  des  révolations  d'An» 
gleterre,  ce  sont  tou|oorf  lesmatKtet  religieuses  qui  ont 
donné  le  signal  de  la  guerre  civile,  et  que  lés  diflTérents 
partis  ont  toujours  dit  qu'on  leur  atait  fermé  la  boucbe. 
SI  TOUS  n^ouvrei  pas  la  tribune  à  ceux  qui  voudront  parleri 
il  circulera  dans  le  public  des  écrits  qui  feront  d  autant 
pi  m  rt'effel  qoe  Tons  n'aorei  pas  nnitn  les  eiitcndie.  Je  ne 
crains  pas  la  %'Oix  des  préjugés,  il  sera  extrêmemenl  facile 
de  leur  répondre  ;  t-i  c  est  parce  que  je  le  crois  que  ]e  dé- 
sire qti*oa  eMendele*  objertions»  Je  éeaaadi  l'InipresBiefi 
et  rajoaraeiMii*  à  trais  joufSi 

CuAmi  :  ISIItab  kuéstfèii  iHMàfriii  pftodpeftMMHi 


pré#  avoir  ajouté  dans  le  considérant  les  deux  réflexions 
que  j*ai  faites,  on  dit  aussi  qie  lei  égiitas  et  les  presbytères 
seront  vendus» 

Pf Mfetff  Mto  I  GCAte  dbpoiItloB  doit  IMre  ime  foi  I 
part. 

La  rapportélftr  fit  leSIrtldéS;  Ils  aant  suecesilvement 
loopies. 

Il  s*élève  une  légère  diaciisikMi  aur  Part.  VIIL 

Boisftftex  t  Bn  interdlsam  attx  communes  la  tibeftéd*a^ 
qMrlrofl  de  louer  nn  local  t>oQr  l'exercice  d'nn  culte, vous 
toflibet  da«É  l'Hiconvénleni  contraire,  celbf  dcle  faiffe 
louer  ou  acheter  par  des  corporations. 

Btaifta  !  Boissieux  n*entend  pas  bien  Parlicle.  car  il  a 
précisément  pour  but  dVmpi'ciier  Pexistif^nce  d  aucunes 
corporations  et  snrtom  de  eorporailObs  rctigieûscs.  Si  une 
commune  pouvait  acquérir  ou  louer  un  local  pour  Texer» 
clee  d'un  euile»  H  en  nftsnIleraH  q nielle  pourrait  an^sl  Im- 
poser nne  taxe  pour  le  même  olijel. 

Albittb  :  Je  demande  qu^on  mette  dans  l'article  ces 
mots  :  €t  tecHont  de  communes, 

Gamban  t  C'est  kinlile.  Les  communes  ne  sont  divlftée!i 
en  »i  étions  que  pour  1rs  0|iérat ions  qui  leur  sont  confiées 
par  la  loi  ;  mais  dès  qu'elles  sortent  des  bornes  que  la  loi 
leur  a  prescrileSi  eHeanc  pcwvtnt  plttslbirc  aueiin  acte. 

GémssiXDt  :  ft  vatlt  mlent  a|otiter  un  mot  inutile,  qui 
lèvera  tous  tes  donics,  que  d'omettre  un  mot  (^ui  donne- 
rait lien  ï  den  difficultés. 

L'assemblée  adopte  l'amendement  d^AlbiltCf  aidfi  que 
les  deux  précédemment  (bits  par  CamboB*    ■ 

Le  décret  est  fftadn  ainsi  qu'il  Suit  i 

•  La  tCU>nventlOn  nationale,  aorès  avoir  entendu  le  rap- 
port de  ses  comités  de  salut  public,  de  sûreté  générale  et  . 
de  législation ,  réunis,  décrété  : 

•  An.  I*'.  ConforméBMnt  a  l'artiele  Vllde  lo  Déelatti^  ' 
tion  des  Droits  de  THomme,  et  ù  l'article  CXXII  de  It 
conslitulioii  »  Texercice  d'acun  culte  ne  peut  être  traablé* 

c  II.  La  république  n'en  salarie  aucun. 
i  UL  Elle  M  fournil  aucun  local  ni  pour  l'eierclee  do 
cuMe»  as  pMff  le  logatteM  das  tttaiitrea» 


538 


t  IV.  Les  cérémonies  de  tout  culte  sont  interdites  hors 
de  Tenceinte  choisie  pour  leur  eiercice. 

•  V.  La  loi  nc  rcconnait  aucun  ministre  du  culte;  nul 
ne  peut  paraître  en  public  a?ec  les  habita,  ornements  ou 
costumes  affeclés  k  des  cérémonies  religieuses. 

«  VI.Toutrassemblemcnl  decitoyrnspourPcierciced*un 
culte  quelconque  est  soumis  k  la  surveillance  des  autorités 
constituées  Cette  surveillance  se  renferme  dans  des  mesu- 
res de  police  et  et  de  sûreté  publique. 

c  VII.  Aucun  signe  particulier  à  un  culte  ne  peut  être 
placé  dans  un  lieu  public,  ni  eilérieurement ,  de  quelque 
manière  que  ce  soii.  Aucune  inscription  ne  peut  désigner 
le  lieu  qui  lui  est  alTeclé;  aucune  proclamation  ni  convoca- 
tion publique  ne  peuvent  être  faites  pour  y  inviter  les  ci- 
toyens. 

•  VIII.  Les  communes  on  sections  de  commune,  en  nom 
colleciif,  ne  peuvent  acquérir  ni  louer  de  local  pour  Teier* 
cice  di'h  cubes. 

•  IX.  Il  nc  peut  être  formé  aucune  dokition  perpétuelle 
ou  viagère,  ni  établi  acanetaxe  pour  en  aôiuilter  let 
dépenses. 

•  X.  Quiconque  troublerait,  par  violence  »  1m  cérémo- 
nirs  d*un  culte  quelconque,  ou  en  outragerait  les  objets, 
sera  p«nt  suivant  la  loi  du...  sur  la  police  correctionnelle. 

•  Xi.  Il  n*est  point  dérogé  à  la  loi  de  la  S«  sansculottide, 
3*  année,  sur  les  pensions  ecclésiastiques,  et  les  disposi- 
lions  en  seront  exécutées  suivant  leur  forae  et  teneur. 

•  XII.  Tout  décret  dont  les  dispoiiliona  wraifol  CMi* 
trairesà  la  présente  toi eatrapporté,  • 

OvBOT  :  Il  estboo  de  dire  que,  par  eetlt  M,  vova  s'a* 
m  pas  voula  rapporter  celle  relative  am  N^bw  qai 
B*ont  pus  prêté  le  srroNNit  à  régalité.M« 

Plusieurê  wai»  :  Non ,  non  I 

Cimoii  :  Vons  avei  consacré  trois  i«wt  par  ëéeiée  à  la 
discussion  des  moyens  de  dininiitr  la  msat  ëas  asaigaatt 
en  circulation.  Plusieurs  mcnbres  de  cellt  asaewbléi  ont 
divers  moyens  à  présenter  ;  c*estcn  éaovIaBlItsdi  vers  pro- 
jets et  en  en  combinant  les  avantages  qnt  bous  ptnvaas 
parvenir  à  un  résultat  utile.  Je  deaianée  en  conséqnenct 
que  la  discussion  s*ouvre«  et  que  la  ConventioB  entende 
les  membres  qui  aaront  è  parler  sur  cette  i^pertasle  na« 
tière. 

CoasH-FoSTisR  :  Un  grand  nombre  de  leeibrca  ayant 
des  projets  à  présenter  à  cet  égard,  ce  serait  nne  opératioa 
très-longue  que  d*entendre  cette  lecture  ;  il  me  semlile  plus 
expéditif  d*autoriser  le  comité  des  finances,  section  die  la 
trésorerie,  à  recevoir  tous  les  projets  et  à  oréonner  l*iai- 
pression  de  ceux  qui  lui  paraîtraient  aller  plus  diredemeol 
an  but  que  se  propose  la  Convention  natitioale  :  je  deunde 
donc  que  les  projets  lui  soient  renvoyés. 

CmBOR  t  rinsiale  sur  la  nécessité  de  donner  è  ealte  dis- 
cussion une  grande  solennité ,  et  surtout  une  publicité  qui 
puisse  porter  la  lumière  et  la  conviction  dans  tous  les  es- 
prits. 

TniBAULT  !  Tappuie  la  proposition  de  Cambon  s  mais 
c*est  vainement  que  vous  lerei  des  plans  de  finance  si 
vous  ne  commences  par  anéantir  Tagiotage.  (On  applau- 
dit. )  On  m*avait  parlé  des  agioteurs  qui  se  réunissaient  au 
Palais  ci-devant  Royal.  J*al  voulu  les  voir  de  plus  près  ;  ie 
OM  suis  mêlé  au  milieu  d*eux,  j*ai  cbercbé  à  connaître  leur 
langage;  j'ai  été  effrayé  du  degré  de  perversité  de  cette 
sorte  de  gens.  Ces  vampires  se  séunissent,  sur  les  neuf 
heures  du  maiin,  dans  un  lieu  convenu  ;  c'est  un  café  le 
plus  souvent.  Là  ils  règlent  entre  eux  la  hausse  ^*ils 
donneront  au  marc  d'argent,  qui,  comme  vous  le  savei, 
est  le  régulateur  du  prix  courant  des  denrées.  Ces  Jours 
derniers ,  par  exemple,  ils  ont  fait  monter  le  louis,  qui  ne 
valait  d*abord  que  102  livres,  à  1S2  livres  en  deux  heures; 
et  il  est  de  fait  que  chaque  jour  il  se  vend  ou  s  apporte 
dans  celte  espèce  de  Bourse  30,000  louis,  sans  qu'il  en  soit 
livré  réellement  plus  de  500;  et  savez-vous  comment  se 
terminent  ces  opérations  abominables?  Quand  cos  hommes 
ont  rempli  leur  but,  agioté,  centuplé  le  prix  des  denrées, 
doublé  Tinfortune  de  la  partie  industrieuse  du  peuple, 
tuivaiit  le  vœu  de  ceux  qui  les  emploient,  ils  comptent 
entre  euK  et  finissent  par  se  battre;  complément  d  opéra- 
lioo  digne  des  acteurs  qu*on  y  emploie.  (  Plusieun  voix  : 
CestvraL) 

11  estesaenliel  que  le  comité  de  sûreté  générale  surveille 
4atellescenss  la  plii^rtieioiiteurklmdantlaréfolatioo 


par  leurs  dilapidations,  ou  sont  d*aocieiit  domestiques  q«l 
ne  veulent  pas  travailler  et  se  livrent  à  cet  infime  nom* 
merœ  ;  ou  enfin  des  hommes  qui  déjà  profitent  de  la  con- 
quête de  la  Hollande  pour  agioter  sur  les  marchaodlsM  de 
ce  pays,  qui  par  là  vous  coûteront  autant  que  celles  qui 
sont  ici. 

Il  faut  donc  que  le  comité  les  surveille  qn*il  n^y  ait  rien 
d^arbitraire  dans  les  mesures,  mais  quelles  soient  sévères; 
alors  vous  pourrex établir  des  pians  de  finances;  alors,  et 
seulement  alors,  la  confiance  renaîtra,  fin  attendant.  Je 
soumets  cette  idée  à  la  Convention.  Dans  le  temps  on  a 
bien  fait  de  fermer  la  Bourse,  mais  quand  votre  système 
de  finances  sera  établi ,  ne  sera-t-il  pas  utile  d'en  ou- 
vrir une  sur  le  modèle  de  celle  d* Amsterdam,  pour  empê- 
cher tons  ces  gens  de  spéculer  sur  Tor,  Targent,  let 
marchandises  ?  Il  faut  les  laisser  spéculer  sur  les  papierSt 
mais  d'une  manière  prévue,  réglée  par  la  loi. 

Je  me  résume  en  demandant  que  le  comité  de  sûreté 
générale  soit  chargé  de  surveiller  les  agioteurs.  (On  ap- 
plaudit ) 

DsNTxsL  : J*appuie  la  proposition  de  Thibeult  ;  il  ne  Tau  t 
passe  borner  à  la  surveillance  d*un  comité,  asais  éveiller 
celle  de  tous  k»  citoyens  ;  une  Bourse  conuiie  celle  d'Am- 
sterdam atteindrait  ce  but  ;  là,  tous  les  négociants  se  con- 
Mitraient;  là,  tous  les  fripons  seraient  surfeillés  etbien- 
tét  réduiu  à  TimpuiManee  de  faire  le  bmI.  (On  applaudit.) 

LsroaTB  :  Je  rappellerai  un  Ihit  qui  a  déjà  été  cité  : 
c*c8t  que  des  gens  dont  les  figurée  sont  très-nouvelles 
dans  le  commerce  iopréMntent  chei  tous  les  marchands, 
achètent  tout  et  à  tout  prix,  depuis  la  denteUe  jnsqu*à  TaU 
luosetle,  malt  jaaMls  pour  leur  compte  ;  Ms  ne  sont  que 
ëes  intermédiaires;  il  arrive  ainsi  qu'avant  de  parvenir  du 
négociant  m  ceniommileur  les  marchandi«es  passent  par 
fingl  maint  ;  et  le  consonuneleur  paie  le  profit  nue  chacun 
y  hiu  Le  vériubie  nègocialenr  est  dans  le  deud  ;  c'est  de 
fons  qu'il  attend  det  remèdes  àinnsiet  mant*  Geuspro* 
pctés  par  ThihauH  sont  InsuBsanit. 

le  demande  qu'outre  la  sorveiHance  profoqnée  let  eo- 
mkét  de  sûreté  générale  et  de  commerce  se  concertent 
pour  préaenler  à  n  Convention  des  Tuet  tur  les  moyent  de 
lépriaier  rat loiafe,  et  de  donner  an  commerça  Pactlf Hé 
qui  lui  convient. 

Tentes  let  prepetitieat  aent  renttjéet  nu  coerilét  ée 
tûreté  générale  et  de  commerce» 

La  séance  est  levée  à  quatre  1 


N.  B.  —Dans  la  séance  dn  5,  la  Convention  •  apprit 
que  la  tranquillité  était  rétablie  à  Marseille,  et  que  In  8o- 
ctéié  populaire  régénérée  avait  détruit  tout  les  signet  du 
terrorisme. 

La  Convention  a  décidé  que  Ions  let  fonctiennelro  pu* 
Mies,  destitués  ou  suspendus  depuis  le  •  thermidor,  se- 
raieni  tenus  de  sortir  des  villes  où  Ils  se  trouvent,  dani  le 
délai  de  trois  joun,  et  de  retourner  dans  leurs  mnnidpa* 
lilés  Les  contrevenants  seront,  à  la  poursuite  de  l'afnit 
national  du  district,  condamnés  à  un  emprisonnement  de 
tix  mois.  Itt  jugement  ne  sera  pas  sujet  à  l'appel. 

La  commission  des  Vingt  et  On  a  déclaré  qu'elle  avait 
I  entendu  les  prévenus  aujourd'hui  pour  la  denîièrB  fois,  et 
qu'elle  ferait  son  rapport  sont  peu  de  (ours. 


LIVRES    DIVERS. 

QuelfUêt  moueet  pour  tkiitoirt  H  U  récit  de  mês  pèriiê 
depuis  le  SI  mai  1193,  par  Jean  Baptiilo  Louvct,  l'un  de« 
'  représentants  proscriU  en  1795;  l  v«l.  Im-ê*,  Prit  :  5  liv..  et 
I  6  liv.,  franc  de  port,  par  la  poaie.  A  Paris,  chei  J.^.  Lou- 
I  vet  libraire  Palais-Egalité,  galène  neuve,  derrière  le  Thëa* 
I  tre  de  la  République,  ■•  «4  ;  Ta  venve  d*Antoioe-JMeph  Gor- 
'  sas,  rue  Neuve-det-Petiu-Champs,  en  cain  de  celle  de  U  Loi, 
'  n»  741  ;  et  Bailly,  roe^Bonoré,  barrière  des  Sergenis.  11  faut 
'  aflk'anchir  les  lettres  et  l'argent. 

PaytmenU  à  la  trétorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  sii  nremiers 
Bsois  ;  il  sera  fait  i  tous  ceui  qui  seront  porteurs  d'inscrw* 
taons  au  grand  livre.  CeHii  pour  les  renies  ▼iagères  est  dn 
huit  omis  vmgt  et  un  jenrs  de  l*onnëe  t798(vieus  stfl4. 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  HOMTEUR  llIVERSEL. 

N©  157.  Septidi  7  Ventosc,  fa»  S«.  {Merereii  Î6  Février  1795,  «teiWP  style,) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Fiermef  k  X^Jhrier,  —  Le  gooTeroenicnt  ouvre  aujour- 
d'hui un  emprunt;  l'intérêt  en  est  à  5  pour  1Û0.  On  y  reocrra 
les  anciennes  obll{;atioDs  d*etat  de  3  1^2 ,  poumi  que  le 
porteur  de  celte  espèce  de  ptpiers  foumime  en  numéraire 
une  eomme  émale  mi  prfaolpal  des  oblIsMioet:  et  cseMe  i 
classe  de  préteurs  reeerra  une  MNit«Ue  obligation  porual 
4  pour  100.  «I  eu  mu  uneflmiiiaalUNi  de  8  pour  liM  de  la 
pariie  du  priadpal  fournie  eu  AUiBurako.  Le  miuiaire  dca 
ruKinces,  dans  la  vue  de  se  concilier  les  capitali»iei«  a 
fait  prendre  augouverncoieot  l'eu^aucBient  de  ne  rembour- 
ser rcmprunt  amuel  gue  dans  Ox  ans,  et  d'en  préreuir  six 
mois  d'avance. 

—  Rotr^  cabinet  éprou voles  plus  vives  Inquiétudes.  STil  a 
déjà  eu  des  raisons  de  craindre  les  démarcbes  empressées 
de  la  cour  et  BiTlin  pour  parvenir  à  la  paix ,  Il  croK  «voir 
un  nouveau  motif  pour  eu  être  aujourdliul  encore  plus  cf* 
Ira^é,  ru  voyant  les  K-ovinees-Voies  à  la  discrétion  dks 
Franqds.  QuHl  y  ait  ponriaM  Ié  m  wmmdLi  d'alwmes,  la 
clKWC  paraîtra  d'aboud  éoiipnBiifsa;  iyUls  rien  de  plus  aa- 
lurei.  s'il  est  vrai  que  la  Prusse  mvaHIe  co  ce  monent  il  ne 
lias  séparer  les  intérêts  de  la  uMdson  Haûwttdérieiine  dbs 
Provinces- Unies. a>d d'aiUeuneal  un  avisas pcop^^tialtfve 
de  surveiller  les  MMëuuéeriana. M- toa  gwissÉins,  doal^a 
tacaiow  nepeutffeHur#il(»afWiiuua.Auuu»ddrifl—iHi, 
AU  oo»  de  .ccMMMiiDB,  jyMl  «al  ^a  pt«t-fl»piaMi»àda 
liberté  politique  du  cc^4iatsi  |^iwL<pi'U  eu  Mit,  M  #anae 
i;(iu'ralcaiail  ici  que. pour  c^wicluiiB  nue  paix  pwiidiaiy, 
Ji ^  ubMades  Kiuut  plus  oomb^ttU^ du  oôlé  da  l'Auiriclie et 
plus  |H:nîblc«  ù  vaincre  que  durolti  Ju  roide  Prusse.  $}uaii4ia 
cour  devienne  a  envoyé  à  DAlç  un  certain  qDUUiiUcodati  pofr 

*  y  entamer  quelques  né^bclàuoo»,  on  jne  devruK  s'en  prà- 
mefire  que  4e  san«Hler  un  peu  mIcUx  les  démarcbes  de  la 
Prusse  •  ut  rien  au  delà.  On  ne  s'apcrçuil jK)int  d'aiUetv*  à 
la  eour  de  Vienne  qul^'y  uMpMr  d«8  dl^iasltiontii'vae 
paix  loyale  et  franche  plut  dt  <MM-lfédaot les  «sprltt^Oe 
dans  les  affaires.       ..,..«    ■■..-- 

~  L'eni|iereur  .Cii  iûBt  A.  fait  tnnmé  vers  la  cour  de 
Bussic.  avec  laquelle  les  relation»  Uiplomatiques oa|  ngné 
toute  l'aciliUé  que  U  Prusse  a  bku.  voulu  pardru  de  ce 
côicMà. 

DeNiUhrim,  le  kjècrker.  —  La  division  prussIeDM  att 
«rdresdu  général  iUlkronUi  qnbtn  sa  fMisition  de  Wiesbaden 
pour  se  rendre  au  bas  Udo.  Le  CQf|>s  que  oonmaode  le 
géuéral  liubeulohe  rempUoera  IcsPruasIensà  Wleabnden. 

—  La  ville  de  Munster  présente  l'image  d*an  canip.  Ahb 
Autrichiens,  qui  viennent  d*en  sortir,  ont  succédé  les  Hano- 
Triens  \jt  pays  va  être  riimpil  de  troupes  autrlcUennes^guI 
probablement  y  prendront  leurs  quartiers  d'hiver. 

~  Le  dégel  du  Rhin  fait  craindre  devant  Mayencc  lUW 
Inondation  considérable  ;  la  glace  est  amoncelée  dans  \ia 
Iles.  IH»  {{laçons  énormes,  détachés  aux  environs  du  cou- 
vent de  Weihsnau,  ont  été  entraînés  jusqn*a  la  porte  Haï- 
mond.  —  Iji  déliàcle  du  Mein  a  cauaé  -beaucoup  de  dom- 
m&{;es;  ce  fluuve  déborde  la  liopne  de  Rostbeim. 

RÉPUBLIQUE   Hfift  PBOVINCES-UIIIES. 

ha  Haye,  ie  \h pktwion, -- On  vient  de  publier  id  la 
prodamaiion  ani vanie-dea  représentMrta  du  peuple  fmçalr 

UBBHrÉ,  S0AU1B,  paânHon. 

A  La  Haye,  le  11  pluviôse,  rsaVda  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

•  Los  représentants  du  peuple  près  les  armées  du  Nord 
et  de  Srmbre-et-Heuse  arrêtrnt  ce  qui  suit  : 

«  Art.  r*.  Tous  les  biens-meubles,  immeubles,  vaisseaux, 
marcliaudiscs»  denrées,  effets,  créances  et  propriétés  quel- 
conques des  gouvernements  en  guerre  avec  la  répubÛqun 
française  et  émlgréa  français,  ceux  dflUtfélaf»  dru  mninr» 


nkombres  des  églises  ou  dos  corporations  rdiglauseStdnA" 
grés  des  pays  conquis  cotre  le  Rhin  et  la  mer ,  ainsi  4|ne  len 
dê|)dls  faits' par  les  membres,  églises  ou  corporations,  sont 
saisis  et  contisqués  au  profil  de  la  République  françaii«. 

K  n.  Tous  ceux  qui  seront  dépositaires .  débiteurs  ou  dé- 
tenteurs de  ee  qui  est  uKutionné  en  i'arllde  précédent  en 
ferooi  leur  déclaration,  |iar  écrit,  an  nuigisirat  de  leur  ar- 
rondisseaseot,  dans  les  huit  jours  après  la  publlctflon  du 
préNeoi  arrêté.  Les  contrevenaoïs  paieront  une  amisde  du 
double  de  la  valeur  de  ce  qu'ils  n'auront  pas  déchue  La 
quart  de  Tamende  et  le  quart  de  la  valeur  des  objets  cl  des 
sommes  non  déclarés  appartiendront  A  cdul  qui  les  anni 
découverts. 

•  m.  il  sera  nommé  un  agent  général  pour  toutes  les 
Prorineès-Unies ,  leqnel  sera  chargé  de  recoeHIir  les  déela- 
raiions  et  de  disposer  des  objets  y  contenus,  selon  les  ia« 
stmctluns  qu'il  recevra  des  représentanu  du  peuple.  Les 
magislFBis  lui  remettront  les  déclarations  qui  ieuranraol 
étéfaites. 

I IV.  Il  est  défrndn  de  fiire  aucune  acceptation  de  billets 
c^  lettres  de  change,  mcone  négociation  ou  emprunt  pour 
coaiMe  des  ^mertmarÊH  en  ^pattftt  avec  la  république 
française,  aona  peine  de  onnflsraiou  du  montant  des  objets. 
Les  contrevenants  aérant  fiprdés  et  trahés  eonune  ennemlt 
dn  U  jnqpuUI<|w  iraBqdaa^ 

/.UdnldéfaiM^ntt&  ^gcntodviUat  nUltairesdela  r^Ni- 
piique  française  de  saisir  aucune  caisse  ifppartenant  nos 
villes,  communes  et  gouvernepicut  des  Proviaces-Unies, 
BOUS  peine  de  destitution  et  d'arrestation. 
'*  Tl/'we  fWrtwilrtrt'^ié'sfcra  adressé  aux  états  généraux, 
ami  lnBlMlnndn1eCalr«]pnrf«nhr  aux  états  des  Provfnces- 
Unles;ponr^ire  imprinnS  dans  les  deux  langues,  envoyé  et 
nfiicbé»  «M»  délai,  dnna  tomes  les  villes  commanes  et  ports 
des  AvvInoes-IJniea. 

«  Slgfiié  torifflmêi,  Fébcuis,  Alodibi, 
N.  HmÉMàuii,  JoaaEaret&QBuuoi^ 
'  cfnèrapèdltlan  confonde: 

«ij^pnd  M.  ■anasMAuu.  s 


CONYEIÎTION  NATIONALE. 

Smiê  4u  r$f^$rt  faU  «m  nom  et  la  enrnmtM^on 
chargée  de  i'tawmmi  des  papien  trouvés  eket  Ro- 
bttp4€rr€  tê4eiê  comptieei^  par  E,-B.  CxtvrtoU, 
dépÊiâé  eu  ééparlemmi  de  l*Aube:^  dam  la  séance 
4m  16  «tnof^«»  tée  la  répabùpte  frem^if» 
une  et  indiviêitde, 

Laksonf  Cousin  avec  Robespierre ,  et  jetons  let 
yeux  sur  la  juslificatiou  des  détenus  de  la  ganiiso» 
de  Morlagne,  eu? oyée  au  comité  de  salut  public. 

'Vous  y  Terrez  avec  indignation,  citoyens,  «  que 
Cbolet  a  été  évacué  sans  motifs  ;  que  la  patrie  a 
perdu  des  millions  dans  celte  évacuation,  outre  les 
grains,  les  farines,  lesliabiUemeuts,  lesapj>rovision- 
iioments  des  manufactures  et  les  manufactures  elles- 
mêmes  ;  que  si,  dès  le  commencrtnent  de  la  guerre, 
on  eût  fait  des  dépots  de  meubles ,  grains ,  four- 
rages, etc.»  la  nation  aurait  eu  des  ressources  im- 
menses. ■ 

Vous  y  verres  que  «  ces  i:itoyens,  tant  calomniés, 
ont  toujours  verse  et  sont  prêts  à  verser  encore  leur 
sang  pour  achever  la  destruction  des  brigands  roya- 
listes, malgré  Tatroce  iniquilé  (y  est-il  dit)  de  ceux 
,  qui,  par  les  horreurs  qu'ils  ont  commises,  au  nom 
i  de  la  république  essentiellement  juste  et  fondée  sur 
les  vertus,  sont  parvenus  à  augmenter  le  nombre  de 
ses  ennemis,  et  à  changer  des  citoyens  paisibles  eu 
rebelles  désespérés.» 

Vous  y  verrez ,  citoyens,  •  que  vos  décrets  bîett» 
bisanls  n'ont  pas éïé  exécutés;  qu*on  pillait  les  i»*^ 

67 


£30 


sons  des  patriotes;  •  vous  y  verrez  ce  que  nous  avons 
dit  plus  haut  :  •  qu*on  dfonnait  la  mort  aux  bons 
habitants  oui  servaient  de  guides  à  nos  colonnes, 
au  milieu  aes  dangers,  dont  la  fidélité  était  à  toute 
épreuve,  et  qui,  sans  aucune  |)erte  d'hommes,  pro- 
curaient à  nos  soldats  des  grains,  des  fourrages  et 
des  bestiaux.  • 

Vous  y  verrez ,  comme  nous  Tavons  dit  encore , 
•  passer  au  fil  de  Tépée  tous  les  individus  des  com- 
munes prises,  sans  exception  des  femmes  et  des  en- 
fants des  patriotes  qui  n'avaient  pu  se  sauver.  • 

Vous  y  verrez  enfin  confirmé  ce  qui  a  été  dit  tant 
de'fois  :  •  Que  si  tout  ce  qui  restait  d'hommes  dans 
les  campagnes  a  repris  les  armes  et  s'est  battu  avec 
)e  courage  du  désespoir,  c'est  parce  que  l'armée  du 
Mord  et  la  division  aux  ordres  du  général  Huchet 
ont  mis  à  mort  hommes ,  femmes,  enfants  et  vieil- 
lards. • 

Ainsi  votre  comité ,  devenu  le  centre  de  tous  les 
rayons  divergents  de  la  lumière  épars  sur  la  répu- 
blique, feignait  toujours  de  ne  pas  voir. 

Dans  une  masse  énorme  de  pièces  relatM^es  à  la 
Vendée,  et  qui  toutes  attestent  que  le  chancre  n'é- 
tait incurable  que  parce  qu'on  voulait  qu'il  le  fût , 
il  s'en  présente  une  très-intéressante,  encore  inuti- 
lement adressée  au  comité  de  salut  public,  dans  la- 
quelle on  pose  comme  principe,  que,  pour  finir  cette 
guerre,  c'est  contre  les  administrateurs ,  bien  plus 
que  contre  les  chouans,  qu'il  faut  prendre  leç  armes; 
que  ceux-ci  ne  sont  rien  sans  ceux-là,  et  que  Texi- 
stencé  des  administrés  tient  à  celle  des  administra- 
teurs. 

On  offre  au  comité,  dans  ce  mémoire,  des  moyens 
sûrs  de  purger  ces  contrées  de  brigands.  L'auteur, 
qui  connaît  bien  les  localités,  propose,  entre  autres» 
l'essai  d'un  corps  de  tirailleurs;  ■  et  pour  opérer, 
dit-il ,  la  destruction  des  brigands,  il  suffirait  de 
huit  cents  hommes  commandes  par  des  chefs  qui 
connaîtraient  bien  le  pays^> 

Dans  ce  mémoire,  rempli  de  vues  excellentes, 
d*observa lions  sages  et  philanthropiques,  il  met  à 
chaque  ligne  le  doigt  des  vrais  patriotes  sur  les 
blessures  très-légères  dans  leur  origine,  mais  que 
l'avidité  des  empiriques  révolutiounaires ,  peu  en 
peine  des  souffrances  et  des  cris  de  la  patrie  malade 
et  gémissante,  s'est  plue  à  rendre  désespérées. 

Quittons  l'enfer  de  la  Vendée,  et  marchons  vers 
Arras,  où  le  compatriote,  l'ami  fidèle  de  Robespierre 
et  de  Barère  (Joseph  Lebon),  se  couvre  du  sang  de 
ses  frères;  où  vous  l'allez  voir  promener  les  suppli- 
ces et  la  mort  sur  le  sol  où  il  a  pris  la  vie,  comme 
pour  le  punir  d'avoir  enfanté  deux  monstres. 

C'est  ici  l'heure  du  carnage;  il  faut  traverser  des 
ruines  ;  il  faut  marcher  sur  des  cendres;  il  faut  fou- 
ler des  cadavres  :  vos  oreilles  vont  être  effrayées  des 
gémissements,  des  cris  d'angoisse  et  de  mort  d'une 
génération  presque  entière  ;  vous  allez  assister  à  sa 
douloureuse  asonie. 

Et  ce  sont  des  représentants  du  peuple  qui  ont 
ouvert  ces  scènes  affreuses  !  Ce  sont  des  collègues 
qui  vous  entraînent  dans  ces  fêtes  de  cannibales, où, 
les  yeux  rouges  et  brûlants  d'une  affreuse  joie,  ils 
n'entendent  autour  d'eux  que  les  déchirements  de 
la  douleur  qui  pénétraient  iusau'à  leurs  âmes  féro- 
ces, comme  les  sons  de  la  plus  aouce  harmonie  ;  as- 
sis, comme  le  frère  de  Thyeste,  à  d'horribles  ban- 
quets, où ,  étendus  dans  les  bras  de  quelque  vile 
courtisane  et  tout  dégouttants  de  sang,  de  liqueurs 
et  dé  voluptés,  ils  buvaient  tranquillement  l'oubli 
des  souffrances  de  feurs  semblables.  N'importe,  l'a- 
venir Tordonne  :  pleurons  sur  les  victimes,  mais 
osons  les  contempler.  La  leçon  sortira  des  tombeaux 
pour  nos  neveux  :  osons  rechercher^  osons  envisa- 


ger leurs  bourreaux  :  sijgnalons  à  la  postérité,  non 
les  linéaments  de  leurs  hgures,  mais  ceux  de  leurs 
âmes  ;  et  que  la  nature,  la  vertu,  Thumanitc  violées 
nous  prêtent  leurs  pinceaux ,  pour  les  empreindre 
sur  la  toile  de  l'histoire. 

Signalons  cet  affreux  Joseph  Lebon ,  qur  peint  si 
bien  lui-même  son  caractère  sanguinaire  dans  ses 
lettres;  qui ,  entouré  des  objets  de  ses  lubriques  fu- 
reurs, dans  ses  embrassements  homicides ,  eût  pti 
dire  avec  plus  de  vérité  que  Caligula  le  disait  iadîs 
à  Césonie  (1)  :  •  Cette  belle  tête  sera  pourtant  cou- 
pée dès  que  je  l'aurai  commandé* ,  et  qui  réalisa  ce 
que  le  tyran  des  Romains  n'avait  porté  qu'en  image, 
au  milieu  des  caresses  de  l'amour. 

Vous  l'aviez  cru  ,  citoyens,  que  le  jour  du  sup- 
plice d'un  coupable  était  pour  la  société  un  jour  de 
deuil. 

Voyez  avec  quelle  légèreté,  avec  quelle  joie,  il  en- 
voie les  innocents  à  la  mort,  ce  Lebon. 

Voici  ce  qu'il  écrit  à  SaintJust,  à  Lcbas,  ses  dignes 
amis. 

•  Messieurs  les  parents  et  amis  d'émigrés  et  de 
prêtres  réfractaires  accaparent  la  guillotine.  Avant- 
hier,  un  ex-procureur,  une  riche  dévote,  veuve  de 
deux  ou  trois  chapitres,  un  banquier  millionnaire , 
une  marquise,  ont  subi  la  peine  due  à  leurs  crimes.» 

Il  n'est  aucune  lettre  ae  ce  Lebon  qui  ne  parle 
d'arrestation  et  de  supplice. 
Voici  encore  comme  il  s'exprime  : 

•  Le  discours  sur  le  fanatisme  a  produit  l'effet  que 
j'en  attendais.  La  salle  regorgeait  d'auditeurs,  et  je 
pense  qu'ils  en  sont  sortis  furieux  contre  les  anciens 
marchands  d'impostures  (2).  Les  sans-culottes  se 
décident;  ils  s'enhardissent  en  se  sentant  appuyés  : 
patience,  et  ça  ira  d'une  jolie  manière!  • 

Dans  une  autre,  aux  mêmes  Saint-Justet  Lebas:  ' 

•  Je  suis  arrivé  à  Cambrai  hier  le  soir^  accompa- 
gne de  vingt  braves....  J'espère  faire  le  bien  à  Cam- 
brai et  y  inspirer  la  terreur  civique.  • 

m  11  ne  peut,  dit-il  ailleurs,  croire  à  quelques  mi- 
ses en  liberté  ;  car  ce  serait  anéantir  tous  les  princi- 
pes établis  dans  les  rapports  de  Saint-Just  et  de  Ro- 
bespierre. • 

Ce  n'étaientdonc  point  lesdécrets delà  Convention, 
c'étaient  les  rapports  de  Robespierre  et  de  Saint- Just 
qui  servaient  de  guides  révolutionnaires  à  Lebon. 

Dans  une  lettre  du  3  floréal,  adressée  d'Arras  par 
Lebon  au  comité  de  salut  public,  on  lit  : 

•  La  loi  générale,  qui  appelle  a  Paris  les  conspi- 
rateurs de  tous  les  points  de  la  république,  avait  été 
ici  interprétée  par  quelques  scélérats  comme  une 
improbation  des  actes  du  tribunal  et  de  la  célérité 
de  ses  jugements;  mais  le  courrier,  Je  bienheureux 

courrier  est  arrivé Le  président,  l'accusateur 

public  et  l'un  des  principaux  membres  du  comité  de 
surveillance  ont  été  les  premiers  à  travestir,  contre 
l'énergie  que  nous  développons,  le  décret  de  la 
Convention Ils  sont  depuis  décadi  en  lieu  de  sû- 
reté, et  leurs  places  ont  été  confiées  à  des  braves 
qui  n'ont  pas  besoin  de  briser  Icfis  échafauds. 

(1)  Aiofi  Suétone  peiat  ce  trait  de  la  >ie  de  Caliçula  : 
Quoties  uxorii  vel  amiculœ  collum  exascularetur,  adaebat  ? 
Tarn  bona  cervix,  simul  ac  juuero ,  demeiur,  Quin  et  sU" 
bindè  j'actabat  f  txquUiUtrum  se  vel  fidiculit  deCouonià 
sud  cur  eam  tanloperh  diligeret, 

«  Il  oe  care9tait  jamaia  aa  fenine  on  ta  maîtresse,  qu'il  no 
dtt  en  même  teinps  :  «  One  si  belle  tète  sera  abattue  quand 
je  le  Toudrai  »  Etonné  lui-même  de  sa  constance  pour  Cé- 
fonie,  il  répétait  de  temps  en  temps  «  au*il  voulait  appliquer 
cette  femme  à  la  question  pour  savoir  d'elle  ce  qui  la  rendait 
ai  aimable.  »  Sdktoub,  Vie  de  Caligula,  A.  H. 

(1  )  Nota.  Lebon  est  un  ci-devant  prêtre,  qui  depuis  la  rd- 
Tolation  se  qualifiait pr^/re  dt  l'Eternel,  à  la  tête  d'un  md« 
moire  qm  eit dépoMà  U  cominisiion.  A.  M. 


5S1 


•  Songez  que  plus  nous  frappons  de  rudes  coups, 
plus  nous  avons  de  pièges  à  éviter.  » 

Il  est  évident,  citoyens,  d'après  celle  lettre  et  Tar- 
rêté  du  comité  de  salut  public,  portant  que  le  tribu- 
nal d^Arras  continuera  ses  fonctions,  que  le  comité 
avait  sanctionné  toutes  les  mesures  de  Lebon  ;  que 
le  comité  aimait  tant  ses  formes  acerbes  que,  pour 
Ten  récompenser,  il  n'étendit  point  au  département 
du  Pas-de-Calais  la  loi  général»  qui  ordonnait  le 
transfèrement  à  Paris  de  tous  les  prévenus  de  con- 
spiration gémissant  dans  les  cent  mille  cachots  de 
la  république.  Il  est  évident  que  ce  projet  de  trans- 
fcrement  n'avait  été  imaginé  par  les  bourreaux  du 
comité  que  dans  la  crainte  qu'un  tribunal  de  dépar- 
tement, moins  inhuniain  ou  plus  équitable,  ne  leur 
ravît  quelqu'une  de  leurs  proies,  qu'ils  étaient  bien 
sûrs  (le  faire  dévorer  par  leurs  cannibales  de  Paris  : 
mais,  rassurés  par  l'instinct  féroce  du  désolateur  du 
Nord ,  ils  tirent ,  pour  Arras,  une  exception  à  cette 
loi  du  transfèrement ,  bien  convaincus,  dans  leur 
appétit  sanguinaire,  qu*ils  D*en  perdraient  pas  une 
victime. 

Partout ,  dans  cette  correspondance  de  Lebon , 
s'uflrent  les  traces  d'une  complicité  coupable  entre 
lui  et  le  comité.  Vous  verrez  oans  le  recueil  des  piè- 
ces des  dénonciations  portées  par  Ouffroy  au  comité 
de  salut  public  contre  ce  représentant ,  dénoncia- 
tions qui  n'ont  valu  à  Guffroy  que  de  la  haine  et  des 
pcrsculions  de  la  part  de  plusieurs  membres  de  ce 
comité ,  vous  y  verrez  le  complément  des  preuves 
de  cette  complicité  dans  les  lettres  de  Lebon  ,  qui , 
eltrayé  lui  même  des  coups  qu'il  porte,  écrit  qu'il 
est  essentiel  que  •  le  comité  se  prononce  hautement 
sur  sa  conduite  ;  que  si  rintention  du  comité  est  que 
la  commission  cesse,  on  lui  commande  de  périr,  ou 
qu'on  le  rappelle  dans  le  sein  de  la  Convention  na- 
tionale. • 

Eh  bien ,  citoyens,  vous  l'avez  vu  ;  le  comité  s'est 
prononcé  sur  la  conduite  de  Lebon  ;  il  ne  lui  a  point 
ordonné  de  périr  ;  il  ne  l'a  point  rappelé  dans  le 
sein  de  la  Convention  ;  mais  il  est  venu,  ici  même, 
payer  d'un  éloge  les  horribles  succès  du  crime  ! 

Une  lettre  signée  Darthé,  et  trouvée  dans  les  pa- 
piers de  Lebas,  vient  encore  à  l'appui  de  ces  preuves. 
En  voici  un  fragment  : 

•  Le  comité  de  salut  public  a  dit  à  Lebon  qu'il 
espérait  que  nous  irions  tous  les  jours  de  mieux  en 
mieux  ;  Robespierre  voudrait  que  chacun  de  nous 
pût  former  seul  un  tribunal,  et  empoigner  chacun 
une  ville  de  la  frontière.  • 

Et  après  ces  mots  affreux  sont  liés  ceux-ci,  bien 
étonnés  de  l'alliance  : 

•  La  vertu  et  la  probité  sont  plus  que  jamais  à 
l'ordre  du  jour.  • 

Puis,  cette  nouvelle  preuve  des  intrigues  nouées 
pour  perdre  Guffroy,  parce  que  sa  dénonciation  con- 
tre Lebon  était  une  dénonciation  indirecte  contre 
ceux  qui  le  faisaient  agir  : 

•  Guffroy  serait  décrété  d'accusation ,  sans  des 
raisous  de  politique.  •  (  La  suite  demain») 


SÉANCE  DU  SOIB  DU  3  VENTOSE. 
Présidence  de  Bourdon  (de  COiee). 

Cette  séance  éult  consacrée  à  l'appel  nominal  pour  l'en- 
vol des  représenuints  du  peuple  dans  les  Indes-OrienUiles. 

Au  miUen  de  l'appel  nominal,  Legendre  se  lève  tout  à 
coup,  el,  s'adressant  à  quelques  membres  placés  peu  loin  de 
lui,  il  s'écrie  :  i  il  vous  sied  bien  de  m'insulter,  brigands  que 
vous  êtes  !  Cesl  parce  que  je  poursuis  les  chefs,  que  les  sol- 
dais s'agitent  :  eli  bien ,  je  vous  déclare  à  tous  une  guerre  à 
morL  ie  déclare  que  Tliuriot  joue  le  rôle  d'oa  chef.  *  (On 


applaudit  vlvemeit.  —  Un  grand  nombre  de  membres  ajoil* 
tem  :  Ouï,  U  joue ie rôle  d'un  lâche  factieux,) 

On  demande  l'ordre  du  jour.  —  L'assemblée  y  passe. 

•    Thuriot  demande  la  parole.  On  réclame  l'appel  nominal. 

Une  vive  altercation  s'élève  entre  Legendre  et  Thuriot. 
Celui-ci,  après  avoir  insisté  pendant  longtemps,  obUent  en- 
fin la  parole. 

Thuriot  :  Je  ne  veux  point  irriter  un  seul  de  mes 
collègues;  je  ne  répondrai  pas  même  à  Leffendre,  car 
je  crois  qu'il  n'est  sorti  des  bornes  de  la  décence  que 
parce  au'on  l'a  irrité  ou  qu'il  s'irrite  lui-même.  11 
prétend  que  les  membres  qui  sont  autour  de  lui  sont 
mes  amis  ;  je  déclare  que  je  ne  les  connais  pas.  fila 
conduite  est  connue.  J'ai  été  persécuté  par  les  chefs 
du  système  que  nous  avons  renversé.  On  sait  com- 
ment je  me  suis  comporté  le  9  thermidor  ;  après 
cette  époque,  j'ai  cru  qu'il  fallait  rester  tranquille. 
Cette  opinion  peut  déplaire  à  quelques  personnes  ; 
mais  c'est  mon  système,  je  veux  y  voir  clair  ;  le 
temps  éclaicira  tout.  Heureux  ceux  qui  combattent 
franchement  pour  la  cause  du  peuple  !  (Quelques 
applaudissements  à  l'extrémité  gauche.) 

Legendre  :  Je  demande  d'abord  que  Billaud 

PlusieuTi  voix  :  Dis  donc  Thuriot  ! 

Legendre  :  C'est  synonyme...  (Murmures  à  l'ex- 
trémité gauche.)  Vous  ne  m'empêcherez  pas  de  dire 
mon  opinion  avec  toute  la  franchise  qui  me  carac- 
térise. Du  moment  que  j'ai  attaqué  les  chefs  de  la 
faction  jacobite,  qui  prêchaient  le  terrorisme,  même 
après  le  9  thermidor,  je  me  suis  attendu  de  moi- 
même  à  être  attaqué  par  tous  ceux  qui  leur  étaient 
attachés;  mais  je  me  suis  dévoué,  et  je  me  regarde 
comme  un  guillotiné  ressuscité  (on  applaudit  vive- 
ment), ainsi  qu'un  grand  nombre  de  mes  collègues 
(nouveaux  applaudissements),  et  Thuriot  lui-même, 
qui  voudrait  bien  tenir  les  rênes  du  gouvernement 
pour  les  diriger  à  son  gré.  (Les  applaudissements  se 
renouvellent.) 

11  y  a  eu  déjà  une  pareille  scène  dans  une  séance 
du  soir  ;  et  j'ai  remarqué  que  ceux  qui  en  étaient  les 
acteurs  n'étaient  pas  ceux  qui  l'avaient  faite  ;  ceux- 
ci  n'étaient  que  soufflés ,  et  Thuriot  était  à  la  tête 
des  souffleurs.  11  disait  à  deux  qu'il  excitait  :  •  Que 
faites* vous  ?  vous  ne  dites  rien  ?  •  Et  quand  ces  hom- 
mes eurent  une  fois  cédé  à  ses  impulsions,  il  de- 
manda que  le  comité  de  sûreté  générale  s'assemblât, 
et  que  ceux  qui  auraient  des  plaintes  à  faire  contre 
quelques-uns  de  leurs  collègues  allassent  les  porter 
à  ce  comité.  Voilà  comme  on  fait  la  pluie  et  le  beau 
temps.  (Vifs  applaudissements.)  Aujourd'hui  j'ar- 
rive ;  je  m'assieds  à  côté  d'un  collègue  dont  je  ne 
sais  pas  le  nom»  mais  que  je  connais  pour  être  un 
ami  de  Thuriot ,  car  ils  se  frottent  sans  cesse  l'un 
contre  l'autre.  (On  rit.)  Ce  collègue  est  venu  pour 
m'insinuer  l'esprit  de  Thuriot 

'    Le  membre  que  Legendre  désigne  assare  qu'il  n*a  point 
parlé  À  Legendre  de  Tburiol. 

Legendre  :  Tu  m'en  as  si  bien  parlé,  que  je  t'ai 
répondu 

Quelques  membres  de  Textrâme  gauche  réclament  Tordre 
du  Jour. 

Legendbe  :  Non  pas ,  non  pas  !...  Tu  m'en  as  si 
bien  parlé,  que  je  t'ai  répondu  que  je  ne  prendrais 
pas  d'infusion  par  la  seringue  de  Thuriot.  (On  rit) 

Phuieurt  voix  :  L'ordre  du  jour  ! 
La  ConvenUon  passe  à  l'ordre  du  Jour. 
On  conUoue  l'appel  nominal. 
Charlier  :  Je  demande  la  parole.  J'entends  nom- 
mer Chiappe,  et  j'en  prends  occasion  pour  deman- 


m 


to  9l ,  étast  de  1i  Cm>S6  «  il  ne  doit  jm  être  consi- 
déré comme  on  pays  de  cofons. 

CMappe  moBffle  à  la  irttmne  et  demande  h  parrole  pour 
lépondre. 

L'asMmblé»  pasie  A  Tordre  dn  ]o«r  sur  l'obser? atk»  de 
Oiarlierr 

Un  autre  membre  demande  si  Chiappe  n'est  pas  parent 
de  Pa^Ii.^.. 

GhUippc  iMiJte  ponrrépoaare^cirasaemMée  taA accorda 
la  parole  par  décret. 

CfliArpe  :  Je  ne  parlerai  pas  snr  ma  nominatton , 
et  je  répondrai  d'abord  à  Charlier  que  jamais  les 
Corses  n*ont  été  colons.  Indépendants  pendai  »  deux 
cent  cinquante  ans,  ils  sont  dignes  aujourd'hui  de 
la  liberté  de^  Français,  et  j*espcre  qu'ils  en  jouiront 
malgré  les  traîtres. 

Quant  à  meê  relations  avec  Paoli,  il  n*en  a  existé 
d'autres  que  les  persécutions  que  j'ai  endurées, 
ainsi  que  ma  famille,  pendant  sa  domination,  .le  ne 
Tai  pas  connu  avant  qu'il  abandonnât  la  Corse, 
parce  que  j'étais  trop  jeune.  Lors  de  son  retour  de 
Londres,  je  fus  nommé  pour  venir  le  chercher  à 
Paris;  je  m'y  refusai,  parce  qu'on  m'avait  appris  à 
connaître  son  ambition.  D'autres  furent  envoyés  à 
ma  place;  et,  à  son  arrivée  en  Corse,  il  marqua  sa 
puissance  en  me  faisant  arrêter.  Je  fus  jeté  dans  les 
cachots  et  couvert  de  fers.  Après  avoir  fait  le  tour 
de  plusieurs  bastilles  de  la  Corse,  j'en  fus  délivré 
par  la  brave  garnison  française  à  Bonifacio.  Je  cou- 
rais les  champs  avec  mes  amis,  et  mon  but  était 
celui  de  la  vengeance  ;  j'en  voulais  à  ses  jours,  lors- 
que la  voix  du  peuple  fit  cesser  toute  «inimosité. 
Sous  la  présidence  de  Paoli ,  j'ai  lutté  contre  ses  pa- 
rents et  ses  créatures  dans  les  différentes  nomina- 
tions :  je  1  ai  emporté,  malgré  l'influence  de  Paoli , 
pour  être  membre  du  département  et  député  è  la 
Convention.  Ce  dernier  événement  excita  toute  son 
auimadversion,  et  je  devais  être  assassiné  par  son 
parti ,  sans  les  grandes  précautions  que  j'ai  dû 
prendre. 

Je  déclare  qu'il  n'existe  entre  Paoli  et  moi  aucune 
relation  ni  en  parenté  ni  en  principes  :  éloignés  de 
cent  vingt  lieues,  nous  ne  nous  sommes  vus  que 
dans  les  grandes  assemblées,  oti  j'ai  toujours  com- 
battu sa  duinination.  J'interpelle,  je  somme  même 
tous  mes  collègues  de  la  Corse  de  déclarer  si  les  faits 
sont  exagérés  ;  je  ne  suis  point  des  plus  pauvres  de 
mon  département;  aujourd'hui  ma  fortune  est  au 
pouvoir  de  mes  ennemis,  ma  famille  dispersée  et 
persécutée.  Voilà  mes  relations  avec  Paoli,  voilà  la 
vérité. 

Au  reste,  je  demande  que  la  Convention  natio- 
nale, dans  son  choix ,  jette  ses  vues  sur  des  mem- 
bres  plus  dignes  que  moi  de  l'importante  mission 
dans  les  colonies,  et  je  déclare  que  mon  vœu  est  de 
rester  ici  pour  combattre  les  factieux  et  les  intri- 
gants. (On  applaudit.) 
On  achève  l'appel  nominaL 

La  majorité  des  suffragfes  donne  pour  représentants  du 
peuple  aux  Indes  orientales  les  citoyens  Barras,  Armand  (de 
la  Meuse),  et  Letoumeur  (de  la  Manche). 
I      La  séance  est  levée  à  dix  heures  et  demie. 

'  SéANCB  DU  4  VBNTOSB. 

Babailon  :  Je  viens,  au  nom  de  vos  comités  d'in- 
ftruction  publique,  des  procès- verbaux  et  archives, 
vous  faire  part  de  leur  étonnement,  de  leur  indi- 
gnation même ,  et  vous  proposer  des  mesures  ca- 
pables de  faire  ceSser  de  grands  abus,  de  vrais  bri- 
gandages qui  insultent  à  la  Convention  nationale 
tout  entière,  qui  seraient  capables  de  paralyser  lea 


arts  et  lesteiences,  malgré  la  proteetron  éclatante 
que  vous  leur  accordez,  si  on  les  laissait  plus  loog^ 
temps  subsister. 

Dn  décret  du  7  messidor  dernier  ordonnait  à  votre 
comité  d'instruction  publique  de  faire  incessamment 
un  rapport  sur  les  divers  ouvrages  qui  lui  ont  été 
renvoyés,  d'après  Tbommage  que  de  bons  citoyens 
en  ont  fait  à  la  Convention. 

Ce  compte  est  iMalheureusement  aussi  court  que 
facile;  il  se  réduit  à  dire  qu'il  n'est  parvenu  depuis 
très-longtemps,  à  votre  comité  d'instruction  publi- 

2ue,  que  quelques  volumes  de  J.-J.  Bousscau,  tous 
épareillés,  et  un  de  ses  manuscrits. 
Il  est  cependant  vrai  oue  la  journée  d'hier  a  été 

Îdus  heureuse  que  tant  aautres;  car  il  fut  déposé  a 
a  bibliothèque  trois  brochures,  un  manuscrit  et 
trois  volumes  réliés  d'un  ouvrage  auquel  manquent 
les  trois  premiers  :  ils  n'avaient  été  offerts  que  de* 
puis  quelques  jours. 

Il  m'en  coûte  sans  doute  d'avoir  à  vons  entretenir 
de  ces  tristes  vérités;  mais  la  loi  impérieuse  du  de- 
voir le  prescrivait  à  vos  comités,  et  à  moi  en  parti*^ 
culier,  qui  suis  spécialement  chargé  de  cette  inspec- 
tion. 

A  Taide.  d'une  surveillance  continnelle,  on  peut 
espérer  de  mettre  fin  aux  scandaleuses  soustractions 
qui  ont  eu  lieu  jusqu'à  cet  instant ,  et  que  vous  voua 
empresserez  de  réprimer. 

Voici  le  projet  de  décret  que  je  suis  chargé  de  vous 
présenter  au  nom  de  vos  comités  d'instruction  pu- 
blique, des  procès- verbaux  et  archives. 

«  La  Convention  nationale .  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  ses  comités  d'instruction  publique,  des  procès-ver- 
baux et  archives,  décrète  ce  qui  suit  : 

I  Art.  H'.  Le  comité  d'instiuclion  retirera  des  archivât 
nationales,  sur  le  récépissé  de  son  commissaire  ad  hoc,  tous 
les  livres  qui  peuvent  intéresser  i'instrucUon  publique .  ies 
sciences  et  les  arts,  ainsi  que  ceux  qui  lui  ont  été  renvoyits 
par  la  Convention  ou  qui  peuvent  appareiller  les  volumes 
déjà  existants  dans  sa  biblioliièque. 

«  il.  A  l'avenir,  les  divers  ouvrages,  gravures,  tableaux, 
médailles  et  autres  objets  de  sciences  et  d'arts,  dont  on  fera 
hommage  A  la  Convention,  seront  remis  au  citoyen  Pucroisy. 
chargé  de  recevoir  les  dons  patriotiques,  lequel  les  déposera 
dans  ie  Jour,  à  celui  des  comités  auquel  le  renvoi  aura  été 
fait,  et  certifiera  du  reçu  de  celui  des  membres  préposé  à 
ceue  fm^dans  les  vinj^t-quatre  heures,  au  comité  dès  procès- 
verbaux,  qui  en  tiendra  rcgisure,  et  en  publiera,  tous  les 
trois  mois,  le  relevé  par  la  voie  de  l'impression  et  de  la  dis- 
tribution. 

«  III.  Les  comités  de  correspondance,  des  décrets  et  pro- 
cès-verbaux veilleront,  chacun  en  iîc  qui  les  concerne,  à  ce 
que  les  hommages  et  offrandes  foiu  A  la  Convention  natio- 
nale, soient  exactement  mentionnés  dans  le  feuiUetoD  d 
dans  le  Bulletin  ^e  la  même  séance. 

c  IV.  L'article  XIV  du  décret  du  7  messidor  dernier,  re- 
latif à  l'organisation  des  archives  nationales,  est  rapporté 
dans  tout  ce  qu'il  contient  de  contraire  au  présent  décret,  a 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  Le  même,  au  nom  du  comité  d'instruction  pu- 
blique, propose ,  et  l'assemblée  adopte  le  projet  de 
décret  suivant  : 

*  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  son  comité  d'instruction  publique,  décrète  ce  qui  8uit  : 

c  Art.  I«r.  Les  citoyens  des  colonies  françaises,  tant  dans 
les  Indes  orientales  qu'occidentales,  qui ,  au  jugement  du 
comité  d'instracUon  publique,  ou  des  commissaires  qu'il 
choisira  à  cet  effet,  réuniront  les  qualités  exigées  par  l'ar- 
dcle  X  de  la  loi  du  14  frfmaire  et  par  celle  du  9  nivose  der- 
nier, seront  reçus  comme  élèves  des  Ecoles  de  Santé. 

K  IL  Le  comité  d'instruction  publique  complétera  de  la 
même  manière  ie  nombre  des  élèves  de  chaque  Ecole  de 
Santé,  en  remplacement  de  ceux  que  les  districts  n'ont  poiol 
envoyés,  ou  qu'ils  n'enverront  pas  d'ici  au  l«r  germinal  pro- 
chain, et  ceux  qui,  éuint  légalement  nommés,  ne  seront  past 
A  la  même  époque,  rendus  A  leur  des tiDatioo. 


sn 


«  llnseiiloD  ao  Bollellii  de  eorrespoiidaDce  fieadra  Deo 
de  promalgatioD.  • 

Barailon  :  Le  atoyeu  Qémeul  de  Ris  ayant 
donné  sa  démîssiau  de  la  place  d'adjoinl  de  la  com- 
mission d*instruction  publique  ;  le  comité  d'instruc- 
tion publique  vous  propose  le  citoyen  Noël,  qui  a 
rempli  diverses  missions  importantes  dans  les  cours 
étrangères,  et  qui  est  d*ailleurs  connu  par  ses  ta- 
lents. 

La  Convention  confirme  cette  nomînacîoD. 

^  Sur  le  rapport  (TAubry,  aa  nom  des  comités  de  saint 
publie ,  militaire  et  ôe%  finances  ,*tB  Gonveiilioii  rend  le  dé- 
cret suiraot  : 

<  Art.  I".  A  compter  de  la  date  du  présent  décret,  la 
commlssioD  des  codtoIs  et  transports  militaires  cessera 
tous  achats  de  chevani  et  marchandises  relatifs  au  aenrice 
des  transports  et  convois  des  armées. 

«  II.  Tous  les  chevaux  des  charrois  et  transports  mili- 
taires, leur  entretien,  leur  conservation  et  leur  service  se- 
ront mis  en  entreprise. 

<  III.  Les  comités  de  saint  public  et  des  finances  réunis 
sont  chargés  de  prendre  tontes  les  mesures ,  et  de  passer 
tous  actes  nécessaires  pour  faire  faire  par  entreprise,  dans 
le  plus  court  délai,  le  remplacement  des  chevaux  qui  man- 
quent aux  différents  services  des  armées .  ainsi  que  tout  ce 
qui  fait  partie  des  attelages  pour  les  charro^et  transports 
militaires;  ils  prendront  les  mêmes  mesures  pour  les  che- 
vaux de  renionie,  si  le  bien  du  service  et  les  Intérêts  de  la 
république  l'exigent. 

i  IV.  La  commission  des  transports  et  eonvols  mllllafres 
continuera  d'éu«  chargée  et  responsable  de  Texécntion  di 
service  qui  lui  est  confié ,  jusqu'à  ce  que  la  reprise  en  ait 
été  faite  par  les  entrepreneurs,  conformément  au  marché 
qui  leur  sera  passé  par  les  comités  de  salut  pnblic  et  des  fi- 
nances réunis,  s 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  On  rcclame  Tappel  nommai  pour  la  nomination 
des  représentants  du  peuple  qui  doivent  être  envoyés 
dans  les  colonies  occidentales. 

'  Topsent:  Je  demande  qu'on  fixecellesdes  colonies 
occiileiilîilcs  dans  lesquelles  seront  envoyés  les  re- 
présentants du  peuple  tju'on  va  nommer  ;  car  il  n'est 
pas  possible  que  les  mêmes  hommes  soient  délégués 
et  aux  Iles-du-Vent,  et  aux  Iles-sous-le  Vent.  La  dis- 
tance est  trop  grande  et  le  trajet  trop  difficile. 

DcPAV  :  Il  est  impossible  que  les  mêmes  repré- 
sentants du  peuple  se  transportent  des  Iles-du-Vent 
aux  Ues-sous-le-Vent;  d'ailleurs,  ce  ne  sera  pas 
trop  de  trois  représentants  pour  la  seule  colonie  de 
Saint-Domingue,  qui  a  deux  cents  lieues  de  côtes. 
Le  comité  de  salut  public  est  convenu  lui-même 
qu'il  faudrait  trois  représentants  pour  cette  colonie. 

Dentzel  :  La  situation  de  la  Martinique  exi^ 
aussi  une  attention  particulière;  il  faudra  y  en- 
voyer un  représentant.  Je  demande  que  les  trois  que 
nous  allons  nommer  soient  spécialement  destinés 
pour  Saint-Domingue,  et  que  le  comité  de  salut  pu- 
blic soit  chargé  de  nous  faire  un  rapport  sur  le 
nombre  de  ceux  à  envoyer  dans  les  colonies  du 
Vent. 

Les  propositions  de  Dentzel  sont  décrétées. 

On  commence  Tappel  nominal.  Il  est  inter- 
rompu par  un  membre  du  comité  de  sûreté  générale 
qui  monte  à  la  tribune. 

AuGUis,  au  nom  du  comité  de  sûreté  générale  :  Ci- 
toyens, je  viens,  au  nom  de  votre  comité  de  sûreté 
générale,  vous  communiquer  la  correspondance  de 
notre  collègue  Jean  Debry  ;  vous  y  verrez  la  scélé- 
ratesse la  plus  prononcée  contre  les  amis  de  la  jus- 
tice ;  ce  qui  vous  a  été  si  souvent  répété  à  cette  tri- 
bune sVftectue  continuellement  :  on  attente  tous  les 
jours  à  la  représeatalioD  aatiouale^  on  a  cherché  à 


assassiner  nn  de  ses  fidèles  mandatafres.  Maigrelet 
dangers  qu'il  a  courus,  son  cournge,  son  énergie  et 
sa  surveillance,  au  lieu  de  s*abattre,  se  prononcent 
avec  cette  fierté  républicaine  qiii  servira  à  -détruire 
tocs  les^monstres  ennemis  de  roumanité. 

Voici  les  pièces  officielles. 

LIBERTÉ  ISGAUTà. 

Jean  J>êhry,  reprétêntant  du  peuple  françûit  éan$ 
Us  dépatîemente  ée  la  Dréme,  VÀrdèehe  eê  Fém- 
eluse,  au  emnilé  de  eûrelé  général. 

Mootélinartt  le  97  phivîose,  Tao  S*  de  Ja  répiblkpM 
française,  nue  et  lodi^isibU. 

•  Citoyens,  tandis  que  vous  faisiez  à  Paris  une 
proclamation  pour  éclairer  les  citoyens  sur  la  pro- 
vocation ati  pillaçe  et  à  la  guerre  J*étais  occuné  à 
Avignon  à  poursuivre  ceux  qui  Texécutaient.  J*etaîs 
désigné  pour  première  victime,  j'ai  été  manqué; 
malneoreusementles  brigands  ont  réussi  en  partie, 
en  parvenant  à  assassiner  un  citoyen  que  j*ai  vu  gé- 
néralement regretté.  Je  ne  vous  parle  de  la  circon- 
stance qui  m  est  personnelle  aue  pour  vous  faire 
sentir  quel  est  le  but  essentiel  cies  fauteurs  de  tous 
ces  troubles;  il  faut  le  dire,  c*est  la  résurrection  de 
de  l'anarchie,  du  brigandage,  le  rétablissement  du 
pouvoir  arbitraire,  n  importe  sous  quel  nom,  et  la 
destruction  de  la  représentation  nationale,  qu'ils 
cherchent  à  avilir,  en  proférant  qu'elle  fait  la  con- 
tre-révolution depuis  qu'elle  a  conduit  Robespierre 
à  l'échafaud. 

•  Un  membre  dn  conseil  général  de  la  commune 
d'Avignon,  Suisse  naturalisé,  conduit  en  France  par 
son  amour  pour  la  liberté,  et  persécuté  au  dehors 
par  son  attachement  à  la  révolution,  vient  d'être  as- 
sassiné :  son  nom  était  Pollier,  homme  aisé,  et,  ce  qui 
est  pire  aux  yeux  des  scélérats,  probe,  chéri  aes 
hommes  de  bien,  et  surtout  aimé  des  indigents,  que 
j'ai  vu  pleurer  amèrement  à  ses  funérailles. 

•  Le  21 ,  à  six  heures  du  soir,  revenant  de  Sorgues 
à  Rozetti, son  domicile,  il  fut  entouré  par  vingt-cinq 
à  trente  scélérats  masqués,  dont  plusieurs  étaient 
déjà  chez  lui ,  et  qui  avaient  une  soixantaine  de 
complices  armés,  disséminés  dans  les  bois  d'alentour, 

four  intercepter  toute  communication  :  on  le  saisit 
ni  et  son  épouse  enceinte  ;  on  le  meurtrit,  on  le 
pilla  ;  on  dépouilla  toute  sa  maison,  on  le  descendit 
dans  sa  cave  pour  lui  faire  remettre  l'or  qu*on  y  sup- 
posait caché,  et  l'on  finit  par  le  tuer  de  quatre  coups 
de  feu  et  d'un  coup  de  poignard.  Pendant  ce  temps, 
toute  sa  famille,  sa  belle-mère  infirme,  sa  femme, 
sa  fille,  sa  belle-sœur,  ses  bûtes  allaient  subir  le 
même  sort  ;  on  leur  annonçait  les  derniers  outra- 

fes;  les  uns,  avec  des  mèclies  souffrées,  brûlaient 
es  linges  dans  les  greniers,  pour  tâcher  d'y  mettre 
le  feu  ;  les  autres  présentaient  au  feu  les  pieds  de  la 
citoyenne  Pollier,  pour  lui  faire  déclarer  oi!i  était 
son  or  ;  elle  était  à  genoux  pour  la  sixième  fois,  prête 
à  être  fusillée,  et  abominablement  frappée  sur  le 
ventre,  malgré  sa  déclaration  de  son  état  de  gros- 
sesse, lorsqu'un  premier  secours,  amené  d'Avignon 
à  toute  bride,  par  un  domestique  fidèle  qui  avait  eu 
le  bonheur  d'échapper,  fit  fuir  les  brigands,  nantis 
d'un  vol  évalué  à  80,000  liv.,  dans  lequel  se  trou- 
vaient des  sommes  déposées. 

•  La  Convention  ne  doit  pas  içnorer  les  noms  des 

Sremiersqui  se  présentèrent  ;  c'était  Rochelin,  maire 
'Avignon  ;  Martin  Etiennct  capitaine  de  la  gendar- 
merie; Lacombe,  gendarme,  et  un  de  ses  camarades. 
Le  citoyen  Dupât,  chef  de  légion,  les  dragons  do 
9«  régiment,  et  les  canonniers  de  la  garnison ^  don- 


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nèrent  également  toutes  les  preuves  de  l  activité  et 
du  dévouement.  .  ( 

•  Malgré  rindignalion  dont  ce  crime,  commis 
avec  toute  l*audace  et  l*atrocité  possibles,  m'a  péné- 
tré, î*ai  vu  avec  satisfaclion  que,  dans  la  cérémonie 
funèbre  qui  eut  lieu  pour  Pollier,  et  à  laquelle  j*ai 
assisté,  tous  les  bons  citoyens  d*Avignon  se  sont 
montrés  remplis  d'horreur  pour  cet  attentat  sur  un 
magistrat  du  peuple  :  elle  a  été  au  comble  quand  ils 
ont  appris  que  la  principale  partie  du  plan  des  bri- 

Sands  était  d'immoler  le  déléeué  de  la  Convention 
ans  le  département  de  Vaucluse  ;  en  effet,  j'avais 
vu,  à  midi,  le  citoyen  Pollier.  Je  devais  me  rendre 
à  Carpentras  le  lendemain  matin;  l'on  présuma  que 
le  soir  je  m'arrêterais  chez  lui;  et  le  premier  mot 
que  prononcèrent  les  assassins,  en  entrant  chez  le 
citoyen  Pollier,  et  en  environnant  sa  voiture,  fut  de 
demander  si  le  repré$enlanl  du  peuple  y  était;  sur 
la  réponse  négative,  ils  déclarèrent  ironiquement 
qu'ils  venaient,  au  nom  de  la  municipalité  d* Avi- 
gnon, pour  saisir  un  robespierrisle;  ils  montrèrent 
leurs  armes  en  signe  de  pouvoir  ;  ils  volèrent,  ils 
massacrèrent,  ils  incendièrent, 

•  Depuis  lors  on  est  à  leur  poursuite  ;  j'ai  fait  des 
patrouilles  â  la  tête  de  la  force  armée;  j'ai  excité  le 
zèle  et  la  vigilance  des  autorités  constituées,  qui 
m'ont  parfaitement  secondé;  l'amitié  générale  que 
l'on  purtait  au  respectable  Pollier  n'a  rien  laissé  né- 
gliger. J'ai  dû  prendre  cei>endant  des  mesures  de  sû- 
reté conseillées  par  les  circonstances.  J'ai  dû  faire 
arrêter  plusieurs  individus  suspectés;  quatre  entre 
autres,  de  Vil leneuve-lès- Avignon,  ont  été  trouvés 
garnis  de  bijoux,  pièces  d'or  et  assignats  provenant 
évidemment  du  vol  ;  j'espère  qu'ils  feront  décou- 
vrir tous  les  Gis  de  cette  traîne  exécrable,  qui  n'est 
autre  chose  que  l'exécution  du  plan  avec  lcc|uel  les 
satellites  hors  de  place  de  l'ancienne  tyrannie  veu- 
lent former  dans  la  France  un  peuple  affreux  séparé 
du  peuple. 

•  Pour  que  vous  soyez  convaincus  de  cette  vérité 
et  de  la  nécessité  d'y  apporter  un  prompt  et  sûr  re- 
mède, je  TOUS  observerai  qu'on  ne  se  rassemble  pas 
à  cent  hommes  armés  et  équipés,  comme  on  a  vu 

âue  l'étaient  ces  brigands  (car  ils  ont  jeté  une  partie 
e  leur  bagage  pour  emporter  le  butin),  sans  avoir 
un  concert  de  vues,  et  même  de  moyens,  qui  peut- 
être  s'étendent  plus  loin  qu'on  ne  le  pense  ;  je  vous 
dirai  qu'il  est  notoire  qu'en  ce  moment  ils  sont  ar- 
més à  la  tour  de  Bourg  près  Tarascon  ;  qu'à  Saint- 
Remy  ils  ont  fait  le  coup  de  fusil  contre  les  patrio- 
tes, et  tué  trois  hommes;  qu'à  Tavel  ils  ont  massa- 
cré sept  personnes  d'une  seule  famille  ;  qu'au  Ponté 
ils  ont  égorgé  le  chel  de  la  maison  ;  que,  dans  toutes 
les  communes,  on  les  voit  se  livrant  à  toutes  sortes 
de  débauches  et  de  jeux  ruineux,  sans  jamais  tra- 
*  vailler;  se  répaudrcen  invectives  contre  la  Conven- 
tion ,  marcher  armés  comme  des  miquelets,  me- 
nacer les  magistrats,  regretter  Robespierre  et  son 
régime,  et  donner  pour  moyen  d'avoir  des  subsis- 
tances regorgement  des  vieillards,  des  enfants  au- 
dessous  oe  trois  ans,  et  des  riches.  J'ai  entre  les 
mains  la  preuve  juridique  de  ces  faits  :  c'est  à  vous 
à  voir  comment  feur  extravagante  atrocité  corres- 
pond avec  les  autres  foits  que  vous  avez  sous  les 
yeux  ;  mais,  je  vous  le  répète,  il  est  temps  d'y  por- 
ter vigoureusement  remède.  Quant  à  moi  qu'ils 
cherchaient,  je  me  flatte  effectivement  d'avoir  mérité 
la  haine  de  coquins  semblables,  et  je  suis  bien  dis- 
posé à  la  mériter  encore.  Que  je  puisse  parvenir  à 
fonder  ici  la  liberté,  l'égalité,  la  justice  et  le  bon- 
heur; ma  mission  et  ma  vie  seront  également  rem- 
plies ! 
•L'événement  dont  je  vous  donne  connaissance 


tient  au  plan  de  piVesse  et  d'atrocité  dont  on  avait 
besoin  pour  nous  ramener  à  l'ignorance  et  à  l'escla* 
vage,  soyez-en  sûrs.  H  «st  déplorable  cet  évé- 
nement; mais  ce  qui  le  sei«il4avantage,  c'est  que 
nos  ennemis  pussent  dire  qu'«i*venaut  chercher 
l'hospitalité  sur  la  terre  des  hommes  libres,  un  étran- 
ger, probe,  énergique  et  républicain,  y  a  rencontré 
l'assassinat  et  n'a  point  été  vengé  par  la  loi. 

«Le  président  du  tribunal  criminel  du  départe- 
ment de  Vaucluse,  que  j'ai  saisi  sur-le-champ  de  la 
connaissance  de  celte  affaire,  m'observe  que,  si  le 
crime  exécuté  est  du  ressort  du  jury  ordinaire,  le 
crime  annoncé  et  projeté,  regardant  la  représenU- 
tion  nationale,  est  au  ressort  au  tribunal  révolution- 
naire ;  je  crois  que  ce  serait  le  cas  de  lui  donner  une 
autorisation  pour  prononcer  sur  ce  double  délit; 
c'est  ce  que  je  ferai,  si  je  ne  reçois  pas  de  vous  une 
détermination  contraire. 

«  Je  pars  pour  l' Ardèche  ;  je  serai  à  Avignon  le  12 
ventôse  au  plus  tard  ;  concertez  avec  le  comité  de 
salut  public  les  moyens  ^  me  donner,  et  comptez  sur 
toute  la  prudenceel  toute  l'énergie. Eclairer  l'homme 
trompé,  recevoir  celui  qui  se  repent,  punir  le  crime 
qui  persiste,  donner  justice  à  tous,  et  les  droits  com- 
muns à  chaque  citoyen,  tels  sont  vos  principes  et 
les  miens;  je*  ne  m'en  départirai  jamais. 

•  Salut  et  fraternité.  '   JbanDbbby. 

■  P.  S.  Ci-joint  copie  de  l'arrêté  que  j*ai  pris  le 
21,  à  minuit,  sur  l'assassinat  de  Pollier. 

AU  NOM  DU  PBUPLB  FBANÇAIS. 

>Jean  Debry,  représentant  du  peuple  français 
dans  les  départements  de  la  DrOme,de  i'Ardèche  et 
de  Vaucluse  ; 

•  Informé  de  l'attentat  commis  aujourd'hui  soir, 
dans  la  maison  du  citoyen  Pollier,  à  Rozetti,  de  l'as- 
sassinat exécuté  avec  toute  l'audace  du  crime  en  la  • 
personne  dudit  Pollier; 

•Instruit  que,  depuis  un  mois  environ,  c'est  la 
seconde  fois  qu'un  semblable  crime  a  lieu  dans  le 
département  de  Vaucluse; 

«  Voulant,  au  nom  ^e  la  justice  nationale,  qu'il 
soit  pu ui,  ses  auteurs  poursuivis,  saisis  et  livrés  au 
tribunal  criminel,  arrête  ce  qui  suit  : 

«  Les  comités  révolutionnaires,  les  municipalités 
du  département  de  Vaucluse  sont  expressément  char- 
gés de  faire  toutes  les  recherches  et  perquisitions 
qui  pourraient  faire  découvrir  les  auteurs,  au  nom- 
bre de  vingt-cinq  à  trente,  de  l'assassinat  commis 
le  21  pluviôse  au  soir  en  la  personne  du  citoyen 
Pollier,  domicilié  à  Rozetti,  district  d'Avignon.  Les- 
(Tits  corps  constitués  sont  autorisés  à  faire  saisir  les- 
dits  auteurs,  s'ils  peuvent  les  découvrir  ;  ils  justifie- 
ront des  diligences  qu'ils  auront  faites  à  cet  égard  : 
toute  autorité  constituée  qui  demeurerait  en  retard 
sur  ce  point  sera  sévèrement  punie,  comme  négli- 
geant criminellement  les  mesures  qui  peuvent  as- 
surer la  tranquillité  des  citoyens. 

«  Le  tribunal  criminel  du  département  est  chargé 
de  poursuivre  cette  affaire  sans  le  moindre  délai. 

«  Le  présent  arrêté  sera  de  suite  remisa  l'admi- 
nistration du  département  de  Vaucluse,  qui  le  fera 
imprimer  en  placards  et  parvenir  dans  toutes  les 
communes  pour  y  être  affiché. 

«  Fait  à  Avignon,  le  21  pluviôse,  à  minuit,  l'an  3e 
de  U  république  française,  une  et  indivisible. 

«Signé  Jean  Dbbby,  repréienlantdupeuple^ 
et  LocABD,  ieerélaire.  • 

La  lecture  de  la  lettre  de  Jean  Debry  excite  de 
fréquents  murmure9  d'indignation. 


535 


Sur  la  proposition  d'Auguîs,  la  Convention  na- 
tionale, après  avoir  entendu  le  rapport  de  ses  comités 
de  sûreté  générale  cl  de  législation,  décrète  : 

■  Le  tribunal  criminel  du  département  de  Vauclusc  est 
Investi  de  tous  les  pouvoirs  nécessaires  pour  poursuivre  et 
juger,  d'après  les  formes  établies  par  la  loi  du  8  nivôse  an  3, 
concernant  lorganisaUon  du  tritMinal  révolutionnaire,  les 
auteurs  et  complices  des  crimes  commis  les  SI  pluviôse 
dernier  à  RoielU,  district  d*AvignoD,  sur  la  personne  ^ 
ciioycn  Pollier,  et  du  complot  tendant  à  assassiner  le  rcpré- 
scniant  du  peuple  Jean  Debry,  en  mission  dans  le  dépaHe- 
ment  de  Vaucluse,  charge  expressément  ledit  tribunal  de 
s'occuper  sans  délai  du  jugement  t 

BovÈRB  :  La  mesure  que  la  Convention  vient  de 
prendre  ne  suffit  pas;  il  faut  couper  le  mal  dans  sa 
racine.  C*est  Timpunité  des  assassins  qui  leur  donne 
tant  d*audace.  (Applaudissements.)  Ceux  qui  ont 
dit  qu'il  fallait  eeorger  les  enfants  et  les  vieillards 
pour  ramener  l'abondance,  ceux  qui  voulaient  ré- 
duire la  population  de  la  France  à  huit  millions 
d'âmes,  ceux-là  se  promènent  en  liberté,  et  sont  pro- 
tégée par  des  hommes  même  qui  sont  dans  le  sein  de 
la  Convention.  (Nouveaux  apolaudissements.)  Il  faut 
enfin  qu'elle  prenne  l'attitude  qui  lui  convient,  et 
qu'elle  ne  craigne  pas  de  frapper  le  crime. 

Citoyens,  voilà  le  mal  qui  résulte  du  délai  qu'on 
met  à  faire  justice.  Si  la  Convention  avait  pris  la 
détermination  que  je  sollicitais,  si  elle  avait  (ait  pu- 
nir ces  scélérats,  elle  n'aurait  pas  à  gémir  sur  les 
excès  qu'ils  ont  commis  depuis...  Bréard  vous  a  dit 
une  grande  vérité  :  si  vous  ne  punissez  pas  ces  hom- 
mes, il  n'est  pas  un  Français  qui  n'ait  le  droit  de  les 
égorger. 

Je  demande  que  les  comités  de  gouvernement 
soient  chargés  ae  prendre  des  mesures  pour  faire 
disparaître  de  tels  monstres  du  sol  de  la  liberté.  (Ap- 
plaudissements. 

Charlier  :  Je  suis  de  l'avis  de  Rovère;  mais  c*est 
le  sommeil  des  tribunaux  qui  assure  l'impunité  à 
ces  brigands,  car  les  lois  sont  faites.  11  faut  charçer 
les  tribunaux  de  les  poursuivre  sévèrement  et  d  en 
certifier  le  comité  de  législation. 

André  Dumont  :  Il  ne  suffît  pas  de  charger  les  tri- 
bunaux de  poursuivre  les  assassins,  les  fripons  et  les 
buveurs  de  sang,  car  il  ne  pourrait  pas  les  attein- 
dre. Ces  hommes  affreux  promènent  leur  infamie  de 
département  en  département;  ils  viennent  surtout 
se  cacher  à  Paris.  (Applaudissements.)  H  faut  pren- 
dre une  grande  mesure  ;  il  fout  les  mettre  dans 
l'impuissance  d'exécuter  leurs  sinistres  complots; 
il  faut  les  désarmer.  (Quelques  murmures  à  l'extré- 
mité gauche.  —  Oui,  oui/  s'écrie-t-on  de  tous  les 
côtés  en  applaudissant.)  11  faut  désarmer  ceux  qui, 
auparavant,  se  faisaient  un  jeu  d'enlever  leurs  ar- 
mes aux  bons  citoyens  et  de  s'en  servir  pour  les 
égorger.  (Applaudissements.)  Quelque  active  que 
soit  la  surveillance  des  tribunaux,  ils  ne  feront  Ja- 
mais justice  de  tous  les  assassins  oui  sont  dans  Paris, 
de  tous  ceux  qui  ne  veulent  de  la  liberté  quepoui 
en  jouir  sur  les  cadavres,  de  tous  ceux  qui  ne  veu- 
lent de  la  liberté  que  pour  rapiner  et  voler.  (Ap* 
plaudissements.) 

Ces  hommes  atroces  ont  autrefois  désarmé  des 
gens  probes,  pour  avoir  émis  leur  opinion ,  des  gens 
ilont  la  vertu  leur  portait  ombraçe.  (ViDs  applaudis 
scmenls.)  Eh  bien ,  aujourd'hui  il  faut  que  1rs  égor- 
gcurs  rentrent  dans  le  sein  de  la  terre  d'où  ils  sont 
sortis  pour  le  malheur  de  l'espèce  humaine.  (Ap- 
plaudissements.) 

Rewreli.  :  Nous  apprenons  que  de  tous  les  côtés 
il  y  a  des  rassemblements  d'hommes  armés  qui  se 
réunissent  pour  piller  et  voler  ;  ce  sont  des  employés 


de  l'ancienne  tyrannie,  du  despotisme  de  Robespierre. 
(Applaudissements.)  Les  mesures  ordinaires  ne  se- 
raient pas  suffisantes  pour  les  atteindre  ;  il  faut  dés* 
armer  ces  scélérats,  les  foire  travailler  ou  les  punir, 
(Vifs  applaudissements.) 

Je  demande  que  les  comités  soient  chargés  de 
prendre  des  mesures  sévères  pour  dissiper  ces  ras- 
semblements. 

Toutes  les  propositions  sont  renvoyées  aux  trois 
comités  de  gouvernement,  pour  en  faire  un  rapport 
sous  trois  jours. 

Alritte  :  Le  citoyen  Pollier  était  connu  par  son 
dévouement  à  la  révolution  ;  tous  les  représentants 
du  peuple  qui  ont  été  dans  le  Midi  ont  été  témoins 
de  son  zèle.  Sa  famille  n'a  point  de  patrie,  elle  a 
tout  perdu  en  perdant  son  chef.  Je  demande  qu'on  lui 
assure  une  patrie  et  des  moyens  d'existence. 

Cette  proposition  est  renvoyée  au  comité  de  salul 
public. 

Blad  :  Tous  les  membres  du  tribunal  égorgeur 
de  Brest  sont  en  liberté  :  ils  courent  Paris,  et  se  réu- 
nissent dans  un  café,  rue  Nicaise,  ou  rue  Thomas- 
du-Louvre,  où  l'on  parle  sans  cesse  d'égorger  la 
Convention... 

On  interrompt  Blad,  en  demandant  qu'il  aille 
porter  sa  dénonciation  au  comité  de  sûreté  gêné* 
raie. 

—  On  reprend  Tappel  nominal. 

Le  résultat  donne  pour  représentants  du  peuple  à 
Saint-Domingue  les  citoyens  Bourdon  (de  l'Oise), 
Vardon  et  Giraud  (de  la  Charente-Inférieure.) 

—  6ouly,au  nom  des  comités  de  marine,  des  co- 
lonies, d'agriculture  et  des  arts,  fait  un  rapport  et 
propose  un  projet  de  décret  tendant  à  former  : 

t^  L'établissement  de  deux  écoles  centrales  d'a- 
griculture et  d'arts,  l'une  à  Saint-Domingue,  pour 
nos  possessions  d'Amérique,  l'autre  à  l'île  oe  Franoe, 
pour  celles  de  l'Inde; 

20  Un  essai  de  pompes  à  feu  pour  les  laboratoires 
à  cannes  à  sucre,  auxquels  on  emploie  maintenant 
des  mulets  qui  coûtent  annuellement  5  millions; 

So  Des  écoles  de  chimie  et  d'histoire  naturelle 
destinées  à  l'analyse  et  à  l'étude  des  trois  règnes  de 
la  nature  dans  ces  contrées  éloignées. 

La  Convention  ordonne  Timpression  et  l'ajournep 
ment  du  rapport  et  du  projet  de  décret. 

—  Le  citoyen  Berthelot,  adjoint  du  génie,  à  Quî- 
beron,  transmet  à  la  Convention  nationale  les  traits 
suivants  : 

•  Un  détachement  du  bataillon  de  Loir-et-Cher, 
cantonné  dans  la  commune  de  Sainte-Barbe,  dépar- 
tement du  Morbihan,  envoya,  il  y  a  quelques  jours, 
quatre  hommes  à  Auray,  même  département,  pour 
chercher  des  vivres.  Attaqués  en  route  par  une  cin- 
quantaine de  brigands,  ilsdéfendentet  n'abandonnent 
leur  convoi  qu'après  avoir  brûlé  toutes  leurs  cartou- 
ches.llsrentrentdansleur  cantonnement  et  racontent 
leur  malheureuse  aventure  à  leur  camarades  et  aux 
habitants  de  Sainte-Barbe.  Ces  derniers,  touchés  de 
cet  accident,  en  informent  aussitôt  la  municipalité 
de  Prouharnel,  chef-lieu  de  leur  canton;  les nabi- 
tantsconvoaués  s'empressent  unanimement  de  four- 
nir au  détachement  les  vivres  nécessaires,  sans  exi- 
ger aucune  indemnité. 

«  Le  commandant  et  les  citoyens  de  l'île  d'Aix  in« 
forment  la  Convention  nationale  qu'après  avoir  été 
bloq^ués  pendant  treize  jours  par  des  glaces  immen- 
ses, et  à  la  veille  de  souffrit  les  désastres  affreux  de 


536 


la  £unÎDe,  ils  ool  éié  heur^usemeat  secourus  par 
Téquipàgede  la  frégate  l'Àçrieole,  malgré  les  péiils 
ioimeuseset  tous  lesëcueilsiosurmou  tables  pourtous 
autres  que  de  vrais  répubiicaiias.  Ces  braves  militai- 
res, disent-ils,  n'ont  point  envisagé  la  rigueur  da 
teuips  ni  Leurs  propres  dangers.  Ils  se  sont  empres- 
sés^ à  travers  dés  monceaux  de  glace,  de  nous  ap- 
porter plusieurs  fois  du  biscuit.  La  neige  nous  em- 
pêchait, depuis  trois  jours,  la  vue  de  la  irëgale,  et  le 
lien  de  biscuit  tiui  nous  restait  venait  d'élre  ditstri- 
Dué.  Nous  n'avions  p(«is  rien  fM^ur  le  lendemain, 
pas  même  aucun  moyen  de  les  avertir.  Le  pavillon 
est  mis  en  berne  :  allers  le  citoyen  Guillotiu^eoui- 
mandant  la  frégate,  qui  avait  toujours  les  yeux  Gxés 
sur  notre  malheureuse  lie,  s'en  aperçoit  le  premici*. 
—  «Voilà  nos  frères  de  Tlle  d'Aix,  dit-il,  qui  sonl 
iKiiués  de  tout;  c^esl  m  aous  a  leur  porter  des  vi- 
vres. >  — Tous  demandeut  à  partir,  et,  malgré  le  froid 
excessif,  la  rame  d*une  mam ,  la  hache  de  Fautre, 
otHinal  les  bancs  ëmmnes  de  elaœs,  ils  parvinrent 
à  nous  sauver  des  horreurs  de  la  famine.  » 

Li  Ct»v)eatton  décrèle  ti  mention  honorable  au 
prooès-verlyat  et  an  Hulletin  de  ces  traits  dliumanité 
etd*iiéro4Sflie. 

—  Un  des  secrétaires  donne  lecture  des leltressui- 
vantes  : 

Biulel,  wêfr^$mlmmi  A»  jan^  ému  te  ferU  ëê 

La  Rochelle t  Rochefort,  Bordeaux,  Rayonne  H 
porls  adjacents,  à  la  Convenliou  naiionak. 

AordeMK,  k  9&  plu«iMe«  Vëm  !•  de  la  wfublifue 
une  et  ia4i visible. 

«  Je  vent  4HMMaoe«  cftl9|ie» CDHè^oei,  fefltiiée «■  ^m% 

de  Bociieforl  du  brick  ai^laU  l Edouard ,  du  port  de 
2B0  tomicain  ,  rtiargé  d'cau-de-vie,  TeBaot  de  Barcelone^ 
pris,  le  it  phnioee,  par  la  fr^te  Ya  Néréide,  faisant  parUe 
de  l'cscaéro. 

«  Je  vous  envoie  les  noticei  des  «entes  ^ue  J'ai  arrêtées 
pour  les  15,  20  et  25  du  mois  prochaio,  A  Rochefort, Bor- 
deam  et  Bhiye.  Chiiilgne  s'est  agitiîe  en  lous  sens  pour  dé- 
R%er  •oes  e^jets  A  fci  tïircalationeteDricbir  des  parûcuKers. 
J'ai  cru  devoir  déconcerter  tous  ces  projets  ;  je  ne  mds  op- 
posée iouie4àéU«rattce4e«e8  •b|jetft,Aalre«fueceHe  Matinée 
aux  besoins  des  armées  de  XecM  «t  de  .mer ,  4eê  hdipUaiUL  et 
des  établissements  publics. 

I  Jaloux  de  la  confiance  que  vous  m^avez  accordée,  je  o'ai 
pas  ^wMttasemir  les-pa^j^loDS  ni  la  vile  cu|ddité  de  quelques 
filpmift.  i)a\  «ris  de  ia  iuraMSié  dans  ma  oooéuite  :  «et»  ^«e 
J*ai  conrrarics  powvBOt  a'acottMr<éc  raideor;  «ait  le  Mes 
public  a  dirigé  mes  actions.;  on  ne  jpeut  s'égarer  en  suivant 
m  dH  ffidde. 

«  BlOI'IIm  > 

1x9  rejrrêsenîanU  au  peuple  tnvo^  dam  Uê  44- 
yariements  des  Bouches-du- Rhône  et  du  Vurèia 
Convenlion  nationale. 

A  VarMine*  le  S5  jplaiios^  Pan  S*  da  ia  n^ubliqHa 
française. 

c  Dtoyens  coUègues,  la  loi  ^u  7  plffviose,  lœUliMre  à  Mar- 
8i*tne,  avait  laissé  quelque  inquiétude  dans  les  eaprits; 
mais  CfAle  du  IS,  qui  n  rapporté  la  di^osiUoo  qui  ordon- 
Mdi  la'penrsaitede  Pinjare  faite  ft  Bd»  a  ramené  la  confiance 
61  vendu  l'diaa  à  4a  ^e  «piibtiqae  :  l'amour  delà  patrie  et 
Taitaciiement  A  laCeweation  rempUssent  tous  les  txrurs; 
A  4iiaqae  paê  ei  «dans  Imis  les  éien  «loas  reoaeiHaii»  l'-ev- 
pression  de  la  jreconnaisaance;  «Ure  aensibiilié  crt  dam 
tous  les  moments  Hrfiiri<»u«i»m«in  ^gmf  par  Je  tpeoiaole  ra- 
viasam  des  citoyens  qui  s'embrassent  et  je  iélkïitent  de 
vHrre  encore  pour  la  patrie;  parie  tableau  consolam  ci  varié 
qw  firésonte  le  concomrs  mnttipiié  des  vendeurs  et  des 
aciwtfMaîSMr  ia  filaoe  4oli  le  -commerce  développe  son  In- 
dustrie; et  suriom  par  les  cris  vifs  et  tnMWnes,  mille  M» 
rt^tét  tdana  le  jmr  :  «éM  «s  républtqw  \  «toe  (fa  ^Conven- 
Uon\ 

-  La  terreur  n'est  plus  dans  Maraellk  ;  Je  peuple  ne  «eot 
fUns  de  VonuigQç,  j;dttfi  de  Jacobinsi  «les  f^obespi^riiaics,^ 


royalistes,  les  brigandt  sont  poar  lui  des  bêles  (Séroces  qu'il 
poursuit  A  outrance*:  le  courage  était,  il  y  .i  peu  de  jours, 
comprimé  par  les  commandants  de  la  garde  nationale,  tous 
hommes  dangereux,  qui  avaient  su  profiter  de  la  crise 
qiil  naguère  menaçait  la  liberuî  daas  celle  commune,  pour 
accaparer  les  grades  s«qpéri6nj:s:  nous  avons  Ucencié  l'état- 
major,  et  remplacé  les  lerrorisles  par  les  amis  de  la  justiœ 
et  de  l'biuianilé. 

«  La  Société  popolàira  èierçait  eooore  le  despotisme  de 
l'arbilralre  et  de  ia  préventioB  :  omis  y  avons  appelé  la 
venu,  les  lumières  et  les  bonnes  moeurs;  les  spectacles 
étaiem  dégradés  cbaque  décade  par  des  rassemUemeau  Ui- 
mnllttalres,  indisriplinés  et  fïeu  déoeais  ;  nous  avons  sup- 
primé les  rcprésenialioos  f#v/â.  La  confiance  est  uni v<^- 
selle  et  entière.  Nous  osons  vous  répondre  de  la  tranquillité 
dans  le  Mdi ,  et  l'arrivage  des  subristances  n'est  pas  inter- 


Le  raéae  esprit  règne dmt  le  déparleoieat^es  Boncbet- 

dB-Abdne;  |iartout  on  chasse  les  dominateurs,  on  brise  les 
idoles ,  on  abat  les  aulels,  on  n'«doi>e  ^«e  la  ttberté ,  l'^lilé 
et  la  justice.  Bienlât  le  département  du  Yar  opérera  la  mémn 
révolution. 

I  La  translalion  dn  département  et  du  tribunal  crimind 
A  Aix  s  est  nilVe,  décadi  dernier,  sans  accident  ni  murmure* 

«  Toutes  les  voloniés  tant  aemnlses  A  la  vOtre,  et  le  peu- 
ple «effioroe  de  népaMr  aes  enean  par  «m  aanialiiioa 
avei^  A  «as  décrets. 

«Salut  et  friieniilé. 

<  ClIMOT.  IIA«ERB.  t 

—  Un  des  secrétaires  donne  lectnre  d*nne  lettre 
de  l'agence  des  lois.  Elle  instruit  la  Convention 
<ra*an  mois  d'août  \TVt  qnatre  superbes  presses  de 
l  imprimerie  nationale  ex^utîye  forent  enlevées  par 
Marat,  muni  d'nn  ordre  de  la  mnnicipalité.  Une  de 
ces  presses  a  eoâtë  irhts  de  €,t>00  Kv.  Les  ustensiles 
et  caractères  à  l'tisage  de  ces  presses  furent  égale- 
ment enlevés.  Le  tout  fnt  transféré  aux  Cordeliers, 
et  esft  resté  entre  les  mains  tSe  la  veuve  Marat,  qui, 
dans  ce  moment  les  fait  ronier  dans  son  domicile. 
L'agence  demande  à  être  autorisée  à  reprendre  ces 
presses. 

Sur  la  firoposition  d*tm  membre,  le  décret  solvant 
est  rendu  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entenda  ia  lecture 
d'une  lettre  de  l'agence  de  l'envof  des  lois  à  son  comité  des 
déorels  et  «rckives,  dbi  9de  ce  mois,  déonèle? 

c  V  Que  ramenée  de  l'envoi  des  lois  fera  Iranapovler  ^ 
suite,  dans  ses  ateliers,  les  quatre  presses,  caractères  et  n»- 
tensiles  de  Timprlmerie  nationale  du  Louvre,  enlevés  par 
Mtarat,  d'tqirès  un  arrêté  du  comité  de  sunrdllance  de  la 
conmmne  de  Paris ,  eroplacés  dans  la  maison  nationale  des 
ci-drvaiit  Cordeliers,  et  restés,  depais  sa  mort,  A  la  dîsposl- 
tkm  de -sa  veuve. 

«  â*  li'ageDoe  des  lois,  air  «a  siesponsabililé,  prendra 
toutes  les  mesures  néoessakes  peu*  faire  Matitner  «ens  4les 
ustensiles  et  caractères  d'imprimerie^  â^propclésniiadileft 
presses,  qui  auraient  pu  être  divertis. 

•  3"  L'agence  de  l'envoi  des  lois  déposera -snr-le-cbamp 
on  comité  des  décrets  et  les  arcbives  les  pièces  probantes 
de  renléfvement  dont  H  s'agit  « 

(La  miUêmain,) 

f9,  B.  —  Bans  la  séance  dn«,1a  Convention  a  décrété,  sur 
la  proposition  de  Cambon,  quH  serah  procédé  A  la  vente 
par  encbère  de  to«  le  mrt>IKer  appartenant  à  la  république. 

£lle  a  £ié  emnile  Je  moim  d^apnte  Jequel  «les  acquéreurs 
dos  iïiens  «ationauc  jOBboanMaieat  ies  tnmmfJt  •qu'Us  doi- 
vent A  ia  république. 

—  EnGn,  sur  la  proposition  deSnisay  d'JLqglas,  au  nom 
du  comité  de  salut  public,  elle  a  autorisé  la  commission  des 
approvisionnements  de  seprocturer,  par  vole  de  réquisition, 
les  isnin%  nécessaires  A  renieraencement  des  terres. 


Txxytmmts  hla  trésorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  sii  premiers 
■sais  ;  il  sera  fait  A  tous  ceux  «qai  <seront  porteurs  cTinscrip- 
ttent  au  grand  livre.  «Celui  «oiir  Vbs  rentes  viagères  est  de 
huit  mois  «ingi  ni  imiom^ii'annéB  iZS3  {taimis  sigde). 


GAZETTE  NATIOMLE  ,»  LE  lONITElJR  UNIVERSEL. 

No  158.  Oetidi  8  Ybntosb,  l'an  3«.  {Jettâi  26  Février  1795,  vimx  styte.) 


POLITIQUE. 

RÉPUBLIQUE   DES  PROVINCES-UNIES. 

La  Haye, le  ISfivrier.  —L'assemblée  des représentanU 
du  peuple  se  complète:  11  y  arrive  tous  les  jours  des  députés 
des  villes  où  la  révolution  s'esl  faite.  C'est  le  6  de  ce  mois 
que  solennellement  le  statboudérat  a  été  aboli  à  perpétuité; 
déclaraiiun  qui  n'est  pas  nouvelle  dans  nos  annales,  mais 
dont  les  principes  sont  tels  aujourd'bai  qu'elle  est  autant 
indépendante  de  l'érudition  historique  que  les  circonstances 
présentes  diffèrent  des  crises  anciennes. 

Une  députation.  ira  demain  communiquer  ce  décret  natio- 
oal  ttui  représentants  du  peuple  français,  en  leur  propo- 
sant une  alliance  entre  les  deux  républiques.  Le  Juste  em- 
pressement à  consommer  l'acte  de  celte  alliance  parait 
convenir  efssentiellement  aui  patriotes  les  plus  éclairés.  Des 
vues  de  prudence  l'indiquent  comme  le  plus  sûr  moyen  d'é- 
chapper aux  grandes  habiletés  du  cabinet  de  Berlin  ;  car  on 
tient  déjà  pour  probable  que  la  Prusse  intrigue  fortement, 
même  en  France,  pour  amener  le  gouvernement  de  la  ré- 
publique française  a  des  négociations  dans  lesquelles  le  roi 
de  Prusse  et  les  Provinces-Unies,  se  trouvant  avoir  une  po- 
sition commune  relativement  à  la  paix,  ne  voudraient  Aiire 
qu'un  traité  commun.  •  Conune  il  est  d'ailleurs  impossible, 
ajoutent  des  personnes  sages,  que  ie  gouvernement  français 
laisse  sa  nation  arriver  à  ce  terme  sans  qu'une  telle  erreur 
ait  été  signalée  par  des  calamités  graduelles ,  on  doit  se 
contenter  d'user  de  surveillance  sur  cet  article,  et  se  presser 
de  cuuclure  l'acte  d'alliance  avec  les  Français,  seule  condi- 
tion d'une  entière  sécurité.  Mais  un  piège  est  sans  doute 
caché  dans  ie  sort  du  Brabant  hollandais,  etc.  i 

—  Il  est  expressément  défendu  de  sortir  des  frontières 
sans  le  consentement  par  écrit  de  la  régence  du  lieu  de  son 
domicile.  Cette  loi  ordonne  le  séquestre  des  biens  des  per- 
sonnes qui  auront  tenté  l'émigration,  et  prononce  d'autres 
puniiions,  et  même  la  peine  de  mort  dans  certains  cas.  Par 
lu  on  relient  les  régcnu,  les  ministres  de  l'ancien  régime  et 
autres  hommes  en  charges  qui  ont  des  comptes  à  rendre.... 
Le  fiscal  de  l'amirauté,  Van-der-Hoop,  et  Kinsbergen,  ami- 
ral statboudérien,  ont  été  arrêtés  à  Amsterdam. 

-^  Les  Anglais  ont  envoyé  un  vaisseau  parlementaire , 
avec  des  chirurgiens,  pour  prendre  soin  de  leurs  malades 
restés  en  Hollande.  Le  vaisseau  n*a  point  été  reçu.  Les  re- 
présentants du  peuple  ont  répondu  aux  Anglais  que  les 
blessés  des  armées  ennemies  éuiient  traités  avec  humanité. 

—  Les  états  ont  déclaré  libre  Pimportation  des  grains  et 
des  farines  en  Hollande. 

—  Les  ministres  de  Russie,  de  Prusse,  d'Amérique,  de 
Bade,  de  Mecklembourg ,  des  villes  Anséatiques,  etc.,  ont 
eu  une  conférence  avec  le  président  des  états.  A  ce  si^et 
les  patriotes  qui  ont  provoqué  la  révolution  que  les  armées 
françaises  nous  mettent  en  état  de  faire  se  font  plusieure 
questions  remarquables  :  Est-ce  le  besoin  qu'on  a  de  nous? 
est-ce  le  désir  de  nous  observer  de  plus  près?  est-ce  la 
confiance  que  rien  ne  durera?  Laquelle  de  ces  rnl^ns  pro- 
cure aux  Provinces-Unies  régénérées  une  condescendance 
dont  Kl  république  française  a  été  loin  de  jouir  de  la  part 
de  quelques-unes  des  mêmes  puissances? 

Arrêté  des  représentants  du  peuple  près  iêS 
actuellement  en  Hollande, 

A  La  Haye,  le  30  pluviôse,  Tau  8*  de  la  république 
française,  une  et  indi^visible. 

t  Les  représentants  du  peuple  près  les  armées  actuelle- 
ment  en  Hollande  arrêtent  ce  qui  suit  : 

c  i^cs  relations  de  commerce  entre  la  Hollande,  la  France 
et  les  pays  conquis  occupés  par  les  armées  de  la  république, 
sont  niiièrement  rétablies,  en  se  conformant  aux  lois  con- 
cernant les  importations  et  exportations,  qui  ne  pourront 
cependant  se  faire  que  par  l'intérieur,  cl  non  par  mer,  jus- 
qu'à ce  qu'il  en  ail  été  autrement  ordonné.  Tous  arrêtés 
contraires  sont  rapportés. 

c  Le  présent  arrêté  sera  imprimé,  publié  et  affiché. 
•  Signé  D.-V.  Ramel,  ALQmiR  et  C  Cogbor.  • 

V  Série. '^  Tome  2L 


PATS-BAS. 

BruxeUeSt  le  dO  pluviôse.  —  H  vient  de  passer  par  cette 
ville  un  convoi  de  chariots  chargés  de  numéraire,  qui  aa 
rend  à  Paris  sous  l'escorte  d*un  corps  de  cavalerie. 

—  Les  républicains  se  sont  emparés  d'Emmerick,  vtlle 
forte  sur  la  rive  droite  du  Rhin,  entre  le  fort  de  Schenck  et 
Bess. 

—  Les  corps  autrichiens  qui  se  trouvaient  dans  les  envi- 
rons d'Emmerick  et  de  Wesel  défilent  vers  DusselOorf  et 
Kayserwerth.  On  présume  que  le  but  des  moaTements  de 
l'ennemi  serait  de  dégager  Luxembourg. 

Les  corps  de  Tarmée  de  Sambre-et-Meuse  qui  étaient  en- 
trés en  quartiers  d'hiver  dans  les  pays  de  JuUers  et  de  Lim* 
bourg  se  sont  rapprochés  du  Rhin,  dont  toute  la  rive  ' 
gauche  est  garnie  de  batteries  et  de  retranchements  formi- 
dables. 

~  Les  habitants  de  la  Belgique  viennent  d'apprendre 
avec  la  plus  vive  reconnaissance  que  l'intention. du  gouver- 
nement français  était  de  les  délivrer  enfin  du  régime  dea 
comités  de  surveillance,  et  de  les  faire  Jouir  des  bienfalta 
de  la  liberté. 

—  Les  représentants  du  peuple  ont  annoncé  et  développé, 
par  un  arrêté  réglementaire,  les  dispositions  d'un  arrête  du 
comité  de  salut  public  dont  Toid  la  teneur  : 

Extrait  du  registre  des  arrêtés  du  comité  de  salut  publie 
de  la  Convention  nationale. 

Du  tt  pluviôse ,  l'an  3«  de  la  république  française , 
une  et  indivisible. 

■  Le  comité  de  salut  public,  après  avoir  conféré  avec  le 
comité  des  finances  sur  les  objets  ci-après  désignés ,  et  con- 
formément à  son  avis,  arrête  : 

c  Art  1".  Les  comités  de  sunreillance  et  révolutionnaires 
sont  supprimés  dans  les  pays  conquis,  et  notamment  dans 
la  Belgique. 

I  II.  Il  est  fait  remise  aux  pays  conquis  des  amendes  im- 
posées à  défaut  de  payement  des  contributions. 

I III.  Ce  qui  reste  à  payer  des  contributions  pourra  l'être 
moitié  en  assignats  et  moitié  en  numéraire. 

I IV.  Les  otages  pris  pour  répondre  du  payement  des  con- 
tributions seront  dès  A  présent  mis  en  liberté  et  renvoyés 
dans  leurs  foyers.  Le  payement  ne  sera  plus  poursuivi  que 
par  des  voies  judiciaires. 

•  V.  Il  ne  sera  fait  aucune  réquisition  dans  les  pays  con- 
quis, si  ce  n'est  pour  l'approvisionnement  des  armées. 

■  Les  réquisitions  de  celte  espèce  seront  adressées  ans 
autorités  constituées,  qui  seront  tenues,  sous  leur  responsa- 
bilité, de  les  faire  exécuter.  Tous  les  agents  employés  aux 
autres  réquisitions  sont  supprimés. 

«  VI.  Le  maximum  cessera  d'avoir  lieu  dans  la  Belgtqfoe 
et  dans  les  pays  conquis. 

•  Signé,  les  membres  du  comité  de  salut  pubUe  » 

CAMBACÉRàs,  BOISSY,  PeLKT,  J.-P.  ChAKAL 

Narec,  Carkot,  Lacombb  (du  Tarn),  Maa- 
LiN  (de  Douai),  et  Dubois-Crahcb. 
«  Pour  copie  conforme  : 
«  Signé  Cambacéràs,  Msaun  (de  Dooai),  J.-P.  Cbaxal.» 


RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE. 
TRIBUNAL  CRIMINBL  RÉVOUmONNAIIB. 

AnaXyig  de  la  procédure  de  Laeroi». 

Le  président  interpelle  Taccusë  de  dire  ce  qu*il 
croit  pouvoir  objecter  aux  imputations  dirigées  con- 
tre lui  dans  Tacle  d'accusation. 

Lacroix:  Citoyens  jurés ,  j'ai  composé  l'ouvrage 
intitulé  le  Spectateur  français  dans  rinlcntion  de 
purifier  la  républigue  de  tous  les  vices  qui  Tont 
enfironnée ,  de  la  faire  fleurir ,  d*établir  ses  bases 

68 


638 


sur  les  nonira  et  la  vertu.  Le  discours  dont  on  me 
fait  un  crime  fu|  écrit  dans  les  circonstances  péril- 
leuses où  le  club  électoral  demandait  la  convocation 
des  assemblées  primaires  et  une  municipalité;  mon 
intention,  toujours  pure,  fut  d'écarter  l'orage  qui 
grondait  alors  sur  la  république.  Je  craignais  que  les 
agitateurs  et  les  anarchistes  n'y  (igurassent  avec  au- 
dace, qu*ils  ne  s'emp«irassent  des  élections, qu'ils 
nMntimidassenl  les  citoyens  qui  ne  veulent  que  Tor- 
dre, qu'ils  ne  dirigeassent  sur  eux  par  la  violence  et 
les  menaces  le  choix  de  la  multitude. 

Lorsque  mon  oiivrage  a  été  imprimé  ,  j'avais  en- 
gagé le  libraire  à  n'en  laisser  circuler  aucun  exem- 
plaire avant  d'en  avoir  fait  hommage  à  la  Conven- 
tion; je  lui  avais  même  fait  passer  de  Versailles  une 
lettre  pour  le  président  ;  en  voici  le  motif;  je  disais: 
«Dam  le  nombre  des  sept  cent  quarante^cinq  lé- 
gislateurs, peut-être  cent  achèteront  mon  livre  et 
'  le  liront;  ai  quelqu'un,  jaloux  d'y  trouver  des  prin- 
cipes répréhensibles  et  interprétant  d'une  manière 
insidieuse  les  opinions  qu'il  contient,  voulait  le  dé- 
iNMicer,  ceux  qui  l'auront  lu  tout  entier  prendront 
sa  défense.»  Et  en  eflet,  s'il  eût  été  lu  avant  que  de 
tomber  entre  les  mains  de  celui  qui  en  a  dénoncé 
des  fragments  isolés ,  on  n'aurait  pas  manqué  de 
crier  au  dénonciateur  :  >  Lisez  ce  qui  suit  ;  lisez  ce  qui 
précède  ;  et ,  rattachant  ainsi  les  idées  antérieures  à 
celles  que  vous  présentez  séparément ,  toute  inten- 
tion pertide  disparaîtra.  «C'est  ce  qui  n'est  point  ar- 
rivé. On  n'a  connu  que  Thypothè^e  innocente,  ab- 
surde ,  si  l'on  veut ,  dans  laquelle  j'ai  établi  les 
moyens  de  donner  au  vœu  du  peuple  pour  la  répu- 
blique le  plus  grand  caractère  d'aulheuticité  ;  car 
c'était  là,  je  le  jure,  mon  unique  motif, 

Uiins  mes  réflexions  méditatives ,  je  médisais: 
Les  puissances  étrangères  afiectent  de  révoquer  en 
doute  la  sincérité  du  vœu  des  Français  pour  la  répu- 
blique démocratique  ;  les  ennemis  même  du  nouvel 
ordre  de  choses  dans  l'intérieur  prétendent  que  la 
terreur,  l'esprit  d'imitation ,  l'inconstance  ont  arra- 
ché les  marques  d'assentiment  du  peuple  à  la  con- 
stitution de  93;  eh  bien,  cherchons  un  moyen  d'as- 
seoir la  république  sur  des  bases  inébranlables  ; 
que  le  peuple,  consulté  individuellement,  prouve  à 
ses  détracteurs  que  leurs  assertions  sont  téméraires 
et  mal  fondées.  Voilà  ,  citoyens,  dans  quelle  inten- 
tion j'ai  écrit  le  chapitre  qui  vient  d'attirer  sur  moi 
lu  sévérité  du  gouvernement. 

On  me  reproche,  dans  l'acte  d'accusation  dressé 
contre  moi ,  d'avoir  cherché  à  avilir;  à  dissoudre  la 
représentation  nationale;  mais,  dans  mon  système  , 
c'était  la  Convention  elle-même  qui  devait  en  diri- 
ger seule  toute  l'exécution  ;  c'étaient  des  représen- 
tants pris  dans  son  sein  qu'elle  aurait  envoyés  pour 
recueillir  le  vœu  du  peuple  français.  J'ai  dit,  à  la 
vérité,  qu'elle  ne  devait  point  être  éternelle.  Mais, 
loin  d'insinuer  qu'il  fallait  la  dissoudre  ,  je  dis  ex- 
pressément que  mon  avis  est  moins  encore  qu'elle 
soit  renouvelée ,  qu'elle  doit  conserver  l'autorité 
dont  elle  est  investie,  et  qu'on  ne  lui  conteste  pas: 
j'ajoute  qu'elle  a  acquis  une  grande  expérience; 
qu'enfin  elle  est  asseï  puissante  pour  prescrire  tout 
ce  qui  est  juste 

J'ai  attaqué  dans  mon  ouvrage,  avec  toute  l'éner- 

fie  d'un  vrai  républicain» la  magistrature  ancienne, 
ont  j'avais  connu  de  près  le  despotisme  et  les  ini- 
quilés«  J'ai  signalé  la  noblesse  grande  et  petite  ;  je 
ma  suis  élevé  contre  les  hommes  lâches  et  coupables 
qui  ont  abandonné  leur  patrie  ;  je  n'ai  pas  oublié  la 
:lasse  ambitieuse  du  clergé.  Enfin  ,  dans  cet  écrit 
pour  leuuel ,  par  une  fatalité  inconcevable ,  je  suis 
traduit  devant  vous,  ie  ne  cesse  de  donner  des  con- 
seils utiles  juf  Us  yrais  principes  de  U  liberté  e(  de 


l'égalité ,  et  même  sur  Véconomie  politique  :  f  y 
recommande  les  mœurs  et  la  pratique  des  vertus , 
parce  que  je  suis  convaincu  qu'elles  sont  absolu- 
ment nécessaires  au  soutien  de  la  république  démo- 
cratique. 

Après  un  discours  sévère  de  Taccusateur  public 
et  diverses  interpellations  faites  par  les  jurés  a  l'ac- 
cusé. Tronçon- Ducoudray  a  pris  la  parole  pour  dé- 
fendre Lacroix.  Mais  comme  Lacroix  s'était  défendu 
lui  même  avec  ce  calme  et  cette  simplicité  qui  ca- 
ractérisent l'innocence ,  et  qu'il  avait  siiflisamment 
démontré  la  pureté  de  ses  intentions  politiques,  nous 
nous  bornerons  à  citer  quelques  fragments  du  dis- 
cours improvisé  de  Trouçon-Ducoudray  sur  la  li- 
berté de  la  presse. 

Tronçon-Ducoudray  :  2e  regrette  de  ne  pouvoir 
pas  traiter  cette  grande  et  importante  question  de  la 
liberté  de  la  presse  avec  l'étendue  qu'elle  mérite  ; 
mais  l'orateur  qui  parle  devant  la  loi  n'a  pas  la  même 
latitude  que  l'écrivain  politique. 

Cependant  la  loi ,  quelque  sévère  qu*elle  paraisse 
aux  amis  de  la  Hberté  indéfinie  de  la  presse,  ne  peut 
pas  punir  les  opinions, et  la  Convention,  en  laissant 
subsister  cette  loi ,  ne  l'a  certes  entendue  que  dans 
le  sens  de  la  justice ,  et  non  pas  dans  le  sens  de  nos 
derniers  tyrans. 

lis  égorgeaient  avec  cette  loi  ;  une  opinion ,  une 
phrase,  un  mot  étaient  punis  de  mort.  La  Conven- 
tion ne  veut  au  contraire  que  punir  la  malveillance 
séditieuse,  les  cris  de  révolte,  les  efforXs  criminels  , 
l'intention  pourrenverser  legouvernement,elc.,etc. 

Ainsi  la  loi  ne  punira  point  une  opinion.  Mon 
opinion  est  ma  pensée  ;  c'est  une  modification  mo- 
mentanée de  mon  esprit  dont  je  ne  suis  pas  maître 
moi-même  :  le  droit  oe  l'exprimer  est  un  droit  na- 
turel que  la  société  ne  peut  pas  m'enlever ,  et  voilà 
pourquoi  la  Déclaration  des  Droits  le  consacre. 

Quelle  patrie  que  celle  où  l'expression  innocente 
de  la  pensée  serait  interdite  !  Quelle  liberté  que  celle 
qui  tuerait  le  citoyen  qui  parie  librement! 

La  liberté  de  la  presse  a  ses  inconvénients  ;  mais 
combien  d'avantages  politiques  les  compensent.  Eh! 
que  m'importe  d'abon),  comme  individu,  la  calom- 
nie qui  me  poursuit,  quand  je  sais  que  mon  pays  est 
libre  par  cela  seul  qu'on  peut  m'y  accuser? 

Je  souftre  comme  particulier,  mais  je  me  réjouis 
oomme  citoyen;He  dois  ma  vie  à  ma  patrie  :  balance- 
rai-je  a  lui  sacrifier  un  instant  de  tranquillité? 

Que  m'importe  ensuite ,  comme  citoyen  ,  l'erreur 
de  récrivain  qui  ne  pense  pas  comme  moi  et  comme 
la  majorité,  des  que  la  société  n'en  souffre  pas,  dès 
qu'il  ne  la  trouble  point?  Que  le  gouvernement  soit 
ferme,  qu'il  fasse  le  bonheur  de  tous;  il  n'a  point 
d'inquiétude  à  avoir.  Un  écrivain  censure  un  prin- 
cipe politique ,  un  autre  le  justifiera.  Allons-nous 
nous  prescrire  une  stupideidolélrie  pour  tout  ce  qui 
est,  et  nous  interdire  de  penser  même  à  ce  qui  peut 

Ou  bien  croyons-nous  que  le  peuple  sera  assez 
insensé  pour  abandonner  un  mode  de  gouverne- 
ment important  dès  qu'on  lui  montre  une  imperfec- 
tion ?  etc. 

Du  ô  ventôse.  <-^  N.-T.  Bureau ,  âgé  de  dix-huit 
ans,  né  au  Pont-de^Larohe,  district  de  Louviers,  dé- 
partement de  l'Eure ,  cx-coiffeur  de  femmes ,  ex-ca 
nonnier  à  la  Vendée,  où  il  a  é^té  blessé,  ensuite  dra- 
gon au  7e  régiment,  non  noble. 

Convaincu  d'avoir  tenu,  le  4  frimaire,  dans  la 
maison  commune  de  Compiègne,  des  propos  contre- 
révolutionnaires,  en  criant  :  •  Vive  le  roi!  vive  la 
reine  î  vive  le  dauphin  !  Je  suis  de  condition,  malgré 
que  je  soisperruqtràii»  um  o'ayasit  pis  tenu  ces 


689 


propos  avec  des  intentions  contre-rëvolutionnaires 
Tétant  extrêmement  ivr^  ,  d*après  les  dépositions 
aes  témoins  entendus ,  et  d'après  même  le  procès- 
verbal  de  la  municipalité  de  Compiègne) ,  a  été  ac- 
quitté et  mis  en  liberté. 


CONVENTION   NATIONALE. 

Suite  du  rappori  fait ,  au  nùm  de  la  ûùmmisiion 
chargée  de  V examen  de$  popterx  trouvé»  cheM  Ro- 
bespierre et  tes  eofnpliee$,par  E,-B»  CourtoU, 
député  du  département  de  VAube,  dan$  la  séance 
du  1 6  nivôse  ,an  3  de  la  république  française , 
une  et  indivisible. 

Pour  vous  faire  connaître ,  citoyens ,  à  qnels  vils 
coquins  Robespierre  avait  livré  son  pays  natal,  d<<Jà 
trop  à  plaindre  ,  sans  doute,  de  posséder  un  Lebon, 
il  faut,  entre  plusieurs,  vous  extraire  quelques  pas- 
sages d'une  lettre  de  ce  Darthé,  oui  concordent  ton- 
jours  avec  les  différents  traits  de  complicité  dont 
nous  venons  de  parler. 

Les  voici  : 

•  Lebon  est  revenu  de  Paris ,  transporté  d'one 
sainte  fureur  contre  Tinertie  qui  entravait  les  mesu* 
res  révolutionnaires.  Tout  de  suite  un  jury  terrible , 
à  rinstar  de  celui  de  Paris,  a  été  adapté  au  tribunal 
révolutionnaire.  • 

o  Lebon  est  revenu  de  Paris....  Tout  de  suite  un 
jury  terrible....»  Il  est  clair  que  Lebon  ne  venait  en 
poste  à  Paris  que  pour  prendre  les  instructions  du 
comité  de  salut  public,  instructions  qu*il  retouruaiti 
en  ooste,  faire  exécuter  à  Arras. 

tiontinuons: 

•  Ce  jury  est  composé  de  soixante  bougres  à  poil, 
«Un  arrêté  vigoureux  a  fait  claquemurer  les  rem* 

mes  aristocrates  dont  les  maris  sont  incarcérés ,  et 
les  maris  dont  les  femmes  le  sont...  Une  perquisition 
vient  d'être  faite  par  une  commission  ardente  de  sept 

Î^atriotes;  j'étais  du  nombre.  La  guillotine ,  depuis 
e  temps,  ne  désempare  pas:  les  ducs,  les  marquis» 
les  comtes ,  les  barons  mâles  et  femelles  tombent 
comme  la  grêle. 

•  Nous  venons  d*arrêter  que  nous  dresserions 
l'acte  d'accusation  de  tous  les  gros  aristocrates  d'Ar- 
ras  d\ibord,  et  ensuite  des  autres  endroits  du  dépar- 
tement.» 

Il  semble  que  les  valets  de  ces  coupables  manda- 
taires ne  se  soient  plus  à  tracer  le  taolean  de  leurs 
)ropres  crimes  que  pour  tracer  la  condamnation  de 
eurs  maîtres. 

Joseph  Lebon,  suivant  ce  même  Darthé  ,  «n'était 
occupé  qu'à  rédiger  des  actes  d'accusation,»  tandis 

3  ne  lui  et  ses  cinq  ou  six  autres  coopéra  leurs  «  ne 
ormaient  plus  pour  faire  des  visites  domiciliaires» 
dont  le  but  était,  disait-il ,  de  faire  «éternuer  dans 
la  besace»  tous  les  coquins. 

Cependant  le  tribunal  révolutionnaire  n'y  pou- 
vant suffire  (à  ce  qu'on  disait), on  lui  donna  une 
section  seconde;  maison  avait  beau  redoubler  d'ac- 
tivité, on  se  plaignait  encore  des  lenteurs. 

•  Il  semble  (écrivait  Daillet  à  Robespierre) que 
tous  les  habitants  soient  coupables ,  puisque  aucun 
n'ose  en  dénoncer  un  autre....  La  commune  d'Arras 
est  peut-être  la  seule  qui  doive  être  excepté  delà  loi 
qui  supprime  les  tribunaux  révolutionnaires  de  dé- 
partement. » 

Vous  venez  de  voir  cju'eîle  en  fut  exceptée,  en 
eflet  ;  et  Daillet  vous  développe  les  motifs  de  cette 
exception  :  •  C'est  parce  qu'ils  ne  font  grâce  à  per- 


le 


sonne,  qnlls  frat^pênt  à  conp  sAr ,  et  (rails  sont  con- 
vaincus que ,  si  les  aristocrates  n*ont  pas  pris  une 
part  active  dans  les  consnirations ,  ils  n*en  ont  pas 
moins  appelé  la  contre-révolution  dans  leur  cœur.» 

Ainsi  le  soupçon  tient  lieu  de  preuve,  et  la  suppo- 
sition d'intention  équivaut  à  Pintention  annuyeede 
faits.  Celui  qui  n'est  point  coupable  à  afl  Fétre, 
parée  qu'il  sort  de  telle  caste ,  ou  que ,  pour  ne  pas 
vivre,  comme  ces  brijgands.  en  volant  la  république, 
il  vit  du  fruit  de  son  industrie. 

«  Il  faut  (  s'écrie  un  de  ces  mis<!rables  dans  un  de 
ses  accès  délirants  ),  il  faut  tuer  l'aristocratie  mer- 
cantile (1),  comme  on  a  tué  celle  des  prêtres  et  des 
nobles.»    • 

Il  veut  qu*un  comité  de  subsistances  et  de  mar- 
chandises créé  dans  chaque  commune  Soit  Seul  admis 
à  faire  le  commerce. 

Vous  la  trouvée  partout  reproduite,  cette  abomi- 
nable doctrine  souftlée  par  nos  inamovibles  dans  les 
cœurs  de  leurs  trop  dociles  esclaves. 

Mais  qu'esl-il  besoin  de  vous  arrêter  plus  long- 
temps devant  cette  peinture  affligeante?  Vous  vous 
rappelez  l'Adresse  énergique  que  la  commune  d*Ar- 
ras ,  réunie  en  assemblée  générale,  vous  présenta, 
trois  jours  après  le  supplice  de  Robespierre  ;  elle 
répète  encore  ces  phrases  mémorables  : . 

•  Notre  ftme  oppressée  se  soulève,  et  notre  voix 
se  joint  à  celle  des  tombeaux  pour  vous  crier  :  Hom- 
mes justes ,  le  sang  innocent  a  coulé  ;  la  liberté  a 
été  poursuivie  jusque  dans  la  conscience  des  hom« 
mes  libres  ;  la  justice  et  l'humanité  ont  été  outra*^ 
gées. » 

A  la  voix  de  la  commune  d'Arras ,  d'autres  com- 
munes ont  uni  leurs  voix,  et  dans  ces  derniers  jours 
encore  celle  de  Saint-Pol  est  venue  vous  présenter 
un  faisceau  de  pièces  légales  d'où  sortira  la  hache 
vengeresse  de  la  justice  pour  frapper  la  tête  coupa- 
ble du  complice  de  la  tyrannie. 

Qu'il  attende  dans  les  fers,  ce  barbare  ennemi  des 
humains,  le  rapport  de  vos  comités.  Pour  nous,  re* 
présentants ,  poursuivons  avec  courage  le  fatigant 
examen  des  crimes  de  nos  oppresseurs* 

Jetez ,  citoyens ,  jetez  vos  regards  sur  les  vtlleS 
commerçantes  et  nourricières  de  la  république  i 
Arras,  Lyon,  Nîmes,  Bordeaux.  Brest,  Nantes i 
Orange  ;  chacune  vous  o&rira  des  larmes  à  essuyer, 
du  sang  à  étancher ,  des  catacombes  à  fermer  ;  cha* 
cune  avait  son  tribunal  sanguinaire  «  chaque  tribu** 
nal  son  Dumas,  son  Fouquier.  Ces  tribunaux  étaient 
autant  de  colonies  d'égorgeurs  sortis  du  tribunal  de 
Paris,  qui  servait  de  modèle  pour  le  choix  des  tùtta- 
bres  dont  on  les  composait. 

Hélns  !  l'instrument  terrible  de  la  mort,  construit 
uniquement  pour  la  punition  du  crime ,  s*est  repro* 
duit ,  comme  une  plante  vénéneuse ,  sur  tous  les 
points  de  la  république.  11  s'est  naturalisé  également 
sous  les  cieux  opposés  du  Nord  et  du  Midi,  el  l'Ourse 
glacée  et  le  dévorant  Sirius  pleurent  également  ses 
funestes  succès. 

Oh  !  venez  ;  pénétrons  ensemble,  citoyens,  à  tra- 
vers les  torrents  de  feu ,  sous  les  murs  sapés  par  la 
hache,  et  qui  seinblent,'en  s'écroulant,  menacer  nos 
têtes  ;  pénétrons  dans  ces  cités  autrefois  populeu* 
ses,  veuves  d'habitants  aujourd'hui  ;  dans  ces  nou- 
veaux déserts ,  plus  affreux  que  ceux  de  Barca  ou 
d'Horeb.  Les  voyez-vous.comme  la  hyène  acharnée 
sur  sa  proie,  tous  ces  génies  dévastateurs  lançant  1« 

(I)  Cette  ariilocrttie  mercantile  était  lé  prétéitè  pôttf 
couvrir  ranéantiuement  du  commerce.  On  peut  fuir  que  Ju- 
lien nu  fait  honneur  fe  Carrier  iTatoir,  dans  un  temps,  écrasé 
le  négociaoïitme  et  tonné  atec  force  contre  Petprit  mer- 
cautile.  Les  lettrei  de  Collot  eootieooent  la  même  doeiriue. 


640 


torche  dévorante  sur  les  monuments  des  arts  et  du 
génie!  Ils  veulent,  ces  nouveaux  Omar,  oui  n'ont 
conquis ,  ni  la  Perse ,  ni  TEgypte,  ni  la  Lybie  ,  faire 
du  Français  du  \yï\\^  siècle  un  peuple  de  barbares 
réduits,  non  à  la  pratique,  mais  à  la  lecture  des 
Droits  de  l'Homme,  comme  autrefois  les  Sarrasins  à 
la  science  du  Coran  ! 

Jetez  avec  nous  un  coup  d*œil  sur  tous  ces  lâches 
dilapidateurs  des  trésors  des  Ptolémées-Philadel- 
phes;  sur  toutes  ces  puissances,  ces  mauvais  princi- 
pes ,  ces  Arimanes  qui  se  sont  disputé  durant  une 
année  entière  les  iambeeuz  palpitants  de  la  patrie 
déchirée.  Que  furent-ils,  que  sont-ils  encore  ces 
fondateurs  de  comités  de  démolition  ,  ces  créateurs 
de  ruines  !  de  vils  eunuques  blessés  de  la  présence 
des  puissants. 

C'est  la  conjuration  de  la  sottise  et  du  crime  for- 
mée contre  le  génie ,  contre  la  vertu  ;  c'est  l'insur- 
rection du  brigandage  contre  le  précepte  du  tien  et 
du  mien  ;  c'est  le  rëgue  des  vengeances  et  des  pas- 
sions abjectes. 

O  Lyon!  cité  fameuse  par  ton  commerce ,  quel 
est  ce  nouveau  Gengis  (1)  qui,  la  hache  et  la  foudre 
à  la  main,  fond  sur  tes  murs,  et  vient  venger  les  in- 
jures de  Thémugin!  C'en  est  donc  fait,  ta  ruine  est 
jurée  ! 

«  En  détruisant  une  ville  rebelle, écrit  Collot(2), 

(t)  Gen^U,  obscur  et  méprisé  sous  le  nom  de  Thémugin, 

revint,  comme  1*od  sait,  en  conquérant,  venger  les  mépris 

qu'il  avait  essuyés.  Collot ,  qui  connaissait  par  état  les  rôles 

[u*avait  joués  le  Tartare,  est  accusé  de  Tavoir  pris  pour  mo- 

ièle,  et  d*avoir  veogé,  comme  lui,  dea  injures  particulières. 

A.  M. 


3; 


(t)  Pendant  rimpreiiioo  de  ce  rapport ,  CeUot  a  imprimé 
les  EclaircissemenU  nécessairti  sur  et  qui  i*est  passé  à  Lyon 
Vannée  tUrnièrâ,  On  7  lit  au  P.  S. ,  page  33  :  «  Les  jour- 
«  nauz  répètent  pour  la  millième  fois,  et  celle-ci  d*après  le 
c  rapport  de  Courtois,  tous  les  hardis  mensonges  qu*il  a  pui- 
c  ses  lui-même  dans  lesplus  impurs  pamphlets.»  Je  n'ai  pas  dit 
on  mot  que  je  n*aie  puisé  dans  les  papiers  trouvés  chei  Robes- 
pierre, et  notamment  dans  les  lettres  de  Collot  lui-même;  voilà 
quelles  sont  les  sources  impures  où  j*ai  puisé.  Si  j*avais  voulu 
tout  dire  sur  Collot,  j'aurais,  sans  sortir  des  papiers  trouvés 
chea  les  conspirateurs,  pu  citer  un  arrêté  que  lui  Collot  ne 
cite  pas  à  la  suite  de  ses  EclaircUsemenU^  et  dans  lequel  on 
le  voit  ordonner  de  mettre  au-dessus  do  la  tête  d'un  coupa- 
ble ouvrier  qui  aurait  volé  pendant  les  démolitions,  et  que 
Ton  aurait  condamné  suivant  les  lois  criminelles,  le  ridicule 
ccriteau  de  muscadin ,  et  mille  autres  gentillesses  de  cette 
espèce.  Si  je  ne  me  fusae  pas  imposé  la  loi  sévère  de  ne  pat 
•ortir  des  papiers  des  conspirateurs,  j'eusse  pu  citer  quel- 
ques faits  bien  constants  attestés  par  un  de  mes  collègues 
(Pressavin) ,  et  qui  prouvent  combien  vaste  était  l'humanité 
de  Collot,  et  combien  stricte  était  son  esactitude  à  se  ren- 
fermer dans  la  loi.  J'eusse  pu  dire  aue  «  Collot  d'Herbois  a 
fait  tomber  sous  le  glaive  de  la  loi  aeux  excellents  patriotes 
qui,  depuis  l'origine  de  la  révolution,  n'ont  cessé  d'en  sou- 
tenir les  principes  avec  énergie ,  et  ont  contribué  de  tous 
leurs  moyens  è  servir  la  chose  publique  ;  ces  deux  citoyens, 
l'un  nommé  Dabost,  président  du  département  de  Rh6ne-et- 
Loire,  l'autre  nommé  Bonamour,  membre  du  directoire, 
avaient  été  un  moment  égarés  sur  la  journée  du  31  mai  ; 
mais  ils  reconnurent  bientôt  leur  erreur  ;  ils  firent  leur  ré- 
tractation dans  le  terme  que  lisait  le  décret  de  la  Conven- 
tion ;  ils  étaient  par  conséquent  sons  la  sauvegarde  de  la  loi. 
Moïse  Bayle  vint  dans  le  temps  à  la  tribune  de  la  Conven- 
tion déclarer  que  les  rétractations  de  ces  deux  fonctionnaires 
publics  s'étaient  égarées  dans  les  bureaux  du  comité  de  sû- 
reté générale;  qu'on  avait  i  ce  comité  des  notions  certaines 
qu'elles  y  avaient  été  déposées;  qu'en  conséquence  il  de- 
mandait à  la  Convention  un  sursis  i  l'exécution  du  nommé 
Dabost,  qui  était  alors  en  jugement.  La  Convention,  sur  l'at- 
testation do  son  comité  et  du  citoyen  Pressavin ,  représen- 
tant du  peuple ,  qui  assura  avoir  lui-même  remis  au  comité 
de  sûreté  générale  les  deux  rétractations  dont  il  était  ques- 
tion, ordonna  le  sursis  ;  mais  Collot  d'Herbois  écrivit  de  suite 
à  la  Convention  qu'il  était  bien  étonné  qu'elle  eût  accordé 
'1  à  l'eiécuUoD  d'un  chef  des  rebelles,  et,  par  le  faux 


on  consolide  toutes  les  autres.  •  Voilà  ses  principes! 
«  11  ne  faut  laisser  que  des  cendres.  •  Voilà  ses  pro- 
jets !  '  Nous  démolissons  à  coups  de  canon  et  avec 
l'explosion  de  la  mine.  •  Voilà  ses  exploits! 
j .     •  J'ai  trouvé  ici  le  système  d'indulgence  ,  écrit 
I  Collot  à  Robespierre  son  ami,  soutenu  par  un  décret 
!  de  la  Convention ,  du  20  brumaire ,  affiché  ici  avec 
I  affectation.- 

On  voit  avec  quel  respect  ce  mandataire  traite  les 
décrets  de  la  Convention,  auxquels  sa  mission  pour- 
tant lui  prescrivait  d'obéir.  11  regrette  que  ce  ne 
soient  pas  ses  arrêts  de  sang  plutôt  qu'un  décret  de 
la  Convention  qui  couvrent  les  murs  d*une  ville 

3u*il  voudrait  ploneer ,  comme  une  autre  Sodome , 
ans  les  entrailles  de  la  terre, 

•  L*arméc  révolutionnaire  arrive  enfin  après  de- 
main, et  je  pourrai  (continue-t-il)  accomplir  de  plus 
grandes  choses.  Il  me  tarde  que  tous  les  conspira- 
teurs aient  disparu Il  faut  que  Lyon  ne  soit 

plus  en  effet,  et  que  l'inscription  que  tu  as  proposée 
soit  une  grande  vérité...  Car  jusqu'à  présent  ce  n'est 
réellement  qu'une  hypothèse ,  et  le  dfécret  lui-même 
oppose  de  grandes  difficultés.  11  t'appartiendra  de  le 
rendre  ce  qu'il  doit  être, et  d'avance  nous  préparons 
les  amendements.» 

«Il  t'ap|)artiendra Quel  langage!  La  Con- 
vention n'était  rien  aux  yeux  des  conspirateurs; elle 
n'était  plus, comme  on  l'a  nommée,  qu  une  machine 
à  décrets.  Robespierre ,  de  leur  aveu  ,  régnait  seul  ; 
ils  reconnaissaient  sa  puissance,  et,  par  un  échange, 
ils  se  servaient  de  celte  puissance  qu'ils  avaient 
créée  pour  s'en  faire  une  à  eux-mêmes.  Il  n'appar- 
tenait, en  un  mot,  qu'à  leur  idole  le  droit  d'étendre 
ou  de  resserrer  l'esprit  des  décrets  que,  par  un  reste 
de  pudeur  dont  on  espérait  bientôt  s'affranchir ,  on 
venait  encore  proposer  à  la  Convention.  Que  celui 
qui  a  écrit  ces  lignes  ose  dire  encore  à  présent  qu'il 
n'a  pas  travaillé  comme  les  autres  à  élever  le  pié- 
destal de  la  tyrannie  !  on  lui  répondra  en  l'opposant 
à  lui-même. 

Après  cette  phrase  où  Collot  invoque  l'exercice 
de  la  souveraineté  de  Robespierre,  on  lit  ces  mots  : 

•  Plusieurs  fois  vingt  coupables  ont  subi  la  peine 
due  à  leurs  forfaits  le  même  jour.  Cela  est  encore- 
lent  pour  la  justice  d'un  peuple  entier,  qui  doit  fou- 
droyer tous  ses  ennemis  à  la  fois;  et  nous  nous  oc- 
cupons à  forger  la  foudre.  • 

Saint-Just ,  dont  Collot  fut  dans  tous  les  temps 
Tadmirateur,  dont  il  avait  soif  de  lire  les  rapports, 
avait  dit ,  avant  son  disciple,  qu'une  révolution  est 
un  coup  de  foudre.  Telles  sont  les  métaphores  de 
choix  de  tous  ces  enfants  du  chaos;  il  ne  s'agit  jamais 
chez  eux  de  création,  de  vie,  mais  de  secousses,  mais 
de  destructions  et  de  ruines. 

•  Ecris-nous  (  continue  Collot  )  ;  une  lettre  de  toi 

«posé  qu'il  fit  h  la  Convention ,  il  obtint  d*eUe  la  levée  du 
aursia,  et  cea  deux  malheureux  patriotes  furent  guillotinéi,  » 
ainsi  que  l'écrit  Achard  i  Gravier,  le  i7  frimaire  de  Pan  S. 
{Vo^et  Pièces  justificatives,  nOXCVIII.) 

J'eusse  pu  rapporter  que  «  trois  citoyennes,  dont  les  ma- 
ris étaient  arrêtés  et  sur  le  peint  d'être  eiécutés,  furent 
auprès  de  Collot  d'Herbois  implorer  sa  clémence  en  leur  fa- 
veur ;  que  celui-ci  les  fit  arrêter  et  eiposer  pendant  six  heures 
en  public,  attachées  au  pilori.  De  ces  citoyennes,  l'une  se 
nommait  Chalons,  une  antre  Barmont  ;  00  ne  m'a  pas  cité  le 
nom  de  la  troisième. 

«  Collot  faisait  incarcérer  toutes  les  femnea  qui  se  présen- 
taient i  lui  pour  implorer  la  grâce  de  leurs  maris.  > 

Je  me  flatte  que  Collot  ne  dira  pas  cette  Ibis  que  j*ai  puisé 
ces  faits  dans  des  pamphlets  impurs. 

An  aurplus ,  afin  que  Collot  ne  dise  pat,  comme  il  l'a  ioH 
primé  dans  ses  Eclaircissements,  que  Ton  a  tronqué  ses  let- 
tres, je  les  ai  mises  dans  leur  eatier  aux  pièces  justificatives, 

A.  M. 


sa 


fera  an  grand  effet  sur  tous  nos  Jacobins.  Ne  laisse 

Îioint  passer  de  rapports  tels  que  celui  qui  a  amené 
e  décret  de  sursis.  • 

Voilà  bien  la  confirmation  de  ce  que  nous  venons 
de  dire,  qu'ils  soutenaient  la  puissance  de  Robes- 

Eierre  pour  opprimer,  de  concert  avec  lui,  la  repu- 
iique;  qu'ils  n'ont  crié  contre  Robespierre  que 
lorsqu'ils  ont  vu  qu'il  voulait  être  seul  oppresseur. 
«Ne  laisse  point  passer  de  rapports!...»  Ils  punis- 
saient de  mort  ceux  dont  les  discours  tendaient  à 
l'avilissement  de  la  Convention  ;  et  Tavilissaient-ils 
moins,  eux  qui  rétrécissaient  la  volonté  nationale 
au  point  de  la  placer  dans  la  giain  de  Robespierre  ! 
Et  ils  ont  osé  dire  dans  cette  enceinte  qu'ils  ne  s'é- 
taient aperçus  de  son  despotisme  que  depuis  quel- 
ques mois,  tandis  qu'il  résulte  de  leurs  écrits  qu'ils 
avaient  reconnu,  épaulé,  caressé  depuis  un  an  ce 
despotisme.  {La  suite  à  demain,) 


SUITE  A  LA  SÉANCE  DU  4  VENTOSE. 
Présidence  de  Bourdon  (de  l'Oise)» 

Garran,  au  nom  du  comité  de  législation,  hiX 
adopter  le  projet  de  décret  suivant  : 

«  La  Convention  nationale,  voulant  assurer  aux 
habitants  de  Paris  les  movens  de  constater  leur  état 
civil  d'une  manière  plus  facile  et  plus  sûre,  décrète  : 

TiTBB  I«r. 

Des  lieux  destinés  à  constater  l'état  cimi. 

•  Art.  I®'.  La  commune  de  Paris  sera  divisée  en 
douze  arrondissements,  pour  constater  l'état  civil. 

«11.  Chacun  de  ces  arrondissements  sera  conforma 
au  tableau  annexé  au  présent  décret. 

■  111.  La  commission  des  travaux  publics  se  con- 
certera avec  le  directoire  du  département  de  Paris 
pour  faire  préparer  un  local  convenable  à  ces  éta- 
blissements. Ce  local  ne  pourra,  sous  aucun  pré- 
texte, être  pris  hors  de  ceux  qui  ont  déjà  été  attri- 
bués aux  sections  pour  les  divers  établissements. 

-  IV.  La  publication  des  mariages  se  fera,  à  l'a- 
venir, à  la  porte  extérieure  et  principale  de  chaque 
établissement;  l'extrait  de  l'acte  de  publication  y 
sera  alOché  dans  un  tableau  destiné  à  cet  objet  ;  le 
même  extrait  sera  en  outre  affiché  sur  la  principale 
porte  du  chef-lieu  des  sections  où  les  futurs  époux 
auront  leur  domicile. 

Titre  II. 

Des  officiers  établis  pour  assurer  V état  civiL 

V.  L'établissement  de  chaque  arrondissement 
sera  composé  d'un  officier  de  l'état  civil,  garde  des 
archives,  de  son  substitut,  de  l'agent  national,  d'un 
secrétaire  commis  et  d'un  concierge. 

•  VI.  Les  agents  nationaux  seront  allernatifrement 
pris  dans  chaque  section  de  l'arrondissement,  d'a- 
près le  choix  qui  en  aura  été  fait  par  le  comité  civil, 
suivant  la  loi  du  14  fructidor;  ils  alterneront  tous 
les  mois. 

•  Vil.  Deux  jours  avant  l'installation  des  officiers 
civils,  les  agents  nationaux  nommés  dans  les  sec- 
tions se  réuniront  au  chef-lieu  de  l'arrondissement 
pour  décider,  par  la  voie  du  sort,  l'ordre  dans  le- 
quel ils  entreront  désormais  en  fonctions. 

•  VllI.  Le  traitement  pour  l'officier  de  Fëtat  civil 
sera  de  3,600  liv.;  il  sera  de  3,000  liv.  pour  le  sub- 
stitut; de  2,400  liv.  pour  le  secrétaire  commis,  et 
de  2,200  liv.  pour  le  concierge. 

•  IX.  Les  fonctions  des  officiels  de  Fétat  civil  et 


de  leurs  substituts  seront  les  mêmes  que  celles  de% 
officiers  municipaux  nommés,  dans  les  grandes  corn* 
munes,  pour  constater  l'état  civil. 

•  X.  A  compter  de  l'installation  des  officiers  de 
l'état  civil,  les  commissaires  de  police  de  chaque 
section  cesseront  de  recevoir  les  déclarations  de 
naissance  et  de  décès,  et  de  remplir  les  autres  fonc- 
tions qui  leur  sont  attribuées  par  la  section  11  de  la 
loi  du  19  décembre  1792;  ces  fonctions  seront  rem- 
plies par  un  des  membres  du  comité  de  l'état  civil 
de  chaque  section,  choisi  par  le  comité. 

«  XI.  Dans  la  première  décade  de  chaque  trimes- 
tre, le  commissaire  nommé  «par  la'section  pour  re* 
cevoir  les  déclarations  de  naissance  et  décès  dépo- 
sera au  greffe  de  l'arrondissement  les  registres  de 
naissances  et  décès  du  trimestre  précédent.  L'officier 
de  l'état  civil  ou  son  substitut  en  fera  le  recollement 
avec  le  registre  de  l'arrondissement;  il  relèvera  les 
contraventions,  s'il  en  a  été  commis,  en  remplissant 
à  cet  égard  tout  ce  qui  est  prescrit  aux  ofticiers  mu^ 
nicinaux  par  l'article  VI  de  la  section  U  de  la  loi  du 
19  décembre  1792. 

TmE  III. 

Des  registres  de  l'état  eiml. 

>  XII.  Il  sera  fourni  à  chaque  arrondissement, 
aux  frais  de  la  commune  de  Paris  et  à  la  diligence 
de  l'agent  national,  deux  doubles  des  cinq  registres 
suivants  : 

«  Le  premier  registre  servira  a  recevoir  les  actes 
de  naissance  et  de  reconnaissance  d'enfants  ; 

•  Le  second  servira  aux  actes  d'adoption; 
«  Le  troisième,  aux  actes  de  mariage  ; 

«  Le  quatrième,  aux  actes  de  divorce; 
«  Le  cinquième,  aux  actes  de  décès  ; 
«  XllI.  Tous  ces  registres  seront  renouvelés  au 
commencement  de  chaque  année;  les  nouveaux  re- 

fistres  seront  désormais  envoyés  à  l'arrondissement 
ans  la  première  décade  de  vuctidor,  pour  l'année 
suivante. 

«  XIV.  Un  double  de  chaque  espèce  de  registre 
restera  aux  archives  de  l'arrondissement;  l'autre 
double  sera  remis  aux  archives  du  département,  au 
plus  tard  dans  la  première  décade  du  second  mois 
qui  suivra  l'expiration  de  chaque  année. 

■  XV.  L'officier  de  l'état  civil,  ou  son  substitut, 
joindra  à  chaque  registre  une  table  alphabétique 
des  noms  des  citoyens  dont  l'état  y  sera  constaté  ;  la 
table  renverra  à  la  date  des  actes  et  au  folio  où  ils 
seront  inscrits.  Le  dépôt  de  registre  ne  pourra  avoir 
lieu  avant  que  celte  formalité  soit  remplie ,  sous 
peine  de  destitution  contre  l'officier  de  l'état  civil 
et  son  substitut. 

«XVI.  Il  sera  de  plus  fourni  à  chaque  arrondis- 
sement un  registre  simple  pour  servir  aux  publica- 
tions de  mariage. 

«  Ce  registre  sera  déposé  aux  archives  de  Tarron- 
dissement  lorsqu'il  sera  rempli. 

Titre  IV. 
Des  anciens  dépôts  relatifs  à  Vétai  civil. 

«  XVII.  Les  registres  des  ci-devant  paroisses  de 
Paris,  hospices,  monastères,  communautés  religieu- 
ses, temples  de  protestants,  chapelles  d'ambassa- 
deurs, et  tous  autres  registres  nui  servaient  à  con- 
stater l'état  civil,  sous  quelque  dénomination  qu'ils 
soient  connus,  ensemble  les  liasses  et  pièces  qui  y 
sont  annexées,  seront  retirés  de  la  maison-commune 
et  déposés  aux  archives  du  département. 

•  XVIll.  Les  registres  qui  ont  servi  à  eoustater 
l'état  civil  des  citoyens  depuis  le  l«r  janvier  1793 
(vieux  style),  et  les  liasies  et  pièces  relatives  au 


64S 


Ittême  objet  «  seront  pareillement  transfères  de  la 
maisGO-commune  aux  archives  du  département. 

Titre  V. 
De  la  délivrance  du  actes  qui  conttatent  Vétat  civiL 

«  XIX.  L'officier  de  Fétat  civil  et  le  garde  des  ar- 
chives du  département  seront  tenus  de  délivrer  au 
Ï>lus  tard  dans  trois  jour?  les  copies  des  actes  qui 
eur  seront  demandées. 

«  XX.  Ils  ne  pourront  exiger,  pour  la  délivrance 
de  ces  actes,  d*au,tres  droits  que  ceux  qui  vont  être 
réglés,  à  peine  de  concussion. 

«  XXI.  Ces  droits  seront  de  15  sous  pour  cha- 
que extrait  d'actes  de  naissance,  de  décès  ou  de  pu- 
blication de  mariage. 

«XXII.  Us  seront  de  30  sous  pour  les  extraits 
d'actes  de  divorce  ou  ses  préliminaires,  et  pour  ceux 
de  mariage  ou  d'adoption. 

•  XXlll.  Les  droits  de  timbre  du  papier  sur  lequel 
ces  différents  actes  seront  délivrés  seront  payés  se- 
paremenL 

m  XXIV.  Tous  ces  droits  seront  perçus  pour  le 
compte  de  la  nation. 

•  XXV.  Pour  en  assurer  la  perception,  la  régie  de 
renrcgistrement  avancera  au  secrétaire-commis  de 
chaque  arrondissement,  sous  son  récépissé,  une  cer- 
taine quantité  de  feuiies  d'expédition  qui  porteront 
un  double  timbre. 

«XXVI.  Les  extraits  de  l'état  civil  ne  pourront 
être  délivrés  que  sur  ces  feuilles.  Le  secrétaire- 
commis  rendra  compte,  tous  les  mois,  à  la  régie, 
et  même  plus  souvent  s'il  en  est  requis,  du  produit 
de  ces  feuilles,  ou  de  leur  existence  en  nature. 

•  XXVIl.  Toutes  les  lois  précédemment  rendues 
sur  l'état  civil  continueront  d'être  exécutées  en  tout 
ce  qui  n*est  pas  contraire  au  présent  décret.» 

SÉANCE  DO  5  VENTOSE. 

Un  secrétaire  donne  lecture  de  la  lettre  suivante  : 

Les  citoyens  composant  la  Société  populaire  régé- 
nérée  de  Marseille  à  la  Convention  nationale. 

•  ReprésenUiii(8,  les  citoyen!*  composant  la  Société  popu- 
lalra  téQéDérét  et  autres  citoyenf>  de  MarseUle  remercient  la 
ConveniloD  pour  It  décret  qui  conserve  cette  place  en  état 
de  sié0e,  ordonne  qu'il  soit  fait  justice  des  agitateurs  ren* 
fermés  dans  son  sein,  et  resUtue  les  autorités  consUtuées  au 
lieu  Gié  par  la  loi.  Ce  décret  sauve  Marseille,  et  rassure 
tout  le  Midi. 

c  Le  parU  Jacobin  avait  son  dernier  boulevard  dans  cette 
commune:  c'était  le  U  pluviôse  que  cette  horde  contre-ré- 
voluUonnnire  devait  se  relever  par  un  coup  de  main.  Ce 
Jour,  tous  les  foncUonnaires  publics  nommés  depuis  le 
9  thermidor,  les  citoyens  rendus  A  la  liberté,  et  tout  ce  qui 
restait  d'hommes  honnêtes  devaient  être  immolés  aux  mânes 
de  Robespierre  ;  mais  dans  le  temps  que  nous  dormions  la 
ConvenUon  nationale  veillait  pour  nous,  ei  ce  même  14, 
qui  devait  éclairer  tant  de  crimes,  n*a  vu  qu'un  grand  acte 
de  JusUce.  Au  signal  du  représentant  du  peuple  Cadroy, 
tous  les  agi ui leurs,  enveloppés  à  la  fois,  sont  renlréit  dans 
les  prisons  qu'ils  n'auraient  jamais  dû  quitter....  Nous  n'ac- 
cusons point  le  représentant  du  peuple  Espert  de  les  avoir 
randus  à  la  liberté  ;  les  iniantions  de  oe  député  nous  sent 
connues.  En  l'absence  de  son  collègue,  U  fut  circonvenu  par 

tous  les  genres  d'obsessions, Notro  estime  pour  lui  s'est 

accrue,  car  il  a  reconnu  son  erreur. 

•  Représentants,  nous  avons  comprimé  dans  nos  murs  la 
parti  des  égorgeurs.  et  toutes  les  précauUoos  ont  été  prises 
pour  qu'il  n'en  reste  plus  de  vesUges.  Ce  nélall  point  assex 
pour  les  citoyens  de  cette  Société  d'avoir  expulsé  de  son 
sein  les  membres  gangrenés,  d'avoir  proclamé  tes  grands 
principes  de  la  morale  publique  ;  ils  ont  porté  un  œil  obser- 
sateur  sur  les  emblèmes  qui  décoraient  le  lieu  de  leurs 
^Hcel,  Des  Ugres,  de*  léopards,  des  lions,  des  ^jtifîei,  des 


et  ton!  l'atttrail  du  oamage  sertaleat  d'embellisse- 
ment a  ce  lieu,  qui  ressemblait  à  l'antre  de  Gacus»  et  qu'on 
appelait  le  temple  de  la  liberté.  L'attention  s'est  surtout  por 
téc  sur  la  tribune  en  forme  de  montagne,  où  les  satellites 
de  Robespierre  professèrent  si  longtemps  la  doctrine  du 
vol  et  de  Tassasslnat.  Une  subite  indignation  s'est  manifes- 
tée;  l'assemblée  s*est  levée  en  masse;...  le  monstrueux édi* 
fice  a  disparu;  c'est  sur  ses  débris  mêmes  que  noua  vooa 
écrivons  cette  Adresse. 

c  Représentants ,  en  proscrivant  les  dénominaUons  oui 
provoquaient  à  la  guerre  civile,  il  était  naturel  d'effacer  les 
emblèmes  qui  pouvaient  entretenir  des  sentiments  séditieux. 
L'enseigne  du  crime,  l'appareil  de  la  mort  seront  remplacés 
par  les  aUributs  de  la  liberté,  de  la  paix  et  du  bonheur.  A 
la  place  des  lions  et  des  Ugres,  le  commerce  réparateur, 
la  respectable  agriculture ,  tous  les  arts  utiles  ou  conso- 
lateurs trouveront  leurs  saintes  images  et  leurs  emblèmes 
révérés. 

c  Représentants,  nous  vous  félicitons  d'avoir  également 
aboli,  dans  l'enceinte  qui  vous  rassemble,  ces  différentes 
places  qui  donnèrent  si  longtemps  prise  au  scandale  public, 
et  firent  couler  tant  de  sang.  Qu'éiait-il  besoin  de  plaine,  de 
marais  et  de  montagne  dans  un  lieu  où  l'on  fonda  l'égalité? 
Ces  dénominaUons  burlesques  étaient-elles  dignes  de  la 
plus  auguste  assemblée  du  monde  ?  Elles  auraient  pu  signa- 
ler tout  au  plus  ces  fêtes  affreuses  où  les  peuplades  sau- 
vages s*attroupent  pour  délibérer  sur  leurs  atroces  moyens 

de  subsisUnce Peut-être  que  la  place  qu'habiUi 

Robespierre  devrait  être  déserte ,  comme  on  purine  par  la 

destruction  le  lieu  qu'infecta  la  tyrannie  et  le  crime 

Nous  nous  empressons  de  tirer  un  Toile  sur  d'affreux  sou- 
venirs ;  notre  intention  n*ett  pas  de  Jeter  de  nouveaux  bran* 
dons  au  sein  de  l'assemblée  nationale;  c'est  aux  agitateurs, 
c'est  aux  buveurs  de  sang,  c'est  aux  patriote^  exclusifs  que 
nous  vouons  toute  notre  haine,  en  travalilani  à  cicatriser  les 
plaies  qu'ils  ont  faites  à  la  patrie.  Que  voulaient-Us,  ces  ré- 
publicains d'un  jour,  qui  Ignoraient  que  toute  dénomination 
distinguée  est  une  insulte  faite  A  la  lil)erté.  et  que  la  vertu 
elle-même,  dans  une  république,  est  sujette  A  l'ostracisme  ? 
ils  se  disaient  patriotes  par  excellence;  ils  attachaient  de  la 
Jalousie  A  ce  titre,  parce  qu'ils  prétendaient  l'exercer  seuls; 
en  effet,  la  profession  était  lucrative  ;  elle  était  bien  moins 
périlleuse  que  celle  de  ces  hommes  plus  hardiment  scélé- 
rats, qui  établissaient  leur  empire  sur  les  grandes  routes. 
La  misère  et  le  désespoir  trop  souvent  les  poussent  A  ce  mé- 
tier dangereux.  Us  courent  le  risque  de  leur  vie.  au  lieu  que 
les  autres,  tranquillement  assis  dans  la  mollesse  des  festins, 
dictaient  des  arrêts  de  mort  sans  craindre  pour  la  leur,  et 
prescrivaient  sans  contrariété  les  tributs  quon  devait  leur 
offrir.  Et  nous  souffririons  encore  de  pareils  êtres  !  et  des 
hommes  honnêtes,  des  pères  de  famille  respectables,  pour 
avoir  osé  s'en  plaindre,  ont  subi  la  peine  de  mort! Re- 
présentants, le  peuple  de  Marseille  est  en  Insurrection  contre 
les  voleurs,  les  égorgeurs  et  les  dominateurs.  11  n'est  point 
de  puissance  qui  arrête  cette  explosion  de  la  vertu  contre 
les  ministres  du  crime,  contre  les  cannibales  qui  ont  dés- 
honoré la  plus  belle  révolution,  et  qui  l'auraient  étouffée 
si  l'on  n'était  parvenu  A  l'arracher  de  leurs  mains. 

■  Représentants,  ordonnez  leur  arrestation;  ordonnez-la 
pour  leur  propre  .sûreté  ;  car  de  la  résistance  a  l'attaque  il 
n'est  qu'un  pas  très-facile  A  franchir,  lorsque  les  outrages 
sont  sanglants  et  que  l'indignation  est  A  sou  comble.  Vive  la 
république  une,  indivisible  et  démocratique,  puisqu'elle  doit 
être  le  gouvernement  des  hommes  vertueux  et  libres  1 

■  Périssent  les  royaUstes,  les  dominateurs,  et  mutes  les 
espèces  de  tyrans  ! 

t  Vive  la  Convention  nationale,  parce  qu'elle  a  la  con- 
fiance du  peuple  français,  et  qu'elle  obtiendra  dans  peu  les 
respects  de  l'Europe  !  « 

(Suioent  dix  pages  de  signatures.) 

Les  membres  du  comité  révolutionnaire  du  dis- 
trict de  Marseille  félicitent  la  Convention  nationale 
sur  ses  augustes  travaux,  dont  l'éclat  passera  à  la 
postérité  la  plus  reculée  et  excitera  son  admiration. 
■  Vors  avezi  diient-ils,  non-seulement  délivré  le 
peuple  de  l'oppression  de  ses  anciens  tyrans,  maia 
encore  vous  1  avez  retiré  du  bord  de  l'abîme  où  de 
nouveaux  tyrans  voulaient  le  plonger,  et,  à  force  de 
crimes,  le  réduire  à  reprendre  des  chaînes  encore 
plus  pesantes  que  celles  qu'ils  avaient  brisées.  Voui 
ave»beaucoup  foit  dans  la  journée  du  0  thermidor. 


«41 


l 


mais  il  vons  reste  è  faire.  Les  tyrans  que  tous  avez  . 
frappés  avaient  des  compaj^nons  et  des  agents  dans  ! 
toute  la  république  :  les  uns  et  les  autres  existent  i 
encore:  il  vsi  temp  que  la  loi  s'appesantisse  sur 
leurs  têtes  coupables;  cet  acte  de  justice  sera  uo 
bienfait  d'autant  plus  grand  qu'il  fera  cesser  le  sys« 
tème  de  terreur  que  les  malveillants,  tenant  toujours 
à  la  faction  des  dëcemvirs,  s*eflorcent  de  rétablir 
dans  la  république,  et  plus  particulièrement  dans 
notre  malbeureuse  commune. 

«Tenez  d^une  main  vigoureuse  les  rênes  du  gou- 
vernement; et  tandis  que  nos  frères  font  triompher 
partout  la  république,  ne  souffrez  pas  que  les  mé" 
chants  renversent  l'édifice  du  bonneur  que  votre 
courage  et  votre  sagesse  ont  élevé.  Vive  la  répu- 
blique !  vive  la  Convention  !  • 

Leblanc  (des  6ouches*du-Rbône)  :  Je  demande 
Finsertion  en  entier  de  TAdresse  de  Marseille  au 
Bulletin,  le  renvoi  au  comité  de  sûreté  générale, 
et  que  le  comité  soit  chargé  de  donner  des  instruc- 
tions au  représentant  du  peuple  Guérin ,  qui  a  été 
nommé  par  la  Convention  nationale  pour  se  rendre 
dans  le  département  des  Bouches-du-Rhône. 
V1LI.BTAIID  :  J*applaudis  aux  sentiments  do  paix 
ui  sont  manifestés  dans  cette  Adresse;  personne  ne 
lésire  plus  que  moi  de  la  fixer  au  milieu  de  nous; 
mais  peut-oQ  Tespérer  alors  qu'on  se  déclare  en  in- 
surrection? 

Pluêifun  voir  ;  Ost  contre  le  crime. 

ViLLETABD  :  Je  ne  crois  pas  que  la  Convention 
doive  siinctionner  cette  Adresse  en  ordonnant  qu'elle 
sera  insérée  au  Bulletin.  L'insurrection  a  toujours 
été  et  sera  toujours  une  mauvaise  mesure;  c'est  le 
signal  de  la  guerre  civile.  Je  sais  au'il  faut  avoir 
vengeance  des  scélérats  :  l'humanité,  la  Justice,  la 
république  la  réclament  ;  mais  il  faut  qu'elle  soit 
di^ne  de  vous,  il  faut  que  ce  soit  U  vengeance  des 
lois,  et  qu'elle  soit  exercée  par  les  tribunaux.  (  Ap« 
plaudissements.) 

La  nation  entière  verra  avec  plaisir  au'ils  pour- 
suivront les  coupables  ;  mais  si  I  on  parle  de  désar- 
mer un  certain  nombre  de  citoyens  en  leur  donnant 
une  dénomination  odieuse(murmures),  on  craindra, 
et  avec  raison,  que  vous  ne  soyes  entraîné?  plus  loin 
que  vous  ne  voudrez.  Vous  avez  détruit  le  terro- 
risme, vous  avez  bien  fait;  mais  votre  intention  n'a 
pas  été  de  lui  substituer  un  autre  terrorisme.  A 
quelle  marque  reconnaîtrez-vous  un  terroriste?  Rap- 
pelez-vous quel  abus  on  a  fait  du  mot  arisloeralel 
Combien  n*a-t-on  pas  fait  couler  de  sane  en  don- 
nant ce  nom  aux  hommes  qu'on  avait  intérêt  de  dé- 
truire !  Une  mesure  générale  de  cette  espèce  pour- 
rait être  mal  dirigée,  ainsi  que  cela  est  arrivé  pour 
la  loi  du  17  septembre.  Elle  a  été  confiée  è  des  or- 

fanes  impurs ,  et  l'on  en  a  cruellement  abusé.  Bh 
ien ,  vous  seriez  responsables  des  nouveaux  mal- 
heurs qui  pèseraient  sur  la  France  si,  étant  instruits 
par  rcxpêrience,  vous  remettiez  l'arbitraire  à  l'or- 
dre du  jour.  Consultez  le  génie  de  la  liberté,  le  gé- 
nie de  l'humanité;  ne  donnez  pas  le  signal  de  la 
guerre  civile  :  vous  en  verseriez  des  larmes  de  sang. 
Applaudissements.)  Que  la  Convention  se  montre 
'amie,  le  soutien  de  la  Justice,  et  qu'elle  repousse 
avec  horreur  toutes  les  mesures  arbitraires.  Je  m'op- 
pose a  l'insertion  de  la  lettre  au  Bulletin,  en  ce 
qu'elle  contient  u*he  résolution  que  Je  crois  con- 
traire au  bien  de  mon  pays. 

Clauzbl  :  Le  préopinant  n'a  pas  bien  entendu 
l'Adresse.  Les  citoyens  de  Marseille  disent  qu'ils 
sont  en  insurrection  contre  le  crime.  (Murmures  à 
reitrémité  gauche.)  Je  demande  une  seconde  leo- 


|Ure,  et  ell«  prouvera  que  les  citoyens  de  Harseille 
ont  pénétrés  de  respect  pour  les  lois. 

On  fait  la  seconde  lecture;  elle  est  souvent  Inter- 
rompue por  les  plus  vifs  applaudissements. 

La  Convention  en  décrète  la  mention  honorable 
et  l'insertion  au  Bulletin. 

Jars«Panvilliir,  au  nom  des  comités  des  secours 
publics  et  de  salut  publie:  Citoyens,  protéger  l'agri- 
culture et  le  commerce,  encourager  les  arts,  favo* 
riser  l'industrie,  t«ls  sont  les  moyens  d'assurer  la 
prospérité  publique,  tels  doivent  être  les  objets  des 
sollicitudes  constantes  d'un  bon  gouvernement. 

C'est  pour  favoriser  l'accroissement  d'un  établis- 
sement utile  de  ce  |;enre  que  je  viens  vous  parler  d'une 
manufacture  de  toiles  à  voile,  établie  à  Bourses. 

Cet  établissement  est  déjà  en  pleine  activité.  11  a 
fixé  l'attention  des  représentants  du  peuple  envoyés 
dans  le  déparlement  au  Cher  ;  il  ne  s*agit  plus  que 
de  lui  donner  l'extension  dont  il  est  susceptible. 
Mais  l'entrepreneur  a  besoin  pour  cela  de  la  protec- 
tion du  eouvernement,  parce  que,  ne  trouvant  pas 
sur  les  lieux  un  nombre  suffisant  de  fileuses  pour 
alimenter  cent  cinquante  ou  deux  cents  métiers 
qu'il  pourrait  y  établir,  il  ne  peut  y  suppléer  promp- 
tement  que  par  des  moyens  extraordinaires.  Il  de- 
mande à  cet  effet  d'être  autorisé  à  tirer  des  hos- 
piees  de  Paris  ou  des  départements  quatre  ou  cinq 
cents  jeunes  filles,  iieées  au  moins  de  dix  ans,  pour 
les  employer  k  la  filature.  Il  s'engage  à  payer  les 
frais  de  transport  de  leurs  personnes  et  de  leurs 
effets  Jusqu'à  Bourges,  à  les  loger  gratuitement 
dansas  manufacture,  i  les  apprendre  à  filer,  à  leur 
payer  le  même  prix  de  main-d'œuvre  que  celui  en 
usage  à  Bourge.^i  pour  les  autres  fileuses,  à  ne  leur 
donner  pendant  leur  apprentissage  que  des  institu- 
trices agréées  par  le  conseil  général  de  U  commune 
du  lieu;  et  comme  durant  ce  temps,  c'est-à-dire  du- 
rant leur  apprentissage,  qui  est  estimé  devoir  être 
a  peu  près  de  deux  mois,  le  produit  de  leur  travail 
pourrait  ne  pas  être  suffisant  pour  les  faire  subsis- 
ter, il  s'engage  à  leur  payer,  pendant  ce  laps  de 
temps,  un  supplément  de  4  sous  par  jour  en  sus 
de  ee  qu'elles  pourront  gagner. 

Enfin  il  s'obliee  à^  maintenir  sa  fabrique  dans  un 
état  d'activité  telle  qu'il  puisse  y  entretenir  les  tra- 
vaux nécessaires  à  cmq  cents  fileuses  pendant  l'es- 
Sace  de  dix  années  ;  et  pour  garantie  de  cette  con- 
ition  il  hypothèque  un  bien  national  de  la  valeur 
de  30,000  liv.  au  moins,  qu'il  justifiera  avoir  payé 
en  entier  dans  le  cours  de  trois  mois  à  dater  du  jour 
de  son  engagement.  De  manière  que  si,  par  une 
cause  quelconque,  sa  fabrique  de  filature  était  in- 
I  terrompue,  la  nation  s'emparerait  du  bien  donné  en 
I  hypothèque,  et  subsidiairement  de  ee  qui  serait  né- 
cessaire sur  sou  établissement  pour  se  dédommager 
de  SCS  avances. 

Les  besoins  présents  de  la  marine  de  la  républi- 
que pour  les  armements  qu'elle  prépare  contre  ses 
i  ennemis  naturels,  et  l'engagement  pris  par  l'entre- 
preneur de  la  manufacture  de  Bourges  de  tripler 
la  quantité  des  fournitures  pour  lesquelles  il  s'est 
obligé  envers  le  gouvernement ,  si  vous  agréez  ses 
!  propositions,  ont  déterminé  vos  comités  à  les  sou- 
mettre à  votre  acceptation. 

lis  ont  considéré  d'ailleun  que  cette  entreprise 
vous  fournirait  le  moyen  d'enlever  à  l'oisiveté  et  à 
tous  les  vices  qui  en  sont  la  suite  un  g^and  nombre 
de  jeunes  filles  qui  paieraient  désormais  le  tribut  de 
leur  travail  à  la  société,  et  qui,  en  prenant  l'habi- 
tude de  s'occuper  utilement,  acquerraient  les  ver- 
tus propres  à  faire  de  bonnes  mères  de  famille. 
Lm  dépenses  que  «et  arrangement  oceasioDiieralt 


544 


à  la  rëpnblîqoa  consisteraient  uniquement  dans  les 
frais  du  modique  trousseau  qui  serait  fourni  à  cha- 
cune des  jeunes  filles  qui  seraient  transférées  à  Bour- 
ges, dans  un  don  de  5  sous  par  lieue,  qui  leur  serait 
accordé  pour  ta  nourriture  pendant  la  route,  et  pour 
les  frais  de  transport  des  couchers  que  la  commis- 
sion des  secours  publics  leur  fournirait. 

La  valeur  intrinsèque  des  lits  ne  doit  pas  être 
comptée,  puisque  la  propriété  en  resterait  a  la  na- 
tion, et  c|ue  les  achats  en  sont  déjà  faits. 

Les  déboursés  qu'il  s'agirait  de  faire  en  ce  mo- 
ment excéderaient  a  peine  ce  qu'il  en  coûterait  pour 
nourrir  et  entretenir,  dans  les  hospices  pendant  une 
année,  le  mâme  nombre  de  filles,  que  vous  met- 
triez à  même  de  pourvoir  à  leur  subsistance  par 
leur  propre  travail. 

Voici  le  projet  de  décret  que  vos  comités  m*ont 
diargé  de  vous  soumettre  : 

■  La  GoDTeoUoD  nationale ,  après  avoir  entenda  le  rap- 
port de  ses  comités  de  secours  et  de  salut  publics ,  décrète  : 

«  Art.  I**.  La  commission  des  secours  publics  est  auto- 
risée à  passer  avec  ie  citoyen  Batel ,  entreprenear  d'une 
manafacture  de  toiles  A  voiie  établie  dans  la  commune  de 
Bourges,  un  traité  pour  lui  procurer  un  nombre  de  fiieuses 
qui  seront  Urées  des  différents  hospices  de  la  république, 
pour  être  enroyées  dans  ladite  manufacture,  aui  oondidons 
énoncées  dans  le  projet  de  traité  anneié  au  présent  décret. 

•  II.  Il  sera  établi  près  ladite  manufacture  un  économe 
au  choix  de  la  commission  des  secours  pubUcs,  et  aux  ap- 
pointements de  1,500  iiv-,  non  compris  le  logement,  qui 
lui  sera  fourni  gratis  par  l'entrepreneur.  Ses  fonctions  se- 
ront déterminées  par  le  règlement  dont  il  sera  parlé  dans 
l'article  ci-après. 

-  lU.  Le  comité  des  secourt  publics  est  chargé  de  faire 
un  règlement  pour  le  mainUen  de  l'ordre,  de  la  poUoe  inté- 
rieure et  des  bonnes  mœurs  parmi  les  flleosas  qui  seront 
envoyées  des  hospices  dans  ledit  éublissement,  et  pour  dé- 
terminer les  fonctions,  le  mode  de  comptabilité,  de  surveil- 
lance et  de  responsabilité  de  l'économe. 

•  IV.  Tant  que  les  fiieuses  tirées  des  hospices  resteront 
attachées  h  la  manufacture  établie  par  le  citoyen  Butel , 
die  seront  sous  la  direction  immédiate  de  Téconome ,  et 
sous  la  surveillance  de  la  conunission  des  secours  publics. 

«  Y.  Les  frais  qu'occasionnera  l'exécudon  du  présent  dé- 
cret seront  pris  sur  les  fonds  desUnés  aux  dépenses  des 
hospices  et  hôpitaux  civils. 

•  VI.  Le  présent  décret  ne  sera  imprimé  que  dans  ie  Bui- 
leUn  de  correspondance.  ■ 

Ce  projet  de  décret  est  adopUS.       {La  suite  demain.) 

N.  B.  Dans  la  séance  du  7,  la  Convention  a  conUnué  la 
discussion  sur  les  finances. 


Au  Rédacjleur. 

Pans,  ce  9  ventote,  Tao  3*  cle  la  répubKque  une 
et  indivisible  et  démocratique. 

I  Citoyen,  fattends  de  ton  impartialité  qu'ayant  imprimé 
ce  qui  me  concerne  dans  quelques  lignes  du  rapport  de 
Courtois,  tu  ne  refuseras  point  de  publier  la  réponse  ci- 
Jointe,  que  déjà  J'ai  cru  devoir  foire  distribuer  à  mes  col- 
lègues. 

«  Salut  et  fraternité. 
I  P.-J.  AcDouiK,  dépu(é  à  la  Convention  nationale,  t 

«  J'attache  un  trop  grand  prix  à  l'esitme  de  mes  conci- 
toyens pour  garder,  sur  un  article  du  rapport  de  Courtois, 
un  silence  qui  pourrait  paraître  orgueilleux  ou  Umide. 

«  On  a  cherché  à  présenter  sous  des  couleurs  défavora- 
bles un^abooneroeni ,  demandé  par  le  gouvernement,  au 
Journal  que  je  rédige  depuis  cinq  années,  et  que  Je  n'ai  con- 
tinué d'écrire  que  pour  instruire  de  mes  pensées,  jour  par 
Jour,  mes  cororoctiants;  car,  je  ie  dis  en  passant,  il  me  sert 
de  correspondance. 

•  Je  ne  croyais  pas  qu'un  fait  aussi  simple,  et  auquel  Je 
n'avais  pas  attaché  la  plus  légère  inquiétude,  pût  devenir 
pour  mol  un  si^et  de  rendre  sur  ma  conduite:  je  réponds. 


c  D'abord  le  ministre  m'adressa  une  lettre  pour  Tcnvoi  de 
ma  feuille  aux  armées;  je  consenlis  à  cet  envoi,  parce  qu'on 
m'allégua  qu'on  était  autorisé  à  la  distritmer  panni  nos 
frères  d'armes. 

«  Après  l'anéanUssement  du  oonseU  exécutif.  Je  reçus  un 
arrêté  du  comité  portant  que  l'abonnement  serait  continué, 
que  le  prix  serait  payé  au  commencement  de  chaque  dé- 
cade ;  car  Je  n'avais  pas  le  moyen  de  faire  les  avances,  sur- 
tout n'ayant  point  d'imprimerie  à  moi  appartenant  ;  et  que 
mon  marchand  de  papier  obUendrait  la  focilité,  s'il  en  avait 
liesoin,  de  s'approvisionner  pour  cet  objet  (en  payant,  comme 
bien  l'on  doit  penser).  On  sait  que  les  réquisKIons  s'éten- 
daient aussi  sur  le  papier,  et  l'abonnement  demandé  par  le 
gouvernement  m'avait  enlevé  un  certain  nombre  de  rames 
de  papier  que  Je  serais  bien  aise  d'avoir  aujourd'hui. 

«  Quant  au  prix,  la  délicatesse  m'ordonnait  de  ne  point 
tirer -avanuige  d'un  abonnement  pris  par  le  gouvernement; 
j'ai  donc  en  bien  soin  de  calculer  les  frais  avec  la  plus 
scrupuleuse  exactitude,  et  j'ai  foit  livrer  l'exemplaire  à 
1  sou ,  lorsque  le  papier  éuiit  moins  cher  qu'à  présent . 
puis  il  a  été  porté  A  1  sou  1  déniera  environ,  lorsque  le  prix 
du  papier  est  devenu  plus  considérable:  les  quittances 
existent. 

«  J'ai  reçu  encore  un  arrêté  du  nouveau  comité  pour 
continuer  le  même  abonnement;  mais  11  vint  un  Jour  A  mon 
oreille  que  f  éuils  payé.  Est-ce  donc  être  pa^é,  est-ce  donc 
recevoir  des  gratifications,  ainsi  qu'on  l'a  dit  méchamment 
et  imprimé,  que  n'exiger,  pour  une  fbumiiure  quelconque, 
que  le  prix  de  la  dépense  ?  Sur-le-champ  j'écrivû  an  comité 
qu'ayant  toujours  agi  avec  franchise  et  probité  je  ne  pouvais 
supporter  une  inculpation  calomnieuse  à  laquelle,  en  vérité. 
Je  ne  m'attendais  pas ,  et  que  je  cessais  tout  envol;  je  l'ai 
cessé. 

■  Je  ne  m'alMiisserai  point  A  dire  qu'avant,  comme  pen- 
dant et  après  l'abonnement  pris  par  le  gouvernement,  mon 
journal  n'a  point  changé  de  principes  ;  qu'ils  ont  toujoure 
été,  sont  et  seront  toujours  les  mêmes  ;  qtie  nulle  puissance, 
nul  parti  ne  m'ont  empêché  et  ne  m'empêcheront  d'être 
moi,  et  que,  ma  plume  ayant  été  pure  comme  met  senti- 
ments, tel  j'ai  été,  tel  je  suis,  tel  je  serai. 

c  Je  le  dis ,  parce  que  c'est  la  vérité ,  et  qu'un  homme 
doit  avoir  le  courage  de  la  publier,  lore  même  qu'elle  est  à 
son  avantage.  J'ai  le  bonheur  de  n'avoir  A  rougir  d*aucune 
de  mes  actions,  soit  particulières,  soit  publiques  ;  que  quel- 
qu'un, je  ne  dis  pas  aussi  probe,  mais  plus  probe  que  moi , 
se  lève  et  m'accuse. 

«  CeUe  courte  et  fraternelle  explication  répond  assez  à 
toutes  les  sortes  de  calomnies  passées,  présentes,  et  j'ose 
ajouter  futures  ;  car  j'espère  bien  ne  jamais  m'écarter  de  la 
route  que  mon  éducation  et  surtout  mon  cœur  m'ont  tracée. 

«  P.<^.  AonoDiH,  député  à  la  Convention  nationale.  > 


LIVRES  DIVERS. 

Le  Spectateur  français  pendtitU  le  gou\*ememeni  révolu^ 
tiotuiairet  par  le  citoyen  Lacrois.  ancien  professeur  de  droit 
public  au  Lycée,  pour  servir  de  suite  i  son  ouvrage  intitulé  : 
Des  constitutions  des  principaujc  Etats  de  l'Europe  et  des 
Etats-Unis  de  l'Amérique,  ifn  vol.  in-8*  de  430  p^iges,  im- 
primé  sur  caractères  de  cicéro  Didot  Prix  :  8  liv.,  broché, 
et  9  liv.  10  s.,  franc  de  port,  par  la  poste,  pour  les  départe- 
ments. 

A  Parts,  cfaes  Buisson,  libraire,  rue  Hsutefeuille,  n«  30. 

—  Procès  criminel  des  membres  du  comité  révolution- 
naire de  Nantes  et  de  Carrier;  première,  deuiièmc  cl  troi- 
sième parties,  format  in-lt,  avec  gravures.  A  Paris,  clirz  la 
citoyenne  Toubon,  sous  les  galeries  du  Théâtre  de  la  Répu- 
blique, à  c6té  du  passage  vitré.  (La  suite  s'imprime  et  pa- 
raîtra incessamment.) 


Payements  à  la  Irésoreri^nationale, 

Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 
miers mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscriptions  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viai^rrcs 
est  de  huit  mois  vingt  et  un  jours  de  l'année  1793  (vkux 
•tylej. 


GAZETTE  NATIONALE  «n  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  159.  Nonidi  9  Vepitose,  Van  3».  {Vendredi  27  Février  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Rathbonne,  le  6  /î^rnVr.  — La  diète  vient  d'oufrîr  ses 
délibéraiions  sur  les  décrets  de  la  commission  impériale, 
du  20  octobre  et  du  6  novembre,  sur  les  moyens coercitib 
à  employer  contre  les  membres  de  HEmpire  qui  n'ont  pas 
encore  fourni  leur  contingent* 

Il  règne  à  cet  égard  une  grande  diversité  d^opinionsdans 
la  dièle  ;  les  uns  prétendent  que  les  circonstances  sont  peu 
Tavorables  pour  songer  à  une  révision  de  t'ordonnance 
d'exécution;  d^autres  pensent  que  les  États  auront  à  allé- 
guer les  excuses  les  plus  valables,  et  que  d'ailleurs  il  existe 
une  disproportion  évidente  entre  les  ressources  actuelles  de 
plusieurs  princes  et  le  contingent  auquel  ils  sont  taxés»  On 
prévoit  qu'il  sera  difficile  d'9rriver  à  un  résultat. 

ESPAGNE. 

Madrid  t  le  SO  janvier.  —  Les  ministres  éprouvent  de- 
puis  longtemps  de  si  grands  embarras  qne  la  cour  ne  peut 
l'ignorer,  et  qu'elle  partage  leur  sollicitude.  Tout  parait 
dangereux,  jusqu*aux  moyens  de  satisfiiire  à  des  besoins 
pressants,  jusqu'aux  ressources  qui  s'offrent  d'elles-mé- 
racs. 

Les  offres  des  Catalans  (voyes  n*  150)  paraissent  moins 
un  secours  qu'une  menace  Taite  k  la  prérogative  royile.  On 
délibère  encore  si  on  les  acceptera. 

Quant  aux  Gnances,  la  pénurie  est  à  un  tel  point  qu*on 
est  décidé  à  imposer  spécialement  la  noblesse  et  le  clergé. 
L'étlit  porte  que  toute  personne  attachée  au  service  du  roi, 
quel  que  soit  son  rang,  tous  ceux  qui  jouissent  de  bénéfi- 
ces ou  de  prébendes ,  et  tous  les  pensionnaires  de  l'État , 
souffriront  une  retenue  de  4  pour  100  sur  leurs  traitements 
et  pensions. 

Les  nouvelles  d'Amérique  ont  encore  augmenté  les  in« 
quiétudes.  L'expédition  contre  les  établissements  français 

de  Saint-Domingue  n'a  point  réussi Un  horrible  oura« 

gan  a  désolé  Cuba  ;  plus  de  soixante^lix  bâtiment  ont  péri, 
malheurs  dont  tt  relèvera  avec  peine  le  commerce  de  la 
Havane» 

»  Si  la  cour  était  revenue  de  ses  funestes  passions,  elle 
sentirait  toute  la  profondeur  de  l'abime  où  l'entraîne  le 
pervers  cabinet  de  Suinl-James.  La  marine  espagnole  est 
dans  un  état  moins  défavorable  encore  à  la  coalition  qu'il 
n'est  conforme  aux  vœux  de  l'Angleterre.  L'amiral  Gravi na 
a  perdu  plusieurs  vaisseaux  de  son  escadre  par  une  affreuse 
icmpéie ,  et  on  n'a  point  de  nouvelles  de  l'eKadre  de  l'a- 
miral Langara. 

ITALIE.  • 

Napleif  le  80 janvier.  —  La  cour  de  Naples  paratt  être 
dans  une  sécurité  qui  étonne.  Il  faut  que  l'intrigue  la  ras- 
sure, car  les  événements  ne  peuvent  pas  lui  inspirer  de  la 
confiance.  Néanmoins  le  peuple  n'a  jamais  vu  de  bon  œil 
les  intérêts  de  la  coalition.  On  vient  d'en  recueillir  une 
nouvelle  preuve ,  dont  la  cour  a  été  surprise.  Un  corps  de 
seixe  mille  hommes  devait  être  employé  en  Lombnrdie;  il 
a  demandé  à  ne  l'être  que  pour  la  seule  défense  des  fron- 
tiiTCs  du  royaume.  Le  gouvernement  a  sur-le-champ  dé- 
claré qu'il  voyait  en  cela  l'effet  d'une  intrigue,  et  qu'il 
s'occupait  d'en  découvrir  les  auteurs;  mais  les  seixe  mille 
hommes  ne  sont  point  en  route  pour  la  Lombardie. 

— On  apprend  que  l'arrivée  du  nouveau  vice-roi  en  Sar- 
daigne  y  a  renouvelé  le  mécontentement.  Le  peuple  hais- 
sait  d'avance  le  général  Planargia,  quoiqu'il  flkt  Sarde  d'o- 
rigine, et  le  hait  encore  plus  par  la  raison  que  le  comte 
Graneri,  autre  objet  de  haine,  a  contribué  ft  la  nomination 
de  ce  vice-roi.  De  nombreux  placards  ont  manifesté  ces 
resseniimcnls. 

3*  Série,  —  Tome  A'. 


RÉPUBLIQUE  DES  PROVINCES-UNIES. 

Extrait  du  registre  des  résolutions  de  Leurs  Hautes  Puis» 
sanees  les  seigneurs  états  générauxdes  ProvineeS'lJnie$% 
(Foy.  U  n*  157.) 

Lundi,  16  février. 

Après  une  délibération  préliminaire,  il  est  trouvé  bon 
ot  entendu  d'arrêter  par  la  présente  qu*une  comnissioQ 
de  l'assemblée  de  L.  H.  P.  sera  décernée  pour  faire  savoir 
aux  représentants  du  peuple  français  qui  se  trouvent  à  La 
Haye  la  résolution  prise  aujourd'hui  à  l'égard  de  la  recon- 
naissance du  pouvoir  suprême  du  peuple  des  Pays-Bas,  la 
Déclaration  des  Droits  de  l'Homme  et  du  Citoyen ,  Paboli- 
tion  du  stalhoudérat,  ainsi  que  des  dignités  de  capitaine 
et  amiral  général  dans  toutes  leurs  relations,  et  la  décharge 
du  serment  sur  la  soi-disant  ancienne  constitution,  en  leur 
remettant  un  acte  déclaratoire  où  les  points  susdits  sont 
détaillés.  A  faire  cette  commission  sont  requb  et  chargés 
les  citoyens  Van  Haerfolte,  Lestevenon,  Forsten,  Van  Cit- 
ters,  Strik,  Van  Liuschoten,  Scuyienbnrgh,  Van  Palland, 
et  le  greffier  Quarlet,  avec  réquisition  ultérieure  de  donner 
à  cette  occasion  à  connaître  aux  susdits  représentants  le 
désir  ardent  de  Leurs  Hautes  Puissances,  et  du  peuple 
amateur  de  droit  et  liberté  des  Provinces -Unies,  de  faire 
une  confédération  solide  entre  les  deux  nations,  comme 
deux  républiques  égales  et  fndépendantes,  et  de  conclure 
une  alliance  à  des  conditions  raisonnables  et  également 
avantageuses  des  deux  côtés ,  afin  que  de  cette  manière 
soit  posé  le  fondement  tant  désiré  de  la  plus  étroite  frater« 
nité  entre  deux  nations  dont  les  histoires  du  genre  humain 
ont  fait  mention  jusqu*ici ,  et  de  laquelle  fraternité  les  sui- 
tes certaines  peuvent  être  très-bien  calculées  et  prévues 
comme  étant  extrêmement  salutaires  tant  pour  les  deux 
peuples  que  pour  l'avancement,  que  pour  la  consomma- 
tion d'une  paix  générale  en  Europe. 

Le  greffier  Quaries  étant  requis  de  communiquer  aux 
représentants  du  peuple  français  que  la  susdite  commission 
aura  lieu  jnercredi  prochain,  à  une  heure  après  midi. 
Paraphé  J.-C.-H.  Hahh, 

D*accord  avec  le  susdit  registre. 

Signé  H.  Quaelis. 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Extrait  du  registre  des  arrêtés  du  eondté  de  salut  publia 
de  la  Convention  nationale» 

Du  5  ventôse,  l'an  3«  de  la  république  française, 
une  et  indivisible. 

c  Le  comité  de  salut  public  arrête  ce  qui  suit  : 

c  Arr.  I".  La  vente  des  objets  provenant  des  prises  ma- 
ritimes faites  sur  les  ennemis  de  la  république,  qui  avait 
été  suspendue  provisoirement,  sera  ouverte  de  nouveau  à 
Brest  au  1*'  germinal,  et  à  Lorient  au  15  du  même  mois, 
ù  la  diligence  des  agents  maritimes  de  ces  deux  ports,  et 
dans  les  formes  prescrites  par  les  décrets. 

•  II.  Seront  exceptées  les  denrées  et  matières  propres  au 
service  des  armées  de  terre  et  de  mer  dont  la  commission 
des  apprerisionnements  ordonnera  la  distraction  d*ici  à 
l'ouverture  des  ventes. 

f  Le  présent  arrêté  sera  rendu  public  par  la  voie  du 
Bulletin  et  des  journaux.  Il  sera  accompagné  d'un  état 
contenant  par  aperçu  les  principaux  articles  à  vendre  dans 
les  deux  communes  ci-dessus  désignées.  • 

État  par  aperça  des  marchandises  proventmt  des  prisée 
maritinÊes  à  vendre  aux  ports  de  Brest  et  de  Lorientm 

Savoir  :  8,850  pièces  de  mousseline  et  mousselinettei 
1,200  pièces  de  linon  et  batiste;  8,800  pièces  de  basin; 
1,2C0  pièces  de  nankin  et  ntnkinet;  2,500  pièces  d*in- 


546 


dienne  ;  400  plkês  de  f  efours  de  sole  et  de  coton  )  150  piè« 
ces  de  taffetas,  satiu  et  pëkin;  4,064  Hvres  d'indigo;  et 
une  quantité  extrôniement  considérable  de  suore,  café, 
Ihé,  cacao  et  tabac;  de  dr^ps,  casimir,  camelot,  cale- 
mandes,  caimoucke,  prunelles,  éternelles,  tricots,  rali- 
DeS|  flanelles I  lerges  et  autres  étoflesi  bonnets  de  luinc, 
gilets,  clranssons,  bas  de  soie,  mouchoirs  de  mousseline, 
de  poche,  des  Indes,  de  soie,  de  coton,  châles,  Rsies, 
organdis,  dentelles,  marlys,  rubans,  fils;  chapeaux  fios; 
toiles  de  plusieurs  espèces,  linge  de  table,  guingarop,  co- 
ton en  balles;  glaces;  vins  étrangers;  matières  de  teintu- 
re I  livres;  objets  de  toutes  espèces  de  quincailleries,  faïen- 
cerie» verrerie,  épiceries  et  autres  marchandises. 

La  masse  des  marchandises  à  vendre  croit  chaque  jour 
par  Tarrivée  de  nouvelles  prises* 

Les  membre»  du  eomiti  de  eatui  publie  t 
BoissY,  J.-P.  Cbazal,  Carnot,  MaauN  (de  Douai), 
Pelet  ,  FoORCROY,  J.-P,  LAcoMBt  (du  Tarn). 


tRIBUNAL  CRIMINEL  BiVOLUTIONFIAlBI. 

Du  6  vtnt9ee.  —  Antoine«Louis-Berard  (  Brutus)  Ma- 
gnier,  âgé  de  vingt-trois  ans,  né  à  Guise,  département  de 
TAbne,  ci-devant  militaire,  cx-prcsidenl  d'une  eommis- 
aion  militaire  révolutionnaire  près  les  armées  dfll*Ouest, 
domicilié  à  Rennes; 

Convaincu  d\ivoir  commis  à  Rennes,  en  germinal  de 
rair2,  abus  d'autorité  dans  Texercice  de  ses  fonctions , 
mais  ne  Tayaut  pas  fait  avec 'des  iutcutions  criminelles,  a 
été  acquitté. 

Et  attendu  qu'il  est  prévenu  de  dilapidations  de  deniers 
publics,  il  sera  de  nouveau  écroué  et  renvoyé,  avec  les 
pièces,  au  tribunal  d'Illc*el-Vilaiue. 


CONVENTION  NATIONALE. 

SuUe  du  rapport  fait,  au  nom  de  la  commission 
chargée  de  Vexamen  des  papiers  trouvés  chez  Ro- 
bespierre el  ses  complices^  par  E.-B.  Courtois^ 
député  du  département  de  VAube^  dans  la  séance 
du  16  nivôse,  an  3  de  la  république  française,  une 
et  indivisible. 

Obliges  de  parcourir  toutes  1rs  picccsimportanlcs, 
toutes  celles  qui  portent  empreintes  le»  traces  de  ces 
prétendus  génies  rëvolutionnalres,  qui  ne  sont  que 
tiesffcnies  dévastateurs,  dont  la  politiciue  furibonde 
n'eslque  l'art  d'ordonner  des  u»itiaillemenls ,  des 
massacres,  des  incendies  et  des  noyades,  suivons 
Collot  dans  sa  correspondance  avec  Couthon. 

Partout  vous  retrouvez  les  mêmes  idées,  qui  se  ré- 
duisent à  celle-ci  :  Détruisons, 

Le  projet  de  Collot  était  de  disiéminer  Çl)  les  ha- 
bitants de  Lyon  sur  la  surface  de  In  république,  pour 
In  détruire  plus  aisément;  on  n'en  peut  douter  en  li- 
sant celte  pnrase  : 

•  La  population  licenciée ,  il  sera  facile  de  la  faire 
disparaître,  et  de  dire  avec  vérité  :  Lyon  u*est  plus.  • 

Et  cette  autre  : 

«  Je  ne  parle  point  des  mesures  révolulionnaircs 
qui  sont  continuellement  méditées,  mises  en  action, 
et  qui  doivent  consommer  le  grand  événement  de  la 
destruction  de  cette  ville  rebelle.  • 

Quelles  idées  1  ouelle  furie  !  il  semble  que  le  monde 
moral  est  retombe  dans  le  chaos.  Et  c>st  là  des  légis- 
lateurs!. Ah!  si  l'Erèbc  des  anciens  eut  aussi  sa  lé- 
gislation, elle  fut  sans  doute  et  plus  conséquente  et 
(ilus  humaine. 

.  (t)  C«  projet  de  dits^minar  x>u  coloniser  ce  pays  Aait  si 
panliquemenl connu  à  Lyon  qu«,  siiivanl  tmo  loi  Irc  d'Acliard, 
«  il  jetait  raillictioo  dans  rame  des  »3u:-cutolles.  »      A.  JU. 


On  est  d*abord  tentj  de  croire,  eh  parcourant  ces 
caractères  où  respire  la  stupide  férocité,  que  tous  les 
monstres  des  forêts  avaient  abandonné  leur  repaire 
pour  faire  une  irruption  dans  nos  villes  ;  ou  plutôt, 
en  revenant  à  des  idées  plus  naturelles,  on  aperçoit 
à  découvert  le  but  de  tous  ces  affreux  niveleurs,  qui 
était,  comme  nous  l'avons  dit,  la  ruine  du  com- 
merce, et  rétablissement,  non  d*une  égalité  de  bien- 
être,  mais  d'une  égalité  de  misère  dansTa  république. 

La  déclaration  faite  par  André  Dumont,  dans  la 
séance  du  14  frimaire  dernier,  >  que  quelques  mem* 
bres  de  Tancien  comité  avaient  autorisé  Leboo, 
Saint-Just  et  Lebas ,  h  faire  guillotiner  tous  les  ex- 
nobles et  négociants  des  départements  du  Nord,  de 
la  Somme  et  du  Pas-de-Calais;  •  celle  consignée 
dans  une  lettre  de  Robespierre  jeune,  Tun  des  con- 
spirateurs, lettre  datée  deCommuneA(rranchie,dans 
laquelle  il  avoue  «  qu*il  existe  un  système  d*amener 
le  peuple  à  niveler  tout;  •  un  imprimé  d'un  nommé 
Compère,  actuellement  émigré,  trouvé  dans  les  pa- 
piers de  Robespierre ,  où  il  découvre  des  traces  an- 
ciennes de  cette  conjuration  contre  le  commerce; 
une  foule  de  lettres  qu'il  serait  trop  long  de  relater 
ici,  toutes  attestant  la  proscriutiou  des  négocrants, 
et,  jptus  que  tout  cela  encore,  la  conduite  oe  Collot, 
de  Carrier,  de  Lebon,  de  Maignct  et  d'autres  propa- 
gateurs de  cette  infernale  doctrine;  les  calculs  af- 
freux de  Carrier  sur  le  nivellement  de  la  population 
française  ;  son  mot  sur  celle  de  Lyon  réduite  a  vingt- 
cinq  mille  habitants  ;  l'affiche  de  Ronsin  qui  la  rédui- 
sait à  quinze  cents  ;  le  projet  de  réduction  mis  à  exé- 
cution pour  les  départements  de  l'Ouest  au  moyen 
du  feu  vendéen  ,  plus  soigneusement  entretenu  par 
les  décemvirs  qu*autrefois  le  feu  des  vestales,  projet 
déguisé  par  eux  sous  te  nom  de  chancre  politique  ; 
les  manufactures  de  soie  brûlées  à  Bédouin  (1),  les 
ruines  de  Lyon,  les  noyades  de  Nantes,  les  massa- 
cres d^Orange  ctd^Arras,  que  de  témoignages  qui 
déposeront  de  ces  affreux  desseins  dans  le  livre  de 
rhistoirc  ! 

Ils  ont  osé  dire  que  «  la  France  républicaine  ne 
pouvait  nourrir  tous  ses  habitants  (2).  • 

£h  quoi  !  quand  la  chute  de  Forgueil  des  rangs  et 
des  préjugés  a  rendu  aux  ci -devant  castes  oisives 
l'exercice  de  leurs  mains  et  de  leur  industrie;  quand 
le  nouveau  traité  permet  à  tous  d'être  utiles  sans  dé- 
roger; quand  le  travail  est  un  honneur,  la  paresse 
une  honte,  même  un  crime  ;  quand  vous  accordes  au 
zèle  des  primes  d'encouragement,  et  qu'à  la  voix  du 
législateur  fidèle  raigiiilloii  de  la  gloire  a  centuple 
les  moyens,  les  ressources  et  les  forces  de  la  patrie, 
cette  patrie,  mère  ingrate,  ne  pourra  plus  alimenter 
ses  enfants  !  0  blasphème  criminel  !  An  !  sans  doute, 
niveleurs  imbécil(^  et  sanguinaires,  sans  doute,  si 
vous  rompez  tous  les  liens  commerciaux,  si  vous  en- 
terrez sous  vos  décombres  les  richesses  des  arts ,  si 
vous  éteignez  dans  les  flols  delà  Loire  les  feux  du 
génie,  si  vous  voulez,  dans  vos  rêves  agrairiens, 
taire  de  vingt-cinq  millions  3c  Français  vingt-eiiiq 
millions  d'hommes  à  quarante  cens  (3),  si  vous  imi- 
tez le  Français  libre  comme  on  traita  ces  inforliiiié. 
serfs  sous  le  règne  de  la  féodalité,  si  vous  Tenchahiez 
&  la  glèbe,  sans  doute  cetle  nature,  qui  nous  trait»  en 
enfants  chéris  en  nous  faisant  naître  sur  cetle  belle 
partie  du  monde,  ne  sera  plus  qu'une  marâtre  qui 
nous  aura  pressés  sur  ce  continent  pour  que  la  faim 
nous  dévore. 


(i)  Voltaire  l'a  dil  t  «  Os  m  doaiie  pai  ua«  «itiiiilbotiiro 
oooMno  iino  motairie ,  p«i«^u*on  ne  donna  pat  rkiduiiria.  » 
Quêst.  9Hcyclop.,  art.  CcMScietice»  A»  M* 

'^i)  Phrase  do  Carrier  d^iu  ton  interrofatoira.    A.  M. 

3)  Allusion  a  Pngréahlc  ouvrage  de  Voltaire  intitula 
i Homme  Mtx  quarante  ccits%  jL  M* 


547 


Mois  si  elle  a  étendu  vos  beioins,  cette  noture.yous 
a-t-elle  prescrit  de  ne  pas  étendre  vos  ressources? 
C*est  vous  qui,  pour  vous  resserrer,  vous  assassinez 
vous-mêmes,  vous  qui  ressemblez  à  cet  homme  qui 
se  coupe  un  bras  pour  faire  profiter  Tautre. 

Vous  parlez  de  rraternité,  et  vous  en  rompez  tous 
les  nœuQs!  vous  parlez  de  fraternité,  et  vous  trouvez 
trop  de  frères  autour  de  vous!  Mais  toi ,  misérable 
propagateur  de  cette  doctrine  abominable,  quel  es» 
tu  pour  l'arroger  le  droit  de  vie  et  de  mort  sur  ce 
frère  ?  L'homme  instruit,  Thomme  vertueux  doit*il, 
en  tribut,  son  sang  à  ton  ignorance  ou  à  ta  scélëra* 
tesse?  Tu  parles  dVgalité!  Si  tu  ne  fondes  son  em- 
pire que  dans  la  mort^  que  ne  meurs-tu  aussi,  toi, 
avec  rélre  estimable q^ue  tu  assassines!  Crois-tu  que 
la  terre  ait  plus  de  jouissance  à  porter  tes  crimes  que 
ses  vertus? 

Nous  nepouvons,  législateurs,  vous  donner  même 
un  sommaire  des  écrits  qui  déposent  de  la  conjura- 
tion formée  par  ces  bourreaux  de  Thumanité  contre 
le  commerce.  U  faudrait  analyser  ici  plus  de  deux 
cents  lettres»  toutes  revêtues  du  caractère  de  la  vé- 
rité, où  les  auteurs,  dans  les  unes,  gémissent  sur  les 
progrès  effrayants  de  cette  doctrine  qui  menaç.iit 
d'infecter,  comme  une  lèpre ,  les  membres  les  pKis 
vigoureux  du  corps  social,  dans  les  autres,  en  agents 
trop  dévoués ,  s'applaudissent  des  eflVts  de  la  conta- 
gion. 

C'est  peu  pourtant  que  d'avoir  mis  en  scène  le 
principal  oraonnateur  des  massacres  de  Lyon,  si 
nous  n'appeldtis  encore  sous  vos  yeux  quelques-uns 
des  vils  aj^ents  qui  ont  figuré  à  ses  côtés,  auxquels 
il  soufflait  sa  rage ,  et  qui  vont ,  dans  leurs  propres^ 
écrits,  vous  fournir  la  preuve  qu'on  n'avait  pas  en 
vain  forgé  la  foudre. 

Nous  glisserons  sur  un  personnage  nommé  Dor- 
feuille,  misérable  comédien  (1),  plus  fameux  par  ses 
crimes  que  par  son  talent,  qui  était  avec  le  général 
Ronsineo  partage  des  massacres  à  CommuneAffran* 
chie.  S'il  n'a  pas  peint,  comme  plusieurs  autres, 
son  caractère  féroce  dans  ses  lettres >  il  nous  en  a 
donné  les  traits  dans  une  exécrable  feuille  imitée  de 
celle  du  Père  Duchesne,  et  trop  digne  de  ce  titre. 

Cet  histrion,  associé  à  un  nommé  Merle,  s'occu- 
pait (dit-on),  a  Paris,  à  filer  journellement  des  in- 
trigues avec  Collot  d'Herbois  et  avec  un  autre  col- 
lègue; et  votre  ancien  comité  lui  renvoyait  toutes 
les  dénonciations  adressées  par  l'infortunée  com- 
mune, afin  qu'il  en  poursuivit  sans  doute  les  cou- 
rageux auteurs. 

Mais  nous  ne  pouvons  glisser  de  même  sur  quel- 
ques autres  scélérats,  sur  un  Pilot,  •  dont  la  santé 
ne  se  rétablit  que  parce  qu'on  guillotine  autour 
de  lui  ;  •  qui  assure  que  •  tout  va  bien,  •  mais  que 
tout  ira  mieux  encore  •  «  parce  qu'on  a  trouvé  lent 
l'expédient  de  la  guillotine,  et  que,  sons  peu  de 
jours,  les  expéditions  seront  de  deux  ou  trois  cents 
à  la  fois  ;  que,  du  reste,  les  maisons  se  démolissent 
à  force;*  sur  un  Pilotqui,  dans  une  autre,  s'exprime 
ainsi  :  «  La  guillotine,  la  fusillade  ne  va  pas  mal  : 
soixante ,  quatre-vingts,  deux  cents  à  la  fois  sont 
fusillés,  et  tous  les  jours  on  a  le  plus  grand  soin 
d'en  mettre  de  suite  en  état  d'arrestation,  pour  ne 
pas  laisser  de  vide  aux  prisons.  • 

Ce  Pilot  est  aussi  l'agent  de  Robespierre:  il  est, 
de  plus ,  son  commissionnaire  ;  c'est  ce  qu'il  prend 

(1)  Je  suis  bien  loin  de  chercher  à  ramener  Pinjnste  pré- 
juge qui ,  sous  l'ancien  régime  .  frappait  l'artiste  qui  consa- 
crait ses  talents  à  rinstroction  publique  par  des  leçons  de 
morale  mises  en  action  surlaacène;  mais  j*ai  pu  donner 
cette  cpiihéie  a  ces  hommes  qui,  dans  la  société,  perpétuent 
les  r6lcs  aiïreui  qu*ils  jouent  quelquefois  peur  être  mis  en 
opposition  avec  la  Tert^  qu'ils  font  ressortir.         A.  M. 


soin  lui-même  de  nous  apprendre.  Il  prie  son  cor- 
respondant de  conduire  sa  femme  à  la  Convention , 
mais  plus  aux  Jacobins. 

S'il  est  partisan  des  Jacobins ,  de  Robespierre  et 
des  expéditions  de  deux  ou  trois  cents,  mon#  Pilot,  il 
est  aussi  le  très-dévoué  de  votre  comité  de  gouver- 
nement, «  dont  les  membres  (dit-il)  offriront  bien* 
tôt  à  l'univers  entier  cette  force  de  caractère  qui 
découle  de  cette  vertu  sans  mélauffe  et  de  la  probité 
la  plus  sévère,  que  n'ont  jamais  oftertc  les  siècles  les 
plus  mémorables  à  aucun  gouvernement  démocra- 
tique. • 

Comme  il  est  éloquent!  mais  surtout  comme  II 
est  prophète  ! 

Après  Pilot  vient  le  maire  Bertrand ,  qui  se  vante 
d'avoir  fait  guillotiner  son  neveu  et  ses  anciens 
amis; 

Puis  TofOcier  municipal  Emery,  qui  ne  contient 
pas  sa  colère  quand  il  pense  que  Grenoble  a  con- 
servé ses  mains  vierges  de  sang. 

Mais  que  sont  tous  ces  malheureux  auprès  d'un  vil 
scélérat  nommé  Achard,  dont  la  moindre  bassesse 
sans  doute  est  d'être  le  fournisseur  de  la  famille  Du- 
play  et  de  Robespierre,  auxquels  il  envoie  bas,  huile 
et  savon  ;  qui  nous  développe  tous  les  secrets  des 
furies  dans  sa  dégoûtante  correspondance,  et  qui 
veut  •  qu'on  colonise  ce  pays  (mot  qu'il  a  retenu  de 
son  maître) ,  attendu  qu'il  en  coûte  400,000  livres 
par  décade  pour  les  démolitions  ;  •  qui,  plein  du  dieu 
qui  l'inspire,  s'écrie  :  •  Encore  des  létes!  et  chaque 
jour  des  têtes  tombent!  Quelles  délices  tu  aurais 
goûtées  si  tu  eusses  vu  avant-hier  cette  justice  na« 
tionale  de  deux  cent  neuf  scélérats!...  Quel  ciment 
pour  la  république  !  En  voilà  déjà  plus  de  cinq  centsj 
encore  deux  fois  autant  y  passeront  sans  doute,  et 
puis  ça  ira.  • 

Tous  ces  barbares  s'étaient  donné  la  main  pour 
troubler  le  repos  vers  lequel  Lyon,  brisé  par  les 
orages  révolutionnaires,  étendait  ses  bras  défail- 
lants. Ce  n'étaient  point  des  Français^  c'étaient  d'o- 
dieux mercenaires  que  Tespoirdu  Dutin  attirait  dans 
cette  malheureuse  ville.  Ces  scélérats ,  comme  vous 
le  pouvez  voir,  n'égorgeaient  que  pour  piller. 

«  J'ai  rendu  le  cheval  rouge  qui  me  servait  (dit 
Achard  à  Gravier);  ton  hère  a  celui  de  Bissuel-Saint- 
Victor,  qui  a  subi  le  joug  de  la  loi...  •  Il  accuse  la 
réception  de  1,400  livres;  il  fera  le  plus  digne  em- 

fdoi  de  cette  somme,  •  celui  de  soutenir  avec  courage 
es  principes  d'une  Société  républicaine.  • 

C'est  Gravier  qui  fait  passer  cet  argent;  de  qui  le 
tenait-il  lui-même,  si  ce  n'est  de  ceux  dont  l'intérêt 
était  de  semer  le  trouble  pour  réaliser  la  destruction 
de  cette  cité  riche  et  commerçante,  dont  l'existence 
gênait  le  cours  de  Thomicidc  niveau  ! 

Eh!  le  mot  d'ordre  avait  été  si  bien  donné  par  les 
chefs  et  si  bien  retenu  par  les  agents  que  le  détes- 
table Achard,  dans  un  discours  prononcée  la  Société 
de  Commune-Affranchie,  a  l'impudence  d'en  faire  en 
ces  termes  l'aveu  public  : 

•  Est-ce  parce  qu'en  1703  vous  avez  combattu  de 
front,  les  armes  à  la  main,  la  foudre  à  vos  côtés, 
cette  classe  d'êtres  monstrueux ,  vampires  de  la  so- 
ciété et  sangsues  de  tous  les  peuples,  cire  vils  et  mé- 
prisables que  l'on  nomme  négociants....  que  Ton 
vous  calomnie?* 

{La  suite  à  demain.) 


BUfTÉ  A  LA  SI^ANCE  DU  5  VEFfTOSB. 

'  Msatm  (de  Douai),  au  nom  dei  comilés  de  salât  pablle^ 
de  sûreté  générale  et  de  légiilalion  *  Citoyens,  voscomUét 
de  salut  public,  de  lûreté  générale  et  de  législation,  te  lost 


64S 


oliKtf  terMt  ptfdllemeot  InMfërés  de  la 
•az  arcbires  do  départemeoU 

TiTM  V. 

JhlûdéUtraneedti  actes  qui  constaientfHaicMl. 

«  IIX.  L'ofBder  de  Tétat  ciril  et  le  garde  des  ar- 
ehif  es  du  département  seront  tenus  de  délîrrer  an 

i>liis  urd  dans  trob  jours  les  copies  des  actes  qui 
enr  seront  demandées. 

•  XX.  Ils  nf  pourront  exiger,  pour  la  dëlîTranee 
de  ces  actes,  d'aigres  droits  que  ceux  qui  font  être 
réglés,  a  peine  de  concussion. 

«XXI.  Ces  droits  seront  de  15  sous  pour  cha- 
que extrait  d*actes  de  naissance,  de  décès  ou  de  pu- 
blication de  mariage. 

•  XXII.  Ils  seront  de  30  sons  pour  les  extraits 
d'actes  de  dirorce  ou  ses  préliminaires,  et  pour  ceux 
de  mariage  ou  d'adoption. 

«  XXIII.  Les  droits  de  timbre  du  papier  sur  lequel 
ees  différents  actes  seront  délirrés  seront  payés  sé- 
parément. 

•  XXIV.  Tous  ces  droits  seront  perçus  pour  le 
compte  de  la  nation. 

•  XXV.  Pour  en  assurer  la  pereeption,  la  régie  de 
l'enregistrement  avancera  au  secrétaire-commis  de 
chaque  arrondissement,  sous  son  récépissé,  une  cer- 
taine quantité  de  feuiles  d'expédition  qui  porteront 
un  double  timbre. 

•  XXVI.  Les  extraits  de  l'état  civil  ne  pourront 
être  délivrés  que  sur  ces  feuilles.  Le  secrétaire- 
commis  rendra  compte,  tous  les  mois,  à  la  régie, 
et  m<^me  plus  souvent  s'il  en  est  requis,  du  produit 
de  ces  feuilles,  ou  de  leur  existence  en  nature. 

•  XXVII.  Toutes  les  lois  précédemment  rendues 
sur  l'état  civil  continueront  d'être  exécutées  en  tout 
Ce  qui  n*est  pas  contraire  au  présent  décret.» 

8ÉANCB  DU  5  VElfTOSB. 

Un  secrétaire  donne  lecture  de  la  lettre  suivante  : 

Les  citoyens  composant  ta  Société  populaire  régé- 
nérée  de  Marseille  à  la  Convention  nationale. 

•  ReprdsenUiDU,  \t%  citoyen»  composant  la  Société  popu- 
Infrs  réi^néréé  et  antres  citoyenft  de  Nariellie  remercient  la 
CoDveniloD  oour  la  décret  qui  eooserve  cette  place  en  état 
de  «iéfle,  ordoDoe  qu'il  toit  fait  justice  des  aeitateors  ren« 
fermés  daos  son  sein,  et  restitue  lcsauu)rités  constituées  au 
Heu  filé  par  la  loi.  Ce  décret  sauve  Marseille,  et  rassure 
unit  le  Midi. 

c  Le  parti  jacobin  avait  son  dernier  boulevard  dans  cette 
commune:  c'éuitle  U  pluviôse  que  cette  borde  contre-ré- 
volutionnaire devait  se  relever  par  un  coup  de  main.  Ce 
jour,  u>us  les  fonctionnaires  publics  nommés  depuis  le 
9  thermidor,  les  citoyens  rendus  A  la  liberté,  et  Umt  ce  qui 
restait  d'hommes  honnêtes  devaient  être  immolés  aux  mânes 
de  Rolxispiurre  :  mais  dans  le  temps  que  nous  dormions  la 
Convention  nationale  veillait  pour  nous,  et  ce  même  14, 
qui  devait  éclairer  tant  de  crimes,  n*a  vu  qu'un  grand  acte 
de  Justice.  Au  »i[;nal  du  représentant  du  peuple  Cadroy, 
tous  IfîK  ai;l  ta  leurs,  enveloppés  à  la  fois,  ](ont  reiilrcK  dans 
les  prisons  qu'ils  n'auraient  jamais  dû  quitter....  iNous  n'ac- 
cusonK  point  le  représentant  du  peuple  Espert  de  les  avoir 
rendus  à  la  liberté  ;  les  intentions  de  oe  député  nous  sent 
connues.  En  l'absence  de  son  collègue,  il  fut  circonvenu  par 

tous  les  genres  d'obsessions Notre  esUae  pour  lui  s'est 

accrue,  car  il  a  reconnu  son  erreur. 

•  Représentants,  nous  avons  comprimé  dans  nos  murs  le 
parti  des  égorgeurs,  et  toutes  les  précautions  ont  été  prises 
pour  Qu'il  n'eu  reste  plus  de  vestiges.  Ce  n'était  point  asses 
pour  lei  citoyens  de  cette  Société  d'avoir  expulsé  de  son 
sein  les  membres  gangrenés,  d'avoir  proclamé  tes  grands 
priooipesde  la  morale  publique  t  ils  ont  porté  un  œil  obser- 
vateur sur  tes  emblèmes  qui  décoraient  le  lieu  de  leurs 
ftéaticel«  Das  tigres,  des  léopards,  des  lions,  des  griffes,  dea 


botthev.  A 


BMal  à  et  Des.  ifé  reeaeablait  à  Pastre  de  i 

appdah  le  temple  de  la  Uberlé.  L'ati^siioa  s'ctt  i 

tée  sur  la  tribose  en  fonae  de  mostagoe.  o*  lea  i 

de  Robespierre  prolessèreat  si  loagieape  la 

vol  et  de  fassaateaL  Une  sabHe  lodieBatfott  s'ca  i 

lée;  rassemblée  s'eM  levée  ca  wêêm^  :...  le  i 

fiée  a  dtsfarv:  e'ett  sv  set  débris  mima  qot  mam  ^mm 

éerivons  ccuc  Adresse. 

«  ReprësentaBU,  ca  proscriraaC  les  rlfanmlBUiOM  ma 
provoquaient  à  la  guerre  dvile,  il  était  aatorel  d'efEaeer  k» 
emblèmes  qui  pooraieotcatreieoir  des  sralioiefits  i 
renseigne  da  crime,  rappardlde  la  mort  seront  i 
par  les  attribnu  de  la  Uberté.  de  la  paix  ef  4a  b( 
la  place  des  Hons  ef  des  tigres,  le 
la  respectable  agricalmre ,  tons  les  artt  atilet  aa  < 
latears  irouvcfot  leais  saintes  imafn  el  leais  < 
révérée. 

f  ReprésenUnts,  noos  vons  féUdtons  d'avoir  4 
aboU.  dans  l'eneeinle  qoi  voos  rassemble,  ces  difliércle» 
places  qui  donnèrent  si  longtemps  prise  au  scandale  pabHc, 
et  firent  couler  unt  de  sang.  Qu'éuit-ii  besoin  de  plalae,  de 
marais  et  de  montagne  dans  un  lieu  où  l'on  fonda  l'éçaikéf 
Ces  dénominations  burlesques  éiaieni-eiles  digacs  de  la 
plus  auguste  assemblée  du  monde  ?  Elles  auraient  pu  i  ~ 
1er  tout  au  plus  ces  fiêles  affreases  oè  les  peuplades 
▼âges  s'attroupent  pour  délibérer  sur  leurs  atroces  moye 

de  subsistance. Peut-être  que  la  place  ^'1 

Robespierre  devrait  être  déserte ,  eoamie  on  porifie  par  In 
destruction  le  lieu  qu'Infecu  la  tyrannie  et  le  crioie.....^.^ 
Nous  nous  empressons  de  Urer  un  voile  snr  d'alTreaz  sna- 
venirs;  notre  Intenlioo  n*est  pas  de  jeter  de  noaveaas  bras» 
dons  au  sein  de  l'assemblée  naUonale:  c'est  aux  agliaiaan» 
c'est  aui  buveurs  de  sang,  c'est  aux  patriotes  exdusiCs  qae 
nous  vouons  toute  notre  haine,  en  travaillant  a  cicatriser  les 
plaies  qu'ils  ont  faites  à  la  patrie.  Que  voulaient  Us,  ces  ré- 
publicahM  d'un  jour,  qui  ignoraient  que  toaia  déaofliUtatioa 
distinguée  est  une  insulte  faite  à  la  liberté,  et  que  la  varta 
elie-^nême.  dans  une  répubUque,  est  sujette  A  roairadsae  ? 
Us  se  disaient  patriotes  par  excellence:  ils  atUcbaleat  da  la 
jalousie  A  ce  Utre,  parce  qu'ils  prétendaient  l'exerctr  seols; 
en  effet,  la  profession  était  lucrative  ;  elle  était  bien  aMias 
périlleuse  que  celle  de  ces  hommes  plus  hardiment  aeélé- 
rats,  qui  établissaient  leur  empire  sur  les  grandes  roQtes. 
La  misère  et  le  déstespolr  trop  souvent  les  poussent  A  ce  mé- 
tier dangereux.  Ils  courent  le  risque  de  leur  vie,  au  llea  que 
les  autres,  tranquillement  assis  dans  la  mollesse  des  feailas, 
dictaient  des  arrêts  de  mort  sans  craindre  pour  la  leur,  et 
prescrivaient  sans  contrariété  les  tributs  qu'on  devait  lear 
offrir.  Et  nous  souffririons  encore  de  pareils  êtres  !  et  des 
hommes  honnêtes,  des  pères  de  famille  respectables,  pour 
avoir  osé  s'en  plaindre,  ont  subi  la  peine  de  mort! Ee- 

K résentants,  le  peuple  de  Marseille  est  en  insurrectioo  contre 
»  voleurs,  les  égorgeurs  et  les  dominateurs.  II  n'est  point 
de  puissance  qui  arrête  cette  explosion  de  la  vertu  contre 
les  ministres  du  crime,  contre  les  cannibales  qui  ont  dés- 
honoré la  plus  belle  révolution,  et  qui  Tauraient  élooffén 
si  l'on  n'était  parvenu  à  l'arracher  de  leurs  mains. 

t  Représentants,  ordonnez  leur  arrestation;  ordonnez-la 
pour  leur  propre  »ùreté  ;  car  de  la  résistance  à  l'atUique  il 
n'est  qu'un  pos  très-facile  A  franchir,  lorsque  les  outrages 
sont  sanglants  et  que  Pindignatiun  est  à  sou  comble.  Vive  la 
république  une.  Indivisible  et  démocratique,  puisqu'elle  doit 
être  le  gouvernement  des  hommes  vertueux  et  libres  ! 

■  Périssent  les  royalistes,  les  dominateurs,  et  toutes  les 
espèces  de  tyrans  ! 

c  Vive  la  Convention  nationale,  parce  qu'elle  a  la  con- 
fiance du  peuple  français,  et  qu'elle  obtiendra  dans  peu  les 
respects  de  l'Europe  !  « 

{SMcent  dix  pages  de  signatures,) 

Les  membres  du  comité  révolutionnaire  du  dis- 
trict de  Marseille  félicitent  la  Convention  nationale 
sur  ses  augustes  travaux,  dont  l'éclat  passera  à  là 
postérité  la  plus  reculée  et  excitera  son  admiration. 
«Vors  avez,  disent-ils,  non-seulement  délivré  le 
peuple  de  Toppression  de  ses  anciens  tyrans,  maie 
encore  vous  Pavez  retiré  du  bord  de  Tabîme  où  de 
nouveaux  tyrans  voulaient  le  plonger,  et,  à  force  de 
crimes,  le  réduire  à  reprendre  des  chaînes  encore 
phis  pesantes  que  celles  qu'ils  avaient  brisées.  Voui 
Ave»beaucoiip  foit  dans  ia  journée  du  0  thermidor. 


<4S 


mais  il  vons  reste  à  faire.  Les  tyrans  que  tous  avez 
frappés  avaient  des  compaii^nons  et  des  agents  dans 
toute  la  république  :  les  uns  et  les  autres  existent 
encore  ;  il  est  temps  que  la  loi  s'appesantisse  sur 
leurs  lêles  coupables  ;  cet  acte  de  justice  sera  un 
bienrait  d'autant  plus  grand  qu  il  fera  cesser  le  sys- 
tème de  terreur  que  les  malveillants,  tenant  toujours 
à  la  faction  des  dëcemvirs,  s>florcent  de  rétablir 
dans  la  république,  et  plus  particulièrement  dans 
notre  malheureuse  commune. 

■  Tenez  d'une  main  vigoureuse  les  rênes  du  gou- 
vernement ;  et  tandis  que  nos  frères  font  triompher 
partout  la  république,  ne  souffrez  pas  que  les  œé* 
chants  renversent  Tédifice  du  honneur  que  votre 
courage  et  votre  sagesse  ont  élevé.  Vive  la  repu- 
blique  !  vive  la  Convention  !  • 

Leblanc  (des  Bouches-du-Rbône)  :  Je  demande 
rinsertion  en  entier  de  TAdresse  de  Marseille  au 
Bulletin,  le  renvoi  au  eomité  de  sûreté  générale, 
et  que  le  comité  soit  chargé  de  donner  des  instruc- 
tions au  représentant  du  peuple  Guérin  ,  qui  a  été 
nommé  par  la  Convention  nationale  pour  se  rendre 
dans  le  département  des  Bouches-du-Rhône. 

ViLiJETARD  :  J'applaudis  aux  sentiments  do  paix 

3ui  sont  manifestés  dans  celte  Adresse;  personne  ne 
ésire  plus  que  moi  de  la  fixer  au  milieu  de  nous; 
mais  peut-on  Tespérer  alors  qu'on  se  déclare  en  in- 
surrection? 

Pluti0urt  voiœ  :  C'est  contre  le  crime, 

ViLLETABD  :  Je  ne  crois  pas  que  la  Convention 
doive  sanctionner  cette  Adresse  en  ordonnant  qu'elle 
sera  insérée  au  Bulletin.  L'insurrection  a  toujours 
été  et  sera  toujours  une  mauvaise  mesure  ;  c'est  le 
signal  de  la  guerre  civile.  Je  sais  au'il  faut  avoir 
vengeance  des  scélérats  :  l'humanité,  la  justice,  la 
'  république  la  réclament  ;  mais  il  faut  qu'elle  soit 
digue  de  vous,  il  faut  que  ce  soit  U  vengeance  des 
lois,  et  qu'elle  soit  exercée  par  les  tribunaux.  (Ap- 
plaudissements.) 

La  nation  entière  verra  aveo  plaisir  Qu'ils  pour- 
suivront les  coupables  *  mais  si  1  on  parle  de  aésar- 
mer  un  certain  nombre  de  citoyens  en  leur  donnant 
une  dénomination  odieuse(murmures),  on  craindra, 
et  avec  raison,  que  vous  ne  soyex  entraînés  plus  loin 
que  vous  ne  voudrez.  Vous  avez  détruit  le  terro- 
risme, vous  avez  bien  fait;  mais  votre  intention  n'a 
pas  été  de  lui  substituer  un  autre  terrorisme.  A 
quelle  marque  reconnaîtrez-vous  un  terroriste?  Rap- 
pelez-vous quel  abus  on  a  fait  du  mot  aritloerale! 
Combien  n'a-t-on  pas  fait  couler  de  sang  en  don- 
nant ce  nom  aux  hommes  qu'on  avait  intérêt  de  dé- 
truire !  Une  mesure  générale  de  cette  espèce  pour- 
rait être  mal  dirigée,  ainsi  que  cela  est  arrivé  pour 
la  loi  du  17  septembre.  Elle  a  été  confiée  i  des  or- 
ganes impurs ,  et  Ton  en  a  cruellement  abusé.  Eh 
bien ,  vous  seriez  responsables  des  nouveaux  mal- 
heurs qui  pèseraient  sur  la  France  si,  étant  instruits 
par  Texpérience,  vous  remettiez  l'arbitraire  à  l'or- 
dre du  jour.  Consultez  le  génie  de  la  liberté,  le  gé- 
nie de  rhnmanité;  ne  donnez  pas  le  signal  de  la 

;ucrre  civile  :  vous  en  verseriez  des  larmes  de  sang. 

Applaudissements.)  Que  la  Convention  se  montre 

'amie,  le  soutien  de  la  justice,  et  qu'elle  repousse 
avec  horreur  toutes  les  mesures  arbitraires.  Je  m'op- 
pose à  rinsertion  de  la  lettre  au  Bulletin,  en  ce 
qu  elle  contient  \ihe  résolution  que  je  crois  con- 
traire au  bien  de  mon  pays. 

Clauzbl  :  Le  préopinant  n'a  pas  bien  entendu 
l'Adresse.  Les  citoyens  de  Marseille  disent  qu'ils 
sont  en  insurrection  contre  le  crime.  (Murmures  à 
Textrémité  gauche.)  Je  demande  une  seconde  laih 


|Ure,  et  elie  prouvera  qu«  las  eitoyena  de  Marseille 
ont  pénétrés  de  respect  pour  les  lois. 

On  fait  la  seconde  lecture;  elle  est  souvent  inter- 
rompue par  les  plus  vifs  applaudissements. 

La  Convention  en  décrète  la  mention  honorable 
et  l'insertion  au  Bulletin. 

Jars^Panviluir,  au  nom  des  comités  des  secours 
publics  et  de  salut  publie:  Citoyens,  protéger  l'agri- 
culture et  le  commerce,  encourager  les  arts,  favow 
riser  l'industrie,  tels  sont  les  moyens  d'assurer  la 
prospérité  publique,  tels  doivent  être  les  objets  des 
sollicitudes  constantes  d'un  bon  gouvernemenL 

C'est  pour  favoriser  l'accroissement  d'un  établis- 
sement utile  de  ce  genreque  je  viens  vous  parler  d'une 
manul'acture  de  toiles  à  voile,  établie  à  Bourges, 

•Cet  établissement  est  déjà  en  pleine  activité.  Il  a 
fixé  l'attention  des  représentants  du  peuple  envoyés 
dans  le  département  au  Cher;  il  ne  s'agit  plus  que 
de  lui  donner  l'extension  dont  il  est  susceptible. 
Mais  l'entrepreneur  a  besoin  pour  cela  de  la  protec- 
tion du  gouvernement,  parce  que,  ne  trQuvantpas 
sur  les  lieux  un  nombre  sufUsant  de  fileuses  pour 
alimenter  cent  cinquante  ou  deux  cents  métiers 
qu'il  pourrait  y  établir,  il  ne  peut  y  suppléer  promp- 
tement  que  par  des  moyens  extraordinaires.  11  de- 
mande à  cet  effet  d'être  autorisé  à  tirer  des  hos- 
piees  de  Paris  ou  des  départements  quatre  ou  cinq 
cents  jeunes  filles,  âgées  au  moins  de  dix  ans,  pour 
les  employer  à  la  filature.  Il  s'engage  à  payer  les 
frais  de  transport  de  leurs  personnes  et  de  leurs 
effets  jusqu'à  Bourges,  à  les  loger  gratuitement 
dans  sa  manufacture,  à  les  apprendre  à  Hier,  à  leur 
payer  le  même  prix  de  main-d'œuvre  que  celui  en 
usage  à  BoUrges  pour  les  autres  fileuses,  à  pe  leur 
donner  pendant  leur  apprentissage  que  des  institu- 
trices agréées  par  le  conseil  général  de  U  commune 
du  lieu;  et  comme  durant  ce  temps,  c'est-à-dire  du- 
rant leur  apprentissage,  qui  est  estimé  devoir  être 
à  peu  près  de  deux  mois,  le  produit  de  leur  travail 
pourrait  ne  pas  être  suffisant  pour  les  foire  subsis- 
ter, il  s'engage  à  leur  payer,  pendant  ce  laps  de 
temps,  un  supplément  ae  4  sous  par  jour  en  sus 
de  ee  qu'elles  pourront  f^agner. 

Enfin  il  s'oblige  àr  mainlenir  sa  fabrique  dans  un 
état  d'activité  telle  qu'il  puisse  y  entretenir  les  tra- 
vaux nécessaires  à  cinq  cents  Gleuses  pendant  l'es- 
Sace  de  dix  années  ;  et  pour  garantie  ae  cette  con- 
ilion  il  hypothèque  un  bien  national  de  la  valeur 
de  30,000  liv.  au  moins,  qu'il  justifiera  avoir  payé 
en  entier  dans  le  cours  de  trois  mois  à  dater  du  jour 
de  son  engagement.  De  manière  que  si,  par  une 
cause  quelconque,  sa  fabrique  de  filature  était  in- 
terrompue, la  nation  s'emparerait  du  bien  donné  en 
hypothèque,  et  subsidiairement  de  ce  qui  serait  né- 
cessaire sur  son  établissement  pour  se  dédommager 
de  ses  avances. 

Les  besoins  présents  de  la  marine  de  la  républi- 
que pour  les  armements  qu'elle  prépare  contre  ses 
ennemis  naturels,  et  l'engagement  pris  par  l'entre- 
preneur de  la  manufacture  de  Bourges  de  tripler 
la  quantité  des  fournitures  pour  lesquelles  il  s'est 
obligé  envers  le  gouvernement,  si  vous  agréez  ses 
propositions,  ont  déterminé  vos  comités  à  les  sou- 
mettre à  votre  acceptation. 

Ils  ont  considéré  d'ailleurs  que  cette  entreprise 
vous  fournirait  le  moyen  d'enlever  à  l'oisiveté  et  à 
tous  les  vices  qui  en  sont  la  suite  un  grand  nombre 
de  jeunes  filles  qui  paieraient  désormais  le  tribut  de 
leur  travail  à  la  société,  et  qui,  en  prenant  l'habi- 
tude de  s'occuper  utilement,  acquerraient  les  ver- 
tus propres  à  faire  de  bonnes  mères  de  famille. 
Les  dëpetties  que  eet  arrangement  ooeasionoeraît 


650 


Noos  TOUS  apportons  an  drapeap  qoe  le  trarire 
Bannot  aTait  oonDë  à  la  sectioD  ;  doos  ne  voulons 
plus  qu'il  souille  nos  regards  ;  nous  le  déchiruus  de- 
vant TOUS. 

(Les  citoyens  de  la  section  se  |)récipitent  sur  le 
drapeau  et  le  déchirent  en  mille  pièces.) 

Puisse  le  dernier  des  coospirstrurs  s'anéantir  ainsi 
devant  la  représentation  nationale  ! 

Ce  nouvel  étendard,  qui  désormais  va  nous  ras- 
sembler, sera  toujours  dans  le  chemin  de  l'honneur, 
de  la  vertu  ;  il  sera  l'appui  des  lois,  de  la  justice,  de 
rhumanité,  et  nous  conduira  sans  cesse  à  la  défense 
de  la  liberté  et  de  l'égalité. 

Daignez,  représentants,  j  attacher  vous-m^mes 
ces  cravates  ;  cette  bveur  va  électriser  notre  coura* 
ge  ;  et,  depuis  l'enfant  qui  commence  à  l>égajer  jus* 
qu'au  vieillard  qui  parle  encore,  on  mèmt  cri  se 
fera  entendre  dans  la  section  des  Gravilliers  :  vive  la 
république!  vive  la  Convention  nationale!  (On  ap- 
plaudit a  plusieurs  reprises.) 

Le  PBSS1DC5T,  â  la  députation  :  Parmi  les  nom- 
breux actes  de  civisme  qui  distinguent  rintércssante 
et  populeuse  section  des  Graviiliers,  celui  que  vous 
faites  en  ce  moment  ne  tiendra  pas  le  dernier  rang. 

H  est  l>eau  de  voir  une  section  du  people,  qui,  le 
9  thermidor,  a  marche  en  masse  contre  les  bri- 
gands,  venir  enfin,  mafgré  toutes  les  intrigues  par 
lesquelles  on  Ta  agitée,  manifester  ici  les  sentiments 
de  justice,  et  surtinit  de  probité,  dont  elle  a  toujours 
été  animée  ;  il  est  beau  de  voir  une  section  du  peunle 
telle  qu'elle  aurait  «lu  lonj  urs  ^Ire,  composée  des 
hommes  de  tous  les  à^es,  de  tous  les  états,  d'hom- 
mes ^ui  ont  n^noncé  ï  toutes  le$  dén .«mi nations  in- 
ventées par  le  crime  pour  diviser  la  république  ;  il 
est  beau,  dis-je,  de  la  voir  se  réuLÎr  à  b  reprcseata- 
lion  nationale. 

Citoyens,  retoomez  dans  vos  Ibycrs  :  dîtes  anz 
vieillards  qui  n'ont  pu  vous  accompagner  que  la 
Convention  ne  met  pas  de  distinction  entre  les  ci- 
loyess,  que  tous  les  citoyens  sont  égaux,  et  que  la 
fraternité  est  une  des  plos  solides  ba»s  de  la  liberté. 
(On  applaudit.) 

Le  dnip«ta  dooné  pir  Hawiol  est  déchiré  dans  la  mllc^ 
H,  sur  la  proposilioB  dTiin  neaibrtp,  le  presidnl  aUacke 
la  envaie  aa  ooavctii  drap6in«  an  oiilMii  des  plus  lï^  ap- 
plandittemenls, 

La  Convention  nationale  décr^  la  mention  honorable 
tl  rinseftkM  et  F  Adresse  in  BnlMB, 

—  Des  dépotés  liéfcois  sont  admU  à  la  Inrm 

L*or«lfiir  ife  In  étfmtaHtm:  Législateurs,  nous 
finies  Liégeois» nous  sommes  Français.  Il  doit  nous 
être  |iermi$  de  rappeler  le  nom  Itegrois  avec  quel- 
que orgueil.  Sons  lui,  le  premier  entre  tous  les  peu- 
ples, nous  nous  élançâmes  sur  les  traces  uiagnani- 
tues  de  la  France;  sous  lui,  les  premiers  proclamant 
vas  saints  principes,  vous  saluant  du  nom  sacré  de 
régénérateurs  des  humains ,  nous  marchâmes  en 
masse ct^ntre  les  tyrans  de  la  Germanie...  Certes,  il 
a  u  gloire  le  nom  d'un  peuple  qui.  apn^^s  avoir 
e^unlmtlu  avec  un  courage  tant  au*de&^u<  de  ses 
moyens  pour  la  liberté,  vota  et  obtint  sa  reunion  à 
la  république. 

Maia,  législateurs,  nous  devons  api^eler  vos  re- 
gards vers  notre  contrée.  Républicains,  nous  som- 
mes Xtxm  hrani^s»  tr\>p  loyaux,  |»our  ne  i»as  faire  ein 
tendre  la  vérité  dans  cette  enceinte.  Oui,  législa- 
teura,  jusi|u'è  présent  il  semble  qirou  ait  Juré  île 
réaliser  les  \\9t\Atn  du  grand  coupable  que  ft»udroya 
le  V  thermidor  ;  il  semble  qu'on  ait  vimlu  rendn'sti^ 
rile  pour  la  renubliqtie  le»  |uilmes  dont  ses  invinci- 
blea  ariuéiui  ont  lait  dans  nos  champs  îles  moisstws  si 
•boiHUnles,  Cm  chanpt  ont  éld  tn  proie  à  des  nudea 


de  vampires  dilapidateun ,  restes  impon  des  Dic- 
tions que  votre  énergie  précipita  dans  In  néant  et 
l'opprobre.  Nous  avons  vu  eontraster  leor  immora- 
lité désastreuse  avec  les  vertus  héroïques,  avec  la 
grandeur  imposante  de  ces  armées  qui,  animées  par 
cet  anguste  sénat,  vengent  partout,  d'une  manière 
nniqne  dans  les  fastes  du  monde,  le  nom  fonçais. 

Législateurs,  nous  nous  hitons  de  rendre  un  écla- 
tant témoignage  à  votre  comité  de  salut  oublie. 
L'opprimé  ne  vient  pas  près  de  lui  en  vain,  teux  à 
qui  vous  avci  confie  ce  poste  honorable  ont  doouté 
nos  réclamations  avec  un  empressement  paternel. 
Ils  ont  travaillé  sans  délai  à  en  tarir  la  source  ;  c*cct 
à  votre  main  puissante  à  achever  cet  ouvrage. 

Nous  demandons  ou'un  de  vous  soit  envoyé  vert 
les  Liégeois,  qu'il  hanile  constamment  parmi  nous, 
qa*il  console  le  peuple  de  cet  aliandon  si  cruel  et  si 
peu  mérité,  qu'il  vienne  en  votre  nom  fraterniser 
avec  ce  peuple,  dans  tous  les  temps  le  plus  ardent 
ami  des  Frani^is,  le  premier  apôtre  de  votre  révolu- 
tion. Qn*il  vienne  ;  il  verra,  et  vous  rendra  compte 
de  rétat  des  choses.  L'agriculture  désolée,  le  com- 
merce paralysé,  les  fabriques  ruinées,  au  grand  détri- 
ment de  la  république,  tout  va  promptement  renaî- 
tre sous  ses  regards  créateurs. 

La  campagne  s'approche  ;  le  Uégeois  brAle  de 
partager  les  périls  de  ses  frères  ;  il  brûle  de  justifier 
l'adoption  de  la  mère-patrie  ;  qu'ils  ne  soient  plus 
condamnés  â  Tinertie,  les  moyens  que  cette  terre 
présente.  Ils  doubleront  sons  rinfluence  Cffconde, 
inépuisable  de  la  liberté.  Des  hommes,  du  fer,  dn 
rénergie,  des  cœurs  de  flamme,  voilà  ce  que  vous 
ofre  Ljége.  (On  applaudit.) 

Cette  pètiiioQ  ot  renvoyée  an  eomUè  de  saint  pablîe. 

—  Un  membre,  an  nom  au  comité  des  décrets,  pro- 
pose BB  profet  de  décret  qui  est  adopté  en  ces  jennes  : 

•  La  GoovcBtioo  natioBale,  après  avoir  entendu  It  rap« 
port  de  son  oomilé  des  décrets,  archites  et  prooès-verbaui, 
décrète: 

•  Il  n*y  anra  plos  de  suppléants  ans  comités  de  la  Con* 
vcBtioa. 

•  Chaqac  ascmbif  ne  pourra  s'inscrire  que  pour  nn 
comité. 

t  Toat  memlire  appelé  par  les  saffiraies  de  la  Conven- 
tioo  à  un  coailé  pour  lequel  il  se  sera  inscrit  sera  tenu 
^accepter. 

t  S  ■■  flMÎDbro  d*aii  comité  est  entoyé  en  mission  t  il 
ava  itss|i!if<  au  rcBoavrlIenenl do  inois,  • 

-i-  Des  d»'pnih  de  la  commone  de  Sche IrstadI,  départ c- 
■eiit  du  BAs-RhiB,  viennent  fiNicIte r  la  Convention  de  ses 
travavi  H  la  remeicier  de  ses  bicotails,  notamment  de  ec- 
Itil  de  loi  avoir  envoyé  le  représentant  do  people  Bailly, 
qui  a  èporé  les  aotorilés  camlilnéim,  et  remplacé  par  de 
vrais  patriotes  les  hoouMS  de  nog^  les  tenroristai  at  les  in- 
tripots. 

La  mention  honorable  est  décrétée. 

JoiAM?(OT ,  au  nom  de  la  commission  des  Vîngt- 
et-Un  :  Citoyens  ,  pour  obéir  au  décret  que  vous 
avei  rendu  dans  cette  séance,  je  viens  vous  déclarer 
que  la  commission  s'occupe  sans  relâche  de  la  mis- 
sion dont  vous  Tavez  chargée  ;  elle  en  sent  toute 
l*importanee,  mais  il  est  impossible  de  vous  dire 
précisément  à  quelle  époque  sa  conscience  sera  suf- 
fisamment éclairée  Cette  affaire  est  singulièrement 
surchartée  de  pièces  que  vous-mêmes  lui  avez  ren- 
vovées;  d*autres  se  trouvent  dans  différents  dépôts;  il 
a  fallu  en  faire  la  recherche,enfaire  faire  des  extraits, 
les  communiquer  aux  prévenus  ;  hier  matin  encore 
il  nous  a  été  remis  de  nouveaux  papiers  qu*ilfout 
examiner.  La  commis<)ion  ne  peut  donc  pas  vous  dire 
quand  elle  pourra  répondre  a  votre  impatience  et  à 
celle  du  peuple  français,  impatience  qu'elle  partage. 
Tout  ce  que  je  pois  vous  annoncer,  c'est  que  nous 


entendons  aujourd'hui  nos  collègues  pour  la  der- 
nière fois,  qu*iinmédiateincnlapics  nous  délibére- 
rons, et  que,  sous  le  plus  court  délai  possible,  nous 
vous  présenterons  le  résultat  de  notre  travoiU 
La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SSANCB  DU  6  VBNT0S8. 

IÎAI7SSMANN  :  J*ai  demandé  la  parole  pour  faire 
Texposé  succinct  du  résultat  de  la  mission  que,  par 
votre  décret  du  4  thermidor,  vous  avez  confiée  à  mes 
collègues  et  à  moi  auprès  des  armées  du  Nord  et  de 
S.imbre-et-Meuse. 

Les  armées  occupaientalors  la  ligne  depuis  Anvers 
jusqu'à  Liège.  Des  mesures  concertées  entre  les  re- 
présentants du  peuple  et  les  généraux  les  portèrent 
en  peu  de  jours  au  delà  de  la  Meuse,  et  jusqu'aux  ri- 
ves du  Rhin. 

Il  fallait  alors  prendre  de  promptes  mesures  pour 
organiser  la  grande  étendue  du  pays  conquis  par  les 
armées,  et  abandonné  par  la  plupart  des  membres  de 
son  gouvernement  qui  ont  fui  avec  les  ennemis  ;  il 
fallait  faire  tourner  à  l'avantage  de  la  république 
les  ressources  abondantes  qu'offraient  ces  belles 
contrées. 

La  circulation  forcée  des  assignats  a  été  établie  ;  le 
maximum  de  Lille  a  été  mis  en  exécution  ;  les  den- 
rées et  marchandises  nécessaires  au  besoin  des  ar- 
mées ont  été  requises  et  fournies  ;  les  lois  sur  les 
chevaux  de  luxe  et  la  lev^e  du  vingtième  cheval  ont 
rté  exécutées  ;  les  tableaux  des  plus  grands  maîtres, 
des  objets  d'arts  et  sciences,  des  métaux  en  irès- 
giMnde  quanlilc,  et  beaucoup  d'objets  de  première 
nécessite  ont  été  envoyés  dansTinlcrieurde  la  ré- 
publique. L'évacuation  des  denrées  et  marchandises 
(lu  nort  d'Ostende  est  seule  évaluée  à  10  millions; 
les  biens  meubles  et  immeubles  des  gouvernements 
et  des  émigrés  ont  été  mis  sous  la  main  de  la  nation  ; 
80  millions  de  contributions  en  numéraire  ont  été 
imposés  sur  la  Belgique;  les  municipalités  ont  été 
organisées  ;  huit  administrations  d'arrondissement 
et  une  administration  centrale  à  Bruxelles  ont  été 
créées  dans  la  Belgique,  ainsi  qu'une  administration 
des  bois  et  forêts,  et  une  direction  des  revenus  et 
domaines  nationaux.  Tous  cesétablissements  sont  en 
pleine  activité.  Des  comités  de  surveillance  avaient 
clé  formés  dans  les  principales  villes,  et  des  tribu- 
naux criminels  à  Anvers  et  Bruxelles  ;  mais,  depuis  le 
l^r  de  ce  mois,  ces  comités  de  surveillance  sont 
supprimés,  et  les  deux  tribunaux  sont  réunis  en  un 
seul,  composé  de  treize  membres. 

J'ai  la  satisfaction  de  vous  annoncer  que  le  glaive 
de  la  loi  n'n  eu  à  frap[)er  de  mort  que  quelques  h- 
bricateurs  de  faux  assignats  et  des  assassins,  et  que 
les  jugements  ont  toujours  été  prononcés  d'après  le 
code  pénal  de  la  république. 

Depuis  huit  mois  nos  armées  subsistent  sur  les 
produits  des  pays  conquis.  A  mon  départ,  les  maga- 
sins militaires,  les  ressources  du  pays  et  celles  que 
doivent  nous  procurer  les  sept  Provinces-Unies,^ 
nous  rassuraient  sur  la  subsistance  future  de  nos  ar* 
mées.  Cependant  différentes  villes  et  contrées  de  la 
Belgique  paraissent  épuisées  et  réclament  des  sub- 
sistances ;  mais  la  suppression  du  maximuin  et  des 
réquisitions,  et  la  liberté  du  commerce,  qui  viennent 
d'être  accordées,  lui  procurerontdes  ressources  dans 
les  arrondissements  voisins. 

La  contribution  en  numéraire  avait  produit,  jus- 
qu'au moment  de  mon  départ,  une  somme  de  33 
millions,  laquelle,  jointe  i  S  millions  de  recettes  ex- 
traordinaires, fait  celle  de  36  millions  en  numéraire, 
versée  dans  la  caisse  du  payenr  général  ;  les  47  mil- 
lions restant  des  contributions  ue  la  Belgique  pour- 


ront, d'après  un  arrêté  du  comité  de  salut  public  dn 
2*2  pluviôse,  élre  payés  moitié  en  assignats  et  moitié 
en  numéraire. 

De  vives  réclamations  se  sont  élevées  contre  ces 
contributions;  mais  je  dois  vous  observer  que,d'après 
nos  arrêtés,  elles  ne  peuvent  peser  que  sur  les  ab- 
bayes, le  clergé,  les  corporations,  les  nobles  et  les 
riches  ;  que  les  abbayes  et  les  corporations  en  sup- 
portent la  plus  grande  part  ;  que,  pour  y  satisfaire, 
elles  fondent  leur  argenterie  et  vendent  leurs  domai- 
nes ;  quedes  particuliers  connus  pour  être  immensé- 
ment riches  n'en  supportent  que  très-petite  portion; 
enfin  que  la  nation  aurait  fait,  dans  le  courant  d'une 
année,  une  recette  de  plus  de  80  millions,  si,  danslo 
Belgique,  elle  avait  voulu  uire  payer  en  numéraire 
les  impositions,  les  droits,  baux,  redevances,  et  au* 
très  sommes  qui  lui  sont  dues. 

Il  est  cependant  vrai  qu'il  y  a  eu  quelque  dispro- 
portion dans  la  répartition  de  cette  contribution,  et 
cela  ne  pouvait  ^uère  être  autrement  ;  mais  nous 
venons  d'obvier  a  cet  inconvénient  en  chargeant 
l'administration  centrale  de  taire  de  ces  80  millions 
une  répartition  plus  juste  et  plus  égale  sur  tout  son 
arrondissement. 

Les  bois  et  forêts  offrent  de  grandes  ressources  à 
la  république.  Déjà  les  adjudications  du  bois  à  brû* 
ier  ont  commencé  ;  les  Français  y  ont  été  appelés, 
et  nous  avons  permis  que  ces  bois  entrent  dans  la 
république  en  exemption  de  tous  droits.  Ces  ventes 
vont  produire  plus  de  10  millions;  de  nlus,  on  s'oc- 
cupe â  marquer  et  abattre,  pour  introduire  dans  les 
ports  et  les  arsenaux  de  la  république,  quatre-vingts 
a  cent  mille  arbres  propres  à  la  construction  des 
vaisseaux  des  affûts  et  des  bois  de  fusil.  La  vente  du 
mobilier  des  émigrés  a  déjà  commencé,  et  va  être  en 
pleine  activité. 

La  direction  des  domaines  et  revenus  nationaux 
est  parfaitement. organisée.  Ses  recettes  s'élèvent 
déjà  à  400,000  livres  par  décade,  et  son  produit  an- 
nuel sera,  dans  la  Belgique,  au  moins  de  50  millions. 

Les  domaines  qui  sont  dans  le  cas  d'être  mis  sous 
la  main  delà  nation  sont  estimés  à  3  milliards. 

Voilà  donc  une  hypothèque  nouvelle  et  considé- 
rable pour  les  assignats  en  circulation.  Les  habitants 
do  la  Belgique  demandent,  citoyens  collègues,  que 
vous  la  fassiez  tourner  au  profit  de  la  république.  La 
réunion  de  la  Belgique  à  la  république  est  générale- 
ment désirée.  Ceux  mêmes  qui  n'étaient  pas  pour  le 
système  républicain  sentent  que  le  salut  de  la  Bel- 

Sique  dépend  de  cette  réunion.  Bile  vous  est  deman* 
ée  par  Tadministration  centrale  et  par  les  adminis- 
trateurs d'arrondissement.  Les  députés  de  toutes  les 
communes  nous  en  ont  fait  la  demande  expresse.  Je 
vous  invite,  citoyens  collègues,  4  charger  le  comité 
de  salut  public  de  vous  faire  un  prompt  rapport  à  cet 
égard. 

J'ai  à  vous  demander  un  acte  de  justice  en  faveur 
des  habitants  du  pays  conquis.  Nommez  une  com^ 
mission  d'hommes  purs,  instruits  et  actifs,  qui  fasse 
le  recensement  de  toutes  les  ré<|uisitions et  de  toutes 
les  fournitures  qui  ont  été  faites,  et  qui  examine 
l'emploi  et  la  ffestinatlon  de  toutes  les  denrées  et 
marchandises  qui  ont  été  fournies.  Il  ne  faut  bas  en 
douter,  il  s'est  commis  des  vols  et  des  dilapiaations 
on  quantité  ;  beaucoup  d'objets  ont  été  livrés  sans 
que  les  réquisitions  aient  fourni  de  bons  valables  ; 
il  faut  que  ces  fournisseurs  soient  payés,  il  fout  que 
les  dilapidateurs  soient  punis.  Nous  étions  à  leur  re* 
cherche,  déjà  nous  avions  réuni  beaucoup  de  ren«* 
sei^nements  ;  mais  la  quantité  immense  des  affaires 
qui  ne  cessaient  de  nous  arriver  de  toutes  parts,  la 
maladie  grave  de  notre  collègue  Brlez,  qui  s'était 
particulièrement  chargé  de  ce  travail,  uous  a  empê- 


652 


elles  de  donner  à  ces  recherches  toute  la  suite  dont 
elles  sont  susceptibles. 

N'ayant  pas  fait  de  long  séjour  dans  le  pays,  entre 
la  Meuse  et  le  Rhin  et  dans  la  Hollande,  je  ne  vous 
entretiendrai  pas  longtemps  sur  ce  qui  s'est  passe' 
dans  ces  contrées  ;  nos  collègues,  à  leur  retour,  vous 
en  feront  part.  Ils  vous  diront  combien  les  représen- 
tants du  peuple  aux  armées  du  Nord  et  de  Sambre- 
et-Meuse  ont  pressé  la  conqut^te  de  la  Hollande  et 
combien  de  difucultés  et  d*obstacles  ont  été  vaincus. 

En  attendant,  je  vous  annonce  aue  le  pays  entre 
la  Meuse  et  le  Rhin  a  été  organisé  à  rinstar  de  la  Bel- 
gique ;  qu'il  a  été  pris  des  mesures  pour  la  subsis- 
tance et  rhabillement  de  nos  braves  frères  d'armes, 
et  pour  la  conservation  de  tout  ce  qui  doit  être  mis 
sous  la  main  de  la  nation. 

Pendant  tout  le  cours  de  notre  mission ,  nous  n'a- 
vons eu  en  vue  que  les  intérêts  de  la  république  et  la 
gloire  de  ses  armées.  Le  pauvre  a  reçu  des  secours  ; 
mais  nous  avons  pensé  aussi  que,  quand  nos  conci- 
toyens se  sont  épuisés  pendant  six  années  pour  la 
cause  de  la  liberté,  et  lorsqu'ils  supportent  chaque 
jour  les  plus  grandes  privations,  il  élaitjuste  que  les 
ressources  qu  offraient  les  pays  conquis  tournassent 
à  Tayantage  de  la  république.  Tel  a  été  notre  plan, 
telle  a  été  notre  conauite. 

Nous  ne  répondrons  point  à  tous  ceux  oui  ont  été 
contraria  dans  leurs  spéculations  et  dans  leurs 
combinaisons  d'intérêt  privé;  mais  nous  serons  tou* 
jours  prêts  à  rendre  à  la  Convention  nationale  le 
compte  de  notre  conduite,  et  à  lui  donner  tous  les 
renseignements  qu'elle  pourra  désirer  sur  nos  opé* 
rations. 

Je  préviens  la  Convention  nationale  que  la  santé 
de  notre  collègue  Briez  est  singulièrement  affaiblie 
par  un  travail  long  et  assidu,  et  qu'avant  quinze 
jours  il  ne  pourra  pas  quitter  Bruxelles,  où  il  gar- 
dait le  lit  à  mon  départ. 

La  Convention  nationale  décrète  ^insertion  de  ce  rap* 
port  au  Bulletin ,  et  le  renvoi  au  comité  de  salut  public. 

Lecointrb  (de  Versailles)  :  Citoyens,  je  viens  vous 
proposer  de  soumettre  à  la  revision  de  votre  comité 
de  législation  les  décrets  rendus  dans  des  temps  mal* 
heureux.  Celui  du  23  ventôse  de  Tan  2  frappe  de 
mort  et  de  confiscation  de  biens  le  citoyen  qui  aurait 
recelé  chez  lui,  ou  ailleurs,  un  individu  mis  hors  de 
la  toi. 

Beaucoup,  en  vertu  de  ce  décret  que  je  ne  crains 
pas  de  qualifier  d*imnioral,  ont  partage  le  supplice 
de  parents,  d'amis  auxquels  ils  avaient  procuré  une 
retraite. 

Ceux  qui  en  avaient  procuré  une  à  notre  collègue 
Babaud  ont  été  suppliciés,  et  dans  la  séance  d'hier 
vous  avez  témoigné  votre  indignation  contre  la4 
femme  Deseine,  aubergiste,  qui  avait  dénoncé  l'ex- 
ministre  Lebrun,  mis  nors  la  loi,  réfugié  chez  elle, 
et  qu'elle  ne  pouvait  garder  sans  encourir  la  peine 
de  mort.  L'exécution  de  cette  loi  a  fait  perdre  à  cette 
femme  et  à  sa  famille  son  état. 

Ce  décret  n'est  pas  le  seul  dont  l'immoralité,  pour 
ne  pas  dire  la  barbarie,  excite  l'indignation  de  tout 
homme  de  bien. 

Celui  du  30  du  premier  mois  condamne  à  la  dé- 
portation tout  citoyen  qui  recèlerait  un  prêtre  sujet 
ê  la  déportation. 

Enfin,  celui  du  39  brumaire  de  l'an  2  porte  que 
les  biens  de  tout  individu  décrété  d'accusation,  ou 
contre  lequel  l'accusateur  public  du  tribunal  révo- 
lutionnaire a  formé  l'acte  d'accusation,  qui  se  don- 
nera la  mort,  sont  acquis  et  confisqués  au  profit  de  la 
nation,  de  la  même  manière  et  dans  les  mêmes  for- 
mel que  f'il  avait  étéconda^^né. 


•  Enfin  ce  décret,  est-il  dit,  aura  son  exécution  du 
10  mars  1793,  jour  de  la  formation  du  tribunal  ré- 
volutionnaire.» 

Sous  le  règne  des  Tibère,  des  Néron,  des  Caligula, 
de  semblables  lois  n'ont  pas  eu  lieu.  Celui  qui,  in- 
digné de  la  tyrannie,  se  donnait  la  mort  avant  de 
périr  sous  le  couteau  des  formes  judiciaires,  conser* 
vait  au  moins  ses  biens  à  ses  héritiers.  Celui  qui  re- 
cevait son  parent ,  son  ami  chez  lui ,  n'encourait 
point  la  peine  de  mort  ;  l'esclave  seul  y  était  sujeL 

Celui  chez  lequel  se  réfugiait  un  individu  dont  le 
crime  était  d'avoir  des  opinions  religieuses,  contrai- 
res à  celles  reçues  pour  le  moment,  n'encourait 
point  la  peine  de  l'exil,  comme  celui  à  qui  il  avait 
donné  l'hospitalité  ;  jamais  chez  aucun  peu|>le  on 
n'avait  donné  d'effet  rétroactif  à  des  lois  aussi  bar- 
bares. 

Plusieurs  autres  décrets  de  ce  genre  sont  suscepti- 
bles de  révision.  C'est  ce  qui  m'a  déterminé  à  vous 
demander  le  renvoi  de  ma  proposition  du  rapport 
des  trois  décrets  que  je  viens  de  citer  au  comité  de 
I  égislation,  afin  que,  mûrie  dans  la  sagesse  etia ré- 
flexion, il  ne  vous  propose  que  des  mesures  exécuta- 
bles, et  dont  la  malveillance  ne  puisse  profiter  pour 
porter  dommage  à  la  république. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

{La  suilc  demain,) 

N,  B.  —  Dans  la  séance  dn  8,  la  Conrenlion  a  conlînaé 
la  discussion  sur  les  finances.  Elle  a  décrété  que  les  in- 
scriptions sur  le  grand  livre  seraient  admises  en  payement 
des  domaines  nationaux  jusqifau  1*'  Tendémiaire  pro- 
chain, et  qu^il  sera  accordé  nne  primo  de  1  pour  100  pour 
chaque  terme  du  prix  desbicos  nationaux  vendus  qui  sera 
payé  par  aulicipation. 


BrûUtnenl  d'astignali. 

Le  9venlosc,  à  dix  heures  du  matin,  il  sera  brûlé  dans  la 
cour  du  nouveau  local  de  la  vérification  des  avigoais  les 
sommes  ci-dessous  énoncées,  savoir  :  iO  millions  484,530 
livres  en  assignats  provenant  des  échanges,  et  3  millions 
515,  470  liv.  provenant  des  domaines  nationaux  et  recettes 
exlraordinnires;  ces  deux  sommes*  réunies  k  celle  de  S 
milliards  582  millions  683,000  liv.  d<jà  brûlés»  forment 
un  total  de  2  millards  596  millions  683,000  lif« 


Lycée  des  Arts. 

DccadI  i  0  ventôse,  à  onze  heures  précises  du  matin,  il  y 
aura  séance  publique,  distribution  de  prix.  On  résenrera 
le  plus  de  places  qu*il  sera  possible  à  nos  frères  de  TEcolc 
Normale,  et  ils  sont  invités  à  venir  prendre  des  billets. 


LIVRES  DIVERS. 

Collection  du  Moniteur^  depuis  son  origine,  le  24  novem- 
hrc  1 789,  jusqu'au  1*'  vendémiaire  de  h  3*  année  républi* 
caine;  10  volumes,  reliéi  en  carton.  Prii  :  8,000  liv.  A  Pa- 
ris, au  bureau  du  Journal  militaire^  me  de  la  Loi,  n''  754. 

Les  sîi  premiers  volumes ,  jusqu'au  99  septembre  1 793 , 
époque  de  la  première  séance  ût  rassemblée  conventMO* 
nelle,  9,000  liv. 


Payement  à  la  trésorerie  nationale. 

l/i  payement  du  perpélacl  est  ouvert  pour  les  six  pre* 
micrs  mois:  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs  d'in- 
scriptions au  crand  livre.  Celui  pour  les  rentes  Tiagéres 
est  de  huit  mois  vingt  et  an  Jours  de  l'année  1793  (viens 
style). 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  HOMTEVR  MVERSEL. 


N*  160. 


Décadi  10  Vbntosb,  Pan  3«.  (Samedi  28  Févrieb  1795,  vieux  style). 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

Varsovie^  U  i9  Janvier.  — -  Le  mlnislre  rnssc  a  déclaré 
au  corps  diplomatiqac  qaMl  n*f  a? ait  plus  ni  royaume  ni 
république  de  Pologne.  On  ne  doute  nullement  que  le  plan 
de  partage  ne  loit  arrêté  ;  on  regarde  même  comme  certain 
qu'en  conséquence  du  démembrement  les  troupes  prus- 
siennes ne  tarderont  pas  à  prendre  possession  de  Varsovie 
au  nom  de  Frédéric-Guillaume. 

—  Voici  un  trait  souvent  raconté  de  la  dextérité  de  Luc- 
chesini.  Ce  favori  du  roi  de  Prusse  n'ignorait  pas  que  Sta* 
nislas  devait  des  sommes  considérables  en  Hollande ,  sur 
des  billeh  qui  perdaient  deux  tiers  et  plus.  Il  en  ramassa 
pour  30,000  ducats,  et  alla  trouver  le  roi  de  Pologne  avant 

•  son  départ  pour  Grodno;  il  se  montra  son  créancier  et 
voulut  être  payé  au  nom  du  roi  de  Prusse. -Stanislas,  qui 
Crut  avoir  encore  quelque  chose  à  craindre,  eut  peur  et  fit 
vendre  sur-le-champ  ses  épaulettes  en  brillants»  pour  sa- 
tisfaire Lnccbesini. 

Grodno  9  U  HOjanvier»  —  Le  roi  de  Pologne  est  arrivé 
dans  cette  ville  avec  son  escorte  russe.  Le  prince  Repnin 
Ta  complimenté  sans  ménagement;  et,  Payant  conduit  au 
château*  lui  a  donné,  en  qualité  de  maréchal  de  sa  cour,  le 
Russe  Besborodi»  qu^on  peut  regarder  comme  son  geôlier. 

L*impératrice  de  Russie  a  fixé  la  pension  de  Stauislas  A 
100,000  sequinst  el  l*a  Ikitaunrer  de  la  protection. 

On  ne  croit  pas  que  cepauvre  prince  demeure  longtemps 
Ici.  Les  uns  disent  qu'il  sera  conduit  à  Pélersbourg,  d'au- 
tres quMl  aura  la  permission  de  se  retirer  où  il  voudra ,  et 
que  dans  ce  dernier  cas  il  ira  terminer  ses  joan  à  Rome. 

ALLEMAGNE. 

pyeael,  le  10  février.  —  Depuis  la  prise  de  la  petite  ?llle 
d*Kmmerich  par  les  Français,  les  troupes  qui  se  trouvaient 
dans  ses  environs  et  le  fort  de  SchenclL  se  sont  repliées  sur 
Wescl. 

—  On  assure  id  qn*un  corps  de  troupes  prussiennes  ?a 
se  rendre  dans  la  Westphalie  prussienne,  pour  la  couvrir 
contre  l'invasion  des  républicains. 

—  Les  avant-postes  français  sont  extrêmement  rappro- 
chés de  cette  ville.  On  leur  suppose  le  projet  de  pénétrer 
dans  l'Empire,  poar  faire  une  expédition  contre  le  pays 

*  d'Hanovre.  Le  général  hanovrien  Walmoden  a  dft  requé- 
rir le  général  prussien  Moilendorff  de  se  hâter  de  défendre 
cette  frontière  de  l'Empire. 

—  Le  général  Ciairfayt  est  à  Merheim. 

—  On  entend  dire  que  les  débris  de  Parmée  anglaise 
forment  à  peine  sept  à  huit  mille  hommes ,  et  que  le  duc 
dTork  cherche  â  rassembler  à  Emden  son  infanterie  fogi* 
tive  et  sa  cavalerie  dispersée. 

REPUBLIQUE   DES   PROVINCES-UNIES. 

La  ffaye^  U  8  février,  —  L'ambassadeur  de  la  cour 
d'E!«pagne  auprte  des  éiatsgénéi  iux  a  quitté  la  Hollande. 
U  se  rend  â  Hambourg  pour  s'y  embarquer. 

SUISS'i. 

Extrait  ifime  lettre  de  Bàle^  du  VI  plttviote,  —  Le 
Courrier  répuHicaiu  du  7  pluviôse  nous  a  donné  on  arti- 
de  sur  l'ambassade  de  France  en  Suisse;  il  est  plus  qu'in- 
complet ;  il  convient  de  le  rectifier  au  moment  où  les  Fran* 
çais  ont  intérêt  de  connaître  celui  d'entre  eux  à  qui  est 
confiée  une  négociation  qui  doit  ou  rendre  le  repos  à 
l'Europe  épuisée ,  ou  la  laisser  en  proie  aux  malheurs  de 
la  guerre,  |)eut-être  la  livrer  aux  horreurs  de  la  famine  et 
la  rendre  au  vaste  silence  des  tombeaux. 

Comme  je  n'ai  étudié  que  le  citoyen  ambassadeur,  je  n« 
parlerai  que  de  lui  ;  ses  coopératears  sont  on  de  son  choix* 
ou  ses  anciens  frères  d'armes. 

Un  ensemble  de  modestie,  d*aménité,  de  calme  et  de 
bonhomie,  com|)osecet  extérieur  simple  et  ffracieuxqui 
rend  confiant  dans  la  bienveillance  de  Taccueil  ducitoyea 

Z*  Sdnii.  ^  Tome  X* 


Barihélemy;  il  soutient  cette  impression  par  une  conver- 
sation facile*  par  la  franchise  de  la  probité  et  la  féracité 
de  la  prudence.  Son  esprit  a  de  la  culture  et  de  l'initruc- 
tion  ;  il  décèle  plus  de  pénétration  que  d'adresse,  plus  de 
justesse  que  de  brillant;  son  âme  paraît  plus  sensible  que 

Î)assionnée;  il  montre  l'énergie  qui  émane  de  la  réflexion, 
a  droiture  qui  tient  autant  au  caractère  qu*aux  principes. 

Sa  vie  est  frugale ,  laborieuse  et  active  ;  l'estime  de  tous 
a  précédé  rafTectlon  de  la  majorité.  C'est  avec  ces  moyens 
que  depuis  la  révolution  l'ambassadeur  concilie  tant  d'in- 
térêts opposés,  rapproche  tant  d'opinions  contraires,  amor^ 
tit  le  beurt  de  tant  de  passions,  et  qu'en  déterminant  et 
conservant  la  neutralité  de  la  Suisse  il  l'a  affranchie  de 
toutes  les  compressions  politiques  qui  auraient  pu  la 
froisser. 

Les  deux  Etats  doivent  reconnaissance  à  la  représenta- 
tion nationale,  qui  a  fait  et  maintenu  le  choix  de  cet  hon- 
nête homme  ambassadeur. 

Républicain,  je  paie  mon  tribut  au  scrutin  secret  *  et  je 
n'entends  pas  qu'il  m'acquitte. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Suite  du  rapport  fait,  au  nom  de  la  eommiesion 
chargée  de  t examen  des  papiers  trouvés  chez  Ro- 
bespierre et  ses  complices^  par  E,'B.  Courtois^ 
député  du  département  de  l'Aube,  dans  la  séance 
du  16  nivou,anZdelarépubliquêfirançaise^un$ 
et  indivisible. 

G  citoyens  !  quels  sont  donc  ces  scëldrats  soute- 
nns  par  des  hommes  trop  coupables  !  Ce  sont  ceux- 
là  même  que  des  représentants  fidèles  dénonçaient 
sans  cesse,  et  bien  vainement,  aux  membres  ae  vos 
comités,  qui,  par  une  sorte  de  réaction  bien  machia- 
vélique, ne  daignaient  parcourir  encore  ces  dénon- 
ciations que  pour  connaître  par  elles  le  succès  des 
mesures  qu'ils  faisaient  prendre  pour  rendre  la  ré- 
volution odieuse.  Us  viennent  de  se  faire  connaître 
à  vous  par  leurs  écrits,  ces  patriotes  plus  que  pa- 
triotes, ces  bruyants  amis  de  Challier  ;  reconnaissez 
encore  leurs  traits  dans  le  tableau  qu'un  de  vos  col- 
lègues trace  des  désordres  de  ces  fripons. 

-  Ce  sont  de  vrais  intrigants  (dit  il)  qui  ne  veu- 
lent que  la  domination  pour  couvrir  leurs  dilapida- 
tions ,  et  détruire  le  commerce  qui  pouvait  faire 
exister  la  masse  du  peuple  qu'ils  ont  totalement  ou- 
blié, et  ne  s*en  servent  que  pour  assouvir  leurs  pas- 
sions (larticulières,  en  dépensant  les  trésors  de  la 
république  pour  maintenir  ce  même  peuple  dans 
l'oisiveté  par  Tenlrctien  de  dix-huit  nulle,  au  lieu 
de  quatre  mille  qui  doivent  être  employés  aux  tra- 
vaux publics;  maintiennent  plus  de  deux  mille  sé- 
questres pour  conserver  deux  mille  gardiens  à  100 
sous  par  jour,  sans  les  dilapidations  qu'ils  commet- 
tent chaque  jour  ;  ce  sont  des  administrateurs  et 
municipes  qui  ne  font  rien,  dont  la  majeure  partie 
n'a  pas  la  moindre  connaissance  d'administration, 
ne  8  occupant  que  de  leurs  vils  intérêts,  qu'ils  cou- 
vrent toujours  du  nom  de  patriotes  persécutés  et 

d'amis  de  Challier Ces  patriotes,  dont  plusieurs 

sont  inculpés  par  des  preuves  certaines  que  nous 
avons  entre  les  mains,  et  que  nous  vous  fierons  pas- 
ser, doivent-ils  rester  en  place?  et  ceux  qui  n*ont 
aucune  aptitude  doivent-ils  être  eonserv^?  Je  ne  le 
pense  pas.  • 

Ecoutez  encore,  citoyens,  ces  aveux  importants 
d'un  autre  collègue  envoyé,  comme  le  premier,  en 
mission  à  Commune-Affranchie,  mais  dont  les  ia« 

70 


650 


Nous  TOUS  apportons  un  drapeap  que  le  traître 
Banriot  avait  donné  à  la  section  ;  nous  ne  voulons 
plus  qu*il  souille  nos  regards  ;  nous  le  déchirons  de- 
vant vous. 

(Les  citoyens  de  la  section  se  précipitent  sur  le 
drapeau  et  le  déchirent  en  mille  pièces.) 

Puisse  le  dernier  des  conspira  leurs  s'anéantir  ainsi 
devant  la  représentation  nationale  ! 

Ce  nouvel  étendard,  qui  désormais  va  nous  ras* 
sembler,  sera  toujours  dans  le  chemin  de  Thonneur, 
de  la  vertu  ;  il  sera  Tappui  des  lois,  de  la  justice,  de 
rhumanité,  et  nous  conduira  sans  cesse  à  la  défense 
de  la  liberté  et  de  Tégalité. 

Daignez,  représentants,  y  attacher  vous-mêmes 
ces  cravates  ;  cette  faveur  va  électrlser  notre  coura* 
ge  ;  et,  depuis  Tenfant  qui  commence  à  bégayer  jus- 
qu'au vieillard  qui  parle  encore,  un  même  cri  se 
fera  entendre  dans  la  section  des  Gravilliers  :  vive  la 
république!  vive  la  Convention  nationale!  (On  ap- 
plaudit a  plusieurs  reprises.) 

Le  Président,  à  la  députation  :  Parmi  les  nom- 
breux actes  de  civisme  qui  distinguent  l'intéressante 
et  populeuse  section  des  Gravilliers,  celui  que  vous 
faites  en  ce  moment  ne  tiendra  pas  le  dernier  rang. 

11  est  beau  de  voir  une  section  du  peuple,  qui,  Te 
9  thermidor,  a  marché  en  masse  contre  les  bri- 

f;ands,  venir  enfin,  malgré  toutes  les  intrigues  par 
esquelleson  Ta  agitée,  manifester  ici  les  sentiments 
de  justice,  et  surtimt  de  probité,  dont  elle  a  toujours 
été  animée  ;  il  est  beau  de  voir  une  section  du  peuple 
telle  qu'elle  aurait  dû  toujours  être,  composée  des 
hommes  de  tous  les  âges,  de  tous  les  états,  d'hom- 
mes qui  ont  renonce  à  toutes  les  dénominations  in- 
ventées par  le  crime  pour  diviser  la  république;  il 
est  beau,  dis-je,  de  la  voir  se  réunir  à  la  représenta- 
tion nationale. 

Citoyens,  retournez  dans  vos  foyers;  dites  aux 
vieillards  qui  n'ont  pu  vous  accompagner  que  la 
Convention  ne  met  pas  de  distinction  entre  les  ci- 
toyens, que  tons  les  citoyens  sont  égaux,  et  que  la 
fraternité  est  une  des  plus  solides  bases  de  la  liberté. 
(On  applaudit.) 

Le  drapeau  donné  par  Hanrlot  est  déchiré  dam  la  salle» 
et,  sur  la  proposition  d*un  membre,  le  président  atlacbe 
Ja  cravate  au  dou? eau  drspeau,  au  milieu  des  plus  rifs  ap- 
plaudissements. 

La  Convemlon  Dallonale  décrète  la  mentiOD  tiOBorable 
et  rinsertloo  de  TAdresse  au  BulleUn* 

—  Des  députés  liégeois  sont  admis  k  la  barre. 

Loratiur  de  la  députalion:  Législateurs,  nous 
fAmes  Liégeois,  nous  sommes  Français.  Il  doit  nous 
être  permis  de  rappeler  le  nom  liégeois  avec  quel- 
que orgueil.  Sons  lui,  le  premier  entre  tons  les  peu- 
ples, nous  nous  élançâmes  sur  les  traces  magnani- 
mes de  la  France;  sous  lui,  les  premiers  proclamant 
vos  saints  principes,  vous  saluant  du  nom  sacré  de 
régénérateurs  des  humains ,  nous  marchâmes  en 
.  masse  contre  les  tyrans  de  la  Germanie...  Certes,  il 
a  sa  gloire  le  nom  d'un  peuple  qui,  après  avoir 
combattu  avec  un  courage  tant  au-dessus  de  ses 
moyens  pour  la  liberté,  vota  et  obtint  sa  réunion  a 
la  république. 

Mais,  législateurs,  nous  devons  appeler  vos  re- 
gards vers  notre  contrée.  Républicains,  nous  som- 
mes trop  francs,  trop  loyaux,  pour  ne  pas  faire  en- 
tendre la  vérité  dans  cette  enceinte.  Oui,  législa- 
teurs, jusqu'à  présent  il  semble  qu'on  ait  Juré  de 
réaliser  les  paroles  du  erand  coupable  que  foudroya 
le  9  thermiaor  ;  il  semble  qu'on  ait  voulu  rendre  sté- 
rile pour  la  république  les  palmes  dont  ses  invinci- 
bles armées  ont  (ait  dans  nos  champs  des  moissons  si 
abondantes.  Cet  champs  ont  été  en  proie  i  des  nudes 


de  vampires  dilapidateurs,  restes  impurs  des  fac- 
tions que  votre  énergie  précipita  dans  le  néant  e| 
l'opprobre.  Nous  avons  vu  contraster  leur  immora- 
lité désastreuse  avec  les  vertus  héroïques,  avec  la 
grandeur  imposante  de  ces  armées  qui,  animées  par 
cet  auguste  sénat,  vengent  partout,  d*une  manière 
unique  dans  les  fastes  du  monde,  le  nom  français. 

Législateurs,  nous  nous  hâtons  de  rendre  un  écla- 
tant témoignage  à  votre  comité  de  salut  public. 
L*opprimé  ne  vient  pas  près  de  lui  en  vain.  Ceux  à 
qui  vous  avez  contie  ce  poste  honorable  ont  écouté 
nos  réclamations  avec  un  empressement  paternel. 
Ils  ont  travaillé  sans  délai  à  en  tarir  la  source  ;  c*est 
à  votre  main  puissante  a  achever  cet  ouvrage. 

Nous  demandons  qu'un  de  vous  soit  envoyé  vers 
les  Liégeois,  qu'il  habite  constamment  parmi  nous, 
qu'il  console  le  peuple  de  cet  abandon  si  cruel  et  si 
peu  mérité,  qu'il  vienne  en  votre  nom  fraterniser 
avec  ce  peuple,  dans  tous  les  temps  le  plus  ardent 
ami  des  Français,  le  premier  apôtre  de  votre  révolu- 
lion.  Qu'il  vienne  ;  il  verra,  et  vous  rendra  compte 
de  l'état  des  choses.  L'agriculture  désolée,  le  com- 
merce paralysé,  les  fabriques  ruinées,  au  grand  détri- 
ment ae  la  république,  tout  va  promptement  renaî- 
tre sous  ses  regards  créateurs. 

La  campagne  s'approche  ;  le  Liégeois  brAle  do 
partager  les  périls  de  ses  frères  ;  il  brûle  de  justifier 
l'adoption  de  la  mère-patrie;  qu'ils  ne  soient  plus 
condamnés  à  l'inertie,  les  moyens  que  cette  terre 
présente.  Us  doubleront  sous  Tinfluence  féconde, 
inépuisable  de  la  liberté.  Des  hommes,  du  fer,  de 
l'énergie,  des  coeurs  de  flamme,  voilà  ce  que  vous 
offre  Liège.  (On  applaudit.) 

Cette  péUtion  est  reuToyée  au  comité  de  saint  public. 

—  Un  membre,  au  nom  du  comité  des  décrets,  pro- 
pose un  protêt  de  décret  qui  est  adopté  en  ces^lcrmes  : 

fl  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  la  rap- 
port de  son  oomllé  des  décrets,  archives  et  prooès-Torbaux, 
décrète  : 

t  II  n*y  aura  plus  de  suppléants  aux  comités  de  la  Con« 
vention. 

•  Chaque  membre  ne  pourra  s'inscrire  que  pour  un 
comité. 

•  Tout  membre  appelé  par  les  sunv-ages  de  la  Conven- 
tion à  un  comité  pour  lequel  il  se  sera  inscrit  sera  tenu 
d'accepter. 

<  SI  un  membre  d^im  comité  est  entoyé  en  mission,  Il 
sera  remplacé  au  renouvellement  du  mois.  • 

-i-  Des  di^piMés  de  la  commune  de  Scheirstadt,  départe- 
ment du  Bas-Rhin,  viennent  féliciter  la  Convention  de  ses 
travaui  et  la  remercier  de  ses  bleofails,  nolamment  de  ce- 
lui de  lui  avoir  envoyé  le  représentant  du  peuple  Bailly, 
qui  •  épuré  les  autorités  constituées,  et  remplacé  par  tte 
vrais  patriotes  les  hommes  de  sans,  les  terroristes  et  les  in- 
trigants, 

La  mention  honorable  est  décrétée. 

JoHANNOT ,  au  nom  de  la  commission  des  Vingt- 
el-Un  :  Citoyens  ,  pour  obéir  au  décret  que  vous 
avez  rendu  dans  cette  séance,  je  viens  vous  déclarer 
que  la  commission  s*oceupe  sans  retâche  de  la  mis- 
sion dont  vous  l'avez  chargée  ;  elle  en  sent  toute 
l'importance,  mais  il  est  impossible  de  vous  dire 
précisément  a  quelle  époque  sa  conscience  sera  suf- 
fisamment éclain^e  Cette  affaire  est  singulièrement 
surchargée  de  pièces  que  vous-mêmes  lui  avez  ren- 
voyées; d'autres  se  trouvent  dans  différents  dépôts;  il 
a  fallu  en  faire  la  recherchc,en  faire  faire  des  extraits, 
les  communiquer  aux  prévenus  ;  hier  matin  encore 
il  nous  a  été  remis  de  nouveaux  papiers  qu*il  faut 
examiner.  La  commission  ne  peut  donc  pas  vous  dire 
quand  elle  pourra  répondre  a  votre  impatience  et  à 
celle  du  peuple  français,  impatience  qu*elle  partage. 
Tout  ce  que  Je  puis  vous  annoncer,  c'est  que  nous 


entendons  aujourd'hui  nos  collègues  pour  la  der- 
nière fois,  qu*iinmédiateincnlapiès  nous  délibére- 
rons, et  que,  sous  le  plus  courl  délai  possible,  nous 
vous  présenterons  le  résultat  de  notre  travoil; 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANGB  DU  6  VBiNTOSS. 

I!a!7ssm\nn  :  J*ai  demandé  la  parole  pour  faire 
Texposé  succinct  du  résultat  de  la  mission  que,  par 
votre  décret  du  4  thermidor,  vous  avez  confiée  à  mes 
collègues  et  à  moi  auprès  des  armées  du  Nord  et  de 
Snmnrc-et-Meuse. 

Les  armées  occupaient  alors  la  ligne  depuis  Anvers 
jusqu'à  Liège.  Des  mesures  concertées  entre  les  re- 
présentants du  peuple  et  les  généraux  les  portèrent 
en  peu  de  jours  au  delà  de  la  Meuse,  et  jusqu^aux  ri- 
ves du  Rhin. 

II  fallait  alors  prendre  de  promptes  mesures  pour 
organiser  la  grande  étendue  du  pays  conquis  par  les 
armées,  et  abandonné  par  la  plupart  des  membresde 
son  gouvernement  qui  ont  fui  avec  les  ennemis  ;  il 
fallait  faire  tourner  a  l'avantage  de  la  république 
les  ressources  abondantes  qu'offraient  ces  belles 
contrées. 

La  circulation  forcée  des  assignats  a  été  établie  ;  le 
maxinvjm  de  Lille  a  été  mis  en  exécution  ;  les  den- 
rées et  marchandises  nécessaires  au  besoin  des  ar- 
mées ont  été  requises  et  fournies  ;  les  lois  sur  les 
chevaux  de  luxe  et  la  lev^e  du  vingtième  cheval  ont 
vie  exécutées  ;  les  tableaux  des  plus  grands  maîtres, 
des  objets  d'arts  et  sciences,  des  métaux  en  irès- 
grandft  quaiUilé,  et  beaucoup  d'objets  de  première 
nécessite  ont  été  envoyés  dans  l'intérieur  de  la  ré- 
publique. L'évacuation  des  denrées  et  marchandises 
(lu  nort  d'Osteiide  est  seule  évaluée  à  10  millions; 
les  biens  meubles  et  immeubles  des  gouvernements 
et  des  émigrés  ont  été  mis  sous  la  mam  de  la  nation  ; 
80  millions  de  contributions  en  numéraire  ont  été 
imposés  sur  la  Belgique;  les  municipalités  ont  été 
organisées  ;  huit  administrations  d'arrondissement 
et  une  administration  centrale  à  Bruxelles  ont  été 
créées  dans  la  Belgique,  ainsi  qu'une  administration 
des  bois  et  forêts,  et  une  direction  des  revenus  et 
domaines  nationaux.  Tous  cesétablissements  sont  en 
pleine  activité.  Des  comités  de  surveillance  avaient 
été  formés  dans  les  principales  villes,  et  des  tribu- 
naux criminels  à  Anvers  etBruxelIes  ;  mais,  depuis  le 
l^r  de  ce  mois,  ces  comités  de  surveillance  sont 
supprimés,  et  les  deux  tribunaux  sont  réunis  en  un 
seul,  composé  de  treise  membres. 

J*ai  la  satisfaction  de  vpus  annoncer  que  le  glaive 
de  la  loi  n'n  eu  à  frap[>er  de  mort  que  quelques  fa< 
bricateurs  de  foux  assignats  et  des  assassins,  et  que 
les  jugements  ont  toujours  été  prononcés  d'après  le 
code  pénal  de  la  république. 

Depuis  huit  mois  nos  armées  subsistent  sur  les 
produits  des  paysconquls.  A  mon  départ,  les  maga- 
sins militaires,  les  ressources  du  pays  et  celles  que 
doivent  nous  procurer  les  sept  Provinces-Unies,^ 
nous  rassuraient  sur  la  subsistance  future  de  nos  ar* 
mées.  Cependant  différentes  villes  et  contrées  de  la 
Belgique  paraissent  épuisées  et  réclament  des  sub- 
sistances ;  mais  la  suppression  du  maximum,  et  des 
réquisitions,  et  la  liberté  du  commerce,  qni  viennent 
d*etre  accordées,  lui  procurerontdes  ressources  dans 
les  arrondissements  voisins. 

La  contribution  en  numéraire  avait  produit,  Jus- 
qu'au moment  de  mon  départ,  une  somme  de  33 
millions,  laquelle,  jointe  i  S  millions  de  recettes  ex- 
iraordinaircs,  fait  celle  de  36  millions  en  numéraire, 
versée  dans  la  caisse  du  payeur  général  ;  les  47  mit- 
lions  restant  des  contributions  ue  la  Belgique  pour- 


ront, d'après  un  arrêté  du  comité  de  salut  public  dn 
2*2  pluviôse,  cire  payés  moitié  en  assignats  et  moitié 
en  numéraire. 

De  vives  réclamations  se  sont  élevées  contre  ces 
contributions;  mais  je  dois  vous  obser  ver  que,d'après 
nos  arrêtés,  elles  ne  peuvent  peser  que  sur  les  ab- 
bayes, le  clergé,  les  corporations,  les  nobles  et  les 
riches  ;  que  les  abbayes  et  les  corporations  en  sup- 
portent la  plus  grande  part  ;  que,  pour  y  satisfaire, 
elles  fondent  leur  argenterie  et  vendent  leurs  domai- 
nes ;  quedes  particuliers  connus  pour  être  immensé- 
ment riches  n'en  supportent  que  très-petite  portion; 
enGn  que  la  nation  aurait  fait,  dans  le  courant  d'une 
année,  une  recette  de  plus  de  80  millions,  si,  danslo 
Belgique,  elle  avait  voulu  liiire  payer  en  numéraire 
les  impositions,  les  droits,  baux,  redevances,  et  au* 
très  sommes  qui  lui  sont  dues. 

11  est  cependant  vrai  qu'il  y  a  eu  quelque  dispro- 
portion dans  la  répartition  de  cette  contribution,  et 
cela  ne  pouvait  ^uère  être  autrement  ;  mais  nous 
venons  d'obvier  a  cet  inconvénient  en  chargeant 
l'administration  centrale  de  faire  de  ces  80  millions 
une  répartition  plus  juste  et  plus  égale  sur  tout  son 
arrondissement* 

Les  bois  et  forêts  offrent  de  grandes  ressources  à 
la  république.  Déjà  les  adjudications  du  bois  à  brû^ 
ier  ont  commencé  ;  les  Français  y  ont  été  appelés, 
et  nous  avons  permis  que  ces  bois  entrent  dans  la 
république  en  exemption  de  tous  droits.  Ces  ventes 
vont  produire  plus  de  1 0  millions  ;  de  nlus,  on  s'oc- 
cupe â  marquer  et  abattre,  pour  introauire  dans  les 
portset  les  arsenaux  de  la  république,  quatre-vinets 
a  cent  mille  arbres  propres  à  la  construction  des 
vaisseaux  des  affûts  et  des  bois  de  fusil.  La  vente  du 
mobilier  des  émigrés  a  déjà  commencé,  et  va  être  en 
pleine  activité. 

La  direction  des  domaines  et  revenus  nationaux 
est  parfaitement. organisée.  Ses  recettes  s'élèvent 
déjà  à  400,000  livres  par  décade,  et  son  produit  an-* 
nuel  sera,  dans  la  Belgique,  au  moins  de  50  millions. 

Les  domaines  (]ui  sont  dans  le  cas  d'être  mis  sous 
la  main  de  la  nation  sont  estimés  à  3  milliards. 

Voilà  donc  une  hypothèque  nouvelle  et  considé- 
rable pour  les  assignats  en  circulation.  Les  habitants 
do  la  Belgique  demandent,  citoyens  collègues,  que 
vous  la  fassiez  tourner  au  profit  de  la  république.  La 
réunion  de  la  Belgique  à  la  république  estgénérale* 
ment  désirée.  Ceux  mêmes  qui  n'étaient  pas  pour  le 
système  républicain  sentent  que  le  salut  de  la  Bel- 
gique dépend  de  cette  réunion.  Bile  vous  est  deman* 
dée  par  l'administration  centrale  et  par  les  adminis- 
trateurs d'arrondissement.  Les  députés  de  toutes  les 
communes  nous  en  ont  fait  la  demande  expresse.  Je 
vous  invite,  citoyens  collègues,  4  charger  le  comité 
àe  salut  public  de  vous  faire  un  prompt  rapport  à  cet 
égard. 

J'ai  à  vous  demander  un  acte  de  justice  en  faveur 
des  habitants  du  pays  conquis.  Nommez  une  com- 
mission d'hommes  purs,  instruits  et  actifs,  qui  fasse 
le  recensement  de  toutes  les  ré<|uisitionset  de  toutes 
les  fournitures  qui  ont  été  faites,  et  qui  examine 
l'emploi  et  la  ffestinatlon  de  toutes  les  denrées  et 
marchandises  qui  ont  été  fournies.  Il  ne  faut  bas  en 
douter,  il  s'est  commis  des  vols  et  des  dilapiaations 
en  quantité  ;  beaucoup  d'objets  ont  été  livrés  sans 
que  les  réquisitions  aient  fourni  de  bons  valables  ; 
il  faut  que  ces  fournisseurs  soient  payés,  il  faut  que 
les  dilapidateurs  soient  punis.  Nous  étions  i  leur  re* 
cherche,  déjà  nous  avions  réuni  beaucoup  de  ren«* 
sei^nements  ;  mais  la  quantité  immense  des  aflfoires 
qui  ne  cessaient  de  nous  arriver  de  toutes  parts,  la 
maladif  grave  de  notre  collègue  Briez,  qui  s'était 
particulièrement  chargé  de  ce  travail  »  nous  a  empê- 


£58 


AdressM  multipliées;  Je  vous  citerait  les  départe- 
ments du  Gers,  du  tara,  des  Bouches-du-Rhône,  du 
Loiret,  de  la  Sarthe,  du  Calvados,  de  THérault,  de 
rYonne,de  TArdèche^dela  Côte-d'Or,desCôtes-du- 
Nord,  de  TAriége,  de  la  Dordogne,  du  Mont-Blanc , 
de  la  Moselle,  des  Hautes-Pyrénées,  du  Bas-Rhin,  de 
la  Charente-Inférieure,  du  Jura,  etc.  ;  je  vous  dirais 

aue  plusieurs  représentants  en  mission  et  que  divers 
épartementsont,  par  desarrêtés  particuliers,changé 
le  mode  d'instruction  publique  dans  différents  cul- 
lëçes. 

Il  importe  de  faire  cesser  cette  dissonance ,  car 
Tunité  ae  la  république  appelle  l'unité  de  l'ensei- 
gnement. 

Je  vous  dirais  que  les  établissements  proposés  sont 
en  quelque  sorte  des  cadres  ouverts  pour  recevoir 
les  élèves  de  TEcole  Normale  qui  se  seront  le  plus 
distingués  pendant  la  durée  du  cours,  et  un  nouveau 
motif  aémuiation  donné  à  leur  amour  pour  la  pro- 
pagation des  lumières  ;  des  cadres  ouverts  pour  re- 
cevoir, dans  toute  rétendue  de  la  république,  les 
hommes  éclairés  et  vertueux  qui  ont  échappé  à  la 
faux  du  vandalisme. 

Citoyens,  vous  avez  fondé  l'Ecole  Normale,  et 
cet  établissement,  en  opérant  un  grand  déversement 
de  lumières  dans  les  départements,  consolera  les 
sciences,  les  lettres  et  les  arts,  des  ravages  de  Tigno- 
rance  et  de  la  tyrannie. 

Les  écoles  primaires  s*organisent  de  toutes  parts  ; 
les  livres  élémentaires  sont  composés  ;  il  vous  reste 
un  pas  à  faire  pour  monter  tout  le  système  de  Tin* 
struction  nationale ,  et  ce  pas  sera  un  grand  bien- 
fait pour  la  génération  qui  s'avance.  Voici  le  projet 
de  décret  : 

•  La  Convention  nationale  «  apièf  avoir  entendu  le  rap* 
port  de  ses  comités  d'instruction  publique  et  des  financest 
décrète: 

CHAniai  I*^ 
Institution  des  écoles  eentrates» 

•  Art  I*'.  Pour  renseignement  des  seiences,  des  lettres 
et  des  arts,  il  sera  établi ,  dans  toute  l'étendue  de  la^répu- 
blique,  des  écoles  centra  1rs  distribuées  àraison  delà  popu- 
lation ;  la  base  proporUonnelle  Kra  d'une  école  par  trois 
cent  mille  habitants. 

«  II.  Chaque  école  centrale  sera  composée  :  i®  d*an 
professeur  de  mathématiques  s  S*  d*ao  professeur  de  phy- 
sique  et  de  chimie  eipérimeûtales  ;  5*  d'an  professeur 
d'histoire  naturelle;  4*  d'un  professeur  de  mélhode  des 
sciences  ou  logique,  et  d'analyse  des  sensations  et  des 
idées  ;  5*  d'un  professeur  d'économie  poliUqiie  et  de  légts* 
lation  ;  e*  d'un  professeur  de  Thisloire  philosophique  des 

Seuples  ;  7*  d'uu  professeur  d'hygiène;  8*  d'un  proiCesseur 
'arts  et  méUert  ;  9*  d*ao  professeur  de  grammaire  géoé* 
Tile;  iO*  d'un  professeur  de  helies-leUres  ;  il*  d'un  pro- 
fesseur de  langues  andeooes;  il*  d*un  professeur  de  lan* 
gués  vivantes,  les  plus  appropriées  anx  localités  ;  18*  d'un 
professeur  des  arts  du  dessin, 

•  m.  Dans  toutes  les  écoles  cenU>ales»  les  professeurs 
donneront  leurs  leçons  en  français. 

•  IV.  Ils  auront  tous  les  mois  une  conférence  publique 
ior  des  matières  qui  intéressent  le  progrès  des  sciences» 
des  lettres,  et  les  aru  les  plus  utiles  à  la  société. 

•  V.  Auprès  de  chaque  école  centrale  il  y  aura  :  i*  nne 
bibliothèque  publique;  S*  un  {ardin  et  un  cabinet  d'his- 
toire naturelle  ;  8*  un  cabinet  de  physique  eipérimentale  ; 
4*  une  collection  de  machines  et  modèles  pour  les  arts  et 
métiers. 

«  VI.  Le  comité  d'instruction  publique  demeure  chargé 
de  faire  composer  les  livres  élémentaires  qui  doivent  servir 
à  l'enseignement  dans  les  écoles  centrales. 

«  VII.  Il  sera  sutné  par  un  décret  particulier  sur  le 
placement  de  ces  écoles. 

Cbapitib  il 
/«rf  eeiifral  éTinêtruetiom.  —  Profetseurs^     • 
Alt.  1*%  Les  professeurs  des  écoles  centrales  seront  exa- 


minés» élus  et  surveillés  par  un  fury  central  d^instrucUon , 
composé  de  trois  membres  nommés  par  le  comité  d'instruc- 
tion publique. 

•IL  Le  jury  central  sera  renouvelé  par  tiers  tous  les  frlK 
mois. 

•  Le  commissaire  sortant  pourra  être  réélu. 

>  III.  Les  nominations  des  professeurs  seront  soumises 
à  l'approbation  de  l'administration  du  département 

•  IV.  Si  l'administration  refuse  de  confirmer  la  nomi« 
nation  faite  par  le  jury  cenUral ,  il  pourra  faire  un  autre 
choix. 

•  V.  Lorsque  le  jury  persistera  dans  sa  nominatioB»  et 
l'administration  dans  son  refus,  elle  désignera,  pour  la 
place  vacante,  le  citoyen  qu'elle  croira  mériter  la  préfé* 
rence;  les  deux  choix  seront  envoyés  au  comité  d'inslruc- 
lion  publique,  qui  prononcera  définitivement  entre  l'admi- 
nistration et  le  jury  central. 

•  VL  Les  plaintes  contre  tes  professeurs  seront  portées 
directement  au  jury  central  d'instruction  publique. 

«  VIL  Lorsque  la  plainte  sera  en  matière  grave,  et 
après  que  l'accu^  aura  été  entendu ,  si  le  jury  Juge  qu*i| 
y  a  lieu  ^  destitution,  sa décbion  sera  portée  a  l'admiui$« 
tralion  do  département,  pour  être  confirmée. 

•  VIII.  Si  l'arrêté  de  l'administraliou  du  département 
n'est  pas  conforme  &  l'avis  du  jury  central,  l'aiBaire  sera 
portée  au  comité  d'instruction  publique,  qui  prononcera 
définitivement. 

•  IX.  Le  traitement  de  chaque  professeur  des  écoles 
centrales  est  fixé  provisoirement  à  3,000  livres. 

•  Dans  les  communes  dont  la  population  s'élève  au- 
dessus  de  quinze  mille  habitants»  ce  traitement  sera  de 
4,000  liv. 

•  Dans  les  communes  au-dessus  de  soixante  mille  babi- 
Unu,ilserade  8,000  liv. 

•  X.  Il  sera  aUoué  tous  les  ans,  à  chaque  école  eentralc, 
une  somme  de  6,000  liv.  pour  frab  d'expériences,  salaire 
éss  employés  à  la  garde  de  la  bibliotiièqne,  du  cabinet 
d'histoire  naturelle,  et  pour  toutes  les  dépenses  nécessaires 
à  rétablissement. 

•  XI.  Le  comité  d'instruction  publique  est  chargé  d'ar- 
rêter les  règlements  sur  le  régime  et  la  discipline  intérieure 
des  écoles  centrales. 

Chapitbi  m. 
BUveê  de  la  Patrie.  -*•  Prix  tTeneouragemenU 

«  Art.  I*'.  Les  élèves  qui ,  dans  la  fête  de  la  Jeunesse, 
se  seront  le  plus  distingués,  et  auront  obtenu  plus  parii- 
eulièrement  les  suffrages  du  peuple,  recevront,  s'ils  sont 
peu  fortunés»  une  pension  annuelle  pour  se  procurer  la  fa- 
cilité de  fréquenter  les  écqles  centrales. 

•  IL  Des  prix  d*encouragemenl  seront  distribués  tous 
les  ans»  en  présence  du  peuple»  dans  la  fête  de  la  Jeu- 
nesse. 

■  Le  professeur  des  élèves  qui  auront  remporté  le  prix 
recevra  nne  couronne  civique. 

•  III.  En  conséquence  de  la  présente  loi,  tous  les  anciens 
établissemenu  consacrés  a  IMnstruction  publique  sous  le 
nom  de  collèges,  et  salariés  par  la  nation,  sont  et  denseu* 
rent  supprimés  dans  toute  l'étendue  de  la  république. 

•  IV.  Le  comité  d'instruction  publique  fera  un  rapport 
sur  les  monumenu  et  établissements  déjà  consacrés  a  J'en- 
se^nement  public  des  sciences  et  des  arts,  comme  les  jar- 
dins des  plantes,  les  cabinets  d'histoire  naturelle,  les  ter- 
rains destinés  à  des  essais  de  culture,  les  observatoires» 
les  Sociétés  des  savanu  et  artbies  qu*U  serait  bon  de  con- 
server dans  le  nouveau  plan  d'instruction  nationale,  s 

La  discussion  s'élève  sur  l'article  1er, 
>    Couppé  :  Je  demande  qu'au  lieu  d'une  école  cen- 
trale par  trois  cent  mille  habitants  on  en  établisse 
une  par  département. 

Lb  Rapporteur  :  Le  comité  d'instruction  publique 
a  adopté  la  base  de  la  population  dans  la  repartition 
des  écoles  centrales  sur  tes  territoires  de  la  républi- 
que. Il  lui  a  paru  juste  et  principal  de  ne  pasdfoDner 
le  même  nombre  d'écoles  centrales  et  aux  départe- 
ments les  plus  forts  par  la  population  et  l'étendue 
territoriale,  et  à  ceux  qui  sont  réduits  au  minimum 
\  de  la  population  et  de  retendue  ;  de  placer  de  la 


559 


même  manière  dans  la  hiérarchie  scolaire  le  dépar- 
tement du  Bec-d*Ambès,  par  exemple,  dont  la  po- 
pulation s'élève  à  près  de  cinq  cent  mille  habitants, 
et  ledéj)artementdesAIpes-Maritimes,quin*ena  pas 
cent  mille.  Nous  n'avons  pas  été  retenus  par  la  con- 
sidération que ,  dans  le  aépartement  le  plus  éten- 
du comme  aans  celui  qui  est  resserré  dans  les  bornes 
les  plus  étroites ,  il  n  existe  qu'une  administration 
de  aépartement,  qu*un  tribunal  criminel,  etc.  N'est- 
ce  pas  plutôt  là  un  vice  de  répartition  qu*un  motif 
pour  nous  de  ne  pas  briser  la  chaîne  départemen- 
taire  dans  le  classement  des écofes centrales?  N'é- 
tions-nous  pas  fondés  à  ie  penser  d'après  vos  propres 
décrets?  En  effet,  vous  avez  adopté  la  base  de  la  po- 
pulation dans  l'organisation  des  écoles  primaires  ; 
et  lorsque  nous  vous  avons  proposé  d'appeler  a  l'E- 
cole Normale  trois  élèves  par  district,  vous  avez  re- 
jeté l'avis  de  votre  comité  pour  adopter ,  sur  la  de- 
mande de  notre  collègue  Ramel,  la  base  proportion- 
nelle d'un  élève  par  vingt  mille  habitants;  c  est  donc 
d'après  ces  principes  et  vos  propres  décrets  que  je 
réclame  l'ordre  du  jour. 

L'ordre  du  jour  est  adopté.     . 

Le  rapporteur  relit  l'article  II. 

Levassbub  (  de  la  Sarthe  )  :  Il  me  semble  que  dans 
la  liste  des  cours  on  en  a  omis  un  bien  important, 
celui  d'agriculture  et  de  commerce.  Je  demande  que 
cette  omission  soit  réparée. 

Le  Rapporteur  :  On  a  dû  voir  dans  le  rapport  qui 
a  précédé  le  projet  de  décret  que  je  me  suis  étendu 
avec  une  sorte  de  complaisance  sur  la  nécessité  d'un 
cours  d'agriculture  et  de  commerce  dans  chaque 
école  centrale.  J'ai  appelé  Texpérience  pour  démon* 
trer  l'utilité  de  ces  sortes  d'étaolissements.  J'ai  cité 
l'eiemple  du  célèbre  Smith,  professeur  d'agriculture 
et  de  commerce  à  Edimbourg.  Le  comité  crinstruc- 
tion  a  rejeté,  contre  mon  opinion,  la  demande  que 
vous  fait  aujourd'hui  notre  collègue  ;  il  a  pensé  qu'il 
suflisait  d'environner  le  commerce  et  l'agriculture 
d'encouragements  et  de  liberté.  Ce  n'est  pas  mon 
avis ,  et  f  appuie  la  proposition  de  notre  collègue 
Levasseur. 

La  proposition  de  Levasseur  est  adoptée. 

***  :  On  propose  dans  l'article  un  professeur  d'arts 
et  métiers.  Je  ne  crois  pas  qu'un  seul  professeur 
puisse  embrasser  les  éléments  de  tous  les  arts  et  mé- 
tiers. Je  demande  que  le  rapporteur  s'explique  à  ce 
sujet. 

Le  Rapporteur  :  Les  arts  se  divisent  en  deux  gran- 
des classes  :  les  arts  mécaniques  et  les  arts  chimi- 
ques. 

Les  arts  mécaniques  sont  ceux  qui  exigent  un  em- 
ploi de  force  vive ,  et  qui  ne  peuvent  être  exercés 
qu'à  l'aide  d'instruments  mécaniques  ;  ainsi ,  par 
exemple ,  on  ne  peut  travailler  le  bois,  les  métaux, 
la  pierre,  qu'en  taisant  une  dépense  de  forces,  et  en 
se  servant  d'outils  appropriés  à  l'effet  qu'on  veut 

Sroduire.  Ces  outils  sont  ou  simples  ou  composés; 
ans  ce  dernier  cas ,  ils  prennent  le  nom  de  machi- 
nes: ainsi,  une  machine  n'est.que  la  collection  d'un 
certain  nombre  d'outils  ou  d'instruments  réunis  pour 

Produire  un  effet.  Toute  machine  est  donc  suscepti- 
Ic  d'être  décomposée,  d'être  réduite  à  des  éléments 
simples. 

Le  professeur  qui  sera  chargé  de  cette  partie  de 
rinstructton  publique  devra  donner  d'abord  des  no- 
tions générales  communes  à  tous  les  arts  mécani- 
ques; il  particularisera  ensuite  ses  leçons  de  ma- 
nière à  ce  que  chacun  puisse  s'arrêter  au  deeré  d'in- 
struction nécessaire  pour  l'art  qu'il  veut  embrasser, 
et  que  les  élèves  ne  soient  pas  forcés  de  consommer 
un  temps  précieux  à  acquérir  des  connaissances  qui 
leur  seraient  inutiles. 


Les  cours  devront  donc  commencer  par  Tosposi- 
tion  des  principes  élémentaires  de  la  géométrie  gra- 
phique. De  là  les  règles  de  la  perspective,  de  la  taille 
des  pierres,  de  l'art  de  la  charpente,  de  ce  qu'on  ap- 
pelle le  trait. 

Les  arts  purement  chimiques  diffèrent  des  arts 
mécaniques  en  ce  qu'ils  n'emploient  ni  force  vive, 
ni  instruments  mécaniques.  Ainsi,  lorsqu'on  brûle 
du  soufre  pour  le  convertir  en  acide  sulfurique  ou 
huile  de  vitriol ,  la  combustion  est  un  agent ,  mais 
non  pas  un  instrument  ;  l'ouvrier  ne  uit  aucune 
dépense  de  force. 

Le  cours  relatif  aux  arts  chimiques  devra  commen- 
cer par  une  exposition  des  corps  naturels  qui  sont  en 
usage  dans  les  arts ,  par  une  description  de  leurs 
qualités  extérieures,  par  quelques  explications  sur 
leur  origine  dans  les  arts,  comme  dans  l'art  du  tein- 
turier, par  exemple. 

C'est  ainsi  que  se  sont  faits,  au  Lycée  républicain 
de  Paris ,  des  cours  d'arts  et  métiers,  dans  lesquels 
on  a  soumis  à  une  méthode  didactique  toutesles  pos- 
sessions manuelles,  et  éclairé  et  abrégé  les  procédés 
des  arts  et  métiers  qui  ont  un  rapport  direct  avec  les 
besoins  de  la  vie. 

L'article  est  adopté. 

**'  :  Le  comité  propose  d'établir ,  dans  chaque 
école  centrale ,  un  professeur  de  langues  les  plus 
appropriées  aux  localités.  Je  crois  au'ilest  dans  l'in- 
tention de  la  Convention  de  faire  aisparattre  du  sol 
de  la  république  tous  les  jargons  particuliers  pour  . 
ne  cohserver  que  la  langne  nationale. 

Lb  Rapporteur  :  J'ooserve  à  mon  collègue  qu'il 
n'a  pas  saisi  le  sens  de  l'article.  Il  n'est  pas  question 
de  conserver  des  idiomes  particuliers ,  mais  de  ré- 
pandre, selon  les  localités,  la  connaissance  des  lan- 
gues parlées  ch^z  les  peuples  nos  voisins,  avec  les- 
quels nous  pouvons  avoir  des  relations  de  commerce 
ou  d'amitié.  Ainsi,  dans  les  départements  voisins  des 
Pyrénées,  on  enseignera  l'espagnol ,  l'italien  dans 
les  départements  situés  au  pieu  des  Alpes,  l'allemand 
dans  les  départements  du  Nord. 

L'article  est  adopté. 

Les  articles  111  et  IV  sont  adoptés  sans  réclama- 
tion. 

Le  rapporteur  relit  l'article  V,  et  ajoute  : 

•  La  mesure  présentée  dans  Tarticle  oe  sera  pas,  comme 
on  pourrait  le  penser,  une  surcharge  pour  le  trésor  natio- 
nal. D'après  le  travail  de  la  commission  temporaire  des 
ans,  les  coUections  en  tout  genre  que  les  émigrés,  les  ci- 
devant  moines,  les-congrégations  enseignantes  ont  laissées 
à  la  république,  sont  plus  que  suffisantes  pour  la  forma- 
tion des  établiflsementsque  nous  vous  proposons;  d*ailieurs 
ces  dépôts,  fassent-ils  incomplets  dans  leur  origine,  s*en« 
richiront  de  dons  particuliers  faits  par  les  bons  citojrens,  se 
compléteront  même  par  des  échanges.  »* 

L'article  V  est  adopté  ainsi  que  l'article  VI. 
Le  Rapporteur  :  Les  députations  respectives  seront 
entendues  pour  le  placement  des  écoles  centroirs. 
Ainsi  toutes  les  difficultés  expireront  dans  le  sein  de 
votre  comité ,  et  vous  ne  perdrez  pas  à  les  lever 
un  temps  que  vous  devez  tout  entier  au  salut  de  h 
patrie. 

L'article  VII  est  adopté. 

La  Convention  décrète  les  chapitres!!  et  III sans 
réclamation. 

—  Delecloy,  au  nom  des  comités  de  salut  public , 
de  sûreté  générale  et  de  législation ,  reproduit  un 
projet  de  décret  présenté  par  Girod-Pouzol  le  22 
nivôse. 

Ce  projet  de  décret  est  adopté  en  ces  termes  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rep- 
art de  ses  trois  comités  de  salut  pnbllc,  de  sûreté  géné« 
raie  et  de  législation ,  décrète  : 


560 


c  Ait  !•%  A  compter  de  la  po1)neatioii  de  la  préienle 
loi ,  les  toppléanu  seront  admis  dans  la  Con?eotioo  natio- 
nale sar  la  simple  eiiiitution  do  prooès-f  erbal  dt  lear  élec- 
tion »  qui  es  eonstatera  la  ?alidité. 

«  II.  Ceux  des  suppléants  qui  n^anront  pai  été  tdmb  à 
leur  toor  profileront  de  la  loi» 

«  III.  Les  décrets  des  S3  fendémîaire  et  7  fructidor  de 
Tan  S«  de  la  république  sont  rappoii6<. 

•  IV.  Le  comité  des  décrets  esi  cbargé  de  présenter, 
dans  deux  jours,  la  liste  de  tous  les  suppléants  qui  sont  ap- 
pelés ft  la  représentation  nationale,  et  de  se  conformer  au 
décret  du  S5  frimaire,  concernant  le  mode  de  rempla* 
cemenL 

•  Le  présent  décret  sert  Imprimé  et  inséré  au  Bulletin  de 
correspondance, 

Gepfrot,  au  nom  du  comité  de  sûreté  générale  : 
Vous  avez  par  décret  chargé  le  comité  de  sûreté  gé- 
nérale de  vous  faire  un  rapport  sur  la  pétition  de 
Dragon  Julien  Carantan,  ci-devant  secrétaire  du  co- 
mité de  salut  public. 

Ce  citoyen,  dont  Tardent  civisme  a  été  reconnu, 
a  été  chargé  par  le  comité  de  salut  public  de  porter 
3  millions  à  Tarmée  de  Mayence,  le  10  août  1793 

f vieux  style),  lorsque  cette  armée  marchait  vers  Or- 
éans.  Dans  le  compte  que  Julian  a  rendu  à  la  tré- 
sorerie, il  se  trouve  un  déficit  de  138,000  livres. 

Julian  parait  en  outre  chargéd'un  dé|>ûtde  14,000 
livres,  reçu  en  sa  qualité  de  secrétaire  du  comité  de 
salut  public. 

Depuis  longtemps,  et  avant  son  arrestation,  le 
comité  de  salut*public  avait  pris  un  arrêté  qui,  en 
destituant  Dragon  Julian,  Tobligeait  à  rendre  compte 
de  ces  deux  sommes,  et  que,  fiule  par  lui  de  remplir 
les  dispositions  de  cet  arrêté,  il  serait  poursuivi  par- 
devant  les  tribunaux. 

Julian  «  dans  ses  Mémoires,  se  défend  en  disant 
qu*il  est  possible  que  la  trésorerie  nationale  se  soit 
trompée  en  lui  remettant  les  sommes  qu*il  devait 
portera  Tarmée  de  Mayence. 

Les  commissaires  de  la  trésorerie,  qui  ont  été  en- 
tendus, ont  annoncé  au  comité  (|ue  Julian  n'avait 
pris  aucunes  précautions  pour  soigner  la  conserva- 
tion de  ces  2  millions ,  et  qu'il  a  obstinément  re- 
fusé un  agent  comptable  de  la  trésorerie  au  fait  du 
comptage  des  assignats  et  au  fait  de  la  comptabilité; 
mais  en  même  temps  la  trésorerie  nationale  nfa 
donné  le  renseignement  que  Julian  avait  étourdi- 
ment  donné  10,000  fraucs  de  trop  à  un  commissaire 
des  guerres,  ce  oui  fait  naître  la  présomption  qu'il  a 
pu  commettre  crautres  étourdenes. 

Mais  il  existe  plusieurs  renseignements  qui  peu- 
vent donner  matière i  des  débats  judiciaires,  faits 
et  renseignements  qui  ont  déterminé  le  comité  de 
sûreté  générale  à  penser  que  ce  n'était  pas  à  lui  à 
prononcer  sur  la  mise  en  liberté  de  Julian,  et  il  m'a 
chargé  de  proposer  à  la  Convention  nationale  de  dé- 
créter : 

«Que  les  pièces  relatives  au  déficit  de  138,000 
livres  et  au  dépôt  de  14,000  livres  seront  renvoyées, 
ainsi  que  ledit  Julian,  au  tribunal  criminel  du  dé- 
partement de  Paris.» 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  Giraud  au  nom  du  comité  de  commerce, 
fait  un  rapport  dans  lequel  il  détruit  toutes  les  ob- 
jections faites  dans  les  précédentes  séances  contre  le 
décret  du  11  nivôse,  qui  supprime  les  franchises  de 
Dunkerque. 

Sur  sa  proposition,  la  Convention  passe  k  Tordre 
du  jour,  et  décrète  que  Tadministration  des  douanes 
nationales  fera  exécuter  sur-lenchamp  le  décret  du 
11  nivôse. 

^  Cambon,  au  nom  du  comité  des  finances,  pré- 
sente,  dans  un  rapport  trèi-étendu  (  et  que  nous 


donnerons) ,  Tanalyse  des  différents  projets  qui  ont 
été  lus  à  la  tribune  dans  les  précédentes  séances 

Ïiour  retirer  des  assignats  de  la  circulation.  11  déve- 
oppe  sur  tous  ces  projets  des  réflexions  générales 
qu'il  termine  en  proposant  à  la  décision  de  l'assem- 
blée une  série  de  questions  sur  laquelle  il  s*élève  une 
discussion  qui  est  interrompue  par  Boissy  d'Aoglaa, 
au  nom  du  comité  de  salut  public. 

BoissY  d'àrglas  :  Vous  avez  tous  senti  la  néces- 
sité de  centraliser  le  gouvernement,  et  pour  y  par- 
venir vous  avez  chargé  une  commission  de  vous  pré- 
senter ses  vues  sur  les  différentes  attributions  des 
comités  de  la  Convention,  et  sur  les  commissions 
administratives.  Sans  doute,  lorsque  ce  rapport  vous 
sera  soumis,  vous  examinerez  s  il  est  utile  à  la  ré- 
publique et  si  ce  n'est  pas  entraver  la  marchedn  gou- 
vernement que  d'envoyer  dans  les  départements  des 
représentants  du  peuple  avec  des  pouvoirs  illimités 
qui ,  nécessairement  et  sans  le  vouloir ,  eontra- 
rient  les  vues  du  (gouvernement.  En  attendant  que 
ce  rapport  vous  soit  fait,  le  comité  de  salut  public  a 
cru  devoir  vous  soumettre  un  projet  de  déksret  pour 
empêcher  que  des  envoyés  de  commissions  execu- 
tives ou  des  autorités  constituées  n'entravent,  par 
des  mesures  contradictoires  à  celles  prises  par  le  gou- 
vernement, l'arrivage  des  subsistances  dans  les  dif- 
férents points  de  la  république. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

•  La  Contenllon  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  oomilé  de  salut  pid>lic,  décrète  que,  dans  au- 
CQB  cas  et  sous  aucun  prétexte,  la  dcslioatioo  des  subsis- 
tances et  autres  objets  d'approvisionnements  appartenanis 
ft  la  république  ne  pourra  être  changée  par  les  repiésen- 
taots du  peuple  en  mission,  ou  par  les  autorités  constituées, 
tant  nn  arrôté  préalable  du  comité  de  saint  poMlc.  a 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—-  La  discussion  sur  les  finances  est  ajonmée  â 
demain. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 


N.  B.  —  Dans  la  séance  du  9,  la  Convention  a 
appris,  par  une  lettre  des  représentants  du  peuple  à 
Marseille,  que  les  brigands  r^ui  désolent  le  Midi  s'é- 
taient rassemblés  dans  le  district  d'Arles,  et  qu'on 
avait  été  obligé  de  déclarer  cette  commune  eu  état 
de  si^e. 

—  On  a  continué  la  discussion  sur  les  finances. 


LIVRES  DIVERS. 

La  Bépubliquê  françaiu  en  quatre^vinguliuit  départe- 
ments, avec  quatrc-Yingt-hiiit  cartes  enluminées;  I  irol.  io*8«, 
broché  en  carton.  Fris  :  16  Ht.  10  s.  ;  S«  édition,  corrigée  et 
augmentée. 

—  Le*  crime$  des  empereurs  turcs  ^  avec  un  rapproche* 
ment  historique  entre  Mahomet  et  Rohetpierre  ;  f  vol.  gros 
in-8®  de  640  pages,  avec  gravures.  Prix  :  S  liv.,  broehé,  et 
10  liv.,  franc  de  port,  A  Parts,  au  bureau  des  RévoUUimudê 
Pqrbt  rue  des  Marais,  faubourg  Germain,  n*  tO. 

Vota.  Le  même  libraire  prévient  qu*il  publiera  im  antrs 
ouvrage  contenant  les  crimes  àe»  rois  d'Angleterre,  eet»  des 
rois  aCspagne  et  des  empereurs  ou  ciars  àtM  Ruasiea  ^  Jm* 
ques  et  compris  Catherine,  la  csarine  actuelle* 


Payements  à  la  tréiorerie  nationale. 

Le  payement  du  perpctncl  est  ouvert  pour  les  sis  pre* 
miers  mois  ;  il  sera  fait  a  tous  cens  qui  seront  porteurs  d*ia« 
scriptions  au  ^and  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères  esi 
de  huit  mois  vingt  et  un  jours  de  Tannée  1793  (vieus  st/le}* 


GAZETTE  NATIONALE  ..  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N»  161.  Primidi  li  Ventosb,  tan  S:  (Dimanche  l"  Mabs  1795,  vieuic  Hyle.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Francfort ,  UiO  févrUr,  -*  Oq  pprie  d'wp  ettéchisme 
poiiiuiiquc  qu'où  aliribue  aux  derniers  iosiirgé»  d9  Hou» 
grie.  On  en  ciie  la  première  demande  et  sa  rê|)oos«  : 

•  Ou'esHu  ?  ^  Une  bêta  brute  courbée  b<^Qi4tuseinQol 
sous  le  joug  d'un  tyri^n»  i» 

Ce  pciU  ouTruge  a  déplu  I  U  cour  de  Vienne t  qui  le 
fait  en}p^er  avec  grand  ftoin  dan»  les  campagnes. 

L  c>prit  public  en  Alk'magne  se  nourrit  d'écrits  d^un 
auirc  ordre.  Dëj^  le  droit  oublie  S*est  affrancbi  de  ses  pré» 
jugés  el  de  ses  chaînes»  C  est  en  quoi  la  révolution  fran- 
çaise a  beaucoup  servi.  La  pbtlosopbie  de  Kant  a  de  nom- 
breux disciples  dans  les  universUés  et  hors  des  universités. 
Ou  la  regarde  comme  remplie  de  conceptions  neuves  sur 
la  nature  deTentendenEieni  de  l'esprii  humain,  et  capable 
(le  donner  un  nouvel  essora  lu  philosophie,  qui  paraU 
vouer  ses  méditations  k  la  liberté  des  peuples. 

RÉPUBLIQUE   DES  PR0VINCE8-*UNIES. 

La  Ilayif  U  \  9  févrUtr.  —  Lf  citoyen  PaolMS  h  ét4  «pn- 

tiniié  dans  ia  piésidence, 

-*  L«s  représeiilauts  proviaohras  ont  aboli  loutca  fran» 
çlii«es,  «Minptiuiia  et  privik^s  queleonquas. 

—  On  a  arrêté,  à  le«r  débarqueraenl  k  Scbereningen , 
Fa  gel  el  L.  Heyde,  eréatarca  du  sKathoudar.  Le  seeHé  a  eié 
uii»  sur  leurs  papiers. 

—  Adams,  ministre  des  Etats-Unis  d'Amérique,  a  re* 
présenlé  que  quelques  capKaines  de  vaisseaux  aménealns 
se  plaignaient  des  visitas  ordonnées  dans  les  ports  de  Hol* 
lande.  Les  représentants  proris^dres  ont  aceueillt  eca  0^ 
servations •  «i  aol  par  une  prodamatiaa  régh^  les  formalii» 
\&i  de  visites. 

^  Le  géoéral  républicain  Piabcgm  a  demandé  que  las 
soldais  de  Taruiée  hollandaise  portassent  la  cocarde  trieo* 
lore.  L'Europe  sera  pcut^étn;  «toBuée  d*apprendre  qua 
Picbegru  n'ait  |)as  été  (uéveiiu  k  ce  sujet;  h  s  Hollandais 
ont  combattu  coutie  la  république  française,  tant  qu*ils 
ont  eu  un  slalhouder,  (jui  les  '^  délivrés  de  lenr  tyran?  lea 
Français. 

PAYS-9ASr 

Anvers,  2  ventôse,  —  Les  ass^ignat»,  monnaie  nationale 
de  France  y  dont  le  cours  est  forcé  dans  nos  provinces,  ne 
sont  point  admis  dans  la  Hollande.  Les  éch^uiges  ont  donc 
cc^sé  entre  les  Provinces-Unles  el  nous.  !l  est  vrai  que  les 
Hollundnis  offrent  de  iuurnir  tous  les  objets  dont  nous 
avons,  tiinsi  que  la  France,  le  plus  grand  besoin;  mais 
leurfi  maisons  de  commerce  ont  déclaré  |i  «elles  des  Pays- 
Bas  ({u'elles  ne  cooiiuusraicnt  leurs  relatinos  qu*«n  rece- 
\iuii  désormais  les  payements  d'avance  et  en  valeur  mé- 
tallique. Aiiibi  les  oiarcbaiids  hollandais,  patriotes  et 
uuiieti,  n'ont  encoie  rien  remboursé  à  la  nation  française 
des  frais  énormes  d'une  guerre  qui  1^  a  pourtant  délivréi 
de  leur  slathouder,  et  leur  a  rendu  la  liberté 


REPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

Parit^  U  9  venlose,  —  Les  malveillants  qui  cher- 
ch(  nt  à  accroître  les  alarmes  du  peuple  sur  les  sub- 
sistancfs  répandent  Je  bruit  el  font  imprimer  dans 
tous  les  iournaiix  que  les  puissances  barbaresqucs 
ont  adopté  lr  syst(Miic  des  puissances  coalisées  con- 
tre la  répiil)li(|nc  française  ;  le  fait  est  faux:  la  bonne 
inlelligcncc  règne  plus  que  jamais  entre  la  France 
et  les  Etats  de  la  côte  d*iUri()ue.  ^oik  )>or|9  de  U  Mé- 

Z*  Série,  — TomeTL 


diterranée  en  reçoivent  tous  |c$  fours  des  navires 
chargés  de  grains,  et  il  n'y  a  pas  longtemps  que  le 
dey  d'Aller  a  écrit  au  comité  de  safiit  public  uqA'^ 
lettre  pleine  des  sentiments  les  plusafTectueu?,      ' 

Le  comité  de  sûreté  générale  vjept  de  faire  arrêter 
six  agioteurs,  évidemment  reconnus  pour  avoir  fait 
monter  en  peq  de  jours ,  à  un  prix  exorbitant,  !e$ 
marcharulises  et  les  objets  de  première  nécessiter 
C*est  à  ces  joueurs  â  la  hausse  que  sont  dus  lacherU 
des  subsistances  et  le  discrédit  des  assignats. 

Le  gouvernement,  sans  cesse  occupé  des  éléments 
dont  se  compose  la  félicité  publique,  va  prendre  des 
mesures  pour  prévenir  les  maux  qui  résulteraient 
nécessairement  de  la  cupidité  de  ces  marchands  d*Of 
et  d'argent, 

MÉLANGES. 
Je  lis  dans  le  journal  intitulé  Gowniêf^univenel^  dliler  f 
«  On  publie  que  la  citoyenne  Sombreuil,  fille  de  l*an« 
cien  gouvemear  des  Invalides^  qu*eli«  avait  arraché  fmf 
•on  courage  et  ici  Isrmas  des  mains  des  septembriseurs  ^ 
el  depui»  massacré  par  le  tribunal  révolutionoairt,  conima 
contplice  do Ladmiral  et  delà  filla  Renaud,  vient  d'époM» 
ser  le  comédien  Larivei  noua  ne  pouvona  le  croire.  Coa^ 
meiu,  en  fCTet,  imaginer  qu'nna  kmm^  puMse  se  résoudre 
à  changer  ainsi  un  nom  connu  de  toutes  les  dmes  sensi* 
btes,  et  qu*elte  a  illustré  elle-même  psr  un  Vsit  de  piété 
filiale  digne  de  la  fllle  d'GCdipe  \  • 

Je  répond»  que  je  jpense  comme  le  Journaliste  ;  il  nVft 
p«K  de  nom  plus  précieui  à  conserver  que  celui  qu*on  a  U- 
lustré  par  ses  vertus,  et  personnne  plus  que  moi  n'a  été  A 
mSne  de  juger  celles  dt  la  citoyenne  Sombreuil ,  dans 
riusiant  fatal  qui  lui  arraeha  la  plus  aimé  des  pt'res.  J*ai 
piHMr «Me  le  respect,  l'amitié  et  l'admiration  que  l'on  doit 
k  le  rettu,  et  n*ai  jamais  eu  diantre  prétention  :  je  n*ai 
pas  tti^faiie  celle  de  rfpousi^  la  mépria  que  le  jourualisia 
vent  Jeter  «ur  mon  nom.  Trop  heureui  celui  qui  n*a  q«i« 
ton  nom  k  délendre  )  If  iupuir  L^a^vp. 


CONVENTION   NATIONALE. 

Suite  du  rapport  fait^  au  nom  dû  la  commission 
chargée  de  Vêœanun  des  papierM  trouvés  chez 
Robespierre  et  sé$  eompUees ,  par  E.-B.  Cour^ 
lois,  député  du  département  de  l'Aube,  dans  la 
séanct  du  15  nivôse,  an  Z  de  la  république  fran^ 
çaise,  une  el  indivisible. 

Jetons  un  voile,  citoyens^  sur  ces  souvenirs  âé* 
chiranls,  et  poursuivons  d'un  pas  affermi  le  cours" 
pénible,  mais  honorable,  de  nos  travaux.  Dans  les 
sentiers  qui  s'ouvrent  encore  devant  nous,  partout 
vous  recoimaissrz  reropreintr  des  roues  du  char  de 
la  tvraniiie.  Les  villes  même  les  moins  ravagées  par 
le  fléau  ont  aussi  des  pertes  à  réparer.  Ici,  c^st 
l'ignorance  que  la  férocité  meneau  crime;  là,  c'est 
la  jeunesse  que  l'inexpérience  rend  féroce.  Bordeaux 
devient  la  proie  d'un  jeune  homme  de  dix-neuf  ans, 
cire  flexible  et  complaisante  dans  les  mains  de  Ro-> 
bespierre.  Ce  jeune  homme  le  consulte  sur  tout,  lui 
mande  tout;  fui  dénonce  les  représentants  du  peu- 
ple, lui  fait  passer  leurs  lettres:  lui  dénonce  jusqu'à 
des  femmes  dont  il  détaille  les  charmes,  dont  il  trace 
l'itinéraire;  écrit  tantôt  ■  (jue  l'esprit  qui  règne  à 
Bordeaux  est  bon,  que  le  riche  même  est  prodigue 
de  sacrifKM's  ;  ■  et  tantôt  peint  cette  ville  avec  des 
cou1c4^rs  opposées  :  Cip  j^out  «  des  autorités  à  purger, 

71 


662 


des  hommes  suspects  qui  nuisent  au  bien  qu*on 
pourrait  faire;  il  faut  révolutionner  Bordeaux;  •  et, 
pour  y  parvenir,  il  ne  demande  rien  moins  à  Robes- 
pierre, ton  bon  amt.que  les  pouvoirs  dont  la  nation 
investit  les  représentants.  Au  dire  du  jeune  Julien» 
il  faudrait  tout  rh^o/uftonner,  jusqu'aux  postes;  car 
il  veut  •  qu*on  force  les  maîtres  de  postes  à  ne  fournir 
de  chevaux  qu'aux  agents  de  la  république.  •  Ce  jeune 
homme  veut  tout  gouverner.  Ses  lettres  sont  pres- 
que toutes  autant  de  plans  dans  lesauels,  après  avoir 
usé  assez  largement  du  privilège  de  son  âge,  qui  le 
porte  à  ne  jamais  douter  de  rien,  il  laisse  échapper 
souvent  des  vues  saines,  quelquefois  des  sentiments 
humains  qui  Tont  regretter  de  voir  sa  jeunesse  livrée 
aux  dévora  leurs  de  l'humanité,  de  la  morale  et  des 
vertus.  Mais  à  côté  de  ces  lueurs  échappées,  par  in- 
tervalles, de  son  cœur  et  de  son  esprit,  que  d'om- 
bres! que  d'inconséquences!  que  de  vœux!  que  de 
hits  coupables! 

«  Sa  mission  est,  dit-il,  de  multiplier  les  clubs.  • 
Mais  il  ne  borne  pas  là  ses  opérations.  •  Il  voudrait 
•  ëlendre  ses  pouvoirs  sur  les  représentations  théâ- 
trales, sur  les  conspirateurs,  pour  les  arrêter;  les 
étendre  jusqu'à  instituer  des  comités  de  salut  public, 
jusqu'au  droit  de  se  faire  adresser  des  dénonciations, 
de  se  créer  des  agents,  et  d'avoir  des  finances  pour 
les  solder.  •  Il  propose  des  plans  pour  réunir  les  So- 
ciétés populaires  ensemble,  et  pour  les  «associer  à  la 
responsabilité  des  représentants  du  peuple,  afin  de 
dominer  par  elles  ;  et  faire  dominer  dans  ces  Socié- 
tés, comme  dans  les  autorités  constituées,  les  sans- 
cnlottes,  en  écartant  les  commerçants,  les  musca- 
dins, les  riches, dont  l'aristocratie,  dit-il,  esta  l'ordre 
du  jour,  après  celle  du  sacerdoce  et  de  la  noblesse.* 
Partout  enfin  il  s'attache  à  montrer  qu*il  est  temps 
que  les  tant-euloUet  dominent  (1). 

Il  se  dépite  sans  cesse  contre  lsabeau,dont  la  pré- 
sence parait  le  gêner;  il  n'aime  pas  que  les  Borde- 
lais témoignent  a  ce  représenUnt  plus  d'attachement 
qu'à  lui  :  il  n'aime  pas  plus  Tallien,dont  il  annonce 
i  Robespierre  la  prétendue  arresUtion.  Il  dit  que  le 
moment  est  venu  de  -  révolutionner  Bordeaux , 
mais  celui  qui  voudra  commencer  ce  travail,  après 
des  représentants  modérés,  ne  sera  certainement 
pas  aimé.  • 

Une  lettre  (entre  plusieurs)  décèle  dans  cette 
Jeune  iluie,  ou  des  mouvements  bien  désordonnés 
de  jalousie,  ou  de  véritables  germes  de  perversité. 

Isa  beau,  Tobjet  de  sa  haine,  est  toujours  l'objet  de 
ses  traits.  Pour  mieux  le  perdre,  il  le  peint  comme 
un  ennemi  du  comité  de  salut  public,  à  la  louange 
du(|uel  ce  jeune  oiseau ,  bien  siCCQé ,  ne  cesse  jde 
chanter  des  airs. 

Après  s'êlrc  plaint  de  ce  qu'Isabeau  reste  encore, 
il  traite  sa  présence  de  rébellion  aux  ordres  du  co- 
mité... •  Tout  lui  prouve  qu'Isabeau  cherche  même 
à  le  décrier.  • 

•  Le  président  de  la  commission  révolutionnaire, 
Lacombe,  dit-il,  m'a  rapporté  une,  se  promenant 
avec  isabeau,  après  l'exécution  d  Hébert  et  de  Dan- 
ton, Isabeau  lui  dit  qu'il  voyait  avec  peine  qu'on 
guillotiuilt  un  grand  nombre  de  Montagnards  ;  il 
ajouta,  dans  la  même  conversation,  en  parlant  de  la 
conduite  de  Tallicn  à  Bordeaux,  qu'elle  était  un  re- 
proche pour  Collot  d'Herbois,  qui  avait  fait  couler 
des  flots  de  sang  dans  Lyon.  Hier,  continue  Julien, 
on  cria  vivê  habeau!  Des  patriotes  indignes  tirent 
entendre  ce  cri  :  Vive  le  comiié  de  satul  public  !  • 

(I)  Pour  prouTer  que  leBians-cuiottes  doivent  dominer,  le 
Jeyoa  Julien  fait  ce  raisonnemenl.  qu'on  ne  peut  pardonner 
qil*fc  ton  i^t  :  «  H  e«t  temps  que  les  pauvres  et  les  ssns-cu- 
loUei  dominent ,  parce  qu*ils  sont  en  majorité  sur  la  terre , 
et  que  11  m  ijoril^  doit  dominer,  etc.  A,  M. 


Julien  invite  ensuite  son  ami  Robespierre  â  faire 
prendre  des  «  mesures  sévères  contre  Isabeau, 
comme  violateur  des  arrêtés  du  comité.  > 

Quelle  fureur  à  dix-neuf  ans  1 

Nous  devons  cependant,  citoyens,  porter  un  œil 
d'indulgence  sur  les  fautes  d'un  jeune  homme  qui, 
entoure  des  séductions  du.  pouvoir,  eût  pti  s'égarer 
davantage,  et  lui  savoir  gré  peut-être,  si  ce  n'esl 
pas  du  bien  qu'il  a  fait,  de  ce  qu'il  n'a  pas  au  moins 
fait  plus  de  mal  ;  il  faut  ajouter  ici  à  sa  louange  qu'il 
fut  un  des  plus  zélés  dénonciateurs  de  Carrier  ;  qu'il 
n'a  pas  tenu  à  lui  que  ce  monstre  ne  fût  rappelé; 
qu'il  l'eût  été  sur-le-champ,  si  vous  n  eussiez  pas 
eu  alors  des  gouvernants  dont  les  oreilles,  fermées  à 
la  voix  des  amis  de  la  patrie,  ne  s'ouvraient  jamais 

Su'àcelle  de  ses  assassms.  Vingt  endroits  des  lettres 
e  ce  jeune  homme,  qui  attestent  l'horreur  que  lui 
inspirait  le  bourreau  des  bords  de  la  Loire,  vous  at- 
testent aussi  que  son  cœur  ne  sera  point  mort  a  la 
vertu,  puisqu  au  milieu  des  égarements  de  sa  tête  il 
ne  se  ferma  point  à  l'humanité.  Que  ce  peu  de  mots 
que  vous  allez  entendre,  et  qui  est  reproduit  plusde 
vingt  fois  dans  ses  lettres,  vous  réconcilie  avec  lui  : 

•  Il  faut  sauver  Nantes  et  la  France H  faut 

étouffer  la  Vendée  qui  renatt;  il  faut  rappeler  Car- 
rier qui  tue  la  liberté...  Qu'on  n'attende  pas  un  jour 
pour  rappeler  Carrierl  • 

Ah!  qu'elle  rentre  à  votre  voix  au  beréail,  cette 
brebis  que  des  cruels  ont  égarée  !  La  foudre  n'est 
que  trop  souvent  sortie  de  cette  enceinte  !  Le  dieu 
qui  par  le  tonnerre  fit  annoncer  sa  puissance  fera 
publier  sa  grandeur  par  le  pardon. 

Mais,  tandis  que  je  m'efforce  d'étouffer  le  feu  de  la 
foudre  dans  vos  mains,  quelles  voix  plaintives  et  la- 
mentables, sorties  des  voûtes  caverneuses  qui  bor- 
dent les  rives  du  Bbône,  vous  crient  encore  de  la 
rallumer!  Quels  sombres  gémissements,  quels  cris 
de  mort  douloureusement  prolongés  jusqu'à  nous 
par  les  échos,  s'élèvent  du  sein  de  ces  rochers  célè- 
bres qui  couronnent  la  source  paisible  et  proronde 
de  la  fontaine  de  Vaucluse;  de  ces  rochers  qui  ne 
répétaient,  depuis  Pétrarque,  que  les  soupirs  de  la 
tendresse,  (^ue  le^  serments  de  1  amour! 

Qui  a  changé  tout  à  coup  en  flots  de  sang  les  eaux 
argentées  de  cette  fontaine  !  Qui  a  rougi  la  verdure 
de  ces  vallons  !  Dans  ces  climats  fortunés,  la  nature, 
autrefois  si  riante,  s'est  couverte  du  crêpe  funèbre 
de  l'épouse  après  la  perte  du  bien-aimé.  La  terre 
aride  et  privée  de  vie  n'enfante  plus  que  des  tom- 
beaux; les  oliviers  ne  sont  plus  que  des  cyprès; 
les  glaces  du  Vontoux,  ces  glaces  éternelles,  se  fon- 
dent à  la  chaleur  des  flammes  qui  ont  dévoré  Bé- 
douin, l'une  des  villes  que  ce  mont  protégeait  ;  le  so- 
leil, si  brillant  dans  ces  contrées,  noyé  dans  les 
vapeurs  du  sang  de  l'innocent  égorgé,  n  offre  plus  k 
l'œil  effrayé  qu'un  cercle  obscur  et  rougeâtre  sur 
l'azur  noirci  des  cieux. 

Le  caractère  des  habitants  y  semble  même  déna- 
turé :  la  tête  courbée  sous  le  sceptre  de  la  terreur, 
les  généreux  descendants  des  Phocéens  ont  souffert 
des  chaînes  !  La  tristesse  règne  où  brillait  la  joie,  et 
les  héritiers  des  troubadours  n'osent  pas  même  en- 
tonner, sur  leurs  flûtes,  des  chants  de  deuil. 

Eh  !  quel  génie  malfaisant  a  donc  déployé  ses  ailes 
et  répandu  ses  funestes  influences  sur  ce  pays!  Quel 
démon  y  a  vomi  le  crime  !  quel  monstre  y  a  prome- 
né la  dévastation  et  la  mort! 

Riaignet,  ton  nom  est  prononcé.  Tout  s*organise, 
tout  prend  une  forme,  une  voix  pour  t'aocuser:  la 
terre  semble  revomir  les  cadavres  ;  les  morts  se  re- 
dressent devant  toi,  ils  te  nomment  dans  leursilence. 
La  solitude  même  des  fosses  creusées  pour  rece- 
voir d'autres  victimes  ;  la  chaux  dont  tu  les  dévorais 


56S 


en  espoir,  déjà  toute  préparée  par  ta  prévoyance 
barbare  ;  les  missions  par  toi  données  à  tes  vils  agents 
auprès  des  bourreaux  de  la  république  ;  tes  propres 
écrits,  ceux  de  tes  agents,  confirmatils  des  tiens,  ce 

Sue  tu  mandais  d'Avignon  le  4  floréal  à  Tinfâme 
outhon,  en  lui  envoyant  Lavigne,  ton  secrétaire  : 

•  que  8*il  (allait  exécuter  dans  ces  contrées  le  décret 
qui  ordonnait  la  translation  à  Paris  de  tous  les  con- 
spirateurs, il  faudrait  une  armée  pour  les  conduire, 
(les  vivres  sur  la  route ,  en  Torme  d'étapes  ;  •  ton 
aveu  fait  à  Couthon ,  que  tu  portais  à  douze  ou  Quinze 
mille  le  nombre  des  incarcérés  dans  les  deux  aépar- 
tements;  ton  intention  bien  prise  d'épouvanter, 

•  parce  que  le  coup,  disais-tu,  n*est  effrayant  qu'au- 
tant qu'il  est  porté  sous  les  yeux  de  ceux  qui  ont 
vécu  avec  les  coupables  ;  •  ton  aveu  que  ce  n*<^t 
point  sur  des  objets  inutiles  que  portent  tes  coups, 
mais  bien  sur  les  persomxes  et  leurs  biens  ;  tes  pro- 
messes feites  de  rendre  bon  compte  de  ce  départe- 
ment, en  reconnaissance  de  ce  qu  on  avait  fait  tout 
ce  que  tu  avais  demandé  ;  ton  intelligence  avec  le 
traître  Payan,  pour  la  création  de  ton  tribunal  d'O- 
range ;  la  demande  que  tu  lui  fais  de  douze  sujets 
capables  de  former  ce  tribunal  ;  ta  soumission  aux 
avis  de  ce  conspirateur;  ton  choix  (approuvé  à  la 
vérité  par  un  comité  complice  de  tes  fureurs)  de  tout 
ce  qu'il  existe  d'infâmes  et  de  coquins,  pour  compo- 
ser ce  tribunal  de  sang,  où  toi  et  ton  comité  osez 
attenter  à  l'institution  sainte  des  jurés,  cette  sauve- 
garde de  la  vie  des  citoyens,  garantie  par  la  consfi-^ 
tution,  par  la  révolution  même,  et  que  le  destructeur 
de  la  liberté  anglaise  n^osa  jamais  attaquer  :  que  de 
témoins  qui  te  condamnent! 

Oui,  tes  crimes  sont,  Maignet,  dans  le  plan  de 
création  de  ce  tribunal  ;  plan  tracé  par  Payan,  sanc- 
tionné par  le  comité  de  salut  pnblic,  et  trop  fidèle- 
ment suivi  par  toi  ;  plan  qui  a  servi  de  patron  â  la 
loi  du  22  prairial,  rejetée  sur  Robespierre  depuis  sa 
mort,  mais  dont  les  décemvirs  osèrent  bien  réelle- 
ment, sans  l'initiative  d'un  décret  de  la  Convention, 
et  au  mépris  de  celui  qui  ordonnait  la  translation 
des  prévenus  au  tribunal  de  Paris,  faire  eux-mêmes 
à  Orange  le  fatal  essai,  trois  semaines  avant  cette 
même  époque  du  22  prairial;  plan  dont  voici  les  ba- 
ses atroces  : 

•  Créer  un  tribunal  révolutionnaire  qui  siège  â 
Orange,  à  l'effet  déjuger  les  prévenus  de  rébellion 
contre-révolutionnaire  des  départements  de  Vau- 
cluse  et  des  Bouches-du-Rhône  ; 

«  Composer  le  tribunal  de  six  juges  qui  pourront 
juger  au  nombre  de ; 

•  L'autoriser  à  se  diviser  en  deux  sections,  en  cas 
de  surcharge  de  travail  ; 

m  Ce  tribunal  jugera  révolutionnairement,  sans 
instrnction  écrite  et  sans  assistance  de  jurés. 

•  Les  témoins  entendus,  les  interrogations  faites, 
les  pièces  à  charge  lues,  l'accusateur  public  oui,  le 
jugement  sera  prononcé.  • 

Les  juges  nommés  par  le  comité  de  salut  public 
sont  Fauvetti,  Meilleret,  Roman-Fonrosa,  Fernex, 
'  Ragot,  tous  créatures  ou  de  Payan  ou  de  Couthon. 

Quelques  extraits  de  leur  correspondance  vont 
établir  leur  moralité. 

Tes  crimes,  Maignet,  sont  encore  daps  les  lettres 
de  ces  agents  de  la  tyrannie,  devenus  aussi  tes  com 
plices  ;  ils  sont  dans  celles  de  ce  Viot,  correspondant 
de  Fouquier,  et  (|ui  n*écrit  jamais  que  pour  célébrer 
le  zèle  et  l'activité  de  la  commission  infâme  qui,  le 
jour  même  de  la  chute  du  tyran,  annonçait  le  ju- 
gement, c*est-à-dire  le  supplice  de  soixante  nou- 
velles victimes,  qui  devaient  être  suivies  d'un  pareil 
nombre  quelques  jours  après,  et  qui  appelait  cela 
employer  bien  ses  moments. 


I  Ils  sont  dans  celles  d*un  autre  coquin  de  Valréas, 
qui  ne  reconnaît  plus  qu'une  $ainte,  la  guillotine, 
•  qui,  dit-il,  va  grand  train  tous  les  jours.  • 

Ils  sont  dans  celles  d'Agricole  Moreau,  qui  ap- 
pelle épuration  ce  qui  n'était  réellement  que  le  sup- 
plice de  douze  on  quinze  mille  individus. 

Ce  fripon,  dans  une  lettre  à  Payan,  l'engage  à  ti- 
rer avec  adresse  du  comité  de  surveillance  du  dé- 
partement de  Paris,  de  Loys,  une  lettre  dont  il  a  be- 
soin à  Orange,  et  il  appelle  encore  cela  se  procurer 
une  lettre.  {La  $uUê  demain.) 


sÉANCB  DU  8  VBirrosi. 
Présidenee  de  Bourdon  (de  VOiêê). 

Jars-Panvilliers,  au  nom  du  comité  des  secours 
publics  :  Citoyens,  nous  touchons,  je  l'espère,  au 
moment  si  désiré  par  tous  les  amis  de  la  république 
et  de  l'humanité,  où  l'affreuse  guerre  de  la  Vendée 
va  finir;  mais  nous  aurons  encore  longtemps  à  gé- 
mir sur  les  maux  que  la  superstition,  le  rovalisme  et 
l'horrible  système  de  destruction  ont  caus&  dans  ces 
malheureuses  contrées.  Ce  sont  surtout  les  patriotes 
sincèrement  dévoués  à  la  cause  de  la  liberté  qui  ont 
le  plus  soufivrt  de  ces  divers  fléaux.  Tel  a  été  leur 
sort  dans  ce  pays,  fameux  par  tant  d'horreurs,  qu'ils 
se  sont  presque  toujours  trouvés  entre  les  armes 
parricides  des  rebelles  et  le  fer  assassin  d'un  trop 
grand  nombre  d'hommes  avides  de  sang  et  de  rapi- 
nes, que  les  gouvernants  d'alors  avaient  associés 
aux  braves  défenseurs  de  la  patrie  pour  les  déshono- 
rer, s'il  eût  été  possible,  pour  faire  haïr  la  répu- 
blique, et  réduire,  par  leurs  excès,  au  désespoir  et  à 
la  révolte  une  foule  de  citoyens  paisibles  qui  étaient 
restés  fidèles  à  la  cause  de  la  liberté. 

Hélas  !  ils  n'y  ont  que  trop  réussi  1  Tout  le  monde 
sait  que  la  plupart  des  hommes  qui  portaient  en  der- 
nier lieu  les  armes  contre  la  république  dans  la 
Vendée  y  avaient  été  forcés  pour  échapper  eux- 
mêmes  au  fer  assassin  sous  lequel  ils  avaient  vu 
tomber  leurs  pères,  leurs  femmes  et  leurs  enfants  à 
la  mamelle. 

Trop  souvent  cette  enceinte  a  retenti  du  récit  de 
ces  horreurs;  je  suis  forcé  de  vous  présenter  encore 
un  de  ces  traits  affligeants  pour  l'humanité. 

Le  22  prairial  dernier,  c'était  un  jour  marqué  pour 
de  grands  crimes,  les  habitants  patriotes  de  la  com- 
mune de  Oezay  furentrequis  par  l'administration  du 
district,  sur  la  demande  du  commandant  de  la  force 
arméede  la  Châtaigneraie,  pour  abattre  les  arbres  et 
les  baies  q^ui  environnaient  cette  place.  Ils  s'y  rendi- 
rent de  suite,  sous  la  conduite  du  citoyen  Pecquin, 
officier  municipal  de  leur  commune. 

Ils  avaient  rempli  leurs  travaux,  et  l'officier  mu- 
nicipal qui  les  avait  dirigés  se  rendait  tranquillement 
au  sein  de  sa  nombreuse  famille,  lorsqu'il  fut  arrêté 
par  des  hommes  revêtus  d'un  uniforme  qu'ils  étaient 
indignes  de  porter,  et  conduit,  sans  au'on  voulût  lui 
en  dire  le  motif,  devant  le  commandant  de  la  force 
armée. 

Lk  on  prétend  qu'il  est  un  espion  des  brigands. 
•  Non,  dit-il,  je  suis  patriote,  et  de  plus  fonction- 
naire public  ;  voilà  mon  écharpe,  mon  passeport,  le 
procès-verbal  de  réquisition  qui  a  été  fait  à  ma  com- 
mune par  l'administration  du  district.  Que  l'on  me 
conduise  devant  les  autorités  constituées,  elles  me 
connaissent;  elles  vous  diront  que  j'ai  travaillé  tout 
le  jour,  avec  mes  concitoyens,!  préparer  les  moyens 
de  défense  de  cette  place... 

—  Nous  ne  connaissons  point  d'autorités  consti- 
tuées, lui  répond-on;  tu  es  un  brigand,  tu  périras!  * 

L'arrêt  fatal  est  prononcé,  et  l'infortuné  tombe 


564 


mavâcrë  de  trente  coups  de  «^bre;  et  comme  si  1rs 
canuibales  qui  l'avaient  immole  eussent  craint  qu*on 
ignorât  qu'ils  avaient  assassiné  sciemment  un  ma- 
gialratdu  peuple,  ils  montraient  à  tout  le  monde  les 
pièces  qui  justifiaient  de  sa  qualité  et  de  son  patrio- 
tisme. 

Que  d'autres  vous  demandent  la  punition  des  au- 
teurs de  cet  horrible  attentat  !  ce  n*est  point  la  tâche 
3ue  j'ai  à  remplir  en  ce  moment  ;  c'est  en  faveur 
'une  mère  infortunéct  à^ée  de  qnatre^vingts  ans, 
qui*  ce  citoyen  estimable  iaisait  vivre,  de  sept  enfants 
m  bas  âge,  qu'il  alimentait  du  produit  de  son  tra- 
vail, que  j'invoque  votre  justice  et  votre  humanité. 

Je  ne  vous  pbrie  pas  de  sa  femme,  elle  est  morte 
de  douleur  en  apprenant  le  massacre  de  son  mal- 
heureux époux.  Ainsi  les  criminels  ont  frappé  d'un 
même  coup  deux  victimes  à  la  fois,  et  livre  à  Ta- 
bandon  le  plus  funeste  sept  enfants,  dont  l'aîné  n'a 
pas  treize  aus^  et  dont  l'un  est  encore  à  la  ma^ 
œelle. 

Qu'ai^je  besoin  de  vous  en  dire  davantage  pour 
exciter  votre  compassion  pour  ces  êtres  infortunés? 
ils  vous  demandent  du  poin,  tous  ne  le  leur  refuse* 
m  pas. 

Voioi  le  projet  de  décret  que  je  suis  chargé  de  vous 
présenter: 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  son  connlté  des  secours  publics,  décrète  que  la  trë- 
iorerie  nationale  meUra  ft  la  disposition  du  receveur  du  Mis* 
tricldelu  Chateiguerafe  la  somme  de  3,â00  livres,  pour 
être  domiée,  à  litre  de  secours,  a  la  bellcinère  et  aux  en- 
fanls  du  ciloyt>n  Pecquin,  officier  municipal  de  la  com> 
mune  de  Cciay,  inêmt  cUatricl«  matMcré  dan»  Texerdoe 
de  ses  fonctions,  t 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  Debourges,  au  nom  du  comité  des  secours  pa- 
blicst  propose  le  projet  de  décret  suivant  : 

«  La  Convention  nationale,  aprèsaroir entendu  lerap*i 
port  de  son  comité  des  secours  publicM  «ur  Tarrôlé  pris,  le 
44  vend(!rmiaire  dernier,  par  ie  repréi»ei)Unt  du  peuple 
Musset,  envoyé  duns  le  départ  mrnt  du  Puy-du-Dôme,  el 
qui  porte  que  la  pension  de  tiOO  liv.  accordée  à  Marie  Du- 
ché, par  décret  du  27  frlnluire  de  Tan  2,  sera  coolinuéo 
d*Olre  payée  à  son  mari  pendant  sa  vie,  au  cas  où  ladite 
Duché  vienne  à  décéder  la  première  ; 

i  Décmt  qu'il  ne  sera  point  donné  d'exécution  5  Tar- 
rété  du  14  vendémiaire  dernier,  el  renvoie  à  son  comité 
des  seoours  publies  pour  examiner  il  Jean  Bonny ,  époux 
de  Marie  Duolié,  a  droit  à  un  secours  ou  a  une  pension. 

«  Le  présent  décret  ne  sera  imprimé  qu'au  BuUeUn  de 
GorretpondaDCC.  t 

Musset  :  La  citoyenne  Ducbé,  d'Aigneperse,  dis- 
trict de  Byères,  département  du  Puy-de-Dôme,  ne 
s'est  pas  bornée  à  élever  un  ffrand  nombre  d>nfanls 
qu'elle  a  eus  de  son  mari;  elle  a  nourri  soixante  et 
quelques  enfants  auxquels  elle  a  donné  les  mêmes 
soins  ({u'aux  siens.  Dix-huit  on  vingt  de  ces  jeunes 
républicainscombattentactuellement  aux  frontières. 
Le  vertueux  époux  de  cette  respectable  citoyenne, 
8gé  de  soixante-dix  ans,  a  contribué  par  son  travail 
i  fournir  la  nourriture  et  l'entretien  à  Cette  nom- 
breuse famille;  il  estinfirme  etila  de  grands  besoins; 
pressé  par  lès  sollicitations  de  ses  concitoyens,  plus 
pressé  encore  par  le  tableau  touchant  de  ses  vertus, 
J'ai  pris  un  arrêté  pour  lui  assurer  un  secours  ou 
une  pension  de  000  liv. 

Votre  comité  dos  secours  publics  pense  que  les 
repr^entants  du  peuple  en  mission  n'ont  pas  le 
droit  d'accorder  des  pensions,  el  il  demande  qne 
rexamen  de  la  demande  de  ce  citoyen  lui  soit  ren- 
voyé, pour  voir  s'il  y  a  lieu  oa  non  à  lui  accorder 
une  pension.  Convaincu  des  principes  d'humanité 
qui  ont  toujours  dirigé  votre  comité ,  j'appuie  ce 
renvoi. 


La  Convention  adopte  le  projet  de  décret,  et  or- 
donne le  renvoi. 

GiRAtJD,  au  nom  du  comité  de  commerce:  Ci- 
toyens, la  loi  du  24  nivôse,  rendue  en  faveur  des 
propriétaires  qui  avaient  été  forcés  de  vendre  leurs 
denrées  à  un  prix  que  l'abrogation  du  maximum 
rendait  pour  eux  onéreux,  a  tAché  de  prévenir  les 
diUlcultes  qui  pourraient  s'élever  entre  les  vendeurs 
et  les  acheteurs.  Elle  a  en  conséquence  posé  des 
bornes  pour  marquer  le  cas  où  les  marchés  r,eraient 
regardés  comme  terminés  entièrement,  et  celui  on 
ils  ne  seraient  regardés  seulement  que  comme  ar- 
rhement. 

L'intention  du  législateur  n*a  pas  été  remplie.  Le<; 
usages  locaux  ont  fait  naître  des  difGcuUés  sur  l'ap- 
plication de  l'article  II. 

La  loi  du  24  nivôse,  en  maintenant  les  marchés 
faits  avant  l'abrogation  du  maximum,  par  cet  art.  11 
élevait  le  prix  des  denrées  et  marchandises  non  li- 
vrées ni  mises  en  ronte  à  celui  que  la  liberté  du 
commerce  lui  donnerait. 

C'est  sur  raccepllon  du  mot  (ter^  que  les  contes- 
tations se  sont  multipliées  entre  les  vendeurs  et  les 
acheteurs,  surtout  dans  les  pays  vignobles. 

Voici  ce  qui  y  donne  lieu.  Dans  plusieurs  pays  vi- 
gnobles les  vinsse  vendent  ordinairement  avant  et 
aussitôt  les  vendonges,  et  sons  reçus  du  l«r  au  11 
novembre  (vieux  style);  après  celte  réception  les 
vins  restent  aux  ristiues  et  périls  de  l'acheteur  dans 
les  celliers  du  venaeur,  qui  est  censé  les  prêter  à 
l'acheteur:  ceux-ci  se  regardent  comme  ayant  les 
vins  dans  leurs  ooves,  et  la  livraison  leur  paraît 
aussi  entière  que  s'ils  les  y  avalent  fait  réellement 
transporter. 

Les  vendeurs  du  Blaisois  surtout,  d'après  l'usage 
local,  disent  que  la  loi  du  2i  nivôse,  si  elle  est  en- 
tendue dans  ce  sens,  est  pour  eux  sans  effet  ;  que  la 
bienfaisante  justice  de  la  Convention,  qui  a  voulu 
venir  au  secours  des  propriétaires  si  fortement  gre- 
vés par  In  loi  du  maximum,  se  trouvera  5nus  objet  ; 
que  les  acheteurs  seuls  profiteront  de  celte  loi,  pour 
me  servir  de  leurs  expressions. 

Voici  la  question  telle  qu'elle  se  présente.  Les 
vins  qui,  après  avoir  été  remplis,  marqués  et  payés, 
sont  restés  dans  le  cellier  du  vendeur,  mais  aux  ris- 
ques et  périls  de  l'acquéreur,  sont-ils  censés  livres, 
par  conséquent  hors  la  disposition  de  la  loi  du  24 
nivose?  Votre  cotni té,  inviolablement  attaché  à  la 
rigueur  des  principes,  pense  que  la  livraison  est 
parfaite. 

Cependant  si  ces  vins  n'ont  pas  été  entièrement 
payés,  l'opinion  du  comité  est  différente,  parce  que, 
mu  par  l'esprit  de  la  loi,  il  croit  remplir  son  vœtr 
en  traitant,  dans  cette  hypothèse,  favorablement  le 
vendeur. 

11  s'est  élevé  aussi  une  autre  difficulté  que  vous 
devex  résoudre.  Plusieurs  marches  ont  été  faits  au- 
dessus  et  au-dessous  du  maximum.  Les  vendeurs  se 
prétendent  dans  le  cas  prévu  par  la  loi  du  24  nivôse. 

Votre  comité  n'a  pas  cru  que  ces  réclamnlions 
fussent  fondées.  Car  qu'est-ce  qui  vous  a  déterminés 
â  rendre  la  loi  du  24  nivôse?  c'est  que  vous  n'avez 
pas  vu,  dans  les  ventes  qui  se  sont  faites  de  bonne 
ibi  sous  l'empire  du  maximum,  la  liberté  qui  fait 
l'essence  des  marchés,  le  débat  de  prix  ;  au  lieu  que 
ceux  qui  ont  vendu  au-dessus  et  au-dessous  du 
maximum  ont  usé  de  toute  la  latitude  que  cette  loi 
dtait. 

D'après  ces  principes  et  ces  motifs,  le  comité  de 
commerce  m'a  chargé  de  vous  présenter  le  projet  de 
décret  suivant: 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  de  tommerce ,  décrète , 


605 


comme  article  additionnel  à  la  loi  du  U  nivôse,  qui 
maintient  les  marchés  faits  pour  des  denrées  et  mar- 
chandises avant  l*abrogation  de  la  loi  du  maximum  : 

•  Art.  W,  Les  denrées  ou  marchandises  qui,  après 
avoir  été  vendues  »  jaugées,  pesées,  mesurées  et 
payées  en  totalité  avant  l'abrogation  de  la  loi  du 
maximum,  sont  restées  dans  les  magasins  ou  celliers 
des  vendeurs,  aux  risques  et  périls  des  acquéreurs, 
sont  censées  et  reg:ardées  comme  livrées. 

«  II.  Les  marchés  faits  à  un  prit  différent  du 
moximum  sont  maintenus,  sans  que  les  vendeurs 
puissent  réclamer  l'augmentation  de  prix,  permise 
par  Tnrt.  Il  de  la  loi  du  24  nivôse.» 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

Suite  d$  la  discuaion  #«r  les  financée. 

Cambon  :  Votre  comité  des  finances  s*est  occupé 
hier  de  la  proposition  qu'il  vous  avait  faite  de  rece^ 
voir  en  payement  des  oiens  nationaux  les  inscrip- 
tions de  la  dette  consolidée,  d'après  les  bases  qui 
vous  ont  été  soumises.  11  a  pesé  toutes  les  objections 
présentées  contre  cette  proposition.  Après  une  loo- 
gue  discussion  le  comité  a  persisté  UDanimemeot 
J.ins  son  premier  Avis. 

Les  objections  portaient  principalement  sur  c% 
point  :  c'est  que  le  but  de  la  Convention  était  de  di- 
minuer la  masse  des  assignats;  recevoir  en  payement 
les  inscriptions  au  granalivre,  c*est  au  contraire  in- 
directement en  créer  de  nouveaux.  Je  réponds  que 
la  Convention  impose  deux  conditions;  la  première, 
de  solder  sur-le-chnmp  le  prix  des  acquisitions,  tan* 
dis  que  par  les  décrets  on  a  douze  ans  pour  le  faire; 
In  seconde,  d'en  solder  les  trois  quarts  en  assignats. 
Par  ce  moyen,  en  créant  indirectement  de  nouveaux 
assignats,  on  n'en  obtiendra  pas  moins  le  résultat 
({u'on  désire,  celui  d'en  retirer  promptement  uiM 
certaine  cmantilé.  On  fera  encore  un  autre  bien,  ce* 
lui  de  libérer  Id  nation  d'une  partie  de  sa  dette,  puis- 
(]ue  cette  opération  sera  une  sorte  de  caisse  d'amor*' 
lissement;  et  moins  la  nation  devra,  à  la  paix,^lus 
il  lui  sera  facile  à  cette  époque  d'établir  une  juste 
balance  entre  les  recettes  et  les  dépenses.  Enfin 
cette  opération  est  un  moyen  de  subvenir  aux  be- 
soins des  créanciers  de  l'Etat  qui  voudraient  acheter 


des  domaines  nationaux,  puisque,  sans  la  faculté 
cju'on  leur  accorde  par  le  décret,  ils  seraient  obligés 
de  vendre  leurs  inscriptions  a  perte  :  or  Tintérét  de 


la  nation  est  de  faire,  de  ses  créanciers,  le  plus  qu'elle 
pourra,  des  agriculteurs  et  des  propriétaires. 

YiLLERs  :  Je  demande  la  question  préalable  sur  le 
projet  du  comité.  Les  finances  d'un  Etat  en  révolu- 
tion suivent  les  crises  qui  l'agitent.  Il  n'est  point  de 
mouvement,  m^me  dans  la  Convention,  dont  les  fi- 
nances ne  se  ressentent.  Je  n'accuse  personne,  mais 
il  est  certain  que  quelques  propositions  énoncées,  11 
y  a  quelques  jours,  à  cette  tribune,  ont  contribué  à 
faire  augmenter  le  prix  des  denrées.  Nous  ne  som- 
mes plus  dans  le  temns  où  quelques  hommes  trom- 
paient le  peuple.  Vous  voule2  organiser  votre 
gouvernement,  le  régulariser;  vous  en  montrer 
l'intention  sincère  en  vous  occupant  des  finances  : 
vous  voules  faire  rentrer  une  partie  des  assignats; 
je  ne  crois  pas  que  le  projet  qui  vous  est  présenté 
puisse  remplir  vos  vues.  Que  vous  projpose-t-on? 
D'admettre  les  titres  de  la  dette  consolida  en  paye- 
ment des  domaines  nationaux.  Mais  n'est-ce  pas  au 
contraire  empêcher  d'autant  le  retirement  des  assi- 
gnats? N'est-ce  pas  une  vacillation  dans  les  finances? 
Cambon  vous  a  dit  hier  une  chose  qui  m'a  singuliè- 
rement frappé  :  c'est  que  dans  un  grand  Etat  il 
n'est  pas  possible  de  mettre  de  Tordre  dans  les 
finances,  comme  dans  une  petite  république  où  il 


suffit  d'une  seule  survcilîanee.  Cette  assertion  serait 
capable  de  nous  désespérer,  si  nous  ne  savions  le 
contraire.  Pour  moi,  je  crois  q^i'il  est  aussi  facile  de 
faire  les  recettes  conformes  aux  dépenses  dans  un 


grand  Etat  que  dans  un  petit.  (On  applaudit.) 
Cambo?!  :  Je  vais  lire  le  paraf^raphe  que  mo 
lègue  a  mal  interprété.  Le  voici  : 


\  parafera pbe  que  mon  col- 


Dans  une  petite  république,  une  administratioD 

S  révoyante  doit  mettre  en  reserve,  pendant  la  paix, 
es  fonds  pour  faire  la  guerre,  ou  pour  de  grands 
événements  imprévus;  mais  dans  une  grande  so- 
ciété, lorsque  la  guerre  arrive,  on  ne  peut  pourvoir 
aux  dépenses  extraordinaires  que  par  des  emprunts; 
mais  alors  les  recettes  ordinaires  doivent  être  aug- 
mentées de  la  somme  qui  est  nécessaire  pour  rem- 
boursement pro^re.ssif  du  capital  emprunté,  et  pour 
en  acquitter  les  intérêts.  » 

En  effet,  s'il  existait  un  fonds  de  réserve,  et  qu'il 
s'élevât  un  nouveau  Robespierre,  plus  courageuse, 
alors  ayant  des  millions  sous  la  main,  il  pourrait  as- 
servir la  république.  (On  applaudit.)  On  a  voulu 
faire  des  reproches  indirects  sur  les  50  millions  mis 
à  la  disposition  de  l'ancien  comité  de  salut  public. 
Il  faut  que  tout  soit  connu  ;  13  millions  lui  ont  été 
comptés  sur  cette  somme;  pour  vous  en  assurer, 
décrétez  que  la  trésorerie  nationale  fera  imprimer 
toutes  les  ordonnances. 

Meblin  :  Cela  ne  vaut  rien;  le  temps  ifest  paa 
venu  de  faire  connaître  aux  cours  de  Londres  et  de 
Vienne  les  dépenses  du  comité.  Je  ne  m'expliquerai 
pas  davantage.  Je  demande  i'a\journement  de  celto 
proposition. 

Cambon  :  Il  n'y  a  point  d'inconvénient  à  publier 
ce  compte;  on  n'y  trouvera  rien  qui  ne  soit  motivé 
et  qui  ne  puisse  titre  connu. 

Thibault  :  On  y  verrait  pourtant  bien  quelques 
dépenses  secrètes  pour  la  prétendue  révolution  du 
81  mai.  (On  applaudit.  •—  Quelques  membres  de 
l'extrémité  murmurent.) 

L'ajournement  demandé  par  Merlin  (de  Tbion- 
fille)  est  décrétée. 

La  discussion  se  rétablit  sur  le  projet  du  comité. 

Lo2EAtJ  :  Il  me  semble  que  pour  obtenir  une  ren* 
trée  considérable  d*assienats,  il  suffit  d'accorder  des 
primes  aux  acquéreurs  de  domaines  nationaux,  pour 
les  engager  à  se  libérer. 

Brwbbll  :  J'appuie  cette  proposition.  Les  domai* 
nés  nationaux  n'ont  pas  été  affectés  au  rembourse^ 
ment  des  inscriptions;  il  ne  dépend  pas  de  vous 
d'altérer  ce  gaffe.  Les  ffens  qui,  sur  la  place,  ont 
acheté  les  inscriptions  a  bon  marché,  désirent  qu'on 
les  admette;  voilà  le  fin  mot.  (On  applaudit.) 

DoissY  d'Anqlab  :  La  question  qui  vous  occupe 
n'est  pas  nouvelle  :  au  mois  d'août  de  l'année  der- 
nière, vous  avez  décidé  l'affirmative,  et  vous  avex 
'  fait  une  chose  juste  et  politique,  en  décrétant  que 
les  inscriptions  sur  le  grand  livre  seraient  reçues  on 
payement  de  domaines  nationaux.  Si  la  Convention 
veut  donner  du  crédit  à  la  dette  publique  en  même 
'  temps  qud  lavoriser  les  créanciers  de  l'Etat,  elle  doit 
ne  pas  revenir  sur  cette  mesure.  Je  vote  donc  pour 
l'adoption  du  projet  de  décret. 

GÉNissiEUx  :  Il  me  semble  qu*il  faudrait  avant 
tout  s'occuper  des  moyens  qui  peuvent  faire  rentrer 
les  assignats^  et  remettre  à  un  autre  temps  la  ques- 
'  tion  de  savoir  si  Ton  admettra  les  inscriptions  sur 
le  grand  livre  en  payement  de  dotnaines  nationaux. 
Je  crois  que  ta  suspension  que  Je  propose  ne  peut 
donner  de  discrédit  aux  inscriptions,  puisque  les  do- 
maines nationaux  sont  hypothéqués  à  leur  rembour* 
sèment. 

Balland  :  Je  pense  que  lé  projet  de  décret  pré- 
senté par  le  comité  peut  être  adopté  sans  Inconvé* 


&66 


nient,  si  l'on  veut  se  borner  à  admettre  en  payrcmcnt 
de  domaines  nationaux  seulement  les  inscriptions 
de  la  dette  exigible. 

REAL  :  11  est  impossible  d*admcttre  la  distinction 
proposée  par  le  preopinant,  car  il  est  impossible  de 
distinguer  les  inscriptions  dans  le  grand  livre.  D*ail- 
leurs  la  république  ne  doit-elle  pas,  à  tous  ceux  qui 
Toudront  échanger  leurs  inscriptions  en  domaines 
nationaux,  la  facilité  de  faire  cet  échange?  Or,  c*est 
cette  facilité  que  leur  donne  le  projet  de  décret,  qui 
concourt  en  même  temps  à  la  rentrée  des  assignats, 
puisqu*ils  seront  obligés  d'en  donner  trois  fois  au> 
tant  que  la  valeur  des  inscriptions. 

Vernier  :  En  appuyant  aussi  le  projet  de  décret, 
je  demande  que  les  inscriptions  ne  soienjt  admises 
qu*en  payement  des  domaines  à  vendre. 

La  Convention  adopte  le  projet  de  décret  en  ces 
termes  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  finances,  décrète  : 

•  Art.  I«r.  Les  inscriptions  sur  le  grand  livre  de 
la  dette  consolidée  seront  admises  jusqu'au  1^'  ven- 
démiaire, an  4«,  en  payement  des  domaines  na- 
tionaux vendus  ou  a  vendre,  aux  conditions  por- 
tées aux  articles  suivants  : 

•  II.  Elles  seront  calculées  par  vingt  fois  leur  mon- 
tant annuel,  lorsqu'on  fournira  en  même  temps  trois 
fois  la  même  valeur  en  assignats,  et  par  seize  fois 
leur  montant  annuel  lorsqu  on  fournira  en  même 
temps  pareille  somme  en  assignats  :  en  Fun  et  l'au- 
tre cas  les  acquéreurs  seront  tenus  de  solder  Tobjct 
sur  lequel  ils  entreront  en  payement. 

•III.  Ceux  oui  voudront  remettre  des  inscriptions 
en  payement  ae  domaines  nationaux  seront  tenus  de 
prouver,  par  un  certificat  du  receveur  de  district* 
quelle  est  la  somme  dont  ils  veulent  solder  le  paye- 
ment. 

«IV.  Les  promesses  de  fournir  les  inscriptions  sur 
le  grand  livre  de  la  dette  consolidée  seront  admises 
à  la  trésorerie  comme  inscriptions,  après  avoir  été 
visées  par  le  directeur  du  grand  livre,  ou  par  un 
préposé  qui  sera  commis  à  cet  effet. 

•  V.  Les  dispositions  de  l'article  CCII  de  la  loi  du 
24  août  1793,  sur  la  consolidation  de  la  dette  conso- 
lidée, qui  accordaient  aux  créanciers  directs  de  la 
nation,  pour  créances  exigibles  soumises  a  la  liqui- 
dation, qui  ont  acquis  des  domaines  nationaux  avant 
le  l«r  octobre  1792,  la  faculté  d'en  acquitter  le  mon- 
tant avec  le  produit  de  leurs  inscriptions  provenant 
desdites  liquidations,  en  les  calculant  par  vingt  fois 
leur  montant  annuel,  sont  maintenues;  elles  seront 
exécutées  jusqu'à  ce  qu'il  en  soit  autrement  or- 
donné* 

•  VI.  Les  personnes  qui  ont  aussi  acquis  des  do- 
maines nationaux  avant  le  l^r  octobre  1792,  et  qui 
ont  été  forcées  par  la  loi  de  recevoir  de  leurs  débi- 
teurs les  inscriptions  provenant  de  la  liquidation  de 
la  dette  exigible,  jouiront  des  avantages  qui  sont 
portés  en  l'article  précédent. 

•  VII.  Les  dispositions  des  articles  V  et  VI  sont 
applicables  aux  inscriptions  provenant  de  la  liquida- 
tion de  la  dette  viagère. 

•  Vlll.  Les  acquéreurs  des  domaines  nationaux 
déjà  vendus  qui  solderont,  d*ici  au  l"*  vendémiaire 
an  4,  rentier  montant  de  leur  acquisition,  auront 
droit,  sur  des  sommes  non  échues  dans  l'an  3,  à  une 

{irime  qui  sera  calculée  à  raison  de  1  pour  100  sur 
es  sommes  qui  auront  une  année  d'échéance  à  cou- 
rir à  l'époque  du  payement;  de  2  pour  100  sur  celles 
qui  en  auront  deux;  ainsi  de  suite;  de  1  pour  100 


pour  chaque  année  sur  les  sommes  qu'on  paiera  par 
anticipatidn  :  les  échéances  qui  auront  une  échéance 
intermédiaire  seront  réglées  d'après  un  calcul  pro- 
portionnel ;  de  sorte  que  si  le  payement  est  anticipe 
de  neuf  mois,  la  prime  sera  de  3/4  pour  100;  de 
vingt  et  un  mois,  nu  ainsi  de  suite. 

BoissT  0'Anglas  :  Il  ne  suffit  pas  d'admettre  les 
inscriptions  en  payement  des  domaines  nationaux  : 
il  faut,  pour  que  la  Convention  soit  juste,  qu'elle 
augmente  encore  leur  valeur.  Je  demande  donc  qu'à 
compter  du  l«r  vendémiaire  dernier  il  ne  soit  fait 
aucune  retenue  sur  les  rentes  et  les  intérêts  payés 
par  la  nation,  à  moins  que  le  contraire  n'ait  été  sti- 
pulé dans  les  titres  de  ces  créances. 

Camron  :  Je  ne  crois  pas  que  l'intention  du  préo- 

Pinant  soit  de  généraliser  cette  mesure,  et  d*en  faire 
application  indistinctement  aux  riches  comme  aux 
pauvres. 

***  :  Il  faudra  donc  fixer  un  maximum  des  for- 
tunes? 

DupiN  :  N'oubliez  pas  qu'en  1788  on  avait  con- 
seillé à  Capet  de  faire  banqueroute  et  de  déclarer  la 
guerre;  cette  idée  souleva  tous  les  esprits.  Eh  bien, 
qui  est-ce  qui  a  contribué  à  faire  la  révolution  à 
Paris?  Ce  sont  tous  les  rentiers. 

Une  voix  :  C'est  tout  le  peuple  français  qui  a  bit 
la  révolution.  (On  applaudit.) 

DuPiN  :  Oui,  sans  doute;  mais  vous  ne  nierez  pas 
que  les  rentiers  y  ont  beaucoup  contribué;  or,  que 
vous  demandent-ils  aujourd'hui?  que  vous  les  re- 
mettiez au  même  état  où  ils  étaient  du  temps  de 
l'Assemblée  constituante,  et  que  vous  leur  rendiez 
le  cinquième,  qu'on  n'aurait  jamais  dû  Jeur  retenir. 
(On  applaudit.)  Faites  droit  à  leur  réclamation;  vous 
serez  justes,  et  vous  affermirez  le  crédit  public.  (Nou- 
veaux applaudissements.) 

Lecarpbntier  :  Si  la  retenue  est  abolie  de  la  part 
de  l'Etat,  elle  ne  doit  pas  l'être  de  particulier  à  par- 
ticulier, parce  qu'elle  a  toujours  eu  lieu,  et  que  ce 
droit  est  une  condition  tacite  des  contrats. 

Camron  :  Sans  doute  il  faut  que  la  nation  se  prête 
aux  circonstances;  mais  n'oubliez  pas  que  vous  au- 
rez des  impôts  à  lever;  vous  avez  consacré  un  prin- 
cipe que  vous  ne  devez  pas  violer;  vous  avez  dit 
que  vous  regardiez  les  rentes  perpétuelles  comme 
une  propriété  foncière,  et  vous  avez  fixé  rim[>ôt 
qu*elles  doivent  payer  au  cinquième,  en  déclarant 
que  vous  le  fixeriez  chaque  année.  Maintenant  ne 
voulez-vous  regarder  comme  propriété  foncière  qne 
les  biens  nationaux?  Je  soutiens  alors  que  l'égalité 
est  violée.Que  devez- vous  foire?  maintenez  le  prin- 
cipe ;  décrétez  que  pour  six  mois  on  ne  paiera  rien, 
et  dans  six  mois  vous  verrez  si  la  diminution  des  as- 
signats perinettra  de  remettre  cet  impôt,  et  s'il  fau- 
dra encore  le  supprimer. 

Real  :  Je  pense,  moi,  que  le  principe  doit  être  ri 
goureusement  exécuté,  et  qu'il  faut  se  borner  à  don- 
ner des  secours  à  ceux  qui  ont  besoin. 

'**  :  Cette  question  est  trop  importante  pour  la 
discuter  en  ce  moment,  j'en  demande  le  renvoi  au 
comité  des  finances,  pour  faire  le  rapport  primidi. 

Le  renvoi  est  décrété. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 


SÉANCB  DU  9  TEICTOSB. 

Un  des  secrétaires  donne  lecture  de  la  lettre  soW 
vante  : 


667 


Les  représentants  du  peuple ,  envoyés  dans  les  dé' 
pariemenls  des  Bouches-du- Rhône  et  du  Var^  à 
la  Convention  nationale. 

Martcille,  le  4  veDlose,  Tan  3'  de  la  république    I 
fraoçaise,  une  et  indi? isible. 

•  Citoyens  oollègues»  tous  a?es  par  Totre  énergie 
trompé  eneore  une  fois  les  espérances  de  ces  hommes  qui , 
après afoir  bu,  pendant  quiiiie  mois,  le  sang  du  peuple, 
Toulaieiil  mettre  le  comble  à  leurs  forfaits  en  égorgeant  la 
rcprésenlaiion  nationale.  Ce  que  les  chefs  méditaient  à 
Paris,  leurs  affidés  et  leurs  complices  Tont  tenté  dans  les 
dépariement$  coufiés  à  notre  sanreiliance»  et  dans  ceux 
qui  les  avoisinent.  Vous  safei  quel  sort  les  scélérats  delà 
Drômc  et  de  Vaucluse  préparaient  i  notre  collègue  Jean 
Dcbry  ;  il  n'a  échappé  à  leur  fureur  que  par  miracle. 

■  Noire  fie  est  également  menacée,  et  nous  ne  mar- 
chons qu*au  milieu  des  sljrlets  et  des  poignards  ;  mais  nous 
avons  pour  nous  notre  courage,  Testime  dosgcnsdebien,  le 
respect  et  la  confiance  des  yruis  patriotes,  et  nous  mépri- 
sons les  poignard».  Les  brigands  qui  fourmillent  dans  ces 
contrées  voient  eu  frémissant  le  r^ne  de  l*urdre,  de  la  jus- 
tice et  de  Phumanité  succéder  au  système  de  terreur,  de 
pillage  et  de  sang  qui*  avaul  le  9  thermidor,  les  rendait 
arbitres  suprêmes  de  la  vie  ei  de  la  Cartune  de  leort  coud* 
toyeos. 

(t  II  u'est  pas  d*eirort8  qu*ils  ne  fassent  poor  se  ressaisir 
de  Paulorité  dont  ils  ont  fait  un  abus  épouvantable.  Chas- 
sés de  Marseille,  qui  commence  enfin  à  sortir  delà  stu- 
peur, ils  se  sont  répandus  dans  les  autres  disiricls ,  et  sur> 
tout  dans  celui  d'Arles.  Ce  miniveaient  nous  a  paru  méri- 
ter une  mesure  eslraordinaire,  et  nous  avons  cm  devoir 
déclarer  la  commune  d*Arles  en  état  de  siège.  Au  reste, 
que  les  ennemis  de  la  république  n'espèrent  pas  triompher 
de  ces  événements  fomentés  dans  le  Midi.  Les  séditieux, 
les  hommes  de  sang,  les  voleurs  seront  poursuivis  sans  re- 
lâche. La  calomnie  pourra  verser  sur  nous  ses  poisons; 
uous  devons  nous  y  attendre.  Ang«is  et  Serres  ont  auisi 
été  calomniés  ;  mais  ils  ont  sauvé  le  Midi,  et  ils  ont  laisié 
dans  tous  les  lieox  où  ils  ont  esefcé  le  pouvoir  q«'ils  le* 
naient  de  vous  d'honorables  souveoim* 

c  On  a  dêiàes5ayé  de^vous  faire  prendre  le  change  aur 
les  derniers  événements  de  Marseille ,  en  tous  insinuant 
que  la  patrie  n*y  était  entrée  pour  rien.  On  a  laissé  enten- 
dre que  ce  n*était  que  reflet  natnrel  d*ooe  luUe  en- 
tre les  arislocratea  et  les  patriotes  énergiques  du  Midi. 
On  nous  a  présentés  indirectement  comme  les  persécuteurs 
des  ardents  républicains  et  les  protecteura  déclarés  des 
ennemis  de  la  chose  publique. 

«  A  celte  inculpation,  que  nous  ne  qualifierons  pas, 
par  égard  pour  celui  de  nos  eolK'gues  qui  Ta  hasardée, 
nous  ne  répondrons  que  par  des  faits  authentiques,  qui  ont 
eu  pour  témoins  tous  les  habitants  de  Marseille. 

t  Les  prétendus  patriotes  que  noua  afons  signalés  à  To- 
pinion  publique,  ceux  que  nous  avons  chassés  des  places 
qu'ils  déshonoraient,  ceux  que  nous  avons  dénoncés  au 
comité  de  sûreté  générale  et  à  la  nation  entière,  ce  sont 
ces  mêmes  scélérats  qui,  pendant  la  longue  tyrannie  de 
Robespierre ,  se  sont  gorgés  d'or  et  de  sang;  ce  sont  ces 
délateurs  déhonlés  qui  bisaient  publiquement  métier  et 
trafic  de  dénonciations  ;  ces  effrontés  appositeurs  de  scel- 
lés, ces  courtiers  de  réquisitions  qui  ont  ruiné  le  com- 
merce, pillé  les  malsons,  dévasté  les  magasins,  dévoré  les 
ressources  que  Pindustrie  avait  accumulées,  et  réalisé, 
autant  qu'il  était  en  lenr  pouvoir,  le  plan  de  famine  et  de 
disette  générale,  eonça  par  le  génie  infernal  qui  dirige  le 
gouvernement  anglais. 

f  Ces  patriotes  que  nons  avons  persécutés»  ce  sont  les 
assassins  de  nos  prédécesseurs,  ces  forcenés  qni  en  plein 
jour  investirent*  main  armée  la  maison  des  représentants 
du  peuple,  et  les  accablèrent  de  mille  outrages  ;  ce  sont 
ces  mêmes  brigands  qui  regrettent  Robespierre,  qui  déi- 
fient la  Montagne  et  vomissent  publiquement  des  horreurs 
contre  la  Convention  nationale  ;  ce  sont  ces  tigres  qui  de- 
mandent du  sang,  et  toujours  du  sang;  qui  veulent  en 
avoir  jusqu'aux  genoux ,  et  qui  dans  leur  idiome  atroce- 
ment énergique,  qu*il  est  impossible  de  rendre  en  fran- 
çais, disent  que,  s'ils  redeviennent  jamais  les  maîtres ,  il 
ne  restera  pas  on  enfant  à  la  mamelte  t  ce  sont  cet  mons- 


tres à  face  humaine  qui,  dans  des  orgies  noctu met ,  où 
pré<«ident  les  furies,  complotent  Tassassinat  des  représen- 
tants dont  la  vigilance  et  le  courage  les  embarrassent:  ce 
sont  enfin  ces  voleurs  qui,  ne  pouvant  plus  piller  et  hri- 
gander  au  nom  de  la  loi ,  se  répandent  dans  les  campagnes, 
se  mettent  en  rébellion  ouverte  contre  Tautoriié  légitime  ; 
voili  cenx  que  noos  opprimons,  que  nous  ne  cesaeroDS 
d*opprimer  tant  que  le  pouvoir  sera  dans  dos  mains. 

t  De  tons  les  devoirs  que  vous  nous  avei  imposé!,  le 
plus  essentiel  était  celui  de  relever  et  d*enconrager  le  com- 
merce. Noos  n*avons  rien  négligé  ponr  le  retirer  du  som- 
meil léthargique  où  le  vandalisme  l'avait  plongé.  Noos 
avons  parlé  au  nom  de  la  patrie  et  de  la  Convention ,  et 
nous  avons  été  entendus.  Vous  avex  applaudi  aux  efforts 
du  citoyen  Payan,  qui  a  fait  venir,  pour  son  compte  ,  des 
grains  de  ^étranger.  Son  exemple  sera  suivi  par  plusieurs 
autres  négociants ,  et  Tabondance  régnera  sons  peu  de 
temps  dans  le  Midi. 

■  Marseille  et  le  reste  du  département  des  Bonehes-da* 
Rhône  sont  tranquilles ,  en  dépit  des  malveillants. 

«  Je  vous  adresse  une  somme  de  3,000  liv.  ;  c*est  l'of- 
frande d^un  négociant  qui  joint  la  modestie  au  civisme»  et 
qui  garde  i*anony me.  (On  applaudit) 

•  Salât  et  firalemité, 

i  Signé  Gadbot  et  Mabiittb.  a 

Cette  lettre  est  renvoyée  au  comité  de  sûreté  gé- 
nérale. 

—  Sur  le  rapport  de  Gossuin,  le  décret  suivant  est 
rendu. 

•  La  Convention  natioBtIe»  lur  le  rapport  de  son  comité 
militaire,  décrète  : 

•  Art.  i".  Il  sera  fait  choix,  dans  lesdépAtsde  eavalerie, 
pour  l'a  ugmentation  provisoire  de  la  S9«  division  de  gendar- 
merie nationale,  du  nomlire  des  citoyens  que  différentes 
sections  de  Paris  n*ont  pu  fournir  dans  le  délai  prescrit ,  h 
défaut  de  candidats. 

•  II.  Les  citoyens  nommés  dans  quelques  sections,  an- 
dessus  du  nombre  déterminé  par  la  loi  du  6  nivôse,  sont 
admissibles,  sMIs  réunissent  les  conditions  prescrites  par 
la  présente  loi. 

cIlL  Les  gendarmes  à  cheval  formant  la  SO*  division 
seront  casernes  en  nombre  égal  dans  chacun  des  étabito* 
semeuts  ci-après  désignés,  savoir  : 

c  Au  ci-devant  couvent  des  Filles  Saiote-Marie,  rue  An- 
toine ; 

«  A  la  caserne  de  la  roe  de  Lonrcine,  faubourg  Marcel  ; 

«  A  la  maison  des  voitures  de  la  ci-devant  conr,  faubourg 
Germain  ; 

«  A  la  maison  dite  des  Petites-Ecuries,  faubourg  Denis; 

«  A  la  caserne  de  la  Goortille,  fkuboorg  du  Temple. 

t  lY.  Les  gpndannes  alterneront  régulièrement  chaque 
trimestre  poo  r  le  logement. 

c  V.  Les  commissions  des  armées,  des  travaux  publics  et 
des  revenus  nationaux,  feront  disposer  les  établissements 
dans  le  plus  court  délai ,  et  veilleront ,  chacune  en  ce  qui 
la  concerne ,  à  l'exécution  des  dispositions  ci-dessus  ;  elles 
en  rendront  compte  séparément,  tous  les  primidis,  aux  co* 
mités  de  salut  public  et  militaire,  a 

BiRON  fait  rendre  le  décret  suivant  : 

-  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu  le  rap« 
port  de  son  comité  des  transports,  postes  et  messageries» 
décrètes 

•  Art.  I*'.  Il  sera  accordé  des  avances  aux  maîtres  de 
poste,  soit  pour  achat  de  chevaux  nécessaires  au  service 
de  leur  relais ,  soit  pour  celui  des  fourrages  et  denrées  ser- 
vant à  leur  nourriture. 

c  H.  Les  sommes  qui  leur  seront  accordées  par  lesai^ 
rêtés  du  comité  des  transports,  postes  et  messageries,  ne 
seront  touchées  qu'après  avoir  préalablement  donné  pour 
caution  envers  la  nation  un  citoyen  bon  et  solvable,  de» 
vant  le  directoire  du  district  dans  rarropdisaement  duquel 
leurs  relais  sont  situés. 

«  m.  Les  avances  faites  aux  mattres  de  poste  seront 
remboursées  par  compensation  snr  les  premiers  services 
qo*ils  auront  faits  poor  le  compte  de  la  lÎÉpubUque* 


568 


«  IV.  Le  comité  des  transports ,  postes  et  messa(;crios  , 
réglera  les  indemnités  dues  aux  maîtres  de  poste,  pour 
perte  de  cheraux  et  autres  causes  qu'il  jugera  légitimes , 
sur  les  oliestations  des  communes  et  procès-Tcrbaux  visés 
par  les  directoires  des  districts* 

«  V,  Lei  procès-verbaux  conilateront  Page ,  la  taille 
dei cbcfaut  leun  défauts ,  s^ils  en  avaient,  leur  valeur, 
et  si  la  caufic  de  leur  mon  est  la  fuite  du  servies  de  la 
poste;  ils  seront  rédigés,  en  présence  d*uu  oflicier  de  la 
commune»  par  uu  ou  plusieurs  marécliaux* 

•  VL  Les  dispositions  des  lois  contraires  à  la  présent* 
sont  abrogées.  » 

— Poltier.au  nom  du  comité  de  législation, donne 
lecture  d*une  Adresse  à  ce  comité  par  le  substitut 
de  l'accusateur  public  du  tribunal  révolutionnaire, 
par  laquelle  il  demande  s*il  peut  se  départir  du  pre- 
mier acte  d'accusation  dressé  contre  Fouquier-Tin- 
viJIe,  ordonnancé  par  le  précédent  tribunal,  et  pré- 
senter un  nouvel  acte  d^aecuaation,  dans  lequel,  «n 
précisant  et  caractérisant,  aux  termes  de  la  loi  du 
•  nivôse,  les  délits  de  Pouqnier,  il  comprendra  et 
caractérisera  en  même  temps  tous  ceux  de  ses  com- 
plices qui,  d'après  Tarticle  XXXV  du  titre  V  delà 
même  loi,  doivent  éUre  compris  dans  le  même  acte 
d'accusation. 

•  La  Convention,  sur  le  rapport  de  son  comité, 
considérant  que  la  loi  du  3  oivose  dernier,  concer- 
nant le  tribunal  révolutionnaire,  n'interdit  pas  à 
Taccusateur  public  la  faculté,  tant  que  les  choses 
sont  encore  entières,  ou  de  re'diger  un  nouvel  acte 
d'accusation,  ou  un  acte  supplémentaire,  lorsque 
Tun  ou  l'autre  lui  paraît  nécessaire,  soit  pour  l'in- 
struction des  jurés,  soit  pour  laisser  aux  accusés  tout 
légitime  moyen  de  défense  ; 

«  Passe  à  Tordre  du  jour.  » 

(Laiuileàdimain.) 


N,  B'  Dias  la  séance  du  10,  de  nourelles  pièces 
sont  Tenues  à  U  charge  de  Joseph  Lebon  ;  elles  in- 
culpent Duquesnoy  de  complicité  avec  lui. 

Boîssy  a  fait  connaître  les  menées  des  malveil- 
lants pour  occasionner  la  disette.  Dans  l'ancien  ré- 
gime, on  ne  distribuait  pour  Paris  que  mille  cinq 
cents  sacs  de  farine  par  jour;  depuis  longtemps  on 
en  distribue  mille  oeuf  cents,  et  hier  il  en  a  été  ré- 

Earti  deux  mille  eent  quarante^six  entre  tous  les 
oulangers.  Boissy  rassure  au  surplus  sur  les  erain- 
.  tes  qu'on  inspire  relativement  au  pain. 

Villetard  a  demandé,  à  la  suite  de  ce  rapport,  qu'on 
fît  sortir  de  Paris  tons  les  jeunes  gens  de  la  première 
réçiiiisilion  qui  s'y  trouvent.  Des  membres  des  co- 
mités de  sûreté  générale  et  de  salut  public  ont  dit 
que  ceux  de  ces  jeunes  ^ens  qui  sont  à  Paris  ont  des 
causes  légitimes  pour  y  rester. 

La  Convention  a  renvoyé  toutes  les  oropositîons 
qui  ont  été  fiiites  au  comité  de  salut  public. 


ILIVEBft  DIVBR», 

De  CBdueationdant  let  grande»  ripmkUqwnx  par  !••<?» 
l^abeMi  A  Paris»  de l'impriaierie de  Didot  jeune.  Pan 
^  Se  vend  elief  F«sclis«  libraire  •  quai  des  Augustins , 
»*  SS^  ei  Deseoiie,  au  Palais-Efaliié,  arcades  n*  i  et  S. 
JPris  1 4  lir.  fKNir  Parii^  et  5  liv.  6  s.*  franc  de  port,  pour 
if  éfpirtficiili.  I 

Cet  ouvrage  intéressant  est  précédé  d'une  introduction 
dans  laquelle  Tauteur  établit  avec  autant  de  clarté  que  de 
raison  la  oéce^sU^  de  joindre  les  iosUtulious  civiles  k  la 


couslilulion,  et  de  leur  douner  pour  base  une  éducation 
commune.  Nous  ne  le  suivrons  point  dans  les  divers  déve- 
loppements qu*il  donne  &  son  sujet.  Il  a  divisé  son  plan  ep 
six  âges  ;  il  prend  les  individu»  depuis  la  naissance,  et  les 
fait  passer  par  diverses  gradations  jusqu'à  vingt  et  un  ans. 
Le  citoyen  Labene  nous  paraît  avoir  voulu  réaliser  pour 
Téducalion  commune  ce  que  J.- J.  Rousseau  avait  proposé 
pour  l'éducation  particulière  dan»  Emile,  On  volt  qu'il  est 
pénétré  des  principes  et  des  sentiraenis  de  cet  Immortel 
écrivain.  L*ouvrage  que  nous  annonçons  respire,  à  chaque 
page,  et  doit  respirer  l'amour  de  la  patrie ,  l'enthousiasme 
de  la  liberté,  la  pureté  des  mours,  le  rospect  pour  la 
vteillasse  et  la  pratiqua  de  l'hospitalité.  Il  k^occupe  au<si 
des  moyens  de  fégénéfc*r  et  perfectionner  l'éducalion  des 
fitmmes.  Sans  approfondir  tous  les  moyens  que  l'auteur  in« 
diqu€  pour  parvenir  à  donner  k  la  république  une  bonne 
éducation,  nousdirons que  rien  n*est  plus  aimable  que  les 
jeuxqu*il  emploie  pour  élever  et  instruire  des  républi- 
cains ;  nous  croyons  même  que  rien  n'est  moins  imprati- 
cable que  son  plan.  Point  detbéorif  pure,  touiours  la  pra- 
tique é  cété.  En  adoptant  sa  méthode,  les  élèves  seraient,  & 
vingt  et  un  ans,  les  plus  vertueux  des  citoyens  et  les  plus 
iostruitsdes  liommes. 

L'auteur  nous  pardonnera  de  lui  reprocher  quelquefois 
un  peu  de  déclamation  ;  quelquefois  il  lui  échappe  des  ex- 
pressions que  le  bon  goût  n«  saurait  permettre;  il  lui  sera 
facile  de  faire  disparaître  des  laches  et  des  longueurs  qui 
nuisent  toujours  à  la  perfection  et  à  la  rapidité  du  style. 

Nous  terminerons  cet  anicle  par  deux  citations  qui  prou- 
veront la  iranchise  du  citoyen  Labene ,  en  même  temps 
que  la  pureté  de  ses  opinions,  et  combien  il  lui  est  posf«ible 
d'écrire  avec  goût,  élégance  et  simplicité. 

«  C'est  ainsi  que,  pour  étouffer  les  trop  vives  douleurs 
que  renouvelait  sans  cesse  en  moi  le  souvenir  d'une  fille 
chérie,  je  traçais  le  plan  d*une  éducation  républicaine 
adaptée  à  une  vaste  population.  Mais  à  quoi  bon  s'orcuper 
de  si  briHanies  chimères,  me  suis- je  dit  souvent,  si  ce 
qu'on  a  arrêté  aujourd'hui,  on  le  détruit  demain  ;  si  tan- 
téC  nous  avons  la  manie  de  ne  vouloir  faire  que  des  acadé- 
raieteiis,  et  tantôt  la  folie  de  ne  vouloir  faire  que  des  l)étes  ; 
si  dans  un  moment  nous  constituons  les  chefs  de  famille 
magistrats  suprêmes  de  l'instruction  publique ,  et  dans  un 
autre  moment  nous  leur  disputons  la  moindre  surveil- 
lanee» 

f  Soyons  de  bonne  foi  ;  Jusqu'à  présent  nous  n'avons 
fait  qae  tâtonner  dans  la  partie  la  pins  importante  de  w^- 
tre  l^isialion.  La  Convention  nationale,  qui  a  abordé  ^\ee 
tant  de  grandeur  et  de  suceés  les  questions  les  plus  é|>i- 
neusesde  la  politique,  qui  a  imprimé  à  tous  ses  travaux 
un  caractère  si  sublime,  qui  a  semé  sur  la  terre  des  idées 
si  fécondes,  qui  a  élevé  l'édifice  denotreconstilution d'une 
main  si  hardie,  n'a  porté  qu'une  main  faible  et  languis» 
santé  sur  l'édificvde  notre  éducation  nationale.  Il  semble 
que  tout  le  feu  de  son  génie  s'éteigne ,  que  ses  hautes  eon- 
ceptions  s'évanouissent,  que  tout  soit  courage  et  son  éner- 
gie l'abandonnent ,  du  moment  où  elle  s'occupe  de  noire 
régénération' :  elle  n'a  encore  aucun  plan  suivi,  aucune 
marche  uniforme,  aucun  tmt  bien  déterminé. 

a  11  est  temps  cependant  de  prendre  tm  parti  :  la  géné- 
ration naissante  souffre;  si  nous  tardons  encore,  nous  al- 
lons lui  communiquer  tous  nos  vices,  et  prolonger  ainsi  Is 
lutte  pénible  de  l'esclavage  et  de  la  liberté.  • 

Plus  loin ,  en  partant  de  l'esprit  qui  devrait  animer  les 
Sociétés  populaires,  il  ajoute  : 

c  Je  voudrais  que  la  moindre  accusation  contre  un  al- 
lât porté  à  la  morale  publique  fût  examinée  avec  la  plus 
grande  sévérité,  et  que  le  membre  reconnu  coupable  fût 
solennellement  exclu  de  la  Société,  comme  indigne  de 
servir  de  modèle.^..  Il  ne  nous  souvient  que  ij-op  encore  de 
ces  intrigants  qui,  tout  pourris  de  vices,  parlaient  conli« 
nuellemeni  de  régéiiérer  la  morale  publique*  et  d'un  lit  de 
débauche  nous  prêchaient  eflroutéwent  Ja  vertu.....  Ne 
croyex  pas  que  Ui  révolution  du  9  thermidor  ait  pur^é  la 
France  de  lous  ces  hypocrites.  Nous  nous  saDmes  épurés, 
écriveol-ils  de  toutes  parts...  Oui ,  ils  se  sont  mutuelle- 
ment  pardonné  leur  ambition,  leur  cupidité,  leurs  brigau* 
dages,  leur  tyrannie;  mais  sont-ils  devenus  meilleurs  ÛU^ 
meilleurs  époux«  meilleurs  pères?  IléUs  1  plusieurs  rien: 
encore  de  ces  aaiola  y«rUtfi  a 


I 


va 

8 


b* 


I: 


GAZETTE  NATIONALE  .»  LE  MONITEUR  UNIVERSEL 


N*  162. 


Duodi  12  Vbntosb,  l'an  3«.  {Lundi  2  Mabs  1795,  vieux  êtyU.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Du  camp  devant  Luxembourg t  USvmiote.—  lJk  rigueur 
de  la  saison  avait  sutpeDda  l'acUTlté  des  travaux .  A  peloe  le 
froid  eut-il  diminué,  qu*on  s'est  remis  à  perfectionner  les 
retranchements^  et  tous  les  autres  ouvrages  nécessaires  pour 
un  sié(;e  d'une  si  grande  imporuince. 

La  ville,  quoiqu'elle  soit  d'une  médiocre  grandeur,  exige 
néanmoins  une  circonvallaiion  d'une  étendue  considérable, 
à  cause  des  ouvrages  avancés  qui  la  défendeut,  et  qui  sont 
de  tous  côtés  à  une  demi-lieue  en  avant  de  la  forteresse.  Les 
fortifications  sont  taillées  dans  le  roc  vif;  elles  bravcntreffet 
ordinaires  des  mines.  L'artillerie  la  plus  forte  ne  peut  en- 
tamer un  rocher  d'une  hauteur  et  d'une  épaisseur  surpre- 
nantes. 

il  y  a  deux  moyens  de  réduire  Luxembourg,  un  blocus 
sévère  et  le  bombardement.  On  les  emploie  tous  les  deux. 

PRUSSE. 

Bertitit  le  Afètrier.—  L'Académie  des  Sciences  a  teoii  ose 
séance  publique  en  mémoire  de  sa  fondation.  M.  MërIaD, 
directeur,  a  ouvert  la  séance  par  la  lecture  d'un  mémoire 
de  M.  Formey  sur  les  circonstances  actuelles,  politiques  et 
morales.  Le  comte  Goyon  a  lu  une  dissertation  sur  la  disso- 
lution des  empires,  qu'il  attribue  à  la  dissolution  des  mœurs, 
et  cette  dernière  à  l'abus  de  l'esprit  et  à  la  corruption  du 
goût.  M.  Maycr  a  lu  un  mémoire  où  il  raconte  les  effets  sa- 
lutaires de  l'électricité  sur  une  fille  de  dix  ans  frappée  de  la 
foudre. 

REPUBLIQUE   DES  PROVINCES-UNIES. 

Amsterdam t  le  \Q février.  ^htA  députés  de  la  province 
de  Hollande  sont  chargés  de  demander  le  rappel  de  Fagel, 
ambassadeur  en  Danemark ,  de  Van-den-Bosch,  ministre  eo 
Suisse,  et  de  Hartsink,  ministre  à  Hambourg. 

—  La  Compagnie  des  Indes  orientales  a  proposé  aux  états 
généraux  de  louer  un  bâtiment  américain  pour  porter  offi- 
ciellement la  nouvelle  de  la  révolution  dans  les  ports  d'I- 
talie, aux  échelles  du  Levant  et  aux  Indes. 

—  Les  représentants  provisoires  viennent  de  publier  la 
nouvelle  proclamation  suivante, au  sujet  des  anciens  régents, 
officiers  publics  et  ministres  émigrés. 

LIBERTÉ,  BOALrrÉ,  FlUTERIflTB. 

<  Les  représentants  provisoires  du  peuple  de  HolUade, 
ayant  considéré  et  examiné  plus  précisément  que  les  mêmes 
raisons  et  motifs ,  allégués  dans  la  publication  du  4  février 
1795,  peuvent  être  pareillement  d'application  à  tels  cl- 
devant  régents,  officiers  et  ministres,  qui  ont  déjà  quitté 
cette  province  quelque  temps  auparavant,  ou  bien  peu  avant 
que  cette  publication  est  venue  à  la  connaiss«ince  de  tous, 
ou  puriiculiérement  d'eux,  ont  à  ces  causes  trouvé  bon  et 
entendu,  par  amplialion  de  ladite  publication,  de  décréter 
plu5  pri'cisément ,  que  quiconque  aura  rempli  dans  cette 
proviiirc,  après  le  1"  janvier  1794,  quelque  poste  public,soit 
comme  régent,  officier  ou  ministre,  sans  aucune  distinction, 
de  quelque  nature  ou  rang,  et  de  quelque  collège  ou  comptoir 
il  pourra  avoir  ressorti,  et  qui  s'est  absenté  depuis  ce  temps- 
là  hors  de  la  province,  quand  même  il  eût  demandé  et  ob- 
tenu une  démission  et  décharge  convenable,  sera  tenu  de  se 
rendre  dans  le  temps  de  deux  mois,  après  la  publlcatioD  de 
la  présente,  à  son  dernier  domicile  dans  cette  province,  à 
s'y  présenter  à  la  municipalité,  et  à  ne  repartir  de  là  sans  le 
consentement  exprès  ou  par  écrit  de  cette  municipalité  ou 
régence,  sous  peine  que  ceux  qui  ne  retourneront  point,  ou 
étant  retournés  émigrent  de  nouveau,  sans  le  susdit  consen- 
tement, hors  du  pays,  et  qui  seront  surpris  un  jour  ou  l'au- 
tre, seront  punis  selon  leurs  mérites,et  même,  suivant  l'exi- 
gence des  choses,  de  la  peine  de  mort.  En  outre,  nous  dé- 
crétons que  les  biens  que  de  tels  émigrés  pourraient  avoir 
Ut^ssés  encore  dans  ce  pays  seront  séquestrés  en  attendant, 

S*  SM€.  —  Tome  X 


Jusqu'à  ce  qu'ils  auront  demandé  et  obtemi»  aprti  kvi 
tour,  la  levée  de  cette  séquestration,  etc.  » 


RÉPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Extrait  d'une  lettre  de  Brest,  du  S  venioit.  —  Le 
contre-amiral  Vanstabel  vient  de  partir  en  poste 
pour  Amsterdam  ,  avec  plusieurs  omciers  et  mate- 
lots :  il  a  le  titre  de  commandant  général  des  forces 
navales  de  la  république  dans  les  mers  du  Noird. 

—  Hier  une  division  de  six  vaisseaux  de  74,  trois 
frégates  et  trois  corvettes,  commandée  par  le  contre- 
amiral  Renaudin,  a  appareillé  ;  elle  a  pris  pour  six 
mois  de  vivres;  on  ignore  sa  destination.  Le  contre- 
amiral  Benaudin  commandait  le  Vengeur  lors  de 
l'affaire  du  15  prairial. 

—  On  prépare  une  seconde  expédition  pareille  « 

Soi  sera  commandée  par  le  contre-amiral  Nielly  :  elle 
oit  embarquer  quelques  troupes,  ainsi  que  le  gé- 
néral de  terre  Dufourneau.  On  croit  que  sa  destina- 
tion est  pour  Saint-Domingue. 

Une  troisième  ex|>édition  se  prépare  ;  elle  est 
composée  de  trois  vaisseaux  convertis  en  flûtes ,  qui 
sont  le  Flihuetiêr,  de  M,  le  Brave  et  le  Scœvola , 
de  46  ,  portant  du  canon  de  35 ,  avec  quelques  cor- 
vettes :  elle  prend  pour  dix  mois  de  vivres ,  et  tout 
porte  à  croire  que  la  destination  est  pour  les  îles  de 
France  et  de  la  Réunion. 

—  Il  arrive  ici  de  temps  en  temps  des  prises  qui 
alimentent  notre  port  et  qui  approvisionnent  les  ma 
gasins  de  notre  marine. 

AEMBB  DE  L*OUBST. 

Extrait  de  Vwdrt  du  général  en  ehef^ 
du  lor  ventôse. 

m  Lazare  Doche,  général  en  chef,  annonce  a  l'ar- 
mée, avec  un  plaisir  bien  vif,  que  Tempire  de  la  rai- 
son vient  enfin  de  rendre  à  la  patrie  tousses  enfants, 
et  que  le  jour  où  les  Français  ne  doivent  faire  qu*une 
seule  famille  est  arrivé. 

•  Charette  et  les  principaux  chefs  de  son  armée  an 
nom  des  Vendéens ,  Caumartin  au  nom  du  parli 
connu  sous  la  dénomination  des  chouans ,  viennent 
de  signer  un  acte  par  lequel  ils  déclarent  aux  re- 
présentants du  peuple  français  que  leurs  intentions 
sont  de  vivre  désormais  sous  les  lois  de  la  républi- 
que une  et  indivisible,  et  qu'ils  s'engagent  à  remet- 
tre leurs  armes  et  leurs  munitions  de  guerre  et  de 
bouche  ;  mais,  tandis  que  les  citoyens  rentrent  dans 
le  sein  de  la  patrie ,  il  est  des  brigands  de  profession 

3 ni,  ne  connaissant  de  parti  que  celui  du  meurtre  et 
u  pillage,  exécutent  des  forfaits  inouïs  et  semblent 
en  méditer  de  nouveaux. 

•  L'instant  est  arrivé  où  tous  les  bons  citoyens 
doivent  se  réunir  pour  détruire  leurs  ennemis  com- 
muns... A  cet  effet,  le  présent  sera  notifié  à  tous  les 
corps  administratifs ,  et  lu  à  Tordre  trois  jours  de 
suite. 

•  Les  chefs  militaires  continueront  de  repousser 
les  agressions  par  la  force,  de  protéger  les  personnes 
et  les  propriétés,  de  faire  respecter  Tes  idées  religieu* 
ses ,  «rassurer  la  sûreté  des  communications,  et  au- 
ront soin  d'accueillir  et  de  traiter  en  frères  tous  les 
hommes  égarés  qui  viendraient  se  rendre. 

7» 


670 


•  Le  ehf (  do  réUit-major  eéi\¥n\  est  cliargi';  de 
faire  passer  le  présent  aux  orficiers  griiénuix  ,  coin- 
maiidaiit  les  divisiooi,  par  des  courriers  extraor- 
dioaires. 

•  Au  quartier  g<<n<fral  de  Bennes  »  le  !«'  ventôse  » 
ran  sa  de  la  république,  etc. 

•  Pour  copie. 

•Le  chef  de  l'état  major  général.  Signé  Cbevin.« 


MÉLANGES. 

Paris,  a  oivote* 

H  Heas  de  lire  on  triicle  de  fAccui^tewpuMe  •  reUiUf 
à  Éleyés.'.  Sam  doute ,  Sie)è«  doit  se  reiirocher  un  silence 
qui  ferait  croire  à  d'aulres  qu*à  mol  que  Mirabeau  a  réelle- 
«••I  dll  •  qu  II  lui  laUtoll  une  réputation  dimcile  à  toate- 
Qlrs»  n»aU  «ppi'UeuMI  blee  a  une  poupée  royaliste,  à  RI* 
elM4^Serlsyl  d  atuiauer  un  homme  T  (^uc  f«ilaidt<il»  lui,  quand 
Slejrés  ne  falsoU  rltn?  Il  Intriguait  en  fawur  de  la  cour, 
qu'il  rappelle  à  grands  cris  dans  son  Aeauatew  pubHc. 
mm^êfur  taristoçratit  Ailtes  faire  vos  motions  patriotiques 
pard'uuircs. ... 

tMous  nous  rappalUrons  toi^ours  In  fable  du  eorheau  et 
4u  renard.  Trêve  de  vos  flagorneries;  nous  accablerons  de 
toutes  nos  forces  et  de  tous  nos  moyen»  les  terroristes  et  les 
hommes  de  sang  :  mais  nouH  vous  reconnaissons  eu  même 
lenilMt  et  nous  vous  rcconnulirons  sous  tous  les  masques. 
Signe  UBiaiN  (  (te  liiionviùe). 


P*  Â%  toum%  nprétmimt  Ai  pmplê^  on  riHetmir  éê 
Moniteur. 

Jt  te  prie ,  dloyen .  d'Insérer  dans  ton  prorlialn  numéro 
du  A/oiii/#ir  la  lettre  cl-jolnio»  que  jVchs  à  la  commission 
dea  suUisiancen  K  opppix)viiiioiinemenis.  Il  faut  que  les 
monstres  qui  ont  «ivuradii  l'iiumaniu*,  en  buvant  le  sang  des 
hOMuioe»  aoleni  ainnalfh  comme  dea  bétes  ftirutes;  c'est  le 
'  asoyt^tt  qu*lla  ue  aoleni  plus  dangereui. 
Salut  et  fraternité. 

P.  A.  LOXBAO. 


P.  J.  Losetfii,  rêpréemtont  dn  ptnpfe,  à  ta 

des  subiétlancts  et  approcisionncmt'^S' 

Je  vous  dénonce»  Je  dénonce  à  tous  les  citoyens  vrais  amis 
de  la  llberlë  et  de  T  humanité,  un  de  ce>  monstres  féroces 
qui,  lous  le  régne  de  In  tyrannie»  se  sont  i«ii  rrmarquer  par 
leur  cruauté  ei  leur  barbarie  ;  Il  se  nomme  Daviaud,  Il  éuiit 
d«devaat  employé  dans  les  vivres  de  hi  marine  du  port  de 
lM»Msrt  «i  émit  soua^bei  d*admluisti«lloii«  Un  seul  tiaii 
s«fliri  pour  le  ftdrs  connaliro. 

t..  DesclK^icaux .  de  i  Ile  de  Ré,  afuH  ssrrl  onualamnMaj 
la  ix^voluUon  luaqu'au  mois  d'août  Ïl9k  A  emm  époque,  il 
réunit  les  suffhiges  du  département  de  la  Charente-lofé- 
rteure,  et  en  f^t  député  à  la  Convention  nationale  ;  je  le 
voyais  souvent;  et,  quoique fale  dlfWré  dopinion  avec  lui 
dans  une  e4reon»iance  Imporlanu^,  !•  déclare  nue  Je  n  al  ja- 
BsaU  vu  en  lui  qu^in  bon  et  fnmf  républtoain.  Desehéieaux 
■a  put  soutenir  les  événements  du  S  t  mal  :  la  vue  de  la  Gon- 
v««tkMi  avilie  et  muUlée  lui  nam»  Insupporlablet  il  donna 
sa  démission  au  moU dao^t  Ï79S.  IHhi  de  leaqis  apris,  on 
éttWIt  à  Rocbefori  un  tribunal  de  sang  qui,  sous  le  nom  de 
rteoAi/KNiMKr»,  assassina  descellenu  pau-iotes  :  Il  v  fut 
Undult  ei  condamné  à  mort.  Davtaud,  rioMme  Davlaud, 
voulut  être  son  bourreau,  et  II  K  donna  le  barbare  olalair  de 
la  gulMatlnor  Gee  Iblts  m'ont  été  cooflrmés  par  deux  dé- 
putés exiraordioaires'  de  la  cooMBune  de  RocbefoH.  qui 
mMlsitant  mi  ce  mnmsM  des  sul«Uiancet.  ils  m'ont  assuré 

Soa  ttara.  awors  eoufori  da  sang,  cbercbe  à  être  |ïJk^ 
_  jte  M  hûbMIomcnts.  Puissent  ne  rencontrci  sur  le  ter* 
Hioira  de  laltberié  que  le  mépris  doi  bons  dtoyeas  et  les 
'idesaoonscieBoel 

letfraUnUlé, 

LOSSAQ. 


Ànrédmeêewr. 

r  »  à  répart  r.  la  |*M  tu  pna* 


sible,  une  Injustice  bien  involontaire,  te  citoyen  Dorfeoine 
auiri^/ois  directeur  du  théâtre  me  de  Richelieu  ,  celui  dont 
J^i  parlé  dans  mes  noilosa .  n'est  paa  le  Dorfeuille  qui  pi^. 
sidaii  l'horrible  commission  de  Lyon.  L'exacte  ressemblan'rr 
de  noms  et  le  rapport  des  professions  (l'autre  est  comédien; 
ont  causé  l'erreur  générale  et  la  mienne*  Je  l'apprends ,  et 
vous  prie  de  vouloir  bien  le  publier. 
Salut  et  fraternité. 

J.-R.  LOUVET. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Fin  du  rapport  fait ,  au  nom  de  /a  e ommmton  char- 
gée de  i  examen  des  papiers  trouvés  chez  Robes- 
pierre  et  ses  complices ,  par  E.-B.  Courtois,  dé- 
puté du  département  de  CAube ,  dans  la  séance 
du  16  nivôse  an  9  de  ta  république  française^ 
une  et  indivisible. 

Veut-on  connattrc  les  principes  de  ce  Houreau , 
dévoué  à  Payan ,  qui  rélail  à  Robespierre ,  et  par 
conséquent  dévoué  à  tous  les  deux?  11  s'explique 
ainsi  sur  les  députés  opposanU  au  décret  du  S2  prai* 
rial  : 

■  Je  pense  que  se  méfier .  ou  feindre  de  se  méfier 
du  gouvernement  actuel ,  c'est  agir  dans  le  sens  de 
rAiigleterre.  > 

Ce  vil  meneur  de  la  Société  populaire  d'Avignon , 
endoctriné  par  Payan,  et  plein  de  la  rage  de  Maigiiet, 
en  envoyant,  au  nom  de  celle  Société ,  une  Adresse 
dont  il  est  le  rédacteur,  a  bien  soin  de  recommander 

âu'elle  soit  soumise  auparavant  au  jugement  de 
iaximilien. 

C'est  ainsi  que  la  Convention  cnit  souvent  cnlcn: 
dre  le  vœu  des  citoyens  des  départements,  quand* 
elle  ne  recevait,  sous  ce  nom,  que  le  vœu  d'une  fu- 
rie ,  d'une  Société  populaire. 

•  La  commission  (dil  Moureau)  marche  bien.  Sur 
douze  accusés,  neuf  ont  été  condamnés  à  mort,  deux 
à  la  déportation ,  un  à  six  mois  de  détention.  *  Puis, 
de  son  àme  atroce  et  sanguinaire ,  il  laisse  échapper 
ce  regret  ; 

•  Je  croyais  que ,  d'après  le  décret  du  22  prairial, 
il  n'y  avait  plus  qtie  la  peine  de  mort  pour  les  cou- 
pables de  délits  contre-révolutionnaires.  » 

Dana  une  autre  lettre,  cet  Agricole  arrive  d'O- 
range ,  où  les  choses  vont  bien...  ■  Mrîlleret  et  Bo- 
man  Fonrosa  (dit-il)  sont  d'excellents  citoyens  ;  mais 
pour  jtiges  révolutionnaires  ils  ne  valent  |)oJnt 
FauveltietlesanlresjugcsdeCommune-Affraucliie." 

Nouveau  regret  de  Moureau  ! 

•  Si  Fauvetti  était  malade  (dit-il),  il  échapperait 
bien  des  coupables,  et  alors  le  but  ou  gouvernement 
serait  manqué...  Les  premiers  sont  esclaves  des  for- 
mes; les  trois  autres  ne  veulent  d'autres  formes 
que  la  conviction  de  leur  eonscience. 

.    La  conscience  des  bourreaux  ! 

Voilà  pourtant  la  correspondance  des  politiques 
de  l'ancien  gouveruemenL 

C'est  la  mort  qui  veut  créer  une  législation  dans 
son  empire. 

Suivons  encore  Thonnéte  Moureau. 

•  Je  vais  travailler  (continue-t-il)  à  une  Adresse 
dans  le  sens  que  tu  me  parles,  ■ 

Nous  ne  relèverons  pas  le  tangage  tudesque  de  ces 
barbares. 

•  J'avais  bien  raison  de  le  dire  (s'écrie  Moureau)* 
et  je  le  dis  encore,  si,  au  reçu  de  ma  lettre,  ceux  c]ui 
s'asseyaientà  côté  de  Danton  (image  empruntée  d  un 
puhlioiste(l)  de  cette  assemblée)  ne  sont  pas  arrêtés 
et  punis,  la  chose  publique  est  en  danger. 

(%\  BiUaMkVaf«Mifa,  m  parbuii  èm  Pabr*  étEf/kmsim,  a 
iiH  Mi  la  SÊm  èè  la  Gmwoiimi  :  •  Halbew  à  mm  ^  sm 


571 


«  Les  ehoses  marchent  roide  ici  :  on  y  est  indigna 

dfs  entraves  que  les  Tallien  et  consorts  voudnienl 
nifMlre  à  la  marche  des  choses.  • 

Vous  le  voyez ,  citoyens ,  comme  de  misérables 
valets  de  vos  insolents  proconsuls  osaient  montrer 
de  leurs  doigts  teints  do  sang  les  téteades  patriotes 
que  leurs  maîtres  avaient  proscrits. 

Moureau  parle,  dans  un  autre  courrier «d^unevi* 
site  domiciliaire  faite  dans  Avignon ,  qui  a  produit 
une  arrestation  de  cinq  cents  personnes:  Maignet 
(dit-il)  en  a  ordonne  la  triaille. 

Dans  un  autre,  Moureau,  qui  vient  d*une  tournée, 
annonce  •  qu*il  a  vu,  la  veille ,  les  flammes  révolu- 
tionnaires qui  consumaient  l'infâme  Bédouin;  il  y  a 
eu  (dit'ij)  soixante-trois  guillotinés.  Le  reste  des 
habitants  est  partagé  entre  quatre  communes  envi» 
ronniintes,  ou  il  sera  traite  comme  les  oi^evant 
sortis  de  Paris,  » 

On  sait  le  sort  que  réservait  l'anciea  gouverne* 
niout  à  tous  ers  expatries. 

Il  fnul  p.irconrir  encore,  pour  se  faire  une  idée  de 
ce  tribunal  d'Orange,  les  lettres  de  tauve tti,  le  h^- 
ros  d'Agricole,  l'un  des  complices  de  Maigtiet. 

Il  se  plaint,  comme  Moureau,  •  des  formes  obse^ 
vées  par  Boman-Fonrosa,  son  collègue;  il  se  plaint 
de  Meilleret ,  qui  ne  vaut  rien  au  poste  qu'il  oo* 
cupe.  •  Il  est  quelquefois  d'avis  (dit-ih  de  sauver 
des  prêtres  contre-révolutionnaires;  il  lui  faut  des 
preuves  ;  il  inculque  cette  manière  de  voir  à  Roman  ; 
il  le  tourntentc,  et  tous  le§  deux  réunis  nous  tour^ 
mentent  à  leur  tour.  • 

Il  lui  faut  despreuvesl...  Parcourons  celled'un 
scélérat  nommé  Benêt ,  qui  écrit  ces  mots  atrocea  à 
Payan  : 

•  Tu  connais  la  position  d'Oronge  ;  la  guillotine 
est  placée  devant  la  montagne;  on  dirait  que  toutes 
les  têtes  lui  rendent,  en  tombant,  l'hommage  qu*elle 
mérite  :  allégorie  précieuse  pour  de  vrais  amis  de  la 
liberté.  • 

Ce  Benêt  est  le  digne  greffier  de  la  commission. 

Dans  une  autre,  ce  misérable  s'exprime  a vco  cette 
légèreté  «  partage  de  l'ignorance  féroce  : 

-  Encore  un  triomphe  de  la  liberté!  Un  ci-devant 
prêtre  passe  sous  mes  fenêtres ,  en  robe  rouge,  es^ 
corté  par  la  gendarmerie  ;  devine  où  va  le  cortège... 
Demam  on  en  annonce  sept  ou  huit  ;  après-demain , 
vêldchê  au  ikédire.,.  L'esprit  public  se  vivifie  dana 
cette  commune.  • 

il  faut  conserver  tous  ces  traits  i  l'histoire ,  ci- 
toyens ;  O  Caligula!  ô  Néron!  0  TigellinI  tyrans 
en  chef  et  tyrans  subalternes  des  siècles  passés, 
consolez-vous  dans  vos  tombeaux  :  des  enfants  qui 
durent  être  ceux  de  la  liberté  ontaurpasaë  vos  oa-> 
priées  et  vos  fureurs  ! 

C'est  peu  de  ton»  ces  traits;  l'impression  despiè-. 
ces  en  fera  connaître  beaucoup  d'autres. 

Qui  pourra  ,  sans  Irémir ,  mesurer  la  profondeur 
de  i'ubînie  que  ces  intrigants  forcenés  se  plaisaient 
à  creuser  encore  ,  pour  le  combler  de  ruinea  et  de 
ca<lavres! 

Oui  pourra  parcourir  les  caractères  de  sang  tracés 
par  ces  mains  encore  fumantes ,  par  les  Juge ,  les 
Faure,  les  Dounaud,  tous  dignes  correspondants  des 
deux  frères  Payan,  tous  dignes  exécuteurs  des  vo« 
Ion  tés  de  Maignet! 

Vos  décrets  ont  porté  des  peines  contre  Pémigra* 
tiou;  mais  que  diresvous,  citoyens ,  quand  la  leC'* 
ture  de  cette  infernale  correspondance  vous  (trou- 
vera que  la  rage  de  tous  les  fnux  révolutionnaires 
Kont  iiiii  à  cbié  de  lu! ,  è*\U  ne  reviennent  pa«  de  leurs  er^ 
reurtl  •  Et  Voù  était  riminel  quand  le  hasard  vous  avall 
pincé  i  cÀië  d*un  homme  dooi  lesossassius  de  lalibcrtë  avaient 
pio^cril  la  tétei  *A.  M. 


s*étendait  sur  les  oceurs  houtiétca  icH^s  Mètaa  à 
leurs  foyers  et  à  leur  patrie ,  •  pour  leur  donner,  dh* 
saient*ils ,  le  regret  de  n'avoir  point  émi^!  • 

Vous  faisiez  des  lois  pour  punir  le  crime ,  etoea 
lois,  dans  la  main  des  scélérats i  étaient  une  armt 
pour  assassiner  la  vertu. 

il  est  dea  êtres  pour  qui  tout  est  Joie  et  bonheur, 
d'autres  pour  qui  tout  est  ennui ,  tout  est  tourment 
dans  la  félicité  publique.  Le  viaage  riant  de  l'homme 
vertueux  annonce  que  tout  jouit  autour  de  lui; 
le  sourire  du  méchant,  que  tout  gémit i  que  tout 
souffre. 

Avec  quelle  funeste  Joie  ces  misérables  ta  oom^ 
plaisaient  à  multiplier  les  viotimesl  Bcoute»>let, 
citoyens* 

•  Lorsqu*on  a  prononcé  l'arrestation  de  la  femme 
Laroche ,  on  discuta  (dit  l'un  d*eux)  si  Son  mari  se- 
rait de  la  partie.  Le  conaeil  général  et  le  comité  dé- 
cidèrent, a  l'unanimité,  que  Laroche  ne  serait  point 
arrêté ,  vu  qu'il  avait  donné  dea  preuves  de  boil 
citoyen.  • 

•  Malgré  cette  décision  favorable  (écrit  ce  lâche 
à  Payan),  si  tu  as  par«devera  toi  quelque  motif  qui 
dicte  sou  arrestation ,  dénonce-le ,  et  tu  verras  qu'il 
prendra  rang  parmi  ces  messieurs  qui  figurent  à  la 
citadelle.  • 

C'était  donc  peu  d*étre  sorti  pur  de  Texamen 
d'un  conseil  général  de  commune ,  et  d'un  comité 
de  surveillance  ;  la  scélératesse,  au  désespoir  d'avoir 
vu,  sans  la  aisir,  s'échapper  Poccasion  d'un  oHme , 
mendiait ,  à  deux  cents  lieues ,  auprès  de  la  sct^léi  a- 
tesse,  l'espoir  de  rouvrir  encore  lia  cachots  à  Piti^ 
nocenoe I 

O  patriotes  1  e'était  pourtant  à  de  telles  maina 
que  de  farouches  décemvirs  avaient  confié  vos  dea« 
tinéesl  leurs  vils  agenu  vomis  sur  la  surface  de  la 
république ,  plus  nombreux  et  plus  homicitleB  quo 
ces  insectes  qui  jadis  dévorèrent  l'Egypte,  avaient 
droit  de  vie  et  de  mort  sur  tout  ce  qui  les  entourait. 

La  scélératesse  était  instituée  luge  en  dernier  rea* 
tort  de  la  vertu  ;  rijgnorance ,  du  mérite  et  du  Sa» 
voir  ;  et  lecontre-révolntionnaire,  en  bonnet  rougCi 
breveté  de  civisme  par  l'ancien  gouvernement,  don- 
nait i  son  lourdes  brevets  de  |>atriotisme  aux  contre» 
révolutionnaires ,  et  de  mort  aux  patriotes.  Quels 
Juges,  6  grands  dieux  !  cVtaient  les  Parques  qui  s^é- 
talent  emparées  du  siège  de  Minos  et  de  Rtiadamante. 

Nous  ne  pouvons  vous  donner  ici ,  eitovens ,  une 
idée  de  certains  écrits  qui  ne  peuvent  soutTrir  l'ana^ 
lyse.  Il  fout  les  lire  tout  entiers,  et  vous  frémirfi:  en 
lisant,  et  vous  nous  plaindrez,  nous  que  vous  arer 
chargés  de  l'affligeant  et  pénible  emploi  de  dépouil- 
ler ces  exécrables  feuillets,  dégouttants  du  fiel  des 
furies,  et  rou^^is  du  sang  du  Juste. 

On  n*est  pas  étonné,  sans  doute,  qu'un  siècle  pro» 
duiseun  tvran  tel  oue  Caligula,  tel  que  Robespierre; 
qu'il  produise  à  côté  de  lui  un  phénomène  mons- 
trueux tel  que  Carrier  ;  mais  qu'à  la  fois,  et  comme 
d'un  gouffre,  il  fasse  sortir  de  la  terre  tant  de  mons- 
tres qui  lui  ressemblent;  qu'il  place  près  de  ces 
monstres  taht  de  complaisants  instruments  de  leurs 
coupables  desseins,  c'est  ce  qu'on  ne  peut  i'expli* 

3uer  qu'en  observant  avec  étude  le  mécanisme  des 
eux  puissants  leviers  qui  donnent  le  mouvement 
aux  hommes ,  la  crainte  et  Tesprit  :  la  eraintê  qui 
rend  prodigue  de  sacrifices  dont  Tespôir  laisse  at- 
tendre l'inaemnité.  C'est  k  Talde  de  ces  deux  levierSf 
dont  nos  tyrans  savaient  trop  bien  diriger  l'action  i 
qu'on  a  incacéré  un  dixième  de  la  république ,  et 
qu'on  s'est  servi  de  l'autre  dixième,  qtii,  dans  l'espé* 
rance  d'échapper  lui-même  à  la  clintne.  a. forgé 
celle  du  premier.  Faut-il  que  cette  seule  Idée ,  oui 
doit  nous  ramener,  citoyens,  au  sentiment  de  notr^ 


572 


f:iib1es8a,  nons  arrache  un  cri  de  pitië  en  faveur  de 
ces  instruments  du  crime,  dont  la  terreur  a  tant  de 
fois  trop  violemment  presse  le  ressort?  Quel  est 
l'homme  sensible  qui,  en  di^teslant  leurs  fiirrurs, 
ne  plaindra  pas  leur  égarement ,  et  n'éprouvera  pns 
des  mouvementsd'horreur  déplus  pour  les  monstres 
oui  les  ont  perdus?  La  postérité ,  ce  grand  jury  des 
événements  et  des  actious  humaines,  passera  l'é- 
ponge sur  beaucoup  de  ces  crimes  commatndés  à 
des  êtres  faibles,  par  des  chefs  qui  ne  leur  laissent 
souvent  que  Talternative  de  l'obéissance  ou  du  sup- 
plice. Dans  un  temps  où  il  est  dangereux  d'être 
vertueux ,  il  est  bientôt  dangereux  de  n*étre  pas 
criminel  :  et  le  peu  de  ressort  d'âme,  une  mauvaise 
éducation ,  une  pente  plus  ou  moins  tracée  vers  la 
corruption  ;  et  la  terreur ,  la  terreur  qui  a  vu  plus 
d'une  fois  broncher  la  vertu  elle  -  même;  voilà 
l'excuse  de  quelques-uns  de  ces  malheureux  ,  que 
l'austérité  de  notre  ministère  nous  a  forcés  à  vous 
dénoncer.  Aussi  justes  que  la  postérité,  vous  distin- 
ffuerez  ceux  qui  n'ont  cédé  qu'à  la  contagion  de 
rexemple ,  de  ceux  qui  ont  suivi  les  mouvements 
d'un  coeur  féroce  ;  ceux  qui  n'ont  été  coupables  (|ue 
par  le  fait ,  de  ceux  qui  l'ont  été  d'intention  ;  ceux 

aui  souffraient  à  l'être,  de  ceux  qui  l'étaient  avec 
élices  ;  vous  distinguerez  enfin  ceux  qui ,  rendus  à 
eux-mêmes ,  pourront  redevenir  bons  et  sensibles , 
de  ceux  qui ,  plus  cruels  encore  par  l'impunité ,  re- 

Broduiraient  peut-être  un  jour  des  Carrier,  des 
laignet,des  Lebon ,  des  Collot,  etc.  (1). 
Mais  si ,  par  respect  pour  Thumanité ,  vous  par- 
donnez l'égarement  ;  par  respect  pour  la  patrie ,  il 
faut  ôter  à  des  mains  qu'on  égara  une  fois  les 
moyens  de  Têtre  encore.  Des  autorités  constituées 
qui  se  sont  enrôlées  sous  les  bannières  de  la  persé- 
cution doivent-elles  siéger  sous  l'étendard  de  la 
justice?  Vous  ne  voulez  point  d'épuration  à  la  Car- 
rier ,  à  la  Maignet;  mais  vous  direz  à  ceux  qui  les 
ont  servis,  ces  tyrans  :  •  Vous  abusâtes  de  vos  pla- 
ces, nous  les  donnons  à  de  plus  dignes  citoyens. 
L*exemple  vous  corrompit;  régénérez  -  vous  par 
Texemple.  • 

Pour  nous ,  qui  avons  touché  le  terme  de  notre 
douloureuse  tâcne,  nous  voulons  encore  laisser  pour 

(t)  CoUot  et  Maignet  t'appoient,  pour  se  justifier,  sur  le 
attloriiAtioni  qu'ils  disent  avoir  reçues;  mais  lorsque  la  jus* 
lloe  est  k  l'ordre  du  jour  dans  une  république ,  les  hommes- 
invoslii  des  pouvoirs  du  peuple  seraient-ils  moins  justes  qued 
lit  tyrans  eui-mémes! 

Voi«:i  ce  que  Voltaire  cite,  en  parlant  de  la  proscription 
jliridique  des  habitants  de  Mërindoi  et  de  Cahrière ,  sous 
François  l*s  en  1546  :  «  Ce  fut  la  seule  proscription  rêvé- 
tut  des  formes  de  la  justice  ordinaire....  Le  crime  est  plus 
grand  quand  il  est  commis  par  ceui  qui  sont  établis  pour  ré- 
primer les  crimes  et  pour  protéger  Tinnocence.  Un  avocat 
général  du  parlement  d'Aii,  nommé  Guérin  (de  concert  avec 
un  certain  frère  Jean,  de  Rome,  envoyé* par  le  pape)  est 
le  premier  auteur  de  celte  boucherie.  «  C'était,  dit  Thisto- 
«  rien  César  Nostradamus,  un  homme  aussi  noir  de  corps  que 
n  d*Ame,  autant  froid  orateur  que  persécuteur  ardent  et  ca- 
M  lomniateur  eiïronté...  »  Guérin  et  lui  soutinrent  que  dii- 
huit  villagesctaient  infectés  d'hérésie.  Le  président  d'Oppède, 
trompé  par  une  information  frauduleuse  de  Gnérin,  demanda 
au  roi  des  troupes  pour  sppuyer  la  recherche  et  la  punition 
des  prétendus  coupables.  François  !•',  trompé  k  son  tour, 
accorda  enfin  les  troupes.  D'Oppède  et  Guérin,  à  leur  tète, 
Mirent  le  feu  i  tous  les  villages,  tout  futlué... 

«  Quiconque  a  lu  l'histoire  sait  assez  qu'on  fit  justice  ;  que 
le  parlement  de  Paris  fit  pendre  l'avocat  général,  et  que  le 
président  d*Oppède  échappa  au  supplice  qu'il  avait  mérité. 
Cette  grande  cause  fut  plaidée  pendant  cinquante  audiences. 
Ik  alléguèrent  les  ordres  et  les  exemplei  donnés  par  l'Eglise 
centre  les  hérétiques.  Ces  exemples  et  ces  ordres  n'empé- 
ahèreat  pas  que  Guérin  ne  fût  pendu,  n 
.  (Voïuire,  QuêsUons  sur  l'Encyclopédie,  Conspirations  con» 
^^w  ses  A  eisvfestS 


adieux  ces  derniers  mots  aux  tyrans  qui  nons  en- 
tendent : 

Tyrans ,  vous  eûtes  tous  la  même  marche.  Vos 
premiers  crimes  furent  ceux  de  Tambition  ;  les  der- 
niers ,  ceux  de  la  peur.  On  n'achète  point  sa  sûreté 
en  multipliant  ses  victimes,  comme  on  ne  se  délivre 
point  de  répouvante  en  la  répandant.  Tyrans  ,  vous 
avez  pu  détourner,  un  moment,  de  votre  personne, 
ceux  que  votre  persécution  força  à  s'occuper  d*eux- 
mémes  :  dans  1  excès  de  leur  misère ,  de^  hommes 
libres  ont  pu  oublier ,  un  moment ,  le  soin  de  leur 
liberté  :  vous  avez  pu  ,  en  les  occupant  à  parer  vos 
coups,  leur  faire  perdre  les  heures  qu'ils  eussent 
employées  à  les  venger  ;  mais  tout  a  son  terme.  La 
patience  n'est  pas  aussi  infatigable  que  la  tyrannie  : 
si  le  méchant  ne  se  lasse  point  d'être  oppresseur,  le 
juste  se  lasse  d'être  opprimé  :  et  les  cnaîties  et  les 
tortures ,  et  le  sang  et  les  victimes ,  tout  retombe  à 
la  fois,  et  comme  un  poids,  sur  la  tête  du  tyran  pour 
l*^raser.  

*  Nota.  On  m'a  fait  le  reproche  de  n'avoir  fait 
mention,  dans  ce  rapport,  ni  des  colonies,  ni  de  la 
diplomatie  du  Levant,  dont  quelques  morceaux  se 
sont  trouvés  dans  les  papiers  de  Bobespierre.  Je  ré- 
pondrai au  premier  reproche  :  que  je  n'avais  pas 
assez  de  documents  pour  me  guider  dans  une  ma- 
tière aussi  délicate  et  aussi  épineuse  oue  celle  des 
colonies;  que  la  Convention  ayant  d'ailleurs  nommé 
une  commission  ad  hoc  ,  j'ai  cru  devoir  renoncer  à 
ce  projet ,  qui  m'offrait  ou  des  diflicullés  insurmon- 
tables, ou  un  travail  au-dessus  de  mes  forces.  Quant 
au  second  reproche,  je  répondrai  :  que  la  Conven- 
tion ayant  ordonné  la  remise  de  toutes  les  pièces 
diplomatiques  au  comité  de  salut  public,  j'ai  cru 
devoir  me  borner  à  l'anecdote  suivante,  dont  quel- 
ques-uns de  mes  collègues  garantiraient,  au  besoin, 
1  authenticité. 

L'ancien  comité  de  salût  public  a  tellement  né- 
gligé la  partie  diplomatique  et  commerciale  des 
opérations  à  faire  dans  le  Levant ,  qu'une  immense 
àuantité  de  lettres  de  cette  intéressante  correspon- 
dance de  Constantinople  et  autres  lieux,  a  été  trou- 
vée, sotu  cachet,  éparse  dans  les  cartons  que  Ro- 
bespierre avait  enlevés  du  comité.  Quelques-unes 
de  ces  lettres  dont  il  a  été  pris  lecture,  prouvent  que 
les  Anglais  ne  dormaient  pas,  et  travaillaient  à  ren- 
re  nulle  notre  influence  auprès  de  la  Porte. 

On  sait  encore  qu'à  Tépoque  où  les  nouveaux 
membres  du  comité  entrèrent  en  fonctions,  on  avait 
fait  la  découverte  d'autres  énormes  paquets  aban- 
donnés dans  le  coin  d'un  appartement,  et  dont  la 
date  remontait  à  plus  d'un  an  de  distance.  Au  reste, 
Barère  a  répondu  d'avance  à  cette  dernière  inculpa- 
tion, en  disant  que  notre  diplomatie  ne  devait  se 
faire  qu'à  coups  ae  canon  ;  et  ces  politiques  ineptes 
n'ont  pas  senti  qu'on  ne  pouvait  faire  la  guerre  sans 
négocier  en  même  temps!  Comment  la  France  a-t- 
elle  pu  résister  à  tant  de  fléaux  réunis? 

Je  dois  encore  dire  que ,  lorsque  j'ai  désigné  les 
comités  de  gouvernement  comme  complices  de  Ro- 
bespierre et  tyransde  première  ligne,  je  n'ai  pas  pré- 
tendu étendre  ma  proposition  à  tous  les  membres 
qui  composaient  alors  les  deux  comités.  J'observe 
qu'il  n'est  ici  question  que  de  cette  majorité  coupa- 
ble des  horreurs  qui  ont  piesé  si  longtemps  sur  la 
république  entière.  Le  moyen  de  regarder  comme 
leurtomplice  Thonnétc  R.  Lindet,  cet  ange  de  paix, 
dont  la  prudence  et  la  fermeté,  diçnes  des  plus  gr.inds 
éloges,  ont  sauvé  le  Calvados  des  déchirements  et 
des  angoisses  d'une  guerre  civile  prête  à  v  éclater  ! 
Je  saisis  avec  plaisir  cette  occasion  de  rendre  justice 
à  un  bon  citoyen ,  qui  s'est  exprimé  quelquefois  sur 


573 


le  compte  des  sc(^lërats  voués  à  l'exécration  publi- 
que avec  une  franchise  qui  n'avait  pas,  à  celte  ëpo 
que  beaucoup  d'imitateurs.  J'excepte  également 
les  membres  que  dis  missions  éloignées  rendaient 
(ilrangers  à  tout  ce  qui  se  passait  dans  cet  antre  de 
Cacus,  où  des  monstres,  décorés  du  titre  fastueux  de 
grands  politiques,  méditaient  froidement  le  meurtre 
et  rassassinat  de  plusieurs  milliers  d'hommes.  La 
patrie  pourrait  dire  de  ces  empiriques  comme  Tem- 
pcreur  Adrien  :  «La  multitude  de  médecins  m'a  tué.» 


SUITE  A  LA  SÉANCE  DU  9  VENTOSE. 
Prétidence  de  Bourdon  (deCOiu). 

Délecloy  reproduit  le  projet  de  décret  présenté,  le 
21  pluviôse,  au  nom  du  comité  de  législation,  rela- 
tivement aux  membres  du  ci-devanl  comité  révolu- 
tionnaire de  Nantes.  Il  propose ,  attendu  que  le  ju- 
gement qu'ils  ont  subi  n'a  pu  éteindre  oue  le  délit 
révolutionnaire,  de  les  renvoyer  devant  le  tribunal 
criminel  du  département  de  Mayenne-et-Loire. 

MÉAULLE  :  Citoyens,  je  ne  puis  me  faire  à  l'idée 
de  remettre  entre  les  mains  de  la  justice  des  hommes 
acquittés,  sur  la  déclaration  d'un  jury,  par  un  juge- 
ment très-public  et  exécuté. 

L'on  prétend  que  le  tribunal  révolutionnaire  n'a 
point  pu  prononcer  sur  les  crimes  ordinaires  ;  qu'à 
cet  égard  le  jugement  est  nui,  et  qu'il  y  a  lieu  à  re- 

jUglT. 

Cette  proposition  est  d'une  conséquence  si  dan- 
gereuse qu'il  m'a  paru  indispensable  d'appeler  ici 
toute  Tattention  de  la  Convention  nationale  :  elle 
vous  engage  dans  la  révision  des  jugements  exécutéi^^ 
du  tribunal  révolutionnaire;  elle  est  d'ailleurs,  à 
mon  sens,  une  violation  manifeste  des  lois  et  des 
principes  les  plus  sacrés  :  nulle  considération  au 
monde  ne  doit  nous  arrêter  dans  une  matière  aussi 
importante. 

D'abord  il  est  incontestable  que  la  déclaration  du 
jury  a  porté  sur  tous  les  faits  imputés  aux  accusés. 
Tous  ces  faits,  sans  aucune  distinction, sans  nulle 
exception,  ont  été  compris  dans  l'acte  d'accusation, 
ont  fait  la  matière  des  débats. 

Donc  le  jugement  acquitte  les  accusés  de  tous  les 
délits,  de  quelque  nature  qu'ils  aient  été.  Les  termes 
d'ailleurs  le  prouvent  très-expressément. 

Or  il  n'y  a  ni  appel,  ni  recours,  ni  cassation  des 
jugements  du  tribunal  révolutionnaire, sous  quel- 
que prétexte  que  ce  soit;  donc  le  projet  de  décret 
violerait  la  loi  ;  donc  il  n'est  pas  admissible. 

Quand  on  passerait  sur  ce  principe,  l'on  n'en  se- 
rait pas  plus  avancé  pour  justifier  la  proposition. 

En  vam  dit-on  que  le  jugement  est  incompétent  : 
cette  allégation  n'est  qu'une  chimère. 

10  La  compétence  ne  pourrait  plus  être  alléguée 
au  nom  de  l'intérêt  ou  du  ministère  public,  puisque 
c'est  l'accusateur  national  qui  a  provoqué  la  procé- 
dure et  le  jugement:  elle  peut  l'être  d'autant  moins 
qu'elle  n'était  pas  radicale,  mais  seulement  acciden- 
telle et  relative  à  la  qualité  des  personnes.  En  effet, 
la  loi  attribue  au  tribunal  révolutionnaire  la  con- 
naissance des  prévarications  et  attentats  de  plusieurs 
fonctionnaires  publics  dans  l'exercice  de  leurs  fonc- 
tions. 

20  Que  cette  incompétence  doit  être  nroposëe  an 
*  moins  au  commencement  du  procès,  in  Umine  Mis, 
Au  contraire,  toute  la  procédure  fut  faite  sans  récla- 
mation aucune,  soit  des  accusés,  soit  de  l'accusateur 
public,  soit  des  dénonciateurs ,  soit  des  jurés,  soit 
des  juges.  La  prétendue  incompétence  serait  donc  en 


tout  cas  couverte  par  une  procédure  longuement 
faite  et  volontairement  consentie. 

30  H  n'est  pas  d'exemple  que  l'incompétence  ait 
jamais  été  alléguée  après  l'exécution  d'un  jugement. 
Or  le  jugement  que  l'on  veut  présenter  aujourd'hui 
comme  incompétence  a  été  exécuté. 

Oui ,  deux  accusés ,  Pinard  et  Grandmaison ,  ont 
subi  la  iport  pour  des  crimes  particuliers  et  proba- 
blement ordinaires  ;  les  renverrait-on  aussi  devant 
les  juges  d'Angers,  aujourd'hui  qu'ils  n'existent 
plus?  Cependant  cela  serait  indispensable,  dans  les 
termes  de  la  proposition  faite  à  l'assemblée  ;  car  on 
ne  saurait  faire  que  le  jugement  soit  bon  pour  eux 
et  nul  pour  les  acquitta.  Quelle  serait  cette  législa- 
tion qui  dirait  du  mêmeiugement:  Bon  pour  ceux 
qui  sont  morU;  nul  pour  ceux  qui  sont  restés  vi- 
vanti?  Cette  maxime  barbare  et  sanguinaire  est 
heureusement  contraire  aux  principes.  L'exécution 
du  jugement  le  met  hors  de  toute  espèce  d'attaque. 

11  est  encore  un  moyen  plus  puissant  qui  milite 
contre  le  projet  de  décret  ;  je  soutiens  qu'il  n'y  a 
point  eu  d'incompétence.  Je  pensais  d'abord  que  les 
crimes  imputés  au  comité  de  Nantes  devaient  être 
renvoyés  au  tribunal  criminel  du  département. 

Que  fit-on  alors?  Je  me  le  rappelle  parfaitement; 
un  décret  formel  investit  le  tribunal  révolutionnaire, 
et  lui  enjoignit  de  poursuivre  les  auteurs  et  compli- 
ces de  tous  les  attentats  commis  à  Nantes. 

Assurément  ce  décret  leva  tous  les  doutes  ;  le  tri- 
bunal instruisit,  jugea  sur  tout,  sans  aucun  scrupule 
relativement  à  sa  compétence,  qu'il  tenait  de  la  puis- 
sance de  la  Convention. 

Le  décret  ne  permet  pas  qu'un  nouveau  tribunal 
prenne  connaissance  d'une  affaire  complètement 
instruite  et  verbalement  jugée  :  ceci  est  sans  ré- 
plique. 

Serait-ce  après  soixante-six  jours  de  procédure, 
d'instruction,  de  débats,  dans  un  procès  célèbre  qui 
a  eu  son  cours  sous  les  yeux  de  la  Convention,  dont 
on  a  rendu  compte ,  jour  par  jour,  au  comité  de  sû- 
reté générale  ;  serait-ce  après  tout  cela ,  après  la 
mort  de  deux  accusés ,  que  l'on  pourrait  établir  une 
prétendue  incompétence?  Non ,  le  jugement  dont  il 
s'agit  n'est  plus  du  ressort  de  la  législation  ni  des 
tribunaux  :  il  n'y  en  a  d'appel  qu'à  la  postérité; il  est 
désormais  tombé  dans  le  domaine  de  l'histoire. 

Je  demande  l'ordre  du  jour  sur  le  projet  de  décret 
proposé  au  nom  du  comité. 

Bailleul  :  On  a  rassemblé  beauconp  de  sophismes 
pour  atténuer  l'horreur  qu'inspire  nécessairement 
cette  affaire;  je  crois  qu'on  ne  peut  mieux  répondre 
à  tous  ces  sophismes  qu'en  lisant  le  jugement  du 
tribunal.  On  verra  si  les  accusés  ont  été  réellement 
jugés,  et  si  les  jurés  n'ont  écouté  que  la  voix  de  leur 
conscience.  (Applaudissements.) 

Legenobb  :  Si  l'on  veut  donner  suite  à  cette  af- 
faire ,  je  demande  qu'elle  soit  discutée  solennelle- 
ment et  avec  toute  l'étendue  dont  elle  est  suscep- 
tible. Je  demande  que,  pour  cela,  on  appelle  les 
membres  des  comités  de  salut  public  et  ae  législa- 
tion. 

Rewbell  :  La  lecture  du  jugement  m'a  révolté  ; 
cela  ne  m'empêchera  cependant  point  de  prendre  la 
parole  pour  défendre  les  principes,  qui  sont  au-des- 
sus de  toutes  les  indignations  possibles.  (Applaudis- 
sements.) 

La  Convention  ijoume  cette  discnsnon  à  primidi, 
à  deux  heures. 

ViLLETABD  :  Cette  affaire  est  de  la  plus  grande 
importance,  et,  pour  qu'on  la  puisse  discuter  en 
connaissance  de  cause,  je  demande  que  le  discours 
de  Méaulle  soit  imprimé. 


5T4 


UlmpMS^on  Mt  déerëtée. 

— Milhaud,au  nom  descomitëdesÛretëgf^tK^rale, 
des  finances  et  mitilaire,  propose  un  projet  de  décret 
qui  est  adopté  en  ces  termes  : 

c  La  ConfeDtlon  oatiooale,  après  avoir  entendu  set  co- 
nitës  de  sûreté  générale,  des  flnaoces  et  utilitaire  réunis, 
décrète  ce  qui  suit  : 

c  Art.  r*.  Le  corps  des  pompiers  de  Paris  tara  porté  au 
complet  de  trois  cent  soixante-seize  buromes. 

•  11.  Ils  seront  divisés  en  trois  eompagnles,  composées 
chacune  de  cent  vingt-quatre  hommes,  savoir  : 

•  Un  capitaine, 
«  I^n  lieutenant, 
i  Un  sergent, 

•  (Quarante  caporaui  cbels  da  potto) 

•  Quatre-vingt>un  pompiers, 
I  Un  tamlMur. 

I III.  Ce  corps  sera  sous  les  ordres  d*un  commandant  ne 
chef  et  d'un  commandant  en  second. 

i  IV.  Il  aura  un  quarder*mattre  et  un  chirurgien,  «t  sem 
tous  la  surveillance  du  comité  de  sûreté  générale,  ou  dt  toute 
autre  autorité,  à  laqueUe  la  police  sera  déléguée. 

«  V.  Les  citoyens  qui  devront  compléter  ce  corps,  s'il  ne 
Voil  pas,  seront  choisis  parmi  les  anciens  pompiers,  parmi 
des  citoyens  exerçant  ou  ayant  exercé  pendant  quatre  ans 
les  professions  de  maçon,  charpentier,  couvreur  ou  plom- 
bier. 

•  VL  Ils  n*admettront  que  des  citovens  munis  de  certi- 
ficat de  civisme  ou  de  bonne  conduite,  délivré  par  leur 
section. 

«  VU.  La  liste  en  sera  présentée  par  le  commandant  au 
comité  de  sùrelé  générale,  qui  oonfinoera  oo  rejettera  les 
nominations. 

i  A'Iil.  Toute  place  de  pompier  qui  viendra  à  vaquer  par 
la  »uite  sera  remplacée  de  la  même  manière. 

i  IX.  L'avancement  aux  différents  grades  se  fera  moitié 
par  ancienneté,  moitié  par  élection ,  du  pompier  au  capo- 
ral, du  caporal  au  sergent,  et  successivement  de  l'un  à  l'autre 
grade.  Jusqu'à  celui  de  commandant  en  second. 

«  X.  Le  commandant  en  chef  et  le  quartier-maître  aeront 
nommés  par  la  ConvenUon,  sur  la  présentation  du  comité 
de  sûreté  générale,  et  U  pUce  de  chirurgien  sera  donnée  au 
concours. 
«  XL  Les  ofOciere  actuellement  en  grade  seront  eontervés. 
«  XII.  Cependant  nul  ne  pourra  conserver  ou  être  élu  k 
aucun  grade  qu'il  ne  sache  lira  et  écrire. 

I  Xlil.  Il  ne  sera  rien  changé  au  mode  et  à  la  fourniture 
du  l'uniforme,  à  l'armement  et  au  service  qui  $9  trouve 
étnlili. 

>  XIV.  La  solde  des  pompiers  est  provisoirement  fixée 
ainsi  qu'il  suit  : 

L.e  commandant  en  chef 4.000  llv.  par  an. 

Le  commandant  en  second 3,000 

Le  quarticr^maltra S,400 

Les  capitaines S,400 

f^  lieutenanU S.OOC 

Les  sergents 1,900 

Les  caporaux 1,100 

1^  pompiers  et  tambours 1,000 

Le  chirurgien i,200 

<  XV.  Ceue  solde  sera  payée  à  compter  du  l"  pluviôse, 
c  XVI.  Les  deux  commandants ,  le  quart ler-maltre  et  le 
ohirurglen  seront  logés  dans  un  édifice  national,  au  centra 
de  Paris. 

«  XVII.  Ce  local,  appelé  liaison  des  Pompiers,  sera  l'en- 
trepôt des  pompes,  seaux,  haches,  crocs  et  autres  ustensiles 
à  1  usage  des  pompiers;  et  il  y  aura  toujours  dans  i*intërieur 
quatre  voitures  chargées  de  quatre  grandes  tonnes  d'eau, 
pour  être  transportées  au  besoin. 

«  XVIII.  Le  commandant  surfeillera  la  aervice,  la  comp- 
tabilité, la  tenue  et  Teniretlen  des  pompes,  seaux,  lonnes  et 
antres  oljeu  y  relatifs,  et  il  fera  fairs  dans  la  belle  Mlson 
la  manœuvre  des  pompes. 

•  XIX.  L'état  des  dépenses  à  foire  sera  présenté,  par  le 
oûOiaMBdant,  au  eomlié  de  sûreté  générale  ou  à  l'autorité 
chargée  de  la  police,  laquelle  en  ordonnancera  le  payement. 

•  XX.  Le  oommandant  en  chef  sera  aidé  et  suppléé  par  le 
enmmandanl  en  second. 

t  XXI.  Le  quartier -maître  fera,  tous  les  mois,  Tétai  de 
solde  du  corps,  lequel  sera  cerUflé  par  le  commandant  et 
Tlaé  par  un  commissaire  des  guerres  chargé  de  passer  les 


revnas  d^maget  eteat  état  sera  payé  par  la  tréaoraria  nailo* 
nale,  le  30  de  chaque  mois  échu.  Le  quarticr-maltre  fera  en 
outre  les  fonctions  de  secrétaire  de  l'étatrmajor. 

«  XXII.  Chaque  capitaine  recevra,  le  T'  de  chaque  mois, 
la  solde  de  sa  compagnie,  et  il  en  fera  sur-le-champ  la  dis- 
tribution au  lieutenant,  aux  sergents  et  aux  quarante  capo- 
raux, qui.  sans  retard,  paieront  le  mois  échu  A  chacun  des 
pompiers. 

I  XXlll.  Les  lieutenants  aideront  m  snppléeroBt  an  tout 
leurs  capitaines. 

c  XXIV.  Les  sergents  commanderont  tous  les  Jours  la 
service  du  lendemain,  après  avoir  été,  à  dix  heures,  cliet 
le  commandant  prendre  les  ordres  particuliers,  pour  les 
transmeure  de  suite  aux  capitaines  et  aux  caporaux. 

«  XXV.  A  cet  effet,  chaque  caporal  n'étant  pas  de  service 
se  rendra  tous  les  Jours,  A  midi,  chez  son  capitaine,  pour  j 
recevoir  l'ordre 

c  XXVI.  Les  tambours  seront  altematlrement  de  garde  & 
la  maison  des  pompiers,  où  ils  resteront  le  Jour  et  la  nuit, 
pour  porter  les  différents  ordres. 

I  XXVII.  Le  chirurgien  sera  tenu  de  se  trouver  à  tous 
les  incendies,  pour  donner  ses  soins  à  ceux  qui  en  auront 
besoin. 

c  XX\11I.  Chaque  compagnie  sera  affectée  à  plusieurs 
arrondissements  voisins,  et  chacun  de  ceux  qui  la  compo- 
seront seront  obligés,  pour  la  facilité  du. service,  d'y  faet 
leur  domicile  S  la  fin  du  terme  prochain. 

I  XXIX.  Chaque  poste  sera  composé  d'un  caporal  et  deux 
pompiers,  et  personne  ne  pourra  s'en  éloigner,  sous  aucun 
prétexte. 

•  XXX.  Indépendamment  de  la  garde  ordinaire  des  postes. 
Il  y  aura  au  dépôt  général  une  reserve  de  deux  pompiers 
par  compagnie,  commandée  par  un  sergenL 

I  XXXI.  Les  corps  de  garde  des  pompiers  seront  phicés 
auprès  de  ceux  de  la  furce  armée,  pour  en  recevoir  l'aide 
dont  ils  pourront  avoir  l>esoin. 

<  XXXll.  En  cas  d'incendie,  le  caporal  en  donnera  sur- 
le-cham|i  avis  par  écrit  au  commandant,  ainsi  qu'au  capi- 
(ptne  des  pompiers  de  l'arrondissement.  Ces  avis  seront 
portés  par  deux  ordonnances  du  plus  prochain  poste  de  to* 
lonlaires  ou  de  gendarmerie. 

I  XXXIII.  Le  commandant  des  pompiers  et  la  capitaine 
de  Parrondissement  se  transporteront  de  suila  au  fsu,  pour 
y  fdire  agir  les  secours  les  plus  actifs. 

c  XXXi  V .  Tous  les  officiers,  sous-officlers  ou  pompiers  de 
Ui  compagnie ,  qui  ne  seront  pas  employt^s  à  la  garde  des 
autre»  postes  de  l'arrondissement ,  se  rendront  de  m^me 
au  lieu  de  l'Incendie,  pour  y  recevoir  les  ordres  de  leur  chef. 

<  XXXV.  Si  le  cas  l'exige,  le  commandant  ordonnera  à  la 
réserve  de  faire  prendre  les  chevaux  du  voisinage,  ou  lea 
premiers  qu'on  pourra  rencontrer,  pour  être  attelés  oux 
chariots  du  dépôt,  et  conduits  avec  célérité  auprès  de  l'in- 
cendie. 

«  XXXVL  Les  frais  qu'occasionnera  cette  opération  se- 
ront payés  par  la  commission  des  travaux  publics,  sur  un 
mandat  délivré  par  le  commandant  aux  propriétaires  des. 
chevaux,  lequel  mandat  sera  certifié  par  deux  citoyens,  et 
visé  par  le  commissaire  de  police  de  la  section  où  sa  sera 
manifesté  l'incendie. 

c  XXXVIII.  Il  y  aura  tous  les  Jours  un  officier  de  vislle 
dans  chaque  arrondissement,  pour  surveiller  le  service . 
examiner  l'état  des  pompes  et  ustensiles,  et  rendre  compte 
du  tout  au  commandant. 

I  XXXVIII.  Il  sera  formé  on  conseil  de  discipline  présida 
par  le  commandant,  cl  composé  d'un  capitaine,  un  lleuté* 
nant,  un  sergent,  deux  caporaux  et  quatre  pompiers,  qui 
seront  pris  par  ancienneté  de  service  et  renouvela  tous  les 
mois.  Ce  conseil  se  conformera  à  tout  ce  que  prescrit  le  rè- 
glement décrété  le  14  brumaire  pour  U  garde  nationale  de 
Paris. 

«  XXXIX.  Len  commandants,  officiers,  sous-officlers  et 
pompiers,  leurs  femmes  et  leurs  enfants,  seront  assimilés , 
pour  les  secours,  retraites  et  pensions,  à  tout  oe  que  les  lois 
accordent  sut  défenseurs  de  hi  patrie,  A  leurs  femmes  M  à 
leurs  enfSnu. 

«  XL.  L'insertion  du  présent  décret  au  Bulletin  tiendra 
lieu  de  promulgation,  i 


SuUe  de  la  diseuuion  iur  Uê  finanea. 
Cambon  :  Les  projets  qa^il  resta  à  rotio  comité 


675 


des  6n«noei  i  tous  présenter,  et  c^ux  qui  vous  oui 
été  soumis  par  plusieurs  de  nos  collèf  ues,  ne  sont 
que  des  emprunts  sous  des  dénominations  différent 
tes  :  la  banque  nationale  est  un  emprunt,  la  tontine 
est  un  emprunt  ;  mais  comme  on  ne  peut  pas  mul- 
tiplier ces  moyens  de  ressources  qui  multiplieraient 
les  rouages  de  Tadministration ,  je  demande  que 
TOUS  consaeriei  une  ou  deux  séances  i  entendre  nos 
collègues  qui  ont  des  vues  à  proposer  ;  et,  en  com« 
parant  toutes  les  lumières ,  vous  serei  à  portée  de 
vous  décider  pour  celles  qui  mériteront  la  préfé- 
rence. 

Thirîon  monte  à  la  tribune  et  prononce  un  long 
discours,  par  lequel  il  propose  de  retirer  3  mil- 
lions d'assignats  de  la  circulation,  en  tirant  provi- 
soirement sur  les  propriétaires  fonciers  un  impôt  qui 
équivaudrait  à  dix  fois  la  valeur  de  leur  imposition 
actuelle.  Ils  recevraient  i  la  place  de  leurs  assignats 
des  obligations  patriotiques  qui  porteraient  3  pour 
101)  d'intérêt,  et  qu*ils  pourraient  donner  en  paye- 
ment de  domaines  nationaux.  Ces  obligations  au- 
raient cours  dans  le  commerce ,  et  ne  seraient  su* 
jettes  qu*à  un  laible  droit  d'enregistrement. 

VeaNiBB  :  Le  premier  moyen  que  la  Convention 
duit  employer  pour  rendre  le  crédit  aux  assignats 
est  de  faire  imprimer  l'état  des  biens  nationaux  avec 
les  dettes  dont  ils  sont  grevés  :  le  peuple  verra,  par 
cet  état,  qu*il  reste  aux  assignats  une  hypothèque 
dr  to  milliards. 

Je  demande ,  en  second  lieu  «  que  vous  déclariex 
que  les  biens  particuliers  servent  d*hypothèque  aux 
assignats  aussi  bien  que  le^s  domaines  nationoux.  Je 
peiisn  eiitin  qu#!  vous  devei  mlopter  à  la  fois  et  la 
tontine  et  une  loterie  bien  combinée  ;  ce  seront  deux 
gouffres  où  les  assignats  surabondants  viendront 
s'engloutir.  D^allleurs  ce  moyen  servira  très-bien 
les  vues  de  tous  les  hommes  uui  s'élancent,  dès  les 
premières  années  de  la  vie,  aana  une  carrière  au 
bout  de  laqu(  Ile  ils  espèrent  recueillir  une  petite 
t'orlunc  qui  puisse  assurer  le  repos  de  leurs  derniers 
jours.  Les  ouvriers,  tous  ceux  qui  auront  quelques 
sommes  un  peu  considérables  à  leur  disposition, 
viendront  les  placer,  dans  Tespoir  d'une  chance 
heureuse,  et  par  là  ils  éviteront  les  occasions  de  dé- 
bauohe  où  ils  sont  quelquefois  enlrahiés. 

Le  projet  de  la  tontine  et  de  la  loterie  est  donc  et 
moral  et  politique  ;  mais  il  faut  déclarer  au  peuple 
que  tout  le  profit  sera  pour  les  aotionnaires.  (On 
applaudit.) 

Johannot  et  Thibault  donnent  de  nouveaux  dé- 
veloppements aux  observations  de  Vernieri  qu'ils 
appuient. 

Ballano  :  La  loterie  ne  peut  remplir  le  but  qne 
se  propose  rassemblée,  puisque  les  bons  qui  rempla- 
ceraient les  assignats  deviendraient  eux-mêmes  des 
assignats  ()ui  circuleraient  au  moins  librement.  Ce 
serait  un  impôt  onéreux  au  peuple, dont  le  riche 
seul  profiterait,  et  qui  avilirait  la  Convention  en  la 
rendant  directrice  de  loterie.  Quant  aux  tontines,  je 
les  regarde  comme  une  entrave  à  la  vente  des  do- 
maines nationaux.  Comment  voulez-vous  qu'elles 
puissent  diminuer  la  masse  de  la  monnaie  nationale, 
puisqu'elles  nécessiteraient  rémission  d'un  nouveau 
papier.  Une  banque  nationale  me  paraît  un  moyen 
plus  simple,  plus  dizne  de  la  nation,  plus  favorable 
aux  citoyens,  capable  enfin  de  retirer  de  la  circula- 
tion beaucoup  d'assignats,  etsurtoutde  donner  à  la 
république  ta  facilite  de  faire  des  échanges  au  pair 
avec  les  étrangers. 

TutRioT  ;  Je  pense  au  contraire  que  le  système 
d*uuc  banque  ne  peut  servir  qu'à  rendre  la  nation 


directrice  de  tous  les  poHenrs  d'sssignats  à  ses  (hijs, 
sans  peut-être  en  retirer  un  seul  ;  car  supposons  qtie 
4  milliards  d'assienats  aient  été  échangés  contre  des 
reconnaissances  Jes  porteurs  de  ces  reconnaissances 
peuvent,  deux  mois  après ,  échanger  ces  reconnais* 
sances  contre  des  assignats,  et,  après  avoir  perdu 
les  intérêts  que  vous  auriex  payés,  vous  vous  trou- 
veries  avoir  une  aussi  grandie  masse  d*as^iguats 
qu'auparavant. 
Je  crois  donc  que  la  loterie  est  préférable.  Mais 

)e  voudrais  qu'on  l'établft  aveo  des  billets  moins 
orts,  et  par  conséquent  des  lots  moins  considérables. 
La  tontine  peut  entraîner  beaucoup  d'inconvénients, 
Tïelui  surtout  de  prolonger  pendant  un  ^pace  de 
temps  considérable  des  intérêts  énormes  qu'il  faudra 
payer,  tandis  qu*aii  contraire  la  France  a  des  biens 
suffisants  pour  se  libérer  de  toute  sa  dette. 

Quant  a  la  proposition,  faite  par  Vernier,  de  dé- 
clarer que  tous  les  biens  des  Français  servent  d'hy- 
pothèque aux  assignats,  je  Tappuie,  et  je  demande 
qu'elle  soit  mise  aux  voix  et  décrétée. 

CAMaoN  :  Je  crains  que  cette  mesure  ne  soit  atten- 
tatoire au  droit  de  propriété,  (il  s'élève  quelques 
murmures.)  Je  veux  émettre  mon  opinion  sur  cet 
objet.  Sans  doute  tous  les  hommes,  en  se  réunissant 
en  société,  contractent  l'obligation  de  la  garantie 
mutuelle»  et  par  conséquent  eelle  de  payer  des  con- 
tributions à  telle  ou  telle  quotité  ;  mais  je  ne  erois 
pas  (lue  chaque  citoyen  contracio  l'obligation  d  af- 
fecter sa  propriété  particulière  ,  de  manière  qu'elle 
puisse  être  aliénée.  (Nouveaux  murmures.)  J'en- 
tends des  murmures  ;  eh  bien,  je  vous  le  demande, 
pourquoi  vous  étes^vous  trouvés  dans  l'embarras? 
parce  qu'en  établissant  le  maximum  on  a  fait  con- 
tribuer les  propriétés  forcément,  et  qu'on  a  ainsi 
violé  le  principe  de  toute  société  bien  gouvernée. 
Ne  violez  Jamais  aucun  principe,  si  vous  voulex  que 
la  confiance  soit  inaltérable.  (On  applaudit.) 

Biwaiu,  :  La  question  qu'on  agite  en  ce  moment 
est  très-importante.  Elle  peut  être  envisagée  sous 
des  aspects  différents;  elle  peut,  étant  prise  sous  un 
certain  sens ,  nuire  à  la  confiance  publique  ;  je  de- 
mande qu'elle  soit  renvoyée  à  Texamen  des  trois 
comités. 

Cambon  :  J'ajoute  à  ce  qui  a  été  dit  dans  le  cours 
de  la  discussion  cjuè  le  produit  des  domaines  nalio- 
naux  est  de  29  millions  par  mois.  Je  demande  que 
rassemblée  discute  la  ouestion  de  savoir  si  elle  éta- 
blira une  loterie,  quelles  en  seront  les  bases,  et 
3 D'elle  renvoie  tout  le  reste  à  Texamen  du  comité 
es  finances. 

Le  renvoi  de  toutes  les  propositions  est  décrété. 
La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

•ÉAMei  DU  10  VBIfTOSE. 

On  lit  la  lettre  suivante  ; 

J.'B.'D,  Maxade,  représentant  du  veuple,  en  mis- 
iion  dans  les  départemenis  de  la  Moselle  el  de  la 
Mwxike^  d  (a  Convcniion  naU'oMii* 

Ifancy,  le  §  Yeateie.  Tmi  S*  de  U  Hpabliqwe 

c  Citoyens  collègues,  la  tranquillit<^  publique  fut  m  In- 
stant troat>lée  à  Nancy,  la  T'  de  ce  mois.  Je  rendis  conipto 
sur-te^bamp  ao  comité  de  sûreté  géoéraie  de  cet  évéuc- 
ne»i,  alasi  que  des  nesures  que  f  aTals  prises  pour  préfc- 
nir  le  retour  du  désordre.  Les  agents  de  l«  ftKïtIon  qui  veut 
régner  par  raffusioa  du  samg  ImUmIb  et  par  lu  terreur  dt« 
salent  4  Mmi  et  qu'ils  dicMM  panom  aOlaws»  i|u1l  «f 


676 


aTail  pM  de  tobtisUmces.  et  que  le  règne  de  Robespierre 
était  l'âge  d'or  de  la  république.  Hâloos-oous  de  coD8i{;ner 
dans  les  fastes  de  rbistoirc  que  les  Yiolences  de  ce  monstre 
exécrable,  que  le  san{,  des  Françai  qu'il  fit  coulei  par  tor- 
rents, que  le  pillagr  auquel  il  dévoua  toutes  les  propriétés, 
ont  seuls  amené  ce  momen*  de  gène  que  votre  sagesse  fait 
partout  disparaître  avec  tant  de  succès  Pour  l'bonDcur  de 
la  nature  bumaloe.  étouffons  des  cris  impies.  Il  serait  af- 
freux qu'on  pût  croire  que  des  hommes  regrettassen  un 
triumvirat  auprès  duquel  celui  d'Auguste ,  de  Lépide  et 
d'Antoine,  est  le  règne  de  Titus. 

•  Je  Joins  ici  one  proclamation  qui  a  ouvert  les  yeux  A 
ceux  des  citoyens  de  Nancy  qu'on  avait  égarés.  Elle  a  pro- 
duit ton  effet,  et  le  calme  le  plus  profond  a  succédé,  depuis 
le  2  ventôse,  dans  celte  commune,  à  cette  agitation  palua- 
gère  et  mendiée. 

«  Je  connais  aujourd'hui  les  provocateurs  et  les  moyens 
dont  ils  se  sont  servis.  Je  suis  convaincu  que  dans  toutes  les 
communes  de  la  république  on  observe  les  mêmes  faits,  et 
qu'ils  ont  partout  la  même  tactique.  Partout  c'est  un  brouil- 
lon obscur,  un  scélérat  subalterne,  que  ses  fonctions  ou  ses 
goûu  rapprochent  de  la  classe  la  moins  fortunée,  et  qu'il  est 
d'autant  plus  aisé  de  tromper.  Partout  leur  compassion  hy- 

Kcrite  cache  le  venin  de  la  vipère;  mais  partout  aussi  le 
n  sens  et  la  l>onté  du  peuple  servent  d'antidote  à  ce  poison. 

c  TOUS  les  iiabitants  de  la  commune  de  Nancy  chérissent 
la  Représentation  nationale,  tous  bénissent  vos  travaux  ;  tous 
coopéreront  avec  nous  A  la  consolidation  de  l'empire  des 
lois,  de  la  justice  et  de  l'humanité;  et  s'il  faut  en  excepter 
quelques  méprisables  factieux,  ils  tremblent  au  moins,  et  la 
crainte  des  lois  les  rend  impuissants. 

«  Salut  et  fraternité.  Signé  J.-^D.  MiSADS.  » 

Cette  lettre  est  renvoya  au  comité  de  sûreté  gé- 
nérale. 

—  Un  membre,  au  nom  du  comité  de  législation, 
propose,  et  la  Convention  adopte  le  projet  de  décret 
suivant  : 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  son  comité  de  législation,  décrète  ce  qui  suit  : 

>  Art.  I*".  L'arUcle  VllI  de  la  section  V  de  la  loi  du  U  fri- 
maire an  2*,  sur  le  mode  du  gouvernement  provisoire  et 
rérolutioimaire,  est  rapporté. 

«  U.  Il  ne  pourra ,  à  l'avenir,  être  appliqué  de  peines  af- 
flicUves  ou  infunantes  que  celles  portées,  soit  par  le  code 
pénal  ordinaire,  soit  par  le  code  pénal  militaire,  soit  par 
les  lois  révolutionnaires,  contre  les  délits  qu'ils  ont  prévus 
et  spécifiés. 

*  III.  I/Insertlon  du  présent  décret  au  Bulletin  de  correa- 
pondance  lui  tiendra  lieu  de  promulgation. 

—  Un  membre,  au  tioin  des  habitants  des  dépar- 
tetnents  du  Pas-de-Calais  et  du  Nord,  dépose  sur  le 
bureau  un  nouveau  recueil  de  preuves  contre  les 
oppresseurs  des  citoyens  de  ces  malheureuses  con- 
trées; ce  volume  a  pour  titre  :  Secrets  de  Joseph 
Lebori  et  de  ses  complices,  11  demande  le  renvoi  d*un 
exemplaire  de  cette  dénonciation  aux  trois  comités 
chargés  d'examiner  la  conduite  de  Joseph  Lebon,  et 
d'un  autre  exemplaire  à  la  commission  des  Vingt- 
et-Un. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

{La  suite  demain,) 


N,  B.  Dans  la  séance  du  U  ventôse  la  Convention 
a  ajourné  la  demande,  faite  par  la  section  de  FUnité 
et  de  la  Butte-des-Moulins,  de  faire  rentrer  dans  le 
sein  de  la  Convention  nationale  les  députés  mis  hors 
laloi. 

A  la  suite  d'une  motion  d'ordre,  interrompue  à 
chaque  instant  par  les  plus  vifs  applaudissements, 
Fréron  a  proposé  de  créer  une  commission  chargée 
de  préparer  les  lois  organiques  de  la  constitution,  de 
rapporter  la  loi  du  17  septembre  sur  les  gens  sus- 


pects, de  charger  le  comité  de  législation  de  revoir 
et  réformer  toutes  les  lois  dans  lestiuelles  il  aurait  po 
se  glisser  des  dispositions  tyranniques,  etc. 

La  Convention  a  ordonné  Fimpression  du  dis- 
cours ,  et  renvoyé  le  projet  de  décret  aux  trois  co« 

mités. 

Les  sections  de  Paris  se  sont  succédé  à  la  barre 
pour  dénoncer  les  membres  de  leurs  anciens  comi- 
tés révolutionnaires  comme  escrocs,  voleurs,  assas- 
sins, etc. 


ANNONCES. 
Journal  des  Théâtres,  troisièwu  trimestre. 

Le  premier  Numéro  de  ce  Journal  a  paru  le  l*'  fructidor  de 
la  2'  année  républicaine.  Chaque  trimestre  forme  un  volume 
in-S*.  La  coUection  des  deux  premiers  volumes  coûte  21 1. 
pour  Paris,  25  liv.  franc  de  port  pour  les  départements,  et 
se  trouve  au  bureau  général  du  Journal  des  Théâtres,  chez 
Barbu,  libraire ,  rue  Glt-le-Cceur,  n*  U.  Cest  à  cette  même 
adresse  que  l'on  s'abonne.  Le  prix  est  de  45  liv.  pour  un  an, 
de  23  liv.  pour  six  mois,  et  de  12  Uv.  10  août  pour  trois 
mois. 

Les  auteurs  s'expriment  ainsi  dans  leur  prospectas:  <  Re- 
monter à  l'origine  des  éfablissemenu  des  spectacles  dans 
cette  grande  cité;  donner  un  abrégé  historique  et  oondsde 
leurs  variations  ;  examiner  avec  soin  le  jeu  des  acteurs  prin. 
clpaiix  ;  attaquer  les  usurpaUons  faites  sur  la  scène  ;  ap<. 
plaudir  les  succès,  encourager  les  talents  et  vanter  les 
efforts;  présenter  l'analyse  ralsonnée  des  pièces  nouvelles  ; 
apprécier  le  talent  des  auteurs,  le  but  moral  de  leurs  ou- 
vrages, ce  que  la  philosophie  doit  y  gagner,  ce  que  les  mœurs 
pourraient  y  perdre  :  comparer  la  différence  des  génies,  des 
âges,  des  pays,  des  costumes  ;  étudier  les  diverses  sensations 
du  public,  son  enthousiasme  et  ses  murmures,  en  chercher 
et  en  expliquer  la  cause ,  embrasser  en  un  mot  tout  ce 
qui ,  relativement  au  genre  dramatique ,  peut  être  atile  aux 
progrès  de  Tart  :  tel  est  l'objet  que  nous  now  proposons 
de  remplir,  i 


LITEBS   DITERf. 

Barème  décimal .  ou  Comptes  faits  suivant  le  système  dé- 
oioial  des  monnaies,  poids  et  mesures,  etc.,  précédé  de  l*ei- 
plication  de  ce  système,  et  suivi  de  Tarithmétique  décimale . 

A  Paris,  chef  Fuchs,  libraire,  ouai  des  Augustins,  n*  28. 
Prix  :  I  liv.  5  sous,  broché,  et  1  liv.  10  sotis,  franc  de  port. 

^  —  Système  universel  et  complet  de  stètograpkie,  on  Ma* 
nière  abrégée  d'écrire,  applicable  a  tous  les  idiomes  et  fon- 
dée sur  des  principes  si  simples  et  si  faciles  à  saisir  qu^oo 
peut  connailre  en  un  jour  les  cléments  de  cet  art.  et  se 
mettre  en  état  dans  très-peu  de  temps  de  suivre  la  parole 
d'un  orateur  ;  inventé  par  Samuel  Taylor.  professeur  Je  sté- 
nographie à  Oxford  et  dans  les  universités  d'Ecosse  et  d'Ir- 
lande ,  et  adapté  à  la  langue  française  par  Théodore-Pierre 
Bertin ,  traducteur  des  Satires  dToung  et  autres  ouvrages 
anglais;  seconde  édition,  revue  et  augmentée  de  vingt-quatre 
planches,  dont  l'une  présente  un  index  à'adversario  on  de 
répertoire  littéraire  plus  avantageux  que  celui  de  Locke, 
avec  lequel  il  est  comparé.  Prix  :  8  liv. 

A  Paris ,  de  l'imprimerie  de  Didot.  8e  trouve  chez  l'au- 
teur, rue  de  la  Sonnerie,  au  coin  du  quai  de  la  Mégisserie. 


Payements  à  la  trésorerie  tiationaiê. 
Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  ili  pre- 
miers mois  ;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscriptions  au  grand  livre.  Celui  pour  les  renm  Tlagèrcs 
est  de  huit  mois  vingt  et  un  Jours  de  l'année  1788  (Vteui 
•tyle). 


GAZEÏÏG  NATIONALE  «>  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


No  163. 


Tridi  13  Vbntosb,  tan  t:  {Mardi  3  Mars  1795,  vieux  êtyte.) 


POLITIQUE. 
Allemagne: 

Brêmê ,  U 15  février^  -^Wesel  est  menteé  pir  les  Frts- 
çais.  LeÈ  géoéraui  qot  f  eomiiiandeot  sVmpreHent  de 
meure  cette  Tille  en  état  de  soutenir  uo  siège.  Les  étrto- 
(ers  en  sont  sortis  ;  les  iiabitaots  sont  |lour?us  de  Titres 
pour  trois  moist  la  famison  ••  été  aufpientée.  Déjà  la 
chambre  des  comptes  de  ClèTeseï  le  dépôt  des  àrcblTesse 
toni  retirés  à  Mindeo,  ainsi  que  le  rédacteur  du  Courrisr 
in  liaiRhin» 

-«Lc«  deux  Gis  aînés  du  feo  d-derant  duc  d*OrléaDSiOBt 
&  Hambourg. 

ITALIE. 

Savonêt  U  5  février.  —  Les  maladies  qui  affligeaient  lei 
troupes  françaises  ont  enfin  cédé  aui  soins,  aux  précau- 
tions et  à  l'établissement  d^bdpitaux  bien  conçus  et  Incq 
silués.  Le  peu  de  malades  qui  restent  sont  en  étal  d*étre 
transférés  à  Nice  et  à  Monaco,  pour  qu'un  nouvel  air  bâte 
la  fin  de  leur  conralescence. 

—  La  flotte  anglaise,  aux  ordres  de  TaiDiral  Hotham,  a, 
dans  sa  croisière  sur  les  côtes  de  la  Corse,  éprouré  un  ter- 
rible ouragan  qui  lui  a  cauié  beaucoup  de  dommages. 

—  Nous  recevons  de  Naples  b  nouvelle  que  le  dey  de 
Tunis  a  fait  la  conquête  de  Tripoli  et  en  a  chassé  l'usurpa- 
teur. 

RÉPUBLIQUE    DES  PROVINCES-UNIES. 

Ln  Haye ,  le  31  février, '^Ln  représentants  provisoires 
du  peuple  de  Hollande  ont,  comme  on  sait,  nommé  une 
députât  ion  pour  proposer  aux  représentants  do  peuple 
français  qui  sont  Ici  Tallianee  désirée  avpc  leur  république. 

Voici  le  discours  prononcé  par  le  président  de  la  dépu- 
talion. 

«  Citoyens  représentanli  du  peuple  français,  les  repré- 
sentants provisoires  du.  peuple  de  Hollande,  composés 
maintenant  uon -seulement  des  députés  de  toutes  les  villes 
c|ui  auparavant  ont  eu  le  droit  de  votfr  aux  ci-devant  états 
de  la  province  de  Hollande,  mais  encore  de  plusieurs 
bourgs  et  villages  considérables  qui  sont  venus  s*y  joindre 
pour  rortifier  i^représenialion  nationale  de  cette  province, 
ont  jugé  de  leur  devoir  de  saisir  les  premiers  moments  de 
leur  existence  complète  pour  vous  témoigner,  par  une  dé- 
putation  solennelle,  l'expression  fidèle  de  leurs  hommages 
et  de  leurs  vœux. 

(c  En  effet,  citoyens  représentants,  c*est  à  votre  oré- 
sence  si  désirée  parmi  nous,  et  à  la  bienveillance  delà 
nation  française  envers  ce  peuple,  que  nous  devons  te 
bontieur  d'avoir  pu  briser  nos  chaînes  et  de  ramener  au 
milieu  de  nous  les  bienfaits  de  la  liberté:  cVst  à  établir 
cette  liberté  sur  des  bases  solides  que  nous  consacrons  tous 
nos  efforts  ;  et  nous  venons  vous  en  offrir  les  premiers  fruits 
en  vous  présentant  les  décrets  y  relatifs  de  notre  assemblée, 
pris  depuis  que  nous  nous  sommes  constitués. 

I  Nous  profitons  d'autant  plus  volontiers  de  ce  moment 
pour  nous  acquitter  de  ce  devoir,  que  nos  rspéranees  de 
voir  les  autres  provinces,  nos  confédérées,  bientôt  libres 
comme  nous,  se  réiilisent  de  plus  en  plus,  et  que  l*heu- 
reux  moment  vient  de  paraître  où  la  majorité  aux  états 
généraux  pourra  accélérer  Taccomplissf'ranit  du  dé^ir  ar- 
dent que  nous  avons  de  nous  allier  le  pi  us  et  roitt*n)ent  pos- 
sible avec  la  nation  françai&e.  Puisse  ce  vibu  ,  désiré  de 
toute  la  nation  batave,  bientôt  s'accomplir  pour  le  bonheur 
commun  des  deux  nations,  pour  leur  intérêt  réttiproque, 
et  pour  Tanéantissement  complet  des  projets  funestes  de 
nos  ennemis  communs! 

«  Veuilles,  citoyens  représentants,  à  eet  effet,  Mms 
tendre  une  main  ftraternellf,  et  mettre  le  sceau  aux  dédara- 
lions  généreuses  et  édifiantes  que  tous  avci  bieD  tonla 

3«  Série.  —  Tome  X. 


fhire  devant  tout  le  monde,  dans  le  manifeste  qoé  '<ltMit 
aves  publié  au  moment  que  vous  êtes  entrèi  dans  cette 
province. 

c  C'est  par  ce  seul  moyen,  citoyens  représentants,  que 
nos  liaisons  pourront  être  utiles  à  la  France  et  funestes  à 
nos  ennemis  coalisés,  et  en  particulier  à  ceux  qui,,  depqis 
le  commencement  de  notre  existence  politique,  ont  été  les 
ennemis  implacables  de  cette  république,  de  sa  liberté, 
de  son  commerce,  et  de  son  indépendance  réelle,  mais 
dont  il  sera  très-possible  d*écraser  tontes  les  machinations 
et  de  déjouer  toutes  les  intrigues,  aussitôt  que  nous  aurons 
fait  une  alliance  par  laquelle  nous  pourrons  concerter  avec 
vous  les  mesures  les  plus  efficaces  et  les  plus  promptes 
pour  servir  deba^^e  dans  la  direction  de  la  campagne  pro* 
cbaine  sur  terre  et  sur  mer,  dont  le  but  et  les  suites  pour- 
ront être  de  rendre  pour  toujours  la  paix  àrBurope. 

•  iNous  vous  prions,  citoyens  représentants ,  de  trans- 
mettre ces  sentiments  du  peuple  de  Hollande  à  la  Conven* 
tion  n:itionale  de  France,  et  de  lui  dire  oue  nous  ne  ces* 
serons  jamais  de  nous  montrer,  autant  qu*il  est  en  nous, 
dignes  de  la  liberté  que  la  valeur  et  les  efforts  inratigables 
de  ses  armées  victorieuses,  joints  à  nos  propres  élans  vers 
la  liberté,  viennent  de  rétablir  au  milieu  des  Bataves,  d 
de  l'alliance  que  le  grand  peuple  que  vous  représentes 
voudra  bien  contracter  avec  nous.  ■ 

Le  représentant  Alqnler  a  répondu  à  ce  discours  de  la 
manière  suivanle  : 

•  Citoyens  représentants  provisoires  du  penpie  hollai^ 
dais,  les  représentants  du  peuple  français  reçoivent  avec 
sensibilité,  au  nom  de  leur  nation,  l'assurance  de  votre 
attachement  et  vos  vaux  pour  l'alliance  que  vous  désireg 
voir  s'établir  entre  elle  et  les  Provinces-Unies.  Nous  ver» 
roos  avec  plaisir  arriver  le  jour  où ,  après  une  union  fran- 
che et  durable  contractée  entre  les  deux  gouvernements  « 
nous  pourrons  réunir  nds  armes  contre  notre  ennemi  ooas» 
mun.  Attendons  tout  alors,  et  pour  k  bonheur  des  deni 
peuples  et  pour  la  paix  du  monde,  de  pos efforts  conoerlés 
Qootre  cette  politiq«e  orfueiUcuse  et  perfide  que  nous 
pouvons  convaincre  de  tous  les  crises  »  et  qui  ose  aspirer 
à  dominer  toutes  les  natioM»  Vous  trouvères  toujours  la 
France  fidèle  à  ses  alliés  comme  elle  est  terrible  pour  ses 
eonerais*  Nous  transmettrons  à  la  Convention  nationale 
l'expression  de  vos  sentiments,  et  nous  nous  ttlicitons  par* 
sonnellement  d'être  léoMins  d'une  révoluliou  que  vous  di* 
rigei  avec  tant  de  sagesse,  et  dont  les  heureux  effets  vous 
mériteront  la  reconnaissance  de  vos  concitoyens,  l'estime 
de  tous  les  hommes  libres  et  TadoiiratioB  de  l'Europe  en* 
Uère.  ■ 

PATS-BAS. 

BnuDeîUêt  U  4  aeafoat.— Id  tout  annonce  les  disposé* 
tions  de  la  répnbKqoe  française  ponr  l*o«ferUire  de  la 
campagne  prochaines 

La  municipalité  de  cette  ville  prend  des  mesures  sa* 
ges  pour  ramener  l'abondance  des  denrées  de  toute  espècCé 

-^  Les  représentants  du  peuple  ont  pris  un  arrêté  relatif 
à  l'administration  des  biens  nationaux.  Ils  l'ont  fait  préeé* 
der  d'une  désignation  qui  caractérise  les  genres  de  proprié- 
tés et  de  biens  que  frappe  la  confiscation  no  profit  de  la  i^ 
publique* 

t  Art.  !•*•  Sont  déclarés  propriétés  de  It  répnbliqna 
française  les  biens  nenblesct  inmetiMes,  eréanoes  activesi 
droits  et  actions  mobilières  et  Immobilières  >  qni  étaient 
possédés  on  dont  jouissaient  dans  la  Belgique  et  antres 
pays  conquis  : 

•  i*  Le  ci-devant  gouvernement  ennemi  :  S*  les  princes 
étrangers  qui  sont  en  guerre  contre  la  république  ou  an 
service  de  ses  ennemis  ;  a*  le  ci-devant  clergé  de  France, 
les  établissements  et  corporations  laïques  ou  ecclésiastiques 
supprimés  en  France  ;  k*  le  clergé ,  les  établissements  et 
corporations  laïques  ou  ecclésiastiques  dont  les  chefi-lient 
de  Mnéfloe  et  sièges  d^étabtisscaMPt  sont  placés  iKMsiela 

78 


578 


Belgique;  0*  les  Français  consUtaét  émigrét  suirant  let 
lois  concerna  ni  l*éinigralion;  6*  les  émigrés  des  pays  con- 
quis» les  maisons  religiouses  ri  bénéfices  abandonnés,  el 
tons  autres  absents  réputés  émigrés;  7*  et  enfin  tous  les 
individus  condamnés ,  et  tous  ceux  dont  les  biens  sont  ac- 
qBls  et  confisqués  au  profit  de  la  république  par  jugement 
pirtfculier  et  en  vertu  des  lois  françaises,  ou  par  les  arrê- 
tés des  représentants  du  peuple. 

«  II.  Seront  dès  ce  moment  séquestrés  les  biens  de  toute 
nature  :  i*  des  sujets  des  puissances  étrangères  avec  les- 
quelles la  république  est  en  guerre;  3*  ceux  appartenant 
aux  Français  dont  les  biens  sont  également  séquestrés  en 
France;  3*  ceux  des  absents  du  pays  conquis,  rentrés  sur 
le  territoire  occupé  par  les  armées  de  la  république,  jus- 

2u*àce  qu'il  ait  été  définitivement  statué  à  leur  égard» 
ans  la  forme  prescrite  par  Tarrété  du  8  frimaire.  • 


CONVENTION   NATIONALE. 

Prétidenee  de  Bourdon  (de  VOite)* 
SUITE  DB  LA  gÉANCE  DU  10  VENTOSE. 

BoissT  D*ÂN0LA8t  an  nom  du  comité  de  salut  public  : 
Depuis  quelques  jours  les  habitants  de  Paris  semblent  livrés 
à  une  agitation  dangereuse  :  des  rassemblements  se  font 
à  la  porte  des  boulangers;  on  proclame  pailout  la  di- 
sette; et,  ce  quM  y  a  di*  plus  affreux,  on  parvient  à  la 
faire  naître  malgré  les  efforts  du  gouvernement,  malgré 
les  sacrifices  de  la  nation,  malgré  les  travaux  non  inter- 
rompus des  dépositaires  de  Tautorilé  du  peuple.  Tanl6t  on 
Hiit  courir  des  bruits  alarmants  sur  la  situation  et  Tadmi- 
nistration dessubsistances;  tantôt  on  prêche,  dans  les  ras- 
lemblements  que  Ton  excite,  la  contre-révolution  et  le 
terrorisme. 

Hier,  à  la  porte  des  boulangers,  un  homme  se  plaignait 
amèrement  de  la  diflBcullé  d*avoir  du  pain ,  et  déclamait 
contre  le  gouvernement;  et  quand  son  tour  d*étre  servi 
Alt  arrivé,  il  se  trouva  n'avoir  point  de  carte,  et  il  se  per- 
dit dans  la  foule.   . 

Il  est  de  fait  que,  ces  jours  derniers,  plusieurs  boulan- 
gers n*ont  pu  suffire  aux  besoins  de  ceux  qu*ils  sont  char- 
gés d^approvisionner,  et  cependant  la  consommation  des 
ftrioes  est  excessive. 

Dans  Tancien  régime,  quond  Paris  voyait  sa  population 
Immense  accrue  encore  par  tous  les  étrangers  qui  y  arri- 
▼aient  de  tous  les  points  de  l'univers,  la  distribution 
joamniière  était  de  quinze  cents  sacs  de  farine  ;  aujour- 
d'hui la  population  est  diminuée,  et  la  distribution  u'a 
jamais  été,  la  décade  passée,  de  moins  de  dix-oeuf  cents 
sacs.  Elle  a  été  souvent  ù  deux  mille,  et  hier  il  a  été  déli- 
vré deux  mille  cent  dix-liuit  sacs.  D*où  vient  donc  cette 
excessive  augmentation,  et  pourquoi  les  mêmes  moyens  ne 
suffisent-ils  plus  ?  Faut-il  Pattribuer  à  la  cupidité  de  quel- 
ques boulangers,  qui  vendent  en  fraude  la  farine  qui  leur 
est  confiée  ou  le  pain  qui  en  est  produit  ?  ou  bien  la  distri- 
bution est-elle  trop  forte  ou  inrérieure  aux  besoins?  C*est 
à  la  police  à  surveiller  ces  abus;  c*est  aux  commissaires 
des  sections  à  faire  que  les  distributions  se  fassent  avec 
exactitude;  cVst  aux  citoyens  i  réduire  nu  nécessaire  leur 
consommation  de  chaque  jour.  C*est  rn  se  tenant  tranquille 
et  calme  surtout,  que  le  peuple  déjouera  les  projets  de  ses 
ennemis.  Ce  n*esi  pas  en  se  pressant  en  foule  i  la  porte 
des  boulangers,  ce  nVst  pas  en  s'efforçaut  chaque  jour  de 
a'approvi&ionner  pour  le  lendemain,  et  en  doublant  ainsi 
la  consommation  journalière,  qu'il  échappera  aux  dangers 
qa*il  craint.  Qu'il  consente  à  ne  recevoir  le  pain  dont  il  a 
iMSoin  qu'une  demi-heure  plus  tard,  qu'il  n'en  demande 
que  ce  qu'il  lui  en  faut,  et  il  sera  sûr  de  n'en  pas  manquer. 
Le  gouvernement  veille  la  nuit  et  le  jour  pour /aciliter 
rarrivage  des  subsistances  et  le  versement  des  grains  :  il  a 
pôar  lai  l'expériencf  du  passe,  qui  doit  servir  de  base 
pour  Tavenir.  Ceux  qui,  malgré  quarante-cinq  jours  de 
fi  gelée  la  plus  rigoureuse,  lorsque  tous  les  arrivages  par 
tan  étaient  fermés,  quand  les  routes  de  terre,  couvertes 
de  glace,  semblaient  impraticables  aux  voitures,  quand 
•tca  moulins  paraissaient  dievoir  être  enchaînés  par  le  froid. 


ont  cependant  épargné  è  Paris  la  disette  mène  d*Qn  four, 
doivent  mériter  quelque  confiance;  ceux  qui,  pendant 
trois  mois  de  la  plus  rigoureuse  des  saisons,  ù  travers  tous 
les  obstacles,  ont  cependant  fait  entrer  à  Paris  et  livré  à  s« 
consommation  six  cent  mille  quintaux  de  farine,  doivent 
être  crus  quand  ils  annoncent  que  les  agitations  fausses  du 
peuple,  que  ses  inquiétudes  mal  placées  peuvent  seules, 
en  entravant  leur  marche,  amener  la  disette  que  l'on  craint. 
Dans  ce  moment  six  représentants  du  peuple  sont  dans  les 
départements  affectés  aux  approvbionnements  de  Pari», 
pour  activer  le  versement  dei  grains  et  tadliler  les  réqui- 
sitions. 

Non,  Taris  ne  manquera  pas,  pourvu  qoe  Paris  soit 
tranquille,  pourvu  que  les  bons  citoyens  repoussent  ftn 
suggestions  des  méchants,  pourvu  que  la  police  ne  soit 
point  arrêtée,  pourvu  que  le  gouvernement  puisse  créer  à 
son  aise  les  combinaisons  indispensables,  pourvu  que  ses 
regards  ne  soient  point  détournés  du  véritable  objet  où  il 
doit  tendre  ;  une  machine  aussi  compliquée  que  celle  dont 
il  a  la  direction  doit  pouvoir  marcher  à  son  aise;  on  Tar* 
rête  dès  qu'on  y  touche. 

Il  n'y  a  pas  longtemps  que  des  lettres  venues  de  Suisse, 
et  écrites  à  des  émigrés,  annonçaient  que  Paris  nageait 
dans  le  sang,  et  que  le  manque  des  subsistances  en  était  la 
cause  ;  il  n'y  a  pas  longtemps  que  les  papiers  anglais  an- 
nonçaient un  soulèvement  à  Paris,  occasionné  par  la  di- 
sette. Ils  araient  préparé  tous  leurs  ressorts,  les  ennemis 
qui  nous  font  la  guerre,  pour  que  ces  calamités  arrivas- 
sent» et  ils  ont  été  déjoués  par  l'activité  du  gouvernement. 
Les  émigrés ,  le  ministère  anglais ,  les  obstacles  de  la 
saison  la  plus  rigoureuse  n'ont  pu  vous  donner  la  disette  :  ne 
cherchez  donc  point  à  la  créer  vous-mCmespardes  alarmes 
sans  objet,  par  des  démarches  sans  motifs. 

Le  moment  où  nous  sommes  est  sans  doute  le  plus  diffi- 
cile; mais  Paris  est  encore  rempli  de  ces  hommes  dange- 
reux que  le  dernier  décret  doit  en  bannir,  et  il  est  simple 
qu*ils  fassent  un  dernier  effort  pour  renverser  un  ordre  de 
choses  qui  les' met  k  leur  place,  et  un  gouvernement  qui  les 
surveille. 

Le  moment  actuel  est  le  plus  difficile  ;  car  le  commerce, 
longtemps  comprimé,  commence  à  peine  à  se  charger  du 
soin  de  nos  approvisionnements  :  mais  cette  crise  touche  à 
sa  fin.  Déjà  des  navires,  précurseurs  de  beaucoup  d'autres, 
arrivent  au  Havre,  à  Donkerque;  déjà  le  Midi  s'approvi- 
sionne; déjà  tous  les  points  de  l'univers  s'apprêtent  à  ef- 
fectuer leurs  promesses. 

11  serait  dangereux,  sans  doute,  de  dévoiler  ici  nos  res- 
sources: ce  serait  donner  à  nos  ennemis  des  facilités  de  les 
combattre  ;  mais  j'en  ai  dit  dit  asssex,  en  plusieurs  occa- 
sions, poar  donner  au  peuple  les  espérances  les  mieux 
fondées.  # 

On  sera  surpris  un  jour,  quand  il  sera  possible  de  le 
dire,  de  Timmensité  des  moyens  mis  en  œuvre  pour  ap- 
provisionner la  république,  des  sacrifices  immenses  faits  à 
cet  égard  par  la  nation. 

En  attendant  que  tous  ces  biens  se  réalisent,  souvenex- 
votts  qu'il  existe  an  milieu  de  vous  des  hommes  pour  qui 
l'ordre  public  el  la  paix  intérieure  sont  des  calamité^,  |)our 
qui  le  trouble  est  un  besoin,  et  dont  les  efforts  et  les  tra- 
vaux ne  tendent  qu'à  porter  le  désordre  parmi  les  citoyens 
les  plus  paisibles.  Ces  hommes  exécrables  savent  qu'ils  ne 
peuvent  dérober  leurs  crimes  ou  réaliser  leurs  ambitieux 
projets  qu'au  milieu  du  bouleversement  et  du  tumulte. 

Vous  les  voyex  arriver  en  foule  partout  où  ils  espèrent 
quelque  lermentation  ;  vous  les  voyex  saisir  toutes  les  cir- 
constances pour  égarer  les  bons  citoyens,  pour  contrarier 
le  gouvernement.  Ils  sèment  partout  l'alarme  et  la  défiance, 
ils  exagèrent  les  calamités  publiques;  ils  regrettent  ce  qui 
n'est  plus,  ils  vantent  ce  qui  n'est  pas,  et  profitent  habile- 
ment de  toutes  les  passions  ;  ils  savent  jeter  dans  le  peuple 
tous  les  ferments  de  division  et  de  discorde;  tout  ce  qui 
tient  aux  premiers  besoins  de  la  vie  est  sans  cesse  l'objet 
de  leurs  regards;  la  moindre  crainte  sur  les  subsistances 
est  pour  eux  une  arme  toujours  certaine,  parce  qu'ils 
trouvent  dans  leurs  propres  succès  de  nouveaux  moyens  d'en 
obtenir  d'autres. 

liais  toutes  les  espérances  des  ennemis  de  la  liberté  se- 
ront trompées;  le  peuple  sentira  ses  vrais  intérêts  «  el  ne 
conspirera  pas  lui-même  contre  son  propre  bonheur. 


579 


Ciloycns  de  eette  immense  commune,  citoyens  de  la 
France  entière,  tous  souffrez  sans  doute,  vous  êtes  con- 
damnés à  des  prif  ations  ;  mais  ne  soyez  point  effrayés  du 
poids  de  fos  peines  ;  c'est  une  avunce  faite  à  la  lil.erié  : 
vous  afez  semé  sur  une  terre  féconde;  elle  vous  resti* 
tuera  tous  les  trésors  que  vous  lui  avex  confiés. 

Une  seule  source  de  prospérité  peut  manquer  encore  : 
c*est  la  tranquillité  publique,  que  défausses  alarmes  cher- 
chenl  sans  cesse  k  troubler,  et  qu'une  foule  d'intrigants 
voudraient  compromettre;  et  c'est  à  la  rétablir  que  tous 
les  efforts  doivent  tendre. 

Français,  vous  ùtes  les  conquérants  de  votre  liberté; 
vous  l'avez  produite  au  sein  de  ce  vaste  empire  par  les 
grands  niouf  eroenis  de  votre  courage  :  soyez-en  mainte- 
nant les  conservateurs  par  votre  justice  et  votre  sagesse;  ré- 
pandez aulour  de  vous  Tesprit  de  patience  et  déraison; 
versez  les  consolations  de  la  fraternité  dans  le  sein  de  ceux 
de  vos  concitoyens  h  qui  la  révolution  a  imposé  de  doulou- 
reux sacrifices;  et  n'oubliez  jamais  que  si  la  régénération 
des  empires  ne  peut  s'exécuter  que  par  la  force  du  peuple, 
elle  ne  peut  non  plus  se  maintenir  que  dans  le  recueille- 
ment des  vertus. 

ViLLiTAAD  :  Rien  n'est  si  important  que  le  rapport  qui 
vient  de  vous  être  fait  ;  je  demande  que  les  comités  de 
gouvernement  surveillent  et  {fassent  cesser  les  rassemble- 
ments qui  se  forment  à  la  porte  des  boulangers,  rassem- 
blements dans  lesquels  il  se  glisse  des  gens  qui  n'ont  pas 
de  carte,  qui  répandent  qu'on  ne  donne  pas  aux  boulao- 
ger.<;  la  quantité  de  farine  suffisante. 

Il  arrive  ici  chaque  jour,  depuis  quatre  mois,  vingt  ou 
trente.'  jeunes  gens  de  la  première  réquisition;  qu'y  font-ils? 
Cela  coïncide  parfaitement  avec  ce  que  vous  dit  le  gouver- 
nement, qu'à  une  certaine  époque  II  doit  y  avoir  du  trou- 
ble dans  Paris.  Je  demande  que  cela  soit  renvoyé  aux  co- 
mités de  gouvernement,  et  que  le  rapport  deBoissy  loit 
imprimé  et  afficbé. 

Dewars  :  Je  demande  que  le  rapport  de  Boissy 
soit  envoyé  de  suite  aux  quarante-ouit  sections, 
pour  qu*il  y  soit  lu  ce  soir. 

Ces  dernières  propositions  sont  décrétées* 

Bourdon  (de  FOise)  quitte  le  fauteuil  et  monte  è  la  tri- 
bune. 

Bourdon  (de  TOis^)  :  Je  prends  la  parole  pour  ré- 
pondre à  la  motion  insidieuse  qui  vient  d*étre  mise 
en  avant  par  Villetard. 

Les  égoreeurs  veulent  exciter  du  trouble ,  et  Ton 
voudrait  adroitement  nous  faire  prendre  le  change 
en  partant  des  jeunes  gens  de  la  première  réquisi- 
tion qui  sont  ici  en  congé.  C'est  ainsi  que  Ton  en 
a  toujours  usé  lorsque  nous  avons  été  à  la  veille 
d'une  grande  affaire  :  ce  ne  sont  pas  les  jeunes  gens 
qui  font  des  queues  à  la  porte  des  boulangers  (  vifs 
applaudissements);  mais  c'est  le  peuple  de  Robes- 
pierre, les  hommes  qu'il  salariait.  (On  applaudit.) 
Que  la  Convention  prenne  garde;  on  veut  la  faire 
dévier  de  la  route  qu'elle  a  tenue  depuis  le  9  ther- 
midor; mais  on  n'y  parviendra  pas.  (Nouveaux  ap- 
plaudissements.) Villetard  a  été  la  dupe  de  quelques 
propos;  il  est  venu  nous  rapporter  ici  ce  q^u'il  a  en- 
.  tendu  dire  par  des  hommes  qui  détestent  les  jeunes 
gens ,  parce  qu'ils  savent  obéir  aux  lois,  parce  que 
souvent  ils  ont  réprimé  les  projets  des  hommes  de 
sans.  (Les  applaudissements  recommencent  et  se 
prolongent.  ) 

Vous  verrez  que  auand  la  grande  affaire  qui  nous 
occupe  sera  terminée ,  il  n'y  aura  plus  de  queue  à 
la  porte  des  boulangers ,  et  que  tout  rentrera  dans 
Tordre.  (Nouveaux  applaudissements.)  C  est  ce  que 
nous  apprennent  les  rapports  journaliers  de  la  po- 
lice. Il  serait  lâche  de  ma  part  de  ne  pas  vous  dire 
une  vérité  dont  tous  mes  collègues  sont  convainctis. 

Villetard  :  Je  n'ai  dit  autre  chose  si  ce  n'est  qu'il 
fallait  surveiller  des  hommes  pervers  qui  vont  a  la 
porte  des  boulangers  pour  semei  le  trounle  et  tâcher 


d'augmenter  la  disette  factice  en  ^lemandant  du  pain 
qu'ils  n'ont  pas  le  droit  d'obtenir ,  puisqu'ils  n'ont 
pas  de  carte.  J'ai  dit,  et  cela  résulte  des  rapports 
que  reçoit  le  comité  militaire ,  que  chaque  jour  il 
arrive  a  Paris  vingt  ou  trente  jeunes  gens  de  la  pre- 
mière réquisition,  et  j'ai  engagé  le  comité  de  sûreté 
générale  de  porter  ses  regards  sur  ces  hommes.  Je 
suis  loin  d'avoir  voulu  aire  un  acte  blâmable  ;  je 
n'ai  voulu  (fuc  dénoncer  uu  abus,  parce  que  ce  n'est 
qu'en  les  détruisant  tous  que  l'on  rera  triompher  la 
chose  publique. 

Rbwbell  :  S'il  arrive  à  Paris  chaque  jour  vingt  ou 
trente  jeunes  gens  de  la  première  réquisition  ,  cha- 
que jour  aussi  il  en  part  le  même  nombre  ;  au  mo- 
ment où  ils  entrent  dans  Paris ,  des  inspecteurs  vont 
visiter  leurs  papiers^  et  les  font  arrêter  et  repartir 
sur-le-champ  s'ils  n'ont  pas  de  causes  légitimes  pour 
rester. 

Quelques  membres  de  VextrémUé  gauche  :  C'est 
bon  à  savoir. 

Rewbell  :  Ce  ne  sont  pas  des  jeunes  gens  qui  sè- 
ment le  trouble  dans  les  marcnés;  ce  ne  sont  pas 
eux  qui  vous  demandent ,  en  passant ,  à  l'oreille  : 
«  Combien  font  huit  et  demi  et  huit  et  demi?-  Ce 
sont  les  agents  des  Jacobins  qui  se  réunissent  aux 
royalistes.  Eh  bien,  je  leur  assure  qu'ils  ne  prendront 
pas  le  dessus.  (  Les  plus  vifs  applaudissements  écla- 
tent de  toutes  parts.)  Non  ,  tant  que  je  vivrai ,  tant 
que  nous  vivrons  tous,  ni  les  égorgeurs  ni  les  roya- 
listes ne  triompheront;  leurs  manœuvres  seront  dé- 
jouées, et  la  république  sera  tranquille.  (Les  applau- 
dissements redoublent.  ) 

RovÈRE  :  Je  vais  vous  donner  le  mot  de  l'énigme; 
c'est  parce  qu'on  sait  qu'après-demain  on  doitlaire 
un  rapport  sur  lequel  toute  la  république  a  les  yeux 
fixés,  que  Tarmée  de  Robespierre ,  que  les  Jacobins 
ont  le  projet  de  s'emparer  des  tribunes  de  la  Con- 
vention pour  y  exciter  du  trouble  ;  d'un  autre  côté, 
les  bons  citoyens  se  sont  promis  de  gagner  de  dili- 
gence sur  eux  ;  alors  de^  malintentionnés  ont  été 
chez  plusieurs  de  nos  collègues  dire  qu'il  y  avait  ï(^ 
des  jeunes  gens  qui  se  proposaient  d'exciter  du  trou- 
ble, et  qu'il  fallait  les  chasser.  Ceux  qui  ont  fait  au 
comité  militaire  les  rapports  répétés  par  Villetard 
sont  des  agents  de  Robespierre  ;  car  il  tant  que  vous 
sachiez  que  les  hommes  de  la  police  sont  encore  de 
deux  espèces  :  les  uns  sont  de  bons  citoyens ,  les 
autres  sont  encore  des  agents  de  Robespierre.  Le 
comité  de  sûreté  générale  a  été  obligé  d'établir  une 
contre-police;  car  les  agents  de  la  première  ne  par- 
laient jamais  aue  de  muscadins,  de  royalistes,  et  ne 
disaient  rien  des  projets  des  égorgeurs  et  des  robes- 
pierristes. 

Marec  :  Je  demande  qu'il  n'y  ait  pas  des  agents  de 
deux  couleurs. 

I  Cambacéiès  :  Il  me  semble  qu'on  attache  beau- 
i  coup  d'importance  à  une  chose  très-simple.  L'agita- 
I  tion  qui  règne  dans  Paris  est  protégée ,  si  elle  n'est 

fias  provoquée,  par  la  malveillance;  reste  à  savoir  si 
es  jeunes  gens  de  la  première  réquisition  sont  les 
I  auteurs  de  ces  mouvements.  Je  vous  assure  que  le 
I  comité  de  salut  public  surveille  très-sévèrement 
!  ceux  qui  sont  ici;  il  n'y  laisse  que  ceux  qui  sont  ma- 
'  lades  ou  blessés  ;  et  je  crois  que  votre  intention  n'est 
:  pas  de  les  chasser  impitoyablement.  Quant  aux  au- 
:  très,  le  comité  a  pris ,  le  25  pluviôse,  un  arrêté  qui 
les  oblige  à  représenter  les  permissions  et  autorisa* 
tions  qu'ils  ont  de  rester  ici,  afin  d'en  juger  la  vali- 
dité. Le  comité  de  salut  public  redouble  de  surveil- 
lance et  d'activité  pour  prévenir  toute  surprise;  mais 
il  n'est  pas  nécessaire  que  la  Convention  nationalet 


BU 


occupée  dips  grands  iotéréU  de  la  patrie,  emploie  nii 
temps  précieui  sur  des  objets  de  détail  qui  ne  regar- 
dent que  êes  comités.  Je  demande  l'ordre  du  jour , 
et  que  les  comités  soient  chargés  de  faire  exécuter 
la  loi. 

Bbntabolb  :  Lorsqu'un  représentant  du  peuple 
eroit  une  vérité  utile  à  son  pays ,  il  y  aurait  de  la 
lilcheté  a  lui  de  ne  pas  la  dire.  J'ai  été  affl'clé  de  voir 
Villetard  dire  qu'il  n'avait  eu  que  de  bonnes  inten- 
tions. Serions-nous  pr^  de  retomber  dans  cette 
lâclie  timidité  qu'inspirait  Robespierre?  Rappeles- 
l'ouê  que ,  lorsque  Couthon  voulait  condamner  un 
bomme,  il  di&ait  :  Je  crois  bien  qu'un  tel  n'a  pas  de 
mauvaises  intentions,  mais  son  opinion  est  mau- 
vaise. Li'jour  où  Ton  ne  pourra  plus  dire  son  opi- 
nion dans  le  temple  des  lois,  tout  sera  perdu.  Que 
diraient  kê  cultivateurs  oui  arrosent  la  terre  de 
leurs  sueurs ,  en  voyant  clans  Paris  cette  foule  de 
jeunes  gens  qui  remplissent  les  spectacles?  (On  mur- 
mure. —  L'extrémitf^  applaudit.  )  Ils  se  demande- 
raient à  eux-mêmes  si  les  habitants  de  Paris  ont  des 
privilèges,  car  ils  $»  rappelleraient  que  tous  les  Ji'ii- 
ses  ffens  au*dessous  de  vingt-cinq  ans  doivent  être 
aux  rrontif  res  et  ne  pas  s'amuser  a  faire  ici  du  train 
dans  les  spectacles. 

Loin  de  moi  l'idée  d'accuser  ces  jeunes  gens  de 
Touloir  détruire  la  révolution.... 

Plutieurs  membres:  C'est  bien  heureux  ! 

BaNTAtOLS  :  Loin  de  moi  l'idée  de  croire  qu'ils 
veulent  favoriser  les  buveurs  de  sang,...  (  On  riL  ) 
Mais  la  loi  qui  les  appelle  à  la  défense  de  la  patrie 
n'a  rien  de  commun  avec  les  égorgeurs.  La  Conven- 
tion n'a  pas  besoin  d'être  soutenue  ni  influencée.  Je 
ne  défends  pas  tes  égorgeurs;  je  suis  leur  plus  grand 
ennemi;  maisje  ne  veux  pas  plus  d'exagération  duu 
côté  que  de  l'autre. 

On  parle  d'une  paix  glorieuse;  pour  la  faire ,  pré- 
parons-nous à  la  guerre. 

DuBBM  :  C'est  ça. 

Bbntabolb  :  Il  y  a  eu  nécessairement  du  relâche- 
ment, car  jamais  il  n'y  0  eu  tant  déjeunes  sens  à 
Paris.  On  a  beau  dire  qu'ils  ont  des  causes  légiti- 
mes :  la  loi  parle  ,  et  le  printemps  leur  donne  le  si- 
gnal de  la  guerre.  Je  demanderais  qu'à  une  certaine 
époque  toutes  Jes  permissions  fussent  annulées,  et 
qu'ensuite  ce  soit  le  comité  de  salut  public  seul  qui 
puisse  les  accorder. 

Maubb  :  Ce  que  dit  Bentabole  est  vrai  ;  la  paix 
glorieuse  qui  nous  attend  est  une  raison  pour  les 
jeunes  gens  de  sortir  sur-le-champ.  Le  temps  ap- 
proche où  il  sera  honteux  pour  tout  homme  d'un 
certain  âge  de  ne  pouvoir  dire  :  J'étais  à  telle  armée  ; 
et  il  ne  faudra  pas  que,  comme  nos  vieux  guerriers, 
ils  content  des  mensonges  pour  des  vérités.  Je  ne  suis 
pas  l'ennemi  de  la  jeunesse  française 

***  :  Oui ,  tu  ne  voulais  pas  même  que  les  Jeunes 
gens  fussent  commissaires  des  guerres. 

Maubb:  Ils  ont  pu  être  dans  l'erreur,  et  je  les  con- 
jure ,  au  nom  de  la  patrie ,  d'éviter  l'ignominie. 
Qu'ils  se  dépêchent ,  car  bientOt  les  sans-culottes 
auront  fini  sans  eux. 

La  discuMion  est  fermée,  et  la  Convention  renvoie  ton* 
tes  ces  propositions  aux  conités. 
•-La  barre  s*ouvre  aux  pétitionnaires. 

Une  députalion  des  sections  de  la  commune  d'Orléans 
•st  admise. 

LVafnir  :  Représentants  du  peuple  français,  quand 
la  tocsin  sonné  par  vous  contre  les  kommes  de  sang  a  re- 
Hnil  sur  tous  les  points  de  la  république,  Orléans,  voire 


•vani-f  arde,  D*a  pas  été  la  dernière  à  Pcotendre.  Si  »  dans 

le  sanctuaire  augusie  des  lob,  quelques  cris  d'allégresse 
ont  devancé  les  nôtres,  il  était  juste  que  nous  oédaMions 
UD  moment  la  place  aus  communes  respirant  à  peine  d*oo 
long  deuil,  nous  qui  avons  anticipé  de  iroismoiilepatrii^ 
lisme  opprimé,  nous  pour  qui  luisaient  déjà  lesrayonf  purs 
etbienfaisBDUdua  tliermidor,quand  le SS  prairial  couvrait 
d*un  nuage  de  sang  le  reste  de  la  France;  nous  qui  dés  et 
moment  avions  arraelié  de  nos  prisons  l'innocence  pour  y 
plonger  la  terreur  enchaînée  t  nous  enfin  qui  avons  donné 
en  spectacle  à  la  république  eniij^re  le  déeem virât  punissant 
SCS  propres  eompiiœsl  liais  dans  des  jours  si  orageux , 
combien  de  fois,  a  travers  quelques  éclairs  de  iwtiheur,  n'a» 
vons*oous  pas  entendu  gronder  sur  nos  têtes  la  foudre 
prête  à  nous  éeraser  ?  Il  vous  était  réservé,  citoyens  repré- 
sentants, de  réteiodre  entre  les  mains  du  crime  pour  la 
rallumer  dans  celles  de  la  vertu  :  qu^eile  n*7  reste  pas  en* 
dormie;  qu'ellefrappesans  pitié  ces  hommes  scélérats  qut« 
sous  le  voile  affreux  d'un  faux  aosour  de  la  patrie,  ont  des* 
séclié  sa  substance  et  déehiré  ses  entrailles.  Ne  crojrei  pas 
pourtant  que,  semblables  a  ces  eauibales,  nousTenioes 
vous  proposer  des  mesures  sanguinaires.  Nous  n'avons  pas 
soi:  de  leur  sang  odieux  ;  nous  craindrions,  en  le  répan- 
dant, de  nous  inoculer  le  crime  :  marquez-les  seulement 
du  fer  chaud  de  Pinfamie,  vomissei-les  ensuite  du  sol  de 
la  république  I  Qu'ils  cessent  d'infecter,  \w  leur  souffle 
empoionné,  Tuir  pur  de  la  liberté  que  nous  respirons  I 

T<'l  est,  législateurs,  le  vœu  de  la  communi*  d'Orléans, 
ft  qui  les  travaux  du  représentant  du  peuple  Porcher  vunt 
bientôt  rendre  entièrement  Tabondance  ci  le  bonheur  ; 
mais  ses  efforts  seraient  impuissants  pour  assurer  Tuo  et 
Pautre,  si  vous  laissiei  plus  longtemps  s*agiter  le  crime, 
La  France  a  partagé  vos  maux,  loraque,  subjugui^s  par  une 
dieiature  perfide,  vous  étiez  forcés  de  courber  la  tête  sous 
sa  tyrannique  oppression  ;  mais  aujourd'hui  vousatexrc* 
couvre  votre  énergie,  rien  ne  doit  en  arrêter  les  effets. 

Songez,  législateurs,  que  le  temps  est  passé  de  transiger 
avee  cette  horde  d*assussius)  que  souffrir  plus  ImiRlemps 
leur  lutte  audacieuse,  cVst  aiguiser  leurs  poignardti,  c*est 
préparer  leur  triomphe.  Leur  impunité  nous  offusque,  et 
nous  vous  laiiguerons  sans  cesse  de  nos  cris,  jusqu*à  ce 
qu*enfin  vous  ayez  achevé  de  sauver  la  France  en  punis- 
sant exemplairement  ses  l)ourreaux.  yive  ta  Convention 
nationale!  (On  applaudit.) 

—Les  élèves  de  PEcolede  Santé^présenfent  une  pétition 
par  laquelle  ils  demandent:  l*  une  distribution  gratuite 
des  livres  que  leurs  professeurs  jugeront  les  plus  nécessui* 
resàleur  instruction;  2*  que  la  Convention  les  mette  dans 
rindépendance  des  premiers  besoins,  et  qu'elle  les  indem* 
nise  proportionnellement  des  frais  d'une  route  dispendieuse 
et  pénible. 

Cette  pétition  est  renvoyée  aux  comités  d'instruction  pu* 
blique  et  des  finances. 

—  Le  reste  de  la  séance  est  occupé  à  entendre  des  péti* 
lions  particulières. 

La  séance  est  levée  à  dnq  heures. 

SÉAIfCB  DU   U  VENTOSE. 

Fréron  demande  Je  parole  pour  une  motion  d'ordre* 
La  parole  lui  est  accordée. 

Fréron  :  Citoyens,  je  ne  viens  point  a  cette  tri- 
bune aux  harangues,  qui  sera  bientôt  la  place  des 
accusés,  vous  entretenir  des  crimes  que  la  France, 
que  rhumanitë  tout  entière  leur  reproche,  ni  vous 
présenter  le  tableau  des  maux  affreux  et  des  plaies 
nationales  que  vous  avez  déjà  cicatrisées  en  grande 
partie. 

Un  sentiment  qui  sera  plus  doux  a  vos  cœurs,  et 
plus  agréable  au  mien,  m'engage  à  prendre  aujour- 
d'hui la  parole  ;  je  viens  vous  parler  ac  vous-memest 
de  Toninion  publique,  de  ce  que  vous  avez  fait  pour 
elle,  de  ce  qu'elle  a  fait  pour  vous,  et  de  ce  qui  vous 
reste  encore  à  faire. 

Tous  les  jours  la  marche  rapide  de  Tesprit  pnblk 


Oof 


nous  entraîne  et  noQS  nonsse  tersle  moment  désiré 
où  l'on  pourra  faire  le  oien  sans  être  exposé  aux  ca- 
lomnies et  aux  clameurs  de  ceux  qui  voient  un  en- 
nemi de  leurs  intérêts  dans  quiconque  est  Tami  des 
intérêts  du  peuple.  L'opinion  publique,  en  sVchap- 

Sant  des  liens  ae  nos  derniers  tyrans,  a  développé 
es  ailes  de  leu  :  elle  vole  devant  la  loi,  oui  a  peine 
a  la  suivre;  elle  la  guide,  elle  lui  trace  le  chemin, 
elle  fait  entendre  partout  le  même  cri  :  Les  droiudu 
eiloyen!  Bile  ne  se  dessaisira  plus  de  cette  précieuse 
conquête  :  elle  a  appris  qu'il  ne  suffit  pas  que  des 
orateurs  lui  disent  qu'elle  est  libre  pour  qu'elle  le 
soit,  elle  veut  l'être.  La  liberté  est  devenue  majeure; 
elle  est  émancipée,  il  ne  dépendra  plus  de  personne 
de  la  tenir  en  tutelle. 

Non,  on  ne  les  reverra  plus,  ces  temps  de  honte 
où  le  tableau  des  Droits  de  l'Homme  n'était  exposé 
dans  cette  enceinte  du  temple  des  lois  que  comme  un 
vain  ouvrage  de  l'art,  comme  une  décoration  de  la 
salle,  comme  la  carte  d'un  pays  perdu.  Tandis,  en 
effet,  que  nos  armées  victorieuses  remplissaient  le 
péristyle  de  ce  temple  des  drapeaux  de  l'ennemi 
vaincu,  n'e{^t-on  pas  dit  que  nos  insolents  dictateurs 
avaient  suspendu  à  ces  murs  les  droits  sacrés  du 
peuple,  comme  un  trophée  de  la  victoire  par  eux 
remportée  sur  la  liberté  publiaue  !  Le  peuple,  à  pré- 
sent détrompé,  ne  se  re|M>se  plus  que  sur  lui-même 
et  sur  vous  du  soin  de  son  indépendance. 

Le  commerce  rapide  des  pensées  apporte,  pour 
ainsi  dire,  dans  une  délibération  commune,  tous  les 
grands  intérêts  politiques  :  la  liberté  de  In  presse  re- 
cueille la  voix  et  les  suffrages.  Depuis  six  mois,  la 
loi,  qui  doit  être  l'expression  de  la  volonté  générale, 
porte  le  caractère  le  plus  parfait  qu'elle  puisse  avoir 
dans  une  si  vaste  république  ;  elle  est ,  autant 
que  possible,  l'ouvrage  de  la  nation  tout  entière;  le 
peuple  prévient  tous  vos  vœux,  tous  vos  projets,  et 
ne  vous  laisse,  pour  ainsi  dire,  que  le  soin  d'apposer 
sur  ses  pensées  le  sceau  de  l'autorité  nationale  :  tan- 
dis que  la  loi  s'élabore  dans  la  sagesse  de  vos  comi- 
tés et  dans  votre  génie,  ell^  s'échappe  et  s'élance  de 
l'opinion  publique,  qui  quelquefois  vous  devance; 
et  si  cette  irrésistible  activité  vous  ôte  souvent  la 
gloire  de  l'initiative,  elle  vous  fait  toujours  éprou- 
ver le  plaisir,  si  doux  a  des  représentants  fidèles, 
d'avoir  pensé  comme  le  penple,  et  d'être  d'intelli- 

fence  avec  lui  dans  tout  ce  que  vous  faites  pour  son 
onheur. 

Lorsqu'on  disputait  encore,  dans  cette  enceinte, 
sur  la  liberté  de  la  presse,  cette  liberté,  si  longtemps 
captive,  se  débarrasse  de  ses  chaînes,  parcourt  d'un 
pied  rapide  toute  l'étendue  de  la  république  ;  et  déjà 
ses  cent  voix  avaient  fait  retentir  toute  la  France  des 
accents  de  la  vérité,  appelé  toutes  les  langues  et  tou- 
tes les  plumes  à  la  proclamation  des  principes,  avant 
qu'aucune  loi  Tût  émanée  du  sein  de  vos  délibéra- 
tions. Son  flambeau  répand  partout  des  torrents  de 
lumière.  Les  J«')C()bins  uu  0  thermidor  l'aperçoivent 
comme  unecomètequi  leur  présage  leur  destruction 
prochaine.  L'augure  n'était  point  faux;  le  peuple  se 
précipite  vers  leur  caverne;  le  trône  de  l^narchie 
s'ébranle,  chancelle  et  tombe  enfin.  Vous  obéissez  au 
vœu  du  peuple,  qui  est  aussi  le  vôtre  ;  et  daiisrari- 
Ire  fermé  des  Jacobins  vous  enchaînez  au  pied  de  cet 
échalaud  toujours  arrosé  de  sang,  qu'ils  appelaient 
tribune,  la  discorde  inhumaine,  le  terrorisme  sous 
la  forme  d'un  lion  prêt  à  s'élancer  sur  sa  proie, 
l'horrible  cruauté,  la  farouche  ambition,  en  un  mot 
tous  les  crimes  que  vous  ensevelissez  pour  jamais 
sous  les  monceaux  dé  leurs  propres  poignards.  Les 
mânes  de  leurs  innombrables  victimes  sont  évoqués 
du  fond  des  tombeaux  ;  la  liberté  de  la  presse  les 
pousse  vers  cette  enceinte,  les  disperse  sur  toutes  les 


avenues  de  cette  salle,  leor  prête  ses  aecents  vigou- 
reux, plaide  à  cette  barre  la  cause  de  l'humanité  et, 
entourée  de  cette  lugubre  clientèle,  vous  demande 
et  obtient  ce  décret  de  justice  rigoureuse,  auquel  vo* 
tre  indulgence  avait  longtemps  répugné. 

Au  milieu  de  cette  insurrection  générale  de  l'opi- 
nion publique  et  de  ce  bouillonnement  de  la  veo* 
geance  nationale,  vous  sentez  le  besoin  de  retenir 
avec  sagesse  ce  tumultueux  débordement  de  l'in* 
dignation  populaire.  L.es  précautions  de  la  justice 
la  plus  scrupuleuse  sont  créées  en  faveur  des  plus 
criminels  des  hommes,  comme  si  vous  aviez  voula 
vous  montrer  aussi  ingénieux  dans  votre  justice 
qu'ils  l'ont  été  dans  leur  scélératesse.  Le  noyeur 
vendéen  fit,  le  premier,  l'essai  de  ces  formes  protec» 
trices  ;  et  si  jamais  les  scrupules  de  la  sévère  équité 
pouvaient  devenir  un  scandale,  l'humanité  eût  été- 
scandalisée  des  lenteurs  de  cette  affaire. 

Mais  ces  sages  lenteurs,  maleré  l'activité  devo* 
rante  de  l'opinion  dont  je  viens  ae  vous  présenter  le 
tableau,  furent  bien  appréciées  par  le  peuple,  oui 
vit  qu'après  cette  belle  révolution  du  9  thermicior 
on  ne  devait  plus  assassiner  personne,  pas  même  les 
assassins: 

Quand  vous  eussiez  vonlu  mettre  à  l'épreuve  ce 
sentiment  de  justice  qui  est  au  fond  du  cœur  de  tous 
les  vrais  Français,  comme  il  est  le  caractère  de  cette 
nouvelle  révolution,  vous  n'eussiez  pu  faire  une 
expérience  ni  plus  efficace,  ni  plus  heureuse. 

Quoique  ce  contraste  de  votre  justice,  si  lente,  si 
timide,  si  impartiale,  fasse  encore  ressortir  toute  la 
turpitude  de  ces  hommes  qui  assassinaient  le  jour^ 
qui  assassinaient  la  nuit,  pour  qui,  s'il  est  permis  de 
s^xprimer  ainsi,  la  vapeur  du  sang  humain  était  de- 
venue comme  un  élément  nouveau,  nécessaire  à 
leur  existence,  le  peuplesait  contenir  la  juste  impa- 
tience qui  l'irrite  ;  il  ne  murmure  point  de  ces  len* 
leurs  de  la  justice  qui  semble  se  traîner  d'un  |»ied 
chancelant  derrière  les  coupables,  et  qui,  tous  les 
jours  sur  le  point  de  les  atteindre,  semble  reprendre 
haleine  pour  les  laisser  échapper  encore. 

Quel  exemple  frappant  la  nation  donne,  par  cette 
longanimité,  de  son  amour  pour  la  justice  !  Aussitôt 
que  vous  avez  dit  que  vous  jugeriez  les  coupables, 
vous  avez  vu  tomber  peu  à  peu  et  s'apaiser  celte  ef- 
fervescence, qui  d'abord  ne  connaissait  aucun  ob* 
stacle. 

On  ne  vous  demande  pas  compte  du  temps  que 
vous  mettez  à  juger,  on  ne  vous  demande  que  la  jus- 
tice. 

Eh  !  cependant  le  peuple  se  dissimule-t-il  que  la 
république  sera  agitée  de  mouvements  secrets,  tant 

Sue  l'existence  des  grands  coupables  servira  de  point 
e  ralliement  au  reste  de  la  faction  désespérée? N'a- 
t*il  pas  vu  toutes  les  divisions,  toutes  les  terreur! 
qu'on  a  voulu  semer  parmi  vous,  depuis  qu'ils  sont 
en  jugement?  Il  a  vu  toutes  ces  agitations,  mais  son 
amour  pour  la  justice  est  resté  inébranlable.  Elles 
l'ont  mis  à  de  rudes  épreuves  toutes  les  ruses  qu'on 
a  employées  pour  grossir  la  faction  qui  se  sent  trop 
faible,  toutes  les  scènes  scandaleuses  par  lesquelles 
on  s'ejtorce  journellement  de  troubler  la  Convention 
nationale.  Eh  !  combien  n'avez-vous  pas  vous-mêmes 
besoin  de  cette  impassibilité  dont  vous  donnez 
l'exemple  au  peuple! 

Tantôt  la  faction  tout  entière  se  montre  sous  les 
traits  d'un  homme  qui  vous  insulte  par  les  expres- 
sions les  plus  outrageantes,  qui  envenime  toutes  vos 
intentions,  qui  compare  l'exécrable  loi  du  33  prai- 
rial à  Brutus  immolant  ses  enfants,  qui  ne  craint  pas 
de  dire,  dans  cette  enceinte  sacrée,  qu'il  assassinem 
ses  collègues;  tantôt  elle  prend  la  plume  pour  ca- 
lomnier vos  principes;  elle  vous  attaque  tous  les 


Mî 


matins  dans  des  écrits  où  sa  fureor  s*exha1e  avec  une 
candeur  qui  fait  pitié.  Mais  let  hommes  libret  n'ai- 
ment point  son  style,  et  l'univers  ne  pense  point  à 
elle.  Véritable  Protée,  vous  Tavez  vue  cacher  sous 
la  toge  romaine  les  flétrissures  qu'elle  recul  de  la 
justice  française,  et  prendre  le  nom  de  Gracchus 
pour  prêcher  l'insurrection  contre  vous. 

Et  après  tant  d'attaaues  et  tant  de  calomnies  dont 
j'ai  été  l'objet  jusque  aans  cette  enceinte,  parce  que, 
depuis  le  9  thermidor,  j*ai  consacré  sans  relâche  mes 
faibles  eftorts  à  développer  les  principes  de  la  Con- 
yenlion  nationale  elle-même,  s'il  m'est  enfin  permis 
une  seule  fois  de  rompre  pour  (|uelques  instants  un 
silence  que  je  m'étais  jusqu'ici  religieusement  im- 
posé par  respect  pour  elle,  je  peindrai  cette  faction 
(qui  a  aussi  son  Couthon) ,  tantôt  empruntant  la 
main  et  le  style  d'un  prêtre  catholique  romain,  pour 
m'accuser  d'avoir  attaqué  les  Droits  de  l'Homme,  et 
lancercoiitre  moi  les  inculpations  que  j'ai  victorieu- 
sement conlondues  ;  tantôt,  sans  égard  pour  la  diffé- 
rence des  sectes,  euj^ageant  un  juil  à  m'habiller  de 
ses  friperies  et  à  tapisser  les  mursdecalomnicsaux- 
quellesje  crois  avoir  répondu  à  la  satisfaction  du 
peuple. 

Vous  avez  su,  citoyens  collègues,  apprécier  et  la 
perversité  de  mes  accusateurs,  et  leur  bonne  foi  ;  il 
est  vrai  que  le  dévouement  avec  lequel  je  me  suis  sa- 
crifié à  la  proclamation  des  Droits  de  I  Homme,  de- 
puis le  9  thermidor,  a  dû  me  valoir  l'honneur  d'être 
injurié  par  ceux  qui  s'en  sont  imperturbablement 
déclarés  les  ennemis.  C'était  une  des  récompenses  du 
patriotisme,  à  laquelle  je  pouvais  avoir  droit  de  pré- 
tendre ;  ils  ont  saisi  la  première  occasion  favorable 
pour  me  la  décerner. 

Je  parle  de  la  manière  dont  les  Droits  de  l'Homme 
sont  rédigés:  ils  crient  aussitôt  que  j'ai  voulu 
anéantir  les  Droits  de  l'Homme. 

Je  dis  que  la  constitution  est  comme  la  Galalhée 
de  Pygmalion ,  cachée  encore  sous  le  rideau  de 
pourpre  qui  la  couvre,  et  qu'il  faut  approcher  d'elle 
le  flambeau  de  Proniéthée  ;ils  crient  que  j'ai  attaqué 
la  démocratie. 

Je  partage  avec  plusieurs  de  mes  collègues  l'hon- 
neur d'avoir  reconquis  Toulon  ;  ils  impriment  des 
lambeaux  de  lettres  écrites  dans  la  crainte  de  mon 
rappel  et  dans  l'appréhension  de  voir  brûler  par  le 
général  ingambe^  ou  par  d'autres,  les  villes  que  je 
voulais  conserver  à  la  république. 

Je  n'ai  pas  dérangé  une  pierre  ;  ils  me  peignent 
comme  un  grand  démolisseur.  J'ai  ménagé  le  sang 
français  ;  et  ils  me  représentent  égorgeant  comme 
Carrier,  et  mitraillant  comme  Collot. 

Mais  que  m'importent  leurs  calomnies  et  leurs  fu- 
reurs! n$  n'étoufferont  pas  plus  la  vérité  qu'ils  ne 
triompheront  de  la  liberté;  quelque  mouvement 

gu'ils  se  donnent,  ils  ne  sauveront  pas  les  coupâ- 
tes ;  car  c'est  là  leur  but:  c'est  là  1  objet  de  toutes 
leurs  intrigues;  c'e^t  pour  y  parvenir  que  la  faction 
aux  abois  prend  tant  de  formes  différentes.  Mais  elle 
est  surtout  remarquable,  d'autant  plus  qu'elle  se 
fait  moins  remarquer,  lorsque,  solitaire,  sur  un  des 
points  les  plus  élevés  de  cette  enceinte,  gardant  un 
silence  perfide,  afiectant  les  dehors  de  I  indigence, 
elle  médite  sa  correspondance  critninelle  avec  tout 
ce  qu'il  y  a  de  plus  factieux  dans  le  Midi,  et  provo- 
que à  l'insurrection  contre  la  représentation  natio- 
nale tout  ce  qu'il  y  a,  dans  ces  régions,  de  têtes  vol- 
caniséespar  les  fureurs  de  Robespierre  et  les  ardeurs 
du  climat. 

Vous  avez  vu  se  développer  et  prospérer  ces  in- 
trigues :  des  coupe-jarrets,  des  assassins,  des  hom- 
•  mes  nés  pour  les  crimes,  ont  inondé  Paris.  Votre  po- 
lice les  a  tenus  sous  son  regard  et  sous  sa  surveil- 


lance ;  une  loi  sage  vient  de  les  repousser,  non  dans 
leurs  foyers  (car  ils  n'en  ont  pas),  mais  dans  leurs 
départements  ;  ils  y  resteront  enchaînés  sous  les  yeux 
d'une  police  attentive  et  sévère. 

Tant  de  trames,  tant  d'intrigues,  tant  de  turpitu- 
des n'ont  pu  émouvoir  ni  votre  impassibilité,  ni  l'in- 
ébranlable patience  du  peuple  ;  il  attend  dans  le 
calme  le  jour  de  la  justice.  Tous  les  ressorts  de  la 
tactique  que  va  épuiser  (on  doit  s'y  attendre)  la 
faction  que  je  viens  de  peindre  ne  pourront  faire  dé- 
vier le  peiiple  des  principes  pour  lesquels  il  a  fait , 
avec  la  Convention  nationale  la  révolution  du 
9  thermidor. 

Rien  de  tout  ce  que  je  viens  de  vous  exposer,  ci- 
toyens, n'a  échappé  à  l'œil  de  la  nation  ;  mais  elle 
bannit  toute  espèce  d'alarmes  ;  elle  se  repose  sur 
l'éternelle  justice  et  sur  la  vôtre,  et  sur  la  pudeur 
publique  ;  elle  se  repose  sur  la  majorité  de  la  Con- 
vention. Combien,  en  effet,  elle  est  imposante,  cette 
majorité,  oui  ne  sera  désormais  ni  le  jouet,  ni  l'in- 
strument a'aucune  tyrannie,  mais  qui  les  brisera 
toutes  ! 

Partout  où  je  porte  mes  regards  sur  cette  masse 
respectable,  je  vois  de  vrais  et  sincères  amis  de  la  li- 
berté, je  vois  des  hommes  francs  dans  leurs  princi- 
pes, ouverts  dans  leurs  discours  ;  des  républicains 
qui  savent  et  c^ui  disent  qu'il  faut  enfin  terminer  la 
révolution,  qui  ne  sont  animés  que  de  cet  unique 
sentiment,  qui  ont  oublié  toutes  les  divisions  qui  ont 
pu  les  séparer  autrefois,  qui  ont  frappé  le  tyran  le 
9  thermidor,  qui  ont  lancé  entre  les  mains  de  la  loi 
les  héritiers  de  sa  perversité  et  les  cosociétaires  de 
ses  forfaits,  ^ui  ont  fermé  les  Jacobins,  et  qui  veu- 
lent rendre  à  la  France  républicaine  sa  liberté  ravie 
pendant  si  longtemps. 

Oui,  vous  êtes  décidés,  toute  la  majorité  de  cette 
assemblée  est  décidée  à  consommer  les  hautes  desti- 
nées du  peuple  français.  Nous  le  jurons  par  les  maux 
qu'il  a  soufferts,  et  dont  le  souvenir  douloureux  pè- 
sera longtemps  sur  nos  cœurs.  Ah  !  combien  cette 
tâche  est  consolante  !  Tout  nous  sera  facile,  si  nous 
voulons  toujours  être  inse'parablement  unis. 

La  malveillance  va  publiant  partout  qu'après  la 
punition  des  traîtres  de  nouvelles  divisions  déchire- 
ront l'assemblée:  si  ce  malheur  pouvait  arriver,  je 
ne  crains  pas  de  le  dire,  citoyens,  la  révolution,  la 
liberté,  la  république,  le  fruit  de  tant  de  douleurs» 
de  tant  de  travaux,  de  tant  de  sang,  la  France  enfin 
serait  perdue  sans  ressource. 

Oui,  sans  ressource.  Eh  qu'est-ce  donc  qui  pour- 
rait les  causer  ces  divisions  ?  Aimerons-nous  mieux 
être  comme  des  tigres  acharnés  les  uns  contre  les 
autres?  aimerons-nous  mieux  nous entre-égorger 
encore,  que  de  finir  paisiblement  et  avec  honneui 
notre  mission  dans  les  douces  méditations  du  bon- 
heur public?  Tous  les  représentants  sont-ils  destinés 
à  se  passer  de  main  en  main  une  coupe  pleine  du 
sang  de  leurs  collègues?  Ne  savons-nous  pas  que 
nos  discordes  ont  aussitôt  mille  rajetons  mortels 
dans  toutes  les  parties  de  Ih  répuMique  ? 

Les  malveillants  calculent  déjà  les  victimes;  ils  se 
Irompentdans.leur  calcul  :  ils  n^auront  plus  l'affreux 
plaisir  de  nous  voir  déchirer  les  entrailles  les  uns 
des  autres.  Ils  nous  verront  tous  d'accord  ;  car  n'en 
doutons  pas  (et  cette  pensée  soulage  mon  cœur), 
dès  que  la  cause  de  discorde  qui  existe  à  présent 
sera  détruite ,  on  n'entendra  plus  dans  cette  en- 
ceinte qu'un  même  cri,  au'un  même  vœu.  Toutes 
les  différences  d'opinions  s  effaceront,  disparaîtront; 
tous  les  cœurs  se  rapprocheront,  se  joindrout,  se 
confondront  dans  un  même  sentiment. 

Oui,  je  vous  en  atteste  vons-mêmes,  vous,  mes 
collègues,  pour  qui  je  suis  un  objet  de  haine  ou  qui» 


683 


an  moins,  me  le  témoignez;  si  vous  voulez  être  sincè- 
res avec  vous-mêmes,  vous  avouerez  que  nous  ne 
sommes  tous  séparés  que  par  un  point  les  uns  des 
autres  ;  qu'un  peu  d'opiniâtreté  vous  retient  seule- 
ment  encore,  mais  qu'au  fond  de  vos  âmes  vous  sou- 
pirez, comme  nous,  après  le  moment  où  la  Conven- 
tion n'offrira  plus  le  désolant  spectacle  d'une  éter- 
nelle division.  Comme  nous,  vous  sentez  le  besoin 
de  l'union  des  sentiments  et  des  pensées  ;  comme 
nous,  vous  êtes  convaincus  de  cette  grande  vérité  : 
c'est  que  la  Convention  nationale  iK>it  renoncer  à 
ses  travaux,  si  elle  ne  peut  renoncera  sesquerelles. 

Déjà  le  sceau  de  la  justice  est  imprime  partout, 
même  sur  les  institutions  du  gouvernement  révolu- 
tionnaire qui  nous  ont  paru  aevoir  être  conservées. 
Les  sièges  du  sanglant  tribunal  où  se  plaçaient  les 
bourreaux  des  dictateurs  sont  honorés  aujourd'hui 
par  un  choix  d'hommes  probes  et  justes  11  a  retenti 
dans  vos  cœurs,  comme  il  retentira  dans  les  siècles, 
cet  cloquent  et  sublime  discours  du  président  de  ce 
tribunal  purifié.  L'histoire  le  recueillera  sans  doute 
comme  un  des  traits  les  plus  frappants  et  les  plus 
caractéristiques  de  cette  révolution  nouvelle. 

Mais  les  institutions  révolutionnaires  doivent  s'ë* 
crouler  peu  à  peu.  Que  sont-elles,  en  effet,  sinon  des 
appâts  pour  l'ambition,  et  des  moyens  pour  le  des- 
potisme? C'est  une  tyrannie  toute  organisée;  c'est 
un  trône  dressé  et  préparé  pour  le  premier  factieux 
qui  aura  assez  d*auaace  et  de  lâcheté  pour  s'y  asseoir. 

Telles  sont  les  formes,  telle  est  la  nature  de  ce 

Î;ouvernement,  qu'il  semble  être  un  piège  tendu  par 
e  démon  de  l'ambition  ;  il  faudrait  des  anges  pour 
le  faire  marcher,  et  nous  n'avons  que  trop  senti  que 
nous  sommes  des  hommes. 

Un  membre  de  cette  assemblée  a  dit,  avec  raison, 
que  c'était  une  dictature.  Or  toute  dictature  suppose 
un  dictateur  ou  des  dictateurs;  et  tout  dictateur  est 
un  tyran. 

Hâtons-nous  donc  de  faire  disparaître  cette  con- 
ception qui  n'a  pu  germer  que  dans  des  têtes  ambi- 
tieuses et  être  présentée  que  par  des  mains  avides  de 
pouvoir  et  de  domination.  Datons-nous  d'effacer  du 
sol  de  la  liberté  cette  invention  sans  exemple  de  la 
tyrannie,  ce  marche-pied  du  trône  de  Robespierre, 
cet  établissement  qui  a  pu,  comme  les  plus  mauvai- 
ses inventions,  avoir  quelque  utilité,  mais  qui  a  en- 
fanté tant  de  fléaux  que  la  postérité  reculera  d'hor- 
reur quand  l'histoire  les  lui  présentera  sur  ses  pages 
ensanglantées. 

Fuyez  dans  les  abîmes  du  nasse,  temps  malheu- 
reux, époques  désastreuses,  où  le  seul  soupçon  était 
un  crime,  et  où  les  terribles  portes  des  cachots  s'ou- 
vraient devant  ceux  qui  étaient  même  soupçonnés 
d'être  suspects  ! 

Citoyens,  nous  aurons  beaucoup  à  faire  pour  dé- 
truire les  traces  des  influences  dangereuses  dont  nos 
lois  ont  été  imprégnées.  Tandis  que  la  nation  appe- 
lait la  liberté  par  ses  vœux  et  son  courage,  tandis 
qu'elle  faisait  tant  de  sublimes  efforts,  tandis  que 
vous  secondiez  ces  efforts  généreux,  des  ambitions 
diverses  jetaient  dans  l'ombre  leurs  plans  divers,  et, 
toujours  sous  le  masaue  trompeur  du  patriotisme, 
marquaient  vos  lois  du  cachet  de  leur  ambition  : 
cette  ambition  violente,  qui  se  détruisit  par  sa  pro- 
pre explosion  le  9  thermidor,  était-elle  l'ouvrage 
d'un  jour  ?  Jamais  Robespierre  aima-t-il  la  liberté, 
dont  il  prononçait  le  nom  avec  tant  d'emphase? 
Quel  empire  cependant  il  exerçait  !  comme  son  as- 
tucieuse hy  pocnsie  fascinait  tous  les  yeux!  Toutes  ses 
)aroles  étaient  des  oracles  ;  tous  ses  mots  étaient  des 
ois.  Marchant  toujours  à  son  but  par  des  routes 
tortueuses,  n'a-t-il  pas  dû  ieter  dès  longtemps  dans 
vos  décrets  les  bases  de  sa  domination,  ou  du  moins 


le 


y  placer  les  asMiranees  de  son  conpable  espiyfr,  el 
comme  les  degrés  de  ce  trône  dictatorial  où  il  mon- 
tait déjà  dans  sa  pensée?  Mais  surtout,  lorsqu'aidé  de 
tant  de  complices,  il  vous  tenait  enchaînés  sous  sa 
main  meurtrière,  lorsqu'un  de  ses  regards  était  un 
arrêt  de  mort,  lorsqu'enfin  il  vous  avait  ravi  le  pou- 
voir de  faire  des  lois,  les  actes  qui  émanaient  d'ici  ne 
devaient-ils  pas  respirer  le  poison  de  son  ambition? 
N'a-t-il  pas  a  A,  suivant  son  naturel  ombrageux,  ti- 
mide et  circons|)ect,  glisser  toujours  dans  vos  décrets 
quelque  disposition  favorable  à  ses  vues  tyranni- 
ques,  et  se  ménager  ainsi,  au  sein  même  de  vos  lois» 
les  moyens  ou  de  les  violer  avec  impunité,  ou  de  les 
détourner  au  profit  de  ses  desseins  ?  Ce  sont  ces  pri- 
ses qu'elles  peuvent  encore  offrir  à  quelque  main 
ambitieuse  qu'il  faut  se  hâter  de  détruire.  Nous  au- 
rons donc  besoin  de  jeter  un  regard  en  arrière,  de 
visiter  notre  propre  ouvrage  avec  l'œil  de  la  censure^ 
et  de  corriger  les  vices  de  certaines  de  nos  lois  qui 
sont,  pour  ainsi  dire,  grosses  de  tyrannie. 

Bnhn  tout  le  peuple  nous  demande  aue  nous  pré* 
parions  les  travaux  oui  doivent,  quand  nous  aurons 
dicté  les  conditions  d  une  paix  glorieuse  avec  les  en- 
nemis de  la  France,  mettre,  sans  danger  et  sans 
crainte  de  secousses,  la  constitution  en  activité. 

O  jour  à  jamais  fortuné  !  ô  jour  dont  tous  nos 
vœux  pressent  l'aurore,  où  nous  pourrons  nous 
écrier  a'une  commune  voix  :  •  Sortez  enfin  de  cette 
arche  sacrée,  charte  sublimç  de  notre  patrie,  tables 
de  Talliance  jurée  par  le  peuple  à  la  liberté  et  à  l'é- 
galité !  Etablissez  sur  la  surface  de  ce  vaste  empire 
vos  dispositions  immuables!  Vous  n'avez  plus  d'en- 
nemis à  craindre;  vous  rallierez  tous  les  cœurs  et 
tous  les  esprits  !  Vous  nous  devancerez  dans  les  dé- 
partements, et  vous  nous  y  ferez  jouir  des  bienfaits 
de  notre  propre  ouvrage  !  • 

Que  d'autres  parlent,  citoyens,  de  l'aristocratie  : 
où  est-elle?  ou  se  cache- t-elle  ?  quels  sont  ses 
moyens,  ses  forces,  ses  espérances?  Elle  n'est  qu'un 
fantôme,  et  nous  ne  sommes  point  des  visionnaires. 
Veut-on  dire,  par  ce  mot,  qu'il  est  encore  quel- 
ques hommes  en  France  oui  versent  des  larmes  se- 
crètes snr  les  ruines  du  troue  ?  Qui  le  conteste  ?  N'y 
avait-il  pas  aussi  des  citoyens,  et  vous  en  êtes  la 

Ereiive,  qui,  sous  les  rois,  soupiraient  après  la  repu- 
lique?  Mais  ces  hommes  sont-ils  nombreux?  ont- 
ils  un  plan?  sont-ils  à  craindre?  Où  sont  leurs  res- 
sources? où  sont  leurs  armées  ?  Cette  fois-ci  la  Ven- 
dée, leur  dernière  espérance,  n'existe  réellement 
plus.  Ont-ils,  comme  Robespierre,  une  commune, 
des  Jacobins,  un  Hanriot,  une  partie  de  la  force  ar- 
mée, des  bataillons  de  dévotes,  un  tribunal,  une 
liste  civile,  tous  les  emplois  à  leur  disposition?  L'a- 
ristocratie sortira-t-elle  tout  à-coup  armée  de  pied 
en  cap,  comme  une  autre  Minerve,  du  cerveau  de 
ceux  qu'elle  tyrannise  ? 

Etrange  opinion,  également  honteuse  à  ceux  qui 
peuvent  la  concevoir,  et  au  peuple  qui  en  est  l'ob- 
jet !  Voyez  les  rois  qui  tremblent  sur  leurs  trônes  au 
bruit  de  la  foudre  nationale  !  Vo)rez  leurs  phalanges 
saisies  d'épouvante  !  Voyez  cette  immense  guirlande 
d'olivier,  qui  bientôt  va  ceindre  et  marauer  nos 
frontières  reculées  et  notre  territoire  agranai  ! 

La  paix!  la  patVr  /  s'écrient  tous  les  peuples,  af- 
faissés sous  le  poids  de  leurs  armes  impuissantes;  et 
le  peuple  français  leur  répond  d'une  voix  douce  et 
fi  ère  :  La  paix! 

Elle  est  l'objet  de  tous  les  vœux,  de  toutes  les  es- 
pérances, et  le  quart  du  globe  ébranlé  a  besoin  de 
repos. 

Qu'elle  arrive,  enfin,  cette  paix  si  désirée  ;  que 
tous  les  peuples  la  révèrent  !  Qu'ils  goûtent  ses 
ruitsde  générations  en  générations  !  Que  les  noms 


584 


4eeiniiqirirtarontJiir<<«(jf  iirpnilr  point  des  des- 
potes) soient  avec  amour  et  vénération  dans  la  bou- 
che de  nos  derniers  neveui  !  Que  cette  paix,  fondée 
•ur  la  justice,  sur  la  bonne  foi  du  peuple  français,  et 
ûign9  de  son  caractère,  soit  le  modèle  de  toutes  les 
pua  qui  se  feront  à  Tavenir  chet  toutes  les  nations  de 
la  terre  I  Qu'aucun  coupde  canon  ne  se  tire  plus  dé- 
sormaia  sana  la  permission  de  la  république  fran- 
çaise; et  devenons,  pour  ainsi  dire,  si  l'on  peut  se 
servir  ici  d'une  eipression  familière,  les  grands  ju- 
ges de  paii  de  TBurope.  Tendons  aux  autres  nations 
nos  bras  Tsinqueurs  et  non  fatigués  :  traitons  avec 
«llea;  mais  ne  composons  jamais  avec  la  gloire.  La 
victoire  elle-même  a  trncé  nos  limites,  feroM-nous 
rétrograder  aon  vol?  Non,  peuples  étrangers,  nous 
poserons  nos  colonnes  là  où  vous  cesserez  de  nous 
Oombaitre. 

fisfiéronsque  les  vœux  do  peuple  pour  la  paix  ne 
tarderont  pns  à  s*accomplir.  DejA,  citoyens,  vous 
avez  snlisfait  un  de  ses  plus  ardents  souhaits,  en  lui 
rendant  la  liberté  des  cultes  dont  il  était  privé  de- 
puis si  longtemps.  Quelle  politique  exécrable  avait 
ainsi  enchaîné  toutes  lea  consciences,  détruit  tous 
les  autels!  Quels  nouveaux  Titans  avaient  escaladé 
les  cieux  1  Déjà  la  morale,  de  toutes  parts  ébranlée, 
ae  raffermit  sur  ses  seules  véritables  bases.  Immor 
talité,  aiguillon  des  grands  cceurs,  mère  des  vertus 
et  des  héros,  je  laisse  à  d'autres  le  soin  de  discuter 
ton  dogme  sublime  ;  mpis  ie  sais  que,  sans  toi,  sans 
tes  douces  espérances,  il  u  est  sur  la  terre  ni  vérita* 
ble  morale,  ni  gouvernement  solide,  ni  saine  politi- 

3ue,  ni  patrie,  ni  liberté.  Consacre  le  patriotisme 
u  citoyen,  et  relève  la  dignité  de  l'homme.  Place  le 
Phédùn  aous  le  poignard  de  Brutus  et  sous  l'épée  de 
Caton.  Que  la  tolérance  établisse  la  fraternité  des 
religions.  La  tolérance  est  la  vertu  des  hommes  li- 
bres; c'est  la  tyrannie  qui  enfante  le  fanatisme. 

Pour  nous,  représentants  du  peuple,  donnons  à 
la  nation  le  ga^e  de  notre  inaltérable  union  ;  sovons 
dignes  de  IV>pinion  publique  qui  nous  seconoe  si 
puissamment.  Le  peuple  a  trop  longtemps  gémi  de 
nos  diKordea.  fiffaçons-en  jusqu'au  souvenir.  Au 
moment  de  notre  séparation ,  voulons  nous  nous 
quitter  amis  ou  ennemis?  S'il  est  un  plaisir  touchant, 
c'est  celui  de  rencontrer,  après  l'accomplissement 
de  sa  mission,  un  ancien  collègue  que  I  on  presse 
contre  son  cœur.  Voulons-nous  nous  priver  de  ce 
plaiiir?  Hors  de  cette  enceinte,  nous  mesurerons- 
nous  encore  avec  des  yeux  de  haine?  Non,  Je  le  ré- 
pète, dès  que  le  motif  de  la  dissension  aetuelle  aura 
disparu,  le  peuple  aura  la  joie  de  nous  voir  tous 
unis,  travaillant  à  l'envi  et  de  concert  à  l'achève- 
roeiit  du  grand  œuvre  pour  lequel  nous  avons  été 
appelés.  Nous  pourrons  même,  aussitôt  que  la  grande 
alniîre  uni  nous  occupe  sera  terminée,  écouter  la 
voix  de  rindntgencc  envers  une  mitUitiide d'hommes 
qu'un  attachement  fanatique  pour  Robespierre  a  fait 
tomber  dans  des  écarts,  et  qui  ont  cru  servir,  danssa 
personne,  la  cause  du  patriotisme  :  le  crime  seul 
sera  pyni,  et  nous  tendrons  nos  bras  à  l'erreur. 
Ainsi  toutes  ces  querelles  se  termineront,  tous  nos 
cœurs  seront  unis,  toutes  les  tempêtes  s'apaiseront, 
et  le  vaisieau  de  l'Etat,  voguant  d'un  cours  tran-> 
otillle,  entrera  dans  le  port  au  milieu  des  transports 
oc  la  joie  et  des  cris  de  la  reconnaissance. 

Voici  le  projet  de  décret  que  je  soumets  à  rassem- 
blée: 

i  La  Contetitlon  fialfonale  décr^te  : 

•  Art.  V\  Le  comité  de  législation  fera,  sons  le  plus 
bref  dêlui ,  un  rapport  sur  toutes  tes  lois  où  se  sont  glissées 
4es  dispo>Uloiis  tjrro!iniquc5. 

•  IL  La  lui  du  M  Kptcmbre  (vieux  style)  est  rapportée. 
H  eoDiéqutmçe  |  te«s  cens  qui ,  d'après  cette  loi ,  sont  en 


état  d*arrest  Jioo  pour  eaise  de  stispîcioa  leroat  s«r-le» 
cbtinp  mis  en  liberté,  et  !e  séquestre  mb  sur  leurs  biena 
sera  levé. 

•  111.  Une  comniisslon  de  vingt  membres,  nommée  par 
appel  Bomioal,  sera  chargée  de  préparer  le«  moyem  d*t'té- 
culino  de  la  constitution  démocraiique  de  1793  fiienx 
ajfle),  pour  le  Bomenl  oà  cette  oootlituiioD  pourra  être 
Bise  CD  activité  sous  les  auspices  d'une  paii  glorieuse. 

•  IV.  La  Confenlioo  aaiionaledécièie  en  prioctpe  que 
le  gouvernement  aduel  ne  pourra  être  remplacé  que  par 
un  gouvernement  définitif»  éubli  sur  les  bases  de  la  ooo- 
Stltution  de  179S. 

•  V.  loeonUnent  après  te  Jugement  des  prérenos.  la  loi 
de  garantie,  en  date  du  8  brumaire,  sera  revue  par  \v\ 
trois  comités  réunis ,  d*après  ee  principe  que  nul  n*pré- 
senlont  du  peuple  ne  pourra  être  S  l*aveDir  iradull  an  tri- 
bunal révolutionnaire,  mais  sera  fagé  par  lu  Convention 
nationale  elle-même,  suivant  aa  nouveau  mode.  ■ 

Ce  discours  est  plusieurs  fols  inierrompii  et  couvert  des 
plus  vils  applandissements.  (L«  êmiH  Ummm.) 

N.  B,  »^Dans  la  séance  du  11  ventoie,  la  commission  dos 
Vlngtet*Un  a  f^it  son  rapport  sur  CoHot,  Billaod,  Barère 
et  Vaitier  \  elle  a  csondu  an  décret  d*arcasaUon« 

La  Convention  a  ordonné  qu*ils  seraient  mis  provisoire- 
ment en  arrestatien. 


LIVRES  DIVERS. 

Code  det  tucc€tuoiu%  donmtioitSf  udutitmiioms,  têstmmmtê 
ef  partages ,  tvec  une  introduction  prélimioaire  et  sii  l»- 
blcaui  généalogiques:  deutième  édition ,  corrigée  et  aug- 
nientée  de  plusteufs  décrets  importanlt  lur  les  successions 
im  étrangm,  deséuiigrét,  déportés,  condsonés  et  détenus; 
de  aouveans  artieles  MditioBneIt  sur  le  rappel  des  enfunu 
nés  hors  mariage;  des  articles  du  aouveau  ceide  civil  relatif» 
ans  mêmes  matières;  termiuée  par  une  tablu  alphabétique 
contenant  ranaljao  abrégée  de  tout  Touvrago  ;  par  le  ci- 
toyeu  Guichard.  Pris  :  5  liv.,  et  S  liv.  10  s.,  franc  de  port. 

A  Paris,  ches  Gamerj,  libraire,  rue  Serpente,  a*  17. 

OBOOBAPHIB. 

Carte  rob Cr>re  du  théâtre  de  la  guerre  sur  les  fronttTres 
d*Espagnet  comprenant  depuis  Bordeani  ]asqu*à  Madrid,  oè 
se  trouvent  les  Pyr<  nées  hautes,  basses  et  orientales  ;  drenée 
par  C.-J.  Chauroier,  Taii  3ode  la  rëpubliqua;  en  une  feuille. 
Pris  :  t  liv. 

Carte  de  la  prutcipami  da  Catalogne*  drestée  par  H.  Jail» 
lot,  avec  les  dépariemenls  limitrophes,  corrigée  eiaugoies* 
tëe  par  P.  Loogchamps  61s  ;  en  deui  feuilles.  Pris  :  4  liv. 

Carte  /  outihe  des  royaumes  d'Espagne  et  de  Portugui^ 
dressée  par  U.  Jailloi ,  avec  les  départoments  limithropCes , 
corrigée  et  augmentée  par  P.  Longchamps  fils ,  d'après  les 
cartes  de  Lopes  eu  1793,  en  deus  feuilles.  Pris  :  3  liv. 

La  même,  en  une  feuille,  dressée  d'après  les  obaarvatioas 
des  meifleurs  géographes.  Prit  :  30  s. 

A  Paris,  chei  Basset,  marchand  d*estampes,  me  Jaeqpes, 
au  Coin  de  celle  des  Hathurios. 


MUSIQUE. 

Aomuitcfi  lUttoriquet,  par  L.-F.  JanflTret,  arasknie  itè 
Mébol. 

Ce  recueil  sera  composé  de  Tingt  roaaacet,  dont  um  pa* 
raitra  tous  lea  vingt  jours.  La  musique  et  l'accompagnement 
de  clavecin  seront  du  cilojen  Méhul  ;  raccompagnemenl  de 
harpe  sera  du  citoyen  Cousinesu  fils. 

Le  pfii  do  la  souscription  est  de  30  liv.  pour  Paris,  et  de 
35  liv.  pour  les  départements.  Le  bureau  est  ches  Ceosineao 
père  et  fils^  luthiers,  rue  de  ThionviMe,  u*  1840. 


Pûyminu  à  la  iréê&nriê  naiionali» 

Le  payeiaent  do  perpétuel  est  ouvert  pour  lea  ali  pmBlers 
mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  (pli  seront  porteurs  d'inscrip- 
tions au  grand  livre.  Celui  pour  tes  rentes  vlai^res  est  de 
huit  mois  vingt  et  un  jours  de  launée  1793  ^vieui  style). 


GAZETTE  NATIONULE  oo  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

>^  164.         Quartidi  14  Vbntosb,  Tan  3».  {Mercredi  4  Mabs  1795,  vieux  ityle.) 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

Varsovie,  te  6  février.  —  Les  Russes,  les  AutricbieDS 
les  Prussiens  campent  autour  de  cette  capitale* 

—  Le  duc  de  Cou  ri  an  de  se  rend  à  Pétersbourg  où  îl 
aura  ,  dit-on ,  bientôt  terminé  en  sa  faveur  les  différeods 
qu'il  a,  tunt  avec  sa  famille  qu^avec  la  noblesse  courlaD- 
daisr. 

—  Il  existe  encore,  après  la  ruine  de  la  patrie,  quelque 
esprit  palriolique  recommandable  aux  yeux  des  honnêtes 
gens.  Les  officiers  polonais,  dégrades  supprimés,  ont  ré- 
sisté aux  instances  de  l'impératrice  qui  les  a  (ait  inviter  à 
prendre  du  service  dans  ses  armées. 

—  L'empereur  a  entoyé  son  portrait  au  général  Suwa- 
row. 

—  Le  général  russe  Buxhoerden  a  établi  une  commis- 
sion chargée  d'examiner  les  comptes  du  trésor  public  de 
la  Pologne.  C'est  le  castellan  de  Dantzig  qui  est  président 
de  celle  commission. 

—  On  se  confirme  de  plus  en  plus  dans  l'idée  que  Sta- 
nislas va  abdiquer.  La  Russie  fait  monter  très-haut  les  det- 
tes personnelles  de  ce  prince. 

—  A  la  lettre  que  Stanislas  avait  écrite  à  Timpëratrice, 
sur  le  déplorable  état  de  la  Pologne,  voici  la  réponse  qu*il 
a  reçue,  lorsqu'il  était  encore  ù  Varsovie. 

m  Monsieur  mon  frère, 

«  Le  sort  de  la  Pologne,  tel  que  V.  M.  ipe  le  dépeint 
cinns  sa  lettre  du  31  novembre,  est  une  suite  des  maximes 
destructives  de  chaque  ordre  et  de  toutes  institutions  so- 
ciales, que  les  Polonais  ont  puisées  dans  Texemple  d*un 
peuple  abandonné  à  tous  les  égarements. 

•  Il  n'a  pas  tenu  k  moi  de  prévenir  leurs  suites  terri- 
bles, el  de  fermer  l'abîme  entr'ouverl  sous  les  pieds  de  la 
nation  polonaise  par  ses  ^éducteurs,  et  où  ils  ont  réussi  à 
l'entraîner.  Toutes  mes  sollicitudes,  toutes  mes  peines» 
ont  été  payées  d'ingratitude,  de  bafne  et  de  trahison. 

«  De  tous  lesmauiqui  accablent  aujourd'hui  ce  peuple, 
celui  d'une  disette  prochaine  est  le  plus  terrible.  Je  don- 
nerai mes  ordres  pour  le  garantir,  autant  que  je  pourrai , 
de  ce  redoutable  fléau. 

«  Cette  calamité ,  réunie  à  la  connaissance  que  j*ai  des 
dangers  auxquels  V.  M.  a  été  exposée  au  milieu  d'un  peu- 
ple eCTréné,  me  fait  souhaiter  qu'elle  quitte  sans  délai 
cette  ville  punissable,  el  qu'elle  se  rende  à  Grodno.  Le 
feld-maréchal  comte  de  Suwarow-Rymnisky  a  l'ordre  de 
vous  le  proposer,  et  de  faire  tous  les  arrangements  conve- 
nables pour  vous  amener  ici  d'une  manière  aussi  sûre 
que  commode.  V.  M.  connaStra  mon  caractère.  Il  me  rend 
incapable  d'abuser  des  avantages  que  la  bonté  de  la  Pro- 
vidence et  la  justice  de  mes  affaires  m'onl  fait  acquérir. 
V.  M.  peut  donc  attendre  en  repos  ce  que  la  raison  d^Etat 
et  la  sûreté  publique  décideront  sur  le  sort  futur  de  la  Po- 
logne. 

c  Dans  ces  sentiments,  je  demeure.  Monsieur  mon 
frère ,  la  bonne  sœur  de  Votre  Majesté. 

Signé  Cathbbinb.  • 

ALLEMAGNE. 

Vienne,  le  h  février,  —  Les  communications  les  plus 
actives  ont  lieu  entre  la  maison  d'Autriche  et  l'impératrice 
de  Russie.  Mais  le  cabinet  de  Vienne  travaille  encore 
moins  avec  celui  de  Pétersbourg  qu'il  n'en  est,  |K>ur  ainsi 
dite,  travaillé.  La  cour  de  Russie,  la  plus  habile  sans 
contredit  de  toute  la  coalition,  est  au  moment  de  tou- 
cher ù  son  but.  L'empereur  donne  dans  le  piège  d'une 
troisième  campagne,  dernier  vertige,  avant-coureur  des 
désastres  de  sa  propre  maison.  Le  roi  de  Prusse  ne  pourra 
pas,  dit-on,  se  dégager  de  la  grande  intrigue,  et  gardera 
son  personnage  jusqu'à  la  fin. 

On  observe  ici  que  l'ambassadeur  de  Russie  est  seul 
écoutcù  la  cour  de  la  jeune  impératrice;  on  en  conclut 
que  le  reste  de  nos  ressourcesTBie  perdre  sur  les  bords  du 
Rhiu. 

8«  Série*  —  Tome  X 


On  renouvelle  les  termes  contradictoires  par  lesqaeb  la 
Russie,  au  commencement  de  chaque  campagne,  paie* 
d'un  côté,  son  contingent  à  la  coalition,  et,  &  l'autre» 
rassure  contre  l'ambition  de  Catherine  II ,  savoir  :  I*  que 
l'impératrice  prendra  décidément  une  part  active  dans  le 
derniers  efforts  de  la  ligue  ;  2*  que  l'impératrice  est  atUH 
quée  d'une  maladie  qui  fait  craindre  pour  ses  jours. 

—  On  commence  à  Bude  une  procédure  contre  sept  non* 
veaux  prisonniers  d'Etat.  C'est  un  choix  fbit  sur  trente- 
neuf,  en  y  comprenant  ceux  qui  avaient  déjà  été  envoyés 
à  Vienne.  Dix-sept  comtés  de  la  Hongrie  se  sont  librement 
accordés  à  demander  officiellement  à  l'emperear  qu'il  ne 
fit  point  de  grâce  aux  accusés  qui  se  trouveraient  coupa» 
blés.  Cette  manœuvre,  que  l'on  attribue  au  gouvernementt 
n'a  qu'un  médiocre  succès  quant  à  l'opinion  publique  t 
quant  à  la  perte  des  sept  personnes  condamnées,  proscri- 
tes d'avance,  le  succès  est  assuré. 

—  On  continue  de  faire,  en  Hongrie,  des  letrées  ponr 
compléter  les  régiments. 

—  L'empereur  a  écrit  au  pape;  il  lui  a  demandé  une 
bnlle  pour  un  jubilé  et  des  processions  solennelles,  dévo- 
tions nécessaires  à  la  prospérité  des  armes  auirichiennei. 
On  attend  de  la  cour  de  Rome  une  réponse  favorable. 

—  L'archiduc  Charles  est  ici,  de  retour  de  l'année  et 
des  Pays-Bas  autrichiens. 

Ratiêbonne^  le  k  février,  —  Le  baron  de  Hardemberg, 
ministre  de  Prusse  auprès  de  la  Franconie  et  de  la  Souabe, 
a  présenté  aux  directoires  de  ces  cercles  une  note  par  Is^- 
quelle  Frédéric-Guillaume  déclare  qu'il  ne  peut  entretenir 
plus  longtemps  son  armée  sur  le  Rhin,  attendu  les  dépen- 
ses considérables  qui  surchargent  son  trésor;  qu'il  de- 
mande en  conséquence  que  l'on  fournisse  l'emprunt  de 
I  million  de  Ihalers  demandé  pour  la  dépense  des  cercles, 
et  en  général  pour  le  salut  de  la  Germanie. 

La  note  porte,  en  outre,  que  cet  emprunt  donnera 
H  pour  100  d'intérêt,  et  que  le  roi  assignera  pour  sûreté 
l'hypothèque  d'une  province  qu'il  désignera  dans  le  temps. 

Les  deux-cercles  ont  répondu  que  S.  M.  prussienne  était 
suppliée,  tant  en  sa  qualité  de  prince  d'Empire  que  comme 
puissance  prépondérante,  d'attendre,  avant  de  retirer  ses 
troupes,  l'issue  des  négociations  entamées  avec  la  France, 
et  que,  dans  le  cas  où  la  guerre  se  continuerait,  on  t'oc- 
cuperait des  moyens  de  remplir  requprunU 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Parié  f  /e  12  ventôse,  —  On  a  très-bien  remarqué  qnOf 
toutes  les  fois  qu'il  s'est  agi  de  traiter  une  grande  affaire, 
une  affaire  qui  devait  porter  un  coup  funeste  à  une  faction 
ennemie  de  la  liberté,  on  a  toujours  crié  contre  les  jeunes  ' 
gens  de  la  première  réquisition  «  qu'on  traitait  de  lâches. 
Ces  hommes  affreux,  dont  le  règne  est  passé,  avaient  posé 
en  principe  qu'on  ne  pouvait  servir  la  république  qu'au- 
tant qu'on  était  couvert  de  crimes,  qu'autant  qu'on  les 
égalait  en  atrocités,  et  ils  ont,  en  plus  d'une  occasion, 
laissé  percer  le  dépit  qu'ils  avaient  de  voir  que  des  hom- 
mes qui  loudroyaient  les  ennemis  de  la  patrie  pussent  loi 
être  utiles  sans  leur  ressembler,  pussent  fixer  la  victoire 
sans  professer  le  meurtre  et  le  pillage.  Aussi,  n'ayant  plus 
rien  à  reprocher  aux  jeunes  Français,  ils  les  ont  traités  de 
muscadins;  ils  n'ont  pas  eu  même  l'attention  de  laire  une 
,  application  vraisemblable  de  ce  mot,  qu*on  inventa  I 
I   Lyon  pour  en  mitrailler  les  habitants  ;  ils  le  donnèrent  in- 
I   distinctement  à  ce  petit  nombre  d'êtres  éphémères  qui  dét- 
I  honorent  la  qualité  d'hommes,  et  à  cette  majorité  de  ri- 
goureux serruriers,  les  noirs  forgerons,  les  forts  artisans 
qui  ont  tous  été  enveloppés  dans  la  même  réquisition. 
Les  scélérats I  ils  sont  sî  ingrats,  si  aveugles  dans  leurs 
proscriptions,  qu'ils  donneraient  même  le  nom  de  musca* 
din  au  brave  et  malheureux  jeune  homme  qui,  après  avoir 
perdu  à  la  défense  de  son  pays  les  deux  bras  et  les  deux 
jambes,  aurait  le  tronc  un  peu  moins  salement  vêtu  que 
le  leur. 
N'étant  engagés  dans  aucun  des  liens  qui  assujettissent 
i  le  père  de  famille,  n'appartenant  qu^à  leur  courage  t 

7i 


«86 


tt^ayaat  betoSil  de  le  eooser«er  qae  pour  la  pairie,  les 
jeunes  geos  opt  mot  aCroolé  pour  e Ut .  Tandis  que  les  uo» 
pfirtaient  la  liberté  chez  les  peuples  nos  voisins,  les  autres 
la  rcnëaient  à  la  Pranœ  ;  tandis  que  les  uns  reculaient  les 
liarM»  dt  la  répvUiqve.  les  autre  b  fuiidalenl  au-dedans; 
lawlM  qM  Ita  uns  rf»dai«rBt  à  m»  vobint  la  lilMrtè  de 
pegarf  et  d'écrire»  kt  Mtret  la  foistieot  rccoBf  rer  à  leivf  ■ 
t'oiicitojeas. 

Ua  anarcàMSlei  aftienl  bie«  aenti  qv'ilt  ne  pearraîest'  ! 
jaiiais  tout  désoffanber  tant  qaMt  auraient  centre  eui 
les  jeunes  Français  t  aeiai  ne  flBt*ce  qu*aprèi  leur  départ 
fmti  Tarmée  qu'on  comaenfa  à  Mitrailler,  à  tuer,  à  éger* 
Ser  P%^  ceutuloes.  Tout  er  qui  s*est  patsé  noos  a  proofé  | 
r||i*flli  ordonnant  la  leiéede  la  première  rèqoisilion  on  avait 
Ilifn  iaoina  en  rue  de  déleodre  la  patrie  que  de  sacrifier  la 
jfineMe  froncaiae.  Dcmiêrenieni  encore  ne  i*est«on  pas 
ippMt  à  et  que  les  jeunes  gêna  foiaent  coaMilssaires  des 
mffWldo  sorte  qo'oo  ne  voulait  leor  aerorder  d'autre 
dr«|l|d*an|re  prérogative  que  celle  de  se  teire  tner,et  qu*un 
leir  rtfHuil  •éao  lo  faeuHé  de  ponr%oir  à  lenrn  propres 
besoins. 

Otti  ni  mit  loboideqia  oontlniiellea  dédanatlom  contre 
les  jeunes  gens  de  la  première  réquisition  ^  Ceoi  qui  les 
ffAl  savent  bien  qne,  s^il  y  en  avait  dans  Tintérieur  on 
amaè  grand  nombre  quHto  le  dlsenl ,  nos  armées  Haussent 
pia  obtenu  d'auasi  brillants  sneeèt }  mais  ib  veulent  faire 
prendre  le  ebangot  ib  venlenl  eieiler  leurs  satellites  à  ar* 
rHer  dana  la  me  ions  Ice  jeunes  gens  qu'ils  reneonirerent, 
même  ceui  qui  ne  sont  pas  coroprb  dans  la  réquisition, 
à  leur  dire  qu'ilatoot  lAcboi»  par  cela  seul  qu'étant  jeu- 
nqi  ib  ne  «ont  pat  à  Tarniée^  ainsi  on  cbasserait  de  tout 
les  empioU  où  le  gouveruen^m  a  été  obligé  de  les  appeler 
lef  jeunes  gens  qui  remplacent  les  atnpidêi  et  féroces  par« 
tisaus  de  la  terreur  ;  ainsi  le»  Jacobin^i  du  9  ibermidor  re- 
prendraivol  le»  places  ;  ainai  on  exciterait  de»  loéoe»  aan» 
glaniez;  ain^oo  amènerait  la  guerre  eivila, 

.1  cH  Ulleaieiit  vrai  que  le»  lerroriues  ne  feulent  qo*in- 
quiéier  les  jeunes  gen»  qui  ne  sont  pa»  de  la  réquisition» 
ne  Yculeiit  que  le  débacra»aer  de  09s  surveillant»  incon- 
oiodca,  éi  ces  dcrtructeur»  d'idole»»  que  dernièrement  le 
ooaiité  de»alut  publie  a  été  obligé  de  prendre  un  ar/été 
qnl  détend  d'inquiéter  le»  jeune»  eito>tB»  qui  aa  »ont  pas 
comprb  dans  la  loi  du  S4  aoûu 

Que  de  déveloupetneui»  ne  pourrait-on  pa»  donner  à  oea 
rrttcaion»  1  Combien  iU  lûuuteraient  aux  preuves  qu'on  a 
d^  du  »|Mè«ie  de  réduire  la  populalion  de  la  France» 
iJ'égorg<>r  les  p^ra»  UmmUi  qu'on  ferait  tnee  leaenlauUl 
Nous  nous  t>orncrons  ft  dire  quct  quelques  jours  avant  son 
procès,  Texécrable  Carrier  cria  aussi  dans  la  Convention 
nationale  contre  b»  jeuoe»  gen»»  tout  m  dbant  qu'il  n'en 
était  pal  Tennemi. 

Jeune»  Prsnçai»,  eipoir  cl  honneur  de  la  patrie  t  frace» 
fOtt»  soient  mille  (bb  rendues;  vous  avfl  terrassé  les  hor- 
de» Impies  du  despoUsme,  vous  avex  arboré  sur  les  forts  de 
la  Hollande  le  drapeau  tricolore ,  en  même  temps  que  vos 
frères,  sous  le»  auspices  de  la  Convention  nationale»  dé- 
tmtsaient  le»  écba(^uds  et  délassaient  les  monceaui  de  ca- 
davre» sou»  le»qneb  la  liberté  gémissait  enseverio»  Que 
ceux  d*enlre  vous  qui  sont  guéri»  dç»  blessure»  glorieuse» 
qnYb  ont  reçues  au  champ  de  Tbonneur  volent  au  po»te 
du  péril  oà  la  république  le»  rappelle;  que  le»  autres,  que 
la  loi  autorise  4  rester  dan»  leur»  fo^er».  uilleol  sans 
cesae;  qu'lU  se  Joignent  è  la  Conveatiou;  qu*iU  l'eutou* 
reqt  de  leur  respect  et  de  leur  amour  ;  qu'il»  l'aident  k 
purger  riniérieur  de  ce  mtconium  poUtique  qui  l'em- 
barrasse. Jeune»  gens  que  rameur  de  la  patrie  eoflaounes 
encore  qucl<iue»  elferi»^  ei  la  patrie  eU  tauvéal 


On  bouéMAde  d'Auxeero  qne  bi  munleipaHié  deeelte 

cuMUune  a  fait  fermer  éepnb  quelqnea  ^ir»  b  Société 

pqiulnim»  Les  vrab  amb  de  bi  patrie,  les  vrab  répnbli* 

CiMatiU  mulu  eiécnter  le  décret  de  b  Convention  natio- 

nibl  ai  Me  aarlir  de  la  salie  des  séance»  de  la  Société  les 

hmÊm  da  Marm  et  de  Lapeiklier  »  mab,  partlaans  du  ler- 

VlMM,  le»  enragé»  Jaeeèin»  vonlaieni  les  conserver.  Il 

Mbi»  pour  Ibba  triompher  la  loi,  recourir  par  motion 

jordie  è  quelques  coups  de  canne  vigoureusement  ap))l>- 

liÉaaag  lia  épaulea  éa  ce»  «etaiMira.  Le  auocés  de  cette 

4ppm  a  été  «MDpIcI»  al  dopnia  la  Ibrinelnre  de  b  Soeiélé 

h  pib  d  la  Manquillité  régnent  dan»  cctu  commune. 


TlIgtdAL  caiMl.lEL  lErOLLTI0!<!<AmK. 

Dm  If  ren/ose.  —  Cbarles-Nicola^ Boréaux,  née  Ifém, 
département  de  POise,  égé  de  trente-quatre  ans,  garçon 
boulanger,  faubourg  du  Tegiple,  demeurant,  lors  de  scmi 
arrestation,  à  Tbôpital  Saint-Germain,  &  Paris; 

Accusé  d'avo.r  foulé  aui  pied>  et  avili  la  cocarde  natio- 
nale, le  16  frimaire.  Pan  2*,  el  d'avoir,  è  la  même  épo- 
que, an  Pont-Toomanl  des  Tuileries,  tenu  àes  propos 
tendant  au  rétab>i«seaBent  de  la  royauté  et  à  l^aviltsscmenl 
de  la  représentation  nationale  »  ces  fhlts  n'étant  pas  oon- 
»tan|»»  a  été  acquitté  et  mis  en  liberté. 

CONVENTION  NATIONALE- 

PrMtd«a«e  dé  B(mrdom  (de  COiêf). 
SITtTB  DB  LA  SdAHCB  DU  It  VB:fTOSB. 

*^  :  Je  demande  l'impre asioo  du  discoars  de  Rré- 
ron,  et  le  renvoi  du  projet  de  décret  aux  trois  comi- 
tés du  gouvernement. 

CsASLis  :  .rei  à  faire  un  amendement  qui  porte  sar 
Toblet  de  la  discussion  dans  tous  les  points  sur  les- 
quels Pile  a  été  établie.  Je  ne  oi*oppose  point  à  Tim* 
pression»  au  renvoi  et  à  rajourneoient  ;  mais  le  dis* 
cours  que  nous  avons  entendu  porte  sur  une  foula 
d'ob^ctsdont  les  uns  intércssenlairectement  la  chose 
publique,  les  autres  portent  sur  la  représentation 
nationale,  les  autres  sur  des  individus;  enlin  il  en  est 
un  autre  qui  absorbera  toute  la  sollicitude  de  la  Cou- 
veotiou  ;  c*est  celui  des  priocipea  et  de  salut  du 
peuple. 

Je  demande  que  la  Convention,  quelque  parti 
qu'elle  prenne  sur  la  demande  en  renvoi  et  ajourne- 
ment ,  autorise,  tfcluuiïe,  par  l'amour  du  bien  pu- 
blie, tous  ses  membres  à  lui  offrir  sur  cet  objet  leurs 
réflexions  par  la  voie  de  l'impression. 

Je  demande  que  la  Convention,  qui  a  la  leçon  de 
rexpérience  sur  les  différents  discours  qui  ont  été 
prononcés,  entre  autres  de  celui  du  9  thermidor 
qui,  comme  celui-ci,  parcourait  un  ensemble  de 
vues....  (Violents  murmures.)  Plus  d'une  fois,  à 
cette  tribune,  par  des  motions  d'ordre,  par  des  dis* 
cours  préparés  sur  les  principes  que  prolesse  la  Con- 
vention, elle  s'est  trouvée  entraînée  par  des  hommes 
qui»  sous  de  belles  paroles,  cachaient  des  vues  per« 
fades  et  ambitieuses.  (Violents  murmures.) 

FiiM»#ttra  membrif.'^  Président,  rappelle  Cbasies  à 
la  question. 

LeGBNnaB  (de  Paris)  :  Il  est  bien  permis  à  un 
membre  de  divaguer,  quand  i!  a  été  deux  moissons 
venir  à  In  Convention  ,  si  ce  nVst  pour  toucher  son 
mandat.  (On  rit  et  Ton  applaudit,) 

CiiAsi^ES  :  Il  est  de  mon  devoir  de  répondrai  ce  qui 
vient  d'échapper  à  Legendre 

PiiiaWwrf  «aùB  ;  Cela  ne  lui  est  point  du  tout 
échappé. 

On  réelana  Timpreaeien  el  le  renvoi  du  discours  et  du 
projet  de  décret  de  Fréron  au](  trois  comilés. 

Ces  propositions  sont  décrétées  au  milieu  des  applaudis- 
semenu 

DuouBSNQY  :  J'ai  été  accusé  hier  d'être  un  parti- 
san de  Robespierre,  el  ma  conduite  fut  toujours  eo 
opposition  avec  celle  de  Robespierre.  Celui-ci  ne 
voulait  INI9  gagner  de  b.ttailles,  et  moi  j'ai  toujours 
annonce  des  succès.  Guffroy  m*a  accusé  d'avoir  per* 
sécuté  les  citoyens  du  département  (lu  Pas-de^lais; 
j'interpelle  les  députés  du  district  de  Bapaume  de 
dire  si  j'ai  fait  incarcérer  un  seul  individu  dans  c« 
district,  de  m^mc  que  dans  ceux  de  Boulogne»  dt 
Calais»  de  Montreuil.  Daits  celui  de  Saint-Omer»  j'ai 
liùt  arrêter  sept  personnes;  dans  celui  deSaint-Poè» 
quatre;  dans  celui  d'Arras,  six;  dans  celui  de  Bé- 
thunc,  miinze  ;  encore  n'est-ce  pab  nroi  qui  les  fai- 
sais arrêter  :  je  les  dénonçais  a^  auturités  cousti- 


«67 


tiiéM,  qui  s*assurtient  de  leurs  persoooei.  Bn  quiuie 
mois  de  temps,  je  n*ai  pas  fait  arrêter  quarante  indi- 
vidus, et  j>n  ai  fait  élargir  quatre  cents.  Au.reste, 
je  demande  que  le«  trois  comités  examinent  ma  con- 
duite. 

La  Convention  passe  ft  Tordre  da  jourt 
l  JoHANNOT,  au  nom  des  comités  des  secours  n 
d'instruction  publique  :  Par  un  décret  vous  avez 
chargé  vos  comités  d'instruction  et  des  secours  pu- 
blics de  vous  faire  un  rapport  sur  l'action  généreuse 
de  Gange ,  commissionnaire  de  Lazare. ,  et  de  vous 
présenter  les  moyens  de  récompenser  lea  vertus  de 
cet  estimable  républicain.  Je  viens,  au  nom  du  co- 
mité des  secours,  acquittercette  dette  sacrée,  en  vous 
retraçant  une  partie  des  traits  généreux  qui  hono- 
rent ti  jamais  fa  vertu  de  ce  bon  citoyen.  Carige, 
sorti  des  mains  de  la  nature,  doué  d*une  âme  bien- 
faisante et  sensible,  a  connu  de  bonne  heure  li  douce 
jouissance  d'être  utile  II  ses  semblables ,  en  parti** 
géant  avec  les  infortunés  le  fruit  de  ses  peines  et  de 
ses  travaux.  Jamais  son  cœur  ne  fut  sourd  i  l'accent 
plaintif  du  malheur  ;  toujours,  au  contraire,  il  fit  le 
Lien  avec  modestie,  et  souvent  se  priva,  ainsi  que  li 
respectable  famille,  des  objets  les  plus  nécessaires  k 
son  existence.  Que  tu  seras  grand  pour  la  postérité, 
estimable  républicain ,  quand  elle  le  rappellera  que 
rhumanilé,  ce  sentiment  précieux  de  la  nature,  mt, 
pour  ainsi  dire,  étouffée  dans  le  c^eur  de  tous  les 
Français  par  les  tyrans  qui  alors  opprimaient  la  pa» 
triel  Que  de  larmes  de  sensibilité  tu  feras  verser, 
quanaon  arrivera  à  cette  époque  de  la  révolution 
où  toutes  les  vertus  morales  ont  paru  exilées  du  ter- 
ritoire français!  Qu'il  sera  consolant  pour  l'homme 
'  de  bien  de  te  rencontrer  dans  ces  moments  de  deuil 
où  la  vertu,  abandonnée  et  sans  appui ,  était  trans- 
formée en  crime  et  traînée  sur  les  échafauds;  dans 
ce  temps  enfin  où  le  crime  seul  marchait  d'un  pas 
ferme,  où  les  larmes  données  au  malheurétaient  un 
suiet  de  proscription»  et  où  tous  les  liens  de  la  mo- 
rale étaient  dissous!  Que  ta  récompense  sera  grande, 
puisque  tu  vivras  dans  l'estime  de  tQus  les  républi  • 
cains ,  qui  t'offriront  comme  le  modèle  du  bon  ci- 
toyen, du  bon  père ,  du  l^on  époox ,  et  de  Tami  ver- 
tueux! Déjà  lu  as  reçu  la  récompense  qui  fut  chère 
à  ton  cttur  ;  ton  action  a  retenti  dans  le  sénat  fran- 
çais et  sur  tous  les  points  de  la  républi.-iue  ;  ton  nom 
est  inscrit  sur  les  pages  de  Timmortalité  »  et  gravé 
profondément  dans  le  cœur  de  l'homme  de  bien.  Tu 
as  le  comble  des  vraies  richesses,  aussi  ce  n*est  plus 
pour  toi  que  nous  parlons  ;  c'est  pour  ta  vertueuse 
famille,  que  nous  recommandons  a  la  sollicitude  de 
la  Convention  nationale;  c*est  pour  te  mettre  à  même 
d'exercer  la  bienfaisance  envers  tes  six  enfants,  dont 
trois  sont  adoptils,  que  nous  venons  lui  offrir  les 
moyens  de  verser  en  tes  mains  un  léger  bienfait,  qui 
t'aidera  à  les  élever  dans  la  pratique  des  vertus  ré- 
publicaines oui  t'ont  fait  distinguer  au  milieu  de 
cette  foule  d'nommes  corrompus  et  Immoraux  qui 
ne  voulaient  agrandir  leur  fortune  qu'à  force  de  for- 
faits et  de  brigandages.  Ainsi,  que  ta  délicatesse  ne 
soit  point  alarmée  :  ce  n'est  point  la  vertu  que  nous 
venons  faire  récompenser  a  prix  d'argent,  car  la 
vertu  ne  se  paie  pas.  mais  seulement  offrir  à  ta  fa- 
mille le  gage  sacré  de  la  reconnaissance  nationalo, 
dans  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rip* 
port  de  soncomiié  desiecouri  publics,  décrète: 

«  La  trésorerie  nationale,  sur  le  vu  du  présent  décret, 
If^aicra  la  somme  de  i,200  lit. ,  à  litre  de  bienfaisance  na* 
tlonale,  BU  citoyen  Can^,  commissionnaire  de  Laiare. 

<  Le  présent  décret  ne  sera  imprimé  qu'au  Bulletin  de 
correspondance,  t 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

Laranal,  âu  nom  du  comité  d'instruction  pu- 


\t 


blique  :  La  loi  d'organisation  dés  écoles  eèntralei, 
disséminées  sur  la  surface  de  It  république  par  qito^ 
tité  de  population  de  trois  cent  mille  habitants, 

Ï»orte  qu'il  sera  statué,  par  un  décret  particulier,  sur 
e  placement  de  ces  écoles.  Le  rapport  de  votre  co- 
I  mité  sur  cette  importante  matière  ne  peut  vous  être 
i  présenté  que  lorsqu'il  aura  entendu  les  différente» 
\  députslions,  afin  que  lea  prétentions  des  grandes 
commnnes  qui  convoitent  ces  éublissements  soient 
discutées  avec  maturité ,  et  que  noua  puissions  vous 
présenter  un  résultat  oui  mérite  votre  approbation  ; 
mais  il  est  nécessaire  de  détacher  de  ce  travail  géné- 
ral l'établiaaeinent  de  l'école  centrale  de  Paris: 
f  parce  qu'il  importe  de  ne  point  laisser  d'intervalle 
entre  la  auppression  dea  collégea  et  l'établissemettl 
des  écoles  centrales,  pour  qu'il  n'y  ait  paa  de  lacune 
dans  l'enseignement  ;  so  parce  que  c'est  de  Paris  que 
doit  partir  le  mouvement  que  vous  voulez^iniprlmet 
à  l'instruction  dans  toute  fa  république.  Il  importe 
éj^alement  de  multiplier  les  établissements  d'instruo> 
tion  dans  cette  grande  commune  :  1»  parce  qu'elle 
est  le  siège  de  la  représentation  nationale;  t»  parée 
qu'elle  est  la  patrie  des  sclenœs,  et  cette  vérité  n'est 
contestée  par  aucun  peuple  de  l'Europe,  surtout  de» 
puis  la  mort  d'Euler;  8»  parce  qu'elle  possède  en 
abondance,  soit  en  hommes,  soit  en  choses,  tous  les 
éléments  dont  se  compose  l'instruction  publique. 

Voici  en  conséquence  le  projet  de  décret  que  Je 
vous  propose,  au  nom  de  votre  comité  d'instruction; 
ce  n'est  qu*une  mesure  d'exécution  d'une  loi  rendue, 
t  La  Convention  nationale,  après  afolr  entendu  le 
rapport  de  son  comité  dMnstruelioD  publique,  décrète  eo 
qui  suit  : 

•  En  exécution  de  ta  loi  du  8  ventoie  présent  mois,  U 
sera  établi  dans  la  commune  de  Paris  cinq  écoles  een» 
traies. 

«  Les  comités  d^lBitnietion  publique,  des  domaines  na> 
tionaux  et  des  travaux  publies  réunis,  chocun  en  ee  qttt 
le  concerne ,  demeurent  chargés  de  la  prompte  exécution 
du  présent  décret.  • 

La  Conftniion  adopte  oe  projet  de  décret» 

—  Pflléfer,  au  nom  duoomlté  d'agrieulture  et  des  arts  # 
propose ,  et  la  Convention  adopte  le  décret  suivant  t 

i  La  Coofcniion  nationale,  considérant  quMI  est  instant 
d*arréter  Jesravaaesquelosloupsfont  daniquclque*  dépa^ 
temenls,  et  Youlant  détruire  dans  le  territoire  de  lu  repu» 
blique  cette  espèce  vorace  et  nuisible  à  la  société,  drcrèie 
ce  qui  suit  : 

•  Art.  I*'.  Tout  citoyen  qui  tuera  une  louve  pleine  rt» 
cevra  une  prime  de  800  li? •  i  une  louve  non  pleine,  250  U  i 
un  loup,  soc  liv.  ;  un  louveteau  au-dessous  de  la  taille  d'un 
renard   400  liv. 

tt  IL  Ces  sommes  seront  payées  par  les  receveurs  des 
districts,  sur  un  mandat  du  directoire,  quM  ne  nourra 
ordonnancer  que  d*après  la  présentation  de  la  lète  du 
loup,  auquel  les  oreilles  seront  coupées,  pour  éviter  toute 
fraude,  et  sur  le  vu  du  eertUleat  de  la  commune  où  te  loup 
aura  été  tué.  •  ^ 

•^  Les  citoyens  de  la  section  deTUnlté,  en  masse,  dé-  ^, 
filent  dans  le  sein  de  la  Convention  nationale.  ^  ' 

Loratêuf,  à  la  barre  :  Législateurs,  le  règne  af-   ^ 
rreux  de  la  terreur  est  passé  sans  retour  ;  vous  Tavez 
promis  au  peuple,  et  le  peuple  le  croit,  parce  que 
vous  ne  pouvez  trahir  sa  confiance,  et  que  vos  in- 
térêts sont  ici,  comme  en  tout,  inséparables  dea  :^ 
siens. 

Législateurs,  nous  serons  avares  de  votre  tempat 
les  jours  de  la  justice  solennelle  approchent  ;  le  pea- 
pleattend  avec  calme,  avecconfiance;  mais  les  coupa* 
blés  s'agitent,  et  cherchent  le  barbare  plaisir  de  l'en- 
traîner avec  eux  dans  l'abîme.  Préservez-le  de  leuri 
pièges,  de  leurs  fureurs,  environnez-vous  de  la 
force  (le  sa  puissance ,  dites  un  mot.  et  vous  verrei 
tous  les  citoyens  de  la  section  de  l'Unité,  comme 
toutes  les  sections  de  Paris,  comme  toutes  les  com- 


588 


mûnes  de  la  république  ,  se  presser  autour  de  vous, 
combattre,  s*il  le  faut,  et  sauver  encore  une  foisja 
patrie. 

Mais  nous  n'invoquons  pas  seulement  la  justice  re- 
doutable au  crime;  nous  réclamons  aussi  la  justice 
qui  protège,  qui  honore  la  vertu ,  le  malheur.  Vos 
coBurs  se  sont  émus,  vos  yeux  ont  laissé  tomber  des 
larmes  sur  la  cendre  de  quelques-uns  de  vos  collè- 
gues égorgés  par  les  décemvirs. 

Epargnez- vous ,  législateurs,  d'autres  regrets;  il 
est  d'autres  victimes ,  il  est  d'autres  proscrits  qui, 
pour  avoir  échappé  à  la  hache  des  bourreaux,  n'en 
sont  pas  moins  dienes  de  votre  attention  ;  il  est  des 
hommes  arrachés  du  milieu  de  vous,  dont  les  crimes 
sont  encore  ignorés  de  leurs  ennemis  mêmes ,  et  qui 
n'osent  franchir  les  barrières  de  cette  enceinte ,  où 
tant  de  fois  vous  admirâtes  leurs  talents  et  leur  cou- 
rage. 

Non,  ce  n'était  pas  un  conspirateur,  celui  qui,  dans 
la  séance  du  24  mai  1793,  osait  prophétiser  les  crimes 
d'Hanriot  et  de  la  commune  rebelle  ;  celui  qui ,  le  2 
juin  ,  vous  peignait  les  angoisses  de  la  liberté ,  qui 
Toyait  l'horrible  monstre  de  la  dictature  s'avancer 
sur  des  monceaux  de  cadavres  et  de  ruines,  vous  en- 
gloutir successivement  les  uns  et  les  autres,  et  ren- 
verser la  république. 

Législateurs,  ceux  que  nous  désignons  ne  deman- 
dent point  de  grâce  ;  ils  ne  demandent  que  la  justice. 
Mous  avons  tous  juré  de  la  maintenir,  et  nous  joi- 
gnons nos  vœux  aux  leurs.  Vous  les  avez  affranchis 
Se  la  poursuite  des  tribunaux,  mais  vous  les  avez 
laissés  sous  le  poids  des  soupçons.  Vous  les  avez 
frappés  de  mort  en  les  tenant  éloignés  du  poste  au- 
q^uelils  étaient  élevés  par  notre  confiance.  Qu'ils  pé- 
rissent s*ils  en  ont  abusé;  mais  ne  refusez  pas  de  leur 
rendre  l'honneur  qu'ils  estiment  plus  que  la  vie,  s'ils 
sont  restés  fidèles,  et  au'ils  achèvent  avec  vous  d'af- 
fermir la  république,  oont  ils  sont,  comme  vous»  les 
premiers  fondateurs. 

PÉNiÈRES  :  S'il  est  permis  aux  citoyens  de  félici- 
ter la  Convention  sur  ses  travaux  ,  il  leur  est  aussi 
permis  de  censurer  ceux  de  ses  actes  qui  leur  pa- 
raissent blesser  la  justice  et  la  souveraineté  du  peu- 
ple. La  section  de  l'Unité  vous  dit  qu'en  rendant  le 
décret  relatif  à  nos  collègues  mis  hors  de  la  loi  vous 
vous  êtes  <k;artés  des  principes  qui...  (Queloues 
membres  de  l'extrémité  gauche  s'agitent  et  parlent 
dans  le  bruit.  )  Ce  n'est  pas  avec  des  mots  qu'on 
étouffera  ma  voix.  (Applaudissements.)  Je  me  rap- 
pelle encore  les  mots  indécents  qui  furent  proférés  à 
cette  tribune  ;  il  me  semble  encore  entendre  dire  au 
rapporteur  des  comités  que  nous  n'avions  pas  fermé 
les  Jacobins  pour  ouvrir  le  Temple,  comme  si,  nous 
qui  avons  conduit  un  roi  à  l'échafaud,  nous  pouvions 
vouloir  de  la  royauté  et  des  crimes  qu'elle  enfante. 

Je  ne  demande  point  d'indulgence  pour  nos  col- 
lègues; ils  n'en  ont  pas  besoin.  (Vifs  applaudisse- 
ments.) S'ils  sont  coupables ,  qu'ils  soient  punis  de 
mert;  mais  s'ils  sont  innocents,  qu'on  leur  rende 
leur  chaise  cnrule.  (Nouveaux  applaudissements.) 

Vous  n'avez  pas  le  droit  de  les  dépouiller  du  ca- 
ractère que  le  peuple  leur  a  donné,  et  qu'ils  conser- 
vent jusqu'à  ce  que  le  peuple  le  leur  reprenne.  (Les 
applaudissements  redoublent.)  Si,  lorsque  le  décret 
fut  proposé,  on  n'eût  pas  effrayé  les  hommes  faibles 
qui  craignent  la  calomnie,  la  discussion  eût  éclairé 
tons  les  esprits,  et  le  décret  n'eût  pas  été  rendu.  Ne 
craignex-vous  pas  qu'en  suivant  une  pareille  doc- 
trine on  ne  parvienne  à  chasser  de  la  Convention  une 
grande  partie  desrepresenlanUi  du  peuple,  et  qu'on 
ne  se  pare  encore  des  dehors  de  l'indulgence  et  de 
la  bonté,  en  ne  les  faisant  pas  poursuivre  par  les  tri- 
bunaux? (Applaudissomcnts.) 

Je  le  répète ,  il  faut  que  nos  collègues  soient  ju- 


fés;  il  m'importe  à  moi  de  savoir  s*il  y  a  parmi  eux 
es  royalistes,  des  contre-révolulionnàires,  des  mi- 
trailleurs, des  buveurs  de  sang,  drségorgeurs.  (Viff; 
applaudissements.)  Mais  non  ,de  tels  forfaits  n*ont 
jamais  approché  de  leur  pensée.  C'est  sur  vous  seuls, 
infâmes  brigands  qui  vous  êtes  emparés  de  l'auto- 
rité nationale  depuis  le  31  mai,  qu'il  faut  rejeter 
tout  l'opprobre  et  l'horreur  qui  vous  environne. 
L'homme  juste,  l'homme  de  bien,  le  républicain  pur, 
invariable,  oue  vous  avez  abreuvé  d'amertumes  et 
que  le  hasara  a  arraché  à  la  mort. cet  homme  sera-t- 
il  encore  proscrit  sous  le  règne  de  la  justice?  Non, 
représentants  du  peuple,  vous  ne  serez  pas  sourds  à 
la  voix  de  la  nation  ;  vous  défendrez  ses  droits,  vous 
défendrez  les  vôtres,  vous  défendrez  ceux  de  vos  col- 
lègues. Je  demande  l'insertion  de  l'Adresse  au  Bul- 
letin ,  et  le  renvoi  aux  trois  comités. 

Rbwbbll  :  Il  n'est  pas  un  bon  citoyen  qui  ne  gé- 
misse de  la  situation  où  se  trouve  la  république.  On 
ne  peut  nier  qu'on  excite  des  mouvements  qui  peu- 
vent amener  une  grande  crise ,  et  ceux  qui  font  des 
motions  déplacées  ne  connaissent  pas  ce  qu'il  faut 
faire  pour  sauver  la  patrie.  Occupons- nous  d'a- 
bord de  son  salut  ;  nous  parlerons  après  de  nos  col- 
lègues. Je  demande  l'ajournement. 

Cette  pétition  est  fréquemment  interrompue  par  le»  plus 
vif^  applaudissements. 

La  Confcntion  ordonne  l'ajoiimement  et  décrète  Tin- 
flertion  de  TAdresse  au  Bulletin. 

—  La  section  de  la  Butte*des-Moulins  présente  une 
Adresse  par  laquelle  elle  demande,  comme  celle  de  rUoitév 
la  rentrée  des  députés  mis  hors  la  loi. 

—  Les  citoyens  de  la  section  des  Marchés  sont  admis 

L'orateur  deladépulalion  :  Représentants,  la  sec- 
tion des  Marchés ,  après  s'étro  livrée  à  la  considéra- 
tion de  l'article  VI  de  votre  décret  du  5  ventôse,  par 
lequel  il  est  proclamé  :  «  que  la  Convention  natio- 
nale se  repose  avec  confiance  du  soin  d'en  seconder 
l'exécution  sur  le  zèle  et  l'énergie  des  citoyens  qui, 
par  leurs  vertus  républicaines  ,  leur  probité  et  leur 
attachement  aux  principes  conservateurs  des  per- 
sonnes et  des  propriétés,  se  rendent  de  plus  en  plus 
dignes  de  la  liberté  qu'ils  ont  conquise;*  aprèsavoir 
entendu  avec  des  transports  de  joie  inexprimables 
l'Adresse  de  votre  collègue  Jean  Debry,  dont  toutes 
les  paroles  ont  passé,  par  une  répétition  demandée, 
dans  tous  les  esprits,  dans  tous  les  cœurs,  est  sortie 
enfin  de  l'engourdissement  dans  lequel  elle  était 
comprimée  par  les  terroristes  ,  les  partisans  du  sys- 
tème de  sang;  elle  s*est  levée  entière  pour  venir 
vous  dire  que  les  féroces  suppôts  de  la  tyrannie 
triumvirale  ne  dominent  plus,  qu'elle  a  exercé  le 
châtiment  que  peut  infliger  l'opinion  sur  ces  hom- 
mes san|;uinaires  qui  ont  arbitrairement  incarcéré, 
désarme,  volé,  pillé;  qu'elle  les  a  déclarés  déchus 
de  toute  espèce  de  conîiance,  qu'elle  les  couvre  du 

fdus  profond  mépris,  et  les  environne  de  sa  surveil- 
ance  jusqu'à  l'instant  où  la  justice  s'élèvera  rapide- 
ment du  fond  d'une  ses  balances  pour  frapper  avec 
choix  ces  faux  et  cruels  défenseurs  de  la  liberté,  qui, 
revêtus  d'un  titre  révolutionnaire,  ne  l'interprétaient 
que  pour  révolutionner  l'humanité ,  que  pour  la 
considérer  à  travers  un  microscope  ensanglanté. 
Elle  ajoute  qu'elle  n'a  point  tardé  à  soustraire  aux 
regards  adoucis  par  la  seule  justice  le  buste  de  Ma- 
rat,  mais  qu'elle  voit  avec  peine  un  homme  qui  se 
dit  son  successeur  établir,  sous  le  titre  d'ami  du 
peuple,  des  listes  de  proscription,  secouer  les  tor- 
ches de  la  guerre  civile  :  nous  déposons  un  de  ses 
Numéros. 

Elle  doit  vous  dire  encore  :  Depuis  longtemps  la 
justice  reste  immobile  ;  qui  donc  arrête  son  oras? 
Les  grands  coupables  dont  l'opinion  publique  est 


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411 

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589 


remplie  auraient-ils  conçu  Tespoir  de  briser  sa  ba- 
lance ou  d'ëinousser  son  glaive  ? 

Oui ,  que  les  assassins ,  que  les  mitrailleurs ,  que 
les  noyeiirs  périssent;  que  les  voleurs  restituent,  que 
leurs  imbéciles  et  lâches  agents  soient  frappés  de 
nullité  et  de  mort  civile! 

Citoyens  représentants ,  nous  toqs  demandons  : 
10  le  désarmement  de  tous  les  coupables ,  membres 
de  notre  comité  révolutionnaire  ,  qui,  chaque  jour, 
regrettent  hautement  les  vols  et  les  assassinats  qu'ils 
n'ont  pu  commettre;  i9  leur  exclusion  de  toutes  les 
places ,  et  en  conséquence  d'ordonner  le  remplace- 
ment de  tous  ces  fonctionnaires  civils  et  militaires 
qui  exerçaient  antérieurement  au  9  thermidor;  3o  la 
restitution  de  toutes  les  armes  que  ces  faux  défen- 
seurs de  Ih  liberté  ont  ravies  aux  meilleurs  citovens, 
en  disant  les  avoir  déposées  entre  les  mains  de  leurs 
chefs  de  Tancien  comité  de  salut  public;  4^  que  vous 
ordonniez  aux  comités  révolutionnaires  nouveaux, 
bien  distingués  par  nous  des  anciens,  de  faire  à  l'as- 
semblée générale  de  chaque  section  le  rapport  dé- 
taillé de  toutes  les  opérations  et  comptes  des  anciens 
comités  se  disant  révolutionnaires. 

Cbasles  :  J'observe  à  l'assemblée ,  et  ce  n*est  pas 
de  ma  part  un  sentiment  de  pusillanimité ,  que  le 
journal  intitulé  l'Ami  du  Peuple  fut  rédigé  par  moi 
jusqu'au  n®  16  inclusivement,  que  depuis  il  est  passé 
entre  les  mains  d'un  rédacteur  que  je  ne  connais 

f)as.  J'invite  donc  mes  collègues  à  ne  m*attribuer  ni 
a  gloire ,  ni  le  blâme  ,  ni  les  calomnies  qui  pour- 
ront résulter  de  ce  journal.  Si  j'étais  l'auteur  do 
Numéro  dénoncé ,  je  l'avouerais,  car  il  y  a  de  la  lâ- 
cheté à  désavouer  ses  écrits  ;  mais  comme  je  ne  le 
suis  pas,  je  me  borne  à  faire  remarquer  aux  citoyens 
qui  sont  à  la  barre  que  leur  démarche  est  contraire 
aux  principes,  qu'elle  attaque  la  liberté  de  la  presse; 
que  cette  liberté  de  la  presse  est  la  sauvegarde  de  la 
liberté  publique ,  et  que ,  si  l'on  en  abuse  pour  ca- 
lomnier un  ou  plusieurs  citoyens ,  les  tribunaux 
sont  ouverts  pour  faire  justice  du  calomniateur.  Ci- 
toyens, je  finis  par  celte  observation:  le  principe 
de  la  liberté  indéfinie  de  la  presse  a  été  établi  par 
Tronçon-Ducoudray,  dans  la  défense  de  Lacroix,  et 
le  tribunal  révolutionnaire  Ta  consacré  par  le  juge- 
ment qu'il  a  porté  dans  cette  ufifaire. 
Oo  demande  l'ordre  du  jour. 

L'ordre  du  joar  est  adopté,  et  Tinsertion  de  l'Adresse 
au  Bulletin  décréiée. 

—  Les  sections  de  PArsenal  et  de  Mutius-Scœvola  suc- 
cèdent, et  présentent  des  Adresses  qui  respirent  le  patrio- 
tisme le  plus  brûlant  et  le-plus  énergique ,  et  le  dévoue- 
ment le  plus  absolu  à  la  représentation  nationale. 

La  Convention  en  ordonne  la  mention  honorable  et  Tin* 
serlion  au  Bulletin. 
La  séance  est  levée  à  quatre  heures* 

SÉANCE  DU   12  VBNTOSB. 

Un  membre,  au  nom  du  comité  des  finances,  commence 
un  rapport  relatif  à  la  citoyenne  Montansier.  — -  Il  est  in- 
terrompu par  une  soudaine  agitation. 

—  Saladin,  membre  de  la  commission  des  Vingt-et-Un, 
entre  dans  la  salle.  —  Des  applaudissements  unanimes  et 
prolongés  se  font  entendre  de  toutes  les  tribunes. 

Les  prévenus  entrent  dans  la  salle ,  et  vont  siéger  à  leur 
place  ordinaire. 

Le  Président  :  Le  rapporteur  de  la  commission 
des  Viiigt-et-Un  a  la  parole. 

Les  acclaritaiions  universelles  recommencent  et  durent 
quelques  instants. 

Le  Président  :  Au  moment  où  les  bons  citoyens 
viennent  réclamer  une  justice  impartiale,  j'attends 
de  la  portion  du  peuple  ici  présente  respect  et  si- 
lence ;  je  Pin  vite  à  ne  donner  aucune  marque  d'ap- 
probution»  ni  d'improbation.  (On  applaudit.) 


Saladin  présente  le  rapport  de  la  commission  des 
Vingt-et-Un  sur  la  conduite  de  Billaud-Varenncst 
Col  lot  d'Herbois,  Barère  et  Vadier. 

11  commence  par  retracer  le  tableau  de  Fétat  de 
la  France  avant  la  révolution  du  9  thermidor.  La 
terre  de  la  liberté,  couverte  de  prisons,  affaissée  sous 
le  poids  des  échafauds,  regorgeant  du  sang  dont  des 
scélérats  l'abreuvaient;  la  terreur  comprimant  tou> 
tes  les  âmes,  la  sûreté  individuelle  attaquée,  les  pro- 
priétés violées ,  les  actes  arbitraires  substitués  à  hi 
marche  des  lois,  la  mort  frappant  les  innocents 
comme  les  coupables ,  le  plus  insolent  despotisme 
siégeant  au  milieu  de  la  représentation  nationale  ; 
telle  était' la  position  de  la  France  à  cette  époque 
mémorable  où  elle  a  été  ramenée  au  bien  par  1  excès 
du  mal ,  et  à  la  liberté  par  l'excès  de  la  tyrannie. 
Robespierre,  Couthon ,  Saint-Just  sont  tombés  sous 
le  glaive  de  la  loi  :  la  tyrannie  a-t-elle  péri  avec  ces 
tyrans?  ont-ils  laissé  des  complices?  C'est  ce  que 
le  peuple  veut  savoir ,  c'est  ce  que  la  justice  et  Tin- . 
térét  général  ordonnent  à  la  Convention  de  pronon- 
cer. 

Le  rapporteur  rend  compte  de  la  marche  qu'a 
tenue  la  commission  des  Vingt-et-Un  pendant  nn- 
struction  de  cette  grande  affaire.  El|ea  communiaué 
toutes  les  pièces  aux  prévenus  ;  elle  les  a  entendus 
dans  tous  leurs  moyens  de  défense.  C'est  ce  qui  a  dû 
nécessairement  retarder  un  rapport  si  longtemps  at- 
tendu. •  Loin  de  nous,  ajoute-t-il,  ridée  d'avoir  cher- 
ché à  trouver  des  coupables;  nous  voudrions  pou- 
voir vous  dire  qu'il  n'en  existe  point.  Nous  nous 
sommes  demandé  si  la  tyrannie  a  été  exercée  sur  le 
peuple,  si  l'oppression  a  pesé  sur  la  Convention  ,  et 
nous  nous  sommes  dit  :  11  y  a  tyrannie  quand  la 
terreur  devient  le  ressort  et  l'âme  du  gouverne- 
ment ;  quand  les  citoyens  ne  trouvent  plus  dans  la 
Déclaration  des  Droits  de  l'Homme  la  garantie  de 
leurs  propriétés ,  de  leur  liberté ,  de  leur  existence, 
de  leur  honneur  ;  quand  le  corps  représentatif  est 
opprimé:  quand,  à  la  faveur  d'une  popularité  usur- 
pée, les  hommes  qui  en  sont  revêtus  ne  s*en  servent 
que  pour  fonder  leur  domination  et  réduire  le  peu- 
ple à  l'esclavage.  En  vain  voudrions-nous  le  dissi- 
muler; la  France  entière  nous  le  dirait:  cet  état 
destructif  de  tout  gouvernement ,  subversif  de  tout 
ordre,  exclusif  de  toute  vertu ,  meurtrier  de  la  Con- 
vention, n'a  que  trop  existé. 

•  C'est  au  courage  de  la  Convention  que  nous  de- 
vons notre  renaissance  à  la  liberté.  11  faut  maintenir 
ce  retour,  en  frappant  avec  la  tyrannie  ceux  qui  en 
ont  été  les  agents  les  plus  féroces.  C'est  dans  cet 
esprit  que  la  commission  a  examiné  si  Barère,  Bil- 
land-Varennes,  Collot-d'Herbois  et  Vadier  ont  véri- 
tablement été  auteurs ,  fauteurs  et  complices  de  la 
tyrannie  qui  a  existé  avant  le  9  thermidor.  Ont-ils 
couvert  la  France  de  prisons?  ont-ils  interprété 
d'une  manière  atroce  la  loi  du  17  septembre  ?  ont-ils 
influencé  le  tribunal  révolutionnaire ,  tous  les  tri- 
bunaux ?  ont-ils,  de  leur  autorité  privée  ,  établi  des 
commissions  populaires  ?  ont-ils  autorisé,  encouragé 
leurs  agents  sanguinaires  répandus  dans  les  dépar- 
tements? ont-ils  exercé  sur  la  représentation  natio- 
nale une  influence  despotique? Si  ces  faits  sont 
constants,  la  tyrannie  est  certaine;  pouvez-YOus  en 
méconnaître  les  auteurs? 

•  Sous  le  despotisme  royal ,  on  comptait  à  Paris 
trois  ou  quatre  prisons;  sous  la  dernière  tyrannie, 
trente  bastilles  s'élevaient  dans  cette  seule  cité ,  et 
enchaînaient  des  milliers  de  citoyens  ;  et  comme  si 
ce  nombre  eût  été  insuflisant ,  un  arrêté  du  comité 
de  salut  public ,  signé  Collot ,  Barère  ,  Couthon  et 
Robespierre,  destine  au  même  objet  le  collège  des 
Quatre  Nations;  ce  n'était  qu'un  dépôt  provisoire  et 
momentané ,  et  cependant  on  y  a  calculé  jusqu'au 


£90 


lu 


degrë  d'air  et  de  Jour  qu*il  fallait  laisser  aux  prison- 
niers pour  ne  pas  les  eiposer  i  mourir.  Qu^on  juge 
par  là  du  régime  intérieur  des  prisons!  La  nomen- 
clature des  actes  d'oppression  serait  incalculable; 
les  mandats  d'arrêt  les  plus  atroces  ëmanaieut  du 
bureau  de  police  générale.  Barère  a  dit  oue  ce  bu- 
reau avait  été  créé  par  Robespierre,  qu'il  était  dirigé 
Sar  lui  seul, et,  en  son  absence,  par  Saint-Just. 
lais  pourquoi  le  comité  n'a-t-il  pas  réclamé  contre 
cet  établissement  ?  Etaient-ils  étrangers  a  ce  bureau, 
ceux  qui  apposaient  avec  tant  de  complaisance  leurs 
signatures  aux  mandats  d'arrêt;  celui  qui,  le  7 
thermidor,  faisait  à  cette  tribune  uu  éloge  pompeux 
de  Robespierre;  qui,  dnuS  son  discours,  ajoutait  que 
cette  police  générale  délivrerait  la  France  de  tous 
les  intrigants  adroits ,  de  tous  les  bas  valets  de  Va- 
rlstocratiePLejcune,  commis  principal  de  ce  bureau, 
ne  venait-il  pas  à  tous  moments  au  comité  de  salut 
)ublic  faire  approuver  les  mesures  prises  par  la  po* 
ice  générale?  Fouquier-Tinville  n'a-t  il  pas  déclaré 
aue  jamais  ce  bureau  n'avait  été  distinct  du  comité 
de  salut  public?  Robespierre  n'a-t-il  pas  été  absent 
du  comité  pendant  quatre  décades  PSsint-Justn'ë- 
tait-il  pas  presque  continuellement  a  l'armée  du 
Nord  ?  Les  arrêtés  liberticides  ne  sont-ils  pas  souvent 
signés  d'un  seul  membre,  quelquefois  de  tous?  La 
forme  des  mandats  d'arrêt  donne  une  idée  de  la 
tyrannie.  • 

Le  rapporteur  ci  te  celui  qui  porte  que  la  citoyenne 
Cabarrussera  arrêtée,  avec  le  jei^ne  homme  qui 
demeure  dans  sa  maison,  et  tous  ceux  qui  pourront 
s'y  trouver  ;  celui  qui  emprisonne  tous  les  artistes 
du  Théâtre^Français ,  «  parce  une ,  disait  Barère ,  il 
serait  possible  qu'ils  fussent  d  intelligence  avec  les 
ennemis  de  la  France  pour  corrompre  l'esprit  pu- 
blic; •  celui  qui,  sur  une  lettre  de  Saint-Just  à  CoU 
lot  d'Herbois,  envoie  à  la  Conciergerie  la  citoyenne 
Lambert,  parce  qu'elle  avait  voulu  voir  Saint-Just, 
et  que  ce  ne  pouvait  être  que  pour  l'assassiner  ; 
mandat  où  étaient  inscrits  ces  mots:  «traduite au 
tribunal  révolutionnaire*  (ces  mots  ont  été  rayés 
depuis);  celui  qui,  sans  motifs,  fait  arrêter  Hérault- 
Séchellesavec  tous  ceux  qui  logeaient  chez  lui. 

H  entre  ensuite  dans  le  détail  des  moyens  em- 
ployés parce  gouvernement  pour  établir  son  atroce 
domination. 

Barère,  au  mois  de  septembre  1793,  proposait  de 
déporter  les  ennemis  de  la  liberté  ;  Collot  d'Herbois 
disait  qu'il  fallait  incarcérer  tons  les  hommes  sus- 
pects, placer  des  barils  de  poudre  sous  les  prisons, 
tenir  toujours  la  mèche  allumée,  pour  les  faire  sau- 
ter s'ils  osaient  conspirer. 

Barère  comprenait  dans  la  loi  du  17  septembre 
toutes  les  classes  de  citoyens  français,  étrangers, 
opulents,  pauvres,  citadins,  campagnards,  put iti- 

Sucs,  marchands,  banquiers,  éloquents,  indifférents, 
criyains  périodiques,  lettrés. 

Billaud'Varennes disait,  en  parlant  de  Lebrun  et 
de  Clavière,  ex-ministres:  «  11  faut  les  juger  en  huit 
jours  :»  de  Custinc  :  «  Il  faut  qu'il  n'existe  plus  di- 
manche prochain;  ces  mesures  donnent  de  1  aplomb 
au  gouvernement.» 

Barère  parlait  souvent  de  déblayer  les  prisons  : 
dans  son  rapport  contre  les  repas  fraternels,  il  disait 
que  les  banquets  civiques  pourraient  être  établis 
•  quand  la  population  serait  épurée.» 

Les  tribunaux  n'étaient  que  les  instruments  de  la 
.tyrannie.  Saladin  cite  un  arrêté  du  25  prairial,  rela- 
tif à  la  prétendue  conspiration  des  prisons,  par  le- 
quel il  est  enjoint  an  tribunal  révolutionnaire  de 
juger  en  vingt-nuaire  heures  une  foule  de  détenus 
dans  la  maison  d'arrêt  de  Bicêtre.  Le  lendemain,  un 
grand  nombre  fut  livré  à  la  mort  tur  uu  simple  ar- 


rêté de  la  commission  de  police  ;  on  compte  trolt 

cent  onze  victimes  de  cette  espèce» 

Hermann,chef  de  la  conmiission  d'administration 
de  police,  proposait  de  déblayer  les  prisons  d'une 
manière  prompte  et  révolutionnaire ,  en  chargeant 
cette  commission  de  surveiller  les  maisons  d'arrêt. 
Ce  projet  fut  approuvé  par  Robespierre ,  Barère  et 
Billaud. 

Le  rapporteur  accuse  Vadier  d'avoir  fait  condam- 
ner à  mort ,  entre  autres  citoyens  de  Pamiers  ,  un 
père  de  famille  dont  tout  le  crime  était  d'avoir  refusé 
sa  (illo  en  mariage  au  jeune  Vadier;  davoir  fait  tra* 
duire  au  tribunal  révolutionnaire  une  foule  de  et« 
toyens  de  la  même  commune,  et  d'avoir  écrit  à  l'ao* 
cusateur  public  que  ce  serait  une  calamité  générale 
s'il  en  pouvait  échapper  un  seul. 

Un  arrêté  signé  Barère,  sur  les  eommi<;sions  po- 
pulaires, annonce  le  dessein  bien  médité  dVxtermi- 
ner  une  partie  des  Français.  On  proposait  de  créer 
quatre  sections  au  tribunal  révolutionnaire,  qui 
parcourraient  les  départements  et  y  promèneraient 
la  guillotine. 

Un  arrêté  du  21  floréal ,  signé  Robespierre ,  Cou- 
thon,  Collot  et  Billaud,  avait  chargé  Mnignet  d'éta- 
blir à  Orange  une  commission  populaire  pour  juger 
les  ennemis  de  la  liberté.  Voici  ce  qu'écrivait  le  pré- 
sident de  cette  commission  à  son  ami  Paynn  :  >  Ça  fia 
va  pa$;  en  dix-huit  jours  la  commission  n'a  jugé  que 
cent  qu&tre*vingt-dix-sept  individus.  Il  nous  fau* 
drait  encore  huit  patriotes  comme  moi  pour  accé- 
lérer les  choses.  Notre  collègue  Meilleret  ne  vaut 
rien.  Il  lui  faut  des  preuves  comme  sous  l'ancien 
régime;  si  cela  continue,  nous  ne  ferons  que  de  Teau 
claire.* 

Saladin  suit  Collot  d*Herbois  dans  sa  mission  à 
Lyon;  il  le  peint  comme  l'apôtre  le  plus  fougueux 
de  la  tyrannie.  Dans  une  lettre  à  Robespierre,  il  se 
plaint  Ide  ce  que  les  démolitions  ne  vont  pas  assez 
vite.  Il  le  presse  d'envoyer  à  Lyon  un  bataillon  de 
l'armée  révolutionnaire  et  un  renfort  de  Jacobins. 

Il  dit  dans  une  autre  lettre  :  «Hier  soixante-qtia- 
Ire  conspirateurs  ont  été  fusillés;  aujourd'hui ,  dfeux 
cent  trente.  Tous  les  jours  nous  en  expédierons  au- 
tant pour  le  moins.  A  mesure  qu'on  fusille,  on  fait 
des  arrestations  nouvelles,  pour  que  les  prisj)iis  ne 
restent  pas  vides.»  Dans  son  rapport  à  la  Conven- 
tion ,  Collot  lit  lui-même  l'apologie  des  fusillades  ; 
dans  un  discours  aux  Jacobins ,  il  dit  qu'il  avait  été 
obligé  d'adoucir  à  la  Convention  l'énergie  de  ses 
mesures.  Dans  une  autre  lettre  à  Robespierre,  il  dit 
qu'il  faut  que  Lyon  soit  entièrement  démoli,  et  qu'il 
n'en  reste  pas  une  pierre. 

Le  rapporteur  passe  aux  ordres,  aux  encourage- 
ments donnés  par  le  comité  de  salut  public  ù  Joseph 
Lebon,  pour  le  département  du  Pas-de-Calais;  on 
l'invite  à  marcher  toujours  dans  la  ligne  révolu- 
tionnaire. Billaud  l'engage  à  s'abandonner  à  sou 
énergie;  Barère  dit,  aux  Jacobins,  que  Lebon  a,  par 
ses  grandes  mesures,  contribué  aux  triomphes  de 
nos  années. 

11  arrive  à  l'oppression  exercée  par  ces  anciens 
comités  contre  la  Convention  nationale.  Les  mem- 
bres n*avaieiit  plus  le  droit  d'émettre  leur  opinion; 
on  les  arrêtait  sans  consulter  l'assemblée;  le  mandat 
d'arrêt  contre  Danton,  Lacroix,  Phélippeaux  et  Ca- 
mille Desmoulins,  n'annonce  aucun  motif,  n*est  pas 
même  signé.  Legendre  veut  parler  contre  cet  acte 
tyrannique; Robespierre  s*écrie  :  «Quiconque  trem- 
ble en  ce  moment  est  coupable.»  Billaud  dit:  «Mal- 
heur à  ceux  qui  se  sont  assis  à  cfité  de  lui!*  en 
IMrlant  de  Fabre  d'E^tantine.  Barère  appuie  Robes- 
pierre; il  prétend  qu  on  exige  ,  en  faveur  des  dépu- 
tés accusés,  un  privilège  digne  de  Taristocralie  de 
Venise.  Les  accusés  sont  traduits  au  tribunal  révo- 


591 


|utîonna!ret  on  toppose  une  conspiration  dans  les 
prisons  en  leur  faveur  ;  on  annonce  à  la  Conrention 
qu'iU  le  révoltent  contre  la  justice  ;  ils  sont  mis 
hors  clfs  débats,  envoyés  è  la  mort  sans  être  enten- 
dus. L'épouse  de  Phélippeaux  se  présente  à  1a  barre; 
DillaudVarennes  demande  qu'elle  soit  admise  pour 
entendre  la  lecture  d'une  lettre  de  Garnier  (de  Sain- 
tes ) ,  qui  prouve  qii*elle  rient  réclamer  pour  un 
couspirateur.  Robespierre ,  plus  humain  cette  fois , 
s'y  oppose. 

Enfin,  après  avoir  retracé  les  divisions  funestes 
entretenues  par  les  tyrans  dans  la  Convention,  leurs 
dénonciations  perpétuelles  contre  les  membres  les 
plus  énergiques,  pour  les  comprimer  par  la  terreur; 
après  avoir  annoncé  que  Vadier ,  Billaud ,  CoUot  et 
Darère  étaient,  avec  les  trois  conspirateurs  déjà 
punis,  les  principaux  auteurs  de  la  conjuration  tra- 
mée contre  le  peuple ,  le  rapporteur  termine  en  dé« 
clarant  que  la  commission  des  Vingt-et-Un  estime 
qu'il  y  a  lieu  à  accusation  contre  Billaud,  Col  lot, 
Diirère,  anciens  membres  du  comité  de  salut  public, 
et  Vadier,  ancien  membre  du  comité  de  sûrelé  gé- 
nérale. 

Legeicdbb  (de  Paris)  ;  Citoyens,  vous  savez  tous 
combien  les  prévenus  aont  la  commission  des  Vingt- 
Cl-Un  a  examiné  la  conduite  ont  cherché  à  rejeter 
sur  la  Convention  les  crimes  dont  ils  sont  accusés. 
Je  demande  en  conséquence  que  la  Convention  fasse 
en  même  temffs  un  grand  acte  de  justice  et  de  pré- 
caution; je  demande  que ,  pour  éviter  les  dangers 
que  nous  avons  courus  lors  de  Tarrestation  de  Ro- 
l)espifrre,  Saint-Just  et  Couthon  ,  et  en  conservant 
tous  les  égards  dus  à  des  représcntanls  du  peuple, 
en  conservant  aux  prévenus  toute  la  latitude  néces- 
saire à  leur  déiense  ,  ils  soicilt  mis  en  iirrestation 
dans  cette  séance  même.  (L«es  plus  vifs  applaudisse- 
ments éclatent  de  toutes  parts.) 

l.E  Président  :  Les  prévenus  ne  demandant  point 
la  narole,  et  personne  ne  s'opposant  à  la  proposition, 
je  1.1  mets  aux  voix. 

Une  iBBmeiise  majorité  se  le? e  pour  Padoptlon  ;  penoone 
ne  se  le? e  à  la  contre-épreuve. 

Lk  Président  :  La  proposition  de  Legendre'esi 
(?écréte>.  (Les  applaudissements  recommencent.) 

BARàRE  :  Apres  le  rapport  qui  vient  d'élre  fait  au 
nou\  de  la  commission  des  Viugt-et-Un,  il  ne  restait 
aux  prévenus  qu'à  attendre  I  exécution  de  la  lot. 
Elle  porte  que  lorsqu'on  conclura  au  décret  d'accu- 
sation, i*arrestAtion  provisoire  pourra  être  décrétée; 
nous  nous  soumettons  en  silence.  Cependant  la 
séance  ne  se  passera  pas,  puisoue  la  parole  nous  est 
.iccordée ,  sans  relever  deux  des  principaux  motifs 
fie  la  prévention  pnbli(]ue,  trop  lonstemps  appesan- 
tie snr  nous.  Le  premier  est  relatif  aux  signatures 
que  nous  avons  données  dans  le  comité  ;  le  second 
concerne  la  liberté  de  penser  des  représentants  du 
pniple.  En  faisant  des  réflexions  sur  le  premier  iiM>- 
tif.jc  poserai  un  fait  constant  dans  le  comité  degou* 
vernemeut  :  en  parlant  du  second ,  je  défendrai  U 
représentation  nationale» 

Le  travail  du  comité  de  saint  public  était  partagé 
entre  les  divers  membres  qui  le  composaient;  mais 
tous  indistinctement  signaient  le  travail  les  uns  des 
autres.  Ainsi  moi ,  par  exemple ,  qui  n'entends  rien 
au  militaire,  j*ai  donné  dans  cette  partie  peut-être 
plus  de  deux  mille  signatures.  Je  n'étais  point  chargé 
de  la  correspondance;  mars  quand  il  manquait  un 
nombre  au  comité,  je  signais  à  sa  place  les  actes  de 
la  correspondance,  i'oki^rverai  ici  que  Couthon , 
Robespierre  et  Saint-Just,  ont  toujours  siçné  les  pre- 
miers les  actes  de  la  police  générale;  police  qui  n^a 
pas  été  établie  par  arrêté  du  comité  de  salut  public, 
UMis  par  un  décret  de  la  Convenlioo,  rendu  d'après 
tin  rapport  de  Saint-Just. 


Je  dirai  en  second  lieu  ({u*il  importe,  au  moment 
où  \e  rapport  de  In  commission  des  Vingt-et-Un  va 
paraître,  au  moment  où  Ton  va  dérouler  publique- 
ment les  opinions  que  chacun  de  nonsa  émises  dans 
cette  enceinte,  il  importe,  dis-je,  de  développer  un 
principe  :  c'est  qu'il  existe  une  représentation  natio- 
nale ,  et  que  chacun  de  nous  a  dû  voter ,  même  au 
péril  de  sa  vie ,  pour  les  cent  cinquante  mille  hom- 
mes qu'il  représente.  La  liberté  d'opinion  rentre  dans 
le  vaste  domaine  de  la  pensée  du  législateur  ;s*il  en 
était  autrement,  Taristocratie  dresserait  contre  cha- 
cun de  nous  autant  d*actes  d'accusatiou  qu*il  aurait 
émis  d'opinions.  Vous  verrez,  lorsque  nous  aborde- 
rons la  tribune  où  nous  sommes ,  sûrs  de  parler  à 
la  justice  de  nos  collègues,  que  nous  avons  toujours 
suivi  l'esprit  public,  que  nous  l'avons  toujours cou- 
sulté.  Il  est  impossible,  à  moins  au'on  ne  veuille 
anéantir  la  représentation  nationale ,  de  dire  que 
nous  ne  devons  pas  l'inOuencer  par  notre  opinion; 
chacun  de  nous  n'y  est  envoyé  que  pour  cela ,  cha- 
cun de  nous  n'est  envoyé  que  pour  éclairer  ses  col- 
lègues de  ses  lumières ,  que  pour  leur  faire  part  de 
SCS  pensées. 

Je  fais  une  autre  observation  qui  doit  toujours 
être  présente  à  l'esprit  des  gouvernants  de  tous  les 
pays  et  de  tous  les  mois  :  ce  n'est  ni  moi  ni  mes  col- 
lègues auc  je  défends;  ce  qui  m'importe, c'est  l'inté- 
rêt public  .c'est  le  vôtre.  Si  Ton  parvenait  à  établir 
cet  effroyable  principe,  que  les  membres  de  la  Con- 
vention qui  passent  dans  les  comités  de  gouverne- 
ment n'ont  plus  la  même  liberté  d'opinion, et  qu'ils 
doivent  la  régler,  pour  ainsi  dire,  au  compas;  si  Ton 
parvenait  à  établir  ce  système,  l'aristocratie  n'aurait 
plus  besoin  d'attendre  la  fin  d'un  gouvernement 
pour  en  proscrire  les  membres* 

Après  avoir  fait  un  9  thermidor  pour  chacun  d'eux, 
elle  re viserait  toutes  leurs  opinions  et  les  ferait 
condamner.  Quand  les  malheurs  publics  qui  pe* 
saient  sur  la  France, il  y  a  un  an,  vous  ont  forcés  de 
supprimer  le  conseil  exécutif  dans  lequel  vous  avex 
reconnu  trop  de  pusillanimité ,  d'impuissance  ou 
d'impéritie ,  vous  avez  pris  sur  votis ,  sur  vous-mê- 
mes, Convention  nationale,  tout  le  poids  du  gouver- 
nement, toute  sa  responsabilité.  Vous  l'avez  dit  dans 
trois  lois  successives,  notamment  dans  celle  du  14 
frimaire;  vous  avez  répété  dans  tons  vos  actes,  dans 
toutes  vos  proclamations ,  dans  toutes  les  opinions 
de  vos  membres ,  que  la  Convention  était  le  centre 
du  souvernement. 

Il  y  a  plus  :  lorsque  Danton,  sous  prétexte  de  don- 
ner au  gouvernement  une  base  plus  solide  ^  Tatta* 
3ua  effectivement,  en  poposant  d'appeler  le  comité 
e  salut  public  amiié  de  gouvernement  ^  qm  com- 
battit sa  proposition?  Ce  furent  Billaud- Varennes et 
moi.  On  peut  consulter  le  JUonUenr,  Nous  avoua 
dit  :  La  Convention  nationale  a  attiré  le  gouverne- 
ment à  elle  ;  la  Convention  est  vraiment  le  gouver- 
nement, et  les  comités  ne  sont  que  des  commissions 
établies  près  d'elle  pour  mé<liter  et  délibérer  les 
mesures  qui  ne  peuvent  être  méditées  et  délibérées 
publiquement. 

J'ai  cru  devoir  faire  ces  observations;  j'ai  cru  de- 
voir rappeler  les  principes  pour  prouver  que  tou^ 
ce  que  nous  avons  dit  dans  la  Convention  ne  doit 
pas  nous  être  imputé  à  crime  »  parce  que  nous  n'a- 
vons fait  au*user  d'un  droit  fondé  sur  la  liberté  des 
opinions  aes  représentants  du  peuple ,  pour  com- 
battre cette  distinction  misérable  et  dangereuse  avec 
laquelle  on  voudrait  établir  une  différence  entre  les 
représentants  du  peuple  nommés  dans  les  comités 
de  gouvernement,  et  ceux  qui  n'en  font  pas  partie  ; 
distinction  qui  donnerait  tien  à  des  procès  sans  cesse 
renaissants  contre  ceux  qui  se  succéderaient  dans 
ces  comités.  Voilà  les  observations  que  j'ai  cru  de- 


593 


voir  faire.  Je  vais  me  rendre  au  décret  d'arrestation 
prononcé  par  l'assemblée. 
On  lit  It  lédacUon  du  décret  d'arrestation. 

***  :  Je  demande  que  les  prévenus  soient  mis  en 
arrestation  chez  eux,  sous  la  garde  de  gendarmes. 
La  rédaction  est  adoptée  avec  cet  amendement. 

CoLLOT  d*Herbois  .'  Lcs  réflexions  qui  viennent 
d*étre  faites  par  Barère  ont  été  nécessitées  par  une 
circonstance  à  laquelle  nous  ne  nous  étions  point 
attendiis.Çertes,si,  dans  le  rapport  oui  vient  de  vous 
être  fait,  on  vous  eût  donné  une  iaée  des  réponses 
que  nous  avons  opposées  à  quelques  faits  du  rap- 
port, il  eût  été  inutile  de  prolonger  la  séance  par  des 
réflexions.  La  nécessité  de  ne  pas  laisser  subsister 
cette  masse  de  préventions  a  engagé  Tun  de  nous  à 

S  rendre  la  parole  ;  mais  je  pense  qu'il  n*a  pas  tout 
it.  Il  a  été  cependant  au  but  ;  il  a  attaqué  ces  pré- 
ventions dont  nous  charge  Topinion  publique;  il  est 
entré  dans  le  sanctuaire  de  vos  consciences  ;  il  a  in- 
terrogé votre  justice.  Citoyens ,  c'est  aux  principes , 
aux  principes  seulstque  nousdevous  nous  rattacher; 
il  faut  les  appliquer  aux  divers  mouvements  de  la 
révolution  :  ce  sont  eux  qui  sont  nos  défenseurs  et 
nos  juges.  Pour  vous ,  vous  devez  rapprocher  les 
faits  des  circonstances  qui  y  ont  donne  lieu ,  vous 
devez  examiner  que  ceux  que  vous  aviez  chargés  de 
diriger  le  vaisseau  pendant  In  tempête  n'ont  pu  s'ap- 
puyer que  de  votre  puissance  ;  car ,  comme  Ta  dit 
Barère ,  vous  étiez  l'âme  et  In  pensée  du  gouverne- 
ment; son  action  seule  était  dans  les  comités.  Elle 
était  inséparable  de  vous  et  du  peuple  lui-même.  La 
providence  du  gouvernement  a  été  dans  les  dangers 
d(*  la  patrie ,  dangers  qui  ont  dicté  les  mesures  qui 
ont  étéprises,  et  contre  lesquelles  on  ne  peut  s'élever 
aiijoura  hui,  parce  qu'elles  ont  été  commandées  par 
les  périls  publics  et  qu'elles  disparaissent  avec  eux. 

Le  premier  principe  que  nous  réclamons  avec 
sécurité  est  celui-ci  :  tout  acte  arbitraire ,  toute  me- 
sure extraordinaire ,  inutile  pour  sauver  la  patrie, 
est  condamnable;  maisque  tout  ce  qui  fut  nécessaire 
soit  légitime.  Sans  cela  le  passé  n'est  rien,  le  présent 
n'est  rien,  l'avenir  ne  sera  rien  encore;  sans  cela  la 
révolution  n'inspire  plus  de  confiance  ;  ce  qui  était 
bien  l'année  dernière  sera  un. crime  aujourd'hui; 
ce  qui  est  bien  cette  année  sera  condamné  dans  l'an- 
née à  venir. 

Il  est  encore  un  grand  principe ,  un  principe  sa- 
lutaire des  gouvernements  démocratiques ,  auquel 
nous  applaudissons ,  malgré  la  douloureuse  expé- 
rience nue  nous  en  faisons  :  c'est  que  ceux  qui  ont 
été  revêtus  d'un  pouvoir  étendu  doivent  tomber 
nécessairement  dans  la  défaveur.  Il  est  de  la  nature 
des  gouvernements  populaires  d'être  jaloux ,  et  la 
disgrâce  suit  ordinairement  de  près  la  puissance.  On 
ne  doit  ni  s'en  étonner,  ni  s'en  plaindre;  mais  il  faut 
créer  pour  celui  qui  a  gouverné  une  sauvegarde  qui 
le  garantisse  du  ressentiment  des  ennemis  de  la  ré- 

Sublique  *  autrement ,  comment  le  .gouvernement 
émocratique  pou rra-til subsister? 

On  réclame  un  grand  exemple  ;  eh  bien ,  exami- 
nez notre  conduite  ;  si  nous  sommes  coupables ,  ne 
flous  faites  pas  de  grâce.  On  nous  a  privés  de  nos 
droits;  nous  avons  souffert  sans  nous  plaindre;  mais, 
citoyens,  au  nom  de  la  démocratie,  examinez  ce  aue 
nous  avons  fait.  Rappelez-vous  qu'un  grand  nomore 
de  citoyens  des  républiques  anciennes  sont  morts 
victimes  des  factions  qui  se  sont  succédé  tour  à 
tour;  pensez  que,  si  ces  accusations  que  dénonce 
l'histoire  n'eussent  pas  été  si  précipitées,  leurs  con- 
temporains n'auraient  pas  eu  le  regret  d'avoir  sacri- 
fié des  hommes  qui  les  avaient  bien  servis. 

Si  nous  n'avions  pns  6xé  In  victoire  sous  les  dra- 
peaux de  la  république ,  si  nous  n'avions  pas  com- 


primé les  eaueinis  du  peuple,  ou  que  nous  eufitions 
partagé  leurs  complots ,  nous  pourrions  craindre  la 
roule  d'ennemis  qui  nous  poursuivent  aujourd'hui, 
dont  on  nous  a  cité  des  paroles  auxquelles  nous  ré- 
pondrons par  des  faits.  Maison  porte  contre  nous  une 
accusation  absolument  contraire.  Eh  bien,  si  les  pou- 
voirs que  vous  nous  aviez  confiés  étaient  au-dessus 
de  nos  forces,  si  nous  avons  été  égarés  par  leur  éted- 
due,  qu'on  nous  punisse  pour  servir  d'exemple  à 
ceux  qui  nous  succéderont;  mais  nous  nous  conso- 
lerons des  peines  qui  nous  seront  infligées  en  pen- 
sant que  nous  n'aurons  d'autre  reproche  à  nous  faire 
3ue  celui  de  l'erreur.  Je  vais  me  soumettre  au  décret 
'arrestation.  ( La  iuile  demain.) 

N,  B,  Dans  la  séance  du  13,  on  a  donné  lecture  de  la 
leltrc  suivante  : 

Les  reprétentanti  du  peuple  près  les  armées  et  dans 
Us  dévarUmenU  de  l'Ouest ,  des  Côles-de- Brest 
et  de  Cherbourg,  à  la  Convention  nationale. 

Nantes,  te  0  ventôse ,  l'an  S«  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

■  Citoyen  collègues,  la  .Vendée  est  rentrée  dans  le  sein 
de  la  république.  Cbarette  et  tous  les  chefs  des  armées  di- 
tes du  centre  et  du  paye  bae  viennent  de  déclarer  solen- 
nellement qu'ils  se  soumettent  aux  lois  de  la  répnbUque 
française,  une  el  indivisible. 

t  Slofflet,  commandant  l'armée  vendéenne  dite  de  fjén» 
Jou,  u*a  pas  encore  montré  les  mêmes  dispositions  pour 
profiter  du  bienfait  de  la  loi  du  12  frimaire;  mais  huit  de 
ses  principaux  chefs  l'ont  quUté,  se  sont  joints  à  Churcite, 
et  comme  lui  ont  exprimé  leur  vœu  de  vivre  en  républi- 
cains. 

t  Si  Stofllet  persiste  dans  sa  rébellion ,  il  ne  peut  être 
dangereux  ;  sou  armée  ^st  réduite,  par  la  retraite  de  huit 
de  ses  chefs,  à  quelques  centaines  de  cavaliers  déserteurs 
des  légions  Germanique  el  Rozenthal.  L'habitant  des  cam- 
pagnes est  fatigué  de  cette  guerre;  en  voyant  entrer  sur 
son  territoire  des  troupes  républicaines,  il  les  bénira  comme 
étant  ses  libérateurs.  Nous  le  savons  ù  n*eu  pas  douter,  il 
énonce  hautement  ses  intentions  à  cet  égard. 

■  Nous  avons  parlé ,  en  votre  nom ,  le  langage  de  l'hu- 
manité ,  et  nous  avons  élé  écoutés.  L'altitude  grande  et 
imposante  de  la  Convention  depuis  le  9  thermidor  a  fait 
dans  l'esprit  des  Vendéens  ce  que  les  défenseurs  de  la  pa* 
trie  n'auraient  obtenu  d'eux  qu'avec  effusion  de  sang. 

•  Ces  malheureuses  contrées  ont  besoin  d'une  nouvelle 
vie;  nous  allons  les  parcourir,  ranimer  l'agriculture  et  re- 
lever le  commerce.  Plusieurs  de  nos  collègues  vont  se  ren- 
dre auprès  des  comités  de  gouverbement,  pour  les  instruire 
des  mesures  et  des  moyens  qui  ont  amené  des  résnliats 
aussi  hvureux. 

•  La  rentrée  des  Vendéens  au  sein  de  la  répobliqoe  en* 
traîne  avec  elle  le  retour  des  chouans.  Deux  de  leurs  chefs 
viennent  de  reconnaître  le  gouvememcnl  républicain;  ils 
rassemblent  les  autres  chefs  pour  souscrire  la  déclaralion 
de  Charette  et  des  Vendéens  ;  des  ordres  ont  été  donnés 
par  eux  derechef  pour  faire  ces«er  toute  hostilité. 

•  La  conduite  de  nos  braves  défenseurs  a  contribué  an 
succès  de  nos  opérations;  ils  ont  porté  aux  Vendéens  les 
paroles  de  paix  et  de  conciliation  avec  la  ni^^me  énergie 
qu'ils  les  auraient  combattus.  Ils  ont  fraternise,  el  ont  per- 
suadé ainsi  les  armées  de  l'Ouest,  des  Côlcs-de-Brest  et 
de  Cherbourg  ;  placées  sur  un  théâtre  moins  brillant  que 
les  autres,  elles  ont  néanmoins  bien  mértié  de  la  patrie 
dans  ces  circonstances. 

f  Salut  et  fraternité, 
c  Signé  P. -P.  Dilaonat,  Romhb  (VAmérietHn),  Bbub, 
LoFFiciAL,  Chaillod,  Bollit ,  RuiLLi,  Mb- 
MDAu,  Gary,  DoRNiiR,  Morissor.  ■ 

Payemevls  à  la  trésorerie  nationale. 
Le  payement  du  perpétuel  est  ouvert  pour  les  six  pre- 
miers mois;  il  sera  fait  à  tous  ceux  qui  seront  porteurs 
d'inscriptions  au  grand  livre.  Celui  pour  les  rentes  viagères 
est  de  huit  mois  vingt  et  un  Jours  de  l'année  1708  (vieiix 
style). 


GAZETTE  NATIONALE  o<<  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


If  166. 


Quintidi  15  Ybutosb,  fan  3*.  (Jeudi  S  Mabs  1795 ,  vieux  ityle.) 


POLITIQDB. 

SUEDE.  ~ 

Stockholm,  U  i**  février.  —  Les  Uialearf»  en  faiiant 
la  répartilion  des  tmp((yts  sur  les  babitanU  de  cet  le  capitale^ 
avaient  diargê  plus  que  dccoutuiDe  quelques  citoyens  peu 
aisés.  La  cours*esl  empressée  de  réformer  cel te opératkni, 
peu  coolbrme,  a-t-eUe  dit,  à  set  pr'uidpca  de  iostice  ci  dt 
modération. 

Le  régent  a  publié  à  ce  tajd  «o  reserit  dana  lequel  oo 
a  remarqué  la  phrase  suivante  :  •  Notre  cttor  paternel  bat 
également  pour  tous  noft  coocitcqreosy  itos  dbtioclioD  de 
rangnideCartuoc  • 

ALLEMAGNE. 

Hurtmherg^  le  8  {écrier.  —  Le  bnût  se  répand  que  les 
Hongrois  sout  en  insurrection  :  ce  peuple  jouit  en  Europe 
de  quelque  estime  par  son  caractère. 

Le  palatin  »  frère  de  reinpereur ,  a*c»t,  dit-on ,  réfugié  k 
Vienne. 

—  On  écrit  d*aillettrs  de  Im  capilate  d'Aotricbe  q«e  la 
g:i i- (le  noble  hongroise  a  été  écartée  du  service  de  ri nlérieur  ; 
IKir  conséquent  elle  ne  fourni  plus  de  iMtiaiinaires  à  la 
chambre  à  condicr  de  rempereur»  où  il  o*jr  a  plus  que  des 
AUemanda. 

—  En  Bohême  le  peuple  murnnre  hantemeirt...  eontre 
tout.  Les  esprits  j  sont  montés  an  plus  haut  degré. 

—  Un  ordre  arait  été  donné  dVxporfer  de  SooTlxbach 
dans  le  HaatPafatfnat  des  blés  roîs  en  magasin  pour  le 
paysi  on  se  préparait  à  Texécuter,  le  17  la nvier»  lorsque 
plus  de  trots  cents  femmes  armées  de  fourches  et  un  grand 
nombre  de  bourgeois  s*j  opposèrent  et  réussirent  à  emp^ 
cher  Topération. 

—  L'emprunt  négocié  à  Francfort  pour  rAulrichet  par 
la  ma»on  Betbmann  »  perd  déjà  20  et  25  pour  iOO. 

—  Aucune  traite  sur  la  llollande  D*e3l  plus  acceptée 
dans  toute  l'Autriche.  La  cour  de  Vienne  regrette  de  n*avoir 
plus  à  sa  dévotion  la  banque  d*AnMlerdam« 

Du  camp  devant  Luxewtbourg^  le  0  vtntoêe^  —  Le 
bardement  de  ta  forteresse  de  Luxembourg  fient  de 
mcncer  avec  une  vigueur  sans  exemple.  Les  assiégés  n'ont 
rien  négtigé  pour  interrompre  les  travaux  de  Tarmée  assié- 
geante, soit  par  des  sorties  très-vîves,  soil  en  tirant  sur  lea 
ooTriers;  mais  tous  leurs  efforts  ont  été  faina,  etTardeur 
française  a  renversé  tous  les  obstacles.  Uu  baaK>fficier  autri- 
chien, nouvellement  arrivé  an  camp,  a  rapporté  que  les 
instructions  du  général  Bender,  qui  coaamande  h  Luxes»- 
bourg,  étaient  de  défendre  la  place  jusqu'au  i*'  mai, 
époque  après  laquelle  it  pourrait  la  rendre  aux  Francis 
s'il  n'était  pas  secouru.  Mais  on  n'ignore  pas  que  Tempe* 
renr  tient  passionnément  i  l'idée  de  tenter  les  plus  grand» 
efforts  pour  délivrer  cette  forteresse. 

—  Les  républicains  s'occupent  avec  actirité  de  la  dém^ 
liiion  du  fort  deRhrinsfeld  ;  la  divbiott  aux  ordres  du  géné^ 
îiil  Marceau  va  se  mettre  en  marche  pour  se  rendre  devant 
niayence ,  dont  le  siège  sera  poussé  avec  la  plus  graadt 
vigueur. 

Les  Autrichievs  rasaenblent  de  eecdfé  des  forces  consi- 
dérables ;  ce  sera  l'un  des  points  sur  lesquels  ils  se  baltrooC 
avec  le  plus  de  résolution. 

Oldenbourg,  le  7  février.  —  Un  corps  de  six  mOfe  An- 
glais, formant  le  reste  deTarmée  britannique  du  continent, 
se  trouve  en  ce  moment  à  deux  Keues  de  Hambourg.  On 
admire  la  célérité  avec  laquelle  ces  troupes  ont  traversé 
une  si  grande  étendue  de  pays.  La  ville  de  Hambourg  et 
celle  d'Altona  ont  cru  devoir  prendre  des  précautions 
contre  l'arrifée  de  ce  corps,  qol  s'est  (hit  précéder  en  ce 
pays  par  une  horrible  réputation. 

— ^  régence  de  Hanom  est  dans  reffroi»  depuis  qià*o» 

f  Série.  —  Tomo  X 


•laure  qu'une  dif  ision  républicaine  prépnrt  i 
tiu  les  possessions  anglo-germaniques. 

—  Les  autorités  publiques  d'Oldenbourg  fieoDCBt  d*et- 
pédier  un  courrier  au  général  anglais  pour  l'inriter  à  oc 
pas  faire  passer  ses  troupes  sur  leur  territoire» 

—  t}n  magasin  immense  ett  tombé  au  po8?olr  de»  Frra« 
çaîs,  à  Docsbourg. 

—  Les  troupes  autriehienncf  aoi  ordret  du  général 
Alvinxi  se  sont  portées  sur  les  bords  de  U  Uppe» 

ITAUE. 

M^ft,  le  5  févrdr.  —  0De  tempête  honrlMe  a  fhlt 
périr,  dans  la  noit  du  17  janrier,  onie  petits  bâtiments  h 
Bastia. 

'  —  La  tocte  anglaise  de  l*aiBlral  Hotham  mooille  en  ce 
moment  dans  le  port  de  Saint-Florent 

—  Il  parait  certain  que  le  général  autrichien  de  Wlns 
aura  de  nouveau  un  commandement  en  ItaHe. 

—  Les  Français  font  faire  sauter  fa  forteresse  de  Garre* 
lio,  dont  ils  se  sont  rendus  maîtres. 

— >  On  écrit  de  Rome  qu'il  y  rC^gne  beaucoup  de  fémieii* 
talion.  La  pesanteur  des  taxes  a  soulevé  le  peuple  ;  la  mul- 
tilade  irritée  a  mis  le  feu  au  palais  du  duc  Braschi ,  net  eu 
du  pape.  Les  richesses  extraordinaires  de  cet  honraie  ont 
donné  occasion  au  peuple  de  reprocher  li  9.  S.  son  népo- 
Usmecfféoè» 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidenee  de  Bwrdom  (de  VOiu)» 
SUITB  DE  LA  SÉANCE  OU  12  VENTOSE. 

Plusîeun  jeunes  cens  de  la  pranière  réqtmtion 
de  Paris  sont  admis  a  la  barre. 

Un  desandanî  de  Calas,  orateardela  dëputa- 
tion  :  Législateurs,  calomoiës  au  setii  même  de  la 
Convention  nationale ,  nous  avions  jusqu'à  présent 
dédaigné  de  répondre  à  nos  détracteurs.  Enhardis 
par  notre  silence ,  ils  Font  pris  pour  de  la  faiblesse  ; 
il  était  le  garant  de  notre  mépris  ;  nous  venons  enfio 
le  rompre;  trop  longtemps  on  s'en  est  servi  pour 
nous  opprimer. 

Chaque  jour  la  raalveillaiiee  se  reproduit  eontre 
nous  sotis  une  fbnne  nouvelle  ;  tantôt  elfe  noQ9 
traite  de  lâches  déserteurs  des  drapeaux  que  vous 
nous  aviez  confiés  ;  tantôt  elle  nous  accuse  de  roya- 
lisme ;  hier  elle  nous  imputait  la  disette  qu*elle- 
roénre  fiitt éprouver;  demain  peut-être  elle  mettrait 
dans  nos  mains  tes  poignards  quelle  vous  destine. 
11  faut  qu'on  sache  enfin  quel  est  notre  crime,  et  si 

c'est  notis  qni  sommes  les  assassins La  patrie  en 

danger  appela  à  sa  défense  les  plus  jeunes  de  ses  en- 
fants :  nous  y  volâmes  totis;  nous  assurions  ses 
triomphes  au  dehors,  tandis  que  ceux  qui  nous  ac- 
cusent prétendaicnl  b  dominer  en  la  deshonoraift  ; 
nous  nous  efloreions  de  bien  mériter  d'elle ,  et  c'é- 
tait en  son  nom  qn'on  iktos  persécutait  ;  nous  Itii 
faisions  le  sacrifice  de  nos  affections  les  plus  chères» 
de  nos  pins  douces  jouissances,  et  notre  jeunesse 
était  un  titre  de  proscription  ;  nous  servions  la  pa- 
trie pac  notre  courage  ;  la  loi  nous  a  rappelés  par 
ses  organes ,  pour  lui  consacrer  nos  ta&enls,eiroB 
veut  nous  proscrire  encore. 

Mais  il  n  est  plus  temps  :  le  9  thermidor  a  ra- 
inené  U  justice  ;  le  règne  de  la  tyrannie  n'est  pins  ; 
nous  lui  jurons  une  guerre  à  mort,  qu'elle  soitcoo- 
verte  d'on  diadème  ou  d'im  bonnet  rmtge,  qifellt 

75 


594 


siège  sur  un  trdne  ou  sur  une  montagne.  On  em- 
poisonne nos  intentions  parce  qu'on  connaît  nos 
sentiments. 

Législateurs,  nous  venons  vous  en  faire  hom- 
mage. Ralliés  autour  de  la  Convention  nationale, 
nous  seconderons  ses  vues  bientaisantes  en  la  dé- 
fendant jusqu'au  dernier  soupir  contre  la  rage  des 
monstres  que  sa  sagesse  a  démasqués,  que  son  éner- 
gie fait  trembler.  Qu*ils  conspirent  contre  vous  ! 
nous  saurons  partout  les  confondre  et  vous  venger; 
ils  nous  trouveront  partout  pour  les  signaler  ;  par- 
tout nous  nous  placerons  à  côté  de  Topmion  publi- 
que pour  les  écraser. 

Voilà,  législateurs,  nos  titres  a  la  haine  des  égor- 
geurs;  voila  pourquoi  leurs  partisans  se  déchaînent 
si  violemment  contre  nous;  nous  voulons  moins 
venger  nos  injures  que  renverser  le  trône  de  la  ter- 
reur. 

Dégouttant  encore  du  sane  de  nos  frères  et  ^e 
nos  amis,  pour  y  parvenir  il  faut  qu'ils  joignent  nos 
cadavres  a  leurs  cadavres  déligurés  ;  mais  qu'ils 
n'espèrent  point  un  triomphe  facile  :  avant  de  tom- 
ber sous  leurs  coups,  nous  nous  multiplierons  pour 
les  anéantir. 

Vous,  pères  de  la  patrie,  continuez  a  assurer  son 
salut  et  sa  gloire  :  vous  nous  verrez  toujours  prêts 
à  vous  défendre ,  à  vous  bénir  ;  vous  serez  toujours 
notre  point  de  ralliement,  le  centre  de  nos  vœux  et 
de  nos  espérances. 

Vive  la  république!  la  Convention  nationale!  A 
bas  les  buveurs  de  sang,  les  Jacobins! 

Cette  Adresse  est  vivement  applaudie  ;  la  Conven- 
tion en  décrète  la  mention  honorable  et  l'insertion 
au  Bulletin. 

—  Un  des  secrétaires  donne  lecture  des  lettres 
suivantes  : 

Le  représentant  du  peuple  prêt  let  armées  du  Nord 
el  deSambre-et'Meuse  à  La  Convention  nationale. 

Bniielles,  le  8  ventote,  Tan  3*  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

•  Citoyens  collègues,  je  tous  eoToie  le  foeu  de  la  fille 
d^Anvers  pour  sa  réunion  à  la  république  française.  Ce 
Vttu  se  prononce  avec  plus  de  vivacité  dans  toute  la  Bel- 
gique, à  mesure  que  nous  approchons  de  l*ou vertu re  de 
la  campagne»  et  c'est  ce  qui  doit  vous  en  garantir  la  sin- 
cérité. 

•  On  ne  brave  pas  les  tyrans  au  moment  où  ils  se  pré- 
sentent pour  donner  de  nouvelles  chaînes  ;  on  ne  les  défie 

Iias,  pour  ainsi  dire,  en  Tacc,  sans  un  ardent  amour  pour 
a  liberté ,  et  sans  la  furte  résolution  de  périr  en  la  défen- 
dant ;  aussi  lu  Convention  nationale  n*a  qu'à  parler,  et 
quarante  mille  Belges  vont  s'unir  aux  armées  triomphantes 
de  la  république  pour  porter  le  dernier  coup  à  la  coalition 
impie  qui  ose  la  méconnaître. 

-  Salut  et  fraternité.  P<iis.  • 

Les  magistrats  de  la  ville  d'Anvers  à  la  Convention 
nationale. 

^Représentants,  eoGn  toutes  nos  peines  vont  cesser; 
Parrêté  bienfaisant  du  comité  de  salut  public,  en  date  du 
32  pluviôse,  tranquillise  tous  les  cœurs.  Dépositaires  de 
DOS  destinées,  vous  manifesiei  les  intentions  non  équi- 
voques de  les  assurer  à  jamais.  Tous  les  habitants  de  notre 
commune  vous  adressent  par  notre  organe  le  juste  tribut 
de  leur  reconnaissance  ;  de  tous  les  points  de  nos  provinces 
le  peuple,  ravi  à  la  vue  de  voi  exploits,  admire  A  méta- 
morphose heureuse  que  vous  venci  d'opérer. 

•  Oui,  citoyens,  l'Europe  entière  plongée  dans  les  hor- 
reurs du  fanatisme,  l'hypocrisie  muUrisanI  tous  les  cœurs, 
le  despotisme  enfin  assis  sur  les  trOnes,  gouvernant,  la 
verge  de  fer  k  la  main ,  ne  Taisaient  de  l'Europe  qu*une 
famille  malheureuse  enchaînée  par  les  volontés  arbitraires 


d*uoe  sorte  dMndlvidus  qu*une  naissance  et  une  orighie 
plus  distinguées  semblaient  mettre  en  droit  de  donner  dcf 
lois  k  leurs  semblables  ;  la  liberté,  suffoquée  sous  le  |Miids 
de Tarislocratie appesantie  sur  elle,  soupirait  isolée  dans 
les  ténèbres;  ses  cris,  ses  gémissements  ont  percé  la  voûte 
des  antres  où  elle  était  précipitée  :  la  nation  française  les  a 
entendus;  elle  seule  s*est  éveillée  à  ses  plaintes;  elle  seule 
s'est  armée  pour  la  défendre;  elle  seule  est  aujourd'hui 
parvenue  à  la  Taire  triompher. 

«  Il  ne  Taliait  rien  moins  qu'une  nation  magnanime  et 
valeureuse  pour  vaincre  et  Taire  avorter  les  nombreux  com- 
plots que  les  ennemis  déclarés  du  bien  public  n'ont  cessé 
de  Tomenter  contre  elle  ;  qui  pût  venir  à  bout  de  déraciner 
l'arbre  antique  de  la  Téodalité,  du  des|>otisme  et  de  la  tyran- 
nie, et  Taire  germer  en  sa  place  la  tige  fleurie  de  la  liberté  ; 
tige  qui  ombragera  un  jour  de  son  bienfaisant  feuillage 
les  arriére-fils  de  nos  neveux. 

•  Tu  as  commencé,  nation  unique,  cet  onvrage  surna- 
turel; le  modérateur  suprême  de  l'univers,  convaincu  de 
la  sainteté,  de  la  justice  de  ta  cause,  associa  à  tes  armes  « 
comme  compagnons  inséparables,  le  triomphe  et  les  succès. 
Au  moyen  de  ces  appuis,  tu  accunlulas  victoires  sur  vic- 
toires: fière  de  la  cause  que  tu  déTends,  tu  passas  comme 
un  Toudre  de  conquête  en  conquête,  et  dans  nos  climats 
seuls,  de  Cambrai  jusqu'aux  rivages  du  Texel,  tu  viens 
d*arracber  au  joug  affreux  du  de^^potisme  des  nations  qui 
t'adorent  en  extase,  et  Tont,  sur  rauiil  de  ta  grandeur  et 
de  ta  gloire  «  l'offre  en  holocauste  de  la  liberté  qu'elles  le 
doivent. 

•  Nous  commençons  S  respirer:  une  heureuse  fraternité, 
une  bienTaisante  liberté,  une  parfaite  égalité  seront  les 
bases  immuables  de  notre  félicité  Tuture.  Ravis  par  1rs  dé- 
lices que  nous  présagent  ces  avenirs  Hatieurs,  nous  ne  pou- 
vons former  d'autres  vœux  pue  de  les  consolider  par  une 
réunion  intime  de  nos  provinces,  déjà  renaissantes  ù  l'as- 
pect du  bonheur,  avec  la  nation  qui  seule  a  pu  opérer 
leur  félicité. 

•  C'est  cette  réunion  seule,  citoyens ,  qui  peut  baser  snr 
des  fondements  impérissables  le  bonheur  que  vous  venez 
de  nous  procurer;  c*est  au  moyen  de  cette  réunion,  et 
sous  ses  auspices,  que  nous  verrons  au  milieu  de  nous 
l'abondance  renaître,  en  oubliant  tous  les  maux  qu^uoe 
guerre  soutenue  pour  notre  liberté  aura  pu  nous  faire 
souffrir;  c'est  elle  seule  qui  pourra  faire  refleurir  le  com- 
merce qui  jadis  fut  le  partage  des  habitants  de  nos  pro- 
vinces; et  la  libre  navigation  sur  TEscaut,  dont  vous  vencx 
de  briser  les  chaînes,  va  ramener  parmi  nos  citoyens  Palx^n- 
dance,  qui  ne  fut  bannie  du  milieu  de  nous  que  par  Tim- 
poîssanceoù  nous  étions  de  puiser  à  sa  source. 

«  Oui ,  citoyens ,  nous  sollicitons  de  vous  cette  heureuse 
réunion,  dans  tout  rppanchemcnt  de  nos  coeurs;  ne  laissez 
donc  pas,  assemblée  auguste,  incomplet  Touvrage  sublime 
que  vous  venex  de  conduire  si  loin. 

-  Vous  avez  brisé  nos  chaines,  achevez  notre  bonheur, 
unissez-nous  à  vous;  devenus  vos  frères,  ne  composant 
qu'une  seule  Tamill&avec  la  nation  glorieuse  que  vous  re- 
préseniez,  et  qui  met  en  vous  sa  confiance,  nous  bénirons 
à  jamais  vo5  exploits  ;  et,  sûrs  sous  le  bouclier  de  nos  vic- 
toires, nous  ne  craindrons  plus  le  despotisme  des  tyrans 
sous  le  joug  affreux  desquels  nous  avons  gémi  ;  et  une  na- 
tion affranchie  par  vos  troupes  invincibles  deviendra,  en 
partageant  avec  vous  les  doux  Truits  de  la  liberté,  une 
nation  de  libres  et  d'amis. 

«  Vive  la  république  Trançaise  snr  toute  la  surface  da 
globe  1  > 

Cette  lettre  est  renvoyée  au  comité  de  salut  pu- 
blic. 

Le  représentant  du  peuple  Duhois-Dubais  ^  dans 
tes  départements  de  VOme  et  de  la  Sarthe ,  à  la 
Convention  nationale. 

Alençon,  le  6  ventôse,  Tan  3*  de  la  républiqvo 
française. 

•  J'ai  déjà  parcouru  plusieurs  communes  dans  les  dé- 
partements de  rOrne  et  de  la  Sarthe  que  vous  avez  confiés 
à  ma  surveillance.  Jane  peux  assez  vous  dire  combien  sur- 
tout je  suis  content  de  l'esprit  des  cités  :  on  j  est  paisiblet 


595 


fournis  aux  lois  ;  od  y  aime  sincèrement  la  république,  el 
Ton  y  souffre  sans  se  plaindre  des  privations  nécessitées 
par  la  pénurie  des  subsistances.  Les  autorités  constituées 
y  sont  bonnes,  et  remplissent  leurs  devoirs  arec  le  zélé  et 
l'aclivilé  qui  prouvent  une  véritable  envk  de  bien  servir 
la  pairie  et  de  faire  aimer  le  gouvernement. 

«  Je  n*ai  à  vous  parler,  dans  ce  moment ,  que  des  com- 
munes de  Bellesme,  Mamers  et  Alençon.  Je  n'en  suis  pas 
moins  presque  certain,  par  mes  relations  très-actives  avec 
toutes  les  autres  communes,  que  f  aurai  peu  de  change- 
ments à  faire  dans  les  fonctionnaires  publics;  ils  me  pa- 
raissent la  plupart  instruits  et  pénétrés  de  leurs  devoirs. 

«  Je  joins  à  cette  lettre,  citoyens  collègues,  le  discours 
que  j*ui  prononcé  dans  cette  commune  en  séance  publique, 
et  quej'ai  communiqué,  en  forme  de  proclamation,  àtoutcs 
les  autres  communes  des  départements  de  TOrne  et  de  la 
Saribe.  J^espère  que  tous  eo  approuvera  Tobjet  et  les 
principes. 

«  Salut  et  fraternitéw  Dubois-Dobais.  • 

La  Convention  renvoie  cette  lettre  an  comitë  de 
salut  public. 

•—  Les  citoyens  de  la  section  de  Brutus,  en  masse, 
défilent  dans  le  sein  de  la  Convention  nationale. 

Voraleur  (à  la  barre):  Législateurs,  la  section  de 
Brutus,  d'après  le  vœu  unanime  d*une  assemblée 
très-nombreuse,  se  présente  devant  vous  ;  elle  vient 
applaudir  à  vos  travaux ,  vous  témoigner  sa  recon- 
naissance et  vous  confier  ses  sollicitudes. 

Les  bataillons  des  sections  offrent  encore  dans 
leurs  rangs,  et  couverts  des  mêmes  armes  que  le  pa- 
triote, non  soi-disant  pur,  mais  dans  toute  la  pureté 
de  ce  mot,  ceux  qui,  au  besoin,  les  tourneraient 
contre  vous,  qui  s  en  serviraient  au  moindre  mou- 
vement excité  par  eux,  et  dont  les  subsistances  se- 
raient le  prétexte ,  peut-être  lorsque  leur  rareté  ou 
leur  cherté  excessive  n*cst  que  le  fait  d'anciens 
agents  aussi  nombreux  qu'ineptes,  n'est  que  le  fait 
d  un  gouvernement  despotique  et  féroce,  plus  oc- 
cupé, lorsqu'il  pesait  sur  nous,  de  compter  tous  les 
jours  le  nombre  des  victimes  que  celui  des  arri- 
vages nécessaires  à  la  consommation,  et,  par  une 
prévoyance  barbare,  calculant  sans  doute  que  les 
approvisionnements  étaient  inutiles,  puisque  bientôt 
la  France  n'offrirait  que  des  monceaux  de  cadavres. 

Que  ce  mélange  odieux  et  bizarre  dans  nos  pha- 
langes républicaines  ne  choaue  plus  nos  yeux  et  ne 
tourmente  plus  notre  pensée;  que  le  père  ne  soit 
plu^  relevé  de  son  poste  par  l'assassin  de  son  tils , 
['époux  par  le  meurtrier  de  sa  femme.  Eh  quoi! 
nous  servirions  i  côté  des  soldats  de  la  terreur  et 
de  la  tyrannie!  ils  seraient  admis  à  l'honneur  de 
partager  nos  fatigues  ou  nos  dangers ,  de  garder  la 
Convention  nationale  !  Non ,  législateurs,  leur  pré- 
sence en  ces  lieux  nous  donnerait  trop  d'alarmes  ; 
nous  disons  plus ,  leur  présence  vous  accuserait. 

§>u'ils  soient  désarmés;  quHs  le  soient  !  Brigands 
e  nos  cités,  qu'ils  soient  réduits  à  l'impuissance  de 
piller  nos  propriétéset  de  nous  égorger  impunément! 
C'est  par  suite  de  ce  vœu ,  qui  n'est  point  celui 
d'une  faction,  mais  le  résultat  de  l'opinion  publique 
fortement  prononcée,  vivement  sentie,  que  nous 
vous  demanderons  encore  la  révision  de  la  loi  du 
17  septembre  1793  contre  les  gens  suspects.  Source 
salutaire  dans  son  principe,  elle  s'est  empoisonnée 
dans  son  cours  ;  et,  confiée  bientôt  de  flots  de  sang 
humain,  entraînant  dans  ses  débordements  subits  et 
la  cabane  du  pauvre ,  et  la  ferme  du  cultivateur,  et 
la  maison  du  riche ,  et  l'atelier  de  l'artisan ,  elle  n'a 
laissé  partout  que  l'image  affreuse  de  la  désolation  , 
du  ravage  et  de  la  mort.  Vous  avez  opposé  déjà  des 
digues  i  ce  torrent  dévastateur;  vous  pèserez  dans 
votre  sagesse  si  vons  ne  deves  pas  en  prononcer  le 
Urissement  total. 


Quant  à  nons ,  amis  de  Tordre ,  soumis  aux  lois, 
ennemis  de  la  tyrannie  sous  tous  les  noms,  sous 
toutes  les  formes ,  nous  vous  jurons  de  vous  rester 
irrévocablement  unis  pour  soutenir  vos  efforts,  affer- 
mir le  rèçne  de  la  justice  ,  et  maintenir  la  gloire  de 
la  république  une  et  indivisible. 

Cette  Adresse  est  couverte  d'applaudissements  et 
renvoyée  aux  comités  de  sûreté  générale,de  législa- 
tion et  militaire. 

—  Un  membre,  au  nom  du  comité  des  finances, 
propose,  et  la  Couvention  rend  les  trois  décrets 
suivants  : 

•  La  CoDvenUon  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap» 
port  de  son  comité  des  finances,  décrète  : 

Art.  I*'.  La  trésorerie  nationale  ouvrira  un  crédit  de 
10  millions  ft  la  commission  des  administrations  civiles  \ 

m  De  200  millions  à  celle  des  approvisionnemenls; 

«  De  10  millions  à  celle  des  travaux  publics; 

c  De  1 5  millions  à  celle  des  secours  publics  ; 

c  De  S5  millions  à  celle  des  transports,  postes,  remontes 
et  messageries  ; 

«  De  10  millions  i  celle  de  la  marine  et  des  colonies; 

■  De  10  millions  à  celle  des  armes  et  poudres. 

c  IL  La  commission  des  approvisionnements  est  char- 
gée de  faire  faire  toutes  les  opérations  nécessaires  pour  sol* 
der  les  objets  d*approyisionnements  qui  sont  faits  à  Pétran- 
ger  pour  les  besoins  du  gouvernement;  elle  ne  pourra 
ordonnancer  les  sommes  nécessaires  pour  cet  objet  qu'avec 
Tautorisation  des  comités  de'  salut  public  et  des  finances 
réunis.  • 

—  f  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
comité  des  finances  sur  Pétat  remis  par  les  commissaires  de 
la  trésorerie  nationale  des  recettes  et  dépenses  faites  pen* 
dant  le  mois  de  pluviôse  dernier  ; 

•  Considérant  que,  la  recette  s^élevant  à  60  millions 
589,918  I.  18  i.  1  denier,  et  la  dépense  à  503  millions 
478,858  1.  7  s.  9  deniers,  il  en  résulte  un  eicédant  de  dé- 
pense de  la  somme  de  443  millions  164*944 1.  9  s.  8  den., 
an  remplacement  de  laquelle  il  est  nécessaire  de  pourvoir  ; 

f  Décrète  que  le  contrôleur  de  la  caisse  générale  retirera 
de  la  serre  à  trois  clefs,  où  sont  dtoosés  les  assignats  nou- 
vellement fabriqués,  ladite  somme  de  443  millions  164,9441* 
9  i.  8  d. ,  destinée  à  remplacer  Texcédant  que  les  dépenses 
faites  dans  le  courant  de  pluviôse  dernier  présentent  sur 
les  recettes  du  môme  mois,  en  remplissant  pour  cette  opé- 
ration les  formalités  prescrites  par  les  précédents  décrets 
de  remplacement  i^ 

—  «  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  son  comité  des  finances, 

•  Décrète  que,  sur  le  vu  du  présent  décret,  la  trésorerie 
nationale  paiera  à  la  citoyenne  Georgette  Daubentoot 
veuve  de  BuCfon ,  condamné,  la  somme  de  15,000  liv.,  im- 
putable sur  ses  reprises  dotales  et  autres  droits.  - 

—  Les  sections  du  Temple,  de  Bondy ,  de  THomme 
Armé  et  de  l'Indivisibilité,  présentent  une  pétition 
par  laquelle  elles  exposent  à  la  Convention  que  le 
défaut  d'établissements  publics  dans  leur  arrondis- 
sement est  très-funeste  au  commerce,  et  demandent 
leur  répartition  dans  toutes  les  sections. 

Cette  pétition  est  renvoyée  an  comité  de  salut  pu- 
blic. 

—  La  section  des  Lombards  présente  une  Adresse 
tendant  a  faire  expulser  des  places  les  anciens  fonc- 
tionnaires publics  qui  ont  abusé  de  leurs  pouvoirs  , 
et  élever  une  colonne  sur  laquelle  seraient  inscrits 
les  noms  des  tyrans  tombés  sous  le  glaive  de  la  loi. 

La  Convention  renvoie  cette  Adresse  an  comité  de 
législation. 

—  Les  représentants  da  peuple  envoyés  à  Meudon 
pour  surveiller  les  épreuves  des  nouvelles  inventions 
adressent  à  la  Convention  une  lettre  par  laquelle 
ils  réclament  contre  un  bruit 'calomnieux  inséré 
dans  plusieurs  journaux,  que ,  sotis  la  dernière  ty- 


596 


rannie,  oo  tannait  à  Meudon  des  peaux  humaioes 
pour  en  faire  des  cuirs. 
I      La  Convention  passe  à  l*ordre  du  jour. 
La  séanee  est  Ie?ée  à  sept  heures. 

^  SÉANCE  DO  13  TEUTOSC. 

CAmACBBis,  an  nom  du  eomité  de  salut  public  : 
Représentants  du  peuple,  c* est  au  moment  où  les  cir- 
constances peuvent  donner  une  grande  activité  à 
DOS  relations  extërieures  qu'il  importe  de  manifester 
vos  intentions  sur  cette  partie  du  gouvernement. 

Vous  avez  iuvesti  le  comité  de  salut  public  de  la 
direction  des  opérations  politiques;  il  vient  vous 
demander  de  ne  laisser  subsister  aucune  incertitude 
ni  sur  l'étendue»  ni  sur  les  limites  de  ses  attribu- 
tions. 

Les  doutes  qui  s'élèveraient  sur  sespouvoirs  arrê- 
teraient sa  marche,  s'ils  n'étaient  promptement  dis- 
sipés par  l'autorité  qui  seule  dans  la  république  a  le 
droit  de  prononcer  sur  la  guerre  et  sur  la  paix. 

La  révolution  française,  soutenue  par  tant  de 
triomphes ,  a  donné  à  l'Europe  une  impulsion  gé- 
nérale vers  la  liberté,  vers  l'anéantissement  des  en- 
traves qui  prolongeaient  l'enfance  des  peuples,  et 
▼ers  le  perlectionnement  de  l'esprit  humain.  Il  faut 
désormais  que  le  progrès  paisible  et  uniforme  des 
lumières,  que  l'exemple  de  notre  bonheur,achèvent 
une  entreprise  commencée  au  milieu  des  orages.  Si 
les  secousses  du  tonnerre  et  la  lutte  des  élémens  pu- 
rifient l'air  et  dégagent  les  parties  fécondantes ,  ce 
n'est  que  par  la  douce  chaleur  du  soleil,  et  sous  l'in- 
fluence d'un  ciel  calme  et  serein,  que  peuvent  mûrir 
les  semences  contiées  au  sein  de  la  terre. 

La  paix  est  le  but  de  la  guerre  ;  tant  de  guerres 
ont  été  entreprises  par  le  caprice  et  continuées  par 
Tin térét  particulier,  que  les  gouvernements  ont 
donné  aux  peuples  la  pleine  mesure  de  leur  tyran- 
nie et  de  leur  perversité. 

C'est  l'ambition  oui  arme  les  rois ,  c'est  la  justice 
qui  arme  les  peuples;  et  quel  est  le  peuple  qui, 
ayant  dissipé  la  ligue  de  ses  ennemis,  renversé  leurs 
projets ,  humilié  leur  orgueil ,  confondu  leur  ambi- 
tion, se  refuserait  k  la  gloire  la  plus  flatteuse,  celle 
de  donner  la  paix  au  monde  après  l'avoir  vaincu? 

La  diplomatie  d'une  république  n'est  point  em- 
barrassée comme  celle  des  cours;  ni  droits  du  sang, 
ni  pactes  de  famille,  ni  intérêts  de  mariage  n'arrê- 
tent sa  marche.  Elle  ne  connaît  de  droits  que  ceux 
des  nations;  le  j^enre  humain  est  sa  famille,  et  elle 
ne  s'allie  qu'à  l'uitérét  des  peuples;  sa  politique  doit 
donc  être  aussi  simple  que  lacile. 

Telle  sera  la  vOtre. 

Pénétrés  des  grands  principes  de  l'indépendance 
des  nations,  de  Ta  réciprocité,  de  l'égalité  aes  droits 
et  des  devoirs  entre  les  sociétés  politiques,  ceux  qui 
seront  chargés  en  votre  nom  de  négocier  avec  les 
Etats  qui  vous  auront  présenté  des  dispositions  pa- 
ciflques  sauront  non-seulement  maintenir  les  droits 
et  la  dignité  du  peuple  français  :  ils  rassureront  en- 
core les  nations  sur  leur  sûreté  intérieure  et  exté- 
^rieure,\sur  notre  fidélité  dans  les  traités,  sur  la 
loyauté  de  nos  intentions  par  rapport  à  la  navigation 
et  au  commerce. 

On  ne  vous  accusera  point  d'alimenter  les  fureurs 
de  la  ffuerre  ;  vous  ne  répondrez  point  du  sang  qui 
peut-être  continuera  de  couler. 

La  république  triomphante,  prête  à  voler  à  de 
nouveaux  triomphes ,  veut  la  paix  ;  elle  la  voudrait 
universelle,  telle  qu'elle  pût  assurer  pour  jamais  le 
repos  et  le  bonheur  du  monde. 

Mais  si  vous  jetez  un  regard  sur  l'Europe,  il  vous 


apprendra  que  la  tâche  glorieuse  des  défenseurs  de 
la  patrie  n'est  pas  finie.  H  est  encore  des  gouverne- 
ments que  tant  de  pertes  et  de  défaites  n'ont  pas 
mûris  pour  la  résipiscence,  et  dont  i'orsueil  préfére- 
rait de  s'ensevelir  sous  des  ruines  plutôt  que  de  ren- 
dre hommage  à  la  justice  et  à  la  liberté. 

L'Angleterre  n'a  pas  cessé  d'aspirer  an  domaine 
des  mers;  l'Autriche  et  la  Russie  conspirent  encore 
pour  envahir  l'empire  du  continent;  elles  reportent 
sur  le  nord  de  l'Europe  leurs  espérances  détruites  aa 
midi  ;  elles  comptent  guérir  leurs  maux  en  les  ren- 
dant contagieux  pour  l'univers,  et  c'est  au  milieu 
d'un  bouleversement  général  qu'elles  veulent  établir 
leur  domination  ou  s  indemniser  de  leurs  pertes. 

Autour  dé  ces  puissances  sont  groupés  les  autres 
Etats  de  l'Europe,  enchaînés  par  la  séduction  ou  pa- 
ralysés par  la  terreur;  ennemis  involontaires  ou 
aveugles  d'une  république  dont  l'existence  garantit 
leur  conservation  ,  auelaues-uns  s'applaudissent 
d'une  neutralité  sage  dans  le  principe,  mais  devenue 
insuffisante  contre  les  efforts  de  nos  ennemis  ;  au 
milieu  d'eux  s'élève  le  peuple  français,  seul  et  uni- 
que centre  de  toutes  les  affections,  de  toutes  les 
haines,  prêt  à  terminer  glorieusement  une  guerre 
juste  et  terrible,  dont  le  sort  est  décidé  par  son  cou- 
rage  et  par  les  destinées  du  genre  humain. 

Citoyens,  que  nous  reste-t-il  à  faire?  Tandis  que 
nos  phalanges  républicaines  se  préparent  à  de  nou- 
velles victoires  contre  des  ennemis  irréconciliables 
ou  irréconciliés,  nous  devons  offrir  à  l'Europe  l'ex- 
posé de  nos  principes  et  le  gage  de  notre  sagesse, 
rallier  autour  de  nous  les  gouvernements  demeurés 
étrangers  à  une  coalition  impie  ,  accueillir  avec  gé- 
nérosité les  Etats  qui  auront  rompu  les  chaînes  de 
la  ligue. 

Il  faut  faire  sentir  leurs  véritables  intérêts  à  ceux 
qui,  livrés  à  une  politique  incertaine  ou  timide, 
balancent  encore  entre  une  guerre  qui  leur  prépare 
des  dangers  terribles  et  des  regrets  éternels ,  et  une 
paix  qui  peut  coûter  quelques  sacrifices  d'amour- 
propre  ou  de  préjugés.  Il  faut  porter  aux  pays  con- 
quis la  consolation  et  le  bonheur.  11  faut  montrer  à 
l'Europe  étonnée  un  peuple  vaincu  qui,  rendu  par 
nos  triomphes  mêmes  a  l'indépendance,  s'élance  vers 
la  liberté  et  notre  alliance.  Il  faut  réconcilier  à  notre 
cause  les  amis  de  l'humanité,  créer  un  droit  des  na- 
tions, le  présenter  à  nos  ennemis,  fixer  un  terme  où 
l'obstination  de  ceux  qui  nous  combattent  sanspio- 
tif  justifiera  des  mesures  de  sévérité  et  accumulera 
sur  leurs  têtes  coupables  toute  la  responsabilité  des 
malheurs  qu'ils  ont  causés  et  des  flots  de  sang  qu'ils 
ont  fait  répandre. 

Déjà  une  partie  dé  cette  tâche  est  remplie.  Les 
peuples  appellent  la  paix,  des  gouvernements  reve- 
nus vers  la  sagesse  la  désirent  ;  des  négociations  im* 
portantes  sont  entamées  ou  prêtes  à  l'être ,  et  bien- 
tôt l'or,  les  prestiges,  le  despotisme  n'étoufferont 
plus  la  voix  de  l'humanité  et  de  In  raison. 

Dans  cet  état  de  choses,  il  ne  s'agit  pas  de  discuter 
le  mode  de  la  pacification  :  la  force  des'événements 
nous  Ta  indiqué  ;  une  négociation  unique  pour  une 
paix  générale  est  impossible  dans  ce  moment  où 
nous  avons  encore  à  combattre  des  ennemis  abattus, 
mais  fiers,  affaiblis,  mais  acharnés;  rien  ne  pourrait 
nous  assurer  ni  la  durée,  ni  la  solidité  d'un  tel  traité, 
nous  n'en  trouverions  la  garantie  ni  dans  la  volonté 
de  nos  ennemis ,  ni  dans  leur  impuissance.  Au  mi- 
lieu de  tant  de  négociateurs  réunis,  seuls  contre 
tous ,  nous  serions  toujours  obligés  de  tendre  à  les 
diviser. 

De  là  la  chimère  d'une  pacification  universelle 
par  l'impossibilité  d'accorder  en  même  temps  tant  de 
puissances  dont  les  projets  et  les  vœux  sont  si  con- 


£«7 


trajres.  Ce  n'est  donc  que  par  des  paix  pariiellesque 
nous  pourrons  arriver  à  une  paix  générale. 

Dès  lors,  tandis  que  ceux  de  nos  frères  que  Ta- 
mour  de  la  gloire  et  la  voix  de  la  patrie  tiendront 
ralliés  sous  les  drapeaux  de  la  liberté  marcheront  à 
de  nouveaux  exploits,  une  foule  de  soldats  citoyens, 
rappelés  dans  leurs  foyers,  des  milliers  de  bras 
rendus  aux  campagnes  et  aux  ateliers  qui  les  rede- 
mandent ,  le  commerce  reflorissant ,  les  manufac- 
tures repeuplées,  des  routes  nouvelles  pour  les 
approvisionnements  et  pour  les  subsistances,  les 
communications  rouvertes  avec  une  partie  de  TEu- 
rope ,  le  retour  de  l'abondance,  les  prodiges  de  la 
confiance  renaissante,  les  chefs-d'œuvre  de  Tindus- 
trie  ranimée ,  les  efforts ,  les  travaux,  les  succès  en 
tout  genre  d'un  grand  peuple ,  fier  de  son  ouvrage , 
assuré  d'être  heureux  et  tournant  vers  les  arts  de  la 
paix  tous  les  dons  de  la  nature  et  toute  Tactivité 
du  génie;  voilà  le  bonheur  qui  est  dans  nos  mains, 
et  pour  ainsi  dire  au  pouvoir  de  notre  volonté. 
Voilà  les  bienfaits  que  la  France  et  l'Europe  atten- 
dent de  nous  ;  nous  voudrons  tout  ce  qui  sera  à  la 
fois  juste,  honorable  et  utile. 

Rassurons  l'Europe  après  l'avoir  étonnée,  et  ne 
donnons  pas  aux  gouvernements  un  facile  prétexte 
pour  nous  calomnier  encore,  et  pour  nous  accuser 
devant  les  nations  qu'ils  ont  trompées  d'être  des 
conquérants  inexorables  et  nullement  des  libéra- 
teurs, et  de  vouloir  leur  destruction  en  combattant 
au  nom  de  l'humanité.  Mais  en  écoutant  la  voix  de 
la  justice ,  en  nous  garantissant  des  prestiges  de 
l'ambition  et  des  instigations  de  la  vengeance,  nous 
n'oublierons  point  ce  que  nous  devons  à  la  prospé- 
rité de  la  patrie,  à  l'affermissement  de  la  républi- 
que. La  paix  doit  détruire  les  germes  des  guerres 
futures,  tixer  et  garantir  les  intérêts  réciproques, 
éviter  les  pièges,  assurer  le  droit  des  nations.  C'est 
dans  la  nature  de  la  guerre  que  nous  avons  été  for- 
cés de  soutenir,  c'est  dans  rexpérience  des  siècles 
passés  et  dans  la  prévoyance  de  l'avenir  qu'il  faut 
puiser  les  conditions  de  nos  traités.  La  génération 
actuelle  n'a  point  subi  tant  d'épreuves  et  fait  tant  de 
sacrifices  sans  la  certitude  d'en  faire  recueillir  le 
fruit  à  la  postérité. 

Nous  ne  combattons  point  pour  quelques  miséra- 
bles querelles  de  ministres,  pour  quelques  ridicules 
prétentions  de  rivalité,  pour  Tusurpation  de  quel- 

Îues  titres  ou  de  quelques  possessions  lointaines, 
es  arrangements  de  convenance  ou  d'astuce ,  ces 
balancements  artificiels  de  restitutions  et  d'indem- 
nités, ces  garanties  qui  ne  garantissent  point,  ces 
promesses  éventuelles  paraissent  peu  dignes  des  de- 
voirs que  les  destinées  ont  imposes  à  la  république 
française.  Lorsque  tous  les  principes  de  droit  naturel 
ont  été  contestes ,  lorsque  les  fondements  de  toute 
société  politique  ont  été  ébranlés  par  des  prétentions 
tyranniques,  lorsqu'une  nation  entière  a  pris  les 
armes  contre  l'invasion,  la  trahison,  la  famine,  la 
guerre  civile ,  le  partage  de  son  territoire,  l'anéan- 
tissement de  son  existence,  elle  doit  sans  doute  faire 
reconnaître  ses  droits ,  et  user  de  sa  puissance  pour 
les  faire  respecter  à  jamais.  S'il  existait  en  Europe 
un  droit  des  nations,  des  principes  reconnus  d'indé- 
pendance, de  liberté  de  commerce  et  de  navigation, 
s'il  existait  un  plan  contre  l'ambition  des  puissances 
usurpatrices  et  une  garantie  pour  la  sûreté  des 
Etats  faibles,  alors  les  conditions  de  la  paix  seraient 
facilement  dictées  et  acceptées,  alors  nous  n'aurions 
point  de  guerre  ù  soutenir.  Mais  la  nécessité  d'assu- 
rer le  repos  de  l'Europe,  et  de  vous  préserver  des 
maux  que  vos  ennemis  méditent  pour  l'avenir,  re- 
commande à  votre  sagesse  des  mesures  propres  i 
vous  faire  atteindre  le  but  que  vous  désirez. 


Ici  nous  aurions  peut-être  à  fixer  votre  attention 
sur  le  sort  des  pays  que  la  conquête  a  mis  entre  nos 
mains,  si  les  questions  que  vous  aurez  a  décider 
dans  cette  importante  matière  ne  demandaient  une 
discussion  étendue,  et  ne  devaient  faire  l'objet  d'un 
rapport  particulier. 

La  république  a  des  limites  naturelles  dans  les 
Alpes  et  les  Pyrénées,  dans  les  deux  mers  et  dans 
un  pays  libre,  notre  allié  depuis  plusieurs  siècles  : 
elle  se  trouve  contiguè'  vers  le  nord  à  des  posses- 
sions étrangères  dont  la  démarcation  et  des  gouver- 
nements jaloux  ont  causé  des  siècles  de  guerre.  C'est 
de  ce  côté  que  l'Autriche  a  prétendu  s'emparer  de  la 
ci-devant  Lorraine,  que  l'Angleterre  a  convoité  le 
port  de  Dunkerque,  et  que  la  navigation  de  l'Escaut 
a  servi  de  premier  prétexte  à  ses  explosions  hostiles. 
C'est  dans  ces  pays,  aujourd'hui  soumis  à  nos  armes, 
qu'un  grand  nombre  de  fleuves,  après  avoir  arrosé 
nos  départements,  prennent  leurs  cours  vers  la  mer 
et  vous  invitent  à  leur  confier  les  productions  de 
notre  sol  et  de  notre  industrie  ;  vous  examinerez  si 
les  conseils  de  la  nature  et  l'expérience  des  siècles 
ne  demandent  point  que  vous  traciez  d'une  main 
sûre  les  limites  de  la  république  française;  si  l'exé- 
cution de  ce  grand  dessein  ne  doit  pas  être  la  base 
et  la  véritable  garantie  de  la  paix  universelle,  et 

3uels  sont  les  moyens  de  concilier  les  conditions 
es  traités  particuliers  avec  cette  idée  principale. 
Quoi  qu'il  en  soit,  il  faut  que  l'Europe  sache  que 
vous  n  êtes  point  dirigés  par  des  vues  d'agrandisse- 
ment ,  mais  par  le  sentiment  de  votre  repos  ;  que 
vingt-cinq  millions  d'hommes,  associés  pour  la  li- 
berté et  pour  le  bonheur,  n'ambitionnent  pas  quel- 
ques centaines  de  lieues  carrées  par  cet  instinct  de 
con(|uéte  qui  peut  guider  un  despote  ou  une  aristo- 
cratie concentrée  dans  un  sénat,  et  qu'ayant  pris  les 
armes  pour  leur  indépendance,  ils  ne  doivent  les 
quitter  qu'après  en  avoir  assure  In  durée  par  tous 
les  moyens  que  la  nature  leur  offre,  et  qui  peuvent 
prévenir  le  retour  de  la  guerre  en  ménageant  Tin- 
térét  bien  entendu  des  antres  nations. 

Vous  voyez ,  citoyens,  par  l'exposé  des  vues  que 
nous  venons  d'indiquer,  la  grandeur  des  obligations 
que  vous  avez  imposées  au  comité  de  salut  public  » 
en  le  chargeant  de  la  direction  des  relations  exté- 
rieures. Pénétrés  du  sentiment  de  nos  devoirs,  nous 
avons  aperçu  quelques  dinicultés,et  nous  en  avons 
pressenti  d'autres  qu'il  appartient  à  votre  sagesse  de 
faire  disparaître. 

Il  semble  d'abord  que  le  comité  de  salut  public, 
chargé  par  le  décret  au  7  fructidor  de  la  direction 
des  opérations  politiques,  est  suffisamment  autorisé 
à  signer  en  votre  nom,  et  sauf  votre  ratification, 
tous  les  traités  diplomatiques,  à  prendre  toutes  les 
mesures  préliminaires,  à  convenir  de  toutes  lescon* 
ditions,  et  qu'il  doit  seulement  présenter  à  votre  dé- 
libération des  traités  qui ,  pour  être  définitifs,  n*ont 
besoin  que  de  votre  assentiment.  Le  mode  adopté 
lors  de  la  confirmation  du  traité  conclu  avec  la  Tos- 
cane justifie  cette  opinion  et  paratt  tracer  nos  de- 
voirs pour  l'avenir. 

En  effet ,  citoyens,  vons  arez  senti  qu'il  était  im- 
possible de  traiter  avec  les  plénipotentiaires  des 
gouvernements  étrangers  dans  le  sein  de  la  repré- 
sentation nationale ,  et  que  de  là  dérivait  la  néces- 
sité de  déléguer  le  pouvoir  de  négocier  et  d'arrêter 
les  conditions  de  paix.  Vous  avez  senti  qu'il  n'y 
avait  point  de  dnnger  dans  cette  délégation  ,  puis- 
que, le  pouvoir  de  négocier  supposant  un  pouvoir 
supérieur  qui  approuve,  modifie  ou  rejette  les  trai- 
tés convenus,  le  refus  de  votre  assentiment  les  dé- 
truisait de  fait  et  de  droit.  Vous  avez  senti  que,  si  |a 
paix  et  la  guerre,  actes  da  souverain,  ne  pouvaient 


598 


être  résolus  que  par  le  pouvoir  auquel  le  ^uple  a 
confié  Texcrcice  de  sa  souveraineté,  Tintérét  du 
peuple  exigeait  que  les  moyens  les  plus  efficaces 
pour  le  succès  delà  guerre  fussent  attribué  à  un 
comité  organisé  dans  votre  sein,  et  que  tous  les  ob- 
stacles à  Ta  paix  fussent  écartés  par  le  secre  et  par 
ractivité. 

C'est  après  nous  être  pénétrés  de  ces  principes,  et 
en  réfléchissant  sur  les  entraves  (}ui  arrêtent  pres- 
que toujours  la  marclie  des  négociations,  sur  les  en- 
êagemeiits  provisoires  qu'elles  peuvent  exiger,  sur 
la  réserve  et  la  célérité  qui  en  garantissent  le  succès, 
que  des  doutes  importants  se  sont  présentés  à  notre 
esprit,  et  que  nous  avons  reconnu  la  nécessité  d*en 
soumettre  la  solution  à  votre  sagesse. 

Les  traités  définitifs  sont  quel(|uefois  précédés  de 
conventions  préliminaires  qui,  étant  bornées  à  un 
objet  déterminé,  ont  pour  but  d'accélérer  tes  négo- 
ciations. Ces  conventions  peuvent  être  considérées 
comme  de  véritables  traités  ;  mais,  attendu  qu'elles 
se  trouvent  limitées,  quant  à  leur  durée  et  quant  à 
leur  objet ,  et  qu'elles  ne  préjugent  rien  sur  la  ques- 
tion principale,  on  ne  doit  les  classer  (]ue  parmi  les 
moyens  employés  pour  parvenir  au  traité  définitif. 

Nous  vous  citerons  comme  exemple  les  armistices, 
les  neutralisations  de  quelque  ville  ou  de  quelque 
territoire.  Ces  stipulations  provisoires  participent 
plus  ou  moins  de  la  nature  des  conventions  militai- 
res dont  la  conclusion  est  souvent  de  la  compétence 
des  généraux  ;  ce  sont  les  localités,  les  convenances 
du  moment  qui  les  déterminent,  et  elles  doivent  être 
suivies  d'une  prompte  exécution. 

En  autorisant  le  comité  de  salut  public  à  négocier 
et  à  rédiger  les  traités,  vous  avez  aussi  voulu  Tau- 
toriser  à  prendre  toutes  les  mesures  <|ui  peuvent  les 
préparer  et  les  faciliter  ;  et  si  nous  venons  vous  de- 
mander une  explication  à  l'égard  des  conventions 
préliminaires  dont  je  viens  de  parier,  c'est  qu'il  nous 
suffit  du  moindre  doute  sur  retendue  de  nos  pou- 
Yoirs  pour  avoir  recours  à  votre  autorité. 

Il  est  une  autre  difliculté  dont  la  solution  exige 
nne  mesure  nouvelle.  Les  traités  définitifs  sont  sou- 
Tent  accompagnés  de  certaines  stipulations  parti- 
culières, pour  lesquelles  le  sceau  ae  votre  autorité 
paratt  nécessaire,  et  qui  cependant  seraient  inexé- 
cutables si  elles  étaient  connues.  Comment  présen- 
ter à  votre  ratification  des  traités  ou  des  articles 
qu'il  est  impossible  de  soumettre  à  la  publicité?  et 
comment  les  exécuter  sans  l'expression  de  votre  vo- 
lonté qui  en  est  le  complément?  Nous  allons  expli- 
quer nos  idées  par  quelques  exemples. 

Supposons  que  la  république,  en  considération 
des  services  rendus  ou  en  stipulant  des  services  à 
I  rendre,  accorde  à  une  puissance  une  somme  quel- 
conque, soit  comme  indemmité  pour  le  passé,  soit 
comme  subside  pour  l'avenir  :  la  position  de  cette 
puissance  pourrait  être  telle  que  toute  l'utilité  d'un 
pareil  traité  serait  détruite  par  une  publicité  pré- 
maturée. 

Supposons  encore  qu'en  vertu  de  ce  traité  une 
escadre  doive  se  joindre  aux  forces  navales  de  la  ré- 
publique et  être  reçue  dans  ses  ports  ;  il  est  encore 
clair  que  la  publicité  pourrait  donner  aux  ennemis 
le  moyen  d'opposer  des  obtacles  insurmontables  à 
son  arrivée. 

Supposons  enfin  qu'il  s'agisse  de  rallier  quelques 
Etats  amis  ou  neutres  à  un  système  plus  actif  et  plus 
étendu ,  ou  de  faire  un  traite  qui  ait  pour  objet  d'o- 
pérer une  diversion,  et  vous  verrez  que  dans  tous 
ces  cas  il  peut  y  avoir  lieu  à  des  stipulations  dont 
Favantage  disparaîtrait  avec  le  secret 

Nous  ajoutons ,  citoyens,  que  la  timidité  de  quel- 
ques gouvernements  ou  les  habitudes  de  leur  di- 


plomatie peuvent  tes  déterminer  à  insister  sur  des 
précautions  qui  pourraient  vous  paraître  inutiles  à 
vous  qui ,  au  sentiment  de  votre  grandeur  et  de  vo- 
tre puissance,  joignez  ce  caractère  de  loyauté  et  de 
franchise  qui  aime  à  prendre  l'univers  entier  pour 
témoin  de  vos  actions  et  de  vos  desseins.  Vous  mon- 
trerez quelque  indulgence  pour  la  diplomatie  de 
l'Europe,  «ccoutumée  au  faux  jour  des  cabinets, 
ses  ytux  malades  redoutent  la  lumière,  et  il  ne  faut 
la  livrer  au  jour  de  «a  publicité  que  par  degrés  et  en 
la  rajeunissant.  Vous  songerez  aux  circonstances 

3ui  vous  environnent,  et  qui  vous  commandent 
'employer  et  d'autoriser  des  moyens  d'açir  plus 
étenous,  plus  puissants  et  plus  rapides  que  dans  l'é- 
tat ordinaire  aes  choses. 

Dira-t-on  qu'il  faut  écarter  de  semblables  trans- 
actions? Nous  répondrons  que  c'est  méconnaître 
les  destinées  de  la  France  que  de  vouloir  Tisoler  de 
la  politique  de  l'Europe ,  qu'elle  est  appelée  à  diri- 
ger et  à  réformer  ;  aue  son  action  ne  doit  avoir  d'au- 
tres bornes  que  celles  <^ue  prescrivent  la  justice  et 
l'humanité  ;  que  soutenir  le  contraire,  c'est  vouloir 
détruire  les  relations  extérieures,  perpétuer  la 
guerre,  et  réduire  toute  la  diplomatie  à  la  loi  du 
plus  fort. 

Ce  n'est  donc  pas  seulement  pour  rendre  hom- 
maee  aux  principes,  mais  encore  pour  donner  à  nos 
opérations  politiques  la  latitude,  la  rapidité,  la  soli- 
dité nécessaires,  qu'il  faut  chercher  un  moyen  qui 
mette  le  comité  de  salut  public  en  situation  de  pro- 
fiter de  tous  les  avantages  que  présentent  les  cir- 
constances et  les  événements ,  en  même  temps  que 
la  Convention  nationale  conservera  Texercice  des 
pouvoirs  qu'elle  ne* peut  ni  ne  doit  déléguer. 
Lorsque  le  ministère  anglais  s'est  permis  de  déro- 

fer  à  une  loi  existante,  ou  d'empiéter  sur  les  droits 
u  parlement,  il  se  fait  accorder  iin  bill  d'amnistie, 
c'est-à-dire  une  approbation  subséquente  qui  sauTe 
la  responsabilité  aes  ministres. 

Vous  ne  |trendrez  point  pour  règle  les  procédés 
du  parlement  d'Angleterre  ;  la  formalité  a'un  bill 
d'amnistie  ne  laisserait  pointdans  toute  leur  intégrité 
les  pouvoirs  dont  le  peuple  vous  a  rendus  les  dépo- 
sitaires, et  elle  ne  s'accorderait  point  avec  la  fran- 
chise et  la  délicatesse  de  ceux  d'entre  vous  qui  sont 
placés  au  comité  de  salut  public.  Un  moyen  plus 
simple  se  présente  :  lorsqu'il  s'agira  de  ces  actes 
qui  doivent  être  indispensablement  soumis  à  votre 
ratification  ,  mais  qu'il  importe  de  laisser  quelque 
temps  dans  le  secret,  le  comité  annoncera  qu'il  y  a 
lieu  à  une  opération  politique  qui  ne  peut  encore 
être  rendue  publique,  mais  pour  laquelle  il  a  besoin 
de  votre  approbation.  Alors  il  sera  nommé  à  l'appel 
nominal  douze  commissaires  qui,  après  avoir  déli- 
béré en  commun  avec  le  comité  de  salut  public ,  fe- 
ront leur  rapport  à  la  Convention  nationale  sur  les 
deux  points  suivants  : 

L'opération  proposée  est-elle  conforme  aux  prin- 
cipes décrétés  par  la  Convention  et  aux  intérêts  de 
la  république  ? 

Cette  opération  doit-elle  demeurer  secrète  ? 

Si  ces  deux  questions  sont  décidées  pour  l'affir- 
mative, la  Convention  nationale  autorisera  le  co- 
mité de  salut  public  à  suivre  cette  opération  ;  et , 
d'après  l'avis  de  ses  commissaires ,  elle  pourra  fixer 
l'époque  où  il  lui  sera  rendu  un  compte  public  de 
l'objet  de  la  négociation  et  des  mesures  qu  elle  aura 
entraînées. 

VoiKi,  citoyens,  l'expédient  que  nous  vous  pro- 
posons pour  les  actes  qui  doivent  être  nécessaire- 
ment soumis  à  la  Convention  nationale ,  mais  qu'il 
importe  de  laisser  dans  le  secret'  jusqu'au  moment 
convenable. 


599 


Il  nous  reste  à  dire  un  mot  sur  une  difGcuIté  de 
forme  qui  se  présentera  avec  fréquence  dans  le  cours 
des  négociations,  et  qu'il  e^  par  conséquent  néces- 
saire de  régler. 

I  Le  comité  de  salut  public  entend  en  votre  nom  les 
propositions  diplomatiques  qui  peuvent  lui  être  fai- 
tes; il  négocie  et  signe  les  traités  en  vertu  des  pou- 
voirs que  vous  lui  avez  délégués,  et  il  présente  en- 
suite son  ouvrage  à  votre  décision  ;  mais  suivra-t-il 
la  même  marche  lorsijue  la  république  aura  traité 
|)ar  l'orgaue  d*uu  ministre  plénipotentiaire  autorisé 
a  négocier,  à  convenir  et  ù  signer  des  traités,  d'a- 
près les  ordres,  les  instructions  et  l'approbation  du 
comité  de  salut  public?  La  raison  et  les  usages  di- 
plomatiques nous  ont  fait  penser  que  la  signature 
des  membres  du  comité  no  devait  point  paraître 
dans  les  traités  de  ce  eenre  ,  et  qu'ils  devaient  être 
soumis  directement  a  votre  approbation  aussitôt 
qu'ils  auraient  été  signés  par  les  plénipotentiaires. 

iNous  venons,  citoyens,  ae  vous  exposer  les  divers 
motifs  de  notre  incertitude,  et  de  vous  indiquer  les 
moyens  qui  nous  ont  paru  propres  à  la  faire  cesser; 
votre  sagesse  les  examinera,  et  vous  jugerez  s'ils 
présentent  ce  caractère  que  vous  voulez  donner  à  la 
diplomatie  de  la  république.  Prescrivez  au  comité 
de  salut  public  la  marche  qu'il  doit  suivre  ;  adoptez 
un  mode  d'après  lequel  les  principes  soient  respec- 
tés, les  convenances  ot)servées  et  les  gouvernements 
étrangers  engagés  à  entamer  des  négociations  qu*ils 
désirent. 

Ou  a  dit  qu'il  était  plus  pénible,  plus  difficile 
de  gouverner  que  de  conquérir;  ne  pourrait-oD 
pas  ajouter  qu'il  y  a  presque  autant  de  difficultés 
dans  les  négociations?  Lorsqu'on  réfléchit  sur  les 
scrupules,  sur  les  défiances,  sur  les  craintes  qui  les 
•  environnent,  sur  les  obstacles  qui  croisent  ou  ra- 
lentissent la  marche  des  traités,  et  qui  ont  si  sou- 
vent retardé  la  paix  de  l'Europe,  on  ne  tarde  point 
à  reconnaître  que  le  négociateur  a  besoin  d'être 
dirigé  et  soutenu  dans  la  carrière  qui  s'ouvre  de- 
vant lui. 

C'est  une  vérité  que  la  raison  et  Texpérience  con- 
firment ;  elle  vous  déterminera  à  donner  aux  agents 
que  vous  aurez  choisis  toute  votre  confiance,  parce 
que  vous  sentez  aussi  bien  qu'eux  l'importance  de 
leurs  fonctions. 

Citoyens,  s'il  était  permis  de  parler  de  soi  lors- 
qu'on traite  des  grands  intérêts  de  la  patrie,  nous 
vous  dirions  que  le  poids  d'une  responsabilité  incer- 
taine trouble  à  chaque  instant  la  délicatesse,  in- 
quiète la  conscience  et  arrête  les  opérations  les  plus 
importantes,  en  repoussant  la  sécurité  ;  nous  vous 
dirions  qu'on  ne  peut  être  tout  à  la  fois  occupé  de 
ses  devoirs  et  tourmenté  de  ses  doutes ,  et  qu'après 
vous  avoir  exposé  les  nôtres  nous  attendons  de  votre 
part  une  décision  qui  soit  tout  à  la  fois  et  la  règle 
du  présent  et  la  loi  de  l'avenir. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

«  La  CoDvenlion  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap" 
port  de  son  comité  de  salut  public  ,  décrète  : 

«  Art  I".  Le  comité  de  salut  public,  chargé  par  la  loi 
du  7  fructidor  de  la  direction  des  relations  extérieures , 
négocie,  au  nom  de  la  république,  les  traité»  de  paix, 
d*alliance ,  de  neutralité  et  de  commerce. 

•  Il  en  arrête  les  conditions. 

•  H.  Il  prend  toutes  les  mesures  nécessaires  pour  faci- 
liter et  pour  accélérer  la  conclusion  de  ces  traités. 

«  Les  traités  sont  signés,  soit  par  les  membres  du  co- 
mité lorsqu'ils  ont  traité  directement  avec  les  envoyés  des 
puissances  étrangères,  soit  par  des  minisires  p/énipotcu- 
tiaires  auxquels  lecomitétdélégué  à  cet  effet  des  pouvoirs. 

«  IV.  Les  traités  ne  son'  valables  qu'après  avoir  été  exa- 


miués,  raUfiés  et  confirmés  par  la  Coovoillon  natiooatef 
•ur  le  rapport  du  comité  de  salut  public» 

•  V.  Les  conventions  préliminaires  et  particulières t 
telles  que  dei armistices  et  des  neutralisations»  aont  com- 
prises dans  VurU  II. 

«  Elles  ne  sont  pas  sujettes  à  la  ratification. 

•  VII.  Dans  le  cas  où  les  traités  soumis  à  la  ratifieatioB 
de  la  Convention  nationale  renrermeut  des  articles  secrets 
et  lorsqu'il  s'agit  de  contracter  avec  un  gouvernement 
étranger  des  engagements  qui  ont  besoin  de  ^approbation 
de  la  Convention  nationale,  et  ne  peuvent  cependant  être 
rendus  publics ,  la  Convention  nomme  à  Tappel  nominal 
une  commission  composée  de  douic  membres. 

•  VII.  Cette  commission  examine  l'opération  politiqilli 
dont  il  s^agit;  elle  dédareà  la  Convention  nationale  si 
elle  estime  que  l'opération  projetée  est  conforme  aux  prin- 
cipes et  aux  intérêts  de  la  république,  et  si  elle  doit  de- 
meurer secrète. 

ft  VllI.  Sur  cette  déclaration ,  la  Convention  nationale 
autorise  le  comité  de  salut  public  à  suivre  cette  opération, 

•  IX.  En  vertu  de  cette  autorisation,  les  conditions  arrê- 
tées par  le  comité  de  salut  public  sont  exécutées. 

•  X.  Sur  le  rapport  de  la  commission ,  la  Convention  na« 
tionale  Gxe  Tépoque  où  le  comité  de  salut  public  lui  rend 
compte  de  Tobjet  de  la  négociation  et  des  mesures  qu^il  a 
prises.  > 

La  Convention  ordonne  l'impression  du  rapport 
et  du  projet  de  décret ,  et  l'ajournement  de  la  dis- 
cussion. 

Lb  Pbbsidbnt  :  Je  vais  donner  à  la  Convention 
communication  d'une  nouvelle  très-satisfaisante  sur 
la  Vendée.  (On  applaudit  à  plusieurs  reprises.) 

Le  président  lit  la  lettre  des  représentants  du  peu- 

Fie  près  les  armées  et  dans  les  départements  de 
Ouest,  des  Côtes -de -Brest  et  de  Cherbourg.  (Voyez 
la  notice  du  Numéro  d'hier.) 

Des  applaudissements  unanimes  s'élèvent  de  tou- 
tes les  parties  de  la  salle,  et  recommencent  à 
plusieurs  reprises. 

Le  Président  :  J'annonce  à  l'assemblée  aue  le 
courrier  porteur  des  dépêches  vient  de  me  connrmer 
la  nouvelle  que  les  chouans  rentrent  dans  l'ordre. 
A  Angers,  quatre  cents  se  sont  jetés  dans  les  bras  du 
représentant  du  peuple  Bezard.  (Vifs  applaudisse- 
ments.) 

Andbb  DuMOtrr  :  Je  demande  que  la  nouvelle  qui 
vient  d'être  donnée  i  l'assemblée  et  confirmée  par  le 
courrier  soit  envoyée  par  un  courrier  extraordi- 
naire à  toutes  les  armées. 

Cette  proposition  est  adoptée,  et  l'assemblée  dé- 
crète que  les  armées  des  COtes-de-Brest  et  de  Cher- 
bourg ont  bien  mérité  de  la  patrie. 

Le  courrier,  qui  était  derrière  le  président,  paraît 
dans  la  salle  ;  à  son  chapeau  est  attachée  une  bran- 
che de  laurier.  (On  applaudit.) 

Boudin  :  Le  comité  de  s(h*eté  générale  m'a  chargé» 
citoyens,  de  vous  rendre  compte  de  l'exécution  du 
décret  rendu  dans  la  séance  d'hier  contre  quatre  de 
nos  (follègues.  Trois  ont  obéi  ;  le  quatrième,  qui  est 
Vadier,  ne  s'est  pas  trouvé  chez  lui  ;  il  est  absent  de- 
puis hier,  six  heures  du  matin.  Un  gendarme  l'at- 
tend dans  sa  maison. 

Meblin  (de  ThioDTÎIle)  :  C'est  au  moment  où  la 
Convention  prouve  au  peuple  français  qu'elle  pour*' 
suit  le  crime  jusque  dans  son  sein,  qu'elle  doit  sur- 
tout professer  l'intégrité  de  la  représentation  natio- 
nale; quatre  de  nos  collègues  ont  été  les  victimes 
de  la  trahison  de  Dumouriez,  un  cinquième  esl 
tombé  couvert  de  blessures  entre  les  mains  des  Au- 
trichiens; tous  les  cinq  souffrent  et  gémissent  d'être 


600 


«éloignés  de  kur  pairie.  Je  demande  que  le  comité 
(le  salut  public  prenne  des  uiesures  pour  effectuer 
leur  échanee.  (Vifs  applaudissemeuts.) 

Meruh  (de  Douai)  :  J'annonce  à  rassemblée  que 
déjà  16  comité  de  salut  public ,  qui  s'est  cru  suffi* 
sainment  autorisé  par  la  loi  du  7  fructidor,  a  ouvert 
des  négociations  à  cet  égard. 

Meilin  (de  ThionviTle)  :  Si  j>i  fait  aujourd'hui 
cette  proposition  »  c'est  que  je  me  rappelle  que,  le 
mémo  jour  où  je  réclamai  le  renouvellement  de 
Tancieu  comité  de  salut  public,  la  demande  (^ue  je 
lis  alors  de  traiter  de  la  délivrance  de  noseoliegues 
fut  rejetée  par  la  question  préalable.  • 
«  L'assemblée  nasse  à  Tordre  du  jour,  motivé  sur 
ce  que  le  comité  de  salut  public  s'est  occupé  de  cet 
objet. 

fU;ifti.  :  Je  demande  aussi  que  le  comité  de  saint 
public  s'occupe  de  la  délivrance  des  patriotes  alle- 
mands qui  sont  au  pouvoir  de  l'ennemi. 

MuLiN  (de  Thiouville)  :  J'avais  oublié  un  fait  im» 
portant  ;  c  est  que  deux  ceuts  paUrioles  mayençais 
retenus  dans  les  fers  ont  été  rendus  sur  la  simple 
menace  faite  aux  tyrans  d'user  de  représailles,  et 
qu'ils  sont  arrivés  aux  avant*postes  français.  (On 
apt)laudit.) 

Dubois-Crancé  ,  au  nom  du  comité  de  salut  po* 
blic  :  Citoyens,  les  succès  que  les  troupes  françaises 
ont  obtenus  dans  la  campagne  devuière  ont  néces- 
sité uue  nouvelle  distribution  des  armées  de  la  ré- 
publique. Il  faut  bien  supprimer  les  dénominations 
d'armée  des  Ardeimes  et  d'armée  de  fa  Moselle , 
puisque,  excepté  la  ville  de  Luxrmbonrg,  qu'on 
peut  regariler  comme  prisonnière  de  guerre  en 
France,  depuis  la  mer  jusqu'au  Rhin  nous  n^avons 

5 lus  d'ennemis  à  combattre,  et  puisque  l'armée  du 
lord,  qui  l'an  dernier  couvrait  la  ville  de  Cambrai  » 
occupe  maintenant  Groningue. 

L'armée  du  Nord  doit  protéger  la  Uollande  ;  celle 
de  Sambre-et-Meuse  et  1  ann<^  du  Rliiu ,  réuuies  à 
celle  de  la  Moselle,  doivent  couvrir  le  Bhin  et  re- 
pousser sur  cette  barière  les  efforts  des  puissances 
coalisées.  En  vain  ces  puissances  réclameraient- 
elles  quelques  propriétés  sur  la  rive  gauche  de 
ce  fleuve  ;  la  nature ,  le  vceo  des  peuples  et  l'inté- 
rêt de  la  république  française  exigent  oue  ce  pays 
reste  à  jamais  conquis  ^'  la  liberté  ;  c  est  sur  ces 
bases  que  votre  comité  de  salut  public  a  préparé  de 
nouveaux  lauriers  à  tws  Irères  d'amNs;  il  croit 
remplir  vos  inlentioitt  et  son  devoir  ;  nous  pensons 
qu'il  n'est  pas  uu  bon  Français  qui  n'applaudisse  à 
cette  mesure,  et  le  courage  des  républicams  qui  ont 
bravé  tous  les  frimas  pour  chasser  reuucmi  de  ce 
territoire  garantit  le  succès. 

Les  généraux  dont  tes  talents  et  les  lumières  ont 
si  bien  concouru  à  fa  conquête  de  ces  pays  doivent 
,  y  conserver  le  commandement  ;  et  si  la  nouvelle  or- 
gantsalion  des  armées  force  les  sénéraux  Michaud 
et  Desjardins  à  rentrer  dans  la  crasse  des  gén(^rnux 
de  division ,  votre  comité  leur  doit  la  justice  de  dire 
qu'ils  ont  parfaitement  rempli  leur  devoir,  et  qu'ils 
n'ont  pas  cessé  de  abriter  votre  couliance. 

Les  deux  armées  des  Alpes  et  d'Italie  étaîf  ni.  Tan 
dernier,  réunies  sous  les  ordres  de  lellermann.  Vo- 
tre conité  a  cru  lui  donner  une  nouvelle  marque 
d'estime  en  les  confiant  de  nouveau  à  ee  général  ex- 
périuieutc,  et  qui  a  si  gloricasemml  préservé  cette 
frontière  des  troubles  de  Tiulérietur  et  de  Tinvasion 
des  Piémontais^ 

Aux  Pyrénées  il  n'y  aura  aucun  changement  ;  et 
(juoique  nous  ayons  l'espérauce  de  vous  annoncer 
incessamment  ((ue  la  Vendée  est  rentrée  dans  le 
sein  de  la  grande  famille,  il  u  en  faut  ivas  moins  con* 
ser\cr  Tarmcc  de  l'Ouest  et  des  Cvkes-de-Brvst, 


réunies  i  eelle  des  Cdtes-dC'CheiiM>oi^,  pour  ga- 
rantir de  œ  côté  nos  limites  de  toute  insulte  de  ki 
part  des  Anglais,  ou  menacer  leur  propre  territoire, 
si  vous  l'orilonnez. 
Voici  le  projet  de  décret  : 

f  La  Contention  nationale ,  après  if oir  entendu  le  rap- 
'  port  de  son  comité  de  saint  public ,  décrète  : 
I       •  Art.  I*'.  L*armée  dv  Rhin  et  celle  de  la  Moselle  se* 
1  ront  réunies  sons  le  nom  d*urmée  du  Rhin-et-MosellCb 
Cette  armée  sera  sons  les  ordres  du  général  Pichegru. 

•  II.  L*artnée  de  Sambre-et-Meuse  sera  commandée  par 
le  général  Jonrdan.  L*armée  du  îktré  tera  commandée 
par  le  général  Moreau. 

«  IIL  Dana  le  cas  où  ces  trois  armées  devront  agir  de 
concert  »  le  commandement  général  en  est  décerné  à  Fi- 
cbcgnu 

«  IV.  Les  deux  armées  des  Alpet  et  dUtalle  leiont  rte- 
nies  sous  les  ordr^  du  général  Kellermann. 

•  V.  L'armée  des  Pyiénées-Orientales  icra  oommaodée 
par  le  général  Scberer. 

m  VI.  L'ai'mée  des  Pyrénées-Qcddentates  sera  coaunaïk- 
dée  par  le  général  Moncey. 

•  VIL  L^rmée  des  Cdles-de-l*Oneit  sera  commandée 
pnr  le  fténéral  Candaox. 

«  VIIL  L*année  des  CMes-de- Brest,  I  laquelle  sera 
rénnie  celle  des  Côles-de-Cherbourg,  sera  oommaodée 
par  le  général  Uocbe« 

•  IX.  Le  talkleaa  des  état»>majors  de  ces  armées  sera  in- 
cttsaosmeat  présenté  ,  par  le  comité  de  salut  poUic^  àla 
GoDventioB  nationale.  » 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

^»  Plusieurs  membres  rendent  bommafre  an  pa- 
triotisme et  aux  talents  des  généraux  Micband  et 
Desjaidins,  qui  ont  eox -mêmes  trouvé  le  grfde  de 
général  en  dief  au-dessus  de  leurs  forces,  et  sont 
rentrés  dans  celui  de  général  de  division,  après 
avoir  cependant  rendu  de  grands  services  à  la  ti- 
berlé. 

Cet  acte  de  modestie  et  de  franchise  répablieniBe . 
excite  les  plus  vib  applaudissements. 

(La  suite  tfemain.) 

N.  fi.  —  La  séance  du  1 4  ventôse  a  été  consacrée 

i  la  discussiou  sur  les  finances. 


LIVRES  DrVERS. 

Prostriptimi  d'tmord;  brodiare  de  S8  pagati  «vee  eeiie 
épigrapkt: 

V—  rêpuhliqiie  n^est  IMen  établie  qoelertqnerii^are 
faite  i  an  cttejCM  en  resacatie  p«r  loal. 

Majcime  de  Soroff. 

Prhl  :  f  Irr.  tO  sons,  et  3  Ut.,  franc  de  port.  À  Paru»  c&ts 
Tauleiir,  le  cHejen  Isnerd.  me  Honoré,  n*  1434,  section  de 
b  Bwlte-deo-Moulim  ;  et  chez  les  m^rcItaBds  de  nouTeauléi. 

Il  Caiit  afraacftûr  les  lettres  el  Targent. 

— •  Le*  fimUf  d'Hiver ,  rariélés  pkilosophrqoet  et  aenti- 
mentales ,  cootes  et  nouvelles  ea  prese  et  e«  ver*,  reeaeil* 
lies  par  Mercier  (de  Coinpicgiic>;  un  toImm  f^iik  faeaat. 

A  Paris,  chex  Mercier,  libraire, ruedu  Coq-Uonoré,  n^iSO. 

—  te  IhspotUme^  poéne  du  nhéme  auleur,  prësealé  4  b 
I   ConTeottoD  nationale  te  7  Trioiaire.  (Uéme  adresse.) 


FmffêmenU  à  la  tréiwrme  nationale. 

Le  payement  de  la  dette  conselidée  perfiëtnelle  at  fait 
pour  les  sis  derniers  mois  de  Pan  9,  et  pour  Vannée  à  ceoi 
fai  u'mk  paa  tencbé  les  sii  premiers  mois  île  Mite  année. 
Les  ciloycna  qai  ent  retiré  leur  ioserîptioit  défimrive,  et  qiri 
désireraient  être  payes  dans  les  diatricls,  peuvent  indiquer 
les  chefs-lieui  de  district  où  ils  vealcuL  être  pa|é>»  tMtâw 
Dément  à  la  loi  dki  9"  jour  des  sansculottides. 

Le  payement  des  rentes  viagères  se  fait  cttnuiUtiTenen& 
pour  deux  mois  vingt  et  an  jours  de  Panncc  1793  (fieus 
ttyk)  ei  Im  iii  prcaïkra  Meie  de  fini  t. 


GAZETTE  NATIOMLE  ..  LE  lONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  166.  Sextidi  16  Vbwtosb,  tan  3«.  (Vendredi  6  Mais  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE- 
DANEMARK. 

Copenhague^  te  AfierUr.  — -  Le  commerce  danoU  a  étë 
fort  satisfeit  d'apprendre  que,  sur  la  représentation  du  oon- 
mil  du  Danemark  A  Bordeaux,  les  bâlimenls  de  notre  nation 
Jouiraient  des  mêmes  avantages  accordés  aux  Américains 
pour  le  commerce  de  poissons.  Le  gouvernement  a  recueilli 
le  lémoicnage  de  la  satisfaction  des  négociants,  comme  on 
premier  fruit  de  sa  bonne  et  sage  conduite  A  Tégard  de  ia 
nation  française. 

—  A  Bergen,  en  Norw^,  on  incendie  affreux  a  menacé 
de  consumer  la  rille,  tant  Ta  violence  de  ce  fléau  est  redou- 
table dans  les  villes  du  Nord,  où  les  maisons  sont  construites 
en  bols.  Tous  les  équipages  de  l'escadre  française  qui  écail 
dans  le  port  ont  couru  au  feu.  Leur  activité  surprenante  et 
leur  zèle*  infatigable  ont  beaucoup  contribué  A  éteindre  les 
flammes  et  A  préserver  Bergen.  Le  grand  bailli  de  la  pro- 
vince, le  magistrat  de  la  ville  et  la  bourgeoisie  ont  envoyé 
des  députatlons  A  bord  de  l'escadre  des  républicains ,  pour 
y  exprimer  les  sentiments  de  la  reconnaissance  publique. 

Cette  escadre  française  a  appareillé  du  port  de  Bergen 
par  un  vent  d'est,  emmenant  avec  elle  oo  nombreux  convoi 
de  prises  faites  sur  les  ennemis. 

ANGLETERRE. 

Lonârêif  le  \^ février,  —  Le  crédit  public  n'a  pas  été 
autant  ébranlé  ici  qu'on  l'aurait  cru  à  la  nouvelle  de  l'inva- 
sion de  la  Hollande  ;  il  parait  qu'on  s'y  attendait. 

—  On  a  mis  un  embargo  général  cnr  les  vaisseaux  ba- 
taves,  et  l'on  se  prépare  A  secourir,  ou,  pour  mieux  dire,  à 
prendre  les  colonies  hollandaises,  dans  le  gouvernement  des- 
quelles le  stathouder  servira,  dit-on,  de  prête-nom  A  la 
Grande-Bretagne.  Une  chose  n'a  pas  peu  contribué  encore  A 
maintenir  le  rrédit  :  c'est  l'envol  A  Londres  d'une  grande 
partie  des  fonds  qui  restaient  a  la  disposition  du  commerce 
d'Amsterdam;  aussi  l'épouvante  qui  aurait  dû  amener  la 
baisse  des  fonds  publics  a-t-elle  été  singulièrement  dimi- 
nuée par  cette  circonstance.  11  faut  bien  que  cela  soit,  quand 
on  considère  avec  quelle  facilité  le  parlement  a  voté  l'em- 
prunt Impérial;  le  chancelier  de  l'échiquier  appuya  sur  sa> 
nécessité  et  ses  avantages,  en  le  soumettant  A  la  Chambre 
des  communes,  d'après  une  lettre  du  roi. 

I  DéjA  vous  avez  avoué,  dit-il,  a  une  grande  majorité, 
qu'il  était  impossible,  dans  les  circonstances  où  nous  nous 
trouvons,  de  fixer  des  bases  de  paix  solides  et  permanentes: 
vous  avez  donc  avoué  en  même  temps  qu'il  était  nécessaire 
d'adopter  des  mesures  vigoureuses,  soit  pour  harasser  l'en- 
nemi, soit  pour  faciliter  dans  la  suite  les  moyens  d'une  paix 
honorable.  Ces  mesures  sont  d'abord  conformes  A  ia  saine 
politique,  en  ce  qu'elles  tendent  à  garantir  la  tranquillité  de 
l'Europe  et  à  consolider  la  paix  intérieure  de  l'Angleterre  ; 
car,  vous  le  savez,  nous  avons  A  combattre  un  ennemi  qui  a 
toujours  été  puissant,  tant  par  ses  troupes  que  par  ses  res- 
sources, qui ,  par  l'effet  des  réquisitions  et  d'autres  moyens 
pareils ,  est  parvenu  A  rendre  ces  ressources  encore  plus 
formidables;  en  second  lieu,  il  est  du  devoir  d'un  parle- 
ment britannique,  lorsqu'il  se  trouve  dans  la  nécessité  de 
soutenir  la  guerre  contre  une  nation  pareille,  de  profiter  de 
ses  alliances  continentales  pour  diviser  les  forces  de  l'en- 
nemi et  empêcher  qu'il  ne  les  déploie  tout  entières  sur  un 
seul  point ,  et  dans  les  vues  de  s'emparer  de  cet  élément 
dont  nous  nous  faisons  un  honneur  ei  une  gloire  d'être  les 
dominateurs. 

•  Le  motif  est  d'autant  plus  puissant  aujourd'hui,  que  l'en- 
nemi fait  les  plus  grands  efforts  pour  augmenter  ses  forces 
navales.  • 

Après  avoir  ainsi  envisagé  la  question ,  M.  Pltt  examine 
les  moyens  de  résistance  que  peut  avoir  l'Angleterre;  ces 
moyens  consistent  dans  les  ressources  financières,  dans  la 
puissance  navale,  et  dans  les  ressources  continentales.  Parmi 
ses  alliances,  l'empereur,  selon  M.  Pitt,  tient  un  rang  dis- 
tingué, Cl  l'Angleterre  doit  employer  tous  les  moyens  d€  le 

Z*  Sérient  TomtX 


conserver  dans  la  coalition  ;  H  examine  tour  A  tour  la  omi- 
raiité  de  l'empereur,  ses  dispositions  et  ses  Intérêts  ;  il  en 
conclut  que  l'emprunt  de  6  millions  porte  avec  lui  b  garan- 
tie b  plus  assui^.  L'orateur  passe  ensuite  A  l'état  de  in 
France  ;  car  c'est  IA  le  champ  de  bauiille  des  ennemis  et  des 
partisans  de  la  république  française. 

I  Qu'on  se  rappelle,  dit  le  ministre,  les  paroles  de  Tal- 
llen  a  la  Convention  nationale  ;iout  concourt  A  démontrer 
la  détresse  de  ce  malheureux  pays.  Jetons  seulement  un 
coup  d*œil  impartial  sur  l'état  de  ses  finances ,  et  nous 
rerrons ,  même  d'après  les  rapports  des  meneurs  les  plus 
marquants  de  la  Convention ,  que  ses  finances  sont  dans 
un  état  désespéré,  ce  qui  provient  et  de  l'immense  circula- 
lion  des  assignats,  et  de  l'impossibilité  de  trouver  les  moyens 
de  les  retirer.  Cette  circonstance  seule  a  déjA  frappé  de 
terreur  les  plus  hardis  de  ia  Convention.  Aussi  le  phm  de 
nos  ennemis  est-il  en  ce  moment  de  faire  des  paix  séparées, 
afin  de  diminuer  une  partie  de  leurs  dépenses  actuelles,  pour 
tenir  tête  au  reste  de  la  coalition.  Mais,  tout  en  supposant 
que  ce  plan  leur  réussisse,  qu'ils  parviennent  A  aétacber 
quelques  Etats ,  nous  devons  aussi  considérer  que  cela  ne 
change  nullement  le  grand  point  d'action.  Je  veux  même 
aller  plus  loin;  je  veux  que  la  Prusse  ne  prenne  plus  A  la 
guerre  le  même  intérêt  qu'elle  y  a  mis  jusqu'ici,  qu'elle  se 
refuse  A  employer  autant  d'hommes;  faut-id  pour  cela  que 
nous  nous  relâchions,  et  que  nous  ne  fassions  plus  d'efforts? 
Au  contraire,  il  faudrait  redoubler  d'énergie;  et  comment 
espérer  autrement  une  paix  solide  et  honorable?  il  est  donc 
de  l'Intérêt  de  ce  pays  de  fournir  A  l'empereur  les  moyens 
d'entrer  en  campagne  avec  des  forces  considérables,  et  de  ne 
pas  permettre  que  l'ennemi  dicte  des  conditions  de  paix  in- 
compatibles avec  la  sécurité  et  le  bonheur  de  l'Europe.  ■ 

MM.  Fox  etSheridan  ont  combattu  l'opinion  de  H.  Pltl 
avec  leur  éloquence  accoutumée  ;  mais  leurs  raisonnements 
n'ont  pu  faire  changer  l'esprit  de  la  majorité  ministérielle , 
qui  a  voté  pour  l'emprun*  proposé,  et  qui  parait  décidée  A 
voler  tout  ce  que  le  ministre  proposera. 

RÉPUBLIQUE  DES  PROVINCES-UNIES. 

RoUerdam%  le  U/éwrier.^  Plusieurs  navires  de  la  Com- 

Kagnie  hollandaise  des  Indes,  richement  chargés,  et  dont 
I  valeur  est  estimée  A  plusieurs  millions,  avaient  été  rete- 
nus dans  les  ports  d'Angleterre.  On  a  fait  en  vain  les  plus 
vives  instances  pour  obtenir  qu'ils  fussent  conduits  en  Hol- 
lande ,  sous  escorte.  Ces  vaisseaux  se  trouvent  maintenant 
compris  dans  l'embargo  mis-en  Angleterre  sur  les  vaisseaux 
hollandais.  Les  directeurs  de  la  Compagnie  des  Indes  ont 
transmis  aux  représentants  du  peuple  de  Hollande  la  nou- 
velle et  les  détails  de  cet  événement Que  les  Hollandais 

pensent  sérieusement  qu'il  n'y  a  pas  d'économie  pour  e^  à 
se  laisser  tromper  par  les  stathoudériens. 

—  La  révolution  parait  complète  en  Zélande.  Des  élec- 
teurs choisis  par  le  peuple  ont  nommé  de  nouveaux  régents, 
et  le  peuple  a  arboré  les  signes  de  la  liberté. 

Amsterdam^  le  26/évrifr.  —  Le  comité  révolutionnairo 
de  celte  ville  vient  de  publier  la  proclamation  suivante  : 

LIBERTÉ,  ÉCALrrÉ,  FRATERKITÉ. 

Le  comité  révotutiormaire,  tenant  ses  séances  à  Amsterdam^ 
à  ses  concitoyens  dans  cette  république. 

I  Le  comité  révolutionnaire  d'Amsterdam ,  qui  n'a  cessé 
de  remplir  les  mêmes  fonctions  depuis  l'heureuse  révolu- 
tion qui  s'y  est  opérée,  s'est  cru  obligé  de  ne  point  les  dis- 
continuer jusqu'.1  ce  que  cette  révolution  fût  entièrement 
achevée.  Mais  le  peu  de  membres  qui  composaient  ce  co- 
mité ne  pouvant  suffire  au  grand  nombre  d'affaires  qui  sur- 
venaient, il  s'est  adressé  aux  différents  comités  qui  se  sont 
établis  dans  d'autres  villes ,  et  leur  a  proposé  de  réunir 
leurs  travaux  et  de  former/par  des  députés,  un  seul  el  uni- 
que comité  de  révolution. 

c  Ce  comité  actuellement  assemblé,  sentant  la  nécessité  de 
mettre  avec  toute  la  diligence  possible  la  dernière  main  A 
cet  ouvrage,  commencé  dans  toutes  les  villes,  bourgs  et  ha- 
meaux, el  sachant  pat  expérience  que  le  peuple,  surtout 
celui  de  la  campagne,  regarde  ce  qui  est  fait  comme  bien 

76 


603 


caffisanl,  ^uolqu'oa  p«iiM  tout  an  plus  renvinccr  oomne 
une  seule  pierre  posi^  à  un  fjuné  édifice,  exhorte  par  les 
présentes  tous  les  babitaou  du  cette  république  de  te  pré- 
munir avec  soin  contre  toutes  ces  fausses  insinuations,  et  de 
vtfiller  a?ee  attention  au  progrès  de  la  révolution,  h  Teffet 
«rcmpécber  que  mainteDanl,  ni  à  la  suite,  ou  ne  souffre  sur 
it  territoire  actuellemeot  libre  pas  même  l'apparence  de  l'a* 
irlslocratie. 

•  M  exhorte  tout  les  citoyens  et  les  vrais  amis  de  b  patrie 
de  s*arroer  au  plus  tût,  de  se  choisir  provisoirement  des  ofA- 
âers  auxqutils  ils  puissent  se  confier,  et  de  se  préparer  ^ 
défendre  leurs  vies  et  leurs  propriétés  contre  tout  ennemi 
étranc^r,  ou  contre  tout  ami  sacrilège  qui  ne  cherche  qu'à 
les  dépouiller. 

«  Le  premier  devoir  de  chaque  citoyen  libre  est  de  s'ar- 
mer pour  rintérét  commun, 
t  Ne  vous  en  laissez  pas  Imposer  par  de  belles  paroles . 

Eir  de  fiiusses  promesses,  encore  moins  par  la  force! 
craseï  de  votre  foudre  le  tyran  qui  voudrait  s'opposer  à 
fos  efforts. 

•  Soyes  généreux  envers  ceux  d*entre  vous  qui,  faute 
de  connaissances,  pourraient  se  laisser  séduire  :  la  généro- 
sité Cl  l'oubli  des  offenses  reçues  sont  les  marques  distioc- 
tives  d'un  peuple  digne  de  la  liberté. 

«  Le  comité  déclare  aussi  qu'il  ne  veut  s'immiscer  en  au- 
eune  manière  dans  le  gouvernement  de  la  ville  ou  du  peuple: 
opérer  la  révolution  dans  les  endrolu  où  le  bien  public  le 
demande  est  pour  tout  citoyen  le  devoir  le  plus  sacré  et  le 
plus  noble. 

«  Les  fonctioBS  du  comité  se  borneront  uniquement  à  aider 
de  80S  conseils  tous  ceux  qui  veulent  être  libres  ;  c'est  pour- 
quoi il  les  Invite  à  s'adresser  à  lui  à  cet  effet. 

<  Amis  et  défenseurs  de  la  vraie  liberté,  nous  vous  teo- 
dotiR  h  main  de  fraternité  et  nous  vous  offrons  notre  secours, 
toutes  les  fois  que  vous  le  désln^rez  ;  nous  vous  déclarons 
tussi  qne  nous  ne  nous  reposerons  point  tant  qu'il  se  trou- 
vera dans  notre  pays  libre  la  moindre  trace  d'oppression 
et  de  tyrannie,  ou  de  tyrans  et  d'oppresseurs.  Que  in  mort 
et  rexiermiiMtkNi  les  ftappéDt,et  avec  eux  tous  les  esclaves 
▼oiontaires  f 

>  Salut  et  frateralté. 

I  Par  ordre  dudlt  comité  : 

I  Etait  signé  Vandkr  Aa,  itcréMrê^  « 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 
ABUÉB  DBS  PYRÉMBBS-OCCIDBNTALBS. 

BayoniM,  1$  25  p(tim'o«e.  —  «  Voici  la  position  de 
notre  armée,  que  la  neige  depuis  quelque  temps 
«nipéche  d'avaucer.  Elle  forme  une  ligne  oblique 
dont  la  droite,  appuya  à  la  mer,  se  prolonge  jus- 
qu'à Aspcy  tia,  vallée  où  Ton  admire  l'église  de  Saint- 
fenace  de  Lovola.  Le  centre  s*étend  dans  les  vallées 
de  Lerins  et  de  Bastan,  et  l*aile  gauche,  rentrant  sur 
le  territoire  de  la  république,  est  appuyée  à  la  place 
de  Mive-Franche. 

•  Nous  occupons  vingt  lieues  dans  le  pays  enne- 
mi,  et  nous  en  tirons  les  denrées  de  première  néces- 
sité, comme  grains,  vins,  fourrages. 

•I*lolrc  armée,  composée  desoixante-se»e  batail- 
lons, est  sous  les  ordres  du  général  en  chef  Moncey. 
Nous  avons  achevé  de  faire  sauter  les  fortilicatiotis 
de  Fontarabie,  qui,  trop  voisine  de  nos  frontières, 
nous  donnait  de  Tombrage,  et  nous  travaillons  à 
augmenter  et  perfectionner  celles  de  Saint  -  Sébas- 
tien. 

•  Les  deux  ports  imnortants  du  Passsage  et  de 
Guetaria  nous  assurent  la  possession  de  tout  le  golfe 
de  Gascogne,  et  les  corsaires  nombreux  qui  en  sor- 
tent tous  les  jours  interrompent  entièrement  le  com- 
merce ennemi  et  nous  amènent  sans  cesse  des 
prises.  • 

TRIBUNAL  CRIMINBL  RÉVOLUTIONNAItB. 

D%i%  venlos0.  —  On  a  donné  lecture  d'un  acte 
a  accusation ,  dressé  le  SI  messidor,  par  Antoine 


Pouquier-Tinvillc,  contre  seise  individus  accusés  de 
différents  délits,  du  nombre  desquels  Hurel,  Allaire 
etBénard,dontil  sera  parlé  plus  bas,  furent  con- 
damnés à  mort  le  15  du  même  mois. 

Jean-Siméond  Bobillard,  âgé  de  trente-cinq  ans, 
né  aux  Loges,  district  de  Lisieux,  vicaire  de  Tex-pa- 
roisse  des  Loges,  se  trouve  porté  le  cinquième  sur 
cet  acte,  mais  sans  prénom  ,  sans  âge,  sans  désigna- 
lion  de  qualité  et  de  lieu  de  naissance. 

Fortin  et  Bailleul,  tous  deux  prêtres,  n'ayant  pas 
prête  le  serment  requis,  furent  déportés  en  Angle- 
terre. Ce  dernier  mourut  à  Londres.  Le  premier  in- 
forma de  cette  mort  Pierre  AUaire ,  époux  de  Marie 
Bailleul,  sœur  du  défunt. 

Allaire  demanda  à  Benard ,  curé  des  Loges*  Tacte 
suivant  : 

•  Nous  soussignés,  Pierre-Gabriel  Benard ,  curé 
de  la  paroisse  de  Sainte-Marg^uerite  des  Loges  ;  Jac- 
ques-Siméond  Robillard,  vicaire  du  même  lien; 
François- Adrien  Benard ,  prêtre  non -fonctionnaire  ; 
Pierre  Blondel ,  Nicolas  Hurel ,  tous  professant  la 
religion  catholique,  apostolique  et  romaine, 

«  Certifions  et  attestons  à  tous  ceux  qu'il  appar- 
tiendra que  Marie  Bailleul,  femme  de  Pierre  Allaire, 
demeurant  en  cette  paroisse,  est  la  sœur  de  feu 
Pierre-Thomas  Bailleul,  décédé  à  Londres,  et  sa 
seule  et  unique  héritière,  et  qu'il  n'avait  d'autres 
sœurs  ni  frères. 

•  Le  présent  délivré  audit  Pierre  Allaire  et  à  son 
épouse  Marie  Bailleul,  pour  leur  valoir  et  servir  ce 
qu'il  appartiendra. 

»  A  Sainte-Marguerite  des  Loges,  évécbé  de  Li- 
sieux ,  province  oe  Normandie,  royaume  de  France, 
ce  4  mars  1793. 

•  Un  mot  rayé  nul. 

«5»^Bbnard,  cttf^;  J.-S.  Bobillard,  vt>atr«  dM 
Loges;  F.-A.  Bbnard,  prtfcre;  BLONnsL^  Hurel.  • 

Ce  certiGcat  fut  envoyé  avec  une  lettre  à  Boueu , 
et  furent  interceptés. Ces  deux  pièces  furent  adressées 
au  district  de  Lisieux,  qui  lit  arrêter  les  signataires. 

Jean-Siméond  Bobillard  se  sauva,  et,  vu  les  circon- 
stances du  temps,  il  n'eut  pas  tort. 

Au  9  thermiaor,  le  prévenu  déclara  que  la  signa- 
ture lto6«(ard,  apposée  sur  ce  certificat,  n'était  pas 
la  sienne,  et  le  8  ventôse  il  s'est  rendu  volontaire- 
ment à  la  maison  de  justice,  et  a  persisté  dans  sa 
précédente  déclaration. 

Deux  experts  écrivains  ont  attesté  que  la  signa- 
ture apposée  au  bas  de  ce  certificat  n'était  pas  celle 
de  l'accusé. 

En  faisant  le  résumé  de  l'instruction,  le  président 
Agier  a  présenté  quelques  observations  pleines  de 
sagesse  stir  les  véritables  principes  qui  auraient  dû 
toujours  diriger  l'exercice  de  la  justice  révolution- 
naire. 

Voici  un  extrait  de  son  discours  : 

•  Si  le  tribunal  qui  a  condamné  à  la  mort  les  vé- 
ritables signataires  du  certificat  cité  dans  l'acte  d'ac- 
cusation, au  lieu  de  chercher  des  coupables  et  des 
victimes,  avait  consulté  ses  devoirs  et  Téquité ,  il 
aurait  senti  qu'il  ne  pouvait  prononcer  contre  eux 
la  peine  fatale.  La  rédaction  Ju  certificat  n'annonce 
pas,  il  est  vrai ,  des  sentiments  républicains  dans 
ceux  qui  l'ont  écrit  et  signé  ;  mais,  à  la  rigueur,  on 
ne  peut  y  voir  que  des  opinions  religieuses  pronon- 
cées et  la  préférence  accordée  au  mode  de  gouver- 
nement sous  lequel  ils  avaient  vécu  jusqu'alors,  et 
nullement  provocation  au  rétablissement  de  la 
royauté.  11  aurait  pu  les  considérer  comme  sus- 
pects, et,  en  raison  des  circonstances  où  se  trouvait 
la  république  à  cette  époque»  ki  coodamner  à  la 


60S 


dëfention  par  mesure  de  sûreté  ;  c'était  tont  ce 
qu'exigeaient  la  justice  et  le  salut  public;  mais  dans 
un  moment  plus  calme,  aujourd  hui  par  exemple, 
cette  sévérité  eût  été  injuste,  car  il  n  f^t  pas  difti- 
ci)e*de  prouver  que  l'innocence  avait  présidé  à  la 
rédaction  du  certificat  dont  vous  avez  connaissance. 
Il  s'agissait  d*accompaguer  cet  acte  de  toutes  1rs 
circonstances  qui  pouvaient  lui  donner  plus  de  va- 
leur dans  le  pays  où  il  était  CDvojfé.  Cétaiten  An- 
gleterre au*on  le  faisait  passer;  il  était  adressé  à  des 
prêtres,  a  des  émigrés;  il  est  certain  qu'il  devait 
être  mieux  accueilli,  qu'il  présentait  un  caractère 
d'authenticité  plus  digne  de  conUance  avec  les  vieil- 
lies formes  monarchiq^ues  qu'avec  une  physionomie 
républicaine,  et  c'est  a  cela  seul  que  se  réduit  tout 
le  délit.  Cependant  cet  acte  si  simple  a  coûté  la  vie 
à  trois  citoyens  parmi  h'squels  il  en  est  un  qui  a 
donné  une  preuve  touchante  de  son  amour  pour  la 
justice  et  pour  la  vérité  :  Benard ,  lorsqu'on  lui  a 
présenté  le  certitîcal,  a  bien  avoué  sa  signature;  mais 
il  a  iléclaré  qu'il  né  reconnaissait  point  pour  vraie 
celle  de  son  vicaire  Robillard,  qui  y  était  ausai  ap- 
posée. • 
Voici  le  jugement  qui  a  été  prononcé  : 
•  Le  tribunal,  ?u  la  déclaration  ananime  du  Jury, 
portant  (]u'il  n'est  pas  constant  que  l'écrit  en  forme 
de  certiUcat,  du  4  mars  1793,  provoque  le  rétablis- 
sement de  la  rovauté,  a  acquitté  et  mis  en  liberté 
Jean-Siméond  Robillaitl. 

Après  le  prononcé  de  ce  Jugement,  la  salle  a  re- 
tenti de  vifs  applaudissements. 


VARIÉTÉS. 

A  peine  eut-on  connalsMDce  dans  le  public  du  projet  da 
réunir  le  vaste  et  charmant  clos  des  ci-devant  Chartreux  ao 
jardin  du  Luxembourg  que  toutes  les  imaginations  fureat 
agréablement  frappées  des  jouissances  que  promet  ce  noa- 
vel  ElyȎe. 

Soit  en  effet  que  Voo  considère  la  posiUon  do  loeal  o« 
les  accessoires  qui  l'accompagnent,  soit  qu'on  envitaga  lea 
agrémeou  de  la  promenade  ou  les  avantages  du  quartier, 
on  ne  voit  dans  celte  réunion  que  plaisir.  uUiité,  et  l'on  est 
fondé  à  croire  que  le  comité  des  Uravaux  publics  s'empres- 
sera de  consacrer  aux  loisirs,  à  la  sanié  des  citoyens,  un 
emplacement  qui  peut,  même  dans  eette  nouvelle  destina- 
tion, conserver  quelque  milité  rurale.  Les  herbages,  les  fleurs, 
les  arbres  à  fraiu  peuvent  à  la  fois  orner  un  Jardin  et  ren- 
dre un  produit  propre  à  la  consommation  ;  doubla  servloe 
qu'on  retrouve  au  JardUi  des  Plantes,  sans  qu'U  fiille, 
comme  on  pourrait  le  croire,  surveiller  rigoureusement  la 
conduite  de  ceux  qui  s'y  promènent. 

Je  ne  veux  donc  point  borner  à  une  stérile  décoration  ce 
beau  et  udie  domaine .  mais  je  veux  qu'il  ajoute  aux  dou- 
ceurs de  la  vie  domestique,  à  l'embellissement  de  Paris,  au 
luxe  bienfaisani  des  arts  ;  qu'il  présente  ù  la  pensée  des  ob- 
jets du  méditation,  au  creur  des  sites  mélancoliques,  à  l'âme 
du  repos  que  lui  rendent  si  nécessaire  l'agitaUon  du  monde 
et  les  combats  qu'il  faut  soutenir  chaque  Jour  pour  affermir 
notre  liberté  naissante. 

Le  jardin  du  Luxembourg  autrefois  pouvait  ofVHr,  soiu 
d'épaisses  allées,  le  silence  de  la  retraite  à  ceux  oui  venaient 
l'y  chercher.  Crcbillon,  Rousseau,  Dlderoi,  tous  les  hommes 
de  lettres  connus  s'y  réunissaient  comme  dans  un  lien  de 
rendez-vous  propre  à  leurs  uilles  entretiens  Hai5  depuis 
que  par  des  rues  et  de  vastes  bâtiments  l'on  en  à  resserré 
Tencelnle,  depuis  que  les  pbnialions  en  ont  été  négligées» 
ce  jardin,  alorit  d'une  étendue  suffisante,  d'un  couvert  agréa- 
ble, est  devenu  rétréci, aride;  11  fatigue  la  vue,  ne  rafraîchit 
point  l'imaginaUon  ;  Valr  s'y  trouve  altéré  par  des  vapeurs 
et  la  poussière  des  allées.  On  y  -est  circonscrit,  sans  Issoe 
champêtre,  sons  point  de  vue,  sans  localités  pittoresques. 

Toutes  ces  Jouissances  se  présentent  dès  qu'on  y  réunit  le 
clos  des  Chartreux.  Alors  des  sites  agrestes,  des  masses  de 
verdures,  des  arbres  â  fruits,  des  couverts,  un  débouché 
lointain  sur  k  boulevard  da  Mont-Parnasse  {  ce  boulevard 


lui-même,  fonaânt  «a  sapplénent  de  proroemide  sans  li- 
mites (car  00  espère  que  bient<)t  Paris  ne  sera  plu»  cloi«  de 
murs  comme  une  prison),  d'autres  agréments  de  détail  et 
d'ensemble,  font  de  ce  projet  un  des  plus  agréables  et  des 
plus  uUles  aux  enfants  des  arts,  aux  amis  des  lettres,  cou- 
tumiers  d'habiter  ce  quartier  dèa  loagteflBps  consacré  à  V^ 
tude. 

Dtral-Je  que  le  quartier  du  Théâtre-Français  a  plas  qu'a» 
con  ««ntre  souffert  de  la  fureur  décemvirale  :  que  1^  loca- 
tion» y  perdent  considérablement,  et  qu'une  promenade  aussi 
délicieuse  que  celle  que  nous  proposons  y  attirerait  de  nou- 
veaux habitants  à  la  décharge  des  quarUers  Intérlenrs  en- 
combrés de  population  f 

Késumant  donc  ces  aperças*  Il  résolle  que  d'an  dos  em- 
prisonné, étranger  au  reste  de  b  ville,  on  peat  feeUeroeot 
ralre  un  Ueu  de  plaisir,  qui  offre  aux  citoyens  saiabrilë, 
agrément  aux  Jeunes  étudiants,  promenade,  retraite,  re* 
cueillement  ;  au  quartier,  augmentation  de  populaUon  et  de 
commerce  ;  enfin ,  à  la  république  entière,  une  nouvelle 
preuve  de  l'amour  éclairé  au  gouvernement  actuel  pour  le 
rétablissement  des  mœurs  douces  et  des  établissementa 
propret  â  les  enurctenir. 


CONVENTION  NATIONALE, 

PriiidêMê  de  Bourdon  {de  rOiiê). 
SUITE  DB  LA  SBâNCB  DU  13  VENTOSE. 

Rouzet,  au  nom  du  comité  de  législation  etdea 
finances,  propose  un  projet  de  décret  qui  est  adopta 
en  ces  termes  : 

•  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu 
aes  comités  de  législation  et  des  finances,  décrète  : 

I  Art  l*r.  Les  linges,  bardes ,  bijoux,  meobles  et  effets 
appartenant  aux  époux  sur.ivanu  ou  aux  enfants  des  con- 
damnés, ou  à  leur  usage  journalier,  leur  seront  remis,  sur 
ua  simple  étal,  sans  délai  et  sans  frais. 

•  II.  Tons  séquestres  ou  scellés  mis  sur  les  biens  meubles 
OQ  immeubles  appartenant ,  par  la  loi ,  la  coutume  ou  sui^ 
tnts,  par  contrat  ou  â  tous  autres  Utres,  aux  époux  survi- 
vants ou  aux  enfants  des  condamnés,  seront  levés  sans  délai, 
afin  que  les  propriétaires  en  Jouissent  libreoieDt ,  à  moins 
que  lesdiis  scellés  ou  séquestres  aient  été  mis  pour  causes 
personnelles  auxdiu  propriétaires. . 

•  III.  S'il  a  été  vendu  quelqnet-oas  desdits  biens  oo  effets 
asentionnés  aux  articles  précédents,  le  prix  en  sera  reai* 
bourse  aux  propriétaires  sur  le  pied  et  aux  oooditlona  dsa 
ventes. 

•  lY.  Les  efists  nécessaires  aux  veuves  et  eafaau  des  eott» 
damnés,  nolaimnent  les  comestUiles,  qui  se  trouveront  daaa 
ce  genre  de  successions  acquises  à  la  nation,  seront  délivrée 
aux  veuves  et  enfants  des  condamnés,  sur  leur  demanda, 

.  pour  le  prix,  réglé  par  des  états  estimatifs,  être  Imputé  sur 
les  droiu  desdits  survivants,  oa  sur  les  secours  à  leur  ac- 
corder. 

•  V.  S'il  se  trouve  des  logements  libres  dans  lesdites  suc- 
cessions, il  en  sera  laissé  ou  accordé  jusqu'à  la  liquidation 
et  à  la  convenance  desdits  sunrlvanu  ou  enfuits,  arbitrés 
par  les  corps  administratifs. 

I  VI.  Lorsqu'il  se  trouvera  dans  les  saoeesstons  des  con- 
damnes des  objets  â  diviser,  soit  en  propriété,  soit  en  jotils- 
sance,  auxquels  aient  droit  les  époux  sarvivaats,  les  en- 
fan»  ou  autres,  il  sera,  concurremment  avec  les  partlaa 
intéressées,  et  à  la  diligence  des  agenu  aationaai  de  dis- 
trict, dressé  des  états  et  inventaires  exacts  desditt  objets. 

«  Vn.  Si  les  époux  survivants»  les  enisata  ça  antres  lBlé«« 
ressés  aux  susdits  indivis,  en  réclament  la  Jouissance  pco* 
vlsolre,  ils  l'obtiendront  en  donnant  cautioa,  et  à  iâ  charga 
d'en  rendre  compte  lors  des  liquidations  et  partages» 
comme  aussi  d'entretenir  provisoirement  les  baux,  s  il  y  en  a. 

I  Vin.  Les  époux  survivants  ou  enfsnts  qui  n'auront  que 
des  créances  ou  des  droiu  à  exercer  sur  lesdites  successions 
en  recevront.  Jusqu'à  la  liquidation,  les  intéréu  par  aperça 
au  denier  S5,  à  dater  dn  Jour  où  Ils  auront  été  privés  de  iear 


604 


•  IX.  Lm  époux  iuiTlvanU  ou  eafints  des  labonr«urt  et 
nrtttvateiirs,  exploitant  par  eux-mêmes  des  terres  à  eux  af- 
fermées, auront  la  faculté  d'acheter  la  portion  des  bestiaux, 
effets  mobiliers  et  instruments  servant  à  ladite  exploitation, 
acquis  à  la  république,  ainsi  que  de  se  foire  subroger  dans 
les  droiu  du  condamoé  au  bail  à  ferme. 

«  X.  Ces  bestiaux,  instrumenu  aratoires  et  autres  objets, 
leur  seront  cédés  aux  mêmes  formes  et  conditions  détermi- 
nées par  la  loi  du  17  frimaire  dernier  pour  les  manufactures. 

«  XL  f  .es  dispositions  des  deux  arUcles  précédents  se- 
ront applicables  aux  frères  et  sœurs  des  condanmés  qui 
étaient  occupés  avec  eux  d'exploitations  de  ce  genre. 

«  XII.  Les  époux  sinivanU  ou  les  enfants  des  condam- 
nëa,  dans  les  successions  desquels  se  trouveraient  des  éta- 
blissements de  commerce  ou  des  ateliers  d'arts  et  métiers , 
seront  pareillement  reçus  à  acquérir  dans  les  mêmes  formes 
tout  ce  qui  sera  nécessaire  pour  la  continuation  du  travail 
desdits  établissements  ou  ateliers. 

I XIU.  Les  citoyens  ayant  été  au  service  ou  aux  appoin- 
tements des  condamnés,  et  dont  les  effets  à  eux  appartenant 
seraient  sous  le  séquestre  ou  te  scellé  desdits  condamnés,  en 
obtiendront  la  restitution  sans  délai  et  sans  frais,  et  le  prix 
lear  en  sera  remis,  s'il  y  en  a  eu  de  vendus,  conformément 
aux  dispositions  de  l'article  111  du  présent  décret. 

«  XIV.  Les  citoyens  ayant  été  au  service,  les  époux  quoique 
non  divorcés  des  émigrés  ou  déportés,  ainsi  que  les  proprié- 
taires ou  jouissant  par  indivis  avee  eux,  jouironi  du  bénéfice 
de  la  présente  loi. 

«  XV.  Les  corps  administratifii.  sons  rinspectlon  de  Ta- 
genoe  des  domaines,  «ont  chaiigés  de  l'exécution.  La  Con- 
vention autorise  soo  eomilé  des  Énaoces  à  en  résoudre  les 
difficultés.  > 

BoissY  D*AiiQLAS,  au  nom  du  comité  de  salut  pu- 
blic :  On  vient  souvent  vous  dénoncer  l'agiokaçe,  et 
l'on  a  raison;  car  il  mérite  tout  à  la  fois  Taimiiad- 
version  publique  et  la  vôtre. 

On  vous  invite  à  protéger  le  commerce,  et  Toa 
a  raison  encore;  car  le  commerce  devenu  libre  doit 
être  un  des  sauveurs  de  la  patrie. 

Mais  la  plupart  des  citoyens  qui  vous  en  parlent 
confondent  ces  deux  choses  si  opposées ,  et  il  im- 
porte aux  législateurs  de  prévenir  les  dangers  qui 
riuvent  résulter  pour  le  peuple  de  l'abus  des  mots 
cet  é^ard  et  de  la  confusion  des  idées. 

L*agiotage  tient  à  une  erreur  de  l'esprit,  à  l'éga- 
rement du  cœur,  à  une  cupidité  sans  mesure  ;  ce 
n'est  point  un  commerce,  mais  un  jeu  ;  ce  n*est 
point  un  négoce  fondé  sur  les  spéculations  de  Tin- 
dustrie,  sur  les  combinaisons  du  talent,  c'est  une 
suite  de  paris  qui  semblent  d'abord  faits  au  hasard, 
mais  que  l'adresse  influence  trop  souvent  et  trop 
aisément.  Lorsqu'un  homme  achète  une  marchan- 
dise ou  un  effet  quelconque  qui  lui  paraît  d'un  prix 
modéré»  mais  dont  il  prévoit  le  renchérissement, 
€t  qu'il  le  revend  ensuite  avec  bénéfice,  il  n'agiote 
pas,  il  commerce;  son  intérêt  personnel  le  conduit 
a  amasser  pour  un  temps  éloigné  les  marchandises 
trop  abonoautes,  à  calmer  ainsi  la  disette  de  l'avenir 
aux  dépens  de  la  profusion  du  moment,  à  maintenir 
une  sorte  d'équilibre  entre  les  différents  prix  de 
toutes  les  choses. 

Mais  quand  un  homme  s'oblige  à  fournir,  dans  un 
temps  donné,  à  un  certain  prix ,  une  marchandise 
ou  un  effet  qu'il  ne  possède  pas,  qu'il  ne  peut  ni  ne 
veut  vendre,  et  que  celui  qui  lui  en  fait  souscrire 
l'engagement  ne  veut  point  acheter;  quand,  le  terme 
arrivé,  le  prétendu  vendeur  paie  au  prétendu  ache* 
teur  on  reçoit  de  lui  la  différence  en  plus  ou  en 
moins  du  prix  auquel  se  trouve  alors  la  marchan* 
dise  avec  celui  ou'on  avait  stipulé,  il  n'y  a  point  de 
commerce;  il  n  v  a  qu'une  gageure,  qu'un  jeu  de 
hasard,  qu'un  véritable  agiotage.  Je  ne  sais  cepen- 
dant si  cette  combinaison  entre  deux  intérêts  égale- 
ment cupides  peut  ou  doit  être  défendue  par  les  lois'. 


Peut-être  ne  pourrait-on  la  réprinner  que  par  une 
inquisition  dont  les  formes  et  les  suites  seraient  en- 
core plus  redoutables  que  l'agiotage  lui-même. 

La  liberté  est  une  chose  si  respectable  qu'on  doit 
plutôt  souffrir  qu'elle  tombe  dans  quelques  écarts 
que  de  s'exposer  à  la  trop  restreindre;  mais  on  peut 
l  éclairer  par  la  raison,  la  contenir  par  l'opinion^ 
lorsqu'elleabusede  la  latitude  au'on  doitlui  laisser. 
La  lioerté  est  comme  la  lance  d'Achille  ;  elle  guérit 
toujours  elle-même  les  blessures  qu'elle  a  pu  faire. 
Ainsi  c'est  avec  la  liberté  que  vous  avez  détruit  le 
fanatisme,  qui  est  l'agiotage  de  la  religion. 

Le  jeu  de  l'agiotaçe,  ainsi  que  je  l'ai  défini,  n'est 
pas  précisément  illicite,  mais  il  est  immoral,  et  c'est 
avec  justice  que  les  hommes  vertueux  le  méprisent, 
qu'ils  refusent  leur  estime  aux  égoïstes  qui  en  font 
métier.  La  raison  en  est  simple  :  c'est  que  la  nation 
ne  gagne  rien  au  déplacement  de  fortune  que  l'agio- 
tage peut  occasionner;  c'est  ^ue  l'industrie  de  l'a- 
gioteur ne  produit  aucune  création  nouvelle  ;  c'est 
que  les  capitaux  qu'elle  emploie  sont  faits  pour  sa- 
larier le  travail,  pour  faciliter  les  entreprises  utiles, 
pour  foire  naître  de  nouvelles  productions  ou  fabri- 
quer de  nouveaux  ouvrages,  en  un  mot,  pour  servir 
la  société,  et  non  pour  être  prodigués  ou  risqués 
dans  des  spéculations  frivoles,  où  l'avantage  de  celui 
qui  gagne  n'est  fondé  que  sur  le  malheur  de  celui 
qui  perd,  sans  qu'il  y  ait  pour  personne  autre  aucun 
pront. 

L'agiotage  tarit  donc  les  sources  naturelles  de  la 
richesse  de  l'Etat;  mais ,  en  produisant  une  vicissi- 
tutte  excessive  dans  les  fortunes,  il  tend  à  bannir 
encore  la  morale  de  la  société;  il  en  chasse  l'écono- 
mie, il  en  éloigne  la  frugalité,  il  y  fait  naître  le  luxe 
et  les  vices  inséparables  d'une  opulence  prompte- 
ment  accrue,  et  qui  souvent  doit  être  si  prompte- 
ment  détruite.  11  invite  par  l'appât  du  gain  le  père 
de  famille,  l'époux ,  le  citoyen  aisé,  à  livrer  aux 
chances  du  hasard  l'existence  de  ce  qui  l'entoure  et 
les  aliments  de  son  industrie;  il  substitue  la  cupidité 
à  la  bonne  foi,  la  dissimulation  à  la  franchise,  et 
l'oisiveté  criminelle  à  l'activité  laborieuse. 

Si  donc  les  lois  ne  peuvent  le  proscrire  formelle- 
ment, si  même  elles  ne  peuvent  l'atteindre,  elles 
doivent  du  moins  le  dénoncer  à  l'opinion  publioue 
comme  un  vice  nuisible  à  l'Etat,  comme  une  habi- 
tude faite  pour  exclure  ceux  qui  s'y  livrent  de  la 
compagnie  des  citoyens  probes  et  sensés.  L'agiotage 
sans  doute  est,  comme  les  autres  jeux,  un  acte  de 
liberté  civile;  mais,  comme  les  an  très  jeux,  il  est  un 
mauvais  usage  de  cette  liberté,  un  abus  fâcheux  de 
la  propriété;  et  le  mépris  doit  s'accroître  pour  lui  en 
raison  de  ce  que,  dans  ce  jeu  comme  dans  les  autres: 

On  eommence  par  être  dupe» 
On  finit  par  être  fripon. 

On  doit  observer  néanmoins  que,  dans  le  temps 
où  les  objets  de  commerce  manquent,  lorsque  les 
réquisitions,  les  préemptions,  les  taxations  arbitrai- 
res des  prix,  la  législation  insensée  du  maximum 
ont  découragé  les  exploitations  rurales,  et  rendu  les 
entreprises  des  manufactures,  sinon  impossibles,  du 
moins  dangereuses;  lorsqu'on  a  ameuté  l'opinion 

Kopulaire  contre  les  marchands,  les  boutiquiers,  les 
anquiers,  les  négociants;  lorsqu'on  a  voulu  anéan-, 
tir  toutes  les  fortunes,  et  que  la  seule  aisance  a  pu 
être  un  motif  de  proscription,  il  est  simple  que  les 
citoyens  auxquels  il  reste  quelques  capitaux,  et  qui 
craignent  de  les  rendre  ostensibles,  de  les  exposer 
aux  regards  jaloux  de  la  dénonciation  et  à  la  main 
rapace  de  la  tyrannie,  aiment  mieux  les  jouer  que 
de  n'en  rien  faire  ;  ils  sont  alors  un  peu  plus  excusa- 
bles; ils  sont  poussés  dans  l'agiotage  par  les  décla- 


606 


mations  contre  Tagiotage  qui  détruisent  le  commerce 
bienfaisant;  ils  sont  entraînés  d'une  manière  presque 
irrésistible  par  le  déraisonnement  général,  l'igno- 
rance des  citoyens,  les  vices  et  les  fautes  du  gouver- 
nement. 

Que  peut  celui-ci  pour  les  ramener  à  Futilité  pu- 
blique lorsqu'il  8*est  lui-même  corrigé?  rétablir  les 
routes  ordinaires  du  commerce;  appeler  ses  agents 
à  des  spéculations  réelles,  solides,  profitables  à  la 
nation,  et  qui  puissent  se  faire  sous  la  sauvegarde 
de  la  loi;  offrir  aux  capitaux  des  particuliers  une 
direction  raisonnable ,  présenter  à  Tintérêt  privé  un 
aliment  et  des  ressources;  garantir  la  propriété  de 
tous,  et  donner  à  chaque  citoyen,  par  une  législa- 
lion  solide  et  fondée  sur  la  justice,  la  certitude  que 
rien  de  ce  qu'il  saura  acquérir  ne  pourra  lui  être 
ravi. 

Le  tripot  des  joueurs  restera  livré  à  son  ignominie 
quand  on  rouvrira  le  marché  de  la  république  com- 
merçante. 

Dans  un  pays  que  Robespierre  et  ses  complices  af- 
famaient pour  l'asservir  et  asservissaient  pour  l'af- 
famer, tous  les  serpents  de  la  calomnie  ont  répandu 
leur  poison  sur  les  négociants;  la  hache  du  despo- 
tisme a  fait  tomber  leurs  plus  estimables  têtes,  les 
torches  des  enfers  ont  dévoré  leurs  magasins. 

Rassemblons  donc  les  débris  du  commerce,  seules 
et  trop  faibles  ressources  dans  les  besoins  du  peuple; 
évoquons  les  ombres  secourables  de  ces  approvi- 
sionneurs des  nations ,  réunissons  autour  ne  nous 
leurs  émules.  Qu'il  ne  soit  plus  dit  qu'une  ville  de 
six  cent  mille  âmes  n'ait  pas  un  marché  général  de 
commerce,  pas  un  lieu  de  rassemblement  public  et 
connu  pour  les  hommes  industrieux  qui  veulent  e1 
qui  peuvent  les  servir;  que  ceux  qui  ont  intérêt  de 
bien  faire  ne  soient  plus  réduits  à  se  cacher  dans  le 
repaire  de  ceux  qui  font  mal. 

Alors  les  combinaisons  ingénieuses  et  sages  pour 
l'approvisionnement  de  la  republioue  se  multiplie- 
ront, excitées  par  le  zèle,  par  la  liberté,  par  cette 
ardeur  à  soigner  ses  propres  affaires,  et  à  bien  mé- 
riter de  ses  concitoyens,  besoin  plus  impérieux  sans 
doute  encore  lorsqu'on  sort  d'un  long  esclavage,  et 
qu'on  a  eu  à  craindre  de  ne  pouvoir  s'en  affranchir 
que  par  la  mort. 

Paris,  par  son  immense  population,  par  l'éloigné- 
meut  de  ses  différents  quartiers,  par  l'étendue  de 
son  enceinte,  ne  doit  pas  seulement  être  considéré 
comme  une  commune,  mais  comme  un  pays  tout 
entier.  L'équilibre  entre  le  prix  des  mêmes  objets 
dans  ses  différents  points  n  existe  souvent  pas;  la 
cupidité  profite  souvent  de  cette  différence  pour 
tromper  la  bonne  foi  des  acheteurs,  dont  l'igno- 
rance est  encore  accrue  par  l'espèce  d'isolement  et 
d'obscurité  qui  s'attache  aux  opérations  du  com- 
merce. La  vraie  valeur  des  choses  n'est  pas  fixée;  la 
quantité  que  Paris  en  renferme  n'est  pas  connue;  et 
la  concurrence,  mobile  toujours  si  puissant  du  com- 
merce, est  entièrement  détruite,  parcequ'il  n'existe 
aucun  rendez-vous  entre  ceux  qui  vendent  et  ceux 
qui  achètent. 

Rendez  au  commerce  rasage  des  assemblées  de 
négociants  honorés  de  l'estime  publique ,  et  qu'on 
appelait  autrefois  la  Bourse;  rendez-les  accessibles 
à  tous  les  commerces  honnêtes;  n'en  bannissez  gue 
le  jeu  reconnu,  que  Tagiotage  impur  :  faites  ainsi 
qu'au  lieu  de  traiter  en  secret  les  négociants  puis- 
sent opérer  sous  l'œil  du  public  ;  qu  en  se  voyant 
mutuellement  dans  les  rapports  d'intérêts  qui  les  ap- 
pellent, ils  apprennent  à  s'apprécier  les  uns  les  au- 
tres, à  juger  de  la  loyauté  de  chacun;  qu'il  s'éta- 
blisse tout  naturellement  entre  eux  une  espèce  de 
surveillance  d^hoiiMiir  qui  comprime  la  cupidité  et 


fasse  distinguer  la  délicatesse.  Ainsi  vous  redonne- 
rez au  commerce  un  nouveau  de^ré  d'activité,  un 
éclat  plus  brillant  et  plus  solide  ;  ainsi  vous  combat- 
trez l'agiotage  et  le  surhaussemeut  de  tous  les  prix, 
en  offrant  un  aliment  aux  spéculateurs  honnêtes  et 
des  facilités  à  l'industrie,  en  les  régularisant  dans 
leur  marche,  en  les  épurant  dans  leurs  principes. 

Paris  n'était  autrefois  qu'une  ville  de  consomma- 
tion et  de  luxe;  vous  devez  en  faire  une  cité  indus- 
trieuse et  manufacturière  :  elle  a  détruit  elle-même 
tous  les  abus  qui  la  faisaient  vivre;  présentez -lui  de 
nouvelles  ressources  plus  certaines  et  plus  honora- 
bles ;  qu'elle  soit  amenée  par  vos  soins  a  être  l'émule 
d'Amsterdam  et  la  rivale  de  Londres;  fixez-y,  par 
le  bonheur  qui  résulte  de  la  liberté  et  par  les  bien- 
faits du  gouvernement,  le  génie  du  commerce  et  des 
arts;  que  l'on  y  vienne,  de  tous  les  points  de  l'uni- 
vers, apporter  en  tribut  les  richesses  des  deux  mon- 
des, et  les  échanger  contre  des  créations  nouvelles, 
fruits  de  l'industrie  française.  Bientôt  cette  paix  sa- 
crée que  les  puissances  qui  vous  combattent  vont 
être  forcées  ae  vous  demander  vous  permettra  de 
donner  à  vos  capitaux  une  direction  plus  utile;  vous 
les  consacrerez  a  créer  ces  grands  établissements  qui, 
après  une  longue  suite  de  siècles,  attestent  encore  le 
génie  des  peuple  dont  ils  sont  l'ouvrage  :  alors  vous 
fonderez  ces  manufactures  de  tous  les  genres  dans 
les  palais  même  du  despotisme,  ou  dans  ces  demeu- 
res du  vice  que  les  traîtres  oui  ont  fui  loin  de  vous 
vous  ont  abandonnées  en  s'éloignant. 

Au  lieu  du  bruit  importun  des  chars,  on  n'enten- 
dra que  celui  de  ces  métiers,  enfants  du  génie  et  du 
talent,  dont  l'effet  est  de  centupler  la  valeur  des 
richesses  de  l'agriculture;  alors  vous  creuserez  ces 
canaux  qui,  unissant  Paris  à  la  nier,  le  rendront  le 
voisin  de  tous  les  peuples,  et  ses  habitants  les  con- 
citoyens de  tous  les  hommes,  et  la  &;ine,  fière  de  sa 
liberté,  n'aura  plus  rien  à  envier  à  la  Tamise;  alors 
le  lieu  de  ralliement  que  je  vous  propose  d'offrir  au 
commerce  sera  le  marche  de  l'univers  et  le  rendez- 
vous  des  nations. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

«  La  Convendoo  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  tes  coailés  do  salut  pablic  et  des  finances  réunis, 
décrète  : 

c  Art.  !«'.  La  Bourse  de  Paris  sera  roa?erte. 

c  11.  Les  assemblées  de  négociants  se  dendront  totu  les 
Jours,  depuis  midi  jusqu'à  deux  heures,  excepté  les  décadis. 

c  lil.  Les  comités  des  finances  et  de  salut  public  sont 
chargés  de  faire  un  règlement  pour  la  police  de  ces  assem- 
blées. 

«  IV.  Le  comité  des  finances  indiquera  iaeeasamment  le 
Ueo  qui  devra  leur  être  destiné.  • 

ViLLBTABD  *.  Il  y  S  bien  longtemps  que  l'on  a  re- 
connu qitto  l'agiotage  était  une  maladie  du  commerce; 
on  a  reconnu  aussi  qu'il  était  plus  facile  de  la  définir 
que  de  la  guérir.  Il  me  semble  qu'il  ne  faut  pas  em- 

f ployer  des  remèdes  hasardés,  car  on  pourrait  sans 
e  vouloir  aggraver  le  mal.  J'ai  été  témoin  et  témoin 
scandalisé  que  dans  plusieurs  bourses  la  même  mar- 
chandise s'y  vendait,  en  un  quart  d'heure,  sept  ou 
huit  lois,  et  cela  sous  les  yeux  des  négociants,  sous 
les  yeux  du  commerce.  Ainsi  le  projet  q^u'on  vous 
propose  ne  détruirait  pas  l'agiotage.  Les  idées  pré- 
sentées par  le  comité  de  salut  public  sont  grandes 
et  salutaires;  mais  je  crois  qu'elle  doivent  être  mû- 
ries, et  je  demande  l'ajournement. 

Thibault  :  J'ignore  si  le  comité  des  finances  a  con* 
tribué  à  ce  projet,  mais  il  me  semble  qu'il  ne  rem- 
plit pas  les  intentions  de  la  Convention  ;  elle  veut 
bien,  non  pas  ouvrir  une  Bourse,  mais  organiser 
une  Bourse,  et  l'organiser  de  manière  à  faire  dispa* 


606 


rattre  l'agiotage.  Celle  d'Amsterdaâi  remplit  à  peu 
près  ce  but.  Il  y  a  des  courtiers  avoués  par  le  sou* 
vernement,  et  qui  déposent  en  justice;  et  cepenoant, 
à  Amsterdam  comme  à  Londres,  il  y  a  encore  des 
agioteurs.  11  faut  donc,  dans  un  ëtablissenieni  de 
cette  nature,  des  gens  qui  aient  également  la  con- 
fiance des  étrangers  et  des  habitants  du  pays«  pour 
faciliter  les  transactions  commerciales  entre  les  dif- 
férents peuples;  il  faut  pour  qu'ils  inspirent  plus  de 
confiance,  qu'ils  soient  avoués  par  le  gouverne- 
ment. 

Je  pense  que  c'est  lorsaue  la  Convention  aura  fixé 
sou  choix  sur  les  plans  de  finances  qui  sont  main- 
tenant soumis  à  sa  discussion ,  qu'il  sera  convenable 
d'examiner  si  les  effets  qu'on  mettra  en  circulation 
devront  être  livrés  à  la  Bourse.  C'est  klors  qu'on 
pourra  voir  l'organisation, qu'on  pourra  lui  donner; 
car  si  le  commerce  doit  se  faire  contre  le  gouverne- 
ment, je  suis  d'avis  qu'il  ne  faut  pas  de  Bourse.  Si 
au  contraire  le  commerce  veut  secourir  le  gouver- 
nement, s'il  veut  l'aider  a  Taire  rentrer  les  assignats, 
à  donner  du  crédit  à  ceux  qui  resteront  en  circula- 
tion et  à  faire  baisser  le  prix  des  denrées,  alors  je 
suis  d'avfï  qu'il  faut  ouvrir  la  Bourse. 

Je  demande  le  renvoi  du  projet  au  comité  des  fi- 
nances. 

BoissY  d'Anglas  :  Il  est  un  principe  que  nous 
avons  appris  malheureusement  à  connaître  à  nos 
dépens;  c  est  que,  lorsque  le  gouvernement  se  mêle 
du  commerce,  il  l'anéantit.  Il  faut  faire  un  règle- 
ment de  police  pour  la  Bourse.  Cet  acte  est  du  ressort 
du  comité,  et  ne  doit  pas  occuper  la  Convention. 
Dans  ce  moment  nous  ne  vous  proposons  pas  une 
création  nouvelle,  mais  seulement  de  rapporter  le 
décret  que  vous  avez  rendu,  il  y  a  deux  ans,  lorsque 
vous  étiez  encore  peu  instruits  dans  les  affaires  de 
finances  et  de  commerce,  et  par  lequel  vous  avez  or- 
donné la  clôture  de  la  Bourse. 

Lapibrrb  ;  J'appuie  l'ajournement.  Il  me  semble 
que  le  rapporteur  a  commis  une  erreur  en  disant  que 
le  n^glement  de  police  à  faire  pour  la  Bourse  était 
un  acte  de  gouvernement,  et  non  point  un  acte  de 
législation.  De  deux  choses  l'une  :  ou  ce  règlement 
imposera  quelques  obligations  aux  citoyens,  ou  ils 
ne  seront  tenus  à  rien  ;  s'ils  ne  sont  tenus  à  rien,  le 
règlement  est  inutile;  s'ils  sont  tenus  à  quelque 
chose,  le  règlement  n'est  plus  un  acte  de  gouverne- 
ment, c'est  une  loi. 

Thibault  :  La  question  qui  est  soumise  dans  ce 
moment  à  la  discussion  tient  à  une  autre  question 
qui,  je  l'espère,  sera  bientôt  agitée  dans  cette  en- 
ceinte :  c'est  celle  de  savoir  si  l'on  exigera  defcau- 
tionnemeiits.  On  les  supprima  lorsque  la  terreur 
planait  sur  la  France,  lorsqu'on  voulait  mettre  en 
place  des  ignorants,  des  gens  mal  famés.  Je  crois, 
moi,  que,  pour  rétablir  le  crédit  public,  pour  don- 
ner de  la  confiance  aux  Français  et  aux  étrangers, 
il  faudra  exiger  des  cautionnements  de  ceux  qui 
seront  à  la  Bourse.  J'insiste  sur  l'ajournement. 

La  Convention  décrète  l'ajournement. 

^  Genevois  propose,  et  la  Convention  adopte  le 
projet  de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rapport 
de  son  comité  de  léelslation,  décrète  ce  qui  suit  : 

•  Les  tribunaux  criminels  ordonneront  la  mise  en  liberté 
des  geôliers,  gardiens,  gendarmes  et  autres  préposés  à  la 
garde  des  détenus,  qui  auront  subi  deux  mois  d'emprison- 
nement, dans  le  cas  prévu  par  l'arUcle  V  de  ta  loi  du  13  bru* 
maire  de  Tan  i«,  lorsque,  postérieurement  au  jugement 
rendu  contre  eux,  les  personnes  évadées  auront  élé  reprises 
U  rec^Astiiuéei  m  maison  d'arrêt  ou  de  JutUce. 


t  Le  présent  décret  aert  liiaéré  dans  le  Billletfai  de  i 

pondaoce.  • 

—  Un  secrétaire  donne  lecture  de  la  lettre  soi- 

vante  : 

Le  reprétentant  du  peuple  envoyé  à  Lyon  mu 
président  de  la  Convention  naiionale* 

Lyoo,  le  4  ventôse,  Vm  le  de  la  rëpubli^o 
fraoçaise. 


f  1^  décret  du  13  pioviose,  qui  rend  à  la  commune  de 
Lyon  les  avantages  dont  Jouissent  les  autres  commune»  de 
la  république  et  replace  ses  citoyens  au  rang  des  citoyens 
français,  a  excité  ici  un  véritable  enthousiasme.  Une  fiéco , 

{provoquée,  dirigée,  exécutée  par  le  peuple,  m  aj^té  la  suites 
es  autorités  consUtnées  n'ont  fait,  en  quelque  sorte,  qu'y  «•> 
sister.  Uue  foule  immense  remplissait  les  avenues  et  la  place 
de  la  maison-commune,  où  je  me  suis  rendu  avec  les  ma^s- 
trats.  Partout  l'cxpresAion  de  la  joie  la  plus  franche,  de  la 
reconnaissance  la  plus  vive,  des  cris  sans  cesse  réitérés  do 
vive  ta  rèpuhliquel  vive  In  ConvaUion  nationale  \  vivent 
les  reprétenlantê  !  les  assurances  les  plus  touchantes  de 
respect,  de  soumission  aux  lois,  d'attacoement  à  la  repré- 
sentaUon  nationale. 

«  Les  listes  fatales  qui  pouvaient  perpétuer  les  divisions 
ont  été  vouées  aux  flammes,  au  milieu  dHin  transport  gé- 
néral.  J'ai  cru  devoir  rappeler  les  principes  qui  distinguent 
les  vrais  républicains,  engager  les  Lyonnais  à  les  adopter 
désormais  pour  *^ie  invariable  de  leur  condnlie,  et  a  étouf- 
fer tous  les  genres  de  division  que  lanuilveilhince  peut  seule 
cherchera  ranimer. 

«  Ces  principes  ont  été  vivement  applaudis;  on  a  demandé 
avec  instance  l'impression  de  mon  dUcours.  Je  vous  en  Cala 
passer  un  exemplaire. 

t  Le  lendemain  de  la  fête,  quelques  mouvements  se  sont 
fait  sentir:  des  hommes  regardés  comme  auteurs  des  dihi- 
pfdatlons  et  des  persécutions  ont  été  insultés .  maltrallés 
sons  ce  prétexte.  J'ai  hautement  manifesté  mon  mécooten» 
tement.  Une  députation  de  la  jeunesse  lyonnaise  est  venue 
m'aUexter  qu'elle  condamnait  tous  ces  désordres ,  qu'elle 
n'y  avait  aucune  part,  et  qu*eile  ne  négligerait  rien  pour  les 
faire  cesser,  et  pour  mettre  sous  la  main  de  la  Jusiice  ceuk 
qui  s'en  étaient  rendus  coupables;  me  Jurer  de  nouveau 
respect  et  attachement  à  la  république,  à  la  Convention  na* 
Uonale  et  aux  lois. 

I  Depuis  cette  époque  il  ne  m'est  parvenu  avcime  plainte. 
Je  crois  pouvoir  assurer  la  Convention  que  la  trèsf[rando 
*   majorité  des  habitants  de  cette  commune  est  excellente  et 
^   veut  sincèremeni  l'ordre,  la  justice  et  les  lois,  i'nncâniisse» 
ment  des  fripons,  des  brigands,  des  conire-révolutionnak«s 
de  toute  espèce;  en  un  mot,  que  le  triomphe  de  la  républi- 
que est  assuré  à  Lydn  comme  dans  tout  le  reste  de  la  France. 
«  Signé  Richauo.  • 

Cette  lettre  est  renvoyée  au  comité  de  sûreté  gé- 
nérale. 

—  Les  citoyens  de  la  section  des  Invalides  défilent 
dans  le  sein  de  la  Convention  nationale. 

Uorateur  (à  la  barre)  :  Représentants,  tandis  quo 
nos  généreux  défenseurs,  guidés  par  la  victoire,  font 
oublier  le  nom  romain  à  force  de  triomphes;  tandis 
qu*ils  élèvent  des  autels  aux  droits  de  l'homme  stir 
le  sol  belgique  et  batave,  continues  à  terrasser  nos 
dangereux  ennemis  de  Tintérieur,  et  comptei  dur 
notre  énergie. 

Honneur  à  la  vertu,  estime  et  protection  aui  vnis 
talents!  Indulgence  pour  la  tourbe  des  faibles  dont 
les  yeux,  mais  non  les  ftmes,  ont  été  fermés  à  la  lu- 
mière, et  que  les  lois  de  Téternelle  justice,  trop 
longtemps  couvertes  d'un  crêpe  sanglant,  peuvent 
ramener  à  ce  saint  amour  de  rhumanité  qui,  mis  en 
action,  n'est  autre  chose  que  le  véritable  patrio* 
tisme!  Mais  guerre  à  mort  aux  chefiB-tigresl  œs 
hommes  n'avaient  d'humain  que  la  figure»  et  leurs 
cœurs  étaient  de  fer. 
^  Accélérez  le  retour  de  Tordre  ptr  le  jugenent  de 
\  tous  les  grands  coupables;  éiNUWii  «lltfAilfant» 


«07 


le  ^taive  de  la  loi  trop  longtemps  coolie  à  leurs 
mains  sacrilégje^;  que  leur  supplice,  celui  des  exé- 
crables assassins  du  2  septembre  et  celui  des  scélé- 
rats qui  conduisirent  froidement  une  foule  de  pré- 
venus d*Orléans  à  Versailles,  pour  s*y  abreuver 

de  leur  sang  jusqu'à  satiété que  ces  actes  d*UDe 

indispensable  justice  consoleot  les  mânes  des  inno- 
centes victimes  de  tant  de  fureurs;  qu'ils  servent  plus 
efficacement  encore  à  imposer  silence  aux  tyrans  de 
l'Europe  abusée;  et  lorsque  nous  aurons  achevé 
d'abattre  leur  ligue  impie,  lorsque  la  paix  régnera 
dans  nos  murs,  la  section  des  Invalides  sera  la  pre- 
mière à  revenir  dans  ce  temple,  la  couronne  civique 
et  le  rameau  de  l'olivier  à  la  main,  vous  proclamer 
les  consolateurs  de  Thumanité,  les  vengeurs  de  ses 
droits  et  les  sauveurs  des  nations.  (On  applaudit.) 

La  Convention  nationale  décrète  la  mention  ho- 
'  norable  et  l'insertion  de  cette  Adresse  au  Bulletin. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie* 

SÉANCB  DO  14  VBNTOSK. 

BoissT  D*AifGLAS,  SU  nom  du  comité  de  salut  pu- 
blic :  Depuis  que,  pour  le  plus  grand  avantage  des 
consommateurs  de  Paris,  et  dans  la  vue  de  leur  ren- 
dre moins  sensible  le  renchérissement,  des  denrées 
de  preifiière  nécessité,  le  gouvernement  a  fait  dis- 
tribuer, sous  la  surveillance  des  comités  civils,  dif- 
férentes sortes  de  comestibles  et  combustibles,  il 
s'est  manifesté  dans  cette  partie  de  l'administration 
une  foule  d'abus  auxquels  il  est  de  la  plus  grande 
urgence  d'apporter  remède. 

Plusieurs  épiciers,  non  contents  du  bénéfice  qui 
leur  est  alloué  sur  des  marchandises  dont  ils  ne  sont 
que  les  dépositaires,  et  au  lieu  de  les  revendre  aux 
prix  fixés  et  sur  les  bons  des  comités  civils,  les  re- 
vendent sans  bons  à  des  prix  excessifs,  souvent 
même  au-dessus  du  cours  du  commerce. 

Des  bouchers,  des  charcutiers  se  rendent  coupa- 
bles de  pareilles  manœuvres,  qui  tournent  au  pré- 
judice de  la  classe  la  moins  aisée  ;  ils  retirent  ae  la 
distribution  la  meilleure  viande,  pour  la  revendre 
au  plus  haut  prix,  et  trompent  les  consommateurs 
dans  les  pesées,  en  substituant  des  os,  de  la  viande 
de  vache  ou  de  mauvaise  qualité,  à  celle  qu'ils  de- 
vraient débiter. 

Mais  c'est  sur  les  farines  et  le  pain  que  se  commet- 
tent les  abus  les  plus  criminels. 

Les  boulangers  ne  peuvent  plus  vendre  de  pain 
sans  cartes  ;  mais  ils  revendent  les  farines, ils  reven- 
dent même  de  la  pâte  préparée. 

D'un  autre  côté,  la  aifférence  entre  le  prix  du  pain 
à  Paris  et  celui  auquel  il  est  monté  dans  les  départe- 
ments excite  la  cupidité  d'un  grand  nombre  de  par- 
ticuliers, qui  en  prennent  une  plus  grande  quantité 
que  celle  dont  ils  ont  réellement  besoin,  afin  de  re- 
vendre l'excédant  aux  habitants  des  communes  voi- 
sines, à  un  prix  excessif. 

Cet  abus  tire  son  origine  de  ce  que,  dans  le  prin- 
cipe, les  citoyens  ont  demandé  une  quantité  de  pain 
beaucoup  plus  considérable  que  celle  dont  ils  avaient 
besoin.  Les  commissaires  des  sections  ont  accédé  à 
ces  demandes,  et  les  cartes  s'en  trouvent  chargées. 
Tant  qu'il  n'y  •  eu  aucun  motif  suffisant  pour  exci- 
ter les  consommateurs  à  se  faire  délivrer  la  totalité 
de  ce  que  portaient  leurs  cartes,  ils  se  sont  bornés  à 
prendre  ce  qui  était  nécessaire  pour  leurs  besoins 
réels;  mais  ai^ourdhui  chacun  veut  favoriser  sa  lai- 
tière, sa  blanchisseuse,  le  voiturier  qui  lui  amène 
des  comestibles  de  la  campagne;  chacun  exige  le 
monUAideai  carie ,  et,  soit  cupidité,  soit  humanité 


mal  entendue,  on  cède  du  pain  à  tous  les  consomma-^ 
teurs  extérieurs. 

Ces  fait5  sont  consignés  dans  une  foule  de  dénon- 
ciations et  de  procès  verbaux  dressés  par  des  com- 
missaires des  sections.  Mais  quoique  toutes  ces  ma- 
nœuvres soient  punissables,  quoique  plusieurs  aient 
été  dénoncées  à  Tagent  national  du  tribunal  cor- 
rectionnel, même  aux  comités  de  salut  public  et  de 
sûreté  générale,  les  autorités  ne  peuvent  point  ap- 
pliquer la  loi  au  fait,  attendu  qu'il  n'en  existe  aucune 
qui  Tait  prévu;  et  de  la  l'impunité. 

On  a  bien  interdit  la  vente  des  denrées  et  comes- 
tibles aux  épiciers,  bouchers  et  charpentiers  contre 
lesquels  il  y  avait  délit  constaté;  mais  cet  exemple 
n'est  pas  suffisant  pour  arrêter  la  cupidité  des  au- 
tres; il  ne  sert  qu'à  la  rendre  plus  ingénieuse. 

La  loi  sur  Torganisation  de  la  police  municipale 
et  correctionnelle  est  muette  sur  ces  délits;  il  exis- 
tait bien,  quant  A  la  délivrance  du  pain,  quelques 
règlements  municipaux  qui  punissaient  par  la  dé- 
tention les  boulangers  qui  vendaient  sans  cartes  ; 
l'arrêté  du  comité  de  salut  public  du  4  nivôse 
dernier  dit  bien  •  que  les  boulangers  contravention- 
iiaires  seront  punis  suivant  les  règlements.  •  Mais 
quels  règlements  ?  Il  n'en  existe  pas  d'autres  que  ceux 
de  la  municipalité,  qu'on  ne  peut,  sans  doute, rappe- 
ler ni  invoquer. 

Il  importe  qu'enfin  le  consommateur  ne  soit  pas 
victime  de  la  cupidité  mercantile,  et  jiue  le  gouver- 
nement réprime  avec  sévérité  les  délits  qui  tendent 
à  affamer  Paris. 

Quels  que  soient  les  prévaricateurs,  il  faut  qu'ils 
soient  atteints  et  punis  ;  il  faut  que  les  citoyens  sa- 
chent que  la  loi  est  là  pour  les  défendre  contre  le 
dépositaire  infidèle  et  contre  le  spéculateur  qui  or- 
ganise la  disette  ;  en  un  mot,  il  parait  nécessaire  de 
taire  rendre  le  décret  dont  voici  te  projet  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendo 
le  rapport  de  son  comité  de  salut  public,  décrète  : 

•  Art.  I«r.  Tous  bouchers,  charcutiers,  épiciers, 
çrenetiers,  chandeliers  ou  marchands  quelconques, 
aépositairesou  chargés  de  vendre  des  marchandises 
ou  denrées  appartenant  à  la  république,  qui  seront 
convaincus  de  les  avoir  détournées  ou  vendues  sans 
bùM  d'autorités  compétentes  ou  au-dessus  du  prix 
fixé,  seront  condamnes,  pour  la  première  fois,  à  une 
amende  de  500  Uv.  :  en  cas  de  récidive,  ils  seront 
condamnés  en  outre  a  un  emprisonnement  d'un  mois 
au  moins  et  de  trois  mois  au  plus. 

«  II.  Les  boulangers  qui  seront  convaincus  d'avoir 
vendu  du  pain  sans  carte,  ou  d'avoir  revendu  de  la 
farine  ou  pâte,  seront  condamnés  à  une  amende  de. 
dix  fois  la  val€ur  des  objets  vendus,  laquelle  tou* 
tefois  ne  pourra  être  momdre  que  celle  prononcée 
par  l'article  précédent  {  en  cas  de  récidive,  Tamende 
sera  double,  et  les  délinquants  seront  de  plus  con- 
damna à  un  emprisonnement  de  trois  mois. 

•  III.  Tout  fonctionnaire  publie  chargé  designer 
les  6oii#,  ou  de  présider  à  la  disUibution  des  objets 
mentionnés  aux  deux  articles  précédents,  qui  sera 
convaincu  de  complicité,  sera  condamné  à  une  peine 
double,  et  destitué  de  ses  fonctions. 

«  iV.  La  tribunal  de  police  correctionnelle  est 
chargé  de  la  poursuite  et  punition  des  délits  dont  il 
s'agit,  et  de  l'exécution  du  présent  décret. 

«  V.  Les  jugements  oui  interviendront  seront  im- 
primés et  affidiés  à  la  ai  licence  du  commissaire  na- 
tional près  le  tribunal  de  Ta  police  correctionnelle, 
et  aux  flrais  des  délinquants. 

•  y  1.  Le  présent  décret  et  le  rapport  seront  poMiéa  ' 


608 


t\  atCchés  sur-le-champ  dans  Paris,  et  envoyés  aux 
quarante-huit  sections.  • 

La  Convention  adopte  ce  |)rojet  de  décret. 

Cabnot,  au  nom  du  comité  de  salut  public  :  Ci- 
toyens, dès  Touverture  de  la  campagne  dernière  le 
.comité  de  salut  public  conçut  le  projet  de  recueillir 
et  mettre  en  ordre  les  matériaux  nécessaires  pour 
en  écrire  Thistoire.  Il  forma  pour  cet  objet,  dans  une  ' 
partie  du  local  qu'il  occupe,  un  établissement  parti-  | 
culier  sous  le  nom  de  Cabinel  topographiçue  et 
kitlorique.  Dans  cet  établissement  se  trouvent  des 
rédacteurs  et  des  dessinateurs  :  les  uns  s*occupent  à 
analyser  et  classer  les  extraits  de  la  correspondance 
dts  généraux  et  des  représentants  du  peuple  près 
les  armées  ;  les  autres  exécutent  les  plans  et  cartes 
relatifs  aux  actions,  positions  et  mouvements  de  ces 
armées  :  ce  sont  ces  matériaux  qui,  rassemblés  et 
comparés,  serviront  à  lormer  un  jour  un  corps  suivi 
de  rhistoire  militaire  de  la  révolution. 

Quelle  entreprise  pourrait  nous  inspirer  un  plus 
Tif  intérêt  que  le  récit  de  ces  événements  mémora- 
bles qui  ont  fixé  le  sort  de  la  république  triom- 
phante !  Avec  quelle  avidité  les  entants  de  nos  bra- 
Tes  défenseurs  ne  parcourront-ils  pas  ces  annales  de 
la  gloire  de  leurs  pères!  Quel  feu  sublime  ne  déve- 
loppera pas  dans  ces  jeunes  cœurs  le  souvenir  des 
traits  héroïques  auxquels  leurs  noms  seront  atta- 
chés! Quelles  leçons  décourage  et  de  dévouement 
ne  puiseront-ils  pas  dans  de  si  nombreux  et  de  si 
touchants  exemples! 

Les  guerres  que  les  rois  se  sont  faites  ont  été  décri- 
tes, et  presoue  toutes  ces  histoires  sont  des  monu- 
ments empnatiques  de  flatterie  et  d'imposture;  il 
faut  que  celle  des  héros  qui  ont  fondé  la  liberté  de 
leur  patrie  au  prix  de  leur  sang  le  soit  d'une  manière 
digne  de  son  objet,  c*est-à-dire  avec  une  rérité  scru- 
puleuse, avec  cette  énergique  simplicité,  cette  philo- 
sophie animée  qui  seule  peut  peindre  les  élans  d'un 
caractère  généreux  et  d'un  courage  indomptable. 

Toutes  les  vieilles  routines,  tous  les  préjugés  mi- 
litaires ont  été  Irondés  dans  le  cours  de  cette  guerre  : 
il  sera  beau  de  voir  dans  les  fastes  de  la  république 
comment  dés  recrues  mal  armées,  sans  habitude  des 
exercices  militaires,  sans  autre  discipline  que  la  con- 
fiance, souvent  dénuées  d'habillement  et  de  subsis- 
tances, ont  arrêté  le  débordement  de  lésions  réunies 
contre  elles  de  toutes  les  contrées  de  l'Europe  ;  com- 
ment de  bons  cultivateurs,  qui  ne  demandaient 
Su'amour  et  simplesse,  forçai  ae  combattre  pour  la 
éfense  de  leurs  foyers,  menés  par  des  chefs  choisis 
parmi  eux,  chantant  ensemble  des  hymnes  à  la  Li- 
berté, ont  vaincu  et  dispersé  ces  cohortes  silencieuses 
et  tacticiennes,  conduites  par  les  nobles  coryphéesde 
la  science  militaire. 

La  postérité  répétera  avec  admiration  les  noms  de 
ces  hommes  modestes  qui,  nés  dans  une  classe  au- 
trefois dédaienée,  ont  surpassé  tout  d'un  coup  les 
Turenne  et  Tes  Luxembourg;  elle  verra  avec  atten- 
drissement et  avec  orgueil  que  cette  courte  période 
de  la  campagne  dernière  ait  fourni  à  l'histoire  plus 
de  traits  particuliers  de  bravoure,  plus  de  faits  d'un 
héroïsme  pur  et  sans  ostentation,  que  toutes  les 
guerres  réunies  des  peuples  les  plus  belliqueux,  les 
Grecs  et  les  Romains. 

Sans  doute  la  France  aura  aussi  ses  Tacite  pour 
acquitter  la  patrie  reconnaissante  envers  ceux  qui 
ont  si  bien  mérité  d'elle.  Votre  comité  de  salut  pu- 
blic a  voulu  leur  préparer  les  matériaux,  et  c'est 
l'objet  du  travail  qui  s^exécutc  sous  ses  yeux  au  ca- 
binet topographique  et  historique. 

En  attendant,  et  pour  satisfaire  la  juste  impatience 
des  citoyens  attachés  à  la  eloire  de  leur  patrie,  le 
comité  a  fait  dresser  le  tanleau  chronologique  des 


principales  victoires  ou  actions  qui  ont  rempli  cette 
immortelle  campagne.  C'est  une  espèce  de  précis  ou 
table  générale  commençant  à  labatailled*Hondscoote 
et  finissant  à  la  prise  de  Rosas. 

Voici  le  résumé  général  de  ce  tableau  :  27  victoi- 
res, dont  8  en  bataille  rangée  ;  120  combats  de  moin- 
dre importance;  S0,000  ennemis  tués,  91,000  faits 
prisonniers;  110 places  fortes  ou  villes  importantes, 
dont  30  après  siège  ou  blocus  ;  230  forts  ou  redoutes; 
3,SO0  bouches  à  feu  ;  70,000  fusils  ;  1,900  milliers 
de  poudre,  et  90  drapieaux. 

Quoique  l'intervalle  de  la  bataille  d'Hondscoote  à 
la  prise  de  Rosas  soit  de  dix-sept  mois,  nous  le  re- 
gardons comme  une  seule  campagne,  parce  que,  par 
une  singularité  qui  n'est  pas  la  moins  remarquable 
de  celte  époque  extraordinaire,  iCs  troupes  ont  été 
pendant  tout  ce  temps  dans  une  activité  continue, 

aue  presque  nulle  part  elles  n'ont  pris  de  quartiers 
'hiver,  et  que  c'est  pendant  l'hiver  même,  l'un  des 
plus  rigoureux  dont  on  se  souvienne,  que  les  plus 
belles  expéditions  ont  été  faites. 

Votre  comité  m'a  chargé  de  vous  présenter  ce  ta- 
bleau, et  de  vous  proposer  d'ordonner  qu'il  demeure 
affiché  dans  le  lic^u  de  vos  séances.  Il  a  pensé  qu'il 
ne  pouvait  se  trouver  une  occasion  plus  favoroble 
que  celle  où  va  s'ouvrir  une  nouvelle  campagne,  qui 
sans  doute  ne  sera  pas  moinsbellequela  précédente; 
car  les  armées  françaises  ne  dégénéreront  point  de 
leur  gloire. 

Votre  comité  vous  demande  aussi  l'impression  en 
livret  de  ce  même  tableau,  et  l'envoi  aux  armées, 
aux  corps  administratiis  et  aux  municipalités. 

C'est  un  tribut  de  reconnaissance  que  la  Conven- 
tion nationale  s'empressera  de  donner  i  nos  braves 
défenseurs. 

Le  comité  de  salut  public  vous  propose  le  décret 
suivant  : 

•  La  Convention  nationale  décrète  : 

•  Art.  |cr.  Le  tableau  de  la  campagne  des  Français» 
depuis  le  22  fructidor  de  Tan  l«r  de  la  république 
jusqu'au  15  pluviôse  de  l'an  3«,  présenté  le  14  ven- 
tôse, présent  mois,  par  le  comité  de  Salut  public, 
demeurera  afRché  dans  le  lieu  des  séances  de  la  Con- 
vention nationale. 

«11.  Le  même  tableau,  imprimé  en  livret,  dis- 
tribué aux  représentants  du  peuple,  sera  envoyé 
aux  armées,  aux  corps  administratifs  et  aux  muni- 
cipalités. • 

Ce  projet  de  décret  e^t  adopté.  (la  suite  demain,) 

N,  B.  —  Dans  la  séance  du  15,  on  a  procédé  par 
appel  nominal  au  renouvellement  par  quartdes  mem- 
bres du  comité  de  salut  public.  Rewbell,  Sieyès  et 
f  aporte  remplacent  Cambacérès,  Carnot  et  Pelet  (de 

Lozère). 

LIVRES  DIVERS. 
Essai  philosophique  sur  cette  question  :  Quand  et  corn» 
I    ment  l'Amérique  a^-elle  été  peuplée  d'hommes  et  d'ami' 
maux?  5  vol.  in-lS,  brochés,  papier  fin,  édition  d*HollaiMie. 
Pris  :  15  liv.,«t  tS  liv.  10  sous,  Traoc  de  port. 

A  Paris ,  ches  RéBoni ,  libraire ,  me  des  GraikU-Augi»- 
tins,  B*  14. 

Payementi  à  la  trétorerie  nationale. 

Le  payement  de  la  dette  consolidée  perpétaelle  se  ftiit  poor 
les  six  derniers  mois  de  l*an  S*,  et  pour  Vannée  à  cens  qui 
n*ont  pas  touché  les  sii  premiers  dois  de  ladite  année.  Les  ci- 
toyens qui  ont  retiré  leur  inscription  définitive,  et  qui  dési» 
reraient  être  payés  dans  les  districts,  peuvent  indiquer  les 
chefi-lieui  du  district  où  ils  veulent  être  pavés ,  oonformé- 
nent  à  la  loi  du  Sa  jour  des  sansculottides. 

Le  nayement  des  rentes  viagères  se  lait  onsiilathreaieiii 
pour  deux  mois  vingt  et  un  jours  d«  Tamiée  1799  (fiiniit]rl«) 
•t  les  sii  prenicrt  moiide  VêuU. 


GAZETTE  NATIONALE  ««  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


N*  167. 


Septidi  17  Ventôse,  fan  3'.  {Samedi  7  Mabs  1795 ,  vieux  style,) 


POLITIQUE, 
COLONIES  FRANÇAISES. 

He'de-'France,  —  Les  citoyens  Marlinct  frères,  babî- 
tanls  de  celle  colonie,  nous  ont  communiqué  les  détails 
suivanis  du  combiil  annoncé  à  la  Convention  dans  l'A- 
dresse de  rtle  de  la  Réunion ,  lue  dans  une  des  précédentes 
séances  ;  ces  détails  sont  tirés  d*un  journal  intitulé  Cour- 
rier  de  C Ile-de-France, 

»  L'expédition  projetée  contre  riIc-de-France,  cl  à 
laquelle  quelques-uns  ne  voulaient  pas  croire,  était  sur  le 
point  de  s'cfTecluer.  Les  Taisseauz  armés  tant  à  Madras 
qu*ù  Bombay  et  au  Bengale  étaient  prêts  à  mettre  à  la 
voile.  Déjà  même  les  équipages  avaient  reçu  le  bat  h,  espèce 
de  supplément  de  solde  que  les  Anglais  sont  dans  Tusagc 
d'accorder  à  Tenlrée  d'une  campagne.  Le  rendexvoiis 
était  à  Rodrigue,  oVi  devait  se  trouver,  avec  les  forces  de 
l'Europe,  le  général  Meadows,  aux  talents  duquel  Pilt 
avait  confié  le  succès  de  l'entreprise. 

•  Nous  avons  été  prévenus  par  la  même  voie  que  le 
Commodore  Newcome  avait  divisé  ion  escadre  en  deux, 
parties,  l'une  expédiée  dans  les  détroits,  et  l'autre  destinée 
à  croiser  sur  l'ile  de  France,  celle*ci ,  composée  de  deux 
vaisseaux,  U  Centurion ^  de  50  canons,  et  le  DiomèdCt 
de  44. 

«  A  la  nouvelle  de  l'apparition  de  l'ennemi,  le  premier 
VŒU  1  été  de  l'aller  chercher,  le  combattre ,  le  prendre  ou 
le  forcer  de  quitter  sa  station.  La  voii  publique,  la  réso- 
lution de  rassemblée,  celle  du  comité  de  défisnse  ont  été 
unanimes  :  on  n'a  vu  que  la  nécessité  d'assurer  la  rentrée 
de  nos  subsistances,  celle  de  nos  corsai rcs*  et  de  Caire  res- 
pecter nos  rivages. 

Du  2  brumaire.  —  t  Notre  division  vient  de  rentrer, 
après  avoir  livré  un  combat  glorieux  à  nos  ennemis* 

«  Hier  elle  les  a  rencontrés  et  joints  à  huit  lieues  en- 
viron, dans  le  nord  de  l'Ile-Roode.  A  trois  heures  et  demie 
de  l'après-midi  l'action  s*est  engagée ,  les  Anglais  ayant 
l'avantage  du  vent. 

•  La  Prudente  a  commencé  le  ffu  à  un  quart  déportée 
de  canon ,  et  par  les  travers  du  commandant  ;  la  Cybèle  a, 
au  même  instant ,  lâché  toute  sa  bordée  au  Diomède.  Les 
Anglais  ont  répondu  avec  vivacité,  et  le  combat  a  duré 
environ  une  heure  dans  celte  position.  Alors  la  Prudente 
a  lurcé  de  voiles,  en  laisani  à  ta  division  le  signal  de  s'as- 
surer le  temps  de  se  regréer,  pour  ensuite  revirer  de  bord, 
et  gagner,  s'il  était  possible,  le  vent  ù  l'ennemi. 

«  La  Cybèle,  déjài  maltraitée,  n*a  pu  réussir  à  dépasser 
le  Centurion  t  qui  l'a  combattue  par  le  travers  peodaut 
que  le  Diomède  la  canonnait  en  hanche. 

«  Alors  le  commandant  a  fait  le  signal  d'arriver  par  un 
mouvement  succcssit.  La  Cybèle^  couverte  du  feu  de  trois 
vaisseaux ,  ne  l'a  pas  aperçu. 

«  Cependant  le  Coureur  la  secondait  avec  une  audace 
extraordinaire.  Garraud  a  osé  tenir,  pendant  trois  quaris- 
d'hrurc,  le  travers  du  Diomède,  dont  une  bordée  bien 
dirigée  pouvait  le  couler  bas.  Il  n'a  pas  été  aussi  maltraité 
qu'il  devait  l'être  naturellement;  sa  petitesse  le  dérobait 
aux  coups  de  l'ennemi. 

•  A  six  heures  et  demie,  le  Centurion  étant  venu  an 
vent,  la  Cybèle  a  continué  sa  route,  et  s'est  ainsi  éloignée 
de  l'ennemi;  le  Diomède  a  voulu  la  poursuivre,  et  lui  a 
tiré  quelques  volées  qui  ne  sont  pas  arrivées  ù  bord. 

«  LaPrudentelu'i  a  donné  une  remorque,  et  la  division 
0  (ait  route  pour  rentrer  dons  le  port. 

•  Le  nombre  des  tués  à  Imrd  de  la  Cybèle  est  de  vingt- 
deux  ;  celui  des  blessés,  de  soixante-deux,  parmi  lesquels 
trcnic-sept  le  sont  dangereusement. 

-  On  regrette  plus  particulièrement,  parmi  les  morts» 
Liliyr,  second  capitaine,  et  Qoclen,  maître  voilier. 

«  Parmi  les  blessés  sont  les  citoyens  Fournicr  et  Drunet, 
officiers. 

c  Lfbyr  est  péri  victime  d*un  dévouement  héroïque.  Il 
avait  été  blessé  d'un  biscalcn  au  talon  ;  comme  on  le  près 
tait  de  descendre  pour  se  faire  panser,  en  lui  faisant  rc- 

fSérie.'^  TomeX. 


marquer  qu'il  perdait  beaucoup  de  sang:  •  Non,  a«t-il 
répondu,  j'ai  juré  de  mourir  à  mon  poste,  je  ne  le  quitte- 
rai pas.  •  Un  moment  après  un  boulet  lui  a  coupé  les  reins. 
Ses  derniers  mots  ont  été  i  •  Courage,  met  amlSf  fcogei- 
nousl  • 

«  C'était  l'ancien  maître  d'équipage  ;  depuis  vingt-sept 
ans  il  servait  sur  les  vaisseaux  de  l'Etat.  Il  laisse  des  eu* 
fants  en  bas  Age,  une  femme,  une  sœur,  une  belle-mère» 
qui  tous  n'avaient  que  lui  pour  fortune  et  pour  soutien. 

«  La  Prudente  a  perdu  quinxe  hommes,  et  en  a  eu  vingt 
de  blessé^. 

I  Le  capitaine  Flouet  et  Salerobicrs,  officiers  distingués, 
sont  au  nombre  des  morts.  Le  commandant  Renaud  a  été 
lui-même  renversé,  et  a  reçu  aux  cuisses  et  aux  jambes 
des  contusions  qui  l'incommodent  beaucoup. 

I  Parmi  ceux  qui  se  sont  distingués  on  ne  doit  pas  ou- 
blier Sixte  Brunet,  matelot  de  la  Prudente,  Ce  brave 
homme  était  occupé  à  charger  son  canon  ;  un  boulet  vient 
et  lui  emporte  le  poignet:  sans  donner  aucun  signe  d'alté- 
ration, il  saisit  le  rerouloir  de  la  main  gauche,  achève  de 
charger,  et  va  ensuite  faire  étancher  son  sang  qu'il  perdait 
h  flots. 

•  Le  JeoH'Bart  a  eu  un  homme  de  tué  et  cinq  de 


•  L'Anglais,  de  son  côté,  a  été  maltraité  de  manière  ft 
lui  dter  l'envie  de  revenir  croiser  sur  nos  côtes  tant  qu'il 
soupçonnera  que  nos  frégates  sont  à  ^faurice. 

c  Le  Centurion  a  perdu  son  mftt  d'artimon  et  son  petit 
met  de  hune;  tes  voiles  étaient  en  pantene,  son  grément 
haché  ;  cinq  des  sabords  de  la  batterie  basse  étaient  fermés 
avant  la  fin  du  combat  x  il  jouait  de  deux  pompes  ;  son 
gouvernail  était  démonté,  et  on  Ta  vu  jeter  un  met  de  hune 
avec  un  cftble  pour  pouvoir  gouvemcfi 

Du  7  hrumàire.  —  •  Il  n*y  a  plus  de  doute  aujourd'hui 
que  les  Anglais  n'aient  levé  la  croisière.  VUnion,  capi- 
taine Raguio,  vient  d'entrer  dans  le  port  avec  un  charge- 
mept  de  cent  cinquante  bcufs  ;  U  est  arrivé  par  le  vent,  et 
serait  inCailllblement  tombé  entre  les  mains  des  ennemis 
s'ils  avaient  conservé  leur  position.  On  s'occupe  avec  une 
très-grande  activité  à  remettre  les  frégates  en  état  de  re- 
prenare  promplcment  la  mer,  » 

POLOGNE. 

Vartovie,  te  4  février.  —  On  va  voir  comment  les  rois 
tiennent  leur  parole. 

Catherine  avait  promis  au  malheureux  peuple  polonais 
une  amnistie  générale,  un  oubli  absolu  de  tous  les  fuils 
relatifs  à  la  révolution  ;  cependant  elle  a  donné  ordre  d'é- 
tal)llr  â  Wilnu  un  tribunal  pour  juger  les  auteurs  de  celte 
même  révolution,  qui  seront  punis  comme  traîtres  à  la 
patrie.  On  sait  d'avance  que  les  juges  qui  composeront 
cette  infâme  commission  doivent  envoyer  à  Pélersbourg 
prier  Timpératrice  de  leur  livrer  et  de  traduire  devant  eux 
le  général  Koxciusko. 

—  I.a  cour  de  Vienne,  occupée  à  débattre  ses  Intérêts 
dans  le  partage  de  notre  mallieureox  pays,  va  faire  pa- 
raître un  manifeste  dans  lequel  les  putriicistes  autrichiens 
ne  manqueront  pas  de  trouver  à  leur  maître  des  droits  in- 
contestables sur  la  Pologne. 

—  Sianislas,  trop  à  blftmer  pour  être  à  plaindre,  avait, 
comme  on  sait,  des  liaisons  avec  le  ministre  britannique  et 
le  nonce  du  pape. 

Voici  deux  lettres  qu'il  a  écrites  de  Grodno  i  en  envoyant 
à  l'un  et  à  l'autre  son  portrait. 

Lettre  durai  de  Pologne  au  ministre  d^jingleterret  re$té 
à  Varsovie» 

«  Mon  cher  Gardiner,  comme  mon  rAle  et  le  votre  an* 
près  de  mol  paraissent  tirer  à  leur  fin,  et  que  je  n'espère 
plus  vous  revoir,  il  m'importe  du  moins  de  vous  dire 
adieu ,  et  de  vous  le  dire  du  fond  de  mon  Ame.  Vous  con- 
serveres  jnsqu'ù  la  mort  la  place  que  vous  avex  dans  mon 
Cflcur,  et  j'espère  que  du  moins  nous  nous  retrouverons  cn« 

77 


610 


combien  oft»  leloD  Qioli  in  ânlis  honnêtes  et  tel  cœtt» 
Lons  doivent  se  trouver  réunis  pour  Téternilé. 

«  Tout  ce  qui  appartient  à  Tëtlquette  ordinaire  est  telle* 
ment  dérangé  et  tel lemenl  interrompu  par  le  malheur  at- 
taché ù  mon  sort,  que,  selon  toute  apparence,  ni  vous  ni 
moi  ne  pourrons  remplir  les  usaiçes  diplomatiques*  Mais  il 
restera  toujours  vrai  que  j'aime  et  honore  votre  roi  et 
votre  nation  i  tous  le  leur  dires;  il  rester*  toujours  vrai 
i|ae  je  souhaite  que  vous  ne  perdiet  pas  le  souvenir  de 
votre  ami  et  TaOection  que  vous  avez  eue  pour  lui.  S'il  ne 
m*estplus  possible  de  vous  parler,  que  du  moins  mon  por« 
Indt  vous  parle  pour  mol  1 

«  Signé  StANtstàs-AoocstB ,  rd  » 

l4Ur$  mu  ntmce  apoitolique^  M.  Littû^  arche^équ»  de 

ThébeSf  résidant  encore  à  Varsovie^ 

•  Mo!nsîl  y  a  d*apparence  que  nous  puissions  récipro- 
l|Uemeut  mcllre  fiu  à  nos  rapports  ))oliliques  conformé- 
ment aux  usages  reçus  cl  suivis,  et  plus  je  suis  empressé 
à  témoigner  du  moins  à  Votre  Emiuence,  de  la  manière 

,  qui  est  encore  en  mon  pouvoir,  combien  je  déplore  de  n'a* 
voir  pu  jouir  que  si  peu  de  temps  de  votre  présence  en  Po- 
logne, el  de  toutes  les  aimables  it  souverainement  esti- 
mables qualités  qui,  partout  où  vous  êtes  el  où  vous 
pouvex  vous  faire  connaître,  vous  assurent  d'être  univer- 
sellement aimé  et  estimé. 

«Quel  que  puisse  Olre  le  sort  qui  m'attend,  cl  en 
quelque  séjour  où  je  doive  me  trouver,  j*y  conserverai 
toujours  mon  respect  filial  envers  notre  père  commun  et 
ma  tendre  emillé  envers  vou5.  Soyei,  je  vous  prie,  Pin- 
terprète  de  mes  sentiments  auprès  de  Sa  Saimclé,  cl  restez 
toujours  convaincu  de  ceux  que  {*ai  pnnr  vous. 

•  Si  Tun  de  mes  vœnx  s'accomplit ,  je  ne  renonce  pas  à 
Pespoir  de  recevoir  en  personne  la  bènédictio?»  paternelle 
de  Pie  VI ,  el  d'embrasser  encore  le  digne  archevêque  de 
Thèbes.  Je  vous  prie,  en  attendant,  de  garder  le  poitrail 
décelai  qui  te  dit  aiec  sincérité  votre  irès-aflcctionné. 

c  Signé  Stanislas-âlccstb,  rou  m 

ALLEMAGNE. 

yUniiê^  U  h  février»  —  Les  dernières  nouvelles  de  Hol- 
lande (après  celles  de  I  entrée  des  Français)  ont  moins 
troublé  notre  cabinet  qu'on  n'avait  droit  de  s*y  attendre.  La 
coalition  aurait-cliedi  cet  égard  des  ressources  que  le  reste 
de  l'Europe  ne  soupçonne  pas  ?  Le  très-pelit-nombre  d'a- 
mis éclairés  que  la  liberté  peut  avoir  ici  parait  craindre 
des  retours  funestes.  Si  les  innombrables  dépOches  qui  vont 
cl  viennent  sans  cesse  de  Pétersbourg  à  Londres  de  Vienne 
à  Berlin,  tombaient  entre  les  mains  des  Hollandais,  on 
verrait  bientôt  s'établir  entre  les  provinces-Unies  et  la  ré- 
publique française  une  telle  uniformité  de  principes ,  une 
telle  réunion  de  moyens  et  de  forces,  que  nulle  puissance 
ne  pourrait  corrompre  leur  politique  cl  résister  &  l'ensemble 
de  leurs  résolutions. 

—  Gollorédo  vient  de  tomber  malade  :  on  lui  attribue 
les  plans  fiinesles  dont  la  France  a  pensé  être  entièiement 
la  victime.  On  dit  même  que,  ses  agents  passionnés  ayant 
été  au  delà  de  ses  plans,  il  en  a  gémi,  et  ou  lui  fuit  enfin 
.  riionoeur  de  soupçonner  que  les  remords  aient  pu  allércr 
ea  santé« 

Le  maréchal  de  Lascj  est  aussi  attaqué  d*une  maladie 
Iprave. 

RÉPUBLIQUE  DES    PROVINCES-CNIES. 

DuTexelt  fbfévrkr.^BtaU  des  ports. -^  te  nombra 
des  vaisseaux  grands  et  petits,  formant  la  marine  militaire 
Miandaîse,  est  porté  à  qoatne- vingt  ou  quptre^vingt-dix, 
desquels  quarante  à  cinquante  euieM  dans  les  ports  de  la 
Hollande  au  moment  de  Piovasioa  ;  le  reste  est  sur  mer  ou 
ms  les  coHmies. 

Mouvement  du  port  de  Tcxel.  —  Du  10  au  ih  février,  il 
n'est  rleo  eatré  ni  sorti  de  ce  port  Entré  le  !5  février, 
W.  Mlly,  îke  CWivitiMii,  venant  de  Philadcî|)hie,  der» 
nlèrement  de  Falmouth;  G.  Metsker,  de  Vronw-Claage, 
»ttiant  de  LiMidres;  H,  Vander  Slccy,  de  Onti:k,  venant 
de  Londkts* 


Les  glaces  ont  rtnpccliê  d*amener  cet  dent  éartikrsi  qui 
sont  arrivés  depuis  plusieurs  jours. 

Le  10  il  n'est  rien  sorti. 

Mouvement  du  port  de  Uelvoctttttit.  —  Le  ii  février ^ 
entré  capitaine  Foyn,  venant' d'Harwick  comme  cartel. 

Un  navire  sous  pavillon  danois,  venant  de  Londres, 
avec  des  lettres  pour  le  commerce t  jusqu'au  7  de  février. 

Mouvement  du  port  de  Brielle,  —  Du  10  au  15  il  n'est 
entré  ni  sorti  aucun  navire,  La  glace  est  brisée  prùs 
des  caps. 

Mouvement  du  port  de  Hitf.-^Le  17  janvier,  B»  Sbolla» 
de  Tinc  Beaira,  venant  de  Kœnigsberg,  ayant  |ierdu  at-s 
ancres  el  ses  câbles,  est  parvenu ,  avec  le  secours  di^s  pi* 
loies,  au  côté  nord-est  du  rivaget  Les  glaces  Pont  empôcbê 
d'entrer  plus  avant. 

Bien  de  sorti. 

Bien  d'arrivé  depuis  le  10  Jonvler  JusqU^au  iS  février. 

Bien  de  sorti  depuis  le  14  janvier  jusqu'au  13  fêvrier. 


RÉPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

PûHs,  le  15  venioie,  —  La  ConvcnUt)n  a  renvoyé 
à  la  commission  chargée  de  lui  présenter  les  bases 
du  gouveniomenl  IVxamen  de  ta  question  desavoir 
s*il  no  convient  j)as,diins  les  circonstances  actuelles, 
de  rendre  aux  citoyens  In  faculté  de  nommer  lee  fonc- 
tionnaires publics  dans  les  municipalités,  coqM  ad- 
nitiislratifs  et  judiciaires. 

Ainsi  donc  tout  annonce  aux  vrais  amis  de  la  li- 
berté que  le  peuple  va  rentrer  dans  ses  droits,  que 
la  barrière  naturelle  et  nécessaire  entre  le  pouvoir 
qui  fait  les  lois  et  le  pouvoir  qui  les  eïécutè  va  se 
trouver  rétablie.  La  décision  tic  la  Convention  ne 
peut  être  douteuse;  et  si  elle  pouvait  éprouver  quel» 
querelaid,  ce  ne  serait  au  moins  que  celui  qu*nn 
jugerait  iiidisj)ensable  à  l'organisation  de  la  consti- 
tution. Ainsi  la  représentation  nationale  va  conso- 
lider rimniortelle  et  bienfaisante  révolution  du  U 
thermidor. 

N'esl-il  pas  en  effet  aussi  absurde  qu*iajurieux 

f)Our  le  peuple  que  des  fonctionnaires  qui  doivent 
*inslruire  de  ses  devoirs  et  lui  rendre  la  justice  soient 
nommés  à  deux  cents  lieues  de  lui,  sur  des  attesta- 
tions individuelles,  quelquefois  Intéressées,  trop 
souvent  sujettes  à  l'erreur?  NVst-ce  pas  Tcxcès  du 
mépris  et  de  la  calomnie  contre  des  citoyens  français, 
que  de  les  croire  incapables  de  donner  leurs  suflï'a- 
gesan  mérite  et  à  la  vertu?  Eh!  qui  peut  mieux  que 
les  administrés  connaître,  apprécier  les  talents  el  la 
moralité  de  ceux  qui  sont  appelée  aux  honorables 
fonctions  d'administrateurs? —  Mais  le  gouverne- 
ment révolutionnaire  avait  nécessité  cette  sntpen^ 
sion  de  Texercicc  des  droits  politiques^  et  le  gott- 
vernemeiit  révolutionnaire  existe  encore.  —  Bb! 
pourquoi  existc-t-il  encore  ce  prétendu  gouverne- 
ment ?  Est-ce  parce  qu'il  a,  pendant  dix-huit  mois, 
légitimé  toutes  les  usurpations,  consacré  tous  les 
abus,  érigé  les  vertus  en  crimes  et  les  crimes  en  ver- 
tus; puni  le  geste,  le  regard,  la  pensée;  aflfamé,  en- 
sanglanté, dépeuplé  la  France?  Qu'on  ne  dise|)as 
qu'il  fut  commandé  par  les  circonstances  :  tes  cir- 
constances n'étaient  commandées  que  par  lui; qu*il 
a  produit  cette  masse  de  victoires  dont  les  annales 
des  nations  n*offrent  point  d'exemple  :  mais  qu'au* 
ront  fait,  à  ce  compte,  les  baîonnettesde  nos  braves 
et  rintatigable  constance  de  nos  armées?  Ah!  les 
soldats  français  sont  républicains!  Lorsque  leurs  fa- 
milles étaient  opprimées,  assassinées  par  des  tigres  a 
face  humaine,  ils  voyaient  la  pntrfe  menuet»  par 
des  ennemis  prêts  à  la  déchirer;  ils  pleuraient  leurs 
parents  et  leurs  amis,  mais  ils  défendaient  Id  patrie. 
Ils  triomphaient  pour  ta  liberté.  Ce  n*étaic  donc 
point  le  gouvernement  révoluUoonaire  4111  les  fai- 


611 


3, 


sait  vaincre.  Leurs  floecès  h*ont  Jamais  été  plus 
brillants,  plus  nombreux,  plus  rapides  que  depuis 
le  9  thermidor,  et,  grâce  au  Ciel,  depuis  cette  épo- 
ue,  le  gouvernement  révolutionnaire  n'existe  que 
_c  nom.  Osons  le  dire;  il  ne  fut  Inventé,  dans  le  si- 
leixe  des  patriotes  et  la  stupeur  des  hommes  de 
bien,  que  par  des  ambitieux  qui  voulaient  devenir 
et  qui  sont  devenus  des  tyrans;  et  puisqu'il  n'a  pas 
perdu  la  république  et  la  liberté,  la  liberté  et  la  ré- 
publique sont  impérissa!)les. 

Quel  est  d'ailleurs  cet  assemblage  incohérent  de 
deux  idées  qui  se  détruisent  l*une  rautre?  N'est-ce 
pas  l'union  de  la  vie  et  de  la  mort,  n'est-ce  pas  1*1- 
magedu  corps  animé  attaché  à  un  cadavre?  Mais 
telle  est  la  nature  de  l'esprit  humain  :  rien  de  plus 
prompt,  de  plus  violent,  que  l'action  du  mal;  rien 
de  plus  lent  que  le  retour  vers  le  bien.  Heureuse 
lenteur,  puisque c*est  elle  nui  en  fait  la  stabilitc*! 
Sans  doute  In  Convention  eut  pu,  par  une  accéléra- 
tion, louable  peut-être,  mais  dangereuse,  tenter  tout 
à  coup,  le  même  jour,  au  même  moment,  le  bien 
que  sa  prudonce  a  opéré  par  degrés,  avec  In  matu- 
rité de  la  sagesse  gui  veut  que  son  ouvrage  soit  du- 
rable. Peut-être  eut-elle  excité  plus  d'enthousiasme, 
plus  d'admiration:  mais  elle  n'eût  cas  acquis  des 
droits  si  solides  à  la  recoti naissance  uc  ses  contem- 
porains et  à  la  justice  des  siècles.  L'histoire,  libre 
des  passions  qui  nous  animent,  dégagée  dos  préjugée 
qui  nous  asservissent  trop  souvent  encore,  saura 
calculer  la  somme  d'efforls  que  cette  assemblée,  au 
sortir  d'une  crise  si  longue  et  si  terrible,  dut  appor- 
ter pour  vaincre  toutes  les  résistenccs  que  lui  oppo- 
saient l'envie  de  conserver  la  puissance  et  le  regret 
de  l'avoir  perdue.  Une  conduite  si  prudente  et  a  la 
fois  si  énergique  couvrira  bien  des  torts  passés,  bien 
des  faiblesses  présentes. 

La  Convention  n*a  plus  qu'à  marcher  sans  dévia- 
tion vers  le  but  au(|uel  doivent  tendre  tous  ses  ef- 
forts, toutes  ses  pensées.  Le  crime  une  fois  puni, 
<|irellc  rende  au  peuple  le  règne  des  lois  que  de  vils 
tyrans  voulurent  renverser  pour  asseoir  à  leur  place 
un  trône  de  sang,  une  domination  de  cannibales. 
L'opinion  publique,  Tesprit  public,  tout  est  d'accord 
avec  elle,  tout  1  environne  d'une  force  que  rien  dé- 
sormais ne  peut  détruire.  Tous  les  bons  citoyens  se 
prononcent,  tous  sentent  la  nécessité  de  braver  le 
poignard  de  la  terreur  et  le  stylet  du  royalisme  pour 

Sue  la  république  et  la  liberté  n'aient  rien  à  crain- 
rc  de  leurs  intentions,  différentes  peut-ôlre,  et  de 
leurs  emploits  communs. 

lNous  ne  terminerons  point  ees  réflexions  sans 
nous  féliciter  avec  nos  concitoyens  d'avoir  vu  siib- 
aiituar  le  mot  d'^Mmaii^/^àcette  affreuse  inscription 
de  la  mort,  qui  se  lisait  dans  les  spectacles  comme 
sur  toutes  les  maisons.  Espérons  que  cette  substitu- 
tion va  devenir  générale.  Qu'il  est  consolant  pour 
des  républicains  français,  à  Pinstant  où  l'on  charge 
les  tyrans  et  leurs  vils  complices  des  chaînes  sous  le 
poids  desquelles  ils  firent  si  longtemps  gémir  la 
vertu,  d'apercevoir  déjà  l'aurore  de  jours  plus  se- 
reins, où  râmc  n'aura  plus  à  redouter  d'être  flétrie 
par  les  idées  de  vengeance  et  de  sévérité,  où  le  re- 
tour d'une  paix  glorieuse  et  permanente  ravivra 
les  sources  ae  la  prospérité  publique,  en  rendant  à 
l'agriculture,  au  commerce  et  aux  arts,  cette  splen- 
deur qui  faisait  rorncment  et  le  bonheur  de  la  pa- 
trie. 


VARIÉTÉS. 

Toid  quelles  renicîgaeiiicDti  mr  lé  sort  de  rioforluné 
ta  Peyroaie. 
Le  ciiojea  WiHaamef,  officier  de  mariae,  et  commandant 


3, 


la  oorveltê  U  Ugêr ,  nottvelleBtot  arrtvd  dea  Iiid6a.0rt«ii« 
talea,  rapparie  qu'il  ëlait  du  nombre  dea  officiera  empinyéa 

aur  les  deux  gabares  expédiées  U ,  par  l*Aaaembléc  cun« 

alituante,  soua  le«  ordres  d*Entrecas(eaus,  pour  aller  à  la 
recberche  de  ta  Peyrouse.  D*Encastreaux  eiant  mort  daua 
les  mers  de  Tlnde,  Dauribeau,  son  second,  prit  le  comman- 
dement des  deui  gabares  ;  mais,  sur  la  nouvelle  de  rabolitloii 
de  la  royauté,  ee  traître,  qui  avait  uns  doute  des  instruc- 
tions aeorètea  dea  eî-dayant  prinoea ,  arbora  la  paviUon  blane 
et  Alt  se  mettre  avec  aea  dent  gabarea  aeua  la  protection  dea 
HoUandais.  danale  port  de  Sourabaya,  dansTile  do  Java,  e« 
elles  sont  depuis  seîxe  mois,  te  oiloyen  Witiajumez  et  quarante 
autres  citoyena  dea  équipages,  n'ayant  pas  voulu  prendre 
part  I  celte  trahison,  obtinrent  des  Bollandais,  après  beau- 
coup de  sollicitations ,  un  parlementaire  pour  se  rendre  ft 
nie  de  France.  Il  croit  que  d^Entreeasteaus  «  s*il  eût  vécu , 
étiit  trop  honnête  homme  pour  prendre  le  parti  détestable 
auquel  s*est  livré  riofàme  Dauribeau,  que  les  Hollandaia  com- 
mençaient déji  h  mépriser  lorsque  le  parlementaire  aban« 
donna  Plie  de  Java. 

Le  citoyen  Willaumea  igoute  quMs  ont  présumé  avoir  passé 
sur  les  traces  où  a  dû  périr  L.i  Peyrouse,  ayant  donné  dans 
des  écueils  qui  ne  sont  décrits  sur  aucune  carte  ni  pnr  au- 
cuns voyageurs,  et  où  ils  ont  eux-mêmes  été  exposés  à  pcrir. 
(1  court  en  outre  le  bruit  dans  Plndo  que  quciquos  navires 
ont  rencontré  dea  débris  ;  rasis  cela  n*est  pas  bien  confirmé. 

AVIS. 

L*Administration  de  la  Tontine  du  Pacte  Social,  place  de  ' 
Victoires,  à  Paris,  dont  les  actions  sont  de  103  iiv.,  prévient 
ses  concitoyens  que ,  cette  tontine  devant  être  formée  le. 
99  ventôse  de  Tan  3,  au  soir,  ses  bureaux  seront  ouverts  tous 
les  jours  indistinctement,  depuis  huit  heures  du  malin  jiisqu'^ 
huit  du  soir  pour  Paris,  et  que  les  départements  auront  un 
mois  du  plus. 

Les  lettres  non  affranchies  ne  sont  pas  reçneai  Tadiliini»' 
tration  répond  de  même  par  lettres  alfranehiei* 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Bourdon  {de  COhe), 
SUITE  *!)£  LA  SÉANCE  DU  14  VENTOSE. 

Un  des  secrétaires  donne  lecture  des  lettres  sui* 
vantes  : 

Le  représentani  du  peuple  Leloumeur  {de  la  Man- 
che), en  mission  près  l'armée  navale  de  la  Médi" 
lerranée  et  l'armée  d* Italie^  à  la  Convention 
nationale. 

Port-la-Montagne,  le  9  ventôse,  Pan  5*  de 
la  république  française. 

«  Citoyens  collègues,  je  suis  rendu  au  poste  ho« 
norable  que  la  Convention  nationale  m*a  assigna,  et 
j*ai  mis  tout  Tempresscment  que  la  nature  des  cir- 
constances exige. 

•  Le  comité  de  salut  publie  a  été  informe  de  suite 
du  moment  de  mon  arrivée,  et  successivement  de 
tous  les  détails  relatifs  aux  grandes  opérations  dont 
je  suis  chargé.  Puisse  le  génie  de  la  liberté,  en  se- 
condant les  puissants  efforts  des  républicains  fran- 
çais, vous  porter  bientôt  sur  ses  ailes  rapides  la  nou- 
velle d'tin  heureux  résultat!  L'énergie  de  nos  bra- 
ves marins,  le  courage  prononcé  de  Tarmée  d'Italie 
en  sont  de  sûrs  garants  ;  tous  me  témoignent  de  la 
conliancc,  et  les  cœurs  réunis  en  un  srul  faisceau 
paraissent  se  diriger  vers  un  but  unique,  le  salut 
de  la  patrie,  et  le  désir  d*y  contribuer  glorieuse- 
ment. 

■  A  rénoque  de  la  fôte  mémorable  qui  a  consacre 
à  jamais  la  naine  des  Français  pour  la  tyrannie,  quel- 
ques cris  séditieux  s'étaient  fait  entendre  dans  cette 
commune.  La  fermeté  de  mes  prédécesseurs  a  com- 
primé ce  mouvement,  et  je  déclare  avec  plaisir  que 
tout  annonce  ici  pour  le  moment  la  meilleure  dispo- 
sition dans  les  esprits.  Jq  mets  ma  plus  chère  élud» 


C12 


à  ëtablir  Tharmonie  entre  les  services  de  terre  et  de 
mer  :  tout  marche  de  front,  et  ce  concert  nous  pré- 
sage les  plus  heureux  succès. 

•  Les  proclamations  que  je  joins  ici  vous  feront 
connaître  Tesprit  qui  me  dirige.  J'ai  vu  le  peuple 
assemblé  au  temple  de  la  Raison,  les  braves  ma  mis 
à  leur  bord,  et  partout  j*ai  reconnu  de  vrais  répu- 
blicains. Si  la  malveillance  et  Tintrigue  cherchaient 
encore  à  agiter,  comptez  sur  ma  fermeté  pour  les 
réprimer;  aucune  considération  ne  me  fera  clévier 
des  principes  de  justice  que  je  me  fais  gloire  de  pro- 
fesser avec  vous;  mats  plus  de  grâce  pour  le  crime, 
plus  de  ménagement  pour  les  mauvais  citoyens  qui 
voudraient  ramener  le  règne  de  la  terreur  par  le  dés- 
ordre et  Tanarchie. 

•  Je  vous  fais  passer  copie  de  la  lettre  qui  a  été 
adressée  aux  représentants  du  peuple  au  Port-la- 
Montagne  par  les  patriotes  français  réfugiés  à  Phila- 
delphie, ainsi  que  le  procès-verbal  de  la  fétc  qu'ils 
ont  célébrée  le  10  août,  à  la  suite  duquel  se  trouve 
une  Adresse  à  la  Convention  nationale. 

•  Ces  principes  sont  les  vôtres,  et  vous  vous  em- 

Îresserez  sans  doute  ù  les  consigner  honorablement, 
ïotf  la  république  I 

•  Salut  et  fraternité.  Letourneub.  • 
Cette  lettre  est  renvoyée  au  comité  de  salut  pu- 
blic. 

Copie  d'une  lettre  datée  de  Philadelphie^  le  2  ven- 
démiaire. Van  3«  de  la  république  française,  une 
et  indivisible  »  aux  représentants  du  peuple  au 
Port-de-la-Montagne  (ci-devant  Toulon). 

•  Citoyens,  dans  le  continent  américain  il  est  des 
Français  amis  de  leur  patrie;  le  sort  qui  les  poursuit 
les  tient  éloignés  de  leurs  frères  et  du  territoire  fran- 
çais :  ils  n'en  sont  pas  moins  attentifs  à  tous  les 
mouvements  de  leur  patrie;  au  sein  du  peuple  allié 
et  libre,  les  lois  françaises  les  guident,  et  ils  se  font 
un  devoir  d'exécuter  les  décrets  de  la  Convention 
nationale. 

«  Ils  viennent  de  célébrer  la  fête  du  10  août  mal- 

tré  les  efforts  secrets  de  Taristocratie.  La  plupart 
e  ces  Français  sont  colons  des  Antilles;  les  uns  ont 
fui  le  fer  et  les  flammes  dirigés  par  la  politique  in- 
fernale des  Anglais  et  des  Espagnols;  les  autres  ont 
été  chassés  par  ces  usurpateurs  affames  de  trahison. 

•  Us  soupirent  tous  après  le  moment  où  le  pavil- 
lon français,  nouvellement  déployé  sur  les  terres 
d'Amérique,  les  mettra  à  même  die  partager  le  ci- 
visme et  les  travaux  de  leurs  frères  d'Europe  ;  ils 
désirent  tous  voir  les  nouvelles  terres  de  la  liberté 
purgées  de  ces  hordes  de  brigands  qui  y  sont  restés 
attachés  aux  despotes. 

•  Vous  verrez,  citoyens,  dans  les  pièces  que  nous 
vous  adressons,  les  sentiments  que  les  Américains 
du  continent  voient  propager  sous  leurs  yeux,  en 
dépit  des  ennemis  de  la  France  et  de  la  liberté.  • 

Pour  copie  conforme  : 

Signé  Letourneur  (de  la  Manche.) 

Blutelf  représentant  du  peuple  dans  les  ports  de 
La  Rochelle,  Rochefort,  Bordeaux,  Rayonne, 
et  porté  adjacents,  pour  V administration  des 
prises ,  la  surveillance  des  magasins  de  la  ré- 
publique et  des  douanes  nationales ,  à  la  Con- 
vention. 

Bayonne,  le  3  venlose.  Pan  8e  de  'la  république 
française,  une  et  indÎTisible. 

•  Malgré  la  rigueur  de  la  saison,  et  en  dépit  des 
temps  et  des  chemins  qui  sans  cesse  entravent  ma 
marche,  je  poursuis  ma  mission  avec  ce  zèle  pour 
le  bien  public  que  partagent  avec  moi  tous  mes  col- 
lègues. Je  suis  arrivé  à  layonne  après  un  trajet  pé- 


nible, durant  lequel  je  pouvais  à  peine  faire  cinq  , 
six  lieues  par  jour  en  poste.  J'ai  trouvé  peu  d'objets 
de  prises  dans  cette  commune,  révacuation  de  Saint- 
Sébastien  s*opérant  lentement;  il  s'y  trouve  cepen- 
dant des  sucres,  des  cacaos,  des  laines,  des  ta- 
bacs, des  cotons,  des  huiles,  une  balle  de  coche- 
nille, etc. 

•  Je  pars  demain  pour  le  Passage,  où  je  vous  an- 
nonce qu'il  est  entré  trois  prises;  la  première,  le 
Ja/fro/,  de  Londres,  allant  de  Falmouth  à  laBarbade, 
prise  par  la  frégate  la  Bayonnaise ,  chargé  princi- 
palement de  fers,  clous^  etc.;  la  seconde,  la  Dame 
Elisabeth  Gérarde,  allant  deTrieste  à  Amsterdam  « 

{)rise  par  la  corvette  V Atalanle,  chsirgée  de  savons, 
miles,  genièvre,  raisins  secs,  potasse,  noix  de  galle, 
drogueries,  etc.;  la  troisième,  l'Achille,  pris  par  la 
même  corvette,  allant  de  Saint-Ander  à  Londres, 
chargé  de  trois  cent  vingt-six  balles  de  laine  d'Es- 
pagne, etc. 

•  Après  avoir  arrêté  ce  que  les  circonstances  exi- 
geront sur  ces  prises,  je  passerai  à  Saint-Sébastien, 
pour  prendre  connaisance  des  travaux  de  l'agence 
établie  dans  ce  pays  sous  le  nom  d'agence  d'extinc- 
tion des  prises.  Je  vérifierai  l'état  de  ses  magasins 
et  ferai  refluer  dans  l'intérieur  tout  ce  qui  ne  sera 
pas  propre  au  service  des  années  de  terre  et  de  mer 
ou  des  hôpitaux.  Je  reviendrai  ensuite  mettre  en  ac- 
tivité la  vente  de-  tous  les  objets  dans  chacun  des 
ports  où  ils  sont  déposés,  en  y  passant  rapidement 
pour  me  rendre  au  sein  de  la  Convention.  Il  me  sera 
doux  de  vous  apprendre  à  mon  retour  que,  dans  tous 
les  départements  que  j'ai  parcourus,  j'ai  trouvé  le 

Scuple  secouant  avec  joie  le  joug  de  l'oppression, 
étestant  les  oppresseurs  et  les  hommes  ae  sang,  et 
jurant  à  la  Convention  nationale  un  attachement  sin- 
cère et  une  reconnaissance  éternelle. 

•  Je  dirai,  à  la  gloire  de  l'humanité  que  Ton  dé- 
gradait, que,  dans  chaque  commune,  on  comptait  à 
pein  dix  à  douze  de  ces  hommes  immoraux  qui 
avaient  surpris  ou  plutôt  étonné  l'opinion  publique, 
tous  étrançers  au  pays,  et  qui  y  étaient  tombés  on 
ne  sait  d'où  ni  comment.  La  France  serait  bien  mal- 
heureuse si,  comme  ils  le  prétendaient,  elle  n'avait 
que  de  tels  êtres  pour  soutiens  de  sa  liberté. 

•  J'apprends  a  l'instant  et  je  vous  annonce  qu'il 
est  entré  à  Rochefort  une  prise  ù  trois  mâts,  nom- 
mée la  Providence,  du  port  de  250  tonneaux, 
faite  parla  frégiite V Insurgente,  Ce  navire,  chargé 
de  marchandises  pour  la  traite,  allant  de  Bristol  à  la 
côted'Airique,  est  entré  à  Rochefort  le  22  pluviôse. 
Vive  la  république  ! 

•  Blutel.* 

La  Convention  renvoie  cette  lettre  au  comité  de 
salut  public. 

—  Le  représentant  du  peuple  Pierret,  en  mission 
dans  le  département  de  la  Haute-Loire,  écrit  à  Ja 
Convention  nationale  que,  dès  l'instant  qu'il  est 
entré  en  fonctions  dans  ce  département,  il  s'est  oc- 
cupé de  l'épuration  des  autorités  constituées,  et  n'a 
rien  négligé  pour  rendre  cette  opération  digne  de 
la  glorieuse  révolution  qui  l'a  rendue  nécessaire. 
■  J'ai  pris,  dit-il,  toutes  les  mesures  que  j'ai  crues 
propres  à  faire  faire  le  bien  :  j'ai  donné  accès  à  tous 
ceux  qui  ont  voulu  y  contribuer,  et  le  résultat  de 
mon  travail  a  été  soumis  à  un  examen  sérieux  et  ap- 
profondi ;  il  a  été  également  subordonné  à  toutes  les 
épreuves  qui  constatent  la  véritable  opinion  popu- 
laire, en  sorte  que  je  suis  prêt  à  donner  à  ceux  qui 
auront  à  se  plaindre  de  leur  remplacement  des  rai- 
sons solides  et  incontestables.  Je  suis  parfaitement 
imbu  de  ce  qu'on  peut  dire  pour  ou  contre  les  épu- 
rés et  leurs  successeurs  ;  mais  ce  qui  me  rassure  bien 


613 


davantage  est  la  sanction  du  peuple,  <^ue  j*ai  pro- 
voquée au  Puy,  dans  une  assemblée  générale  et  très- 
nombreuse,  à  qui  j*ai  donné  toute  la  latitude  possible. 
•  Après  avoir  terminé  1  épuration  des  autorités  du 
chef-lieu  du  département  Je  me  suis  rendu  à  Brioude, 
chef-lieu  de  district,  où  j*ui  suivi  une  marche  à  peu 
près  semblable,  en  cherchant  même  à  la  rectiher. 
J'ai  trouvé  dans  ce  district,  et  principalement  dans 
cette  commune,  des  hommes  éclairée  et  une  popu- 
lation plus  civilisée  que  ne  le  sont  en  jgénéral  les 
habitants  de  ces  montagnes  :  il  n*y  a  point  de  fana- 
tisme proprement  dit;  on  y  sait  subordonner  ses 
opinions  et  même  sa  faim  à  la  tranquillité  publique. 
L'on  ne  voit  de  mécontents  que  quelques  hommes 
jaloux  du  bonheur  d'autrui,  qui  avaient  tout  sacrifié 
à  leur  ambition,  et  cette  horde  peu  nombreuse  de 
fainéants  dont  ils  flattaient  les  vues  et  la  cupidité, 

fiour  eu  faire  les  instruments  de  leurs  cruautés  et  do 
cur  domination. 

«  C'est  sans  doute  dans  cette  caste  d'hommes  ré- 
prouvés que  Chastes  trouve  des  partisans,  et,  si  j'en 
juge  par  ses  abonnés,  je  n'ai  pas  de  peine  à  décou- 
vrir ceux  qu'il  cherche  à  flagorner.  J'»i  eu  une  oc- 
casion de  voir  un  échantillon  de  son  indignation 
contre  la  révolution  du  9  thermidor  dans  son  Nu- 
méro 27  de  son  journal ,  qu'il  devrait  intituler 
VAmi  de$  Ennemis  du  Peuple;  il  dit  que  j'ai  rendu 
la  justice  aux  Vendéens,  que  je  leur  ai  proclamé  la 
justice  du  jour,  etc.  Oui ,  la  justice  que  je  proclame 
au  nom  de  la  Convention  vaut  bien  celle  que  l'on 
proclamait  dans  le  département,  il  y  a  quelques 
mois.  Que  Chasles  et  ses  adhérents  apprennent  que 
le  résultat  de  mes  opérations  ne  sera  pas  le  meurtre, 
le  pillage,  l'incendie,  le  vol,  les  dilapidations,  les 
vexations  oui  se  sont  commis  dans  toutes  les  com- 
munes du  département  où  je  suis,  et  dont  je  rendrai, 
à  mon  retour,  un  compte  exact,  les  pièces  à  la  main. 
Chasles  et  ses  amis  y  verront  combien  les  habitants 
de  la  Haute-Loire  ont  eu  à  gémir  sous  le  règne  de 
la  tyrannie.  Ce  n'est  pas  Tassentiment  de  tous  les 
Chasles  de  l'univers  que  je  cherche,  mais  bien  celui 
de  la  Convention,  et  la  masse  des  citoyens  du  dépar- 
tement que  je  parcours  aujourd'hui  le  réclame  pour 
moi.  En  attendant,  j'atteste  que  la  Haute-Loire  est 
entièrement  dévouée  à  la  Convention,  et  qu'elle  veut 
ne  se  régler  que  par  elle  :  ses  habitants  font  des 
vœux  sincères  pour  qu'elle  ne  soit  plus  en  butte  aux 
divisions  qui  ont  fait  tant  de  victimes;  ils  chantent, 
avec  un  égal  enthousiasme,  les  victoires  de  nos 
armées  et  la  chute  des  hommes  de  sang. 

•  PlERBET. » 

Cette  lettre  est  renvoyée  au  comité  de  sûreté  gé- 
nérale. La  Convention  en  décrète  l'insertion  au  Bul- 
letin, ainsi  que  des  lettres  précédentes. 

—  Laurence,  au  nom  du  comité  de  législation, 
propose  à  la  Convention  de  confirmer  plusieurs 
choix  faits  par  ce  comité  pour  remplir  les  places 
dans  différentes  administrations,  entre  autres  dans 
celle  du  district  de  Cusset. 

Forestier  :  Je  suis  étonné  de  ce  qu'on  propose, 
pour  remplir  des  places  dans  le  district  de  Cusset, 
des  citoyens  sur  le  compte  desquels  on  ne  m'a  pas 
consulté.  (On  rit.) 

Plusieurs  voix  :  La  liste  a  été  affichée. 

Laurence  :  Le  comité  de  législation  a  pris  l'avis 
de  la  députation  du  département  de  rAllier  sur  le 
civismeet  la  moralité  des  candidats,dont,au  surplus, 
les  noms  ont  été  exposés  pendant  trois  jours  dans 
la  salle  des  séances  de  la  Convention. 

Plusieurs  voix  ;  L'ordre  du  jour  ! 

L'ordre  du  jour  est  adopté. 


Thibault  :  Pour  éviter  à  Ta  venir  des  réclama  tiens 
pareilles  à  celle  de  Forestier,  je  demande  que  le 
comité  de  législation  soit  chargé  de  faire  lui-même 
les  nominations,  de  concert  avec  les  députés  du  dé- 
partement où  il  s'agira  de  nommer. 

Laurence  :  Je  demande,  moi,  s'il  ne  serait  pas 
temps  de  renvoyer  au  comité  de  législation  la  ques- 
tion de  savoir  s'il  ne  conviendrait  pas  de  restituer  au 
peuple  le  droit  de  nommer  tous  les  fonctionnaires. 
(Applaudissements.) 

^huriot  :  J'appuie  la  proposition  de  Laurence.  I! 
est  ridicule  de  faire  nommer  par  l'assemblée  des  per- 
sonnes qui  ne  sont  souvent  connues  que  d'un  seul 
de  ses  membres. 

Le  renvoi  proposé  par  Laurence  est  décrété. 

Jabs-Panvilli^rs,  au  nom  des  comités  de  secours 
publics  et  de  salut  public  :  Citoyens,  de  toutes  les 
parties  de  la  dépense  publique  il  n'en  est  point  qu'il 
soit  plus  important  de  considérer  dans  son  ensemble 
et  dont  il  soit  plus  nécessaire  de  réserver  exclusive- 
ment l'ordonnance  à  la  Convention  nationale  que 
celle  dessecours  et  des  pensions.  En  effet,  les  secours 
publics  sont  une  dette  à  laquelle  tous  les  indigents 
ont  un  droit  égal,  en  proportion  de  leurs  besoins.  II 
en  est  de  même  des  récompenses  nationales;  tous 
ceux  qui  servent  la  république  y  ont  également  droit, 
à  raison  de  l'importance  et  ae  la  durée  de  leurs 
services. 

Pour  ne  pas  s'écarter  des  principes  d'égalité  qui 
doivent  en  régler  la  distribution,  il  faut  donc  suivre 
des  bases  uniformes,  et  ces  bases  doivent  être  éta-  ' 
blies,  d'un  côté  sur  la  justice,  de  l'autre  sur  l'intérêt 
de  la  république. 

Trop  souvent,  cependant,  des  représentants  du 
peuple  eu  mission,  sans  doute  entraînés  par  un  sen- 
timent de  commisération,  sans  avoir  égard  à  ces 
principes,  ont  pris  des  arrêtés  pour  accorder  des 
secours,  non  de  ces  secours  individuels  que  le  besoin 
pressant  réclame  et  que  l'on  ne  peut  refuser  sans 
blesser  l'humanité,  mais  des  secours  généraux  appli- 
cables seulement  à  une  classe  particulière  de  ci- 
toyens, qui,  par  ce  moyen,  se  trouve,  pour  ainsi 
dire,  privilégiée.  11  en  est  même  qui  ont  accordé 
des  pensions  viagères. 

Je  n'examinerai  point  en  ce  moment  si  les  pou- 
voirs des  représentants  du  peuple  dans  les  départe- 
ment s'étendaient  jusque-la.  Mon  opinion  particu- 
lière est  que  leur  mission  n'a  dû  avoir  pour  objet 
principal  que  de  faciliter  l'action  du  gouvernement, 
en  suppléant  au  silence  des  lois  dans  les  cas  urgents 

Eour  le  salut  de  la  république;  mais  je  crois  que, 
ors  ces  cas  assez  rares,  ils  ont  dû  toujours  puiser  les 
règles  de  leurs  arrêtés  dans  les  décrets  de  la  Con- 
vention nationale;  autrement  il  y  aurait  eu  dans  la 
république  autant  de  pouvoirs  législatifs,  distincts 
et  séparés,  et  par  conséquent  autant  de  systèmes  de 
législation  différents  qu'il  y  aurait  eu  de  représen- 
tants en  mission. 

11  faut  convenir,  au  reste,  qu'il  n'y  a  point  de  mo- 
tif qui  emporle  avec  lui  plus  d'intérêt  que  celui  qui 
a  causé,  en  général,  l'erreur  de  pouvoir  sur  laquelle 
vos  comités  de  secours  et  de  salut  publics  m'ont 
chargé  d'appeler  votre  attention.  Une  erreur  (^ui  n'a' 
tourné  qu'au  profit  de  l'indigence  doit  être  prévenue 

fiour  l'avenir,  lorsque  les  principes  et  l'intérêt  de 
a  république  l'exigent;  mais  on  ne  doit  point  cher- 
cher à  la  réparer,  ni  même  la  blâmer,  lorsqu'elle  a 
pris  sa  source  dans  un  sentiment  pur,  tel  que  celui 
oui  animait  ceux  de  nos  collègues  qui  ont  accordé 
des  pensions  ou  des  secours  généraux  à  des  classes 
particulières  de  malheureux. 

Nous  ne  devons  pourtant  pas  nous  dissimuler 
combien  cette  action  généreuse  en  elle-même  pour^ 


ou 


nit  devenir  funeste  à  la  liberté,  si  elle  ëteit  permise 
et  dictée  par  l'ambition. 

11  est  aisé  de  sentir  combien  la  faculté  d'accorder 
des  secours  ou  des  pensions  serait,  pour  un  ambi- 
tieux, un  moyen  puissant  de  se  faire  des  partisans  et 
de  rétablir  la  tyrannie. 

Mais,  je  le  répète,  ce  n*est  point  sous  ce  point  de 
vuequej*ai  à  vous  présenter  les  incoiiyénieiits  des 
arrêtés  particuliers  dont  je  viens  vous  entretenir.  Ce 
n*est  ^uc  par  respect  pour  les  principes  de  Tégaiité, 
pour  éviter  les  abus  et  pour  mettre  plus  d'ensembh; 
et  d'uniformité  dans  la  distribution  des  secours  cl 
des  pensions,  que  vos  comités  m'ont  chargé  de  vous 
proposer  de  (Idcrëter  qu'il  ne  sera  plus  donné  de 
suite  à  ces  arrêtés. 

Au  surplus,  les  individus  qui,  par  cette  mesure, 
se  trouveront  privés  de  secours  ou  pensions  aux- 
quels ils  ont  des  droits  réels,  n'en  souffriront  uoiiit, 
puisqu'ils  conserveront  toujours  la  (acuité  oe  les 
réclamer,  conformément  aux  lois  de  la  Convention 
nationale.  Voici  le  projetdedécretqueje  suis  chargé 
de  vous  présenter  : 

•  La  Convention  nationale,  aprè^  avoir  entendu 
le  rapport  de  ses  comités  de  salut  public  et  des  se* 
cours  publics,  décrète  : 

•  Art.  1er.  n  ne  sera  plus  donné  de  suite  aqx  ar- 
rêtés par  lesquels  les  représentants  du  peuple  en 
mission  ont  accortl»»  des  secours  on  pensions  a  dos 
individus  ou  ù  des  dusses  particulières  de  citoyens. 

«  11.  Les  citoyens  qui  ont  desdt'oils  aux  secours  ou 
•pensions  qu'il»  avaient  obtenus  pur  iesdits  nrrêli^s, 
et  qui  s'en  trouveront  privés  par  les  dispositions  de 
Tarticle  précédent,  pourront  les  reclamer  suivant  les 
formalités  prescrites  par  les  lois.  • 

Ce  décret  est  adopté. 

—  Un  membre,  au  nom  du  comité  des  secours, 
fait  rendre  le  décret  suivant  : 

«  La  Convention  décrète  qu'à  l'avenir  les  certifi- 
cats d'indigence  exigés  des  veuves  et  enfants  des 
citoyens  morts  dans  un  service  requis  et  commande, 
pour  obtenir  les  secours  ou  pensions  auxquels  ils  ont 
droit,  en  vertu  des  lois  du  4  Juin  1793,  tl  pluviôse 
et  18  prairial  de  l'an  2,  seront  délivrés  à  Paris  par 
les  comités  de  bienfaisance,  visés  au  comité  civil  de 
la  section  et  au  département,  et  que,  dans  les  autres 
communes  de  la  république,  les  mêmes  certificats 
d'indigence  seront  délivrés  par  la  municipalité,  et 
visés  seulement  par  le  directoire  du  district.  • 

Thibaudeau  :  La  Convention  a  nommé  une  com- 
mission composée  d'un  membre  de  chaque  comité 
pour  examiner  d'abord  s'il  convenait  de  maintenir, 
de  changer  ou  de  supprimer  l'organisation  actuelle 
des  commissions  executives  et  des  agences,  et  faire 
à  ce  sujet  un  rapport  à  la  Convention. 

Vous  avez  postérieurement  décrété  que  la  com- 
mission chargée  de  réviser  l'organisation  du  gou- 
vernement ferait  incessamment  son  rapport  sur  les 
moyens  d'en  assurer  la  marche,  de  lui  donner  toute 
l'activité  et  la  force  nécessaires. 

Dès  lors  la  commission  s'est  occupée  de  ces  grands 
objets  :  les  éléments  dont  elle  était  composée,  l'amo- 
\ibilite  des  comite.s  l'ont  souvent  désorganisée  ou 
ont  entravé  ses  travaux,  Jusqu'au  moment  où  vous 
avez  décrété  que  les  représentants  qui  la  composaient 
en  resteraient  membres  lors  même  qu'ils  sortiraient 
des  comités  qui  les  avaient  nommés. 

La  commission  s'est  néanmoins  occupée  avec  quel- 
que fruit  de  l'objet  pour  lequel  elle  avait  été  insti- 
tuée, et  elle  était  sur  le  point  de  vous  présenter  le 
résultat  de  ses  travaux  lorsqu'une  motion  d  ordre 
faite  dans  l'assemblée  l'a  encore  jetée  dans  Tincer- 
titude. 


Fréron  vous  a  proposé  ëe  décréter  :  i^  qii*ll  \ 
créé  une  commission  chargée  de  préparer  les  moyens 
d'exécution  de  la  constitution  républicaine;  }•  quo 
le  gouvernement  actuel  ne  pourra  être  remplacé  que 
par  un  gouvernement  délinitif  établi  sur  les  bases 
de  la  constitution  de  1793. 

Vous  avez  renvoyé  ces  propositions  à  Tetamen  de 
vos  trois  comités.  La  première  devait  vous  être  pri{- 
sentée  par  la  commission,  qui  rn  avait  senti  la  né* 
cessité;  mais  le  renvoi  prononcé  sur  la  seconde  a 
paru  k  votre  commission  devoir  suspendre  ses  tra- 
vaux jusqu'à  ce  que  la  Convention  se  soit  eipliquéi*  ; 
car  elle  ne  peut  plus  continuer  à  s'occuper  de  rëvt*' 
ser  l'organisation  actuelle  du  gouvernement,  oe  qui 
porte  nécessairement  sur  la  forme,  lorsque  vous  avez 
chargé  vos  trois  comités  d'examiner  la  proposition 
faite  de  ne  rien  changer  à  cette  forme  jusqu  au  mo- 
ment où  la  constitution  pourra  être  mise  en  activité. 

La  commission  m'a  chargé  de  vous  présenter  ses 
doutes  et  de  provoquer  votre  décision. 

Tburiot  :  Un  renvoi  prononcé  n'a  jamais  pa  sus- 
pendre l'exécution  d*un  décret  de  la  Convention,  à 
meins  que  le  même  décret  ne  contienne  expressé- 
ment cette  clause  de  suspension.  Je  ne  vois  donc 
rien  qui  justifie  rincertitude  de  votre  commission 
pour  exécuter  la  mission  dont  vous  l'avez  charçée. 

Je  ne  saurais  être  entièrement  de  l'opinion  déve- 
loppée par  Fréron,  et  qui  tendrait  à  conserver  fa 
forme  du  gouvernement  provisoire  actuel  jusqu'à 
l'organisation  définitive  du  gouvernement  répunli- 
cain.  Je  crois  que  la  Convention  doit  suivre  à  cet 
égard  une  autre  marche;  In  Convention  n'avait 
nommé  une  commission  pour  examiner  l'organisa- 
tion du  gouvernement  actuel  que  parce  qu'elle  ct«it 
convaincue  qu'il  y  avait  des  vices  dans  cette  orga- 
nisation :  la  commission  est  chargée  de  lui  présenter 
son  travail  à  cet  égard,  et  j'observe  que  les  vices  de 
l'organisation  actuelle  sont  tels  que  la  Convention 
ne  pourrait  trop  presser  le  rapport  de  la  commission , 
Son  travail,  en  eftet,  doit  la  mettre  en  état  de  vous 
présenter  un  résultat  qui  vous  faciliterait  les  moyens 
d'examiuer  le  jeu  de  la  machine  que  vous  devez 
organiser  définitivement,  et  par  conséquent  vous 
mettre  parfaitement  en  mesure  de  suivre  le  travail 
de  l'organisation  définitive  du  gouveri»emeut  répu- 
blicain. 

Quand  le  travail  de  cette  première  commission 
aura  été  adopté,  la  Convention  jugera  sans  doute 
convenable  de  nommer  une  seconde  commlssifui 
chargée  de  lui  présenter  l'organisation  déllnilive  de 
son  gouvernement  Celle  commission  suivra  le  tra- 
vail de  la  première  dans  toute  ses  parties,  et  se 
trouvera  à  portée  d'en  indiquer  toutes  les  défeotuo» 
sites  et  d'en  éviter  le  retour. 

Je  demande  donc  Tordre  du  jour,  et  que  la  Con- 
vention charge  sa  commission  de  suivre  sou  travail. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

CAMROif,  au  nom  du  comité  des  finances  :  La  li- 

3 nidation  de  la  dette  a  nécessité  la  remise  et  le  dépôt 
es  titres  de  créance  qui  ont  été  remplacés  momtMi- 
tanément,  et  pour  le  temps  de  la  liquidation,  par 
des  litres  provisoires  qui  sont  :  |o  des  certificats  de  ■ 
propriété  ;  2»  des  récépissés  de  l'emprunt  volontaire  ; 
30  des  inscriptions  provisoires;  40  des  çcrlilicots 
d'arrérages. 

Plusieurs  citoyens  ont  perdu  ces  titres  provisoi- 
res; ils  sont  privés  de  leurs  revenus  nniiuejs*,  la 
nation  est  trop  juste  pour  vouloir  profiler  de  cette 
circonstance  pour  anéantir  des  créances  légitimes; 
mais  aussi  devons-nous  prendre  des  précautions 
telles  qu'en  favorisant  des  citoyens  malheureux  nous 
n'ouvrions  pas  une  porte  a  la  friponnerie,  qui  pour- 


615 


rait  profiler  de  celle  occasion-  pour  se  procurer  des 
doubles  titres  de  créance  qui  pourraient  donner  lieu 
dans  une  ou  plusieurs  années  à  des  réclamalioiis 
qu'on  croirait  tondées. 

Votre  comité  des  finances, «n  s'occupant  des  récla- 
mations (fui  ont  été  Faites  pour  les  litres  perdus,  a 
cherché  tous  les  moyens  qu  il  a  crus  nécessaires  pour 
concilier  le  droit  des  citoyens  avec  les  intérêts  de  la 
république. 

Les  certilicats  de  propriété  ont  été  fournis  par  les 
payeurs  ou  par  les  liquidateurs  de  la  dette  ancienne  ; 
lis  servent  pour  se  faire  rtfconnaltre  à  la  trésorerie 
nationale,  et  pour  réclamer  les  Inscriptions  délinl- 
lires  ;  on  pouviil  les  échanger  contre  des  inscriptions 
provisoires. 

On  peut  les  comparer  à  des  effets  au  porteur  qui 
ne  peuvent  pas  être  n^ociés,  et  qui  serviraient  à 
constater  la  propriété. 

Mous  devons  veiller  à  ce  qu*un  faux  propriétaire 
ne  se  fasse  pas  reconnaître  créancier  de  fa  nation  au 
lieu  et  place  du  véritable  créancier;  il  faut  aussi 
prendre  garde  qu*un  propriétaire  qui  aurait  retiré 
une  inscription  provisoire  ne  se  présente  pas  une 
seconde  fois. 

C'est  pour  prévenir  ces  abus,  t\  satisfiaiire  les  per- 
sonnes qui  ont  perda  leurs  titres,  que  votre  comité 
vous  propose  les  dispositions  de  l'article  I«r. 

Il  se  trouve  une  circonstance  particulière,  celle 
011  un  payeur  ou  liquidateur  n*B  pas  remis  le  certi^ 
licat  de  propriété  au  vrai  propriétaire.  Celui-ci  se 
trouve  aujourd'hui  porteur  d'un  bulletin  qui  prouve 
qu'il  n'a  pas  reçu  ;  ou  ne  peut  donc  pas  l'astreindre 
aux  forinaliU'S  que  nous  avons  établies  pour  les  cer- 
tificats perdus;  cependant  il  est  en  souffrance,  et  il 
ne  peut  pas  recevoir  sou  revenu  annuel.  Votre  co- 
mité a  cru  devoir  vous  proposer,  dans  ce  cas,  les 
dispositions  de  l'article  II. 

On  doit  observer  que  la  délivrance  du  duplicata 
a  d'autant  moins  d'inconvénients  qu'on  ne  peutfaiie 
aucun  usage  des  ccrliiicats  de  propriété  qu'avec  des 
certilicats  de  résidence  qu'il  est  diflicilc  d'obtenir 
sous  uu  nom  supposé. 

Les  receveurs  de  district  ont  fourni  par  duplicata 
les  récépissés  de  l'emprunt  volontaire.  Un  duplicata 
a  servi  au  payement  de  l'emprunt  forcé;  l'autre  est 
nécessaire  pour  se  faire  reconnaître  à  la  trésorerie 
et  s'y  faire  délivrer  une  inscription  sur  le  grand 
livre.  On  pouvait  les  échanger  contre  les  inscrip* 
lions  provisoires. 

Nous  devons  prendre  les  mtoes  précautions  que 
pour  les  certilicats  de  propriété,  puisqu'il  pourrait 
en  résulter  les  mêmes  abus;  c'est  dans  cette  vue  que 
Votre  commission  vous  propose  l'orticle  111. 

Les  inscriptions  provisoires  ont  été  délivn'cs  par 
la  trésorerie  nationale.  Biles  pouvaient  se  négocier 
au  moyen  d'un  endossement  qui  était  soumis  a  l'en- 
rcgistreuient;  on  pouvait  aussi  les  employer  en 
payement  des  domaines  nationaux,  les  receveurs  de 
district  étant  autorisés  a  les  recevoir,  dans  certains 
cas,  comme  comptant. 

Le  propriétaire  qui  les  a  retirées  peut  donc  en 
avoir  déjà  disposé  sans  que  la  trésorerie  en  ail  la 
moindre  connaissance. 

Les  inscriptions  provisoires  peuvent  être  consi- 
dérées comme  des  lettres  de  change  oui  n'appar- 
tiennent qu'au  dernier  endosseur  :  il  faut  prendre 
des  mesures  qui  puissent  rassurer  sur  les  droits  de 
ceux  qui  ont  iiequis  ces  Hleis  sur  h  confiance  et 
d*après  l'assurance  de  la  loi:  il  faut  aussi  prendre 

§arde  r|u*on  ne  vienne  pas  reclamer  une  inscription 
éfînitive  pour  le  montant  d^unc  inscription  provi- 
soire au'un  receveur  de  district  aurait  reçue  en  paie- 
ment des  domaines  nationaux» 


On  peut  dire  qu'il  n'existe  réellement  aucun  pro- 
priétaire des  inscriptions  provisoires  qui  soit  parfai- 
tement connu  ;  aussi  votre  comité  s'est-il  arrêté  a 
vous  proposer  d'exiger  une  caution,  et  de  fixer  une 
peine  à  ceux  qui  abuseraient  des  dispositions  de  la 
toi  pour  se  créer  un  litre  de  créance  qui  ne  leur  ap- 
partiendrait pas. 

Le  grand  livre  serviras  faire  reconnaître  les  abus, 
s'il  s'en  commet  ;  la  réclamation  du  vrai  propriétaire, 
qui  se  présentera  pour  jouir  de  sa  propriété,  ferait 
aussi  reconnaître  les  personnes  qui  en  auraient  abusé. 

Le^  certiGcats  d'arrérages  ont  été  fournis  par  les 
payeurs  ou  par  les  liquidateurs;  ils  constatent  le 
droit  des  propriétaires  aux  orrérages  qui  leur  sont 
dus,  et  qui  sont  payés  par  la  trésorerie  sur  ces  cerli; 
Ûcats  et  sur  le  récépissé  des  parties. 

La  multiplicité  des  parties  prenantes,  qui  sont  au 
nombre  d'environ  trois  cent  mille,  ne  permet  pas  de 
vérilier  sur-le-champ  si  la  somme  réclamée  a  déjà 
été  payée  ;  ce  n'est  qu'au  classement  des  pièces  pour 
la  comptabilité  qu'on  peut  s'apercevoir  oes  doubles 
emplois,  s'il  y  en  a  ;  ce  classement  peut  traîner  quel* 
quefois  pendant  une  année;  pour  ne  pasretorder  le 
payement  des  personnes  qiii  ont  perdu  leur  titre  rt 
se  garantir  contre  les  doubles  emplois^  votre  comité 
vous  propose  1rs  dispositions  de  1  article  VI. 

Les  opérations  du  grand  livre  et  ta  rapidité  avec 
laquelle  il  a  fallu  les  exécuter  est  cause  que  quelques 
certificats  remis  ont  été  adirés  dans  rintéricur  de  la 
trésorerie;  comme  c'est  le  grand  livre,  comparé 
aux  états  fournis  par  les  payeurs,  qui  est  la  base  ae  la 
comptabilité,  et  qu'il  n'est  pas  juste  que  des  parti- 
culiers souffrent  d'une  faute  qu'ils  iront  pas  corn- 
mise,  nous  vous  proposons  les  dispositions  de  rar^^ 
ticlc  Vil. 

Déjà  quelques  citoyens  ont  perdu  leurs  inscrip** 
lions  sur  le  grand  livre;  comme  cet  effet  ne  peut 
pas  établir  le  droit  à  la  propriété,  le  grand  livre 
étant  le  titre  unique  et  fonaainental  de  tous  les 
créanciers  de  la  nation,  votre  comité  n'a  vu  aucun 
inconvénient  d'en  faire  délivrer  des  duplicata. 

Déjà  la  loi  du  21  frimaire  an  3  a  statué  sur  le 
mode  à  adopter  pour  suppléer  les  contrats  et  titres 
qui  ont  élé  perdus  ou  adirés,  mais  elle  ne  prononce 
pas  sur  les  eflt'ts  au  porteur,  ni  sûr  les  l*econnais- 
sances  de  liquidation. 

Déjà  tous  les  effets  de  celle  nature  qui  n'ont  pas 
été  déposés  à  la  liquidation  ont  encouru  fa  déchéance  ; 
il  y  aurait  à  craindre  que,  sous  le  prétexte  qu'oli  a 
perdu  son  titre,  on  ne  trouvât  le  moyen  de  le  con- 
server et  d'éviter  la  déchéance  encourue. 

D'un  autre  côté,  les  eff^elsau  porteur  n'appartien* 
lient  qu'à  ceux  qui  les  représentent;  il  est  diuicile  de 
reconnaître  si  les  effets  ont  été  remboursés,  à-moins 
de  vérilier  tous  les  comptes  de  l'ancien  trésor  public,^ 
de  la  caisse  de  l'extraordinaire  et  les  listes  de  tirage  ; 
opération,  pour  ainsi  dire,  impraticable  dans  ce 
moment. 

Ce  n'est  donc  qu*en  Jugeant  l'état  et  la  moralité 
des  demandeurs,  et  en  exigeant  une  caution  suffi* 
saule,  qu'on  peut  décider  sur  les  demandes  de  cette 
nature.  Votre  comité  a  pensé  que  vous  deviez  Tau- 
loriscrà  y  statuer,  en  lui  prescrivant  des  précau- 
tions; c'est  dans  cette  vue  qu'il  vous  propose  les 
articles  suivants  : 

•  La  Convention  tialkmale,  aprb  avoir  roiaidki  le  rap* 
port  du  comité  des  fioancei,  décrète  t 

«  Art.  !•'.  Les  créanciers  de  la  nation  qui  ont  pelda 
leur  ccniflcQt  de  propriété  pourront  retirer  leurs  inscrip-* 
lions  définitives  en  rapportant  au  directenr  du  grand  livre: 
1*  un  dnplicata  des  récépissés  perdus,  qu'ils  se  feront  re- 
mcUre  par  les  payeurs  ou  lîquidateuri  qui  les  leur  avaient 
fournis;  S*  la  soumlMlon  de  rapporter  les  cerlUlcats  par- 


616 


dus,  s'il  les  rclrouTcnl ;  S*  un  certificat  d'indivîdualilé; 
A»  un  certificat  du  liquidateur  delà  irésorerie,  conslalant 
qu'il  ne  leur  a  point  éié  délivré  d'inscription  provisoire 
pour  les  sommes  portées  auxdiis  certificats. 

t  II.  Dans  le  cas  où  les  payeurs  ou  liquidateurs  auraient 
délivré  des  cerliflcals  de  propriété  à  d'autres  personnes 
qu'aux  propriétaires,  ils  sont  autorisés  d'en  délivrer  des 
duplicata  aux  porteurs  de  bulletin  de  remise  des  titres,  en 
y  faisant  mention  que  •  le  premier  certificat  a  été  égaré, 
•  ou  a  été  remis  à  un  autre  individu.  • 

•  L'extrait  d'inscription  sera  délivré  aux  porteurs  de  ce 
duplicata ,  qui  seront  tenus  de  fournir  en  même  temps  un 
certificat  du  liquidateur  de  la  trésorerie,  constatant  qu'il 
n'a  pas  été  fourni  d'inscription  provisoire  pour  les  sommes 
portées  au  duplicata. 

•  «  III.  Les  propriétaires  des  récépissés  de  l'emprunt  vo- 
lontaire qui  les  ont  égarés  pourront  retirer  à  la  trésorerie 
le  certificat  de  propriété  qui  leur  est  nécessaire  pour  obte- 
nir leurs  inscriptions  définitives,  en  fournissant:  !•  un 
tripiicala  du  récépissé  du  receveur  de  di>trict  ;  2"  la  sou- 
mission de  rapporter  le  certificat  perdu,  s'ils  le  retrouvent  ; 
S»  un  ctTlifical  d'individualité;  4*  le  récépissé  de  la  caisse 
des  recettes  journalières  constatant  qu'ils  ont  payé  la  por- 
tion des  intérêts  prescrit^  par  la  loi  du  34  vendémiaire 
an2«. 

I IV.  Les  personnes  qui  ont  perdu  leurs  inscriptions 
provii^oires  pourront  retirer  leurs  inscriptions  définitives 
en  fournissant  :  i*  un  certificat  du  liquidateur  de  la  tré- 
sorerie, constatant  que  l'inscription  provisoire  qu'on  dé- 
clare avoir  perdue  a  été  expédiée  ;  2»  un  certificat  d'indi- 
vidualité; 3»  une  soumission  de  rapporter  l'inscription  qui 
a  été  perdue ,  si  elle  se  retrouve  ;  4*  une  caution  suffisante 
reçue  et  admise  par  l'agent  de  la  trésorerie,  laquelle  du- 
rera ,  ainsi  que  l'opposition  qui  sera  formée  au  nom  de  la 
nation,  sor  la  propriété  de  l'inscription  délivrée,  jusqu'à 
ce  que  toutes  les  inscriptions  provisoires  soient  rentrées. 

•  V.  Dans  le  cas  où  l'inscription  provisoire  déclarée  per- 
due aurait  été  vendue  ou  employée,  le  réclamant  sera  con- 
damné à  une  amende  égale  à  cinq  fois  le  payement  annuel 
de  l'inscription,  et  la  caution  garantira  le  capital  de  ladite 
Inscription  calculée  à  raison  de  vingt  fois  son  montant  et 
cinq  années  d'arrérages. 

■  Vï.  Les  personnes  qui  ont  perdu  leur  certificat  d'ar- 
rérages pourront  recevoir  leur  payement  sur  un  duplicata 
qui  sera  délivré  par  le  payeur  ou  liquidateur,  d'après  la 
demande  qui  sera  faite  par  le  payeur  principal  de  la  tréso- 
rerie. 

«  Celte  demande  ne  pourra  être  faite  qu'après  que  le 
réclamant  aura  fourni  bonne  et  suffisante  caution,  accep- 
tée et  reçue  par  l'agent  du  trésor  public,  laquelle  s'obli- 
gera pendant  une  année  à  rembourser  la  somme  réclamée, 
au  cas  qu'il  y  ait  un  double  emploi. 

«  La  personne  qui  aura  réclamé  un  payement  par  dou- 
ble emploi  sera  condamnée  à  une  amende  de  trois  fois  le 
montant  du  payement  qui  lui  aura  été  fait. 

«  VII.  Dans  le  cas  où  quelques  cerlincals  remis  à  la  tré- 
sorerie y  auraient  été  égarés,  le  liquidateur  de  la  trésore- 
rie est  autorisé  d'en  demander  un  duplicata  aux  paveurs 
ou  liquidateurs  qui  les  auraient  fournis,  lesquels  feront 
mention  sur  ce  duplicata  de  la  demande  qui  leur  en  sera 
faite. 

«  VIII.  Les  personnes  qui  auront  perdu  leurs  inscrip- 
tions de  la  dette  consolidée  ou  viagère  pourront  en  obtenir 
de  nouvelles,  timbrées  du  mot  duplicata. 

I  Ces  inscriptions  par  duplicata  ne  seront  admises  en 
payement  des  créances  dues  à  la  nation  qu'à  la  trésorerie 
nationale,  dans  les  cas  où  la  loi  admet  en  payement  le» 
inscriptions  sur  le  grand  livre. 

-  IX.  Les  personnes  qui  ont  perdu  des  effets  au  porteur 
ou  des  reconnaissances  de  liquidation,  et  autres  effets  au- 
tres que  ceux  mentionnés  dans  la  loi  du  21  frimaire  et  le 
présent  décret,  seront  tenues  d'adresser  leurs  demandes 
aux  commissaires  delà  trésorerie  nationale  d'ici  au  1*' ven- 
démiaire an  4 ,  en  leur  fournissant  toutes  les  preuves  et 
indications  qui  peuvent  établir  leurs  demandes. 

«Après  ce  délai,  il  ne  sera  plus  reçu  de  réclamations, 
ceux 'qui  auraient  négligé  de  les  faire  dans  ce  délai  étant 
déchus  de  toute  réclamation  envers  la  république. 

c  X.  Les  commissaires  de  la  trésorerie  feront  faire  tou- 


tes les  recherches  et  examens  nécessaires  pour  vérifier  la 
légitimité  des  demandes;  ils  en  feront  un  rapport  général 
au  comité  des  finances,  qui  est  autorisé  à  statuer  par  un 
arrêté  sur  toutes  les  réclamations,  en  prenant  les  précau- 
tions nécessaires  pour  garantir  l'intérêt  uational.  » 
Ce  projet  de  de'cret  est  adopté. 

{La  suite  demain.) 


N.  B,  •—  Dans  la  séance  du  16,  le  président  a  an- 
noncé à  l'assemble  qu'il  venait  de  recevoir  une 
lettre  de  Saint-Domingue,  par  un  officier  qtii  a  paru 
à  la  barre. 

Le  président  a  donné  lecture  de  celte  lettre,  qui 
est  signée  d'Etienne  Lavaux,  gouverneur  gëncraî 
par  intérim  des  îles  françaises  sous  le  vent,  et  datée 
du  Port-de-l^aix,  le  18  vendémiaire. 

Celte  lettre  annonce  que  les  républicains,  quoique 
peu  nombreux,  ont  conservé  dans  le  nord  de  l'île 
deux  forts,  pour  y  recevoir  les  forces  qui  seront  en- 
voyées par  la  mère-patrie  au  secours  delà  colonie:  le 
Port- de  Paix  et  le  Cap  dans  le  sud  ;  lesCayes  dans  le 
sud-est;  dans  Touest,  Jocmelle. 

Le  général  Lavaux  ajoute  dans  sa  lettre  que  deux 
officiers  qui  se  sont  distingués  dans  l'île  contre  les 
Anglais,  et  qui  sont  chargés  de  ces  dépêches,  pour- 
ront donner  de  plus  granas  renseignements  sur  l'clal 
actuçl  de  nos  colonies. 


LIVRES  DIVERS. 

Annales  du  Cultivateur,  pour  la  troisième  année  de  la  ré- 
publique, présenté  le  50  pluviôse  de  Pan  S*  i  la  Gonveotioa 
nalionale^  qui  en  a  décrété  Piropression  et  Pcnvoi,  pour  ser- 
vir aux  écoles  de  la  république;  par  G.  Romme,  représentant 
du  peuple. 

Les  citovcns  qui  ont  concouru  ï  ce  travail ,  en  communi* 
quant  les  vérités  utiles  qu'ils  doivent  à  leur  expérience  et  à 
leurs  mcfiitntions.sont  :  Ccisc,  Vilmorin,  Thouin.  Parmcnlitrr, 
Dubois,  Desfontaiiies,  Lnmnrk,  PreauUaux,  Lefebvre,  Bou- 
lier, Chabert,  Flandrin,  Gilbert,  Daubcnton,  Richard  et  Uo- 
lard.  Un  vol.  in-12  de  400  pages.  Prix  :  4liv.,  broche;  5  liv. 
S  sous,  franc  de  port  pour  les  dcparlcmcnls  cl  les  pays  coq* 
quis.  A  Paris,  chez  Buisson,  libraire,  rue  Hautefeuille,  a»  20. 
Il  faut  affranchir  le  mootant  cl  la  lettre  d'avis. 

—  Code  de  police  municipale,  correctionnelle,  de  sûreté 
générale  et  révolutionnaire  i  deuxième  cdilion ,  contenant, 
tome  I"*  et  11*,  tous  les  décrets  des  Assemblées  constituante, 
législative  et  conventionnelle,  sur  toutes  les  parties  de  la  po- 
lice ;  ouvrage  indispensable  aux  fonctionnaires  chargés  de 
cette  partie  de  Padministration  ;  par  le  citoyen  Guichard. 
Prix  :  16  liv.,  et  17  liv.  10  sous,  franc  déport.  A  Paris,  chef 
Garnery,  libraire,  rue  Serpente,  n»  17. 

—  Valdenil,  ou  les  Malheurs  d'un  habitant  de  Samt-Do- 
mingue^  publiés  par  Maton  La  Varenne;  â  vul.  in-18,  avec 
gravures.  Prix  :  3  liv.,  et  3  liv.  15  sous,  franc  de  port.  A 
Paris,  chez  Deroy,  libraire,  rue  du  Cimetièrc*André,  n»  15. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  de  la  dette  consolidée  perpétuelle  se  fait 
pour  les  six  derniers  mois  de  Pao  3%  et  pour  Pannée  à  ceux 
qui  n*ont  pas  touché  les  six  premiers  mois  de  ladite  année. 
Les  citoyens  qui  ont  retiré  leur  inscription  déAnitive,  et  qui 
désireraient  être  payés  dans  les  districts,  peuvent  indiquer 
les  chefs-lieux  de  district  où  ils  veulent  être  payés,  coofor- 
mémcnt  à  la  loi  du  3*  jour  des  sansculottides. 

Le  payement  des  renies  viagères  se  fait  cumulativement 
pour  deux  mois  vingt  et  un  jours  de  Paooée  1793  (vieux  style) 
cl  l«s  six  premiers  mois  de  Pao  3*« 


GAZEÏÏE  NATIONALE  oc  LE  HONITEUR  UNIVERSEL. 

N**  168.  Octtdi  18  Ventosb,  l'an  3«.  (Dimanche  8  Mars  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Extrait  d*une  tttire  de  Bamberg ^  en  fVaneofile,  du  20 
fèttrier.  —  Le  princc-éTéqae  de  Bamberg  et  de  Wurli- 
bourg  est  mort  le  14  tle  ce  mois.  Aussitôt  les  courriers  se 
sont  mis  en  campagne.  On  préiend  que  TAutriche cherche 
à  fuire  échoir  cette  succession  ù  un  prince  de  sa  maison; 
le  roi  de  Prusse,  de  son  côlé,  doit  la  considérer  comme  un 
dédommagement  praticable ,  et  qui  pourra  faire  partie  de 
son  traité  de  paix  avec  la  république  française,  etc.;  mais 
les  habitants  des  pays  qu*il  plaît  aux  princes  de  regarder 
comme  des  héritages ,  terre  cl  gens,  se  déclarent  déjà  pour 
ne  vouloir  point  souffrir  la  domination  d*un  étranger.  Des 
placards  imprimés  s'expriment  clairement  là-dessus;  on  y 
exhorte  d*abord,  et  on  y  menace  enfin  au  nom  du  peuple, 
dans  le  louable  dessein  de  diriger  la  nouvelle  élection  qui 
se  fera  par  les  chapitres  respectif!  Une  de  ces  affiches 
porte  eipressén»ent  que,  •  si  l*oa  forçait  d*accepter  un 
étranger  pour  prince ,  It  peiple  tturait  bien  trouver  la 
manière  de  »7en  défaire.  > 

Les  chapitres  respectifs  ont  fixé,  cbacan  séparément, 
le  13  mars  prochain,  pour  faire  l'élection,  de  façon  qu'il 
y  aura  probablement  deux  princes  au  lieu  d'un.*.* 

A  Wuritl>ourg  on  parle  de  deux  prétendants  ;  l'un  est 
le  baron  de  Fecbembach ,  qui  sera  éliminé  comme  Mayeo- 
çais  de  nation  ;  le  second  est  un  très-riche  baron  de  Wurtx- 
ixiurg. 

Le  défunt  prince  sera  enterré  le  5  mars.  Ses  funérailles 
coûteront  à  l'Etat  60,000  florins  ;  or  la  disette  est  extrême 
dans  les  deux  principautés  de  Bamberg  et  de  Wurlibourg, 
et  tandis  que  les  habitants  n'ont  pas  de  pain,  ta  somme 
qu'il  en  coulerait  pour  nourrir  pendant  un  an  cent  mille 
personnes  va  set  dépenser  pour  uu  cadavre*  * 

—  L'électeur  de  Cologne  est  très-malade. 

•«  Le  roi  de  Prusse  Tieol  d*exiger  de  li  tille  de  Franc- 
fort-sur-1e-Mein  2  millions  de  florins  pour  les  fraie  de  st 
protection  puissante»  - 

ANGLETERHE. 

tondre»,  /e  12  février,  »  Les  dispositions  du  ministère 
et  du  parlement  sont  moins  pacifiques  que  jamais;  on  en 
peut  juger  par  le  peu  de  succès  qu'a  eu  la  motion  du 
lord  Bedford  en  faveur  de  la  pals.  Cet  orateur,  dans  lu 
discours  qu'il  prononça  ù  ce  sujet,  s*ailacha  d'abord  ii 
taire  sentir  les  désastres  de  la  guerre.  Il  soutint  que  les 
propositions  de  paix  s'allient  avec  l'honneur  et  i'intérCt  de 
la  Grande-Bretagne;  et,  après  avoir  eiposé  que  le  gou* 
vernement  anglais  est  l'agresseur  dans  cette  guerre,  il  fit 
ses  cllurls  pour  prouver  que  l'intention  du  gouvernement 
et  du  peuple  français  n'est  plus  de  se  mêler  des  affaires 
intérieures  des  nations  étrangères* 

«  A  présent,  dit  ici  l'orateur,  que  je  crois  avoir  détruit 
tout  sujet  de  crainte ,  )e  dois  examiner  sur  quoi  reposent 
nos  espérances.  Est-ce  sur  les  nouveaux  eflorls  de  nos  al- 
liée? Mais  quand  même  ces  alliés  resteraient  toujours  unis 
à  la  coalition  ,  et  qu'ils  leraient  de  nouveaux  efforts ,  il 
est  encore  très-douteux  si  nous  pourrions  obtenir  quclqui  s 
succès.  De? ons*nous  compter  sur  le  manque  de  ressources 
de  la  France?  Mais  tous  les  ans  nous  nous  en  voyons  dé- 
çus. Quant  au  secours  que  nous  devons  attendre  de  la  part 
des  alliés,  je  dois  encore  observer  que  Tempereur  et  le  roi 
de  Prusse  se  sont  déclarés  pour  la  paii. 

«Quand  l'empereur,  dans  la  diète  de  Ratisbonnc ,  i 
voté  comme  archiduc  d'Autriche,  il  •  opiné  pour  la  paix  i 
11  a  demandé  seulement  qu'on  lui  acoordftt  le  t«ai|ii  qu'il 
jugerait  convenable  pour  entrer  ea  oégocietion.  Il  reste  k 
savoir  si  les  0  millions  sterling  que  nous  lui  avont  acoor* 
dés  pourront  le  faire  changer  d*opioion.  Je  crois  d'ailleurs 
que  les  ressources  ne  manqueront  pas  A  la  France;  dans 
un  pays  où  l'on  combat  pour  sa  liberté  et  pour  sa  sûreté 
personnelle,  chaque  individu  est  prêt  ft  fuire  le  sacriGce 

Z*  Série. '^  TomeX. 


de  tout  ce  qu'il  possède.  Ce  ne  sont  pas  là  les  sentiment 
seulement  des  Français,  mais  de  tous  les  peuples  qui  se 
trouvent  en  pareilles  circonstances.» 

Lord  Bedford  compare  ensuite  la  population  de  fa 
France  à  celle  des  autres  puissances;  suivant  son  calcul,  la 
France  forme  un  septième  de  la  population  de  rEuro|)e  ; 
mais,  au  moyen  des  puissances  neutres  et  des  pays  con- 
quis, il  soutient  que  la  population  de  la  France  surpasse 
celle  des  puissances  coaliséos;  ensuite  il  continue  ainsi  : 
«  On  dit  que  la  guerre  actuelle  est  entreprise  pour  le  Ciel 
et  pour  l'humanité;  quant  à  mol,  je  ne  crois  pas  que  cette 
guerre  soit  avouée  par  l'humanité;  si  jamais  elle  eût  pu 
avoir  ce  titre,  c'était  lorsqu'il  s'agissait  de  sauver  l'infor- 
tuné monarque  de  la  France,  quoique  dans  le  fkit  notre 
entreprise  n'ait  fait  qu'accélérer  sa  mort.  Nos  efforts  ont 
sans  doute  beaucoup  contribué  k  établir  le  régime  de  la 
terreur  dans  ce  pays,  et  sans  doute  notre  ministère  a  beau- 
coup de  part  aux  malheurs  qui  sont  arrivés.  Lorsque  nous 
avons  perdu  cinquante  mille  hommes,  ils  viennent  nous 
dire  que  le  comité  de  salut  public  ne  peut  avoir  de  consis- 
tance parce  qu'il  se  renouvelle  par  quart  tous  les-  mois  : 
c'est  comme  s:  on  prétendait  qu'un  changement  de  minis- 
tres dans  un  gouvernemeiU  pouvait  y  être  nuisible.  Lors 
du  changement  qui  vient  de  s'o|)érer  en  France,  ils  se  sont 
réjouis  de  voir  triompher  le  modérantisme  ;  mais  leur  joie 
n'avait  pas  pour  motif  l'humanité,  ni  le  désir  de  voir  cesser 
les  meurtres  et  Ics^nassacres;  ils  pensaient  qu'un  régime 
doux  ayant  succédé  au  système  de  terreur,  il  serait  bien 
plus  facile  de  détruire  leurs  adversaires  et  de  pénétrer  eu 
France. 

ijfconvicnsqueles  crimes  (les  Français  sont  nombreux; 
mais  j'en  appelle  aux  honorables  membres,  et  je  leur  de- 
mande si  c'est  à  nous  à  appliquer  le  ch&timent ,  ou  si  ce 
u'est  pas  plutôt  la  cause  du  Ciel.  On  disait  que  la  tyran- 
nie sous  laquelle  le  peuple  français  avait  gémi  la  condui* 
rait  naturellement  au  royulismc,  et  cependant  nous  avons 
vu  l'effet  contraire.  Lors  de  nos  succès  sur  les  frontières  du 
Nord,  en  Alsace,  dans  Toulon,  avons-nous  vu  un  seul 
Français,  voisin  du  pays  que  nous  occupions,  venir  de- 
mander la  protection  des  alliés?  Vous  avex  vu  un  Dumou- 
riei,  après  avoir  sauvé  son  pays,  abandonner  la  cause  de 
la  liberté,  et  ne  faire  déserter  avec  lui  qu'un  seul  régiment 
de  ligne.  Vous  avex  vu  plusieurs  généraux  monter  sur  Té- 
chafaud,  et  les  troupes  conserver  le  même  enthousiasme^ 
Quant  à  moi,  je  le  déclare  ici ,  quoique  je  ne  nie  sois  pas 
opposé  au  subside,  je  m'oppose  à  toute  idée  de  continua- 
tion de  guerre  ;  si  je  ne  me  conduisais  pas  ainsi ,  je  croirais 
tremper  mes  mains  dans  le  sang  que  la  guerre  fait  verser. 
Mais  si  la  France  refuse  tout  accommodement,  il  sera  natu- 
rel de  penser  qu'elle  médite  d'attaquer  notrepays,  et  alors 
nous  devons  défendre  notre  liberté  dans  notre  pays,  et 
nous  opposer  à  tout  envahissement  ;  et  je  suis  bien  sûr 
qu'il  n'y  aurait  pas  un  seul  habitant  qui  ne  verserait  avec 
plaisir  jusqu'à  la  dernière  goutte  de  son  sang  pour  la  dé- . 
fense  de  notre  poys.  • 

Lord  Bedford  compare  encore  ici  la  détresse  de  la  France 
à  celle  de  son  pays ,  la  disette  de  blé  qui  se  fait  sentir  dans 
les  deux  pays.  Enfin,  après  avoir  dit  que  les  assignats  de 
l'Angleterre,  parleyquels  il  n'entend  point  parler  dos  bil- 
lets de  la  Banque,  mais  des  fonds  publics,  perdent  près 
d'un  tiers  ;  après  avoir  exposé  qu*il  pourrait  s'étendre  en* 
corc  beaucoup  plus  sur  ce  sufet ,  il  a  produit  la  molion 
qu'il  avait  annoncée  ;  mais  elle  a  été  rejelée  à  une  très* 
grande  majorité. 

REPUBLIQUE  DES  PROVING£S-*UMIES« 

Groninguê  le  26  fétrrier,  -^  La  révolution  s*est  fhltd 
pataibl«iuentdaM  cette  ville,  comme  dans  toutes  les  autres* 

La  régence  stathoudérlennt  •  été  reaplaeée  par  une 
nagistratire  patriote. 

Les  Anglais  et  les  Hanovriens  fuient  sans  ordre,  sans 
discipline,  conaiBe  une  troupe  de  brigands  forcenés.  VeU 
frol  les  précède,  le  meurtre  et  le  pillage  lesaccompagmMit  | 
on  neretrouve  que  désolation  partout  où  jls  ont  passé.  Cro- 

78 


613 


ninfifne  s^est  racheté  de  leur  passage  en  leur  envoyant 
tout  ce  qaMIs  ont  demandé.  Ils  ont  tratersé  une  partie  de 
rOost-Frise  comme  on  traverse  un  désert.  Les  habitants 
avaient  fui.  A  Eidembourg ,  dans  la  Gueldre,  les  habitants 
ont  été  rançonnés,  les  églises  dépouillées  :  nulle  propriété 
D*a  été  respectée* 

SUISSE. 

BttUf  le  iO  février»  —  La  mort  du  ministre  prussien  de 
Golix  retarde  seulement  les  négociations  entamées»  mais 
n'y  apportera  point  d'obstacle. 

—  On  parle  diversement  de  l'effet  qu'a  produit  à  Berlin 
la  nouvelle  de  Tinvasion  de  la  Hollande.  Quelques  person- 
nes prétendent  savoir  que  le  roi  de  Prusse  a  été  mécontent 
de  la  préférence  que  la  famille stathoudérieooet  cherchant 
une  retraite»  a  donnée  à  T Angleterre.* 

—  Les  émigrés  d'une  certaine  classe  parlent  beaucoup 
du  rétablissement  de  la  constitution  de  1791.  L'ex-consti- 
tuant  Mounier,  qui  est  en  Suisse  précepteur  d'un  jeune 
Anglais,  avec  850  liv.  sterling  de  pension»  et  qui  se  croit 
toujours  le  plus  grand  génie  de  la  France»  a  envoyé,  il  y 
a  ù  peu  près  deux  mois  et  demi ,  un  courrier  au  roi  d'An- 
gicierre,  pour  lui  dire  que  «  le  moment  était  enCn  arrivé 
croifrir  aux  Français  la  constitution  de  1791»  avec  un  roi.  • 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 
ARMÉE  DE  L*OUE^. 

Discours  prononcé  le  8  venlose ,  devant  les  repré- 
sentants  du  peuple^  au  nom  des  généraux  chefs  de 
la  Vendée. 

m  Citoyens  représentants,  en  nous  rappelant  au 
sein  de  la  patrie  commune  à  tous  les  Français,  en 
rendant  la  paix  et  le  repos  à  des  contrées  affligées  si 
longtemps  par  les  horreurs  de  la  guerre  civile,  vous 
avez  acquis  les  titres  les  plus  flatteurs  à  la  recon- 
naissance publique. 

•  La  nôtre  la  surpasse  encore,  s*il  est  possible,  et 
nous  n'oublierons  jamais  que,  sous  cette  tente  (1  )  où 
se  sont  traites  des  intérêts  si  majeurs  et  si  puissants, 
vous  vous  êtes  montrés  constamment  les  amis  de  la 
justice,  de  Thumanité,  de  la  bienfaisance,  et  les  sou- 
tiens de  l'honneur  et  de  la  gloire  de  tous  les  Fran- 
çais sans  exception. 

«  Pour  récompense  de  vos  généreux  efforts,  venez 
parcourir  nos  campagnes,  lorsque  l'industrie,  le  tra- 
vail, protégés  par  nos  lois  et  encouragés  par  la  paix, 
auront  effacé  les  traces  de  la  guerre ,  et  réparé  les 
maux  qu'elle  entraîne  après  elle. 

•  L'image  du  bonheur  qui  aura  remplacé  le  deuil 
qui  les  couvre  maintenant  portera  à  vos  cœurs  l'an- 

'  nonce  des  bénédictions  de  tous  les  heureux  que  vous 
aurez  faits.  • 

Pariiy  le  7  venlose.  —  Pressés  par  le  désir  de  faire 
connaître  la  brochure  d'Isnard,  mais  embarrassés 

Ear  l'abondance  des  matières,  nous  n'avons  pu  d'a- 
ord  Qu'annoncer  le  titre  de  cette  nouvelle  produc- 
tion a  un  vertueux  proscrit,  d'un  énergi(]ue  ré- 
publicain. De  tous  les  écrits  publiés  depuis  le  9 
thermidor,  aucun  de  nous  a  paru  contenir,  en  peu 
de  pages,  plus  de  vérités  sur  les  événements  désas- 
treux qui  ont  précédé  et  amené  cette  seconde  épo- 
que de  la  liberté  démocratique;  aucun  ne  aoit 
mieux  éclairer  l'opinion  du  peuple  sur  la  contre-ré- 
volution du  3t  mai  ;  aucun  n'a  peint  avec  plus  de 
force  et  de  chaleur  les  calamités  qu'enfanta  cette 

(t)  L*entranie  des  représentants  du  peuple  avec  les  cheb 
d«  la  Vendée  a  eu  lieu  loai  une  tente  surmontée  du  pavillon 
tricolore ,  et  dressée  en  rase  campagne ,  tous  les  oiart  de 
Ifantes.  A.  M. 


horrible  Journée.  Voici  comme  il  en  retrace  le  do')- 
loureux  tableau  : 

•  La  guerre  civile  allumée  ;  Robespierre  élevé  au 
trône  dictatorial  ;  la  Convention  mutilée,  impuis- 
sante, subjuguée  ;  le  règne  de  la  terreur  établi  ;  le 
proconsulat  introduit  ;  tous  les  sentiments  de  la  na- 
ture étouffés;  la  liberté  des  actions,  des  paroles,  de 
la  presse,  enchaînée  ;  la  probité,  la  vertu,  la  philo- 
sophie proscrites  ;  le  commerce,  les  sciences  el  les 
arts  anéantis  ;  le  vandalisme  et  le  brigandage  cou- 
ronnés; la  calomnie  et  la  délation  récompensées;  le 
maratisme  déifié  ;  la  fortune  publiaue  dilapidée  ;  le 
système  agraire  professé;  la  morale  humaine  cor- 
rompue ;  Ta  foi  nationale  violée  ;  les  propriétés  en- 
vahies; de  nombreux  tribunaux  de  sang  institués;  le 
droit  de  vie  et  de  mort  délégué  aux  êtres  les  plus  fé- 
roces; des  milliers  d'échafauds  dre^és;  cinquante 
mille  bastilles  encombrées  de  prétendus  prisonniers 
d'Etat  ;  la  peste  ravageant  les  prisons  de  l'Ouest  ;  la 
Vendée  entretenue;  cent  mille  victimes  suppliciées, 
foudroyées  ou  submergées;  trois  cent  mille  défen- 
seurs de  l'unité  conventionnelle  mis  hors  la  loi  d'un 
trait  de  plume  ;  six  cent  mille  vrais  républicains 
forcés  d'émigrer;  des  millions  de  familles,  de  veu- 
ves, d'orphelins,  noyés  dans  les  pleurs;  des  départe- 
ments entiers  passés  au  tranchant  de  l'épée  et  con- 
sumés par  les  flammes  ;  de  vastes  contrées  n'offrant 
pour  moissons  que  des  ossements  et  des  ronces  ;  la 
vieillesse  massacrée  et  brûlée  sur  son  lit  de  douleur; 
l'enfance  égorgée  dans  le  sein  maternel  ;  la  virgi- 
nité violée  jusque  dans  les  bras  de  la  mort;  les 
monstres  de  l'Océan  engraissés  de  chair  humaine  ; 
la  Loire  roulant  plus  de  cadavres  que  de  cailloux  ; 
le  Rhône  et  la  Saône  changés  en  fleuves  de  sang, 
Vaucluse  en  fontaine  de  larmes,  Nantes  en  tombeau; 
Paris,  Arras*,  Bordeaux,  Strasbourg,  en  boucheries  ; 
Lyon  en  ruines,  le  Midi  en  désert,  et  la  France  en- 
tière en  un  vaste  théâtre  d'horreurs,  de  pillage  et  de 
meurtres.  • 

La  Convention  nationale  appréciera  sans  doute 
bientôt  la  justesse  des  réflexions  auxquelles  Isaard 
se  livre  dans  une  note  de  son  ouvrage. 

«  Le  31  mai,  dit-il,  est  la  source  de  tous  les  maux 
qu'a  soufferts  la  France.  Je  ne  conçois  pas  comment 
la  Convention,  qui,  par  le  fait,  a  déjà  condamné  cette 
journée,  semble  craindre  de  se  prononcer  ouverte- 
ment à  ce  sujet;  elle  croit  agir  politiquement,  je 
pense  qu'elle  se  trompe.  Il  est  impossible  d'entrete- 
nir longtemps  un  préjugé  et  de  perpétuer  un  men- 
songe. L'erreur  n'a  au'un  temps  ;  la  vérité  seule  est 
immortelle,  et  l'apotnéose  de  Marat  en  est  la  preuve. 
D'ailleurs,  le  31  mai  est  déjà  jugé  dans  l'esprit  du 
peuple  français,  et  il  est  dangereux  pour  la  Conven- 
tion de  se  tenir  arriérée  de  1  opinion  publique,  qui, 
n'étant  plus  contrainte,  retourne  à  la  vérité  et  a  la 
justice,  comme  un  ressort  qui  se  redresse  en  cessant 
d'être  comprimé.  Consacrer  aujourd'hui  le  31  mai 
serait,  comme  l'a  dit,  je  crois,  Edme  Petit,  «  former 

•  une  nouvelle  conspiration  contre  le  peuple.  »  L*as* 
semblée  craint-elle,  en  disant  la  vérité,  de  se  recon- 
naître des  torts  ?  S'ils  existent ,  ce  n'est  qu'en  les 
avouant  qu'elle  les  effacera. 

•  Au  reste,  ne  sait-on  pas  qu'elle  a  été  tyrannisée 
par  la  commune  et  Robespierre  depuis  le  31  mai 
jusqu''au  9  thermidor?  Ce  n  est  même  qu'en  publiant 
celte  vérité  fondamentale  qu'elle  peut  mettre  à  l'abri 
sa  responsabilité,  parce  qu'on  lui  adressera  cet  ar- 
gument :  •  Quelle  est  la  journée,  quelle  est  la  force 

•  majeure,  si  ce  n'est  celle  du  31  mai,  qui  peut  vous 
«  avoir  ôté  la  liberté?  Et  si  vous  êtes  restée  libre, 

•  pourquoi  avez-vous  ordonné  tant  d'atrocités,  ou 

•  ne  les  avex-vous  pas  empêchées  ?  • 


619 


•DVilleurs  il  est  impossible  de  soutenir  et  de  pré- 
coniser à  la  fois  les  deux  révolutions  du  31  mai  et 
du  9  thermidor,  car  celle-ci  a  détruit  tout  ce  que 
Tautre  a  créé  ;  de  Talliance  du  crime  à  la  vertu ,  si 
elle  n*était  absolument  impossible ,  il  ne  naîtrait 
que  des  monstres.  Le  bonheur  public ,  l'intérêt  et 
la  gloire  de  la  Convention  exigent  qu'elle  marche 
à  l'avenir,  sans  dévier  d'un  pas,  dans  les  sentiers  de 
la  vérité  et  de  la  justice ,  et  que,  libre,  elle  fasse 
autant  de  bien  que,  captive,  on  lui  a  fait  faire  de 
mal  ;  alors  la  nation  ne  se  rappellera  que  le  pré- 
sent. 

•  Sans  doute  ce  ne  sont  pas  des  considérations 
d'amour-propre  qui  empêchent  la  Convention  de  se 
prononcer  contre  le  31  mai  ;  ce  sentiment  est  indi- 
gne d'elle.  Je  ne  suppose  pas  non  plus  qu'elle  soit 
retenue  parce  que  plusieurs  de  ses  membres  ont  été 
aveuglés  à  cette  époque  et  ont  agi  en  conséquence. 
H  est  convenu  que  l'erreur  n'est  pas  un  crime.  Heu- 
reusement que  tous  les  grands  auteurs  de  Tiosur- 
rection  ont  déjà  été  punis  et  incarcérés  pour  d'au- 
tres déhts,  et  je  |>ense  qu'en  proclamant  la  vérité 
sur  cette  journée  il  faut  au  même  instant  jeter  un 
voile  sur  tout  ce  qui  y  est  relatif  et  s'occuper  de 
cicatriser  la  plaie,  sans  rechercher  des  coupables. 
Périssent  seulement  ceux  qui  auraient  régne  ou  se 
seraient  disputé  le  sceptre  de  la  tyrannie  avec  Ro- 
bespierre l 

•  Ce  ne  sont  pas  des  victimes  qu'il  faut,  c'est  le 
triomphe  des  principes  dont  o;i  ne  peut,  sans  risque, 
consacrer  légalement  la  violation.  Si  Ton  reconnaît 
aujourd'hui  que ,  dans  un  temps  quelconque ,  uu 
Hanriot,  à  la  tête  d'une  force  armée»  a  pu  se  consti- 
tuer l'organe  du  souverain ,  dicter  des  lois  à  la  re- 
présentation nationale ,  et  lever  sur  elle  son  cime- 
terre, n'est-il  pas  à  craindre  qu'en  d'autres  temps 
d'autres  factieux  se  permettent  les  mêmes  forfaits, 
sous  le  prétexte  habituel  de  salut  public?  Ceux  de 
mes  collègues  qui  aujourd'hui  ne  sont  pas  de  mon 
avis,  et  dont  le  nouvel  Hanriot  demanderait  peut- 
être  la  tête,  reconnaîtraient  alors,  mais  trop  tard, 
qu'un  31  mai  est  un  grand  crime. 

•  Le  plus  grand  coup  de  massue  que  Ton  puisse 
[)orter  au  terrorisme  est  de  faire  promptement  jus- 
tice du  31  mai,  comme  on  l'a  faite  de  Marat; 

•  Presque  tout  ce  que  je  viens  de  dire  de  relatif  a 
la  Convention  peut  s'appliquer  aux  sections  de  Paris. 
11  convient  qu'elles  désavouent  cette  insurrection,  à 
laquelle  elles  sont  étrangères  ;  car  elle  est  réelle- 
ment l'ouvrage  exclusif  de  leurs  magistrats  et  des 
Jacobins,  puisqu'elles  ignoraient  pourquoi  la  com- 
mupe  et  Hanriot  lésa  vaient  rassemblées  au  Carrousel, 
et  que  c'est  leur  soumission  passive  à  la  discipline 
militaire  qui  les  a  fait  concourir  au  crime  sans  s'en 
douter.  Mais  si  elles  ne  la  désavouent  pas  aujour- 
d'hui qu'elles  sont  libres,  elles  s'en  rendent  com- 
plices; quelles  se  hâtent  donc  de  prononcer  ce 
désaveu  authentique  ;  c'est  alors  que  leur  gloire 
révolutionnaire  ne  sera  plus  obscurcie,  et  que  les 
départements  embrasseront  Paris  avec  encore  plus 
de  fraternité.  • 

Quelle  main  osera  prendre  la  plume  pour  réfuter 
le  passage  suivant  ? 

•  11  s'appelle  Amar  ou  Omar  celui  qui,  le  3  octo- 
bre 1793,  jour  du  taere  de  Robeipierre,  fut  le  vil 
instrument  dont  se  servit  le  despote  pour  immoler 
environ  cent  vingt  membres  de  la  Convention,  qu'il 
fit  passer  à  la  barre  sans  leur  permettre  de  proférer 
un  seul  mot,  sans  vouloir  même  accorder  la  parole 
à  aucun  de  leurs  collègues....  C'est  Amar  qui.  après 
avoir  fait  fermer  tontes  les  portes  du  temple  des  lois 
qu'entourait  une  force  armée,  fit  compter  devant 


lui,  comme  des  esclaves  ou  des  têtes  de  bétail,  tous 
ces  illustres  proscrits ,  et  marqua  comme  à  la  craie 
ceux  qu'il  fallait  envoyer  au  supplice  ou  simplement 
au  cachot.  Et  ces  victimes  sont  les  mêmes  que  celles 
dont  la  Convention ,  depuis  le  9  thermidor,  a  re- 
connu l'innocence  par  décret,  puisqu'elle  a  rendu  à 
la  liberté  ou  rappelé  dans  son  sein  toutes  celles  qui 
ont  miraculeusement  survécu.... 

•  Il  est  bien  extraordinaire  qu'aujourd'hui  que 
l'on  examine  la  conduite  de  plusieurs  membres  des 
anciens  comités  de  gouvernement,  on  n'ait  pas 
compris  parmi  eux  leur  collaborateur  Amar,  qui 
non-seulement  a  dû  participer  à  tous  les  actes  de 
tyrannie,  mais  qui  fut  individuellement  le  bourreau 
de  la  Convention. 

•  Ce  n'est  aucun  motif  de  haine  particulière  qui 
me  dicte  ces  réflexions.  J'oublie  tout  ce  qui  m'est 
personnel  ;  jamais  le  ressentiment  ne  germa  dans 
mon  cœur;  mais  puis-je  pardonner  au  monstre  qui 
a  assassiné  ma  patrie? 

«  Tremble,  Amar  !  le  destin  ne  semble  t'épargner 
aujourd'hui  que  parce  qu'il  te  réserve  à  de  plus 
longs  et  plus  affreux  tourments.  Déjà  tu  dois  sentir 
dans  ton  cœur  venimeux  un  serpent  qui  le  ronge. 
Un  jour  viendra  où  ton  aspect  fera  reculer  d'épou- 
vante. Tu  ne  trouveras  nulle  part  où  reposer  ta  tête, 
si  ce  n'est  sur  l'échafaud.  Et  si  tu  échappais  à  la  jus- 
tice des  hommc;^,  tu  n'échapperas  pas  à  la  justice 
éternelle.  Du  fond  du  tombeau  où  tu  précipitas  tes 
vertueux  collègues ,  j'entends  sortir  une  voix  qui 
prononce  ces  paroles  d'anathème,  que  le  père  de  Vir- 
ginie ,  retirant  son  couteau  sanglant  du  sein  de  sa 
fille,  adressa  à  Claudius  :  «  Par  ce  sang -innocent,  je 
«  dévoue  ta  tête  aux  dieux  infernaux  !  • 

Nous  nous  étonnerons,  avec  un  écrivain,  de  trou- 
ver dans  cette  production  d'Isnard  une  partie  inti* 
tulée  :  Moyen»  de  défense.  11  ferait  beau  voir,  sous 
un  régime  qui  n'est  plus  celui  de  la  tyrannie  et  du 
sang,  un  républicain  vertueux  descendre  devant  ses 
persécuteurs  jusqu'à  discuter  son  innocence,  tandis 
qu'il  ne  doit  ouvrir  la  bouche  que  pour  prouver 
leurs  crimes  et  les  réduire  au  moins  à  un  étemel  si- 
lence !  L'opinion  publique  est  mûre  ;  elle  demande 
à  grands  cris  le  retour  des  proscrits  dans  la  repré- 
sentation nationale.  Ils  y  reviendront  sans  doute,  ils 
y  reviendront  pour  soutenir  de  leur  brûlante  éner- 
gie, de  leur  maie  éloquence ,  les  principes  de  la  li- 
berté, et  travailler  avec  leurs  collègues  à  immorta 
liser  les  destinées  de  la  république  irançaise. 


SOCIÉTÉ  DES  AMIS  DES  ARTS. 

La  Société  prévient  les  artistes  qu'elle  commence 
sa  troisième  année  ;  ceux  qui  voudront  Seconder  ses 
vues  peuvent  lui  adresser  leurs  ouvrages  comme  par 
le  passé»  en  y  joignant  leurs  noms,  leurs  adresses  et 
le  prix.  Si  l'artiste  ne  veut  pas  être  connu,  il  se  bor- 
nera à  indiquer  le  prix  de  son  ouvrage,  et  y  joindra 
un  billet  cacheté,  contenant  son  nom,  qui  ne  sera 
ouvert  que  dans  le  cas  d'admission. 

Le  conservateur  lui  remettra  une  reconnaissance 
numérotée,  avec  laquelle  l'auteur  pourra  retirer  son 
ouvrage.  La  Société  espère  que  les  artistes  seront 
assez  jaloux  de  leur  réputation  pour  ne  présenter 
que  des  ouvrages  dignes  d'eux. 

Les  ouvrages  seront  remis  au  conservateur  de  la 
Société,  salle  des  Porcelaines,  cour  du  Muséum,  ci- 
devant  Louvre ,  lequel  en  donnera  une  reconnaisr 
sancc  au  nom  de  la  Société. 


620 


LIVRES  DIVERS. 


Aeeusation  ùUentêe  dans  la  Convention  nationale  contre 
Maximilien  Robespierre^  par  J.-B,  Louvet^  /«38  octobre  1 791. 
Prii  !  40  aoiii }  et  SO  sous,  franc  de  port,  pour  les  départe- 
neota. 

A  Parts,  chef  J.-B.  Louvet,  libraire,  Palais-Egalitë,  gale- 
rie neuve,  n*^  24,  derrière  le  Théilre  de  la  République; 
Bailly,  librairti  rue  Honoré,  el  chez  les  marchands  de  nou- 
veautés. 

—  Le  Petit  Cousin  de  Berquin,  ou  les  Délassements  dupre^ 
mier  âge,  ouvrage  contenant  des  historiettes  amusantes  et 
morales,  a  Tusage  des  enfants;  n*  I". 

A  Orléans,  chei  Berthevin  el  RipauU,  libraires,  place  de 
la  République. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Bourdon  {de  COise% 
SUITE  A  LA  SÉANCE  DU  14  VENTOSE. 

Cambon,  au  nom  du  comité  des  finances,  fait  ren- 
dre le  décret  suivant  : 

m  La  ConTention  nationale,  après  avoir  entenda  le  rap- 
port du  comité  des  finances,  décrète  : 

c  Art  !*'•  Les  mots,  ou  pour  toute  autre  cause ^  qui  se 
trouTent  dans  les  dispositions  de  Tarticle  XIII  de  la  loi  du 
S4  août  1793  sur  la  dette  publique  consolidée,  sont  rap- 
portés et  déclarés  nuls  et  comme  non  avenus. 

•IL  L'inscription  sur  le  grand  livre,  proTenantd*un  trans- 
port, sera  faite  à  présentation  du  certificat  du  vendeur; 
textrait  sera  remis  à  celui  qui  rapportera  le  récépissé  des 
pièces  produites  pour  opérer  le  transfert,  U  est  dérogé  ù 
cet  égard  aux  dispositions  de  Particle  CLXXI  de  la  loi  du 
S4  août  1793  (vieux style)  sur  la  deUe  publique  consolidée. 

«  III.  Le  remboursement  de  la  propriété  des  inscriptions 
■n-dessous  de  50  livres,  qui  appartiennent  à  un  usufrui- 
tier ou  à  uo délégataire,  et  à  un  tiers  pour  la  nue-propriété, 
sera  fait  sans  exiger  la  déclaration  prescrite  par  les  lois  des 
S4  août  179S  (vieux  style)  et  23  messidor  dernier. 

c  IV.  Si  la  ouc-propriété  d*une  inscription  au-dessousde 
50  livres  appartient  à  la  république^  le  montant  du  capi- 
tal représentatif  de  Pusulruit  ou  de  la  délégation  sera  dé- 
terminé diaprés  les  bases  et  lès  calculs  établis  pour  la  li- 
quidation de  la  dette  viagère,  et  le  remboursement  sera 
fait  aux  usufruitiers  ou  délégataires. 

V.  Les  créances  au  dessous  de  50  Ht.  de  payement  an- 
nuel, dont  la  propriété  sert  de  garantie  à  un  douaire,  se- 
ront inscrites  sur  le  grand  livre,  avec  mention  de  cette  ga- 
rantie, étant  dérogé  à  cet  égard  aux  dispositions  de  l'arti- 
cle III  de  la  loi  du  24  août  4  793  (vieux  style)  sur  la  dette 
consolidée;  le  remboursement  de  ces  inscriptions  sera  fait 
lors  de  l'ouverture  du  douaire,  co  les  calculant  par  vingt 
fois  leur  montant. 

<  VI.  Les  créanciers  de  la  nue-propriété  des  inscriptions 
sur  le  grand  livre  ne  pourront  pas  réclamer  des  extraits  de 
leur  ioscriptioD,  leurs  droits  étant  sufiisamment  établis  et 
garantis  par  la  mention  faite  sur  le  grand  livre  ;  mais  lors- 
qu'ils voudrout  disposer  de  cette  nue-propriété,  ils  en  fe- 
ront la  déclaration  devant  un  juge  de  paix  ou  un  notaire. 
Cette  déclaration  sera  signifiée  au  conservateur  des  oppo- 
sitions, visée  par  le  liquidateur  de  la  trésorerie,  et  portée, 
par  le  directeur  du  grand  livre,  sur  le  livre  particulier  qui 
sera  destiné  pour  le  transfert  des  nues-propriétés.  Cepen- 
dant la  trésorerie  nationale  délivrera  aux  nus-propriétaires 
qui  le  demanderont  un  titre  pour  prouver  leurs  droits  à  la 
nue-propriété ,  d'après  le  mode  qui  sera  déterminé  par  le 
comité  ucs  finances. 

c  VII.  Tous  les  transferts  dMnscription  sur  le  grand  livre 
de  la  dette  consolidée  qui  seront  faits  &  Pavenir  ne  don- 
neront la  jouissance  aux  acquéreurs  qu'à  partir  du  pre- 
mier jour  du  semestre  lors  prochain ,  étant  déroge^  à  cet 
égard  aux  dispositions  des  articles  CLXXIII,  CLXXIV, 
CLXXVIII  de  la  loi  du  24  août  1793  (vieux  style)  sur  la 
dette  consolidée. 


«  Vin.  Le  eomlté  des  finances  est  autorisé  è  sUtner  par 
arrêté  sur  les  réclamations  qui  seront  faites  pour  obtenir  uo 
transfert,  du  compte  de  la  république  au  compte  d*un  par- 
ticulier, de  la  propriété  d*une  inscription  sur  le  grand  livre 
de  la  dette  consolidée. 

c  IX.  Ces  transferls  ne  pourront  être  ordonnéa  que  nir 
le  rapport  des  commissaires  de  la  trésorerie  nationale,  et 
d'après  un  certificat  du  liquidateur  de  la  trésorerie,  indt* 
quant  l'origine  et  le  motif  du  transfert  demandé*  etoon* 
statanl  que  le  transfert  qui  avait  été  fait  au  profit  de  la  ré- 
publique avait  eu  pour  objet  le  payement  d'une  créance 
due  à  la  nation,  et  qu*il  n'a  pas  reçu  sou  effet. 

•  X.  Le  directeur  du  grand  livre,  en  exécutant  le  trans- 
fert ordonné  par  le  comité  des  finances ,  fera  mention ,  sur 
le  compte  de  la  république,  de  l'arrêté  du  comité  et  du 
certificat  du  liquidateur,  qui  lui  seront  remis  pour  lui  ser- 
vir de  pièce  de  comptabilité.  » 
\—  Boudin,  au  nom  du  comité  de  sûreté  générale, 
annonce  que  Vadier  n'a  pas  reparu  dans  sa  maison  ; 
sur  sa  proposition,  la  Convention  décrète  que  le  co- 
mité de  sûreté  générale  fera  apposer  les  scellés  sur 
les  papiers  et  effets  délaissés  par  le  représentant  du 
peuple  Vadier  dans  son  domicile. 

—  Les  citoyens  de  la  section  de  Montreuil  sont 
admis. 

Voraleur  i  Citoyens  législateurs,  la  section  de 
Montreuil  vient  en  masse  vous  féliciter  lur  les  beaux 
jours  de  justice  et  d'humanité  que  vous  avez  rappe- 
lés sur  le  sol  de  la  république. 

Eclairez,  mais  ne  redoutez  point  ce  faubourg  An- 
toine, dont  la  descente  vous  fut  toujours  présentée 
comme  une  incursion.  Ce  faubourg,  pépinière  tou- 
jours renaissante  d'artistes  et  de  défenseurs  de  la 
patrie,  ne  fut  jamais  agité  que  par  des  malveillants 
de  Textérieur  ;  ses  démarches,  toujours  calomniées, 
ne  furent  suscitées  que  par  des  scélérats  masqués, 
et  ne  furent  faites  que  niar  des  hommes  trompes  et 
dans  Tespoir  du  bien.  l)ette  masse  d'hommes  pars 
A  souvent  même  marché  sans  en  savoir  Tobjet. 
Telles  furent  les  journées  des  31  mai  et  2  Juin  ;  on  se 
réunit,  on  partit  sans  savoir  pourquoi.  Des  membres 
des  comités  révolutionnaires  d'alors ,  après  avoir 
électrisé  sur  des  tonneai>x,  la  nuit,  en  plein  air  et  à  la 
lueur  des  flambeaux,  marchèrent  le  jour  en  tète  de 
la  force'ormée,  et,  après  l'expédition  du  décret  arra- 
ché pour  Tarrestation  et  la  mort  de  plusieurs  de  vos 
membres,  chacun  se  demandait  :  Que  sommes-nous 
venus  faire  ici? 

Législateurs,  des  armes  pour  les  bons  citoyens; 
des  fers  et  des  cages  pour  les  buveurs  de  sang,  les 
agitateurs,  les  assassins,  les  voleurs  et  les  spolia- 
teurs de  toute  espèce  ;  de  Torganisation  dans  le  gou- 
vernement ;  de  1  ordre  et  de  la  clarté  dans  les  finan- 
ces ;  de  la  probité ,  de  la  vertu  et  des  talents  dans 
les  gens  en  place;  de  Ténergie  dans  votre  caractère; 
de  la  maturité  et  de  la  majesté  dans  vos  délibéra- 
tions ;  de  la  sévérité  enfin  contre  ceux  qui  les  trou- 
blent: le  crédit  alors  se  rétablit,  la  bonne  foi  re- 
prend ses  droits,  et  la  patrie  n'a  plus  qu*à  célébrer 
ses  victoires  sur  tous  les  ennemis  qui  Tout  attaquée 
à  la  fois.  (On  applaudit.) 

La  Convention  nationale  décrète  la  mention  hono- 
rable et  rinsertion  de  cette  Adresse  au  Bulletin. 

AuBRT,  au  nom  du  comité  militaire:  Citoyens, 
voire  comité  militaire,  dans  l'examen  que  vous  lui 
avez  envoyé,  a  pris  pour  pour  base  de  sa  discnssion 
l'utilité,  la  justice  et  le  principe  invariable  qui  veut 
que,  dans  un  pays  libre,  les  vertus  et  les  lumières 
soient  encouragées  et  récompensées  dans  le  rapport 
de  leur  utilité  pour  le  bonheur  commun. 

En  promenant  nos  regards  sur  les  limites  de  nos 

anciens  tyrans ,  nous  y  comptons  cent  cinquante 

i  places  fortes  ou  postes  militaires,  dont  la  piupurt 


6)1 


inspirent  le  hideux  souvenir  des  ressources  toujours 
timides,  souvent  cruelles,  des  despotes  avides  de 
trouver  dans  l*art  des  fortificalions  cette  sûrelë  que 
réprouve  le  sentiment  intérieur  de  la  liberté ,  qui 
naît  dans  le  cœur  de  tous  les  hommes. 

Le  temps  irest  pas  encore  venu  de  faire  dispa- 
raître de  notre  sol  la  plus  grande  partie  de  ces  inu- 
tiles et  affligeantes  ressources  ;  c*est  pourauoi  votre 
comité  a  pensé  qu'il  ne  fallait,  auant  à  présent,  ap- 
porter aucune  réduction  dans  I  arme  qui  en  a  la  di- 
rection et  lasurveillace.  Mais  une  raison  plus  déter- 
minante, c'est  celle  que  présentent  nos  nouvelles 
limites.  Nous  les  tenons  de  nos  conquêtes  ;  nous  les 
maintiendrons  par  une  suite  des  indications  de  la 
nature  que  nous  avons  trop  longtemps  méconnue. 
Il  faudra  donc  y  faire  la  juste  répartition  des  travaux 
que  le  système  de  défense  militaire  exigera. 

Il  sera  beau,  sans  doute,  ce  moment  où  d*une 
main  nous  renverserons  les  tristes  limites  de  nos  an- 
ciens tyrans,  taudis  que  de  Taulre  nous  travaille- 
rons à  la  conservation  de  celles  que  la  nature  nous 
offre  depuis  si  longtemps. 

Vous  ne  perdrez  pas  de  vue  sans  doute  qu'elles 
seront,  penoant  nombre  d'années,  Tobjetde  la  rage 
et  de  Tenvic  des  ennemis  que  nous  avons  chassés, 
vaincus  et  humiliés. 

C'est  cette  prévoyance  nécessaire  qui  n'a  pas  dQ 
échapper  à  votre  comité,  et  qui  Ta  dirigé  aans  le 
travail  que  je  suis  chargé  de  vous  présenter. 

Il  ne  me  reste  qu'a  vous  prouver  que  votre  co- 
mité a  suivi,  dans  la  gradation  qu'il  a  fixée  pour 
l'avancement  et  la  solde  des  ofticiers  de  cette  arme, 
les  principes  de  la  plus  rigoureuse  justice. 

11  a  pressenti  que  votre  décret,  qui  a  provoqué  le 
rapport  que  je  viens,  en  son  nom,  soumettre  à  votre 
discussion,  avait  pour  objet  d'encourager  les  talents 
utiles  de  cette  arme,  et  de  traiter  les  ofticiers  qui  la 
composent  en  proportion  de  leurs  travaux  et  des 
services  importants  qui  en  sont  la  suite  naturelle. 

Les  calculs  des  tyrans  tendent  à  humilier  les  ta- 
lents ;  ceux  des  gouvernements  libres  et  démocra- 
tiques ont  un  but  tout  opposé,  celui  de  les  honorer. 
Ce  sont  des  vérités  consolantes  et  mises  en  activité 
par  vos  soins  qui  doivent,  avec  le  temps,  effacer  de 
la  mémoire  les  trop  légitimes  regrets  des  malheurs 
progressifs  qui  ont  accompagné  la  marche  de  notre 
étonnante  révolution. 

Votre  comité  a  sûrement  rempli  vos  intentions  en 
les  prenant  pour  base  du  projet  de  décret  dont  je 
vais  vous  faire  la  lecture. 

«  La  Convention  nationale,  aprèt  avoir  entendu  le  rap« 
port  de  son  comité  militaire  ^  décrète  ce  qui  suit  : 

«  Art.  !*'•  Le  corps  da  génie  militaire  de  la  république 
sera  composé  de  457  officiers,  et  de  six  compagnies  de  mi- 
neurs, savoir  :  7  inspecteurs  généraux  des  rorlificalloiis  t 
dont  trois  du  grade  de  général  de  division,  et  quatre  de 
celui  de  général  de  brigade;  80  directeurs  chefs  de  bri- 
gade; 60  sous-directeurs  cliefs  de  bataillon;  100  ingé- 
niciirs-capilaines,  dont  douze  attachés  aux  mineurs  ;  80  in- 
génieurs-lieutenants, dont  douze  attachés  aux  mineurs. 

■  H.  Chaque  compagnie  de  mineurs  sera  commandée 
par  un  capitaine  en  premier,  un  capitaine  en  second,  un 
lieulcnanl  en  premier  et  un  lieutenant  en  second. 

«  ItL  Les  inspecteurs  généraux  des  fortifications  feront 
partie  des  officiers  généraux  des  autres  troupes,  et  fouiront 
des  traitements,  droits  militaires  qui  leur  sont  attribués. 

•  IV.  Il  n'y  aura  qu*une  classe  de  solde  dans  chacun  des 
grades  de  directeur  et  de  lous-directeur;  les  capitaine 
formeront  deux  classes  de  solde  ;  les  lieutenants  formeront 
également  deux  classes, 

«  V.  On  parviendra  par  ancienneté,  dans  chaque  grade» 
d*une  classe  de  solde  ù  l'autre ,  sur  la  totalité  de  l'arme. 

•  VI.  Les  officiers  de  mineurs  rouleront  eutre  eux  seuls 
pour  passer  d'une  classe  de  solde  ù  l'autre* 


•  VII.  La  solde  alliée  à  chaque  grade  len  payle,  | 
compter  du  I*'  germinal  procliain ,  conformément  au  ta» 
bleau  ci-annexé. 

•  VIII.  Les  officiers  de  tous  grades  seront  indemnisés  da^. 
leurs  frais  de  bureaux  et  de  tournées,  auxquels  Ils  po^« 
ront  être  assujettis  pour  leur  service.  Le  mode  de  naje« 
ment  de  ces  frais  sera  déterminé  par  le  règlement  qui  sera 
rendu  à  cet  effet. 

•'IX.  L'école  de  Mets  sera  conservée;  le  nombre  des 
éKves  sera  porté  6  vingt;  Ils  auront  le  grade  desous->neu- 
tenant ,  et  ne  pourront  être  reçus  ingénieurs  qu'après  avoir 
été  employés  au  moins  pendant  un  an  dans  les  places  ou 
aux  armées,  et  sur  la  production  des  certificats  des  com- 
mandants de  récoie  du  génie  et  de  leurs  derniers  cbeb, 
qui  constateront  leurs  qualités  morales  et  physiques,  leur 
civisme,  ainsi  que  leur  instruction  et  capacité. 

I X.  L'avancementdans  l'arme  du  génie  se  fera  de  grade 
à  grade,  de  la  manière  suivante  : 

c  Les  officiers  généraux  de  génie  seront  tous  au  choix 
de  la  Convention  nationale,  sur  la  présentation  du  comité 
de  salut  public. 

«  Les  places  de  directeurs,  cheCf  de  brigade,  seront  don- 
nées, deux  tiers  à  l'ancienneté  de  grade,  et  le  dernier 
tiers  parla  Convention  nationale,  sur  la  présentation  de 
son  comité  de  salut  public  ;  ' 

•  Les  places  de  sous-directeurs,  chefs  de  bataillon,  denx 
tiers  à  l'ancienneté,  un  tiers  au  choix. 

•  Les  lieutenants  parviendront  par  ancienneté  au  grade 
de  capitaine. 

•  LcH  officiers  de  mineurs  rouleront  entre  eux  pour  par- 
venir au  grade  de  capitaine,  et  sur  la  totalité  du  génie, 
dont  Us  feront  partie,  pour  parvenir  aux  grades  supé- 
rieurs, tant  par  l'ancienneté  que  par  le  choix. 

•  XI.  Les  places  au  choix  ne  pourront  être  données  qu'à 
des  officiers  ayant  servi  au  moins  deux  ans  dans  le  grade 
inférieur,  si  ce  n'est  pour  action  d*éclnt  ou  services  im- 
portants rendus  aux  armées. 

•  XIL  Les  officiers  qui,  quoique  faisant  partie  de  l'arme 
du  génie,  servent  dans  les  autres  troupes  de  la  républi- 
que, seront  tenus»  aussitôt  la  proroulgaUon  de  la  présente 
loi,  d'opter  entre  le  grade  supérieur  qu'ils  exercent  et  celui 
qu'ils  ont  conservé  dans  le  corps  du  génie;  au  moyen  do 
cette  disposiUoo ,  le  décret  du  i*'  fructidor  »  sur  les  offi- 
ciers du  génie,  est  rapporté* 

«  XIIL  Les  officiers  du  génie  aux  armées  et  dans  les 
places  seront  considérés  comme  faisant  partie  de  Tétat- 
major  des  armées  ;  ils  concourront,  pour  le  commande- 
ment, avec  les  antres  officiers  des  autres  armes,  suivant 
leur  grade  et  leur  ancienneté  respective. 

«  Ils  seront  d'ailleurs  subordonnés  à  tons  les  règlements 
de  la  hiérarchie  militaire;  mais  il  n'y  aura  que  les  officiers 
généraux  sous  les  ordres  desquels  Ils  seront  aux  armées , 
cantonnements  et  reiranchemenis»  qui  pourront  leur  or* 
donner  des  travaux  reiatiA  à  leur  arme  et  y  apporter  quel- 
ques changements* 

•  XIV,  Il  sera  formé  ft  Paris  un  comité  central  des  foi^* 
ttficalions,  composé  d'Inspecteurs  généraux  et  des  officiers 
que  le  comité  de  salut  public  jugera  à  propos  d'y  appeler. 
Ce  comité,  qui  sera  assemblé  du  1*'  frimaire  au  dernier 
germinal,  s'occupera  de  rassembler  les  résultats  des  tour- 
nées fbltes  par  les  inspecteurs,  de  former  les  plans  géné- 
raux de  défense  et  de  coustiuclions  à  faire  pendant  la 
campagne  suivante»  et  les  présentera  au  comité  de  salut 
public. 

•  XV.  L'arme  du  génie  sera»  tant  pour  son  personnel 
que  pour  les  travaux  des  fortifications,  les  construciions 
de  magasins  et  autres  dépendant  de  leur  service,  du  res- 
sort de  la  commission  de  l'organisation  des  armées. 

«  XVI.  Les  neuf  régiments  de  sapeurs  allachés  au  corps 
du  génie  rouleront  entre  eux  pour  leur  avancement;  il 
n'est  rien  changé  à  leur  solde. 

«  XVII.  Il  est  dérogé  6  toutes  les  dispositions  réglées  par 
les  lois  antécédentes  sur  cette  arme,  et  qui  pourraient  être 
contraires  à  la  présente  loi.  » 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 

SÉANCE  DU   15  VENTOSB. 

Les  sections  de  rindtvisibilité  et  des  Droits  de 


6}S 


r 


l'Homme  se  présentent  à  la  Convention,  et  dans  des 
Adresses  énergiques  l'assurent  de  leur  attachement 
aux  prineipes  et  de  leur  haine  contre  les  tyrans  de 
Ibute  espèce.  Elles  demandent  que  les  agents  du  ter- 
rorisme soient  désarmés  et  exclus  de  toutes  les 
places. 

La  Convention  applaudit  par  Torgane  de  son  pré- 
sident à  l'expression  de  ces  sentiments,  et  ordonne 
l'insertion  de  ces  Adresses  au  Bulletin. 

—  Un  secrétaire  donne  lecture  de  la  lettre  sui- 
vante : 

L'agence  de  commerce  et  d'extraction  de  la  Belgi- 
que, et  les  commissaires  nommés  par  les  repré- 
sentants du  peuple  pour  la  recherche  des  objets 
d'arts,  etc,  à  la  Convention  nationale. 

m  Citoyens  représentants,  nous  vous  annonçons  que  la 
collecUou  complète  des  cbers-d*œuvre  de  Rubens,  Van 
Dyck,  Jordaens,  Crayer,  MidieNAnge,  etc.,  dont  vous 
avci  ordonné  l'extraction,  est  exposée  aux  regards  du  pu- 
blic, dans  le  salon  qui  précède  le  Muséum  naUonal  :  ce 
monument  des  arts  attestera  sans  cesse  la  valeur  et  Tin- 

llrépidité  des  armées  du  Nord  et  de  Sarobre-el-Meuse. 

^^  •  Vous  Irouverei  ci-joints,  èitoyens  représentants,  les 
procès  verbaux  des  enlèvements  des  tableaux  de  chaque 
ville  d*où  ils  ont  été  extraits,  ensemble  un  tableau  gêné- 
rai  de  tous  les  objets  d*arts  et  des  tableaux  particuliers.  » 

—  Une  députation  de  la  municipalité  de  la  com- 
mune de  Gaud  est  admise  à  la  barre. 

V orateur  de  la  députation  :  Citoyens  législateurs , 
inondés  chaque  jour  de  plaintes  très-ameres,  et  la 
disette  s'augmentant  à  un  point  qui  effraie,  il  ne 
nous  reste  a  autre  ressource  que  d'épancher  dans  le 
sein  de  la  Convention  nationale  nos  sollicitudes  et 
le  désespoir  du  peuple,  en  réclamant  la  justice  et 
l'humanité  des  vainqueurs. 

A  peine  les  armées  victorieuses  de  la  république 
prirent  possession  de  la  ville  de  Gand,  on  nous  fit 
entendre  que  les  représentants  du  peuple  français 
imposeraient  sur  nos  habitants  une  contribution  mi- 
litaire qui  égalerait  au  moins  deux  fois  les  revenus 
annuels  de  toutes  les  contributions  perçues  par  l'an- 
cien gouvernement  ;  que  cette  contribution  devait 
être  répartie  sur  les  riches,  les  hommes  sans  pro- 
fession ,  les  ecclésiastiques  séculiers  et  réguliers , 
jouissant  de  plus  de  1,000  liv.  de  revenu»  et  généra- 
lement sur  tous  les  habitants  aisés. 

Mais  nous  étions  bien  éloignés  de  penser  que  le 
représentant  du  peuple  Laurent,  par  son  arrêté  du  3 
fructidor,  ordonnerait  que  la  seule  ville  de  Gand 

Saierait  à  la  république  française  une  contribution 
e  7  millions  en  numéraire,  à  répartir  sur  les  nobles, 
les  prêtres,  les  maisons  religieuses,  les  privilégiés, 
les  gros  propriétaires  et  les  capitalistes. 

Une  telle  imposition,  si  inattendue  et  sans  exem- 
ple dans  les  annales  de  notre  pays,  frappa  tout  le 
monde. 

En  effet,  depuis  le  fameux  Philippe  II,  quand  le 
méchant  duc  d'Albe  perdit  par  ses  exactions  le  fruit 
de  ses  victoires,  les  contributions  que  leva  l'ambi- 
tieux Louis  XIV  étaient  très-modérées,  et  le  vain- 
queur Louis  XV  (quoique  roi)  n'en  imposa  pas. 

Les  temps  anciens  et  barbares  seraient-ils  donc 
revenus?  et  doit-on  croire  que  le  droit  de  conquête, 
*    depuis  le  9  thermidor,  est  le  droit  de  destruction  ? 

Eh  quoi  !  la  contribution  imposée  sur  notre  com- 
mune surpassé  dix  années  de  subsides  ordinaires, 
tandis  que  Robespierre  même  ne  fixa,  dans  le  comité 
de  salut  public,  le  30  messidor,  qu'une  contributi(m 
militaire  qui  égalerait  deux  fois  le  revenu  annuel 
des  contributions  perçues  par  l'ancien  gouverne- 
ment. 

Néanmoins  toute  remontrance  a  été  inutile  ;  il 


fallait  obéir  dans  les  sept  jours;  et,  pour  mieux  pré- 
venir tout  dqute  sur  la  forme,  le  représentant  du 
peuple  Briez,  par  son  arrêté  du  9  fructidor,  prescri- 
vit le  mode  de  la  répartition. 

Il  statua,  conformément  aux  arrêtés  précédents, 
que  la  contribution  était  personnelle,  qu'elle  devait 
être  assise  au  lieu  du  domicile. 

Nous  avions  ainsi,  en  conformité  d'une  règle  si 
positive,  réparti  l'énorme  imposition  sur  1^  classes 
de  nos  concitoyens  désignées,  en  les  taxant  selon  la 
masse  de  leurs  facultés  et  moyens. 

Mais  à  peine  avions-nous  achevé  cette  tAche  bien 
dure,que,  par  arrêté  du  20  fructidor,  on  changea  le 
mode  de  répartition  ;  de  manière  que,  quand  nous 
ne  pouvions  plus  retoucher  notre  cotisation  exécu- 
tée de  bonne  foi,  selon  le  premier  mode,  on  arrêta 
pour  lors  qu'on  pourrait  aussi  être  imposé  à  raison 
des  biens  et  propriétés  dans  le  lieu  de  la  situation. 

Lojn  que  l'arrêté  du  20  fructidor  ait  facilité  la 
levée  de  la  contribution,  il  n'a  fait  qu'en  entra vtr  la 
marche. 

Nous  nous  Sommes  donné  tous  les  mouvements 
possibles  pour  la  rentrée  de  la  contribution  person- 
nellement par  nous  répartie  selon  la  masse  générale 
des  biens,  au  point  ^u'on  a  cru  la  terreur  a  l'ordre 
du  jour  ;  et  le  cierge  seul,  poor  ainsi  dire,  reste  eu 
défaut. 

Cependant,  malgré  les  clameurs  insidieuses  des 
intrigants,  la  disette  du  numéraire  en  est  unique- 
ment la  cause. 

On  a  beau  menacer, prendre  des  otages,  augmen- 
ter la  somme  imposée,  nommer  des  curateurs  a  leurs 
biens,  les  vouloir  vendre,  il  faut  du  numéraire  pour 
trouver  des  acheteurs. 

Lorsqu'on  considère  que,  dans  des  temps  tran- 
quilles, quand  les  plus  riches  capitalistes  du  pays 
n'étaient  point  absents  ou  fugitifs ,  et  lorsque  les 
principaux  commerçants  et  gros  crédi-reutiers  pou- 
vaient retirer  leurs  fonds  des  pays  étrangers,  on  éva- 
lua la  circulation,  par  approximation,  dans  la  Bel- 
gique, de  30  à  40  millions  de  florins,  et  que  le  total 
ne  la  contribution  imposée  monte  à  peu  près  à  70 
millions  de  livres,  et  cela  sur  un  pays  depuis  huit 
ans  en  proie  aux  troubles  et  agitations  de  partis, 
est-il  donc  étonnant  que  pour  le  présent  la  disette 
du  numéraire  se  fasse  sentir? 

Nous  espérions  aussi  bien  fermement  que  les  ri- 
gueurs lancées  par  l'arrêté  du  représentant  Hauss- 
mann,  le  12  pluviôse,  seraient  révoquées. 

Il  est  vrai,  on  dit  quelquefois  :  Le  Belge  est  riche  : 
mais  on  se  trompe  ;  le  Belge  est  économe  et  labo- 
rieux. Ce  n'est  ni  l'or  ni  l'argent  qui  font  sa  richesse; 
c'est  la  culture,  les  soins  et  le  travail  assidus  qui  lui 
donnent  une  certaine  aisance. 

Ainsi,  ce  n'est  que  par  la  sueur  de  son  front  qu'il 
peut  payer,  dans  des  cas  urgents,  deux  ou  trois  an- 
nées de  subsides  à  la  fois. 

Non,  le  terrorisme  même  ne  saurait  le  forcer  à  en 
payer  dix,  puisque  son  sol  ne  produit  point  dix  ré- 
coltes par  an. 

Français,  vous  êtes  vainqueurs,  mais  vous  êtes 
aussi  les  apôtres  des  droits  éternels  et  imprescripti- 
bles de  l'homme  :  nous  réclamons  la  justice  et  vos 
Eromesses  au  nom  d'un  peuple  qui,  dans  ses  mal- 
eurs  même,  ne  cesse  de  vous  admirer. 

Nous  réclamons  aussi  la  conservation  de  toute 
propriété  individuelle,  sans  y  porter  atteinte  par  voie 
mdirecte  ou  contraire  aux  lois  existantes,  ni  par  des 
réquisitions  à  des  prix  idéaux,  ni  par  l'agiotage  des 
assignats ,  pour  rembourser  des  rentes  et  autres 
droits  utiles  créés  avant  leur  émission  dans  notre 
pays  :  moyens  infaillibles  de  renverser  les  fortunes 
médiocres. 


623 


Et  puisque  la  justice  est  à  Tordre  du  jour,  nous 
osons  espérer  que  la  contribution  imposée  sur  un 
peuple  qui  n*a  pris  ni  voulu  prendre  les  armes  con- 
tre ses  conquérants,  ou  disons  plutôt  contre  ses  frè- 
res et  amis,  sera  au  moins  réduite  à  la  somme  que 
le  comité  de  salut  public  fixa  le  30  messidor;  en 
outre,  que  toute  contribution  territoriale  cessera  en- 
tièrement, non-seulement  parce  qu*elle  est  contraire 
aux  lois  anciennes  de  notre  pays,  mais  parce  qu'elle 
est  un  prétexte  de  trouble  et  de  dévastation,  tant 
par  les  voies  de  fait  sur  les  bois  de  haute  futaie, 
grands  et  petits,  dont  les  pertes  sont  incalculables, 
que  par  les  exécutions  irrégulières  et  ventes  conti- 
nuelles des  biens-fonds  à  des  prix  qui,  dans  la  mal- 
heureuse disette  actuelle  de  numéraire,  confondent 
toute  idée  de  propriété. 

Ce  n*est  pas  tout  :  les  haines  personnelles  et  les 
vengeances  particulières  ne  cessent  de  troubler  Tor- 
dre et  le  repos  public  par  des  enlèvements  continuels 
et  sans  nombre  ;  sous  prétexte  d*otages  pour  la  con- 
tribution ,  pères  de  famille,  fabricants ,  fonction- 
naires publics,  rien  n*est  épargné,  pas^néme  ceux 
qui  ont  acquitté  tout  ce  qu'on  a  exigé  d*eux. 

Nous  relevons  ces  malheureuses  circonstances, 
parce  que  vous  les  avez  senties  en  nous  accordant, 
par  Tarrêté  du  22  pluviôse,  que  •  les  otages  pris 
pour  répondre  du  payement  des  contributions  seront 
aès  à  présent  mis  en  liberté  et  renvoyés  dans  leurs 
foyers  ;  •  en  y  ajoutant  bien  expressément  que  «  le 
payement  ne  sera  plus  poursuivi  que  par  les  voies 
judiciaires.  • 

Cette  pétitloli  est  renvoyée  au  comité  de  salut  pu- 
blic. 

—  Barailon,  au  nom  du  comité  d'instruction  pu- 
blique, propose  la  formation  d*un  cabinet  d'anato- 
mie  et  de  pièces  artificielles  relatives  au  système 
des  vaisseaux  lymphatiques  et  au  système  nerveux, 
sous  la  direction  de  Lemonnier. 

Plusieurs  membres  demandent  la  question  préa- 
lable sur  le  projet  de  décret  présenté,  et  qu*il  soit 
décrété  que  le  travail  dont  il  s*agit  de  charger  Le- 
monnier soit  donné  au  concours,  et  que  ce  projet  de 
décret  soit  renvoyé  au  comité  dinstructiou  publi- 
que, pour  présenter  le  mode  du  concours  pour  cet 
oDjet. 

Cette  proposition,  appuyée  par  Charlier,  est  dé- 
crétée dans  les  termes  suivants  : 

•  La  Convention  nationale  décrète  : 

•  10  II  n'y  a  lieu  à  délibérer  sur  le  projet  de  décret 
présenté  ; 

•  20  Que  le  travail  dont  il  s'agit  sera  donné  au 
concours;  et  renvoie  à  son  comité  d'instruction  pu- 
blique pour  en  présenter  le  mode.  • 

Monnel  demande,  par  amendement,  que  la  forme 
du  concours  soit  adoptée  en  principe  pour  toutes  les 
places  qui  ont  rapport  aux  sciences,  aux  arts  et  aux 
talents. 

Cet  amendement  est  décrété. 

—  Sur  la  proposition  de  Lemoine,  le  décret  sui- 
vant est  rendu  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  finances,  nomme,  aux 
trois  places  de  commissaire  vacantes  dans  la  comp- 
tabilité nationale,  les  citoyens  Saucourt,  Ferai  et 
Rousselot-Surgy  ; 

•  Et  à  celle  d'agent  national  de  ladite  comptabi- 
lité* le  citoyen  Gaussard.  • 

Saint-Mabtiii,  au  nom  du  comité  des  secours  pu- 
blics: Citoyens,  je  viens»  an  nom  de  votre  comité 
des  secours  publics,  soumettre  à  votre  sanction  un 


nouvel  état  des  liquidations  des  pensions  ducs,  ca   ^ 
vertu  de  vos  décrets,  à  des  veuves  et  enfants  des  dé- 
fenseurs de  la  patrie. 

Fidèles  à  leurs  serment*:,  ces  généreux  guerriers 
sont  morts  en  combattant  pour  elle  ;  et  vous,  repré- 
sentants, toujours  empressés  d'acquitter  une  aettc 
sacrée,  il  vous  tarde  a'assurer  à  leurs  intéressantes 
familles  une  honorable  subsistance. 

N'en  doutons  pas,  les  défenseurs  que  là  mort  nous 
a  enlevés  revivront  dans  ces  enfants  (^ue  la  nation 
va  adopter  par  votre  organe.  Les  bienfaits  que  sa  re- 
connsrissance  leur  distribue,  et  plus  encore  l'exem- 
ple de  ceux  dont  le  sang  coule  dans  leurs  veines,  Ic^ 
récit  journalier  de  leurs  exploits  et  de  leur  fin  glo- 
rieuse (récit  que  la  bouche  d'une  tendre  mère  rend 
si  touchant)  embraseront  les  jeunes  cœurs  de  ce  feu 
sacré,  de  cet  amour  ardent  de  la  patrie  qui  crée  les 
héros  ;  comme  leurs  pères  ils  la  serviront  avec  zèle, 
avec  courage,  et  comme  eux  ils  verseront,  s'il  le 
faut,  tout  leur  sang  pour  sa  défense.  Voici  le  projet 
de  décret  : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  secours  publics,  dé- 
crète : 

•  Art.  1er.  Les  veuves  des  citoyens  morts  en  défen- 
dant la  patrie,  en  faisant  un  service  requis  et  com- 
mandé au  nom  de  la  république,  dénommées  en 
Tétat  annexé  au  présent  décret,  recevront,  à  titre  de 
pension  alimentaire,  la  somme  de  133,635  livres  18 
sous  6  deniers,  conformément  aux  dispositions  de  la 
loi  du  13  prairial  dernier,  laquelle  somme  sera  ré- 
partie entre  elles  d'après  les  proportions  indiquées 
audit  état. 

•  II.  Les  pensions  accordées  auxdites  veuves  leur 
seront  payées,  aux  termes  de  l'article  1er  du  titre  II 
de  la  loi  du  13  prairial,  par  les  commissaires  distri- 
buteurs de  leurs  communes  ou  sections  respectives, 
à  partir  de  la  date  de  la  mort  de  leurs  maris,  sauf  à 
imputer  sur  le  montant  desdites  pensions  les  sommes 
susceptibles  de  retenue  qu'elles  auront  pu  recevoir  à 
compte. 

•  III.  Il  n'y  a  lieu  à  délibérer  snr  les  4<*mandcs  ou 
réclamations  des  veuves  des-  citoyens  dénommés 
dans  le  présent  état  depuis  le  no  232  jusqu'au  n^  236 
inclusivement. 

«  IV.  L'état  annexé  au  présent  décret  ne  sera  point 
imprimé.  • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

—  L'assemblée  procède  à  Tappel  nominal  pour 
l'élection  de  trois  nouveaux  membres  au  comité  de 
salut  public. 

Les  membres  sortis  sont  Cambacérès,  Pelet  (de  la 
Lozère)  et  Carnot.  Ils  sont  remplacés  par  Sieyès, 
LaporteetRewbell. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SEANCE  DU  SOIR  DU  15  VENTOSE. 

Dans  cette  séance  extraordinaire  la  Convention 
procède  é  Tappel  nominal  r  qui  donne  Calés,  Pémar- 
tin,  Gauthier  (de  l'Ain),  Delecloy,  Isabeau  et  Mont- 
mayau,  pour  remplacer  au  comité  de  sûreté  géné- 
rale Laignelot,  Garnier,  Armand,  Barras,  Vardoo  et 
Bourdon  (de  TOise.) 

SEANCE  DU  16  VENTOSB. 

Le  citoyen  Ange  Lorière,  de  la  commune  de  Ba- 
zoug^es,  nistrict  de  Dol,  offre  a  la  république  les 


624 


200  liv.  de  son  traitement  déjuge  de  paix;  il  y  joint 
150  livres  en  numéraire  déjà  remis  au  représentant 
du  peuple  Lecarpenlier.  11  désire  que  la  Convention 
destine  cette  somme  à  récompenser  une  belle  action. 
La  Convention  nationale  décrète  la  mention  hono- 
rable de  Tuffrande  et  Tinsertion  au  Bulletin. 

Boursault  annonce  que,  le  7  ventôse,  des  chouans 
attaquèrent  le  courrier  ;  poursuivis  par  nos  troupes, 
ils  u  ont  pas  le  temps  d*emporter  ses  effets;  ils  lais- 
sent dans  les  champs  deux  malles  remplies  d*effets 
Î précieux  et  de  numéraire.  Des  citoyens  infortunés 
es  trouvent  et  en  remettent  les  effets  intacts  à  Vi- 
tré. Ce  trait  de  désintéressement,  de  vertus  républi- 
caines, qui  caractérisent  le  peuple  français,  m*en- 
gage  à  prier  la  Convention  de  faire  Tapplication  des 
iOO  liv.  à  récompenser  cette  belle  action. 

La  Convention  nationale  décrète  la  mention  ho- 
norable de  ce  trait  de  désintéressement,  l'insertion 
au  Bulletin,  et  que  la  somme  de  200  livres  sera  en- 
voyée à  la  municipalité  de  Vitré,  pour  être  distri- 
buée aux  citoyens  connus  par  ce  trait  degénérosité, 
d'après  le  procès-verbal  qui  en  a  été  fait  sur  les 
lieux. 

—  Un  secrétaire  donne  lecture  de  la  lettre  sui- 
vante : 

Les  représentanli  du  peuple  près  les  ports  et  côtes 
de  Brest  et  de  Lorienl,àla  Convention  nationale. 

Brest ,  le  T  Tentoie ,  Tan  V  dt  la  république 
française,  une  «t  indifisible. 

•  Citoyen  prêt ideDt,  nous  nous  empressons  de  vous  faire 
nasser  une  lettre  écrite  par  les  mas isirals  de  la  fille  de 
uergheo,  en  Norwége,  au  consul  de  la  irèpublique  fran- 
çaise, qui  vient  de  nous  être  remise  par  le  coamandant 
de  la  division  qui  croisait  en  ces  mers. 

m  Les  sentiments  de  reconnaissance  des  habitants  de  cette 
ciU'  y  sont  vivement  exprimés,  et  prouvent  que,  il  les  ré- 
publicains français  font  trembler  leurs  ennemis,  il  n*est 
point  d'aaion  généreuse  dont  iU  nt  SQienl  capables  poMr 
leurs  alliés. 

a  Salut  et  fraternité. 

«  Sifné  B«  TalBOVABT»  A*  Favm  »  DoiaTi  • 

Traduction  de  la  lettre  du  grand  gouverneur  et  des 
magistrats  de  Berghen ,  écrite  au  citoyen  Cha- 
zaulx^  consul  de  la  république  française, 

m  Les  équipages  de  Tescadre  française  actuellement  de 
relàcbc  en  ce  port,  qui  ont  si  généreusement  et  amicale- 
ment contribué  par  leur  travail  et  efforts  redoublés ,  d*unr 
manière  effieace,  dans  le  malheureux  incendie  de  mardi 
dernier,  à  éteindre  le  feu  et  prévenir  ou  empêcher  ses  pro- 
grès, qui  a  été  le  salut  de  la  Tille,  ont  mérité  les  plus 
grands  éloges. 

«  Pénétrés  de  la  plus  vive  reconnaissance,  nous  nous 
eniiiressons ,  avec  tous  nos  concitoyens  les  rcprésenlanls  et 
bubiianls  de  celte  ville,  de  vous  le  communiquer,  cl  de 
vous  prier,  monsieur,  de  vouloir  bien  témoigner  6  M.  le 
commandant  de  Tescadre ,  qui  a  eu  Tatlention  et  la  bonté 
&  celle  occasion  de  donner  ses  ordres,  combien  nous  som* 
mes  sensibles  ù  ces  marques  d*amitié,  et  le  désir  que  nous 
avons  de  lui  en  marquer  notre  gratitude,  en  rassurant 
que  ce  bien  Tait  ne  s'effacera  jamais  de  nos  cœurs  et  de  no- 
tre souveniri  comme  aussi  de  vouloir  bien  faire  connaître 
également  à  tous  les  capitaines  et  les  braves  officiers  de 
Tescadre,  et  tous  les  individus  qui  ont  tant  contribué  è  lu 
couservation  de  oetle  fille  t  les  obligations  que  nous  leur 
avoost 

•  Nous*  avec  tous  leidtojreoi  de  la  ville»  lemerdoni 
donc  tous  et  un  chacun  d*eux  en  particulier,  puisqu'ib 
ont,  ajuste  titre,  droit  à  notre  recoonaisianœ,  ctniéri« 
tcnt  les  plus  grands  applaudissements. 

f  Nous  vous  prions ,  au  nom  de  la  ville  de  Berghen ,  h 
la  conservation  de  laquelle  ils  ont  font  eooiribué,  de  faire 
agréer  au  commandant,  pour  être  distribué  aux  équi- 
pages, comme  une  faible  marque  de  sa  reconnaissance, 
un  rafraîchissement  de  cinq  barriques  de  vin  rou^e  qui 
leur  seront  eovo]réeS|  et  que  nous  osons  espérer  de-leur 


amitié  qu*ns  ne  voudront  pas  refuser,  ftniflll  dVme  ftll» 
qui  leur  doit  son  salut. 

•  Berghen,  le  23  janvier  1795. 

•  Signé  Haocb,  Dbpiri,  Fmacbi,  Roemniiot* 
Gtlduikbodts,  BaAUDT,  Oum,  JoaiAii.  • 
Pour  copie  conforme  à  la  lettre  originale  t 

Signé  CoASAOtx. 

Cledel,  représentant  du  peuple^  délégué  dam  le$  dé- 
partements de  la  Haute-  Ktenne  «I  de  la  Cretwt, 
à  la  Convention  nationale. 

Au  Dorât,  le  10  ventôse.  Pan  8«deU  républiqM 
française,  une  et  indivisible. 

«  Citoyens  collègues,  dans  les  déparlements  de  It  Creuse 
et  de  la  Haute* Vienne,  les  ennemis  de  la  liberté  et  les  fh^ 
tieux  de  tous  les  genres  sont  réduits  au  silence  ;  les  fanati- 
ques restent  observateurs,  et  doivent  être  surveillée  J*al 
fait  de  mon  mieux  pour  faire  entendre  à  toua  leurs  vrala 
intérêts,  qui  sont  inséparables  de  la  tranquillité  publique» 
J*ai  taché  d*opérer  parlent  une  réconciliation  ;  on  ne  peut 
se  flatter  qu*elle  soit  sincère  dans  tous  les  cœurs  :  j^e>pèrc 
cependant  quMI  n*y  aura  qu*un  pcllt  nombre  de  mauvais 
citoyens  qui  oseront  tenter  de  violer  le  serment  qu*ils  ont 
fait  d'oublier  leurs  torts  respectifs  et  de  vivre  en  tièreu 

•  Les  intrigants,  les  terroristes,  les  royalistes  ae  fri- 
saient mutuellement  la  guerre;  les  frais  pairiotes,  les  bons 
citoyens  étalent  comprimés  et  découragés  par  tous  ces  en* 
nemis  de  l*ordre  et  de  la  justice.  L*esprit  de  la  Cnnvenikm 
mieux  connu,  le  palriolisine  a  repris  toute  aon  énerfie  | 
les  turbaJenis  se  sont  trouvés  couverts  de  honte  i  les  pnro* 
les  de  paix  et  d'union  ont  été  accueillîea  avee  enthoosinaiDe 
dans  toutes  les  assemblées  publiques.  Le  peupla  n  acoll 
rutililé  et  la  nécessité  de  la  concorde  et  de  U  tranqoiUilé; 
il  a  juré  de  les  maintenir. 

c  On  éprouve  déjà  les  benreux  effets  de  la  liberlé  du 
commerce.  Le  grain  ationde  dans  certaines  commtineft  où 
la  disette  était  effrayante  il  y  a  peu  de  jourai  les  boaa  ci* 
toyens  compatissants  et  généreux  ont  fait  dana  ptttsie«ra 
lieux  des  fonds  pour  faire  délivrer  aux  pauvres  le  pain  à 
un  prix  plus  bas  qu'il  ne  leur  coûte  :  i^ai  eiifagé  rbomoM 
sensible  à  coutribuer  de  tous  ses  moyens  à  cet  honorable 
sacrifice. 

•  Cependant  U  y  a  des  communes  qui  ont  pea  dliabi* 
tants  capables  de  soulager  les  laaui  de  leurs  voisiBa.  Il  se- 
rait à  souhaiter  que  les  Tonds  que  la  Convention,  tovjoars 
prévoyante,  vient  de  décréier  en  faveur  des  indigeats  fha- 
scnt  déjà  distribués  ;  je  crois  même  qu'il  serait  de  la  jus* 
ticc  que  les  deux  dépariemenls  que  je  viens  de  parcoarir 
fussent  compris  dans  la  disiribulion  |>our  une  grande  por- 
tion. Leur  première  récolle  avait  été  ruinée  par  les  inteoi- 
priics  des  saisons,  cl  une  gtéle  affreuse  avait  ravagé,  le 
16  floréal,  une  infinité  de  communes  du  départeniciit  de 
In  Cicnsc.  Nous  avons  droit  d'espérer  que  les  travaux  de 
la  campii'^rnc,  qui  ne  larderont  pas  à  s'ouvrir,  y  présente- 
ront nne  nouvelle  res^^ourre. 

-  Malgré  la  pénurie  qui  pé^e  sur  ces  départements ,  le 
peuple  la  supporte  avec  une  patience  généreuse,  difficile  à 
exprimer;  Tesprii  de  la  liberté  te  soutient,  Tammir  de  la 
patrie  nourrit  son  cœur;  il  compte  sur  une  paix  gloriea«c, 
et  tous  SCS  maux  sont  oubliés;  il  chante  gatment  viira  laré^ 
publique  !  vive  la  Convention  /  ie  ne  sub  jamais  aorli 
d*nne  assemblée  publique  sans  entendre  ces  cris  de jaia 
mille  lois  répétés.  ^ 

■  Salut  et  fralernité.  Cttntu  * 

La  Convention  décrète  que  ces  lettres  seronl  insé- 
rcesau  Bulletin. 

—  Le  représentant  du  peuple  Girod  -  Potixol 
adresse  à  la  Convention  nationale  un  exemplaire  de 
la  proclamation  qu'il  a  faite  aux  citoyens  des  dëptr* 
tcinents  du  Gard  et  de  TUërault. 

Cette  proclamation  estrenvoyëe  au  comité  de  sa* 
roté  générale.  (  La  suite  dewMin.) 

N,  B,  —  Dans  la  séance  du  17,  une  dëputation  lie 
In  commune  de  Lyon  est  venue  apporter  de  nou- 
velles pièces  à  la  charge  de  Collot  (rUerliois;  elles 
ont  été  renvoyées  à  la  commission  des  Viiigt-et-Uu. 

On  a  repris  la  discussion  sur  les  ûnances. 


GAZETTE  NATIONALE  ..  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


W  169. 


Naniii  19  Ybhtosb,  l'an  i\  {Lundi  9  Mam  1795,  vieux  «fyb.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Itatiibonne  ^  leil  février,  —  Le  directoire  de-ld  diète  a 
reçu  le  décret  de  notification  de  l*emperear  sur  le  eoneU' 
9um  de  la  diète  du  22  décembre ,  coocernaot  la  paix.  Ce 
décret  n'a  pas  encore  été  porté  à  la  dictature. 

—  Il  Tient  de  paraître  une  résolution  impériale  qui  porte 
que  ceui  des  états  de  TEmpire  qui  n*ont  pas  fourni  leur 
contingent  pour  1794  doivent  entretenir  le  contingent  de 
Trètes,  et  s'adresser  pour  le  payement  à  Télecteur  lui- 
même.  Chaque  homme  est  éfalué  à  240  florins,  au  lieu  de 
100,  comme  il  avait  été  stipulé  jusqu'à  ce  moment.  Les 
états  de  la  Poméranie  suédoise  sont  dam  le  cas  de  la  ré- 
quisition. 

—Le  duc  régnant  de  Wurtemberg  a  publié  une  procla- 
mation pour  permettre  aux  habitants  de  ses  Ëtats  la  vente 
des  grains  et  du  bétail  à  leurs  voisins  les  Suisses. 

Il  parait  que  le  conseil  de  ce  prince  est  dirigé  par  des 
sentiments  patriotiques. 

fVittbaéen,  le  24  féwrUr.^te  quartier  général  de  l'ar- 
mée prussienne,  aux  ordres  du  général  Mollendorff,  a  été 
transféré  à  Buclienheim.  Ce  général,  accompagné  de  plu- 
sieurs officiers  de  son  armée,  s*était  rendu  à  Wiesbaden, 
auprès  du  général  Kallireutb. 

—  Il  a  été  tenu  un  conseil  de  guerre  à  Toccasion  de 
quelques  dépêches  arrivées  de  Berlin. 

—  Une  colonne  de  l'armée  prussienne  doit  se  mettre  en 
marche  pour  se  rendre  dans  la  Westphalie. 

—  Un  corps  de  vingt  mille  hommes,  aux  ordres  da  gé- 
néral Hohentobe,  joindra  l^armée  d'Empire  aux  ordres  du 
duc  de  Saxe-Teschen. 

Du  camp  devant  Luxembourg ^  le  12  ventôse.  —  Les  ar- 
tilleurs français  emploient  au  bombardement  de  Luxem- 
bourg des  mortiers  d*une  nouvelle  invention,  dont  la  portée 
est  infiniment  plus  forte  que  celle  des  mortiers  ordinaires. 
De  leur  côté,  les  assiégés  ne  cessent  de  répondre  aux  as- 
siégeants par  un  Teu  très- vif  et  continuel,  mais  cependant 
de  peu  d'effet,  attendu  la  solidité  des  constructions  fran- 
çaises» 

PAYS-BAS. 

Bruxelles,  le  il  ventôse.  —  Un  corps  de  trente  à  trente- 
cinq  mille  hommes,  pris  de  l'année  du  Nord,  s'est  rais  en 
marche  sur  l'évéché  de  Munster  et  le  pays  tU  Hanovre, 

—  Toute  cette  ville  a  été  fort  divertie  d'une  idée  plahnnte 
qu'a  eue  le  général  Ferrand ,  commandant  de  la  place. 

Un  vieil  habitant  fort  riche  débitait  depuis  plusieurs 
jours  que  les  Autrichiens  avaient  repassé  le  Rhin;  il  assu- 
rait que  les  Français  avaient  levé  le  siège  de  Luxembourg, 
et  que  l'ennemi  s'avançait  victorieux  sur  Mamur.  Ces  nou- 
velles, disait-il,  étaient  certaines,  et  il  n'épargnait  ni  ar- 
gent ni  peines  pour  les  répandre.  Le  général  Ferrand  a 
fuit  venir  l'alarmiste  et  l'a  condamné  à  se  rendre,  à  ses  frais, 
sur  les  bords  du  Rhin  et  devant  Luxembourg.  Là  a  été 
dressé  procès-verbal  de  tout  ce  qu'on  a  fait  voir  au  mali- 
cieux Bruxellois,  et  lui-même  a  été  obligé  de  rapporter  la 
pièce  authentique  qui  démentait  ses  mensonges» 

Le  code  du  général  Ferrand  minerait  tons  les  gaietiert 
de  l'Europe. 

—  On  vient  de  pnblier  Farrêté  sni vant  du  condté  de  lalat 
public. 

Àrrité  du  comité  de  saUtt  public^  du  11  ventoêê^  fan  8*. 

c  Le  comité  de  salut  public,  considérant  qu'jl  importe 

dliabituer  au  régime  bienfaisant  des  |arés  les  habitants  da 


la  Belgique  et  antres  pays  conquis  dans  I 

du  tribunal  criminel  établi  à  Bruxelles,  arrête  : 

•  Art.  I*'.  Il  ne  pourra  être  rendu ,  par  le  tribunal  ori« 
minel  établi  à  Bruxelles,  aucun  jugement  portant  peine 
affiictive  ou  infamante,  que  sur  une  déclaration  des  jurés, 
formés  d'après  les  dispositions  des  titres  VI ,  VII  et  VIII  de 
la  deuxième  partie  de  la  loi  du  16  septembre  1791. 

«  II.  Les  listes  des  jurés  seront  dressées  par  l'agent  na- 
tional de  l'administration  centrale  de  Bruxelles,  et  arrê- 
tées par  cette  administration  ;  les  tableaux  des  jurés  seront 
formés  d'après  ces  listes  par  le  président  du  tribunal  cri- 
minel ,  le  tout  en  conformité  de  la  loi  du  2  nivôse  an  2  de 
la  république. 

t  III.  Le  tribunal  criminel  se  conformera,  dans  les  |a« 
gements,  aux  lois  pénales  de  la  république  française. 

c  Le  présent  arrêté  sera  envoyé  aux  représentants  dn 
peuple  après  l'armée  du  Nord  et  Sambre-et-Meuse ,  avec 
invitation  de  le  faira  pnblier  et  exécuter. 

•  Signe  CâMBAcisàs,  Mbhlui  (de  Douai),  J.-P.  CiAlALt 

PiLiT,  Garrot,  MAaac,  DuBois-CaAHci.t 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

ExlraU  de$  Affichée  t^ Angers,  du  9  venioiê. 
^-  Nous  avons  lieu  d'espérer  que  les  principes  de 
justice,  d'humanité  et  de  générosité  de  la  Conven- 
tion nationale  vont  obtenir,  parmi  les  chouans,  les 
mêmes  succès  qu'ils  ont  eus  parmi  nos  frères  égarés 
de  la  Vendée. 

Le  représentant  du  peuple  crut  devoir  parcourir 
les  pays  occupés  par  les  ctiouans,  et  connaître  par 
lui-même  l'esprit  des  habitants  :  il  paraît  même  ^ue 
son  voyage  était  connu  de  plusieurs  chefs  qui  desi- 
raient conférer  avec  lui. 

Il  partit  le  6  de  ce  mois  avec  cent  hommes  de  ca- 
valerie, dragons  du  16«,  hussards  du  ll«  et  chas- 
seurs du  15«,  en  grande  tenue.  Il  était  accompagné 
de  l'adjudant  général  Guillemé.  11  passa  au  milieu 
du  cantonnement  et  earnisons  de  la  Membrole,  du 
Lion-d'Angers,  Segre  et  postçs  intermédiaires,  au 
milieu  des  cris  de  vive  la  république!  vive  la  paim! 
Quelques  chouans  se  sont  trouves  sur  son  passage 
en  divers  endroits,  mais  sans  attaquer  ni  inquiéter 
l'escorte  ;  les  chefo  des  rebelles  avaient  donné  des 
ordres  pour  que  le  représentant,  qui  apportait  des 
paroles  de  pan,  fût  assuré  dans  sa  marcne. 

Nous  ignorons  s'il  a  eu  des  entrevues  avec  les  re« 
belles;-  mais ,  d'après  tous  les  rapports,  il  est  con- 
stant que,  excepté  quelques  mauvais  sujets,  assas- 
sins par  habitude  du  crime,  pillards  et  voleurs  par 
intérêt,  les  habitans  et  tous  les  chefs  désiraient  la 
pacification.  - 

Avii  aum  eréaneien  de  la  république^  déchut  par 
suile  de  délcnlian. 

Paris,  lé  0  ventôse. 
Le  directeur  général  provisoire  de  la  liquidation 
renouvelle  l'avis  qu'il  a  donné  aux  créanciers  de  la 
république  compris  dans  les  ëtats  de  déchéance 
foute  de  production  des  titres  originaux  de  leurs 
créances  avant  l'expiration  des  délais,  et  qui  étaient 
détenus  comme  suspects  ou  pour  cause  de  la  révo- 
lution à  ces  époques,  qu'en  vertu  de  la  loi  du  29 
fructidor  de  l'an  2,  et  de  l'arrêté  du  comité  des  finan- 
ces du  14  frimaire  dernier,  rendu  pour  l'exécution 
de  cette  loi,  il  est  autorisé  à  les  relever  de  la  dé- 

79 


626 


chëance.  m  A4BQPil  pr  ««1  d^iMlf^bumux  ^ 
la  liquidation  générale,  ayant  le  1«r  germinal  pro- 
chain, les  extraîV)  d^^  écrUPS  délivras  par  le  con- 
cierge des  maisons  où  11^  ont  été  détenus,  ou  par  les 
dépesilaires  actuels  des  registres  desdites  maisons 
i^9ffél«  WlHlIi^  par  le  pmid^Bt  du  tribunal  du  dis- 
trict, ou  ¥iflés  par  la  éÎMeteiM  du  district,  ensem- 
ble^ Itl  (itN s  <iiU|t  l#  défaut  da  p^duotion  a  ocoa- 

Uav  fMToeuraurs  fondés,  eu  autres  dépositaires  pu- 
kliei  qui  ont  été  délenus,  el  qui  réclameront  av^n^ 
le  l^r  germinal  p|Our  les  citoyens  qui  les  avaient 
duiPijéi  de  poursuivre  leurs  liquidations,  outre  le$ 
•ilvaits  d^écpou,  justifleront  par  leurs  resistres  ou 
aulres  aeles  authentiques  qu*ils  étaient  chargés  des 
alKiires  des  citpyens  pour  Iç^QUçte  ÎU  réclameront  à 
répeque  oh  ils  étaient  détenus.      DENOi^AKfliUU 


Lyeéé  à»ê  Ârh.  —  Séana  pubHq^  dn  10  ventôse, 

Wiptërit  de  eelte  séanoe  a  doublé  par  la  prés 
des  élèves  de  TBoole  Normale,  qui  s^y  étaient 


senee 
por- 


USi  Ml  foule,  e{  auxquels  le  Lycée  t^est  cmpreasé  de 
faire  Paccueil  le  |dus  fraternel.  ^ 

Après  un  discours  qui  leur  a  été  adressé  par  le 
président,  la  musique  ayant  joué  Tair  si  connu,  mais 
expressif,  Qù  p^^^O|l  4lre  fiKiur  q^^AH  Ifin  de  sa 
lamiller  ce  moment  a  été  marqué  par  un  attendris 
sèment  général,  et  de  loiigs  ^polçudi^^QieQU  Qnt 
prouvé  que  tous  les  eœurs  alors  Ventçndaier\i, 

Le  secré^aife  a  î^ltnpncé  qqe,  décadi  procfeaip,  «Q, 
il  Y  aurait  vine  ?^éance  cxtrawdwirç  pOMr  rPMV^rr 
mrc  des  çqu^s  4WQfHéi  d^^i^és  ^wx  élèves,  qw\ 
ont  été  invités  à  y  communiquer  toutes  |çi  (lates  e| 
rençeigpewftte  q^t  WilYÇiH  inïér^s^r  ViW^  ^c^i^l 
des  arft  e\  4ç  l'UjdusVie  daiUch^ique  d^p^rtemwU 
Ctt^c  m^nièrç  d  uUliw  1^.  %émK  d^  CÇa  ^l^YÇ*  ï 

Puri^  est  ua  v^o^n  p^réçiewx  qwc  Vm  ^\  ^mK 

gré  au  Lycée  des  Arts  d'avoir  a^  $ai|iir  fWiK  \^  plm> 
grand  iqteçê^  d(î  \a  X^?Xii\m^A 

r^rv^i  1^  o^ts  i«tér#|Siauts  qui  onl  ëlé  traités 
^ttii«  ç^Uç.  |i«?|iQP%  en  a  dUtin^ué  paHiculièreMont  > 

)^  Up  9«PP«fft^  lait  par  Duitronne,  sur  des  enato- 
n^^s  iHi(KÂi^lea  e|  pièeee  aïkatomiquea  du  eitoyen 
B!»rtr^^t  liMf)^,  et  principalement  sur  des  pièces 
P?UlS^ii4VIM  dttl^l  la  ^léMte  et  IVxactitude  pour- 
^%fi^  ^rf  à(^  ta  pÂMA  geenflb  utililé  pour  Télu^e  do 

^  Un  wélie»  iftouveeu,  Irèt-iimpHfié  par  les  frè- 
r^  C^tav^te,  ppur  fobriqueiF  des  toiles,  mousseli- 
nes, étoffes  de  laine  et  autree,  dans  les  tr^grandes 
laMie^MUS,  de  osiaaière  une  le  jeu  entier  de  la  navette 
cl  m  n»étier  aafail  de  iui-mè»e,  el  sans  exiger  d*au- 
trçi  tm^  que  eeUe  d^  enflai^t  de  quiuae  an^. 

B^usieure  ^utre»  ebJiels  nouveau^  dç  perf^çtjoit 
(Wua  lea  aate  onl  obtenu  des  mentrons  et  des  q^ié- 
dajlles,  et  le  citoyen  Milet-Mureau  a  lu  ensuite  une 
noie  Irès-détaillée  et  très-touchante  sur  le  dernier 
▼^X^^^l  wr  tavaorl^cdlèhre  La  Reyrouee. 

Cette  séance  élail  le  vingt-cinquième  depuis  la 
fondaljoçtd.Vl  Ujc^^^ns  que  les  agitations  révolu- 
lionna^res  qui  s%  sonA  si^cf^é^l?  df RMVS  \XOi^  flkWV^fs 
aient  ralenti  m  mpmçnA»^  U^X^M^^  A  Vé«uUlio«i 
{(éainralç  repaçdt^e  ^r  \^s  ^xtJi^W  ^j^Qj^^quî^lrç  çi^\^ 
eduoatf09» gratuites,  et  cteps  çf  rfto.wW  il  en^(M^V« 
s»  ceol^eri  fcveuv  des  çl^ye?,de  TEpp^c  ^o*w*^e.. 
De  pareils  eflbris  seront  sa.^is  do^te  appjçéçi^  j/^  1^ 
venlahles  amts  (|es  ^rte  e^  du  bi^^  pùpUcn 

rairc,  la  n^aiç^  de?  W»^  et Vm^i^  m  swin W.  |tt^ 


COMTENTION  NATIONILE. 

Présidence  d^  Bq^rdo^  (de  COise). 
SUITE  DE  LA  SÉANCE  DD   16  VENTOSE. 

On  donne  lecture  de  TAdresse  suivante  : 

c  La  tribune  de  la  h^\¥^  p<ipvla.lfq  de  Straslmurg  ne 
sera  plus  souillée  par  la  présence  et  par  les  erimes  des  ter- 
roristes. Asseï  et  trop  lpiu(-le|pps  ellç  a  été  Parèoc  de  ces 
vils  intrigants  qui,  accourant  de  toutes  parts  dans  nos 
murs,  attirés  par  la  cypidité  des  emplpiiki  par  iVipoIr  du 
piHage,  jol^aient  à  leurs  desseins  ambitieux  e\  çupidea  le 
pMJet  sanguinaire  de  nous  faire  loblr  la  tOTt  affl^ua  <ie| 
■killMereui  Nantais. 

f  La  révolution  du  9  thermidor  a  flxé  pour  |amals  la 
Ufoe  de  d^mareatipa  taira  la  vertu  et  le  ertaue, 

%  Par  anelle  falalU^  eitoyees  représentants,  lorsque  la 
France  eatit^re  joull  dea  bienfaits  an^le  a  reças  de  tous  , 
lOTMiae  nous  nous  lit  rien»  i^ous^aièfies  aux  doux  épanebe- 
m?ais  de  pptre  receaaaissaDce  et  de  notre  aneur  pour  la 
Ceevention  patiQpale«  par  ao^He  fetalilé  se  AiH-il  qiiq 
f'elui  qu^  a  rtradu  la  liber  lé  à  nos  eoaelioyeas  eppriaaéi  te 
déclare  au|ourd'hui  leur  accusateur? 

f  Ce  n'est  poiu^  son  çç^ur  qui  a  parlé*  Nova  «veoa  re- 
connu ep  lui  un  ami  linçèr^  de  la  jaitioi  ti  de  U  fériui. 
Ses  premières  paroles  ^  «n  arrivant  c^n»  ao*  »M«1.  fureal 
des  paroles  de  paix  et  de  con|olalion  ;  U  s*9itnoQÇa  avec 
l^ppareil  taipesant  de  la  Justice  qui  foudroie  Ic  crîpiCf  qui 
prot^e  et  relève  la  vertu  ;  il  vit  renaître  notre  confiance  ; 
déjà  il  nous  laissais  eptrevçir  \a\W»  punition  de  aw  nlus 
cruels  Qppresseura.MaU,  cçr«é  par  de  vrv»  tçrrorUleai  qui 
se  disent  encore  au}ourd1mi  je  vraU  4aceÎHaa«  qui*  ea 
maintenant  la  terreur  ^  IVdrc  dtt  jour^  rendaient  auU  Vil 
elbrls  des  gens  de  bien  qui  rorm^ûentaieç  ÇUI  *0U  coaiaaiU 
il  lui  Tut  impossible  d*ètre  lui-même;  il  ne  put  voif  que 
pa»  leura  yeux  »  il  fellut,  pour  ainsi  dire,  qu^(  leqr  a^ft* 
chat  la  justice  qu'il  était  venu  nous  offHr. 

«  I^QUSideiQa%  ^  U  vérité  de  dire  qu'il  aeaa  a  éétivrés 
de  deux  oppresseuri  (Moanel  et  Tetrel  )}  okala  anek|oct 
intrigants,  qui  par  la  suite  Tant  eKlu&ivemen(€UvU<UiU<&t 

ne  lui  eni  pas  permis  dç  terminer  l«a  tpuraUau»  qa'U  ai  ail 

s)  bien  eommencéesi 

«  Il  était  réservé  à  Pénergie  et  à  la  f^melé  du  représen- 
tant Bailly  d'achever  Içf  opi^ratiOUI  ^?  VIU  wUèiae.  Il  a 
fait  dans  iiQtrp  commune  el  nous  a  donné  toat  qç  qvkf  la 
représentant  Fous$edoire  npus  avait  promis,  Kos  dewe  tee* 
lions  ont  été  convoquées  ;  çUes  ont  cboiiii  lib^meaV  to  eea« 
seil  dont  il  s'est  environné  \  elles  çyak  «anotienaé  a^iee  lea 
transports  les  plus  unanimes  les  opéraiWa^  da  çaMiiMti 
il  nVst  pas  un  seul  <lç  no&  (MaçUoanaweij^  ppl^to  qu\  a'a'H 
reçu  les  témoignages  les  plus  flaUeurs  de  la  confiaoQidu 
peuple. 

f  Si  ces  ronctionnairaa  aaal  daa  oeotrc-révolutlonnaires, 
nous  le  sommes  tous,  car  c'est  nous  seuls  qui  les  avons 
chaiais^  Neaa  dBaoaatre«rév€iufio»»»alrea  1  ^aa  ne  le  cro^x 
p«ai  eilooteiw  wpréseatanlsl  vous  noua  regardes  au  con- 
traire etvaaaie  de  francs  e«  k>yM»x  ré))ublica}HS,  puisqnr, 

<içp.Mi4  j^v^  d  un  an^  xoua  aves  eeafie  ^  rauiaae  gaide 
des  h^l;>\UMVts  ^^  ^^m^smn,  Vun  des  prin^^yiaai^  UaUaxafda 
delà  république.» 

Lf  Q^ertiçn  de  cette  Adresse  ^u  RuUetia  wt  4^ 

Oa?(1SEi. }  Je  dois  donner  coiinaissonee  it  ht  Con  •  ' 
veûtiond-UH  jugement  du  iribunal  révolutionnaire  | 
étabb  à  Strasbourg  par  Saint-Just  et  Lebaa^  rendu  < 
sur- ta  dénonciation  d*un  nommé  Leclerc^  locataire  • 
d'imo  maison,  contre  le  prop<:iét9ri:Çx  C^  <to)Ll  voici 
les  termes: 

Extrait  daa  ngHktee  dM  l/eikssmah  réeeèeM^nnaif^ 
étoPli  à  StXQ<MkmX%  X  fOX  Q^ifÀ  4a  \ei§K4ems^ 
kants  du  peuple  Baudot  el  Lacoste,  le  iSfeimek^e^ 
et  d*un  autre  des  refrésçntÇtnls,  SQifki'J.HSk  ei  Le- 
à«e,  éhe  »?  du  même  mois  de  tan  2®.  —  Séam^ 
du  7  niro^e,  Can  2«  de  ta  république  française^ 
m^H  i»âifHêikèe,^pvéêemêBkeei$weene  9Êainom\ 
t<ixehlWolhJ*iieM 
Va  pai  la  Irihnaat  ta  étaeaciattea  portée  yar  le  citojrco 


ni 


Fisn^i  Lteferci  cka^Hef  éê  tett»  fHlf  i  Miitrl  lean- 
Micliei  Schaneri  fielletier,  à  Btrtsbottif  i  et  eefllrè 
Ôuzaiiné- Marftuerile  Schuner,  fille  dudil  Jean  -  kichtl 
Scbaner,  prévenus  d'iristocratieâd^ivilisitfBieollles  M^ 
siguiiU;  éi  ledit  Jean-Michel  Scnanef,  en  outre»  «IV 
voir  refusé  d'accepter  le  lo^rer  de  maison  du  citoyen  Le- 
«lerc  au  taux  du  ibaxiitattlli  ;  tolif  lëAisUoyênsIliedIhl  TÊlthel 
et  Louis  Hoos  ed  leurs  dépositions,  les  préVenbS  dills  ll!ttlv 
moyens  de  jusliAealioni  leurs  défeliieurs  onicl«ux«  M- 
semble  les  réquisitions  de  Tacctisateiir  publié  substitut  (  le 
tribunal,  après  avoir  opiné  publiquemeoli  Jugeant  lespt<i- 
veuus  révolutiondaîrement ,  comme  aristocrates  hors  la 
loi ,  a  déclaré  ledii  Jean-Blicliel  Scbaoer  convaincu  d^arla- 
tocratie,  de  mépris  pour  les  assignats;  d'avoir  bler,  le  & 
nivôse  I  le  IVttdéflialh  Ht  lé  tlutHicallOd  d«  VsHM  éA  re- 
présentants SainfJust  et  Letas,  dy  •  du  cottréilti  cddlffe 
les  agioteurs  et  ceux  qui  vendent  au-dessus  du  mailmaii, 
rerusé  du  ciloj^en  Leélerci  sous'-locaiaire,  le  lo|er  dé 
maison,  pour  le  quartier  échu  le  85  décedibre(vieulsl]fh'k 
au  taux  du  maximum,  en  exigeant  de  lui  Texéeulion  m 
leur  bail  du  ii  février  dernier,  par  lequel  il  rendait  400  k 
nàr  quartier;  a  pareillement  déclaré  sa  fille,  Sutannc^ 
Mar^Ueritté  Sébanef,  cobvàttacué  d^arislocruiie  et  d'avoir 
discredile  ibs  asslgnatl,  en  dliailt  l|Ué  l'àsslsnai  de  t  livh 
MC  Viltait  que  &0  80US.ËU  eenséquème,  lé  Iribuoni,  en  édtt- 
OHldbiit  lés  d«Ux  délllbi  èofdôhné  Que  Ift  IfiâiMb  dudU 
Scbaner  sera  rasée,  cettlèt-tiiéttléol  à  TUM^lê  Idttlliolitté  tt- 
dessus,  dont  il  a  été  fait  lecture,  qui  porte  qu'il  cétor- 
dortné  au  tribunal  du  département  du  Bas*Rhin  de  faire 
rdsèr  la  maison  de  quicobque  sera  convaincu  d^agioiage, 
ott  d*éVOir  Vebdu  À  un  (irix  au-dessus  du  maximum  :  or* 
dotihe  que  lUr  la  p\Hé  dé  tUdUe  dôlisOd  il  sera  dflesèè  un 

^eftu  sur  l&t)Uèi  on  ettebefâ  le  prè&bûl  ju^ëmMl  lu^  udts 
pléquë  dé  fehbléue,  lë^ut^l  |)ott*uu  léi-a  ))iaté  m  réiéeu- 

teur  des  jUgfttëfatl  éHiâlneiS,  ))0Ur  WtWt  de  Virr^ût  éUk 
ood(re^rév«lttllo«hali>élt  aUx  égldléUH)  Ul  fél^nlI'dbAI  (u 
devoir  tous  ceux  qui  pourraient  être  teniél  d^iVllii-  la  IMOfl- 
naie  nationale,  et  d'enfreindre  la  loi  du  mailiium  t  ton* 
damne  ledit  ^  haner  &  payer  au  citoyen  Leelére  ton»  lai 
frais  de  déménagement  et  tous  ceux  qu^ii  aura  faits  pour 
Uh  «Hlfe  l6||efMu( ,  d*â))Tt4  léê  étéb  qdt  lëfont  élKillés  et 
visés  pirléthbunhhéfdonhé,  te  outre,  i)tte  le  pfteot 
jugeineoiaei-a  Imprime  eu  les  deut  lau^ué»  et  envoyé  tlâU^ 
toutes  hn  tomuauei  du  déparumeUti  et  t|Ué  lé  tdM  lOlt 
exécuté  à  la  diligénde  de  raceusateur  puUlO  sttlislituu 
Fait  el  juge  fl  Bl^asboUlY,  lé»  jottt  tl  Ib  que  déSIUlé 
Signé  Tbtrbl,  Maimoni  et  WôLV»;  «I  HooML,  edmmtl- 

L'ttsiemblëe  entière  flrémlt  d'horrêuir  à  eette  le(S 
turei 

b«{itKlst  :  Le  tnilbeUt^ux  pft)pHétâire  de  cette 
maUt)»,  a^ë  de  qiiatriî'^yiDgts  attji,  fût  jeté  dâhi  h 
rue  et  guillotitië  le  même  jour  ;  sa  îàmille  erre  de*^ 
|mfs  ce  temps  *,  lu  maisoii  fut  hisëe,  et  la  ndEiDn  oblU 
gée  de  fhire  uUé  dépensé  de  30,000  liv.  bOtir  emt)â- 
cher  que  les  deux  maiSOttS  yolSîttés  ^u'èllU  âouteiiult 
ne  s*écrou  lassent» 

Je  demande  le  renvoi  au  comité  dessecourg,  pour 
gU*on  accordé  des  indemnités  À  cette  malheureuse 
famille. 

Barailon  :  Je  demande,  moi,  qu^on  renvoie  aus^ 
uu  comité  de  lëgislatlon  pour  examiner  si  Ton  ne 
devi-alt  pis  fdlre  rétftbilr  U  maiioA  BuX  fhite  des  Ju*- 
ges  ;  et  uu  comité  dé  sûreté  géuérâle,  pour  les  pour- 
suivre.   • 

DuROY  :  Ces  jugea  ont  au  la  roUin  fbrcéaparSBidt- 
Just  et  Lebas;  ils  n'avaient  d*autre  altarnative  Aué 
il*accepter  leurs  fonctions  et  de  juger  au  gré  des  aic- 
Uiteurs,  ou  d*êlre  eulllotihës. 

hkSÂkh  :  J'atteste  à  la  Convention  que  Mainoni, 
ruh  de  Céuk  qui  oUt  rehdu  ce  jugement,  est  un  ia- 
irigaUt  préVéhU  d&  mlâpidàtiôUS  enormea  pour  rai- 
sons desquelles  il  était  poursuivi.  Il  se  réfugia  au- 
près de  ëuint-iuet  et  Lebes,  â  qui  il  dematidu  de 
faire  pertie  du  tribUtiAl  et  du  comité  dé  surteilUttCe 
de  qmiboiirg* 


ANlilimmiiT!  Qê!l*AallMifltU  iniMbtlHftl 
il  n'y  avait  pas  de  juréd,  point  flè  10111)11  •  O'étaieir 
trois  individus  qui  égOrgeéiént  A  I««ir  gri.fl*M-il 
pas  atroce  qu'on  vienne  vous  dire  ici  que  a'aal  parce 
qu'ils  cràigîiaien^  d*itre  ffuillolinés  eUz-toiimea  aiit 
èès  nommes  faisaient  guillotiner  des  innoaanU?  rtû 
démande  je  renvoi  au  comité  de  sûreté  gtinéralet 

MÉADitiB  t  Je  aeminde  le  revifoi  eu  eomtté  de  (é* 
gieittttbii  ;  te  eode  pénëi  porte  une  diapoiltioi  cOfibè 
tous  «eux  t}ui,  meehummenli  ftroot  détruire  les  bl^ 
limetiti.  Il  ue  mut  Ml  «oulfrir  uue  lea  mimhi  loiehi 


rasées  au  gré  de  oueldues  imriganti.de  quelques 
mpouBi  on  dit  que  ee  (daioofii  à  &o,odO  uvres  de 
reute  \  e*eat  ufîé  raiaon  de  plus  pour  léi  eohdamâer 
é  rebâtir  la  maison  à  leura  fraiSi 

Le  renvoi  èét  AétYéii  aux  ôomités  dé  législation, 
de  lAfeté  générale  et  de  aecours. 

ÀNDBÊ  DtJMONT  t  Ju  dènahde  que  l'arrêté  pria  par 
6aiqt*Just  et  Lebaa  soit  ënbuléi  li  est  inutile  de  dé- 
molir les  maiaonai  8i  léa  propriétaires  sont  ooupa<- 
ble«i  il  faut  les  pdniri  mais  il  fout  laisser  les  mai- 
soUs  debout. 

L'arrêté  pris  par  Saint-Just  et  LeM  Oêt  attbulé. 

Lê  PHÉslOfeirr  \  TinStrUta  la  CoOVèritlon  qu*on 
Vient  de  me  remettre  une  lettre  du  cito]^en  Lavaux. 


Sâlnt-Domib^ue  duatre  porta  qui  lont  toujours  ou 


verts  à  la  république  :  dana  le  nord  le  Cap  et  le 

l^ort-de-Paix*,  lés  Caves  dans  te  sud,  et  Jacmel  i 

l'ouest.  Le  commandant  syoute  oue  la  CohvénUoft 

pourra  aeeorder  une  pleine  cônnancé  aux  détails 

?ué  lui  donnera  Voffieier  porteur  de  là  lettre,  qu'il 
ourra  surtout  en  dontier  de  nrëCiS  aUr  la  trahlsoa 
f)Ui  a  livré  le  fbrt  Dauphin,  afiaii^e  dans  laquelle  soo 
courage  seul  Ta  empêché  d^étré  fait  prisénnicn 

PiuêifUTi  ff9im{  U  r#nv«l  du  tout  du  comité  des 
oolonies» 

DuvÀY  t  Je  demande  due  le  pétitionnaire  soll  ad- 
mia  à  la  barré)  pour  quii  a'ae^uitte  de  M  mission  ; 
aprèa,  le  renvoi  aux  eoloOles» 

Le  pétitionnaire  est  k  la  barre. 

te  piiiUonnaire  :  titoyens^  J'ai  è\â  envoyé  par  It 
général  Lavaux  pour  accompagner  en  France  les  ar- 
Shlves  des  eïreommtSSatrè^  oivlU  Polverel  el  San- 
thonax  :  elles  avaient  été  laissées  a  New-Vork,  d  ou 

elles  seront  apportées  par  un  bâtiment  neutre.  Je 
prête,  au  nom  de  nos  Mm  restés  •  Sàint-Doimâ- 
gue,  la  serment  de  fidélité  a  la  Fraadt. 

Ltt  PntstoitfiT  !  Jamais  la  sollicitude  de  la  Con- 
vention n'a  été  blus  grande  sur  le  sort  déS  coloniél 
que  depuis  qu'elle  y  a  rétabli  Tégalité,  en  rendant 
aux  noirs  tous  leurs  droits.  La  Convention  prendra 
en  considération  les  dépêches  dont  tu  ea  lé  portéuf. 
Elle  tlnvlte  aux  honneurs  dé  la  séanêé. 

DvFAT  i  Je  prie  la  Convention  d'obserVer  que  le 
sarment  dont  elle  vient  d'accueillir  l'hommage  n'eac 
pas  de  l'espède  de  oeux  Mis  à  Pliiladelphlei 

Je  m'abstiens  en  ce  moment  de  faire  l'éloge  de  II 
brave  armée  républlOaim!  qui  a  servi  aveela  plus 
grande  distinction  et  a  aupporté  toutes  te  priva* 
tions.  voire  comité  de  salut  public,  quand  II  en  auri 

pris  connaissance,  s'empressera  sans  dOuté  Oê  lUi 
rendre  justice,  de  vous  rendre  compte  de  sa  con- 
duite et  de  solliciter  votre  approbation. 

Je  demande  que  l*ofBclér  qui  vient  dé  paraître  ft 
votre  barre  se  retire  pir-^devaBl  le  éontfll  (llMlut 


628 


public  ponr  lai  remettre  toutes  les  dépêches  et  lui 
rendre  compte  de  sa  mission. 
Cette  proposition  est  décrétée. 

Camboii,  an  nom  du  comité  des  finances  :  La  tran- 
tcriptioD  de  la  dette  consolidée  sur  te  ^rand  livre 
est  termina  depuis  le  l«r  juillet  1794  (vieux  style). 

Depuis  cetle  épo<)ue  on  s*occupe  de  la  délivrance 
des  inscriptions,  qui  n*a  pas  été  exécutée  avec  la  cé- 
lérité Qu'on  espérait  obtenir,  à  cause  des  erreurs 
multipliées  qui  se  sont  glissées  dans  les  états  ou  dans 
les  certificats  de  propriété  fournis  par  les  payeurs. 

Chaque  jour  on  s  occupe  de  la  véri6cation  et  du 
contrôle  du  travail  commencé  ;  chaque  jour  on  dé- 
livre 2  à  aoo  inscriptions  :  déjà,  sur  107,305  créan- 
ciers portés  dans  les  états  qui  ont  été  fournis  à  la 
trésorerie,  83,602  ont  réclamé  leurs  inscriptions, 
23,702  ne  se  sont  pas  encore  présentés,  mais  dans  ce 
nombre  se  trouvent  compris  les  émigrés,  etc.,  dont 
les  biens  sont  acquis  à  la  république. 

Sur  les  83,602  inscriptions  demandées,  56,720 
sont  prêtes,  et  50,379  ont  été  délivrées;  de  sorte 
qu'il  y  avait  hier  au  soir  6,341  inscriptions  prépa- 
rées qu'on  n'avait  pas  retirées,  et  26,882  parties  en 
retard  qui  réclament. 

C'est  des  arrérages  de  ces  parties  en  retard  que 
votre  comité  s*est  occupé  ;  il  vous  propose  de  les 
faire  nayer  sur  le  bulletin  du  dépôt  des  titres  pour 
ceux  de  Van  2,  et  pour  le  premier  semestre  de  Tan  3, 
qui  n'écherra  que  le  l^r  g^erminal  prochain. 

Les  dispositions  sont  prises  pour  que  ce  payement 
ne  retarde  pas  l'expédition  aes  inscriptions;  nous 
espérons  oue  tout  s'exécutera  â  la  fois  et  avec  le 
plus  grana  zèle. 

Si  on  considérait  le  travail  qa*a  dû  entraîner  la 
vérification  des  états  fournis  par  les  payeurs,  la  réu- 
nion et  le  classement  de  270,000  parties,  la  tran- 
scription de  107,000  articles,  la  réception  des  an- 
ciens titres,  la  vérification  du  grand  livre  d'après  les 
certificats  de  propriété,  les  erreurs  inséparables  d'une 
81  grande  opération  qu'il  a  fallu  relever,  l'expédition 
des  inscriptions  et  des  feuilles  de  payement,  la  ré- 
ception de  240,000  contrats  de  la  dette  viagère,  leur 
liquidation,  on  serait  forcé  de  convenir  que  Tes  agents 
qui  en  ont  été  chargés,  au  lieu  de  mériter  des  re- 
proches, ont  bien  rempli  leur  devoir. 

Voici  le  projet  de  décret  que  votre  comité  m'a 
ehargë  de  vous  proposer  : 

I  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  ion  comité  des  finances,  décrète  t 

■  Art.  I*'.  A  compter  du  20  ventôse  présent  mois,  les 
créaDden  de  la  dette  consolidée  qui  n'auront  pas  pu  ob- 
tenir leurs  inscriptions  définitif  es  seronl  payés  du  mon- 
tant de  leurs  arrérages  de  la  seconde  année  républicaine , 
et  pour  le  premier  semestre  de  la  troisième  année,  d'après 
le  mode  déterminé  par  les  articles  suivants. 

■  II.  Ils  pourront  se  présenter  dans  Tordre  qui  leur  sera 
Indiqué  par  les  commissaires  de  la  trésorerie,  aveclenr 
bulletin  de  dépôt,  sur  le  dos  duquel  on  déterminera  le 
montant  de  l'inscription  à  obtenir  d'après  les  certificats  de 
propriété  fournis. 

■  111.  Il  sera  tenu  an  registre  sur  lequel  sera  enregistré 
lous  un  naméfo  d'ordre  le  résultat  de  la  transcription  au 
dot  du  bulletin.  Ce  nnméro  sera  porté  aussi  sur  le  bulletin 
dedépéu 

t  IV.  Dix  jours  après  Tenregistrement  mentionné  en 
Tarticle  précédent,  les  créanciers  porteurs  du  bulletin  se- 
ront payés  de  la  totaUté  des  trois  semestres  mentionnés  en 
rarticle  I«% 

«  ¥•  Le  directeur  du  grand  livre  fera  dresser  les  feuilles 
de  payement  dans  la  forme  usitée,  qu'il  remettra  au  payeur 
principal,  afin  que  le  payement  soit  exécuté  sans  retard.  > 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 


—  Un  membre  propose  de  créer  une  monnaie  mé* 
tallique  représentant  les  fractions  des  assignats  de 
10  sous  ;  il  se  fonde  sur  la  dilliculté  qu'on  éprouve  à 
faire  des  échanges  dont  la  valeur  est  au-dessous  de 
10  sous. 

Thibault  :  Je  demande  l'ordre  du  jour  sur  cette 
proposition.  Cette  monnaie  n'aurait  aucune  base. 
Vous  avez  adopté  un  système  décimal  que  Ton 
pourra  mettre  a  exécution  dans  des  cireonstances 
plus  faciles.  Alors  nous  aurons  des  pièces  de  décime, 
de  5  décimes,  et  des  pièces  de  centime  qui  corres- 
pondront aux  pièces  de  3  deniers. 

Vbrnieb  :  Il  n'est  nécessaire  d'établir  des  bases 
que  pour  les  monnaies  d'or  et  d'argent;  les  autres 
monnaies  n'ont  jamais  la  valeur  intrinsèque  qu'on 
leur  donne  ;  ce  ne  sont  que  des  signes  convention- 
nels. Il  faut  nécessairement  créer  une  monnaie  de 
fractions  pour  faciliter  les  échanges,  et  l'on  ne  se 
fait  pas  assez  d'idée  du  renchérissement  que  ce  dé- 
faut de  petite  monnaie  occasionne  sur  le  prix  des 
denrées.  Il  faut  suppléer  aux  gros  sous,  dont  on  ne 
voit  plus  un  seul  :  c'était,  au  reste,  une  très-mau- 
vaise monnaie,  qu'il  faut  remplacer  par  une  autre 
idéale,  qui  sera  moins  mauvaise. 

Thibault  :  Je  suis  d'accord  avec  Vemier;  Je 
pense  comme  lui  qu'il  est  impossible  de  ne  pas  éta- 
blir une  petite  monnaie ,  et  lorsque  j'ai  dit  qu'il  n'y 
avait  pas  de  base,  i'ai  entendu  parler  du  plan  pro- 
posé par  notre  collègue,  et  non  pas  de  celui  des  co- 
mités ;  car  les  bases  du  système  monétaire  sont  dk^ 
posées.  Au  surplus,  j'annonce  que  nous  nous  som- 
mes déjà  occupés  de  créer  la  petite  monnaie  dont  on 
vient  de  parler. 

Cette  discussion  se  termine  par  un  renvoi  au  co- 
mité des  6nances. 

—  Un  membre ,  au  nom  des  comités  des  finances 
et  des  domaines,  fait  un  rapport  sur  les  réclamations 
de  la  citoyenne  Montatisier,  et  présente  un  projet  de 
décret  par  lequel  il  propose  de  lui  rendre  la  salle  qui 
lui  appartient ,  rue  de  la  Loi ,  et  d'ordonner  que  le 
Théâtre  des  Arts  reprendra,  d'ici  à  trois  mois,  son  an- 
cienne salle ,  porte  Martin. 

Bentabolb  :  Je  m'oppose  à  ce  projet  de  décret.  Je 
pense  que  l'on  doit  favoriser  l'Opéra  plutôt  que  la 
citoyenne  Montansrer,  qui,  si  l'on  en  juge  d'après  ce 
qui  se  passe  dans  son  théâtre,  au  Palais-Egalité,  fera 
encore  de  cette  nouvelle  salle  un  lieu  de  ralliement 
pour  les  contre-révolutionnaires.  On  a  chanté  der- 
nièrement,  dans  la  salle  du  Palais-Egalité,  des  vers 
royalistes,  des  vers  en  l'honneur  de  Charlotte  Cor- 
day (On  rit  et  on  murmure.) 

***  :  C'est  là  le  langage  de  Marat. 

Bentabolb  :  11  viendra  un  temps  oh  d'autres  fe- 
ront les  réflexions  que  je  fais  aujourd'hui,  mais  avec 
plus  de  nécessité. 

Lemoinb  :  On  prétend  qu'il  est  dû  des  indemnicës 
à  la  citoyenne  Montansier;  mais  il  me  semble  qu'il 
faudrait  d'abord  examiner  si  c'est  par  le  fait  oe  la 
Convention  que  sa  salle  lui  a  été  enlevée... 

Clauzbl  :  Oui,  c'est  le  comité  de  salut  public  qui 
la  lui  a  prise. 

Lemoinb  :  Reste  à  savoir  si  la  Convention  est  te- 
nue de  réparer  les  torts  de  l'ancien  comité  de  salut 
public,  si  elle  est  obligée  de  tenir  tous  les  actes  qui 
ont  été  faits  parce  comité,  et  qu'elle  n'a  jamais  ap- 
prouvés. (Murmures.) 

Rewbell  :  Je  ne  me  serais  jamais  imaginé  qu'il  ne 
fallût  pas  rendre  justice  à  un  propriétaire  oe  spec- 
tacle parce  qu'on  aurait  chanté  de  mauvais  conpleta 


629 


sur  son  théâtre.  Le  comité  de  saint  public  a  ruiné  la 
citoyenne  Montansier  en  lui  prenant  sa  salle  et  tous 
ses  accessoires  ;  et  elle  sera  toujours  ruinée  si,  en  lui 
rendant  sa  salle,  nous  ne  lui  rendons  pas  ce  qui  peut 
la  faire  valoir.  Vous  devez  lui  remettre  sa  chose  dans 
rétat  où  vous  Tavez  prise,  et  lui  en  payer  les  loyers. 
Je  demande  au  surplus  Timprcssion  et  rajournement 
do  projet  de  décret. 

Legendbb  (de  Paris)  :  La  persécution  que  la  ci- 
toyenne Montansier  a  éprouvée  est  une  suite  du  com- 
plot qui  fut  ourdi  pour  arracher  du  sein  de  la  Con- 
vention plusieurs  de  ses  membres  qu*on  a  égorgés. 
C'est  encore  là  un  des  crimes  de  Robespierre. 

Avant  de  tuer  un  homme ,  il  fallait  le  dépopulari- 
ser, et  pour  cela  Robespierre  se  servait  de  Chau- 
mette  etd*Hébert.  Le  journal  de  celui-ci  était  comme 
Ja  trompette  de  Jéricho;  quand  ce  scélérat  avait  fumé 
trois  fois  sa  pipe  autour  d*une  réputation ,  il  fallait 
qu'elle  pérît.  Cnaumette  et  Hébert  ont  répandu  que 
Danton  et  Lacroix  avaient  contribué  à  la  construc- 
tion du  spectacle,  et  il  a  été  prouvé  depuis  qu'ils  n'y 
avaient  pas  fourni  un  sou.  La  Montansier  a  été  onze 
mois  en  prison  ;  elle  a  échappé  à  l'échafaud,  et  tout 
son  crime  était  d'avoir  bâti  un  spectacle  pour  enri- 
chir la  nation  :  car  c'est  l'enrichir  que  de  faire  pro- 
s|iérer  les  arts.  (On  applaudit.)  Lorsque  la  Conven- 
tion s'occupe  de  lui  rendre  justice,  on  veut  l'en  em- 
ptlcher  ;  on  vient  tenir  ici  le  langage  d'Hébert  et  de 
Chaumette;  on  vient  dire  ici  qu'il  a  été  chanté  sur 
un  théâtre  des  vers  aristocratiques.  Les  spectacles 
sont  ouverts  à  tout  le  monde;  les  directeurs  ne  sont 
pas  responsables  des  mauvais  propos  qui  s'y  tien- 
nent; cestà  lauolice  à  les  surveiller.  Faudra-t-il, 
comme  à  Lyou,  nrûler  les  maisons  où  il  se  sera  tenu 
quelques  mauvais  propos?  Je  n'attaque  pas  le  pa- 
triotisme de  BentaDole ,  mais  je  dis  qu'il  a  parlé  le 
langage  d*Hébert  et  de  Chaumette  ;  je  dis  que ,  si 
quelque  chose  peut  l'excuser,  c'est  son  tempéra- 
ment pusillanime  et  peureux.  (  Vïb  applauoisse- 
ments.) 

'  Bentabolb  :  Je  demande  la  parole. 

Lbgendre  :  La  peur  n'est  pas  de  mise,  sortoul  en 
révolution  ;  il  faut  du  courage,  de  l'audace  (  nou- 
veaux applaudissements)  pour  faire  triompnerla 
liberté  et  la  justice;  c'est  du  courage  qu'il  faut,  en- 
core du  courage  et  toujours  du  courage.  (Vifs  ap- 
plaudissements. )  La  Convention ,  qui  sait  que  la 
citoyenne  Montansier  a  été  opprimée^  ne  doit  pas  lui 
rendre  une  demi-justice. 

J'appuie  la  motion  de  RewbelL 

Bentabolb  :  H  ne  doit  pas  être  permis  à  on  mem- 
bre de  la  Convention  d'insulter  un  de  ses  collègues 
parce  qu'il  n'est  pas  de  son  avis.  Faites  attention, 
citoyens ,  que  je  n*ai  iamais  fait  aucune  allusion  dé- 
favorable. Je  aemande  qu'on  maintienne  la  liberté 
des  opinions;  c'est  par  des  allusions  et  des  insultes 
qu'on  étouffe  le  zèle  des  patriotes.  (On  murmure.) 
Legendre  a  manqué  aux  principes  ;  je  ne  demande 
rien  contre  lui  ;  il  a  le  plus  grand  tort  de  dire  que 
j'ai  peur.  (On  rit.)  J'ai  peur  sans  doute  (on  rit)  :  un 
amant  craint  pour  sa  maîtresse.  Au  surplus ,  ceux 
qui  me  taxeront  d'avoir  peur  n'ont  qu'à  venir;  ils 
verront  qui  je  suis.  (On  rit.) 

La  Convention  passe  à  l'ordre  do  Jour  sur  l'inci- 
dent. • 

FoBBSTiEB  :  Tétais  présent  à  la  discussion  qui  a 
eu  lieu  au  comité  des  fanances,  et  je  dirai  à  la  Con- 
vention que  la  citoyenne  Mantansier  avait  renoncé 
à  la  propriété  de  son  théâtre ,  et  qu'elle  avait  seule- 
ment demandé  que  la  république  lui  en  payât  le 
prix  ;  ce  parti  serait  d'autant  plus  raisonnable  qu^  la 


république  a  déjà  fait  des  dépenses  considérables 
pour  la  réparation  et  l'ornement  de  ce  spectacle. 

La  Convention  ajourne  la  discussion  à  nonidi. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  80IB  DU  16  YBHTOSB. 

Cette  séance  était  destinée  au  renouvellement  du 
bureau. 

On  procède  à  l'appel  nominal  :  Thibaudeau  ob- 
tient la  majorité  des  suffrages  et  est  élu  président. 
On  commence  ensuite  un  appel  nominal  pour  le 
choix  des  secrétaires;  il  est  interrompu  par  Léonard 
Bourdon,  qui  s'écrie  :  •  On  insulte  les  membres  de 
l'assemblée  nationale  autour  du  lieu  de  ses  séances.  • 

Quelmui  membrts  de  Vextrémili  :  Il  faut  y  aller! 
—  (Ils  descendent  pour  sortir.) 

***  :  C'est  une  tactique;  il  y  a  un  mois  qu'on  vou- 
lait aussi  nous  faire  croire  que  la  Convention  était 
investie,  tandis  qu'il  n'y  avait  pas  le  moindre  ras- 
semblement. 

Léonard  Bourdon  demandela  parole  avec  instance. 

Legeiidbe  (de  Paris)  :  Il  t'appartient  bien ,  assas- 
sin de  neuf  pères  de  famille,  dfe  neuf  citoyens  d'Or- 
léans, de  te  plaindre  d*avoir  été  insulté! 

Lbonabd  Boubdon  :  Mais  ce  n*est  pas  moi  qui  ai 
été  insulté» 

Les  membres  de  l'extrémité  gauche  murmurent 
vivement.  —  Le  bruit  augmente  ;  le  président  se 
couvre.  —  Le  calme  renaît  peu  à  peu. 

LéoNABD  Boubdon  :  Je  demande  la  parole  pour 
rétablir  le  fait.  Ce  n'est  pas  moi  qui  ai  été  insulté... 
(Le  bruit  se  renouvelle.) 

***  :  Cest  Ârmonville  qui,  étant  ivre,  a  insulté  des 
citoyens. 

Le  Pbésident  :  D'après  les  renseignements  qui 
viennent  de  m'étre  donnés  Jl  ne  s'agit  que  d'une 
rixe  qui  s'est  élevée  dans  un  café,  entre  un  membre 
de  la  Convention  et  plusieurs  citoyens. 

La  Convention  passe  k  l'ordre  du  jour. 

On  continue  l'appel  nominal. 

Après  quelques  instants  Duquesnoy  réclame  la  pa- 
role ;  elle  lui  est  accordée. 

Duquesnoy  :  Je  demande  l'ordre  du  jour  motivé 
sur  ce  que  ceux  de  nos  collègues  qui  ont  été  insul- 
tés ont  le  droit  de  venir  id  réclamer  la  justice  na- 
tionale. 

Lbgendbb  !  Je  demande  que  l'on  donne  la  parole 
è  ceux  qui  se  prétendent  insultés;  on  leur  répondra 
ensuite,  et  l'on  prouvera  que  ce  n'est  qu'à  force  de 
s'avilir  eux-mêmes  qu'ils  se  font  insulter  :  c'est  à 
force  d'ivrognerie.  (On  applaudit.) 

Gaston  se  lève  et  s'agite.  Il  tire  son  sabre.  ^  Les 
membres  qui  l'environnent  le  retiennent  et  le  font 
asseoir. 

On  continue  l'appel  nominal.— Il  est  de  nouveau 
interrompu  par  Mathieu. 

Mathieu  :  Le  comité  de  sûreté  générale  m'a  chargé 
d'annoncer  à  la  Convention  nationale  que  le  trouble 
qui  s'était  manifesté  autour  du  lieu  de  ses  séances 
est  entièrement  apaisé.  Nous  ne  pouvons  vous  faire 
de  rapport  aujourd'hui  ;  nous  sommes  occiipés  dans 
ce  moment  d'éclaircir  les  faits;  nous  vous  ferons  le 
rapport  quand  ils  seront  éclaircis.  (On  applaudit.) 

On  termine  Tappel  nominaL 


ItO 


Lis  ttoareany  MorëUirei  nùhX  Uf |nelol  i  Blàd  It 
Baudin  (d*lodr«Hii-Lnire). 
La  êéêOQt  est  le? ëa  à  odza  heuras^ 

ièkfiCÈ  DU   17  YENTOSB. 
Préiidenee  de  Thibaudeau. 

Musset  donne  lecture  d'une  lettre  qui  lui  est  adres- 
sée par  la  dommuue  de  Gif  rinOnt-Ferrand,  dëpafle- 
mentdu  Puy-de  Dôme;  elle  contient  le  faitsuiYant  l 

'  Lea  citoyens  Fermant  et  Dul>oiSi  de  la  commune 
de  Clermont-Ferrand ,  sans  fortune  at  portefaix  de 
leur  profession ,  furent  chargea,  il  y  a  douce  Jours, 
de  transporter  dans  une  place  ëcariëe  une  paillasae 
sur  laquelîa  était  mort  un  citoyen  quelques  jours 
auparavant.  Bn  vidant  la  paille  sur  un  fumier^  ces 
deux  citoyens  aperçurent  une  bourse  pleine  d*or  et 
ub  portefeuille  garni  d'assignatâ. 

«  La  probité  était  le  ^ul  témoin  dé  (ies  deuï  ci- 
toyens; aile  les  porU  vefs  le  juge  de  psix,  â  qui  ils 
remirent  Is  bourse  ssns  Tavoir  déliée  et  le  porter- 
feuille  sans  ravoir  ouvert;  H  S'y  trouva  200  louia 
en  or  et  1 ,000  livres  en  assignats.  Le  toUt  a  été  re* 
mis  depuis  aux  parents  du  défunt.  • 

La  Convention  nationale  décréta  la  mention  ho- 
norable et  riuftei^tiod  au  Bullôtio  de  ce  irait  de  pro- 
bité : 

^  Un  des  secrétaires  lit  las  lettres  suivantes  i 

J.'B.'D.  Maxade,  représentant  du  peupli^  en  mO* 
«ton  dun$  M  éépafêemenU  de  lo  moitileU  dt  la 
îiieurthêf  à  ia  Convention  naiit^nale» 

Maseyi  Ift  la  véaiMe,  rsa  s«da  larépubllqu* 

UQ«  tl  iodiviûble. 

•  Ciloiant  collèauei,  je  nielt  sovl  vos  yeax  «fie  procla- 
mation dont  Je  vieuft  d^arrèler  la  publication  dasi  les  dé- 
partements de  la  Meurtbe  el  de  la  Moselle.  I^i  cet  acte  était 
flur«ttftBt  liOn  euvrbltt  je  me  glHlerall  bien  de  recher- 
cher vos  auspices  :  il  serait  trop  au-dessous  de  voai|  natl 
je  n'ai  que  le  mérite  de  rédaction i  il  eiitle  toul  entier 
dads  voire  loi  i  dont  j^ai  usé  développer  les  motifs,  et  dans 
les  principes  épars  de  quelt|Uei  VrSis  amis  de  la  sagesse.  Je 
suis  une  portion  de  vôus-mémei,  et  votre  éloge  ^étit  pa* 
raitre  suspect  dans  ttia  bouebe;  Il  ne  le  sera  pourtant 
qu'aux  brigandi  et  Sus  malveillants»  lorsque i  détenant 
Torgane  des  citoyens  qui  m*enu>urent,  j^oserai  m*écrier  : 
Vivent  à  jamais  la  CoiiVtîntiOn  nationale  él  Sa  ttiémôire» 
pour  le  boobeurde  rbumallltai 

•  Salut  et  fraternité.  Si§ni  Ifâiàaai  • 

Cette  lettre  eat  ranVOyéa  au  comité  de  aûraté  gé- 
nérale. 
'^  Le  représentant  du  peuple  Paganei,  envoyé  dans  le 

département  de  la  Corrèze,  écrit  de  Tulle,  le  13  venlose,  à 
la  Convention  nationale,  qu'ayant  été  chargé  de  surveiller 
les  travaux  de  la  manufacture  d*armes  à  feu  de  Tulle i  il  a 
été  obligé  de  réorganiser  cet  utile  établissement,  bue  l*op« 
pression,  le  terrorlsOie  tt  lel  abus  du  pouvoir  avaient  fait 
tomber  dans  un  relâchement  voisin  de  la  dissolution  ;  que 
les  administrations  de  ce  département  matlrlsalent  Popl- 
niod,  politlquaieat,  gouf  emaieni,  proiionçaleot  sur  le  son 
des  citoyens.  Il  a  séparé  leS  erreurs  du  erimai  le  Vttu  des 
citoyens,  le  vœu  des  ouvriers  lui  ont  indiqué  les  réfbmes 
qu'il  avait  à  Taire.  •  Une  nouvelle  adminlstrailoQ,  investie 
dé  leur  confiadce,  concourt  maintenant  avec  mol,  dii-il,  ft 
rétablir  Tordre  et  la  discipliné  i  ces  hommes  utiles  ont 
proavé  leur  ripubileanlsme  an  fêilltant  a  rappreisiort)  en 
opposant  rénurgit  de  la  probité  et  ie  la  vertu  a  rinteiB* 
péranea  de  la  eapidité,  a  la  fureur  du  oriar»  Nulle  part 
plus  qu*ici  on  n'a  «OMté  un  plus  révoltant  mépris  des 
droits  des  citoyens,  da  la  vie  dei  bommes  i  le  retour  de  la 
justice  a  éommencé  leur  supplice. 

•  Tout  est  cbaitgé  ;  un  ordre  nouveau  a  sueoédé  a  cette 
situation  désespérante  :  la  confiance  remplit  les  àmeS, 
t'allégrease  anime  tous  Ml  %liagai  |  la  règne  df  la  Justice 


IleM  eliaqui)MriHtBh«ttM«l1l  llblMik  erilB  êè 
la  loi  fait  des  praaeiyiflll  éSs  Ml  VIgOliriiï  fH^dèl  I 
rcBvl  des  armes  pour  la  défense  dé  la  ^atrW|  l'efifliièe  Cl 
k  jeunesse  sont  instruites  à  Tadoteri  S  vlVi«  et  a  ttôHIIP 
poer  elle.  Attendons  tout  des  intlitiHtodl  desnder«lHt«M« 
mtb  n^atiendons  rien  de  la  cooirtintc  et  de  la  tioiêiieé» 

c  !f  oublions  pas  que  tous  les  tymns  et  les  INpons*  jui» 
j|n*a  Robespierre ,  se  sont  servis  de  \i  biviaité  pour  aiMf% 
vir  les  peuples  ou  s'approprier  les  fruits  de  leur  indoslrte» 
Qne  le  gouvernement  fortde  lés  ««Urt  et  M  veHus  fiar 
des  insliltttioos  républicaines  )  la  régénération  biurattdll 
peuple  ne  peut  être  que  le  fruit  de  la  sàgesaa  II  des  laê<ii< 
tétions  de  ses  législateurs* 

I  L^affermissement  de  la  eonstUiition  démoeratiqUc  eH 
l'objet  des  vœdi  des  citoyens  de  la  Corrèse  i  |a  ConvetitioQ 
nationale  est  leur  seul  point  de  ralliement.  Je  ne  suis  qua 
l'organe  des  ouvriers  de  II  kâanufaclure  drames  de  Tulto 
en  assurant  à  ta  Convention  nationale  qUMIs\ont  redoubler 
de  iMe  et  d'aetUlté  pour  armer  nos  Invtneibles  phalanges 
répuMioaioelt 

a  Salut  et  rraierbllé.  Si§%i  PaiasibU  » 

La  Cônventioa  renvoie  cette  lettre  au  cooiite  de 
salut  publie. 

^—  Une  députation  da  la  oommune  de  Lyon  est  ad* 
niise  à  la  barre* 

i.*oraieiir  (  Citoyen!  représentants,  enrôyësjbar  le 
peuple  de  Lyon  pour  vous  dénoncer  l'atrone  Col  lot 
d*Herbois,  nous  regrettons  de  n'avoir  pu  afriVfV 
avant  la  rapport  de  la  commission  des  Vingt-e(»tJtl; 
mais  ai  le  flambeau  de  la  juatice  qui  vous  éclalne  a 
devancé  nos  pas,  les  pièces  dont  nous  Sommes  por> 
leurs  achèveront  de  convaincre  la  France  entière  que 
Collot  d'Uerbois  fut  Tennemi  le  plua  orual  de  la 
vertu  et  de  Thumanité. 

Son  instruction  adressée  auxautoritéaoddStilUées 
sanguinaires  qu'il  avait  crééea^  et  que  votoi^  SUfflrall 

λouri*envoyer  àTéchafaud;  chaque  phNsa  iburnll 
a  preuve  de  l'immoralité  de  son  atitiuf.  Allons 
chea  leapeuplea  les  plua  barbares  «  parcoumna  les 
gouveraementa  les  |)lus  ty  ranniques^  et  notu  nt  trott» 
verons  rien  qui  puisse  lui  être  comparé. 

Législateurs ,  lisez ,  et  voua  verrei  que  lea  trois 
quarts  des  citoyens  étaient  proscrits. 

SuWant  la  moraltï  de  ce  monstre ,  les  rtehes  »  les 
propriétaires,  les  Commerçants,  enmi  tous  eèux  qui 
jouissaient  d'une  honnête  aisance ,  ne  Ibisatent  pas 
partie  du  peuple.  Son  peuple  était  ceut  que  là  fai- 
blesse et  rignorance  rendaient  dociles  4  rexééutiou 
de  ses  perbdes  projets;  ceux  surtout  qtii,pàir  leur 
ineondulte  et  la  dépravation  des  mœurs ,  sont  oou- 
verts  d'un  opprobre  éternel,  étaient  établis  Ministres 
de  ses  fureurs  et  de  Sea  Vengeances  bartlôuUèf^  ;  et 
ce  peuple  devait  dévorer  tout  le  reste. 

Voila  quels  obt  été  ses  principes  dans  la  tiomiliuiia 
de  Lyon  ;  les  crimes  qu'il  a  commis,  et  que  BOul  al» 
Ions  énonoer ,  en  sont  les  oonstfquences. 

Adrem  iupeMplê  de  Lyon. 

•  Le  régne  de  rétemelle  Justice  ett  doue  enfin  afHvé! 
Les  trop  malbeureut  bebitsttti  de  Lyon  pourront  done 
jouir  des  fruits  de  la  beUe  journée  du  9  tbe^midor  !  leurs 
justes  plointei  parviendront  doac  dans  le  lelb  de  la  Con- 
vention nationale  t  . 

I  I^islateiirsi  jetei  vos  regards  sur  notre  ville  naguèra 
rivallsée  de  toutes  celles  de  rSurope  par  ses  manufaoturea 
et  son  commerce  :  vous  y  verres  des  ruines  et  des  mon- 
ceautde  cadavres;  vous  y  verrei  des  femmes  éperdnea 
cherchont  inutilement  leurs  époux,  leurs  enranls;  vous  y 
verres  la  vleiliesiS  pleurer  dans  le  salaère  la  perte  da  aa 
postérité* 

•  Vous  n^  trouvérea  pas  une  famille  qui  na  rédaoïa 
contre  Tassasslnat  d^un  de  ses  membres» 

è  Reporlei  vos  rearards  sur  le  passé  t  vous entendrea  lea 
cris  plaintifs  de  plusieurs  milliers  de  victimes  qui  demaa« 
dent  ttngeanee  contre  leurs  as&asains. 


ÛU 


m  Vous  ferrei  deni  ccQt  treize  malheureux ,  sans  inter* 
regatoire,  sans  J«|eBept,  mitraillés  et  hachés  dam  nnt 
aèf»ioc,  iMiraii  lâffluals  sa  Ipouvenl  vieillanis,  entants,  et 
Aesi  elto^rant  aequAtés  de  la  veille  i  Tous^nlendrei,  dans 
•eut  joumée  da  tant,  Collet  d*iifrlieii  sérier  dans  les 
iransnorit  d'un  ioie  féroea  i  «  lia  tqîII  f ancé  des  oeqpi 
•  ^  iifP^t  «uf  j*9i  r^tt^  m  iMéifi  dt  L<|on  \  i 

•  Vous  varrti  49UI  \9^^H  {mm»  «U9«lid«s  i^  U  fnil* 
iQtine  iaut«  d^PUU«oie  du  Mni  ^  no»  conçjtojfepsi  pour 
ifpir  Qsti  ^  la  U^U  d*un9  dépttUUon  ioiBbreu««i  (leuan* 

der  jrliçe  pQur  Içurs  marjs  lo09QCntft 

«  vous  7  Terrea  les  trois  jeunes  01|es  de  la  fetiTç  Qe* 
guère  demandera  prendre  la  place  de  lear  mère,  goillotl- 
née  en  leurpr^seoee, 

•  V9US  y  ferrai  une  oièfp»  alleliant  ion  enfant  •  leldf 
^mm  uu  ÇfoM>  et  toovnr  dioi  l«i  douieun  aiiulf  que  lui 
ftiiaii  éprouver  laprifatjon  c|e  ion  nourrisson. 

«  Vqus  1  T6rrei„M«  fit  Ttoteur  4e  tant  dv*  «rutut^s^  lo 

féroce  GoHot  d'Herbois,  respire  encore!  et  ce  monstre  9 
siégé  si  longtemps  parmi  tous  1  II  ose  peut-é(re  encore 
parler  de  la  patrie  et  de  sa  sensibilité,  eel  imposteur  qui  a 
trumpé  la  république  entière  dans  |a  rapport  quil  vous 
fit  M  iU  repeire  jiaoliitei  le  I  nivoy  de  Tan  I*,  sur  la  lU 
tuatloq  de  notro  commune  quHl  voulait  annéantir.  et  qui 
eufiq  «'fit jug^  iui-qiéme  on  profioMiqt  oonlro  iOU  dif nt 
émulai  r^x^r^Mf  Carh«r«  > 

lSi»i  «R  «TiM  neiiiéN  Ile  i{f  Nilurei.) 
L'orateur  continue  :  Après  a?olr  peint  nos  malheurSt 
voti«  evojr  dénoncé  ealul  qui  eu  eit  le  principal  auteur, 
p^m9ite9tnQ»s  dq  vpm  m^nn  nui  Iw  yeun  r^iai  dei 

manufactures,  des  veutes,  des  orphelins  49  M^IHfW" 
m  une. 

Vous  avea  déjà  fêté  sur  elle  des  regards  de  tendresse  ; 
vous  lui  ivei  iUVPJfd  d^  Sf^urs,  et  tous  les  citoyens,  à 
cet  acle  de  bienfaisance,  ont  versé  des  larmes  de  joie  ;  mais 
rétablir  les  manufaelures,  voilà  le  grand  intérêt  de  la  ré- 
publique. Les  chefs  manufacturiers  sont  rentrés,  les  ou- 
vriers sont  prêts,  et  nous  n^avons  point  d^atellers.  Ce  que 
la  liONitM  a  épargné,  la  malveillaRoe,  le  orime  ont  aehevé 
de  le  détruire,  i,as  métiers  de  soierie*  OUI  été  dénientél» 
brOlés  I  les  atoliars  4e  ehapellene  ont  ^^  dégrg dés  i  il  u*9i 
reste  pqi  mèuté  df  trece«{  jes  cllHUd>i^ros  eu  ouivre,  Q)>jft 
priiipipalf  ont  presque  touiei  été  fiiuduet  i  enQp  loi  mqnu* 
uipiunt;r«  p*eul  plMS  aucune  itsiourçer 

Mais  vous  connaisses  la  profondeur  de  nos  mau^i  vqqi 
vous  empresserex  de  venir  à  noire  secours:  vous  êtes  les 
pèrei  de  la  patrie,  et  vous  ne  souQipiraa  pas  que  les  terro- 
ristes furibonds  qui  se  «ont  enrichis  |iar  If  m9MMre  et  la 
pillage  jouiu^l  plus  longtemps  d#  oo«  MpouiHes.  Il  eil 
dans  VQ«  priqpîpfM  çuf  VQU4  di^préiiei  que  lf«  (oriui»9«  en* 
tuelie*  de  99m  qui  ont  occupa  dei  pl9C^  som  ^9  r^lme 

atroce  de  la  persécution  soient  examinées  |  au*tU  ^niçpt 
contraints  de  regorger  ce  qu*ils  croyaient  avoir  impuné- 
ment volé ,  et  le  produit  de  cette  restitution  spécialement 
affecté  au  soulagement  des  veuves,  des  orphelins  et  des 
manufacturiers  ruin^ 

Législateurs,  la  justice  triomphe ,  Phumanité  respire, 
maif  e|le  p^est  ps|^  T^ngéç,  Çest  dqnç  yo%  m%ins  que  le 
peuple 9  rendis  fîg  n)%ssuè  :  frappHî  MtKVqq^  d'^n^ 
k  prime  §l  d'étouffer  l'anerçhie.  «ous  vouions  lu  liberté, 

parce  qu^elle  épure  les  mœurs,  et  rend  l^dQRimf  WÇilIfUr  i 
mais  nous  délestons  la  licence,  source  de  tous  nQs  maux- 
Nous  demandons  que  Gollot  d*lierbois,  que  tgus  les  Im- 
placables terroristes,  tous  ceux  qui  lAchement  ont  it^pi^ 
de  leur  autorité  pour  faire  couler  le  sang  des  hommes, 
qui  enfin  ont  osé  mettre  la  cruauté  à  la  place  de  Téquilé 
la  plus  rigoureuse,  soient  traduits  devant  les  tribunaui, 
qu'ils  disparaissent  sous  le  régime  des  Iqis. 

Citoyens  représentants,  les  Lyonnais,  trop  longtemps 
comprimés  Mr  la  (erreur  d'une  gqillplipe  permanen|ç  et 
delà  mitraillade  de  Q5II0I  d'perhpij,  n'Ôspiçuil^ievcr  jg 
vpix  ;  mais  enput  r^g^o^fés  pgr  fça  6'cnfaiiant»  décrets , 
iif  jurent  guorre  éteruf||g  ||  la  tyranuifs.SQus  qoelquo 
forme  qu'elle  ne  présent!,  giistcbeiuent  inviolable  à  la  re» 
présentaMoq  uatiooal^,  eti  iné|)renla|))es  daui  leurs  yer« 
ments ,  ils  ne  cesseront  df  cr|f r  ;  Yiie  le  règne  de  1|  JUI« 

^>pç  I  viv6  li  CapvouUgn  I  vivç  lu  r^u^>iqMe  I 

f  Jeieenl  9in§êtm$uf  fmm  4i  i<|ne#tiPi«.) 


Ces  Adresses  sont  soQVént  interrompues  par  les 
pluf  Yif^  appldudissemf  lits ,  auxquels  se  méleqt  dos 
mouvements  d'indignaiioa  comrci  les  borreMra 
qu'elles  dépQoçeuU 

Li  PnÉsiDiNT,  à  la  ddpqtation  1  Citoyens,  une  fu- 
neste expérience  nous  a  prouvé  que  vingt-cinq  mil- 
lions d^hommes  libres  pouraient  être  opprimes,  au 
nom  même  da  la  JiberUi,  par  quelques  scélérats  am- 
bitieux ;  mais  la  même  génératiop  ne  retombe  pas 
deux  fois  sous  le  Joug  alfVeux  de  la  terreur,  et  l'atli- 
tyde  imposante  de  tous  les  citoyens  rassure  les  amis 
de  la  liberté  contre  les  tentatives  criminelles  des  sec- 
tateurs du  système  de  destruction.  Le  peuple  n'est 
point,  éomme  Im  tyrans,  avidç  da  vengeance,  mais 
de  la  justiea;  il  remet  aux  lois  la  soin  do  punir  leq 
pppreaaeun.  Lea  droits  de  la  justice  sont  impéris-' 
sables  :  plus  forte  que  toutes  laspuisaanoea,  elle  at« 
teindra  lût  ou  Urd  Us  coupable^.  Citoyens,  1^  tpo- 
derne$  despgteg  dç  la  Franco  voulaient,  di^aient-iis, 
Yfqger  la  Providence  ;  pour  nou^t  non^  consolerons 

l'humanité  des  maux  qu'ils  lui  ont  faits.  Habitant?  lie 
LyoPi  d'une  cité  qui  fut  si  longtemps  le  théâtre  des 
plus  cruels  fléaux  et  des  plus  grands  malheurs,  re- 
pose«-vpus  sur  les  principes  connua  4^  la  Conven- 
tion natioqaje. 

RIIq  voui  io¥ito  à  cussisttr  k  la  $49n6f .  (On  appim« 
du.) 

L'insertion  au  Bulletin  al  le  renvoi  i  la  commis- 
sion des  Vingt-et-Un  sont  dëerëtés. 

•^  Un  secrétaire  lit  T Adresse  sitlvante  : 

Lêê  administrateurs  du  district  de  Nantei 
éla  dntvfnli&n  nt^Honale. 

(lenteSf  le  tl  vea^oseï  Te  »  ?i*  do  le  r^pulimuf 
fvin^ifei  nm  etinaiviiible, 

e  Gileyeni  veprésentanti,  nous  voyons  afee  douleur  que 
Ni  mlnien  dei  reprAfeutanti  ^eile,  Dornlfr  et  BoUet, 
dans  notre  département ,  est  sur  le  poiq!  ^'eipjrer* 

•  lA  paaitaiii0ii  de  la  Vanlée  eii  prosiiiie  entiirMnent 
açliev^  par  leuri  mios  et  oeuY  df  leiir^  «olléfued  1  inais  il 
rcilç  ençQce  Quelques  divlfions  de  Tarmée  (le  ^todlei  *  qui  « 
k  Teiemple  de  leur  c|ief  •  n'oot  pan  vm  ^^  les  armes  e( 
reconnu  la  répul^liquc*  {fous  n*aTon9  quf:  Tespérance  de 
les  ramener  ^u  ^n  dç  Ja  patrie  qui  Içur  tendfune  mfiiQ 
bienfaisante. 

t  D*un  autre  cdté,  si  les  principaux  chefs  de  Tarpiép 
des  royalistes,  connus  sous  le  nom  de  chouans ,  ont  fait 
œsser  les  hostilll^  da  leur  troupe  errante;  s'ils  ont  juré' 
an  milieu  4e  nous  d*êlre  fld)lei  à  la  netion  et  de  faire  leurs 
ei^rts  pour  eonsolider  la  paiSi  Ipos  nVmt  pas  adopté  un 
Pfrti  auui  »agfi 

■  Nous  trouTons  que,  pavnl  les  ehonanset  les  Vendéens, 
il  eiistf  bien  des  gens  qui  sont  brigands  par  hubilude  et 
per  inclination;  d^sulres  eomerfent  des  sentimenu  da 
haine,  de  vengeance,  si  difl^cjlQs  ^  vainerq  dins  les  guert 
rçg  clfjles,  Murs  fheft  las  ^^isarment;  ils  Tondraient 
(nouf  en  ftqmf  leur  bonna  fPi)  arréiar  le  désordre.  11  e^ 
doue  bien  m  isefprei»  I  prendre»  ikieu  des  obstacles  j^ 

surmonter  pour  aPçrptlr  IB  féunloq  91  dé^rablei  Ct  fairq 
régner  la  paix  dans  nos  malheureuses  contrées. 

a  Mal?  qui  pourra  pileux  atteindre  ce  but  que  ceux  qui 
ont  oeai^nenee  à  faire  revivre  ici  la  justice  et  rhumanlté| 
qui  oniso  se  «enoilier  l'estime  et  la  confianœ  de  nos  an- 
ciens ennemis?  Si  vous  laisses  dans  ees  lieux  les  représen- 
tant Buellei  Oemlereteoiiet,  que  nausavo»»  tout  sujet 
de  regrelieri  pous  rç|erdoni  comme  a^suréa  la  paciflcatlon 
entl^ra,  et  le  lapg  des  Françaia  ne  9era  plus  vçrs^  dans  la 
Vendée. 

•  La  prudence  qui  préside  H  vpe  arrêtés  exigeait  sans 
douta  que  la  mission  d'un  représentant  dans  les  mêmes  d^ . 
parteipepts  ne  f^t  pas  de  trop  lopfua  durée  ;  mais  les  çir- 
constenççs  fpni  fwim  «dnCMl  dei  «lœBiioos  nu^  r^Sflef 


6» 


les  ploi  tiKCf.  TMf  tTO  déjà  plasiain  fois  profoogé  le 
t^ior  de  qiidqoe«-«os  de  vof  collèfiie  tore  da  feio  de  la 
ConfenliMi,  et  jaaait  motif  se  parut  pins  pnnsaDt  q«e 
erloi  qai  mh»  porte  à  lolliciler  b  prorofatioo  des  pooroire 
que  ? ovf  itci  eoafié»  aux  repréwataoU  Radie,  Doreier  et 
Bollet.  Ce  o*cit  pas  notre  î«o  teol,  c'est  odai  de  tOM 
oof  ooQdtojrcos  que  bow  f o«  adicMOUf  tTCc  confiasoe. 
ISmhemi  U$  ti§matmrti,) 

Les  maire  et  officiers  mnnîdpaux  de  la  commone 
de  Nantes,  et  les  administrateurs  du  département  de 
la  Loire-Inférieure ,  adressent  les  mêmes  tcbux  â  la 
Conrention  nationale. 

Roux  (de  la  Marne)  :  Invariablement  attachée  aux 
principes  qu'elle  a  consacrés,  la  Con?entioo  natio- 
nale doit  donner  des  successeurs  a  ces  représentants, 
00  au  moins  les  reoouf  eler  par  moitié. 

BouisAULT  :  La  guerre  de  la  Vendée  est  un  in- 
cendie qui ,  depuis  deux  ans ,  dévore  une  des  plus 
belles  parties  de  la  république  ;  mais  elle  est  près  de 
s*éteindre. 

Il  est  un  autre  objet  qui  doit  attirer  votre  atten- 
tion. Une  correspondance  saisie  prouve  que  la  guerre 
des  chouans  était  soudoyée  par  I  Angleterre.  Pendant 
dix-huit  mois  nos  côtes  ont  été  accessibles  aux  sa- 
tellites de  cette  puissance  ;  mais  enfin  des  mesures 
sont  prises  pour  au*elle  ne  puisse  plus  y  envoyer  des 
recrues  de  scélérats,  des  bandes  d'émin-es.  Ces 
traîtres  ont  toujours  été  méprisés  de  la  Vendée  même; 
ils  Tout  été  de  Charette;  ils  se  font  haïr  partout,  et 
l'Angleterre  veut  les  vomir  à  quelque  prix  que  ce 
soit  sur  nos  côtes. 

Les  chouans ,  ainsi  appelés  parce  qne ,  comme 
des  oiseaux  de  nuit,  comme  des  chouettes ,  ils  ne 
marchent  que  la  nuit .  assassinent  depuis  Lorient 
jusqu'à  Alençon  ;  leurs  hostilités  sont  des  massacres, 
leurs  victoires  des  égor^ements  :  ils  sont  les  i nstru- 
mentsde  TAngleterrequi  leur  fournit  tous  les  moyens 
de  faire  la  guerre. 

J*ai  fait  débourrer  i  Lorient  et  a  Alençon  deux 
fusils;  ils  étaient  charj^és  de  poudre  anglaise.  Il  v  a 
deux  mois  que  j'ai  pris  vingt- cinq  barils  de  poudre 
qui  leur  étaient  envoyés  par  les  Anglais.  Cette  guerre 
n'est  pas  dangereuse  pour  la  patrie,  mais  pour  l'hu- 
manité. Le  seul  moyen  de  la  terminer  est  d'envoyer 
deux  représentants  qui  s'occupent  uniquement  de 
cette  affaire. 

Gbnissibux  :  Ce  n'est  pas  en  dissimulant  la  vérité 
qu'on  fait  cesser  les  maux  qui  affligent  la  patrie.  La 
France  a  des  soldats  qui  sauront  surmonter  toutes 
ces  difficultés.  Voici  comment  les  chouans  font  la 
guerre  :  ils  s'assemblent  i  six  heures  du  soir  et  cou- 
rent toute  la  nuit.  S'ils  entrent  chez  des  citoyens  qui 
ne  se  sont  jamais  prononcés  pour  la  révolution ,  ils 
n'y  prennent  que  des  aliments;  ils  tuent,  égorgent 
et  pillent  chez  les  autres;  ils  les  désarment,  ils  de- 
mandent les  voitures,afin  d'empêcher  les  transports. 
Cette  guerre  des  voleurs  ne  peut  être  terminée  que 
par  la  surveillance  de  la  police  et  de  la  gendarmerie. 

Desrubs  :  Je  soutiens  que  les  faits  annoncés  par 
Génissieux  ne  sont  pas  vrais.  J'ai  passé  dans  la 
chouannerie,  et,  si  les  chouans  eussent  voulu,  ils 
m'eussent  assassiné.  (Grand  bruit.) 

BouBSAULT  :  Il  a  longtemps  que  la  guerre  des 
chouans  serait  finie  si  la  république  n'avait  craint 
d'envelopper  des  communes  patriotes  dans  le  châti- 
ment des  coupables.  Les  chouans  sont  organises  ; 
mais  pour  les  désorganiser  il  sufBt  de  garder  nos 
côtes.  L'Angleterre,  qui  ne  leur  a  pas  encore  donné 
un  écu,  mais  qui  lésa  accablés  de  faux  assignats, ne 
pourra  leur  rieo  faire  passer.  Je  vais  vous  citer  on 


fait  qui  va  vous  donner  une  idée  du  peu  de  I 

2ui  leur  restent  Leci-devut  conte  de  PoInTe,  wû 
Uit  â  la  tête  de  la  révolte  de  Wirapfea,  daos  le 
Calvados,  intrigant  qui  a  jotiéà  la  révolatioo  coBoe 
il  joue  aux  cartes,  leur  a  envoyé  des  brevets  de  par- 
chemin ^u'il  a  signés  de  sa  main ,  et  qui  ne  sont 
bons  qu'à  boucher  des  bootdlles;  il  leur  a  écrit  eo 
même  temps  :  •  Je  vous  envoie  M.  le  comte  de  Vas- 
seiat  mon  aide  de  camp  ;  s'il  ne  réussit  pas,  noos 
soimDes  perdus.»  Ainsi  vous  voyei  que  leurs  ■oycw 
ne  sont  pas  grands. 

Quand  ce  comte  de  Vasselat  a  tii  qa'il  était JoBé 
par  Puisaye,  par  l'Angleterre,  il  a  tout  avoué;  il  est 
maintenant  dans  lesvprisonsde  Rennes.  Pourquoi  ne 
fait-on  pas  venir  ici  tous  ces  cb^  d'émigrés,  dont 
on  tirerait  tous  les  renseignements  les  plt»  pié- 
deux? 


Je  n'ai  jamais  consenti  à  la  trêve  donnée 

chouans.  On  a  surpris  en  cela  le  zèle  et  la  bonne  vo- 
lonté de  notre  collègue  Rolet.  Les  chouans  ont  pro- 
fité des  passeports  qu'ils  ont  reçus  pour  aller  dans 
cinq  ou  six  départements  accroître  leurs  Ibrces.  Us 
faisaient  croire  que  leur  armée  était  de  quarante 
mille  hommes ,  et  Stofflet  vient  de  leur  faire  passer 
quinze  hommes  de  la  sienne. 

Il  suffira  d'envoyer  dans  ce  pays  deux  représen- 
tants uniquement  chargés  de  terminer  cette  guerre^ 
pour  la  finir. 

Le  tout  est  renvoyé  an  eomîlé  de  saint  pnblk. 

(lasnt'IedMial».) 


2V.  B.  Dans  la  séanee  du  10 ,  Chénier  a  demandé 
la  rentrée  dans  le  sein  de  la  Convention  nationale 
des  représentants  du  peuple  mis  hors  de  la  loi.  La 
discussion  allait  s'engager  sur  cette  proposition  lors- 
qu'un membre  a  annoncé  que  les  trots  comités  de 
salut  public ,  de  sûreté  générale  et  de  l^islation , 
réunis  hier  pour  le  même  objet,  allaient  nire  leur 
rapport. 

Merlin  (  de  Douai  ) ,  au  nom  des  comités  de  gou- 
vernement, se  présente  à  la  tribune,  et  sur  sa  propo- 
sition, et  au  milieu  des  cris  mille  fois  répétés  ue  vi%€ 
la  république  !  vive  la  représentation  nationale  I  la 
Convention  a  rappelé  dans  son  sein  les  députés  rais 
hors  de  la  loi. 


LIVRES  DIVERS. 

Pi^es  juttificatives  de  la  dénonciation  contre  Vadietf 
contenant  la  réfutation  dt  la  réponse  de  celui-ci  a  Lcceiotr« 
et  à  Darmaing ;  par  J.-R.  Darmains*  A  Paris,  efaci  Uoa lea 
marchands  de  nouf  eantés. 

Nota.  Toutes  ces  pièces  ont  été  ettraît«sda  grttm  dn  tri* 
buna  (  réTolutionaaire ,  en  verta  d*uB  arrêté  dm  trois  < 
tés  réunis. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  de  la  dette  consolidée  perpétuelle  se  fait  pour 
les  sis  derniers  mois  de  l*an  S*,  et  pour  Vannëe  à  ceni  qui 
■*ont  pas  touché  les  sii  premiers  mois  de  ladite  année.  Le« 
citoyens  qui  ont  retiré  leur  inscription  définitive,  et  qui  dé- 
sireraient être  payés  dans  les  districts,  peuvent  indiquer  l«8 
chers-lieui  de  district  où  ils  veulent  être  pajés ,  oonformé» 
ment  i  la  loi  du  U  Jour  des  sansculotlides. 

Le  payement  des  rentes  viagères  se  fait  cumulativement 
pour  deus  mois  vingt  et  un  leurs  de  raniiée  1078(?ieiiiatTle) 
el  les  sis  pr«mi«n  noii  de  raa  S*, 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


N*  170. 


Dieaii  30  YiiiiOMS,  Fm  8<.  (Mardi  10  Mars  j[79S,  vimx  êtyh). 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

Fursoviêi  te  Hfivrier.  —  L'aadace  et  rimpudence  impé- 
riales n'oDi  point  de  terme.  On  Ta,  malgré  l'amoietie  et  It 
parole  sacrée  de  Catherine  Juger  le  général  MirlMcli,  Paa 
des  hommes  les  plus  distingués  de  la  réfolution.  Il  a  été 
lirré  au  tribunal  de  Wtlna  poar  ses  délits  réfolotionnaires. 

Le  commandant  russe  à  Varsovie  a  annoncé  le  rétablisse- 
ment de  l'administration  de  la  Justice  tel  qu'il  aralt  été  (lié 
en  Pologne  par  l'ancienne  diète.  Voilà  donc  les  çrodSt  les 
Jugemeots  lerrastreseï  lesJaipeneDts  d'appellatloa  retenos. 

•—  Aa  nom  des  provinces  de  Lltbuairie  et  de  Samogitie, 
et  sous  le  bâtoo  des  Russes,  soat  partis  poar  Pélarsboarg 
des  malheureux  soi-disant  députés  qui.  les  fers  aux  pieds  et 
aux  mains,  pour  ainsi  dire,  vont  remercier  Catherine  II  de 
la  facalté  de  virre  libre  soui  ses  lois. 

—  L'arsenal  de  Varsovie  a  été  totaleneot  vidé.  Les  Eusset 
se  sont  même  emparés  d'un  autre  butin,  en  faisant  emballer 
la  célèbre  bibliothèque,  aisil  que  les  archives  de  U  cMevant 
république  de  Pologne. 

ALLSMAGNB, 

Extrait  étntu  lettre  àe  Stuttgard,  le  ^Janvier.  —  Les 
manufactures  royales  de  patriotisme  d'il  y  a  deax  ans  sont 
entièrenem  tombées  dans  la  Hoagrle;  H  s'élève  à  la  pièce 
un  roécontentemeot  universel.  La  cause  principale  de  ces 
cliangemenls  vient  de  rinsapportable  oppression  de  la  no- 
blesse. Des  rumeura  publiques  ont  ùi^k  signalé  la  haine 
active  du  peuple 

L'esprii  pohiic  se  prononce  de  la  même  manière  en 
Bohême,  et  pour  la  même  raison,  qpiolqoe  avec  moins  d'é- 
nergie. 

Tout  antre  qu*im  prince  antriehien  el  «o  empereur,  ea 
sacrifiant  les  absurdes,  lesodfem  privilèges  de  celle  caste 
nobiliaire,  aunii  an  moyen  aàr  de  coalenter  les  peaplee  et 
de  rétablir  bi  paix. 

On  prétend  que  la  diéle  hongroise,  qol  a  oaverf  aet 
séances  le  S  Janvier,  a  arrêté  que  les  Hongrois  seraient  rap* 
pelés  de  l'armée  et  ne  oombattraient  pins  œntre  la  répaMi- 
que  française* 

La  diète  doit  s'occaper  de  ftdre  dliparattre  les  barrières 
qui  emprisonnent  son  oommeroe  et  sarloat  cehii  de  se» 
vins. 

FroM^ortt  U  IS  février.  -^  Que  le  roi  de  Prnste  veoHIe 
tromper  la  république  française,  ce  n'est  ni  une  chose  avé- 
rée, ni  In  matière  d'un  problème  ;  il  y  a  lA-dessas  une  opi- 
nion mitoyenne  qui  tient  beaucoup  pins  de  la  probabilité 
qae  de  la  certitude.  Ce  qa*ll  y  a  de  certain,  c  est  que  les 
Allemands  sont,  à  cet  égard,  moins  dans  Terreur  que  les 
Français. 

—  On  prétend  que  le  prince  Henri  a  maintenant  de  l'In- 
flucocc  dans  le  cabinet  de  Beriln.  Les  amis  de  la  coalition 
sont  peu  alarmée  de  ce  bruit ,  ce  qui  or  prouvé  point  qu'il 
soit  dénué  de  fbndement. 

—  I/Ac^dém!e  des  Sciences  de  Berlin,  en  recevant  tout  à 
l'heure  parmi  ses  membres  l'émigré  Boufflers,  connu  sous 
le  nom  de  chevalier  et  de  chansonnier  gakint,  a  sans  doute 
été  forcée  de  prendre,  en  quelque  sorte,  parti  dans  ta  coa- 
lition, et  de  donner  aussi  son  manifeste  contre  ta  répnhiiqne 
française. 

rAT8  D'nnn-MBUSI-BT-EHIII. 


Bo/»  le-Ducy  le  12  ventote.  —  L*armée  deSambre-et- 
a  prorué  (Je  la  prise  d'Emmcrick  et  de  sa  position  sur  le 
bas  Rhin  pour  passer  ceflenve;  elle  a  réuni  son  aile  gauche 
à  l'aile  droite  de  l*armée  du  Nord.  Cette  opération  doit  être 
proniablc  aux  républicains»  qui,  présentant  ainsi  nn  front 
redoutable,  s'étendent  depuis  Cobbitx  jusqu'aux  estrémitét 
de  la  Hollande. 


L'armée  du  Nord  poursuit  sa  marche,  et  poosae  aa  delà  dt 
la  rivière  de  l'Ems  tes  troupes  des  alliés,  tandis  ^|iie  celte 
de  Sambre-et-lf  euse  se  dirige  sur  la  lippe,  poffaani  le  paya 
dn  reste  des  forces  coalisées. 

Les  Autrichiens  redoublent  lenrs  efforts  vert  le  bant 
RlUn.  Leur  projet  est  de  seooorir  Loxemboarg  :  c'est  le  voni 
le  phM  ardent  de  l'emperenr. 

ANGLETERRE. 

DEBATt  WO  VSnLBMBirr. 

Chambre  du  fMUn.  —  smtê^  as  la'dUeusMm  em  ia  pëU. 

Le  lord  Crrrrllle  prend  la  parole  après  le  doc  de  Bedford  ; 
en  rendant  Justice  aux  vaes  bamaines  de  celoi-d,  U  déclare 
qu'il  est  d'une  opinion  contraire. 

Après  on  asaex  long  dlsoooradana  leqœl  fl  prétend  pron« 
ver  qu'on  traité  de  paix  avec  le  goaTemement  actad  de  hi 
France  ne  serait  pas  stable,  il  conclut  par  présenter  i'a- 
mendement  qui  a  été  voté  hier  soir  dans  la  ChomlMe  det 
communes,  et  dont  la  teneur  suit  : 

«  D'après  les  ciroonstances  actnelles ,  la  Chambre  eroif 
de  son  devoir  de  faire  connallre  l'intention  ferme  ah  elle 
est  de  soutenir  Sa  Majesté  pour  contlnaer  avec  vigueur  cette 
guerre  Juste  et  indispensable,  comme  étant  le  seul  moyen  de 
nous  procnrer  une  paix  aoHde  et  dnraiile. 

•  Poar  parvenir  h  ce  bot,  la  Chambre  met  toute  la  coq- 
ftance  dans  les  Intentions  oii  est  Sa  Majesté  d'employer  toote^ 
les  ressonrees  possibles  afin  de  sontenir  les  tntérêto  de  son 
pays,  comme  aussi  dans  le  désir  connu  de  Sa  Majesté  pour 
parvenir  à  une  paciflratlon  honorable  avec  tel  gouvernement' 
reniant  en  Frauce,  tant  oa'il  ne  pourra  pas  troubler  les 
liaisons  de  paix  et  d'amitié  entre  les  autres  puissances.  > 

Le  dac  de  Norfolk  combat  l'amendement  dn  lord  Gren<« 
ville  et  soutient  la  motion  principale,  parce  qu'elle  montre 
la  perspective  d'une  négociation  de  paix. 

Le  marauis  Darnley  s'oppose  k  la  motion  pour  deux  rai- 
sons principales,  dont  II  demande  ta  solution  :  la  première 
est  de  savoir  avec  qui  nous  pourrions  traiter;  ta  seconde, 
si  les  Français,  animés  pnr  leurs  succès,  voudront  traiter 
avec  nous.  «  Comme  Je  ne  crois  pas,  dlt-n.  que  l'on  puisse 
répondre  à  ces  deux  questions,  Je  vole  pour  1  ameodement.s 

L'évéqiM  de  Landiir*  dans  nn  ^Isoomrt  fon  éloqoent,' 
appuie  ta  motion  du  due  de  Bedford. 

Le  lord  Hawkesbury  ne  trouve  pas  que  les  différents  ar- 
guments présentés  par  les  nobles  lords  puissent  répondra 
et  détruire  raroendement  proposé.  On  a  mal  compris,  sui- 
vant lui,  l'intention  des  ministres,  ils  ne  refusent  pas  de 
traiter  avec  ta  France  conune  république;  asata  lea  princi- 
pes qui  dirigent  son  gonvernement  mettent  nn  obelacle  i»« 
surroontabtaA  toute  espèce  de  négoctation.  «  Quant  A  mni, 
dit-il .  Je  vote  pour  l'amendement,  parce  que  Je  ne  vois  an-^ 
cune  apparence  de  succès  dans  les  négodations  qui  pour^ 
raient  être  enumées,  ni  aucune  stabilité  dans  ta  paix  qiiï 
pourrait  être  conclue.  • 

Le  marquis  de  Lansdown  prend  enanlle  ta  pan>ta;  il  fhit 
sentir  avec  énergta  ta  crise  où  se  trouve  F  Angleterre.  «  La 
prise  de  la  Hollande,  dit-il,  me  parait  un  songe  ;  cet  événe- 
ment est  si  incroyable  que  les  esprits  ne  sont  pas  revenus 
encore  de  leur  étonnement,  et  on  n'a  pu  encore  calculer  ta 
dixiième  et  même  la  centième  partie  des  conséquences  qai 
pourront  en  résulter. 

c  Cest  encore  on  problème  A  résoudre  que  d'expliquer 
comment  la  Hollande,  possédant  toutes  les  ressources  de  ta 
netoreet  de  Fart,  est  devenue  en  un  moment  ta  proie  de  l'en- 
nemi :  et  Je  pense  que  les  ministres  doivent  nous  donner 
d'antres  preuves  que  des  fleurs  de  rhétorique  pour  noua 
convaincre  qu'on  avait  mb  tout  en  usage  pair  préserver  on 
pays  de  Flnvasion. 

•  Noiu  avons  envoyé  de  Fargent  à  Fempereur,  noua  m- 
avons  envoyé  au  roi  de  Prusse  :  pourquoi  ne  nous  ont-Mt< 
pas  payé  cette  valeur  par  les  efforu  qu*iia  auraient  dà  faire? 
À4»résent  que  les  Provinces-Unies  sont  au  pouvoir  de  l'en-. 

80 


634 


■mi,  oommeotpoorsiiiTroiif-aoïu  la  guerre  TQoaiid  BOUS 
poMédIoos  ce  pays,  dm  armées  te  trooTaient  alimeotéet  par 
de  Dombreiues  riTièret  qui  l'arroeeol.  Commeol  paierona- 
flout  nos  iroopest  Sans  doote,  ce  tera  en  numéraire  que 
BOUS  enferrons  par  Hambourg  :  mais  on  sait  que  les  Uam- 
teorgeds  aiment  les  Français,  et  ils  seront  encore  moins 
disposésà  aider  les  puissances  coalisées  depuis  que  les  Fran- 
çais se  sont  autant  rapprochés  de  leur  pays.  Nous  serions 
donc  forcés  alors  de  passer  par  Lubeck ,  ou  peut-être  par 
l'Oder.  Il  sera  asses  curieux  alors  de  voir  le  roi  de  Prusse 
jouer  le  rôle  de  M.  Hope.  >       (La  miU  ineessûmmeiU.) 


YARIËTÉS. 

Crier  k  la  Justice,  Invoquer  la  raison,  l'humanité,  ce  n'est 
vériublement  l'effet  d'un  sentiment  profond  que  chei  les 
patriotes,  Trais  républicains.  Que  signifie  le  même  langage 
chez  tant  d'autres  citoyens ,  sinon  une  mode  ou  un  jargon  ? 
Ile  serait-ce  point  encore  de  leur  part  une  perfidie  ?  On 
sait  que  les  Taleis  des  scélérau  qui  avaient  mis  la  Justice  à 
l'ordre  du  Jour  sont  aux  ordres  de  qui  voudra  les  payer. 

On  a  vu  avant-hier,  an  Palais-Egalité,  une  troupe  de  dix 
à  douze  Jeunes  gens  entrer  tumultueusement  dans  les  cafés, 
en  sortir  avec  fracas,  signalant  les  gens  sans  poudre  ;  ils  al- 
laient, disiient-iis,  à  la  chasse  aux  Jacobins.  Un  citoyen  qui 
portait  des  cbereux  noirs  a  pensé  devenir  la  victime  de  ces 
nouveaux  amis  de  l'humanité. 

Si  c'était  là  ce  qu'on  appelle  la  Jeunesse  parisienne,  on  la 
▼errait  bientôt  faire  la  chasse  aux  républicains;  mais  Dieu! 
les  jeunes  citoyens  qui  adorent  les  principes  du  gouverne- 
ment républicain,  et  qui  n'ont  pas  pris  pour  la  république  la 
révolution  du  31  mai  et  tous  ses  désastres,  sauront  bien,  par 
le  contraste  seul  de  leur  conduite,  arrêter  les  déportements 
aristocratiques  d'une  troupe  insensée  et  liberticide.  parce 
qu'en  effet,  partout  où  s'élèvera  du  tumulte  au  nom  de  l'hu- 
manité, une  fureur  organisée  contre  les  buveurs  de  sang, 
les  magistrats  du  peuple  se  présenteront  avec  la  confiance 
qu'il  n'y  a  pas  là  de  Jeunesse  patriote. 


Brûkmenl  d'assignats. 

Le  19  ventôse,  à  dix  heures  du  maUn,  il  a  été  brûlé,  dans 
la  cour  du  nouveau  local  de  la  vérification  des  assignais,  la 
somme  de  U  millions  en  assignats,  provenant  des  échanges, 
lesquels.  Joints  aux  2  milliards  596  millions  683.000  liv. 
déjà  brûlés,  forment  un  total  de  2  milliards  610  millions 
683,000  lir. 


ANNONCES. 

N*  II  du  Journal  de  ropposition,  par  P.-F.  ^éaf.  A  Pa- 
ris, chez  Buisson,  libraire,  me  Haulefeuille. 

Cet  ouvrage  se  vend  par  numéros  séparés  23  sous,  et 
30  sous  franc  de  port,  ou  par  abonnement.  Le  citoyen  Buis- 
son invite  ceux  qui  voudraient  en  former  la  collection  de 
lui  faire  passer  10  liv..  franc  de  port.  Ils  seront  prévenus 
lorsqu'il  sera  nécessaire  de  faire  passer  de  noureaux  fonds 
pour  la  continuaiiotr  de  l'envol.  Ceux  qui  ont  déjÀ  le  pre- 
mier numéro  déduiront  30  sous  sur  les  10  liv.  de  hi  sous- 
cription. 

Paris,  le  18  ventôse. 
•  J'ai  été  témoin,  décadi  dernier,  au  manège  de  FranconI, 
barrière  du  Temple,  des  applaudissements  accordés  aux  ta- 
lents de  sa  fille  et  de  ses  fils,  qui  ont  déjà  acquis  de  la  célé- 
brité dans  l'art  de  l'équltaiion  et  de  la  voltige  A  cheval.  J*ai 
remarqué  aussi  la  force  et  la  souplesse  du  citoyen  Benoit 
Guerre,  leur  compagnon  d'exercices.  Cet  artiste  réunit.  A  la 
parfaite  connaissance  du  cheval  et  à  une  extrême  sécurité,  la 
légèreté ,  la  précision  et  la  grâce.  Je  l'ai  vu  sauter  plus 
de  cinq  pieds  de  haut  sur  ses  chevaux,  et,  franchissant  qua- 
tre rubans  tricolores  les  ans  après  les  autres ,  passer  avec 
une  adresse  vraiment  étonnante  un  chapeau,  tenu  dans  ses 
mains  par  les  deux  cornes,  sous  ses  Jambes,  en  faisant  le 
saut.  Ce  tour,  qui  a  été  parfaitement  exécuté,  semble  indi- 
quer le  plus  haut  degré  de  la  force  et  do  talent. 


c  n  serait  à  désirer  que  le  citoyen  Prancoel  choUH  wm 
local  plus  rapproché  du  centre  de  Paris  ;  alors  toaa  les  d- 
loyens  pourraient  plus  aisément  Jouir  de  ce  spectacle  c«« 
rieux  et  intéressant.  BABJOonLLB.  t 


CONVENTION  NATIONALE. 

Résumé  des  diverses  opinions  présentées  à  la  dm- 
vemion  nationale ,  sur  le  projet  du  eomisé  des 
finances  pour  accélérer  le  retiremeni  d€S  osst- 
gnats,  lu  à  la  séance  du  7  venlose  an  S*,  par 
Cambon. 

Citoyens ,  la  question  des  assignats  est  d*oii  si 
grand  intérêt  pour  la  révolution,  que  vous  ne  devei 
rien  négliger  pour  obtenir  des  lumières. 

Votre  comité  des  Gnances,  pour  éclairer  votre  dé- 
libération ,  a  fait  imprimer  et  distribuer  une  opinion 
qu'un  citoyen  lui  a  présentée  ;  vous  apprécierez  les 
principes  qu*il  établit  et  les  moyens  qu'il  propose. 

Je  vais  mettre  sous  vos  yeux  le  résumé  des  diver- 
ses opinions  qui  ont  été  présentées;  mais  je  dois  d'a- 
bord répéter  ce  que  j'ai  dit  dans  le  rapport  que  j'ai  < 
fait  au  nom  du  comité  des  6nances  :  •  Il  faut  que  le 

•  gouvernement  ait  une  marche  assurée ,  aue  le 

•  corps  politique  prenne  de  l'ensemble,  que  les  di- 

•  visions  intestines  cessent ,  que  les  dénominations 
•^de  partis  que  la  révolution  a  créées  disparaissent , 

•  que  la  partie  administrative  prenne  enfin  une  sta- 

•  bilitéetdes  formes  simples,  pour  que  toutes  les 

•  mesures  proposées  aient  du  succès.  • 

Tous  ceux  qui  ont  parlé  sur  la  question  des  assi- 
gnats se  sont  accordés  à  vous  dire  que  leur  crédit 
dépendait  essentiellement  de  raffermissement  du 
gouvernement  républicain. 

Je  réclamerai  donc ,  comme  je  le  fis  en  juillet 
1793,  les  lois  organiques  de  la  constitution.  Il  est 
temps  de  donner  des  bases  stables  au  gouvernement: 
faisons  disparaître  le  plus  tôt  possible  les  lois  provi- 
soires et  Tarbitraire  qu'elles  entraînent;  rendons  an 
peuple  Fexercice  de  ses  droits  ;  sans  perdre  de  vue 
les  circonstances  où  nous  nous  trouvons»  tons  nos 
travaux  et  toutes  nos  pensées  doivent  tendre  vers 
:  une  organisation  déGnitive  de  l'ordre  social. 

Les  observations  que  notre  collègue  Lanthenas 
vous  a  présentées,  et  que  je  regarde,  comme  lui, 
utiles  au  succès  des  principes  démocratiques  et  es- 
sentielles au  maintien  du  crédit  public,  mériteront 
votre  attention. 


Je  dois  cependant  répondre  à  notre  collègue  que 
le  projet  de  loterie  qui  vous  a  été  présenté  n*est  pas 
l'ouvrage  du  rapporteur;  il  appartient  au  comité, 

aui  Ta  adopté  et  modiûé,  comme  il  serait  un  décret 
e  la  Convention  si  la  ihdjorité  l'adopte. 

Je  conviendrai  avec  notre  collègue  que  Galonné 
aurait  pu  le  proposer  pour  servir  et  favoriser  le  des- 
potisme ;  mais,  en  Gnance,  ce  qui  aurait  pu  être  utile 
au  maintien  de  la  monarchie  peut  rendre  des  servi' 
ces  au  gouvernement  républicain.  Votre  comité,  ei 
vous  le  proposant,  n'a  eu  d'autre  objet  que  de  ré- 

f»ondre  au  désir  que  vous  avez  manifesté  (raccélcrcî 
e  retirement  des  assignats. 

Je  sais,  comme  notre  collègue,  que  la  loterie  pro- 
posée «  n'augmentera  pas  la  reproduction  d'un  seul 
■  brin  d'herbe,  ni  d'une  seule  aune  d'étoffe;  •  mais, 
si  elle  améliore  le  cours  des  changes  avec  Tétranger* 
les  marchandises  et  denrées  que  nous  en  ferons  ve- 
nir reviendront  à  un  prix  plus  modéré. 


635 


3; 


Notre  collègue  Lanthenas  me  fournit  une  réponse 
à  ses  observations,  puisqu'il  dit  que  le  projet  du  co- 
mité, «  sans  être  à  Tabri  de  critique,  peut  être  bon.  • 
Il  ajoute  que  •  nous  ne  nous  trouvons  pas  dans  l'heu- 

•  reuse  position  de  faire  les  meilleures  lois ,  mais 

•  que,  durant  la  guerre  et  pendant  que  subsisteront 

•  les  obstacles,  il  fout  choisir  les  plus  convenables  a 

•  la  position  des  affaires.  »  D*après  cet  exposé,  il 
aurait  peut-être  dû  jeter  un  peu  moins  de  défaveur 
sur  un  projet  qu'il  adopte ,  et  qui ,  suivant  lui ,  doit 
faire  frémir  nos  ennemis. 

Quant  à  l'immoralité  attribuée  aux  loteries,  je 
répéterai  ce  qui  se  trouve  dit  dans  le  rapport  du  co- 
mité :  •  que  celle  proposée ,  n'offrant  aucune  perte 

•  pour  ceux  qui  s  y  intéresseront ,  ne  laisse  après 

•  elle  ni  désespoir,  ni  regrets  ;  qu'ainsi  elle  ne  res- 

•  semble  en  rien  à  ces  jeux  immoraux  qui ,  sous 
«  l'appât  d'un  çain  énorme  ou  d'une  fausse  lueur,  ne 

•  procuraient  a  ceux  qui  s*y  livraient  que  la  honte 

•  et  la  misère.  • 

.  Notre  collègue  Thibault,  en  annonçant  qu'il  a  con- 
couru par  son  assentiment  au  projet  du  comité,  pro- 
pose une  tontine  combinée  avec  une  loterie  :  je  crois 
qu'un  emprunt  en  tontine  et  l'établissement  ats  cais- 
ses d'économie  dont  parle  notre  collègue  Lanthenas 
pourraient  se  combiner  avec  la  loterie  que  le  comité 
propose ,  et  contribuer  à  son  succès. 

Je  dois  cependant  vous  soumettre  quelques  ob- 
servations sur  le  projet  présenté  par  notre  collègue 
Thibault. 

La  proposition  qu'il  foit  de  faire  vendre  à  rente,  à 
raison  de  5  pour  100  de  l'adjudication ,  une  partie 
des  domaines  nationaux,  afin  d'assurer  une  hypothè- 
[ue  certaine  aux  actionnaires,  pourrait  faire  crain- 
re  le  rétablissement  des  rentes  à  cens  que  vous  avez 
supprimées.  Le  capital  des  rentes  qui  servirait  de 
garantie  aux  actions  ne  pouvant  être  acquitté  qu'a- 
près leur  extinction,  vous  rétabliriez  des  rentes  fon- 
cières dont  vous  avez  autorisé  le  remboursement  ; 
les  ventes  à  rente  ne  se  feraient  pas  au  prix  actuel  des 
domaines  nationaux,  puisque  les  adjudicataires,  ne 
pouvant  pas  en  acquitter  le  capital  et  étant  par  con- 
séquent privés  des  avantages  que  la  masse  des  assi- 
gnats qui  sont  actuellement  en  circulation  doit  leur 
Srocurer,  calculeraient  cette  différence  dans  le  prix 
e  l'adjudication  ;  elles  paralyseraient  les  rentrées 
successives  des  assignats  qu'il  importe  cependant  de 
ne  pas  arrêter,  afin  de  procurer  un  écoulement  a 
ceux  que  les  circonstances  exigent  que  nous  émet- 
tions journellement. 

L'intérêt  accordé  par  la  tontine  esta  un  taux  plus 
modéré  que  celui  proposé  par  les  opérations  du  co- 
mité ;  mais  comme  dans  un  emprunt  volontaire  il 
faut  le  concours  des  prêteurs,  je  vais  examiner  les 
avantages  que  la  tontine  leur  présente. 

L'intérêt  tontinier  est  fixé ,  pour  les  quatre  pre- 
mières classes  prises  depuis  la  naissance  jusqu'à 
vingt  ans,  à  2  *  pour  100;  pour  les  quatre  classes 
prises  depuis  vingt  ans  jusqu'à  quarante  ans,  à  3 
pour  100  ;  pour  les  quatre  classes  depuis  quarante 
jusqu'à  soixante  ans!,  à  3  J  pour  100  ;  pour  les  deux 
classes  prises  depuis  soixante  jusqu'à  soixante-dix 
ans,  à  4  pour  100;  et  pour  les  deux  dernières  classes 
prises  depuis  soixante-dix  ans  et  en  sus,  à  4  ;  pour 
100  ;  de  sorte  que,  si  la  tontine  était  remplie  d'après 
une  proportion  é^ale  pour  les  diverses  classes ,  le 
taux  moyen  de  l'intérêt  serait  à  raison  de  3  \  pour 
100. 

La  moitié  des  extinctions  des  rentes  dans  les  di- 
verses classes  tournerait  au  profit  de  la  nation  ;  l'au- 
tre moitié  serait  partagée  entre  les  actionnaires  d'une 


même  division  ;  ce  qui  donnerait  l'espérance  d'une 
augmentation  progressive  qui,  dans  les  premi^*e& 
classes,  pourrait  procurer  50,000  livres  de  rente,  et 
dans  les  deux  dernières  jusqu'à  90,000  livres. 

Notre  collègue  pense  que  le  succès  de  son  opéra- 
tion repose  moins  sur  l'intérêt  accordé  que  sur  l'es- 
pérance des  accroissements  considérables  dont  les 
actions  de  la  tontine  seraient  susceptibles,  qui,  sui- 
vant lui ,  suffiraient  pour  la  faire  réussir. 

11  est  possible  que  l'espoir  des  accroissements  pro- 
gressifs séduise  des  personnes  qui ,  ne  sachant  pas 
calculer,  n'envisageront  que  l'expectative  d'une 
rente  de  50  ou  de  90,000  livres,  en  croyant  survivre 
à  tous  les  coassociés  ;  mais  ceux  qui  connaissent  les 
probabilités  de  la  vie  humaine  et  ses  décroissements 
successifs  examineront  quels  sont  les  avantages  que 
leur  présente  la  tontine  avant  de  s'y  intéresser. 

C'est  pour  procurer  cette  connaissance  à  tout  le 
monde  que  je  me  suis  décidé  à  vous  présenter  la  pro- 
gression des  rentes  que  la  tontine  doit  faire  espérer 
à  chaque  âge. 

Les  observations  sur  les  probabilités  de  la  vie  hu- 
maine apprennent  que,  d'après  un  ordre  de  mortalité 
commune ,  sur  quatre  mille  personnes  de  cinq  à  dix 
ans,  ou  de  sept  ans  et  demi ,  oui ,  d'après  les  bases 
de  la  tontine,  formeraient  une  division  de  la  seconde 
classe ,  cinq  cent  trois  doivent  être  mortes  à  vingt 
ans,  mille  aouze  à  trente  ans,  deux  mille  cinquante-  ' 
trois  à  cinquante  ans,  trois  mille  cent  soixante  a 
soixante-dix  ans,  trois  mille  six  cent  quatre-vingts  à 
quatre-vingts  ans ,  trois  mille  neuf  cent  soixante- 
neuf  a  quatre-vingt-dix  ans ,  trois  mille  neuf  cent 
quatre-vingt-dix-neuf  à  quatre-vingt-quinze  ans. 

D'après  ces  observations  et  les  conditions  de  la  ton- 
tine ,  un  citoyen  de  cinq  à  dix  ans ,  qui  y  placera 
1,000  livres,  recevra  d'abord  une  rente  de  25  livres, 
ou  de  2  i  pour  100;  cette  rente  sera  de  26  livres  16 
sous,  ou  d'environ  2  ^  pour  100  s'il  vit  à  vingt  ans  ; 
de  29  livres  4  sous,  ou  d'environ  2  -  pour  100,  s'il 
vit  à  trente  ans;  de  38  livres  4  sous,  ou  d'environ 
3  ^  pour  100  s'il  vit  à  cinquante  ans  ;  de  72  livres, 
ou  de  7  n  pour  100  ,  s'il  vit  à  soixante-dix  ans  ;  de 
69  livres,  ou  de  16  ^  pour  100,  s'il  vit  à  quatre-vingts 
ans;  de  1,609  livres  s'il  vit  à  quatre-vingt-dix  ans  ; 
enfin  de  50,000  livres  s'il  survit  à  ses  trois  mille  neuf 
cent  quatre-vingt-dix-neuf  coassociés;  mais  alors 
il  doit  avoir  aux  environs  de  quatre-vingt-quinze 
ans. 

Les  accroissements  seront  plus  rapides  dans  les 
deux  dernières  classes,  composées  de  personnes 
âgées  de  soixante  dix  ans  et  en  sus,  puisque  l'intérêt 
primitif  est  fixé  à  raison  de  45  liv.  par  action  :  mais 
ils  ne  sont  pas  assez  considérables  pour  les  personnes 
de  cet  fige,  puisque,  sur  quatre  mille  personnes  de 
soixante-dix  ans,  formant  une  division,  il  ne  doit  en 
exister  que  seize  cent  vingt-quatre  à  l'âge  de  quatre- 
vingts  ans  :  de  sorte  que  l'intérêt  de  chaque  action 
des  survivants  serait  de  77  liv.  8  sous,  ou  environ  de 
7  ^  pour  100. 

D'après  ces  calculs,  les  espérances  que  présentent 
les  accroissements  progressifs  de  la  tontine  ne  me 
paraissent  pas  as$ez  attrayantes,  ce  qui  me  fait  crain- 
dre que  cette  mesure  ne  procurât  pas  la  rentrée  des 
assignats  avec  l'activité  que  vous  paraissez  désirer. 

Le  placement  des  inscriptions  viagères  que  votre 
comité  vous  propose  pour  l'emploi  des  bons  au  por^ 
teur  offre  un  plus  grand  avantage ,  puisque  le  paye- 
ment annuel  est  fixé  pour  chaque  âge ,  d'après  un 
intérêt  perpétuel,  à  raison  de  3  pour  100;  je  suis 
même  dravis  qu'il  faudrait  le  fixer  d'après  un  intérêt 


6se 


perpétuel  a  raison  de  4  pour  100.  A  la  Tëritë,  je  pro-  | 
pose  que  les  bons  au  |K>rteur  ne  puissent  être  reçus 
en  viager  qu'en  fournisunt  en  même  temps  moitié 
de  leur  montant  en  assignats. 

Les  primes  de  la  loterie  de  Thibault  éUnt  de  800 
millions  pour  4  milliards,  ou  20  pour  100  en  sus  du 
capital  (|ui  serait  fourni,  tandis  que  celles  du  projet 
du  comité  ne  sont  qu*à  raison  de  9  iL\  pour  100,  ou 
391  millions  pour  4  milliards,  semblent  offrir  plus 
d'avantaees  aux  préteurs;  mais  il  n*y  a  que  ceux  qui 
veulent  raire  des  placements  en  tontine  qui  puissent 
en  profiter,  au  lieu  que  la  loterie  du  comité,  offrant 
des  chances  aux  personnes  qui  veulent  acheter  des 
domaines  nationaux  ou  placer  leurs  capitaux  ou  in- 
scriptions de  la  dette  consolidée  ou  viagère ,  doit 
attirer  un  frand  nombre  dintéressés,  et  par  consé- 
quent paraît  devoir  faire  rentrer  une  plus  çrande 
masse  d'assignats;  ce  qui  remplirait  mieux  roDjet  de 
vos  désirs. 

D'ailleurs,  si  vons  pensez  comme  moi  qu'il  con- 
viendrait d'accorder  une  plus  forte  prime  que  celle 
qui  est  proposée  par  le  comité ,  afin  d'offrir  un  plus 
grand  attrait  aux  prêteurs,  il  sera  facile  de  faire  cette 
augmentation  par  amendement,  lorsque  vous  discu- 
terez le  projet. 

Notre  collègue  Lanthenas  propose  de  créer  des 
caisses  d'économie  :  votre  comité  des  6nances  vous 
annonça ,  le  33  floréal  an  2«,  qu'il  se  proposait  de 
vous  présenter  ses  vues  sur  cet  établissement ,  qui 
pourrait  procurer  i  ceux  oui  s'y  intéresseraient , 
moyennant  le  fruit  de  leurs  épargnes,  une  rente  via- 
gière  pour  leur  vieillesse,  on  un  sort  honnête  pour 
leurs  enfants. 

L'Assemblée  constituante  s'était  occupée  de  cet 
établissement  :  il  était  sans  doute  réservé  à  la  Con- 
vention de  le  décréter  ;  quelques  exemples  qui  se 
trouvent  dans  le  rapport  qui  rut  fait  à  rAsseinblée 
constituante  suffiront  pour  vous  en  faire  connaître 
les  avantages. 

Il  résulte  des  calculs  faits  en  suivant  l'ordre  de 
mortalité  de  Northampton,  et  en  fixant  lintérêt  per- 
pétuel à  raison  de  4  pour  100,  qu'une  personne 
pourra  avoir,  à  Tige  de  soixante  ans,  un  capital  de 
5^23  livres  8  sous,  ou  une  rente  viagère  de  600  liv., 
si  on  place  pour  elle  à  sa  naù^sance  un  capital  de 
90  liv.  3  sous  9  den.  Les  mêmes  avantages  seraient 
assurés  i  une  personne  qui  placerait  sur  sa  tête ,  à 
l'âge  de  dix  ans,  un  capital  ae  274  liv.  1  sou  2  den.; 
idem,  à  vingt  ans,  moyennant  448  livres  11  sous 
11  den.;  idêm^  à  trente  ans,  moyennant  777  livres 
2  sous  &  den.  ;  idem^  à  quarante  ans,  moyennant 
1,387  liv.  5  sous  ;  idem ,  à  cinquante  ans ,  moyen- 
nant 2,613  liv.  12  sous. 

Si  on  plaçait  1,000  livres  sur  la  tête  d'un  enfunt 
naissant ,  on  lui  assurerait ,  d'après  un  intérêt  per- 
pétuel à  4  pour  100,  un  capital  de  4,974  liv.,  ou  une 
rente  viagère  de  310  liv.,  lorsqu'il  aura  atteint  vingt 
ans;  un  capital  de  3,617  liv.,  ou  une  rente  viagère 
de  583  liv.,  lorsqu'il  aura  atteint  trente  ans  ;  un  ca- 
pital de  15,387  liv.,  ou  une  rente  viagère  de  1,166 1., 
lorsqu'il  aura  atteint  quarante  ans;  un  capital  de 
28,979  liv.,  ou  une  rente  viagère  de  S,578  liv.,  lors- 
qu'il aura  atteint  cinquante  ans;  un  capital  de 
60,138  liv.,  ou  une  rente  viagère  de  6,658  liv.,  lors- 
qu'il aura  atteint  soixante  ans. 

Les  placements  dans  les  caisses  seront  suscepti- 
bles de  diverses  combinaisons  au  gré  des  prêceors  ; 
ils  pourront  se  faire  pour  la  somme  et  l'âge  qu'on 
voudra  ;  les  personnes  peu  fortunées  pourront  s'y 
intéresser  en  fournissant  chaque  année  une  somme 
déterminée,  qui  pourra  être  l«  firui  t  de  leurs  épargnes. 


3 


Tel  homme  quitriTsille,  et  qui  peut  tnnflter. 
y  placerait  une  partie  de  ce  qu'il  aurait  économisé; 
il  laisserait  croître  le  fruit  de  ses  économies  jusqu'à 
ce  que ,  ses  forces  ne  lui  permettant  plus  un  travail 
assidu  ,  il  pourrait  jouir  de  leur  produit  à  l'époque 
de  la  vie  i  laquelle  il  éprouverait  les  plus  grands  oe* 
soins. 

Peut-être  le  moment  est-il  venu  de  décréter  cet 
établissement  philanthropique;  on  pourrait  même 
le  combiner  avec  la  loterie  du  comité,  de  manière 
qu'il  concourût  à  en  assurer  le  succès  ou  à  accélérer 
le  reliremeiit  des  assignats;  mais  comme  les  calculs 
[u'il  exige  méritent  la  méditation  la  plus  approfon* 
lie,  je  propose  d'en  renvoyer  l'examen  à  votre  co- 
mité des  finances ,  ainsi  que  du  projet  de  tontine  de 
Thibault. 

Mais,  pour  ne  pas  retarder  pins  longtemps  le  reti- 
rement  des  assignats,  vous  pourriez  toujoura  adopter 
la  loterie  du  comité,  et  décréter  en  même  temps  que 
les  bons  au  porteur  qui  seront  donnés  en  payement 
dâs  lots  seront  admis,  concurremment  avec  les  nssi- 
gnats,dans  les  caisses  d'économie  ou  dans  la  tontine 
qui  seront  établies  d'après  les  calculs  qui  seront 
faits,  l'intérêt  perpétuel  étant  fixé  à  4  pour  100,  le 
comité  des  finances  demeurant  chargé  d'en  présenter 
incessamment  les  bases  et  le  projet. 

Ainsi ,  un  citoyen  qui  a  100  livres  en  assignats ,  et 
qui  les  placera  dans  la  loterie ,  aura  la  chance  de 
recevoir  jusqu'à  50,000  livres  en  bons  au  porteur; 
dans  la  position  la  moins  heureuse,  il  recevrait  tou- 
jours un  bon  au  porteur  de  100  livres,  qu'il  poum 
placer  en  acquisition  des  domaines  nationaux,  ou  en 
inscriptions  consolidées  ou  viagères,  ou  dans  les 
caisses  d'économie ,  ou  dans  une  tontine.  Ces  divera 
placements  feraient  rechercher  les  bons  au  porteur, 
et  attireraient  un  plus  grand  nombre  d^intéresaés  à 
la  loterie. 

La  réussite  des  caisses  d'économie  et  ûe$  tontines 
dépend  exclusivement  de  la  confiance;  car  un 
homme  qui  sacrifie  une  partie  de  ses  jouissances  ac- 
tuelles pour  se  procurer  à  l'avenir  un  sort  plus  avan- 
tageux a  besoin  d^une  garantie  oui  ne  lui  laisse  au- 
cun doute  :  nous  ne  pouvons  la  lui  assnrer  qu'en 
organisant  définitivement  le  gouvernement  répu- 
blicain ;  ainsi ,  sans  cette  grande  mesure ,  toutes 
les  autres  sont  inutiles  et  illusoires. 

{La  tuite  demain.) 


SUITE  OE  LA  SEANCE  DU   17  VEIITOSB* 
PréêUinùê  de  TMauditnu 

PiETTB  :  Citoyens ,  au  mois  d'août  179S,  le  ci- 
toyen Sombreuil,  gouverneur  des  Invalides,  âgé  de 
soixante-quatorze  ans ,  couvert  de  trente-cinq  bles- 
sures honorables,  fut  enfermé  à  l'Abbaye:  sa  fille, 
âgée  de  vingt  et  quelques  «innées ,  obtint ,  a  force  de 
sollicitations,  la  grâce  d'être  emprisonna  avec  lui. 

Lora  des  massacres  de  septembre,  elle  couvrit  son 
père  de  son  corps  pendant  plus  de  vingt-cinq  heures; 
quatre  fois  elle  l'arracha  au  tribunal  de  sang;  ses 
efforts,  son  dévouement  déterminèrent  des  témoins 
de  ces  scènes  d'horreurs  à  solliciter  un  sureis  pour 

(^rendre  des  renseignements,  sur  l'infortuné  vieil- 
trd  ,  aux  Invalides  et  à  la  section  du  Gros-Callloa , 
qui  attestèrent  de  la  manière  la  plus  satisfaisante aOB 
civisme ,  son  humanité  et  sa  bieniaisanoe. 

Sombreuil  fut  donc  sauvé  cette  lois  ;  mais  li  ter- 
reur, le  désespoir  auxquels  sa  fille  avait  été  en  proie 
aussi  longtemps,  et  ce  qu'elle  éprouva  lorsqu'on  lui 


6S7 


rendft  ion  pèra,  avaient  attaqué  conaidérableineQt 
sa  santé. 

Dans  le  temps  de  la  tyrannie  que  vous  avez  dé- 
truite ,  le  citoyen  Sombreuîl,  flgë  alors  de  soixante- 
seize  ans  s  a  été  incarcéré  avec  son  fils  et  sa  6lle 
comme  suspect,  et,  après  avoir  été  traîné  de  cachots 
en  cachots ,  Sombreuil  père ,  qui  n'avait  plus  qu*un 
souffle  de  vie,  fiit  égorgé;  comme  tant  d'autres^  avec 
son  fils ,  sans  savoir  pourquoi. 

La  citoyenne  Sombreuil  survit  à  tous  ses  maux, 
mais  elle  survit  en  traînant  dans  la  misère  la  plus 
profonde  Texistence  la  plus  languissante,  la  plus 
malheureuse,  n*ayant  absolument  aucune  ressource; 
ses  chagrins,  ce  qu'elle  a  souffert,  ont  tellement  al- 
téré sa  santé  qu'elle  ne  peut  par  son  travail  suffire  à 
ses  plus  pressants  besoins ,  bien  moins  encore  aux 
ménagements  et  aux  traitements  qu*exige  l'état  de 
dépérissement  où  elle  se  trouve. 

Si  la  citoyenne  Sombreuil  avait  des  droits  à  récla- 
mer sur  la  succession  de  son  père,  elle  se  serai, 
pourvue  au  comité  des  finances ,  où  l'on  se  serait 
sûrement  empressé  de  soulager  sa  misère. 

La  pétition  qu'elle  vous  a  présentée  le  9  de  ce 
mois  a  été  renvoyée  au  comité  clés  secours,  où  je  me 
suis  rendu  pour  faire  prononcer  sur  sa  demaude.  Le 
comité  de  secours  m*a  dit  qu'il  ne  pouvait  pas  8>n 
occuper;  que  le  comité  de  législation  était  chargé  de 
proposer  un  décret  pour  faire  statuer  sur  le  sort  de 
tous  les  individus  qui  sont  dans  la  situation  de  la 
citoyenne  Sombreuil ,  qui  devait  se  présenter  à  la 
Convention  pour  avoir  un  secours  provisoire. 

Je  demande  donc  qu'à  la  présentation  du  décret 
la  trésorerie  nationale  soit  autorisée  à  délivrer  à  la 
citoyenne  Sombreuil  la  somme  de  3,000  liv.  de  se** 
cours  provisoire. 

J'ai  en  main  ^attestation  de  la  section  des  Invali- 
des, qui  porte  que  la  citoyenne  Sombreuil  n'a  au- 
cune possession ,  et  est  absolument  sans  fortune ,  et 
qu'elle  a  été  obligée  d'emprunter  pour  ne  pas  mon- 
rir  de  foim. 

La  Convention  renvoie  au  comité  des  secours,  pour 
faire  son  rapport  dans  le  plus  court  délai  possible. 

~  On  reprend  la  discussion  sur  les  finances. 

Creuzé-Latouche  demande  la  question  préalable 
sur  tout  projet  qui  tendrait  a  établir  des  taxes  ex- 
traordinaires. 

La  question  préalable  est  adoptée. 

Bourdon  (de  TOise)  dénonce  les  agioteurs,  et,  sur 
sa  proposition  »  la  Convention  décrète  que  nonidi 
elle  s'occupera  des  mesiures  propres  à  faciliter  le  re- 
tirement  des  assignats. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 

SÉAIVCB  DU  18  VBNTOSB. 

CiiéiviBB  :  Citoyens  représentants ,  vous  indiquer 
un  devoir  à  remplir ,  c'est  deviner  vos  intentions , 
c'est  servir  à  la  fois  et  votre  gloire  et  la  chose  publi- 
que. Spectateur  attentif  des  événements  qui  ont  mar- 
qué les  différentes  époaues  de  la  révolution ,  et  plus 
excité  par  mon  zèle  qu  arrêté  par  mon  insuffisance , 
j'avais  résolu  de  vous  développer  mes  pensées  sur 
l'état  présent  de  la  patrie  ;  mais,  pressé  par  le  temps, 
qui,  durant  les  révolutions,  rend  tour  à  tour  ou  pré- 
coce ou  tardive  une  suite  de  mesures  salutaires  par 
leur  essence,  je  n'ai  d'autre  but  aujourd'hui ,  en 
montant  è  cette  tribune ,  que  d'appuyer  de  mon 
vœu  et  de  quelques  motifiÉ  une  motion  d'ordre  qui 
voiiB  est  déjà  connue»  dont  rajoarnement  me  semble 


injuste,  dont  Je  erois  hi  prompte  adoption  nécessaire 
poilr  consommer  le  triomphe  des  principes ,  pour 
opérer  enfin  la  réunion,  jusqu'à  ce  jour  plus  désirée 

a  n'obtenue,  de  tous  les  représentants  du  peuple, 
e  tous  les  républicains  ;  pour  anéantir  les  ractiona 
que  la  persécution  enfante  ou  dont  elle  reveille  les 
cendres;  pour  suivre ,  diriger,  consolider  la  vérita* 
ble  opinion  publique. 

J'ai  dit  la  véritable  opinion  publique.  Je  n*entends 
pas  celle  qui,  poussée  tour  a  tour  en  sens  contraire, 
se  dispute  l'empire  des  groupes;  qui  insulte  à  la 
souveraineté  du  peuple  en  prenant  des  arrêtés  ridi- 
cules dans  un  club  ou  dans  un  café  ;  qui  prétend 
déguiser  en  élans  de  patriotisme  les  cris  de  la  dé- 
magogie sanguinaire  ou  de  l'aristocratie  avide  de 
vengeance ,  qui,  changeant  tous  les  jours  de  masque 
ef  de  lan^ag' ,  fait  donner  des  leçons  de  vertu  par 
les  assassins  aux  gages  de  Robespierre,  et  des  leçons 
de  républicanisme  par  des  censeurs  royaux.  Je  parle 
d<  cette  opinion  publique  qui  plane  sur  la  représen- 
tation nationale  et  sur  la  patrie  entière ,  qui  n'est 
point  assujettie  au  thermomètre  des  événements  et 
des  passions,  qui  casse  lesjugements  contemporains 
quand  ils  ne  sont  point  conrormes  à  la  morale  ,  qui 
forme  la  voix  des  siècles  et  dicte  les  arrêts  de  la 
postérité,  qui  poursuit  le  crime  triomphant ,  et  re- 
pose avec  la  gloire  sur  le  tombeau  de  l'innocence 
immolée  ;  je  parle  de  cette  opinion  publique ,  im- 
muable comme  la  vérité ,  impassible  comme  la  jus- 
tice ,  éternelle  comme  la  nature ,  puissante  comme 
le  peuple ,  dont  elle  déclare  la  souveraine  volonté. 

C'est  elle  qui,  longtemps  comprimée  par  la  tvran- 
nie  décemvirale,  immobile,  et  ne  servant  plus  la 
liberté  que  par  son  silence ,  exilée  de  la  bouche  des 
citoyens,  banrtie  même  de  leurs  regards,  se  réfugiait 
dans  l'asile  des  consciences.  C'est  elle  qui ,  tour- 
mentée quinze  mois  d'une.  languf*ur  létnargique, 
mais  réveillée  par  la  Convention  nationale  dpns  la 
nuit  du  9  thermidor,  a  rompu  les  fers  du  peuple  et 
les  siens.  La  Déclaration  des  Droits  en  main  ,  elle  a 
ranimé  la  liberté  civile  expirante;  elle  a  rafformi  In 
liberté  politique  en  rappelant  au  sein  de  la  Conven  - 
tion  des  représentants  détenus  par  une  mesure  éver- 
slve  du  gouvernement  républicain.  Elle  redemande 
à  grands  cris ,  elle  s'étonne  de  ne  pas  revoir  encore 
dans  cette  enceinte  ceux  de  nos  collègues  que  le 
despotisme  de  Robespierre  et  de  ses  complices  a 
poursuivis  avec  le  plus  de  fureur;  qui,  aans  un 
temps  de  honte  et  de  délire ,  ont  été  mis  hors  la  toi 
pour  avoir  cru  que  des  représentants  du  peuple 
avaient  le  droit  de  penser  et  de  manifester  leur 
pensée. 

N'en  doutes  pas ,  citoyens  représentants ,  il  vous 
reste  un  pas  à  faire  pour  enlever  à  vos  ennemis  in- 
térieurs et  à  l'Europe, qui  épie  toutes  vos  démarches» 
un  prétexte  au  moins  plausible  de  révoquer  eu 
doute  l'intégrité  du  corps  représentatif  de  la  nation 
française.  Vos  collègues  mis  hors  la  loi  vous  ont 
demandé  à  être  traduits  en  jugement.  Le  décret  que 
vous  avez  rendu  le  37  frimaire ,  j'ose  et  je  dois  le 
dire,  est  contraire  à  tous  les  principes  :  il  n'y  a  point 
de  demi-justice,  comme  il  n  y  a  point  de  demi-inno* 
cence.  Nos  collègues  sont  innocents  ou  ils  sont 
coupables;  sont-ils  coupables,  vous  les  arraches 
aux  tribunaux  qui  les  réclament ,  vous  leur  accor- 
dez un  privilège  d'impunité;  sont-ilà  innocents, 
vous  leur  enlevez  leurs  droits  politiques,  vous  usur- 
pez ceux  du  peuple  qui  leur  a  confié  ses  pouvoirs, 
qui  a  voulu  être  représenté  par  eux. 

Je  veux  un  instant  les  supposer  conpables  ;  ek 
bien  »  n'a  vez-vous  pas  senti  combien  il  importait  au 


«S8 


saint  public  cTassorer  li  garantie  de  la  reprcscuU- 
tion  nationale?  N*avez-vous  pas  créé  des  formes 
totélaires  pour  les  représentants  du  peuple  prévenus 
de  quelques  délits?  Eh  quoi  !  depuis  six  mois  des 
hommes  sont  accusés  d'avoir  opprimé  le  peuple  et 
la  Convention  ;  trois  comités  délibèrent  longtemps 
pour  savoir  seulement  si  la  conduite  de  ces  hommes 
doit  être  soumise  à  Fezamen  :  une  commission  de 
vingt  et  un  membres ,  choisis  par  le  sort ,  s'assem- 
ble deux  mois  entiers  pour  peser  leurs  actions  poli- 
tiques :  tous  leurs  collègues ,  après  les  avoir  enten- 
dus dans  cette  tribune ,  émettront  indiTiduellement 
leur  vœu  sur  le  décret  d'accusation. 

Certes,  je  suis  loin  de  blâmer  cette  circonspection 
que  nous  avons  adoptée  bien  tard  ;  mais  pouvons- 
nous  ,  sans  une  injustice  révoltante ,  suivre  une 
marche  différente  quand  il  s'agit  de  nos  collègues 
peraécutés!  Serons-nous  plus  rigoureux  pour  les 
TÎctimes  que  pour  les  bourreaux?  Faut  il  ,afîo  de 
jouir  du  bienrait  de  ces  formes  protectrices ,  que  les 
mart^frs  du  31  mai,  du  2  et  3  octobre,  aient  commis 
les  crimes  de  Carrier?  Faut-il  que  la  France  entière 
leur  reproche  des  calamités  sans  nombre ,  que  des 
cités  dépeuplées ,  des  hameaux  réduits  en  cendres , 
des  fleuves  sanglants  déposent  contre  eux;  que 
toutes  les  prisons  racontent  leurs  fureurs ,  que  tous 
les  échafauds  les  dénoncent ,  que  tous  les  tombeaux 
les  accusent  ? 

.Vous  frémissez,  représentants!  Ah!  que  direz* 
TOUS  si  vos  collègues  mis  hors  la  loi  sont  innocents, 
si  aucun  délit  ne  peut  leur  être  imputé?  Je  ne  com- 
promettrai point  la  raison  de  la  Convention  natio- 
nale au  point  de  lui  rappeler  encore  ce  fantôme  de 
fiMéralisme  dont  on  a  fait  le  prétexte  de  leur  pro- 
scription. •  Mais  ils  ont  fui  !  •  Ohf  les  grands  cou- 
pabies  qui,  ouvertement  condamnés  par  Te  dictateur, 
ont  osé  échapper  à  sa  vengeance  !  Oh  !  les  scélérats, 
qui  ontdoutéde  la  justice  impartiale  de  Robespierre 
et  de 'Dumas ,  d*Hébert  et  d'Hanriot,  de  Saint- Just 
et  de  Fouquier-Tinville  !  Ne  devaient-ils  pas  en  effet 
attendre  respectueusement  les  bourreaux ,  et  vanter 
en  expirant  la  clémence  de  leurs  assassins?  Et  l'on 
ne  rougit  pas  de  présenter  des  objections  si  absur- 
dement  féroces  !  Ils  ont  fui,  dites- vous,  ils  se  sont 
cachés;  ils  ont  enseveli  leur  existence  au  fond  des 
cavernes ,  comme  autrefois  les  martyrs  des  Ceven- 
nes.  Voilà  donc  leur  crime  !  Eh  !  plût  aux  destinées 
de  la  république  que  ce  crime  eût  été  celui  de  tous , 
dans  un  temps  où  les  talents  célèbres ,  où  les  vertus 
courageuses  ne  pouvaient  espérer  une  longue  im- 
punité! Pourquoi  ne  s'est-îl  pas  trouvé  de  caverne 
assez  protonde  pour  conserver  à  la  patrie  les  médi- 
tations de  Conaorcet  et  l'élomience  de  Vergniaud? 
Les  nombreux  successeurs  de  Barneveltet  de  Sidney 
n'avaient  pas  besoin  de  chercher  la  gloire  sur  l'é- 
chafaud.  Quand  la  surface  de  la  terre  était  soumise 
au  pouvoir  arbitraire ,  pourguoi  n'ont-ils  pas  pour- 
suivi la  liberté  dans  la  profondeur  des  abfmes?et 
pourquoi,  le  10  thermidor  «  après  le  supplice  des 
triumvirs,  une  terre  hospitalière  et  libérale  n'a- 1- 
elle  pas  rendu  au  jour  puriflé  cette  colonie  sou- 
terraine d'orateurs  patriotes,  de  philosophes  ré- 
publicains ,  dont  la  sagesse  et  l'énergie  auraient  si 
puissamment  servi  l'Etat  dans  la  prochaine  et  der- 
nière lutte  de  l'égalité  contre  les  privilèges ,  de  la 
liberté  contre  les  rois? 

Mais  on  craint  des  projets  de  vengeance  de  la  part 
de  ces  représentants  aigris  par  de  longues  persécu- 
tions. Des  projets  de  vengeance  !  y  pense z-vous  ?  On 
médite  quand  on  est  seul  avec  les  malheurs  :  dans 
les  nuits  longues,  inauiètes,  pénibles,  où,  les  yeux 
fermés  au  sommeil ,  roreille  ouverte  a  tous  les  cris 


des  délateurs ,  à  tous  les  pas  des  assassins ,  nos  col* 
lègues  infortunés  ont  souffert  si  longtemps  la  mort» 
ils  ont  eu  le  tempsde  se  persuader  que  ce  n'est  point 
à  l'échafaud  de  gouverner  les  hommes  «  et  que  le 
supplice  attend  tôt  ou  tard  ceux  qui  dominent  par  les 
supplices.  Que  dis-ie  !  Condorcet ,  Vergniaud  ,  Ra- 
baut-Saint-Etienne,  Camille  Desmoulins,  Phélip- 
peaux  ne  veulent  point  d'holocauste  de  sang  ;  on  ne 
les  apaisera  point  par  des  hécatombes. 

Les  mains  des  royalistes  désirent  la  vengeance  ; 
les  républicains  égorgés  pardonnent  leur  mort  si  la 
république  est  immortelle.  Terreur,  aristocratie, 
fanatisme,  royauté,  voilà  le  signal  des  factions. 
Réunion  des  représentants  du  peuple ,  liberté ,  éga- 
lité, république,  voilà  le  ralliement  de  la  Franc  en- 
tière, voilà  le  vœu  de  tous  nos  collègues»  voilà  le  cri 
qui  sort  des  tombeaux. 

Recevons  donc ,  recevons  aujourd'hui  sur  le  vais- 
seau de  la  république  ceux  de  nos  compagnons  qui, 
sauvés  par  une  planche  fragile,  ont  survécu  au  com- 
mun  naufrage.  Nous  donnerons  ensemble  quelques 
larmes  à  nos  amis  submergés  durant  la  tourmente , 
et,  quand  la  route  sera  terminée,  nous  leur  dresse- 
rons des  mausolées  sui-  le  rivage  ;  mais  surtout  sau- 
vons le  navire ,  sacrifions  à  la  patrie  des  haines  qui 
n'ont  que  trop  déchiré  son  sein  maternel  ;  unissons- 
nous  pour  détruire  le  coupable  espoir  qui  reste  à  la 
royauté;  unissons-nous  pour  anéantir  en  France 
l'esprit  de  TAutriche  et  ae  l'Angleterre  ;  unissons- 
nous  pour  fermer  les  portes  du  Temple  :  nos  divi- 
sions seules  pourraient  les  ouvrir.  Nous  vengerons 
d*innocentes  victimes  eu  faisant  ce  qu'elles  voulaient 
faire ,  des  lois  sages  et  républicaines;  en  organisant 
un  gouvernement  vigoureux  pour  maintenir  les 
droits  du  peuple ,  impuissant  pour  les  renverser  ;  en 
préparant  une  paix  durable ,  une  paix  utile  et  glo- 
rieuse pour  la  république ,  et  nécessaire  à  l'Europe. 

Ecrivains  de  l'aristocratie ,  vous  êtes  signalés;  fa- 
natiques turbulents,  hommes  à  privilèges,  esclaves 
qui  avez  besoin  d'un  roi,  ne  vous  flattez  pas  de  maî- 
triser l'esprit  public  :  on  n'a  point  détrôné  la  terreur 
pour  rétablir  la  monarchie  ;  tous  les  représentants 
vont  se  réunir  ;  ils  vont  se  serrer  avec  le  peuple ,  et 
la  république  est  impérissable. 

Projet  de  déereL 

■  1^8  représentants  du  peuple  dénommé»  dans  les  décrets 
dttSS  Juillet  et  du  3  octobre  1793  (vieux  style),  non  cooipris 
dans  le  décret  du  18  frimaire  dernier,  rentreront  dans  le  sein 
de  la  Convention  nationale;  en  conséquence  les  décrets 
contraires  sont  rapportés.  > 

Bbntabolb  :  Je  ne  m'opposerai  jamais  à  ce  que  la 
Convention  soit  juste;  mais  je  ne  suis  point  préparé, 
ni  mes  collègues  non  plus ,  à  répondre  sur  cette 
question.  Je  crois  que  la  Convention  ne  pourrait  pas, 
sans  une  précipitation  qui  tiendrait  de  la  partialité, 
ou  du  moins  qui  en  aurait  Tapparencc  aux  yeux  du 
peuple  français  ,  traiter  à  présent  cette  question.  Je 
ne  me  permettrai  que  quelques  réflexions  qui ,  à 
mon  avis ,  prouveront  que  cette  motion  ne  doit  pas 
être  emportée  d'emblée.  Plusieurs  de  nos  collègues 
ont  été  décrétés  d'accusation  de  la  Convention... 

Pluiieurs  voix  :  Par  une  faction  ! 

Bbntabolb  :  Vous  paraissez  révoguer  en  doute 
que  ce  décret  ait  été  rendu  par  la  Convention.  Il 
faut  savoir  ce  que  nous  sommes,  et  où  nous  voulons 
aller... 

PluHeurt  voix  :  Nous  venons  de  la  tyrannie ,  et 
nous  allons  à  la  république.  (Vifsapplaudissements.) 

Bbntabolb  :  Il  faut  enfin  que  le  peuple  connaisse 
quel  est  son  point  de  ralliement... 


639 


Plusieun  wnx  :  La  Conyention  !  (Vifs  applaudis- 
«emcnts.) 

Bentabolb  :  Je  dis,  et  cette  parole  est  nécessaire, 

que ,  si  vous  dites  que  ce  décret  n*a  pas  été  rendu 

oar  la  Convention,  il  faut  être  franc,  il  faut  dire  que 

K)ut  ce  que  la  Convention  a  décrété  est  nul.  (Vio- 

ents  murmures.) 

Battblibi  :  Président ,  rappelle  BenUbole  k  Tor- 
dre. 

Bentabolr  :  Quelle  route  le  peuple  doit-il  suivre? 

Plusieurs  voix  :  La  justice  ! 

Bentabolb  :  Je  sais  bien  que  c*est  la  justice.  Je 
crois  que  je  parle  ici  pour  le  bien  de  la  patrie. 

Plusieurs  voix  :  Rentre  dans  la  question. 

Bentabole  :  Si  vou»  dites  au  peuple  :  Tel  décret 
rendu  par  la  Convention  n*a  été  rendu  nue  par  une 
faction ,  alors  le  peuple  ne  sait  plus  quelle  loi  il  doit 
suivre. 

Je  suppose  que  vous  rendiez  le  décret  qli*on  vous 
propose  :  qui  vous  répondra  que ,  Tannée  suivante, 
on  ne  Viendra  pas  dire  aussi  que  le  décret  aue  vous 
aurez  rendu  est  l'ouvrage  d'une  faction  ?  Il  ne  doit 
y  avoir  que  la  Convention  qui  parle  ;  je  sais  qu>n 
révx>lution  il  y  a  des  factions;  mais, telles  factions 
qu*il  y  ait ,  je  soutiens  qu'il  n'appartient  pas  à  une 
majorité  de  dire  que  Touvrage  d*une  autre  majorité 
est  celui  d*une  faction.  Que  la  Convention  répare  le 
mal  qui  est  fait ,  mais  qu'elle  prenne  garde ,  en  se 
laissant  entrafner  à  une  détermination  précipitée, 
d'attirer  de  nouveaux  malheurs.  N*est-il  pas  vrai 
que  ,  si  vous  dites  que  c'est  une  faction  qui  a  rendn 
ce  décret ,  vous  traitez  de  factieux  ceux  qui  l'ont 
rendu  ?  Or,  traiter  de  factieux  une  partie  de  la  Con- 
vention, c'est  vouloir  la  détruire,  (violents  murmu- 
res.) Si  vous  renversez  ce  décret  sous  prétexte  de 
terreur ,  vous  vous  £aites  votre  procès  i  tous  ;  car 
vous  avez  tous  participé  à  la  terreur. 

Un  tris-grand  nombre  de  membres  :  C'est  faux! 

"*  :  C'est  le  canon  qui  nous,  a  commandé  ce  mal- 
lieureux  décret. 

Bentabolb  :  Quel  est  celui  qui  pourrait  prouver 

qu'il  a  exposé  sa  tête?... 

Un  irès-grand  nombre  de  membres  :  Moi  !  moi  ! 

Bentabolb  :  Je  vois ,  par  les  interruptions  qu'on 
fait  à  ce  que  je  dis,  qu'on  ne  veut  pas  que  je  parle. 

PÊNiÈREs  :  Rentre  dans  la  question ,  ne  calomnie 

pas  l'assemblée. 

Bentabolb  :  Je  suis  dans  la  question.  Lorsque 
Camille  a  été  décrété  d'accusation,  personne  d'entre 
vous  n'a  demandé  la  parole  pour  le  défendre. 

Plusieurs  voix  :  Legendre  Ta  défendu. 

PÉNiÈRES  :  Je  Tavais  demandée  pour  défendre  Ver- 

gniaud. 

Bentabolb  :  J'entends  dire  que ,  lorsque,  le  31 
mai  ;  la  Convention  était  entourée  de  baïonnettes , 
elle  n'était  pas  libre. 

Plusieurs  voix  :*Non ,  non  ! 

Bentabolb  :  Attaquez-vous  le  31  mai? 

Un  irès-grand  nombre  de  voix:  Oui,  oui!  (Vib 
applaudissements.) 

Bentabolb  :  Puisque  tous  voulez  attaquer,  je  ne 
dis  pas  les  auteurs  de  la  conspiration... 

Un  très-grand  nombre  de  voix  .*  Le  31  mai  ! 

Quelques  membres  de  l'exlremue  youche ,  à  Ben- 
tabole :  Descends  de  la  tribune. 


Bbntabolb  :  Puisque  je  suis  entendu  avec  autant 
de  désagrément ,  je  vais  finir.  Mais  je  demande  au 
moins  que  vous  entendiez  quatre  phrases  :  ce  n'est 
oas  trop.  Je  laisse  à  d'autres  plus  heureux,  ou  peut- 
être  plus  habiles  que  moi,  le  soin  de  vous  démontrer 
le  danger  de  la  proposition  que  Ton  vous  fait. 

Quand  on  parle  du  31  mai ,  toutes  les  passions  se 
réveillent  ;  on  soupçonne  des  intentions  perverses  à 
ceux  qui  parlent  de  telle  ou  telle  manière.  Je  ne  fais 
qu'une  réflexion  :  ce  n'est  pas  pour  soustraire  à  la 
justice  les  auteurs  du  31  mai  qui  ont  eu  des  intentions 
perverses  ;  mais  si  vous  attaquez ,  je  ne  dis  pas  les 
auteurs  de  la  conspiration,  puisque  vous  en  avez  le 
droit ,  mais  cette  journée ,  vous  attaquez  aussi  les 
quatre-vingt  mille  hommes  qui  l'ont  faite. 

Andbb  Duhont  :  On  n'a  pas  l'intention  de  faire  le 
procès  aux  quatre-vingt  mille  hommes,  qui,  sans  le 
savoir,  ont  lait  une  contre-révolution.  (Non,  non  I 
s'écrie-t-on.)  Que  ceux  qui  ont  peur  se  rassurent; 
ou  ne  poursuivra  que  les  auteurs  de  cette  manœu- 
vre infernale.  Au  surplus,  les  trois  comités ,  à  qui 
vous  avez  déjà  renvoyé  cette  proposition ,  s'en  sont 
occupés  cette  nuit,  et  Merlin  va  se  présentera  la 
tribune  pour  faire  le  rapport. 

Au  surplus,  je  demande  Timpression  du  discours 
de  Chénier  ;  il  contient  des  vérités  incontestables, 
qu'il  est  important  de  faire  connaître. 

L'impression  du  discours  de  Chénier  est  décrétée. 

Sibtbs  :  Si  quelque  chose  tni  capable  de  faire  sen- 
tir toute  la  profondeur  de  la  tyrannie  sous  laquelle 
la  Convention  est  restée  si  longtemps  opprimée,  c'est 
la  nécessité  où  Ton  est  encore  ae  vous  présenter 
comme  une  motion  ordinaire  la  question  de  savoir 
si  une  partie  intégrante  de  la  représentation  natio- 
nale aura  la  faculté  de  rentrer  dans  Texercice  de  ses 
devoirs. 

Les  pouvoirs  de  nos  collègues  arrachés  de  notre 
sein  par  la  plus  horrible  violence  sont-ils  donc 
d'une  autre  nature  que  les  nôtres?  ne  les  tiennent- 
ils  pas  du  peunle,  ainsi  que  nous?  sont-ils  moins 
obli^toires?  Chacun  de  nous  peut-il  se  reconnaître 
un  titre ,  un  droit,  un  devoir,  qui  ne  soit  commun  i 
chacun  de  nos  collègues?  Est-ce  au  moment  enfin 
où  chaque  député  ici  présent  exerce  ses  pouvoirs, 
que,  par  la  plus, étrange  contradiction,  il  voudrait 
les  nier  chez  les  autres?  Eh  bien»  les  croirait-il ,  par 
la  plus  révoltante  aristocratie,  plus  respectables 
dans  ses  mains  que  dans  celles  de  ses  collègues  ? 

Non ,  citoyens ,  nous  ne  confondrons  point  l'ou- 
vrage de  la  tyrannie  avec  celui  des  principes  :  lors- 
que des  hommes  jouissant  d'une  immense  popularité, 
poussés  par  leseSbrts  convergents  de  toutes  les  clas- 
ses ,  de  tous  les  genres  de  mécontents ,  des  ennemis 
surtout  de  toute  représentation  nationale  ;  lorsque 
ces  hommes ,  dis-je ,  appuyés  sur  des  autorités  que 
Tanarcbie  avait  rendues  rivales  de  la  vôtre ,  munies 
d'ailleurs  de  tous  les  moyens  matériels  de  force  et 
de  pouvoir ,  conspirateurs  constants  depuis  Touver* 
ture  de  la  Convention ,  ont  réussi  enfin ,  au  milieu 
des  défiances  qui  vous  tenaient  isolés  et  incapables 
de  résistance ,  a  organiser  le  plus  çrand  des  crimes 
dans  les  fatales  journées  des  31  mai ,  l«r  et  2  juin» 
non,  ce  n'était  point  Touvrage  du  patriotisme,  mais 
celui  de  la  tyrannie.  A  quelle  cause  cependant  pou- 
vez-Tous  attacher  Texclusion  forcée  de  nos  collè- 
gues? 

Vous  avez  vu  à  cette  fatale  époque  la  Convention 
décimée ,  la  majorité  mise  sous  le  jOug  ;  il  n'y  avait 
plus  de  Convention  ;  la  minorité  régnait ,  et  ce  ren- 
versement de  tout  ordre  social  fut  l'effet  de  Tappa- 


640 


rence  d'ooa  portieo  du  peuple  qu'oa  disait  en  insBr- 
rectioDv  Uodis  qu*îl  D*etait  que  témoin  d*nn  crime 
qu*il  ignorait.  Qu'il  a  été  loog  Tintervalle  du  temps 
qu'il  a  lalla  à  la  grande  masse  des  représentants 
pour  rompre  ses  fers  et  ceux  du  peuple  français,  qui 
étaient  la  suite  inéf  itable  de  rassenrissemeut  de  la 
Conyentioo  ! 

flous  ne  pourrons  empêcher  nosneyeux  de  classer 
tonte  rhistoire  conyentionnelle,  jusqu'au  1 0  thermi- 
dor ,  en  deux  époques»  dans  le  sens  du  rapport  qui 
yous  a  été  (ait  pa  la  commission  des  Vingt-et-Un.Que 
verront-ils  depuis  Touverlure  de  l'assemblée  jus- 
qu'au Si  mai  ?  oppression  de  la  Convention  par  le 
Seuple  trompé  ;  après  le  31  mai  jusqu'au  10  thermi- 
or ,  oppression  du  peuple  par  la  Convention  as- 
servie. 

Soi ,  citoyens ,  depuis  le  10  thermidor ,  des  re- 
ntants  du  peuple  ont  recouvré  leur  liberté ,  la 
majorité  est  rentrée  dans  l'exercice  de  sa  procura- 
tion législative ,  votre  assemblée  a  repris  jusqu'à 
son  nom  de  Convention ,  étouffé  sous  je  ne  sais 
quelle  dénomination  colossale  et  arbitraire,  et  vous 
délibéreriez  encore  pour  savoir  si  cette  liberté  doit 
être  aussi  l'apanage  de  ceux  d'entre  vous  que  l'his- 
toire regardera  comme  les  plus  honorables  victimes 
de  cette  tyrannie  que  vous  avez  abattue  ? 

Je  ne  ferai  point  à  mes  collègues  Tinjure  de  leur 
prouver  ce  ou  ils  savent  mieux  que  moi  :  qu'une  as- 
semblée délibérante  dont  la  violence  éloigne  une 
Sartie  de  ceux  qui  ont  droit  d'v  voter  est  blessée 
ans  son  existence  même  ;  qu'elle  cesse  de  pouvoir 
délibérer  dans  l'objet  de  sa  mission ,  et  ne  fNeut  que 
s'occuper  des  movens  de  recouvrer  et  de  rétablir 
son  intégrité  ;  que  la  loi  qui  émane  d'un  corps  léfis- 
lalifcesse  d'avoir  ce  véritable  caractère  si  quelqu  un 
de  SCS  membres,  dont  l'opinion  et  le  suffrage  auraient 
pu  changer  Pissue  de  ses  délibérations ,  ne  peut  y 
faire  entendre  sa  voix  lorsqu'il  le  juge  nécessaire. 
Ces  principes  sont  ceux  de  tout  le  monde. 

Nous  ne  différons  plus  aujourd'hui  mie  par  un 
reste  d'agitation  morale  qui  s'amortira  oientôt ,  il 
faut  l'espérer;  mais,  lors  même  qu'il  subsisterait 
parmi  nous  quelques  passions  individuelles ,  fout  il 
perdre  l'espérance  ?  Une  réflexion  vient  me  rassurer. 
Nous  voyons  la  foule  des  ennemis  du  peuple  et  des 
mrcontrnts,  quoique  divisés  entre  eux  de  tant  de 
m.'inières  et  par  toute  sorte  de  leviers ,  s'accorder  à 
'  aiuqucren  commun  la  représentation  nationale; 
pourquoi  donc  ne  me  persuaderais-je  pas  que  nous, 
bien  plus  près  de  nous  entendre  à  tous  égards ,  nous 
saurons  ,  malgré  des  nuances  personnelles  qui  nous 
séparent ,  nous  réunir  pour  défendre  la  Convention 
et  pour  remplir  enfin  la  mission  qui  nous  a  amenés 
ici?  Songeons  à  nos  perfides  ennemis,  et,  pour  ne 
pas  être  nous-mêmes  les  instruments  involontaires 
de  leurs  dangereux  desseins,  respectons  nous-mêmes 
celte  Convention  que  nous  voulons  faire  respecter 
aux  autres.  Rendons-lui  la  plénitude  de  son  existence, 
.rendons  une  liberté  entière  à  tous  «eux  desesmem- 
'bres  qui,  depuis  l'exécrable  2  juin,  ont  cru  qu'ils  ne 
pouvaient  prendre  la  parole  avant  la  rentrée  de  nos 
collègues  que  pour  la  demander.  On  ne  peut  nier 
qu'il  n'y  en  ait  de  cette  opinion ,  puisque  j'avone 
qu'elle  est  la  mienne. 

Je  suis  sans  doute  de  l'avis  de  mon  collègue  Ché-  ' 
nier;  mais  je  désirerais  encore,  par  un  sentiment  de 
convenance  que  je  crois  digne  de  l'assemblée,  qu'on  ' 
ne  se  contentât  pas  de  porter  nûment  et  froidement 
un  décret  ordinaire.  Il  me  semble  que,  dans  une  . 
sorte  de  considérant  au  décriât,  ou,  si  l'on  aime 
mieux ,  dans  une  lettre  du  président,  on  pourrait 


jeter  quelques  mots  propres  à  faire  sentir  que  si, 
depuis  le  9  thermidor,  nous  avons  paru  balancer  à 
rappeler  nos  collègues,  c'est  par  des  considérations 
auxquelles  nous  savons  ou 'ils  veulent  eux-ménacs 
rendTre  hommage.  Nous  n  avons  pas  pn  vouloir  nier 
leurs  pouvoirs;  c'eAtété  vouloir  anéantir  les  nôtres: 
nous  ne  les  avons  pas  repoussés  :  nons  n'en  avions 
pas  le  droit  ;  mais,  dans  une  réciprocité  de  confiance, 
vous  dans  leun  vertus  républicaines,  eux  dans  notre 
sagesse  législative  ,  nous  avons  présumé  qu'ils  onl 
consenti  volontairement  à  cette  prolongation  de  leur 
honorable  exil  iosqu'i  ce  que  l'opinion  commune, 

fdus  éclairée ,  plus  juste  «  eût  elle-même  détenniué 
'époque  où  il  a  été  permis  d'annoncer  et  d'effectuer 
leur  rentrée  avec  tous  les  avantages  que  cette  me* 
sure  doit  avoir  pour  la  chose  publique. 

Puisse  cet  événement  être  l'heureux  présage  de 
cette  autre  grande  réunion  des  esprits  et  des  cœnre 
qui  doit  enfin  s'opérer  parmi  vous;  réunion  à  la- 
quelle est  attaché,  qui  pourrait  se  le  dissimuler  au- 
jourd'hui ?  le  salut  oe  la  république. 

(£aaii/l«ii«Matii.) 


N.  B,  Dans  la  séance  du  0 ,  la  Convention  a  rap- 
porté le  décret  portant  qu'il  serait  célébré  une  fieie 
en  l'honneur  dn  SI  nui  ;  elle  a  renvoyé  an  comité 
de  sûreté  générale  l'examen  de  la  conduite  de  Paciie« 
Rouehotte  et  complices ,  et  celle  de  Garat 

Lecointre  (de  Versailles)  a  demandé  qne  les  trois 
comités  fissent  un  rapport  particulier  de  la  conduite 
de  chacun  des  députi»  proscrits.  La  motion  de  le- 
cointre n'a  pas  en  de  suite  ;  la  Convention  o*a  pas 
même  voulu  l'écarter  par  un  décret  d'ordre  du  jour. 


LIVRES  DIVERS. 

Quintui  Cincinnatui,  inrédie  em  U^>iiactet,  reprêtetë^ 
pour  la  première  fob ,  sur  te  Théâtre  de  la  BéfÂliqne ,  le 
if  nivMe  Tm  a«,  Miirte  de Teete  4*liW«4Nfj  Cocéh ;  fwt  le 
citojeo  Aroault,  avec  ceUe  épigraphe  : 

hmfimqu€  m  mûdio  feràgmntur  hdU  $mmm. 
A  Paris,  chef  Mérigot  jeime,  quai  desAngoiUiis,  ■•sa. 


GRAVimas. 

Vue  de  V incendie  de  la  ville  du  Cap,  ertmipe  de  \__, 
hmi  powees  aur  dis-huit,  grevée  ee  coelesr  par  le  citay^ 
Chapuy,  d'après  le  tableau  du  citojen  J.-L.  Boqnet,  fait  a*a* 
prèf  nature.  Prit  :  S4  liv.  —  A  Pari»,  ches  les  dtoyeiia  Bo- 
quet  frères,  rue  Monlorgueil,  n»  119. 

—  L'Africain  hospitalier,  peint  par  G.  Morland,  et  gravé 
ett  eeulcur  par  la  ctuyewie  Rellct.  Se  vead  à  Paris,  cbes 
Deneuille  ,  rue  Franciade ,  section  de  Bon^Codaeil ,  a*  ftn« 
Prix  :  6  liv.,  en  noir;  et  11  Iît.,  en  couleur. 


Payements  à  la  trésorerie  natitmale. 

Le  payement  de  la  dette  consolidée  perpétuelle  se  fait 
pour  les  sii  derniers  mois  de  l*an  9*.  et  pour  l*amiëe  à  creux 

Ki  B*ont  pas  touché  les  sis  premiers  mois  de  ladite  aaaee. 
*  citoyens  qui  ont  retiré  leur  inscription  défioitiTe,  et  qui 
désireraient  être  payés  dans  les  dictricls,  peuvent  indiqtier 
les  chefs- lieui  de  diatriei  eè  ili  veulent  être  paya,  cea&er. 
mément  à  la  loi  du  a*  jour  des  aanaculeUidet. 

Le  sayemeiit  des  rentes  viagères  se  fait  cumulatWettieii 
pour  deui  mois  vingt  et  un  jours  de  Tannée  1793 (vieuist*!^ 
ei  let  tii  preanen  noii  de  Tan  f».  ^         •V»/» 


GAZETTE  NATIONALE ..  LE  HOMEI]R  MVERSEL. 

N«171.  Primidi  21  Vewtosb,  l'an  8*.  {Mercredi  11  Mars  1796\  «teiw;  </y/e.) 


POUTIQCR 

ALLEMAGNE. 

Hambourg  ^  U  S/|  février»  —  Les  dernières  lettres  de 
Varsovie  annoncent  quelMmpératricede  Russie  a  prononcé 
avec  une  indignité  dont  )*Europe  sera  révoltée  sur  le  sort 
des  prisonniers  d*Etat  polonais.  Le  comte  Poioclii|  M.  Mos- 
towslii  et  M.  Niemcewiei  seront  transportés  en  Sibérît 
pour  y  finir  leurs  jours.  Le  géoérenx  Koiciusko  est  cou* 
damné  à  une  prison  perpétuelle. 

Francfort^  U  i^  février.  —  Si  les  Français  poilTaieilt 
regarder  en  arrière  et  s*écarter  en  rien  des  principes  d*une 
conMitution  républicaine  et  populaire,  il  suffirait,  pour 
soutenir  leur  vigueur  et  les  ramener  dans  le  cbeinin  de 
leur  gloire  et  de  leur  bonheur,  de  leur  faire  connaître  les 
écrits  énergiques  que  Tanoar  de  leurs  intérêts  a  produits 
en  Allemagne.  On  pourrait,  indépendamment  de  traités 
généraux,  citer  des  brocliures  très-fortes,  qui  servent  de 
réponse  aux  libelles  de  la  coaliiionet  des  émigrés.  Un  écrit 
astucieux  parait  à  peine  qo*il  bit  Mitre  on  autre  écrit  qui 
le  combat. 

L*émigré  Bombelles  a  composé  une  espèce  d'ouvrage . 
sous  le  titre  d^Àvis  raisonnakU  au  peuple  allemand  ^  par 
un  Suisse,  Cest  un  fatras  où  on  prétend  qu*jl  est  de  Tin* 
térél  des  Allemands  de  ne  redonner  à  la  France  qu'un  roi, 
une  noblesse,  des  parlements  et  un  clergé.  Néanmoins  ce 
fatras  a  donné  lieu  à  un  écrit  plein  de  force  et  de  raison , 
dons  lequel  le  solide  examen  des  intrigues  de  Londres  et 
de  Vienne  décèle  un  écrivain  exercé  aux  matières  quMl 
traite  et  digne  de  défendre  la  cause  de  la  liberté  par  les  vrais 
principes  de  Tart  social. 

RÉPUBLIQUE   DES   PROVINGES*UNIES. 

La  Hayey  le  29  février,  —  La  Chambre  présidiale d'Am- 
sterdam a  fait  passer  aux  représentants  provisoires  du  peu* 
pie  de  Hollande  la  réponse  que  lui  ont  faite  les  directeurs 
de  la  Compagnie  des  Indes  orientales  à  celte  question  : 
t  Pour  quelle  raison  les  vaisseaux  de  la  Compagnie  s*é- 
talent  arrêtés  si  longtemps  en  Angleterre,  t 

Voici  en  substance  quelle  est  la  réponse  de  ces  direo- 
lears: 

t  Ils  déclarent  que ,  n^ayant  eu  aucun  pouvoir  pour  or- 
donner au  convoi,  sans  les  ordres  du  capitaine  Oorthuis, 
de  leur  servir  d'escorte,  ils  sont  dans  Pimpossibilité  de 
donner  les  raisons  pourquoi  ces  valsst*aux  sont  restés  dans 
les  ports  d'Angleterre,  ni  pourquoi  ils  y  sont  restés  si 
longtemps ,  comme  ils  sont  aussi  incertains  si  lesdits  vais- 
seaui,  ou  un  ou  plusieurs  du  nombre,  se  trouvent  encore 
en  Angleterre.» 

Comme  11  n'avait  pas  été  pris  juf  qu*à  présent  par  les 
états  généraux  de  résolution  cléfinilive  pour  mettre  un  em- 
bargo sur  les  vaisseaux  anglais  dans  les  ports  de  la  répu- 
blique, et  que  celte  mesure  exige  néanmoins  toute  la 
promptitude  possible,  les  députés  de  Hollande  à  rassem- 
blée des  états  généraux  ont  été  chargés  d'eOiectuer  t  qu'il 
soit  écrit  immédiatement  aux  amirautés ,  pour  qu'elles 
envoient  les  ordres  nécessaires  aux  officiers  commandant 
des  vaisseaux  de  l'Etal  de  ne  point  laisser  sortir  de  navi- 
res anglais;  de  l'empCcbcr  même,  s*il  le  faut,  par  des 
moyens  de  force,  et  de  demander  à  cet  eCCet  l'assistance 
des  commandants  français.  » 

Il  a  été  arrêté,  après  une  longue  séance,  que  les  scellés 
seraient  mis  sur  les  papiers  de  M.  Page!,  ancien  greffier 
des  états  généraux,  et  de  ks  deux  commis. 

De  Leuwarden^  en  Frise,  le  26  février,  —  Le  comité 
révolutionnaire  de  la  province  de  Frise  a ,  au  nom  du  peu- 
ple, déclaré  déchus  de  leurs  fonctions  les  membres  des  ci- 
devant  états.  Le  citoyen  BorgrinciL  le  leur  a  notifié  par  le 
discours  suivant  t 

8*  Série,  ^  Terne  X. 


ff  Nobles  et  Puiuants  Seigneurs,  souverain  légitime  du 
pays^  étaient  les  titres  que  vous  vous  êtes  «rrogés  jusqu'ici, 
et  qu'un  peuple  prétendu  libre,  mais  en  elTet  opprimé,  a 
été  obligé  de  vous  donner,  Maintenaqt  nous'  vivons  dans 
des  jours  plus  éclairés  et  plus  heureux  ;  le  peuple  sent  sa 
dignité,  reprend  ses  droits  inaliénables,  et  se  ressent  d'ê- 
tre libre  ;  personne  ne  peut  être  noble  que  par  des  faits, 
puissant  que  par  la  volonté  du  peuple,  qui  lui-même  est  > 
et  veut  être  seul  souverain. 

•  Dans  ces  lieux  la  sueur  et  le  sang  de  la  bourgeoisie  la% 
borieuse  et  des  braves  gens  de  guerre  ne  seront  plus  dissipés, 
inutilement,  et  répandus,  pour  les  plus  funestes  fins,  au 
gré  d'un  despote  méchant  et  ingrat,  Guillaume  le  cin-' 
quième.  Grâce  à  la  divine  Providence,  les  droits  sacrés  de 
rborome  sont  respectés,  et  (du  moins  nous  l'espérons  )  se- 
ront toujours  respectés. 

•  Citoyens,  vu  que  les  fers  avec  lesquels  on  avait  en- 
chaîné et  tenait  enchaîné ,  par  une  puissance  étrangère , 
le  véritable  et  vertueux  citoyen  frisois ,  sont  à  peine  brisés 
que  TOUS  apercevei  déjà  de  la  manière  la  plus  sensible  jus- 
qu'à  quel  point  vous  êtes  privés  de  la  confiance  de  la  na- 
tion ,  c'est  à  cause  de  cela  que  »  conformément  à  la  volonté 
de  la  nation  et  à  notre  devoir,  nous  fous  déclarons  déchus 
et  déposés  de  vos  postes  de  membres  de  l'assemblée  des 
états  et  des  commissions  aux  états  députés  qui  en  ont  été  la 
suite  ;  et  qu'en  conséquence  vous  êtes  exemptés  du  ser- 
ment fait  à  l'entrée  de  ces  postet,  mais  non  de  votre  res- 
ponsabilité ;  car  on  exige  bien  expressément  de  vous  de 
rester  présents  dans  ce  pays,  perrai  tos  concitoyens. 

•  Retoumei  donc ,  à  cette  condition  maintenant  res- 
pectable de  citoyens,  et  y  jouissez  non-seulement  de  la 
sûreté  de  vos  personnes  et  iMens,  qai  appartient  ù  tous  les 
hommes ,  mais  apprenei  aussi  par  expérience  que  les  au- 
teurs et  promoteurs  de  la  révolution  actuelle  des  choses  ne 
sont  pas  inciléi  et  conduits,  comme  dans  celle  de  1767, 
par  vengeance,  intérêt  propre,  ambition,  et  en  même 
temps  par  une  servile  soumission  au  tyran  Guillaume  cin- 
quième, qui  dominait  lui-même  sur  ceux  dont  il  devait  et 
prétendait  être  le  serfitev  i  non,  mais  par  vertu,  honnê- 
teté et  douceur,  au  maintien  des  droits  sacrés  de  rbomme.i 


VARIÉTÉS. 

Le  procès  de  FooquIerTinville  va  enfin  reprendre.  On 
parle  d'une  nouvelle  horreur  qui  est  au  nombre  des  chefii 
du  procès.  Dans  la  fameuse  conspiration  du  Luxembourg, 
quarantO'huit  accusés  ont  été  exécutés,  le  même  jour  21 
messidor,  sans  qu'il  existe  de  jugement  de  condamnation* 
Quelle  abominable  férocité  1  C'était  asseï  d'assassiner  avec 
des  formes;  mais  dédaigner  la  plus  essenlielle  de  tontes, . 
celle  de  la  condamnation  I  Eiécuter  sans  juger!  oser,  aa 
milieu  de  Paris,  égorger,  au  nom  de  la  loi,  quarante- 
huit  citoyens  que  la  loi  n'a  pas  condamnés,  Yoilà  ce  qu'on 
ne  soupçonnait  pas  encore. 

On  dit,  au  reste,  qne  les  fiimllles  de  ces  malheureuses 
victimes  réclament  auprès  de  la  Convention,  et  que  leur 
mémoire  va  incessamment  paraître.  Ce  sera  une  page  de 
plus*à  ajouter  à  cette  affreuse  époque  de  notre  histoire.  ' 
On  ne  doute  pas  que  la  Convention  ne  regarde  comme 
nulle  la  confiscation  des  biens  ;  car  la  confiscation  ne  peut 
exister,  d'une  part,  qu'avec  une  condamnation  à  mort , 
de  l'autre,  qu'en  vert»  d'un  jugement  ;  or  il  n'y  a  en  ici 
ni  l'un  ni  Tautre.  Le  principe  politique  va  donc,  comme 

!  dans  l'affaire  de  l'infortuné  Loiserollesi  céder  au  principe 

I  de  justice. 

{  Dans  celle-là  il  n*y  avait  pas  d'acte  d'uccosation  ;  dan 
;elle-ci  il  n*y  a  pas  de  jugement  :  ce  qui  assurément  est 
pis  encore.  Le  patriote  fiscal  dira  peut-être  que  voilà  qua- 
rante-huit confiscations  qui  échappent  à  la  république  t 
lorsque  ,  dans  l'aflteire  de  Loiserolles,  elle  n'en  perd 
qu'une  ;  nais  la  réponse  sera  simjile  t  tS'il  y  a  dans  le  tré-  * 

81 


642 


lor  national  quarante-sept  confiscations  de  moins ,  c*est 
qu'il  y  a  eu  quarante-sept  assassinats  de  plus.  » 


SPECTACLES. 

THÉÂTRE  DE  LA  RUE  FEYDEAU. 

Les  Comédiens  Français,  réunis  sur  ce  théâtre,  Tiennent 
4*j  donner  une  pièce  nouvelle,  en  cinq  actes  et  en  vers; 
elle  s'appelle  jégathine,  ou  ta  Fille  naturelle. 

Une  jeune  bâtarde ,  orpheline,  a  été  confiée  à  un  homme 
vertueux  ;  celui-ci  Ta  remise  entre  les  mains  d'une  femme 
vertueuse  qui  Ta  adoptée,  Ta  donnée  pour  sœur  à  sa  pro- 

Src  fille;  en  sorte  (|u*Agalhinese  croit  la  fille  de  madame 
lupré,  et  que  Rosette  la  croit  sa  sœur.  Madame  Dupré  a 
eu  des  malhenrs  ;  son  mari ,  qui  est  aussi  un  homme  ver- 
tueui,  a  essuyé  une  banqueroute  ;  son  commerce  a  été 
ruiné  ;  il  a  disparu ,  et  depui«  dix  ans  sa  femme  n*cn  a 
poiut  de  nouvelles.  L*ami  qui  a  recueilli  Agathioe  a  donné 
un  asile  dans  sa  terre  à  madame  Dupré  et  aux  deux  jeunes 
personnes.  Celte  honnête  famille  se  trouve  voisine  de  cam- 
pagne avec  uu  M.  Doutremer,  tièshounêle  homme,  qui  a 
un  jeune  neveu  amoureux  et  aimé  de  Rosette. 

M.  Doutremer  possède  de  grands  biens  en  Amérique  ; 
ils  sont  dirigés  par  un  économe  qui  est  la  probité  même  ; 
cet  économe  se  trouve  être  Dupré.  11  écrit  ft  son  proprié- 
taire; la  lettre  tombe  sous  les  yeux  de  madame  Dupré. 
On  peut  juger  de  sa  joie;  brûlant  de  reyolr  son  mari  ,  elle 
songe  à  s^embarquer  ;  mais  Dupré  arrive  lui-même  aussi- 
tôt que  sa  lettre;  le  jeune  neveu  de  Doutremer  épouse  Ro- 
sette; Tami  bienfaisant  épouse  Agalhine;  madame  Doprè 
a  retrouvé  son  époux,  et  tout  le  monde  est  content. 

On  voit  qu*il  n'y  a  guère  dans  cette  pièce  qu*un  écha- 
faudage de  faits  romanesques  antérieurs  à  l'action  même; 
pour  Taction,  elle  est  nulle;  tout  se  passe  en  conversa- 
tions fort  honnêtes ,  mais  qui  n'ont  rien  de  comique.  Le 
dialogue  n*a  presque  jamais  de  vérité;  des  sentences  re- 
battues sur  la  bienfaisance,  la  probité,  Famour,  la  vertu, 
reviennent  à  tout  moment;  en  un  mot,  la  pièce  fait  plus 
d'honneur  au  cmur  de  Tauteur  qu*à  son  talent  dramati- 
que. 

Les  Comédiens  Français,  qui  sont  chargés  du  dépôt  de 
Fart  de  la  comédie,  qui  ont  des  talents  si  propres  à  les 
conserver,  ne  devraient-ils  pas  faire  un  choix  plus  heureux 
dans  les  ouvrages  qu'ils  ont  à  représenter?  Il  dépend  beau- 
coup d'eux  de  former  le  goût  du  public,  de  te  diriger  vers 
tel  ou  tel  genre  ;  or,  qui  doute  que  le  bon  genre  de  la  co- 
médie ne  soit  celui  de  Molière,  et  de  ceux  qui  de  loin  ont 
marché  sur  ses  traces  ?  Pierre  et  Thomas  Corneille,  Re- 
gnard,  Brueys,  Antreau,  Boursault,  Hauteroche,  Des- 
touche, Dancourt,  Legraod,  Dufresny,  Piron,  Lesage,  etc. 
N'est-ce  pas  là  en  général  la  bonne  école  ?  Un  grand  nom- 
bre de  pièces  de  ces  auteurs  seraient  nouvelles  pour  le  pu- 
blic qui  fréquente  actuellement  nos  spectacles  :  comme 
elles  sont  bonnes  et  plaisantes,  il  les  aimerait,  il  s'y  amu- 
ferait,  il  y  profiterait;  nos  auteurs  actuels,  nos  jeunes 
talents,  les  prendraient  pour  modèles,  en  s'accommodanl 
toutefois  à  notre  temps  et  ù  nos  mœurs  ;  on  pourrait  re- 
voir quelquefois  de  vraies  comédies. 

Nous  proposons  avec  défiance  ces  réflexions,  qui  peu- 
vent avoir  quelque  justesse,  et  qui  nous  sont  seulement 
inspirées  par  un  grand  amour  de  l'art  de  la  comédie. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Fin  du  Résumé  des  diverses  opinions  présentées  à 
la  Convention  sur  le  projet  du  comité  des  finances 

Î}our  accélérer  le  relirement  des  assisnatt^  tu  à 
a  séamci  du  7  ventôse  an  3,  par  Camhon. 

Notre  collègue  Veriiier  pense  qu*il  est  instant  de 
diminuer  la  masse  des  assignats  qui  sont  en  circula- 
tion ;  il  trouve  que  les  mesures  proposées  par  le  co* 


mité  peuvent  en  faire  rentrer  une  somme  considéra- 
ble ;  il  a  présente  des  observations  sur  divers  arti- 
cles, que  vous  examinerez  lors  de  la  discussion  ;  il 
désire  qu^on  ajoute  rétablissement  d*un  impôt  extra- 
ordinaire, dont  le  produit  ne  servirait  qu*à  diminuer 
la  masse  des  assignats  qui  sont  en  circulation. 

Jeconviendraique  cette  mesure  serait  juste,qu*cne 
serait  utile  et  avantageuse  aux  particuliers  et  à  la 
républiquejeurs  intérêts  étant  inséparablement  liés; 
je  pense  même  c|ue ,  si  elle  pouvait  être  exécutée , 
elle  contribuerait  essentiellement  à  la  confiance  et 
au  crédit  des  assignats.  Je  vous  ai  annoncé,  dans  le 
rapport  de  votre  comité,  qu'il  s*en  était  occupé,  mais 
^ue  les  circonstances  ne  lui  avaient  pas  paru  propres 
a  son  adoption  :  la  loi  du  maximum  et  les  réquisi- 
tions ayant  occasionné  des  pertes  considérables  à  l'a- 
griculture et  au  commerce,  il  a  craint  qu'une  contri- 
bution extraordinaire  n'enlevât  aux  agriculteurs  et 
aux  négociants  les  ressources  qui  leur  sont  néces- 
saires pour  répondre  au  désir  âue  vous  avez  mani- 
festé de  faire  prospérer  ces  deux  branches  principales 
de  l'économie  politique. 

D'ailleurs,  il  se  présente  de  grandes  difficultés 
lorsqu'on  s'occupe  d'un  mode  de  répartition  qui 
puissr  atteindre  toutes  les  propriétés  :  les  fortunes 
mobilières  n'ont  jamais  été  imposées  due  par  des 
moyens  arbitraires,  aujourd'hui  que  la  foi  du  maxi- 
mum a  déplacé  un  grand  nombre  de  fortunes,  et  que 
la  révolution  en  a  créé  de  nouvelles  qui  sont  incon- 
nues, puisqu'elles  reposent  sur  la  valeur  des  assi- 
gnats enfouis  dans  les  portefeuilles,  il  est  presque 
impossible  de  les  atteindre,  à  moins  d'assujettir  à  un 
impôt  quelconque  le  signe  monétaire,  ce  qui  détrai- 
rait la  confiance  et  pourrait  entraîner  des  injustices. 

Notre  collègue  Lozeau  attribue  exclusivement  la 
cherté  excessive  des  denrées  à  la  grande  quantité 
des  assignats  ;  il  pense  qu'il  est  avantageux  et  même 
nécessaire  d'en  diminuer  la  masse  ;  la  démonétisation 
forcée  lui  paraît  injuste  et  tyrannique;  il  se  borne  à 
adopter  une  partie  des  mesures  proposées  par  le  co- 
mité, sauf  quelques  amendements  (]u'il  indique.  Il 
combat  la  loterie,  ce  moyen  lui  paraissant  -onérettx 

■  pour  la  nation,  ruineux  pour  les  particuliers,  et 

■  propre  à  affaiblir  le  crédit  public.  • 

La  loterie  lui  paraît  onéreuse  pour  la  nation  par 
le  sacrifice  qu'elle  exige  pour  les  primes»  pour  les 
3  pour  100  accordés  aux  bons  au  portetu*,  et  par  les 
frais  qu'elle  entraînera  ;  il  estime  que  ces  trois  objets 
s'élèveront  à  650  millions  pour  un  an ,  ce  qui  équi- 
vaut, suivant  lui,  à  un  emprunt  nour  un  an,  moyen- 
nant un  intérêt  de  14  pour  100,  sur  les  4  milliards. 
.  Ce  calcul  serait  juste  si  les  bons  au  porteur  ren- 
traient tous  dans  l'année  en  payement  des  domaines 
nationaux  ;  mais  il  ne  présente  pas  la  vérité  s'ils  ne 
rentrent  que  dans  une  proportion  égale  pendant 
vingt  ans,  puisque ,  le  montant  des  primes  et  des  frais 
étant  toujours  le  même,  l'intérêt,  qui  est  fixé  à  3 
pour  100  par  an,  ne  reviendrait  alors  qu'à  raison 
de  4  pour  100  pour  chaque  année. 

L'emploi  de  tous  les  bons  au  porteur  en  payement 
des  domaines  nationaux  ne  peut  pas  être  fait  dans 
l'année,  puisqu'il  n'y  a  pas  en  circulation  les  8  mil- 
liards 39!  millions  en  assignats  qui  seraient  néces- 
saires, savoir:  4  milliards  pour  la  loterie,  et  4 
milliards  391  millions  de  livres  qu'il  faudrait  fournir 
en  se  libérant  avec  des  bons  au  porteur.  D'ailleurs, 
notre  collègue ,  qui  attribue  la  cherté  de  toutes  les 
denrées  exclusivement  à  la  quantité  dc's  assignats , 
pourrait-il  regretter  un  sacrifice  de  550  millions  qui 
les  ferait  tous  disparaître  dans  un  an  ;  ce  qui,  d'après 
son  système,  devrait  laire  diminuer  le  prix  des  aen- 
rées  au-dessous  du  cours  de  1789,  par  la  rareté  da 
signe  qui  en  serait  la  suite? 


648 


Si  tout  les  bons  au  porteur  rentraient  dans  une 
année  en  payement  des  domaines  nationaux,  le  pro- 
duit des  ventes  à  faire  s'élèverait  à  8  milliards  783 
millions  de  livres,  ce  qui  supposerait  un  grand  em- 
pressement ;  ou  peut  donc  espérer  que  la  plus-value 
qui  eu  serait  la  suite  dédommagerait  la  nation  du  sa- 
crifice qu'elle  aurait  pu  faire. 

Si  la  loterie  est  onéreuse  pour  la  nation ,  elle  ne 
peut  pas  être  ruineuse  pour  les  particuliers,  ces  deux 
assertions  paraissant  contradictoires  ;  car  si  la  répu- 
blique fait  un  sacrifice  considérable ,  il  faut  néces- 
sairement que  quelqu'un  en  profite. 

Notre  collègue  pense  que  la  loterie  altérerait  le 
crédit  public,  parce  qu'elle  atténuerait  le  gage  des 
assignats  par  les  sacrifices  qu'elle  nécessite;  mais  il 
faut  convenir  de  bonne  foi  qu'il  n'existe,  pour  le  re- 
tircmcnt  des  assignats ,  que  des  moyens  coercitifs, 
que  vous  repousseriez  avec  raison,  ou  des  moyens 
libres  et  volontaires,  qui  ne  peuvent  réussir  qu'en 
offrant  des  avantages. 

Notre  collègue  propose  d'accorder  une  prime  de 
5  ou  10  pour  100  aux  acquéreurs  des  domaines 
nationaux  qui  se  libéreront  par  anticipation  ;  mais 
cette  prime  n'atténuerait-elle  pas  aussi  le  gage  des 
assignats?  puisqu'une  rentrée  de  3  milliards  668 
millions  de  livres  dans  un  an  supposerait  l'aliénation 
de  4  milliards  de  domaines  nationaux;  ce  qui  oc- 
casionnerait évidemment  à  la  nation  un  sacrifice 
d'environ  400  millions,  somme  à  peu  près  égale  au 
montant  des  primes  de  la  loterie. 

Votre  comité,  convaincu  qu'il  faut  accorder  des  pri- 
mes pour  faire  rentrer  des  as^nats,  propose  aussi 
cette  mesure,  sauf  quelques  différences  qui,  lorsque 
vous  vous  occuperez  de  la  discussion  des  articles  qui 
y  sontrelatifs,pourront  donner  lieu  à  quelquesamen- 
déments;  à  la  vérité,  il  ne  compte  pas  sur  une  ren- 
trée aussi  rapide  que  celle  présentée  par  Lozeau. 

Notre  collègue  combat  la  proposition  faite  par  le 
comité  d'admettre  en  payement  des  domaines  natio- 
naux vendus  ou  à  vendre  les  inscriptions  de  la  dette 
consolidée,  en  les  calculant  par  vingt  fois  leur  mon- 
tant si  on  rournit  en  n^éme  temps  trois  fois  leur  va- 
leur en  assignats,  et  par  seize  fois  leur  montant  si  on 
fournit  en  même  temps  pareille  somme  en  assi- 
gnats, pourvu  que  dans  tous  les  cas  on  solde  l'en- 
tière acquisition.  11  considère  la  condition  de  rece- 
voir les  inscriptions,  en  les  calculant  à  raison  de 
seize  fois  leur  montant,  •  comme  peu  digne  de  la 

•  nation  française,  peu  conforme  à  la  loyauté  d'une 
«  grande  nation  ;  enfin,  comme  une  véritable  ban- 

•  queroute.  •  En  conséquence ,  il  demande  qu'elle 
soit  rejetée,  et  que  les  inscriptions  ne  soient  plus  ad* 
mises  en  pavement  des  domaines  nationaux. 

Je  vais  aétruire  les  fausses  impressions  que  le 
mot  infâme  de  banqueroute  peut  avoir  produites  sur 
les  esprits. 

Les  inscriptions  sont  un  titre  qui  indique  le  droit 
des  créanciers  de  la  république  a  un  payement  an- 
nuel et  perpétuel  ;  on  peut  les  assimiler  a  un  contrat 
de  rente  perpétuelle,  dont  le  créancier  ne  peut  ja- 
mais exiger  le  remboursement  du  capital. 

Quelle  injustice  peut-on  reprocher  à  la  nation 
qui  propose  de  recevoir  en  payement  des  domaines 
nationaux  le  capital  d'un  effet  qu  elle  n  est  pas  obli- 
gée de  rembourser?  Elle  ne  force  pas  qu  on  accepte 
cette  condition;  elle  se  contente  d'offrir,  ou  le  paye- 
ment annuel  pour  lequel  elle  s'est  engagée,  ou  de 
recevoir  l'inscription  de  100  livres  en  payement  des 
domaines  nationaux,  pour  un  capital  de  2,000  livres 
à  condition  qu'on  fournira  en  même  temps  6,000  liv. 
en  assignats,  ou  pour  1,600  livres  si  on  ne  fournit 
que  1,600  liv.  en  assignats.  Tout  est  facultatif  pour 
le  créancier»  et  obligatoire  pour  la  nation. 


Cette  mesure,  loin  de  mériter  l'odieuse  qualifica- 
tion qu'on  lui  a  donnée ,  est  donc  une  véntable  fii- 
veur;  aussi  a-t-elle  été  sollicitée  pendant  longtemps, 
et  dans  ce  moment  même  il  y  a  plus  de  trois  mille 
pétitions  au  comité  des  finances  pour  demander  que 
le  délai  qui  avait  été  fixé  pour  l'admission  des  in- 
scriptions en  payement  des  domaines  nationaux,  à 
raison  de  seize  fois  leur  montant,  soit  prorogé. 

La  proposition  de  votre  comité  tend  au  double 
but  d'accélérer  le  payement  des  domaines  natio- 
naux et  de  faire  rentrer  (jles  assignats ,  les  créanciers 
de  la  république  y  trouvent  aussi  leur  avantage  ;  car 
si  vous  adoptiez  la  proposition  de  Lozeau,  vous  nui- 
riez essentiellement  au  crédit  des  inscriptions,  ce 
qui  occasionnerait  une  perte  considérable  a  ceux  qui 
sont  dans  le  cas  de  les  vendre  pour  se  libérer. 

Votre  comité  aurait  désiré  pouvoir  vous  proposer 
d'admettre  les  inscriptions  en  payementdes  domaines 
nationaux  en  les  calculant  par  vingt  fois  leur  mon- 
tant sans  fournir  des  assignats  ;  mais  si  d'un  côté 
vous  devez  vous  occuper  du  sort  des  créanciers  de 
l'Etat,  de  l'autre  vousdevez  veillera  la  conservation 
du  gage  affecté  au  payement  des  assignats  et  à  leur 
retirenient  successif,  en  ne  précipitant  pas  trop,  dans 
ce  moment,  le  remboursement  de  la  dette. 

Notre  collègue  Balland  vous  a  présenté  aussi  ses 
réflexions  et  ses  vues  ;  il  croit  <^u'il  est  nécessaire,  et 
même  indispensable,  pour  le  bien  général  et  le  salut 
de  la  patrie,  de  retirer  au  moins  3  milliards  d'assi- 
gnats de  la  circulation  ;  il  ne  combat  pas  les  mesures 
proposées  par  le  comité ,  auxquelles  il  a  donné  son 
assentiment;  mais  il  a  proposé  l'établissement  d'une 
banque  nationale ,  qui ,  sans  nuire  à  personne  et 
sans  faire  aucun  sacrifice,  ferait  rentrer  1  milliards 
en  assignats. 

Son  projet  consistée  ouvrir  un  échange  volontaire 
des  assignats  contre  des  reconnaissances  nationales 
de  500  livres,  qui  porteraient  un  intérêt  de  5  pour 
100  sans  retenue ,  et  seraient  admises  sans  frais  en 
payement  des  domaines  nationaux  vendus  ou  à  ven- 
dre, ou  en  achat  d'annuités. 

Elles  seraient  délivrées  sans  frais  par  la  tré- 
sorerie et  par  les  directoires  de  district,  et  pourraient 
être  transmises  par  endossement,  moyennant  1}S 
pour  100  par  mutation;  elles  seraient  remboursa- 
bles à  vue ,  soit  à  la  trésorerie,  soit  dans  les  caisses 
de  district,  moyennant  un  droit  de  1  pour  100. 

Les  assignats  qui  rentreraient  par  échange  contre 
les  reconnaissances  seraient  déposés  dans  des  caisses 
à  trois  clefs,  pour  être  employés  au  remboursement 
des  reconnaissaDces,  ou  pour  être  annulés  et  brûlés, 
lorsqu'elles  rentreraient  en  payement  des  domaines 
nationaux  ou  par  la  vente  des  annuités. 

Cette  opération  est  un  emprunt  remboursable  à 
vue,  portant  un  intérêt  à  9  pour  100  sans  retenue  ; 
il  me  paraît  qu*il  ne  produirait  pas  l'effet  que  notre 
collègue  en  espère ,  puisque  la  nation  serait  obligée 
de  conserver  les  assignats  à  la  disposition  des  por- 
teurs des  reconnaissances  qui  pourraient  réclamer  à 
chaque  instant  leur  payement  ;  d'ailleurs  il  n'offre 
presque  aucun  avantage  aux  prêteurs,  puisque  « 
pour  se  procurer  un  intérêt  annuel  de  5  pour  100, 
ils  se  priveraient  de  la  faculté  illimitée  qu'ils  ont  de 
se  servir  de  leurs  assignats  dans  toutes  les  transac- 
tions journalières,  et  que  les  reconnaissances  qu'ils 
recevraient,n'ayant  pas  un  cour9forcé,seraient  sou- 
mises à  une  formalité  et  à  un  droit  de  1}2  pour  100 
pour  chaque  mutation,  et  que  d'ail  leurs  Ton  ne  pour- 
rait en  exiger  le  remboursement  qu'en  payant  1  pour 
lOOde  leur  valeur.Si  les  reconnaissances  circulaient, 
les  divers  droits  de  mutation,  comme  l'observe  notre 
collègue ,  paieraient ,  et  au  delà,  l'intérêt  de  5  pour 
100  que  la  nation  accorderait  ;  mais  alors  cet  échange 


644 


n'oftrê  aocnn  arantage  aux  préteurs;  il  ne  produira 
donc  aueuD  effet,  car  personne  ne  se  soumettrait  yo* 
lontairement,  et  sans  aucun  profit,  à  des  formalités 
ei  des  dépenses  qui  grèyeraient  ses  propriétés. 

A  la  vérité,  ces  reconnaissances  seraient  admises 
sans  frais  et  sans  formalités  en  payement  des  domai- 
nes nationaux;  maiscet  avantage  n*esl  qu'en  faveur 
des  acquéreurs,  qui  n*ont  pas  besoin  des  reconnais- 
sances pour  faire  produire  5  poui  100  à  leurs  assi- 
gnats puisqu'en  se  libérant  ils  se  procurent  cet  inté- 
rêt, en  faisant  cesser  celui  qu'ils  doivent  annuelle- 
ment k  la  nation  sur  le  prix  de  leur  acouisition. 

Cependant  le  projet  d'établissement  d^une  banque 
nationale  ne  doit  pas  être  abandonné;  je  crois  même 
qu'il  conviendrait  de  charger  votre  comité  des  finan- 
ces de  s'en  occuper  ;  mais,  en  attendant,  vous  pour- 
riez toujours  discuter  les  moyens  proposés  par  votre 
comité ,  puisqu'ils  ne  contrarient  pas  cet  établisse* 
ment. 

On  parle  souvent  (|u'il  faut  établir  l'cj^dre  dans 
Tadministration  des  finances,  mais  on  n'indique  pas 
les  mesures  préalables  qui  sont  nécessaires,  ni  les 
difficultés  qu'il  faut  vaincre  pour  y  parvenir.  Je  vais 
essayer  de  vous  en  pr^nter  l'aperçu,  afin  de  fixer 
les  opinions. 

Tout  le  monde  sait  que,  pour  établir  Tordre  dans 
les  finances  d*un  gouvernement ,  il  faut  régler  ses 
dépenses  ordinaires  de  manière  qu'elles  n'excèdent 
pas  le  produit  des  recettes  ordinaires.  Dans  une  pe- 
tite république,  une  administration  prévoyante 
doit  même  mettre  en  réserve,  pendant  la  paix,  des 
fonds  pour  faire  la  guerre,  ou  pour  de  grands  évé- 
nements imprévus.  Cette  mesure  serait  dangereuse 
dans  un  grand  Etat  libre  ;  aussi,  lorsque  la  guerre 
arrive,  on  ne  peut  pourvoir  aux  dépenses  extraor- 
dinaires que  par  des  emprunts  ;  mais  alors  les  recet- 
tes ordinaires  doivent  être  augmentées  de  la  somme 
3ui  est  nécessaire  pour  le  remboursement  progressif 
u  capital  emprunté,  et  pour  en  acquitter  les  intérêts. 
Lorsque  TAsseroblée  constituante  eut  décrété  l'or- 
ganisation du  gouvernement  qu'elle  avait  donné  à  la 
France,  elle  régla  l'aperçu  des  dépenses  et  recettes 
ordinairesau'elle  crut  nécessaires:  malheureusement 
l'état  qu'elle  arrêta  fut  très-imparfait,  puisqu'on  y 
avait  omis  au  moins  150  millions  des  dépenses  or- 
dinaires. D'un  autre  côté,  le  produit  des  contribu- 
tions qu'on  y  avait  affecté  fut  presque  nul,  de  sorte 
que,  la  première  année,  le  déficit  fut  de  300  millions, 
qu'on  se  procura  par  des  créations  successives  d'as- 
signats. 

Le  comité  des  finances.de  la  Législative  dressa  l'état 
des  dépenses  ordinaires  de  1792;  il  fut  imprimé  et  dis- 
tribué ;  mais  la  session  du  corps  législatif  ayant  été 
une  lutte  perpétuelle  pour  abattre  le  trône,  il  ne 
s'occupa  pas  de  cet  objet  important,  ni  des  contri- 
butions, de  sorte  que  l'état  imparfait  arrêté  par  l'As- 
semblée constituante  fut  prorogé. 

La  guerre  ayant  été  déclarée,  les  dépenses  augmen- 
tèrent; le  produit  des  recettes  étant  toujours  le 
même ,  il  fallut  pourvoir  à  tous  les  besoins  par  des 
créations  d'assignats. 

Votre  comité  des  finances  s'occupa,  au  commen- 
cement de  votre  session,  de  l'état  des  dépenses  pour 
1793  ;  il  vous  proposa  de  statuer  si  les  frais  du  culte 
continueraient  d'être  à  la  charge  de  la  nation  :  cette 

auestion  n'ayant  pas  été  décidée,  et  les  événements 
e  la  guerre  et  de  la  révolution  s'étant  succédé  avec 
une  rapidité  incroyable,  il  abandonna  le  travail  qu'il 
avait  entrepris,  et  qui  aurait  été  d'ailleurs  inutile, 
puisqu'on  n'aurait  pas  pu  prévoir  alors  les  dépenses 
qu'ont  entraînées  la  création  dos  tribunaux,  comités 
et  armées  révolutionnaires  ;  les  40  sous  accordés 
pour  présence  aux  assemblées  desection  ;  la  fixation 


du  prix  du  pain  à  3  sous  la  livre  ;  la  loi  des  WMpttts  ; 
les  mouvements  qui  se  sont  manifestés  dans  i'inté-» 
rieur  ;  la  trahisonde  Toulon;  la  guerre  de  la  Vendée  ; 
les  levées  en  masse  des  citoyens  ;  la  réquisition  des 
citoyens  de  dix-huit  à  vingt-cinq  ans;  l'entretien  de 
douze  mille  hommes  armés;  la  marine  ;  la  défense  de 
toutes  les  frontières  et  côtes  menacées  ;  les  ttais  extra- 
ordinaire de  l'administration  ;  les  indemnités  aux 
défenseurs  de  la  patrie  et  a  leurs  familles;  les  secours 
aux  indigents;  enfin  les  sacrifices  au' il  a  fallu  faire 
pour  {aire  venir  de  l'étranger  les  objets  de  première 
nécessité. 

D'un  autre  côté,  vous  avez  supprimé  le  droit  des 
patentes  et  la  contribution  mobilière,  ^ue  vousavex 
remplacée  en  partie  en  assujettissant  a  la  contribu- 
tion foncière  les  rentes  dues  aux  créanciers  de  l'Etat. 

Personne  ne  pouvait  prévoir  les  événements  de  la 
révolution  ;  le  payement  des  dépenses  qui  en  ont  été 
la  suite  a  été.  exécuté  en  vertu  de  vos  décrets,  qui 
ont  été  dictés  par  la  loi  impérieuse  du  salut  du  peu- 
ple ;  les  assignats  ont  fourni  à  tous  nos  besoins. 

Tant  que  la  guerre  durera,  les  assignats  serviront 
a  acquitter  les  dépenses  qu'elle  nécessite  ;  ainsi  ces 
dépenses  auront  été  acquittées  par  l'aliénation*  des 
capitaux ,  comme  tout  autre  gouvernement  y  aurait 
pourvu  par  des  emprunts  ;  mais  il  y  a  cette  difiérenoe 
essentielle,  que  les  em{)runts  laissent  après  eux  le 

{)oids  des  intérêts  à  payer  et  des  remboursements  à 
aire ,  au  lieu  que  les  assignats  s'éteignent ,  sans 
frais,  par  les  ventes  successives  des  domaines  natio^ 
naux.  A  la  paix  il  faudra  des  revenus  ordinaires  pour 
acquitter  les  dépenses  ordinaires. 

Examinons  si  nous  pouvons  préparer  d'avanee 
l'état  des  recettes  et  des  dépenses  oromaires  du  gou- 
vernement républicain. 

Les  recettes  de  tous  les  gouvernements  se  com<- 
posent,  soit  du  produit  des  propriétés  nationales, 
soit  des  contributions* 

La  république  française  aura  aliéné  ses  propriétés 
nationales  jusqu'à  concurrence  du  montant  des  as- 
signats; on  peut  donc  établir  qu'à  la  paix  les  dépen- 
ses publiques  ne  pourront  être  acquittées  qu'avec 
le  produit  des  forêts  nationales,  qui  ne  font  pas 
partie  des  domaines  dont  la  vente  a  été  ordonnée,  ou 
des  contributions. 

Le  plus  sûr ,  on  peut  même  dire  l'unique  moyen 
d'affermir  le  crédit  public ,  serait  donc  d'établir  un 
bon  système  de  contribution  ;  car,  sans  revenus  files, 
point  de  confiance. 

Depuis  le  commencement  de  la  révolution ,  od  a 
toujours  attaqué  \h  source  des  revenus  publics,  sans 
examiner  si  les  moyens  de  remplacement  sufïiraient 
aux  dépenses  ordinaires  ;  on  vous  demande  encore 
la  suppresMon  des  contributions  qui  subsistent  ;  on 
vous  insinue  que  la  seule  que  vous  avez  établie  en 
remplacement  est  une  injustice;  on  a  même  annoncé 
dans  cette  assemblée  qu'avant  la  fin  de  la  révolution 
la  contribution  foncière,  qui  est  le  seul  impôt  direct 
qui  nous  reste,  serait  supprimée. 

Voilé,  n'en  doutez  pas,  les  causes  principales  da 
discrédit  dont  on  se  plaint,  puisqu'elles  paralysent 
les  recettes  ordinaires.  Disons  au  peuple ,  il  en  est 
temps,  qu'une  grande  société  n'aura  jamais  un  gou- 
vernement protecteur  des  personnes  et  des  propnétés 
si  les  recettes  ordinaires  ne  lui  (onrnissent  pas  les 
moyens  d'acquitter  les  dépenses  ordinaires;  disons- 
lui  que,  sans  contribution,  point  de  tranquillité  pu* 
blique,  puisque  le  gouvernement  ne  pourrait  veiller 
à  la  défense  commune,  ni  réprimer  le  désordre  et 
l'anarchie  ;  disons  aussi  aux  créanciers  de  l'Etat  que 
leur  intérêt  particulier  est  lié  à  l'existence  et  à  la 
rentrée  des  contributions. 

C'est  eii' mettant  en  pratique  ces  principes  étemels 


f45 


de  l*ordre  social  que  nous  paryiendrons  à  établir  an 
système  de  finances. 

Mais,  avant  de  s'occuper  de  cette  question  impor- 
tante ,  il  faudrait  déterminer  quel  sera  le  ttimtoire 
de  la  république  française.  Le  Rhin,  les  Alpei,  la 
Méditerranée,  tes  Pyrénées  et  TOcéan  forment  au- 
jourd'hui les  limites  que  les  défenseurs  de  la  liberté 
ont  conquises  et  qu'ils  sauront  défendre;  cepen- 
dant la  loi  n'a  rien  prononcé  sur  les  nouveaux  pays 
occupés  par  les  armées  de  la  république  :  cette  dé- 
cision est  préalablement  nécessaire  et  même  in- 
dispensable pour  établir  un  bon  système  de  contri- 
bution :  car  il  est  impossible  d'asseoir  des  impôts  si 
on  ne  connaît  pas  les  bases  sur  lesquelles  ils  doivent 
porter. 

Il  faut  en  même  temps  régler  les  dépenses  ordi- 
naires du  gouvernement  de  manière  qu'elles  ne 
puissent  pas  excéder  le  produit  des  recettes  ordi* 
naires. 

Pour  y  parrenir,  on  a  besoin  de  connaître  l'orga- 
nisation du  gouvernement. 

La  constitution  a  établi  qu'il  y  aura  un  corps  lé- 
ffislatif,  un  conseil  exécutif4des  départements,  des 
districts,  des  municipalités,  des  tribunaux  ;  mais  il 
faut  que  la  loi  détermine  combien  il  y  aura  de  com- 
missions ou  administrations  executives  ;  le  nombre 
des  corps  administratifs,  municipaux  et  judiciaires; 
l'état  militaire  et  maritime  quon  conservera  en 
temps  de  paix;  le  régime  des  colonies  ;  les  indemni- 
tés aux  défenseurs  de  la  patrie  ;  les  secours  publics; 
les  frais  d'instruction  publique  ;  les  travaux  publics; 
toutes  ces  bases  étant  indispensables  pour  établir  un 
ordre  permanent  dans  les  nuances. 

Jusqu'à  ce  que  ces  points  soient  déterminés,  vous 
ne  pouvez  vous  occuper  que  de  mesures  provi« 
soires. 

Votre  comité  vous  propose  de  retirer  une  grande 
masse  d' assignats  de  la  circulation  :  tout  le  monde 
est  d'accord  a  cet  égard.  On  propose  divers  moyens 
d'y  parvenir  :  je  vais  vous  en  présenter  l'analyse, 
afin  de  vou?  mettre  à  même  de  prononcer. 

Vous  B\n  déjà  adopté  les  propositions  de  votre 
comité,  qui  tcndaieut: 

i^  A  accélérer  la  vente  du  mobilier  des  émigréSi 
déportés  ou  condamnés  :  cette  mesure  est  estimée 
devoir  faire  rentrer  dans  l'année  300  millions  de 
livres  ;  *  ^ 

*io  A  fixer  un  nouvel  ordre  de  payement  pour  les 
domaines  nationaux  à  vendre,  que  votre  comité 
estime  devoir  faire  rentrer  dans  l'année  800  millions 
délivres; 

30  A  autoriser  les  transactions  amiables  pour  les 
affaires  de  commerce  des  émigrés,  condamnés  ou 
déportés  :  cette  mesure  doit  faire  rentrer,  d'après 
l'estimation  de  votre  comité,  dans  cette  année,  100 
millions  dp  livres. 

Ainsi  les  divers  décrets  que  vo^s  avez  déjà  ren- 
dus doivent  procurer  la  rentrée  de  1  milliard  100 
millions  de  livres. 

Il  vous  reste  à  statuer  sur  les  propositions  sui- 
vantes : 

10  Admettrez-Tous  en  payement  des  domaines  na- 
tiuMaux  vendus  ou  à  vendre  les  inscriptions  conso- 
lidées pour  une  quantité,  à  condition  qu  on  soldera 
rentière  acquisition  d'ici  au  t^^  vendéui.aire? 

Cette  proposition  vous  est  faite  pnr  votre  comité, 
qui  estime  qu'elle  doit  faire  rentrer  800  millions. 

Elle  est  combattue  par  Lozeau  ;  elle  peut  être 
décidée  séparément  des  autres  questions. 

"i^  Accordcrez-vous  une  prime  à  ceux  qui  se  libé- 


reront par  anticipation  des  termes  non  échus  sur  les 
domaines  nationaux  vendus  ? 

Je  vous  ai  foit  cette  proposition,  qui  a  été  rejetée 
par  le  comité  :  elle  a  été  faite  aussi  par  Lozeau. 

Vous  avez  adopté  cette  mesure  pour  les  domaines 
à  vendre  ;  vous  pouvez  aussi  la  décider  séparément 
des  autres  moyens  proposés. 

30  Etablirez-vous  un  impôt  extraordinaire,  ainsi 
que  vous  le  propose  notre  collègue  Verdier  ? 

Je  pense  qu*il  conviendrait  de  renvoyer  cette  pro- 
position à  Texamen  du  comité. 

40  Etablirez-vous  la  banque  nationale  pour  échan- 
ger les  assignats  contre  les  reconnaissances  au  por- 
teur? 

Cette  proposition  est  faite  par  notre  collègue  Btl- 
land. 

5e  Sera-t-il  établi  une  loterie? 

Votre  comité  vous  la  propose;  notre  collègue 
Thibault  en  propose  une  autre. 

60  Ouvrirez-vous  un  emprunt  en  tontine? 

70  Etablirez-vous  des  caisses  d'économie  ? 

Ces  diverses  mesures  doivent  être  traitées  ensem- 
ble, puisqu'elles  se  trouvent  liées  dans  les  divers 
projets. 

80  Vous  aurez  ensuite  à  vous  occuper  du  projet 
de  décret  que  votre  comité  de  législation  a  préparé, 
pour  régler,  avec  les  parents  des  émigrés,  la  portion 

3ui  revient  à  la  nation  ;  cette  mesure  est  estimée 
evoir  produire  dans  l'année  une  rentrée  de  500 
millions. 

SUITE  A  LA   SÉANCE  DU   18  VBNTOSB. 
PririéÊnsê  de  Tldbandititu 

Sieyès  descend  de  la  tribune  au  milieu  des  applau- 
dissements. 

Delbclot  :  J'avais  demandé  la  parole  pour  ap- 
puyer le  projet  de  décret  de  Chénier  ;  j'attendrai  le 
rapport  des  comités. 

RicHOUX  :  Ce  n*est  pas  assez  que  les  discours  de 
Chénier  et  de  Sieyès  soient  imprimés  et  distribués  à 
la  Convention  ;  if  faut  qu'ils  soient  connus  de  toute 
la  république.  Je  demande  donc  qu'ils  soient  insérés 
au  Bulletin. 

Cette  insertion  est  décrétée. 

Mbrun  (de  I>oaai),  an  nom  des  comités  de  salut 
public,  de  sûreté  générale  et  de  législation  :  Vous 
avez  chargé  vos  comités  de  salut  public ,  de  sûreté 
générale  et  de  législation,  de  vous  présenter  leurs 
vues  sur  différentes  Adresses  tendant  au  rapport  do 
décret  du  27  frimaire  dernier,  par  lequel  vous  avez 
fermé  l'entrée  de  la  Convention  nationale  tant  aux 
députés  compris  dans  le  décret  du  28  juillet  179S 
qu'à  ceux  qui  avaient  été  frappés  par  celui  du  8  oc- 
tobre suivant,  et  que  n'avait  pas  rappelés  celui  du 
18  du  même  mois  de  Frimaire. 

Vos  comités  se  sont  occupés  de  ce  grand  objet,  et 
ils  m'ont  chargé  de  vous  soumettre  le  résultat  de 
leur  délibération. 

Je  ne  dirai  pas  qu'il  m'a  fallu  quelque  courage 
pour  accepter  une  mission  de  cette  nature;  mais  je 
dirai  que  je  ne  me  suis  pas  cru  maître  de  la  refuser. 

Lié  par  la  volonté  de  mes  collègues,  j'ai  du  obéir; 
qu'importe  ensuite  que  la  calomnie  Tienne  encore  à 
cette  occasion  s'attacher  a  moi,  et  que ,  pour  m'at- 
teindrc,  les  traits  partent  de  tel  côté  ou  de  tel  autre? 
Ce  n'est  pas  de  moi  qu'il  s'agit  ici  ;  c'est  de  mon  de- 
voir, c'est  de  la  chose  publique. 


CM 


Je  rm  if  abord  f  oof  rtmHtre  sous  les  yeux  les  ' 
pnnciiMOX  faibi  qui  ont  précède  le  décret  dont  ? oos 
aTCX  en  ce  moment  à  examiner  les  dispositions. 

Vous  D*avfz  pa5  oublié  (et  plût  â  Dieu  que  yous 
poissiez  le  faire  !  ),  tous  n'ayez  pas  oublié  que  le  3  , 
lom  17f  3  il  vous  fut  arraché  on  décret  par  lequel  , 
plusieurs  membres  de  cette  assemblée  furent  mb  en 
état  d'arrestation. 

Dix -huit  d'entre  eux  panrinrent  è  s'éTader,  et  i 
bientôt  un  autre  décret  voos  fut  commandé  contre  I 
eux;  le  28  juillet  ils  forent  déclarés  traîtres  à  la  i 
ptrie.  I 

Le  3  octobre  suivant,  troisième  décret  qui  con- 
firme cette  déclaration,  et  en  même  temps  décrète 
d'accusation  plusieurs  autres  membres  au'une  fuite 
heureuse  a  également  soustraits  à  Téchauiud  qui  les 
attendait. 

U  condition  de  ceux-ci  ne  fot  cependant  pas  dès 
ce  moment  la  même  que  celle  de  leurs  collègues 
compris  dans  le  décret  du  28  iuillet. 

Le  décr^-t  du  28  juillet  condamnait,  celui  du  3  oc- 
tobre lie  taisait  qu  accuser.  Les  députés  frappés  par 
le  premier  de  ces  décrets  étaient  de  plein  droit  sou- 
mis au  poignard  de  quiconque  eût  eu  soif  de  leur 
sang  ;  les  autres  ne  pouvaient,  en  casd'arresUtion, 
qo'Itre  traduiU  devant  un  tribunal  pour  être  jugés. 

i:riie.  diflérence  éuit  au  fond  bien  peu  de  chose 
dans  un  temps  où  le  glaive  de  la  justice  était  dirigé 
par  des  mains  qui  ne  savaient  (fo'assasstner  avec  plus 
on  moins  de  formes  ;  néanmoins  ellecboqna  les  ty- 
rans, et  ils  la  tirent  disparaître,  à  la  séance  du  23 
ventôse  de  Tan  2,  par  un  rapporta  la  suite  duquel 
ils  firent  déclarer  généralement  hors  de  la  loi  tout 
prévenu  de  conspiration  qni  se  soustrairait  par  la 
fuite  à  l'examen  de  la  justice. 

Dès  cet  instant  les  dépotés  décrétés  d*accnsation 
le  3  octobre  1793  lurent  assimilés  à  ceux  que  le  dé- 
cret du  28  juillet  précédent  avait  déclarés  traîtres  à 
la  patrie,  et  il  fut  permis  au  premier  venu  de  les  im- 
moler tous. 

Cependant,  tandis  qoe  deox  de  vos  anciens  conû- 
tés  se  jouaient  ainsi  des  droits  do  peuple  et  de  la  vie 
de  ses  représentants,  on  autre  comité,  cdoi  de  lé- 

gislation,  s'occupait,  dans  un  travail  obscur  et  dé- 
signé par  les  dominateurs  d'alors,  à  réparer  cette 
atroce  violation  de  tous  les  principes;  et  le  3  ther- 
midor il  parvint,  par  mon  organe,  à  faire  insérer, 
dans  une  nouvelle  organisation  de  la  procédure  par 
contumace,  une  disposition  qui,  en  faisant  dépencire, 
même  pour  le  passé ,  Texécution  du  décret  du  23 
ventôse  de  formalités  qu'on  n'avait  ni  remplies  ni 
pu  remplir,  paralysa  complètement  ce  funeste  dé- 
cret, et  par  là  rétablit  dans  totis  lej  droits  de  citoyens 
ceux  de  nos  collègues  qui ,  pendant  trois  mois  en- 
tiers ,  s'étaient  vus  hors  de  la  loi. 

C'était  beaucoup  pour  eux,  sans  doute,  que  de  sor- 
tir d'un  état  aussi  affreux  ;  mais  au  fond  leur  sort  fût 
resté  le  même  sans  la  révolution  mii,  six  jours  après, 
fit  tomber  la  tête  desprincipaux  chefs  de  la  tyrannie, 
et  rendit  enfin  à  la  Convention  nationale  I  autorité 
que  le  peuple  n'avait  confiée  qu'à  elle. 

Le  9  thermidor  devait  faire  et  a  fait  effectivement 
sortir  de  leur  retraite  nos  malheureux  collègues  :  ils 
se  sont  présentés  avec  le  calme  de  l'innocence,  et  ils 
ont  réclamé  votre  justice. 

L'un  d'eux, Devérité  (qui  avait  été  décrété  d'accu* 
sation  le  8  octobre  1793),  a  été  rappelé  au  milieu  de 
vous  par  une  disposition  du  décret  du  18  frimaire 
relatif  aux  soixante-treize  représentants  du  peuple 
qui  avaient  été  arrêtés  le  9  octobre  même. 

Bientôt  on  a  demandé  que  cette  disposition  fût 
déclarée  commune  aux  autres  ;  et  c'est  sur  ce  point 


qn'îl  a  été  prononcé  le  27  frimaire,  par  le  déctd 
même  dont  il  est  aujourd'hui  question. 

Parce  décret,  vous  avez  déclaré  :  premièremeBty 
qne  les  représentants  du  peuple  compris  dans  le  dé- 
cret du  28  juillet  1793,  ou  décrétés  iraccnsation  par 
celui  du  3  octobre  suivant,  ne  rentreraient  pas  daas 
le  sein  de  la  Convention  nationale  ;  en  second  lien, 
qu'il  ne  pourrait  être  fait  contre  eox  ai 
suite  par  les  tribunaux. 

En  examinant  ces  deux  dispositioDS,  vos 
ont  trouvé  le  germe  de  trois  questions  à  résoudre  : 

La  première ,  si  les  décrets  do  28  joillet  et  do  3 
octobre  1793  doivent  sobsister; 

La  deuxième ,  si  vous  avez  dû ,  dans  les  circon- 
stances où  vous  vous  trouviez  le  27  frimaire,  pro- 
noncer comme  vous  l'avez  fait  à  cette  époque; 

La  troisième,  si  aujourd'hui  vous  devez  maintenir 
ou  rapporter  votre  décision  do  27  frimaire. 

Sur  la  première  question ,  deux  mots  suffisent. 
Les  décrets  du  28  juillet  et  3  octobre  1793  n*ont  en 
d'autres  motifs  que  les  événements  du  31  mai  et  dn 
2  juin  :  c'en  est  assez  pour  les  foire  rentrer  dans  le 
néant.  Vous  ne  pouvez  vous  dispenser  de  les  rap- 
porter. 

Quant  aux  deux  autres  questions,  je  ne  toos  pro^ 
poserai ,  pour  les  résoudre,  que  de  jeter  on  conp  o'aril 
sur  la  différence  des  temps. 

Sans  doute,  si  vous  n'eussiez  consulté  qne  ce 


timent  de  justice  oue  l'on  vous  voit  si  constamment 
placer  à  U  tête  de  vos  devoirs  «  vous  n'auriez  pas 
attendu  oue  l'opinion  publique  vous  invitât  à  rap- 
procher de  vous  ceux  que  Texécrable  tyrannie  dont 
vous  venez  de  briser  le  joug  avait  si'crnellement 
proscrits  ;  vous  vous  seriez  empressés  de  voler  ao- 
devant  d'eux,  de  leur  rendre  ce  caractère  qne  Tin- 
justice  n'avait  pu  leur  enlever,  caractère  sacré,  dont 
le  nouvel  édat  qu'il  a  reçu  de  leurs  malheurs  et  de 
leur  courage  rejaillit  si  vivement  snrionie  la  repré- 
sentation nationale. 

Combien  ne  vous  en  a-t-il  pas  coûté  ponr  conte- 
nir cet  élan,  et  céder  ainsi  è  ce  qoe  vous  prescrirait 
le  danger  des  circonstances  dont  tous  éties  eari- 
ronnés? 

La  tyrannie  était  terrassée,  mais  elle  se  débattait 
encore  à  terre ,  et  d'une  manière  assez  effrayante 
pour  craindre  qu'elle  ne  trouvât  dans  le  moindre 
oubli  de  précautions  quelques  moyens  de  se  relever. 
Elle  avait  encore  près  d'elle  toutes  les  factions,  qni 
n'attendaient  que  le  moment  de  lui  tendre  la  main 
et  un  prétexte  pour  se  rallier.  Elles  l'eussent  tenté, 
n'en  doutons  pas,  et  peut-être  avec  succès,  si  elles 
eussent  pu  donner  à  votre  beau  triomphe  de  la  jiuit 
du  9  thermidor  l'apparence  d'une  simple  victoire  de 
parti  ;  si  tout  à  coup  se  réunissant,  et  confondant 
dans  une  seule  ligue  tous  vos  ennemis,  elles  eussent 
saisi  la  plus  faible  imprudence  pour  vous  entraîner 
subitement ,  sous  les  perfides  apparences  de  justice 
et  de  générosité,  au  delà  de  ces  limites  qne  ne  rcs- 

E cote  pas  toujours  l'enthousiasme,  et  pour  vous  jeter 
ors  oe  la  liberté. 

Aussi  rappelez-vous  avec  quelle  promptitude  leur 
malignité,  furieuse  de  se  voir  déjà  pressentie,  avait 
changé  l'application  de  ce  mot  uniquement  dirigé 
contre  elle.  Sans  doute  elles  ne  devaient  pas  plus 
s'y  méprendre  que  les  bons  esprits  qui  l'ont  aussi 
entendu  alors  comme  il  devait  l'être. 

Votre  conduite,  citoyens,  a  donc  été  jusqu'à  ce 
moment  celle  que  vous  commandaient  également 
votre  sagesse  et  le  soin  de  la  patrie  ;  mais  aujour- 
d'hui que  vous  n'avez  plus  rien  à  redouter  ni  des 
tyrans,  ni  des  factieux  ;  aujourd'hui  que  les  portes 
des  Jacobins  sont  fermées,  sans  que  nous  ayons  à 
craindre  qu'ils  aillent,  en  nous  en  accusant,  ouvrir 


647 


celles  du  Temple,  vous  pouvez,  dans  toute  la  plënl- 
lude  de  votre  force,  combler  celle  de  votre  justice. 
Voici  le  projet  de  décret  que  je  suis  chargé  de 
vous  présenter.  L'exception  qui  vous  y  est  proposée, 
relativement  à  Lahaye,  a  pour  motif  une  inculpa- 
tion extrêmement  grave,  consignée  à  sa  charge  dans 
une  lettre  officielle  écrite  de  Dinan,  le  22  frimaire 
dernier.  Il  est  consolant  pour  vos  comités  de  pou- 
voir vous  assurer  q^ue  cette  inculpation  est  la  seule 
3ui  se  soit  offerte  à  leurs  recherches  sur  la  conduite 
e  nos  malheureux  collègues  pendant  leur  pro- 
scription. 

I  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap- 
port de  ses  comités  de  saJut  public,  de  sûreté  générale  et 
de  législation,  décrète: 

•  ArL  I*^  Les  représentais  du  peuple  compris  dans 
Pariicle  I*'  du  décret  du  28  juillet  1793  et  dans  le  décret 
d'accusation  du  3  octobre  suivant,  dont  les  dispositions 
sont  rapportées,  rentreront  sur-le-champ  dans  le  sein  de 
la  G>nTentioo  nationale. 

t  Les  inspecteurs  du  Palais-National  sont  chargés  de 
leur  faire  pajrer  leurs  indemnités  à  compter  du  dernier 
p.i}'eroent  qu^ils  ont  reçu. 

•  IL  Labaye,  député  par  le  département  de  la  Seine- 
luférieure,  n*est  pas  compris,  quanta  présent,  dansPar- 
licle  précédent.  Les  comités  jde  salut  public,  de  sûreté  gé- 
nérale et  de  législation ,  sont  chargés  dé  faire  à  son  égard 
on  prompt  rapport. 

■  Le  présent  décret  et  le  rapport  seront  insérés  au  Bulle- 
tin de  correspondance»  t 

Garran  :  Je  me  suis  déjà  opposé,  dans  la  réunion 
des  trois  comités,  au  dernier  article  qui  vous-  est 
proposé.  Rien  ne  peut  justifier  Texception  qu'on 
veut  faire  contre  Lahaye.  Ou  bien  il  est  coupable 
de  crimes  antérieurs  au  décret  rendu  contre  lui,  ou 
bien  il  est  coupable  de  crimes  postérieurs,  ou  bien 
enfin  il  n*v  a  seulement  qu*une  indication  de  cul- 
pabilité; dans  tous  les  cas  sa  conduite  doit  être 
examinée  ;  mais  pour  cela  il  Gaut  Tentendre.  11  est 
représentant  comme  nous,. et  nous  n*avons  pas  le 
droit  de  le  dépouiller  de  son  caractère.  Je  demande 
donc  qu'il  soit  rappelé  comme  les  autres,  et  qu'en 
renvoyant  aux  trois  comités  les  dénonciations  faites 
contre  lui  il  soit  décrété  au'on  suivra  à  son  égard  les 
formalités  prescrites  par  la  loi  du  8  brumaire. 

Rbwbbll  :  L'avis  de  Garran  a  déjà  été  discoté 
hier  dans  les  trois  comités.  Je  lui  réponds  encore  au- 
jourd'hui qu'il  y  a  un  décret  de  la  Convention  qui 
accorde  une  amnistie  aux  chouans  et  à  ceux  qui  ont 
pris  partr  parmi  eux.  D'après  des  lettres  ofucielles 
que  nous  avons  reçues,  Lahaye  a  profité  de  cette 
amnistie.  Il  faudrait  donc,  avant  qu'il  pût  rentrer 
dans  le  sein  de  la  Convention,  qu'il  renonçât  au  bé- 
néfice de  cette  amnistie ,  et  qu'il  consentît  à  être 
jugé.  Au  surplus,  tant  que  je  vivrai,  je  m'opposerai 
à  ce  qu'il  entre  ici  un  homme  qui  aura  porté  les  ar- 
mes contre  sa  patrie.  (On  applaudit.) 

Le  président  met  aux  voix  le  projet  de  décret  pré- 
senté par  Merlin.  La  très-grande  majorité  se  lève 
pour  l'adoption;  Goujon  seul  se  lève  contre.  — 
Quelques  membres  qui  siègent  dans  Tcxtréuiité  gau- 
che ne  prennent  point  part  à  la  délibération. 

Le  président  prononce  que  le  décret  est  adopté. 

Les  bravos,  les  cris  de  vive  la  Convention  !  vive  la 
république!  se  font  entendre  de  toutes  parts. 

Thibault  :  Citoyens,  vous  venei  de  rendre  hom- 
mage aux  principes,  mais  it  vous  reste  encore  un 
acte  de  justice  à  laire  à  l'égard  d'un  de  vos  collè- 
gues ;  je  veux  parler  de  Larevellière-Lépeaux.  (Vifs 
applaudissements.  )  Cet  homme  courageux  s*était 


opposé  à  une  motion  insidieuse  faite  nar  Danton;  il 
fut  entouré  par  des  hommes  qui,  voulant  le  perdre, 
lui  conseillèrent  de  donner  sa  démission,  afin  de 
soustraire  sa  tête  aux  assassins.  Lépeaux,  dont  la 
santé  était  délabrée  par  le  travail,  consentit  à  don- 
ner sa  démission  ;  deux  heures  après,  l'ancien  co- 
mité de  sûreté  générale  décerna  contre  lui  un  man- 
dat d'arrêt  ;  il  eut  le  bonheur  de  s'y  soustraire.  Je 
demande  que  notre  collègue  Lépeaux,  qui  n'est  pas 
remplacé,  soit  rappelé  dans  le  sein  de  la  Convention 
nationale. 

Cette  proposition  est  adoptée  au  milieu  des  plus 
vifs  applaudissements. 

Ricnoux  :  Citoyens,  sur  la  proposition  de  Lacroix, 
vous  décrétâtes  que  la  maison  de  Buzot  serait  démo- 
lie, et  qu'un  obrlisque.... 

De  toutes  parts  on  demande  Tordre  du  jour. 

L'ordre  du  jour  est  décrété. 

Marbc  :  Il  vous  reste  un  grand  acte  de  justice  à 
faire,  il  existe  encore,  dirai-je  un  représentant  du 
peuple?  OUI,  car  il  n'est  pas  dépouillé  de  son  carac- 
tère ,  quoique  sous  le  coup  de  l'inculpation  la  plus 
grave  qui  puisse  être  faite  a  un  homme  d'honneur; 
vous  devinez  delà  €|ue  je  veux  parler  de  Jullien  (  de 
Toulouse).  Je  n  ai  jamais  eu  avec  lui  aucune  rela- 
tion. Depuis  que  je  suis  au  comité  de  salut  public, 
j'ai  reçu  plusieurs  lettres  de  Jullieo  ;  j'ai  promis  de 
vous  faire  part  de  sa  demande  ;  je  dois  à  la  justice 
de  dire  que  Jullien,  revêtu  du  pouvoir,  n'a  point  été 
inaccessiDle,  et  que,  quand  j'ai  eu  des  réclamations 
à  faire  pour  quelques  malheureux,  c'est  toujours  à 
lui  que  je  me  suis  adressé.  Je  demande  que  les  trois 
comités  de  gouvernement  examinent  s'il  est  dans  le 
cas  de  la  garantie  de  la  représentation  nationale. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

IfsBLTii  (de  Douai),  au  nom  des  trois eoBBltéi  l  Le  14 
Difose  dernier,  vous  avei chargé  vo«  eomiléB  de  salut  pu- 
blic, de  sArelé  générale  et  de  législation .  de  vous  faire  an 
rapport  lur  la  lettre  qui  vous  avait  été  écrite  par  Vite! , 
pour  être  adnia  à  reprendre  sa  place  dans  le  ado  de  la 
ConTeiition  nationalcw 

Je  viens  en  leur  nom  vous  reodrc  compte  des  renseigac- 
nenu  qu'ils  ont  pris k  cet  égard,  et  de  l'opinion  qo*ils  se 
fout  forniée  en  conséquence. 

Par  décret  di février  179S,  la  Convention  nationale 

accorda  au  représentant  du  peuple  Vitet  an  congé  pour  le 
rétablissement  de  sa  santé,  altérée  par  deux  missions  dans 
les  départements  méridionaux. 

Muni  de  ce  congé,  Vitet  se  rethn  dans  ane  maison  de 
campagne  qu'il  possédait  à  sept  lieues  de  Lyon. 

Le  li  mai,  sur  l'observation  d'un  membre  qne  Vilet  n'é- 
tait pas  encore  parfaitement  rétabli,  la  Convention  nalio* 
nale  prorogea  son  congé  jusqu'à  la  fin  de  ce  mois. 

Le  28  du  même  mois,  autre  décret  qui  autorise  Vilcl  à 
rester  ches  lui  jusqu'à  son  entier  rétablissement. 

Dans  ces  entrefaites,  dés  troubles  s'élevèrent  dans  le  dé- 
partement de  Rbône-et-Loire  ;  Vitet  assure  n'y  aroir  pris 
aucune  part,  et  11  n'existe  aucune  preuve  du  contraire. 

Cependant,  le  il  juUIel  1795,  an  décret  d'arresUtion 
ftat  lancé  contre  Vitet  i  voici  à  quelle  occasion. 

Un  membre  du  comité  de  salut  salut  (c*était  Coutbon  ) 
vint  faire  à  la  Convention  nationale  le  rapport  suivant  : 

t  Le  comité  de  salut  public  a  reçu  des  renseignements 
sur  la  ville  de  Lyon,  qull  croit  important  de  communiquer 
à  la  Convention  nationale;  ils  nous  sont  donnés  par  notre 
collègue  Méaulle  et  par  la  Société  populaire  de  Clermont» 
Ferrand.  C'est  un  admiubirateur  du  district  dlssoire,  re« 
venant  de  Lyon»  qui  a  rapporté  à  cette  Société  ka  déuila 
suivants: 

I  Biroteau  y  a  provoqué  la  révolte;  Il  s*j  est  tenu  un 
congrès  départemental,  composé  d'administrateurs  et 
d'électeurs  de  différentes  communes.  Par  les  instigations 
de  Biroteau ,  on  a  arrêté  dans  cette  assemblée  que  la  Con» 


646 


fention  ne  serait  plus  reeonnue  dans  le  départemeot  de 

Rh6ne^t-Loire.  Cet  arrêté  a  été  proclamé  avec  pompe , 

]•  Montagne  de  la  Convention  mise  hors  de  la  loi....  Un 
courrier  dépêché  par  Dubois-Crancé  pour  Paris  a  été  arrêté 
et  ses  dépêches  ont  été  enlevées.....  Chassey ,  député  de  ce 
département,  vient  d*arriver  à  Lyoni  pour  y  soufflerie 
feu  de  la  guerre  civile. 

•  D*après  ces  (ails,  le  comité  de  salut  public  vous  pro- 
pose de  déclarer  attentatoire  &  la  vouveraiueté  nationale  le 
congrès  départemental  tenu  à  Lyon  par  les  administrateurs 
et  les  électeurs  des  différentes  communes;  de  déclarer 
traîtres  à  la  patrie  Birotcau  et  tous  ceux  qui  ont  participé 
uuz  délibérations  du  congrès  ;  de  mettre  Chassey  en  état 
d^arrestalion»  d^ordonuer  réiargissement  des  patriotes  in- 
carcérés. » 

Ainsi  s*expliqua  le  rapporteur  du  comité  de  salut  pu- 
blie. Vous  voyez  qu*il  n*était  nullement  question  de  Vitet 
dans  ce  discours,  et  vous  croirez  aisément  que,  s'il  eût 
existé  dans  les  cartons  du  comité  quelque  inculpation  à  sa 
charge,  elle  n*y  aurait  pas  été  oubliée. 

Cependant,  sur  la  seule  demande  faite  par  un  membre 
de  rassemblée,  Vitet,  Forest,  Michet  et  Patrin  furent 
décrétés  d'arrestation. 

NI  le  décri't,  ni  le  procès-verbal  de  la  Convention  n*en 
Indiquent  le  motif,  et  /e  AfoniVeur  nous  apprend  seulenient 
que  le  membre  dont  je  viens  de  parler  les  présenta  dans 
son  amendement  comme  complices  de  Chassey ,  leur  co- 
député. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  décret  ne  fut  exécuté  que  sur  Pa- 
trin, qui  même  fut  mis  en  liberté  peu  de  jours  uprt-s.  Le 
S8du  même  mois  de  juillet,  il  Tut  rendu  un  second  décret 
paricquel Chassey  et  dix-neufaulres Turenl déclarés  trattrcs 
k  la  patrie  ;  et  cette  fois  on  ne  parla  pas  de  Vitét,  quoi- 
qu'il se  fût,  comme  Chassey,  soustrait  par  la  fuite  è  Tarres- 
tation. 

Les  octobre  suivant,  nouveau  décret  qui,  en  maintenant 
celui  du  28  juillet,  envoie  plusieurs  membres  de  la  Con- 
vention nationale,  les  uns  au  tribunal  révolutionnaire,  let 
autres  en  maison  d'arrêt. 

Dans  ce  décret,  pas  encore  le  moindre  mot  sur  Vitet, 
Forest,  tA  Mlehet. 

Mais  le  silence  même  qui  y  règne  à  leur  égard  mérite 
toute  votre  attention. 

Il  en  résulte  invinciblement  que  Vitet  n*a  pas  même  été 
compris  au  nombre  de  ceux  que  votre  décret  du  27  frimaire, 
que  \ous  venea  de  rapporter,  avait  éloignés  de  la  Conven- 
tion nationale,  sous  la  qualification  collective  de  •  dénom- 
més dans  les  décrets  des  28  juillet  et  8  octobre  I79S.  » 

Il  faut  donc  en  revenir  au  décret  du  18  du  même  mois, 
par  lequel  la  ConTf>ntion  nationale  n  rappelé  dans  son  sein, 
non-seulement  ceux  de  ses  membres  qui  avaient  été  mis  en 
état  d'arrestation  le  8  octobre  1798 ,  mais  encore  Forest  et 
Michet. 

S*il  n*a  point  été  parié  de  Vitet  dans  ce  décret,  c'est 
qu'il  n'existait  alors  aucune  réclamation  de  sa  part.  S'il 
eût  élevé  la  voix  à  cette  époque,  nul  doute  qu'il  n'eût  été 
compris  dans  la  disposition  sage,  juste,  nécessaire,  qui  a 
i-endu  à  la  représentation  nationale  toute  son  inlégriié. 

Vos  comités  vous  proposent  en  conséquence  de  rappeler 
dans  le  sein  de  la  Convention  notre  collègue  Vitet. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

Aucuis,  an  nom  du  comité  de  sûreté  générale  t  Citoyens, 
d'aprit  le  rapport  de  votre  commission  des  Vingt-et-Un,  qui 
a  déclaré  qu'il  y  avait  lieu  ù  accusation  contre  le  repré* 
siniaiit  du  peuple  Vadier,  vous  avei  décrété  qu'il  serait  en 
arrestation  chez  lui  ;  il  n'a  pas  obéi  à  votre  décret.  Après 
toutes  les  perquisitions  qu'on  a  pu  faire,  on  n*a  pu  décou- 
vrir où  il  était  allé,  et  vous  avez  décrété,  le  44  de  ce  mois, 
que  les  scellés  seraient  apposés  sur  ses  papiers  et  effets.  Il 
vient  d'être  apporté  à  votre  comité  de  sûreté  générale  dcni 
lettres  chargées  h  son  adresse.  Tune  timbrée  de  Jean-Pied- 
de-Porl,  et  l'antre  de  Savenlun  ;  je  suis  chargé  devons  de- 
mander en  Son  nom  la  marche  qu'il  doit  tenir  ft  cet  égard. 

Il  connaît  combien  il  importe  à  la  sûreté  publique  que 
le  secret  dés  leltrei  ne  soit  pas  violé{  mais  en  même  temps, 
dans  la  dreonitanee  présente ,  il  serait  peut-être  utile  de 
ooimaitre  ee  que  renferment  ces  deux  paquets,  et  je  de- 
mande ca  eoniéqttenct  que  la  Convention  nationale  s'ei- 


ptlqae,  ou  eh  lui  permettant  de  les  décacheter,  on  de  lef 
renvoyer  devant  la  commission  des  Vingt«el-Un. 

La  Convention  autorise  le  comité  de  sûreté  générale  à 
décacheter  ces  lettres. 

On  demande  la  levée  de  la  séauceb 

LBcanoas  :  Je  demande  ta  parole  pour  nne  motion  d'or- 
dre. Les  travaux  qu'on  a  faits  à  cette  salle  ont  obligé  les 
ouvriers  ù  retirer  le  tableau  de  la  Déclaration  des  Droits  de 
l'Homme  et  celui  de  la  constitution.  Je  demande,  afin  de 
fermer  la  bouche  à  la  malveillance,  que  les  inspecteurs  de 
la  salle  le  fassent  replacer  séance  tenante. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

SaaaaRT  :  Ces  tableaul  ont  été  déplacés  par  les  ouvriers, 
dans  la  crainte  qu'ils  ne  fussent  cassés.  (On  applaudit.) 

DuHBM  :  C'est  parce  qu'ils  ont  été  décrétés  depuis  le  81 
mai,  qu*on  n'en  veut  pas. 

ViLLBTABD  !  Comme  la  Convention  nationale  doit  sana 
cesse  avoir  devant  les  yeux  la  constitution  démocratique 
de  1793,  je  demande  qu'elle  soit  placée  au  milieu  de  la 
salle. 

Les  tableaux  de  la  Déclaration  des  Droits  et  de  la  consti-. 
totion  sont  replacés  dans  la  salle ,  aux  cris  répétéa  de  vive 
la  république  !  vive  la  eonititutiom  ! 

***:  Je  vois  au-dessus  de  la  Déclaration  des  Droits  un. 
poignard ,  attribut  des  buveurs  de  sang.  Je  demande  qu^on 
le  fasse  disparaître. 

Madbb  :  Citoyens ,  Brutus  s*est  armé  d'un  poignard 
contre  un  tyran.  Celui  qui  est  au-dessus  des  Droits  de 
l'Hommeest  destiné  aux  tyrans  qui  voudraient  les  détruire. 

L'assemblée  passe  à  l'ordre  du  jour. 

La  séance  est  levée  ù  quatre  heures. 

/V.  B.  —La  séance  du  20  a  été  consacrée  à  entendre  let 
pétitionnaires. 

^um  amis  de  lajuitiei  el  de  Chumauitém 

Il  n'est  pas  un  véritable  patriote,  pas  un  homme  de 
bien,  pas  un  ami  de  l'heureuse  révolution  du  9  tbemidort 
qui  n'ait  versé  des  larmes  sur  la  tombe  de  Camille  Oes- 
mouiinset  de  Phélippeaux. 

Les  noms  de  ces  deux  représentants  fidèles,  essasaioéa 
par  nos  derniers  tyrans  pour  avoir  osé  dire  la  vérité»  Boni 
dans  la  bouche  dei»  bons  citoyens. 

L'époque  n'est  pas  sans  doute  éloignée  où  la  mémoire 
de  ces  courageux  républicains  sera  réhabilitée  par  la  Con- 
vention nationale,  délivrée  enfin  de  Toppression  sons 
laquelle  tous  ses  membres  gémirent  pendant  quinae  mois. 
En  attendant  ce  grand  acte  de  justice  nationale,  provoqué 
par  l'opinion  publique  depuis  longtemps,  cette  aentinelle 
avancée  des  législateurs,  un  artiste  qui  fut  l'ami  deCnoAille 
Desmoulins,  qui  le  14  juillet  arbora  à  ses  côtés  le  signe 
sacré  de  notre  liberté,  qui  sollicita  avec  importunité,  de 
Fouquier*Tin ville,  une  place  dans  cette  charrette  qui 
conduisit  à  l'échafaud  tant  de  grands  hommes  et  tant  de 
redoutables  adversaires  des  infâmes  décemvirs,  vient  de 
faire  avec  soin  les  bustes  de  Phélippeaux  et  Camille  Des-> 
moulins;  il  en  prévient  ses  concitoyens. 

Aucune  souscription  ne  sera  ouverte  ;  mais  on  pourra 
s'adresser  chex  le  citoyen  Martin ,  sculpteur,  rue  deGréiry, 
n«  2. 

Le  prix  de  chaque  buste  est  de  50  livres,  forme  natu- 
relle. 


Payemenls  à  la  trésorerie  nalionale. 

Le  payement  dt  la  dette  consolidée  perpétuelle  aa  liil 
pour  les  fis  derniers  mois  de  Tan  3*,  et  pour  Tannée  à  ceux 
qui  n'ont  pas  touché  les  sii  premiers  mois  de  ladite  aooée. 
Les  citoyens  qui  ont  retiré  leur  inscription  définitive,  et  qui 
désircraieiii  être  payés  dans  les  districts ,  peuvent  indiquer 
les  clicfs-licux  de  district  où  ils  veulent  être  payëa,  confor- 
mément A  la  loi  du  Se  jour  des  sansculottifles. 

Le  payement  des  rentes  viagères  »e  fait  camolativetneni 
pour  dcus  mois  vingt  et  un  jours  de  Tawiée  nd3(vieiu  atyle) 
et  tes  sis  premiers  mois  de  Tan  S*. 


GAZETTE  NATIONALE  o,  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


«•  172. 


Duadi  22  Vbntosb»  Van  3®.  {Jeudi  12  Mars  179.5,  vieux  êtyle.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Fiennèf  fe  15  février. -^On  prétend  (lue  notre  cabinet 
a  reçu  de  la  pari  de  la  Russie  des  explications  très- 
défavorables  aux  Tues  de  rAutrichc  sur  la  possession 
deCracovie.On  ajoute,  à  l'appui  de  cette  nouvelle,  que  nos 
troupes,  qui  s'étaient  déjà  approchées  de  Cracovie,  se 
sont  repliées  dans  le  palatinatdc  Lublio.  L'intention  dans 
laquelle  on  divulgue  un  bruit  qui  se  trouve  si  peu  d'accord 
avec  l'état  reconnu  de  nos  relations  actuelles  avec  la  Rus- 
sie serait-elle  de  faire  croire  qu'il  existât  une  prédilection 
marquée  de  la  part  de  Callicrine  11  en  faveur  du  roi  de 
Prusse?  Cependant  Frédéric-Guillaume  a  depuis  deux  mois 
rempli  les  gazettes  d'Allemagne  de  probabilités  sur  sa  rup- 
ture prochaine ,  ou  du  moins  sur  le  déflcit  de  sa  bonne  in- 
teliigence  avec  rimpératricc.  Ces  vicissitudes  ou  ces  ma- 
nœuvres sont  pleines  d'obscurités.  On  se  demande  qui  sera 
la  dupe  de  tout  ceci....  Le  cabinet  de  Pélersbourg  est  sans 
doute  en  étal  de  subtiliser  et  le  nôtre  et  celui  de  Berlin; 
mais  les  trois  cabinets  à  la  fuis  ont  peut-être  un  même  dé- 
sir de  tromper  une  autre  puissance  quant  aux  véritables 
dispositions  de  la  Prusse  à  son  égard. 

On  rappelle  beaucoup  comment  le  premier  partage  de  la 
Pologne,  suivant  le  plan  de  Frédéric  II ,  a  pensé  brouiller 
les  trois  co-partageanls,  comme  si  le  nouveau  partage  de 
ce  royaume  enlre  les  mêmes  puissances  devait  reproduire 
les  mêmes  semences  de  division.  Certes,  tant  que  la  coali- 
tion contre  la  France  durera  dans  son  iulégralilé,  les  coa- 
lisés ne  se  disputeront  qu*en  émulation  à  qui  trompera  le 
mieux  la  France. 

Si  la  Prusse  veut  de  bonne  foi  Taire  la  paix  avec  la  répu- 
blique française ,  il  est  faux  qu'elle  soit  en  ce  moment  plus 
favorisée  que  l'Autriche  par  la  Russie.  En  est-il  autrement? 
Voilà  ce  qu'il  importe  aux  Français  d'éclaircir. 

SUISSE. 

De  Neuchâielf  prinàpaufé  prusêiennet  U 16  février,  — 
Le  conseil  d'Etat  de  cette  régence  vient  d'ordonner  formel- 
lement ,  par  l'arrêté  suivant,  l'expulsion  des  émigrés  fran- 
çais. 

«  Le  conseil  d'Etat,  venant  de  nouveau  de  s'occuper 
des  émigrés  français,  qui  sont  encore  tolérés  dans  ce  pays 
pur  un  sentiment  d'humanité  de  sa  part,  et  ayant  pris  à 
cet  égard  en  considération,  non-seulement  la  pénurie  tou- 
jours plus  sensible  et  inquiétante  des  subsistances,  mais 
aussi  la  conduite  condamnable  de  quelques-uns  d'en- 
tre eux,  qui,  malgré  les  défenses  les  plus  expresses  signi- 
fiées à  tous,  se  sont  permis  d'entretenir  sur  les  frontières 
de  France  des  intelligences  secrètes,  et  d'y  commettre 
même  des  actes  de  violence  de  nature  à  troubler  le  bon 
voisinage  et  à  compromettre  la  tranquillité  de  l'Etat  ; 

«  Le  conseil  ayant  de  plus  donné  son  attention  aux  jus- 
tes égards  qu'il  doit  aux  précieuses  relations  holvéïiques 
de  cette  souveraineté,  d'où  résulte  son  heureuse  neutralité 
actuelle,  et  aux  devoirs  qui  lui  sont  imposés  par  lu  même 
de  prévenir  tout  ce  qui  pourrait  fixer  désagréablement  sur 
ce  pays  l'attention  de  la  commune  patrie,  il  a  jugéindis 
pensable  pour  le  bien  de  l'Etat,  qui  doit  être  le  premier 
objet  de  sa  sollicitude ,  de  statuer  le  renvoi  général  des 
susdits  émigrés,  pour  l'elTecluer  successivement  jusqu'au 
i*'  du  mois  d'avril  prochain. 

«  En  conséquence,  il  est  ordonné  à  tous  les  officiers  de 
juiUcaiure  di*  cet  Etat ,  premièrement  de  procéder  sans 
délai  à  un  nouveau  recensement  des  émigrés  français  qui 
peuvent  se  trouver  dans  leurs  juridictions  respectives,  enl 
indiquant  l'âge,  le  sexe  et  la  vocution  de  chacun  d'eux, 
ainsi  que  le  nom  de  ceux  qui  les  logent,  et  d'envoyer  le 
plus  tôt  possible  ce  recensement  au  conseil  ;  en  second 
lieu,  de  faire  lire  en  ouverte  justice,  et  dès  dimandic  pro- 
chain, à  l'issue  du  service  divin,  le  présent  arrêté,  afin 
que  les  susdits  émigrés  français  puissent  se  préparera  se 
conformer  ù  son  contenu ,  et  que  les  particuliers  de  ce 

Z*  Série. -^  Tome  X. 


pays  chei  qui  ils  demenrent  ne  puissent  en  prétendre  caoM 
d'ignorance;  le  conseil  avertissant  lesdits  émigrés  que» 
s'ils  se  trouvent  dans  ce  pays  après  le  terme  fixé  pour  lo 
départ  de  chacun  d'eux.  Useront  expulsés  sous  escorte» 
comme  gens  suspects  et  dangereux,  et  prévenant  loditt 
particuliers  qui  les  logent  que,  s'il  se  trouve  cbex  eux  des 
émigrés  français  réfractaires  aux  significations  de  nenvol 
qu'ils  recevront,  ils  seront  envisagés  comme  connivant 
avec  lesdits  émigrés,  et  poursuivis  suivant  toute  la  rigueur 
des  lois ,  comme  ennemis  du  bien  public 

•  Enfin,  le  conseil  déclare  que  si,  parmi  les  susdits 
émigrés,  il  en  est  qui,  avant  le  moment  de  leur  départ, 
osent  commettre  quelques  voies  de  fait  sur  le  territoire 
français,  ils  seront  arrêtés  pour  être  offerts  et  livrés  à  la 
France. 

•  Donné  en  conseil  »  tenu  sous  notre  présidence^  an  châ- 
teau de  Neucbàtel»  le  27  ian?  ier  1795. 

«  SigniUjMiU  » 

ANGLETERRE. 

DiBATS  DU  PARLEMllIT. 

Chambre  de»  eommunei.^^Séance.du  5  février. 

Le  chancelier  de  l'échiquier  fixe  l'attention  de  la  Cham- 
bre sur  le  message  royal;  il  mérite,  suivant. lui,  qu'on 
écarté  toute  autre  discussion  pour  s'en  occuper,  parce 
qu'il  y  est  question  d'une  alliance  de  la  pltu  haute  impor- 
tance dans  la  guerre  actuelle  ;  il  remet  en  conséquence 
à  présenter  l'exposé  des  dépenses  courantes,  et  passe  à 
l'examen  des  avantages  de  la  négociation  entamée,  comme 
l'annonce  le  message  même  du  roi  ;  c'est  sous  un  point 
de  vue  très-général  qu'il  veut  les  considérer  d'abord. 

n  commence  par  poser  en  principe  qu'il  est  impossible, 
dans  les  circonstances  présentes,  d'établir  la  paix  sur  des 
basessoIides,et  il  prétend  que  c'est  une  vérité  déjà  re- 
connue par  la  Chambre.  Cette  paix  durable,  il  ne  l'attend 
que  de  Paffaîblissement  de  la  France  et  de  la  supériorité 
maritime  de  la  Grande-Bretagne  ;  il  en  conclut  que  l'An- 
gleterre  doit  tirer  tout  le  parti  possible  de  ses  alliances 
continentales,  et  opposer  tant  d'ennemis  sur  terre  aux 
Français  qu'ils  ne  puissent  rivaliser  avec  elle  sur  les  mers. 
U  Ini  échappe  le  double  aveu  des  forces  redoutables  de  \i 
république  française  et  de  la  prétention  de  son  pays  à  do- 
miner entièrement  sur  les  mers,  avis  dont  les  puissances 
coalisées  qui  veulent  conserver  quelque  commerce  feront 
bien  de  profiter. 

Le  ministre  se  fait  ensuite  cette  question  :  «  Mais  l'cm* 
pereur  doit-il  inspirer  assez  de  confiance  à  la  Grande-Bre- 
tagne pour  traiter?  >  Elle  est  bicnlôt  résolue  pour  lui  :  il 
trouve  ses  motifs  de  confiance  dans  le  personnel  del'empe- 
reqr  et  dans  ses  intérêts,  et  relève  l'assertion  de  M.  Sheri- 
dan,  qui,  voyant  ce  prince  avec  les  yeux  de  la  prévention, 
croit  le  chef  du  corps  germanique  encore  plus  infidèle  que 
ses  membres.  Il  soutient  qu'il  est  impossible  que  l'empe- 
reur consente  à  la  perte  des  Pays-Bas,  à  l'agrandissement 
du  territoire  français  par  l'occupation  delà  Hollande  et  la 
conquête  d'une  partie  de  l'Espagne  et  de  l'Italie  ;  il  est 
persuadé,  au  contraire,  que  l'intention  réelle  de  l'empe- 
reur est ,  ainsi  que  ses  véritables  intérêts  l'exigent,  de  con* 
tribucr  de  toutes  ses  forces  à  écraser  cet  ennemi  déses» 
péré,  cet  ennemi  qui  doit  tomber  enfin  sous  les  coups  vio« 
lents  et  non  ralentis  que  lui  préparent  de  profondes  et  pais» 
santés  combinaisons. 

Il  fait  observer  à  la  Chambre  que  tout  doit  la  rassurer 
sur  les  6  millions  sterling  au  moyen  desquels  la  Grande- 
Bretagne  se  trouve  avoir  à  sa  disposition  toutes  les  forces 
de  l'Autriche.  Quand  on  ne  croirait  pas  à  l'engagement  so* 
ennel  et  à  la  bonne  foi  de  l'Autriche,  qui  ne  voudra  passe 
déshonorer  de  galté  de  cœur  et  ruiner  ainsi  tout  son  cré- 
dit, la  Grande-Bretagne  ne  lui  fournit  les  Ibnds  que  par- 
tiellement^ et  à  mesure  qu'elle  remplira  les  conditions  da 
traité. 

«  Quant  au  premier  point ,  nos  richesses  et  notre  crédit 
ont  porté  nos  finances  à  un  élat  si  respectable  que  nous 
sommes  à  cet  égard  au-dessus  de  tontes  les  autres  nations  i 

82 


650 


mais,  ^f  tbMitnt  noire  aUpértoHlè  %nf  tel  tàm,  U  tant 
occuper  Pennemi  par  une  grande  puissance  conlinentale , 
afin  de  détourntr  Mil  tittentlon  de  U  marine.  El  dans  le§ 
?  circonstances  actuelles,  à  qui  devons-nous  principalement 
*'  Dous  attacher  si  ce  n*est  à  la  maison  d'Autriche  ?  Quelle 
est  la  puissattee  dont  ralllance  nous  soit  plus  utile,  si  nous 
eousidéi^DS  son  caractère  militaire,  sa  situation  locale,  et 
iMntirêt  qu'elle  h  à  contlbuer  la  guerre?  Si,  dans  Tétat  ac- 
tuel des  enoses,  nous  tie  pouvohs  espérer  la^  pais,  il  faut 
poursuWre  la  guerre  avec  vigueur  pour  négocier  avec  avan- 
tage $11  Taut  opposer  une  barrière  aux  Irruptions  françai- 
•es.  Songeons  au  terrible  exemple  que  nous  avons  sous  les 
yeut.  La  Hollande  négociait  la  paix ,  et  pendant  ce  temps 
on  s'emparait  de  ses  provinces.  En  considérant  sous  ce 
point  de  vue  la  situation  de  PEurope  et  de  l*Angletcrre,  il 
li*esl  personne  d*entre  vous  qui  ne  vit  avec  douleur  i'enipe- 
reur  se  retirer  de  la  coalltiou. 

'  «  S'il  était  besoin  d'autres  motifs  pour  continuer  la 
guerre,  Je  porterais  votre  attention  sur  les  événements  qui 
se  sont  passés  depuis  le  commencement  de  cette  session. 
Voyez  les  dUcours  de  Tallien  à  la  Convention;  vous  y  ren- 
contrez sans  cesse  les  preuves  de  la  misère  de  l'intérieur  ; 
que  Ton  examine  sans  passion  l'état  de  leurs  finances, 
qu'on  lise  attentivement  Ici  comptes  rendus  par  les  me- 
neurs les  plus  considérés  de  la  Convention ,  et  Ton  se  con- 
vaincra qu'ils  sont  réduits  à  un  état  désespéré  par  l'énorme 
quantité  d'assignats  en  circulation,  dont  ils  ne  peuvent  di- 
minuer la  maise  i  voilà  ce  qui  épouvante  les  plus  hardis 
parmi  eut. 

i  Si  par  nos  efforts  nous  pouvons  détruire  la  puissance 
maritime  de  nos  ennemis,  la  naix  alors  pourra  être  Taite 
à  des  termes  beaucoup  plus  iionorables  qu'aujourd'hui. 
Le  plan  de  l'ennemi  est  de  faife  des  paix  partielles  pour  di- 
minuer sel  dépenser  et  %e  mettre  en  état  de  résister  plus 
sûrement  auk  autres  puissances.  Mais,  en  supposant  qu'ils 
puissent  déterminer  la  Prusse,  par  exemple,  à  se  relâcher 
de  ses  premiers  efforts,  ce  doit  être  une  raison  pour*  re- 
doubler les  nôtres {  sans  cela,  comment  e<ipérer  une  paix 
supportable?  Notre  plus  grand  Intérêt  est  donc  d'empêcher 
l*empereur  de  quitter  la  coalition,  et  de  lui  fournir  les 
mojpcUS  de  mellrc  en  campagne  de  puissantes  armées  ;  au- 
trement Tennemi  sera  en  état  de  dicter  une  paix  honteuse, 
Incomnalible  avec  le  repos  et  le  bonheur  de  l'Europe. 

•>  L  On  a  proposé  d^employer  cet  emprunt  aux  dépenses 
^c  la  marine  ;  niais  J'ubcrverai  que  cet  emprunt  n*esi  point 
nue  taxe,  qu'il  est  volontaire,  et  que  le  refus  qu'on  ferait 
de  le  garantir  n*augmentêrait  pas  d'un  shelling  le  trésor 
public,  ni  par  conséquent  nos  forces  navales.  Je  pense, 
au  reste,  qu'il  n*est  aucun  membre  de  la  Chambre,  quelles 
que  soient  ses  opinions  particulières,  qui  ne  soit  convaincu 
que  notre  marine  ne  soit  bientôt  portée  au  plus  haut  degré 
de  force  et  de  puissance  où  elle  soit  jamais  arrivée. 

t  31  tous  garantissez  cet  emprunt,  l'empereur  s'engage 
è  opposer  à  la  t^'rance  deux  cent  quarante  mille  hommes 
pendant  la  prochaine  campagne  ;  et,  ainsi  attaquée  sur  le 
continent,  elle  sera  hors  d'état ,  même  avec  une  réquisi* 
tion ,  de  résister  à  nos  forces  navales.  Mais  devons-nous 
placer  notre  conGance  dans  Pcmpereur  ?  Eh  quoil  devons- 
nous  noUs  défier  delui  parce  que  le  roi  de  Prusse  a  manqué 
à  ses  engagements  ?  Ce  nVst  rien  prouver  que  de  conclure 
ainsi  du  roi  de  Prusse  aux  autres  puissances  de  l'Allema- 
gne. Lés  pHnées  allemands  et  Tempereur  leur  chef  n'ont- 
ils  pas  déi  raisons  pour  être  fidèles  aux  engagemrnts  quMIs 
Contractent  avec  les  autres  puissances?  Nauront-ils  jamais 
de  guerres  à  l'avenir,  qui  les  forcent  de  former  des  allian- 
éês  et  de  recevoir  des  subsides?  Oublieront-ils  leur  carac- 
tère et  leurs  intérêts;  leurs  intérêts  «  qu'ils  ne  peuvent 
maintenir,  quelles  que  soient  leurs  ressources»  que  par  un 
parfait  accord  avec  les  autres  puissances  ?  Peut-on  même 
assurer  que  la  conduite  du  roi  de  Prune  sera  la  même  eo 
0!)  et  96  qu'en  94?  Mais,  parce  aue  le  roi  de  Prusse  a 
manqué  de  fol,  doit-on  renoncer  à  faire  des  alliances?  doit- 
on  se  défier  du  reste  de  l'Allemagne?  doit-on  ne  plus  comp- 
têf  sur  la  bonne  foi  qui  lie  les  nations,  et  qui  établit  M 
parfait  équilibre  de  forces  et  d'intérêts  où  chacun  trouve 
sa  puissance  et  sa  sûreté?  J'observe,  au  reste,  à  Thonora- 
blé  membi'e  qui  est  à  la  tête  de  l^oppotitioo ,  et  qui  dans 
les  circonstances  actuellea  contredit  sans  cesse  toutes  les 
i&esareii  du  gouTcmemeoti  quHl  a  blâmé  autrefois  les  mi- 


nistres dé  Bê  pùM  faire  d^alliances  dans  le  eontinenl.  d 
de  ne  point  opérer  une  utile  diversion  (|ui  doublait  bOs  IIN 
ces  et  affuibliSsait  celles  de  nos  ennemis.  • 

M.  Pitt  en  conclut  qu'il  faut  remercier  le  roi  dSroir 
garanti  à  l'empereur  un  traité  utile  à  la  sûreté  nationale  et 
à  la  tranquillité  de  l'BurOpe ,  et  lui  promettre  en  même 
temps  de  prendre  toutes  les  mesures  possibles  pour  Taug- 
mentation  de  la  marine  lorsquMl  en  Sera  question. 

PAYS-BAS. 

BnueêUêê^  le  15  wnfoie.-«Les  rtpréKtttallll  dll  pml« 
viennent  de  prohiber  la  fkbHcatioii  du  géolèf  re  dibS  fé» 
tendue  de  la  Belgique^  Le  grand  nombre  de  |entèvrertes 
étaitune  des  principales  causes  de  rilieMCtttkHI  dH  r^uU 
sitious  faites  pour  assurer  les  subslsUnMS  été  innées»  Km 
effet ,  ces  fabriques  t  qui|  dens  la  seule  Flandre  oHedtale, 
sont  au  nombre  de  cent  qusirt-vlngt-lllie,cmisoilltDeilt 
chaque  jour  le  grain  néeessaira  ù  la  tuMstanci  dt  plus 
de  deui  cent  mille  citoyens,  le  ebarbott  qui  lertlnll  ia 
chauffage  de  plus  de  neuf  mille  méneges,  et  l'IVoliie  qol 
nourrirait  plus  de  deui  mille  trois  eents  ohevittti  Me. 

Les  représentants  ont  fait  sentir  dans  une  praelaiMiUoil 
tout  les  autres  ineoavénianu  de  eei  ftbrlqttei* 


tlBPUBLlQUK  PRANÇAISIfi. 

TntbCNAL  CRlMtNfiL  RÉVOLUTIONRAIll* 

Z>tt  19  i'tfnfofSt— Le  tribunali  tu  la  dtolartUoildaJilrj, 
portant  : 

1*  Qu'il  n*est  pas  constant  que,  pendent  que  \H  Iroupn 
de  la  république  française  étaient  assiégées  dans  Meyence^ 
il  a  été  tenu  des  propos  tendent  t  snéenilr  le  JtOUTerne- 
menl  républicain,  à  rétablir  la  rOyaUlé,  à  avilir  la  Cou* 
vention  nationale  et  les  commlMfltrrs  prU  dans  sdb  leint 

2*  Qu'il  n'est  pas  constant  qu'à  la  même  époque  II  a  été 
tenu  des  propos  contenant  des  nouvelleê  ÂiUSSM  et  ilar» 
mantes,  tendant  à  jeter  le  découragement  dani  Téme  Mn 
défenseurs  de  la  patrie  et  a  désorganiser  les  bataillons  da 
l'armée  française,  a  acquitté  et  iftis  en  liberté  Charlea  Per- 

rin,  âgé  de  vingt-six  uns,  né  à  Poinson,  district  de  Lan- 
dres,  adjudant  général  del^armée  du  Rhin. 

L'accusation  intentée  contre  Charles  Perriéf  i  la  éom- 
mission  militaire  de  Strasbourg,  par  un  dHjUfOsde  eetta 
commission  qu'il  avait  lui-même  dénoMé  comme  dilapida* 
teur  du  trésor  militaire,  avait  été,  après  un  premier  jil|V* 
ment  portant  peine  de  morti  reotoyN  ail  tribunal  révo- 
lutionnaire. 

Dans  le  nombre  des  témoins^  qui  ttht  touSi  tfanatetif 
nouvelle  instruction ,  déposé  pour  raemiséi  lea  repiéwiM 
tanis  du  peuple  Merlin  (de  Thionvllle)  et  BetiUMt  wK 
rendu  le  témoignage  le  plus  favorable  sur  la  moralHé  fl  le 
patriotisme  de  Charles  Perrim  Merlin  a  déclaré  qM*i  lors 
de  la  retraite  de  Mayencei  Perrlh»  alors  adjudant  gUliéruli 
ne  Pavait  presque  pas  quitté,  et  quCi  chargé  par  lui  d^lN 
dres  très-importants  dans  cette  coiûonctUrei  II  ataK  donHé 
des  preuves  du  tèle»  du  courage  et  de  rinUrtligeaui  lea 
plus  dignes  d*éloges. 

Ainsi,  pour  satisfaire  des  haines  penénnelleet  lOi 
dénonciateur  et  quelques  mécontents  de  PavanoinHHit  ra« 
pide  de  Perrin  dans  la  carrière  militaire  avaient  bàtl  ttU 
échafaudage  de  reproches  calomnieux i  et  rechervtMdeé 
témoignages  plus  que  suspects  pour  le  p<n^r«t  et  leur  ea» 
poir  était  fondé  sans  doute  sur  l'impossibilité  Ué  aU  irUU^ 
vait  à  cette  époque  rinnoœnet  accusée  du  pfUdUlru  an 
moyens  de  justificatieni 

•  •  '•       -  I     ^ 

VARlliTÉS. 
On  doit  BU  goùl  pour  rblstolra  naturelle,  Il  l'initltUthMI 
des  établissements  qui  lui  snnt  consacrés ,  de  fiottvéllea 
découvertes,  des  ptugtés  dans  leéaris  utiles,  et  Je  dlisJ 
presque  la  perRnsiiou  aeiuelte  de  la  chimie.  La  eonnumaaiiôé 
des  productions  et  des  HebeSses  de  la  nature  a  du  plu  S 
étendu  la  pensée  i  accru  la  Ibrce  et  augmenté  le  dOfiiàitté 
de  nos  sens. 

Ces  avantages  Inestimables  résultent  en  paitlu  du  la 
méthode  adoptée  depuis  longtemps  par  les  nalurattstéé 
dVxposeraux  yeux,  dans  un  unUu  réfléchi,  les  échaoUIlmu 


6&1 


âa  (tfodueiioDS  Mtorrilti«  mi  lofte  «nti  Mas  lorilr  d*aiie 
enceinte  limiiée»  on  percotiri  le  ?  mu  étendue  des  trois  rè« 
gnet  de  le  nelure^ 

Eli  bien ,  Je  propose  qu^l  soit  élebU,  à  l*initar  des  eebi- 
neu  d*bistoire  naturelle»  un  cabinel  ou  muséum  d*bisiolre 
des  erts  t  que  là  on  présente  aui  yeux  des  écbaniUlçns  de 
toutes  les  espèces  de  productions  de  rinduttrie«  en  suirant 
une  elttsifleatlon  d'objets  d*après  une  mélbode  déterminée. 

N'est-il  pas  surprenant,  en  eflbt,  |*allais  dire  bumiliant, 
que  tel  qui  dlitingue  très^en  une  agatbe  d*un  caillou 
d'SgyptOi  un  spatb  oaleaire  d'un  spath  étineelant.  Ignore 
le  cersoiôre  qui  différencie  la  serge  du  drap»  le  linon  dé  la 
gase*  la  Ibutre  du  simple  tissu  i  que  des  bommes  destinés 
à  prooonoer  sur  les  traTaux  des  nanuftiotuns,  h  lei  sur- 
teiiler,  à  les  encourager,  n'aient  pa«  un  moyen  d^aequé- 
rir  les  connalsMnces  qui  leur  sont  nécessaires  à  cet  égard? 

Ne  seraitHl  pas  lrés«ulile  qu'on  put,  dans  un  teste  Ipcal, 
examiner,  apprendre  à  connaître  les  différents  cuirs,  toiles 
drops,  paniers,  feutres  t  Terres,  tulles*  terres  cuites,  por« 
ceialnes,  blscuttSi  etc.,  enfln  tout  ce  que  l'art  enfante  par 
remploi  des  matières  premières  ? 

Quelques  particuliers  ont,  àla  vérité,  de  ces  collections; 
mois  elles  sont  incomplètes,  étrangères  au  public,  et  leur 
utilité  par  conséquent  bornée  au  proGt  de  peu  de  person- 
nes. 

Si  quelque  chose  poufait  ajouter  aox  inotlft  qui  doivent 
déterminer  à  former  un  pareil  établissement»  ce  serait  le 
peu  de  dépense  quMI  doit  entralneri  car  Jamais  un  cabinet 
iVhittoire  ariifioitlU  ne  coulera  le  cenliùme  des  dépenses 
d*un  cabinet  a'hUtoirû  naturelle^ 

CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Tkibaudeau. 
SÉANCE  DD  19  VENTOSE. 

Un  secrétoire  donne  lecture  des  lettres  suivantes  : 

A  Gayenne,  le  18  Juillet  lT94'(Yleus  style),  5  thermidor 
an  9*  d«  la  république  française. 

•  Ciloren  président,  le  directoire  du  département  delà 
Guyane  française  a  reçu  aTec  satisfoction  ta  lettre  en  dote 
du  S2  Juillet  1708  (vieux  style),  et  les  bulieUns  de  la  Con- 
vention nationale  qui  raccompagnaient.  Cette  satisAiction 
est  devenue  extrême  à  la  lecture  de  ces  bulletins ,  dont 
presque  chaque  ligne  loi  oflk>ait  un  tableau  des  nouveaux 
succès  de  la  république.  Puissent  les  glorieux  trrompfaes 
qu'elle  a  remportés  combler  les  vœux  que  le  direc* 
toire  et  la  colonie  forment  pour  l'heureuse  fin  d^une  ré* 
volutlon  oui  doit  assurer  le  bonheur  du  monde  I 

•  Le  directoire,  conformément  au  d^ir  de  ta  lettre»  a 
envové  des  exempioijes  de  ces  bulletins  k  la  Société  répu- 
blicaine de  la  colonie  et  aux  neuf  cantons  du  département, 

a  Nous  avons  aussi  reçu,  par  la  corvette  l'Oiaêau^  le 
décret  qui  abolit  l'esclavage.  Il  a  été  lu,  publié,  aflSché, 
et  accueilli  sans  être  accompagné  de  baïonnettes.  Eh  I  en 
avai^n  besoin?  Les  armes  ordinaires  dont  se  sert  notre 
commissaire  civil  sont  la  loi,  l'amitié»  Tunion,  la  concorde, 
et  sa  sagesse  fait  le  reste. 

•  Ennn»  le  ié  on  a  célébré  la  fête  de  la  fédération  et 
planté  un  arbre  à  la  liberté;  on  y  voyait  le  colon,  la  ma- 
rine, le  commerce»  même  les  éi*devant  marchands  d'es- 
claves, auprès  du  noir  Africain ,  offrir  uu  pur  eucens  à  la 
patronne  des  Français.  Assure  la  Convention  que»  de  tout 
cet  encens»  il  ne  s'en  est  point  brûlé  un  grain  empoiionué 
d'aristocratie}  invitela  encore  à  recevoir  notre  félicitation  : 
il  n'appartenait  qu'à  elle  d'établir  les  droits  inaliénables 
de  rhomme,  de  rendre  l'univers  libre,  de  faire  le  bonheur 
du  genre  humain. 

«  Les  membres  du  directoire, 
f  Signé  CnvaiuiL»  Laboros,  Rondiao»  Balb.  ■ 

•—  Le  magistrat  de  Bruxelles ccrit  à  la  Convention 
nationale  : 

~  •  Représentants  du  peuple  français ,  la  ville  et  l'arron- 
dissement de  Bruxelles»  représentés»  d'après  des  formrt 
anciennes»  par  nous,  par  le  large  conseil  et  par  les  neuf 
Qttionst  composées  des  corps  «t  métiers  de  cette  oomnune, 


ont  émis  Hbremeiit  et  par  aeelamatlon  leur  vau  «roanlme 
pour  la  réunion  à  la  république  f^aneaise.  Nos  députés 
ront  porté  au  comité  de  salut  pubilcj  le  15  thermidor  der- 
nier. Persuadés  qu'il  se  trouve  consigné  dans  les  actes  de 
ce  comité,  nous  vous  prions  d'y  avoir  égard.  Si  nousdési« 
rons  de  faire  partie  intégrante  de  la  république  française» 
c'est  que  nous  croyons  mériter  de  partager  sa  gloire  Cl 
son  bonheur,  f^ivc  laréjmbliqm!  vive  la  fonviniiofUn 

(  Siiivini  ti$  iignaturêê.  )    . 

«—  Les  membres  composant  l'administration  d*ar- 
rondisaement  et  la  municipalité  do  Liège  offrent  à 
la  Convention  rhommage  de  la  reconnaissance  de 
leurs  conoitoyens  pour  les  preuves  touchantes  de 
confiance  et  n'estime  qu'ils  reçoivent  de  la  républi- 
que française.  Ils  rappellent  le  courage,  la  panence 
et  le  dévouement  du  peuple  liégeois  pour  la  liberté; 
ils  présentent  le  tableau  de  ce  qui  se  passait  à  Liège 
le  9  thermidor;  ils  expriment  leur  gratitude  pour 
Tarrété  du  comité  de  salut  pul)Iio  du  22  pluviôse, 
et  celui  des  représentants  à  Bruxelles»  du  27  du  même 
mois. 

•  Oui,  léffislateurs»  s'écrient  ces  citoyens,  il  est 
impossible  de  vous  peindre  la  joie  qu'ils  répandent 
parmi  nous Grâces  immortelles  vous  soient  ren- 
dues! le  Liégeois,  qui  croit  y  voir  un  garant  assuré 
de  sa  réunion  prochaine,  renatt  de  nouveau  à  la  li- 
berté et  à  la  justice,  et,  reprenant  toute  sa  fierté,  tout 
son  courage,  il  se  jette  avec  confiance  dans  les  bras 
de  sa  mère  adoptive.  • 

Ces  Adresses  sont  renvoyées  au  comité  de  salut 
public,  et  leur  insertion  au  Bulletin  est  décrétée. 

André  Dumont  :  Je  demande  la  porole  pour  un 
article  additionnel  au  décret -<iuo  vous  avez  rendu 
hier.  Hier  vous  avez  décrété  que  les  députés  proscrits 
rentreraient  dans  votre  sein;  leur  proscription  avait 
été  une  des  suites  de  la  journée  du  31  mai.  Beaucoup 
de  personnes  ont  été  trompées  sur  cette  journée,  et 
moi  aussi,  j'en  fais  ici  ma  profession  de  foi.  (Vifs 
applaudissements.)  Aujourd'hui  auevous  avez  cica- 
trisé les  plaies  de  la  patrie,  je  aemaiide  que  Ton 
fasse  disparaître  jusquWu  souvenir  de  cette  ofTreuse 
journée,  en  rapportant  le  décret  qui  porte  que  le  31 
mai  sera  célébré.  (Applaudissements.) 

On  demande  de  toute  part  que  le  président  mette 
cette  proposition  aux  voix. 

La  proposition  d'André  Dumont  est  mise  aux  voix. 
Une  très-grande  majorité  se  lève  pour  l'adoption  ; 
personne  ne  se  lève  contre.  Le  décret  est  rapporte 
au  milieu  des  plus  vifs  applaudissements. 

PÊMARTiN  :  Je  demande  aussi  que  l'on  poursuive 
les  auteurs  de  cette  journée.  (Murmures  et  applau- 
dissements.) 

Plusieurs  voix  :  Pache,  Bouchotte! 

PÉMARTtif  :  11  faut  effacer  jusqu'à  leurs  dernière» 
traces  les  horreurs  de  cette  journée.  Je  demande  la 
punition  de  Pache  et  de  Bouchotte. 

On  demande  le  renvoi  de  cette  proposition  aux 
trois  comités. 

Bourdon  (de  TOise)  :  On  a  demandé  la  punition 
des  auteurs  de  la  journée  du  31  mai;  Cette  propo- 
sition est  trop  vague.  Plusieurs  ont  déjà  péri  sur 
réchafaud;  d'autres  sont  dans  le  château  de  Ham. 
C*est  un  scandale  public  de  voir  que,  depuis  le  9 
thermidor,  Pache,  Bouchotte  et  ses  complices  soient 
jusqu'à  présent  impunis.  J'ai  observé  le  silence  sur 
ces  grands  scélérats,  parce  que  j'ai  cru  le  devoir  à 
la  manière  dont  je  les  avais  attaqués  avant  le  0  ther - 
midor  ;  j*ai  craint  que  Ton  imputât  mes  accusations 
à  des  vengeances  personnelles  plutôt  qu'à  mon 
amour  pour  le  bien  public;  mais  à  présent  que  l'o- 
pinion publique  est  éclairée,  que  les  trois  comités 
savent  la  vérité,  qu'ils  sont  reconnus  pour  les  prin- 
cipaux auteurs  de  la  journée  du  31  mai,  je  demande 


652 


le  renroi  de  toutes  les  pièces  auî  les  concernent  aux 
trois  comités,  qui  rtfdigeront  le  décret  d'accusation 
contre  ces  grands  coupables  {plusieurs  voix  :  Et 
Garât?),  pour  les  renvoyer  ensuite  au  tribunal  ré- 
Tolutionnaire. 

DuMOifT  (du  Calvados)  :  11  est  un  autre  coupable 
que  plusieurs  de  nos  collègues  ont  déjà  nommé  : 
c'est  le  ministre  Garât.  Non-seulement  Garât  a  fa- 
Torisé  la  journée  du  31  mai,  mais  il  a  favorisé  cn- 
.  core  les  scélérats  du  mois  de  février,  il  a  fait  Tapo- 
logie  des  assassins  de  la  journée  du  2  septembre. 
M*est-ce  pas  Garât  gui,  à  la  suite  de  la  journée  du 
31  mai,  vint  vous  dire  que  le  comité  d'insurrection 
n'existait  pas,  quoique  uous  en  eussions  des  preuves 
palpables? 

Je  demande  que  la  conduite  de  Garât  soit  exami* 
née,  et  que  ma  proposition  soit  renvoyée  aux  trois 
comités. 

Taveau  :  Garât  a  eu  des  faiblesses,  mais  je  crois 
dans  mon  âme  et  conscience  que  Garât  n*est  pas  cou- 
pable. Pache,  Bouchotte  sont,  à  mon  avis,  les  seuls 
grands  coupables;  ce  sont  eux  qui  ont  jeté  parmi 
nous  ces  semences  de  divisions  qui  nous  ont  si  long- 
temps agités.  Quant  à  Garât,  laissez,  si  vous  voulez, 
aux  trois  comités  le  soin  d'examiner  sa  conduite  ;  ils 
verront  que  cet  homme  a  été  trompé  lui-même  par 
les  circonstances. 

Bréard  :  Je  ne  prends  pas  la  défense  de  Garât.  Il 
suffit  qu'il  ait  été  accusé  publiquement  par  plusieurs 
membres  de  cette  assemblée  pour  que  sa  conduite 
doive  élre  examinée.  Cepenaant  je  vous  ferai  ob- 
server qu'à  cette  époque  malheureuse,  où  Pachc  et 
Bouchotte  conspiraient  contre  la  patrie,  ce  fut  Garât 
qui  donna  aux  comités  connaissance  de  leur  com- 
plot. Cambon ,  qui  est  là,  peut  le  dire.  Nous  traitâ- 
mes alors  ces  monstres  comme  ils  le  méritaient. 
Nous  avions  fait  demander  Uanriot,  qui  ne  vint  pas; 
Bouchotte  nous  dit  qu'il  était  occupé  à  donner  ses 
ordres  dans  Paris  :  je  lui  répondis  qu'il  avait  bien 
fait  de  ne  pas  venir,  car  je  lui  aurais  plongé  le  poi- 
gnard dans  le  sein.  Dans  la'suite,  voyant  au'il  était 
impossible  de  faire  le  bien  dans  le  comité,  je  don- 
nai ma  démission  :  vous  devez  vous  le  rappeler. 
Un  grand  nombre  de  voix:  Oui,  oui  ! 
Bréard  :  Je  ne  veux  point  disculper  Garât,  puis- 
que les  préventions  contre  lui  sont  fortes,  et  je  ne 
m'oppose  pas  au  renvoi  aux  trois  comités,  pour  que 
sa  conduite  soit  examinée. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Le  comité  de  sûreté  géné- 
rale suflit.  11  ne  faut  pas  que  ces  coquins-là  fassent 
Îierdre  le  temps  de  tous  les  comités  de  gouvernement. 
On  applaudit.) 

Delecloy  :  Je  demande  que  l'on  ne  vienne  pas  ici 
nous  parler  des  fripons;  c'est  leur  donner  l'éveil 
pour  les  faire  disparaître.  La  Convention  ne  doit  pas 
non  plus  perdre  son  temps  dans  la  discussion  d'ob- 
jets ae  cette  nature;  elle  ne  doit  s'occu|)er  que  du 
pouvoir  législatif,  et  renvoyer  à  ses  comités  tout  le 
reste.  Je  demande  Tordre  du  jour, 
le  tout  est  renvoyé  au  comité  de  sûreté  générale. 
—  Plusieurs  des  députés  rappelés  dans  le  sein  de 
la  Convention  par  le  décret  d'hier  entrent  successi- 
vement dans  la  salle,  au  milieu  des  plus  vifs  applau- 
dissements. 

Le  Président  :  Lesage  (  d'Eure-et-Loir  )  demande 
la  parole. 
Elle  lui  est  accordée. 
^  monte  à  la  tribune.  (On  applaudit) 
Lesage  (d'Eure-et-Loir)  :  Représentants,  le  peu- 
ple, dont  la  tyrannie  de  Robespierre  et  de  ses  com- 
plices n'a  pu  nous  faire  perdre  la  confiance;  le  peu- 
ple, dont  les  conjurés  ont  longtemps  étouffe  la  voix 
sans  eu  changer  i'opiuioni  nous  rappelle  par  votre 


organe  à  nos  fonctions;  fidèles  aujourd'hui  comm« 
au  31  mai,  le  triomphe  de  la  liberté  et  le  bonheur 
de  la  patrie  seront  le  mobile  unique  de  nos  actions. 
Que  les  défiances  soient  pour  jamais  bannies  de 
cette  assemblée  ;  ne  craignez  point  qu'aigris  par  le 
malheur  nous  n'apportions  dans  vos  délibérations 
que  des  vœux  rembrunis  par  te  sentiment  de  nos 
malheurs  passés.  Eh!  que  sommes-nous  devant  le 
peuple  frauçais  !  Nous  avons  souffert  ;  mais  nos  op- 
presseurs, nos  tyrans,  n' ont-ils  pas  aussi  opprimé, 
tyrrannisé  le  peuplé?  Et  quand  les  propriétés  entêté 
violées,  quand  le  meurtre  et  l'assassinat  ont  couvert 
de  sanç  le  territoire  français,  quand  partout  le  crime 
a  précipité  l'innocence  dans  le  tombeau,  la  nation 
entière  n'a-t-elle  pas  été  mise  hors  des  lois  ? 

Nous  ne  nous  souviendrons  plus  de  tant  de  maux 
que  pour  en  empêcher  le  retour  et  garantir  le  peu- 
ple français  des  nouveaux  coups  que  voudraient 
lui  porter  le  royalisme  en  délire  et  le  terrorisme  en 
fureur. 

Lecointre  (de  Versailles),  se  précipitant  à  la  tri- 
bune :  Citoyens,  je  viens,  pour  rhonneurde  la  Con- 
vention nationale,  pour  l'honneur  même  des  hom- 
mes dont  je  vais  parier,  je  viens  vous  demander,  uou 
pas  le  rapport  du  décret  rendu  hier  en  mon  ab- 
sence au  sujet  des  députés  démissionnaires,  ou  mis 
hors  la  loi;  mais,  au  lieu  d'un  rapport  précipité, 
incirconstancié,  énoncé  en  des  termes  généraux  et 
vagues,  je  viens  demander  que  vous  décrétiez  que  vos 
comités  présenteront  un  rapport  détaillé  sur  chacun 
des  membres  dont  vous  avez  prononcé,  sans  exa- 
men (murmuresj,  la  rentrée  dans  votre  sein  ;  eux- 
mêmes  ont  intérêt  de  se  joindre  à  moi. Certes  leur  po- 
sition diffère  ;  elle  n'est  pas  à  beaucoup  près  la  même 
à  tous.  Si  les  uns  ont  fui  pour  se  soustraire  a  vos 
décrets,  s'ils  sont  allés  s'enfoncer  dans  l'obscurité  la 
plus  profonde,  ils  peuvent  sans  doute  être  excusés 
aux  yeux  de  la  nature  ;  mais  si  d'autres  se  sont  portés 
en  fureur  dans  les  départements,  s'ils  y  ont  excité 
des  troubles,  s'ils  ont  porté  les  peuples  a  la  révolte, 
s'ils  se  sont  institués  eux-mêmes  en  autorité  rivale 
de  la  Convention... 

CouppÉ  :  Tu  as  dit  que  tu  les  assassinerais. 

Lecointre  :  C'est  pour  vous  que  je  parle.  (Bruit.) 
S'ils  ont  attisé  les  premiers  les  (eux  de  la  guerre  ci- 
vile; s'ils  ont  autorisé ,  ordonné  l'enlèvement  et  la 
dilapidation  des  caisses  publiques  ;  s'ils  ont  inter- 
cepté, arrêté  les  approvisionnements  et  les  vivres 
destinés  pour  Paris,  qu'ils  voulaient  affamer  et  dé- 
truire; s'ils  ont  levé  des  années....  (On  murmure.) 

Merlin  (de  ThionviUe)  :  Citoyen  président,  je  de- 
mande la  parole. 

Tallien  :  Je  demande  aussi  la  parole.  (  Le  bruit 
continue.) 

Merlin  (de  Thionvillc)  :  Je  demande  à  répondre; 
mais  qu'on  conserve  la  parole  pour  l'honneur  de  la 
liberté.  (On  applaudit.) 

Lecointre  :  S'ils  ont  créé  des  généraux ,  s'ils  ont 
marché  avec  ces  armées  rebelles  sur  Paris,  sur  la 
Convention  nationale  elle-même,  ne  sera-t-il  pas 
évident  qu'ils  ont  porté  les  armes  contre  la  patne  ; 
je  dis  plus,  qu'ils  ont  trahi  la  patrie  ?  11  ii*y  a  ciu*un 
jugement  qui  puisse  empêcher  le  soupçon  de  planer 
sur  leur  tête  et  repousser  loin  d'eux  l'indignation 
publique.  Citoyens,  plus  le  crime  dont  de  tels  hom- 
mes seraient  prévenus  est  grand, plus  il  importe  à  la 
Convention  nationale  de  donner  a  la  discussion  tout 
l'éclat  qu'elle  mérite. 

Des  années  ont  marché  sur  Paris,  sur  la  Conven- 
tion nationale  elle-inêinc.  (Violents  murmures.)' 
Des  représentants  du  peuple  en  mission  ont  été^in- 
carcérés,des  départements  se  sont  coalisés;  des  villes 
ont  été  assiégées,  livrées  aux  flammes  et  à  l'ennemi; 


653 


des  armées,  sorties  des  différents  points  de  la  répu- 
blique, ont  été  en  présence;  des  batailles  ont  été 
données,  le  sang  français  a  coulé,  et  des  représen- 
tants,, des  mandataires  du  peuple  sont  prévenus 
d*étre  les  auteurs  de  pareils  attentats.  Parmi  ceux- 
là  même  qui  viennent  de  rentfer  dans  cette  enceinte, 
plusieurs  sont  regardés  comme  étant  de  ce  nombre. 
Prononcer  en  leur  faveur  une  amnistie  sans  examen, 
vous  le  pouviez  comme  pour  tout  ennemi  public; 
mais  recevoir  ces  hommes  dans  votre  sein  sans  un 
rapport  particulier  sur  chacun  d*eux ,  sans  un  rap- 
port connu ,  distribué,  sans  discussion  approfondie, 
sans  que  personne  même,  excepté  vos  trois  comités, 
ait  été  prévenu  d'une  aussi  importante  et  si  délicate 

Question  ;  admettre,  dis-je,  de  tels  hommes,  lorsque 
es  décrets  précédents  les  ont  mis  hors  de  la  loi , 
qu*un  dernier  décret  tout  récent  a  prononcé  qu1Is 
ne  rentreront  point  dans  le  sein  de  la  Convention 
nationale  !  Les  principes,  citoyens,  Tamour  de  vos 
devoirs  et  l'éternelle  justice  sont  violés;  ils  ne  vous 
le  permettent  pas. 

Quand  vous  avez  rejeté ,  quand  vous  avez  frappé 
du  glaive  de  la  justice  des  hommes  qui ,  par  leurs 
machinations,  ont  abusé  tyranniquement  du  pouvoir 

3ui  leurfutconfié,non,  ce  n'était  pas  pour  accueillir 
'autres  hommes  qui  auraient  tenté  de  rétablir  leur 
tyrannie  par  la  rébellion  armée. 

D*oii  vient  donc  tant  de  précipitation  ?  Vos  comités 
ont-ils  craint  des  mouvements  séditieux?  vous- 
mêmes  a  vezvous  quelque  chose  à  redouter?  Non, le 
peuple  s'insurge,  mais  c'est  pour  les  principes,  et 
non  pour  des  rebelles;  leur  expulsion  du  Calvados 
en  est  la  preuve.  (On  murmure.)  Là  ils  avaient 
trompé  le  peuple  :  le  peuple  Ta  reconnu ,  le  peuple 
éclairé  les  a  chassés.  (Nouveaux  murmures.) 

Qu'avaient  donc  à  craindre  vos  comités  pour  pré- 
cipiter un  tel  rapport?  Eh  !  nont*ils  pas  tant  de  fois 
arrêté  ou  prévenu  des  mouvements  dont  nous  étions 
menacés  ? 

Le  peuple  français  nous  voit ,  TEurope  nous  ob- 
serve, l'histoire  et  la  postérité  jugeront  sans  appel, 
sans  retour,  et  ils  nous  jugeront  beaucoup  plus  sai- 
nement que  vous. 

Plusieurs  voix  :  Oui ,  oui  !  (On  applaudit.) 

Lecointre  :  La  postérité  jugera  sans  appel,  sans 

retour {^Plusieurs  voix:  Et  plus  sainement.  — 

Lecointre  repète  la  phrase. —  On  applaudit.)  lis  exi- 
gent, ils  prescrivent  avec  empire  le  plus  scrupuleux, 
le  plus  mûr  examen. 

Quiconaue  a  porté  les  armes  contre  sa  patrie  ne 

feut  plus  être  le  représentant  de  cette  même  patrie. 
On  applaudit.)  C'est  un  principe  reconnu  chez 
toutes  les  nations,  dans  tous  les  lieux,  dans  tous  les- 
temps ,  dans  tous  les  gouvernements;  vous-mêmes 
vous  avez  reconnu  encore  hier  ce  principe  sacré  sur 
la  motion  de  Rewbell.  Je  ne  m*étendrai  point  sur  le 
compte  des  démissionnaires.  Citoyens,  quiconque 
abandonne  son  poste  au  moment  où  la  patrie  est  en 
péril  est  indigne  de  le  reprendre,  et  de  servir  jamais 
la  patrie  daus  ce  poste. 

Quiconque  ne  sait  pas  mourir,  comme  Léonidas, 
aux  Thermopylcs  de  la  liberté,  est  indigne  de  vivre; 
c*est  un  lâche  :  Texcuser  est  une  faiblesse  (  Qu'as-iu 
fait?  lui  crie  t-on) ,  le  recevoir  est  un  crime  :  et  ce 
crime  vous  appartiendrait!  Non.  Avez-vous  donc 
oublié  que  la  faiblesse  mine,  perd  et  tue  les  gouver- 
nements? 

Certes,  si  chacun  de  nous,  si  chaque  soldat  de  la 
liberté  en  eût  fait,  en  faisait  autant,  que  seraient 
devenues,  que  deviendraient  la  patrie  et  la  liberté  ! 
Celte  salle  serait  vide ,  et  le  peuple  livré  à  la  plus 
honteuse  anarchie. 
Je  demande  que  la  Convention  nationale  décrète 


le  renvoi  de  ma  proposition  aux  comités  de  salul 
public  ,  de  sûreté  générale  et  de  législation  réunis. 

CouppÉ  (des  Cotes-du-Nord)  :  Et  d'aliénation. 

Lecointre  :  Je  suis  accoutumé  à  cela Je  de* 

mande  que  ces  comités  lui  présentent  un  rapport  cir- 
constancié sur  la  conduite  qu*a  tenue  chacun  des 
députés  rentrés  dans  son  sein,  nar  un  décret  du  jour 
d'hier,  pendant  tout  le  temps  de  leur  absence,  afin 
que,  ce  rapport  distribué,  discuté,  Tinnocence  ou  le 
crime  éclate  dans  tout  son  jour,  atin  qu'eux-mêmes 
ils  viennent  honorablement  ici ,  ou  qu'ils  en  soient 
rejetés.  J'ai  rempli  mon  devoir,  vous  ferez  le  vôtre. 

Lecointre  descend  de  la  tribune  au  milieu  des 
murmures  longtemps  prolongés. 

Merlin  (de  Thion ville)  :  Le  génie  de  la  liberté 
avait  sans  doute  inspiré  le  premier  de  nos  collègues 
qui  a  parlé  ;  car  il  a  demandé  la  paix.  C'est  de  la 
paix  de  cette  assemblée  que  dépend  la  paix  du 
globe eiitier.  (Vifs  applaudissements.) 

Lecointre  vous  demande  de  charger  les  trois  co- 
mités d'examiner  la  conduite  de  ceux  de  nos  collè<- 
gues  que  nous  avons  peut-être  trop  tardé  à  rappeler 
dans  notre  sein.  (Applaudissements  réitérés.)  Car 
c'est  toujours  tarder  trop  longtemps  à  faire  le  bien 

3uë  de  ne  pas  le  faire  de  son  propre  mouvement,  et 
e  ne  s'y  décider  que  sur  des  demandes  réitérées. 
(  Nouveaux  applaudissements.  )  Lecointre  vous  de- 
mande tacitement  le  rapport  du  décret  «que  vous 
avez  rendu  hier,  et  il  n'a  pas  plus  de  raison  de  le 
faire  qu'il  n'en  aurait  à  demander  la  nullité  de  tout 
ce  qui  a  déjà  été  fait  contre  Barère  et  ses  complices. 
(  Applaudissements.  )  Si  les  lois  ne  sont  pour  les  lé- 
gislateurs que  des  moyens  du  plus  fort  contre  le  plus 
faible,  une  tyrannie  succédera  toujours  à  une  autre, 
et  nous  serons  perpétuellement  environnés  de  mal- 
heurs. (Applaudissements.) 

Lecointre  ne  demande  autre  chose  oue  ce  qui  a 
été  fait  hier.  Les  trois  comités ,  après  s'être  occupés 
^e  ceux  de  nos  collègues  qui  avaient  été  mis  hors  la 
loi,  vous  ont  déclare  qu'il  n'y  avait  pas  lieu  à  exa- 
men de  leur  conduite ,  mais  au  contraire  qu'il  fal* 
lait  les  faire  rentrer  dans  la  Convention.  (  Vifs  ap* 
plaudissements.) 

La  preuve  que  les  trois  comités  ont  sévèrement 
examiné  la  conduite  de  chacun  de  ces  collègues, 
c'est  qu'ils  vous  ont  proposé  une  disposition  parti- 
culière à  l'égard  d'un  seul,  qui  est  soupçonné  d'a- 
voir porté  les  armes  contre  la  patrie. 

Je  crois  que  la  motion  de  Lecointre  n'est  qu*un 
brandon  jeté  dans  cette  assemblée  pour  y  allumer 
la  discorde  et  détourner  l'attention  de  dessus  des 
hommes  dont  chaque  instant  d'existence  est  un 
crime  de  complicité  que  nous  reproche  la  république 
entière.  (Applaudissements.) 

Je  crois  que  nous  avons  tous  le  même  vœu,  celui 
de  la  prospérité  de  la  république,  pour  laquelle  nous 
nous  sacrilîerions  nous-mêmes...  (Out,  out  /  s'écrie- 
t-on.)  Eh  bien,  je  vous  demande  si  c*est  préférer 
son  pays  à  soi-même  que  de  se  livrer  à  des  haines 
particulières.  Quoi  qu'il  en  soit,  la  république  s'af- 
fermira ,  parce  que  douze  cent  mille  guerriers  sont 
armés  pour  la  défendre;  parce  que  le  père  dont  le 
fils  est  mort  sur  le  champ  de  bataille  ne  voudra  pas 
avoir  perdu  en  vain  l'objet  de  son  amour;  parce  que 
le  frère  ne  voudra  pas  avoir  vu  couler  inutilement 
le  sang  de  son  frère  ;  parce  que  nous  tenons  tous  à 
la  république  par  les  plus  cnères  affections  de  nos 
âmes.  (Vils  applaudissements.) 

Ne  nous  occupons  donc  que  de  notre  pays,  et  « 
après  avoir  fait  justice  des  hommes  affreux  qui  l'ont 
désolé ,  tirons  un  rideau  impénétrable  sur  le  passé  ; 
qu'il  dérobe  à  l'histoire,  s'il  est  possible,  les  erreurs 
dont  la  Convention  et  le  peuple  français  tout  entier, 


CS4 


oot  éU  eomplieef  %  ear ,  tom^  je  deviit  tuer  m 
tyran ,  il  D*cst  pas  on  Français  poor  qui  te  ne  fût 
aussi  uo  devoir.  Si ,  après  ^ue  nos  travaux  seront 
terminés  •  me  |»rësentant  un  jour  à  la  barre  de  ras- 
semblée lé(pslative,  on  osait  me  dire  que  j*ai  man- 
qué de  eourage,  je  m'écrierais  :  Quel  est  celui  qui  ose 
m'aocuser?  Quel  est  celui  qui  n'a  pas  été  auisi  lâche 
que  moi  ?  (Vifs  applaudissements.) 

Je  demande  la  paix  au  nom  de  la  république  «  la 
ptaix  que  «  pour  cette  fois ,  nous  aurons  ou  nous  pé* 
rirons.  (  Vds  applaudissements.) 

Botaooif  (de  TOise)  :  J*ajouterai  à  ce  que  rient  de 
dire  Merlin  (de  Tbionville)  que  la  motion  de  Le- 
cointre  est  absolument  éversive  du  gouvernement 
représentatif.  Toutes  les  fois  que  le  peuple  a  nommé 
des  représentants,  leur  garantie  est  dans  leur  man* 
dat;  et  tant  quHs  nes>n  écartent  pas,  on  ne  peut  pas 
les  inquiéter. 

Les  comités,  dans  le  rapport  qu'ils  vous  ont  fait 
hier,  n*ont  pu  exécuté  la  loi  du  8  brumaire  ;  ils  vous 
ont  seulement  proposé  de  réparer  un  acte  de  vio« 
lenoe  par  lequel  on  avait  attauué  la  représentation 
nationale.  Ils  vousont  proposé  ae  rappeler  dans  votre 
sein  des  collègues  qu'on  en  avait  arrachés  au  mo- 
ment où  commença  cette  oppression  (]ui  mit  la  Con- 
vention à  deux  doigts  de  sa  perte.  Si  nos  collègues 
se  fussent  présentés  ici,  vous  n'aviez  pu  le  droit  de 
leur  refuser  l'entrée  de  cette  salle.  Ils  avaient  le 
droit  de  prendre  part  à  vos  délibérations  même 
avant  le  aécretque  vous  avez  rendu  hier  (  vifs  ap- 
plaudissements); car  ils  tiennent  leurs  pouvoirs  du 
feuple ,  et  vous  n'avez  jamais  pu  les  en  dépouiller. 
Nouveaux  applaudissements.)  On  ne  peut  donc 
contester  le  droit  qu'ils  avaient  de  reprendre  leurs 
fonctions.  Que  Lecointre ,  s'il  croit  avoir  le  droit  de 
les  accuser,  se  charge,  s'il  le  veut  encore,  de  porter 
le  trouble  parmi  nous;  qu'il  lâche  de  nous  prouver, 
s'il  le  peut,  que  des  hommes  qui,  dans  le  Calvados, 
ont  abandonné  Wimufen  dès  qu'ils  l'ont  reconnu 
royaliste,  sont  aussi  des  royalistes. ()uand  Lecointre' 
les  aura  accusés,  alors  il  sera  temps  ne  renvoyer  aux 
trois  comités  ;  mais  jusqu'à  ce  moment  là  souverai* 
neté  du  peuple,  le  besoin  de  la  paix,  l'amour  de  l'u- 
nion et  de  la  fraternité,  tout  nous  fait  un  devoir  de 
Sasser  à  )*ordre  du  jour  sur  sa  motion.  (  Vifs  applau- 
issementsO 

Louvet  demande  la  parole. 

Legendre  :  Je  demande  qu'on  ferme  la  discus- 
sion. 

La  discussion  est  fermée. 

Blao  :  La  proposition  n'étant  pas  appuyée,  je  de- 
mande qu'on  ne  prenne  aucune  délibération ,  et 
qu'on  laisse  les  paroles  de  Lecointre  pour  ce  qu'elles 
sont. 

Lb«endbe  :  Toutes  les  fois  qu'une  motion,  même 
extravagante,  a  été  faite ,  qu'elle  a  été  discutée ,  on 
ne  peut  se  dispenser  de  délibérer. 

Bodudon  (ne  l'Oise)  :  Je  réponds  à  Legendre  qu'il 
suffit  de  consigner  au  procés-verbal  que  la  proposi- 
tion de  Lecointre  n'a  pas  été  appuyée. 

Jban-Baptistb  Louvet  :  Pour  prouver  que  le  dé- 
sir de  la  paix  n'est  pas  seulement  sur  nos  lèvres, 
mais  qu'il  est  au  fond  de  nos  cœurs  ;  pour  prouver 
que  nous  voulons,  de  concert  avec  nos  collègues,  ci- 
catriser l'immense  plaie  faite  à  la  république  par  les 
tyrans  de  la  France,  je  renonce  a  la  parole. 

Anobé  Dumont  :  Je  demande  qu'on  passe  à  la  dis- 
cussion sur  les  finances  ;  ne  salissons  pu  le  procès- 
verbal  par  une  délibération  sur  la  motion  de  Le- 
cointre. (On  applaudit.) 

—  Canibon  monte  à  la  tribune  et  propose  le  pro- 
jet de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale ,  voulant  venir  au  se- 


des  reatiert ,  après  avoir  eateado  le  rtppoit  dmot» 
mité  des  finaocei,  décréta  : 

•  Art.  |cr.  La  contributioo  (boeièra  ffiil  aan  im^ 
posée  par  retenue  est  fixée,  po^ur  la  troimne  mmném 
républicaine  seuleoient,  au  dixième  du  produit  ta» 
nuel  sur  les  inscriptions  eoBaolidëes  et  but  les  in* 
téréts  00  rentes  fonàères  et  perpétuelles*  •!  mm 
vingtième  du  produit  annuel  sur  les  ioacriplîoiia  H 
rentes  viagères. 

•  IL  Lm  eonditioii  de  non  retenue  atipalde  dsos 
les  eontrats  ou  aoles  passés  entre  particQfiBrB  ecmti- 
nuera  de  recevoir  son  exécution. 

•  111.  Le  montant  de  la  retenue  qui  iera  Caila  en 
exécution  du  présent  décret  sera  déduit  sur  les  aooi- 
mes  qui  seront  réparties ,  pour  la  troisième  année , 
sur  les  propriétés  mobilières.  • 

Lecabpemtibb  :  Il  n'y  a  pas  d'ineonvénient  i  ad* 
mettre  le  projet  de  décret  en  ce  qui  concerne  la  re- 
tenue à  faire  sur  les  créanciers  de  l'Etat  ;  niais  o*i4l 
rompre  les  contrats  entre  les  particuliers  qiiedVten* 
dre  cette  mesure  aux  rentes  viagèrea  et  pe rpétaellea 
dues  de  particulier  à  particulier.  Je  deniandi»  la 
question  préalable  sur  cette  seconde  partie  du  décret, 

REAL  :  Lt  projet  de  décret  qui  vous  est  soumis 
présente  deux  dispositions  principales.  Par  la  pre« 
mière  on  décide  que  la  retenue  sur  les  rentes  per« 
nétuelles  et  viagères  dues  par  l'Etat  est  fixée,  pour 
la  troisième  année  républicaine,  savoir  :  au  dixième 
de  leur  produit  annuel  pour  les  rentes  foncières  et 
perpétuelles,  et  au  vingtième  pour  les  rentes  tIb- 
gères. 

Par  une  seconde  disposition,  ou  plutôt  par  la  ma* 
nière  générale  dont  est  conçu  le  projet  de  décret,  on 
décide  que  les  rentes  perpétuelles  ou  viagères  dues 
par  des  particuliers  à  d'autres  particuliers  seront 
soumises ,  pour  la  troisième  année ,  à  la  même  re- 
tenue que  celles  dues  par  le  trésor  public. 

En  ce  qui  concerne  les  rentes  dues  par  l'Etat  «  on 
convient  généralement  que ,  la  retenue  fixée  sur  les 
rentes  viagères  ou  perpétuelles  étant  représentative 
de  la  contribution  foncière,  le  corps  légulatif  a  bien 
le  droit  d'en  déterminer  chaque  année  la  quotité, 
relativement  aux  circonstances  et  aux  besoina  où  il 
se  trouve. 

Mais  on  a  dit  que  c'était  rompre  les  contrata  entre 
les  particuliers  que  d'augmenter  ou  diminuer  à  ?d* 
lonté  le  taux  de  cette  retenue.  C'est  une  erreur  en 
fait  et  en  principe  qu'il  importe  de  détruire. 

Certes ,  ce  serait  violer  et  dénaturer  les  transae* 
tions  particulières  que  d'assujettir  à  la  retenue  pro- 
posée le  propriétaire  d'une  rente  perpétuelle  ou 
viagère  qui  a  été  stipulée  payable  sans  retenue;  mais 
ce  n'est  point  l'obiet  du  décret  pré^nL 

On  propose  seulement  de  décréter  que  le  débitear 
d'une  rente  soumise  à  ce  que  Ton  appelait  la  retenue 
des  tributs  royaux  ne  pourra  retenir,  pour  la  troi* 
sième  année,  que  le  dixième  ou  le  vingtième  de  aa 
rente. 

Cette  mesure  rentre  dans  le  pouvoir  du  législateur, 
qui  a  le  droit  de  déterminer  la  quotité  annuelle  dea 
contributions. 

Elle  est  d'ailleurs  conforme  à  l'équité.  Il  est  Juste 
d'accorder  ce  léger  secours  à  un  rentier  dont  le  re- 
venu reste  numériquement  le  ini!me,  tandis  que  le 
produit  du  domaine  acquis  avec  les  fonds  du  rentier 
a  acquis  une  valeur  quadruple.  Je  conclus  à  1  adop- 
tion du  projet  de  décret. 

Génissieux  et  Thibault  parlent  successivement  en 
faveur  du  projet  de  décret. 

Il  est  adopté. 

PiETTB,  au  nom  du  comité  des  finances  :  Citoyens, 
la  commission  des  contributions  directes  de  la  com* 
miine  de  Paris,  en  s'occupant  des  dégrèvements. 


655 


d^harges,  et  réductions  que  la  loi  du  23  nivôse  der- 
nier accorde  sur  les  rôles  des  contributions  foncières 
de  1791,  1791  et  1793.  oaz  contribuables  fonciers 
qui  se  trouYetit  dans  le  cas  d*en  obtenir,  a  pensé 
qu^il  était  de  toute  justice  de  faire  les  déchargés  et 
réductions  partielles  que  las  circonstances  nécessi- 
teraient sur  le  rôle  prochain,  pour  les  huit  mois 
Vingt  et  un  Jours  de  rannée  1794  (vieux  style). 

Mats  ce  département  a  r^té  ces  décharges  et  ré- 
ductions, sur  le  prétexte  (|ue,  ta  contribution  de 
1794  devant  être  faite  à  raison  des  trois  quarts  de 
1793  et  sans  dégrèvements ,  on  ne  peut  apporter 
SUCUh  changement  è  la  cote  de  chaaue  contribuable. 

Mais  ce  n  est  pas  là  Tintention  de  la  Convention 
hàtionftle  *,  Ce  n  est  pas  là  le  vœu  des  lois  existantes 
sur  les  Contributions. 

Par  celle  du  S3  nivôse ,  les  dégrèvements  à  faire 
collectivement  ou  partiellement  ne  peuvent,  à  la 
vérité ,  avoir  lleU  que  pour  les  années  17914 1793, 
1793  ;  ils  he  doitent  pas  porter  sur  la  contribution 
foncière  de  1794,  en  ce  que  la  masse  de  l*impoéition 
fixée  psr  cette  loi  doit  être  versée  en  entier  dans  le 
Ifésor  public  sans  aucune  diminution. 

Mais  cette  loi  n*a  point  dérogé  aux  loi|  nrécé^ 
dentés,  qiii  autorisent  lea  administrations  de  aistrict 
et  de  département  à  ordonner  lès  décharges  et  les 
changements  partiels  que  les  variations  dans  les 
nropnélés.  dans  les  revenus  fonciers,  nécessitent 
aune  atiuee  u  Tautre.  8^11  en  était  autrement  pour 
1794,  il  y  aurait  bien  plus  de  difBcultés  dans  les 
recouvrements,  par  rimpoàsibllité  de  faire  acquitter 
des  contribuables  hors  d'état  de  paver  le  montant 
de  leurs  cotes,  ou  dont,  par  une  foule  de  circon- 
atances  aurvenuea  bendant4*année  1793  et  depuis, 
les  cotes  seraient  mises  au  nombre  des  non-valeurs. 

Il  est  donc  indispensable,  en  Ce  cas,  de  laisser  aux 
administrateurs  toute  II  latitude  nécessaire  pour  fa- 
ciliter et  accélérer  le  recouvrement,  en  faisant  les 
changements  et  les  réductions  partielles  qu'exigent 
les  variations,  mais  à  la  charge  expresse  aen  réta- 
blir le  montant  ftur  chacune  des  communes  où  ces 
décharges»  réductions  et  changements  auront  lieu 
lors  de  la  eonfbctioh  des  rôles  pour  1794. 

Voici  )  en  conséquence ,  le  projet  de  décret  que  Je 
suis  chargé  de  vt)us  proposer  : 

>  La  Convention  nattbuale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  fait  au  nom  du  comité  des  Tinances,  section 
del  contributions  publiques ,  sur  le  doute  qui  à*est 
élevé  s  ril  peut  être  .fîiit  des  réductions  et  change- 
mnts  partlAla  sur  l«s  rMes  de  1794  (  vieux  style], 
relativement  aux  variations  survenues  depuis  1793; 

•  GoHsidéraut  que  la  loi  du  ta  nivOSe  n'a  point 
aéro^é  aux  lois  précédentes  qui  autorisent  les  té* 
ductions  et  changements  partiels  survenus  d'une 
année  à  l'autre  danis  les  revenus  fonciers  des  contri- 
buables ,  t\,  que  conséquemment  II  peut  en  être  usé 
alt^st  au  rftie  de  1794  ,  à  la  charge  d'en  rétablir  le 
montant  sur  les  communes  où  ces  réductions  et 
changements  partiels aHroutlicy,  pasSe  à  Tordre  du 
jour. . 

1  Le  présent  décret  sera  îbséré  an  Bulletin  de  cor- 
respondance. • 

Ce  projet  d«  d#er«t  est  adopté.' 

Jars-Panviluers,  au  nom  du  comité  des  secours 
publics  I  Vous  vmis  rappelez,  citoyens,  qn*à  Tépoque 
où  la  ttuerre  de  la  Vendée  commenta  a  prendre  un 
caraetere  alarmant  pour  la  patrie ,  il  fallut,  pour 
ainsi  dire,  improviser  une  armée  pour  en  arrêter 
les  progrès.  Il  fut  fait  «n  conséquence  un  appel  A 
plusieurs  communes  ou  départements  de  la  repu* 
Mique  ;  il  «a  fut  fait  in  MtrUHil  è  la  commune  de 
Parlât 


I  Presque  toutes  les  sections ,  nonr  exciter  à  1«  dé- 
;  fense  de  la  liberté  le  zèle  des  citoyens  peu  fortunés 
qui  pouvaient  être  retenus  par  des  inquiétudes  sur 
leur  sort  à  venir  ou  sur  celui  de  leurs  femmes  et  de 
leurs  enfants,  prirent  envers  les  uns  et  lesautres  des 
engagementa  qui  furent  plutôt  dictés  par  VetUhou- 
'  siasme  que  par  la  raison. 

On  a  trop  su  que  la  plupart  do  CêS  volontaires 
avaient  reçu  chacun  500  livres  au  moment  de  leur 
départ  ;  plusieurs  devaient  en  recevoir  autant  è  leur 
retour.  La  section  du  Théâtre-Français  i  entre  ou- 
tres .  s*était  engagée  à  payer  400livref  de  pension 
viagère  à  ceux  des  volontaires  de  son  arrondisse* 
ment  qui ,  par  leurs  blessures  i  se  trouveraient  hors 
d'état  d^eitercer  aucune  profession  ;  elle  doit  payer 
la  même  pension  aux  femmes  et  enfknisde  ceux  qui 
ont  perdu  la  vie  dana  lea  oombats. 

Quelque  considérables  que  Soient  ces  encage^ 
meots,  voua  avei  cru  devoir  les  maintenir,  puisque 
vous  avez  décrété  qu'il  serait  pourvu  à  leur  aequit* 
tement  per  dea  aoua  additlonneU  attX  ootca  des  con- 
tribuables de  chaque  aeotioOt 

Votre  comité  des  secours  publics  ne  voua  propose 
donc  pas  d'y  porter  atteinte  ;  maia  il  a  oru  devoir 
appeler  votre  attention  sur  la  pétition  de  la  section 
du  Théâtre-Français,  qui  vous  a  exposé  que  les  mou- 
vements d'enthousiasme  auxquels  elle  s'était  livrée 
pour  exciter  lea  citoyens  à  voter  au  secours  de  la 

ÎMtrie  en  danger  ne  lui  avaient  pas  permis  de  régu- 
ariaer  aa  ffénerosité,  et  quViitratnee  par  ces  mou« 
vements  elle  avait  promis  des  pensions  considéra- 
bles aux  enfants,  sans  penser  à  hxer  le  terme  auquel 
elle  cesserait  de  les  paver. 

La  réflexion  lui  a  fait  sentir  la  nécessité  de  réparer 
cette  omission,  et  elle  vous  o  demandé  de  le  foirti 

Votre  comité,  chargé  de  vous  présenter  Ses  vues  à 
cet  égard ,  a  pensé  que ,  dans  un  cas  tel  que  celui 
qui  se  présente  et  qui  est  commun  à  plusieurs  autres 
sections ,  il  convenait  de  fixer  le  terme  des  engage* 
ments  des  sections  envers  les  enfants  des  citoyens 
morts  en  combattant  pour  la  république  d'après  tes 
mêmes  principes  qui  vous  ont  airigéa  dans  fa  fixa'* 
tion  des  secours  accordés  par  la  nation,  c^est-â-diré 
à  rèpoque  où  les  enfants  sont  présumés  être  à  même 
de  pourvoir  à  leur  subsistance  par  leur  travail,  hors 
lea  cas  d'infirmités  ;  car  il  répugne  à  la  justice  et  à 
la  politique  de  profiter  de  l'imprévoyance  dei  acco- 
tions dans  la  rédaction  de  leurs  engagemeiits  pour 
le  prolonger  au  delà. 

Voici  le  projet  de  décret  : 

i  La  Convention  nationale ,  après  avoir  eutendu 
le  rapport  de  Son  comité  dea  secours  publics ,  dé-  ' 
Crète  que  les  secours  ou  pensions  promis  par  lea 
communes  ou  sections  aux  enibnts  desdétènMursde 
la  patrie  enrôlés  dans  leurs  arrondissements  respec- 
tifs, et  dont  le  terme  n'a  pas  été  fixé  par  dea  conven- 
tions expresses,  cesseront  d'être  exigibleaè  Tépoque 
où  leadits  enfiints  auront  atteint  l*ége  de  douae 
ans ,  à  moins  quila  ne  soient  infirmes  )  dans  ee  cas 
les  secours  ou  pensions  leur  seront  payés  tant  que 
leurs  infirmités  les  mettront  hors  d*état  de  pourvoir 
à  leur  subsistance  par  leur  propre  travail*  • 

Ce  proiet  de  âéertt  est  adopté» 

U  aéiuee  est  levée  *  quatre  heures. 

llAlICIt  mi  tO  VittfOSBi 

FDtiiBMOtaft  :  Nous  avons  tous  |émt  de  T^tat 
d*oppres^ion  dans  leqtiel  on  vivait  sous  le  renie  de 
la  tyrannie  de  Robespierre,  et  de  la  lésèrete  avee 
laquelle  ou  empriaounait  les  eltoyeus.  Pour  que  M 


65C 


pareils  abns  ne  reviennent  plus,  je  demanderais  que 
les  autorilés  constituées  dans  les  départements,  à 
Paris  les  commissaires  civils ,  donnassent  au  comité 
de  sûreté  générale  ,  à  la  fin  de  chaque  décade ,  un 
état  nominatif  de  tous  les  détenus,  pour  qu'il  pût 
ensuite  en  donner  connaissance  à  la  Convention. 

Plusieurs  voix  :  Cette  loi  existe. 

PKmtiN  (des  Vosges)  :  Je  ne  sais  pas  si  cette  loi 
existe  ;  mais  ce  que  je  sais,  c*est  que,  depuis  quatre 
décades  que  je  suis  au  comité  de  sûreté  générale , 
chargé  de  la  correspondance ,  nous  n'avons  eu  au- 
cuns détails  là-dessus. 

La  proposition  de  Foussedoire  est  adoptée. 

—  On  lit  une  lettre  du  citoyen  Badier,  négociant 
à  Lille ,  qui  réclame  la  restitution  d'une  somme  de 
31,000  livres  en  numéraire,  trouvée  chez  lui  au 
moment  de  son  arrestation ,  et  qui  a  été  déposée  à 
la  trésorerie  nationale. 

LEcoiirrRB  (de  Versailles)  :  Je  convertis  cette  pé- 
tition en  motion,  et  je  demande  eu  outre  que  la  tré- 
sorerie nationale  soit  tenue  de  restituer  en  nature 
tous  les  dépôts  qui  lui  ont  été  faits. 

P/tfit>ttr#  membres  :  Le  renvoi  au  comité  des  fi- 
nances. 

Lecoiktiie  (de  Versailles)  :  Je  consens  au  renvoi 
au  comité  des  finances ,  non  pas  pour  qu'il  garde 
l'argent ,  mais  pour  qu'il  le  rende.  (  Violents  mur- 
mures.) 

Thibault  :  Il  semble  aue  Lecointre  se  soit  abonné 
avec  les  ennemis  de  la  chose  publique  pour  insulter 
la  représentation  nationale.  Le  comité  des  finances 
est-il  fait  pour  garder  l'argent  de  personne?  C'est 
parce  qu'on  craint  sa  surveillance  et  sa  sévérité 
qu'on  le  calomnie. 

GÉNissiEUX  :  La  motion  de  Lecointre  tendrait  à 
faire  croire  qu'il  existe  des  dépôts  d'argent  dans  les 
comités  ;  eh  bien,  il  faut  qu'on  sache  bien  qu'il  n'y  a 
pas  un  sou  dans  les  comités  de  la  Convention,  et  que 
tout  est  porté  à  la  trésorerie. 

La  uétition  du  citoyen  Badier  est  renvoyée  au  co- 
mité aes  finances. 

Lesage-Sênault  :  J'ai  vu  avec  une  surprise  mêlée 
d*indignation  que  le  drapeau  tricolore  ne  flotte  plus 
sur  le  Palais  National.  Je  ne  sais  à  quoi  attribuer 
cela  ;  je  demande  qu'on  s'explique ,  et  qu'il  soit  re- 
placé séance  tenante. 

André  Dumont  :  Dans  la  crainte  de  voir  qualincr 
de  malveillance  un  accident  occasionne  par  te  vent, 
le  comité  de  salut  public  a  envoyé  un  de  ses  mem- 
bres au  comité  des  inspecteurs,  pour  l'inviter  à  faire 
replacer  le  drapeau  le  plus  tôt  possible. 

Bourgeois  :  Non-seulement  le  vent  a  emporté  le 
drapeau,  mais  encore  il  a  cassé  la  flèche  à  laquelle  il 
était  attaché  ;  de  sorte  qu'il  tant  fabriquer  une  nou- 
velle flèche  en  fer.  Voilà  ce  qui  a  occasionné  du  re- 
tard. 

Maure  :  On  ne  doit  pas  nous  faire  un  crime  d'a- 
voir conçu  des  inquiétudes  en  voyant  disparaître 
tout  à  la  fois  le  drapeau  national  et  les  Droits  de 
lllomme.  Je  veux  bien  croire  que  c'est  par  accident 
et  sans  mauvaise  intention  ;  mais  puisque  le  comité 
de  salut  public  a  eu  des  inquiétudes,  il  nous  était 
bien  permis  d'en  avoir  aussi. 

•••  :  Sur  la  proposition  de  Legendre  (de  Paris),  il 
avait  été  décrété  avant-hier  que  la  Déclaration  des 
Droits  et  Pacte  constitutionnel  seraient  replacés 
dans  la  salle  des  séances  de  la  Convention  ;  je  de- 
mande pourquoi  on  n'a  pas  entièrement  exécuté  le 


décret,  et  pourquoi  il  n'y  a  ici  que  la  Déclaration  des 
Droits.  (Applaudissements.)  Je  vois  bien  l'arche  de 
la  constitution,  mais  je  n'ai  pas  sous  lesyeax  la  con- 
stitution elle-même.  Je  demande  qu'elle  soit  ap- 
portée ici  sur-le-champ. 

Atcdré  Dvmont  :  J'appuie  cette  proposition  :  aa 
ton  dont  on  Ta  faite  ,  il  semblerait  que  l'on  voudrait 
attribuer  à  la  malveillance  d'avoir  fait  disparaître  de 
cette  enceinte  l'exemplaire  de  la  constitution  qui  y 
était  placé.  Je  somme  ceux  qui  disent  sans  cesse 
qu'on  veut  détruire  la  constitution  d*accuser  nomi- 
nativement les  hommes  auxquels  ils  prêtent  ce  pro- 
iet.  Remarquez,  citoyens,  que  ceux  qui  crient  si 
nautique  ceux  qui  se  prétendent  les  chauds,  les 
seuls  amis  de  la  constitution,  sont  ceux  qui  ont  ap- 
pelé à  grands  cris  le  gouvernement  révolutionnaire, 
ceux  qui  en  ont  si  bien  usé,  ceux  enfin  qui  le  regret- 
tent. Que  le  peuple  se  méfie  des  manœuvres  perfides 
de  ces  contre-révolutionnaires  qui  voudraient  faire 
croire  que  la  saine  majorité  de  la  Convention  a  le 
dessein  de  renverser  la  constitution  ;  elle  sera  main- 
tenue malgré  vous,  malgré  vos  cris,  malgré  vos  ca- 
lomnies. (  ViEs  applaudissements.  )  Nous  avons  juré 
une  guerre  aux  Jabobins  et  aux  monarchistes ,  aox 
hommes  de  sang  et  aux  royalistes,  et  jamais  le  règne 
des  uns  ni  des  autres  ne  pourra  être  rétabli.  (Nou- 
veaux applaudissements.)  Je  demande  qu'on  mette 
aux  voix  la  proposition  qui  a  été  faite. 

,  La  proposition  est  décrétée. 

—  La  barre  s'ouvre  aux  pétitionnaires. 

Ln  Convention  entend  un  grand  nombre  de  récla* 
mations  particulières  qui  sont  renvoyées  aux  divers 
comités  qu'elles  concernent. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


N,  B.—  Dans  la  séance  du  21  ventôse ,  les  see- 
tious  de  Paris  sont  venues  féliciter  la  Conventioo 
d'avoir  rappelé  dans  son  sein  ceux  de  ses  membres 
mis  hors  de  la  loi  ;  elles  ont  toutes  protesté  contre 
la  révolte  du  31  mai ,  ont  demandé  la  punition  de 
ceux  qui  en  ont  été  les  auteurs,  ainsi  que  des  mas- 
sacres du  2  septembre. 

—  Boissy  a  proposé  de  porter  des  peines  contre 
les  provocateurs  au  royalisme ,  et  de  faire  une 
Adresse  au  peuple  pour  l'éclairer  sur  les  manœuvres 
de  ses  ennemis. 

Après  la  discussion  qui  a  eu  lieu,  ces  propositions 
ont  été  renvoyées  au  comité  de  législation. 

—  Louvel  a  proposé  de  déclarer  que  les  citoyens 
des  départements  qui,  après  le  31  mai,  se  sont  arm^ 
pour  soutenir  la  Convention  ,  ont  bien  mérité  de  la 
patrie. 

On  a  passé  à  l'ordre  du  jour. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  de  la  dette  consolidée  perpélaelle  se  I 
pour  les  six  derniers  mois  de  Pan  i*",  et  pour  Tannée  à  i 
qui  n*ont  pas  touché  les  six  premiers  mois  de  ladite  an^ 
Les  citoyens  qui  ont  retiré  leur  inscription  définitive,  et  qui 
désireraient  être  payés  dans  les  districts,  peuvent  iodiqner 
les  chefs-lieux  de  district  où  ils  veulent  être  payés,  confor-* 
mémenl  à  la  loi  du  S*  jour  des  unsculottides.  • 

Le  payement  des  rentes  viagères  se  fait  cumulatîvemeut 
pour  deux  mois  vingt  et  un  jours  de  Tannée  t793(vieui«iyle) 
et  les  six  prcmiort  mois  de  Tan  3*. 


GAZETTE  NATIONALE  .»  LE  OONITEUR  UNIVERSEL. 

N*  lt3.  ïridi  n  Vbktosb«  l'an  S««  {VfHdrêdi  13  MâR»  1795,  vieuœ  $tyl$.) 


PÙlltlQM. 

ALLEMAGNE^ 

Osnabruck,  lé  H  février.  —  On  écrit  de  Miillieîai  que 
les  Fraiiçai»  ont  fait  arrifer  à  Cologne  un  grand  nombre 
de  chariots  changés  de  subsislances ,  et€|ue  le  clergé  de 
celte  ville  a  eu  ordre  de  donner  au  peuple  trois  cents  me^ 
éures  de  grains, 

—  Le  débordement  des  fleuves  a  inlerron^pu  le  service 
des  postes.  Les  ponts  sont  rompus  sur  le  Weser  i  la  ville 
de  Lipsladt  a  été  inondée. 

—  Le  quartier  gédéral  des  Hanovriens  occupe  la  ville  de 
Munster,  qui  dW  pas  moins  dans  les  plus  vives  alarmes* 
Les  pàlrouitles  françaises  viennent  jusqu^à  Àiibalt« 

—  La  cour  de  tierlin  e«)Tuie  k  fiûle  le  comte  de  Hardem- 
berg,  poUr  suivre  les  négociations  entamées  par  le  feu  comte 
de  Gollz.  Les  cours  de  Londres  el  de  Vienne  font  tout  ce 
quelles  peuvent  pour  discréditer  Jans  ces  circonstances  la 
sibcérité  de  la  Prusse. 

—  La  diète  de  Souabe  a  mis  eo  cJélibératioa  i  î»  Ten- 
tretien  des  troupes  du  cercle;  2*  les  demandes  faites  k  ce 
cerblc  par  la  cour  de  Vienne  :  8*.  les  mesures  nÀxssaires 
pour  la  défetase  du  cercle;  4*  TentretieB  dii  commerce 
dvcc  les  Etats  neutres  limitroplies. 

Brème,  le  S5  fivrief,  —  Il  est  arrivé  ici  deui  commis- 
saiies  8n§laiS|  venant  de  Londres  ;  Tun  s*est  rendu  i  Ha- 
novre auprj^s  du  lord  Malroesbury^  et  le  ieeond  doit  s'a-* 
dresser  au  commissaire  gétléral  de  Tarméc  anglalsei 

—  La  cour  de  Londres  fait  lever  à  sa  solde  neuf  tôrps 
d*émigréa»  Les  ebels  de  ees  corps  sont  i  le  nitfréHial  de 
Broglie«  le  marquis  d*Amiehamp,  leceinie  de  Viomesnili 
le  duc  de  Laval-Montmorency,  le  marquis  de  Bélhlsy^  le 
duc  de  Mortemart»  le  duc  deCastries^  le  marquis  d*Er- 
villy,  le  baron  suisse  de  lloll«  le  comte  d'Hector^  eie;  On 
compte  ù  peu  près  cent  cinquante  cfaefsi  et  à  peine  trois 
cents  soldats  ;  encore  ces  derniers  sont-ils  presque  tous  des 
chevaliers  de  Saint- Louis i  qui  brftleut  de  ftipplanten 
leurs  cbeis  pour  commander  eui-némes. 

Au  reste,  on  attend  dès  hommes,  de  TargeBl  et  des  ar- 
mes d'Au^lelerrei 

ANGLETERRE i 

DEBATS    DO    PAILBMBilTt 

Chambre  de$  eofnmunet.  •—  Suite  de  la  délibéf^atlon  $ur 
Cempmnt  linpériali 

AL  Fox  :  Je  crois  qu*il  n*y  a  point  d'inconvénient  ft  rap- 
peler ici  jes  débats  de  lu  dernière  session,  et  je  prie  Tlio- 
norable  membre  M.  Pitt  de  s'abstenir  de  me  traiter,  comme 
if  le  fait  ordinairement,  d'homme  ardent  et  passionné,  si 
je  le  fais  ressouvenir  que  j'ai  prédit  dans  le  temps  qtie  Pê- 
norme  subside  accordé  au  roi  de  Prusse  serait  pour  Tcm- 
penuT  une  excellente  occasion  de  faire  une  semblable  de- 
mande. Ma  prédictiotl  n*a  point  été  vaine;  un  an  s'est 
écoulé ,  et  déjà  nous  aionS  a  délibérer  sur  des  subsides  à 
accorder  fi  l'empet-eur. 

M.  put  prétend  qiiè  J'ai  btftmê  autrefois  les  ministres  sur 
leur  négligence  à  former  des  alliances  dans  le  continent. 
Je  lui  répondrai  qUMl  y  a  des  temps  pour  (es  alliances  du 
continent,  et  je  lui  ra|)pellerai  cette  sage  maxime,  aussi 
▼raie  en  politique  Comme  en  morale,  que  les  convenances 
changent  avec  les  tetnps.  Ce  sont  les  temps  qu'il  faut  con- 
sidérer ici ,  et  non  les  nriocipeS  dés  ininistres,  principes 
aroits,  mioutieui  et  petits. 

M.  Pitt  m'a  reproché  de  m^abàhdonner  k  de  sophistiques 
ràlsohnetnebt^  tnalS  II  m'accuse  dé  ses  proprés  erreurs  : 
if  pettsè,  en  élRft,  qde  le  rbl  Ae  Prusse  a  manqué  de  toi  en 
4794  ;  cependant  ^  dit-il ,  il  pourra  être  fidèle  en  i^  tt  fié  ; 
c^cst-à-dil-e  qne  Gdriliai^  est  sàiys  fbij  et  qu'on  j^ui  ce- 
pcridâht  se  Hél'  avec  elle.  De  pareils  faisohhemeîils  iiè  mé- 
ritent pas  dé  répbMSë,  et  je  fale  conléiiièfui  de  lui  ëliscrvér 
qu'il  est  imprudent  de  trop  ooifepter  fût  l'bdmme  qui  a 
•déjà  fiole  ses  engagements. 

V Série»  "^Tome  X» 


liais  èi  tibU»  «tdiiiinobs  attentivement  les  ciréotistànéet 
àtije  ironie  Tédiperetii-,  iious  serons  convaincus  qu'il  est 
IrB-brdbable  4u*il  sera  àtissi  peu  fidèle  que  son  frère  le 
rbl  de  Prusse,  et  je  jii^tettds  qu*il  i  avait  beaucoup  plus 
de  faisons  de  se  confier  à  celui-ci  I  aii  passé  qu'à  l'empe- 
teiîf  aujoiird'bili.  Il  est  d^ailleurs  ft  reibarqiier  que  l'hono- 
hible  lliembre  Uôus  a  oflTert  pour  le  roi  de  Prusse  tous  les 
Raisonnements  dont  il  veut  nous  convaincre  aujourd'hui 
pour  l'empereur.-  Si,  dans  totis  les  raisonnements  que  l'on 
à  développés  pour  ce  monarque,  la  Chambre  ne  recon- 
iiatt  pdS  tdus  ceui  que  l'on  a  faits  pour  le  roi  de  Prusse,  je 
me  lais,  et  je  vote  l'emprunt  de  6  nlillions  sterling,  em« 
(it-unt  dont  il  faut  s'attendre  i  retirer  les  mêmes  fruits  que 
ne  celui  de  l'an  passé.  Ne  sàit-on  pas  que  chaque  pjys  n'a- 
git jamais  que  d'après  ses  intérêts  ?  et  n  Vst-il  pas  probable 
^ue  l'Aulriclié  cbérdiera  enfin  son  intérêt  elson  salut  dans 
line  paix  avec  la  France  ?  Alors  que  deviendrons -nous  ? 
Nous  resterons  seuls  pour  combattre  les  Français,  et  nous 
aurons  payé  le  subside  par-dessus  le  marché.  L'on  vous 
disait,  l'an  passé,  que  le  dernier  roi  de  Prusse,  par  sa 
fidélité  dans  ses  engagements,  paR  sa  bravoure  dans  les 
oOibbats,  avait  accru  ses  Taibies  Etats  au  noint  d'en  falrd 
Tobjet  dé  l^efllrie  de  toute  l'Europe,  et  qu*il  était  à  présu- 
niér  qiié  sod  successeur  né  se  départirait  pas  d'une  si  ho- 
norable conduite.  Qu^est*il  arrivé?  Chacun  le  saiL  CV'st 
dans  ce  seiià  ^ue  l'on  vous  a  parlé  d'uti  empereur  fameux 
par  sa  lojralité  :  je  treôablë  que  ce  raisonnement  ne  ^it 
aussi  mautais  que  telui  dé  l'an  passé. 

&f.  Pitt  se  flatte  que  la  majorité  de  la  Chambre  est  con- 
vaincue de  son  opinion.  Chacun  sait,  en  effet,  qu'il  a  lr.i 
moyens  de  persuader  la  majorité  d'être  de  son  opinion  ou  d  j 
n'en  être  pas  ;  mais  personne  ne  soutiendra  «  je  le  suppose  i 
qu^une  pareille  conviction  prouve  en  rien  la  justice  et  In 
vérité  des  choses.  L'on  vous  a  cité  un  discours  de  Tallien 
comme  une  preuve  de  l'épuisement  où  la  France  est  ré*, 
duite:  mais  doit-on  avoir  confiance  en  de  pareils  discours, 
qui  n^ont  le  plus  souvent  pour  okjet  que  de  làire  réussir 
des  Vues  personnelles?  . 

L^on  prétend  que  les  6  millions  fournis  pour  cet  emprunt 
procureront  de  grands  avantages  à  l'Angleterre  t  et  qu'en 
les  refu^ni  on  ne  se  donnerait  pas  un  matelot  de  plus.  Ce* 
calcul  d'une  année  est  un  mauvais  calcul  ;  car  il  nefaul 
pas  examiner  seulement  les  dépenses  d'une  année  ou  deux^ 
mais  si  nos  ressources  sont  suffisantes  pour  soutenir  notre 
marine  pendant  un  grand  nombre  d'années  ;  et  fi  cet  égard 
je  citerai  un  exemple.  Croyes-vous  que,  si  les  Français 
n'eussent  point  eu  à  supporter  les  énormes  dépenses  de 
leur  guerre  du  continent,  ils  n'eussent  pas  trouvé  cette 
année  de  bien  plus  grandes  ressources  pour  i'aCcroisSc- 
ment  de  leur  marine? 

Ce  raisonnement  nous  est  bien  plus  applicable  eneOre  ; 
car  ce  n'est  pas  ft  leurs  ressources  personnelles  que  U^ 
Français  doivent  leurs  forces  de  terre  et  de  mer,  c'est  à  lu 
puissance  quMs  ont  acquise  par  leurs  conquêtes» 

L'honorable  membre  nous  a  dit  qu'il  ne  pouvait  èntrrr 
dans  aucuns  détails  sur  le  traité  avec  l'empereur;  maift, 
en  refusant  dé  nous  accorder  une  confiance  aussi  illimitée, 
il  aurait  dCt  nous  donner  certains  détails  sur  la  conduite  (Ij 
ce  monarque.  Nous  a-t-il  expliqué  pourquoi  les  Autri- 
chiens ont  abandonné  Tunrnay  ?  pourquoi  i  lOrS  de  la  re- 
traite du  duc  d'York ,  ils  ont  d  bonteusemeat  abandomiâ 
Coudé  et  Valenciennes  ? 

Dans  uqe  rejation  de  la  dernière  èainpagne,-  j'ai  tu  nnc 
lettre  du  duc  d'YorJi,  où  il  déclare  qu'il  àlserve  les  mou- 
vements des  Autrichiens  avec  autant  d'inquiétude  que  eèuf 
des  ennemis.  Ne  serait-il  pas  convenable  d'examiner  un 
peu  les  cbôsèsi^  l^e  nous  domiera-t-oo  jamais  quelques 
explications  oé  la  très-extraordinaire  conduite  de  oOS  hon- 
nêtes alliés?  Je  ne  p^rle  pas  de  la  Prusse;  sa  conduite  esl 
si  basse  due  nos  ministres  même^  n'oaent  pas  la  défendre, 
si  ceperiaatit  ils  ne  nous  ont  pas  iqsipué  que  nous  n'élkmè 
pas  étrangers  au  démembrement  de  la  Pologne* 

Mais  fe  prie  nos  minisires  de  Irireet  d^eiitmlner  «Ilérna- 
tivesaent  (et  déclaralioM  ë«  princtf  de  GébMirg  avant  et 

83 


658 


oprès  la  désertion  de  Dumonriex.  Certes,  U  y  a  là  autant 
de  perOdie  que  dans  toute  la  conduite  de  la  Prusse.  Je 
soutiens  que  Ton  ne  peut  mettre  aucune  conGance  dans 
des  puissances  qui  ont  agi  comme  la  Prusse  et  rAulricbe» 
Lorsque  le  peuple  d^Angleterre  demande  la  paix  arec 
la  France,  nos  ministres  répondent  :  «  Avec  qui  voulei* 
«  TOUS  que  nous  traitions?  Est-ce  a?ec  un  Brissot,  un  Ro* 
«  bespierre,  etc.  ?i»  Mais  la  perfidie  des  coprs  d* Allemagne 
•  ne  doit-elle  pas  également  nous  détourner  de  confier,  de 
sacrifier  à  leur  foi  les  intérêts  les  plus  sacrés  de  ce  pays  ? 
L*lionorable  membre  se  fâche  de  ce  qu*on  donne  le  nom 
de  despotes  aux  princes  allemands;  mais  tout  Anglais  doit 
exécrer  de  pareils  caractères ,  qui  déshonorent  non-seule- 
ment les  majestés,  mais  Thumanilé  mOmé;  oui,  les  Anglais 
doivent  les  exécrer,  les  Anglais,  dont  le  monarque  n'a  rien 
de  commun  avec  de  pareils  hommes  que  le  nom  de  roi.. Le 
roi  de  Prusse,  nous  ne  Tignorons  pas,  retenait  dans  les 
fers  des  hommes  que,  par  de  honteux  motifs,  il  a  cédés  i 
Pempereur.  La  conduite  de  ces  despotes  envers  Lafayette 
les  fera,  je  Tespère,  exécrer  à  jamais  parmi  nous;  et  je  ne 
doute  pas  que  Thonorable  membre  n'agU  en  sens  inverse 
B*il  était  chancelier  de  Tempcreur. 

Au  reste,  la  maison  d*Autriche  n*est  pas  aussi  ardente 
pour  la  guerre  qu'on  Ta  prétendu,  puisque  PEmpire  a  en- 
tamé des  négociations  pour  la  paix.  Si ,  tandis  que  Pem- 
pereur  traite  avec  nous  d*un  emprunt  comme  chef  de  TEm- 
pire,  il  est  probablement  à  la  tête  de  ces  négociations;  si 
le  corps  germanique  est  dans  de  pareilles  dispositions,  il 
n*est  pas  très-certain  que  ^empereur  veuille  irrévocable- 
ment continuer  la  guerre.  Mais,  en  lui  supposant  cette  in- 
tention ,  est-il  très-probable  qu'il  pourra  lever  deux  cent 
mille  hommes?  L'honorable  membre  prétend  que,  si  on 
lui  fournissait  seulement  2  millions  de  plus,  il  marcherait 
en  France  avec  trois  cent  mille  hommes  ;  voilà  un  raison- 
nement si  extraordinaire  que,  si  on  ne  connaissait  pas 
toute  la  logique  de  M.  Pitt,  on  pourrait  se  moquer  de  lui. 
11. s'appuie  sur  la  bonne  foi  et  le  crédit  de  l'empereur; 
mais,  s'il  en  est  ainsi,  pourquoi  donc  les  minisires  le  lais- 
sent-ils payer  un  si  gros  intérêt?  Si  son  crédit  est  si  bon, 
pourquoi  ne  le  font-ils  pas  traiter  avec  les  prêteurs  eux- 
mêmes?  Qu*ii  se  serve  de  son  crédit  et  de  sa  royale  foi,  cela 
ne  regarde  en  rien  le  parlement  ;  mais  je  crois  que  les  prê- 
teurs connaissent  mieux  que  nos  ministres  le  crédit  de  Sa 
Majesté  impériale. 

Cet  emprunt  diffère  en  un  point  essentiel  du  subside 
pour  le  roi  de  Prusse.  On  payait  celui-ci  tous  les  mois,  et, 
en  cas  d'infraction  à  ses  engagements,  les  ministres  pou- 
vaient arrêter  les  payements  et  sauver 'au  moins  unepar^ 
tie  du  subside;  mais  l'empereur  reçoit  tout  à  la  fois,  et,  s'il 
ne  remplit  pas  ses  promesses,  Temprunt  en  entier  sera 
perdu  pour  nous.  Qu'il  lui  plaise,  par  exemple,  de  fbire 
la* paix  dans  deux  ou  trois  mois,  il  n'y  aura  pas  de  paye- 
ments à  arrêter,  et  le  peuple  restera  grevé  d'un  impôt  de 
450,000  livres  sterling  pour  Tintérèt  de  cet  emprunt  impé- 
rial. 

L*bonorable  membre' nous  a  parlé  de  la  banque  de 
Vienne;  mais  peut-elle  survivre  au  K'gne  de  l'empereur 
actuel  ?  La  base  de  son  crédit  était  dans  les  Pays-Bas  ;  mais 
.  ce  gage  ne  lui  appartient  plus  ;  les  Pays-Bas  sont  un  enjeu 
qu'il  s'agit  de  retirer;  il  n'a  donc  d'autre  garantie  à  nous 
offrir  que  sa  parole  d'honneur  ;  faible  motif  pour  espérer 
qu'il  sera  fidèle  à  ses  promesses. 

Cet  emprunt  est  donc  vicieux,  essentiellement  vicieux. 
Et  quelles  suites  pouvons-nous  nous  en  promettre  ?  Les  mi- 
nistres sont-ils  certains  que  la  présente  campagne  finira  la 
guerre  et  arrêtera  les  flots  de  sang  dont  l'Europe  est  inon- 
dée? L'empereur  n'aura-t-il  pas  besoin  l'année  prochaine 
d'un  pareil  emprunt?  Ce  sera  donc  un  revenu  annuel  que 
nous  lui  ferons?  Mais  l'Espagne  ne  suivra-t-elle  pas  l'exem- 
ple de  nos  autres  fidèles  alliés  ? 

Que  la  guerre  se  prolonge  encore  une  année,  quelle  sera 
notre  destinée  ?  quel  sera  Ténorme  fardeau  qui  pèsera  sur 
nous?  Nous  avons  non-seulement  nos  dépenses  à  payer  ;  il 
faut  encore  que  nous  subvenions  aux  finances  épuisées  de 
la  Prusse,  de  TAutriche,  de  la  Sardaigne,  etc.  Cherchons 
plutôt  à  augmenter  nos  forces,  à  doubler  notre  marine. 
Toutes  les  puissances  du  continent  désirent  la  paii  ;  ce  dé- 
sir est  celui  de  l'Europe  entière,  éclairée  par  une  funeste 
et  terrible  expérience.  Jusqu*à  présent  mes  conjectures  sur 


l'Autriche  ont  été  justifiées  par  réfénement ,  et  onc  fbolt 
de  raisons  nouvelles  m'ont  convaincu  que  ces  paUsanoet 
soupirent  après  la  paix.  Et  si  elles  exécutent  ce  dcMela, 
quel  sera  le  sort  de  l'Angleterre?  quel  sera  le  sort  de  mn 
malheureux  soldats,  que  nous  enverrons  dans  le  continent 
pour  y  être  trahis  et  massacrés  ?  Les  armées  de  Tempereor 
se  soumettront-elles  à  un  commandant  anglais?  Ne  se  mil* 
tineraient-dles  pas  contre  leurs  maîtres  impériaux  si»  ce 
qu*elles  regarderaient  comme  une  indignité,  oo  les  sou- 
mettait à  nos  ordres?  Je  voudrais,  car,  quelque  rang  où  il 
soit  placé,  aucun  Anglais  ne  doit  être  regardé  comine  su- 
périeur à  Pintérêt  de  la  patrie,  je  voudrais,  dis-ie,  qôc  le 
duc  d'York  f&t  obligé  de  comparaître  devant  la  Chambrv, 
et  de  déclarer  s'il  croit  que  l'empereur  coopérera  aai  intè* 
rêt»  de  Sa  Majesté;  s'il  ne  pense  pas,  au  contraire,  q«*U 
cherchera  à  faire  une  paix  séparée* 

Le  caractère  de  l'empereur  et  sa  posItioD  partieiilière 
vis-à-vis  de  la  France  ne  nous  offrent  donc  que  de  vagues 
et  incertaines  espérances.  Nous  n*aTons  aucune  sûreté  à  eu 
attendre;  il  est  donc  utile  et  nécessaire  de  ne  lui  délivrer 
l'emprunt  qu'à  des  époques  différentes,  pour  qu^en  cas 
d'infraction  de  sa  part,  les  ministres  puissent  sauver  au 
moins  ce  qui  resterait  à  lui  fournir.  Enfin ,  il  est  dange» 
reux  d'accumuler  ainsi  dépenses  sur  dépenses,  comne  le 
fait  le  gouvernement,  et  c*est  la  marque  d'un  esprit  déré- 
glé de  surcharger  d'une  somme  aussi  énorme  un  pays  qui 
gémit  déjà  sous  le  poids  des  impôts  les  pluseiorbitants. 

Je  me  réserve  de  faire  dans  une  autre  .circonstance  de 
nouvelles  objections  contre  la  mesure  qu'on  tous  propose; 
mais  je  voudrais  que  les  ministres  réfléchissent  un  peu  sur 
l'état  des  choses,  et'  qu'ils  examinassent  avec  attention  les 
funestes  démarches  où  ils  nous  ont  engagés.  Les  circon- 
stances pré^utes  réclament  toutes  les  lumières,  toutes  les 
vertus  des  vrais  Anglais  ;  plus  d'astucieuse  politique,  plus 
de  criminelle  duplicité,  car  le  temps  en  est  passé. 

Je  conclus  par  un  amendement  qui  est  de  snpprli 
dans  PAdresse  à  Sa  Majesté  tout  ce  qui  suit  le  mot  p 
aerver, 

M.  Pultney  trouve  que  le  préopinant  insiste  trop  sur  Ici 
forces  navales  que  les  circonstances  présentes  doivent  lUre 
employer  à  la  défense  des  côtes  mêmes  de  1* Angleterre;  il 
assure  quelles  seront  infailliblement  attaquées  si  Ton  n*a(* 
«aque  les  Français  sur  leur  propre  territoire.  Il  est  étonné 
d^entendre  dire  que  le  subside  impérial  servira  à  Pastertis- 
sèment  de  la  Pologne,  comme  le  subside  prussien  y  a  servi  ; 
l'empereur  est  aussi  avancé  sur  ce  point  que  les  autres  puis- 
sances copartageanles ;  ainsi,  ce  qu'il  a  de  mieut  à  faire, 
et  .qu'il  fera  sûrement,  et  ce  en  quoi  il  faut  le  S(*eonder, 
c'est  d'envoyer  une  forte  armée  contre  les  frontières  de 
France ,  conquérir  la  paix  au  dedans  et  la  considération  au 
dehors;  car  ces  deux  avantages  inestimables  sont  là,  et  là 
seulement. 

M.  Brandiing  ne  peut  réussir,  au  milieu  du  tumulte,  à 
se  faire  entendre  contre  l'amendement,  et  PAdresse  an  lei 
passe,  173  voix  la  faisant  admettre  contre  56  réctamants. 

RÉPUBLIQUE   DES   PROVINCES-UNIES. 

Amsterdam^  le  4  mari.  —  L^asscmblée  des  représen- 
tants provisoires  du  peuple  de  Hollande  s'est  formée,  le  25, 
en  comité  général  pour  délibérer  sur  la  situation  actuelle 
des  finances.  Le  comité  des  finances  avait  préalablement 
convoqué  quelques  personnes  instruites  sur  cette  partie, 
pour  s'éclairer  de  leurs  avis. 

—  Les  corps  républicains  qui  sont  dans  le  pays  de  Gro- 
ningue  reçoivent  de  fortes  contributions  en  fourrages  cC 
en  denrées  de  p rem i(>re  nécessité,  qu'ils  lèvent  dana  le 
comté  de  Dent heim.  Ce  comté  est  hypothéqué  à  TAngle- 
terre  depuis  quarante  ans  par  le  comte  de  ce  nom  ;  tous  les 
fonctionnaires  publics  y  sont  nommés  par  la  réseoce  de 
Hanovre,  au  nom  du  roi  Georges. 

—  Les  Français  occupent  Bourtange,  Delfxiel  et  MIeu* 
weschaux ,  trois  forts  sur  les  frontières  du  pays  de  Munster 
et  de  rOost-Frise. 

Les  représentants  du  peuple  français  ayant  manifesté  la 
désir  que  la  navigation  fCkt  ouverte,  les  représentauls  de 
cette  commune  ont  publié  la  proclamation  suivante  : 

LfSBRTÉ,   ÉOALITé,   PRATBRlflTi. 

c  Les  représentants  provisoires  de  la  commune  d*Aiil« 


650 


tterdam  »  poor  satisfiiire  le  plas  t6l  poiilble  aux  lotentions 
que  les  représentants  français  nous  ont  manifestées  de  le* 
ver  rembargo  quMIs  ont  mis  et  d^onvrir  la  naTigation ,  or- 
donnent par  les  présentes  (sur  les  représentations  du  ci- 
toyen ToulRilt,  principal  agent  de  la  marine  et  des  colonies, 
autorisé  spécialement  par  la  nation  française  ii  prendre  une 
connaissance  exacte  de  tous  les  vaisseaux  et  l>atimenis  a|)- 
partenant  aux  nations  en  guerre  avec  la  France,  leur  gran- 
deur, le  nombre  des  hommes  de  Péquipage»  des  charges 
qu*ils  portent,  pour  autant  qu'elles  se  trouvent  encore  dans 
ces  vaisseaux,  ou  qu*elles  aient  déjà  été  transportées,  en 
tout  ou  en  partie,  sur  d*autres  vaisseaux  ou  allèges,  et  ù 
qui  elles  appartiennent)  i  tous  négociants,  cargadors, 
courtiers  de  vaisseaux ,  et  tous  ceux  que  cette  publication 
pourra  regarder,  d*en  faire  sous  trou  jours,  après  ladite 
pubncalion ,  leur  déclaration  par  écrit  au  comité  de  com- 
merce et  de  marine,  soit  que  ces  marchandises  soient  char- 
gées pour  leur  compte  ou  pour  celui  de  leurs  corres- 
pondants, en  7  ajoutant  leurs  noms.  Le  susdit  comité 
s'occuperade  cet  objet,  après  la  publication  des  présentes, 
tous  les  fours,  excepté  le  dimanche,  depuis  dix  heures  du 
matin  jusqu'à  une  heure  après  midi ,  sous  peine  que  ceux 
qui  seront  trouvés  coupables  de  négligence  à  cet  égard,  ou 
d'avoir  fait  des  déclarations  frauduleuses,  seront  regardés 
comme  des  ennemis  des  deux  républiques,  et  comme  tels 
punis  rigoureusement  selon  Texlgence  des  cas. 

«  Arrêté  et  publié  le  27  février  1795 ,  la  première  année 
de  la  liberté  batave. 

c  Par  ordre  des  susdits  représentants  : 

«  G.  BaaHDiBA  Bbamdis,  ieeritaire,  s 


REPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

Niett  («10  vcfilose. —Depuis  quelques  jours  les  Géuois 
paraissent  atoir  alMndonné  tous  nos  ports.  Les  taxations 
et  les  violences  employées  envers  plusieurs  de  leurs  mate- 
lots et  patrons  les  avaient  totalement  découragés  et  con- 
sternés. Un  grand  nombre  de  bâtiments  de  celle  républi- 
que, chargés  de  grains  pour  noire  compte,  étaient  attendus 
ici  avec  impatience.  Tout  d^un  coup  on  apprend  que  leurs 
équipages  se  refusent  absolument  à  partir,  et  que  quelques 
autres,  déjà  arrivés  au  Port-Maurice,  ont  rebroussé  che- 
min ,  et  sont  rentrés  dans  le  port  de  Gênes. 

Le  représentant  Pn>st  s'est  aussitôt  etnpressé  de  prévenir 
les  effets  dangereux  qui  allaient  résulter  nécessairement 
d'un  tel  préjugé;  il  a  publié  un  arrêté  qui  a  été  traduit  en 
italien,  et  par  lequel  il  invite  avec  force  les  Génois,  nos 
alliés,  à  ne  jamais  douter  de  la  justice  et  de  la  loyauté  du 
peuple  français;  il  leur  promet  en  son  nom  sAret^  protec- 
tion, lil>erté  ;  que  jamais  et  sous  aucun  prétexte  il  ne  leur 
sera  fait  la  moindre  violence;  que  justice  leur  sera  rendue 
pour  tous  les  torts  qu'ils  ont  éprouvés  jusqu'à  ce  moment 
et  pour  les  actes  arbitraires  auxquels  ib  ont  été  obligés 
d'obéir,  etc.  Il  faut  espérer  que  cette  proclamation  mettra 
fin  aux  impressions  défavorables  que  l'on  a  voulu  leurdon- 
■er  de  nous;  que  la  famine  que  l'on  a  voulu  attirer  dans 
le  Midi  n'étendra  pas  ses  ravagessur  celte  belle  contrée,  et 
que  les  projets  désastreux  de  quelques  perfides,  qui  vou- 
laient organiser  le  trouble  et  exciter  à  la  révolte  les  habi- 
tants des  départemeou  méridionaux  de  la  république,  se- 
ront encore  une  fois  déjoués. 

Toulon ,  le  il  ventoie.  —  L'armée  navale  a  appareillé 
le  11  ventoie  ;  elle  est  composée  de  quinze  vaisseaux ,  dont 
un  à  trois  ponts,  trois  de  80  canons,  de  cin4  frégates,  une 
corvette  et  quelques  bricks. 

Un  convoi  armé  de  vingt  mille  hommes  est  atissi  prêt  à 
mettre  à  la  voile. 

Parii,  le  2S  vettlote.  —  S'il  suflBsalt,  pour  empêcher  à 
Jamais  le  retour  de  ces  temps  de  deuil  et  de  larmes  qui 
ont  pesé  sur  la  France  pendant  l'époque  tyrannique  du  31 
mai  au  0  thermidor,  de  rappeler  tous  les  traits  de  férocité 
dont  chaque  jour  nous  offrait  un  exemple ,  nous  citerions 
aussi,  comme  l'ont  fait  quelques  feuilles,  les  deux  lettres 
qui  se  trouvent  au  commencement  du  second  Numéro  du 
Journal  de  COppoêiH^n,  par  Real.  Sans  doute  de  pareils 
souvenirs,  en  déchirant  les  âmes  sensibles,  donnent  un 
nouveau  degré  de  force  à  l'énergie  des  patriotes  contre  les 
auteur»  et  les  partisans  de  la  lyranniei  mais  C9  qui  peut 


surtout  rendre  Impossible  le  retour  de  ces  horreurs,  c*est 
le  lèle  et  le  courage  des  bons  citoyens  à  éclairer  l'opinion 
du  |)euple  et  de  ses  représentants  sur  les  vices  de  plusieurs 
lois  que  la  rétolution  du  9  thermidor  n'a  pas  encore  re- 
plongées dans  la  tombe  des  assassins  de  la  patrie.  Ce  cou- 
rage et  ce  lèle  nous  paraissent  animer  le  cœur  et  guider  la 
plume  de  Real  ;  ses  efforts,  en  conservant  toujours  leur  pu- 
reté, ne  seront  pas  perdus  pour  le  bien  de  la  répul^lique  : 
une  telle  récompense  suffit  pour  payer  la  persévérance  d'un 
ami  des  principes  et  de  l'humanilé. 

Nous  allons  analyser  rapidement  les  vérités  fortes  qu'il 
développe  dans  ce  Numéro  de  son  ouvrage.  C'est  ù  l'orga- 
nisation du  tribunal  révolutionnaire  qu'il  s'attache  d'a- 
bord ;  la  loi  (lu  8  nivôse  lui  parait  conserver  une  ressem- 
blance de  famille  avec  celle  du  22  prairial.  En  examinant 
l'esprit  de  cette  loi ,  il  s'écrie  avec  Cicéron  :  Tyvannu»  oe- 
cidit^  vioit  tyrannus»  11  se  demande  :  Qu'csl-ce qu'un  tri« 
bunal  révolutionnaire  ?  Selon  lui ,  c*est  une  arme  dans  la 
main  du  parti  dominant  pour  tuer  légalement  le  parti 
abattu.  Qui  forme  le  tribunal?  le  parti  qui  domine.  Qui  fait 
son  code?  le  parti  qui  domine.  Quel  est  l'esprit  de  L'audi- 
toire? celui  du  parti  qui  domine.  Qui  sont  ceux  que  l'on 
poursuit,  que  Ton  condamne?  ceux  qui  s'opposent  au  parti 
qui  domine.  Revenant  à  la  loi  du  8  nivôse,  il  demande 
pourquoi  elle  ordonne  :  1*  que  les  jurés  voteront  à  haute 
voix  ;  2*  qu'ils  acquitteront  ou  condamneront  à  la  simple 
majorité;  3*  pourquoi  elle  réduit  les  jurés  à  onze  au  lieu 
de  les  laisser  à  douze;  A*  enfin,  pourquoi  elle  prive  les 
malheureux  condamnés  de  tout  recours  au  tribunal  de  cas- 
sation? 

Relativement  à  la  première  question,  il  rappelle  l'affaire 
de  Bachmann,  jugé  au  tribunal  du  17  août.  C'était  le  2  sep- 
tembre; les  jurés  allaient  délibérer;  on  tire  le  canon  d'a- 
larme; une  troupe  furieuse  se  précipite  dans  la  salle  d'au- 
dience, et  demande  à  grands  cris  Taccusé  pour  Vexpédicr  • 
sur-le-champ.  Les  juges  conliennent  ces  scélérats.  Les  ju- 
rés font  annoncer  qu'ils  sont  prêts  à  donner  leur  déclara- 
tion. Ils  furent  obligés  d'aller  aux  voix  en  présence  les  uns 
des  autres,  dans  la  seule  salie  quixestàt  libre. 

Déjà  une  boule  blanche  était  en  faveur  de  l'accusé,  et 
trois  sur  doute  pouvaient  Tacquitler  ;  un  autre  juré  se  pré- 
sente, et,  après  avoir  déclaré  le  fait  constant,  saisit  une 
boule  blanche  pour  prononcer  sur  la  question  intention- 
nelle. Quelques-uns  des  jurés  frémirent.  •  Que  fais-tu  ?  lui 
dit-on;  quand  un  troisième  juré  serait  de  ton  avis,  vous 
ne  sauveriez  pas  l'accusé;  il  serait  mis  en  pièces,  et  vous 
feriez  égorger  inutilement  avec  lui  les  juges  et  les  jurés.  > 
'  Ces  réflexions,  les  bruits  affreux  qu'un  répandait,  les 
hurlements  qu'on  entendait  le  firent  hésiler  un  instant;  mais 
bienldt  :  •  Je  n'ai  qu'une  conscience,  dit-il,  et  je  sais  mou- 
rir. (Il  met  la  boule  blanche.)  S'il  s'en  trouve  un  troisième, 
ajoule-t-il  avec  émotion,  soyez  tranquilles  :  j'irai  déclarer 
au  peuple  que  c'est  moi  qui  ai  sauvé  l'accusé.  > 

Fonctionnaires  publics,  quelle  leçon,  quel  exemple  pour 
vousl 

Real ,  après  avoir  relevé  des  expressions  échappées  au 
rapporteur  delà  loi  du  8  nivose,  comme  celle-ci  :  «  Il  faut 
encore  à  la  liberté  des  hécatombes,  >  prouve  que,  loin  d'a- 
voir remporté  une  grande  victoire  sur  l'aristocratie  en  fai- 
sant voter  à  haute  voix  et  à  la  simple  pluralité,  ces  fqrmes 
ont  fait  massacrer  d'excellents  citoyens  que  les  formes  or- 
dinaires auraient  sauvés.  Il  cite  l'exemple  de  l'Angleterre, 
où  il  faut  l'unanimité  des  jurés  pour  la  condamnation. 

Il  s'élève  ensuite  contre  la  disposition  de  cette  loi  qui 
6te  aux  condamnés  tout  recours  en  cassation  ;  il  s'élève 
contre  la  proposition  faite  par  le  comité  de  législation  de 
casser  un  jugement  qui  acquitte.  «  Si  l'on  nous  condamne, 
diront  les  accusés,  la  voie  de  cassatiou  nous  est  fermée; 
mais  elle  sera  ouverte  à  nos  accusateurs  si  l'on  nous  ac- 
quitte. >  Il  annonce  qu'il  traitera  dans  son  troisième  Nu- 
méro cette  intéressante  question  :  s  Doit-on  confisquer  les 
biens  des  condamnés  ?  > 

Enfin  il  termine  cet  article  sur  le  tribunal  révolution- 
naire par  une  dernière  question  :  c  Pourquoi  ne  peut-on 
se  présenter  au  tribunal  pour  défendre  un  accusé  sans 
avoir  un  certificat  de  civisme?  >  11  démontre  que  cette  dis- 
position, imaginée  par  Couthon,  nous  reporte  •  à  ces  bien- 
heureux temps  des  gens  suspects,  et  sous  ce  régime  bien- 
faisant des  charretées,  • 


SCO 


•  Le  déftoieur,  a]oule-t-11,  n'est  que  Porgiane  de  Fao- 
eusé;  il  ne  feil  que  rassembler  et  présenter  dans  un  ordre 
favorable  ]es  moyens  que  Paccu^é  lui  fournit.  Eb  bien, 
dit-il  au  rapporteur  de  la  lofdu  8  ni? ose ,  il  faut  a?oir  le 
courage  de  pousser  plus  loin  laconséqupnee,  et  présenter 
une  disposition  qui  interdise  à  l'accusé  lui-même  la  fticulté 
de  se  défendre,  à  moins  qu*il  ne  justiCe  d'un  certificat  de 
eivisme.  • 

Nous  ne  suivrons  point  Real  dans  la  censure  énergique 
et  trop  juste  qu*il  Tait  dNine  disposition  de  la  loi  du  23  ni- 
vôse, relutife  aux  émigrés.  On  peut  foir  dans  Pouvrage 
même  comment  II  prouve  que  cette  disposition  rétablit  une 
distinction  entre  les  Français,  avec  quelle  force  il  retrace 
les  calamités  de  Pabominuble  règne  qui  vient  de  se  passer, 
eft  la  consternation  et  la  terreur  avaient  atteint  toutes  les 
classes,  tous  les  individus;  où,  selon  Pexpression  de  Pélo- 
quent  Vergniaud ,  la  révolution,  comme  Saturne,  dévorait 
tousses  enfants  ;  avec  queilt*  vérité  il  engage  la  Convention 
h  achever  le  bien  dont  elle  n^arracha  qu'une  partie  par  ca- 
pitulation avec  des  hommes  qui  refusaient  tout.  Que  les 
républicains  se  rassurent,  les  observations  de  Real  ne  fa- 
vorisent point  Pémigraiion.  —  Mais  nous  ne  passerons 
point  sous  silence  le  morceau  dans  lequel  il  sVIève  contre 
le  scandale  qu*a  produit  une  affaire  de  séduction  :  dNine 
part,  la  corruption  la  plus^ révoltante  dans  une  fille  de  qua- 
torze ans;  de  Pautre,  Pinimoralité  la  plus  profonde  dans 
un  homme  de  trente.  Mais  ce  qui  élait  plus  épouvantable 
que  tout  le  reste,  c*é(ait  de  voir  la  moitié  des  auditeurs 
composée  de  jeunet  femmes,  déjeunes  filles,  dont  plus  de 
vingt  n'avaient  pas  treize  à  quatorze  ans,  dont  plusieurs 
étaient  à  côté  de  leurs  mères  ;  de  les  voir,  au  lieu  de  se  cou- 
vrir le  visage,  rire  avec  éclat  aux  détails  néoessaires,  mais 
dégoûtants,  qui  faisaient  rougir  les  hommes. 

Nous  le  disons  avec  Real  :  «  llQmmes  libres,  républi- 
cains prononce,  vous  qui  voulez  la  franche  et  bonne  dé- 
mocratie, réunissei-vous  pour  rappeler  à  grands  cris  le  rè- 
gne des  mœurs,  sans  lequel  vous  n'aurez  lamais  de  liberté. 
Rendez  è  la  nature,  aux  mœurs,  rendez  à  leurs  ménages 
ces  femmes-soldats  qui  ne  voient  la  lik>erté  que  dans  le  li- 
bertiuBge.  Une  femme  sans  pudeur,  une  fille  sans  sa  mère, 
une  épouse  sans  son  mari  doivent  être  vouées  au  mépris 
du  républicain.  La  nature,  en  donnant  au  lexe  une  voix 
faible  et  des  membres  sans  vigueur,  Péloigne  des  assem- 
blées politiques  et  des  combats  ;  que  les  femmes  gardent 
la  laine  et  Paigtiille,  mais  Qu'elles  abandonnent  à  Phomme 
la  harangue  et  le  fer. 

t  Je  crois  qu'à  Rome  une  loi  défendait  aux  jeunet  filles 
d'assister  aux  courses  des  Lu  percales.  Pourquoi  une  loi  ne 
permettrait-elle  pas  aux  juges  de  faire  sortir  de  l*audltoire, 
quand  la  pudeur  le  réclame,  ces  femmes  déhonlées  qui 
mentent  à  Iq  nature,  calomnient  leur  sexe  et  la  moralité 
de  la  révolution  ?  » 

Écrivains ,  journalistes ,  vons  tous  que  le  besoin  de  votre 
pensée  appelle  à  profiler  de  la  litwrté  de  la  presse,  servez 
l'humanité,  la  patrie,  les  mœurs  par  vos  opinions,  par  vos 
écrits  ;  mais  que  Pesprlt  de  parti,  que  les  préjugés  monar- 
chiques ou  religieux  n'égarent  point  votre  plume,  et  que 
jamais  elle  ne  soit  trempée  dans  un  poison  d'autant  plus 
dangereux  que  Part  qui  l'apprête, ^m  plus  finement  dé- 
guisé. Trouvé, 


CONVENTION   NATIONALE. 

Présidêneâ  de  Thibaudsau, 
SÉANCE  DU  21   VENTOSB. 

Boissy  d'Anglas  demande  la  parole  pour  une  mo- 
tion d'ordre. 

La  Convention  lui  accorde  la  parole. 

BoissT  d^ÀNGLAS  :  La  journée  du  0  thermidor 
ne  fut  pas  une  victoire  de  parti,  mais  un  mouvement 
national  cjui  rendit  au  peuple  Pexercice  de  ses  droits, 
et  à  la  republique  son  iudf^pendance  Df  puis  cette 
brillante  époque,  1rs  rayons  de  la  justice  et  de  la 
v(*rit(^,  perçatit  les  ténèbres  épaissen  qui  obscurus 
sftient  notre  horizon  politique,  ont  fait  renaître  pour 
la  France  le  règne  du  bonheur  et  d«  la  vertu.  Les 


télés  eoùnablês  de  plusieurs  tyrans  iMnt  loiiiMflt.Jt« 
bruit  de  leur  chuté,  leurs  exécrables  complicM,  i|9i 
semblaient  inaccessibles  atii  remord|i|  ont  coiii^ 
mencé  à  éprouver,  à  connaître  cette  tiprreur  qu'ils 
avaient  si  longtemps  inspirée  Privésde  rappiji  d'uup 
commune  repelle  ;  n'avant  plus  d'ordres  i  doimer  ^ 
des  commandants  perndes,  a  des  ^gorgeum  soldés; 
apprenant  chaque  jour  Parrastation  dM  comités  ré- 
volutionnaiiesqui  avaient  servi  leur  fureur;  vojraul 
fermé  pour  jamais  Pautre  funeste  ou  retentigtaienl 
leurs  vociférations  janguinaires,  leurs  provoeatiom 
au  crime  ;  perdant  sans  retour  leur  crédit,  leurs  for- 
ces, leur  pouvoir  ;  isolés  au  milieu  de  cette  commune 
immense,  s*y  promenant  parmi  les  ombres  mena- 
çantes de  leurs  victimes,  ils  paraissent  déjà  frappés 
^*Uîie  mort  politique,  èl  semblent  ne  se  survivre 
quelques  instants  que  pour  être  témoips  de  Thorreur 
universelle  qu*ilsmspirent  et  de  Péternelle  infamie 
à  laquelle  leurs  noms  sont  dévoués.  Les  prisons  ou^ 
vertes,  les  éohafauds  brisés,  Pinnocenoe  rendue  à  U 
liberté,  la  raison  reprenant  sea  droits,  les  familles 
vertueuses  recouvrant  leur  sécurité,  le  commerce 
se  livrant  à  son  Industrie,  Phomme  libre  rsprimant 
sa  pensée,  le  vandalisme  eipirant,  le  flambeau  des 
arts  rallumé  par  la  main  du  génie,  et  les  conceptioi)s 
du  talent  agrandifs  encore  par  Pinfluence  d*un  gooL 
vernement  sage  et  doux ,  ces  idées  d'espérance  et 
d*union  qui  ravivent  nos  âmes  et  adoucissent  nos 
malheurs  passés,  sont  autant  de  poignards  qui  dé* 
chirent  le  sein  de  vos  insolents  oppresseUFf.  La  dou- 
leur d'être  les  témoins  du  bonheur  général  et  Tim- 
puissance  de  le  troubler,  voilà  le  premier  ehdtiment 
de  leurs  forfaits,  et  peut-être  le  plus  insupportable 
de  leurs  supplices. 

Mais  pourquoi ,  citoyens,  des  nuages  son)bre$  pu- 
raissent-ils  se  rassembler  encore  pour  obscurcir  yé- 
clat  de  ces  beaui^  jours  ?  Par  guel  maihfiur  cette  na- 
tion courageuse,  qui  résiste  à  l'Europe  aQtiirfi,  qi|i 
triomphe  des  armées  les  plus  formidables»  qyi  supr 
porte  les  privations  les  plus  pénibles,  qui  renvcHe 
tous  les  obstacles  et  semble  maîtriser  tous  |6S  ëlér 
ments;  par  quelle  fatalité,  dis-je,  cette  nation  éi 
fière  a-t-elle  pu  être  si  longtemps  comprimée? 
Quelle  fût  la  force  qui  Penchatna,  le  prestige  qui  la 
séduisit?  Pourquoi  voyons-nous  encore  des  inquié- 
tudes honteuses  et  des  espérances  coupables?  Pour- 
quoi le  citoyen  vertueux  et  paisible  craint-il  de  voir 
renaître  le  rèsne  de  la  terreur  et  des  proscriptions, 
etcherche-t-iT,  dans  s^  alarmes,  un  appui  jusaue 
parmi  ceux  à  qui  les  atnis  de  la  révolution  ne  aoj* 
vent  adresser  que  des  reproches  ?  Qui  peut  inspirera 
quelques  factieux  cette  arrogance  délirante  oui  règne 
sur  leurs  fronts,  et  cet  espoir  féroce  que  ron  voit 
briller  dans  leurs  regards?  Le  peuple  a  juré  Ta- 
néantissement  de  la  tyrannie,  et  les  insensé  croi- 
raient-ils en  relever  les  débris  ?  Quels  sont  donc  les 
ressorts  cachés  sur  lesquels  ils  comptent  pour  s*opr- 
poser  à  votre  force  et  pour  soutenir  leur  faiblesse  ? 
Quel  est  enfin  le  secret  de  leur  infernal  système? 

J'ai  résolu ,  citoyens,  de  je  dévoiler  à  vos  yeux  ; 
je  vais  porter  la  lumière  dans  les  replis  de  leurs 
pensées  et  leur  arracher  le  secret  de  leurs  complots. 
Je  ferai  voir  ensuite  quels  sont  les  écueits  qu'en  les 
combattant  vous  devez  apprendre  à  éviter. 

Plusieurs  de  mes  collègues  ont  déjà  depuis  lengw 
temps  indiqué  ce  mystère  odieux  ;  mais  if  f^ut  cou- 
rageusement le  développer  à  cette  tribune,  |e  dire 
au  peuple  tout  entier,  à  ce  peuple  qu'on  s  tant  de 
fois  et  si  cruellement  trompé,  qu*il  faut  éclairer 
enQn  sur  ses  véritables  intérêts.  Nos  ennemis  par- 
lent à  ses  passions,  il  faut  <;|ue  sa  raison  nous 
écoute  •  il  faut  qu'il  connaisse  a  fond  le  machiavé- 
lisme de  ces  hommes  qui  ont  voulu  «  qui  ont  su , 


(«1 


qui  ¥ml0lil  éDQoiN!  «îfrir  tas  douleân*  «BTeiiiineQ 
lOC  blestum,  eieitar  la  jalousje,  epflaromer  et 
tromper  aes  pefsentimenU,  (tiviser  ses  membres, 
tâtir  6f9  ressources,  et  épuiser  son  sang  pour  ëta-* 
bljp  leur  puisspnee  usurpatrice  ^ur  les  ruines  de  ■' 
Tordre  social  et  sur  les  décombres  de  leur  patrie.   , 

Pfl  tout  ternes  et  (jfins  tous  les  pays  la  nature  a 
produit,  pour  le  malheur  du  monde,  de  ces  eipritq 
fimbitieux  qui  comptent  pour  rien  le  bonheur  des 
b^mipes  et  qui  ne  veulent  que  les  asservir. 

La  domination  est  un  besoin  pour  eux ,  Texereice 
du  pouYoir  une  passion  irrésistible.  Ces  fléaux  de 
Tupivers  ont  toujours  profité  des  passions  et  de  Ta» 
Yeuglement  de  la  partie  la  plus  nombreuse  du 
genre  humain  pour  satisfaire  la  soif  insatiable  d'une 
autorité  3ans  bornes  et  d'une  funeste  célébrité. 

Tantôt,  parlant  au  nom  d'un  Dieu  vengeur,  sa 
déclarant  ministres  du  courroux  céleste,  ils  ont 
porté  l6  trouble  dans  les  conseiences ,  la  discorde 
dans  les  familles ,  la  fureur  dans  les  esprits ,  le  car-* 
page  et  la  déât)lation  dans  les  empires  ;  tantôt ,  en* 
:flammant  Torgueil  d*un  sénat  trop  lier  ou  la  colère 
d'un  principe  soupçonneux ,  ils  violèrent  toutes  les 
lois  sous  le  voile  du  bien  public,  ils  donnèrent  le 
sfgnal  des  proscriptions  sous  prétexte  de  ré|abtir  la 
paix  intérieure;  ils  asservirent,  ils  éerpsèrent  le 
peuple,  sous  oelui  de  maintenir  Tordre  social  :  par- 
tout le  sang  de  l'homme  de  bien  cimenta  leur  odieuse 
tyrannie. 

Mais,  de  tous  les  masques  que  prirent  en  diffé- 
rents temps  ces  hommes  dévorés  d  ambition ,  celui 
qui  a  le  plus  trompé,  celui  qui  a  couvert  les  plus 
grands  attentats ,  celui  qui  a  opéré  les  plus  grands 
bouleversements,  celui  enfin  qui  a  précipité  dans 
la  tombe  le  plus  de  victimes,  c'est  le  masque  hypo*- 
erite  dont  se  couvrirent  vos  derniers  tyrans,  et  qu'il 
faut  enfin  arracher  à  leurs  successeurs. 

Ils  se  parent  du  titre  d'amis  du  peuple,  ils  pren- 
nent l'attribut  sacré  de  défenseurs  du  pauvre  ;  et 
ces  perfides  imposteurs,  fanatiques  aveugles  et 
cruels,  déshonorant  les  noms  respectables  qu'ils 
usurpent,  veulent  plonger  dans  la  misère  ee  pauvre 
qu  ils  prétendent  défendre  ;  ils  veulent  diviser  ce 
peuple  dont  ils  se'  déclarent  les  amis*  armer  ses 
main&du  flambeau  de  la  haine  et  du  poignard  de  la 
Teogeanee,  le  porter  à  des  fureurs  |iberttcides ,  le 
déchirer  par  des  guerrres  intestines  ;  et ,  après  avoir 
épuisé  sa  force  et  sou  sang  pour  le  gouverner  a  leur 
gré,  ils  aspirent  à  le  livrer  ainsi ,  sans  ressources  et 
sans  ditfense,  à  ses  implacables  ennemis. 

Tous  les  législateurs  philosophes ,  tous  les  bien* 
faiteurs  de  Thumanité ,  tous  les  vrais  patriotes ,  (gé- 
missant au  nom  du  despotisme  ets'inaignant  contre 
ces  distinctions  héréditaires  qui  corrompent  une 
partie  du  genre  humain  et  avilissent  l'autre ,  ont 
cherché  à  embraser  les  hommes  de  l'amour  de  la  li- 
berté et  de  l'égalité  ;  ils  leur  ont  retracé  leurs  droits; 
il  les  ont  rappelés  à  leur  dignité  naturelle,  et,  sa 
livrant  à  tous  les  périls  pour  embrasser  une  si  belle 
cause ,  ils  les  ont  rassemblés;  ils  ont  renversé  les 
bastilles;  aboli  les  lois  opressives,  supprimé  les 
taxes  arbitraires,  anéanti  les  distinetion»numiliafl- 
tes,  et  placé  sur  toutes  les  vertus  les  fondements  de 
la  république.  Mais  il  ont  su  que  |es  hommes,  im- 
prescriptiblemement  égaux  en  droits,  ne  pouvaient 
jamais  l'être  en  Tertu,  en  talents  et  en  fortune  :  l'é- 
galité qu'ils  ont  reconnue  et  consacrée  est  le  fruit 
éternel  de  la  nature  et  de  la  justice,  et  serait  le  lien 
le  plus  solide  de  toutes  les  sociétés  ;  Tégalité  de  for- 
tune ,  au  contraire ,  que  prétendent  ramener  quel- 
ques sophistes,  qui  fut  le  système  de  Chabot  tant 
qu'il  fut  pauvre ,  de  Robespierre  tant  qu'il  eut  be- 
soin de  s'élever,  fst  la  prétention  de  la.folie ,  k  sys- 


tème du  ertme  misquëen  patriotisme,  Cftte  (ffalitd 
de  fortune  n'est  autre  chose  que  ta  ruine  de  Vélat 
social  et  le  retour  à  Tétat  sauvpge  :  c'est  la  grande 
vérité  qu'il  faut ,  sans  craindre  de  déplaire  au  pf^u? 
pie,  lui  dire  courageusement,  parce  qu'il  est  df^  Sûi\ 
intérêt  de  l'entendre,  du  devoir  de  ses  représentanlij 
de  la  lui  rappeler  :  celui  qui  l'ignore  est  un  insensé, 
celui  qui  la  tait  est  un  lâche ,  celui  qui  la  déguisQ 
est  un  Tourbe  di^e  du  n)épris  des  hon)me$  et  de  lai 
vengeance  des  lois. 

La  masse  de  tous  les  hommes  nés  sur  le  sol  de  la 
France,  voilà  le  peuple.  Une  partie  du  peuple  a  ob- 
tenu par  héritage ,  par  acquisition  ou  paf  son  indus^ 
trie,  des  propriétés  ;  une  seconde  partie  de  ce  même 
peuple  travaille  pour  en  acquérir  ou  y  suppléer. 
Des  gradations  insensibles  d'aisgnce  ou  de  pauvrctc 
existent  entre  ces  deux  parties  du  peuple,  sous  le 
nom  de  pauvres  et  de  ricnes;  elles  se  servent  réci- 
proquement ;  elles  sont  l'une  à  l'autre  indispensable- 
ment  nécessaires  :  si  l'une  n'existait  pas,  l'autre  ces- 
.  serait  d'exister  ;  leur  union  fait  leur  rorce,  et  de  leur 
mésintelligence  ou  de  leur  harmonie  dépend  le  maN 
heur  ou  la  prospérité  de  l'Etat.  La  nature,  plaçant 
le  mal  à  côté  du  bien ,  a  éternellement  établi  que  si, 
dans  la  partie  la  plus  aisée  du  peuple,  on  trouve 
plus  d'instruction,  de  talents,  et  des  mœurs  plus 
douces,  ou  y  trouve  aussi  plus  de  penchant  à  1  or- 
gueil ,  à  la  domination  ,  à  l'égotsme ,  et  une  dispo- 
sition à  humilier  les  homnu^s  privés  ^qs  dons  de  la 
fortune.  11  n'est  pas  moins  vrai  que  si,  dans  la  partie 
pauvre  du  peuple,  on  trouve  plus  de  sin^pjicite,  plus 
de  force,  plus  de  franchise,  et  des  mœurs  plus  pu-^ 
res,  on  y  trouve  aussi  un  penchant  dangereux  à  l'ai- 
greur, à  la  méfiance,  h  la  colère,  et  aux  excès  qui  ne 
les  suivent  que  trop  souvent. 

Le  travail  du  législateur  vertueux  et  habile  doit 
donc  consister  à  étouffer  continuellement  ces  germes 
de  dédain  ou  de  haine,  à  réprimer  l'orgueil  et  {'(im- 
bition  du  riche,  à  contenir  la  jalousie ,  Temporte- 
ment  et  la  licence  du  pauvre,  à  établir  des  lois  sages, 
des  barrières  immuacle^  qui  s'opposent  à  ce  que  la 
richesse  puisse  doniiner  ou  avilir  |a  pauvreté,  et  qui 
défendent  à  la  pauvreté  de  violer  les  propriétés  de 
la  richesse. 

11  doit ,  d'un  cOté ,  par  des  décret^  mOrement  dis-r 
cutés.  donner  à  l'industrie  du  pauvre  toute  la  lati-    * 
tude  possible  pour  qu'il  puisse  avoir  l'espérance  de 
devenir  riche  à  son  tour;  et,  de  l'autre,  par  des 
impôts  établis  sur  le  luxe ,  par  des  lois  sur  le  par- 
tage des  successions,  ppr  des  institutions  politiques 
et  morales,  mettre  de  justes  bornes  à  U  centrali- 
sation des  richesses.  Mais  le  législateur  prudent  ne 
doit  jamais  perdre  de  vue  que  son  premier  devoir 
est  de  forcer  ces  deux  parties  du  peuple  i  l'union,  à 
la  fraternité,  à  la  réciprocité  des  services,  en  cher- 
chant sans  cesse  à  les  guérir  de  ces  germes  empoi'^ 
sonnés  d'éloignement  et  d'envie  que  la  différence  do' 
leur  position  a  jetés  dans  leurs  âmes,  Riche,  si  tu 
dédaignes  le  pauvte,  celui-ci  te  haTra,  et  un  plus  xW 
che  que  toi  (e  méprisera  ;  pauvre,  si  tu  jalouses  le' 
riche,  si  tu  ravis  sa  propriété,  un  plu^  pauvre  que 
toi  t'enviera,  te  dépouillera.  Riche^  $i  tu  repousses 
le  pauvre,  oh  seront  tes  moyens  d'industrie,  les  in-^ 
struments  de  ton  commerce,  les  bases  de  ton  acti^ 
vite?  Quel  emploi  feras-tu  qe  tes  richesses?  com«^ 
ment  en  recueilleras-tu  les  fruits?  comment  cultive*  \ 
ras-tu  tes  champs,  activeras-tu  tes  ateliers? Comment 
obtiendras-tu  les  jouissances  que  donnent  l'opulence 
et  le  repos'^  Pauvre,  si  l'on  porte  atteinte  \  la  pro- 
priété du  riche.  Il  n  y  aura  plus  d'impôt,  plus  o'ar- 
mée  pour  te  défendre,  plus  de  commerça  pour  te 
vêtir,  te  nourrir,  tes  subsistances  manqueront,  tq; 
perdras  le  trav^jl  qui  te  faisait  vivre,  et  1  oisiv^etéra- 


662 


menant  tous  les  vices  au  milieu  de  toi  y  fera  naître 
tous  les  désordre  ;  la  patrie  sera  embrasée,  d'affreu- 
ses vengeances  s'exerceront,  le  sang  coulera,  Té- 
tranger  cruel  profitera  de  vos  troubles  pour  vous 
asservir,  et  le  royalisme  exécré,  s*emparant  de  vos 
dissensions,  vous  entraînera  les  uns  par  les  autres. 
Ah  !  que  Tamour  du  pays  vous  enflamme,  que  la  jus- 
tice et  la  vérité  dissipent  vos  funestes  illusions  !  Ser- 
rez-vous à  ma  voix  près  de  l'autel  de  la  patrie  ;  ne 
formez  qu'une  société  de  frères,  qu'une  famille  de 
héros,  et  livrez  au  fer  de  la  justice  les  perfides  qui , 
loin  de  vous  tenir  le  même  lanj^age,  nourrissent  vos 
préjugés,  enflamment  vos  haines,  et  vous  égarent 
pour  vous  gouverner. 

Peuple  français,  ouvre  les  yeux;  observe  ces 
hommes  à  l'œil  farouche,  au  teint  pâle,  au  ton  cour* 
roucé,  qui  excitent  ton  ressentiment,  et  qui  veulent 
te  porter  à  la  vengeance  contre  une  partie  de  toi- 
même  qu'ils  appellent  perfidement  million  doréy 
pour  frapper  tes  oreilles  et  égarer  ton  cœur  !  Ce  mot, 
qui  a  d'abord  rclenh  dans  la  salle  des  Jacobins  ré- 
voltés contre  la  Convention  ;  ce  mot,  qu'on  a  trop 
souvent  répété  à  cette  tribune,  est  le  mot  magique 
qui  renferme  tout  le  secret  de  la  tyrannie  passée', 
qui  fonde  tout  l'espoir  de  celle  au'on  veut  rétablir; 
c'est  le  cri  de  ralliement,  c*est  le  rempart  derrière 
lequçl  on  croit  pouvoir  masouer  l'ambition  déme- 
surée, tromper  Topinion  publique  et  braver  la  juste 
sévérité  des  lois;  c*est  le  signal  du  pillage  et  des 
proscriptions,  c'est  celui  du  désordre  et  ou  crime, 
c'est  celui  de  la  guerre.  Mais,  dût  ma  tête  tomber 
sous  le  poignard  de  tes  assassins,  peuple,  je  veux  te 
dévoiler  tout  ce  que  renferme  de  sinistre  ce  mot  ter- 
rible avec  lequel  on  espère  faire  égorger  tous  les 
Français  les  uns  par  les  autres  ;  je  vais  te  retracer  ce 
qu'il'a  déjà  produit  depuis  dix-huit  mois.  Peuple, 
songe  au  passé,  et  lis  avec  moi  dans  l'avenir. 

Les  tyrans  qui,  sortant  de  ton  sein,  sont  devenus 
tes  oppresseurs,  donnèrent  le  funeste  signal  de  la 
guerre  du  pauvre  contre  le  riche  ;  aussitôt  on  voit 
tous  les  propriétaires  emprisonnés,  tous  les  ban- 
quiers, tous  les  négociants  dans  les  fers,  et  des  pro- 
clamations prétendues  légales  mettre  l'opulence  au 
rang  descrimes  qu'il  faut  réprimer.  Chacun,  loin  de 
trouver  le  repos  dans  ses  foyers,  loin  d'y  jouir  du 
fruit  de  ses  travaux  et  de  ses  dépenses,  de  son  indus- 
trie et  de  ses  talents,  y  reçoit  1  arrêt  de  sa  mort. 

Marseille,  toujours  florissante  depuis  sa  fondation, 
malgré  les  dissensions  de  la  républioue  et  de  l'em- 

{urede  Borne,  malgré  les  invasions  des  Barbares  et 
es  guerres  civiles  qui  ont  tant  de  fois  désolé  la 
France;  Marseille  perd  en  un  instant  ses  richesses, 
son  commerce  ;  et  le  pauvre,  touiours  trompé,  se 
voit  privé  des  riches  cargaisons  de  blé  que  cette  ville 
opulente  faisait  venir  de  Barbarie  chaque  année. 

Lyon  voit  démolir  ses  maisons,  tomber  ses  manu- 
factures, fusiller  ses  habitants,  foudroyer  ses  fa- 
milles opulentes;  et  l'Europe  n'apporte  plus  ces 
immenses  tributs  qu'elle  payait  à  l'mdustrie  de  nos 
artisans. 

Nantes  voit  un  infâme  Verres  déshonorer  ses 
murs,  renverser  sa  prospérité,  décimer  sa  popula- 
tion ;  la  Loire  porte  au  loin  dans  l'Océan  les^ cada- 
vres innombrables  des  victimes  de  ce  bourreau  fé- 
roce :  et  le  navigateur, épouvanté  par  l'aspect  de  ces 
flots  teints  desang,  oui  lui  annoncent  tant  de  crimes, 
est  averti  de  n'aboraer  pas  sur  une  terre  inhospita- 
lière. 

Partout  le  propriétaire  est  insulté,  accusé,  con- 
damné ;  ses  domestiques  sont  corrompus  pour  le  dé- 
noncer ;  la  trahison  la  plus  vile  est  érigée  en  vertu 
publique  ;  les  monuments  des  arts  sont  mutilés  ;  tout 
ce  qui  retrace  l'opulence  de  la  nation  est  anéanti  ; 


les  métaux  précieux  sont  dilapidés  ;  une  suspicion 
vague  suffit  pour  plonger  dans  les  cachots  le  citoyen 
paisible  et  calme;  il  y  languit  dans  les  tourments  et 
l'abandon ,  dans  ta  solitude  et  le  désespoir  ;  et  s'il 
lui  échappe  une  plainte,  il  est  égorgé  comme  coa* 
spirateur. 

Le  petit  nombre  qui  échappe  à  la  mémoire  des 
prosdripteurs  frémit  d'épouvante;  il  consume  dans 
une  longue  agonie  les  tristes  jours  qu'il  conserve 
encore;  et  tandis  que  des  milliers  de  familles,  dont 
le  bonheur  était  si  intimement  lié  à  celui  de  leur 
patrie,  étaient  toutes  ou  dans  la  crainte  de  la  capti- 
vité, où  dans  l'horreur  des  cachots,  ou  dans  tes  an- 
goisses  de  la  mort,  ou  dans  le  deuil  d'une  mère, 
'un  frère,  d'un  époux,  d'un  fils  ;  tandis  qu'une  nuée 
de  barbares,  au  bruit  du  fer  des  assassins,  se  eor- 
geaient  d'or  et  desang, et  insultaient  la  pudeur, 
outrageaient  la  vertu ,  massacraient  l'innocence,  et 
changeaient  nos  monuments  en  ruines,  nos  Cités  en 
tombeaux,  nos  champs  en  déserts  ;  le  pauvre,  qu'on 
avait  flatté  d'une  folle  espérance,  livré  sans  secours 
au  besoin  ;  abreuvé  de  larmes,  condamné  aux  plus . 
affreuses  privations,  redemandait  en  vain  le  travail 
qui  le  faisait  auparavant  subsister  :  le  négociant  ruiné 
n'avait  plus  de  vaisseau  pour  lui  ;  le  manufacturier 
écrasé  ne  pouvait  plus  activer  ses  métiers  ;  l'artiste, 
sans  occupation,  ne  lui  commandait  plus  d'ouvrage; 
le  propriétaire  dépouillé  abandonnait  ses  champs 
sans  culture;  et  ce  pauvre,  si  indignement  trompé, 
à  qui  Ton  vendait  au  poids  de  l'or  les  mêmes  denrées 
qoe  la  richesse  des  commerçants  faisait  répandre 
partout  en  abondance  et  à  bas  prix  ;  ce  pauvre,  trem- 
blant sous  ses  tyrans  insensibles,  serait  mort.  Privé 
d'état,  de  soutien,  d'aliment  et  d'existence,  il  serait 
mort  mille  fois  de  misère  et  de  faim,  si  le  fléau  ter- 
rible de  la  guerre,  qui  nous  a  coûté  tant  de  sang  et 
fait  obtenir  tant  de  gloire,  n'avait  pas  offert  à  ses 
bras  vigoureux  une  ressource  utile,  mais  précaire  : 
l'extraction  du  salpêtre,  la  fonte  des  canons,  la  fa- 
brication des  armes  ont  seules  longtemps  prolongé 
la  vie  de  ce  pauvre,  à  qui  l'on  avait  criminellement 
promis  les  propriétés  du  riche,  et  la  foudre  qui 
moissonne  tant  de  mortelsa  du  moins  servi,  pendant 
cette  affreuse  époque,  à  conserver  les  jours  de  cette 
nombreuse  partie  ae  la  nation  que  le  vandalisme  de 
nos  dictateurs  privait  d'état,  de  soutien,  d'aliment  et 
d'existence. 

Peuple,  dis-moi  si  j'ai  chargé  ce  tableau  ?  Mais 
j'entends  ta  voix  me  répondre,  et  je  vois  tes  mal- 
heurs me  prouver  que,  dans  un  récit  trop  rapide, 
je  n'ai  pu  les  retracer  qu'imparfiiitement. 

Quel  fut  donc  le  résultat  oe  cet  infernal  système  ? 
D'un  côté,  un  deuil  général,  l'anéantissement  du 
commerce,  la  disette,  le  renchérissement  fatal  de 
toutes  les  denrées,  la  ruine  du  riche,  le  redouble* 
ment  de  la  misère  du  pauvre  ;  de  l'autre,  l'affermis* 
sèment  du  pouvoir  absolu  de  ces  insolents  despotes 
qui  avaient  flatté  ses  passions  pour  l'enchaîner,  ad- 
ministrant toutes  les  propriétés,  faisant  courber 
toutes  les  têtes  sous  le  glaive  de  la  terreur.  Eux  seuls 
profitaient  de  la  désolation  universelle,  eux  seuls 
avaient  atteint  leur  but,  eux  seuls  régnaient  paisi- 
blement sur  les  cadavres  et  sur  les  ruines. 

Peuple  français  !  à  notre  voix  tu  t'es  réveillé,  et  le 
trône  sanglant  des  tyrans  s'est  enseveli  dans  la  pous- 
sière; mais  persiste  dans  ton  réveil,  tiens  toujours 
les  yeux  ouverts  sur  cette  horde  de  cannibales  ;  ils 
l'environnent,  ils  t*observent,  et  ils  sauront  profiter 
du  moindre  mécontentement,  du  plus  léger  revers*, 
de  la  faute  la  moins  grave  de  tes  véritaoles  amis, 
pour  égarer  tes  passions,  reprendre  ta  confiance  et 
rassembler  les  débris  de  leur  pouvoir. 

Diyà,  lorsqu'on  enchaîne  les  brigands,  ils  disent 


m 


qnelepatriotismeestopprlmë;dëjàJorsqu*onabsout 
riiinoceDce,  lorsqu'on  rend  aux  propriétaires  leur 
sûreté,  à  la  presse  sa  liberté,  au  comaieree  soo  acti- 
vité, ils  disent  que  l'aristocratie  triomphe.  Ils  ue 
peuvent  plus  dilapider,  terrifier,  égorger  les  citoyens 
sous  le  nom  d*ex-nobles,  de  prêtres,  de  riches,  de 
magistrats,  de  modérés,  de  muscadins,  d'hommes  de 
lettres,  d*hommes  de  loi,  et  ils  annoncent  que  tous 
les  principes  sont  bouleversés. 

La  Convention  ue  reconnaît  plus  de  castes;  elle 
ne  reconnaît  que  de  bons  et  de  mauvais  citoyens. 
Elle  laisse  à  hi  justice  impartiale  des  tribunaux  le 
soin  de  les  juger  avec  toutes  les  formes  qu'exige  le 
respect  dû  à  l'homme  ;  elle  fonde  enfin  la  vraie  li- 
berté sur  les  bases  de  la  vertu,  de  la  justice  et  de 
l'intérêt  public,  et  les  monstres  crient  que  l'on  mar- 
che à  la  contre-révolution.  Ah  î  si  l'on  y  marche,  ce 
sont  eux  qui  nous  y  conduisent.  Ah  !  si  le  royalisme, 
justement  proscrit,  peut  concevoir  quelques  espé- 
rances, c'est  à  l'aspect  des  désordres  que  leurs  af- 
frenx  principes  pourraient  faire  naître  encore.  Ils  te 
parlent  sans  cesse  du  million  doré  ;  s'ils  ne  peuvent 
plus  exciter  par  là  contre  le  riche  la  haine  du  culti- 
vateur honnête,  de  l'artisan  probe,  de  l'ouvrier  la- 
borieux, détrompés  par  une  funeste  expérience, 
voici  quel  est  leur  dernier  espoir  :  ils  se  flattent  de 
rallier  à  eux  cette  vermine  de  toutes  les  nation^,  ce 
rebut  de  Thumanité,  ce  fléau  attaché  aux  cités  cor- 
rompues et  populeuses,  cette  nuée  de  brigands, 
d'hommes  vils,  plongés  dans  l'oisiveté  et  le  liberti- 
nage, qui,  ne  possédant  rien  et  ne  voulant  point  tra- 
vailler pour  acquérir,  ne  vivent  que  dans  le  désor- 
dre et  ne  subsistent  que  de  rapines,  et  dont  la  police 
nous  avertit  que,  depuis  quelques  jours,  celte  pre- 
mière commune  abonde,  qu'ils  s'y  rendent  de  tous 
les  points  de  l'empire,  et  semblent  n'attendre  que  le 
signal  du  carnage  pour  porter  partout  le  crime  et  la 
mort. 

Voilà  le  secret  de  leur  audace,  l'appui  de  leurs 
déclamations,  l'espoir  de  leurs  ténébreux  complots  ; 
voilà  leurs  patriotes  opprimés,  voilà  l'armée  sur  la- 
quelle ils  comptent;  elle  se  rallie  toujours,  en  tout 
temps,  à  ceiix  qui  déclarent  la  guerre  au  million 
doré,  c'est-à-dire  à  ceux  qui  promettent  le  pillage. 

Marins,  (]ui  remplit  Rome  d'horreurs  et  de  massa- 
cres ;  Catilina,  qui  pensa  la  détruire;  le^  chefs  de 
bandes  du  temps  de  Charles  VI,  qui  mirent  la  France 
a  contribution  ;  les  niveleurs  d'Angleterre,  d'abord 
excités,  et  puis  immolés  par  Croinwell;  Jean  de 
Leyde  et  Mlincer,  qui  noyèrent  durant  quatre  an- 
nées l'Allemagne  dans  des  flots  de  sang  ;  Mazaniello, 
3 ni  pendant  huit  jours  fut  le  Robespierre  de  Naples, 
éployèrent  tous  un  semblable  étendard,  eurent  tous 
de  semblables  partisans;  la  guerre  au  million  doré 
fut  toujours  leur  signal  et  leur  cri  ;  ils  voulurent  do- 
miner sur  les  ruines  de  leur  patrie,  et,  pour  y  par- 
venir, ils  enflammaient  la  haine  de  ceux  qui  n'a- 
vaient rien  contre  ceux  qui  possédaient  quelque 
chose. 

C'est  par  ce  système  épouvantable  qae  les  traîtres 
que  vous  avez  renverses  espèrent  de  rétablir  leur 
puissance  et  vous  donner  de  nouveaux  fers.  Tantôt 
vous  les  verrez,  exagérés  dans  leurs  principes,  cher- 
cher à  dégoûter  le  peuple  de  la  liberté  qu'il  a  con- 
quise, en  ne  lui  en  présentant  que  l'abus;  tantôt  vous 
les  verrez  déplorer  les  maux  qu'il  souffre,  afln  de 
lui  faire  regretter  un  régime  justement  odieux , 
mais  qu'ils  lui  présentent  avec  adresse  comme  ac- 
compagné de  moins  de  privations.  Toujours  ils 
aspirent  à  le  détourner  de  la  ligne  de  justice  qui 
seule  peut  le  conduire  au  bonheur,  et  qui  est 
la  véritable  politique  des  gouvernements;  ils  ne 
veulent  dominer  sur  lui  que  pour  le  rendre  tôt  ou 


tard  à  ses  anciens  et  lâches  tyrans;  car,  ne  vous  y 
trompez  pas,  citoyens  de  tous  les  partis,  de  tous  les 
états,  de  toutes  les  opinions,  c'est  à  la  domination 
qu'ils  aspirent,  mais  c'est  à  la  royauté  qu'ils  veu- 
lent vous  ramener  ;  ils  veulent  renverser  par  un  seul 
ébranlement  l'édifice  entier  de  votre  liberté,  et  dé- 
truire dans  un  seul  jour  [es  pénibles  travaux  de  cinq 
années. 

Voyez ,  au  sein  de  vos  dissensions  politiques,  au 
bruit  de  vos  haines  et  de  vos  combats,  le  royalisme 
hypocrite  levant  déjà  sa  tête  impure,  marchant  à 
côté  de  la  terreur  et  épiant  l'instant  où  il  pourra 
vous  enchaîner,  tandis  que  l'étranger  astucieux, 
d'accord  avec  les  traîtres  que  vous  avez  abattus, 
conspire  encore  au  milieu  de  vous;  c'est  lui  qui 
vous  divise  et  vous  déchire  ;  c'est  lui  qui  a  arme  le 
pauvre  contre  le  riche^  et  rendu  le  riche  insensible 
aux  calamités  du  pauvre  ;  c'est  lui  qui  a  fait  tomber 
les  murs  de  Lyon ,  ensanglanté  les  rivages  de  Nan- 
tes, créé  la  Vendée  et  préparé  la  disette  qui  vous 
menace;  c'est  lui  qui ,  associant  ses  efforts  à  ceux 
des  successeurs  de  Robespierre,  qu'il  soudoie,  veut 
vous  rendre  ce  régime  de  sang  qui  vous  a  trop  long- 
temps accablés,  et  vous  faire  ensuite  considérer  la 
royauté  comme  un  asile  paisible  et  calme  où  vous 
pourrez  espérer  le  repos. 

Citoyens,  le  repos  est  un  bien,  mais  il  est  la  ré- 
compense du  courage,  et  non  le  prix  de  la  faiblesse  ; 
il  doit  couronner  la  vertu  ,  et  non  récompenser  la 
lâcheté  ;  mais  vous  ne  le  trouverez  ni  dans  les  bras 
des  successeurs  de  Couthon,  ni  dans  ceux  des  sti- 
pendiaires  des  Capet. 

Les  uns  feraient  encore  tomber  sous  vos  yeux  les 
têtes  de  vos  plus  tidèles  amis  ;  chaque  jour  verrait 
encore  assassiner  quelques-uns  des  hommes  qui ,  par 
leur  industrie  et  leur  richesse,  doivent  approvision- 
ner vos  cites,  offrir  des  ressources  à  votre  travail  et 
ramener  l'opulence  dans  vos  campagnes  et  dans  vos 
villes  ;  les  autres,  excités  par  la  soif  des  plus  impla- 
cables vengeances,  ne  commettraient  pas  moins  de 
crimes,  et  vous  raviraient  en  même  temps  tous  les 
résultats  de  votre  courageuse  persévérance.  Pour 
prix  de  cinq  années  de  sacrifices  les  plus  pénibles, 
vous  n'obtiendriez  plus  que  des  chaînes  ;  la  tyran- 
nie détruite  au  10  août,  celle  renversée  le  9  ther- 
midor vous  seraient  également  funestes  :  la  France 
doit  être  affranchie  pour  jamais  des  horreurs  de 
l'une  et  de  l'autre.  La  royauté!....  Ah!  qu'ils  sont 
coupables  ceux  oui  voudraient  persuader  au  peuple 
qu'elle  pourrait  diminuer  ses  peines,  qu'il  serait  pos- 
sible de  conserver  avec  elle  quelque  apparence  de 
liberté.  Non, «non ,  et  l'histoire  de  tous  les  pays  nous 
le  prouve,  la  tyrannie  qui  se  relève  est  cent  lois  plus 
forte  que  si  elle  n'avait  pas  été  comprimée.  Les  ob- 
stacles qu'elle  a  été  forcée  de  vaincre  ont  accru  ses 
forces,  épuisé  celles  de  ses  plus  courageux  adver- 
saires. 

Je  ne  fais  pas  à  la  France  l'injure  de  penser  qu'il 
soit  nécessaire  de  lui  exposer  ici  les  maux  qui  ré- 
sulteraient pour  elle  des  succès  affreux  du  roya- 
lisme; ce  nest  pas  à  ceux  qui,  depuis  trois  ans, 
combattent  avec  tant  de  gloire  pour  l'affermisse- 
ment de  la  république  qu'il  faut  prouver  la  nécessite 
de  la  maintenir.  11  n'est  aucun  citoyen  qui  n'ait  aux 
frontières  un  fils,  un  frère  ou  un  ami;  il  n'en  est 
aucun  qui,  par  ses  efforts  dans  l'intérieur,  n'ait  con- 
couru à  chasser  tous  les  despotes  coalisés  jusque 
au  delà  des  barrières  que  la  nature  leur  ayait  oppo- 
sées ;  il  n'en  est  aucun  qui  ne  soit  solidaire  pour  la 
gloire  comme  pour  les  dangers,  et  qui  ne  sente  au 
tond  de  son  cœur  la  nécessité  de  inovrir  plutôt  que 
I  de  renoncer  à  la  défendre.  Je  ne  crains  pas  le  roya- 
I  lismc  ;  s'il  ose  se  montrer,  il  sera  anéanti  ;  mais  je 


é«4 


Crains  une  hypocrisicastûcirhsé,  je  craitièjusdu*aux*| 
impuissants  efforts  de  ses  imbéciles  et  critninels  par-  1 
tisans.  Je  Voudrais,  par  pitié  même  ndui*  ceux  qu'ils  | 
pourraient  égarer,  armer  tous  les  efforts  contre  lui , 
en  démasquer  tous  les  projets,  en  faire  détester  tou-  ' 
tes  les  suites,  et  pour  cela  je  dirai  au  peuple  qu'il 
doit  se  garder  de  ces  insinuations  pertidii^s ,  de  ces 
fausses  promesses  de  paix  et  de  bonheur,  avec  les- 
quelles on  veut  le  tromper,  avec  lesquelles  on  peut 
apporter  la  guerre  civile  au  milieu  de  lui. 

Il  ne  s*agit  pas  seulement ,  dans  le  véritable  es- 
poir des  contre-révolutionnaires,  de  ramener  la  ré- 
volution aux  preniières  années  de  son  histoire,  mais 
de  nous  reporter  aux  temps  les  plus  affreux  de  la 

f dus  exécrable  tyrannie  royale  ;  ce  ne  serait  passeu- 
enient  à  la  royauté  que  la  France  serait  reconduite, 
inais  à  toute  I  horreur  de  Tancien  régime.  Peuple, 
considère  ta  position,  observe  tes  enneniis,  et  juge 
ce  qu*ils  veulent  de  toi.  Qu'ils  disent  si  c'est  pour  la 
constitution  de  1789  qu'ils  ont  voulu  combattre,  il 
7  Q  trois  dus,  ces  exécrables  émigrés  qui  fuient  au- 
jourd'hui si  loin  de  nos  frontières  ;  n^est-ce  pas»  au 
seul  nom  dé  Tégalité  Qu'ils  ont  quitté  notre  terri- 
foire?  n'est-ce  pas  dès  le  (iremier  insfaut  qu'ii«  nous 
ont  soupçonnés  de  vouloir  être  libres  qu  ils  ont  fui 
cette  terre  sacrée?  Se  sont-ils  armés  contre  les  cri- 
mes de  Rubcst)ipr^e,  cohtfé  les  assassinats  d'Orange 
et  de  Nîmes?  Se  sont-ils  soulevés  contre  les  arres- 
tations a^bitrdires  qui  changèrent  la  t'rance  en  ca« 
chots?  Est-ce  les  remparts  dé  Lyon  qu'ils  ont  voulu 
défendre,  ou  bien  oUt-ils  voulu  disputer  à  la  Loire 
ses  innombrables  et  malheureuses  victimes?  Non  , 
lion!  tous  Ces  forfaits  n'existaient  pas  encore;  la 
France  n'avait  pas  à  eu  Rougir. 

Les  tyrans  du  9  thermidor,  leurt  complices,  leurs 
slipendiaires,  étaient  encore  ensevelis  dans  une  pro- 
fpiide  obscurité;  mais  ce  fut  pour  qu'il  y  eût  en 
France  un  clergé  puissant  et  riche  qu'ils  prirent  les 
armes  ou  qu'ils  conspirèrent  en  secret  ;  ce  fut  pour 
rétablir  une  noblesse  insolente  et  oppressive,  des 
corvées,  des  dîmes,  de^  chasses,  des  droits  féodaux  ^ 
des  taxes  arbitraires,  des  parlements  et  des  lettres 
de  cachet;  ce  fut  pour  consolider  au  milieu  de  vous 
cl  pour  agjçraver  encore  le  despotisme  qui  i  depuis 
quatorze  siècles,  vous  courbait  sous  son  joug  de  fer; 
etaujourdhui  vous  entendez  leurs  complices  s'api- 
toyer Sui*  vos  maux,  tandis  que  c  est  eux  qui  les  ont 
causés  ;  ils  Voiis  reprochent  la  tyrannie  de  Robes- 
pierre, et  ce  sont  euit  qui  l'ont  facilitée  en  vous  for- 
çant de  n'être  occupés  que  de  les  combattre. 

Us  parlent  au  peuple  des  privations  de  tous  les 
genres  auxquelles  il  est  condamné  depuis  si  long- 
temps ;  ils  feignent  d'oublier  que  ces  privations  sont 
les  fruits  d'une  guerre  plus  ancienne  que  la  té^vk^ 
blique.  Citoyens,  la  Convention  sera  ferme  au  mï^ 
lieu  de  tant  d'agitations;  elle  ôtera  au  royalisme 
son  prétexte  en  punissant  les  terroristes  qui  nous 
épouvantent  du  retour  de  leur  tyrannie  )  elle  ôtera 
au  patriotisme  énc^rgique  ses  inquiétudes  en  Com- 
primant les  amis  de  Tancien  régime,  et  elle  mar- 
chera avec  courage,  et  sans  se  détourner  de  sa  l^oute, 
vers  le  tyran  de  la  Tamise,  et  saura  travailler  à  l'af- 
fermissement de  la  liberté. 

Mais  c'est  au  peuple,  au  peuple  seul,  &  ^eftdré  $es 
efforts  utiles  ;  la  puissance  de  In  Convention 'est  dans 
la  persévérance  du  peuple,  S9t  force  est  dans  la  ?o- 
lojité  natiopale  ;  son  courage  a  besoin  d'être  Sou- 
tenu par  la  confiance  des  gens  de  bien  éf  p«r  cette 
opinion  prolectrice  qui  garantit  la  vertii  des  attein- 
tes du  Tice. 

Peuple,  rallie-toi  done  autour  de  tes  représen- 
tants ;  féconde  tettr  lèle^  honore  leurs  (tataux,  Cft 


oppose  pnè  masse  .immobile  et  majesluense  à  «eidfc 
qui  voudraient  te  désunir  pour  te  domintiri  Peupli^, 
méfie- toi  de  ces  monstres  qui  osent  te  pfépdrer  dés 
chaînes,  et  qui ,  paraissant  plaindre  tes  maux  pour 
te  séduire,  veulent  te  conduire  au  royalisme  par  la 
terreur  et  rétablir  la  terreUr  par  le  royallsmei  Dé- 
joue leurs  complots  ;  rejette  loin  de  toi  leurs  pro- 
vocatiohs  perlides,  leurs  insinuations  coupâlnes; 
dénonce-les  à  l'autorité  des  lois,  et  marché  avec 
nous  d'un  pas  ferme  dans  la  ligne  droite  de  li  li^ 
berté.  Rappelle  au  milieu  de  toi  la'  concorde  %  lii 
bonnr  intelligence,  l'union,  l'amour  du  trarali  et 
de  la  vertu.  Nous  avons  renversé  la  féodalité;  Te'* 
galité  reçue  dans  la  république;  il  n'y  a  |»|lus  de 
châtelleuiesdans  nos  campagnes,  plus  de  palais  daiiè 
nos  villes;  il  u'existe  que  des  maisons  et  des  cliati- 
mières  :  qu'elles  se  soutiennent  réeiproquemetit,  en 
bien  elles  tomberont  ensemble: 

Paix  éternelle  entre  les  chaumières  et  les  mâisonsi 
entre  le  négociant  et  l'ouvrier,  entre  le  maDufaôtu- 
rier  et  l'artisan  ;  paix  éternelle  entre  le  rîebe  et  lé 
pauvre!  Guerre  à  mort  aux  ennemis  de  la  rëpubli-i 
que  ;  aux  traîtres  qui  voudraient  ressusciter  le  tèf* 
rorisme,  le  despotisme!  la  royauté)  aux  intrigante 

3 ni  voudraient  nous  diviser^  aui  scélérats  ^n\  rotl* 
raient  nous  asservir  !  Que  les  rivaux  de  la  j^raliei^ 
qui  comptent  encore  sur  hos  troubles  pour  i'é^i^f 
leurs  nombreuses  défaites,  respectant  iiotre  M^éSSf^, 
redoutant.nolre  union,  et  perdant  l'e^olr  de  ralt«:= 
rer,  se  voient  forcés  à  nous  demander  et  à  receroir 
de  nous  unç  paix  glorieuse,-  qui  conserve  à  jamais  Id 
prospérité  de  la  nation  ! 

Jtt  demande  que  la  Convention  charge  son  eoiffité 
de  sûreté  générale  et  les  autorités  constituées  de 
faire  arrêter  et  poursuivre  devant  lél  tribllfidlit  j 
selon  la  rigueur  des  lois,  tous  eeux  cftil.^  ^dr  «M 
proclamations  écrites  ou  verbales,  invitêraienf  le 

fieuple  9u  rétablissement  de  la  rdysiuté  eu  a  la  tio 
ation  des  propriétés  publiques  et  pairticiilières^  oa 
attenteraient  au  respect  dû  à  la  reprësentatlou  lia^ 
tionale. 

Je  demande,  en  outre,  qu'il  ioit  fait  une  Adresse 
au  peuple  pour  l'éclairer  sur  les  complots  qai  s'our- 
dissent contre  la  liberté,  pour  le  prémunir  eMtre 
les  insinuations  perfides  des  ennemis  de  la  rë?ôlu- 
tion,etpour  lui  exposer  les  principes  adoptés  par 
ses  représentants.  {La  iuU9  d9mmihi) 


If,  Bé  -^  Dans  la  séance  du  SS  ^  la  èonrëntidn  il 
reçu  les  sections  de  Paris^qui  sont  venuèa  Applaudit 
à  la  rentrée  de  ceux  de  ses  membres  ^iii  avaieiH  été 
proscrits  après  le  31  mai^  et  protester  cdntre  oMe 
journée  désastreuse. 

— =  On  ri  dl<;cuté  le  projet  dé  d^ci-'et  âili  fixé  lés  at- 
tributions du  comité  de  salut  public  pour  là  direct 
tion  des  relatiçns  extérieures. 


PdyemefUê  â  U  kitourié  nalitnmUt 

te  paireineiil  Ae  la  dette  cooMJJdëe  perpé^ve1l«  m  fkif  flaw 
les  sis  dernierl  mois  Ae  i*an  V  t  et  pour  ranhëe  è  e^a«qti 
n*ont  pM  touché  les  i\k  pAfinifirs  mois  de  iëi'aë  «anée.  JLm 
citoyens  qtii  ont  feiïré  leirl-  inicrÎDtltfii  de'Bnîtive.  et  àui  dS- 
sireraient  être  fijié  âatn  les  disftlcts,  èëUveat  id^itftteé  Im 
chefs-lieuf  du  district  où  Ils  teufétit  iUë  payée,  toSMiês  ' 
meut  à  la  loi  du  9*  jour  de«  smscnttftltdeti 

U  payement  des  rentes  tiagèfes  iè  Uh  enÉMiU¥émén< 
pour  deui  mois  vingt  et  un  Jours  de  VêàÊH  1791  HlèidéHlèl 
•t  les  M  premiers  mois  de  r«a  la.  ^ 


GAZEÏÏE  NATIONALE  .n  LE  HONITEI]R  IIVERSEL. 

!74.  Quartiii  24  Ventosb*  l*an  S*.  {Samedi  14  Mabs  1795»  mua?  iry{#,) 


POLITIQUE. 

POLOGNE. 

Far$09ief  lé  Ujhrier.  —  Deux  officiers  rosses  se  soot 
'  <*nduK  à  GracoTie  sous  uoe  très-forte  escorte;  Ils  s'y  sont 
I  m  parés  de  la  couronne  et  des  autres  ornements  royaux  de 
l*oiogne,  et  les  ont  envoyés  à  Pétersbourg. 

Au  reste,  Catherine  II  exerce  en  Pologne  les  droits  de  la 
sont erainelé  :  elle  y  fait  recruter  en  son  nom  et  pour  son 
propre  service  ;  tous  les  monuments  et  dépôts  publics  sont 
A  la  garde  des  Russes.  Ceux-ci  disposent  des  effets  de  tout 
genre  selon  les  ordres  qu'ils  ont  reçus,  et  ne  paraissent  pas 
devoir  rendre  aucun  compte  du  objets  pour  lesquels  Ils 
n'ont  point  d'instructions. 

L'impératrice  de  Russie  va  mettre  une  taxe  sur  les  che- 
minées de  Pologne.  Elle  a  déclaré  que  les  maisons  de  Var- 
sovie et  de  Praga  qui  ont  le  plus  souffert  du  bombardement 
seront  exemptes  de  cet  Impôt  pour  trois  ans. 

Le  Ru^se  Buxhoërden,  gouverneur  de  Varsovie,  a  annoncé 
dans  une  proclamation  quMt  est  au5sl  gouverneur  de  Mazo- 
vie,  de  Podiaqnle,  de  Che Im.  de  Lukow  et  de  œ  qui  reste 
des  palatinats  de  Lublin  et  de  Riva. 

Le  peuple  de  cette  capitale  gémit  sous  la  plus  dure  op- 
pression et  sunouf  la  plus  offensante.  Les  troupes  russes 
sont  maintenant  cuemées;  elles  ne  sont  pas  sans  inquié- 
tude, tant  le  peuple,  loutdésaraié  qu'il  est,  deviendrait  ter- 
rible si  la  Providence  lai  réservait  le  moyen  de  faire  un 
dernier  effort  dans  un  accès  de  désespoir. 

—  Le  baron  de  Toit .  ministre  suédois,  a  quitté  la  Polo- 
gne ;  il  n*a  pu  supporter  davantage  l'indignation  que  lui 
inspirait  la  conduite  des  Russes.  Sa  mur  a  p«ut-étre  aujour- 
d'hui des  preuves  matériel  les  que  Catherine  11  a  eu  sur  la 
couronne  de  Suède  même  des  projeu  pareils  A  ceux  qu'elle 
exécute  en  Pologne,  avec  cette  différence  pourtant  que  le 
cabinet  de  Pétersboureeùtcoounis  chez  les  Suédois  un  crime 
de  pins  que  chei  les  Polonais,  où  Stanlslas-Aususle  vit  en- 
core. 

ALLEMAGNE. 

FrùmfarU  le  Wflprier.  —  On  ne  peut  se  refuser  à  voir 
que  les  Prussiens  se  retirent  de  la  guerre;  leur  activité,  qui 
diminue  de  Jour  en  Jour,  en  est  presque  réduite  à  leur  pré* 
sence.  Ils  ont  abandonné  les  positions  Importantes  qu'ils oo- 
cupaient  devant  llayeoce;  k»  Saxons  et  les  Autricliieiis  les 
y  ont  remplacés. 

•—  Le  général  prussien  Kucbel,  qui  s'était  mis  en  mouve- 
ment le  18  de  ce  mois  pour  se  rendre  vers  le  bas  Rhin,  a 
fait  halle  tout  A  coup  A  Llmboorg,  et  il  reste  lA  Jusqu'A  nou- 
vel ordre. 

—  n  est  très-vrai  que  le  prince  BenrI  et  le  comte  Rertx- 
berg  exercent  depuis  peu  une  influence  sans  bornes  dans 
le  cabinet  de  Berlin.  On  sait  que  l'un  et  l'autre,  ayant  des 
principes,  ont  toujours  été  opt>ost^s -d'opinion  aux  plans  que 
la  cour  n'a  que  trop  A  regretter  d'avoir  suivis. 

Tout  le  rôle  que  la  Prusse  soutient  dans  la  guerre  ac« 
tuflle  atteste  que  Frédéric-GniUaume  a  constamment  été, 
enirc  les  malnx  d'habiles  inin(^nis,  le  jouet  des  passions  de 
l'Auiriche:  au-ssi  assure-t-on  que  ce  prince  vient  de  faire 
enfermer  à  la  forlc*rcsse  de  Spandau  le  fameux  Bisschofwer- 
der,  celui  qoi  l'a  entraîné  dans  la  fatale  oonlitlon. 

ITALIE. 

Savonêf  lé  X^fhrUr,  —  La  cour  de  Turin  est  dans  une 
sorii!  d*aball«;niRnt.  L'approclie  d'une  oouvcllo  campagne 
Térlnire  5ur  .<ui  sKuation  ;  cllo  en  scut,  plus  qu'elle  n'avait 
encore  fait,  toule  ramerlumc.  Un  crédit  épui.\é  par  on  pa- 
pier-monnaie sans  h)-potlièqu<> ,  des  recrues  difririles  chei 
un  |u'U|ile  mécontent,  les  symptômes  d'une  disotlt  qur  le 
renrhi'riji.scmettt  de  toute  chose  amène  A  grands  pas,  tant  dt 
réaliilV^  ilcplorablcs  ne  souffrent  plus  qu'on  se  fasse  iUusion. 
\jfti  ministres  assemblés  dans  le  dernier  cooseli  ont  été 

8«  Strie.  —  Tvmê  X, 


forcés  de  confesser  des  vérités  tardives,  et  de  fidre  preuve 
dimpuissance  plutôt  que  d'Incapacité. 

On  dit  que  le  fils  aine  du  roi  avait  prévu  tons  les  mal- 
heurs qui  arrivent,  et  que  même,  au  premier  voyage  des 
émigrés  d'Artois  et  Coudé  à  Turin,  il  a  eu  rhooocur  d'étri 
tourné  en  ridicule  pour  ses  opinions  sur  la  coalition.  Ce 

C rince ,  ajoute-t-on ,  se  voit  maintenant  consulté  :  on  est  si 
onleux  d'avoir  ri  de  ses  prédictions,  qu'on  l'écoute  aujour- 
d'hui comme  un  oracle. 

—  Le  général  républicain  Scherer  fait  la  visite  de  toutes 
les  positions  de  son  armée,  A  Oneilie,  à  Lioano,  A  Vado,  et 
l'ennemi  s'attend  A  des  entreprises  hardies. 

— -  La  flotte  anglaise  a  remis  A  la  voile,  de  Saint-Florent, 
le  7  février  ;  elle  est  composée  de  treize  vaisseaux  de  ligne 
et  de  plusieurs  frégates. 

—  Nous  apprenons  de  Gênes,  où  de  nouvelles  fabriques 
s'élaJent  tMal)li('.s  depuis  un  an  par  ic  moyen  des  artistes  et 
des  ouvriers  français  réfugiés  A  cause  du  terrorisme  anglo- 
antrichien  qui  désolait  leur  patrie,  que  ces  éUiblissements 
se  trouvent  détruits  par  la  nouvelle  du  décret  équitable  de 
la  Convention  de  France  qui  distingue  de  la  coliorte  do  in- 
fAaes  émigrés  une  clAise  de  bons  citoyens  exilés  par  la 
seule  ftayeur. 

ANGLETERRE. 

Londrîi ,  le  }3  février,  —  Le  comte  de  Stanliope,  ce  gé- 
néreux ami  de  la  liberté,  ce  philanthrope  aussi  recomman- 
dabie  par  se.^  lumières  que  par  la  droiture  de  son  cœur, 
ayant  la  douloureuse  conviction  qu'il  ne  pouvait  plus  faire 
aucun  bien  dans  la  Qiambre  luiute,  a  pris  le  parti  de  se 
retirer. 

—  L'Angleterre  semble  craindre  une  invasion  ;  en  consé- 
quence, elle  rappelle  ses  troupes  employées  sur  le  conti- 
nent 

M.  Sidney -Smith  va  partir  avec  une  escadre  de  huit  M" 
gâtes,  destinées  à  convoyer  jusqu'à  Embdeu  soixante-dix 
t>âtiroents  de  transport  qui  ramèneront  dans  le  sein  de  la 
Grande-Bretagne  les  défenseurs  de  la  IJoltande,  chargés, 
Doo  de  lauriers,  bmIs  de  butin,  car  lia  ont  piilé  leurs  alliés 
en  les  quittant. 

—  Le  6,  l'amiral  Howe  a  donné  le  signal  de  sortie;  mais 
Il  n'est  pas  encore  faAen  sûr  que  la  flotte  puisse  gagner  le 
large,  la  mer  étant  trop  orageuse  et  les  vents  au  sud-sud- 
ouesl  ;  on  se  flatte  néanmoins  que.  dès  qu'il  paraîtra  A  la  vue 
de  Piymouih,  les  bâtiments  qui  l'attendent  dans  ce  port  se- 
ront prêts  A  partir  sous  son  escorte. 

—  La  ville  de  Durbam,  qui  en  cela  ne  fait  que  partager 
l'opinion  de  beaucoup  d'autres,  a  fait  remettre  au  pariement 
une  pétition  très-énergique  pour  obtenir  promptement  la 
paix  avec  la  France. 

VÉBkTS  00  PARLKMEST. 

Chambre  des  pain. -^SuUe  delà  discussion  sur  la  paix{l). 

lAi  lord  L^nsdown  examine  l'augmentation  de  force  que 
la  conquête  de  Hollande  procure  A  la  France.  Outre  une 
étendue  de  côtes  très-considérable,  les  Français  se  sont 
emparés  d'une  marine  tirès-forte. 

Après  avoir  examiné  la  question  sous  divers  points  de  vue 
politique,  il  terrolnealnsi  par  unesoriie  satirique  sur  le  ma- 
riage du  princp  de  Galles.  <  Je  dois  encore  observer,  dit-Il, 
que  la  conquête  de  la  Hollande  a  retardé  le  mariage,  de- 
puis si  lon[;iemps  attendu,  d'un  personnage  royal;  mais  mol 
qui  compte  toujours  sur  la  galanterie  française,  Je  pense 

(1)  Ici  se  trouve,  dans  l'édition  originale  du  Ifonif eur,  IV 
nalyse  de  plusieurs  discours  précède mment  inaérée  n*  i70, 
page  635,  1'*  colonne,  depuis  ces  mots  :  Le  lord  GrenvilU 
pieiid  la  parole  y  etc. ,  jasqu*h  eeut-el  inclusivement  :  1} 
sera  assee  curieux  aeort  de  voir  le  roi  de  Prusse  Jouer  A 
rôle  de  M  Hope  Nous  avons  cm  inutile  d'insérer  dans  notr( 
édition  eetterépétAtson,  qui  ne  centient  aucun  changement 


686 


qu*eD  fidsaot  la  moindre  prière  an  e^nëral  Pichegm,  il  lais- 
•eniit  passer  sans  nul  obstacle  cette  aimable  personne.  >    • 

Après  cette  saillie  piquante»  lord  Lansdown  se  résume  en 
appuyant  la  motion  pour  négocier  la  paix. 

Le  comte  Spencer  soutient  que  la  guerre  est  nécessaire; 
que,  loin  de  solliciter  la  paix,  l'honneur  national  doit  engager 
les  Anglais  à  faire  tous  leurs  efforts  pour  faire  la  guerre 
avec  vigueur.  Il  interpelle  ensuite  le  marquis  de  Lansdown , 
en  lui  demandant  pourquoi  lui  et  ses  amis  ne  prêtent  pas 
leur  assistance  au  ministère,  il  termine  en  appuyant  l'amen- 
dément. 

Lord  Hanke  opine  pour  ramendemeot,  et  soutient  que  la 
marine  anglaise  est  beaucoup  supérieure  à  celle  des  Fran- 
çais. 

Lord  Hardwlch  opine  pour  l'amendement,  et,  pour  prou- 
ver que  l'on  ne  veut  pas  se  mêler  des  affaires  intérieures  de 
France,  il  cite  la  proclamation  faite  à  Toulon,  au  nom  de 
Sa  Majesté. 

Le  marquis  d*Abercoon  soutient  la  motion  et  la  nécessité 
d'une  négociation  prompte. 

Lord  Mulgrave  appuie  l'amendement. 

Lord  Lauderdale  s'oppose  à  l'amendement  que  l'on  vient 
de  proposer.  Il  pense  que  la  circonstance  actuelle  est  favo- 
rable et  urgente  pour  négocier.  <  L'année  dernière,  il  était 
en  notre  pouvoir  de  faire  la  paix  d'une  manière  plus  avan- 
tageuse; mais  il  ne  faut  pas  être  bien  clainoyant  pour  s'a- 
percevoir que  nous  serons  bien  plus  mal  encore  dans  un  an. 
Si  nous  avions  voulu  faire  la  paix  l'année  dernière,  nous 
œ  verrions  pas  aujourd'hui  la  femille  staihoudérienne  ve- 
nir chercher  un  asile  dans  ce  pays,  et  les  forces  des  Fran- 
çais n'auraient  pas  été  augmentées  par  cellea  de  la  Hollande. 

«  On  avait  beaucoup  compté  sur  les  auxiliaires  que  l'Au- 
triche devait  nous  fournir,  mais  c'était  une  folie  de  croire 
que  ces  troupes  serviraient  sous  les  ordres  d'un  général 
anglais  :  elles  auraient  reçu  cette  proposition  avec  autant 
d'indifférence  que  l'empereur  de  la  Chine  a  reçu  vos  pré- 
sents. » 

Après  d'autres  observations,  lord  Lauderdale  termhiesoo 
discours  en  appuyant  la  motion. 

Le  duc  de  Leeds  et  lord  Carlisie  parlent  éffalement  en 
faveur  de  la  motion. 

Lord  Auckland  s^oppose  à  la  motkm,  mais  il  trouve  aussi 
quelques  ambiguïtés  dans  l'amendement;  cependant  il  l'ap- 
puie. 

Le  comte  Guilford  feit  un  discours  très-bref  en  faveur  de 
la  motion. 

L'évéque  de  Durham  pense  que  la  motion  du  noble  lord 
ne  tend  qu'à  ralentir  nos  efforts,  à  nous  engager  dans  une 
négociation  illusoire,  et  à  détruire  le  bon  ordre  et  la  religion. 

Le  duc  de  Bedford  répond  d'une  manière  très-éloquente 
aux  différentes  observations  qui  ont  été  faites  sur  sa  motion; 
Il  lait  sentir  qu'elle  n'a  pour  but  que  de  chercher  à  enuimer 
lue  négociation  très-nécessaire. 

La  Chambre  va  ensuite  aux  voix  snr  ramendement,  et  le 
résultat  est  :  pour,  88;  contre,  15;  majorité,  73. 


REPUBLIQUE  FRANÇAISE. 

Parts,  le  22  venlose.  —  Les  étals  généraux  des 
Provinces-Unies  onl  nommé  les  citoyens  Blauw  el 
Meyer  ministres  plénipotentiaires  auprès  de  la  ré|)U- 
blique  française  ;  ce  dernier  vient  d^arriver  à  Paris , 
où  le  citoyen  Blauw  résidait  déjà  depuis  quelque 
temps. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Préddenee  de  Thibaudeam 
SUITB  DB  LA  SÉANCE  DU  21  VENTOSE. 

Legendbb  (de  Paris)  :  Je  ne  crois  pas  qu'il  y  en 
Bit  on  seul  de  nous  qui  s'oppose  à  ce  qu'on  fasse  une 


Adresse  au  peuple  ;  mais  je  crois  que  la  meilleim 
chose  que  nous  puissions  faire  est  d'oublier  nos 
vieilles  haines  (applaudissements  V,  c'est  d'éteindre 
ici  toutes  passions  particulières;  c est  de  nous  con* 
vaincre  que  non-seulement  la  Convention ,  mais  U 
France  entière,  a  été  opprimée,  et  que ,  toutes  les 
fois  que  le  gouvernement  est  tyrannique,  il  faut 
que  les  autorités  subalternes  soient  oppressives  ou 
opprimées.  H  ne  faut  donc  punir  tiue  les  tyrans,  el 
pardonner  à  ceux  qui  ont  été  égar&. 

La  Convention  était  tellement  opprimée  que  ^ 
lorsque  les  tyraâs  entraient  en  masse  dans  son  sein, 
chacun  de  nous  voyait  sur  leur  front  son  mandat 
d'arrêt  écrit  en  lettres  de  bile  et  de  sang  ;  et  quand 
un  membre  osa  demander  ici  que  quelques-uns  de 
ses  collègues  ne  fussent  pas  envoyés  à  l'écnafaud  sans 
avoir  été  entendus,  peu  s'en  est  fallu  qu'il  n*allât  les 
rejoindre.  (Applaudissements.) 

Examinons  les  coupables  avant  de  les  condamner; 
que  personne  ne  se  fasse  justice  soi-même  ;  car  dans 
un  pays  libre,  c'est  se  mettre  au  rang  des  assassins. 
Je  me  déclare  le  défenseur  de  tous  mes  collègues 
qui  ont  été  dans  Terreur,  et  de  ceux  même  qui  au- 
raient dépassé  les  bornes  de  l'erreur;  ils  trouveront 
autant  de  défenseurs  qu'il  y  a  de  membres  dans  cette 
assemblée.  11  faut  donc ,  et  ce  n'est  pas  Tenvie  de 
voir  périr  des  hommes  qui  me  le  fait  dire,  mais  le 
désir  de  voir  éteindre  tous  les  soupçons,  il  faut  donc 
faire  justice  des  tyrans  seuls. 

Si  la  Convention  est  divisée  en  deux  ]>artis,  il  y 
aura  aussi  deux  partis  dans  la  république.  Le  plus 
sûr  moyen  d'éviter  les  divisions  est  de  ne  voir  que 
le  but,  le  bonheur  du  peuple^  En  y  marchant  direc- 
tement et  avec  un  zèle  bien  ardent,  nous  ne  ver- 
rons pas  à  droite  et  à  gauche  les  petites  passions  qui 
pourraient  nous  arrêter  sur  la  route.  Occupons-noos 
donc  d'établir  un  gouvernement  libre.  Que  les  hom- 
mes éclairés  qui  n'ont  pas  l'habitude  de  la  tribune 
travaillent  utilement  dans  leurs  cabinets!  que  les 
hommes  modestes  sachent  que  la  modestie  est  un 
crime  lorsqu'il  faut  de  l'énergie  !  que  toutes  les  hai- 
nes s'oublient!  que  chacun  serre  son  ennemi  par- 
ticulier, s'il  veut  faire  le  bien  avec  lui  !  Souvenons* 
nous  qu'il  est  impossible  qu'une  grande  révolution 
s'opère  sans  que  Ton  commette  quelques  injustices. 

J'appuie  donc  l'Adresse  proposée  par  Boissy  ;  je 
demande  au'elle  exprime  fortement  que  les  puissan- 
ces étrangères  ne  parviendront  jamais  à  nous  divi* 
ser,  que  nous  sommes  bien  déterminés  à  assurer  le 
bonheur  public  sur  les  bases  de  la  constitution  ac- 
ceptée par  le  peuple.  (Vifs  applaudissements.)  Je 
demandTe  qu'elle  fasse  connaître  aux  royalistes  qu'ils 
ont  perdu  tout  espoir.  La  raison  nationale  estcomuM 
un  glaive  à  deux  tranchants  ;  elle  abattra  ^galenent 
et  les  royalistes  et  les  terroristes.  Tant  qu'il  n*y  aura 
pas  de  royalistes  dans  cette  assemblée,  et  je  suis  peff> 
suadé  qu  il  n'y  en  a  pas  (vifs  applaudissements).  Il 
n'y  en  aura  pas  dans  la  république. 

André  Dumont  :  J'appuie  aussi  les  |>ropositîons 
de  Boissy;  je  déclare  aussi  une  guerre  à  mort  aux 
royalistes  ;  mais  je  crains  bien  que  ceux  qui  crient 
si  fort  contre  les  royalistes  ne  le  soient  beaucoup 
plus  que  ceux  qu'ils  accusent  de  l'être.  Je  crois  que, 
si  l'on  arrêtait  tous  tes  provocateurs  à  la  royauté, 
on  pourrait  bien  reconnaître  parmi  eux  beaucoup 
de  ceux  qui  secondaient  la  terreur  avant  le  9  ther- 
midor. Comment  voulez- vous  qu'on  ne  craigne  pas 
le  retour  de  cet  affreux  système,  quand  les  coefii  de 
la  terreur  existent  encore?  Ne  cmrche-t-on  pas  à 
trouver  chaque  jour  des  projets  de  contre-révoln* 
tion  ?  Hier  encore  o'accusait-on  pas  le  vent  ?  Le  temps 


667 


des  conspirations  est  passe,  celui  de  la  justice  est 
arrivé.  Ne  laissons  plus  de  motif  aux  agitations  : 
frappons  et  les  royalistes  et  les  terroristes;  tons 
deux  sont  également  en  horreur  aux  vrais  républi- 
cains. (Applaudissements.) 

BOUBDON  (de  l'Oise)  :  11  me  semble  que  si,  dans 
ce  moment,  nous  prenions  des  mesures  répressives 
contre  les  royalistes,  ce  serait  faire  croire  que  jus- 
qu*à  présent  la  Convention  a  flotté  incertaine  sur 
ropinion  qu'elle  devait  avoir  des  royalistes.  Vous 
avez  déjà  porté  contre  eux  des  lois  sévères,  et  vous 
avez  dû  le  faire  ;  car,  indépendamment  de  l'aversion 
que  tous  les  Français  ont  pour  ce  système  maudit,  le 
rétablissement  de  la  royauté  ne  tendraitqu*à  renver- 
ser le  nouvel  ordre  social  que  vous  avez  établi. 

Je  ne  m*op|)ose  pas  à  ce  qu'on  fasse  une  Adresse 
au  peuple,  mais  je  crois  que  la  meilleure  chose  que 
nous  puissions  faire  est  de  nous  occuper  des  finances, 
de  retirer  les  assignats.  (Applaudissements.)  Nous 
avons  encore  à  nous  occuper  d'un  autre  objet  qui 
n'est  pas  moins  intéressant  :  c'est  de  fixer  la  ma- 
nière dont  vous  traiterez.avec  les  puissances  étran* 
gères,  de  la  paix  qui  doit  assurer  le  bonheur  du 
peuple. 

Je  le  répète,  je  ne  m'oppose  pas  à  ce  qu'il  soit  fait 
une  Adresse  au  peuple  ;  mais  je  crois  que  la  Conven- 
tion descendrait  de  la  hauteur  où  elle  est  parvenue 
si  elle  faisait  de  nouvelles  lois  contre  les  royalistes: 
car  elle  semblerait  les  craindre.  D'ailleurs,  il  faut 
être  de  bonne  foi  ;  il  faut  convenir  que  bien  des  gens 
n'ont  souvent  accusé  d'autres  hommes  d'être  roya- 
listes que  parce  qu'ils  n'étaient  pas  de  leur  avis; 
c'est  une  arme  usée.  (Applaudissements.) 

Rewbell  :  Toutes  les  lois  qui  ont  été  faites  jus- 
qu'à présent  contre  les  provocateurs  au  royalisme 
sont  vagues  et  atroces  ;  c'est  pour  cela  qu'on  n'est 
point  encore  parvenu  à  les  comprimer.  L'article  que 
propose  Boissy  aurait  le  même  inconvénient;  ou  il 
ne  produirait  rien,  ou  il  jetterait  les  juges  dans  des 
difbcultés  interminables. 

Je  crois  qu'il  est  nécessaire  défaire  connaître  à  la 
Convention  l'état  actuel  de  l'opinion  dans  Paris. 

On  a  grand  soin  de  répandre  que,  dans  les  spec- 
tacles, le  cri  de  vive  la  réfmbHquel  ce  cri  qui  doit 
faire  tressaillirde  joie  tout  cœur  français  qui  n'est 
pas  de  boue,  qui  doitélectriser  les  ftmes  de  glace  ;  on 
répand,  dis-je,  avec  afiectation,  que  ce  cri  n'est  en- 
tendu, qu'indifféremment  dans  les  spectacles.  On  ré- 
pand ce  bruit  jusque  dans  les  groupes  ;  mais  ce  qu'on 
se  garde  bien  de  dire,  c'est  que,  dans  les  rassemble- 
ments qu'on  fait  à  la  |K)rle  des  bouchers  et  des  bou- 
langers, on  cherche  à  donner  des  inquiétudes  sur 
les  subsistances  ou  sur  leur  cherté;  on  insinue  en- 
suite que  cet  état  durera  tant  que  nous  n'aurons  pas 
la  constitution  de  1791,  c'est-à-dire  tant  que  nous 
n'aurons  pas  un  roi.  On  ajoute  qu'il  pourrait  bien  y 
avoir  une  espèce  d'insurrection  qui  ferait  cesser  aus- 
sitôt la  disette.  Comme  si  un  roi  pouvait  nous  don- 
ner du  pain  !  comme  s'il  pouvait  nous  donner  4iutre 
chose  que  des  fers  !  comme  si  tout  le  monde  ne  fui- 
rait nas  comme  un  pays  de  pestiférés  celui  qui  serait 
agité  par  des  insurrections  continuelles! 

On  a  reconnu,  parmi  ce^  eens  oui  prêchaient  la 
royauté  et  excitaient  le  trounle ,  des  individus  qui 
propageaient  la  terreur  avant  le  9  thermidor.  Que 
veulent-ils  donc  ces  malheureux  qui,  dans  ce  temps, 
mouraient  de  faim  ?  Si,  a  cette  époque  où  l'on  man- 
quait de  tout,  où  l'on  ne  pouvait  avoir  ni  pain,  ni 
viande,  ni  chandelle,  ni  huile,  ni  rien  enfin  de  tout 
ce  qui  est  nécessaire  à  la  vie  ;  si  à  cette  époque  on 


eût  dit  :  Vous  paierez  la  viande  cher,  mais  vous  en 
aurez;  vous  paierez  la  chandelle  cher,  mais  vous  en 
aurez  ;  vous  paierez  les  denrées  cher,  mais  vous  en 
aurez  ;  vous  pourrez  avoir  douze  œufs  chez  vous 
sans  crainte  d'être  regardés  comme  accapareurs,  et 
l'on  va  faire  disparaître  cet  instrument  odieux  qui  a 
déjà  donné  la  mort  à  tant  de  victimes  et  qui  blesse 
les  yeux  de  tout  le  monde  :  quel  est  celui  qui  n'au- 
rait pas  embrassé  les  genoux  de  l'homme  qui  lui 
aurait  fait  cette  promesse?  Eh  bien,  cette  promesse, 

elle  est  accomplie (vifs  applaudissements);  elle 

est  accomplie  par  les  soins  de  la  Convention.  On  ne 
se  fait  pas  d'idée  des  efforts  qu'il  a  fallu  faire  anx 
comités  de  gouvernement  pour  ramener  cette  sorte 
d'aisance  ;  toutes  les  ressources  étaient  détruites, 
tout  était  perdu. 

BouRooif  (de  l'Oise)  :  On  a  trop  longtemps  vécu 
de  la  guillotine  dans  les  anciens  comités. 

Rewbell:  On  a  voulu  faire  prendre  pour  dn  répu- 
blicanisme toutes  les  horreurs  qui  se  sont  passées 
avant  le  9  thermidor,  et,  parce  que  la  Convention  est 
plus  juste,  parce  qu'elle  ne  fait  point  guillotiner  par 
cinquantaine,  par  soixantaine,  par  centaine,  on  vou- 
drait l'accuser  de  penchant  au  royalisme.  Ceux  qui 
répandent  ces  bruits  n'en  croient  pas  un  mot  ;  mais 
ils  les  sèment  parce  qu'ils  savent  bien  que,  tant  que 
la  Convention  sera  et  passera  pour  être  républicaine, 
jamais  ni  le  royalisme  ni  le  terrorisme  ne  pourront 
reprendre  le  dessus;  c'est  pour  celaqn'ils  s'attachent 
à  calomnier  la  Convention.  (Vifs  applaudissements.) 
Oui,  nous  le  proclamons  à  la  face  de  l'univers  en- 
tier, ta  Convention  est  républicaine.  (Ont,  oui!  s'é- 
crient tous  les  membres  ;  vive  la  réjmbliquel  Ce  en 
est  répété  par  tous  les  citoyens,  qui  applaudissent  de 
toutes  parts.)  Eh  bien,  hommes  de  sang,  royalistes, 
vous  qui  êtes  aussi  des  hommes  de  sanff,  levez- vous 
donc  pour  détruire  la  république  !  Il  faudra  qu'au- 
paravant vous  nous  ayez  égorgés  tous,  et  ce  ne  sera 
que  sur  nos  cadavres  aue  vous  établirez  le  trône  ou 
la  guillotine.  (Vifs  applaudissements.) 

C'est  en  vain  qu'on  voudrait  tromper  le  peuple  ; 
il  n'va  pas  d'aristocrate,  pas  de  royaliste,  tel  enragé' 
qu'il  soit,  qui  ne  sache  que  la  Convention  est  répu- 
blicaine, et  qui  ne  sente  que  jamais  le  royalisme  ne 
sera  rétabli  ;  car  pour  cela  il  faudrait  détruire  la 
Convention  ;  mais  le  jour  où  elle  serait  détruite  se- 
rait celui  où  naîtrait  la  famine  et  où  Ton  commence- 
rait à  sfentr'égorger  les  uns  les  autres. 

Si  ces  malheurs  arrivaient,  il  ne  faudrait  pas  en- 
core que  les  royalistes  ou  les  terroristes  se  crussent 
vainqueurs  ;  car  après  la  dissolution  de  la  Conven- 
tion il  resterait  encore  des  républicains 

Pluiieun  voiœ  :  Et  les  armées  !  (Vifs  applaudisse- 
ments.) 

Rewbell  :  NoUj  jamais  un  seul  des  républicains 
qui  resteraient  ne  voudrait  vivre  dans  un  pays  qui 
serait  devenu  la  proie  de  tout  ce  qu'il  y  a  de  plus  vil 
et  de  plus  méprisable  sur  la  terre,  des  lâches  émi- 
grés. Qui  voudrait  vivre  sous  la  domination  d'un 
tyran?  Et  qu'ils  ne  s'y  trompent  pas,  les  royalistes 
enragés  seraient  eux-mêmes  leurs  premières  victi» 
mes.  (Applaudissements.) 

Notre  devoir  est  donc  de  prévenir  tant  de  maux,  et 
de  comprimer  les  royalistes  et  ceux  qui  disent  qu'il 
y  a  beaucoup  de  royalistes,  afin  de  leur  faire  croire 
une  force  qu'ils  n'ont  pas  ;  mais  il  ne  faut  pas  que 
les  lois  soient  vagues  comme  elles  l'ont  été  jusqu'à 
présent;  il  ne  faut  pas  qu'on  puisse  abuser  d'une 
juste  formalité  établie  par  la  loi  pour  protéger  FiD-- 
pocent,  et  qu'on  puisse  soustraire  les  plus  grands 


6«8 


coupables  à  la  yengeanee  des  lois  en  {prononçant  sor 
U  question  intentionnelle  :  pour  cela  il  fout  préciser 
les  délits  et  les  peines. 

Je  sais  qu'il  j  a  encore  des  |^ns  qui  ne  se  plaisent 
pas  dans  la  société  des  républicains  ;  eh  bieu,  qu'ils 
partent  !  ^Vifs  applaudissements.)  Voilà  un  principe 
sur  lequel  on  peut  baser  une  bonne  loi. 

Je  demande  qu'on  charge  le  comité  de  législation 
de  présenter  une  loi  dans  laquelle  il  précisera  les 
délits  et  y  appliquera  la  peine,  celle  de  la  déporta- 
;  tion,  par  exemple.  (Nouveaux  applaudissements.) 
'  Alors  tous  les  bons  citoyens  qui  n*aiment  pas  à  ver- 
^ser  le  sang,  mais  qui  voudraient  voir  la  république 
délivrée  des  mauvais  sujets  qu'elle  renferme,  ne 
manqueront  pasde  les  désigner.  (Applaudissements.) 

La  proposition  de  Rewbell  est  décrétée. 

Goujon  :  Je  ne  parlerai  pas  sur  les  premiers  arti- 
cles présentés  par  Boissy  uÀnglas;  je  me  bornerai 
à  faire  quelques  observations  sur  l'Adresse  qui  vous 
est  proposée.  Je  ne  veux  pas  la  combattre,  mais  je 
désire  ou'elle  soit  l'interprète  des  véritables  senti- 
ments ae  la  Convention  nationale.  L'union  et  l<'i  paix 
sont  les  éléments  du  bonheur  public  ;  c*est  avec  ce 
sentiment  .profondément  gravé  dans  l'âme  que  Je 
prends  la  parole.  Ce  n'est  pas  seulement  dans  les 
discours  que  l'on  doit  trouver  la  paix,  mais  bien  plus 
encore  dans  les  cœurs,  dans  les  actions.  N'en  doutez 
pas,  citoyens,  ce  qui  a  troublé  la  paix  de  la  républi- 
que, et  ce  oui  pourrait  encore  la  troubler,  c'est  la 
manie  que  l'on  a  toujours  eue  de  combattre  les  rai- 
sons par  des  mots  de  parti  et  par  des  dénominations 
injurieuses.  La  paix  ne  peut  exister  quand  un  ûéau 
pèse  sur  toutes  les  têtes,  quand  on  s'élève  contre 
quiconque  ne  partage  pas  i  opinion  reçue,  auand  on 
empoisonne  les  intentions  de  celui  qui  parte  contre 
le  système  de  quelques  individus  ;  en6n  la  paix  ne 
peut  exister  quand  on  accuse  un  homme  sans  prou- 
ver les  crimes  dont  on  annonce  qu'il  s'est  rendu 
coupable.  (On  applaudit.) 

Il  est  vrai  que  la  richesse  fut  toujours  un  éternel 
sujet  de  division  des  sociétés;  des  intrigants,  des 
factieux  se  sont  servis  du  préjugé  contre  les  riches 
pour  diviser  les  citoyens  et  créer  des  partis  ;  ils  di- 
saient à  une  portion  du  peuple  :  Les  riches  veulent 
vous  affamer,  vous  détruire  ;  aux  autres  :  Ils  visent 
à  la  suprématie.  De  ces  insinuations  astucieuses  sont 
nées  les  dénominations  vagues  avec  lesquelles  on 
terrassait  la  raison  et  la  vertu.  (On  applaudit.) 

Si,  dans  l'Adresse  proposée  par  Boissy  d'Anglas, 
011  peint  les  amis  de  la  liberté  comme  des  hommes 
sanguinaires....  (Murmures.)  Citoyens,  je  hais  au- 
tant que  vous  leshommesdesang;de  ma  vie  je  n'ai 
fait  de  mal  volontairement;  mais  je  dis  ane  si  on  se 
sert  du  mot  terroriste  pour  poursuivre  les  bons  ci- 
toyens  (Violents  murmures.) 

Vn  grand  nombre  de  membres  :  Personne  ne  veut 
poursuivre  les  bons  citoyens. 

Goujon  :  Cette  dénomination  vague  de  terroristes, 
inventée  par  des  hommes  qui  veulent  tout  agiter,  né 
sert  qu*à  taire  planer  le  soupçon  indistinctement  sur 
toutes  les  léles  ;  s1l  existe  des  coupables,  qu'on  les 
désigne  et  que  la  loi  en  fasse  justice.  Quant  à  moi , 
je  déclare  que,  si  je  me  croyais  coupable,  j'aurais  le 
courage  de  m'accuser  moi-même  ;  je  dirais  :  Si  mon 
sang  peut  rétablir  la  paix  dans  mon  pays,  qu'il  soit 
répandu  !  (Quelques  applaudissementsdeTextrémité 
gauche.) 

N'oubliez  jamais,  citoyens,  et  vous  en  avez  fait 
la  funeste  expérience,  qu'un  homme  revêtu  de  la 
puissance  se  croit  en  droit  d'opprimer,  et  qu'il  rc- 


farde  celui  qui  lutrésiste  comme  an  médiiiil;  n*M* 
liez  jamais  non  plus  que  quiconque  redoute  lavé* 
rtté  est  un  tyran.  (On  applaudit.) 

Si  vous  voulez  que  la  paix  rè^e  dans  la  répnblî- 

3ue,  ne  souffrez  qu'une  seule  oénomînatîoii ,  ceile 
e  citoyens;  bannissez  toutes  les  autres,  qui  oe  sont 
que  des  armes  dans  la  main  de  celui  qui  veut  établir 
la  terreur.  Je  ne  m'oppose  pas  à  ce  qu'une  AdresM 
soit  faite  aux  Français  ;  mais  je  demande  qu'elle 
contienne  les  véritables  sentiments  de  la  Convention 
nationale  ;  je  demande  aussi  que  l'on  ne  puisse  ja- 
mais accuser  un  membre  de  cette  assemblée  sans 
prouver  les  faits  qu'on  lui  reproche. 

L'assemblée  décrète  an'une  Adresse  sera  faîte  aux 
Français,  et  ordonne  1  impression  et  l'insertion  au 
Bulletin  du  discours  prononcé  par  Rewbell. 

FoussEDOiRB  :  Je  demande  que  les  observations 
de  Goujon  soient  également  imprimées. 

On  réclame  l'ordre  du  jour  sur  cette  proposition. 

L'ordre  du  jour  est  adopté. 

LoisEAU  :  C'est  ainsi  que  vous  voulez  la  paix  ! 
(Bruit.) 

Chazal,  au  nom  du  comité  de  salut  public  :  Ci- 
toyens, on  cherche  à  donner  de  l'inquiétude  an  peu- 
ple. On  répand  depuis  plusieurs  jours  que  des  corps 
nombreux  de  cavalerie  et  d'infanterie  sont  rassem- 
blés autour  de  Paris  et  menacent  la  liberté. 

Il  est  souvent  dangereux  de  publier  les  mesures 
de  sûreté  que  prend  le  gouvernement  ;  heureuse* 
ment  dans  cette  occasion  on  peut  tout  dire. 

Il  n'existe  dans  les  environs  de  Paris  et  sur  les 
différents  points  de  la  circonférence  de  trois  mille 
toises  de  rayon,  au'un  dépôt  de  deux  cents  hommes 
du  83e  régiment  d'infanterie  et  du  i^r  bataillon  de  la 
Manche ,  dont  les  corps  sont  prisonniers  ;  soixante- 
dix-huit  cavaliers,  quatre-vingt-huit  dragons, 
trente-deux  chasseurs  et  quarante-trois  hussards; 
ce  qui  fait  en  tout  quatre  cent  quarante  et  un  hom- 
mes. 

Ces  soldats,  citoyens,  sont  employés  à  prot^cr  la 
police  des  marchés  et  l'arrivage  des  subsistances. 

Leur  pr.ésence  ne  menace  que  la  liberté  de  s'op- 
poser aux  approvisionnements ,  de  piller  les  maga- 
sins de  Paris,  et  d'affamer  cette  grande  et  intéres- 
sante commune. 

Ceux  qui  ont  cette  raison  de  s'en  alarmer  up  mé- 
ritent pas  sans  doute  qu'on  les  rassure. 

Votre  comité  de  salut  public  m'a  chargé,  en  voos 
rendant  ce  compte,  d'en  demander  l'insertion  an 
Bulletin. 

Cette  proposition  est  décrété  en  ces  termes: 
-  La  Convention  nationale  «  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  de  salut  public  relative* 
ment  aux  inouiétudes  que  l'on  cherche  à  donner  an 
peuple  en  publiant  qu'il  rxislc  aux  environs  de.  Paris 
des  rassemblements  d'hommes  armés,  décrète  que 
ce  rapport  sera  inséré  au  Bulletin  et  allicbé  dtans 
Paris." 

—  Sur  le  rapport  du  même  membre,  les  deux  dé- 
crets suivants  sont  rendus  : 

•  La  Convention  nationale ,  sur  la  proposition  de 
son  comité  de  salut  public ,  décrète  que  la  commis- 
sion  des  travaux  publics  continuera  jusqu'au  l«r 
floréal  prochain  le  service  relatif  à  l'arme  du  Renie.  ' 
attribué  à  celle  du  mouvement  par  la  loi  du  H  de  ce  i 
mois.  •  I 

—  -  La  Convention  nationale,  après  avoir  en- 


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tendu  son  comité  de  saint  publie, décrète  qneles 
représentants  du  peuple  Bô  et  Piquet  se  rendront 
sur-le-champ  près  les  armées  des  Pyrénées-Occi* 
dentales,  pour  y  remplacer  les  représentants  du 
peuple  Delcher,  Garrau  et  Baudot,  dont  la  mission 
est  expirée.  • 

—  Des  députations  de  sections  se  présentent. 

—  La  section  du  Théâtre-Français  est  admise. 

Fiévée^  orateur  de  la  députation  :  Législateurs,  la 
section  du  Théâtre-Français,  effrayée  de  la  nou- 
velle scission  que  Ton  cherche  à  opérer  dans  l'opi- 
nion publique ,  vient  dans  votre  sein  désavouer  ae- 
vaut  la  France  entière  les  journées  désastreuses  des 
31  mai  et  2  Juin. 

Nous  devons  révéler  à  la  Convention  nationale,  à 
tous  les  départements,  à  Thistoire  surtout, qui  pour- 
rait nous  accuser  de  versatilité ,  nous  devons  révé- 
ler des  vérités  terribles  qui  prouveront  que  la  sec- 
tion du  Théâtre-Français  manifesta  ,  au  milieu  des 
plus  grands  daneers,  les  mêmes  sentiments  quVIle 
professe  aujourd'hui.  Ab!  si  le  2  juin  on  nous  eût 
permis  de  parvenir  jusqu'à  vous,  sur  combien  de 
malheurs,  de  pertes  irréparables,  la  France  n'aurait 
pas  à  gémir  maintenant  ! 

Oui ,  législateurs ,  après  avoir  combattu  pendant 
deux  jours  les  soudoyés  de  la  commune  conspira- 
trice; après  9Voir  renvoyé  ignominieusement  pen- 
dant deux  jours  les  émissaires  décorés  de  Técharpe 
municipale  :  le  2  juin  enfin ,  la  section  du  Théâtre- 
Français,  à  la  majorité  la  plus  respectable,  protesta 
par  un  arrêté  formel  contre  tous  les  attentats  com« 
mis  an  nom  du  peuple  de  Paris  dans  les  journées 
des  31  mai  et  l^r  juin.  Avec  quel  empressement  elle 
nomma  aussitôt  des  commissaires  pour  venir  vous 
communiquer  cet  arrêté  si  glorieux  pour  elle,  et 
vous  assurer  qu'elle  combattrait  jusqu'à  la  mort  pour 
maintenir  la  liberté  de  vos  délibérations  ! 

Vous  vous  demandez  sans  doute  par  quelle  fatalité 
les  commissaires  chargés  de  notre  vœu  ne  parvin* 
rent  pas  jusqu'à  vous  ;  vous  gémissez  de  ce  que  par 
leur  présence  ils  ne  Durent  ranimer  votre  énergie 
que  tant  de  sections  divisées  s'étaient  réunies  pour 
comprimer.  Législateurs,  nous  n'accusons  personne, 
mais  nous  vous  avons  promis  la  vérité,  il  est  temps 
de  la  dire. 

Nos  commissaires,  arrivés  à  l'une  de^  portes  du 
jardin  des  Tuileries,  furent  arrêtés  par  quatre  satel- 
lites qui  les  conduisirent  au  comité  de  sûreté  géné- 
rale de  la  Convention ,  et  demandèrent  un  reçu  du 
dépôt  qu'ils  venaient  de  faire.  Effectivement  i1  leur 
fut  donné,  sur  un  papier  auquel  on  apposa  le  timbre 
du  comité,  un  récépissé  en  bonne  forme  ,  contenant 
acte  de  la  plus  énorme  violation  nu'il  soit  possible 
de  couiniettre  envers  les  députés  a'une  portion  du 
peuple  ,  exerçant  légalement  les  droits  politiques 
dans  le  lieu  ordinaire  de  ses  séances. 

Nos  commissaires, plus  indignés  qu'effrayés  d'une 
mesure  aussi  extraordinaire ,  insistaient  avec  opi- 
niâtreté pour  arriver  jusqu'à  vous.  On  les  en  empê- 
cha sous  divers  prétextes ,  sous  celui  surtout  que, 
dans  la  position  où  était  la  Convention ,  ils  pour- 
raient opérer  beaucoup  de  mal  et  aucun  bien.  Quelle 
absurdité,  grand  Dieu  !  Comme  s'il  n'était  pas  évi- 
dent que  le  véritable  vœu  du  peuple  n'arrive  jamais 
jusqu  à  ses  représentants  sans  qu  aussitôt  la  volonté 
du  peuple  et  celle  de  la  Convention  se  réunissent 
pour  le  salut  de  la  patrie. 

Nos  commissaires  voulurent  quitter  le  comité  de 
sûreté  pour  chercher  d'autres  moyens  de  pénétrer 
dans  cette  enceinte;  vain  désir  !  Les  nommes  charges 


d'exprimer  le  vera  d'une  seetion  entière  étaient  dans 
un  etnt  réel  d'arrestation ,  que  les  formes  les  plus 
honnêtes  tentaient  en  vain  de  déguiser.  Us  furent 
maîtres  de  sortir  quand  le  décret  d'arrestation  contre 
vos  infortunés  et  innocents  collègues  eut  été  arraché 
par  la  violence;  ils  furent  maîtres  de  sortir  quand  il 
était  malheureusement  trop  décidé  que  le  peuple  et 
Il  Convention  n'étaient  plus  libres. 

Législateurs,  ce  n'est  là  qu'une  partie  du  tableau; 
nous  aurons  le  courage  de  l'achever. 

Les  patriotes  aussi  éclairés  que  courageux  qni  « 
dans  la  section  du  Théâtre-Français,  venaient  de 
protester  contre  les  journées  des  31  mai  et  l«r  juin, 
mqUiets  de  la  longue  absence  de  leurs  commissaires 
auprès  de  vous,  craignant  la  violation  du  caractère 
sacré  que  leur  mission  leur  avait  imposé ,  propo- 
saient de  s'armer  pour  voler  à  votre  secours,  lors* 
que  des  hommes  soudoyés  entrent  dans  notre  as* 
semblée ,  le  pistolet  à  la  main ,  nous  saisissent  par 
les  cheveux ,  nous  traînent  de  banc  en  banc  pour 
nous  réunir  et  nous  massacrer  sur  le  bureau  de  nos 
délibérations.  Nous  opposions  les  efforts  du  déses» 

ftoir  et  ce  courage  qui  décide  l'homme  vraiment 
ibre  à  mourir  sans  regrets  pour  sa  patrie,  lorsqu'un 
cri  :  Auw  arme«/  se  fait  entendre.  Ce  cri  nous  ràp* 

Eelle  que  nos  fusils,  nos  sabres  sont  en  faisceau  dans 
I  cour  qui  précède  la  sallp  de  nos  délibérations. 
Nous  courons  pour  nous  armer;  ce  cri  perfide  :  Âuw 
armet  !  était  celui  de  notre  mort  ;  il  nous  avait  dis- 
persés l  Les  brigands  avaient  triomphé  de  la  Con- 
vention; nous  rapprîmes,  et  il  ne  nous  resta  plus 
qu'à  cacher  notre  douleur.  Depuis  ce  temps ,  des 
monstres,  qui  ne  peuvent  être  comptés  pour  quelque 
chose  que  dans  une  caverne  de  voleurs,  ne  nous  ar- 
rêtaient jamais  sans  nous  dire  :  •  Vous  étiez  contre 
nous,  le  31  mai  ?  -  Ah  !  sans  doute,  nous  étions  con- 
tre eux  le  31  mai ,  nous  étion»  aussi  contre  eux  la 
nuit  du  0  au  10  thermidor  ;  nous  n'avions  jamais 
cessé  d'être  contre  eux ,  puisque  nous  avons  cou* 
stamment  défendu  les  principes  i  la  justice  et  l'hu* 
manité. 

Législateurs,  nous  devons  le  dire  ponr  l'honneur 
des  citoyens  de  Paris  :  en  désavouant  aujourd'hui 
les  journées  désastreuses  des  81  mai,  l«r  et  2  juin, 
nous  ne  faisons  que  reproduire  une  volonté  pronon- 
cée dans  un  moment  où  il  y  aurait  eu  du  mérite  à  la 
manifester,  si  ce  n'eût  été  un  devoir.  Nous  défen- 
dions alors  les  droits  de  la  représentation  nationale; 
nous  les  défendons  encore  en  applaudissant  au  dé- 
cret qui  rappelle  à  leur  poste  les  aeputés  injustement 
mis  hors  la  loi,  La  reconnaissance  publique  se 
chargera  de  la  mémoire  de  ceux  qui  ont  pén  sous 
le  glaive  de  la  tyrannie.   ^ 

Législateurs ,  désarmement  des  hommes  atroce- 
ment révolutioonaires;prompt  jugement  des  Pache, 
Bouchotte  et  autres  scélérats  prônés  par  toutes  les 
factions,  parce  qu'ils  se  ralliaient  sans  cesse  à  celles 
qui  pouvaient  le  plus  vite  opérer  la  ruine  de  la 
France  ;  guerre  à  mort  aux  septembriseurs,  aux  fri* 

Sons ,  et  notre  cri  de  ralliement  ne  cessera  jamais 
'être  :  Vive  la  républiqvul  vive  la  Convention! 
(On  applaudit.) 

»  On  introduit  les  citoyens  de  la  section  Lepel- 
letier. 

Vorateur  (à  la  barre)  :  Législateurs ,  déjà  chaque 
section  du  peuple  est  venue  vous  découvrir  son  sein, 
vous  montrer  ses  blessures  ;  partout  vous  avez  re« 
connu  les  mêmes  traces  de  sang,  le  même  brigan* 
dage,  la  même  férocité.  Cependant  le  génie  du  peu- 
ple s'est  relevé  au  milieu  de  ses  ruines;  il  a  trace 
dans  tous  les  cœurs ,  en  caractères  ineffaçables ,  ce 


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mot  sacré  :  Jusiice;  et  chacun  de  nous  est  tcou  tous 
r^p<^ler  :  Justice  !  Mais  que  veut  cette  justice  que  la 
France  entière  r^lame?  Elle  ne  veut  punir  que  le 
crime,  pardonner  à  Terreur,  et  réintégrer  dans  tous 
ses  droits  la  vertu  proscrite. 

Le  décret  qui  rappelle  vos  collègues  a  retenti  dans 
les  cœurs  de  tous  les  hommes  qui  aiment  leur  patrie 
et  la  liberté  ;  il  anéantira  le  dernier  espoir  ae  nos 
ennemis,  en  prononçant  ^u^il  n'y  a  plus  ou'une  seule 
passion  dans  cette  encemte ,  celle  du  Donheur  du 
peuple.  Il  n'en  faut  pas  douter ,  ce  retour  solennel 
aux  principes  va  porter  un  coup  terrible  à  la  coali' 
tion.  Les  fruits  de  la  victoire  nous  sont  assurés,  et,- 
en  dépit  de  tous  les  tyrans  du  monde ,  nous  serons 
libres,  puisque  notre  gouvernement  est  juste,  hu- 
main et  vertueux. 

Cependant,  à  cette  époque  glorieuse,  on  ose  publier 
encore  impudemment,  que  «Sous  peu  de  iours  on 
prépare  le  sceptre  pour  un  roi  ;  •  que  •  Si,  dansTaf- 
laire  des  quatre ,  les  républicains  succombent ,  le 
drapeau  blanc  sera  arboré,  que  le  royalisme  triom- 

She  !  •(  Extrait  du  N»  1906, 16  ventôse,  du  journal 
'Audouin.) 

Qui  ne  reconnaft  ici  le  menteur  universel  !  qui  ne 
croit  entendre  i*un  des  échos  gagés  des  gazettes  de 
Londres  ! 

L'immortelle  journée  du  10  août  a  vu  renverser 
le  trône  des  rois;  la  mémorable  journée  du  10  ther- 
midor a  vu  crouler  le  trône  de  la  terreur.  Que  ces 
deux  époques  à  jamais  consacrées  dans  notre  his- 
toire apprennent  aux  contemporains  et  à  la  postérité 
que  le  peuple  français  ne  veut  plus  de  tyrannie,  sous 
quelaue  forme  qu'elle  se  présente  et  quelque  nom 
qu'elle  emprunte  ;  voilà  le  serment  sacré  qui  doit 
Dous  rallier  tous. 

La  journée  du  31  mai  a  créé  la  terreur,  et  c'est  par 
la  terreur  qu'on  organise  la  tyrannie;  la  journée  du 
9  thermidor  a  détruit  l'une  et  l'autre.  Les  hommes 
du  9  thermidor  ne  peuvent  donc  qu'être  ceux  du  31 
mai,  et  il  n'y  a  que  les  tyrans  et  leurs  sicaires  qui 
ont  pu  ourdir  et  exécuter  cette  trame  odieuse.  Mais 

rtons  une  vérité  douloureuse  :  c'est  que  les  peu- 
,  comme  les  particuliers ,  ne  s'instruisent  qu'à 

école  du  malheur.  Noire  expérience  est  faite  ;  les 
amis  des  tyrans  sont  démasqués,  signalés  partout,  et 
leurs  têtes  nous  répondent  des  vôtres. 

Suivez  donc,  législateurs,  le  cours  de  vos  travaux 
sans  rien  perdre  oie  votre  énergie.  Vous  avez  prouvé 
que  tous  vos  vœux  étaient  pour  le  bonheur  du  peu- 
ple; le  peuple  vous  dit  que  tous  ses  vœux  sont  pour 
vous,  vive  la  république  !  viv$  la  ConverUion  na- 
tionale! 

Lb  PtÉsiDBirr,  à  la  députation  :  La  liberté ,  dans 
un  gouvernement  représentatif,  est  fondée  sur  la 
liberté  du  corps  représentatif,  et  l'indivisibilité  de 
la  république  sur  l'indivisibilité  de  la  représentation 
nationale  ;  c'est  la  violation  de  ces  principes  qui  a 
confondu  toutes  les  notions  politiques  et  dénaturé 
toutes  les  idées  ;  c'est  elle  qui  a  créé  toutes  les 
craintes,  qui  a  substitué  la  faiblesse  au  courage, 
.  l'esprit  de  domination  au  sentiment  de  l'égalité;  c  est 
elle  qui  a  érigé  le  crime  en  vertu,  qui  a  mis  l'écha- 
faud  dans  la  main  corrompue  des  factions ,  ensan- 

flanté  la  justice,  couvert  la  France  d'un  crêpe  fuiiè- 
re ,  et  conduit  la  patrie  sur  le  bord  de  l'aDime  le 
plus  profond. 

Les  malheurs  publics  sont  une  grande  leçon  pour 
le  peuple  comme  pour  les  législateurs;  que  l'expé- 
rience du  passé  nous  guide  tous  a  l'avenir,  et  que  le 
sang  des  victimes  de  la  tyrannie  ne  soit  pas  au  moins 
perdu  pour  la  liberté. 


Citoyens,  la  représentation  natloiiale  existe  i 
tenant  dans  toute  sa  plénitude  ;  longtemps  mutilée, 
elle  a  recouvré  tous  ses  membres;  cette  cirooo- 
stance  lui  rendra  toute  son  énergie  pour  combattre 
les  ennemis  de  la  république  et  pour  établir  sur 
des  bases  bien  solides  la  gloire  et  la  prospérité  na- 
tionales. 

La  Convention  nationale  décrète  la  mention  ho- 
norable, l'insertion  au  Bulletin  de  l'Adresse  et  de  la 
réponse  du  président. 

—  Les  sections  de  l'Observatoire ,  des  Droits  de 
l'Homme, des  Tuileries,  présentent  successivement 
des  Adresses  où  respirent  les  mêmes  sentiments  de 
félicitation  sur  la  rentrée  des  députés  proscrits,  d'é- 
nergie républicaine  contre  le  crime  et  contre  les  au- 
teurs des  journées  des  2  et  3  septembre,  31  mai,  l«r 
et  2  juin. 

LouvBT  (  dn  Loiret)  :  Les  déclarations  qui  Tien- 
nent de  vous  être  faites  par  les  sections  de  Paris 
sont  le  gage  d'une  union  solide  et  durable  entre  tons 
les  Français.  Le  cri  que  Paris  fait  entendre  esl  la 
preuve  aîie  Paris  n'a  pas  fait  la  révolte  du  SI  mai. 
Les  répuDlicains  des  départements,  qui  s'étaient  le- 
Tés  pour  vous  demander  venaeanee  des  auteurs  de 
cette  révolte,  ne  marchaient  ofonc  pas  contre  les  ré- 
publicains de  Paris,  mais  pour  secourir  les  Parisiens 
opprimés  par  une  municipalité  insolente  et  conspi* 
ratrice;  ils  ne  marchaient  pas  contre  la  Convention, 
mais  pour  secourir  la  Convention  que  Hanriot  ve- 
nait de  dissoudre  et  que  Robespierre  allait  tyrannl- 
S4>r  ;  ils  ne  marchaient  pas  pour  propager  le  fédéra- 
lisme, vous  avez  reconnu  qu'il  n  avait  jamais  existé, 
mais  pour  protéger  et  défendre  la  représentation 
nationale,  qu'ils  regardaient  comme  le  principal 
garant  de  l'unité  de  la  république.  Cependant  œs 
apôtres  de  la  liberté,  ces  défenseurs  de  la  soiiTerai- 
neté  nationale,  ces  soldats  de  la  révolution,  ont  été 
presque  tous ,  sous  différents  prétextes ,  et  souvent 
sans  prétexte,  conduits  à  l'échafoud.  fieprésentants, 
l'œuvre  de  courage  que  votre  sagesse  a  accompli  le 
9  thermidor,  les  républicains  des  départements  l'a- 
vaient entrepris  quelques  jours  après  le  S  juin  : 
ne  seraient-ils  coupables  que  parce  qu'ils  ont  été 
vaincus?  Et  vous,  ne  seriez- vous  aemenrés  les 
vrais ,  les  fidèles  représentants  du  peuple ,  que 
parce  que  vous  êtes  restés  les  vainqueurs  de  Rolies- 
pierre? 

La  Déclaration  des  Droits  porte  que,  lorsqu'il  y 
a  oppression ,  l'insurrection  est  le  plus  sacre  et  le 
plus  indispensable  de  tous  les  devoirs  ;  décrétez 
donc ,  représentants ,  que  tous  les  républicains  des 
départements  el  de  Paris  qui  se  sont  arm^ ,  après 
le  2  juin,  pour  notre  défense ,  ont  bien  mérité  de  la 

f latrie..  (Applaudissements.)  Vous  porterez  la  conso- 
ation  dans  un  nombre  incalculable  de  familles  ver- 
tueuses ;  vous  la  rendrez  à  deux  cent  mille  orphe- 
lins qui,  tandis  que  les  tyrans  saignaient  leurs  pères 
sur  réchafaud ,  ne  se  battaient  pas  avec  moins  de 
courage.  Je  démontrerai  ensuite  sans  peine,  et  peut- 
être  sans  contradicteurs ,  que  le  créait  national  n'a 
pas  de  plus  sôre  hypothèque  que  Téquité,  et  qu*il 
n'y  a  de  politique  que  ce  qui  est  essentiellement 
juste.  (Applaudissements.) 

Tallibn  :  Le  sentiment  qui  a  dicté  cette  proposi- 
tion est  sans  doute  louable ,  mais  je  pense  qu'elle 
s'écarte  des  règles  de  justice  et  de  politique  que  la 
Convention  doit  toujours  suivre.Nous  avons  prouvé, 
le9  thermidor,  en  abattant  la  tyrannie,  et  depuis  en 
poursuivant  ses  sectateurs ,  que  nous  ne  voulions 
'ouffrir  que  le  peuple  fût  plus  longtemps  op- 
oais  il  ne  faut  pas  non  plus  changer  les  per* 


67t 


sdcutés  en  persécuteurs,  et  semer  de  noufelles  divi- 
sions dans  la  république.  (  Applaudissements.  )J<^ 
sais  que,  sous  le  prétexte  du  fédéralisme,  on  a  égorgé 
beaucoup  de  bons  citoyens;  je  sais ,  comme  ra  oit 
Louvet*  que  la  base  d  un  bon  eouvernemeat  est  la 
justice;  mais  quel  besoin  ont-us,  les  citoyens  qui 
ont  fait  leur  devoir,  que  nous  disions  qu'ils  ont  bien 
mérité  de  la  patrie?  Vous  avez  défendu  qu'on  les 
poursuivît,  vous  avez  proscrit  le  mot  fédéralisme; 
lis  n*ont  donc  plus  rien  à  craindre. 

Reportons  nos  idées  sur  des  vues  plus  générales; 
songeons  à  donner  à  la  France  un  gouvernement  sa- 
ge, a  organiser  la  constitution.  (Applaudissements.) 
C'est  aujourd'hui  surtout  que  vous  devez  vous 
en  occuper,  aujourd'hui  que  vous  avez  rappelé  dans 
votre  sein  tous  les  hommes  éclairés  oui  n  auraient 
jamais  dû  en  être  arrachés  ;  aujourd'hui  que  vous 
pouvez  vous  entourer  de  toutes  les  lumières  des  ci- 
toyens probes  et  instruits.  C'est  en  établissant  le 
gouvernement  constitutionnel  gue  vous  ferez  dispa- 
raître le  gouvernement  révolutionnaire,  et  que  vous 
anéantirez  avec  lui  les  dénominations  d'aristocrates* 
de  royalistes,  de  terroristes ,  etc.;  c'est  alors  que 
vous  pourrez  déclarer  que  tous  les  Français  ont  bien 
mérité  de  la  patrie  par  le  zèle  qu'ils  auront  mis  à 
seconder  vos  efforts. 

Je  le  répète ,  j[e  n'attaqtie  point  rintention  qui  a 
dicté  la  proposition  de  Louvet,  mais  je  la  crois  pro- 
pre à  semer  de  nouvelles  divisions. 

Réunissons-nous,  réunissons  tous  les  Français  au- 
tour d'un  bon  gouvernement  ;  c'est  ainsi  que  nous 
parviendrons  à  retirer  les  assignats ,  à  accélérer  la 
lin  de  notre  mission,  et  à  recueillir  les  bénédictions 
du  peuple.  Je  demande  Tordre  du  jour. 

L'assemblée  passe  à  l'ordre  du  jour. 

PÉifiÈBBs  :  Plusîeun  des  sections  qui  sontTenueg 
aujourd'hui  à  la  barre  vous  ont  demandé  de  chan- 
ffer  l'heure  de  la  tenue  de  leurs  assemblées ,  et  de 
la  fixer  au  matin,  /e  convertis  cette  demande  en 

motion. 

Mathieu  :  Le  décadi  est  le  jour  du  repos  de  tous 
les  citoyens  ;  c'est  aussi  celui  oi!i  les  mécontents 
font  des  rassemblements  secrets.  L'heure  de  la  tenue 
des  assemblées  de  sections  importe  plus  qu'on  ne 
pense  à  la  tranquillité  publique.  Je  demande  que 
vous  ne  décidiez  rien  à  cet  égard  avant  que  le  co- 
mité de  sûreté  générale  vous  ait  soumis  ses  ré- 
flexions. 

L'assemblée  renvoie  au  comité  de  sûreté  géné- 
rale. 

—  Coren-Fustier,  au  nom  des  comités  des  finan- 
ces et  d'instruction  publique ,  propose ,  et  la  Con- 
vention adopte  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  ses  comités  d'instruction  publique  et 
des  domaines,  décrète  \ 

•  Art.  l«r.  Les  experts  respectivement  nommés  en 
exécution  du  décret  du  21  frimaire  dernier,  relatif 
au  Muse'um  d'histoire  naturelle ,  pour  faire  l'esti- 
nialion  des  terrains  y  réunis ,  en  détermineront  la 
juste  valeur  telle  qu^elle  serait  lixée  si  ces  terrains 
étaient  vendus  par  actes  volontaires  entre  particu- 
liers, en  admettant  pour  base  les  ventes  de  ces  mê- 
mes terrains  précédemment  faites. 

•  II.  Si  les  experts  sont  partagés  en  avis,  ils  nom- 
meront un  tiers  pour  fixer  le  discord.» 

— ;  Sur  le  rapport  du  méuic  membre ,  au  nom  du 
couiilc  des  finances ,  les  deux  décrets  suivants  sont 
rendus  ; 


«  La  Convention  nationale ,  après  avoir  entenda 
le  rapport  de  son  comité  des  (inancest  décrète  ; 
«  Art.  I«r.  L'article  11  du  décret  du  6  de  ce  mois  » 

2 ni  détermine  un  nouveau  mode  d'adjudication  des 
omaines  nationaux  a  vendre,  est  rapporté  dans  ton* 
tes  ses  dispositions. 

•  11.  L'article  IX  de  la  loi  du  3  juin  1793,  snr  la 
division  et  le  mode  des  ventes  des  biens  nationaux 


quence,  les  soumissions  seront  purement  facultatif 


ves.> 

—•La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu 
le  rapport  de  son  comité  des  finances ,  section  des 
domaines  et  contributions  directes,  décrète  : 

•  Le  comité  des  finances ,  section  des  domaines, 
est  chargé  de  réviser  le  décret  du  6  ventôse ,  relatif 
k  la  vente  du  mobilier  national  de  toute  origine,  et 
de  proposer  les  modifications  dont  il  est  suscepti- 
ble ,  après  en  avoir  conféré  avec  les  divers  comités 
compétents. 

•  L'exécution  dudit  décret  du  6  ventôse  est  sas- 
pendue.  • 

—  Un  pétitionnaire,  admis  à  la  barre ,  lit  une 
Adresse  du  ci-devant  l«r  bataillon  de  Paris ,  troi- 
sième levée ,  pour  l'expédition  de  l'Eure,  incorporé 
au  15*  bataillon  de  la  formation  d'Orléans.  Les  si- 
gnataires de  cette  pétition  réclament  la  réintégration 
au  bataillon  dans  l'ordre  de  son  numéro  et  la  resti- 
tution de  son  drapeau. 

Elle  est  renvoyée  aux  comités  militaire  et  de  saint 
public. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


Décrei  omiê  dans  wm  des  préeédentei  iéaneei. 

•  La  ConTcntlon  nationale ,  après  avoir  entendu 
son  comité  d'instruction  publique ,  décrète  ce  qui 
suit: 

•  Art.  I«r.  Pour  la  formation  du  cabinet  d'anato- 
mie  décrétée  par  l'article  VI  de  la  loi  du  U  frimaire 
dernier,  le  citoyen  Laumonnier,  officier  de  santé  en 
chef  de  l'hospice  d'humanité  à  Rouen,  est  chargé  de 
faire  et  de  délivrer  successivement,  dans  le  cours  de 
quatre  années,  à  dater  du  l«r  germinal  prochain,  en 
pièces  anatomiaues  artificielles,  à  l'Ecole  de  Santé  de 
Paris  1 1*  tout  le  système  des  vaisseaux  lymphati- 
ques en  une  grande  pièce  qui  contiendra  l'ensemble ^ 
3«  tout  le  système  nerveux  pareillement  traité  ;  3o 
enfin  toutes  les  pièces  de  l'une  et  de  l'autre  espèce, 
pour  offrir  les  détails. 

•  II.  Le  comité  d*instruction  publique  est  autorisé 
à  faire  retirer  des  dépôts  et  magasins  nationaux ,  et 
défaire  remettre  au  citoyen  Laumonnier, cinquante 
livres  de  mercure  crû ,  tant  pour  injecter  les  pièces 
anatomiques  dont  il  a  t>esoin,  pour  copier  plus 
sûrement  la  nature ,  que  pour  poursuivre  ses  re- 
cherches sur  les  vaisseaux  lymphatiques  ou  absor- 
bants. 

•  III.  En  conséquence,  il  est  mis  à  la  disposition  de 
la  commission  d'instruction  publique  une  somme  de 
15,000  liv.  pour  chacune  des  quatre  années  que  doit 
durer  le  travail  du  citoyen  Laumonnier,  qu'elle  or- 
donnancera de  six  mois  en  six  mois ,  et  par  avance , 
sur  les  fonds  mis  à  sa  disposition. 

•  Tout  décret  contraire  au  présent  est  rapporté.  • 


67J 


•ÉANCB  DU  22  VCNTOSK. 


MBBLiiiOT,au  nom  du  comité  des  secours  publics  : 
Je  vieus,  au  uom  de  votre  comité  des  secours  pu- 
blie, appeler  votre  bienfaisance  sur  la  famille  infor- 
tunée (Tun  ouvrier  en  soie  de  Lyon  ;  et  c*e^t  avec 
douleurque  je  vais  retracer  l'événement  malheureux 
qui  a  privé  la  femme  et  l'enfant  de  Lesne  d'un  époux 
et  d'un  pèrf . 

Après  une  dénondation  quelconque ,  Claude-Jo- 
seph Lesne  fut  mis  en  arrestation  et  envoyé,  le  23 
frimaire  de  Tan  2,  à  la  fusillade,  par  ordre  de  la 
commission  révolutionnaire  de  Lyon  ,  qui  ne  passa 
à  son  jugement  que  le  lendemain',  jour  auquel  elle 
proclama  hautement  son  innocence  et  sa  mise  en 
liberté.  Osl  dans  cette  pénible  situation  que  cette 
veuve  eut  recours  à  vos  collègues  en  mission  dans 
cette  commune ,  qui ,  après  avoir  fait  constater  les 
faits  par  l'administration  du  district ,  qui  reconnut 
la  iidélité  de  leur  exposé,  la  renvoyèrent  à  se  pour- 
voir devant  vous. 

Votre  comité  Ta  crue  dans  le  cas  de  recevoir  une 
indemnité,  et  m'a  chargé  de  vous  proposer  le  décret 
suivant: 

•  L.i  Convention  nationale,  après  avoir  entendn  le 
rapport  de  ««iu  comité  des  secours  publics  sur  l'ar- 
rête* du  district  de  Lyon,  du  28  nivôse;  celui  des  re- 
présentants du  peuple  en  mission  à  Lyon,  du  3  plu- 
viôse ,  en  faveur  de  la  citovenne  veuve  Lesne  et  soo 
enfant,  dont  le  mari  a  été  fusillé  le  23  frimaire,  l'an 
2,  par  ordre  de  la  commission  révolutionnaire,  qui, 
le  lendemain  24 ,  a,  par  iugeineut, proclamé  son  in- 
nocence ;  et  son  décret  du  19  pluviôse  dernier,  dé- 
crète : 

•  Que  la  trésorerie  nationale  mettra  sans  délai ,  à 
la  disposition  de  l'administration  du  district  de  Lyon, 
département  du  Rhône  ,  la  somme  de  3,000  liv., 
|iour  être  comptée,  à  titre  de  secours  et  indemnités, 
a  la  citoyenne  veuve  de  Claude-Joseph  Lesne.  • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

(La  mff  demain,) 


^-N.  B.  Dans  la  séance  du  23 ,  on  a  continué  la 
discussion  sur  les  attributions  du  comité  de  salut 
public  concernant  les  relations  extérieures. 

—  Matliieu,  au  nom  du  comité  de  sûreté  générale, 
a  dénonce  à  la  Convention  deux  afliches  intitulées  : 
Peuple,  réveille 'loi,  il  en  e$i  tempe  J —  Imprimerie 
du  10  août  el  du  31  mai  ;  l'autre,  ayant  pour  titre: 
Au  Peuple;  vérités  ierriblet^mait  indiepeneabUe^ 
tirées  deRausteau.Mably,  RaynaL 

Ces  deux  afliches  oiit  été  placnrdéos  pendant  la 
noit«  Elles  donnent  des  inquiétudes  sur  les  subsi- 
stances, avilissent  les  assignats;elles  excitent  le  peu- 
ple au  pillage;  elles  attaquent  une  partie  de  la  Con- 
vention, contre  laquelle  elles  excitent  les  ouvriers  à 
marcher. 

Le  comité  de  sûreté  générale  a  pris  toutes  les  me- 
sures nécessaires  pour  le  maintien  de  la  tranquillité, 
et  p)ur  rechercher  les  auteurs  de  ces  alDches  liber- 
ticides* 

Le  comité  de  salut  pnblic  a  pris  aussi  des  mesures 
pour  les  approvisioaneaients  de  la  répablique. 


lie  salut  Dublie,  sous  le  nom  de  DNpoNl,elqiiî  a  ou- 
blié d'indiquer  son  adresse,  est  invité  à  st*  prcseuter 
au  représentant  du  peuple  Merlin  (de  Douai),  mem- 
bre de  ce  comité ,  pour  conférer  avec  lui  sur  Tobjel 
de  sa  lettre. 


AVIS. 
Le  citoyen  qui  a  écrit  le  19  de  ce  mois  au  coaûLiî 


Les  gelées  nous  ont  fait  perdre  une  grande  quan- 
tité de  pommes  de  terre,  dont  la  substance  nutritive 
aurait  pu  être  sauvée  par  la  dessiccation.  Bllr  a  en- 
core un  risque  à  courir,  celui  de  la  germination 
prochaine  ;  le  même  moyen  peut  la  garantir  de  ce 
dernier  danger. 

Le  citoyen  Grenet ,  qui  s'est  déjà  occupé  de  cet 
objet ,  vient  de  le  perfectioiuier  et  de  rédiger  une 
nouvelle  instruction  sur  la  manière  d'employer  lea 
forcesdu  levier  pour  fabriquer  eu  grand  cette  racine. 
et  la  conserver  un  temps  infini  sous  la  forme  de  ris. 
Il  a,  pour  la  focilité  des  départements,  fait  Caire  des 
modèles  en  petit  de  sa  mécanique.  Prix  :  15  liv.; 
boîte ,  emballage ,  3  liv,;  les  tubes  et  pillons  daat 
leurs  véritables  proportions,  30  liv.;  botte,  5  livres. 
Avec  ces  seules  pièces  et  quatre  planches ,  on  peut 
exécuter  sur  les  lieux  le  surpins  de  cette  mécanique. 
Petit  cylindre  dont  le  piston  se  monte  à  la  main, 
toujours  le  même  prix  de  15  liv.;  botte,  3  liv.  La 
brochure  et  nouvelle  instruction  aéparément,  30 
sous. 

Adresser  les  demandes  au  citoyen  Grenel,  artiste, 
rue  de  Tracy,  au  coin  de  celle  du  Poaceau ,  maison 
du  limonadiier*  et  affranrhir  les  lettres  et  rargcnt. 

Gbbnst. 


LIVRES    DIVERS. 

tÊÊtm^  au  Cuithmtear ,  contenant  :  t*  耻  Instraetioai 
tiir  !•  calendrier ,  aar  Im  travaiii  âe%  diampa  et  de*  jarditts 
a«r  lea  obiett  4e  froduil  et  die  eMniaeroe,  «i  gur  les  anmae» 
ments  champêtres  propres  k  chaque  mois  de  Tannée  ;  S*  mg 
les  hétes  i  cornes,  les  mouloos,  les  chèvres,  les  cochons*  les 
lapins,  la  Tolaille,  etc.  ;  leurs  maladies,  et  lea  remèdes  qa*il 
convient  de  leur  administrer  :  3*  sur  le  eonmerce  et  le  «tébîi 
des  bon  de  charpente,  de  aciage,  charroaaai^e  et  csbeufleft  ; 
sur  ceus  d'ornement  ;  sur  les  charbons ,  les  crndres  et  les 
écorces;  4*  sur  les  boissons  naturelles  et  artiAcielles;  |»*  mm 
les  mesures  agraires,  aur  celles  de  contenance  pour  les  den- 
rées sèches  et  liquides,  sur  leurs  rapports  avec  le^  nouvelles 
mesures  décrétées  par  la  Convention  nationale  ;  6*  sur  la  lai- 
terie, et  le  parti  qu^on  peut  en  tirer  pour  la  fabrication  det 
beurres  et  des  fromages  secs ,  frais ,  cuits  ,  etc.  ;  7<*  sur  les 
divers  établissements  économiques  que  l'on  peut  faire  à  la 
campagne,  tels  que  briqueteries,  fours  à  chaux  et  a  plâtre, 
moulins  i  farine,  fabrication  des  builet,  des  an  von»,  etc.  ; 
S*  enfin,  sur  les  propriétés  médicinales  des  plantas. 

A  Paris,  chei  Théophile  Barrois  le  jeune,  libraire,  ^«ai-  4es 
AguaLina,  volume  in-lS,  nouvelle  édition.  Prix  :  broebc,  3  liv» 
iO  sous,  et  4  liv.  10  soQs,  franc  de  port,  dans  lea  départe- 
ments. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  de  la  dette  consolidée  perpétaelle  ae  fait 
pourle«  sis  derniers  mois  de  Tan  2*,  et  pour  TAiinée  h  ceux 
qui  n'ont  pas  touché  les  six  premiers  mois  de  ladite  année, 
tes  citoyens  qui  ont  retiré  leur  inscription  définitire,  et  qui 
désireraient  être  payés  dans  les  districts,  peuvent  indiquer 
les  chefs-lieux  de  district  où  ils  veulent  être  payéa,  confor- 
mément à  la  loi  du  St  jour  des  aansculottides. 

Le  payement  des  renies  viagères  se  fait  cumulât irenent 
pour  drus  mois  vingt  et  un  jours  de  Pannée  ntSfTÎeiiz  siTle) 
•'  Nmert  Mois  de  l'an  S«,  ' 


GAZETTE  NATIONALE  o.  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N**  175.        Quinttdi  25  Yentosb,  l'an  Z^.  (Dimanche  15  Mars  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Dm  eamp  àevûnt  Luxembourg^  teiS  ventote.  —  La  gar- 
nison de  Luxembourg  a  f«it,  le  10 ,  une  reconnaissance 
générale  des  positions  que  Tarmée  française  occupe  auprès 
de  cette  forteresse.  Il  jf  a  eu  ft  cette  occasion  une  fusillade 
très-vive,  mais  dont  Teflet  n*a  été  mearlrier  d^une  part  ni 
de  Tautre. 

Le  lendemain ,  l'ennemi  a  fait  une  sortie  an  nombre  de 
quatre  mille  hommes,  marchant  sur  trois  colonnes.  Il 
attaqua  quelques  batteries  et  des  postes  retranchés^  après 
avoir  forcé  la  chaîne  des  avant-postes  français  à  se  replier 
snr  les  cantonnements  voisins.  Alors  un  combat  opiniâtre 
s*engagea ,  où  Ton  se  battit  avec  achamemenL  L*ennemi, 
dont  le  but  était  de  détruire  une  partie  des  ouvrages  du 
siège,  parvint»  après  de  grands  efforts,  à  s*emparer  d^un 
poste  retranché  ;  il  en  fut  bientôt  cbasaé,  et  plusieurs  corps 
d^infdnterie  qui  s^étaient  formés  pendant  le  combat,  mar- 
chant à  Tennemi,  l'obligèrent  de  se  fetirer  avec  précipita- 
tion ,  dans  la  crainte  d'être  coupé» 

Le  siège  le  oonlinae  avec  vigueur» 

PIEMONT. 

TVrln,  téiS  février»  —  Le  mauvais  état  des  finances 
rojfales  a  fait  mettre  en  vente  les  biens  ecclésiastiques  :  le 
gouvernement  a  même  supprimé  plusieurs  monastères  ;  il 
a  en  cette  occasion  écrit  en  cour  de  Rome.  Ces  mesures 
pourront  produire  quelques  millions,  29  ù  30,  comme  on 
le  présume,  et  procurer  à  la  conscience  du  roi  une  bulle 
du  pape,  que  Vtm  attend. 

La  cour  n'a  pas  ainsi  des  ressources  nationales  pour 
recruter  et  composer  son  armée  ;  ses  troupes  sont  pour  la 
plupart  autrichiennes.  Elle  uttend  aussi  un  corps  de  cava- 
lerie napolitaine,  pour  en  augmenter  la  garde  de  la  capi- 
Ule. 

Tous  les  préparatifs  que  Ton  peut  faire  se  font  pour  la 
campagne  prochaine.  On  forme  des  corps  de  mi  lice  desti- 
nés à  la  défense  de  l'intérieur....  Le  général  Colli  aura» 
dit-on ,  le  commandement  en  chef  de  l'armée. 

ITALIE, 

Napletf  lei6  février.  —  On  a  lien  de  présumer  i|tte  la 
cour  de  Naples,  voyant  qqe  la  marine  français  n'a  point 
encore  trop  étonné  la  Méditerranée,  attendra  les  événe» 
ments  préliminaires  de  la  campagne  prochaine  du  côté  du 
Rhin ,  pour  suivre  ou  rejeter  le  bon  exemple  que  l'Italie 
aurait  dû  recevoir  de  la  Toscane. 

—  La  flotte  anglaise,  qui  est  sortie  depuis  peu  de  Saint- 
Florent  ,  s'est  partagée  en  trois  divisions,  dans  les  eaux  de 
rtle  de  Corse,  des  Iles  d'Hyères  et  de  Villefranche. 

—  Le  petit  nombre  d'amis  que  la  France  peut  avoir  ici 
ont  appris  avec  ioie  qu'une  Hotte  française  très-nombreuse 
doit  sortir  incessamment  du  port  de  Toulon;  mais  n'ayant 
pas,  ù  cet  égard,  des  renseignements  assez  positils,  ils  se 
contentent  d'exciter  de  leurs  vœux  le  gouvernement  fran- 
çais à  veiller  ù  l'étal  de  sa  marine.  Combien  ils  souhaitent 
que ,  sur  cet  article ,  on  craigne  les  faux  rapports,  les  exa- 
gérations, et  surtout  qu'on  renonce  aux  carmagnoles  J 

—  On  a  de  la  peine  à  concevoir  ici  que,  les  Provinces- 
Unies  ayant  été  évidemment  conquises  sur  le  stathouder, 
comme  les  provinces  belgiques  l'ont  été  sur  l'archiduc 
d'Autriche,  les  Français  n'en  aient  pas  retiré  de  grands 
avantages.  Par  quel  hasard,  dil-on,  ne  s'est-il  trouvé  au- 
cun vaisseau,  ni  anglais,  ni  espagnol,  ni  aucun  des  nôtres, 
dans  les  divers  ports  de  Hollande  alors  fermés  par  les  gla- 
ces? et  n'es! -ce  pas  encore  un  mystère  que  la  république 
française,  travaillée  au  sein  même  de  sa  gloire  par  tant  de 

Z*  Série. -^  Tome  JU 


nécessités,  n'ait  pu  rien  trouver  chex  les  opulents  BalafOi 
ni  en  numéraire,  ni  en  denrées  d'aucune  espèce  ? 

Mais  sans  doute  la  prudence  exige  que,  jusqu'à  répoqub 
d'une  alliance  déOnitive  entre  les  deux  républiques  des 
Provinces-Unies  et  de  la  France,  on  s'abstienne  de  pronon- 
cer sur  le  caractère  de  la  révolution  actuelle  en  Hollande* 

D'ailleurs,  on  assure  que  les  Français,  vainqueurs  du 
stathouder,  sont  logéset  nourris  moyennant  leurs  assignats, 
monnaie  dont  une  loi  hollandaise  leur  enjoint  de  dépenser 
peu,  et  dont  la  valeur  est  réduite  ft  presque  rieo  par  le 
change  du  commerce  dans  le  pays. 

—  Trois  bâtiments  de  la  marine  napolitaine,  U  Tanerédef 
de  Ih  f  et  les  frégates  la  PaUai  et  la  Minerve  ^  vont  mettre 
à  la  voile;  ils  se  rendront  vers  le  ponent  pour  y  protéger 
notre  commerce. 

ANGLETERRE. 

Londres  t  f«  48  février.  —  Enfin  les  ministres  ont  reç« 
hier  des  nouvelles  de  l'armée  du  continent  ;  encore  est-ce 
par  une  espèce  d'heureux  hasard  :  ces  nouvelles  n'étaient 
pas  plus  fraîches  que  la  date  du  17  janvier,  et  venaient  de 
Deventer,  où  Tarméc  se  trouvait  encore  à  cette  époque» 
Elles  ont  été  apportées  par  un  étranger,  chargé  de  dépêches, 
qui  fut  ramassé  dans  un  bateau  découvert  par  le  capitaine 
d'un  des  paquebots  d'Harwich.  Il  résulte  de  ces  nouveaux 
détails,  peu  consolants,  que  beaucoup  de  soldats  sont  ma- 
lades par  suite  des  fatigues  qu'ils  ont  éprouvées.  Ces  fa- 
tigues, ainsi  que  la  rigueur  de  la  saison,  en  ont  même  fait 
p^r  un  certain  nombre. 

—  Le  général  Presoolt  est  arrivé  hier  des  Iles -sous- 
le-Vent;  on  sait  par  lui  que  toute  l'Ile  de  la  Guadeloupe 
esl  rentrée  sous  le  pouvoir  des  Français.  Le  fort  Mathilde 
les  a  empêchés  longtemps  de  compléter  leur  conquête; 
mais,  malgré  des  renforts  détachés  de  la  garnison  de  Gi- 
braltar, le  commandant  n'a  pas  cru  qu'il  dfit  tenir  davan- 
tage contre  les  Français,  qui  avaient  aussi  des  troupes 
fraîches.  Le  général  Prcscott  a  néanmoins  réussi  à  tirer  de 
111e  toutes  celles  qu'il  avait  sous  ses  ordres. 

—  Il  s'est  trouvé  dans  la  Chambre  haute  comme  dans 
celle  des  Communes  des  défenseurs  de  Vkabeas  eorpmu 

Lord  Lauderdale  a  voulu  le  remettre  en  yigneur  ;  mais 
lord  Grenville,  et  surtout  le  lord -chancelier ,  ont  sou- 
tenu qu'il  fallait  continuer  de  le  suspendre  encore  pendant 
quelque  temps,  on  dit  jusqu'au  mois  de  juillet.  Les  deux 
sénateurs  ont  prétendu  qu'il  y  avait  eu  une  véritable  con- 
spiration formée  contre  le  gouvernement,  que  ce  n'était 
plus  une  question  pour  quiconque  connaît  les  lois  anglaises 
sur  le  crime  de  haute  trahison ,  et  que  le  dernier  verdict 
d'acquittement  des  jurés  ne  prouve  point  du  tout  la  non- 
existence  de  celte  conspiration  ni  l'innocence  des  prévenus. 

'Cependant  lord  Lansdown  s'est  élevé  avee  beaucoup 
de  lurce  contre  le  parti  ministériel,  dont  l'avis  n'en  a  pas 
moins  fini  par  triompher  comme  dans  la  Chambre  basse. 
Indignés  de  la  violation  delà  loi  fondamentale  de  Vhabeaê 
corpus^  les  lords  Norlolk,  Guilford,  Bedfurd  et  Lauder- 
dale ont  protesté  depuis  contre  cette  mesure  tyrannique. 


RÉPUBLIQUE     FRANÇAISE. 

Parie  ,  le  24  ventoee.  —  Plusieurs  journaux 
ont  assuré,  sur  la  foi  des  cezettes  italiennes,  que 
Maroc  et  Alger  s'étaient  déclarés  contre  la  républi- 
que française  et  avaient  accédé  à  la  coalition;  nous 
pouvons  assurer  aujourd'hui  qfie  cette  nouvelle  est 
absolument  fattsse.  Voici  les  faits. 

Le  royaume  de  Maroc  est,  depuis  deux  ans,  dé- 
chiré pnr  la  guerre  civile,  dont  la  balance  parait 
enfin  pencher  en  faveur  de  Muley- Soliman.  Ce 

85 


674 


prince  s'e$t  toujours  montré  ami  des  Français;  la 
(république  vient  dVnvoyer  auprès  de  lui  un  aceut 

3u'il  connaît  et  qu'il  aime.  Cet  agent  est  parti  il  y  a 
eux  mois. 

Le  dey  d*Alger  a  demandé  tout  récemment  Téta- 
bTissement  de  paquebots  entre  la  France  et  Alger, 
pour  avoir  le  plus  promptement  possible  des  nou- 
velles authentiques  des  triomphes  de  la  république, 
qu'il  admire  jusqu'à  reulhousiasme.  Toutes  los  res- 
sources de  ce  pays  nous  ont  été  ouvertes  pendant 
la  durée  de  lu  guerre;  elles  le  sont  encore,  et  le 
caractère  franc  cl  loyal  du  dey  d'Alger  nous  garan- 
tit la  continuation  de  ses  dispositions  amicales. Quel- 
ques avis  annoncent  même  que  le  dey  vientde  décla- 
rer la  guerre  à  la  Grande-Bretagne. 

Le  bey  de  Tunis  a  donné  a  la  république  des 
prouves  non  équivoques  de  la  fidélité  avec  laquelle 
il  observe  les  traités.  Une  escadre  anglo-espagnole 
arriva  Tannée  passée  dans  la  rade  de  Tunis  ;  elle  le 
somma  de  livrer  un  convoi  français  très-riche  qui 
se  trouvait  alors  dans  le  port;  le  bey  refusa;  sa  con- 
duite ne  s'est  jamais  démentie. 

Le  nouveau  pacha  de  Tripoli  paraît  avoir  des  amis 
dans  le  ministère  ottoman  ,  dont  les  dispositions  à 
regard  de  la  république  sont  connues.  Le  consul  de 
la  république  est ,  de  tous  les  agents  des  puissances 
étrangères ,  celui  auquel  il  montre  les  plus  grands 
égaras. 


SPECTACLES. 

THÉATBB  DE  L'OPÉRA-COMIQUB  NATIONAL. 

Le  succès  de  Doria^oH  la  Tyrannie  détrniie^  opéra  en 
trois  acles,  donné  dcrni^remeiu  à  ce  théâtre,  n*a  pas  été 
aus5i  f  rand  que  le  nom  et  ta  réputation  méritée  des  auteun 
le  faisaient  espérer.  L'histoire  nous  a  transmis  la  conjura* 
tion  deDoiift,  qui  a  délivré  Gènes  de  la  tyrannie  raonar^ 
chique.  Voici  cojnmeat  cet  éréuemenl  vient  d'être  trias* 
porté  sur  la  scèue. 

Doria,  brfttani  d^amonr  pour  la  liberlé,  pour  sa  patrie, 
gémissant  de  la  voir  sous  le  joug  de  Gooiague,  de  voir 
chaque  jour  les  meilleurs  cito/pns  immolés  aux  soupçons 
que  la  tyrannie  entraiue  après  elle,  épouse  Albanie,  fille 
de  Monlallo,  mort  Tune  des  premières  victimes  du  monstre 
qui  tient  les  Génois  dans  les  fers.  Non-seuiemcnl  il  cherche 
par  cet  hymen  ù  relever  Pespoir  de  la  famille  infortunée  de 
Montulto,  mais  il  veut  même  profiter  du  trouble  de  la  ftHe 
pour  faire  éclater  un  complot  (|u'il  a  formé  secrètement 
avec  quelques  amis  et  avec  les  citoyens  les  plus  distingués 
qu*il  a  su  arracher  des  prisons.  11  a  fait  part  de  ses  desseins 
à  Vivaldi,  cipilainc  des  gardes  de  Gonzague;,et  comme  le 
mariage  doit  être  célébré  dans  le  palais  du  tyran,  c*est 
Vivaldi  qui ,  en  distribuant  les  postes,  doit  favoriser  le  plus 
Tctécution  du  complot.  Un  des  conjurés  qui  figure  encore 
dans  cet  ouvrage,  c*est  le  frère  de  Doria,  feune  homme  de 
diX'Sepl  ans,  plein  de  courage,  et  que  le  liasard  met  dans 
le  secret  de  cette  glorieuse  entreprise.  Amoureux  de  la 
jeune  sa'ur  d'Albanie,  il  saisit  un  moment  où  sa  mère  la 
laisse  seule,  assez  imprudemment,  dans  le  salon  de  Doria. 
Les  deux  jeunes  amants  sont  surpris;  le  jeune  homme  se 
cache  dci  rtère  un  rideau ,  et  c>8t  de  Ift  quMl  entend  la  con- 
juration. 

Cependant  Vivaldi  trahît  DoHa  $  celui-ci,  qui  a  demandé 
nn  entretien  secret  avec  Gotizague,  lui  découvre  ses  des- 
seins, se  croyant  sûr  du  succès,  et  lui  offre  la  vie,  à  la 
condition  de  lui  livrer  la  citadelle,  pour  épargner  le  sang 
des  Génois.  Goniague,  qui  compte  avec  plus  ée  raison  sur 
ceux  qui  le  servent,  qui  n*n  nul  motifde  se  regarder  comme 
taÏHcu,  rejette  cette  proposition,  comme  Doria  devait  peut- 
Otre  s'y  attendre,  et  le  fait  saisir  et  désarmer.  Cependant 
SpoîUi  rami  de  Doria  i  est  partenu  à  soulerer  le  peuple, 


et  déjà  l'on  auiége  le  palah.  Gonzogue  se  retire  avec  soo 
prisonnier  dans  la  citadelle,  et,  à  Tinstantoù  Ton  en  fomie 
aussi  le  siège,  il  paraU  sur  Pesplunade,  m  poignard  levé 
sur  Doria,  menaçant  de  le  percer  si  le  peuple  ne  se  retire. 
Cotre  situation  connue  finit  comme  à  fordînaire  :  Sporta 
s'est  emparé  delà  citadelle;  pendant  le  débat,  duliaut  d'une 
travée  on  tire  un  coup  d*arme  à  fba  qui  tue  GoDzague ,  et 
Doria  est  délivré. 

Cette  pièce  oflTre  peu  dMntérèl.  On  y  trouve  plus  de  re* 
muement  que  de  mouvemeoU  Aucun  effet  dranali4|iie  af y 
presse  le  cœur,  et  la  curiosité  méoie  a^est  pas  excitée.  La 
style  en  est  noble  ei  correct,  mais  il  manque  de  traits  ei  da 
ce  charme  qui  attache.  Excepté  quelques  maainses  de  li* 
herlé,  qui  sont  d*uQ  effet  toujours  certain  sur  desFi^n» 
çais,  on  n*y  trouve  rien  qui  excite  PapplaudisseiDeBt.  Es 
un  mot,  Pouvrage  n*a  pas  de  défaut  très  rem  arqua  tile 
mais  il  manque  entièrement  d^effet.  La  musique  même  ii*a 
produit  qn^nne  sensation  médiocre,  si  Ton  en  excepte  un 
air  de  Doria,  très-bien  chanté  par  Philippe,  morceau  par» 
failement  dramatique  et  d^un  effet  prodigieux ,  le  final  da 
second  acte ,  plein  de  chaleur  et  d'énergie ,  et  PouTerture, 
qui  est  celle  que  Méhal  avait  faite  pour  Cora,  On  reconoatl 
tout  son  talent  dans  ces  trois  morceaux  ;  on  le  cliercbe  dans 
les  autres,  où  cet  habile  compositeur  parait  8''6tre  trompé. 
Il  a  voulu  donner  du  chant  à  la  citoyenne  Davrigny  ;  il  P^ 
été  chercher  bien  loin«  sans  se  rappeler  que  son  imagina* 
tioD  hri  en  fournit  toujours  quand  il  en  a  besoin;  témoin 
Pair  de  Philippe  dans  Stratoniee^  et  beaucoup  d*autres» 
Les  auteurs  des  paroles  sont  les  cHayeas  Davrlfiny,  conou 
par  plusieurs  productions  agréables,  et  Legouvé,  auteur 
de  ia  Mort  (TAM  et  ù'EpickanA 


CONVENTION    NATIONALE. 

Prindenct  de  Thibaudeau* 
SUITB  DE  LA  SÉANCE  DO  22  VE1IT08S« 

DUeusiitm  snr  la  ailrihutiom  du  tomiîé  de  salut 
jmbUc  pour  les  relaliom  extérieures. 

Cambacërès  soumet  à  la  discussion  le  projet  de 
décret  stir  la  direction  des  relations  extérieures. 
11  lit  Tarticle  1er  ainsi  conçu: 

•  Art.  !*'•  Le  comité  de  salut  public,  chargé  par  la  loi 
du  7  fructidor  de  la  direction  des  relations  eitérieures,  né* 
gocie,  au  nom  de  la  république,  les  traités  de  paix,  d*aU 
iiance,  de  neutralité  et  de  commerce.  11  en   arrête  les 

conditions,* 

Villbtabd:  Je  demande  qu'après  le  mot  arrête  on 
ajoute  provtfotremenl. 

Cbazal:  rinvite  mon  collègue  à  lire  rarUcle  IV; 

il  répond  à  soiî  amendement. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  La  re'ponse  de  ChazaI  suffit 
sans  dotite  pour  explique  les  intentions  du  comité; 
mais  il  faut  démontrer  combien  est  mauvaise  la  pro- 
position de  Villetard.  Citoyens  ,  adopter  l'amende- 
ment qui  votis  est  proposé  serait  donner  au  coiiiilé 
de  salut  public  le  droit  de  faire  exécuter  provisoire- 
ment les  traités  qu'il  aurait  conclus  avec  les  puis- 
sances étrangères,  tandis  que  l'intention  de  la  Con- 
vention est  que  ces  traités  ne  puissent  a roir  d'effet 
qu'après  qu  ils  auront  été  ratifiés  par  elle.  D'après 
ces  observations,  je  demande  que  l'article  l«r  soit 

!  adopté  tel  qu'il  a  été  présenté. 

I      L'article  l«r  est  adopté. 

I      Les  articles  U ,  III  et  IV  sont  adoptés  en  ces 
I  termes  : 

•  II.  Il  prend  toutes  les  mesures  néeestiires  pour  fad» 
Hier  et  pour  accélérer  la  conclusion  de  ces  traités* 

I       •  III.  Les  traités  sont  signés,  soit  par  les  memt^res  da 
I  comité,  lorsqu'ils  ont  traité  dlrectemeot  avec  les  cuvo/ct 


67.6 


des  puiff  aoeat  ttrangèrt ,  loit  par  les  ministrai  plénipoteii- 

tiaires  auiquels  le  comité  a  C.élé^n^  à  cet  effet  des  poQ? oirs. 

■  IV.  Les  traités  ne  sont  valables  qu'après  avoir  été  eia* 

minés  «  ratifiés  et  confirmés  par  la  ConveoiioQ  pftUoqale» 

sur  le  rapport  du  comité  de  salut  puUic,  i 

Le  rapporteur  lit  Tarticle  V,  ainsi  oonçu  : 

wV.  Les  conventions  préliminaires  et  préj^aratoires,  telles 

que  les  armistices  et  tes  neutraliaatioiis,  sont  comprises 

dans  l'article  II ,  et  ne  sont  pat  sujettes  k  la  ratification.  » 

Pblet  (de  la  Lozère)  :  L'article  ne  dit  pas  si  ia 
iK  utralisatioo  se  bornera  à  une  ville,  à  une  place. 
Ce  silence  donnerait  au  comité  le  pouvoir  de  con- 
clure une  neutralité  réelle  avec  la  Prusse  ou  avec 
l'Autriche,  par  exemple. 

Prieur  (de  la  Marne)  :  L'observation  que  Pelet 
vient  de  faire,  relativement  au  mot  neutralUalion^ 
peut  s'appliquer  également  aux  armistices.  Si  le 
comité  avait  le  droit  de  faire  un  armistice  dont  la 
durée  serait  indétt^rminéo,  il  s'ensuivrait  qu'il  pour- 
rait arrêter  tout  d'un  coup  la  marche  de  nos  trou- 
pes. L'armistice  pourrait  durer  deux  mois,  ou  deux 
ans  même  ;  ainsi  la  république  serait  chargée  pen- 
dant tout  ce  temps  de  l'entretien  de  ses  troupes,  qui 
ne  feront  aucun  progrès  sur  le  pays  ennemi.  Je  ne 
crains  pas  mie  le  comité  abuse  des  pouvoirs  qui  lui 
seront  connés,  mais  je  dis  qu'il  aurait  le  droit  de 
faire  des  armistices  qui,  par  leur  durée,  devien- 
draient de  véritables  trêves  et  même  des  traités  de 
paix. 

Hermann  :  Un  armistice,  pour  peu  qu'il  soit  pro- 
longé, devient  une  véritable  trêve  ;  aussi  n'est-il 
pas  dans  l'intention  de  la  Convention  d'accorder 
au  comité  le  droit  de  faire  sans  son  autorisation 
cette  espèce  de  traité.  Cependant  je  sens  qu'un  ar- 
mistice de  deux  jours,  dans  toutes  nos  armées  de-, 
puis  rOoéan  jusqu'aux  Alpes,  serait  une  chose  très- 
dangereuse;  c'est  pourquoi  il  faut  faire  disparaître 
tout  le  vaçue  que  présente  l'article,  et  je  propose 
qu'on  en  limite  les  expressions  en  disant  :  •  Les  ar- 
mistices et  négociations  y  relatives.  • 

Duhbm:  Prenez  garde,  citoyens,  que  l'armistice 
est  presque  toujours  le  moyen  qu'emploie  un  géné- 
ral nabile  près  d'être  battu,  pour  tromper  son  en- 
nemi vainqueur.  Si,  par  exemple,  le  comité  de  salut 
public  ou  les  représentants  du  peuple  avaient  ac- 
cordé un  armistice  seulement  de  vingt-quatre  heu* 
res  aux  stathoudériensdeHollande,  nous  n'aurions 
jamais  pu  délivrer  les  patriotes  de  ce  pays.  On  ne 
doit  donc  jamais  accorder  légèrement  une  suspen- 
sion d'armes.  Au  reste  Je  m'en  rapporte  à  la  àon- 
vention;  mais  je  crois  qu'il  faudrait  admettre  la 
question  préalable  sur  l'article. 

Merlin  (de  Thionville)  :  L'armistice  D*a  ordinal* 
rement  lieu  que  lorsqu'il  s'agit  d'enterrer  les  morts 
sur  le  champ  de  bataille  ou  de  traiter  de  la  réduction 
d'une  ville  ou  d'un  poste.  Cela  diffère  de  la  trêve; 
l'armistice  n'est  que  l'affaire  du  moment,  au  lieu 
que  la  trêve  peut  donner  à  l'ennemi  le  temps  de  se 
nfaire  ou  de  fuir  avec  sécurité,  comme  cela  est 
arrivé  en  Champagne.  C'est  cette  espèce  de  traité 
qu'on  ne  peut  pas  permettre  au  comité  de  salut  pu- 
blic de  faire  sans  l'approbation  de  la  Convention 
nationale;  mais  on  ne  peut  pas  lui  refuser  le  droit  de 
conclure  un  armistice,  qui  ne  signifie  autre  chose 
si  ce  n'est  qu'on  ne  se  tuera  pas  pendant  un  ou  deux 
jours,  pour  des  raisons  que  les  circonstances  de  la 
guerre  déterminent. 

.le  demande  la  question  préalable  sur  cet  article, 
qui  me  semble  compris  dans  l'article  II  ;  car  si  l'ar- 
mistice est  nécessaire  pour  accélérer  uo  traité,  il  est 
absolument  compris  dans  cet  artiele. 


MiLHAUD  :  Lea  pourparlers  néeessalret  pour  la 
réduction  d'une  place  exigent  toujours  un  armistice, 
qui  dure  quelquefois  plusieurs  jours;  les  généraux 
font  alors  entre  eux,  pour  la  paix  à  accorder  à  cette 

{dace,  ce  que  les  gouvernements  font  entre  eux  pour 
a  paix  à  accorder  à  une  puissance,  et  je  crois  qu'il 
y  aurait  de  la  barbarie  à  empêcher  des  pourparlers 
qui  ménagent  le  sang  des  hommes.  Je  pense  donc 
que  le  droit  de  conclure  des  armistices  doit  être  ac- 
cordé au  comité, 

CAMBAcÉais  :  11  faut  avoir  le  cœur  net  dans  une 
matière  aussi  grave.  Je  croyais  que  les  intentions  du 
comité  de  salut  public  ne  pouvaient  pas  être  équi- 
voques; je  croyais  qu'il  avait  poussé  au  plus  haut 
point  la  délicatesse  sur  les  pouvoirs  qui  lut  étaient 
confiés.  Je  déclare  que,  si  j'avais  cru  avoir  besoin 
d'invoquer  le  témoignage  de  quelqu'un  pour  ap- 
puyer cette  proposition  que  j'ai  développée  dans  mon 
rapportée  me  serais  adresse  à  Prieur  et  à  Pelet,  qui 
tous  deux  ont  été  du  comité  de  salut  public,  et  qui 
savent  dans  quelles  circonstances  nous  avons  été 
obliffés  de  délibérer  là-dessus.  Je  conviens  cependant 
qu'il  y  a  un  vice  de  rédaction  dans  l'article;  car  il 
faut  que  le  comité  de  salut  public  n'ait  qu'autant  de 
pouvoir  qu*il  lui  en  faudra  pour  faire  le  bien,  et  ja* 
mais  assez  pour  faire  le  mal.  Je  propose  donc  cra* 
jouter  à  l'article  l«r,  qui  contient  l'énumération 
des  traités  que  le  comité  de  salut  public  ne  peut 
faire  sans  la  ratification  de  la  Convention,  le  mot 
trêve;  alors  on  ne  pourra  plus  craindre  que  le  co- 
mité fasse  lui-même  une  paix  déguisée  sous  le  nom 
de  Irive  prolongée.  Je  m  oppose  à  ce  qu'on  écarte 
par  la  question  préalable  l'article  V;  rien  n'est  plus 
dangereux  que  de  ne  pas  donner  aux  lois  tout  le 
développement  dont  elles  ont  besoin  pour  être  en- 
tendues; moins  votts  voulez  donner  a  l'arbitrairei 
plus  vous  devez  vous  expliquer.  Je  propose  de  con- 
cevoir ainsi  l'article  Y  ; 

•  Les  conventions  préliminaires  et  préparatoires, 
telles  que  les  armistices  pour  un  temps  limité,  et  les 
neutralisations  y  relatives,  sont  comprises ,  etc.  • 

Goujon  :  Le  rapporteur  n'a  point  répondu  ni  t 
Merlin  ni  à  Prieur  ;  si ,  comme  le  premier  Ta  dit, 
l'armistice  n'a  lieu  que  lorsqu'il  s'asit  d'enlever  les 
morts,  de  traiter  pour  la  capitulation  d'une  ville 
assiégée,  le  comité  de  salut  public  ne  sera  pas  sur 
les  lieux  pour  ratifier  cet  armistice.  C'est  un  traité 
du  moment,  du  quart  d'heure, que  les  généraux  seuls 
peuvent  faire ,  et  conséquemment  il  est  absurde  de 
donner  au  comité  le  droit  de  ratifier  ces  traités. 

SI  l'armistice  doitdurer  plusieurs  jours,  rien  n'est 
plus  dangereux;  la  république  ne  veut  traiter  aveo 
ses  ennemis  que  quand  ils  sont  vaincus ,  ou  au 
moins  quand  elle  les  a  abaissés.  On  vous  l'a  dit, 
citoyens,  l'ennemi  ne  demande  souvent  un  armis- 
tice que  la  veille  d'un  revers;  on  vous  ferait  perdre 
par  la  les  fruits  d'une  victoire,  et  les  fruits  de  la  vic- 
toire ne  se  retrouvent  pas  quand  on  les  a  laissé 
échapper. 

Je  ne  pense  pas  que  le  comité  veuille  accorder  une 
stispension  d'armes  qui  serait  funeste  À  la  patrie.  Je 
demande  la  question  préalable. 

Hermann  :  Duhem  et  Goujon  ont  dit  de  grandes 
vérité»  On  accorde  un  armistice  pour  enterrer  les 
morts,  et  la  suspension  d'armes  finit  avec  l'enterre- 
ment; on  accorae  une  suspension  d'armes  pour  trai- 
ter de  la  réduction  d'une  ville,  mais  la  suspension 
d'armes  cesse  avec  la  résistance  de  la  ville.  Il  faut 
donc  que  l'armistice  soit  borné  à  la  durée  de  l'opé^ 
ration  pour  laquelle  il  a  été  demandé;  autrement 
l'ennemi  â  qui  vous  l'auriez  accordé  le  prolongerait. 


676 


et  profiterait  du  temps  pour  recruter  et  pour  vous 
opposer  de  nouvelles  forces  au  moment  de  la  rup- 
ture. Je  le  répète,  il  faut  que  l'armistice  soit  borné  à 
la  durée  de  la  négociation;  et  si  le  comité  voit  que  la 
DëgociatioD  n'avanc«  pas,  il  rompra  aussitôt  l'ar- 
mistice. Je  propose  donc  de  mettre  après  ces  mots  : 
•  armistices  et  négociations  y  relatives,»  ceux-ci  : 
•pendant  le  temps  de  la  négociation.  • 

Laignelot  :  L'armistice  n'est  qu'une  suspension 
d'armes  momentanée,  et  si  un  général  a  le  droit  de 
la  faire,  il  me  semble  au'on  ne  peut  pas  le  refuser 
au  comité  de  salut  public.  Il  a  besoin  de  prendre 
quelquefois  cette  mesure,  soit  pour  commencer  une 
négociation,  soit  pour  battre  Tennemi  sur  un  point. 
Je  vous  demande  si  vous  voudriez  refuser  au  comité 
de  salut  public  le  droit  de  faire  un  armistice  avec 
l'armée  d'une  puissance  pour  la  paralyser  et  en 
mieux  battre  uqe  autre.  Je  vous  demande  si  vous 
voudriez  refuser  à  votre  gouvernement  tous  les 
avantages  que  Pitt  tire  du  secret  qui  couvre  toutes 
les  opérations  du  gouvernement  britannique  ? 

Je  soutiens  que  la  chose  la  plus  importante,  le  pre- 
mier soin  de  la  Convention,  doit  être  de  placer  aans 
le  comité  du  gouvernement  des  hommes  dignes  de 
sa  conhance;  ce  comité  veut  le  bien,  puique  nous 
ne  cessons  d'être  victorieux.  Reposons-nous  en  donc 
sur  ses  bonnes  intentions,  et  croyons  qu'il  n'est  pas 
une  seule  chose  dans  la  nature  qui  n'ait  deux  faces, 
et  dont  tout  fripon  ne  puisse  abuser. 

Cambacébés  :  Je  n'aurais  pas  repris  la  parole  si 
Tarticle  ne  me  paraissait  donner  au  comité  de  sa- 
lut public  un  pouvoir  que  la  Convention  a  enfin  en- 
levé à  son  propre  ouvrage.  Voulez- vous  être  perpé- 
tuellement en  guerre  avec  l'Europe?  {Non  ,  nonl 
s'écrie-t-on.)  En  bien,  il  faut  dire  au  peuple  qu'on 
le  fera  périr  par  l'excès  de  la  démagogie ,  si  l'on  n'y 
prend  garde.  (Applaudissements  réitérés.)  Je  ne  suis 

Sas  dans  l'usage  de  prendre  ici  la  parole  pour  dire  : 
e  ne  veux  pas  de  roi  ;  ma  profession  de  foi  est  faite 
i  cet  égard,  et  je  courrai  avec  la  plus  grande  joie  tous 
les  hasards  avec  mes  collègues ,  parce  que  je  pense 
que  notre  conservation  est  attachée  à  celle  du  gou- 
vernement républicain;  mais  je  périrai  s'il  le  faut 
ici  pour  empêcher  que  la  Convention,  égarée  par 
an  sentiment  pur,  mais  mal  dirigé,  n'arrive  sur  les 
bords  d'un  abrme  dont  il  serait  impossible  de  nous 
retirer.  Nous  ne  voulons  pas  nous  laisser  bloquer 
pour  mourir  de  farim.  Eh  bien,  il  faut  donc  donner 
au  comité  de  salut  public  les  moyens  de  faire  venir 
des  subsistances.  Je  ne  suis  plus  ae  ce  comité,  mais 
j'ai  reconnu,  pendant  les  quatre  mois  que  j'y  suis 
resté,  qu'il  était  entièrement  paralysé,  qu'il  n'avait 
aucun  moyen  de  traiter  avec  les  puissances  étran- 
gères. Je  vous  demande  si,  lorsqu  on  reconnaît  que 
rarmistice  n'est  qu'une  suspension  d'armes,  que  les 
généraux  eux-mêmes  ont  le  droit  d'accorder,  on 
peut  refnser  au  comité  de  salut  public  celui  de  leur 
ordonner  de  le  faire,  quand  il  le  croira  convenable 
aux  intérêts  de  la  France?  (Vifs  applaudissements.) 
Comment!  un  général  aura  la  fiaculté  de  suspen- 
dre les  hostilités  pendant  deux  ou  trois  jours,  soit 
pour  faciliter  la  capitulation  d'une  place,  ou  pour 
tout  autre  motif,  et  le  comité  de  salut  public  ne 
pourra  lui  dire  :  «Quand  vous  aurez  pris  telle  posi- 
tion, vous  pourrez  suspendre  pendant  deux  ou  trois 
Jours?  Je  crois  qu'il  serait  fatal  pour  la  chose  publi- 
que de  ne  pas  accorder  ce  droit  au  comité.  Je  suis 
plus  désireux  que  personne  qu'il  n'étende  pas  ses 
pouvoirs,  car  c'est  moi  oui  ai  proposé  l'établisse- 
ment de  la  commission  dont  il  est  parlé  dans  les 
articles  subséquents,  pour  connaître  et  donner  son 
ftvis  sur  les  articles  secrets  qu'il  serait  dans  le  cas  de 


faire;  mais  je  pense  en  même  temps  qu'il  Défont  pas 
lui  refuser  les  moyens  indispensaoles  pour  opérer  le 
bien. 

L'article  amendé  comme  l'a  proposé  en  dernier 
lieu  notre  collègue  Hermann  me  paraît  prévenir 
tous  ces  inconvénients,  et  je  demande  qu'il  soit  ainsi 
amendé.       * 

L'article  V.  amendé  par  Hermann,  est  décrété. 

La  Convention  décrète  que  le  mot  trêves  sera 
ajouté  à  l'article  l«r.  ^ 

Meblin  (de  Thionville)  :  Je  demande  la  question 
préalable  sur  le  surplus  du  projet  de  décret. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Je  l'appuie.  Il  me  semble 
que  c'est  une  grande  maladresse  de  venir  dire,  lors- 
qu'on veut  cacher  quelque  chose,  qu'on  a  un  secret 
à  garder;  car  il  est  certain  qu'avec  un  syllogisme  ou 
une  règle  de  trois  il  ne  sera  pas  difficile,  d'après  les 
circonstances  où  vous  serez  placés,  de  deviner  quel 
est  votre  secret.  Ainsi ,  la  commission  qu'on  vous 
propose  de  créer  n'aura  servi  qu'à  divulguer  ce  qu'il 
était  nécessaire  de  cacher,  et  n'aura  rien  ajouté  à  la 
responsabilité  du  comité. 

Je  suppose  que  cette  commission  soit  d'une  opi- 
nion contraire  à  celle  du  comité  sur  le  traité  qui  lui 
sera  soumis;  qu'en  résultera-t-il  !  C'est  que  vous 
aurez  un  gouvernement  à  deux  têtes,  dont  Tune  irait 
à  droite,  et  l'autre  à  gauche.  C'est  ainsi  qu'en  divi- 
sant l'action  on  n'a  point  de  gouvernement,  ou  bien 
on  en  a  un  détestable,  à  cause  de  son  incohérence. 


fait 


Merlin  (de Thionville):  La  proposition  au'on 
It  d'établir  cette  commission  tendrait  a  aiié 


vous 
anéantir 


le  vœu  de  la  majorité  par  celui  de  la  minorité.  Si , 
par  exemple ,  les  douze  membres  du  comité  de 
salut  public  et  cinq  membres  de  la  commission 
trouvaient  le  projet  bon,  et  que  sept  membres  de 
cette  commission  ne  fussent  pas  du  même  avis,  il  est 
clair  que  ces  siept  membres  feraient  la  loi  à  tous  les 
autres ,  parce  qu'ils  formeraient  la  majorité  de  la 
commission.  Ainsi  le  salut  de  la  patrie  serait  com- 
promis par  sept  personnes  contre  l'avis  de  dix-sept. 

Tbibaudbau  :  Il  s'agit  dans  ce  moment  de  savoir 
si  vous  aurez  un  gouvernement  ou  si  vous  n'en  au- 
rez pas.  Je  crois  que  In  simple  présentation  de  l'ar- 
ticle soumis  à  votre  discussion  annonce  qu'il  y  a  des 
vices  dans  le  gouvernement  actuel.  Je  vais  dire  une 
chose  qui  étonnera  peut-être,  mais  qui  n'en  est  pas 
moins  vraie  :  c'est  que  l'ancien  comité  de  salut 
public  était  une  bonne  institution ,  qu'il  gouver- 
nait bien,  et  qu'il  aurait  toujours  bien  gouverné 
s'il  n'eût  pas  usurpé  la  puissance  de  la  Convention, 
s'il  n  eût  pas  eu  le  droit  de  vie  et  de  mort  sur  tous 
les  citoyens  et  sur  la  Convention.  Si  vous  n'inves- 
tissez pas  le  comité  de  salut  publia  d'une  grande 
confiance,  vous  ne  luidonnerezpas  celle  desjeou ver- 
nementsétrangers;  ils  verront  bien  que  la  Conven- 
tion fait  les  lois,  mais  ils  ne  verront  pas  que  personne 
les  fasse  exécuter;  ils  ne  verront  pas  de  gouverne- 
ment. Il  faut  en  revenir  aux  principes,  sans  quoi 
vous  ne  ferez  que  changer  d'anarchie.  La  création 
d'une  commission  pour  connaître,  concurremment 
avec  le  comité  de  salut  public ,  des  articles  secrets 
d'un  traité,  ôterait  à  ce  comité  toute  la  confiance 
dont  il  a  besoin,  et  le  dégraderait  aux  yeux  de  l'Eu- 
rope entière.  D'ailleurs  cette  mesure 'est  illusoire, 
parce  que  les  douze  membres  qui  composeront  la 
commission  ne  tiendront  par  tous  les  fils  de  l'opéra- 
tion sur  laquelle  ils  seraient  obligés  de  prononcer; 
leur  opinion  serait  celle  des  membres  du  comité, 
car  ce  ne  serait  que  par  eux  qu'ils  auraient  connais- 
sance des  motifs  qui  devraient  les  déterminer  à  por 
noncer  pour  ou  contre  1rs  arlicles  secrets. 


e77 


Bbwbcll  :  II  ne  suffit  pas  de  demander  la  ques- 
tion préalable  sur  l'article,  il  faut  indiquer  quelque 
chose  qui  puisse  le  remplacer;  car  on  ne  peut  pas 
nier  qu'if  est  nécessaire  que  le  comité  de  salut  pu- 
blic ait  le  droit  de  faire  des  articles  secrets. 

Pblbt  :  On  n*a  pas  répondu  à  l'objection  qu*a 
faite  Merlin,  et  il  est  impossible  d'y  répondre.  J'a- 
joute deux  autres  objections.  Je  suppose  qu'il  y  ait 
unanimité  dans  le  comité  de  salut  public  pour  un 
avis,  et  unanimité  pour  un  avis  différent  dans  la 
commission  qu'on,  vous  propose  de  nommer.  Je  de- 
mande pour  lequel  des  deux  la  Convention  penche- 
ra, surtout  lorsqu'il  sera  nécessaire  de  garder  le  se- 
cret sur  les  articles  du  traité,  et  qu'on  ne  pourra  pas 
détailler  les  motifs  qui  devront  la  décider  pour  ou 
contre.  D'ailleurs,  je  demande  s'il  n'y  aurait  pas 
quelques  dangers  à  placer  un  corps  intermédiaire 
entre  la  généralité  des  représentants  du  peuple  et 
quelques-uns  d'entre  eux  qui  sont  chargés  du  gou- 
vernement. Je  crois  qu'il  n  est  qu'un  cas  où  le  traité 
devra  être  secret  :  c'est  celui  où  il  serait  question 
d'accorder  un  subside  à  une  puissance  neutre  pour 
qu'elle  s'alliât  avec  nous  et  prît  la  défense  de  notre 
cause.  Au  surplus,  je  demande  le  renvoi  au  comité 
de  salut  public  pour  examiner  si,  oui  ou  non,  il  doit 
v  avoir  des  articles  secrets,  et  qu'en  attendant  on  re- 
jette l'établissement  de  la  commission  en  adoptant  la 
question  préalable  sur  l'article. 

Bbéabd  :  J'ai  compté  jusqu'à  cinq  cas  où  il  serait 
peut-être  nécessaire  de  faire  des  articles  secrets. 
Nous  avons  à  combattre  toute  l'Europe,  et  nous  ne 
pouvons  parvenir  à  la  paix  qu'en  divisant  les  puis- 
sances ;  or,  vous  devez  sentir  que,  dans  cette  hypo- 
thèse, il  sera  peut-être  indispensable  de  faire  des  ar- 
ticles secrets.  On  a  prouvé  que  l'article  ne  pouvait 
être  admis  ;  il  faut  donc  s'en  rapporter  au  comité  de 
salut  public  ;  et  je  le  dis,  il  faut  que  le  comité  sache 
prendre  sur  sa  responsabilité....  (Plusieurs  voix  : 
Oui,  oui!) 

Cbassous  :  Il  a  été  démontré  par  la  discussion  que 
la  république,  qui  a  beaucoup  d'ennemis,  devait  sou- 
vent employer  le  secret  pour  traiter  avec  quelques- 
uns  d'eux.  Il  a  été  démontré  également  que  l'on  de- 
vait s'en  rapporter  au  comité  de  salut  public  seul 
pour  la  conclusion  de  ces  sortes  d'articles,  parce 
que  ce  comité,  qui  a  suivi  toutes  les  opérations  pré- 
liminaires, sait  mieux  que  personne  ce  qui  convient 
davantage  aux  intérêts  de  la  république.  Je  demande 
donc  qu'on  écarte  par  la  question  préalable  l'arti- 
cle qui  établit  une  commission,  et  que  l'on  autorise 
le  comité  de  salut  public  à  ne  communiquer  à  la 
Convention  les  articles  secrets  que  lorsqu'il  ne  sera 
plus  nécessaire  de  les  cacher. 

Gaston  :  Les  difficultés  que  nous  éprouvons  vien- 
nent de  la  forme  de  notre  gouvernement.  Jamais 
vous  ne  ferez  croire  aux  puissances  que  leur  secret 
sera  gardé  lorsqu'elles  traiteront  avec  un  grand 
nombre  de  personnes;  cela  implique  contradiction. 
En  nommant  une  commission  pour  concourir  avec  le 
comité  à  la  conclusion  des  traités  qui  renfermeront 
des  articles  secrets,  vous  entraverez  les  opérations 
de  ce  comité,  vous  lui  ferez  perdre  la  considération 
des  puissances  de  l'Europe.  Je  pense,  moi,  que  vous 
ne  pouvez  pas  l'investir  aune  trop  grande  confiance. 

Collègues  du  comité  de  salut  public,  vous  allez, 
je  l'espère,  je  le  désire,  vous  allez  donner  la  paix  au 
peuple  français  ;  rem  plissez  cet  te  mission  importante 
et  douce,  et' ne  craignez  pas  qu'on  vous  chicane  sur 
la  responsabilité.  (Applaudissements  réitérés.) 

On  réclame  l'ajournement  de  la  discussion. 

L'aiournement  est  décrété. 


La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie, 

SBAIfCB  DU  2S  YBNTOSB. 

Un  secrétaire  donne  lecture  de  la  lettre  suivante  : 

Les  rsTprésentants  du  peuple,  envoyés  dans  les  dé^ 
parlements  du  Varet  des  Bouches-du-Rhàne,  à  la 
Convention  nationale. 

Maneille»  le  11  ventote,  Tan  S*  de  la  républiqiit 
fraoçaUe,  uoe  ei  iudiTitible. 

•  Nous  vous  transmettons  avec  plaisir  le  rapport  qal 
nous  a  été  fait  hier  soir  delà  prise  de  doute  bâtimeais  en- 
nemis, venant  de  Barcelone,  Alitante  et  Angleterre,  faite 
par  la  frégate  de  la  république  In  Badine  et  le  brick  T/^- 
lertt,  La  même  frégate  a  pris  encore  un  bâtiment  anglais 
à  trois  mats  et  a  brûlé  un  bâtiment  espagnol  venant  d'Al- 
ger, après  en  avoir  retiré  Téquipage.  Vous  verrei  encore 
par  ce  rapport  que  le  brick  CAUrte,  que  le  mauvais  temps 
avait  séparé  de  la  frégate ,  s*est  emparé  du  brick  anglais  U 
Triton ,  venant  de  Messine. 

*  P.  5.  Par  un  avis  particulier  que  nous  recevons,  on 
ajoute  que  les  prisonniers  faits  dans  ces  prises  sont,  U*iinc 
part»  quatre -vingt  six  Anglais,  Hollandais  et  Espagnols 
à  bord  de  la  frégate ,  et,  de  Tautre»  treize  Anglais  ou  Hol- 
landais à  bord  du  brick. 


•  Salât  et  fraternité. 


«  Gbamior  »  Cadeot.  » 


Dbboubgbs,  au  nom  du  comité  des  secours  pu- 
blics :  Citoyens,  Julien  Levionnais,  manouvrier  de  la 
commune  de  Coutances,  est  né  dans  le  XVI1«  siè- 
cle ;  il  doit  à  ses  mœurs  pures,  à  la  pratique  des 
vertus  et  à  l'amour  du  travail,  le  honneur  d'avoir 
vécu  asses  longtemps  pour  voir  la  France  libre  et 
triomphante  de  presque  toutes  les  puissances  de 
l'Europe.  Ce  citoyen,  âgé  de  plus  de  cent  ans,  avait 
toujours  subsisté  du  travail  de  ses  mains  :  mais  de- 
puis-quelques années  l'épuisement  de  ses  forces  lui 
I  impérieusement  commandé  le  repos,  et  l'a  privé  de 
ses  moyens  d'existence.  Son  épouse,  âgée  de  soixante- 
quatorze  ans,  était  elle-même  dans  l'impuissance  d'y 
suppléer  ;  la  misère  assiégeait,  accablait  ce  respecta- 
ble centenaire,  si  notre  collègue  Le^ot,  envoyé  dans 
le  département  de  la  Manche,  ne  lui  eût  accordé  un 
secours  provisoire  de  300  liv. 

Citoyens,  Julien  Levionnais,  qui  a  vécu  près  d'un 
siècle  sous  les  trois  derniers  tyrans  de  la  France,  fut 
heureux  de  trouver  ses  ressources  en  lui-même  et 
dans  son  travail  ;  car  les  despotes  ne  regardèrent  et 
ne  soulagèrent  jamais  l'honnête  indigence. 

La  conquête  de  la  liberté  a  rétabli  Thumanité  et  la 
fraternité  dans  tous  leurs  droits  ;  le  vieillard  hors 
d'état  de  travailler  n  a  plus  à  redouter  les  besoinsde 
la  vie.  Le  peuple  français  honore  la  vieillesse  et  sou- 
lage le  malheur.  Ces  sentiments,  cet  engagement 
sacré  sont  exprimés  dans  l'article  CXXIU  de  sa  con- 
stitution ;  ils  sont  gravés  dans  le  cœur  de  tous  les  ré- 
publicains :  a  ces  titres  Julien  Levionnais  réclame  et 
doit  obtenii ,  de  la  bienfaisance  iiationale.  un  secours 
annuel  proportionné  à  ses  besoins  et  qui  le  mette  en 
état  de  finir  tranquillement  sa  longue  et  honorable 
carrière.  Puisse- t-il  longtemps  jouir  de  ce  bienfait 
de  la  nation,  et  partager  le  bonheur  que  la  liberté, 
l'égalité  et  la  victoire  assureront  bientôt  à  tous  les 
Français  ! 

Voici  le  projet  de  décret: 

«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  lerap* 
port  de  son  comité  des  secours  publics  sur  la  péliUon  du 
citoyen  Julien  Levionnais»  indigent  et  oeatenairt »  qui  ré* 
danie  des  secourt  ; 


678 


•  Décrète  que,  sur  les  fonds.mis  à  la  disposition  de  la 
commission  des  secours  publies,  il  sera  payé  au  citoyen 
Levioonais,  manoufrier  de  la  commune  de  Coûtantes, 
un  secours  annuel  deSOOlif^i  sans  imputation  de  la  somme 
de  300  iiv.  à  lui  accordée  à  litre  de  secours  profisoire  par 
le  représentant  du  peuple  Legot,  envoyé  dans  le  déparie- 
menl  de  la  Manche» 

•  Le  présent  décret  ne  lert  inprlmé  qn^aii  Bnllelln  de 
correspondance*  • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

Le  Président  :  Plusieurs  sections  deoiandent  à 
être  admises  à  la  barre. 

FoussEDOiRB  :  Les  qtiintidis  et  les  dëcadis  sont  con- 
sacrés à  entendre  les  pétitionnaires;  les  autres  jours, 
ils  ne  font  que  faire  perdre  à  la  Convention  un 
temps  précieux. 

'**  :  Les  sections  de  Paris  sont  trop  nombreuses 
pour  que  la  Convention  puisse  les  entendre  toutes 
les  quintidis  et  les  dëcadis.  On  ne  faisait  pas  de  diffi- 
culté pour  les  admettre  du  temps  de  Robespierre, 
quand  la  terreur  les  traînait  à  cette  barre  pour  teUr 
faire  approuver  des  mesures  -que  tous  les  bons  ci- 
toyens aétestaient  dans  leurs  cœurs  ;  et  on  les  re- 
pousserait aujourd'hui  !  aujourd'hui  qu'elles  vien- 
nent entourer  la  représentation  nationale  d*amour 
et  de  respeet  !  aujourd'hui  qu'elles  ne  font  entendre 
à  cette  barre,  que  les  expressions  du  plus  sincère,  du 
plus  entier  dévouement  n  la  liberté,  a  la  république! 

Est-ce  le  moment,  je  le  demande  au  préopinant, 
j'atteste  sa  conscience,  auand  de  toutes  parts  on 
cherche  à  exciter  des  troubles,  est-ce  le  moment  de 
ne  pas  accueillir  les  citoyens,  de  ne  pas  écouter 
leurs  vœux? 

FOUSSEDOIRB  :  J'ignore  si  Ton  cherche  à  exciter 
des  mouvements  ;  je  ne  suis  d'aucune  faction,  et  Je 
ne  m'oecupe  pas  d'examiner  si  la  terreur  a  existé  ou 
non. 

Une  voix  :  11  en  doute  ! 

Plusieurs  voiœ  :  L'ordre  du  Jour  ! 

FoussEDoiRE  :  Je  demande  que  cet  ordre  du  jour 
soit  motivé  sur  la  loi. 

Les  mêmes  voix:  L'ordre  du  Jour  pur  et  simple! 

L'ordre  du  jour  pur  et  simple  est  adopté,  et  les 
sections  sont  admises. 

—  Une  députation  de  la  section  des  Gardes-Fran* 
çaises  est  introduite  à  la  barre. 

L'orateur:  Reijdus  enfin  à  la  plénitude  des  droits 
dont  la  nation  vous  a  confié  l'exercice,  vous  avez 
senti  la  nécessité  de  venger  la  souveraineté  du  peu- 
ple, et  de  poursuivre  sans  relâche  les  agents  et  les 
fauteurs  de  la  tyrannie  qui  a  couvert  la  république 
de  bastilles  et  d  échafauds. 

Qu'elle  fut  horrible,  qu'elle  fui  coupnble  cette  ty- 
rannie qui  pesait  à  la  fois  sur  les  bons  citoyens  et  sur 
leurs  représentants  fidèles!  Eh  !  quels  sont  ceux  sur 
qui  les  lâches  oppresseurs  de  notre  liberté  se  plu- 
rent à  appesantir  leur  joug  odieux  ?  les  vrais  répu- 
blicains. Leur  zèle  était  un  droit  à  la  proscription  ; 
nous  étions  réduits  à  gémir  en  silence  de  l'excès  de 
leurs  attentats,  et  nous  hâtions  par  des  vœux  le  mo- 
ment de  la  justice,  l'instant  qui  devait  venger  quel- 
ques-uns d'entre  vous  de  tant  d'injures,  en  les  rap- 
pelant dans  votre  sein. 

Ce  moment  est  enfin  arrivé  :  grâces  vous  en  soient 
rendues,  législateurs;  mais  en  aviez-vous  fnit assez? 
Le  silence  des  tombeaux  ne  vous  accusait-il  pas  en- 
core de  trop  d'indulgence?  Oui,  les  mânes  plaintifs 


de  Babaut,  de  Vergniaud,  de  Camille  DesmoulHis* 
de  Phélippeaux,  et  de  tant  d'autres  honorables  vie- 
times,  appelaient  la  vengeance  nationale  sar  les  par- 
ricides auteurs  de  tant  de  forfaits.  Vous  avez  en** 
tendu  leurs  cris  accusateurs,  et  le  glaive  de  la  loi  eal 
enfin  suspendu  sur  les  têtes  coupables  de  nos  tyrans 
et  de  leurs  vils  satellites. 

Les  factieux!  ils  s'étaient  essayés  dans  leshorreiin 
des  fatales  journées  des  2  et  3  septembre  :  nais  ce 
fut  à  l'époque  du  31  mai  que  leur  criminelle  audace 
osa  déposer  le  masque  perfide  à  Taide  duquel  iû 
nous  avaient  abusés.  Effrayés  d'avoir  été  signalés 
dans  plusieurs  sections  de  Paris,  et  surtout  par  celle 
des  Gardes-Françaises,  qui,  le  27  mai,  vint  à  cette 
barre  jurer  de  vous  défendre  contre  leurs  criminels 
efforts;  effrayés  de  l'active  surveillance  de  votre 
commission  desDouze,  ils  tentèrent  alors  un  dernier 
effort,  et,  enhardis  par  le  danger  même  où  leur  ré> 
voUe  les  avait  placés,  ils  se  servirent  de  notre  obéis- 
sance pour  nous  tenir,  au  son  de  la  caisse,  éloij>vÀ 
du  sein  de  nos  délibérations  et  dans  l'état  passif  du 
service  militaire. 

C'est  ainsi  au'à  l'aide  du  pouvoir  que  nous  lesr 
avions  confié  ils  eurent  l'art  perfide  d'enchatner  iio« 
tre  zèle  et  dese  rendre  les  téméraires  interprètes  de 
la  majorité  des  habitants  de  Paris. 

Depuis  cette  ftitale  époque,  une  grave  incnipatioo 
pesait  sur  cette  commune.  C'est  cette  inculpation 
odieuse  que  la  section  des  Gardes- Françaises  vient 
repousser  aujourd'hui.  Elle  vient  dénoncer  à  la  ré- 
publique les  coupables  manœuvres  des  assassina  des 
31  mai,  2  juin  et  3  octobre;  elle  vient  en  masse  vons 
réitérer  l'expression  du  brûlant  désir  qu'elle  a  eou- 
stamment  nourri  dans  son  sein,  celui  de  moorir  ponr 
la  représentation  nationale,  que  des  traîtres  voulu- 
rent en  vain  anéantir  le  10  mars  et  le  31  mai  ;  elle 
vient  enfin  vous  déclarer  aue,  décadi  dernier,  elle  a 
ohargé  une  commission  cie  recueillir  les  dénoncia- 
tions des  bons  citoyens  pour  vous  mettre  à  portée  de 
faire  punir  les  auteurs  de  ces  désastreuses  journées. 

C'est  après  la  victoire  seulement  que  la  elémence 
est  permise  avec  les  ennemis. 

Achevez  alors,  citoyens,  d'anéantir  leur  espoir  en 
ordonnant  à  vos  comités  ^de  s'occuper  des  moyens 
d'activer  la  constitution  démocratiqtie.  Qu'au  bruit 
des  vengeances  de  la  justice  nationale  elle  sorte  du 
tombeau  ofi  ces  traîtres  l'avaient  ensevelie;  qu'elle 
soit  dans  vos  mains  la  pierre  de  touche  qui  vous  ser- 
vira à  distinguer  le  véritable  patriote  du  faux  ami  de 
la  liberté,  de  cette  liberté,  fille  des  lois  et  amie  de 
l'ordre,  que  nous  voulons  tenir  de  vous  et  conserver 
au  péril  de  notre  vi^,  en  la  défendant  avec  un  égal 
courage  et  contre  les  royalistes  et  contre  les  hom- 
mes de  sang.  (On  applaudit.) 

Le  Président,  à  la  députation  :  Citoyens,  le  règne 
affreux  de  la  terreur  n'est  plus,  et  il  ne  renaîtraja- 
mais  ;les  représentants  du  peuple  l'ont  juré;  ilsse- 
rontiidèles  a  leurserment.  toujours  juste,  toujours 
sage,  la  Convention  nationale  frappera  lecrime,  quel- 
que part  qu'il  se  Irouve,  pardonnera  à  l'égarement, 
ouvrira  les  bras  à  l'innocence  opprimée  et  marchera 
d'un  pas  ferme  et  tranquille  vers  le  but  de  tous  vos 
désirs,  la  constitution  démocratique  acceptée  parla 
France. 

Flattée  des  sentiments  républicains  contenus  dans 
votre  Adresse,  elle  vous  invite  aux  honneurs  de  la 

séance.  (Onapplaudit.) 

r-Une  députation  de  la  section  du  Pont-Neuf  est 

admise. 

L orateur  (à  la  barre):  Grâces,  mille  îm$ 


67» 


F; 


Toas  soient  "endues,  It^gislateurs  !  Oui,  nous  n'en 
doutons  pms,  jus  «vez  mis  la  vertu  à  l'ordre  du 
jour;  vous  venez  de  le  prouver  :  vous  avez  ordonné 
que  la  conduite  des  instigateurs  du  81  mai  serait 
examinée»  Deuz  sections  ont  déjà  avoué  qu'elles 
avaient  été  dupes  de  la  faction  qui  avait  provoqué 
4sette  révolte;  nous  vous  déclarons,  au  nom  de  celle 
du  Pont-Neuf,  que  la  nomination  des  commissaires, 
sous  le  nom  de  cette  foction,  pour  concourir  à  cette 
manœuvre,  n*a  été  faite  que  par  les  mêmes  brigands 

2ue  nous  vous  avons  dénoncés,  à  la  tête  desquels 
tait  encore  le  scélérat  Minier.  Et  vous  aussi  vous 
avez  remporté  des  victoires,  vous  avez  détruit  les 
tyrans,  vous  avez  anéanti  la  commune  conspiratri- 
ce,  vous  avez  fermé  l'antre  infâme  des  Jacobins,  vous 
poursuivez  les  auteurs  atroces  des  malheurs  de  la 
république  ;  votre  contenance  ferme  fait  pâlir  tous 
les  féroces  agents  du  crime  et  de  la  terreur  que  vous 
avez  juré  d'anéantir,  et  ils  léseront,  {puisque  vous 
l'avez  promis.  Que  n'avons-nous  pas  à  attendre  de 
vous,  de  vous  qui  venez  d'imposer  silence  aux  pas- 
sions, de  réparer  des  erreurs,  de  vous  vaincre  vous- 
mêmes?..  Cette  victoire,  ce  dernier  effort  est  le 
triomphe  de  l'humanité Restes  précieux  des  pro- 
scriptions honorables  du  31  mai,  salut  !  Oubli  du 
lassé,  vigilance  pour  le  présent,  prévoyance  pour 
'avenir,  vous  l'avez  dit,  et  la  France  vous  a  enten- 
dus. Les  injustrs  persécutions  que  vous  avez  éprou- 
vées sont  un  lien  de  plus  qui  vous  attache  au  sou- 
tien de  la  rémiblique  ;  votre  énergie,  votre  conduite 
anciennci  1  héroïque  aveu  de  vos  collègues,  sont 
pour  les  uns  et  les  autres  le  garant  de  votre  con- 
duite à  venir.  Le  baiser  de  paix  oui  vous  a  réunis  est 
le  gage  sacré  d'une  concorde  aésormafs  impertur- 
bable sans  doute,  puisque  c'est  d'elle  que  dépendent 
les  destinées  de  la  république,  et  que  vous  venez  de 
prouver  qu'un  même  sentiment  vous  anime  pour  son 
affermissement  et  son  bonheur. 

Lfi  PnÉsiDEnT.  à  la  dépntation  :  Oui,  citoyens,  la 
justice  est  à  l'ordre  du  jour,  et  vos  représentants  l'y 
maintiendront.  Ils  trouvent  la  garantie  de  cette  pro- 
messe solennelle  dans  leur  propre  courage,  dans  vo- 
tre fermeté  et  dans  votre  connance.  L'opinion  pu- 
blique fait  enfin  justice  de  cette  journée  funeste  du 
31  mai,  source  exécrable  des  maux  qui  ont,  pendant 
dix-huit  mois,  pesé  sur  la  France  en  deuil. 

La  Convention  voit  avec  plaisir  cette  Journée  af- 
freuse désavouée  par  le  peuple,  qui  n'y  eut  aucune 
part  directe,  puisqu'elle  fut  l'ouvrage  d'une  (action 
conspiratrice  qui  voulait  anéantir  la  représentation 
nationale.  En  rappelant  dans  son  sein  une  partie 
précieuse  d'elle-même,  proscrite  par  cette  faction, 
elle  a  rempli  son  devoir,  et  elle  trouve  sa  récom- 

Sense  dans  l'acte  de  justice  qu'elle  a  fait,  auUntoue 
ans  la  sanction  qu'y  donne  en  ce  moment  l'opinion 
publique. 

Vous  réitérez  une  demande  déjà  faite  par  la  plu- 
part des  sections  de  Paris  ;  ces  diverses  pétitions  ont 
été  renvoyées  aux  comités  de  la  Convention,  qui  fe- 
ront sur  cet  objet  un  travail  général.  Attendez  donc 
avec  confiance  que,  dans  sa  sagesse,  la  Convention 
remplisse  le  vœu  que  vous  avez  fait  entendre.  Satis- 
faite des  sentiments  civiques  dont  l'expression  se 
trouve  dans  votre  Adresse,  la  Convention  nationale 
vous  invite  aux  honneurs  de  la  séance. 

—  On  admet  une  dëputatioo  de  la  section  de  la  Fi- 
déUtë. 

VaraUwr:  Représentants,  en  rappelant  dans  vo- 
tre sein  les  députes  proscrits  sous  le  règne  de  la  ty- 
rannie, en  vouant  a  l'oubli  une  journéB  qui  rappe- 
lait ropyrtasiiNi  eu  peuple  et  la  vtoct  vous  avei 


fait  un  actedejastice  ;  vous  avez  vengé  les  droits  de 
la  nation  outragée  dans  ses  représentants.  Il  vous 
reste  encore  à  déchirer  de  notre  histoire  ces  pages 
ensanglantées  ()ui  rappelleraient  à  la  postonté  les 
horribles  journées  des  2  et  3  septembre  1702.  Tou- 
tes les  lois  de  la  justice  et  de  l'humanité  ont  été  vio- 
lées par  des  bourreaux  ;  des  citoyens  jsans  nombre 
ont  été  massacrés  ;  et  par  qui,  et  par  quel  ordre  ? 
voilà  le  mystère  affreux  qu'il  est  de  votre  devoir  de 
pénétrer,  vengeance  pour  ces  victimes  malheureu- 
ses, punition  prompte  et  éclatante  des  provocateurs 
et  exécuteurs  de  ces  assassinats  !  Que  nos  neveux 
apprennent  au  moins  que  ces  forfaits  ne  sont  pns 
restés  impunis:  voilà  le  vœu  de  la  section  de  la  Fi- 
délité ;  elle  ne  craint  pas  de  dire  que  c'est  celui  de 
la  nation  entière.  Ffve  to  république!  vive  la  repré- 
tenlalian  nationale! 

.  Le  Président  :  Citoyens,  après  la  glorieuse  jour- 
née du  9  thermidor,  il  ne  fut  sans  doute  pas  de  mo- 
ment t)lus  doux  pour  les  représentants  de  la  nation 
française  que  celui  où,  cédant  à  la  fois  au  cri  du  de- 
voir, à  la  voix  de  l'opinion  publique  et  au  vœu  de 
leur  cœur,  ils  rappelèrent  à  leurs  augustes  fonctions 
d'illustres  proscrits  qu'une  faction  odieuse  avait  ar- 
rachés à  la  représentation  nationale.  On  sait  ce  que 
fit  cette  foction  abominable  ;  on  sait  comment  elle 
égara  le  peuple  qui  assiégea  la  Convention  nationa- 
le, croyant  l'environner  pour  la  défendre  ;  on  sait 
que  ce  peuple  généreux  fut,  sans  le  savoir,  l'instru- 
ment passif  d'une  conspiration  longtemps  méditée 
dans  le  silence  et  les  ténèbres.  Aussi  la  France  rend- 
elle  justice  an  peuple  de  Paris;  et  la  Convention, qui 
veut  et  doit  la  rendre  à  tous,  saura  frapper  sans  mé- 
nagement les  chefs  de  cette  conspiration  odieuse. 

La  Convention,  toujours  juste,  se  fera  rendre 
compte  de  l'objet  de  votre  seconde  pétition,  relatif 
aux  rentes  viagères  foi  tes  par  des  émigrés*,  elle  se 
fera  faire  incessamment  un  rapport  sur  votre  de- 
mande. En  applaudissant  au  civisme  que  vous  venez 
de  manifester  à  sa  barre,  elle  vous  invite  aux  hon- 
neurs de  la  séance. 

Cette  Adresse  est  renvoyée  au  comité  de  sûreté 
générale. 

La  Convention  nationale  en  ordonne,  ainsi  que 
des  autres,  la  mention  honorable  et  Tinsertion  au 
Bulletin. 


Sut(e  àe  la  diseussion  iur  les  relationt  exlérieuret. 
• 
CAHBACiiàs  :  Le  comité  de  salut  paMic  a*  eitminé  de 
noufeau  la  question  importanit  qui  a  él6  agitée  dans  la 
précédeole  séance,  et  dont  vous  ates  ajourné  la  décision* 
Plus  il  a  médité  sur  les  dilBcaltés  qu'elle  présente ,  sur  \c* 
inconvéuieiits  qu*elle  fait  craindre,  sur  les  résultats  qu'elle 
peut  produire,  plus  il  a  reconnu  que  rimérét  bien  en- 
tendu du  peuple  et  celui  du  gouvernement,  qui  en  est  tou* 
jours  inséparable,  ne  vous  permettaient  point  délaisser  au 
comité  de  salut  publie  le  pouvoir  de  contracter  avec'  1rs 
puissances  étrangères  des  eogagemeols  qui  demeureraient 
dans  le  secret. 

L'opinion  contraire  détrafraH  le  principe  de  la  loi  dont 
nous  vous  avons  lonmit  le  projet ,  et  elle  rendrait  sans  ob* 
jet  les  articles  qui  ool  été  déeréiéi  hier. 

Cn  effct ,  citoyens,  en  laissant  an  comité  de  salut  public 
toute  la  latitude  dont  il  a  besoin  pour  accélérer  et  facitiler 
les  négociations,  il  faut  lous  réserver  les  moyens  de  {uger 
son  ouvrafe,  et  ne  point  lui  déléguer  an  droit  qui  n*ap* 
partient  qu'à  vous  dans  la  république,  celui  de  prononcer 
sur  la  guerre  et  sur  la  pait. 

Cet  hommage  rendu  à  la  raison  et  aux  principes,  dans 
la  articles  !••,  II  et  IV  du  projet,  disparaîtrait  ncUenent 


680 


d  fovs  déerétiei  tajouiirhai  que  le  comUé  de  salot  publie 

Cnit  termiiier  définitif  ement,  et  par  Teffel  de  m  seule  vo- 
nté,  toutes  les  néfociatioos  qui  par  leur  nature  doivent 
demeurer  sccrèies.  N*esl-ll  pas  frai  qu*il  pourrait  mettre 
dans  celte  catégorie  toute»  les  transactions  politiques?  Ne 
def  ait-on  pas  craindre  que  letgoufernemenls  de  l'Europe, 
peu  accoutumés  aux  lois  de  la  publicité,  nefoulussent 
désormais  traiter  que  dans  le  secret,  et  que  la  forme  de  la 
ratification  ne  fût  ainsi  bientôt  éludée,  ou  du  moins  quMl 
ne  s*élefât  une  lutte  continuelle  sur  le  point  de  safoir  si 
l'opération  politique  a  dft  demeurer  dans  le  secret? 

Ces  considérations,  citoyens,  sont  de  quelque  impor- 
tance :  f  otre  sagesse  les  appréciera.  Le  def  oir  de  f  otre  co« 
mité  de  salut  public  était  de  f  ons  les  présenter,  et  de  f  ous 
faire  remarquer  cooibien  il  était  essentiel  de  ne  point  écar- 
ter les  articles  du  projet  par  la  question  préalable,  sans 
fous  être  fixés  sur  les  mesures  à  substituer  k  rétablisse- 
ment d'une  commission  qui  parait  ne  pu  obtenir  f  otre  as- 
senti  ment» 

Ici  nous  rappellerons  sommairement  les  diverses  ol^ee- 
lions  faites  contre  notre  projet.  On  a  dit  que  la  nomina- 
tion de  la  commission  donnerait  Téfeil  aux  puissances  en- 
nemies ;  que  la  déclaration  à  faire  par  cette  commission  à 
la  Convention  nationale  pourrait,  dans  le  cas  où  elle  serait 
négative,  entraîner  des  débats;  que  la  minorité  pourrait 
souvent  faire  la  loi;  que  le  secret  ne  serait  point  gardé; 
enfin  que,  la  confiance  pour  le  gouvernement  devant  être 
entière,  il  ne  lallait  pas  lui  6ter  des  moyens  de  faire  le 
bien,  surtout  lorsque,  par  Teflet  de  PamovibUité  de  ses 
membres,  il  lui  était  impossible  défaire  le  mal. 

Quelque  spécieuses  que  soient  ces  obfections,  elles  ne 
sont  pas  sans  réponse.  Délègues  ft  un  de  vos  comités  le 
droit  d'examiner  l'opération  politique,  concentre!  cet  exa* 
men  à  un  objet  déterminé,  assujettissex-le  à  donner  son 
avis  par  écrit,  rendex  ce  comité  plus  nombreux  que  le  co- 
mité de  salut  public,  dispensex-le  de  vous  faire  connaître 
son  opinion,  et  réservei-f ous ,  en  dernier  analyse,  la  fa- 
culté de  juger  son  opinion  lorsque  le  temps  sera  f  enu  où 
le  comité  «de  salut  pubKc  tous  rendra  compte  et  de  la  né- 
gociation et  des  mesures  qu'elle  aura  entraînées  ;  af  ec  ces 
précautions,  ne  remédiei-Tous  point  à  la  plupart  des  in- 
convénients qui  TOUS  ont  été  exposés  ? 

Quant  ausecrel,  il  ne  faut  pas  se  le  dissimuler ,  U  est 
des  inconf  énients  qui  tiennent  à  la  nature  des  choses  ;  e^ 
lui  d'une  trop  grande  publicité  est  inséparable  des  gouf  er- 
nements  où  ceux  qui  exercent  la  puissance  du  peuple  ai- 
ment à  prendre  l'univers  pour  témoin  de  leurs  actions  et 
de  leurs  résolutions.  D'ailleurs,  qui  ne  sait  point  que  nulle 
transaction  politique  n'est  longtemps  ignorée?  que  les 
despotes  les  plus  absolus  ne  peuvent  laisser  longtemps  leurs 
desseins  cachés,  et  qu'on  a  calculé  la  durée  nécessaire 
pour  découvrir  les  plus  mystérieuses  résolutions  des  cabi- 
nets de  l'Europe  ? 

J'insiste  peu  sur  les  effets  âe  la  confiance.  Sans  doute 
que  la  force  du  gouvernement  est  dans  la  confiance  de  la 
Convention,  comme  la  force  de  la  Convention  est  dans  la 
confiance  do  peuple  ;  mais  le  vrai  moyen  de  conserver  ce 
caractère,  c'est  de  ne  le  point  forcer;  c'est  de  donner  à  la 
nation  des  garanties;  sans  elles  il  n'est  point  d'organisa- 
tion sociale.  Ainsi,  d'après  notre  système,  dans  les  traités 
patents,  la  Convention  aura  pour  garant  le  comité  de  salut 
public,  et  le  peuple  aura  à  son  tour  une  double  garantie, 
celle  du  comité  qui  négocie  et  celle  de  la  Convention  qui 
ratifie  la  négociation.  Dans  les  traités  secrets,  cette  double 
garantie  se  retrouve,  et  pour  vous  et  pour  la  nation, 
d'abord  dans  le  comité  de  salut  public ,  qui  répondra  de 
l'utilité  de  l'opération  politique,  et  dans  le  comité  désigné, 
qui  répondra  que  cette  opération  est  conforme  aux  princi- 
pes du  gouvernement  républicain»  et  qu'elle  doit  demeu- 
rer secrète 

Tels  sont  les  motifs  des  mesures  que  le  comité  de  salut 
public  vous  propose.  Vous  les  pèserex  ;  vous  vous  décide- 
rex  en  connaissance  dr  cause,  et ,  quel  que  soit  le  parti  que 
TOUS  croirex  devoir  prendre,  l'Europe  n'oubliera  point  que 
BOB  armées  triomphantes  soutiendront  toujours  la  sagesse 
de  nos  négociations,  et  que  fomcontittucrei  k  préparer  la 
paix  ptr  lettn  conquêtes» 


Voici  lei  articles  nouveaux  que  le  eoBité  i 

«  Art.  VI.  Dans  le  cas  où  les  traités  doifent 
des  articles  secrets,  ou  lorsqu'il  s'agit  de contmeler ,  aree 
des  gouvernements  étrangers,  des  engagesnents  qui  ne 
peuvent  être  rendus  publics,  le  comité  de  salut  public  in- 
struit de  l'objet  de  la  négociation  le  comité  de  i^^latioau 

•  VII.  Ce  comité  examine  si  l'opération  projetée  crt 
conforme  aux  principes  du  gouTemcment  lépubUcûn  »  et 
si  elle  doit  demeurer  secrète. 

«  Il  donne  par  écrit  son  avb  sur  ces  deux  fxrfntfl» 

•  VIIL  D'après  l'avis  du  comité  de  législation,  le  e^ 
mité  de  salut  public  est  autorisé  à  terminer  définitifenienl 
la  négociation ,  et  les  conditions  qu*il  arrête  sont  eiécatéei. 

•  IX.  Lorsque  le  comité  de  salut  public  rend  comiae  à 
la  Convention  nationale  des  mesures  qn'il  a  priaes,  il  est 
tenu  de  lui  présenter  l'avis  du  comité  de  législation.  • 


N.  B.  —  Dans  la  séance  du  24,  les  représentants 
du  peuple  près  Farmëe  de  la  Vendée,  revenus  an 
sein  de  la  Convention,  ont  donne  des  détails  sur 
la  paix  qui  a  été  faite  entre  Tannée  de  Charette  et  la 
république.  Stoffletestleseul  de  l'armée  vendéenne 
qui  n*a  point  voulu  écouter  de  propositions.  Cha- 
rette s'est  rangé  de  notre  côté,  et  marche  sur  loi  à  la 
tête  de  quinze  mille  hommes.  Les  représentants  da 
peuple  ont  aussi  annoncé  que  demain  ou  après-de- 
main il  arrivera  à  la  Convention  plusieurs  orapeaux 
3 ne  Charette  envoie,  et  sur  lesquels  il  est  écrit  cette 
evise  :  Conquis  par  la  justic9  eiVkumanilé. 

Les  arrêtés  pris  par  les  représentants  dans  la  Ven- 
dée ont  été  approuvés. 


LIVRES  DIVERS. 

Code  de  l'arbitrage,  un  petit  volume  in-tt.  Prit  :  a  lir.  iùê^ 
franc  de  port.  Se  trouve  h  Paris ,  chei  Auberiio  ,  inpri* 
meur ,  cour  du  Palait-de-Justice ,  n*  SI  ;  et  Mcmdonneaa  « 
au  dép6t  des  lois,  place  de  U  âcunion,  cintevani  ém  Ov- 
al. 


Cet  ouvrage  contient  le  teite  et  l'eiplicatiôn  ém  tons  Ict 
décreU  relatifs  :  |o  à  l'arbitrage  volontaire;  S*  k  celui  de 
famille  ;  V*  k  Tarbitrage  forcé  d'après  les  lois  sur  les  aaceeo- 
tîoos  ;  4*  à  quelques  autres  arbitrages  également  fbrcéa  :  U 
est  de  Tauieur  dm  la  loi  du  17  nivôse  sur  les  nirrtisaioui,  e«- 
vrage  qui  se  (rouve^au  même  dép6t. 

—  Iraité  des  opérations  de  chirurgie,  par  Bcrirandi,  tra- 
duit de  ritalien  par  Soliier  de  la  Romillaia ,  aovvelle  édi- 
tion ;  in -S»,  fig.(  broché.  Prit  :  6  liv.  10  a.  A  Faris,  chca 
Théophile  Barrois  le  jeune,  libraire,  quai  dee  AiiçMalina. 
n»l8.  ^ 

-^Codedei  tucceuiont,  donations,  smSêtituiiosu,  (fttmtmtmi 
et  partages,  avec  une  introduction,  detUbleaua  gênëaleff- 
ques  et  une  table  alphabétique  des  matières;  par  Te  citojea 
A.-C  Guichard ,  avantageusement  connu  par  aea  codea  dca 
jugea  de  paix,  du  tribunal  de  famille,  police,  etc.,  etc.,  deat 
il  va  paraître  de  nouvelles  éditions. 

A  Paris,  chei  Garnery,  rue  Serpente,  tfi  17.  Prix  :  S  lir. 
10  sous,  et  4  liv.  10  sous  franc  de  port,  par  la  poste. 


Payemenls  à  la  trésorerie  noltonole* 

Le  payement  de  la  dette  consolidée  perpétuelle  m  Uà 
pour  les  sii  derniers  mois  de  Tan  2«,  et  pour  l*aonëe  i  ce«s 
qui  n*ont  pas  touché  les  sii  premiers  mois  de  ladite  année. 
Les  citoyens  qui  ont  retiré  leur  inscription  définitive,  et  ^ 
désirerai'  ni  être  payés  dans  les  districts,  peuvent  iadiqver 
les  che.'i-lieui  de  district  où  ils  veulent  être  pajda»  i 
mémcnt  à  la  loi  du  S*  jour  des  saosculoitides 

Le  payement  des  rentes  viagères  se  fait  ( 
pour  deui  mou  y'wff,  et  un  jours  de  l*aand«  iVM  (n 
ai/le)  et  les  sis  premiers  asois  de  Paa  ta. 


-    GAZETTE  NATIONALE ..  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N»  176.  Sextidi  26  Vbntosb,  Pan  8«.  (Lundi  16  Mars  1795,  vietêx  style.) 


CONVENTION   NATIONALE. 

Préiidenee  de  T/dbaudeau» 
SUITE  DB  LA  SÉANCB  DU  23  VBNTOSB^ 

Suite  de  la  diectuiion  sur  les  relations  extérieures. 

Chazal  :  Le  discours  et  la  discussion  qui  ont  eu 
lieu  hier  roulent  sur  ce  point  de  fait,  que  la  Conven- 
tion nationale,  qui  procède  solennellement,  ne  peut 
elle-même  passer  ces  actes  sans  danger. 

Si  le  fait  était  constant,  je  dirais  aue  la  Convention 
doit  alors  imiter  le  peuple,  dont  elle  est  l'image ,  et 
subdélëguer  ce  qu'elle  ne  saurait  faire. 

Je  dfrais  :  11  faut  une  commission  d*examen,  une 
commission  créée  spécialement  pouf  chaque  traité , 
oui  garantisse  qu'il  est  conforme  aux  principes  et  à 
1  intérêt  de  la  république  ;  une  commission  qui  force 
le  gouvernement,  obligé  de  la  demander,  de  recon- 
naître sans  cesse  l'autorité  législative,  et  de  lui  ren- 
dre un  hommage  conservatoire.  L*idée  de  cette 
commission  est  séduisante  ;  je  5uis  un  ceux  qui  Tap- 
puyèrent  le  plus  fortement  au  comité  de  salut  public 

Elle  nous  vient  des  anciens  Grecs ,  de  ces  sages 
démocrates,  nos  maftres  en  constitution. 

Vous  la  lisez  pratiquée  dans  cette  belle  page  de 
rhistoire  d'Athènes  ou  Aristide  déclare  au  souve- 
rain assemblé,  qui  l'avait  choisi  pour  examiner  un 
projet  de  Thémistocles  :  •  Citoyens,  rien  de  plus 
utile  que  le  projet  conçu  par  notre  magistrat,  mais 
aussi  rien  de  plus  injuste.  • 

Sans  doute  la  Convention  nationale  devrait  em- 
prunter des  Grecs  la  mesure  qu'ils  employèrent  avec 
autant  de  gloire  à  cette  occasion,  si  elle  ne  pouvait 
examiner  et  ratifier  elle-même  les  traités. 

J'estime  que  le  pitis  grand  danger  est  attaché  à 
dispenser  le  comité  de  salut  public  de  les  soumettre 
à  son  examen,  à  sa  ratification. 

Et  d'abord,  en  l'en  dispensant,  quelle  garantie  au- 
rez-vous  que  le  traité  sera  conforme  h  vos  principes 
.  et  à  l'intérêt  de  la  république? 

Couthon,  Saint-Just,  Robespierre  furent  du  co- 
mité de  salut  public  et  trahirent  la  Convention  et  la 
liberté. 

Je  veux  que  leurs  successeurs  réunissent  la  vertu 
au  zèle  :  la  vertu  se  laisse  tromper,  et  le  zèle  a  ses 
erreurs. 

Tous  les  jours  vous  rejetez  avec  sagesse  des  pro- 
jets de  loi  sortis  des  laboratoires  de  vos  comités. 

Il  n'est  presque  pas  un  seul  traité  de  paix  ou  de 
guerre  qui  ne  soit  très-susceptible  de  prendre  des 
clauses  secrètes.  Comment  ne  pas  redouter  qu'on 
en  fasse  prendre  à  tous  ?  et  alors  que  devient  la  plus 
belle,  la  plus  importante  de  vos  augustes  fonctions? 

Le  cœur  humain  est  impatient  du  joug  le  plus  lé- 
gitime et  le  plus  respectable.  Les  pouvoirs  tendent 
toujours  à  s'étendre.  Voyez  les  rois:  qu'étaient- ils 
dans  le  principe?  de  vrais  ministres,  tenus  de  tout 
rapporter  aux  assemblées  du  peuple.  On  les  auto- 
rise à  agir  seuls  pour  des  objets  secrets;  il  n'y  eut 
plus  de  convocation. 

Cicéron  lui-même ,  CicéroD ,  consul  de  Rome,  ne 
commit-il  pas  le  même  crime?  n'encourut-il  pas  le 
bannissement  nour  avoir  eu  seul  la  eloirede  déli- 
vrer sa  patrie  des  complices  de  Catiîina,  qu'il  au* 
fait  dû  faire  juger  par  le  peuple  convoqué?  Cicéron 
usurpa  la  dictature. 

J*ai  (ait  connaître  les  dangers  de  la  confiance  il- 

9*5lrie«-*7om«X, 


limitée  et  aveugle,du  poids  de  laquelle  on  cherche  à 
nous  écraser,  les  unsde  très-bonne  foi,  d'autres  peut- 
être  avec  perfidie. 

Apprécions  maintenant  les  prétendus  avantages 
que  1  on  balance  avec  les  dangers  réeb.  Ils  se  rédui- 
sent à  un  seul  :  le  secret. 

Le  secret  !  il  était  reçu  dans  l'ancienne  diploma- 
tie que  le  secret  le  mieux  gardé  n'en  était  plus  un  le 
auarantièmejour.  Il  n'y  avait  pourtant  alorsqu'unou 
eux  dépositaires.  Espérez-vous  mieux  de  douze  que 
de  vingt-quatre?  espérez-vous  mieux  de  douze,  ou 
de  vingt-quatre,  que  de  sept  cent  quarante- cinq? 

Mais  quels  sont  ces  si  grands  secrets  diplomati- 
ques dont  on  nous  fait  tant  de  peur,  auxquels  on  est 
prêt  à  sacrifier  les  principes  de  la  sagesse?  Citera-t- 
on le  rassemblement  d  une  armée ,  l'équipement 
d'une  flotte  ?  Une  armée  ne  se  rassemble  pas  sans 
coups  de  tambour;  une  flotte  ne  s'équipe  pas  sans 
coups  de  marteau. 

Le  son  de  l'un,  le  bruit  de  l'autre  éveille  toujours 
à  temps  l'espion  titré  de  la  puissance  intéressée  à 
surprendre  les  desseins  de  ses  rivaux  ou  de  ses  en* 
nemis. 

Mais  les  traités  de  subsides?  En  publiant  que  vous 
en  accordez,  vous  blesserez  Toreueil  de  ceux  qui  les 
obtiendront,  et  nul  n'en  voudra  a  ce  prix. 

Il  y  a  ici  de  la  mauvaise  foi  ou  de  l'ignorance. 
Subside  n'a  rien  d'humiliant  dans  la  langue  diplo- 
matique ;  ce  mot  est  noble  dans  les  cours.  L'empe- 
reur, le  roi  de  Prusse  en  ont  reçu  publiquement,  et  ' 
ils  n'en  rougissent  pas  ;  ils  s'eut  tout  au  contraire 
honneur.  Les  Anglais  ont  payé  leur  protection. 

Au  reste,  s'il  se  présentait  des  demandeurs  plus 
difficiles,  n'imaginez  pas  qu'ils  comptassent  sur  un 
secret  comme  vous  l'entendez;  ils  pourraient  tout 
au  plus  désirer  que  la  publicité,  qui  ne  peut  jamais 
manquer  d'avoir  lieu  le  quarantième  jour  échu,  ne  fût 
pas  officielle  ;  et  vous  avez  le  moyen  de  les  satisfaire 
a  cet  égard  en  passant  le  traité  en  grand  comité. 

Le  parlement  d'Angleterre  les  passe  portes  ou- 
vertes; vous  aurez  tout  fait  pour  l'extrême  délica- 
tesse, vous  aurez  fait  beaucoup  plus  qu'on  n'exigera» 
en  les  passant  portes  fermée,  les  échos  qui  vous 
entourent  écartes. 

Je  conclus  à  ce  que  la  Convention  nationale,  con- 
vaincue qu'il  n'existe  aucun  inconvénient  à  son  pro- 
pre examen,  à  sa  propre  ratification  de  tous  les  trai- 
tés qu'on  nomme  secrets ,  ne  délègue  à  qui  que  ce 
soit  le  droit  de  les  consommer  sans  sa  puissance,  et 
qu'elle  décrète  tout  au  plus  que,  pour  les  passer,  elle 
se  formera  en  comité  général. 

Citoyens ,  si  la  nouvelle  opinion  que  je  viens  de 
jeter  ici  ne  prévaut  pas,  je  reviendrai,  et  je  me  ran- 
gerai à  celle  d'une  commission. 

La  commission  offre  au  jmoins  une  garantie  à  la 
Convention  nationale,  et  elle  sera  une  digue  suffi- 
sante pour  contenir  le  fleuve  usurpateur  du  pouvoir. 

DuHBM  :  Il  me  semble  que  la  discussion  jetterait 
beaucoup  plusde  lumières  si  les  orateurs  remontaient 
aux  véritables  principes.  Excepté  Chazal,  personne 
n'a  discuté  s'il  devait  y  avoir  des  articles  secrets 
dans  la  diplomatie.  Pour  moi,  je  les  crois  absolu- 
ment inutiles,  puisque  presque  toujours  les  secrets 
sont  mal  gardés.  Un  de  mes  collègues  m'a  assuré 
qu'un  de  ses  amis  qui  était  revenu  de  Florence  lui 
avait  dit  qu'avant  même  l'arrivée  du  courrier  à  Paris 
l'ambassadeur  de  Russie  savait  toutes  les  conditions 
du  projet  de  traité  entre  la  France  et  la  Toscane,  et 

86 


6B) 


l 


qu'il  était  mSme  inslruit  du  jouir  et  de  rinslant  où  il 
serait  présenté  a  la  Convenliorik  Vous  voyez  donc 
qu'il  n'y  a  pas  de  secret  en  diplomatie.  Je  demande 
que  Ton  discute  d'abord  si,  dans  nos  traites,  il  y 
aura,  oui  ou  non,  des  articles  secrets. 
ViLLETARD  :  Ricfi  nc  me  paraît  plus  évident  que, 
ar  son  projet  de  décret,  le  comité  de  salut  pu- 
ilic  veut  se  décharger  de  sa  responsabilité.  Je  pense, 
comme  le  préopinant,  qu'il  n'est  point  digne  de  la 
grandeur  du  peuple  français  de  traiter  dans  le  se- 
cret. Sa  grande  diplomatie  est  fondée  sur  la  justice  ; 
une  fois  qu'où  nous  présentera  des  conditions  justes, 
et  que  nous  les  aurons  acceptées,  le  secret  nc  sera 
plus  important  pour  les  puissances  étrangères,  à 
qui,  comme  dans  l'ancienne  diplomatie,  on  ne  cher- 
chero  pas  à  tendre  des  pièges. 

Le  peuple  (Vançais  doit  traiter  comme  le  sénat  ro- 
main. Il  n'y  a  pas  de  iMret  à  garder,  d'autant  plus 
3tte  l'expérience  nous  a  prouvé  que^  même  le  vou- 
rions-notts,  U  secret  ne  serait  pas  maintenu.  En 
nommant  une  commission^  la  Convention  se  prive- 
rait des  droits  qui  appartiennent  au  peuple,  et  que 
le  peuple  lui  a  délégués,  ceux  d'élaborer  tout  ce  qui 

Eeut  être  utile  à  son  bonheur.  Croiriee-vous  avoir 
ien  rempli  ses  intentions  en  laissant  (et  avantage  à 
douze  ou  vingt-quatre  memj)rt*s  seulement?  Je  ne 
crois  pas  qu'un  décret  soit  valable  quand  il  n'est  pas 
sanctionné  par  la  puissance  à  qui  ce  droit  appartient 
exclusivement,  et  je  demande  que  la  Convention  ne 
s'en  dessaisisse  jamais. 

BouRSAULT  :  Sans  doute  que  cette  puissance 
énorme  donnée  à  douze  membres  de  cette  assem- 
blée présente  quelque  lehose  d'effrayant  pour  la  li- 
berté, tandis  que  tous  les  pouvoirs  résident  dans  la 
Convention  seule;  mais,  citoyens,  il  est  une  vérité  : 
c'est  ^u'il  y  a  des  circonstances  où  le  secret  est  né- 
cessaire, et  je  le  prouve  par  un  exemple  ;  la  Conven- 
tion en  fera  l'application.  Je  suppose  que  l'AutHche 
veuille  traiter  avec  la  république  ,  mais  é  condition 
que  le  traité  demeurera  secret  pendant  deux  ou  trois 
mois,  parce  qu'elle  a  elle-même  h  traiter  avec  une 
«utre  puissance.  Si  vous  trouvez  ce  traité  utile,  irez- 
vous  divulguer  ce  secret,  ou  refuserez- vous  de  trai- 
ter avec  elle  à  cette  conditioB?  Je  M  le  crois  pas. 
(On  applaudit) 

Cette  proposition  e^t  réi^lle  eil  diplomatie;  reste 
maintenant  à  la  Convention  de  discuter  la  manière 
dont  le  secret  sera  maintenu,  pour  ne  pas  alarmer  la 
liberté.  J'ajoute  cependant  encore  une  chose  :  c'est 
que  la  publicité  que  l'on  veut  consacrer  en  principe 
peut  être  nuisible  aux  vrais  intérêts  du  peuple,  et 
que  les  puissances  ne  désirent  rien  tant  que  le  se- 
cret ne  soit  point  gardé. 

Boux  (de  la  Haute-Marne)  :  Il  ne  s'agit  pas  de 
discuter  s'il  doit  y  avoir  des  Secrets  en  diplomatie, 
mais  comment  ces  secrets  seront  maintenus;  si  ces 
secrets  étaient  inutiles  ^  pourquoi  les  agents  des 
puissances  seraient-ils  si  surveillants?  Non,  il  ne 
faut  point  montiiËr  les  armes  dont  nous  pouvons 
frapper  nos  ennemis. 

Le  jour  où  l'on  sé  servit  pour  la  première  fois  de 
la  baïonnette,  la  victoire  fut  à  nous,  parte  que  l'en- 
nemi surpris  ne  s'attendait  pas  à  voir  des  baïonnettes 
au  haut  des  fusils  des  braveS  Français.  (On  applau* 
dit.) 

Je  reviens  au  véritable  but  delà  question  ;  je  pense 
comme  Boursault qu'il  faut  garder  le  secret,  à  cause 
des  puissances  étrangères.  On  confond  deux  espèces 
de  traités  bien  distincts  dans  le  projet  de  décret  pré* 
sente  par  le  comité  de  salut  public. 

Un  article  du  projet  de  décret  dit  que  les  traités 
ne  sont  valables  que  par  la  ratification  de  la  Con- 
vention nationale;  mais  dans  l'article  que  nous  dis- 


cutons ici,  il  s'agit  moins  de  traités  que 'de  prélimi- 
naires qui  doivent  amener  le  traité  et  assurer  son 
existence,  ttien  ne  sera  caché  lorsque  le  décret  sera 
définitif. 

L'Autriche  n'a  pas  le  même  avantage  que  vous 
pour  traiter  ;  vous  êtes  seuls  de  votre  parti,  et  vous 
pouvez  traiter  sans  en  communiquer  a  qui  que  ce 
soit.  Mais  l'Autriche  est  dans  la  coalition»  et  ne  peut 
traiter  sans  auparavant  en  parler  avec  les  puis- 
sances, ou  il  faut  qu'elle  soit  sur  ses  gardes* 

Or,  citoyens,  comme  nous  tie  pouvons  arriver  à 
une  paix  générale  que  par  des  paix  partielles,  il 
faut,  autant  que  possible,  retirer  de  la  coalition  les 
puissances  qui  voudront  traiter  avec  nous,  pour  que 
le  reste,  ne  pouvant  plus,  par  ses  pertes,  continuer  la 

5uerre,  accepte  les  conditions  que  nous  proposerons, 
e  suppose  qu'une  puissance  ne  puisse  8*eropêcher 
de  continuer  la  guerre  contre  nous  parce  «qu'elle  est 
trop  faible  pour  résister  aux  autres ,  et  qu'a  1»  veille 
d'une  bataille  où  elle  aurait  dû  forurnir  quinze  mille 
hommes,  de  concert  avec  nous  par  un  traité  secret^ 
elle  retire  son  contingent,  et  mette  le  reste  dans 
l'impossibilité  de  la  livrer;  eh  bien,  citoyens,  serez*  - 
vous  satisfoits  alors  que  le  traité  ait  été  secret?  (Oa 
applaudit.)  ' 

Il  serait  dangereux  d'insister  sur  cet  article;  il 
suffit  de  dire  qu  il  est  impossible  de  parvenir  jamais 
à  une  paix  sans  cette  mesure. 
Quant  à  la  manière  de  maintenir  le  secret,  c'est  ce 

3n'il  faut  discuter.  Pour  moi,  je  pense  qu*il  convien- 
rait  de  donner  à  un  comité  une  inspection  partictt- 
lière,  quand  il  s'agira  de  conditions  secrètes.  Ce 
comité,  ayant  la  connance  de  la  Convention,  exami- 
nerait les  conditions  présentées,  et,  sur  le  rapport 
des  deux  comités  réunis  la  Convention  fixerait  son 
opinion. 

Dbsrubs  :  Il  faut  comparer  la  Convention  à  on 
général  d'armée  qui,  à  la  veille  d'une  bataille,  prend 
toutes  les  dimensions  et  toutes  les  dispositions  né- 
cessaires. Il  dira  :  H  faut  affaiblir  telle  partie  de  Tar- 
mée  ennemie,  pour  la  frapper  ensuite  par  tel  en* 
droit.  Voici  votre  situation  à  l'égard  de  la  coalition  ; 
il  faut  l'affaiblir  par  des  paix  partielles^  tnala  il  est 
clair  que  le  secret  est  nécessaire. 

La  commission  proposée  par  le  projet  de  décret 
donnera,  a-t-on  dit,  l'éveil  à  nos  ennemis.  Pour  ob- 
vier à  cet  inconvénient,  je  propose  de  créer  dans  ce 
moment  cette  commission,  pour  la  renouveler  en* 
suite  tous  les  mois  ;  par  ce  moyen  voUs  ne  donnerez 
pas  l'éveil. 

DuROY  :  Y  aura-t-il,  oui  on  non,  des  articles  se- 
crets dans  les  traités  faits  avec  la  république?  c'est  ce 
qu'il  s'agit  de  discuter.  Pour  moi,  je  ne  crois  pas  que 
la  Convention  doive  admettre  de  pareils  articles. 
(On  murmure.)  C'est  mon  opinion.  C'est  la  Conven- 
tion qui  ratifie  les  traités.  Si  elle  ratifie  des  articles 
secrets,  elle  ratifiera  donc  ce  qu'elle  ne  connaît  pas. 
Pour  moi,  je  ne  voudrais  pas  partir  d'ici  après  avoir 
voté  sur  ce  que  j'ignorerais  :  je  veux  savoir  com- 
ment on  a  réglé  les  droits  du  peuple  français  avec 
les  puissances  étrangères. 

A  la  bonne  heure  que  le  comité  prépare  dans  le 
secret  des  articles  préparatoires.  Moi,  je  parle  ici  des 
traités  consommés  ;  pour  ceux-là,  la  Convention  ne 
doit  pas  les  ratifier  saus  les  connattn;  }e  veux  savoir 
ce  que  je  faia. 

ALBiTTt  :  Le  comité  de  salut  public  a  lô  droit  de 
faire  des  conditions  préliminaires;  mail  il  fkut  bien 
distinguer  des  dispositions  préliminaires  d'avec  des 
traités  définitifs. 

On  demande  qu'il  soit  adjoint  au  comité  de  salut 
pablic  une  commission  pour  examiner  les  traita  te- 
crets.  Qui  doit  ratifier  les  traités?  la  Convention.  Si 


683 


le  comité  de  salut  public  a  le  droit  de  Caire  un  traité 
secret,  le  comité  de  salut  public  fait  un  traité  dé- 
tinitif. 

Sil  y  a  dans  les  traités  des  articles  secrets,  la  paix 
sera  dans  ces  articles  secrets  ;  les  avantages  y  seront, 
et  les  autres  paraîtroni  désavantageux,  parce  qu'on 
ne  connaîtra  pas  ceux-là.  Comment  donc  pourrez- 
vous  asseoir  votre  jugement? 

Ëst-il  nécessaire  qu'il  y  ait  dans  (es  traités  des  ar- 
ticles secrets?  dans  les  dispositions  préparatoires, 
oui;  dans  les  traités  définitils,  non.  J'ai  déjà  prouvé 
que,  s*il  y  avait  des  traités  secrets ,  ce  serait  le  cg- 
mité  de  salut  public  qui  ferait  la  paix ,  et  la  consti- 
tution veut  que  ce  soit  la  Convention  qui  seule  ait  oe 
droit.  Si  le  comité  le  partage  a.vec  elle,  voua  ne  sui- 
vrez dùnc  pas  la  constitution. 

Âujoura  bui  vos  comités  sont  dignes  de  votre  cou- 
Gance,  demain  ils  le  seront  encore;  mais  qui  peut 
vous  le  garantir  pour  la  suite?  Vous  vous  plaignez 
lie  vos  anciens  comités  de  gouvernement;  si  alors 
ils  eussent  fait  de  ces  traités  secrets ,  y  auriez- vous 
aujourd'hui  bien  de  la  confiance?  La  paix  par  le  co- 
mité de  salut  public  ne  peut  être  une  paix  véritable 
et  définitive. 

Merlin  (de  Thionville)  :  Albitte  vient  de  traiter  la 
question  de  savoir  s'il  y  aura  des  articles  secrets  dans 
les  traités  que  vous  passerez  avec  les  puissances 
étrangères.  Albitte  a  traité  un  question  préliminaire, 
et  n'est  point  entré  dans  te  véritable  objet  de  la  dis- 
cussion. 

Plusieurs  membres  de  Vexlrémilé  gauehê:  Albitte 
a  discuté  la  véritable  question. 

Merlin  (de  Thionville)  :  Eh  bien,  il  s'agit  en  ce 
moment  d'examiner  s'il  y  aura  des  articles  secrets 
dans  les  traités  ;  la  Convention  nationale,  qui  veut  le 
bonheur  du  peuple,  a  senti  que  ce  bonheur  ne  petit 
exister  que  aans  une  paix  prochaine  et  glorieuse. 

Citoyens,  c'est  après,  la  paix  nue  le  peuple  jouira 
du  bonheur  dont  on  le  berce  depuis  si  longtemps 
par  des  paroles.  (Vifs  applaudissements.)  C'est  la 
paix  qui  améliorera  les  finances  ;  c'est  la  paix  qui  af- 
fermira la  république  ;  c'est  la  paix  qui  antènera  les 
subsistances  et  fera  baisser  le  prix  des  denrées  ;  c'est 
la  paix  qui  donnera  à  la  répuolique  une  représen* 
tation  tellement  formidable  qu'elle  écrasera  ieroya* 
lisme  audacieux  et  les  scélérats  qui  de  nouveau  vou* 
draient  égorger  le  peupla.  (Vifs  applaudissements.) 

Comment  voulez-vous  arriver  a  cette  paix  si  dé- 
sirée? Comment  pouvez- vous  prétendre  a  rompre 
cette  coalition  des  rois  si  vous  vous  ûtez  la  faculté 
de  traiter  secrètement  avec  quelques-uns  d'eux?  Il 
n'y  a  que  les  ennemis  de  la  paix  et  de  la  constitu- 
tion ,  que  je  voudrais  voir  marcher  demain,  parce 
qu'elle  seule  empêchera  qu'une  tyrannie  succède  à 
une  autre ,  et  que  le  patriotisme  devienne  la  proie 
de  scélérats  qm  n'ont  rien  fait  pour  la  patrie,  il  n'y 
a  que  leurs  ennemis, dis-je<  qui  ne  sentent- pas  la  vé- 
rité de  ce  que  j'avance.  (On  applaudit.)  Je  le  répète, 
il  n'y  a  aue  les  ennemis  de  la  paix  qui  ne  veulent  pas 
qu'il  y  ait  des  articles  secrets  dans  les  traités,  et  je 
crois  ravoir  démontré  en  prouvant  qu'il  était  im- 
possible de  rompre  la  coalition  sans  faire  des  pactes 
secrets  avec  quelques-uns  d'entre  eux. 
.  Je  viens  maintenant  à  la  question  de  sa  voir  s'il  est 
utile  de  nommer  une  commission  de  douze  membr«>s 
cour  sanctionner  les  opérations  du  comité  de  salut 
public,  et  je  pense  que  la  confiance  dont  les  membres 
de  votre  comité  sont  investis  et  l'amovibilité  de  cha- 
cun dans  l'exercice  de  ses  fonctions  doivent  vous 
porter  à  décréter  que  le  comité  de  salut  public  seri^ 
seul  chargé  de  traitersecrèiementetpatemmcnt  avec 
les  gouvernements. 

Bourdon  (de  l'Oise)  :  Il  me  semble  qu'on  ne  peut 


pas  mettre  en  doute  s'il  sera  quelquefois  néoessam 

de  faire  des  articles  secrets;  je  crois  aussi  qu'il  est 
inutile  d'autoriser  par  un  article  exprès  le  comité  à 
faire  des  articles  secrets  ;  car  cela  rentre  nécessaira- 
ment  dans  les  conventions  préliminaires  et  prépara- 
toires, telles  que  l'armistice  et  la  neutralisation, qae 
le  comité  est  autorisé  à  faire  par  l'article  11.  Je  de- 
mande, en  conséquence ,  la  question  préalable. 

Cambacérès  :  Je  m'applaudis  d'avoir  appuyé  hier 
l'ajournement,  puisqu'il  a  fait  éclore  des  idées  nou- 
velles et  profitanles  à  l'instruction.  Je  vais  résumer 
la  discussion  d'aujourd'hui.  ChazaI  a  proposé  que  la 
Convention  se  formât  en  comitégénéral  pour  déli- 
bérer sur  les  articles  secrets;  il  n  y  a  dans  cet  avis 
rien  qui  contrarie  les  principes  du  projet  dp  comité, 
puisque  nous  ne  vous  proposons  que  de  limiter  ses 
pouvoirs  et  de  multiplier  pour  la  Convention  natio- 
nale la  garantie  qu'il  n'eu  abusera  pas.  Mais  si  une 
fois  vous  consentes  à  ce  que  la  Convention  se  forme 
en  grand  comité,  on  pourra  successivement  user  de 
cette  formalité  pour  d'autres  délibérations.  Ainsi  je 
croisqu'avantd'adopterlapropositiondeChazal  il  fau- 
drait ouvrir  la  discussion  sur  la  question  de  savoir  si 
l'intérêt  du  peuple  et  si  l'intérétde  la  Convention,  qui 
est  inséparable,  permettent  que  nous  nous  formions 
en  grand  comité.  (Pluêieun  voix  :  Non,  non  1)  La 
discussion  a  ensuite  changé  de  faoe  :  on  a  mis  en 
question  s'il  était  nécessaire  de  faire  des  articles  se- 
crets; il  faut  donc  discuter  ce  point;  si  on  ne  doit 
pas  faire  des  conditions  secrètes,  il  est  inutile  d'exa- 
miner par  qui  sera  gardé  le  secret  ;  mais  je  crois 
q^u'il  est  essentiel  de  traiter  à  fond  cette  motion  in- 
cidente, et  déporter  dans  l'âme  de  tous  les  membres 
de  la  représentation  nationale  le  plus  haut  degré  de 
conviction  qu'il  est  possible  d'acquérir  sur  cette  ma- 
tière. Quoique  je  ne  sois  point  préparé  pour  la  trai- 
ter, les  réflexions  que  mes  collègues  ont  déjà  faites 
m'aideront. 

Je  crois  qu'on  n'a  pas  assez  distingué  le  temps  ac- 
tuel du  temps  à  venir,  et  le  gouvernement  que  nous 
avons  maintenant,  et  qui  doit  avoir  une  grande  ae- 
tivité,  une  grande  rapidité,  à  raison  des  circonstances 
où  nous  nous  trouvons ,  du  gouvernement  consti- 
tutionnel qui  sera  basé  sur  les  principes,  et  qui  nous 
régira  lors  de  la  paix.  Peut-être  alors  n'aurons-nous 
d'autre  diplomatie  que  celle  de  Popilius,  et  c'est  là 
la  diplomatie  que  je  crois  digne  d'un  peuple  libre; 
mais  nous  n'en  sommes  pas  encore  à  ce  temps.  La 
république  naissante  est  entourée  d'ennemis  qn^elle 
a  forcés  à  l'admirer  ou  à  lui  demander  la  paix. 

On  a  comparé  notre  gouvernement  au  gouverne- 
nAent  de  Rome  ;  je  ne  sais  comment  on  a  pu  penser 
à  établir  un  parallèle  entre  deux  gouvernement^ 
qui  ont  si  peu  de  ressemblance.  Avons*nous,  comme 
à  Rome,  un  sénat?  délibérons- nous  sur  la  place  pu- 
blique? la  république  est-elle  affermie  par  trois  siè- 
cles de  victoires?  Je  ne  conçois  pas,  quand  il  exista 
une  si  grande  disparité  entre  les  éléments,  com- 
ment on  peut  vouloir  en  tirer  les  mêmes  résultats* 
Je  crois  qu'on  a  apporté  dans  la  discussion  plus  de 
zèle  gue  de  méditation  ;  car,  avant  d'examiner  si  on 
doit  ou  non  faire  des  articles  secrets,  il  faudrait  dis- 
cuter s'il  ne  serait  pas  nécessaire  de  dresser  préala- 
blement une  déclaration  du  droit  des  ^èns,  d'élé^ 
menter  le  système  général  de  la  pacification,  et 
d'établir  les  données  d'après  lesquelles  la  république 
traiterait.  Mais  je  crois  que  dans  le  cours  de  cette 
discussion  nous  serions  arrêtés  par  une  foule  d'àbs* 
tractions  théoriques  auxquelles  les  intérêts  et  les 
circonstances  forcent  de  substituer  la  pratique^ 
Lorsqu'il  s'agit  de  traiter  avec  les  puissafioes  étran- 
gères, je  crois  qu'il  est  sans  inconvénient,  qu'il  est 
même  indispensable  que  le  comité  soit  autorisé  à 


684 


fkm  des  articles  secrets  ;  je  soutiendrai  cette  opinion 
arce  que  je  la  crois  essentielle  au  salut  de  la  pa- 
trie. Si  Ton  me  prouve  que  je  me  suis  égaré,  je  me 
rendrai;  mais  prenez  sarde,  citoyens,  que, si  vous 
engagez  une  longue  discussion  sur  cette  matière, 
vous  serez  obliges  de  la  traiter  sous  tous  les  points 
de  vue,  et  vous  retarderez  par  là  les  négociations 
que  le  comité  de  salut  public  a  entreprises. 

Qu'oç  ne  croie  pas  que  ces  négociations  puissent 
compromettre  Thonneur  de  la  république  ;  jamais 
le  comité  de  salut  public  n*en  entamera  de  pareilles; 
et  s*il  pouvait  assez  oublier  ses  devoirs  et  ses  prin- 
cipes pour  le  faire ,  la  Convention  serait  là  pour  le 
desavouer  et  le  réprimer. 

Lorsque  nous  reçûmes  au  comité  dé  salut  public 
les  premiers  envoyés  des  états  généraux  de  Uol- 
lande ,  la  même  main  qui  les  faisait  admettre  dans 
le  comité  signait  Tordre  aux  troupes  de  la  république 
d^  marcher  à  Amsterdam.  Croyez  donc  que  le  comité 
de  salut  public  ne  manquera  jamais  de  remplir  tous 
ses  devoirs  et  de  concourir  au  salut  et  a  la  prospérité 
de  la  république  ;  mais  pour  cela  ne  lui  ôtez  pas  les 
iqpyens  de  le  faire. 

J  ai  entendu  dire  que  la  mesure  que  nous  propo- 
sons ne  tendait  qu*a  diminuer  ta  responsabilité  du 
coDiité  de  salut  public.  Ceux  qui  ont  fait  cette  ob- 
jection n*ont  pas  réfléchi.  Le  comité  projette  une 
opération,  il  la  soumet  à  la  Convention  ;  il  Tappuie 
de  tous  les  avantages  quelle  présente.  Il  est  donc, 
soit  vis-à-vis  de  Ta  Convention,  soit  vis-à-vis  du  peu- 
ple«  le  garant  de  la  bonté  de  cette  opération;  et  soit 
que  vous  lui  adjoigniez  une  commission  pour  exa- 
miner les  articles  secrets,  soit  que  vous  ne  lui  en  ad- 
joigniez pas,  il  aura  toujours  une  responsabilité  con- 
sidérable. 

Prenez  garde, d'un  autre  côté,  que, si  tous  accor- 
dez au  comité  le  droit  de  faire  seul  des  articles  se- 
crets, les  puissances  étrangères,  qui  en  seront  in- 
struites, pourront  ne  vouloir  traiter  que  de  cette 
manière.  Elles  diront  :  Nous  ne  demandons  pas 
mieux  que  de  faire  la  paix,  mais  nous  demandons  de 
traiter  secrètement.  Celte  forme  ne  diminue  pas  les 
avantages  que  peuvent  prendre  Tune  ou  l'autre  des 
parties.  Qu  arrivera-t-il ,  citoyens?  c*est  que  le  co- 
mité de  salut  public,  convaincu  de  la  bonté  de  ce 
traité,  enchaîné  par  son  amour  pour  la  république, 
ne  pourra  pas  se  refuser  d'accepter  les  conditions 

âuVn  lui  proposera,  quoiqu'on  exige  le  secret;  et 
e  cette  manière  il  sera  forcé  malgré  lui  de  faire 
seul  la  paix ,  et  de  ne  pas  soumettre  a  votre  ratifica- 
tion les  conditions  qu'il  aura  arrêtées. 

Une  des  objections  qu'on  fait  encore  contre  la 
commission  est  la  crainte  de  divulguer  le  secret  en 
le  communiquant  à  d'autres  personnes.  Mais  on  n'a 
donc  pas  réfléchi  qu'en  ce  cas  notre  devoir,  l'intérêt 
du  peuple  et  notre  sûreté  personnelle,  tout  nous  en- 

gagerait  à  être  discrets;  et  je  vous  avoue  que ,  si  la 
invention  s'assemblait  en  grand  comité ,  je  ne 
pourrais  pas  croire  qu'un  seul  de  ceux  qui  y  auraient 
assisté  fût  capable  de  publier  ce  qu'il  y  aurait  en- 
tendu. 

Je  me  résume  en  vous  faisant  observer  encore  une 
fois  que  ,  si  le  comité  peut  faire  seul  des  traités  se- 
crets, il  peut,  par  cela  même,  rendre  sans  objet  la 
formalitéde  la  ratification. 

Hbbmann  :  Je  pense  qu'il  n'est  point  possible  d'ad- 
mettre des  articles  secrets  dans  les  traités ,  et  de  ve- 
nir après  les  présenter  à  la  ratification  de  la  Conven- 
tion nationale  :  la  Convention  ratifierait  ce  qu'elle 
ne  connaîtrait  pas.  Le  comité  de  salut  public,  ayant 
le  droit  dcrfaire  des  articles  secrets,  acquerrait  par 
la  un  pouvoir  énorme;  il  ferait  peut-être  marcher 
un  jour  contre  vous-mêmes...  (On  murmure.)  Oui, 


cela  est  dans  Tordre  des  choses  possibles.  Le  moyen 
d'éviter  de  pareils  inconvénients  est  de  décréter  en 
principe  que  les  traités  seront  communiqués  en  en- 
tier à  la  Convention  nationale. 

RuHL  :  Avant  tout  il  faut  fixer  les  bornes  du  terri- 
toire français.  (Murmures.) 

Plusieurs  voix  :  On  ne  veut  pas  la  paix. 

RuBL  :  Alors  les  articles  secrets  ne  pourront  rou- 
ler que  sur  les  indemnités.  Je  demande  donc  que  Ton 
fixe  d'abord  nos  limites ,  qui  sont  naturellement  les 
Pyrénées,  la  Méditerranée,  le  Rhin,  l'Océan,  et  que 
Ton  décrète  que  nous  ne  ferons  aucune  paix  avec 
les  puissances  avant  qu'elles  n'aient  reconnu  ces  li- 
mites. 

On  demande  que  la  discussion  soit  fermée. 

MÊAULLE  :  Je  n'ai  qu'une  observation  à  faire.  Les 
articles  secrets  ne  seront  pas  obligatoires  lorsque 
la  Convention  ne  les  aura  pas  ratifiés  ;  les  articles 
non  obligatoires  pourront  être  violés.  (Murmures.) 
Si  vous  voulez  qu'ils  soient  obligatoires,  il  vous  est 
impossible  de  ne  pas  les  ratifier.  Mais  si  la  Conven- 
tion les  ratifie,  elle  ratifiera  ce  qu'elle  ne  connaît  pas. 
Je  ne  crois  donc  pas  que  la  Convention  puisse  adop- 
ter de  pareils  articles. 

Lbgbndrb  :  Je  demande  la  parole  pour  inviter  la 
Convention  à  ne  pas  fermer  la  discussion.  Cet  objet 
est  de  la  plus  haute  importance;  il  faut  le  couler  à 
fond.  Cependant,  si  on  le  désire,  je  ne  m'oppose  pas 
à  Taiournement,  pour  que  les  membres  de  cette  as- 
semblée puissent  travailler  dans  leurs  cabinets,  et 
aient  le  temps  de  peser  s'il  est  utile  ou  non  d'adop- 
ter des  articles  secrets. 

D'un  côté  Ton  dit  :  Si  une  puissance  de  la  coali- 
tion veut  traiter  avec  vous  à  condition  que  le  traité 
sera  secret,  pour  que  le  reste  de  la  coalition  n'enva- 
hisse pas  son  territoire  et  ne  lui  déclare  pas  la  guerre, 
le  refuserez-vous? 

D'un  autre  côté  on  dit  qu'il  est  dangereux  pour  la 
Convention  et  le  peuple  ae  déléguer  de  trop  grands 
pouvoirs  ;  je  ne  saisi  niéme  si  la  Convention  a  ce 
droit.  (On  murmure.)  Je  demande  l'ajournement  à 
trois  jours;  les  députés  auront  eu  le  temps  de  réflé- 
chir, de  mettre  sur  le  papier  leurs  réflexions,  et  la 
discussion  pourra^être  lumineuse.  Je  demande  sur- 
tout que  chaque  membre  ait  la  liberté  d'émettre  son 
opinion. 

Cet  ajournement  est  décrété. 

Mathiv,  aa  nom  du  comité  de  sûreté  générale  :  Ci* 
loyens  représeDtants ,  malgré  les  efforts  constants  de  l« 
Convention  nationale  pour  diriger  la  révolution  vers  son 
terme,  pour  ramener  Tabondance,  tant  par  les  lois  qui 
seules  peuvent  la  faire  naUre  que  par  une  paix  qui  puisse 
la  garantir,  en  assurant  à  la  reproductive  industrie  et  au 
travail  régénérateur  ses  plus  libres  développements ,  la  ca- 
lomnie s'attache  aux  pas  du  gouvernement ,  s'efforce  de 
verser  le  discrédit  sur  chacune  de  vos  opérations,  d'élever 
des  nuages. sur  votre  républicanisme,  el  de  vous  faire  ua 
crime  d'une  des  plus  mémorables  jouroéei  de  la  révolution, 
celle  du  10  thermidor. 

On  sait  que  les  bons  citoyens  professent  le  plus  entier 
dévouement  pour  la  Convention  nationale,  que  les  atta* 
qaes  que  Ton  dirigerait  contre  elle  seraient  impuissantes  i 
on  se  borne  à  faire,  dans  l*opinion,  le  siège  des  comités  de 
gouvernement  ;  ils  sont  devenus  le  but  de  tous  les  traits 
de  la  calomnie  et  des  plus  criminels  projets.  La  malveil* 
lance  va  jusqu*à  s'armer  des  besoins  du  peuple  pour  Tir- 
riter  et  Tégarer,  pour  le  porter  à  un  mouvement  qui  dé« 
cirait  ses  dernières  ressources  et  lui  ravirait  son  dernier 
espoir.  On  proclame  la  révolte  dans  des  affiches  sédilieu- 
ses ,  et  des  hommes  aposiés  près  de  ces  affiches  demandent 
le  pillage. 

Ainsi  se  place  le  commentaire  à  côté  du  texte;  ainsi  la 
crime  se  signale,  et,  par  sa  marche  même,  avertit  la  Con- 
vention el  le  peuple,  qui  en  est  inséparable,  de  celle  qa*ils 
doivent  tenir. 


685 


Orgafte  de  foIre  comité  de  sûreté  générale,  je  dois  tous 
Taire  coonailre  ces  afficlies,  dont  on  reclierclie  les  auteurs. 
Placer  sous  ?os  regards  cet  œuvre  de  ténèbres,  placardé 
la  nuit  dans  les  rues  de  cette  cité ,  c*est  déjà  en  punir  les 
coupables  rédacteurs  ;'c*est  donner  le  signal  de  la  surveil- 
lance active  à  toutes  les  autorités  constituées,  à  tous  les 
amis  de  la  république.  Le  prisme  de  l'analyse  ne  vous  fera 
point  apercevoir  dans  ces  écrits  les  couleurs  chéries  dont 
le  patriotisme  s^bonore,  mais  bien  les  couleurs  de  l'étran- 
ger ,  ou  des  bommes  qui  n*onl  point  de  patrie. 

Irriter  la  portion  indigente  des  citoyens  contre  les  d« 
toyens  plus  aisés ,  les  ouvriers  contre  les  bommes  qui,  par 
leurs  moyens,  vivifient  Tindustrie  ;  verser  sur  le  gouver* 
nement  actueUous  les  torts  de  Tanden,  sur  la  Convention 
les  résultats  de  Timprévoyance  municipale,  sur  vous-mê- 
mes les  crimes  de  ces  hommes  que  vous  avei  justement 
frappés;  feindre qu^il  existe  un  parti,  même  parmi  vous, 
qui  ne  veut  pas  la  constitution  ;  fermer  les  oreilles  et  les 
yeux  sur  les  preuves  multipliées  que  vous  avei  données 
de  votre  attachement  inaltérable  à  la  république  et  de  vo« 
tre  haine  pour  la  royauté  ;  faire  Tapologie  de  Tancienne 
commune  et  des  anciens  comités;  évoquer  et  invoquer  les 
Jacobins;  avilir  les  assignats,  cette  représentation  des  cho- 
ses ,  en  calomniant  toutes  les  lois  et  la  représentation  na- 
tionale, en  calomniant  directement  le  peuple  qui  vient  id 
à  cette  barre  vous  porter  l'expression  solennelle  et  tou- 
chante de  son  dévouement  et  de  son  courage  ;  provoquer, 
pour  la  faire  échouer ,  le  brusque  établissement  de  la  con- 
stitution,  comme  vous  le  commandait,  les  huit  premiers 
jours  de  votre  session,  sous  peine,  disait-il,  d*étre  lapi- 
dés, un  homme  audacieux  que  Topinion  publique  met  à 
sa  place;  tel  est  le  poison,  non  pas  distillé,  mais  versé  à 
pleines  mains,  dans  deux  pamphlets  imprimés  en  grand 
nombre,  et  qui,  au  grand  étonnement  des  républicains, 
souillaient  ce  matin  les  murs  de  Paris. 

L*on  de  ces  écriu  est  intitulé  :  Peuple^  réveilU-loi!  H 
têt  iemp$,  — >  De  Vim^merie^  est-il  dit,  des  hommes  du 
H  juillet,  du  40  août  et  du  3i  mai. 

Tous  les  bommes  qu'on  appelle  riekes  se  trouvent,  dans 
cet  écrit,  rangés  dans  la  classe  des  contre-révolutionnaires; 
Ton  assure  que  leur  coalition  avec  le  gouvernement  est  la 
cause  de  la  famine.  •  On  Ta  opérée,  dit-on ,  en  séduisant, 
en  achetant  les  membres  du  gouvernement,  afin  d*aotori- 
ser  les  riches,  par  des  lois  de  drconstances,  k  faire,  en  rai* 
son  de  cet  accaparement,  la  loi  aux  sans-culottes.  C'est  lors- 
que le  gouvernement  (qui  fait  ou  le  bien  ou  le  mal)  envahit 
tout,  sous  prétexte  d'approvisionnements  publics,  ou  en  \ei 
détournant  d*uoe  autre  manière  par  Texportation ,  et  lors- 
qu'il s'en  rend  lui-même  le  marchand.  • 

On  peut  s'étonner,  citoyens ,  que  ce  soit  dans  le  moment 
où  le  gouvernement  a  rejeté  loin  de  lui,  par  l'effet  de  vos 
sages  lois  et  en  exécution  de  vos  volontés,  les  désastreuses 
mesures  qui  étaient  précédemment  employées;  dans. le 
moment  où,  pour  écarter  tout  reproche,  féconder  et  utili- 
ser toutes  les  ressources,  il  s'est  confié  à  la  voie  du  com- 
merce pour  l'approvisionnement  des  cités,  qu'on  dirige 
contre  lui  une  imputation  si  évidemment  démentie  par  les 
faits.  Prétendraient-ils,  ces  hommes  coupables,  donner 
une  couleur  odieuse  au  mode  extraordinaire  d'approvi- 
sionnement décrété  pour  Paris?  Quel  serait  le  bon  citoyen 
qui,  calculant  les  sacrifices  du  gouvernement,  n'en  verrait 
pas  une  juste  et  utile  compensation  dans  la  tranquillité  de 
cette  grande  commune,  centre  de  tous  les  grands  intérêts 
publics  et  de  ious  les  pouvoirs  nationaux  ? 

«  Le  but  de  cette  Conduite,  c'est,  poursuit  l'auteur  de 
l'aifiche,  de  réduire  le  peuple  k  un  tel  point  de  faiblesse 
et  de  léœssité  extrême  qu'on  lui  fasse  accepter  l'esclavage 
et  toutes  ses  horreurs.  •  Et  plus  loin  :  •  Faute  de  magis- 
trats, tu  u  manqué  de  bois,  et  des  familles  sont  mortes 
de  froid,  b  Elle  existait,  cette  municipalité  rebelle  que 
l'on  regrette,  dans  la  saison  où  l'on  pouvait  s'occuper  effi- 
cacement d'approvisionner  Paris  ;  et  c'est  k  réparer  les 
torfset  les  crimes  de  ces  magistrats  conspirateui^,  que  vous 
aves  consacré  vos  soins  les  plus  assidus. 

Nous  nous  abstiendrons,  citoyens,  de  fixer  plus  long- 
tcàups  votre  attention  sur  un  écrit  aussi  penrers.  Le  peuple 
est  trop  sage,  et  les  intentions  de  la  Convention  trop  géné- 
ralement connues  pour  qu'on  puisse  tenter  avec  quelque 
succès  de  lui  persuader  qu'elle  veut  l'assenrir.  La  Conven- 


tion ne  se  dissimule  pas  qu'il  a  existé  de  grandes  difllcnl- 
tés  pour  les  approvbionnements ,  que  la  saison  rigoureuse 
a  rendu  les  moyens  de  transport  très-rares  et  très-pénibles* 

La  Convention  n'ignore  pas  qu'il  est  des  privations  in* 
séparables  des  révolutions,  et  surtout  de  l'état  de  guerre; 
qu'il  est  des  maux  inévitables,  suites  nécessaires  de  la  loi 
du  maximum,  qui  a  quelque  temps  alimenté  les  Tentes t 
mais  qui  a  tué  la  reproduction. 

La  Convention  n'ignore  pas  non  plus  que  toutes  ces  con- 
sidérations se  présentent  à  l'esprit  des  bons  citoyens  ;  lors- 
qu'ils veulent  réfléchir  sur  notre  situation  et  sur  la  marche 
ordinaire  des  rérolutions,  ils  sont  obligés  d'avouer  et  de 
'  reconnaître  qu'aujourd'hui  l'intérêt  du  peuple  français  et 
de  sa  représentation  est  un,  que  les  mêmes  calamités  en- 
velopperaient l'un  et  l'autre,  et  verseraient  tous  les  maux 
k  la  fois  sur  notre  malheureuse  patrie,  si  la  fatale  voix  de 
la  discorde  était  un  instant  écoutée. 

Ce  n'est  pas  lorsque  le  vaisseau  est  près  de  toucher  a|i 
port  que  vous  négligerez  ,dtoyens  représentants,  d'entre- 
tenir le  vertueux  courage  du  peuple  pour  lui  épargner  les 
horreurs  d'un  naufrage  qui  ne  pourrait  réjouir  que  nos 
ennemis. 

Vous  parlerai-je  du  deuxième  écrit,  ainsi  intitulé  :  jiu 
peuple  f  des  véiHtés  terrikles,  mais  indispensables  ^  Urées 
de  J.'J^  Rousseau ,  Biaëly  et  Raifnal,  et  de  tous  les  philo^ 
sophes  amis  des  principes  et  de  Cigatitim 

C'est  sous  ces  noms  imposants,  et  si  chers  aux  républi- 
cains, que  l'on  provoque  au  déchirement  de  la  république 
et  à  la  guerre  civile.  C'est  k  côté  de  quelques  maximes  ti- 
ré«i  des  ouvrages  de  ces  grands  hommes  que  l'on  ose  re- 
produire celles  qui  servaient  de  devise  au  régime  de  la 
terreur.  Non,  vous  ne  vous  associeres  point  k  des  crimes, 
hommes  immortels  qui  aves  honoré  la  France  en  l'éclairant* 

Bst-œ  dans  les  écrits  consolateurs  de  Jean-Jacques  que 
l'on  a  puisé  les  calomnies  suivantes  contre  les  citoyens  de 
Paris?  •  Ce  ne  sont  pas  les  sections  de  Paris  qui  vont  fla- 
gorner, mais  bien  leur  écume ,  puisque  ce  sont  les  élargis 
qui  délibèrent,  et  que  les  patriotes  n'y  peuvent  émettre 
leur  opinion  sans  risquer  d'être  incarcérés.  •  Suivant  le 
langage  de  ces  conspirateurs,  la  terreur  thermidorienne  a 
étouffé  les  sublimes  élans  du  patriotisme,  et  y  a  fait  succé- 
der ceux  do  fanatisme  et  de  la  royauté. 

Est-ce  dans  Mably  que  ces  hommes  ont  vu  que  l'on 
projetait  •  de  fermer  les  assemblées  de  sections,  et  de  faire 
un  2  septembre  sur  les  patriotes  pour  arriver  sans  obstacle 
k  la  royauté;  t  projet  atroce  «  qui  ne4>ourrait  avoir  d'exé- 
cution que  par  la  main  de  ceux  qui  osent'croire  k  sa  possi- 
bilité? 

Est-ce  enfin  sous  la  dictée  de  Raynal  que  les  terroristes 
désignés  par  eux-mêmes  ont  dit  :  >  Une  loi  punit  de  mort 
ceux  qui  avilissent  la  représentation  nattonale,  et  vous 
l'avilisses  chaque  jour  en  refusant  la  parole  aux  énergiques 
défenseurs  de  nos  droits,  et  en  portant,  malgré  leurs  ré- 
clamations confoftnes  aux  principes,  des  décrets  libertid- 
des.  t 

Vive  la  constitution ,  ou  l'article  XXXV  de  la  Déclara- 
tion des  Droits,  c'est-i-dire  l'insurrection  I  Voilà  en  deux 
mots  la  substance  de  cette  feuille,  où  l'on  recoonatt  le  lan- 
gage d'une  faction  expirante  et  l'accent  de  la  peur  qui 
menace. 

Si  quelque  lumière,  dtoyens,  jaillit  de  pareils  écrits, 
c'est  sur  les  intentions  de  leurs  punissables  auteurs.  Il  est  su- 
perflu de  vous  dire  que  toutes  les  mesures  sont  prises  par  le 
comité  de  sûreté  générale  pour  le  maintien  de  la  tranquillité 
publique ,  comme  elles  le  sont  par  votre  comité  de  salut 
pnblic  pour  l'approvisionnement  de  Paris.  Votre  but  est 
marqué,  législateurs,  par  votre  devoir,  par  la  volonté  de 
vos  commettants  dans  toute  la  république.  Vous  l'attein- 
dfes,  ce  but,  k  travers  toutes  les  difficultés,  tous  les  piè- 
ges de  la  perfidie,  et  toutes  les  calomnies  des  ennemis  du 
dedans  et  du  dehors.  Le  comité  ne  vous  propose  en  cet 
instant  aucune  mesure  ;  il  a  pris  celles  que  la  foi  met  entre 
'ses  mains;  il  se  borne,  pour  la  satisfaction  commune  des 
représentants  du  peuple  et  la  sécurité  des  bons  citoyens,  k 
énoncer  l'espérance  et  l'intention  connues  de  tous  les 
membres  de  cette  assemblée,  celles  de  voir  bientôt  la  France 
heureuse,  jouissant  en  paix  de  l'abondance  et  des  bienfaili 
de  l'industrie  ranimées  Tombredes  lois  constitutionnelles. 

La  Convention,  après  avoir  pendant  le  coorsde  ce  rap- 


6a« 


iwrtt  flic  éclater  de  fréqupntt  tnannurei  dHn(KgnatioD« 
ordonne  qu'il  sera  imprimé  et  affiché  dans  Paris. 

*  La  séance  est  levée  à  cinq  heures. 

SÉAIVCE  DU  24  VENTOSE. 

»  Un  des  sccrëtaires  donne  lecture  des  lettres  sui- 
vantes : 

Le  repréêtntant  du  peuple,  envoyé  dansiee  dépar- 
tements du  YaT  et  des  Bouchet- du- Rhône ^  à  la 
Convention  nationale. 

MarteiHe,  le  16  venuse,  Ttii  8«de  larëpabliquo 
française,  une  et  indivisible, 

«  Vos  soins  pour  le  rétablissement  de  la  confiance  des 
Cjénois  n'ont  pas  été  sana  effet;  depuis  vingt-quatre  heu- 
res chaque  instant  nous  amène  dans  le  port  de  Marseille 
un  vaisseau  chargé  de  blé  et  autres  approvisionuemeuls; 
on  en  compte  déjà  prés  de  cent.  Le  peuiilé  accourt  eu  foule, 
et  Tarrivage  des  subsistances  lui  fait  goûter  les  avantages 
de  son  atiaobement  à  la  Convention  nationale.  Les  mal- 
veillants frémissent,  et  les  bons  citoyens  crient  galmenl: 
vive  la  république  1  Nous  vous  enverrons  demain  Pétat  des 
bàiiminis  arrivés,  a?cole  tableau  dfii  marchand!^  qu'iU 
ont  apportées. 

«Salut  et  fraternité.  GAftiOY.  ■ 

Cette  lettre  est  renvoyée  «u  eomité  de  salut  pu- 
blie. 

Lei  représentante  du  peuple  près  les  armées  des 

•  Pyrénées-OrientaUê  au  président  de  la  Conven- 
tion nationale. 

•  Nous  t'adressons,  oitoyen  président,  la  lettre  qui 
nous  a  été  écrite  par  le  commandant  du  5*  Uauillon  de  sa** 
peurs;  elle  contient  le  don  que  les  sous-olficiertct  voloo* 
taires  de  oe  baUiillon  font  h  la  patrie  de  la  somme  de 
U«SSO  liv,  qu'ils  avaient  droit  de  percevoir  pour  les  (ra** 
vaux  extraordinaires  faits  dans  le  courant  de  nivôse. 

•  Les  officiers  du  même  baiaillon  «joutent  k  cette  of- 
frande patriotique  la  somme  dc7S0  liv.,  asoDtaul  du  quart 
de  leur  solde  pendant  un  mois;  cette  dernière  somme  est 
jointe  à  notre  lettre. 

«  LMntentiondecesgénéreuimllitairesestqoecesdeos 
sommes  soient  employées  k  la  construction  d'un  vaisseau. 
Il  ne  suffit  pas  à  ces  braves  républicains  de  oombiHtre  sur 
terre  pour  la  liberté;  ils  veulent  encore,  par  leurs  saorifi» 
ces,  concourir  aux  succès  maritimes  de  la  république. 
•  Si§né  GoupiLLiAV  (de  Fontenay).  • 

Le  capitaine  ûommandant  du  d^  bdtaillon  des  sa-' 
peurs  aux  représentants  du  peuple  près  V armée 
des  Pyrénées-Orientales. 

«  Citoyens,  je  suis  chargé  par  le  conseil  d*admintstra^ 
tlou  du  5*  bataillon  do  sapeurs  de  vous  inuroire  que  les 
officiers  du  corps  font  don  à  la  patrie  du  quart  de  leurs 
appointements  du  mois  demler>  et  je  vous  en  fais  passer 
le  montant.  • 

«  Les  sous*officiers  et  soldats  font  aussi  homanage  à  la 
nation  de  la  somme  de  14*8S0  liv,,  à  laquelle  ils  ont  droit 
pour  les  journées  de  travail  militaire,  faites  par  eux  dans 
le  courant  du  mois  de  nivôse.  Cette  somme  n*a  pas  été 
perçue  ;  les  soldats  n*ont  pas  voulu  que  vous  doula^sies  un 
seul  instant  du  sacrifice  qu'ils  étaient  dans  Tinlention  de 
faire  depuis  longtemps  i  cette  somme,  suivant  leurs  vqBui^ 
ainsi  que  la  première»  servira  k  la  construction  d'un  vaisr 
seeu. 

•  Salut  et  fraternité.  Dalmas.  s 

La  Convention  d(5crète  la  mention  honorable  et 
rinsertion  au  Bulletin. 

Merlin  (  de  Thionville)  :  Depuis  trop  longtemps 
on  répand  des  bruits  absurdes  et  contre-révolution* 
naires  siir  la  Vendée.  J'aperçois  dans  cotte  enceinte 
les  repivyentants  du  peuple  qui  reviennent  de  ces 


départements;  je  demande  qu'ils  soient  «Dtendiis. 

(On  applaudit.) 

La  Convention  leur  accorde  la  parole. 

Dblaunay  lèjeune^  au  nom  des  représentants  dn 
peuple  près  les  armées  de  l'Ouest,  des  Côles-de- 
Brest  et  Cherbourg  :  La  justice  et  Thumanité  ont 
conquis  la  Vendée  ^  la  république.  Des  enfants  éga- 
res viennent  de  rentrer  dans  le  sein  de  la  grande  fa^ 
mille.  Cette  conquête  est  due  à  votre  énergie  depuis 
le  10  thermidor,  et  à  votre  amour  constant  pour 
Tunité  et  Tindivisibilitéde  la  république. 

Il  est  de  notre  devoir  de  vous  faire  connaître  les 
détails  d'un  événement  aussi  important,  oui  trompe 
l'espoir  des  malveillants  et  déconcerte  les  projets 
insensés  de  l'étranger.  Mes  collègues  Ruelle,  Bollet 
et  moi,  envoyés  par  les  représentants  du  peuple  près 
les  armées  de  l'Ouest,  des  COle$-de-Brest  et  qe  Cher- 
bourg, devons  vous  rendre  compte  des  opérations 
qtii  ont  amené  des  résultats  aussi  heureux. 

Chargés  de  r<ftablir  le  calme  et  la  tranquillité 
dans  les  départements  de  l'Ouest  troublés  par  les 
chouans  et  les  rebelles  de  la  Vendée,  nous  crûmes 
(lue  notre  premier  soin  devait  être  de  connaître  les 
dispositions  des  habitants  de  ce  malheureui  pays. 
Nous  envoyâmes  des  émissaires  parcourir  les  cam- 
pagnes et  étudier  l'opinion  qui  y  régnait. 

Nous  sûmes  que  la  révolution  ou  9  thermidor  y 
était,  pour  ainsi  dire,  ignorée  j  et  qqe  les  eaux  en- 
sanglantées de  la  Loire  y  avaient  laissé  des  plaiej^ 
qui  n*étaient  pas  encore  cicatrisées;  noiis  apprîmes 
que  la  Vendée  était  divisée  en  trois  armées  :  la  pre- 
mière, dite  du  Pays-Bas,  commandée  par  Charette  ; 
la  deuxième,  dite  du  CenUe,  par  Sapinaud;  et  la 
troisième,  dite  de  TAnjQu  et  du  Haut-Poitou,  par 
Stofflet.  Nous  fûmes  ëjgalement  instruits  que  Cha- 
rette était  le  généralissime  de  la  Vendée ,  sans  en 
porter  le  titre. 

Il  fallait  donc  établir  la  eonBance  et  rassurer  les 
Vendéens  sur  le  régime  de  sang  et  de  persécution 
gue  vous  avez  détruit.  Notre  première  opération  a 
été  de  leur  donner  connaissance  du  décret  du  12  fri- 
maire et  de  la  proclamation  de  la  Convention  na- 
tionale. Deux  citoyens  de  Nantes  ont  accepté  cette 
honorable  mission,  et  ils  l'ont  remplie  avec  autant 
d'intelligence  que  de  dévouemeuLpour  la  chose  pu- 
blique, C'est  aussi  à  l'armée  que  nous  avons  confié 
le  mâme  soin  ;  c'est  elle  qui  a  répandu  le  décret  et 
la  proclamation  avec  promsion  dans  la  Vendée  et 
chez  les  chouans.  Ce  sont  les  défenseurs  de  la  patrie 
qui,  en  éclairant  desh'ères  égarés,  nous  ont  été 
utiles,  et  que  vous  avez  récompensés  en  décrétant 

3  ne  les  armées  de  TOuest,  des  Cûtcs- de -Brest  et 
e  Cherbourg,  ne  cessaient  de  bien  mériter  de  la 
patrie. 

Un  de  nos  collègues  avait  fait  parvenir  directe- 
ment à  Charette  votre  décret  et  voire  proclamation; 
il  sut  lui  inspirer  de  la  conliance.  Cnarette  et  ses 
chels  parurent  désirer  une  entrevue  avec  les  repré» 
sentants  du  peuple  qui  lors  étaient  dans  la  commune 
de  Nantes,  et  ils  la  demandèrent. 

Nous  n'étions  pas  envoyés  pour  faire  oouler  le 
sanp  ;  vous  nous  aviez  autorisés  à  recevoir  dans  nos 
bras  les  Français  trompés  qui  voudraient  s'y  jeter. 
Nous  crûmes  que  la  représentation  nationale  n'était 
pas  compromise  en  se  trouvant  avec  les  chefs  de  la 
Vendée,  surtout  lorsqu'il  s'agissait  d'enlever  à  l'é- 
tranger la  Jouissance  barbare  de  voir  des  Français 
armés  contre  des  Français.  L'entrevue  fut  accordée 
pour  le  24  pluviôse. 

Les  dispositions  pacifiques  de  Charette  étaient 
connues  dans  Nantes.  Les  ennemis  de  la  paix  dissé-> 
minèrent  dans  les  deux  armées  vendéeimes  que  ic» 
représentants  du  peuple  devaient  faire  ari^éter  leurs 


«8?     ci^r 


ehefs  et  que  Charette  serait  assassiné  s'il  se  rendait 
à  l'entrevufe. 

Nous  ôtâmes  à  la  malveillance  qui  s*agitait  les 
inoyéhs  At  nuire  et  de  consommer  ses  projets.  Une 
tente  lut  dressée  sous  la  volée  du  canon  des  murs 
de  la  commune  de  Nantes,  ei  le  drapeau  tricolore 
tîotit  elle  hit  sûrniontée  annonça  aux  habitants  de 
h  Vendée  ()t!iM)À  étaient  appelés  par  la  loi  bienfai- 
sante du  12  frimaire  à  rentrer  dans  le  sein  de  la 
patrie. 

C'est  sous  cette  tente  que  les  chefs  des  deux  ar- 
mées vendéenne^  dites  du  Centre  et  du  Pays-Bas, 
huit  des  principaux  officiers  de  Farmée  d'Anjou  et 
dû  Haut-Poitou ,  et  plusieurs  chefs  des  chouans , 
avoués  par  eux,  ont  déclaré  «  qu'ils  reconnaissaient 
f>  la  république  française,  une  et  indivisible,  et  ^e 

•  soumettaient  à  ses  lois  ;  qu'ils  ont  promis  de  ne 

•  jamais  portek*  les  armes  contre  elle,  i^tde  remettre 
«toute  rartitlerie  et  les  chevaux  d*artiUerie  qui 
»  pouvaient  être  en  leurs  mainsi  • 

Voici  cette  déclaration  t 

MtlataUon  d9i  eh^fii  4ê  la  ViHéiê  dans  h$  afmé$$ 
du  CnUti  $t  du  Pays-Bas. 

«  Desaltentatsiiioiiis  contre  notre  libeHèy  IMntoIérance 
la  plus  cruelle 9  le  despotitise,  les  injustioeSi  les  Vexations 
les  plus  odieuses  que  nous  avoasiftprottfèëSittdtts^t  mis 
les  ai  mes  à  la  main. 

«  Nous  avons  vu  avec  horreur  notre  malheureuse  patrie 
livrée  à  des  ambitieux  qui,  SOUS  tel  apparences  du  patrio- 
tisoie  le  plus  pur»  sous  le  Dsasqjue  séduisant  de  la  popula- 
riiéi  aspuvieniè  uocdicUittreperpétoelle.  PnoVions-rtous, 
eu  disceruttut  leurs  projets  à  travers  le  voile  dont  ils  s'en- 
veloppaieoi»  ne  pas  tcuier  les  derniers  eflbrts  ^our  repla- 
cer i'aulorité  danides  mainsque  nos  principes  légitimaient? 

«  Tant  que  le  gouvenrement  oppressif  a  pHvé  nos  cbnel- 
toyens  de  leurs  droits  les  plus  précieux,  nous  avons  sou- 
tenu les  nôtres  avec  constance  et  fermeté:  nous  avons 
puisé  dans  nos  malheurs  de  nouvelles  forces;  le  désespoir 
est  veiiu  nous  prêter  son  aCTreux  si'cours;  et«  nous  rendant 
'  insensibles  aux  considérations  qui  allendrissenl  les  cœurs 
les  plus  feroucbes ,  11  a  vàil  gravé  dans  les  nôtres  la  résolu- 
tion de  mourir  plutôt  que  de  vivre  sous  une  pareille  ty- 
rannie. 

•  ïLùùn  le  régime  de  sang  a  disparut  les  coryphées  de 
la  secte  impie  qdi  couvrit  la  France  de  deuil  et  de  cyprès 
obt  l^ayé  de  leurs  tôies  leurs  criminels  desseins, 

•  Le  reprébeolaut  Ruelle,  ami  de Thumanité  eC  des  lois, 
est  venu  parmi  nous  apporter  des  paroles  de  paix  t  la  con» 
fiance,  si  fort  altérée  p^r  les  actes  de  barbarie  qui  ont  pré- 
cédé sa  mission,  a  Cbmttencé  à  renaître.  A  son  aspect  nous 
n'avons  eu  aucune  répugnance  pour  des  rapprochements 
Capables  dé  mettre  fib  âui  calamités  qui  nous  déchirent. 

«  De  nouveaux  représenlanls, dignes  de  notre  estime  et  de 
noa  éloges,  ont  été  adjoints  au  premier.  Nous  leur  avons 
bit  connaître  à  tous  nos  intentions,  et  le  désir  d'une  paci- 
fication sincère  ,  garantie  par  rbonneur* 

«  Dans  les  conrércnccs  que  nous  avons  eues  avec  eux, 
nous  nous  sommet  dp))liqués  à  leur  faire  connaître  ce  qui 
Intéressait  essentiellement  le  bonheur  de  notre  pays,  et  et 
qu'il  était  de  leut  sagesse  et  de  leur  prudence  d'accorder, 
pour  atteindre  le  but  si  désirable  de  la  paix.  Réunis  sou» 
une  même  tente  avec  les  représentants  du  peuple ,  nous 
avons  senti  plus  fortement  encore,  s'il  est  possible,  que 
nous  étions  Français,  que  Je  bien  général  de  notre  patrie 
devait  seul  nous  animer. 

•  Et  c'est  dans  ecs  sentiments  que  nous  déclarons  to* 
leutieliement  ï  la  Conventioii  nationale  et  à  la  France  en* 
lière  nous  soumettre  à  li  république  IVénçalseï  une  et  Itt* 
divisible;  que  nous  reconnaissons  les  lois,  et  que  nous  pre- 
nons l'engagement  formel  de  n'y  porter  aucune  atteinte. 

«  Nous  promettons  de  remettre  le  plus  tôt  qu'il  sera  po^ 
aibie  rartillerie  et  les  chevaux  d'artillerie  qui  sont  entre 
nos  mains,  et  nous  prenons  rengagement  solennel  de  uc 
ItiBais  potier  les  armei  contre  là  république. 


«Fait  sous  la  tenle«  le  39  pluviôse (noufean  llyle)  i790f 

l'an  3 de  la  république. 

Signé  Chabitt*,  FtiuiiOf  i  Gouvrast  SàViifAOBt  Cao- 
II4ETIN,  DiMOc>Guàa  1  atné«  GAibLAu»,  DESAioNAa», 
GoûOBT,  LiPiNAT,  Saotaobt^  Baudbt ,  Gdérir  jeune, 

SOLILLUAC,  BUAY.  DeBSUC  jCUne,  E^BUDBOIIIIB,  Rbjbao, 

Dblabobbbib^  RovssbaU|  Bossabd  le  jeune,  et  Au  vin  it 

fils  aîné.  » 

Déclaration  des  oflScierl  de  la  Vendée»  composant  en 
parlie  lé  conseil  de  IVmée  d*Âojou ,  du  8  ventôse ,  sem- 
blable a  la  première. 
Sigfié  t*BOTOHis,  Dblavillb,  DasAUcit  Rbnou,  Mabtiii 

atné,  Mabtih  le  jeune,  Tbistan  Mabtiii  et  Gibbrt. 

Déclaration  au  nom  des  chouans ,  d'après  celle  de  la 
Vendée,  semblable  a  la  première,  sous  U  date  du  8  ven- 
tôse. 
Signé  Caoiiabtin  ,  Solillhac  »  na  Scbpbauz  »  Dnosia, 

Goublbt  et  MéNABS. 

Dblaunat  :  t)ès  cet  instant  nous  n'avons  plus  m 
d*insurgés;  la  cocarde  nationale  et  le  panache  tH- 
colore  dont  ils  se  sont  décorés  noua  ont  dit  que 
nous  embrassions  des  trères.  La  déGance  s* est  ëloi- 

Î;née  de  nos  ftmes,  et  nous  n'avons  plus  connu  dans 
a  Vendée  que  deuxclAsgeB  de  citoyens,  les  bous  et 
les  méchants. 

Il  fallait  mettre  la  dernière  sanction  à  ce  grand 
œuvre  qui  anéantit  tes  projets  de  nos  ennemis.  Nous 
nous  soûimes  occupés  des  moyens  qui  pouvaient 
contribuer  au  bonheur  de  ces  contrées  |  nous  avons 
examine  ce  qu'il  étpit  de  la  aa^se  et  de  la  prudence 
d'accorder  pour  la  conciliation  des  esprit!  et  le 
maintien  de  la  pacification  qui  s'opérait. 

L'article  VU  de  la  Déclaration  des  Droits  de 
l'Homme,  trop  longtemps  oublié,  était  réclamé  pal* 
les  Vendéens  ;  nous  avons  autorisé  l'exercice  lîbrc^, 
paisible  et  intérieur,  de  tout  culte  quelconque.  De- 

Suis,  nar  un  décret  que  nous  pressentions  pour  ainéi 
ire  alor^,  la  Gonvention  nationale  a  régie  le  mode 
d'exercice  des  cultes* 

Là  Ventrée  des  habitants  de  la  Vendée  dans  le  teia 
de  la  répu|>.liquei  en  rendant  à  l'agriculture  et  au 
commerce  des  bras  qui  leur  sont  précieux  i  laissatl 
sans  ressources  et  sans  moyens  de  subsister  des 
hommes  qui  n'avaient  aucun  état  ni  profession. 
Nous  devions  assurer  leur  existence  et  les  rendre 
utiles  à  leurs  concitoyens.  Moua  avons  donc  distin* 
eue  parmi  eux  les  hommes  naturels  ou  attachés  à  la 
Venaée  au  mois  de  mars  1793  (vieux  style),  époaue 
de  l'insurrection,  des  hommes  qui  y  sont  entrés  de- 
puis. Nous  avons  pensé  qu'en  organisant  Ihs  pré** 
miers  en  compagnies,  les.  dissémmani  sur  une  surp- 
lace aussi  étendue  que  le  territoire  insurgé  >,  les 
plaçant  à  des  postes  nxea,  lea  mettant  sous  la  sur 
veillahce  des  autoritéa  oonatituéea ,  les  aoumettant 
aux  généraux  républicains,  leur  donnant  énffn  et  en 
quelque  sorte  une  existence  plus  civile  que  militaire, 
nous  remplissions  un  but  aussi  désirable*  Nous  avons 
consulté  le  général  eo  chef  de  l'armée  de  TOnest,  et 
ses  idées  pourront  servir  utilement  à  cette  organisa** 
tion,  si  vous  l'approuves. 
Les  départements  frontières ,  désola  par  le  fléau 

(le  la  guerre,  ont  obtenu  des  secours»  La  Vendée  et 
e  pays  des  chouans  tixeront  également  votre  attend 
tion.  Nous  avons  promis  en  votre,  nom  dessecouri 
pour  aider  lea  habitants  de  la  Vendée  k  rebâtir  leura 
chaumières  i  à  relever  leur  commerce  et  à  ranimer 
l'agriculture. 

Les  intéri'tsdes  patriotes  réfugiés  n'ont  pas  été  ou- 
bliés. La  sûreté  de  leurs  personnes  en  rentrant  dans 
leurs  communes^  le  respect  dû  à  leurs  propriétés  ont 
été  prévus  par  nous. 

Les  Vendéens  insurcés  avaient  quelqu^inqulé- 
tudes  sur  Texécution  «e  là  loi  du  is  friWre  ;  cet 


688 


Inquiëtudes,  nous  les  avons  dissipées  ;  ils  .  Dnt 
demandé  des  éclaircissen^nts,  nous  les  let  3ns 
donnés.  Nous  leur  avons  dit  que  les  habitant  sur- 
gés  de  la  Vendée  rentraient  de  fait  dans  la  piupriété 
et  possession  de  leurs  biens  par  leur  soumission  à  la 
république. 

Telle  est  l'analyse  des  différents  arrêtés  que  nous 
avons  cru  devoir  prendre  pour  maintenir  la  tran- 
quillité dans  Tune  des  contrées  les  plus  fertiles  de  la 
France. 

La  mission  que  vous  nous  avez  confiée  est  en  par- 
tie remplie.  L/horizon  politique  de  TOuost  com- 
mence à  s'éclaircir  ;  nos  espérances  d'une  pacifica- 
tion complète  dans  les  contrées  .occupées  par  les 
chouans  ne  sont  pas  vaines,  et,  nous  osons  vous  le 
dire,  tout  fléchit  aujourd'hui  devant  le  génie  de  la 
république. 

Deux  agents  principaux  des  chouans  ont  souscrit 
les  déclarations  vendéennes.  Les  chefs  des  chouans, 
dans  les  districts  d'Ancenis,  Segré,  Craon,  Châleau- 
gonthier.  Sablé,  Châteauneuf  et  Angers,  ont  déclaré 
rentrer  dans  le  sein  de  la  république. 

Une  entrevue  est  fixée  au  10  germinal  dans  la 
commune  de  Rennes.  Là  tous  les  chefs  des  chouans 
des  ci-devant  provinces  de  Bretagne  et  Normandie 
doivent  se  réunir;  là  ils  doivent  promettre  à  la  Con- 
vention que,  soumis  aux  lois  de  la  république,  ils  ne 
porteront  jamais  les  armes-contre  elle. 

Le  sang  va  donc  cesser  de  couler,  les  campagnes 
vont  se  repeupler,  et  les  Français  n'oublieront  plus 

Î|ue  la  même  patrie  les  a  vus  naître.  Nous  vous  of- 
rons  pour  garant  la  conduite  des  Vendéens  et  des 
diouans  rentrés  dans  le  sein  de  la  république.  Déjà 
la  confiance  s'établit  entre  les  habitants  de  la  Ven- 
dée et  ceux  des  autres  départements  de  TOuest  ;  déjà 
les  passions  ne  s'agitent  plus  avec  autant  de  force  ; 
les  naines  particulières  se  taisent,  et  les  vengeances 
personnelles  s'éteignent;  déjà  les  liaisons  sociales 
qui  étaient  roAnpues  se  renouent  »  et  les  rapports 
commerciaux  se  rétablissent. 

Les  voitures  se  remontrent  dans  les  campagnes  ; 
les  communications  entre  les  grandes  communes, 
qui  étaient  interceptées,  deviennent  libres  ;  les  hos- 
tilités cessent;  les  chefs  des  chouans  fusillent  ceux 
qui  osent  porter  les  mains  sur  les  républicains.  La 
commune  d'Ancenis  manquait  de  vivres  et  de  four- 
rages; les  chouans  ont  facilité  son  approvisionne- 
ment et  facilitent  ceux  des  grandes  communes. 

La  Vendée  est  cultivée  et  ensemencée  dans  Tinté- 
rieur.  Ce  pays,  qui  alimentait  Paris  de  viande  pen- 
dant une  partie  de  Tannée ,  n'a  pas  perdu  cette 
ressource  de  son  industrie  et  cette  branche  de  son 
commerce.  Le  Vendéen  tranquille  va  s'occuper  de 
Tengrais  de  ses  bestiaux»  dont  le  nombre  est  encore 
considérable. 

Les  maux  que  la  guerre  de  la  Vendée  a  causés 
vont  se  réparer.  Un  voile  épais  jeté  sur  le  passé  ne 
présentera  plus  le  tableau  affligeant  de  frères  qui  se 
déchirent.  Sans  doute  que  des  meurtres  et  des  assas- 
sinats pourront  être  commis,  mais  ce  sont  les  suites 
malheureusement  inévitables  des  guerres  civiles. 

Sans  doute  que  des  scélérats  qui  ont  marché  sous 
le  nom  de  Vendéens  et  de  chouans,  et  que  ceux-ci 
désavouent ,  pourront ,  d'intervalle  en  intervalle, 
troubler  la  sûreté  des  routes  ;  mais  une  police  bien 
active  et  vigilante  remédiera  à  ces  désordres. 

Stofflet  n'a  pas  montré  les  mêmes  dispositions 
pacifiques,  et  n'a  pas  suivi  Texemple  donné  par  ses 
voisins.  Quelle  que  soit  la  conduite  de  Stofflet ,  ce 
royaliste  ne  peut  être  dangereux  pour  la  chose  pu- 
blique. 

Cet  homme  est  entouré  par  une  espèce  de  garde 
Drétorienfte,  composée  d'un  ramas  d'individus  sans 


mœurs,  sans  principes,  sans  propriétés,  et  étrangers 
au  pays.  Cette  garde,  qui  ne  le  quitte  ni  jour  ni  nuit, 
le  domine  lui-même,  et  sous  sop  nom  tyrannise  l'ha- 
bitant des  campagnes. 

Les  naturels  de  la  Vendée  attendent  avec  impa- 
tience Tinstant  où  ils  seront  délivra  de  ces  hommes 
de  sang  let  de  pillage.  Stofflet  vient  d'amener  ce  mo- 
ment, et  sa  dernière  heure  sonne. 

Stofflet,  accompagné  de  trois  cents  déserteurs  des 
légions  Rozenthal  et  Germanique,  la  seule  force 
qui  lui  reste,  a'surpri^  et  arrêté  quelques  chefs  ren- 
trés dans  le  sein  de  la  républi(^ue. 

Cette  démarche  vient  de  lui  aliéner  tous  les  es- 
prits; à  Tinstant  où  nous  vous  parlons,  notre  armée 
s'ébranle  pour  entrer  sur  le  territoire  qu'il  occupait. 
Dans  cet  instant  même  Charette  et  les  Vendéens 
soumis,  conquis  à  la  république ,  de  concert  arec 
nos  collègues  et  le  général  en  chef,  ont  repris  les 
armes.  Jaloux  de  montrer  la  sincérité  de  leur  retour 
à  Tordre,  ils  marchent  sur  lui.  Bientôt  le  sol  de  la 
Vendée  sera  purgé  des  scélérats  qui  l'infestent  en- 
core. (On  applaudit.) 

En  vous  présentant  le  tableau  actuel  de  la  Ven- 
dée, nous  détruisons  les  bruits  que  la  malveillance 
ne  cesse  de  répandre  sur  les  opérations  qui  ont  con- 
duit la  pacification  à  sa  fin.  En  mettant  sous  tos 
yeux  nos  arrêtés,  c'est  vous  faire  connaître  les  me- 
sures d'exécution  que  nous  avons  prises. 

{La  suite  demain,) 


Nm  B,  —  Dans  la  téaiiçc  du  S5,  Boissy  d*Anglas  a  an- 
DODcé  l'arrivée,  dans  les  ports  de  Marseille  et  de  T6alon, 
d'un  convoi  considérable  chargé  de  grains.  Un  second  doit 
bientôt  mouiller  dans  les  ports  de  la  république» 

A  la  suite  de  ce  rapport,  Boissy  a  présenté  on  projet  de 
décret  portant  qu*une  livre  de  pain  serait  distribuée  ^a- 
quejour  k  chaque  individu  habitant  de  Paris. 

Sur  Tamendement  d'un  membre,  la  Convention  a  dé- 
crété que  chaque  ouvrier  en  recevrait  une  livre  et  demie. 

—Le  reste  de  la  séance  a  été  consacré  aui  pétitionnaires. 


LIVRES  DIVERS. 

Tome  XV  de  V Histoire  de  la  Décadence  et  de  U  Chtêie  de 
tempire  romain,  traduit  de  l*angUis  de  Gibbon.  Pris  :  6  liv., 
broché,  et  7  liv.  10  s.,  frtnc  de  port. 

A  Paris,  ches  Mtradan  libraire,  rue  du  Cimelière-Andf^ 
des-Arcs,  n®  9. 

—  Telhphe,  par  Pechmeja;  t  vol.  ia-lS,  avec  gravores. 
Pris  :  4  liv.,  et  5  liv.,  franc  de  port. 

A  Paris,  ches  Devaus,  librtire,  rue  de  Chartres,  n*  381,  et 
maison  Bgalitë. 

Ct  romtn  philosophique  offre  un  triomphe  énergique  des 
droits  de  l'homme,  des  eieroples  de  modération  et  de  sagesse» 
des  pensées  neuves,  et  une  peinture  de  l'amiiié  telle  que  la 
sentait  Fauteur,  qui  en  mourut  victime. 

—  On  trouve  à  It  même  tdresse  les  Œuvres  pastorales  dt 
Merthghen  ,  traduites  de  Ttllemand  ;  t  volume  ia-ia  ,  avec 
gravures.  Pris  :  4  liv.,  et  5  liv.,  frtnc  de  port. 

Et  le  Code  du  Divorce,  Prix  :  t  liv.,  et  S  liv.  10  a.,  fraae 
de  port. 


Payements  à  la  trésorerie  nalionaU, 

Le  payement  de  la  dette  consolidée  perpétuelle  se  tm  i 
pour  les  sii  derniers  mois  de  Tan  f,  et  pour  Tannée  a  ceux 
qui  n*ont  pas  touché  les  sii  premiers  mois  de  ladite  année. 
Les  citoyens  qui  ont  retiré  lelir  inscription  définitive,  et  qm 
désireraient  être  payés  dans  les  districts,  peuvent  indiquer 
les  chefs-lieui  de  district  où  ils  veulent  être  payés,  coiûiaff^ 
mément  à  la  loi  du  â'  jour  des  sansrulottides. 

Le  payement  des  rentes  viagères  se  fait  cumulativement 
pour  deui  mois  vingt  et  un  jours  de  l'anoéc  1 793  (vieux  style) 
et  les  sis  premiers  mois  de  Tao  f. 


GAZETTE  NATIONALE  .a  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 

N^  177.  Septidi  27  Veutosb,  l'an  3«.  [Mardi  17  Mars  1795,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Henné  j  le  i5  février,  --  Il  s*estteDu  extraordinaîrcment 
plusieurs  assemblées  entre  les  ministres  d'Etat,  Tambassa- 
deur  d* Angleterre  toujours  présent*  Uu  certain  nombre  de 
courriers  a  élé  expédié  à  Tissuo  de  ces  conférences. 

—  La  cour  de  Vienne  parait  peu  satisfaite  des  volontés 
du  corps  germanique.  Elle  se  repent  d*a>oir,  précisément 
il  l'époque  où  la  guerre  a  commencé,  donné  trop  de  motifs 
de  soupçonner  son  ambition.  Elle  est  néanmoins  détermi- 
née, si  la  guerre  continue,  à  demander  à  TEropire  un  con- 
tingcnlhors  de  toute  mesure,  quoique  le  quintuple,  qu'elle 
a  tant  sollicité,  tant  motivé,  n*ait  pas  encore  été  et  ne 
puisse  pas  C'tre  effectué. 

—  Ou  prétend  que  M.  de  Hertiberg  doit  partir  de  Berlin 
sous  peu  de  jours»  pour  se  rendre  à  Baie  en  qualité  d*cnvojré 
prussien. 

—  On  assure  que  la  Russie  et  la  Prusse  sont  ? raiment 
sur  le  point  de  se  brouiller. 

Ces  deux  nouvelles  ne  sont  point  publiées  ft  Vienne,  où 
les  gaxeltes  de  la  cour  ont  ordre  de  n*en  point  parler. 

-—  La  Porte-Ollomane  a  fait  signifier  aux  ministres  coa- 
lisés que  S.  H. ,  vivement  affectée  de  voir  continuer  une 
guerres!  meurtrière  et  si  offensante  pour  l*bumanité,  offrait 
de  son  propre  mouvement  sa  médiation. 

Les  ministres  des  puissances  alliées  ont  paru  disposés  à 
croire  que  leurs  cours  respectives  s'empresseraient  de  ré- 
pondre aux  intentions  du  Grand  Seigneur  sur  le  réiablisi^e- 
ment  de  la  tranquillité  en  Europe,  et  ont  promis  d*cn 
instruire  sur-le-cbamp  leur  maîtres. 

—  L^ambassadeur  stalhoudérien,  qui  n'a  plus  de  maître, 
a  mis  bas  son  train,  et  vit  en  simple  particulier. 

Neuwied,  le  5  marg,  —  Le  siège  de  Mayence  se  fera 
avec  la  plus  extraordinaire  vigueur.  Les  républicains  s'y 
préparent;  il  leur  arrive  et  des  renforts  et  de  nouveaux 
convois  de  grosse  artillerie.  Les  alliés,  de  leur  côlé,  s'oc- 
cupent sans  relâche  à  se  procurer  tous  les  moyens  de  faire 
la  plus  mémorable  des  résistances.  Leur  garnison  est  de- 
venue une  armée,  et  leurs  bouches  à  feu  sont,  pour  ainsi 
dire,  en  nombre  presque  égal  au  nombre  de  soldats  qu'il 
y  aurait  dans  la  place  si  la  garnison  était  ordinaire. 

Coblentz,  le  16  ventôse»  —  L'armée  autrichienne  est 
QUgmenlée  de  quelques  renforts  qu'elle  a*reçus  de  la  Bo* 
hênie  et  de  l'Autriche;  elle  continue  à  se  porter  vers  le 
haut  Rhin.  Les  généraux  français  épient  tous  ses  mouve- 
ments ;  ils  en  ont  plus  d'une  fois  déconcerté  les  desseins. 

—  On  a  élevé  ici  plusieurs  batteries  de  gros  calibre  en^ 
face  de  celles  que,  sur  l'autre  rive  du  fleuve,  l'ennemi  e 
élevées. 

—  Les  avant-postes  autrichiens  sur  la  rive  droite  du 
Bhin  sont  composés  de  chasseurs  tyroliens.  Ces  esclaves  se 
faisaient  un  horrible  plaisir  de  tirer  sur  les  paysans  passa- 
gers, sur  les  voyageurs,  sur  toute  personne  isolée,  de 
Tautre  côté ,  sur  la  rive  gauche. 

Les  généraux  républicains  ont  envoyé  demander  aux 
généraux  de  rAotriche  s'ils  avaient  intention  de  laisser  ces 
assassinats  impunis.  Aussitôt  a  cessé,  de  la  part  des  chas- 
seurs tyroliens,  leur  atrocité  gratuite.  Le  voyageur  a  été 
respecté,  et  même  d'une  rive  k  Tautre  on  ne  tire  point  ré- 
ciproquement sur  les  patrouilles  peu  nombreuses. 

Mulheim,  le  !•'  man,  — On  a  les  plus  vives  inquiétudes 
au  sujet  du  Hanovre,  car  le  recrutement  foreé  et  d'autres 
arrangements  ont  prodigieusement  aigri  les  écrits.  Néan- 
moins on  a  mis  en  mouvement  les  milices  de  Pélectorat, 
seule  résistance  qu'on  ait  k  opposer  aux  Français. 

On  multiplie  en  vain  les  calomnies  contre  la  France;  il 
est  certain  que  l'approche  des  républicains  n'est  redoutée 
dans  tout  l'électoral  que  des  employés  briiauoiques.  On  a 
dans  cette  fatale  guerre  tant  sacrifié  les  Hanovriens,  que  le 
peuple  demande  la  paix  à  grands  cris.  Les  agents  royaux 


répondent  à  cet  empressement  du  peuple  par  la  considéra* 
tion  que  les  Français  s'étendent  trop  pour  ne  pas  courir  ù 
leur  perte,  et  ils  ajoutent  que  Luxembourg  doit  être  et 
sera  délivré» 

ANGLETERIIE. 

DiBAXS  DO  PABLiMBiiT*  — •  Chambré  deê  Communee» 

Le  chancelier  propose  et  fait  adopter  à  la  Chambre  de  se 
former  en  comité  général  pour  délibérer  sur  les  moyens  de 
recruter  la  marine  royale.  Les  mesures  qui  lui  paraissent 
les  meilleures  sont  au  nombre  de  quatre;  pour  persuader 
qu'elles  doivent  être  suivies,  il  dit  que  presque  tous  ses 
collègues  sont  d'accord  sur  la  nécessité  d'accroître  promp- 
tement  les  forces  navales  britanniques;  ils  doivent  l'être 
aussi  sur  les  moyens,  et  ne  pas  s'effaroucher  des  inconvé- 
nients que  IVxécution  de  ce  plan  peut  entraîner.  Il  continue 
en  disant:  ••  Je  vous  exhorte  donc  à  considérer  avec  fran- 
chise et  impartialité  dans  quelles  sources  il  est  le  pfus  ù 
propos  de  puiser  celte  augmentation.  C'est  naturellement 
dans  la  marine  marchande,  puisqu'elle  y  a  le  plus  grand 
intérêt  pour  la  préservation  de  son  commerce. 

■  La  mesure  que  je  vais  vous  proposer  la  délivrera  de 
la  crainte  de  voir  enlever  ses  équipages  dans  les  voyager, 
chex  Téiranger,  ainsi  que  de  la  cruinle  d'un  embargo  gé« 
néral.  Celle  mesure  consiste  à  obliger  chaque- vaisseau 
marchand,  avant  d'obtenir  son  acquit-àcaulion ,  de  four- 
nir un  nombre  d'hommes  proportionné  à  son  tonnage;  et 
comme  rincoiivénient  qui  en  résulte  s'étend  également  ù 
tous,  il  pourrait  être  diminué  k  raison  de  Pactivilé  de 
chacun  d'eux. 

«  En  1793 ,  il  y  avait  cent  mille  hommes  employés  dans 
la  marine  murchande,  ce  qui  faisait  à  peu  près  un  homme 
pour  chaque  14  tonneaux  de  charge  ;  en  parlant  de  ce  fait, 
je  propose  que  chaque  vaisseau  au  dessus  de  80  ou  35  Ion* 
neaux  fournisse  un  matelot  ou  deux  soldats  par  chaque 
sept  hommes  d'équipage;  que  tous  les  vaisseaux  au  dessus 
de  35  et  au  dessous  de  75  tonneaux  fournissent  un  sol- 
dat, et  que  tous  ceux  au  dessus  de  75  et  au  dessous  de  100 
fournissent  trois  soldats  ou  deux  matelots;  et  ainsi  de 
suite  dans  la  même  proportion. 

•  Tous  les  gros  vaisseaux  partant  pour  des  voyages  de 
long  cours,  après  avoir  fourni  leur  contingent,  seront 
convoyés  pour  un  voyage  seulement;  les  petits  vaisseaux 
parlant  pour  des  voyages  moins  longs  seront  convoyés  deu  x 
ou  trois  fois,  selon  la  longueur  de  ces  voyages.  Il  n'est  pas 
possible,  pour  le  moment,  decalculer  au  juste  le  nombre 
d'hommes  que  cette  mesure  produira  ;  en  1793  elle  en  eût 
produit  vingt  mille. 

t  Une  autre  mesure  que  je  propose,  c'est  que  chaquo 
paroisse  dans  le  royaume  fournisse  à  la  marine  un  ou  plu- 
sieurs hommes,  selon  son  étendue  ;  qu'un  nombre  soit  fixé 
par  le  magistrat  en  chef  du  canton,  et  que  les  paroisses 
qui  refuseront  de  fournir  leur  contingent  soient  condamnées 
à  une  amende  assez  forte  pour  qu'elles  ne  soient  pas  ten« 
tées  de  man((uer  à  leur  devoir.  En  supposant  qu'il  J  ait 
dix  mille  paroisses  dans  le  royaume,  et  que  chacune  no 
fournisse  qu'un  homme,  voilà  déjà  dix  mille  matelots  do 
plus. 

c  Une  troisième  mesare  que  je  propose,  c'est  de  faire 
rontribucr  In  navigation  Intérieure  du  royaume  à  Paugmen- 
lalion  de  notre  marine;  mais  il  est  impossible  de  détermi- 
ner les  secours  que  ce  moyeu  procurera ,  jusqu'à  ce  que 
nous  ayons  un  état  exact  du  nombre  de  bras ,  ainsi  que  du 
nombre  et  du  tonnage  des  bâtiments  employés  à  ce  service 

•  Une  dernière  mesure  est  de  faire  revivre  un  acte  du 
parlement  en  vigueur  dans  la  guerre  précédente,  par  le- 
quel il  était  enjoint  à  tous  les  magistrats  de  chaque  com:é 
d'arrêter  pour  le  service  de  la  marine  tous  les  gens  sans 
aveu,  qui  ne  feront  pas  preuve  de  leurs  moyens  pour  suh- 
sister.  » 

M.  Fox,  tout  en  convenant  quMlfiiut  des  mesures  vi- 
goureuses, n'est  point  du  tout  d'avis  que  celles  proposé(^ 
par  M.  Pitt  soient  les  mobis  onéreuses  et  les  moins  opprt»* 

87 


690 


sîves  pour  le  peuple.  11  y  ?  oit  au  coulraire  an  développe- 
inent  du  système  désastreux  de  taxes  et  d*oppression  sous 
lequel  il  n*a  que  trop  longtemps  gémi,  et,  particularisant 
cette  assertion ,  il  prouve  que  les  paroisses  et  la  marine 
marchande  en  ressentiront  les  effets  les  plus  f&cbeux. 

«  En  effet,  dit-il,  si  le  propriétaire  du  bâtiment  se  trouve 
hors  d'état  de  remplir  les  clauses  du  bill ,  comment  peut-il 
Qgir?  Faut-il  qu'il  tire  de  son  équipage  le  contingent  re- 
quis? Alors  il  ne  pourra  plus  manœuvrer  son  vaisseau. 

«  Quant  à  la  taxation  par  paroisses .  ce  moyen  a  été  sou- 
vent sans  succès,  attendu  les  variations  continuelles  qu'é- 
prouve la  population.  Les  mesures  actuelles  sont  de  nature 
ù  exciter  chez  le  peuple  les  plus  vives  inquiétudes ,  des  in- 
quiétudes telles  que  la  crise  la  plus  alarmante  peut  seule 
justiGer  ceux  qui  les  occasionnent.  Aussi  le  peuple  n'ap- 
prouvera-t-il  jamais  ces  mesures  que  quand  il  sera  bien 
convaincu  que  tous  les  moyens  possibles  d'obtenir  la  paix 
ont  été  employés  en  vain. 

«  Maleré  les  revers  et  les  désastres  que  nous  avons 
éprouvés  jusqu'à  présent  dans  cette  guerre  ruineuse,  le 
peuple  ne  s'est  livré  à  aucun  mouvement  séditieux  ;  serait- 
ce  qu'il  a  cru  que  l'administration  n'avait  rien  à  se  repro- 
cher, qu'elle  a  tenté  tous  les  moyens  de  se  procurer  les 
douceurs  et  les  avantages  de  la  paix?  Si  nous  n'avons  pas 
fait  tout  ce  qui  dépendait  de  nous  pour  parvenir  à  une  Gu 
aussi  désirable,  si  nous  n'avons  pa<pris  les  mesures  con- 
venables pour  y  réussir,  ne  fournissons-nous  pas  au  peuple 
l'occasion  de  faire  éclater  son  mécontentement.  ? 

«  Ainsi,  que  les  ministres  ne  perdent  plus  leur  temps  à 
tromper  le  peuple  par  des  phrases  équivoques  et  des  pro- 
messes illusoires;  qu'ils  lui  donnnent  des  preuves  convain- 
cantes que  l'objet  de  la  guerre  actuelle  n'est  plus  ce  projet 
absurde  et  injuste  de  changer  le  gouvernement  intérieur 
de  la  France,  mais  uniquement  de  défendre  et  maintenir 
nos  propres  droits  et  notre  propriété. 

«  Ce  projet  ridicule  a  été  donné  dans  la  session  dernière 
comme  le  véritable  motif  de  la  guerre  ;  j'ignore  si  l'impu- 
deur et  la  démence  qui  l'ont  fait  mettre  en  avant  oseraient 
encore  le  soutenir;  mais  je  les  avertis  qu'il  est  trop  tard  : 
nous  savons  aujourd'hui  que  le  peuple  anglais  ne  veut  plus 
s'en  laisser  imposer  par  des  délibérutions  aussi  avilissantes 
et  aussi  absurde».  Nous  qui  le  représentons  ici ,  nous  qui 
sommes  ici  pour  stipuler  ses  véritables  intérêlH,  voulons- 
nous  enGn  reconnaître  sérieusement  et  d'une  manière  non 
équivoque  la  réputilique  française,  avec  qui  nous  sem- 
blons  renoncer  à  toute  voie  de  conciliation?  Ëh  bien,  dé- 
clarons que  nous  sommes  prêts  à  entrer  en  négociations 
avec  elle  quand  il  existera  un  gouvernement  capable  de 
maintenir  les  relations  mutuelles  de  nos  traités  ,  ainsi  que 
lu  stabilité  de  l'amitié  qui  doit  exister  entre  les  deux  nations 
et  par  conséquent  dès  à  présent,  si  le  gouvernement  existe; 
fait  imporiant,  sur  lequel  il  ne  faut  pas  s'en  rapportera 
des  déclamations  exagérées  ou  à  des  hommes  de  mauvaise 
foi ,  puisque  la  léte  des  uns  et  le  cœur  des  autres  nous 
tromperaient  également  eu  niant  l'existence  de  ce  qui  se- 
rait pourtant  réel. 

«  Quant  à  moi ,  j'avoue  qu'il  ne  m'est  pas  possible  de 
croire  aux  intentions  paciGques  des'ministrcs  quand  je  vois 
que,  dans  la  réponse  qu'ils  ont  fait  faire  par  le  roi  à  la  livrée 
de  Londres,  il  n'est  pas  question  une  seule  fois  de  paix,  et 
qu^au  contraires.  M.  y  déclare  sa  résolution  et  insiste  sur 
la  nécessité  de  continuer  la  guerre  avec  une  vigueur  et  des 
efforts  redoublés. 

n  Je  le  dis  avec  douleur,  mais  avec  vérité:  pas  un  plan, 
pas  une  mesure  dans  le  cabinet  qui  annonce  le  désir  de  la 
puix.  Tranchons  le  mot:  c'est  ici  non  une  guerre  de  la  na- 
tion anglaise  contre  la  France,  mais  une  guerre  des  minis- 
tres anglais  contre  la  France;  c'est  pour  leur  intérêt  parti- 
culier  qu'ils  persistent  dans  len  opérations  qui  ont  amené 
ce  pays  sur  les  bords  de  l'ablmc.  Il  est  grand  temps  que 
les  ministres  renoncent  enGn  à  leur  routine  surannée  d'é- 
vasions et  de  supercheries.  Le  règne  des  chicanes  politi- 
ques est  à  peu  près  passé,  et,  pour  peu  qu'il  reste  dans 
l'âme  de  ces  messieurs  un  seul  sentiment  de  tendresse  pour 
leur  patrie,  pour  peu  que  leur  sûreté  personnelle  les  touche 
encore,  ils  agiront  d'une  manière  franche,  loyale,  et  non 
équivoque.  Qu'ils  fassent  donc  un  aveu  qui,  par  son  uti- 
lité et  la  pureté  de  son  motif,  balancerait  bien  la  petite 
humiliation  de  ramour-oropre  dout  au  reste  i'iocptie  ne 


serait  pas  moins  évidente  sans  cet  aveu  ;  qu^ls  oonvlennent 
que  leurs  manœuvres  désastreuses  ont  compromis  la  sûreté 
et  l'existence  même  de  ce  pays.  Quant  à  la  motion  en  elle- 
même,  c'est  à  des  personnes  plus  instruites  que  moi  dam 
ces  matières  que  je  laisse  le  soin  de  la  combattre,  t 

Quelques  membres  prennent  encore  la  parole  far  ce 
sujeL  M.  Grey  a  parlé  du  désir  que  le  peuple  anglais  avait 
de  la  paix.  11  déclare  n*étre  pas  dupe  des  manœuvres  em- 
ployées pour  procurer  des  conire-oétilions  qui  coutre-ba« 
lancent  celles  qui  la  demandenL  11  trouve  dans  le  projet 
du  ministre  une  clause  à  laquelle  il  s'opposera  de  toulct 
ses  forces  :  c'est  celle  qui  autorise  les  magistrats  k  s'assorer» 
pour  la  marine,  de  toutes  les  personnes,  qu'ils  jugeront 
oisives  et  sans  aveu.  Une  pareille  autorisation  serait  une 
atteinte  nouvelle  à  la  liberté  des  individus.  11  exhorte  la 
Chambre  à  consulter  le  vœu  de  ses  constituants* 

La  motion  de  M.  Pitt  a  été  adoptée,  et  l'examen  du  bill 
proposé  par  lui  renvoyé  an  comité. 


RÉPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Paris ,  le  26  ventôse,  —  La  discussion  qui  s*est 
élevée  dans  la  Convention  nationale,  sur  les  attribu- 
tions du  comité  de  salut  public  pour  les  relations 
extérieures,  a  mis  en  évidence  ceux  qui  veulent  sin- 
cèrement la  paix  et  ceux  qui  cherchent  par  de  vai- 
nes subtilités,  par  de  misérables  chicanes,  à  en  éloi- 
gner répoque  tant  désirée.  Chacun  se  demande  : 
«  Aurons-nous  la  paix  ?  •  Le  peuple  français  la  veut, 
TEurope  en  a  besoin,  rhumauité  la  commande.  On 
Ta  déjà  dit  à  la  tribune  ;  dans  les  feuilles  publiques, 
on  ne  saurait  trop  le  repéter  :  c'est  la  paix  seule  qui 
pourra  faire  cesser  ces  agitations  qu'on  appelle  ré- 
volutionnaires, et  qui  ne  sont  que  les  convulsions  de 
Tanarchie;  c'est  la  paix  seule  qui,  en  rétablissant  la 
balance  entre  les  dépenses  et  les  recettes,  remettra 
de  Tordre  dans  les  finances;  c'est  la  paix  seule  qui» 
en  faisant  disparaître  sans  retour  ces  institutions, 
chefs-d'œuvre  de  la  tyrannie  la  plus  profondément 
conçue,  nous  fera  jouir  de  la  protection  d'un  gou- 
vernement basé  sur  la  justice,  dirigé  par  des  lois 
fixes  et  certaines,  et  resserré  dans  les  limites  qui 
doivent  séparer  et  contenir  tous  les  pouvoirs . 

Assez  de  lauriers  se  mêlent  aux  cyprès  dont  la 
France  est  couverte  ;  il  est  temps  que  le  rameau  d'o- 
livier paraisse  dans  la  main  de  la  victoire  ;  il  est 
temps  que  la  paix  vienne  guérir  des  blessures  en- 
core saignantes,  et  dont  les  cicatrices  attesteront, 
bien  des  années  peut-être,  les  douleurs  que  nous 
avons  ressenties.  Mais  cette  paix  qui  doit  être  l'ub- 
jet  de  tous  nos  vœux,  le  but  de  toutes  nos  pensées, 
parce  qu'elle  est  le  terme  de  nos  malheurs,  cette 
^paix  est  aussi  nécessaire  à  l'Europe  qu'à  notre  ré- 
publique. Osons  proférer  une  vérité  terrible  :  c'est 
3ue  ,  si  la  guerre  continue  encore  quelque  temps  à 
épeupler  les  campagnes,  à  tuer  le  commerce,  ce 
n'est  pas  la  France  seule  qui  sera  menacée  de  la  fa- 
mine ,  c'est  l'Europe  entière  sur  laquelle  ce  spectre 
épouvantable  asseoira  sa  domination  dévorante. 

Puissances  de  la  terre,  plongez  un  moment  vos  re- 
gards sur  cet  avenir  effrayant,  et  voyez  s'il  est  indis- 
pensable de  poser  des  bornes  à  vos  fureurs,  ou  si 
vous  préférez  de  régner  sur  des  débris  et  sur  des  ca- 
davres !  République  française,  c'est  à  toi  qu*il  ap- 
partient, après  six  années  de  sacrifices  et  dix-huil 
mois  de  triomphes,  d'entendre  enfin  la  voix  de  l'hu- 
manité qui^  te  crie  que  tous  les  hommes  sont  frères, 
que  ta  liberté  n'a  pas  besoin  d'être  cimentée  de  leur 
sang,  et  que  ton  mdépendance  a  d'assez  beaux  ga- 
rants dans  la  continuité  de  tes  victoires  et  dans  le 
courage  de  tes  douze  armées.  Ah  !  je  respère,  celle 
voix  n  aura  pas  vainement  retenti.  Sans  doute  il  feut 
que  la  paix  soit  glorieuse  autant  que  solide;  mais 
les  vainqueurs  de  l'Europe^  les  conquérants  de  la 


691 


Hollande  Je  me  reprends,  les  libérateurs  du  Bntave, 
peuvent-ils  faire  une  paix  sans  honneur,  quelles 
qu*en  soient  les  conditions,  pourvu  loutefois  qu^elIes 
rendent  hommage  à  notre  liberté  républicaine?  Si 
quelqu'une  des  parties  belligérantes  doit  se  relâcher 
sur  des  prétentions  trop  ambitieuses,  n'est-ce  pas  au 
vainqueur  qu'il  est  beau  de  montrer  cette  généro- 
sité? Je  suis  si  loin  de  croire  que  nos  inconcevables 
succès  doivent  nous  rendre  plus  difficiles  à  traiter, 
que  c'est  en  eux-mêmes  qu'il  nous  faut,  selon  moi, 

Kuiser  la  modération  et  la  sagesse  qui  mettent  à  Ta- 
ri des  revers  dont  est  presque  toujours  suivie  l'i- 
vresse de  la  prospérité.  Mais  si  nos  armes  étaient 
malheureuses,  si  quelque  grand  revers  avait  com- 
promis la  sûreté  de  l'Etat  et  la  liberté  de  la  patrie, 
c'est  alors  qu'il  faudrait  dire  :  La  guerre  ou  la  mort! 
c'est  alors  qu'il  faudrait  imiter  l'exemple  de  «  Rome 
assiégée,  régissant  tranquillement  les  terres  sur  les- 

Suelles  l'ennemi  venaitd  asseoir  son  camp  (J.-J.  R.).» 
bus  sommes  vainqueurs;  si  nous  faisons  la  paix, 
2ui  est-ce  qui  osera  nous  blâmer  d'avoir  été  mo- 
estes?  l'ennemi?  mais  ses  défaites  ont  aussi  prouvé 
que  nous  sommes  courageux  et  habiles;  nos  con- 
temporains? ils  soupirent  après  le  repos  et  le  bop- 
heur;  la  postérité?  nous  aurons  mérité  sa  recon- 
naissance en  profitant  de  nos  exploits  pour  arrêter 
l'effusion  du  sang,  faire  sortir  de  leurs  ruines  l'agri- 
culture et  le  commerce,  et  procurer  au  peuple  la  li- 
berté qui  n'a  guère  pu  exister  pour  lui  qu'en  espé- 
rapce.  Que  l'accent  de  la  Vérité  n'inspire  aucune 
crainte  :  eh  !  qui  ne  la  connaît  pas?  Croit-on  que  la 
pusillanimité  prévienne  des  désastres?  N'est-on  pas 
convaincu  par  l'expérience  que  tout  ce  qui  se  dit  ici 
est  répété  au  loin  par  des  échos  ou  mercenaires  ou 
intéressés?  N'a-t-on  pas  vu  toujours  qu'une  mau- 
vaise séance  de  la  représentation  nationale  est  pres- 
que aussi  funeste  à  la  république  que  le  serait  la 
perte  d'une  bataille?  Les  luttes  de  l 'amour-propre, 
le  choc  et  le  déchirement  des  passions,  la  versatilité 
des  opinions,  le  défaut  de  suite  dans  les  mesures  de 
vigueur  et  d'énergie,  les  transactions  arrachées  par 
le  crime  audacieux  à  la  probité  sans,  vertu  et  à  la 
raison  sans  caractère,  voilà  ce  qui  pourrait  effrayer 
les  patriotes,  les  républicains;  voilà  ce  dont  les  re- 
présentants du  peuple  doivent  perpétuellement  se 
garantir.  Trouvé. 


CONVENTION  NATIONALE. 

Préêidenee  de  Bourdon  {de  VOite). 
SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU  24  VENTOSE. 

Ruelle  :  Citoyens,  ce  que  vous  venez  d'entendre 
prouve  que  les  représentants  du  peuple  chargés  par 
vous  de  rétablir  la  paix  dans  la  Vendée  n'ont  pas 
trahi  la  république,  et  sont  dignes  de  toute  la  con- 
fiance de  la  Convention  nationale.  (Oui,  oui!  s'é- 
crient un  grand  nombre  de  membres  en  applaudis- 
sant.)  Cependant,  depuis  huit  jours,  la  malveillance 
s'agite  contre  eux;  on  dit  qu'ils  ont  favorisé  les 
royalistes,  qu'ils  ont  promis  aux  Vendéens  de  leur 
livrer  des  places,  et  que  des  arrêtés  secrets  leur 
earanlissent  l'exécution  de  cette  promesse.  Tout  à 
l'heure,  dans  celte  salle  même,  nous  avons  eu  la 
douleur  d'entendre  dire  que  nous  venions  tromper 
la  Convention  sur  le  véritable  état  de  la  Vendée, 
qu'il  n'y  avait  qu'une  trêve  de  conclue»  et  que  bien- 
tôt la  guerre  allait  renaître. 

Plusieurt  membres:  Nomme  ceux  qui  ont  dit  cela! 

RuEr.LB  :  Lorsque  nous  arrivâmes  dans  les  dépar- 
tements de  l'Ouest,  nous  ne  connaissions  pas  les 


Vendéens,  et,  je  l'avoue,  nous  avions  contre  eux  de 
grandes  préventions.Chargés  par  vous  d'opérer  l'exé- 
cution du  décret  du  12  frimaire,  nous  le  fîmes  ré- 
pandre avec  profusion  dans  la  Vendée.  Deux  citoyens 
de  Nantes,  ne  consultant  que  leur  amour  pour  la  pa- 
trie, ont  pénétré,  non  sans  courir  de  grands  risques, 
jusqu'au  camp  de  Charette  ;  ils  ont  remis  à  ce  chef 
prlusieurs  exemplaires  du  décret  et  de  la  proclama- 
tion. Depuis  longtemps  les  chefs  et  les  malheureux 
habitants  de  la  Vendée  soupiraient  après  la  paix  ; 
c'est  vous  dire  avec  quelle  joie  votre  décret  fut  reçu. 
Je  ne  vous  dissimulerai  pas  que,  dès  nos  premiè- 
res entrevues  avec  les  chefs  vendéens,  ils  nous  in- 
spirèrent de  la  confiance,  et  nous  crûmes  à  la  sincé- 
rité de  leur  démarche  ;  ils  nous  avaient  fait  beaucoup 
de  prisonniers,  ils  les  rendirent;  ils  nous  avaient 
pris  des  bestiaux  de  toute  espèce,  ils  s'empressèrent 
de  les  remettre  ;  les  chevaux  de  l'armée  dans  un  de 
nos  cantonnements  manquaient  de  fourrages,  ils  en 
fournirent.  (Vifs  applaudissements.) 
,  Je  rendis  compte.de  ces  faits^à  la  Convention  le 
;  29  nivôse,  et,  quelque  exacts  qu'ils  fussent,  la  mal- 
I  veillance  les  dénatura  et  la  calomnie  les  empoisonna. 
A  peine  la  pacification  a-t-elle  été  conclue,  que  les 
Vendéens  ont  fourni  à  Nantes  environ  trente  milliers 
de  foin,  dont  la  disette  était  extrême,  et  sans  les- 
quels la  plupart  des  chevaux  de  la  république  eus- 
sent péri  d'inanition. 

A  cette  époque,  les  chefs  de  la  Vendée  entrèrent 
à  Nantes,  non  pas  revêtus  du  panache  blanc,  comme 
on  l'a  dit,  mais  décorés  de  la  cocarde' et  du  panache 
tricolores.  (Vifs  applaudissements.)  Leur  premier 
soin  a  été  de  faire  part  au  peuple  de  leurs  senti- 
ments. Voici  la  lettre  qu'ils  ont  envoyée  à  la  Société 
populaire  de  Nantes. 

Lettre  adressée  à  la  Société  populaire  de  Nantes 
par  les  chefs  soussignés  de  l  armée  dite  de  la 
Vendée, 

•  Citoyens,  deux  années  d*ane  gnerre  faneste  tous  ont 
appris,  comme  à  nous,  combien  11  est  dangereux  d'établir 
entre  les  villes  et  les  campagnes  une  scission  capable  de 
rompre  tous  les  liens  d'échanges  et  de  services  mutuels  qui 
assurent  la  prospérité  des  unes  et  des  autres.  Sans  doute, 
si  nos  ennemis  communs  n'avaient  pjs  fait  tous  leurs  eflTorts 
pour  étendre  les  ravages  d'un  incendie  facile  à  éteindre 
au  commencement,  nous  nous  serions  bientôt  entendus, 
et  nous  n'aurions  pas  à  gémir  sur  tous  les  désasUres  dont 
nous  avons  été  les  témoins.  Oublions,  s'il  se  peut,  tant  de 
scènes  désolantes  pour  Thumanilé;  et,  puisque  la  paix  vient 
verser  un  baume  salutaire  sur  nos  blessures,  ne  les  enve« 
nimons  pas  au  lieu  de  les  guérir;  ne  songeons  à  nos  maux 
que  pour  employer  tous  les  moyens  qui  nous  restent  à  les 
réparer, 

«  Le  commerce  et  l'agriculture,  pour  fleurir,  ont  besoin 
de  la  paix,  de  la  justice,  de  la  tolérance  et  de  la  liberté. 
Ne  nous  livrons  pas  ù  discuter  des  opinions  politiques  sur 
lesquelles  les  hommes  les  plus  sages,  les  plus  éclairés,  peu- 
vent n'élre  pas  d'accord  sans  cesser  d'être  des  citoyens 
utiles,  des  gens  vertueux:  travaillons  plutôt  à  rétablir 
entre  nous  ces  communications  avantageuses  qui  fournis- 
•ent  aux  hommes  les  occasions  de  faire  valoir  leur  indus- 
trie, leurs  talents,  qui  multiplient  les  sources  du  travail, 
qui  détournent  les  malheurs  de  l'oisiveté,  qui  procurent 
enfin  les  aisances  et  les  commodités  de  la  vie. 

•  Après  les  tempêtes  qui  ont  agité  nos  contrées,  après 
les  ravages  qui  les  ont  désolée^,  vous  ne  pouvei,  citoyens* 
compter  y  trouver  l'abondance  et  les  richesses  qu'elles  pro* 
duisaicnt  autrerois;  mais  l'eCTet  d'une  réconciliation  sincère 
est  de  porter  les  hommes  à  une  bienveillance  mutuelle  et  à 
s'entre-secourir  de  tout  leur  pouvoir;  soyei  sûrs  qu'il  ne 
tiendra  pas  à  nous  que  vos  besoins  en  plusieurs  genres  ne 
soient  satisfaits.  De  votre  côté,  veuillei  bien  penser  aussi 
que  les  habitants  de  la  campagne  exigent  des  ménagements, 

'  et  que  ceux  de  la  Vendée,  séparés  de  vous  pendant  un 


692 


Joof  eipace  de  temps*  ont  des  idéeSi  des  habiludes^  des 
préventions  même  qu'il  est  nécessaire  de  ne  pas  choquer 
trop  fortement  pour  parvenir  à  établir  cette  confiance  et 
cette  sécurité  qui  doivent  être  les  plus  sûrs  garants  de  la 
paix;  ses  fruits  sont  si  doux,  ses  avantages  sont  si  précieux, 
qu'elle  vaut  bien  la  peine  que  Ton  fasse  quelques  sacrifices 
pour  Pobtenir.  D'ailleurs,  les  Français  ont  trop  de  raisons 
de  s'estimer  pour  être  longtemps  ennemis  les  uns  des 
autres.  II.  est  temps  que  leurs  malheureuses  dissensions 
cessent,  qu'ils  n'aiguisent  plus  contre  eux-mêmes  des  ar- 
mes destinées  k  les  défendre  contre  leurs  ennemis  com- 
muns. Qu'au  raient-ils  à  se  contester  ?  La  gloire  des  armes 
est  une  propriété  nationale  qu'ils  doivent  partager  en  com- 
mun, et  non  se  disputer  en  rivaux. 

•  Soyons  donc  amis,  citoyens,  de  cœur  et  dWectioc;* 
rassemblons  no^  efforts  pour  seconder  les  vues  sages  et 
l)ien faisantes  de  la  Cou\enlion  nationale,  pour  aider  aux 
rcprésenlanls  qu'elle  a  envoyés  parmi  nous  à  finir  d'extir- 
per jusqu'aux  dernières  racines  de  la  tyrannie  qui  a  cou- 
vert la  France  de  deuil  et  de  misère.  Les  fripons  et  les  scé- 
lérats ont  seuls  intérCt  au  désordre,  à  ranarchie  et  à  la 
discorde.  Tous  les  bons  citoyens,  au  contraire,  tous  les 
hommes  d'honneur,  de  courage  et  de  probité,  ont  le  plus 
grand  intérêt  à  s'estimer,  à  se  concilier,  à  s*entendre,  pour 
opérer  le  bonheur  et  le  salut  de  notre  communepntrie.  Tels 
sont  nos  sentiments  à  votre  égaid,  et  nous  éprouvons  Je 
plus  grand  plaisir  à  vous  en  donner  l'assurance. 

•  Les  généraux  et  officiers  de  la  Vendée  t 

Signé  Charbttb,  Fleuriot,  Coubtus,  Daoanc,  Rb- 
MOU»  FnoTOViN,  Martim  aîné 9  Dblavillb,  Gi- 
BEBT»  Martin  jeune. 
■  P.  S,  Nous  devons  vous  prévenir  que  la  malveillance 
et  l'intrigue  ont,  de  votre  côté  comme  du  nôtre,  essayé 
toutes  sortes  de  manœuvres  pour  traverser  la  négociation 
de  la  paix  ;  les  méchants,  des  deux  côtés,  ne  manqueront 
pas  de  chercher  tous  les  moyens  que  leur  fournira  leur  dé- 
testable astuce,  pour  troubler  la  sérénité  de  la^paix  elle- 
même.  Soyez  donc  en  garde  contre  leurs  efforts  perfides, 
comme  nous  serons  sans  cesse  attentifs  à  les  rendre  aussi 
Tains  que  propres  &  faire  démasquer  leurs  auteurs.  ■ 

Ruelle  :  Vous  apercevez  dans  cette  lettre  la  fran- 
chise des  hommes  que  j'ai  essayé  de  peindre;  vous 
voyez  que  la  pacification  est  sincère,  et  que  ce  n'est 
point  une  trêve,  comme  on  Ta  dit.  Bientôt,  citoyens, 
vous  verrez  à  votre  barre  les  drapeaux  qui  flottaient 
dans  la  Vend<^e,  et  qui  nous  ont  hé  remis  avec  celte 
devise  :  «  Conquis  par  la  justice  et  par  rhumanité.  • 
(Les  plus  vils  applaudissements  éclatent  de  toutes 
parts  et  se  prolongent  pendant  quelques  instants.) 

Ruelle  donne  ensuite  lecture  de  l'extrait  d'une 
lettre  datée  de  Nantes,  du  lu  ventôse. 

•  Des  nouvelles  certaines  (parlant  de  Stofflet) 
m'apprennent  que  Rostain^  l'a  abandonné,  a  re- 
passe la  Loire  avec  sa  famille ,  qui  parait  être  la 
cause  de  sa  rupture  avec  Slofllet,  craignant  sa  ven- 
geance sur  sa  femme  et  ses  enfants ,  s'il  suivait 
l'exemple  de  Trolouin,  de  Gibert,  etc.,  etc.  La  plu- 
part des  chasseurs  stofHeticns  le  quittent,  murmu- 
rent ;  toutes  les  campagnes  refusent  de  marcher,  et 
je  vois,  d'après  tout  ce  que  m'ont  dit  divers  indivi- 
dus de  ce  pays,  que  ces  scélérats  ne  sont  pas  au  plus 
quatre  à  cmq  cents  déterminés,  et  que  c'est  ià  toute 
la  ressource  de  Stofflet,  avec  Quelques  paysans  qu'il 
bétonnera  pour  les  faire  marcher.  Il  paraît  que  c'est 
dans  les  communes  environnant  Chemillé,  dans  le 
ci-devant  Anjou,  qu'il  veut  organiser  ses  forces; 
c'est  en  vain  ;  je  crois  que  son  heure  dernière  sonne. 
Je  présume  les  armées  républicaines  sur  le  Layon 
en  mouvement;  peut-être  a-l-on  passé.  Charette  est 
à  la  tête  de  quinze  mille  hommes  bien  armés,  ou- 
trés des  ravages  de  Stofflet,  qui  garrotte,  soufflette, 
crache  à  la  figure,  jette  de  la  boue  à  tous  les  olliciers 

qu'il  peut  attraper Déjà  cette  armée  a  fait  un 

mouvement  en  avant;  Charette  est  à  Beaurepaire; 
il  va  toujours  aller  provoquant  une  aflTairc.  Autant 


il  y  a  de  perfidie  et  de  scélératesse  d*un  cOté,  antant 
il  y  a  de  loyauté  et  d'honneur  de  Taulre.  • 

Merlin  :  Je  demande  que  Ruelle  donne  aussi  lec- 
ture d'une  lettre  qui  lui  a  été  adressée  par  le  chef  de 
la  Vendée. 

BoissY  d'Anolas:  La  roode&tie  de  notre  collègue 
se  refuse  a  vous  la  Taire  connaître  ;  je  vais  la  lire.  La 
voici  : 

Au  représenlanl  du  peuple  Ruelle, 

LtjauDAye,  te  fS  février  I79S  (TÎeux  style). 
«  Citoyen  représentant,  personne  ne  mérite  plus  que 
vous  de  recevoir  de  notre  part  tous  les  témolfj^nagfes  parti- 
culiers de  la  reconnaissance  que  nous  ont  inspirée  vos  soins 
assidus  et  votre  zèle  pour  la  pacification  de  la  Vendée.  Nous 
nous  empresserons  toujours  de  saisir  les  occasions  qui 
pourront  donner  à  ce  sentiment  toute  la  publicité  quM 
doit  avoir;  et  puisque  vous  êtes  celui  qui  sûtes  nous  inspi- 
rer, avec  la  confiance,  le  désir  de  faire  cesser  une  guerre 
affligeante,  soyez  aussi  celui  auquel  nous  nous  adressoat 
pour  les  faire  passer  à  la  Convention  nationale  comme  le 
gage  de  notre  réconciliation  sincère.  Ces  gages  so!it  en 
même  temps  les  monuments  d'une  victoire  qui  doit  être 
bien  douce  pour  votre  cœur.  Gomme  cette  victoire  est  le 
fruit  d'une  négociation  pacifique,  nous  désirons,  citoyen 
représentant,  que  les  citoyens  Bureau  et  Blin,  qui  ont 
{KTondé  depuis  longtemps  vos  heureui  desseins  «  soient 
chargés  par  vous  de  faire  hommage  à  la  Convention  natio- 
nale de  nos  drapeaux  ;  ils  ont  passé  avec  nous  assez  de 
temps  pour  counailre  nos  vrais  sentiments  ;  ils  sauront  les 
exprimer  dans  toute  leur  sincérité;  et,  persuadés  d^avance 
que  vous  nous  accorderez  cette  satisfaction,  nous  leur  écri- 
vons pour  leur  en  faire  part, 

•  Recevez  Tassurance  de  notre  estime  et  de  notre  atta- 
chement. 

«  Signé  Cbautte,  Flbubiot,  Sapiraud»  Goubtds  et 
Dbbbuc.  » 
Les  plus  vifs  applaudissements  se  font  entendre. 
La  Convention  se  lève  tout  entière,  aux  cris  de  vive 
la  république! 

Elle  contirme  à  ruuanîmité  tous  les  arrêtés  pris 
par  ses  commissaires  à  l'armée  de  TOuest;  Timpres- 
sion  et  rinsertion  au  Bulletin  de  leurs  rapports  et 
des  lettres  lues  par  eux  sont  décrétées. 

Lacombb-Saint-Micbbl  :  Le  compte  satisfaisant 
qui  vient  de  nous  être  rendu  par  nos  col  lègues  prouve 
que  le  moment  est  arrivé  de  satisfaire  à  une  demande 
qui  nous  a  été  réitérée  par  les  habitants  des  commu- 
nes voisines  de  la  Vendée.  Je  demande  que  nos  col- 
lègues, qui  ont  si  bien  justifié  la  confiance  que  nous 
avions  en  eux,  soient  renvoyés  au  poste  qui  leur 
était  assigné ,  et  où  ils  ont  remporté  une  victoire 
si  importante  à  la  république.  (On  applaudit  vive- 
ment.) 

La  proposition  de  Lacombe  est  adoptée  à  Tuna- 
nimite. 

—  Boissy  d'Anglas,  au  nom  du  comité  de  salut 
public,  fait  proroger  pour  un  mois  les  pouvoirs  de 
Gillel,  représentant  du  peuple  près  Tarmée  de  Sam- 
bre-et-Meuse. 

Bassal  :  J'avais  dénoncé  un  agent  national  comme 
ayant  itiis  en  récjuisition  du  bois  à  32  livres  la  voie, 
qui  ensuite  a  été  vendu  150  liv.  La  commission  des 
approvisionnements  et  marchés  a  cru  devoir  relever 
ce  fait  et  le  démentir.  J*avais  demandé  dans  le  temps 
le  renvoi  de  ma  dénonciation  au  comité ,  â  TefTet  de 
rechercher  l'auteur  de  cette  manœuvre.  Je  ne  pou- 
vais avoir  été  trompé  sur  ce  fait,  que  je  tenais  du 
propriétaire  lui-même,  qui  m*en  avait  lait  la  décla-  ' 
ration.  Cet  homme  est  également  connu  de  mon  col- 
lègue Geffroy,  et  il  peut  donner  à  ce  sujet  les  mêmes 
éclaircissements. 

Je  demande  donc  qti'il  soit  enjoint  â  votre  comité 
de  faire  les  recherches  nécessaires  pour  atteindre  les 
auteurs  de  cette  manœuvre,  parce  que  je  tiens  ma 
dénonciation  pour  vraie  et  que  j*y  persiste. 


en 


Cette  proposition  est  décrétée. 
.  Andbb  Dumont  :  Vous  avez  attribué  à  votP6  co- 
mité de  sûreté  générale  le  soin  de  renouveler  les 
comités  révolutionnaires  de  la  république  ;  les  com- 
missaires de  police ,  dont  les  fonctions  ne  sont  pas 
moins  importantes  dans  les  circonstances  actuelles, 
ne  sont  pas  dans  ce  même  cas;  je  demande  en  con- 
séquence que  la  Convention  nationale  charge  son 
comité  de  sûreté  générale  de  pourvoir  à  leur  renou- 
vellement et  lui  en  accorde  le  pouvoir. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

—  Pémartin ,  au  nom  du  comité  de  sûreté  géné- 
rale ,  propose  le  projet  de  décret  suivant  : 

•  Art.  I«r.  Les  cultivateurs,  les  artistes  et  les  né- 
gociants compris  dans  les  dispositions  de  la  loi  du 
5  ventôse  dernier,  qui  auraient  besoin  de  s'absenter 
du  lieu  de  leur  domicile  pour  vaquer  à  leurs  affaires, 
en  feront  leur  déclaration  à  leurs  municipalités  res- 
pectives. 

•  11.  Cette  déclaration  sera  soumise  à  l'examen  du 
conseil  général  de  la  commune;  s'il  décide  que  les 
motifs  de  Tabsence  sont  légitimes,  la  municipalité 
pourra  accorder  un  congé  limité ,  et  pour  le  temps 
qui  sera  jugé  nécessaire. 

•  111.  Dans  ce  cas,  la  municipalité  délivrera  un 
passeport  dans  lequel  sera  désigné  le  lieu  où  le  pé- 
titionnaire doit  se  rendre. 

•  IV.  Le  porteur  du  passeport  sera  tenu  de  le  faire 
enregistrer,  dans  les  vmgt-aualre  heures  de  son  ar- 
rivée ,  à  la  municipalité  du  lieu  désigné  dans  le  pas- 
seport. 

•  V.  Ceux  qui  ne  se  conformeront  pas  aux  disposi- 
tions ci-dessus  seront  soumis  aux  peines  portées  par 
la  loi  du  5  ventôse  dernier.  • 

DuRoY  :  Si  nous  voulons  rétablir  la  paix  entre 
tous  les  citoyens ,  il  faut  bannir  l'arbitraire ,  il  faut 
bannir  les  dénonciations  qui  peuvent  entretenir  les 
haines  ;  il  ne  faut  plus  de  suspects  en  France;  il  ne 
doit  plus  y  avoir  que  des  bons  et  des  méchants. 

•'*  :  Tu  ne  parlais  pas  comme  cela  autrefois. 

DoROY  :  Si  j*ai  mal  fait  autrefois,  ce  nVst  pas  une 
raison  pour  que  je  fasse  mal  encore.  Il  faut  qu'il  n'y 
ait  que  les  tribunaux  qui  aient  le  droit  de  poursuivrje 
les  coupables.  Il  ne  faut  pas  poursuivre  tel  homme 
parce  qu'il  a  occupé  telle  place,  mais  seulement 
parce  qu'il  a  abusé  de  ses  pouvoirs.  Vous  avez  tous 
senti,  citoyens,  combien  la  loi  du  It  septembre 
avait  fait  de  mal  ;  celle  du  5  ventôse  lui  ressemble. 
Vous  comprenez ,  dans  une  mesure  générale  que 
vous  avez  prise  contre  des  fripons,  les  honnêtes  gens 
qui  ont  rempli  des  places  semblables  aux  leurs;  en 
obligeant  les  fonctionnaires  publics  destitués  depuis 
le  9  thermidor  de  se  présenter  deux  fois  par  jour  à 
leur  municipalité,  vous  les  empêchez  de  vaauer  à 
leurs  affaires  et  vous  entravez  le  commerce.  Je  de- 
mande le  rapport  de  cette  loi. 

Crassous  :  Les  exceptions  proposées  à  la  loi  du 
5  ventôse  prouvent  combien  elle  est  mauvaise.  On 
ne  vous  a  pas  encore  proposé  toutes  celles  dont  elle 
est  susceptible,  peut  être  parce  qu'on  en  a  senti  tout 
l'embarras.  Je  vous  demande  si  vous  comprendrez 
sous  le  titre  d'artistes  ou  de  négociants  les  voituriers 
des  campagnes  qui  auraient  pu  être  membres  d'un 
comité  révolutionnaire.  Voulez-vous  établir  une  lé- 
gislation solide;  faites  disparaître  l'arbitraire;  rap- 
portez la  loi  du  5  ventôse  ;  celte  loi  qui,  par  l'exten- 
sion très-susceptible  et  par  la  facilité  qu  elle  prête  à 
l'arbitraire,  peut  devenir  aussi  désastreuse  que  la 
loi  du  17  septembre.  Je  demande  le  rapport  de  ces 
deux  lois. 

ViLLÈTARO  :  Vous  avez  dit  qu'il  était  temps  que 
riirbitraire  cessât;  aussitôt  on  a  cru  que  la  justice 
allait  seule  régner.  Quel  a  dû  être  l'étonnementdes 


citoyens  en  Vôvant  une  loi  arbitraire  succéder  h  une 
loi  arbitraire  !  Il  est  temps  que  nous  nous  réunis- 
sions pour  faire  prospérer  la  patrie  ;  ce  n'est  pas  en 
employant  l'arbitraire  que  nous  y  parviendrons;  c'est 
en  protégeant  l'innocence ,  et  en  raisatit  des  lois  qui 
ne  punissent  que  les  coupables.  Ce  n'est  pas  en  em- 
ployant l'arbitraire  que  nous  assiérons  la  républi- 
que sur  des  bases  solides;  car  le  négociant  refuse 
d'accorder  sa  confiance  dans  la  crainte  que  ceux  à 
qui  il  la  donnerait  ne  deviennent  les  victimes  de  l'ar- 
bitraire. Ce  ne  serait  pas  faire  aimer  la  révolution 
que  de  laisser  subsister  un  régime  oui  vexerait  tous 
les  citoyens.  D'après  celai  je  demande  le  rapport  des 
lois  du  17  septembre  et  du  5  ventôse. 

Perri!<i  (des  Vosges)  :  Je  suis  de  cet  avis  ;  mais  il 
faut  se  rappeler  les  circonstances  qui  ont  fait  rendre 
la  loi  du  5  ventôse.  La  commune  oe  Paris  était  inon- 
dée de  mauvais  sujets  qiui  s'y  réunissaient  depuis  le 
9  thermidor.  Je  demande  qu'on  rapporte  ces  lois,  si 
l'on  veut,  mais  ie  demande  en  même  temps  ^ue  les 
fonctionnaires  aestitués  ne  puissent  venir  à  Paris 
sans  une  permission  de  leur  municipalité. 

Clauzbl  :  Il  est  impossible  que  le  comité  de  sûreté 
générale  fasse  la  police  de  Pans  si  vous  rapportez  la 
loi  du  5  ventôse.  11  est  impossible  qi^'une  mesure  pa- 
reille ne  froisse  pas  quelques  bons  citoyens  ;  mais 
rappelez-vous  que ,  lorsque  vous  l'avez  prise  ,  il  se 
rendait  à  Paris,  de  toutes  les  communes  de  la  répu- 
blique, et  surtout  du  Midi,  une  foule  d'égorgeurs  qui 
étaient  poursuivis  dans  leurs  départements. 

Dans  quels  moments  rapporteriez-vous  cette  loi? 
C*est  lorsqu'il  vient  d'être  placardé  des  libelles  af- 
freux ,  lorsqu'il  y  a  encore  dans  Paris ,  malgré  les 
dispositions  de  ce  décret ,  une  foule  d'égorgeurs  qui 
se  cachent  et  qu'il  faut  faire  partir. 

Nous  avons  décrété  que  nous  ne  rapporterions  au- 
cune loi  sanS' avoir  entendu  auparavant  le  rapport 
d'un  comité.  Je  demande  que  nous  exécutions  nos 
propres  décrets,  et  que  les  propositions  de  Crassous 
et  de  Villetard  soient  renvoyées  au  comité  de  sûreté 
générale. 

Le  renvoi  est  décrété. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures. 

SÉAIfCe  DU  15  VCIfTOSB. 

Merlin  (de  Thion ville)  :  J'annonce  à  rassemblée 
que ,  la  19  de  ce  mois,  la  garnison  de  Luxembourg , 
ayant  fait  une  sortie  générale,  a  été  repoussée  jusque 
dans  la  palissade  par  l'armée  de  la  république. 
,  Je  dois  encore  dire  à  la  Convention  qu'en  démo- 
lissant le* fort  de  Rheinsfeld  on  a  trouvé  cent  cin- 
quante tonneaux  de  poudre ,  vingt-cinq  de  cartou- 
ches à  balles  et  plusieurs  à  canon.  Ainsi  nos  ennemis 
prennent  la  peine  de  nous  approvisionner  pour  la 
campagne  prochaine.  ^On  applaudit.) 

—  Des  colons  de  Saint-Domingue  sont  admis  à  la 
barre.  ; 

Le  citoyen  BruUey^  orateur  de  la  députation  :  Ci- 
toyens représentants,  le  but  principal  de  l'Angle- 
terre ,  dans  la  guerre  actuelle  avec  la  France ,  est 
ranéanlissemenl  du  commerce  français;  pour  y  par- 
venir, il  lui  fallait  la  conquête  ou  plutôt  la  destruc- 
tion des  colonies  françaises,  source  première  de  la 
marine  et  du  commerce  De  là  le«  prévarications  et 
les  forfaits  des  agents  perfides  du  pouvoir  exécutif, 
qui,  toujours  au  nom  de  la  république,  ont  persé«- 
cuté,  déporté  ou  fait  égorger  cette  portion  précieuse 
du  peuple  français  qui  avait,  pendant  quatre  ans , 
conservé  à  la  France  ses  colonies,  en  combattant  ses 
ennemis  et  les  contre-révolutionnaires  de  toutes  les 
couleurs. 

C'est  cette  portion  active  et  industrieuse  de  la  na 


694 


tioD  qiii  rivifiait  ragricuUare  et  tes  maoufactares 
françaises  en  imprimant  aa  commerce  un  monve- 
ment  annuel  d«  400  millions  ;  c*est  encore  elle  qui , 
par  le  résultat  de  ses  travaux ,  procurait  à  la  France 
ses  moyens  d'échanges  abondants  en  denrées  colo- 
niales; qui  assurait  à  la  France ,  dans  la  balance  gé- 
nérale du  commerce  de  TEurope,  une  prépondérance 
de  74  millions. 

Eh  bien ,  législateurs,  c*est  tette  portion  de  vos 
frères  d*outre-roer  qu'on  a  forcée,  le  fer  et  le  feu  à 
la  main ,  de  se  réfugier  chez  un  peuple  hospitalier. 
Et  ceux  qui,  pour  favoriser  l'Angleterre,  les  ont  ré- 
duits a  cet  état  de  fuite  et  de  détresse ,  osent  les  ca- 
lomnier !  Vous  l'avez  entendu  jusque  dans  cette  en- 
ceinte :  des  hommes  qui  ont  osé  se  dire  investis  de  la 
coniiance  et  des  pouvoirs  des  colons  n'ont  cessé  de 
vous  répéter  qu'ils  doivent  être  rangés  dans  la  classe 
des  émigrés. 

La  réponse  à  ces  calomnies  vient  de  nous  être 
transmise  par  ceux  mêmes  qui  en  sont  l'objet  ;  ils 
nous  ont  expressément  chargés  de  vous  en  donner 
connaissance  ofGcielIe.  Vous  l'entendrez  avec  inté- 
rêt ,  parce  qu'il  est  temps  que  vous  connaissiez  les 
véritables  sentiments  de  vos  frères  d*outre-mer. 

Procêi-verbcU  de  célébration  de  la  fête  du  18  ther- 
midor (10  août^  vieux  style). 

L*an  2e  de  la  république  française,  une  et  indivi- 
sible, et  le  24  thermidor,  les  citoyens  français  ac- 
tuellement à  Philadelphie ,  voulant  donner  aux  re- 
présentants du  peuple  français  et  à  tous  leurs  frères 
de  l'Europe  une  preuve  de  leur  dévouement  à  la 
cause  de  la  liberté,  de  leur  attachement  à  la  répu- 
blique française,  mais  désirant  allier  l'exécution  du 
décret  qui  consacre  la  fête  du  10  août  1792  avec  la 
soumission  qu'ils  doivent  aux  lois  et  aux  usages  des 
Etats-Unis,  qui  destinent  le  dimanche  a  la  tranquil- 
lité et  au  recueillement  religieux  ;  après  avoir  fixé 
au  jour  suivant  la  célébration  de  ladite  fête ,  jaloux 
de  manifester  leur  enthousiasme  au  milieu  d'un  peu- 
ple allié  de  la  France,  y  ont  procédé  de  la  manière 
suivante. 

Au  soleil  levant,  la  fête  fut  annoncée,  sur  la  place 
du  Centre,  lieu  de  la  réunion,  par  une  salve  de  vingt- 
deux  coups  de  canon  (par  allusion  au  22  septem- 
bre). 

A  huit  heures  du  matin,  une  autre  salve  de  dix 
coups  de  canon  annonça  la  fête  du  10  août  et  Theure 
du  rassemblement. 

Les  citoyens  français  et  américains  se  rendirent 
sur  la  place  du  Centre,  où  l'ordre  de  la  marche  de- 
vait être  distribué.  La  plus  grande  partie  des  ci- 
toyens portait  des  brancnes  de  chêne ,  et  des  bou- 
quets d'épis  de  blé ,  ornés  de  rubans  tricolores. 

Au  milieu  de  cette  place  était  élevé  un  obélisque 
décoré  des  attributs  de  la  liberté  ;  sur  les  quatre 
faces  de  sa  base  étaient  gravées  les  inscriptions  sui- 
vantes : 

A  llmmorUlitë. 
La  république  française,  une  et  indivisibla^ 

Liberté,  Egalité,  Fraternité. 
Tremblei!  tyrans;  Toire  règne  est  passé. 

Une  députation  de  citoyens  français  partit  alors  du 
lieu  du  rassemblement,  et  se  rendit  chez  le  ministre 
français ,  où  étaient  réunis  les  chefs  civils  et  mili- 
taires des  Etats  de  Pensylvanie.  Un  député  annonça 
au  ministre  que  le  peuple  attendait  sesreprésen 
tants  ;  aussitôt  tous  se  mettent  en  marche  ;  ils  arri- 
vent sur  la  place ,  précédés  des  drapeaux  des  deux 
nations,  au  bruit  des  tambours  et  du  canon,  aux 
cris  mille  fois  répétés  de  vive  la  république  française, 
um  et  indivisible!  vivent  les  Etats-Unis!  Une  mu- 


sique guerrière  avait  accompagné  leur  marche,  et 
jouait,  par  intervalle,  des  airs  analogues  aux  tnins* 
ports  qui  éclataient  de  toutes  parts. 

Quand  tout  fut  disposé  pour  la  marche ,  elle  fut 
annoncée  par  dix  coups  de  canon. 

Elle  fut  ouverte  par  deux  pièces  d'artillerie ,  ser- 
vies par  des  canonniers  français  et  américains  ;  on 
i  lisait  sur  toutes  les  figures  la  haine  que  chaque  ci- 
toyen allait  jurer  aux  tyrans:  l'anniversaire  de  la 
destruction  du  despotisme  faisait  éclater  sur  tous 
les  visnges  l'amour  de  la  patrie ,  de  la  liberté  et  de 
l'égalité. 

Les  tambours  battaient,  alternativement  avec  la 
musioue ,  des  marches  françaises. 

L'obélisque  était  porté  par  quatre  citoyens  fran- 
çais et  américains;  un  grenadier  suivait ,  tenant  à  la 
main  une  pique  surmontée  du  bonnet  de  la  Liberté. 

De  jeunes  citoyennes ,  vêtues  de  blanc ,  parées 
de  couronnes  et  de  ceintures  tricolores,  portant 
chacune  une  corbeille  de  fleurs ,  entouraient  Tobë- 
lisque. 

Paraissaient  ensuite  les  drapeaux  des  deux  nations, 
précédés  du  corps  de  musioue  ;  sur  deux  colonnes, 
a  droite  et  à  gauche,  depuis  la  tête  du  cortège  jusqu'à 
la  fin,  marchaient  tous  les  citoyens  français  et  amé- 
ricains confondus,  tandis  que  le  ministre',  les  consuls 
français,  les  chefs  civils  et  militaires  de  Pensylvanie 
tenaient  le  centre  de  la  marche. 

Des  bouquets  d*épis  de  blé,  ornés  de  rubans  tri- 
colores, furent  les  seules  armes  employées  à  main- 
tenir Tordre  de  la  marche;  les  couleurs  nationales 
étaient  respectées  à  Ten  vi  par  l'aflluence  des  citoyens 
qui  assistaient  à  cette  cérémonie. 

On  se  rendit  dans  cet  ordre  sur  un  enclos  dépen- 
dant de  la  maison  du  ministre  de  la  république  fran- 
çaise; là  étaitielevé  un  autel  de  la  patrie,  sur  lequel 
était  la  statue  de  la  Liberté  ;  les  drapeaux  des  deux 
nations  furent  plantés  à  ses  côtes;  autour  de  i'autel 
étaient  rangées  les  jeunes  citoyennes. 

Des  hymnes  patriotiques  furent  chantés  et  accom- 
pagnés par  |a  musique ,  tandis  qu'aux  invocations 
les  plus  toucnantes  les  jeunes  citoyennes  faisaient  à 
la  Liberté  hommage  des  fleurs  qu'elles  avaient  ap- 
pbrtées ,  et  dont  elles  couvraient  son  autel  avec  le 
zèle  intéressant  de  leur  âge. 

Les  hymnes  patriotiques  finis,  le  citoyen  ministre 
de  la  république  française  fut  placé  à  la  droite  de 
Tautel  de  la  patrie  ;  le  citoyen  Chotard  aîné  se  plaça 
à  la  gauche,  et  fit  un  discours  analogue  à  la  journée 
du  10  août ,  à  la  suite  duquel  il  prononça  le  serment 
de  fidélité  à  la  république ,  au  nom  de  tous  les  Fran- 
çais, qui ,  avec  le  plus  grand  enthousiasme,  répé- 
taient :  •  Nous  le  jurons!  •  à  chaque  division  da 
serment. 

Le  ministre  de  la  république,  invi'té  à  être  l'organe 
des  Français  auprès  de  la  Convention  nationale, 
après  avoir  témoigné  sa  sensibilité ,  ajouta  :  •  Ci- 
toyens, vous  venez  de  prêter  serment  entre  mes 
mains  comme  le  représentan  de  la  république  fran- 
çaise; recevez  le  mien  comme  faisant  partie  de  la 
souveraineté  du  peuple;  •  et  il  répéta  le  même  ser- 
ment. A  peine  Teut-il  achevé  qu  il  fut  interrompu 
par  les  cris  de  vive  la  république  française^  une  et 
indivisible  ! 

Une  décharge  de  coups  de  canon ,  une  marche 

Î guerrière  et  le  roulement  des  tambours  signalèrent 
a  joie  du  peuple,  et  annoncèrent  que  tous  Tes  cœurs 
étaient  satisfaits. 

Aussitôt  des  danses  se  formèrent  autour  de  Tautd 
de  la  patrie ,  sur  toute  l'étendue  de  Penclos.  La  Li- 
berté a  vu  l'enthousiasme  de  ses  enfants,  elle  a  en- 
tendu nos  serments.  Périsse  le  parjure  qui  hésiterait 
un  instant  à  les  remplir  ! 


695 


Le  reste  du  jour,  la  joie  publique  s*est  manifestée 
par  toute  la  ville  :  un  repas  frugal,  préparé  en  plein 
air,  attendait  les  amis  de  la  liberté  et  de  Tégalité;  le 
ministre  français  et  les  consuls,  les  chefs  civils  et 
militaires  de  Pensylvanie  y  assistèrent  indistincte- 
ment ,  réunis  aux  Français  et  aux  Américains  ;  les 
amis  de  la  patrie  ,  et  les  vertus  que  les  républicains 
français  honorent,  y  ont  été  fêtés  au  bruit  du  canon. 
La  journée  a  été  terminée  par  un  feu  d*artiiice  orné 
de  plusieurs  pièces  analogues  à  la  fête ,  et  qui  a  été 
tire  devant  ta  maison  du  ministre  français,  dans  la 
rue  la  plus  spacieuse  de  la  ville  et  la  plus  commode 
pour  rétendue  du  spectacle. 

Les  membres  du  comité  français  chargés  de  inor- 
ganisation. 

{Suivent  les  tignaturet.) 

BruUey  :  Nous  supprimons  les  divers  discours  qui 
furent  prononcés  à  celte  léte  mémorable;  ils  furent 
analogues  à  ct*tte  réunion  vraiment  fraternelle  de 
donx  nations  libres  et  amies.  Nous  supprimerons 
aussi  1rs  détails  de  la  fête  publique  qui  fut  faite  le 
!««•  vendémiaire,  pour  célébrer  l'anniversaire  de  la 
constitution  de  la  France  en  république  une  et  indivi- 
sible; mais  nous  ne  pouvons  nous  dispenser  de  vous 
donner  lecture  de  l'Adresse  de  nos  Trères  à  la  Con- 
vention nationale ,  à  l'occasion  de  cette  fête. 

A  la  Convention  nationale. 

Pbiltdelphie,  le  3  ventôse.  Tan  3*  de  la  république 
française,  une  et  indivisible. 

«  Citoyens  représentants,  les  républicain!  français  et  les 
consuls  de  la  république  française  résidant  ù  Pbitadelpbie 
viennent  de  célébrer,  le  i*'  vendémiaire,  dans  une  fête 
publique,  rantii versai re  de  la  conslituliou  de  la  France, 
une  et  indivisible. 

•  La  liberlé  et  l'égalité  ont  présidé  à  celte  fi^te,  consa- 
crée ù  la  vénération  des  vertus  républicaines.  Pénétrés  de 
la  grandeur  des  destinées  de  la  France,  nous  nous  sommet 
représenté  le  courage  de  la  nation ,  le  zèle  rt  la  fermeté  de 
ses  représentants  :  nous  avons  vu  le  despotisme  fuir  de 
toutes  parts  la  terre  de  la  liberté  que  vous  avez  purifiée; 
nous  avons  vu  les  armées  de  la  république  française  re- 
pousser le  fanatisme  et  la  perfidie  jusque  soos  les  murs  des 
palais  de  leurs  tyrans. 

■  Nous  avons  renouvelé  le  vœu  de  la  France  pour  la  li- 
berté du  genre  humain,  partagé  sa  reconnaissance,  son 
respect  pour  la  mémoire  des  héros  qui  ont  versé  leur  sang 
pour  la  défense  de  la  liberté  et  Tanéautissemeut  du  fédé- 
ralisme. 

«  Nous  avons  voué  une  haioe  étemelle  aux  anarchistes» 
aux  contre-révolutionnaires,  aux  fédéralistes,  et  à  tous  les 
ennemis  de  la  révolution.  *  i 

•  Avec  nos  brèves  frères  d^armes  de  France ,  nous  avons  • 
voté  la  destruction  de  la  nouvelle  Cartbage.  Puisse  un  I 
peuple  nouveau,  un  peuple  vraiment  libre,  s'élever  sur  les 
ruines  de  son  gouvernement,  et  servir  les  vœux  de  la 
France  pour  le  bonheur  du  genre  humain. 

«  Nous  n*avons  pas  oublié  nos  frères  d'armes  de  la  Gua« 
deloupe  :  les  succà  de  ces  défenseurs  de  la  liberté,  à  Tabri 
des  séductions  du  fédéralisme  et  de  l'aristocratie,  nous 
rappellent  sans  cesse  les  moyens  infâmes  dont  s'est  servi  le 
gouvernement  de  Saint-Domingue  pour*  rendre  nulles  les 
forces  de  la  république  et  sacrifier  les  soldats  citoyens, 
trop  fiers  pour  ramper  sous  le  joug  de  la  tyrannie. 

B  Nous  avons  rendu  hommage  aux  moyens  de  félicité 
des  peuples,  à  Tagriculture et  k  toupies  arts  utiles.  Nous 
nous  sommes  convaincus  que  la  soumission  aux  lois  était 
la  première  vertu  des  républicains. 

•  Enfin ,  sensibles  à  la  justice  que  les  représentants  du 
peuple  français  viennent  de  rendre  k  Téquipage  du  vais« 
seau  ie  Vengeur,  nous  pensons  que  le  XVIII*  siècle  s*ét0D« 
nera  que  les  nations  aient  jamais  eu  des  rois. 

«  Nous  devons  au  gouverneur  de  la  Pensylvanie  men- 
tion de  sa  présence  ;  cet  ardent  ami  de  la  république  fran* 
çaise  a  partagé  avec  enthousiasme  tous  nos  sentiments  pen- 
dant le  court  temps  qu*il  a  pu  donner  ù  cette  fClc ,  et  ue 


s*est  retiré  que  pour  aller  défendre  en  personne  la  cause 
de  la  liberté  de  son  pays. 

«  L*abseoce  du  citoyen  ministre  lui  a  fait  connaître  que 
la  liberté  a  des  amis  à  New-York,  où  le  même  anniver- 
saire a  été  célébré  le  même  jour,  en  sa  présence. 

«  Voila  »  citoyens  représentants,  les  principes  que  pro- 
fessent, et  dans  lesquels  mourront,  des  hommes  longtemps 
calomniés ,  les  colons  des  Antilles,  persécutés  par  les  (ac- 
tions qui  ont  ravagé  la  France. 

■  Notre  dévouement  k  la  liberté,  notre  fidélité  k  la  répu- 
blique étaient  connus  ;  nous  nous  félicitons  quMls  aient  été 
le  sujet  des  persécutions  que  nous  avons  éprouvées. 

•  C*est  dans  les  succès  de  la  France,  dans  ses  triomphes, 
que  nous  trouvons  aujourd'hui  les  seules  consolations 
qui  nous  restent* 

■  Salut.  Les  membres  du  comité  français.i 

{Suivent  tet  iignatures,) 

BruUey  :  Législateurs ,  sont-ce  là  les  expressions 
des  émigrés,  des  ennemis  de  la  révolution  française? 
Après  des  témoignages  aussi  authentiques  d'attache- 
ment à  la  France,  oserait-on  encore  calomnier  ces 
vrais  citoyens  français?  oserait-on  les  confondre 
dans  la  classe  de  ceux  qui  n*ont  fui  leur  |)atrie  qu'a- 
vec l'intention  d'v  rentrer  à  main  armée ,  pour  la 
livrer  à  toutes  les  horreurs  de  la  guerre? 

Ce  n'est  pas  ainsi  que  la  Convention  nationale  les 
a  jugés  quand,  par  son  décret  du  8  septembre  1793, 
elle  a  autorisé  le  ministre  de  la  marine  à  s'entendre 
avec  les  commissaires  de  Saint-Domingue,  Pa;^e 
et  Brulley,  sur  les  mesures  à  prendre  pour  trans- 
porter ces  colons,  soit  en  France,  soit  a  Saint-Do- 
mingue. 

Sr  des  circonstances  difficiles  ont  entravé  l'eiécu- 
tion  de  ce  décret ,  les  colons  ne  l'ont  pas  perdu  de 
vue ,  puisqu'ils  ont ,  sous  les  auspices  des  autorités 
constituées  des  Etats-Unis,  nommé  de  nouveaux 
commissaires  chargés  de  s'adjoindre  aux  anciens , 
pour  demander  tous  ensemble  justice  contre  les  dé-  ^ 
vastateurs  des  lles-sous-le-Vent ,  protection  et  se- 
cours pour  retourner,  le  plus  proinptement  possi- 
ble, sur  leurs  propriétés,  et  en  chasser  les  ennemis 
de  la  France. 

Nous  nous  empressons  donc,  pour  remplir  le  vœu 
de  nos  concitoyens,  qui  est  aussi  le  nôtre.  Nous  Ju- 
rons devant  vous  de  rester  inviolablement  attachés 
à  la  république  française,  une  et  indivisible,  et  une 
entière  soumission  aux  décrets  qui  seront  émanés  de 
la  Convention  nationale. 

*'*  :  Je  demande  que  l'assemblée  ne  se  hâte  pas  de 
rien  préjuger  en  faveur  des  colons.  J*ai  lu  les  débats 
qui  ont  eu  lieu  devant  la  commission  des  colonies, 
et  j'ai  vu  q^u'il  n*y  a  rien  de  moins  constant  que  le 
patriotisme  des  colons  ;  ils  ont  à  leur  tête  Page  et 
Brulley,  oui,  en  1792,  écrivaient  que  bientôt  les  dé- 
créteurs  a'alors  n'existeraient  plus. 

La  Convention  décrète  l'insertion  att  Bulletin ,  et 
le  renvoi  à  la  commission  des  colonies. 

{La  suite  demain,) 


N.  B,  —  Dans  la  séance  du  26,  la  Convention  a 
appris  qu'un  incendie  s'était  manifesté  à  Meudon.  Le 
feu  a  pris  par  le  frottement  d'une  fusée  qu'un  ou- 
vrier a  laissée  dans  Fatelier  en  se  sauvant;  il  s'est 
communiqué  à  une  aile  du  vietix  château.  Toutes 
les  poudres  et  ustensiles  de  guerre  ont  été  préservés, 
et  personne  n'a  été  blessé. 

—  On  a  continué  la  discussion  sur  le  mode  de  di- 
rection des  relations  extérieures.  La  Convention  a 
décrété  qu*il  pourrait  y  avoir  dans  les  traités  des  ar- 
ticles secrets  ;  mais  que  ceux-ci  ne  pourraient ,  eu 
aucun  cas,  atténuer  les  articles  ostensibles. 


606 


TBiaUrCAL  CBIMINEL  BEVOLUTIONNAIBB. 


Du  tl  venlotê,  —  Théodore- Waldemar  Bardon  , 
né  à  La  Ferté-Lowendal,  près  Orlt^ans,  âgé  de  trente- 
trois  ans,  précepteur,  clerc  minore ,  professeur  au 
séminaire  de  Mung,  épicier,  marié,  ensuite  pour- 
suivi en  diroroe  par  son  épouse,  âgée  de  quatorze 
ans ,  était  prévenu  d*immoralité ,  ae  fanatisme ,  et 
d*avoir  écrit  des  lettres  contre-révolutionnaires. 

Sur  la  déclaratioii  unanime  du  jury,  portant  : 

10  (Ju'il  est  constant  que  des  lettres  écrites  au 
comité  de  surveillance  d'Orléans,  à  la  Conveniiun 
nationale' et  à  Taccusaleur  public  du  précédent 
tribunal  révolutionnaire  de  Paris ,  tendent  à  Tavi- 
lissemcnt  et  à  la  dissolution  de  la  représentation  na- 
tionale ; 

20  Qu'il  n'est  pas  constant  que  ces  lettres  provo- 
quent le  rétablissement  de  la  royauté  ; 

3«  Qu'il  est  constant  qu'elles  sont  propres  à  ébran- 
ler la  fidélité  des  citoyens  envers  la  nation  ; 

40  Que  Théodore- Waldemar  Bardon  est  convaincu 
d'avoir  écrit  ces  lettres^ 

50  Qu'il  n>st  pas  constant  qu'il  les  ait  écrites  avec 
des  intentions  contre-révolutionnaires  (ne  jouissant 
pas  depuis  très-longtemps  de  la  plénitude  de  sa  rai- 
son), le  tribunal  a  acquitté  Bardon;  mais ,  attendu 
3u*il  était  en  état  d'arrestation  comme  suspect  avant 
'avoir  écrit  ces  lettres,  il  restera  détenu  jusqu'à  ce 
qu'il  en  ait  été  autrement  ordonné. 

Du  24  venlose.  —  Nicolas  Plessis,  âgé  de  trente- 
ucuf  ans,  né  et  demeurant  à  Etain  ,  département  de 
la  Meuse,  cordonnier,  prévenu  d'être  un  fournisseur 
inlidèle  des  approvisionnements  militaires,  en  met- 
tant dans  les  souliers  qu'il  avait  fabriqués  ou  fait 
fabriquer  de  la  toile,  du  vieux  cuir,  et  de  i'ccorce  de 
.cerisier  ; 

Joseph  Franck ,  âgé  de  trente-cinq  ans,  né  à  Dus- 
seldorr,  en  Allemagne,  cordonnier  a  Etain,  prévenu 
d'ôtre  complice  de  la  frauduleuse  fourniture  de  Ni- 
colas Plessis,  en  procédant,  avec  une  coupable 
complaisance,  à  l'expertise  qu'il  était  chargé  de  faire, 
avec  Louis  Lajone ,  de  onze  cent  quarante -huit 
paires  de  souliers,  dont  Plessis  était  entrepreneur 
|)our  le  compte  de  la  république  ,  ont  été  mis  en  ju- 
gement. 

Louis  Lnjone  ,  leur  coaccusé,  est  mort  à  l'hospice 
de  Paris  ,  le  20  nivôse  dernier. 

L'instruction  a  duré  jusqu'à  six  heures  du  soir. 
Voici  le  jugement  intervenu  dans  cette  affaire. 

Vu  la  déclaration  du  jury  portant  qu'il  est  con- 
stant : 

.  lo  Qu'il  a  été  commis  des  infîdélités  dans  une 
fourniture  de  onze  cent  quarante -huit  paires  de 
souliers  faite  pour  le  compte  de  la  république ,  du 
10juittctl793; 

20  Que  Nicolas  Plessis  est  convaincu  d'être  l'au- 
teur de  ces  infidélités  ; 

30  Que  cette  fourniture  est  de  nature  à  faire  man- 
quer les  approvisionnements  des  armées  ; 

40  Qu'il  n'a  pas  fait  cette  fourniture  avec  des  in- 
tentions contre-révolutionnaires  ; 

50  Que  Joseph  Franck  est  convaincu  d'avoir, 
comme  expert  de  Plessis,  été  complice  de  ces  infi- 
délités, en  ne  les  faisant  pas  connaître  lors  de  la 
vérification  faite  de  ces  souliers ,  mais  qu'il  ne  l'a 
pas  fait  avec  des  intentions  contre  -  révolution- 
uaires; 

Le  tribaoal  a  acquitté  Nicolas  Plessis  et  Joseph 
Franck  ,  et  les  a  renvoyés ,  par  le  même  jugement , 
devant  le  tribunal  de  Metz ,  comme  provenus  d'un 
délit  de  la  compétence  des  tribunaux  ordinaires. 


Real ,  défenseur  des  accnsës,  envisageant  la  cause 
sous  un  point  de  vue  général  de  justice  et  de  morale, 
s'est  élevé  contre  reflet  rétroactif  donné  à  la  loi  do 
29  septembre ,  sur  laquelle  était  basée  l'accusation. 

Le  délit  présumé  était  consommé  en  juin  et  juillet 
1793;  la  loi  qui  le  punit  est  du  29  septembre  sui- 
vant. •  C'est  avec  ces  lois  de  circonstances,  a  dit 
Real ,  c'est  avec  cet  effet  rétroactif  qu'on  a  assassiné 
dans  cette  salle  des  milliers  de  Français,  c^u'on  a 
tué  la  liberté ,  et  couvert  de  sang  la  Déclaration  des 
Droits. 

•  La  loi  existe ,  me  dit-on  ;  elle  prononce  no  effet 
rétroactif,  et  le  premier  devoir  du  juge  est  d'exécu- 
ter fidèlement  la  loi ,  même  détestable.  Je  réponds  : 
Et  la  Déclaration  des  Droits  n'est-elle  donc  pas  aussi 
une  loi?  N'est-elle  pas  plus  qu'une  loi,  indépen- 
dante de  la  volonté  des  hommes?  Son  existence  n'est- 
elle  pas  constante ,  n'est-elle  pas  sacrée ,  éternelle , 
comme  la  raison  ,  comme  la  Divinité?  Contre  cette 
Déclaration  immortelle  doivent  se  briser  toutes  les 
lois  de  circonstance  qui  la  contrarient ,  tous  ces  ef- 
fets rétroactifs  qui  ont  démoralisé  notre  révolution. 

«  La  loi  existe  !  Mais  elle  existe  aussi ,  cette  abo- 
minable loi  du  22  prairial  ;  lorsqu'elle  fut  procla- 
mée, s'il  s'était  trouvé  sur  le  siège  un  juge  coura- 
geux»  ami  de  la  justice,  adorateur  de  Dieu  ;  si,  plein 
d'une  sainte  indignation  ,  il  se  fût  écrié  :  «  N(»n  ,  je 
«  n'exécuterai  pas  cette  loi  sanguinaire  qui  tue  la 
•  Déclaration  des  Droits;  •  si  cet  homme  juste  n'eût 
pas  été  massacré  par  les  bourreaux  qui  gouvernaient 
alors  ;  si  un  miracle  nous  l'eût  conservé,  quel  est 
l'homme  sensible  qui  ne  s'empressât  pas  de  couvrir 
de  chêne  son  front  vénérable?  Faites  aujourd'hui  ce 
qu'il  eût  été  juste  de  faire  alors,  et  qu'on  ne  dise  pas 
en  vain  que  la  justice  est  de  retour.» 


Au  rédacteur. 

A  rAssemblôelégiilativejasqu'aaiOeof^t,  je  o*alpat 
répondu  à  Royan,  Suleau^  Sérisy,  ni  au  petit  Gauibier. 
Je  ne  répondrai  pas  plus  acturilcincnt  à  Sérhj,  puisqu*il 
n*a  répété,  dans  son  n*  5  de  r accusateur  public^  que  ce 
qu'il  disait  à  peu  près  dans  ses  Actes  des  y4j9âtres,  etc.  Les 
citoyens  honnêtes,  qui  n'aiment  pus  les  rois ,  ont  de  quoi 
porter  uo  très-beau  jugement  entre  Merlin  (de  Thionvillr) 
et  la  poupée  qui  s'éveille  très-grafement  et  trés^pairioii- 
queroent  après  cinq  ans  de  révolution.  Il  nie  suffit  d'avoir 
sigoalé  rbomme  qui  se  cachait  dans  les  rangs  des  patrio- 
tes, qui  y  criait  :  Sauve  qui  peull  en  attendant  le  moment 
favorable  décrier  vive  le  roil  et  qui  ne  répondra  jamais  à 
cela.  MatLiN  {de  Thionnlle), 


LIVRES  DIVERS. 

Projet  de  code  civil,  par  Gambtcérès ,  avec  table  des  ti- 
tres el  ithic  alphabétique  des  matières;  jolie  édition  io-li, 
de  130  pages.  Prît  :  40  sous,  et  50  sous,  franc  de  porU 

Cher  Gtroery,  libraire,  rue  Serpente,  d®  17. 


Payements  à  (a  trésorerie  nationale. 

Le  pajcmcnt  de  la  dette  consolidée  perpétuelle  se  fait 
pour  les  six  derniers  mois  de  Tan  2* ,  et  pour  Pannée  «  cous 
qui  n*onl  pas  touché  les  six  premiers  mois  de  ladite  aociée. 
Les  citoyens  qui  ont  relire  leur  inscription  dénnitiToT,  «t  qui 
désireraient  être  p^és  dans  les  districlj ,  peuvent  indiquer 
les  chefi-lieux  de  district  où  ils  veulent  être  payés,  coofor- 
mëment  à  la  loi  du  t*  jour  des  sansculottidcs. 

Le  payement  des  rentes  viagères  se  fait  cumulatÎTemeoi 
pour  deux  mois  vingt  et  un  jours  de  Taniiée  1793  (vieux  atjle) 
et  les  sis  premiers  mois  de  Tan  t«« 


GAZETTE  NATIONULË  ».  LE  HONITËUR  UNIVERSEL. 

N*  178.  Octidî  28  Ventôse,  l'an  3».   {Mercredi  18  Mars  1795,  ùeux  style.) 


AVIS    DE  L* ANCIEN  MONITEUR  AUX    SOUSCRIPTEURS. 

Tout  ce  qui  concourt  à  la  confection  et  exploitation  du 
Moniteur  (le  plus  étendu  de  tous  les  journaux),  et  surtout  le 
renchérifiseme-nt  très-rapide  du  papier,  dont  nous  ne  pouvons 
pas  faire  toujours  un  choix  égal,  pour  satisfaire  nos  souscrip- 
teurs suivant  noire  vœu.  nous  force  à  une  nouvelle  augmen- 
tation dans  le  prix  de  la  souscription ,  qui  sera ,  pour  les 
départements,  à  compter  du  1*'^  germinal  prochain,  de  57  liv. 
10  sous  pour  trois  mois,  de  75  liv.  pour  six  mois,  et  de  150  liv. 
pour  Pannée  entière,  y  compris  les  jours  complémentaires, 
rendu  franc  de  port  dans  toute  la  république. 

L'abonnement  pour  Paris  est  de  33  liv.  10  sous  pour  trois 
mois,  65  liv.  pour  six  mois,  et  1  TU)  liv.  pour  Tannée  entière. 

Cette  augmentation  n^a  pas  d'effet  rétroactif  pour  les  sous- 
cripteurs dont  l'abonnement  est  antérieur  au  \*'  germinal. 

Nous  prenons  itéraiivcment  rengagement  formel  de  dimi- 
nuer le  prix  de  la  souscription  aussitôt  que  les  circonstances 
nous  permettront  de  nous  livrer  à  cette  mesure. 

Nous  n'avons  pas  de  bureau  intermédiaire  ,  à  Paris,  pour 
la  recette  des  abonnements  :  les  lettres  et  l'argent  doivent 
être  adressés,  francs  de  port,  au  citoyen  Aubry.  directeur, 
rue  des  Poitevins,  n»  18.  11  faut  avoir  soin  (attendu  le  nom- 
bre de  lettres  qui  s'égarent)jde  charger  celles  qui  renferment 
des  assignats. 

Il  faut  aussi  ajouter  le  port  aux  lettres  d'envoi  de  la  Bel- 
gique et  autres  pays  où  l'on  ne  peut  pas  affranchir. 

Tout  ce  qui  entre  dans  la  composition  du  Moniteur  doit 
être  adressé  au  bureau  de  rédaction,  à  notre  imprimerie,  rue 
des  Poitevins,  n»  13,  en  observant  d'affranchir  les  lettres  et 
paquets,  comme  pour  les  abonnements. 


POLITIQUE. 

REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Parts ^  le  26  ventôse,  —  (Nota,  Nous  n^avons  âiCférê  la 
publication  de  celte  pièce  intéressante  que  pour  avoir  le 
temps  d'en  constater  l'aulbe^licilé.  ) 

Adresse  aux  habitants  des  campagnes  de  la  Vendée^ 

•  Braves  babitanls,  de  vils  séducteurs,  d'infûmcs  in- 
trigants, des  hommes  ambitieux  et  pervers,  qui  fondent 
leurs  jouissances  et  leur  bonheur  sur  les  débris  de  la  for- 
lune  publique»  et  qui  sacrifieraient  sans  remords,  k  la 
réussite  de  leurs  coupables  desseins,  la  vie  et  les  biens  de 
leurs  semblables,  cherchent  aujourd'hui  à  vous  égarer. 
Ils  prêtent  à  nos  démarches  des  motifs  déshonorants  ;  ils 
dénaturent  nos  intentions  bienfaisantes,  el  présentent  le 
traité  que  nous  avons  conclu  sous  des  couleurs  fausses  et 
perfides  ;  ils  répandent  impudemment  des  bruits  capables 
de  semer  dans  tous  les.cocurs  la  défiance,  la  terreur  et  les 
divisions. 

«  Songer  à  vos  intérêts,  oublier  les  nôtres,  faire  votre 
bonlieur  sans  le  concours  d'aucune  considération  person- 
nelle i  voilù  la  tâche  glorieuse  que  nous  nous  .sommes  pro- 
posée :  nous  croyons  avoir  parcouru  celte  honorable  car- 
rière. 

«  Puisque  des  malveillants  osent  maintenant  élever  sur 
notre  conduite  des  doutes,  des  soupçons  injurieux,  les  dis- 
siper, vous  détromper  et  vous  instruire,  voilà  notre  devoir. 
Nous  allons  le  remplir. 

«  Nous  connaissons,  braves  habitants,  les  raisons  puis- 
santes qui  vous  provoquèrent  ù  rinsurreclion  et  qui  vous 
mirent  les  armes  à  la  main.  On  avait  porté ,  à  la  liberté  de 
vos  opinions  religieuses  les  plus  terribles  coups;  de  nou- 
veaux pontifes,  un  nouveau  culte  avaient  été  érigés  sur  les 
ruines  du  vôtre;  partout  l'intolérance  cherchait  des  cou- 
pables et  aimait  à  trouver  des  victimes.  Le  despotisme  or- 
gueilleux d'autorités  établies  pour  vous  protéger ,  des  cor- 
vées de  toute  espèce,  des  vexations  de  tout  genre  venaient 
encore  charger  cet  affligeant  tableau. 

«  Lorsque  le  principe  d'un  mal  dangereux  est  entièrc- 
mcul  détruit,  les  conséquences  fàcheubcs  qui  en  dérivent 

3*  Série   —  Tome  A. 


ne  doivent  plus  exister:  la  nécessité  dVn  faire  cesser  lef 
tristes  résultats  depuis  sa  source  est  dans  vos  besoins  les 
plus  pressants  et  dans  vos  obligations  les  plus  sacrées. 

«  L'exercice  paisible  de  votre  religion  vous  est  accordé; 
vous  pouvez  user  avec  sécurité  de  ce  droit  imprescriptible, 
qu'on  n'avait  pu  vous  arracher  sans  méconnaître  les  vô- 
tres. 11  vous  est  libre ,  dès  ce  moment,  d'offrir  à  l'Être  su- 
prême, d'apKs  vos  ancicDB  usages,  vos  hommages  et  vo- 
tre reconnaissance. 

«  Votre  malheureux  pays  a  été  dévasté  ;  la  flamme  a  dé- 
voré vos  habitations  ;  une  soldatesque  effrénée  a  exercé  sur 
vos  personnes  et  vos  propriétés  les  plus  horribles  brigan- 
dages. Rh  bien,  la  Convention  nationale  contracte  aujour- 
d'hui l'engagement  de  vous  indemniser  de  vos  pertes,  ot 
de  réparer,  s'il  se  peut,  tous  les  maux  causés  pur  un  ré- 
gime de  proscription  el  d'injustice. 

«  Des  secours  vous  sont  accordés  pour  rebâtir  vos  chau- 
mières ;  des  bestiaux  vous  seront  rendus  pour  faire  revivre 
l'agriculture  et  vous  procurer  les  aisances  de  la  vie.  Vous 
ne  regretterez  pas  longtemps  la  privation  de  vos  instru- 
ments de  travail  :  vous  ne  parlerez  des  impôts  qu'au  mo- 
ment où  une  position  plus  heureuse  vous  fournira  les 
moyens  de  subvenir  aux  besoins  de  l'Etat. 

•  Que  la  veuve  éplorée  et  que  le  père  infirme  et  caduc 
ne  tremblent  point  sur  le  sort  de  leurs  enfants  que  les  lois 
pourraient  appeler  au  secours  de  la  république.  Eh  quoi  I 
pourrait-elle  se  résoudre  à  priver  l'infortune  de  son  appui, 
la  vieillesse  resportable  de  ses  soutiens?  Non,  la  nation 
vous  dispense  d'aller  proléger  ses  frontières  ;  elle  ne  vous 
impose  que  la  tAche  facile  de  travailler  dans  vos  campa- 
gnes, pour  l'aider  à  nourrir  ses  défenseurs. 

«  Vous  avez  fourni  pour  la  subsistance  des  armées  le 
fruit  de  vos  sueurs  et  de  vos  économies  :  nous  vous  en  avons 
donné  des  reconnaissances  :  la  Convention  nationale  vous 
en  acquitte  le  roontanf. 

«  Que  vous  reste-f-il  à  désirer?  Quelles  inquiétudes  peu- 
vent encore  agiter  des  cœurs  aigris  si  longtemps,  il  est 
vrai,  par  le  ressentiment  et  le  malheur?  Craindriez-vous 
d'être  opprimés  de  nouveau  par  des  autorités  indignes  de 
votre  confiance  ? 

■  Russurez-vous,  braves  habitants;  que  la  sécurité  ren- 
tre dans  vos  aunes,  qu'elle  en  chasse  l'affreux  désespoir. 
Ces  hommes  dont  vous  redoutez  avec  raison  le  joug  odieux, 
ces  hommes  qui  étaient  auti^it  les  ennemis  de  leur  patrie 
que  les  vôtres ,  ne  seront  plus  les  dépositaires  du  pouvoir 
dont  ils  faisaient  un  si  cruel  abus. 

«  Les  représentants  du  peuple  veulent  bien  nous  consul- 
ter sur  le  choix  qu'ils  doivent  faire  pour  les  remplacer; 
nous  leur  indiquerons  des  gens  que  vous  connaissez,  des 
gens  qui  ont  acquis  votre  estime  el  la  nôtre;  des  gens  en- 
fin qui,  pour  adoucir  votre  existence,  sont  prêts  à  sacri- 
fier leurs  plaisirs,  leurs  jouissances,  leurs  fortunes. 

c(  Auriez-vous  donc  pensé,  braves  habitants,  que  nous 
pouvions  trahir  lâchement  vos  intérêts  après  les  avoir  sou- 
tenus av(>c  tant  de  chaleur  ?  Deviez-vous  croire  un  instant 
que  nous  étions  capables  de  démentir  la  conduite  que  nous 
avons  constamment  tenue? 

«  Ahl  si  ces  senlimeiits  injurieux  partaient  de  votre 
cœur,  si  nous  les  imputions  à  la  jalousie  et  à  la  molveil- 
lunce,  combien  notre  âme  en  serait  cruellement  déchirée  I 
Comment  supoorterions-nous  l'affreuse  idée  qui  nous  con- 
vaincrait qu'en  voulant  faire  des  heureux  nous  fîmes  des 
ingrats  1 

«  Mais  quoi  !  vos  intérêts  ne  sont-ils  pas  les  nôtres?  Nos 
amis,  nos  femmes,  nos  enfants  ne  sont-ils  pas  parmi  vous? 
Nos  possessions  n'avoisinenl-elles  pas  vos  champs?  Oui, 
sans  doute;  et  quelque  précieux  que  soient  ces  rapports, 
ne  croyez  pas  qu*ils  aient  fourni  les  motifs»  qui  nous  ont 
déterminés.  Nous  n^avons  songé  qu'à  vous,  noqs  avons 
tout  sacrifié  à  votre  bonheur;  et,  en  l'établissant  sur  des 
bases  solides  et  durables,  nous  ne  nous  sommes  réservé 
que  l'inestimable  avantage  d*en  être  les  témoins. 

•  5}<7ne  Crarbttb  ,  Fliosiot,  Sapinauo,  CouitdSi 
Dtfiutjc.  • 

88 


698 


CONVENTION  NATIONALE. 

Présidence  de  Thibattdeatt, 
SUITE  DE  LA  SÉANCE  DU  25  VENTOSE. 

BoissY  d'Anolas  :  Citoyens,  le  plus  grand,  le  seul 
obstacle  peut-être  qui  puisse  opposer  quelque  rési- 
stance à  raffermissement  de  vos  lois,  à  rétablisse- 
ment d'un  ordre  invariable  et  fixe  dans  toutes  les 
parties  de  votre  administration  publique,  aux  résul- 
tats de  vos  méditations  et  de  votre  courage,  c'est  la 
Sénurie  des  subsistances  ;  c'est  même  la  seule  crainte 
e  là  disette.  Je  vous  ai  parlé  dans  plusieurs  occa- 
sions des  efforts  du  gouvernement  actuel  ;  je  vous  ai 
annoncé  nos  espérances  et  nos  ressources,  et  vous 
pve2  applaudi  aux  mesures  qui  doivent,  sinon  ra- 
mener l'abondance  au  milieu  de  nous,  du  moins  en 
bannir  cette  disette  effrayante,  qui  devient,  entre  les 
mains  de  la  malveillance  et  de  la  cupidité,  une  arme 
si  redoutable;  mais  il  est  bon  de  le  répeter  au  peu- 
ple, à  la  Convention,  à  l'Europe  entière,  dont  les 
despotes  coalisés  contre  nous  calculent  avec  tant  de 
perfidie  ce  qui  nous  reste  de  moyens  et  de  force  :  la 
rrance  jusqu'ici,  et  dans  les  besoins  qui  nous  pres- 
sent, s'est  presque  entièrement  sufli  a  elle-même, 
et  a  été  presque  réduite  à  trouver  dans  ses  propres 
ressources  ses  seuls  moyens  d'approvisionnement  ; 
et  si  vous  calcules  les  effets  du  passage  subit  de  la 
loi  désastreuse  du  maximum  au  régime  si  bienfai- 
sant, mais  si  opposé,  de  la  liberté  absolue  du  com- 
merce ;  la  cessation  de  cet  affreux  système  de  terreur, 
qui,  remplacé  par  la  justice,  a  nécessairement  sub- 
stitué dans  le  premier  instant  un  peu  de  faiblesse  à 
un  régime  despotiaue;  vous  sentirez  combien  a  dû 
être  parsemée  de  dillBcUltés  et  d'obstacles  la  car- 
rière de  ceux  que  vous  avez  investis  de  votre  con- 
fiance. 

Le  gouvernement  qui  nousavaitprécédésétaitper- 
iide  dans  plusieurs  de  ses  parties,  imprévoyant  dans 
toutes  les  autres;  mais  il  faut  le  dire  néanmoins,  à  la 
justification  de  ceux  de  ses  membres  qui  étaient  spé- 
cialement chargés  des  approvisionnements,  il  était 
impossible  qu'avec  les  éléments  qui  l'organisaient, 
avec  l'absence  absolue  de  cette  confiance  qui  ne  s'at- 
tache qu'à  la  justice,  avec  la  destruction  du  com- 
merce, avec  la  terreur  qui  accompagnait  toutes  ses 
opérations,  avec  la  mort  Qu'il  prodiguait  à  tous  les 
spéculateurs  habiles  dont  le  génie  aurait  pu  Taider 
dans  ses  besoins,  avec  la  mauvaise  loi  qu  il  portait 
dans  toutes  ses  transactions  politiques;  il  était  im- 
possible, dis-je,  qu'il  fît  autre  chose  que  de  vivre 
au  jour  le  jour  :  et  l'on  conçoit  que  ce  système  pou- 
vait s'allier  avec  celui  d*injustice  et  d'oppression 
que  vous  avez  sagement  anéanti;  mais  vous  conce- 
vrez aussi  qu'il  tendait  essentiellement  à  paralyser 
d'avance  tous  les  moyens,  en  tarissant  toutes  les 
ressources,  et  qu'il  subvenait  aux  besoins  du  présent 
aux  dépens  de  ceux  de  Tavenir.  «  Ainsi,  comme  l'a 

•  dit  Montesquieu,  le  despotisme  ressemble  à  ce 

•  sauvage  de  la  Louisiane  qui,  lorsqu'il  veut  avoir 

•  du  fruit,  coupe  l'arbre  par  le  pied  et  cueille  le 

•  fruit.  • 

11  faut  convenir  toutefois  qu'indépendamment  des 
deux  millions  six  cent  mille  quintaux  de  grains, 
c'est^^dire  de  la  nourriture  de  toute  la  république 
pendant  cina  jours,  apportés  dans  vos  ports  par  la 
tomtnission  ae  commerce  durant  les  dix-neuf  mois 
tle  son  existence,  l'ancien  gouvernement  avait  donné 
tîans  l'étranger  diverses  commissions  dont  l'effet  au- 
rait pu  être  pi  us  considérable,  mais  qui  offrent  encore 
pour  nous  des  espérances  plus  ou  moins  éloignées 
et  plus  ou  moins  sûres.  La  rigueur  des  saisons  a  sans 


doute  contribué  à  en  empêcher  Peffet;  mais  enfin, 
ce  qu'il  y  a  de  sûr,  c'est  que  le  gouvernement  actuel 
n'en  a  encore  retiré  presque  aucun  secours.  Bu  at- 
tendant que  toutes  les  espérances  se  réalisent,  (e 
commerce  a  commencé  à  nous  faire  sentir  ses  effets, 
et  la  libre  circulation  des  subsistances  et  la  surveil- 
lance perpétuelle  du  comité  de  salut  public  ont  fait 
le  reste.  Je  vous  lirai  bientôt  diverses  lettres  qui 
vous  attesteront  que  le  midi  de  la  France  va  être 
incessamment  approvisionné ,  et  nos  rapides  con- 
quêtes du  côté  ou  Nord,  nous  offrant  d'immenses 
ressources  pour  la  subsistance  de  quelques-unes  de 
nos  armées,  vont  diminuer  la  disette  qui  pesait  sur 
l'intérieur.  Cependant,  en  jetant  les  yeux  sur  tout 
ce  qui  nous  environne,  il  est  difficile  de  n'être  pas 
alarmé  et  encore  plus  touché  des  besoins  pressants 
qui  existent  dans  la  plupart  des  départements  voisins, 
et  de  ne  pas  sentir  bu  dedans  de  soi  l'impérieuse 
nécessité  ae  diminuer  une  consommation  dont  l'ex- 
cès ne  pourrait  manquer  d'être  nuisible  à  quelques- 
uns  de  nos  frères.  Si  nous  n* étions  chargés  que  de 
l'approvisionnement  de  Paris;  si  la  Convention  na- 
tionale n'était  la  représentation  que  de  cette  ville 
immense;  si  elle  était  environnée  de  ste  ennemis, 
au  lieu  de  l'être  de  ses  frères;  si  ie^ besoin  de  se  se- 
courir mutuellement  n'était  pas  au  rang  des  pre- 
mières vertus  républicaines,  nous  userions  des 
moyens  de  force,  et  Paris  n'éprouverait  aucune  di- 
minution ;  mais  tout  ce  qui  se  consommerait  à  Paris 
au  delà  du  strict  nécessaire  serait  un  larcin  fait  aux 
besoins  de  ses  compagnons  dans  la  conquête  de  In 
liberté,  des  autres  membres  de  la  même  famille.  Il 
faut  donc  que  Paris  renonce  à  tout  superflu  lorsque 
plusieurs  Français  peuvent  manquer  du  nécessaire. 
Et  certes  un  tefsacrifice  ne  peut  lui  couler,  car  il  est 
fait  en  faveur  d'hommes  qui  apportent  le  plus  grand 
zèle  à  assurer  la  libre  circulation  des  denrées  qui  lui 
arrivent.  Ces  mots  :  •  C'est  pour  nos  frères  de  Paris*  • 
ont  été  plus  d'une  fois  les  mots  magiques  qui,  sur 
les  routes,  dans  les  communes^  dans  les  rassemble- 
ments populaires,  ont  empêché  le  pillage,  dissipé  les 
attroupements  et  facilité  la  circulation  des  grains. 

Une  telle  conduite  impose  aux  citoyens  des  olili- 
gations,  et  ils  sauront  les  remplir.  Excepté  cette 
mk;ade,  Paris  a  consommé  tous  les  jours  plus  de 
deux  mille  sacs  de  farine;  ce  qui  suppose  de  sept  à 
huit  mille  quintaux  de  blé.  Ces  jours  derniers  il  a 
été  essayé  de  n'en  distribuer  que  près  de  dix-huit 
cents  sacs,  et  il  y  a  eu  des  réclamations.  Il  est  vrai 
que  ces  réclamations  ne  sont  nées  que  de  la  mau- 
vaise et  inégale  distribution  du  pain  ;  car  dans  toutes 
les  sections  où  la  répartition  s  est  faite  avec  égalité 
il  n'y  a  pas  eu  le  moindre  murmure. 

Que  faut-il  faire  dans  cette  circonstance?  Déter- 
miner d'une  manière  fixe  et  invariable  la  juste  quan- 
tité de  pain  que  chaque  citoyen  devra  recevoir,  et 
s'assurer  qu'au  moyen  des  mesures  qui  seront  prises, 
soit  qu'il  se  présente  de  bonne  heure,  soit  qu'il  se 
présente  tard  à  la  porte  de  son  boulanger,  soit  qu'il 
y  arrive  en  foule,  soit  qu'il  y  arrive  seul,  soit  qu'il 
attende  à  la  porte  l'instant  de  la  distribution,  soit 
qu'il  se  retire  pour  ne  revenir  que  lorsqu'elle  sera 
commencée,  il  recevra  rigoureusement  son  contin- 
gent  Cet  engagement,  contracté  par  le  gouver- 
nement envers  lui  est  un  dédommagement  avanta- 
geux du  retranchement  qui  lui  sera  fait,  et  qui, 
indépendamment  des  motifs  aue  j^ai  allégués,  ast 
encore  nécessité  par  le  gaspillage  du  pain  oue  l'oa 
nous  dénonce  tous  les  jours,  et  qui  est  tel,  vu  la 
modicité  de  son  prix,  que  les  chevaux,  les  volailles 
et  d'autres  animaux  domestiques  sont  nourris  avec 
la  subsistance  enlevée  à  l'homme. 

Dans  tous  les  temps  et  dans  toutes  les  époques  la 


699 


consommation  Journaliàre  de  Paris  n*a  point  excédé 
«luiiize  cents  sacs  de  farine,  et  c'est  un  tait  connu  de 
tout  le  monde;  c'était  beaucoun  moins  d'une  livre 
par  individu;  en  fixant  aujourd'nui  la  distribution  à 
environ  seize  cents  sacs,  chaque  individu  recevra 
une  livre  de  pain.  Ce  sera  donc  cette  quantité  que 
les  boulangers  seront  autorisés  i  délivrer  à  chaque 
citoyen  ;  et  cette  distribution  se  faisant  sous  la  sur- 
veillance habituelle  des  commissaires  de  section, 
dont  le  zèle  est  si  digne  d'élogas,  dont  la  prévoyance 
et  l'activité  nous  ont  paru  si  recommaiidables,  on 
sera  sûr  d'éviter  tous  les  inconvénients  dont  on  a  pu 
se  plaindre  jusqu'ici.  Si  quelque  citoyen  se  permet* 
tait  quelque  plamte  à  ce  sujet,  blâmait  cette  mesure 
(le  justice,  nous  lui  rappellerions  le  régime  sous 
lequel  il  vivait  il  y  a  un  an,  et  qui  était  tel  que,  sous 
peinft  d'être  mis  à  mort  comme  accapareur,  nul  ne 
pouvait  avoir  chez  lui  aucune  espèce  de  comestibles, 
aucun  légume,  aucun  moyen  d'approvisionnement  ; 
et  nous  lui  dirions  :  Comparez 

Boissj  donne  lecture  des  lettres  suivantes  : 

Le$  repréientants  du  peuple,  envoyés  par  la  Conven- 
lion  naiionale  près  tes  armées  d'Italie  et  des 
A  Ipesj  et  dans  les  départements  du  Var  et  des 
BoueheS'dU'Rhône^  au  comité  de  salut  public, 

Toulon,  le  15  ventôse,  l'an  S*  do  la  république 
frtoç«U4»,  une  et  indivisible. 

■  Citoyens  eollègrues,  Tarrivage  des  frains,  interrompu 
pendant  quelque  temps  par  Teffet  des  mesures  violentes 
employées  contre  les  Gôuois ,  reprend  son  actif itô  ordl* 
uaire.  Il  est  entré  ce  inalio  dans  le  port  de  Toulon  quinie 
cent  cinquanle-buit  émines  de  h\é,  expédiées  de  Livourne 
par  Génrs.  Une  trentuine  de  bâtiments  chargés  de  grains 
sont  peut-être  dans  ce  moment  à  Marseille,  où  ils  vont 
faire  renaître  Pabondance,  Nous  coromençonM  Si  recueillir 
les  fruits  des  encouragements  que  nous  avons  donnés  au 
commerce.  Plusieurs  négociants  de  Marseille  s*occupent 
eieluslfement  des  subsistances.  Nous  avons  délivré  des 
passeports  h  un  grand  nombre  pour  aller  faire  des  achats 
dans  toutes  les  parties  du  Levant.  Nous  espérons  que, 
dans  un  mois»  tout  le  Midi  sera  abondamment  ipprovi- 
aionné  ;  mais  le  gouveroemepi  doit  encore  continuer  ses 
sacrifices  pendant  quelque  temps  ;  le  commerce  est  daua 
un  état  de  dépérissement  qui  rendrait  lous  ses  efforts  inu* 
Ules  s*il  n*éiail  puissamment  secouru.  Il  faut  du  temps  pour 
ramener  lu  eonflance,  rassurer  la  timide  industrie,  et 
pour  eleatriser  les  larges  plaies  que  quinie  mois  de  tyran- 
nie ont  fhltes  au  commerce  et  k  l'agriculture, 

>  Salut  et  fVaierQité« 

•  Signé  F»«J,  Rirriif  Jt  MARnmk  t 

Lettre  de  l'envoyé  extraordinaire  de  la  république 
française  près  l(k  république  de  Gènes  au  comité 
de  salut  public^ 

De  Oénas,  la  IS  ventoie,  Tan  S*  de  la  répu- 
blique une  et  iudivisible. 

•  Citoyens  représentants,  Pétat  ci-joint  des  e\pédillon9 
fliilts  du  port  de  Gênes  pour  ceux  de  la  république  fran- 
çaise, depuis  le  6  de  ee  mois,  est  bien  plus  satisflilsant  que 
je  n'avais  lieu  de  lYspérer.  Le  mauvais  temps  s*est  soutenu 
pendant  plusieurs  jours •  et  Tarrestation  des  matelots  gé- 
nois ù  Marseille  noua  privait  d*équipages.  Cela,  je  l'avoue, 
me  meuait  dans  de  grandes  alarmes  ;  mais  enfin  les  expé- 
ditions de  grains  ont  repris  leur  cours  :  le  peuple  génois 
est  rassuré  par  la  conHance  que  j'ai  eu  le  bonheur  de  lui 
inspirer.  Nos  négociants  approvisionneurs  ont  reçu  des 
fonds,  et  tout  est  bien  dans  ce  moment. 

•  Toutes  les  expéditions  portent  en  Franet  vingt-cinq  h 
trente  mille  émines  de  blé,  et  beaucoup  d'autres  obiets, 
soit  en  matières  premières ,  soit  en  petites  provisions  géné- 
rales. 

«  Il  est  arrivé  k  Gènes,  la  déeade  dernière ,  neuf  à  dix 
mille  émines  dc  bl<t  dfvs  BiUo  quaUe  otnts  d*avoine,  et 


trois  mille  troll  cents  émines  d*OTge  t  11  b^est  vendu  environ 
neuf  mille  émines  pour  la  France, 

•  Il  est  arrivé  de  plus,  dans  le  courant  de  la  décade 
dernière,  quinxe  mille  cent  sacs  de  blé,  et  dix-sept  roilta 
cinq  cents  sacs  d'orge;  U  s'est  vendu  pour  la  Fmnce  treise 
mille  cent  sacs  de  blé,  et  six  mille  sacs  d'orge. 

c  Salut  et  fraternité.  Signé  Viuias»  » 

Boissy  propose  ensuite  un  projet  de  décret. 

RoMMB  :  Je  nVntrerai  pas  dans  rexamen  des  mo- 
tifs qui  ont  dicté  le  projet  de  décret  qui  vous  est  pré- 
senté, mais  je  suis  étonné  qu'avec  les  ressources  qui 
nous  restent  on  réduise  chaque  citoyen  à  une  livre 
de  pain.  Je  pense  que  les  ouvriers,  ceux  qui  se  fati- 
guent tout  le  jour....  (Les  applaudissements  les  plus 
bruyants  parlent  des  tribunes.)  La  proposition  que 
je  fais  ici  est  extrêmement  sage.  Je  demande  que  les 
ouvriers,  ceux  qui,  après  s*être  fatigués  tout  le  jour 
dans  les  ateliers,  ne  trouvent  en  rentrant  chez  eux 
que  du  pain,  en  trouvent  au  moins  une  quantité 
suffisante.  Qu'on  réduise,  et  il  le  faut,  la  ration  do 
ceux  qui  ont  d'autres  ressources,  de  ceux  qui  peu- 
vent acheter,  à  quelque  prix  que  ce  soit,  de  la  viande 
et  des  légumes  ;  mais  je  demande  que  ceux  qui  man- 
gent du  pain  pour  première  subsistance  en  aient  au 
moins  une  livre  et  demie  par  jour.  (Applaudisse- 
ments.) 

Rewbell  :  En  appuyant  la  proposition  deRommc» 
je.pense  qu'il  faut  éclairer  le  peuple  sur  les  manœu- 
vres des  fainéants  qui  ne  sont  pas  des  ouvriers,  et 
qui  les  premiers  assiègent  la  porte  des  boulangers 
et  enlèvent  tout  le  pain  qu*on  distribue.  (Violents 
murmures  dans  les  tribunes.) 

Le  président  les  rappelle  à  Tordre. 

Rrwdbll  :  Il  faut  prendre  une  détermination  queU 
conque  pour  éviter  le  gaspillage  qtie  Ton  fait  du 
pain  ;  il  faut  diminuer  la  distribution  afin  d'atteindre 
les  arrivages  qui  nous  sont  promis  ;  il  faut  eutin  que 
les  citoyens  de»  départements  voient  que  ceux  de 
Paris  sont  leurs  frères.  (Les  murmures  des  tribune« 
interrompent  encore  Topinant.) 

Le  président  réclame  de  nouveau  Tohlre  et  le 
silence. 

Rewbell  :  Ne  sommes-nous  pas  tous  frères?  Eh 
bien,  dans  les  départements  on  n'a  qu'une  demi- 
livre  de  pain 

Plusieurs  voix  :  Et  Ton  ne  murmure  pas. 

Rrwbell  :  Ce  sont  cependant  des  ouvriers  qui 
travaillent  aussi  pour  Fintérét  commun  de  la  répu- 
blique, et  ils  paient  un  pain,  bien  inférieur  à  celui 
qu'on  mange  a  Paris,  30  et  40  sous  la  livre. 

Plusieurs  voix  :  Jusqu*À  50  sous,  et  l'on  ne  mur- 
mure pas. 

Revi'bell  :  Si  nous  sommes  tons  les  enfants  de  I« 
même  famille,  nous  devons  lous  nous  secourir  mu- 
tuellement, et  c'est  précisément  sur  ceux  oui  ont  le 
plus  de  besoin  qu'il  faut  étendre  notre  sollicitude  ; 
il  faut  donc  adopter  ramendement  de  Bomme. 

Je  remarque  que  le  projet  de  décret  accorde  une 
livre  de  pain  à  tous  les  individus,  même  aux  enfanta 
à  la  mamelle;  et  comme  ce  sont  les  artisans  qui  ont 
le  plus  d'enfants,  ce  seront  aussi  les  artisans  qui  au» 
ront  le  plus  de  pain. 

Les  malveillants  chercheront  peut-être  à  proHter 
de  la  mesure  que  le  comité  propose;  mais  un  mol 
sufBrapourfairedisparattreleursperfidesinduotjona, 
11  vaut  mieux  ménager  et  fournir  pendant  longtemps 
aux  besoins  du  peuple  que  de  livrer  au  gaspillage  et 
de  manquer  tout  à  coup.  Il  faut  avoir  les  moyen! 
d'attendre  uos  ressources. 

Gaston  :  J'ai  cru  m'apereevoir  que  la  principale 


700 


cause  de  ce  que  les  bons  citoyens  de  Paris  n'ont  pas 
la  quantité  ae  pain  qui  leur  est  nécessaire  vient  de 
ce  qu'il  y  a  à  Paris  cinquante  mille  individus  qui  ne 
devraient  pas  y  être.  (La  tribune  gauche  applaudit 
à  plusieurs  reprises.)  Il  y  a  des  hommes  qui  ont  été 
h  Coblentz  et  qui  sont  maintenant  à  Pans.  (Mêmes 
applaudissements.)  J*ai  vu  des  hommes,  j*en  suis 
sur,  et  je  le  démontrerai,  qui  ont  été  en  Espagne  et 
dans  d'autres  pays,  et  qui  sont  actuellement  à  Paris. 

Plusieurs  voix  :  Pourquoi  ne  les  as-tu  pas  dé- 
noncés? 

Gaston  :  Nos  efforts  réunis  ont  vaincu  les  puis- 
sances de  l'Europe;  elles  ont  changé  de  tactique, 
et  elles  ont  envoyé  à  Paris  des  gens  sans  aveu,  pour 
assassiner  la  république  et  lui  percer  le  cœur.  Je  ne 
veux  pas  interdire  l'approche  de  Paris  à  ceux  qui 
viennent  pour  l'approvisionner,  à  ceux  qui  y  vien- 
nent pour  des  affaires  de  commerce,  à  [ceux  même 
qui  y  viennent  sans  mauvaise  intention  ;  mais  je  suis 
convaincu  qu'il  y  a  ici  cinquante  mille  individus  qui 
y  sont  venus  pour  faire  la  contre-révolution.  Ils  n'en 
veulent  pas  à  tel  ou  à  tel  autre  parti,  mais  à  toute 
la  Convention,  mais  à  la  république  qu  ils  abhorrent. 

Je  demande  que  le  comité  de  sûreté  générale 

E renne  des  mesures  pour  les  éloigner  de  Paris,  ou 
ien  ces  hommes  atroces  exciteront  des  troubles 
qu'ils  attribueront  aux  bons  citoyens  de  Paris;  mais 
cest  en  vain;  on  connaît  l'esprit  des  habitants  rfe 
Paris  :  ils  sont  attachés  à  la  république,  et  feraient 
h  la  Convention  uationale  un  rempart  de  leurs  corps. 

Tallien  :  Je  ne  crois  pas,  dans  un  moment  aussi 
critique,  dans  un  moment  où  nous  nous  occupons 
de  reparer  les  fautes  de  ceux  qui  nous  ont  précédés, 
dansuu  moment  où  nous  nous  occupons  de  détruire  le 
système  de  famine  créé  par  l'Angleterre  pour  affamer 
Paris  et  toute  la  France;  je  ne  crois  pas,  dis-jc,  que 
dans  un  pareil  moment  les  déclamations  scient  le 
meilleur  remède  qu'on  puisse  employer.  C'est  par 
des  déclamations  qu'on  obtient  des  applaudisse- 
ments; mais  l'homme  de  bien,  qni  veut  pourvoir 
aux  besoins  du  peuple,  sait  s'honorer  même  des  mur- 
mures qu'excitent  les  propositions  qu'il  fait.  (Ap- 
plaudissements.) 

Trop  longtemps  on  a  flaeorné  une  portion  du 
peuple  qui  n'est  pas  le  peuple  français;  trop  long- 
temps on  a  flagorné  une  portion  du  peuple  qui  n'est 
pas  composée  des  estimables  artisans,  des  laborieux 
ouvriers,  mais  des  fainéants  qni  forment  les  groupes, 
et  qui  ne  forment  pas  l'opinion  publique.  (Applau- 
dissements.) Les  individus  qui,  chaque  jour,  assiè- 
gent les  portes  des  boulangers,  y  tiennent  les  propos 
les  plus  contre-révolutionnaires.  (Vifs  applaudisse- 
ments.) Ces  individus,  qui  ne  sont  pas  des  ouvriers, 
mais  qui  sont  des  gens  payés,  sont  ceux  qui  s'unis- 
sent avec  les  royalistes. 

Le  comité  de  salut  public,  qui  connaît  les  besoins 
de  cette  immense  cité,  a  dû  proposer  une  mesure 
sage  qui  a  déjà  été  prise  dans  tous  les  départements. 
On  a  dû  la  prendre  surtout  pour  éviter  le  gaspillage 
du  pain  que  l'on  fait  chez  les  traiteurs.  Ceux  qui 
arrivent  des  départements  méridionaux  diront  que 
les  citoyens  y  sont  réduits  à  une  demi-livre  de  pain 

Ear  jour.  A  Bordeaux,  où  il  y  a  aussi  un  grand  nom- 
re  d'individus  pauvres  et  qui  sont  occupés  à  des 
travaux  pénibles,  les  habitants  ont  été  pendant  sept 
mois  entiers  à  n'avoir  que  quatre  onces  de  pain  par 
jour;  aujourd'hui  encore  ils  n'en  ont  que  huit  onces, 
qu'ils  paient  à  raison  de  20  sous  la  livre. 

Je  suis  loin  de  m'élever  contre  la  proposition  de 
Romme;car,  dès  qu'elle  a  été  faite,  ce  serait  une 
inconséquence  de  ne  pas  l'adopter,  d'autant  mieux 
qu'elle  rentre  dans  les  vues  de  la  Convention  ;  et  il 


ne  faut  pas  laisser  croire  quelle  appartienne  a  un 
individu  plutôt  qu'à  la  Convention  tout  entière,  car 
le  lemps  du  patriotisme  exclusif  est  passé.  (On  ap- 

f)laudit.)  Mais  que  le  comité  prenne  garde  que  les 
àinéants  n'abusent  de  cet  acte  de  justice  ;  qu'il  n'ac- 
corde le  supplément  qu'on  a  demandé  qu'à  l'homme 
de  peine, non  pas  parce  qu'il  ne  mange  que  du  pain, 
car  le  prix  des  salaires  est  augmente  en  proportion 
du  prix  des  denrées,  mais  parce  que  ses  peines  lui 
font  dépenser  une  plus  grande  somme  de  substance. 

FoussEDOiRE  :  Quoique  la  motion  de  Gaston  ne 
soit  qu'incidente,  elle  a  été  appuyée.  Vous  avez  pris 
des  mesures  pour  renvoyer  dans  leurs  départements 
les  hommes  dangereux;  mais  je  crois  que  rien  n'est 
plus  dangereux  que  les  fainéants,  et  il  y  en  a  beau- 
coup. Je  demande  le  renvoi  au  comité  de  sûreté 
générale. 

Mathieu  :  C'est  le  patriotisme  de  notre  collègue 
Gaston  qui  lui  a  fait  illusion.  Le  comité  reçoit  cna- 
que  jour  l'état  des  personnes  qui  arrivent  dans  Paris, 
et  je  vous  assure  qu'il  n'y  a  pas  maintenant  ici  dix 
mille  individus  de  plus  qu'avant  le  9  thermidor; 
d'où  il  résulte  que,  s'il  y  a  cinquante  mille  individus 
dans  Paris,  ce  sont  ceux  qui  existaient  avant  le  9 
thermidor.  (On  applaudit.)  Le  comité  porte  sa  sur- 
veillance contre  ceux  qui  pourrait  tramer  contre  la 
liberté;  il  sait  qu'il  y  a  des  terroristes  dangereux  et 
des  royalistes  perfides;  il  examine  ceux  qui  se  taisent 
et  ceux  qui  parlent,  et  vous  pouvez  compter  sur  lui. 

Boudin  :  Suivant  notre  collègue  Gaston,  il  y  a  ici 
cinquante  mille  individus  arrivés  de  Coblentz,  d'Es- 
pagne et  d'ailleurs;  eh  bien,  puisque  Gaston  a  vu  et 
touché  ces  émigrés,  qu'il  en  indique  donc  un  seul 
au  comité  de  sûreté  générale,  et  il  sera  arrêté  sur-le- 
champ.  (Vifs  applaudissements.)  Je  ne  conçois  pas 
comment  on  peut  s'étonner  de  ce  que  le  comité  ne 
saisit  pas  sur-le-champ  quelques  intrigants  qui  pren- 
nent tous  les  masques,  quand  il  fait  chercher  en 
vain  un  de  vos  collègues  qui  s'est  enfui  au  moment 
où  il  allait  être  mis  en  jugement.  Gaston ,  je  pense , 
ajoute  un  peu  trop  de  foi  à  ce  qui  se  dit  dans  les 
groupes.  Il  sait  bien,  par  exemple,  qu'hier  soir,  dans 
ces  groupes,  un  individu  prêchait  l'insurrection 
contre  la  Convention.  Cet  individu  était  Jacobin  au 
9  thermidor;  il  avait  obtenu  une  mission  pour  aller 
surveiller  les  fonderies  que  nos  troupes  ont  conquises 
sur  les  Espagnols.  Il  est  resté  là  quelque  temps;  il  a 
disparu  un  beau  matin  :  notre  collègue  Delcher  lit 
visiter  sa  caisse,  et  il  trouva  qu'elle  contenait  6,000 1. 
de  moins.  Cet  individu  disait  aux  Jacobins  :  •  Frères, 
gardez-vous  de  vous  laisser  épurer,  car  il  en  pour- 
rait arriver  de  grands  malheurs.  •  (On  rit.) 

Cet  individu  fut  dénoncé  à  la  Convention  et  an 
comité;  il  fut  arrêté  ;  mais  ces  gens  ont  toujours  de 
bons  amis,  et  l'un  de  ceux-ci  est  parvenu  à  soulever 
au  comité  de  sûreté  générale  la  liberté  de  son  pro- 
tégé. 

Je  rappelle  à  notre  collègue  Gaston  que  tout 
homme  qui  connaît  un  émigré  rentré  en  France,  et 
qui  ne  le  dénonce  pas,  se  rend  par  là  même  so;k 
complice.  Je  l'invite  donc  lui  et  nos  antres  collègues, 
s'ils  connaissent  des  émigrés  rentrés  en  France,  a 
les  dénoncer  au  comité  de  sûreté  générale,  et  ils 
seront  arrêtés  sur-le-champ. 

Gaston  :  Je  prends  l'engagement  d'aller  au  co- 
mité de  sûreté  générale  dénoncer  ceux  qui  sont  ici 
et  que  je  connais. 

Plusieurs  membres  :  Cela  devrait  déjà  être  fait. 

MRnrJN  (de  Thionville)  :  Il  n'y  a  que  les  complices 
des  émigrés  qui  puissent,  lorsqu'ils  en  connaissent 
ici,  ne  les  pas  dénoncer.  (On  applaudit.) 


701 


Chazal  :  On  a  tëmoignë  des  craintes  sur  les  sub- 
sistances, on  a  parlé  de  la  détresse  des  départements  ; 
enfin  on  a  parlé  de  l'embarras  dans  lequel  se  trouve 
Paris.  Eh  bien,  citoyens,  il  (aut  faire  connaître  les 
véritables  auteurs  de  tous  ces  maux  :  les  auteurs  de 
ces  maux  sont  ceux  qui  ont  inventé  le  maximum  et 
le  nom  d'accapareur;  ce  sont  ceux  qui  ont  créé  la 
commission  de  famine,  appelée  de  commerce,  com- 
mission qui  a  commis  toutes  sortes  de  vols  et  de 
pillages  ;  les  auteurs  de  ces  maux  sont  ceux  qui  ont 
mis  le  séquestre  sur  la  moitié  du  sol  français,  en 
emprisonnant  les  agriculteurs  de  la  république. 
Après  le  10  thermidor,  nous  n*avons  trouvé  que  du 
sang  et  la  guillotine,  et  partout  les  magasins  vides. 
Les  scélérats  qui  nous  ont  opprimés  voulaient  nous 
faire  moqrir  de  faim  ;  du  sang  et  des  cadavres,  voilà 
les  aliments  affreux  qu'ils  destinaient  aux  malheu- 
reux Français.  (On  applaudit.) 

Boissy  donne  une  nouvelle  lecture  du  projet  de 
décret,  amendé  par  Romme. 

Merlin  (de  Thionville)  :  Je  demande  qu*on  mette 
aux  voix  le  projet  de  décret,  et  que  l'assemblée  dé- 
crète l'impression  et  rafHche,  dans  Paris,  du  rap- 
port fait  par  Boissy  d'Anglas. 

Ces  propositions  sont  décrétées. 

Le  décret  est  adopté  ainsi  qu'il  suit  : 

•  La  Convention  ndilonale,  après  avoir  entendu  ton 
comité  de  salut  public,  déci^te  : 

•  Art.  I«'.  La  distribution  du  pain  par  les  boulangers 
se  fera,  comme  par  le  passé,  sur  les  cartes  délivrées  aux 
citoyens  par  leur  section. 

«  II.  Chaque  citoyen  vivant  du  travail  de  ses  mains  re- 
cevra une  livre  et  demie  de  pain  ;tous  les  autres  individus, 
de  quelque  âge  et  de  quelque  sexe  quMIs  soient ,  en  rece- 
vront une  livre. 

«  m.  La  distribution  sera  surveillée  par  des  commis- 
saires nommés  dans  chaque  section  par  les  comités  civils 
et  de  bienlatsance  réunis. 

•  IV.  Ces  commissaires  seront  tenus  de  se  rendre  chei 
les  boulangers  avant  la  première  distribu lion. 

•  V.  Ils  seront  en  place  peudant  un  mois,  et  renouvelés 
par  tiers  toutes  les  décades. 

•  VI.  Le  comité  de  salut  public,  celui  de  sûreté  géné- 
rale et  la  commission  des  approvisionnements,  sous  la  sur- 
veillance du  comité  de  salut  public ,  sont  chargés  de  pren- 
dre toutes  les  mesures  nécessaires  pour  l'exécution  du 
présent  décret. 

a  VII.  Le  présent  décret  et  le  rapport  seront  affichés 
daus  Paris  et  insérés  au  Bulletiu  de  correspondance.  • 

PÉNiÈREs  :  Je  demande  qu'on  détermine  d'une  ma- 
nière claire  ce  qu'on  entend  par  hommes  vivant  du 
travail  de  leurs  mains. 

RoMHE  :  Je  n'ai  pas  eu  le  temps  de  rédiger  mon 
amendement  ;  j'appuie  la  proposition  de  Pénières  et 
je  demande  que  le  comité  de  salut  public,  dans  un 
règlement,  détermine  ce  que  c'est  que  l'ouvrier 
vivant  du  travail  de  ses  mains.  Je  demande  en  se- 
cond lieu  qu'il  n'y  ait  plus  qu'une  sorte  de  pain 
pour  tous  les  citoyens  indistinctement. 

Plusieurs  membres:  C'est  fait. 

Boudin  :  Je  demande  que  le  comité  de  salut  pu- 
blic publie  l'état  des  subsistances  qu'il  a  trouvées 
dans  les  magasins  de  la  république  après  l'époque 
du  9  thermidor. 

Merlin  (de  Thionville)  :  Je  m'oppose  à  celte  pro- 

I position.  Cette  discussion  a  duré  trop  longtemps,  et 
es  ennemis  de  la  république  en  ont  déjà  profité.  Ci- 
toyens, le  comité  de  salut  public  a  pris  des  mesures 
pour  assurer  les  subsistances  de  Paris  et  de  toute  la 
république.  On  a  amendé  son  projet  de  décret,  J'ai 
moi-même  appuyé  l'amendement,  et  la  Convention 


a  donné,  en  Tadoptant,  une  preuve  nouvelle  de  son 
amour  pour  la  justice  et  pour  l'humanité.  Si  le  co- 
mité eût  bien  fait,  il  aurait  pris  de  lui-même  les  me- 
sures qu'il  a  proposées,  et  n'aurait  pas  donné  invo- 
lontairement une  nouvelle  arme,  un  prétexte  nou- 
veau de  sédition  à  nos  ennenns  ;  mais,  quelles  que 
soient  les  manœuvres  de  ces  derniers,  quelle  que 
soit  leur  habileté  à  saisir  toutes  les  formes,  à  profi- 
ter de  toutes  les  circonstances,  la  France,  l'Europe» 
doivent  savoir  que  nous  ne  le  céderons  pas  ici  en 
courage  et  en  dévouement  aux  douze  cent  mille  bra- 
ves qui  exposent  leur  vie  aux  frontières  pour  la  dé- 
fense dé  la  liberté. 

Représentants  du  peuple,  je  le  déclare  à  vos  enne- 
mis, j*ai  les  yeux  ouverts  sur  eux;  je  tiens  le  fil  d'une 
vaste  conjuration ,  je  la  dévoilerai  lorsqu'il  sera 
temps  ;  et  dussé-je  périr  au  milieu  des  généreux  ci- 
toyens qui,  au  premier  signal,  sont  prêts  à  vous  faire 
un  rempart  de  leur  corps...  (Oui,ouiI  s'écrient  un 
grand  nombre  de  citoyens  qui  se  trouvent  dans  les 
bancs  des  pétitionnaires  et  dans  la  majorité  des  tri- 
bunes, en  agitant  leurs  chapeaux;  la  seule  tribune 
gauche  reste  muette.)  Oui,  dussé-je  périr,  je  com- 
battrai vos  assassins  ;  qu'ils  ne  croient  pas  que  nous 
soyons  au  bout  de  nos  ressources;  elles  sont  immen- 
ses... 

Un  citoyen  dçs  tribunes  s'écrie  :  Bravo  ! 

Une  femme  de  la  tribune  gauche  :  Du  pain  I  (Vio- 
lents murmures  de  l'assemblée  et  des  autres  tri- 
bunes.) 

Merlin,  reprenant:  Je  ne  cherche  point  les  ap- 
plaudissements; mais  ie  dois  au  peuple  la  vérité,  je 
la  dirai  sans  craindre  les  huées  et  les  cris  séditieux. 
Oui,  je  le  répète,  la  patrie  est  assez  forte  pour  écra- 
ser les  vils  reptiles  qui  se  traînent  aujourd'hui  dans 
la  fange,  après  s'être  traînés  dans  le  sang.  (Vifs  ap- 
plaudissements.) Après  cinq  années  de  travaux  ré- 
volutionnaires, après  une  traversée  orageuse,  vous 
n'arriverez  pas  au  port  pour  y  essuyer  un  honteux 
naufrage  ;  votre  union  et  votre  courage  sauront 
conjurer  les  tempêtes  que  l'on  vous  prépare.  Mal- 
heur, malheur  à  ceux  qui  méditent  de  faire  faire  à  la 
révolution  un  pas  rétrograde  !  Le  jour  où,  dans  leur 
âme  perverse,  ils  ont  juré  de  porter  leurs  mains  sa- 
crilèges sur  la  représentation  nationale,  ce  jour  sera 
le  dernier  de  leur  existence. 

Je  demande  Tordre  du  jour  sur  la  seconde  propo- 
sition de  Romme  ;  je  suspecte,  je  ne  m'en  cacne  pas» 
les  intentions  dans  laquelle  elle  a  été  faite  ;  je  vois 
évidemment  le  dessein  de  ceux  qui,  voyant  appro- 
cher un  moment  de  crise4]ui  leur  est  fatal,  veulent» 
à  quelque  prix  que  ce  soit,  sauver  leurs  chefs,  sau- 
ver ces  hommes  qui,  après  avoir  égorgé  le  peonle» 
ne  voient  plus  d'autre  moyen  de  salut  que  de  rallier 
autour  d'eux  les  instruments  dont  s'étayait,  dont  se 
servait  autrefois  leur  exécrable  tyrannie.  Je  demande 
l'ordre  du  jour. 

L'ordre  du  jour  est  décrété. 

—  On  lit  la  lettre  suivante  : 

Le  représentant  du  peuple  Chauvier,  en  mission 
dans  les  départements  de  la  Corrèze  et  de  la  Dor* 
dognûy  à  la  Convention  nationale. 

•  Citoyens  collègues ,  avant  de  vous  rendre  eoniple  de 
ma  mission  dans  le  département  de  la  Corrèxe,  j*ai  voulu 
connaître  l'esprit  public  de  ses  habitants  et  les  causes  de 
l'inexécution  des  lois. 

«  Lorsque  je  me  suis  rendu  dans  ce  département,  con- 
formément à  votre  décret ,  quelques  fils  suppôts  de  la  ty- 
rannie y  bravaient  encore  les  rflbrts  que  vous  aves  faits 
pour  rabattre;  ils  osaient  concevoir  la  coupable  espérance 
de  la  rétablir,  et  ils  ne  la  disaimulaieot  pas.  Les  seules 


702 


villes  de  Tulle  et  de  Brivet  aTaient  en  le  eourage  de 
s^affrancbir  du  joug  honteux  de  reiclaTage;  mais  toulet 
les  autres  commuoca  étaient  opprinëes,  et  la  terreur  y 
régnait  encore. 

t  Fort  de  la  puissance  dont  vous  m^aTei  revêtu  «  j*al 
pufgé  lei  administrations ,  tous  les  corps  eonstiiués,  des 
liommes  immoraux  qui  les  déshonoraient  ;  je  leur  ai  sub- 
stitué des  citoyens  éclairés  et  patriotes,  qui.  lidéles  à  la  ré« 
publique I  mettront  à  exécution  ses  lois  et  feront  régner 
l'ordre. 

«  J'ai  proclamé  tos  principes,  j*ai  proclamé  la  Jastke  et 
le  règne  des  lois ,  et  j'ai  vu  tous  les  citoyens  s'y  réunir. 
L'esclarage  a  disparu  de  la  Corrèze;  Tamour  delà  liberté 
a  repris  toute  soq  énergie,  et  les  citoyens,  par  leur  haine 
pour  le  erime  et  par  le  mépris  quMls  ont  pour  les  briiands 
Mroces  qui  les  ont  opprimés  «  montrent  quMUsont  oignes 
du  nom  d^hommes  libres.  Cest  enfîn  uvec  de  tel^  hommes 
qu^on  fonde  la  république  i  braves,  laborieux,  tempérants, 
Ils  seront  les  fermes  soutiens  de  eelle  que  nous  avons  fon- 
dée. Les  habitants  de  la  Corrde  chérissent  vos  lois,  bénis- 
sent vos  travaux,  et  je  les  ai  vus  pénétrés  de  reconnaissance 
pour  tout  ee  que  vous  avei  fait  pour  sauver  la  patrie.  Le 
royalisme,  Tarislocratie  st  le  terrorisme  sont  en  horreur 
dans  ce  dcparicment,  et  le  fanatisme  n'y  exercera  passes 
fureurs,  par  les  précautions  que  j'ai  prises  de  placer  dans 
les  autorités  constituées  premières  des  hommes  écluirés  et 
amis  sincères  de  la  liberté  et  du  bonheur  public  > 

Leblanc  (des  Bouches-dti-Rhône)  :  Nos  collègues 
dans  le  déparlcnient  des  Bouches-du-Bhône  ont  été 
circonvenus  par  des  gens  qui  les  ont  tronopés.  lis 
ontdëclarë  la  ville  d'Arles  en  état  de  siôge,  sous 
prétexte  qu'elle  était  environnée  de  brigands,  tandis 
(|U*il  n'y  avait  dans  les  plaines  à  l'entour  que  des 
bergers  qui  gardaient  paisiblement  leurs  trou  peaux. 
lis  ont  ordonné  le  désarmement  général  de  tous  les 
citoyens;  ils  ont  créé  un  tribunal  miUtaire  ;  enfin, 
citoyens,  on  ne  serait  pas  porté  à  des  mesures  plus 
sévères  dans  une  ville  prise  d'assaut.  Cependant  il 
y  a  dans  le  département  un  tribunal  criminel  de- 
vant lequel  ils  pouvaient  renvoyer  les  coupables, 
8*il  y  en  avait;  mais  un  tribunal  militaire  retrace 
toutes  les  horreurs  qui  ont  mis  la  France  en  deuil 
sous  le  règne  de  Robespierre.  Je  demande  le  renvoi 
deParrête  au  comité  de  sûreté  générale. 

Granbt  :  L'improbation  ! 

Plusieurs  voix  :l}n  moment,  un  moment  ! 

Leblanc:  Je  demande  le  renvoi  au  comité  de  su- 
reté  générale  de  Tarrété  de  nos  collègues,  pour  en 
faire  le  rapport  demain. 

Le  renvoi  est  décrété. 

MÉAULLB  :  Une  loi  défend  aux  représentants  du 
peuple  d'établir  des  tribunaux  militaires  ;  si  un  seul 
citoyen  était  condamné,  contrairement  aux  lois,  par 
celui  qu*on  a  établi  à  Arles,  on  commettrait  un  as- 
sassinat juridique  en  exécutant  ce  jugement.  Pour 
rhonneur  des  principes,  la  Convention  ne  doit  pas 
laisser  subsister  ce  tribunal,  et  je  demande  qu'il  soit 
suspendu  sur-le-champ. 

CouppÊ  (des  Côles-du-Norù):  Il  roc  semble  que 
Ton  ne  peut  pas  adopter  cet  avis  sans  connaître  les 
circonstances  et  les  motifs  qui  ont  déterminé  nos 
collègues  à  créer  ce  tribunal.  Je  demande  qu'on  at- 
tende jusqu'à  demain. 

BoYÈRB  :  J'appuie  cet  avis,  parce  qu'il  donnera  le 
temps  au  comité  de  vous  rendre  compte  de  ce 
qu'ont  fait  nos  collègues.  Vous  verrez  que  si,  d'un 
côté,  ils  poursuivent  vigoureusement  les  égor^eurs 
et  les  buveurs  de  sang  (murmures  à  l'extrémité 
gauche),  de  l'autre  ils  font  arriver  des  subsistances. 
(Mêmes  murmures.]!  Ne  voulez-vous  pas  entendre 
les  nouvelles  satisfaisantes  ?  Un  courrier  nous  a  ap- 
pris que  par  les  soins  de  uos  eollèguei  il  était  entré 


dans  le  port  de  Marseille  cent  bâtiments  charge  de 
subsistances... 

Plusieurs  voix:  Est-ce  Granet  qui  a  fait  cela? 
(Vifs  applaudissements.) 

RovÈBB  :  Voici  la  lettre  de  Cadroy  : 

Le  représentant  dupeuple  Cadroy,  envoyé  dans  tes 
départements  du  Var  et  iesBo^eheS'd^^Rh^t  à 
son  eollègue  Rovère, 

•  Je  ne  sais  quelle  aura  été  ton  opinion  rar  asMopératioiit 
à  A  ries  t  j*ignore  aussi  la  décision  de  la  Conventioii  natio» 
nale;  mais  je  pais  t'assurer  que  les  événements  ultérieurs 
nous  conGrment  Turfence  des  mesures  que  nous  avons 
prises.  Notre  fermeté  a  besoin  d*accroUre  chaque  jour 
pour  comprimer  les  méchants  et  arréier  les  vengeances 
particulières;  nos  efforis  n*ont  pas  été  vains  iusqu*à  ce 
moment,  cl  nous  tiendrons  jusqu'au  bout.  Mais  |e  le  dé- 
clare qu'en  mon  pariicnlier  mes  fbrces  ne  me  permettraient 
pas  de  continuer  le  développement  de  Ténergie  à  laquelle 
je  me  suis  abandonné.  J'ai  attaqué  partout  les  terroristes, 
les  buveurs  de  sung  et  les  aristocrates,  et  je  dois  à  ces  me- 
sures quelques  succès, 

•  J'ai  envoyé  depuis  deux  jours  à  la  Convention  le  ta- 
bleau des  arrivages  en  approvisionnements  de  toutes  espèce 
dans  le  port  de  \f  arseiilc.  La  rade  est  un  grenk'r  d'abon- 
dance, et  chacun  peut  y  satisfaire  ses  besoins.  La  confiance 
des  Génois  est  totalement  rétablie,  et  nos  invitations,  nos 
protestations,  au  nom  de  la  république  française,  ont  fbit 
naître  pour  ainsi  dire  le  blé  dans  la  Méditerranée  i  nous 
comptons  près  décent  bâtiments  i  MarseUlOi  chargés  de 
subsistances. 

s  Salut  et  fraternité.  '  Caprot.  • 

La  Convention  ordonne  rinserlion  de  cette  lettre 
an  Bulletin. 

Merlin  (de  Thionville)  :  L*altitude  d'une  granda 
assemblée  ooit  toujours  être  indépendante  des  bon- 
nes comme  des  mauvaises  nouvelles.  Appuyé  sur  les 
principes,  le  législateur  doit  frapper  la  tyrannie  là 
où  elle  se  trouve,  fût-il  entouré  d'une  armée  d'en- 
nemis ou  menacé  des  poignards  dej  assassins.  (Ap> 
Klaudissements.)  Trop  longtemps  Barère  et  S(*s  ad- 
érents  ont  employé  cette  tactique  ;  ils  avaient 
toujours  soin  d'annoncer  une  bonne  nouvelle  lors- 
airils  voulaient  faire  adopter  unemesuretyraunique. 
11  faut  en  revenir  aux  principes. 

MéauUe  a  dit  au*un  décret  défendait  aux  représen- 
tants du  peuple  de  créer  des  tribunaux  extraordinai- 
res; eb  bien,  il  faut  que  ce  décret  soit  exécuté. 
Ainsi,  sans  rien  prononcer  contre  nos  collègues,  je 
demande  que  le  tribunal  soit  cassé. 

Je  saisis  celte  occasion  pour  faire  remarquer  com- 
bien est  grande  la  malveillance  de  ceux  qui,  dans  le 
sein  de  la  Convention,  ont  dit  que  le  convoi  dont  on 
vient  deporler  avait  été  pris  par  Tcnnemi.  Les  hom- 
mes qui  font  courir  ces  bruits  sont  ceux  qui  font  des 
affiches  incendiaires,  sont  ceux  qui,  après  avoir  ap- 
partenu à  la  tyrannie  de  Robespierre,  voudraient  se 
vendre  à  celle  du  petit  Capet.  (Applaudissements.) 
Voulez-vous  avoir  la  paix;  voulez-vous  avoir  wn 
gouvernement  définitif:  rester,  fermes,  et  soyez  éga- 
lement sévères  pour  les  buveurs  de  sang  et  pour  les 
royalistes,  (Nouveaux  applaudisse mtMitâ. )  De  la 
même  main  qui  pulvérise  les  ennemis  de  Pextérienr, 
frappez  la  tyrannie  de  Bobespierre  et  ses  restes,  la 
tyrannie  de  Capet  et  ses  restes.  (Les  applaudisse- 
ments redoublent.) 

La  Convention  décrétais  suppression  du  tribunol 
militaire  établi  à  Arles. 

^LAUZBL  :  Je  demande  que  le  décret  soit  envoya 
par  un  courrier  extraordinaire. 

Barras:  Je  demande  que  tout  jugement  rendu 
par  ce  tribunal,  et  qui  n'aurait  pas  reçu  son  exéco- 


708 


tiotiisoit  cassé.  Je  demande  en  outre  que  les  préve- 
nus dont  les  jugements  auront  été  cassés  soient  tra- 
duits, s'il  y  ■  fieu,  devant  le  tribunal  criminel  du 
département. 

Les  propositions  de  Glauzel  et  de^  Barras  sont 
adoptées. 

LoucHET  :  Il  s*était  manifesté  quelques  troubles 
dans  le  département  de  l'Aveyron  ;  mais  le  zèle  des 
administrateurs  et  Ténergie  des  gardes  nationales  les 
ont  dissipés  dès  leur  naissance. 

La  Convention  nationale  n'entendra  pas  Sans  le 
plus  vif  intérêt  an  beau  trait  dhéroîsme  auquel  ces 
troubles  ont  donné  lieu*  Le  voici  en  deux  mots. 

Un  sergent  des  volontaires  du  Tarn  est  pris  parlrs 
rebelles;  ceux-ci  exigent qu*il  jure  de  soutenir  le  roi 
et  la  religion  catholique.  Le  digne  soldat  de  la  li- 
berté refuse.  On  le  menace  de  la  mort.  •  Je  préfèn». 
une  mort  glorieuse,  s'écrie-t-il,  à  une  vie  qu'il  fau- 
drait acheter  par  un  serment  inurae.  •  Cette  réponse 
généreuse  ne  désarme  point  les  rebelles.  Le  volon- 
taire est  mis  en  pièces. 

Citoyeosi  l'histoire  de  notre  révolution  n*offre 
point  d'exemple  d'un  dévodement  plus  sublime,  et 
qui  honore  davantage  le  berceau  de  la  république. 
Le.nom  de  ce  brave  nomme  mérite  une  place  sur  lu 
colonne  du  Panthéon. 

Ce  sont  les  administrateurs  du  district  de  Rhodez 
qui  nous  ont  transmis,  à  mon  collègue  Boux  et  à 
moi,  ce  fbit  qui  intéressera  si  vivement  les  hommes 
libres  de  tous  les  pavs  et  de  tous  les  temps.  Je  vais 
lire  l'article  de  leur  lettre  où  ils  nous  l'annoncent. 

•  Nous  a?OD$  à  pleurer  la  mort  d^un  sergent  des  volon- 
taires du  Tarn,  qui  a  élè  Victime  de  leur  rage  aristocrall*- 
que,  et  qui  a  préféré  une  mort  glorieuse  à  la  houle  de  se 
voir  otiligé  de  pr^er  le  aerment  de  loatenir  le  roi  et  la  re- 
ligion catholique. 

•  Salut  et  fraternité. 

•  Signé  LABrr,  Tiulat,  ÂiteAR cadet;  Blazt,  agent 
nationaU 
Louchet:  Je  demnnde  l'Insertion  au  Bulletin,  le 
renvoi  au  comité  d'instruction  publique,  pour  vous 
présenter  un  projet  de  décret  qui  honore  la  mémoire 
de  cet  intrépide  volontaire,  elau  comité  des  secours 
publics,  pour  faire  jouir  sa  famille  dos  secours  aux- 
quels elle  a  droit,  aux  termes  dé  la  loi. 
Cette  proposition  est  décrétée. 

—  Maignen,  au  nom  du  comité  des  décrets,  pro- 
pose, et  la  Conveution  adopte  la  disposition  sui- 
vante; * 

«  La  Convention  Dationale.  après  avoir  entendu  son 
comité  des  décrets,  procès-verbaux  et  archives,  rapporic 
son  décret  du  3  brumaire  dernier,  relaUf  k  Georges  Cha- 
bot, suppléant  du  département  derAHIer,  et  décrète  qu'il 
se  rendra  de  suile  au  sein  de  la  ConvenUoo  naUonalr,  eu 
remplacement  du  cltojreii  VidaUo  «  uu  de  ses  membres, 
décédé. 

a  Le  présent  décret  et  le  rapport  seront  insérés  au  Bul- 
letin de  correspondance.  • 

—  La  section  de  Bonne-Nouvelle  est  admise  à  la 
barre. 

LoraUuT  de  la  députation  :  Le  premier  objet  di; 
nos  vœui,  citoyens,  est  d*obtenir  de  votre  justice  et 
de  votre  autorité  le  réarmement  des  bons  citoyens, 
la  plupart  pères  de  famille  «  fortement  attachés  à  la 
révolution,  et  dont  tout  le  crime  fut  de  montrer  des 
vertus  proscrites  par  la  tyrannie  ;  mais  en  même 
temps  que  vous  restituerez  à  la  probité  et  au  civisme 
les  moyens  de  défendre  la  liberté  et  les  propriétés,  ne 
conviendrait-il  pas  d''en  priver  ceiu-là  m^me  qui, 
dans  des  temps  d'oppression  et  de  crime,  s'en  sont 
montrés  tes  ennemis  les  plus  mortels  et  les  plus  dan- 
gereux? 


Vos  sentiments  et  vos  principes  sont  les  nôtres: 
comme  vous  nous  pardonnons  a  l'erreur,  nous  ne 
sommes  inexorables  que  pour  le  crime. 

A  ce  mot  de  crime,  un  souvenir  douloureux  se  ré* 
veille  dans  nosâme.«i.  Il  en  est  un  é()ouvan(able,dont 
la  justice  nationale  réclame  impérieusement  la  ven» 
geance:  c'est  celui  qui,  placé  dans  notre  histoire  à 
côté  de  la  plus  belle  de  toutes  ses  époques,  pourrait 
en  ternir  la  gloire  aux  yeux  de  la  postérité,  si  la 
Convention  nationale  ne  se  hâtait  d'en  punir  les 
exécrables  auteurs.  Oui,  représentants,  ce  serait  en 
vain  que  la  république  entière  vous  aurait  demandé 
la  punitiou  des  hommes  de  sang,  si  vous  ne  rappor- 
tiex  au  plus  tôt  celui  de  vos  décrets  qui  suspend  la 
poursuite  des  massacres  des)  et  3  septembre. 

Nous  vous  proposons  un  changement  que  nous 
croyons  salutaire  relativement  à  1  heure  de  nos  as*- 
semblées  ;  nous  nous  bornons  à  vous  rappeler  que 
les  inconvénients  attachés  aux  séances  du  soir  ont 
été  vivement  sentis  par  la  première  Assemblée  na* 
tionale,  puisque  l'expérienoe  à  cet  égard  a  sudi  pour 
les  fîiire  supprimer.  Notre  vœu  serait  donc  que 
l'heure  des  assemblées  de  sections  fût  désormais 
fixée  depuis  dix  heures  du  matin  jusqu'à  deux. 

Nous  n'avons  plus  qu'un  sentiment  à  vous  expri- 
mer :  c'est  celui  de  la  joie  aifa  fait  naître  daus  nos 
cœurs  le  rappel  de  vos  collègues  malheureux.  Oui, 
cet  acte  de  justice  vous  honore  ;  il  montre  enlin  à' 
PEurope  le  spectacle  sublime  d'une  nation  libre  et 
digne  de  Tétre,  puisqu'elle  rachète  la  honte  des 
longs  égarements  de  la  raison  publiuue  par  l'aveu 
solennelde  ses  fautes,  et  qu^elle  sait  les  couvrir  par 
des  vertus  plus  grandes  encore  que  ses  malheurs» 
(On  applaudit.) 

L'insertion  au  Bulletin  est  décrétée. 

La  séance  est  levée  i  quatre  heures. 

SÉANCE  DU  26  VENTOBÊ. 

Dès  le  commencement  de  la  séance  le  bruit  s'était 
répandu  que  l'arsenal  de  Meudon  avait  sauté.  Une 
épaisse  fumée,  qu'on  voyait  s'élever  au-dessus  de 
Meudon,  avait  donné  de  vives  inquiétudes  ;  le  prési- 
dent les  calme  par  la  lecture  d'un  rapport  de  la 
commission  des  armes  et  poudres  au  comité  de  sa* 
lut  public. 

Cette  lettre  annonce  que  le  feu  a  pris  seulement  au 
vieux  château  ,  mais  qu'on  assure  qu'il  n'y  a  rien  à 
craindre  pour  les  magasins. 

***  :  Je  demande  l'impression  de  ce  rapport  etTaf-^ 
Gche  dans  Paris. 

Cbarlibr  :  11  faut  quelque  chose  de  plus  satisfai* 
sant.  Que  signifie  on  anurt  f  11  va  arriver  tout  à 
l'heure  de  nouveaux  renseignements,  il  faut  les  at-- 
tendre. 

André  DUMONTt  J'annonce  à  la  Convention  quo 
le  comité  de  salut  public  a  envoyé  des  agents  à  Meii- 
don,  et  qu'il  ne  tardera  pas  à  faire  son  rapport. 

Un  moment  après,  Fourcroy  monte  à  la  tribune. 

FoDRCROY,  au  nom  du  comité  de  salut  public: 
Citovens,  un  incendie  s'est  manifesté  ce  matin,  vers 
dix  heures  et  demie,  dans  l'établissement  de  Meu  • 
don.  Il  a  pris  par  le  frottement  d'une  fusée  qui  o 
mis  le  feu  à  un  artifice  ;  l'ouvrier  qui  le  tenait,  au 
heu  de  le  jeter  au  dehors  du  bâtiment,  comme  on 
doit  le  taire  dans  un  pareil  accident,  très-ordinaire 
dans  les  ateliers  des  arsenaux,  s'est  sauvé,  et  le  feu 
s'est  communiqué  promptement  à  d'autres  artifices 
voisins,  et  par  eux  a  une  des  ailes  du  vieux  château. 
A  la  première  nouvelle  de  cet  accident,  le  comité  a 
envoyé  sur-le-champ  deux  de  u»  meinbrca»  et»  sur 


704 


leur  rapport,  il  a  pris  de  suite  toutes  les  mesures 
propres  à  arrêter  les  progrès  de  Tincendie.  On  as- 
sure qu'il  n'y  a  personne  de  blessé.  Trois  de  nos  col- 
lègues sont  à  Meudon  et  surveillent  tous  les  travaux. 
Le  comité  rendra  compte  à  la  Convention  à  mesure 
qu'il  recevra  des  nouvelles. 

Le  comité  doit  faire  remarquer  à  la  Convention 
que  la  maniçre  naturelle  dont  le  feu  a  pris,  et  qui  n*a 
lieu  que  trop  souvent  dans  les  arsenaux,  ne  laisse 
pas  craindre  au*on  puisse  attribuer  ce  malheur,  tou- 
jours trop  fâcheux,  à  aucune  malveillance. 

L'insertion  au  Bulletin  est  décrétée. 

Lacombe  (du  Tarn)  :  Je  demande  que  Ton  admette 
à  la  barre  les  braves  républicains  de  l'armée  des  Py- 
rénées-Orientales qui  apportent  les  nouveaux  tro- 
phées pris  sur  les  Espagnols.  Parmi  ceux  qui  les  pré- 
sentent il  y  en  a  qui  sont  couverts  d'honorables 
blessures,  et  qui  viennent  ici  s'en  consoler  en  faisant 
jouir  la  Convention  du  récit  de  leurs  victoires. 

Les  militaires  de  l'armée  des  Pyréuées^Oricntales 
sont  admis  à  la  barre. 

Le  citoyen  Clauxel,  adjudant  général  dans  les  ar- 
mées des  Pyrénées-Orientales,  portant  la  parole  : 
L'armée  des  Pyrénées-Orientales  vient,  pour  la  se- 
conde fois,  enlacer  aux  palmes  du  Nord  les  palmes 
du  Midi  ;  pour  la  seconae  fois  elle  expose  dans  le 
sanctuaire  de  la  liberté  les  signes  glorieux  des  triom- 
phes de  la  républioue  et  de  la  défaite  de  ses  ennemis. 

Nous  sommes  chargés  de  vous  présenter  vingt- 
quatre  drapeaux  espagnols  ou  portugais  et  le  pa- 
villon qui  Qottait  sur  Figuières;  c'est  le  tribut  de  la 
force  qui  exécute  au  génie  qui  conçoit,  à  la  sagesse 
qui  dirige  ;  ce  sont  les  monuments  âe  la  victoire  du 
17  brumaire,  de  la  mémorable  journée  du  80,  où 
quatre-vingts  redoutes  ont  été  emportées  dans  dix 
heures  de  combat,  et  quatre  cents  pièces  d'artillerie 
ont  enrichi  les  arsenaux  de  la  république. 

Certes ,  avoir  chassé  les  ennemis  du  territoire 
français,  les  avoir  précipités  du  haut  des  Pyrénées, 
avoir  conquis  Lempourdan,  assiégé  et  prit  Rosas  au 
milieu  des  neiges  et  des  frimas,  malgré  la  plus  opi- 
ni«1tre  résistance  et  le  plus  rigoureux  hiver,  avoir 
sept  fois  mérité  vos  honorables  décrets,  c'est  avoir 
marqué  sa  place  dans  les  fastes  militaires  de  la  révo- 
lution française.  Mais  les  défenseurs  de  la  patrie 
imitent  votre  exemple;  jaloux  d  affermir  la  gloire  du 
peuple  français  quand  vous  travaillez  incessamment 
a  son  bonheur,  ils  ne  comptent  ni  leurs  succès,  ni 
leurs  privations,  ni  leurs  fatigues;  la  victoire  appelle 
la  victoire,  de  nouveaux  triomphes  se  préparent.  Que 
les  ennemis  de  la  république  s*humilient.  ou  qu'ils 
tremblent  ;  c'est  chez  eux  que  la  sagesse  de  vos  lois  ' 
et  les  succès  des  armées  ont  pour  jamais  déporté  la 
terreur.  (On  applaudit.) 

Le  Président  :  Au  milieu  des  orages  de  la  révolu- 
tion, des  déchirements  produits  par  les  factions,  et 
des  fléaux  dévastateurs  qui  ont  ravagé  le  sol  de  la 
France,  les  républicains  ont  toujours  mis  leur  espé- 
rance et  leur  consolation  dans  les  défenseurs  de  In 
patrie.  Tandis  que  le  vice  déchaîné  conjurait  la  perte 
de  la  patrie,  sa  vertu  semblait  s'être  retirée  tout  en- 
tière dans  les  camps,  et  les  armées  étaient  devenues, 
|K)ur  ainsi  dire,  les  seuls  dépositaires  de  la  gloire  na- 
tionale. Vous  n'avez  pas  ressemblé  à  tant  de  déposi- 
taires infidèles  qui  se  sont  approprié  leur  dépôt  ; 
▼ous  avez  reculé  les  barrières  de  la  république  et 
immortalisé  par  vos  victoires  la  gloire  du. nom  fran- 
çais. Citoyens,  les  représentants  du  peuple  n'ont  jeté 
que  les  premiers  fondements  de  la  république  ;  ce 
sont  les  nommes  libres,  armés  pour  sa  défense,  qui 
l'ont  réellement  fondée  et  scellée  de  leur  sang,  et  qui 


la  maintiendront  contre  les  tyrans  coalisés  et  ses  en« 
nemis  intérieurs. 

Continuez  à  enrichir  la  patrie  de  dons  aussi  pré- 
cieux. La  Convention  vous  invite  aux  honneurs  de 
la  séance. 

La  mention  honorable,  l'insertion  des  deux  dis- 
cours au  Bulletin  sont  décrétées. 

Maure  :  Je  demande  que  le  président  donne  l'ac- 
colade fraternelle  au  chef  de  ces  braves  militaires. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

Le  président  lui  donne  l'accolade  au  milieu  des 
plus  vifs  applaudissements. 

{La  suite  demain.) 


N  B,  —  Dans  la  séance  du  27  ventôse,  la  Con- 
vention a  entendu  la  lecture  de  la  ratification  donnée 
par  le  grand  duc  de  Toscane  au  traité  conclu,  en  son 
nom,  entre  lui  et  la  république  française,  ainsi  que 
des  lettres  de  créance  qu'il  a  adressées  à  M.  Carletti 
pour  résider  en  qualité  de  ministre  plénipotentiaire 
auprès  de  la  république  française.  La  Convention 
a  ordonné  que  demain  M.  Carletti  serait  admis  pour 
être  reconnu  en  cette  qualité. 

—  Quelques  individus  sont  venus  à  la  barre  de- 
mander du  pain  d'une  manière  peu  mesurée.  Le  pré- 
sident leur  a  répondu  fermement.  Ils  se  sont  reti- 
rés, et  ont  ensuite  voulu  forcer  la  porte  de  la  salle. 
Des  femmes  les  excitaient  et  se  répandaient  dans  les 
groupes  voisins  pour  inviter  à  les  seconder.  Tout  a 
été  apaisé. 

-*"  Marec  a  aononcé  cinquante-deux  nouvelles 
prises. 


Brûlement  d'auignals. 

Le  29  ventôse,  à  dix  heures  du  matin,  il  sera  brûle, 
dans  la  cour  du  nouveau  local  de  la  vérification  des 
assignats,  la  somme  de  15  millions  en  assignats, 
provenant  des  échanges,  lesç^uels,  joints  aux  2  mil- 
liards 610  millions 683,000  liv.  déjà  brûlés,  forment 
un  total  de  2  milliards  625  millions  683,000  liv. 


LIVRES  1MVERS. 

De  la  Médecine  opiratoîret  ou  Traité  élémentaire  des  opê^ 
rations  de  la  chirurgie;  9  vol.  in-8<>  de  1,000  pages,  «Yec 
sept  planches  gravées  en  taille-douce;  par  Pierre  Lassas,  pro- 
fesseur public  à  l'Ecole  de  Santé  de  Paris.  Pris  :  17  Vit.. 
broché;  et  31  liv.  IS  sous,  franc  de  port,  par  la  poftc,  pour 
les  départements  et  pour  les  pays  conquis. 

A  Paris,  chez  Buisson,  libraire,  rue  Hautefeuille,  n»  90. 


Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  delà  dette  consolidée  perpétuelle  se  fail  pour 
les  sii  derniers  mois  de  Pan  f,  et  pour  Tannée  k  ceui  qui 
n*ont  pas  touché  les  six  premiers  mois  de  ladite  année.  L«s 
citoyens  qui  ont  retiré  leur  inscription  définitive,  et  qui  dé- 
sireraient être  payés  dans  les  districts,  peuvent  indiquer  les 
chefs-lieux  de  district  où  ils  veulent  être  payés,  confoimë- 
ment  à  la  loi  du  3«  jour  des  sansculottides. 

Le  payement  des  rentes  viagères  se  fait  cumulativeioeii 
pour  les  deux  mois  vingt  et  un  jours  de  Tannée  1703  (vieux 
style;  et  les  six  premiers  mois  de  Tan  Sa. 


GAZETTE  NATIOILE  «»  LE  lONITEUR  UNIVERSEL. 


NO  179. 


Nonidi  29  Ventosb,  fan  3«.  (Jeudi  19  Mars  1796,  vieux  style.) 


POLITIQUE. 

PRUSSE. 

Dant^g^  <«  15  février^^hts  blés  de  1b  Pologne  sont  ar- 
rêtés pour  le  compte  des  Rosses  et  des  Autrichiens.  Le 
gouvernement  prussien  est  obligé,  pour  s'en  procurer,  de 
se  faire  autoriser  par  Tune  ou  Taulre  des  deui  puissances. 

—  Les  Russes  doivent  ouvrir,  le  97  d«  ce  mois,  leurs 
tribunaux  pour  juger  les  patriotes  polonais;  on  y  mettra 
deux  ans,  s'il  le  faut,  mais  pas  un  n'échappera.  Ils  ont 
fait  exhumer  les  corps  de  leurs  partisans  qui  ont  élé  con* 
damnés  par  les  lois  nationales  pendant  la  révolution,  et 
Ton  prépare  à  ces  restes,  tirés atec  pompe  de  la  sépulture^ 
des  obsèques  fastueux  dans  Varsovie  même  :  horrible  céré- 
monie, à  laquelle  seront  forcés  d'assister,  au  milieu  des 
baXonuetles  russes,  les  divers  corps  de  métiers  de  la  capi- 
tale.... Voilà  ce  que  c'est  qu'une  contre-révolution. 

—  Il  circule  ont  nouvelle  lettre  de  Stanislas,  adressée  à 
l'impératrice  ;  c'est  le  testament  de  mort  de  la  Pologne, 
tableau  serré  des  longs  désastres  de  oe  royaune ,  et  que  le 
roi  termine  par  s'y  représenter  lul-asème  a«x  genoux  de 
Catherine  II,  lui  demandant  pour  demièfc  Gifeiirla  per* 
mission  d'abdiquer  voloutaireroent* 

ESPAGNE. 

Madrid,  te  5  février. -^he  roi  a  Donmé  l'éfèqw*  ^ 
Salaraanque,  Antonio-Femandei  Vallefo,  gouverneur  du 
conseil  suprême  de  Castille,  à  ia  place  du  comte  de  Ca« 
gnada. 

— La  reddition  de  la  place  de  Rosas  aux  Français  a  vi- 
vement affligé  la  cour.  L'amiral  Gravioa,  que  des  gros 
temps  ont  emi)êchéde  secourir  cette  ville,  s'est  pleinement 
justifié» 

—On  ne  peut  plus  douter  que  la  cour  de  Madrid  ne 
commence  à  juger  celle  de  Londres,  et  à  ouvrir  les  yeux 
sur  l'effiojable  profondeur  de  l'abtme  où  celle-ci  veut 
'  l'eotraiuer.  Les  agents  de  l'Angleterre  font  en  ce  moment 
les  derniers  efforts  pour  la  retenir  dans  l'égarement  Le 
ministre  britannique  sème  en  tout  lieu  -  que  ce  serait  un 
acte  de  démence  de  renoncer  k  la  coalition,  quand  la  pré- 
tendue république  de  France  a  un  pied  dans  le  cercueil; 
qu'un  système  de  terreur  ayant  détruit  la  fièvrepatriotique, 
011  verra ,  dans  peu ,  le  désir  d'un  roi  mitre  d'an  système 
d'humanité..,.  »  Des  lettres  arriveut  de  Vieune  à  l'appui 
de  ces  discours ,  et  portent  le  oèème  caractère  de  trompe- 
rie. 

—  Ily  a  une  sorte  d'insurrection  en  Catalogne.  T^ 
même  mouvement  a  gagné  jusqu'à  Barcelone.  La  cour  est 
enfin  instruite  de  la  vérité  des  faits.  On  ne  ménage  plus  son 
repos  aux  d^ns  de  sa  sftreté.  Une  maladie  épidénrique 
très-fuueste  règne  dans  l'armée  et  dans  les  pays  voiakis  de 
sa  position.  La  cour  en  est  informée,  H  elle  attribue  à  ce 
fléau  le  ralentissement  des  répo  Mica  lus,  qui,  «am  cela,  se 
seraient  avancés  jusqu'à  Barcelone.  On  peut  confeolurer 
raisonnablenent  que  le  roi  d'Espagne  doit  désirer  la  ^ii. 

PAYS-BAS. 

Osfende,  le  îl  rcnfose,  —  Le  commerce  de  ce  port  re- 
prend un  état  florissant.  Les  vaisseaux  danois  et  suédois  y 
apportent  des  marchandises  de  première  nécessité,  tandis 
que  des  marchandises  de  luxe  y  arrivent  de  France-en 
échange  d'autres  fM^uctioos. 

— Ou  vteut  de  nomaer,  pour  les  abbayes  et  eouveols  de 
la  Belgique,  des  économes  chargés  de  dresser  l'état  des 
bieus  de  œs  diverses  propriétés  et  de  les  adainistrer. 


REPUBLIQUE   FRANÇAISE. 

Paris  ^  le  .i8  i en f  ose.  —  Jamais  l'énergie  ne  fut  pour  la 
Convention  un  devoir  plus  impérieux  ;  jamais  les  repré- 
seataotadu  peuple  n'eurent  plus  besoin  d'être  secoadést 

8»  Série*  —  Tome  X, 


par  les  efforts  des  citoyens  vertueux  et  des  bons  républl* 
cains. 

Tout  ce  qui  craint  la  recherche  et  la  sévérité  des  loi# 
s'agite  en  ce  moment  pour  exciter  une  crise  qui  finirait 
toujours  par  tromper  les  coupables  espérances  des  royalis* 
tes  et  des  dominateurs  sanguinaires.  La  malTeillauce  cor* 
ruptrice  et  corrompue  s^ttache  sans  cesse  à  toutes  les 
causes  de  la  misère  publique,  et  eherebe  à  les  rejeter  sur 
l'autorité  nationale. 

Pourquoi  y  a-t-il  des  boulangers  à  la  porte  desquels  on 
ne  voit  point  de  queues?  Y  aurait-il  une  raison  secrète  de 
ces  rassemblements  si  désolants  pour  les  patriotes  ?  Où  s« 
profèrent  les  plus  horribles  blasphèmes  contre  la  républi- 
que et  la  liberté?  N'est-ce  pas  dans  ces  attroupements  qui 
deviennent  presque  séditieux  ?  Ce  n'est  pas  que  la  patrie 
dût  être  bien  effrayée  des  murmures,  trop  naturels  sans 
doute,  de  la  pari  des  femmes  dont  les  intentions  sont  pures 
et  qui  gémissent  d'aller  perdre  ainsi  un  temps  précieux  et 
endurer  toutes  les  injures  de  la  saison;  mais  pourquoi  ne 
prend-on  pas  des  mesures  pour  que  la  distribution  du  pain 
se  fasse  à  .domicile?  Bien  de  plus  aisé,  et  ce  serait  de  It 
part  du  gouvernement  un  sacrifice  Déoessalre  et  peu  coû- 
teux. 

Pourquoi  des  femmes  et  foufours  des  ftmmes  dans  tous 
les  mouvements  populaires?  Lorsque  des  pétitionnaires 
audacieux,  dirigé  par  des  fils  d'or  trop  peu  impereeptl« 
blés  pour  échapper  à  la  vue  de  l'homme  qui  pense ,  du 
l'homme  qui  aime  son  pays,  viennent  insulter  la  représcn» 
tatfon  nationale,  qui  pourtant  s*est  occupée  principalement 
de  leurs  besoins,  pourquoi  des  femaaes  turbolenles  les 
exdtent-elles  par  leurs  clameurs ,  par  leurs  applaudisse- 
nients,  par  leurs  cris,  parleurs  vociférations?  N*est-il 
pas  évident  qu'elles  sont  aux  gages  des  scélérats  qui  veu- 
lent rail  verser  le  règne  de  la  jurtice  et  de  la  liberté  ? 

Quoi  1  dans  ces  momenls  difficiles  où  le  travail  le  plus 
assidu  suffit  à  peine  pour  salistaire  aux  nécessités  de 
l'homme  honnête,  on  verra  tous  les  jours,  dans  la  même 
tribune ,  les  mêmes  figures  ?  et  l'on  ne  croira  pas  qu'elle» 
ne  sont  si  exactes  à  ce  poste  de  troubles  que  parce  qu'dles 
y  trouvent  leur  compte  ?  ' 

Quand  finira  donc  cette  espèce  d'aristocratie  feuwiler 
Nos  lois  n'aeoordent  point  de  droite  politiques  aux  femmes  s 
eh  bien ,  pourquoi  sont-eUes  partout,  dans  toutes  les  aa» 
semblées  politiques?  Ne  serait-il  pas  raisonnable  autant 
quedéeeot  de  les  en  exdure?  La  publicité  n'aurait«€lle 
pas  le  méane  effet  lorsqu'on  n'y  verrait  que  des  citoyens? 
Les  devoirs  des  femmesne  sont-ils  pas  tous  dansTintérieur 
de  leurs  ménages,  dans  la  pratique  des  vertus  domesti* 
ques, dans  l'éducation  de  leurs  enfants?  Sur  qui  d'ailleurs 
tomberait  cette  exclusion?  Qu'on  me  cite  beaucoup  de 
femmes  vertueuses  qu'on  rùt  obligé  de  renvoyer  des  assem- 
blées où  les  hommes  seuls  ont  des  droits  à  discuter  et  des 
devoirs  à  remplir? 

5e  vois  d'affreux  symptdmes.  On  parie  sans  «esse  contre 
les  exécrables  journées  du  S  septembre  et  du  Si  mai,  et 
plusieurs  de  leurs  auteurs  sont  encore  à  la  tète  des  admi* 
iii&trations  publiques,  ou  président  leurs  sections.  Il  n'y  a 
donc  que  les  ennemis  de  la  lit>erté  qui  aient  applaudi  à  idie 
révolte  dont  la  suite  fut  la  dissolution  de  la  représentation 
populaire;  il  n'y  a  donc  que  les  partisans  de  la  tyrannie 
qui,  aujourd'hui  que  cette  représentation  a  repris  son  iu- 
iégralité,  veuillent  encore  amener  un  nouveau  mouve- 
ment contrerévolutionnalrc.  Il  n'y  a  donc  que  les  ennemis 
de  la  France  qui  puissent  encoura^^r,  soudoyer  lesmacfaf  ' 
nations  criminelles  de  ceux  que  le  gouvernement  repré 
sent  a  tif  blesse  et  gène,  parce  qu'il  deviendrait  la  base  di 
la  félicité  de  notre  patrie.  Convention  nationale,  de  Vé 
nergiel  Fais  respecter  la  majesté  du  peuple  français  que 
tu  représentes  ;  chassesaos  uiénagement quiconque insuHe 
à  ton  «utorité.  Souviens-toi  que  le  li  mai  n'a  été  produit 
que  par  la  temporisation  des  hommes  qui  n'opposèreut 
pus  sur-le-champ  la  viguiur  à  l'audace,  et  songe  qu'eu  le 
prononçant  pour  l'affermissement  de  la  république  et  le 
rionplie  de  U  liberté  tu  seras  totyours  soutenue,  eofirou* 

89 


706 


née  des  dtoyens  pour  qui ,  dans  Phypothèse  impossible  du 
retour  du  despotisme*  la  mort  serait  cent  fois  préférable  à 
la  Tic.  Taoïnri. 

AVIS. 

Le  citoyen  Domairon,  ancien  professeur  à  la  ci-deTant 
Ecole  Militaire^  auteur  des  Principes  généraux  des  belles- 
lettres^  ouvrira,  le  11  germinal  prochain ,  un  cours  de 
langue  française,  qui  aura  pour  objet  Texplication  des  rè- 
gles grammaticales  et  le  développement  des  principes  du 
style. 

Ce  cours  «  composé  de  vingt  leçons,  aura  lieu  les  i«',  8, 
5«  7  et  9  de  chaque  décade,  à  midi  précis,  rue  Chris- 
tioe,  n*  2»  Le  prix  est  de  25  livres  par  personne.  Le  même 
citoyen  se  propose  de  donner,  à  la  suite,  un  cours  de  litté- 
rature. 


CONVENTION    NATIONALE. 

Présidence  de  Tfnbaudeau, 
SUITE  DB  I.A  SÉANCE  DU  26  VENTOSE. 

Perbin  (des  Vosges)  :  Je  profile  de  celte  occasion, 
où  des  ddfenseurs  de  la  pairie  vous  présentent  ici  les 
trophées  de  leurs  armes  victorieuses ,  pour  dire  un 
mot  aux  royalistes  qui  maintenant  osent  lever  la 
tête  et  se  montrer  de  toutes  parts.  Au  lieu  de  jeter 
leurs  regards  sur  le  passé,  qu'ils  regardenl  nos  ar- 
mées, et  qu'ils  se  souviennent  que  nos  défenseurs 
n'ont  point  reçu  tant  de  blessures  pour  voir  un  nou- 
veau tyran  sur  le  trône.  Non,  douze  cent  mille  hom- 
mes n'ont  point  combattu  pendant  quatre  ans,  n'ont 
point  fait  tant  de  sacrifices  et  supporté  tant  de  tra- 
vaux, Dour  retpmber  sous  le  joug  de  la  tyrannie. 

Qu'ils  sachent,  ceux  qui  en  veulent  à  la  représen- 
tation nationale,  que,  s'ils  parviennent  à  passer  sur 
nos  cadavres,  douze  cent  mille  vengeurs  sont  là  pour 
nous  défendre. 

Je  dis  donc  qu'hier,  sur  les  huit  heures  du  soir, 
Ton  cherchait  dans  différents  groupes  a  exciter  les 
plus  grandes  agitations.  L'un  disait  qu'il  fallait  aller 
piller  tous  les  marchands,  tous  les  riches  ;  un  autre, 
que  le  jour  d'aujourd'hui  éclairerait  leurs  forfaits, 
et  qu'ils  viendraient  massacrer  la  Convention.  (On 
murmure.) 

Braves  militaires,  rapportez  à  Farmée  que  nous 
sommes  ici  à  notre  poste,  prêls  à  périr  plutôt  que  de 
le  déserter,  et  que  nous  périrons  s'il  le  faut  pour  la 
liberté.  (Vifs  applaudissements  ;  l'assemblée  se  lève 
tout  entière  par  assentiment  à  la  déclaration  de 
l'orateur.) 

Perbin  :  Les  malveillants  prenaient  pour  prétexte 
le  décret  d'hier,  qui  fixe  à  une  livre  la  distribulion 
du  pain ,  et  à  une  livre  et  demie  pour  les  hommes 
laborieux,  les  hommes  de  peine.  Certes,  personne 
ne  peut  se  plaindre  de  ce  décret,  lorsque  (fans  plu- 
sieurs départements  les  citoyens  sont  réduits  à  une 
demi-livre  qu'ils  paient  fort  cher. 

Je  me  borne  à  dire  que  l'intention  de  l'assemblée 
est  de  faire  marcher  incessamment  la  constitution 
démocratique.  Il  est  des  citoyens  qui  disent  tout 
haut  qu'ils  sont  las  de  nous;  eh  bien  ,  nous  aussi 
nous  sommes  las  d'iHre  ici,  et  nous  n'aspirons  qu'a 
retourner  dans  nos  foyers,  après  avoir  assure  le 
bonheur  du  peuple  par  la  paix,  mais  par  une  paix 
glorieuse.  (Applaudissements.) 

BoissY  d'Anglas  :  Je  n'ajouterai  rien  à  ce  que  vient 
de  dire  mon  collègue  Perrin.  Les  principes  qu'il  a 
manifestés  sont  ceux  de  la  Convention  entière.  Oui, 
nous  périrons  à  notre  poste,  s'il  le  faut,  mais  nous 
fonderons  la  république. 
^  Je  dois  annoncer  à  la  Convention  que  le  décret 
d*hier  a  été  généralement  approuvé  par  les  citoyens 


de  Paris.  Des  malveillants  qui  8*étaient  glissés  dans 
les  groupes  ont  été  maltraités. 

Une  députation  du  faubourg  Antoine ,  composée 
d'ouvriers  laborieux,  est  venue  dire  au  comité  que 
ramen(J^ment  qui  leur  accorde  une  livre  et  demie 
de  pain  était  bon  ;  mais  que,  quand  même  il  n'eût 
pas  été  adopté,  ils  se  seraient  soumis  au  décret.  (Vifs 
applaudissements.) 

•  Nous  devons  souffrir,  ont-il  ajouté,  quand  nos 
frères  des  départements  n'ont  pas  même  le  néces- 
saire.* (Nouveaux  applaudissements.)  Ces  braves 
gens  nous  ont  aussi  instruits  que  l'on  cherchait  à 
travailler  les  faubourgs,  qu'on  y  avait  affiché  avec 
profusion  l'affiche  dénoncée  par  Mathieu.  Hier  les 
citoyens  étaient  à  la  porte  d'un  boulanger  dans  une 
des  rues  du  fauboure,  lorsqu'un  individu  dit  aux 
autres  :  «  Pourquoi  donc  ces  cartes  pour  le  pain  ? 
Nous  n'en  avons  pas  besoin  ;  entrons  et  prenons.  • 
Cet  homme  fut  chassé  avec  indignation,  et  sa  fuite 
l'a  soustrait  à  ceux  qui  voulaient  l'arrêter.  Les  ou- 
vriers ont  protesté  que  c'était  en  vain  que  les  mal- 
veillants comptaient  sur  eux.  (Les  applaudissements 
redoublent.^ 

Le  comité  de  salut  public  s'occupe  sans  cesse  du 
soin  d'accélérer  l'arrivage  des  subsistances  ;  mais  il 
m'a  chargé  de  vous  rappeler  que  la  loi  du  3  plu- 
viôse, qui  déclare  suspects  les  cultivateurs  qui  se  re- 
ftiseraient  aux  réquisitions  en  grains,  ne  remplirait 
pas  votre  but  si  ceux  qni  peuvent  se  charger  des 
transports  voulaient  s'y  refuser  ;  en  conséquence , 
il  vous  propose  d'étendre  sur  eux  les  dispositions  de 
cette  loi,  et  voici  le  projet  de  décret  qu'il  vous  pré- 
sente : 

•  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le  rap« 
port  de  son  comité  de  salut  public ,  décrète  : 

•  Art.  I*'.  La  loi  du  3  pluviôse,  contre  les  cultivateurs 
qui  refusent  de  satisfaire  aux  réquisitions  de  grains,  est 
applicable,  quant  h  la  détention,  à  ceux  qui  refusent 
d'obéir  aux  réquisitions  de  Toi(urc!>. 

«  IL  La  confiscation  des  grains  ne  pouvant  avoir  liea  à 
leur  égard,  iU  seront  condamnés  ù  une  amende  égale  à  la 
valeur  des  derirées  dont  ils  auront,  par  leur  refus  «  occa- 
sionné le  détérioremenl  ou  la  perte.  • 

Ce  projet  de  décret  est  adopté. 

Le  Président  :  Dupuis  demande  la  parole  pour 
une  motion  d'ordre;  je  consulte  l'assemblée. 

La  Convention  accorde  la  parole  à  Dupuis. 

Dupuis  :  H  est  un  temps  où  le  silence  est  un  acte 
de  sasesse,  et  Brutus  ne  tut  pas  déshonoré  de  l'avoir 
gardé  sous  le  règne  de  Tarquin  ;  il  est  aussi  un 
temps  où  le  silence  est  un  acte  de  lâcheté,  et  ce 
temps  est  arrivé.  La  Convention  nationale,  enfin 
réorganisée  et  rendue  à  elle-même  après  de  grandes 
fautes  et  de  grands  malheurs,  doit  en  ce  moment 
jeter  un  coup  d'œil  sur  elle-même  et  sur  tout  ce  qui 
l'entoure.  Le  peuple  français,  trompé ,  en  applau- 
dissant aux  aflretises  journées  des  31  mai  et  2  juin, 
et  en  changeant  le  nom  de  Convention  en  celui  de 
Montagne,  m'avait  déchargé  de  toute  responsabi- 
lité, car  on  n'est  pas  responsable  quand  on  n'est  pas 
libre. 

Depuis  cette  époque,  le  peuple  n'a  pu  imputer 
qu'à  lui-même,  ou  plutôt  à  ceux  qui  l'ont  ('garé,  les 
malheurs  qui  l'ont  accablé  et  dont  les  suites  se  fe- 
ront encore  longtemps  sentir  ;  mais  aujourd'hui  que 
la  Convention  est  redevenue  libre,  et  que,  sembla- 
ble à  une  brave  armée  qui  a  perdu  ses  grenadiers 
sans  perdre  l'espérance  de  la  victoire,  elle  peut  en- 
core signaler  et  combattre  ses  ennemis,  je  reprends 
toute  ma  responsabilité,  et  j'invite  mes  collègues  à 
se  souvenir  qu'elle  va  tout  entière  peser  sur  eux, 
avec  peut-être  plus  d'espérance  de  succès. 

Reportons  donc  nos  regards  sur  la  carrière  que 


707 


nous  avons  parcourue  ;  voyons  ce  que  bous  avons 
fait  et  ce  qui  nous  reste  à  faire. 

La  France ,  en  nous  envoyant  ici ,  nous  confia  le 
soin  d*assùrer  sa  liberté  au  dedans  et  au  dehors,  car 
elle  n'a  fait  la  révolution  que  pour  être  plus  libre  et 
plus  heureuse  qu'elle  ne  Tétait  sous  rempire  des 
rois.  La  sagesse  de  ses  généraux  et  la  bravoure  de 
ses  soldats,  secondées  par  les  mesures ^e  votre  gou- 
vernement, ont  repoussé  loin  de  nos  frontières  ces 
armées  d*esclaves  stipendiées  par  tous  les  tyrans  de 
TEurope  ;  elles  ne  souillent  plus  par  leur  présence 
le  sol  pur  de  la  liberté,  les  hordes  germaniques  qui 
inondaient  les  plaines  de  Chàlons  et  menaçaient  Pa- 
ris dune  attaque  prochaine.  Lorsque  la  France  vous 
envoya  dans  ces  murs,  la  grandeur  du  danger  ne 
vous  empêcha  pas  de  vous  y  réunir  en  Convention 
et  de  proclamer  la  république  presque  sous  les  yeux 
des  rois* ligués  contre  vous,  et  qui  travaillaient  a  ré- 
tablir la  tyrannie. 

Je  ne  ferai  pas  ici  Ténumération  des  succès  et  des 
revers  que  vous  avez  éprouvés  depuis  cette  époque  ; 
je  dirai  seulement  que  les  Prussiens  et  les  Autri- 
chiens étaient  presque  aux  portes  de  Paris  lorsque 
vous  y  arrivâtes ,  et  qu*aujourd*hui  vos  armées  vic- 
torieuses ont,  les  unes  franchi  les  Pyrénées,  les  au- 
tres les  Alpes,  tandis  que  leurs  frères  d'armes  ar- 
borent le  pavillon  tricolore  dans  Amsterdam  et  sur 
les  rives  de  l'Escaut  et  du  Rhin.  Vous  avez  donc 
rempli  la  première  tâche  au  delà  même  de  vos 
esDérances,  et  la  France  voit  sa  liberté  affermie  au 
denors  par  les  mains  puissantes  de  quatorze  armées 
qui  ne  laisseront  pas  rétrograder  le  char  de  la  vic- 
toire. 

Par  quelle  fatalité  cette  même  France,  qui  a  donuf 
au  dehors  le  spectacle  étonnant  de  tant  de  triom- 
phes qui  assurent  sa  liberté  et  préparent  celle  du 
reste  du  monde,  a-t-cllc  donné  au  dedans  celui  de  la 
plus  avilissante  servitude  dans  laquelle  des  hommes 

{)uissent  être  plongés?  Vos  soldats  triomphaient,  et 
eurs  pères ,  leurs  mères,  leurs  frères,  leurs  enfants 
étaient  jetés  dans  des  cachots  ou  expiraient  sous  la 
hache  des  bourreaux  1  Et  nons ,  représentants  du 
peuple,  nous  siégions,  muets  et  tranquilles,  à  côté 
des  échafauds!  Etions- nous  les  complices  des  ty- 
rans ?  Si  nous  Tétions,  nous  devons  périr  tous  avec 
eux.  Etions-nous  leurs  victimes  ?  nous  devons  les 
exterminer  tous  :  cVst  à  la  vengeance  éclatante  que 
nous  en  tirerons  que  la  France  reconnaîtra  que 
nous  ne  fûmes  jamais  leurs  complices.  Nous  ne 
pouvons  laisser  impuni  un  seul  de  leurs  crimes,  que 
nous  n'en  appelions  sur  nos  têtes  le  châtiment  ;  car 
tût  ou  tard  la  nation  fera  jusUbe  de  tous  ceux  qui 
l'ont  opprimée,  ainsi  que  de  ceux  qui,  chargés  du 
soin  de  la  défendre  de  l'oppression,  n'auraient  pas 
rempli  fidèlement  leur  devoir.  Nous  n'avons  pas  le 
droit  d'enhardir  le  crime  par  une  amnistie  funeste, 
nous  n'avons  que  celui  de  faire  grâce  à  Terreur. 

Toutes  les  pétitions  qui  vous  sont  faites  à  cette 
barre  par  les  diverses  sections  du  peuple  de  Paris, 
toutes  les  Adresses  qui  vous  sont  envoyées  des  dé- 
partements se  réunissent  à  vous  demander  la  puni- 
tion des  agents  divers  de  Taffreuse  tyrannie  que 
vous  avez  abattue  le  9  thermidor.  11  n'est  pas  un 
point  dans  toute  la  république  d'où  ne  partent  les 
cris  de  Justice  et  vengeance!  parce  qu'il  n'est  pas 
un  point  sur  lequel  n'ait  pesé  la  plus  odieuse  op- 
pression. Ne  souffrez  pas  que  le  peuple  ait  sur  vous 
l'initiative  de  la  justice  nationale,  car  il  l'aurait  bien- 
tôt contre  vous.  Il  a  été  outragé,  il  veut  être  vençé, 
et  il  a  remis  entre  vos  mains  le  glaive  de  la  justice 
suprême.  Les  massacres  de  Paris  au  2  septembre  et 
ceux  de  Versailles  n'auraient  peut-être  pas  eu  lieu, 
si  des  tribunaux  chargés  de  yunir  les  i^rands  crimes 


eussent  fait  leur  devoir,  et  eussent,  en  séparant  Tin* 
noceut  du  coupable,  prévenu  ces  atroces  vengeances 
qui  confondent  toujours  l'innocent  avec  le  coupa- 
ble. Je  ne  prétends  pas  excuser  les  crimes  qui  furent 
commis  alors  sous  le  nom  de  vengeance  populaire  ; 
mais  je  suis  fâché  que  la  lenteur  de  la  justice  ait 
fourni  un  prétexte  aux  ambitieux  de  se  porter  à  des 
forfaits  qui  leur  frayaient  par  la  terreur  un  chemin 
à  la  puissance,  en  déshonorant  le  peuple.  N'imitons 
pas  cet  exemple  ;  soyons  justes  et  sévères,  et  nous 
éviterons  les  funestes  effets  d'une  réaction  qui, 
abandonnée  aux  haines  et  aux  vengeances  particu- 
lières, produirait  encore  de  nouveaux  crimes.  Si  la 
patrie  retombait  dans  de  nouveaux  malheurs,  ce  se- 
rait l'effet  de  notre  faiblesse. 

Portons  donc  nos  regards  sur  tous  les  instru- 
ments d'oppression  dont  on  s'est  servi,  et  nous  ver- 
rons qu'il  n'en  est  aucun  qui  ne  nous  ait  été  arraché 
fiar  la  force  et  commandé  par  la  puissance  qui  rtva- 
isait  avec  nous.  C'est  elle  qui  vous  força  de  créer 
ces  tribunaux,  ces  comités  et  ces  armées  révolution- 
naires, lesquels  ont  été,  entre  les  mains  des  ambi- 
tieux qui  ont  tour  à  tour  trompé  et  opprimé  le  peu- 
ple, les  plus  puissants  agents  de  leur  tyrannie.  Vous 
ne  fûtes  pas  les  maîtres  de  vous  refuser  à  la  forma- 
tion de  ces  institutions  qui,  bien  dirigées,  auraient 
pu  servir  utilement  la  cause  de  la  liberté,  et  qui, 
par  leur  abus ,  et  dans  Tintention  de  ceux  qui  les 
ont  sollicitées,  devaient  nécessairement  l'opprimer  et 
établir  un  despotisme  mille  fois  plus  cruel  que  ce- 
lui auquel  la  nation  venait  de  se  soustraire.  Elles 
ont  été,  je  lésais,  pour  leurs  auteurs  le  taureau  de 
Phalaris,  qui  les  a  dévorés,  mais  qui  a  dévoré  avec 
eux  des  milliers  de  victimes  innocentes.  Néanmoins 
tous  ceux  qui  sont  entrés  dans  l'organisation  de  ces 
funestes  moyens  d'oppression  n'ont  pas  tous  éga- 
lement partagé  le  crime  de  ceux  qui  les  ont  em- 
ployés. 

Si  nous  »  qui  y  avons  mis  le  sceau  de  l'autorité 
publique,  ne  sommes  point  responsables  des  abus 
qu'il  n'était  point  eu  notre  pouvoir  de  réprimer, 
pourquoi  frapperait  -  on  indistinctement  ceux  qui 
n'ont  été  que  les  témoins  passifs  des  vexations  et  des 
dilapidations  de  leurs  collègues,  qu'ils  ne  pouvaient 
empêcher? 

Quel  est  Thomme  de  bien ,  quel  est  le  patriote 
pur  qui ,  par  la  fatalité  des  circonstances,  ne  se  soit 
pas  trouvé  accolé,  comme  malgré  lui,  à  quelque 
ambitieux,  à  quelque  traître,  à  quelque  fripon, 
dans  les  emplois  publics  et  dans  les  opérations 
politiques?  Gnrdons-nous  de  tout  confondre,  les 
ct\oses  et  les  hommes,  et  surtout  évitons  ces  dé- 
nominations odieuses  et  vagues  dont  on  a  tant 
abusé. 

Nous  ne  pouvons  nous  dissimuler  qu'il  ait  été 
commis  bien  des  actes  arbitraires  et  tyranniques  sur 
toute  la  surface  de  la  république  par  ces  hommes 
qu'on  appelle  aujourd'hui  des  terroristes,  des  hom- 
mes de  sang  ;  mais  nous  ne  pouvons  pas  non  plus 
nous  dissimuler  que  ces  noms  odieux  peuvent  être 
injustement  donnés  à  ces  patriotes  sévères  qui,  dès 
Torigine  de  la  révolution ,  ont  fait  constamment  la 
guerre  à  l'aristocratie  et  au  royalisme.  Le  vrai  pa- 
triotisme est  aussi  un  crime  aux  yeux  des  vieux 
aristocrates  justement  attaqués,  comme  le  véritable 
républicanisme  Tétait  aux  yeux  des  ambitieux  qui, 
sous  le  nom  de  patriotes  purs  et  exclusifs,  visaient  à 
la  dictature  et  au  décem virât. 

C*est  à  vous  à  tracer  d'une  main  hardie  et  juste  la 
ligne  de  démarcation  qui  doit  séparer  la  cause  du 
défiuiseur  inflexible  de  la  liberté  ae  celle  de  l'agent 
de  la  dernière  tyrannie.  Il  n'est  personne  de  nous 
qui  ait  bien  servi  son  pays,  qui  ne  doive  s'attendre  à 


708 


trouver  des  ennemis  dans  tôQS  ceux  qui  ont  cherche,  ; 
sous  quelque  dénomination  que  ce  soit,  à  anéantir  j 
la  liberté.  Pour  moi,  je  rougirais  de  ne  pas  avoir  i 
des  ennemis,  quand  ma  patrie  en  a  tant  à  combattre  | 
et  à  comprimer.  L'aristocratie  abandonnée  par  les 
rois  vaincus,  pour  qui  elle  a  si  longtemps  formé  des 
vœux  impuissants,  en  se  ralliant  autour  de  Tarbre 
ide  la  liberté  qu'elle  n*a  pu  renverser,  n*a  pas  oublié 
ses  haines  pour  ceux  qui  Tont  planté  et  qui  Tont 
arrosé  de  leur  saojg;.  Ces  hommes,  à  qui  il  n  a  man* 
que  que  la  victoire  pour  être  encore  plus  féroces 
que  ceux  qu*ils  accusent  et  aue  nous  punirons,  con- 
fondent leurs  cris  avec  les  nôtres  contre  les  hommes 
de  sang  et  contre  les  dilapidateurs  de  la  fortune 
publique,  parce  qu'ils  ont  essuyé  des  pertes  parti- 
culières, et  qu'ils  ont  perdu  des  parents  et  des  amis, 
qui  ne  furent  Jamais  ceux  de  la  liberté.  Ce  sont 
leurs  propres  blessures  qui  les  irritent  plutôt  que 
celles  de  la  patrie  :  ils  sont  aussi,  à  les  entendre,  des 
patriotes  opprimes,  ces  hommes  qui  ont  cherché  à 
étouffer  la  liberté  dès  son  berceau,  et  dont  le  moin- 
dre crime  est  de  n'avoir  jamais  rien  fait  pour  elle. 
Us  s'abuseraient  étrangement  s'ils  se  persuadaient 
qu'en  criant  aussi  vivent  la  Convention  et  larépubli- 
que  !  ils  nous  feraient  oublier  ce  que  nous  aurons 
toujours  à  craindre  des  anciens  amiis  des  rois  et  des 

Srétres  imposteurs.  Notre  surveillance  sur  eux  sera 
'autant  plus  active  qu'ils  ont  aujourd'hui  plus  de 
motifs  de  ne  pas  aimer  la  révolution,  oui  leur  était 
déjà  odieuse  avant  qu'elle  fût  ensanglantée  ;  nous 
leur  rendrons  justice ,  mais  nous  ne  servirons  ja- 
mais leur  vengeance.  Nous  leur  assurerons  la  jouis- 
sance de  tous  les  droits  de  l'homme  hbre  et  du 
citoyen  ;  mais  nous  ne  souffrirons  jamais  qu'ils  usur- 
pent les  droits  du  peuple ,  et  qu'ils  portent  atteinte 
a  la  gloire  des  vertueux  défenseurs  de  la  liberté,  en 
les  flétrissant  du  nom  odieux  de  terroristes  et  d*hom- 
mes  de  sang  ;  voilà  notre  devoir»  et  nous  jurons  de 
le  remplir. 

Quant  à  ceux  qui  n'ont  que  trop  mérité  ces  hor- 
ribles dénominations ,  et  qui  ont  flétri  par  le  crime 
le  nom  de  patriotes  et  de  républicains,  qu'ils  ont 
faussement  usurpé,  nous  leur  jurons  une  guerreà 
mort,  telle  qu'on  doit  la  faire  à  tous  les  assassins  et 
aux  brigands  dans  un  Etat  bien  policé,  et  chez  une 
nation  qui  veut  sérieusement  un  gouvernement  et 
le  bonheur  qui  en  doit  être  la  suite.  Le  patriotisme 
Sj  comme  le  royalisme ,  ses  chouans ,  qui  vivent  de 
pillage  et  de  massacres,  et  qui  ne  veulent  point  de 
paix,  parce  qu'ils  ne  peuvent  avoir  d'existence  que 
dans  la  confusion  et  dans  le  désordre  ;  ils  ne  sau- 
raient être  heureux  que  du  malheur  de  leur  sembla- 
bles. Mais  qu'ils  apprennent  une  bonne  fois,  ces  soi- 
disant  patriotes,  qu'ils  n'ont  ici  ni  protecteurs  ni 
amis,  car  ils  appartiennent  à  la  coalition  de  tous  les 
brigands  de  rÉurope;  qu'ils  sachent  que  tous  les  pa- 
triotes ardents  qu  ils  auraient  trompés  les  livreront 
les  premiers  au  glaive  de  la  loi,  aussitôt  que  leurs 
Crimes  leur  seront  connus.  J'estime  assez  tous  mes 
collègues  pour  faire  en  leur  nom  cette  solennelle 
déclaration  de  nos  principes.  Si  nous  pensons  tous 
ainsi,  il  faut  donc  que  la  Convention  avise  au 
moyen  de  distinguer  l'innocence  du  patriote  injuste- 
ment calomnié,  de  la  scélératesse  du  brigand  qui  a 
Usurpé  ce  nom  sacré,  et  que  la  voix  publique  accuse 
Justement. 

11  n'appartient  à  aucune  section  du  peuple  de  re«- 
pousser  de  son  sein  un  seul  citoyen ,  oe  lui  refuser 
Une  carte  civique,  de  le  désarmer.  Si  ce  citoyen  est 
réellement  coupable  des  crimes  qu'on  lui  impute, 
il  n'est  pas  assez  puni  ;  s'il  est  innocent ,  il  Test 
trop  ;  car  il  doit  jouir  de  tous  les  droiu  des  autres 
Citoyens. 


La  Convention  ne  peut  pas  rester  neutre  au  milieu 
de  cette  lutte  d'une  partie  des  citoyens  contre  l'autre, 
lutte  qui  s'exerce  sur  tous  les  points  de  la  républi- 
que,  et  qui  finirait  peut-être  par  un  grand  déchire- 
ment, si  les  véritables  patriotes  se  trouvaient  con- 
fondus dans  une  proscription  commune  avec  ces 
charlatans  en  patriotisme, qui  ont  opprimé  leurscon- 
citoyens  sous  le  nom  de  liberté,  et  qui  ont  été  des 
persécuteurs  cruels,  quand  la  loi  n'avait  exigé  d'eux 
que  d'être  des  surveillants  fidèles.  Ce  sont  eux  qui 
agitent  aujourd'hui  le  peuple  qu'ils  ont  si  longtemps 
trompé  et  pillé,  qui  l'aigrissent  sur  une  disette  qui 
est  leur  ouvrage,  qui  crient  contre  les  maux  qu  ils 
ont  faits,  et  qui  cherchent  dans  une  insurrection 
l'impunité  de  leurs  atroces  forfaits,  et  désireraient 
d'en  commettre  de  nouveaux.  Je  ne  vous  dirai  pas 
seulement  qu'il  serait  très-impolitique  de  grossir  la 
masse  des  mécontents  qu'a  pu  faire  la  victoire  du  9 
thermidor,  en  laissant  plus  longtemps  croire,  com- 
me les  brigands  ont  intérêt  de  l'insinuer,  qu'elle  a 
été  remportée  sur  les  véritables  patriotes;  inculpa- 
tion insidieuse,  qui  acquerrait  de  la  consistance 
dans  l'opinion  de  l'homme  de  bien  et  du  patriote  ar- 
dent, mais  pur,  qui  se  verrait  aussi  persécuté;  mais 
je  vous  dirai  qu  il  est  de  votre  justice  de  ne  pas  le 
souffrir,  et  de  votre  sagesse  de  prendre  les  moyens 
les  plus  propres  à  empêcher  un  pareil  abus,  et  de 
ne  pas  laisser  aller  trop  loin  une  réaction  qui  en  ap- 
pellerait nécessairement  une  autre. 

Nous  avons  mis  la  justice  à  l'ordre  du  jour  ;  elle 
doit  y  être  jpour  tous,  et  surtout  pour  ceux  qui  ont 
servi  avec  zèle  la  liberté,  quand  même  leur  ardeur 
bouillante  les  aurait  entraînés  trop  loin.  Nous  au- 
rons toujours  besoin  des  patriotes,  même  des  pa- 
triotes égarés,  que  nous  pourrons  éclairer.  Il  n'ap- 
partient qu'à  vous  de  fixer  l'opinion  publique  à  cet 
éeard,  en  mettant  chaque  citoyen  qui  a  été  revêtu 
d  un  grand  pouvoir,  ou  qui,  dans  chaque  commune, 
a  paru  comprimer  la  liberté  de  ses  concitoyens ,  à 
portée  de  rendre  compte  de  sa  conduite  politic^ue 
et  des  écarts  ou  des  uélits  qu'on  pourrait  lui  im- 
puter. ' 

En  conséquence,  je  demande  que  vous  chargiez 
vos  trois  comités  de  salut  public,  de  sûreté  générale 
et  de  législation,  de  vous  présenter  un  projet  de 
décret  qui  fixe  la  manière  dont  il  sera  statué  sur 
toutes  les  réclamations  faites  contre  les  comités  ré- 
volutionnaires, contre  les  prétendus  meneurs  des 
Sociétés  populaires,  de  sections,  contre  tous  ceux 
qui  sont  prévenus  d'avoir  été  les  oppresseurs  de  la 
liberté  de  leurs  concitoyens,  afin  que  chacun  ob- 
tienne la  justice  qu'il  réclame  et  qu'il  a  droit- d'at- 
tendre de  vous. 

Thubiot  :  Je  rends  hommage  aux  principes  qui 
sont  renfermés  dans  ce  discours;  mais  les  proposi- 
tions ont  besoin  d'être  méditées.  Toutes  les  Adresses 
et  les  pétitions  sur  ce  même  objet  ont  été  renvoyées 
aux  comités  ;  il  me  semble  qu'il  serait  sage  d'y  ren- 
voyer aussi  les  propositions  de  notre  collègue. 

L*assemblée  décrète  rimprcssiOD  el  le  ren? oi  aux  trois 
comités  réunis. 
—  Gosiuin  donne  lecture  de  la  lettre  sulyanle  : 

Le  représentant  du  peuple  en  surveillance  àMeudon 
au  comilé  militaire.  j 

I  Les  inquiétudes  que  vous  avez  conçues,  cbers  collè- 
gues, sur  rétablissement  de  Meudon,  ne  sont  que  trop 
réelles.  Le  feu  t'y  est  manifesté  ce  matin  ;  mois  les  projec- 
tiles de  guerre  susceptibles  d'exploî>iou  sont  sauvés*  ainsi 
que  la  majeure  partie  de  la  poudre.  L^officier  que  tout  1 
nravei  envoyé  vous  dira  qu'il  n*y  a  absolument  rieo  à  I 
craindre  pour  les  habitations  veisioesi  et  que  nous  n'a* 
fr  .«q  oue  de  pompiers  «  de  bacbes  et  de  aeaus. 


-09 


qaenoQS  avons  déjà  demandés  à  Paris,  et  qui  nousairi* 
vent  en  ee  motuenU 

•  Salut  et  fraleruilé.  Enlart.  » 

GossuiN  :  Le  comité  militaire  a  pris  toutes  les  pré- 
cautions; il  a  envoyé  une  force  armée.  Il  n'est  péri 
personne. 

Suite  de  la  ditcuaion  iur  lee  relations  extérieurêê, 

CAMBAcéRÈs,  au  nom  du  comité  de  salut  public  : 
11  serait  inutile  de  revenir  sur  les  motifs  qui  ont  dé- 
terminé le  Comité  de  salut  public  a  vous  proposer 
une  mesure  nouvelle  pour  la  solution  d'une  diffi- 
culté qui  peut  se  présenter  avec  fréquence  dans  le 
cours  des  négociations  qu'il  aura  à  entreprendre. 
Tout  a  été  dit  à  ce  sujet,  soit  dans  le  rapport,  soit 
dans  les  opinions  émises  pendant  le  cours  de  la  dis- 
cussion. Quelques-unes  de  ces  opinions  ont  offert 
(les  idées  nouvelles,  qui,  ietantdes  doutes  dans  cer- 
tains esprits,  ont  fait  perdre  de  vue  l'objet  principal 
et  changé  l'état  de  la  uuestion. 

On  n  avait  d'abord  discuté  que  sur  le  point  de  sa- 
voir si  le  comité  de  salut  public  négocierait  seul  des 
traités  secrets,  ou  s'il  ne  pourrait  entreprendre  des 
transactions  de  ce  genre  que  d'après  l'avis  d'une 
commission  créée  adhoc^  ou  d'un  comité  délégué  à 
cet  effet  par  la  Convention  nationale  ;  mais,  dans  le 
cours  des  débats,  quelques-uns  ayant  demandé  si  la 
forme  de  notre  çouvernement  et  l'intérêt  de  la  répu- 
blique permettaient  d'admettre  des  conventions  se- 
crètes, et  quelques  autres,  en  les  admettant,  ayant 
proposé  de  fixer  les  points  sur  lesquels  elles  pour- 
raient uorler  ou  ceux  oui  ne  pourraient  jamais  en 
être  l'objet,  il  est  résulte  de  ces  diverses  propositions 
une  sorte  de  confusion  dans  les  idées  au'il  importe 
de  faire  cesser  si  vous  voulez  simplifier  la  discussion 
et  parvenir  à  d'heureux  résultats. 

Je  pense  donc  que  c'est  entrer  dans  vos  vues  et 
éclairer  la  matière  importante  qui  nous  occupe,  que 
de  présenter  le  résumé  delà  discussion  dans  une  sé- 
rie de  questions  qui  pourraient  être  successivement 
décidées  ou  débattues,  dans  le  cas  où  l'on  aurait  de 
nouvelles  observations  à  faire,  et  où  Ton  sentirait 
le  besoin  de  s'éclairer  encore  par  le  secours  de  la  ré* 
flexion. 

Dans  cette  série,  il  m*a  paru  nécessaire  de  suivre 
moins  Tordre  dans  lequel  les  propositions  ont  été 
faites  que  Tordre  naturel  des  idées  et  leur  analogie. 
Ainsi  je  les  classerai  comnie  il  suit  : 

1*  La  république  peut-elle  prendre  avec  les  gouverne- 
menls  étrangers  des  engagements  qui  demeurent  dans  le 
secret  pendant  un  temps  déterminé? 

2*  Quels  peuvent  être  les  objet^t  de  ces  négociations  Se- 
crrtes ,  ou  quels  sont  ceux  qui  en  sont  exclus  ? 

3»  Le  comité  de  salut  public  sera-t-ll  autorisé  h  faire 
seul  CCS  négociations? 

/i*  Ne  pourra-t'il  agir  dans  les  transactions  de  ce  genre 
que  d'après  Tavis  d'une  commission  ou  d*un  comité? 

Si  cet  ordre  obtient  votre  assentiment,  je  demande  à 
être  entendu  sur  chacun  dès  points  qui  pourra  entraîner 
quelques  déj)ats. 

On  demande  que  les  membres  qui  se  sont  fait  incrire 
pour  parler  sur  le  fond  de  la  question  soient  entendus* 

Cette  proposition  est  adoptée* 

Le  Présidbnt  :  Âudouin  à  la  parole. 

AunouiN  :  Je  suis  loin  de  confondre  Tétat  actuel 
de  la  republique  avec  Tétat  constitutionnel  ;  je  sais 
qu'alorson  pourra  traiter  publiquemcnlsans  danger, 
et  d'une  manière  plus  conforme  au  caractère  d'un 
peuple  libre,  ses  affaires  politiques;  mais  alors  aussi 
nous  n'aurons  point  TEurope  armée  contre  nous; 
nous  n'aurons  point  une  coalition  à  désorganiser 
pour  arriver  însensiBlemcnt  à  une  paix  gtméralc. 


De  ouoi  t*dgil-it  aujourd'hui? de  ne  point  nous  lais- 
ser éblouir  par  les  succès  brillants  que  nous  avons 
obtenus;  de  ne  point  saper  les  fondements  de 
notre  liberté  et  de  notre  bonheur  par  le  tumulte  de 
nos  irrésolutions  et  la  fougue  de  nos  emportements  ; 
de  réprimer  par  la  conscience  de  nos  intérêts  les 
saillies  de  nos  passions,  et  de  donner  un  démenti 
solennel  aux  adversaires  de  la  démocratie ,  en  leur 
prouvant  que,  chez  le  peuple  français,  la  raison  est 
compagne  de  la  liberté,  et  que  la  saine  philosophie 
est  aussi  ta  saine  politique.  11  faut  prouver  égale- 
ment à  ceux  qui  nous  accusent  de  ne  pas  vouloir  la 
paix,  lorsque  nous  paraissons  différer  avec  eux  d'o-* 
pinion,  qu'ils  se  trompent  étrangement.  Àh!  qu*il 
nous  soit  permis  de  craindre  qu'à  Pespritde  patience 
sublime  et  d'héroïsme  qui  a  enfanté  tant  de  prodiges 
l'idée  de  la  paix  ne  fasse  trop  promptement  succéder 
cet  esprit  de  nonchalance  et  de  paresse  qui  attiédit 
le  courage  et  porte  atteinte  à  1  énergie  guerrière  ; 
qu'il  nous  soit  permis  de  vouloir  une  paix  nonorable 
et  sûre,  et  non  une  paix  précaire  et  fallacieuse  qui 
nous  conduirait  à  notre  ruine.  Voilà, sur  la  paix,  nos 
sentiments  dans  toute  leur  pureté.  Ne  nous  plai» 
gnons  pas  avec  trop  d'aigreur  de  cette  espèce  d'in- 
Quiétude  civique  qui  quelquefois  tourmente  nos 
âmes,  et  de  ce  penchant  à  l'examen  qu'on  n'est  pas 
toujours  maître  de  témoigner  avec  aménité:  notre 
excuse  est  dans  les  conjurations  qui  ont  existé. 
Comptons  oue  la  douce  sécurité  renaîtra  à  mesure 
que  notre  horizon  politique  va  s'éclaircir;  mais 
gu'on  nous  pardonne  de  songer  aux  éclats  de  la 
foudre  alors  que  nous  en  sentons  encore  Pudeur,  et 
que  la  fumée  esta  peine  dissipée. 

Je  viens  à  la  question,  sans  parler  des  cris  de  paix 
Qu'on  a  accompagnés  au  dehors  de  cris  de  disette  et 
de  plusieurs  autres  symptômes....  Mais  loin  de  cette 
enceinte  un  soupçon  qui  ne  doit  pas  souiller  une 
aussi  belle  cause  !  La  coalition  des  rois  nous  en- 
tend ;  elle  mesurerait  ses  propositions  sur  notre  ap« 
parente  faiblesse,  et  éloignerait  par  des  négociations 
toujours  renaissantes  l'instant  désiré  par  tous  les 
bons  Français  de  jouir  du  fruit  de  leurs  travaux  ré* 
volutionnaires  et  guerriers. 

Je  suis  de  Tavis  de  ceux  qui  ont  rejeté  la  création 
de  la  commission  ou  du  comité  proposé. 

On  a  objecté ,  en  faveur  de  l'établissement  d'uB 
comité  ou  d'une  commission  juge  des  opérations  du 
comité  de  salut  public,  que  la  garantie  sera  plus  cer» 
taine.  Citoyens,  la  dénance  que  la  sagesse  retient 
dans  ses  justes  limites  n'est  point  inutile  pour  la 
patrie;  mais  cette  autre  défiance  exagérée,  et  que 
réprouve  la  prudence,  devient  par  cela  même  funeste 
à  la  liberté,  et  n'est  qu'une  source  d'anarchie  per* 
pétuelle. 

Rassurons  les  citoyens,  par  la  prévoyance  de  la 
loi,  et  sur  la  dignité  et  sur  l'intérêt  national  ;  con- 
cilion  ce  qu'où  doit  au  peuple  français  et  ce  qu'on 
ne  peut  refuser  aux  gouvernements  étrangers;  mais 
craignons  que  le  projet  qu'on  nous  présente  comme 
un  accroissement  de  garantie  ne  oonnc  en  même 
temps  aux  diverses  puissances  un  éveil  dangereuxi 
et  ne  fournisse  des  prétextes  d'agitation  faussement 
populaire  à  ceux  qui  tenteraient  d'exécuter  des  pro- 
jets qui  ne  nous  sont  pas  connus,  mais  dont  l'exis- 
tence, sentie  par  je  ne  saisuuel  instinct  q[ui  ne  trompe 
jamais,  répand  une  sorte  a'anxiété  qu'il  est  difiicile 
dej)eindre. 

Que  le  peuple  soit  tout  entier  réuni  avec  vous; 
isolez-le  par  votre  législation  de  ces  ennemis  de  la 
révolution  qui,  las  St  leur  impuissance  à  renverser 
la  liberté,  en  sont  réduits  à  prendre  leurs  espérances 
pour  des  réalités  et  leurs  stupides  menaces  pour  des 
triomphes  certains. 


710 


Pour  isoler  le  peaplede  ses  ennemis  incorrigibles, 
il  faut,  ce  me  semble,  rendre  impossible  Texistence 
des  alarmes  chez  ce  peuple  agité  par  les  mouvements 
d'une  grande  révolution,  et  qui  se  communique 
avec  la  rapidité  de  Téclair  les  divers  sentiments  qu*il 
:  iprouvc  ;  et  vous  ne  parviendrez  à  rendre  impossi- 
ble Fexistence  de  ces  alarmes  qu'en  gouvernant 
d'une  main  hardie.  Vos  soins  pour  le  bonheur  pu- 
blic seront  dignement  appréciés  par  la  république, 
et  ne  laisseront  plus  de  place  à  la  charlatanerie  des 
hommes  du  deuans  et  à  Tinsidieuse  politique  des 
ennemis  du  dehors.  Et  ici,  il  faut  le  dire,  c'est  moins 
la  guerre  ouverte  que  je  redoute  que  ces  manœuvres 
souterraines  par  lesquelleson  excite  la  division  parmi 
nous,  que  cet  art  perfide  avec  lequel  on  crée  des 
partis  qu*on  détruit  ensuite  l'un  par  l'autre,  pro- 
longeant ainsi  sans  cesse  nos  discordes,  donnant  de 
l'espoir  et  de  l'audace  aux  mécontents,  et  nous  con- 
sumant avec  lenteur  pour  nous  éteindre,  et  cacher 
la  liberté  sous  le  manteau  royal. 

Encore  une  explication  nécessaire.  Oo  a  dit,  dans 
une  des  précédentes  séances,  qu'on  se  livrait  sans 
cesse  aux  élans  de  la  démagogie,  et  qu'on  ferait  pé- 
rir le  peuple  par  l'excès  de  la  démocratie  :  eh  bien, 
il  faut,  une  bonne  fois,  détruire  une  idée  funeste, 
conique  par  une  partie  de  l'assemblée  contre  l'autre 
partie,  et  accréditée  ensuite  par  des  hommes  à  tous 
masques.  Je  déclare  que  je  oemetsacune  différence 
entre  la  démocratie  outrée  et  l'anarchie  :  l'une  et 
l'autre  sont  destructives  de  l'égalité  et  de  la  liberté; 
Tune  et  l'autre  conduisent  à  la  royauté  avec  tous  ses 
désastres,  et  font  pendre  ou  écarteler  les  républi- 
cains. 

Que  les  membres  appelés  plus  particulièrement  au 
timon  des  affaires  n'oublient  point  que  cette  opinion 
est  celle  de  tous  les  véritables  amis  de  la  patrie; 
qu'ils  ne  craignent  point  une  responsabilité  plus  ho- 
norable encore  que  périlleuse. 

Citoyens,  voulez-vous  entraver  la  marche  de  vos 
collègues,  chargés  plus  spécialement  du  fardeau  du 
gouvernement  ;voulezvous  détruire  leurforce;  vou- 
lez-vous affaiblir  cette  confiance  sans  laquelle  vous  ne 
ferez  rien  de  bon  et  serez  à  la  merci  de  vos  ennemis? 
Créezbienviteunecommissionou  un  comité  ré  viseur. 
Eh  !  je  vous  le  demande,  comment  vous  imaginez- 
Yous  contraindre  les  étrangers  i  se  fier  aux  hommes 
de  votre  choix,  à  votre  ouvrage,  si  vous  ne  vous  y 
fiez  pas  vous-mêmes?  Comment  un  architecte  enga- 
gera-t-il  des  individus  à  loger  dans  la  maison  qu'il 
aura  bâtie  si  lui-même  a  l'air  de  ne  point  croire  a  sa 
solidité?  Comment  prétendez- vous  demeurer  par- 
faitement unis  avec  le  peuple,  et  isoler  ce  même 
peuple  des  ennemis  de  la  révolution,  si  vous  n'ûtez 
a  ces  derniers  les  moyens  de  vous  calomnier  avec 
quelque  apparence  de  raison?  Ayons  assez  d'estime 
pour  nous-mêmes,  ayons  assez  d'estime  pour  nos 
collègues,  comptons  assez  sur  leur  amour  pour  la 
patrie,  sur  l'intérêt  de  leur  propre  gloire,  sur  leur 
horreur  de  l'usurpation ,  pour  leur  abandonner  l'u- 
sage de  tous  les  moyens  qu'ils  croiront  nécessaires 
à  rétablissement  d'une  paix  honorable  et  solide,  et 
pour  ne  pas  redouter  qu'ils  s'arrogent  des  actes  de 
souveraineté. 

Je  ne  connais  point  de  secrets  proprement  dits;  je 
ne  connais  que  des  mesurer  préparatoires  des  traités. 
On  leur  attribuera  le  nom  qu'on  voudra  ;  mais  tous 
mes  vœux ,  dans  cet  instant ,  se  portent  vers  la  né- 
cessité d'enlever  à  nos  ennemis  le  plus  de  données 
que  nous  pourrons ,  tendant  à  éveiller  leurs  intri- 
gues et  leurs  manœuvres.  Qu'ils  apprennent  bien 
surtout  que  nous  savons  qu'un  peuple  s'affaiblit  par 
l'abus  qu'il  fait  de  ses  forces  !  Qu'ils  n'ignorent  pat 
que  notre  ambition  n'est  point  cette  ambition  vorace 


des  Romains  dans  leur  décadence  ;  que  la  haine  bm- 
talenient  ruineuse  et  l'orgueil  insensé  des  conque'- 
ranls  dévastateurs  ne  sont  point  l'âme  de  notre  poli- 
tique ,  que  notre  philanthropie  se  révolte  à  la  vue 
des  fleuves  de  sang  que  la  guerre  &it  couler  ;  que 
nous  ne  sommes  point  éblouis  par  cette  fausse  gloire 
qui  n'égare  les  esprits  que  pendant  le  sommeil  de  la 
raison ,  et  que  nous  n'avons  pris  les  armes  que  pour 
obtenir  des  lois  impartiales,  des  magistrats  esclaves 
des  lois  consenties  par  le  peuple,  i^ie  liberté  appuyée 
sur  les  vertus  civiles,  les  vertus  militaires,  les  ver- 
tus politiques ,  par  le  respect  des  lois  sagement  ré- 
digées ;  en  un  mot ,  sur  un  gouvernement  démo- 
cratique tellement  organisé  qu'il  n'y  ait  ni  opprimés 
ni  oppresseurs,  et  qui  prévienne  les  maux  qui  pour- 
raient naître  ou  de  l'ambition,  ou  de  l'inconstance , 
ou  d'un  fol  orgueil,  ou  de  faction,  enfin  des  passions 
diverses  qui  pendant  tant  de  siècles  ont  tyrannisé  le 
genre  humain. 

Personne  aussi  de  nous  n*ignore  que  la  conduite 
des  autres  gouvernements  n'est  toujours  environnée 
de  nuages  que  parce  qu'ils  ont  intérêt  de  cacher  tou- 
jours aux  peuples  des  opérations  qu'on  fait  moins 
pour  leur  bonheur  que  pour  les  passions  de  ceux  qui 
s'intitulent  leurs  maîtres;  personne  de  nous  n'i- 
gnore que  les  plénipotentiaires  des  gouvernements 
étrangers  sont  seulement  les  plénipotentiaires  de 
ces  gouvernements,  et  que  notre  gouvernement ,  la 
Convention ,  est  le  plénipotentiaire  du  peuple  ;  que 
ceux-là  stipulent  seulement  pour  les  intérêts  de  leur 
gouvernement ,  et  que  nous  stipulons  pour  les  inté- 
rêts de  la  nation  française  ;  que ,  s'il  y  a  pour  ceux- 
là  des  secrets  éternels,  il  ne  peut  y  avoir  chez 
nous  que  des  secrets  momentanés,  et  qu'en  con- 
séquence le  comité  chargé  des  relations  étrangères 
ne  doit  présenter  à  notre  ratification  les  traités  que 
lorsqu'ils  peuvent  être  mis  au  jour  sans  danger  pour 
les  parties  contractantes D'après  ces  considéra- 
tions, je  demande  la  question  préalable  sur  l'établis- 
sement de  la  commission  ou  du  comité  proposé ,  et 
j'ajoute  que  les  cinq  articles  adoptés  par  la  Conven- 
tion ,  et  le  sixième  proposé  dans  une  des  dernières 
séances ,  avec  l'amendement  de  Crassous ,  me  pa- 
raissent suffisants  pour  la  marche  fjrompte ,  sûre  et 
hardie  du  comité  de  salut  public.  Si  l'on  persistait  à 
en  exiger  davantage ,  alors  il  ne  serait  pas  inutile 
peut-être  de  demander  qu'on  déterminât ,  non  pas 
ce  que  les  traités  contiendront,  mais  ce  qu'ils  oe 
pourront  jamais  contenir. 

Mais ,  citoyens ,  hâtons-nous  de  jeter  les  bases 
d'une  fraternité  durable  entre  les  autres  nations  et 
nous,  et  entre  nous  et  nous.  Ce  sera  un  acte  de  poli- 
tique vertueuse  qu'il  n'appartient  peut-être  de  taire 
qu'à  un  peuple  qui  ne  prétend  point  fatiguer  la  re- 
nommée en  agitant  sans  cesse  le  monde  par  ses  vic- 
toires, mais  qui  veut  seulement  conserver  sa  Décla* 
ration  des  Droits,  retrouvée  sous  les  ruines  de  la 
Bastille ,  et  vivre  sous  la  sage  démocratie  burinée 
dans  sa  constitution. 

Lareyeillèbe-Lépeaux  :  Si  vous  voulez  fonder 
solidement  la  république  française,  vous  devex 
avoir  en  vue  l'accomplissement  de  trois  objets  prin« 
cipaux  : 

1*  Il  faut  remédier  sur-le-champ,  par  des  moyens 
simplesjusteset  d'une  prompte  exécution,  au  desor- 
dre des  finances.  Si  elles  périssent,  nous  périssons» 
et  nous  abîmons  l'Etat  avec  nous. 

2*  Nous  devons  nous  occuper  sans  délai  d'orjgini» 
ser  un  gouvernemeut  définitif;  faute  de  ce  point  de 
ralliement,  les  meilleurs  citoyens  et  les  plus  éclairés 
sont  entraînés  malgré  eux  dans  tel  ou  tel  parti,  lors- 
qu'ils ne  voudraient  défendre  que  la  cause  de  la  |wa- 
trie.  Les  révolutions  succèdent  aux  révolutioiis,  et. 


711 


bi 


après  avoir  parcouru  le  cercle  entier,  on  revient  au 
point  don  I  on  était  parti,  le  despotisme. 

3<»  Enfin  il  importe  de  se  prêter  à  tous  les  moyens 
raisonnables  de  donner  la  paix  à  Europe.  Vous  avez 
TU  les  républiques  les  plus  vigoureuses  périr  sous 
le  poids  de  leurs  propres  victoires,  lorsqu'elles  n*ont 
~as  su  s*arréter  a  de  justes  bornes.  D'ailleurs,  si  la 
ravoure  de  nos  soldats  et  le  génie  de  la  liberté  doi- 
vent nous  inspirer  une  juste  confiance  et  nous  pro- 
mettre le  succès  non  interrompu  de  nos  armes ,  la 
sagesse ,  d'un  autre  côlé,  nous  prescrit  de  ne  pas  per- 
dre de  vue  que,  dans  les  temps  anciens  comme  dans 
les  temps  modernes,  la  fortune  inconstante  a  souvent 
trompé  le  courage  et  trahi  la  cause  la  plus  sacrée. 

La  question  qui  nous  occupe  est  relative  à  ce  troi- 
sième objet,  et  je  n*ai  pas  besoin  de  faire  remarquer 
combien  son  exécution  peut  accélérer  celle  des  deux 
autres. 

Plusieurs  orateurs  ont  parlé  sur  cette  question  : 
Pourrat-il  y  avoir  des  articles  secrets  dans  les  traités 
de  paix  faits  avec  la  France  et  les  puissances  étran- 
gères? Ils  ont  soutenu  TafGrmative  par  des  raison- 
nements très-solides,  et  Cambacérès  avait  achevé  en 
moi  la  conviction  par  une  discussion  serrée ,  claire 
et  profonde ,  avec  tous  les  ménagements  qu'exigent 
des  circonstances  délicates.  Cependant  on  a  désiré 
que  la  discussion  se  prolongeât  encore.  Je  vais  vous 
payer  le  tribut  de  mes  idées. 

Je  pense ,  comme  on  vous  Ta  déjà  exposé,  que, 
dans  l'état  actuel  de  l'Europe,  si  vous  vous  refusez 
à  la  proposition  faite  par  le  comité,  vous  éloignez  la 
paix  à  une  époque  dont  on  ne  peut  calculer  la  di- 
stance ,  et  par  conséquent  vous  vous  exposez  à  faire 
couler  le  sans  des  hommes  et  à  prolonger  l'état  de 
pénurie  et  de  disette  où  nous  ont  réduits  les  derniei's 
tyrans ,  et  cela  non-seulement  sans  utilité  pour  la 
cause  de  la  liberté,  mais  même  avec  toute  apparence  ' 
de  lui  nuire.  On  vous  a  fait  plusieurs  hypothèses 
qui  démontrent  que  telle  puissance  ne  peut  faire  là 
paix  qu'en  convenant  avec  vous  d'articles  secrets 
dont  la  trop  prompte  manifestation  pourrait  la  faire 
écraser  par  les  coalisés  avant  qu'elle  eût  pu  se  met- 
tre en  mesure  de  se  garantir  ;  que  telle  autre  ne  peut 
que  dans  ce  cas  arrêter  avec  vous  des  manœuvres  de 
guerre  qui  servent  à  déconcerter  l'ennemi  qui  vous 
sera  devenu  commun  ;  qu'une  troisième  peut  armer 
en  votre  faveur,  mais  qu  elle  a  besoin  du  secret  pour 
n*être  pas  attaquée  et  ruinée  par  ses  voisins  avant 
qu*elle  aitpu4'aire  ses  dispositions.  Enfin,  lorsqu'on 
songe  aux  intérêts  divers  qui  existent  entre  toutes 
ces  puissances,  on  s'aperçoit  aisément  que  les  motifs 
du  secret  qu'elles  peuvent  exiger  doivent  être  mul- 
tipliés à  l'infini.  J'ajoute  que  cette  disposition  de  vo- 
tre de'cret  peut  seule  produire  sur  vos  ennemis  un 
effet  propre  à  relâcher  les  nœuds  de  la  coalition  en 
jetant  la  méfiance  parmi  eux;  et  il  est  très-possible 
alors  que  telle  puissance  qui  aurait  balancé  aimera 
mieux  contracter  unr  des  premières,  dans  l'espoir 
d'avoir  les  conditions  meilleures. 

Cependant,  qu'a-t-on  objecté?  On  a  prétendu  que 
eela  était  illusoire,  qu*nn  secret  entre  douze  per- 
sonnes cesserait  bientl^t  de  l'être,  et  qu'il  serait  tout 
aussi  bien  gardé  par  sept  ou  huit  cents.  Je  réponds 
à  cela  deux  choses  :  premièrement,  qu'il  n'est  pas 
vrai  de  dire  qu'il  n'y  ait  pas  plus  de  probabilité 
qu'un  secret  sera  gardé  par  douze  que  par  mille; 
secondement,  tant  qu'une  des  puissances  coalisées 
ne  sera  informée  que  par  une  voie  secrète  de  la  né- 
gociation faite  avec  une  de  ses  coalisées,  elle  peut 
et  doit  avoir  une  juste  méfiance  sur  ce  point,  puis- 
que l'indiscrétion  peut  n'être  que  prétendue ,  et  lui 
présenter  en  effet  un  piège.  Elle  ne  peut  pas  d'ail- 
leurs agir  ouvertement  contre  lui ,  car  elle  ne  peut 


lui  opposer  aucune  preuve  qu'il  a  dans  son  traité 
fait  une  convention  qui  tourne  à  son  préiudice; 
ainsi ,  comme  l'on  voit»  cette  observation  n  est  pas 
fondée. 

On  a  dit  que  ce  serait  donner  au  comité  de  salut 
public  une  trop  grande  extension  de  pouvoirs ,  et 
que ,  par  le  moyen  d'un  article  secret ,  ce  comité 
pourrait  même  stipuler  avec  les  puissances  qu'elles 
marcheraient  sur  la  Convention.  Mais  je  suppose 
que  vous  eussiez  un  comité  composé  de  douze  nom- 
mes assez  scélérats  pour  faire  un  pacte  aussi  crimi- 
nel et  aussi  insensé  ;  pensez-vous  qu'ils  seraient  assez 
stupides  pour  ne  pas  sentir  que  tous  les  décrets  du 
monde  ne  les  sauveraient  pas  du  juste  reproche  de 
la  plus  affreuse  trahison  et  d'une  punition  aussi  équi- 
table que  légale  ? 

Il  est  bien  clair  que ,  lorsque  je  plaee  mes  inté- 
rêts entre  les  mains  de  quelqu'un ,  et  que  je  lui 
donne  des  pouvoirs  illimités  sur  certain  point ,  il  ne 
peut  pas  prétendre  que  je  lui  ai  donné  celui  de  m'é- 
gorger,  et  que  celui  qui  aurait  pu  m'égorger  avec 
ma  procuration  ne  l'eut  pas  moins  fait  sans  elle.  Il 
me  semble ,  d'après  ces  réflexions  très-simples ,  que 
la  su)>position  n'est  pas  admissible.  Un  autre  de  mes 
collègues  a  paru  douter  qu'il  pût  voter  pour  un 
traite  dont  tous  les  articles  ne  lui  seraient  pas  entiè- 
rement connus.  •  Je  ne  puis,  a-t-il  ajouté,  déléguer 
à  d'autres  la  mission  positive  qui  m'a  été  déléguée.  » 

On  a  aussi  opposé  que  l'admission  d'articles  se- 
crets blessait  les  principes  de  la  démocratie  ;  je  ferai 
une  même  réponse  à  ces  différentes  observations. 

Cette  délicatesse  est  assurément  bien  louable  ; 
mais  regardez  l'objet  sous  plus  d'un  aspect.  Quel 
est  le  vœu  d'un  peuple  qui  nomme  une  Convention 
pour  lui  constituer  un  gouvernement  libre?  C'est 
que,  pour  parvenir  à  ce  but,  ses  députés  prennent 
tontes  les  mesures  qui  sont  avouées  par  la  justice  et 
là  raison,  et  commandées  par  les  circonstances  ;  car 
qui  veut  la  fin  veut  les  moyens  :  or,  s'il  est  vrai , 
comme  il  me  semble  qu'on  la  démontré ,  que ,  pour 
parvenir  à  l'établissement  d'une  paix  prompte  et  ho- 
norable ,  l'article  proposé  est  nécessaire  ;  si,  comme 
cela  doit  être  sensible  pour  tous,  cette  paix  doit  ra- 
nimer le  crédit  public,  ramener  la  confiance  des 
gens  de  bien,  anéantir  l'espoir  des  factions,  faire  re- 
naître l'abondance,  et  par  conséquent  faciliter  l'éta 
blissement  du  gouvernement  républicain  et  le  con- 
solider, vous  avez  donc ,  non-seulement  lé  droit , 
mais,  je  dis  plus,  le  devoir  d'y  consentir. 

Eh/  qu'on  ne  dise  pas  qu'avec  de  telles  maximes 
on  pourrait ,  sous  le  même  prétexte ,  ramener  les 
calamités  passées.  Preinièifement,  il  est  toujours  im- 

fiossible,  aux  yeux  de  tout  être  pensant,  d'établir  la 
iberté  par  la  tyrannie ,  la  justice  par  l'injustice ,  et 
la  morale  par  l'immoralité;  observez,  en  second 
lieu,  que  j'ai  dit ,  non  par  toutes  les  mesures  possi- 
bles ,  mais  par  toutes  les  mesures  avouées  par  la 
justice  ;  car ,  citoyens ,  il  n'y  a  qu'un  lâche  flatteur 
et  un  infâme  corrupteur  de  la  morale  publique  qui 

r misse  dire  qu'un  peuple  a  droit  de  faire  tout  ce  qui 
ni  plaît. 

Il  en  est  d'un  peuple,  pris  collectivement,  comme 
d'un  individu  :  il  ne  peut  vouloir  que  ce  qui  est 
juste  ;  et  dès  que  la  raison  et  la  justice  sont  violées, 
tous  peuvent  être  tyrans  contre  un  seul,  comme  un^ 
seul  peut  l'être  contre  tous. 

Ces  maximes ,  sans  doute ,  ne  sont  pas  celles  des 
courtisans  du  jour;  ils  savent  trop  bien  que  la  mul- 
titude ,  comme  les  rois,  aime  à  être  flagornée ,  et 
qu'en  l'adulant  on  règne  sous  son  nom  ;  cependant 
le  véritable  ami  est  l'homme  probe  qui  nous  sert,  et 
non  le  lâche  complaisant  qui  nous  loue. 

Ce  sont  les  flatteurs,  peuple,  qui  ont  conduit  l'io 


712 


ràmc  Cn^Yet  è  ta  petie  de  sa  puissance  ;  prends  garde 
que  les  flatteurs ,  ceux  qui  t*excitaient  hier  au  pil- 
lage ,  ne  te  conduisent  aussi  à  la  perte  de  ta  souve- 
rainclé  par  Tinjuslice  et  la  misère. 

Je  poursuis.  On  vous  a  dit  qu'un  traité  n*est  pas 
nu  acte  de  législation  ,  mais  un  acte  de  gouverne- 
ment.  Cette  proposition  a  été  démontrée  par  l'auteur 
du  Contrai  Social ,  cet  homme  immortel  aue  ses 
maximes  politiques  et  ses  principes  de  morale  ren- 
dront toujours  cher  aux  vrais  amis  de  la  liberté  et 
de  la  vertu  ,  en  dépit  de  tous  ses  détracteurs.  Or , 
dans  une  démocratie  de  l'étendue  de  celle-ci ,  oilï  le 
peuple  est  forcé  de  déléguer  l'exercice  même  du 
pouvoir  législatif  à  une  assemblée  nombreuse,  cette 
assemblée  est  forcée  elle-même  de  déléguer  l'exer- 
cice du  gouvernement,  soit  à  un  corps  distinct, 
comme  cela  doit  être  par  la  constitution  ,  soit  à  une 
partie  de  ses  membres,  comme  dans  le  gouvernement 
provisoire  actuel  ;  et  suit  dans  l'un,  soit  dans  l'autre 
gouvernement ,  la  nécessité  du  secret  a  été  égale- 
ment sentie  et  admise  sur  plusietirs  lK>ints.  Ainsi 
donc  la  f]uestion  se  réduit  ici  à  savoir  s'il  7  a  néces- 
sité ,  oui  ou  non  ,  à  l'admettre  sur  ce  point  particn- 
lier,  et  c'est  ce  qu'il  me  semble  qu'on  a  prouvé. 

.le  reviens  encore  à  la  crainte  de  donner  des  pou- 
voirs au  comité  dont  il  pourrait  abuser.  On  y  a  déjà 
répondu  en  faisant  remarquer  que  ses  membres  sont 
amovibles,  n'exercent  qu'un  temps  fort  court  ;qu'€n 
second  lieu  il  ne  s'agit  pas  d'un  corps  de  traité,  mais 
de  quelques  articles  secrets ,  et  dont  la  publicité  ne 
peut  être  retardée  que  pour  un  temps  ;  enfin  ,  celte 
publicité  très-prochaine  est  «n  frrin  bien  suffisant 
pour  arrêter  l'uiconsi  dé  ration  mi  la  mauvaise  inten- 
tion d'un  membre  qui  n'a  plus  l'espoir  de  se  perpé- 
tuer dans  le  pouvoir. 

On  a  aussi  fort  bien  ri^ndn  snr  la  comparaison 
tirée  des  anciennes  républiques  ;  ne  comparons  que 
ce  qui  peut  l'être.  La  souveraineté  était  concentrée 
dans  une  seule  ville ,  et  le  gouvernement  n'était  pas 
forcément  représentatif;  il  n'exisUiit  pas,  comme 
aujourd'hui,  un  grand  nombre  de  despotes  formant 
^treeux  des  coalitions  pour  le  maintien  de  je  ne 
sais  quel  équilibre  ,  et  toutes  délibérant  en  secret. 
Les  peunles  d'ailleurs  étaient-ils  pressés  comme  en 
Eni-ope?  Un  commerce  immense,  résultat  de  la  dé- 
couverte des  deux  Indes ,  avait-il ,  comme  dans  les 
temps  modernes ,  diversifié  k  l'inlini  leurs  rapports 
et  conséfjuemmenl  leurs  intérêts ,  leurs  passions  et 
leurs  besoins?  Je  le  répète,  ni  les  gouvernements, 
ni  les  temps ,  ni  les  lieux  >  ni  les  hommes  peut-être 
ne  se  ressemblent. 

Je  viens  à  nnc  dernière  observation.  On  a  ditqar 
la  constitution  n'admettait  point  d'articles  secrets 
dans  les  traités;  je  vous  réponds  que  je  regarde 
comme  un  des  objets  les  plus  pressants ,  en  effet,  la 
confection  des  lois  organiques  nui  doivent  en  assu- 
rer l'exécution  ;  et  certes  ce  n  est  pas  moi  qui  ai 
voulu  qu'en  naissant  elle  descendu  au  tombeau; 
mais  enfin  ,  le  fait  e^t  qu'elle  n*esl  pas  en  exercice, 
que  vous  êtes  encore  Convention ,  et  non  simple 
corps  législatil ,  et  que  vous  pouver  et  devez,  je  le 
répète,  saisir  tout  moyen  raisonnable,  juste,  de  par- 
venir à  l'établissement  d'un  gouvernement  définitif. 
Eh  quoi  !  ne  serait-ce  donc  que  pour  rainer  les  fa- 
milles, embastiller  les  citoyens,  inonder  la  France 
du  sang  de  ses  enfants,  dépraver  toutes  les  idées, 
amener  parmi  nous  la  famine  et  la  guerre  civile», 
ruiner  l'agricultunc  et  le  commerce ,  et  tarir  toutes 
les  sources  de  la  reproduction  ,  qu'il  serait  prrniis 
de  prendre  des  mesures  extra-constitutionnelles  ?  et 
ne  seraient-elles  plus  légitimes  lorsqu'il  faut  rani- 
mer rinduslrie,  ramener  l'abondance,  verser  du 
baume  sur  toutes  les  plaies ,  et  hâter  le  moment  où 


les  douceurs  feront  oublier  tant  de  peines  et  de  mal- 
heurs ?  INe  seraient-elles  plus  légitimes  quand  il  faut 
consoler  l'humanité  et  chercher  à  conduire  toutes 
les  nations  à  la  liberté,  non  par  la  force,  elle  ne  foit 
que  des  esclaves,  mais  par  l'image  de  notre  bonheur? 

Citoyens  ,  je  suis  persuadé  de  la  pureté  des  inten- 
tions de  tous  mes  collègues,  comme  ils  doivent 
l'être  de  la  pureté  des  miennes  ;  mais  défions-nous 
des  suggestions  étrangères  ;  honorons  les  hommes 
qui ,  constamment  attachés  aux  principes  de  la  li- 
berté ,  sont  uniquement  occupés  des  moyens  d'en 
assurer  l'établissement  et  la  clurée  ;  mais  gardons- 
nous  de  ces  saltimbanques  politiques  qui  ne  parlent 
éternellement  de  la  souveraineté  et  des  droits  du 
peuple  que  pour  s*en  saisir  en  le  flagornant ,  mais 
sans  avoir  la  volonté  ni  les  moyens  de  lui  en  assurer 
l'exercice  par  des  lois  profondement  combinées. 

L'homme  digne  de  servir  la  cause  du  peuple  est 
celui  qui ,  selon  l'expression  d'un  ancien  ,  marche 
d'un  pas  assuré  dans  le  sentier  de  la  justice  et  n'en 
peut  être  détourné  ni  par  les  menaces  d'un  tvran 
'  irrité ,  ni  par  celle  d'une  multitude  en  fureur  ; 
l'homme  digne  de  servir  la  cause  de  la  liberté  est 
celui  enfin  qui  ne  sait  plier  sous  aucun  joug,  qu'il 
soit  terni  pur  les  livrées  royales  ou  perfidement  paré 
des  couleurs  populaires;  c  est  à  lui ,  à  lui  seul,  qu'il 
appartient  de  parler  des  droits  sacrés  du  peuple, 
parce  que  lui  seul  possède  la  droiture  du  cœur  et  la 
force  de  l'âme,  ce  qui  constitue  la  vertu. 

Je  reviens  à  mon  sujet,  et  je  conclus  à  l'admission 
de  l'article  ,  quant  aux  clauses  secrètes ,  mais  sans 
admettre  la  commission.  Si  l'on  ne  croit  pas  que  le 
comité  de  salut  public  doive  être  chargé  seul  de  la 
g;inintie,  jeflemande  alors  qu'il  soit  autorisé  î  s'ad- 
joindre le  comité  de  législation  ;  en  observant  tonte- 
fois  que  je  suis  peu  touchéde  lacraintedeCambacérès, 
que  les  puissances  demandent  toujours  des  articles 
secrets,  car  le  comité  aéra  toujonrs  maître  de  rejeter 
des  propositions  de  cette  nature,  tandis  que  son  ad- 
jonction à  un  comité  aura  toujours ,  quoiqu'un  peu 
moindre,  Tinconvénient  de  faire  savoir  aux  puissan- 
ces non  contractantes  l'eristeneede  ces  articles. 

Ainsi  ,je  demande  que  le  eomité  seul  soit  juge  des 
articles  dont  il  croira  la  non -publicité  non  préjudi- 
ciable à  la  France,  ou,  si  Ton  n'admet  pas  cette  pro- 
position ,  à  ce  qu'on  lui  adjoigne  le  comité  de  lé- 
gislation. 

Ces  deux  discours  sont  fréquemnent  applaudis» 

La  CofiveDlioo  en  ordonne  Pimpression; 

{La  Muite  demaim,) 

/V.  B,  —  Dans  la  séance  d«  13,  la  Convencion  a  reçu 
M,  CarlelU ,  et  Ta  reoonan  ea  qoaUté  de  mioifirr  plénip»- 
teiUiaire  du  grand  duc  de  Toscane  auprès  de  ia  répiOiii- 
que  française. 

—  Les  secUons  de  l'Observatoire  et  du  Finialère  aoM 
venues  désavouer  la  péiiUon  sédiUcuse  faite  hier  par  qyd* 
ques  individus  pour  demander  du  pain. 

-^  La  Convention  a  rends  un  dicrel  qui  assujettit  loas 
les  citoyens  de  Paris  à  faire  personnellement  leur  aervlee 
de  garde  nationale. 

—  Le  rapport  delà  commission  des  Vinglel-Un sur  Bil- 
laod,  Barère,  Collet  et  Vadier  a  été  distribué  nujoor^ 
d'hui  aux  membres  de  la  Convention. 

Payements  à  la  trésorerie  nationale. 

Le  payement  de  la  dette  consolidée  perpétuelle  se  IkiS 
pour  les  six  derniers  mois  de  Tan  t«,  et  pour  Tannée  à  cesa 
qui  n*ont  pas  touché  les  six  premiers  mois  de  ladite  année. 
I^s  citoyens  qui  ont  retire  leur  inscription  définitive,  et  qui 
dësirerMenl  «Hre  puyésdans  les  districts,  peuvent  iiidtquer 
les  ciirfs-Het»  de  district  où  ils  veulent  élre  payés,  eonfior- 
mément  à  la  loi  du  2«  jour  des  aansculottide». 

Le  payement  des  rentes  viagères  se  fait  cumufativeiem 
pour  deus  mois  vingt  et  un  jours  de  J*aiuiée  1793  (vieos 
style)  et  les  six  premiers  mois  de  l'an  S*. 


GAZEÏÏE  NATIONALE  o.  LE  MONITEUR  UNIVERSEL. 


N*  180. 


Décadi  30  Ventôse,  l'an  3«.  (Vendredi  20  Mais  ll^h,. vieux  ityle.) 


POLITIQUE. 

ALLEMAGNE. 

Vitnnty  £018  février.  —  LMnternonce  impérial  à  Cons- 
tantioople  en  est  rappelé;  il  a  poar  successeur  le  comte 
Ludolpb,  ci-devanl  ambassadeur  ùStockbuim.  On  présume 
que  ie  cabinet  de  Vienoe,  ajanl  des  inquiétudes  réelles  sur 
les  principes  politiques  qu^adoplc  enfin  laPor|e  Ottomane, 
fonde  quelque  intrigue  auprès  du  divan,  et  qu^il  en  a 
donné  la  direction  au  compte  Ludolpb,  qui  est  fils  du  mi- 
nistre napolitain  auprès  du  Grand  Seigneur.  Les  conseils 
du  cabinet  de  Pétersbourg  ont  pu  contribuer  A  ce  cbange- 
ment.  En  effet ,  il  ne  serait  pas  surprenant  que  les  deux 
cours  redoublassent  de  menées  non- seulement  auprès  du 
divan,  mais  dans  Constantinople  même,  où  la  république 
française  voit  augmenter  le  nombre  de  ses  partisans. 

—  Les  troupes  autricbiennes  qui  composaient  les  garni- 
sons de  Valeuciennes,  Condé  et  Le  Quesnoy,  s'étant  enga- 
gées à  ne  pas  servir  contre  la  France  t  se  rendent  dans  la 
Gallicie  et  la  Bukovine. 

—  Le  général  Clairra>t  était  tur  le  point  de  donner  sa 
démission  da  commandement  qa*il  a  par  intérim  ;  une 
lettre  écrite  de  la  main  de  Tempereor  le  retient  i  ce  poste.* 

—  Les  généraux  Cumellér  et  Mikowiny ,  ct-devant  com- 
mandants de  Valcnciennes  et  de  Condé ,  sont  sortis  irré* 
procbables  du  conseil  de  guerre  cbargé  d^examiner  lear 
conduite. 

Mergentheim,  te  5  mon.  *  A  Cologiit,  les  biens  des 
émigrés  sont  en  vente  et  trouvent  des  acquéreurs. 

—  Le  ministre  de  Hanovre  a,  le  S8  février,  réitéré  ses 
instances  auprès  de  la  diète  pour  obtenir  des  troupes  capa- 
bles de  couvrir  les  cercles  de  Westpbaiie  et  de  Basse-Saxe, 
que  Tarmée  française  parait  menacer. 

—  Le  quartier  général  autriebien  vers  le  bas  Wn  est  à 
Orsten. 

ANGLETERRE. 

Londreê  tê  8  mari.  ~  Voici  ce  que  portent  des  lettres  de 
li  capitale  de  Tlrlande. 

fl  Le  35  février,  le  vice-roi  reçut  une  dépécbe  écrite  de 
la  propre  main  de  M.  Pilt ,  par  laquelle  il  lui  était  défendu, 
an  nom  de  S.  M.,  de  suivre  les  dispositions  du  bill  en  fa- 
leur  des  catholiques,  non  plus  que  celles  du  bill  qui  or- 
donnait le  rapport  du  ConveniiotCê  aet.  On  lui  ordonnait 
en  outre  de  rétablir  dans  leurs  fonctions  respectives  ceux 
qui  en  aTaient  étéécurté*.  Le  ministre,  prévoyant  que  le 
comte  Fiti-Williams  pourrait  refuser  d*obéir  i  ces  ordres 
absolus,  si  contraires  ii  sa  mission  et  aux  véritables  inté- 
rêts de  ririande,  avait  pris  la  précaution,  A  ce  qn*on  as- 
sure, de  Ini  enjoindre,  en  cas  de  refus,  de  se  démettre 
sur-le-champ  de  ses  pouvoirs  entre  les  mains  d'une  commis- 
sion de  lords  juges  qui  gouvernerait  josqu^à  l'arrivée  de 
son  successeur.  Suivant  le  bruit  commun  des  cercles  de 
Dublin,  formé  sur  les  rapports  des  gens  les  plus  au  fait  des 
mouvements  politiques  intérieurs,  la  commission  devait 
être  composée  du  lord-chancelier,  du  lord  chef  de  justice 
du  banc  du  roi ,  de  Vorateur  des  Communes  et  du  primat 
d'Irlande.  On  présume  que  ce  sera  lord  CamlKlen  qui  rem- 
placera le  lord  Fitx-Williams.  Les  amis  de  cet  ex-vice-roi 
disent  avoir  reçu  de  M.  Pitt  des  lettres  confidentielles,  où 
il  les  assure  que  les  motions  faites  au  parlement  pour  ftiire 
admettre  les  deux  bills,  ainsi  que  le  renvoi  de  MM.  Rew- 
ford  Wolfe  et  Taler,  objeis  du  mécontentement  de  S.  M.» 
sont  des  points  entièrement  contraires  à  ceux  convenus 
entre  le  lord  lieutenant  et  lui  ;  que  le  roi  j  bien  persuadé 
que  son  représentant  en  Irlande  donnerait  sa  démission , 
avait  cru  devoir  y  pourvoir  par  la  création  des  lords  juges. 

«  Nul  ne  saurait  rendre  l'effet  prodigieux  produit  sur  le 
peuple  d'Irlande  par  une  nouvelle  de  cette  nature  ;  l'étin- 
celle électrique  ne  se  communique  pas  avec  plus  de  rapi- 
dité. )^a  Chambre  des  communes  s'assembla  dès  le  lende- 
main ;  la  première  proposition  Tut  de  voter  une  Adresse  au 
comte  Fitx-VViliiams,  pour  déclarer  qu'il  ava[t  toujours  la 
conGance  de  la  nation  ;  qu'en  conséquence  elle  le  priait  de 
garder  sa  place. 

«  Cette  motion  donna  lien  à  une  dlseonion  tiès-ittières- 
2^5en>,— //Vwif  X. 


santé,  où  M.  Ponsomby  déclara  qnMI  n'était  pas  i 
temps  de  donner  Texplication  des  bruits  qui  circulaient 
dans  le  publie;  mais  que  ce  temps  Tiendrait  bientôt,  et 
que  l'explication  serait  complète,  et,  comme  il  l'espérait, 
A  la  satisCaction  des  deux  partis.  D'après  cette  issue  pro- 
chaine de  la  crise  présente,  il  croyait  qu'on  devait  retirer 
une  motion  prématurée,  parti  que  prit  effectivement  la 
Chambre. 

•  Le  vice-roi  témoigna  sur-le<bamp  combien  il  était  fn- 
digné  de  la  mauvaise  foi  qui  avaK  dicté  les  dépêches;  il 
expédia  promptement  un  courrier  pour  Londres.  Sa  ré- 
ponse consistaiti  donner  sa  démission  et  i  fixer  le  jour  de 
son  départ.  Il  a  formellement  déclaré  qu'il  serait  à  Lon- 
dres sous  huit  jours,  à  moins  que  le  ministère ,  revenu  A 
des  idées  plus  sages ,  ne  consentit  A  le  laisser  soiTre  la  mar- 
che convenue  avant  son  départ,  et  qui  a  été  l'unique  basa 
de  sa  conduite  depuis  son  arrivée  à  Dublin. 

•  Il  faut  bien  se  garder  de  ne  Yoir  dans  cet  événement 
qu'une  de  ces  révolutions  ordinaires  dont  le  résultat  est 
simplement  la  victoire  d'un  parti  sur  l'autre.  Les  politi» 
ques  les  plus  sage*,  et  les  pllks  éclairés  prétendent  que  le 
sort  futur  de  l'Irlande  est  tout  entier  dans  les  circonstan* 
ces  présentes.  En  effet,  malgré  l'absurdité  en  politique  et 
l'immoralité  en  principes  de  la  dernière  coalition  entre 
les  chefs  des  wbigs  et  le  ministère,  le  caractère  d'honneur 
et  de  probité  du  lord  Fiis-Williamsétait  tellement  reconnu, 
qu'il  passait  poor  constant  qu'il  avait  Ihit  de  la  liberté  des 
catholiques  irlandais  l'une  des  principales  conditions- de 
son  traité  a?ec  M.  Pitt;  et  cependant  quel  mépris,  quel 
déboire  le  chancelier  de  Péehiquier  tient  de  terser  sur  ce 
corps  si  puissant  parle  nombre,  et  qui  commençait  à  res- 
pirer de  l'oppression.  Ainsi ,  de  toutes  les  flatteuses  espé* 
rances  dont  les  catholiques  irlandais  s'étaient  bercés.  Il  ne 
leur  reste  plus  qu'un  affreux  désespoir.  Ceux  à  qui  l'état 
de  llrlande  est  bien  connu  peuvent  se  faire  une  idée  de  la 
confusion  qui  règne  dans  ce  malheureux  pays.  » 

Cette  nouvelle  et  les  réflexions  qui  l'accompagnent  soni 
extraites  dn  Bioming'CkromUle. 

REPUBLIQUE  DES  PROVINCES-UNIES. 

Dt  La  Hoffe,  te  5  mare.  —  L'administration  de  celte 
province  est  organisée.  La  division  de  ses  travaux  est  fixée. 
Hier  le  oomitédes  finances  a  proposé  A  l'assemblée  des  re- 
présentants provisoires  du  peuple  de  Hollande  deux  plansi 
Ton  est  relatif  aux  seigneuries  qui  ont  différents  degrés  de 
juridiction,  restes  de  la  féodalité  sous  Tancien  gouverne- 
ment des  comptes  ;  l'autre  regarde  l'administration  des 
postes. 

Anjoordiitti  on  établit  la  discussion  sur  le  conseil  des 
colonies  orientales.  L'ordre  du  tra?ail  appellera  ensuite  In 
question  qui  a  pour  objet  quel  emploi  l'on  fera  desdomal* 
nés  du  et-devant  stathonder. 

Dans  le  hnême  temps  le  comité  militaire  est  occupé  de 
l'organisation  de  l'armée  hollandaise.  Le  militaire  de  l'Eu- 
rope étant  presque  partout  gangrené  de  royalisme,  plu- 
sieurs oflîciers  tiennent  de  donner  leur  démission. 

Le  comité  a  pris  un  arrêté  qui  déclare  indignes  de  sertir 
la  république  tous  les  militaires  déserteurs  de  leurs  dra- 
peaux dans  la  révolution  de  1787  en  faveur  du  stathoudtft 
auquel  ils  ont  alors  vendu  leurs  soldats. 

Le  conseil  d'Etat  de  Hollande  rst  déflnltitement  sup- 
primé. Les  représentants  provisoires  ont  adopté  A  ce  sujets 
le  plan  proposé  par  le  citoyen  Peters  Paulus  ;  il  est  ainsi 
conçu  : 

«  Il  sera  créé  un  comité  de  tingt  et  unepcrMmnes,  nom- 
mées par  l'assemblée.  Sept  d'entre  elles  seront  particulière- 
ment chargées  de  la  direction  de^  troupes  de  l'Etat ,  des 
magasins,  arsenaux,  hôpitaux,  etc.;  sept  autrel  le  seront 
spécialement  de  la  partie  des  finances,  ou  de  la  direction 
des  sommes  fournies  par  toutes  les  provinces  et  le  pays  de 
la  généralité;  enfin,  sept  s'occuperont  en  particulier 
de  la  formation  d'un  plan  moyennant  lequel  tous  les 
citoyens  de  la  république  entière  pourront  être  convo- 
qués en  assemblée  générale.  Ce  deinier  département 
aura  en  outre  radministratlon  des  pays  qu'on  nomme  de 
la  généralité  «  aussi  looglcmps  que  cette  administratiott 

90 


)!(> 


dem  avoir  liea  de  la  part  de  Leurs  Hautes  Puissances. 

c  La  diredmVi  liéntrale  et  sè|^Vtae  ée  ttous  tes  okfeH 
JMS-énoncés  restera  à  rassemblée  du  comité.  Le  travail  par 
dÇarUment  n'est  statué  comme  dessus  que  pour  plus  de 


%i  pi  }Èar9(i(ley  le  St  renfoêe^  —  Lt  fréfrete  ia  Badine  t\ 
,  le  biick  C  Alerte  ont  jpris  doofee  bAtiments  ennemis  veiiam 
ée  Éarcelotie^  d*Aiican^  «  d^Ànjleterrew  La  même  fn  « 


igâtè  a  pris  encore  ùnïÀtimen\  anglaisa  trois  roftts,  et.a 
brûlé  un  bAtineni  esDaml  renanl  d'Alfcn  apW-s  en  a 
rMiré  Véquipa|:e.  "L^bHc*  VAUrtes  i^ue  le  mau^-ats  lewifl 


brûlé  un  batineni  esoafrirol  renanl  d'Alfcn  apn-s  en  avoir 
rMiré  Véquipare.  "L^bHc*  VAlertey  i^ue  le  mau^-ats  lewifl 
at^\  séparé  &  la  frégate>  a^eil  emparé  du  brick  ang^aia 


(e^Vt^oii,vemiit,deM!frninev  , 

Les  pVisonniers  faits  dans  ces  bfttHiients,«enH  d'une  pafi^ 
qùatre-vingtsit  Ancrais,  Hollandais  et BaMgnolsiè  bord 
de  W  rrégaiei  et,,  de  t\ralre,  dix-huit  Angiftie  «o  IMIa«^ 
àA  il  ï>orj  dn  hriekk 

ChiabtiS,  i\s\m\  ^Kùtttfty,  ioftièstiqÏÏte  '^é  ^ôtiUltt- 
6hiV«i\,  Marchand  épicier,  ^  Çnablis,  ^it  ï^réyeiiuè 
4^éiVoî(  tenu  des  fwopoâ  inciV^ues  et  eoBlre-réVolu- 
tiôi^ïk^ires'. .      ... 
Vtt  la  tIéelttriitMii  ub  jtirf ^  fK>rtant  ^*il  «^«sl  cm 

|o^*il«Àë  ^^e««  ^VM la «Mwraiie  éeCMMf» 

d«  ta  f^y-litaCén  tèîMWtl «  iHMhalim  lé  (idiMt^  ^te «^ 

*  Ôtfè  KlàY^u-eSlté  tdhveMt,  «te  &6pWè,  %l 
éM^Vaui^'e  d^^vôîr  Wnu  ces  proposs  mais  àU'içlfe 
n  es\  pas  convaincue  Of  les  avoir  tenus  avec  aes  in- 
teqlion8Conlire-f:)évoi«itK>iHittire8{  \t  InbùnaiB  ac- 
quitté et  mis  en  liberté  )Aafeg«iélite  €«BV«v0iU 

i«  I     !<■■  Il  M   I    mm  ■■    m\ 

Pmiê^  le^vffifOM,  *^^emaré  Saint'^A'frr^f  Ooenan 
«ir  iueriiin^i'ie  Tki<mvjWi)\  représenfmtis  4u  peuple^ 
■meni^ê  itu  towiitéije  fo^eire^  êeetitm  ÎÊeiaéirectkfk 
ie  ift/oTM  ffrméf  >  «  kiiin  boncifojfeti^ 

cne^caa  ve^tfive  WoSvhw  ^le  ^ffwRirS*  *tfc  ^  TMpoirvnceTR 

*kars  fonctions;  ils  veiHent  sur  un  dépdt  bien  préeféMit 

Hi  v^WcM  V  va  fvrc^v  vS  la^frtnMR  wnbi^a^  vm  MR^va  ne 


«ONVCMTION  MATIONAL& 

Ihrétidènce  ée  TMbmétMni. 
^[f&  iè  ià  ifCscusHim  twr  Ih  reltkiohi  €xtiériewre$, 

radjonction  d'une  WttfvUmtHi  m  Aè  totlt  ïftilrè  ^^ 

%Xift'tfS  *:  Snuis  a'ps.^  ffi%îp^!y  ^ït'ièisî^^ 
«TrèTS  aaVi%  Tei  ffaîtés  qi/è  Von  passera  aVel  Tleâ 

nissances  étraugères%  quand  oette  mesure  sers(  Wti'le 
a répuiHicraei;  mai^  je.veftv  ^«e  cp-aecre^  «i^ait ipM 
iNta  lors^ll  s*^^ifa  fit  fixer  'k's  Ir^i^  de  4a  i^anoe 
tm4t  ffétmAk^  territoire ^d'^nc  fwsaance  mWtéek 
BvMs^^dffrn^er  cass  vo#s  aèntet^^fu^  frè  seorc^t  v<yin 
#tVMWdrilt  fBWèste^  yjêr  )è  %li^f^f<^  ^^^wie  p^îi?- 
Mm  'émn^hrt  *cmm/^  à  Wnir  !lf^  èi'Mef»-Mi!t  vO-- 
Ws  *mittt  Vos  ^èfnWWMi,  à^rfWtfon^'dè  Votrt 
éStë  Votfs  la  '^tftrtÎÉfhdl'tt  *(îbnY!%  'àlA  Vh  nVcirts  pd^ïi- 
tttts,  le  Vtfus  dAnVnAè  si  Ift  trè  iserdl  )>fls  Vous  dt» 
«WelbcoRë  de  *frlilk<^l*>1«bM)*uti^  Pû  ^ 

mbom  :  1t  est  dans  nspnt  oè  ràissemDieè  qâb  1% 


comité  puTSse  fafre  des  articles  secrets  ;  mais  il  nVst 

Sas^ns  son  inCentiofi  de  permettre  au  comité  àé 
isposer  du  territoire  de  la  république,  ou  du  terri- 
toire conauis,  sans  un  décret  exprès.  (Applaudisse*- 
ments.)  L  excès  dn  kèîe  pôurtait  laiVe  consentir  à  un 
pareil  article.  Une  fmt  ^él  ^fs  conquis,  et  qui 
sont  déjà  rénfiis  è  la  réf^Bblique^  el'ai^ifent  dWc 
saeriiiés  i  la  fsix^  il  fstit  faire  tesser  VM%  tn^niéli^ 
d^évet^gard^ 

Je  demande  tjtt'il  wit  "éCttBBê  ifix*%!iit!é¥t  îfcrtiirtift 
aeem  he  piyoïta  bo«»fr  ittttVilft  è  TwWW ,  %  rittdivl- 
fllibilité  de  la  n^^1»1iqt^,et  è  la«Mlsliiut«Mèè  1^). 


sevrètes;  cleU  peuvent  nahfè  ui^e  infinité  de  qiie6ti%MM 
secondaires  ;  ^r  exemple  <  ^tril  T  «v«ir  «n  méoiè 
temps  wi  ireité  «eerel  ^  «b  traMë^aleAsiMe?  l€  mt 
wt  tirois  uh9\ 

I^BSWS  feS  ^pteBMPDvBBOai^BBWBS^BMIOBYTHi  wBIvP^ 
Mo  BTWqBTNttll  peB  xRI  V^UpR  VIT  le  wW^  vtVTCNM  x^ 

traité  doit  influer;  mais  ils  ne  MlllMft«e^ïdtodlh«D(A 
mm^  ^  t^  ^cmYfm  ^S  fio!s  dortt  S\i  Mêttnênt 

pMùtiùf^  ?iU1  ^Hiè^t  feft-\iA  dèVe  |^\ib1i«  We  dus- 
sent pas  cènn'ahrë  là  îïè.titre-îèttrè  seèHUttiiï  aug- 
mj&Btel*9i't  ou  dîminii^erait  les  «liasses  de  i  aele  fM- 
blic?)ci  cest  la  bation  n-aliçaise  qui  contracte  { il 
fant^qu'elle  connaisse  les  conditions  pour  les  cm- 
sentir,  car  il  117  a  |Mfi  Be  traité  là  où  il  n>  a  (M  «de 

VOlOBléi 

,ve  recoBBafÉ.cc^eftBBBt  qti  h  vst  nés  oas  ^bb  n  bsibi 
neoessafre  vciati^Bcs  oCHrotaiioBs  vccuBieS'^  Biais  cpb 
stipulations  ne  doivent  we  <tBe  jwytWBtèwéesi,  èt|% 
ftffusit  "ipÈn  wttSàtmft  Wt  wéVNi  fM^BMiMéff*  le  lM*aité  a  la 
ratification  de  la  Convention  que  lorsque  frttîl^ 
constances  qui  exij^vHit  ^  ^(ttelques  articles  fus* 
ssBC  vBBos  Bcvreu  aMTOn'  cesvCk 

Je  le  répète,  nous  sommes  dans  Me  yoÉkien  Bè  H 
esc  iBi0onBBi  Be  BctacBor  tes  ^BissaBccs  ^vk  la  cob~ 
litfons  «t  mtfvÊi  ii*y  iMn-Wèndrons  |>éllt-*étre  ^>ii  M>> 
satot  d^  BrlK)les  iiecrcts,  paw  ^.  pés  '496 aà'^iiH t Mf flff% 
eeMes^^eB  m^nsnmfn  ^i  hobs  ^denraMev^Mlli 
pÊffK  ^  fti#i%  |e  wBtiteB  J  Hfttt  V&iA  fit  (WbvHe  \nt^  ^pÈlt*" 
v^Wifrli^  wrtWilftWjfrt  WW|>s|>a^trtiTr*if?léis<WÊ?t%^ 
pkt  Vrti  tWSte  ^tfMitinm  *;  ant  vtù  'MoiM^nt  ^^fià  en  prf^ 
^ffilmx  k  \^  liH&èatîôYi  4t  \k  CèâXtinlIôYi  Vn  tKsit?. 
pàtèfirA^'ft  à'n^a^WWf  '<[ï]é  \tt\t  poissa  hce^  veat 
plïis  TaD%  ^aHîè  de  la  èoàfition,  tés  aBtres  4Hiissancr« 
nè^ardèroniplosaucBB  ménagement  vis-^visd^'ellBw 
Je  pense  «one  qn^'A  fNHtrra  y  «voir  des  daBBes  0e«> 
ètlkm  four  ioBi  «e  qoJi  «era  accessoire  «b  ttmîé^ 
bmhs  4pfes  dB  Bioneiii  <qiK  le  iraité  vxfislei^Bv  i^  ''>^ 
ée5rf%  flBs  y  avoir  dé  «Mm.  AbMndoBBOBB-wows 
peWh*  les  (ïlaMi^iss  wt^^ètffc W  'lKîee?îS<»i^,  "è  H  '#î#Oiy> 
WWd  tft  è  Hi  WtfdêW&fc  fffc  '(fHtïiilé  de  %aNit  WhMc,  t^ 

SinttOnS  WItI  TtC   vTCTWr*!   pTesCTIPRT  TPS  TraTTcs    B 

IhnMrc^tfdft  ^è  ftft^HYie  5»à  )AA^%éccsà;rî1« 
d^jhVft»Yèî«tel. 

Vôr^i  ;  Itè  que  Viéht  oè  dîré  t^rasso'dà  me  prouve 
qfifeYiouà  ne  sommes  jMis!|[>lu8  avancés «^u'il  :y  a-qna- 
Ç^^oi^rs.  Se  refuser  a  ce  qBC  le  coflfiité  f>«N$s<'  Èiîre 
oes^ticles  secrelsvtf'est  nef^as  votiïkm-^'ki  Fr»nee 
[açseBipetme  transaolioB  «vce  les  awirws  pmsmmccêk 
n  latftdB«eel'et4aBs  les4raiCés;H^'dèB#flfeim«m 
qÉe  v6m  «raifet  àv«e*c  Mve  pnrisjtarflJbv^elle'deii'ient 
off^sféeBBk  fiBtssftBees^vee  1<^(e1le»  VMs  He  ^i- 

nWrttft'C'irtfè  nfrtro*  de  Tafrèirtiè'dîfsmîtè  Wi  Xti- 
rfrcittllt';  ttfùfcait  11  Venir  le  tfîfe  à  ta  Convention  > 
ntim^-V11  v^ni>tu1%rpôsèl'1^  conditions  du  IrBîté 
et  les  mesures  que4*0B  iiroBéM  4»Bttr  C 
cèxlè  expédition? 


w 


l4  «M\l«ttV^  K«f «i^t4«  que  U  C9iftY«MM»  «w«p 
l^emçKt  M^nel.  S\^  par  UniuM^i^^  ^ï  t^^^  ww- 

lKi^r  OH  (çs  iQi«rl^i4«  te  r^ubliau^^  U«  t^w  w*»- 

angereux,  et  ils  Yiendraient  aussitôt  \(^h^  ^  Wh 
popcçr. 

quç)q^^arU(^l^4  UAtr^^4tt^n9nsHHdmi4«  qhhI 

QM  su  vmiA^  vmm.  f%\  ^m  ^\m^  wm^mm 
ft.  pfép^mwe  m  mué  q\ie  If  ¥<MAi(?a«lmt  m 

faire  sans  la  ratification  de  la  Conventiog^  ^m  |M^ 

ms  4e  rartiçie  (i  qui  ««(  f|^4  d^r^^éi  U  m%  mm^ 

que  fqp  dpit  i>ft  [f r^if  IJ, 

n  est  pre^uft.  rien:  U  pert^  ^  f<^uU  a  ^^mm  f#()|s 
hvrçs  tf  arUfiçf s  hrOlé^v^^  p«r4W^fte  n'*  ^<^  W*^ 
kajdU^  çraUMf  Uanquillilé  règiie,  (On  iipp|«H#|.]i 

îy*H«fllSÇre{  df  B^er  te  c?»  çiu  \\  m^^^  ï  fivpii  lifM 
a  laire  desarticle^  ^ectftî^;  çar  ç&  li^raîl  dir^^i  r|ur 

ripp.gi  !warli€lw  seçrc^  him  Hwrai^nt  été  i\mé^. 

.€AM§AÇélM;Qniditque]e^Etits|itir«£daviiiBi\t 
4ip)aiUatifi^rdaq£iJL^^(^lï4ç«s  imbliqH^,  c(ttk  ^m^é^ 
serait  vraie  s*m  p^  (r^J Liaient  ijt*'a\c(j  lï^  Ët^u  liiir«* 

r^P^iil  y  aur^  liiuiiûMr^  dans  le^  ije§uf:iiïliQ4LJi  d« 
P^M.fiie;  à  pcypiç  uo^  iurie  dis  M^yst^N^,  e^  des  couir 

P)fi)^  dmpcraliï|Mtî!i  dar\i  i*«e  ^ùrip  d'udénonU 

[IdliliflM^i  s*Ua  n^uvaii^iil  pas  la  tat^M^^^  iVustt  t^iiveii 
^  autres  ^QUYerofigientg  de^  VOyei»  qoci  PfiHM 
emploient.  ^ 

{Jtèc  juMf  d^<J^BO0t:4l  ialii(aiF«t  P^m0»i  l'^im, 

cctif^  quaJit*^  tieru  jil^s  du  vic^  gue  i)^  |a  f«fiu>  Il 
f^ijt  iliHiP  chercher  è  lui  ({on(ti!f  i^m  ^i^^Mim  ulHe; 
ç'^t  l<!  I^m  i}ue  vqtrti  pqtpitiïdfl  ^^\^l  dmIjH^  ah«F0M 
àaUfiudrejc'fst  p^r  ce  fi^atil  qM'tl  VQM^A  pfqi«(i4« 
(le  prnftir  le  pas  qh  l^  pifemisUncÉi*  RPurralËiit 
«ïig*'rnu>|PQniractât,aiini>»n  ri^h  NpiitiliqMe^de* 
efig,f^g(.MïieiiU  Ipcrpts  f^  flu'ii  *"fiMS  ?  dciiiamK  de  jt^i 

(|t>MïitT  pPHf  ces  «Prtp^  dp  tPftS^Ctifi^lS  liim  les  pQU* 

vûMi  (l^t^t  il  atiraft  bpsûjp  pqjir  fm^  Ip  IîïpÔt<i* 
ptt^ni^  |piï)ps  qu'il  spfaji  dap«  riaiptiiâsihjlii^  de  (uit^ 
\P  mail 

Nous  n'avnps  point  ici  à  raisonner  &qu$  I^  point 

de  vqe  d^  Vtw.  f^m\it^tiomliH  faut  sQRgfF  au9 
<HrpQnstancç§  qm  poys  arivjFsnpini,  #i  jug^^  flq'allw 
Qpus  Drf§çnvf0tdiff  m^fPF^f  piya  va^jftfs,  prus  foi^ 
(efi  plua  aptiv«»i  ciHf  \9mn$  poiiii  aPFops  atteint 

lépoque  heureuse  où  la  France  jouira  véritablapB^Qt 

du  Ropyern^q^ent  qH'ii||a  8>ai  ^nné- 

fm  epnemif  iopt  dft»iBli§  iHina  douM.  paais  il«  «a 
9pnt  point  epfiPF?  |*|n«  liapéFao^.  fi^O^hima  un 
inat«nt  «Mr  la  nmitiplif^it^,  m  I9  div^rg<ppa  d^  laiipa 

ipl^rétf.  et  ditiesrppps  is}|§uite  6|  vppa  ep^nd^i  VOM 

S  river  d#  tPU9  i#f  ivanMg^s  sm^  p^Mv^nt  vops  qi^jr 
^1  artipl^op  d#9  m^g^mm  mf^u^^ 

Aussi  insiste-t-on beaucoup  niQJFï»wrla  pr^WM: 

\m  ûpmm\^§  d^  fr^fi^fictious  qije  $u9  la  B^^as- 

aitiî  de  liyer  l^s  ptoM  qui  f p  fep^QNt  Ij  niîitiira. 

P  abflfd  on  parait  craindre  qui!  Ie$  artMsjea  ae^rfif 
O'atU^np^pt  l^  ^rticl^s  pattpts;  n}A\s  un^  telje  id^e 
0^  pi^Mt  ffjPitra  qu^  dsDs  l'esprit ,df  ^Mi  qMJ  Proianl 
a  la  tri|b|jSop  H  jiMI  traîtreii.  Ce  n'^st  pas  ici  MM 
cpntrerl^ttrf  aiyt  Tp»  iMtend  faire;  (^'e^ Mneatipii-? 
latipn  Mftjf pliera  i|^  rui^  pr^nt/J^e,  et  dopt  t/[>Ntl^ 
Ft^tiliMaer^it  4éti»iUi  V^f  wa  PMftlj^M  Pf^piaturit. 

Dana  le  rapport  j*ai  indiqué  plusie^r^  ^irp^P^lafi; 


t|ui  ^vûihl  fésulkr  des  aé»ï$ïatious  qoa  l\)a  w^^ 
pruscfurc.  ¥<)^ex  s't)  serait  p^^sible  dé  faire  ca»na (tua 
un  article  qui  dëti'nut lierait  k  but  avar^^  auc  I4 
ckusç  liB  fût  exéculée,  et  quNj^^i  çp^iuem^e  s'^f  fjst  fi 
propos  de  %Ê  %ltaquèç  up  4*^  p<^^i^^is  feris  U^^ 
fpuqiie  et  sur  un  pJint  donné  sans  couvrir  la  pégi^- 
aatton  du  vçilç  d4  s^cçççt. 

'^  Quçlq^^ift  a  iijjl^ervi  qù^tl  kW^^^  fî'^  IfSobiftH 
qpi  ptJ^^^^lçp^  ^^\s  t^^fç  1?^  TO^t^ftça  «  uit»;  lu^gucM- 
Uot^sec^c^ti^*^  U  ivNïvT^tMls  qua  la  pr+w^itiou  fût 
PF^%>Hli^uifiij|aUvi^(p4^iit,  fit  mm  dettu'^iuât  quêta 
sùut  les  objets  qui  ne  peu  veut  jamais  lairc  la  nia^ 
lière  d'une  q^g^li^  m^k\»i  ^Ç  i)  »  «  WÏIRWSî- 
bilitë  de  hxer  ces  oDiets.  par  la  f<^ç\lite  que  les  puis-  . 
sauces  ennemiârauraienr  clê  co'nniiùre  le  but  de  la 
ftlipplaltctp*  .        -     ■•% 

Il  p»a  saptbia  qaa  nom  aoun-ioDS  tous  étra  (l'aa- 
e<u>d  en  d»ant  quil  pouiia  ^tre  hit  à^s  articles 
secrets,  pourvu  qu'ils  n'attaauagt  paa  les  ar|i(la8 
palaula. 

OalUt  mpAsitîaa  ^si  d^csétët. 

JaaatraiHFM'Maiis ,  au  nom  du  comité  des  sê- 
m\W  puUica  :  ëitoyans,  plus  la  lipubliqua Vélaia 
gloiiat^Aamai^l  «f  rs  sas  hautes  destinées,  ultis  srà 
ennemis  s'efforcent  de  sapla¥ti:  çctntra  $\h  ^' pas? 
«QPfaH^  préjugés. 

lia  vcitia  ont  àpcuaés  d^hoad  da  na  pas  ¥ou)oif  t|r 
nir  1^  pronassa  d^aaopfdepdas  panaioPs  aux  mijiiai- 
rM  auisaai  lieénaiés  paii  la  loi  dti  mois  d^àoAt  1  Vftî  : 
vous  avez  répondu  à  cette  calonnnie  en  diciétani 
df4  p^siqnii  an  hiveua  d^up  asaan  gnnd  noipbn  de 
aaa  (Pilitairas.  .    *        • 

Aujourd'hui,  nepou^pl  ittpisoduira  ca  nproaha 
dans  toula  saa  étapdua,  ils  prélandan|  que  voiis 
avaa  aharahé  au  moins  à  éludSîr  une  partie  9e  vqa 
engagements  envers  plusieurs  officiers,  en  leur  im- 
ppaa^t  des  GonditionsxIéshQnoaantes  pouip  aux.  €k^|- 
a^diva  an  exigeant  quma  déposassent  les  bre^fts  et 
dépoaalions  quHIs  ont  reçus  da  l^aqpien  gouverna- 
Rient^  cumoiè  si  voqs  aviiz  pu  ptésumefr  que  àt& 
militaires  nés  dans  un  pays  iibr^  tiendraient  aux  lio* 
ehttsd'une  uionaEchiéqui  n-eiiste  plus,  ctcomiiig 
si,  dans  le  cas  de  cette  pt^ésomption,  vous  ^nri^z  pu 
vous  écarter  des  principes  de 'd^-Et^^cptiè  qui  voti| 
font  uu  devoir d'enjcer]usqu'api  plus [^g^fH  lf*^ÇPJ 
du  régime  que  vous  ^yt^  proscfjt.    " 

En  vain  pféiena-on  que,  par  celte  condition,  vpîj| 
méconfentez  yn  assez  grandi  H^RlI^T^  ^lyn^i^^fP'" 
'jtaires,  et  qpe  Fp^  fpîlîr 


% 


., liHKPi  m\  \mï  h  f^^p^^ 

cantons  resnrctifs;  ce^^t-â  dire  que.  par  celle  obr 

i^fvfiiipp,  gu)  9  ^\f  %ifpmitPimH  wmMf  on  roa- 
dFiJt  vqiM  donnais  à  anti^pdpe  q\^$  lotca  perséaé» 
rance  dans  vos  principes  peut  inmiaasuc  les  bonnaf 
dispositions  de  la  nation  suisse  à  votre  égard. 

ioi],  pon,  ce  n'est  pas  chez  les  peuples  liCres  qut 
las  pasaiops  ou  les  préjugés  blessés  en  quelques  la- 
djyidMS  peuvent  faire' changer  las  dispositions  d|i 
gouvernement.  B'aiilauM»  ca  o-estparpardé  Far- 
dent que  vum  voulez  attacher  las  pfàiplea  ëtràaigcis 
a  la  ctipubliq  j£  française;  c^est  en  persévérant  oana 
l^s  principes  de  justice  cl  de  loyauté  qup  vous  vou- 
lez ini^raer  Ijeur  iKstûne  ef  leqr  amitié.'* 

hiuù  ^ous  3)iaz  prouvef  encore  upa  feif  voirt 
raapact  pour  vos  cngagefneQU  en  adopfaqila  woifi 
dapé^at  que  je  vaia  irous  présenter,  pour  apcordif 
dea  pansiotia  i  plus  de  sept  ui^U  noîilitairaa  aûiss^;. 
cpfl£[)raitoaol  aux  diapositioas  de  U  loi  du  ap  gav? 
mioal. 

Voici  le  projet  de  décref  : 

•  M (k)nyràlion  Mfjpnalc, 'aprb |^9]rg»flidl> Hm^: 
port  de  ioo  côoiité  des  secopii  puDfic»  •  d^ôrete  : 

•  An.  W.  La  trifeorerie  Bàtloûale  lèra  pajêr  aux  uâXI^ 
MiayaoMiai  liaaBcléipirtoipi«i  mas 


716 


MMiiéf  dans  Ici  étati  sonéxés  au  présent  décret,  la  somme 
de  196,738  Ht.  7  b.  7.  ilen. ,  qui  sera  répartie  entre  eux 
soiTant  les  proportions  établies  dans  lesdits  états. 

«  II.  Le  payement  des  pensions  accordées  par  Tariicle 
précédent  sera  (ait  conformément  aui  dispositions  des  ar- 
ticles XI,  XII,  XIII  et  XIV  de  la  loi  du  29  germinal  de 
Pan  S. 

«  III.  Les  états  annexés  an  présent  décret  ne  seront  pas 
imprimés,  mais  ifs  seront  envoyés,  ainsi  que  le  décret,  à 
l'agent  de  la  république  française  auprès  des  cantons  bel- 
féliques,  pour  y  recevoir  toute  la  publicité  nécessaire  et 
être  cooNBuniqués  aux  militaires  qui  y  sont  dénommés.  » 

Ce  décret  est  adopté. 

La  séance  est  Xejéeà  qtiatre  heures. 

SÉANCE  DU  17  VENTOSE. 

ZaDgiacooii,  au  nom  du  comité  des  secours,  fait 
un  rapport  à  la  suite  duquel  il  propose  un  projet  de 
décret  relatif  à  la  répartition  des  secours  aux  indi- 
gents des  départements. 

***  :  Je  demande  que  vous  rendiez  aux  sections  le 
droit  de  nommer  les  citoyens  qui  doivent  composer 
les  comités  de  bienfaisance.  Je  dis  plus  ;  il  faut  enfin 

3ue  vous  fessiez  de  suite  marcher  la  constitution 
émocratique,  il  faut  rendre  au  peuple  ses  droits 
politiques.  (Ou  applaudit.) 

Lbcointme  (de  Versailles)  :  Trop  longtemps  le 
peuple  a  été  esclave;  il  ffautenfin  qu'il  recouvre  sa 
liberté  entière.  (Nouveaux  applaudissements.) 

***  :  Je  demande  que  l'on  fasse  aussi  disparaîtl^  là 
mendicité. 
TautiOT:  Il  est  juste  que  les  sections  soient  char- 

§ées  elles-mêmes  de  la  nomination  des  membres 
es  comités  de  bienfaisance. 

***  :  Je  demande  qu'il  y  ait  des  secours  distribués 
dans  les  départements  comme  dans  la  comaïune  de 
Paris. 

Le  Rapporteue  :  J'assure  la  Convention  on'il  ■ 
été  réparti  des  secours  dans  tonte  la  république, 
dans  tous  les  départements  et  dans  tous  les  districts. 

Le  rapporteur  relit  le  projet  de  décret,  qui  est 
adopté  en  ces  termes  : 

«  La  Convention  nationale  décrète  qne  Tétat  de  rtpar- 
tltion  de  la  somme  de  iO  millions  qui ,  par  décret  da  Si 
pluviôse  dernier,  doivent  être  répandua  dans  les  déoarte- 
naents  pour  secourir  Tiudigence,  «era  imprimé  et  aistri- 
boé  a  chacun  de  ses  membres.  » 

Les  autres  propositions  sont  adoptées  en  ces  ter- 
mes: 

•  La  Convention  nationale  décrète  que  les  membres  des 
comités  de  bienftlsance  de  Paris  seront  nommés*  suivant 
les  anciens  règlements,  par  rassemblée  générale  de  chaque 
section. 

•  La  Convention  nationale  décrète  que  le  comité  des 
secours  rendra  compte  de  Texéculion  des  lots  sur  la  sup- 
pression de  la  asendicité.  • 

Laurent  Lbcointre  :  De  nombreuses  réclamations 
se  sont  fait  entendre  depuis  longtemps  de  la  part  des 
parents  des  condamnés;  chaque  jour  en  produit  de 
nouvelles.  Vous  avez  décrété  que  les  femmes,  que 
les  enfants  de  ces  citoyens,  dont  plusieurs  sans  doute 
ont  été  victimes,  recevront  des  indemnités,  des  se- 
cours; vous  avez  voulu  que  les  droits  des  femmes 
et  des  enfants  soient  respectés  avec  une  telle  justice, 
que  les  meubles,  outils,  instruments  aratoires,  usi- 
nes, métiers  propres  aux  fabriques,  jouissance  des 
baux,  intérêts  commerciaux,  leurs  fussent  conser- 
vés, d'après  l'estimation,  en  suivant  la  teneur  des 
dispositions  authentiquement  reconnues.  Sur  le  sur- 
plus des  réclamations  tendant  à  obtenir,  à  recouvrer 
en  nature  la  propriété  des  immeubles,  vous  avez 
{Misse  à  l'ordre  du  jour. 

Mais,  citoyens,  aujourd'hui  un  député,  représen- 
tant du  peuple  le  matin,  journaliste  le  soir,  au  lieu 
de  monter  à  cette  tribune  réclamer  ces  mêmes  droits, 
crie»  dans  sa  feuillt»  i  l'injustice  ;  il  demande  jusqu'à 


ouahd  composerons-nous  avec  la  justice?  •  O  justîcel 
sécrie-t-il,  déchire  tous  les  voiles  qui  couvrent 
encore  ton  front  lumineux,  romps  entièrement  le 
charme  où  des  monstres  barbares  t'ont  retenues! 
longtemps  captive,  et  reçoit  aujourd'hui  dans  ta  ba- 
lance la  misère,  les  douleurs,  les  larmes  et  les  récla- 
mations de  ces  infortunés  qui  sont  privés  de  leurs 
héritages  par  suite  de  la  condamnation  inique  de 
leurs  parents. 

•  Financier  barbare ,  dit-il ,  si  ton  cœur  ne  s'est 
point  encore  desséché  tout  entier  dans  ta  poitrine, 
s'il  a  conservé  encore  une  partie  vive,  si  les  eaux 
du6tyx  t'ont  laissé  quelque  endroit  sensible,  les  cris 
de  tant  d'infortunés  ne  troublent-ils  point  ta  main 
calculante? 

•  Législateurs ,  vous  dit-il  encore ,  toutes  les  fois 
qu'on  vous  entend  parler  de  justice ,  on  rappelle 
cette  loi  inique  du  séquestre  des  biens.  Et  qu*eu 
voulez-vous  faire  àfi  ces  biens  ?  qui  en  voudra  ,  qui 
les  achètera?  Quelle  confiance  peuvent-ils  inspirer, 
ces  biens?  ils  sont  pleins  de  remords  qui  passeront 
dans  le  cœur  de  ceux  qui  se  les  approprieraient.  Ces 
biens,  ils  appartiennent  encore  aux  ombres  des 
hommes  justes  qui  ont  été  égorgés. 

«  Acquérir  de  pareils  biens ,  cdotinue-t-il,  c'est  se 
nourrir  d&  la  chair  des  cadavres  et  dévorer  la  cendre 
des  infortunés  ;  que  dis-je  !  c'est  manger  le  sang  in- 
nocent qui  dégoutte  de  l'échafaud  ,  ou  plutôt  c'est 
boire  celui  de  la  veuve  et  de  l'orphelin.  « 

Certes,  citoyens ,  ce  langage  uans  la  bouche  de  ce 
représentant,  ici ,  à  cette  tribune ,  aurait  bien  un 
autre  prix  que  dans  des  feuilles  ;  c'est  là  ,  c'est  ici 
oue  j'aurais  désiré  Tentendre,  auand  cette  question 
$  est  agitée ,  non  dans  une  feuille  où ,  trop  souvent, 
à  ('exemple  deMarat,  •  son  divin  maîti'e,  son  éternel 
modèle,  •  pour  me  servir  de  ses  propres  expressions» 
il  porte  les  défiances ,  l'inquiétude ,  le  décourage- 
ment ,  l'exaspération  ,  le  désir  des  sombres  vengeao» 
ces  dans  tous  les  cœurs,  dans  tous  les  esprits. 

Vous  avez  sans  doute  été  frappés  comme  moi  des 
accents  de  ce  joi^nal ,  de  l'impression  et  des  suites 
qu'il  peut  avoir,  d'une  part,  sur  l'esprit  des  récla- 
mants, naturellement  aigris  par  leurs  malheurs  ;  de 
l'autre,  sur  celui  des  acauéreurs  de  ces  mêmes  biens, 

3ui  ont  suivi  la  foi  publique  et  vos  décrets,  aujour- 
'hui  réduits  à  craindre  pour  leurs  personnes  et  leurs 
propriétés,  par  l'exaspération  à  laquelle  il  semble 
qu'on  veuille  porter  les  esprits.  Et  ces  craintes  se 
borneraient-elles  là?  Non;  celle  de  la  dépossession 
des  biens  des  émigrés ,  peut-être  même  celle  des 
autres  biens  nationaux ,  ne  se  ferait-elle  pas  sentir 
dans  l'esprit  des  âmes  faibles?  déjà  même  les  acqué- 
reurs des  églises ,  des  presbytères ,  n'éprouvent-ils 
pas  dans  les  campagnes  les  plus  vives  inquiétudes  à 
ce  sujet  ? 

C'est  à  vous ,  citoyens  collègues ,  qu'il  appartient 
de  calmer ,  d'adoucir  le  malheur  des  uns  i,  ne  rassu- 
rer l'anxiété  des  autres,  par  un  décret  froidement  et 
sagement  médité  dans  un  comité,  ensuite  discutée 
cette  tribune ,  avec  tout  l'éclat ,  l'intérêt  et  l'impar- 
tialité' qui  conviennent  a  l'importance  d'une  ma- 
tière à  laquelle  est  attaché,  en  grande  partie ,  le  sa- 
lut de  la  républiaue. 

Je  crois  donc  ne  mon  devoir  de  vous  proposer  de 
renvoyer  à  vos  comités  de  salut  public ,  de  sûreté 
générale,  de  législation  réunis,  la  question  de  savoir 
s*il  y  a  lieu  ou  non  à  restituer  en  nature  les  biens 
immeubles  des  citoyens  morts  sous  le  glaive  de  la 
loi ,  par  l'effet  d'un  jugement  notoirement  inique, 
quelles  formes  seront  à  remplir  pour  s'assurer  da 
vrai  dans  une  matière  aussi  délicate,  et  quelles  me- 
sures à  employer  pour  rendre  à  tous  une  égale  et 
prompte  justice. 

Lbsagb  (d'Bure-et'Loir)  :  11  firat  enfin  que  Ta»» 


717 


femblée  aborde  cette  grande  question  ;  mais  ne  ren- 
Toyez  pas  aux  comités  la  proposition  de  Lecointre 
telle  qu*elle  vous  est  faite  ;  je  1^  crois  dangereuse. 
En  rappelant  votre  attention  sur  tous  les  biens  ,  on 
veut  que  vous  n*en  rendiez  aucuns  :  on  veut  peut- 
être  alarmer  ceux  qui  les  ont  acquis,  leurjTaire 
craindre  une  dépossession  impolitique;  mais  les 
biens  qui  existent  encore  dans  vos  mains ,  les  biens 
encore  à  vendre ,  c'est  pour  ceux-là  qu'il  faut  une 
loi.  Et  comment  pourriez-vous  les  garder  quand 
▼ous  ne  pouvez  pas  ignorer  que  les  propriétaires 
n*ont  pas  été  jugés,  mais  assassmés?  La  fortune  pu- 
blique ,  c'est  la  justice  qui  la  fondera ,  l'assassinat 
ne  peut  pas  la  doter  ;  la  meilleure  garantie  pour  vos 
assignats ,  c'est  la  justice  pour  tous  les  citoyens  ;  et 
quand  vous  avez  mis  à  l'ordre  du  jour  cette  vertu, 
seul  soutien  des  empires ,  vous  n'avez  pas  entendu 
ne  prononcer  qu'un  vain  mot.  Vous  donnerez  des 
indemnités  aux  héritiers  de  ceux  dont  les  biens  sont 
vendus ,  et  vous  restituerez  les  biens  encore  exis- 
tants. Je  demande  donc  le  renvoi  aux  comités  de  la 
proposition  ainsi  modifiée.  (On  applaudit.) 

Personne  :  Sur  la  proposition  d  un  membre,  vous 
avez  décrété  qu'il  serait  interdit  à  tous  les  parants 
des  condamnés  toute  pétition  tendant  à  une  révision 
de  jugement  ;  mais  votre  comité  de  législation  a  cru 
remplir  vos  vues  bienfaisantes  en  annulant  tout  ju- 

fement  non  exécuté ,  et  dont  l'injustice  était  évi- 
ente  :  c'est  ainsi  qu'il  en  agi  à  l'égard  du  jeune 
Sainte-Marie ,  âgé  de  quatorze  ans ,  condamné  a 
vingt  ans  de  fers  par  le  tribunal  révolutionnaire  de 
Pans.  Il  se  propose  d'examiner  ainsi  toutes  les  pro- 
cédures ,  et  d'annuler  toutes  celles  qui  seraient  con- 
tra ires  aux  lois. 

l.EcoiNTRE  :  Je  n'ai  parlé  sur  cette  question  que 
purée  que  j'ai  craint  le  mauvais  effet  que  pourront 
produire  les  assertious  soutenues  dans  les  feuilles 
que  j'ai  dénoncées. 

On  demande  Tordre  /lujour. 

BouBDON  (de  l'Oise)  :  Cette  question  tient  à  la 
justice,  elle  tient  à  la  tranquillité  publique  ;  vous  ne 
pouvez  pas  tous  contenter  d'un  ordre  du  iour  qui 
serait  inutile,  puisque  Ton  viendrait  tous  les  jours 
renouveler  cette  motion. 

il  faut  aborder  cette  question  et  la  discuter  fran- 
chement ;  je  crois  qu'il  faut  rendre  aux  familles  des 
condamnés  qui  ne  sont  pas  riches  la  totalité  de  leurs 
petites  fortunes ,  et  en  rendre  une  partie  à  celles 
dont  les  propriétés  sont  plus  considérables.  La  ré- 
publique ne  peut  acquérir  de  splendeur  qu'autant 
que  tous  ceux  qui  la  composent  seront  heureux.  11 
est  imposible  de  réviser  les  jugements  parjurés; 
mais  il  faut  verser  du  baume  sur  toutes  les  plaies  ; 
il  faut  que  les  femmes  et  les  enfants  des  condamnés 
aient  aussi  à  se  louer  de  la  révolution.  Je  demande 
le  renvoi  de  cette  question  au  comité  de  législation. 

Le  renvoi  est  décrété. 

ViBELiN  (de  Douai)  :  Le  comité  de  salut  public  m'a 
chargé  de  vous  communiquer  les  lettres  de  créance 
que  le  grand  duc  de  Toscane  vient  d'adresser  à  son 
envoyé  extraordinaire ,  M.  Carletti ,  pour  résider 
auprès  de  la  république  française  en  qualité  de  mi- 
nistre plénipotentiaire. 

heUreê  de  créance  du  comte  CarleUi ,  minUire 
plénipotentiaire  de  Toscane. 

•  Ferdinand  III ,  par  la  gréée  de  Dieu  prioee  royal  de 
Hongrie  et  de  Bohême,  archiduc  d'Autriche,  grand  duc 
de  Tofcane,  etc.,  elc,  à  la  Convenltoo  nationale  de 
France,  les  dtoyens  représentants  du  peuple  français. 

«  L*lieureux  événement  du  renouvellement  de  la  plus 
païuite  amitié  et  de  la  meilleure  intelligence  entre  notre 
gouveraenient  et  nos  sujets,  et  la  république  et  la  nation 
minçaise,  en  conséquence  du  kraité  récemment  stipulé  et 
•oodo  le  9  lévrier  de  la  présente  année,  entre  les  repréMn^ 


lants  du  peuple  français,  membres  du  eomlté  de  Miotpii» 
blic,  et  le  comte  François-Xavier  Carletti,  chevalier  de 
Tordre  toscan  de  Saint-Etienne,  notre  chambellan  et  en- 
voyé eiiraordinaire  près  la  république  française,  traité 
que  vous  avex  ratifié  par  votre  décret  du  susdit  mois,  el 
que  nous  avons  aussi  ratifié  ce  2  mars  1795,  en  comblant 
lous  nos  vœux,  nous  a  encore  persuadé  que  le  peuple  fran* 
çaisest  uniquement  animé  des  sentiments  de  justice  et  de 
modération  qui  conviennent  à  un  peuple  grand  et  glo» 
rieux. 

•  Quant  i  nous,  désirant  que  les  liens  de  Tamitié  et  de 
la  bonne  intelligence  qui  unissent  les  deux  gouvernements 
et  les  deux  nations  se  renforcent  de  plus  en  plus,  pour  leur 
avantage  commun,  et  considérant  que  ledit  comte  Car^ 
letli,  par  la  scrupuleuse  probité  dont  il  est  doué,  par  ses 
lalenU  et  son  expérience  peu  commune,  est  celui  de  nos 
sujets  qui  peut  le  mieux  conduire  le  tout  i  cette  heureuse 
fin ,  nous  avons  résolu  de  l'envoyer  près  de  vous  en  quaUté 
de  notre  ministre  plénipotentiaire,  avee  ordre  de  voua 
manifester  dans  toutes  les  occasions,  à  vous  et  à  votre  co- 
mité de  salut  public,  nos  vrais  sentiments;  et  nous  vous 
prions  d*ajouter  foi  ù  tout  ce  dont  il  vous  fera  part  en  no- 
tre nom. 

•  À  Florence,  le  S  mars  1795.         Si§ni  FianiKAND. 

•  PIm  bn  t  AiiToiRB  SeaaiSToai,  Nau  Coaiiai, 
ê€crétaire$,  • 

(On  applaudit  à  plusieurs  reprises.) 

Merlin  :  Le  comité  m'a  chargé  de  voos  proposer 
d'admettre  demain  M.  Carletti ,  pour  être  reconnu 
en  qualité  de  ministre  plénipotentiaire  de  Toscane. 

Cette  proposition  est  décrétée. 

Lb  Président  :  Des  citoyens  des  sections  du  Fi* 
nistère  et  de  l'Observatoire  demandent  à  paraître 
à  la  barre. 

La  Convention  ordonne  leyr  admission. 

L'un  deux  s'exprime  en  ces  termes  : 

«  Le  pain  nous  manque  ;  nous  sommes  k  la  veille 
de  regretter  tous  les  sacrifices  que  nous  avons  faits 
pour  la  révolution...  • 

De   violents  mnrmures  d'improbation  Tempe», 
chent  de  continuer. 

Plusieurs  membres  font  observer  aux  pétition- 
naires combien  les  sentiments  qu'ils  expriment  s'é- 
cartent de  ceux  des  bons  ptriotes.  Quelques  uns 
d'entre  eux  ne  répondent  qu  en  frappant  sur  la  barre 
et  criant  :  •  Du  pain!  du  pain  !  • 

Peu  à  peu  le  calme  se  rétablit.  Celui  qui  porte  la 
parole  reprend  ainsi  : 

•  Ne  laissez  pas  flotter  au  milieu  de  nons  l'éten- 
dard de  la  famine  ;  déployez  tous  les  moyens  que  le 
peuple  a  mis  entre  vos  mains ,  et  donnez-nous  du 
pain.  Huit  cents  de  nos  camarades  attendent  votre 
réponse.  Jusqu'à  ce  que  vous  ayez  satisfait  à  notre 
demande,  nous  crierons  vive  la  républigtte  l  • 

Le  Prksidbnt,  à  la  députation  :  Citoyens,  la  Con- 
ventioii  nationale  s'est  toujours  occupée  avec  la 

Îiltis  pressante  sollicitude  des  subsistances  de  Paris; 
a  France  entière  fait  des  sacftGces  sans  nombre 
pour  l'approvisionnement  de  cette  commune  ;  il  n'y 
a  point  de  département  où  le  pain  ne  soit  plus  cher  et 
plus  rare ,  et  cependant  les  citoyens  ne  murmurent 
point  :  ils  se  privent  avec  plaisir  de  leurs  premiers 
besoins  pour  assurer  les  vôtres.  La  Convention  ■ 
senti  qu'il  fallait  donner  une  ration  plus  forte  à 
rhomme  utile ,  à  l'homme  laborieux  ;  c'est  une  des 
dispositions  de  la  loi  ;  elle  en  maintiendra  l'exécu- 
tion et  la  fera  respecter. 

Citoyens,  les  ombres  des  conspirateurs  assiègent 
encore  cette  enceinte  ;  la  malveillance  s'agite  en 
tous  sens  pour  produire  des  mouvements;  ils  n'au- 
raient d'autre  résultat  que  d'augmenter  la  disette, 
et  de  détruire ,  en  interrompant  les  moyens  d'ap- 
provisionnement, les  mesures  prises  par  la  Conven- 
tion pour  assurer  à  chacun  la  portion  de  subsistanee 
qu'elle  lui  a  promise.  Mais  la  Convention  compte  sur 
le  zèle  des  bons  citoyens  pour  déjouer  tooles  kt  Uh 


T18 


trigoea;  tt,  quoi  qu'il  arrive  »  son  éaefgie  at  mui 
courage  saroBUeiuours  ati-dtasua  daaévëneBaïUa. 
Eclairée  par  raipârieuee,  furtada  la  puiasanca  du 
peuple  eulter ,  elle  périra  à  aon  poala  plutAl  que  de 
rëtKigrader  par  la  erainte,  et  elle  ne  cessera  de  niAr- 
elier  vers  le  but  quVUe  se  propose,  la  réparation 
dea  maux  qu*ont  faits  à  la  patrie  les  derniers  tyrans, 
et  la  répartition  égale  de  Paisance  et  du  bguheur 
entre  toutes  les  communes  de  ta  république. 

Non,  les  eSorts  que  le  peuple  a  faits  pour  conqué- 
rir la  liberté  ue  aerout  point  perdua  ;  la  famine  ne 
dévorera  point  la  France»  loraque  loua  le«  citoyeoa 
secondent  les  travaux  de  leurs  représentants*  te 
désespoir  n'appartient  qu'aux  eselavea;  Tbomme 
libre  ne  regrette  jamaia  let  saorifleea  qu*il  a  faits. 

La  Convention  fera  examiner  ¥oa  réelamationa. 
Chaque  citoyen  a  dû  avoir  la  portion  qui  lui  est  ae- 
eordée  par  la  loi  ;  s*il  y  a  eu  inOdélité  aans  la  distri- 
bution, faites-en  connaître  paisiblement  les  auteurs; 
elle  les  fera  punir,  t^  Convention  eat  k  aon  poata  i 
retournei  à  vos  travaux. 

Cette  réponse  est  souvent  iuterrompua  par  Ica  plus 
▼ifii  applaudissements  de  la  très^graudfi  lôi^orité  des 
tribunes. 

Les  pétitionnaires  sortent* 

Gaston  :  La  malveillance  est  toujours  derrière  le 
rideau  pour  provoquer  les  bonadtoyens  i  des  mou* 
vementsdont  ils  auraient  à  se  repentir.  Le  peuple 
ne  s'insurge  jamais  (|ua  lorsqu'il  est  poussé  par  aes 
hommes  intéressés  à  ces  mouvements.  Prononce z> 
vous  donc  contre  ces  agents  de  Pitt  et  de  Cobourg, 
contre  ces  coupe-jarrets  nui  excitent  des  rassemble* 
ments  séditieux,  et  aussitôt  iU  luiront  dans  les  caver- 
nes. Je  demande  que  U  réponse  ferme  du  président 
soit  insérée  au  Bulletin ,  et  que  le  diseouraqui  a  été 
lu  soit  renvoyé  au  comité  de  aûreté  générale. 

André  Dumont  :  Je  remarque  qa*aueun  décadi 
n'est  encore  passé  depuis  que  vous  aves  rendu  le 
décret  sur  la  distribution  du  pain  ;  eonséquemment 
aucune  section  n'a  eneore  pu  s'assembler.  Je  pense 
qu'il  est  nécessaire  de  connaître  quels  sont  les  au- 
teurs de  cette  pétition  séditieuse.  Je  demande  pour 
cela  qu'elle  soit  renvoyée  au  comité  de  sAreté  géné- 
rale, que  la  réponse  du  président  soit  imprimée  et 
aftichée,  et  qu'en  tête  on  mette  les  phrases  de  la  pé- 
tion  qui  ont  excité  Tindignation  ne  la  Convention 
nationale  «  afin  que  tous  les  citoyens  oonnalssent 
Jusqu'à  quel  point  la  perfidie  et  la  sèélératesse  pous- 
sent leurs  manœuvres. 

Les  propositions  d'André  Dumont  sont  décrétées, 

BoissT  d'Anolas,  au  nom  du  comité  de  salut  pu- 
blic :  Vous  ne  deves  pas  douter,  citoyens ,  que  les 
mouvements  qui  vous  sont  dénoncés  ne  soient  l'cf* 
fei  de  la  malveillance,  et  Je  vous  laisse  i  Juger  quel 
est  le  rspport  qui  existe  entre  ces  mouvements  et  les 
circonstances  particulières  où  nous  nous  trouvons  ; 
radministrstion  de  police  vient  de  nous  prévenir 
que,  dans  le  faubourg  Marceau,  des  hommes  coupa* 
blés  provoquaient ,.  au  bruit  d'une  sonnette ,  les  ci- 
toyens à  des  rassemblements,  et  qu'en  même  temps 
que  Ton  se  plaignait  de  manquer  de  pain,  on  cher-^ 
cnait  A  arracher  aux  boulangers  le  bois  qui  leur  es( 
destiné,  et  qui  est  indispensable  ft  leur  manutentiour 

Dans  les  environs  de  Paris,  des  hommes  inconnus 
parcourent  les  campagnes ,  obstruent  les  routes ,  et 
i^efioreent  d'intereepTer  la  circulation  des  grains» 
de  provoquer  le  pillage  ,  et  de  porter  dans  les  dis^^' 
triets  qui  concourent  à  l'approvisionnement  de  Pa» 
ris  des  préventions  défavorables  à  celle  grande 
commune;  mais  le  comité  de  salut  public  ne  laisse 
échapper  aucun  moyen  pour  déjouer  tous  ces  corn* 
ploto  et  assurer  l'approvisionnement  de  Paris  :  i) 
veille  la  nuit  et  le  jour  pour  j  parvenir,  et  son  actirg 


aurv«Ula»ee  a  été  Mmmmh  luaf^Hiel  f»  la  aneeèai 

Mîsqu'il  a  |ev4  loiia  Ift  <yb#aHsft  al  é^ôué  ka  «dK»^ 
ira  ennemis  du  kian  puMia« 

Le  décret  que  Y«ma  ave»  fendu  était  ndsaasatae 
pour  régularisef  let  dislribuliena  de  pain  el  en  aaaii- 
rer  la  eonsosAmation»  atsurinul  jf»k»  oalaseï^  lea  in* 
quiétudes  de  nus  frères  des  dîaineta  votsini. 

Voici  cQ«Ament  il  s'exi^ute  >  il  a  élédiatfilM  a»« 
jourd^hui  dis^buit  cent  qualre-vingl-iNx-^ef^  iaee 
df  farine  i  or  il  existe  à  Paria,  d^ipréa  le  daruiar  re* 
eenaensent  «  aix  cent  Irenla^sit  uûUe  habUania  de 
tout  ûge  et  de  tout  aaxa«  Aprte  avnir  donné  à  ebaeim 
d>ux  une  livre  de  pain,  il  eneal  mH  cent  solannie- 
deux  mille  livres  •  ee  qui  a  proenrd  à  Ifoia  eenl 
vingt-quatre  mille  citnyena  une  deinl4if  re  de  ulua  ) 
d'eu  il  résulte  que  plus  de  la  moili»  des  habilants  A 
dA  recevoir  une  livre  et  demie  ^  ee  qui  eat  beauonup 

Rlua  que  le  décret  ne  preaorit,  puisqpe  la  nioilid  de| 
abitants  de  Paria  ne  doit  pas  être  eonsidérde  ee4iMne 
vivant  du  travail  de  sea  màina* 

BouanoN  (de  Tûise)  i  Je  demande  que  le  rappoH 
de  Boissy  soit  auaai  imprimd  el  affiche  \  Il  inalruirt 
le  peuple  dea  elorls  que  font  sea  représentante  pour 
pourvoir  A  aea  besoins:  at  quoiqu'on  ait  voulu  le 
démoraliaerdepuialonglaQipa,  ilaauralenrfendif 
juatice. 

Jademandequ^onexamineadvèfeaMni  laeondniie 
de  l'espèce  d'aide  de  camp  qui  a  perlé  iei  la  pamin, 
et  qui  eat  venii  crier  i  la  contre  révolution  \  ear  deé 
cris  séditieux  ne  peuvent  tendre  à  aulre  chose  quanB 
la  Convention  a  pourvu  aux  besoins  du  peuple.  H 
demande  aussi  que  le  comité  da  sAreté  (énépale  ré- 
prime ceux  qui  cauaant  Isa  agilationa  at  provoquenl 
au  pillage  du  bois. 

Les  propoaitiona  de  Bourdon  aoni  déepétéae, 

Boiaav  ;  Us  arrivages  de  aubalstances  oonlinnCQt 
toujours  avec  activité.  Nous  avons  raçu  df  Maratillei 
depuis  les  lettres  que  nous  vous  avbU9  tronfUllf^ 
hier,  la  nouvelle  que  qutnae  autres  bâtiments  char- 
gés de  grains  sont  antres  dans  ce  porti  U  oomUé  na 
perd  pas  un  moment  pour  activer  Icf  approviàlon'' 
nements ,  et  dsns  ce  moment  Je  sqi^  eharfd  de  voui 
proposer  de  donner  au  représentant  du  pfUpIc'LoN 
seau,  rentré  depuis  moins  de  trois  mois  dana  la  aein 
de  la  Convention ,  une  nouvelle  mlisiop  POUT  IM 
subsistances. 
Boissy  soumet  le  projet  de  décret .  qui  eat  adoptéi 
LisLANc  (de9  Bouches-du-Rhdne)  :  h  vlenaoell 
porte  de  la  salle  qu'on  veut  forçcri  l'iPYllO  li  COB* 
ventlon  à  prendre  ûts  mesurea^ 

^*  i  Bcstooa  h  notre  poste» 

CAHVAQ^aAs!  Citoyens,  aprAs  une  dlscusalon  éclai- 
rée •  voua  avas  décrété  que  les  Intérêts  de  la  répu- 
blique ne  permatUient  point  de  rejelee  de  nnf 
transactions  politiques  les  engagements  aeere ta.  (.«s 
mêmes  motifs  avaient  déterminé  le  comité  de  salut 
public  A  vous  proposer  dej  mesures  qu'il  croyait 
propres  A  concilier  la  réserve  que  le  sagesse  fom* 
mande  svec  le  besoin  de  multiplier  les  garanties,  al 
nécesaairea  dans  Tordre  social,  et  sans  leaquellea  lea 
meilleures  institutions  dégénArent  ou  se  détrulaaiitf 
Votre  sagesse  en  a  autrement  décidé. 

Je  ne  viens  point  VOUS  rappeler  tout  ee  wîi  été 
dit  pour  éUblfr  combien  il  importe  d>pprendre  A 
TEurope  que  vous  ne  vous  reiuserea  point  à  i|ne 
psix  honorable  et  utile ,  et  que ,  pour  atteindre  i| 
but,  il  était  dans  vos  intentions  dc  donner  m  comSi 
chargé  de  la  direction  dci  relations  nlM^ff»  Um 
les  moyens  d'accélérer  et  de  faciiiUr  Jee  négoeia- 
lions;  je  ne  retracerai  ni  lea  indiaaiiona  qu'une  an* 
lulaire  déliaoce  a  pu  énoncer  pour  vaua  menton  ef 
garde  contre  lea  aaeie  dte  la  eonlianee,  ni  lea  wipemi 
qui  ont  été  dévélnpiMM  poMP  élaMir  fM»  piff  VeMI 


719 


de  Tor^anisation  actuelle  de  notre  gouvernement, 
il  était  impossible  de  donner  de  la  consistance  aux 
^«fiCMM  iw  é  tsel  intvilpatmm  Vèi^il^  l^ujiVutii  in- 
•epanMfii  ém  lo^l^s  ftffliitf  dn^. 

A  «e  «ijiM  tvvnl  Bmm  dam  1«s  disî^WR  ptonbA- 
M  Miftt  t^  #Mt  #fe  YiO»  e<>11è1g;t)t!S,  «t  )e^  idées  ^uie 
je  pourrais  vous  présenter  n'ajouteraient  rien  à  la 
conviction  qui  s^est  opérée  dans  vos  âmes  et  qui 
a  produit  le  décret  fkf  feifM  ^  précédente  séanpe 
a  été  terminée.  Aussi  le  comité  de  salut  public  s'est 
)ftlHttnnniPM  ifmipi,  diatt^  Hi  Y^ôùVélle  rédaction  qu' 
Je  ^t6  thal^é  te  vo^s  soumettre  ^  de  donV^et  à  toi 
m  ïrViètès  du  projet  de  loi  ce  caractère  4e  ir«iiolii«e 
et  de  loyauté  qui  vous  distingue,  et  qu'il  est  si  ftre- 
t^t  àe  coliseryêl*^  fioiir  fions,  pour  nos  mhr  H. 
^tiffios«iNiemi«« 

Ôiiaiit««K4N-op«silk)m4lMlea«lawl«  cawr^titek 

"est  qw  wîiqiiwit  wiilMW  Micfix  %  wtft  f/înct  dlaYi^  ûyi 
ico)de««vyiplet^^bl««ikà\i^^.  ttiàt^eomm^  t'^^lu  Ti\>nt 
fifMi  Vitk%  tfOM'MiOfi  dite^tè  ^t%è  f  objet  de  la  loi 
que  nous  disCYiVonè.  i1  est  évident  qu'elles  ft^en  |>cu- 
venttWTJ^attft ,  ijttMnitJYi* ,  saff J^^otil pour  la 

%Mim  €>me  fcittrè  tte  iMAiti  taitltitèft  oYk  eo^àt- 

^  t^el^Cieï  aùtl^»  iè  ces  |ilH)|»eâfioiis  ^  «  elles 
ttaietil  admise^ ,  afi4ie«>Gerafè«l  de  v^«  ^liarl  qwe 
vousn'^avfz  aucune  conHance,  ni  daMitestonnesM 
^ouvemement^  «4  thffis  4a  «MiNrfilé  4e  ^er«K  é  «^ui 
vous  <?w>fieg  4'fcefi»raMfe  <C  péHWtiiHt  ^Hf^rt  ^  «Mr^ 
vejller  l*exéeiilioii  de  vos  ordm. 

EU  wi  4nM\  44  Taw  'qwR  Ta  fei  <qfie  v^MR'alTOZ  Wwcr% 
4terve««i  «omité  4^  ««iut  fwbli^  de  régtttètcw  4M^ 

fa  vft^drVn  tK»  lypCTWnwilS  pCII iTOnr»  ,  Tl XTHe  TOuvrS 

wn^efSMMVis  ^Allrti{|Mff§  Ta  tsrt  lotjjft  îwiSww  WfftVdSwS 
ê>MMftiiètnvki1  qtte  "^fftfy  p(fttrtm  t^imp^t  foVre  co- 
ttité  de  Vôb^brésetalér,  et  Mr  ^«d  vèiig  seatif«z 
U  flèoessité  â^^'bAir  one^iseiissieii  k«Wf»è«Be%  Ce 
9L^eû  done  ^pae  des  deVetoMèaMUls  «  Remuer  ^ 
j^'MRipOB  wwreaw  ae  ¥^  iv^aKMiin'  q^  w  'n^t  s^aewHWT 
dans  cet  instant,  et  tel  est  1>6^  ^  n[ll»iittmi«>^ 
daction  que  le  eMoité  de«aliit  MiMte  vous  ^ré8(M»te, 
^  da*s  Wq«èll^4l  a  merelié  «à  ^^kaeer  ^  ^iiaposi^ 
dans  Tordre  où  elles  aa  fftmmk  iuaHaaituemcat  ta 
plus  grande  4«ii>fèrew 

«  «it  Con<ifMflNi  %vwii^Me^4i|a%iafiviih^MMMMaw'llip- 
paff'i'acaMi^oflHiave^rtMrt  i^mmk^  ^Hl^i'c^t 

%  Xt^t*.le«(t>ft)frë  ftè  «itùtl>At>te,  chai«è|)irk)oi 
du  7  fructidor  de  la  direction  des  relations  extérieures, 
négocie ,  au  nom  ^H  ié|wl>Hqfre ,  tes  tnilés  de  paix  »  de 
trêve,  d'alliance,  de  neutralité  et  de  commerce. 

■  Il  en  arrête  les  coMtfftîMto. 

Me^^)aMa'^KXj(Mer  ^  'euncHKtuh  ^léklnvMk 

<  ÏÙ.  t\  est  autorisé  i  faire  des  stipulatioaspréliaiifMii- 
YlSs  et  pmttôlftfretf  4  lellës  que^a^  annisHces ,  des  «emra- 
lt)tt(6oJtts^>f^ alliées,  pendant  le  temps  de  la  néaeeiatioH 
et  des  conventions  secrètes. 

•  KV.  Les 'engagements  secrets  contractés  tfH^eidefeigaa^ 
veroements  étrangers  ne  peuvent  avoir  pour  ob|et  que  d*as- 
surer  U  déU»as€4€4a  lépubliqMC^a'd^woHie-scsufByaB 
de  prospérité. 

•  V.  Data  ^'CM9a'R%^VWI%MftkiMBmTK%lfi*ticles  se- 
crets ,  les  dispositions  de  ces  articles  ne  penvant  ai  ^ire 
cWimillrekVCftlKfilflespa^ents  ni^esatténoec. 

^  vk  Bias  4vafCê6  aaiM  ^mi^mss  90it  ffar  ina  VNnnM%s  *utt 
aMmé  'lorp^  u  NB'Oifi  ai  (fNé*a^Fcieiefff0nra¥eev<£ii|?inw^r0sde!& 
pwIssaaoBh  ^étramgèi'gs,  is«^  «pur  >feB  Wirffsli^  "pienfpdic^ 
tiaiawawaqaafc'H  <Ma>ita%«aeiftyiié%^c»t?het  des^imvohn. 

•  VII.  Les  traitlb  iie  8bn*t  vala'bles  ûu^après  avoir  été 
aMHMAY  VlMftft  ^  %«flll«ak  m  <^a  titoVëtyâôa  ^^ 
■■•i  vor  lanpponTni  iXMDia  «a  WRR^niiMb 


V  VIIt«  fa^aaaniaaiesaBwalHlaaaacfaafleiviMiaitiiiia* 
«emems  secrtu  n^veM  4c<ar  «aéMliaa  caïaaai  al  «Nca 
avaient  été  ralMéee^ 

•  IX.  Aussitôt  quelescirconstancespermetlMèè1%ftl)re 
Dubliques  1rs  0|)ératioiis  peliUquee  qui  ont  doa^  4ku  ù 
tk%  CbnvèMtôlo)  sellâtes ,  le  tomitè  rend  compte  à  U  Gm^ 
veotion  nationale  de  Tobjet  de  la  négociation  et  des  mesu- 
I«|B  q«'fl  a  fn^»k  *» 

Oetia  réda^Ydfi  «!lii«optée. 

KXMYi  \  Les  comités  de  a&reté  ^érale  «t  antii- 
\sAtt  ônl  pensé  qi^e  ,  dans  les  circonstances ,  tous  les 
citoyens  ayant  le  plus  grand  intérêt  à  conserver 
l^ardte,  #ftraif!nt  1^  w^itfwti&fiti  V^TSranttoûil;>er- 
4mm»m/^\  im  %ettittfc.  Cw  comités  vous  propo- 
sent en  conséquence  de  rapporter  fartide  de  la  loi 
#a  v«ep«MiitM«  irai>^<pem6t'âitixf6nc)^oYi^aii'rs 
ffdMftÈ  ¥it  m  «l'ire  rewipTWwr  pour  le  ^rr^ntee  d^  tk 
fWêe  t»aWofta!<fc ,  f\  de  thar^ cr  le  crotnttè  militaire 
de  prononcerait  Ve%  fettiplacemenlâ  qtf  i1  jugera  iii- 

LlMô'iNË  :  Xi  )ne  semble  qu^il  Taudrait  au  «maia 
une  exception  pour  les  représentants  dupeuple^ 

^  ^€iiiiàRsa<  )i  «ne  «cmële  qu'il  «ataMusiém  kmo 
iionnaires  qui  sont  au  moins  aussi  utiles  à  leur  fvosta 
que  le  soldat  dans  sa  guérite.  UeA«8t«u«q«olsoi)  ne 
peii\  pas  reTttserde  se  lawe  remplaoer^  ^  demanda 
que  le  comité  militaire  présente  le  tableau  de  ceux 

MaaMN  <  #e  «MiMNaia  wè  tieni^9«i4  de  iMAaâ  Hts  fff^ 
positions  au  comité,  afin  qu'il  nous  présente  ofiYRm- 
vaauprc^etqiM  aaii^n^MmelMiifniiMaeeKaéV'ère: 
€ar^ft<atil^c^<>yll>kH^^^a4as<»aoya^li4ef1ff^wirn^ 
d'aHM  iwfmmoè  «nsn  «MNNMNMfrlev  Ha  v«ul«Kt 

dori€  voir  oucnrt^la^^uillotkie  permanente ;4ls  v«u- 
ïertt  ^6rïc  roir  ]|ïn<it  leurs  propriëtés .,  pirisqu'ils 
abaîidaiir^èlït^  o^uU^  Vetercicedeteursdrortsel 
te  ktit  sïitv^itlàDoa^  Citoyens  de  IWis.,  sortez  dcwa 
dt  cc^ttf  fUTiestc  apatt^  :  n^'abandoMiea  pka  è  des 
Ibiftfs  mÈreetiaires  le  acâft  de  veïner  «  votre  -ailUieté 
pifTsattuéÙt^  \  celle  de  vostemmd^.,  de  vos  enfatots^ 
9(ff»A  fua  )è  servitt  de  garde  national  est  pUitdC 
«a  TiromYilfiA'  qu'nirkè  clhal^e^^^e  de  votre  exaoti- 
ttfda  i  ^e  tnea  renvptir  amendent  votre  liberté  «t 
t^cA[lt  \^.  t  V3k  applatfdisaemenls.^  le  ^temande  )a 
nNmiMTi&iiiiiti. 

Le  renvoi  est  décrété. 

Hovdgaat  <  M  4e  «m  leeM^es  v<atis«  dit  ^^on 
av«it  v<>iid«  kvoer  4a  parae^e  4a  OénvcnttÊm  \  telaît 
eat  viimv  4i«a  ^KNMOH»  4ffiÉI  4a  f«MCtM  Hf^affi  «^ 
dignes  4HI  inalaaii  ««parav^nl me  4NMI  fHiiM4  <0lft 
exob.  OM<adéptoyé  4*4ipp«rei4  «de  4a  ITor^e  «a  «ii^we 
teflHps  q«e  !'«•  ai  «aiirfayë  4es  vaîes  «de  «la  tdoocenr 
et:àa4a  ràsim,  La  {garde  «parMoamnit  imi  «Mi  de» 
veiir.,eta0iitest  aipasaé.  MtaS'caHègvestKaaM  aviwa 
remarqué  4a«  laa  ^rMipMs  v^oiaim  beatfMup  de 
femmes  qui  excitaient  taSMimMtei  la  réroHe-,  ieit 
beaucoup  de  bons  cito,yens  ^  que  nous  avons  ■éclai- 
rés, ont  rëïïfta  dommage  ^  ra  soflicitude  de  la  Con- 
vention pour  leursY«s5te.l.%oni"ftie*qui  a  porte 'la 
parole  à  la  barre  est  le  fils  d'un  maître  d'école  de 
Villeneuve-Saint-GifOTg^^ ,  qui  a  déserté  l'armée... 

lcvA88aim<<4e  4a  SmH^i  ¥aili  la  MHanle  jeu- 
nesse! 

TOrfelffet  Des  tfftoyéfft  \tA  otft  denrrnnie  oe  qui 
s'était  passé  à  la  Convention  ;  il  a  répondu  que  le 
préaidi^t  tm  vw^4il ,  à ihfi  fit  A  'mit  qai  f'accom- 
pagwaicirrt ,  ^Nls  'érarcoA  tcm^  des  monstres,  iyit- 
\fm^  wtfrwtii^.)  \jcs  bmrs  titoy^s  Au  faubourg; 
Marceau  se  sont  retirés  en  disant:  '■'Nous voyons' 
bien  que  tous  cas  noHaemanttaia  Mandent  qu'à  sau- 


7Î0 

Vf r  quatre  eraiids  coupables.  •  f Applaudissements.)  : 

Le  comité  de  sûreté  générale  a  aonné  les  ordres  les  ; 

plus  précis  pour  arrêter  ceux  qui  troubleraient  Tor-  '■ 

dre  public.  ; 

Phuieun  voix  :  Bt  celai  qui  a  porté  la  parole  à  la  [ 
barre.  { 

—  Sallen^os,  au  nom  des  comités  de  salut  public  | 
et  des  secours  publics ,  fait  un  rapport  sur  une  péti-  ! 
tion  des  citoyens,  de  Landrecies ,  à  la  suite  duquel  il 
propose  un  projet  de  décret  qui  est  adopté  en  ce^ 
termes  :  . 

m  La  Convention  nationale,  après  atoir  entendu  le  rap- 
port de  set  comités  de  salut  public  et  des  secours  publics, 
décrtte  ce  qui  suit  : 

«  Art  I«%  La  ConT^ntion  nationale  approuve  la  con- 
duite des  babitanis  de  Landrecies,  et  déclare,  au  nom  de 
la  nation  française,  qu*ils  ont  bien  asérité  de- la  patrie 
pendant  le  siégie  que  cette  place  a  soutenu. 

•  IL  II  sera  élevé  une  colonne  en  marbre  dans  la  com- 
mune, en  asémoire  du  généreux  dévouement  de  set  ha- 
bitants. 

•  III.  Les  maisons  détruites  ou  détériorées  par  Teffet  du 
siège  seront  reconstruites  ou  réparées  aux  frais  éû  trésor 
public 

«  IV.  Celles  qui  seront  reconstruites  ae  pourront  avoir 
que  le  rex-de-cbanssée,  un  étage  et  le  grenier. 

«  V.  Les  dispositions  du  décret  du  SO  nivôse  dernier, 
concernant  les  secours  et  indemnité  à  accorder  aux  babi- 
tants  de  Landau»  sont  applicables  aux  citoyens  de  Lan- 
drecies. 

.  «  VI.  Il  sera  envoyé  an  représentant  du  penpie  sur  les 
,.  i  pour  Pexécutioa  du  présent  décret;  il  se  concertera 
avec  le  comité  de  salut  public  La  Convention  nomme 
pour  Texécution  le  représentant  da  peuple  Iioger^Doeo8»§ 

GossoiN  :  Les  habitants  de  Landrecies  ont  montré 
autant  de  fermeté  et  de  prudence  qu*ils  ont  éprouvé 
de  fléaux.  La  Convention  nationale  vient  de  taire  en 
leur  faveur  un  ^rand  actr  de  justice  ;  il  convient  que 
la  république  ait  connaissance  de  ce  que  ces  braves 
citoyens  ont  fait  pour  la  délendre.  Comme  les  ofB- 
ciers  municipaux  de  cette  mémorable  commune, 
dans  le  mémoire  imprimé  qui  vous  a  été  distribué, 
ont  été  absolument  induits  en  erreur  sur  quelques 
faits  étrangers  à  rintérieur  de  leurs  murs,  qu'ils  ont 
cités,  et  au'ils  en  ont  omis  d*autres  à  leur  louange, 
je  demande  que  le  rapport  de  vos  comités  soit  inséré 
en  entier  au  Bulletin. 

Marec  ,  au  nom  du  comité  de  salut  public  :  Les 
malveillants  ont  répandu  dans  le  public  le  bruit  que 
les  Anglais  nous  avaient  pri&un  convoi  considérable, 
tandis  que  la  perte  que  notis  avons  faite  se  réduit  à 
dix  bâtiments.  Nous  en  sommes  bien  dédommagés 
par  la  prise  de  cinquante  deux  bâtiments  entrés  dans 
nos  ports  depuis  le  27  pluviôse  ;  ils  sont  chargés  de 
laine ,  bois  de  construction  ,  fruits  et  raisins  secs,  I 
suifs,  tabacs,  eaux-de-vie,  légumes,  sucre,  café,  in 
digo,  fers  et  blés.  (On  applaudit.) 

La  Convention  décrète  Plnsertion  au  Balletin, 
La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


AVIS. 


AT.  B,  —  Dans  la  séance  du  39  ventôse,  le  comité  de 
salut  public  a  annoncé  Tarrivée  d*une  grande  qiiaïuilé  de 
bâtiments  chargés  de  grains  dans  les  ports  de  Marseille  et 
de  Bordi'aux. 

—  Lecointre  a  proposé  d^abolir  le  gouvernement  réîO- 
luiionnaire,  et  dVdonner  l'exécution  immédiate  de  la 
constiiu.iion  de  1795.  Ses  propositions  oot  été  renvoyées 
aux  trois  comités* 


Les  créanciers  non  viagers  de  la  répuMique  lostawitta 
qu*i  compter  du  i*'  germinal  an  8",  les  bulletins  por- 
lanl  promesses  d'inscription  seront  enregistrés,  pour  te 
payement  des  dix-huit  mots  d'Intérêts,  jusqu'au  n*  75,00iw 


LIVRES  DIVERS.  ; 

Collection  de$  CEuvret  complètes  de  Ma^fy^  18  vol.  in-a* 
le  500  pages  et  plus ,  htMUx  caractères  ci  htm  papier.  A 
Paris,  de  rimprinierie  de  Ch.  Desbrière,  me  et  place  Creix, 
chaasséedu  Mont-Blanc. 

Une  petite  partie  des  «ovret  potthames  de  ce  célèbre 
écrivain  a  été  publiée  en  1790;  réditear  actnel  a  acquis  la 
propriété  de  Paulre,  qui  est  b«>aucoup  plus  ceosidérable  ;  ces 
manuscrits  précieux,  au  nombre  de  sept,  sont  :  1*  L'Ormcle 
d'Apolim,  ou  de  Im  CoHitautance  de  un-mimt;  —  t*  Du 
développement^  detprogi-ès  et  des  bot  nés  de  la  rmiion;  — 
3*  Du  cours  et  de  la  marche  des  passions  dans  U  société;  — 
4«  Du  beau  ;  —  5«  Oef  talents  ;  —  8*  Du  compte-^rendu  par 
M.  tlecker ;^T  DeU  retraite  de  Jf.  Necker. 

Cette  édition  sera  aekevée  k  la  fin  de  Boréal  prochain. 

L*uo  des  exécuteurs  tesUasenuiret  de  Vablj  a  bien  voahi 
s'intéresser  i  son  succès;  elle  sera  la  seule  correcte,  et  qui 
mérite  la  couBance  du  publie,  parce  que  les  manuscriu  au- 
tographes sont  sous  les  yeux  de  Ch.  Desbricre.  Le  /espect 
sempnleux  pour  tout  ce  qui  est  sorti  de  la  plume  de  cet  écri- 
vain politique  ne  pcrasettra  pas  qu'en  y  ijoute  et  qu*oo  ea 
retranche  un  met. 

L'eiécntien  typographique  est  belle  et  très-soignée.  Os  a 
tiré  un  certain  noo3>re  d*esemplaires  sur  papier  vélin. 
*-Le  citoyen  Poinçot,  libraire,  rue  Hantefeoille,  n*  36,  aver- 
tît qu'il  vient  de  foire  paraître  le  3a<  vol.  des  CEuvresdeJ.-J. 
Kotuteau,  édition  in-8®,  ornée  de  gravures,  caractères  de 
Didot  Talné.  Chaque  volume  sera  délivré  aus  souscripteurs  k 
8  liv.  10  s.,  et  celui  des  Romances,  prix  doublé,  eeume  il  en 
a  donné  a  vu  il  y  a  deux  mois.  Passe  le  15  ventôse,  ceux  qui 
auront  négligé  de  retirer  paieront  les  volumes  10  liv. ,  et 
seront  réputés  avoir  abandonné  leur  souscription.  Mais  ce 
tenne  de  rigueur  sera  prolongé,  pour  les  départements,  jus- 
qu'au l**  germinal  prochain ,  époque  h  laquelle  le  citoyen 
Petnçot  fera  paraître  la  dernière  livraison,  eemposée  de  sis 
volumes  et  un  de  Romances. 


.—  Anthologie  patriotique,  ou  Reeueil  de  cfaanaons.  byas- 
nes,  etc. ,  et  un  calendrier  comparatif,  pour  Tan  8*  républi- 
cain ;  in-l8.  Prix  :  t  Iît.,  broche. 

A  Paris,  chez  Poulin,  imprimeur-libraire,  rue  des  Pères,  9. 

^Vie  et  mort  républicaine  du  petit  Emilien  ,  parle  ci- 
toyen Fré ville.  A  Paris,  chei  Guefier  jeune,  impnmeur-h- 
braire,  rue  Glt-le-Cour,  vfi  18.  Pris  :  1  liv.  tO  s.;  et  t  liv., 
franc  de  port. 


GRAVURES. 

Le  Triomphe  de  la  Raison  et  de  la  Vérité,  estampe  de 
vingt-deui  pouces  de  haut  sur  seize  de  large,  présentée  è  la 
Convention  nationale,  le  16  vendémiaire.  Prix  :  IS  liv. 

La  Philosophie,  sous  la  figure  de  J.-J.  Rousseau,  décou^ru 
è  rUnivers  la  Raison  et  la  Vérité,  voilées  par  rRrrcur  et  te 
Mensonge. 

A  Paris,  ches  Delerme,  marchand  d'estampes,  qoai  dt 
Gèvres,  n*  19. 


Payenuntê  à  la  trésorerie  nalionale. 

Le  payement  de  la  dette  consolidée  perpétuelle  se  (ait  pour 
les  sii  derniers  mois  de  Tan  a«,  et  pour  Vannée  i  ceux  qui 
n*ont  pas  touché  les  six  premiers  mois  de  ladite  année.  Les  ci- 
toyens qui  ont  retiré  leur  inscription  définitive,  et  qui  dési- 
reraient être  pa^és  dans  les  districU,  peuvent  indiquer  les 
chefs-lieux  de  district  où  ils  veulent  être  payés ,  eenformé- 
ment  à  la  loi  du  a*  jour  des  sansculottides. 

Le  payement  des  rentes  viagères  sa  fut  rumulaliieasinl 
peur  deux  mois  v'ngt  et  un  jours  dn  raaaét  t7t8  (vÎMu  slf  te) 
m  les  sis  premiers  aMii  de  l'an  ••• 


3  blDS  004   ^45   b12 


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